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Commission permanente
de l'industrie et du commerce,
du tourisme, de la chasse et de la pêche
Etude des crédits du ministère de
l'Industrie et du Commerce
Séance du jeudi 29 mai 1975
(Dix-sept heures trois minutes)
M. Brisson (président de la commission permanente de
l'Industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la
pèche): Al'ordre, messieurs!
Les membres de la commission sont les suivants: MM. Bellemare (Johnson),
Cadieux (Beauharnois), Côté (Matane), Louis-Phillippe Lacroix
(Iles-de-la-Madeleine), Vaillancourt (Orford), Dufour (Vanier), Lachance
(Mille-Iles), Fortin (Gaspé), Lessard (Saguenay), Malouin (Drummond),
Marchand (Laurier), Morin (Sauvé), Samson (Rouyn-Noranda), M.
Saint-Pierre (Chambly).
Nous sommes rendus au programme 8.
M. Dufour: M. le Président, vous avez fait une erreur, ce
n'est pas Fortin (Gaspé), c'est Fortier.
Le Président (M. Brlsson): Fortier. Est-ce que j'ai dit
Fortin? Je m'excuse, c'est Fortier.
M. Dufour: Tu vas l'être, tu l'es avec nous autres.
M. Fortier: J'y suis. C'est bien Fortier, par exemple.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! La parole
est au ministre. Programme 8: développement des pêches
maritimes.
Pêches maritimes
M. Saint-Pierre: M. le Président, dès le
début des crédits du ministère, nous avions eu l'occasion
d'esquisser ce qui s'était fait au cours de la dernière
année en matière de pêches maritimes et certains des
efforts à tenter au cours de la prochaine année. Je n'ai pas
l'intention de m'étendre longuement sur le sujet, sinon de rappeler que
le programme 8, dans ses trois éléments, touche à la fois
nos programmes d'administration relativement minimes, et nos programme de
recherche, qui s'élèvent quand même à près de
$1,700,000. J'aborderai également, dans un deuxième temps, tout
notre secteur économique dans ce groupe et finalement et le secteur
technique, l'assistance technique plus particulièrement reliée
aux parcs industriels de pêche. Je sais que le chef de l'Opposition avait
un dossier volumineux sur le sujet et que les autres députés ont
maintes fois exprimé de l'intérêt pour ce qui se passait
dans leur secteur vis-à-vis de la pêche. Je serais heureux de
répondre aux membres de la commission qui pourraient avoir des questions
à soulever.
Le Président (M. Brisson): Le chef de l'Opposition.
M. Morin: M. le Président, le sous-développement de
l'industrie des pêcheries commerciales au Québec par rapport aux
autres pêcheries côtières et l'effondrement des
marchés depuis quelque temps achèvent de rendre la situation
intenable pour les pêcheurs québécois. Devant l'inertie,
sur laquelle je compte m'étendre aujourd'hui, et l'impuissance du
gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral entend
venir à la rescousse des pêcheurs et s'apprête même
à revenir de façon définitive sur le décret de 1922
qui laissait le Québec s'occuper, à tout le moins partiellement,
du domaine de la pêche.
Déjà, l'intrusion du pouvoir fédéral a
été accentuée par l'entente de coopération
intervenue entre Ottawa et le Québec en 1968 et qui porte sur l'est du
Québec, par laquelle le ministère fédéral de
l'Expansion économique régionale finançait, ou finance
encore, 60% des centres de pêche, 60% de la recherche en matière
de pêcheries et 75% du développement de la pêche.
Pendant ce temps, M. le Président, les prises diminuent
d'année en année. Pour la morue, on a vu les prises diminuer de
48% depuis cinq ans. Pour le hareng, la diminution est de 80% en quatre ans.
Pour le sébaste, la diminution atteint 50% en un an. Ce sont là
des chiffre qui, vous en conviendrez, sont catastrophiques.
J'aimerais poser un certain nombre de questions au ministre pour savoir
ce que son ministère entend faire au cours des mois qui viennent pour
tirer cette industrie du marasme dans lequel elle est en train de couler
à pic.
M. le Président, peut-être que mes premières
questions pourraient porter sur l'aspect international de la question. Le
ministre est sûrement au courant que, récemment encore, des
bateaux de pêche étrangers sont venus prendre du poisson sous le
nez des pêcheurs québécois, dans le golfe Saint-Laurent en
particulier. Régulièrement, on a signalé, depuis des mois
ou des années, mais encore de façon significative
récemment, que des chalutiers péchaient notamment le hareng
à quelques milles du Rocher-aux-Oiseaux, près des
Iles-de-la-Madeleine. Compte tenu du fait qu'on a vu les prises de hareng
diminuer de 80% en quatre ans, ces faits contribuent à appauvrir la
population québécoise, la population de pêcheurs.
M. le Président, il est défendu aux 'pêcheurs
québécois et canadiens de pêcher le hareng.
Les pêcheurs étrangers, eux, ne sont pas tenus à
cette réglementation et viennent le prendre sous le nez des
pêcheurs québécois. Or, le golfe Saint-Laurent constitue
depuis I970 une zone de pêche adjacente, exclusive,
réservée en principe aux pêcheurs autochtones. Il s'agit
évidemment d'une compétence fédérale. Combien de
fois ne trouve-t-on pas, justement, des compétences
fédérales lorsqu'on se trouve devant des problèmes comme
ceux-là au Québec? On avait pu, ce matin, dans une autre
commission, constater à quel point, pour ce qui est du territoire
notamment, la
présence fédérale constitue un problème pour
le ministère des Affaires intergouvernementales. Ici encore, nous sommes
devant une compétence fédérale. Je voudrais donc demander
au ministre ce qu'il a l'intention de faire pour que les pêcheurs
étrangers, portugais, espagnols, français, norvégiens,
russes, ne puissent venir contribuer à la surexploitation
systématique des richesses du golfe, alors que les pêcheurs
québécois, eux, sont liés par une réglementation
fédérale qui les empêche de capturer les mêmes
poissons.
J'aimerais demander au ministre s'il a effectué des
démarches auprès du gouvernement fédéral pour que
les responsables de la surveillance dans le golfe prennent des mesures pour
faire cesser ce qui constitue, de plus en plus, un pillage par les
étrangers. C'est la première question que je destine au
ministre.
M. Saint-Pierre: M. le Président, en parlant de
pêche, il me semble que le chef de l'Opposition a "pêché"
plusieurs fois d'une façon grave en déformant peut-être la
réalité, en tentant de jouer avec les chiffres pour nous faire
croire à une chose qui n'est pas exactement conforme à la
vérité. C'est bien sûr que, d'une année à
l'autre, dans un domaine comme la pêche, les petits poissons sont dans le
fond de la mer, il peut y avoir des variations importantes. Si l'on veut donner
un portrait plus réaliste de la situation, il faudrait évidemment
le donner au total. En particulier, on aurait pu parler des augmentations
substantielles, des chiffres beaucoup plus importants que ceux dont vous avez
parlé, en termes de valeur, en ce qui touche la croissance et
l'importance des espèces comme le homard, le crabe et d'autres types de
pêche qui, il y a à peine sept ou huit ans au Québec, ne
rapportaient que des sommes relativement marginales et qui ont pris beaucoup
d'importance aujourd'hui.
D'ailleurs, on m'informe, et ce sont des renseignements qu'il faudrait
mesurer au jour le jour, que la saison de cette année s'annonce
extrêmement meilleure que celle de l'an dernier. Si le chef de
l'Opposition veut bien revoir son diagnostic à la mesure de
l'expérience de cette année, il faudra faire fondre
littéralement dans l'eau du golfe les statistiques qu'on a voulu nous
donner pour montrer une situation désastreuse. En ce qui touche la
pêche étrangère dans nos eaux intérieures, il
faudrait diviser le problème en deux, M. le Président.
Il y a la pêche étrangère à
l'intérieur des eaux territoriales canadiennes, de la mer canadienne,
que ce soit dans le golfe ou le long du littoral. Et là, il faudrait
dire que les bateaux étrangers qu'a pu voir le chef de l'Opposition dans
ses périples gaspésiens étaient effectivement des bateaux
français. Ce sont les seuls qui jouissent, en vertu du traité de
Paris, d'un droit acquis qui doit être respecté
intégralement et, à la suite de discussions engagées avec
ce gouvernement, ce privilège se terminera en 1985. Je pense que le chef
de l'Opposition connaît le traité de Paris, il connaît
quelles ont été les dispositions...
M. Morin: Ce n'est pas le traité de Paris, c'est le
traité d'Utrecht de 1713. Peu importe.
M. Saint-Pierre: Alors, une tradition encore plus longue aurait
dû, dans vos remarques, mériter qu'on tienne compte quand
même d'un traité historique qui donnait aux Français des
droits particuliers.
M. Morin: Est-ce que je pourrais poser une question technique au
ministre? Le ministre doit savoir qu'à la suite de l'arbitrage de 1910,
il a été décidé que, bien que des étrangers
puissent avoir certains droits conventionnels fondés sur des
traités dans le golfe Saint-Laurent, ils n'en étaient pas moins
assujettis à la réglementation canadienne sur les
pêcheries. Comment se fait-il que, dans ce cas-ci, les pêcheurs
québécois, canadiens, soient assujettis à te
réglementation fédérale et qu'il semble que les
pêcheurs français ou autres ne le soient pas?
M. Saint-Pierre: Dans le cas de la pêche du hareng?
M. Morin: Dans le cas de la pêche du hareng, par
exemple.
M. Saint-Pierre: Je vais demander à M....
M. Lacroix: II y a un contingentement de 40,000 tonnes qui est
respecté. J'ai rencontré aux Iles-de-la-Madeleine, en fin de
semaine, un capitaine qui est venu livrer du hareng à Havre-Aubert.
Naturellement le hareng ne saute pas sur les côtes comme on le trouvait
ordinairement, mais il a dit qu'il n'a jamais vu autant de hareng de sa vie
dans le golfe et particulièrement aux environs du Rocher-aux-Oiseaux. Il
est déjà arrivé que le hareng ait disparu des côtes
pour une période donnée. Par exemple, en 1956, il y a eu une
épidémie qui a fait mourir une très grande partie des
stocks de hareng. Aujourd'hui, il y a un contingentement de 45,000 tonnes. Le
chef de l'Opposition sait que, dans les pêcheries dans le golfe, il y a
le banc Hamilton, dans le détroit de Belle-lsle, qui est
pêché par les gens de Terre-Neuve et de la Basse
Côte-Nord?
Il y a les grands bancs dans le détroit de Cabot, où les
Madelinots vont pêcher en particulier. En Gaspésie, il y a le banc
des Orphelins, le banc des Américains, le banc Bradelle, qui est
p^êché par les Gaspésiens, les pêcheurs du
Nouveau-Brunswick, ceux de l'Ile-du-Prince-Edouard et par les gens des
Iles-de-la-Madeleine.
Quant aux stocks de hareng, il y avait, il y a deux semaines, quelques
chalutiers dans le bout du Rocher-aux-Oiseaux, mais ce sont des bateaux
canadiens qui pêchaient le hareng. Il n'y avait ni bateaux
français ni bateaux américains. Il y avait uniquement des bateaux
canadiens, qui étaient particulièrement des bateaux du
Nouveau-Brunswick qui venaient pêcher dans le golfe.
Naturellement, dans les pêcheries, je pense que, même dans
un contexte politique autre que
celui dans lequel on vit, il y aura toujours des hauts et des bas. Quand
le temps est favorable, il n'y a pas de poisson; quand il y a du poisson,
ordinairement, le temps n'est pas favorable. Je ne crois pas qu'un parti
politique puisse régler cela. En dehors de toute considération
partisane, je crois qu'actuellement, dans le golfe, les Américains ont
aussi des droits acquis. Cela ne se rapporte ni au traité de Paris ni au
traité d'Utrecht. C'est lorsque le Canada a décidé de
porter ses limites territoriales à douze milles, cela fermait le golfe
aux étrangers. Il y a les Français, avec lesquels nous sommes
pris par une entente jusqu'en 1985, et les Américains également,
mais ils n'ont pas le droit de renouveler leur flotte. Lorsqu'un bateau devient
désuet, il n'est pas remplacé, ce qui fait que leur flotte
s'élimine automatiquement. Quant aux Français, ils viennent
pêcher dans le golfe, et surtout durant l'hiver. Nous engageons le Cryos,
l'été, pour faire des recherches dans le golfe pour les besoins
de nos pêcheries. Le Cryos est le bateau amiral de la flotte de
pêche française qui vient pêcher l'hiver au sud-ouest de
Terre-neuve. On fait de bonnes pêches l'hiver dans le golfe.
Le chef de l'Opposition veut-il s'en tenir uniquement au hareng, ou
veut-il parler de toutes les pêcheries? Nous les prendrons une à
une. Dans le cas du hareng, je pense que ce n'était peut-être pas
écrit dans les livres de droit, mais il y a eu une grave
épidémie en 1956 qui a affecté le hareng et qui a
considérablement diminué les stocks. C'est pourquoi, pendant
plusieurs années, la pêche au hareng a diminué.
Aujourd'hui, il y a du hareng en quantité et le hareng est de belle
qualité.
Etant donné la pêche intensive qui se pratiquait, pour ne
pas détruire le hareng trop rapidement, pour lui permettre de se
reproduire et de pouvoir être une source de revenu continue pour les
pêcheurs, il y a un contingentement de 45,000 tonnes qui est
observé, à ce que je sache.
M. Saint-Pierre: Comme le chef de l'Opposition le voit, la
connaissance et l'intérêt du député des
Iles-de-la-Madeleine pour les questions de la pêche ne sont pas un
phénomène passager mais remontent à longtemps.
M. Morin: Oui, je sais, et l'intérêt que j'y porte
aussi remonte à plusieurs années, puisque j'ai eu autrefois
l'occasion, de coopérer avec le gouvernement fédéral au
sujet de ces questions de juridiction sur les pêcheries.
Effectivement, il y a deux pays qui ont des droits fondés sur des
traités. Ce sont la France, depuis le traité d'Utrecht, qui avait
cédé l'Acadie et Terre-Neuve à l'Angleterre, et il y a
également les Etats-Unis, à la suite du traité accordant
l'indépendance à ce pays et à la suite d'un
renouvellement, dans le traité de 1818, à la suite de la guerre
de 1818. Effectivement, comme l'a dit le député des
Iles-de-la-Madeleine, les Américains font l'objet de ce qu'on appelle un
"phasing out", mais je constate que d'autres pêcheurs sont actifs dans le
golfe et ne sont pas assujettis, semble-t-il, à la réglementation
sur les pêches, ce qui fait que le ha- reng qui ne peut être
pêché par les pêcheurs québécois et canadiens
peut l'être par les étrangers qui pénètrent dang le
golfe. Ceci me paraît pour le moins, étrange, étant
donné que les droits conférés par les traités ne
comportent pas une license absolue, une liberté absolue de pêche
dans le golfe.
Je pose ma question au ministre, parce que le député des
Iles-de-la-Madeleine ne semble pas voir les problèmes, il semble dire
que, au fond, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.
M. Lacroix: Non.
M. Morin: Je pense qu'il y a des problèmes et j'aimerais
demander au ministre de répondre à la question que je lui posais.
Est-ce qu'il est intervenu auprès du gouvernement fédéral
pour protéger les pêcheurs québécois? Est-ce qu'il a
l'intention de le faire, s'il a négligé, jusqu'ici, d'y
procéder?
M. Saint-Pierre: M. le Président, pour répondre
à la question, avec la permission de la commission, je vais demander au
sous-ministre adjoint responsable des pêcheries au ministère, M.
Viateur Bernard qui, d'ailleurs, revient de Genève où, avec le
gouvernement fédéral et d'autres représentants des
provinces de l'Atlantique, il a défendu la position canadienne pour un
élargissement de nos limites de pêche, de nous faire le bilan des
efforts qui ont été faits pour cerner le problème
soulevé par le chef de l'Opposition et des mesures que nous prendrons au
cours des prochaines années pour améliorer le sort des
pêcheurs québécois.
M. le Président, on a parlé de la question du hareng, de
la situation qui prévaut en 1975. D'abord, la pêche au hareng se
pratique de deux façons. Il y a la pêche pratiquée par les
bateaux-seineurs. Tout le lit, c'est un immense filet. Le hareng est une
espèce qui longe les côtes, en temps normal. C'est près des
côtes. Il faut le pêcher. La seule restriction est la suivante: Aux
Iles-de-la-Madeleine, par exemple, du 15 avril au 15 mai, aucune pêche
par bateau-seineur.
M. Lacroix: Dans la baie de Plaisance.
M. Saint-Pierre: La baie de Plaisance, c'est fermé
à perpétuité parce que c'est un incubateur, c'est une
frayère. Nous prenons le contingentement de 1975 qui
s'élève à 55,000 tonnes. Le départage sera fait
comme suit: 30,000 tonnes pour ce qu'on appelle la flotte mobile, la flotte des
bateaux-seineurs. Incidemment, le Québec n'est pas propriétaire
de seineurs comme tels. Une seule société établie au
Québec, la Société B.C. Packers à Gaspé a
quelques bateaux-seineurs. En saison, elle fait, avec ses bateaux-seineurs, un
genre de capture qui sert à deux fins: le poisson qui est de
qualité moindre, parce qu'il est pêché en assez gros
volume, on en fait de la farine de poisson, et le poisson de bonne
qualité, on le convertit pour l'alimentation humaine. Dans les
seineurs, il y a la flotte de Nouvelle-Ecosse, la flotte du
Nouveau-Brunswick, la flotte qui pêche au Québec, mais qui n'est
pas une flotte du Québec, B.C. Packers, qui a ses propres bateaux.
Ça, c'est ce qu'on appelle la flotte mobile, si vous voulez, dans
le jargon. Il y a après cela le pêcheur au filet maillant. Son
contingentement a été établi pour le golfe à 25,000
tonnes. C'est là que j'ai toujours demandé au
fédéral, et le message est bien perçu et compris, de
diviser ce contingentement. A Terre-Neuve, le hareng entre par le
détroit de Cabot, le chenal laurentien. Pour Terre-Neuve, ce qui
prévalait, c'est que c'était le premier arrivé, premier
servi. Il est arrivé que Terre-Neuve a pris déjà la
moitié du contingentement certaines années,
particulièrement en 1973, alors que les quatre autres provinces avaient
dû se partager 7,000 ou 8,000 tonnes. C'était une situation
intenable. Aujourd'jui, on divise le contingentement de façon à
favoriser la pêche par le filet maillant et à produire du poisson
pour l'alimentation humaine. Les choses se redressent considérablement
de ce côté.
M. Lacroix: II y a aussi le fait que, du 15 avril au 15 mai, il y
a la situation des glaces qui ne permet pas toujours de travailler normalement.
Ainsi, la saison du homard a été retardée à cause
des glaces. Le hareng, naturellement, est un poisson qui se
déménage et la température de l'eau influe toujours sur la
migration de ce poisson comme sur les migrations des autres poissons.
M. Saint-Pierre: Alors, du 15 avril au 15 mai, il y a une zone
très bien délimitée autour des Iles-de-la-Madeleine
où toute pêche par bateau-seineur est prohibée. Maintenant,
d'ici la fin de la saison, nous avons "Gaspésie du 15 août au 15
septembre" dans certains secteurs de la Gaspésie où la
pêche par seineur est prohibée parce que c'est une pédiode
de frai. Disons, à partir de Carie-ton, je n'ai pas tous les
détails, mais on va chercher la baie de Gaspé jusqu'à
Saint-Maurice, sur la rive nord de la Gaspésie. Maintenant, la
production en volume, il faut s'entendre ici. Excusez, il y a une distinction.
On disait du hareng, il y a jusqu'à une dizaine d'années: C'est
absolument une ressource inépuisable. Il y en avait
énormément.
On s'est lancé à faire de la farine de poisson.
Réellement, on a fait énormément de misère aux
harengs dans le golfe. Par contre, aujourd'hui, on a trouvé une solution
qui est, de plus, avantageuse. Je vous donne un exemple, au moment ou B.C.
Packers utilisait jusqu'à 35,000 tonnes de poisson pour faire de la
farine, les revenus nets, aujourd'hui, avec 3,500 tonnes de harengs qu'on
prépare pour consommation humaine, sont tout aussi importants. C'est ce
que nous visons à faire.
M. Morin: C'est sûr, la rareté du bien fait monter
le prix.
M. Saint-Pierre: La rareté du bien, mais surtout son
utilisation. Là, c'était de la protéine pour consommation
animale, alors qu'aujourd'hui on transforme cela pour la consommation
humaine.
M. Lacroix: II n'y a pas seulement les pêcheries
canadiennes; il y a aussi d'autres pays...
M. Morin: M. le Président, pourriez-vous s'il vous
plaît, me reconnaître. J'ai demandé la parole.
M. Lacroix: ... qui occupent énormément notre
marché.
M. Saint-Pierre: Disons qu'il y a un phénomène de
gestion qui est intervenu et qui favorise les choses.
Le Président (M. Brisson): Mais, monsieur était en
train d'expliquer. Vous avez des questions à poser?
M. Morin: Oui, bien sûr! J'ai des questions à
poser.
Le Président (M. Brisson): Le député de
Sauvé.
M. Morin: Je voudrais parler de la surexploitation et des effets
qu'elle entraîne sur les stocks de hareng. Je voyais, par exemple, qu'en
1973 la quantité en poids avait déjà diminué
sensiblement par rapport aux autres années, mais elle était
encore de 13,354,200 livres; en 1974, elle est tombée à 9,545,400
livres. C'est tout de même une diminution substantielle, alors que
d'autres espèces, elles, ont connu des chutes peut-être même
plus spectaculaires. Je pense au maquereau et, notamment, aussi, aux
pétoncles qui ont connu des chutes dramatiques. Mais, tenons-nous-en au
hareng. Avez-vous des espoirs de prises supérieures à
celles-là, j'entends en poids, au cours de l'année qui vient?
M. Saint-Pierre: Au cours de l'année qui vient, le
contingent a été relevé de 45,000 tonnes. L'an dernier, il
était remonté à 55,000 tonnes. Ce sont des
hypothèses émises par des biologistes et, naturellement, ce sont
les biologistes fédéraux, avec ce qui peut entrer de "input" et
d'indications de chez nous. C'est très difficile à
évaluer. Chez le poisson, il y a la maladie, l'éparpillement, le
phénomène des marées, la froidure de l'eau. C'est une
espèce mouvante. Cela peut sortir du golfe et y en trer.
M. Morin: Niez-vous qu'il y ait eu surexplo tion du stock depuis
quelques années?
M. Saint-Pierre: II faut admettre qu'il y a eu surexploitation
parce qu'il y a eu un manque de contrôle. Comme je l'ai rappelé
précédemment, on s'était dit: Le volume du hareng est tel
qu'on n'en verra jamais la fin.
M. Morin: Quelle part de responsabilité attribuez-vous aux
pêcheurs étrangers dans la chute des stocks?
M. Saint-Pierre: II faudrait sortir du domaine du hareng. Pour
parler de cela, il faut sortir du golfe. Le Canada s'est donné une mer
territoriale portée de trois à douze milles en 1970.
M. Morin: En 1970, c'est bien cela.
M. Saint-Pierre: Je sais que vous êtes mieux
renseigné que moi sur beaucoup de choses. Dans la pratique des choses,
il se produit ceci, c'est que concurremment, si vous voulez, on va se placer au
temps des années soixante-dix.,. Prenons les pays d'Europe qui font
partie du CIPANO, c'est-à-dire du comité international des
pêches. Nous identifions seize pays qui pêchent dans l'Atlantique
nord-ouest. Vous avez la flotte de la Russie qui s'est décuplée.
On va là avec des navires-usines et avec des flottes de satellites. Vous
avez le Portugal, vous avez l'Allemagne de l'Est, vous avez la Pologne, vous
avez la France. Cet effort conjugué fait que, nécessairement, on
a exercé un effort sur les stocks qui est tout à fait
irraisonnable.
La cause, nous la reconnaissons, cela a été traité
à Genève, c'est reconnu. Maintenant, comme mesure, si on peut y
sauter tout de suite, le Canada et nous sommes bien conscients de cela; si on
empêche le poisson de sortir du golfe ou qu'on le pêche à sa
sortie, si on l'empêche de sortir ou d'entrer, nécessairement,
à douze milles ou à treize milles ou à quatorze milles, ce
n'est pas dans le langage du poisson. Si on le capture trop, cela baisse les
stocks. Au mois de juin, le 7 ou le 8, se déroulera à Edimbourg,
Ecosse, la conférence annuelle de CIPANO. La demande canadienne a
déjà été produite, il faut la produire 60 jours
à l'avance. Alors, les pays intéressés ont
été saisis de la demande du Canada qui veut et exige une
réduction de l'effort de pêche de 40% cette année, à
l'exclusion du Canada.
M. Morin: Comme le golfe fait partie de la zone ICNAF, cela
comprendrait l'effort de pêche dans le golfe.
M. Saint-Pierre: L'effort de pêche... il faut s'entendre.
Il n'y a plus de flottes étrangères. On ne parle pas de seize
pays qui pêchent dans le golfe. On parle de la France qui a un droit de
pêche durant trois mois l'hiver sur la côte ouest de Terre-Neuve,
un peu des Etats-Unis, les Etats-Unis se retirent, cela n'a plus de
signification. Il reste la France qui pêche de la morue. On peut bien se
demander pourquoi les Canadiens ne pêchent pas la morue, c'est que nos
bateaux ne sont pas gréés pour pêcher la morue l'hiver.
Nous avons quelques bateaux qui pourraient le faire théoriquement, mais
ce sont des bateaux où les poissons entrent sur le pont. Alors, tout
gèle. C'est un pain de glace à l'intérieur des cales de
navires, ce n'est pas faisable. Les Français ont des flottes, la
pêche par le côté et le traitement du poisson se fait
à l'intérieur des navires. Nous allons y arriver; incidemment, je
ne veux pas faire un débat là-dessus, mais nous arriverons
à pouvoir faire la pêche l'hiver. Dans le contexte actuel, avec
les bateaux qui pêchent en saison d'été, c'est une
situation intenable.
M. Morin: Oui, effectivement, je voyais récemment que des
rapports fédéraux se font extrêmement alarmistes. Je vois
un rapport dans le Montreal Star qui fait état des inquiétudes
fédérales, le 26 mai I975, donc il y a trois jours à
peine; on nous dit que le Canada craint une crise dans les pêcheries.
"Canada fears fisheries crisis." On nous dit que la raison majeure est
l'état très grave des pêcheries de la côte de
l'Atlantique. Je me permets de citer deux passages: "In the last ten years or
so, the catch of major fish species has steadily declined and part of the blame
is placed on large foreign fishing fleets..." comme vous l'avez reconnu
vous-même il y a un instant, "especially those of the Soviet Union which
methodically sweep the oceans". Plus loin, "economists from the fisheries
service of Environment Canada provided some up-to-date statistics on Atlantic
groundfish landings which appear to give stark proof of decline".
Donc, on craint une baisse draconnienne, "stark proof of decline". "For
example, in the first two months of this year, the total Atlantic ground-fish
landings were down 61% from the same period last year". Cela ne me paraît
pas aller dans le sens des observations du député des
Iles-de-la-Madeleine.
M. Saint-Pierre: II y a peut-être une note explicative
à cela, c'est que la flotte de pêche de Terre-Neuve, l'hiver
dernier, a été attachée au quai durant tout l'hiver par
l'effet d'une grève. Alors, l'effort canadien de pêche a
été peu significatif; la flotte de la Nouvelle-Ecosse a
pêché de janvier à avril, d'ailleurs elle n'a pas
pêché au large de la côte Atlantique, elle a plutôt
pêché à l'embouchure du détroit de Cabot.
M. Morin: Pourriez-vous peut-être ... Pour mettre fin
à cette question, M. le Président, puis-je demander à
notre spécialiste de nous faire une sorte de tableau de chasse des
pêcheries québécoises, du moins pour les principales
espèces. J'entends la morue, en comparant l'année I973,
l'année I974, la sébaste, je pense que cela serait
intéressant, le hareng bien nous en avons parlé il y a un
instant; le maquereau, peut-être aussi les pétoncles qui sont une
source de revenu importante; le homard est resté à peu
près stable, les prises ont légèrement augmentées
en poids. Est-ce que vous pourriez nous donner aussi une idée de
l'ensemble du tableau de chasse?
M. Côté: M. le Président, si le chef de
l'Opposition me le permet, c'était bien touché dans sa
première question. Je pense à un volet très important dans
le domaine des pêcheries, soit la conférence de Genève
à laquelle M. Bernard a participé avec la collaboration du
fédéral.
M. Morin: Nous allons l'interroger là-dessus...
M. Côté: C'est parce que vous aviez abordé
cette question au départ.
M. Morin: Oui, je veux l'aborder par la suite, mais je veux
d'abord établir le problème, s'il y en a un. Il faut d'abord voir
les prises et les chefs.
M. Saint-Pierre: Le problème. Si vous voulez, à la
date de ce jour, on va faire un petit recul. Au moment où je vous parle,
on va prendre l'espèce "homard", les pêches sont
quasi-miraculeuses cette année, autant aux Iles-de-la-Madeleine qu'en
Gaspésie. C'est un phénomène et je continue, remarquez
bien, on dit que la morue... On ne prétend pas que c'est la faute du
gouvernement. Non, disons pour incidence.
M. Morin: Je ne sais pas qui a dit que ce n'était pas le
gouvernement qui empêchait les pommes de terre de pousser dans certaines
régions du Québec.
M. Saint-Pierre: On va prendre les faits d'entraînement.
Moi, disons, je l'impute à ce phénomène. L'hiver dernier,
à Terre-Neuve, depuis juillet l'an dernier, cela a été
grève par-dessus grève, l'effort de pêche a
été peu de chose. Au moment où je vous parle, la morue qui
était très faible en Gaspésie, d'après l'expression
des gens de là-bas, on dit: "Cela leur sort par les oreilles". A tel
point que les usines sont engorgées et engorgées à un tel
point que les producteurs ont été obligés d'appliquer des
contingentements aux bateaux. Un bateau de 50 pieds n'apportera pas plus que
20,000 livres de morue un autre et un autre, c'est un tableau qu'on a fait.
Maintenant, si cela durait toute l'année, je m'en irais pêcheur.
C'est pour dire que, par effet d'entraînement, on a un peu moins
pêché, je l'impute à cela parce que le golfe c'est un peu
une bombe biologique. Alors, le détroit de Belisle a été
dégagé, le détroit de Cabot a été
dégagé, il y a de la morue en ce moment à un point tel que
c'est un embarras, c'est un problème.
M. Lacroix: D'ailleurs, aux Iles-de-la-Madeleine, on a
également attaché, le 4 novembre, à cause d'une
grève .
M. Saint-Pierre: D'ailleurs, dans les statistiques les plus
récentes que nous avons au plan des quantités, c'est pour cela
que je ne comprends pas, peut-être que dans les provinces atlantiques, il
y a des problèmes. Je voyais ici dans les statistiques que, pour les
trois premiers mois, par rapport à 1974, en 1975, l'indice de 1974
étant à 100, nous avons actuellement, au niveau des prises
totales, les débarquements totaux et je réfère,
bien sûr,...
M. Morin: Je vous parle de la pêche
québécoise, c'est de ce dont vous me parlez.
M. Saint-Pierre: C'est cela, exactement. Le Fleur-de-Lys c'est
tout ce que je vous parle. C'est 165% de ce que c'était l'an dernier. Au
mois de janvier, c'était de 274% par rapport à...
C'est-à-dire qu'au point de vue de...
M. Morin: Pourquoi cela, pour la morue?
M. Saint-Pierre: Non, les débarquements totaux. On l'a
pour différentes espèces. M. Bernard peut peut-être et je
peux vous les lire aussi.
Pour la morue, si cela vous intéresse, je vais vous donner cela.
Nous avons...
M. Morin: Alors, les fédéraux sont
complètement dans les pommes!
M. Cadieux: Ils parlent des autres provinces aussi. Ils ne
parlent pas seulement du Québec.
M. SaintPierre: II faut retenir ceci: globalement, il y a une
inquiétude réelle motivée sur l'avenir des pêches.
Disons que si rien n'est fait au niveau de CIPANO et que la flotte
étrangère n'accepte pas volontairement ou par coercition de se
retirer de la zone qui va jusqu'à la limite de douze milles de notre mer
territoriale, nos pêcheries sont foutues d'ici quelques années. Il
y a 2,200 bateaux étrangers qui pèchent, qui peuvent aller
jusqu'à douze milles des côtes, ils sont en zone internationale.
Lors de la conférence de Genève, si on y fait allusion, la
délégation canadienne a expliqué ce problème et a
essayé de le faire comprendre.
Maintenant, cela peut se pratiquer de deux façons. Ce qui va se
passer à CIPANO, par exemple, c'est qu'on demande une réduction
de l'effort de pêche de 40%. La Russie a laissé entendre ce
sont des gens comme les autres qu'elle a fait des investissements
massifs dans sa flotte de pêche et qu'elle n'accepte pas qu'on lui
demande de se retirer subito presto. Elle est en eaux internationales. Il y a
là cette épée de Damoclès. Il y a la zone
économique de 200 milles qui peut être proclamée
unilatéralement et ce n'est pas exclu. Le Canada tient fort à la
négocier, parce que s'il ne négocie pas sa zone, il la
déclare unilatéralement, on perd du même coup tout pouvoir
de négociation touchant le saumon qui revient au Québec et au
Canada.
M. Morin: Et qui est pris dans la haute mer, au large de
l'Islande.
M. Saint-Pierre: II est pris par le Danemark, par les Danois. Et
Terreneuve fait sa bonne part. C'est un problème interne. Il y a des
gens qui se sont fait parler à ce sujet.
M. Morin: Oui, avec l'aide du pouvoir fédéral.
M. Saint-Pierre: Je ne sais pas de quelle façon c'est
articulé, mais de toute façon, il y a une gestion à
effectuer à l'intérieur du golfe. Le message commence à se
vendre. Je leur ai dit: C'est du dernier ridicule que de vouloir
contrôler 200 milles si on ne peut pas faire la gestion du golfe.
M. Morin: Oui. Maintenant, si la zone écono-
mique de 200 milles finit par être acceptée, malgré
toutes les tergiversations de la conférence des divers Etats à
Genève, et avant cela, à Caracas, est-ce que le Québec va
dans le même sens? Le ministère a-t-il pris position sur cette
zone économique?
M. Saint-Pierre: Nous appuyons totalement la zone
économique, parce qu'elle concède à l'Etat souverain
ce ne sera pas particulier au Canada, il y a 90% des 150 pays qui
étaient là qui ont vue sur les océans elle donne la
gestion exclusive des stocks renouvelables et non renouvelables. Nous savons
pertinemment déjà que le Canada ne pourra pas, en héritant
d'une zone économique de 200 milles, capturer toute la production
normale de poissons. C'est une impossibilité physique. Alors, le Canada
est disposé à se servir à 100% de ses besoins, à
délivrer des permis, à vendre des permis de pêche à
certains pays.
M. Morin: Quel est le ministère qui a pris position sur
cette question? Est-ce le ministère des Affaires intergouvernementales,
puisque cela relève des relations internationales, ou est-ce le
ministère de l'Industrie et du Commerce qui a fait connaître
à Ottawa l'appui du Québec pour cette zone économique?
M. Saint-Pierre: Nous avons fait connaître à Ottawa
l'appui du Québec à cette zone économique, mais il n'y a
pas de problème avec le ministère des Affaires
intergouvernementales. Il est constamment mis au courant des dossiers que nous
avons avec le gouvernement fédéral, dans le secteur de la
pêche, bien sûr. Il faudrait parler de consultations presque
journalières, parce qu'il y a toujours quelque chose qui se passe au
niveau des programmes de recherche, des programmes conjoints et des programmes
d'aide au renouvellement de la flotte de pêche.
M. Morin: Parce que, si la zone de 200 milles, la zone
économique est acceptée, elle protège, du fait même,
le golfe Saint-Laurent. Elle se trouve à fermer le golfe
Saint-Laurent.
M. Lacroix: Me permettriez-vous une remarque? Je crois que
même si les limites territoriales étaient portées à
200 milles, il faudra négocier avec les autres partenaires de l'Est du
Canada, parce qu'il y a deux migrations de poisson qui viennent dans le golfe.
C'est-à-dire qu'il y a une migration qui va vers l'extérieur du
golfe et il y a une autre migration qui vient des grands bancs vers
l'intérieur.
Il y a quelques années, naturellement, on ne pêchait pas de
façon intensive douze mois par année. Aujourd'hui, ce qui arrive,
c'est que, lorsque la migration va vers l'extérieur du golfe, à
ce moment, les chalutiers sont à la porte du détroit de Cabot et
ils pêchent la morue qui veut sortir.
M. Morin: C'est cela.
M. Lacroix: De la même façon, lorsque le poisson qui
vient de l'Atlantique, qui vient des grands bancs du plateau continental, veut
entrer dans le golfe, les chalutiers sont encore là pour le capturer.
Naturellement, il faudra, à un moment donné, qu'il y ait, au
moment de sa migration, une relâche pour permettre à ce poisson de
pouvoir entrer et sortir du golfe, parce que, autrement, avec la reproduction
uniquement du stock qu'il y a dans le golfe, c'est certain qu'on est capable de
l'épuiser. Même si on portait les limites territoriales à
200 milles, si on n'agit pas de façon que la pêche ne soit pas
permise pendant une certaine période de temps, au moment des migrations
vers l'intérieur ou l'extérieur, de toute façon, lors de
ces deux migrations, je ne crois pas que la situation s'améliorera dans
le golfe.
M. Morin: Est-ce que je peux demander au député des
Iles-de-la-Madeleine si les chalutiers auxquels il fait allusion, qui guettent
le poisson à l'entrée ou à la sortie du golfe sont des
chalutiers étrangers? Est-ce qu'il fait allusion à des chalutiers
étrangers ou à des chalutiers de la Nouvelle-Ecosse, du
Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve?
M. Lacroix: De la Nouvelle-Ecosse, de Terre-Neuve, du Nouveau-Bru
nswick et, occasionnellement, les nôtres également.
M. Morin: II est évident, M. le Président, que si
la zone de 200 milles peut permettre l'exclusion éventuelle des
étrangers, elle ne permettrait pas et n'empêcherait pas, dis-je,
les chalutiers néoécossais, néo-brunswickois c'est
bien comme cela qu'on dit et terre-neuviens de procéder de la
même façon que par le passé...
M. Lacroix: Seulement, il y aura beaucoup moins de bateaux.
M. Morin: ... et de cueillir la moisson avant qu'elle n'entre
dans le golfe.
M. Lacroix: C'est pour cela que je dis qu'il faudra, avec nos
partenaires, discuter de cette possibilité, pour permettre aux stocks du
golfe d'augmenter et de s'améliorer.
M. Morin: Le député des Iles-de-la-Madeleine me
facilite la question que je voulais poser.
M. Lacroix: Ce n'est pas la première fois que j'interviens
à ce sujet.
M. Morin: Je sais, je m'en doute, puisque cela doit vous
intéresser au premier chef, du moins, je le souhaite. Je n'ai pas
d'objection à ce que le député participe activement
à la discussion, au contraire.
M. Cadieux: II n'y a rien...
M. Morin: Mais, je voudrais, M. le Président, demander au
ministre quelles sont les attitudes prises par le Québec devant les
procédés utilisés
par des chalutiers des autres provinces, les attitudes auxquelles vient
de faire allusion le député des Iles-de-la-Madeleine. Est-ce que
le gouvernement québécois a fait des représentations au
pouvoir fédéral pour qu'il mette ordre à cette situation?
Est-ce que le gouvernement québécois a pris la défense des
pêcheurs québécois, dans la situation qui a
été décrite par le député des
Iles-de-la-Madeleine?
M. Saint-Pierre: Bien sûr. Depuis l'automne dernier, nous
avons eu au moins quatre réunions fédérales-provinciales
sur les sujets des pêches et la gestion du golfe. La position dite
action. Je représentais un petit peu la solitude
québécoise parce qu'il n'y a pas de ministre en titre aux
pêches au Québec. Tout de même par délégation
et en présence des ministres des pêches et de leurs sous-ministres
et tout cela, j'ai fait l'exposé et on l'a trouvé ce n'est
pas par flatterie que je le dis le ministre, M. Leblanc, a dit: La
formule, c'est Viateur Bernard qui l'a, la gestion du golfe. J'ai des appuis
officiels du Nouveau-Brunswick qui la partagent à 100%, qui l'ont
confirmé, ainsi que de l'Ile-du-Prince-Edouard. Avec deux provinces,
cela fait trois, cela fait 60%.
Maintenant, dans la pratique des choses, ce que je leur demande, c'est
ceci: S'il doit y avoir des contingents, bon Dieu, qu'on fasse le partage du
contingent. Il faut nécessairement un contingent global. "The other bird
gets the worm", je dis que cela ne va pas. Si on accepte le principe de cela,
c'est déjà une chose. On contingente le hareng, on subdivise.
Deuxièmement, j'ai demandé, ce qu'on dit en anglais la "closed
season", c'est une saison prohibée, justement aux périodes de
migration. Dans l'ensemble, la position du Québec... Gestion et modes de
gestion, je vous dispense de la narration de cela, il y a beaucoup de choses.
C'est retenu et accepté en principe.
M. Morin: M. Bernard, je ne doute pas que vous soyez un
porte-parole éloquent. A ces conférences, est-ce que les autres
provinces qui ont des pêcheurs, les autres provinces de l'Atlantique
notamment, sont représentées par leur ministre?
M. Saint-Pierre: Elles sont représentées et elles
sont réceptives à la question. Prenez...
M. Morin: Ma question est très technique. Je ne veux pas
vous demander leur attitude, je veux vous demander si les autres provinces sont
représentées par leur ministre ou leur sous-ministre.
M. Lacroix: Pour les autres provinces, la principale industrie
est la pêche.
M. Saint-Pierre: Oui, elles sont représentées par
leur ministre. Habituellement, c'est le sous-ministre qui fait le bagou. Il
faut s'entendre là-dessus. Maintenant, Terre-Neuve et Nouvelle-Ecosse,
il faut les... S'il faut les identifier, dans le problème de
Terre-Neuve, ce qui nous ennuie, c'est qu'il y a une migration de poissons qui
vient du banc de la rivière Hamilton, à l'embouchure de la
rivière Hamilton. C'est près de chez eux, c'est sur leur
littoral. Ils sont un peu gourmands. Nouvelle-Ecosse, le détroit de
Cabot, l'embouchure du détroit de Cabot, le secteur 4-VN, c'est
contingenté. Seulement, la Nouvelle-Ecosse...
Ecoutez, cet hiver, j'ai encore attiré l'attention
là-dessus. J'ai dit que cela n'a pas plus de sens qu'une poule à
genoux, vous avez des bateaux qui peuvent aller en haute mer et vous allez
pêcher à l'embouchure du détroit de Cabot,
précisément les "stocks" qui émigreraient dans le golfe
cet été.
M. Morin: Vous avez des métaphores d'agriculteur pour un
pêcheur!
M. Lacroix: C'est pour vous redescendre sur la terre, on ne veut
pas vous noyer dans la mer.
M. Morin: Continuez, je vous écoute, monsieur.
M. Saint-Pierre: A partir de là, c'est un petit peu
à la faveur de la situation qui prévaut. En somme, on constate
à la fois un petit peu la déchéance dans les "stocks", une
déchéance momentanée qui peut se corriger. Il faut avoir
confiance parce que le poisson sait se reproduire instinctivement. Pour cette
année, il n'y a aucune intervention possible. Les contingents sont
déjà établis au niveau de CIPANO. Nous travaillons sur le
projet 76. Si cela débouche sur du concret, le Canada
récupérerait 40% de l'effort de pêche qu'on soustraira de
l'autre côté.
Dans l'articulation des mesures, il est raisonnable de croire que la
zone économique je ne vous annonce pas cela en primeur, ce n'est
pas moi qui vais signer la convention de Genève il y a des
indications fermes que ce serait signé, les zones économiques,
parce qu'au niveau des deux groupes qui se sont formés, les pays en voie
de développement et les pays pollués, comme je les appelle, il y
a déjà un consensus sur la nécessité et
l'à-propos de cela. On a établi à quatre ou cinq ans la
période qu'il faudra pour refaire les "stocks". Et, à
l'intérieur du golfe, j'ai donné mon message à M. Needier
qui est le négociateur canadien de CIPANO. J'ai acheté un
quarante onces et j'ai dit: You will have to sing for your drink, et je crois
l'avoir pas mal ramolli, précisément, sur le...
M. Lacroix: ... par le conseil...
M. Morin: Comme je connais bien M. Needier, cela prend beaucoup
pour le ramollir.
M. Saint-Pierre: Mais je l'ai fait chanter en français,
c'est...
M. Morin: Qu'est-ce que vous lui avez fait chanter? Au fond de
l'océan les poissons sont assis?
M. Saint-Pierre: C'est toujours Alouette!
Ce qui nous intéresse vivement, dans l'immédiat, c'est la
zone 4B-N, précisément l'embouchure. J'ai dit: M. Needier, il y a
une chose à faire.
D'abord, je lui ai fait un compliment, cela l'a insulté: "You are
an aging man". Je lui ai dit: C'est un compliment parce que vous prenez de la
sagesse en vieillissant. J'ai dit: Le contingentement est de l'ordre de 40,000
tonnes, on fait pêcher environ 30,000 tonnes l'hiver et il en reste 8,000
pour les quatre autres provinces dans le golfe. J'ai dit: Vous n'avez
qu'à renverser cela et ce sera une pierre à votre monument. Il
est parti avec le message, il l'a bien perçu et je crois qu'il va le
retenir.
M. Morin: Oui, au fait, vous ne faites pas un peu abstraction des
pressions qui vont être exercées par les pêcheurs des autres
provinces?
M. Saint-Pierre: A Ottawa, j'ai réussi à faire
accepter le principe, et le ministre, M. Leblanc, s'en est fait l'écho,
que les bateaux qui atteignent ou dépassent une certaine dimension, 140
pieds, n'ont pas d'affaire à pêcher dans le golfe alors qu'ils
peuvent aller au large et partager avec la flotte russe et les autres.
On placerait une limitation: Telle dimension de bateaux, en saison
estivale, sortez du golfe.
M. Morin: Et vous avez bon espoir d'avoir été
entendu.
M. Saint-Pierre: J'ai été entendu et compris.
Maintenant, est-ce qu'on va donner suite... De la pression, sachez-le, il y en
a.
M. Morin: Je vais m'arrêter là-dessus, pour
l'instant, parce que nous pourrons juger des effets de ces
représentations au cours des mois qui viennent et au cours des
années qui viennent.
Je voudrais, maintenant, passer à un autre sujet qui, bien
sûr, est pertinent au domaine des pêcheries également.
Est-ce que je pourrais vous demander, M. le ministre, quelle part
l'industrie des pêcheries du Québec a reçue du programme
fédéral de $20 millions destiné aux pêcheries de
l'est du pays, programme qui est en vigueur du 1er janvier 1975 au 30
avril?
M. Saint-Pierre: Les pêcheurs ont reçu un peu plus
de $2 millions et les producteurs pour les filets frais et congelés ont
reçu $3.5 millions. Lorsqu'on établit la part, j'imagine qu'on
doit tenir compte des conditions des activités de pêche dans
chacune des provinces. Bien sûr, chez nous, M. Bernard me donnait tout
à l'heure des chiffres au niveau du nombre de pêcheurs que nous
avions, et comme le mentionnait le député des
Iles-de-la-Madeleine, dans certaines provinces, l'industrie
manufacturière étant quasi inexistante, c'est l'industrie de la
pêche qui soutient dans une large mesure l'activité
économique.
M. Morin: Et c'est juste pour le Nouveau-Brunswick, la
Nouvelle-Ecosse et Terre-Neuve, l'industrie de la pêche est une industrie
clé, mais elle l'est aussi pour certaines régions du
Québec.
M. Saint-Pierre: Ce que je veux dire c'est...
M. Morin: On songe à la Gaspésie, aux
Iles-de-la-Madeleine, à certaines parties de la Côte-Nord, s'il
n'y avait pas les pêcheries, je me demande bien de quoi les gens
vivraient. Je pense que le député des Iles-de-la-Madeleine sera
d'accord avec moi.
M. Lacroix: Les pêcheries sont certainement l'épine
dorsale de l'économie des Iles-de-la-Madeleine.
M. Morin: Bien sûr.
M. Saint-Pierre: M. Morin, je dois à la
vérité de faire une rectification car on passe les papiers trop
vite. Le programme de $20 millions s'appliquait pour la pêche, le poisson
de fond qui serait cap-turédurantlesmoisd'hiver,de l'hiver1974-1975.
lise trouve qu'au Québec, seules deux sociétés ont pu se
prévaloir des avantages de cela.
M. Morin: Gorton Canada, si ma mémoire est bonne et St
Lawrence Sea Products.
M. Saint-Pierre: Gorton Canada et St Lawrence Sea Products, qui
n'a d'anglais que le nom. Ces gens-là pêchent à
l'extérieur, au sud et au sud-est de la Nouvelle-Ecosse. Ce sont les
deux seules. Ceci est une extension, c'est une hypothèse, parce que ce
programme de $20 millions a un enchaînement. Il débouche sur une
formule qui a été mise au point et qui vaut à compter du
1er mai, depuis trois semaines, dans la forme suivante: les cinq provinces de
l'Atlantique bénéficient, au niveau du pêcheur et du
producteur, d'une subvention qui va chercher deux cents et demi la livre de
poisson de fond qu'on paie directement au pêcheur, deux cents et demi la
livre brute. Le producteur va toucher huit cents la livre, le produit fini. Ces
deux programmes additionnés... Ce sont des programmes qui seront
révisés tous les trois mois compte tenu de l'état des
marchés, parce que certains produits présentement, certaines
espèces, tombent sous le coup de cette assistance financière, et
ils vont en sortir automatiquement dès que le marché sera
suffisant. Je vous donne comme exemple le flétan, qui est exclu à
l'avance, son prix est très bon; le sébaste sera
éventuellement exclu très prochainement car il y a une reprise du
marché. Si ce programme, qui coûtera $38 millions pour les
pêcheurs et $12 millions aux producteurs, nous trouvons la part du
Québec, les chiffres que vous avez notés plus tôt, si l'on
se basait sur les chiffres absolus de 1974...
M. Morin: C'était donc $5 millions.
M. Saint-Pierre: ... cela engendrerait $6 millions.
M. Morin: Enfin, $5.5 millions, d'après les chiffres.
M. Saint-Pierre: Oui, $2,075,000 et $3,570,000. M. Morin:
Donc, $6 millions sur $38 millions.
M. Saint-Pierre: C'est $6 millions sur 38... 40... sur $50
millions. Maintenant, c'est la mathématique qui joue, la
mathématique du volume des pêches...
M. Morin: Oui...
M. Saint-Pierre: ... au niveau de chaque province. Le homard, je
pense, est exclu complètement de cela; les crustacés sont
exclus.
M. Morin: Ce programme de $50 millions, m'avez-vous dit, ou de
$38 millions?
M. Saint-Pierre: De $38 millions aux pêcheurs, de $12
millions aux producteurs.
M. Morin: C'est un programme nouveau qui est distinct du
programme de $20 millions sur lequel portait ma première question.
M. Saint-Pierre: Au sujet du programme de $20 millions, je ne
peux pas vous donner de montants absolus. Je crois qu'il n'en a peut-être
pas été dépensés au-delà de $5 millions ou
$6 millions, parce qu'il y avait une prévision. Terre-Neuve n'est pas
entrée dans le coup. En somme, seule la Nouvelle-Ecosse s'en est
prévalue, et nos deux sociétés québécoises.
Nous avons ramassé les retailles de ces $20 millions et nous les avons
réinjectées dans ce programme majeur.
M. Morin: Y aurait-il moyen que le ministère dépose
un document sur l'état de cette question, sur les sommes qui ont
été perçues au titre du programme de $20 millions? Est-ce
possible?
M. Saint-Pierre: Sûrement, avec plaisir.
M. Morin: Si vous pouviez y ajouter ce qui a été
octroyé aux pêcheurs des autres provinces, par hasard, cela
compléterait le tableau. Si les renseignements sont à votre
portée. Nous avons entendu énormément de critiques sur ce
programme fédéral de $20 millions.
M. Saint-Pierre: De la part de qui?
M. Morin: De la part des pêcheurs.
M. Saint-Pierre: Des vrais pêcheurs?
M. Morin: Oui, oui, les pêcheurs non pas en eau trouble
mais les pêcheurs de la Gaspésie, notamment. Quand j'ai fait le
tour de la Gaspésie, j'en ai beaucoup entendu parler.
M. Saint-Pierre: Je vais déposer une longue lettre qu'on
avait envoyée à M. Leblanc sur ce programme.
M. Morin: Pour vous plaindre de ce programme?
M. Saint-Pierre: Pour attirer son attention sur des anomalies et
des modifications désirées.
M. Morin: Voulez-vous faire cela, M. le ministre? Cela
compléterait le tableau également? Dans le contexte... Je
m'aperçois que ce n'est peut-être pas la peine de continuer ce
soir, j'allais entamer une autre question, mais il est dix-sept heures
cinquante-huit minutes, M. le Président...
M. Lacroix: A vingt heures quinze.
M. Saint-Pierre: On va aller manger du poisson.
M. Morin: Est-ce que nous pouvons remettre à un autre
jour...
M. Dufour: Je demande I' "accouchement".
M. Morin: Je regrette de ne pas avoir pu terminer
aujourd'hui.
M. Saint-Pierre: A vingt-heures quinze ce soir?
M. Morin: On peut continuer ce soir, à vingt heures
quinze.
M. Saint-Pierre: A vingt heures quinze, oui.
M. Morin: Je pense qu'en trois quarts d'heure ou une heure on
peut liquider l'affaire.
M. Saint-Pierre: Mes collègues, là-bas, ont
beaucoup de questions également. On prendra le temps nécessaire
pour la commission.
Le Président (M. Brisson): La commission suspend ses
travaux jusqu'à vingt heures quinze.
(Suspension de la séance à 17 h 58)
Reprise de la séance à 20 h 27
M. Brisson (président de la commission permanente de
l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche):
A l'ordre, messieurs!
Nous sommes au programme 8, et je pense qu'il est près
d'être adopté.
M. Morin: J'ai encore quelques petites questions, M. le
Président.
Le Président (M. Brisson): Le chef de l'Opposition
officielle, et député de Sauvé.
M. Morin: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord
revenir sur une question que nous avons abordée plus tôt ce
soir.
Le ministre sait que l'usine de Paspébiac a été
réouverte avec l'aide du gouvernement québécois. En fait,
le gouvernement québécois s'est porté acquéreur de
l'usine elle-même, je pense, et l'a louée à un consortium.
Je ne connais pas très bien la nature des arrangements qui sont
intervenus. Je demanderais peut-être au ministre d'abord de nous
expliquer dans quel contexte s'est effectuée la réouverture de
cette usine et je lui demanderais si son ministère compte accorder une
aide semblable à celle qu'il a accordée à cette usine aux
autres producteurs concernés, par exemple, les Pêcheurs unis.
M. Saint-Pierre: M. le Président, l'usine de
Paspébiac a toujours appartenu au gouvernement depuis longtemps. Elle
était sous bail pour des périodes variables. Le dernier contrat
de location se terminait l'an dernier, avec la compagnie Pêcheprod, qui
l'avait eu depuis à peu près dix ans. L'usine a été
louée de nouveau cette année à un nouveau groupe: la
Société des pêcheries du golfe Saint-Laurent, pour un
contrat initial de cinq ans, avec une option d'achat par après.
M. Morin: Les conditions de réouverture de ce bail
comportent-elles une aide au nouveau groupe?
M. Saint-Pierre: Avec la permission de M. le ministre, oui. Une
aide indirecte, qui sera, en somme, un défaut à gagner du
gouvernement, pour les justifications suivantes: La Société des
pêcheries du golfe Saint-Laurent, incidemment, c'est une
société exclusivement québécoise, formée de
sociétaires québécois, entre à Paspébiac et
traîne avec elle le problème des prédécesseurs des
sortants, c'est-à-dire qu'elle n'a pas de flotte. Au cours de l'hiver
1975, elle a acquis deux bateaux qui sont sortis en mer.
Les deux sont sortis hier matin, incidemment. Ils ont loué un
bateau de l'ancienne société qui était sous bail à
Paspébiac, la Société Pêcheprod, une filiale de
Fishery Products de Terre-Neuve. Ils ont loué un bateau. Ils en ont un
en construction, depuis 1974, au chantier maritime de Verreault Navigation. Il
y a eu grève, l'été dernier, à ce chantier maritime
et la mise à l'eau de la première des deux unités sous
contrat, sous commande ne sera livrée qu'au cours du mois de juin.
Dans un contexte tel, commençant seulement avec deux bateaux qui
sont d'assez faible dimension, le gouvernement a acquiescé à la
demande suivante, à savoir qu'au lieu d'exiger un minimum de loyer
annuel de $45,000, nous avons consenti, comme condition, à $1,000 le
million de livres de produits bruts qui entrent à l'usine. C'est une
clause du bail qui vaut pour l'année en cours seulement et qui, l'an
prochain, sera rajustée. C'est déjà inscrit au bail par
million de livres, alors que l'an prochain, ce sera un minimum de $50,000. Par
contre, c'est un contrat intégré qui prévoit tant la livre
de produits finis. Plus il y a de travail d'usinage, plus les versements sont
élevés.
M. Morin: C'est donc une aide temporaire, si j'ai bien
compris.
M. Saint-Pierre: C'est une aide qui vaut pour l'année en
cours.
M. Morin: Qui représente un manque à gagner
d'à peu près combien pour le gouvernement du Québec?
M. Saint-Pierre: Si nous partons du principe de $45,000 minimum,
en tenant compte de la Société sortante... Cette année, je
ne peux pas présumer du volume brut des captures. Il y a une
présomption d'à peu près 5 millions ou 6 millions de
livres. A $1,000 le million de livres, ce serait $6,000 par rapport à
$45,000. Parce que la nouvelle société n'était absolument
pas en situation d'absorber. Ce n'est pas une production normale, c'est un
début.
Il faut dire cependant qu'on le compare par rapport à $45,000 qui
avait été le prix établi. M. Bernard, le sous-ministre
adjoint, pourra apporter des corrections, mais il me semble qu'il y a quand
même une difficulté pour pouvoir maintenir l'usine en
opération. C'est avec assez d'efforts de la part du ministère
qu'on a pu trouver preneur. Dans cette condition, on peut se poser la question
que les $6,000 peuvent représenter un manque à gagner par rapport
aux $45,000, mais ils peuvent également représenter une
activité qui risquait de ne pas démarrer, tant au niveau des
emplois qu'au niveau de l'allocation que nous avions. On ne peut pas dire qu'il
y a eu plusieurs preneurs qui acceptaient d'exploiter l'usine.
M. Morin: Eventuellement, combien de bateaux de pêche
seront attachés à cette usine au moment où ils devront
payer les $50,000 de minimum?
M. Saint-Pierre: Je dis dès l'an prochain. D'ailleurs, le
bail est articulé et contient cette disposition. L'exception est faite
pour 1975 seulement. L'an prochain, ils auront au minimum, en
propriété à eux, quatre bateaux, dont deux tout neufs de
132 pieds et deux de 82 pieds, usagés. Alors, ils auront suffisamment
d'unités pour une alimentation normale, quoique l'usine même
puisse traiter 20 millions de livres de produits.
M. Morin: Cette subvention indirecte, comme vous l'avez
appelée, ce manque à gagner ont attiré l'attention
d'autres producteurs gaspésiens, et notamment des Pêcheurs unis
qui voudraient également profiter d'avantages semblables. Est-ce que
c'est l'intention du gouvernement d'en faire profiter d'autres producteurs en
tenant compte, évidemment, des proportions dans la production?
M. Saint-Pierre: M. le Président, je pense qu'en
général, compte tenu des cycles que nous observons dans la
pêche, compte tenu des problèmes particuliers qui peuvent se
présenter à des endroits comme à d'autres, je pense que,
dans le passé, on pourrait facilement en faire le bilan, nous avons
tenté d'aider les pêcheurs québécois, mais
également les producteurs québécois. J'inclus dans cela,
bien sûr, les Pêcheurs unis. Cependant, suivant les sites, suivant
les endroits, suivant les endroits où on a des problèmes, il y a
des places où on peut aider des gens qui sont là et il y a
d'autres places où on ne peut pas aider ceux qui ne sont pas là.
Je pense qu'en toute justice et on pourrait en faire le bilan si cela
pouvait intéresser le chef de l'Opposition les gens des
Pêcheurs unis ont quand même bénéficié,
à l'occasion, de subventions importantes pour la fabrication de navires
dans les chantiers de construction gérés par les Pêcheurs
unis eux-mêmes ou pour d'autres types d'activités dans lesquelles
ils étaient.
M. Morin: La raison pour laquelle je posais la question, c'est
que, dans le cas des Pêcheurs unis, ce sont des coopérants, tandis
que, dans le cas du consortium ou du groupe qui va exploiter l'usine de
Paspébiac, il s'agit d'une société privée.
M. Saint-Pierre: Dans les deux cas, ce sont des
Québécois.
M. Morin: Oui, je sais, bien sûr. Vous m'assurez...
M. Saint-Pierre: C'est ce qui est important.
M. Morin:... donc que c'est une subvention de départ.
M. Saint-Pierre: C'est cela.
Exclusivement, il faut dire, d'ailleurs, à la décharge,
que c'est la seule usine gouvernementale, Paspébiac, alors que les
Pêcheurs unis, les propriétaires de ces usines, je peux vous le
signaler en passant... Vous dites: Les faire bénéficier.
Si on fait un recul sur le passé, je l'ai déclaré
en présence du ministre lors d'une réunion il y a deux ans, ils
avaient atteint en subventions inconditionnelles $2,874,000 aux
Pêcheurs-Unis. Je crois que...
M. Lacroix: Ces gens ont dû bénéficier de la
vente des bateaux Unipec et Unifox?
M. Saint-Pierre: Cela va dans le coût... c'était de
l'ordre de $250,000.
M. Lacroix: Quant à moi, M. le Président, je crois
que ce qui est bon pour les Pêcheurs unis, ce doit être bon pour
l'entreprise privée. Ce qui est bon pour l'entreprise privée doit
être bon pour l'entreprise coopérative également. Il ne
devrait pas y avoir de discrimination.
M. Morin: C'est l'esprit dans lequel je posais la question,
justement. Mais que ce soit bien clair. Quand vous dites qu'il s'agit d'une
usine gouvernementale, il faudrait peut-être apporter la nuance que le
bien-fonds appartient au gouvernement, mais que cela ne fonctionne pas comme
une entreprise gouvernementale. C'est loué à des
intérêts privés.
M. Saint-Pierre: C'est une bâtisse en location.
M. Morin: C'est cela! Autre sujet, M. le Président, dans
le contexte du vieillissement de la flotte de pêche de moyen tonnage au
Québec, le ministère de l'Industrie et du Commerce compte-t-il
faire des pressions ou accentuer les pressions qu'il exerce déjà
auprès du gouvernement fédéral pour que les subsides
soient maintenus?
M. Saint-Pierre: Je peux vous dire, M. Morin, si vous parlez du
mot pression, nous en exerçons presque à un rythme quotidien
depuis deux ans. D'abord, il faut faire un recul pour avoir l'intelligence des
faits, c'est qu'en 1973 le ministre du temps avait déclaré un
moratoire sur la construction des navires, un moratoire de trois mois qui a
faussé totalement l'échéancier, des projets de
construction. A partir de là, Ottawa est devenu drôlement
sélectif. Devant le phénomène de la baisse des captures on
s'est dit: Où cela est saturé, c'est la politique
fédérale établie, il contrôle les subventions, alors
telle et telle catégorie de bateaux a été exclue
définitivement, au moins pour un temps donné. Ils ne sont plus
admissibles à des subventions. L'an dernier, en 1974, le Québec,
je peux vous le dire en toute honnêteté, je ne dirai pas que nous
avons eu la part du lion, nous avons eu un peu plus qu'ailleurs parce
qu'à force de pleurer, on a réussi à aller chercher
à Ottawa une garantie de $867,000 ou $868,000 et cela a
été fait aux dépens des autres provinces. On a
été obligé de diminuer le programme de constructions.
Cette année, par un retour des choses, nous devons recevoir cette
semaine $347,000 qui s'appliquent encore sur le budget terminé, et j'ai
ouï dire qu'il était mis à notre disposition $1,200,000
cette année, et s'il devait...
M. Morin: A force de pleurer, toujours. M. Saint-Pierre:
Bien, pleurer...
M. Morin: C'est ce que l'on appelle le fédéralisme
braillard.
M. Saint-Pierre: Je ne l'ai jamais fait mouchoir en main, c'est
une manière de m'exprimer.
Le Président (M. Brlsson): A l'ordre, messieurs! ... se
moucher.
M. Morin: Avez-vous terminé votre réponse?
M. Saint-Pierre: Si elle vous satisfait. J'ajouterai ceci, c'est
que cette année nous avons un carnet de commandes pour la construction
de bateaux, mais il faut tenir compte concurremment que nous avons une
capacité de construire. Alors, cette année je crois qu'on ne
pourrait pas exécuter plus de dix mises en chantier, et si tel est le
cas, les indications que j'ai sont que les subventions fédérales
qui nous seraient rendues disponibles seront amplement suffisantes pour verser
les 35%.
M. Morin: 35% auxquels vous ajoutez 90% du solde qui est
nécessaire pour la construction, est-ce bien ça?
M. Saint-Pierre: Dans un effort que je crois
apprécié, nous ajoutons 10% à la subvention
fédérale et le propriétaire, l'acquéreur verse 10%
du solde, et nous prêtons 90%, toujours du solde. Ce qui veut dire que,
pour le type de bateau qui se construit actuellement, cela donnerait un rapport
de... Par exemple, sur les dix mises en chantier, quelle est la nature des
bateaux, quel est le coût, quelle est la proportion versée
par...
Sur dix mises en chantier, je ne voudrais charrier personne, je crois
qu'il y a huit bateaux qui seraient des cordiers, des bateaux de 60 pieds de
quille, d'un coût approximatif de l'ordre de $200,000. Il y en aurait
deux de 65 pieds... qui vont chercher autour de $500,000.
Mais, dans le cas d'un bateau de $500,000, c'est dire que la subvention
fédérale... ...est 35% de $500,000. Nous ajoutons 10% au
Québec, tant et aussi longtemps...
M. Morin: C'est un subside, c'est une subvention...
M. Saint-Pierre: C'est une subvention directe et
spéciale...
M. Morin: Et non remboursable. M. Cadieux: Et sans condition.
M. Saint-Pierre: ... toujours dans le but de
l'amélioration et du remplacement d'une flotte dont certains
éléments sont désuets. Le subside canadien, si on fait
l'exercice pour un bateau, sur un 60 pieds, c'est une subvention
fédérale de $79,445.
Et le pêcheur verse alors?
Nous ajoutons nos propres 10%. Je n'ai pas de machine à
additionner. C'est une subvention de $80,000 plus $20,000 sur $200,000.
M. Morin: Le ministre fait le travail de l'Opposition, je n'aurai
plus qu'à me croiser les bras et à le laisser aller.
M. Lacroix: C'est parce qu'il sait compter. M. Morin: C'est parce
qu'il a intérêt à se ren- seigner, à ce que je vois,
sur ce qui se passe dans son ministère.
Non, c'est très bien, je ne voulais pas vous empêcher, vous
alliez très bien.
Le Président (M. Brisson): C'est l'honnêteté
des membres de l'Assemblée nationale.
M. Morin: J'ai vu deux de ces bateaux en construction
effectivement et je crois que les propriétaires devaient mettre une mise
de fonds de $15,000 ou $20,000. Ce devaient être des bateaux de 60 pieds,
ceux-là, il me semble en tout cas.
M. Saint-Pierre: II arrive que les cordiers de 60 pieds soient
des constructions dont le coût approximatif actuel est d'environ
$225,000.
M. Morin: $225,000.
M. Saint-Pierre: Forcément, il y a $70,000 de ' subsides
canadiens, ou un peu plus; il y a environ $20,000 de subsides
québécois; il reste un résidu sur lequel le pêcheur
doit fournir l'équivalent de 10%, ce qui peut faire des sommes variant
de $10,000 à $15,000 ou à $20,000, selon le coût de
construction. Par exemple, pour les 65 pieds en bois, le coût de
construction monte à environ $430,000. Je crois que c'est $437,000, le
coût total de construction auquel s'appliquent les subsides canadiens et
québécois et, forcément, la participation du
pêcheur.
M. Morin: Pourriez-vous m'indiquer quel est le taux
d'intérêt exigé par le gouvernement du Québec sur le
subside, sur le solde qui est prêté aux pêcheurs?
M. Saint-Pierre: Sans intérêt.
M. Morin: Aucun intérêt. Très bien. Il n'y a
donc pas eu de changement là-dessus.
M. Lacroix: Est-ce que vous avez des demandes des
Iles-de-la-Madeleine pour la construction de bateaux?
M. Saint-Pierre: Nous n'avons pas de cahier de commande pour des
bateaux de dimension de la flotte intermédiaire.
M. Lacroix: Quand les Pêcheurs unis reconstruiront aux
Iles-de-la-Madeleine, peut-on espérer qu'on va récupérer
notre flotte de pêche, qui était attachée à la
coopérative centrale et qui est utilisée actuellement en
Gaspésie? Ce sont uniquement des Gaspésiens qui pêchent sur
ces bateaux alors que cela appartient aux gens des Iles-de-la-Madeleine. Les
bateaux sont utilisés pour le compte de la Gaspésie et on a
changé les équipages. Le Marie-Hélène, qui a
été vendu dernièrement, était un bateau qui
appartenait à M. Léonard Hubert; il a été vendu
encore à un Gaspésien.
Va-t-on finir par ne plus avoir de bateau aux Iles-de-la-Madeleine,
parce qu'il nous reste seulement les cinq unités qui appartiennent
à la compagnie Gorton?
M. Saint-Pierre: Je répondrai, M. Lacroix, aussi gentiment
que possible. Si je prends la flotte, j'ai un tableau qui m'indique que 16
bateaux de dimension moyenne, cela étalé sur une période
d'à peu près dix ans, nous sont revenus volontairement de ces
pêcheurs. Il y a un contexte aux Iles que nous commençons à
cerner. Cela ne dépend ni du député présentement,
ni des autres. La pêche, aux Iles-de-la-Madeleine a ceci de particulier:
La pêche du homard, du pétoncle, du hareng, du maquereau, la
pêche côtière va très bien. En ce qui concerne la
flotte intermédiaire, enfin, les chiffres le révèlent, les
gens nous remettent leur bateau: "Je n'arrive pas avec un bateau d'un calibre
moyen, compte tenu des distances où on va chercher le poisson". Cela
veut dire qu'il y a les deux extrêmes. Nous allons avoir la barque, le
bateau de 35 à 42 pieds, le polyvalent, qui va faire très bien et
le gros bateau qui fait très bien. Il ne semble pas y avoir... Cela se
présente comme cela. Ces bateaux nous sont tous revenus: "Je n'arrive
pas à faire mes frais avec un bateau".
C'est une coïncidence que les Gaspésiéns sautent
dessus, parce qu'ils sont plus près des bancs de pêche.
M. Lacroix: Avez-vous vécu le départ de la flotte
de pêche?
M. Saint-Pierre: Je le ressens. J'en ai...
M. Lacroix: Au départ, le bateau a été remis
à des pêcheurs inexpérimentés. Il a fallu aller les
chercher pour les ramener au port, parce qu'ils n'étaient pas capables
de revenir au port. Ils ne savaient pas où il se trouvait. A ce moment,
on ne cherchait pas la qualification des capitaines, on cherchait leur couleur
politique. Par la suite, le gouvernement a construit des bateaux. Les moteurs
n'étaient pas assez forts pour les bateaux. On a placé, à
bord des bateaux, des moteurs plus forts, mais on a oublié que les
moteurs étaient trop forts pour la coque. Toutes ces réparations
se faisaient sur le compte des pêcheurs.
Par exemple, le capitaine Sarto Thériault propriétaire du
bateau Dune du Sud, après avoir pêché pendant onze ans avec
son bateau, s'être désâmé, devait plus sur son bateau
qu'au moment où il l'a acquis, parce que ce sont les capitaines de
pêche qui payaient pour les expériences du gouvernement.
Je pense qu'aujourd'hui, si on leur donnait la même chance, avec
l'expérience qu'ils ont acquise, avec des bateaux qui sont de meilleure
qualité... On a les meilleurs pêcheurs, vous le savez. Je ne veux
pas déprécier les pêcheurs de la Gaspésie, mais on a
certainement les meilleurs capitaines aux Iles-de-la-Madeleine. La preuve,
c'est qu'avec nos bateaux de 125 ou 130 pieds, on fait vivre une usine et on
fait vivre les gens des Iles-de-la-Madeleine, alors que les Pêcheurs
unis, avec leurs deux bateaux, en Gaspésie, étaient en train de
se mettre en faillite. On devrait faire un effort pour que la flotte de
pêche des Iles-de-la-Madeleine n'aille pas en s'éliminant, parce
que la pêche côtière ne suffirait pas à faire vivre
la popu- lation des Iles-de-la-Madeleine. On a besoin d'un approvisionnement
plus stable. La pêche côtière, c'est excellent, mais elle a
diminué parce qu'on a été négligé par le
gouvernement fédéral en ce qui concerne les hâvres de
pêche. Nous sommes allés du côté du gouvernement
provincial.
Je ne sais pas ce qui s'est passé exactement, mais notre flotte
de pêche a disparu à la suite de l'incendie qui a détruit
l'usine de l'Etang-du-Nord. La coopérative centrale se trouvant dans une
situation financière très difficile, je pense qu'elle a pris une
décision sage en se mariant avec les Pêcheurs unis. Je crois que
les Pêcheurs unis auraient pu aider la population des
Iles-de-la-Madeleine en attachant les bateaux aux Iles-de-la-Madeleine et en
exploitant l'usine de la compagnie Gorton à Havre-Aubert qui est
désaffectée. Ils auraient pu, au moins pendant le temps qu'ils
auraient reconstruit, fournir du travail à notre population.
De ce côté, le ministère devrait faire un effort
pour demander aux Pêcheurs unis que les bateaux qui appartiennent aux
Iles-de-la-Madeleine reviennent aux Iles-de-la-Madeleine pour fournir du
travail à nos excellents équipages, à nos bons
pêcheurs et aussi aux gens de terre qui pourraient gagner leur vie
à l'usine de transformation. A l'heure actuelle, cette année,
nous avons $15 millions de travaux publics sur les îles. L'an prochain,
on ne les aura pas. A ce que je sache, la Coopérative des Pêcheurs
unis n'a pas encore pris de décision en ce qui concerne le
réouverture de l'usine de Cap-aux-Meules. Si, l'an prochain, l'usine de
Cap-aux-Meules n'est pas ouverte, si les bateaux que la Gaspésie nous a
empruntés, sans nos équipages, continuent à livrer leurs
poissons en Gaspésie, c'est la population des Iles-de-la-Madeleine qui
paiera encore. J'espère qu'on ne reviendra pas à ces
années où les Iles-de-la-Madeleine qui devraient
être, à mon point de vue, le coeur des pêcheries
commerciales de la province de Québec étaient ont toujours
traitées au bout de la ligne, étant donné qu'elles se
trouvent à l'extrémité. On ne commence jamais par l'autre
bout en s'en venant ici, on commence toujours par ici en s'en allant aux
Iles-de-la Madeleine. Quand on arrive chez nous, il ne reste pas grand chose
dans le baril. Le sac a pas mal été vidé en
Gaspésie. Malheureusement, on a à peu près toujours eu des
ministres responsables des pêcheries qui appartenaient à la
Gaspésie. C'était bien normal qu'ils pensent à eux avant
de penser à nous. Aujourd'hui, on en a un qui est un petit peu en dehors
du cercle. Nous espérons qu'il fera en sorte que les
Iles-de-la-Madeleine, pour une fois, reçoivent leur juste part.
Le Président (M. Brisson): Est-ce que le chef de
l'Opposition a d'autres questions?
M. Morin: Oui, j'ai d'autres questions suite à cette fort
intéressante intervention. Revenons, si vous le voulez bien, à
l'usine des pêcheries de Paspébiac. Le ministre de l'Industrie et
du Commerce, dont relèvent encore pour l'instant les pêcheries, a
reçu une lettre récemment, le 21 avril
1975 plus précisément, concernant les conditions de
travail dans cette usine. Je me permets de rafraîchir la mémoire
du ministre sur le contenu de cette lettre. Je ne la citerai pas au complet,
parce qu'elle est un peu longue.
M. Saint-Pierre: Une lettre de Mlle Kavanagh.
M. Morin: C'est exactement cela. Mlle Angèle Kavanagh,
pour les employés de l'usine de pêcheries de Paspébiac. "M.
le ministre écrit-telle les employés de l'usine de
pêcheries de Paspébiac, comté de Bonaventure, vous
demandent de bien vouloir prendre en considération leur situation. Vous
n'ignorez pas, M. le ministre, que ces employés, travaillant pour des
compagnies qui se succèdent dans une usine du gouvernement du
Québec, dépendent très étroitement des conditions
de la température, des prises de poissons, du nombre de bateaux
approvisionnant l'usine, de la durée de la saison de pêche, six
mois environ, en ce qui concerne leurs heures de travail, et, par
conséquent, leur salaire. Vous n'ignorez pas non plus
continue-t-elle la hausse excessive qu'a subie le coût de la vie
durant les douze derniers mois, d'où l'importance pour les
employés d'avoir un salaire horaire décent. Or, l'an dernier, le
salaire du personnel féminin était de $2.09 l'heure. Ce personnel
constitue 65% de la main-d'oeuvre de l'usine. Celui du journalier était
de $2.14 l'heure. Celui du trancheur de$2.27.
Les plus hauts salaires étaient ceux du responsable de
l'entretien des bateaux, $3.41 l'heure et du mécanicien en diesel pour
les bateaux, $3.34 l'heure. " La partie pertinente se termine de la
façon suivante: La compagnie Les Pêcheurs du golfe Saint-Laurent
Inc. n'opérant l'usine que depuis le printemps 1975, nous soutient
qu'elle est limitée dans ses possibilités de hausser le salaire
horaire des employés et qu'elle ne peut pas leur garantir une semaine
complète de travail puisqu'actuellement le nombre de bateaux
approvisionnant l'usine est très restreint et c'est sa première
année de production dans cette usine."
En dépit du fait que ce soit la première année, ne
serait-il pas juste que cette compagnie paie des salaires convenables à
ses employés? Peut-on tolérer, prétextant le fait que
l'usine est remise en marche, que cela doit nécessairement
pénaliser les employés de cette entreprise. Est-ce que le
ministre s'est penché sur les conditions de travail de l'usine? Peut-il
nous faire part de ses réactions? A-t-il répondu à la
lettre?
M. Saint-Pierre: M. le Président, à la
première question je répondrai à la deuxième
après c'est bien sûr que, non seulement dans l'usine de
Paspébiac et non seulement dans le secteur de la transformation du
poisson, mais dans toutes les usines au Québec, dans le secteur
manufacturier, nous aimerions bien avoir, non seulement les plus hauts salaires
au monde, mais les plus hauts salaires payés par tous les gens. Je l'ai
dit en Chambre...
M. Morin: Ce n'est pas ce qu'ils vous demandent.
M. Saint-Pierre: Je vous donne le contexte global de tout cela.
Bien sûr que, dans la construction, il y a des gens qui ont $7 l'heure.
Bien sûr que, dans l'industrie des textiles avec une moyenne de $3.60
l'heure, on dit que le Canada et le Québec ont les salaires les plus
élevés au monde. Mais le textile est plus faible que la
construction. Je pense que ce qui se décèle de cela, c'est qu'au
niveau de la pêche, au niveau de la transformation du poisson,
peut-être les mêmes ratios existent et que nous avons quand
même des salaires très élevés par rapport à
d'autres pays. Mais, si on veut vaincre le cercle vicieux et être capable
d'écouler nos produits de la pêche, je pense bien qu'à
moins de croire à la théorie des créditistes qu'on peut
imprimer de l'argent, il faut bien s'en remettre au fait qu'on a les
difficultés...
M. Morin: Vous l'appliquez déjà avec les
prêts sans intérêts.
M. Cadieux: Ecoutez donc les réponses.
M. Morin: M. le député de Beauharnois, je vous en
prie.
M. Cadieux: Le chef de l'Opposition pose des questions et il sait
les réponses.
M. Morin: Je vous en prie, cela allait très bien avant
votre intervention.
M. Cadieux: Bien non, c'est vous qui interrompez à tout
bout de champ.
M. Morin: M. le ministre, j'allais dire que... M. Cadieux:
J'écoute le ministre, moi.
M. Morin: ... vous appliquez la théorie crédi-tiste
déjà dans les prêts sans intérêts.
M. Saint-Pierre: C'est déjà un effort qui est fait
dans ce secteur et on comprend qu'il n'y a presque pas de limite. Si tous les
gens qui regardent les salaires dans le secteur de la construction, peu
importent les salaires payés, voulaient bien dire: Que le gouvernement
comble la différence, que le gouvernement nous assure d'un revenu, que
le gouvernement, même s'il n'y a pas d'emploi, comble ceci... Vous
êtes au courant des estimations faites simplement pour un salaire annuel
garanti à l'ensemble des travailleurs et les sommes qui semblent hors de
portée de la capacité de payer des contribuables
québécois de faire ceci. Dans le cas précis, il faut
d'ailleurs se le rappeler, les salaires versés sont quand même
conformes à la convention collective dûment signée entre
les parties. Les parties ont toujours la possibilité au renouvellement
de cette convention collective, de ne pas accepter ces conditions. Mais, encore
une fois, il faut se rappeler qu'il y a
des grèves, qu'il y a des "lock-out" où les deux parties
ne peuvent pas gagner. Souvent, dans les journaux, on nous dit que les deux
parties gagnent. Il y a toujours quelqu'un qui perd suivant les conditions
économiques dans lesquelles il se retrouve.
M. Morin: Savez-vous, M. le ministre, quand la convention
collective vient à échéance?
M. Saint-Pierre: Je ne pourrais pas le dire, il faudrait que je
vérifie dans mes dossiers.
M. Lacroix: II y a un autre fait qu'on ne peut pas oublier, c'est
que la très grande majorité des produits finis sont
exportés aux Etats-Unis, étant donné que le Canada n'est
pas beaucoup un pays de consommateurs de poisson. Il y a un an ou deux, la
moyenne de consommation par personne était environ 14 livres de poisson
par année, alors qu'au Japon, par exemple, cela dépasse 170
livres. Une très grande partie du produit fini est
expédiée aux Etats-Unis et l'aide du gouvernement, comme le
prêt sans intérêt, est une aide à l'industrie de la
pêche. On a déjà éprouvé certains
problèmes avec les Etats-Unis qui nous accusaient de faire du dumping,
parce que l'aide indirecte accordée à nos pêcheries venait
en concurrence avec leurs propres pêcheries; je pense que c'est un point
qu'il ne faut pas négliger non plus.
M. Morin: Le ministre est-il conscient du fait que 65% de la
main-d'oeuvre à cette usine est féminine et que...
M. Saint-Pierre: J'imagine que si elle est à 65%
féminine, ce serait une raison de plus... Bien sûr, je ne voudrais
pas faire de discrimination sur le plan de la main-d'oeuvre, mais il faudrait
penser alors que... Peut-être que le chef de l'Opposition dans sa
tournée là-bas a pu avoir des chiffres pour voir qu'une forte
proportion des employés peuvent être des personnes
célibataires et que dans d'autres cas, cela représente un
supplément de revenu à apporter à un père de
famille qui, déjà, apporte le pain et le beurre.
M. Morin: Je dois dire, M. le ministre, que lors de ma
tournée j'ai surtout constaté que ces gens se plaignaient tous,
qu'ils soient célibataires ou mariés, qu'ils n'arrivaient pas
à vivre avec ce qu'on leur payait, étant donné que
l'alimentation ne coûte pas moins en Gaspésie qu'ailleurs au
Québec; même certains produits coûtent plus cher car on doit
les importer. Ces gens sont vraiment dans des conditions sociales et
économiques assez déplorables, même s'ils travaillent, et
c'est dans cet esprit que je vous pose la question. Est-ce que...
M. Saint-Pierre: Je vous renvoie la balle. Est-ce que dans votre
esprit il faudrait dire à tous les Québécois qui gagnent
moins que le salaire moyen que l'Etat va combler la différence?
M. Morin: Dans ce cas-là, ce n'est pas l'Etat, c'est une
compagnie privée.
M. Saint-Pierre: Voulez-vous dire que l'Etat doit intervenir
lorsqu'il juge que les conventions collectives ne sont pas dans
l'intérêt... Faut-il faire un processus d'examen des conventions
collectives que les syndicats auraient pu signer librement, et dire qu'ils sont
assujettis à des conditions inacceptables? Il me semble que là,
on modifie complètement l'esprit même de notre code du travail qui
donne la liberté complète à des employés de
s'associer et de signer des conventions collectives.
M. Morin: Mais nous sommes devant un cas assez spécial.
C'est une société privée qui jouit déjà
d'avantages considérables de la part du gouvernement
québécois avec un manque à gagner de plus de $30,000 en
somme pour le gouvernement donc, une société que vous remettez
sur les rails à grands frais et dont on pourrait s'attendre à
tout le moins qu'elle traite ses employés un peu plus convenablement.
Avec $2.09 l'heure, vous conviendrez avec moi que personne ne va loin. Ce sont
vraiment des conditions de misère, de famine.
M. Saint-Pierre: Je le sais, mais on peut imposer à la
société des charges financières additionnelles et je pense
que le chef de l'Opposition conviendra avec moi que c'est peut-être poser
le geste qui met la clé dans la porte, et finalement, c'est le nombre
d'emplois. Vous connaissez, dans cette réaion, les difficultés
que nous avons à créer de l'emploi, particulièrement
l'emploi secondaire.
M. Lacroix: Le salaire minimum est supérieur à
cela.
M. Saint-Pierre: Maintenant, il va y avoir des variations.
M. Morin: La hausse du salaire minimum a dû intervenir.
Oui, en fait, c'est plus élevé à l'heure actuelle que
cela, de quelques cents, en tout cas. Le ministre a-t-il répondu
à cette lettre?
M. Saint-Pierre: II faudrait que je vérifie. Je
reçois beaucoup de lettres à chaque jour. Il faudrait que je
vérifie.
M. Morin: Je vais demander au ministre, si c'est possible, s'il
veut bien en convenir, de déposer la réponse qu'il a
donnée à cette lettre.
M. Saint-Pierre: Sûrement, avec plaisir.
M. Morin: J'aimerais en prendre connaissance.
Dans ce même dossier, on nous a signalé que l'un des
problèmes que la nouvelle société exploitante a
trouvés, lorsqu'elle a pris possession de l'usine, c'est le fait que
tous les dossiers avaient été enlevés par la
société Pêcheprod, l'ancienne locataire de l'usine. C'est
une société de Terre-Neuve qui est partie en emportant tous les
dossiers, statistiques, rendement, production, tout est parti, de sorte que le
nouveau groupe s'est trouvé
devant zéro, au départ. Le ministre a-t-il
été saisi de cette situation que je lui signale au cas où
il ne serait pas au courant? A-t-il l'intention de tenter de
récupérer les dossiers en question? Etant donné qu'il
s'agissait d'une usine appartenant au gouvernement, louée à une
société privée, elle aurait au moins dû avoir la
décence de laisser derrière elle les statistiques de production.
Le ministre a-t-il l'intention de poser des gestes pour récupérer
ces documents?
M. Saint-Pierre: A notre connaissance, et d'après les
fonctionnaires du ministère, il n'y a jamais eu de plainte en ce sens.
C'est la première fois que nous en entendons parler. Les gens n'ont pas
braillé beaucoup.
M. Morin: Je vous signale que la lettre du 21 avril 1975 contient
une phrase à cet effet. On vous le signale. "La compagnie a dû
repartir à zéro, parce que la compagnie Pêcheprod
Ltée, Terre-Neuve, qui la précédait, n'a rien
laissé qui puisse être utile, ni statistique, ni rendement, ni
dossier."
Je vous signale le fait, à tout événement.
M. Saint-Pierre: On vous remercie!
Je ne connais pas Mlle Kavanagh, elle n'est pas une employée de
Pêcheprod. A un moment donné, elle blâme la nouvelle
société de payer des salaires de famine et, d'autre part, elle se
porte à la défense de cette nouvelle société qui se
serait fait rafler tous les documents de production, ce qui ne nous a jamais
été signalé.
M. Morin: Elle ne se porte pas à sa défense. Elle
signale un fait qui peut expliquer les conditions de travail peut-être,
étant donné que la nouvelle société ne savait pas
devant quoi elle se trouvait en commençant.
M. Saint-Pierre: Je crois que quand cette nouvelle
société est entrée en fonction, à la date de la
rédaction de cette lettre, il n'y avait pas encore d'activité
à l'usine même. Cette société est entrée en
activité au moment où les termes de l'ancienne convention
collective prévalaient. Je crois que ce sont les mêmes conditions
qui prévalent et pour Pêcheprod-Paspébiac et pour les
Pêcheurs unis à Gaspé.
Je me suis fait dire aujourd'hui je ne l'ai pas
contrôlé qu'une nouvelle convention de travail avait
été signée tout récemment.
M. Morin: Dans ce cas, pourrais-je demander au ministre, avec la
lettre...
M. Saint-Pierre: Je dois contrôler, je l'ai appris...
M. Morin: Vous seriez bien aimable de le faire et de nous
communiquer le texte.
M. Saint-Pierre: Avec plaisir.
Le Président (M. Brisson): Le député de
Beauharnois.
M. Cadieux: M. le Président, étant donné que
le chef de l'Opposition a en main la lettre de Mlle Kavanagh, ne pourrait-il
pas la déposer lui aussi?
M. Morin: Le ministre l'a déjà.
M. Cadieux: De toute façon, est-ce que vous pourriez nous
dire quel est son titre, qui est Mlle Kavanagh et, au nom de qui
parle-t-elle?
M. Morin: Mlle Kavanagh parle au nom du Syndicat des
employés des usines de pêcherie de Paspébiac,
affilié à la CSN. J'imagine que Mlle Kavanagh doit avoir quelque
chose à voir avec la CSN. Je n'en suis pas sûr, toutefois. C'est
une lettre...
M. Cadieux: Sa signature, c'est cela ?
M. Saint-Pierre: A sa signature, elle ajoute le signe CS. Je ne
l'ai pas identifié.
M. Morin: Oui, CS, effectivement. M. Cadieux: Club
social.
M. Saint-Pierre: Ce n'est pas de la cour Supérieure?
M. Morin: Cela m'étonnerait que ce soit la cour
Supérieure. M. le Président, le ministre possède une copie
de la lettre. Il est indiqué, sur l'original, que des copies ont
été communiquées à un certain nombre d'organismes
et de personnes dont l'Opposition. C'est comme ça que nous avons
reçu cette lettre, pour l'information du député de
Beauharnois.
M. Saint-Pierre: On va déposer... M. Morin: La
réponse.
M. Saint-Pierre: On va obtenir la réponse, bien sûr,
le projet de convention...
M. Morin: Bien.
M. Saint-Pierre: ... et l'augmentation du salaire horaire.
M. Morin: Ce sera le dernier geste élégant que vous
poserez comme ministre des pêcheries.
M. Saint-Pierre: Sûrement non. C'est une excellente saison
qui s'annonce.
Le Président (M. Brisson):Le programme 8 est
adopté?
M. Morin: Pas tout à fait. M. le Président a des
idées fixes. Nous achevons l'élément I. Je suis heureux de
vous... Pas tout à fait...
M. Saint-Pierre: On va patauger dans les éléments 2
et 3.
Mémoire présenté à
Ottawa
M. Morin: Je pense qu'on pourra terminer ce soir, de toute
façon, M. le Président. Dans cet esprit, je procède
immédiatement avec une autre question. Puis-je commencer par vous donner
lecture d'un mémoire présenté aux honorables Jeanne
Sauvé et Roméo Leblanc et aux autres ministres et
députés fédéraux du Québec, par l'Industrie
de la pêche du Québec, les entreprises coopératives et les
compagnies et l'Association de pêcheurs de [a Côte-Nord du
Saint-Laurent, de la Gaspésie et des Iles-de-la-Madeleine,
présenté à Ottawa, en février 1975?
Dans ce mémoire, on peut lire, au début, le passage que
voici: "Notre groupe c'est-à-dire l'Association
coopérative des pêcheurs unis, l'Association des producteurs de
poissons du Québec, l'Association des producteurs de poissons de la
Gaspésie est conscient que, contrairement aux autres provinces
canadiennes, l'administration des pêches au Québec relève
du gouvernement provincial. Cependant, la juridiction fédérale
sur la ressource des pêches, sur la réglementation des zones et
engins de pêche, sur les droits maritimes, sur le commerce
extérieur, sur les lois et réglementations d'inspection, sur
l'émission des licences de pêche, sur les aménagements et
l'entretien des installations portuaires, de même que sur tous les
programmes fédéraux de recherche et d'assistance tels que les
subsides à la construction des bateaux de pêche, font que les
politiques déterminées par le gouvernement fédéral
ont des incidences directes, non seulement sur les propres politiques de la
direction des pêches du gouvernement du Québec, mais aussi sur les
entreprises et pêcheurs du Québec."
M. le ministre, devant cette impressionnante liste de compétences
fédérales, on se demande vraiment ce qui reste en matière
de compétence au Québec, en matière de pêcherie.
Pourriez-vous faire le point sur l'aspect constitutionnel de la question?
M. Lacroix: Avant que vous ne répondiez, M. le ministre,
est-ce que je pourrais ajouter que quant à moi, je ne crois pas que ce
soit la meilleure chose aue le gouvernement Taschereau ait réussie dans
son règne soit rapatrier les pêcheries à la province de
Québec, parce que, premièrement, dans ce temps, on n'avait rien
et on n'en a pas plus aujourd'hui au point de vue de l'organisation pour la
recherche et pour tout cela.
Je pense que si le gouvernement fédéral se retirait des
pêcheries, seulement chez nous, aux Iles-de-la-Madeleine, ils sont en
train de construire une usine de halage à l'Anse-à-la-Cabane qui
va coûter plus de $3 millions et ils dépensent à peu
près $2 millions par année uniquement pour le dragage des
différents ports de livraison, en plus de tout le personnel qui est
requis pour les différentes opérations. Quant à moi, je
pense que si on pouvait retourner les pêcheries au gouvernement
fédéral pour qu'on puisse, dans le golfe autour des
Iles-de-la-Madeleine particulièrement, bénéficier des
avantages de la recherche du gouverne- ment fédéral qui est mieux
organisé que nous, ce serait bon pour nous. Cet après-midi, avant
l'ajournement du souper, le chef de l'Opposition parlait des pétoncles.
Justement, en 1963, alors que le ministre fédéral des
pêcheries, M. Hédard Robichaud, était venu passer trois
jours chez moi, à l'occasion de la bénédiction des
chalutiers aux Iles-de-la-Madeleine, il avait permis à des bateaux de
recherche de Darmouth de venir faire du travail autour des
Iles-de-la-Madeleine. On avait découvert le banc de
pétoncles.
Si aujourd'hui on faisait des recherches, si on était mieux
organisé pour faire de la recherche pour la crevette, le
pétoncle, le crabe et beaucoup d'autres sortes de poissons qui
pourraient être exploités dans le golfe autour des
Iles-de-la-Madeleine particulièrement, je pense que ce serait
extrêmement valable pour la province de Québec. Quant à
moi, que les résultats des recherches soient identifiés par une
fleur de lys ou par la feuille d'érable, je m'en fous éperdument.
Je veux savoir où sont les poissons, où sont les produits de la
pêche pour qu'on puisse les exploiter pour que la population vive. Si la
province tombait seule, je pense que les Iles-de-la-Madeleine caleraient, ce ne
serait pas long, parce que le gouvernement de la province de Québec
n'aurait pas les ressources financières voulues pour permettre la
réalisation de ce dont on a besoin aux îles pour pouvoir maintenir
l'épine dorsale de l'économie des Iles-de-la-Madeleine que sont
les pêcheries. Nous sommes des quêteux montés à
cheval dans le domaine des pêcheries, en particulier. Je pense qu'au lieu
de faire du nationalisme sur les pêcheries, on serait mieux de faire de
la recherche sur les poissons.
M. Saint-Pierre: M. le Président...
M. Morin: Je pense que le ministre veut répondre, parce
que le député des îles vient de lui asséner le coup
de grâce. Je n'ai même pas osé être aussi
méchant que le député des Iles-de-la-Madeleine.
M. Saint-Pierre: Dans la réponse du député
des Iles-de-la-Madeleine, il faut peut-être retrouver le point essentiel
dans la discussion. Evidemment, je sais que le chef de l'Opposition est
préoccupé de débats constitutionnels et de champs de
juridiction. Lorsqu'on lit le mémoire on voit différents secteurs
qui sont assumés par le gouvernement fédéral. C'est bien
sûr, à moins de vouloir déposer les armes et se lancer dans
des batailles constitutionnelles pendant dix ans, qu'il y a quelqu'un qui va
être obligé de s'occuper de commerce extérieur et il y a
quelqu'un qui va être obligé de s'occuper de ports de mer, et il y
a quelqu'un qui va être obligé de s'occuper de recherches, et il y
a quelqu'un qui va être obligé de s'occuper de différentes
choses qui sont mises de l'avant par l'un ou l'autre niveau de gouvernement
aujourd'hui. Ce qui me semble le plus important, je prends sur ce point
l'argument principal qui est soulevé par le député des
Iles-de-la-Madeleine, c'est qu'effectivement, le maximum d'efforts soit fait
par les deux
niveaux de gouvernement pour apporter les correctifs à la
pêche. Cela me laisse, compte tenu des ententes que nous avons...
M. Morin: Ce n'est pas cela que le député a
dit.
M. Saint-Pierre: Oui, mais ce qu'a dit le député,
je pense que ce qu'il est important de s'assurer, c'est qu'effectivement, au
lieu de faire une bataille constitutionnelle sur le dos des pêcheurs, les
deux niveaux de gouvernement tentent d'avoir le plus d'efficacité
possible, compte tenu de leurs ressources, pour apporter un correctif, pour
apporter un palliatif aux difficultés que peuvent affronter les
pêcheurs sur différents fronts.
Je pense que, enfin, M. Bernard a pu le dire tantôt, que ce soit
la conférence de Genève ou que ce soit dans les démarches
sur le plan de la recherche, il y a un bon nombre de programmes conjoints que
nous faisons. Je pense que nous continuons d'administrer, suivant les
dispositions de l'entente, la gestion générale de la pêche
au Québec, tout en permettant à nos pêcheurs et aux
industries reliées à la pêche de bénéficier
de programmes dont d'autres provinces aussi peuvent
bénéficier.
M. Morin: Je me demande si le ministre ne devrait pas appliquer
à l'ensemble de son ministère les conseils que lui a
donnés le député des Iles-de-la-Madeleine puisqu'au fond
ce qui compte, c'est d'être efficace, c'est le rendement.
M. Saint-Pierre: C'est ce qu'on fait.
M. Morin: Le ministère fédéral de
l'Industrie et du Commerce est infiniment plus efficace et dispose de moyens
infiniment supérieurs aux vôtres. Appliquons le même
principe à tout votre ministère et appliquons-le à
l'ensemble des ministères québécois parce qu'au fond,
entre nous, Ottawa est bien plus efficace. Prenez la viande. Voulez-vous que je
vous donne d'autres exemples? Si on applique le même principe, il n'y a
plus de gouvernement québécois. Est-ce que le ministre me
suit?
M. Saint-Pierre: Non, je ne vous suis pas, parce que vous avez
fait au moins quatre sophis-mes en cours de route, mais là, je vais
retourner en arrière.
M. Morin: Je n'ai pas fait tant de sophismes que cela.
M. Saint-Pierre: Oui, vous êtes parti du particulier au
général.
M. Morin: A partir du moment où on se fiche du...
M. Saint-Pierre: Vous êtes parti du particulier au
général, Mgr Grenier vous avez appris cela, à la page 79,
les règles du syllogisme? Il ne faut pas partir du particulier au
général.
M. Morin: Nous n'avons pas été à la
même école philosophique, M. le Président.
M. Cadieux: Cela paraîtl
M. Morin: Je pense avoir bien interprété le
député des Iles-de-la Madeleine, je ne pense pas lui faire tort
en disant...
M. Saint-Pierre: Oui, écoutez, un instant!
M. Morin: II dit: Je me fiche que ce soit Ottawa ou
Québec.
M. Saint-Pierre: Vous avez parlé de commerce
extérieur, vous avez parlé de la construction des ports. Nommez
autre chose. Voyons, est-ce qu'on va commencer à écrire de
nouveau l'Acte de l'Amérique du Nord britannique? Est-ce qu'on va dire
à tout le monde: Restez dans vos maisons parce que M. Morin, le
gouvernement fédéral et le gouvernement provincial vont commencer
à faire un réaménagement? Cela fait cent ans qu'on parle
de réaménagement, mais, entre-temps, il faut que les gens
vivent.
M. Morin: Ah! pour cela...
M. Saint-Pierre: C'est le sens de la démarche. C'est la
même chose au ministère de l'Industrie et du commerce. Je pense
qu'on n'a pas abdiqué nos responsabilités dans nombre de
secteurs. On n'est sûrement pas pour faire des chicanes sur les fleurs du
tapis. Il faut que les gens vivent, il faut que l'ensemble de l'industrie
canadienne, incluant l'industrie québécoise, soit capable de
relever les défis.
M. Morin: II faut que les gens vivent. Je suis bien d'accord, il
faut même qu'ils prospèrent, si c'est possible.
M. Saint-Pierre: C'est ce qui arrive, effectivement. Vous le
savez.
M. Morin: Je pense que si, au Québec, à
l'époque du régime Taschereau, on avait vraiment pris les
pêcheries en main, comme c'était peut-être l'intention de le
faire, si on avait vraiment créé, si on s'était
donné les mécanismes et les moyens financiers d'administrer les
pêcheries sérieusement au Québec, on ne se trouverait pas
un peu assis entre deux chaises comme c'est le cas aujourd'hui.
M. Lacroix: Etes-vous capable d'avoir des biologistes, vous? On
en a eu des biologistes aux Iles-de-la-Madeleine et en Gaspésie et
aujourd'hui on a de la difficulté à en avoir. Le personnel en
place est excellent. Seulement on a de la difficulté à avoir le
personnel requis pour faire le travail dont on a besoin. La preuve, c'est que,
pour faire les recherches, on est obligé, dans le golfe, de retenir les
services du Cryos, le bateau français. Nous n'avons pas les moyens
financiers, non plus. En fait, les pêcheries dans la province de
Québec,
pour les Iles-de-la-Madeleine, la basse Côte-Nord et un secteur de
la Gaspésie, c'est une industrie importante. Mais, dans l'ensemble de la
province, c'est une goutte d'eau dans l'océan. Il me semble voir les
Iles-de-la-Madeleine dans une province de Québec séparée
du reste du Canada et avec les limites territoriales à trois milles on
aurait l'air drôlement intelligent avec le Canada qui pousse ses limites
territoriales à cent milles. Je pense que les bancs de pêches
seraient assez éloignés de nos besoins.
M. Cadieux: Vous pêcheriez à la ligne.
M. Lacroix: II faudrait saler le poisson, faire des ouvertures
dans les mines de sel et l'amener là directement.
M. Morin: Attention! Il est question de sel, c'est dangereux.
M. Lacroix: Je ne voudrais pas que le chef de l'Opposition me
fasse dire ce que je n'ai pas dit. A l'heure actuelle, ce n'est pas parce que
le personnel attaché au ministère de l'Industrie et du Commerce
ne fait pas son possible.
M. Morin: J'ai compris cela.
M. Lacroix: ... mais nous n'avons pas les possibilités
physiques, bateaux de recherches, personnel... Il y avait aux
Iles-de-la-Madeleine un centre biologique à Gros-Cap, on avait
l'école des pêcheries à Grande-Rivière où il
y avait des biologistes aussi; on a été obligés de fermer
cela car on manquait de personnel. C'est la difficulté.
M. St-Pierre: II manquait d'étudiants?
M. Lacroix: II fut un temps où c'était nous qui
alimentions l'école de Grande-Rivière, il n'y avait presque plus
d'étudiants de la Gaspésie.
M. Morin: Je me permets, M. le Président, car, de toute
façon, la conversation est assez détendue ce soir, de demander au
député des Iles-de-la-Madeleine qui s'intéresse beaucoup
à cette question...
M. Lacroix: Je ne veux pas devenir votre conseiller...
M. Morin: Pour les fins de la discussion, je pense que cela est
intéressant. Supposons que le Québec ait la compétence en
matière de pêcheries. Ce n'est pas impossible d'imaginer qu'on
aurait pu décider cela entre 1865 et 1867.
Une Voix: ... commerce extérieur.
M. Morin: Une seconde. Et supposons que le Québec ait la
compétence exclusive en matière de pêcheries et qu'il mette
les moyens nécessaires pour les développer. Le
député des Iles serait-il contre cela?
M. Lacroix: Ce qui nous manque à l'heure actuelle... Les
moyens dont parle le chef de l'Opposition, par exemple pour l'exportation,
l'inspection et tout, qu'on le veuille ou non, qu'on soit dans n'importe quel
système, pour l'exportation, on a des choses qui relèvent du
gouvernement fédéral
M. Morin: Je ne le nie pas, c'est comme...
M. Lacroix: Ce qui nous manque, c'est au point de vue des
recherches. La plus grande faiblesse des pêcheries, c'est la recherche
pour pouvoir trouver de nouveaux fonds de pêche, de nouvelles sortes de
poissons à exploiter, ...
M. Morin: De nouveaux moyens, aussi de nouvelles techniques de
pêche.
M. Lacroix: L'industrie elle-même s'est
améliorée sensiblement. Nous avons les Pêcheurs unis qui
sont tout de même aujourd'hui une force assez importante au point de vue
de la transformation de toutes les sortes de poissons, de la mise en
marché; nous avons la compagnie Gorton, même si c'est une
compagnie américaine, des mauvais selon ce que vous prétendez,
des multinationales, seulement, ce sont ces gens qui nous font vivre. Elle
dépense des sommes assez considérables pour améliorer ses
installations, pour améliorer les pêcheries aux
Iles-de-la-Madeleine. Elle a collaboré avec l'entreprise
coopérative et les autres entreprises privées. Je crois que la
faiblesse du ministère des pêcheries, c'est justement que nous
n'avons pas l'organisation que possède le gouvernement
fédéral au point de vue des recherches. Par exemple, la station
de Dartmouth est fort bien équipée pour la recherche soit dans le
golfe, soit à l'extérieur, en haute mer. Nous n'avons pas cela,
nous. Je crois que, dans le golfe, toutes les espèces de poissons ne
sont pas exploitées; prenez la sébaste, il n'y a pas tellement
d'années que nous l'exploitons de façon intensive;
peut-être qu'à l'heure actuelle, il y a un danger de
surexploitation. Le crabe, les pétoncles. Y a-t-il un seul banc de
pétoncles, celui que nous avons épuisé? N'y en aurait-il
pas d'autres? Je crois que l'on exploite le homard en quantité maximale,
car, que nous ayons 100 bateaux de plus ou 100 bateaux de moins, on capture
exactement la même quantité de homards, ce qui veut dire que
l'effort de pêche est au maximum.
Quant aux autres, il y a la plie, la sébaste, les crevettes entre
l'île d'Anticosti et les Iles-de-la-Madeleine; dans les chaluts pour les
poissons de fond, on relève la crevette, ce qui veut dire qu'il y en
a.
Y en a-t-il en quantité commerciale, pour que cela vaille la
peine de l'exploiter? C'est une autre chose. On ne le sait pas. Mais, à
l'heure actuelle, les recherches que nous faisons autour des îles se
limitent au homard. Quant à la recherche pour les autres sortes...
M. Saint-Pierre: Des recherches assez considérables ont
été faites sur le pétoncle.
M. Lacroix: Oui, mais c'est à la suite du rapport qui a
été soumis par le gouvernement fédéral. Je crois
qu'à ce moment, vous vous en souviendrez, j'ai exigé qu'on fasse
une saison de pêche aux pétoncles pour en faire un territoire
déterminé, comme pour le homard, afin d'éliminer les
pêcheurs du Nouveau-Brunswick qui venaient pêcher les
pétoncles. Le gouvernement fédéral avait transmis le
résultat de ses recherches à la coopérative centrale qui,
n'ayant pas les bateaux ni les agrès nécessaires pour faire la
pêche, a fait appel à des bateaux du Nouveau-Brunswick. Un soir,
j'arrive sur le quai, les pêcheurs n'étaient pas trop contents du
gouvernement ni de leur député, parce que les pêcheurs du
Nouveau-Brunswick arrivaient avec 500, 600, 700 et même 1,000 livres de
pétoncles par jour et qui, eux, ignoraient cette ressource. Ils venaient
de le découvrir. On aurait dû limiter le nombre de bateaux sur ce
banc de pêche, parce qu'il y avait 60, 70, 80 bateaux, à un moment
donné, qui se trouvaient sur le banc de pêche. Si on avait
exploité avec quinze ou vingt bateaux, a lieu de le faire mourir, de le
surexploiter, de l'éteindre sur une période de cinq ou six ans,
aujourd'hui, ce banc de pétoncles rendrait encore. Mais, il y avait trop
de bateaux pour la possibilité d'exploitation. C'est clair, cette
année, la grande majorité des pêcheurs se défont de
leurs bateaux. Il y a déjà trois ou quatre bateaux qui ont
été vendus, soit en Gaspésie, ou sur la Côte-Nord,
des bateaux de 45 pieds, qui avaient été organisés pour la
pêche aux pétoncles.
M. Saint-Pierre: Tout ce que je puis dire à ma
décharge, c'est que je n'étais pas là lorsque le banc a
été exploité.
M. Lacroix: Non. La faute vient de chez nous, aux
Iles-de-la-Madeleine, à l'intérieur, des gens qui oeuvraient dans
le domaine des pêcheries.
Le Président (M. Brisson): M. le député de
Matane.
M. Côté: M. le Président, si le chef de
l'Opposition me le permet, à l'intérieur de
l'élément I, j'aimerais discuter de certaines recherches. Je
pense, probablement, que M. Lachance pourra répondre à certaines
questions.
Le député des Iles-de-la-Madeleine a fait état de
la possibilité d'un banc de crevettes entre l'île d'Anticosti et
les Iles-de-la-Madeleine mais, à l'heure actuelle, on exploite des
crevettes à Matane et j'aimerais savoir si l'étude qui avait
été commandée par le ministère, concernant la
crevette, est terminée. Il était question d'un Atlas, à ce
moment. Où en est-on rendu avec l'étude sur les crevettes?
M. Saint-Pierre: Avec la permission de M. le ministre, M. le
Président, effectivement, nous effectuons des recherches sur le banc de
crevettes du secteur de Sept-lles, le banc qui est en fait exploité par
la compagnie de Matane. Ces recherches sont de caractère statistique et
consistent à étudier la biomasse, c'est-à-dire la
quantité de crevettes qui peuvent être exploitables sur le banc
sans rompre l'équilibre biologique. Ces recherches sont en cours depuis
maintenant trois ans et les résultats obtenus jusqu'à maintenant
nous démontrent que la quantité de bateaux qui fréquentent
le banc de Sept-lles, c'est-à-dire, si ma mémoire est bonne, une
quinzaine ou une vingtaine, est suffisante pour l'état du banc, à
l'heure actuelle.
Maintenant, il reste que ces calculs de biomasse, nous les faisons, en
général, deux ou trois fois par saison, au début, en
avril, au moment où la crevette est concentrée pour le frai, dans
le milieu de l'été et à l'automne.
Il reste que, compte tenu que c'est quand même chez nous une
pêche assez .récente, la pêche à la crevette, compte
tenu également que c'est un stock qui est assez imprévisible ,
compte tenu qu'il y a de données qui ne sont pas connues,selon
lesquelles je ne voudrais pas être trop technique un
courant anticyclonique puisse faire que le banc de crevettes de Sept-lles
puisse être relié à des bancs de crevettes qui se trouvent
beaucoup plus à l'Est de l'Ile d'Anticosti, par exemple, et même
jusque dans le chenal d'Esquiman, compte tenu de tous ces facteurs, il reste
qu'on n'est pas en mesure de dire, sauf dans le moment très
présent, que la quantité de bateaux qui se trouvent sur le banc
est une quantité qui n'affectera pas, dans les prochains mois le stock
comme tel. C'est peut-être un peu nébuleux comme réponse,
mais tout cela, je le résume, en disant que les bateaux qui sont
là, à l'heure actuelle pour autant que nos données
permettent de le vérifier, sont suffisants. Ils n'affectent pas le stock
comme tel, la viabilité du stock, mais tout cela est à revoir de
façon régulière.
M. Côté: Avez-vous un échéancier
précis en ce qui concerne des statistiques plus à point
là-dessus?
M. Saint-Pierre: II y a un relevé qui vient d'être
fait, il y a à peine trois semaines. Les résultats ne sont pas
complètement sortis. On croit savoir qu'il y a une légère
diminution sur l'année dernière. En fait, l'année
dernière, on avait une biomasse.une capacité d'environ 32
millions de livres. Il y en a 4 millions qui ont été
pêchés, l'année dernière, effectivement. Cette
année, le calcul de la biomasse, les premiers résultats semblent
vouloir indiquer que c'est peut-être légèrement
inférieur, mais il y a un paquet de facteur qui peuvent jouer.
Vous parlez d'échéancier. En fait, il n'y a
véritablement pas d'échéancier là-dedans. Il faut
que ce soit un suivi constant et permanent. Il faut que ce travail soit fait
régulièrement, chaque année, peut-être pas avec la
même intensité, mais sûrement
régulièrement.
M. Côté: Y a-t-il des recherches qui se font
à l'heure actuelle dans d'autres secteurs, pour essayer de
repérer la crevette ou si les efforts sont concentrés uniquement
dans ce banc?
M. Saint-Pierre: Les principaux bancs de cre-
vettes du golfe Saint-Laurent, du moins dans la partie du golfe qu'on
est peut-être habitué à considérer plus comme
étant, j'oserais dire le patrimoine québécois ou, du
moins, les endroits fréquentés par les Québécois,
ils sont assez connus. Il y a évidemment le banc de Sept-lles. Il y a un
banc qui est situé sur les accords nords de l'Ile d'Anti-costi, mais qui
n'est pas tellement facile au chalutage, puisque c'est un fond très
rocheux. Il y a également un banc qui est situé dans le chenal
d'Esquiman, qui est effectivement, de mémoire, pêché par
certains pêcheurs terre-neuviens et qui pourrait être
pêché par des pêcheurs québécois.
Mais, il va sans dire, en ce qui concerne la principale usine, qui est
l'usine de Matane, cela fait des distances extrêmement importantes
à parcourir. Il faut quand même se rappeler que les bateaux qui
pêchent n'ont pas de cale réfrigérée. Ces crevettes
sont habituellement conservées dans la glace. La vie utile d'une
crevette, conservée même à une température
idéale de zéro cel-sius, ou 32 farenheit, n'excède pas six
ou sept jours. Compte tenu du temps de chalutage, le temps de se constituer un
stock de capture, l'allée-retour, c'est presque impossible pour des
bateaux de Matane d'aller chercher ces stocks.
Evidemment, la situation serait différente s'ils pouvaient faire
un premier traitement à bord, une cuisson de la crevette à bord.
Là encore ce sont des détails techniques. Je m'en excuse.
M. Côté: En ce qui concerne la réglementation
de la pêche de la crevette, quelle est-elle à l'heure
actuelle?
M. Saint-Pierre: II n'y a pas de réglementation.
L'année dernière, lorsque nous avons effectué les calculs
de biomasse, nous nous étions, à vrai dire,
préparé, de concert avec le fédéral, à
mettre de l'avant une réglementation qui était beaucoup plus un
contingentement en termes de bateaux. Compte tenu de cette biomasse de 32
millions de livres que nos biologistes ont trouvée, la
réglementation nous est apparue tout à fait inutile et
non-avenue, puisque effectivement le nombre de bateaux, environ une vingtaine,
ne pouvaient décemment pas cueillir une telle quantité de
crevettes.
Effectivement, ils en ont recueilli 4 millions de livres et cela a
été, dans l'ensemble, une très bonne saison.
M. Côté: Est-ce qu'il n'y a pas une étude sur
le caplan qui est en cours?
M. Saint-Pierre: Oui, c'est la troisième année,
effectivement.
M. Côté: Où en est-on? Est-ce qu'on cherche
à localiser le caplan ou si...
M. Saint-Pierre: On ne cherche pas à localiser le caplan,
on cherche plutôt à le suivre, puisque le caplan se
déplace. Le travail que l'on fait sur le caplan est de deux ordres. Les
premières recherches portent surtout sur l'identification d'une va- leur
commerciale au stock de caplans qu'on retrouve dans le haut et le moyen
estuaire du Saint-Laurent, disons à partir, à toutes fins
pratiques, de Tadoussac en descendant. Ce sont les premières recherches.
Il s'agit de savoir si ce stock est de taille commerciale et s'il pourrait
supporter éventuellement une pêcherie commerciale. Deuxième
étape de nos recherches, cela consiste à tenter de
vérifier vous allez me dire que c'est peut-être un peu plus
théorique, mais cela peut quand même avoir des incidences
commerciales importantes si ce stock de caplans qu'on retrouve dans le
haut et le moyen estuaire est relié de quelque façon, si ce sont
les mêmes espèces que celles qu'on retrouve en très grande
quantité sur la côte est de Terre-Neuve. Ce stade de recherche
n'est pas assez avancé pour donner une réponse.
M.Côté; II y aurait peut-être une
dernière étude sur laquelle j'aimerais me pencher un peu, sur le
saumon. Je sais que vous avez entrepris une étude sur le saumon
capturé par les pêcheurs cô-tiers avec des filets maillants,
ou du moins si ce n'est pas fait, c'est sur le point de se faire. Qu'est-ce
qu'il y a de fait dans ce domaine?
M. Saint-Pierre: Effectivement, il existe un banc de saumons sur
le secteur qui va depuis Matane jusqu'à l'embouchure de la
rivière Matapédia, et ceci depuis 1972. La pêche y est
interdite pour cinq ans, la pêche commerciale. La seule pêche
autorisée dans les rivières est la pêche à la ligne
sous le contrôle du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche. Maintenant, à partir du saumon, je dirais que
l'étude ne s'est pas faite, mais la constatation s'est faite. Le retrait
de la pêche commerciale a fait que le saumon est revenu en
quantité, je dirais de plus en plus appréciable à tel
point que nous avons un problème de taille nous autres au service de la
protection, parce qu'il faut protéger le saumon pour viser à son
repeuplement. Nous avons le phénomène des filets maillants, le
filet à morue de cinq ou six pouces. Nous avons établi une
réglementation qui établit comme un niveau, un minimum de six
pouces de mailles étirées. Il faut que le filet soit
déposé dans une colonne d'eau de 18 pieds. Il ne se fait plus de
pêche en surface.
Maintenant, j'ai recommandé au fédéral dès
l'an prochain qu'on revienne à l'émission des permis de
pêche commerciale au réquérant.
M. Morin: Est-ce que le député me permettrait, sur
le même sujet, exactement sur le même sujet...
Le Président (M. Brisson): ... président.
M. Morin: Oui, M. le Président, bien sûr, avec la
permission également du député. Je voudrais signaler, sur
le même sujet, une intervention du président de l'Association pour
le saumon de la Baie des Chaleurs, M. Campbell, qui déclarait
récemment ce qui suit, dans la Voix Gaspésienne: Tout le long de
la côte gaspésienne, dans les eaux qui sont sous la juridiction du
département de l'industrie et du commerce de Québec, il se fait
un
usage sans précédent de filets à hareng, à
morue et à maquereau, arrangés pour prendre le saumon. La
réponse qui vient de nous être donnée ne nous dit pas ce
que le ministère a fait pour mettre un terme à ces abus.
M. Saint-Pierre: Cela est une mesure à cet effet.
M. Morin: Cela en est une. Est-ce que le ministère a
posé des actes précis pour mettre fin à ces abus cette
année?
M. Saint-Pierre: II y a deux pêches; le saumon, qui navigue
dans les eaux de la Baie des Chaleurs, plus particulièrement, cherche
à regagner l'embouchure des rivières, il revient à son
lieu d'origine, d'où il veut sortir. Il y a une juridiction double.
Depuis l'embouchure des rivières en filant vers la source, c'est la
responsabilité du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la
Pêche. Je ne peux pas vous cacher que cela crée un imbroglio. La
justification de mon emploi est de favoriser l'expansion des pêches
commerciales. Il se trouve que, par le moyen des engins de pêche, vous
avez le filet à hareng; nous avons dans notre réglementation
concernant le filet à hareng une clause à l'effet qu'il ne doit
pas être tendu à plus d'une distance donnée, pour
dégager les embouchures de rivières. Nous ne pouvons pas
arrêter la pêche au filet maillant ou pour le hareng ou pour le
maquereau ou pour la morue. Le filet le plus dangereux était le filet
maillant à morue. Nous avons monté le maillage à six
pouces au minimum. Comme je l'ai dit, au lieu d'être tendu en surface,
comme auparavant, il est tendu à dix-huit pieds, en dessous de la
colonne d'eau de la su-face.
M. Morin: J'entends vous poser la question sur le contrôle.
Comment vous assurez-vous que les dispositions dont vous venez de nous faire
part ont été respectées par les pêcheurs?
M. Saint-Pierre: Elles sont respectées dans toute la
mesure du raisonnable. Premièrement, nous avons constaté que le
pêcheur commercial de saumon étant disparu temporairement; il
s'est levé une génération spontanée de braconniers.
Cela, il ne faut pas le cacher, c'est dans notre nature, c'est probablement une
des caractéristiques du Canadien français. Tout filet individuel
est interdit chez nous. Pour obtenir un permis pour pêcher la morue cette
année, le poisson de fond, le pêcheur doit acquérir un
minimum de cinq filets à $150 le filet, cela fait $750 pour aller
braconner un saumon. Il va y penser. Nous avons établi un minimum, et
d'ailleurs il y a un nombre maximum de filets maillants pour un bateau, tout
dépend de la dimension du bateau. En deuxième lieu, pour
repérer tout filet non identifié, c'est entendu, nous avons un
système de grappins sur nos bateaux de patrouille et tout ce qui est
en-deça de dix-huit pieds se fait accrocher et détruire
automatiquement.
M. Morin: Combien avez-vous de bateaux patrouilleurs?
M. Saint-Pierre: Nous avons sept ou huit bateaux patrouilleurs.
Ils sont disséminés à partir de Lourdes-de-Blanc-Sablon
jusqu'à Rimouski..
M. Morin: Et dans la Baie des Chaleurs?
M. Saint-Pierre: Dans la Baie des Chaleurs, ce n'est pas mon
domaine précis, je dirais trois bateaux. Il faut s'entendre, les gens
ont des radiotéléphone et ils disent: La patrouille est à
cinquante milles de chez toi, tu as le temps d'aller te chercher un saumon. On
n'a pas le don d'ubiquité. Il nous faudrait flanquer chaque braconnier
d'un garde-pêche.
M. Morin: Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourrait
peut-être emprunter l'un des hélicoptères de son
collègue du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.
Une Voix: II n'est pas prêteur, peut-être.
M. Lacroix: Cela prendrait un policier par poisson.
M. Morin: Blague à part, c'est quand même un
problème suffisamment grave pour qu'on en fasse état et qu'on se
plaigne de la situation.
M. Saint-Pierre: Je l'ai déjà signalé
à Ottawa. Dans les faits, c'est ceci: Je fait des recommandations pour
enlever de la pression sur ces stocks et je dis que les stocks se refont
très rapidement, comme, par exemple, dans la rivière Cap-Chat,
où le saumon était disparu. J'y suis allé
l'été dernier et j'en ai compté vingt-trois dans une seule
fosse. A la rivière Sainte-Anne-des-Monts, le saumon est revenu.
C'était complètement stérile depuis des années.
Dans la rivière Matapédia, qui est un ruisseau, on a
capturé l'an dernier, tout près de 5,000 saumons à la
ligne, cela ne s'était pas vu depuis des années.
M. Côté: Mais, même si elle est prise...
M. Saint-Pierre: Concurremment, je dois ajouter que le saumon est
une espèce anadrome qui sort du golfe, et c'est Terre-Neuve qui est
notre plus gros braconnier. Il y a des gens qui se sont fait tutoyer;
incidemment, l'honorable Crosbie, j'ai été oblige de lui donner
une leçon de choses là-dessus.
M. Morin: D'après votre raisonnement de tout à
l'heure, ce seraient des Québécois qui auraient
émigré à Terre-Neuve qui seraient coupables de...
M. Saint-Pierre: Cela va dans les deux sens. Le braconnage est un
de nos sports, une de nos qualités nationales. D'ailleurs, c'est
punitif.
M. Lacroix: II y en a un sur six chez vous, comment voulez-vous
que, dans la province, il n'y en ait pas autant?
M. Saint-Pierre: Le saumon, c'est un...
M. Cadieux: Cela lui prend du temps, mais il comprend.
M. Saint-Pierre: Vous avez un député qui a
été accusé de braconnage, c'est pour cela qu'il dit un sur
six.
M. Morin: Oui, je sais, et il s'est bien défendu.
D'ailleurs, je ne veux pas entraîner le ministre sur les rivières
qui sont données à fermage aux étrangers, c'est une autre
question.
M. Côté: Nous en avons discuté avec le
ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.
M. Morin: C'est exact, nous en avons déjà
discuté ailleurs, et c'est dans ce contexte qu'il faudrait parler
vraiment de braconnage. M. le Président, vous pouvez reprendre.
M. Côté: J'ai la ferme conviction que, de toute
façon, les mesures seront plus sévères au cours de
l'été, que la patrouille sera plus intensive en ce qui concerne
la capture du saumon dans les filets maillants; du moins c'est l'impression que
cela me laisse au moment où l'on se parle. L'an passé, il
n'était pas rare de voir des pêcheurs côtiers à
quelques occasions l'an passé, avec 15, 20 ou 25 saumons qui
s'étaient pris dans les filets, qui avaient été
"terrés" si vous voulez.
M. Saint-Pierre: Je trouve que c'est un signe de bonne
santé des stocks; nous ne favorisons pas cela dans toute la mesure du
possible. Nous agissons. J'ai vu 45 filets saisis à Gaspé l'an
dernier et c'est seulement un échantillonnage de ce qui a
été fait. Il y a la capture occasionnelle, qui n'est pas
punissable aux termes de la loi, et puis, s'il y a du saumon, pêchons-le.
Ce qui a favorisé la venue du saumon, c'est la présence de
banquises et de glaces tardives dans le détroit de Belle-lsle l'an
dernier, alors Terre-Neuve n'a pas pu lui faire l'accueil des années
passées. Exemple, sur la Basse Côte-Nord, où il se
capturait 30,000 livres de saumon, les pêcheurs, l'an dernier, en ont
pêché 200,000 livres.
M. Crosbie m'a dit, comme compromis: "Je t'en laisserai un sur trois".
Alors, j'ai dit: "Renversez les données et on est d'accord".
Une Voix: Adopté.
M. Morin: M. le Président, encore une ou deux questions
sur l'élément 1. Le 13 février 1975, on a annoncé
à Ottawa une étude globale du golfe Saint-Laurent au coût
modeste de $30 millions. J'imagine que le gouvernement québécois
a dû en être informe, comme nous, par la voie des journaux.
M. Saint-Pierre: Non.
M. Morin: Cette somme est...
M. Saint-Pierre: C'est très sérieux. On avait
participé à des discussions avec Madame Sauvé et d'autres
ministres aussi. Cela a touché l'aspect de l'environnement et
différents autres aspects de l'activité du gouvernement.
M. Morin: C'est ce dont je veux vous entretenir.
M. Saint-Pierre: Nous avions, huit ou neuf mois avant, des
discussions sur la portée de l'étude, ses aspects; nous avions,
à notre demande d'ailleurs, fait ajouter certains
éléments.
M. Morin: A l'étude fédérale?
M. Saint-Pierre: Non, il y a eu des discussions où on
avait convenu de la nécessité d'avoir un pro- gramme de
recherche; somme toute, c'est essentiellement de la recherche scientifique
qu'il y a dans ce secteur.
Je me rappelle que M. Slivitzky, secrétaire du comité
ministériel de la recherche scientifique, est allé à
quelques reprises à Ottawa. Il avait fait rapport. Il y a eu une
discussion sur une longue période de temps et qui touchait plusieurs
ministères. Quand cela a paru dans les journaux, c'était bien
connu.
M. Morin: Oui, mais ce qui me frappe, c'est que le budget qui va
être consacré à cette étude est considérable.
Il ne constitue guère moins que vingt fois ce que le Québec
alloue à sa propre recherche dans le domaine maritime. J'ai l'impression
que cette étude qui porte sur les courants marins... Si vous voulez me
laisser finir ma question...
M. Saint-Pierre: Soyons honnêtes. L'étude est faite
sur une période de combien d'années? Vous dites: Le montant est
vingt fois ce que vous dépensez.
M. Morin: Ce n'est pas clair, la durée de cette
étude. Je ne sais pas si le ministre peut nous éclairer.
M. Saint-Pierre: C'est plus qu'un an. C'est un programme d'une
certaine envergure, je n'ai pas les chiffres devant moi, mais qui portait sur
presque dix ans. Le gouvernement fédéral peut être
porté à faire cela. On parle de $30 millions sur dix ans. Cela
fait $3 millions, et $3 millions, par rapport à ce qu'on dépense
sur la recherche au ministère, mais, à cela, il faudrait ajouter
ce qui est dépensé en matière de recherche dans les
institutions québécoises, soit sur l'aspect de l'environnement,
soit sur l'aspect des ressources hydrauliques et d'autres domaines, les
proportions sont plus compréhensibles et plus près de la
vérité.
M. Morin: Je sais que Mme Sauvé a fait allusion, au
même moment, aux intentions de son ministère de conclure une
entente avec le gouvernement québécois sur les ressources
maritimes. Le ministre peut-il nous dire si cette entente a maintenant
été signée? Est-elle en vigueur? Il y a maintenant quatre
mois que Mme Sauvé a annoncé la chose.
M. Saint-Pierre: C'est une intention. Il y a certains projets
conjoints, mais, jusqu'à présent, il n'y a pas eu d'entente
formelle entre les deux niveaux de gouvernement sur cela.
Dans les journaux, il y a bien des choses qui ne sont pas toujours tout
à fait au point.
M. Morin: D'après les journaux, justement, on me signale
que les entretiens s'étaient déroulés plutôt avec le
Dr Goldbloom qu'avec le ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. Saint-Pierre: Le ministre était bien au courant.
M. Morin: Ce doit être parce qu'il s'agissait aussi
d'environnement.
M. Saint-Pierre: C'est cela.
M. Morin: De courants marins, du sous-sol
marin. Mais ce qui m'étonne aussi, c'est que cela va beaucoup
plus loin que le sous-sol marin, l'exploitation éventuelle des
dépôts miniers, des nappes de gaz, dans le sous-sol du
Saint-Laurent. Cela touche, évidemment à des compétences
fédérales, comme le trafic maritime, l'aménagement
portuaire. Cela va beaucoup plus loin et envahit même des
compétences provinciales. Je vois, par exemple, que cela va toucher
à la gestion des côtes, c'est un peu étonnant, ne
trouvez-vous pas, la gestion des côtes, les espaces
récréatifs et industriels.
M. Saint-Pierre: C'est un programme conjoint, exactement.
D'ailleurs, cela donne suite à des récriminations depuis quelques
années, où, dans les programmes de recherche
fédérale, nous disions que nous n'avions pas notre part. Il faut
se rappeler que tout cela a commence lorsque Mme Sauvé était
responsable du ministère de la Science et de la Technologie. C'est par
le biais du comité ministériel de la recherche scientifique qu'au
Québec nous avons été amenés dans ce dossier. M.
Goldbloom a été mandaté par mes quatre collègues
qui siègent avec moi à ce comité pour discuter avec elle.
Cela donnait suite à des demandes de notre part d'avoir une plus large
part du gâteau fédéral, en matière de recherche
scientifique.
M. Morin: M. le ministre, si je comprends bien, c'est un plan
conjoint qui fait appel à vos recher-chistes et à vos services
aussi.
M. Saint-Pierre: Par incidence, mais quand on va parler de
récréation, cela touche le ministère du Tourisme, de la
Chasse et de la Pêche. Quand on parle de l'aménagement de la
côte, cela peut aussi bien toucher le ministère de l'Industrie et
du Commerce, en matière d'infrastructure industrielle. Cela peut encore
toucher la voirie. Quant à l'ampleur de la recherche scientifique,
à $30 millions, dans un secteur comme celui du golfe Saint-Laurent, il
n'y a pas un ministère du gouvernement fédéral, pas un
ministère du gouvernement provincial et pas une municipalité que
cela ne doit pas concerner un peu de près ou de loin.
M. Morin: Je ne doute pas que cela touche à plusieurs
ministères. Cela touche à plusieurs compétences du
Québec. Mais le sens de ma question est celui-ci: Qui organise les
recherches? Qui choisit les chercheurs? Qui paie les chercheurs? Est-ce le
gouvernement fédéral ou le gouvernement du Québec? Vous me
dites que c'est un programme conjoint. J'imagine que le Québec va
effectuer certaines de ces recherches par lui-même. Est-ce bien le sens
de vos propos?
M. Saint-Pierre: C'est cela. Je pense que, ce soir, on peut
demander à M. Lachance de parler de l'aspect de la pêche maritime,
mais il ne faudrait pas sous-entendre que la seule part du Québec dans
tout cela touche la pêche maritime.
A l'environnement, il y a un programme. A l'OPDQ, j'imagine, en
matière d'aménagement du territoire pour les côtes, il doit
aussi y avoir quelque chose.
M. Morin: Quelle partie des $30 millions va être
versée au gouvernement québécois pour faire faire les
recherches en question?
M. Saint-Pierre: Pour autant que je me rap- pelle, les $30
millions, ce sont des fonds fédéraux qui sont prévus par
lui dans un programme qui a donné suite à des discussions de part
et d'autre.
M. Morin: Je comprends, mais vous me dites que c'est un programme
conjoint.
M. Saint-Pierre: Un programme conjoint en ce sens que c'est une
approche conjointe pour tenter d'obtenir les résultats de certaines
recherches dans une région donnée.
M. Morin: Attention! Si c'est un programme conjoint,
Québec doit avoir sa part des fonds et effectuer une partie des
recherches lui-même. Autrement, sous le sigle de programme conjoint, vous
êtes en train, en fait, de dissimuler un abandon de
compétence.
M. Saint-Pierre: Absolument pas, M. le Président.
M. Morin: Si Ottawa fait toutes les recherches, même en
matière de gestion des côtes et d'espace récréatif
et industriel...
M. Saint-Pierre: M. le Président, en matière
d'aménagement des ports sur le Saint-Laurent, cela touche au programme
que vous avez mentionné. Les recherches qui sont faites actuellement par
le gouvernement du Québec et payées à 100% par
lui-même pour avoir une meilleure expertise sur le port en vrac liquide,
est-ce qu'on va interpréter cela comme si c'était le
fédéral qui a abandonné sa juridiction sur les ports? Non,
ce sont les deux niveaux de gouvernement qui veulent en connaître
davantage sur différents aspects qui touchent le fleuve Saint-Laurent.
En matière de pêche maritime...
M. Morin: Je vais demander à M. Lachance de nous expliquer
comment cela va être un programme conjoint
fédéral-provincial.
M. Saint-Pierre: Evidemment, M. le Président, avec la
permission de M. le ministre, voici la partie que je connais de ce projet. A ce
que je sache, ce sont des fonds fédéraux qui sont sous la gestion
du service de protection de l'environnement. Je parle évidemment pour la
partie que je connais.
Le service de protection de l'environnement, avec un de ses responsables
dont j'oublie malheureusement le nom, peu importe, a préparé, en
collaboration avec différents ministères dont celui de
l'Industrie et du Commerce, à la direction des pêches, et le
ministère des Richesses naturelles aussi, une série de projets
dans le cadre d'un "crush program" vous excuserez l'anglicisme
qui fonctionne de la façon suivante: Le service de protection de
l'environnement vient chercher des compétences dans les
ministères pour une période de temps X. Cela peut être six
mois, un an, un an et demi ou deux ans même.
C'est une sorte de contrat. Le technicien ou le professionnel qui est
affecté à ce projet est remplacé par le service de
protection de l'environnement au sein de l'organisme. Exemple: II y a un projet
chez nous qui a été approuvé, qui consiste à faire
l'inventaire des ressources halieutiques, c'est-à-dire des poissons,
à partir du territoire qui est sous notre juridiction,
c'est-à-dire du pont de Trois-Rivières jusqu'au bas estuaire du
Saint-Laurent.
Pour ce faire, on nous a demandé un technicien. On a chez nous
effectivement, dans nos services, un technicien dont la compétence est
reconnue dans ce domaine. On l'a prêté au service de protection de
l'environnement pour une période d'un an. En compensation, il nous
remet, à titre de contractuel ou d'occasionnel, un technicien qui fait
le travail que le technicien prêté faisait normalement; c'est le
mécanisme utilisé.
M. Morin: Puis-je vous demander, M. La-chance s'il s'agit du
service fédéral de l'environnement?
M. Saint-Pierre: Non, du service provincial de la protection, le
SPE, comme on l'appelle chez nous.
M. Morin: Provincial. Ce service provincial travaille dans le
cadre de ce programme de $30 millions.
M. Saint-Pierre: A ce que je sache, oui. C'est ce qu'on appelle
encore une fois, je ne suis pas un expert dans ces transferts de fonds
je pense, ce programme où les fonds fédéraux sont
gérés par le Québec. C'est effectivement le Québec
qui a la maîtrise d'oeuvre.
M. Morin: Si tel est le cas, est-ce que je pourrais demander au
ministre, pas nécessairement ce soir, mais d'ici quelques jours, de me
faire savoir ou de faire savoir à la commission nous aurons
terminé nos travaux ce soir, donc, il faudra qu'il les dépose en
Chambre ou qu'il me fasse parvenir les renseignements de me faire savoir
la portion des $30 millions qui va être sous gestion
québécoise...
M. Saint-Pierre: Avec plaisir.
M. Morin: ... quel que soit le ministère concerné?
Pourriez-vous aussi nous donner quelques détails sur l'affectation par
le Québec, par les divers services au ministère, de la portion
des $30 millions qui sera administrée par nous?
M. Saint-Pierre: Parfait.
M. Morin: Cela va. Je voudrais vous entretenir maintenant de
quelques incidents côtiers qui ont eu lieu l'été dernier,
qui vont intéresser peut-être certains de mes
collègues.
M. Côté: Estce que vous êtes rendu à
l'élément 2?
M. Morin: Non, pas tout à fait, c'est encore à
l'élément 1. On peut peut-être en traiter à
l'élément 2, mais cela m'est égal.
M. Côté: Oui, je pense que ce serait à
l'élément 2.
M. Morin: On peut bien.
Le Président (M. Brisson): A l'ordre, messieurs! J'ai
l'impression qu'on discute en général des trois
éléments ensemble.
M. Morin: Si vous le voulez, je n'ai pas d'objection. En tout
cas, si le ministre le veut bien, nous allons l'entretenir de ces
pêcheurs côtiers qui en sont venus aux coups l'été
dernier, aux coups de fusil plus particulièrement, avec des
propriétaires de chalutiers dans le secteur de
Saint-Joachim-de-Tourelle.
M. Côté: Vous les avez rencontrés?
Incident chez les pêcheurs côtiers
M. Morin: Non, je n'ai pas rencontré de gens qui se soient
fait tirer dessus, ni qui aient tiré d'ailleurs sur les autres. Dans Le
MacLean de mars 1975, sous la signature de Pot Chantraine, on trouve ce qui
suit: "L'été dernier, tannés de se faire considérer
comme quantité négligeable, comme une espèce en voie de
disparition, les petits pêcheurs côtiers ont repris leurs fusils
tant à Saint-Godefroy qu'à Cloridorme ou aux Méchins pour
faire feu sur les chalutiers québécois, cette fois, qui venaient
râcler le fond de la mer, tellement près des côtes qu'ils
saccageaient les trappes à morue et emportaient lignes de fond et filets
maillants. En décembre dernier, la direction des pêches du
Québec n'avait encore proposé aucune solution à ce
pressant problème, et ce précisent les pêcheurs
irrités en dépit d'une tradition centenaire de la mer qui
donne la priorité aux plus démunis." Le reste n'est
peut-être pas aussi essentiel à la compréhension du
problème.
Nous approchons maintenant du début d'une nouvelle saison de
pêche. Le ministre a-t-il l'intention de proposer une solution à
ce problème avant que les gens ne recommencent à se tirer
dessus?
M. Saint-Pierre: M. Bernard va vous donner la solution qu'on a
retenue.
M. le Président, à la date du 29 mai, nous avons des eaux
canadiennes et des pêcheurs canadiens. C'est une ressource commune qu'il
faut partager. Alors, sur la juridiction, il s'agit de s'entendre et de ne pas
se blesser. L'an dernier, il n'y a eu ni tué, ni blessé, c'est
heureux. Un principe veut qu'on balkanise le secteur des pêches, c'est
là-dessus qu'il faut s'entendre. Les pêcheurs de
Saint-Joachim-de-Tourelle ont dit: Nous autres, pour les pêcheurs
côtiers, on détermine une zone de trois milles des côtes
à l'intérieur de laquelle les chalutiers n'ont pas d'affaires.
C'est assez compliqué. Je ne peux pas dire théoriquement que ces
gens ont tort. Allons tout de suite à l'application pratique de cela.
Nous n'avons pas le droit chez nous de balkaniser, c'est-à-dire qu'on va
répondre à la demande des gens d'une localité: Oui, vous
avez une zone de trois milles. Le jeu se poserait comme ceci: Le pêcheur
côtier se limite, s'il est en dehors de trois milles. Nous autres, il
faudrait faire une réglementation. Trois milles, c'est trois milles.
Alors, il faut le faire au transit ou au
radar, peu importe. Si le bonhomme sort à l'extérieur de
trois milles, il est en défaut. Si le chalutier entre, il est en
défaut.
Cette réglementation devait être entérinée
par le fédéral, qui ne la reconnaîtra jamais. J'en ai
parlé au député de Matane, et il n'y a pas eu de fins de
recevoir. Je suis descendu à Saint-Godefroy et, contrairement à
ce qu'on laisse entendre, les fusils ne sont pas sortis et je suis allé
désamorcer cela bien allègrement. J'ai expliqué ces choses
aux gens, seulement ce petit jeu, et j'ai dit: En faisant ce que vous voulez
faire, vous demandez deux choses et tout d'abord de fermer la Baie des
Chaleurs. Il y a une ligne imaginaire de Paspébiac, Grande-Anse au
Nouveau-Brunswick. On a dit: Vous allez la descendre jusqu'à Gascon, je
crois, Shigawake. Messieurs, vous rendez-vous compte qu'en exigeant la
fermeture de cette zone, vous vouez à la mort certaine, à
l'inanition, les pêcheurs de Newport, qui sont vos compagnons de travail?
On n'avait pas pensé à cela. Avez-vous pensé à la
zone de trois milles? C'est vrai, m'a dit l'un d'eux, je pêche avec mes
filets côtiers près de Miscou, Nouveau-Brunswick. L'un portant
l'autre, les gens ont dit: Ecoutez, on est nettement dans les patates. On
retire toute demande et on sert les carabines. Cela a été
désamorcé. Je ne crois pas qu'il y ait signe de reprise à
Saint-Godefroy. Maintenant, pour les pêcheurs de
Saint-Joachim-de-Tourelle, le phénomène est différent. On
se réclame d'un statut de pêcheur professionnel. Le pêcheur
côtier dit qu'il est un pêcheur professionnel. Chez nous, un
pêcheur professionnel fait l'objet d'une définition et d'une
reconnaissance. Le pêcheur professionnel est celui qui occupe le gros de
son temps et dont la majorité des revenus sont tirés de la
pêche. Il faut faire cela, autrement c'est un désordre. Ils n'ont
jamais voulu se profession-naliser selon nos exigences jusqu'à
maintenant.
M. Côté: Si le chef de l'Opposition et la
présidence me le permettent, pour corriger une affirmation du chef de
l'Opposition tirée d'un magazine qui disait qu'il n'y avait aucune
intervention du gouvernement, permettez-moi de lire un bout de lettre
adressée à M. Gaston Rioux, secrétaire
général des Pêcheurs unis en date du 30 septembre 1974.
Vous allez y voir l'efficacité des députés de la
région, contrairement à ce que vous affirmiez il n'y a pas
tellement longtemps. "Nous avons eu le 4 septembre une assez longue discussion
sur le sujet avec les députés de la région. On
parlait, évidemment, de la petite querelle Un certain nombre de
solutions ont été discutées pour éviter la
renaissance du conflit. Une seule a été retenue: Que les
producteurs demandent aux capitaines des chalutiers qui pêchent dans le
secteur de Les Méchins-Saint-Joachim, de bien vouloir éviter de
pêcher à l'intérieur de trois milles des côtes dans
cette zone. Je comprends bien qu'aucun règlement n'astreint à
cela et ce n'est pas notre intention d'en proposer un à cet effet. Nous
croyons toutefois que les quelques capitaines, c'est-à-dire à peu
près cinq ou sept, au maximum, qui pèchent dans cette zone
pourraient accepter de combler cette demande pour éviter que la querelle
se renouvelle."
Il y a une lettre des Pêcheurs unis pour dire qu'il n'y a rien eu
de fait. A la décharge des responsables des pêcheries, il y a eu
effectivement une rencontre au ministère, des interventions
auprès des Pêcheurs unis, mais la réponse n'a pas
été tellement satisfaisante, on en convient. La réponse
suivante était contenue dans une lettre adressée à M.
Marcel Pelletier, en date du 4 octobre 1974: "Nous comprenons très bien
la suggestion retenue par les députés de la région
à la réunion du 24 septembre dernier, mais nous ne pouvons
l'accepter, etc."
Il y a eu des efforts du côté du ministère. Il y a
eu aussi des efforts du côté des pêcheurs côtiers.
M. Morin: Sans grand succès, à ce que je vois.
M. Côté: Sans grand succès. Le
problème qu'a soulevé M. Bernard concernant les pêcheurs de
Saint-Joachim-de-Tourelle, c'est que, depuis l'avènement d'un autre
gouvernement dans les années 1966, on a eu une politique formidable au
ministère, surtout dans la division des pêcheries, cela a
été de fermer les neigères et les entrepôts
frigorifiques un peu partout tout le long de la côte pour les concentrer
dans certains endroits ce qui a malheureusement influé sur le nombre des
pêcheurs côtiers qu'il y avait à ce moment-là.
Saint-Joachim-de-Tourelle a été une des paroisses les plus
durement touchées. Maintenant que la situation est passablement
stabilisée du côté des fermetures, il y a une recrudescence
de pêcheurs ou du moins de gens intéressés à
s'équiper comme pêcheurs côtiers et à faire la
pêche côtière dans le secteur de Saint-Joachim-de-Tourelle.
Il y en a environ soixante. Dans ce que M. Bernard dit, que tout le monde n'est
pas inscrit comme pêcheur professionnel ou ne répond pas aux
critères de pêcheur professionnel, il y a du vrai et il y en a
même beaucoup. On fait face à un certain nombre de
difficultés car ces gens vivaient du bien-être social. N'allez pas
demander à un individu qui, l'hiver, reçoit du bien-être
social, et qui, l'été, va vendre sa morue à peu
près à $0.15 ou $0.20 la livre et qui se procure ainsi un revenu
à l'année, de renoncer aux montants du bien-être social
qu'il reçoit l'hiver.
Il y a là tout un système et je sais que M. Bernard est
intervenu au cours de l'hiver avec les Pêcheurs unis au niveau du
chômage. Là aussi, il y avait des problèmes au niveau du
chômage. C'est un ensemble de problèmes qui a
débouché sur ce conflit. L'été dernier, je pense
qu'on peut affirmer qu'il y avait pénurie de poisson et les
pêcheurs côtiers en ont été affectés aussi. Ce
n'est pas tellement plaisant quand arrivent cinq ou sept chalutiers, ce n'est
pas toute la flotte, qui viennent pêcher à un demi-mille des
côtes, je les ai vus moi-même, et qui, à certaines
occasions, ramassent les filets des pêcheurs et s'en vont avec. Ce n'est
pas tellement intéressant pour le pêcheur.
Il y a une fameuse réglementation qui exige certaines normes de
bouées, de signalisation, de perches, là-dessus, je m'inscris en
faux. S'il faut que cela coûte $400 à $500 le filet pour que le
pêcheur puisse pêcher légalement, je me demande où on
va se ramasser à un moment donné.
Les pêcheurs de Saint-Joachim-de-Tourelle sont à l'heure
actuelle intéressés à pêcher. Il y en a au moins 45
sur les 60 qui sont sérieux. Ils n'ont pas des exigences énormes,
pour en avoir déjà discuté avec les ministères. On
exige d'eux qu'ils aillent porter leur poisson à chaque jour à
Rivière-au-Renard, qui est à environ 120 milles de
Saint-Joachim-de-Tourelle. Le ministère fait sa part en donnant une
subvention pour le transport du poisson. Mais ce n'est pas là la
difficulté, c'est dans l'approvisionnement en glace, pour conserver le
poisson au moment où il n'y en a pas suffisamment pour une
journée. Croyez-le ou non, la semaine dernière, les
pêcheurs de Saint-Joachim-de-Tourelle ont été
obligés d'aller gruger dans une banquise de glace qui était
descendue de la montagne, à Mont-Saint-Pierre, pour avoir de la glace et
pour pouvoir conserver leur poisson. Il y a là une neigère. Il
n'y a pas de machine à glace dedans.
D'après les chiffres que j'ai pu recevoir à gauche et
à droite, il en coûterait à peu près $7,500 pour une
machine à glace qui produirait 5,000 tonnes de glace par jour. Je pense
qu'avec une machine à glace, on réussirait quand même
à régler le problème.
En fait, c'est tout cet ensemble de faits qui fait que les
pêcheurs de Saint-Joachim-de-Tourelle ont dit, à un moment
donné: On va essayer de préserver ce qu'on a comme filets et ce
qu'on peut gagner un peu comme poisson. Ce n'est pas toute la flotte des
chalutiers qui est venue piller le long des côtes, parce que si les
pêcheurs côtiers ont leurs torts, les chalutiers aussi ont leurs
torts. Ils sont équipés pour aller pêcher en haute mer,
qu'ils aillent pêcher en haute mer, qu'ils donnent la chance aux
pêcheurs côtiers de se faire valoir.
M. Saint-Pierre: Je regrette de vous dire que c'est une opinion,
parce que les pêcheurs, théoriquement, ont des droits
égaux. Il y a le pêcheur côtier, le petit pêcheur
côtier et le chalutier. Le chalutier en est tenu à une seule
exigence, celle de ne pas s'approcher à plus d'un demi-mille d'un engin
de pêche bien identifié. Lorsqu'on dit qu'il faut identifier, nous
essayons d'y aller d'un compromis parce qu'il y a un règlement
fédéral qui s'applique à l'ensemble des pêches sur
l'identification et la signalisation. Cela irait chercher peut-être
$1,000. Chez nous, nous voulons faire un compromis qui est une identification,
qu'il y ait une bouée qui porte une couleur. On a des kleenex, on a des
vieilles chemises, on a des têtes de pirates, on a toutes sortes de
choses. C'est peu indicateur cela.
M. Côté: Vous avez peut-être imagé
beaucoup. Je comprends un peu le problème que vous soulevez, mais il y
avait, l'an passé, des bouées lumineuses rouges qui n'ont pas
été suffisantes. Il y a eu de la mauvaise volonté de part
et d'autre. Je le pense en tout cas. Je pense qu'on pourrait régler une
fois pour toutes le problème de Saint-Joachim-de-Tourelle si au moins on
trouvait une machine à glace au lieu de fermer les neigères.
M. Morin: Sur le plan juridique, si je peux revenir sur la
question... Répondez si vous le voulez, j'y reviendrai.
M. Saint-Pierre: Pour la machine à glace, je me suis
occupé activement de voir la possibilité de cette chose. Mais,
par contre, examinez la situation... A la Rivière-au-Renard, ce sont les
Pêcheurs unis qui font le transit, qui effectuent le transport du
poisson. Ils peuvent monter de la glace de la Rivière-au-Renard et ce
serait suffisant. Je sais...
M. Côté: Je m'excuse, mais les Pêcheurs unis
font le transport du poisson de Saint-Joachim-de-Tourelle à la
Rivière-au-Renard, mais, dans la correspondance, il n'est pas
complètement clair qu'ils vont charroyer la glace, parce que, à
l'heure actuelle, il n'y en a pas.
M. Saint-Pierre: J'ai demandé de m'assurer qu'ils
acceptent le transport de la glace. L'été dernier, à un
moment donné, on a transporté... Les Pêcheurs unis ont
laissé tomber le service. Ils avaient transporté 3,000 ou 4,000
livres de poisson en l'espace de trois mois. Vous comprenez le jeu. C'est que
les pêcheurs ils font bien pèchent et vendent le
plus beau, le meilleur poisson chez eux. Ce qui reste, le
laissé-pour-compte, on le refilait à 100 milles de distance.
M. Côté: Je suis d'accord pour dire qu'il existe un
problème à ce niveau aussi, mais c'est tout simplement parce
qu'on n'a pas de glace pour être capable de conserver le poisson. Quand
on est rendu à aller chercher des banquises de glace, le long de la
route, de la route 132... Je l'ai vu de mes yeux, je l'ai vu moi-même. Ce
n'est quand même pas exigeant que de demander une machine à glace
qui pourrait coûter $7,500.
Je sais que vous avez fait des recherches, que vous avez
vérifié à la Grande Entrée aux Iles-de
la-Madeleine, mais on a eu comme réponse qu'ils pouvaient
s'approvisionner en glace à Cloridorme qui est encore à 80 milles
de Saint-Joachim-de-Tourelle.
M. Cadieux: En somme, M. le Président, pour appuyer le
député de Matane, même si je ne suis pas connaissant dans
le domaine, est-ce qu'on pourrait demander au ministre si c'est tout ce que
cela coûte pour satisfaire plusieurs personnes et plusieurs
pêcheurs et augmenter leurs revenus? Il me semble que M. le ministre
pourrait même se prononcer immédiatement sur la demande du
député de Matane.
M. Saint-Pierre: C'est un achat, l'installation et ce que cela
implique.
M. Côté: Cela implique quoi?
M. Saint-Pierre: Je ne peux pas risquer un chiffre, mais $7,500,
c'est le coût d'acquisition.
M. Côté: Oui, c'est la machine.
M. Saint-Pierre: La machine, mais écoutez... M.
Côté: On fera une corvée pour l'installer.
M. Saint-Pierre: On n'installe pas cela sous une tente.
M. Côté: Comment?
M. Saint-Pierre: Si on veut faire de la
réfrigération, on n'installe pas cela sous une tente. Il faut que
ce soit...
M. Côté: II y a une bâtisse, une
neigère qui est là au havre des Quinze-Collets à
Saint-Joachim-de-Tourelle.
M. Saint-Pierre: Dans quelle condition? M. Côté:
Elle est en très bonne condition.
M. Lacroix: Si vous permettez, le chef de l'Opposition a fait
mention de l'article "Le pillage du golfe" signé par M. Pol Chantraine
qui demeure aux Iles-de-la-Madeleine. Naturellement, je ne crois pas que M.
Chantraine soit un gars malhonnête, mais je crois que...
M. Morin: Je comprends qu'il n'est pas de vos amis
exactement.
M. Lacroix: Je ne le connais pas et cela ne me dérange pas
du tout. Mais je lis l'article et il y a des choses qui sont un peu farfelues
là-dedans, je pense.
Je vais citer: "Pour illustrer ce manque de considération
on parle des multinationales, les actionnaires qui sont des capitalistes de la
Nouvelle Angleterre, qui contrôlent et qui sont plus
intéressés aux dividendes qu'aux pêcheurs pour le
poisson et pour les hommes, voici une anecdote que m'ont racontée les
pêcheurs du Grande-Entrée, le bateau de la compagnie Gorton, au
cours de cette nuit mémorable qui a vu les six chalutiers de la Gorton
revenir en escadrille serrée des côtes de Terre-Neuve à
Cap-aux-Meules, après que les équipages eurent
décidé la grève à l'unanimité. "Cela se
passait quelques jours avant Noël et les pêcheurs venaient de
remonter une grosse poche de morue qui "dégolfe" au large de
Chéticamp. Là, je vous en passe un bout. Là, on dit qu'ils
ont demandé à la compagnie étant donné que
la taille laissait à désirer, que la morue était un peu
petite si elle prendrait le poisson. La compagnie leur donna le feu vert
en ridiculisant au passage leurs scrupules et ils travaillèrent comme
des damnés pour mettre aussi vite que possible les 400,000 livres de
poisson dans la cale. Mais lorsqu'ils furent revenus au port avec leur plein
voyage, elle jugea la morue trop petite pour être filetée et au
lieu de l'acheter au prix courant de $0.07 ou $0.08 la livre, elle leur offrit
un demi-cent, même pas de quoi s'acquitter des dépenses du bateau;
et sans le moindre remords, ni la moindre pensée pour les fileteurs
qu'on privait de travail, on envoya toute la cargaison à l'usine de
farine de poisson.
Et plus loin, on dit: "Au mois de novembre, c'était au tour des
Madelinots à l'emploi de Gorton... Plus haut, on disait que cela se
passait quelques jours avant Noël, et les bateaux ont été
attachés le 4 novembre. Voici le rapport de débarquement du
bateau G-C Grande-Entrée, le 5 novembre, à la compagnie Gorton.
Il a débarqué 223,452 livres de poisson rouge, à $0.05 la
livre, pour une valeur de $11,172. Il n'y a pas eu de perte, et la part des
membres de l'équipage a été de $3,134. Le G-C Fatima a
livré sa cargaison au port le 6 novembre et a reçu, pour 246,312
livres de poisson rouge, à $0.05 la livre, $12,315. Le G-C Havre-Aubert,
le 9 novembre, a livré 97,029 livres à $0.05. Il n'y a pas eu une
livre de poisson à un prix moindre. Le G-C Cap-aux-Meules, le 8
novembre, a livré 198,621 livres de poisson à $0.05 la livre,
$9,931 au débarquement. Le G-C Bassin, le 7 novembre, a laissé
167,292 livres à $0.05 la livre, $8,364.60 de valeur au
débarquement. Le G-C Gorton, le 4 novembre, 52,992 livres à $0.05
la livre, $2,649 de valeur au débarquement.
Je ne veux pas mettre en doute les renseignements de M. Chantraine, son
honnêteté, mais voici une anecdote qui a été
racontée par les pêcheurs du G-C Grande-Entrée. Vous voyez,
j'ai ici les feuilles de débarquement. C'est absolument faux. On peut
relever des tas de choses qui sont plus ou moins exactes dans son reportage. Je
pense qu'il faut prendre cela avec un grain de sel.
En I963, j'étais poursuivi pour libelle diffamatoire pour
$60,000, parce que j'avais dit qu'un film sur la chasse aux loups-marins
était un film truqué, M. Chantraine dans la revue Maclean
ridiculisait le député des Iles-de-la-Madelaine et le combattait
sévèrement. Aujourd'hui, ce journaliste est spécialiste de
l'Association des chasseurs de loups-marins madelinots aux
Iles-de-la-Madeleine. C'est à peu près la valeur de son
reportage.
Lorsque le chef de l'Opposition veut avoir des renseignements valables
et objectifs sur les pêcheries il pourrait les obtenir du
ministère ou du député.
M. Cadieux: Vous vous fiez trop aux journalistes!
M. Morin: M. le Président, en l'occurence, les faits qui
étaient rapportés sur les échanges de coups de feu n'en
étaient pas moins exacts. Je voudrais revenir peut-être sur la
question, avant de la laisser, y revenir une dernière fois. Si j'ai bien
compris la lettre écrite par M. Marcel Pelletier, au nom du
ministère de l'Industrie et du Commerce, le 30 septembre I974, la
solution du ministère serait la limite de trois milles.
M. Saint-Pierre: Non. Nous disions que c'était impossible
à réaliser. La lettre de M. Pelletier a été
écrite à ma suggestion et dit: Nous allons demander aux
pêcheurs, aux opérateurs de chalutiers, pour des raisons de bon
commerce, de ne pas s'exposer et de ne pas provoquer et même, autant que
possible, de se dégager du terrain.
M. Morin: Très bien. J'ai compris cela. Si vous
aviez eu la compétence nécessaire pour imposer une
solution, vous auriez sans doute préféré une limite de
trois milles.
M. Saint-Pierre: M. le Président, c'est comme je disais,
une limite de trois milles pour un village, cela devient de la balkanisation,
que voulez-vous, cela devient du spaghetti. Une localité, il faudrait
placarder cela à vingt pieds de côté et dire: Ici, on
pêche à trois milles. Il faudrait faire le tour. Il y a 2,200
milles de territoire.
M. Morin: Oui, je sais. Donc, c'était une solution
purement ad hoc que vous avez imposée, que vous avez
suggérée dans ce cas.
M. Saint-Pierre: Suggérée, écoutez,
tenez-vous en aux règlements. Nous ne pouvons pas les changer et nous ne
voyons pas l'à-propos. C'était impossible. Les trois milles, cela
ne s'interprète pas. Ecoutez, s'il y en a un qui sort de sa limite, et
qu'il est en infraction, en défaut, alors cela prendrait une
armée.
M. Morin: Est-ce que le ministre peut nous assurer que les
mesures ont été prises, les démarches ont
été faites pour que les incidents ne se répètent
pas?
M. Saint-Pierre: Tous les efforts sont faits de notre
côté pour essayer d'en arriver à une solution. C'est
subordonné à la bonne volonté. J'imagine que, s'il y a des
gens qui veulent absolument qu'il y ait des coups de feu qui soient
tirés cette année, il y a toujours moyen de provoquer les uns et
les autres.
M. Morin: Non, j'essayais de comprendre si vraiment vous avez
trouvé une solution véritable au problème, parce qu'aller
voir les parties et les supplier de ne pas tirer, cela peut peut-être
avoir de l'effet, mais cela n'en aura peut-être pas non plus.
M. Saint-Pierre: M. le Président, il ne faut pas non plus
exagérer le problème. C'est la même chose si ce soir le
chef de l'Opposition se promène sur le trottoir de la
Grande-Allée et qu'il frappe une personne. Est-ce que demain matin on va
être obligé de faire un règlement pour dire qu'à
chaque fois qu'il se déplace, il faut qu'il y ait un pied de chaque
côté? On espère que les gens ne se frapperont pas. Il me
semble que là, c'est un peu la même chose. Il s'agit de part et
d'autre, de trouver des solutions qui permettraient aux pêcheurs des
différentes régions de...
M. Morin: Non, dans le cas que vous venez de citer, ne faisons
pas de sophismes, si je suis frappé ou si je frappe quelqu'un...
M. Saint-Pierre: Cela ne prend pas un règlement, il y en
a...
M. Morin: ... il y a des lois qui s'appliquent à cela.
M. Saint-Pierre: Non, sur le troittoir, quand on marche sur le
trottoir, se frapper parce qu'on était distrait l'un et l'autre, qu'on
pensait à des problèmes, on n'est pas pour faire des...
M. Morin: Oui, mais c'est un accident. Là aussi, cela
tombe sous l'empire du code civil pour le cas où il y a eu
négligence. Mais ce n'est pas de cela dont il s'agit. Il s'agit de coups
de feu intentionnels.
M. Cadieux: Est-ce qu'il y en a eu des coups de feu?
M. Côté: Effectivement, il y en a eu. Je pense que
les journaux étaient à une période quand même assez
creuse au point de vue de la publicité. On en a profité pour
essayer de vendre son quotidien. Si le chef de l'Opposition me le permet, cela
a été épinglé un peu et cela a été
augmenté. Il y a eu quelques coups de feu, mais quand même pas
dans l'ordre qui a été mentionné. J'ai personnellement
rencontré à plusieurs occasions les pêcheurs de
Saint-Joachim-de-Tourelle pour leur demander de se modérer et qu'il y
avait d'autres moyens possibles pour atteindre leur but ou revendiquer ce dont
ils avaient besoin. A l'heure actuelle, tout laisse présager que les
incidents ne se reproduiront pas cette année. Il y avait un petit hic
où on pouvait accrocher, c'était une question d'approvisionnement
de glace. Avec cela, je pense qu'on pourra régler les problèmes
de Saint-Joachim-de-Tourelle. D'ailleurs, là où le
ministère a porté des accusations, c'est sur ceux qui ont
été porter des carcasses de voitures dans a peu près 90
brasses d'eau. D'ailleurs, chacun a été condamné à
$100 d'amende. Cela a été en cour à ma suggestion. Ils ont
été condamnés à $50. Alors, des pêcheurs ont
dû payer $50. Je ne crois pas que le problème se
répète cette année.
M. Saint-Pierre: Je pense que le coryphée du groupe a
perdu son bateau, il a été incendié il y a trois semaines
à un retour des choses.
M. Côté: Non, il n'a pas été
incendié au complet. Il a été réparé, c'est
un de mes amis.
M. Lacroix: Nos pêcheurs sont impliqués
là-dedans. Naturellement, les pêcheurs hauturiers suivent le
poisson là où il se trouve. Je pense bien qu'il n'y aura pas de
difficulté entre nos pêcheurs et les pêcheurs
concernés de s'entendre de façon à identifier leurs
agrès de pêche. Il ne faut pas oublier non plus que du
côté nord de la Gaspésie, le plateau de pêche,
passé trois milles, il y a 500 à 600 brasses d'eau. A ce moment,
c'est impensable de penser que la pêche est possible au chalut à
l'extérieur de la limite de trois milles, parce que le plateau de
pêche se situe à l'intérieur des limites de trois
milles.
Nos pêcheurs ont été informés.
J'espère que ce n'étaient pas eux qui étaient
impliqués dans la chicane. Assurément, ils vont pêcher sur
la côte de Gaspé. Ils ont convenu qu'à l'avenir ils
feraient doublement attention, comme ils le font chez
nous, pour ne pas briser les engins de pêche des pêcheurs
côtiers.
Cela arrive aussi chez nous que nos chalutiers brisent les agrès
de pêche des pêcheurs côtiers quand ils reviennent la nuit au
port et que les pêcheurs côtiers ont tendu leurs filets maillants
à une distance assez grande de la côte. Si les agrès de
pêche ne sont pas identifiés, les chalutiers passent dedans et ce
n'est pas par malice. A ce moment, on ne peut pas les blâmer tellement.
Chez nous, la collaboration est acquise. On essaie d'éviter ces
incidents. Je pense qu'ils vont faire la même chose en ce qui concerne
les pêcheurs de la Gaspésie. Je ne crois pas qu'on ait à se
plaindre du renouvellement de ces incidents.
M. Saint-Pierre: Un autre point?
M. Morin: Oui, encore un autre point, faisant confiance à
l'avenir sur la dernière question qui a été
soulevée. Je voudrais passer maintenant a un autre...
M. Côté: Est-ce qu'on pourrait suggérer au
chef de l'Opposition, au moment où il reviendra en Gaspésie,
précisément dans le comté de Matane, de m'inviter et
j'irai lui faire rencontrer les pêcheurs de Saint-Joachim.
M. Morin: Oui, avec plaisir. J'accepte l'invitation. Cela ne
devrait pas trop tarder. J'espère que le député y sera
quand j'y serai.
M. Lacroix: A ce moment, vous aurez la chance d'avoir du
monde.
M. Cadieux: Allez-vous être délégué
par l'Assemblée nationale?
M. Morin: Non, ce ne serait pas une mission officielle, si cela
peut rassurer le député.
M. Cadieux: C'est une invitation personnelle.
Mémoire des Pêcheurs unis
M. Morin: C'est cela. Le ministre est-il au courant de l'accueil
fait par Ottawa aux Pêcheurs unis du Québec qui ont
présenté un mémoire à la Commission
d'assurance-chômage faisant valoir les points suivants: Qu'il convenait
d'éliminer la limitation aux cinq sixièmes des semaines
assurables; qui prônait le retour au revenu brut comme base de calcul des
prestations, qui demandait l'extension de la période des prestations
surtout, si ma mémoire est bonne, parce que je suis passé par
cette usine, c'était ce point qui était le plus important; enfin,
qui demandait l'établissement d'un mécanisme pour permettre une
meilleure bonification du travail chez les pêcheurs professionnels. Le
ministre est-il au courant de ces démarches? Est-il lui-même
intervenu dans ce dossier? Peut-il nous dire quel a été l'accueil
réservé par la Commission d'assurance-chômage aux
Pêcheurs unis?
M. Saint-Pierre: Une réunion, en décembre 1974, a
eu lieu avec le président de la Commission d'assurance-chômage. M.
Bernard y était. Il assiste à beaucoup de réunions qui
touchent les pêcheurs. C'est réellement un spécialiste,
alors que je vais lui demander...
M. Morin: Volontiers.
M. Saint-Pierre:... de vous faire part du climat qui
prévalait.
Effectivement, j'ai collaboré, j'ai l'impression d'avoir
apporté une certaine contribution au factum qui a été
présenté au président de la Commission
d'assurance-chômage. Alors, nous nous rejoignons sur les points qui sont
cités. L'accueil a été très bon. Seulement, il
arrive ceci. Nous avons fait admettre aux commissaires que, réellement,
il y avait quelque chose d'anormal là-dedans. Alors qu'un travailleur en
forêt, après huit semaines de travail, partait pour la gloire, il
en avait pour 44 semaines à se regarder pousser la barbe. Eux, on les
punissait, pêche saisonnière, on comptait cinq sixièmes
seulement des semaines. Après, il y avait une autre limite. On limitait
à $170 les gains hebdomadaires, c'est-à-dire qu'il y avait un
seuil et un plafond. Moins de $35 par semaine n'étaient pas admissibles
à l'assurance-chômage et tout ce qui dépassait $170 par
semaine était perdu. Nous avons proposé la moyenne des revenus,
parce que certains pêcheurs se faisaient $500 par semaine dans certaines
semaines, alors, ça compte pour $170; les cinq sixièmes, nous
avons dit: Cela n'a pas d'allure.
Disons que l'accueil a été chaleureux et bon et que tout
le monde s'est mis au travail. On va vous donner des nouvelles dans trois
semaines. En décembre 1974, il arrive le hic suivant. C'est que le
ministre des Pêches qui a été remplacé...
Excusez-moi, M. Davis avait conçu dans sa solitude, et il partageait son
opinion, que l'assurance-chômage allait tomber; ce serait le revenu
garanti aux pêcheurs. En somme, on garantissait jusqu'à $9,500 ou
$9,800. C'était le plafond de ses revenus, ils n'étaient pas
sujets à l'assurance-chômage. Alors, M. le ministre Leblanc
voulait d'abord faire les comparaisons.
Il est intervenu. J'ai dit: M. Leblanc, allons donc, redressons donc ce
qui est faux, et vous ne trouvez peut-être pas la
nécessité, vous ne verrez peut-être pas l'à-propos
d'aller chambarder tout le système. On a cogité là-dessus
depuis ce temps, et j'ai perdu la piste des négociations. Je ne sais pas
ce qui s'est passé.
M. Morin: Vous n'êtes pas au courant des derniers
développements. Est-ce qu'il ne serait pas opportun que le ministre
aille aux nouvelles et essaie de faire pression pour que les choses avancent?
C'est bien de déléguer M. Bernard qui, je vois, est très
efficace, mais est-ce que le ministre ne devrait pas y mettre son
autorité, pour que les choses aboutissent?
M. Saint-Pierre: C'est une excellente suggestion.
M. Morin: Bien! Est-ce qu'il serait possible que le ministre nous
tienne au courant, le jour où ce sera réglé?
M. Saint-Pierre: Avec plaisir.
M. Morin: Merci!
M. le Président, nous sommes prêts à accepter
l'élément I du programme no 8.
Subventions pour construction de bateaux
M. Lacroix: Est-ce que vous me permettriez? Je voudrais seulement
aborder... Je pense qu'il pourrait aller là-dedans. Globalement, il y a
le problème des pêcheurs professionnels, en ce qui concerne les
subventions pour la construction des bateaux, pour les agrès de
pêche. Autrefois, on avait fait accepter que, pour avoir droit aux
subventions pour la construction des bateaux, les agrès de pêche,
il fallait, dans l'année précédente, avoir
pêché, soit pour $1,500 de valeur ou 50,000 livres de capture.
Naturellement, à ce moment, la morue avait une valeur de $0.03 la
livre. Quand on demandait un tel effort de pêche, cela avait un certain
bon sens. Ensuite, pour maintenir nos gens en pêche plus longtemps, on a
dit que les pêcheurs, pour être considérés comme des
pêcheurs professionnels, devaient fournir un effort de pêche durant
quatre mois. Aujourd'hui, on veut rendre la chose un peu plus facile. On veut
faire une nouvelle classification, soit les pêcheurs
spécialisés, mais cela ne couvre pas tous les cas. Je pense qu'on
devrait revenir à l'ancien système, mais en augmentant les
normes, soit, par exemple, qu'il y ait $5,000 de valeur de capture ou 100,000
livres de capture. Celui qui ne réussira pas à pêcher pour
$5,000 de capture dans l'année, au prix de la morue aujourd'hui, au prix
du homard, a ce moment, il ne doit pas rester dans la pêche. Mais vous
allez prendre, par exemple, quand on parle de quatre mois de saison de
pêche, vous savez, une période de pêche de quatre mois, ce
n'est pas possible partout, même chez nous, aux Iles-de-la-Madeleine.
Vous allez prendre, par exemple, dans la partie septentrionale des îles,
soit de Pointe-au-Loup, Grosse-Ile, Old Harry et Grande-Entrée.
Même si les gars voulaient sortir pour aller en pêche aux poissons
de fonds l'an passé et il y a deux ans également, ils ont
fait des efforts valables pour aller pêcher, nous, quand on dit qu'on
fait des efforts valables, on se rend jusqu'à 20 et 25 milles de la
côte pour aller pêcher ils n'étaient pas capables de
couvrir leurs frais.
Naturellement, il y a le problème de l'assurance-chômage
qui entre en ligne de compte. Dans un bateau, pour aller pêcher à
20, 25 milles de la côte, un gars ne part pas seul avec son bateau de 30,
35 ou de 40 pieds. Il a besoin d'un aide-pêcheur, qu'il doit payer, que
les captures soient bonnes ou pas bonnes. S'il ne le paie pas, le gars n'ira
pas, parce que l'aide-pêcheur, qui fait la pêche au homard avec le
propriétaire du bateau, après la période de huit semaines,
est admissible, immédiatement, aux bénéfices de
l'assurance-chômage.
Le pêcheur propriétaire va donner $1,000 pour la
période de pêche au homard à son aide-pêcheur, et il
va pouvoir retirer $3,000 d'assurance-chômage pendant l'année. Le
pêcheur propriétaire, étant considéré comme
un entrepreneur, n'a pas droit aux avantages de l'assurance-chômage avant
le 1er décembre. Il n'est pas capable d'avoir d'aide. Il ne peut pas. On
a des pêcheurs qui ont gagné leur vie depuis 40, 45 et même
il y en a d'il y a 50 ans, qui arrivent et ont besoin de nouveaux bateaux, ils
n'ont pas droit aux subventions. J'ai des cas, ici, particulièrement, un
M. Burke. Il y en a au moins quatre ou cinq à l'heure actuelle. Il y en
a d'autres qui s'en viennent dans ce cas.
M. Saint-Pierre: Ce sont surtout les pêcheurs au homard qui
font les huit semaines, et vous dites que, dans certains endroits des
îles, parce qu'il y a absence de poissons de fond, les quatre mois
deviennent...
M. Lacroix: Ils ne peuvent pas.
C'est absolument impossible qu'ils puissent pêcher quatre mois. A
ce moment-là, ils n'ont pas le droit aux subventions. Prenez celui qui
est depuis vingt ans dans la pêche. Son bateau est fini et il doit
s'acheter un bateau neuf.
Le gars qui prend 8,000 homards, cela vaut $8,000. Il faut qu'il paie
son aide-pêcheur, ses dépenses, etc. Il peut vivre avec cela. Mais
quand vient le temps de remplacer son bateau et de changer ses agrès de
pêche, il ne peut plus arriver.
Le pêcheur à la morue qui prend 100,000 livres de morue,
qui vaut $0.10 la livre, avec les subsides que le gouvernement
fédéral et le gouvernement provincial vont donner, va se faire un
revenu de $13,000 à $15,000.
A ce moment-là, lui, il est admissible aux subventions. Le
pêcheur au homard, qui est tout de même un pêcheur
spécialisé, un pêcheur professionnel, n'a pas le droit de
bénéficier de ces avantages. Je pense que cela est une situation
qu'on devrait voir à améliorer.
A mon sens, le pêcheur professionnel, particulièrement le
pêcheur des Iles-de-la-Madeleine je ne parlerai pas des autres,
parce que je connais moins leurs problèmes, mais cela s'apparente un peu
aux nôtres notre pêcheur est un peu laissé à
lui-même si on le compare, par exemple, au cultivateur.
Le cultivateur a l'assurance-récolte sur bien des
récoltes. S'il n'est pas assuré, s'il y a trop de pluie, le
gouvernement arrive et il lui donne des subventions, parce qu'il y a eu trop de
pluie et que cela a nui à ses récoltes.
S'il n'a pas plu, s'il y a eu une sécheresse, si le gars n'est
pas assuré, le gouvernement s'empresse de verser des subventions pour
compenser les pertes. Il y a le prêt agricole. Il y a des prix de
soutien. Il y a des prêts à court et moyen termes,
tandis que le pêcheur, lui, ses agrès de pêche ne
sont pas assurables. L'an passé ou il y a deux ans, on a eu une
tempête. Grâce à la compréhension et à la
générosité du ministre, les pêcheurs ont pu obtenir
plus de $200,000 d'aide pour compenser la perte des casiers à homards,
à cause de deux tempêtes qu'on a subies.
Aujourd'hui, la philosophie qui semble se dégager du
ministère, c'est que l'industrie de la pêche fasse ses frais.
On augmente, par exemple, le coût de la
réfrigération. On augmente le coût de la glace, la bouette.
Vous savez, on augmente un peu les charges du pêcheur et on semble
vouloir en arriver à ce que l'industrie de la pêche se suffise
à elle-même, se finance.
Je crois que ce n'est pas une philosophie qui soit à l'avantage
des pêcheries ni des pêcheurs. On devrait faire des pêcheurs
des citoyens à part entière, comme les cultivateurs, et le
gouvernement devrait se montrer plus généreux pour compenser
lorsqu'il y a des dommages et des pertes à subir.
Je pense qu'au coût actuel de construction des bateaux, des
agrès de pêche, de l'augmentation du coût du carburant,
etc., les frais du pêcheur augmentent considérablement et l'aide
du gouvernement ne suit pas le cours des choses.
Je demanderais au ministère s'il y aurait
possibilité...
M. Saint-Pierre: A ma visite aux Iles-de-la-Madeleine, l'an
dernier, c'est un point qui avait été soulevé par certains
pêcheurs. Par après, j'avais demandé au sous-ministre
adjoint de réexaminer ce point parmi beaucoup d'autres.
Il touche la définition des pêcheurs professionnels
contenue dans les arrêtés en conseil 2361 et 2362. Il y en a un
qui est déjà prêt à être modifié et
nous retenons essentiellement les problèmes que le député
a à l'esprit, c'est-à-dire que nous allons modifier
l'arrêté en conseil pour, d'une part, retenir la question de
quatre mois, mais, d'autre part, prévoir des conditions
particulières.
Par exemple, pour le pêcheur à homards qui obtient un
certain seuil dans ses prises de homard et qui est dans des conditions
particulières, comme le député le soulève, qui ne
lui permettent pas d'oeuvrer pendant quatre mois d'une façon rentable,
je pense que son sort va être allégé pour lui permettre...
Dans les prochaines semaines, deux arrêtés en conseil qui
rendraient admissibles aux programmes de reconstruction de navires du
ministère, des pêcheurs qui, fondamentalement, comme vous le
mentionniez, font tout ce qu'ils sont capables de faire pour la pêche. Si
par exemple, il n'y a pas de poisson, on ne peut pas leur demander d'aller
à la mer pour le plaisir de la chose pendant quatre mois.
Cela me fera plaisir de transmettre au député des
Iles-de-la-Madeleine les modifications qui vont permettre d'ouvrir la porte des
classes, qui permettraient de corriger des anomalies qui ont été
portées à notre attention.
M. Lacroix: II y a une autre chose que je voudrais soulever.
Autant dans les pêcheries que dans l'agriculture, on s'aperçoit
que l'âge de ceux qui s'adonnent à la pêche ou de ceux qui
s'adonnent à l'agriculture tend à augmenter
considérablement. Dans le domaine de l'agriculture, on donne une prime
d'établissement. Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité de faire
des études pour que le pêcheur, le fils du pêcheur, qui veut
lui aussi s'adonner à la pêche, qui doit acquérir, acheter
le bateau, les agrès de pêche de son père, de lui fournir
une aide pour l'aider à partir? Je crois que ce serait de nature
à intéresser davantage les jeunes à rester dans le
métier. Chez nous, la pêche est excellente. Il y a la pêche
au homard qui rend bien. Vous avez la pêche côtière
également. A un moment donné, on disait que la pêche
hauturière nuisait considérablement aux pêcheries, mais la
nature se préserve elle-même. La morue se tenait sur les beaux
fonds, mais aujourd'hui, parce qu'elle a été pas mal
malmenée par les chalutiers, elle se place sur les fonds pierreux et les
chalutiers ne peuvent pas aller la capturer. Les pêcheurs côtiers
peuvent faire encore des captures qui sont valables. Je pense que, si on
faisait quelque chose pour inciter le jeune à demeurer dans le
métier, cela amènerait beaucoup de poissons à l'usine
parce que, si vous prenez 100 bateaux côtiers qui capturent 100,000
livres de poissons chacun, cela représente déjà 10
millions de livres de poissons. Et vous avez une mise de fonds beaucoup moins
considérable que si vous avez un seul gros chalutier qui va
coûter, à l'heure actuelle, un peu plus de $2 millions ou
$2,500,000, tandis que 100 petits bateaux côtiers vont coûter, au
maximum, avec tous les gréements, $1,500,000 et vont fournir du travail
à 200 personnes sur la mer. On dit qu'un emploi sur la mer fournit du
travail à trois, quatre et même cinq sur la terre. Cela veut dire
qu'on ne doit pas délaisser la pêche côtière et on
devrait essayer aujourd'hui d'avoir des mesures incitatives pour que nos jeunes
demeurent dans la pêche côtière.
M. Saint-Pierre: Merci, M. le député. Je pense
qu'au cours des prochains mois, on va regarder si les choses qui sont rendues
disponibles aux agriculteurs ne pourraient pas être données aux
pêcheurs, ou des choses semblables.
Le Président (M. Brisson): Programme 8, adopté.
M. Morin: L'élément 1 du programme 8, est
adopté.
Le Président (M. Brisson): Elément 1,
adopté. Elément 2?
Chasse aux loups-marins
M. Morin: A l'élément 2, j'aurais quelques
questions. La première a trait à la chasse aux loups-marins aux
Iles-de-la-Madeleine. J'ai un col-
lègue qui va être fort intéressé. On sait que
la chasse aux loups-marins, cette année, a été un fiasco.
A peine 2,500 captures sur une moyenne annuelle de 4,000, elle-même bien
éloignée du quota annuel permis par le gouvernement
fédéral de 30,000 bêtes. Or, il semble, d'après ce
que nous avons appris, que les Norvégiens viennent encore, tous les ans,
près des côtes de Terre-Neuve, capturer quelque 120,000
bêtes, soit plus de quarante fois le total capturé par les
Québécois.
J'aimerais demander au ministre s'il est absolument indispensable que
les Québécois se décident à aller vivre en
Norvège pour pouvoir exercer la chasse aux loups-marins dans des
conditions comparables à celles qui sont faites aux étrangers.
J'aimerais demander au ministre s'il a fait faire des recherches pour mesurer
l'incidence de la pêche norvégienne ou de la chasse
norvégienne sur le cheptel de loups-marins du golfe.
M. Saint-Pierre: M. le Président, touchant le loup-marin,
il y a deux phénomènes. Sur la côte est, la côte
orientale de Terre-Neuve, les captures sont contingentées à
parties égales, 120,000 têtes, en partage égal, entre la
Norvège et Terre-Neuve. Dans ce secteur, ce qu'on appelle le "front", on
peut chasser le loup-marin, ce qu'on appelle le phoque du Groënland et le
phoque à capuchon. Il n'y a pas de restriction. Seulement, il s'est
contingenté à 120,000 têtes, à partage égal,
entre Terre-Neuve et...
M. Morin: Vous voulez dire 60,000 têtes?
M. Saint-Pierre: 60,000 têtes pour la Norvège et
60,000 pour Terre-Neuve.
M. Morin: Pour les Terre-neuviens.
M. Saint-Pierre: Du côté oriental. A
l'intérieur du golfe, ce n'est pas nécessairement un contingent.
C'est un peu un objectif. Nous sommes à la merci... C'est encore une
retombée si vous voulez, les faits des coeurs saignants qui ont fait des
campagnes, qui ont tourné des films. J'ai passé pour un barbare
à la télévision, il n'y a pas plus d'un mois, en sortant
du contexte de mon exposé. Je suis un sanguinaire, etc.
M. Saint-Pierre: Si vous n'êtes pas un barbare.
M. Morin: Des coeurs saignants, je pensais que c'était une
allusion à la viande, mais c'est plutôt la traduction de "bleeding
hearts". C'est cela que vous avez dans l'esprit.
M. Saint-Pierre: Les "bleeding hearts", c'est une
variété de fleurs aussi dans son nom vulgaire. De toute
façon, il y a beaucoup de sentiment du côté de Terre-Neuve.
Nous n'avons pas M. Brian Davis qui va, chaque année, se chercher I
million de lettres de protestation avant que ne débute la chasse aux
Iles-de-la-Madeleine et qui s'amène accompagné de ses coeurs
saignants, ses vieilles mémères. Je me suis déjà
fait dire qu'on allait sortir un foetus en morceaux du ventre de sa
mère. C'était tout simplement aider la société,
alors qu'assommer une bête et lui enlever la peau, c'est un acte barbare
et brutal.
A l'intérieur du golfe, c'est le phoque du Groënland, le
seul. Le phoque à capuchon, la capture n'en est pas permise. C'est
plutôt un objectif, 30,000. Ces troupeaux, voici la situation: Notre
connaissance nous autres, nous permet de dire qu'il se promène entre 1.2
million et 2 millions de phoques du Groenland qui entrent par le détroit
de Cabot qui viennent séjourner, qui viennent faire leurs Pâques
dans le golfe, dans le mois de mars. Chaque bête adulte consomme à
peu près 30 livres de poisson par jour. J'ai donné la
mathématique de cela au fédéral. Il n'y avait jamais
songé.
Je dis que nous pouvons très facilement, chaque année,
comme objectif avoir au moins 150,000 têtes, parce que ces bêtes
prolifèrent. Je peux vous dire, entre parenthèses, qu'il y en
avait à un point tel que, sur la route nationale, en allant vers Sidney,
Nouvelle-Ecosse, le trafic automobile a dû être
arrêté, parce qu'il y avait des loups-marins qui se chauffaient la
couenne au soleil, fin mars. La Gendarmerie royale a dû intervenir.
Du côté fédéral, je les ai suppliés
d'arrêter de conserver cette légende voulant qu'abattre le
loup-marin cela a de beaux petits yeux ce soit un acte de
barbarie. On a à choisir.
Si l'expression n'était pas enregistrée, je dirais, on a
l'option de haranguer le phoque ou de "phoquer" le hareng. C'est un peu cela,
parce qu'il se nourrit.
M. Morin: C'est un dilemme très grave que vous
proposez.
M. Saint-Pierre: On a dit, à la télévision,
pour me confondre, que cela ne mange pas tellement du hareng, que cela se
nourrit surtout de crustacés. Les crustacés, ce sont du homard et
de la crevette...
M. Morin: Cela n'arrange pas les choses.
M. Saint-Pierre: ... à $1 la livre. Cela multiplie par 20,
ce crime envers la société.
M. Morin: Mais, le sens de ma question, ce n'était pas
cela. Le sens de ma question c'était que les Madelinots, cette
année, n'ont capturé, dans les circonstances que vous avez
décrites, au milieu de toute cette abondance, que 2,500 têtes.
M. Saint Pierre: Voici l'explication toute simple.
M. Lacroix: On ne mène pas le vent.
M. Saint-Pierre: Je me réfère encore à M.
Davis, l'ex-ministre des pêches, il y a trois ans, il a établi une
réglementation pour essayer de contenir les braillettes de M. Davis qui
a pris la succession d'un qui en est mort, le commentateur radio-phonique, qui
a terminé son film,
M. Lacroix: Serge Deyglun.
M. Saint-Pierre: ... M. Serge Deyglun. Brian Davis a pris la
succession. M. Davis a établi ceci: II a rendu la pêche impossible
disant que seuls les navires en deça de 60 pieds de quille cela a
été limité à 60 pieds de quille pouvaient
aller chasser le loup-marin. 60 pieds, c'est un petit bateau de bois qui doit
se frayer un chemin à-travers des glaces flottantes.
M. Lacroix: On en a perdu tous les printemps.
M. Saint-Pierre: C'était une impossibilité. Chaque
année, nous perdons un bateau et nous perdons des chasseurs. J'ai fait
la comparaison Envoyez quelqu'un chasser l'orignal avec une fronde et il y a
des chances.
M. Morin: Quelle est la raison de la limite imposée de la
sorte aux bateaux?
M. Saint-Pierre: C'est précisément pour rendre la
tâche impossible et décourager. En somme, c'était une
réponse diplomatique.
M. Lacroix: Un compromis de M. Davis.
M. Morin: J'ai bien compris que ce n'étaient pas les bancs
et que c'était tout simplement la réglementation
fédérale.
M. Lacroix: Non, non. Cette année c'est parce que les
glaces ne sont pas venues... Les loups-marins n'ont pas accosté aux
îles.
M. Morin: Ce n'est pas ce que nous disait M. Bernard...
M. Saint-Pierre: Comprenons-nous. Si nous avions des bateaux...
J'ai demandé le bateau jusqu'à cent pieds. Nous avons des bateaux
de 90 pieds, des bateaux avec armure d'acier qui peuvent très facilement
se rendre et ouvrir un chenal et donner accès aux bateaux de bois. Ce
qu'il nous faut c'est un bateau amiral qui puisse aller ouvrir les glaces,
aller au devant de ces bancs immenses.
M. Morin: M. Bernard, je ne vous fais pas dire une
bêtise.quand j'interprète vos paroles, signifiant que si cette
réglementation fédérale n'avait pas restreint le calibre
des navires, la chasse aux loups-marins, cette année, aurait pu
rapporter davantage aux Madelinots.
M. Saint-Pierre: La chasse, cette année aurait pu
rapporter peut-être 200,000 têtes.
M. Morin: Bon!
M. Saint-Pierre: II y en avait en surabondance et chaque
année les stocks augmentent.
M. Morin: Cela va permettre au député des
Iles-de-la-Madeleine de vanter les avantages du
fédéralisme aux Iles-de-la-Madeleine.
M. Lacroix: Ce n'est pas le gouvernement fédéral.
C'est un imbécile qui s'est fait battre à la dernière
élection. Je le lui avais souhaité et c'est arrivé. M.
Davis qui était ministre fédéral des Pêcheries,
à cause de M. Bryan Davis et à cause de M. Serge Deyglun
s'était ému de voir ces pauvres bêtes qu'on assommait et
qu'on dépouillait de leur fourrure. Pour lui, la façon
d'arrêter la chasse aux loups-marins c'était justement de la
limiter aux bateaux de 60 pieds, chose qui est impossible parce que ce sont des
bateaux de bois. Naturellement, on avait toujours les pêcheurs
côtiers qui réussissaient à capturer un nombre assez
important de loups-marins, mais cette année ils n'ont pu le faire parce
que le loup-marin n'a pas accosté aux Iles-de-la-Madeleine et les vents
n'ont pas été favorables et on n'a pas pu pêcher.
Il ne faut pas non plus oublier que la pêche intensive avec les
hélicoptères, le bruit et tout cela, un grand nombre de
loups-marins allaient à l'eau avant qu'ils ne sachent nager, parce qu'un
loup-marin ne nage pas à sa naissance, avant quatre ou cinq
semaines...
M. Saint-Pierre: Quatre semaines.
M. Lacroix: ... quatre à cinq semaines, le loup-marin ne
flotte ni ne nage. C'était une cause de perte. Le danger de la
prolifération du troupeau, à l'heure actuelle, est existant. Le
contingentement actuel est trop bas. La prolifération du troupeau
détruit, premièrement, une très grande quantité de
poissons et cela a aussi un autre effet, c'est que le troupeau ayant
augmenté considérablement, on en subit les conséquences
dans le traitement du poisson, de la morue en particulier, parce qu'il y a
beaucoup plus de vers, parce qu'on parle tellement aujourd'hui de viandes
avariées, on va parler de parasites, il y a beaucoup plus de parasites,
ce qui fait que beaucoup de morue doivent aller à l'usine de farine de
poisson plutôt que d'être traitées pour faire des filets,
pour être transformées.
Une Voix: Quel parasite ont-ils?
M. Lacroix: Quant à la transformation, je pense que
là, le chef de l'Opposition voulait en venir à cela, il y a ses
bons amis, dont M. Pol Chantraine en tête, M. Hubert qui les
années passées portaient des pancartes à l'aéroport
"Go back Bryan Davis." Ils ne voulaient pas voir les Américains.
Aujourd'hui, il a cédé la présidence à M.
Chantraine et lui, aujourd'hui, il fait visiter M. Bryan Davis et ses acolytes,
ses coeurs sai-gnants, comme le disait tantôt le sous-ministre. C'est lui
qui les amène sur les glaces pour leur montrer les magnifiques
bêtes que l'on trouve en quantité innombrable sur les banquises.
On a déjà essayé de faire la transformation du loup-marin,
ici, au Québec et cela n'a pas été un succès.
Vous pouvez faire du cuir pour les bottes, pour les peaux finies,
ça ne peut pas marcher, on a déjà essayé chez
Alexander, chez Hollander à Montréal. Le meilleur endroit pour
traiter les peaux de loup-marin, c'est chez Martin à Londres.
D'ailleurs, le marché, les enchères pour le loup-marin, c'est
à Londres qu'on le trouve et les plus importants clients pour les
quantités de peaux de loup-marin qui sont capturés autant sur la
côte orientale de Terre-Neuve que chez nous, c'est la France, la Suisse,
l'Allemagne et l'Angleterre.
Là, on veut bâtir une usine, on a déjà eu une
usine de dégraissage aux Iles-de-la-Madeleine, mais à cause de la
pollution, on a dit que ça devait cesser et aussi, par le fait qu'on
n'est jamais sûr, d'une année à l'autre, si on va en avoir
ou si on n'en aura pas, parce qu'il faut s'en remettre à la
volonté du Très-Haut pour savoir si les glaces vont approcher des
côtes ou non. On a déjà essayé ça.
Là, on veut partir une industrie de transformation de la peau de
loup-marin. Je n'ai aucune objection à ça, mais l'objection,
c'est que les personnes qui parlent de ça veulent que ce soit le
gouvernement qui investisse, elles n'ont pas un cent à mettre
là-dedans, c'est le gouvernement qui va investir. Quand ça va
bien aller, elles vont empocher les bénéfices; quand ça va
mal aller, ça va être la faute du gouvernement et c'est le
gouvernement qui va payer. Je suis favorable, mais j'aimerais que ce soient des
gens sérieux, des gens solvables, des gens qui soient
financièrement engagés. Je ne suis pas réfractaire,
allergique à ce que le gouvernement aide l'organisation d'une telle
industrie aux Iles-de-la-Madeleine, loin de là. Mais je voudrais que les
gens qui vont investir là-dedans, qu'ils investissent réellement
pour ne pas laisser tout sur le dos du gouvernement.
Parce qu'une industrie comme ça, pour être rentable,
nécessite au moins un certain minimum de peaux et ça, on n'est
jamais capable de le savoir. Cette année, on a eu un fiasco,
l'année passée, on a atteint de peine et de misère le
quota, il faudrait alors revenir à des bateaux d'acier. Nos bateaux,
ceux que la compagnie Gorton exploite, est-ce qu'on leur donnerait le feu vert
pour aller dans les glaces, dans les banquises chasser le loup-marin avec ces
chalutiers, quitte à les briser, à les laisser dans les cales
sèches des différents chantiers maritimes pour des mois, à
l'ouverture de la saison de pêche? Je ne crois pas que ce soit rentable.
Je doute que les gouvernements fédéral et provincial,
particulièrement le provincial, accepteraient que la flotte de
pêche des Iles-de-la-Madeleine, qui appartient à la compagnie
Gorton, que l'on finance sans intérêt c'est le même
avantage que l'on donne à toutes les autres entreprises dans les
pêcheries fasse la chasse. Je pense que ce ne serait pas bon pour
nos travailleurs de prendre le risque d'envoyer ces bateaux à la chasse
au loup-marin, parce que l'on risquerait de ne pas avoir d'approvisionnement de
poissons lorsque débute la saison de la pêche.
Le Président (M. Cornellier): D'autres questions?
M. Morin: Oui, toujours sur la même chose, j'aimerais
demander au ministre ou à M. Bernard s'il est possible d'évaluer,
au moins grosso modo, les pertes qui ont été
entraînées pour les Madeli-nots au cours de cette saison par la
réglementation fédérale. M. Bernard a mentionné
qu'environ 200,000 bêtes auraient pu être capturées,
ça me paraît, à première vue, beaucoup de
bêtes, mais enfin quand on compare 2,500 captures effectives cette
année avec 150,000 têtes, il y a une différence
considérable. Est-ce qu'il est possible d'évaluer en argent les
pertes qu'ont subies les Madeli-nots?
M. Saint-Pierre: C'est assez difficile comme perte de revenu. Je
vais demander à M. Bernard de donner quelques chiffres, mais vous
l'imputez à la réglementation fédérale.
M. Morin: Sur les bateaux... je suis le raisonnement de M.
Bernard depuis tout à l'heure.
M. Saint-Pierre: Je vais vous ramener pour éviter un
sophisme, c'est parce qu'on pourrait dire également que c'est la
responsabilité de M. Bryan Davis, qu'après avoir mis tout le
monde avec les mouchoirs...
M. Morin: Ce n'est pas ce monsieur qui fait la
réglementation.
M. Saint-Pierre: C'est ce monsieur qui crée un mouvement
de pression, qui tente de dire au gouvernement c'est un peu la
même chose si, dans d'autres secteurs, le gouvernement, parce qu'on
invoque le bien commun, fait de la réglementation la
réglementation est responsable des pertes.
M. Morin: Le ministre...
M. Lacroix: Cela fait six ans que cette réglementation
existe, ce n'est pas la première année.
M. Morin: Le ministre sait que, si quelqu'un fait pression sur
lui, en cédant à cette presssion, il commet une erreur, c'est lui
qui va porter la responsabilité, ce n'est pas la personne qui a fait
pression sur lui, n'est-ce pas?
M. Saint-Pierre: Je ne sais pas, on reprendra avec le nouveau
ministre des Pêcheries pour voir s'il n'y a pas moyen de faire changer la
réglementation. Cette année, le montant des pertes...
C'est-à-dire l'évolution de ce dossier, je l'ai
exprimé avec vigueur à Ottawa à deux ou trois occasions,
l'Ile-du-Prince-Edouard fait chorus avec nous, le Nouveau-Brunswick et
même la Nouvelle-Ecosse. Le fédéral se dit, ce sont des
paroles vaines de M. Leblanc: Le loup-marin n'est plus une chasse
gardée, écoutez, les gars, il est temps, c'est une récolte
à aller cueillir et je crois que les dispositions vont être prises
pour relâcher un peu. J'ai dit à M. Leblanc: II n'y a que
ça, autorisez des bateaux de plus fort tonnage ou de plus
grande capacité à y aller et on se charge du reste. Il est
même question, chez nous, que l'un de nos bateaux de protection soit
renforcé de façon suffisante. Nous le mettrons en hivernage aux
Iles-de-la-Madeleine l'hiver prochain et le printemps prochain, il est possible
qu'il aille au devant, aller saluer la compagnie.
M. Morin: M. Bernard, est-ce que vous pourriez répondre
à ma question sur le manque à gagner que cela représente
pour les Madelinots?
M. Saint-Pierre: C'est une hypothèse, écoutez.
M. Morin: C'est une question hypothétique et je vous la
pose comme telle.
M. Saint-Pierre: J'ai dit que théoriquement, on aurait pu
abattre 200,000 bêtes, parce qu'à un moment donné, on a
rapporté que sur une banquise, en somme, une plaque de glace de 10
milles sur 3 milles de largeur , c'était un peu comme des bleuets en
floraison. Il y avait certainement au-delà de I million de bêtes.
On aurait certainement pu... parce que le petit loup-marin, le jeune, ne peut
pas plonger, il va se noyer, alors, il est obligé de rester là
pendant que ses parents sont à préparer la nouvelle
génération. Oisons entre parenthèses, que cinq à
sept jours après la mise à bas, elle redevient en chaleur et le
cycle recommence.
M. Lacroix: Mais la question du chef de l'Opposition me rappelle
un monsieur qui disait: Moi, j'ai perdu un million, parce que si j'avais fait
tel placement, j'aurais réalisé un million, j'ai perdu un million
dans ma vie, mais il n'avait rien risqué.
M. Morin: Entendons-nous, ma question reste sérieuse. Je
pars des faits qui ont été mentionnés par M.
Bernard...
M. Saint-Pierre: Dans l'hypothèse, si on avait pu en tuer
sans limites cette année, le prix aurait été
nécessairement avili. Il faut tenir compte de ce facteur.
M. Morin: Tenons compte de l'objectif que vous avez
mentionné, parce que ce n'était pas un quota, de 30,000
bêtes. On en a capturé 2,500, on aurait pu aller jusqu'à
30,000 s'il n'y avait pas eu la réglementation sur les bateaux. Cela
représente un manque à gagner vous voyez, je prends une
hypothèse modeste d'à peu près combien?
M. Saint-Pierre: La peau de loup-marin, cette année, s'est
vendue $8, $10 ou $12?
M. Lacroix: Cela a commencé à $8, mais il y en a eu
tellement peu je crois que ça va être à peu près
$10.
M. Saint-Pierre: C'est encore la rareté qui fait le prix.
Si on pouvait établir à $8 la peau, pour 30,000, on gagnerait
$240,000 et nous soustrayons ce qui a été abattu effectivement.
Maintenant, il y a des captures des Iles-de-la-Madeleine. Il y a, à la
fois, la chasse et la pêche au loup-marin. La pêche peut sembler un
mot nouveau, c'est que, sur la basse Côte-Nord, dans le secteur de
Blanc-Sablon, on pêche le loup-marin.
M. Lacroix: Chez nous aussi.
M. Saint-Pierre: Au moyen de filets, il se noie. C'est un
phénomène parce qu'il a des poumons, il doit respirer, on le
noie. Alors, les 30,000, qui sont un objectif, ça vaut non seulement
pour le Québec, mais c'est global à l'intérieur du
golfe.
M. Morin: Tout le golfe.
M. Saint-Pierre: II y a une convention entre Terre-Neuve et chez
nous. Si les glaces se déplacent par le mouvement des vents et que vous
êtes les premiers à les atteindre, allez-y et vice versa.
M. Morin: Parce que, effectivement, si on avait pu capturer
200,000 bêtes à $10 chacune, cela aurait fait un revenu
considérable.
M. Saint-Pierre: Oui. Je pense bien que le prix du
marché...
M. Morin: C'est de l'ordre de $2 millions.
M. Saint-Pierre: On aurait eu un problème d'abondance qui
aurait peut-être travaillé négativement.
M. Morin: Qui aurait peut-être
déprécié, bien sûr, la valeur.
M. Saint-Pierre: Cela aurait eu un effet négatif quelque
part.
M. Morin: Cela aurait certainement représenté quand
même entre $1,500,000 et $2 millions.
M. Saint-Pierre: II y aurait eu bien des films sur les
Iles-de-la-Madeleine, une mauvaise publicité.
M. Morin: C'est possible.
Le Président (M. Brisson): L'honorable
député de Matane.
Ports de débarquement
M. Côté: M. le Président, si le chef de
l'Opposition me le permet, on laisserait les questions hypothétiques
pour parler d'une chose concrète. A quoi peut-on s'attendre, M. le
ministre, en ce qui concerne le port de débarquement à Les
Méchins et Cloridorme?
M. Saint-Pierre: Cloridorme, en deux mots. Cette année, il
y a environ un mois, le ministère fédéral de
l'Environnement a lancé un appel d'offres précisément pour
l'enrochement du quai à Cloridorme. Deuxième phase, dans quelques
jours, on va lancer un deuxième appel d'offres en
vue de remettre le quai dans l'état où il était
avant la tempête de l'an dernier. La troisième phase, on attend
après notre ministère parce que, pour réaliser à
Cloridorme un point de débarquement qui avait été
estimé à $300,000, ça irait chercher $1,300,000 parce que
la prise d'eau pour rendre l'eau potable sur les lieux, ce serait un petit jeu
de $1 million et je ne l'ai tout simplement pas.
M. Côté: Est-ce que ce n'est pas par le biais des
Affaires municipales?
M. Saint-Pierre: Si les Affaires municipales veulent y aller, je
n'ai aucune objection, je les encourage à le faire.
M. Côté: Les Méchins?
M. Saint-Pierre: Les Méchins, nous sommes encore en mesure
d'attendre. Les Méchins rejoint un peu Saint-Joachim-de-Tourelle, en ce
sens que nous attendons de voir révolution. Je répète ce
que je vous ai déjà dit: Produisez-nous des pêcheurs,
produisez-nous une justification d'y aller et, si on m'accorde les budgets, je
ferai cela avant ma retraite.
M. Côté: Est-ce que Les Méchins
n'était pas prévu dans le budget de l'entente?
M. Saint-Pierre: A un moment donné, il y a eu des
indications. La situation est évolutive partout. On avait retenu,
à un moment donné, 23 points de débarquement. Cela a
été réduit à 17. Nous en sommes à cinq.
Nous en réalisons un cette année. Pour les autres, du fait
de la diminution des captures, il faut se ressaisir. Aller investir $1 million
et s'asseoir sur le quai et attendre le poisson...
M. Côté: Cela veut quand même dire que, dans
le secteur de Matane à Cloridorme, il y a un point de
débarquement qui est celui de Cloridorme, qui est à
l'extrémité de cette zone.
M. Saint-Pierre: Méchins à Carloti c'est dans notre
passé, on l'a même localisé, c'est un peu une position
d'attente et tout est subordonné à nos disponibilités
budgétaires. Je peux vous dire que, pour l'entente de l'ODEQ qui expire
le 31 mars 1976, l'enveloppe est engagée totalement, l'entente
auxiliaire que nous avons signée exclut ces points de
débarquement.
Il faudrait le réaliser intégralement avec un budget
québécois.
Rapport de rentabilité
M. Morin: M. le Président, j'ai encore quelques questions.
Il existe un rapport sur la rentabilité d'une usine de poisson aux
Iles-de-la-Madeleine, qui a été effectué par la firme
d'ingénieurs Major et Martin. Le ministre aurait-il objection à
déposer ce rapport?
M. Saint-Pierre: Non.
M. Morin: Vous n'auriez pas objection à le faire?
M. Saint-Pierre: Absolument pas.
M. Morin: Bien. Est-ce que cela pourrait être fait ce
soir?
M. Saint-Pierre: Dans les prochains jours. M. Morin:
L'avez-vous avec vous?
M. Saint-Pierre: On ne l'a pas avec nous, mais on vous envoie
cela... J'en ai un exemplaire sur mon bureau. On vous envoie cela demain.
Est-ce qu'il y a d'autres membres qui voudraient...
M. Lacroix: Oui, s'il vous plaît. Il y a aussi M. Lessard
et un groupe de travail qui ont fait des études pour le compte des
Pêcheurs unis là-dessus.
M. Morin: Est-ce que le ministre pourrait nous faire part des
conclusions générales de ce rapport et nous dire quelles mesures
il entend prendre...
M. Saint-Pierre: J'ai lu bien des rapports, mais pas
celui-là. Le rapport, en somme...
M. Morin: II me semble que le ministre se
désintéresse des pêcheries.
M. Saint-Pierre: Non, ce n'est pas cela. C'est un problème
très complexe, les petits poissons.
Il est davantage pris par les 12,000 autres industries, si on dit que
l'industrie des pêches en est une. Je l'excuserais bien volontiers.
M. Morin: Vous allez vous retrouver avec la viande
peut-être bientôt, ce sera...
M. Saint-Pierre: J'ai de bons appuis, des personnes très
compétentes dans ce secteur.
L'étude a été réalisée pour le compte
des Pêcheurs unis par Major et Martin. J'ai parcouru l'exemplaire, parce
que les Pêcheurs unis sont obligés de faire une réflexion
et je crois que c'est très indiqué.
Comme je l'ai dit précédemment, aux Iles-de-la-Madeleine,
nous sommes dans une situation que nous vivons actuellement. Le fait de la
reprise des bateaux, c'est symptomatique de quelque chose de différent
de la Gaspésie.
La flotte moyenne ne semble pas avoir sa place pour tout de suite. Ce
n'est pas exclu. Mais tournons la page. Aux Iles-de-la-Madeleine,
l'étude a porté surtout... les recommandations du rapport Major
et Martin indiquent plus particulièrement...
Allons-y d'une pêche côtière et d'une pêche
diversifiée. C'est surtout cela, la pêche diversifiée
côtière.
Elle peut se réaliser par le biais de l'utilisation de vos
bateaux polyvalents. Maintenant, les Pêcheurs unis, encore une fois,
doivent se redresser un peu parce qu'ils ont plongé assez fort pour
prendre à leur compte les obligations de la Coopé-
rative régionale des îles, qui avait quatre bateaux;
franchement, le compte de surplus est à la veille de couler avec les
bateaux. Alors, il y a une réflexion à faire. Je n'ai pas
d'indication de construction dans l'immédiat, mais, tout de même,
cela débouche sur une usine de dimension assez modeste et la grande
diversification de la production.
M. Lacroix: II y a une rencontre cette semaine à
Montréal. J'ai rencontré en fin de semaine, aux îles, les
responsables de la coopérative. Il n'y a encore rien de défini.
Là, on espère d'ici peu de temps en arriver à une
conclusion qui, je l'espère, sera heureuse pour les pêcheurs des
îles.
M. Saint-Pierre: M. le directeur de l'économique me parle
de cette semaine, je crois que c'est demain; la fin de la semaine des
fonctionnaires, c'est plutôt la semaine prochaine, la réunion au
niveau des Pêcheurs unis et des membres de la coopérative
régionale, précisément pour faire avancer ce dossier.
M. Morin: Les points saillants de ce rapport, en fait, ont
été publiés dans le Radar. Ce qui est intéressant,
c'est qu'on a souligné qu'il y aurait non seulement une
rentabilité individuelle dans un tel projet; il y aurait aussi ce qu'ils
appellent une rentabilité collective, c'est-à-dire qu'il y aurait
une rentabilité, des bénéfices à retirer pour la
municipalité de Cap-aux-Meules, des bénéfices qui seraient
de l'ordre de $12,000 par année. Il y aurait aussi une
rentabilité pour le gouvernement du Québec qui, lui, se verrait
retourner des sommes de l'ordre de $150,000. Ce concept de rentabilité
collective me paraît extrêmement intéressant dans le
rapport. C'est quelque chose d'un peu neuf. J'espère que le ministre en
tiendra compte.
M. Saint-Pierre: Excusez, il me vient à l'esprit qu'en
lisant ce rapport, j'ai vu une erreur d'extension qui chambarde drôlement
les chiffres, qui va chercher des dizaines de milliers de dollars. Je vous le
souligne ici-même. Attention, lorsqu'on établit la
rentabilité, il y a un fait, on a mal fait l'extension, on a
escamoté des dizaines de milliers de dollars, bien involontairement. Je
crois que...
M. Lacroix: Le directeur du Radar a été plus
accoutumé à compter les quêtes qu'à compter
réellement les montants.
M. Morin: Cette fois, le Radar a publié quelque chose de
fort intéressant. Je pense que cela intéressait les Madelinots.
Je ne vois pas pourquoi on leur en ferait un reproche. Est-ce que le
ministère a fait des commentaires sur le rapport Major et Martin qui
seraient disponibles ou bien si c'est une observation que vous vous êtes
faite simplement à la lecture dudit rapport?
M. Saint-Pierre: Je n'ai pas eu de rencontre personnelle avec les
Pêcheurs unis. C'est-à-dire que j'en ai causé avec M. Guy
Bernier, dans le temps, directeur général des Pêcheurs
unis. On va raffiner la formule. On va l'étudier en profondeur.
L'indication que me donne ici M. Barras est claire, on veut faire
progresser ce dossier et on vise à déboucher sur du concret.
C'est un dossier...
M. Morin: Très bien. Vous n'aurez jamais que notre
appui...
M. Lacroix: ... la population des Iles-de-la-Madeleine serait
plus avancée de transmettre le rapport Major et Martin au
député pour activer le dossier que de le transmettre au directeur
du Radar, mon dominicain défroqué.
M. Morin: M. le Président, je ne pense pas que les
attaques de ce genre arrangent quoi que ce soit pour les Madelinots. Je pense
que c'est d'abord la responsabilité du ministère d'agir et de
faire avancer le dossier. Si le député des Iles-de-la-Madeleine
veut intervenir, certainement qu'il sera écouté par le
ministère, je n'en doute pas. Mais, ce n'est certainement pas à
lui de prendre des décisions.
M. Marchand: Adopté.
Aquaculture
M. Morin: Encore une question à l'élément 2.
Nous achevons, M. le Président. Ce ne sera pas bien long maintenant.
J'aimerais savoir du ministre où en sont rendues les expériences,
effectuées depuis quelque temps, à Barachois, en Gaspésie
et dans les lagunes de l'île de Havre aux Maisons aux
Iles-de-la-Madeleine, concernant l'aquaculture des mollusques. En
Gaspésie, je crois que les expériences ont porté sur les
moules et, aux Iles, sur les moules et les huîtres. Est-ce que le
ministre est au courant de ces expériences qui pourraient être
très prometteuses? Vous savez que, dans le monde, les expériences
portant sur l'aquaculture se multiplient sur plusieurs continents. Il semble
qu'un jour... J'ai lu quelque part qu'on envisage que, d'ici une cinquantaine
d'années, la mer sera devenue une ferme dans laquelle on
élèvera, au moins dans certains secteurs côtiers, parce
qu'on ne peut peut-être pas songer à le faire pour la haute mer,
pour l'instant, le poisson comme on élève des troupeaux de vaches
sur le plancher des vaches.
M. Marchand: Sur la mer.
M. le Président, j'aimerais donc demander au ministre s'il est au
courant de ces expériences et s'il veut faire le point.
M. Saint-Pierre: M. le Président, avec la permission du
ministre, je répondrai à cette question. Tout d'abord, une petite
correction. Il n'y a pas d'installation expérimentale de conchyliculture
ou de mariculture ou d'aquaculture on ne s'entend' pas encore sur le
terme à Barachois. Ce qu'il y a eu effectivement de fait, il y a
deux ans et demi, maintenant, ce sont des essais d'hydrologie qui ont
été faits pour déterminer si le secteur de Barachois
était un secteur approprié, un secteur idéal pour ce genre
de culture.
Malheureusement, ce n'est pas le cas. Nous nous sommes effectiveent
concentrés sur les lagunes des Iles-de-la-Madeleine, en particulier la
lagune d'Havre aux Maisons et la lagune de Grande Entrée, où nous
effectuons des essais depuis deux ans grâce à des experts
français qui viennent chez nous, dans le cadre de la coopération
technique franco-québécoise. Le stade des recherches, à
l'heure actuelle, est le suivant: Nous avons réussi à faire de
l'implantation, sur des radeaux ou sur des supports, enfin, je n'entrerai pas
dans les détails techniques encore une fois, de naissains,
c'est-à-dire de larves de moules. Ce sont effectivement des moules. Les
huîtres j'y reviendrai, M. le Président, un peu plus tard
c'est un problème un peu différent. Nous avons
réussi ce que nous croyions, au départ, assez difficile,
c'est-à-dire à faire l'hivernement de ces naissains ou de ces
larves. On a réussi par l'immersion à les sauver et à les
reprendre l'année suivante.
Nous sommes en mesure de dire maintenant que la période de temps
pour arriver à une moule de taille commerciale, c'est-à-dire
environ de 30 à 40 centimètres, est de 18 mois. Cela se compare
favorablement à ce qu'on fait dans les bassins de mytiliculture en
France. C'est donc dire qu'au niveau de la rentabilité, on peut, sans
avoir fait d'études élaborées sur ce sujet, parce que cela
se fera dans une phase ultérieure, on peut donc dire, je pense, qu'il y
a des possibilités très fortes d'une implantation conchylicole
aux Iles-de-la-Madeleine.
La phase qui débutera cette année, qui, en fait,
débute, puisque nos équipes sont déjà sur le
terrain, sera une phase semi-commerciale, c'est-à-dire qu'il s'agit
d'implanter, de développer un stock de moules suffisant pour voir quel
est le rendement de ces lagunes. C'est un résultat qu'on devrait
connaître, en fait, dans 18 mois, l'été prochain.
Le problème des huîtres est un peu différent, en ce
sens que c'est-à-dire que c'est à peu près la
même technique; c'est quand même un mollusque il y a
déjà eu, aux Iles-de-la-Madeleine, une implantation
d'huîtres qui a été faite d'une façon assez
artisanale; en effet...
M. Lacroix:... Edmond Richard...
M. Saint-Pierre: C'est exact. Je crois que c'est dans les
années 1937...
M. Lacroix: En 1936.
M. Saint-Pierre: Bon! Je m'excuse.
M. Lacroix: Vous étiez passablement près.
M. Saint-Pierre: Je n'y étais pas, de toute
façon.
On s'est aperçu, l'année dernière et il y a deux
ans, lors de nos essais sur les moules, qu'effectivement on retrouvait encore
des naissains d'huître et qu'on pouvait encore faire du captage
d'huître de cet ancien stock, qui datait de 1937, ce qui nous a
laissé croire qu'effectivement, il y avait un milieu qui était
viable non seulement pour les moules, mais aussi pour les huîtres.
Cette année, nous partons sur une échelle un peu plus
importante puisque nous avons importé, c'est déjà fait
à l'heure actuelle, un stock de trois tonnes d'huîtres de
l'Ile-du-Prince-Edouard aux Iles-de-la-Madeleine. Les climats se valent, donc
les conditions hydrologiques sont à peu près les mêmes et
nous partons véritablement en grande pour tenter de mettre en place une
ostériculture aux Iles-de-la-Madeleine. Si vous me le permettez,
j'ajouterais juste un mot pour dire qu'il y a quand même quelque chose de
supplémentaire qui peut éventuellement se greffer
là-dessus et c'est la culture des algues, puisque l'on sait très
bien que la culture des algues est complémentaire à la culture
des moules.
Actuellement, sur les marchés mondiaux, les algues, à
cause de la présence de cette substange gélatineuse qu'on appelle
l'agar, ont des marchés extrêmement intéressants et le prix
est très élevé. Donc, c'est à peu près en
gros le projet pour les deux ou trois prochaines années dans le domaine
de la mariculture.
M. Morin: Pour les algues, c'est encore purement
expérimental, j'imagine?
M. Saint-Pierre: Exact. M. Morin: A quel endroit?
M. Saint-Pierre: Cela se ferait vraisemblablement dans les
lagunes des Iles-de-la-Madeleine.
M. Morin: Dans les lagunes. Bien. Est-ce que le ministre pourrait
nous donner une idée du budget qui va être consacré
à ces recherches et à ces tentatives cette année?
M. Saint-Pierre: On avait ça dans l'élément
I qu'on a voté tantôt, la recherche.
M. Morin: On peut en parler... M. Saint-Pierre:
$20,000.
M. Morin: $20,000, et ça, c'est pour les salaires ou
seulement l'achat des matériaux?
M. Saint-Pierre: Cela comprend l'achat des matériaux,
l'engagement de personnel occasionnel, surtout des stagiaires,
c'est-à-dire des biologistes diplômés des
universités, quelques étudiants; ça ne comprend pas
évidemment le coût du personnel régulier de la direction de
la recherche, qui fait ce travail, et ça ne comprend pas non plus le
coût de l'expert, puisque cet expert ne nous coûte rien, il nous
est fourni grâce aux accords franco-québécois.
M. Morin: M. le Président, nous sommes disposés
à adopter l'élément 2 du programme.
Le Président (M. Brisson): Elément 2.
Adopté. Elément 3, adopté?
Parcs industriels de pêche
M. Morin: Non, à l'élément 3, j'ai quelques
questions qui ne seront pas bien longues. J'aimerais entretenir
brièvement le ministre du mémoire qu'il a reçu des
Pêcheurs unis du Québec au sujet de la reconnaissance de
Newport-Longue-Pointe comme véritable centre de pêche au sujet de
la vocation des parcs industriels de pêche et de la mise en marche d'un
comité consultatif des pêches. Je garderai ce dernier point pour
la fin.
Le ministre peut-il nous expliquer les raisons qui l'ont amené
à réduire le nombre de parcs industriels de pêche à
aménager, au détriment de Newport, mais aussi de Sandy Beach et
de Havre-Aubert, de même qu'à restreindre sensiblement les
dimensions recommandées par les consultants pour les parcs de
Cap-aux-Meules et de Rivière-au-Renard?
M. Saint-Pierre: Je vais avoir une très bonne
réponse à la question. A la suite de la rencontre que nous avions
eue le 10 décembre avec les représentants et en particulier le
capitaine Giasson, j'ai transmis une lettre, le 10 février 1975, dont
vous avez copie. Il me semble que là, vous avez réponse à
toutes les questions que vous soulevez.
M. Morin: Je n'ai pas l'impression qu'elle répondait
à toutes les attentes des Pêcheurs unis, dans leur
mémoire.
M. Saint-Pierre: Je pense que nous avons tenté d'expliquer
pourquoi se faisait la réduction. Nous avons expliqué qu'à
Newport, il ne fallait pas juger de l'importance que nous accordions à
Newport, uniquement au niveau des nouveaux investissements qui pouvaient
être faits. Il y avait déjà, à Newport, des
installations satisfaisantes qui pouvaient expliquer pourquoi qu'ailleurs, il
était nécessaire d'y consacrer des sommes.
M. Morin: Est-ce que les experts n'avaient pas recommandé
que Newport fasse l'objet d'une expansion?
M. Saint-Pierre: Entre 1968 et 1975, quand nous en sommes
à réaliser le projet, il s'est quand même passé des
modifications importantes. Je pense que les niveaux de capture avaient connu
des baisses importantes. C'est le même phénomène dont on a
parlé, celui des points de débarquement...
M. Morin: Oui, mais là, on nous dit que cela augmente
cette année, que les captures prennent le chemin de la hausse.
M. Saint-Pierre: A Newport? M. Morin: Dans l'ensemble.
M. Saint-Pierre: Vous me parlez de Newport. Dans l'ensemble, cela
a augmenté dans les trois premiers mois, c'est vrai. Il faudrait voir un
peu plus loin. Mais là, on parle de points spécifiques à
Newport.
C'est la même chose que le problème qu'on soulevait
tantôt sur les points de débarquement. On commence à 49, en
cours de route, on est à 23 et on finit à 17 et, après
cela, on en réalise 5.
Le fait est que Newport, en somme, s'est assez bien
intégré. Le ministère a déjà
contribué à 100% à l'aménagement d'un réseau
d'aqueduc qui dessert le havre de Newport. Le havre de Newport est entretenu
par le ministère fédéral de l'Environnement. L'usine
appartient à Pêcheurs unis. Il n'y a pas de possibilité
d'établissement d'autres usines à cet endroit, à Newport.
Nous voulons protéger Pêcheurs unis.
Dans la pratique des choses, il nous aurait fallu acheter,
acquérir les propriétés des Pêcheurs unis, se
tourner de bord et les leur louer. Cela n'aurait rien ajouté.
M. Morin: Le ministre pourrait-il déposer le texte de la
lettre pressante qu'il a fait parvenir à son homologue
fédéral, le 15 octobre 1974, au sujet de l'octroi de
crédits additionnels pour la construction de bateaux.
M. Saint-Pierre: Avec plaisir.
M. Morin: Je sais que, le 10 février 1975, le ministre
nous a dit qu'il espérait une réponse favorable et qu'il
talonnait sans cesse les fonctionnaires fédéraux. Est-ce que vous
avez reçu une réponse à votre supplique?
M. Saint-Pierre: Oui, nous avons reçu une
réponse.
M. Morin: Alors, nous...
M. Saint-Pierre: Elle était favorable.
M. Morin: Et vous pourrez nous en faire parvenir copie.
M. Saint-Pierre: Sûrement, avec plaisir.
M. Morin: M. le Président, nous sommes prêts
à adopter l'élément 3, mais, auparavant, je voudrais
remercier le ministre et ses principaux adjoints qui sont venus répondre
à nos questions. C'est peut-être la dernière fois que j'ai
l'occasion de l'entretenir des questions de la pêche puisque,
l'année prochaine, il semble qu'il se pourrait que le poisson rejoigne
la viande, ce qui ne devrait pas rassurer beaucoup les pêcheurs.
Je tiens à dire au ministre, cependant, que si, par hasard, il
demeurait responsable de ces dossiers, ce serait avec plaisir que nous
reviendrions en discuter avec lui.
M. Saint-Pierre: Est-ce qu'il y a des rumeurs que je sois
muté à l'Agriculture?
M. Morin: Non, mais il y a des rumeurs voulant que les
pêcheries passent à l'Agriculture, et à la viande!
M. Saint-Pierre: Si c'est le cas, je vais suivre les
pêcheries.
Le Président (M Brisson): Le programme 8 est
adopté.
M. Marchand: Cela a l'air, d'après le chef de
l'Opposition, qu'il y a des mutins qui bougent.
Le Président (M. Brisson): Le programme 9 est
également adopté.
M. Morin: L'élément 3 du programme 8 est
adopté.
Le Président (M. Brisson): Donc, le programme 8 est
adopté dans son entier.
M. Morin: Le programme 8 dans son entier est adopté.
Le Président (M. Brisson): Est-ce que le programme 9 est
adopté?
M. Saint-Pierre: Oui, il a déjà été
adopté.
M. Morin: II a déjà été
adopté, M. le Président, lors d'une séance
antérieure.
Le Président (M. Brisson): Donc, les crédits
budgétaires du ministère de l'Industrie et du Commerce sont
adoptés en entier.
M. Morin: A ma connaissance, oui.
M. Saint-Pierre: M. le Président, permettez-moi, trente
secondes, pour remercier les parlementaires et les fonctionnaires qui nous ont
assistés cette année dans cette tâche importante et
intéressante que constitue l'examen des crédits du
ministère de l'Industrie et du Commerce.
M. Marchand: Et principalement votre acolyte à
côté de vous, qui a expliqué avec un humour fantastique
tout ce qu'il y a de beau dans votre ministère.
Le Président (M. Brisson): La commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance 23 h 16)