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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le mardi 7 décembre 1982 - Vol. 26 N° 215

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition d'organismes et étude du projet de loi no 85 - Loi sur les valeurs mobilières


Journal des débats

 

(Onze heures trente-trois minutes)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente des institutions financières et coopératives est réunie ce matin aux fins d'entendre des groupes et de faire l'étude article par article du projet de loi no 85, Loi sur les valeurs mobilières.

Les membres de la commission sont les suivants: MM. Marquis (Matapédia), French (Westmount), Gravel (Limoilou), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Lafrenière (Ungava), Mailloux (Charlevoix), Martel (Richelieu), Parizeau (L'Assomption), Rocheleau (Hull), Blais (Terrebonne), Vaugeois (Trois-Rivières).

Les intervenants sont: MM. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Bisaillon (Sainte-Marie), Bordeleau (Abitibi-Est), Bourbeau (Laporte), Dean (Prévost), Mathieu (Beauce-Sud), Middlemiss (Pontiac), Paradis (Brome-Missisquoi), Payne (Vachon).

Avant d'entreprendre nos travaux, je demanderais aux membres de la commission de se désigner un rapporteur.

M. Gravel: M. le Président, je pense que le député de Terrebonne pourrait...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Limoilou propose le député de Terrebonne. Adopté?

M. French: Effectivement, M. le Président, le député de Terrebonne ferait ce boulot avec son élan habituel.

Le Président (M. Rochefort): Parfait. M. le député de Terrebonne, vous êtes désigné rapporteur de la commission. Avant d'entendre les groupes qui sont présents devant nous, je laisse la parole au ministre des Institutions financières.

M. le ministre.

M. Parizeau: M. le Président, de concert avec les représentants de l'Opposition, nous nous sommes entendus sur la procédure suivante: nous entendrions d'abord un certain nombre de groupes qui veulent faire des représentations quant à la teneur du projet de loi. Jusqu'à hier, quatre groupes ou quatre organismes pensaient se présenter ici ce matin. Nous apprenons maintenant que l'Association des banquiers canadiens ne se présentera pas, mais nous a fait parvenir un télégramme portant sur quelque chose de spécifique. J'en remettrai une copie aux membres de l'Opposition. D'autre part, le Barreau du Québec nous a indiqué qu'il nous enverrait, probablement aujourd'hui, des représentations, par télégramme aussi, sur un article de la loi; si bien que nous entendrions ce matin, d'abord le président de la Bourse de Montréal et ensuite des représentants de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, section de Québec. Ce sera notre ordre du jour avant que nous passions à l'examen article par article.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, effectivement cela va. J'ai peut-être manqué un bout, mais j'ai reçu le télégramme de l'Association des banquiers canadiens. Pour ce qui est du barreau, il va nous faire parvenir un télégramme?

M. Parizeau: C'est cela.

M. French: Nous ne l'avons pas reçu.

M. Parizeau: Nous ne l'avons pas reçu encore. L'Opposition, évidemment, le recevra en même temps que nous. Nous lui en remettrons une copie. D'après ce que nous comprenons, cela porte sur l'article 272 de la loi.

M. French: II n'y a pas de danger qu'on franchisse l'étape avant que nous n'en entendions parler.

M. Parizeau: Non, 272. M. French: Cela est sûr.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? Donc, sans plus tarder, j'inviterais les représentants de la Bourse de Montréal à nous faire la présentation de leur mémoire. Avant, M. Lortie, je vous demanderais d'identifier les personnes qui vous accompagnent pour les fins du journal des Débats.

M. Lortie (Pierre): Dans le cas de la Bourse de Montréal, je suis seul.

Le Président (M. Rochefort): Excusez-moi, je croyais que les autres étaient...

M. Lortie: Les représentants ici sont de l'ACCOVAM. Étant donné que nous sommes proches cousins...

Le Président (M. Rochefort): Bienvenue parmi nous. Présentez-nous votre mémoire, s'il vous plaît!

Bourse de Montréal

M. Lortie: M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, nous sommes particulièrement heureux de l'occasion que vous nous donnez d'exprimer notre point de vue sur le projet de loi no 85, Loi sur les valeurs mobilières du Québec.

C'est avec un intérêt évident que la Bourse de Montréal a procédé à l'examen exhaustif du projet de loi no 85 sur les valeurs mobilières. Nous voyons, dans l'effort de réforme, la reconnaissance par les autorités gouvernementales de l'importance qui doit être accordée au développement de ce secteur de l'activité économique.

Une loi mieux adaptée au contexte actuel est susceptible de fournir une contribution positive au renforcement et au développement de nos marchés financiers.

L'examen du projet de loi en commission parlementaire à l'Assemblée nationale constitue la dernière étape d'un long processus de consultation mené depuis quelques années au Québec afin d'établir un cadre statutaire mieux adapté. La Bourse de Montréal a pris une part active dans cette démarche. À titre d'exemple, elle a soumis un mémoire, le 3 mai dernier, concernant l'avant-projet de loi des valeurs mobilières. Plusieurs des suggestions que nous avions formulées ont déjà été retenues et incorporées au projet de texte législatif.

De même, dès le dépôt du projet de loi, nous avons fait part de nos observations à la direction de la Commission des valeurs mobilières du Québec et du ministère des Institutions financières et Coopératives. Nos commentaires ont été ensuite formulés dans un mémoire daté du 2 novembre 1982. Nous tenons à souligner ici le souci qu'ont démontré les principaux responsables de l'élaboration du projet de loi à consulter les principaux organismes concernés par la législation sur le commerce des valeurs mobilières. Ce processus de consultation était situé au coin de la plus grande qualité. J'aimerais témoigner ici de notre appréciation pour l'attitude franche et ouverte de MM. Paul Guy et Jean-Marie Bouchard durant ce processus.

Notre présentation, ce matin, constitue donc un effort additionnel visant à assurer que le cadre législatif au Québec soit adapté aux exigences particulières du commerce des valeurs mobilières. Cela implique qu'il faut instaurer un cadre qui simultanément réponde aux besoins particuliers du Québec et favorise le développement des marchés financiers chez nous, tout en nous assurant que nos marchés soient bien intégrés au sein des marchés nord-américains et internationaux. Ces deux dimensions ne sont pas nécessairement en opposition; souvent elles sont même complémentaires et se renforcent mutuellement. Le défi de la législation québécoise en valeurs mobilières est d'établir un sain équilibre entre ces deux aspects et d'accentuer la complémentarité de ces deux dimensions.

Afin de faciliter l'examen de notre mémoire en fonction de modifications suggérées au projet de loi, nous avons suivi l'ordre des articles du projet de loi.

Le premier commentaire porte sur l'article 4. L'article 4 soulève plusieurs commentaires. Premièrement, il est regrettable qu'il faille recourir à une disposition législative pour s'assurer qu'un organisme mandataire du gouvernement adopte un comportement qui respecte le cadre législatif et réglementaire qui gouverne les intervenants dans le marché financier. Un tel comportement devrait, naturellement, constituer le code normal de conduite du gestionnaire public. Qu'il n'en soit pas ainsi constitue un jugement assez sévère sur la détérioration de l'éthique dans le secteur public.

Deuxièmement, il faut s'étonner de la portée restreinte de l'article 4. Les problèmes récents qui ont été soulevés publiquement ont résulté du fait que les dispositions concernant les offres publiques d'achat n'auraient pas été respectées. Pourquoi un intervenant important dans le marché d'une valeur n'aurait-il pas à se conformer aux exigences législatives et réglementaires qui visent à assurer la protection de tous les investisseurs? Le traitement inéquitable d'un petit investisseur ne devient pas équitable du simple fait que c'est un organisme gouvernemental qui a effectué l'opération qui l'a lésé.

Enfin, la Bourse de Montréal a indiqué publiquement sa position sur la question de la divulgation des opérations d'initiés par les organismes et mandataires gouvernementaux. Nous ne voyons pas pourquoi les exigences de divulgation pour les organismes gouvernementaux différeraient de celles qui prévalent pour les autres investisseurs. Nous serions curieux de savoir pourquoi les dispositions contenues au chapitre IV, articles 89 à 103, sont jugées adéquates et appropriées pour l'ensemble des intervenants dans les marchés financiers mais trop rigoureuses pour un organisme ou mandataire gouvernemental.

Comment se fait-il que les dirigeants du Groupe La Laurentienne ou de Power

Corporation, par exemple, peuvent s'y conformer sans nuire à leur entreprise alors que ce ne serait pas le cas pour les dirigeants de la Société générale de financement ou de la Caisse de dépôt et placement du Québec?

Il serait beaucoup plus simple, à notre avis, et plus sain, surtout, d'imposer les mêmes exigences pour tous.

L'article 15 soulève aussi quelques interrogations. La formulation du cinquième paragraphe, par exemple, est beaucoup trop large et vague à la fois. Cette disposition peut prêter à des abus et empêcher le financement d'entreprises solvables. Elle implique que la commission devrait refuser une opération de placement destinée à restaurer la solvabilité d'une entreprise. L'approche de la loi ontarienne nous semble beaucoup plus adéquate et plus juste car elle prévoit plutôt que le refus du visa ne sera donné que si l'opération de placement ne procure pas les fonds additionnels requis pour réaliser le but visé par cette opération de placement.

L'article 16 est également extrêmement important pour nous. Nos observations découlent du fait que le cadre statutaire proposé est trop limitatif, en ce sens que les dispositions simplifiant l'appel public à l'épargne ne peuvent s'appliquer qu'aux grandes entreprises. On admettra que cette attitude est un peu ironique car c'est précisément à l'endroit du financement des moyennes entreprises qu'on s'entend généralement sur l'obligation de réduire le fardeau réglementaire. Aux États-Unis, la "Securities and Exchange Commission" a agi en ce sens et les résultats obtenus sont assez probants.

Nous comprenons très bien le dilemme qui a confronté les rédacteurs du projet de loi. O'une part, le concept du prospectus simplifié s'appuie sur le fait que l'information est déjà disponible et disséminée dans le marché. Par conséquent, cette situation ne peut prévaloir que si l'entreprise a déjà fait un appel public à l'épargne et qu'elle diffuse régulièrement des informations aux investisseurs. Cette disposition ne peut donc s'appliquer à la moyenne entreprise qui effectue un premier appel public à l'épargne car elle n'est pas bien connue des investisseurs. D'autre part, on voit bien l'incongruité de la situation: si on veut favoriser le financement public de nos entreprises, il importe de réduire les barrières à l'entrée. Par conséquent, il faudrait chercher à minimiser le fardeau réglementaire qu'on leur impose.

Les membres du Comité de la Bourse sur le financement de la moyenne entreprise ont examiné cette question. À l'analyse, il nous est apparu que le problème était beaucoup moins difficile à résoudre qu'il peut sembler à première vue; C'est pourquoi nous recommandons qu'un article additionnel soit ajouté au projet de loi afin de prévoir qu'une personne qui entend procéder au placement d'une valeur n'est pas tenue d'établir un prospectus soumis au visa de la commission si l'opération de placement est effectuée par l'intermédiaire d'une bourse reconnue conformément aux règles de la Bourse. Cette disposition serait analogue à celle prévue à l'article 72.1b de la Loi des valeurs mobilières de l'Ontario.

On ne doit pas sous-estimer l'importance de cette recommandation. D'abord, il faut tenir compte du fait que cette exception pour les opérations de placement effectuées par l'intermédiaire d'une bourse existe dans les autres juridictions canadiennes. Que ce soit en Colombie britannique ou en Ontario, les organismes de contrôle du commerce des valeurs mobilières acceptent, en lieu d'un prospectus, ce qu'on appelle le "Statement of Material Facts" approuvé par la Bourse.

La procédure est surtout utilisée par les petites et moyennes entreprises parce qu'elle est moins onéreuse en termes de délais et de coûts. D'ailleurs, le rapport du "Market Access Committee" de la Bourse de Toronto fait grand état des avantages de ce document et recommande, dans le cadre d'une politique visant à faciliter et à promouvoir le financement des moyennes entreprises, un recours beaucoup plus large à cet instrument de dissémination de l'information. En fait, la nouvelle réglementation permettrait à une entreprise d'utiliser le "Statement of Material Facts" pour effectuer un premier appel public à l'épargne et non pas, comme c'est le cas actuellement, seulement après qu'elle a été inscrite à la cote de la Bourse. (11 h 45)

D'ailleurs, il y a des audiences devant la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario aujourd'hui et il appert que la Bourse de Toronto deviendra l'autorité réglementaire unique capable de réviser et d'autoriser le "Statement of Material Facts". Nous sommes d'avis que la loi québécoise devrait donner les mêmes pouvoirs à la Bourse de Montréal. De plus, il importe que cette délégation de pouvoirs soit clairement prévue dans la loi afin de donner aux épargnants la protection qui leur est offerte lors d'un appel public à l'épargne par voie d'un prospectus.

Ensuite, il ne faudrait pas que, par souci de réduire les coûts des activités de placement des entreprises établies, on rende malencontreusement les marchés financiers au Québec moins compétitifs et plus difficiles d'accès pour les jeunes entreprises. Dans la mesure où le "Statement of Material Facts" est utilisé par les entreprises dont les titres sont inscrits à la Bourse de Montréal et de Toronto, par exemple, le cadre

statutaire prévu dans le projet de loi obligerait la préparation d'un prospectus au Québec. L'inverse est également vrai: même si l'entreprise pouvait se prévaloir des dispositions concernant le prospectus simplifié au Québec, elle devrait établir un prospectus complet pour obtenir le visa de l'Ontario Securities Commission. L'absence de cette disposition s'est déjà traduite à plusieurs reprises dans le passé par le fait que des entreprises inscrites à notre cote ont effectué un financement ailleurs au Canada, mais non au Québec. Cette balkanisation des marchés financiers à cause de contraintes réglementaires est malsaine et joue à notre détriment. De tels problèmes deviendront de plus en plus aigus si, comme le laissent entrevoir les développements récents dans d'autres juridictions, les bourses prennent un rôle de plus en plus actif dans le financement des moyennes et des jeunes entreprises.

La Commission des valeurs mobilières nous a indiqué qu'elle ne s'opposait pas à l'utilisation d'un "Statement of Material Facts" et qu'elle était disposée à proposer une réglementation appropriée. Nous sommes heureux de cette attitude. Par contre, elle exige que ce document obtienne le visa de la commission avant chaque appel public à l'épargne. Les motifs invoqués ne nous paraissent pas suffisants. Il ne faut pas perdre de vue que l'objectif recherché est de simplifier le processus et non d'ajouter un autre palier de révision. C'est pourquoi nous croyons qu'il serait éminemment préférable que le cadre législatif prévoie explicitement cette exception au cadre général. Il nous semble qu'un des principes fondamentaux de rédaction et d'interprétation des lois est à l'effet que le pouvoir de faire des règlements ne permet pas d'établir des dispositions discriminatoires. Autrement dit, un règlement doit, à moins que le texte qui l'autorise ne dise le contraire, s'appliquer à tout le monde de la même façon. Si l'on veut pouvoir faire des distinctions, il faudrait le dire.

C'est pourquoi nous recommandons fortement qu'un article soit ajouté afin de prévoir qu'un appel public à l'épargne effectué par l'intermédiaire d'une bourse reconnue puisse être effectué sans un prospectus soumis au visa de la commission.

L'article 43 soulève aussi certaines ambiguïtés qu'il serait utile de lever. Nous comprenons que la prohibition de publicité est levée au terme d'une démarche de placement. Par conséquent, il serait permis de placer un avis dans les journaux indiquant qu'un placement privé a été effectué. Du point de vue du fonctionnement des marchés financiers, cette information est utile. Si notre interprétation est la bonne, pourquoi ne pas le dire clairement? Chaque fois que nous avons souligné ce point lors de nos discussions avec la commission, on nous a répondu qu'à leur avis cette disposition du projet de loi était claire. Nous soumettons que le véritable test d'une telle affirmation est qu'il ne subsiste aucune ambiguïté dans l'esprit du lecteur. Mais nos consultations ainsi que des mémoires sur le projet de loi ont soulevé des interrogations. L'ambiguïté pourrait sans doute être éliminée si l'article était modifié comme suit: "Le placement de titres auprès d'un acquéreur averti est dispensé de l'établissement d'un prospectus, dans la mesure où aucune publicité n'est faite durant l'opération."

En ce qui concerne les offres publiques, nous sommes heureux du cadre prévu dans le projet de loi. La Bourse de Montréal a effectué une analyse exhaustive des approches possibles. Les conclusions de cette étude étaient décrites dans notre mémoire du 3 mai 1982. Depuis ce temps, les bourses d'Alberta, de Montréal, de Toronto et de Vancouver ainsi que l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières ont formé un comité conjoint dont le mandat est précisément de mettre sur pied un cadre législatif uniforme au Canada. Des discussions ont déjà eu lieu avec les autorités de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario qui sont fort intéressées par les travaux du comité conjoint. C'est la Bourse de Montréal qui assure la présidence de ce comité.

À l'article 116, nous croyons que l'alinéa 2 est une disposition nouvelle qui introduit une contrainte additionnelle et inutile qui n'existe pas dans les autres juridictions.

Les règles de la Bourse concernant les offres publiques d'achat faites par son intermédiaire ont fait l'objet d'analyses et de discussions intenses non seulement avec la Commission des valeurs mobilières du Québec, mais également avec celles des autres provinces. Le cadre qui a été développé par la Bourse de Montréal a été accepté par tous les gouvernements. C'est pourquoi cette réglementation est maintenant uniforme dans tout le Canada. Bien plus, la Loi des valeurs mobilières de l'Ontario a été formulée de façon à respecter le cadre réglementaire des Bourses. C'est dans cette perspective qu'il faut comprendre les exemptions prévues aux articles 88 (2Xa) et 88 (2)(b) de l'Ontario Securities Act.

Le cadre général qui prévaut au Canada est que les achats de titres effectués sur une Bourse reconnue et n'excédant pas, durant une période de 30 jours, 5% des titres comportant droit de vote ne sont pas assujettis aux obligations prévues pour les offres publiques d'achat.

Il n'existe pas de contrainte à savoir que l'acquéreur ne peut acquérir sur une bourse plus de 10% des titres sur une période de 180 jours. D'ailleurs, dans la

mesure où ces achats en bourse sont effectués au prix du marché, nous ne voyons pas le bien-fondé de cette contrainte. Enfin, il faut noter que le projet de loi ontarien no 176 ne contient aucune modification à cette disposition. Nous recommandons donc que l'alinéa 2 soit modifié comme suit: "Les achats de titres sont effectués sur une bourse reconnue et n'excèdent pas, durant une période de 30 jours, 5% des titres comportant droit de vote".

De plus, nous suggérons que le dernier paragraphe soit modifié de la façon suivante de façon à inclure dans le prix constaté sur le marché l'expression "plus des frais de courtage raisonnables", ce qui serait en conformité avec l'article équivalent dans la Loi des valeurs mobilières de l'Ontario.

En ce qui concerne l'article 143, on utilise l'expression "au moins 5% - ou 2,5% dans les changements modifiés - des titres de la catégorie ou série qui fait l'objet de l'offre". Cette terminologie n'est pas suffisamment rigoureuse. Elle ne correspond pas non plus aux exigences imposées par l'article 103a de l'Ontario Securities Act. Elle ne correspond pas non plus au concept de position dominante tel que défini à l'article 111. Nous croyons qu'il serait préférable d'ajouter un alinéa précisant que les mots "titres de la catégorie ou série qui fait l'objet de l'offre" comprennent également tout titre ou tout droit permettant d'acquérir au moment considéré un titre comportant droit de vote par une seule opération ou par plusieurs opérations en chaîne. Effectivement, il faudrait mettre l'exigence sur les droits de vote plutôt que sur les titres proprement dits.

Nos commentaires sur le titre VI, Organismes d'autoréglementation, soulèvent une question de principe. Nous sommes d'avis que les pouvoirs attribués à la commission sur les politiques concernant la structure même de l'industrie des valeurs mobilières et des marchés financiers et les modalités du contrôle exercé par la commission sur la Bourse sont exorbitants. Nous croyons qu'il serait préférable d'instaurer un cadre législatif plus soucieux du respect des institutions et de la nature véritable des différents ordres de questions en cause.

L'économie générale du projet de loi sur les valeurs mobilières est de donner à un tribunal administratif l'autorité et la flexibilité nécessaires pour intervenir rapidement et prévenir les abus et les fraudes. Nous souscrivons à ces objectifs et, de manière générale, avec les mécanismes prévus dans le projet de loi. Cependant, il nous semble qu'on outrepasse trop facilement les principes qui doivent fonder notre droit administratif lorsqu'on adapte sans retenue les mêmes mécanismes à des sujets qui concernent la structuration de l'industrie ou des marchés financiers. En fait, cet élargissement dénature les mécanismes. Les larges pouvoirs d'adjudication et d'intervention donnés à la commission pour assurer la protection du public investisseur lors des transactions de valeurs mobilières s'accordent mal aux exigences de concertation qui caractérisent ou qui devraient caractériser l'élaboration de politiques économiques.

Les règlements et règles visés à l'article 76 sont une codification de politiques concernant la structure de l'industrie des valeurs mobilières et des marchés financiers. Qu'elles doivent être réévaluées à l'occasion ne fait aucun doute. Mais nous soumettons que les questions en jeu sont généralement trop importantes pour que la décision finale relève exclusivement d'un tribunal administratif dont le personnel est souvent l'ardent défenseur d'un point de vue particulier. Par ailleurs, les articles 179 et 181 donnent, à toutes fins utiles, à la Commission des valeurs mobilières un pouvoir de vie ou de mort sur l'ensemble de la réglementation de la Bourse. Elle peut non seulement approuver ou désapprouver nos règlements et règles lorsqu'ils lui sont soumis pour examen, mais également, à tout moment et de sa propre initiative, les modifier ou les abroger en tout ou en partie. En fait, concernant la réglementation de la Bourse, la commission possède un pouvoir d'une portée pratiquement illimitée. Lorsqu'il s'agit de politique structurante pour l'industrie et les marchés financiers, de tels pouvoirs ne nous paraissent pas justifiés.

Dans les Lois du Québec, l'ampleur de ce pouvoir de tutelle est tout à fait inhabituelle. Si le pouvoir d'approuver les règlements d'un autre organisme en les modifiant ou non avant leur entrée en vigueur devient de plus en plus fréquent -encore que ce soient généralement des autorités politiquement responsables qui l'exercent - celui, pour une autorité quelconque, de porter atteinte de sa propre initiative à des règlements déjà en application est très exceptionnel. Notre examen des lois du Québec démontre en effet que le législateur s'est montré très parcimonieux dans l'octroi de tels pouvoirs, qu'il s'agisse du pouvoir de substitution permettant à une autorité de réglementer à la place d'un autre organisme pour édicter un règlement ou en modifier un déjà en vigueur, ou du pouvoir de désaveu permettant l'abrogation pure et simple d'un règlement en application.

Nous avons relevé les principaux exemples de ces pouvoirs que l'on peut trouver dans les Lois du Québec et nous avons comparé la façon dont on encadre généralement leur exercice avec ce que l'on trouve dans le projet de loi sur les valeurs mobilières. Le résultat est très instructif.

Voyons d'abord le pouvoir de

substitution. C'est essentiellement dans le secteur du contrôle et de la surveillance des professions que l'on a recours au pouvoir de substitution. Trente-neuf professions sont actuellement reconnues par le Code des professions et régies par des corporations professionnelles suivant le principe de l'autoréglementation. Ces corporations contrôlent les aspects les plus importants de l'exercice de la profession par des règlements qui doivent être approuvés par le gouvernement.

Les règlements qui ont le plus d'impact sur la relation entre le professionnel et son client sont soumis à un pouvoir de substitution exercé par l'Office des professions, organisme paragouvernemental chargé de veiller à ce que chaque corporation joue son rôle de protection du public. Ainsi, en vertu de l'article 12 de ce code, l'office peut demander à une corporation professionnelle d'établir un règlement sur un sujet donné ou encore de modifier un règlement déjà en application. En cas d'inaction de la corporation, l'office peut agir à sa place.

Ce pouvoir de substitution de l'Office des professions lui permet essentiellement d'imposer des modifications à un règlement déjà adopté et mis en application. Or, si l'on compare ce pouvoir avec celui dont disposerait la Commission des valeurs mobilières, si le projet de loi n'était pas modifié, on constate qu'il existe une différence marquée quant à la marge de discrétion dont elle bénéficierait et quant au degré d'encadrement auquel seraient assujettis les deux organismes.

D'autre part, la commission n'autorise l'adoption d'un règlement ou d'une règle de la Bourse que "dans la mesure où elle le juge nécessaire à la protection des épargnants". Elle peut en tout temps utiliser son pouvoir de se substituer à la Bourse, "lorsqu'elle estime cette mesure nécessaire". Son appréciation peut même être très subjective puisqu'elle est alors le seul juge de l'intérêt public. De plus, lorsqu'elle décide d'agir, son action n'est soumise à aucun encadrement, à aucune contrainte, ni préalable ni postérieure. Enfin, la Bourse ne dispose d'aucun recours auprès des autorités politiques, ministre de tutelle ou gouvernement.

D'autre part, l'Office des professions peut lui aussi exercer son pouvoir de substitution en se fondant sur une norme subjective, celle de la protection du public. Toutefois, comme nous l'avons vu, il doit d'abord demander à la corporation professionnelle de modifier ou d'abroger son règlement et lui fixer un délai. S'il n'agit pas dans le délai imparti, l'office peut apporter ces modifications ou cette abrogation de sa propre initiative, mais il doit adopter son propre règlement, le soumettre à l'approbation du gouvernement et le publier dans la Gazette officielle du Québec avant son entrée en vigueur.

Une telle procédure, surtout la requête auprès de la corporation et encore davantage l'obligation d'obtenir l'accord du gouvernement, tranche nettement avec la discrétion totale dont bénéficie la Commission des valeurs mobilières. Pourtant, le rôle de l'office et celui de la commission à l'endroit de ceux qu'ils contrôlent présentent plusieurs similitudes. Tous deux sont créés par la loi et surveillent l'activité d'un autre organisme, lui-même créé législativement, dont les fonctions de contrôle concernent un aspect important de l'activité économique et touchent directement le public, qu'il s'agisse d'individus ou de personnes morales. La corporation professionnelle, sous la surveillance de l'office, réglemente les aspects importants de la relation professionnel-client, de la même façon que la Bourse de Montréal, sous l'autorité de la commission, contrôle l'activité des courtiers en ce qui concerne leurs transactions avec leurs clients. Dans les deux cas également, la violation de certaines exigences législatives ou réglementaires peut, bien qu'à des degrés divers, entraîner des poursuites et des sanctions disciplinaires.

On admettra volontiers que cette différence d'encadrement dans des pouvoirs de tutelle si analogues surprend et qu'elle exige une justification solide. Jusqu'à maintenant, personne ne nous a démontré le bien-fondé de cette absence d'encadrement du pouvoir de tutelle de la commission à l'égard de la Bourse. Bien plus, en Ontario, certaines questions ont été résolues par un règlement du gouvernement, notamment la question de la propriété étrangère et par conséquent elles ne sont plus du ressort exclusif de la commission. Pourquoi en serait-il autrement au Québec? (12 heures)

À notre connaissance, il existe dans les lois du Québec seulement trois autres exemples de lois donnant à une autorité quelconque un pouvoir de substitution touchant les règlements. Il s'agit de la Loi sur les corporations municipales et intermunicipales de transport, de la Loi sur la santé et la sécurité du travail et de la Loi sur le parc de la Mauricie et de ses environs. Dans chacun de ces cas, le pouvoir de substitution a été conféré non pas à un organisme du gouvernement, comme la Commission des valeurs mobilières, mais au gouvernement lui-même ou au ministre de tutelle.

En ce qui concerne le pouvoir de désaveu, c'est dans le droit municipal, dans la Loi sur les cités et villes que l'on retrouve au Québec l'application la plus importante du pouvoir de désaveu à l'égard

des règlements. Cette loi est une loi-cadre parfois complétée par une charte spéciale, qui régit l'organisation et le fonctionnement des plus importantes corporations municipales, soit essentiellement celles de plus de 2000 âmes, les autres étant régies par le Code municipal. Cette loi attribue de très importants pouvoirs de réglementation aux conseils municipaux. En plus des formes de contrôle qui existent sur certains règlements, l'article 409 de la loi prévoit un mécanisme de tutelle applicable à tout règlement adopté par un conseil municipal: "Un exemplaire de tout règlement adopté par le conseil doit être transmis sans retard au ministre des Affaires municipales. Le gouvernement peut, dans les trois mois suivant la réception de cet exemplaire par le ministre, désavouer le règlement, en entier ou en partie, à moins qu'il ne l'ait antérieurement approuvé ou que le ministre ne l'ait antérieurement approuvé. Avis de désaveu est publié dans la Gazette officielle du Québec et du jour de cette publication, le règlement est nul et de nul effet." Ce pouvoir de désaveu du gouvernement s'apparente à celui dont bénéficie la Commission des valeurs mobilières en vertu des termes très larges des articles 179, 180 et 181 du projet de loi, dans le sens où cet organisme pourrait décider de supprimer en tout ou en partie un règlement de la Bourse. L'effet du pouvoir de la commission en matière de valeurs mobilières et de celui du gouvernement en matière municipale est donc identique, même si, dans le premier cas, le projet de loi ne mentionne pas spécifiquement le terme "désaveu", tout comme d'ailleurs il ne mentionne pas non plus le mot "substitution".

Si dans ces deux cas les pouvoirs sont de même nature, l'encadrement de leur exercice est ici encore fort différent. Alors que la commission dispose d'une discrétion quasi absolue qui lui permet d'agir sur les règlements de la Bourse, n'importe quand et même à l'égard de ceux qu'elle a déjà approuvés, le gouvernement, pour sa part, ne peut agir sur les règlements municipaux que dans un délai de trois mois et seulement à l'égard de ceux n'ayant pas fait l'objet d'une approbation de sa part ou du ministre des Affaires municipales. Il y a là une nette disproportion entre l'importance des organismes en cause et la discrétion dont ils disposent.

Les autres cas de pouvoir de désaveu sur les règlements que nous pouvons retrouver dans les lois québécoises sont relativement marginaux. Toutefois, ici encore, ils sont accordés exclusivement au gouvernement ou à l'un de ses ministres.

Nous n'avons pu trouver dans les lois du Québec qu'un seul cas où un pouvoir de retirer une approbation déjà donnée à un règlement a été conféré à une autorité publique. On le retrouve à l'article 7 de la Loi sur les transports qui permet au ministre des Transports de retirer l'approbation qu'il a donnée à des règlements d'une association ou d'un organisme de transporteurs.

Cet examen des conditions d'exercice de pouvoir de tutelle analogue à celui de la Commission des valeurs mobilières qui existent dans les lois du Québec fait ressortir clairement le caractère exorbitant et inhabituel de ce pouvoir, compte tenu de son absence d'encadrement presque totale. À notre avis, il n'existe aucune raison de politique législative pour confier à la Commission des valeurs mobilières une discrétion aussi absolue sur l'ensemble de la réglementation de la Bourse, exempte de toute forme de contrôle gouvernemental.

Le bien-fondé de l'article 180 se comprend facilement. En ce qui concerne l'exercice des pouvoirs accordés à la commission par cet article, nous croyons que celui-ci devrait faire l'objet d'un certain encadrement. Par exemple, la commission devrait être tenue de publier son projet d'ordonnance et de le transmettre à l'organisme concerné avant qu'il ne prenne effet. La commission devrait également être tenue de publier un énoncé de la substance et de l'objet du règlement proposé. Les personnes intéressées devraient avoir la possibilité de faire des représentations relatives au projet d'ordonnance.

C'est pourquoi nous recommandons que la Loi québécoise sur les valeurs mobilières contienne d'abord une disposition visant à encadrer le pouvoir de tutelle de la commission sur les règlements et règles de la Bourse. Deuxièmement, une disposition établissant clairement que la réglementation ayant un effet structurant sur l'industrie des valeurs mobilières ou le marché financier, doit faire l'objet d'un règlement du gouvernement. L'article 331 pourrait être modifié afin de donner suite à cette recommandation. En fait, le problème c'est qu'on ne voit pas pourquoi le gouvernement se réserve le pouvoir de fixer les honoraires et certains frais sur des transactions, alors que la question, par exemple, de la diversification ou l'organisation de l'industrie des valeurs mobilières, la participation des banques dans la propriété des firmes de courtage relèveraient tout simplement de l'organisme. Il y a là ce qui nous apparaît un certain manque d'équilibre sur l'importance des questions en cause.

En conclusion, je dirais simplement que, tel que mentionné au début de notre exposé, nous avons participé activement au processus de présentation de ce projet de loi. La Commission des valeurs mobilières nous a fait part des suggestions ou commentaires qu'elle soumettrait au gouvernement relativement à plusieurs observations que nous avons formulées.

J'aimerais confirmer ici que nous sommes satisfaits des explications ou recommandations de modifications aux articles 1, 5, 13, 18, 25, 67, 73, 163, 166, 167, 172, 214, 215, 218, 220, 221, 224, 231, 235, 236, 249, 290 et 291 qui ont été formulées par la commission.

De plus, nous aimerions dire à la commission que nous sommes particulièrement satisfaits de l'article 168 et que nous nous opposons à toute modification visant à en changer la substance. Merci.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. Lortie.

M. le ministre.

M. Parizeau: M. le Président, j'ai quelques questions à poser. À l'article 4, j'imagine que nous en discuterons quand nous verrons l'examen article par article assez longuement.

Comme j'ai eu l'occasion de le dire, je n'ai pas de querelle fondamentale là-dessus. L'article 4, tel qu'il est rédigé dans le projet de loi, dit que c'était la première fois au Canada qu'apparaissait une obligation juridique à l'égard d'un mandataire du gouvernement de faire quoi que ce soit dans ce domaine. Depuis ce temps, il y a eu le projet de loi no 176 en Ontario. Il y aura manifestement à réexaminer, à la lumière de ce qui se passe dans d'autres juridictions, l'article 4. À cet égard-là, je pense qu'on peut laisser cela pour l'examen article par article.

Il y a cependant, dans certaines des autres propositions faites par la bourse, certaines questions qui me demandent des éclaircissements. Elles sont presque essentiellement ramassées autour des articles 176 et suivants, c'est-à-dire 176, 177, 179, 180 et 181. Quant aux pouvoirs donnés à la commission, la difficulté que je vois dans l'argumentation qui nous est présentée par le président de la Bourse, c'est que, dans les autres commissions au Canada, ils se sont réservé ce genre de pouvoir, même dans leurs législations les plus récentes. Il faut noter aussi que les dispositions que le président de la bourse soulevaient ne sont pas nouvelles dans leur esprit par rapport à la vieille législation.

D'une façon générale, il y a longtemps que des dispositions de cet ordre existent et chaque fois qu'on voit les autres commissions de valeurs mobilières modifier leur statut, faire changer leurs lois, les principes généraux, au moins, demeurent.

Je vais donner des exemples de ces principes généraux que la Bourse de Montréal voudrait nous faire amender. Regardons les articles 177, 178 et 179. 177: "Toute modification aux règles internes d'un organisme d'autoréglementation reconnu doit être approuvée préalablement à son entrée en vigueur par la commission." 178: "Les délais pour approbation et tenue d'audience publique si nécessaire..." Cela va. 179: "La commission peut suspendre, au nom de l'intérêt public, l'application d'une règle interne d'un organisme d'autoréglementation reconnu." 180: "La commission peut ordonner la modification d'une règle interne d'un organisme d'autoréglementation pour la rendre conforme à la loi ou ses règlements."

Le Securities Act de l'Ontario de 1978 dit: La commission peut, lorsqu'il lui semble que l'intérêt public l'exige, prendre toute décision concernant les règles internes d'une bourse reconnue. C'est très large. Ce n'est pas libellé tout à fait de la même façon que le nôtre, mais, à toutes fins utiles, cela veut dire la même chose.

L'Alberta, mêmes dispositions. L'article 52 du Securities Act de 1981 dit: La commission peut, lorsqu'il lui semble que l'intérêt public l'exige, prendre toute décision concernant les règles internes d'une bourse reconnue.

Je comprends le problème soulevé par le président de la Bourse. Il dit que, par rapport à d'autres lois québécoises ou à l'esprit d'autres lois québécoises, le pouvoir qu'on donne à la Commission des valeurs mobilières semble exorbitant. Mais lorsqu'on se compare à d'autres commissions de valeurs mobilières, on a plutôt l'impression d'être en plein centre de ce qui se fait habituellement plutôt que d'être dans une situation exorbitante. Est-ce que je pourrais lui demander de préciser un peu ce contraste apparent, d'une part, entre la comparaison avec d'autres lois dans d'autres domaines que nous trouvons dans la loi québécoise et ce qui semble être, j'allais dire, assez monnaie courante dans les autres commissions de valeurs mobilières?

M. Lortie: En fait, M. le Président, la question qui est soulevée est importante. Le problème qui se pose est celui-ci. Nous admettons très bien que la commission doive avoir des pouvoirs qui lui permettent d'agir avec beaucoup de souplesse et beaucoup de rapidité. Lorsqu'il y a des opérations qui se font ou lorsqu'il y a des transactions qui se font où des problèmes d'intérêt public sont soulevés, à ce moment-là elle agit carrément un peu à la façon d'un tribunal. C'est un problème d'adjudication vis-à-vis certaines questions. Sauf qu'avec le temps, les commissions se sont préoccupées d'autres questions que celles d'adjudication. De tribunal administratif qu'elle était, elle devient de plus en plus celui qui formule des politiques de base, par exemple, sur la structuration de l'industrie.

Nous avons devant nous, dans le moment, un débat sur la question de la diversification du secteur financier. Dans une large mesure, une partie de ce débat a eu

lieu lors de la révision de la Loi sur les banques. Une autre partie se fera lors de la révision des lois sur les compagnies de fiducie. Dans chaque cas, c'est fait devant le Parlement. Aux États-Unis, même si le SEC ne semble pas trop souffrir de manque de pouvoirs, c'est le secrétaire au Trésor, Donald Reagan, qui a présenté devant le Congrès des recommandations précises concernant le "Class Steagall Act", le Edge Act, etc. C'est par le biais de la tradition américaine, indépendamment des pouvoirs, que ces questions passent devant le Congrès pour discussion.

Le problème que l'on a, c'est que le projet de loi ne fait pas cette distinction entre une nécessité d'intervention sur des problèmes d'adjudication, sur un jugement: à savoir si oui ou non un geste ou quelque chose se conforme, dans le fond, soit à la réglementation soit à la loi, et, lorsqu'on restructure complètement les règles du jeu pour l'industrie, on ne fait pas cette distinction. Je trouve cela particulièrement malsain.

Si vous regardez la liste de tous les trucs sur lesquels vous avez des pouvoirs de réglementation, le gouvernement se réserve encore un pouvoir de réglementation pour interdire l'utilisation d'un document publicitaire lors d'un placement... Mais comment vous allez restructurer complètement l'industrie des valeurs mobilières au Québec, vous vous en foutez. Je trouve qu'il y a là un manque d'équilibre entre ce qui devrait normalement relever du gouvernement ou, en tout cas, recevoir une décision finale et ce qui est du ressort exclusif de la commission. Il y a un manque d'équilibre. Notre suggestion n'est pas qu'on doive carrément balancer par-dessus bord ces articles, mais on doit au moins prévoir que certaines questions sont suffisamment importantes pour que ce soit un règlement du gouvernement. Cela implique simplement que la commission tiendra des audiences, fera sa recommandation au gouvernement sur une question, et cela se traduira par un règlement plutôt que d'être carrément un ordre de la commission. (12 h 15)

Ce qu'il faut voir aussi, c'est que cet article ou ce pouvoir de la commission sur la Bourse ne date pas de très longtemps, cela date de 1973. C'est par la suite que les autres commissions des valeurs mobilières, dont celle de l'Ontario, ont ramassé les mêmes pouvoirs. Je comprends très bien que les commissions ne veuillent pas les laisser tomber non plus. Si j'étais à leur place, je le comprendrais. Sauf que la commission et la Bourse canadienne ont été épurées. On regarde aujourd'hui une industrie qui est très différente. Les débats en cours, que ce soit sur les tarifs de courtage ou sur tout le problème de la diversification - par exemple, dans le moment, la propriété publique, etc. -sont des sujets qui, en termes d'une réglementation devant les commissions, s'en viennent jusqu'à un certain point à échéance. À mon avis, ce sont des sujets qui sont suffisamment importants pour justifier le gouvernement de prendre position.

Il y a quelque temps, lors des audiences sur la divulgation, la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario avait dit: On tiendra des audiences sur la divulgation et sur la propriété étrangère. Deux semaines après, ces gens ont changé d'avis en disant que la propriété étrangère, ils ne s'occupaient pas de cela. Finalement, ce qu'on sait et ce que tout le monde sait, c'est que le ministre, en Ontario, leur a dit: C'est un règlement du gouvernement et ce ne sont pas vos affaires. Si on veut avoir votre avis, on vous le demandera. La règle du jeu était là, était claire. En Ontario, la propriété étrangère, c'est un règlement du gouvernement. On peut être d'accord ou pas, ce n'est pas important. Ce qui me paraît important, par exemple, c'est que ces éléments vraiment structurels aient au moins une révision de la disposition finale par l'autorité gouvernementale.

Ce n'est pas la question d'émasculer la commission complètement, c'est la question d'avoir un certain équilibre sur ce que se réserve le gouvernement. Ce que je ne comprends pas, c'est que le gouvernement tienne mordicus à faire le règlement quant à savoir ce que sera la divulgation des salaires des cinq plus grands dirigeants d'entreprise et que, pour ce qui concerne une autre disposition qui peut foutre le bordel sur le marché financier au Québec, il ne s'occupe pas de cela. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Dans notre société, c'est le gouvernement qui mène, normalement. En tout cas, il devrait avoir le dernier mot sur ce type de choses-là.

M. Parizeau: Je comprends la position du président de la Bourse et je le remercie de ses explications.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, je veux d'abord dire à quel point j'apprécie la présence du président de la Bourse qui est un ami personnel professionnel, un associé, et dont les conseils dans ce dossier nous sont extrêmement valables. En poursuivant, puisque le ministre a déjà touché la question des relations entre la Commission des valeurs mobilières et la Bourse, je lui soulignerai simplement que, lorsqu'un intervenant dans le dossier trouve une incohérence entre les pratiques courantes dans d'autres provinces et celles prévues dans les dispositions du projet de loi, on fait référence rapidement à la force de la tradition juridique québécoise.

Voilà une occasion où un intervenant trouve une incohérence entre la tradition juridique québécoise et une des dispositions de la loi et voilà que le ministre a recours aux pratiques courantes dans d'autres provinces, ce qui est tout à fait de bonne guerre. Je ne l'en critique pas, mais il faut quand même faire un débat de fond, je pense.

Je voudrais donc poursuivre et non pas couvrir le même terrain sur ce sujet. Y a-t-il un problème, M. le président de la Bourse, à faire la distinction entre les questions qui sont forcément de nature structurelle ou qui sont d'un genre qui ne devrait pas relever uniquement de la discrétion de la commission et les questions où la commission - je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus -devrait avoir les mains libres et totalement libres d'agir dans les plus brefs délais? Est-ce que cette distinction est facile à faire dans une disposition, un projet de loi, un règlement?

M. Lortie: Non, je ne pense pas qu'elle soit nécessairement facile à faire. Ce que je dois dire, c'est que le règlement 180 règle une partie de ce problème. Ce que 180 dit, c'est que s'il y avait un organisme d'autoréglementation qui adoptait un règlement qui, à son avis, va à l'encontre d'une disposition d'un règlement, il aurait le pouvoir de le faire changer. Là-dessus, il n'y a pas de problème, c'est bien évident. La responsabilité de l'organisme, c'est de faire en sorte que les organismes d'autoréglementation se conforment, dans le fond, à la législation publique et à la réglementation proprement dite. Je pense que la façon de régler un peu ce problème, c'est d'introduire dans 330, je pense, qui est la liste des endroits où le gouvernement fait des règlements, une série de sujets - 331, je m'excuse - une série de points qui concerneraient, par exemple, la structure de l'industrie, des règlements qui auraient pour effet de restreindre la concurrence, par exemple, encore que là il faut bien dire que c'est souvent sujet à débat, ces questions.

Toute la question qui concerne la structuration de l'industrie proprement dite devrait aller carrément dans une disposition réglementaire. Il y en a déjà une partie qui est là. Par exemple, tout l'aspect des règles de capital minimal sont là, dans la réglementation. Tout l'aspect du commerce entre les courtiers et leurs clients est déjà prévu dans la réglementation. Ce qu'on ne prévoit pas dans la réglementation, ce sont des questions qui touchent, par exemple, à la propriété des firmes de courtage, toutes les questions qui sont reliées à la divulgation et des questions qui sont reliées, dans le fond, à la concurrence.

M. French: M. le Président, pour poursuivre très brièvement, il y a là une foi quand même encourageante dans la possibilité d'un intervenant non gouvernemental d'influencer le progrès des règlements. Je sais pour en avoir la responsabilité dans une autre commission concernant ce problème de la législation déléguée qu'il existe quand même un problème, même au niveau gouvernemental, d'une intervention en temps et lieu sur les règlements. Est-ce que j'ai bien compris? Sans d'autres dispositions quant aux droits de la Bourse ou d'autres intervenants de faire des représentations, etc., tout simplement ajouter quelques alinéas qui spécifieraient des genres de soucis que vous avez évoqués, cela vous satisferait.

M. Lortie: Je pense que ce serait un grand progrès.

M. French: Est-ce que quelque part vous avez vous-même essayé d'esquisser les genres d'alinéas dont il s'agirait?

M. Lortie: Non, mais je pense qu'on pourrait vous envoyer des suggestions.

M. French: M. le Président, je pense que nous apprécierions fortement cela, des deux côtés, au moins pour avoir une bonne base de discussion. M. le Président, je ne sais pas si le ministre a d'autres questions à poser, parce que j'en ai une autre...

M. Parizeau: Au sujet d'autres articles? M. French: Oui, c'est cela.

M. Parizeau: Je voudrais revenir au même sujet.

M. French: D'accord.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Parizeau: Si je vous comprends bien, M. Lortie, vous souhaiteriez au fur et à mesure que notre discussion avance que l'on précise à l'article 331, dans des règlements ou dans un pouvoir de règlement qui seraient ajoutés, un certain nombre de dispositions qui, quant à la structure, au changement de structure ou de concurrence dans la profession y apparaîtraient en plus de ce contrôle. Ce serait le canal que vous envisageriez pour - comment dire? - baliser l'action des décisions de la commission. C'est essentiellement à 331 que cela devrait se faire.

M. Lortie: Je voudrais qu'on se comprenne bien. Premièrement, je reconnais très bien qu'on a besoin d'une commission des valeurs mobilières. Deuxièmement, je reconnais qu'elle doit avoir beaucoup de

latitude sur sa capacité d'intervenir rapidement et troisièmement, que les organismes d'autoréglementation soient soumis à sa juridiction dans le sens qu'ils ne devraient pas être en mesure d'adopter une réglementation à eux, qui va contrairement à celle adoptée par le gouvernement. Je comprends cela et j'accepte cela immédiatement, sans problème. Là où j'ai des problèmes, c'est que, si on se met à changer les règles du jeu complètement, que ce soit un tribunal administratif qui ait ce pouvoir sur des questions qui fondamentalement sont beaucoup plus importantes que beaucoup d'autres que le gouvernement se réserve, je trouve qu'il y a quelque chose qui n'est pas sain.

M. Parizeau: Alors, M. le Président, je reviendrais à la suggestion que faisait le député de Westmount. Si assez rapidement, sans nécessairement faire l'effort de rédiger le texte lui-même, le président de la Bourse pouvait nous envoyer deux ou trois suggestions quant à la façon dont il verrait l'élargissement de cet article 331, ce serait sûrement fort utile.

M. Lortie: D'accord.

M. Parizeau: Mais il faudrait procéder avec une certaine célérité cependant.

M. French: M. le Président...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Westmount.

M. French: ... un autre sujet qui peut nous retenir très longuement et qui ne le fera pas, à moins que M. Lortie ne soit plus bavard qu'à son habitude. C'est juste pour avoir des balises sur l'importance de la question. Vous avez parlé du financement des moyennes entreprises québécoises. Pouvez-vous me dire combien de tels financements ont eu lieu depuis... C'est à vous de définir la période de temps en question. Cela nous donnerait une idée du sérieux du problème. Je comprends bien qu'il y a d'autres problèmes que la barrière de réglementation qui empêchent ou encouragent certains financements, mais seulement pour avoir une idée. De quoi parle-t-on, statistiquement, à la Bourse de Montréal?

M. Lortie: Le problème, c'est que c'est un problème qui est d'abord canadien plus que seulement québécois. Depuis les trois dernières années, aux États-Unis, la moyenne est d'environ 500 financements de petites entreprises par année, c'est-à-dire des financements de moins de 5 000 000 $, avec une majorité de ces financements qui sont sous 1 000 000 $. De tels financements ne se font pas au Canada, en tout cas pas beaucoup. Au cours des dernières années, il y a eu certains progrès là-dessus. L'an passé, par exemple, surtout chez les industriels -parce que c'est là qu'est la résistance la plus grande - il y a eu Comterm, la première industrie depuis plusieurs années et cette année, dernièrement, il y a eu le groupe Cascade. Il vient de se financer; nous ne soulèverons pas ici les problèmes de parcours qu'il y a eus. Si la norme américaine était applicable chez nous, on devrait avoir au moins autour de six de ces nouveaux financements par année, cela en faisant abstraction du paquet de retards qu'on devrait rattraper et de la position un peu difficile des entreprises québécoises en termes de structure de capital.

La question de savoir comment on peut favoriser cela est un peu plus compliquée à résoudre.

M. French: Cela dépasse largement le cadre du projet de loi.

M. Lortie: Oui, sauf que le projet de loi est important en mettant, dans le fond, les briques nécessaires pour construire l'édifice.

M. French: D'accord, dans un domaine particulier.

M. Lortie: L'examen du financement public révèle qu'il y a fondamentalement trois grandes dimensions sur lesquelles on doit intervenir. Une des plus importantes concerne la liquidité dans le marché secondaire de ces types-là. M. le ministre, je suis convaincu, le sait: les épargnants n'aiment pas que leurs épargnes soient gelées dans un investissement. Que ce soit au Québec, au Canada ou aux États-Unis, toutes les études qui ont examiné le problème du financement des moyennes entreprises reviennent à ce problème de manque de liquidité comme étant un des coûts les plus onéreux, les plus difficiles à résoudre pour favoriser le financement. Évidemment, là-dessus, il y a des choses qui peuvent être faites. Il y a eu un amendement apporté à l'article 166, je pense, qui permettrait ou, en tout cas, qui clarifierait la position d'un spécialiste ou d'une firme pour agir comme mandataire négociant. C'est une disposition qui est essentielle. (12 h 30)

Donc, le projet de loi fait oeuvre utile, en ce sens qu'il nettoie cela. Je rappellerai ici que, jusqu'en 1975, les courtiers à Montréal n'agissaient pas comme négociants et comme courtiers en même temps sur le parquet. Il y a même eu, jusqu'en 1973, une opinion juridique dans les règlements de la Bourse qui expliquait aux gens qu'ils ne pouvaient pas faire cela à cause de dispositions du Code civil. Ce qu'on oublie

souvent, c'est que la Bourse de Toronto s'est bâtie fondamentalement à cause de cette possibilité d'avoir des gens sur le parquet qui travaillaient comme spécialistes, comme mainteneurs de marché. C'est la même chose pour toutes les bourses américaines. Nous, pour des raisons d'incompréhension quant au fonctionnement d'un marché financier, un marché secondaire et pour ne pas avoir fait l'adaptation de notre structure légale pour favoriser cela, finalement on a retardé, de façon extrêmement indue, le développement d'une fonction essentielle au fonctionnement du marché.

Ce qu'on cherche à faire, dans le moment, c'est de rattraper le temps perdu. Évidemment, c'est toujours un peu plus difficile. Quand tu commences en même temps que les autres, tu cours une chance de te rendre au même moment. Il reste qu'il y a des démarches qui sont faites au niveau de la bourse pour régler cela. Le projet de loi clarifie une disposition.

Le deuxième élément important est celui des coûts réglementaires occasionnés par le financement public. Ces coûts réglementaires sont assez onéreux. Aux États-Unis, il y a eu des efforts assez importants pour réduire ces coûts réglementaires. L'Ontario a également examiné la question. On en arrive fondamentalement à une conclusion qui est à peu près similaire. Ces coûts peuvent être réduits de façon substantielle si, au lieu du prospectus comme tel, on utilise ce qu'on appelle le "Statement of Material Facts" qui, fondamentalement, comprend à peu près la même information, mais qui est approuvé par la Bourse plutôt que de passer à travers tous les méandres de la commission.

Ce que cela implique, c'est qu'il est important que cette procédure soit prévue dans le projet de loi de façon à faire en sorte que ce document d'information donne aux investisseurs la même protection que s'ils avaient passé par l'entremise d'un prospectus.

Maintenant, le cadre statutaire en Ontario prévoit actuellement que la commission doit aussi l'approuver. La proposition devant la commission aujourd'hui, qui a l'appui du gouvernement, c'est que cette autorité sera déléguée complètement à la Bourse de Toronto. La circulaire de la Bourse de Toronto là-dessus est assez claire. Je vais la lire. Dans ce qui s'appelle là-bas le Circular number 5: "The exchange will be the sold reviewer of the statement of material facts."

Donc, le cadre qui gouverne le financement des moyennes entreprises, tant aux États-Unis qu'au Canada, va dans une direction qui vise à amoindrir un peu cette contrainte réglementaire et à pousser vers certains organismes prêts à faire le suivi à l'intérieur de certaines règles du jeu qui seraient approuvées, la responsabilité de prendre des décisions. Fondamentalement, ce que la Bourse recommande, c'est que, d'une part, on ait cette disposition dans le projet de loi et, deuxièmement, qu'on soit placé dans la même position que d'autres marchés financiers concurrents.

Le troisième point, à savoir pourquoi c'est important le "Statement of Material Facts", c'est qu'il arrive que des entreprises soient inscrites non seulement à notre cote, mais à la cote d'une autre bourse, que ce soit en Ontario ou à Vancouver. Lorsque le document d'information n'est pas le même, c'est-à-dire que si on exige le processus ici et que le "Statement of Material Facts" est disponible là-bas, ce qui arrive, c'est qu'au lieu de s'empêtrer dans les deux ou trois procédures différentes, il est arrivé souvent que les entreprises ont tout simplement décidé de ne pas faire le financement au Québec et vice versa, si on n'a pas la disposition. D'une part, en termes d'harmonisation, c'est important de l'avoir. En termes d'ajustement vis-à-vis du rôle de plus en plus actif que prennent les bourses pour favoriser le financement des moyennes entreprises, qu'on passe immédiatement à la disposition que l'Ontario devrait avoir qui est celle de la délégation d'autorité à la bourse à poser le visa sur ce type de document.

J'aimerais souligner aussi qu'à venir jusqu'à présent, le "Statement of Material Facts" ne s'appliquait qu'à une compagnie déjà inscrite. Cette disposition est modifiée en ce moment en Ontario et s'applique également à des entreprises qui s'inscriront à la suite du financement. Donc, c'est un changement assez important sur les règles du jeu qu'on a connue jusqu'à présent.

M. French: M. le Président, le président de la bourse a mentionné trois volets de réponse. Il a parlé de liquidité, il a parlé de coûts réglementaires. Est-ce qu'il y en avait un troisième qui touche les PME, brièvement?

M. Lortie: Le troisième, c'est fondamentalement celui de l'investisseur, c'est-à-dire qu'il y a, d'une part, le problème de liquidité, soit des risques associés à cela. Deuxièmement, il y a la question qui est le cadre réglementaire, donc, la suggestion que l'on fait sur l'article 16. Et la troisième question concerne la fiscalité.

M. French: J'ai parlé dans mon discours de deuxième lecture - je ne sais pas si le ministre l'a lu - sur ce sujet-là. M. le Président, je n'ai pas d'autres questions, compte tenu de l'heure. Je ne sais pas si mon collègue de Vaudreuil-Soulanges en aurait une?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le

Président, pendant qu'on bénéficie de la présence du président de la Bourse, j'aimerais peut-être amorcer en sa présence, pour avoir ses propres commentaires sur l'article 4 dans la mesure où on voit et à la relecture même de l'avant-projet de règlement, lorsque le président de la Bourse parle des deux poids et deux mesures qui s'appliqueraient à des initiés généralement, à des gens qui atteignent une emprise sur 20% ou plus des titres d'un émetteur assujetti, on voit que l'avant-projet de règlement n'a pas encore avancé aussi loin qu'on aurait cru, la détermination des genres de formules, des genres de renseignements qui sont exigés.

On voit, de toute façon, à sa face même, que dans le chapitre qui concerne ces problèmes-là, que tout le monde est soumis à un certain ensemble de contraintes, mais qu'en vertu de l'article 4 on pourrait interpréter de façon fort limitative, les mandataires du gouvernement ne le sont pas.

Le président de la Bourse parle de l'éthique dans le secteur public et je me demandais si, au-delà de cela, il y avait, quant au fonctionnement quotidien de la Bourse de Montréal, des effets qu'il juge néfastes quant à la façon dont certains mandataires du gouvernement sont soustraits, même lorsqu'ils font des transactions substantielles. Cela ne doit pas nécessairement être substantiel dans le cas des autres intervenants sur le marché, qu'ils soient assujettis à des dispositions particulières. Est-ce qu'il y a des effets substantiels si on échappe aux règles générales en vertu de l'article 4?

M. Lortie: Je pense que la question soulevée est celle de la confiance dans le marché des titres. Dans la mesure où il est reconnu qu'un intervenant de marché important ne respecte pas le cadre statutaire prévu pour tous les participants, beaucoup y voient des risques de posséder les mêmes titres. L'impact ou l'effet de cela serait sur les titres des sociétés dans lesquelles ces mandataires seraient participants importants.

Le problème n'est pas vraiment celui de la Bourse proprement dite, bien que certains comportements peuvent mettre quelques personnes en faillite sur le parquet, mais vraiment sur la qualité des marchés financiers au Québec. Ils sont déjà assez frêles, assez fragiles qu'à mon sens on doit mettre tous les efforts que l'on peut réunir pour les renforcer. Je ne pense pas que la société québécoise y gagne s'il y a des doutes sérieux que les marchés financiers d'ici fonctionnent de telle façon que les intérêts des divers intervenants et des participants ne soient pas lésés par un comportement quelconque.

Je pense que ce n'est pas vraiment la Bourse proprement dite qui en souffre, mais c'est fondamentalement l'ensemble de nos marchés financiers. Ma conviction, c'est qu'on doit travailler pas mal tous ensemble au Québec pour faire en sorte que ces marchés se bâtissent.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): L'influence que le degré de confiance peut avoir sur le fonctionnement du marché financier affecte le marché, de façon précise l'existence d'un marché secondaire plus vaste; donc l'occasion de créer un marché plus liquide. Est-ce que cela affecte des chances de placement, d'investissement, d'émissions primaires? Est-ce que cela affecte d'autres normes de comportement habituel de la Bourse ou des marchés financiers en général ou si c'est difficile à dire?

M. Lortie: Jusqu'à maintenant, je ne pourrais signaler aucun problème particulier. Il faut dire qu'il n'y a pas eu tellement de financement dans les six premiers mois de l'année. Je pense qu'on a suffisamment de choses qui ne sont pas en notre faveur que plus on additionne des choses malsaines moins on réussit.

Pour répondre à votre question précisément, du point de vue de la Bourse, nous n'avons pas d'exemples précis où des marchés auraient été très affectés à cause du comportement d'une société d'État. Ce que nous savons, c'est que les titres de certaines compagnies dégringolent joyeusement quand il y a une participation importante, qu'il y a, dans le secteur financier, en tout cas, un point de vue qui prévaut, à savoir que les risques sont accrus lorsqu'elle intervient dans ces titres ou même pour d'autres qui seraient plutôt de propriété ou d'orientation québécoise. Ce que cela a pour effet, c'est, dans le fond, de déprimer les cours par rapport à ce qu'ils devraient être. Donc, cela rend tout le processus du financement plus difficile. Donc, on n'y gagne pas.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Parizeau: Pas de commentaires.

Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie.

M. Parizeau: Nous reprendrons cette discussion en abordant l'article 4.

Le Président (M. Rochefort): M. Lortie, je vous remercie de vous être présenté devant nous ce matin. J'inviterais maintenant l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières à nous présenter son mémoire.

Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières

M. Joubert (Claude): M. le Président, M. le ministre, MM. les députés. L'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières est représentée par Mme Fernande Gervais, à ma droite, directrice de la section de Québec, et par moi-même, Claude Joubert, vice-président, de la section de Québec de l'ACCOVAM, et vice-président administrateur d'une firme ayant son siège social au Québec.

Brièvement, l'association regroupe, sur une base de libre association, plus de 100 firmes de courtage au Canada. C'est un organisme d'autoréglementation avec constitution et règlements. Au Québec, elle emploie plus de douze personnes à temps plein et, par l'entremise de son institut, dispense un cours à plusieurs centaines d'individus au Québec sur le fonctionnement des marchés, lequel cours mène à une accréditation en tant que courtier en valeurs mobilières. Aussi, il y a plus de 1200 individus au Québec ayant soit licence pleine ou restreinte pour pratiquer le commerce des valeurs mobilières. (12 h 45)

L'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières, autrement appelée l'ACCOVAM, attache une très grande importance à cette nouvelle loi. Soucieuse des conséquences de cette loi sur l'avenir des marchés financiers québécois et canadiens, elle se réjouit qu'il lui ait été donné de participer de façon active à sa formulation. Nous tenons, à cette occasion, à rendre à la Commission des valeurs mobilières du Québec les hommages qui lui sont dus pour sa constante disponibilité, pour avoir su être à l'écoute des revendications des divers intervenants de ce secteur de l'économie et ce par une attitude de franche collaboration et d'ouverture d'esprit. Nous voulons également exprimer notre satisfaction pour l'occasion qui nous est offerte, une fois de plus, de nous faire entendre par les instances gouvernementales.

Nous nous réjouissons de constater que beaucoup des recommandations de l'ACCOVAM ont été retenues et que nombreux sont les changements positifs qui ont été apportés à ce projet de loi qui chemine depuis plusieurs années. Nous n'avons pas l'intention, à ce stade presque ultime des discussions, de soulever des observations de détail. Il nous semble plutôt préférable d'attirer l'attention de la commission sur certains problèmes d'équité qui nous paraissent importants et que le projet de loi, dans sa forme actuelle, n'a pas pleinement résolus.

Il nous paraît en effet fondamental que tous les intervenants dans un même marché financier soient traités de la même façon et qu'il n'y ait pas de situation privilégiée. Il nous semble encore plus critique que la loi elle-même, devant laquelle tous sont égaux, ne crée pas de telles situations. Or, le projet que la commission étudie consacre deux situations de ce type que nous désirions souligner.

D'une part, en effet, elle soustrait de droit les organismes mandataires du gouvernement aux obligations qui incombent aux autres institutions financières. Il faut souligner ici que les dispositions de l'article 4 sont limitatives et définissent les seules obligations qui affecteront ces mandataires. Il y aura donc, à ce plan, deux poids deux mesures et, par un curieux paradoxe, l'État soustraira lui-même ses propres agents à la règle commune.

D'autre part, la loi impose à l'ensemble des courtiers en valeurs mobilières des obligations à la fois strictes et justes, dont l'objectif est d'assurer que l'investisseur est conseillé dans ses décisions par des personnes qui ont reçu une formation adéquate et qui sont surveillées de près par des organismes tant publics que privés. Ici encore, cependant, se glisse une situation d'exception qui soustrait à ces normes et à cette surveillance certaines classes de personnes dont les activités ne sont guère différentes des nôtres. Nous faisons ici allusion aux employés des banques - on pourrait y ajouter les caisses et les compagnies de fiducie -dont le commerce des obligations fédérales, provinciales ou municipales échappent aux exigences de la loi. Nous nous référons, entre autres, à l'article 154. Un courtier qui négocie dans ce secteur est donc assujetti à des obligations précises; le banquier qui négocie dans ce même secteur ne l'est pas. Ici, donc, le principe d'équité est rompu pour des motifs qui demeurent obscurs.

On argumentait jadis que les titres d'obligation étaient sans risque et que les transactions sur ces titres n'exigeaient conséquemment aucune connaissance des marchés en cause. Ceux et celles qui ont cru à cette théorie s'en repentent aujourd'hui. Sans doute les titres gouvernementaux ne présentent-ils guère de risque de crédit, en ce sens que le prêteur retrouvera à l'échéance le quantum de son prêt, le pair autrement dit, mais ces titres présentent cependant des risques très significatifs de marché qui se montre, depuis quelques années, volatil, imprévisible et instable. L'obligation gouvernementale constitue maintenant un placement qui n'est plus dénué de risque, bien au contraire, et l'investisseur qui s'oriente vers ce marché a besoin de conseils aussi professionnels que celui qui investit dans des titres d'actions ou d'obligations de sociétés privées. Pour s'en convaincre, il suffit, en premier lieu, de suivre l'évolution de la valeur des obligations fédérales, provinciales ou municipales depuis

quelques années et, ensuite, d'observer la croissance de leur importance dans le marché.

L'importance et l'instabilité de ce marché justifie, on en conviendra, une surveillance, une compétence, une responsabilité et un professionnalisme équivalant à ce qui est exigé à juste titre du courtier en valeurs mobilières.

Pour conclure, qu'il nous suffise d'ajouter que la pratique et l'expérience ont démontré que les courtiers en valeurs mobilières servent de façon adéquate ce secteur de l'investissement, qu'ils maintiennent l'intégrité du marché et qu'il n'est pas souhaitable, si l'on tient à la protection de l'investisseur, que les normes de qualification que l'on exige d'eux soient diluées. Nous apprécions la considération que vous accorderez à nos observations.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Parizeau: Avant d'aller plus loin, M. le Président, est-ce que je pourrais m'entendre avec ces messieurs de l'Opposition pour que nous puissions faire revenir M. Lortie cinq minutes avant que nous n'ajournions? J'aurais simplement une question additionnelle à lui poser.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Consentement.

M. Parizeau: J'aimerais remercier l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières de nous avoir présenté ses observations. Ce sont des choses qui ont été discutées à plusieurs reprises avec eux jusqu'à maintenant. Je dois dire que je pense comprendre assez bien leur position. Nous aurons l'occasion de revenir là-dessus à l'occasion du projet de loi, mais dans ces conditions, je n'ai pas de questions additionnelles à leur poser.

Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le député de Westmount.

M. French: J'aurais une très brève question concernant la croissance de l'importance des obligations sur le marché. Avez-vous quelque chose, grosso modo, qui pourrait illustrer ce genre de croissance?

M. Joubert: Présentement, il y a au-dessus de 1 000 000 000 $ de financement par année en titres municipaux du Québec. Il y a des emprunts minimums de 1 000 000 000 $ au niveau de la province de Québec; peut-être que le ministre Parizeau pourrait m'éclairer. Il y a aussi plus de 12 000 000 000 $ par année émis par le gouvernement du Canada en titres fédéraux, en plus des autres provinces. C'est un marché qui est très vaste et où les fluctuations annuelles, entre le début et la fin de l'année, sont très vastes.

M. French: La croissance comme proportion relative de l'épargne?

M. Joubert: Je n'ai pas les chiffres des dernières années pour la croissance. Quand on regarde l'ampleur du marché, des financements de 1 000 000 000 $ au niveau municipal et de plusieurs milliards de dollars aux niveaux provincial et fédéral, ce sont des chiffres qui auraient pratiquement doublé, si je peux m'aventurer, sur la base des cinq ou six dernières années.

M. French: Merci.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? Je vous remercie de vous être présenté devant nous. À la suite du consentement intervenu il y a quelques instants, je demanderais à M. le ministre d'adresser ses questions à M. Lortie.

M. Parizeau: Rapidement, M. Lortie. Tout à fait à la fin de votre témoignage de tout à l'heure, vous disiez que lorsqu'une société d'État prend une participation importante dans des titres cotés en Bourse, je pense que c'est cela qui était implicitement visé, vous disiez que ces actions ont tendance à prendre - je ne me souviens plus exactement de ce que vous disiez - une joyeuse débarque - quelque chose qui est une expression à peu près de ce genre. Je comprends que vous faites allusion à un ou deux exemples que nous avons connus récemment. Je voulais seulement vous poser la question suivante. Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est une affirmation de caractère un peu général? Tout à coup, par la suite, je pensais à un certain nombre d'autres cas que je jetterais sur la table comme cela, simplement à titre d'indication.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): De divulgation.

M. Parizeau: Comment? On ne parlait pas de divulgation. Dans la dernière phrase, ce n'était pas de la divulgation. Quand, par exemple, SOQUEM s'est associée au groupe Keable, il y a plusieurs années - je vous en donne d'années différentes - pour le développement de NIOBEC, je ne me souviens pas que les actions de ce groupe aient chuté. Au contraire, celles de St. Lawrence-Columbia même ont dégringolé parce que c'est Keable qui avait été choisi plutôt que St. Lawrence par SOQUEM. Le cas Provigo, la Caisse de dépôt a toujours eu

beaucoup d'actions, des participations importantes: d'abord dans Couvrette et Provost, Couvrette et Sauriol, Lamontagne. Il y en avait qui étaient cotées en Bourse, d'ailleurs. Finalement, cela a fait Provigo. La fusion s'est faite largement et justement parce que la Caisse de dépôt avait des actions dans chacune des parties constituantes. Il y a eu ensuite, si on reprend les épisodes là-dessus, la grande querelle à savoir si Loeb contrôlerait, c'est-à-dire si cette compagnie du Nouveau-Brunswick, pas Loeb mais Sobeys contrôlerait ou ne contrôlerait pas Provigo. La Caisse de dépôt, à un moment donné, a fait une entente avec Loeb pour assurer un contrôle plus permanent de cette entreprise.

Est-ce qu'on a l'impression que vraiment les cotes en Bourse avaient été d'une nervosité extraordinaire de voir la Caisse de dépôt agir à cette échelle, parce qu'elle transigeait à une échelle importante en termes de capital-actions à l'intérieur des 30% qui lui sont consentis par la loi. Lors de l'achat d'une participation importante de Donohue par la Société générale de financement, les actions de Donohue étaient cotées en Bourse. Si je me souviens bien, à cette époque, il n'y avait pas eu d'effondrement quelconque parce que la SGF graduellement avait pris le contrôle de Donohue. Dans le cas de Gaz métropolitain, est-ce que les interventions de la Caisse de dépôt ou de SOQUIP dans Gaz métropolitain depuis quelque temps ont provoqué des agitations frénétiques à la Bourse dans le sens de la baisse? Je vois très bien à quel genre de cas vous faisiez allusion tout à l'heure. Je voulais seulement vous poser la question. Est-ce que vous ne trouvez pas que votre affirmation était un peu générale?

M. Lortie: Je pourrais vous donner un exemple où effectivement elles ont monté. Aiguebelle a été émis à 5 $ et est rendu à 7,50 $, 7,78 $.

M. Parizeau: Lesquelles? M. Lortie: Aiguebelle.

M. Parizeau: Ah oui, bien sûr! Aiguebelle.

M. Lortie: Je pense que le problème concerne le comportement du mandataire comme tel. Il est assez clair que dans le cas de Domtar, par exemple, il y a eu assez de rebondissements qui ne sont pas nécessairement intéressants pour des personnes et qui ont plus cours sur le type de comportement que la société d'État ou le mandataire se dit avoir que sur la participation gouvernementale a priori. D'ailleurs devant le Sénat, la semaine passée, c'est un des points qu'on a fait valoir à savoir que, dans le cas de certaines sociétés d'État, même de toutes les sociétés d'État, il était préférable d'avoir des actionnaires qui soient associés à des actionnaires autres que gouvernementaux, qui soient associés à l'entreprise surtout si c'est une entreprise qui est publique, parce que cela amène une discipline beaucoup plus forte sur la performance de l'entreprise que si elle est simplement à 100% détenue par une société d'État.

Un exemple assez probant de cela est le comportement de SOQUEM dans le développement minier au Québec, sauf que SOQUEM est reconnue dans le milieu comme respectant les règles du jeu. Par conséquent, il y a un certain apprivoisement, évidemment, qui se fait à l'égard de ces institutions dans le décor, mais dans la mesure où les gens respectent les règles. Je pense que les gens ont beaucoup moins peur. Dans le cas d'une société, d'un mandataire qui dit: moi, je ne respecterai pas les règles ou je suis au-dessus des règles, évidemment, cela pose un peu plus de problèmes. C'est fondamentalement un problème de confiance.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? M. Parizeau: Cela va très bien.

Le Président (M. Rochefort): Merci. Sur ce, la commission suspend ses travaux...

M. Lortie: Cela dépend aussi de l'ampleur. C'est clair que la caisse est à 3%, à 5% et à 10% de l'entreprise; cela dépend de l'ampleur.

M. Parizeau: Bien sûr.

Le Président (M. Rochefort): La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

(Reprise de la séance à 15 h 11)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente des institutions financières et coopératives reprend ses travaux aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 85, Loi sur les valeurs mobilières.

Les deux partis demandent de faire chacun une modification à leurs membres à cette commission. M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) remplacerait M. Mailloux (Charlevoix) et M. Boucher (Rivière-du-Loup) remplacerait M. Martel (Richelieu). Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

M. Fortier: Je ne suis pas sur la liste.

M. French: Je pensais que votre nom était ajouté. Je m'excuse, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): M. Fortier (Outremont) remplace M. Rocheleau (Hull)?

M. French: Oui...

Le Président (M. Rochefort): Ah non! je ne fais pas de suggestion, quand même.

Une voix: Absolument pas.

Le Président (M. Rochefort): Les électeurs de vos comtés peuvent faire cela.

Donc, M. Fortier (Outremont) remplace M. Rocheleau (Hull). Cela va pour les modifications. Avant d'appeler l'article 1, est-ce que vous avez des commentaires généraux, M. le ministre? Oui.

M. le ministre.

Remarques générales

M. Parizeau: Oui, quelques-uns, M. le Président. Je voudrais d'abord, avant que nous procédions à l'examen article par article du projet de loi, faire distribuer à nos collègues une refonte avec des ajouts de l'avant-projet de règlement qui accompagne cette loi que nous avons déjà distribuée, il y a quelques jours, aux participants sous une autre forme. Certains éléments additionnels ont été ajoutés et la refonte est disponible.

M. French: ... retourné le précédent, sans être accusé de...

Le Président (M. Rochefort): Le document est distribué.

M. Parizeau: Deuxièmement, M. le Président, j'aimerais qu'on distribue aux membres de cette commission une série de modifications qui ont été apportées à la traduction anglaise du projet de loi. Je sais que certains des membres de cette commission avaient déjà fait état que dans le texte anglais il y avait un certain nombres de termes qui étaient impropres ou d'expressions qui avaient été mal traduites.

La Commission des valeurs mobilières avait déjà d'ailleurs averti le gouvernement à cet égard. J'aimerais qu'on fasse circuler simplement les modifications à la traduction. Ce ne sont pas des amendements à proprement parler, mais simplement des améliorations au texte anglais. Je pense qu'on peut les distribuer.

Le Président (M. Rochefort): Oui, sûrement.

M. Parizeau: Nous acceptons le texte dans nos discussions autour de la table avec ces amendements en français et on tient pour acquis que la traduction sera faite correctement.

Mais il arrive, comme cela s'est produit ici, que la traduction n'est pas correcte, et à ce moment-là, on présente simplement l'exercice de traduction, comme je suis en train de le faire.

M. French: L'original en français n'est pas touché par...

M. Parizeau: Non. Par ces amendements-là, pas du tout.

Le Président (M. Rochefort): Cela va? J'appelle...

M. Parizeau: Si vous me le permettez j'aurais quelques remarques préliminaires. Ce que nous présentons, M. le Président, n'est pas une série d'amendements à la Loi des valeurs mobilières, c'est une refonte de la loi qui s'inspire d'un certain nombre de principes, je pense, assez simples dans leur esprit et qui sont les suivants.

Premièrement, il est important que cette loi soit adaptée à la façon dont le commerce des valeurs mobilières s'exerce à notre époque. La loi antérieure n'avait pas été amendée souvent. C'était une loi qui était vraiment, à bien des égards, dépassée par rapport à la façon dont le commerce des valeurs mobilières se fait à notre époque. Il était temps de présenter une refonte complète. (15 h 15)

Deuxièmement, il m'a paru important -à partir du moment où j'ai été impliqué dans l'exercice - de faire en sorte que nous ne cherchions pas à faire - j'allais dire - trop original, c'est-à-dire que la législation au Québec, cette nouvelle législation, ne cherche pas à trop innover par rapport à d'autres, surtout dans le sens d'être plus restrictif. Dans un domaine comme celui-là, on peut toujours être de plus en plus restrictif. Il y a toujours moyen. On peut toujours imaginer des circonstances qui impliqueraient une disposition législative un peu plus dure, des règlements un peu plus serrés. Il n'y a pas vraiment de limites. D'une part il faut, bien sûr, avoir des règles de prudence évidentes pour protéger l'investisseur mais d'autre part, il ne faut pas non plus qu'au Québec on ait une législation qui aurait comme principale caractéristique d'être plus dure, plus sévère et plus musclée que partout ailleurs. Je ne vois pas en quoi le développement économique ou financier du Québec en serait avantagé.

Troisièmement, troisième principe qui soustend cette loi. C'est une loi-cadre à bien des égards. Il est important qu'on n'attende

pas six mois ou un an pour avoir les règlements qui définiront littéralement l'action de la commission à l'intérieur de cette loi. C'est la raison pour laquelle -j'allais dire une fois n'est pas coutume, mais encore peut-être que la coutume devrait s'installer - les versions préliminaires des règlements ont été communiquées aux membres de cette commission assez tôt et que nous avons aujourd'hui le texte de l'avant-projet de règlement de façon que, au fur et à mesure que nous avancerons dans l'examen des dispositions juridiques, si on cherche à définir ce que, à l'intérieur de certains articles un peu généraux, on veut dire par le pouvoir réglementaire ou jusqu'où celui-ci s'exercera, on puisse en avoir plus qu'une illustration, on puisse en avoir la substance par l'avant-projet qu'on a déposé en même temps. Je sais que ce n'est pas fréquemment le cas que les règlements soient déposés en même temps que le projet de loi. Je reconnais que beaucoup de critiques s'exercent à cet égard envers les législateurs québécois parce qu'ils présentent ces règlements beaucoup trop tard à certains moments. Disons que c'est une tentative de rectifier nos moeurs.

Voilà à peu près ce que je voulais dire en termes, encore une fois, très généraux avant que nous abordions la substance même du projet de loi.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Westmount, avez-vous quelques commentaires généraux?

M. French: Non, je n'ai pas de commentaires généraux à ajouter à ce que j'ai dit quant à nos intérêts lorsque je suis intervenu dans le débat en deuxième lecture. Je crois, à ce stade cependant, que le député d'Outremont a une question d'information quant à certains amendements touchant, croit-il, les valeurs mobilières dans un autre projet de loi.

M. Fortier: C'était une interrogation que j'avais: Est-ce que dans le projet de loi omnibus no 101 il y a des articles qui touchent les valeurs mobilières? Est-ce que je fais erreur? En tout cas, on pourra le préciser.

M. Parizeau: Pas à ma connaissance, M. le Président. Là, vraiment, je...

M. Fortier: Voici la seule question que je voulais poser au ministre: Compte tenu de la réglementation qui vient d'être déposée et sachant l'intérêt du ministre pour la déréglementation, d'une façon générale, puisqu'on en est aux remarques préliminaires sur la loi et au dépôt des règlements, est-ce que le ministre peut nous dire s'il a donné des instructions précises pour limiter la réglementation et faire en sorte qu'elle soit la moins coûteuse possible pour l'administré? Et si des efforts ont été faits dans ce sens, quels sont les critères qui avont été choisis pour s'assurer que la loi et les règlements puissent être le plus simplifiés possible?

M. Parizeau: M. le Président, non, je n'ai pas donné d'instructions spécifiques à cet égard pour la raison suivante. C'est que dans le domaine des valeurs mobilières, sur le plan des réglementations à établir, il y a des choses - comment dire? - qu'on ne peut pas éviter. Ce n'est pas un domaine, la réglementation des valeurs mobilières, où on a l'habitude d'abuser des règlements. Il y a d'autres secteurs d'activité, ne serait-ce que les divers types d'inspection d'industries manufacturières ou de commerces, où à certain moment cela exubère de façon prodigieuse. Dans le domaine des valeurs mobilières, je pense qu'on constatera que les règlements de la commission québécoise ne sont pas à cet égard délirants par rapport à ce qu'on trouve ailleurs. Tant qu'il n'y a pas, dans un secteur en particulier, d'abus criants, je ne vois pas de raison de les corriger. Il y a trop d'abus criants dans d'autres domaines. Alors non, je n'ai pas donné d'instructions particulières à cet effet.

Comme il faut reconnaître aussi... Il y a peut-être autre chose qu'on doit ajouter à cet égard. C'est que dans la préparation des règlements la Commission des valeurs mobilières consulte énormément. Elle a tenu des audiences publiques très nombreuses avec les gens du milieu. Finalement, on aboutit à la conclusion. On le voit d'ailleurs par le peu d'organismes qui sont venu faire des représentations au départ de cette commission, que énormément de consultations, sur une très longue période de temps ont été faites à la fois, quant à la loi et quant au règlement avec les institutions du milieu. On sait très bien que ça correspond à un cadre qui est maintenant intelligible par tout le monde. Ce n'est pas de ce côté-là qu'il y a des abus.

M. Fortier: Merci.

Étude du projet de loi no 85

Champ d'application et interprétation

Le Président (M. Rochefort): J'appelle l'article 1. Avez-vous quelques mots d'introduction, M. le ministre?

M. Parizeau: Nous avons, M. le Président, non pas des mots d'introduction pour l'article 1, mais nous allons l'avoir dans le cas d'un certain nombre d'articles. Nous avons des amendements.

Le Président (M. Rochefort): J'en ai un pour le huitième...

M. Parizeau: Le huitième paragraphe.

Le Président (M. Rochefort): paragraphe.

M. Parizeau: "Une option quelconque, négociable sur une bourse de valeurs reconnues", selon l'article 167, est remplacée par "une option quelconque, négociable sur un marché organisé". C'est le seul amendement à cette nomenclature qui indique simplement à quelle forme d'investissement la Loi sur les valeurs mobilières doit s'appliquer.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'amendement au paragraphe 8 est adopté?

M. French: L'amendement au paragraphe 8 répond sensiblement aux préoccupations de la Bourse de Montréal en ce sens que le fardeau était plus lourd ici qu'ailleurs.

M. Parizeau: Exactement c'est...

M. French: II le fait d'une façon autre que celle que la Bourse a recommandée mais l'effet est...

M. Parizeau: ... est le même. M. French: ... semblable.

M. Parizeau: Ça correspond au fond, quant à son esprit, à ce que la Bourse de Montréal demandait.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Parizeau: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. French: M. le Président, j'ai mentionné et le ministre a reconnu - il a fait des changements parce qu'il en a sûrement entendu parler d'autres personnes que moi-même - les problèmes de traduction. Il y avait également des problèmes de cohérence de signification de chaque mot, en français, à l'intérieur même du projet de loi, notamment, en ce qui a trait aux mots "titres, valeurs mobilières, valeurs, etc." Du moins, cela semblait être le cas, aux yeux d'un profane comme moi. Je me demande -pas parce que cela touche uniquement l'article 1, mais parce que cela semble bien d'en discuter maintenant plutôt que plus tard - si le ministre est d'accord avec cette constatation ou s'il y a eu des mesures de prises pour corriger cela.

M. Parizeau: Pas nettement, M. le Président. Nous avons utilisé à cet égard les titres au sens du dictionnaire. Il est évident que le mot "security", en anglais, est utilisé de façon plus répétitive que cela suffit normalement. Il est vrai que, selon le contexte, on utilise "valeurs mobilières ou titres" dans la Loi sur les valeurs mobilières, mais je ne vois pas, en pratique... Nous avons examiné la chose et nous nous rendons compte que, dans l'interprétation de la loi, cela ne pose pas de difficultés particulières. Dans ces conditions, je n'ai pas procédé à des amendements à cet effet.

Le Président (M. Rochefort): L'article 1 est-il adopté?

M. French: Le ministre a-t-il eu à ce sujet des représentations d'autres intervenants? L'Office de la langue française, sujet de mon collègue de Vaudreuil-Soulanges.

M. Parizeau: Non. Dans une note qu'on m'a envoyée à ce sujet, on reproduisait une phrase de quelqu'un que nous connaissons bien dans ce parlement, n'est-ce pas, et que la Cour suprême a appris à connaître par la suite, Me Louis-Philippe Pigeon, dans son livre Rédaction et interprétation des lois, que je cite: "Ce n'est pas le rôle du législateur de reproduire le dictionnaire. Par conséquent, on doit systématiquement s'abstenir de définir les mots que l'on emploie dans leur sens ordinaire." C'est cela, essentiellement, que nous avons fait.

Le Président (M. Rochefort): Troisième tentative. Est-ce que l'article 1 est adopté tel qu'amendé?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. J'appelle l'article 2.

M. Parizeau: L'article 2 se démarque de la loi actuelle en ce sens que notre loi, telle qu'elle existe actuellement, ne stipulait pas le champ d'application ou son champ d'application. Dans ce sens, l'article 2, même s'il est court, a une importance assez nette.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. French: M. le Président, le Barreau du Québec a fait valoir ses préoccupations contre l'étendue de l'article 2 qui - si j'ai bien compris - comprendrait certains contrats de concessions de franchisage que, semble-t-il, le barreau verrait autrement, verrait exclus du projet de loi. Le ministre a-t-il des commentaires là-dessus?

M. Parizeau: Effectivement, M. le

Président, tel que l'article 2 est écrit là, il fait appel à un certain nombre de dérogations expresses que nous retrouverons ailleurs.

M. French: Dans le projet de loi?

M. Parizeau: Oui, alors ce n'est pas...

M. French: Ce n'est pas ici qu'il faut toucher cette question.

M. Parizeau: "Le régime établi par la présente loi et les règlements pour les valeurs mobilières s'applique aux autres formes d'investissement énumérées à l'article 1 - ce que nous avons vu tout à l'heure -sous réserve des dérogations expresses et compte tenu des adaptations nécessaires."

M. French: Le ministre assure la commission que la préoccupation du barreau que j'ai évoquée va avoir une réponse ailleurs dans le projet de loi?

M. Parizeau: Les seuls contrats de franchisage qui sont retenus ont trait aux contrats d'investissement prévus dans l'article 1 et tous les autres sont exclus.

M. French: Quel alinéa? M. Parizeau: Alinéa 1.7. M. French: Ah, oui.

M. Parizeau: Avec la définition qu'on en donne un peu plus loin, et qui existe déjà dans la loi actuelle.

M. French: Donc, ce qu'on entend par contrat, les franchises, telles celles des chaînes de restaurants par exemple, ne sont pas touchées.

M. Parizeau: Non.

M. French: Enfin, la préoccupation du barreau découle tout simplement d'une mauvaise compréhension de l'article 2.

M. Parizeau: C'est la seule interprétation que je peux en donner.

M. French: C'est une mauvaise lecture du projet de loi.

M. Parizeau: Je ne vois pas en vertu de quoi l'exemple que le député de

Westmount vient de donner pourrait être assujetti. Je ne vois pas en vertu de quel article.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 2 est adopté. J'appelle l'article 3.

M. Parizeau: Nous avons plusieurs amendements.

Le Président (M. Rochefort): Oui, on en a quelques-uns.

M. Parizeau: Un instant, M. le Président, je vais vous demander...

M. le Président, examinons brièvement les amendements qui sont apportés à l'article 3, qui a une importance particulière, puisqu'il s'agit des formes d'investissement qui sont dispensées de l'application des titres 2 à 8 de la présente loi. Il s'agit donc de quelque chose d'assez substantiel et nous avons eu une série d'amendements à présenter à cet égard, qui ont tous été communiqués à nos amis d'en face.

Un, non deux, pardon. Alors, le premier amendement a trait au paragraphe 3. Les valeurs émises par une personne morale à but non lucratif à condition que le placement des valeurs n'entraîne aucune rémunération, nous transformons cela par les valeurs, "les titres émis par une personne morale à but non lucratif", etc. Ce sont les valeurs émises transformées par les titres émis. Il s'agit essentiellement d'une concordance avec les autres paragraphes. (15 h 30)

M. French: C'est tout simplement pour indiquer, M. le Président, que c'est le genre de préoccupation que je voulais évoquer au début, qui me semblait nécessaire. Si c'est systématiquement adopté, très bien.

M. Parizeau: À l'intérieur d'un même paragraphe, dans un cas comme celui-là, il faut établir la concordance, c'est clair.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. French: L'amendement spécifique en question...

Le Président (M. Rochefort): On va procéder amendement par amendement, évidemment.

M. Parizeau: Comme il y en a plusieurs, on pourrait peut-être adopter les amendements l'un après l'autre.

Le Président (M. Rochefort): Oui, oui, j'ai compris qu'on procéderait amendement par amendement.

M. French: Adopté.

M. Parizeau: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté.

M. Parizeau: Nous suggérons, comme

deuxième amendement, de biffer le paragraphe 4.

M. Fortier: Est-ce qu'on peut savoir quelle était l'intention de la régie?

M. Parizeau: On ne voit plus de raison de donner une exemption, maintenant, en fonction du nombre d'associés. L'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières nous avait fait cette recommandation de ne pas tenir compte ici du nombre des associés. Nous nous sommes rendus à leur demande.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Parizeau: II y a de plus en plus de sociétés en commandite, à l'heure actuelle, et il est probablement préférable de faire en sorte qu'on n'ait pas cette espèce de critère très arbitraire de dire: Si vous êtes 27, vous êtes assujettis; si vous êtes 22, vous ne l'êtes pas.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Troisième proposition d'amendement, sur les paragraphes 5 à 7?

M. Parizeau: Les paragraphes 5 à 7 doivent être numérotés comme 4 à 6. C'est l'amendement suivant.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté.

M. Parizeau: Le paragraphe 5 doit être biffé et remplacé par un nouveau paragraphe 5. Je vais donner l'ancien texte, le texte original proposé: "Les parts sociales ou les titres d'emprunt émis par une caisse d'épargne et de crédit, y compris ceux d'une fédération, au sens de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, pourvu que la souscription n'ait été ni sollicitée ni reçue par un vendeur ou recruteur rémunéré et que la part ait été libérée au moment de la souscription." C'est remplacé par: "Les parts sociales ou privilégiées d'associations coopératives, y compris celles d'une fédération constituée en vertu de la Loi sur les associations coopératives ou de la Loi sur les coopératives, émises aux membres ou aux personnes qui désirent le devenir, pourvu que la souscription n'ait été ni sollicitée, ni reçue par un vendeur ou recruteur rémunéré."

Cette modification était nécessaire, d'abord, en raison de la nouvelle Loi sur les coopératives, pour établir la concordance. D'autre part, on enlève la condition de la dispense, soit que la part ait été libérée au moment de la souscription. Cela ne devrait pas servir de critère pour l'exemption.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre, si je me réfère au document pour l'amendement à l'article 3, je comprendrais, au paragraphe 4, soit ce que nous discutons, que le texte qui est changé est plutôt celui qui est dans le projet de loi numéroté comme étant le paragraphe 6, c'est-à-dire ce qui est entre parentheses.

M. Parizeau: Oui, je me trompe. Vous avez tout à fait raison. Mes excuses. Je travaille sur trois pages à la fois. Toutes mes excuses.

M. Lalonde: Lequel remplace-t-on exactement?

Le Président (M. Rochefort): On remplace celui qui est numéroté dans le projet de loi comme sixièmement.

M. Parizeau: Sixièmement.

M. Lalonde: Bien. Alors que le ministre avait lu, cinquièmement?

M. Parizeau: Oui, c'est ça.

Le Président (M. Rochefort): C'est ça. Adopté?

M. Lalonde: Y a-t-il des changements?

M. Parizeau: II y a deux changements. Nous enlevons d'abord, à la fin, "et que la part ait été libérée au moment de la souscription." Cela étant enlevé, on ne voit pas que cela doive servir de critère à une dispense.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: L'autre changement est un peu plus au début.

M. Parizeau: Oui.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'aimerais avoir le consentement unanime des membres pour que vous puissiez participer à nos travaux, étant donné que je ne vous ai pas sur la liste des intervenants.

M. Lalonde: Je m'excuse, ce n'est pas la commission des finances, c'est la commission des...

Le Président (M. Rochefort): Non, c'est la commission des institutions financières et coopératives.

M. Lalonde: D'accord. Je suis membre

de la commission des finances, mais je n'avais pas...

M. Parizeau: Mais, M. le Président, nous acceptons volontiers.

Le Président (M. Rochefort): Parfait.

M. Lalonde: Merci beaucoup! Je ne serai pas là longtemps.

Le Président (M. Rochefort): Loin de moi ces intentions, M. le député.

M. Parizeau: Le deuxième changement en est un de concordance. On notera que dans le sixièmement original, on disait, à la troisième ligne, "au sens de la Loi sur les associations coopératives" et nous ajoutons dans notre papillon "ou de la Loi sur les coopératives", parce que vous vous souviendrez que la Loi sur les coopoératives que nous avions votée il y a quelques mois devient le successeur, en somme, de la Loi sur les assocations coopératives qui, graduellement, vont disparaître. C'est une question de concordance par rapport à une loi que nous avons votée.

Le Président (M. Rochefort): Dans un premier temps, la proposition 4 d'amendement qui est de changer le paragraphe 6° du projet de loi, est-elle adoptée?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Dans un deuxième temps, ce que le ministre vient de présenter est-il adopté?

M. French: Là, je suis un peu perdu, M. le Président, je pensais que je venais d'accepter ce que le ministre vient de proposer.

Le Président (M. Rochefort): C'est parce que j'ai l'impression qu'il y a peut-être eu une discussion pendant que je demandais le consentement aux membres de la commission pour que le député de Marguerite-Bourgeoys intervienne. Je n'avais pas noté qu'on avait adopté la proposition 4. Si on se réfère au document du ministre sur l'article 3, la proposition d'amendement no 4 était de changer l'ancien paragraphe numéroté 6 par un nouveau. D'une part, je viens de vous demander si c'est adopté. Vous me dites oui.

Dans un deuxième temps, le ministre des Institutions financières et Coopératives vient de nous présenter sa proposition 5 qui vise à changer l'ancien paragraphe 7 par le nouveau paragraphe qui nous est proposé en tête de son document à la page 2.

M. Parizeau: C'est bien cela. J'ai quelques commentaires à faire à cet égard. C'est exactement la même chose que ce que nous avons fait avant et pour la même raison.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. French: Adopté.

M. Parizeau: L'amendement suivant, M. le Président, consiste à ajouter un nouveau paragraphe 7°, puisque dans notre numérotation on va avoir un trou à 7°. Je ne dis pas que j'introduis un amendement parce qu'il faut boucher le trou. Nous avons un trou à 7°.

M. Lalonde: II n'y a pas assez d'amendements pour...

M. Parizeau: Et là, c'est un nouveau paragraphe qu'on suggère d'exempter. Ce sont des titres d'emprunt émis aux seuls membres par les personnes mentionnées aux paragaphes 5° et 6° selon les mêmes conditions. Il s'agit essentiellement de coopératives. Jusqu'à maintenant nous avons parlé de parts sociales, mais nous ajoutons les titres d'emprunt. Il y a dans un certain nombre de coopératives agricoles, des titres d'emprunt qui sont émis aux membres de ces coopératives agricoles et que nous suggérons par cet amendement de traiter au même titre que si c'étaient des parts sociales quant à l'exemption, partant du principe que si elles sont exemptées pour les parts sociales, elles devraient être exemptées aussi pour les titres d'emprunt qu'elles n'émettent qu'à l'égard de leurs membres qui ont déjà souscrit des parts sociales.

M. French: M. le Président, l'effet conjugué des trois amendements et l'intention du législateur est de dire: ces animaux financiers là on ne les réglemente pas par la Commission des valeurs mobilières. Est-ce que c'est aussi simple que cela ou si c'est trop simplifié?

M. Parizeau: À la condition que cela soit émis à leurs membres. À leurs membres seulement.

M. French: Est-ce qu'actuellement au Québec il y a des titres, des actions émis au non-membres des coopératives?

M. Parizeau: En pratique, non. En pratique ils n'émettent qu'à leurs membres. Il faut tout de même... À supposer, par exemple, que la Coopérative fédérée vende des emprunts dans le public, à des gens qui ne seraient pas leurs membres, à ce moment ils seraient assujettis.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. French: Adopté.

M. Parizeau: Nous avons un amendement au paragraphe 12, non renuméroté. On remplace le mot "gérés" - à la deuxième ligne - par les mots "créés, gérés et placés". Je vais amender cela encore, si on me le permet pour des raisons essentiellement de français. C'est "créés, gérés et dont les titres sont placés" -j'espère M. le Président que vous avez cette dernière correction?

Le Président (M. Rochefort): C'est ce document-là que j'ai entre les mains, M. le ministre.

M. Parizeau: C'est essentiellement pour que cela soit plus français. C'est une recommandation de la... Cela restreint, cela a tendance à restreindre la dispense d'application des titres II à VIII. Ce n'est pas un élargissement, c'est plus restrictif.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges); Une question de coquille. Je me demandais pourquoi cela était au masculin pluriel. Cela s'accorde avec actions et avec parts, sauf erreur. C'est féminin une part.

M. Fortier: II faudrait que cela soit au singulier. L'erreur, s'il y a erreur, est très importante parce qu'on ne sait pas avec quoi cela s'accorde. Cela peut être au singulier...

M. Parizeau: Cela s'accorde avec sociétés et fonds commun. C'est masculin.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le masculin l'emporte sur le féminin.

M. Parizeau: Non, M. le Président. À notre époque, ne me demandez pas de me prononcer sur des choses comme celle-là. Je respecte la grammaire française, un point c'est tout. Je ne fais surtout pas de commentaires. C'est une question de protection des politiciens à notre époque.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. French: Adopté.

M. Parizeau: Bon, au suivant. Nous avons, au paragraphe 12a, remplacé "Loi de l'impôt sur le revenu du Canada" par la "Loi de l'impôt sur le revenu tel que modifié". C'était la référence qui était erronée. Il n'y a pas de changement quant au fond. On me demande encore de biffer quelque chose. Un amendement de dernière minute. 'Tel que modifié" doit être biffé. C'est donc remplacé la "Loi de l'impôt sur le revenu du Canada (Statuts révisés du Canada, chapitre 1 à 5)" par la "Loi de l'impôt sur le revenu (Statuts révisés du Canada, 1952, chapitre 148)."

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Lalonde: M. le Président. Adopté... Parce que je veux revenir sur - je veux être sûr de comprendre - le dernier amendement, l'amendement précédent où on parlait de "créés, gérés et dont les titres sont placés". Quand on parle de "créés", est-ce qu'on parle des actions et des parts ou bien des sociétés? Est-ce que ce serait une société d'investissement créée par une compagnie de fidéicommis? (15 h 45)

M. Parizeau: C'est société et fonds.

M. Lalonde: Alors, c'est une société d'investissement à capital variable créée par une compagnie de fidéicommis.

M. Parizeau: Voilà, c'est cela. M. Lalonde: D'accord.

Le Président (M. Rochefort): Alors, si l'on revient à la proposition d'amendement, au paragraphe 12a, est-ce qu'elle est adoptée?

M. French: Adopté.

M. Parizeau: Bon. On doit ajouter maintenant le paragraphe 15 à l'article 3. "15° les titres d'emprunt émis ou garantis par une banque constituée en vertu de la Loi sur les banques et les opérations bancaires ou de la Loi sur les banques d'épargne du Québec, à l'exclusion des titres d'emprunt conférant un droit au paiement d'un rang inférieur aux dépôts, visés au paragraphe 10 et confiés à l'émetteur ou au garant de ces titres d'emprunt." Ceci a été fait à la suite de la présentation du mémoire de l'Association des banquiers canadiens. La Commission des valeurs mobilières nous a suggéré, dans ces conditions, d'ajouter cette nouvelle dispense. Elle existe en Ontario.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, j'essayais de voir de quel genre d'instruments spécifiques il s'agit ici, quel genre de titres, précisément.

M. Lalonde: Un rang inférieur aux dépôts.

M. Parizeau: II s'agit essentiellement de certificats de dépôts ou de titres analogues qui sont - comment dire? - pari passu, au plan de la protection, avec les dépôts. Ce que cela vise en pratique, c'est surtout le certificat de dépôt bancaire.

M. French: Dans un tel cas, il est

extrêmement important et tout à fait nécessaire comme dispense.

M. Parizeau: Comme amendement, oui, je pense.

M. French: Oui, c'est-à-dire que ce n'est pas une bête rare.

M. Parizeau: Non, non, cela concerne des opérations que les banques font tous les jours.

M. French: Oui.

M. Parizeau: Par opposition, par exemple, à un emprunt, à une émission de débenture qui ne se fait qu'occasionnellement par une banque. Alors que là l'émission des certificats de dépôt se fait dans toutes les succursales tous les jours.

M. French: Et on ne la réglementera sûrement pas de cette façon.

M. Parizeau: Pas de cette façon.

M. Lalonde: J'aimerais seulement qu'on m'explique pourquoi les mots "et confiés à l'émetteur ou au garant de ces titres d'emprunt". Quel est le sens du mot "confiés"?

M. Parizeau: Ce qu'on me signale, c'est qu'il faut non seulement que cela ait le même rang qu'un dépôt, au plan des créances, mais, d'autre part, que l'émetteur en assure la responsabilité lui-même quant à la diffusion qu'il en fait dans le public. Il pourrait y avoir des démarcheurs, il ne peut pas confier cela à une autre entreprise, à un courtier ou à qui que ce soit. Cela relève de lui, comme un certificat de dépôt, d'ailleurs, qui est émis aux caisses par la banque elle-même. S'il s'agissait d'une opération faite par le truchement d'un tiers pour le compte de la banque, cela, non.

M. French: ...

M. Parizeau: Ah! Là, il n'y a pas de dispense.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que c'est adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté.

M. Parizeau: Nous avons, à la demande de l'Association des banquiers canadiens, introduit un nouveau paragraphe 16. J'admets que là je doute beaucoup que les gens se battent dans les autobus à ce sujet. Mais il s'agit des titres d'emprunt émis ou garantis par la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, la Banque asiatique de développement ou la Banque inter-américaine de développement pour autant qu'ils soient payables en monnaie canadienne ou américaine. Étant donné que cette dispense existe en Ontario et que l'Association des banquiers nous demandait une dispense pour ce titre, j'admets un peu exotique chez nous mais néammoins très fréquent sur les marchés financiers internationaux, nous l'avons accordée.

M. French: Adopté.

M. Lalonde: Adopté; M. le Président, il y a deux "p" au mot développement, à la quatrième ligne.

Le Président (M. Rochefort): Merci. M. Lalonde: II manque un "e". M. Parizeau: Oui, developments.

Le Président (M. Rochefort): À la troisième ligne.

M. Lalonde: Même, il y a deux "p" à la troisième ligne. Il y a seulement un "p" en français, je crois.

Le Président (M. Rochefort): II y a deux "p".

M. Parizeau: II y a des problèmes d'orthographe à mettre au point, M. le Président, je le reconnais.

M. Lalonde: Pourrions-nous appeler l'Office de la langue française, ils vont voir que vos fonctionnaires travaillent souvent en anglais?

M. Parizeau: Je pense qu'on n'a peut-être pas besoin de recourir à l'Office de la langue française, M. le Président. On prendra le dictionnaire Larousse. Je crois que cela suffira.

M. Lalonde: Exactement.

M. Parizeau: C'est moins cher.

Une voix: II ne répond pas au téléphone de ce temps-ci.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Parizeau: Adopté. Non, mais il manque un "e".

Alors, nous avons ajouté un paragraphe 17, qui nous est parvenu à tous relativement récemment, à la demande aussi de l'Association des banquiers. Cela correspond au télégramme qu'ils nous ont envoyé ce

matin dont je pense, nos amis d'en face ont eu copie et qui se lirait ainsi: "les actions d'une société d'investissement à capital variable et les parts d'un fonds commun de placement créés et dont les titres sont placés par une banque régie par la Loi sur les banques et les opérations bancaires ou par la Loi sur les banques d'épargne du Québec, ou par une caisse populaire ou une fédération régie par la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit présentant les caractéristiques prévues au paragraphe 12a du présent article pourvu que la gestion soit confiée à une compagnie de fidéicommis visée à ce paragraphe". Ce que cela vise au fond, essentiellement, ce sont des régimes enregistrés d'épargne-retraite, des régimes enregistrés d'épargne-logement, en tout cas des régimes qui doivent être définis par la Loi de l'impôt. Donc, ce n'est pas n'importe quoi, même si la définition a l'air d'être relativement large. Ce sont des opérations très spécifiques comme sur les REER, les REEL, etc. Je pense que cette demande qui nous est faite par l'Association des banquiers en est une de bon sens. On ne voit pas pourquoi on devrait assujettir au paragraphe en question des opérations de cet ordre.

M. Lalonde: Je voudrais tout simplement souligner qu'au paragraphe 12 on avait: "créés, gérés et dont les titres sont placés." Ici on a:" créés et dont les titres sont placés." Alors la question de gérance n'entre pas en ligne de compte.

M. Parizeau: Non, parce que la banque n'a pas le droit de gérer.

M. Lalonde: Elle n'a pas le droit, elle les fait gérer comme en bas de paragraphe.

M. Parizeau: Exactement, c'est pour ça qu'il fallait ajouter le paragraphe 17.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 3, tel qu'amendé...

M. Fortier: J'aurais juste une question d'ordre général. Excusez mon ignorance mais j'aimerais interroger le ministre. Cet article 3 libère un très grand nombre de transactions - même un très grand nombre de sociétés - qui peuvent être extrêmement importantes sur le plan financier, comme on peut le voir. Tout a l'heure mon collègue de Westmount posait la question à savoir si dans les sociétés coopératives dont les actions émises aux membres, je vois ici qu'on dit "émises aux membres ou aux personnes qui désirent le devenir", c'est dire qu'on peut devenir membre assez facilement et on obtient l'exemption. Mais, on le libère absolument de tout. Loin de moi de ne pas vouloir simplifier la loi et de faire en sorte que la loi soit moins restrictive mais dans une certaine mesure toutes ces transactions qui peuvent se chiffrer par des millions et des millions de dollars dans une année, j'imagine...

M. Parizeau: ... des milliards.

M. Fortier: ... des milliards, peuvent avoir des impacts sur des individus ou sur d'autres sociétés. Alors, il y a une certaine forme d'information qui autrement aurait été disponible à d'autres sociétés ou à d'autres individus si, ces transactions-là pouvant avoir un impact, on les libère même de la réglementation la plus simple qui serait de décréter qu'ils auraient l'obligation de publier un avis dans un journal pour informer les gens que cette transaction a eu lieu ou devrait avoir lieu incessamment. Je me demandais si le ministre avait un commentaire à faire. J'imagine que par la suite on va continuer avec la loi qui est assez restrictive à bien des égards pour toutes les autres sociétés qui ne sont pas exemptées ou pour toutes les transactions qui ne le sont pas. Ici, on est extrêmement généreux. Cela semble tout blanc, tout noir. Je me demandais si cela n'était pas d'une générosité excessive par rapport au volume des transactions.

M. Parizeau: M. le Président, cela revient un peu à la question que le député d'Outremont posait tout à l'heure, en parlant de la réglementation. Les banques à charte, quel que soit le gouvernement impliqué dans leur réglementation et dans leur contrôle, sont remarquablement bien surveillées et soumises à des contrôles dont on ne dira jamais suffisamment à quel point ils sont astreignants. Dans la mesure où les banques à charte sont amenées à émettre, pour reprendre un exemple dont on parlait tout à l'heure, des certificats de dépôts, cela n'ajouterait rien de donner à la Commission des valeurs mobilières une juridiction quelconque là-dessus. En termes de contrôle de protection du public, absolument rien. Ce qui se fait en vertu de la Loi sur les banques est remarquablement bien fait. Reconnaissons-le et n'entrons pas dans des contrôles juridictionnels. On a tellement de bagarres entre les niveaux de gouvernement dans d'autres domaines, sans commencer ici à empiler les contrôles. C'est bien fait, bon, eh bien! cela reste bien fait.

Sur le plan des associations coopératives, nous venons d'adopter une nouvelle Loi sur les coopératives qui améliore considérablement ce que nous avions comme instruments jusqu'à maintenant. À l'égard des caisses d'épargne et de crédit,

cela n'est pas encore tout à fait ce que je voudrais que ce soit; cela viendra. Mais, enfin, tout de même, il y a là une série de contrôles passablement précis aussi. Il faut reconnaître que dans cette espèce de floraison et d'abondance de législation et de surveillance que nous avons, il vaut aussi bien donner à la Commission des valeurs mobilières un champ d'activités dans un domaine où on sait qu'il n'y a rien pour la remplacer. Lorsqu'il y a autre chose pour la remplacer, ne pas faire le mât totem des organismes réglementaires. L'émission des parts sociales par une coopérative, par exemple, est exemptée ici. Ce sont des parts dans les coopératives dont nous parlons qui sont rachetables à demande dans les caisses populaires, qui représentent de petits montants où la caisse populaire est forcée sur le plan des renseignements à donner à ses membres, à des exigences très précises. Tout ce que cela donnerait d'assujettir l'émission des parts sociales au contrôle de la Commission des valeurs mobilières, c'est davantage de délais, des complications sans nom. Il ne faut pas oublier que l'achat et le rachat des parts sociales par les membres d'une caisse populaire, cela roule toutes les semaines. À moment donné, on se dit: Si le public ne va pas être mieux protégé par un mât totem et, d'autre part, si on peut simplifier le fonctionnement du système, pourquoi pas le faire? C'est l'esprit qui préside aux dispenses. Ce n'est absolument pas le fait de dire: Certains types de transactions qui ne seraient pas surveillées autrement qu'en vertu de cette loi seront surveillées, et d'autres types de transactions qui ne pourraient pas être surveillées qu'en vertu de cette loi, ne le seront pas. Cela non! sûrement pas.

Le Président (M. Rochefort): L'article 3, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Lalonde: J'aurais seulement une question parce que...

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... c'est un article qu'on n'a pas touché. Le paragraphe 8: "tout titre constatant un emprunt et émis en règlement d'une vente à crédit ou conditionnelle, aussi longtemps qu'il n'est pas cédé à une personne physique;". Ces choses-là sont bien dites, mais j'aimerais avoir un exemple concret de ce que cela veut couvrir... en paiement d'un achat... (16 heures)

Une voix: D'un solde de vente.

M. Parizeau: Puisqu'on demande un exemple ici, je suggérerais peut-être quelque chose comme ceci: un titre d'emprunt basé sur un lien sur une machinerie, dans une compagnie de finance et une entreprise manufacturière. Tant que cela n'entre pas dans le commerce, cela va. Si une compagnie de finance a pris un lien sur une machinerie et a émis un titre d'emprunt sur cette base, parfait! Il n'y a pas de raison, cela n'entre pas dans le commerce.

M. Lalonde: Oui, mais le critère commerce semble être la personne physique. On peut passer à côté de ce critère en créant une personne morale qui représente la personne physique et on entre dans le commerce.

M. Parizeau: Imaginons qu'une compagnie de finance ait pris un lien sur la machinerie d'un industriel et décide de vendre le contrat à une autre compagnie de finance. Là, on ne voit pas en vertu de quoi ils ont besoin de la protection de la loi. Si, cependant, ils commençaient à vendre cela à des individus, à diviser cela en tranches, cela serait autre chose. On dirait: La Commission des valeurs mobilières doit protéger. Mais si la compagnie de finance XYZ vend son lien sur la machinerie de l'entreprise D à une autre compagnie de finance ABC, c'est une transaction commerciale ordinaire, il n'y a pas de raison de... Cela n'appartient vraiment pas au commerce des valeurs mobilières en tant que tel.

M. Lalonde: Ce type peut être, par exemple, un billet à ordre...

M. Parizeau: Cela peut aussi être un billet à ordre.

M. Lalonde: ... qui constate un emprunt et qui est émis en règlement d'une vente à crédit ou conditionnelle. Cela peut être émis par un individu et il est exempt aussi longtemps que ce billet à ordre n'est pas cédé à une personne physique; il ne peut pas le vendre à son beau-frère. Je me demande si on n'en met pas trop, si on ne dit pas exactement ce qu'on veut dire. Ce qu'on veut dire, c'est que ce qui est exempté, c'est tout le commerce comme en faisait GMAC ou toutes les compagnies de finance. Il y a un volume énorme de choses qui n'ont pas besoin de surveillance. Mais il me semble que ce que nous allons surveiller, cela sera l'individu qui émettra son billet.

M. Parizeau: Un instant, est-ce qu'on parle de l'individu qui émettrait le billet? L'individu, dans l'esprit du député de Marguerite-Bourgeoys, est-il celui qui a une dette ou si c'est celui qui fait un prêt?

M. Lalonde: Fatalement, puisque je signe un billet, j'ai emprunté et je promets de payer.

M. Parizeau: Voilà.

M. Lai onde: J'émets cela en règlement d'une vente à crédit. Mais la vente à crédit peut être faite par autre chose que les compagnies de finance. Elle peut être faite par un voisin. Le voisin, s'il cède mon billet que je lui ai remis à son beau-frère, à ce moment-là, est assujetti à la loi. Est-ce voulu?

M. Parizeau: À l'heure actuelle, il est assujetti, dans notre loi actuelle. Une transaction comme celle-là, dans nos lois actuelles, pas celle qu'on a devant nous, dans la loi actuelle, il l'est. Ce qu'on veut éviter, c'est le commerce de ce type de billet par une personne physique émettant des titres de prêt et se finançant en revendant ces titres de prêt à d'autres individus. On veut se protéger contre cela. La loi considère que le gouvernement a une responsabilité de protéger les emprunteurs à ce sujet.

M. Lalonde: À quel moment cela commence-t-il à devenir un commerce? À un billet, deux billets, plusieurs billets par jour?

M. Parizeau: L'important, c'est que la commission, à un moment donné, se rendant compte qu'un commerce de la sorte est en train de s'établir, puisse entrer dans le dossier. Il n'est pas question de faire la liste de tous les beaux-frères et d'aller vérifier, mais si on se rend compte qu'un commerce s'organise quelque part, il faut avoir les pouvoirs pour entrer.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On me signale que cela tente sans doute de s'aligner sur ce que le paragraphe 6 de l'article 23.2 de la loi ontarienne a tenté de faire. Je le lis et on verra si cela se rapproche: "Securities evidencing indebtedness due under any conditional sales contract or other title retention contract providing for the acquisition of personal property..." On parle de biens meubles, en réalité, au sens de la common law. "... if such securities are not offered for sale to an individual." C'est de cela qu'on parle.

M. Parizeau: C'est la même idée.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est exprimé de façon beaucoup plus large, par ailleurs, ici.

Une voix: "Offered for sale", il y a une idée de commerce.

M. French: II y a un concept de commerce qui n'existe pas ici dans le simple mot "céder".

M. Lalonde: On pourrait couvrir une transaction unique par cela. Tandis que "offered for sale" c'est plutôt une idée de commerce.

M. French: C'est systématique.

M. Parizeau: C'est alors au mot "céder".

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Céder contre valeur, qu'on pourrait dire, sans s'enfarger dans le mot "valeur". Aussi longtemps qu'il n'est pas mis en vente.

M. Parizeau: Je ne sais pas si on peut dire que "offered for sale" rend l'idée de commerce. Est-ce qu'on est certain que "offered for sale" implique l'idée de commerce? "Offered for sale"...

Une voix: C'est "trading" en Ontario.

M. Parizeau: Normalement, si on voulait invoquer l'idée de commerce, on mettrait "trading" ou quelque chose du genre. "Offered for sale", cela peut être à un individu seulement. Je vous avouerai, M. le Président, qu'entre "offered for sale" et "céder", là, je ne vois pas si la nuance vaut la peine. Parce que là...

Le Président (M. Rochefort): Adopté. M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 3 tel qu'amendé est adopté. Article 4.

M. French: M. le Président, c'est bien.

M. le Président, en ce qui concerne l'article 4, mon collègue le député de Vaudreuil-Soulanges voudrait être présent lorsqu'on en discutera. Il a été appelé en Chambre pour faire une intervention. Donc, je vais demander qu'on suspende l'article 4 et qu'on passe à l'article 5.

Le Président (M. Roehefort): Article 4, suspendu. Article 5.

M. Parizeau: Nous avons deux amendements, M. le Président. Un à l'article 5.5°, excusez-moi, 5.3°. Là c'est une faute d'orthographe. Ce n'est pas "digireant" mais "dirigeant". Et à la deuxième ligne du paragraphe 2°, un instant, je m'excuse, c'est curieusement organisé...

Le Président (M. Rochefort): Oui, je vois cela.

M. French: Troisième, paragraphe 2°.

M. Parizeau: Troisième, paragraphe 2°, c'est cela. "Le fait, par le souscripteur ou l'acquéreur qui a acquis ses titres sous le régime d'une dispense prévue aux articles 44 à 56"; c'est "43 à 56". Remplacer "44" par "43". Ce sont les seuls amendements à cet article qui en est un de définition.

M. French: Pour ce qui est des amendements...

Le Président (M. Rochefort): Les deux amendements proposés à l'article 5 sont adoptés?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 5 tel qu'amendé est-il adopté?

M. French: Non. En un mot, non. Il va falloir l'indulgence de la commission pendant que l'Opposition se concerte, étudie ses dossiers.

Le Président (M. Rochefort): Nous suspendons nos travaux?

M. French: Ah! cela ne prendra pas si longtemps que cela, je l'espère. Cela prendra deux, trois minutes si le président veut aller...

M. Parizeau: M. le Président, est-ce que je pourrais suggérer une sorte de règle de procédure pour nos travaux? Nous allons avoir, comme cela, certains articles qui sont extrêmement techniques et compliqués. Plutôt que d'avoir une procédure de suspension, soit pour nous, soit pas pour l'Opposition d'ailleurs, on pourrait peut-être laisser, sans suspendre officiellement, quelque temps de silence utile à la demande de l'un ou l'autre des deux partis.

M. French: Merci beaucoup. M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Westmount.

M. French: Le ministre n'est pas sans savoir que le problème principal qui est sorti des consultations préalables au sujet de cet article se dessine autour du manque de définition de ce qu'est un "fait important". On sait, dans la définition d'information fausse et trompeuse, à la première ligne du troisièmement, qu'on retrouve à la page 9 du projet de loi...

Le Président (M. Rochefort): Le troisième alinéa.

M. French: ... le troisième alinéa, qu'on fait référence à un "fait important", sauf, que ce "fait important" n'est pas défini selon la réglementation actuelle de la commission qui donne une définition. On sait également que la loi antérieure donne une définition du "fait important", rendue en anglais par "material fact". La question est de savoir pourquoi le ministre hésite, vu l'importance des implications d'une telle définition, pour encadrer le comportement d'un courtier ou d'un autre intervenant dans le milieu financier réglementé par le projet de loi.

M. Parizeau: Cette définition de "fait important" présente effectivement un problème de définition. D'une part, il faut qu'on le mette dans la loi. On ne peut pas l'éviter. Il y a effectivement des "faits importants". Il y en a d'autres qui ne le sont pas. Tous ceux qui ont à rédiger des lois de valeurs mobilières sont invariablement placés devant cette nécessité de tenir compte du "fait important" et de la difficulté d'en donner une sorte de définition générale qui serait valable urbi et orbi, quelles que soient les données.

La voie suivie, dans le projet de loi devant nous, consiste, chaque fois qu'on en arrive à cette notion de "fait important", de dire: "fait important" à quelle fin? Pourquoi? C'est ainsi qu'à travers le projet de loi, d'article en article, on détermine concrètement, au fur et à mesure qu'on avance, ce qu'est un "fait important".

Je vais donner un certain nombre d'exemples. L'article 13. "Le prospectus présente les informations et les attestations prévues par règlement. "Il révèle tous les faits importants susceptibles d'affecter la valeur ou le cours des titres qui font l'objet du placement." Vous voyez, c'est un cas où il faut définir "fait important" dans un contexte bien défini, qui est celui du prospectus.

Article 25. "En cas de changement important susceptible d'affecter la valeur ou le cours des titres à placer, ou en cas d'augmentation du nombre des titres à placer, une modification du prospectus doit être établie." Là encore, on définit "important", mais pourquoi? (16 h 15)

Article 26: "Dans le cas du prospectus provisoire, l'établissement d'une modification n'est exigé qu'en cas de changement important survenu durant la période visée à l'article 21 et susceptible d'exercer une influence défavorable sur la valeur ou le cours des titres à placer."

Article 73: "Dès que survient un changement important susceptible d'affecter la valeur ou le cours de ses titres et encore inconnu du public, l'émetteur assujetti établit et diffuse un communiqué de presse en exposant la substance." De cette façon, on a l'impression, dans le projet de loi qui est présenté, que nous sommes plus précis dans

la définition de "fait important" ou de "changement important" que d'autres lois ne le sont, parce qu'au moment où on fait intervenir cela dans le déroulement du projet de loi, on dit de quoi il s'agit et à quelles fins cela doit servir.

C'est de cette façon qu'on a réussi à éviter un problème dont je reconnais qu'il existe dans toutes les législations du même ordre. Si on essaie de définir à toutes fins utiles, urbi et orbi, ce qu'est un fait important, on n'arrive jamais à trouver une définition qui ait un peu de cohérence.

M. French: M. le Président, le ministre prétend qu'en regardant dans certains articles qu'il a invoqués, le contexte et l'usage du législateur des mots "changement important", on peut déceler dans l'article 5 le sens que le législateur veut donner aux mots "fait important". Est-ce que mon interprétation est juste? J'évoque le problème du manque de définition du "fait important" et le ministre me répond en citant trois ou quatre occasions dans d'autres articles du projet de loi où il utilise les mots "changement important".

Je sais que cela peut bien être dans la même ligne de pensée, mais je me demande si c'est vraiment là une politique de législation, une philosophie de législation qui est aussi attrayante, aussi utile, aussi pratique que le ministre le prétend.

M. Parizeau: Ce que je voulais dire, M. le Président, tout à l'heure, c'est qu'il n'y aura aucun moyen, dans un article de définition au début d'un projet de loi, de dire de façon opérationnelle ce qu'est un fait important. Alors, ce que nous avons suivi comme voie dans ce projet de loi, c'est, chaque fois que nous avons besoin dans le déroulement de la loi de "changement important" ou de "fait important", à l'occasion des articles où nous en avons besoin, de dire que "fait important" veut dire ceci dans ce cas, que "fait important" désigne cela, que "changement important" a tel sens. Dans ce sens-là, nous avons l'impression d'avoir au total, si on prend non pas seulement l'article 5, sur les définitions, mais tous les autres articles de la loi, été beaucoup plus précis que, par exemple, la loi de l'Ontario ne l'est à cet égard.

Je prends cela pour une amélioration. Nous avons eu d'ailleurs beaucoup de discussions à cet égard avec toute espèce d'intervenants qui reconnaissent maintenant -c'est une des raisons pour lesquelles cela ne revient pas dans les représentations qui nous sont faites - que ce soit le Barreau du Québec ou la Bourse de Montréal, que la façon dont nous nous en sommes tirés pour définir à travers tout ce projet de loi les termes "changement important" ou "fait important" - ils sont d'accord - c'est mieux que c'était avant.

M. French: M. le Président, je dois avouer que la seule chose qui m'a fait réfléchir dans ce que le ministre a dit, c'était que les autres intervenants étaient satisfaits de son explication. En ce qui me concerne, je vous l'avoue, je ne le suis pas. Je n'ai pas envie de continuer de prétendre que je connais mieux que l'ensemble du ministère, des commissions et de tous les intervenants, s'ils en sont satisfaits. Si le ministre nous dit solennellement devant la commission qu'ils sont satisfaits et que je n'ai pas d'appel téléphonique du contentieux d'un de ces groupes-là le lendemain de notre adoption de cet article, je me rallierai volontiers, mais l'argumentation du ministre sur le fond, je ne la comprends pas. Je ne le suis pas. Voyons un cas où il a cité dans un autre article les mots "fait important". C'est l'article 13. Si c'est cela la définition d'un fait important, ce qui est censé guider l'interprétation, l'usage des mots "fait important", dans la définition d'information fausse et trompeuse. Je ne pense pas qu'il y ait une grande amélioration. Dans les autres articles que le ministre a évoqués, c'était toujours un changement important. Je pense qu'un avocat ou un courtier peut être pardonné s'il ne se rend pas compte que, lorsque le législateur parle à une place de "fait important" et à une autre place de "changement important", il est supposé faire l'équivalence et être ainsi guidé.

M. Parizeau: M. le Président...

M. French: II ne faut pas trop retarder, M. le ministre. Si vous nous dites que vous êtes convaincu que les intervenants sont satisfaits, je n'ai pas l'intention de retarder indûment les travaux de la commission.

M. Parizeau: Mes conclusions sont dans le sens suivant. Vous allez voir. Dans les définitions de la loi ontarienne, ils ont cherché eux aussi à le définir et ils sont arrivés à ceci comme définition générale: "Material fact where used in relation to securities, issued or proposed to be issued, means a fact that significantly affects or would reasonably be expected to have a significant effect on the market price or value of such securities." C'est tout ce qu'ils ont pu trouvé. Nous, quand on arrive à l'article 13 au sujet du prospectus, on dit: "II révèle tous les faits importants susceptibles d'affecter la valeur ou le cours des titres qui font l'objet du placement". On dit exactement la même chose.

On a beau retourner cela de n'importe quelle façon, on se heurte toujours à quelque chose d'un peu analogue. Il arrive un moment où il faut trouver une expression juridique d'ordre qualitatif et ce n'est jamais facile de

trouver une expression juridique d'ordre qualitatif. On procède différemment. Nous, on le définit article par article, au fur et à mesure que cela se présente. En Ontario, ils ont cherché à avoir une sorte de définition au départ. Nous arrivons à peu près au même point. C'est devant cela que tous les intervenants nous ont dit que cela allait et qu'ils ne voyaient pas comment on aurait pu aller plus loin.

M. French: Est-ce qu'il y a, dans les règlements actuels ou dans quelque règlement futur, la possibilité d'une autre définition, d'augmenter la profondeur du sens qui est donné?

M. Parizeau: II n'y en a pas dans le projet qui nous est présenté, mais il pourrait y en avoir si on trouvait un moyen plus... Il y aura peut-être, à un moment donné, un avocat astucieux qui trouvera la façon de... Mais jusqu'à maintenant on est tous plus ou moins logés à la même enseigne.

M. Fortier: Je regarde au hasard l'annexe 2, sous le prospectus de la rubrique 27, autres faits importants, je regarde dans la réglementation et on dit: "donner l'information sur tout autre fait important susceptible d'affecter la valeur ou le cours des titres qui font l'objet du placement." Si cela est la même chose, pourquoi ne pas l'avoir mis dans la loi, alors que la réglementation peut être changée - je ne sais pas de quelle façon - mais beaucoup plus rapidement que par une modification à la loi? Il semblerait que la définition que vous donnez dans votre réglementation est identique à celle qui est dans la loi de l'Ontario.

M. Parizeau: Effectivement, nous arrivons à aller un petit peu plus loin dans le sens suivant. C'est peut-être plus visible quand on parle de changements importants que de faits importants. Vous aurez remarqué, dans la nomenclature que je donnais tout à l'heure, qu'à l'article 26 on dit: "tout changement important susceptible d'exercer une influence dévaforable sur la valeur". Dans ce cas-là, on est spécifique. C'est une influence défavorable, pas n'importe quoi, une influence défavorable. À l'article 73 on dit: "susceptible d'affecter la valeur ou le cours de ses titres - c'est ce qu'on a vu jusqu'à maintenant - et encore inconnu du public". En procédant comme nous avons procédé dans le projet de loi, cela nous permet d'aller un petit peu plus loin, en étant un petit peu plus spécifique. L'idée fondamentale reste toujours la même, c'est d'affecter la valeur ou le cours des titres mais, quand on va dans le détail de chacun des articles, avec une précision additionnelle de temps à autre. C'est mieux.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 5 tel qu'amendé est adopté?

M. French: L'article 5 tel qu'amendé est adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 6.

M. Parizeau: L'article 6 est de droit nouveau. Il n'y avait rien de correspondant dans l'ancienne loi, ou dans la loi actuelle. "Le fonds commun de placement est considéré comme l'émetteur des parts de sorte que l'information sur le fonds tient lieu d'information sur l'émetteur. "Toutefois, les obligations imposées à l'émetteur ou, le cas échéant, à l'émetteur assujetti incombent à la personne chargée de la gestion du fonds."

Il n'y avait rien d'équivalent à cela dans notre loi antérieure. Cela fait partie des précisions, des modernisations ou des ajustements du nouveau projet de loi.

M. French: C'est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 7.

M. Parizeau: C'est la même chose, c'est un droit nouveau, cela permet de combler un vide dans la législation actuelle concernant les contrats d'investissement.

M. French: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 8.

M. Parizeau: Essentiellement, ce sont des changements de terminologie par rapport à la loi actuelle.

M. Fortier: Comment se lit l'article 8?

M. Parizeau: A le contrôle... C'est le verbe avoir. On commence par le verbe.

M. Fortier: "A" le contrôle, oui, d'accord. Je disais: "A le contrôle."

M. Parizeau: En allemand, le verbe serait à la fin.

M. Fortier: Oui, cela va.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que c'est adopté?

M. Fortier: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 9, est-ce qu'il y a des questions?

M. Parizeau: Excusez-moi, M. le

Président.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Parizeau: Un député vient de soulever la question, je vais voir simplement s'il ne manque pas une virgule "A le contrôle d'une personne morale, la personne..." Non? "La personne" est le sujet. Non, je retire ce que j'ai dit. Cela va.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 8 est adopté? Adopté. Article 9, il y a un papillon.

M. Parizeau: Nous remplaçons le texte de l'article 9 tel que proposé par le texte suivant: "Une personne morale est la filiale de la personne morale qui la contrôle. "Deux personnes morales dont l'une est la filiale de l'autre ou qui sont sous le contrôle de la même personne appartiennent au même groupe."

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que c'est adopté?

M. Parizeau: Et, alors, l'article 10...

Le Président (M. Rochefort): Juste un instant, est-ce que l'article 9 est bien adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Merci. Article 10, M. le ministre.

M. Parizeau: Je ne vous cacherai pas que la raison pour laquelle nous avons complété comme nous venons de le faire l'article 9, c'était d'évacuer l'article 10 pour introduire un nouvel article 10 sous forme de papillon et ne pas forcer le renumérotage jusqu'à la fin de la loi. Alors, le nouvel article 10, l'amendement qui est proposé se lirait ainsi: "Chaque fois qu'il est question de la propriété de titres, il est fait abstraction de toute convention ayant pour effet d'attribuer la propriété de ces titres à un titulaire autre que celui à qui ils appartiennent véritablement."

Le Président (M. Rochefort): Est-ce qu'il est adopté?

M. Parizeau: II s'agit tout simplement de boucher à l'avance un "loophole" qui permettrait une propriété indirecte.

M. French: Juste par curiosité, cela arrive dans quel genre de situation qu'une personne essaie... Est-ce qu'il s'agit de la pègre ou quoi?

M. Parizeau: Cela concerne essentiellement des opérations de prête-noms.

M. French: Des opérations de...

M. Parizeau: ... prête-noms, d'hommes de paille.

M. French: Qu'est-ce que c'est cela?

M. Parizeau: Comment décrirait-on cela, un prêteur? C'est un "nominee" en anglais, c'est quelqu'un qui sert essentiellement aux fins de l'opération, qui prête son nom et disparaît de l'opération ensuite.

M. French: Donc, ceux qui sont les vrais investisseurs ou le vrai titulaire, ce serait une personne qui ne veut pas que son nom apparaisse, probablement à cause de ses affiliations, de son expérience antérieure ou...

M. Parizeau: ... et qui se sert aux fins d'un enregistrement par exemple d'un nom d'une personne une fois et qui disparaît tout de suite une fois l'opération terminée.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. J'appelle donc l'article 11.

Appel public à l'épargne

M. Parizeau: Cela reprend l'article que nous proposons. L'article 11 reprend l'obligation prévue dans la loi actuelle d'établir un prospectus soumis à l'approbation de la commission. Il y a une définition de l'expression "personne" qui est un peu plus large que celle qu'on donnait dans la loi actuelle. Cela nous évite de reprendre l'énumération qu'on avait dans la loi actuelle, la personne, la compagnie ou l'entreprise existante ou projetée, y compris une entreprise minière quelconque. Nous avons défini "personne" de façon à être capable de réduire considérablement la nomenclature. C'est très pratique. Nous sommes très proche ici de la loi de l'Ontario. (16 h 30)

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 12.

M. Parizeau: II n'y a pas de modifications majeures par rapport, dans son sens, à la loi actuelle. Ça indique l'obligation du prospectus.

M. Fortier: ... Floride.

M. Parïzeau: C'est ça.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

Une voix: Ça va.

Le Président (M. Rochefort): Article 13.

M. Parizeau: Article 13, nous avons un papillon, M. le Président, qui se lit ainsi, au sujet du prospectus: "II révèle tous les faits importants susceptibles d'affecter la valeur ou le cours des titres qui font l'objet du placement." C'est à la fois plus français et plus précis que la formulation qu'on avait d'abord qui disait: II révèle tous les faits importants à l'égard de la valeur qui fait l'objet du placement. "Tous les faits importants susceptibles d'affecter la valeur", c'est à la fois plus explicite et plus français.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? L'article 13 tel qu'amendé est-il adopté?

M. French: Un instant, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Un instant, parfait.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 13 tel qu'amendé est adopté. Article 14.

M. Parïzeau: L'article 14 est assez évident.

M. Fortier: L'article 14 veut dire que, dans les faits, la commission doit donner son consentement ou ne pas le donner; elle ne peut pas rester dans des limbes.

M. Parizeau: Elle doit agir, elle doit faire...

M. Fortier: Elle doit faire telle chose ou, autrement, elle doit ne pas le faire. Elle ne peut pas rester entre les deux.

M. Parizeau: Non.

M. Fortier: Mais ça à l'intérieur de certains délais, j'imagine.

M. Parizeau: Oui, ils sont prévus par les règlements.

M. French: Y a-t-il une jurisprudence sur les délais?

M. Parizeau: II n'y a pas de jurisprudence quant aux délais à proprement parler. C'est fixé par règlement.

M. French: C'est fixé par règlement.

M. Parizeau: Non, c'est par entente. Excusez-moi. Ce qu'on me dit c'est que, pour les émissions dites nationales qui seraient présentées à plusieurs bourses, c'est par entente entre les commissions que les délais sont établis. S'il s'agit d'une émission qui relève seulement de la Commission des valeurs mobilières du Québec, c'est dans les meilleurs délais. Il n'y a pas de jurisprudence établie. Il y a des cas où ils peuvent retarder simplement parce qu'il manquerait des renseignements. Ça n'a pas l'air de présenter un caractère contentieux; dans ce sens-là, il n'y a pas de jurisprudence.

M. Fortier: Juste une question de détail. Dans les faits, pour que la commission, plus tard, puisse se défendre, elle doit garder, j'imagine, une copie de ces prospectus qui ont été visés. Est-ce qu'il y a un article qui permet à la commission d'utiliser le microfilm pour alléger le fardeau de garder la documentation? Est-ce qu'il y a un autre article de la loi qui permet de garder des microfilms plutôt que de garder les documents originaux?

M. Parizeau: II n'y a pas d'obligation, à proprement parler, de garder les documents, parce que ce sont des documents publics. Tous ces documents-là sont publics. Le public y a accès totalement, mais il n'y a pas de règle précise quant à savoir si ce sera gardé sous forme de microfilm pendant un délai donné.

M. Fortier: Alors, ce n'est pas nécessaire de légiférer à ce sujet.

M. Parizeau: Non, parce que si on voulait le faire... Il faut bien comprendre, encore une fois, que tout est public, que tous les documents y sont du domaine public.

M. Fortier: D'accord. Le seul but de mon intervention était de m'assurer qu'encore là, pour simplifier la paperasse, la loi permettrait à la commission de garder cela sur microfilm, si elle jugeait que c'était utile.

M. French: Si j'ai bien compris, M. le Président, l'effet du changement entre l'avant-projet et le projet de loi est à l'effet de réduire quelque peu la discrétion quasi totale dont jouissait la commission sous le libellé de l'article 26 de l'avant-projet.

M. Parizeau: Oui, on peut l'interpréter comme cela. En pratique, cela rend l'obligation positive. Cela remplace cette espèce de libellé négatif de la loi actuelle par l'obligation positive. Elle doit donner un visa sauf...

M. French: M. le Président, je ne sais

pas si le président de la commission peut parler pour lui-même; j'ai une question très briève. Est-il conscient de faire tout le nécessaire pour diminuer le plus possible les délais lorsqu'il s'agit du financement des entreprises moyennes, puisqu'il y a là un rôle et une responsabilité qui sont extrêmement importants pour la commission? Je comprends que la commission est d'abord et avant tout un chien de garde, mais un chien de garde qui est trop efficace se retrouve sans rien à garder. Je veux seulement savoir, vu l'intérêt du président de la Bourse actuelle à voir plus de financement, par la voie de la Bourse, de la part des moyennes entreprises, si le président de la commission a quelques observations à faire là-dessus, surtout sur le délai.

M. Parizeau: M. le Président, puisque nous parlons de procédures administratives de la Commission des valeurs mobilières, je suggérerais que nous puissions passer la parole au président de la commission pour qu'il nous donne... Nous sortons de l'examen de la loi proprement dit, alors, on pourrait peut-être demander à M. Guy, le président de la Commission des valeurs mobilières, de présenter ses observations à ce sujet.

M. le Président, certainement. La commission a dans les derniers mois réduit au minimum la plupart des délais. Les délais pour l'examen d'un prospectus à la Commission des valeurs mobilières du Québec sont les plus courts au Canada actuellement, même dans les cas de placements de nouvelles entreprises. Habituellement, cela ne dépasse pas beaucoup un mois dans le cas de nouveaux placements, ce qui est très court. C'est évident que, dans bien des cas où il y a des délais plus longs, cela dépend beaucoup de l'émetteur, soit qu'il n'ait pas fourni les documents nécessaires, soit que les renseignements qui soient exigés dans le prospectus ne sont pas disponibles. On s'est même entendu dernièrement dans le cas de plus grandes entreprises, dans des délais réduits pour des prospectus simplifiés, à cinq jours ouvrables entre les commissions de valeurs mobilières. C'est évident qu'on fait tout le temps des efforts de façon à réduire les délais au minimum.

M. Fortier: Seulement pour continuer dans l'ordre de pensée de mon collègue, pour la plus petite entreprise qui voudrait éventuellement se prévaloir d'aller en Bourse, j'imagine qu'il y aurait deux façons de procéder, la première étant de consulter des consultants spécialisés, ou bien la commission pourrait faire oeuvre d'éducation relativement à ces nouvelles entreprises qui voudraient... Faites-vous cette oeuvre d'éducation?

M. Parizeau: M. le Président, on fait cela actuellement. On donne des renseignements aux PME, aux entreprises et aux sociétés d'exploration minière qui veulent faire appel à l'épargne du public. On prépare certaines petites brochures à l'attention de ces gens. On a participé à des colloques avec eux et, enfin, on fait tout notre possible pour réduire au minimum aussi bien les documents nécessaires que les délais.

Le Président (M. Rochefort): L'article 14 est-il adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 15.

Le Président (M. Rochefort): M. le Président, l'article 15 n'avait pas de parallèle dans la loi actuelle. Vous noterez qu'il s'agit d'encadrer, de baliser les raisons pour lesquelles la commission peut refuser de donner son visa. Il n'y avait pas d'équivalent dans la loi actuelle. On dit: Elle refuse son visa pour les raisons suivantes...

M. Fortier: Est-ce à dire que, lorsqu'elle refuse, elle fait référence à l'alinéa 1, 2 ou 3? Précise-t-elle quel alinéa s'applique dans ces cas-là? La loi doit-elle exiger cela?

M. Parizeau: Toute décision de la commission à partir de ce nouveau texte -actuellement il n'existe pas - normalement, doit être motivée. Toute décision de toutes façons est déjà motivée, mais là, il y aura des points de référence précis.

M. French: Est-ce que le ministre a terminé ses remarques préliminaires?

M. Parizeau: Sur l'article 15? M. French: Oui. M. Parizeau: Oui.

M. Fortier: J'aurais une question à poser. Si on prend par exemple: "la protection des épargnants l'exige", j'imagine que cela a dû arriver dans le passé, quelle a été la proportion des demandes qui ont été refusées? J'imagine qu'on ne demande pas à la commission d'expliciter ou de prouver l'allégation qu'elle pourrait avoir en disant qu'une demande ne doit pas être acceptée.

M. Parizeau: On pourrait fort bien imaginer une situation où la commission ayant invoqué l'article 6, l'émetteur aille devant les tribunaux. À ce moment-là, la commission doit dire: Voici...

M. Fortier: Elle peut aller devant les

tribunaux. C'était ma seconde question.

M. Parizeau: À ce moment-là, il faut justifier qu'en vertu de l'article 6, la protection de l'épargnant est en cause.

M. Fortier: Est-ce que cela s'est posé dans le passé? Est-ce qu'il y a eu des cas assez nombreux?

M. Parizeau: Ce que nous mettons dans l'article 15 est entièrement nouveau.

M. Fortier: Ma question est plus générale. Est-ce que, dans le passé, la commission a refusé...

M. Parizeau: Des visas?

M. Fortier: D'une façon générale, des visas qui ont été contestés devant les tribunaux?

M. Parizeau: Cela lui est arrivé à plusieurs reprises de refuser des visas. Maintenant, est-ce qu'il y a eu des contestations? Non. Il faut dire que j'imagine que cela n'était pas d'une facilité enfantine d'aller devant les tribunaux avec la loi actuelle. En somme, la commission pouvait dire: Je ne trouve pas cela prudent.

M. Fortier: Acceptable. M. Parizeau: Non?

M. Fortier: C'est du mauvais français. Pour quelle raison, comme vous semblez le dire, cela permettra-t-il à ceux qui font des demandes de mieux se défendre ou de mieux attaquer? Quel est le but réel de l'article 15 à ce moment-là?

M. Parizeau: Je pense que quand on détermine, quand on donne à un tribunal administratif des pouvoirs...

Une voix: Un pouvoir...

M. Fortier: ... de le baliser.

M. Parizeau: ... comme c'est le cas à la Commission des valeurs mobilières, on ne peut tout de même pas ou il n'est pas correct de dire: Vous avez, à toutes fins utiles, des pouvoirs de vie et de mort sur une émission ou sur une entreprise et vous allez faire cela selon votre bon jugement. Cela paraît un peu vaste. Il faut quand même que cela puisse s'appuyer sur des critères...

Une voix: Objectifs, le plus possible.

M. Parizeau: ... objectifs, en tous cas un peu concrets, un peu précis. La loi actuelle donnait, à cet égard, un pouvoir qui, à mon sens, était exorbitant. On ne peut pas créer des tribunaux administratifs sur cette base. Ce n'est pas correct.

M. Fortier: On se rejoint là-dessus, M. le ministre.

M. Parizeau: II faut que les gens sachent pourquoi on leur refuse un visa et en vertu de quelle disposition de la loi.

M. French: M. le Président, seulement pour enchaîner brièvement là-dessus. C'était effectivement une évolution qui n'en était pas une, telle la tradition "blue sky" des États américains à la fin du XIXe siècle. Effectivement, tu créais un inspecteur de banque qui avait le droit de vie et de mort sur la vente de toute émission ou à peu près; ce qui est maintenant vétuste, évidemment, comme pratique. Dans la même veine donc, quant à l'alinéa 5, la Bourse de Montréal a suggéré qu'il y aurait lieu de baliser encore davantage le pouvoir de la commission en amendant le cinquième alinéa, en ajoutant - quelque chose comme: le refus de visa ne sera donné que si l'opération de placement ne procure pas les fonds additionnels requis pour réaliser le but visé par l'opération de placement. Dans ce cas, la commission ne pourrait ainsi empêcher le financement d'entreprises solvables ou refuser une opération de placement destinée à restaurer la solvabilité d'une entreprise. (16 h 45)

M. Parizeau: La difficulté, M. le Président, c'est que... Enfin, les intentions sont bonnes. Mais comme critère d'application, c'est probablement plus compliqué que celui que nous avons là. Remarquez que, à titre de compromis, si c'en était un et je ne suis même pas certain que c'en soit un. Je serais bien prêt, moi, à admettre que l'émetteur ne présente pas les garanties financières nécessaires à la viabilité si on veut. Je ne suis pas certain que cela améliore tellement les choses. L'avantage de dire - ne présente pas les assises financières - par opposition à ce que dit la Bourse, c'est que là, il y a quand même une certaine latitude. On dit les assises; mais là la Bourse de Montréal veut nous entraîner, au nom d'un élargissement, elle nous entraîne dans un critère qui est plus restrictif parce que les mots sont plus précis. Si on veut être plus précis, moi, je mettrais bien les garanties financières, mais il faut comprendre que c'est toujours la même chose. Là, les intentions sont bonnes de baliser. Si on nous dit, les balises sont un peu larges, on pourrait les rendre plus précises encore. Mais oui, mais plus on rend précis, plus on va restreindre la marge de manoeuvre de la commission. Et quand il s'agit de faire un jugement sur la solvabilité

des entreprises, moi, j'aurais plutôt tendance à dire - laissons quand même un peu de latitude à la commission.

M. French: M. le Président, n'hésitez pas à me corriger si j'ai tort mais je ne vois pas dans la suggestion les mots suivants. Le refus de visa ne serait donné que si l'opération de placement ne procurent pas les fonds additionnels requis pour réaliser le but visé par l'opération de placement, non pas un jugement, non pas un standard abstrait mais une espèce du "real world". Je ne sais pas si... je vois que le ministre a des réserves là-dessus.

M. Parizeau: Ex ante.

M. French: D'accord, ex ante.

M. Parizeau: Mais là vous demandez à la commission "to play God".

M. Fortier: Messieurs, excusez-moi mais si je comprends bien ce qui est proposé ici, c'est qu'il voudrait que la commission ne porte un jugement que sur les sommes additionnelles qui viendraient s'ajouter pour réaliser une opération X, alors qu'ici l'article permet à la commission de porter un jugement sur la viabilité de l'entreprise dans son ensemble, ce qui me semble plus réaliste.

M. Parizeau: Sur les assises financières nécessaires à la viabilité. Les assises, ce peut être ce qu'il y a déjà, l'argent qui entrera. Cela laisse un peu de latitude. Si on vous demande de porter un jugement seulement sur les fonds additionnels comme le veut la Bourse, cela devient très restrictif. Ces fonds sont-ils suffisants, à l'égard d'une compagnie qui possiblement a fait des pertes dans deux ans, ou trois ans? Moi, je trouve que vous donnez une... On exige une précision foudroyante dans les jugements de la commission que le mot "assises" financières nécessaires à la viabilité n'avait pas.

M. French: On n'exige pas techniquement. Là où j'en suis, mais de dire qu'il y a fondamentalement dans la pratique une grande différence, cela, je ne suis pas sûr de cela, je ne suis pas convaincu de cela.

M. Parizeau: Dans la pratique, pour un comptable, pour un analyste financier d'un bureau de courtage qui nous écouterait, j'imagine qu'il trouverait qu'on discute du sexe des anges, je le reconnais. Ce n'est pas de cela qu'on parle, n'oublions pas cela. Ce sont les critères en vertu desquels le visa sera donné ou non. Dès qu'on touche à l'idée que l'on se fait de la viabilité de l'entreprise, grand Dieu, ne soyons pas trop précis parce que là, on demande effectivement à la commission de jouer à la fois une sorte de rôle de prophète et de dieu tout à la fois, là.

M. French: Monsieur....

M. Parizeau: Moi, je laisserais cela très large.

M. French: Je suis obligé de dire au ministre qu'on demande le même genre de jugement, quelle que soit la formulation, mais que la formulation de la Bourse a la vertu de créer une espèce de test de marché qui n'existe pas dans le jugement prima facie exigé par le libellé actuel de l'alinéa 5. Ce jugement ne sera pas plus facile ou plus difficile dans un cas ou l'autre, sauf que dans le deuxième cas...

M. Parizeau: Donc, il serait différent.

M. French: Mais dans le deuxième cas, cela va être davantage possible pour l'entreprise de démontrer que la confiance existe.

M. Parizeau: Non, parce que l'émission, ce n'est pas parce qu'on obtient un visa que l'émission va se vendre. Attention, obtenir un visa, cela ne veut pas dire que l'émission est vendue. Cela peut être un borne à cette émission.

Il s'agit de savoir si on donne un visa. Il faut faire attention de ne pas, à l'occasion de ces critères qui, je le répète, sont encore tout à fait nouveaux, faire croire au public que le "placet", quant au visa de la commission est une sorte de garantie que l'entreprise va faire beaucoup d'argent, ou même va s'en sortir ou ne fera pas faillite. C'est ce qu'il faut leur dire. C'est là où on leur demande de jouer à Dieu, autrement.

M. French: M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Westmount.

M. French: Je pense vraiment qu'il y a un malentendu. C'est probablement de ma part. Mais je voudrais au moins épuiser la question. À la section 60, sous-section II, partie C, à la page 46, de la onzième édition de "Ontario Securities Act", on lit: "The proceeds from the sale of the securities to which the prospectus relates, that are to be paid into the treasury of the issuer together with other resources of the issuer, are insufficient to accomplish the purpose of the issuer stated in the prospectus." That is it.

M. Parizeau: Oui, oui.

M. French: Ce n'est pas un test exempté qui implique un jugement d'une série d'investisseurs possibles qui donnent ou ne donnent pas leur engagement. Donc, qui donnent un vrai "test" par du vrai monde d'affaires, à partir duquel la commission est mieux placée pour rendre un jugement.

M. Parizeau: Oui, mais entendons-nous. On ne peut pas prendre la partie C, de l'article 60 de la loi ontarienne, sans tenir compte des autres. Nous avons six critères. L'Ontario en a beaucoup plus que cela, quant à la santé financière de l'entreprise ou à l'utilisation des fonds qui suivrait l'émission d'un visa, il y a plusieurs choses. Il faut prendre tout cela ensemble. Qu'on regarde le paragraphe d en même temps.

M. French: C'est-à-dire que toutes ces conditions sont cumulatives?

M. Parizeau: Bien oui.

M. French: Évidemment, ma compréhension de l'intervention de la Bourse a été...

M. Parizeau: Ce n'est pas du tout... Nous n'avions aucun critère. L'Ontario avait une page de critères. Nous avons établi six critères. Évidemment, si on peut les prendre un à un, on ne va pas les retrouver exactement comme cela est fait en Ontario, n'est-ce-pas?

M. French; D'accord.

M. Parizeau: Mais je ne vous cacherai pas que, là-dessus, je trouve que plus on veut partir de 0 critère et arriver à des choses très très précises ou trop précises, il y a un danger de vouloir régler un problème en en créant un autre. Il me semble, quand on aborde la question de la solvabilité de l'entreprise ou de sa santé financière, dans un domaine où nous ne sommes jamais intervenus jusqu'à maintenant au plan des critères de visa - c'est la première fois que cela apparaît - que nous ne devrions pas être trop spécifiques pour commencer.

M. French: M. le Président, je suis tout à fait d'accord avec le ministre. Je lui souligne tout simplement, dans les interventions de la Bourse, telles que nous les avons comprises et je pense que notre compréhension est correcte, que les réserves qu'il fallait émettre sur le contexte de la recommandation ne sont pas du tout présentes. Si on avait bien examiné la Ontario Securities Act, qu'eux prétendaient utiliser pour se baser quant à la recommandation, on aurait tout de suite bien compris que cela ne marche pas.

Tout simplement sur le libellé actuel de l'alinéa 5, je suis un peu curieux de savoir si on ne devrait pas plutôt dire ou faire une référence quelconque à la viabilité de l'entreprise de financement additionnel plutôt que la viabilité de son entreprise. Puisque l'entreprise existe, ne devrait-on pas conclure que les assises financières sont au moins à l'heure zéro, si elles sont suffisantes. Il me semble qu'il y a une espèce de problème logique dans l'alinéa 5.

L'entreprise veut faire un financement et ce financement pourrait être pour une expansion. Pourquoi la commission, à ce moment-là, serait-elle appelée à juger si les assises financières actuelles d'une telle entreprise sont suffisantes?

M. Parizeau: Ce qui est dit dans 5, ce ne sont pas les assises financières actuelles. Le mot "actuelles" n'est pas là. Ce sont "les assises financières nécessaires". Alors là, il faut établir toutes espèces de cas. Il faut faire attention non pas à un seul cas là-dedans; il faut tenir compte de l'entreprise qui commence, qui n'a pas un sou, d'une entreprise qui est déjà en place. On doit tenir compte en somme des circonstances. Il faut qu'on ait une phrase qui soit suffisamment large pour être capable de tenir compte de l'ensemble des différences de circonstances. Je le répète encore une fois. Ce ne sont pas les assises financières actuelles, ce sont les assises financières nécessaires.

M. French: Autrement dit, son entreprise, c'est sa proposition de financement.

M. Parizeau: Voilà.

M. French: J'ai mal lu l'article. Je vous remercie, M. le ministre.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cela dispose de l'article 15?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. L'article 16.

M. Parizeau: M. le Président, est-ce que nous revenons à l'article 4, maintenant que le député de Vaudreuil-Soulanges est revenu ou si nous continuons nous y revenons plus tard?

Le Président (M. Rochefort): Je continue, j'appelle l'article 16.

M. Parizeau: Nous avions ici une proposition de la Bourse. M. le Président, étant donné que la Bourse nous avait fait

des propositions, ce matin, dans son mémoire à l'effet qu'elle a déjà eu l'occasion d'en discuter avec la commission, je demanderais de mon côté maintenant, une minute de consultation avec mes acolytes à ce sujet. (17 heures)

M. le Président, ce matin, le président de la Bourse me soulignait l'intérêt qu'il y aurait selon lui à ce que la Bourse puisse, en vertu d'un pouvoir délégué par la Commission des valeurs mobilières, autoriser une émission basée sur un document comportant des renseignements sur l'état de la compagnie et qui serait agréé par la Bourse. Dans la mesure où ces renseignements seraient disponibles, seraient acceptés par la Bourse comme correspondant au document fourni aux investisseurs, à ce moment, disait le président de la Bourse - si je l'interprète correctement - il ne serait pas nécessaire qu'il y ait un prospectus préparé pour la Commission des valeurs mobilières et visé à nouveau par la Commission des valeurs mobilières; dans le but d'éviter en somme une double administration.

Il faut bien comprendre une chose. L'idée est manifestement dans l'air. Il est clair qu'en Ontario des pressions ont lieu à cet effet. Mais ce n'est pas accepté en Ontario. La loi ontarienne ne dit pas cela. La loi ontarienne ressemble exactement à ce que nous avons devant nous. Il y a actuellement de la part de la Bourse de Toronto des démarches qui sont faites à cet effet et on me dit qu'il y a une audience publique de la commission de l'Ontario, justement aujourd'hui, sur la question. On veut en somme, en un certain sens, nous faire anticiper ce qui pourrait se produire ailleurs.

On me dit qu'en vertu à la fois de la loi actuelle et de la loi que nous avons devant nous, rien n'empêche que la Commision des valeurs mobilières et la Bourse s'entendent sur des renseignements simplifiés qui puissent être adoptés de part et d'autre comme étant le type de renseignements que des entreprises, dans certaines circonstances, doivent fournir, et actuellement cela se fait sur cette base. Ce que les Bourses, pas seulement la Bourse de Montréal, voudraient avoir, c'est un pouvoir délégué; ce qui va plus loin.

Je ne suis pas très certain qu'il soit utile que nous innovions à cet égard. Il me semblerait plus utile que la Commission des valeurs mobilières et la Bourse de Montréal s'entendent. On s'entend tous sur la nécessité de simplifier. On s'entend tous sur le fait que cela doit coûter le moins cher possible. On s'entend tous sur le fait que, pour les petites et moyennes entreprises, les coûts peuvent être relativement élevés pour préparer une première émission. Sur cette base-là, ayons des prospectus simplifiés comme c'est déjà le cas avec la Commission des valeurs mobilières du Québec. Faisons en sorte que la Bourse et la Commission des valeurs mobilières s'entendent sur une formule commune. Mais de là à introduire dans la loi un pouvoir délégué, cela ne me paraît peut-être pas nécessairement mauvais, mais un peu prématuré. On ne sait pas directement dans quoi on saute avec cela. Et dans ce sens, je préférerais laisser de côté l'amendement qui nous était proposé par la Bourse ce matin. Je ne suis pas certain que cela soit un domaine où il est absolument nécessaire que nous innovions. Dans ce sens, le texte de l'article 16, tel que nous l'avons devant nous, reprend l'article 68 de la loi de l'Ontario.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président. J'ai été un peu frappé de voir comment, entre les prémisses et la conclusion, le discours du ministre m'a semblé changer. Si nous nous entendons tous pour reconnaître les difficultés de financement des PME, si nous nous entendons tous qu'il faut faire quelque chose, la conclusion dans la langue de Shakespeare est: why don't you do something about it? II me semblait que si on peut y faire quelque chose, si on peut apporter des changements, l'occasion était rêvée, étant donné qu'il y a des précédents, étant donné - comme l'a souligné le président de la Bourse, on revient là-dessus - que les expériences qui ont pu avoir lieu dans d'autres juridictions ont été -à son sens - concluantes à certains égards pour élargir quelque peu l'accès des marchés financiers, donc au marché de l'épargne, à des entreprises qui, par ailleurs, ne pourraient pas aussi facilement y avoir accès. Il me semble, on ne peut pas dire à titre expérimental mais très certainement à titre indicatif, devoir permettre à la commission, d'ores et déjà, d'établir une façon de permettre à la Bourse de Montréal, à titre d'exemple, de faire l'expérience du dressage de documentation, de l'encadrement à venir qui assurerait effectivement de répondre aux désirs d'un grand nombre de PME. Si le plan Biron avait un sens, il n'en a plus aujourd'hui; je parle du plan Biron original, celui de la campagne électorale, non pas celui de la prise en charge des emprunts des entreprises. Il me semble qu'il n'a plus aucun sens, qu'il est totalement dénué de fondement dans la réalité, si on n'en a pas encore franchi les étapes. On ne parle pas de bourses régionales comme il en était question dans le plan Biron, on parle simplement de la Bourse de Montréal qui, au moins, s'ouvrirait quelque peu à des gens qui, par ailleurs, n'ont pas l'occasion de faire appel à l'épargne des Québécois par ce mécanisme.

M. Parizeau: M. le Président, on me souligne qu'il y a peut-être lieu d'y aller

avec une certaine prudence dans ce domaine. Quand on dit qu'il faut faire quelque chose, oui, bien sûr; c'est pour cela d'ailleurs que la Commission des valeurs mobilières a considérablement simplifié ses prospectus. J'ai été à même de voir dans le cas de la mise en place du régime d'épargne-actions, parce que cela s'est fait à peu près en même temps, à quel point la simplification avait été considérable. Qu'on puisse encore faire davantage dans ce domaine, que la Bourse et la Commission des valeurs mobilières puissent vivre une harmonie de plus en plus grande, cela, je le veux bien, mais on n'a pas besoin d'une loi pour cela. Seulement, les expériences qui ont été faites ailleurs ne sont pas toutes aussi emballantes qu'on pourrait l'imaginer. On signale, par exemple, que certaines tentatives de délégation qui ont été faites en Colombie britannique ont donné lieu à des expériences, au contraire, épouvantables. Il y a toute une série d'enquête à l'heure actuelle, en Colombie britannique, sur un certain nombre de financements qui ont été acceptés par la Bourse de là-bas.

M. French: Lorsque vous investissez là-bas, vous n'avez pas besoin de délégation de pouvoir pour faire des dégâts. C'est fait sous l'égide de la commission même.

M. Parizeau: Mais là, on me dit que, justement à la suite de certaines expériences qui ont été faites en Colombie britannique, les résultats ne sont pas concluants du tout. Quant à faire comme cela de grands sauts dans des choses nouvelles, je ne vous cacherai pas que pour cet article, comme pour bien d'autres dans la loi, je préfère y aller avec une certaine prudence: qu'elle ait besoin d'être modernisée, bien! qu'on doive l'aligner sur des commissions de valeurs mobilières qui nous paraisssent fonctionner correctement, parfait! Mais des expériences dans ce domaine, à moins que vraiment cela ne crève les yeux, pourquoi ne pas être un peu prudent?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, sans compter qu'on pourrait dire en pratique qu'on ne peut pas envisager aujourd'hui qu'à brève échéance les marchés financiers seront inondés par des PME en quête de l'épargne des Québécois, par les temps qui courent. Ce qui me laisse soupçonner que les cas seraient très peu nombreux, donc par définition susceptibles, étant donné un échantillonnage très restreint, de faire l'objet de certains contrôles, donc de mesures plus adéquates, donc il n'y aurait pas de danger de "stampede" ou d'émeute sur le parquet de la Bourse, de quelque façon que ce soit. Je ne vois pas que l'innovation dont le ministre veut se garder, pour l'instant, aurait des effets aussi néfastes qu'il ne semble le craindre.

M. Parizeau: Je ne sais pas. Il suffit simplement de deux ou trois cas qui tournent au sur et cela a un effet qui est pire, en un certain sens, que n'importe quoi, parce que cela se répand, cela fait des ondes.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Cela peut se répéter, disons, ou des choses comme celle-là.

M. Parizeau: Si ce n'étaient que des choses comme celle-là... À notre époque, il y a bien des gens qui font des déficits, ce ne sont pas deux ou trois cas, mais des émissions qui sont faites et qui ne correspondent pas, comment dire? à ce que des critères d'éthique prévus par la loi doivent comporter. C'est plus sérieux quand il s'agit de la crédibilité des institutions. Nous avons une Bourse à Montréal à l'heure actuelle qui a, depuis quelques années, une excellente réputation. Cela n'a pas toujours été le cas. Nous avons une Commission des valeurs mobilières qui n'a pas toujours eu une excellente réputation. Elle l'a actuellement, elle l'a depuis plusieurs années, mais cela n'a pas toujours été le cas. Il y a des leçons à tirer du passé. Je comprends que je parle ici d'un passé assez lointain. Mais quelques cas assez douloureux, il y a 20 ou 25 ans, ont probablement contribué davantage au développement de la Bourse de Toronto par rapport à celle de Montréal que n'importe quoi d'autre. Il vaut peut-être mieux, encore une fois, ne pas innover trop quand on sait que certaines des expériences actuelles ne sont pas, comment dire? à ce point probantes. Si je comprends bien ce qui s'est passé depuis quelque temps, depuis le début de l'année, cela me fait hésiter un peu. On serait peut-être mieux d'amener des organismes gouvernementaux comme la Commission des valeurs mobilières et des organismes publics comme la Bourse de Montréal à s'entendre sur une base de coopération où on ne délègue pas trop et voir comment cela fonctionne et si tant est que cela a donné des résultats excellents, on verra.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre est-il en train de nous indiquer que les dispositions qui sont devant nous ouvrent la porte à une expérience comme celle que suggère la...

M. Parizeau: C'est simplement la porte de la délégation qui est embêtante. La délégation ouverte, on ne peut pas déléguer pour trois ou quatre compagnies par année. Il est évident que la délégation ne pourrait pas être du genre on vous déléguera à titre de quatre dossiers par an; si on délègue, on délègue. On ouvre tout.

Je ne suis pas certain que cela soit sage. Nous avons maintenant une bourse qui fonctionne bien, une Commission des valeurs mobilières qui a bonne réputation. Avant de commencer à bouleverser les rapports, gardons donc cela comme cela.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Dans quel contexte, le ministre trouvera-t-il que les expériences qu'on voit ailleurs seront probantes, dans un sens qui pourrait donner lieu à la délégation à la Bourse de Montréal du genre de documentation requis pour l'émission qu'elle suggère?

M. Parizeau: Probablement le fait que, pendant un certain nombre d'années, la Commission des valeurs mobilières et la Bourse s'entendraient parfaitement bien sur le genre de renseignements qui doivent être obtenus et qu'elles aient constaté de part et d'autre que ces renseignements sont suffisants, sont corrects, renseignent suffisamment bien le public. Dans cette opération de simplification, encore une fois, sur laquelle nous nous entendons tous, il arrive à un moment donné où dans la simplification il n'y en a pas assez. Où est-il ce point-là? Est-ce qu'on pourrait le jauger ensemble? C'est très joli de simplifier, mais il arrivera à un moment donné dans la simplification où il n'y en aura plus suffisamment. Il faudra s'arrêter avant d'arriver à ce point-là. Tout le monde a intérêt à simplifier les choses à l'heure actuelle. Tout le monde se plaint de la complexité des choses. Bon, très bien, on en est. Mais faisons cela sous la surveillance de la Commission des valeurs mobilières et arrêtons nous, essayons de nous arrêter juste avant que le simple ne devienne insuffisant.

M. French: M. le Président, la Bourse, dans son discours à ce sujet, prétend qu'il y a entre les juridictions canadiennes dans ce domaine certaines anomalies et certaines incohérences qui font en sorte que certaines entreprises ne voudraient pas se donner la peine de se financer au Québec. Il y a là une racine ou une cause de balkanisation des marchés financiers en raison des contraintes réglementaires. Le ministre prétend que la Bourse a quelque peu - je ne veux pas mettre les mots dans sa bouche - anticipé les développements ontariens et qu'en effet, ce qui est devant nous comme dispositions, le projet de loi no 85, est l'essentiel du statu quo en Ontario.

M. Parizeau: C'est cela.

M. French: Donc, peut-il m'expliquer de quelle source vient cette impression de la Bourse de témoigner d'une balkanisation des marchés financiers à cause des contraintes réglementaires?

M. Parizeau: Nous abordons un autre sujet. Cela, c'est tout à fait autre chose. Il est tout à fait clair que l'évolution assez rapide, finalement, au cours des dernières années, de la législation des valeurs mobilières en Ontario, au contraire, l'absence presque totale de changement au Québec dans nos lois, ont créé des écarts sur le plan législatif qui sont très importants. Il est vrai aussi qu'il y a eu, à une certaine époque, des tentatives dans certaines provinces de l'Ouest de voter des législations oriqinales, différentes de celle de Toronto. À une certaine époque, je pense ici aux années soixante, je me demandais parfois si ce n'était pas dû simplement au fait qu'on tenait pour acquis - j'exagère et je caricature bien sûr - que si c'est à Toronto, c'est mauvais et donc, il faut faire autre chose. On voyait apparaître dans l'Ouest - je pense à une province en particulier - qu'il était très simple, quand on voulait leur faire faire quelque chose, de leur dire qu'en Ontario c'était comme cela et ils faisaient le contraire. (17 h 15)

II y a eu un risque de balkanisation considérable, tellement important que, à ma connaissance, au moins deux ministres fédéraux des Finances ont fait préparer à un moment donné des lois sur les valeurs mobilières canadiennes fédérales et ont cherché à établir, un peu sur le modèle de la SEC, une commission fédérale des valeurs mobilières. L'argument, invariablement, était d'éviter la balkanisation, une balkanisation qui, encore une fois, à une certaine époque était loin d'être absente, qui avait l'air, au contraire, de proliférer. Sauf erreur, la dernière tentative en ce sens était celle de M. Turner. Je peux me tromper, mais il me semble bien que c'est M. Turner qui a été le dernier à proposer cela.

Les provinces ont toujours été extraordinairement récalcitrantes à cela à un point tel, d'ailleurs - cela appartient à la petite histoire; cela ne s'est pas produit, mais c'est amusant de le penser - qu'à une certaine époque, je pense ici à la fin des années soixante, on en est même arrivé à une situation où plusieurs provinces étaient disposées à rendre leur juridiction sur les valeurs mobilières à l'Ontario plutôt que de la passer au fédéral. Il y a déjà eu à une conférence fédérale-provinciale, une proposition en ce sens, de dire: Plutôt l'Ontario qu'Ottawa. Cela n'a pas abouti. Cela eut été plutôt surprenant. Mais, c'est seulement pour indiquer jusqu'où cela allait. Dans l'intervalle, pour éviter les tentations de la part d'Ottawa et d'autre part, pour éviter cette situation qui, je l'admets, aurait peut-être été un peu baroque, de voir Toronto diriger les valeurs mobilières dans l'ensemble du Canada, on est arrivé à quelque chose de beaucoup plus simple, c'est-

à-dire un rapprochement graduel des lois sur les valeurs mobilières. L'exercice que nous commençons aujourd'hui est tout à fait dans cette voie-là. Au fond, la modernisation que nous apportons à des lois qui n'avaient pas beaucoup changé - l'essentiel est quoi? 55 de notre loi actuelle - cela vise quoi? Cela vise à moderniser au sens large si on veut, mais on notera à quel point cela nous rapproche graduellement de cette législation ontarienne dont il faut reconnaître - qu'on le veuille ou pas, il faut quand même être réaliste - que c'est la législation dominante au Canada depuis déjà plusieurs années. Alors, on s'en rapproche à bien des égards.

L'exercice auquel nous nous livrons ne va pas dans le sens d'une balkanisation accrue; au contraire, il va dans le sens d'une réduction de la balkanisation. Je pense, d'ailleurs, que c'est la seule façon d'éviter que les pressions deviennent trop fortes pour l'établissement d'une SEC canadienne qui, pour encore une fois, périodiquement revient. Alors, le risque de balkanisation, pour le moment, je ne le vois pas. Au contraire, je vois qu'il y a une disparition graduelle de la balkanisation qui, sur ce plan, est une excellente chose, d'ailleurs. En d'autres domaines, la balkanisation peut avoir des avantages, mais sûrement pas dans ce domaine-là.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): J'aurais quand même tendance à privilégier étrangement la balkanisation si on pouvait se rendre au désir de la Bourse de Montréal. Cela m'apparaît comme une chose d'innovateur; cela m'apparaît comme quelque chose, si on s'imagine qu'on a les talents et les moyens de contrôler cela, et je pense qu'on les a, et de faire preuve de leadership quant à l'accès au marché financier... Cela demeure le problème de fond, notamment, parce que le gouvernement se plaît à répéter qu'on est le paradis de la PME, même si on pouvait vous faire la démonstration qu'il y en a autant ailleurs qui ont les mêmes difficultés de financement, sans aucun doute, que celles du Québec. Si on pouvait attirer ici, non seulement celles qui, aujourd'hui, pourraient en bénéficier, mais celles qui, très bientôt, avec des virages ou des sparages technologiques, seront appelées à se lancer dans des aventures - appelons-les par leur nom - qui nécessiteront des capitaux, qui nécessiteront la prise d'un risque certain par un tas d'investisseurs... Il me semble qu'on doit trouver un débouché pour ces gens. Si l'appui qu'on veut donner ici au Québec et partout ailleurs, de toute façon, à la prolifération d'entreprises de haute technologique, donc, qui auront à parcourir des eaux inconnues avec tous les risques que cela comporte... Cela va appeler nécessairement de nouvelles formes pour faciliter l'accès à des capitaux.

Il ne faut pas se dire que c'est simplement par des programmes d'aide et de subventions gouvernementaux qu'on va financer tout ce beau monde-là. Il me semble que toute la société en dehors du gouvernement est également habilitée à prendre des risques, est également habilitée à évaluer quels sont les risques que les gens sont prêts à prendre pour participer au développement de la haute technologie ici, chez nous. Et, par ce mécanisme qui est encore une fois suggéré par M. Lortie et ses collègues à la Bourse, ouvrir cette porte m'apparaît, à la lumière de ce fait additionnel que j'évoque, une chose souhaitable qui devrait amener, au moins, le ministre à reconsidérer, beaucoup plus qu'à la lumière d'expériences probantes sur une longue période de temps qui viendraient de l'extérieur, sa décision.

M. Parizeau: M. le Président, je pense qu'il faut aussi tenir compte du fait qu'il y a bien des façons, si on veut augmenter le capital-actions d'une PME ou accroître son équité, autres que le recours à la Bourse. En fait, en pratique, la plupart des façons sont autres que la Bourse. On peut le déplorer, mais, enfin, c'est comme cela. L'apport de capital-actions de la Société de développement industriel, chaque année, à des petites ou des moyennes entreprises est certainement bien plus important que le nombre de petites entreprises qui, par le truchement de la Bourse, iront chercher de l'équité additionnelle. Il n'y a pas de commune mesure. La liste... Comment?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est un raisonnement circulaire. C'est la poule et l'oeuf, dans le sens que, évidemment, s'ils n'ont pas accès au marché de la Bourse, ils vont être obligés de se tourner vers la SDI.

M. Parizeau: Non, non. On sait très bien, sur la base de l'expérience passée, il ne faut pas non plus rêver en couleur, que le nombre d'ajouts à la liste des actions à la Bourse de Montréal, depuis fort longtemps -ou à la Bourse de Toronto, d'ailleurs, il ne faut pas se faire d'illusions - est relativement peu de chose par rapport au nombre de petites et moyennes entreprises qui vont acquérir de l'équité dans le courant d'une année. En simplifiant le prospectus, en réduisant le coût d'émission, on se dit: On pourrait peut-être en apporter quelques-unes de plus. Mais il fallait écouter M. Lortie ce matin. Que disait-il? À notre échelle, cela devrait être six par année et ce n'est pas six par année, c'est une ou deux. Bon! Si l'objectif est de six par année, comparons cela au nombre de PME dans lesquelles la SDI met du capital-actions chaque année, vous allez trouver que c'est pas mal plus que cela. La soi-disant liste de PME dans laquelle la Caisse de dépôt investit chaque

année dans des placements privés, c'est bien plus que cela. Le placement privé, d'une façon générale, joue bien plus de rôles que le placement boursier pour accroître...

Pour un avenir prévisible, cela sera comme cela. Les avantages fiscaux donnés par le programme d'épargne-actions sont venus s'ajouter à cela, cette fois-ci, en dehors du cadre public. Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas rendre l'accès à la Bourse aussi facile que possible, cela ne veut pas dire cela, mais il ne faut pas non plus s'imaginer que c'est le "pain-killer", que c'est cela qui va ramasser le capital de risque dont les PME ont besoin. L'essentiel du capital de risque, ce n'est pas par la Bourse que les PME vont le chercher, à l'heure actuelle, et quelles que soient les modifications qu'on puisse apporter à la Bourse, dans un avenir prévisible, ce n'est pas là non plus qu'elles vont aller le chercher, pour l'immense majorité d'entre elles. Ce que je disais simplement, c'est: Trouvons le moyen de simplifier les choses. La commission a déjà fait un bon bout de chemin à cet égard. Que la commission et la Bourse s'entendent pour les simplifier encore davantage. Mais il reste que, dans le processus de simplification, à un moment donné, on va être tenté d'aller trop loin. Là, je souhaiterais vivement que la Commission des valeurs mobilières soit capable de dire: Passé ce point, c'est non. Cela se lie très mal à une sorte de délégation générale comme celle qu'on nous présentait ce matin. Sur l'objectif, on est d'accord, je ne suis pas certain que le procédé soit le bon.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cela dispose de l'article 15?

Une voix: Non.

Le Président (M. Rochefort): Non.

M. French: L'article 16.

Le Président (M. Rochefort): Seize, excusez-moi.

M. French: Est-ce que cela peut vous réconforter, M. le Président?

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II me semble, à la suite des remarques du ministre, qu'on néglige de faire la distinction entre "seed money", le premier apport de capital qui, effectivement, se fait généralement, je suis entièrement d'accord, par voie de placements privés, par voie de subventions gouvernementales, par voie d'une facette d'un programme gouvernemental comme celui que la SDI, récemment, a décidé de se donner. Mais, il ne faut quand même pas oublier le deuxième ou le troisième appel de fonds comme une croissance de quelque chose qui a beaucoup de succès. C'est bien connu que cela a beaucoup de succès. Cela a des retombées. Cela fait qu'il y a un tas de gens qui, dans le public et non pas simplement dans le public au sens des citoyens et non pas dans le sens du secteur public, entendent parler de ce nouveau succès et aimeraient avoir l'occasion d'y participer, que le deuxième appel de fonds, dans des circonstances comme celles-là, le troisième, le quatrième, l'étagement des appels à l'épargne, d'une façon ou de l'autre, sont de plus en plus substantiels. S'il y a succès, nécessairement, si on parle de haute technologie à titre d'exemple, s'il y a un succès, on parle de croissance foudroyante possible auquel cas ce sont des appels de fonds massifs dans les phases croissantes de ces entreprises dont on parle et il me semble que ce deuxième ou troisième appel a beaucoup plus de chances de se concrétiser, non exclusivement par un apport additionnel de la SDI ou quelqu'un d'autre, mais il me semble d'un champ beaucoup plus large qui se retrouve évidemment sur les parquets des Bourses et dans ce sens, on retrouve encore le même problème, c'est que même si on constate qu'effectivement dans ces domaines, au départ, c'est très difficile de prétendre qu'on connaîtra des succès foudroyants, il me semble qu'il faut quand même mettre en place la possibilité pour ces entreprises dans la deuxième phase de leur appel de fonds d'avoir accès à cette source additionnelle. On ne parle pas que de la prise de risques initiale, dans le saut dans l'inconnu, c'est-à-dire pour les épargnants. Je pense qu'on parle d'un saut avec risque calculé dans quelque chose d'un peu plus connu.

M. Parizeau: M. le Président, si on parle de deuxième, troisième, quatrième appel de fonds, on entre des entreprises effectivement plus connues et moi, je dis au député de Vaudreuil-Soulanges qu'il sait comme moi qu'il y a des raisons fondamentales pour lesquelles il n'y a pas davantage de ces entreprises qui vont s'inscrire en Bourse, c'est qu'elles ne veulent pas. Ce n'est pas une question de coût. Rendues à la taille qu'elles ont habituellement, ce n'est pas parce qu'elles doivent préparer un prospectus que cela les empêche d'aller à la Bourse. Pourquoi est-ce qu'elles ne veulent pas aller à la Bourse? Il y a des raisons bien plus fondamentales que cela. D'abord, la famille ne veut pas lâcher le contrôle. Et elle est prête à mettre des émissions à la Bourse à condition que ce soit 15%. Alors, trois frères et une soeur ont le contrôle des dividendes et on demande s'il y a des amateurs qui veulent devenir minoritaires à 15% dans une compagnie comme cela. On est tout surpris de voir qu'il n'y en a pas beaucoup.

On va arrêter de se raconter des

histoires. J'ai quand même vécu aussi un peu dans ce milieu. Combien d'années cela a-t-il pris pour que Bombardier ait des actions à la Bourse? C'était devenu une grosse boîte avant qu'elle en mette et encore, elle en a mis gros comme cela. Elle a réussi à les vendre parce qu'à ce moment on était en pleine expansion du ski-doo. Pour Steinberg, cela a pris combien d'années avant d'émettre des actions à la Bourse? L'entreprise était déjà gigantesque avant qu'elle s'inscrive en Bourse. Et c'est le cas d'un très grand nombre d'entreprises où soit la famille, soit les fondateurs se disent: On aimerait bien un apport de fonds mais on voudrait garder le contrôle. Des choses comme celles-là sont infiniment plus importantes que de savoir si le coût d'un prospectus a fait reculer Steinberg ou pas. Là, vraiment, tout de même.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II ne me semble pas que c'était l'exemple que j'avais à l'esprit.

M. Parizeau: Non, non, mais enfin, il faut être un peu réaliste. Les résistances de s'inscrire en Bourse sont bien plus souvent passées, si on parle de deuxième, troisième, quatrième financement. D'abord qu'une entreprise est déjà en très forte expansion, c'est bien plus souvent venu de questions de gens qui voulaient garder le contrôle que du coût du prospectus quant à la taille de l'entreprise à ce moment. Je ne me fais aucune espèce d'illusion sur cela. Je pense qu'on est tous assez réalistes autour de la table pour le savoir.

M. French: Sur division.

Le Président (M. Rochefort): Article 16 adopté sur division? Article 17.

M. Parizeau: Ce n'est rien de...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, cela va me donner une excuse pour parler d'autre chose qui aurait peut-être dû être amené un peu plus tôt. J'avais pris une note après la lecture d'un article dans Les Affaires de juillet dernier. J'évoquais tout à l'heure la possibilité pour les épargnants québécois de participer par voie d'investissement dans les entreprises à haute technologie. On sait qu'elles ne peuvent pas exclusivement ou nécessairement venir de chez nous, que ce n'est pas nécessairement dans des entreprises québécoises à haute technologie que les Québécois peuvent décider d'investir par la voie du marché boursier et j'avais été frappé, étant donné qu'on vit quand même en Amérique du Nord, que no.tre langue est minoritaire, qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse? Que les prospectus de la Bourse devaient être déposés à la commission en français. Évidemment, conformément à la loi no 101 qu'on donnait à titre d'exemple. C'était en juillet dernier cela. L'exemple de Ampal-American Israel Corporation qui ne pouvait donc pas distribuer, vendre au Québec, 30 000 000 $ US de débentures et pour 7 000 000 $ US, des unités composées d'actions et de débentures, étant donné qu'elle refusait, à ce moment-là, de déposer un prospectus en français. (17 h 30)

Je me demandais jusqu'à quel point les exigences de la Charte de la langue française restreignaient quelque peu l'accès, pour les épargnants québécois, à des occasions d'investissement très réelles pouvant venir de notre côté, étant donné qu'il semblerait, à la simple lecture de ce rapport, que la commission ne semble pas faire d'exception, quelle que soit la qualité du placement possible, quel que soit le nombre, grand ou petit, d'investisseurs québécois qui aimeraient participer à une émission qui traîne dans le portrait. Elle peut traîner autant ici qu'à Toronto ou ailleurs. Pourquoi donc réserver, à cause de certaines exigences de nos lois linguistiques, aux Ontariens ou aux anglophones en général, des occasions d'investir dans certains secteurs?

M. Parizeau: On ne parle pas d'investir dans certains secteurs, pour des entreprises comme celles-là. Elles viennent ramasser des fonds et non en investir. Ce qu'elles veulent, c'est faire des émissions. Où vont-elles investir? C'est une autre paire de manches. La commission ne donne pas des visas en disant: On vous le donne, à condition que vous vous construisiez une usine ici.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): L'épargnant au Québec.

M. Parizeau: Ce n'est pas ce dont on parle. On parle de l'épargnant.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, l'épargnant.

M. Parizeau: C'est une longue histoire chez nous. On disait cela au sujet des boîtes de "corn flakes" autrefois, que si elles portaient une étiquette française, cela coûterait tellement cher aux fabricants de Kellogg que les petits Québécois ne pourraient pas manger du "corn flakes". On a imposé cela et finalement, le français apparaît sur les boîtes de "corn flakes" et on continue à en manger.

On nous a dit: C'est épouvantable, le coût va être effrayant. Une fois que la décision a été prise, on n'a plus jamais entendu parler du coût. On a eu la même chose avec le système métrique, récemment.

C'est affolant, le système métrique. Cela va ruiner le petit commerce; enfin, tout ce qu'on veut. Une fois que tout le monde s'y est habitué, tout le monde s'y est habitué. En fait, c'est la même chose.

En somme, lorsqu'on nous dit qu'une entreprise voudrait sortir 30 000 000 $ de debentures, 7 000 000 $ de capital-actions, et que le coût de la traduction du prospectus va être tel pour des montants pareils que cela risque de mettre en péril l'intérêt qu'elle pourrait avoir, je ne le crois pas un seul instant.

Je viens d'apprendre que la commission, néanmoins, après avoir examiné le cas, a autorisé ces personnes à procéder, même si ce n'était pas en français, à la condition que la prochaine fois ce soit en français, ce à quoi elles ont consenti, d'ailleurs. Je ne suis pas certain que je sois d'accord avec la commission. Non, parce qu'il n'y a pas de raison. Cela fait partie des niaiseries de notre milieu que l'on transmet de génération en génération, avec alacrité, en considérant que le français, sur le plan des affair.es, ce n'est pas tout à fait aussi mal, mais presque, que les maladies vénériennes pour la santé publique. Je ne l'ai jamais cru. Je trouve cela navrant. Cela revient à chaque génération qui a ses thèmes, n'est-ce pas? Mais, qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse? À un moment donné, il faut prendre l'habitude de vivre avec la niaiserie. La prochaine génération, j'imagine, aura aussi ses mythes et ses thèmes. À ce moment-là, je ne sais pas exactement ce qu'on ne pourra pas faire en français, jusqu'à ce qu'on décide de le faire.

Mais, encore une fois, sur une émission de 30 000 000 $ de débentures et 7 000 000 $ d'actions ordinaires, traduire un prospectus, y a rien là: Voyons! Pensez-vous que, si ces gens en étaient rendus à aller chercher de l'argent chez les Danois, ils n'iraient pas le ramasser en danois? Pour 37 000 000 $, monsieur, il n'y a rien qu'on ne ferait pas, même traduire en français.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui. J'ai posé cette question à dessein, étant donné que j'étais au courant. Je savais pertinemment que la commission faisait preuve de flexibilité. Dans le cas présent, je ne sais pas si je rejoins le ministre ou la commission exactement, mais chose certaine, dans d'autres cas, on pourra nous le confirmer, la commission a dit: Le prospectus préliminaire se promène en anglais. Une nouvelle émission est en train d'être placée. Si vous pouviez le traduire éventuellement, étant donné que l'émission est toute placée ou à peu près, c'est acceptable. C'est un argument qui revient souvent, l'argument de minimis quant au coût de la traduction, il y a aussi un coût humain très réel lorsqu'on se consacre à la traduction. Je l'ai vécu dans l'autre sens. D'abord, on le fait en français et, évidemment, on voulait aller sur le marché ontarien, il fallait donc le traduire en anglais. Il est entendu que le coût en dollars, si l'émission est importante, est insignifiant; mais, pendant ce temps, vous avez des ressources dans nos entreprises et chez nos courtiers - les bureaux d'avocats s'arrangeront - dans le fond, qui sont préoccupées par le besoin d'être absolument, en tous points, conformes à la législation. Ceci appelle une attention soutenue à la langue employée, que la responsabilité demeure celle du dirigeant de la société émettrice qui signe le prospectus, etc., avec ce que cela signifie, il est évident, à mon sens... Ce n'est pas tellement l'argument du coût qui me préoccupe, c'est la façon dont on peut se couper, parce que cela se déroule très vite une émission... Il faut que le "timing" soit parfait, il faut que les conditions du marché soient réunies, il faut que tout l'appareil soit en place et, pendant ce temps-là, quand des gens dans les entreprises se préoccupent de le faire dans les deux langues... Que ce soit dans un sens ou dans l'autre, vers l'anglais ou vers le français, cela devient extrêmement ennuyeux. Il y a la reconnaissance, par ailleurs, que le marché, pour les grandes choses qui ont une portée d'un océan à l'autre sur le territoire du Canada, a tendance, c'est inévitable, à se faire surtout en anglais, auquel cas si les Québécois décident d'y participer par le biais de leurs épargnes - on ne parle d'investir ici, on parle d'investir dans quelque chose qui peut être ailleurs mais qui procure un rendement aux Québécois - il me semble que si on dresse une barrière tant soit peu importante - je ne veux pas en faire de drame effectivement; le ministre me comprend, il me connaît - il demeure qu'on est désavantagé un petit peu à cause de ces exigences. C'est tout.

M. Parizeau: J'aurais presque le goût de tourner cela en boutade. Je comprends très bien ce que dit le député de Vaudreuil-Soulanges, que ces histoires de traduction peuvent des fois être passablement compliquées pour ceux qui ont à administrer les entreprises. Je suggère qu'ils fassent comme beaucoup de chefs d'entreprise que j'ai connus à l'époque où j'étais jeune professeur d'université, fort mal payé d'ailleurs: Qu'est-ce que j'ai pu en faire de la traduction, mais qu'est-ce que j'ai pu en fairel Et c'est parfait comme cela, les directeurs d'entreprise ont l'esprit parfaitement libre et cela ajoute du beurre sur les épinards pour toute espèce de professeurs d'université spécialisés, ce qui fait très bien. J'ai été jusqu'à traduire le rapport annuel de la Banque du Canada en quatre jours sur ce principe-là et comme

cela le gouverneur de la banque avait l'esprit parfaitement libre.

Est-ce qu'on peut approuver l'article 17, M. le Président?

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 18.

M. Parizeau: Alors, nous abordons une chose dont nous avons discuté, M. le Président, jusqu'à maintenant un peu de façon anticipée, c'est-à-dire le prospectus simplifié, toujours dans le sens d'avoir un régime un peu allégé. Ici, on est un petit peu en avance sur les autres lois canadiennes, mais tout le monde reconnaît la nécessité d'en arriver à quelque chose d'un peu allégé, si bien que là-dessus cela semble pour le moment correspondre davantage à une question de sens commun qu'à autre chose. Dans ce sens-là, même si on innove un peu ici, cela ne me donne pas les appréhensions que j'avais à l'égard de l'article 16.

M. French: On s'en doutait.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. French: Le député de Marguerite-Bourgeoys a-t-il...

M. Lalonde: Aucun problème. Je regrette simplement de ne pas avoir prescrit le droit sur ce nouveau régime.

Le Président (M. Rochefort): Article 18, adopté. Article 19.

M. Parizeau: Question d'uniformité.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): II manque l'expression mutatis mutandis, M. le Président.

Une voix: Le premier ministre n'était pas présent lorsqu'on a fait la rédaction du projet de loi.

M. Parizeau: Compte tenu des adaptations nécessaires, on aurait pu mettre mutatis mutandis.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Parizeau: Prospectus provisoire. Vous noterez, M. le Président, à l'égard des quelques derniers articles que nous venons de prendre qu'on est dans un secteur où il n'y avait rien dans l'ancienne loi. Quand je parlais de la modernisation de la loi et de son adaptation au nouveau commerce des valeurs mobilières, c'est par des sections comme celle-là que cela se traduit. On notera ici qu'en Ontario le prospectus provisoire est obligatoire. Ici, non. Nous n'allons pas aussi loin. Toujours dans le souci de ne pas complexifier les démarches et les multiplier. Cela va pour l'article 20?

Le Président (M. Rochefort): L'article 20.

M. French: Un instant. Il n'y a pas de délai statutaire pour la soumission de commentaires par la commission sur un projet de prospectus qui se veut national et donc il peut - par la suite - y avoir un sérieux problème pour l'émetteur sur le plan national de groupes donnés, son appel à l'épargne.

M. Parizeau: Le président de la Commission des valeurs mobilières me souligne quelque chose à quoi nous avions fait allusion tout à l'heure. Par entente entre les commissions de valeurs mobilières, les délais sont fixés entre elles de façon à ce que ce soit uniforme.

M. French: Donc, ce problème que j'ai soulevé est approché par une autre voie que la voie de la loi ou de la réglementation.

M. Parizeau: Par entente mais dans un cadre très précis donnant lieu à l'émission de directives. On me dit que lorsque les commissions de valeurs mobilières se sont entendues, il y a eu une sorte d'instruction générale qui a été envoyée à toutes qui établissait ces délais.

M. French: La remise d'un prospectus provisoire à un acheteur de valeurs au Québec, empêche cet acheteur d'exercer son droit unilatéral de résiliation du contrat d'achat.

M. Parizeau: Cela est beaucoup plus loin. Est-ce que le député de Westmount...

M. French: Ce n'est pas... D'accord.

M. Parizeau: C'est 7 ou 8 articles plus loin.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 20 est adopté?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 21.

M. Parizeau: Tout à fait nouveau l'article 21.

M. Fortier: Cela devrait se faire en pratique.

M. Parizeau: Justement, un des problèmes qu'on avait, était que cela se

faisait partout ailleurs au Canada, sauf au Québec. Il n'y avait pas d'assise juridique au Québec en vertu de laquelle on pouvait le faire.

M. Fortier: ...

M. Parizeau: Non, il y a bien plus baroque que cela, c'est qu'il n'y a rien qui empêchait, finalement... Les gens lisent des journaux d'autres provinces, vous savez, des gens du Québec peuvent lire le Globe and Mail ou je ne sais quoi, ils peuvent recevoir de la documentation d'un courtier de Toronto. Cela se faisait partout au Canada. Cela avait manifestement des répercussions chez nous et nous n'avions rien qui nous autorisait à le faire.

M. Fortier: On rattrape les autres.

M. Parizeau: Ah non! Là-dessus, quand je parlais de modernisation, pour tous ces articles, c'est tout à fait clair.

M. Fortier: Merci.

M. French: II faut attendre l'article 30 pour parler de la question de la résiliation.

M. Parizeau: C'est cela, l'article 30 ou 31, est-ce que c'est cela?

M. French: L'article 30. Ce serait plus approprié que de l'aborder ici...

M. Parizeau: C'est cela, oui.

M. French: Pourtant il touche un prospectus provisoire et il le ressort. Adopté.

M. Parizeau: Article 21, est-ce que cela va?

Le Président (M. Rochefort): L'article 21 est adopté. Article 22.

M. Parizeau: C'est un article réglementaire.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 23. (17 h 45)

M. Fortier: S'il n'existait pas, cela ne changerait rien non plus, n'est-ce pas? On pourrait l'enlever.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Fortier: Tant qu'à moi, il n'y pas de problème, c'est notre chef de file qui décide.

M. Parizeau: À l'article 24 aussi, c'est un peu du sens commun.

Le Président (M. Rochefort): On n'a pas disposé de l'article 23 encore.

M. French: L'article 23, adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 23 est adopté. Et l'article 24?

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. J'appelle l'article 25.

M. French: Changement important, à distinguer d'un fait important et d'autres changements importants auxquels on fait référence dans d'autres articles.

M. Parizeau: Exactement.

M. French: Et ils sont fiers à part cela. Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 26.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 27.

M. Fortier: Avant l'expiration d'un délai de dix jours, de quel délai s'agit-il? Dix jours avant quoi?

M. Parizeau: C'est au plus tard dix jours après que la modification n'ait été exigée en vertu de l'article 26, le précédent, ou de l'article 25. Et l'article 25 dit: "Une modification du prospectus doit être établie." L'article 26 dit: "L'établissement d'une modification n'est exigée qu'en cas de changement important survenu durant la période visée à l'article 21, susceptible d'exercer une influence défavorable sur la valeur, etc." Au plus tard dix jours, après cela.

M. Fortier: C'est correct, merci. C'est dix jours après...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ... un changement qui donne lieu à la nécessité d'une modification.

M. French: Alors, c'est dix jours...

M. Fortier: C'est dix jours d'après l'article 25.

M. French: C'est dix jours après la réaction. C'est dix jours après que la modification ait été établie.

M. Parizeau: C'est ça.

M. French: C'est-à-dire que c'est être généreux, il me semble, pour l'émetteur en cas de délai. Ça peut être plus court le délai technique.

M. Parizeau: Oui. Au plus tard...

Le Président (M. Rochefort): Article 27.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 27 adopté. J'appelle l'article 28.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 29.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 30.

M. Parizeau: C'est l'article auquel faisait allusion le député de Westmount tout à l'heure.

M. French: En effet, il s'agit d'une perte de droit une fois le prospectus provisoire reçu. Je suppose que j'essaie de faire parler un peu le ministre sur le fait que ce n'est pas conforme à la pratique de nos voisins. Je vous avoue, c'est une question que je veux juste clarifier, la logique de la démarche.

M. Parizeau: Cela correspond au fond à cette idée qu'on retrouve ailleurs dans les lois de protection du consommateur, le délai de réflexion. Là, il n'y a pas eu de prospectus provisoire ou autrement. Il a acheté. On ne lui devait aucun renseignement disponible là-dessus. Il a deux jours pour résilier ça. Si, au contraire, il a reçu des prospectus, là on tient pour acquis - peut-être à tort - qu'il a au moins jeté un coup d'oeil sur le prospectus avant d'acheter. Enfin, s'il a acheté sans qu'il y ait aucun prospectus que ce soit, on lui donne un délai de grâce. Comme ça existe maintenant de plus en plus fréquemment pour la vente, on l'identifie un peu avec la vente à domicile. Quelque chose comme ça. C'est un délai de grâce.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 30 adopté. Article 31.

M. Parizeau: On suppose, dans le cas de 31, que si l'acheteur est lui-même courtier, il n'avait qu'à se renseigner.

M. French: Adopté.

M. Parizeau: Là, c'est une présomption.

Comme nous allons le voir beaucoup plus tard dans le texte de loi, il faut placer la présomption quelque part à l'égard de l'expédition de bonne foi d'un prospectus qui ne serait pas arrivé. On présume que le destinataire l'a effectivement reçu dans le délai normal.

M. French: M. le Président, les mots "délai normal de livraison" ont-ils une interprétation juridique? Est-ce une phrase standard?

M. Parizeau: Autrefois, c'était très clair. À notre époque, cela l'est moins. Je reconnais que la poste étant ce qu'elle est... Évidemment, cela a une incidence juridique très précise quand on le verra plus loin, comment une cour apprécierait un délai normal? Je ne le sais pas. J'imagine d'ailleurs que les cours ont dû, depuis que le service postal connaît les soubresauts qu'on lui sait, développer une certaine jurisprudence à cet égard, quant à un délai normal, mais...

M. Fortier: Non, cela varie dans le temps.

M. Parizeau: Elles doivent interpréter, selon qu'il y a eu une grève ou non, ou quelque chose comme cela, j'imagine. Il faut bien comprendre que le sens de cet article, c'est comme base de recours que nous verrons quand on examinera le chapitre des recours. Cela implique donc, nécessairement, que la justice pourrait être appréciée.

M. Fortier: ... d'imposer tous les jours.

M. Parizeau: M. le Président, dans la loi ontarienne, c'est encore plus ironique. C'est: In the ordinary course of mail.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est plus extraordinaire. C'est plus britannique comme définition.

M. Parizeau: Nous mettions au moins "de livraison" au cas où il y ait d'autres moyens de tranmettre, mais c'est "of mail".

M. French: M. le Président, j'avais imaginé que cela n'est quand même pas unique dans nos lois. On doit l'utiliser ailleurs et on doit le comprendre de la même façon. Ce sont les mêmes mots qu'on utilise ailleurs.

M. Parizeau: C'est cela. Donc, il doit y avoir dans les cours une jurisprudence qui s'est établie pour interpréter cela parce que cela n'est pas seulement dans la Loi sur les valeurs mobilières qu'on retrouve des expressions de ce genre.

M. French: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. L'article 33.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): On avait ici un commentaire qu'on a relevé. Le barreau suggérait que le délai coure simplement à compter du visa du prospectus, même s'il y a un prospectus provisoire, et prétend que cela harmoniserait notre législation avec celle de l'Ontario, de la façon dont je lis la note que j'ai ici.

M. Parizeau: Vous pouvez le garder. Il n'y a pas de guerre de religion à faire là-dessus. On va simplement vérifier ce qui existe en Ontario. Je crois que nous avons la même chose qu'en Ontario, c'est l'article 61.1: "No distribution of a security to except section 52.1 applies shall continue longer than twelve months from the latter of either a, the date of the issuence of the receipt for the preliminary prospectus relating to such security or the date of the last prospectus filed under this section." L'un ou l'autre.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): ...

M. Parizeau: As the case may be.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Est-ce qu'on peut concevoir que le prospectus préliminaire peut être déposé après le prospectus?

M. Parizeau: Non, ce n'est pas possible.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Alors...

M. Parizeau: Donc, c'est un ou l'autre, cela veut dire que... C'est ce qu'on dit ici: la date du prospectus provisoire...

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Excepté que cela ne dit pas que c'est le...

M. Parizeau: ... ou la date du prospectus.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): C'est le contraire. Ici, dans l'article 33, on dit que lorsqu'il y a un prospectus provisoire, le délai commence à être compté à partir de la date du prospectus provisoire. Tandis que dans le cas de l'Ontario, on dit que c'est le plus tard des deux: "...the latter...".

M. Parizeau: Non, non, pas "the later", "the latter shall continue longer...", "...no distribution of a security shall continue longer than twelve months from the latter of...". Non, c'est " the later", ce n'est pas "the latter". Un instant, il y a une distinction. C'est le plus tard.

M. Fortier: Le plus tard des deux. M. Parizeau: C'est le plus tard. M. Fortier: S'il y en a eu deux.

M. Parizeau: C'est un bon point. Le plus tard des deux, c'est donc nécessairement le prospectus.

M. Fortier: Finalement, oui.

M. Parizeau: Bon, alors on pourrait apporter un amendement.

M. French: C'est donc de biffer ce qu'il y a dans l'article après le mot "prospectus".

M. Fortier: Pas nécessairement, s'il n'y a pas de prospectus permanent.

M. Parizeau: M. le Président, il est tout à fait possible qu'on puisse s'entendre sur une rédaction rapide là-dessus, mais comme il est 6 heures, est-ce qu'on pourrait laisser cet article en suspens jusqu'à la prochaine réunion? Dès le début de la prochaine réunion, on suggérerait une rédaction, plutôt que de chercher à faire de la législation à 6 heures, sur le coin de la table. Je comprends ce qui vient d'être dit, il n'y a pas de querelles.

Le Président (M. Rochefort): Sur ce, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 58)

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