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Commission permanente des Institutions
financières,
Compagnies et Coopératives
Bill 45 Loi de la protection du
consommateur
Séance du jeudi 21 janvier 1971
(Dix heures trente-six minutes)
M. GIASSON (président de la commission permanente des
Institutions financières, Compagnies et Coopératives): A l'ordre,
messieurs!
Il me fait plaisir, au nom de la commission parlementaire, de souhaiter
la bienvenue la plus cordiale à toutes ces personnes qui sont avec nous,
en ce jour, soit pour faire des représentations au nom d'organisations
qui ont déjà déposé des mémoires ou toute
autre personne qui vient assister aux travaux de la commission.
Je pense que, dès le début de cette séance, il
serait bon d'établir l'ordre de travail de la journée. Nous avons
remarqué, au cours de toutes les séances antérieures, que
beaucoup de personnes s'étaient déplacées pour venir
représenter des organismes qui voulaient se faire entendre auprès
de la commission et, par suite de la longueur des travaux, de l'interrogatoire
assez serré des membres de la commission à la suite des
commentaires des représentants, il en est résulté que des
personnes venant d'assez loin ont passé des journées avec nous et
n'ont pas eu l'occasion de se faire entendre.
Je crois, pour une plus grande rapidité des travaux de notre
commission et avec l'accord des leaders de chacun des partis autour de cette
table, que nous pourrions décider de consacrer la matinée, et
continuer la séance dans l'après -midi et même en
soirée, si nécessaire, à entendre toutes les personnes qui
sont avec nous et qui, j'imagine, voudraient déposer leurs commentaires,
suggérer des amendements qu'elles jugent à propos de faire, afin
de permettre aux gens de cette commission de les interroger et d'en arriver
à un travail encore plus complet et plus positif.
Nous pourrions, si vous me permettez cette opinion, épargner du
temps en évitant, dans le cas de la lecture des mémoires,
d'entendre le début des mémoires qui sont, somme toute, un
indicatif de la représentation des organismes. Si vous étiez
d'accord, nous pourrions, lorsque chaque personne se présente au nom de
son organisme, passer immédiatement aux commentaires qu'elle apporte au
projet de loi, c'est-à-dire passer aux articles sur lesquels elle veut
suggérer des modifications.
Est-ce que le ministre aurait des commentaires au début de la
séance?
M. TETLEY: Non, je suis parfaitement d'accord, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Nous commençons donc notre séance de
travail en invitant le ou les représentants du Conseil du patronat du
Québec à nous livrer leur message. Prière de s'identifier,
également.
Conseil du patronat du Québec
M. DUFOUR: M. le Président, messieurs les membres de la
commission, mon nom est Ghislain Dufour. Je suis directeur
général du Conseil du patronat du Québec.
Je représente ici, ce matin, le président Charles
Perreault qui s'excuse; il doit siéger au Conseil consultatif du travail
et de la main-d'oeuvre. Je suis accompagné de l'un de nos conseillers
juridiques, Me Jean Roger, et de M. Roger Bédard qui pourront participer
éventuellement à la discussion.
Je tiens compte de vos remarques, M. le Président. Nous n'avons
absolument pas l'intention de vous faire lecture de notre mémoire. Vous
l'avez déjà en main. Vous avez reçu, cette semaine, des
notes additionnelles. Nous sommes conscients du fait que beaucoup de choses ont
déjà été dites devant cette commission et que, de
toute façon, les points que nous laisserons tomber, vous aurez
l'occasion de les entendre par les porte-parole d'autres associations
sectorielles.
Donc, nous ferons simplement un très bref résumé de
notre mémoire en nous attardant, si vous le permettez, surtout à
trois mécanismes du projet de loi, à savoir: l'office, le conseil
et tous les règlements qui sont prévus à l'article 97.
Si vous le permettez, avant même de faire ce résumé,
j'aimerais signaler aux membres de cette commission que notre organisme a
été très heureux de voir que vous avez modifié la
programmation des audiences. Cela permet à beaucoup de nos membres de se
faire entendre. Nous considérons que c'est extrêmement important
devant un tel projet de loi. Il est sûr que 6 millions de consommateurs
seront concernés, mais des dizaines de milliers de commerçants
devront aussi vivre cette loi. On peut réaliser que cette loi comporte
énormément de technicité avec laquelle on ne pourra vivre
tellement facilement si les textes ne sont pas clairs.
Dès le dépôt du projet de loi, le Conseil du
patronat a affirmé son accord avec le principe général du
projet de loi. Nous tenons, évidemment, à le réaffirmer
à nouveau. Mais cet accord général de principe,
évidemment, ne nous autorise pas à en accepter toutes les
implications. Ce sont quelques-unes de ces implications que nous aimerions
relever très rapidement.
Premièrement, il y a toute la question des dispositions de
concordance. Il en a été question devant vous; nous rappliquons
à nouveau. Ces dispositions de concordance, réfèrent
à toutes les autres lois de protection du consom-
mateur qui existent dans d'autres provinces. Vous avez tous les champs
d'application d'autres lois qui touchent indirectement les champs d'application
couverts ici, soit des lois, fédérales, soit des lois
provinciales, et nous aimerions dire simplement un mot sur les
règlements.
Dans les règlements, on parle, par exemple, d'étiquetage,
d'emballage, etc. Déjà, il y a des lois provinciales je
pense à la Loi des marchés agricoles, à la Loi des
produits laitiers, etc., qui mettent en cause ces
problèmes-là, pour lesquelles, évidemment, il faudra faire
des concordances. C'est peut-être un sujet difficile, mais on aimerait
mentionner aussi la question de la langue dans l'étiquetage. Vous savez
que, déjà, des législations existent sur ce sujet ou sont
en voie de préparation. Alors, toutes ces concordances nous paraissent
absolument essentielles si on veut éviter des conflits de juridiction
éventuels.
De toute façon, nous n'en avons pas fait l'étude. Nous
considérons que la commission est beaucoup mieux équipée
que nous pour le faire et nous considérons que c'est un point clé
du projet de loi.
Mise en application de la loi: La mise en application de la loi
nécessitera évidemment des changements importants dans les
systèmes comptables et la papeterie des commerçants. Nous
suggérons que, dans tous les cas, des délais raisonnables soient
accordés pour sa mise en application, de même que pour la mise en
application des règlements.
Quant aux cartes de crédit, nous appuyons la disposition du
projet de loi à l'effet qu'aucune carte de crédit ne soit
généralement émise sans que le consommateur en ait fait la
demande. Nous recommandons cependant que, dans le cas de toutes celles qui sont
actuellement émises et dans le cas de celles qui le seraient
après l'adoption de ce projet de loi, le principe de la reconduction
tacite s'applique dans tous les cas.
Nous nous opposons évidemment à l'article 14 du projet de
loi, qui stipule que le consommateur bénéficie de toute erreur
dans le calcul ou renonciation du coût de crédit. Cet article nous
paraît injuste, unilatéral et, selon nous, devrait être
rayé. Nous nous opposons, de la même façon, au
deuxième paragraphe de l'article 31, qui prévoit un paiement
initial d'au moins 15 p. c. sur l'achat d'un bien. Il s'agit là d'une
recommandation discutable, trop facile à contourner de toute
façon et qui, le cas échéant, pourrait faire l'objet de la
réglementation, mais ne devrait pas se retrouver dans le projet de
loi.
L'article 37 de la loi, tel que rédigé, nous
apparaît également injuste pour le commerçant. Nous
soumettons que tous les articles qui ont une relation directe avec cet article
37, à savoir les articles 35, 36 et 37, doivent être revus dans
toute leur philosophie. Quant aux articles du projet de loi relatifs à
l'Office de la protection du consommateur, à ceux du Conseil de la
protection du consommateur et à l'article 97 de la loi, nous aimerions
les considérer dans un ensemble à partir de l'article 97.
L'article 97 du projet de loi donne au lieutenant-gouverneur en conseil
des pouvoirs très vastes et pose, à toutes fins utiles, tout le
problème des lois-cadres. Nous avons eu, au conseil du patronat, depuis
quelques années, certaines expériences malheureuses avec des
lois-cadres. De par sa nature, une loi-cadre définit un grand principe,
mais cela laisse au lieutenant-gouverneur en conseil la possibilité de
l'appliquer selon la portée des règlements éventuels.
Evidemment, il y a plusieurs désavantages dans un tel mode de
procéder dont, notamment, l'impossibilité pratique d'intervention
de la part de ceux qui sont concernés par les règlements.
Par une loi-cadre, on signe presque un chèque en blanc au
lieutenant-gouverneur en conseil et nous ne sommes pas certains que ce soit la
meilleure façon de procéder. Dans le cas du projet de loi no 45,
la presque totalité de la portée de la loi dépendra des
règlements. Lorsqu'on considère l'article 97 m) par exemple, on
dit que "le lieutenant-gouverneur en conseil établira des
règlements quant aux normes de qualité et de
sécurité pour tout bien ou service", il est difficile pour les
commerçants de donner un accord inconditionnel à une telle
possibilité de règlement.
Comment s'en sortir? Nous croyons que pour s'en sortir, on pourrait
donner des pouvoirs nouveaux au Conseil de la protection du consommateur. Nous
sommes entièrement d'accord avec le principe d'un Conseil de la
protection du consommateur. Non seulement nous sommes d'accord, mais nous
considérons qu'un tel conseil est essentiel. Mais, à condition
qu'on le restructure et qu'on lui permette vraiment de fonctionner.
Il y a trois éléments clés qui nous paraissent
essentiels pour que ce conseil fonctionne bien. Premièrement, que ce
comité conserve des initiatives personnelles d'étude et qu'il ne
soit pas tout simplement astreint à étudier des sujets sur
lesquels on demanderait son opinion.
Deuxièmement, ce conseil devrait grouper des personnes,
nommées par le lieutenant-gouverneur en conseil, mais à partir
des suggestions des corps les plus représentatifs dans le domaine de la
consommation. Et, c'est un point clé pour nous, il faudrait que ce
conseil assure un équilibre entre les représentants des
commerçants et les représentants des consommateurs.
Cela suppose une révision du rôle de l'office. Nous
interprétons actuellement le rôle de l'office comme étant
celui qui va recommander au lieutenant-gouverneur en conseil ces
règlements prévus à l'article 97, alors nous faisons un
transfert du rôle actuel de l'office au conseil. Pour nous, cela
paraît absolument important, parce qu'il ne faut pas oublier la
composition
de l'office. Il est composé de fonctionnaires. Or, ce ne sont pas
les fonctionnaires qui sont directement impliqués par les transactions
commerciales, ce sont les commerçants et les consommateurs. C'est aux
commerçants et aux consommateurs qu'il importe vraiment de conseiller le
lieutenant-gouverneur en conseil, dans toutes les meilleures relations
possibles, avec l'Office de protection du consommateur.
Nous allons même plus loin. Même avec ce rôle
modifié du conseil, nous suggérons que les règlements,
avant d'être promulgués, soient publiés dans la Gazette
officielle du travail pour une période nous suggérons une
période de trente jours afin que tous ceux qui sont
concernés puissent vraiment émettre leur point de vue.
Evidemment, cela paraît peut-être vouloir mettre en cause
les pouvoirs de décision du lieutenant-gouverneur en conseil. Absolument
pas. La seule chose qu'il s'agit d'éviter, c'est que par
réglementation on ne rencontre pas toutes les situations de fait qui
sont la réalité du commerce. On peut réaliser actuellement
que dans la préparation d'un tel projet de loi, la commission, ici,
entend des points de vue qu'elle a souvent ignorés.
Finalement, nous disons aussi que dans ce rôle nouveau de l'office
on devrait ajouter à la dimension de l'information du consommateur la
dimension de l'éducation. Il est excellent d'informer le consommateur,
mais nous croyons que bon nombre des griefs actuels qui sont logés
à l'endroit des commerçants pourraient s'estomper si le
consommateur lui-même était un consommateur plus responsable.
Compte tenu de vos remarques originales, M. le Président, j'ai
tenté de faire un résumé très bref. Je remercie
cette commission de la possibilité qu'elle nous a donnée de faire
valoir ce point de vue.
M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions de la brièveté de
votre message, qui se conforme ainsi à ce que nous avions demandé
au début de la séance. Maintenant, je donnerais la parole
à l'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce.
M.TETLEY: M. le Président, je voudrais tout d'abord remercier M.
Dufour et le Conseil du patronat du Québec. Leur premier mémoire
est très intéressant ainsi que le deuxième mémoire,
le 5 A, qui est très important. Nous apprécions le travail que
vous avez fait.
Je voudrais faire certaines remarques concernant vos commentaires.
L'article 14 est très important. D'accord! L'article 14 est en effet un
article qui protège, croyons-nous, le public. C'est-à-dire que le
consommateur bénéficie de toute erreur dans le calcul ou
l'énonciation du coût de crédit.
Erreur, oui, mais dans quoi? Dans le calcul ou l'énonciation du
coût de crédit. Et vous croyez ou votre mémoire est
à l'effet que c'est trop rigide. Mais, nous voulons protéger le
public et je vais vous donner un exemple: Souvent, vous voyez dans un contrat
que l'intérêt est de 20 p. c. par exemple, et que $100 sont
prêtés. Les paiements sont au nombre de 12 à $10 par mois,
c'est-à-dire $120; l'intérêt apparaissant au contrat est de
20 p. c. Ce taux n'est pas le taux annuel réel. Le taux
d'intérêt annuel réel est plutôt de 33 p. c. ou 34 p.
c, ou même de 40 p. c, parce que le consommateur doit payer 20 p. c.
d'intérêt sur le montant initial ($100) à tous les
mois.
Dans un cas comme celui-ci, à l'avenir, lorsque le contrat
stipulera que le prêt est de $100 à un taux de 20 p. c,
réparti en 12 paiements sur une période de douze mois, 20 p. c.
sera le taux réel annuel, qui se traduira dans l'exemple,
peut-être par un montant de $10 d'intérêt à payer au
lieu de $20. Nous croyons que cela forcera les prêteurs d'argent à
suivre l'idée principale de la loi, qui est d'énoncer ouvertement
et honnêtement le vrai coût de l'intérêt.
M. DUFOUR: Est-ce que vous me permettez un commentaire très
rapide?
M. TETLEY: Bon.
M. DUFOUR: II est évident que cela se réfère
purement au coût du crédit quant au calcul, mais aussi quant
à l'énonciation. L'énon-ciation, évidemment,
suppose un geste écrit, geste qui est de plus en plus
mécanisé. Mais l'article ne fait aucune distinction entre une
erreur volontaire, si on veut, et une erreur tout à fait involontaire.
Cette énonciation, surtout dans le domaine des ordinateurs, maintenant,
peut créer des problèmes, même compte tenu de votre
exemple, M. Choquette. Je voulais dire M. Tetley. Excusez-moi.
M. TETLEY: Je n'aviserai pas M. Choquette de votre erreur!
C'est une question d'opinion. A notre avis, il faut que le consommateur
soit protégé. Notez aussi que vous avez le code civil, l'article
991, etc., les procédures d'annulation du contrat.
Je crois que le prêteur d'argent est assez protégé.
Il peut toujours annuler le contrat. Il y a toujours les procédures
existantes, le bill 45 n'abroge pas le code civil, du moins pas ces
articles.
L'article 37. Cet article existe ailleurs, au Manitoba; c'est le
principe "seize or sue", c'est-à-dire vous saisirez ou vous
procéderez pour avoir votre argent. Nous avons pris note de votre
mémoire et de vos idées, mais je crois aussi qu'il y a certains
cas où il faut protéger le consommateur. De toute façon,
je prends note de vos remarques.
M. DUFOUR: Je suis très heureux que vous preniez note de la
remarque, parce que j'ai l'impression que l'exemple que nous donnons dans le
cas de l'automobile, est typique de la difficulté d'application de cet
article 37.
M. TETLEY: Nous avons déjà lu vos mémoires et nous
avons fait une compilation de tous
les mémoires. Mais, encore une fois, je prends bonne note de vos
remarques de ce matin.
A la page six de votre mémoire, vous faites des réserves
sur les lois-cadres. En effet, c'est un problème. L'article 97 donne le
droit au lieutenant-gouverneur d'adopter des règlements. Il y a un jeu
entre l'efficacité et la démocratie.
Vous avez suggéré quelques solutions, et nous les avons
notées. L'Opposition a déjà suggéré quelques
moyens d'éviter ce problème: publication des règlements
dans la Gazette officielle, que les règlements soient
étudiés par le conseil et aussi que la commission de
l'Assemblée nationale étudie ces règlements avant leur
adoption.
Comme je l'ai dit la semaine dernière, je ne suis pas contre,
mais je ne suis pas nécessairement pour.
M. BEDARD: Vous avez dit "noui", si je comprends bien.
M. TETLEY: C'est tout ce que j'avais à noter.
M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny-
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais demander
des précisions à M. Dufour au sujet de ses réserves sur
les lois-cadres. A la page 7, vous dites: "Depuis l'expérience
malheureuse de certaines lois-cadres récentes..." Est-ce que vous pouvez
me dire à quelles lois-cadres vous référez en
particulier?
M. DUFOUR: Je pourrais vous en donner plusieurs, M. le
député. Je vous donne l'exemple de la loi no 49,
sanctionnée en juin 1969, sur la formation et la qualification
professionnelles, de la main-d'oeuvre. C'est une loi-cadre qui prévoit
l'établissement d'un programme pour les études qualitatives et
quantitatives de la main-d'oeuvre. C'est une loi-cadre dans le sens qu'elle
prévoit, par un tout petit article, qu'éventuellement tout
travailleur devra obtenir une carte de compétence du ministère du
Travail avant de pouvoir exercer une profession ou un métier dans un
établissement industriel du Québec. Mais l'application
concrète de cet article 42, l'établissement de ces normes
justement de qualifications, nous n'en prenons connaissance que par les
règlements. Si, à ce moment-là, il n'y a pas de
consultation véritable avec les gens concernés,
évidemment, on peut établir n'importe quel certificat de
qualification obligatoire. C'est un exemple.
M. CLOUTIER (Montmagny): C'est un exemple. J'imagine que vous avez
d'autres lois-cadres à l'idée.
M. DUFOUR: La provision concernant les licenciements collectifs. C'est
la même chose. Dans les règlements, on définit les
licenciements collectifs comme étant des mises à pied. La
réglementation, à ce moment-là, est venue changer, en tout
cas dans notre esprit, complètement le sens prévu à la
loi-cadre.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je suis satisfait, M. le Président, des
réponses. Je craignais que M. Dufour ne prenne ses exemples dans le
domaine social.
M. Dufour, vous dites également, à la fin de ce
paragraphe: Un moyen de pallier, ce serait que les règlements soient
étudiés en collaboration avec le Conseil de la protection. Est-ce
que vous allez jusqu'à dire que le conseil aurait une voix égale
à celle de l'office dans la préparation et l'acceptation des
règlements ou si ce serait plutôt une consultation?
M. DUFOUR: A notre avis, non seulement ce serait égal, mais
l'opinion du conseil serait sûrement supérieure à l'opinion
de l'office.
M. CLOUTIER (Montmagny): A l'opinion de l'office. Un droit de veto, ni
plus ni moins.
M. DUFOUR: Non, non, ce n'est pas un droit de veto. C'est que le
lieutenant-gouverneur en conseil, évidemment, possède tous les
pouvoirs. Il a besoin, à ce moment-là, d'une consultation. Quelle
est la meilleure consultation qui puisse lui être donnée? C'est
celle des gens qui sont directement impliqués dans les questions qu'on
discute. Ces questions-là sont connues, à notre sens, beaucoup
plus par les commerçants et par les consommateurs. Alors, nous croyons
beaucoup plus valable la consultation par le lieutenant-gouverneur en conseil
d'un conseil qui serait composé, évidemment, selon nos
suggestions, qu'une pure recommandation de l'office. Parce que l'office est un
bureau gouvernemental et que ce sont exclusivement des fonctionnaires qui en
font partie.
Un exemple avec le Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, c'est dans le domaine social. Vous avez la composition d'un
conseil qui représente exclusivement les centrales syndicales et le
patronat et qui avise le ministère du Travail sur tous les
règlements qu'il va être amené à établir. Par
contre, le ministère du Travail dispose d'autres services qui
rempliraient à peu près exactement le rôle de l'office ici,
qui est un pouvoir de décision sur l'application de la loi.
M. CLOUTIER (Montmagny): Je ne sais pas si vous avez entendu le
ministre, à la dernière séance de la commission
parlementaire.
Le ministre des Institutions financières, en réponse
à une des suggestions que nous lui faisions, a dit qu'il n'avait pas
d'objection à
soumettre à cette commission parlementaire une ébauche ou
les idées maîtresses de la réglementation prévue
à l'article 97. Je crois que ce serait là, déjà,
une excellente initiative que la commission parlementaire et ceux qui assistent
aux délibérations puissent déjà prendre
connaissance de la trame de la réglementation. Je pense qu'à la
suite des suggestions que vous faites, même si elles ne sont pas retenues
entièrement, que s'il y a déjà cette forme de consultation
parce qu'il faut bien comprendre cet argument d'équilibre,
d'efficacité administrative, d'équilibre entre la loi, d'une
part, et aussi les exigences d'une réglementation il y aura une
certaine garantie quant à l'expression d'opinions que les organismes
voudraient voir traduire dans la réglementation.
M.DUFOUR: Nous sommes d'accord, M. Cloutier, parce que nous mentionnons
au paragraphe c) "consultations autres sur base ad hoc". La commission
parlementaire est un mécanisme de consultation. Quand nous parlons d'un
conseil de la protection du consommateur restructuré, nous sommes quand
même bien conscients que ce conseil sera composé de quatorze ou
quinze personnes. Ces quatorze ou quinze personnes ne peuvent pas saisir
l'ensemble des dimensions des transactions économiques qui s'effectuent
dans la province. C'est un mécanisme que nous suggérons; il y. en
a sûrement d'autres dans le sens de votre suggestion.
M. LE PRESIDENT: La parole est à l'honorable député
de Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire,
à la page 6, article 39, deuxième alinéa, vous dites:
"Nous recommandons également que l'article 94 soit modifié de
façon à radier la disposition à l'effet que la
décision du juge est sans appel". Est-ce que vous pourriez citer un
exemple d'un cas où vous croyez qu'il pourrait y avoir abus de pouvoirs
parce qu'enfin, dans ma pensée, un juge doit juger ou ne pas juger, et
vous semblez contester cela.
M. DUFOUR: C'est une question juridique, M. le député, je
la laisse à mon honorable collègue.
M. ROGER: M. le député, je crois bien que vous avez
demandé un exemple. Je ne crois pas qu'il s'agisse tellement d'un
exemple concret que tout simplement du droit des personnes de se pourvoir
contre une décision qui peut être erronée. Et le droit
d'appel est déjà prévu dans le Code de procédure
civile. Je ne vois pas pourquoi, en vertu d'une loi du consommateur, une
décision d'un juge deviendrait sans appel. D'autant plus que même
s'il s'agit d'articles de consommation il peut arriver assez souvent que les
sommes en jeu soient très importantes.
M. DUMONT: Même si c'est un bill du consommateur, vous croyez
qu'il ne fallait pas le rédiger ainsi?
M. ROGER: II peut arriver qu'une décision... En fait, les juges
seront les premiers à l'admettre, ils sont humains et ils peuvent se
tromper. On devrait donc prévoir une procédure par laquelle on
puisse en appeler d'une décision parce qu'il peut être fait un
tort considérable.
M. LE PRESIDENT: Pour l'avantage des membres de la commission, nous
apprécierions connaître le nom du conseiller juridique.
M. ROGER: Jean Roger.
M. LE PRESIDENT: Merci.
Y a-t-il d'autres membres de la commission qui auraient des questions
à poser au représentant du conseil? Sinon, je remercie, au nom de
la commission, ceux qui ont fait des représentations pour le Conseil du
patronat du Québec. J'invite maintenant le ou les représentants
de l'Association des manufaturiers canadiens à se faire entendre.
Association des manufacturiers canadiens
M. ROGER: Je reprends la parole. Je vous remercie, M. le
Président, ainsi que MM. les membres du comité d'avoir permis
à l'association de présenter ses suggestions ou ses observations,
aujourd'hui. L'Association des manufacturiers canadiens n'est pas, par essence,
un organisme directement axé sur le consommateur, c'est pourquoi le
mémoire, dont vous avez déjà pris connaissance, est assez
succinct et porte tout simplement sur quelques recommandations d'ordre assez
général.
Je crois que vous avez déjà entendu les deux
premières recommandations. Ce qui saute aux yeux, à là
lecture du projet de loi, c'est qu'il ne contient pas de définition du
consommateur. L'association recommande que l'on définisse le
consommateur et que cette définition exclut les personnes qui effectuent
des achats dans le cours normal de leurs affaires, les sociétés
commerciales, les associations de personnes ou de compagnies qui sont dans le
commerce. Cela s'inscrit évidemment dans les règles ou les lois
générales qui régissent le commerce. Imposer à des
commerçants, lors de transactions entre eux, des formalités qui
s'appliquent à la protection du consommateur, serait probablement
excessif.
La troisième observation porte sur les mots "délai
suffisant", que l'on trouve à l'article-5 du projet. Le délai
suffisant est un peu vague et peut permettre libre cours à
l'appréciation arbitraire. Pour ce qui est de la quatrième
recommandation, c'est évidemment, encore une fois, l'article 14 du
projet de loi.
Nous sommes conscients que de telles dispo-
sitions sont prévues dans d'autres lois semblables et il y aurait
peut-être lieu de préciser qu'une erreur ou une omission commise
de bonne foi pourrait être corrigée. L'article, dans sa
rédaction actuelle, semble être une règle sans appel, en
vertu de laquelle une erreur commise, même de bonne foi, dans le calcul,
va bénéficier de toute façon... On ne sait pas de quelle
façon cet article serait susceptible d'entrer en conflit avec les
dispositions du code civil qui prévoit soit l'annulation du contrat,
soit le remboursement de l'indu lorsqu'une personne a payé, par erreur,
une chose qu'elle ne devait pas ou inversement, qu'une personne a reçu,
par erreur, une somme qui ne lui était pas due.
La cinquième recommandation porte sur le délai de reprise.
J'étais présent lors de la première séance de la
commission et j'ai entendu les propos véhéments des diverses
personnes qui ont des raisons bien sérieuses de s'opposer au
délai de 30 jours. La suggestion de l'Association des manufacturiers
canadiens est que le vendeur soit admis à reprendre son bien si, par
exemple, il estime pour employer des propos souvent entendus par des
juristes que sa créance risque d'être mise en péril.
Dois-je continuer?
M. LE PRESIDENT: Oui, je vous en prie.
M. ROGER: On suggère que le marchand puisse être admis
à reprendre son bien et à le conserver pendant une période
de trente jours pendant laquelle le consommateur pourra remédier
à son défaut et le tout sans pénalité pour le
consommateur. Cela est évidemment dans le but de protéger le
vendeur contre les pertes qui pourraient être considérables si on
pense, en particulier, aux automobiles neuves. Je crois que la commission est
suffisamment éclairée sur ces questions.
Pour ce qui est de la sixième recommandation, elle porte sur la
définition de l'expression "vendeur itinérant" et
également le mot à mot de la section 4 de la loi qui vise les
contrats conclus entres les vendeurs itinérants et les consommateurs. Il
semble que ces définitions soient assez larges pour comprendre
également les établissements qui vendent par correspondance. La
recommandation de l'association, c'est que l'on prévoit soit une
exception, pour les établissements qui vendent par correspondance, soit
un régime de règlements spéciaux qui en fassent des
vendeurs ou des marchands bien distincts des vendeurs itinérants comme
on l'entend normalement.
La septième recommandation a également déjà
été entendue par la commission et faite par d'autres organismes,
il s'agit des pouvoirs assez extraordinaires de réglementation qui sont
conférés au lieutenant-gouverneur en conseil. On vient tout juste
d'en discuter à nouveau et on s'inquiète évidemment de
l'usage qui peut être fait des pouvoirs.
Il y a la question de conflit ou de l'aspect pratique d'une loi; on peut
choisir entre une loi-cadre, dont la rédaction est assez simple, quitte,
par la suite, à prévoir l'application de ses diverses parties par
des règlements. D'un autre côté, une loi-cadre qui
confère des pouvoirs trop vastes à des organismes de
réglementation mènent à des erreurs ou des abus dont on
vient de citer quelques exemples, plus particulièrement à
l'article 97, l'alinéa k) qui traite des "normes d'emballage,
d'étiquetage et de présentation". On sait qu'aujourd'hui il
existe déjà, au Québec, un règlement sur les
aliments qui prévoit des normes d'emballage des produits alimentaires et
leur préparation, leur présentation, leur étiquetage. On
sait également qu'il y a une loi fédérale à
l'étude portant sur le même sujet. Nous suggérons donc
qu'il y ait concordance entre ces dispositions.
La neuvième recommandation porte sur les alinéas m) et o)
de l'article 97 et, encore une fois, c'est dans le même esprit que l'on
recommande de bien surveiller la façon dont seront mises en vigueur ces
dispositions, pour qu'elles concordent avec d'autres dispositions.
La dixième recommandation est peut-être un peu plus
nouvelle, il s'agit de l'article 107 qui traite des pénalités qui
peuvent être imposées à tout officier, fonctionnaire, etc,
d'une compagnie. Or, il se trouve dans le commerce beaucoup de compagnies
privées d'un seul actionnaire, d'un seul actionnaire important, et on
recommande, en fait, que l'Etat accorde sa clémence à
l'entreprise ou au président d'entreprise qui en est le principal
actionnaire, si son entreprise a déjà été
pénalisée, puisqu'à toutes fins pratiques c'est de la
poche même de l'intéressé que la pénalité
sera payée.
Enfin, pour ce qui est de l'article 108, l'association n'a que des
félicitations à accorder aux auteurs du projet pour avoir
prévu les erreurs ou omissions de bonne foi. Cela nous ramène
évidemment à nos observations sur l'article 14; il semble y avoir
discordance entre ces dispositions.
Je crois qu'au sujet de la douzième et dernière
recommandation, celle qui porte sur l'article 113 où l'on traite de
l'inexpérience d'un consommateur, il y a déjà eu diverses
représentations là-dessus. Elles sont
réitérées par l'Association des manufacturiers, en ce sens
que l'inexpérience est un terme assez vague et assez subjectif qui
demeure toujours soumis à l'appréciation des
intéressés et des juges.
Je vous remercie M. le Président, messieurs les membres de la
commission, ce sont là les quelques recommandations que l'Association
des manufacturiers tenait à formuler.
M. LE PRESIDENT: La parole au député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Merci Me Roger de votre mémoire, et je voudrais
remercier l'Association des
manufacturiers canadiens aussi. Je prends note de vos remarques au sujet
de l'article 1, où vous demandez une définition du consommateur.
L'article 5 pourrait aussi être modifié. Jusqu'à
maintenant, plusieurs mémoires ont noté l'expression
peut-être équivoque qui se trouve dans cet article, et je vais
suggérer qu'on biffe les mots suivants dans l'article 5. "accorder un
délai suffisant pour lui"... Je fais cette suggestion parce que je veux
que les membres de l'Opposition l'étudient un peu, y pensent durant la
journée qui vient.
Article 14. Je ne veux rien ajouter aux commentaires que j'ai
déjà faits. Notez que les consommateurs ont tous trouvé
que l'article était très bien. Vous, vos clients et d'autres
personnes qui ont présenté des mémoires de l'autre
côté ne l'ont pas aimé.
Article 35.
M. ROGER: Si vous me permettez d'intervenir ici encore, M. le ministre,
je crois que l'Association des manufacturiers est d'accord avec le principe de
l'article 14, à savoir que cet article doive protéger le
consommateur. Mais, dans sa rédaction actuelle, il semble assez
sévère; il impose une pénalité qui, parfois,
peut-être assez onéreuse pour le marchand qui peut avoir commis
une erreur de bonne foi, alors que la même loi, à l'article 108,
dit: "Une erreur commise de bonne foi ne constitue pas une infraction." On
impose ici de toute façon, sur le plan purement civil, une
pénalité au marchand qui aurait commis une erreur ou dont la
machine pourrait se tromper. Apparemment, même les machines peuvent se
tromper aujourd'hui.
M. TETLEY: Article 43, le vendeur itinérant. Je trouve
très intéressantes vos remarques au sujet de la vente par
correspondance, la vente par téléphone et même le commis
voyageur et le vendeur d'automobiles qui invitent quelqu'une manger. En effet,
si le contrat est signé au cours du repas, c'est un contrat signé
hors du siège social, ou de son bureau de commerce. J'ai pris note de
vos remarques.
Article 97. C'est le même problème.
Article 107. Vous n'aimez pas la double pénalité, mais
récemment le gouvernement de l'Ontario a adopté le système
des "triple damages", ça ne concerne pas directement la protection du
consommateur, mais la protection de personnes qui achètent des parts
d'un actionnaire d'une compagnie. L'idée de dommages doubles ou triples
est, à mon avis, assez intéressante, et il faut parfois
arrêter des procédures néfastes. Peut-être que
ça va prendre des "triple damages" ou des dommages doubles.
M. ROGER: Concernant le principe, à ma connaissance il existe
certaines lois. Enfin, les lois du Revenu prévoient quelquefois qu'une
compagnie et tous les administrateurs peuvent être condamnés
à des dommages. En pratique assez souvent, je sais également que
le ministère du Revenu se contentera d'une poursuite et d'une
pénalité soit contre la compagnie soit contre son
président. Ici, on prévoit spécifiquement une double
pénalité.
M. TETLEY: Très bien!
Article 108. Cet article concerne une erreur ou une omission faite de
bonne foi. C'est tout simplement dans le cas d'une poursuite pénale,
c'est la section XIII, commençant à la page 22 du projet de
loi.
Article 14. Cet article impose une sanction civile dans le cas d'une
erreur déterminée. Vous savez qu'en droit pénal la preuve
est très difficile, le fardeau de la preuve est lourd; je ne trouve pas
que l'article 108 soit trop dur. C'est une opinion.
Article 113. Je note que vous vous opposez à cet article.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.
M. PERREAULT: M. Roger, à l'article 97 m), vous craignez une
confusion à propos des normes de qualité et de
sécurité. Est-ce à cause des normes édictées
par la Canadian Standard Association?
M. ROGER: Je ne crois pas qu'on ait nécessairement fait allusion
aux normes de la Canadian Standard Association, mais surtout aux normes qui
sont susceptibles d'être établies par la loi
fédérale. En somme le but du mémoire, pour ce qui est de
l'article 97, est tout simplement d'alerter la commission relativement à
la loi fédérale qui est en élaboration dans le moment pour
éviter qu'il y ait, en fait, conflit ou discordance entre ces lois.
M. PERREAULT: Est-ce que vous préconisez les mêmes valeurs
de qualité et de sécurité pour des produits qui sont
interchangés entre les différentes provinces?
M. ROGER: Je sais que l'Association des manufacturiers canadiens,
étant un organisme à l'échelle fédérale qui
a des divisions partout, a toujours été en faveur d'une certaine
uniformisation des normes à travers le Canada.
M. PERREAULT: Merci.
M. LE PRESIDENT: Une question supplémentaire, l'honorable
député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): Sur le même sujet, M. Roger, vous
représentez l'Association des manufacturiers canadiens. Vous dites que
le gouvernement doit être prudent dans la réglementation aux
article 97 m) et o) pour "éviter la confusion qui pourrait survenir si
les normes établies en vertu de ces dispositions diffèrent de
celles qui seront établies par la loi fédérale".
Est-ce que vous avez eu l'occasion, comme groupe, de faire la même
réflexion ou la même observation au gouvernement canadien en lui
disant que le Québec aussi discute et prépare une loi de la
protection du consommateur et que les normes qui seront édictées
par la réglementation au Québec seraient intéressantes
à consulter pour le gouvernement canadien?
M. ROGER: Je suis seulement avocat et seulement représentant au
Québec de l'association. Je présume et j'en suis
moralement certain qu'au niveau fédéral on a fait des
représentations là-dessus précisément et qu'on
étudie le projet de loi provincial. Il se peut même qu'on en tire
une inspiration pour le fédéral.
M. CLOUTIER (Montmagny): Ce que je voudrais souligner, c'est que la
consultation que le Québec fera dans ce domaine puisse se faire dans le
sens inverse aussi et que le gouvernement canadien soit attentif aux normes et
à la réglementation que le Québec voudrait mettre dans sa
réglementation. Il y a certains points de vue, je pense bien, qui
retiennent davantage notre attention quant au domaine publicitaire ou quant au
domaine de la qualité des produits. C'est pour cela que je mentionne cet
aspect. Votre association est l'Association des manufacturiers canadiens. Il
est donc normal qu'elle fasse aussi des représentations à
d'autres ordres de gouvernement.
M. ROGER: Je n'ai pas mandat pour aller faire des représentations
auprès du fédéral au nom du gouvernement provincial, mais
je souhaite avec vous qu'il y ait consultation dans les deux sens.
M. TETLEY: M. le Président, je voudrais tout simplement noter que
j'ai des liens assez étroits avec M. Basford, par
téléphone et par écrit, et jusqu'à maintenant il
n'y a eu aucun problème. Mais je crois que la suggestion de l'honorable
député est une bonne suggestion.
M. LE PRESIDENT: Je cède la parole à l'honorable
député de Laurier.
M. MARCHAND: M. Roger, dans votre mémoire, vous ne semblez pas
je ne sais pas si c'est voulu attacher tellement d'importance
à la vente par téléphone. Par contre, j'ai reçu
hier, une lettre, d'un monsieur Paul-Emile Leclerc, qui s'occupe de la vente
pour la compagnie Comtesse Caroline. Je ne sais pas si vous connaissez cette
compagnie. Son travail consiste à solliciter par téléphone
des dames afin qu'elles donnent une démonstration à la maison en
invitant cinq à huit amies à cette démonstration.
A l'occasion de la démonstration, la compa- gnie, en arrivant,
offre un cadeau, à la dame. Après la démonstration, on
prend les commandes et le tout est payé sur réception de la
marchandise.
Je pense que c'est quand même un travail honnête puisqu'il
n'y a aucun contrat de signé et je ne vois pas qu'on s'occupe tellement
de ce domaine. Je pense qu'un monsieur comme ça, dont le travail serait
supprimé après douze ans, se demanderait quoi faire dans la vie
puisqu'il n'aurait jamais fait autre chose que ça. Ce serait un autre
monsieur que le gouvernement serait probablement obligé de faire vivre.
Je me demande si, dans vos revendications, il n'y aurait pas eu lieu de revoir
ça puisque ça touche quand même des manufacturiers.
M. ROGER: II se peut que ça touche les manufacturiers, mais je
n'ai malheureusement pas participé moi-même à la
rédaction du mémoire. J'ai été chargé de le
défendre après que diverses personnes eurent collaboré
à son élaboration. C'est un problème intéressant.
Nul doute que la commission tiendra compte de vos suggestions à
défaut de celles qui n'apparaissent pas dans le mémoire.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. Roger, à la page 2 de votre mémoire,
à la recommandation numéro 3, il est mentionné ceci: "Nous
croyons que l'expression "délai suffisant", à l'article 5 du
projet, est vague et qu'elle créera beaucoup d'équivoque dans
l'esprit des marchands".
Pourriez-vous nous dire ce que vous entendez suggérer à la
place de "délai suffisant"? Avez-vous des suggestions à faire
à la commission à ce sujet-là?
M. ROGER: C'est un problème assez difficile et c'est un
problème de rédaction législative. Je ne suis
malheureusement pas spécialiste dans ce domaine, mais on pourrait
prévoir, peut-être, un certain nombre de minutes par page,
préciser davantage le sens de "délai suffisant" ou établir
certaines normes dans le texte de la loi que devrait respecter le vendeur.
C'est vraiment une question difficile. La seule raison pour laquelle nous
soulevons la question, c'est que "délai suffisant" est, en somme, assez
vague. Comment le marchand qui vend à une personne peut-il savoir s'il
lui a accordé un délai suffisant? Si la personne lit 30 mots
à la minute, il se peut qu'il doive lui accorder
énormément de temps pour lire un contrat. Une autre personne lit
peut-être 4,000 mots à la minute. C'est un problème.
M. VINCENT: Sur le même sujet, M. le Président. Le ministre
a suggéré tout à l'heure un amendement à l'article
5 pour que nous puissions en prendre connaissance. Le ministre
pourrait-il répéter la suggestion qu'il a faite et voir si
ceci n'entre pas dans les suggestions du...
M. TETLEY: Ce n'est pas une décision prise. C'est une suggestion
que je vous soumets. Je ne veux pas suggérer tous les amendements ici.
Biffer les mots, dans l'article 5, à la page 3 du bill: Accorder un
délai suffisant pour lui".
M. VINCENT: "Accorder un délai suffisant pour lui".
M. TETLEY: Ces mots.
M. VINCENT: Donc, l'article se lirait...
M. TETLEY: "Et lui permettre de prendre connaissance", parce que nous
voulons garder ce droit au consommateur de prendre connaissance. Si vous
trouvez que l'expression est équivoque, il faudrait peut-être
biffer ces mots, mais garder le reste. Parce que le principe est important.
M. VINCENT: M. le Président, pourrions-nous avoir l'opinion de M.
Roger sur cette suggestion qui n'est pas un amendement proposé, mais qui
nous est quand même soumise pour étude? Si l'article se lisait:
"... et lui permettre de prendre connaissance de ses termes et de sa
portée avant d'y apposer sa signature".
M. ROGER: Je trouve que c'est une excellente suggestion. Même, en
écoutant le ministre, il me venait à l'esprit que l'on pourrait
imposer aux vendeurs le devoir de recommander et même d'exiger que
l'acheteur ou le consommateur prenne connaissance de l'écrit et imposer
également à l'acheteur le devoir d'en prendre connaissance ou de
déclarer qu'il en a pris connaissance. Evidemment, assez souvent, l'on
trouve au bas de certains contrats des termes qui disent que l'acheteur
reconnaît avoir lu et bien compris. Cela vaut évidemment ce que
ça vaut. Il se pourrait que l'on puisse ici, à l'article 5,
prévoir, en somme, un mécanisme quelconque qui assurerait que les
parties sont bien d'accord et qu'elles ont bien lu et compris.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres membres de la commission qui
ont...
M. ROY (Beauce): Oui. J'aurais une question à poser, s'il vous
plaît, à la recommandation no 5: Si un consommateur faillit
à ses obligations contractuelles, il nous semble injuste que l'article
35 du projet de loi oblige un marchand à attendre trente jours
après réception de l'avis par le consommateur pour exercer son
droit de reprise. Alors, vous recommandez plutôt que le marchand soit
admis à revendiquer immédiatement sur défaut du
consommateur, celui-ci se voyant accorder un délai additionnel de 30
jours pour remédier à son défaut sans
pénalité.
Est-ce que vous pourriez donner un peu plus d'explications à la
suite de votre recommandation?
M. ROGER: Je sais que lors de la première séance des
travaux de la commission, sur ce projet de loi, des représentations ont
été faites à propos, par exemple, des automobiles neuves.
Il peut se produire beaucoup d'autres cas où le bien qui a
été vendu est susceptible de se déprécier
rapidement, de sorte que sa valeur de revente sera considérablement
réduite si le vendeur est obligé d'attendre 30 jours. Il se peut
également que le bien en question soit placé dans un local tel,
ou un lieu tel qu'il puisse s'endommager. Si on permet au commerçant,
dans le but de protéger sa créance et de protéger, en
somme, ce qui serait encore sa propriété, de reprendre le bien et
de le conserver pendant 30 jours, on lui accorde la faculté de se
protéger, mais à ses propres frais.
Si le commerçant estime qu'il n'y a aucun inconvénient, ou
que les inconvénients, ou les risques de perte sont assez faibles, il
pourra laisser le bien entre les mains du consommateur et s'éviter les
frais de reprise et de conservation.
M. ROY (Beauce): J'aurais peut-être une question à poser au
ministre à ce sujet. Relativement à l'article 35, le ministre
a-t-il l'intention de proposer des modifications, ou de proposer certaines
précisions? Dans le cas d'une automobile, par exemple. C'est un cas
particulier. Mais il y a certains biens de consommation à long terme, il
y en a de consommation immédiate et d'autres, à moyen terme. Si
on prend la même loi et qu'on l'applique à quelqu'un qui a
acheté des pneus d'automobile, il est évident qu'une remise
après 30 jours change considérablement la responsabilité
du consommateur vis-à-vis du marchand. Il est évident que si le
marchand, ou le vendeur est dans l'obligation d'attendre 30 jours, cela peut
causer des préjudices assez sérieux. Il ne faudrait tout de
même pas que la Loi de la protection du consommateur, non plus, nuise
à notre commerce. Ma question est peut-être vague, M. le ministre,
mais tout de même, j'ai prix un exemple, entre autres, pour expliquer
qu'il peut y avoir des biens de consommation immédiate.
M. TETLEY: D'accord. J'ai noté votre remarque. En effet, il faut
protéger le consommateur et aussi, en même temps, il est
très important que le commerce fonctionne. Il ne faut pas, comme vous
dites, arrêter toutes les ventes de pneus ou d'automobiles. J'en prends
bonne note.
Je note que bien des mémoires ont signalé une
équivoque dans cet article.
M. LE PRESIDENT: La parole à l'honorable député de
Lafontaine.
M. LEGER: Merci pour l'honorable. J'aurais
une question concernant l'article 10, quand vous dites que vous voudriez
qu'une compagnie privée et son principal actionnaire ne soient pas
condamnés pour la même offense. Est-ce que, dans votre esprit, une
compagnie privée, c'est une compagnie limitée, à actions
ou une société?
M. ROGER: Evidemment, une compagnie privée, c'est une notion
fédérale. Mais il existe des compagnies privées, en fait,
c'est-à-dire des entreprises purement familiales ou le père de
famille est président et actionnaire à 98 p. c. et le reste
étant détenu par son épouse et son fils, ou qui que ce
soit. A toutes fins pratiques, dans ces cas-là, si une amende est
imposée à la compagnie, elle est imposée au
président lui-même, ou au père de famille. Et ici,
l'article en question prévoit que le président et même,
théoriquement, les membres de sa famille puissent subir la même
pénalité.
M. LEGER: Mais dans votre esprit, quand même, pensez-vous que la
loi pourrait prévoir la différence entre une petite compagnie et
une autre compagnie?
M. ROGER: Oui. C'est la raison pour laquelle on fait allusion à
compagnie privée. Compagnie privée, au strict sens juridique,
cela n'existe pas au Québec. Mais il y a des compagnies qui, en fait,
sont des entreprises privées.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Si non, nos
remerciements à Me Roger, pour les suggestions très positives
qu'il a faites, au nom de son groupe.
M. ROGER: Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Nous invitons maintenant le Barreau du Québec
à se faire entendre par l'intermédiaire de ses
délégués.
Barreau du Québec
M. de GRANDPRE: M. le Président, honorables membres du
comité, je me permets d'abord de me présenter: Pierre de
Grandpré, Barreau de Montréal. Je représente ce matin le
bâtonnier général, Me Cinq-Mars, qui est actuellement
retenu en dehors du pays pour les affaires du Barreau, et qui aurait
aimé, j'en suis certain, être au moins présent sinon
présenter lui-même le mémoire du Barreau à votre
comité. Je suis accompagné, ce matin, de Me Jean Moisan,
bâtonnier du Barreau d'Arthabaska, et Me Micheline Audet-Fillion,
recherchiste au Barreau du Québec.
Si je veux bien être bref, à votre invitation, M. le
Président, il est quand même venu à nos oreilles que nous
avons été si brefs dans nos recommandations écrites au
comité que nous avons, à certains endroits, été mal
interprétés.
Et certaines de nos recommandations nécessiteront peut-être
des explications qui donneront à la commission les raisons qui motivent
les recommandations que nous avons faites.
D'abord, comme nous en faisons état, nous avons accueilli avec
satisfaction ce projet de loi de la protection du consommateur. Si nous
admettons que tout ne peut pas être traité dans une même
loi, nous invitons instamment le gouvernement, non pas à l'amender dans
sa teneur actuelle, mais à légiférer le plus tôt
possible dans le domaine du commerce des immeubles, dans le domaine de
l'alimentation. Nous croyons également que la Loi des agents de
recouvrement devrait être modifiée de façon à
accorder une plus grande protection au consommateur en assurant de meilleures
garanties de solvabilité, en prévoyant les formules de contrat et
en imposant des remises à termes fixes à leurs clients.
Nous croyons également que toujours au niveau du
consommateur la Loi de l'enseignement privé devrait
également être amendée au plus tôt de façon
que tous les cours qui sont donnés par correspondance puissent
être résiliables par le consommateur, à son gré, et
qu'il n'ait à payer que pour les cours qu'il a effectivement
reçus au moment de la résiliation du contrat.
Le bill 45 ne permet la résiliation de l'achat d'un bien que dans
le cas d'un contrat intervenu avec un vendeur itinérant. Nous
suggérons que, dans le cas d'un bien d'occasion, le droit de
résiliation soit étendu à tous les contrats d'achat. Et
nous nous expliquons en ce sens que l'objet que l'on achète neuf porte
généralement au moins la garantie du manufacturier, en plus de
celle du vendeur, ce qui est loin d'être le cas lorsqu'on achète
soit une voiture ou un objet d'occasion où la mécanique a
tellement d'importance. Il est facile de tromper un consommateur sur
l'état véritable du bien d'occasion que l'on vend.
Le projet de loi 45, et particulièrement l'article 19, qui fait
une exception à l'application de la loi pose à notre point de
vue, un problème important pour les consommateurs lorsque, au second
paragraphe, il exclut les contrats où le crédit peut être
garanti par un privilège ou une hypothèque. Les problèmes
que cela pose, c'est dans le cas de biens qui deviennent immeubles par
destination au moment où on les incorpore à l'immeuble sur lequel
les réparations sont faites ou sur lequel les modifications sont
effectuées.
Le consommateur, pas plus que le commerçant, ne sait toujours pas
s'il s'agit d'un contrat qui peut ou non être protégé par
un privilège ou une hypothèque. Je pense qu'il serait plus sage
de définir les objets que l'on entend exclure de la loi plutôt que
d'avoir le terme général de privilège et
hypothèque. Nous pensons à ces vendeurs itinérants qui
vendent des adoucisseurs d'eau, par exemple, que l'on raccorde au
système de plomberie, des sytèmes de chauffage, des
appareils de climatisation, du revêtement d'aluminium. Je pense qu'il
vaudrait mieux exclure une catégorie et dire exactement ce qui tombe ou
ne tombe pas sous la loi plutôt que de recourir à un procès
pour décider si oui ou non il s'agit d'un bien qui peut être
l'objet d'un privilège ou d'une hypothèque.
Dans ce sens, nous faisons la suggestion dans notre mémoire
écrit que lorsqu'il peut y avoir lieu à une résiliation
lorsque le contrat intervient à l'heure actuelle selon le texte
tel qu'il est présenté avec un vendeur itinérant
que l'on attende après la période de réflexion de cinq
jours avant de commencer les travaux. Parce qu'au moment où les travaux
sont commencés sur un immeuble, il n'est pas facile de retirer les
objets ou les matériaux qui ont été incorporés. Je
pense qu'il serait sage, pour éviter des ennuis et des procès,
d'énoncer clairement cette disposition législative.
Si nous pensons plus particulièrement au texte de la loi dans nos
recommandations, nous suggérons quelques définitions ou quelques
corrections à des définitions déjà
présentes. Nous avons dit tout à l'heure, au sujet des biens, que
si le législateur a l'intention d'intervenir dans la Loi de
l'enseignement privé, il faudrait exclure les cours par correspondance
de la notion de "biens" dans la présente loi. Il faudrait c'est
assez étrange et je soumets respectueusement que ce n'est pas la
première fois que cela vous est soumis définir au moins ce
qu'est un consommateur. On vient ici pour protéger le consommateur mais
le législateur ne nous a pas dit qui on doit protéger. C'est
assez extraordinaire. Nous sommes tous prêts à protéger
quelqu'un, mais nous ne savons pas qui.
Nous suggérons je ne dis pas que c'est excellent de
nous limiter. Je présume que cela se présente comme une mesure
sociale de protéger la personne physique qui achète et non pas
deux corporations qui vont conclure une vente entre elles. Nous pensons que
c'est l'idée du législateur de protéger une personne
physique et nous suggérons cette définition dans notre
mémoire.
Il a été question tout à l'heure des vendeurs
itinérants qui concluent des contrats durant l'heure du lunch ou en
dehors de leur place d'affaires. Nous suggérons d'incorporer dans la
définition du vendeur itinérant une exclusion à l'effet
que si le vendeur devient itinérant sur mon invitation parce que
je l'invite chez moi soit pour me vendre une voiture, soit pour me poser des
fenêtres d'acier, soit pour me faire un revêtement d'aluminium
je crois qu'il serait injuste, si je signe le contrat chez moi parce que
je n'ai pas besoin de me déplacer, de faire de cet homme un vendeur
itinérant. Je pense que s'il se présente chez un consommateur
à l'invitation du consommateur il devrait être exclu des
pénalités prévues pour le vendeur itinérant.
Nous croyons également que la loi devrait ne porter que sur des
biens. On devrait protéger le consommateur simplement pour l'achat de
biens et non pas pour l'achat de services purs et simples.
Je pense qu'il ne faudrait quand même pas croire que la loi se
présente dans un vacuum complet de législation, le code civil
existe déjà depuis longtemps. Dans le domaine du service pur et
simple, que j'engage un jardinier ou un laveur de vitres, je ne pense pas qu'on
puisse prétendre à lésion et qu'il y ait lieu d'appliquer
des lois différentes de celles qui sont déjà
prévues à notre code civil. Par conséquent, le contrat de
service pur et simple, lavage de linge ou lavage de vitres, devrait être
exclu de la portée de la loi.
Je souligne en passant c'est dans notre mémoire
qu'on a oublié, en français, la définition du mot
commerçant, qui existe en anglais.
Le contrat accessoire n'est non plus nulle part défini dans la
loi; nous soumettons qu'il devrait l'être et nous suggérons une
définition, à notre mémoire écrit.
Nous attirons également l'attention de la commission sur le fait
qu'il existe, à l'heure actuelle, un bill fédéral, le bill
C-22, qui se propose de permettre à un consommateur qui a signé
une lettre de crédit, un billet promissoire accessoire à un
contrat d'avoir une période de reconsidération, qui, à
l'heure actuelle, dans la loi fédérale, est, je crois, de 3
jours. Est-ce que l'on pourrait inviter les deux niveaux de gouvernement
à se consulter, de façon qu'il y ait au moins identité de
période de reconsidération, tant dans une législation
fédérale que dans une législation provinciale qui se
proposent le même but, protéger le consommateur, de façon
qu'au moins le public n'ait pas à se souvenir de 10 ou 15 dispositions
différentes?
Le bill, à l'heure actuelle, ne prévoit pas l'obligation
d'aviser la partie cocontractante de son changement d'adresse. Je pense qu'on
devrait nécessairement imposer cette obligation, si l'on veut que les
avis qui sont prévus en vertu de la loi puissent être efficacement
donnés.
Nous avons si nous passons plus précisément
à des recommandations de texte déjà
mentionné le problème, à l'article 12, de l'expression
"privilège ou hypothèque", nous n'y reviendrons pas. Au risque,
cependant, de m'attirer les foudres de M. le ministre, le Barreau s'oppose
fortement à la rédaction de l'article 14 du bill. Je pense que,
tel que rédigé, cet article 14, qui dit que "le consommateur
bénéficie de toute erreur dans le calcul ou l'énonciation
du coût de crédit", contient un principe qui est absolument faux
en droit et qui est contraire aux dispositions des articles 1047 et suivants du
code civil. Si l'on veut ne traiter que de l'ambiguïté, d'accord,
cela devra être stipulé, comme nos principes de droit le disent,
contre la personne qui a normalement rédigé le contrat, le
vendeur. Mais si l'on veut dire par là
qu'une erreur qui est une erreur, est une erreur de bonne foi, puisse
emporter le bénéfice au consommateur, je pense que c'est un
principe absolument inadmissible.
On sent peut-être que le projet de loi, dans certains articles,
est pénétré du concept que le consommateur est
nécessairement bon et que le vendeur est nécessairement mauvais.
Je pense que ce n'est pas exact et qu'il faut quand même, en toute
justice, protéger les droits des uns comme ceux des autres, tout en
améliorant la situation. Et le Barreau, M. le ministre, ne peut admettre
un principe comme celui-là, s'il va au-delà de corriger un
problème d'ambiguïté. Je pense que si c'est ce qu'on se
propose de faire, on devrait le faire en termes clairs et précis.
Partout dans le projet de loi, on ajoute ceci: le nom et l'adresse du
consommateur, s'ils sont connus ou si on les connaît. Ce sont les
articles 22 c), 28 c), etc. Je pense qu'avec le projet de loi tel que
conçu les deux parties sont en présence, connaissent bien leurs
nom et adresse. Il n'y a aucune raison pour que la loi n'oblige pas que le nom
du consommateur et son adresse soient écrits au contrat, au même
titre que ceux du vendeur.
Nous avons entendu, ce matin, des représentations je pense
que c'est des manufacturiers ou du Conseil du patronat concernant les
cartes de crédit. Vous verrez que le Barreau endosse le principe qu'ils
ont mis de l'avant, à savoir que, pour les crédits existants, il
n'y aurait pas lieu de renouveler la demande de crédit. Je pense
qu'à l'avenir on n'accorde pas le crédit qui n'est pas
sollicité, mais, d'abord, au point de vue économique, ça
représente des millions que de refaire toutes les demandes de
crédit pour des cartes qui sont en circulation.
M. le Président, je suis convaincu que, vous comme moi ou bien
d'autres, vous seriez drôlement dérangé d'avoir à
remplir 5, 6, 7 ou 10 formules de crédit quand la loi sera entrée
en vigueur, parce que cela fait votre affaire d'avoir les cartes et que vous en
faites un usage que vous jugez raisonnable.
Je pense que c'est légiférer un peu rétroactivement
que d'imposer une nouvelle demande de crédit à des gens qui s'en
trouvent satisfaits.
A l'article 34, nous suggérons, parce que la loi n'est
peut-être pas tout à fait claire sur ce point, qu'il devrait
être permis au commerçant de cumuler, dans son avis de trente
jours, les recours qu'il entend exercer. Le projet de loi lui accorde trois
options: exiger le paiement des versements dus; exiger le paiement du solde ou
reprendre possession du bien vendu. Si je donne un avis de trente jours, par
exemple, pour reprendre possession du bien vendu et qu'au bout de trente jours
l'objet est tellement détérioré que cela ne vaut pas la
peine de le reprendre, je vais il y a une certaine ambiguïté
donner un autre avis de trente jours pour exiger le paiement ou du solde
ou des versements échus. Je pense qu'au bout de tant de jours le
commerçant devrait avoir à son choix, à l'expiration des
délais d'avis, le droit d'accepter l'une des trois options qui lui sont
données.
Nous endossons également les remarques qui ont déjà
été faites, M. le Président, au sujet de l'article 52
à l'effet que, lorsque l'objet ne peut pas être restitué,
il ne peut y avoir par le consommateur une demande de résiliation de
contrat. Que cela soit sa faute ou non, je crois que c'est créer une
injustice monumentale que d'imposer la résiliation d'un contrat alors
que le commerçant ne reçoit rien en retour.
Nous attirons l'attention de la commission sur l'article 72 de ce projet
de loi, où l'on donne au directeur et à tout inspecteur le
pouvoir de prélever des échantillons. Est-ce qu'il n'y aurait pas
lieu d'accorder un délai pendant lequel il pourrait faire l'étude
de l'échantillon ou de démommager le commerçant du
prélèvement de cet échantillon? On peut fort bien imaginer
que le directeur se présente pour examiner une voiture et prenne un
échantillon chez un vendeur d'automobiles. Il s'en va avec un objet de
$4,000 à $10,000. Quelle indemnité donne-t-on au
commerçant? Est-ce qu'on a l'intention de l'indemniser? Est-ce qu'on a
l'intention de le payer dans l'intervalle? On lui fait peut-être manquer
une vente de cet objet-là. Est-ce qu'il y a un délai? Est-ce
qu'on va le garder six mois ou un an, cet échantillon? J'admets que
prendre un morceau de gomme chez quelqu'un ne crée pas de
problèmes, mais prendre une voiture ou un objet de très grande
valeur pose un problème qui est drôlement différent.
Les articles 86 et suivants traitent de l'appel de la décision du
directeur de l'office. Nous soumettons ne pas comprendre très bien
pourquoi on donne cet appel à un juge désigné plutôt
qu'à une cour constituée qui est la cour Provinciale et de
déclarer que ce juge a les droits d'un commissaire-enquêteur, etc.
Il semble qu'il existe un cadre juridique, une cour qualifiée et
compétente. Je ne vois pas pourquoi l'appel ne serait pas fait à
la cour comme telle plutôt qu'à un juge désigné de
la cour. Le juge en chef fera ce qu'il voudra des demandes, mais l'appel
devrait être dirigé à la cour Provinciale, suivant les
règles de la procédure et suivant les règles de la
preuve.
Il y a, M. le Président, des objections de beaucoup de gens au
texte de l'article 97 qui est un principe dangereux: celui de
légiférer par arrêtés ministériels. M. le
ministre a mentionné tout à l'heure que c'est un problème
d'efficacité contre un problème de démocratie. Je pense
que cela va beaucoup plus loin que cela. Il ne me ferait peut-être rien
ce n'est peut-être pas l'endroit pour le dire de laisser
tomber la question de la démocratie si l'on m'assure qu'avec une
consultation normale et efficace j'obtiendrai une loi juste et
éclairée. Il m'impor-
te peu que la loi me soit imposée par un démocrate ou un
tyran, si la loi est juste et éclairée. Je pense que la
façon, vraiment, d'être éclairé sur les
règlements à adopter en vertu de la loi, c'est comme nous le
suggérons, de consulter ou de donner au conseil le pouvoir de faire des
audiences publiques et d'entendre les mémoires, les revendications et
les positions de tout le monde, de façon à ne pas
légiférer d'une façon très efficace mais avec une
loi qui peut s'avérer très mauvaise.
Il y a quand même, en plus, et nous les appuyons, dans notre
mémoire, les sous-articles de cet article 97 qui devraient faire l'objet
de consultations publiques, sous l'égide du Conseil de la protection du
consommateur. Mais nous allons plus loin parce que nous vous soumettons qu'il y
a les sous-articles d) et g) qui sont de droit substantif et qui devraient
être décidés dès maintenant par le
législateur, en Chambre, plutôt que par arrêté
ministériel. Si on veut avoir des mentions obligatoires dans un contrat
c'est du droit substantif qu'on dise quelles sont les
dispositions qui sont nécessaires. Si l'on veut fixer un minimum pour un
versement comptant, qu'on le dise dans la loi. C'est le droit substantif. Cela
ne devrait pas être de nature à varier d'une journée
à l'autre, d'un mois à l'autre et d'une année à
l'autre. Je pense que donner un blanc-seing au lieutenant-gouverneur en conseil
est, démocratiquement parlant, un mauvais principe.
Nous nous opposons également à l'article 99. Il est tout
à fait contraire à l'économie du droit actuel ou de la
preuve actuelle de permettre la preuve testimoniale à l'encontre d'un
écrit. C'est ce que permettrait l'article 99 du projet de loi. L'on dit:
"lorsque la présente loi n'a pas été respectée". A
l'heure actuelle, il est permis de faire la preuve testimoniale des
circonstances qui ont entouré la signature d'un document. Par
conséquent, là-dessus, le projet de loi n'ajouterait rien. Et si,
dans son texte même, la loi n'a pas été respectée,
on n'a pas besoin de la preuve testimoniale pour en faire la preuve. Par
conséquent, nous soumettons respectueusement que l'article 99 n'a pas sa
place dans ce projet de loi,,
A l'article 102, on dit: "Tout avis prévu dans la présente
loi doit être délivré en personne ou expédié
par courrier recommandé ou par télégramme." Pourquoi
mettre de côté la signification par huissier ce qui, en
matière de droit, est quand même la signification la plus
sûre et la plus certaine? Est-ce que ce serait illégal de donner
une signification par huissier d'un avis prévu à la loi? Ce n'est
pas mentionné. Cela pourrait l'être, dans le texte actuel, et je
crois qu'il y aurait lieu de faire les corrections qui s'imposent.
Quant à l'article 103, connaissant les problèmes de la
poste, c'est un principe, nous vous le soumettons qui est drôlement
dangereux, que ce soit pour une partie ou pour l'autre, parce que la loi
prévoit des avis tant au consommateur qu'au commerçant. Confier
à la poste ou faire de la poste le mandataire entre les deux parties
contractantes, avec le résultat automatique que le fait de
déposer ma lettre à la poste constitue un avis à l'autre
partie, est un principe drôlement dangereux, en l'imposant, par la loi,
aux parties.
Il peut fort bien arriver que l'avis ne soit jamais reçu par
l'autre partie contractante.
Je pense que, dans un domaine comme celui-là, si l'on choisit la
poste, il faut s'assurer qu'il a été livré au destinataire
avant de prétendre que l'avis a été reçu.
Autrement, qu'on fasse signifier par huissier ou qu'on aille lui livrer la mise
en demeure ou l'avis en question.
Je pense que, pour se délier d'un contrat validement conclu, il
faut au moins être au courant d'un changement d'opinion ou d'un
changement de consentement chez la partie contractante.
A l'article 113, l'on projette d'instaurer la lésion comme cause
de nullité de contrat entre majeurs ou entre toutes personnes, en fait
donc entre majeurs. Le Barreau suggère d'aller même plus loin, de
faire une présomption de lésion en faveur des mineurs dans le cas
d'achat de biens de consommation.
C'est simplement une question de fardeau de preuve, mais je pense que
tout le monde a eu connaissance de jeunes et de mineurs qui s'achètent
des automobiles et qui se rendent bientôt compte qu'ils n'ont plus les
moyens de payer les versements qui sont dus. Il est facile de s'engager et
d'acheter des objets dispendieux quand on est jeune; je pense qu'il y a
peut-être un avantage d'avoir une présomption de lésion au
départ.
Le commerçant pourra prouver que tel n'était pas le cas,
qu'il l'a acheté pour les besoins de ses affaires, mais nous
suggérons qu'il y a là une innovation valable à faire de
ce côté-là.
Finalement, quand nous passons aux dispositions transitoires, nous
constatons que tout le chapitre de la Loi de la vente conditionnelle est
abrogé par la loi. L'article 31 du projet de loi exige 15 p. c. du prix
comme paiement initial pour constituer une vente à tempérament
valide. Nous croyons que l'ancien article 1561 j'oublie le paragraphe
protégeait davantage certains consommateurs parce qu'il excluait
de l'obligation de payer 15 p. c. du prix d'achat certaines classes d'acheteurs
ou de consommateurs, ce qui favorisait pour eux l'achat de biens dispendieux.
Nous pensons à l'achat de machines aratoires, installations
industrielles, instruments, bateaux de pêcheurs, barques, instruments
artisanats, professionnels, parce que l'on peut, au point de vue
économique, se retrouver dans la situation suivante que, si le
consommateur n'a pas les moyens, sur une barque de pêche, par exemple, de
payer 15 p. c. du prix d'achat au départ, il n'y aura pas de vente
conditionnelle à tempérament. Le vendeur se-ra-t-il
prêt à prendre un risque sur le crédit personnel de
l'individu sans avoir un titre valable à l'objet qu'il serait autrement
prêt à lui vendre; or, autrefois, au code civil, cela était
permis. Je pense que c'est rétrograder vis-à-vis de certaines
classes de consommateurs que de supprimer carrément ces articles de la
vente conditionnelle.
Nous suggérons également que l'article 1561 g) du code
civil actuel, qui permet à un créancier d'un consommateur de
payer le solde pour faire tomber le bien dans le patrimoine, de façon
à exécuter ou réaliser une créance contre lui,
devrait être conservé.
Pour des raisons, nous croyons qu'il n'y aurait pas lieu d'abroger en
bloc tout le chapitre de la vente conditionnelle du code civil ou d'incorporer
des dispositions équivalentes dans le projet de loi.
Je tiens à remercier la commission de l'occasion qu'elle nous a
donnée de présenter notre point de vue.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me de Grandpré. Je présume que le
ministre, député de Notre-Dame-de-Grâce, a des questions
à adresser à Me de Grandpré.
M. TETLEY: M. le Président, je remercie Me de Grandpré
ainsi que les charmants compagnons et le distingué membre du Barreau qui
sont avec lui.
Je trouve que le mémoire est intéressant et important
parce qu'il est technique et qu'il n'y a pas de parti pris dans ce
mémoire. Je voudrais proposer ici, si vous avez des suggestions
concrètes, de nous envoyer un texte, par exemple au sujet de l'article
113.
M. DE GRANDPRE: Pour l'article 113?
M. TETLEY: L'article 113. C'est un exemple. Il y a peut-être
d'autres exemple que j'ai notés.
M. DE GRANDPRE: L'article 113 n'a pas fait l'objet de notre
mémoire. Est-ce que ce serait un autre numéro?
M. TETLEY: La présomption, dans votre mémoire, à la
page 13.
M. DE GRANDPRE: D'accord.
M. TETLEY: En tout cas, c'est une suggestion pour l'avenir. Vous avez
noté que le commerce des immeubles fera l'objet d'une autre loi.
Très bien. J'ai noté vos suggestions au sujet des
matériaux et une description des biens. J'en ai pris bonne note. Il y a
aussi la définition du consommateur. Les questions relatives aux
vendeurs itinérants sont très intéressantes. Le
député de Laurier a déjà fait un commentaire avec
référence à une lettre d'un de ses électeurs. Vous
voulez exclure de la vente le contrat de services. J'en prends bonne note.
Je note aussi, à l'article 1, que nous avons une
définition anglaise mais pas de définition française du
mot commerçant ou "merchant". Peut-être que les anglophones ont
besoin d'une définition... Je me le demande. Je note aussi la question
du changement d'adresse pour le consommateur et les questions relatives aux
cartes de crédit. Pour ces dernières, il faut noter que la loi ne
préconise pas de rétroactivité. Mais je prends note de vos
observations. Au sujet de l'article 14, vous avez référé
à l'article 1047 du code civil, mais nous notons l'article 1019 qui est
aussi important dans le cas des... Sans en donner lecture, je note que le code
parle du cas de doute dans un contrat.
M. DE GRANDPRE: Si vous me permettez, M. le ministre, c'est ce que je
vous ai souligné. Si vous n'avez l'intention que de corriger une
ambiguïté, dites-le dans la loi; c'est déjà
prévu d'ailleurs dans le code civil. Mais s'il s'agit
d'interpréter toute erreur, même faite de bonne foi par le
commerçant, en faveur du consommateur, je dis que c'est un principe
absolument inadmissible.
M. TETLEY: Non. Il faut lire l'article 14. C'est tout simplement toute
erreur dans quoi?
M. DE GRANDPRE: Dans le calcul du coût de crédit.
M. TETLEY: Oui, mais pas toute erreur dans le contrat.
M. DE GRANDPRE: Si vous me permettez, vous allez donner à un
consommateur le bénéfice d'un crédit pour lequel il n'aura
pas payé.
Il n'est pas normal qu'il bénéficie, sur le dos du
commerçant, d'une erreur faite de bonne foi. Une erreur est une erreur,
elle est vraie des deux côtés.
M. TETLEY: Parfois l'erreur n'est pas une erreur.
M. DE GRANDPRE: C'est l'équivalent de la réception...
M. TETLEY: ...et surtout de la part d'un commerçant, d'une
compagnie de finance ou de quelqu'un qui prête de l'argent. Et nous avons
peur de ces erreurs-là, qui ne sont pas toujours des erreurs, mais qui
sont faites exprès.
M. DE GRANDPRE: Si vous me permettez, M. le ministre, ce que dit votre
loi ce n'est pas l'erreur faite par le commerçant dans le choix du taux
de crédit qui serait applicable, ce sur quoi le consommateur n'a
évidemment aucun contrôle et serait à la merci du
commerçant qui
dit: Je vous ai dit que c'était 7 mais ce n'est pas 7. Je me suis
trompé dans ma table, c'est 9, dans votre cas.
Vous dites: Une erreur dans le calcul.
M. TETLEY: C'est ça.
M. DE GRANDPRE: Par conséquent, si vous avez une annexe dans le
contrat qui dit que c'est 7 p.c. par année, pendant dix ans, cela
me fait penser à une chose que j'ai oublié de souligner devant la
commission et qu'au lieu de dire c'est sept fois 10 p.c, on fait une
addition qui ne va donner que 500, par exemple, c'est une erreur dans le
calcul. Est-ce que le consommateur va profiter du résultat final parce
que le calcul aura été mal fait?
M. TETLEY: Oui, parce que...
M. DE GRANDPRE: C'est la réception de l'indu ça. Le
consommateur reçoit une chose pour laquelle il n'a pas payé,
qu'il n'a pas le droit de recevoir. Il n'y a pas de raison de traiter plus
particulièrement celui-ci que son voisin, en faveur de qui il n'y a pas
eu d'erreur de calcul quand il s'est présenté hier, chez le
même marchand.
M. TETLEY: Vous avez un tout petit consommateur devant une compagnie qui
prête de l'argent et les erreurs qui favorisent le consommateur sont
rares. Les erreurs de calcul n'oubliez pas tout simplement de
calcul et de calcul dans le coût du crédit, pas dans tout le
contrat, ces erreurs favorisent la plupart du temps la compagnie et non le
consommateur. C'est l'idée maîtresse de la loi, de protéger
le consommateur contre ces erreurs-là, parce que le consommateur ne
prépare pas le contrat. C'est un autre principe de droit aussi que le
contrat est considéré contre celui qui l'a
préparé.
M. DE GRANDPRE: Si vous le permettez, M. le ministre, il y a deux
concepts qui sont mêlés dans votre énoncé. Celui du
commerçant qui stipule, en cas d'ambiguité parfait, c'est
ça le principe en faveur de celui qui n'a pas stipulé.
Mais le concept de l'erreur de calcul, c'est un concept purement
mathématique et la loi oblige maintenant à dire qu'il n'y aura
qu'un taux de crédit et vous obligez maintenant la compagnie
prêteuse le prêt d'argent à expliciter
clairement sur son contrat comment on en arrive aux chiffres et combien
l'individu sera appelé à payer chaque mois. Et si, sur la face
même du contrat, dans le calcul, il y a une erreur qui fait que le total
n'est pas le total qui serait juste et qui devrait être celui
apposé en regard des chiffres qui apparaissent et qui ont servi à
faire le calcul, il n'y a rien on ne trompe personne c'est
simplement parce que l'addition faite n'est pas bonne.
Je me souviens je m'excuse de donner un exemple comme
celui-là avoir eu un comptable qui m'a fait, dans un état
financier, une multiplication que trois crayons à $0.10 donnait
$0.25.
Pourquoi aurais-je payé ou pourquoi une personne devrait-elle
payer $0.25, théoriquement, pour trois crayons nettement marqués
à $0.10 et qui faisaient $0.30? Je pense que votre loi parle d'une
erreur de calcul, elle ne parle pas d'une chose qui se passe en coulisse,
derrière le dos du consommateur. Elle parle d'une erreur de calcul qui
est sur la face du contrat. Je pense que cela est inique et que cela n'a pas sa
raison d'être.
M. TETLEY: Ce n'est pas une erreur de prix, on parle du coût du
crédit. Toute l'intention de la loi est que le prêteur doit
divulguer tous les coûts. S'il fait une erreur, on ne sait pas qu'il y a
une erreur, mais s'il en fait, le consommateur va en bénéficier.
Je prends note de votre opinion, c'est plutôt une opinion. Nous
connaissons tous les deux la loi telle qu'elle est à l'heure actuelle,
mais c'est une différence d'opinion. C'est peut-être un changement
dans la loi du Québec, mais c'est peut-être aussi un bon
changement.
M. DE GRANDPRE: Je m'excuse encore, M. le ministre, mais vous basez
votre argument sur l'énonciation du coût de crédit et j'en
suis, parce que le consommateur ne le sait pas, mais vous avez
également, dans votre article 14, le calcul du crédit. Si le
calcul, à sa face même, est inexact et qu'il y a une erreur dans
le calcul, je ne vois pas pourquoi le consommateur en profiterait.
Si vous voulez restreindre votre article à l'énonciation
du coût de crédit, j'en suis, mais pas à l'erreur de
calcul.
M. FOURNIER: M. de Grandpré, au sujet de la Loi de la protection
du consommateur, admettons que le chiffre total est le chiffre sur lequel le
consommateur s'est basé pour conclure la vente. A ce moment-là,
le vendeur prend avantage du manque de connaissances du consommateur.
M. DE GRANDPRE: C'est-à-dire que... Non.
M. FOURNIER: Admettons que l'extension, au lieu d'être de $1,200,
soit de $1,000.
M. DE GRANDPRE: Oui.
M. FOURNIER: C'est sur ce chiffre-là que le consommateur s'est
basé pour acheter; si on le calcule de nouveau en arrivant à
$1,200, il se fait alors jouer de $200.
M. DE GRANDPRE: Le vendeur se fait jouer de $200.
M. FOURNIER: L'acheteur aussi, parce qu'il pensait acheter pour $1,000
et non pas pour $1,200.
M. DE GRANDPRE: II y a peut-être une erreur... Là, vous
allez me parler d'un analphabète qui ne pourra pas lire que trois fois
dix font trente ou que dix fois cent font mille.
M. FOURNIER: Oui, le consommateur n'a parfois pas toutes les
connaissances voulues.
M. DE GRANDPRE: Oui, d'accord, mais s'il y a une erreur au contrat, il
est résiliable.
M. FOURNIER: Non, pas dans le calcul. Légalement, comme vous le
dites, dix fois cent font mille, mais si le vendeur inscrit que dix fois cent
font huit cents et que l'acheteur dise qu'il achète parce que c'est $800
et non pas $1,000, par la suite, par la loi que nous présentons, nous
voulons qu'il soit protégé et que le chiffre soit de $800 et non
pas $1,000. C'est la protection du consommateur que nous recherchons.
M. DE GRANDPRE: Je veux bien protéger le consommateur, mais
à quel prix? Est-ce qu'on doit le protéger en étant
iniuste pour d'autres? Le vendeur, lui non plus, ne l'aurait peut-être
pas vendu à $1,000, parce que ça peut être sa marge de
profit ou que ça peut être plus que sa marge de profit. Par
conséquent, que l'on parle de protéger le consommateur, si le
coût total du contrat a été pour le consommateur le motif
d'acheter et s'il savait qu'il est inexact par une erreur de calcul, le contrat
pourrait être résilié. On remettrait alors les parties dans
le même état où elles étaient auparavant. Qu'on ne
prenne pas avantage d'une erreur pour punir une partie.
M. FOURNIER: Nous partons du principe suivant: les deux parties ne sont
pas dans la même situation. Vous avez un vendeur
expérimenté qui connaît sa marchandise, ses prix, ses
calculs, qui a des vendeurs sur la route, etc., et vous avez le consommateur,
d'éducation moyenne, qui peut quelquefois ne pas en avoir du tout et qui
ne connaît pas les conséquences de ce qu'il signe.
Cette loi est faite pour ça. Si tout le monde avait un cours de
droit, évidemment, nous n'aurions pas besoin de présenter de
telles lois, mais le but premier de la loi est de protéger la personne
qui n'est pas en mesure de faire face à ces vendeurs et à ces
hommes qui ont toute l'expérience.
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, ça, c'est le principe de
la loi. Ce n'est pas une question d'expérience, d'inexpérience ou
de tromperie; on parle d'une erreur de calcul. Une erreur de calcul, c'est
quelque chose que la personne la plus compétente, même vous, M. le
député, fera peut-être en rédigeant un texte:
oublier un mot dans une phrase ou faire une mauvaise multiplication. On ne
prend avantage de personne; il ne s'agit pas de tromper qui que ce soit. Par
conséquent, je trouve inique qu'on punisse la personne qui commet cette
erreur-là; c'est une erreur faite de bonne foi. Je ne parle pas de
l'énonciation du montant de crédit; ça, le consommateur
n'en sait rien. Mais, s'il y a une erreur dans un calcul, il me semble
inadmissible qu'on en fasse profiter une partie plutôt que l'autre. Une
erreur, c'est une erreur et on doit placer les parties sur le même
pied.
M. LE PRESIDENT: Une question de concordance du député de
Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): Si vous permettez à un comptable
d'intervenir dans une discussion de juristes, je retiens les observations de M.
de Grandpré; je pense qu'il a raison. Je voudrais attirer l'attention du
ministre sur la différence entre le calcul et le coût du
crédit. Une erreur de calcul ne doit pas être imputée
à la mauvaise foi; c'est une opération comptable. Le
commerçant devra nécessairement, dans le cours normal de ses
affaires, faire effectuer une vérification du calcul par des assistants,
que ce soient des comptables ou des commis. Mais, même après cette
vérification M. de Grandpré a donné l'exemple tout
à l'heure d'un calcul faussé même par un comptable;
c'était peut-être 3 pour $0.30, en tout cas, ce n'était pas
indiqué par un de ses assistants, le commerçant peut subir
un dommage qu'il n'a pas voulu et qu'on ne peut imputer à sa mauvaise
foi.
Je serais porté à souligner au ministre que
l'argumentation de M. de Grandpré me parait sérieuse et qu'on
doit s'interroger sur le mot "calcul" inscrit à l'article 14.
Peut-être qu'il y aura lieu de différencier davantage, de laisser
tomber le mot "calcul" et de garder le point sur lequel le ministre veut
surtout protéger le consommateur, soit le coût du
crédit.
M. TETLEY: J'en prends note. N'oubliez pas qu'un marchand ou un
commerçant a le droit d'annuler le contrat, s'il va perdre ses $100,000,
etc. Il aurait toujours ce droit-là.
M. DE GRANDPRE: En vertu du code civil.
M. TETLEY: Oui. J'espère que vous n'êtes pas contre le code
civil.
Il a ce droit-là. Je prends note de votre suggestion, mais
n'oubliez pas que ces erreurs-là je le répète
parfois, n'en sont pas.
M. DE GRANDPRE: Cela devient une question de fait, M. le ministre.
M. LE PRESIDENT: Je permets au député de
Notre-Dame-de-Grâce de terminer les commentaires qu'il a à faire
sur ces articles.
M. TETLEY: Vos commentaires au sujet des articles 34 à 37 et 86
à 88 sont intéressants.
Au sujet de l'article 97, comme vous l'avez noté, c'est un
article de grand principe. Est-ce que le gouvernement va préparer les
règlements? Qui va les préparer? Qui va les critiquer? Je crois
que le gouvernement doit les préparer et que le Parlement,
c'est-à-dire l'Opposition et le gouvernement, doit les critiquer. J'ai
peur de retirer au Parlement ses droits et ses devoirs. Je ne veux pas donner
ces pouvoirs-là à un conseil ou au grand public, retirer à
l'Opposition ses devoirs et ses obligations. Je vais vous donner un autre
exemple. Au fédéral, tout le monde veut donner à
l'auditeur général d'autres pouvoirs, pouvoirs qui sont vraiment
les devoirs et pouvoirs de l'Opposition. Au lieu de diminuer les pouvoirs du
gouvernement, l'auditeur général, avec ses pouvoirs
considérables, va diminuer ceux de l'Opposition qui est ici ce matin ou
qui est à Ottawa. Je préfère des conseils de vous, autant
que possible, des lettres ou même des commissions, ici, mais je crois que
le Parlement c'est-à-dire l'Opposition et le gouvernement ensemble
doivent gouverner. C'est encore une fois une opinion.
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, M. le ministre, je suis
entièrement d'accord pour dire que le gouvernement doit gouverner. On se
plaint de l'inverse trop souvent. Mais, ce que je veux souligner je me
suis peut-être mal exprimé c'est que, dans un principe de
délégation de pouvoirs comme celui-là, qui est un principe
extrêmement dangereux, on doit quand même mettre dans la loi des
précautions, non pas pour supprimer ou enlever au gouvernement le droit
ou l'obligation de gouverner, mais pour imposer au moins qu'avant de l'avoir
fait on ait pris les précautions nécessaires et qu'on ait pris
connaissance des points de vue les plus répandus sur le point sur lequel
on s'apprête à gouverner. Cela, le Conseil des consommateurs, on
en dispose en quelques articles. Dans l'article 97 et par
référence, également, au niveau des articles traitant du
conseil, on devrait avoir l'obligation, avant de légiférer sur
des problèmes qui affectent toute l'économie, d'avoir eu au moins
des auditions publiques, d'avoir écouté des points de vue. Libre
au gouvernement de ne pas les suivre par la suite.
Cela se produit souvent. Mais, au moins, on se donne la chance de
légiférer d'une façon éclairée en
s'imposant, au départ, dans cette délégation de pouvoirs,
l'obligation de consulter quand même les gens qui sont directement
intéressés.
M. TETLEY: Très bien. Sur le plan technique, d'accord. Mais c'est
à l'Opposition de nous critiquer. Elle est élue pour cela.
M. DE GRANDPRE: Oui, mais, par arrêté en conseil,
l'Opposition critique très peu. Ce n'est pas un projet de loi. Les
arrêtés en conseil sortent et ils sont là.
M. TETLEY: Le Parlement siège de neuf à dix mois par
année et l'Opposition... Peut-être n'avez-vous pas confiance en
l'Opposition. Mais moi, j'ai confiance dans le système je ne dis
pas que j'ai confiance en l'Opposition mais je préfère le
système.
A l'article 102, c'est très bien. Je prends bonne note de vos
références à l'article 102.
A l'article 115, la fameuse question de 15 p.c, c'est une question de
précision, d'opinion. Je note votre opinion. Merci.
M. DE GRANDPRE: Si vous permettez, M. le ministre, il y a un point sur
lequel j'ai oublié de soulever l'attention de la commission tout
à l'heure. Le projet de loi, contrairement à ce que faisait le
code civil, ne met pas de délai à la période de
crédit. Je pense que c'est dangereux de tomber dans ce principe de $1
maintenant, $1 tout le temps. Le code civil faisait cela; pour une classe de
crédit de tant à tant, on avait tant de mois, de tant à
tant, on avait tant de mois. Je pense qu'il est mauvais, pour le consommateur,
de le laisser s'embarquer pour parler canadien dans un contrat de
crédit pour une période que ne limite pas la loi. Elle peut
être de dix ans, quinze ans, vingt ans, cinquante ans, si on respecte le
taux de crédit, l'énonciation, le calcul, etc.
M. TETLEY: Quelle limite voulez-vous?
M. DE GRANDPRE: Je ne suis pas le législateur. Je vous
suggère le danger qu'il y a de ne pas mettre de terme. Je ne m'immisce
pas dans les questions sociales.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de
Mégantic. Suivront le député de Lafontaine, le
député de Papineau et le député de Montmagny-
M. DUMONT: Merci, M. le Président.
A la page 6 de votre mémoire, vous indiquez et c'est une
question que vous posez : Les séries de cours, les cours par
correspondance sont-ils inclus dans cette définition? Le Barreau est-il
en faveur que ce soit inclus ou non?
M. DE GRANDPRE: C'est-à-dire que le Barreau, comme je l'ai
énoncé, serait plutôt en faveur de modifier la loi de
l'enseignement privé, et d'imposer à tous les cours par
correspondance la pénalité d'être résiliables
à la volonté du consommateur en ne payant que pour le nombre de
cours qu'il a reçus au moment de la résiliation, ce que la loi ne
fait pas à l'heure actuelle. Elle devrait également uniformiser
les délais je pense que c'est dix jours dans l'autre loi
de façon qu'il y ait une certaine concordance, une certaine
facilité pour le public de s'y reconnaître.
M. DUMONT: A la page dix, article 37, deuxième alinéa, en
confrontant les articles 34, 36, 66 du projet de loi, on se demande si le
contrat pourrait stipuler le droit au commerçant de
pénétrer dans les lieux où se trouve le bien vendu et d'en
reprendre possession de force sans procédures judiciaires. Justement
à la page 12, je trouve qu'il y a là contradiction. Vous dites,
à l'article 102, "Pourquoi mettre de côté la signification
par huissier prévue au code de procédure civile"? N'y a-t-il pas
contradiction entre ces deux déclarations?
M. DE GRANDPRE: Je m'excuse, à l'article 102, si vous me
permettez, on ne traite que des avis que les parties peuvent se donner entre
elles avis de 30 jours, par exemple de leur intention de
reprendre possession ou d'exiger le paiement. Alors, quand nous demandons si
oui ou non il est loisible au commerçant de prendre, sans
procédures judiciaires, le bien chez le consommateur, la loi ne se
prononce pas là-dessus. Le commerçant doit-il se présenter
et reprendre son bien, au bout du délai de 30 jours convenu que la loi
impose? S'il le stipulait dans son contrat, est-ce que ce serait légal
s'il disait: Au bout des avis prévus à l'article de la loi, il
sera loisible au vendeur de se présenter et de reprendre possession, par
la force si nécessaire, etc. N'y aurait-il pas lieu de décider si
oui ou non il a le droit de le faire ou s'il faut nécessairement qu'il
s'adresse aux tribunaux?
M. DUMONT: Ma dernière question s'adresserait au ministre. A la
page 9, quatrième ligne, dans l'explication de l'article 23, il est
indiqué: "Nul ne peut émettre une carte de crédit à
un consommateur qui ne l'a pas sollicitée, sauf en cas de renouvellement
d'un crédit préexistant." Est-ce que, en tant que ministre, vous
auriez objection à ce qu'en cas de renouvellement d'un crédit
préexistant ça ne devienne pas une sollicitation de carte de
crédit? Est-ce que ça changerait tellement le texte de la loi et
que ça ne serait pas plutôt une accommodation?
M. TETLEY: Oui, nous pouvons peut-être ajouter à la
suggestion du Barreau les mots: "Aux mêmes conditions, s'il y a un
renouvellement."
M. LE PRESIDENT: Messieurs, la commission suspend ses travaux et elle
reprendra cet après midi à deux heures trente.
Reprise de la séance à 14 h 35
M. GIASSON (président de la commission permanente des
Institutions financières, Compagnies et Coopératives): A l'ordre,
messieurs!
Au moment de suspendre notre séance, ce matin, trois
députés, des deux côtés de la table, avaient
demandé de prendre la parole, car, semble-t-il, des questions devaient
être adressées aux représentants du Barreau.
Je donne donc la parole immédiatement au député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, M. De Grandpré nous parlait,
à la page 6, de la définition du vendeur itinérant et nous
faisait noter qu'on pourrait le définir ainsi: Celui qui, sans y avoir
été préalablement invité, de sa propre initiative,
par le consommateur... Est-ce que, dans votre définition, vous ne
prévoyez pas une ouverture possible à toutes sortes de
prétextes ou de gadgets pour passer à côté de la
loi? Je pense à une publicité où le client va appeler la
personne, ou même un appel téléphonique dont l'auteur
demande à la personne d'être invité et qui, par la suite,
sera invité. Est-ce que vous ne pensez pas que ce terme peut amener
beaucoup de falsifications?
M. DE GRANDPRE: Evidemment, M. le député, nous ne sommes
pas prisonniers du texte que l'on propose. Je pense que l'inclusion, dans la
définition, des expressions "sa propre initiative" fait que l'on
écarte au départ l'appel téléphonique que le
commerçant ou le représentant du commerçant ferait pour
faire la première approche. A ce moment-là, ce ne serait plus
strictement la propre initiative du consommateur. On pensait surtout à
ceci: Vous voulez avoir un représentant chez vous pour acheter quelque
chose. Vous préférez discuter de cela dans la tranquilité
de votre salon, vous le faites donc venir chez vous. Je pense qu'il serait
inique de le traiter comme un vendeur itinérant. Vous êtes heureux
de ses explications, heureux de son prix et vous signez chez vous un contrat,
que ce soit pour le revêtement de quoi que ce soit, en aluminium, la
réfection de votre toiture, ou quelque autre bien que vous
désiriez, ou même une automobile. Vous pouvez
préférer avoir une démonstration à domicile et vous
appelez M. Untel. A la minute où l'initiative du premier contact viendra
du commerçant, cela tombera en dehors de la définition. Si
l'initiative du premier contact vient du consommateur, je pense que, à
ce moment-là, il y a lieu de faire une exception.
M. LEGER: Si, par hasard, l'initiative des deuxième et
troisième contacts venait du vendeur, étant donné que le
premier contact n'a pas été fructueux, la loi ne
protégerait pas ce vendeur?
M. DE GRANDPRE: Evidemment, on peut
toujours imaginer des cas concrets. Je pense que les tribunaux seront
encore là et il leur faudrait décider. Il y a bien d'autres cas
que nous n'avons pas mentionnés dans le projet de loi qui, pour autant
que nous sommes concernés, peuvent facilement
dégénérer en chicanes. Quand même, on tente au
moins, d'une façon générale, de couvrir le plus de cas
possible.
M. LEGER: A la page 8, vous faisiez allusion au fait que le délai
de jours de réflexion proposé par la loi provinciale était
un peu peut-être pas contradictoire mais n'était pas
exactement le même que celui de la loi fédérale et vous
disiez qu'il faudrait qu'ils s'entendent.
Maintenant, selon vous, est-ce qu'il faut nécessairement qu'ils
s'entendent? Si, comme il arrive souvent, on s'aperçoit qu'on ne
s'entend pas, est-ce que, quand même, la loi provinciale ne pourrait
aller plus loin? C'est celle qui va le plus loin, en réalité, qui
fait force de loi.
M. DE GRANDPRE: Non. Si vous me permettez, tout ce que le Barreau
mentionne et dont vous faites état, c'est un voeu pieux afin que le
consommateur n'ait pas à considérer deux, trois ou quatre dates
possibles de reconsidération. Etant donné que les deux projets de
loi sont à l'étude, il me semble qu'il ne serait pas difficile
d'avoir une concordance de délai de façon qu'on sache que la
lettre de commerce est annulable dans les mêmes délais que le
contrat lui-même, qu'il y ait une concordance de temps. Et, comme le
fédéral était prêt à étudier le bill
C-22, ce serait tellement facile, alors qu'on étudie le bill 45, de voir
s'il ne serait pas possible de trouver un moyen terme afin que les les gens
s'en tiennent à trois ou à quatre ou à cinq, enfin qu'on
s'entende de façon qu'il y ait uniformité sur la
résiliation des contrats et des accessoires du contrat.
M. LEGER: Maintenant, aux articles 14, 23 et 113 je mets cela
ensemble parce que ce sont trois sujets différents mais qui touchent un
même état d'esprit dans l'article 14, on parle d'une erreur
de bonne foi; dans l'article 23, on parle d'une carte de crédit
renouvelable; et à l'article 113, on parle d'exploiter
l'inexpérience du consommateur. Je ne sais pas mais j'ai l'impression,
à la lumière de votre mémoire, surtout la deuxième
partie, non la première, que pour vous, cette loi vise à corriger
les fraudes venant des deux parties contractantes, alors que, selon moi, cette
loi veut protéger particulièrement une des parties contractantes:
le consommateur. Je pense qu'il faut tenir compte du fait que le consommateur,
souvent, du fait qu'il est isolé, du fait qu'il n'est pas
organisé aussi bien je parle comme individu - que les
producteurs, on doit tenir compte de sa difficulté à faire un
choix judicieux selon ses besoins personnels et ses moyens, et qu'il ne faut
pas uniquement le protéger contre l'exploiteur mais contre
lui-même. En ce sens qu'une erreur de bonne foi, suivant l'article 14,
comme c'est une loi pour le consommateur, je pense que si le consommateur voit
une erreur ou même s'il ne la voit pas, si celui qui a signé le
contrat, le commerçant, a fait une erreur, à ce moment-là,
le commerçant avait quand même toutes les possibilités,
tout le personnel pour établir son contrat.
Je ne vois pas pourquoi dans cette loi, qui a pour but de
protéger le consommateur, ce ne serait pas le consommateur qui
bénéficierait de cette erreur de bonne foi. Si vous voulez me
répondre la-dessus...
M. DE GRANDPRE: Je pense avoir tout dit là-dessus. Je suis
d'accord, on veut protéger le consommateur, mais je ne crois pas
c'est une opinion que l'on doive protéger quelqu'un en
créant ce que je considère, à certains égards, une
injustice vis-à-vis d'un autre. Ce n'est pas parce qu'on intitule une
loi, Loi de la protection du consommateur, qu'on doive en conclure
nécessairement qu'il faut punir quelqu'un d'autre. Il s'agit de
concilier les points de vue. Il faut le protéger, mais dans la justice
pour tout le monde. C'est cela qu'il s'agit de faire.
Vous mentionnez que l'article 14 traite de l'erreur de bonne foi; c'est
ajouté au texte. J'ai dit ce matin que si ce sont des erreurs de bonne
foi, il n'y a pas lieu que qui que ce soit en bénéficie. Il
s'agit de placer les parties dans le même état où elles
auraient dû être si l'erreur n'avait pas été commise
et si le contrat, par ailleurs, avait respecté toutes les prescriptions
de la loi.
M. LEGER: Vous me permettez une parenthèse? Etant donné
que le contrat, dans 99p. c. des cas, est préparé par le
commerçant lui-même, supposons que vous avez une erreur de calcul
indiquant que huit paiements de $100 égalent $700, si $700 sont inscrits
dans le contrat comme le disait tantôt le député qui
est maintenant absent c'est $700 que le client s'attend de payer
même s'il y a une erreur de calcul.
Je serais porté à dire peut-être que si c'est
marqué huit fois $100 et qu'il reçoit une facture, par la suite,
qui n'est pas partie intégrante du contrat de $700, là, d'accord,
le contrat sera de huit fois $100. Mais si le calcul précis est
marqué sur le contrat, vous ne voyez pas une façon de jouer le
consommateur qui s'attendait de payer ce prix-là exactement?
M. DE GRANDPRE: C'est-à-dire, si vous le permettez, il faut,
encore une fois, distinguer entre le taux de crédit et le calcul brutal
du crédit. Si vous me dites qu'on voit, à la face même du
contrat, dans deux blancs, huit avec un signe imprimé
préparé par le marchand et 100 qu'on rajoute, cela fait $800
à la multipli-
cation normale; si on écrit, par erreur, à l'autre bout de
la ligne $700, il ne peut être question pour qui que ce soit d'en prendre
avantage ou de frauder qui que ce soit. On a déclaré exactement
quel était le nombre de versements et c'est humain de faire une erreur.
On multiplie mal et on écrit $700 au lieu de $800; je ne vois aucune
raison pour laquelle le consommateur doive en bénéficier, ou
qu'on l'ajoute à la loi.
Si, en raison du total ou du montant qu'il s'attendait de payer, le
consommateur a consenti au contrat mais il ne l'aurait pas fait si l'erreur de
copiste n'y avait pas été, alors on annulera le contrat.
Il n'y a pas de raison pour que cet individu-là,
bénéficie d'une erreur humaine, mathématique aussi simple
que celle-là au détriment de l'autre. C'est un principe
injuste.
M. LEGER: A l'article 23, on parle de la carte de crédit qui est
expirée. Vous savez qu'on connaît, ces mois-ci, une avalanche
précédant la loi qui va être adoptée
bientôt - des cartes de crédit envoyées à tout le
monde. Plusieurs personnes de mon comté m'ont apporté l'exemple
de cartes de crédit de la compagnie Simpsons qui en envoie à tout
le monde, sans qu'on l'ait demandée. Ce crédit existe maintenant.
Lorsque la loi va être adoptée, ils pourront revouveler leur carte
de crédit. Ils en envoient actuellement, sciemment,, en avalanche, parce
que, justement, la loi va être adoptée.
Mais, si on reprend le principe de la protection du consommateur, celui
qui n'a jamais su parce qu'il n'avait pas la maturité voulue ou
qu'il avait une certaine naiveté résister aux cartes de
crédit précédentes, parce qu'il y voyait une
possibilité d'obtenir des biens qu'il n'aurait pas pu avoir autrement,
à ce moment-là, le fait de continuer cette habitude, parce que
les compagnies n'auraient pas le devoir de redemander le crédit ou
d'attendre que le client le fasse, au niveau de la protection du consommateur,
vous ne croyez pas que c'est un préjudice pour celui qui n'est pas
averti?
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, j'ai deux solutions au
problème que vous posez. S'il est facile de modifier, de mettre un terme
ou de corriger la situation que vous décrivez, à l'effet qu'on
s'empresse d'expédier des cartes de crédit à l'annonce du
projet de loi 45, que la législation dise tout simplement: Tout
crédit en date du 1er septembre 1970 n'a pas besoin d'être
renouvelé.
Deuxièmement, si vous dites qu'il y a des gens qui, par
inexpérience, ont déjà un crédit dont ils ne
veulent plus, qu'on mette quand même la réserve que ces
gens-là, avec la loi, auront le droit de retourner leur carte de
crédit et de résilier leur contrat, comme ils ont, d'ailleurs, le
droit de le faire à l'heure actuelle. Vous pouvez la retourner, votre
carte de crédit.
M. LEGER: Le principe que je veux soumettre, c'est que vous semblez dire
que tous les consommateurs ont une certaine maturité, qu'ils ont tous
les moyens de réaliser les désavantages et les avantages. Mais le
but de la loi de la protection du consommateur, c'est d'aider le consommateur
contre lui-même. Il est sur que les deux parties contractantes n'ont pas
la même possibilité de réaliser ça. Si on facilite
trop ce marchandage de cartes de crédit à des gens qui n'ont pas
les moyens de s'en servir, mais qui le font parce qu'ils sont attirés
par le besoin de posséder des choses que leur voisin possède, je
pense que, dans l'esprit de la loi même, on pèche, à ce
moment-là.
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, le crédit qui existe
à l'heure actuelle, c'est un fait.
Si une avalanche de crédit s'est greffée sur l'annonce de
la loi, je pense avoir donné une solution valable. Qu'on mette
rétroactivement, on bloque ces crédits. Mais pensez-vous que le
seul fait que vous exigiez une demande écrite de crédit va
protéger le consommateur contre sa propre expérience et sa propre
envie de faire aussi bien que son voisin? Il va signer sa carte de
crédit, il va l'envoyer pour faire comme Jos son voisin et il va la
payer. Ce n'est pas le fait d'avoir une formule additionnelle qui va
empêcher le bonhomme de s'en procurer une.
M. LEGER: Je m'excuse, mais je crois qu'il y a une grande
différence entre une personne qui est sollicitée
continuellement... D'ailleurs, c'est la raison de la publicité. La
publicité qui arrive régulièrement oblige la personne
à prendre une décision qu'elle ne prendrait pas
d'elle-même. C'est parce qu'elle est continuellement sollicitée
qu'elle la prend. Le fait de mettre quand même une certaine
barrière comme la barrière des 15 p. c. est pour
rendre davantage réaliste la personne, ne pas lui rendre trop facile
l'accès à des choses dont elle n'a peut-être pas besoin. Il
y a quand même une différence de penser que la personne peut le
faire tout simplement parce qu'elle le demande ou parce qu'elle va le recevoir.
Il y a une grosse différence, je pense, chez le consommateur.
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, il y a un nombre
considérable de cartes de crédit qui existent à l'heure
actuelle et qui ont été obtenues à la suite d'une demande.
La loi n'existait pas. Il a fallu quand même que vous fassiez une demande
à la compagnie pour obtenir de telle compagnie d'essence, de telle
banque, de telle compagnie, que ce soit l'American Express, le Diners Club ou
la Carte Blanche, le bénéfice de leur carte de crédit. Le
bonhomme qui n'a pas les moyens de l'avoir mais qui l'a déjà
demandée va être dans la même situation après
l'adoption de la loi. S'il veut la ravoir, il va écrire de nouveau et il
va la ravoir. Cela ne résout pas le problème. Il y a des limites
à
vouloir protéger les gens contre eux-mêmes, vous savez. Il
n'y a quand même pas moyen de se mettre dans les culottes de tous les
citoyens.
M. LEGER: C'est dans l'esprit de la société qu'on veut
créer.
M. DE GRANDPRE: Je comprends, mais il ne faut quand même pas
verser dans un socialisme extrême où on va prendre tous les
citoyens par la main et les empêcher de vivre. Il faut un juste milieu
entre protéger le consommateur et avoir une activité
économique qui soit raisonnable.
M. LEGER: Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela clôt les questions du
député de Lafontaine?
Il y avait une question retenue par le député de Papineau,
mais je crois qu'il n'est pas à la commission. Je cède donc la
parole au député de Montmagny.
M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, ma question s'adresse
davantage au ministre. Elle a trait à l'article 31. Le Barreau du
Québec en parle à la page 13 et exprime des réserves. On
dit: "N'y aurait-il pas lieu de conserver certaines exceptions"? Ma question
est celle-ci.
Je veux demander au ministre si on a vérifié, dans les
prêts consentis par les banques et les caisses populaires aux
agriculteurs pour l'achat de machinerie aratoire, installations et instruments
qui servent à l'exploitation agricole, si la banque ou la caisse
populaire ne prête pas jusqu'à 90 p.c. dans certains cas? C'est
une question que je me pose. Il y a longtemps que, personnellement, je n'ai pas
vu ces sortes de prêts, mais il me semble que les agriculteurs utilisent
largement ce prêt des agriculteurs. Dans ce cas, si les banques et les
caisses populaires, les institutions de prêt, vont jusqu'à 90 p.c,
évidemment, l'agriculteur ne pourrait pas, étant donné
l'article 31, utiliser le maximum du prêt de l'institution
prêteuse. Cela existe peut-être aussi dans d'autres
législations, dans l'industrie de la pêche et de la navigation
là où le prêt va peut-être jusqu'à 90 p.c.
M. TETLEY: L'article 31 concerne tout simplement les ventes à
tempérament.
M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, mais dans le cas de la machinerie
agricole...
M. TETLEY: Mais si c'est une vente à tempérament, qui veut
dire que la propriété est retenue par le vendeur jusqu'au moment
où le paiement final est fait, ces cas sont très rares. Les
légistes ont de toute façon pris note de vos observations...
M. CLOUTIER (Montmagny): Pour faire vérifier ce point.
M. TETLEY: ...pour vérifier si nous ne nuisons pas au commerce
actuel au bon commerce, et aux prêts aux cultivateurs, aux
pêcheurs, etc.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Bagot.
M. CARDINAL: M. le Président, pendant que nous avons l'avantage
d'avoir à la fois des représentants du Barreau du Québec
et un ministre qui est bilingue, et qu'on fait aux pages 9 et 10 du
mémoire du Barreau certaines suggestions concernant le texte, ma
question n'est pas du tout une critique à l'égard du rapport du
Barreau; je constate qu'il a fait des remarques sur les articles 12 et 14,
qu'il conseille de corriger le texte anglais de l'article 37 je pose la
question suivante au ministre et en même temps aux représentants
du Barreau: N'y aurait-il pas lieu, pour éviter des difficultés
d'interprétation, non pas que je veuille empêcher des
procès éventuels, de corriger également le deuxième
paragraphe, en anglais, de l'article 13?
Si on lit l'article 13 du deuxième paragraphe français, il
me semble que la traduction qu'on en donne en anglais n'a pas tout à
fait le même sens: "Only one additionnai credit", ça n'a pas le
même sens qu'un "coût de crédit additionnel calculé
suivant ce taux." Ne devrait-on pas plutôt dire: "A merchant shall
require, on any arrears, an additionnai credit charge calculated according to
such rate only,"? C'est une suggestion. Il me semble qu'il y a là une
mauvaise traduction anglaise. Comme nous sommes dans un texte juridique, la
différence entre la traduction anglaise et le texte français,
pourrait porter à confusion.
M. TETLEY: M. le Président, j'en ai pris note, avec mes
remerciements.
M. CARDINAL: D'accord. M. TETLEY: With thanks.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions de la part des membres de
la commission? Le député de Lotbinière.
M. BELAND: Oui, M. le Président. Par exemple, l'achat de services
par une firme qui ne déclare pas de taux statués selon une
échelle donnée lorsque le consommateur, à un moment
donné, s'aperçoit qu'il devra payer dix fois à peu
près le taux normal pour de tels services. Disons que ça se
rattache aux articles 12 et 14 et même 113. Soit à cause du temps
que devra prendre la cause en question ou encore d'une foule d'autres menus
détails, comme la compa-
rution en cour etc, le consommateur peut-il tout simplement ne pas payer
cette firme-là qui vend des services, s'il n'y a pas eu même de
contrat?
M. DE GRANDPRE: Si vous me le permettez, je crois comprendre que dans
votre exposé, vous semblez vous référer à un
avocat: longueur de cause ou services, comparution. Parlez-vous de services
professionnels?
M. BELAND: Non, il ne s'agit pas de services professionnels. Je vais
aller plus à fond. Disons qu'il y a une certaine quantité de
firmes spécialisées dans la détection possible de fautes
de matériaux de construction ou encore, par exemple, de défauts
de fabrication. Pour l'une, entre autres, de ces firmes-là, pas toutes,
c'est un cas qui a été porté à mon attention.
Le consommateur, évidemment, se plaignait en sonme que cela lui
avait coûté environ dix fois ce que chargent la moyenne des autres
maisons d'affaires semblables.
M. DE GRANDPRE: Si je comprends le problème que vous soulevez et
si vous me permettez, ce genre de service n'est vraiment pas rendu en
général aux petits consommateurs. Pour ce qui est de
vérifier la résistance de matériaux de construction ou de
choses semblables, les expériences telles que de béton, les
expériences en forêt, les expériences et tests sur quoi que
ce soit, si on veut protéger vraiment le consommateur, je ne pense pas
qu'on tombe dans la catégorie du consommateur que la loi a en vue. Je
peux faire erreur. On traite, en général, dans ce
domaine-là, avec des gens avertis, des entrepreneurs ou un industriel.
Je pense qu'il est assez exceptionnel de rencontrer ce genre de service au
niveau de consommateur qui, comme cela a été mentionné, ne
serait pas suffisamment averti pour décider à l'avance, quand il
traite du contrat ou de l'entente qu'il fait, à quel taux ce sera
payé. Combien me chargez-vous? Quelle est la base horaire? C'est le
contrat à forfait? C'est quoi? Je pense donc qu'on s'entend au
départ sur cette nature de service.
M. BELAND: Oui, mais j'ai une question supplémentaire. Vous
semblez alléguer que ce n'est pas la majorité des consommateurs,
d'accord. Par contre, prenons tout simplement le cas de celui qui a une petite
maison familiale et qui vend cette maison. L'acheteur éventuel, avant
d'accorder les derniers $500 ou $5,000 je ne sais pas, moi
allègue à ce moment-là toutes sortes de motifs pour ne pas
payer. Le vendeur est obligé de recourir à une maison du genre
pour tâcher de faire établir que la maison qu'il a vendue avait
toutes les qualités stipulées au contrat, etc.
M. DE GRANDPRE: Si vous me permettez, à moins de faire fi
totalement du code civil, il y a toujours moyen d'aller devant les tribunaux et
de laisser au créancier la tâche de prouver la valeur de ses
services. Si c'est vraiment en dehors de la valeur du marché, je ne
pense pas que son action pour le plein montant serait reçue. Je pense
qu'il existe quand même je l'ai dit ce matin -- d'autres
législations. On n'a pas que ce projet de loi pour protéger le
consommateur. On regarde l'ensemble du système juridique. Comme c'est
une exception et qu'on traite, en général, avec des gens qui ont
quand même une certaine aisance, un certain revenu pour faire ce genre de
contrat et que les tribunaux sont toujours là pour faire
apprécier la valeur des services, si, par hasard, ils étaient
bien au-delà de ce qui est normalement prévisible, je pense que,
là encore, on pourra faire arbitrer la chose par un juge, pour
décider si la charge est raisonnable en face du service rendu.
Evidemment, il est toujours souhaitable et préférable que ces
textes d'une législation comme la Loi de la protection du consommateur
je comprends, qu'on veuille l'adopter, cela presse un peu pour
différents motifs il serait vraiment préférable,
dis-je, qu'éventuellement les textes qui seront adoptés par
l'Assemblée nationale soient incorporés dans le code civil, de
façon qu'on n'ait pas à regarder le code civil et à se
promener des statuts au code pour savoir un peu tout ce dont
bénéficie un consommateur dans le cas de vente. On devrait
retrouver cela à peu près au même endroit, et ce serait
beaucoup plus simple.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.
M. MARCHAND: M. de Grandpré, je voudrais revenir à 1
article 14. Ce matin, vous vouliez, à cet article, faire enlever "dans
le calcul' et de laisser tout simplement l'énonciation.
Mais, par contre, la loi prônée actuellement par le
gouvernement est, je pense bien, une loi de protection au consommateur qui est
absolument nécessaire. Si on se réfère aussi à
l'article 108, qui dit: "Une erreur ou une omission faite de bonne foi ne
constitue pas une infraction au sens de la présente loi," est-ce que cet
article ne permet pas, justement, à celui qui a fait une erreur de bonne
foi de pouvoir résilier le contrat? Je pense alors que le mot "calcul"
à l'article 14 peut demeurer.
M. DE GRANDPRE: Je m'excuse, mais si vous regardez l'entête de la
section où se retrouve l'article 108, vous verrez que cette partie ne
traite que des infractions et des sanctions pénales et que je ne serai
pas condamné au pénal pour avoir commis une erreur de bonne foi.
Mais, en vertu de l'article 13, au civil, je resterai pris avec mon contrat tel
qu'il est dans sa rédaction. Ici on parle de notion pénale et de
notion civile... C'est pourquoi
Particle 108 auquel vous référez n'apporte pas de solution
ni de protection au texte de l'article 14.
M. MARCHAND: Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions à l'adresse
de M. De Grandpré?
Nous remercions bien sincèrement le Barreau du Québec
d'avoir voulu déposer un mémoire à notre commission et de
s'être fait représenter de façon si brillante. Merci,
messieurs; merci, madame.
M. DE GRANDPRE: Merci.
Association canadienne des compagnies de prêts
au service des consommateurs
M. LE PRESIDENT: J'inviterais les représentants de l'Association
canadienne des compagnies de prêts au service des consommateurs à
venir commenter leur mémoire et discuter des amendements
proposés.
M. FORGET: Mon nom est Marc Forget.
Je représente l'Association canadienne des compagnies de
prêts au service des consommateurs. Je suis accompagné par notre
conseiller juridique, Me Parsons, à ma gauche, et MM. Poirier et
Girardin; aussi un autre conseiller juridique, M. Kevin Smith, dont pour
l'instant la langue m'a fouché j'oubliais le nom.
Voilà le groupe qui doit faire cette intervention devant vous.
A la suite des remarques du président, je ne lirai pas le
mémoire au complet. Par contre, je me permettrai de faire quelques
commentaires sur certains des articles. Mais avant de commencer, je crois qu'il
serait opportun de ma part de rectifier toute impression de blâme qui
pourrait se dégager du premier paragraphe de notre mémoire. Je me
réfère à une phrase en particulier. Je cite: "Nous
déplorons la rapidité, etc. avec laquelle on nous a
demandé de préparer ce mémoire." Il est vrai qu'au tout
début les délais qui nous ont été accordés
ont été assez faibles; cependant, nous constatons avec plaisir
qu'ensuite, tous les intéressés ont eu ou auront l'occasion de se
faire entendre. Je remercie le gouvernement et les membres de cette commission
de l'occasion qu'il donne à tout le monde d'exposer son point de
vue.
Le premier point que je voudrais soulever concerne l'adoption des
règlements et la connaissance des règlements. Plusieurs ont fait
état de l'ignorance des intéressés au sujet des
règlements. Je crois que la consultation avec les
intéressés est nécessaire. J'ai été heureux,
ce matin, d'apprendre que M. le ministre approuve entièrement cette
consultation et il n'est pas question que nous désirions gouverner, ou
forcer l'adoption d'un règlement ou d'un autre.
Etant donné la complexité de certaines procédures
comptables, par exemple, de l'emploi de certaines formules qu'il va nous
falloir ajouter à nos opérations de chaque jour, nous sollicitons
respectueusement... Avant d'adopter certains règlements qui peuvent nous
occasionner des dépenses considérables, des ajustements dans nos
ordinateurs, par exemple, etc. nous croyons que le consommateur, comme le
commerçant, aurait grand avantage à être consulté
avant l'adoption de ces règlements. Et nous souhaitons que cela se passe
de cette façon.
Comme seconde remarque, il s'agit maintenant de voir à ce que les
règlements et cette loi touchent tout le monde. J'ai constaté,
avec regret, que, par exemple, les banques n'ont pas cru bon, apparemment, sauf
erreur, de présenter leurs vues concernant certaines des transactions
couvertes par la législation. Nous faisons le voeu et demandons
l'assurance que cette loi ne souffrira pas d'exceptions et que toutes les
sociétés prêteuses, que ce soit les banques, les caisses
populaires, les caisses d'économie, les coopératives, etc., y
soient soumises au même titre.
Question de définition, maintenant. Je ne crois pas que qui que
ce soit qui m'ait précédé ici ait fait allusion à
la définition du mot "période". Nous croyons que le
définition, telle que décrite dans le projet de loi, est trop
restrictive. Nous suggérons ceci, au lieu de 35 jours: Le nombre de
jours entre les dates auxquelles un paiement est requis par contrat. Pourquoi
cet amendement? Parce que dans quelques cas, peut-être pas nombreux mais
ils existent, le consommateur dont le revenu est saisonnier ne peut ni ne doit
être requis de faire des paiements à tous les 35 jours ou dans une
période égale.
Il peut arriver bon nombre de contrats où le remboursement peut
être fait à tous les trois mois, par exemple, ou à tous les
six mois, selon les dates auxquelles le revenu entre. Je crois que ce
changement n'enlèvera rien à l'objectif de la loi, qui, je crois,
vise à éliminer les paiements-ballons qui ont eu une certaine
popularité dans les années passées, lesquels
créaient des situations réellement difficiles pour le
consommateur. Le groupe de compagnies que je représente est
sûrement d'avis que le but que se propose la législation, tel que
nous le comprenons, est louable et que ce genre de paiements doit être
évité. En ce qui regarde la restriction à 35 jours, je
soumets qu'elle est trop restrictive et c'est pourquoi nous avons soumis une
nouvelle définition.
Nous nous inquiétons aussi du terme "vendeur itinérant",
à la suite de bon nombre de personnes et d'autres qui suivront, j'en
suis sûr. Nous vous suggérons simplement d'ajouter un mot à
la définition: "habituellement". Comme l'ont fait remarquer d'autres
encore, dans le cours normal du commerce, il arrive maintes et maintes fois, et
pour une multitude de raisons,
que le commerçant ait à visiter son client à
domicile. Cette définition rejoint celle établie dans une autre
province. Je crois qu'elle toucherait tous les vendeurs itinérants
à pression, pour se servir d'une expression qui les désigne bien,
parce qu'eux, habituellement, font du travail de porte à porte.
Je crois qu'il faudrait être bien sûr que dans le cas d'un
prêteur, par exemple, qui, pour cause de maladie ou autres, aurait
à passer à domicile pour faire signer un contrat qui a
déjà été conclu verbalement, il ne soit pas ipso
facto condamné ou classifié comme vendeur itinérant, du
fait qu'il soit arrêté au domicile pour avoir cette signature.
Je ne ferai pas de commentaire à l'article 5, car je suis
absolument de l'avis exprimé par le ministre, ce matin, pour la
suggestion qu'il a proposée, laquelle cadre avec nos vues. Nous nous
inquiétons un peu du conflit possible entre cette législation et
la loi fédérale sur les petits prêts. Il serait bon,
cependant, d'ajouter que nous reconnaissons la compétence provinciale
dans le domaine contractuel. Mais, nous attirons votre attention sur le fait
que l'obligation, pour le commerçant, de n'exiger qu'un seul taux de
crédit empêcherait la réduction du taux prévu
à l'échéance finale.
Vous savez, j'en suis sûr, que la Loi sur les petits prêts
exige que le taux à l'échéance tombe à 12 p.c. par
année. Si le texte de l'article 11 du bill actuel est maintenu, il
semble qu'il créerait un conflit par la baisse je dis bien la
baisse du taux d'intérêt pour le consommateur.
L'article 12. Cet article devrait être sûrement
amendé, surtout dans son deuxième paragraphe qui se lit comme
suit: "Elle ne vise pas non plus le contrat où un crédit consenti
à un consommateur pour l'achat, la construction ou l'amélioration
d'un immeuble est garanti par un privilège ou une hypothèque." Si
un emprunteur hypothécaire affecte une partie de son prêt à
rembourser une dette ou, à faire autre chose que la construction ou
l'amélioration d'un immeuble, encore une fois d'après le texte,
il nous semble que ce prêt deviendrait sujet au bill 45, ce qui,
d'après nous, n'est pas souhaitable.
Article 13. Ici aussi je pense je me répète
peut-être au conflit possible avec la loi fédérale
sur les petits prêts, car le taux, à l'échéance, est
décroissant. J'ai déjà mentionné les
conséquences pour le consommateur qui ne seraient sûrement pas
bonnes.
Article 14. Je ne crois pas que je pourrais ajouter beaucoup à ce
qui a été dit précédemment, mais je voudrais vous
offrir une considération pratique des problèmes qui peuvent se
poser si le marchand, ou le prêteur en l'occurrence, était
pénalisé par le fait qu'il y avait une erreur de calcul. Nous
sommes à l'ère des ordinateurs. La compagnie pour laquelle je
travaille est à installer un système d'ordinateurs et vous
n'êtes pas sans savoir qu'il y a souvent des erreurs, du moins au cours
des premières années. Si, le cas échéant, quelqu'un
pèse sur le mauvais bouton et crée, non seulement un calcul, mais
des centaines et des milliers de calculs erronés, il serait très
injuste de faire profiter les consommateurs d'une chose à la quelle ils
n'ont pas droit, de quelque chose qui n'est pas du tout illégal, et de
punir le commerçant qui, par inadvertance, par une erreur très
humaine, a causé une erreur de calcul.
Je pense que le sujet a déjà été
traité assez en profondeur; tout ce que je pourrais ajouter en plus
serait superflu. Ma seule conclusion est que si on ajoutait à l'article
14: "sauf si l'erreur est commise par inadvertance", le problème serait
réglé facilement.
A l'article 16, on lit: "Sauf pour le contrat accordant un crédit
variable, les paiements différés doivent être
consécutifs et égaux, sauf le dernier qui peut être
moindre." Evidemment, si un prêt hypothécaire est couvert par la
loi et que l'hypothèque est renouvelable tous les cinq ans, il est assez
clair que le dernier paiement serait plus élevé que les autres,
et il serait impossible de procéder par hypothèque.
Article 17. La méthode de calculer les frais de financement sera
couverte on nous le dit et c'est logique par des
règlements. Je soumets au gouvernement que la méthode de calculer
la réduction du coût de crédit en cas de paiement
anticipé, soit celle qui est reconnue partout ailleurs et qui est connue
sous le nom de règle 78, qui est reconnue comme celle qui est la plus
équitable, il n'est rien de mystérieux en ce qui concerne cette
méthode et elle est généralement acceptée par tous
les responsables de la surveillance des compagnies de finance dans les autres
provinces et dans différents Etats américains.
Le principe de base de ce système de calcul est tout simplement
l'allocation des frais, chaque mois, dans la proportion du montant de
l'obligation. En d'autres termes, plus la dette est élevée, plus
les frais sont élevés, et plus l'obligation est faible, plus les
frais diminuent. Nous sommes à votre disposition pour vous fournir toute
autre explication s'il y a lieu.
Article 21. L'article 21 semble défendre non seulement
semble, mais assez clairement défend tous les changements et
toutes les modifications à apporter à un contrat. Donc, le
commerçant est empêché par cet article de donner des
délais, de réduire les montants des versements selon la
capacité de rembourser du consommateur, à moins de passer un
nouveau contrat à chaque occasion. Il semble clair qu'on n'a pas
prévu les conséquences que cet article peut avoir.
Premièrement, en rendant les conditions de remboursement beaucoup
plus onéreuses pour le consommateur. Donc, on ne le protège plus.
On exige de lui qu'il respecte les clauses du contrat, peu importe que son
revenu ait diminué dans certains cas.
Deuxièmement, en forçant le marchand d'exercer ses droits
de reprise de la marchandise dans le cas d'un contrat de vente conditonnelle,
plutôt que d'en perdre la propriété le cas
échéant où il modifierait les conditions de remboursement.
Si dans le cas d'un contrat de vente conditionnelle le marchand signe un
nouveau contrat avec son client, la propriété passe maintenant du
marchand à l'acheteur. Donc, les conséquences pourraient, pour le
consommateur, être beaucoup plus mauvaises que bonnes. Nous croyons qu'il
est essentiel que le marchand puisse accorder certains délais et
même s'engager à de nouvelle conditions plus faciles pour
l'acheteur sans qu'il soit obligé de lui accorder un nouveau contrat qui
lui ferait perdre la propriété de l'article vendu. Nous
recommandons donc que la phrase suivante soit insérée à la
fin du premier paragraphe: "Nonobstant ce qui précède, le
commerçant peut accorder des délais, réduire le montant
des versements sans qu'il lui soit nécessaire de conclure un nouveau
contrat".
De plus, si le texte actuel n'est pas changé, il faudra
décréter que cet article ne s'appliquera pas au contrat de vente
conditionnelle car les mots suivants, dans le deuxième alinéa de
l'article 21: "Le consommateur est réputé payer avant
l'échéance", transférera effectivement à l'acheteur
la propriété de la chose vendue. Je crois que tout cet article
doit être revu dans ce sens.
Article 22. Le coût de l'assurance. Je crois qu'on n'a pas
beaucoup fait état de cette section précédemment. Nous
croyons fermement que le coût de l'assurance ne doit pas être
inclus dans le coût du crédit. Les frais d'assurance-vie ou
d'invalidité couvrent un service particulier qui ne doit pas être
confondu avec le coût du crédit. La couverture de l'assurance est
disponible et offerte à l'acheteur à crédit, mais n'a rein
à voir avec le coût du crédit. Plusieurs prêteurs
offrent à leur clientèle non seulement une assurance qui
rembourse toute somme due au décès, mais aussi une assurance
d'invalidité selon laquelle les versements sont acquittés par la
compagnie d'assurance sur présentation d'un certificat du médecin
traitant attestant de l'invalidité.
Il est inexact de dire que cette assurance est une partie essentielle du
contrat, car l'emprunteur a le choix de prendre l'assurance ou de la refuser.
Il me semble donc tout à fait injuste de prétendre que le
coût de l'assurance fait partie du coût du crédit. Tout
emprunteur peut à sa guise obtenir son prêt sans acheter
l'assurance qui lui est offerte et le coût du crédit n'est
influencé d'aucune façon par l'achat ou le refus d'acheter de la
part du client. On a mentionné, je crois, que c'est l'emprunteur qui
bénéficie de cette assurance parce qu'en cas de
décès, par exemple, la somme due est remboursée au
complet. C'est vrai en partie. Mais je crois et vous en conviendrez tous
que le grand bénéfi- ciaire est le consommateur. Dans le
cas de décès, je dirais que neuf fois sur dix mes
remarques sont basées sur une expérience personnelle la
veuve, ou enfin la succession, a dans la grande majorité des cas
suffisamment d'actif pour permettre le remboursement des dettes de ce
genre.
Seulement, il est très avantageux pour le consommateur de pouvoir
se décharger de cette dette par la compagnie d'assurance et de permettre
à la veuve, aux enfants ou à la succession de garder le produit
des polices d'assurance.
On a discuté aussi assez souvent, au cours des
délibérations, le montant comptant de 15 p. c. Je crois que je
vais déroger, si vous me le permettez, à la consigne de ce matin,
car je crois que c'est un des passages les plus importants du projet de loi,
pour vous lire une page de notre mémoire.
On y dit: II y aurait lieu de faire un long plaidoyer en faveur de
l'élimination de cette mesure, basé sur les points suivants:
Le premier: Les sacrifices que cette exigence impose aux
économiquement faibles qui n'ont pas le comptant requis. Je pourrais
même dire qu'il y a quelquetemps je ne veux pas parler au nom du
gouvernement ou de fonctionnaires mais il m'a semblé que, dans
les journaux, on avait mentionné qu'il était question de rendre
le crédit accessible aux nécessiteux, aux gens qui obtiennent des
prestations de bien-être social, etc. Ce sont eux qui, en somme, ont le
plus besoin de crédit. Les économiquement faibles ont, plus que
tout autre, besoin de crédit. Lorsque vient le temps d'acheter une
nécessité de la vie, un lit, enfin, je ne sais trop, on demande
les 15 p. c. à celui qui a le moins les moyens de les trouver. Je trouve
que non seulement cet article n'est pas de nature à aider le
consommateur, mais il est de nature à lui nuire.
Deuxièmement: L'impossibilité de contrôler
efficacement les exigences de cet article à cause de la grande
facilité avec laquelle on peut en contourner les dispositions, soit en
majorant le prix de vente ou soit en donnant à un article pris en
échange une valeur supérieure à sa valeur
réelle.
On a mentionné qu'une loi qui ne pouvait être
policée de façon convenable ne devait probablement pas être
adoptée. Je crois que celle-ci pourrait facilement être
classifiée parmi ce genre de lois.
Autre point: Les restrictions que cette mesure impose à la grande
majorité des commerçants soucieux de s'en tenir aux dispositions
de la loi. Vous avez un vendeur qui est devant un acheteur, il y a un potentiel
et il manque les 15 p. c. Il veut respecter la loi, il veut s'en tenir à
ses exigences, mais il sait fort bien que, s'il y tient mordicus, il faut les
15 p. c.; l'acheteur nécessiteux qui a besoin de l'article traversera
alors la rue et ira trouver un marchand un peu moins soucieux de respecter la
loi. Ce n'est ni
plus ni moins que jeter le consommateur entre les mains de gens qui,
sûrement, ne transigeront pas à son avantage.
Autre point: Le détournement vers les commerçants peu
scrupuleux des consommateurs moins fortunés qui n'ont pas au moment de
leur achat le comptant nécessaire à la transaction.
Etant donné que cette exigence ne fait pas partie de la loi des
deux provinces de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, les commerçants des
villes en bordure de ces provinces seront sérieusement affectés,
car le consommateur pourra, à son gré, obtenir de meilleures
conditions pour ses achats dans la province voisine.
Nous prions donc le gouvernement d'abolir l'article 31. Si, toutefois,
nos demandes n'étaient pas acceptées, il nous semble
évident que toute restriction prévue sur le montant du comptant
requis devrait faire partie des règlements et non de la loi
elle-même.
J'avais oublié un article fort important et je vous assure que je
suis placé pour le savoir: Un des premiers actes de celui qui est
obligé de verser un paiement comptant pour l'achat d'une marchandise et
qui ne l'a pas, est de se tourner vers une société
prêteuse. Il ira soit chez nous, à une banque ou à une
caisse populaire et il empruntera le montant dont il a besoin pour faire le
paiement comptant nécessaire à l'achat de l'article qu'il
désire.
Donc, le consommateur qui est placé dans cette
circonstance-là finit par avoir deux comptes au lieu d'un. Il fait deux
paiements au lieu d'un et assume des obligations qu'il ne devrait pas
être obligé d'assumer normalement.
Dans le contexte actuel, tout changement requiert un amendement à
la loi, ce qui n'est pas souhaitable à cause de la lourdeur de la
procédure à suivre. Cette loi, qui est une loi-cadre comme on le
faisait remarquer ce matin, prévoit des règlements pour la
plupart sinon pour la totalité des mesures pratiques, mais elle semble
faire exception pour la question du montant comptant. Nous recommandons, si nos
remarques ne parvenaient pas à obtenir l'assentiment du gouvernement,
que cette section fasse partie des règlements et non de la loi
elle-même.
Je vous avouerai qu'au cours de nos délibérations nous
avons hésité longuement à insérer les deux derniers
paragraphes dont je vous faisais mention, de peur de laisser l'impression que
notre objection au montant comptant n'était pas sérieuse. Nous
vous prions donc d'étudier de très près les
conséquences du maintien de cet article. Il serait peut-être utile
d'ajouter que la surveillance requise pour faire respecter cette loi
demanderait un nombre inouï d investigateurs. Le seul résultat
serait de priver ces personnes dont le revenu est faible d'acheter certaines
nécessités.
Aux articles 35, 36, 37, il s'agit de la reprise de la marchandise. Nous
trouvons que ces articles sont très sévères pour le
marchand. Ils favorisent les abus de toutes sortes de la part des consommateurs
qui voudraient se soustraire à leurs obligations sans, en
échange, obtenir pour l'acheteur, qui est soucieux de maintenir de
bonnes relations avec son marchand, une protection dont il ne jouit pas
actuellement.
Nous n'avons aucune objection à l'extension de l'avis de 30
jours. Actuellement, après la reprise, le marchand doit garder la
marchandise 21 jours; nous ne voyons aucun inconvénient à ce que
ce soit 30 jours. Nous croyons que cet article va trop loin parce que l'avis de
30 jours qui est donné au consommateur dont la probité est en
doute ne peut qu'encourager le recel et la détérioration de la
marchandise, soit par négligence ou par vandalisme. Nous soumettons que
les nouvelles restrictions n'accordent que très peu de protection
additionnelle au consommateur honnête et qu'elles auront comme effet
d'encourager la spoliation des biens par les moins honnêtes.
Vous voyez d ici le cas d'un acheteur qui, ayant pris la clef des champs
avec l'article acheté, automobile ou autre, est finalement
localisé. A ce moment-là, le marchand doit lui envoyer un avis de
30 jours avant de reprendre sa marchandise, soit plus de temps qu'il ne lui en
faut pour lui permettre de disparaître de nouveau ou de procéder
à un acte de vandalisme ce qui n'est pas rare.
Si, toutefois, on jugerait à propos de maintenir ces restrictions
que nous trouvons excessives, les modalités pour la reprise du bien
vendu devraient prévoir que la cour puisse accorder, par exception, une
reprise avant jugement. Du point de vue juridique, ce ne serait rien de
nouveau. Lorsqu'il y a présomption que le débiteur puisse se
sauver du pays ou cacher un article quelconque, la cour peut donner,
aujourd'hui, un ordre de saisie avant jugement.
Alors, pourquoi ne pas donner, si vous choisissez de maintenir les
restrictions actuelles, le même privilège à un marchand? Il
pourrait aller en cour et demander au juge, étant donné les
circonstances actuelles, étant donné l'expérience
passée et les faits, la permission de prendre la marchandise
immédiatement, quitte à protéger le consommateur, en lui
donnant, après les 30 jours requis actuellement par le projet de loi. En
plus, si, le cas échéant, il est impossible de rejoindre le
client, ne pourrait-on pas lui accorder 90 jours pour s'opposer à la
vente de la marchandise?
Voilà le sens de notre intervention dans notre
mémoire.
L'article 37, si nous en comprenons bien le sens, dit ceci: "Au cas de
remise volontaire ou de reprise forcée du bien, l'obligation
contractuelle du consommateur est éteinte..." Il nous semble assez
injuste d'éteindre l'obligation contractuelle d'un consommateur qui
remettrait volontairement au marchand le bien acheté, sans tenir compte
de sa valeur marchande et de
sa condition au moment de la remise. Il nous semble que cet article
devrait être amendé comme suit: "Au cas de remise volontaire
à laquelle le marchand consent." Le marchand devrait sûrement
avoir la possibilité de dire: Non! Vous avez abusé de la
marchandise. La marchandise est dans un état pitoyable. Gardez-la. Nous
nous réservons les droits accordés dans la législation
pour les paiements, mais tout consommateur ne devrait pas avoir la permission
de se décharger facilement en jetant un article qui n'a à peu
près aucune valeur dans la cour du marchand, et dire: Je ne te dois plus
rien.
Il faudrait se souvenir peut-être aussi que, si cet article est
maintenu, il aura comme effet un raidissement des exigences du marchand ou de
la compagnie de finance envers le débiteur. Car il encouragera une
reprise hâtive à la moindre indication de difficultés
financières, afin d'éviter une détérioration plus
rapide de l'article acheté. Aujourd'hui, je ne voudrais pas
répondre pour toutes les compagnies, mais je crois que la pratique
générale permet que le contrat puisse être en retard
jusqu'à 90 jours, avant qu'un marchand reprenne la marchandise. Tandis
que si l'article est maintenu, pour se-protéger, il est fort probable
que certains marchands verront à reprendre la marchandise dans les 30
jours, au lieu de 90 jours.
A l'article 39, en supposant le rejet de la requête, nous posons
une question au ministre, à savoir si le refus de la cour confère
à l'acheteur la propriété de la chose vendue. Il me
semble, au contraire, que le commerçant devrait conserver cette
propriété et, le cas échéant, advenant un
changement des circonstances affectant le consommateur, est-il prévu que
le commerçant puisse faire une seconde requête à la cour?
Je me réfère ici au cas où il y a plus que les deux tiers
du montant versés et une requête est faite à la cour pour
reprendre la marchandise. Cette requête, supposons-le, est
refusée. Est-ce qu'il y aurait une modalité qui nous permettrait,
advenant un changement des circonstances du consommateur, de retourner une
seconde fois, le cas échéant?
L'article 58, tel qu'écrit, rend impossible toute
publicité concernant le crédit sans en indiquer les coûts
affectant toute la gamme des contrats offerts par un commerçant, du
moins à ce qu'il nous semble. Je lis: "Un commerçant ne peut
faire de publicité concernant le crédit qu'il accorde les
mots sont très larges à moins que cette publicité
n'indique le coût total de crédit..." Je comprends par ces mots
que je ne puis pas annoncer que je consens des prêts, ou que je fais du
crédit, sans donner toute l'explication des charges qui peuvent
être bien différentes, selon les cas, dans mon annonce
publicitaire.
Nous recommandons qu'il soit récrit de la façon suivante:
"Un commerçant ne peut faire de publicité concernant le
coût du crédit qu'il accorde... il me semble que ce serait
plus clair à moins que cette publicité n'indique le
coût total du crédit, calculé et énoncé
conformément aux règlements."
Nous sommes à 100 p. c. d'accord pour que cesse toute
publicité qui fait état du montant d'un versement mensuel mais
oublie, par hasard, de mentionner le nombre de paiements. C'est un genre de
publicité qui est réellement regrettable. Mais tel que
rédigé, cet article interprété de façon
stricte, peut défendre, à toutes fins pratiques, toute
publicité par qui que ce soit en matière de crédit, car il
est évidemment impossible d'inclure le coût total de toutes les
transactions possibles.
A larticle 79, il y a une autre question que nous adressons à M.
le ministre. Un commerçant - dans le cas qui nous occupe une compagnie
de financement qui, dans l'exercice normal de son commerce, reprend une
voiture et subséquemment la revend, seul ou avec d'autres, au
détail ou en gros, devient-il par le fait même sujet à la
nécessité d'obtenir un permis tel que prévu à
l'article 79? En d'autres termes, la vente très occasionnelle d'une
voiture classifie-t-elle le marchand ou la compagnie de finance comme
étant un marchand de voitures usagées? Nous recommandons que
cette vente occasionnelle soit permise sans qu'il soit nécessaire pour
le marchand d'être détenteur d'un permis.
L'article 94 a été discuté à fond. Je crois
que je ne peux rien ajouter à ce qui a été dit
précédemment.
A l'article 111, il nous semble inacceptable qu'un contrat qui ne
respecte pas les exigences prescrites par la présente loi soit
déclaré nul. La perte du coût du crédit nous semble
suffisamment sévère sans entraîner la nullité du
contrat. Si la loi est acceptée dans des termes actuels et que le
contrat devient nul, comment peut-on réclamer le montant du principal
avec un contrat qui est nul? Au point de vue légal je soumets la
question aux juristes si un contrat est déclaré nul, je
vois difficilement comment on pourra obtenir un jugement sur un contrat nul,
étant donné que tout ce que nous rechercherions à ce
moment serait de retrouver le principal.
Nous croyons aussi qu'il devrait être stipulé que, dans le
cas où le consommateur demande la suppression du coût de
crédit et qu'effectivement il a gain de cause, le montant du principal
devienne immédiatement exigible.
Une dernière remarque sur l'article 113, au sujet de
l'inexpérience. On a mentionné déjà, au sujet de
cet article, que l'inexpérience n'est en cause que dans le cas où
les obligations du consommateur sont considérablement
disproportionnées par rapport à celles du marchand. C'est un
fait. Mais alors, pourquoi parler d'inexpérience? Un acheteur de
première instance sera-t-il toujours considéré comme
inexpérimenté? Combien d'automobiles un homme doit-il
acheter avant d'être considéré comme
expérimenté? Il nous apparaît que la possibilité de
se soustraire à ses obligations en prétextant
l'inexpérience, qui est un facteur très imprécis, devrait
être corrigée.
Je crois que ce sont toutes les remarques que j'avais à faire et
il me fera plaisir de répondre aux questions.
M. LE PRESIDENT: Merci bien, M. Forget. On vient d'avoir un petit caucus
sur la liberté. Je donne la parole au député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Je demande, M. le Président, que le
député de Bagot pose ses deux questions.
M. CARDINAL: Ce ne sont pas deux questions; ce sera plus court. Ce sont
seulement deux commentaires.
M. Forget a commencé son exposé en parlant des
règlements et il y est revenu à plusieurs reprises. C'est
l'article 97 de la loi qui donne à l'Exécutif,
c'est-à-dire au lieutenant-gouverneur en conseil, le pouvoir d'adopter
des règlements.
Lorsqu'il s'agit de moyens techniques qui se réfèrent
à la loi, nous, de l'Opposition n'y voyons aucune objection, mais
plusieurs des pouvoirs de réglementation peuvent affecter la loi
elle-même. Par exemple, si l'article 31 où il est question de ces
fameux 15 p.c. était reporté dans les règlements, je pense
que ce serait dangereux. Nous maintenons qu'il doit toujours y avoir une
différence très nette entre l'exécutif et le
législatif, sans quoi c'est donner un blanc-seing au gouvernement, de
quelque parti qu'il soit.
En d'autres mots, les citoyens, devant cette loi qui sera
complétée par des règlements, doivent se rendre compte que
les règlements ne peuvent pas, d'une façon importante, modifier,
du jour au lendemain, les modes d'applications de cette loi, sans quoi il
pourrait arriver que certaines transactions permises, suivant certaines
modalités, par la loi, puissent être, demain, rendues difficiles,
sinon impossibles, par des règlements.
Cependant, j'ai compris ici, je pense que le ministre va
m'appuyer que la semaine dernière, à la réunion de
la commission, il a été convenu qu'il y aurait une rencontre de
la commission sur un document de travail des règlements proposés
par le gouvernement.
M. TETLEY: Ce matin encore.
M. CARDINAL: Je n'insite donc pas sur ce premier point. Le
deuxième commentaire que je voulais faire, c'est que les membres du
gouvernement comme les membres de l'Opposition prennent très au
sérieux toutes vos remarques. Cependant, une chose me frappe: il me
parait difficile d'accepter certains amendements que vous proposez, si l'on
veut maintenir, entre le projet de loi 45 et le code civil du Québec,
certaines concordances qui paraissent absolument nécessaires, sans quoi
nous allons, par une loi spéciale, tout défaire ce que
j'appellerais l'économie du code civil qui, déjà, traite
des prêts, des ventes à tempérament, des obligations
hypothécaires, etc.
Ce sont les deux seules remarques, M. le Président, M. le
ministre et M. Forget, que je voulais faire et j'espère ne pas avoir
pris trop de votre temps.
M. TETLEY: Merci, M. Forget, ainsi qu'à vos conseillers
juridiques. Je note que vous avez suggéré et insisté sur
le fait que les questions bancaires, concernant le crédit, sont
régies par le projet de loi 45. Vous avez noté que les banques
n'ont pas, jusqu'à présent, présenté de
mémoire. A la page 4 de votre mémoire, vous avez mentionné
les vendeurs itinérants et vous avez suggéré une formule
ajoutant le mot "habituellement". Qu'est-ce que cela veut dire? J'ai deux
commentaires. Comment le consommateur peut-il savoir que le vendeur
itinérant, qui lui offre un lunch, est habituellement un vendeur
itinérant? C'est presque impossible. "Habituellement", cela veut dire
quoi? Est-ce que cela aide vraiment? Nous préférons que la loi
soit claire et que la loi comprenne tout le monde.
A la page 6 de votre mémoire j'ai pris note des autres
articles, mais je veux tout simplement faire des commentaires au sujet de
certains articles; cela ne veut pas dire que je ne trouve pas vos suggestions
valables vous avez fait des commentaires au sujet de l'article 13. D est
malchanceux, cet article 13, c'est certain. J'ai pris note, ce matin, que
d'autres personnes ont fait des commentaires, mais je crois quand même
que le principe est très valable; ce sont plutôt les
modalités qu'il faut peut-être modifier.
Vous avez parlé, à la page 7, de la règle des 78
qui se trouve dans d'autres provinces et dans plusieurs Etats
américains. Nous voulons aussi une loi générale et
universelle et j'apprécie votre commentaire. A la page 9, sur la
question des 15 p. c., ce problème-là est très important.
Je note qu'on peut écarter cette exigence par un marché noir qui
existe aujourd'hui; nous connaissons le problème. A la page 11, vous
avez mentionné les article 35, 36 et 37.
Vous dites qu'il n'y a pas de protection pour le marchand. Mais le code
de procédure et le code civil existent et vont exister. Il y a des
mesures provisionnelles dans le code de procédure civile. Par exemple,
l'article 733 au sujet des saisies avant jugement. C'est un droit qui existe.
Le code a été amendé, il y a trois ans. "Le demandeur
peut, avec l'autorisation d'un juge, faire saisir avant jugement les biens du
défendeur." C'est une mesure qui existe dans la loi actuelle. Vous avez
l'article 742, séquestre judiciaire; vous avez même l'injonction
dans les cas très importants.
M. FORGET: M. le ministre, est-ce qu'il n'y aurait pas une contradiction
évidente entre les deux? Il semble que le projet de loi 45 exige cet
avis de 30 jours et le code civil, effectivement, donne le droit à
certains créanciers d'obtenir saisie avant jugement. Alors, il n'y a
aucune référence aux 30 jours. Si la cour vous accorde le droit
de reprendre la marchandise immédiatement, l'avis de 30 jours est
annulé. Est-ce que le code civil passerait avant cette loi-ci? Je me
réfère aux juristes.
M. TETLEY: On peut faire les deux ensemble. Ici, c'est le marchand qui
fait la demande. Vous pouvez attendre 30 jours et saisir ou procéder par
séquestre. Je crois qu'il n'y a pas de contradiction. S'il y en a, nous
allons modifier la loi, mais je ne le crois pas.
M. CARDINAL: Je pense que c'est le point général que je
soulignais tout à l'heure, M. Forget. Vos suggestions, il faut les
étudier, comme la loi, en corcordance avec ce qui existe dans le code
civil et dans le code de procédure civile. C'est un point important. Je
pense que le comité de législation du gouvernement aura à
se pencher longuement sur la question.
M. TETLEY: A la page 14, vous avez posé des questions au sujet de
l'article 39, le rejet de la requête, etc. La réponse est non et,
pour le même article 39, la deuxième réponse est non.
M. FORGET: La propriété demeurerait entre les mains du
commerçant?
M. TETLEY: C'est ça. A la page 16 de votre mémoire, vous
avez posé une question. La réponse est la suivante: si une
compagnie de finance fait le commerce de vendre des automobiles usagées
à un consommateur, il lui faut un permis. Nous voulons contrôler
les personnes qui vendent des automobiles neuves et usagées, mais pas un
simple individu qui vend son automobile tous les deux ans. Il n'est pas
commerçant d'automobiles usagées. C'est tout.
M. LE PRESIDENT: Merci. Je cède la parole au député
de Lafontaine.
M. LEGER: M. Forget, le mémoire est présenté par la
Canadian Consumers Loan Association. Votre association a été
incorposée en 1944. Je présume qu'elle a été aussi
incorporée sous le nom d'Association canadienne des compagnies de
prêts au service des consommateurs.
M. FORGET: Malheureusement, elle ne l'a pas été encore;
elle le sera très bientôt.
M. LEGER: Très bientôt, je l'espère.
A l'article 22, vous parlez du coût de l'assurance qui ne devrait
pas être inclus, parce que, parfois, il y a des personnes qui ne veulent
pas en avoir. Est-ce qu'en général la compagnie elle-même
prête, même si la personne ne veut pas d'assurance? Cela ne fait
pas partie intégrante du contrat?
M. FORGET: Pas du tout, je vous l'assure.
M. LEGER: Vous avez affirmé, tout à l'heure, que cette
assurance-là était presque exclusivement à l'avantage du
consommateur ou, du moins, à son avantage.
Il faut quand même admettre que c'est une prime qui est
payée par le consommateur et dont le bénéficiaire serait
la compagnie qui n'aura pas de frais à encourir pour avoir son argent.
Est-ce que ce n'est pas aussi à l'avantage...?
M. FORGET: Je ne crois pas que j'aie dit que c'était
exclusivement à l'avantage du consommateur, mais vous avez parfaitement
raison, c'est le consommateur qui paie les frais, cependant, pour autant que
les bénéfices sont concernés, par expérience, je ne
peux pas dire que c'est le consommateur qui en bénéficie le plus,
parce que la perception de certains de ces comptes n'est pas tellement
difficile. Normalement, dans un règlement de succession
même aujourd'hui il y avait plusieurs polices d'assurance et la
perception ne posait pas de problème. Je ne prétends pas qu'on
percevait tous ces soldes, mais, à mon avis et par expérience, je
pense qu'à 60-40 le consommateur y retirait son avantage.
M. LEGER: A l'article 31, vous dites que vous trouvez que c'est inutile
de mettre 15 p. c. comme montant comptant à débourser. Je pense
qu'il y a toute une philosophie différente derrière cela. Si on
se place dans notre échelle de valeurs, en disant qu'idéalement
tous les gens devraient avoir la possibilité d'acheter tout ce qu'il y a
sur le marché, c'est sûr que c'est un obstacle; mais, si on veut,
par une loi de protection du consommateur, le protéger contre
lui-même, ne pensez-vous pas que, plus on rendra difficile l'accès
au crédit pour une personne qui n'en a pas les moyens, mieux ce
sera?
M. FORGET: Vous supposez le cas où une personne n'a pas les
moyens. Je crois que les préposés au crédit portent ce
jugement. Je crois qu'ils le portent assez bien. Une personne qui n'a pas les
moyens d'acheter à crédit, à l'étude, elle devient
un risque pas tellement bon. Je le dis par expérience acquise à
la compagnie où je travaille, nous refusons à peu près 50
p. c. des demandes. C'est donc qu'il s'exerce un contrôle. Les gens qui,
apparemment, n'ont pas les moyens de s'engager se font dire non. Nos
employés de même que les préposés au crédit
des grands magasins n'auraient pas avantage à consentir un crédit
à des gens qui n'auraient pas les moyens de rembourser. Il se fait un
contre-
le. Le contrôle est-il parfait? Non, j'en conviens. Mais, le
consommateur ne peut être brimé même s'il a
été imprudent. Qui d'entre nous peut dire qu'il n'a pas
été imprudent à un certain moment. Un consommateur peut
avoir été imprudent, il a trop dépensé, mais il
arrive une nécessité; même dans un cas où il n'a pas
été imprudent, par exemple, il n'a pas fait de temps
supplémentaire ou son revenu est diminué ou quelque chose, et les
exigences de sa famille ont voulu que le peu d'argent qu'il avait de
côté pour ces 15 p. c, il ne l'a plus et il doit s'acheter un
réfrigérateur. C'est l'été et ça va lui
coûter beaucoup plus cher pour sa nourriture; il va en perdre, et il ne
les a pas, les 15 p. c, Par contre, son crédit est bon, il travaille,
son revenu est stable; il n'y a aucune raison pour laquelle le vendeur
refuserait de vendre le réfrigérateur en question. Le
consommateur placé devant ces faits serait obligé d'aller
à sa caisse populaire ou à sa banque ou à une compagnie de
finance emprunter les $150, retourner au magasin et donner les $150 comptant ou
les $100, enfin le montant dont il s'agira. Faire cela n'aide pas le
consommateur. Je crois qu'il faut qu'on laisse aux préposés au
crédit le jugement qu'ils exercent assez bien. Des abus, il y en aura
toujours. Il y a des abus de la route, il y a des abus dans tout.
M. LEGER: II faut quand même admettre que laisser le jugement
à la personne qui veut prêter, cela peut être un peu
suggestif quand même; elle peut déterminer que tel client n'a
absolument pas les moyens de rembourser. Mais il y a d'autres cas où le
client aurait peut-être les moyens de rembourser, mais il se prive d'un
paquet d'autres choses plus nécessaires que l'objet de luxe qu'il
désire avoir. A ce moment-là, la raison de ces 15 p. c. est
justement pour rendre cela le plus difficile possible.
M. FORGET: Si on pouvait restreindre les 15 p. c. à des
situations où le consommateur n'est réellement pas obligé
d'avoir l'article qu'il veut acheter, cela serait merveilleux. Je reviens
à mon cas de réfrigérateur il pourrait y en avoir
bien d'autres où c'est réellement une
nécessité; la personne crèverait peut-être pas de
faim, mais c'est une nécessité, le moteur de son autre ne
fonctionne plus et sa nourriture ne peut pas se conserver. Il en a besoin et il
n'a pas les $50 comptant ou les $30, $40. On peut lui dire: Monsieur, vous avez
été imprudent, vous auriez dû prévoir que le moteur
se briserait, et il va falloir que vous attendiez trois paies encore pour
acheter votre réfrigérateur.
C'est dans ce sens que je trouve que c'est injuste pour le consommateur.
Cela ne l'aide réellement pas. S'il a suffisamment besoin de l'avoir,
s'il le désire suffisamment, il a je ne sais pas combien d'avenues,
aujourd'hui, pour se le procurer de toute façon. La restriction ne donne
donc rien, au point de vue pratique.
C'est pour cela que nous nous y opposons, en plus du fait que c'est
impossible de l'appliquer parce que cela prendrait je ne sais pas combien de
surveillance.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Merci, M. le Président. M. Forget, j'aurais
quelques questions à vous poser mais j'aimerais auparavant,
connaître davantage votre association. Il est dit au début,
à la page 1, qu'elle groupe 31 compagnies membres. Pourriez-vous me
donner quelques détails, par exemple, sur les 31 compagnies qui sont
membres? Est-ce que cela comprend également de grosses compagnies de
finance reconnues? Ou s'agit-il de petites compagnies de prêts, qui
peuvent oeuvrer surtout à un niveau régional, dans certaines
régions comme dans les grands centres? Ou encore, y a-t-il des
compagnies qui sont plutôt québécoises que
fédérales?
M. FORGET: Nos membres comprennent presque toutes les compagnies,
à quelques exceptions près. Je serais bien embêté de
vous nommer une compagnie de finance sauf quelques petites compagnies
locales qui ne soit pas membre de notre association.
M. ROY (Beauce): Vous représentez en quelque sorte toutes les
compagnies de finance,
M. FORGET: Je peux vous en nommer; en fait, ce sont celles qui sont
connues: Household, Niagara...
M. ROY (Beauce): De grandes compagnies.
M. FORGET: ...Avco, Laurentide, Beneficial, enfin toutes ces compagnies
sont membres de notre association.
M. ROY (Beauce): Vous pouvez nous en fournir une liste.
M. FORGET: Sûrement, avec plaisir.
M. ROY (Beauce): Nous aimerions également connaître la
liste.
Il y a un point qui a attiré particulièrement mon
attention. C'est à la page 6, section III, article 12. Vous dites ceci:
"Le deuxième paragraphe de cet article devrait être amendé
de façon qu'il soit clairement dit que tout prêt garanti par une
hypothèque ne soit pas visé par cette loi. Si on s'en tient au
langage actuel, tout prêt hypothécaire qui servirait en tout ou en
partie à d'autres fins que l'achat, la construction ou
l'amélioration d'un immeuble serait assujetti à la loi, ce qui
n'est sûrement pas souhaitable et causerait des ennuis inutiles au
consommateur".
J'aimerais avoir des explications là-dessus, lorsque vous dites,
par exemple, "causerait des
ennuis inutiles au consommateur et que ce ne serait pas
souhaitable".
M. FORGET: Premièrement et j'en parle un peu plus loin
dans le mémoire il serait impossible, dans le cas d'un prêt
hypothécaire, d'avoir des paiements égaux, parce qu'un grand
nombre des prêts hypothécaires sont renouvelables après
cinq ans et le paiement après cinq ans serait un paiement de ballon, si
vous voulez, ce qui est expressément défendu par le bill 45.
Voici un inconvénient auquel je ne vois pas comment on pourrait
remédier dans le texte actuel de la loi.
M. ROY (Beauce): N'y aurait-il pas lieu, croyez-vous, d'ajouter, par
exemple, à la loi "sauf en ce qui concerne les remboursements de
prêts hypothécaires", de façon à ne pas les inclure
dans la loi, pour ce qui a trait aux paiements égaux?
M. FORGET: Sûrement que...
M. ROY (Beauce): Plutôt que de condamner en bloc le prêt
hypothécaire. A ce moment-là, je songe surtout je suis
convaincu que toutes les compagnies de finance sont au courant qu'il
existe des contrats de garantie hypothécaire sur lesquels des compagnies
chargeront, par exemple, 10 p. c. du prêt hypothécaire, ce qui
constitue, en quelque sorte, comme un endossement au prêt; or, ces
compagnies sont également des courtiers en prêts
hypothécaires. Or, il y a des milliers de petits propriétaires au
Québec qui ont été victimes je dirai bien victimes
de ces compagnies. Dans certains cas, cela a rendu d'immenses services
je suis d'accord mais, dans d'autres cas, il y a de petits
propriétaires qui en ont été victimes. Je crois que,
justement, la Loi de la protection du consommateur devrait
légiférer de ce côté pour prévenir les abus
et, autrement dit, les éliminer, en quelque sorte. Je pense en effet que
tous ceux qui ont travaillé dans les caisses populaires, dans des
compagnies de prêts ou autres sont en mesure de se rendre compte des abus
qui ont été causés.
C'est pour cela que je suis un peu surpris de voir que vous dites que ce
n'est pas souhaitable et que cela causerait des ennuis inutiles au
consommateur.
M. FORGET: Je déplore certains des abus dont vous faites mention,
parce qu'il y en a eu, mais je suggère que vous obteniez des
informations d'un notaire. Je ne crois pas en effet que le commerce courant des
hypothèques puisse cadrer avec les implications du bill 45. Il y a par
exemple ce qu'on appelle communément en anglais le "finder's fees" et il
y a toutes sortes de frais qui, je crois, cadreraient difficilement avec
certains articles du bill 45. A mon sens, je ne vois pas ce que donnerait
l'inclusion des hypothèques dans le bill 45, quelle protection
additionnelle cela donnerait au consommateur.
Lorsque c'est une garantie hypothécaire additionnelle
rattachée à un autre contrat, d'accord mais là, le
consommateur est protégé par le fait que le contrat principal est
couvert par cette loi. Au point de vue de l'hypothèque, je ne suis pas
un expert, mais je ne crois pas que ce serait avantageux, je ne vois pas
personnellement les avantages qu'il y aurait.
M. ROY (Beauce): Mais ça permettrait tout de même au
gouvernement de pouvoir établir certaines normes, certaines exigences en
vue d'éviter l'exploitation, comme je l'ai dit tout à l'heure et
comme vous l'avez admis vous-même.
Vous parlez, un peu plus loin, de conflit possible entre la loi
fédérale et la loi provinciale en ce qui a trait aux petits
prêts. Sur quel point particulier croyez-vous qu'il pourrait y avoir un
conflit de ce côté-là?
M. FORGET: Sur le taux, tout simplement. D'après le bill 45, on
dit qu'un seul taux doit entrer en ligne de compte; il n'y a pas de changement
de taux, un seul taux et c'est toujours le même, tandis que la loi
fédérale, actuellement, prévoit un changement de taux non
pas au désavantage du consommateur mais à son avantage parce
qu'à l'échéance le taux baisse. Alors, ce serait brimer
les droits du consommateur... non pas brimer car je pense bien qu'il n'y aura
pas de conflit, je crois bien que la chose s'arrangera, mais en ce moment, si
nous comprenons bien, le texte empêcherait de faire
bénéficier le consommateur de la baisse du taux à
l'échéance de son contrat, dans le cas où le compte n'est
pas entièrement payé, et le taux, tel que prévu par la Loi
sur les petits prêts, la loi fédérale, baisse à 12
p.c. Le contexte de cette loi-là semblerait indiquer qu'on ne peut pas
le baisser, il semblerait y avoir conflit.
M. ROY (Beauce): II y a peut-être un autre côté de la
médaille par exemple, qui pourrait peut-être amener le
gouvernement provincial à obliger, en quelque sorte, les compagnies de
finance à publier leurs taux réels, car vous savez qu'il y a une
différence entre le coût du crédit et le taux. Le
coût du crédit s'établit en quelque sorte en montants et en
"signes de piastre", alors que le taux du crédit s'établit en
pourcentages.
Maintenant, il y a différentes façons de calculer le taux
de crédit. Vous pouvez établir un taux de crédit global
pour une période de 30 mois, et vous pouvez calculer un taux de
crédit global sur le montant total emprunté, et vous pouvez
calculer un taux de crédit réel fixe sur le solde. En quelque
sorte, de la même façon que les caisses et les banques le
calculent. Je sais que les compagnies de finance n'ont pas la même
façon de calculer le taux d'intérêt.
M. FORGET: Le taux réel auquel vous faites allusion est inscrit
dans nos contrats depuis cinq
ans, dans les contrats de presque toutes les compagnies qui font partie
de notre association. Je reviens maintenant au conflit possible. J'avais
oublié de mentionner que, d'après la loi fédérale,
actuellement, il y a trois taux d'intérêt qui jouent, qui entrent
en cause. Sur la première tranche de $300, le taux permis est de 2 p. c.
par mois ou 24 p.c. par année, mais seulement sur les premiers $300 de
toute dette. Sur la tranche entre $300 et $1,000, le taux permis est de 1 p.c.
par mois, 12 p.c. par année. Sur la dernière tranche de $500
et la loi fédérale ne couvre que les prêts de $1,500
en moins c'est 6 p.c. par année ou 1/2 par mois. Donc, le taux
varie selon le montant emprunté. Alors, étant donné que
c'est un taux qui change à mesure que le prêt augmente ou diminue,
on s'inquiète de savoir si le conflit, qu'on trouve assez
évident, ne viendra pas de l'acceptation du texte du bill tel qu'il est
proposé. Si on ajoute, soit dans les règlements ou autrement, que
les prêts, dont le taux est déjà contrôlé par
la Loi fédérale sur les petits prêts, ne sont pas
visés par ce règlement, alors il n'y a plus de problème.
Ou si on accepte dans les règlements que ce taux-là est conforme
au taux prévu dans l'article en question, là encore, tout est
bien. Nous voulons éviter les conflits entre deux lois , c'est tout.
M. TETLEY: M. le Président, qu'il me soit permis de noter qu'au
fédéral, la loi prévoit que, jusqu'à $500, le taux
peut être disons de 10 p.c; jusqu'à $1,000, de 8 p.c;
jusqu'à $1,500, de 6 p.c. Mais, ici au Québec, en vertu de
l'article 13, premier paragraphe, dans le contrat, il faut qu'il y ait un seul
taux.
Donc, il n'y a pas de conflit. Il peut y avoir un contrat de $1,500 avec
les trois taux différents au fédéral et que le taux final
soit par exemple, de 9 p. c. H faut annoncer dans nos contrats, suivant notre
loi, que le taux actuel qui nous intéresse, qui intéresse le
consommateur et qui intéresse le marchand, c'est le taux final, le vrai
taux. Nous ne voulons pas un contrat où une dame arrive et voit trois
taux différents. Nous voulons un taux et que le calcul soit fait par le
marchand.
M. FORGET: M. le ministre, le taux réel est déjà
inscrit à tous nos contrats. Mais le seul point que je voulais apporter,
c'est que, à l'échéance, il baisse. Alors, on peut
difficilement, dans le contrat, sans mettre deux taux, dire que le taux
réel est 16 p. c. et, à l'échéance, 12 p. c. Donc,
cela semblerait être contraire aux prévisions de l'article 13.
C'est le seul point qu'on veut apporter.
M. CARDINAL: Ecoutez, M. Forget, il y a quelque chose qui me
paraît peu clair, c'est peut-être parce que je ne comprends pas.
Que voulez-vous dire, quand vous dites que, à l'échéance,
le taux est de 12 p. c. au lieu de 16 p. c.? Est-ce que vous voulez dire s'il y
a un remboursement avant échéance?
M. FORGET: Non, non.
M. CARDINAL: Ou bien, si vous voulez dire qu'à
échéance...
M. FORGET: L'échéance finale. Si vous prêtez $1,000,
remboursables sur une période de 24 mois. Alors, au bout de deux ans,
pour une raison ou pour une autre, le compte n'est pas entièrement
payé. Il y a un solde.
M. CARDINAL: Ah bon! C'est ce qu'on appelle le ballon qui peut rester
sur un compte ou un...
M. FORGET: Non, non, pas du tout.
M. CARDINAL: ... ou un solde impayé parce que les versements
n'ont pas été faits à échéance.
M. FORGET: Oui, c'est ça. Simplement lorsqu'il y a un solde
à cause des retards dans les versements.
M. CARDINAL: Bien, justement, l'article 13, mal rédigé, je
l'avoue, dans son deuxième paragraphe on en a déjà
parlé prévoit justement que, s'il y a des arrérages
de taux, ces arrérages ne pouvant pas être
supérieurs...
M. FORGET: Bien oui, cela semble demander un taux plus
élevé que ce qui est reconnu actuellement.
M. CARDINAL: Disons que ce que je pourrais conclure de cela, c'est que
le deuxième paragraphe de l'article 13 devrait être
rédigé à nouveau, mais que ce qui est désiré
par le gouvernement et je pense que l'Opposition est d'accord
là-dessus c'est que le client sache, qu'il y ait ou non des
retards, quel va être le taux effectif.
M. FORGET: Nous sommes absolument d'accord avec ce point de vue.
M. CARDINAL: Et ça, ce sera un taux, même s'il y avait 25
taux dans un contrat, le commerçant les calculera et il dira le montant
total. Par conséquent, c'est ça, effectivement, le taux
réel.
M. FORGET: Le taux réel est indiqué. Maintenant, nous
sommes absolument d'accord avec la proposition du gouvernement d'indiquer
clairement ce taux.
M. CARDINAL: Très bien. Là, je pense que c'est compris.
Cela va, merci.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Nous remercions M.
Forget de ses commentaires au nom de son organisme et j'invite
immédiatement les représentants de Gulf Oil Canada
limitée, à s'adresser à la commission.
Gulf Oil Canada limitée
M. PARADIS: M. le Président, MM. les membres de la commission,
nom nom est Jean Paradis, avocat, et je représente la compagnie Gulf Oil
Canada limitée. Je suis accompagné, à mon extrême
droite, de M. Jean-Paul Godin, directeur adjoint au service du crédit;
à ma droite, de M. Bill Habkirk, directeur général du
crédit et à ma gauche, de M. André Corneille,
gérant de la division du Québec.
Nous apprécions de comparaître devant la commission
parlementaire pour exprimer notre opinion sur le projet de loi de la protection
du consommateur. Gulf Canada est d'accord avec les objectifs de cette
législation proposée et tient à assurer le gouvernement du
Québec de son entière coopération.
Nous avons eu l'occasion de travailler avec d'autres gouvernements
provinciaux au sujet des lois sur la protection du consommateur et nous nous
sommes toujours conformés à leurs exigences.
De façon générale, après étude du
projet de loi 45, nous avons conclu que, dans sa forme actuelle, le texte de
loi proposé semblait aller au-delà de ce que nous croyons
être l'intention du législateur. Nous avons aussi conclu que, si
le projet de loi 45 était adopté tel quel, ce serait le
consommateur québécois qui en définitive supporterait le
poids de certaines ambiguïtés et de certaines dispositions
exorbitantes qu'il contient.
Enfin, le projet de loi nous causerait, sans raisons apparentes, de
nombreux problèmes si certaines définitions ne sont pas
ajoutées ou modifiées, si les articles 3, 13, 14 et 48 demeurent
tels quels et si les articles 23 à 27 ne sont pas révisés
tout en respectant l'intention du législateur.
En faisant l'analyse détaillée du projet de loi article
par article, nous avons cherché à découvrir si, tout en
respectant l'esprit de la loi, le texte de loi ne pouvait pas être
amélioré en vue d'en faciliter l'application
éventuelle.
Les résultats de notre analyse se retrouvent aux pages 3 à
14 de notre mémoire. Depuis la préparation du mémoire,
nous avons eu l'occasion de considérer d'autres implications dont
j'aimerais également vous faire part.
Notre mémoire suit l'ordre du projet de loi et porte sur les
sections I, II, III, IV et VIII.
A la section I, le terme "consommateur" n'est pas défini. Il nous
semble essentiel que la loi protégeant le consommateur définisse
ce qu'elle entend par consommateur. Nous comprenons que le gouvernement a
l'intention de proposer la définition suivante du mot "consommateur":
"toute personne physique partie à un contrat visé par la
présente loi en une qualité autre que celle de
commerçant". Cette définition nous semble acceptable. Le seul
commentaire que nous pourrions faire serait de vous suggérer d'exclure
non seulement les commerçants de la notion de consommateur, mais aussi
les professionnels qui en fait font des affaires alors qu'en droit ils ne sont
pas considérés comme des commerçants.
Toujours au chapitre des définitions, nous avons certaines
représentations à faire au sujet de la définition de
"vendeur itinérant". Les dispositions du projet de loi concernant le
vendeur itinérant ont, il faut bien le dire, un caractère
exorbitant. Il semble que les mesures proposées aient pour but d'enrayer
les abus causés par les colporteurs ou les vendeurs itinérants
faisant des ventes sous pression. On comprend dès lors la
difficulté à définir l'expression "vendeur
itinérant" dans un texte de loi.
Je voudrais cependant ici vous mettre en garde contre une
définition trop libérale de l'expression. En effet, il ne
faudrait pas chercher à remplacer un abus par un inconvénient
encore plus grand pour le consommateur. Dans sa forme actuelle, il semble que
le législateur veuille soumettre, même dans les cas d'urgence,
l'installateur de "fournaises" aux dispositions de la loi visant le vendeur
itinérant, soit au délai de réflexion de cinq jours
accordé au consommateur par l'article 48.
L'inconvénient que nous voulons ici éviter au consommateur
est la décision que pourrait prendre le commerçant d'attendre
l'expiration du délai de cinq jours pour commencer ou même
terminer les travaux. Aussi, nous avons proposé un amendement qui serait
de nature à protéger le consommateur. Cet amendement rejoint
d'ailleurs la proposition qui a été formulée plus
tôt devant vous par le Barreau du Québec.
Par contre, il est fait dans une forme différente. Nous
suggérerions d'ajouter, à la première ligne de l'article 1
o), les mots "non sollicité au préalable par le consommateur".
Autrement dit, si le consommateur, de son propre choix, invite le vendeur de
fournaises, à faire une inspection et s'il y a une vente qui s'ensuit,
il semble que, là, le vendeur ne serait plus soumis aux dispositions de
la loi.
Un deuxième inconvénient que le législateur devrait
épargner au consommateur peut être illustré par l'exemple
qui suit. Prenez le cas d'un vendeur d'huile à chauffage qui sollicite
ou contracte avec le consommateur en dehors de son établissement. Si la
définition du terme "vendeur itinérant" est adoptée telle
quelle, le vendeur d'huile à chauffage pourrait obliger le consommateur
à venir signer à son adresse ou à son bureau d'affaires le
contrat de vente d'huile à chauffage. Ceci entraînerait des
inconvénients
considérables pour le consommateur. Aussi, il semble
évident que le législateur a oublié dans son projet de
loi, comme exclusion à la définition de "vendeur
itinérant", le vendeur de matières combustibles qui, au
même titre que le vendeur de denrées alimentaires, vend des biens
que l'on peut qualifier non seulement de fongibles en droit, mais aussi de
biens nécessaires à la vie d'un foyer.
Nous avons proposé dans notre mémoire, un amendement
spécifique à l'effet d'exclure de la notion de "vendeur
itinérant" le vendeur de produits utilisés pour
l'éclairage ou le chauffage. Nous n'avons pas fait de recommandation
spécifique, dans notre mémoire, au sujet de l'article 5 qui a
trait à l'obligation, entre autres, pour le commerçant d'accorder
un délai suffisant au consommateur avant que ce dernier signe un contrat
assorti d'un crédit. Nous sommes d'accord avec l'amendement
proposé plus tôt par le ministre des Institutions
financières.
Passons maintenant à la section III, concernant les contrats
assortis d'un crédit. Les articles, en particulier, qui risquent de
causer certains problèmes sont les articles 13 et 14. Dans notre
mémoire, nous avons noté, comme l'a fait tout à l'heure le
député de Bagot, une erreur de traduction au deuxième
paragraphe de l'article 13. Nous avons suggéré une traduction qui
semble être plus conforme au texte français. Cette traduction
pourrait se lire: "A merchant may charge, on any arrears, an additional credit
charge calculated only according to such rate."
Cependant nous n'avons pas mentionné ceci dans notre
rapport ce qui nous semble être plus important à l'article
13, c'est qu'il stipule que le contrat assorti d'un crédit doit contenir
un seul taux de crédit. Il pourrait ne pas être à
l'avantage de nos clients d'avoir un seul taux de crédit. La pratique,
dans notre industrie, est de faire payer un taux uniforme de crédit par
mois, disons 1 1/2 p. c. Par contre, pour certaines catégories de
clients, soit les consommateurs au sens de cette loi, le taux de crédit
devient inférieur pour des achats de crédit qui sont
au-delà de la somme de $500.
Le texte de loi proposé nous empêcherait de favoriser ainsi
nos clients.
Quant à l'article 14, ce dernier stipule que "le consommateur
bénéficie de toute erreur dans le calcul de l'énonciation
du coût de crédit". Nous suggérerions ici, comme d'autres
l'ont fait, que le mot "erreur" soit remplacé par le mot
"ambiguïté". En effet, nous avons tous présent à
l'esprit la situation d'un consommateur recevant un état de compte avec
un crédit de plusieurs milliers de dollars au lieu d'un débit
pour frais de service, résultat d'une erreur d'ordinateur. Nous croyons
que, si le consommateur devait profiter d'une telle erreur cela provoquerait
une injustice considérable. Si le consommateur doit
bénéficier d'une erreur du commerçant, ce ne devrait
être qu'après que ce dernier aura eu l'occasion de rectifier son
erreur.
L'amendement suggéré aurait pour effet de donner la chance
au commerçant d'expliquer le calcul ou l'énonciation du
coût du crédit au consommateur; si ce dernier demeure dans le
doute, le directeur pourrait toujours arbitrer le différend. Aussi, avec
l'amendement proposé, le commerçant ne serait pas
empêché de rectifier une erreur faite par lui de bonne foi.
J'ai noté ce matin que l'intention de ce texte de loi est, pour
le commerçant, d'énoncer correctement le coût de
crédit. Ceci est une obligation qui est déjà
imposée par d'autres sections du texte de loi et les recours sont
déjà prévus à l'article 111 dans le cas où
le coût de crédit n'est pas indiqué correctement. Aussi, je
crois que l'article 14 devrait être révisé dans le sens que
nous vous avons suggéré.
Toujours à la section III, j'en viens à la partie traitant
des contrats accordant un crédit variable, soit les articles 23 à
27. Ce sont sans doute les dispositions du projet de loi qui affectent le plus
directement notre compagnie. Un problème auquel nous avons à
faire face est le 3e paragraphe de l'article 23, à savoir le sens qui
doit être donné au mot "émettre". En effet, ce 3e
paragraphe se lit comme suit: "Nul ne peut émettre une carte de
crédit à un consommateur qui ne l'a pas sollicitée."
Lorsque notre compagnie renouvelle une carte de crédit qui vient
à échéance, faut-il conclure qu'elle émet de
nouveau une autre carte de crédit et qu'alors elle serait
empêchée de le faire si le consommateur ne l'a pas
sollicitée? Dans le but d'éviter ce problème pratique pour
le consommateur et pour notre compagnie, nous proposons que le 3e paragraphe de
l'article 23 se lise comme suit: "Sauf s'il s'agit d'un renouvellement de carte
de crédit, nul ne peut émettre une carte de crédit
à un consommateur qui ne l'a pas sollicitée". Cette
recommandation rejoint d'ailleurs celle qui a été faite par le
Barreau de Montréal ce matin.
Passant maintenant à l'article 24, nous aimerions toucher en
particulier aux paragraphes d), e) et g). Le paragraphe d) obligerait le
commerçant à indiquer sur l'écrit de base "le montant
jusqu'à concurrence duquel le crédit variable est consenti ou, le
cas échéant, l'absence de limitation à ce montant."
Pratiquement parlant, pour l'industrie pétrolière et pour tous
nos clients se servant de cartes de crédit, cette exigence
soulèverait de graves problèmes d'ordre administratif.
Nous ne pouvons qu'endosser les arguments présentés dans
les mémoires d'Imperial Oil et de Shell Canada et faire nôtres les
recommandations qui y sont contenues.
Au sujet du paragraphe e), ce paragraphe obligerait le commerçant
à indiquer la durée de la période. Il serait difficile,
pour ne pas dire impossible, pour notre compagnie de stipuler en jours la
durée de chaque période. En effet, la
date d'échéance elle-même varie de mois en mois pour
tomber un jour ouvrable. En plus de cette difficulté pratique, le nombre
de jours qu'il peut y avoir dans une période n'a aucune importance pour
le consommateur, car ce dernier, s'il a un coût de crédit à
payer en vertu d'un contrat à crédit variable, ce coût de
crédit est calculé à la fin de la période sur une
base mensuelle et non pas sur une base journalière. Aussi, nous
suggérons que le paragraphe 24 e) se lise: "La date
d'échéance de chaque période".
Au paragraphe g), nous aurions une recommandation de concordance avec la
recommandation que nous avons faite au sujet de l'article 13, et ce paragraphe
devrait se lire: "Le ou les taux de crédit exigibles à la fin de
chaque période sur le solde impayé".
Passons maintenant à l'article 25. Cet article semble impliquer
que le consommateur doive signer un écrit, si l'on regarde en
particulier les derniers mots de cet article. Nous ne comprenons pas le sens de
cet article, car le consommateur bénéficiant d'un crédit
variable ne serait pas selon nous obligé de signer l'écrit de
base. Aussi, nous recommandons que les derniers mots de cet article "lorsqu'il
signe l'écrit" soient remplacés par les mots "en même temps
que l'écrit de base".
Un problème important pour notre industrie est celui que nous
poseraient les exigences de l'article 26 dans sa forme actuelle. Tout d'abord,
le début de cet article suggère qu'à la fin de chaque
période le commerçant doit fournir au consommateur un document
énonçant certaines informations. Dans notre cas, il peut arriver
que l'un de nos clients possédant une carte de crédit ne
l'utilise pas pendant plusieurs mois. S'il fallait alors lui envoyer un
état de compte mensuel, ceci impliquerait des frais inutiles pour le
commerçant et une source d'inconvénients pour le consommateur. Il
nous semble que l'état de compte mensuel ne devrait être
exigé du commerçant que si le consommateur a un montant à
payer au commerçant.
Au sujet des inscriptions que l'on doit retrouver à l'état
de compte mensuel, nous avons certaines représentations à faire
au sujet des paragraphes a), c), d) et e). Comme je le disais
précédemment, l'énoncé de la date du début
de la période n'a aucune signification pour le consommateur dont le
coût de crédit est calculé sur une base mensuelle, disons
11/2 p.c. par mois.
Aussi, l'exigence de la loi entraînerait des dépenses
considérables pour notre compagnie. Nous proposons donc un amendement
à l'article 26 a), lequel pourrait se lire comme suit: "Les dates du
début et de la fin de la période lorsque le coût de
crédit est calculé par jour et la date de la fin de la
période lorsque le coût de crédit est calculé par
mois."
Les paragraphes c) et d) ont trait tous les deux au montant et à
la date des avances. Il nous semble que ces paragraphes devraient être
alternatifs et non pas cumulatifs. La pratique dans l'industrie
pétrolière en Amérique du Nord est de faire parvenir une
copie des pièces justificatives de chacune des avances accordées
au consommateur et de ne pas indiquer sur l'état de compte mensuel le
montant et la date de chacune de ces avances. Le consommateur
québécois ne subit aucun préjudice du fait de cette
pratique.
Si notre compagnie devait indiquer la date et le montant de chaque
avance accordée au consommateur dans ses états de compte
mensuels, des changements considérables devraient être
apportés à nos relevés de compte et à nos
programmes d'ordinateurs. De tels changements seraient très
coûteux et prendraient un temps considérable à être
mis en application.
De plus, l'utilisation de deux systèmes de relevés
mensuels au Canada par notre compagnie serait plus coûteuse que
l'utilisation d'un seul système. Nous estimons que ce changement
impliquerait une dépense additionnelle de $200,000 par année, ce
qui éventuellement se refléterait dans le coût des biens et
des services dispensés par nous au public.
Quant au paragraphe c) lui-même, il semble que les mots "au cours
de la période" devraient être éliminés. En effet, il
arrive fréquemment qu'un de nos clients achète de l'essence ou
d'autres produits dans les autres provinces ou même aux Etats-Unis avec
sa carte de crédit et que le coupon de crédit ne nous parvienne
pour facturation que deux ou trois mois après la date de l'achat.
Le paragraphe e) de l'article 26 concerne la date et le montant des
paiements par le consommateur. Présentement, le système
utilisé par les compagnies pétrolières est d'indiquer le
total des paiements effectués par le consommateur au cours de chaque
période sans indiquer les montants de chaque paiement, s'il y en a
plusieurs ce qui est plutôt rare et sans indiquer les dates
respectives de ces paiements.
Nous n'avons jamais reçu de plaintes de consommateurs au sujet de
cette pratique. Aussi, nous ne croyons pas que le système proposé
apporterait plus de protection au consommateur qui paie un coût de
crédit calculé sur une base mensuelle. Enfin, le coût de
transformation de nos opérations pour répondre à
l'exigence de l'article 26 e) serait d'un minimum de $100,000. C'est pourquoi
nous recommandons que l'article 26 e) soit rédigé comme suit: "La
date et le montant de chaque paiement effectué par le consommateur au
cours de la période si son coût de crédit est
calculé par jour et le total de ses paiements au cours de la
période si son coût de crédit est calculé par
mois."
Comme vous le voyez, les problèmes que causerait l'application
des articles 23 à 27 sont très sérieux. C'est pourquoi
nous avons tenu à y consacrer plus de temps.
Au sujet de l'article 28 qui a trait aux contrats assortis d'un
crédit accessoire, nous constatons que le terme "contrat assorti d'un
crédit accessoire", qui n'est pas défini dans le projet de loi,
risque de provoquer certains conflits d'interprétation en ce qu'il peut
englober le contrat de vente à tempérament ou un contrat
accordant un crédit variable. Aussi, pour éviter tout malentendu,
il nous semble que cette notion devrait être précisée.
Je passe maintenant à la section IV qui a trait aux vendeurs
itinérants et, en particulier, à l'article 48.
Cet article prévoit le droit, pour le consommateur, de
résoudre un contrat dans une période de cinq jours à
compter de la date d'exécution partielle ou totale par le
commerçant.
Le but de cet article, semble-t-il, est d'accorder au consommateur une
période de réflexion avant de s'engager définitivement
dans un contrat avec un vendeur itinérant.
La mesure proposée par l'article 48 semble aller au-delà
de l'intention du législateur en ce qu'elle fait de chaque contrat
passé par un consommateur avec un vendeur itinérant un contrat de
vente à l'essai. Le préjudice qui peut être causé au
consommateur par l'imposition d'une telle exigence semble être plus grand
que les maux auxquels il entend remédier. La raison de ce
préjudice réside dans la façon dont serait calculé
le délai de résolution qui commencerait à courir non pas
à partir de la date où le consommateur signe l'écrit mais
à partir de la date de l'exécution partielle ou totale de
l'obligation du vendeur. Si chaque vendeur d'installations d'huile à
chauffage qui sollicite ses clients en dehors de son établissement
commercial devait se conformer à l'article 48 tel que
rédigé, il est probable que les effets de cet article seraient de
décourager un bon nombre de ces vendeurs d'installations à
continuer ce genre de commerce. Ceci aurait un effet défavorable sur
l'économie et sur le bien-être du consommateur.
Gulf Canada recommande donc que l'article 48 se lise comme suit: "Le
consommateur peut résoudre le contrat au plus tard le cinquième
jour de la date à laquelle il a signé le contrat."
Au sujet de la section VIII, qui concerne le Conseil de la protection du
consommateur, il nous semble important, dans l'intérêt de tous,
que les commerçants soient adéquatement représentés
au sein du Conseil de la protection du consommateur. Et bien qu'aucune
disposition ne soit établie dans le projet de loi sur la méthode
utilisée par le lieutenant-gouverneur en conseil pour choisir les
membres du conseil, il serait souhaitable, selon nous, que non moins de la
moitié des membres du conseil soient choisis parmi les différents
groupes de commerçants affectés par la présente
législation.
Deux remarques sur l'application de la loi et des règlements.
D'abord, à cause des change- ments importants qui devront être
apportés à nos modes d'opération et à nos contrats
pour se conformer à la loi et aux règlements, il y aurait lieu
que le gouvernement accorde un délai raisonnable aux commerçants
avant de mettre les dispositions de la loi et des règlements en
vigueur.
Au sujet des règlements eux-mêmes, en tant que partie
intéressée, nous serions heureux d'apporter notre
coopération lors de leur élaboration.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Paradis. Y a-t-il des questions à
poser?
Le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. TETLEY: Merci, M. Paradis, ainsi qu'à vos conseillers. A la
page trois de votre mémoire, concernant les vendeurs itinérants,
nous notons que nous pouvons en exclure par l'article 97 p), par
règlement, et nous avons l'intention d'exclure plusieurs vendeurs
itinérants. Pour le reste, je trouve que votre mémoire est d'une
grande valeur, surtout d'une grande valeur technique et je vous remercie au nom
du gouvernement.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres question? Le
député de Lafontaine.
M. LEGER: Juste une question d'information. Sans aviser le client, parce
que ça ne serait peut-être pas nécessaire là, est-ce
que vous fixez un maximum de crédit, est-ce que vous limitez le
crédit d'une personne qui a une carte de crédit chez vous? Sans
l'aviser?
M. PARADIS: II existe, en fait, une limite de crédit dont le
client, s'il paie régulièrement ses comptes, n'aura jamais
connaissance. Cette limite de crédit varie d'un client à l'autre.
Ce n'est pas la même limite pour un simple journalier qui utilise sa
carte de crédit seulement pour acheter de l'essence que pour un
exécutif qui s'en sert pour louer des automobiles ou pour fins
d'hôtellerie, en plus d'acheter de l'essence. Alors, il existe des
limites. Ces limites sont différentes de ce qu'on appelle la limite de
vente. La limite de vente, en fait, ne concerne pas le consommateur; c'est une
obligation qui est imposée aux détaillants, dans le but de
contrôler la fraude sur les cartes de crédit.
Autrement dit, au-delà d'un certain montant donné sur la
facture, le détaillant a l'obligation maintenant, avec le nouveau
système qui a été installé pour essayer d'enrayer
ces fraudes, de téléphonner par code. Alors, on lui
révèle si la carte de crédit est valide ou si elle a
été annulée. En général, lorsque la carte de
crédit a été rapportée volée,
automatiquement l'information est transférée dans nos
ordinateurs, et c'est ainsi qu'on peut, très rapidement maintenant,
prévenir la fraude par les cartes de crédit volées.
M. LEGER: D'après votre expérience, est-ce que la
majorité des achats ou des crédits offerts aux clients
dépasse souvent les $50 prévus à l'article 12?
M. PARADIS: Cette limite de vente que je viens de vous mentionner
n'empêche pas du tout nos clients de faire des achats de $50, $100 ou
même $150. Vous dire exactement jusqu'à quelle limite ça
va, c'est difficile, parce que cela dépend de chaque client
donné.
M. LEGER: Ce n'est pas tout à fait la question que je posais. Ce
que je vous ai demandé, c'est quand on achète de l'essence ou de
l'huile, les factures, la plupart du temps, sont inférieures à
$50. C'est seulement quand il y a des réparations que cela peut
peut-être dépasser $50. A l'article 12, on dit: La présente
section ne vise pas le contrat où le montant de crédit
accordé n'excède pas $50. Alors, je voudrais savoir quel
pourcentage de vos crédits aux clients dépasse $50? Est-ce que ce
sont plutôt des petites factures de $5, $7, $8, $10 qui sont pour de
l'essence ou s'il y a une bonne proportion qui dépasse $50?
M. PARADIS: La plupart des achats individuels sont des petits montants.
Mais, comme vous le savez, vous pouvez faire plusieurs achats au cours d'un
mois. Eventuellement, vous pouvez avoir un solde à votre compte qui peut
être supérieur à $50. Cela peut être très
fréquent. A ce moment-là, si vous ne payez pas votre compte sur
réception et que vous attendiez trop longtemps, à partir d'un
certain moment, vous aurez à payer un coût de crédit ou des
frais de service.
Est-ce que j'ai répondu à votre question?
M. LEGER: Oui. Maintenant, à la page 4 de votre mémoire,
vous dites "tout vendeur non sollicité par un consommateur", et vous
apportez l'exemple du vendeur d'huile. Le vendeur d'huile peut avoir
été invité par la personne, mais une fois rendu dans la
maison, selon l'amendement que vous voulez proposer, il peut offrir de vendre
des appareils connexes à la fournaise. Parce qu'il y a plusieurs
vendeurs d'huile qui ont aussi la possibilité de placer des
purificateurs d'air ou différents appareils sur une fournaise. Ce sont
des appareils qui ne seraient pas sujets, selon votre amendement, à la
clause résolutoire s'ils ne conviennent pas à l'acheteur.
M. PARADIS: Est-ce que vous pouvez donner un exemple? Vous avez
peut-être des exemples précis parce qu'à ma connaissance je
n'en connais pas.
M. LEGER: Je prends un distributeur d'huile qui a aussi un service de
réparation de fournaise, qui installe l'appareil et qui va distribuer
votre huile à chauffage. Selon l'amendement, vous ne vouliez pas que le
vendeur soit considéré comme un vendeur itinérant du fait
qu'il aurait été sollicité par le consommateur pour venir
lui vendre de l'huile. Mais, une fois rendu à la maison, le vendeur peut
lui dire: Ecoutez, pour votre fournaise, vous devez avoir telle ou telle chose
en surplus. Selon la loi, le vendeur itinérant doit accepter la clause
résolutoire, mais vous passez à côté en disant qu'il
a été sollicité. Mais, il a été
sollicité pour l'huile et non pas pour les appareils à ajouter
à la fournaise.
M. PARADIS: Je prends l'exemple que vous me donnez. Si ce cas
précis était soumis au directeur ou même à un
tribunal quelconque, je suis certain qu'il serait capable de faire la
distinction entre le contrat de vente d'huile à chauffage et le contrat
pour d'autres produits. Je pense que le texte que nous proposons
n'empêcherait pas une interprétation favorable au
consommateur.
M. LEGER: Une dernière question. Vous terminez votre
mémoire en disant que vous aimeriez avoir un délai raisonnable
avant de mettre les dispositions de la loi en vigueur. Qu'entendez-vous par
délai raisonnable?
M. PARADIS: C'est assez difficile de répondre à cette
question. Tout dépend des dispositions de la loi et des
règlements qui seront éventuellement adoptés. Certains ont
fait des représentations pour un délai de six mois; j'ai vu des
mémoires à cet effet. Je ne voudrais pas vous donner un
délai fixe. Il me semble que tout dépendra des dispositions de la
loi.
M. LEGER: Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. A la page 9 de votre
mémoire, M. Paradis, vous mentionnez, à l'article 26 "date et
montant des paiements par le consommateur". Vous dites, au deuxième
alinéa: "Nous n'avons jamais reçu de plaintes de consommateurs au
sujet de cette pratique". Peut-être que les citoyens ne sont pas au
courant, par exemple, qu'au lieu d'acheter à crédit de votre
compagnie ils peuvent aller à une caisse populaire, emprunter $1,000,
rembourser à raison de $100 par mois. Si je rembourse le 25ème
jour, par exemple, on va me faire payer des intérêts sur 25 jours
et non pas les versements mensuels que votre compagnie semble exiger. C'est
cela que nous avons voulu atteindre par ces règlements. Vous dites, un
peu plus loin, que, même si vous n'avez pas eu de plaintes, si on vous
obligeait à effectuer cette transformation, ça coûterait
$100,000. Si ça coûte $100,000, est-ce que vous pourriez aussi
avoir prévu ce que ça épargnerait aux
consommateurs? Est-ce que ça ne leur épargnerait pas
$500,000? Alors, si Gulf, qui est vendeur d'huile et non pas vendeur de
crédit, veut rendre service aux consommateurs, elle doit être
prête à dépenser $100,000 pour épargner $500,000 aux
consommateurs canadiens. Ne croyez-vous pas?
M. PARADIS: C'est votre opinion. Au sujet, par contre, du premier point,
il me semble que vous ne faites pas tellement la distinction entre le cas
où le coût de crédit est calculé par jour et le cas
où le coût de crédit est calculé par mois. En
général, avec une carte de crédit, toujours, dans notre
industrie, le coût de crédit est calculé sur une base
mensuelle; 11/2 p.c, disons, du so.de impayé.
M. DUMONT: Même s'il y a eu des montants de payés dans
l'intervalle.
M. PARADIS: Non, ici il faut faire une distinction. S'il y a eu des
paiements de faits au cours de la période, avant la date
d'échéance indiquée sur l'état de compte mensuel,
ces montants sont déduits du solde et automatiquement le solde
impayé est réduit. Le consommateur a un bénéfice
pour une certaine période donnée. Disons qu'il n'a pas à
payer de coût de crédit jusqu'à la fin de la
période.
M. DUMONT: Plutôt que de transformer votre méthode d'action
j'imagine qu'un cerveau électronique vient à votre secours
seriez-vous prêts à engager cette somme de $100,000 dans
l'éducation du consommateur, parce que nous considérons que vous
vendez des services et de l'huile, et non du crédit?
M. PARADIS: Nous avons de nombreux clients dans la province de
Québec, nous sommes une compagnie respectable...
M. DUMONT: Nous n'en doutons pas.
M. PARADIS: ... et nous croyons qu'il est important, et pour le
consommateur et pour nous, de renseigner le consommateur sur son coût de
crédit. L'intention du projet de loi ici n'est pas quelque chose de
nouveau pour nous. Nous renseignons déjà le consommateur sur son
coût de crédit. Disons que notre travail d'éducation a
déjà été fait.
M. DUMONT: Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Merci. Y a-t-il d'autres questions? Je vous remercie,
M. Paradis, de votre brillant exposé et soyez assuré que la
commission parlementaire va certainement tenir compte des recommandations que
vous avez formulées.
J'invite maintenant les délégués de la compa- gnies
Québec Propane Inc. à se présenter devant la
commission.
Québec Propane Inc.
M. MORRIS: M. le ministre, MM. les membres de la commission, tout
d'abord je désire exprimer notre appréciation non seulement pour
l'occasion que nous avons d'exprimer nos vues sur ce très important
projet de loi, mais sutout peut-être pour l'atmosphère de
compréhension et de dialogue qui prévaut aujourd'hui et qui va
certainement nous aider beaucoup dans notre courte présentation.
Nous vous avouons que ce n'est pas sans une certaine trépidation
que nous nous présentons devant vous, peu habitués que nous
sommes de présenter des mémoires devant une commission de
l'Assemblée souveraine de la province de Québec, Nous demandons
votre indulgence. J'insiste sur le fait que le président de
Québec Propane Inc., M. Joseph Moreau, a insisté pour être
présent avec moi afin d'aider, au maximum, la commission à
comprendre peut-être certains aspects techniques relatifs à
l'industrie du pétrole et du gaz propane en particulier.
We particularly appreciate, Mr. Minister and Mr. Chairman, the
athmosphere of dialogue and understanding which prévales today and which
will certainly help us greatly in making our few brief remards to you this
afternoon.
Dans le sens indiqué par le président de la commission,
nous allons insister sur les quelques idées maîtresses de notre
court mémoire, quitte, par la suite, à essayer de
répondre, au meilleur de nos connaissances, aux questions que vous
pourriez poser.
Il est d'abord important d'insister sur les quatre idées
suivantes. La première, il nous fait plaisir de le souligner, a
déjà été indiquée par l'honorable ministre
et les membres de la commission, comme étant un domaine où un
amendement serait noté; il s'agit de l'idée que le projet de loi
en question ne devrait pas s'appliquer au consommateur commerçant pour
diverses raisons qui ont déjà été moult fois
exposées ici et sur lesquelles je n'insisterai pas cet
après-midi, vu l'heure tardive.
Mais je me permets de souligner l'aspect encourageant de la chose.
Grâce à des remarques qui ont été soumises à
la commission, il y a déjà une preuve que le dialogue se traduit
par quelque chose de concret et il y a là un exemple d'amendement qui
semble acceptable à la commission et au ministre. C'est très
encourageant pour nous.
Nous désirons aussi souligner qu'à notre avis, ce bill ne
devrait pas s'appliquer à une industrie ou un commerce qui est
déjà contrôlé, d'une façon ou d'une autre,
soit par une loi spécifique, soit par une régie. Il existe, comme
vous le savez, un certain nombre de lois spécifiques qui
régissent certaines industries; il existe aussi des corps
semi-gouvernementaux comme, dans le
cas qui nous intéresse, la Régie de
l'électricité et du gaz qui contrôle l'industrie d'une
façon fort efficace et dans l'intérêt du consommateur, en
définitive. Nous croyons que c'est là un aspect extrêmement
important et, plutôt que de vous réciter un tas d'amendements
suggérés tout à l'heure, nous voulons accentuer cet aspect
parce que nous pensons que ce n'est peut-être pas l'intention du
législateur d'avoir une double réglementation d'une industrie qui
va déjà très bien et qui ne nécessite pas une
surabondance de dispositions législatives qui ne pourraient
peut-être qu'aboutir à créer la confusion et chez le
consommateur et chez les tribunaux qui sont appelés de temps à
autre à interpréter ces lois.
Une troisième idée qui nous semble très importante
et que nous voulons souligner à la commission est qu'il nous semble que
ce bill ne devrait pas s'appliquer à des produits qui se consomment
déjà par l'usage. Le bill en question prévoit
déjà un respect de ce concept, en ce sens que, sans
référer trop précisément à la loi, il est
prévu au début de la loi qu'il est excepté de l'orbite de
cette loi les aliments qui sont achetés à un marché. La
raison est bien simple: il s'agit d'une chose qu'on consomme. Forcément,
une fois qu'on l'a consommée, il est bien difficile de faire toute une
histoire et de vous retourner la chose achetée. Evidemment, ce n'est pas
pratique, ce n'est pas possible. Nous soumettons que l'industrie du gaz propane
est dans le même ordre d'idée. C'est une chose nécessaire.
Ce n'est pas un luxe que le gaz propane. Ce n'est pas comme une Cadillac ou un
avion à réaction. C'est une chose nécessaire, comme le
logis, comme la nourriture. On a besoin de carburant, soit pour une maison,
soit pour une industrie. J'appliquerais le même principe que si on admet
que les aliments sont exceptés et ils font l'objet d'une
exception précise on devrait peut-être étendre le
même raisonnement et admettre que cela devrait s'appliquer à une
gamme de produits qui sont consommés par l'usage.
Nous soumettons respectueusement que le véritable but de la loi
est avant tout de protéger le consommateur dans le domaine de l'achat au
sens défini d'un objet durable, comme une pièce
d'équipement, une automobile; des choses de ce genre, mais qui sont
durables. De sorte que si ce n'est pas satisfaisant la garantie s'applique; on
retourne l'objet, les parties s'entendent ou ne s'entendent pas, mais enfin la
loi peut agir d'une façon efficace. Si l'objet a été
consommé, cela devient une question purement académique.
Etant donné que ce projet de loi comme tous les projets de
loi représente de la part du législateur un effort de
communication avec la population pour régir et régler certains
problèmes, nous croyons qu'il est utile de souligner la porte de sortie
que présente l'article 97 p) qui permet au cas où il serait
vraiment trop compliqué de faire toute une série d'amende- ments
à ce projet de loi, d'excepter, soit une industrie, soit une partie
d'une industrie de l'orbite de cette loi. Nous tenons pour acquis que les
membres de la commission et M. le ministre ont lu les différentes
suggestions de détail que nous faisons dans la deuxième partie de
notre mémoire quant à des amendements possibles.
Vu que nous tenons cela pour acquis, il n'y a pas lieu d'insister et de
lire dans les détails de nouveau ce que vous avez déjà lu
et dont vous avez pris connaissance. Nous croyons qu'avec la meilleure
volonté du monde, il pourrait s'avérer difficile pour les membres
de la commission, pour les légistes du ministère
approprié, d'inclure tous ou même une partie substantielle des
amendements que nous, ou d'autres industries, avons l'honneur de vous
soumettre. Dans ce cas-là, il serait plus simple puisque la
perfection n'est pas de ce monde, et que la politique c'est l'art du possible,
cela demeure toujours vrai de vous servir tout simplement de l'article
97 p) et par arrêté ministériel de dire que telle
industrie, à cause de sa nature, est exemptée, si vous voulez, de
l'orbite de cette loi. ce qui peut simplifier beaucoup les choses et, en somme,
arriver au même résultat, jusqu'à un certain point.
Nous ne voulons pas diminuer l'importance de nos quelques remarques
maîtresses, en particulier sur la question de l'objet qui se consomme par
l'usage. Cela est assez important, c'est une idée de base et je pense
que, si vous ne l'approuvez pas, même si vous tirez profit de l'article
97 p) le problème va demeurer pour d'autres industries, même si
vous accédez à notre suggestion d'être exemptés en
vertu de l'article 97 p). Nous ne faisons pas de représentations
uniquement pour nous; nous croyons que l'industrie du gaz propane étant
tellement proche du consommateur, sa prospérité c'est notre
prospérité. Si le consommateur est prospère, il
achètera davantage d'équipement de camping, il se servira
davantage de propane chez lui, il ira plus souvent au restaurant qui se sert
d'équipement de propane. Nous sommes donc près du consommateur et
nous sommes en faveur de tout ce qui peut lui permettre d'être plus
prospère.
Ceci dit, nous sommes à votre disposition au cas où vous
auriez des questions, parce que nous ne voulons pas vous lire toutes les
suggestions de détail que nous avons. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. LEGER: J'ai une question. A la page 3, paragraphe c), vous parlez de
l'injustice qui pourrait être causée par le fait que, si vous
êtes inclus dans cette catégorie de commerçants, il se
pourrait qu'une compagnie d'huile ou de chauffage électrique puisse
faire résilier le con-
trat déjà passé et avoir elle-même un autre
contrat. Est-ce que cela ne relève pas plutôt de l'éthique
professionnelle? Même si c'était le contraire, disons que
Québec Propane pourrait aussi faire la même chose, pour un contrat
avec une autre compagnie. N'est-il pas plutôt question d'éthique
professionnelle plutôt que de mettre cela dans une loi?
M. MORRIS: Je vous avoue que je ne comprends pas entièrement le
sens de votre question. Naturellement, de notre côté, je crois que
nous pouvons, sans faire l'apologie nous-mêmes de notre industrie, dire
que l'industrie du gaz propane, en toute sincérité, est un
domaine où il n'y a pas vraiment de problèmes pour le
consommateur. Nous croyons que quant au prix, le consommateur reçoit une
valeur à un prix concurrentiel, c'est reconnu; nous sommes en
concurrence avec le pétrole, avec l'électricité. Quant
à la qualité, le consommateur ne souffre jamais de la
qualité du gaz propane, la qualité est constante, cela est
reconnu. Quant à la sécurité, nous sommes
surveillés, donc, il n'y a pas de problèmes.
M. LEGER: Excusez-moi. Ce n'est pas tout à fait ma question. Au
paragraphe c) vous dites: "Vu le caractère tellement compétitif
de notre industrie..."
M. MORRIS: Oui.
M. LEGER: J'en passe. Et vous dites: "Le consommateur, en effet,
pourrait exhiber à nos concurrents notre contrat, obtenir un
léger escompte et résoudre son contrat avec nous." Vous voulez
dire par là qu'il y aurait un danger pour vous de perdre des clients qui
ont déjà signé avec vous...
M. MORRIS: Oui.
M. LEGER: ... du fait qu'un concurrent pourrait vous les enlever.
M. MORRIS: Oui, nous le croyons.
M. LEGER: La même chose de l'autre côté. Un contrat
signé par une compagnie d'huile pourrait aussi avoir été
mis de côté par vos vendeurs pour avoir le contrat. Alors, je ne
vois pas comment vous pouvez dire que, dans la loi, il devrait y avoir une
particularité à cause de cet argument. Peut-être pour
d'autres, mais je ne vois pas par l'argument que vous invoquez que vous devriez
être exclus de ce groupe de vendeurs itinérants, ce qui vous
oblige à subir, peut-être, la résolution d'un contrat.
M. MORRIS: Voici, ce n'est pas original, ce que je vais vous dire. Cela
a déjà été dit, notamment, dans le mémoire
du Board of Trade, où j'ai eu quelque chose à faire.
Peut-être que la difficulté serait résolue si, au lieu de
dire "le cinquième jour après l'exécution", on disait "le
cinquième jour après la signature du contrat". Si quelqu'un signe
avec nous, nous laissons les cinq jours passer et, si nous n'avons pas de
nouvelles, eh bien, tout marche. Cela pourrait très bien marcher.
M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic.
M. DUMONT: Merci, M. le Président. A la page 8, vous dites: "Dans
l'industrie du pétrole et l'industrie du gaz propane, nous achetons le
produit chez différents fabricants. Le pétrole, par exemple, peut
provenir de l'Amérique du Sud, du Moyen-Orient ou d'Europe." Est-ce que
vos sources d'approvisionnement sont québécoises et canadiennes
ou si vous achetez le gaz propane et les sous-produits du pétrole
à l'extérieur du pays?
M. MORRIS: C'est une excellent question. Je vous remercie de l'avoir
posée. En ce qui concerne le pétrole, disons, comme nous l'avons
mentionné au début, que ce n'est pas notre principale
activité, parce que nous avons loué à une autre compagnie
de pétrole nos stations-service. Donc, ce sont les produits d'une autre
compagnie de pétrole qui passent par là. Voici, tout de
même, un mot sur le pétrole avant d'insister sur le propane.
Comme vous le savez, il y a une politique nationale sur le
pétrole qui a fait la manchette ces dernier mois. C'est la vallée
de l'Outaouais qui forme la ligne magique, si on peut dire. Le pétrole
de l'Ouest ne traverse pas cette ligne et le pétrole de l'Est... C'est
comme: "The East and West, and never the train shall meet". Alors, c'est comme
cela. Cela répond assez à votre question, je crois, sur le
pétrole.
Mais cela ne s'applique pas au propane. Par exemple, nous pouvons
vendre, dans la région de Montréal ou dans toute la province de
Québec, du propane qui vient directement de l'Ouest. Evidemment, il est
question de quantités, n'est-ce pas, d'offres, si vous voulez, qui ne
suffisent pas à nos besoins, comme compagnie. Nous achetons donc du gaz
propane qui est raffiné par des compagnies de pétrole. Nous
achetons de l'une ou de l'autre, n'est-ce pas. C'est une question de
concurrence, d'offre et de demande, de prix. Nous avons donc deux sources
essentielles pour le gaz propane.
M. DUMONT: Je n'ai pas remarqué, dans votre mémoire, la
question de la pollution. Est-ce que le gaz propane peut réellement,
à la différence des autres pétroles, apporter une solution
au problème de la pollution de l'air?
M. MORRIS: Vous nous rendez très heureux en posant cette
question, parce que nous payons très cher pour la publicité dans
ce domaine et voici que nous avons l'occasion, devant un auditoire de cette
qualité, de dire et
de confirmer qu'en effet un des grands points de notre produit, c'est
qu'il est d'une propreté exemplaire au point de vue de la pollution. Il
n'y a pas de résidus. Donc, certainement que cela aiderait beaucoup.
J'ai d'ailleurs vu dans les journaux, tout récemment, que, dans
l'Ouest canadien, on s'était appliqué à installer, dans
certaines automobiles, un dispositif qui permet, par une manette, de se servir,
soit d'essence conventionnelle, soit de gaz propane.
Donc, il se pourrait qu'il y ait dans ce domaine-là comme dans
d'autres une solution à la pollution. Le propane est là pour vous
servir.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions des membres de la
commission?
Merci, M. Morris. Nous continuons en invitant les représentants
de la maison Grolier limitée.
Grolier limitée
M. TALBOT: Je me présente, je suis Normand Talbot,
représentant de la compagnie Grolier. Je suis accompagné de M.
Gaston Lavoie, qui est directeur de la compagnie.
Nous sommes d'accord avec le principe du bill 45 et nous pensons que
certainement le consommateur peut être victime de commerçants peu
scrupuleux; par conséquent, il doit être protégé.
Cependant, nous ne croyons pas que ça doive aller jusqu'à nuire
à des commerçants honnêtes, qui par ailleurs ne nuisent pas
aux consommateurs.
Notre principale préoccupation à nous, pour en venir aux
faits le plus tôt possible, est l'abolition des exceptions qui
étaient prévues à l'article 1561 j) du code civil, qui au
paragraphe d), entre autres, prévoyaient que les livres de
référence, les encyclopédies, tout le matériel
éducationnel ne tombaient pas sous le coup des règles
prévues dans les articles 1561 a) à g) exigeant entre autres
et c'est ça qui nous fait le plus mal, disons 15 p. c. de
paiement de base sur l'achat de ces articles.
Cette exemption reconnaissait, à notre avis, l'importance
très grande du livre de référence en l'exemptant des
limitations qui pouvaient être posées à son achat.
Or, et c'est notre avis, nous allons essayer de vous le prouver: le
livre de référence est loin d'avoir perdu l'importance qu'il
avait au moment où ces lois ont été adoptées. C'est
ce qui, nous le croyons, nuirait le plus au consommateur dans les articles que
la loi prévoit là-dessus.
Grolier limitée est établie au Québec depuis 1923
et a ses quartiers généraux à Montréal. Nous avons
publié plusieurs encyclopédies écrites en collaboration
avec nos universitaires et notre intelligentsia canadienne-française et
qui servent nommément la cause canadienne-française. C'est
à peu près les seules encyclopédies proprement
québécoises, qui ne sont pas impor- tées de France, et
c'est important de les préserver et surtout de les répandre le
plus possible.
L'importance de ces publications est facilement prouvée par trois
choses, entre autres: le volume des ventes, qui est assez grand, et qui prouve
qu'elles ont été importantes dans le passé et qu'elles le
demeureront; les nombreuses lettres de reconnaissance que nous avons
reçues et que je pourrais mettre à la disposition de la
commission; la place qu'occupent nos volumes de référence dans
les bibliothèques.
De plus, le volume de référence est essentiel et ça
se prouve par l'intérêt que le ministère de l'Education a
montré en développant les bibliothèques et en les
garnissant de livres de référence du même type que les
nôtres. C'est ce que le ministère de l'Education tend à
faire, actuellement; il développe de plus en plus de
bibliothèques régionales pour permettre l'accès aux
références. Cela prouve l'importance des
références.
La pédagogie nouvelle, par ailleurs, met l'accent sur les travaux
personnels, et cela crée aussi un besoin de références
encore plus grand. De plus en plus, nos étudiants sont obligés de
faire des travaux à la maison et cherchent frénétiquement
du matériel pour y arriver. Or, ils le trouvent dans les volumes de
référence et dans le matériel éducationnel que la
compagnie met à la disposition des étudiants.
Nous avons, par exemple, un service, le service d'information qui sert
de complément à notre matériel éducationnel et qui
fournira, sur demande, à tous nos souscripteurs, de la documentation sur
n'importe quel sujet encyclopédique qui pourrait être
demandé. C'est très important et cela permet de garder le savoir
à jour et de compléter ce qui est impossible d'inclure dans une
encyclopédie, mais qui est quand même du savoir important à
posséder.
Un tel service...
M. TETLEY: Pardon, monsieur... M. TALBOT: Excusez-moi.
M. TETLEY: Je comprends très bien l'importance de Grolier. En
effet, j'ai été autrefois l'avocat de la compagnie, mais est-ce
que cela veut dire qu'il faut éviter les exigences de la Loi de la
protection du consommateur?
M. TALBOT: Non, non, pas du tout. Nous ne demandons pas d'être
exemptés de toute la loi, non plus. Ce que nous voulons dire, c'est
qu'il ne faut pas créer de limitation à l'achat du livre, du type
de celle, par exemple, qui impose 15 p. c. à l'achat. C'est
là-dessus que je veux en venir. Je cherche à faire valoir ici
l'importance du livre pour qu'ensuite je puisse faire valoir qu'en mettant des
restrictions telles que 15 p.c. à l'achat, on pourrait créer un
empêchement majeur, surtout pour les familles à faible reve-
nu, qui. éventuellement, ne pourront pas se procurer les volumes
nécessaires.
Bien au contraire, nous croyons justement c'est souvent le cas
dans l'encyclopédie qu'il y a toutes sortes de gens et qu'il faut
les contrôler. Il faut empêcher les gens peu scrupuleux
c'est ce que je disais au début de s'immiscer dans le commerce et
de faire de mauvaises affaires. Sur ce point, je suis parfaitement d'accord
avec vous. Mais je ne crois pas que ce soit en imposant, par exemple, les
fameux 15 p. c. qui étaient exemptés autrefois par le code civil.
Je ne crois pas que ce soit en faisant un tel règlement que l'on arrive
à clarifier la situation dans le domaine de l'encyclopédie.
Pour maintenir un haut standard de qualité, justement, il faut un
gros volume de vente. C'est pourquoi, dans un domaine aussi vital que celui des
volumes de référence, on a deux bonnes raisons d'éviter,
autant que possible, les empêchements à la vente. Ce sont les
empêchements à la vente qu'on veut multiplier, non pas les
empêchements à la fraude, les empêchements à la vente
comme telle, à la vente honnête et pour ça, il faut... Pour
quelle raison faut-il les empêcher? C'est que premièrement, la
population a un besoin très grand de livres de référence
de qualité. Deuxièmement, pour que ces volumes aient de la
qualité, il faut que la vente soit large. Parce que sans ça, nous
n'aurons pas les moyens de garder nos volumes à jour. Récrire les
encyclopédies coûte très cher et il faut justement que ce
soit très répandu.
Or, si on soumettait le commerce du livre à toutes les mesures
contenues dans le bill, on pense que la distribution en serait restreinte et
que ce ne serait pas dans le meilleur intérêt des
consommateurs.
Alors, je vais me permettre de vous suggérer cela ne sera
pas tellement long un certain nombre de recommandations que l'on fait
à cet effet. L'article 5 ne contient pas de définition du mot
"délai suffisant". Cela a été dit par tout le monde et je
pense que la commission a l'intention de voir à cela. Seulement, j'ai
remarqué que, de plus, elle pouvait faire double emploi dans le cas des
ventes à domicile où, justement, l'individu jouit d'une
période de cinq jours pour réfléchir; il a donc amplement
le temps de lire son contrat. Alors, il n'y aurait pas nécessité,
au moins dans les cas de vente à domicile, de créer un article
supplémentaire où l'on parle d'un délai suffisant,
puisqu'il y a cinq jours, au moins à la base, pour lire.
Deuxièmement, à l'article 31, c'est justement
l'article en question, les 15 p. c. on parait affecter le plus gravement
le commerce du livre de référence. Notre recommandation serait
qu'on élimine tout règlement quant au paiement initial sur
l'achat des volumes de référence, tout au moins. C'est un
pourcentage prohibitif pour des choses aussi essentielles que le volume de
référence. On peut l'imposer pour des objets de luxe, cela ne
nous dérange pas, mais on ne devrait pas mettre de barrière
à l'achat du matériel éducatif dont la province a
tellement besoin.
Si cet article devait être adopté, je pense que plusieurs
familles à faible revenu en souffriraient, je l'ai dit tantôt.
C'est surtout cela qui est le point essentiel de notre intervention ici: Ne pas
réduire les achats honnêtes et en bonne et due forme de volumes
qui pourraient être faits par une limite qui, finalement, n'est pas une
garantie d'honnêteté des contrats mais tout simplement une
limitation à la diffusion du savoir et des références dans
la province.
A l'article 35, le délai de 30 jours nous parait trop long, comme
pour plusieurs d'ailleurs, y compris le Barreau qui en a parlé. Dans
notre cas, entre autres, je sais que l'on fait la reprise seulement dans les
cas où il y a vraiment mauvaise foi de la part du client. Or, ce sont
justement ces gens-là, qui ont mauvaise foi, qui sont les plus
susceptibles de ruiner notre marchandise, ou encore de s'en débarrasser,
de la receler, d'en faire quoi que ce soit, de telle façon que l'on ne
puisse plus la reprendre. Trente jours, c'est beaucoup trop long et il faudrait
que ce soit ramené à des proportions plus raisonnables de telle
sorte que l'on puisse justement ne pas se faire rouler par les fraudeurs. Dans
le commerce d'encyclopédies, on accorde des conditions de crédit
très faciles et on ne charge rien pour le crédit; de fait, les
gens achètent nos volumes et parce qu'ils sont mal pris, ou je ne sais
quoi, les revendent pour $100 ou n'importe quel montant, juste pour se
déprendre, et ensuite, si nous n'avons pas la faculté de les
reprendre rapidement, nous ne pouvons jamais retrouver nos volumes. C'est
important que le délai ne soit pas trop long.
A l'article 48, on dit: "Cinq jours après l'exécution
totale ou partielle du contrat." On dit, dans notre mémoire, que c'est
vague et trop long. C'est vague, parce que ça contient les mots "totale
ou partielle". Qu'est-ce qu'une exécution partielle? Je suis vendeur
d'encyclopédies, je viens vendre pour $300 d'encyclopédies
à un individu et, entre autres, là-dedans, il y a un dictionnaire
de $5. Je dis: Vous pouvez avoir cela. C'est déjà livré,
je l'ai dans mon auto, dans ma valise, j'en ai une cinquantaine et je lui
laisse. Je m'en vais chez moi. Le client ne sait pas que c'est une
exécution partielle. Il ne peut pas présumer que c'est une
exécution partielle et il laisse passer les cinq jours. Il attend pour
avoir sa livraison et puis, la livraison arriverait et il n'y aurait pas moyen
à ce moment-là d'annuler puisqu'il y aurait déjà
livraison partielle depuis cinq jours. Ce sont des imprécisions qu'il
faut éviter.
Nous sommes parfaitement d'accord avec un délai de cinq jours,
justement pour empêcher les poteaux, ces choses-là et les
mauvaises ventes, pour empêcher aussi surtout les ventes sous pression.
Cinq jours après la date de la
signature du contrat, ça me semblerait plus raisonnable parce que
ça élimine la pression. Mais, par contre, si on fait des ventes
à l'essai, on peut contourner ça très facilement de toute
façon et ça devient très onéreux pour une compagnie
qui doit livrer sa marchandise et la reprendre à ses frais ensuite.
A l'article 52, la rédaction de cet article nous laisse perplexe.
Cela rejoint un peu ce que le Barreau disait, ce matin. Il semble laisser
reposer le risque de la chose sur le commerçant, s'il n'y a pas la faute
du consommateur. Je vais lire l'article 52, de la façon dont on le
comprend, du moins: "Le consommateur ne peut demander la résolution du
contrat si l'objet qu'il a reçu du commerçant ne peut être
restitué à ce dernier par suite d'un fait ou d'un d'une faute
dont le consommateur est responsable." Donc, si le tonnerre tombe sur ma maison
et que la marchandise est détruite, c'est le commerçant qui
devrait supporter le risque de la chose. Ce n'est pas normal. En bon droit, ce
devrait être le possesseur de la chose qui doive en subir les
conséquences. C'est comme cela dans le code civil actuellement et
ça devrait, à notre avis, rester comme cela. Evidemment, s'il y
va de la faute du consommateur... qu'il y ait faute du consommateur ou non, si
l'objet est en sa possession et qu'il est détruit, ça devrait
être au consommateur à en subir les conséquences.
A l'article 70, le bureau, à notre avis, devrait assumer un
rôle de médiateur dans certaines disputes,
commerçant-consommateur. D'ailleurs, ça se fait dans d'autres
provinces. Ce rôle pourrait être extrêmement utile parce que,
dans ces cas-là, il y a souvent des consommateurs qui ne connaissent pas
très bien la loi et qui font des réclamations qui ne sont pas
fondées, ou des commerçants aussi, qui peuvent ne pas être
au courant de la loi et qui pourraient entreprendre des procédures
inutiles, parce que la loi ne leur a pas été
expliquée.
Si le bureau avait un rôle de médiateur et de conseiller,
il pourrait éviter beaucoup de chicanes inutiles. Je pense que cela
pourrait être utile aussi.
L'article 99 le Barreau a parlé là-dessus aussi ce
matin risque, selon sa rédaction actuelle, de bouleverser notre
droit contractuel et, par là, de rendre le contrat commercial
très incertain. En fait, cet article ne semble même pas
prévoir que le commerçant pourrait présenter lui aussi une
preuve testimoniale à l'encon-tre du témoin de l'autre partie. Je
pense ici c'est une suggestion que je veux faire qu'on pourrait
ajouter à la fin de cet article quelque chose comme ce que
prévoit l'article 569 du code civil au sujet des maîtres
commettants, je pense, et qui se termine comme ceci: "Mais ce serment peut
être contredit comme tout autre témoignage." On pourrait ajouter
cela à l'article 99 afin qu'il se lise comme ceci: "Tout consommateur
peut administrer une preuve testimoniale même pour contredire ou changer
les termes d'un écrit lorsque la présente loi n'a pas
été respectée, mais ce témoignage pourrait
être contredit comme tout autre témoignage." Je pense qu'il est
important, si l'on permet à une partie de présenter un
témoignage en dehors de l'écrit, de permettre aussi à
l'autre partie de présenter un témoignage pour contredire ce
témoignage-là. Sinon, on pourrait s'acheter n'importe quel
chauffeur de taxi pour jurer n'importe quoi.
A l'article 111, cela n'est pas tellement important, mais ce
serait peut-être quelque chose de valable à noter il semble
y avoir une erreur de traduction dans la partie anglaise du texte. On dit: "Any
consumer" à la place de "the consumer". Cela voudrait dire, selon la
version anglaise, que n'importe quel consommateur pourrait s'immiscer dans les
affaires d'un tiers consommateur et demander la résolution. Je pense que
l'on devrait dire "the consumer", celui-là même qui est
concerné par le contrat. Parce que "any consumer" veut dire n'importe
que! consommateur, en français. C'est tout.
M. Lavoie me fait remarquer que nous vérifions chaque commande.
Dans le commerce du livre, étant donné que nous avons des
vendeurs itinérants, nous avons trouvé très important de
faire la vérification de chaque commande. Ceci s'inscrit dans l'article
48: "Cinq jours après exécution totale ou partielle." Nous
pensons que le fait de vérifier les commandes devrait nous permettre
d'éviter de tomber sous le coup des articles comme celui-là, les
article 48 et 35, qui sont justement là pour protéger le
consommateur. Or, le fait de vérifier la commande et de vérifier
si tout ce qui était écrit et dit dans la commande est conforme
à ce que le client désirait, crée justement pour le
consommateur une sécurité qui remplacerait les
sérurités prévues par les article 48 et 52. C'est tout, je
vous remercie.
M. TETLEY: Je vous remercie, M. Talbot. Nous avons pris des notes. Je
crois qu'il y a de bonnes suggestions dans votre mémoire. Je regrette,
mais je ne l'ai pas eu avant cet après-midi.
M. TALBOT: Oui, nous sommes arrivés un peu à la
dernière minute.
M. TETLEY: II est de grande valeur et je vous en remercie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. LEGER: M. Talbot affirmait quelque chose au début de son
exposé et j'ai remarqué que certaines autres personnes qui sont
venues devant nous ont dit la même chose. Il semblait, à la suite
de plusieurs représentations qu'un consensus se formait au sein de la
commission pour accepter certains amendements qu'on pro-
posait, entre autres, sur la question du délai suffisant, sur le
paiement initial de 15 p. c, sur la reprise d'un bien, sur la
résolution, sur l'erreur de bonne foi, sur le coût de
crédit, choses qui sont venues régulièrement. Je fais
remarquer qu'il ne faudrait pas tenir pour acquis que, parce que beaucoup de
gens ont amené ça, c'est la solution idéale.
Jusqu'à maintenant, si on regarde, comme je le disais à la
première réunion, la quantité d'organismes qui ont
demandé de se faire entendre à la commission parlementaire, on
voit qu'il y en a 32 qui représentent le point de vue du producteur ou
du commerçant. C'est sûr que les producteurs se sentent
visés par cette loi et qu'ils vont en arriver on le voit
à un certain consensus, alors que nous n'aurons à peu près
que cinq personnes représentant des organismes qui s'occupent de
protection du consommateur et qui, eux, semblent avoir un consensus de l'autre
côté.
M. TETLEY: Mais, le gouvernement veut protéger le
consommateur.
M. LEGER: C'est justement pourquoi je vous disais ça. Nous sommes
en face de deux philosophies: la philosophie du producteur qui doit voir
à écouler son produit et la philosophie du consommateur qui
demande au gouvernement de mettre dans cette loi une dimension sociale que,
très souvent, le producteur peut oublier dans son désir
d'accroître sa production. Même s'il y a plusieurs personnes qui en
parlent, cela ne veut pas dire que le consensus se fait de ce
côté-là. Il faut équilibrer les chances.
M. TALBOT: II reste que chacun des producteurs nous pouvons
parler pour nous, parce que nous n'avons que notre expérience
connaît assez bien ses consommateurs et est assez bien placé pour
parler en leur nom. On sait que des gens désirent ardemment
posséder des volumes. On leur impose un coût initial minime et
c'est déjà beaucoup; il semble déjà que ça
les force, mais cela ne les empêche pas de désirer vraiment
posséder nos volumes et d'en avoir besoin.
Il est certain qu'on ne doit pas leur vendre des choses sous pression.
C'est pour ça que nous sommes d'accord avec les cinq jours de
réflexion. Cela leur donne toute la chance de peser le pour et le
contre. Nous sommes tellement certains que les volumes de
référence sont nécessaires que nous sommes
persuadés qu'au bout de ces cinq jours-là la plupart des gens qui
signeraient nos contrats seraient encore d'accord pour les acheter. Même
après cinq jours, la nécessité des volumes ne
disparaîtrait pas pour autant. Nous sommes d'accord là-dessus,
mais les 15 p. c., eux, sont prohibitifs, à la base. Qu'on soit d'accord
ou non, qu'on ait les moyens ou non, si on n'a pas les 15 p. c. sur soi
à un moment donné, on ne pourra pas devenir propriétaire
de volumes qui seraient nécessaires. C'est là-dessus surtout
qu'on insite.
Il faudrait, au moins, pour les volumes c'était le cas,
d'ailleurs, autrefois dans le code civil qu'on mette ça au rang
des instruments aratoires, des barques de pêche, des choses essentielles
à l'épanouissement des gens et à leur progrès
social. On a besoin d'une barque pour travailler; bien, on a besoin de volumes
pour s'instruire et pour avancer. On ne devrait donc pas mettre de limites
aussi strictes que 15 p. c. sur le prix de base à l'achat. C'est surtout
ça qu'on veut dire. Nous sommes d'accord avec les autres limitations,
parce que, justement, ça protège le consommateur, mais je ne
pense pas que les 15 p. c. imposés à l'achat d'un volume
protègent le client. C'est plutôt justement limitatif. C'est une
limitation économique et non pas sociale. Le bill devrait surtout
être social, chercher à protéger l'économiquement
faible et non pas l'empêcher, justement, de s'en sortir, en s'instruisant
et en lisant des choses qui l'aideraient ou en achetant des barques s'il est
pêcheur. S'il ne peut pas se l'acheter, il ne gagnera pas beaucoup
d'argent à tendre sa ligne du quai.
M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Ouest.
M. AUDET: Ne croyez-vous pas que, peut-être ça peut
protéger certains clients de ne pas pouvoir acheter quelque chose qu'il
ne veut pas acheter, si les 15 p. c. lui sont imposés?
Je crois réellement que pour quelqu'un qui n'a pas beaucoup de
défense... Il y a bien des clients qui n'ont pas de défense
devant un bon vendeur, et si réellement il n'a pas les 15 p. c. à
débourser, il s'agirait certainement d'un moyen de défense s'il
pouvait dire que la principale raison...
M. TALBOT: Ce ne serait pas un moyen de défense contre le
vendeur, ce serait un moyen d'autodéfense contre lui-même parce
que, justement, il a cinq jours de réflexion. Le vendeur, après
avoir vendu son produit, il part, et le client a quand même cinq jours de
réflexion pour se sortir de cette pression. Normalement, dans toutes les
provinces et partout aux Etats-Unis on a conclu que cinq jours c'était
plus que suffisant pour apprécier convenablement la démarche
qu'on a faite en signant tel contrat. Par ailleurs, on vérifie le
contrat, comme je vous dis, et on s'assure que c'était bien ce que le
client voulait acheter. Les gens qui font la vérification ne
reçoivent pas de commission, ils n'ont pas intérêt à
pousser la vente du tout, eux; ils cherchent exactement à savoir dans
quel sens le consommateur a compris son engagement et ça se termine
là. Les 15 p. c. viennent, au contraire, poser une limitation,
même malgré
la volonté de l'individu d'acheter le produit, malgré la
nécessité qu'il peut en éprouver.
M. AUDET: Le bill le prévoit peut-être, mais pour la
protection du consommateur, en ce sens que, si le client n'a pas les 15 p. c,
c'est que, peut-être, il n'a pas les moyens de s'acheter une telle chose.
Il devrait au moins pouvoir payer une partie de cette chose assez
dispendieuse.
M. TALBOT: J'admets qu'il y a des choses qui ne sont pas essentielles,
mais on voudrait se procurer les choses essentielles à n'importe quel
prix. A notre avis, le livre de référence, et c'était
d'ailleurs dans le code civil avant, est une chose très essentielle
parce que, justement, cela peut être un instrument, un investissement
pour l'avenir qui va permettre ultérieurement de mieux vivre et de mieux
être. Par exemple, j'en reviens encore à mes instruments
aratoires: le cultivateur qui n'a absolument rien pour cultiver sa terre et qui
n'a pas les 15 p. c, il va rester pauvre toute sa vie. Si vous lui donnez la
chance d'emprunter, même s'il n'a que 5 p. c. ou 2 p. c. du montant
initial, si vous lui donnez la chance d'acheter les instruments
nécessaires à son épanouissement, après, il va
pouvoir s'en sortir. Si, à la base, vous lui coupez l'herbe sous le
pied, et si vous dites: Vous n'avez pas les 15 p. c, restez pauvre toute votre
vie, ne vous instruisez pas, vous n'avancez pas sa cause du tout, à
notre avis.
M. AUDET: Vous êtes bon vendeur! M. TALBOT: Je ne suis pas
vendeur!
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: En ce qui concerne le droit de reprise, vous avez dit que
trente jours c'était trop long. Vous avez parlé de proportion
plus raisonnable sans spécifier exactement le nombre de jours que vous
considérez comme un nombre raisonnable. Qu'est-ce que c'est pour vous
une proportion raisonnable?
M. TALBOT: Déjà il existait un délai de 21 jours
pendant lesquels on était obligé de garder la marchandise sans la
revendre. Cela revenait exactement au même que de donner un avis de
trente jours à l'individu. Que la marchandise soit chez lui ou à
nos bureaux, cela ne fait pas de différence. Dans les 21 jours ou dans
les 30 jours ça pourrait être allongé à 30
jours ça ne nous dérange pas qu'il puisse, justement,
réclamer sa marchandise. On ne veut pas l'égorger. Seulement si
on lui donne trente jours en possession de la marchandise, on lui donne une
occasion inespérée de nous rouler, de vendre la marchandise, de
la mutiler hors de service et puis de nous faire un préjudice qui n'est
pas normal en bonne pratique commerciale. Un délai de trois jours pour
une reprise serait suffisant ou cinq jours, quelque chose de court, et on peut
ensuite obliger le producteur, le vendeur à conserver la marchandise au
magasin au moins 30 jours avant de la revendre.
Cela irait très bien parce qu'elle serait en notre possession;
nous aurions une garantie qu'elle ne serait pas mutilée ou vendue
ensuite. Il n'y a pas de problème. Et si le client paie dans les trente
jours subséquents, pendant que nous sommes en possession de la
marchandise mais que nous n'avons pas le droit de la vendre, nous la retournons
au client qui n'a souffert d'aucun préjudice. Tout cela s'est fait
à nos frais. Mais si on la laisse en sa possession et qu'on lui permet
d'aller vendre notre marchandise, c'est nous qui devrons courir après et
nous exposer à des frais judiciaires qui sont beaucoup trop
élevés en comparaison avec la protection supplémentaire
que cela peut accorder et qui est infime. Est-ce que je réponds à
votre question?
M. LATULIPPE: Cela veut donc dire que vous voulez avoir cinq jours de
plus que les cinq jours qui sont alloués?
M. TALBOT: Oui. Je n'aurais pas d'objection. Cela pourrait être
soixante jours, même soixante jours où la marchandise serait
gardée à nos entrepôts pour permettre à quelqu'un de
s'en sortir et ensuite nous aurions le droit de la vendre. Mais à la
condition que le client, personnellement, ne soit pas en possession de volumes
dont il peut faire ce qu'il veut durant ce temps. C'est là qu'est le
problème. C'est que nous la laissons à quelqu'un qui,
généralement, a fait preuve de mauvaise foi. Si c'était
quelqu'un en qui nous pourrions avoir confiance, cela irait bien. Mais en
général, le gars qui n'a pas payé et pour lequel nous nous
sommes décidés, finalement, après maints et maints essais,
après lui avoir accordé toutes les chances: La plupart des
industries, c'est ce qu'elles font; elles attendent à la dernière
minute et, finalement, elles se décident à reprendre la
marchandise parce que le gars fait vraiment preuve de mauvaise foi. Eh bien,
celui-là a toutes les chances, justement, de chercher à profiter
d'un délai qui serait trop long, par ailleurs. Un délai de trente
jours, cela donne un trop grande occasion à quelqu'un de prendre la
poudre d'escampette avec ce qui nous appartient.
M. LATULIPPE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions? Nous vous remercions, M.
Talbot...
M. TALBOT: Je remercie la commission.
M. LE PRESIDENT: ... du savant exposé que vous avez fait. Comme
il n'y a pas d'autres organismes représentés ici, nous ajournons
les travaux de la commission au mardi 26 janvier à 10 h 30.
(Fin de la séance: 17 h 34)