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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mercredi 20 septembre 1972 - Vol. 12 N° 91

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 32 - Loi concernant les activités immobilières


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières

compagnies et coopératives

Projet de loi no 32 — Loi concernant les activités immobilières

Séance du mercredi 20 septembre 1972

(Dix heures quinze minutes)

M. PICARD (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives continuera, ce matin, l'étude du projet de loi no 32 et entendra les représentants de plusieurs organismes qui ont soumis des mémoires.

Auparavant, j'aimerais apporter certains changements à la formation de la commission. Ces changements m'ont été fournis par les leaders parlementaires des différents partis présents à l'Assemblée nationale: M. Cardinal, du comté de Bagot, est remplacé par M. Boivin, du comté de Dubuc; M. Fraser, du comté de Huntingdon, est remplacé par M. Pelletier, du comté de Kamouraska; M. Harvey, du comté de Chauveau, est remplacé par M. Faucher, du comté de Yamaska; M. Kennedy, du comté de Châteauguay, est remplacé par M. Marchand, du comté de Laurier; M. Roy, du comté de Beauce, remplace M. Latulippe, du comté de Frontenac; M. Perreault, du comté de L'Assomption, remplace M. Ostiguy, du comté de Rouville, et M. Pearson, du comté de Saint-Laurent, remplace M. Veilleux, du comté de Saint-Jean.

Ce matin, au programme, nous avons les organismes suivants, qui ont été convoqués: le Barreau du Québec, dont les porte-parole seront Me André Brossard et Me Henri Lanctôt;. l'Association des détaillants de maisons mobiles et roulottes du Québec Inc., dont le porte-parole sera Me Pierre Delisle; la Chambre de commerce de la province de Québec, dont les porte-parole seront MM. Gilles Champagne et Jean-Paul Létourneau.

On me soumet de plus que la Fédération des associations coopératives, éducatives et familiales du Québec aura comme porte-parole Me Marois. Je cède maintenant la parole au ministre, qui a peut-être quelques commentaires à faire.

M. TETLEY: J'attends l'étude des mémoires des différentes associations.

M. LE PRESIDENT: J'invite immédiatement un des deux porte-parole du Barreau de Québec à prendre la parole. Je ne sais pas lequel va se présenter. Il faudrait vous identifier au micro, s'il vous plaît.

Barreau du Québec

M. BROSSARD: Mon nom est André Brossard. Je suis accompagné de Me Henri Lanctôt, qui est assis à ma gauche et qui se fera un plaisir de répondre aux questions tout à l'heure, s'il y en a.

Messieurs, la brièveté du mémoire du Barreau en ce qui concerne ce projet de loi n'aura d'égale, j'espère, que la brièveté de l'exposé que nous avons l'intention de faire ce matin. Certaines méchantes langues pourront dire que cette brièveté provient peut-être de ce que le Barreau n'a aucun intérêt à défendre dans la présente loi. C'est avec une objectivité absolue que nous nous présentons parce que, de fait, le Barreau, en ce qui concerne le bill 32, n'a aucun intérêt à représenter ou à défendre. Nous voulons simplement essayer d'apporter quelques précisions basées plutôt sur une expérience de pratique professionnelle.

Avant de commencer l'analyse des articles de la loi, il y a trois points que nous soulignons dans notre mémoire, sur lesquels, je pense, il y aurait lieu d'insister, dont deux en particulier qui nous paraissent être des lacunes dans le projet de loi en ce qu'il ne répond peut-être pas entièrement à certains des ennuis que le consommateur peut avoir lorsqu'il s'agit d'abus dans le domaine de transactions immobilières.

La première de ces lacunes, c'est que là où le projet de loi prévoit la nullité des contrats de vente dans certains cas lorsque certaines des conditions prévues par la loi n'ont pas été satisfaites, il y a un silence complet en ce qui concerne les créances hypothécaires, les prêts hypothécaires ou même les prêts personnels à la consommation.

Effectivement, la pratique nous révèle que le gros problème, lorsqu'on a affaire à des ventes frauduleuses ou abusives, ce n'est pas tellement de faire annuler la vente devant les tribunaux parce que nos lois générales', en particulier le code civil, y pourvoient déjà assez bien, mais c'est l'annulation du prêt hypothécaire.

Vous savez tous que maintenant les prêts hypothécaires sont également non seulement des charges qui grèvent l'immeuble mais des prêts personnels. Souventefois on se retrouve avec un consommateur qui obtient devant le tribunal d'annulation d'une vente mais qui reste quand même pris à payer pendant des mois et des années un prêt hypothécaire. C'est parce que le créancier hypothécaire, qui souvent est une personne de bonne foi, n'a pas participé du tout à l'abus, à la fraude ou à la pression et est détenteur d'un titre valable qui n'est pas annulé.

Le Barreau propose — je pense qu'il y a là un problème sérieux pour le consommateur — que le législateur, dans ce projet de loi 32, trouve une formulation qui serait un peu similaire à ce qui a déjà été fait dans le cas des lettres de change attachées à des contrats de finance. Cela rend le contrat hypothécaire véritablement l'accessoire de la vente et sujet aux mêmes causes de nullité que la vente.

Nous comprenons que les sociétés prêteuses pourront crier, mais je pense qu'à moins d'une telle mesure le consommateur risquera toujours

d'être dépourvu au bout de la ligne, même s'il obtient l'annulation. Alors, c'est une première recommandation sur laquelle nous insistons au Barreau, c'est que la créance hypothécaire devienne sujette aux mêmes causes de nullité —évidemment dans le cadre du bill 32, les articles 12, 13 et 17— que l'acte de vente lui-même, de façon que le consommateur soit entièrement libéré. Une autre des lacunes —et nous pourrons peut-être y revenir au sujet de l'article 18 — concerne, à notre point de vue, la protection des consommateurs qui sont l'objet de ventes sous pression, par des intérêts étrangers, de terrains ou d'immeubles qui sont situés à l'étranger. Vous me permettrez de faire allusion à un exemple que nous avons vécu au Québec, il y a quelque temps; nous pensons particulièrement aux propriéraitres d'orangeraies en Floride. Voici un groupe de consommateurs québécois —d'ailleurs ça c'était étendu même en dehors du Québec, en Ontario aussi — qui avaient été victimes ici de ventes vraiment abusives, frauduleuses et sous pression.

Le projet de loi, à l'article 18, prévoit que de telles ventes, par des étrangers, de terrains situés à l'étranger devront être faites par l'entremise de courtiers détenteurs de permis. Mais nous ne croyons pas que ceci soit vraiment suffisant, parce que le courtier lui-même peut être victime de ces intérêts étrangers. Les prospectus prévus par la loi et qui seront prévus par les règlements pourront être faits mais pourront également être frauduleux.

Si le courtier lui-même est victime, nous croyons que le consommateur, au bout de la ligne, se retrouvera exactement dans la même situation où il s'est trouvé il y a deux ou trois ans dans le cas des orangeraies de Floride, c'est-à-dire sans aucun recours valable.

Il faut imaginer le problème que les consommateurs et les acheteurs d'orangeraies ont vécu et vivent encore aujourd'hui. Il était bien facile de faire annuler leur contrat de vente au Québec, mais leur argent était rendu en Floride. Le créancier hypothécaire est en Floride avec un titre valable. Des actions doivent donc être prises en Floride contre des vendeurs, évidemment — parce qu'on avait affaire à quelque chose de frauduleux — devenus depuis insolvables frauduleusement, sans recours apparent contre un créancier hypothécaire apparemment de bonne foi, de sorte que le résultat de leurs procédures en Floride est encore très douteux.

Quand nous arriverons à l'étude de l'article 18, nous ferons à ce sujet une recommandation très précise — évidemment, nous ne voulons pas entrer dans les mécanismes — qui devrait, à notre point de vue, venir compléter le projet de loi.

Si vous voulez, nous allons passer à travers le projet de loi assez rapidement parce que, outre ces deux points que nous venons de mentionner, le reste des remarques du Barreau est un peu de la concordance et de la technique.

II y a d'abord une première remarque à l'article 1, sous-paragraphes h) et i) — je pense que plusieurs autres organismes l'ont faite et vont la faire — c'est la question de la définition des lotissements et des lots. Le lotissement est défini par le lot et le lot est défini par le lotissement, c'est vraiment très vague. Quelle est la superficie possible d'un lotissement ou d'un lot? Rien ne le précise dans la loi. Ce que nous suggérons, quant à nous, c'est qu'une superficie soit déterminée par la loi en ce qui concerne un lot et non pas par règlement. La raison pour laquelle nous disons "par la loi", c'est que l'expression "lot", dans notre droit, revient à plusieurs endroits. On la voit non seulement dans le projet de loi qui est devant nous, mais nous la retrouvons dans le code civil, sans définition, nous la retrouvons dans la Loi du cadastre, sans définition. Nous croyons qu'il serait dangereux de mettre tout simplement dans un règlement une définition précise d'un lot, définition dont l'application serait alors vraiment limitée à une seule loi. Nous croyons qu'il serait peut-être opportun, à l'occasion de l'étude de ce projet de loi, d'inclure une définition générale du lot qui serait susceptible de s'appliquer dans tous les cas possibles régis par notre droit en général.

En ce qui concerne l'article 8 f) où on donne au comptable public...

M. TETLEY: Pardon, Me Brossard, quelle est votre définition de lot et lotissement? Avez-vous une définition?

M. BROSSARD: C'est une excellente question. Comme le législateur lui-même, M. le ministre, nous nous sommes penchés sur ce problème sans vraiment être capables, quant à nous, du comité, qui avons préparé ce mémoire, en deux semaines, de trouver une définition susceptible de s'appliquer à tous les cas. Nous croyons, cependant, que le législateur a, quant à lui, toutes les ressources possibles et toutes les compétences intellectuelles possibles pour y arriver mieux que nous.

M. JORON: M. le Président, si vous me le permettez, est-ce que vous avez des suggestions par rapport à la superficie que vous avez mentionnée?

M. BROSSARD: Personnellement, non. Les gens qui sont dans la technique de la construction pourraient probablement vous éclairer beaucoup mieux que nous. Il faut que ce soit, par définition, quelque chose qui soit susceptible d'être bâti. Je pense qu'il faut partir de ce critère minimum pour arriver à une définition d'un lot. Maintenant, qu'est-ce que c'est, à ce moment-là, cette superficie minimum? Je pense que les techniciens pourraient le dire mieux que nous.

A l'article 8 f), nous avons fouillé dans le nouveau projet de code des professions, qui est un projet que le Barreau connaît très bien, et nous n'avons pu trouver nulle part de comptable public. Nous nous sommes demandé s'il ne

serait pas préférable de s'en tenir aux définitions qui existent dans le code des professions pour plus de concordance et de précision et peut-être même de limiter ce privilège donné par l'article 8 aux comptables agréés qui sont principalement appelés, dans le cours de leur travail de comptables, à effectuer certaines transactions.

La définition de comptable public nous semblé beaucoup trop large et générale.

M. CLOUTIER (Montmagny): Me Brassard, hier soir à la commission parlementaire chargée d'étudier les règlements du projet de loi 65 sur les services de santé et les services sociaux, le même problème s'est posé et on a examiné une suggestion semblable dans le cadre du code des professions et des lois spécifiques. Les légistes ont décidé de revoir toute cette proposition, parce que, évidemment, on ne peut pas présumer de l'adoption de chacune des lois spécifiques à ce moment-ci.

Il y a eu des représentations devant la commission parlementaire d'autres groupes de comptables que les C.A. Les A.P.A., les C.G.A., les R.I.A. sont venus devant la commission. Le législateur ne s'est pas encore prononcé. Je demanderais au ministre des Institutions financières et à ses officiers de faire le lien avec le groupe de légistes qui travaillent à la réglementation du bill no 65.

M. TETLEY: Merci de la suggestion.

M. BROSSARD: A l'article 10, il s'agit de plus qu'une simple technicité ou concordance. On y dit: " Le surintendant peut délivrer un permis si le requérant remplit les conditions prescrites par la loi et les règlements..." Nous croyons que, si le requérant remplit effectivement les conditions prescrites par la loi et les règlements, le surintendant devrait émettre le permis. Nous ne pouvons accepter, par principe, au Barreau, une telle discrétion, alors que la loi elle-même prévoit les conditions. On laisse quand même au surintendant la décision, qui, dans le cadre de l'article 10, est tout à fait discrétionnaire. Elle deviendrait sans appel et définitive, nonobstant les termes des autres dispositions de la loi.

Nous suggérons que le mot "peut" soit remplacé par le mot "doit".

A l'article 18, nous revenons au problème de vente par des étrangers. Nous suggérons, de façon plus précise, que l'une ou l'autre des deux formules soit utilisée lorsque des intérêts étrangers viennent ici faire de la promotion de terrains situés à l'étranger.

Le projet de loi prévoit un délai d'un an pour demander la nullité d'une vente qui n'aurait pas rempli les conditions prévues par la loi. Nous suggérons que le projet de loi prévoie que l'argent versé à l'achat d'une propriété à l'étranger soit gardé en fiducie au Québec, pendant le même délai d'un an, à moins que le promoteur étranger ne verse, suivant des dispo- sitions qui pourraient s'apparenter à celles de la Loi des assurances, un cautionnement ou un dépôt substantiel auprès du surintendant pour garantir le remboursement de l'argent payé par le consommateur advenant qu'il y ait fraude ou annulation.

Evidemment, la technique même, les mécanismes, nous croyons que les experts doivent les prévoir, mais l'une ou l'autre des deux formules nous paraîtrait une garantie suffisante pour le consommateur. Nous croyons que l'article 18 devrait également s'étendre non seulement aux lots, mais également aux immeubles vendus à l'étranger.

De plus en plus, nous assistons au Québec à la promotion de ventes d'appartements dans des condominiums, soit en Espagne, dans le sud ou dans les Antilles. Nous croyons que la vente des appartements devrait également être prévue dans cette loi en ce qui concerne les intérêts étrangers.

Alors, nous suggérerions...

M. TETLEY: Pardonnez-moi, Me Brossard. Vous savez que depuis certaine publicité de la part du ministère et d'ailleurs, il n'y a pas beaucoup de plaintes pour les orangeraies; il y a certainement eu des plaintes pour ce qui s'est produit dans le passé. Nous prenons bonne note de votre suggestion mais nous ne voulons pas une loi trop rigide. Il est très difficile de légiférer au Québec en droit pour l'étranger, comme vous le savez. Peut-être que nous allons légiférer ici, et que la Floride aura une autre loi...

M. BROSSARD: Ce que nous voudrions... M. TETLEY: ... contradictoire.

M. BROSSARD: ... empêcher, M. le Président, c'est que ces intérêts étrangers viennent ici frauder les détenteurs de permis et ensuite repartir chez eux avec l'argent qu'ils auraient accumulé bien vite. Je comprends que, depuis l'affaire des orangeraies, cela ne s'est pas reproduit. Mais c'est toujours susceptible de se reproduire. Et il y a de plus en plus, surtout avec les relations qui sont de plus en plus internationales dans ce domaine, de promotion — on le voit à tous les jours dans les journaux — de vente d'appartements en Espagne, en Floride, dans les Antilles. Nous croyons que tout cela devrait être dans le cadre de l'article 18. Celui-ci devrait inclure également la vente d'immeubles à l'extérieur et non seulement "offrir en vente ou en location au Québec un lot." Alors, il s'agirait d'ajouter les immeubles à l'article 18. Nous croyons que dans le cas des étrangers qui viennent ici — non pas investir parce qu'ils ne viennent rien investir au Québec; ils viennent vendre des terrains à l'étranger — on devrait exiger d'eux des sauvegardes pour notre consommateur. S'ils sont sérieux, ils les donneront. S'ils ne sont pas sérieux, ils ne viendront pas.

Quant à l'article 20, nous suggérons, évidemment, que ce ne soit pas limité à une personne physique mais que ce soit également étendu aux corporations dont les activités immobilières ne sont pas l'objet premier et ne peuvent être qu'accidentelles ou incidentes à l'exercice d'un autre commerce.

Vous pouvez avoir, par exemple, une compagnie d'huile qui a des terrains. Elle vend un terrain à un concessionnaire. Nous croyons que cette vente pourrait être faite directement sans nécessiter de passer par un détenteur de permis, c'est-à-dire par un courtier. En d'autres mots, étendre le privilège de l'exclusion de l'article 20 à toute corporation dont ce n'est pas l'objet de faire des activités immobilières, tel que défini dans la loi.

Quant à la réglementation de la publicité, qui est prévue par l'article 20, nous croyons qu'elle est beaucoup trop restrictive. Nous croyons qu'il est essentiel et nécessaire de réglementer le contenu de la publicité, mais non pas de limiter la forme de publicité. Tel que l'article 20 se lit dans le projet de loi, l'individu qui aurait une propriété à vendre dans un endroit qui est à l'écart des sentiers battus ou des grandes routes ne pourrait mettre qu'un panneau-réclame sur son terrain et risquerait d'avoir son terrain en vente pendant des mois et des années. Nous croyons donc que l'article 20 devrait également permettre la publicité dans les journaux. Il faudrait, cependant, que le contenu de cette publicité, évidemment, soit bien fixé par des règlements qui pourraient, par exemple, ne prévoir que l'endroit, le prix, les dimensions exactes, sans faire de promotion exagérée sur la qualité du terrain à vendre.

Quant aux articles 21 à 24, Me Lanctôt pourra répondre plus précisément à vos questions, s'il y en a sur ce sujet. Ce que nous voulions souligner dans un premier jet, ici, c'est que, souvent, les municipalités elles-mêmes jouent un rôle direct dans la promotion immobilière. En effet, vous pouvez avoir un nouveau développement dans un endroit où les services ne sont pas installés. Alors, le promoteur peut bien, en toute honnêteté, dire, par exemple, que les services publics seront installés dans un délai de deux ou trois mois, sans que la municipalité, évidemment, ne soit liée par ces représentations du promoteur immobilier. Au bout de la ligne, on peut avoir un promoteur immobilier honnête, par l'entremise d'un courtier honnête, qui vend un développement immobilier et les acheteurs se retrouvent, après six mois ou un an, sans services publics. Il y aurait peut-être lieu, à l'intérieur non pas des cadres du bill 32, mais peut-être même à l'intérieur de la Loi des cités et villes, que l'on institutionnalise une pratique que certaines municipalités commencent à prendre au Québec, qui est de refuser les permis de construction — elles le font, évidemment, sur une base volontaire — lorsque les plans et programmes de développement des services publics, à cet endroit, ne sont pas arrêtés et définitifs.

Peut-être y aurait-il lieu — cela fera peut-être l'objet d'une autre commission parlementaire — d'institutionnaliser des mesures semblables. Ce que nous voulions souligner ici, c'est qu'il y a là tout un aspect de la promotion immobilière qui n'est pas couvert par le projet de loi no 32 et qui peut, éventuellement, causer d'autres problèmes.

Quant à l'article 23, évidemment, c'est seulement une précision que nous suggérons. L'article 23 dit que "le constructeur ou le vendeur doit remettre à l'acquéreur une copie des plans et devis visés à l'article 22". L'article 22 nous paraissait un peu ambigu. Est-ce qu'il s'agissait des plans et devis de la maison modèle? Est-ce qu'il s'agissait des plans et devis incorporant les modifications apportées? Ce que nous suggérons tout simplement, pour préciser l'article 23, c'est que ce soient les copies des plans et devis de la maison modèle elle-même qui soit remises.

Ces plans et devis devraient être remis évidemment à un moment X bien précisé qui est soit celui de la signature de l'acte de vente ou celui de l'acceptation de la promesse de vente, selon le cas. Parce que l'article 23 ne dit pas à quel moment les plans et devis doivent être remis. Si les plans et devis sont remis une fois que tout est signé, ça n'a plus aucune utilité. Nous suggérons que ce soit au moment de la promesse de vente, ce qui donnera tout le temps voulu à l'acquéreur pour les vérifier et comparer avant la signature même de l'acte de vente proprement dit.

De là nous sautons à l'article 47, parce que ce qui concerne les courtiers en immeubles, d'autres que nous sont beaucoup plus compétents pour commenter le projet de loi. Je suggérerais qu'on lise tout d'abord l'article 47 en relation avec l'article 61. Nous suggérons, à l'article 61, que l'avis du surintendant de suspendre ou de révoquer un permis soit inclus dans l'article 61, c'est-à-dire qu'après "l'avis prévu à l'article 17", on ajoute les mots "et 47". L'article 61 se lirait: "L'avis prévu aux articles 17 et 47 doit être envoyé sous pli recommandé";

Et à l'article 47, nous suggérons qu'on ajoute un article 47 a) ou un autre paragraphe à l'article 47 qui se lirait comme suit: "La décision du surintendant de révoquer ou de suspendre un permis prendra effet le dixième jour suivant sa mise à la poste". Si nous lisons l'article 50 du projet de loi tel qu'il est rédigé, on voit que la décision du surintendant prend effet au moment où elle est prononcée. Nous soumettons tout d'abord qu'il est normal de prévoir, pour le courtier qui perdrait son permis, le mode d'avis qu'il doit recevoir, et nous soumettons également que cette disposition de l'article 50 nous paraît exorbitante du droit commun et du droit général.

Le principe de base de notre droit c'est que toute décision qui est sujette à appel ne peut pas prendre effet avant que les délais d'appel ne soient expirés. Les délais d'appel qui sont suggérés dans le projet de loi étant de 30 jours,

nous comprenons qu'un délai de 30 jours est peut-être exorbitant dans l'autre sens, en ce qu'il donnerait un trop long laps de temps aux courtiers dont le permis serait révoqué pour continuer ces transactions et peut-être continuer à frauder le consommateur.

D'autre part, l'opinion s'inspire un peu des dispositions du code de procédure civile en matière d'injonction. Nous mettons un délai de dix jours avant que ça prenne effet, tout en gardant le délai d'appel de 30 jours. Si le courtier vraiment se sent lésé, et convaincu de son droit d'appel, il pourra toujours le faire en dix jours et son permis ne sera pas révoqué, autrement après dix jours son permis sera révoqué. Mais nous recommandons quand même que l'article 50 soit modifié et que les mots "ne pas" soient rayés de l'article 50. Nous changeons complètement le sens de l'article 50, mais nous croyons que le principe de base de notre droit c'est que l'appel suspend la décision qui est en appel. Et l'article 50 tel que rédigé est complètement à l'effet contraire et nous parait exorbitant de nos principes de droit.

Nous suggérons fortement que l'appel suspende la décision du surintendant, parce que le surintendant, si on regarde les dispositions suivantes de la loi, jouit quand même de plusieurs autres pouvoirs pour mettre fin à une situation qui pourrait se perpétuer, de fraude par exemple, et dispose de moyens, il peut demander une injonction — c'est prévu à une autre disposition de la loi — il peut porter une plainte au pénal également — c'est également prévu à une autre disposition de la loi — alors nous croyons que toutes ces sauvegardes existant pour le consommateur et en faveur du surintendant, cette décision elle-même devrait cependant être suspendue par un appel.

Une dernière remarque, c'est à l'article 64 qui là nous semble tout à fait exorbitant du droit civil et qui est de permettre par témoin la contradiction d'un document écrit.

Nous croyons que l'intention du législateur, lorsqu'il a suggéré cet article 64, était probablement de permettre par témoin la preuve d'une infraction à la loi, d'une fraude, de fausses représentations ou de dols. S'il s'agit seulement de fausses représentations, de fraudes ou de dols, le code civil et surtout la jurisprudence reconnaissent depuis toujours le droit à la preuve testimoniale nonobstant les termes mêmes du contrat de vente ou de promesse de vente. La jurisprudence permet la preuve par témoin de la fraude, de l'erreur, de tous les vices de consentement.

S'il s'agit simplement de prévoir le cas où l'acquéreur aurait signé sous pression la formule comme quoi il a reçu copie des plans et devis ou qu'il a reçu copie des prospectus, s'il signe ça et que ce ne soit pas le cas, c'est peut-être ce que le législateur voulait prévoir. A ce moment-là nous croyons qu'il serait beaucoup plus conforme à notre droit général de tout simplement limiter l'article 64 en disant que toute personne qui est partie à un contrat régi par la présente loi peut établir par preuve testimoniale que les dispositions de la présente loi n'ont pas été respectées.

A ce moment-là, la preuve testimoniale pourra être permise pour prouver que la loi a été violée ou qu'on a amené quelqu'un, par pressions ou sous de fausses représentations, â signer tel ou tel écrit, mais l'écrit lui-même ne pourra pas être contredit. Alors c'est ce que nous croyons qui devrait être à l'article 64, c'est-à-dire se limiter aux violations de la loi en ce qui concerne l'admissibilité de la preuve testimoniale. Alors ce sont les remarques d'ensemble que le Barreau désirait faire. Nous sommes à votre entière disposition, s'il y a quelque question que ce soit des membres de la commission.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a des questions? Le député de Gouin.

M. JORON: J'en avais une à propos de l'appel dont on a parlé il y a un moment. Il y a parfois des opérations qui sont avantageuses malgré les amendes à payer. Je me demandais si vous aviez une idée de la façon dont on pourrait parer quand même aux désavantages qui peuvent subsister pour le consommateur.

M. LANCTOT: La loi le prévoit elle-même. Je cherche l'article qui nous mentionne ça. Il y a les cas d'injonction, il y a les cas d'administration des comptes en fidéicommis par le surintendant...

M. JORON: Les opérations peuvent continuer quand même.

M. LANCTOT: Je vous renvoie à l'article 59, entre autres, dans les cas d'infractions répétées. Ici il est possible de prendre une injonction contre une personne pour l'empêcher de continuer à agir.

M. JORON: A votre avis, c'est suffisant?

M. TETLEY: Le dilemme est soulevé par le Barreau et aussi par le député de Gouin. Parfois quelqu'un fraude le public, le surintendant retire son permis et l'homme en question s'en va en appel. Est-ce qu'il doit perdre son permis durant l'appel ou non? C'est le problème. Nous avons l'exemple d'Inspiration et Succès et nous avons gagné notre cause. L'homme est allé en appel et en appel de cet appel, etc. C'est un dilemme et je n'ai pas encore la solution. Il y a le problème de la démocratie et de l'administration pour le bien-être du grand public.

M. BROSSARD: Si je peux, M. le Président, il y a aussi le risque contraire. Si la suspension est définitive, nonobstant appel, ce bonhomme-là a quand même des mandats en cours. Ce courtier peut avoir fait une fraude, dans un cas

donné, justifiant la suspension de son permis. Mais il y a quand même dix ou vingt mandats en marche qui, du jour au lendemain, tombent automatiquement, sans même que le consommateur qui fait affaires avec lui soit nécessairement au courant, sans qu'il puisse en aucune façon le continuer sans se rendre coupable d'infractions beaucoup plus sérieuses à la loi.

Nous croyons que l'injonction prévue à l'article 59 crée cet équilibre entre les deux cas. Si nous avons affaire à une répétition d'actes frauduleux, le surintendant peut demander une injonction pour empêcher quelqu'un de poser telle ou telle série d'actes, nonobstant l'appel, un peu comme une injonction interlocutoire pendant l'instance.

Nous croyons que, déjà, le mécanisme de protection est suffisant, tel que prévu dans la loi. La Corporation des courtiers a également elle-même proposé d'autres mécanismes possibles de défense du consommateur, sans aller jusqu'à ce qui nous paraît exorbitant, la suspension nonobstant l'appel.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Me Brossard, l'article 8 de la loi énumère les personnes qui peuvent agir comme courtiers en immeubles sans détenir un permis. Est-ce que vous croyez que cette liste est trop limitative ou trop large? Qu'est-ce que vous pensez de la représentation des courtiers en immeubles à l'effet que les avocats et les notaires devraient être restreints quant aux activités immobilières?

M. BROSSARD: Je prends connaissance de la recommandation des courtiers en immeubles: "Les avocats et notaires en exercice, à l'occasion de l'exercice des actes qui leur sont généralement réservés d'après les lois qui les régissent". Disons que je ne peux pas engager le Barreau sur cette question qui m'est posée. De toute façon, pour autant que les avocats sont concernés, nous ne croyons pas qu'une disposition comme celle qui est recommandée par les courtiers en immeubles crée de grandes protestations, parce qu'effectivement, en vertu de notre propre Loi du Barreau, nous ne pouvons pas faire du courtage en immeubles une quasi-profession. C'est nécessairement à l'occasion d'autres actes professionnels que nous pouvons être appelés à en faire et, encore là, c'est tellement exceptionnel que je ne crois pas que le Barreau ait d'objection à une telle recommandation.

En ce qui concerne les notaires, évidemment, si une disposition semblable était acceptée, il faudrait peut-être que les notaires, à leur tour, commencent à bloquer 60 p.c. des étudiants qui se présenteraient aux examens.

M. CLOUTIER (Montmagny): De toute façon, Me Brossard, on pourra vous reposer la question à l'occasion du bill 250, sur le champ d'exercice de la profession.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.

M. ROY (Beauce): M. le Président, Me Brossard a proposé que, lorsqu'il y a annulation de contrat, il puisse y avoir, en même temps, annulation du prêt, de façon que l'acheteur, le consommateur ne soit pas obligé de continuer à payer pendant un certain temps les frais et autres choses. Comment croyez-vous possible l'annulation d'un prêt, par exemple, 45 jours après que l'argent a été déboursé, alors qu'il y aurait eu des procédures d'annulation du contrat et que la personne qui a perçu l'argent comme vendeur l'aurait investi ailleurs ou l'aurait dépensé à d'autres fins? Si on réinvestit, cela suppose des valeurs correspondantes, mais supposons que la personne l'aurait dépensé ailleurs, comment peut-on prévoir un mécanisme pour réaliser cette annulation de prêt?

M. BROSSARD: Evidemment, la recommandation que nous faisons impose un fardeau au prêteur. Justement, le problème que vous soulevez va être sérieux pour le prêteur qui devra —c'est peut-être une bonne chose — avant de prêter pour un immeuble, pour construction ou pour achat, s'assurer lui-même que les dispositions des articles 12 et 13 ont été respectées par le vendeur. A ce moment-là, le consommateur ne sera pas seul à assumer les risques, le vendeur non plus, mais le prêteur aussi devra les assumer.

Trop souvent, aujourd'hui, le prêteur est celui qui ne court aucun risque, qui retire tous les bénéfices et qui s'en sort tout le temps les mains nettes. Là, à son tour, il va être obligé de participer aux risques et, avant de prêter, il devra s'assurer, comme l'acheteur, qu'on a respecté les dispositions 12 et 13. Evidemment, c'est toujours limité aux articles 12 et 13; l'annulation est prévue par l'article 17.

Il est possible aussi que les prêteurs, les gros prêteurs, trouveront une formule je pense par exemple à la Société centrale d'hypothèques et de logement. Peut-être qu'ils en viendront —parce qu'on s'adapte toujours aux nouvelles dispositions — à mettre dans les clauses de leurs prêts que les sommes seront versées seulement 90 jours après la signature ferme de l'acte de vente. Ainsi, 90 jours après, évidemment, si l'avis prévu par l'article 17 n'a pas été donné, ils pourront effectuer sans risque le paiement du prêt.

Nous comprenons le risque pour le prêteur, mais nous croyons qu'il est temps que lui aussi assume ces risques.

M. ROY (Beauce): Etant donné que vous parlez justement du fardeau pour les prêteurs en ce qui a trait au prêt hypothécaire, il semble y avoir eu énormément de difficultés compte tenu des hauts taux d'intérêt que nous connais-

sons. Je me place ici au niveau, par exemple, d'une compagnie d'assurance-vie ou encore au niveau d'une caisse d'épargne. Considérant les possibilités qu'il y a de placer de son argent dans des obligations — on sait que placer de l'argent dans des obligations gouvernementales, municipales, scolaires, hospitalières ou autres entraîne des frais d'administration très peu élevés et qu'il y a possibilité à l'heure actuelle de placer à des taux de 8 1/4 p.c. et 8 1/2 p.c. — si on exigeait du prêteur une participation aux risques de fraude dans le cas de ventes, ne croyez-vous pas que les prêteurs n'auraient d'alternative que d'augmenter le taux d'intérêt qu'ils mettent à la disposition de ceux qui veulent faire des emprunts dans ce domaine? J'ai parlé des caisses populaires ou des sociétés mutuelles d'assurance-vie qui font face quand même à des responsabilités, des engagements et des rendements. Il faut qu'elles répondent à des normes d'administration, qu'elles montrent exactement des critères de rentabilité et — je vois mal une caisse populaire dans un milieu, même urbain, qui fonctionne à perte — compte tenu des possibilités qu'elles ont de placer tout leur argent en obligations, à cause des risques que pourrait comporter le prêt hypothécaire, elle disent: Voici, le prêt hypothécaire, on est de moins en moins intéressé à en faire. A ce moment-là, ce sont les consommateurs qui sont lésés.

M. BROSSARD: Je serais d'accord avec vous si on généralisait cette clause de nullité du prêt hypothécaire. Par exemple, si on la rendait applicable dans tous les cas d'annulation de vente, vice caché, etc., évidemment, le prêteur deviendrait le seul à assumer les risques et je serais d'accord que ce ne serait plus un placement intéressant, quoique la loi de la concurrence jouera toujours dans ce domaine.

Mais là, on ne parle que de deux cas bien précis et ce sont les articles 12 et 13. Le risque que prend le prêteur est très minime; c'est simplement de s'assurer avant de prêter que les dispositions des articles 12 et 13 ont été remplies par le vendeur. Une fois qu'il est sûr de ça, son risque est disparu. L'autre formule qu'il peut prendre est de suspendre le versement du prêt à 90 jours. Ce que nous voulons surtout, c'est enlever au consommateur l'odieux d'être obligé, nonobstant l'annulation d'une vente, de continuer à payer des prêts pendant des années. A ce moment-là, l'annulation de la vente ne veut rien dire. Nous voulons que les trois participent aux risques, d'une part, et également à l'observation de la loi d'autre part; que les trois fassent leur part: prêteur, vendeur, acquéreur. Je pense que c'est plus équitable comme ça.

M. ROY (Beauce): Si vous voulez faire participer les trois aux risques, je reviens toujours à ma question principale, parce qu'ayant une certaine expérience dans ce domaine, on se rend compte à un moment donné qu'on ne peut pas obliger une institution financière à faire des prêts dans le domaine hypothécaire. On ne peut jamais l'y obliger. Elle en fait si elle le veut bien et elle le fait lorsqu'elle croit avantageux de le faire parce que, justement, on doit rembourser les sommes à une période donnée, à une échéance selon les contrats faits par les compagnies d'assurance, les contrats d'actuaires ou encore, lorsque ce sont des institutions financières qui vont accepter des dépôts à terme, après un certain terme le dépôt doit être remboursé au client. Elle est obligée de voir à ce que toute la procédure et le système fonctionnent normalement.

Mon point — je m'excuse d'y revenir — est que, nous n'avons pas de législation pour obliger les institutions financières à faire des prêts hypothécaires.

La clause de 90 jours, en somme, est généralisée dans tout le Québec. Elle n'est pas généralisée dans tous les cas, mais elle s'applique à tout le territoire. On sait très bien, à l'heure actuelle, que dans plusieurs territoires au Québec il est impossible d'obtenir des prêts hypothécaires dans certaines régions à cause des coûts d'administration que cela implique.

Je reviens encore avec ma question. Ne croyez-vous pas que c'est un fardeau additionnel que d'obliger le prêteur à participer au risque, s'il fait des prêts? Mais si on ne peut pas l'obliger à faire le prêt, qu'est-ce qui peut se produire?

M. BROSSARD: Nous ne craignons pas vraiment, à cause de la limite du risque des articles 12 et 13, que cette situation puisse survenir. Nous pensons qu'un placement à 9 1/2 p.c. ou 9 3/4 p.c, comme c'est le cas actuellement, est toujours un placement intéressant, compte tenu du petit risque, parce qu'après tout, les articles 12 et 13, c'est très peu. Ce sont les seuls motifs de nullité que nous prévoyons dans notre recommandation. C'est le dépôt du prospectus contenant les renseignements prévus par règlement et c'est la remise à l'acquéreur de la copie du prospectus, plus le cadastrage prévu par l'article 12. C'est très facile pour le créancier hypothécaire de vérifier si ces trois choses ont été faites par le vendeur. Il n'y a plus de risque.

Nous ne pensons pas que cela va diminuer les prêts faits aux consommateurs par les institutions financières.

M. ROY (Beauce): Dans la préparation du prospectus, la personne ou le courtier qui aura à préparer un prospectus doit voir — et d'ailleurs, vous l'avez souligné dans votre mémoire — à fournir tous les renseignements possibles quant aux services municipaux et autres. Le courtier s'engage en quelque sorte à garantir que la municipalité va donner au client éventuel tel et tel service dans tel et tel délai. Supposons qu'une personne a commencé à se faire construire et que des complications, des difficultés

surviennent entre la municipalité et le ministère des Affaires municipales relativement à l'obtention de subventions pour ériger un réseau d'égouts et d'aqueduc dans un secteur donné, et que les délais se prolongent à cause de cela, comment le courtier peut-il naviguer à l'intérieur de cela sans devoir, d'une part, faire annuler ses contrats, et d'autre part, après l'annulation des contrats, peut-être prendre le risque d'annuler ses permis? Les prêteurs sont aux prises avec ces problèmes. De quelle façon pouvez-vous prévoir que le consommateur puisse effectivement être protégé par le prospectus alors qu'il y a beaucoup d'implications de part et d'autre, parce qu'il n'y a pas seulement une personne concernée là-dedans?

M. BROSSARD: Je ne crois pas que l'exemple que vous donnez soit un motif d'annulation du contrat, de toute façon. Si nous lisons les articles 12 et 13, le prospectus aura été déposé et accepté et approuvé par le surintendant. Et si l'un ou l'autre des faits représentés dans le prospectus ne s'avère pas exact, pour ce qu'on appellerait un cas fortuit, enfin pour des raisons hors de la volonté du vendeur ou de l'acquéreur ou du prêteur, je ne pense pas qu'il y ait motif d'annulation du contrat de vente. Le créancier hypothécaire n'est pas en danger.

Le seul risque qu'il pourrait courir — et encore là, la façon dont les articles 12 et 13 sont rédigés, je pense qu'un tribunal n'annulerait pas la vente — serait que les renseignements donnés dans le prospectus sont de toute apparence faux. Mais même si c'est le cas, si on lit l'article 13, un prospectus aura été déposé, et pour autant qu'il est approuvé par le surintendant, il nous semble que l'article 17 ne s'applique plus. Même là, le risque pour le prêteur nous paraît inexistant.

M. ROY (Beauce): Je ne parlais pas du risque pour le prêteur, je parlais du risque qu'il y a pour le courtier ou pour le vendeur de terrains. Cette personne, en faisant les ventes de ces propriétés, passe par un courtier, et le courtier inclut dans son prospectus, ce qui est normal, tous les services publics qui vont desservir l'acheteur éventuel. Mais si, pour des raisons administratives et financières, la municipalité n'est pas en mesure de répondre aux obligations incluses dans le prospectus? C'est sur ce point que je m'interrogeais. On peut prendre de multiples exemples, et je pense que vous connaissez le problème mieux que nous.

Il y a des municipalités de grosseur moyenne au Québec; par contre, vous avez de petites municipalités; en dernier lieu, vous avez les très grandes municipalités urbaines. Cela ne veut pas dire, parce qu'elle est petite ou parce qu'elle est grosse, qu'elle a moins de difficultés. Les difficultés se retrouvent surtout dans les municipalités où il y a beaucoup d'aménagement domiciliaire. Les municipalités ne fournissent pas à faire les investissements nécessaires pour offrir tous les services à la population des nouvelles rues et aux nouvelles habitations. Alors, des délais s'ensuivent par voie de conséquence.

M. BROSSARD: Ecoutez, je répondrais en deux temps à votre objection. Tout d'abord, évidemment, il s'agit de réglementation et nous ne pouvons pas présumer de ce qu'il va y avoir dans la réglementation. Est-ce que les délais pour fournir les services publics devront être prévus en vertu des règlements dans le prospectus ou non? On ne le sait pas. Même en assumant que ce soit le cas, ce que nous proposons — c'est pour cela que nous insistons pour que ce soit dans la Loi des cités et villes et non pas seulement dans le cadre de la loi 32 — c'est qu'on institutionnalise l'obligation pour les cités et villes, avant d'émettre des permis de construction, de s'assurer que les services publics seront prêts en temps utile. A ce moment-là, il faudrait mettre la responsabilité sur la municipalité de refuser le permis de construction si ses finances ne lui permettent pas d'assurer les services publics. Si, pour une raison qui, vraiment, est hors du contrôle de tout le monde, les services publics finalement ne sont pas installés dans les délais prévus, nous ne croyons pas que le contrat de vente soit annulable en vertu du projet de loi, tel quel, parce que ce ne serait sûrement pas une violation des dispositions des articles 12 ou 13. Ce ne sera sûrement pas la faute du vendeur, non plus.

M. ROY (Beauce): J'aurais une dernière question, M. le Président, au sujet du prospectus. Je suis d'accord qu'il y a des endroits où un prospectus doit être préparé, c'est nécessaire. Mais est-ce que vous croyez, à la lumière de l'expérience que vous avez, qu'il sera nécessaire d'exiger un prospectus dans toutes les municipalités au Québec lorsqu'il y a vente de plus de trois terrains? Lorsqu'il y a un plan de lotissement, on a parlé de trois terrains.

M. BROSSARD: Au-dessus de quatre.

M. ROY (Beauce): Au-dessus de quatre. Est-ce que vous estimez absolument nécessaire qu'un prospectus soit préparé, peu importent les endroits au Québec, lorsqu'il y a plus de quatre terrains de vendus?

M. BROSSARD: Si nous regardons le problème de façon juridique, oui. On ne peut pas faire de distinction. L'autre aspect que vous soulevez, je pense que c'est d'ordre beaucoup plus économique que juridique. A ce moment-là, nous ne croyons pas que nous puissions, le Barreau, répondre à cette question. Peut-être que mon ami, Me Marois, dans la présentation du mémoire de l'ACEF, sera en mesure d'apporter une réponse à votre question.

M. ROY (Beauce): Parfait.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions en rapport avec le mémoire présenté par le Barreau du Québec?

M. TETLEY: Vous me permettez, M. le Président, de remercier Me Brassard et Me Lanctôt de leur présence aujourd'hui ainsi que de leur mémoire que j'ai trouvé très intéressant, même plus ce matin que lorsque je l'ai lu en fin de semaine.

M. BROSSARD: Vous nous permettrez, quant à nous, de remercier les membres de la commission de leur accueil sympathique.

M. LE PRESIDENT: J'invite maintenant Me Pierre Delisle, procureur de l'Association des détaillants de maisons mobiles et roulottes du Québec Inc.

Association des détaillants

de maisons mobiles et roulottes

du Québec

M. DELISLE: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, à titre de représentant des deux associations, soit les manufacturiers de maisons et de véhicules récréatifs du Québec et des détaillants de roulottes et de maisons mobiles — en effet, il s'agit bien d'un mémoire conjoint des deux organisations — je tiens, d'abord, à remercier le secrétariat des commissions de l'Assemblée nationale pour nous avoir permis, malgré notre retard extrêmement long à remettre nos représentations écrites, de nous présenter ici ce matin.

Je dois dire, à titre d'introduction, que c'est par hasard que les deux associations se sont aperçues qu'à titre de producteurs et de vendeurs d'un bien mobilier elles se retrouvaient dans une loi qui concerne les activités immobilières dans tout le Québec. C'est peut-être ce qui explique un peu le retard.

J'ai ici avec moi, aujourd'hui, des représentants des deux catégories d'industries que nous représentons, c'est-à-dire les maisons mobiles et les maisons préfabriquées, modulaires ou sec-tionnelles. J'ai à ma gauche M. Réal Désourdy, qui est président des Entreprises Désourdy Inc., M. Rosaire Latendresse, des Constructions La-tendresse, et un peu plus loin, là-bas, M. Pierre McDonald, qui est vice-président administratif des Industries L'Islet qui se spécialisent, en particulier, dans la construction et la vente de maisons mobiles. Ces personnes se feront un plaisir, tout à l'heure, de répondre aux questions techniques, s'il y en a, parce que c'est probablement une industrie qui est un peu mal connue, au Québec, et qui est jeune. Alors ces personnes se feront un plaisir de répondre aux questions techniques ou autres, concernant la construction de leur produit et la mise en marché.

Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, en introduction, c'est avec surprise que l'industrie de la maison mobile et de la maison sectionnelle s'aperçoit aujourd'hui que l'article 2 a) du projet de loi no 32 prévoit que les maisons mobiles et les maisons préfabriquées seront, au sens de la loi 32, considérées comme des immeubles et des maisons d'habitation. Le mémoire porte essentiellement sur ce point, parce que nous voyons des contradictions dans plusieurs lois qui viennent d'être adoptées ou dans des anciennes lois, telles que la Loi des véhicules automobiles, qui s'applique in extenso aux vendeurs de maisons mobiles. Nous voyons des contradictions et même un risque grave. A force de réglementer, d'émettre des permis et d'en ajouter à ceux qui existent déjà dans l'industrie manufacturière, nous craignons que ces contrôles viennent à étouffer complètement cette industrie qui est jeune, comme je l'ai dit tout à l'heure, et qui est particulièrement dynamique dans les zones marginales, au Québec.

Je ne reviendrai pas sur l'introduction mais on sait, par les journaux, par exemple, qu'il y en a une à Saint-Joseph-de-Beauce, qu'il y en a d'autres à Saint-Jérôme, L'Islet, Drummondville, Saint-Jean-d'Iberville et, en général, dans les zones satellites de Montréal ou de Québec.

Un premier rappel, il s'agit, évidemment, d'un détail de la loi, l'article 2 a), qui définit les mots "immeuble et maison d'habitation" comme comprenant une maison mobile ou une maison préfabriquée, qui sera définie par règlement. Nous ne connaissons pas le contenu du futur règlement mais nous comprenons suffisamment le sens des mots "maison mobile et maison préfabriquée" pour voir que, directement, le projet de loi no 32 s'appliquerait, s'il était adopté comme tel, in extenso à toutes les activités manufacturières, au niveau de la construction de la maison mobile, de la maison préfabriquée, de la maison fabriquée sur le terrain, de type conventionnel, et aussi à toute la mise en marché de ces produits, mise en marché, d'ailleurs — c'est peut-être un peu ce qui a compliqué le mémoire — qui est différente, selon qu'il s'agit d'une maison mobile ou d'une maison préfabriquée.

Il serait peut-être utile, avant de faire des représentations plus précises quant au texte de la loi, de préciser ce qu'est la maison mobile et la maison préfabriquée. La maison mobile, c'est celle que l'on voit sur roues, transportée sur nos autoroutes. Ces temps-ci, il s'en monte beaucoup, sur la Côte-Nord. Elles ont généralement 60 pieds et plus et de 12 à 14 pieds de largeur. Ce sont ces grandes unités, avec le toit bas, qui sont généralement construites avec des alliages de métaux. Ces maisons mobiles sont actuellement construites en usine. C'est un point que tout le monde admet. Elles sont distribuées par des concessionnaires — et là, c'est un point important — qui les vendent exactement selon les mêmes lois que les vendeurs d'automobiles. La Loi des véhicules automobiles, au niveau des

permis, au niveau du cautionnement, de la garantie, par exemple, du produit qu'ils vendent, s'applique in extenso au vendeur de maison mobiles.

La Loi de la protection du consommateur, qui est une loi qui dépend aussi de votre commission et qui a été adoptée l'année dernière, s'applique elle aussi in extenso à ces ventes, non seulement à la vente et au permis, par exemple, que le concessionnaire doit détenir comme vendeur de maisons usagées mais aussi au financement des maisons mobiles.

M.TETLEY: Est-ce que les membres de votre association ont des permis de notre Office de la protection du consommateur, comme vendeurs itinérants?

M. DELISLE: Comme vendeurs itinérants, non. Il ne se fait aucune vente par les portes.

M. TETLEY: Je parle des maisons mobiles. M. DELISLE: Oui. Il n'y a aucun permis.

M. TETLEY: Je ne parle pas des maisons préfabriquées. Je parles des maisons mobiles.

M. DELISLE: A ma connaissance, il n'y a eu aucun permis de vendeur itinérant pour les maisons mobiles. A ma connaissance, il ne se fait aucune vente de porte à porte. Cela ne pourrait s'appliquer exactement au vendeur itinérant. Par contre, votre ministère semble exiger, depuis quelques mois, suivant une interprétation qui a été donnée par les légistes du ministère, un permis de vendeur de véhicules usagés aux concessionnaires qui vendent des maisons mobiles et qui, évidemment, revendent leurs produits au niveau des ventes d'articles neufs.

M. TETLEY: Cela, c'est clair.

M. DELISLE : Ce qui est plus particulier encore que les lois qui s'appliquent, c'est le financement des ventes de maisons mobiles, ce qui nous fait bien comprendre s'il s'agit d'une activité mobilière ou immobilière. Les maisons mobiles se vendent actuellement sous forme de vente conditionnelle financée par des compagnies de finance, des institutions financières bancaires et autres. Mais jamais sous forme de création, d'hypothèques. Parce que la maison mobile, au sens de nos lois, au sens de la loi 48 qui concerne l'évaluation, demeure un meuble et il est toujours possible, dans des délais très courts, de la démanteler et de l'apporter dans une autre région du Québec.

Ce qui fait qu'actuellement autant au niveau de la construction que de la vente et du financement de la maison mobile, on ne peut pas parler d'un marché immobilier. Il est peut-être analogue, similaire sous certaines de ces dernières activités, par exemple l'installation dans un parc — c'est un sujet sur lequel je reviendrai tout à l'heure — on peut peut-être l'assimiler à certaines activités immobilières, mais sa construction, sa vente et son financement, qui sont peut-être les trois étapes les plus importantes pour un bien dans lequel on vit, une habitation, ces trois étapes sont des étapes purement mobilières, tant au niveau de la manufacture, de la vente que du financement. Et elles sont considérées comme telles à ce jour par toutes les personnes qui oeuvrent dans ce domaine.

Quant à la maison sectionnelle, je voulais faire une distinction parce que c'est un peu différent. La maison sectionnelle la plus conventionnelle est la maison en deux parties qu'on voit sur deux camions, deux "floats" qui se promènent l'une après l'autre. Ces maisons sont réajustées, réinstallées sur le site. Evidemment, il y a peut-être une certaine activité qui demeure immobilière, on voit un peu la dernière étape de construction qui se fait sur le site de construction lui-même.

Mais la maison elle-même est complètement assemblée en usine, tant le toit, les murs, les planchers que la plomberie, l'électricité et même parfois les tapis, etc. La maison arrive et en quelques heures elle est presque prête à être habitée. Les seules étapes qui se font au lieu de construction sont le solage et d'autres activités connexes pour raccordement aux services municipaux.

Comme tels ce sont là les deux types d'activités que cette industrie recoupe.

On a parlé tout à l'heure de concessionnaires de maisons mobiles qui s'assimilaient beaucoup, pour fins de compréhension, aux vendeurs d'automobiles. Le représentant qui vend la maison sectionnelle est d'un type complètement différent. Généralement, il vend la maison sectionnelle pour l'industrie, il la vend à la commission et tomberait, semble-t-il, sous le coup de la définition du courtier en immeubles. C'est évidemment un des points qui nous inquiètent le plus.

Dire demain que tout le domaine de la mise en marché de la maison sectionnelle, modulaire ou autre — appelons-la comme on voudra — sera accordé uniquement à des courtiers en immeubles, c'est tuer immédiatement cette industrie dans l'oeuf. Il existe environ 200 représentants au Québec actuellement, au niveau de la maison sectionnelle seulement. Ces 200 représentants ne pourraient évidemment pas demain matin avoir les compétences, la qualification des courtiers en immeubles, tels qu'on les connaît et selon les qualifications que l'on trouve dans la réglementation actuelle.

C'est évidemment ce qui inquiète encore plus la partie de l'industrie qui construit des maisons sectionnelles actuellement.

M.TETLEY: Pardon, Me Delisle. Vos 200 vendeurs par toute la province, est-ce qu'ils vendent aux commerçants ou directement au grand public?

M. DELISLE: Là, nous parlons des vendeurs

de maisons sectionnelles. Ils vendent soit au public, soit à d'autres constructeurs, mais généralement directement au public.

M. TETLEY: Est-ce qu'ils vendent le terrain aussi?

M. DELISLE: Souvent ils vendent le terrain, et sous ce chef ils tombent sous le coup de la Loi des activités immobilières sans aucun problème. Mais comme représentants de l'industrie, comme, par exemple, intermédiaires entre l'industrie et le consommateur ultime pour le bien lui-même qui est la maison, c'est cette maison qui nous importe, ce n'est pas son installation nécessairement sur le site. Cette activité n'est pas une activité immobilière.

Mais s'il vend, s'il fait lui-même un lotissement, s'il érige lui-même les fondations, il devient constructeur sous ce chef, il devrait avoir un permis de constructeur et l'Association des constructeurs d'habitations ferait ses représentations là-dessus. Ce n'est pas son activité immobilière de constructeur, si c'est ce qu'il fait, qui nous importe actuellement, mais plutôt la partie représentant l'hypothèse où il ne vendrait qu'à un autre constructeur à titre de représentant. Représentant, par exemple, pour la région de Québec, qui vendrait à telle entreprise de construction une maison préfabriquée alors qu'il n'en est jamais propriétaire. Au sens strict, il deviendrait, semble-t-il d'après la loi, courtier en immeubles.

Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il est clair, à notre avis, que la mise en marché, la construction du produit qu'on vient de préciser est une activité mobilière.

C'est donc une exception très importante dont on ne peut pas voir tous les effets actuellement d'en faire une activité immobilière au sens de cette nouvelle loi.

M. TETLEY: Pardon, parmi vos membres, avez-vous des compagnies qui vendent non pas des maisons préfabriquées, mais toutes sortes de pièces de bois qu'on rassemble pour construire un chalet etc? Est-ce que ces personnes sont membres de votre association?

M. DELISLE: On me dit que non, M. le ministre.

M. TETLEY: Parce que nous avons des plaintes de ces compagnies, plutôt que de votre industrie jusqu'ici. Je viens de causer avec le surintendant de notre service et notre devoir ici au gouvernement, c'est de régler les problèmes, non pas d'en créer. D'autre part, votre industrie est très jeune et ça ne veut pas dire que nous n'aurons pas de plaintes.

M. DELISLE: Evidemment, c'est un point sur lequel j'entendais revenir tout à l'heure. Tout les produits dont on parle, maisons mobiles, maisons préfabriquées ou autres, sont actuellement construits suivant les normes de la Société centrale d'hypothèques et de logement et vérifiées en usine, ce qui est beaucoup plus facile que des vérifications sur les lieux de construction, comme pour la maison conventionnelle. Il existe aussi actuellement des normes du comité canadien de normalisation, ce que l'on appelle les normes CSA, auxquelles adhèrent tous les manufacturiers qui sont membres de l'association que je représente aujourd'hui. Ces normes-là sont très strictes et très rigides et c'est un deuxième contrôle qui s'applique dans les usines.

Les industries représentées ici ne fabriquent aucun autre produit —du moins, si elles en mettent en marché, ce sont d'autres produits complètement distincts concernant l'habitation — que des maisons complètes fabriquées en usine et prêtes pour installation sur le terrain qu'elles soient préfabriquées, mobiles, modulaires ou autres. Il peut s'agir de motels ou même d'industries. Il y a même une école qui vient d'être construite sous forme de modules. Ce sont toutes des unités préfabriquées complètement en usine et prêtes pour l'installation.

J'en venais, tout à l'heure, à la contradiction entre plusieurs lois. Il y a d'abord le bill 48 qui, après les représentations des deux associations que je représente, a été amendé pour faire définitivement de la maison mobile en particulier un bien immobilier. J'ai donc crainte ici qu'il n'y ait contradiction entre ces deux lois. Il y a aussi la Loi sur la taxe de vente — c'est une des représentations qu'on fait depuis plusieurs années — qui s'applique in extenso à la vente de la maison préfabriquée et de la maison mobile, parce qu'elle est fabriquée en usine et, donc, un produit fini.

Alors, c'est 8 p.c. sur des ventes qui représentent actuellement $200 à $225 millions au Québec. C'est déjà une charge très lourde au niveau fiscal pour ces industries-là. Il y a ensuite la Loi de la protection du consommateur. Je n'insisterai pas sur celle-là. Je pense bien que les membres de la commission connaissent les termes de la Loi de la protection du consommateur, ses permis, ses contrôles au niveau des contrats, et au niveau du financement.

Il y a, enfin, toutes les réglementations municipales où on exige déjà des permis municipaux d'installation, des permis de taxes d'affaires à toutes ces industries-là. Il y a, donc, en général, une prolifération de permis et de contrôles qui, à notre avis, n'ajoutent rien à la vente du produit en question.

Il y a, deuxièmement, un danger, celui qu'à long terme la vente et la mise en marché de ces produits-là ne soient confiées à des courtiers en immeuble. Ce n'est évidemment pas l'objet de la loi actuelle, mais on peut facilement prévoir une évolution dans la loi et des contrôles de plus en plus précis de la mise en marché des habitations en général. Il y a risque, à long terme, que les maisons mobiles, les maisons préfabriquées et, en général, les maisons ou les

habitations fabriquées en usine ne soient contrôlées par des personnes qu'on appellerait courtiers en immeubles ou autrement et qui sont plutôt spécialisées dans le financement par hypothèques, etc. Evidemment, pour une industrie, la perte de sa mise en marché, c'est une solution qui est inacceptable.

C'est une crainte plutôt qu'une réalité.

M. TETLEY: Lorsqu'une maison mobile est vendue, disons, à quelqu'un de Chicoutimi, qui l'installe sur son terrain avec des fondations — je parle non pas d'une maison préfabriquée, mais d'une vraie maison mobile comme celles que je vois sur les grandes routes — pour la revendre, est-ce que, selon vous, il faut un courtier en immeubles? Est-ce un courtier en immeubles qui doit la revendre?

M. DELISLE: II y a une querelle chez les avocats au niveau du caractère immobilier, par nature ou par destination, des maisons mobiles. Mon opinion personnelle — il semble que c'était celle du ministère des Affaires municipales lorsqu'il a adopté le bill 48 — c'est qu'elle demeure toujours un meuble. Elle peut être immeuble par destination si vous l'immobilisez suffisamment, par exemple par un solage en ciment, mais elle demeure toujours un immeuble par destination qu'on peut enlever. C'est la différence avec un immeuble par nature. Si on prend la question de financement comme critère d'application du jeu du courtage, le créancier hypothécaire ne prêtera pas, même si elle est installée sur un solage de ciment parce qu'elle peut être trop facilement levée.

Cela demeure un meuble qu'on a immobilisé pour les fins du code civil et certaines lois des saisies, etc., où on le considère comme un immeuble par destination, mais vous n'avez pas, actuellement, de prêt hypothécaire sur les maisons mobiles. La Société centrale d'hypothèques et de logement fait certaines expériences types en Ontario et dans le nord de Montréal actuellement pour financer des aménagements de parcs de maisons mobiles, mais à ma connaissance, il s'agit encore de financement personnel, et non pas hypothécaire réel, sur la chose elle-même.

D'ailleurs, les termes de financement sont beaucoup plus courts; on a dix, douze et même jusqu'à quinze ans, il n'est pas question d'aller jusqu'à vingt ou vingt-cinq ans. Je parle seulement de la maison mobile.

Le troisième point qui inquiète beaucoup les membres de l'association, ce sont les compétences, les connaissances des personnes qui oeuvrent dans la fabrication et dans la mise en marché des maisons mobiles et des maisons préfabriquées. Découlant de ce qu'on a dit tout à l'heure, qu'il s'agissait d'une activité purement manufacturière, on comprend facilement que les compétences et les connaissances sont loin d'être les mêmes, c'est une arme à deux tranchants. D'abord, on ne voudrait pas que des personnes incompétentes et n'ayant pas les connaissances manufacturières s'introduisent, par le biais de cette loi, dans la mise en marché; deuxièmement, on ne voudrait pas non plus qu'au niveau des permis de constructeur, de commerçant et de courtier on exige des manufacturiers, des détaillants et des représentants de maisons mobiles et de maisons sectionnelles, des connaissances qu'ils n'ont pas et dont ils n'ont pas besoin, eu égard à la qualité et à la nature du produit qu'ils vendent. Ici, il y a un risque très clair.

Prolifération des permis, je l'ai mentionné tout à l'heure. Réglementation interne. Je rappelle que les normes du Comité canadien de standardisation, les normes qu'on appelle, nous, Z-240 et qui ont déjà été exposées au gouvernement, au comité interministériel sur la sécurité, les normes de construction de la Société centrale d'hypothèques et de logement sont toutes appliquées en usine, ce qui garantit beaucoup plus la qualité de construction et qui protège beaucoup plus le consommateur. Le produit est complètement assemblé en usine, on peut vérifier la qualité, on peut vérifier les produits qui y entrent et surtout, on a une température, à l'intérieur de l'usine, qui permet un travail de meilleure qualité à longueur d'année.

M. LAVOIE (Wolfe): M. le Président, concernant la maison mobile ou la roulotte importée des Etats-Unis, est-ce qu'elle est aussi inspectée au Canada?

M. DELISLE: Actuellement, elle ne l'est pas.

M. LAVOIE (Wolfe): ... pour répondre aux normes?

M.DELISLE: Actuellement, la maison mobile importée des Etats-Unis n'est pas inspectée au Canada et l'association a demandé justement au comité interministériel d'exiger que les normes canadiennes s'appliquent à toute maison mobile vendue au Québec. On est allé beaucoup plus loin, d'après moi, que l'effet que pourrait avoir l'émission de permis ici. D'ailleurs, tous les manufacturiers québécois adhèrent volontairement à ce code. On voudrait le rendre obligatoire comme il l'est actuellement dans certaines autres provinces canadiennes, qu'il devienne obligatoire partout, que ce soit au niveau du contrôle des installations électriques, de plomberie, du gaz, etc., de la qualité de la protection contre l'incendie, de la durabilité des matériaux. On voudrait que ces normes soient obligatoires au Québec pour toute roulotte ou maison mobile, qu'elle soit exportée, importée, d'où qu'elle vienne; aussitôt qu'elle serait vendue ou installée dans un parc ou sur un terrain privé, ces maisons-là devraient avoir une étiquette les identifiant comme répondant aux normes minimums de sécurité.

Je suis content que vous posiez la question. Il y a une anecdote très drôle qu'on raconte au

comité sur la sécurité. Des roulottes avaient été vendues, provenant des Etats-Unis, et le gars ne pouvait même pas remplacer les fusibles parce qu'ils n'étaient pas de la même grosseur que ceux qui sont vendus ici au Québec. On voit tout de suite un problème au niveau du consommateur. Celui qui avait ce type de maison-là ne pouvait même pas remplacer le fusible qui venait de sauter dans son circuit électrique, il devait le faire venir de New-York. Déjà, ce sont des situations inacceptables. Si c'est vrai au niveau des fusibles, c'est encore plus vrai au niveau du chauffage; on connaît le climat ici au Québec.

M. LAVOIE (Wolfe): Au point de vue de l'isolation, il y a toute une différence.

M.DELISLE: La section II du mémoire parle de l'analyse particulière du projet de loi vue à la lumière des manufacturiers de maisons préfabriquées et de maisons mobiles. Evidemment, ce sont des choses qui sont déjà dans la loi et on voit le contrôle un peu absolu qui en proviendrait. Il y a l'obligation pour tout le monde d'obtenir des permis; je pense qu'il n'est pas nécessaire d'insister. Le constructeur de maisons mobiles, de maisons préfabriquées, si la loi s'applique, doit détenir un permis de commerçant, le détaillant aussi; le représentant, dont on a expliqué le rôle tout à l'heure, devra en détenir un de courtier. Tous ces permis, ce sont de nouveaux permis.

Les réglementations que le lieutenant-gouverneur en conseil peut appliquer sont très importantes et vont très loin. On parle de la qualité requise pour détenir les permis. On pourrait donc, à l'absurde, réglementer qui pourra et ne pourra pas construire des maisons mobiles ou des maisons préfabriquées au Québec, cela va très loin.

On peut réglementer les autres occupations que peuvent détenir ces personnes. On sait actuellement que l'industrie de la maison mobile construit aussi des roulottes de voyage, qui sont très différentes de la maison d'habitation et que vous ne voulez pas réglementer. Interdi-ra-t-on la vente aux détaillants qui vendent déjà des maisons d'autres types, entre autres le véhicule récréatif? Ce sont toutes des questions que nous nous posons.

Il y a aussi la possibilité de réglementer les normes relatives à la publicité. Vous comprendrez facilement que, si on voit l'importance de réglementer la publicité au niveau des constructeurs de maisons ordinaires, on la voit difficilement en matière d'industrie manufacturière. Les normes de publicité, au niveau de la manufacture ou au niveau des détaillants, ne nous semblent pas une question importante pour la protection du consommateur comme tel puisqu'il s'agit d'un produit déjà préétabli, qui est fabriqué en usine, sur lequel le détaillant n'a plus aucun contrôle.

Evidemment, c'est un risque d'ingérence très important dans la mise en marché encore une fois. Il y a aussi la question de la maison modèle, que je n'ai pas encore soulevée, et je pense bien que les constructeurs d'habitations conventionnelles feront eux-mêmes leur propre représentation. Quant à nous, nous croyons que l'application de cet article risque de faire double emploi, encore là, avec l'Office de la protection du consommateur qui, lui aussi, prévoit le contenu des contrats et spécialement les garanties que les détaillants doivent donner au consommateur. Donc, double emploi, d'abord, comme pour la plupart des articles et, deuxièmement, risque de contradictions et risque d'augmentation des coûts au consommateur par l'obligation d'avoir des devis complets d'une chose qui est usinée parfois à 100 ou 200 milles du lieu où on la vend et où il peut y avoir des changements au niveau, par exemple, de l'utilisation de telle fenêtre par rapport à telle autre. On imagine facilement, au niveau des fournisseurs de ces manufactures, les changements qui peuvent intervenir. Alors, augmentation des coûts pour tenir à jour des devis qu'on remettrait à tous les consommateurs d'un produit usiné, comprenant toutes les modifications qui y seront faites au fur et à mesure de la production.

Nous croyons qu'imposer des coûts, des contrôles et une obligation aussi forte aux manufacturiers ne vaut pas la chandelle par rapport à la qualité ou à la protection additionnelle qu'on donnerait au consommateur et qu'il a déjà en vertu de la Loi de la protection du consommateur.

Un autre exemple du caractère inquiétant de cette loi pour notre industrie, les livres, les registres et les comptes que doivent détenir tous les détenteurs de permis. Imagine-t-on un manufacturier, comme la maison Désourdy ou la maison Latendresse, être obligé de tenir un registre spécial de chacune des transactions qu'il fait, comme industrie, par le biais de ses représentants ou même directement avec le gouvernement ou d'autres? Par exemple, la ville de Fermont est actuellement construite selon un seul contrat; est-ce qu'on va faire un registre particulier pour chaque maison qui sera installée là-bas? On voit ici encore, sur ces questions de livres et registres, de comptes en fiducie qu'on doit détenir, que la chose est tout à fait inapplicable en ce qui nous concerne.

Les contrôles aussi...

M.TETLEY: Lorsque vous parlez de "nous", vous parlez des maisons mobiles ainsi que des maisons préfabriquées?

M. DELISLE: Oui. Du moins la manufactu-ration des maisons préfabriquées. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a la commercialisation. Si un constructeur a acheté une unité d'une industrie de maisons préfabriquées, le fait qu'il l'installe, vende des lots et érige des solages en ciment ou fasse quelque chose de conventionnel, qui est similaire aux autres constructions de maisons conventionnelles, c'est évident que

cette activité est une activité immobilière et nous ne pouvons pas l'empêcher.

C'est clair que le constructeur' qui aura à la fois le rôle de représentant et de constructeur devra détenir un permis de constructeur. Nous ne le nions pas. Nous disons que l'activité entre la manufacture et ce type, ou lui-même à titre de représentant vis-à-vis d'un autre consommateur, n'est pas une activité immobilière qui devrait être régie par cette loi. C'est la distinction que nous faisons.

Il y a un dernier point que nous n'avons pas encore touché — il concerne plus particulièrement les détaillants de maisons mobiles, ce qu'on appelle les concessionnaires de maisons mobiles — c'est la question du lotissement dans les parcs de maisons mobiles. Ce problème est exposé aux pages 10 et suivantes du mémoire. L'obligation qu'on retrouve aux articles 22 et suivants de faire une brochure pour la location — parce que, nous, c'est la location de lots qui nous intéresse — et, deuxièmement, celle de cadastrer et d'avoir une subdivision inscrite sur le cadastre pour chacun des lots qui seront offerts au public dans le cadre des parcs de maisons mobiles nous semblent absolument inacceptables et rendront impossible tout développement de maisons mobiles pour la raison suivante, qui est simple d'ailleurs: Le ministère des Affaires municipales prévoit actuellement une nouvelle loi concernant l'urbanisme. On ne sait pas ce qu'il y aura dedans mais les lois actuelles sur le lotissement prévoient que les municipalités ont discrétion d'établir des règlements de lotissement qui définissent les superficies minimales des lots, la largeur des rues, etc. Je n'insiste pas, je suis sûr que vous connaissez ces dispositions.

Les parcs de maisons mobiles sont généralement, pour les maisons mobiles, le principal débouché, celui qu'on accepte le plus, l'industrie comme telle ne favorisent pas l'installation individuelle de maisons mobiles dans toutes les municipalités. Cela déprécie souvent l'ensemble des valeurs. Nous préconisons l'installation, le regroupement dans des lotissements de maisons mobiles. Pour 99 p.c. de ces lotissements, actuellement, il s'agit de terrains loués au mois sur une base de tant, incluant tous les services: déneigement, éclairage, aqueduc, égout, services, d'ailleurs, qui sont tous donnés par le propriétaire du parc. Ces lotissements sont faits sous forme de location. S'il nous fallait, demain, lotir ces terrains, les municipalités refuseraient évidemment et directement le lotissement pour plusieurs raisons, la première étant, par exemple, la superficie du lot occupé. Etant donné que c'est un regroupement communautaire, les superficies des lots sont beaucoup moindres. J'ai mentionné dans le mémoire 3,500 pieds carrés, et c'est généralement le maximum que les municipalités ont exigé jusqu'ici dans les parcs de maisons mobiles. Mettons même jusqu'à 4,000 ou 5,000 pieds carrés. C'est déjà beaucoup moins que les 8,000, 9,000 et même souvent les 10,000 pieds carrés qu'on exige pour des maisons conventionnelles.

La raison en est que beaucoup de services publics sont donnés. On exige des parcs dans un lotissement de maisons mobiles. On exige des rues. On exige des espaces verts. Ces espaces sont à l'avantage de tout le monde. Exiger le lotissement, par exemple, à 4,000 ou 5,000 pieds carrés d'un terrain nous semble une dépense inutile, parce que si jamais le terrain doit être réutilisé, il aura été mal loti. Un lotissement à 4,000 ou 5,000 pieds carrés ne peut servir à autre chose qu'à une location pour maisons mobiles, sans quoi il n'a aucune utilité.

Deuxièmement, il risque fort d'être refusé par la municipalité, ne répondant pas à des normes de lotissement. Toutes les municipalités du Québec ont de tels règlements qui interdiront indéfiniment le lotissement pour des terrains qui sont plus petits que ceux qu'on a prévus pour les maisons conventionnelles. Il y a la question des rues aussi à l'intérieur des lotissements. Les municipalités qui acceptent des lotissements exigent généralement, pour que les rues soient municipalisées, que les normes de leurs rues soient toutes satisfaites. C'est un problème qu'on n'a pas connu encore parce que les propriétaires qui vendaient ou qui louaient des terrains sur leur propre propriété, avec leurs propres rues privées, n'étaient pas obligés de lotir. Obligation qui proviendrait maintenant de la loi et qui risque de créer de graves ennuis à ceux qui exploitent ou qui voudront exploiter à l'avenir des parcs de maisons mobiles.

Encore là, il faut se rappeler que c'est un des principaux débouchés de l'industrie, les parcs de maisons mobiles, et on risque de venir en opposition directe avec la maison conventionnelle, les normes de lotissement pour ces maisons, les normes de services publics. Est-ce que les municipalités, si on lotit, exigeront qu'on soit raccordé directement aux services publics, puis on les refusera parce qu'il s'agit d'un terrain privé? On voit tout de suite que même au niveau du lotissement du parc de maisons mobiles qui est loué au mois, il y a un conflit direct. Conflit qui existe d'ailleurs déjà avec les municipalités et qu'on essaie de régler par la loi no 48 en permettant des taxes, des arrangements à l'amiable, mais conflits qu'il ne faut pas empirer par l'obligation de se présenter comme propriétaire de parc et d'offrir un lotissement qui est à sa face même inacceptable.

Nos conclusions, aux pages 13 et suivantes du mémoire, sont très simples. La principale conclusion et recommandation, c'est que l'article 2 a), d'où, à notre avis, proviennent tous nos ennuis, soit retiré du texte, de façon à éviter que les activités manufacturières que nous représentons et qui sont faites par les industries en question soient astreintes à un système de contrôle qui est purement immobilier et qui n'est probablement pas adapté à ces besoins.

Maintenant, à défaut de l'acceptation par

votre commission de cette recommandation générale ...

M. TETLEY: Vous avez deux recommandations. Une au sujet des maisons mobiles et l'autre au sujet des maisons préfabriquées. Vous voudriez que les deux soient exemptées.

M.DELISLE: Oui. La recommandation générale concerne et la maison mobile et la maison préfabriquée. A défaut d'accepter cette recommandation — nous espérons que nous ne serons pas dans cette situation — nous demandons à la commission d'au moins respecter les droits acquis et le caractère particulier de cette industrie. Si jamais il fallait quand même être astreints à la loi, nous demanderions qu'on émette des permis particuliers, qu'on ne prévoie pas seulement des conditions particulières d'un permis général — par exemple, de courtier ou de commerçant —mais qu'on prévoie un permis qui identifierait les personnes qui oeuvrent dans ce domaine. Cela pour éviter que, dans des modifications ou réglementations futures, on publie, à un moment donné, que lorsqu'on parlait d'un courtier en immeuble, on avait aussi un représentant qui vendait des maisons préfabriquées ou modulaires, on oublie que lorsqu'on parle d'un commerçant en activité immobilière, la personne qui, dans l'idée de tous, est un vendeur de maisons ou un constructeur de maisons, cela couvre aussi un détaillant de maisons mobiles qui est un concessionnaire du type vendeur d'automobiles.

Ce sont des choses dont nous nous souvenons aujourd'hui, mais que nous pouvons oublier dans un an, dans deux ans et arriver avec des normes tellement strictes ou même à des normes qui ne sont pas adaptées à ses besoins et qui rendent impossible la continuation de son commerce.

Qu'on respecte aussi — c'est la recommandation no 3 — les droits acquis des personnes qui construisent, vendent ou autrement font le commerce des biens mobiliers, soit de la maison mobile ou de la maison préfabriquée.

A l'article 1 d), qui définit le courtier en immeubles, qu'on exclue définitivement celui qui vend pour autrui et contre rémunération des maisons mobiles et des maisons préfabriquées. Même si on exige, pour ces personnes, un permis, que ce ne soit, en aucun cas, un permis de courtier pour éviter que la mise en marché du produit ne soit affectée de la façon exposée tout à l'heure.

M. TETLEY: Est-ce que vous me le permettez?

M. DELISLE: Oui.

M. TETLEY: Au sujet de l'article 1 d), avez-vous négocié ou parlé à l'Association des courtiers en immeubles de ce problème? Est-ce qu'il y a eu des discussions au sujet de la vente des maisons préfabriquées?

M. DELISLE: Nous-mêmes, nous n'avons eu aucune discussion avec eux.

Alors, la recommandation no 5, que l'article 20 ne s'applique en aucun cas au lotissement et à la location de lots servant à l'installation de maisons mobiles (parcs de maisons mobiles). Alors, qu'une exemption générale soit donnée pour le prospectus, pour l'obligation de lotir et, en général, pour les obligations prévues aux articles 20 et suivants de la section IV, en ce qui concerne la location de terrains qui ne servent qu'à des fins de parcs de maisons mobiles, de façon à éviter que, tant et aussi longtemps que nos lois municipales ne seront pas ajustées, on restreigne de façon certaine cette utilisation qui est le seul débouché acceptable au Québec de toutes les industries de maisons mobiles. Il ne faut pas se leurrer; on ne peut pas vendre, demain matin, l'idée aux municipalités de laisser installer des roulottes un peu partout sur leur territoire, chacun dans son coin. La seule idée qu'on peut préconiser, c'est de les grouper. Il faut favoriser, de toutes les façons possibles, ces groupements.

En ce qui concerne les articles 23 et 24 sur l'obligation de donner les plans et devis au consommateur, encore là, nous demandons qu'une exception générale soit faite dans le cas de la maison mobile et de la maison préfabriquée pour les raisons exposées tout à l'heure.

La recommandation no 7 est plus précise. On demande que si le projet de loi 32 oblige tant le constructeur que le vendeur de maisons mobiles et de maisons préfabriquées à détenir un permis, ces derniers soient exemptés de détenir des permis en vertu de la Loi des véhicules automobiles et de la Loi de la protection du consommateur. En fait, on demande au gouvernement, en général, et non pas seulement à votre commission de faire un effort pour coordonner son activité et son intervention dans les industries de vente et de manufacture de notre produit. On ne veut pas détenir des permis de tous les côtés et se conformer aux normes de tous les ministères. On s'en plaint déjà depuis plusieurs années. Là encore, il s'agirait d'un permis plus général et avec des contrôles beaucoup plus précis. Si jamais la première recommandation est refusée et que vous jugez quand même bon de rendre applicable le projet de loi 32 à notre industrie, nous demandons au moins, d'être exemptés de détenir des permis en vertu d'autres lois. Si on est pour avoir une activité immobilière, qu'on l'ait jusqu'au bout. Si on a une activité mobilière, qu'on l'ait jusqu'au bout.

Dans la dernière recommandation — c'est une recommandation omnibus; c'est un mot à la mode — nous demandons d'être consultés si jamais la loi s'applique à nous, pour la réglementation. Etant donné le caractère particulier de nos activités, si la loi s'y applique, il faudra nécessairement une consultation très précise et très étroite pour éviter que des fonctionnaires ou des personnes qui connaissent plus particulièrement le domaine réellement immobilier ne

viennent appliquer à un domaine mobilier dos normes qui sont inacceptables et qui risqueraient d'étouffer toute cette industrie.

Ce n'est pas le fait de détenir un permis qui nous inquiète ou le fait d'avoir tel ou tel contrôle. On en a déjà et de nombreux. C'est ce qu'on peut faire avec ces permis, avec ces contrôles qui étouffent toute une industrie, un peu comme c'est arrivé concernant la Loi de l'évaluation foncière, première version, qui a créé un problème très important à toute l'industrie de la maison mobile.

Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, j'ai ici des présidents et des représentants de manufactures, tant de maisons mobiles que de maisons préfabriquées. Ils sont là pour répondre aux questions techniques. Il me fera plaisir, personnellement, de répondre à des questions concernant la présentation du mémoire.

M.. TETLEY: Lors de votre présentation, j'ai demandé â un de mes adjoints de vérifier le nombre de plaintes à l'Office de la protection du consommateur au sujet des maisons mobiles. Je vous ai déjà dit qu'il n'y avait pas de plaintes au service immobilier au sujet des maisons préfabriquées. On m'avise qu'au Québec, il y avait 60 plaintes au sujet des maisons mobiles. Les plaintes sont les suivantes: objet non conforme à celui présenté dans le contrat; construction défectueuse; mauvais service après la vente; aucune garantie et les dépenses sont à la charge de l'acheteur.

J'ajoute que souvent, les plaintes ne sont pas valables. Je ne dis pas que ces 60 plaintes sont valables ou ne sont pas valables, mais je voudrais noter qu'il y a quand même des plaintes au sujet des maisons mobiles.

D'autre part, peut-être avez-vous raison que cela doit être inscrit dans le bill 45 plutôt que dans le bill 32. Je suis certain qu'on peut arriver à un compromis ou à une solution du problème sans créer de la confusion et sans créer d'autres problèmes que vous avez soulevés ce matin.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, j'ai entendu le commentaire du ministre. Si on me permet un commentaire, moi non plus je ne suis pas certain, après avoir entendu la représentation, qu'on doive légiférer pour la question des maisons mobiles et des maisons préfabriquées à l'intérieur de cette loi no 32. Si on tient compte de tout ce que vous avez mentionné — il y a également la Loi de l'urbanisme, qui est en préparation, et la loi 45, étant donné qu'elles sont similaires — seul le constructeur et celui qui installe les maisons et qui construit les solages et ainsi de suite, qui en fait une spécialité, devront probablement avoir un permis.

M. DELISLE: II demeure constructeur, de toute façon.

M. CLOUTIER (Montmagny): II demeure constructeur.

M. DELISLE: C'est généralement une entreprise de construction qui, de toute façon, détiendra un permis.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'autre part, évidemment, c'est une industrie qui est relativement nouvelle, surtout dans le secteur des maisons préfabriquées. Dans le secteur des maisons mobiles, cela fait un peu plus longtemps. Je pense que l'affirmation que vous avez faite est importante aussi, étant donné que je ne suis pas impressionné, disons, par le nombre de plaintes par rapport aux chiffres que vous avez donnés du commerce qui se fait, de la construction qui se fait dans ce secteur.

M. DELISLE: II s'en construit 4,000 au Québec. Maintenant, il y a aussi de la roulotte américaine qui est importée au Québec.

M. CLOUTIER (Montmagny): Alors on ne peut pas dire que, véritablement, il y a une levée de boucliers de la part des consommateurs et des acheteurs de maisons. Il peut arriver qu'il y ait des cas, évidemment. C'est peut-être autant attribuable au concessionnaire ou à celui qui était l'intermédiaire entre l'acheteur, et pas particulièrement le constructeur, dans certains cas.

D'autre part, je voudrais vous poser une question. Ceux qui fabriquent des usines préfabriquées, font-ils aussi partie de votre association? Est-ce que ce sont les mêmes constructeurs qui fabriquent les usines?

M. DELISLE: En fait, on ne voudrait pas dire qu'il n'y a pas d'autres constructeurs qui font des usines en usine, c'est ce que vous voulez dire, des usines préfabriquées.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui. Des usines fabriquées en usine.

M. DELISLE: Mais les manufacturiers que nous représentons font de ces usines. Ils font aussi des écoles. En fait, l'expression "modulaire" s'applique à tout type de construction qui peut être préfabriquée en usine.

M. CLOUTIER (Montmagny): Les normes de la Société centrale d'hypothèques et de logement, est-ce que ça sont des normes canadiennes?

M. DELISLE: Les normes de la Société centrale d'hypothèques et de logement? C'est le code national du bâtiment et les normes en général qu'il applique pour les constructions de maisons conventionnelles sur le site, sauf que là, elles sont appliquées en usine et il y a des contrôles plus rigoureux, du fait que les usines sont centralisées. On produit, par exemple, 100, 200, 2,000 maisons à tel endroit. Evidemment,

c'est beaucoup plus facile de contrôler la production moyenne, de contrôler la qualité des matériaux.

En ce qui concerne le Comité canadien de normalisation, c'est la qualité des matériaux qui est prévérifiée par le Comité canadien de normalisation. Par exemple, pour faire des panneaux de bois préfinis, dans les maisons mobiles, ces panneaux doivent avoir telle norme de résistance au feu, etc., de qualité, de portée. Ils doivent nécessairement répondre aux normes. Les normes sont préétablies et le produit doit être accepté, auparavant, par le Comité canadien de normalisation, avant même d'être installé dans la maison mobile. Cela veut dire qu'il y a une double protection, tant de la Société centrale, avec ses normes de construction — elle pense plutôt à la construction sur le site et cela s'applique surtout aux maisons modulaires et préfabriquées — que du Comité canadien de normalisation, qui s'applique beaucoup plus aux maisons mobiles et à la qualité des matériaux utilisés pour le système électrique, le système de gaz, etc., là où il y a du gaz, le bois, la portée, le système de transport, etc.

En général, tous les aspects de la construction sont réglementés et toutes les industries que nous représentons — et c'est 99 p.c. de la production au Québec — adhèrent volontairement actuellement au code. Et nous avons même demandé il y a environ six mois au gouvernement de rendre obligatoire ce code de construction, qui nous semble donner beaucoup plus de garanties au consommateur ultime que l'émission de contrôles.

D'ailleurs, tout à l'heure, la référence de M. le ministre à quelque 60 plaintes qu'ils auraient reçues..

M. TETLEY: Je parle du bureau à Québec, pas le bureau à Montréal.

M. DELISLE: Je voulais simplement dire que cette référence pointe du doigt un problème qui se créerait parce que des maisons mobiles actuellement vendues sont importées des Etats-Unis ou d'autres provinces canadiennes. Qu'advientra-t-il des contrôles au niveau des constructeurs pour ces produits-là? Nous proposons, nous, une norme unique de construction et de mise en marché, alors que le contrôle qui est prévu ici est pour les industries québécoises, et non pas toutes les industries. On ne peut pas exiger un permis d'une industrie américaine. Ce produit, finalement, ne sera pas contrôlé.

On aura donc deux types de maisons qui seront vendues. On aura une situation, d'après moi, pire que celle qu'on a actuellement.

M. CLOUTIER (Montmagny): Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.

M. LATULIPPE: Parallèlement au problème soulevé à l'article 2 a), vous avez mentionné la question des courtiers. Vous ne voulez pas que vos vendeurs deviennent courtiers. Quelles seraient pour vous les conséquences, si effectivement le bill 32 retenait cette note et demandait à vos vendeurs de devenir courtiers?

M. DELISLE: Selon les informations que j'ai obtenues de l'industrie de la maison préfabriquée, qui est directement touchée par cette fonction de courtier, il y aurait 200 représentants actuellement et presque les 200 ne pourraient pas agir demain matin. Ils n'ont pas nécessairement la 10e année, le cours de deux ans, ils n'ont pas l'expérience voulue. On exige par exemple deux ans d'expérience dans le domaine immobilier. Or, ces gens, pour la plupart, ne font pas d'activités immobilières; comment voulez-vous qu'ils puissent obtenir les permis de courtiers?

On exige une résidence au Québec, on exige d'un courtier qu'il n'ait aucune autre activité. Le vendeur de maisons mobiles vend des véhicules récréatifs, il vend toutes sortes d'autres choses. Il peut même avoir d'autres activités, ça peut être une activité à temps partiel. Comment pourra-t-il demain continuer son commerce si on exige de lui qu'il ait résidence au Québec, qu'il ait 21 ans, qu'il puisse établir sa compétence, sa solvabilité, qu'il ait une connaissance du courtage immobilier? On sait ce que c'est de connaître le courtage immobilier, c'est connaî tre entre autres tout le domaine des hypothèques, pour ne parler que de celui-là, qui ne s'applique pas du tout dans notre domaine et qui est très complexe.

Personnellement, je suis avocat, je pratique très peu dans le domaine et j'aurais des difficultés demain à passer un examen sur la question de toutes les hypohtèques, de tous les rachats, du financement de la Loi de la société d'habitation. Il y a tellement de prolifération de lois actuellement dans le domaine que ça prend des spécialistes pour travailler dans le domaine immobilier, ce qui est le but d'ailleurs de la loi ici. On veut que les gens qui travaillent dans le domaine immobilier connaissent bien les lois, les normes, les règlements, que les personnes qui proposent des financements à la Société d'habitation ou à la Société centrale d'hypothèques connaissent ce qu'ils font et qu'on ne fasse pas de fausses représentations au consommateur ultime.

J'ai l'impression que ça demande une très bonne compétence. Et la compétence devra être de plus en plus forte. Ce n'est pas la même malheureusement que ça prend pour vendre des maisons mobiles ou des maisons préfabriquées.

M. LATULIPPE: Donc, pour vous, vendre vos produits par l'entremise de maisons de courtage, c'est impensable.

M. DELISLE: Absolument.

M. LATULIPPE: Cela veut dire la fin de votre industrie.

M. DELISLE: Cela veut dire en tout cas que la mise en marché actuelle est complètement coupée. Imaginez-vous une industrie qui dépend de courtiers pour vendre son produit. Cela me semble personnellement une absurdité. Vous manufacturez, dans un point central au Québec ou dans deux ou trois usines, un produit et pour l'écouler vous passez automatiquement par un courtier. Quel intérêt le courtier a-t-il de vendre la maison préfabriquée de telle usine plutôt que de telle autre? Le courtier n'est jamais le représentant d'un constructeur, dans le sens qu'il n'est pas là pour vendre le produit même d'un constructeur d'habitations conventionnelles. Il est là pour relier les parties qui ont un contrat à faire dans le domaine immobilier, celui qui veut acheter, celui qui veut vendre, celui qui veut louer, semble-t-il, dans l'avenir. Cette personne représente, elle est mandataire.

Quelle sorte de mandataire serait-elle pour une industrie qui fabrique un produit en usine où il y a peut-être dix modèles de maisons, modèle 1, 2, 3 avec tel ajout, etc.? Quelle mise en marché cela peut-il faire?

M. LATULIPPE: Je vous remercie beaucoup. M. LE PRESIDENT: Le député de Wolfe.

M. LAVOIE (Wolfe): Me Delisle, tantôt vous parliez de regroupement des maisons mobiles dans des parcs. Est-ce que ça veut dire que vous seriez contre l'installation de maisons mobiles un peu partout, sur des fermes, comme en voit quand on passe sur la route? Y a-t-il une autre raison?

M. DELISLE : Nous ne sommes pas loin d'être contre. Si nous ne sommes pas contre, nous ne le favorisons pas du tout. Les représentations que nous avons faites depuis deux ans sont toujours formelles et dans le même sens. Nous voulons un regroupement de maisons mobiles, pour éviter les bidonvilles qui se sont créés un peu partout ou des installations individuelles qui souvent sont dangereuses.

Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas certaines formes d'installations individuelles qui ne sont pas acceptables. Tout dépend des endroits. Mais nous attendons beaucoup de la future loi d'urbanisme pour préciser ces questions, obtenir des mécanismes de consultation et l'application des normes dans toute la province de Québec.

Les problèmes de l'Abitibi, à ce niveau, ne sont pas les mêmes que ceux de la région de Montréal ou de la région de Québec. Il est possible qu'en Abitibi, dans certains coins, on permette des installations individuelles là où c'est urgent qu'on ait des habitations. Il ne faut pas oublier qu'on peut monter 200 maisons mobiles à Port-Cartier, dans le nord, ou en Abitibi ou à la baie James en très peu de temps, alors qu'on ne peut pas y ériger des maisons conventionnelles. Il faut aussi pouvoir régler ces problèmes individuels, mais d'une façon généra- le, l'association favorise le regroupement en lotissements.

M. LAVOIE (Wolfe): Avez-vous fini sur le sujet, M. Delisle?

M. DELISLE: Oui.

M. LAVOIE (Wolfe): Pour vendre une maison mobile, cela prend plusieurs permis: premièrement, cela prend un permis du ministère du Revenu; cela prend un permis du ministère des Transports, un bon de garantie à part cela, plus un permis du consommateur avec deux bons de garantie.

M. DELISLE: Là, cela prendrait un nouveau permis de commerçant en activités immobilières.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Au nom des membres de la commission, je désire remercier Me Delisle de la présentation de ce mémoire.

M. DELISLE: M. le Président, M. McDonald, qui représente l'industrie de la maison mobile, aimerait ajouter quelque chose à ce que j'ai dit tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT: D'accord.

M. McDONALD: Je ne voudrais pas répéter ce que M. Delisle a dit, mais j'aimerais insister sur la distinction qu'on doit faire entre les différents produits qui ont été mentionnés, pour vous montrer que la loi, en utilisant le terme général, maison mobile, peut apporter confusion.

La maison mobile telle que nous la connaissons, la maison mobile proprement dite — je ne voudrais pas qu'on prenne cela dans le sens péjoratif, mais l'allée de quilles, le module de douze pieds sur soixante pieds et plus ou quatorze pieds, etc. — peut être confondue avec ce qu'on pourrait appeler une roulotte de voyage. Certains manufacturiers, nous en particulier, fabriquons des roulottes de voyage, qui peuvent avoir 30, 32, 35 pieds de longueur. Elles peuvent être utilisées comme habitations, mais sont qualifiées de véhicules récréatifs et le sont effectivement. Première possibilité de confusion. Cependant, ces véhicules récréatifs sont vendus par des concessionnaires qui ont des permis dans le même genre d'activité qu'un concessionnaire d'une marque d'automobile. La maison mobile n'est vendue, au détail, que par des concessionnaires de ce genre.

J'ouvre immédiatement une parenthèse. Normalement, le bill prévoirait que toute transaction de maison mobile pourrait être assujettie à la loi et que la personne qui vend ou la personne légale, la personne physique devrait avoir un permis. Que faire des cas, par exemple, où une industrie comme la nôtre, comme cela s'est fait. dernièrement, vend au ministère des

Transports d'Ottawa, à la fois des bâtisses devant servir pour le contrôle du trafic aérien dans la baie James et, dans le même contrat, tout le logement pour le personnel du ministère des Transports qui dirige le centre de trafic aérien? Est-ce que nous devrons, comme manufacturiers, détenir un permis de courtier en immeubles pour réaliser ce contrat avec le ministère des Transports? Je vais parler d'une autre chose. Cela, c'était pour la maison mobile. Mais, pour la maison préfabriquée, M. Désourdy —cela a été mentionné tantôt — a exactement le même problème, alors que s'est vendu, par son industrie et ses collègues, un groupe considérable de maisons préfabriquées en usine à une compagnie minière pour y loger son personnel autour du concentrateur et de la mine. Est-ce qu'ils devront avoir un permis pour couvrir ces opérations?

Pour relever un point de M. Tetley, tantôt, je crois que vous vouliez aborder la question des chalets, etc. J'ai couvert la première partie qui concernait les maisons mobiles: un seul module de douze ou de quatorze pieds, sur différentes longueurs. La maison sectionnelle est constituée, en principe, de deux modules réunis ensemble sur un emplacement quelconque. Celle à laquelle vous faisiez allusion est la maison en panneaux.

Nous n'avons pas à l'heure actuelle, dans notre association, de manufacturiers de maisons ou de chalets en panneaux comme tels, nous ne les représentons pas dans notre association. Il y a une forte distinction à faire entre les deux premiers que j'ai mentionnés et ce troisième genre de manufacturiers.

L'autre cas sur lequel j'aimerais m'arrêter est le fait qu'une personne qui vendrait une maison mobile ne pourrait avoir d'autres activités commerciales. Je répète que je crois pouvoir prétendre que 95 p.c. des détaillants de maisons mobiles— je ne peux pas représenter ici la maison sectionnelle, ils ont un représentant qui peut le faire mieux que moi — qui achètent au gros d'un manufacturier vendent également le véhicule récréatif; souvent, ils vont détenir également une concession d'une marque d'automobile ou à la fois vont être dans le commerce de la motoneige ou dans le commerce de l'équipement de camping, ce qui veut dire qu'appliquer la loi telle qu'elle est rédigée actuellement demanderait un chambardement quasi complet, l'exception confirmant la règle, dans tout le système de mise en marché de la maison mobile.

Le dernier point sur lequel je voudrais insister est celui-ci: le comité sur la sécurité a reçu des représentations de notre association et de l'association des détaillants. On a insisté sur la volonté de l'industrie canadienne — je parle de l'industrie canadienne dans son ensemble —de se discipliner et d'adhérer à des normes de l'ACNOR, l'Association canadienne des normes ou CSA. Nous avons adopté des normes qui sont non seulement pour régir la construction des maisons mobiles avec tous les détails donnés par Me Delisle, mais ça a été poussé plus loin, nous avons la norme A-277 pour prévoir les normes de construction de maisons sectionnel-les ou modulaires, qui sont déjà régies et qui adhèrent déjà aux normes du code national d'habitation et de la Société centrale d'habitation.

Pour aller plus loin encore, l'ACNOR, dans son Z-240, est à terminer la rédaction de normes pour le développement de parcs de maisons mobiles, normes très sévères dont vous pouvez voir l'application dans un projet concret en Ontario et qui s'appelle Sandy Cove, près du lac Simcoe. L'industrie comme telle se discipline, cherche des normes pour protéger le consommateur, ce qui est le premier but, je crois. Son système de mise en marché, sa définition de la maison mobile, par les lois mêmes déjà adoptées qui la définissent comme étant un meuble, la soustraient, à notre avis, complètement du bill qui cherche à traiter des transactions immobilières.

J'aimerais dire, M. le ministre — cela a été dit au comité de sécurité — que j'oserais prétendre que parmi les 60 plaintes que vous avez au bureau de Québec, je serais très curieux de connaître la provenance de la fabrication des maisons sur lesquelles il y a eu plaintes de faites. Les industries québécoises qui, volontairement, adhèrent à Z-240, sont régies très sévèrement dans leurs normes de construction et sont souvent sujettes à des inspections des gens de l'ACNOR. Cependant, dans la province de Québec, je dirais que cette année plus de 600 maisons mobiles vont être vendues au détail, lesquelles sont des importations américaines qui ne sont pas construites selon les normes, dont quelques-unes vont adhérer au code de l'électricité. Ceci est surveillé assez étroitement quelquefois par les gens de l'Hydro-Québec.

Pour le reste, l'ensemble de la construction, la structure du châssis, la structure de la bâtisse, l'isolation mentionnée par monsieur, l'installation électrique, l'installation du gaz, etc., il serait intéressant de connaître le détail de ces statistiques. J'aimerais insister sur le fait que, s'il y a des normes à adopter pour protéger le consommateur québécois, j'aimerais — nous travaillons en ce sens — que la province de Québec, au même titre que l'Alberta, au même titre que la Colombie-Britannique maintenant et d'autres provinces, accepte le code Z-240; non seulement elle l'accepte mais elle exige que toute nouvelle maison mobile, je pousse plus loin, véhicule récréatif vendu dans la province de Québec soit selon les normes de Z-240.

Cela aurait pour effet non seulement de protéger le consommateur mais également d'assurer aux industries de la province proprement dite, qui ont pris la peine de se discipliner elles-mêmes, une part du marché qui va actuellement à des gens qui parce qu'ils ne construisent pas selon ces normes, peuvent faire une sorte de dumping à un prix beaucoup inférieur au prix de revient que nous pouvons avoir pour mettre ces maisons sur le...

J'insiste sur ce fait et j'apprécierais que votre commission... Je parle directement au ministre des Institutions financières, compagnies et coopératives et à vous, MM. les députés. Ce n'est peut-être pas ce que vous voulez atteindre par le bill qui est à l'étude actuellement mais j'aimerais que, lorsque l'on se présentera devant d'autres commissions parlementaires, lorsqu'on fera des représentations vis-à-vis des ministères pour ceci, on ait votre appui complet sur le sujet. Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. McDonald. Je désire aussi, au nom de tous les membres de la commission, remercier Me Pierre Delisle, qui a présenté le mémoire de l'Association des détaillants de maisons mobiles et roulottes du Québec Inc.

La commission suspend maintenant ses travaux jusqu'à 2 h 15 cet après-midi, même salle.

(Suspension de la séance à 12 h 6)

Reprise de la séance à 14 h 26

M. PICARD (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire des institutions financières, compagnies et coopératives continue l'étude du projet de loi no 32, Loi concernant les activités immobilières.

J'invite maintenant le porte-parole de la Chambre de commerce de la province de Québec, soit M. Gilles Champagne ou M. Jean-Paul Létourneau. Si vous voulez vous identifier, monsieur.

Chambre de commerce de la province de Québec

M. LETOURNEAU: Mon nom est Jean-Paul Létourneau.

M. LE PRESIDENT: M. Jean-Paul Létourneau qui est, je crois, le vice-président exécutif.

M. LETOURNEAU: C'est ça. M. le Président, M. le ministre, messieurs les membres, tout d'abord, nous voudrions vous remercier d'avoir accepté de nous recevoir aujourd'hui, parce que, un peu comme ceux qui nous ont précédés, nous avons eu des problèmes de délais pour produire les rapports que vous désiriez.

Si nous sommes présents ici aujourd'hui, M. le Président, c'est surtout par un souci d'assurer l'efficacité de la loi que le législateur se propose d'adopter, compte tenu des problèmes d'ordre pratique qu'on pourra rencontrer dans son application. Il nous a été donné de voir à quelques reprises dans le passé, des lois qui ont été adoptées avec l'objectif de protéger le consommateur ou d'arrêter certains abus. Ces lois étaient présentées à la suite d'abus qui avaient été commis effectivement, mais, très souvent, comme c'est le cas ici, ces abus sont commis par des gens qui sont marginaux dans le secteur. La grande majorité des transactions immobilières, pour autant que nous sommes concernés aujourd'hui, nous avons l'impression qu'elles se font raisonnablement. Evidemment, il y a toujours des gens qui abusent et le législateur doit intervenir.

Notre souci est que, lorsque le législateur intervient, son action atteigne justement les gens qu'il faut atteindre sans créer de fardeaux, de tracas, d'embarras à ceux qui font des affaires raisonnables. Comme d'autres, nous avons remarqué des définitions qui ne nous paraissaient pas satisfaisantes, particulièrement à l'article l h) et i). Il y a la question du commerçant en immeubles, d'abord, qui se réfère au paragraphe 18 de la page 4 de notre mémoire. Nous croyons que les banques, les distributeurs de produits pétroliers, les grandes sociétés commerciales, les sociétés d'utilités publiques qui ont comme accessoire l'activité immobilière ne devraient pas être touchées par la loi.

Je pense que d'autres l'ont dit avant nous. C'est une question de relation de commerçant à commerçant bien souvent. Nous croyons, en principe, lorsqu'il y a relation de commerçant à commerçant, et non pas relation de commerçant à consommateur immédiat du bien ou du service comme c'est le cas d'ailleurs dans la Loi de la protection du consommateur, qu'il devrait y avoir exemption.

Le mot "lotissement" qui est relié à la définition du mot "lot" nous apparaît également un autre endroit où la définition n'est certainement pas satisfaisante. On donne dans cette loi une définition au mot "lot" qui est différente de celle qu'on va retrouver ailleurs, par exemple dans la Loi du cadastre, et aussi de la définition que l'on peut donner au mot "lot" d'une façon générale. Alors, on lui donne une définition très particulière qui part de la définition que l'on donne à lotissement. A ce moment-là, nous ne croyons pas que ce soit satisfaisant pour les fins de la loi.

On a, devant vous, ce matin, recommandé, comme solution à ce problème, que la loi donne les dimensions de ce que devrait être un lot. Je ne crois pas que nous soyons favorables à une telle recommandation. Nous sommes plutôt favorables à la définition qu'en donnait la Chambre des notaires dans son mémoire, c'est-à-dire: Tout immeuble désigné par un numéro donné aux plan et livre de renvoi officiels. Je pense que cette définition est beaucoup plus acceptable et respectera aussi les règlements ou les intentions des autorités municipales, par exemple, qui, selon le caractère de la population ou le milieu où elles sont, vont déterminer que des lots doivent avoir telle ou telle dimension. Si nous devions dans cette loi proposer des dimensions pour un lot, je ne crois pas que ce serait très raisonnable ou acceptable.

Il y a aussi la question du prospectus. Il n'y a pas dans la loi de définition de ce que devrait être le prospectus. Cette fameuse question du prospectus, M. le Président, nous amène à considérer des problèmes d'ordre concret, comme par exemple celui d'un citadin ou d'un villégiateur qui a acheté, il y a un certain temps, plusieurs parties d'un lot pour se construire.

Disons qu'il en a acheté cinq et il désire, à un moment donné, revendre sa propriété. Il peut arriver qu'il soit obligé de préparer un prospectus parce qu'il a une propriété où il y a plusieurs lots; effectivement, il y en a plus de quatre. Parce qu'il y a plus de quatre lots et que cela a été mis ensemble, quand cela a été fait originairement — c'était dans le but de vendre — pour en faire une propriété, eh bien quand il voudra en disposer, il aura l'obligation du prospectus en vertu de la loi, ce qui nous paraît un problème. Il semble que c'est un tracas pour celui qui veut disposer de son lot, ce qui ne nous paraît pas très raisonnable.

Prenons le cas d'un cultivateur ou d'un autre propriétaire terrien qui voudra vendre quelques lots sur sa terre. Disons qu'il est en bordure d'une route, d'un lac ou d'une rivière et qu'il veuille disposer d'une partie de cette terre ou de sa propriété qui pourrait lui donner un certain revenu parce que cela a une plus-value. Encore une fois, cet individu, s'il a plus de quatre lots qu'il désire vendre, sera devant l'obligation de passer par la fameuse formalité du prospectus.

Je ne sais pas, M. le Président, si le législateur a pensé quelles seraient les demandes qui viendraient auprès des arpenteurs-géomètres, lors de l'application de cette loi. Je souligne tout simplement que dans cette profession il y a actuellement manque de professionnels et que les arpenteurs-géomètres sont rares. Nous avons l'impression que l'application de cette loi amènerait une augmentation de demandes de leurs services passablement considérable. Je ne crois pas qu'ils soient en mesure, actuellement en tout cas, d'y répondre, et certainement pendant quelques années. C'est donc un problème d'ordre pratique qu'il faudra certainement envisager.

On pourrait peut-être, si les membres de la commission veulent nous poser des questions là-dessus, en discuter. Nous cherchions des solutions à ce fameux problème de la limite de quatre lots ou plus pour devoir publier un prospectus. Semble-t-il qu'ailleurs on a fixé, en dehors du pays, aux Etats-Unis, cette limite à 50 lots. D'autres, ici, ont recommandé que ce soit 25 lots. J'admets que c'est peut-être arbitraire mais, en cherchant un moyen terme, nous avons pensé que la loi pourrait parler de 10 lots et d'une valeur de $10,000.

On a l'impression que, peut-être, on ne créerait pas des obligations auprès de gens qui veulent vendre des lots tout simplement pour réaliser une plus-value de leur capital, sans en faire un commerce véritable. On ne les obligerait pas à des modalités administratives coûteuses, d'une part, et, d'autre part, très embarrassantes.

M. JORON: Si vous me le permettez, avez-vous prévu quelque chose quant à la superficie, d'une part? D'autre part, quand vous mentionniez, tout à l'heure, $10,000, c'est pour l'ensemble des lots mis en vente?

M. LETOURNEAU: C'est ça.

M. JORON : Par rapport à la superficie, est-ce que vous vous êtes penchés sur ce problème?

M. LETOURNEAU: Pour ce qui est de la superficie d'un lot, non. Nous croyons qu'il y a déjà des réglementations municipales. Il va y en avoir de plus en plus qui vont déterminer la dimension minimum d'un lot. Il y a certaines municipalités où on demande des dizaines de mille pieds carrés comme minimum de superficie pour un lot. Il y a d'autres municipalités, où les citoyens sont peut-être de condition plus modeste, qui diminuent leurs normes de dimensions minimum d'un lot. Il faut que ce soit assez souple, adapté aux endroits et aux circonstances.

C'est pour ça que nous nous opposerions à ce que le législateur introduise la dimension du lot dans la loi. Que les autorités municipales concernées fixent leurs normes par règlement de zonage, ou d'autre façon, par règlement municipal. Il pourra y avoir éventuellement des règlements au niveau régional au point de vue du développement, au point de vue de l'urbanisme, mais nous ne croyons pas que ce serait opportun de définir dans la loi la dimension d'un lot.

S'il n'y a pas d'autres questions sur cet aspect, je vais procéder à ce qui suit. Concernant le rôle du surintendant, ici, je veux tout d'abord faire remarquer que nous ne voulons pas faire de personnalité. Nous savons que, jusqu'ici les surintendants qui ont été en poste ont toujours été raisonnables. Nous n'avons pas raison de croire que ce ne seront pas des personnes raisonnables dans l'avenir, mais une loi est une loi. Lorsqu'elle est écrite et que les pouvoirs qui y sont consignés sont bien nettement définis, la personne qui les exerce a toujours le droit de les exercer jusqu'à leur limite. Il pourrait arriver éventuellement que ça aille jusqu'à la limite.

Si cela y allait, nous croyons que ces pouvoirs sont trop largement discrétionnaires sous certains aspects. Par exemple, à l'article 10 et à l'article 45. A l'article 10, le surintendant peut délivrer un permis. D'autres l'on dit ici avant nous. Nous croyons que si le requérant remplit toutes les conditions voulues et prévues par la loi, le surintendant devrait délivrer le permis. Au paragraphe 23, il y a aussi la fameuse question de la suspension du permis et de ce qui arrive entre le moment où le permis est suspendu et l'appel, si le commerçant ou la personne visée par la suspension, personne morale ou physique, fait appel de la décision du surintendant. Qu'est-ce qui arrive entre ce moment-là et le jugement?

Beaucoup de gens cherchent la solution. A priori, nous serions favorables à l'idée que le jugement du surintendant ne soit pas appliqué si la personne qui est visée fait un appel, ce qui est normal, je pense, dans toute circonstance semblable. Pourquoi désire-t-on que la suspension soit valable immédiatement même s'il y a appel? Peut-être y a-t-il de bonnes raisons d'ordre pratique mais nous estimons que c'est une décision très importante qu'on laisse à une autorité administrative. Des choses semblables devraient se régler devant un tribunal, à notre avis.

M. TETLEY: Mon cher collègue, vous savez peut-être qu'à l'heure actuelle, il n'y a pas d'appel de la décision du surintendant. Et j'admets que "peut" est trop fort, mais nous avons élargi ce droit. Nous avons donné pour la première fois le droit d'appel par le bill 32 et jusqu'à maintenant, il n'y a pas eu de plaintes. Les plaintes arrivent depuis que nous avons présenté le bill 32. Mais il n'y a pas eu de plaintes de la part des courtiers, que je sache, qui ont demandé un droit d'appel. Et la raison pour laquelle nous voulions peut-être suspendre le permis durant l'appel à moins que le juge ne donne instruction ou ordonne autrement, c'est parce que parfois les gens vont en appel et cela arrête tout l'effet de la décision du surintendant. D'autre part, je comprends très bien le principe démocratique du droit d'appel.

C'est un problème, je l'avoue, mais qui n'arrive pas souvent, qui n'est pas arrivé depuis que je suis ministre, en fait.

M. LETOURNEAU: Comme je l'ai dit dans le préambule, M. le Président, nous ne voulons pas faire de personnalité; nous avons l'impression que, jusqu'ici, les surintendants qui ont occupé la fonction ont exercé ce pouvoir avec beaucoup de prudence, peut-être même trop à un moment donné, mais peu importe; les lois sont les lois, une fois qu'elles sont votées, elles restent là. Ceux qui ont des pouvoirs peuvent les exercer jusqu'à la limite et c'est en vertu de ce pouvoir très large qu'on donne au surintendant...

Je reconnais avec le ministre que dans la loi précédente il n'y avait pas ce droit d'appel, on n'en a pas abusé, semble-t-il, heureusement, mais cependant, même si la loi actuelle ne l'avait pas prévu, nous serions venus très fortement la réclamer parce que c'est un principe que nous défendons à toute occasion, comme organisation, que le droit d'appel doit toujours exister dans les cas de décisions prises par des organismes administratifs et non pas judiciaires.

Mon collègue qui m'accompagne, Me Gilles Champagne — il y a M. Pierre Morin — aurait peut-être un commentaire, si vous nous le permettez, à ajouter sur cette question de droit d'appel.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, messieurs les membres de la commission, il est évident, comme le disait M. Létourneau tantôt, que suspendre la décision ou attendre pour appliquer la décision lorsque l'appel est demandé par l'une des parties donne l'avantage suivant: si la partie est réhabilitée dans le mois suivant ou dans les deux mois qui viennent, elle n'a pas été pénalisée pour rien, pour des choses dont on l'aurait accusée ou qu'on a supposé qu'elle aurait faites et qu'elle n'a pas faites. Cela permet justement à la partie d'être protégée dans ses droits.

Par contre, il peut arriver l'inverse, où la partie fait des choses pour lesquelles elle mériterait qu'on la prenne à la gorge et qu'on attende d'avoir le jugement final. A ce moment-là, vous avez d'ailleurs prévu, dans le cas répété des infractions, à l'article 59, une demande d'injonction interlocutoire pour, justement, bloquer quelqu'un de façon immédiate dans les actions qu'il pose. Je ne suis pas sans savoir que cela pose des problèmes, les injonctions interlocutoires, et que l'application peut être difficile

à certains moments, mais je pense que ce droit, qui est accordé au surintendant de demander une injonction interlocutoire contre des personnes qui agissent, permettrait justement de protéger le bien public en ce sens que si le jugement est rendu immédiatement, et que la décision de la cour d'Appel doit être entendue dans les mois qui vont venir, au moins les parties ne sont pas lésées et le droit public n'est pas brimé si le jugement interlocutoire est obtenu.

A ce moment-là, on obtient justement un arrêt immédiat des opérations. C'est dans ce sens-là que je voulais préciser que vous avez déjà prévu, à l'article 59 dans les cas répétés d'infraction, que cela devrait être fait par jugement ou par une injonction interlocutoire. Si cela était ramené au départ, lorsqu'il y a une suspension par le directeur, par le surintendant, ça permettrait justement d'atteindre deux objectifs similaires: protection d'abord des parties si elles n'ont rien à se reprocher et, deuxièmement, protection du public.

M. LE PRESIDENT: Vous voulez continuer, M. Létourneau?

M. LETOURNEAU: Oui, s'il vous plaît.

Une autre chose à noter, M. le Président, c'est que l'ancienne loi ne s'appliquait qu'aux courtiers en valeurs immobilières; la loi actuelle va s'appliquer à d'autres personnes aussi. Il se pourrait que d'autres personnes soient plus sensibles ou plus vulnérables.

Les pouvoirs du surintendant, qui sont prévus à l'article 45, sont très grands et on remarque, à l'article 45, que "le surintendant ou une personne qu'il autorise par écrit peut saisir les livres, registres, comptes, dossiers et autres documents d'une personne dont les activités font l'objet d'une inspection en vertu de l'article 40." L'article 40, c'est tout simplement pour le surintendant qui va inspecter des gens qui ont un permis ou qui, dans son opinion, devraient détenir un permis. A ce moment-là, il n'y a pas nécessairement soupçon que ce sont des gens qui font des choses malhonnêtes ou contraires à la loi.

Dans l'ancienne loi, on ne prévoyait cette saisie que dans les cas où on soupçonnait que quelqu'un faisait des choses malhonnêtes, ce qui n'est pas l'intention visée, semble-t-il, par l'article 40. On avait prévu, à l'article 41, les modalités d'inspection des gens qu'on voulait inspecter en vertu de l'article 40. Tout à coup, à l'article 45, on dit: On va saisir, on peut saisir; le surintendant a, tout simplement, décidé qu'il va saisir leurs livres, etc. Nous considérons que ce sont des pouvoirs très grands et même nous avons eu des réticences lorsque la nouvelle Loi de police a donné des pouvoirs semblables à la Commission de police.

Nous nous demandons si ces pouvoirs ne sont pas trop grands pour le surintendant, surtout lorsqu'ils s'appliquent aux gens visés à l'article 40. Si on prend le reste de l'article 45, c'est-à-dire: "... dont le permis est suspendu ou révoqué et les retenir jusqu'à l'inspection", ça irait peut-être, mais, pour la première partie de l'article, nous croyons que ce sont des pouvoirs abusifs accordés au surintendant.

Un certain nombre de restrictions pourraient être assouplies. Selon notre interprétation de l'article 20, si elle est bonne, quelqu'un qui a un terrain à vendre ne pourrait même pas l'annoncer dans les journaux. Je me permets de poser la question. Est-ce que notre interprétation est bonne?

M. TETLEY: Je crois qu'elle est fautive. Il faut que la personne ait plus de quatre lots à vendre ou quatre lotissements, en vertu de la définition de "lot", à l'article 1 i), et de celle de "lotissement", à l'article 1 h).

M. LETOURNEAU: D'accord. Donc, il faudrait qu'une personne ait plus de quatre lots à vendre. Evidemment, on revient toujours au fameux problème de la définition. Un fermier, par exemple, possède une ferme, laquelle peut facilement couvrir plus de quatre lots. Cela a été groupé à l'origine pour fins de vente, c'est évident. Quand il voudra en disposer, il sera encore pris avec cette fameuse histoire des quatre lots. Je pense qu'il va falloir revenir à une meilleure définition, augmenter le nombre de lots et relier cela à une valeur minimum.

Me Champagne aurait une observation à ajouter ici.

M.CHAMPAGNE: Je pense bien qu'il est évident qu'on pourrait discuter longtemps sur les définitions de "lot" et "lotissement". Je ne reviendrai pas tellement là-dessus, je parlerai d'un cas concret. Vous avez M. Jos Y, qui reste dans le rang 12; il a divisé le front de sa terre en six lots, en prenant votre définition du début. Cela vaut de $400 à $500 le lot dans le rang. Cela fait environ $2,500. Le seul droit qu'il a, c'est de mettre un panneau et de dire qu'il vend ses six lots — parce qu'il y en a six évidemment — ou bien de passer par un courtier et obtenir de la publicité. C'est dans ce sens-là qu'il y a des endroits où ce n'est pas pratique. En fait, cela nous ramène même à la question du prospectus. M. Létourneau invoquait les dix lots et les $10,000. Je connais des endroits où on a créé des lacs artificiels, par exemple. Ce qu'on a fait, c'est qu'on a pris une terre qui ne valait presque rien — disons des arpents à $100, c'était déjà élevé comme prix — on a fait un trou, on a mis de l'eau dedans et on a vendu les terrains $50, $75, $100, des terrains qui étaient d'une grandeur convenable.

Si vous demandez au gars de faire un prospectus et que vous lui demandez en plus, s'il dépasse quatre lots, de faire de la publicité simplement avec un panneau, s'il n'est pas courtier, vous lui imposez un tas d'exigences, pour le montant qu'il obtiendra à la fin. Il ne sera pas intéressé. On va nous invoquer à l'inverse qu'il va être obligé de faire quand

même son certificat de localisation. Il va être obligé de faire sa recherche de titres. Il va être obligé de faire tout cela. Mais on sait qu'il y a d'autres formalités qui vont survenir avant le prospectus. Cela va coûter de l'argent, prendre du temps. Lorsque le prospectus sera envoyé, encore une fois malgré la diligence du service, j'imagine que le gars qui sera dans son bureau et qui recevra des plans aura besoin d'un inspecteur. De temps en temps, il devra aller voir ce qui se passe dans les lots dont les plans lui sont envoyés. Ils peuvent envoyer des choses qui seront plus ou moins exactes.

On sait que dans le domaine immobilier cela varie rapidement.

Vous avez le cas du petit propriétaire qui veut lotir, comme on a eu peut-être facilement son terrain à des coûts pas tellement élevés, pour rendre service à une classe de population qui n'avait pas les moyens de payer sur le bord des lacs et des choses semblables... A ce moment-là, dès qu'on dépasse quatre lots, on pénalise le gars en disant: Toi, tu n'as plus le droit de vendre plus de quatre lots de façon commerciale, c'est-à-dire mettre une annonce dans le journal et dire que tu vends quelque chose. Il faut que tu mettes un panneau dans le champ chez vous. S'il ne passe personne, tu n'en vendras pas. S'il passe des gens, tu as peut-être la chance d'en vendre.

Vous avez le deuxième cas des prospectus où il n'y a pas de problème. Quand vous aurez des gens nombreux qui ont de grands lotissements, à ce moment-là, ils vont en faire des prospectus. Alors, vos quatre lots, M. Tetley, si vous me permettez, de la manière qu'on le comprend évidemment, les gens au ministère ont étudié cela pendant plusieurs mois tandis que nous, nous passons moins de mois que ça... Si vous avez à Montréal, dans votre définition de lotissement, des gens qui sont installés sur quatre lots parce qu'ils achètent des frontispices de 25 pieds sur les rues principales, alors, il y a quatre lots et on pourrait peut-être l'inclure dans la définition de lotissement. Peut-être! A ce moment-là, vous avez à Montréal un tas d'endroits où les bâtisses sont vendues seulement pour les terrains. Alors, il pourrait peut-être y avoir des problèmes où ces gens ne pourraient pas vendre personnellement. Il faudrait qu'ils passent par un courtier. Disons que cela nous ramène aux définitions de lotissement et de lot. Cela nous a créé des embêtements pour la compréhension.

Ce que je veux spécifier à la commission, c'est que dans le développement des terrains de valeur très inférieure, les exigences de la loi sont tellement grandes qu'elles vont défendre à un gars, qui est un petit propriétaire, qui a peut-être quelques arpents de terre, de mettre une annonce dans un journal.

C'est dans ce sens que nous voulions faire notre intervention. Que ce soit permis, justement, de faire une reconsidération de la quantité des lots, de la valeur des lots et où ils sont situés. Si vous aviez à l'esprit, par exemple, lorsque vous avez voulu protéger des terres de plusieurs centaines de lots, des gens qui faisaient des annonces peut-être frauduleuses, bien on arrive peut-être à conditionner tellement l'activité mobilière qu'on se demande si les petits vont être capables de s'en sortir. Les gros vont continuer à en faire parce qu'ils en faisaient des prospectus.

M. TETLEY: Vous soulevez un problème qui est vrai. Nous voulons contrôler certaines fraudes au Québec. Mais ces fraudeurs, quand ils ont commencé, ils étaient petits; par exemple, Lakefield Estates a commencé autour d'un lac, comme vous l'avez décrit. On a subdivisé ça. La fraude a été celle-ci: c'est que quelques lots étaient en dessous du lac ou n'existaient pas. Il y avait de grandes fraudes. Donc, il y a un problème. En protégeant le public, c'est vrai que l'on force peut-être un cultivateur, qui veut vendre plus que quatre lots, à subdiviser et même à demander un prospectus. Nous avons une exception et c'est à l'article 20. Il peut le faire, s'il veut en faire plus que quatre, par le moyen de son prospectus, son courtier. Il a toujours ce droit. Tout le monde a ce droit, c'est-à-dire tout simplement en obtenant un permis de commerçant. Nous avons respecté le droit des citoyens de vendre leurs terres et ceux qui veulent faire la vente d'immeubles en créant une troisième sorte de permis, celui du commerçant.

Je crois qu'à l'article 1 h), vous avez oublié le fait que, si la construction vaut plus que la terre, même s'il s'agit de quatre ou cinq lots, ce n'est pas un lotissement. Dans le cas d'Outremont, de Wesmount où il y a une belle maison sur quatre subdivisions...

M.CHAMPAGNE: M. Tetley, dans le Vieux-Montréal, les bâtisses sont vendues pour les terrains. La valeur de la bâtisse est nulle. Dans le Vieux-Montréal, nous en avons discuté hier avec des gens qui font de la vente immobilière dans le centre-ville, l'immeuble est vendu pour la valeur du terrain. On ne s'occupe même pas de la valeur de la bâtisse. Cela fait que dans Montréal, si je continue votre explication, dès que vous avez cinq lots qui composent un immeuble, la vente de la propriété devrait passer obligatoirement par un courtier. C'est régulier, à Montréal.

Prenons un exemple concret. Vous avez, en dehors de Montréal, un tas d'endroits où vous vendez, par exemple, de l'essence. Le terrain vaut cinq fois la bâtisse qui vend l'essence. Vous avez les restaurants, les "curb services", dont la valeur du terrain dépasse de beaucoup la valeur de la bâtisse. Toutes ces fois, ces gens seraient obligés de passer par des courtiers.

M. TETLEY: Non, non, pas du tout. S'ils veulent vendre leur terre, ce n'est pas un lotissement, ce n'est pas un lot. Ils vendent leur terre.

M. CHAMPAGNE: S'ils veulent la louer?

M. TETLEY: Us peuvent la louer. C'est permis.

M. CHAMPAGNE: Ils peuvent louer. M. TETLEY: Ils peuvent louer, vendre.

M.CHAMPAGNE: Mais à la condition que ce ne soient pas cinq lots. Si on prend la définition telle quelle, on dit: "Lotissement: un immeuble situé au Québec ou à l'extérieur du Québec, divisé en plus de quatre lots ou que l'on se propose de diviser en plus de quatre lots". A Montréal, les immeubles sont bâtis sur plus de quatre lots. Vous avez d'autres endroits, dans la province, où il y a plus que quatre lots. Donc, le courtier sera obligé d'intervenir pour vendre.

Prenons par exemple, les postes d'essence. Il arrive régulièrement que les postes soient vendus sur un coin de rue, qui affectait déjà un deuxième lot, un troisième sur l'autre coin, pour pouvoir faire un terrain potable. Automatiquement, vous êtes obligé, à ce moment-là, de passer par le courtier, dans le cas de location du terrain, puisque la valeur de la bâtisse est inférieure à la valeur du terrain. Vous avez plusieurs cas où le courtier sera obligé d'intervenir. J'ai discuté l'autre jour avec certains gars des compagnies d'essence et ils interprètent la loi dans le même sens, en disant qu'ils seront obligés de passer par un courtier ou demander le permis de courtier pour louer leurs stations à leurs propres détaillants.

Je ne sais pas si notre interprétation est juste mais si on comprend le mot de l'article 1 h), en supposant toujours que c'est la même définition qu'on a dans le texte, qui sera modifié, je l'imagine, plus tard mais en prenant cela tel quel, cela veut dire que, dès qu'il y a plus que quatre lots, vous êtes pris avec le problème de passer par un courtier.

M. TETLEY: Je ne vois pas où on doit passer par un courtier pour vendre en bloc quatre ou cinq ou vingt lots.

M. CHAMPAGNE: Article 12.

M. TETLEY: Si c'est vrai, nous allons le modifier.

M.CHAMPAGNE: M. Tetley, article 12: "Nul ne peut vendre ou louer ou tenter de vendre ou de louer un lot —alors s'il a plus qu'un lot, même s'il en vendait cinq, il vend quand même des lots — à moins que ce lot ne soit spécifiquement marqué aux plan et livre de renvoi, etc." A l'article 13, on dit: "Nul ne peut vendre... à moins d'avoir déposé un prospectus..." Article 14: "Nul ne peut distribuer un prospectus ni en délivrer copie... avant d'avoir obtenu l'autorisation, etc." Vous avez quand même l'obligation de passer par l'intermédiaire du courtier. Non?

M. TETLEY: Si c'est vrai, nous allons l'exclure, parce qu'on avait toujours le droit, au Québec, de vendre son terrain ou son immeuble. Nous voulons garder ce droit. On a même ajouté, dans la loi...

M. CHAMPAGNE: M. Tetley, je pense que c'est le prospectus qui est nécessaire...

M. TETLEY: Oui.

M. CHAMPAGNE: ... et non pas le permis de courtier.

M. TETLEY: C'est cela.

M. CHAMPAGNE: C'est le prospectus, comme on le disait tantôt, qui devenait compliqué dans le cas de vente. Je m'excuse.

M. TETLEY: Dans le cas de vente en bloc, comme votre collègue Létourneau l'a soulevé, il semble qu'il y a une lacune dans la loi. Nous sommes ici précisément pour les corriger.

M. LAVOIE (Wolfe): M. le Président, ne trouvez-vous pas qu'en voulant protéger le consommateur, il y a trop d'ingérance de l'Etat, aussi, dans chaque transaction, dans chaque domaine? L'Etat est rendu partout. Ne trouvez-vous pas que c'est un peu exagéré dans les lois, maintenant? L'Etat s'ingère dans tous les domaines, partout. Il ne faut pas exagérer l'ingérence de l'Etat. Il faut laisser une certaine liberté au citoyen aussi.

M. TETLEY: Quelle est votre suggestion concrète?

M. LAVOIE (Wolfe): Laisser la liberté au citoyen d'agir avec certaines normes raisonnables.

M. TETLEY: Je suis 100 p.c. d'accord mais...

M. LAVOIE (Wolfe): Je ne suis pas juriste!

M. TETLEY: ... j'aimerais voir la rédaction que vous proposez.

M. JORON: Parce qu'il y a des citoyens méchants!

M. LAVOIE (Wolfe): Ce n'est pas parce qu'il y a quelques citoyens qui violent les lois qu'il faut écraser le consommateur. Il ne faut pas punir toute la population pour cela, tous les gens qui s'en vont dans le commerce et tous les gens qui veulent agir honnêtement et convenablement.

M. LE PRESIDENT: M. Létourneau, je crois que le député de Frontenac aurait une question à vous poser.

M. LATULIPPE: Une question sur le même sujet. Peut-être que M. Létourneau peut me répondre. Est-ce que vous avez déjà envisagé la possibilité de contourner la difficulté que vous avez soulevée tout à l'heure en augmentant les pouvoirs du surintendant pour qu'il lui soit possible d'émettre des certificats d'exemption dans certains cas qu'il jugera à propos? Est-ce que vous pensez que ce serait une mesure valable?

M. LETOURNEAU: C'est encore élargir les pouvoirs discrétionnaires du surintendant.

M. LATULIPPE: II en a, d'ailleurs, déjà beaucoup.

M. LETOURNEAU: En effet, nous avons remarqué qu'il en avait peut-être encore trop. Lui donner des pouvoirs discrétionnaires de cette façon-là, peut-être que ça pourrait être pratique, mais ce serait préférable de trouver une solution qui puisse venir de la loi. Si on refait la définition de lot et qu'on la rend un peu plus conforme à ce qu'on connaît actuellement, si on augmente le nombre et la valeur nécessaires pour être obligés de procéder par prospectus, j'ai l'impression que, peut-être, on peut éliminer les gens qui vraiment ne pourraient pas, même s'ils le désiraient, abuser considérablement du consommateur. Ce serait quand même très limité. Je pense que les limites sont bien basses actuellement. Il faudrait probablement les élever en ce qui concerne le nombre de lots et la valeur des terrains impliqués lorsqu'on demande l'émission d'un prospectus. Il faudrait peut-être aussi, comme on l'a demandé déjà, définir dans la loi ce qu'on veut dire par prospectus.

M. TETLEY: Le prospectus, à notre idée, c'est un document peu compliqué, pas un prospectus dans le sens de la Commission des valeurs mobilières; plutôt un document qui décrit en terme clairs les avantages d'un lotissement ou d'un lot.

M. LETOURNEAU: Si nous voulons atteindre l'objectif de la loi, je crois que le prospectus devra, quand même, donner des informations raisonnablement bonnes pour guider l'acheteur. Si vraiment l'objectif de la loi est de protéger le consommateur, il va falloir que le prospectus en donne d'assez bonnes. Et ça peut aller très loin. Cela peut aller jusqu'à savoir quelle est la capacité portante du terrain, si on est dans un terrain de glaise, par exemple, qu'on vend ça pour construire des maisons et qu'on ne sait pas trop si les maisons vont s'enfoncer ou non. Cela pourrait aller jusque-là si on veut vraiment protéger le consommateur. Là, on s'embarque dans un tas de choses. Si vous ne le faites pas, vous aurez des pressions de la part de groupes représentant les consommateurs pour que le prospectus exigé par le ministère soit toujours de plus en plus complet, de plus en plus développé et on aura besoin de toute une armée de gens pour vérifier la véracité des données qui seront contenues dans le prospectus. On aura besoin de plus en plus d'experts pour aller vérifier ces choses qui normalement, jusqu'ici, sont la responsabilité de l'acheteur, dans une certaine mesure.

Quand on s'embarque là-dedans, je pense qu'on peut aller très loin. En définitive, cela peut impliquer des coûts plus élevés que la protection globale qu'on apporte réellement aux consommateurs.

Les vérifications de titres se feront toujours par le contrat notarié, par le notaire. S'il n'y a pas d'autres questions sur cet aspect, je vais continuer.

Au paragraphe 27 de notre mémoire, nous croyons qu'un autre problème d'ordre très pratique — je ne sais pas si on l'a examiné — ce sont les limitations que l'article 13 pourrait apporter dans le cas de location de terrains de camping. On pourrait, peut-être procéder en indiquant dans la loi une limitation de la durée du bail de location, mais notre interprétation nous laisserait entendre que les gens qui louent des terrains de camping pourraient être placés, encore une fois, dans l'obligation d'avoir des prospectus ou des choses du genre. Je ne sais pas si notre interprétation est bonne, M. le ministre, mais c'est ce que nous avons envisagé. Nous ne croyons pas que ce serait raisonnable, dans ces cas-là, de faire appliquer l'article 13.

M. TETLEY: C'est le même problème pour les lots de cimetières. Ce n'est pas un lotissement. C'est peut-être divisé en quatre pour la famille.

M. LETOURNEAU: En étages à part cela et en profondeur. A l'article 13, M. le ministre, au sujet de la vente de terrains commerciaux et industriels, si on donne suite à notre recommandation à l'effet que cette loi ne s'appliquera pas dans les transactions entre commerçants, notre recommandation au paragraphe 28 serait réglée et notre problème également. Nous ne croyons pas que cela devrait s'appliquer dans le domaine des terrains commerciaux et industriels. Ce sont des transactions entre commerçants.

L'article 17 mentionne un délai de 90 jours pour demander la résolution d'un contrat. Il nous parait que ce délai ne devrait pas dépasser 30 jours. La Loi de la protection du consommateur accorde cinq jours actuellement dans les cas d'achat de biens meubles; alors peut-être que six fois plus pour l'achat de biens immeubles serait suffisant. Vraiment, on va placer le vendeur dans une position extrêmement difficile si on a 90 jours pour résoudre un contrat. Il peut y avoir des pertes assez considérables et il nous semble qu'un délai de 30 jours serait raisonnable. C'est un fardeau très lourd pour le vendeur que de donner 90 jours pour résoudre un contrat.

M. TETLEY: C'est 90 jours en Ontario.

M. LETOURNEAU: Nous pouvons peut-être faire mieux qu'eux.

M. TETLEY: Parfois, lorsque la vente est en hiver, on ne peut pas inspecter le terrain avant le printemps.

M. LETOURNEAU: Ces délais soulèvent aussi un problème pour le crédit hypothécaire. Concernant le mandat verbal, à l'article 25, il semble que ce mandat sera éliminé. Tout notre droit commercial est basé sur la preuve testimoniale. Elle est admise en droit commercial parce que c'est la façon de rendre les choses expéditives. Dans de nombreux cas, des vendeurs ne veulent pas s'engager avec un courtier en particulier et puis il y a aussi la fameuse question des transactions commerciales et industrielles qui ne se font pas avec des mandats écrits. Nous nous demandons jusqu'où cela peut nous conduire que d'éliminer le mandat verbal dans une loi semblable.

L'article 20 nous parait trop restrictif lorsqu'il refuse à toute personne autre qu'une personne physique qui est propriétaire le droit d'offrir en vente ou en location un terrain. On se demande si le fils ne pourrait plus agir pour son père ou sa mère, par exemple. Il nous semble que cette possibilité sera éliminée selon la forme que prend l'article 20. Encore une fois, M. le ministre, nous aimerions avoir une interprétation, à savoir si nous sommes dans la vérité lorsque nous donnons une interprétation semblable à la loi.

M. TETLEY: J'en prends bonne note. Mon conseiller juridique m'informe que le fils a toujours le droit, s'il ne reçoit pas de commission, de vendre les terres de son père ou de sa mère. Mais je vois que c'est assez vague et je prends note de votre recommandation. N'oubliez pas que c'était notre intention d'exempter beaucoup de personnes et de cas spécifiques des règlements, en vertu de l'article 53. Mais il est clair que vous n'avez pas vu les règlements.

M. LETOURNEAU: Me Champagne, mon collègue aurait quelques remarques, M. le Président.

M.CHAMPAGNE: M. le Président, dans cette optique, dans les règlements qui vont venir plus tard et qu'on ne connaît pas, c'est de plus en plus difficile d'étudier la législation, parce qu'on ne sait pas ce qui s'en vient comme règlements ultérieurement après la commission parlementaire...

M. HARVEY (Chauveau): On va les faire connaître.

M. MARCHAND: Aujourd'hui, vous les voyez avant, c'est la seule différence.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, je veux seulement souligner au ministre que dans les définitions qui viendront ultérieurement ou dans les exemptions, toute personne qui a un mandat gratuit —l'exemple du fils était peut-être plus concret parce que la loi disait clairement qu'une personne physique propriétaire... — mais je pense qu'on devrait penser au mandat gratuit donné à n'importe quelle personne autour qui pourrait agir et étendre la définition, non pas seulement père, mère, fils et frère, dans ce sens-là...

En conclusion, M. le Président.

M. TETLEY: Vous permettez? La définition de courtier est toute personne qui agit pour une commission. Donc, je crois, en conséquence, que le fils ou le neveu ou l'ami n'est pas visé.

M.CHAMPAGNE: M. le Président, je ne voudrais pas faire un débat juridique, mais quand on lit le texte, on dit: "... faite par une personne physique propriétaire du lot." A ce moment-là, elle est exemptée, mais si elle n'est pas propriétaire du lot, parce qu'elle est mandatée par quelqu'un, elle n'est plus dans ce groupe-là. Sur le plan de la compréhension du texte, en tout cas, si c'est là l'intention du législateur, il devrait au moins la préciser dans ce domaine-là. Je pense qu'on devrait aller plus loin... ce sont des personnes qui agissent gratuitement par ce que vous inférez de la définition du courtier. Mais il y a d'autres personnes qui agissent dans les immeubles qui ne sont pas nécessairement des courtiers. Vous avez les notaires, les avocats et toute la série.

M. TETLEY: Mais les notaires ne sont jamais gratuits.

M.CHAMPAGNE: Les avocats le sont de temps en temps...

M. LETOURNEAU: En résumé, M. le Président, nous désirons que certaines définitions de la loi soient précisées, diminuer les pouvoirs discrétionnaires du surintendant, assouplir certaines procédures qui sont trop rigides et soustraire les commerçants de la loi lorsqu'ils transigent avec d'autres commerçants. Pour nous, c'est un point très important. Nous aimerions, si c'est possible, si ce n'est pas abuser de la patience de la commission, savoir si le ministre a un avis ou enfin a des objections à cette recommandation, concernant des transactions entre commerçants.

M. TETLEY: C'est notre intention d'exempter une transaction entre commerçants. C'est une loi qui protège plutôt le consommateur.

M. CHAMPAGNE: Merci beaucoup, M. le Président, merci M. le ministre.

M. LETOURNEAU: En définitive, M. le Président, notre dernier souhait est que la réglementation qui viendra s'inspire surtout du fait d'essayer d'atteindre les gens qui abusent et de ne pas créer de tracasseries administratives, souvent fort coûteuses. Parce que dès qu'il y a des formules à remplir, c'est automatiquement coûteux par les temps qui courent, pour les gens qui font des affaires raisonnables. Plus on pourra éviter ça, plus on rendra acceptable, pour les gens qui font des affaires raisonnables, l'intervention de l'Etat pour vraiment essayer de protéger le consommateur de ceux qui veulent abuser de lui.

M. le Président, M. le ministre, MM. les membres, merci beaucoup. Nous sommes à votre disposition, s'il y a d'autres questions.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Au nom des membres de la commission, je remercie M. Jean-Paul Létourneau de même que Me Gilles Champagne de l'exposé qu'ils viennent de nous faire.

M. TETLEY: M. le Président, je remercie encore la Chambre de commerce de la province de Québec de son mémoire. Nous allons étudier vos recommandations ici, à la commission, et au gouvernement.

M. LE PRESIDENT: Merci.

J'invite maintenant Me Marois, le porte-parole de la Fédération des ACEF du Québec. Me Marois.

M. MAROIS: Si vous me permettez, M. le Président, c'est M. Auger, le vice-président de la Fédération des ACEF du Québec, qui va faire la présentation de notre mémoire.

M. LE PRESIDENT: Quel est son nom? M. MAROIS: M. Gérard Auger.

Fédération des ACEF du Québec

M. AUGER: M. le Président, M. le ministre, les membres de la commission, l'Association coopérative d'économie familiale que nous représentons ici, je pense, est suffisamment connue dans les buts qu'elle poursuit et je sais que vous sentez déjà que nous allons parler de la protection du consommateur.

Les actions que nous menons chaque jour nous ont permis de prendre connaissance de façon très satisfaisante du premier texte dé la loi 32. Nous sommes, dans l'ensemble, très satisfaits de la loi et j'irais même jusqu'à dire que nous sommes un peu surpris de la rapidité avec laquelle le gouvernement, après la loi 45, propose la loi 32 qui nous avait été promise ici, il n'y a pas tellement longtemps.

Notre action quotidienne, par contre, nous met au fait de certains problèmes particuliers. C'est pourquoi nous avons ajouté à la loi certaines observations et certaines recommandations. Pour faire ces représentations, ces propositions, je céderai la parole à Me Pierre Marois, directeur-général, et à M. André Bourdon qui est au service juridique de la fédération. Si vous avez des questions, je vous prierais de vous adresser à ces deux messieurs.

M. MAROIS: M. le Président, bien sûr, les ACEF n'ont pas la réputation, comme le dit en introduction notre document, d'être dociles. Ce n'est pas tous les jours que le mouvement ACEF se sent fondamentalement en accord sur un projet de loi qui est déposé et, puisqu'on a pu entendre d'autres mémoires présentés aujourd'hui, passablement en accord sur la position adoptée par le Barreau du Québec sur le présent projet de loi. A notre avis, il s'agit d'un excellent projet de loi.

Compte tenu de quelques propositions d'amendement ou surtout de suggestions quant à l'éventuelle administration de cette loi, il est urgent, à notre point de vue, qu'une loi comme celle-là soit adoptée au Québec pour mettre un terme à des pratiques commerciales douteuses et surtout à certains abus qui, dans bon nombre de cas, constituent rien moins que de la fraude. Si on aborde directement et immédiatement les suggestions ou propositions, bien sûr, notre première remarque porte aussi sur l'expression "lot" qui est défini par le lotissement. Tel qu'est rédigé le présent projet de loi, ce sont les règlements qui vont déterminer la superficie d'un lot.

Ce que nous demandons, au premier abord, c'est qu'il soit tenu compte d'une réalité, que, dans la pratique, dans les cas quotidiens que nous avons constatés de vente ou de location de terrains sous pression, en règle générale, en moyenne, il s'agit de lots dont la superficie n'excède pas 50 pieds sur 100 pieds, donc de passablement petite dimension. Si la définition devait devenir trop large, il est évident que bon nombre d'entreprises pourraient facilement non seulement contourner la loi, mais échapper à l'application de cette loi. Un problème a été évoqué tout à l'heure — on ne veut pas y revenir et insister longuement — c'est celui des terrains de camping où on loue des lots. Ce n'est pas notre intention, par l'intervention que je veux faire là-dessus, d'aucune espèce de façon de nuire aux petits propriétaires de terrains de camping. Cependant, on désire attirer votre attention sur le fait qu'il existe maintenant aussi des groupes ou des entreprises qui procèdent à la location de terrains sous pression. Analogiquement, c'est le même procédé que celui utilisé dans les cas de vente sous pression de terrains par certaines entreprises. On réunit, selon les mêmes techniques, des groupes de familles; une famille par table avec — il ne s'agit pas d'un vendeur, mais d'un locateur— un locateur qui fait miroiter une kyrielle d'avantages. On parle d'un contrat de location, dans certains cas, de $250 par année. Lorsque ledit

contrat de location est signé, à l'analyse, on se rend compte qu'il s'agit d'un contrat de plus de $900, liant le consommateur pour une période d'au moins quatre ans.

Encore là, il s'agit véritablement d'une pratique de location de terrains pour des fins de camping où, dans la plupart des cas, les avantages qu'on a présentés sous pression aux consommateurs n'existent pas. Il s'agit là d'une pratique commerciale qui est plus que douteuse et qui existe. On suit déjà certaines entreprises qui agissent dans ce sens-là, notamment dans la région de Joliette présentement.

En ce qui concerne la définition de "lot", on n'a pas plus de solution miracle que d'autres. Si vous permettez, M. le Président, André Bourdon, du service juridique de la fédération, voudrait vous soumettre quelques hypothèses si ça peut aider les conseillers en loi du ministère qui auront à travailler à ce problème.

M. BOURDON: Avant d'embarquer dans la définition technique de "lot" qu'on veut proposer, il y a une chose au préalable qui, à notre avis, s'impose. Tantôt les discussions ont porté en partie à savoir si telle catégorie de personnes va être exemptée de la loi, entre autres les commerçants ou les compagnies dont ce n'est pas le but principal que de vendre des terrains.

Le bill 32, nous croyons, a deux buts: Premièrement, de reformuler la Loi du courtage immobilier et la moderniser; deuxièmement, de prévenir les abus flagrants qu'on a pu dénoncer dans les terrains, que ce soit le cas de Lakefield ou celui de Saint-Adolphe. Face à ces deux solutions, la Loi du courtage immobilier, quant à nous, respectait d'une façon assez adéquate les relations entre commerçants et les relations qui pouvaient exister entre un courtier et un acheteur suffisamment averti. Probablement qu'en reformulant la Loi du courtage immobilier et en prenant certaines des dispositions du bill 32 ce serait suffisamment bien couvert, mais en mettant le tout dans une section spéciale.

Comme le deuxième but de la loi est de protéger les consommateurs les plus faibles parmi les démunis, ceux qui plus facilement se laissent attirer par un certain appât du gain, par le rêve d'avoir une maison, une section pourrait être faite spécialement pour protéger ces gens-là. Donc, une section visant les commerçants, une section visant l'achat par les consommateurs.

La première section, ce serait dans le cas où l'achat est fait par un consommateur et la vente par un commerçant en cette matière. La seconde section pourrait inclure le cas d'un achat fait par un consommateur alors que le vendeur n'est pas un commerçant. Ceci pourrait inclure les cas dont nous parlions tantôt, le fermier qui a une terre qu'il veut diviser et vendre en faisant un profit intéressant mais sans nécessairement embarquer les gens dans le pétrin. Donc, il y aurait cette partie-là et aussi une autre couvrant les relations entre une compagnie et un commerçant ou les relations qui existent entre un courtier et un acheteur qui serait lui-même un commerçant. Donc, une section spéciale pour les achats faits par les consommateurs et dont la vente est faite par un commerçant — on pense que ça pourrait couvrir les cas d'abus qu'on a eus depuis quelques années — et une autre section qui contiendrait peut-être des mesures moins strictes mais qui viserait quand même à contrôler le domaine des activités immobilières.

Si cette dichotomie entre les achats faits par le consommateur et ceux faits par un autre était acceptée ça aurait une influence assez grande sur le problème de la définition du lot. Présentement, on mentionne plus de quatre lots. Si on entre dans la section qui traiterait des commerçants comme acheteurs ou des commerçants qui achètent d'un autre commerçant ou du consommateur qui achète d'un autre consommateur, nous croyons que dans ces cas on pourrait prévoir une définition spécifique de "lot" qui incluerait plus de quatre lots, qui pourrait être portée à dix ou vingt lots. Si une compagnie achète un terrain, elle a des experts, elle a le personnel et elle va prendre le temps de réfléchir avant de conclure son achat. Donc, la protection qu'on a à lui accorder est moins grande parce qu'elle va voir à se protéger elle-même. On n'a donc pas à restreindre la definition de "lot" de façon à couvrir tous les cas.

Par contre, dans le cas du consommateur, je pense qu'il faut vraiment prévoir, lui accorder le minimum d'appui nécessaire pour faire un achat intelligent. On pourrait garder dans ce cas la définition de "lotissement" et de "lot" prévue, qui serait un rapport de un à quatre, et augmenter le nombre dans le cas de la section qui traiterait des commerçants. On pourrait l'augmenter peut-être, selon la proposition que faisait la Chambre des notaires ou la Chambre de commerce, à dix lots ou à $10,000 ou à des valeurs de beaucoup supérieures, ce qui aurait pour effet d'empêcher pour eux les tracasseries administratives.

Cela, c'est quant au domaine de l'application de la loi pour les deux sections. Quant à la définition, du lot même, pour tous les cas, on voyait une possibilité. Il a déjà été mentionné qu'il existe dans la plupart des municipalités des règlements qui prévoient que, si on veut construire sur un terrain, celui-ci doit être d'une superficie minimale. On s'est dit: II est peut-être sage de laisser aux édiles locaux la possibilité de réglementer la superficie d'un lot par rapport aux caractéristiques régionales.

Dans une région comme Westmount, c'est évident qu'un terrain de 50 x 100, c'est impensable. Par contre, à Saint-Henri-de-Mascouche, à Sainte-Béatrix ou ailleurs, un terrain de 50 x 100 peut être pensable pour les habitants qui demeurent dans ce coin-là.

M. MARCHAND: Ce n'est pas le contraire?

M. BOURDON: Excusez-moi, mais, quand je dis habitants, ce sont les gens qui ont une maison, pas nécessairement les cultivateurs.

M. MARCHAND: Vous dites que des terrains de 50 x 100, à Westmount, ce serait impossible et que serait possible ailleurs. Je pense que c'est bien plus facile d'avoir un terrain de 200 x 400 à Saint-Henri-de-Mascouche qu'à Westmount. A Westmount, vous allez avoir un terrain de 50 x 100 en tout temps. Vous allez bâtir une maison de $50,000.

M. BOURDON: Le seul problème, c'est que votre maison va déborder du terrain, assez souvent.

M. MARCHAND: Non, non.

M. BOURDON: Pour en revenir à ce que je disais, il faudrait prévoir dans la loi que la définition du lot ne soit pas la même pour la province, mais qu'elle tienne compte des disparités régionales et même des disparités entre municipalités. Cela pourrait être strictement le règlement municipal. On dirait : Un lot doit être de la superficie prévue par le règlement municipal pour qu'on puisse l'acheter.

De façon corollaire à cela, si on prévoit qu'un lot doit avoir une telle superficie, on a une autre proposition qui serait la suivante: à savoir qu'aucun terrain dont la superficie est moindre que celle d'un lot ne puisse être vendu, sauf si un avertissement formel est fait au consommateur, lors de la vente, que ce terrain est impropre à la construction et sauf si le consommateur, acceptant et connaissant cette impossibilité de construire, décide d'acheter le terrain. Si j'ai un terrain à un endroit et que je veux acheter une bande de terrain de 25 pieds de mon voisin, il ne faudrait pas m'empêcher de l'acheter parce que je ne pourrai pas construire dessus. Si on prévoit une disposition qui dit: II est interdit de vendre un lot qui a une superficie moindre que celle définie par les règlements municipaux, sauf si le consommateur le sait, admet le savoir et y consent, nous pensons que le problème de la définition du lot pourrait être partiellement réglé. Merci.

M. MAROIS: Encore une fois, M. le Président, il ne s'agit pas d'une solution miracle. Je pense bien que personne ne l'a, mais toutes les discussions, au cours de cette journée, montrent qu'il se pose quand même un problème fondamental autour de cette définition.

M. TETLEY: Vous me permettez de noter, Me Marois, que notre intention était d'exempter les ventes commerciales, comme votre confrère l'a suggéré, dans les règlements. Evidemment, il faut que vous voyiez les règlements avant de formuler un jugement.

M. MAROIS: Bien sûr.

M. TETLEY: J'ai peur de mettre toutes ces restrictions dans la loi, parce que c'est difficile de modifier une loi. C'est beaucoup plus facile de modifier un règlement.

M. MAROIS: D'accord. En terminant sur ce point, je vous rappelle simplement ce que je disais au début en ce qui concerne une pratique qui commence à se développer et qui est la location de terrains pour fins de camping. Entre autres, il y a eu une entreprise qu'on suit de très près présentement et qui loue plus de 300 terrains avec des techniques de pression qui sont exactement les mêmes que celles qui ont été utilisées par des entreprises qui sont bien connues pour vendre des terrains. Je veux vous rappeler aussi que déjà, la plupart des terrains de camping tombent sous la coupe de la Loi de l'hôtellerie du Québec, qui prévoit des dimensions très spécifiques minimales pour les lots propres à des terrains de camping. Encore là, bien sûr, il y a une définition de "lot" qui est rattachée à cette loi, puisqu'il ne s'agit pas de lots qui apparaissent à des cadastres.

Notre remarque suivante porte sur l'article 18, mais, au préalable, j'aimerais vous soumettre une remarque, en passant, sur l'article 16, qui est ce fameux article qui stipule que " le surintendant n'est pas responsable à l'égard des tiers de l'exactitude des renseignements contenus dans un prospectus."

Bien sûr, on comprend le sens d'un article comme celui-là. Cependant, on voudrait vous soumettre le problème qu'il pose très souvent en pratique. C'est exactement le même genre de problème qui se pose présentement dans les fameux dossiers explosifs, en particulier de la Société centrale d'hypothèques.

Lorsque des projets de développement d'habitations ont été approuvés, bien sûr, l'autorisation écrite de la Société centrale apparaît sur des documents. Très souvent, on se sert de ce fait comme un des éléments de marketing ou de promotion du projet, si bien que la majorité des citoyens qui nous ont contactés pour nous soumettre des problèmes qu'ils ont eus sont portés à croire que la responsabilité de la Société centrale est directement liée et impliquée. Or, vous savez, comme moi qu'il y a une jurisprudence très claire là-dessus, parce qu'il y a une disposition analogue à celle que vous nous proposez pour le bill 32 dans la loi qui réglemente la Société centrale et sa responsabilité n'est absolument pas impliquée.

Donc, bien que soit stipulé que le surintendant n'est pas responsable, il est fort probable que, dans la pratique, dans les prospectus, va apparaître, dans la promotion, l'autorisation écrite du surintendant de distribuer un prospectus. Dans la majorité des cas, dans l'esprit des citoyens, on va croire qu'il y a une responsabilité directe, liée, du surintendant, ce qui ne sera pas le cas. Ce n'est pas sans causer des problèmes. On se demande si la formulation de l'article 16 ne devrait pas être reprise, compte

tenu de cette réalité pratique qui existe tous les jours.

En ce qui concerne l'article 17, à l'article i8 qui réglemente les ventes de terrains situés à l'extérieur du Québec, il est prévu que cela doit se faire par l'intermédiaire exclusif d'un courtier qui est détenteur d'un permis. L'article stipule: Sous peine de nullité du contrat. On pense que dans le cas de l'article 18, c'est une excellente disposition. Il n'est peut-être pas inutile de rappeler qu'une jurisprudence, maintenant de plus en plus claire et ferme, fait une distinction fondamentale entre du droit administratif et du droit civil, tant et si bien qu'on est porté à croire que, parce qu'une entreprise ne respecte pas une disposition de droit administratif, par exemple, fonctionne sans avoir un permis, forcément, par voie de conséquence, le contrat civil est annulable. Vous savez comme moi que ce n'est pas le cas, à moins que le droit statutaire ne le spécifie. C'est donc une excellente disposition dans le cas de l'article 18.

Or, dans l'article 17, la même disposition n'apparaît pas. Il est prévu, bien sûr, que si la transaction portant sur un contrat de vente ou de location de terrains au Québec n'est pas conforme aux articles 12 et 13, donc au prospectus, à l'autorisation du surintendant, l'acheteur ou le locataire pourra exercer une faculté de résolution dans les 90 jours. A cause, premièrement, de la raison et de l'argument que j'ai invoqués pour justifier, à notre avis, la justesse de la disposition inhérente à l'article 18, nous demandons que la même disposition soit rattachée à l'article 17 et qu'il soit spécifié que, dans les cas où les conditions prévues aux articles 12 et 13 ne seraient pas respectés, le contrat soit entaché de nullité du contrat. Ce ne sont pas des distinctions, vous le savez comme moi... Dans la pratique des choses, il y a une nuance fondamentale entre une faculté de résolution d'un contrat et une nullité attachée à certaines opérations civiles qui ne seraient pas conformes à des procédures administratives prévues par du droit statutaire. Bien sûr, vous prévoyez une faculté de résolution de 90 jours, ce qui est un délai quand même assez long, mais cette faculté de résolution prévue dans le bill 32 n'est pas la même que celle qui est prévue, par exemple, dans la loi 45 dans les cas de résiliation de contrats, puisque dans ces cas on peut invoquer, en vertu de la loi 45, cette faculté de résolution sans aucun motif particulier, parce que c'est une faculté très large.

Dans le cas présent, cette faculté est liée à un certain nombre de conditions précises qui ont été respectées ou non. Mais, il s'agit quand même d'une faculté de résolution encadrée de façon passablement précise.

D'autre part, la différence entre cette faculté de résolution et la nullité, c'est que la nullité fait partie du domaine de l'ordre public et elle peut être même, vous le savez comme moi, invoquée directement par un juge à l'occasion d'un litige. Donc, nous demandons que, dans la même mesure, cette disposition, à l'article 17, prévoie la nullité du contrat.

Cela nous semblerait être une chose normale.

Par ailleurs, et ceci est relié à la même question — et là, nous avouons que nous n'avons pas la réponse magique — l'article 19 prévoit que l'action qui est basée sur les articles 17 et 18 se prescrit par un an à compter de la date du contrat. Imaginons que vous reteniez notre suggestion de modifier l'article 17 et de remplacer la faculté de résolution par une nullité du contrat, si les conditions prévues aux articles 12 et 13 ne sont pas respectées, qu'est-ce qui va arriver après une année? Le consommateur a signé un contrat avec une entreprise qui ne respecte pas les conditions prévues aux articles 12 et 13. Après un an et un jour, on ne pourra plus invoquer la nullité? Qu'est-ce qui va arriver? En d'autres termes, cela signifie qu'une entreprise pourrait attendre un an, si le consommateur ne fait pas ses paiements et n'a pas invoqué la nullité, et là, prendre action, et le consommateur, lui, aurait perdu sa faculté d'alléguer la nullité du contrat, mais l'entreprise, elle, pourrait récupérer les sommes qu'elle aurait, au fond, illégalement extorquées à un consommateur puisque, pendant une période d'un an, le contrat a été entaché de nullité. Vous voyez comme moi le genre de problème que cela pose. Nous vous demandons donc de réexaminer ces deux articles de très près.

En ce qui concerne les permis, il ne s'agit pas d'une remarque qui tend à modifier le projet de loi comme tel mais qui soulève un problème d'administration ou d'application de la présente loi. Nous avons été appelés à suivre l'application de certaines lois qui supposent et impliquent l'émission de permis, que ce soit la loi 45 ou que ce soit la Loi de l'enseignement privé. Dans bon nombre de cas, on a vu imposer une amende minimale notamment dans les cas de la Loi d'enquête fédérale sur les coalitions frauduleuses, les articles 33c) et d) qui réglementent la publicité trompeuse. Ceci s'est produit à cause du fait que les sanctions pénales prévues laissent une latitude, une marge de jeu au juge. C'est l'article 55, je crois, qui prévoit les sanctions pénales. Or l'article 55 dit que, dans le cas d'une corporation, l'amende peut être d'au moins $500 et d'au plus $25,000. Dans la plupart de nos lois, c'est le genre de latitude qu'on laisse normalement au juge.

Or dans la pratique des choses, notamment dans les cas de la publicité trompeuse, selon les paragraphes c) et d) de l'article 33, dans les cas aussi qu'on a pu vérifier d'application de la Loi de l'enseignement privé, dans les amendes données par les tribunaux à des entreprises exploitées sans permis, généralement, les juges commencent par donner des amendes minimales. Or, dans bon nombre de cas, pour certaines entreprises, il est moins coûteux de fonctionner illégalement, de payer l'amende que de se soumettre à la loi, de telle sorte qu'en fin de compte,

l'objectif visé par le contrôle, par le permis, est, dans la pratique, contourné par l'entreprise.

Evidemment, la demande que nous formulons dans notre mémoire est nouvelle. On ne la trouve pas, à ma connaissance, je ne crois pas, en tout cas, sous réserve de vérifier, dans le droit statutaire actuel. Mais on demande dans le cas spécifique des permis d'une entreprise qui fonctionnerait sans permis, que l'amende, elle aussi, soit spécifique et que cette marge de latitude ne soit pas laissée aux tribunaux. Nous formulons une suggestion quant au montant des amendes qui sont prévues par la loi. Il nous semble que c'est extrêmement important, si on veut que le minimum de première étape de respect et d'application de la loi soit respecté par les entreprises, que, sur ce plan, la loi ait suffisamment de dents pour qu'elle ne puisse pas être contournée dans les faits.

M. TETLEY: Oui, ça existe apparemment dans la loi des contrôles des permis d'alcool. Et c'est intéressant. Nous avons appris, à notre grande surprise, la force des permis dans le cas des tapis vendus à Montréal. Nous avons retiré certains permis avec un très grand succès jusqu'à maintenant, sauf que certains vendeurs de tapis de Montréal ont trouvé d'autres commerces ou ont changé leur nom, mais je crois que le pouvoir d'émettre ou pas un permis est très important. Et la question des amendes, que ce ne soit pas discrétionnaire, c'est intéressant. C'est lourd comme article. D'autre part, dans le cas d'Inspiration et Succès, par exemple, après des procédures et des procédures, il y a eu une amende de $500 et ça a été une grande déception, évidemment, pour le ministère, mais c'était le jugement d'un juge de Québec.

M. MAROIS: Encore une fois, bien sûr, il se trouverait à y avoir dans la loi, dans certains cas spécifiques, des sanctions qui auraient énormément de mordant. Encore une fois, ça s'appliquera uniquement dans les cas d'entreprises qui fonctionnent illégalement. Et c'est vraiment l'objectif qu'on croit être celui de la présente loi, de mettre un terme à ces abus. Il y a des cas d'espèce. Il y a des exemples qui doivent être faits, sans quoi ça devient une risée.

Dans le cas de la Loi de l'enseignement privé, certaines maisons ne détenant pas de permis ont été condamnées à des amendes de $100 à deux ou trois reprises, et par la suite le ministère a émis des permis. Le cercle se trouve fermé complètement. Il n'y a plus personne qui va respecter la loi.

M. TETLEY: Ce n'est pas mon ministère qui a émis les permis.

M. MAROIS: Non, quoique au chapitre de la protection des élèves, il nous semble que ce serait peut-être une chose heureuse que l'ensemble des bouts de lois qui régissent le consommateur tombent sous la coupe des mêmes responsables pour éviter un émiettement.

Pour poursuivre essentiellement dans le mê- me sens, — ça ne touche pas directement la loi, et c'est le problème que vous aurez à examiner dans la préparation des règlements — en ce qui concerne les cautionnements, nous demandons de tenir compte de la valeur habituelle des biens qui seront régis par le présent projet de loi. Il s'agit, au minimum, d'environ $1,000 et d'une valeur moyenne se situant entre $2,000 et $3,000. Ce sont les cas courants de vente de terrains sous pression, et il y aurait lieu de prévoir des cautionnements proportionnellement aussi élevés que ceux qui sont prévus actuellement par la Loi de la protection du consommateur, qui fait varier le cautionnement requis selon la considération habituelle des ventes et selon le nombre de représentants.

Nous pensons que c'est un élément très important, parce que, vous le savez comme moi, dans bon nombre de cas on exerce, pour des consommateurs, des recours en vertu du code pénal. On obtient des amendes, des sanctions, on exerce des recours civils. Les entreprises ont toutes sortes de moyens, même à cette étape, pour échapper à l'application ou à l'exécution de la loi faite pour donner justice aux consommateurs, soit par des procédures ou des techniques comptables, soit simplement en recourant à la faillite. Nous, nous pensons que le cautionnement est un des moyens d'exécution d'un jugement, le cas échéant, et que des mesures très précises et importantes doivent être prises dans ce sens-là.

En plus, il y a un élément additionnel qui pourrait peut-être être retenu et qui était intégré dans l'article 820 du règlement de la loi 45, c'est celui-ci: Selon la loi 45, lorsqu'on poursuit une compagnie, si on en avise le directeur de l'office ou le ministre, celui-ci a le droit d'exiger un cautionnement additionnel de l'entreprise pour garantir, le cas échéant, l'exécution du jugement. Il nous semble que c'est une disposition qui devrait être retenue quand on verra à préparer les règlements.

Toujours dans le même sens de l'application de la loi, en ce qui concerne l'administration de cette loi, étant donné ce qu'on a pu constater — bien sûr ça ne relève pas, encore une fois, directement de votre ministère, mais ce sont quand même des constatations quotidiennes que nous avons faites, et il nous semble important de vous les souligner — dans le cas de la Loi de l'enseignement privé qui a été adoptée en 1968, qui est entrée en vigueur en juillet 1969, très peu de poursuites avaient été prises en 1972. Les poursuites entamées l'ont été par des consommateurs individuellement.

Il nous semble qu'on devrait prévoir, le cas échéant, tout le personnel, les ressources humaines et financières qu'il faut pour que la machine administrative soit très efficace dès l'adoption de la loi, l'entrée en vigueur des règlements pour qu'elle puisse rapidement être mise en application sans quoi s'enchaînent forcément des délais importants qui font qu'à toutes fins pratiques, la loi n'a aucune espèce d'application.

Nous demandons aussi que le ministère se donne les moyens de publier dans les plus brefs délais les noms aussi bien des individus que des corporations qui détiennent un permis du ministère que ceux à qui le permis a été refusé, suspendu ou annulé. De même nous demandons que soit prévue la publication de toute condamnation pénale. Nous pensons que cela fait partie des éléments de base à la fois d'information des citoyens et, d'autre part, dans le genre "avis public" à ceux qui voudraient tenter d'utiliser les mêmes techniques commerciales douteuses.

M. TETLEY: Vous me permettez de noter que nous avons publié les noms, etc., dans le cas de notre loi 45, comme vous l'avez suggéré.

Hier, j'ai rencontré une journaliste qui s'est occupée pendant presque deux ans à temps plein de la protection du consommateur, pour un grand journal de Québec et elle s'est retirée du sujet, non pas parce qu'elle était déçue du gouvernement mais de la population. Elle a dit: J'ai écrit des articles, j'ai avisé le public, j'ai tout fait. Elle a été à la radio, partout — un peu comme moi — et, malgré tout, le public a acheté Inspiration et Succès ou d'autres contrats semblables très frauduleux. Et il y a le problème d'éducation et de publicité. On peut peut-être faire trop ou le public parfois veut acheter ou contracter malgré les avis de tout le monde. Je crois que c'est un problème.

M. MAROIS: C'est exact. Mais cela témoigne peut-être aussi de la nécessité d'investir des sommes beaucoup plus importantes dans l'information et dans l'éducation populaires par des techniques et des moyens modernes, au fond, ceux qui sont utilisés pour "marketer" les pratiques commerciales douteuses. Sans cela, il est évident qu'il n'y aura pas de contrepoids. Une annonce d'une page dans un journal qui parait à tous les six mois ne fait certainement pas le contrepoids à une pression constante qui vient d'une annonce publiée dans le même quotidien, mais tous les jours et allant dans le sens opposé. Cela, c'est sûr.

Nous demanderions également que soit inclus dans le projet de loi 32 l'équivalent de l'article 118 de la loi 45. Vous savez que ce dernier article est l'article qui donne une ouverture ou une extension de la notion de lésion des mineurs aux majeurs et qui prévoit que "tout consommateur dont le commerçant a exploité l'inexpérience peut demander la nullité de son contrat". Nous croyons que dans la mesure ou cet article a été justifié pour la loi 45 nous ne voyons pas pourquoi il ne le serait pas également, surtout dans la mesure où il s'agit de sommes encore beaucoup plus importantes pour les citoyens qui sont impliqués dans la présente loi. Nous croyons que cela devrait s'appliquer et il y a déjà un précédent dans ce sens.

M. TETLEY: Nous avons évidemment étudié cette solution ou cet article pour le bill 32 parce que c'est de nouveau dans le bill 45. Et c'est une modification du code civil qui était tout simplement pour les mineurs. Mais dans le cas d'une vente de terrain, si deux ans après ou même après une période plus longue, le citoyen va à la cour et demande l'annulation pour son ignorance ou son inexpérience, cela peut affecter énormément le titre de nos terrains â Québec.

C'est une question de prêteurs d'argent qui ne seraient peut-être pas prêts à en prêter. Puis-je noter que je regrette qu'à ce jour aucun prêteur d'argent ne soit venu devant la commission? C'est pourquoi j'ai prolongé le délai. Encore une fois, dans les cas de terres, d'immeubles, si vous donnez trop de délais vous allez affecter les hypothèques, les prêts et les titres des acheteurs.

M. MAROIS: Je ne sais pas si vous vous souvenez quand il a été question d'inclure cet article dans la loi 45. Il serait peut-être intéressant de relever les commentaires qui avaient été faits à l'époque par les porte-parole des groupes financiers. Ils avaient formulé des objections bien arrêtées et radicales à un article comme celui-là, alléguant précisément que ça allait affecter le commerce et le reste. C'était l'argumentation normale venant de leur part sur un article comme celui-là. Personne n'est encore en mesure de vérifier la portée de cet article puisque la loi, à toutes fins pratiques, vient à peine d'entrer en vigueur. On verra à l'usage puis à l'usure ce que ça donne.

Encore une fois, il faut jamais oublier que dans tous les cas où les commerçants ou ceux qui sont appelés à financer — que ce soit par des créances hypothécaires ou par du financement personnel — des contrats de vente de biens meubles ou immeubles, dans tous les cas où ces gens se comportent de façon civilisée, normale, en vendant un produit de qualité, ils n'ont aucune espèce de raison de croire que le marché va être perturbé ou que qui que ce soit va leur causer des ennuis. Bien sûr, tous les consommateurs ne sont pas parfaits. Ce n'est pas du tout ce que je veux soutenir ou alléguer. Cela s'appliquera dans les cas où, véritablement, les citoyens ont besoin d'être protégés, de disposer de recours, d'autant plus que le consommateur peut plaider l'inexpérience. Encore, il va falloir quand même, j'imagine —on le verra dans l'application de l'article 118 — en faire la preuve. Ce n'est pas un article d'annulation automatique dû au simple fait qu'on allègue devant l'honorable juge l'inexpérience. Il va falloir quand même l'étayer et la prouver. On verra peut-être que ce n'est pas une chose aussi simple que ça, en partant. Donc, je ne crois pas, M. le ministre, que ça puisse perturber considérablement le marché. Vous venez de le soulever vous-même, vous lancez un appel aux porte-parole des groupes financiers pour qu'ils se fassent entendre. Si eux-mêmes, à l'heure ac-

tuelle, ne réagissent pas sur ces articles c'est peut-être qu'ils croient qu'au fond les pratiques vont s'ajuster d'elles-mêmes et que finalement ça ne va pas bousculer mer et monde. Enfin, c'est notre point de vue à nous, remarquez.

En ce qui concerne toujours le projet de loi, on demanderait, comme on l'avait fait pour la loi 45, que soit prévue une faculté de résolution de tous les contrats réglementés par ce projet de loi, pour les consommateurs, dans les 30 jours. Bien sûr, vous avez prévu une faculté de résolution dans un cas très spécifique, pour 90 jours. On ne demande pas 90 jours, on demande 30 jours. Si vous me permettez, je voudrais expliquer un peu pourquoi. Généralement on nous dit, devant des recommandations comme celles-là: Mais vous imaginez ce que ça va donner sur le marché, ça va être épouvantable, ça va tout perturber. Pendant 30 jours qui que ce soit peut se prévaloir du droit de résolution. Dans le cas de la loi 45, on disait: Vous voyez ce que ça va donner, un consommateur peut utiliser un bien, il peut le détériorer; au bout de 30 jours, il décide qu'il n'en veut plus, il le remet, ça va être épouvantable sur le marché. On est dans le domaine immobilier et le problème n'est pas du tout le même. On voit mal comment quelqu'un pendant 30 jours pourrait utiliser un terrain, le massacrer complètement et que ça puisse conduire à des pratiques commerciales incroyables. Mais dans la pratique des ventes ou locations de terrains sous pression, à l'heure actuelle, d'après ce qu'on a constaté, l'acte notarié lui-même ne vient uniquement que lorsque tous les paiements ont été faits. Généralement, c'est un an après la signature du contrat aux fins de titres ou de la promesse de vente. Deuxièmement, on croit que les commerçants honnêtes, qui ont une pratique commerciale normale et de qualité, n'ont absolument rien à craindre, au contraire, d'une faculté de résolution comme celle-là, si ce n'est le fait que peut-être elle sera un élément additionnel pour nettoyer le marché et finalement favoriser le commerçant honnête, d'autre part.

On pense, au fond, qu'il s'agit là d'une mesure préventive et que le simple fait de l'inclure dans une loi, même si cela ne donne lieu à aucune espèce d'application éventuelle, pourra assainir et nettoyer le marché. Vous savez comment certains commerçants s'y prennent déjà pour contourner la faculté de résolution des contrats faits par des vendeurs itinérants sur la loi 45. Ils font tout simplement en sorte que la livraison de la marchandise se fasse uniquement après l'écoulement de la période de cinq jours, tant et si bien que le consommateur a la marchandise uniquement après cinq ou six jours. C'est à ce moment-là qu'il est à même de mesurer si cela correspond à ce qui avait été défini et prévu au contrat, acheté, etc.

A ce moment-là, le délai étant écoulé, il a perdu sa faculté de résolution. Il peut toujours recourir à certains mécanismes juridiques, mais

celui qu'on lui avait accordé au point de départ, certaines entreprises ont déjà trouvé le moyen de le contourner. On pense que cela pourrait s'appliquer à l'ensemble des contrats réglementés par cette loi.

M. TETLEY: Vous me permettrez de vous signaler que, dans le cas d'une vente d'immeubles, une personne peut, suivant votre suggestion, signer un contrat, un ordre d'achat ou un ordre de vente d'une certaine maison avec un tel et, dans les trente jours, elle peut aller voir un autre vendeur, signer un autre contrat, montrant le premier qu'elle a signé pour prouver qu'elle essaie de trouver un meilleur prix. Elle peut même faire cela deux ou trois fois pour, finalement, annuler les deux ou trois contrats précédents, même un acte notarié.

Dans le cas d'immeubles, on joue avec quelque chose de très spécial et je me demande si on ne va pas bouleverser la vente d'immeubles si un tel droit existe.

M. MAROIS: Encore une fois, il ne faut jamais perdre de vue le genre de pratique commerciale à laquelle, nous le croyons, vous cherchez à mettre un terme par le présent projet de loi. Le cas que vous évoquez suppose, quand même, un consommateur qui dispose déjà d'un certain revenu et qui est capable de se permettre ce genre de transactions. Cela me semblerait, à première vue, être un cas d'espèce par rapport aux pratiques auxquelles vous voulez mettre un terme présentement qui, elles, touchent précisément le citoyen le plus démuni, en règle générale, qui, de toute manière, n'a pas les moyens de se permettre le genre de transactions auxquelles vous faites allusion.

M. TETLEY: Notre solution est différente, c'est celle d'insister sur le prospectus, sur la divulgation de tous les faits, des vraies qualités de la terre ou de l'immeuble en question, de donner droit au citoyen de faire son choix et, après, il est visé.

Au lieu de lui laisser trente jours pour faire un meilleur achat ou pour trouver un meilleur marché, l'économie des bills 32 et 45 est de divulguer les qualités et, après cela, le consommateur est visé. Je trouve plusieurs pièges dans votre solution. De plus, je crois que le consommateur a une certaine responsabilité; il doit faire certaines recherches. Pour notre part, nous voulons éviter certaines pressions des vendeurs par notre système de divulgation.

En tout cas, je prends votre suggestion en considération. Cela existe dans les autres provinces, mais je crois que c'est dans le cas des terrains vendus hors des frontières. Il y a un certain délai.

M. MAROIS: Si vous permettez, M. le Président, M. Bourdon qui est ici avec moi voudrait ajouter quelques commentaires sur ce point précis.

M. BOURDON: La crainte que le ministre Tetley fait voir, à savoir que la faculté de résolution de trente jours soit peut-être une injure pour les consommateurs, je pense qu'elle est peut-être mal fondée, entre autres; si on regarde à l'intérieur du bill 45, les vendeurs itinérants, cinq jours, je ne pense pas que vous ayez eu à ce jour de plaintes à l'effet qu'il y ait eu un genre de "shopping" à ce niveau. Ce sont peut-être des circonstances assez différentes parce que la vente doit se faire ailleurs qu'à l'adresse du commerçant.

Il y a aussi une autre chose, quand on dit à l'article 13 c) que le consommateur ou l'acheteur doit signer un reçu attestant qu'il a pris connaissance du prospectus, c'est un peu là-dessus que vous vous fondez pour dire que le consommateur sachant ce qu'il va acheter devrait y penser avant d'acheter. On a une expérience avec, entre autres, les compagnies de finance et l'application de la Loi sur les petits prêts où la loi stipule que tous frais supplémentaires font partie du coût du prêt, comme le stipule le bill 45. Et il y a une condition spéciale à ça, c'est seulement si c'est libre et volontaire. Si je paie une assurance, ça altère mon prêt, si je la prends librement et volontairement et si je la demande, ça peut faire partie du montant principal du prêt.

La pratique courante des compagnies veut qu'elles aient ajouté une clause au formulaire de prêt qui stipule à toutes fins pratiques: J'ai demandé à avoir une assurance-vie, je la demande librement, volontairement, je ne suis pas forcé, je sais que si je ne l'accepte pas, je vais quand même avoir le prêt. Et là, elles font signer le consommateur. C'est une technique purement juridique parce que, à toutes fins pratiques, essayez d'emprunter d'une compagnie de finance sans avoir une assurance-vie et une assurance-accident et vous ne serez pas capable. Tout ministre que vous soyez, je pense qu'il n'y a personne qui va réussir à le faire, elles veulent protéger leurs créances. Et finalement, la signature attestant la connaissance du prospectus va être elle aussi: Tu signes ça, sans ça je ne te vends pas ou bien... Ça va être déjoué facilement.

Il y a aussi deux autres raisons à l'intérêt d'inclure une faculté de résolution sans condition pour les ventes de terrains, ça va permettre dans un délai de trente jours au consommateur de se rendre sur son terrain. Là encore, les abus que la loi essaie de corriger, ce sont des cas où le consommateur — vous l'avez mentionné tantôt — achetait un terrain au fond du lac. Pour acheter un tel terrain, il ne fallait pas qu'il ait vu son terrain. A l'intérieur d'un délai de trente jours, il va pouvoir au moins, s'il le veut aller le voir. S'il ne veut pas, ce sera sa faute, il court après, il pourrait au moins voir son terrain.

Un autre des aspects que la loi cherche à corriger, c'est que la plupart des ventes frauduleuses se font sous pression. Or, sous pression, on ne laisse pas le temps au consommateur de réfléchir à son achat. Les gens s'en rendent compte, le lendemain de l'achat ou deux jours après que, finalement, compte tenu de leurs moyens, compte tenu... Ils se mettent à réfléchir à toutes les raisons qui ont été invoquées la veille pour leur faire acheter le terrain, le développement de l'économie, que ce soit l'aéroport de Sainte-Scholastique, que toutes ces raisons sont plus ou moins artificielles et dans certains cas sont carrément fausses; alors la période de trente jours sert de "cool off", permet de voir le terrain, permet de se refroidir. On croit qu'à toutes fins pratiques c'est peut-être une des bonnes solutions pour corriger ces problèmes.

M. TETLEY: Vous avez parlé du bill 45, les cinq jours plus les deux jours de fin de semaine pour un total de sept jours. Comme Me Marois l'a noté, c'est au moment de la signature, non pas la livraison. Et nous l'avons fait exprès, parce que, pour un meuble ou une encyclopédie, ou pour un réfrigérateur vendu à la porte, le commerçant peut attendre les sept jours. Nous voulons donner un "cooling off period" pour le contrat mais, après la livraison, je crois que c'est trop tard. Je crois que nous avons bien fait dans le cas du bill 45.

Dans le cas du bill 32, la signature, c'est la livraison, dans le cas d'un immeuble, parce que l'immeuble est là. Vous pouvez enregistrer une offre d'achat, comme vous le savez. Vous avez le titre, vous l'avez, le contrat est fait. A mon avis — je vais étudier encore votre représentation — un "cooling off period" après la livraison — qui est votre solution ici — de trente jours est inacceptable, cela va affecter trop le commerce d'immeubles au Québec.

M. BOURDON: Sauf que dans le cas du bill 45, si je reçois le meuble à l'intérieur du délai de cinq jours, je peux l'endommager et évidemment là ça va causer des problèmes de restitution. Mais le terrain, je ne pense pas aller me promener avec des bâtons de dynamite ou envoyer une grue immédiatement; donc, il n'y a aucun dommage qui peut être causé au terrain. On entre plus dans les questions techniques, il pourrait y avoir des provisions dans la loi disant qu'entre autres l'offre ne pourra pas être enregistrée avant la fin du délai de trente jours, que le contrat ne pourra pas être notarié avant la fin du délai de trente jours.

A toutes fins pratiques, la livraison ne se ferait qu'à la fin du délai de trente jours.

M. TETLEY: Mais il y a plusieurs autres raisons. Il n'y a qu'un immeuble du genre au Québec. Vous affectez la vente pendant trente jours, la livraison, le titre. Si c'est une maison, vous pouvez la détruire. Si c'est une terre, vous pouvez détruire les arbres. Peut-être c'est une différence d'approche, mais je crois qu'il faut protéger le citoyen. Le moyen que je préconise est de donner toutes les chances et d'éviter

autant que possible les pressions. Mais, arrêter le commerce ou les droits des vendeurs, ou d'un cultivateur qui veut vendre sa terre, je crois qu'il y a trop d'arguments contre votre solution.

M. BOURDON: Mais ce que vous dites concernant la destruction de terres, de maisons ou du paysage, ce serait contré par ce que je vous disais précédemment, à l'effet que l'acheteur ne pourra rien faire sur l'immeuble acheté avant la fin du délai de 30 jours. Il n'en deviendra propriétaire qu'à ce moment Finalement, le délai de 30 jours sera un peu comme une offre véritable d'achat prévue dans le code civil.

M. TETLEY: On est propriétaire à la signature d'une offre d'achat ou d'une offre de vente.

M. BOURDON: Vous êtes propriétaire, mais c'est une offre d'achat telle que prévue, je pense, à l'article 1478 du code civil. Il y a moyen de s'en défaire. Si la faculté des trente jours était assimilée à cela, il y aurait peut-être des possibilités.

M. MAROIS: Encore une fois, comme vous le mentionnez, c'est forcément une approche différente du problème. Dans le cas des ventes de terrains sous pression faites par l'entreprise que vous mentionniez tantôt, les problèmes auxquels font face les consommateurs et qui traînent devant les tribunaux depuis maintenant deux ans — tout le dossier est maintenant en appel et c'est uniquement pour la partie pénale il y a 150 actions au civil de placées — auraient pu, dans bon nombre de cas, être très rapidement résolus.

M. TETLEY: Oui, mais je crois que nous avons d'autres pouvoirs dans le bill, y compris le permis. Prenez Lakefield Corporation. Elle n'avait aucun besoin de permis dans le temps, parce qu'elle vendait ses propres terres. Aujourd'hui, nous avons ajouté une troisième classe de permis dans le bill. L'étape dont vous parlez, j'avoue que nous l'avons considérée pendant plusieurs mois, ce printemps et l'an dernier, lors de la préparation du bill. S'il faut à l'avenir une telle étape qui va affecter tellement les droits des citoyens du Québec, peut-être que oui, mais je crois que c'est beaucoup mieux de commencer avec le bill tel qu'il est

C'est seulement une opinion. En tout cas, je vais l'étudier encore et la commission l'étudiera. C'est plus que son devoir, c'est sa responsabilité.

M. MAROIS: Avant de passer au point suivant de notre mémoire, je voudrais simplement souligner un oubli dans la préparation de notre texte, il a fallu faire relativement vite. C'est extrêmement important et c'est un point sur lequel est intervenu le Barreau, ce matin. Cela concerne les prêts consentis par des entreprises financières liées à des contrats qui seraient résolus ou qui seraient nuls suite aux dispositions des articles 17 et 18.

Nous demandons que soient inscrits dans la loi no 32 des articles équivalant aux articles 18 et 19 de l'actuelle loi no 45. Vous savez que les articles 18 et 19 disent qu'à toutes fins pratiques, si un contrat de financement ou de prêt est lié à un contrat de vente et si ce contrat de vente donne lieu à une annulation, automatiquement l'effet de commerce est aussi sans considération. Ceci est déjà aussi prévu dans la Loi des lettres de change et a mis un terme à un problème épouvantable.

Si une mesure comme celle-là n'est pas prévue dans le cas des ventes de terrains sous pression, vous voyez très bien ce qui arrive en pratique: on fait annuler un contrat, mais une compagnie de finances, elle, parce qu'elle a fait signer un contrat de prêt, pourra faire payer complètement le contrat de prêt au consommateur, avec les taux d'intérêt que cela entraîne et, celui-ci, de toute façon, se retrouvera sans terrain au bout de la ligne. Cela, il nous semble que c'est un point extrêmement important. C'est un oubli de notre part de ne pas l'avoir mis dans le mémoire parce que c'est vraiment un point fondamental.

M. BOURDON: Tel que le prévoit la Loi des lettres de change et les articles 18 et 19 de la loi 45, cela ne couvre que les cas de financement de ventes. Cela ne couvre pas, entre autres, comme le ministre le connaît sûrement, le cas de Lakefield où une bonne partie des contrats ont été financés soit par des prêts personnels, soit par des ventes ou par des compagnies de finances. A cela, on n'a pas trouvé de solution. Mais comment peut-on accorder une protection suffisante au consommateur pour qu'il puisse, à ce moment-là, ravoir son argent? Il va y avoir, évidemment, les cautionnements qui vont être là et qui vont probablement — c'est la seule solution que je trouve pour le moment — être la seule façon d'obtenir le remboursement. Parce que si c'est un prêt personnel, la société prêteuse n'ayant aucun lien avec le vendeur, on ne peut pas lui opposer la Loi des lettres de change, ni les articles 18 et 19. Quelle protection autre le cautionnement le consommateur pourra-t-il avoir dans ce cas-là? Je ne sais pas si vous y avez pensé ou si vous avez des solutions?

M. MAROIS: Dans les cas que nous avons constatés, les contrats, bien sûr, sont complètement distincts juridiquement. Or, dans la pratique des choses, vous savez comment cela se passe. Dans la même soirée, dans le même immeuble, dans un bureau, on faisait signer le contrat; dans le bureau voisin, on passait à la compagnie de finances. Mais là, le problème juridique qu'on avait et qu'on a devant les tribunaux, c'est de faire la preuve de la collu-

sion pour rattacher le contrat de prêt au contrat de vente. Je vous jure que la preuve de collusion, ce n'est pas une petite preuve à faire devant un tribunal. Cela est un point extrêmement important.

Maintenant, pour rapidement poursuivre et terminer, dans le cas de l'article 56 du projet de loi, il est prévu que "lorsqu'une corporation commet une infraction..., tout officier, administrateur, employé ou représentant cette corporation qui a prescrit ou autorisé..." ou, à toutes fins pratiques, qui n'a pas, en quelque sorte, inscrit sa dissidence, est lié et peut être lui-même passible de la même sanction et des mêmes poursuites, indépendamment du fait que la corporation soit trouvée coupable. On pense que c'est une excellente disposition. Ce qu'on suggère, c'est que soit ajouté son pendant civil parce qu'à l'heure actuelle, quand on poursuit une corporation au civil, il s'agit d'une personne morale. Mais les administrateurs, très facilement, se camoufflent très souvent, surtout dans les entreprises qui fonctionnent illégalement et qui fraudent les citoyens. Les administrateurs sur le plan civil, s'en tirent toujours à bon compte parce que l'entreprise, à toutes fins pratiques, a liquidé ses biens. On en peut plus exécuter le jugement.

Nous demandons que soit prévue, dans une action civile intentée en vertu de l'alinéa précédent, donc de l'article 56, première partie, la production d'une condamnation pénale en vertu de la présente loi ou de toute autre loi et qu'on établisse une présomption de responsabilité. Là, il faudrait lire: Contre la corporation, l'officier, l'administrateur, employé ou le représentant de la corporation." C'est peut-être une légère entorse au vieux principe de droit criminel. Le criminel et le civil ne se tiennent pas mutuellement en respect quoique, vous le savez comme moi, si une corporation est trouvée coupable au criminel, il a fallu faire une preuve, hors de tout doute raisonnable, alors qu'au civil, on se contente, généralement, d'une prépondérance de preuve. Donc, on croit que cela ne met vraiment pas la corporation dans une situation impossible sauf que cela permettrait d'ouvrir une porte additionnelle pour exécuter un jugement contre, finalement, ceux qui sont les vrais responsables. Parce qu'on a beau se camouffler derrière une corporation, c'est purement une abstraction. Il y a des individus.

Vous savez que dans certains cas, dans certaines entreprises, on a affaire à des gens de la pègre. On n'a pas affaire à des amateurs. Là, ce n'est pas le petit contrat de vente de biens meubles scandaleux.

Maintenant, nous demandons, pour terminer, que dans les cas des poursuites civiles et pénales, à cause des problèmes que cela implique, la lourdeur de la machine administrative normale, on aura beau chercher à la rendre la plus efficace possible, la doter, comme on le suggérait , de toutes les ressources financières et humaines qu'il faut pour appliquer rapidement la loi.

On pense aussi aux budgets requis pour faire les enquêtes avant de procéder et le reste.

Quant à nous, nous pensons vous suggérer deux mesures qui seraient susceptibles d'alléger la lourdeur de l'application de lois comme celle-là et probablement d'éveiller un sens des responsabilités de plus en plus important chez les citoyens. Ces mesures seraient les suivantes.

Ce serait d'abord, sur le plan pénal, la possibilité pour les citoyens d'intenter eux-mêmes, et sans nécessairement obtenir la permission du procureur général, des poursuites pénales dans le cas notamment de cette loi 32. Là, il ne s'agit pas d'un précédent, bien sûr, puisque cela existe déjà, car vous le savez comme moi, il y a des compagnies qui se plaignent présentement de ces fameux règlements concernant l'étiquetage des produits alimentaires. C'est donc que cela existe déjà chez nous. Nous croyons que cela allégerait considérablement la machine, que cela permettrait à des citoyens de se rendre responsables et de contribuer au respect et à l'application des lois chez nous. Nous demandons que non seulement ils aient cette possibilité mais aussi celle de participer à un pourcentage à déterminer des amendes qui seraient prévues par le jugement.

Par ailleurs, nous demanderions aussi que soit établie, le plus rapidement possible, la "class action", aussi bien au civil qu'au pénal. Vous savez que la "class action" existe déjà aux Etats-Unis, qu'elle donne des résultats passablement intéressants et évite des frais considérables. Je vous disais tantôt que, dans le cas d'une compagnie qui est présentement devant les tribunaux, on a dû intenter près de 150 actions civiles, dans lesquelles 150 actions il faudra faire 150 fois la même preuve et cumuler 150 fois les mêmes frais aussi. Tant et si bien, en fin de compte que bon nombre de citoyens ne croient pas pouvoir obtenir justice devant les tribunaux, ne croient pas aux avocats, ne croient pas aux juges et ne croient pas pouvoir obtenir justice dans notre société. Ils se disent en effet: C'est trop coûteux, c'est trop long et nous n'y arriverons pas. De toute façon, très souvent, aussi, pensez encore une fois qu'il y a des corporations qui sont dirigées par des gens de la pègre, et ils en ont peur.

A partir du moment où il est possible à tous ces gens de se regrouper dans le cadre d'une seule et même action, on réduit considérablement les frais, on permet à l'ensemble des citoyens de procéder devant les tribunaux, aussi bien au civil qu'au pénal, pour obtenir justice. Cela réduit considérablement les frais et cela permet à ces citoyens d'obtenir justice.

Nous croyons que ce seraient deux éléments additionnels qui pourraient, globalement, permettre d'éliminer bon nombre de "rackets", d'abus, de fraudes ou de pratiques commerciales douteuses qui existent présentement.

Voilà, pour l'essentiel, les remarques, les propositions et les suggestions que nous voulions soumettre sur ce projet de loi. Nous croyons, encore une fois, qu'il est, dans son ensemble, excellent, mais nous demandons aussi, bien sûr, aux membres de la commission

parlementaire et au gouvernement, de faire diligence, parce que nous croyons que ce projet de loi est urgent. Il y a déjà des milliers de citoyens québécois qui sont en train de faire les frais et de payer, il s'agit de centaines de milliers de dollars qui sont extorqués à des consommateurs. Nous vous remercions donc de nous avoir entendus. Si vous avez des questions ou des remarques, il nous fera plaisir d'y répondre.

M. LE PRESIDENT: Vous avez quelque chose à ajouter, M. Auger?

M. AUGER: Oui, une toute petite chose. J'aimerais, comme citoyen et, deuxièmement, comme délégué de notre association, vous dire ce qu'un citoyen espère lorsqu'il se présente devant une commission comme aujourd'hui.

Il espère, évidemment, comme Pierre nous le dit, que la loi soit adoptée le plus rapidement possible. Nous espérons aussi que les représentations que nous faisons seront retenues. Nous ne disons pas que nous avons le Saint-Esprit voisin de nous, mais nous espérons que ce que nous avons préparé comme mémoire, découlant de notre travail quotidien, sera retenu. Particulièrement, le mouvement ACEF que je représente a aussi une espérance qui n'était pas partagée par d'autres qui sont venus devant vous.

Je pense qu'on peut se baser sur l'état d'esprit dans lequel nous avons fait notre représentation pour espérer que nous serons capables, comme mouvement, d'aider à l'application de la loi. Je fais allusion aux moyens financiers de notre mouvement, car nous désirons pouvoir continuer à faire la lutte.

Demain matin, le comité exécutif de la fédération se réunit et il est encore question de savoir si, oui ou non, notre mouvement pourra continuer à faire un travail que nous jugeons utile. Merci beaucoup, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Auger. Au nom des membres de la commission, je veux vous rassurer en vous disant que les propos tenus ici devant cette commission, comme, d'ailleurs, devant toutes les commissions parlementaires, sont enregistrés et que ces enregistrements sont remis aux députés, à tous les membres de la commission, de même qu'à tous les autres députés qui en font la demande. Les légistes du ministère les étudient attentivement — à ce qu'on me dit et d'après l'expérience — et soyez certain que ces propos seront pris en sérieuse considération.

M. CLOUTIER (Montmagny): Si vous me permettez un simple commentaire, nous avons entendu aujourd'hui des mémoires extrêmement intéressants. Il y a eu des suggestions qui méritent d'être étudiées. D'ailleurs, le ministre l'a mentionné à chaque reprise. De la part des ACEF, la suggestion qui a été faite en dernier, au sujet de la "class action", de l'action collective, était extrêmement intéressante. Je pense que le ministre et ses légistes l'ont notée. Il y aurait lieu de pousser des recherches de ce côté-là pour faciliter les recours pour les citoyens. Cela va plus loin que certaines dispositions juridiques.

D'autre part, il y a eu l'excellente suggestion également du conseiller juridique des ACEF, et je pense qu'on devrait réviser ça.

En terminant, j'ai senti que le ministre a été impressionné par la présentation du mémoire des ACEF et qu'assez souvent il a pensé à la subvention tout au long de l'après-midi.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais remercier M. Auger, M. Marois et M. Bourdon. C'est un mémoire important et intéressant. Je voudrais noter aussi, M. le Président, que nous avons prolongé les délais de notre étude à la commission parlementaire, parce que, parmi plusieurs groupements représentant non pas simplement le monde financier, mais des associations de consommateurs, l'ACEF est la première et la seule jusqu'à maintenant qui est venue. Aucune autre association n'a fait de recommandations. Les commerçants, non plus, n'ont pas fait de recommandations. Lors du bill 45, un groupement qui nous a critiqué sévèrement, depuis deux semaines, n'a pas fait de recommandations en novembre 1970, ni en 1971, ni après la présentation du bill, ni durant la période d'un an d'étude des règlements. Finalement, six ou sept semaines après l'adoption des règlements et un an et un mois après l'adoption de la loi, j'ai reçu des lettres exigeant des changements dans la loi et dans les règlements.

Je suis prêt à tout changer, mais à la condition que nous ayons les recommandations avant l'adoption de la loi et des règlements. Encore une fois, je remercie tous les groupes et les membres de la commission.

M. le Président, j'ai fait la promesse, soit solennelle ou politique, de présenter aux membres de la commission des règlements du bill 45 et je crois que j'ai fait la même promesse pour le bill 32.

J'ai quelques changements et suggestions ici que je voudrais vous donner aujourd'hui. Je suis prêt à rester ici jusqu'à 11 heures ce soir ou même minuit afin d'étudier ces documents. Un autre membre de la commission a suggéré que nous revenions la semaine prochaine, soit le 26 ou le 28 septembre.

De toute façon, j'ai des règlements, qui ont été étudiés par le Conseil de la protection du consommateur hier et adoptés également par le conseil suivant la loi, au sujet du bill 45.

Il s'agit surtout de la publicité destinée aux enfants, je vais les distribuer aux membres et, si vous êtes d'accord, je suis prêt à discuter ça maintenant ou la semaine prochaine.

M. CLOUTIER (Montmagny): Pour ma part, M. le Président, je préférerais que nous prenions

connaissance des textes, parce que nous entrons dans une réglementation importante, la publicité pour les enfants. Je préférerais qu'on ait le document, qu'on l'étudie d'ici à la semaine prochaine et que la commission puisse se réunir...

M.JORON: Mardi...

M. CLOUTIER (Montmagny): Mardi, il y a une séance sur le code des professions où plusieurs membres de la commission siègent déjà; alors je pense que ce serait préférable peut-être jeudi.

M. TETLEY: M. le secrétaire l'a confirmée pour le 28, jeudi. Donc on peut ajourner, M. le Président, jusqu'au 28. Je vais distribuer aux membres les documents en question.

M. LE PRESIDENT: J'aimerais en profiter pour faire part aux membres des associations qui viennent devant les commissions parlementaires que tel que le ministre l'a dit tout à l'heure, il va vous proposer la réglementation. J'aimerais attirer votre attention sur le fait que, lorsque les règlements sont étudiés devant les commissions parlementaires, vous pouvez présenter des mémoires en rapport avec ces règlements-là. Mais à ce moment-là, les mémoires ne sont pas étudiés en commission parlementaire, comme on le fait pour les mémoires lorsqu'on étudie un projet de loi. C'est donc dire que vous ne pourrez pas intervenir dans la discussion lorsqu'on étudiera les règlements; seuls les ministériels peuvent intervenir. Lorsque vous présenterez un mémoire qui touche la réglementation, assurez-vous qu'il est complet. Tout ce que vous avez à dire, dites-le parce que vous n'aurez pas d'autres occasions pour le dire.

Est-ce clair?

La commission ajourne ses travaux au jeudi 28 septembre, 10 heures, salle 81-A.

(Fin de la séance à 16 h 28)

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