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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le jeudi 30 janvier 1975 - Vol. 16 N° 12

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Etude du rapport Gauvin


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières,

compagnies et coopératives

Etude du rapport Gauvin

Séance du jeudi 30 janvier 1975

(Dix heures treize minutes)

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs ! Les membres de la commission, ce matin, sont les suivants: M. Lachance (Mille-Iles), qui remplace M. Assad (Papineau); M. Beauregard (Gouin); M. Bellernare (Johnson); M. Bonnier (Taschereau); M. Burns (Maisonneuve); M. Chagnon (Lévis); M. Harvey (Charlesbourg); M. Harvey (Dubuc); M. Léger (Lafontaine); M. Marchand (Laurier); M. Picotte (Maskinongé); M. Roy (Beauce-Sud); M. Tetley (Notre-Dame-de-Grâce); M. Tremblay (Iberville).

L'honorable ministre des Institutions financières.

M. Tetley: Merci, M. le Président. Je note avec plaisir la présence de M. Jean-Louis Gauvin ainsi que de ses collègues, M. Rankin, Me Jean-Marie Bouchard et Me Belleau.

Je propose que l'ordre du jour suivant soit suivi : Tout d'abord, je fais motion pour que les commentaires de M. Rankin, du 10 décembre, soient déposés et insérés dans le journal des Débats. Ensuite, nous poserons des questions d'ordre général à MM. Gauvin, Rankin, Bouchard et Belleau; 20 minutes pour moi, 20 minutes pour le Parti québécois, 20 minutes pour le Parti créditiste et 20 minutes pour les députés. Si, par hasard, quelqu'un de l'Opposition est absent, les membres de l'Opposition auront au moins le même temps que le gouvernement, c'est-à-dire 40 minutes. Ensuite, nous poserons des questions à MM. Gauvin et compagnie concernant l'AutoBAC. Ensuite, les critiques du Barreau, son plan, et ainsi de suite, peut-être la CSN, les demandes des courtiers, etc., dans cet ordre.

C'est donc l'ordre du jour que je propose, un ordre général.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Lafontaine

Remarques préliminaires

M. Léger: M. le Président, il y aurait seulement deux points. Le premier: Je comprends la courtoisie du ministre des Institutions financières concernant la répartition du temps. Je ne voudrais pas qu'on en fasse une tradition, c'est-à-dire qu'on brise une tradition en posant le geste d'aujourd'hui, que nous avions accepté comme un cas spécial avant. La tradition veut que, dans une commission parlementaire, il y ait autant de temps pour l'Opposition officielle que pour le gouvernement.

C'est cela l'équilibre de la démocratie: Autant de temps pour l'Opposition officielle que pour le gouvernement. Le gouvernement présente des pro- jets et l'Opposition officielle a le même temps pour les critiquer.

Qu'il y ait aussi un temps important — je n'ai pas à en déterminer la durée — pour les autres partis reconnus de l'Opposition. Je n'ai pas d'objection qu'ils prennent le temps qu'il faut. Je ne m'opposerai jamais à cela. Mais qu'on essaie de dire que le temps de l'Opposition officielle sera prolongé par le fait que des membres des partis reconnus de l'Opposition pourraient être absents, ce n'est pas la tradition. La tradition est un temps égal pour les deux et je n'ai pas d'objection aujourd'hui, parce que mon deuxième point va tout simplement faire comprendre au ministre que je ne m'attarderai pas sur le premier point, mais je ne veux pas laisser passer cela pour qu'on le prenne pour un fait acquis. Normalement, l'Opposition officielle a le même temps que le gouvernement.

Le deuxième point est que, tel que nous l'avions dit au mois de décembre dernier, nous trouvons que la commission aujourd'hui, en convoquant nos distingués invités, aura peut-être éclairci certains points, c'est sûr, mais n'a pas l'utilité politique que nous espérions.

Nous croyons que le comité Gauvin a fait un travail en profondeur, un travail fantastique. Il a présenté un rapport sur lequel le gouvernement devrait se pencher. Par la suite, le gouvernement a décidé de faire siéger la commission pour entendre la critique du rapport et non pas la critique d'une position gouvernementale. Nous avons toujours été contre cet objectif et, aujourd'hui, nous sommes rendus à contre-interroger les membres du comité Gauvin sur les différentes appréciations des groupes directement et je dirais même égoïstement impliqués dans le dossier.

Je pense que nous faisons fausse route et que c'est uniquement par courtoisie, d'une part, spécialement pour les membres du comité Gauvin, M. Belleau, M. Bouchard, M. Rankin et M. Gauvin, que nous acceptons d'écouter leurs réponses ou les arguments qu'ils peuvent apporter aux déclarations des différents groupes qui sont venus ici pour notre information et par déférence pour les autres députés qui auraient peut-être d'autres questions à poser sur le sujet. Mais nous trouvons que nous perdons du temps, en ce sens que c'est une décision politique, provenant du gouvernement, qui devrait être prise.

Il devrait dire: Voici, nous avons le rapport des experts qui, d'une façon impartiale, froide et logique, ont analysé une situation conflictuelle entre les tenants de la situation actuelle et ceux qui bénéficieront ou perdront par un changement nécessaire pour l'ensemble de la société. D'un autre côté, nous avons eu des réactions de ceux qui sont directement concernés par ce changement proposé par un organisme mandaté par le gouvernement pour établir une solution de rechange devant le fouillis de l'assurance-automobile.

Devant cela, le gouvernement devait se dire: Voici, il faut prendre une position politique. Faut-il prendre et adopter intégralement le rapport Gauvin? Faut-il prendre la majorité des recommandations du rapport Gauvin et en voir les répercussions

sur les organismes concernés? Ces organismes concernés peuvent-ils mettre de l'eau dans leur vin? C'est un travail qui devait être fait par lé gouvernement. Il devait établir un échéancier des travaux de réalisation du projet gouvernemental, le soumettre à la commission parlementaire pour étude et, peut-être, convoquer les membres de la commission Gauvin pour obtenir leurs réactions devant la prise de position du gouvernement, eux qui sont un organisme d'étude et, par la suite, nous nous prononcerions.

Je pense, M. le Président, que ce n'est que par courtoisie pour les députés membres de cette commission et spécialement pour les membres de la commission Gauvin que nous allons y assister et, prendre des notes. Peut-être, parfois, il nous viendra, parce que cela va nous brûler les lèvres, quelques questions, mais je pense que nous n'aurons pas souvent l'occasion de prendre le temps qui nous est alloué parce que nous pensons que nous sommes déjà dans la période préhistorique de l'histoire de l'assurance-automobile et que nous devrions être rendus dans l'ère moderne et le gouvernement est encore en retard dans ce domaine.

Le Président (Houde, Limoilou): Le député de Beauce-Sud.

M.Roy: M. le Président, je voudrais dire tout de suite, au début de la commission, que, malheureusement, parce qu'il y a une autre commission convoquée ce matin, à dix heures trente, la commission parlementaire des engagements financiers, je regrette beaucoup de ne pouvoir continuer à assister à la séance ici, parce que le problème de l'assurance-automobile est une question qui nous intéresse d'une façon toute particulière.

Cependant, si la commission parlementaire poursuit ses travaux cet après-midi, je serai en mesure de revenir, parce qu'il est normal que la commission des engagements financiers termine ses travaux avant une heure. C'est une tradition établie de ce côté-là, de sorte que les travaux ne se continuent jamais dans l'après-midi.

J'aimerais dire simplement un mot. Nous sommes, ce matin, en commission parlementaire suite à une séance qui a eu lieu au mois de décembre et au cours de laquelle nous avions demandé de revenir au mois de janvier, étant donné le menu législatif extrêmement chargé à l'Assemblée nationale et tous les travaux auxquels nous devions participer.

Mais nous sommes également ici en face d'un précédent. C'est la première fois, en ce qui me concerne, que j'ai l'occasion de constater qu'on commence un deuxième tour de table, si on peut dire, pour rappeler à nouveau des personnes qui ont présenté un mémoire et ceux qui ont présenté des rapports pour les contre-interroger en commission parlementaire. J'aimerais bien savoir jusqu'où cela peut nous conduire, ce que cela va nous donner ensuite. Mais je n'aurais pas d'objection, d'un autre côté, à entendre les membres du comité Gauvin, s'ils ont quelque chose à ajouter, étant donné que c'est le rapport Gauvin que nous avions le mandat d'examiner et d'étudier. Il s'agirait alors de choses qui auraient été omises ou pour lesquelles les explications n'auraient pas été suffisamment précises. Mais, si on parle de faire revenir le Barreau devant la commission parlementaire, si on parle de faire revenir les autres organismes, si on parle de réexaminer le document du Bureau d'assurance du Canada, le projet BAC, je veux bien remercier le ministre des documents qu'il nous a donnés ce matin, mais si on recommence toutes ces choses, on perd énormément de temps avant de savoir quelles seront les intentions véritables du gouvernement. J'estime que cette commission parlementaire devrait être assez précise et assez brève de façon qu'on s'entende définitivement sur la façon dont la commission parlementaire doit terminer ses travaux. Si le ministre crée un précédent à l'effet de permettre à un des organismes de revenir devant la commission parlementaire, il va être obligé de permettre aux autres de revenir.

M. Tetley: Ce n'est pas notre intention.

M. Roy: C'est un précédent extrêmement dangereux. Si on se limite à interroger uniquement les membres du comité Gauvin...

M. Tetley: C'est vrai.

M. Roy: ...suite au rapport et aux nombreux mémoires qu'il y a eu devant la commission parlementaire, je n'ai aucune objection. Mais je n'aimerais pas, en ce qui me concerne, qu'on aille plus loin que cela.

M. Tetley: Parfait.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce que l'ordre du jour est accepté et acceptez-vous que les notes de M. Rankin soient incluses? (Voir annexe 1 )

M. Léger: Oui, M. le Président, pas d'objection.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Adopté. Le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

M. Tetley: M. le Président, permettez-moi de noter que j'ai aussi devant moi, et je l'ai distribué à l'Opposition, un document de l'AutoBAC, le Bureau d'assurance du Canada le 23 décembre.

Je n'ai pas l'intention de déposer certains chiffres. Je crois que M. Gauvin et compagnie ont vu ces documents et aussi notre ministère et je veux tout simplement noter que ces documents sont joliment en retard. Je note que, lorsque le BAC était ici, le 15 octobre 1974, le BAC, M. Moreau et M. Saint-Germain ont dit qu'ils avaient préparé leur plan au mois d'avril 1970. Je me réfère à la page B/6841 du journal des Débats et le BAC, cinq ans après, nous présente certains chiffres. Je trouve que c'est très tardif.

M. le Président, permettez-moi aussi de répondre au député de Beauce-Sud et un peu au député de Lafontaine, beaucoup au député de Lafontaine.

Ce n'est pas notre intention de convoquer d'autres témoins. C'était la simple politesse de laisser aux commissaires le droit de répondre à certaines allégations et stipulations des différents groupes qui sont venus ici et M. Gauvin et M. Rankin ont tous les deux préparé des réponses écrites que nous avons eu le plaisir d'entendre à notre dernière séance.

De plus, j'ai des questions à poser à ces messieurs au sujet du plan du BAC, parce que bien des personnes ont lu et ont écouté le BAC sans connaître vraiment la réponse de M. Gauvin, parce que le BAC a présenté un plan qui se croit mieux ou meilleur et il faut un éclaircissement pour le public; la même chose pour le Barreau.

Est-ce que le Barreau va payer les citoyens autant que cequi est prévu au rapport Gauvin? Je crois que la réponse est non. Les plans du Barreau et du BAC ne sont pas aussi généreux. Il faut que le public connaisse les réponses de M. Gauvin et je trouve... J'ai parlé à des citoyens dans tous les coins de la province, à des journalistes et à des éditeurs. On pense que les commissions parlementaires sont d'une très grande valeur et que le rapport Gauvin est très important, et il faut que le rapport ait de la publicité.

Le rapport a été l'objet de plusieurs semaines d'études publiques et je crois qu'il est sorti indemne. Il faut féliciter les quatre commissaires de leur rapport. Voici les raisons, M. le Président. Je crois qu'on peut peut-être terminer aujourd'hui. Je n'impose jamais le bâillon. S'il y a un seul député qui veut revenir une autre journée, je serai ici. Mais je crois qu'on peut poser facilement des questions aux commissaires aujourd'hui.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Lafontaine.

M. Léger: Le ministre a répondu très très partiellement à ma préoccupation. Je vais lui soumettre sixquestions précises et il jugera s'il peut répondre.

M. Tetley: A la fin.

M. Léger: Non, non. Immédiatement et vous répondez si vous pouvez ou non. C'est à la suite de déclarations que vous avez faites.

En date du 12 décembre, M. le ministre des Institutions financières a dit que le conseil des ministres a un échéancier sur la rédaction d'une loi pour l'assurance-automobile.

M. Tetley: Ce n'est pas vrai. J'ai dit que c'étaient plusieurs lois.

M. Léger: Sur le problème de l'assurance-automobile...

M. Tetley: Non.

M. Léger: ...vous avez un échéancier.

M. Tetley: C'est cela.

M. Léger: Ma première question: Quand M. Desjardins doit-il faire rapport?

M. Tetley: Aussitôt qu'il aura terminé ses études. C'est la réponse.

M. Léger: Si le ministre peut...

M. Tetley: Non, non. C'est la réponse.

M. Léger: ...attendre les six questions.

M. Tetley: M. Gauvin est venu ici. Vous posez vos questions et je vais répondre en temps et lieu.

M. Léger: D'accord. C'est parce qu'il y a une certaine logique dans les six questions.

M. Tetley: J'ai répondu à la première.

M. Léger: Je ne veux pas que vous fassiez une évasion verticale, une évasion parlementaire à mes questions.

M. Tetley: Non. J'ai déjà répondu.

M. Léger: Quand M. Desjardins doit-il faire son rapport?

M. Tetley: J'ai répondu. Deux.

M. Léger: Vous avez répondu. Ce n'est pas une réponse; vous venez de dire lorsqu'il sera prêt.

M. Tetley: C'est certain que c'est la réponse. Que voulez-vous? Lorsque vous serez prêt?

M. Léger: D'accord. Dans ce cas-là, pour combien de temps a-t-il été libéré de ses fonctions publiques pour faire ce travail?

M. Tetley: A peu près le 1er novembre. M. Léger: Pour combien de temps?

M. Tetley: II a commencé vers le 1er novembre. Il fallait terminer son travail. L'arrêté en conseil est jusqu'au 1er avril. Evidemment, il y aura un autre arrêté en conseil.

M. Léger: Autrement dit, cela va dépasser le 1er avril, son travail?

M. Tetley: Certainement.

M. Léger: Quand le ministre doit-il présenter un projet au conseil des ministres?

M. Tetley: Lorsque je serai prêt.

M. Léger: Quand la première rédaction du projet doit-elle être soumise au bureau de législation?

M. Tetley: Demandez au premier ministre, au

conseil des ministres, parce qu'il faut que cela soit étudié au conseil des ministres.

M. Léger: J'ai l'impression que vous allez être obligé de m'inviter au conseil des ministres.

M. Tetley: Je peux dire qu'il y a déjà une loi au comité de législation.

M. Léger: La Loi sur les transports.

M. Tetley: Non, je ne donne pas d'autre "hint" non plus et je crois...

M. Léger: M. le Président, si le ministre peut ne pas m'interrompre, étant donné que je vois qu'il n'a aucune réponse précise...

M. Tetley: ...très précise, une loi est déjà devant le comité de législation.

M. Léger: Un instant! Laissez-moi terminer. Je répète mes six questions pour la logique de l'affaire. On peut voir, d'après les premières réponses, que le ministre n'est pas branché. J'ai demandé: Quand M. Desjardins doit-il faire ce rapport? Quand le ministre doit-il présenter son projet au conseil des ministres? Quand la première rédaction doit-elle être soumise au bureau de législation? Quand fera-t-on le dépôt de ce projet de rédaction? Comment se fera l'étude du projet de loi? Quand doit-on prévoir la date des réformes? Tout cela ensemble. Je pense que c'est la préoccupation majeure de ceux qui ont travaillé depuis près de six mois, je parle de nous, de la commission parlementaire, à un projet, à un document de cette ampleur, comprenant une étude en profondeur de la situation actuelle. Je comprends que c'est complexe. Quant à nous, M. le Président, nous sommes rendus au point du non-retour, il faut qu'une décision soit prise et, pour arriver à une décision... A la première question que je pose, le ministre dit: Quand je serai prêt. Il a un mandat jusqu'au 1er avril et, après avril, on va renouveler cela.

M. le Président, le reste des autres étapes dépend de cela. Que le ministre dise qu'il va y avoir quelques lois de "réformette" ici et là. Cela me décourage. Il faudrait que vous m'invitiez au conseil des ministres pour que je convainque le reste du cabinet, puisque je ne suis pas capable de convaincre le ministre, le porte-parole responsable de ce dossier.

Je me demande ce qu'on va faire. Je vais vous écouter aujourd'hui bien poliment, bien gentiment, mais j'ai l'impression que nous perdons notre temps.

M. Tetley: Si vous perdez votre temps, partez. Je crois que vous perdez votre temps, parce que votre parti avait décidé, il y a trois ans, d'un certain plan. Vous avez même refusé de soumettre les idées du rapport Gauvin à votre convention. Vous avez refusé. C'est un peu comme votre augmentation de salaire...

M. Léger: Ce sont des affirmations gratuite que vous faites là.

M. Tetley: ...tout est décidé par une clique de six personnes qui ne sont même pas députés...

M. Léger: Cela fait déjà trois ans, M. le Président, que nous avions décelé ce problème d'une façon non intuitive, parce que nous sommes au milieu des gens, et le rapport Gauvin est venu confirmer, par une étude impartiale d'experts, ce que nous savions déjà intuitivement. Cela montre que nous sommes beaucoup plus près des problèmes des gens.

M. Tetley: J'ai parlé à un des sept membres de votre exécutif national qui, par hasard, est avocat de Joliette, et il préfère le plan du Barreau. Il est aussi cave que cela, mais il est gentil quand même.

M. Léger: C'est faux.

M. Tetley: C'est faux? Si vous voulez, je vais...

M. Léger: C'est faux parce que ce monsieur est dans mon comité.

M. Tetley: ...à une question de mon épouse.

M. Léger: II est dans mon comité et il est absolument d'accord sur la position du rapport.

M. Tetley: II est aussi cave que vous. Il préfère le Barreau. C'est cela.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tetley: Ce n'est absolument pas faux. Il l'a dit devant mon épouse. A sa question: Voulez-vous le "no fault"? Il a répondu: Vous savez, madame, je suis député de Joliette et je préfère...

M. Léger: Le député de Joliette, bien là, je ne me trompe pas. Il n'est pas dans mon parti, le député de Joliette.

M. Tetley: Je me corrige. Il a dit: Je suis avocat de Joliette et je préfère, après un certain niveau, le système de faute et que les avocats pratiquent. Autrement, ce serait triste pour nous autres. C'est un membre de votre exécutif national qui l'a dit sur une plage, en présence de mon épouse qui a posé la question que je n'ai pas osé poser moi-même...

M. Léger: J'ai l'impression que vous avez mal compris. Il a dû vous parler...

M. Tetley: Vous êtes une gang de caves, vous autres.

M. Léger: M. le Président, je comprends que vous êtes rendu dans la cave pour discuter...

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Léger: ...mais je tiens à vous dire ceci: C'est que les courtiers d'assurance et les membres du Barreau du Parti québécois, dans leur grande majo-

rité, incluant ceux que vous avez mentionnés et d'autres qui sont venus ici assister, sont d'accord sur le rapport Gauvin parce qu'ils savent que c'est pour le bien et l'intérêt général des citoyens. Ils savent qu'ils auront peut-être une certaine perte à subir dans leur domaine actuel, mais ils ont au moins l'objectif et l'idéal de l'avancement de la société québécoise. Pour être capable de faire la part des choses, ils ne sont pas comme des affamés pour essayer de protéger leur pain au détriment de la société québécoise.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Dubuc.

M. Harvey (Dubuc): Vous voulez dire que le député de Chicoutim est d'accord aussi sur le rapport Gauvin?

M. Léger: Le député de Chicoutimi? M. Harvey (Dubuc): Oui.

M. Léger: Oui, il est d'accord parce que c'est une décision du caucus.

M. Harvey (Dubuc): J'en prends bonne note.

M. Lachance: II est téléguidé par le conseil national.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît! Le ministre des Institutions financières.

M. Léger: On est démocratique, nous autres, parce que, si vous suivez votre congrès du Parti libéral, vous êtes bien mal pris parce que la commission Gauvin ne devrait même pas siéger.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! Le ministre des Institutions financières.

M. Tetley: M. le Président, je vais répondre aux questions ensuite. J'ai déjà répondu à toutes les questions, mais s'il veut, je vais faire un sommaire ensuite. Nous avons devant nous certaines gens. Je vais procéder, je vois qu'il est 10 h 38. M. Gauvin, j'ai trouvé votre document, que vous avez déposé il y a un mois, très important et intéressant. A la page 7, vous avez dit, parce que c'était une réponse générale de votre co m ité à to utes les questions soulevées par certains groupes, vous avez posé la question suivante: La notion de responsabilité est-elle de nature à prévenir les accidents? C'était votre question. Vous avez, après cela, préparé une réponse. Pourriez-vous, si vous voulez, j'ai votre texte ici... Avez-vous une copie de votre texte?

Peut-être pourriez-vous expliciter un peu cette question que vous avez vous-même posée, parce que je trouve que c'est une des questions primordiales du problème de l'assurance-automobile. M. Bouchard, peut-être, ou un autre membre?

Notion de responsabilité

M. Gauvin (Jean): Si vous me permettez, peut-être que les ex-membres du comité qui ont d'autres commentaires pourraient les ajouter.

Dans les remarques qui ont été présentées devant les membres de la commission parlementaire des institutions financières, on a souvent souligné que la responsabilité individuelle était un élément de prévention des accidents. Cela fait assez longtemps que plusieurs personnes s'interrogent sur le problème, à savoir si la responsabilité et l'assurance-responsabilité amènent, en fait, un élément de "deterrence", comme ils disent en anglais, ou aide à la prévention des accidents. A peu près toutes les études impartiales en sont venues à la conclusion que ce n'était pas le cas. J'en ai cité quelques-unes et je les ai ici. L'étude qui a été effectuée par le "Department of Transportation" du gouvernement américain est une étude sur l'assurance-automobile ou les accidents d'automobile et leurs compensations aux Etats-Unis. J'aimerais encore citer ce qu'on dit, en anglais, à la page 53 de ce rapport: "Unfortunately, the claim of a significant deterrent effect for the present automobile liability insurance system has, so far, proven unsusceptible to substantiation by empirical evidence".

Je pourrais remettre aux membres de cette commission au moins trois ou quatre autres études qui ont été faites par des gens qui n'étaient pas intéressés directement, et qui en sont venus a la même conclusion, et même plus.

Une commission connue sous le nom de "Ontario Law Reform Commission", qui s'est penchée, en fait, sur tout le problème de la compensation des victimes d'accidents d'automobile, arrive exactement à la même conclusion. Je cite, à la page 126 de ce rapport qui a été déposé... Soit dit en passant, sur ce rapport, les membres de cette commission, au nombre de cinq, sont, pour autant que je puisse m'en rendre compte, tous de formation juridique.

Je cite: "While opinions may continue to vary, we have come to the conclusion that the justification for the retention of the negligence action in motor vehicle cases does not lie in its specific deterrent value".

Je pourrais continuer comme cela. Je pourrais citerun rapport de Nouvelle-Zélande. Je pourrais en citer d'autres. Mais, dans les faits, ce que nous avons dit dans le rapport, c'est que, si la responsabilité individuelle a un élément de "deterrence", l'assurance-responsabilité vient l'enlever complètement. Dans les faits, les gens peuvent s'acheter une conduite, puisque c'est l'assurance-responsabilité qui va payer les dommages. Quand on parle de responsabilité, il faudrait bien faire une distinction entre la responsabilité devant les cours de justice pour répondre de ses actes, soit en vertu du code criminel ou du code de la route, et lorsqu'on poursuit une personne; il ne fait pas de doute que cet élément peut amener les gens à agir d'une manière plus sage dans la conduite des véhicules.

Si c'est exact que la responsabilité financière d'un individu influencera son comportement; à ce

moment, il faudrait lui faire assumer pleinement ses actes et lui faire payer les dégâts.

Et on ne peut qu'arriver à la conclusion de ce qui a été dit dans le rapport et on le répète, qu'à toutes fins pratiques, si c'est vrai, l'assurance-responsabilité est immorale. C'est ce que j'ai à dire sur le sujet. Je ne sais pas si mes collègues veulent ajouter quelque chose.

Avant, je pourrais peut-être me permettre d'ajouter que certaines personnes ont produit des mémoires que j'ai lus avec beaucoup d'intérêt, mais qui à mon sens n'ont apporté rien de nouveau par rapport à ce que nous avions reçu comme observations des groupes intéressés. Les gens disent: Avec le système d'assurance-responsabilité, quand on a un accident, notre prime augmente. Elle augmente après l'accident, non pas avant l'accident et, en plus de cela, elle n'augmente pas, en fait, pour punir l'individu. Elle augmente, parce que, statistiquement, on peut démontrer que la propension à avoir un deuxième accident lorsqu'une personne en a eu un est plus grande que pour les personnes qui n'en ont pas eu. C'est fondamentalement la raison pour laquelle on augmente la prime, et non pas pour punir parce que, dans les faits, si on voulait punir l'individu, il faudrait certainement que la prime augmente en relation avec les dommages qui ont été causés et la prime augmente de la même façon que vous ayez causé $5,000, $50,000 ou $100,000 de dommages.

M. Tetley: M. Belleau, avez-vous des commentaires à nous soumettre?

M. Belleau (Claude): Je voudrais simplement ajouter à ce que M. Gauvin a dit que toute cette notion d'assurance sans responsabilité ou "no fault insurance", comme certains rapports l'ont laissé entrevoir ou contrairement à ce qu'ont laissé entrevoir certains rapports, ce n'est pas l'abolition — on parle de l'abolition de la faute, mais au niveau des concepts, je pense qu'il est bien important de préciser — ce n'est pas la disparition de la responsabilité individuelle pour autant que le comportement sur les routes est concerné, il faut bien comprendre que c'est la disparition de la faute comme fondement du droit à la réparation de la victime. Et je pense qu'il y a une différence fondamentale.

Il existe, spécialement dans le domaine de la circulation routière, des mécanismes très efficaces pour contrôler les gens qui commettent des fautes graves sur la route, comme, par exemple, le retrait du permis de conduire, le système de points de démérite. Il faudrait penser un peu en fonction de la sécurité routière.

Le retrait du permis de conduire est une mesure beaucoup plus efficace, évidemment, que la pénalité financière ou l'augmentation de la prime.

Alors, il faut bien penser que l'assurance sans faute n'est pas l'assurance qui abolit complètement la notion de responsabilité des individus par rapport à leur comportement sur la route. En plus, je pense qu'on n'a qu'à se référer chacun à ses expériences personnelles. Il est évident que le véritable "deterrent" en matière d'accident d'automobile est davan- tage la crainte d'avoir un accident avec tous les inconvénients que cela comporte. C'est davantage la crainte d'être blessé et cela, évidemment, subsistera dans n'importe quel système.

Alors, tout cela pour dire que cette notion de responsabilité financière qu'on veut faire assumer à un individu par rapport à un accident, quand on dit que c'est dépassé, c'est désuet, c'est parce que, finalement, c'est l'ensemble des assurés qui assume la responsabilité financière. Il est faux de dire qu'elle est essentiellement individuelle et qu'elle est un "deterrent".

Je voulais simplement démontrer ici qu'il y a d'autres mécanismes pour contrôler le comportement des individus que la responsabilité financière. Quand on suggère de faire disparaître la faute, encore une fois, c'est par rapport au droit à la réparation de la victime. Or, je pense que l'Etat, le gouvernement, a bien d'autres moyens: les infractions au code criminel, les infractions au code de la route, le retrait du permis de conduire, le système de points de démérite. Il y a toutes sortes de mécanismes spécialement dans ce domaine qui permettent de contrôler les individus qui seraient carrément irresponsables. Je voulais ajouter cette dimension.

M. Tetley: M. Gauvin, à la page 11 de votre document d'il y a un mois, vous dites: "Le régime actuel n'effectue pas la réparation intégrale du préjudice." Pourriez-vous préciser un peu cette remarque?

M. Gauvin: Nécessairement, j'aimerais situer le débat. On prétend, en fait, que le système actuel effectue la réparation intégrale des pertes subies par un individu, lorsque nécessairement il peut prouver qu'un tiers était responsable, lorsque ce tiers est soit solvable ou détient une police d'assurance; s'il ne détient pas une police d'assurance suffisante, à ce moment-là, la limite imposée au fonds d'indemnisation peut empêcher l'indemnisation de l'individu.

Les tenants de la continuation du système actuel disent qu'il va très bien et qu'il compense bien les victimes. Le comité qui avait été formé en vertu de la Loi des commissions d'enquête ne s'est pas fié aux représentations que nous avaient faites le Barreau, les assureurs ou d'autres groupes. Nous avons effectué notre propre enquête auprès d'un nombre assez considérable de victimes pour savoir dans quelle mesure le système actuel répare bien les préjudices subis lors d'accidents d'automobiles.

J'aimerais signaler que c'est la première étude de ce genre qui a été faite au Québec et ce ne sont pas des chiffres qui ont été tirés d'autres expériences; les documents, les pièces justificatives ont été déposés au gouvernement. Ces preuves sont là pour ceux qui veulent les consulter. Mais nous avons quand même, au niveau des victimes de blessures corporelles, retracé 1,691 cas où nous avons pu, au niveau de ce que nous avons défini comme perte économique, comptabiliser ou actualiser la perte économique de chacune de ces victimes.

Nous avons retenu, pour l'actualisation ou pour comptabiliser ces pertes, des critères qui sont ex-

pliqués dans le rapport; ces critères ressemblent à ceux qu'on utilise couramment pour un tel calcul et, dans les faits, nous nous sommes rendu compte que le régime actuel compensait très mal les victimes.

En fait, les victimes de petites pertes sont surcompensées, je répète ce qui a déjà été dit. Les victimes de grosses pertes sont mal compensées. C'est la situation présente. Si on se réfère au mandat du comité, on disait que le comité devait s'assurer que les victimes étaient justement et équitablement compensées pour les pertes subies. On ne pouvait pas faire autrement qu'arriver à la conclusion que, les victimes n'étant pas justement compensées, il y avait certaines choses qui ne fonctionnaient pas dans le système.

Incidemment, les conclusions de notre propre étude, à partir de cas de Québec et quand même à partir d'un échantillonnage que des spécialistes que nous avons retenus avec les sommes d'argent que le gouvernement nous a données pour fonctionner, nous ont démontré que l'échantillonnage des victimes était, quand même, valable.

Moi, je trouve malheureux que des gens qui se disent professionnels viennent vous présenter un cas pour dire: Voici ce que ça fait présentement, voici ce que ça ferait avec le rapport du comité Gauvin.

M. Tetley: Vous vous référez à quel cas?

M. Gauvin: J'aimerais mieux ne me référer à aucun cas en particulier.

M. Tetley: Référez-vous au Barreau, par hasard? Je crois que l'allusion, M. Gauvin, devrait être claire et nette, parce que le Barreau a référé à votre rapport. Je pense que c'est sans aucune...

M. Gauvin: Pour compléter ma réponse personnelle, en fait, c'est le Barreau qui a présenté un cas pour dire: Voici ce que ça fait maintenant, voici ce que ça ferait. Il n'a pas présenté tous les autres cas, par exemple, où ça fait l'inverse.

Je pense que, si vous êtes en train de faire un procès, ce ne serait pas un procès juste, quand on présente les choses de cette façon.

Pour revenir à l'enquête de la compensation des victimes, elle rejoint exactement les conclusions, encore une fois, d'autres enquêtes effectuées ailleurs tant dans l'Etat de New York.

Cette enquête, nous avons eu l'occasion de la consulter, nous avons eu l'occasion de discuter avec les gens qui l'avaient faite. Elle rejoint également l'enquête qui avait été faite par le département de Transport, que je pourrais citer. Elle rejoint également la commission d'enquête de Colombie-Britannique. Toutes sont arrivées aux mêmes conclusions que le système allait mal pour toutes sortes de raisons. On indemnise très mal les victimes qui ont droit à une compensation. Il faut quand même s'interroger et savoir pourquoi on a un régime d'assurance. C'est pour, fondamentalement, indemniser les gens et il faut s'assurer que le régime, quel qu'il soit, va indemniser les gens convenablement pour les pertes qu'ils ont subies.

Vous remarquerez que si nous avions pu comptabiliser dans nos rapports compensation-perte des 1,691 victimes, certaines pertes, telle la jouissance de la vie dont nous n'avons pas tenu compte, la sous-compensation des victimes aurait été encore plus flagrante que les pourcentages que nous avons trouvés. Il faut bien comprendre que la perte de jouissance de la vie, à toutes fins pratiques ne se monnaie pas. On ne peut pas avoir de critères objectifs pour déterminer ce que vaut le bras d'une personne dont le seul plaisir dans la vie est d'aller à la pêche. Combien lui donne-t-on pour la perte de cette jouissance? Cela varie selon les individus et, si on regarde les montants qui sont accordés un peu partout, cela varie d'un cas à l'autre. Alors, dans notre enquête, tous ces faits, toutes les pertes non économiques, avaient été ignorés. Si on avait pu trouver un moyen de les additionner, on aurait trouvé encore une sous-compensation importante des victimes beaucoup plus considérable que ce que nous avons trouvé.

M. Tetley: A la page 14 de votre mémoire de décembre passé, vous avez dit: La réadaptation des victimes est rendue plus difficile dans le régime actuel. Encore une fois, puis-je vous demander d'élargir cette constatation?

M. Gauvin: En fait, qu'est-ce qui se passe dans le régime actuel, dans un système où on vit en adversaires et où on doit chercher à prouver la plus grande perte d'intégrité physique pour avoir la plus grande compensation? C'est que cela peut nuire à la réadaptation de la victime. En fait, les médecins que nous avions consultés et, encore une fois, les autres études sont arrivés à la même conclusion. Le système d'adversaires, le système de prouver la faute d'un tiers, également de trouver le plus grand préjudice corporel possible, tout ce système amène, en fait, les gens à retarder les mesures de réadaptation de l'individu qui devraient être faites. On peut même arriver à laisser les gens avec certaines balafres, certaines cicatrices afin de pouvoir impressionner le juge ou les gens qui vont accorder une indemnité finalement. Mais lorsque la cause est réglée, après des délais considérables, très souvent, il est trop tard pour commencer la réadaptation et l'individu est réduit à vivre avec son préjudice.

Dans un véritable système où, dès qu'il y a un accident, on cherche à tout remettre en place, à remettre l'individu, autant que possible, dans la situation où il était, on ne doit pas se permettre, d'après les gens compétents, le moindre délai pour effectuer tout ce qu'il faut pour redonner à la personne humaine son intégrité, en autant que possible. Il faut bien réaliser qu'il y a des choses qui ne sont pas réparables.

M. Tetley: N'est-il pas vrai, M. Gauvin, que, dans un système de pension ou de rente, hormis un système de paiement global, "one lump payment", après le jugement, le rentier garde la rente pour la fin de ses jours et cède à la tentation de ne pas guérir.

M. Gauvin: Vous entrez dans le débat du problème du paiement à capital. Le rapport est clair

là-dessus, on est absolument opposé au paiement du capital pour la simple et bonne raison que c'est une mauvaise utilisation des fonds. Vous payez, dans certains cas, de très petits montants à des personnes.

Ces personnes vont les dépenser, non pas pour remplacer leur perte économique mais, en fait, pour ce qu'elles veulent et à toutes sortes de fins; finalement, elles peuvent être à la charge de la société par le biais de mesures d'aide sociale ou du revenu minimum garanti ou quoi que ce soit que la société va se donner.

Je pense que, si on veut avoir un système intégré, un système cohérent, et qu'on veut charger à l'automobile toutes les pertes résultant des accidents qu'a créés ce monstre, effectivement, il faut s'assurer qu'on ne paiera pas deux fois, dans certains cas, la même indemnisation. Mais, dans le présent système, vous avez des paiements en capitaux et vous avez, par la suite, ces gens qui vont, en fait, au ministère des Affaires sociales pour obtenir des indemnisations. Mais la société ne peut pas accepter une telle situation où l'individu est payé deux fois pour la perte qu'il a subie.

Egalement, lorsqu'on paye une rente, un capital à un individu, qu'est-ce qu'on fait pour la perte continuelle ou l'érosion de la valeur du capital de l'individu? Est-ce qu'on ne devrait pas prévoir des rentes où la valeur relative du dollar serait conservée? C'est une autre forme de sous-compensation des individus de leur donner, en fait, des montants qui ne tiennent pas compte de l'inflation.

M. Tetley: J'ai presque épuisé mon temps. M. Rankin, à la page 7 de votre document que nous avons déposé aujourd'hui, il y avait quatre questions et vous dites que vous êtes prêt à répond re aux questions de M. Giasson, M. Léger, M. Roy et de moi-même. J'ai épuisé mon temps, mais peut-être, auriez-vous les réponses toutes prêtes à ces questions?

M. Rankin: Sur la question de l'administration, je suis prêt à répondre à tout, mais est-ce qu'on a vidé les questions sur le plan de la compensation? Si vous voulez, je peux donner des explications sur la question de M. Giasson, la question d'existence d'une compagnie d'Etat à côté des compagnies privées, qui fait concurrence à ces compagnies privées. Nous avons examiné cette question. D'abord, nous avons rejeté cette option pour les raisons que M. Gauvin a déjà données. Pour expliquer un peu plus le problème, c'est, qu'à ce moment-là, d'abord vous perdez les 3% d'économie sur les dépenses qui étaient là à cause d'un monopole. Les 3% d'économie, ce n'est pas à cause du fait que c'est une régie d'Etat mais c'est à cause du fait qu'il n'y a pas de concurrence.

La deuxième chose, si vous pouviez arriver à la même situation sans créer cette régie d'Etat, cette compagnie étatique, vous allez atteindre votre objectif sans encourir tous les risques de créer une compagnie qui peut être un succès ou ne pas l'être.

D'ailleurs, pour la question des compagnies étatiques qui font concurrence dans le marché, il y a des exemples qui existent déjà aux Etats-Unis, dans l'administration des assurances pour la perte de salaire et il y en a plusieurs qui se font concurrence là. En Nouvelle-Zélande, avant qu'elle en fasse une nouvelle loi, il y a eu une compagnie étatique qui a fait concurrence avec les compagnies privées et dans la province de l'Alberta, il y a aussi une compagnie étatique qui fait concurrence dans un certain secteur d'assurance.

Sauf que les résultats n'étaient pas tellement frappants. L'objectif c'est qu'il faut agir un peu comme un policier pour forcer les compagnies privées de suivre certaines règles. Je crois, que quelqu'un qui examine la chose de plus près peut savoir qu'il y a d'autres moyens plus efficaces pour atteindre cet objectif.

M. Tetley: Je ne veux pas prendre le temps des autres. C'est pourquoi je poserai les questions de M. Léger, de M. Roy et les miennes un peu plus tard. Je cède la parole, M. le Président.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Lafontaine, vous avez des questions à poser?

M. Léger: A ce stade-ci, non. Mais ce qui me surprend, c'est qu'à la clôture du 12 décembre, alors que nous pensions que la commission avait terminé son travail jusqu'à la présentation du projet de loi, il y avait eu deux députés qui avaient proposé qu'on continue en janvier, parce qu'eux avaient d'énormes questions à poser. Ce sont le député d'Iberville et le député de Taschereau. J'attends qu'ils posent aujourd'hui la quantité de questions qu'ils avaient à poser pour qu'on siège aujourd'hui et je les trouve cois. Qu'est-ce qui se passe?

M. Bonnier: Ce n'est pas notre tour encore.

M. Léger: C'est notre tour. J'ai dit tantôt que je n'avais pas d'autres questions...

M. Tetley: Nous avons fait... Quel plaisir.

M. Bonnier: Règle de procédure, M. le Président.

M. Tetley: C'est tellement agréable qu'il se taise, M. le Président, parce que j'ai toutes sortes de questions. Qu'il continue ses conversations privées au lieu d'écouter M. Rankin, M. Belleau et...

M. Léger: Allez-y, M. le Président, ne vous gênez pas. Si cela peut nous éclairer davantage, je n'ai pas d'objection. Nous, c'est de l'action qu'on veut.

M. Tetley: Ah! l'action.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Mille-Iles.

Indemnisation des victimes

M. Lachance: M. Gauvin, au niveau de l'indemnité aux victimes, votre rapport estime que le plan

d'indemnisation suggéré répondra aux besoins de 85% de la population, quant au montant du salaire hebdomadaire qui sera payé aux victimes d'accidents.

Ces prévisions sont basées sur les salaires de 1970/71, n'est-ce pas?

M. Gauvin: Avec une projection en 1974. L'évaluation que nous avons faite est claire, les chiffres sont valables pour 1974. Il y a eu de l'inflation depuis, mais il ne faut pas non plus oublier que toute proposition de réforme devra être réévaluée, en tenant compte du moment où on veut l'entrer en vigueur.

M. Lachance: En tenant compte de l'inflation?

M. Gauvin: ... l'inflation, tenir compte, en fait, même de variations dans le genre de véhicules, dans le parc-automobile, dans le coût de réparation, c'est bien évident. J'ai regretté, en lisant le journal des Débats, qu'à un moment donné on dise qu'on n'avait pas évalué notre régime. Je regrette. Le régime que nous avons proposé a été évalué, nous avons évalué le coût, nous avons déposé les documents et nous avons dit combien il coûterait. Pour nous, l'évaluation est valable pour 1974. En pourcentage des primes, il est probable que cette éval ua-tion sera valable pour d'autres années si le régime actuel de l'assurance-automobile suit l'inflation. Il y a eu des augmentations encore récemment, dans les primes d'assurance-automobile du régime actuel, pour tenir compte de l'inflation.

Alors, les rapports que nous avons préparés vaudraient. A ce moment-là, il faudrait changer le pourcentage de notre couverture. Au lieu de donner $200 par semaine, au lieu de couvrir un salaire de $200 par semaine, on pourrait couvrir un salaire supérieur, avec le régime proposé. Les primes seront différentes, mais c'est en pourcentage de ce que coûte le système actuel.

M. Lachance: Par rapport aux primes? M. Gauvin: Par rapport aux primes, oui.

M. Lachance: Vos primes vont augmenter aussi?

M. Gauvin: C'est évident que les primes vont augmenter aussi. Les primes vont augmenter dans le régime actuel, les primes vont augmenter dans le régime proposé par le Barreau, dans le régime d'AutoBAC et dans n'importe quel régime que vous allez instaurer. Elles sont toujours sujettes aux forces extérieures, aux forces de l'inflation et aux forces de la fréquence d'accidents, quel que soit le régime que vous imposiez. Même si l'Etat ne change rien, mais prend tout en charge demain matin, il ne faudrait quand même pas penser, comme on l'a laissé sous-entendre, qu'il n'y aura plus d'augmentations de primes. Les coûts vont augmenter également.

M. Lachance: Oui.

M. Gauvin: Le coût de réparation ne sera plus ce qu'il était il y a trois ans. Il suit, en fait, les forces du marché.

M. Lachance: Dans la partie des indemnités aux victimes, vous parlez de régime supplémentaire, de bénéfices que devront se procurer les personnes dont le revenu annuel dépasse $12,000, pour obtenir une protection complète.

Si une personne gagne $17,000, est-ce qu'à ce moment-là, elle va payer plus cher?

M. Gauvin: II est évident qu'elle va payer plus cher. On l'a dit dans le rapport d'ailleurs. La proportion qu'elle va payer de plus n'est pas si considérable, parce qu'elle ne s'applique effectivement qu'à la partie de la prime qui s'en va aux blessures corporelles.

Le problème que vous avez dans une évaluation de ce genre, c'est que nous avons proposé un régime de base obligatoire pour tout le monde.

C'est facile à évaluer. Mais lorsque vous analysez des régimes optionnels, le coût total du régime optionnel va dépendre, en fait, des choix individuels. Il faut bien se rendre compte que, dans le régime proposé par le comité, l'individu n'est pas à la merci de ce qu'un autre a décidé pour savoir quel niveau de compensation il va avoir. L'individu va avoir la compensation du régime de base et la compensation supplémentaire qu'il aura lui-même choisie, soit pour son salaire ou pour d'autres genres de pertes.

On demande à chaque individu d'être passablement plus responsable vis-à-vis de ce niveau que présentement. Au lieu de s'assurer pour les pertes qu'il cause à un autre, il s'assure, en fait, pour les pertes qu'il subit. C'est à lui de décider en haut du régime obligatoire, quel niveau ou quel risque il encourt quand il conduit son véhicule et comment il va être indemnisé dans chaque accident qu'il aura.

En ce qui a trait au régime supplémentaire, les primes ne seraient certainement pas aussi élevées qu'on l'a laissé sous-entendre.

M. Lachance: En somme, est-il juste de dire que la majorité de la population devra payer un supplément pour obtenir une protection adéquate?

M. Gauvin: 15% de la population est couverte à 100%. Ce n'est pas la majorité, mais bien 15% de la population qui...

M. Lachance: Oui, mais cela peut aller à 30%, si vous voulez.

M. Gauvin: Pardon?

M. Lachance: Cela peut être plus que cela.

M. Gauvin: Non, il y a 85% de la population du Québec qui serait entièrement couverte pour ces pertes. Elle n'a pas besoin d'assurance supplémentaire. Ce sont seulement pour ceux qui gagnent en haut du plafond que vous établissez, ou que seront établis ceux qui auront besoin de s'assurer pour l'excédent. Il y en a qui sont déjà assurés en vertu d'autres régimes. L'individu qui a déjà de

l'assurance-salaire n'aura pas besoin d'en acheter, il en a déjà ailleurs. L'individu qui a déjà de l'assurance-vie, en cas de décès, ailleurs, dit: Je n'en ai pas besoin, j'en ai déjà. Dans quelle mesure ceux dont le revenu excède des plafonds du régime choisiront de s'assurer? C'est assez difficile de le dire, mais cela ne devrait pas représenter une proportion très considérable.

M. Lachance: D'après vous, c'est à peu près 15%, cela ne pourrait pas être 30%?

M. Gauvin: Cela ne peut pas être 30%, il y a 15% de la population qui gagne en haut de notre plafond, il n'y a qu'eux. A moins que les gens en bas veuillent avoir des couvertures supplémentaires.

M. Lachance: Justement, si les gens en bas du plafond voulaient avoir une protection adéquate?

M. Gauvin: II faut bien constater une chose, c'est que le régime qu'on préconise permettrait, en fait, de réduire les primes substantiellement par rapport au régime actuel. Substantiellement, une réduction qu'on a émise dans le rapport français à 15%, c'est une erreur de frappe, c'est 19%; je l'ai corrigée dans le rapport anglais.

Les primes, en 1974, auraient pu être réduites de 19% avec le régime qu'on préconise. Les individus qui veulent de la protection supplémentaire ont quand même 19% de moins que leur ancienne prime à payer. Ils peuvent s'en acheter drôlement avec cela.

M. Lachance: M. Gauvin, au niveau de l'administration, votre rapport semble indiquer que, dans le texte proposé, l'élément de compétition entre les assureurs va faire en sorte que la tarification et les taux vont être justes et que, de plus, le mécanisme que vous proposez évitera en grande partie toute forme de collusion entre assureurs dans le but de fixer les prix. Si cela est vrai, est-ce que vous croyez aux valeurs bénéfiques de la compétition? Pourq uoi fixez-vous arbitrairement les frais d'administration alloués aux assureurs à 20%?

M. Gauvin: En fait, on les a fixés arbitrairement pour faire démarrer le régime. Eventuellement et effectivement, cette succession devrait se faire par la compétition, mais comment voulez-vous imposer un nouveau régime, imposer les réformes si vous ne décidez pas, à un moment donné, qu'on doit les fixer, qu'on doit dire: Vous devez fonctionner avec cela? Remarquez que cela a été fait ailleurs, cela a été effectivement fait en France où le gouvernement a dit aux assureurs: Vous allez fonctionner avec X, Y ou Z% de la prime.

Cela a pour but d'amener nécessairement les réformes appropriées. Egalement, ce qui est fondamental, c'est que le système actuel retourne $0.60, en chiffres ronds — je reviens encore au rapport — dans la piastre aux victimes. C'est pour elles que le régime est important.

En fait, vous avez des régimes étatiques qui ne sont pas, à mon sens, ce qu'il y a de mieux au niveau de l'indemnisation, mais qui retournent plus que $0.80 aux victimes. Est-ce que le consommateur québécois est prêt à accepter la situation telle qu'on la connaît présentement? Est-ce qu'on ne doit pas infuser ou forcer certaines réformes pour ramener l'écart entre ce que le consommateur paie en prime et ce qu'il reçoit sous forme d'indemnité? Il faut absolument en arriver là, effectivement.

On a bien mentionné dans une des recommandations que c'était une période transitoire. On a dit: On va le faire, on va forcer les gens à en arriver là et, après coup, on en viendra à la force, à la compétition, soit une véritable compétition où les assureurs ne s'entendront plus ensemble pour fixer les prix. Cela va enfin amener les assureurs à agir le plus efficacement possible. Vous savez, j'ai pris connaissance de documents qui ont été déposés, même un article qui a été publié en disant qu'il y avait de la compétition. Les différences de $2 sur une prime de $100, on dit que c'en est de la compétition. Il faudra peut-être que les membres de la commission prennent connaissance d'un guide aux consommateurs qui a été émis au Michigan. Ces Américains ont un nouveau régime, on en a fait mention. La date... Je pourrais laisser ce guide aux députés, pour autant que je puisse en avoir une photocopie. On a même écrit que $2 ou $3 sur une prime de $100 ou $200, c'était de la compétition.

Je tourne n'importe quelle page, je prends, en fait, Détroit-centre, comme exemple. La compagnie qui a la prime la plus basse, pour toute une kyrielle de couvertures, demande $229. Ne prenons pas les risques de facilité, les risques réellement tarés, la compagnie la plus haute serait à $324. Vous allez ailleurs et vous avez un écart de $372 à $635, vous en avez, en fait. Ils ont pris des mesures pour amener les assureurs à avoir de la compétition entre eux. Il y a des écarts significatifs.

Quand on me parle d'écart de $1 ou $2, ce ne sont pas des écarts significatifs. Il ne faudra pas non plus croire qu'il y a simplement le prix, il y a également le service. Dans le système actuel, quand vous faites toujours affaires avec l'assureur d'un autre, quand c'est l'autre qui est responsable, comment pouvez-vous vous assurer que quand vous allez avoir un accident, vous aurez le service que vous voulez? Cela dépend du choix de l'autre. En fait, c'est simple. Un type devrait s'assurer, dans le système actuel, pour l'assurance-responsabilité avec le plus mauvais assureur, celui qui paie le moins, qui prend le plus de temps, parce que ce n'est pas lui qui est touché. Pour son assurance-collision, par exemple, il devrait s'assurer avec celui qui paie le mieux et le plus vite. Dans un régime d'assurance directe, effectivement, le consommateur va toujours traiter avec son assureur. S'il n'est pas content, il va pouvoir changer. Dans le moment, si vous n'êtes pas content d'un assureur, en particulier, quand ce n'est pas votre assureur, il n'y a pas grand-chose que vous pouvez faire, vous pouvez simplement le dire à vos voisins.

M. Lachance: Dans votre rapport déposé, vous parlez du rôle des courtiers comme tel, et dans un petit rapport qui a été remis le 11 décembre, je crois,

vous dites que vous voulez revaloriser le rôle du courtier comme tel. En somme, je crois bien, la majorité des courtiers que j'ai pu rencontrer, ont dans l'esprit que dans le rapport, vous voulez presque les faire disparaître.

M. Gauvin: Non.

M. Lachance: Mais ici, dans votre petit rapport du mois de décembre, vous parlez de revaloriser le rôle du courtier comme tel.

M. Gauvin: On en parlait dans l'autre rapport aussi.

M. Lachance: Oui, mais c'est que...

M. Gauvin: C'est peut-être que les gens ont lu ce qu'ils voulaient lire, ils n'ont pas lu ce qui était écrit, effectivement. Maintenant... Continuez.

M. Lachance: C'est parce que, lors du dernier congrès du Parti libéral, on a parlé justement du rapport Gauvin. Les courtiers, ainsi que les avocats, avaient une idée bien préconçue du rapport déposé, en ce sens qu'on faisait disparaître les courtiers comme tels et que les avocats aussi perdaient une certaine clientèle. Dans votre autre rapport, vous parlez de revaloriser le rôle du courtier. Il y a des gens qui ont mal compris votre rapport ou, comme vous dites, ils ont lu ce qu'ils voulaient lire.

M. Gauvin: En fait, sur le rôle, vous avez parlé des avocats également...

M. Lachance: Les avocats.

M. Gauvin:... on conserve un droit d'appel devant les cours de justice. Alors, l'avocat aura un rôle à jouer, parce qu'on a très bien dit dans le rapport, je ne me souviens pas de la page — cela fait quand même un bout de temps qu'on l'a écrit — mais on a très bien dit que l'assuré qui n'était pas satisfait, pouvait s'adresser à la cour — on n'a pas nommé la cour, parce que ce n'était pas nécessaire — pour obtenir une meilleure indemnisation. Il a quand même un rôle à conserver. Pour ce qui concerne le courtier, c'est certainement un problème beaucoup plus complexe. Il faut regarder ce que le courtier fait dans le système actuel. Je me souviens très bien, lorsque, dans ma présentation, j'ai parlé de brasseurs de paperasses, d'avoir entendu des rires. Je me demandais si les courtiers étaient devant ou derrière moi, à ce moment.

M. Lachance: Dans votre petit rapport...

M. Gauvin: Effectivement, on n'a quand même pas lancé cette phrase sans la considérer. On avait retenu une firme d'experts qui a fait une analyse — elle a été déposée — de ce que constituait le travail du courtier dans le système actuel.

On se rend compte qu'il y a une bonne part de son travail qui est effectivement d'agir comme intermédiaire pour envoyer des documents d'une place à l'autre. Je ne veux pas dire qu'il ne joue pas, dans le système actuel, un rôle valable. C'est tout simplement que dans un nouveau système, le courtier resterait comme un conseiller, mais ne s'occuperait plus de ces tâches purement administratives qui, à toutes fins pratiques, prennent beaucoup d'argent du système, mais rapportent très peu. Les réformes proposées sont interreliées. Il faut qu'on fasse une avec l'autre. On a parlé de l'élimination de la sélection des risques. On a dit que, d'après nous, dans un système d'assurance obligatoire et d'assurance directe, on devrait forcer les assureurs de prendre tout le monde. On ne peut pas faire cette réforme sans changer le rôle du courtier.

J'aimerais ici... Je l'ai envoyé à M. Giasson qui avait exprimé le désir de l'avoir. Il y a un document de 1973 — on a eu l'occasion de parler avec ces gens — par le département des assurances de New York qui s'appelle: "Competition in Property and Liability Insurance in New York State". Eux sont arrivés exactement à la conclusion qu'il fallait effectivement éliminer le "underwriting", éliminer la sélection des risques, et que dans le système actuel, on ne pouvait pas le faire sans changer le mode de mise en marché. La sélection des risques coûte quand même passablement cher, si on se réfère au rapport et prend une somme assez considérable d'argent qui, finalement, pourrait être utilisée à meilleure fin. Je donne ou cite une façon. Egalement dans un régime d'assurance directe, l'intervention du courtier pour percevoir la prime ou courir après le client, tout cela, le courtier le fait, mais cela lui coûte quelque chose. Il est rémunéré pour cela, mais si on peut utiliser ses talents pour conseiller véritablement le public sur combien d'assurance il a besoin, à savoir: Est-ce que j'ai besoin d'assurance supplémentaire? Est-ce que tu en as besoin? Evidemment, dans un régime d'entreprise privée, dire: Voici, en voilà une étude montrant quel assureur est le meilleur. Dans ton cas à toi, cela devrait être à telle place. A mon sens, c'est revaloriser le rôle du courtier. C'est lui enlever les tâches purement administratives pour l'amèner à jouer un rôle beaucoup plus de conseiller professionnel que présentement.

M. Lachance: Vous parlez aussi de responsabilité sans égard à la faute. Je vous pose une question... Responsabilité sans égard à la faute, mitigée. Je pense aux blessures corporelles où, pour fins d'indemnisation, on fixerait un taux — je ne sais pas — de $10,000 ou de $20,000. Après cela, on pourrait avoir un recours devant les tribunaux, tel qu'il existe actuellement. Est-ce que cela pourrait être fait? Je parle d'une responsabilité sans égard à la faute, mitigée.

M. Gauvin: C'est la proposition des assureurs, effectivement, un peu dans le sens que vous avez... C'est évident que cela peut être fait, mais malheureusement, à moins qu'on change également d'autres règles, cela reste les victimes qui sont les plus mal compensées, dans le système actuel, qui sont les victimes de grosses pertes. Cela va les laisser mal compensées. Dans l'enquête des 1,691 victimes, il a été démontré que les gens qui avaient en

haut de $10,000 de pertes recevaient 40% de leur perte économique, ajoutez à cela la perte de jouissance de la vie et tout ce qui devrait être ajouté. A ce moment, ces gens sont mal compensés. Si vous établissez un régime et dites: Les premiers $10,000 de perte, c'est un paiement automatique, une assurance directe et en plus, ce seront nos recours habituels. Vous allez avoir exactement le même système. Vous n'aurez pas réglé ces problèmes. Vous allez conserver les iniquités du système actuel pour les victimes de grosses pertes. C'est la raison...

AutoBAC, qui est le plan... Les intéressés ont changé de nom deux ou trois fois. Je pense qu'ils l'ont même changé. On connaissait leur plan. On n'avait pas de coût.On n'avait pas reçu le coût du régime, mais on connaissait effectivement le régime. On l'a examiné. Comme la position du Barreau qui vous a été présentée, c'est la position qui a été prise dans le mémoire présenté aux membres de la commission lorsqu'on a tenu les audiences publiques. De la même façon, la CSN, c'est la même présentation, plus volumineuse peut-être, qu'elle nous a faite. Ces faits, nous les avions. Pour les motifs que nous avons développés dans le rapport, nous avons dit: Nous, fondamentalement, voulons indemniser tout le monde, justement et adéquatement. Pour cela, il y a simplement une façon, c'est s'orienter vers un système d'indemnisation directe.

Je n'aimerais pas poser des questions, mais j'aimerais simplement souligner que, quand on parle des innocents, des gens qui n'ont rien à voir... Je ne voudrais pas qu'on oublie également les dépendants des personnes qui sont trouvées responsables dans notre système actuel. Ils n'avaient rien à voir dans l'accident. Ils n'avaient absolument rien à voir. Ils étaient assis chez eux, bien tranquilles. La femme, avec ses enfants, était chez elle. Elle n'avait rien à voir avec le fait que son mari a brûlé un feu rouge, a heurté un individu ou s'est tué. Dans le système actuel, s'il n'y a pas le chapitre B, c'est bien dommage.

Dans un système comme celui que vous préconisez, à moins de prévoir un montant pour ces cas, elle ne serait pas mieux placée. Qu'arrivera-t-il dans ces cas? Elle va se ramasser bénéficiaire du bien-être social. Vous allez avoir tout un système que vous mettez en vigueur.

Vous demandez aux gens de dépenser des énergies, des frais juridiques pour prouver s'il avait tort ou non, pour décider si on va le payer ou non et, finalement, quand tout cela est fini, ce que vous refusez de la main droite, vous allez le lui donner de la main gauche. En fait, c'est de dépenser des énergies de façon assez drôle.

M. Lachance: D'après les plaintes portées par les gens concernant la responsabilité, on signale que cela prend des années à régler ces cas. Cela prend tellement de temps à régler... Avec votre système, cela serait-il réglé en moins de trois ans ou de cinq ans? Actuellement, cela prend au-delà de cinq ans et c'est pour cela qu'on parle de responsabilité sans égard à la faute mitigée. Je pense que les compagnies d'assurance parlent comme cela. Les courtiers aussi font un genre de front commun pour être d'accord sur ce principe, mais les grosses plaintes qu'ils ont à formuler vis-à-vis des compagnies d'assurance indiquent que les règlements prennent des années.

M. Gauvin: Oui, mais cela est dans un système d'adversaire, mais finalement, ce ne sont pas les causes de $100 qui prennent des années. Ce sont les grosses causes. Ce sont les causes importantes. Dans un système où vous conservez le système d'adversaires, le système de responsabilité, vous n'aurez pas réglé le problème.

Je ne sais pas si vous avez pris connaissance d u Star du 28 janvier. On fait référence à ce dont vous parlez, les délais, à ce qui semble être — je n'ai pas vu le jugement — une bataille entre le Fonds d'indemnisation des victimes d'actes criminels et un assureur, à savoir qui paiera. Cela fait cinq ou six ans, deux ou trois cours, et le juge Owen s'est choqué et il a dit que c'est indécent. Cela fait deux ou trois fois... Il est clair qu'il faut payer ce gars, mais il y en a un qui se bat. L'assureur se bat avec l'autre et cela se rendra en cour Suprême. L'accident s'est produit il y a six ans, $29,000 ou quelque chose comme cela. Je trouve cela indécent. C'est inacceptable, en fait. Et vous n'aurez pas réglé cela avec le système, préconisé par le Barreau... Je ne sais pas si elle serait dans la situation pour le dire. Je la prends comme exemple. Vous conservez la situation en conservant notre système d'adversaires. Je trouve un peu normal que les victimes, surtout celles qui sont enterrées, ne peuvent venir vous dire ce qu'elles ont perdu, mais vous n'avez pas eu beaucoup de victimes qui sont venues vous dire comment elles avaient été maltraitées dans le système, sauf un cas assez pathétique, et si vous conservez le système actuel, vous faites affaires avec d'autres et chacun essaie de ne pas payer, vous allez alors conserver les iniquités que le système actuel comporte.

M. Lachance: Dans le système actuel, il y a aussi une grande quantité d'automobilistes qui ne sont pas assurés. Je pense que 25% ou 30% de la population n'est pas assurée.

M. Gauvin: C'est plutôt 10% à 15% qui ne sont pas assurés.

M. Lachance: A ce moment, s'il y avait une assurance obligatoire, le gars qui achète une automobile ou qui va chercher ses plaques d'immatriculation serait obligé de s'assurer. Cela pourrait-il baisser le taux d'assurance?

M. Gauvin: Si on disait que cela va baisser les taux, c'est que, dans le moment, on finance le Fonds d'indemnisation par le truchement des assurés, alors, cela pourrait être cette partie. Pour le reste, cela ne changera rien. Il y a des provinces où on a fait la réforme suggérée. Dans le rapport, on a fait une espèce d'historique pour voir quelle sorte de réforme on pourrait faire et on a rejeté celle-là parce qu'on dit: D'accord, vous amenez plus de victimes qui auront droit à l'indemnisation, mais en plus, il faut s'entendre. Les victimes déjà non assurées vont

au Fonds d'indemnisation des victimes d'actes criminels et elles y ont droit. Alors, vous n'amenez pas beaucoup plus de victimes qui ont droit à l'indemnisation, mais elles vont être mal traitées quand même.

M. Lachance: Oui, mais si tout le monde est assuré à ce moment, le Fonds d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile n'a plus lieu de persister.

M.Gauvin: II y en aura toujours un. Même, il n'y a pas un Etat qui ait réussi à avoir un régime d'assurance obligatoire et la plupart des pays ont cette mesure depuis bien longtemps. On ne l'a pas eue au Québec. Ne me demandez pas pourquoi, mais la plupart des pays l'ont eue et ceux qui l'ont ont des contrôles. Il y a toujours des gens qui s'échappent. Il y a toujours des gens qui peuvent conduire, à un certain moment, sans plaque d'immatriculation; l'Etat de New York a fait une enquête et a trouvé un nombre assez élevé de gens qui conduisaient sans assurance, même avec l'assurance obligatoire.

Dans une telle mesure aussi, il ne faut pas oublier une chose. Vous imposez l'assurance obligatoire, d'accord, mais vous aurez des contrôles à instaurer et vous instaurez des contrôles pour protéger les tiers.

Dans un système où vous dites à tout le monde: Si vous ne vous assurez pas, vous n'aurez pas le droit à une indemnisation, c'est un drôle d'incitatif à s'assurer et, à ce moment, vos contrôles ont besoin d'être moins forts que lorsque vous voulez forcer quelqu'un à s'assurer pour les dommages qu'il cause à l'autre.

Dans l'Etat de New York, on dépensait des sommes assez considérables pour vérifier, avec des "slips" et tout ce que vous voudrez, si l'individu est assuré.

M. Lachance: Une dernière question, M. Gau-vin. Si votre rapport était accepté intégralement, pourrait-il être appliqué par étapes?

M. Gauvin: Est-ce que je peux consulter mes collègues?

M. Lachance: Oui. M. Tetley: Un caucus.

M. Gauvin: En fait, il faut s'entendre. Vous dites par étapes. La première partie qui traite de la sécurité routière, c'est une chose, et il faut que le gouvernement agisse. Pour les deux dernières parties, je pense qu'on peut changer le régime d'indemnisation et peut-être ne pas faire toutes les mêmes réformes en administration, mais on n'aura pas les mêmes économies.

On peut très bien faire une chose à une place et faire différent à l'autre, mais vous n'aurez pas les mêmes résultats. Pour obtenir les mêmes résultats que ceux que nous nous étions fixés, soit amener la population du Québec à réduire ses primes, je pense qu'il faut appliquer le rapport dans ces parties-là, intégralement.

M. Lachance: Mais pas par étapes.

M. Gauvin: Cela ne peut pas se faire par étapes.

M. Lachance: Cela ne peut pas se faire.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Taschereau.

Responsabilité sans égard à la faute

M. Bonnier: M. le Président, en ce qui regarde l'application du régime de responsabilité sans égard à la faute, vous avez déjà dit, d'une façon globale, que vous aviez examiné, évidemment, les coûts, mais, en particulier, pourriez-vous nous donner un ordre de grandeur de la répercussion sur le coût des primes de l'implantation de ce système puisque, avec le système actuel, quand même, certaines compagnies d'assurance peuvent récupérer un certain montant des sinistres pour lesquels elles ont payés? Autrement, c'est une espèce d'assurance-accident directe, je fais affaires avec ma compagnie d'assurance, elle me paie dans tous les cas. Est-ce qu'il y aurait, selon vous, une majoration substantielle des primes à cause de ce système?

M. Gauvin: En fait, dans le système actuel, il est bien évident que l'assureur en collision...Vous faites plutôt référence à...

M. Bonnier: Collision.

M.Gauvin:... la collision, qui paie son assuré et récupère de l'autre. Mais cela, on en tient compte dans la fixation du tarif. En fait, l'assureur n'a pas établi... S'il fallait qu'il fasse cela, il ferait de beaux profits et les profits ne sont pas aussi élevés que certains le laissent entendre.

Mais, effectivement, lorsque l'assureurétablit le prix de son produit pour l'assurance-collision, il tient compte que, dans une certaine proportion, il va récupérer d'un autre. C'est déjà là; il n'y aura pas d'augmentation de tarif à cause de cela parce que, dans le système actuel, vous vous assurez pour les dommages matériels que vous causez à autrui et vous vous assurez (assurance-collision) pour les dommages que vous subissez, en même temps que vous en faites à d'autres. Mais vous ne vous assurez pas, en somme, pour les dommages que d'autres vous font. Ce sont les autres qui paient. Alors, il n'y aura pas de majoration de prime à cause de l'élément de subrogation qui existe entre assureurs, lorsqu'ils vous paient; c'est déjà là.

M. Bonnier: II y aurait même, peut-être, si on se réfère à certaines de vos données, des revenus supplémentaires, des "manques de pertes" parce que vous dites que vous évaluez, je pense, à $1,500,000, ou quelque chose comme ça, des pouvoirs de subrogation pour des...

M. Gauvin: C'est l'Etat qui subroge, en fait, l'assurance-maladie...

M. Bonnier: Quant à l'Etat, M. Gauvin, ou les autres, n'êtes-vous quand même pas d'accord pour dire que, justement, dans le calcul de l'assurance-maladie ou des autres régimes, lorsque ces calculs ont été établis, c'était avec la considération que l'Etat pouvait avoir des pouvoirs de subrogation? Si on les enlève, il faudra aussi relever nos primes.

M. Gauvin: Oui, mais il ne faut pas oublier que tout cela vient du même portefeuille, effectivement. Ce que nous avons dit dans le rapport, c'est que, lorsque vous passez par le mécanisme de l'assurance-automobile, vous passez par un mécanisme qui est quand même très inefficace, qui retourne, dans le moment, $0.60 dans le $1. Il y a beaucoup d'argent versé qui ne sert pas à ces fins. Ce que nous avons dit, c'est que nous croyons, et c'est une des recommandations fondamentales du comité, que l'assurance-automobile devrait payer tous les coûts encourus lors d'accidents. Nous l'avons dit, et c'est dans ce sens que nous ne voulons pas passer à d'autres régimes, nous voulons que l'assurance-automobile soit le premier payeur. AutoBAC veut que l'assurance-automobile soit le deuxième payeur, par exemple. Nous, nous voulons que ce soit réellement l'assurance-automobile qui paie tous les coûts. Mais le faire de la façon la plus équitable ou la moins onéreuse possible.

En fait, nous n'avons pas pris position pour que l'Etat n'ait plus à percevoir cet argent, même des automobilistes, mais, si cela représente $3, la valeur de la subrogation, par conducteur au Québec, on pourra augmenter le permis de conduire, on pourra augmenter les plaques d'un montant équivalent pour que l'Etat ne le perde pas. Mais on va avoir économisé en fait, tous les mécanismes qui sont nécessaires pour faire cette subrogation. Je pense que le $1.5 million auquel vous faites référence, c'est ce qu'on a évalué comme étant l'argent qui était perdu inutilement parce qu'il faut avoir, en fait, beaucoup de gens qui s'occupent d'aller chercher la subrogation. Vous pourriez simplement la faire sur une moyenne et dire: La subrogation nous aurait rapporté tel montant et on va aller le chercher à même la mesure la plus efficace possible pour ne pas perdre d'argent dans la transaction. Ou vous pouvez faire une grosse bâtisse avec beaucoup de gens qui vont brasser beaucoup de papiers pour aller chercher le même argent, mais cela va coûter plus cher.

M. Bonnier: Mon autre question est en relation avec un commentaire du mémoire de la CSN relativement au pourcentage des primes qui retourne effectivement à l'assuré. En particulier, ils reprochent au comité Gauvin de ne pas avoir tenu compte des revenus de placement sur les primes qui sont, selon eux, un manque à gagner pour l'assuré, alors que, dans d'autres régimes, on en tient compte.

M. Gauvin: Nécessairement, le rapport est peut-être trop condensé, mais je pense qu'on l'a quand même très bien traité, pour autant que je suis concerné, mais on est très mauvais juge dans sa propre cause.

M. Bonnier: Vous soulignez, je pense, dans un paragraphe, qu'intentionnellement vous n'en avez pas tellement tenu compte, parce que vous n'avez pas calculé que c'était effectivement un manque à gagner de la part des assurés.

M. Gauvin: En fait, il faut bien comprendre. Dans le système d'entreprise privée, les assureurs ont un capital de risque. Ce sont eux qui mettent ce capital et, quand il y a des pertes, c'est à même leur capital qu'ils vont les assumer. En fait, comme assureurs, ils s'engagent à prendre les écarts par rapport à la normale, si on veut employer l'expression. C'est-à-dire que, si telle chose est arrivée parce qu'on a mal établi nos tarifs, c'est nous qui le supportons. Ils prennent un risque comme actionnaires. Comme tels, ils ont droit à une juste rémunération du capital de risque. Nous, à la page 237, on a fait une analyse de ce que, dans les dernières années, les assureurs avaient réalisé sur leur capital. Nous en sommes venus à la conclusion que cela ne nous paraissait pas exorbitant.

M. Bonnier: C'est sur le capital investi, tandis que l'autre question est sur...

M. Gauvin: Oui, mais nous en tenons compte. Si vous regardez comment cela a été fait, on a dit: II y a de l'argent sur les investissements. Sur les investissements, cela comprend la prime des assurés également. On a totalisé, en fait, tout ce que les assureurs avaient fait de profits ou de pertes, parce qu'ils ont fait certaines pertes et on a dit: Par rapport au capital de risque, qu'est-ce que cela fait? Ces profits viennent, en fait, des investissements du capital des actionnaires; ils viennent également de l'investissement des primes que les assurés paient d'avance. Ils viennent également du profit prévu dans les primes d'assurance et qu'ils ne réalisent pas toujours. En moyenne, ils réalisent un certain profit. Vous comptabilisez la somme de cela et vous faites le rapport des profits au capital que les actionnaires ont et vous arrivez à un taux de 15.7% pour la période de 1965 à 1971.

Quand on compare à d'autres industries, on se rend compte que c'est dans la bonne moyenne; alors, on dit: Si le capital est nécessaire, il est simplement justement, rémunéré. A ce moment-là, il n'y a pas de réduction à obtenir, à moins qu'on ne puisse en arriver à la conclusion que le capital n'est pas nécessaire. A la fin du rapport, lorsqu'on parle de l'avantage de l'Etat et de l'entreprise privée, on dit: Même dans l'Etat, il y a une forme de capital qui est le droit d'appel de toutes les pertes qu'on fait à l'assuré. Effectivement, quand vous établissez une grosse mutuelle — au lieu de l'Etat, on peut parler d'une grosse mutuelle — où les assurés sont captifs, si vous perdez de l'argent une année, l'année suivante, vous le leur ferez payer. A ce moment-là, c'est l'assuré qui supporte le risque, qui remplace le capital et, comme tel, on n'a pas à en tenir compte.

Je sais très bien que la CSN nous l'a reproché. Que voulez-vous, c'est peut-être dans leur philosophie.

M. Bonnier: Cela dépend du calcul. C'est bien sûr que l'Etat doit quand même capitaliser jusqu'à un certain point pour mettre sur pied une entreprise d'assurance.

M. Gauvin: Oui.

M. Bonnier: C'est peut-être le rendement sur le capital investi qu'on ne calcule pas à ce moment-là dans une entreprise d'Etat. D'ailleurs, l'Etat va être obligé d'emprunter sur le marché pour financer. Il y a un manque à gagner quelque part.

M. Gauvin: Oui, cela, il faut en tenir compte, mais, en assurance, cette année, les primes vont probablement dépasser $500 millions. Vous savez, ce serait quand même temporaire. Le problème, c'est que, lorsque vous avez un monopole — il y en a — en fait, ils ont toujours la possibilité de récupérer toutes leurs pertes et, finalement, c'est le consommateur qui les paie, ces pertes

Evaluation des dommages

M. Bonnier: J'ai une autre question dans un autre ordre d'idées; vous me le direz si je prends trop de temps, M. le Président. Une façon d'épargner, c'est de contrôler le mode de réparation ou l'évaluation des dommages dans un sinistre. On pourrait peut-être recommander qu'il y ait des centres d'évaluation, quoique certains ont dit que ce n'était pas efficace, mais d'autres sont venus nous dire — je pense que c'est Allstate, ou une autre compagnie je ne sais pas quoi— qu'ils en ont, qui effectivement sont ouverts même le samedi et après cinq heures.

Mais, quand on regarde un régime comme celui de la Saskatchewan, ils ont cru nécessaire de juxtaposer à côté de ces centres d'évaluation leur propre garage de réparations, leur centre de réparations, de façon à dire: Ecoutez, si vous ne trouvez pas un garage, nous on va en avoir. C'est ce que j'ai entendu dire.

M. Gauvin: Je m'excuse, je pense que vos informations... Selon celles que je possède, ce qu'ils ont, c'est ce qu'ils appellent un "salvage division".

M. Bonnier: "Salvage division", mais "repair division" aussi.

M. Gauvin: Non.

M. Bonnier: Non?

M. Gauvin: C'est peut-être nouveau mais disons...

M. Bonnier: Moi, c'est ce que j'ai entendu dire, il y a quinze jours. Ce n'est peut-être pas exact. C'est parce qu'ils étaient en face du problème que les centres d'évaluation faisaient une évaluation, mais, par ailleurs, ils ne trouvaient pas de garages qui pouvaient la faire à ces prix. Alors, ils se sont dit: C'est bien simple, si vous ne trouvez pas de garage, nous on va vous en référer un. En tout cas, ils pourraient le faire.

La question que je voulais poser est celle-ci. Est-ce qu'on peut mettre sur pied des centres d'évaluation — je ne sais pas s'ils devraient être contrôlés par l'Etat ou par les assureurs; de toute façon, ils devraient être contrôlés par quelqu'un — mais, en même temps, avoir un système de réparation ou de "salvage"? Cela, c'est peut-être l'endroit où vous allez chercher vos pièces, mais vous êtes obligé de réparer vous-même.

Est-ce que ça n'est pas exigé à côté d'un système?

M. Gauvin: A mon sens, ce n'est pas absolument nécessaire. Peut-être que M. Rankin voudra ajouter son expérience ou ce qu'il a vu en Allemagne, mais effectivement, en Suède, ils ont des centres d'évaluation et un assureur au moins a son propre garage simplement pour connaître en fait comment cela se fait et quels sont les coûts pour négocier. Ils s'en servent beaucoup plus comme outil de négociation à ce moment-là, pour savoir ce que ça coûte véritablement d'exploiter un garage, effectivement, comment ça prend de temps pour les normes. Ils s'en servent beaucoup plus de cette façon que réellement pour avoir des centres de réparation un peu partout.

Ceux que nous avons eu l'occasion de voir, on s'en servait plus comme outil d'élaboration des normes ou des coûts, etc. Cela peut exiger de le faire, oui.

M. Rankin: Le problème voulant que tout garage doit faire les réparations au coût que l'évalua-teur a fixé, dans plusieurs juridictions, a été déjà résolu. Prenez la situation au Massachusetts qu'on a visité, et en Floride aussi où on a visité un centre d'évaluation qui appartient à une grosse compagnie d'assurance. Evidemment, cela peut se trouver seulement dans une grande ville. Ils ont un groupe de garages qui ont fait un accord avec la compagnie de faire les réparations selon l'évaluation donnée. Ces garages ont trouvé qu'ils perdent sur un contrat, ils gagnent sur l'autre. Ils ont confiance dans l'évaluation donnée.

Une Voix: Cela ne posait pas de problème?

M. Rankin: Non, ça ne posait pas un problème en pratique. La deuxième chose, le garage aime ça, parce que, quand le système a fait son rodage, il n'a pas besoin de faire l'évaluation lui-même qui est une procédure assez dispendieuse pour chaque garage.

Au Manitoba, par exemple, M. Gauvin et moi sommes allés voir un garagiste et il nous a dit que, maintenant, il accepte l'évaluation. Il ne la fait pas lui-même. Cela lui épargne beaucoup d'argent.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député d'Iberville.

M. Tremblay: M. le Président, M. Gauvin, afin d'ajouter un peu d'humour à cette sérénité qui préside notre rencontre de ce matin, vous avez parlé de brasseurs de paperasse — c'est une expression assez typique qui se retrouve souvent dans les conversations entre députés — vous référant surtout à la bureaucratie gouvernementale. Seriez-vous d'accord avec nous pour nous dire que les maîtres brasseurs experts de la paperasse au Québec, c'est précisément ici où nous sommes?

M. Gauvin: Je n'ai pas la compétence pour vous répondre. Est-ce que vous voulez former une commission d'enquête pour étudier ce problème?

M. Tremblay: Merci. M. Rankin, je parcours avec une mémoire photographique pas toujours fidèle ce rapport intéressant que M. le ministre nous a présenté ce matin, hélas à court terme; je dois le lui reprocher.

M. Tetley: Je vous ai présenté un exemplaire il y a un mois, monsieur, à tous les membres ici.

M. Tremblay: Je m'excuse, je ne l'avais pas eu.

M. Tetley: Je sais qu'avant Noël nous étions tous très occupés avec des "filibusters" ; on siégeait jusqu'à minuit tous lés soirs.

M. Tremblay: Probablement que nos brasseurs de paperasse, précisément, ont fait la lessive.

M. Tetley: Oui. C'est parmi votre paperasse, quelque part.

M. Tremblay: A toutes fins pratiques, M. Rankin nous avait déjà exprimé verbalement plusieurs des commentaires qu'il a consignés dans ses notes. Je trouve quelques points très intéressants, sur lesquels je ne voudrais pas m'étendre trop longtemps, mais poser possiblement les questions pertinentes.

Concernant votre quatrième réaction, à la page 6 de vos commentaires, vous dites: "II est évident que certaines recommandations du rapport ne peuvent pas plaire aux intéressés", cela est tout à fait normal.

Et vous ajoutez, par exemple: "Mais essayer de tout détruire dans le rapport — vous référant naturellement à ceux qui ont présenté des mémoires — sauf peut-être pour la fameuse section sur la sécurité routière, me paraît comme une tactique douteuse".

Soutenant l'allégation que vous nous soumettez, quel serait, d'après vous, M. Rankin, le motif ayant présidé à cette attitude de la part de ces présumés objecteurs au rapport Gauvin?

M. Rankin: Je trouve que cela vient de la peur et de la mauvaise compréhension des recommandations du rapport. Je ne trouve pas que c'est une question d'être malin. Je cite un exemple plus loin dans mes remarques. La plupart des mémoires ont rejeté le plan d'indemnisation proposé. Je crois que cela est vrai. Je parle, par exemple, des mémoires des diverses associations de courtiers, comme la Fédération des courtiers a rejeté notre plan. Pour un expert, c'est difficile de dire que notre plan n'était pas un bon plan.

Comme je le dis un peu plus loin, je comprends leur attitude, mais notre plan d'indemnisation, pour un courtier, on doit admettre que c'est un plan très riche. Mais ils ont dit: Non, on va vers le plan d'Au-toBAC. Ils auraient dû dire, en tant qu'experts: Le plan d'AutoBAC nous paraît peut-être plus facile d'exécution, au lieu de mettre en doute l'évaluation d'une telle façon... Je ne me souviens pas exactement des mots, mais le porte-parole de l'Association des courtiers a dit: C'est une question pour les actuaires. Mais un courtier doit être capable d'évaluer un plan d'indemnisation au point de vue des victimes. Il n'est peut-être pas capable, sauf dans les grandes lignes, d'évaluer les coûts de ce plan. Je crois que les commentaires étaient mal exprimés par le porte-parole. Ils ont dit: Nous craignons que les coûts ne soient trop élevés. C'est autre chose.

C'est une question à discuter entre les actuaires. Nous avons eu d'autres évaluations. Il y a deux autres actuaires qui ont été consultés par les autres groupes et qui en sont arrivés à peu près au même coût au point de vue du plan d'indemnisation, mais qui ont discuté de certaines questions, des problèmes administratifs. Peut-être que j'ai été un peutrop sévère, je m'en excuse, mais je trouve que, d'abord, les réactions étaient bien compréhensibles. Ils n'ont pas cherché les explications, ils n'ont pas compris l'objectif. Je cite l'exemple des courtiers; en changeant leur rôle, on leur enlève beaucoup de leurs dépenses. Ce ne sont pas les courtiers qui vont être frappés, ce sont les commis de bureau. Ils n'ont plus besoin autant d'un comptable, ils n'ont plus besoin d'une réceptionniste.

M. Tremblay: Je vous remercie. Dans les pourparlers que vous avez eus au sein de votre mandat au comité Gauvin, vous avez certainement dû avoir des consultations assez fréquentes avec ces groupes qui, après, sont venus présenter des mémoires à la commission.

M. Rankin: Est-ce que M. Gauvin... M. Gauvin: II est bien évident que...

M. Tremblay: Le BAC, par exemple, les courtiers, les avocats.

M. Gauvin: En fait, le BAC, le Barreau, les courtiers nous ont présenté effectivement des mémoires. Nous avons également eu l'occasion de les rencontrer dans d'autres circonstances, pour obtenir des éclaircissements, lors de la durée du mandat, et nous avons demandé, au moins aux courtiers — je peux en nommer deux — même au Barreau, de nous fournir des renseignements supplémentaires.

En fait, les problèmes ont été... On ne leur a pas dit les options que nous prenions. Il est bien évident que le rapport du comité devait être remis au conseil exécutif tel que le mandat le stipulait. Personne ne l'a vu avant qu'il soit remis aux autorités, mais les

gens ont eu l'occasion de nous dire ce qu'ils pensaient.

Il y a des groupes qui nous ont dit très peu de chose. Des mémoires présentés par certains groupes ne disaient pas grand-chose. Vous avez eu à peu près la même chose. Si vous regardez certains mémoires qui ont été présentés ici, on disait: Oui, on est d'accord sur la sécurité routière, on est d'accord sur tout ce qui nous touche. Ce qui nous touche, on n'en parle pas. On disait: On ne veut rien changer.

M. Tremblay: Naturellement, ceux qui semblent, à mon avis du moins, le plus sensibilisés, ce sont les assureurs, le BAC comme tel, le Bureau des assurances du Canada. Depuis l'automne dernier, nous remarquons que, maintenant, ils se font connaître un peu plus au public qu'auparavant. C'est peut-être une réaction heureuse qu'ils ont eue face au travail du comité Gauvin et aux sessions actuelles, publiques, de la commission parlementaire.

Ce fameux BAC, qui se réclame finalement être l'industrie de l'assurance au Canada, il faut toujours lui accorder ses lettres de créance comme telles. Est-ce qu'il a eu lui-même une influence réelle, non pas sur vous, mais sur les délibérations du comité Gauvin? Autrement dit, est-ce que vous avez pris en sérieuse considération l'avis des assureurs ou si eux-mêmes n'ont pas semblé vouloir vous communiquer une réelle portion de leurs convictions?

M. Gauvin: Effectivement, je pense qu'on n'a pas plus tenu compte de l'avis des assureurs que de l'avis d'autres parties intéressées. On a traité tout le monde de la même façon. Les assureurs nous ont fait connaître leur point de vue. Ils nous ont fait connaître l'AutoBAC, le plan qu'ils préconisaient. Nous en avons tenu compte. Nous avons dit: Nous le rejetons pour les motifs suivants.

Ce que je trouve quand même assez intéressant, suite aux discussions de la commission parlementaire, c'est que, fondamentalement, il n'y ait aucun chiffre qui ait été cité dans le rapport selon lequel, par exemple, les assurés ne reçoivent que 60% de la prime. On n'a démontré nulle part que c'était inexact. En fait, fondamentalement, pour les données qui sont contenues dans le rapport, il n'y a personne qui est arrivé ici, à mon sens, pour vous dire qu'elles ne sont pas exactes. Les assureurs, que ce soit le BAC ou d'autres, sont obligés d'admettre qu'ils ne retournent que $0.60 dans la piastre aux assurés. C'est quand même important.

Il n'y a pas eu, à mon sens, de véritables preuves selon lesquelles les victimes sont mieux traitées qu'on l'a dit. La délibération des membres a tenu compte des avis des gens. On vous dit: Les assureurs nous ont fait connaître des données. On les leur a demandées à plusieurs reprises, parce qu'ils avaient, par leur agent en statistiques, des renseignements. Nous avons, à plusieurs reprises, exigé d'eux — ils ont toujours collaboré — de nous fournir des renseignements sur les délais, sur les coûts. Les experts consultants que nous avons retenus sont allés les voir, ces gens. Ils sont allés voir également les assureurs et les courtiers. Ils nous ont fait rapport. C'est à l'aide de ces études que nous avons finalement pris notre responsabilité et dit: Pour nous, pour résoudre le problème, c'est ce qu'il faut faire.

M. Rankin: Excusez, M. le Président, je peux peut-être ajouter quelques mots. Vous faites référence avant le rapport. Avant le rapport, nous avons eu une collaboration très étroite avec tous les intéressés. On ne peut demander beaucoup mieux. Après le rapport, on en parle, bien entend u, mais par exemple, les gens comme ceux du BAC qui n'ont pas compris du tout cette conception de "direct selling". Ils ne nous ont pas consultés pouravoir les éclaircissements. C'est cela que j'ai trouvé curieux, c'est peut-être la raison pour laquelle j'ai été un peu sévère.

M. Tremblay : A la page 8, principales questions soulevées pendant les séances subséquentes de la commission parlementaire, concernant la responsabilité comme principe d'indemnisation, me référant aux paragraphes a), b) et c), je vous demande de nous fournir précisément les explications pertinentes que vous nous offrez à la fin de votre texte, disant: "Je crois que toutes les questions de tarification sur le dossier de conduite méritent d'être expliquées si les députés le veulent". Naturellement, je vous demande une explication sommaire pour nous ramener un peu dans le contexte de ce grand principe.

M. Rankin: Je vais essayer d'expliquer cela, M. le Président, un peu à la façon de l'homme dans la rue.

M. Tremblay: Allez-y:

M. Rankin: Je vais demander à M. Gauvin d'ajouter ses remarques, parce que c'est une question technique. J'ai étudié cette question, parce qu'à première vue, comme comptable et comme économiste, j'ai eu les mêmes réactions que la populace. On est obligé de payer pour un accident, quand on est déjà assuré. Ce semble être un non-sens. Le problème est le suivant: Si vous prenez 1,000 personnes, un échantillon de 1,000 automobilistes, il y a un certain pourcentage parmi eux qui sont de mauvais risques, soit parce qu'ils sont de mauvais conducteurs, soit parce qu'ils sont des "accident prone", soit parce qu'ils utilisent beaucoup leur véhicule, par exemple parce qu'ils sont dans un cas très commun, celui du type, avec une voiture, qui fait la livraison pour les supermarchés le vendredi ou le samedi, sans changer pour cela sa police pour une voiture commerciale.

Ces gens font un pourcentage, parce qu'il faut donner un chiffre. Par 1,000, il y en a une vingtaine ou une soixantaine: après une certaine période, il y en a une centaine qui vont avoir un accident. Dans les 900 qui restent, il y a encore des mauvais conducteurs et des "accident prone". Mais le pourcentage est moins élevé que dans les 100 qui ont déjà un accident. A chaque année où vous progressez, vous allez discerner un peu plus exactement ce

groupe que vous voulez. Ce que nous avons dit dans nos discussions, c'est qu'il y a peut-être d'autres moyens de mettre le doigt sur ces gens. Comme il a été suggéré assez souvent, par exemple une tarification qui tienne compte des points de démérite. Faute de cela, c'est une situation exacte. L'idée n'est pas de vous punir pour l'accident, parce qu'on trouve que vous êtes un mauvais risque, mais vous étiez déjà un mauvais risque au début, mais on n'était pas capable de le discerner. C'est seulement quand vous avez eu un accident, comme on l'a vu, que vous vous trouvez parmi les mauvais risques. Je vais laisser M. Gauvin préciser un peu plus.

M. Tremblay: C'est, en définitive, vers ce principe de tarification que vous tendez au sein des recommandations du comité, en vue d'améliorer le système de classification des risques, au fond.

M. Rankin: Oui.

M. Gauvin: Le système est très mal vu du public qui croit être puni parce qu'il a eu un accident. Mais, dans les faits, ce n'est pas la raison.

M. Tremblay: Mais le système est établi par les assureurs...

M. Gauvin: Actuellement, oui.

M. Tremblay:... en vertu des critères généraux que M. Rankin vient de définir...

M. Gauvin: C'est cela.

M. Tremblay: ... et en vertu également des renseignements qu'ils peuvent obtenir par le dossier des personnes qui ont perdu des points, etc. Tout cela est consigné dans les bureaux des assureurs, sans doute. Chaque compagnie le fait-elle à son gré ou si c'est le BAC, dans l'ensemble des compagnies qui font ça?

M. Gauvin: J'aimerais mieux... Vous posez des questions sur le BAC. Je pense qu'il est venu... Le BAC a un agent qui s'occupe de statistiques et vous avez probablement le surintendant des assurances qui peut répondre. Vous avez un agent qui s'occupe de statistiques et qui, lui, compile les renseignements au niveau de tous les assureurs. C'est fait pour l'ensemble...

M. Tremblay: Ah bon!

M. Gauvin: Nous, ce qu'on a trouvé, c'est que le système était boiteux, en ce sens qu'il ne permettait pas des évolutions rapides de la classification des risques. Il fallait justement amener une réforme au système de statistiques. On en a parlé dans le rapport.

M. Tremblay: La classification des risques, si je comprends bien — vous allez m'excuser; ce n'est pas un langage qu'on parle tous les jours — c'est déterminé par des gens du Bureau des assurances du Canada et des gens du surintendant. C'est cela? Il y a un bureau qui existe...

M. Gauvin: Le modèle statistique est déterminé par un agent qui s'occupe de statistiques, qui est sous la responsabilité de l'Association des surintendants d'assurance...

M. Tremblay: Ah bon!

M. Gauvin: Mais il est dirigé, en fait, par le Bureau d'assurance du Canada. Ces gens recueillent les statistiques selon une donnée, mais ce qu'il ne faudrait pas oublier, nécessairement, c'est que, selon les données que vous recueillez, selon le genre de données, cela impose des limites quant aux classes que vous allez faire par la suite. Si vous voulez classifier les gens divorcés et, dans les statistiques, vous ne recueillez pas ce renseignement, vous allez avoir des difficultés à le faire.

M.Tremblay: D'accord! Merci beaucoup. J'avais pris une autre note pour terminer...

M. Rankin: Je vais vous citer un autre exemple. Dans les âges, on peut avoir des statistiques pour chaque catégorie d'âge des conducteurs. Les statistiques qui sont disponibles actuellement sont déjà groupées selon les genres de primes et les tarifications actuelles. Prenez l'exemple d'une compagnie d'assurance qui veut accorder une prime différente pour les gens de 47 ans. Il n'est pas capable d'aller dans le plan statistiq ue et de savoir si son hypothèse est bonne. Il n'est pas capable de voir si une Chevrolet est un meilleur risque qu'une Ford. Le plat est déjà cuit avant qu'il lui soit présenté.

M. Tremblay: C'est bien. A la page 10, et je vais terminer avec cela, vous vous référez à une citation de M. Moreau lorsqu'il est venu présenter le mémoire du Bureau d'assurance du Canada, M. Moreau disait: "Les régimes proposés par le comité d'étude et par le BAC sont sensiblement les mêmes. Il est donc évident qu'une étude faite conjointement par les spécialistes du gouvernement et les assureurs pourrait rapidement conduire à un compromis idéal pour le consommateur". Ne voyez-vous pas là une formule valable de consultation pouvant apporter des éléments de solution au problème du principe d'indemnisation?

M. Rankin: Oui. Remarquez que ces remarques de M. Moreau se rapportent aux différents systèmes de dommages matériels. Les différences entre le système du BAC et le nôtre sont des différences techniques. Je crois que nous avons déjà examiné l'expérience dans certains Etats où le mode d'application que nous avons suggéré existe déjà dans une mesure ou une autre. Nous avons essayé d'en profiter de leurs erreurs dans leurs innovations pour proposer quelque chose qui soit le plus à jour. Le système du BAC est sensiblement le même. Il y a certaines nuances que nous avons apportées et que nous considérons être là pour des raisons très spécifiques.

M. Gauvin: Excusez-moi. On parle du BAC au niveau des dommages matériels seulement.

M.Tremblay:Oui. Il l'indiquait aussi dans son...

M. Rankin: II n'y a certainement pas beaucoup de différence. Par contre, si vous parlez des mémoires du Barreau, où il est question de supprimer le droit de subrogation dans les dommages matériels, cela soulève un problème technique très épineux, je crois. S'ils vont consulter les spécialistes, ils vont trouver que ce n'est pas si facile qu'à première vue.

M. Tremblay: Comme dernière question complémentaire, cela vous demanderait-il une recherche ou avez-vous cela de mémoire? Quel est le pourcentage des réclamations globales de dommages matériels à l'automobile à comparer aux dommages physiques à la personne?

M. Gauvin: C'est 65%-35%. A peu près.

M. Tremblay: Cela correspond-il aux statistiques des assureurs?

M. Gauvin: Non. Vous parlez de montants. C'est le pourcentage.

M. Tremblay: Le nombre de réclamations pour des dommages matériels? C'est 65%.

M. Gauvin: Non. Pas le nombre, le montant impliqué.

M. Tremblay: Je veux dire le pourcentage.

M. Rankin: Le nombre.

M. Tremblay: En dollars ou en...?

M. Gauvin: En dollars. En nombre, il est évident que le nombre de blessures...

M. Tremblay: ... peut varier.

M. Gauvin: ... est beaucoup plus bas que... Le rapport, je ne l'ai pas.

M. Tremblay: Mais les réclamations en dollars, c'est 65% pour les dommages matériels et c'est 35%...

M. Gauvin: Avec une marge d'erreur...

M. Tremblay:... pour les dommages physiques. Cela correspond-il à leurs statistiques?

M. Gauvin: Oui.

M. Tremblay: Et les fameux règlements pour dommages matériels se règlent-ils vite ou y a-t-il encore des causes pendantes indéfiniment?

M. Gauvin: En fait, dans l'analyse des délais, on avait distingué les cas de blessures corporelles et les cas de dommages matériels avec blessures corporelles et les cas de dommages corporels seulement. Il est quand même surprenant de trouver... Il y a même des cas où il y a simplement des dommages matériels et les délais sont relativement longs. Une des raisons, c'est qu'on fonctionne dans un système d'adversaires. Il faut commencer par prouver qui est responsable et aller voir son assureur. Dans un système d'assurance directe, vous allez vous adresser immédiatement à votre assureur. Il pourra prendre les mesures appropriées. Vous n'attendez jamais après un autre.

M. Tremblay: D'accord. Merci.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Laurier.

Coûts cachés

M. Marchand: Je m'adresserais à M. Gauvin. Le premier ministre de l'Ontario, le 2 novembre, à une conférence aux agents d'assurance et aux courtiers, faisait une déclaration que je cite: "Even a cursory examination of premium costs and benefits, to say nothing of hidden costs in Manitoba, Saskatchewan and British Columbia, reveals that these people are either deluding themselves or deliberately misleading the public by engaging in some very cunning book-keeping". Pouvez-vous commenter cette déclaration?

M. Gauvin:... l'affirmation, je sais à peu près ce qu'il a dit. Je ne sais pas où il prend ses informations. Tout ce que je peux dire, c'est que nous n'avons pas accepté les chiffres du Manitoba et de la Saskatchewan sans aller les voir. Le comité a coûté presque trois quarts de million de dollars. Avant de prendre les chiffres du Manitoba et de la Saskatchewan, nous avons retenu les services d'experts comptables en administration; en fait, il y a eu deux équipes de maisons dont l'impartialité ne pouvait être mise en doute, des gens qui — même, dans un cas, je ne voudrais pas donner de nom, ils sont dans le rapport de toute manière — travaillent à la fois pour les assureurs et pour ces gouvernements. Le mandat qu'ils ont eu était clair, c'était d'aller nous dire combien cela coûte là-bas, de voir s'il y a des frais cachés. Les conclusions de leur étude, nous les avons adoptées en demandant des explications additionnelles et nous en avons fait part dans le rapport. Nous n'en avons pas trouvé. Si le premier ministre d'Ontario, pour qui j'ai beaucoup de respect, a fait la même étude et est arrivé à une conclusion différente, qu'il la rende publique.

Je peux vous dire que la première réaction que nous avons eue des assureurs quand on nous a dit... Quand ils ont su que nous allions dans ces provinces pour vérifier, ils nous ont écrit une lettredans les mêmes termes que ce que vous venez de lire là, dans la langue de Shakespeare, en nous disant: "Hidden facts, hidden costs". Ici, à droite, à gauche, nous nous attendions à voir des millions qui sortaient d'un peu partout et, s'il y en a, les conclusions des

comptables agréés que nous avons retenus sont que ce sont des montants tellement minimes que ça ne vaut pas la peine d'en parler.

M. Marchand: Naturellement, M. Gauvin, cela n'attaque nullement les membres de la commission Gauvin ni des firmes engagées. Cette déclaration ne vous engage pas. Vous avez pris les chiffres que vous avez eus. C'est au premier ministre, comme vous le dites si bien, d'expliquer où il y a eu des fuites.

Mais cela ne vous implique pas du tout, la déclaration.

M. Gauvin: Non, ce n'est pas que ça m'implique, j'ai dit...

M. Marchand: Je ne voudrais pas que vous pensiez que j'ai dit cela dans ce sens-là.

M. Gauvin: Je ne l'ai pas pris dans ce sens. Je veux simplement vous dire que j'ai été un peu surpris de la déclaration en question parce qu'en fait, ça venait au contraire de ce que disaient... Etrangement, c'est le même son de cloche que celui que les assureurs nous ont donné.

Je dis bien "étrangement", je ne veux pas insinuer qu'il y a une relation entre les deux. Mais, quand même, nous avons demandé au Conseil du trésor des sommes assez considérables — je ne me souviens pas des montants — pour engager des experts, les envoyer là-bas avec un mandat clair et précis. Cela coûte combien? Il y a combien de coûts cachés? On retourne combien au public? Eux nous ont fait un rapport. S'il y a des faits différents, que le premier ministre d'Ontario les fasse connaître.

M. Lachance: M. Gauvin, sur la même chose, dans ces provinces, apparemment, les prévisions budgétaires pour l'assurance ont été dépassées, il leur a fallu se renflouer à un moment donné. Ils auraient eu ce problème au Manitoba?

M. Gauvin: Oui. Mais, comme les assureurs viennent d'annoncer qu'ils ont perdu de l'argent... S'ils ont mal estimé effectivement leur coût, parce que, quand vous faites de l'assurance, vous fixez à l'avance une prime pour un risque qui va se matérialiser; si, pour toutes sortes de raisons, dans ces provinces, on n'a pas estimé les coûts au juste niveau, il ne faut pas se surprendre qu'il y ait eu des pertes. Et l'ordre de grandeur qui a été donné de ces pertes, ce qui s'est réalisé, d'après les chiffres que j'ai vus, est à peu près ce que nous avons vu dans l'industrie. L'industrie vient de dire qu'elle a perdu $200 millions. Si on fait le rapport sur le volume qu'ils font et si on va là-bas, il n'y a peut-être pas des écarts aussi considérables que ça. Maintenant, effectivement, dans ces provinces, quand même, on retourne 82% ou 83% de la prime au public. C'est un fait. Si, pour une raison ou pour une autre, vous ne demandez pas assez au consommateur, eux ont l'avantage sur l'entreprise privée de pouvoir le repasser ultérieurement; pour toutes sortes de motifs que j'ignore, il est possible, je ne le sais pas, qu'on ait sous-évalué les coûts du régime. A ce moment-là, le public va le repayer quand même.

M. Lachance: Quand on parle de coûts cachés, c'est un peu ce qu'on veut dire. Est-ce que...

M. Gauvin: Excusez-moi, ce n'est pas un coût caché; si la perte a été de $10 millions, elle est là; ce monopole, ils vont le reprendre l'année suivante. Moi, je pense que des coûts cachés, ce sont des subsides que le gouvernement leur donnerait en payant des frais, en évitant qu'ils paient des loyers.

Le mandat que nous avions donné au consultant, c'était justement d'aller chercher les coûts véritables de ce que cela leur coûtait. C'était également d'aller voirsi le gouvernement ne lui donnait pasdes terrains, ne lui donnait pas des loyers gratuitement, ne payait pas des contributions aux avantages marginaux. On est allé dans les détails pour aller voir finalement s'il fonctionne tout seul. Est-ce que le budget qu'il y a là, c'est le vrai budget? Est-ce qu'il n'y a pas $1 million qui passe dans d'autres comptes. On parle quand même d'une opération de $40 millions. Cela fonctionne là-bas. Tenons pour acquis que cela fonctionne d'une manière aussi efficace que notre système actuel, qu'il fonctionne à $0.60 au dollar. Sur un budget de $40 millions, cela veut dire qu'il devrait se camoufler $8 millions à $10 millions quelque part.

M. Marchand: Cela commence à être pas mal.

M. Gauvin: Cela commence à faire pas mal d'argent. Cela fait pas mal à cacher. Je ne sais pas s'il y a un ministère qui accepterait $3 millions, $4 millions d'un autre, comme cela. Les experts que nous avons retenus nous ont dit: II n'y en a pas, mais s'il y en avait, cela peut simplement être des montants infinitésimaux.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Taschereau.

M. Marchand: Je n'ai pas fini.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Vous n'avez pas terminé?

Ventes au comptoir

M. Marchand: Sur un autre sujet, M. le Président, lorsque vous êtes venu, la première fois, pour expliquer votre rapport, vous avez parlé de la vente de l'assurance au comptoir par les banques, les caisses populaires. Vous n'avez pas soulevé ce sujet? Lorsque les caisses populaires sont venues, elles se sont dites opposées à votre proposition. Elles ne sont pas intéressées à vendre de l'assurance au comptoir. Est-ce que vous maintenez cette proposition?

M. Gauvin: Je ne sais pas si les caisses populaires sont venues. C'est la Compagnie d'assurance des caisses populaires.

M. Marchand: Oui.

M. Gauvin: Mon gérant de caisse me dit qu'il est très intéressé à le faire. Sa compagnie ne veut pas. C'est la Compagnie d'assurance des caisses populaires.

M. Marchand: La compagnie...

M. Gauvin: Alors, c'est la compagnie d'assurance. Effectivement, ce que nous préconisons, ce n'est pas de la vente au comptoir.

M. Marchand: C'est plus compliqué que de vendre Loto-Québec et la Loterie olympique au comptoir.

M. Gauvin: Je ne suis pas convaincu avec la Loto-Perfecta.

M. Marchand: Celle-là est plus compliquée.

M. Gauvin: II faut bien situer le problème. Dans un régime comme on préconise, où les options ne sont quand même pas si considérables, on ne parle pas en fait d'assurance commerciale, on parle d'un plan prédéterminé. L'élément vente est assez facile. C'est l'élément conseil qui doit entrer. Ce que nous avons dit dans le rapport, c'est qu'on voudrait en fait que le public, pour amener de la concurrence dans tout cela, puisse faire le choix et dire: Moi, je veux aller à telle compagnie et je veux y aller directement. Cela a été extrêmement mal compris. Vous avez eu une multinationale américaine qui, dans un français très châtié, nous a tenu toutes sortes de propos. Effectivement, c'est un "direct writer" qui dit: On n'en veut même pas. Ce n'est pas le genre de "direct writer" qu'elles font. Tout ce que nous voulons, c'est que le public puisse, s'il le désire, aller directement à l'assureur de son choix. A ce moment-là, il n'y aura pas d'intermédiaire, il n'aura pas de service, il n'aura pas de conseil. Il va peut-être, en fait, être moins bien servi, mais il fait le choix.

M. Marchand: Probablement qu'il sera moins bien servi.

M. Gauvin: II pourra être moins bien servi.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Taschereau.

Coûts et bénéfices

M. Bonnier: Pour moi, M. le Président, c'est une question bien générale, mais je voudrais reprendre mon droit de parole pour poser cette question aux membres du comité Gauvin. Je pense bien qu'ils se rendent compte, quand on a fini de tourner autour du pot, il y a pas mal de gens qui regardent cela et qui seraient peut-être d'accord, dans l'arrière-plan, que leurs recommandations impliquent des changements assez fondamentaux dans les modes de fonctionnement de la société comme telle. Il existe, dans notre société comme dans toute société, des tissus économiques. Il existe des tissus sociologiques, il existe toutes sortes de tissus. C'est sûr qu'une commission d'enquête comme la vôtre vient provoquer des changements qui font que l'organisme est obligé de changer un peu. Est-ce que, dans vos recommandations, vous avez pensé qu'il était de votre ressort de tenir compte d'une certaine pondération à cet effet par rapport à vos recommandations ou si votre étude a été tout simplement, de façon très objective, une étude des coûts et des bénéfices par rapport au consommateur en ce qui regarde l'administration d'un nouveau système?

M. Gauvin: En fait, il est bien certain que les termes de référence du mandat qui nous avait été donné étaient clairs. Enfin notre première préoccupation était les victimes. Il ne fallait pas pour autant ignorer les autres parties et je suis, quant à moi, convaincu que nous avons tenu compte quand même qu'il y avait des gens qui oeuvraient dans le domaine et qui avaient un rôle ajouter. Nous avons, dans nos recommandations, quant à moi — et j'aimerais que les membres vous disent leur propre opinion — tenu compte, effectivement, que ces gens avaient un rôle à jouer qui était valable et qu'ils devaient y rester. Moi, ce que je trouve un peu déplorable, c'est quand même l'aspect négatif, excessivement négatif, de certains des mémoires qui nous ont été présentés où les gens disent: On n'en veut pas, mais qui n'ont même pas, dans certains cas, amené d'éléments de rechange.

Ils ont dit: On ne veut pas changer notre rôle, mais en fait ils n'ont pas prouvé que le rôle qu'ils jouaient actuellement, c'était le rôle qu'ils devraient jouer pour véritablement protéger le consommateur. Nous, on a dit: II faut fondamentalement protéger le consommateur, il faut accorder aux victimes une juste et équitable compensation et il faut également conserver une motivation et une évolution future. C'est dans cette optique que la recommandation de base était l'entreprise privée, pour ne pas tomber dans un organisme qui s'installe et qui n'a pas de motivation de changer, comme c'est arrivé dans certains cas. Je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Bouchard (Jean-Marie): La question que je vous ai posée, c'est au fond une synthèse de la philosophie générale qui a présidée à la rédaction du rapport. Il faudrait peut-être vous rappeler très rapidement que le but que nous avions poursuivi était celui qui nous avait été édicté en termes très clairs par l'arrêté en conseil qui nous a constitués et la base ou l'hypothèse de travail de notre comité a consisté, comme j'ai eu l'occasion de l'affirmer à plusieurs reprises, à étudier ce qu'on appelle le phénomène sociologique nouveau qui s'appelle l'envahissement de l'automobile dans la vie de l'individu, l'envahissement dans la société moderne de l'automobile, du phénomène de l'automobile, d'où découle la notion que nous avons retenue, mais que nous n'avons pas inventée, mais que nous avons adoptée, qui était celle de risque social.

Cette notion a comporté des recommandations

énergiques dans tous les secteurs que no us avions à étudier et nous en étions pleinement conscients, puisque, si je me réfère à la dernière page de notre rapport, nous disions expressément ceci : A n'en pas douter, les réformes proposées par le comité constituent des innovations radicales. Elles exigent des transformations profondes dans l'administration de l'assurance-automobile au Québec, dans les compagnies d'assurance et chez les intermédiaires. Nous terminions, après avoir exposé les deux possibilités de réforme, en disant que la création du monopole étatique qui apparaît ici comme la solution ultime — et ça, c'est une notion qui nous échappait, nous devions le signaler — pourrait devenir prioritaire en raison de considérations socio-politiques poursuivies par le gouvernement et qui ne sont pas du ressort du comité. Je pense que ça résume assez bien.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Charlesbourg.

M. Harvey Charlesbourg): M. le Président, ça va bien, M. Gauvin, bonjour.

M. Gauvin: Cela va toujours bien.

M. Harvey (Charlesbourg): M. Gauvin, j'ai lu avec attention également et je vous ai entendu, lors de la présentation de la commission parlementaire du 12 décembre dernier. Je vous avouerai franchement que c'est au choc des idées que jaillit la lumière et, de ce fait, je pense que, consciemment, le rapport Gauvin va provoquer l'avancement du système en matière d'assurance-automobile au Québec. Et je pense que la crainte ou la peur sont peut-être, dans certains cas, le commencement de la sagesse et, consciemment, je le sais, vous réalisez que vous favorisez un dialogue entre les courtiers d'assurance et les assureurs comme tels, chose qui n'existait pas autrefois. On présentait une brique comme ça sur la table du courtier et on disait: C'est ça, l'affaire qu'on a à vendre, ça comprend tel ou tel avantage et puis, maintenant, organisez-vous avec ça en regard d'une concurrence, je pense, entre les différents bureaux de courtiers.

Cependant, dans votre étude, vous proposez un barème qui est établi à 5%. Je voudrais savoir pourquoi 5%? Pourquoi pas 10%? Pourquoi pas 3%? Pourquoi pas 2%? Sur quels chiffres vous êtes-vous basé? Est-ce un taux de 5% arbitraire ou non?

En fait, je ne voudrais pas non plus que vous m'accusiez de prendre la part du courtier, mais je pense que nous devons discuter dans le système que nous avons aujourd'hui, celui de la libre entreprise, celui de la commercialisation libre, et c'est en regard de cela que je voudrais connaître votre point de vue.

M. Gauvin: II y a deux grandes considérations qui sont entrées en ligne de compte pour déterminer ce pourcentage qui, incidemment, lui aussi, n'avait qu'un but transitoire pour amener finalement les forces du marché à déterminer ce qu'il devrait être.

La première considération, vous avez l'expé- rience de systèmes étatiques, où, effectivement, on travaille pour des pourcentages où la rémunération aux intermédiaires est même inférieure à ce niveau-là. C'est une considération, parce qu'on peut très bien dire: Une fois qu'on a élaboré un mode d'indemnisation, maintenant, on va voir qui va l'administrer. Le choix s'offre alors d'établir un monopole d'Etat.

L'expérience des monopoles qui existent indique un taux inférieur au pourcentage impliqué. Deuxièmement, lorsque nous avons fait faire une analyse du travail du courtier par nos conseillers, nous avions demandé qu'elle soit très bien subdivisée, entre ce qui avait lieu, ce qui était fait lors de l'émission d'un nouveau contrat, ce qui était fait lors du renouvellement, la fréquence des avenants qu'on ajoute, les annulations, les problèmes de perception des primes, etc.

C'est à partir de cette analyse qu'on peut se rendre compte que si, aujourd'hui, la rémunération dans l'ensemble, environ 12%, pour les intermédiaires, est valable, les tâches qu'on enlève à ces gens-là, autrement dit, réduisent le temps qu'ils doivent consacrer à l'administration et, en proportion, on peut réduire en fait, les montants qu'on leur consacre.

Comme on a recommandé l'élimination d'avenants, qui prend quand même un temps assez considérable, à ce moment-là, les personnes vont consacrer moins de temps à l'administration du portefeuille qu'elles ont. En parallèle, elles devraient accepter une rémunération moindre.

Si, de la même façon, vous vous en allez vers un système où le financement des primes est fait indépendamment, vous avez encore le même phénomène. C'est à l'aide de cette analyse que nous avons fixé que cela devrait être de cet ordre de grandeur. Le public qui devra payer la note pourra très bien accepter de payer plus à l'un qu'à l'autre, parce que les services qu'il reçoit sont plus élevés. A ce moment-là, le jeu des services rendus va déterminer ce qu'un intermédiaire pourra demander par rapport à un autre.

M. Harvey (Charlesbourg): Sur la question de la prime, il est bien clair qu'on vise à trouver une rationalisation des hausses constantes des coûts. Vous avez énormément de charges indirectes, au fond, lorsqu'on pense simplement à la réparation des automobiles qui ont été accidentées et aux coûts qui sont négociés par les forces syndicales, via le patron, c'est bien clair que cela a des répercussions directes.

Vous avez l'exemple très récent du Manitoba, où une hausse des primes d'assurance de 20% a été annoncée. Je pense que c'est un choc qui apporte la réalité brutale. A cet égard, je pense qu'on ne peut pas facilement avancer qu'autant ce taux de 5% peut être utilisé parce qu'on minimise l'effort ou le travail du courtier, autant il faut quand même "gambler" vis-à-vis d'une restriction des augmentations effarantes qui se produisent dans le domaine de l'assurance.

Mais ces charges indirectes qu'on ne peut pas contrôler mais dont il faut tenir compte quand

même dans le contexte inflationniste qui est le nôtre, croyez-vous que la formule étatique peut être véritablement celle qui va freiner la hausse des coûts? C'est philosophiquement la base même de votre étude.

M. Gauvin: La formule étatique n'est pas du tout la philosophie de base de notre étude, c'est une option.

M. Harvey (Charlesbourg): C'est la conclusion.

M. Gauvin: La philosophie, c'est le meilleur service. Non, la conclusion c'est que, si on ne veut pas faire les réformes dans l'entreprise privée, on dit: On n'a pas que le choix d'aller à l'Etat. Ce n'était pas du tout la base de notre étude. En fait, c'est la dernière possibilité.

M. Harvey (Charlesbourg): Oui, d'accord.

M. Gauvin: Vous avez parlé de deux choses. Vous avez parlé de la rémunération du courtier et de l'augmentation des primes.

M. Harvey (Charlesbourg): Incontrôlable. Les coûts.

M. Gauvin: Je l'ai dit tout à l'heure. Qu'on établisse un monopole, soit d'Etat ou privé, ou qu'on établisse des compagnies privées, on ne mettra pas une hausse aux coûts. Vous avez parlé d'une hausse de 20% au Manitoba. Il y a également une hausse au Québec et je ne serais pas surpris si elle était peut-être moins forte qu'elle devrait l'être; n'eût été de la parution du rapport et également le fait que les parlementaires...

M. Harvey (Charlesbourg): C'est un autre côté bénéfique du rapport.

M. Gauvin: C'est possible, cela peut avoir un côté bénéfique.

M. Harvey (Charlesbourg): Je vous en donne le crédit.

M. Gauvin: Je ne veux pas dire que c'est le cas, mais je dis que c'est possible. Mais, dans les faits, si l'inflation continue, les assureurs ont même déjà annoncé une autre hausse pour bientôt, c'est du moins ce qui a été rapporté dans les journaux.

Je pense qu'on ne peut pas relier le fait des 5% aux courtiers avec les hausses. Il est évident que les courtiers ont besoin d'une juste rémunération et que c'est un problème assez délicat que de déterminer ce que devrait être cette juste rémunération. C'est à eux, dans le système actuel, je suppose, d'en discuter, et, dans le système que nous préconisons, c'est avec le client qui est, très souvent, bien plus en mesure de déterminer les services que son courtier lui rend, qu'ils négocieraient finalement ces tarifs.

C'est dans ce sens que la population a quand même besoin d'un conseiller, parce qu'elle ne sait pas à qui se fier dans cette histoire. Son rôle, dans le régime que nous préconisons, serait revalorisé et la population paierait pour les services qu'elle reçoit.

M. Tetley: M. le Président...

M. Léger: Avant que le ministre ne réponde, je voudrais, parce que j'avais demandé la parole tantôt, étant donné différentes circonstances, prendre trois ou quatre minutes...

M. Tetley: Une autre déclaration ! Etes-vous capable, comme M...

M. Léger: M. le Président, vous êtes le défenseur de la démocratie, vous allez en faire preuve.

M. Tetley: La démocratie ne veut pas dire de "filibuster" ou de répéter. Chaque jour, vous arrivez...

M. Léger: Est-ce que vous appelez "filibuster", le silence de l'Opposition?

M. Tetley: Je dis que votre silence était précieux, mais...

M. Léger: II est éloquent.

M. Tetley: Eloquent, pour une fois, mais répéter la même chanson... Je peux la lire, je l'ai dans mes notes ici.

M. Léger: A force de la répéter, peut-être que le ministre va l'apprendre par coeur.

M. Tetley: Personne ne vous croit. J'ai dit que je vais répondre à la fin à vos six questions. J'ai déjà répondu à vos questions. Il est midi trente. Je propose la suspension des travaux. Cet après-midi, c'est notre intention d'interroger le comité au sujet d'AutoBAC, de son plan, des comparaisons et des coûts, des avantages, des désavantages d'AutoBAC, le plan du Barreau et des avantages et désavantages, ainsi que d'autres groupes.

Ces deux groupes, surtout, ont prôné un système différent, au lieu de critiquer votre plan. Je crois qu'ils ne donnent pas au public autant de poids que votre plan, messieurs du comité Gauvin. Il faut que ces faits soient notés dans le journal des Débats. C'est pourquoi c'est essentiel de revenir cet après-midi.

M. Léger: M. le Président, sur la motion de suspension, je dois m'inscrire en faux et dire pourquoi je m'oppose à la suspension à 12 h 30. La raison est la suivante: On va faire un bref historique de ce que nous avons fait depuis le début des séances de la commission sur le rapport Gauvin. Le comité Gauvin a comparu devant la commission parlementaire à quatre occasions. Nous avons eu quatre séances

pour entend re les représentants du rapport Gauvin. Le comité Gauvin avait déjà rencontré tous les groupes directement impliqués par une réforme possible. Donc, le rapport Gauvin comprenait des réponses et des solutions aux problèmes rencontrés dans ces rencontres dans le Canada et parmi les groupes directement impliqués.

M. le Président, la première formule du rapport Gauvin, celle que nous avons dans le volume, nous avait donné la solution préconisée avec un dernier choix qui était l'étatisation, s'il n'y avait pas les réformes proposées. Depuis ce temps, contrairement à l'habitude, nous avons eu environ 18 séances pour entendre les réactions des différents groupes directement et personnellement impliqués dans les propositions du rapport Gauvin. Par la suite, nous avons eu la présence de M. Gauvin et de son groupe, qui nous ont donné un texte — c'est là que j'arrive à la motion du ministre — qui répondait à toutes les allégations, à toutes les réactions, à toutes les prises de position des groupes qui ont été entendus durant ces 18 séances de la commission parlementaire qui touchaient l'assurance-automobile. La réponse était dans un texte qui nous a été remis au mois de décembre dernier. Les réponses étant là, le gouvernement, n'ayant pas voulu agir, a préféré, contrairement à notre décision, à notre proposition, c'est-à-dire celle de l'Opposition officielle, les reconvoquer.

Ce matin, le règlement dit que les membres du gouvernement n'avaient que 20 minutes pour poser des questions à un groupe donné. Je n'ai pas moi-même utilisé le temps qui m'était alloué pour être logique avec ma position, parce que les réponses, nous les avions eues par écrit. Comme de raison, il y a peut-être plusieurs membres de la commission qui n'avaient pas lu les réponses du rapport Gauvin ou peut-être n'avaient pas saisi certains aspects de ce rapport. C'était la réponse à toutes les affirmations des groupes en question, AutoBAC, le Barreau, les avocats, les courtiers, la CSN, etc.

Donc, M. le Président, il y avait des réponses prêtes. Ce matin, j'ai fait exprès de ne pas utiliser le règlement pour que les députés ne se sentent pas muselés par l'Opposition, chose qui est faite souvent à l'inverse.

Ils avaient droit, M. le Président, à 20 minutes, mais ils ont pris deux heures et 25 minutes pour poser des questions sur un document qu'ils avaient déjà. Nous n'avons appris rien de nouveau.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Je tiens à rappeler au député de Lafontaine que l'article 8 spécifie ceci: Ces périodes peuvent être prolongées si la commission le juge à propos. Etant donné qu'il n'y a eu aucune objection, j'ai laissé aller.

M. Léger: Je ne blâme pas le président, M. le Président. J'ai moi-même laissé aller, justement pour montrer jusqu'à quel point nous croyons à la démocratie. Mais cela ne voulait pas dire que les 20 minutes qui nous étaient allouées, à l'Opposition officielle, devaient être prises par les autres. Nous avons laissé faire.

M. le Président, tout ce qu'on peut conclure de la séance d'aujourd'hui, c'est une démonstration de l'indécision et de la division du gouvernement sur une réforme du système de l'assurance-automobile, une indécision, une ambivalance entre un choix précis qu'il doit faire, soit protéger les assurés ou protéger les intermédiaires. C'est sûr, M. le Président, que les intermédiaires, les groupes directement impliqués dans le système actuel de l'assurance-automobile, ont eu leur raison d'être depuis une période de temps très longue. Mais il arrive un moment où la population entière sent que ce système doit être changé. C'est sûr que cela ne fait pas l'affaire des groupes qui, pendant ce temps, ont profité de ce système, ce qui a amené, justement, ce rejet du système actuel et ce désir d'une réforme.

M. le Président, le gouvernement, dans son indécision ou dans son ambivalence, prouve encore, par cette séance qui est convoquée aujourd'hui, qu'il n'est pas encore branché. En ce qui nous concerne, nous croyons que les réponses, le gouvernement les a et qu'il n'a pas à siéger encore cet après-midi sur chacun des groupes qui sont venus, durant les 18 séances, faire entendre leur réaction et leur opposition à la commission Gauvin. Ils l'ont donnée, la réponse. Ils ont été assez courtois et assez gentils et assez disponibles pour revenir réexpliquer des choses qui étaient, soit dans le premier document, soit dans le deuxième.

M. le Président, il ne faut pas abuser non seulement des gens de la commission, mais du public qui attend une réforme. C'est la raison pour laquelle — le ministre m'a dit qu'il me donnerait une réponse tantôt — je répète les questions, les seules questions qui nous intéressent à ce stade-ci.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! M. Léger: Comme le contenu...

M.Tetley:Bien non! Vous n'avez aucun droit de répéter, dans la même session, les mêmes questions. Vous avez répété deux, trois, quatre fois...

M. Léger: M. le Président, il n'y a aucune place dans le règlement qui empêche une personne de répéter une question...

M. Tetley: C'est dans l'ancien règlement... M. Léger: ...qui n'a pas eu une réponse.

M. Tetley: ...M. le Président, et c'est une coutume maintenue par le présent règlement...

M. Léger: Je m'en reporte au président.

M. Tetley: ...qu'aucune question ne peut être répétée dans la même session.

M. Léger: Aucun article du règlement ne le prévoit, et c'est le nouveau règlement qui marche.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le nouveau règlement, article 76, 2): Cette motion ne peut pro-

voquer qu'un débat restreint au cours duquel le proposeur peut parler dix minutes, exercer un droit de réplique de même durée, après que les représentants des partis reconnus de l'Opposition se sont fait entendre pendant uneduréed'au moinsdix minutes chacun.

M. Léger: M. le Président, cela ne fait que cinq minutes que je parle, et je termine en demandant au ministre une réponse précise à la question suivante: Quand M. Desjardins doit-il faire son rapport? Quand le ministre doit-il présenter...

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! M. Léger: ...un projet au conseil des ministres? Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Léger: M. le Président, j'ai le droit. L'article 76 du règlement ne dit pas cela.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Oui! L'article 76, pour une motion de suspension qui...

M. Léger: C'est justement, M. le Président, sur la motion de suspension. Je dis qu'on ne peut pas ajourner tant que je n'ai pas eu la réponse aux questions. Les questions que j'ai posées, M. le Président, sont les deux premières...

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Léger: ...et la dernière question était pour savoir quand nous aurions...

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Léger: ...le dépôt du projet de loi du gouvernement...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Je ne peux permettre...

M. Léger: ...et quand nous allons en discuter.

Le Président (M. Houde, Limoilou): ...cette question.

M. Tetley: Ce n'est pas la première question...

M. Léger: C'est la seule raison pour laquelle... Pardon?

M. Tetley: Quand M. Desjardins fait-il son rapport?

M. Léger: Si le ministre me permet... Quand M. Desjardins va-t-il faire son rapport?

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! Je ne peux permettre des questions.

M. Léger: C'est le ministre qui le permet.

Le Président (M. Houde, Limoilou): II n'a pas le droit de le permettre.

M. Léger: Oui, il veut répondre.

Le Président (M. Houde, Limoilou): II n'a pas le droit.

M. Léger: Je n'ai jamais vu un ministre qui veut répondre à une question. Quand il ne les a pas, il me les demande. Il faut être logique.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! M. Léger: Je veux savoir quand il va déposer... Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Léger: Le ministre n'a pas le droit de répondre à mes questions?

Le Président (M. Houde, Limoilou): Pas sur la motion de suspension.

M. Léger: Oui, parce qu'il va ajourner ou il n'ajournera pas.

M. Tetley: C'était la motion de reprise pourtrois heures.

M. Léger: Je dis que nous n'avons pas suspendu jusqu'à trois heures parce qu'à trois heures nous allons répéter toutes les choses pour lesquelles nous avons eu des réponses actuellement et les seules réponses que nous n'avons pas eues et dont nous avons besoin...

M. Harvey (Charlesbourg): Vous pouvez prendre congé cet après-midi.

M. Léger: ...se sont celles aux questions que j'ai posées. Quand aurons-nous un projet de loi et à quand la réforme complète? Que le ministre réponde à cela et nous n'aurons pas à siéger à trois heures cet après-midi.

M. Tetley: M. le Président, M. Gauvin et compagnie sont venus trois fois. La première fois...

M. Harvey (Charlesbourg): Ils sont venus ici trois fois, oui.

M. Tetley: ...avant Noël, pour une demi-journée en matinée, et ils sont ici à ma demande suite à une demande de l'Opposition. A ce moment, vous vouliez les entendre cet après-midi-là. Vous aviez même fait une motion malgré que la Chambre siégeait ainsi que des commissions parlementaires à quatre ou cinq endroits et surtout le député de Beauce-Sud voulait les entendre deux ou trois jours. Je voulais les entendre et des députés du gouvernement voulaient les entendre et si un seul député le voulait, j'étais prêt à venir moi-même. Vous êtes libre de ne pas venir ou de venir. C'est de la simple démocratie de laisser à M. Gauvin et compagnie le temps de répondre à nos questions et aussi de nous expliquer si leur programme et leur plan sont meilleurs que le plan de l'AutoBAC, et de celui du Barreau, etc., et aussi de répondre parcequej'ai certainesquestions

à poser à messieurs les avocats, Me Bouchard et Me Belleau, parce que je veux rétablir les faits. Ce sont deux avocats d'expérience et d'une grande compétence et je veux faire ressortir leur carrière cet après-midi même.

M. Léger: M. le ministre... M. Tetley: Je n'ai pas fini.

M. Léger: ...pour quelle raison n'avez-vous pas pris les deux heures et vingt-cinq minutes pour poser ces questions...

M. Tetley: Je n'ai pas vingt-cinq minutes...

M. Léger: ...alors que les députés arrivaient vingt minutes en retard?

M. Tetley: Parce que vous avez...

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. Tetley: Parce que, mon cher, vous avez posé des questions d'ordre général au document de M. Gauvin et de M. Rankin et, cet après-midi, ce seront les questions concernant l'AutoBAC.

Je crois que c'est la simple démocratie de les écouter. En même temps, les comités de M. Desjardins — deux comités, celui de la sécurité routière et celui des questions d'assurance — siègent et, en réponse à votre question, ils présenteront leur rapport aussitôt que possible. Ils ont déjà donné un conseil au sujet d'une loi et la loi sera déposée aussitôt que possible devant la Chambre. Moi, je ne ferai pas hors de la Chambre des promesses au sujet des lois parce que c'est contre la loi pour un ministre de déposer les lois hors de la Chambre. Quant à votre dernière question au sujet d'une réforme complète, cela sera certainement cette année.

M. Léger: La seule logique...

M. Tetley: Vous n'avez pas le droit de parole.

M. Léger: La réponse est que vous n'êtes pas branché.

Le Président (M. Houde, Limoilou): La commission suspend ses travaux à quinze heures.

(Suspension de la séance à 12 h 41)

Reprise de la séance à 15 h 16

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

L'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

M. Tetley: Merci, M. le Président. Je remarque huit libéraux, au moins.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le neuvième s'en vient.

M. Tetley: Et le neuvième. Cet après-midi, on peut terminer nos travaux, mais je crois que les questions les plus importantes devraient être posées.

AutoBAC

M. Tetley :Tout d'abord, M. Gauvin et messieurs les commissaires, je voudrais savoir de vous comment et où le programme d'AutoBAC est moins fort ou plus fort, si son plan donnerait autant aux citoyens du Québec que le plan Gauvin et si cela coûterait plus cher ou moins cher. C'est une grande question mais personne n'a répondu spécifiquement à cette question jusqu'à maintenant. Evidemment, vous n'avez pas eu l'occasion, vraiment, de répondre directement au système d'AutoBAC, ici, à la commission.

M. Gauvin: M. le ministre, je m'excuse. Je pense que nous avons répondu au niveau du plan d'indemnisation, à l'intérieur du rapport, aux principales critiques que l'on peut faire au système d'AutoBAC. Là-dessus, en ce qui concerne le plan d'indemnisation, nous avons dit que ce système n'allait pas, effectivement, au bout de sa logique, dès l'introduction. A ce moment, il faut admettre que nous n'avions pas, malgré les promesses répétées, obtenu le coût de ce régime et je dois dire, malgré ce qu'on a laissé sous-entendre dans le mémoire du BAC, qu'on nous avait fourni toutes les informations, c'est vrai que le BAC a collaboré mais en ce qui concerne le coût, nous ne l'avions pas.

D'ailleurs, l'évaluation de la firme retenue par AutoBAC, Woodward &Fondiller, est datée du 5 juin 1974. C'est quand même assez cocasse qu'on puisse avoir eu ce document le 29 mars, quand notre mandat s'est terminé. De plus, vous avez eu l'amabilité de me faire parvenir copie d'une lettre qui vous était adressée le 23 décembre par le directeur du Bureau d'assurance du Canada, M. Charles Moreau, qui donne effectivement, en ce qui concerne une partie des assurés, les assurés de véhicules privés et véhicules de tourisme, en fait, l'évaluation du coût du régime proposé.

Alors, j'aimerais bien répéter que, quant à nous, les critiques sur le régime lui-même étaient contenues à l'intérieur et je dois dire que ces critiques concernent la mauvaise indemnisation des victimes qui subissent des pertes considérables. Le régime du BAC, qui est certainement une amélioration par

rapport à la situation actuelle, laisse quand même les victimes les plus mal servies dans le système conventionnel et, à cet égard, il me paraît tout à fait — nous l'avions dit dans le rapport — inacceptable.

M. Harvey (Charlesbourg): Est-ce à cause des délais seulement?

M. Gauvin: Non. Il faudrait bien situer que ces délais peuvent être améliorés. La raison fondamentale, c'est que, quand on prend ce que les gens ont véritablement perdu — les victimes de blessures graves — et qu'on regarde, comme je l'ai expliqué ce matin, ce qu'elles ont reçu, on se rend compte que les victimes qui ont perdu plus de $10,000 reçoivent 40%. Cela, c'est le système actuel. Ces victimes, peut-être pas toutes, mais un bon nombre, le régime du BAC va les laisser dans la même situation.

M. Léger: II y a le fait aussi d'établir la responsabilité du coupable qui fait que le résultat final est une perte dans le montant, parce qu'il n'est pas responsable à 100%, il y a des degrés.

M. Gauvin: II reste que les victimes qui sont trouvées à 100% responsables, dans le régime du BAC, auraient droit à certaines indemnités de base, mais qui sont fixes, qui sont préétablies et qui ne sont pas nécessairement en relation avec ce que la personne a perdu. On prévoit certaines indemnités de décès. Lorsque la personne est responsable dans ce régime, elle en recevra, mais pas plus. Tandis que, dans notre régime, la personne décédée recevrait, à l'intérieur des limites que nous avions choisies — je reviendrai là-dessus — toute sa perte économique.

En plus de cela, il y a d'autres considérations dans le régime du BAC comme tel. Pourquoi doit-on transférer des indemnités aux autres régimes? Vous devriez vous interroger à savoir pourquoi, alors que nous voulions que l'assurance-automobile soit le premier payeur, AutoBAC, en ce qui concerne l'assurance-salaire et d'autres régimes, veut être ce deuxième payeur; c'est pour réduire les indemnités qu'il paie, mais, à ce moment-là, vous transférez à d'autres régimes sociaux, d'autres régimes de bénéfices marginaux, les coûts de l'utilisation de l'automobile. Cela, à mon sens, c'est certainement inacceptable. Il y a une raison qui a été admise publiquement, je pense, par le directeur général adjoint, Cari Wilkin, du BAC, c'est que la proposition du BAC ne fait à peu près rien pour améliorer l'administration du régime et il veut être second payeur, parce qu'il admet, au point de départ, que des régimes d'assurance-salaire sont plus efficaces que le sien. Il aime mieux laisser payer ces régimes.

Mais si vous regardez la situation du BAC à long terme, plus il y aura, au Québec, de gens qui seront couverts par des régimes d'assurance-salaire, moins le régime du BAC va débourser de prestations puis, à l'extrême, si toute la population du Québec était couverte par des régimes d'assurance-salaire, au niveau des blessures, le régime ne paierait rien.

Si on transfère les coûts à d'autres régimes, on n'en viendra jamais à percevoir, dans l'assurance-automobile, ce que ça coûte véritablement pour l'utilisation de l'automobile et des accidents qui en découlent. Il y a d'autres points qui pourraient être soulevés, par exemple dans la lettre que j'ai citée, et je ne sais pas si vous l'avez distribuée, cette lettre-là...

M. Tetley: Oui, la lettre du 28 décembre. M. Gauvin: C'est la lettre du 23 décembre... M. Tetley: Du 23 décembre, oui.

M. Gauvin: Dans le rapport, nous avions souligné qu'en ce qui concerne les véhicules lourds, c'était injuste de ne pas leur faire payer une partie des dommages supplémentaires qu'ils occasionnent parce que ce sont des véhicules lourds. Ils ont prouvé ici exactement ce que nous disions, c'est-à-dire qu'au Québec, il y aura un transfert des véhicules lourds aux véhicules de touristes, c'est-à-dire que les véhicules de touristes vont payer plus cher pour faire faire des économies à ces monstres de la route qui se promènent et qui occasionnent plus de dommages.

Ils offrent même de faire n'importe quoi. Ils disent: Si vous voulez le changer, on va le changer. Franchement, la position des assureurs, moi, je dois admettre que je la connais plus ou moins. Ils ont l'air de vouloir faire à peu près n'importe quoi.

M. Tetley: M. Gauvin, vous avez dit qu'il n'y a aucun changement dans le système des coûts d'administration. Vous parlez de 40% ou à peu près de 40%?

M. Gauvin: II y en a quand même. J'ai essayé de lire, dans la langue de Molière, le texte en question; j'ai eu un peu de difficulté. J'ai demandé le texte anglais pour comprendre un peu mieux et, effectivement, il y a des économies au niveau de l'administration. Il y en a, mais elles sont d'un ordre assez minime. Nous avons quand même attaqué les assureurs en disant qu'ils sont inefficaces. A mon sens, il n'y a pas eu une preuve ici, qui vous a été faite, qui démontre que les assureurs retournent plus que $0.60 aux victimes et ça, c'est quand même important. Ce qu'ils vont faire, ils vont peut-être retourner $0.65, dans la piastre, aux victimes.

Ce n'est certainement pas une amélioration si fantastique que ça. Maintenant, il faut admettre que ce régime, s'il était mis en vigueur, d'après leurs estimations que je ne mets pas en doute ferait économiser 10% à l'assuré moyen, au moins dans les véhicules de touristes, mais la grande partie, au moins une bonne partie de ça, va venir quand même des indemnités moins élevées qu'on va payer.

M. Tetley: Quelqu'un m'a dit, au déjeuner, aujourd'hui, qu'il y a un autre rapport stipulant que le plan du BAC donnerait moins que le système actuel. Est-ce possible? Il paierait moins en total.

M. Gauvin: On parle, M. Tetley, de donner

moins. Il faut quand même essayer de remettre les choses sur le même pied. Peut-être qu'on va donner moins, mais on va baisser les primes. Si on veut augmenter légèrement les primes, on pourrait donner plus. Il ne faut quand même pas l'oublier. C'est, à mon sens, quand même malheureux. Dans certaines des comparaisons qui ont été faites, on a dit — je l'ai dit ce matin et je le reprends parce que c'est un exemple — le Barreau avait sorti un exemple pour prouver qu'il donnait plus; il avait quand même oublié tous les autres qui donnaient moins et il avait oublié également de dire ce que le régime va coûter globalement. Le BAC dit: Notre régime va coûter 10% de moins. Si on ne veut pas faire cette économie, on pourrait certainement donner des indemnités plus généreuses. Il ne faudrait pas l'oublier dans la comparaison.

Ceci dit, j'aimerais faire, non pas une mise en garde, mais une simple constatation. Je doute — et les membres étaient très conscients de ce fait — qu'un nouveau régime d'assurance-automobile puisse être mis en vigueur au Québec sans qu'on accorde une réduction de prime au public. Je pense que l'expérience des Etats américains l'a assez bien démontré. Pour introduire un nouveau régime, il faut que le public puisse sentir immédiatement qu'il en bénéficie dans ses primes.

C'était un des objectifs que nous avons recherchés, ce qui fait que nous avons quand même limité certaines des indemnités qu'on a prévues à notre régime pour permettre aux consommateurs québécois de payer des primes moins élevées, indépendamment de la situation de la sécurité routière, qui est une autre chose.

Quand on regarde le régime du BAC ou qu'on regarde tout autre régime, il faudrait quand même regarder les équivalences pour s'assurer de ce que coûte l'un par rapport à l'autre. Il me semble que, si vous allez acheter une voiture de luxe, vous ne regardez pas les avantages d'une Cadillac et ceux d'une Volkswagen. Vous regardez les avantages d'un véhicule comparable.

M. Tetley: M. Gauvin, messieurs, vous avez regardé le plan du Barreau du Québec...

M. Gauvin: Est-ce qu'il s'agit du Barreau ou du Jeune Barreau, parce qu'il y a le Jeune Barreau.

M. Tetley: Le Jeune Barreau de la ville de Québec vous appuyait. Je parle du Barreau.

M. Gauvin: Est-ce que vous parlez du plan du Barreau qui aurait été soumis à ses membres ou celui qui n'aurait pas été soumis à ses membres?

M. Tetley: Comme membre, je n'étais pas présent. Je ne suis pas témoin de ce qui s'est passé. Je crois que c'était légal, j'en suis certain. Le Barreau est venu nous présenter un mémoire, un plan et nous a présenté, après, un document sur les coûts. J'aimerais avoir vos commentaires. Est-ce que le plan du Barreau est aussi généreux que votre plan? Est-ce que cela coûterait plus cher ou moins cher que votre plan? Est-ce que c'est meilleur que le régime actuel?

M. Gauvin: Le plan du Barreau qui est présenté comme étant révolutionnaire, à mon sens, cela ne change pas grand-chose. C'est, parmi les régimes, le moins bon qu'on puisse trouver. C'est un régime qui continue de surcompenser les petites pertes et de sous-compenser les grosses pertes. C'est un régime qui continue le système d'adversaires où on fait affaires avec les assureurs des autres. On élimine très peu de disputes entre les parties. C'est un régime qui, en vue d'améliorer l'efficacité du dollar-prime, ce qui est retourné au public, ne fait à peu près rien; il fait moins que celui du BAC sur ce sujet.

Le BAC, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, n'a pas l'air de faire grand-chose, si on peut comprendre ses chiffres. A ce moment, on veut simplement souligner que le régime du Barreau, c'est un régime qui a été essayé il y a longtemps, qui est même passablement vieux.

L'assurance obligatoire, par exemple, c'est à peu près dans tous les pays du monde qu'il y a de l'assurance obligatoire, ce n'est pas une grande innovation qu'on a faite. Rendre le chapitre II obligatoire, cela fait des années qu'il l'est ailleurs; ce n'est pas une grande réforme.

Finalement, le régime du Barreau n'amène pas d'économie, n'amène pas une réduction de prime. L'évaluation qu'il a déposée, et j'accepte les chiffres sans les mettre en doute, indique très bien qu'il n'y aurait pas de réduction pour le consommateur. En prenant 1%, si on tient compte des difficultés d'évaluation, on peut effectivement le mettre en doute.

M. Tetley: Oui. Est-ce que les autres membres de la commission...

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Taschereau.

M. Tetley: Un instant! Vous n'avez pas de question? Je n'ai pas exactement terminé. J'ai encore quatre ou cinq minutes...

Le Président (M. Houde, Limoilou): D'accord, je pensais que vous aviez terminé.

M. Tetley: ... sur mes vingt minutes. Vous me permettez de terminer, mon cher ami. Vous n'êtes pas aussi exigeant que le député de Lafontaine.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Tetley: Est-ce que les autres membres du comité ont des commentaires au sujet du système AutoBAC ou du système du Barreau? Me Bouchard peut-être?

M. Bouchard: M. le ministre, dans le système du Barreau, tel qu'il a été proposé par le deuxième rapport qui vous a été soumis, et dans le premier rapport qu'on avait eu, c'étaient sensiblement les mêmes propositions. Remarquez qu'il y a peut-être un point qu'il serait important de rappeler constamment, parce qu'il pourrait peut-être paraître par après, lorsqu'on considère les conclusions du

comité, qu'on est assez sévère sur à peu près tous les différents rapports qui nous ont été proposés. Cela ne résulte pas d'idées préconçues, cela ne résulte pas de préjugés. Cela ne résulte d'aucune préconception. Lorsque le comité précisément a eu à aborder toutes ces questions, il se devait, en toute conscience et en toute honnêteté, de les aborder objectivement, d'autant plus qu'étant membre du Barreau, j'avais effectivement à me convaincre moi-même d'un tas de conceptions qui étaient avancées.

Si vous voulez, on va les prendre par étapes. En ce qui concerne les différents plans, que ce soit du Barreau ou du BAC, c'est à peu près la même chose, c'est que vous avez fondamentalement une notion, la notion de faute ou de responsabilité. Nous avons fait une distinction dans notre rapport en ce qui concerne faute et responsabilité. A ce propos, nous avions fondé ce qui représentait précisément, si vous voulez, la quintessence de notre pensée là-dessus, en disant qu'en ce qui concerne la notion de responsabilité... On ne l'a pas rejetée au point de départ, on l'a étudiée comme toutes les autres notions. Nous avons adopté, après avoir rencontré les experts en responsabilité, soit aux Etats-Unis, soit en Europe, le point de vue que nous pouvons vous synthétiser comme le suivant et que je tire directement du rapport qui représente vraiment en quelques lignes la conclusion fondamentale de ce point de vue. En ce qui concerne la responsabilité, je cite le professeur Tunc, qui est une autorité sur le plan de la responsabilité en Europe: "Du point de vue prospectif, on se demande si la responsabilité civile n'est pas vouée à disparaître dans le domaine des accidents. Il est probable qu'elle est en recul constant et qu'elle ne survivra que dans la mesure — c'est important — où les assureurs procureront aux victimes un meilleur service que la sécurité sociale dispensée par l'Etat. A vrai dire, la notion même de faute s'évanouit.

Comment qualifier de fautif le comportement qui est tous les jours celui d'honnêtes gens, soucieux de leurs responsabilités? Il y a une chose qui se produit, et tous les jours, ce sont des accidents et des malheurs qui tombent sans qu'on les ait voulus et sans qu'on ait pu, très souvent, les éviter. On sait bien que les risques d'accidents — cela, je pense que c'est fondamental, vous allez me permettre d'y insister — varient avec le tempérament des conducteurs, les véhicules, les régions, les jours, les conditions atmosphériques. C'est dans un tel monde, tout différent de celui où chacun veut prendre ses responsabilités en toute âme et conscience et où, partant, l'idée de faute conserva sa valeur.

Je vous ai fait cet exposé parce que, précisément à la base du système du Barreau, le Barreau n'a pas contesté cela. Il s'est contenté de dire, dans son rapport, que la notion de faute est incrustée dans les moeurs et que le peuple du Québec, comme toute population quelconque, ne saurait accepter une disparition de la faute. Partant, il suggère le maintien de la responsabilité et précise ensuite le rôle des avocats dans le partage de la responsabilité devant les tribunaux.

Sur cette première partiede la responsabilité, je pense que je ne veux pas m'étendre pi us longtemps. Dans le rapport, nous avons assez longuement élaboré notre position pour vous démontrer que non seulement notre conclusion, mais de façon assez générale, ce qui se produit tant sur le continent nord-américain qu'en Europe, c'est une notion qui était vouée à disparaître.

La deuxième partie du rapport du Barreau qui justifie sa proposition, c'est que la notion de faute étant fondamentale, vous devez évidemment, faire la démonstration encore une fois. Or, on démontre dans le rapport du Barreau qu'il est possible de faire la démonstration d'une faute, d'un comportement fautif des parties. Là encore on a démontré, à l'aide d'études faites aux Etats-Unis et un peu partout ailleurs, qu'il était pratiquement difficile, oui, mais à toutes fins pratiques avec des conclusions très aléatoires, de déterminer deux ans, deux ans et demi, trois ans après, la responsabilité véritable d'actes humains qui se sont posés à un certain moment. Supposons que cela puisse se faire. On dit encore: II résulte un délai assez considérable. J'avoue. Le Barreau a dit dans son rapport subséquent que les délais devant les tribunaux se sont améliorés.

C'est vrai que, depuis que nous avons fait nos études, le délai s'est amenuisé et qu'en cour Provinciale et qu'en cour Supérieure les délais sont moins longs qu'ils ne l'étaient. Bien sûr, mais ils demeurent. Ils demeurent encore trop longs comparativement aux problèmes fondamentaux que nous avons envisagés et à l'indemnisation de la victime. Et continuons la démarche.

Oublions les délais maintenant et voyons la compensation qui est accordée, compensation purement arbitraire. C'est un arbitrage fait par un homme ou par un tribunal quelconque qui déterminera, à l'aide de la preuve qui est faite devant lui, non pas en toute objectivité, à l'aide des preuves et des faits qui lui sont apportés, dans quelle circonstance, comment il faut arbitrer la responsabilité, et d'autre part, les dommages qui en découlent.

Continuons la démarche. Une fois ceci fait, l'indemnité, comment elle est accordée, avec quel coût? Tout cela pour dire, M. le ministre, que la proposition du Barreau maintient, à notre humble point de vue, intégralement tous les vices que nous avons dénoncés du système actuel. Ce que le Barreau ajoute est qu'il amplifie le chapitre b) de la police d'assurance qui existe déjà actuellement, laissant intacts tous les problèmes que nous avons soulevés dans notre rapport et ceux pour lesquels nous avons été constitués en comité pour les étudier.

Alors, nous ne pouvons faire autrement que de conclure que les recommandations que nous avions faites demeurent intégrales et que nous devons les maintenir face à la proposition du Barreau qui ne s'attaque absolument pas au problème fondamental de l'indemnité des victimes, sans parler du coût d'administration. Le Barreau n'en parle pas du tout, et nous disons que c'est important parce que — comme M. Gauvin vous l'a répété plusieurs fois ici devant cette commission parlementaire — nous considérons que le pourcentage qui est utilisé dans le facteur dollar-prime pour les frais d'adminis-

tration est prohibitif comparativement à ce qu'il pourrait être.

M. Tetley: Merci. Avant de terminer mes questions, je voudrais dire à Me Bouchard et à Me Belleau que c'était difficile d'être à la fois avocat et membre d'une commission Gauvin et cela affectait la profession et ma profession aussi. Je remarque que votre curriculum vitae est en théorie et pratique, pour tous les deux, est très volumineux. J'ai apprécié votre participation ainsi que la participation des deux autres membres, M. Gauvin et M. Rankin. Je voulais faire cette remarque parce que, en votre absence, un jour, un avocat est parti en guerre absolument sans raison.

Je n'ai pas d'autres questions, sauf quelques mots à la fin, M. le Président.

Le Président (M. Houde, Limoilou): D'accord.

L'honorable député de Taschereau.

M. Bonnier: M. le Président, je me demande si je dois poser ma question à la suite de l'intervention de Me Bouchard parce que son intervention est beaucoup plus fondamentale que la question que je voulais poser, mais je vais peut-être revenir quand même à son intervention. Je voulais savoir si les membres de la commission Gauvin pouvaient apporter un peu plus de précisions quant aux 40% de la perte subie par les assurés dans les blessures corporelles de grande valeur. Est-ce que, d'après vos études — évidemment, c'est une étude sur une base d'échantillonnage — vous avez étudié un certain nombre de cas et vos conclusions sont qu'il y avait au moins 40% de pertes subies qui n'étaient pas compensées, cela pourrait être dû au mode de fonctionnement des tribunaux? Est-ce que les tribunaux auraient une certaine jurisprudence qui ferait que, dans la plupart de ces cas, ils n'admettent jamais en preuve la totalité des pertes subies et ils prennent une certaine marge, quand même, au cas où il y aurait des erreurs dans leurs projections de pertes subies pour l'avenir?

M. Gauvin: D'abord, si vous me le permettez, j'aimerais peut-être mieux laisser mes collègues avocats aller un peu plus loin. Les barèmes que nous avons utilisés, effectivement, sont ceux qu'on rencontre dans les cours de justice. On fait toujours mention des cas qui se rendent devant la cour de justice, mais il ne faudrait quand même pas oublier que ce n'est pas la grande majorité des cas. Il y a beaucoup de cas, également, qui se règlent sans se rendre à ce niveau. On voit, en fait, que le degré de compensation varie selon le processus pris pour obtenir compensation.

Il est certain que la méthode d'évaluation de la perte peut être un facteur. Maintenant, j'aimerais bien resituer le problème des 40%. Les 40% sont la relation entre ce qu'on a payé en indemnités à l'ensemble des victimes et ce que cet ensemble de victimes avait subi comme pertes économiques. En fait, assez souvent, on tient compte d'autres facteurs, d'autres pertes non économiques et on ajoute des montants à ces sommes. Mais nous, dans le calcul de la compensation, nous avons pris la compensation totale et nous n'avons présumé que la perte était calculable, de telle sorte que, si on avait pu trouver un moyen d'additionner ces pertes, la sous-compensation de ces cas aurait été encore plus forte.

Comme je le dis, il y a le fait que les gens ne vont pas tous devant les cours. Il y a des causes qui se règlent avant. Il y a probablement des mauvaises évaluations de pertes. Là-dessus, ce que nous avons fait, c'était quand même relativement élaboré. Des équipes de recherches sont allées voir les victimes qui ont pu être retracées pour leur demander: Combien de temps avez-vous été véritablement absents du travail? Quel est votre degré de manque à gagner, maintenant? L'analyse a été faite pour aller chercher dans les faits quelle était la perte de l'individu.

On doit conclure que le système actuel, qui est un système de base, censé remplacer intégralement la perte, ne le fait pas. Il faut le changer radicalement pour amener une bonne compensation des victimes.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Mille-Iles.

M. Bouchard: II a deux autres réponses. M. Bonnier: La réponse n'est pas terminée. Une Voix: Excuse, Claude.

M. Bouchard: Je voudrais, pour compléter, répondre à votre question, M. le député, en ce qui concerne la formule observée relativement à l'indemnité. Je pense que je ne saurais mieux le faire que de vous donner un extrait de ce qu'un juge a affirmé en cour Supérieure en 1973 et qui dit ceci: "Après avoir évalué précisément la perte économique d'un soutien de famille qui laisse une femme et deux enfants..." Après avoir présenté toute la preuve, le juge s'étend sur les doléances suivantes. Je vous cite ce que le juge dit en 1973: "Nos tribunaux cherchent encore une formule magique permettant de fixer une indemnité globale pouvant adéquatement compenser la perte subie par les dépendants, les enfants, conjoints, ascendants et descendants survivants. Les calculs mathématiques ne répondent pas de façon satisfaisante. Trop de facteurs interviennent dont plusieurs sont fort imprécis et aléatoires. Il appartient en définitive au tribunal, saisi d'une instance, de fixer l'indemnité due à chacun en regard des circonstances révélées par la preuve — pas les circonstances véritables — pour autant qu'on respecte les principes d'usage courant."

Là, vous avez vraiment ce qu'un juge qui a à interpréter et qui a très souvent à le faire... A un moment donné il se laisse aller et vous dit cela dans un jugement. On en est rendu à cela et on cherche encore la formule magique pour indemniser adéquatement les dépendants ascendants et les soutiens de famille. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Bonnier: Oui.

M. Belleau: Je pense que cela complète les informations qui viennent d'être données. Ce que je veux ajouter, c'est que, parmi tous ces facteurs, je pense qu'un facteur qui est très important, c'est la nécessité de faire un paiement en capital une fois pour toutes, alors que, quand on a calculé la perte, nous avons calculé la perte réelle, indépendamment de la nécessité de faire, à un moment précis, la somme de la perte. Je pense qu'on l'a souvent oublié, ici, aux commissions parlementaires, et ailleurs. Notre régime, quand il prend à sa charge une victime d'accident, lui paie une rente. Il n'y a pas de limite quant au temps. Il va la payer indéfiniment. Je pense qu'on peut l'ajuster éventuellement, compte tenu de la condition des victimes, mais, encore une fois, c'est à cause de la nécessité de faire un paiement définitif en capital. C'est peut-être une des raisons qui font qu'on cherche des formules magiques qu'on n'a pas trouvées, pour répondre à une perte qu'on n'est pas en mesure d'évaluer. Je pense qu'un régime qui va compenser la perte au fur et à mesure qu'elle va se produire ou se maintenir est davantage susceptible d'indemniser adéquatement la victime. Pour une bonne part, cela tient à cette nécessité d'établir, une fois pour toutes, la perte, dans ce calcul que le juge essaie de faire. Je voulais ajouter cette dimension. C'est le système qui le veut. On paie une fois pour toutes en capital. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles il y a cette espèce de disproportion entre la perte réelle et le montant qu'on accorde.

M. Gauvin: Si vous voulez me le permettre, je voudrais ajouter que, souvent, l'attrait d'un capital peut faire que les gens vont accepter un montant moindre que celui de la véritable perte. Cela peut être un autre des facteurs. Si vous comptabilisez la perte d'une personne et que, finalement, en tenant compte de son âge, en tenant compte de tous les facteurs, vous arrivez à dire que cela vaut $20,000 et qu'on lui fait une offre de $15,000, il peut être porté à prendre cela.

Ils aiment mieux prendre ça que d'attendre et, finalement, lui, il a eu simplement 75%. Je donne ça comme exemple. C'en est un. C'est un des nombreux facteurs. Je pense qu'il y a quand même un nombre assez considérable de facteurs qui font que les gens sont mal indemnisés.

Maintenant, j'aimerais bien revenir — c'est important — aux victimes que nous avons prises dans notre échantillonnage; on n'a pas ajouté celles qui n'avaient pas droit à la compensation parce qu'elles étaient en faute. Tel que c'est bien dit dans le rapport, ce sont strictement des victimes dont il avait été établi qu'elles avaient droit à une indemnité. On n'a pas dilué les résultats avec celles qui n'y ont pas droit. C'est strictement dans le système actuel, une victime qui y a droit. Nous avons recherché comment sa compensation se compare à ce qu'elle a perdu.

M. Bonnier: Juste une dernière question, en relation avec celle-là, M. le Président, si vous per- mettez. Justement, M. Gauvin, sur le plan strictement humain, s'il était recommandé en fin de compte, dans la question de dommages corporels, que ce soient vos recommandations qui soient acceptées, est-ce que beaucoup de consommateurs — surtout lorsqu'il s'agit de la mort d'un proche parent, d'un garçon ou d'une fille, parce qu'à ce moment-là ils évaluent en capital la perte, essayent d'évaluer et ont actuellement la possibilité, devant les cours du moins, d'accrocher quelque chose — seraient aussi bien servis? Quels seraient leurs réflexes selon vous?

Moi, j'ai l'impression qu'il pourrait y avoir, au niveau de certaines gens, un réflexe négatif vis-à-vis d'une telle solution, par rapport à ce qu'ils considèrent comme étant leurs droits.

M. Gauvin: Encore une fois, dans le régime qu'on propose, on donne l'option à l'individu qui ne serait pas satisfait, de dire: Moi, j'en veux plus pour mes proches. On a un régime optionnel qui s'applique non seulement à l'individu, mais à sa famille et ça, il ne faudrait pas oublier de le considérer en fonction de ce que le régime coûte. Nous avons recommandé un régime qui paierait des indemnités, mais qui économiserait 20%. Si on ne veut pas économiser les 20%, on pourrait se rendre compte qu'il y a des sommes assez fantastiques qu'on pourrait allouer en plus aux victimes.

Il y a un problème, je pense, là-dedans, de priorités sociales, à savoir: Est-ce qu'on aime mieux, d'une part, réduire les primes, puis peut-être payer un peu moins d'indemnités ou si on aime mieux conserver les primes au niveau où elles sont aujourd'hui et payer beaucoup plus d'indemnités? Il y a ce problème à résoudre. Je pense qu'on ne peut pas dissocier les deux. Dans certains cas, on a dissocié les deux; on a dit: Voici un régime qui donne plus.

Moi, je regrette, c'est inexact, parce que le régime qui donne plus coûte 10% ou 15% de plus que l'autre. Il faudrait ramener l'équation à un dénominateur commun pour être en mesure de dire: Voici, tel régime coûte tant, il donne telle chose. En fait, vous avez un régime AutoBAC qui dit: On épargne 10%. Vous en avez un autre qui dit: On épargne 20%. Mais quand on fait la comparaison, je pense qu'il faut quand même tenir compte des coûts et des indemnités payées.

M. Bonnier: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député des Mille-Iles.

M. Lachance: M. Gauvin, dans les réformes proposées par votre comité, dans les conclusions auxquelles vous êtes arrivé, à la page 377, je ne les comprends pas, c'est pour ça que j'aimerais avoir vos commentaires. Je vais les citer, parce que ça semblerait important. Vous dites en terminant: Le comité tient à souligner que les réformes qu'il propose, au niveau de la mise en marché et de l'administration de l'assurance sous le régime de la libre entreprise, auront à plus ou moins brève échéance

une conséquence certaine sur les autres branches d'assurance. Le comité croit que le gouvernement devrait prendre les mesures nécessaires pourque la situation, dans ces autres branches d'assurance, ne vienne pas contrecarrer les effets des réformes dans l'assurance-automobile.

C'est un genre de mise en garde pour ceux qui auront à préparer les lois concernant ces choses-là. Il semblerait que...

M. Gauvin: En fait, il ne faut pas oublier que la mise en marché de l'assurance-automobile, actuellement, se fait de la même façon que pour d'autres secteurs. Si on veut changer le rôle, si on veut changer le mode de mise en marché dans un secteur qui s'appelle l'assurance-automobile, il ne faudrait quand même pas que, par des ententes dans les autres secteurs on puisse un peu renverser la vapeur.

Nous avons dit: Le courtier d'assurance doit être le conseiller de son client seulement. Il ne doit pas y avoir d'ententes. Il ne doit pas être rémunéré par l'assureur et il doit pouvoir diriger l'assureur à l'endroit où ça lui semble le plus approprié.

Si, par des ententes parallèles, l'assureur dit: Si tu m'envoies de l'assurance-automobile, je vais te donner plus de commission dans d'autres secteurs, vous tuez un peu, vous amoindrissez le but que vous recherchiez. C'est dans ce sens-là que cela a été mis.

M. Lachance: Seulement dans ce sens-là, pas...

M. Gauvin: Seulement dans ce sens-là et cela pourrait aller plus loin, effectivement. Il ne faut pas oublier que les assureurs font affaires dans plusieurs genres d'affaires. Il ne faudrait pas qu'ils puissent, lorsqu'on parle d'un taux de dépense de X%, ajuster leurs livres pour passer des dépenses de l'automobile dans un autre secteur ou vice versa. Il faut bien s'assurer — ce n'est peut-être pas le sens de votre question, mais j'en profite pour le souligner — que, dans les faits, c'est cela qui se passe.

M. Lachance: Que ce ne soit pas un précédent pour qu'on change l'autre système, que ce soit l'assurance-vie ou ces choses-là?

M. Gauvin: Non.

M. Lachance: Je veux revenir simplement à votre recommandation numéro 56. Vous dites que les courtiers, les assureurs n'auraient pas le droit de financer. Je pense que cette question a déjà été posée.

M. Gauvin: Oui. Vous voulez savoir pourquoi, effectivement?

M. Lachance: Oui.

M. Gauvin: C'est un peu dans le but de réduire la tâche du courtier. Le courtier émet le contrat, doit servir un peu d'agent de perception, etc. Nécessairement, cela lui impose des obligations et il doit être rémunéré en conséquence. Il y a d'autres systèmes qui existent et qui fonctionnent, où on a changé le mode et on a dit: Maintenant, le financement ne se fera plus par ce truchement. On va beaucoup réduire les tâches administratives des parties.

Si vous voulez avoir une autre raison, si vous voulez avoir de l'assurance obligatoire, si vous voulez vous assurer que le contrat demeure en vigueur, il faudra q ue la prime soit toujours payée pour q ue le contrat ne soit pas annulé, comme cela peut se produire.

Avec un mode de financement où on donne la police en garantie, à certains moments, il y a des gens qui n'ont plus d'assurance. On veut également éviter cela.

Finalement, on a dit dans un mémoire, je ne me souviens pas lequel, que cela augmentait les coûts. Il ne faut pas oublier que, présentement, le financement, le public le paie, d'une façon ou d'une autre. Le courtier, lui, reçoit une certaine commission et ses frais de financement, il est obligé de les assumer à même cela; dans certains cas, il en exige du client. On va me dire que ce n'est pas exact, j'ai un exemple, mais il y en a d'autres où le public paie des intérêts aux courtiers. De toute manière, le public paie le coût de financement. Si vous l'envoyez ailleurs, ce n'est pas une augmentation de coût. Cela permettrait même de réduire l'assurance par les économies qu'on réaliserait. Par exemple, les assureurs recevraient leurs primes d'avance. Ils devraient, théoriquement, gagner plus d'intérêts. Finalement, s'il existe une véritable concurrence, les assureurs vont repasser l'économie aux consommateurs. S'il n'y a pas une véritable concurrence, les mêmes assureurs vont peut-être s'enrichir un peu plus.

M. Lachance: Merci.

Le Président (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Montmagny-L'Islet.

Accidents hors du Québec

M. Giasson: M. le Président, je n'ai pas eu l'occasion, malheureusement, de suivre toutes les séances de la commission depuis qu'elle siège.

J'ai souvent été retenu à d'autres choses. Il est peut-être possible que les questions aient été posées aux membres de la commission, mais dans l'hypothèse de l'application intégrale de vos recommandations, c'est-à-dire l'abolition du principe de la responsabilité absolue, comment voyez-vous la possibilité de faire face aux problèmes des automobilistes du Québec, vous ou moi, qui sommes impliqués dans un accident très sérieux, en Ontario, où, je pense, le principe de la responsabilité tient toujours, étant donné que le principe de la responsabilité disparaît et que chaque assuré devient protégé par les couvertures de son propre contrat? Lorsqu'on va à l'extérieur et que le principe de la responsabilité n'est pas aboli, quel mécanisme prévoyez-vous pour qu'on puisse faire face à une réclamation venant d'un citoyen d'une autre pro-

vince assujetti à la réglementation d'une autre province?

M. Gauvin: II y a deux situations. Est-ce que vous parlez du Québécois qui... Vous avez parlé en premier...

M. Giasson: Celui qui s'en va là-bas ou du Mani-tobain qui s'en vient au Québec.

M. Gauvin: Le Québécois qui s'en va en dehors, cela n'a peut-être pas été dit assez explicitement, mais il est évident que le contrat d'assurance contiendra une clause de responsabilité résiduelle lorsque cet individu ira en dehors.

M. Giasson: Vous maintenez le principe d'une certaine responsabilité. Elle n'est pas totalement abolie.

M. Gauvin: Lorsqu'il est en dehors du Québec. Le Québec ne peut quand même pas légiférer pour un accident qui se passe en Ontario. Le contrat d'assurance devra couvrir l'assuré du Québec qui aura un accident en Ontario pour les dommages qu'il pourrait être appelé à payer, mais, de la même façon, il ne faut pas oublier que...

M. Giasson: Avec une limite de couverture déterminée lorsqu'il est à l'extérieur de sa province.

M. Gauvin: C'est la limite de cet endroit, cela existe dans le moment. Vous achetez une police d'assur'ance-responsabilité de $35,000, vous traversez la frontière de l'Ontario et elle ne vaut plus $35,000, elle en vaut $50,000 à cause des ententes qui sont faites. C'est une chose qui existe déjà, que quand vous changez de région, votre contrat d'assurance en tient compte.

M. Giasson: D'accord, cela va pour la limite qui est en vigueur en Ontario, mais la personne ou les personnes de l'Ontario à qui je cause des préj udices très grands, même si la loi de la province exige une limite minimale de $50,000, ne perdent pas leur droit de quand même revenir contre moi pour l'excédent de cette limite de la province.

M. Gauvin: Si l'accident arrive en Ontario, vous avez raison, c'est la loi de l'Ontario et l'assuré...

M. Giasson: Vous êtes Ontarien, je vous cause des dommages évalués à $150,000, la loi de l'Ontario exige un minimum de $50,000. Mon assureur paie $50,000. Vous me poursuivez à nouveau. C'est votre droit, je vous ai frappé en Ontario. Qu'est-ce qui me couvre à ce moment?

M. Gauvin : A ce moment, si vous n'avez pris que la limite minimale, c'est vous qui allez être obligé de payer l'excédent.

M. Giasson: Je n'ai pris que la limite minimale, mais les limites dans le contrat du Québec, toujours dans l'hypothèse de l'application de votre recommandation, que va-t-elle être?

M. Gauvin: Les limites dans le contrat du Québec?

M. Giasson: Oui, en matière de responsabilité pour prévoir le cas d'accident que je ferais à l'extérieur...

M. Gauvin: Résiduelle ou...

M. Giasson: ...dans les Etats ou dans les provinces où le principe de la responsabilité tient toujours.

M. Gauvin: Tout d'abord, cela va être au moins le minimum de ces Etats, parce que ce sont les ententes qui existent.

M. Giasson: Le minimum, cela va, mais ce sont les excédents qui m'inquiètent.

M. Gauvin: L'excédent, vous allez avoir le choix d'assurer la responsabilité résiduelle pour le montant que vous voulez. Présentement, si je veux prendre $200,000, je peux prendre $200,000. Quand je m'en vais en Ontario, on paie jusqu'à concurrence de $200,000.

M. Giasson: Présentement dans votre régime actuel mais...

M. Gauvin: Dans le régime préconisé, c'est la même chose.

M. Giasson: Cela suppose que, même avec l'application de toutes les recommandations de Gauvin, je peux m'acheter des couvertures d'excédents de l'entreprise privée.

M. Gauvin: Vous allez être obligé d'en acheter. D'ailleurs, les recommandations...

M. Giasson: Non seulement je vais être obligé, mais je peux. Vous acceptez ce principe que je puis ie faire.

M. Gauvin: Pour les accidents à l'extérieur, oui. Cela a été dit dans le rapport de l'évaluation. On a tenu compte du coût de la responsabilité résiduelle. Le BAC en a tenu compte également que le Québécois qui s'en va en dehors doit avoir une couverture pour ce qu'on a appelé la responsabilité résiduelle pour les accidents qui surviennent dans un Etat où la responsabilité existe. J'aimerais simplement, si vous me permettez...

M. Giasson: D'accord, cela va.

M. Gauvin: Vous avez présentement, aux Etats-Unis, plusieurs Etats où on a aboli la responsabilité, le Michigan, par exemple, d'une manière assez substantielle. Les assurés du Michigan, quand ils voyagent dans un autre Etat où la responsabilité n'a pas été abolie, sont couverts selon la loi de cet endroit.

Ce n'est rien de nouveau, cela existe déjà. Vous avez des situations...

M. Giasson: Non, pour autant que j'ai une couverture assurée ici...

M. Gauvin: Absolument.

M. Giasson: ...en partant du Québec pour aller dans n'importe quel Etat américain...

M. Gauvin: Vous êtes couvert.

M. Giasson: ...quelle que soit la loi, que j'ai la garantie...

M. Gauvin: Oui.

M. Giasson: ...que, responsable d'un accident qui cause des blessures graves ou la mort, j'ai la certitude que je ne suis pas décapité par un accident au retour.

M. Gauvin: Non. D'ailleurs comme je vous dis, c'est la situation qui existe dans les endroits où on a établi des régimes semblables. Lorsqu'un assuré s'en va dans un autre endroit...

M. Giasson: Cela va être automatique. Le citoyen qui s'assure à l'intérieur d'un régime tel que proposé par vous est couvert automatiquement pour jusqu'à $1 million s'il doit faire face à une loi de responsabilité d'une autre province.

M. Gauvin: S'il a choisi une limite de $1 million, à ce moment. Cela dépend de...

M. Giasson: C'est automatique, c'est prévu dans le plan.

M. Gauvin: Dans le plan...

M. Giasson: S'il doit acquérir une couverture additionnelle et s'il oublie de le faire...

M. Gauvin: Si vous voulez avoir $1 million, c'est une couverture additionnelle. La couverture de base des autres provinces est incluse dans le régime, autrement dit, la limite minimale, parce que tous ces Etats ont des limites minimales. Il y en a même qui ont encore $10,000, effectivement. La limite minimale est incluse dans le régime obligatoire. Si vous voulez avoir $1 million, c'est la même situation qu'actuellement, vous devrez en acheter plus que la limite minimale.

M. Giasson: A l'intérieur du plan d'assurance-automobile bâti selon les recommandations.

M. Gauvin: Oui, c'est cela. Si vous permettez, vous allez avoir des situations très cocasses. Je vous défie de démêler le fils d'un assuré du Michigan qui est dans une auto de New York et qui a un accident au New Jersey. Vous avez trois lois absolument différentes. Au Michigan, on couvre la famille. Disons que l'accident, vous allez voir que...

M. Giasson: Ce n'est pas trop grave qu'il y ait trois ou dix lois, si le gars, par son contrat d'assurance-automobile, a la protection qui couvre toutes ces hypothèses.

M. Gauvin: Non seulement cela, mais notre régime prévoira à l'assuré du Québec le moindre de ce qu'on prévoit dans notre régime, ou ce qu'il pourra avoir en Ontario. C'est que le Québécois aussi peut être blessé en Ontario.

M. Giasson: Cela suppose, somme toute, si on résume, qu'à l'intérieur du Québec, je suis couvert en vertu du régime qui rejette la notion de responsabilité, mais que dès que je sors du Québec ou que je vais dans d'autres régions où le principe tient toujours, j'ai la garantie par mon contrat de base d'avoir cette protection qui me couvre, quelle que soit l'éventualité à laquelle je fais face.

M. Gauvin: Non seulement cela, mais vous avez la garantie que, si c'est vous qui êtes blessé, vous allez avoir la plus grande protection que vous puis-siea- avoir là...

M. Giasson: Toujours par mon régime à moi. M. Gauvin: ...selon le régime du Québec.

M. Giasson: Ce n'est dans ce que moi je vais subir, cela ne peut pas me foutre par terre. Ce qui peut me foutre par terre, c'est une réclamation possible et tenant légalement contre moi, cela va me faire bien plus mal que de perdre ma voiture ou perdre un peu de ma santé ou de mon pourcentage de capacités.

M. Gauvin: Seulement, six pieds sous terre, cela ne fera pas tellement mal.

M. Giasson: Non, même si je demeure vivant.

M. Gauvin: Si vous demeurez invalide, cela peut quand même vous foutre...

M. Giasson: Si je demeure invalide et que je détiens déjà une police d'assurance-salaire contre l'invalidité, je fais face à une situation. Si l'autre, d'un autre pays ou d'une autre province, vient avec une réclamation pour rafler tous les biens que je possède, et que je suis encore assujetti à des paiements futurs parce que je n'ai pas assez de biens pour faire face à la réclamation immédiatement, je vais être en faillite.

M. Gauvin: Non, je vous assure...

M. Giasson: Cela peut faire beaucoup plus mal que ce que je peux subir ou que les membres de ma famille peuvent subir.

M. Gauvin: Disons que — je ne voudrais pas me répéter — en fait, le régime prévoit la couverture de responsabilités dans l'Etat où vous allez lorsque l'accident a lieu. Ce n'est pas nouveau. Le problème a déjà été posé, les sol utions ont été tro u vées et sont présentement appliquées.

M. Giasson: Toutes ces protections pour une couverture nettement élevée, disons $1 million, cela va être compris dans la prime de base du régime...

M. Gauvin: Pas $1 million. J'ai dit la couverture minimale de l'Etat où vous allez.

M. Giasson: II y aurait une prime additionnelle si je veux...

M. Gauvin: Oui, si vous voulez avoir $1 million. En somme, dans notre régime... En Ontario, la limite est de $50,000. On a prévu dans l'évaluation le coût, la couverture de responsabilités résiduelles lorsque l'accident arrive en Ontario ou ailleurs. On n'a pas prévu des excédents, parce que les excédents dans les régimes optionnels, c'est toujours difficile d'établir dans quelle mesure les gens les prendront. Ace moment, si vous voulez avoir $1 million...

M. Giasson: II y a des automobilistes qui n'en ont pas besoin pour aller à l'extérieur, ils ne sortent jamais du Québec avec leur véhicule.

M. Gauvin: Ils ne sortent jamais du Québec ou, en fait, ils n'ont tellement pas d'argent qu'ils n'ont rien à perdre. Il y en a qui peuvent être comme cela. Vous avez raison, il y en a qui ne sortent pas du Québec. Alors, ils n'en ont pas besoin.

M. Giasson: Mais tout de même...

M. Gauvin: L'individu pourraitdire: Moi, je veux $1 million de responsabilité résiduelle pour les accidents hors du Québec. Il paierait une surprime et les surprimes ne sont pas élevées entre $100,000, $200,000, etc.

M. Giasson: On connaît les différences de primes entre les...

M. Gauvin: Cela sera moindre que les différences actuelles, parce que cela ne va que s'appliquer en dehors du Québec. On ne peut pas prendre les différences telles qu'on les connaît présentement. Je ne sais pas par coeur ce qu'elles sont, mais cela va simplement être une partie de cette différence pour lorsqu'on est hors du Québec. C'est quand même assez minime.

M. Bouchard: D'ailleurs, si vous le permettez, je vais vous lire seulement les deux phrases qu'on avait prévues à ce propos, à votre question qui est très pertinente. On disait ceci: "Les dispositions du régime s'appliquent à tous les véhicules du Québec, quel que soit l'endroit de l'accident. L'assurance de base suit le véhicule et l'assurance supplémentaire, qui est à son choix, couvre les membres de la famille, même à l'extérieur du Québec", dans la mesure où l'événement implique un véhicule enregistré au Québec, évidemment. Si vous êtes dans une voiture de l'Ontario, c'est une autre chose. "De plus, l'assurance de base protège l'assuré du Québec contre la responsabilité pour un accident survenu en dehors du Québec, dans les cas où précisément les régimes maintiennent un système de faute". Je pense que cela répond à votre question.

M. Giasson: Pour autant que vous acceptez le principe d'une couverture excédentaire...

M. Bouchard: C'est prévu dans notre régime.

M. Giasson: ...faisant face à la responsabilité qui peut être établie contre moi...

M. Bouchard: C'est prévu.

M. Giasson: ...dans une région où c'est encore en vigueur.

Une Voix: Oui.

M. Belleau: Si vous me le permettez, M. le Président, je voudrais ajouter quelque chose. Je pense que vous connaissez assez bien les polices d'assurance-automobile, je pense que vous êtes courtier. Par analogie, c'est la même chose qui existe déjà dans le contrat pour la non-assurance des tiers. C'est exactement le même principe qui va s'appliquer. Cela existe déjà pour les gens qui ont des accidents dans des endroits où il n'y a pas de fonds d'indemnisation. C'est exactement le même principe. C'est une chose qui existe déjà. Au fond, au plan technique, il n'y a pas de difficulté. Cela existe déjà dans les contrats, ce qu'on appelle la clause de non-assurance des tiers.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Beauce-Sud.

Fonction du courtier

M. Roy: M. le Président, il est évident que je n'ai pas pu assister à toutes les délibérations qui ont eu lieu aujourd'hui. J'espère qu'on va m'excuser à l'avance si je viens à poser des questions...

M. Tetley: Toujours.

M. Roy: ...qui ont été posées; j'aimerais qu'on me le dise à ce moment.

Je veux revenir un peu sur les dispositions du rapport Gauvin concernant la fonction de courtier. C'est parce que je n'ai pas eu l'occasion de vous poser ces questions au début des séances de la commission, avant que nous commencions les audiences. Mais, je veux revenir là-dessus, parce que j'estime quand même que c'est assez important.

Vous insistez beaucoup dans votre recommandation no 55, entre autres, pour que le courtier n'intervienne plus dans le processus de règlement des sinistres, de sélection de risquesetd'administration de la police. J'aimerais que vous nous disiez, si vous pouvez nous en faire part ici, qui l'a demandé et quels sont ceux qui ont fait pression auprès du comité Gauvin, et d'abord, si vous avez eu des pressions de faites à ce sujet ou si vous êtes venus à ces conclusions après avoir examiné l'ensemble de la question.

M. Gauvin: D'abord, M. Roy, le comité Gauvin n'a pas été la cible de quelque pression que ce soit. C'est à la suite d'une analyse du problème, à la suite également de discussions avec des experts et également par des consultations que nous en sommes venus à la conclusion que, fondamentalement, si on veut améliorer l'efficacité du régime, il fallait faire une réforme complète et éliminer la sélection des risques, éliminer les interventions qui nous paraissent inutiles et, à ce moment, il fallait absolument changer le rôle du courtier pour le faire.

J'aimerais vous citer de nouveau ce que disait un rapport de l'Etat de New York, que j'ai cité ce matin, intitulé: "Competition in Property and Liability Insurance in New York State". Ces gens en sont venus à la conclusion que l'élimination de la sélection des risques, imposée à l'assureur "the elimination by law of an insurance company's right to choose its own customer".

On dit qu'il y a des effets bénéfiques, mais qu'il y a "however great problems with such a proposition". Et je pourrais vous laisser ce document. On dit bien "given the present structure of the insurance distribution system, a rule that insurance companies must accept all applicants who apply will notbe likely to achieve its objectives." Et, en fait, nous en sommes venus à cette même conclusion après une étude qui est une étude extrêmement sérieuse. Nous sommes arrivés à la même conclusion que, si on voulait éliminer la sélection des risques, fondamentalement, il fallait changer le rôle du courtier. Tant et aussi longtemps qu'on ne l'a pas fait, on ne pourra pas éliminer la sélection des risques et on ne pourra pas, à ce moment, imposer aux assureurs d'accepter obligatoirement tous les risques et on n'atteindra pas l'objectif sous-jacent à tout cela qui est de rendre le régime beaucoup plus efficace.

Comme je vous l'ai dit, le régime actuel retourne $0.60 par dollar aux victimes. Si on veut obtenir un régime qui va retourner $0.80, il faut faire des économies un peu partout et, parmi les économies nécessaires, il y a celle découlant de l'élimination de la sélection des risques. A ce moment, cela ne va pas sans changer le rôle du courtier. Ce ne sont pas des pressions, ce n'est pas une demande, je peux vous l'assurer, que les courtiers nous ont faite. C'est simplement une analyse avec nos spécialistes et à la suite des discussions que nous avons eues.

M. Roy: Si je vous pose cette question, c'est parce que nous recevons comme député d'un comté — je pense que c'est surtout vrai dans les comtés ruraux — des gens qui viennent nous voir pour toutes sortes de raisons, toutes sortes de cas. Vous avez dit dans votre rapport que 86% des transactions se faisaient avec des courtiers. Ce sont des chiffres qui n'ont pas été niés par qui que ce soit, qui ont été généralement admis. Donc, cela veut dire qu'il y a 14% des assurés qui font affaires directement avec des compagnies d'assurance.

Dans le cas de règlement des sinistres, avez-vous fait une étude concernant les méthodes, les délais et la façon dont sont réglés les sinistres vis-à-vis des compagnies qui transigent directement avec leurs assurés, comparativement avec les cour- tiers et quelles conclusions ou différences avez-vous constatées?

M. Gauvin: Pardon?

M. Roy: J'ai dit: Quelles sont les constatations que vous avez faites à ce sujet et quelles sont les conclusions que vous en avez tirées sur ce point particulier? J'aimerais d'abord savoir si vous avez fait des études comparatives à ce niveau.

M. Gauvin: Oui. Nous avons obtenu des chiffres et des analyses comparatives. Nous n'avons pas divulgué de noms de compagnies. On a, en fait, des délais qui apparaissent par exemple, dans le rapport. Nous nous étions engagés à ne pas divulguer les noms de compagnies et nous ne l'avons pas fait. Il y avait là-dedans des "directes". Il y avait, effectivement, des compagnies d'assurance — ce qu'on appelle les directes, mais je reviendrai là-dessus, si vous le permettez — qui font affaires par l'intermédiaire de courtiers. De ces compagnies directes, il y en a qui étaient moins bonnes que les autres et il y en a qui étaient meilleures que les autres quant aux délais. Par ailleurs, il y avait autant de variations dans celles qui faisaient affaires par l'entremise des courtiers que de l'autre côté.

J'aimerais bien situer le problème. Ce que nous avons recommandé n'est pas du "direct writing" comme il existe présentement. Nous avons même pris la peine de dire qu'il y a 86% du public — et cela n'a pas été nié par qui que ce soit — qui fait affaires par les courtiers. Comme d'ailleurs pour tous les autres chiffres du rapport, je n'ai pas vu de preuve qu'ils n'étaient pas exacts. Nous avons pris la peine de dire que le courtier demeurera l'intermédiaire principal, parce que ce que nous préconisons n'est pas l'ouverture de bureaux par les compagnies d'assurance. Nous préconisons pour le consommateur le libre choix d'aller voir son courtier, d'aller à une compagnie d'assurance qui a un bureau à un endroit ou, s'il le veut, d'écrire lui-même directement à l'assureur qu'il veut. A ce moment, il sera obligé de faire affaires directement avec un assureur, il n'aura pas l'avantage du conseil de son courtier, qui est valable, mais il aura le choix de faire l'un ou l'autre. Dans la grande majorité des cas, les gens, d'après nous, continueront de faire affaires avec leur conseiller en assurance ou leur courtier, parce qu'il rend un service valable.

M. Roy: Je comprends, mais vous avez une recommandation qui est bien précise, M. Gauvin, quand vous dites que les courtiers n'interviennent plus dans le processus de règlement des sinistres. Vous en faites une recommandation qui est bien spécifique. C'est la raison pour laquelle j'aimerais savoir de quelle façon vous pouvez voir le service auquel l'assuré a droit lorsqu'il n'y a pas de bureau d'assurance dans la région où il demeure.

Actuellement, il a son courtier et le courtier intervient dans le processus de règlement des sinistres comme ceci: on avise le courtier qui, lui, avise la compagnie d'assurance de nous envoyer les formules et on sait de quelle façon cela se règle. Mais nous

avons du service. On ne demeure pas tous à Montréal, dans la province de Québec.

Je n'ai pas mes dossiers devant moi, mais je pourrais vous citer des cas de gens qui ont transigé directement avec des compagnies d'assurance. Cela fait cinq mois que l'accident a eu lieu et on n'accuse même pas réception des lettres, parce qu'il n'y a pas de courtier pour prendre l'intérêt et la défense de la personne. La compagnie n'est même pas dans la province de Québec.

M. Gauvin: Ce n'est pas, à mon sens, la raison fondamentale. La raison fondamentale, c'est que vous faites affaires avec un assureur dont vous n'êtes pas le client bien souvent. Vous faites affaires avec l'assureur de l'autre partie. La journée où vous allez faire affaires avec votre propre assureur, la journée où cela va être vous qui allez être son vrai client, il va vous donner du service. Autrement, vous ne resterez plus son assuré.

Le problème fondamental, aujourd'hui, c'est que vous faites toujours affaires avec un adversaire. C'est l'assureur de l'autre. Ces problèmes, en général, arrivent toujours quand c'est l'assureur de l'autre. Lui, en fait, vous n'êtes pas son client et le service, il n'y tient pas. Même s'il ne vous en donne pas trop, effectivement, cela ne le dérange pas. Vous n'êtes pas son vrai client. Mais la journée où vous avez de l'assurance directe, où vous faites toujours affaires avec votre assureur, s'il ne vous donne pas satisfaction, vous allez changer d'assureur. L'assureur qui n'en donne pas va être obligé de relever ses manches et de donner plus de service.

M. Roy: Oui, mais l'assureur, M. Gauvin, n'a pas des bureaux établis partout au Québec.

M. Gauvin: Non.

M. Roy: Dans le cas d'un sinistre et dans le cas d'un accident, on parle de diminuer le coût de l'assurance-automobile.Tout le monde est d'accord là-dessus. Mais, dans l'assurance-automobile, il n'y a pas seulement le coût de l'assurance. Il y a le service que nous devons obtenir. Si, pour économiser $10 dans la prime d'assurance, les assurés se retrouvent dans l'obligation de dépenser $20, $25, $30 ou $40 chaque fois qu'ils pourraient avoir une réclamation, par le fait qu'il n'y a pas de services dans la région, à ce niveau, et que le courtier est complètement exclu de l'intervention qu'il avait l'habitude de faire auparavant, dans l'intérêt même des assurés, j'aimerais qu'on me dise... Vous dites: II va y avoir une intervention directe. Mais prenons le cas, par exemple, des gens qui demeurent à Lac-Frontière ou à Dorset, dans le comté de Beauce-Sud, qui sont très loin des grands centres; quel sera le service et comment ces gens pourront-ils s'organiser de façon à pouvoir être capables d'insister auprès de la compagnie ou de faire les pressions qui s'imposent auprès de la compagnie pourque leur affaire se règle au plus tôt, s'il n'y a aucun intermédiaire pour prendre l'intérêt de son client?

Actuellement, ce sont des choses qui sont faites par les courtiers dans les régions rurales.

M. Giasson: Le député de Beauce-Sud vient de poser la question la plus intéressante, à mon sens, vis-à-vis des implications que le rapport Gauvin, dans son application intégrale, va avoir en milieu rural.

Sur papier, je vais le lire, votre affaire va bien, M. Gauvin. Mais vous allez voir que, si cela se traduit dans une réalité, dans les grands centres, quand tu es proche de ton agent, tu es proche des bureaux de réclamation, des agents de réclamation et de la compagnie, cela va bien, mais, dans le milieu rural, on va arrêter de jouer avec le livre, on va descendre sur le plancher des vaches et on va regarder ce que cela va donner comme application pratique. Vous allez voir que cela ne sera pas si fin et si commode que ce que vous prétendez.

M. Gauvin: C'est bien évident qu'il va y avoir des problèmes.

M. Giasson: Vous avez dit une belle phrase, tout à l'heure: Vous allez donner du service. Vous n'avez jamais dit si vrai. Mais qui va payer le service?

M. Roy: C'est cela.

M. Gauvin: C'est toujours le public qui paie le service.

M. Giasson: Non. Dans le contexte de rémunération de votre conseiller, ce n'est pas le public. Vous l'avez assujetti à un montant de rétribution que vous jugez essentiel pour appliquer les baisses de coût dans les primes d'assurance-automobile, si on reste logique avec tous les calculs que vous avez faits. L'assuré, dans la campagne, est habitué àfaire affaires avec son courtier. Il va aller faire compléter une proposition, se faire expliquer les couvertures que sa police va lui accorder et après, dans la pratique, quand il va revenir pour des changements à apporter, nécessairement, dans le cours de la police — il va toujours y avoir des changements lorsque le gars va changer de véhicule, va vouloir inclure des jeunes conducteurs, parce que cela ne sera pas une prime uniforme, absolument, pour tout le monde — quand les réclamations vont arriver et que le gars va venir te voir, tu vas être obligé de lui dire: Mon gars, c'est bien dommage, au taux auquel on me rémunère, je ne fais plus d'appels interrurbains et je n'appelle plus les agents de réclamation.

Je n'appelle plus la succursale. Voici le numéro de téléphone, appelle. Vous pensez que cela va se faire comme ça?

M. Gauvin: En fait, il ne faudrait pas oublier qu'on ne pourra jamais amener Montréal à Dorset, je ne sais pas si c'est dans le comté de Beauce-Sud. Il y a quand même des avantages et des désavantages à vivre dans certains milieux.

M. Tremblay: M. Gauvin, au Québec, géographiquement parlant, il y a des gens qui restent partout. Le Québec, c'est rural. Vous avez deux territoires métropolitains Québec et Montréal, et Sherbrooke, un peu, si on parle de densité de population.

A par cela, c'est "at large" à la campagne. C'est beau, le Québec.

M. Gauvin: Oui, c'est beau.

M. Tremblay: Mais, comme le dit mon collègue de Montmagny-L'Islet, l'application du système, au niveau du service, dans le moment... Le gars qui est assuré et qui demeure dans une petite place... Moi, je demeure dans une petite place, nous demeurons tous dans une petite place, sauf le député de Mille-Iles, peut-être.

M. Lachance: A Laval.

M. Giasson: Infailliblement, on va être obligé de dicter des lettres à nos secrétaires de bureau au nom de notre client, parce qu'il va dire...

M. Tremblay: Nos courtiers.

M. Giasson: ...Giasson, veux-tu, tu vas m'écrire cela, tu connais cela. Tu sais comment réclamer. Notre secrétaire va travailler pour le client à l'intérieur de la rémunération que vous avez prévue. Deuxièmement, sélection des risques. Dans vos prévisions, un courtier actuel qui devient conseiller veut continuer de vendre de l'assurance-automobile, prévoyez-vous qu'il deviendra un conseiller pour une compagnie ou s'il pourra rester sous contrat avec plusieurs compagnies?

M. Gauvin: Nous prévoyons qu'à ce moment-là il va devenir conseiller pour toutes les compagnies. Il pourra envoyer ses gens "at large", partout.

M. Giasson: D'accord, cela va. C'est une déclaration, je la prends. Ramenons cela au pratique. Les compagnies auront-elles le droit d'annuler les polices pendant leur durée?

M. Gauvin: Non.

M. Giasson: II faudra qu'elles attendent...

M. Gauvin: Les compagnies sont obligées d'accepter tous les gens qui leur feront une demande d'assurance. Elles n'auront pas le droit de rejeter une seule demande. Elles ne pourront pas de plus annuler le contrat.

M. Giasson: Au renouvellement, est-ce qu'elle va pouvoir se désister devant certains risques ou si elle va être obligée de continuer à les assumer?

M. Gauvin: Ce n'est pas l'assureur qui va décider qui il assure. C'est l'assuré avec son conseiller. Nous avons dit...

M. Giasson: Dans cette hypothèse, vous parlez d'abolition de la sélection des risques. L'expérience pratique dans un bureau d'assurance générale où il y a un volume d'automobiles, c'est que je peux faire la sélection des risques à moins que vous ne me donniez la formule qui va m'empêcher de la faire. Je connais assez bien la qualité des risques. Ils ne sont pas tous égaux dans l'automobile, vous savez cela. Si je décide q ue, si j'ai des assurés, des automobilistes que je considère comme d'excellents risques, je les place chez un de mes assureurs et que, quand j'ai des risques plus hasardeux, plus douteux, je les place toujours chez l'autre assureur, il n'aura pas le choix, il va être obligé de toujours...

M. Gauvin: Oui.

M. Giasson: ...assumer les mauvais risques que volontairement je lui donne?

M. Gauvin: Mais il n'aura pas la même prime éventuellement. Parce que chaque assureur va fixer la prime qu'il veut.

M. Giasson: Même s'il n'a pas la même prime. M. Gauvin, vous ne pouvez pas inonder...

M. Gauvin: L'assureur, par exemple... Excusez-moi.

M. Giasson: ...un assureur de mauvais risques. Jamais il ne pourra appliquer la prime proportionnelle aux hasards que vous lui donnez.

M. Gauvin: Non, je ne suis pas d'accord sur cela, parce que l'assureur aura toujours le droit d'édicter ses normes, à quelles conditions il accepte. Il va dire: J'accepte tout le monde, mais tel individu qui a telle caractéristique va dans telle classe. Tel individu qui a telle autre caractéristique va dans telle autre classe.

M. Giasson: II pourra toujours augmenter sa prime de façon arbitraire parce qu'il juge que c'est...

M. Gauvin: Pas arbitraire, parce que, s'il y a de la compétition, dès que cela va devenir arbitraire, c'est là que va jouer son rôle un dépliant comme celui que j'avais ce matin où il y a des comparaisons de tarifs. Dès qu'un assureur va augmenter sa prime à un niveau trop élevé, vous n'enverrez plus vos clients là, vous allez dire: Je vais les envoyer ailleurs. C'est trop cher. Le jeux de la compétition va jouer. L'assureur va dire: Telle catégorie de risques...

M. Giasson: Oui, je comprends. Si l'assureur dépasse largement, en matière de tarification, ce que l'ensemble des autres assureurs font, cela va...

M. Gauvin: II n'aura plus d'affaires, il va s'en aller.

M. Giasson: Mais s'il est obligé d'accepter tous les risques que je lui soumets, volontairement, en faisant ma propre sélection, je peux embarrasser un assureur et favoriser d'autres assureurs. Je vous dis cela en fonction d'une expérience de quinze ans.

M. Gauvin: Oui, mais là, c'est quand même dans le système actuel. Il faudrait bien...

M. Giasson: Je prétends connaître cela un peu.

M. Gauvin: Je n'ai jamais mis en doute que vous connaissiez cela, mais, justement, quel doit être votre intérêt de jouer contre un assureur? Vous n'avez pas d'intérêt. Vous conseillez votre client, le meilleur service au meilleur prix. Ce n'est pas nécessairement le plus bas. Pourquoi enverriez-vous ces cas-là?

M. Giasson: Peut-être moins dans le nouveau système. Mais vous savez que les assureurs, vis-à-vis des bureaux de courtiers, donnent des accommodements. Je ne parle pas en matière de taux ou de commissions, mais dans les relations, la rapidité d'exécution des demandes que le courtier place et au point de vue du placement des risques aussi, il reçoit des accommodements de placement de risques — c'est dans le système actuel — que d'autres assureurs ne donnent pas. Question de volume, d'expérience de l'agence, etc.; il y a bien des facteurs qui interviennent.

M. Gauvin: Oui, mais c'est ça qu'on veut abolir dans l'automobile. On veut que tous les conseillers, tous les courtiers puissent placer tous les risques où ils le veulent. C'est précisément ça. On veut, en fait, que le courtier soit un peu égal à égal avec l'assureur et envoie tous les risques au meilleur endroit. Qu'est-ce que vous voulez, le courtier qui se fait annulerdes risques ou dont on veut pas accepter les affaires, ce n'est pas fameux pour lui, ça lui cause toutes sortes d'embêtements.

M. Giasson: II restera toujours sans doute, si ça se pratiquait chez les conseillers, la possibilité pour un assureur de mettre fin à un contrat d'agence avec un conseiller. Vous ne lui enlèverez pas ce droit.

M. Gauvin: Pas en automobile, on ne veut pas de concurrence.

M. Giasson: L'automobile... On va être obligé; si un conseiller ou un ancien courtier demande de représenter telle compagnie, la compagnie n'a pas le choix.

M. Gauvin: Non, il n'a même pas besoin de les représenter; il les représente tous. Il représente l'assuré seulement. L'assureur ne peut pas lui dire: Tu n'as pas le droit de placer chez nous. Tu places tous les risques.

M. Giasson: Je continue à avoir ma petite idée là-dessus, moi.

M. Rankin: Excusez-moi, M. le Président, est-ce que je peux ajouter quelques mots sur le rôle du courtierdans le règlement des sinistres, parce que cela a l'air d'être un peu mal compris? C'est dans le processus de règlement des sinistres et ce n'est pas quelque chose que nous avons inventé. Cela existe déjà dans les juridictions où on trouve l'assurance directe. Il faut quand même mettre ça dans le contexte qui est envisagé. Mettez-vous dans la situation où vous avez une réclamation de dommages matériels. Je parle seulement de dommages matériels pour le moment, parce qu'il y a six ou sept réclamations pour chaque réclamation pour blessures corporelles.

A l'heure actuelle, c'est vrai que, dans les milieux ruraux, vous passez par votre courtier, mais lui il envoie ça automatiquement à la compagnie d'assurance. Lui, en fait, n'est qu'une étape dans le processus. On peut éliminer ça. Il n'ajoute rien du tout, sauf quand il y a quelque chose en dehors de l'ordinaire. Dans ce cas, il va agir comme conseiller dans la réclamation. On ne dit pas qu'il ne peut pas agir comme conseiller dans la réclamation; on dit seulement dans le processus. Cela existe déjà dans le Massachusetts et en Floride et ça existe aussi à Québec et en Ontario avec quelques compagnies.

Ils vont vous conseiller de téléphoner directement à la compagnie. Vous allez avoir une réclamation plus rapide, un règlement plus rapide. Les gens ont pris l'habitude de téléphoner à leur courtier, mais, assez souvent, vous en avez l'expérience, il agit seulement comme une boîte à lettre. Au lieu de faire cela, vous envoyez ça directement à la compagnie d'assurance. Je cite l'exemple d'une grande compagnie qui a une ligne directe interurbaine. Alors, chaque assuré peut téléphoner pour les réclamations directement.

M. Giasson: M. le Président...

M. Roy: Je n'ai pas fini, M. le Président.

M. Tetley: C'est parce que ça fait une journée; j'admire votre présence, mais venir à la fin...

M. Giasson: Un peu tardive, c'est ce que vous voulez dire.

M. Tetley: Mais non, c'est comme a dit le bon Dieu; il payait tout le monde le même salaire, malgré qu'un est arrivé à la onzième heure. Qu'il ne force pas les autres à travailler en surtemps.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Moi, si je pose toutes ces questions, je ne veux pas donner l'impression à qui que ce soit que je veux prendre la défense des courtiers, loin de là. Non, je veux bien que ce soit clair dans l'esprit de tout le monde. Ce que je pose comme question ici, c'est que les courtiers — même si on trouve ça drôle, la réalité est là — dans les régions rurales du Québec, ce sont eux jusqu'ici, qu'on aime ça ou non, qui ont donné les services à la population; ce ne sont pas les compagnies d'assurance comme telles. Des bureaux, il n'y en a pas.

Il y a deux façons de se débarrasser de choses qu'on considère à un moment donné, comme gênantes ou qu'on cherche à éliminer pour d'autres fins: les éliminer par une loi, quand c'est une chose qui peut être faite, ou bien leur rendre la vie impossible.

Le service de l'assurance-automobile, je considère qu'il est primordial, parce que la personne qui

assure son véhicule, qui s'assure, paie pour un service. Ce n'est pas tout de payer, ce n'est pas simplement une question de coûts; c'est une question de services, comme je le disais tout à l'heure.

On fait donc en sorte que le courtier, qui est le seul représentant dans les régions éloignées, dans les régions rurales du Québec, n'ait à intervenir, si je me fie aux recommandations de la commission Gauvin, dans les règlements des sinistres, d'aucune façon.

M. Rankin: Dans le processus de règlement.

M. Roy: Dans le processus de règlement des réclamations, il n'a à intervenir en aucune façon en ce qui a trait au financement de la prime, parce qu'il faut en réduire le coût, il n'intervient pas dans un autre domaine et, à cause des difficultés politiques — je dis bien des difficultés politiques — et de la concurrence qui existe à ce niveau-là, compte tenu du fait que les grosses compagnies d'assurance veulent garder leur fromage — et on ne peut pas les blâmer de vouloir garder leurs prérogatives — on fait en sorte d'éliminer le courtier et on fait d'une pierre deux coups.

Les petites compagnies d'assurance, que vont-elles faire là-dedans? On n'en a pas tellement parlé. Les petites compagnies d'assurance québécoises qui oeuvrent dans le domaine de l'assurance-automobile, qui ont débuté avec très peu de chose et qui ont terminé...

M. Giasson: Nommez-les!

M. Roy: Je ne ferai pas de publicité pour les compagnies comme telles. Je ne suis pas ici pour défendre les compagnies. Mais il faut tenir compte de tous les aspects du problème, si on veut agir de façon sérieuse et de façon consciencieuse. Il y a les assurés, il y a les compagnies et il y a les courtiers qui agissent comme intermédiaires qui, jusqu'ici, ont joué un rôle et ils sont nécessaires.

C'est curieux, mais je remarque qu'on en dit beaucoup et on semble vouloir s'attaquer surtout aux courtiers là-dedans, pour vouloirfaire un grand processus de changement. Je suis encore à entendre des plaintes de la part de la population. Je m'étonnerais même que, lors des études que vous avez faites et des longues séances que vous avez tenues pour entendre les mémoires ou encore recevoir les délégations ou les organismes qui se sont présentés devant la commission Gauvin, vous ayez eu tellement de plaintes à l'endroit des courtiers.

Si les compagnies d'assurance, compte tenu de ce fait, plutôt que de hausser leurs primes d'assurance — je pose la question — font en sorte de diminuer les revenus des courtiers de façon à leur rendre la vie impossible, comme je le disais tout à l'heure, il est évident qu'on va faire d'une pierre deux coups. Mais qui sera le bénéficiaire derrière tout cela? C'est là la question. Est-ce que ce sont les assurés? Je ne le crois pas. Ce seront peut-être les grosses compagnies, peut-être les multinationales, qui vont encore être les grandes gagnantes dans tout cela. Peut-être que cela justifierait par la suite, de vouloir les étatiser.

Je me demande si, dans le rapport Gauvin, vous avez étudié les implications — parce qu'il y a quand même des implications économiques dont il faut tenir compte, tout en prenant l'intérêt primordial des assurés — et les conséquences, à moyen et à long termes, que ces recommandations, si elles étaient mises en application, pourraient avoir dans l'avenir et l'influence qu'elles pourraient avoir sur les prix des primes d'assurance à venir et sur la qualité des services à être donnés aux assurés. Je remercie le député d'Iberville de son commentaire.

M. Tremblay: C'est une longue question.

M. Gauvin: Cela peut être une longue ou une courte réponse. Il est bien évident que, lorsque nous avons fait l'étude, on a pris en considération que les réformes qu'on préconisait allaient affecter durement certains groupes.

Il y a beaucoup de choses que vous avez dites, sur lesquelles je ne suis certainement pas d'accord. Vous avez même mentionné un fait, M. Roy, que cela favorisait les multinationales.

M. Roy: Oui. J'en suis convaincu. Je m'excuse, mais j'aimerais avoir votre opinion à ce sujet-là.

M. Gauvin: Est-ce que je peux essayer de répondre?

M. Roy: Oui.

M. Gauvin: J'aimerais qu'après vous me disiez comment. Si on prend la somme des réformes qu'on préconise, moi — et je pense que mes collègues du temps avaient la même impression — je suis persuadé, effectivement, que les entreprises québécoises seraient même favorisées avec les réformes préconisées.

Mettez-vous à la place d'une multinationale, vous en avez une qui est venue vous dire toutes sortes de sornettes. Je ne m'en cache pas, nous sommes censés être entre bonnes mains avec elle, je ne la nommerai pas, moi non plus.

Elle a été condamnée à $100,000 d'amende en Floride pour avoir eu bien des pouces dans ses mains au lieu d'avoir les mains...

M. Roy: Oui, les multinationales, oui.

M. Gauvin: Je demeure convaincu que cette multinationale avait une raison de venir ici. Elle ne veut pas que le système change. Elle a une raison pour ne pas vouloir que le système change; c'est qu'elle sait très bien que, si jamais on arrivait au Québec avec quelque chose de nouveau, avec quelque chose de différent, elle ne pourrait pas rester au Québec. Tout est mené d'une petite place du "su-burd " de Chicago. Je vais quasiment la nommer. Il n'y a rien qui se fait au Québec. Il n'y a pas de décisions qui se prennent au Québec. Elle fait tout au Québec comme elle le fait ailleurs.

Vous allez imposer un nouveau système, vous allez arriver au Québec en disant: Dorénavant, nous autres, notre système d'assurance fonctionne comme cela, notre mise en marché est faite de cette

façon. Effectivement, son affaire ne marche plus. Son gros ordinateur devient tout mélangé et elle n'est pas intéressée à se faire tout un nouveau système pour le Québec.

Je suis convaincu que, contrairement à ce que vous dites, les recommandations du rapport du comité que j'ai eu l'honneur de présider favorisent les entreprises du Québec. Je n'ai pas peur de le dire. On n'avait pas le mandat de le favoriser. Dans notre arrêté en conseil, on ne nous a jamais dit de favoriser ceci et de favoriser cela. Ils ont dit: Les victimes en premier. Quand même, on était conscient que cela permettait à nos compagnies québécoises de s'épanouir encore plus qu'elles ne le font, parce que vous avez beaucoup de compagnies qui agissent au Québec et qui n'y sont pas, qui font affaires ici. C'est une petite succursale le Québec pour elles. Changer leur philosophie et leur façon de penser pour le Québec, elle n'y seront pas intéressée et elles vont s'en aller.

Ce qui va arriver, c'est qu'on va finir par avoir des compagnies québécoises plus fortes que celles qu'on a pour le Québec et qui pensent en fonction du Québec. Là-dessus, je ne partage pas du tout votre point de vue qu'on favorise les multinationales, pas du tout à ce point de vue.

M. Roy: J'aimerais avoir votre opinion...

M. Giasson: Parce qu'ils nous en ont sorti une capable quand ils sont venus ici.

M. Gauvin: Ils vous en ont sorti plusieurs capables.

M. Giasson: Ils sont allés jusqu'à plaider la cause du courtier. Pour sauver le système actuel, ils sont allés plaider la cause d u courtier. Ils se sont dits favorables aux courtiers. C'est la meilleure que j'aie entendue.

M. Gauvin: On dit même que c'est du direct qu'on veut faire, que le comité Gauvin préconise l'assurance "direct writer". Vous avez eu un "direct writer" qui est venu ici et qui s'oppose à cela. J'ai mon voyage! Si c'est cela qu'on préconisait, cher monsieur, comment se fait-il que ce gars est venu ici pour vous dire: Ne faites pas cela? C'est ce qu'il fait partout. Voyons, il n'en veut pas. Il sait que les quelques millions de dollars d'affaires qu'il fait ici, il ne les ferait plus demain matin.

M. Roy: Est-ce qu'il a un permis du...

M. Gauvin: Les assurés du Québec seraient probablement mieux servis.

M. Giasson: Où celui-là place-t-il son argent?

M. Gauvin: On n'avait pas le mandat d'examiner le problème.

M. Giasson: Quelle partie de l'argent des primes perçues au Québec ou des placements vient-il faire chez nous?

M. Gauvin: On n'avait pas ce mandat.

M. Roy: Est-ce que cette compagnie, cette entreprise a un permis pour faire affaires au Québec?

M. Tetley: Tous ceux qui font affaires au Québec ont un permis.

M. Roy: Vous leur avez donné un permis.

M. Tetley: De quelle compagnie parlez-vous? On ne peut parler sans... Il y a peut-être plus d'une compagnie qui remplit...

M. Gauvin: Je ne la nommerai pas.

M. Tetley: Vous ne l'avez pas nommée. C'est difficile pour moi de vous donner une réponse.

M. Gauvin: A moins que vous ne m'assuriez de l'immunité parlementaire.

M. Tetley: II faut être élu pour avoir ce plaisir et ce droit.

M. Roy: Ce n'est même pas une garantie.

M. Tetley: Non, ce n'est pas nécessairement une garantie.

Centres d'évaluation

M. Giasson: M. Gauvin, votre recommandation 57: "Que l'évaluation des dommages soit effectuée par des centres d'évaluation dont l'administration est commune à toutes les assurances. " Dans votre vision de l'implantation de centres d'évaluation, est-ce que vous les voyez nombreux dans les milieux ruraux?

M. Gauvin: Nécessairement, ils seraient en fonction du volume en question. Quand on parle de centres, ce ne sont pas nécessairement des centres physiques. Il y a bien des choses qui ont été dites. Je regrette de revenir sur les mémoires. Je les ai tous lus, mais il y a tellement de choses qui ont été dites que ce n'est pas à rire, c'est pratiquement à brailler.

M. Giasson: On va essayer de voir cela sur le plan politique.

M. Gauvin: Effectivement, nous avions demandé à des experts combien cela en prendrait si jamais on allait à de vrais centres physiques. Si vous allez à des centres pour tous les assureurs, le problème du milieu rural serait pire, parce qu'il n'y a pas d'assureur qui a assez de volume pour établir de ces centres. Du moment où vous faites cela commun à tout le monde, cela agrandit considérablement le nombre d'endroits où on peut avoir un de ces centres. A ce moment, le Québec pourrait être couvert par de tels centres si c'était cela.

Effectivement, l'optique était d'avoir un système d'évaluation.

C'est beaucoup plus un système systématisé d'évaluation. Cela vise strictement les dommages matériels. Au lieu d'aller courir à trois garages pour toutes sortes d'histoires, même le rural va aller à l'endroit approprié, et, même dans le cas des endroits ruraux, c'est le centre qui va se déplacer. Ce qu'on appelait le centre, ce n'est pas nécessairement une bâtisse; c'est un système où on va aller voir comment cela se fait. Là, c'est un individu qui le fait pour tout le monde. A ce moment, c'est l'assuré qui va appeler et il va dire:J'ai un accident. Il va venir faire l'évaluation, si c'est nécessaire. Vous en avez de ces centres physiques au Manitoba. Dans les régions rurales, ils n'ont pas établi les centres partout. Ils ont simplement du personnel itinérant qui joue le même rôle, sauf que dans notre régime ils sont communs à tout le monde.

A ce moment, l'individu, en fait, peut en faire bien plus. Vous pouvez avoir des individus dans plus d'endroits que si vous permettez à chaque assureur d'avoir son propre représentant, parce que cela lui prend une plus grande superficie.

M. Giasson: Non, je vous pose la question parce que, justement, je ne voudrais pas qu'on répète l'expérience de certains assureurs qu'on n'a pas nommés. Vous amenez l'automobiliste accidenté à un centre. Il y a un bonhomme qui connaît cela ou prétendument doit connaître cela. Il dit: Cela vaut tant pour réparer ton véhicule. Le gars part du centre, s'en va chez son garagiste et le garagiste lui dit: C'est dommage, cela vaut $150 de plus. Ton assureur va me donner X montant et tu me donnes $150. Je ne voudrais pas qu'on répète ce système qui s'est pratiqué au Québec vis-a-vis de certains assureurs. Deuxièmement, si c'est un centre qui est placé à un endroit donné; on va prendre une zone que je connais bien, le comté de Montmagny-L'Islet. Disons qu'on met le centre à Montmagny, qui est la grosse agglomération. Mon client de Saint-Pamphile, qui a environ 50 milles à faire pour aller à Montmagny, si son véhicule est encore en état de circuler, c'est un dommage mineur, est-ce qu'il devra aller à Montmagny ou si le personnel du centre va se déplacer pour aller dans les paroisses?

M. Gauvin: Comme je l'ai dit, ce n'est pas nécessairement ce qu'on avait à l'esprit, des centres physiques. C'est un système, c'est systématiser l'évaluation, un peu l'enlever des mains des assureurs. Les garagistes qui peuvent faire n'importe quoi, à ce moment, vont simplement déléguer un gars qui va passer et qui va faire l'évaluation.

M. Giasson: II va circuler dans les paroisses.

M. Gauvin: II va circuler et il va la faire selon les normes préétablies. Là, vous amenez assez de volume à ces gens qui font les évaluations qu'ils peuvent acquérir une plus grande compétence. Ils peuvent également établir des normes: Combien cela prend de temps pour réparer une porte, combien cela prend de temps pour peinturer, quelle est la meilleure façon de réparer. Vous avez un système en Allemagne qui, je pense, est à l'étude au BAC; il s'appelle Audate, et fait effectivement cela. C'est un système sur ordinateur qui permet justement de déterminer un programme de réparation. Ils ont dans des endroits des centres physiques, mais ils ont également des gens qui vont sur les lieux au besoin.

M. Giasson: Parce que vous savez qu'il existait au Québec des assureurs qui réglaient très vite les tiers.

M. Gauvin: Les tiers ou les leurs.

M. Giasson: Les tiers. Je réclamais contre un autre assuré de telle compagnie. Son agent de réclamation arrivait, faisait le calcul et disait: Cela coûte tant, ton affaire. On te fait un chèque tout de suite. On pouvait aller jusqu'à signer le chèque, quittance-moi et bonjour. Après cela, les gens arrivaient. L'automobiliste qui avait réglé, qui avait quittancé s'en allait voir différents garages et il n'y en avait pas un seul qui voulait procéder à la réparation pour le prix accepté et quittancé.

M. Gauvin: Alors, cela...

M. Giasson: Cela a été pratique courante, vous savez cela.

M. Gauvin: C'est malheureux, je pense. Les gens sont mal traités...

M. Giasson: II ne faudrait pas répéter cette expérience avec les centres d'évaluation.

M. Gauvin: Remarquez bien que vous avez dit les tiers. Vous n'êtes pas capable dans le système actuel de vous prémunir contre cela, parce qu'en fait c'est toujours l'autre qui choisit cet assureur. C'est ce que j'ai dit ce matin. J'ai dit que, si un gars veut être malin, il choisit, en fait, le plus mauvais assureur pour les tiers et le meilleur assureur pour lui-même, parce que c'est toujours l'autre qui écope. Tandis que, dans un système d'assurance directe, votre assureur en question, il transige avec ses assurés. S'ils sont traités comme cela, quand arrivera le temps de renouveler leur police, ils vont dire au conseiller: La compagnie que tu m'as envoyée vient de loin, mais...

M. Giasson: D'accord, M. Gauvin, mais il ne faudrait pas que, lorsque l'évaluateur ou l'agent de réclamation, peu importe le nom, aura déterminé que cela coûte tant pour réparer le véhicule, cet automobiliste qui va être payé parson assureur à lui ait un déboursé personnel à ajouter parce qu'il n'y a pas un garage qui veut procéder à la réparation pour le prix convenu par l'évaluation ou le centre d'évaluation.

M. Gauvin: En fait, je comprends très bien votre point. Je voudrais vous signaler l'expérience en Suède...

M. Giasson: L'assuré, il va rebondir où? Chez le gars qui a vendu la police, c'est son seul recours à la campagne. Il n'a pas d'autre place où se diriger.

M. Gauvin: J'aimerais vous signaler qu'il existe des centres comme on en envisageait. Dans certains endroits, je vais vous nommer le Manitoba, par exemple, les garages acceptent complètement les évaluations qui y sont faites, tous les garages.

Il y a nécessairement un mécanisme, à un certain moment. Les garages disent: Vous ne nous en donnez pas assez pour faire telle chose, on veut un peu plus. Mais il y a des négociations qui se font. Au point de vue pratique, au tout début de l'instauration de tels systèmes, il y a des garages qui ne les acceptaient pas, parce qu'ils disaient qu'il n'y en avait pas assez, mais les problèmes se sont résolus rapidement. Quand vous avez votre autorisation de réparer, que ce soit, par exemple, en Suède ou que ce soit au Manitoba, en Saskatchewan — je ne connais pas la situation de "B.C." du tout — vous allez au garage de votre choix. Tous les garages, à toutes fins pratiques, acceptent l'évaluation et les gens n'ont pas à débourser. C'est l'expérience de centres qui existent, de systèmes comme celui préconisé, qui existent. Cela existe également dans certaines juridictions américaines. Il y a des modèles qui sont là, où on a réussi à le faire. Je ne peux pas voir, moi, pourquoi le Québec ne pourrait pas faire non seulement aussi bien que ce qui se fait ailleurs, mais même mieux.

M. Tremblay: Y aura-t-il obligation de la part du garagiste d'accepter les normes de la régie, si régie il y avait?

M. Gauvin: II va les négocier, mais, au point de vue pratique, si neuf garages sur dix les acceptent, l'autre garage va bien être obligé de les accepter ou il ne restera pas en affaires. Ce qui est arrivé, en fait, c'est que les mauvais garages qui faisaient de mauvaises réparations ont finalement cessé de faire affaires dans ce domaine. Les gens allaient dans les meilleurs garages. C'est un processus de négociation, effectivement, qui devrait s'instaurer entre, d'une part, ceux qui évaluent les dommages matériels et ceux qui font la réparation. Ils vont dire: Cela prend tant d'heures pour faire telle chose, cela vaut tant l'heure, les prix des pièces sont tels. A un certain moment et très rapidement — l'expérience du Manitoba l'a démontré — les garages acceptent très bien. Il y aura toujours des cas où il y a des choses qui ne sont pas apparentes. Les problèmes se résolvent.

M. Tremblay: Le courtier, en supposant qu'il est conseiller comme vous dites, selon ce qui est prévu au rapport, ne pourrait-il pas être intégré, moyennant, par exemple, 1% de plus au lieu de 5%, 6%, au système d'inspection? Le gars, comme il dit, qui est à 50 milles de Montmagny, qui appelle le conseiller...

M. Giasson: II a répondu à cela.

M. Tremblay: II a répondu, j'ai peut-être entendu, mais je n'ai pas compris.

M. Giasson: II dit que les centres d'évaluation vont se déplacer.

M. Gauvin: Ils vont se déplacer. Il n'y en aura pas besoin.

M. Tremblay: Non, mais est-ce que lui ne peut pas être... Vous parlez encore de fonctionnarisme, à ce moment.

M. Gauvin: Pardon?

M. Tremblay: Vous parlez de fonctionnaires.

M. Gauvin: Non!

M. Tremblay: Vous ne parlez pas de gars en affaires qui se déplacent.

M. Gauvin: Ce n'est pas une régie. C'est un organisme qui pourrait être commun à tous les assureurs, mais l'Etat dirait: Pour faire affaires au Québec...

M. Tremblay: Les agents de réclamation actuels.

M. Gauvin: Ils engageraient les agents de réclamation...

M. Tremblay: Ah bon! M. Gauvin: ...actuels.

M. Tremblay: Je pensais que vous vouliez dire que la régie aurait ses inspecteurs.

M. Gauvin: Ils engageraient des estimateurs et diraient: Maintenant, au Québec, toutes les réparations qui passent par le système d'assurance-automobile doivent être préalablement soumises à une évaluation de ces gens.

M. Tremblay: Ces gens, ce seraient, par exemple, les agents de réclamation actuels...

M. Gauvin: Ou les évaluateurs de dommages.

M. Tremblay: ...qui ont le personnel disponible, etc. Pardon?

M. Gauvin: Les évaluateurs de dommages, parce qu'on parle de dommages matériels.

M. Tremblay: Ah bon!

M. Gauvin: Mais de cela, il y en a partout effectivement.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: M. le Président, on me dit que le ministre doit partir dans quelques minutes. J'aurais eu encore quelques questions à poser à M. Gauvin, mais puisqu'on semble vouloir... Ce sont des questions qui ont déjà été discutées devant la commission. Disons que je veux remercier, au nom de l'Opposition, les membres de la commission Gauvin d'avoir accepté de venir devant la commission parlementaire aujourd'hui.

M. Tremblay: Quelle Opposition, officielle ou non officielle?

M. Roy: J'ai dit l'Opposition.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! A l'ordre!

M. Tremblay: Vous considérez-vous comme l'Opposition officielle?

M. Roy: Peut-être que la question a été posée, mais j'aimerais savoir, avant qu'on ajourne les travaux de la commission sine die, quelles sont les intentions du gouvernement, maintenant.

M. Tetley: Mes intentions, comme tout bon père de famille, sont honorables. M. Roy: Oui.

Législation

M. Tetley: Nous allons présenter la législation qui n'est pas évidemment une seule loi, parce que, pour adopter toutes les recommandations de M. Gauvin, cela prendrait plusieurs lois, dans plusieurs domaines, par plusieurs ministres. Donc, nous allons présenter à l'Assemblée nationale des lois pour étude et, à ce moment, nous allons adopter les lois ou nous y opposer.

M. Roy: Le ministre pourrait-il nous dire si les lois seront présentées durant la première partie de la session?

M. Tetley: Non. Je ne peux faire de promesse pour le conseil des ministres. J'ai déjà dit que nous avons travaillé en parallèle depuis novembre. Un comité a été formé, des gens nommés. M. le juge André Desjardins entre autres, est chargé de deux comités, un sur la sécurité routière et l'autre concernant l'assurance, son administration et toutes les questions soulevées par le comité Gauvin. Nous avons déjà adopté certaines choses depuis le dépôt du rapport Gauvin. Nous avons complètement changé le système de points de démérite. J'espère que cela sera encore modifié, incessamment et qu'il y aura d'autres changements d'ici quelque temps. Mais je ne peux faire de promesse au nom du conseil des ministres.

M. Roy: Je comprends, mais le ministre pourrait-il nous dire si on peut compter au moins que cela viendra durant l'année 1975?

M. Tetley: Je l'espère. Oui.

M. Roy: Autrement dit, en ce qui a trait au ministre lui-même...

M. Tetley: Je ne veux pas faire de promesse.

M. Roy: Ce que le ministre lui-même veut nous dire aujourd'hui, c'est qu'en ce qui concerne son ministère il est prêt à procéder pour 1975.

M. Tetley: Oui, à déposer la loi et j'espère que vous voterez pour la loi, mais cela peut être très dur.

M. Roy: Je ne me prononcerai pas sur la loi, je ne la connais pas.

M. Tetley: Etes-vous prêts à adopter toutes ces lois?

M. Roy: Nous sommes prêts à étudier la loi... M. Tetley: Ah!

M. Roy: ...à l'examiner et à faire les recommandations que nous croyons dans l'intérêt du public québécois, à la façon du ministre, mais, pour cela, il faut qu'il présente sa loi devant l'Assemblée nationale. Nous ne la connaissons pas. Le ministre a parlé des recommandations de la commission Gauvin tout à l'heure. Il a dit que cela prendrait beaucoup de lois. Le ministre a tenté de nous faire croire ou de nous dire qu'il y aurait quelques lois.

C'est donc dire que toutes les recommandations de la commission Gauvin ne seront pas nécessairement adoptées et appliquées. Alors, nous voulons voir dans quelle mesure. Ce que je veux savoir est ceci: Pouvons-nous espérer en 1975 avoir des résultats de ce côté?

M. Tetley: Oui. Je l'espère. C'est mon plan. Je ne suis qu'un ministre parmi plusieurs, un député dans un caucus et un citoyen parmi six millions.

M. Roy: Alors, si cela ne vient pas en 1975, on pourra dire: C'est le conseil des ministres qui a...

M. Tetley: Ah! C'est peut-être l'Opposition officielle et officieuse. On ne sait pas. Ce sont peut-être des pressions par des groupements...

M. Roy: Pardon? Vous voulez dire des pressions en coulisse?

M. Tetley: Non, de groupements hors du Parlement ou créées par des députés de l'Opposition. On ne sait jamais!

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le mot de la fin. Le ministre des Institutions financières. Compagnies et Coopératives.

M. Tetley: Oui?

M. Gauvin: J'aurais eu une dernière observation avant de quitter cette illustre salle.

M. Tetley: Certainement.

M. Gauvin: Au cours de la journée, à plusieurs

reprises, on a posé une question. J'ai répondu partiellement. J'aimerais maintenant peut-être apporter plus de détails.

On a demandé: Quel régime est le plus avantageux, donne plus? Je vous ai souligné, en fait, au cours de la journée, qu'il fallait mettre cela sous un dénominateur commun. J'aimerais déposer un document, non pas au nom du comité qui n'existe plus, mais ce sont quelques calculs que je me suis permis de faire à l'aide des renseignements disponibles. J'aimeraisvousdemanderde les considérer non pas comme étant absolument définitifs, parce qu'il y a des renseignements qui ne sont pas complets dans des mémoires qui ont été présentés. Je me suis permis de comparer cequ'aurait été, en 1974, le coût de différents régimes d'assurance-automobile, au Québec, selon qu'on aurait le régime actuel, le régime préconisé par la commission, le régime qui est connu sous le nom du Barreau et AutoBAC.

En fait, en 1974, d'après une estimation qui avait été faite dans le rapport, on parlait, au Québec, de $450 millions de primes. C'est passablement d'argent. Si on se réfère à l'analyse qui a été faite à la page 218 du rapport de la commission on se rend compte, effectivement, que ce que j'ai appelé, sur mon petit tableau, les frais divers, représentent 38.3% de la prime — cela comprend la mise en marché, la sélection des risques, les frais de règlement de sinistres et certains frais légaux — ou $172 millions. Le profit qu'on considère légitime des assureurs, 2.5%, représentait $11 millions. On sait très bien que c'est hypothétique. On sait bien, apparemment, qu'ils ne l'ont pas fait. D'ailleurs, ils ont augmenté les primes comme dans les provinces où il y a des monopoles étatiques. Finalement, le régime actuel laisse en indemnités au public 59.2% — ce sont les chiffres de la commission qui n'ont été mis en doute par personne, ici — pour donner aux victimes $267 millions. Ce sont, en fait, les fameux $0.60 par dollar qui sont retournés aux victimes.

En prenant les chiffres tels qu'ils sont publiés, tels qu'ils ont été déposés, sans les mettre le moindrement en doute, si on se réfère à la proposition de la commission, on se rend compte que le coût du régime de la commission, en 1974, aurait été de $354 millions pour les mêmes assurés. En plus de cela, il faudrait tenir compte, en fait, qu'il y a des gens qui ne sont pas assurés, mais on met tout sur la même base. Ce même régime, qu'on adit radical, mauvais, pas bon, aurait effectivement consacré 20% à l'administration ou $71 millions; les profits aux assureurs — nécessairement, écrivant moins de primes, il est tout à fait normal que leurs profits soient moindres — auraient été de $9 millions. On aurait retourné au public, aux bons Québécois, $274 millions ou 77.5% de la prime.

Je pense que, dans la comparaison, tout de suite, on se rend compte que, d'une part, on en a un qui coûte $450 millions et que l'autre coûte $354 millions. Comme je l'ai mentionné, sans mettre en doute les évaluations, j'ai pris effectivement le rapport du Barreau et l'évaluation qui vous a été soumise. Même si j'ai des réserves sur cette évaluation, elle a été déposée et je l'accepte telle quelle. On se rend compte, à toutes fins pratiques — et d'ailleurs le bâtonnier Robert l'a dit lui-même — que cela ne changerait rien. On parle de .9% de réduction, mais je pense qu'en fait c'est bien plus la situation actuelle. Donc, en 1974, le régime du Barreau, selon ses propres experts, aurait coûté $450 millions. Encore une fois, avec les chiffres qui ont été soumis, on se rend compte qu'il y aurait eu une réduction de frais, parce qu'il y a un peu moins de frais d'après leur évaluation, et qu'on aurait dépensé $157 millions en frais divers; seulement, les assureurs auraient pris $11 millions en profit et ils auraient remboursé au public $282 millions d'indemnités.

AutoBAC, grâce au papier qui a été déposé — et j'ai écrit ici "chiffres approximatifs" parce que je n'ai pas pu déchiffrer tout ce qui était là-dedans — prétend apporter une réduction de 10%. Cela devait s'appliquer strictement aux véhicules de touristes. On ne sait pas encore ce que cela ferait dans le cas des véhicules commerciaux. J'ai tenu pour acquis qu'on obtiendrait la même réduction.

A ce moment, effectivement, AutoBAC aurait donc coûté, l'année dernière, $405 millions au public québécois et, encore une fois, en démêlant les chiffres parce qu'ils ne sont pas présentés de cette façon, j'en suis venu à la conclusion qu'approximativement 33% de la prime, en vertu du système d'AutoBAC, serviraient en frais, pour $134 millions, 2 1/2% en profit... En fait, c'est $10 millions qui vont en profit, c'est une erreur, et 64 1/2% ou $261 millions qui iraient en indemnités.

Effectivement, nous sommes en face de quatre régimes: deux qui coûtent $450 millions, le régime actuel et le régime du Barreau; un qui coûte $405 millions, AutoBAC, et un qui coûte $354 millions, celui que nous avons préconisé.

Quand on regarde ces montants qui sont complètementdisproportionnés, on se rend compte qu'au niveau du régime actuel il n'est retourné au public que $267 millions, mais qu'il a demandé $450 millions de prime. Le régime du comité aurait retourné $274 millions aux victimes en n'exigeant que $354 millions de primes. Au Barreau, on aurait retourné $282 millions, toujours en demandant $450 millions de primes, et AutoBAC retournerait approximativement $261 millions en demandant $405 millions. Là, on pose la question, à savoir lequel est le plus généreux. Ma foi, il faut, comme on le faisait quand on faisait des additions de fractions, mettre un dénominateur commun et c'est ce que j'ai fait immédiatement après. J'ai dit: D'accord, le public québécois — quoique je le mets en doute — est prêt à établir un nouveau régime et à dépenser $450 millions, mais voyons donc ce que chacun de ces régimes ferait si on y mettait $450 millions et là on pourra dire lequel est le plus généreux pour les victimes.

Le régime actuel coûte déjà $450 millions. Il ne peut pas, en fait, en retourner plus.

Le régime du comité, si au lieu effectivement de coûter $354 millions, on lui infusait $450 millions, on se rend compte, tel que le démontre le tableau, qu'on pourrait payer en indemnités $349 millions au lieu de $274 millions. Quant au Barreau, il reste au même niveau, de son propre aveu. L'AutoBAC éga-

lement pourrait, en n'effectuant pas de réduction de primes, retourner au public, contre une prime de $450 millions, $290 millions d'indemnités. Comme je l'ai mentionné précédemment, cela a été fait très rapidement, simplement pour fins d'illustration.

Si on les compare tous les quatre, on se rend compte que le régime du comité paierait $82 millions de plus aux victimes pour une même somme de primes des assurés que le régime actuel. Le régime du Barreau ne paierait que $15 millions de plus aux victimes et AutoBAC, $23 millions. Je pense que la conclusion se tire d'elle-même; lequel des régimes est le plus avantageux? Et quand on vous a donné un exemple, à mon sens, qui est quasiment malhonnête d'un cas où on avait $15,000 contre $100 dans le régime du comité, moi, je réponds à ça qu'on va changer la situation de cette victime. On va lui donner les $82 millions de plus, juste à elle et, à ce moment-là, ça va être les $15,000 que le Barreau a prétendus contre $82 millions pour cette même victime.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le ministre des Institutions financières.

M. Tetley: Je vous remercie, messieurs de la commission, de votre participation, de votre travail. Je regrette de n'avoir pas reçu votre document avant les cinq dernières minutes. J'aurais préféré le recevoir ce matin mais on peut proposer, M. le Président, que ce soit déposé dans le journal des Débats.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Est-ce que le président accepte le document déposé par M. Gauvin?

M. Tetley: Par le ministre. (Voir annexe II)

M. Gauvin: Est-ce que je pourrais demander qu'il y ait quand même une note à l'effet que ce sont des chiffres qui ont été faits, que ce ne sont pas des chiffres approximatifs...

M. Tetley: Avec un astérisque.

M. Gauvin: ... et signaler la correction également?

M. Tetley: M. Gauvin, M. Rankin, Me Bouchard, Me Belleau, je vous remercie de votre présence ici. Je vous remercie d u travail q ue vous avez fait depuis presque quatre ans. La semaine dernière et cette semaine, un autre groupement est venu ici faire la preuve, devant une autre commission parlementaire, d'une autre proposition. Et je crois que vos réponses étaient beaucoup plus claires ce matin et cet après-midi que les réponses devant l'autre commission.

Je crois aussi que les travaux de la commission, aujourd'hui, ont eu une très grande valeur. La question primordiale était, je crois, soulevée par le député de Beauce-Sud et elle a été répétée par le député de Montmagny-L'Islet. Cette question des courtiers dans les régions rurales a été une question importante proposée à la commission avant cet après-midi.

Il y avait d'autres questions. La comparaison entre AutoBAC, le Barreau, le régime du comité et le régime actuel était très importante.

Je dois noter que si je n'ai pas fait de pressions auprès de vous, j'apprécie beaucoup la remarque du comité à ce sujet et que vous n'ayez pas fait pressions auprès du ministre. Souvent, les commissions et comités font des pressions auprès du gouvernement.

Vous étiez libres, ce qui est très important. Vous avez fixé, en effet, le mandat; je l'ai fixé, après vous avoir consultés. Vous avez fait le travail, vous avez obtenu certains délais raisonnables et vous avez fait un rapport très important. Nous sommes quatre ans avant la province d'Ontario et c'est quelqu'un de très important de l'Ontario qui m'avait expliqué cela.

Apparemment, notre rapport Gauvin est le rapport le plus avancé au monde. Je vous remercie au nom de tous les députés et de l'Opposition; je regrette l'absence de quelques-uns, mais je suis certain qu'ils vous remercient aussi.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Merci, messieurs. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 6)

COMMENTAIRES SUR LES MEMOIRES PRESENTES A LA COMMISSION PARLEMENTAIRE

I Introduction

J'ai eu le privilège d'assister aux audiences de la Commission Parlementaire. Avant de vous donner mes impressions sur ces réunions des deux derniers mois, je voudrais attirer votre attention sur le Journal des Débats de la première séance du 8 octobre. Je l'ai relu plusieurs fois et, revu dans une atmosphère plus calme, je me suis rendu compte que la plupart des questions posées par les députés étaient très pertinentes mais que parfois elles se répétaient lors des séances subséquentes. Alors, je suggère qu'il serait peut-être valable de se référer aux réponses données à cette occasion par monsieur Gauvin et les autres auteurs du Rapport. Je me suis également aperçu que plusieurs questions n'avaient reçu que des réponses partielles ou incomplètes et je donnerai, dans la deuxième partie du présent texte, une liste de certaines de ces questions.

Je veux vous faire part de mes réactions générales, tout d'abord, avant de traiter des divers problèmes soulevés par les mémoires et lors des discussions qui ont suivi leur présentation.

Premièrement, j'étais très surpris de constater qu'après deux mois de critiques fusant de toute part, personne jusqu'à maintenant n'a réussi à déceler de véritables lacunes dans les principes émis dans le Rapport. Bien entendu, les témoignages ont démontré qu'il y a bien des gens qui ne sont pas d'accord avec les recommandations du Rapport, mais ils n'ont pas réussi à trouver les erreurs de grande portée dans le Rapport tel que déposé. Ceci ne signifie pas que le Rapport est parfait. Loin de là! Si j'avais à le refaire demain, il y a beaucoup de précisions que j'y apporterais, mais seulement quatre changements, n'impliquant cependant pas les questions de fond. Le Rapport, tel que présenté, est donc solide. Néanmoins, il serait peut-être intéressant pour les membres de la Commission parlementaire de savoir quels seraient ces quatre changements et de connaître les motifs de ma prise de position. Ils traitent d'une définition plus détaillée de "l'incapacité" dans le plan d'indemnisation, de l'élargissement des modalités de l'indemnité minime, d'une modification dans la façon de traiter le financement des primes et, finalement, j'aurais ajouté une autre modalité dans les options A et B du plan de couverture pour les dommages matériels pour éviter une source de confusion pour l'assuré dans les juridictions où l'on trouve des systèmes identiques. Je serais heureux de les expliquer si c'est votre désir.

Ma deuxième réaction était de voir le contraste frappant entre les attitudes prises dans les mémoires et les objectifs donnés au Comité Gauvin par l'arrêté en conseil déterminant son mandat. Nous avons visé les intérêts des victimes et des assurés qui, en effet, chevauchent. Ceci se résumait à la page 10 de l'Introduction du Rapport: "Les études du Comité ont été entreprises et menées selon l'objectif qui lui a été fixé: l'indemnisation la plus complète possible des victimes des accidents d'automobile selon un système efficace et peu coûteux." Plusieurs députés, en posant les questions aux auteurs des mémoires, ont souligné ce même aspect du problème, souvent sous une forme de rappel à l'ordre. Toutefois, ceci mérite d'être répété parce que très peu de mémoires soumis à la Commission parlementaire ont suivi cette logique. En effet, sauf dans le cas de la famille Tansey et des organismes intéressés à la sécurité routière, les victimes étaient toujours reléguées à l'arrière-plan. C'est une source de beaucoup de malentendus, mésententes et distorsions lesquels ont surgi pendant les discussions des deux derniers mois. A titre d'exemple, je cite les mémoires de certaines des parties les plus touchées par les recommandations du Rapport: d'abord, le BAC et les compagnies d'assurance. Leur objectif est plutôt une réduction des primes pour apaiser les critiques dirigées contre le système actuel; les avocats veulent surtout la rétention du droit de poursuite; la CSN vise l'étatisation à l'exclusion de toute autre considération; les courtiers, qui veulent le statu quo.

Ainsi, avec tant d'objectifs différents, il n'est pas étonnant qu'il y ait des différences dans les mesures proposées.

Troisièmement, j'étais obligé, étant donné tant de fausses interprétations relativement aux points clés, d'admettre que le Rapport est très dense, difficile à lire et à comprendre. Je cite certains points très importants du Rapport tels que: les principes derrière le choix des options pour le plan d'indemnisation, les raisons pour l'abolition complète du droit de poursuite, l'intégration des indemnités, les propositions de réforme de l'administration et spécialement ceux touchant le rôle du courtier. J'espère être capable, avec l'aide de mes collègues, d'apporter des précisions relativement à ces points.

Ma quatrième réaction était de percevoir l'absence d'une attitude constructive dans les mémoires soumis par quelques organismes. C'est évident que certaines recommandations du Rapport ne peuvent pas plaire aux intéressés. Cela est tout à fait normal. Mais essayer de tout détruire dans le Rapport, sauf peut-être pour la fameuse section sur la sécurité routière, m'apparaît comme une tactique douteuse. Ainsi, la plupart des mémoires ont rejeté le plan d'indemnisation proposé par le Comité Gauvin sans vraiment examiner les principes impliqués.

II Questions soulevées pendant la première séance du 8 octobre

Page 6675: M. Picotte: "avez-vous songé à la possibilité d'une assurance obligatoire pour tout conducteur?" L'on trouve la réponse en se référant à la page 314 du Rapport, mais on peut traiter du sujet plus amplement étant donné l'intérêt général pour le sujet.

Pages 6677 et 6693: M. Giasson: "Est-ce que vous voyez très bien l'existence d'une compagnie d'Etat à côté des compagnies privées...?" La réponse était: "si vous pouvez, en effet, établir un régime de concurrence pur sans ce mécanisme-là, il ne sert effectivement pas à grand chose." Aussi, dans ce cas, on peut expliquer la décision du Comité en plus de détails.

Page 6677: M. Léger: "...l'impact négatif du système "no fault" sur le comportement des automobilistes". La réponse était reportée jusqu'à ce que le Barreau ait déposé son mémoire.

Pages 6690 et 6691: M. Roy: Le député de Beauce-Sud a voulu les données historiques sur l'évolution des primes et les frais administratifs. Ces données n'étaient pas incluses dans le Rapport mais peuvent être fournies avec plaisir, en autant qu'elles sont disponibles, s'il nous spécifie les éléments manquant qu'il désire avoir.

Page 6692: M. Tetley: "Les courtiers au Manitoba (et en Saskatchewan) combien sont-ils payés?" J'ai moi-même répondu que je n'avais pas les chiffres en main mais que je les fournirais. (En effet, j'ai omis de le faire mais je suis maintenant prêt à fournir cette information).

III Principales questions soulevées pendant les séances subséquentes

de la commission parlementaire

1. Concernant la responsabilité comme principe d'indemnisation

Je vais laisser à mes collègues qui sont mieux qualifiés dans cette matière, la tâche d'expliquer les détails de ces questions, mais j'en fais mention ici pour que mes remarques couvrent tout aspect important du Rapport. Les points relevés dans le Rapport qui étaient, à mon avis, souvent mal compris ou ignorés sont les suivants: a)le fait qu'on peut s'assurer contre la responsabilité a comme effet d'annuler son aspect dissuasif; b)si on admet le "no fault" partiel, on est obligé logiquement de laisser tomber tous les arguments voulant que le système de responsabilité est dissuasif. Par exemple, on ne peut pas avoir un aspect dissuasif qui entre en jeu quand l'automobiliste réalise que sa conduite risque d'hospitaliser sa victime pour une période de sept cent trente-et-un (731) jours au lieu de sept cent trente (730). c)la tarification sur la base du dossier de conduite ne vise nullement à pénaliser les personnes ayant eu un accident. Elle vise seulement à corriger une erreur dans le classement des risques. La seule raison pour laquelle ces ajustements de la prime ne sont pas faits rétroactivement est qu'il n'y a pas de moyen pratique de le faire. Je crois que toute la question de tarification sur le dossier de conduite mérite d'être expliqué si les députés le veulent. 2. Réforme du régime actuel — chapitre III — recommandations d'un nouveau régime

II me paraît que les points suivants concernant l'indemnisation des blessures corporelles ne sont pas pleinement appréciés. 1.On ne fait pas suffisamment la distinction entre le plan d'indemnisation proposé et le principe de l'abolition complète du droit de poursuite. Bien que ce dernier principe peut être adopté seulement quand un plan accorde une indemnisation adéquate aux victimes, les principes incorporés dans le plan proposé peuvent être mis en application en retenant le droit de poursuite, complet ou partiel, mais à un coût qui risque d'être très élevé. Bien entendu, en retenant le droit de poursuite, on ignorait les arguments de logique pour le faire disparaître. 2.L'objectif d'une évaluation d'un plan n'est pas de permettre une comparaison entre le coût global d'un plan avec celui d'un autre. Les différents plans doivent être comparés en fonction de la qualité des principes y inclus. Une fois d'accord sur les principes, on peut fixer les barèmes des indemnités pour arriver à un coût global visé. (Le député de Taschereau a déjà soulevé cette différence entre les principes et les barèmes pendant une des séances de la Commission Parlementaire). 3. L'évaluation des différentes options de principe (en contraste avec l'évaluation globale) est, par contre, essentiel pour permettre un jugement. Par exemple, un délai de sept jours, une rente minime, l'indemnisation des conducteurs trouvés responsables et de leurs dépendants, l'indemnisation des dépendants des décédés sur la base d'une rente, etc...

Ainsi, on peut discerner que tout argument traitant du coût global du Plan Gauvin, en comparaison avec le Plan Autobac ou le Plan du Barreau risque de partir sur une fausse piste.

En ce qui concerne les dommages matériels, je vous réfère aux remarques de monsieur Moreau du BAC devant la Commission Parlementaire, (page 7). "les régimes proposés par le Comité d'étude et par le BAC sont sensiblement les mêmes... Il est donc évident qu'une étude faite conjointement par les spécialistes du Gouvernement et les assureurs pourrait rapidement conduire à un compromis idéal pour le consommateur".

Concernant les principes de tarification dans un système d'indemnisation sans égard à la responsabilité, le fait qu'il n'existe que très peu de littérature sur ce sujet peut expliquer les malentendus qui circulent autour de la question. Il y a des raisons très particulières pour ce manque d'études sur la tarification, principalement les structures rigides de la tarification au Massachusetts et en Floride, les deux juridictions où on a une expérience de tels systèmes. Je pourrais, si c'est votre désir, essayer d'expliciter quelques principes de base, mais je voudrais attirer votre attention sur un aspect très important. L'indemnisation sans égard à la faute permet une tarification tenant pleinement compte des différentes marques et dessins de voitures, leur susceptibilité d'avoir des accidents et le coût relatif des réparations. Ceci s'applique aux dommages matériels, mais il est à souhaiter que l'on puisse arriver à quelque chose de semblable dans le cas des blessures corporelles. Dans la situation actuelle, il nous est impossible de recueillir des données valables dû à la faible fréquence par rapport à chaque modèle d'automobile. 3. L'administration du régime 1.La recommandation numéro 53 concernant le rôle du courtier et les recommandations numéros 50, 51, 52, 54, 55 et 56 qui touchent le même sujet sont très mal corn prises. Les objectifs de ces recommandations sont d'assurer la concurrence parmi les compagnies d'assurance et d'éliminer les frais inutiles pour les assurés. Les moyens proposés sont l'élimination du dédoublement du travail entre les courtiers et les assureurs, et d'aider dans l'élimination de la sélection des risques. Le revenu brut des courtiers serait ainsi réduit, mais leurs dépenses seraient aussi réduites dans la même proportion. Le revenu net demeurerait donc le même.

La recommandation à l'effet que les courtiers n'interviennent plus dans les processus de règlement des sinistres a été attaqué férocement, mais il faut envisager le rôle du courtier dans le système préconisé et non pas dans le système actuel. Dans un système de réclamations par téléphone, des centres d'évaluation pour dommages matériels et d'assurance directe, l'assuré traiterait toujours avec sa propre compagnie d'assurance. Le rôle du courtier, dans les processus de règlement des sinistres serait radicalement changé. La plupart de ces changements existent déjà dans quelques juridictions en ce qui concerne les dommages matériels. Il est possible que le courtier demeure comme conseiller en sinistres toutefois dans un nombre de cas très restreints.

La limite globale des honoraires des courtiers de 5% de la prime était, évidemment, un estimé, mais basé sur une étude assez détaillée de ses fonctions, et fondé aussi sur l'expérience récente au Manitoba. 2. Les recommandations concernant l'élimination de la "sélection des risques" commence à être comprises. (Voir les questions posées par les députés à la séance du 19 novembre — Lloyds). 3. La raison de la recommandation numéro 59 est de donner une idée des pouvoirs qui seront nécessaires, pendant une période de transition, pour effectuer les changements. Certains de ces pouvoirs resteront, du point de vue pratique, afin d'inciter les intéressés à coopérer.

Dans ce sens, il faut comprendre que le Rapport Gauvin adopte le principe de la concurrence comme forme du contrôle de I'assurance-automobile (ex. "open rating", publicité sur les taux des dépenses administratives etc...) Ainsi, c'est un principe qu'on trouve à New-York mais pas dans certains autres états américains, tels que le Massachusetts et la Floride. Il faut apprécier les avantages de ce principe: beaucoup moins coûteux à administrer; le gouvernement ne porte pas le fardeau de responsabilité pour les hausses de primes ou les autres critiques de la tarification, etc.. 4.Concernant la recommandation numéro 57, il existe une confusion entre "centres d'évaluation" comme proposé et "centres de réclamations" tel qu'ils existent en Saskatchewan, au Manitoba et en Colombie-Britannique. Ces derniers ne sont pas si efficaces que les méthodes suggérées dans le Rapport. 5. Page 321 — Intégration des indemnités.

Les implications de la recommandation à l'effet que les prestations de l'assurance-automobile aient priorité, sauf pour les exemptions spécifiques, ne paraissent pas être appréciées. Ceci éliminerait une source de gaspillage que l'assuré aujourd'hui est obligé de supporter s'il veut être adéquatement couvert pour le risque d'être tué dans un accident d'automobile. Il y a actuellement un problème pareil dans l'assurance contre l'incapacité. 6. Il est intéressant de constater que, à la séance de la Commission Parlementaire du 15 octobre monsieur Moreau, du BAC, en réponse à une question de monsieur Léger, page 6833, a laissé entrevoir que l'industrie d'assurance est capable d'entreprendre les réformes proposées. (Voir nos 39 à 59). Monsieur Saint-Germain a apporté des réserves à l'effet qu'il croit que certaines de ces recommandations ne seront pas dans les intérêts des assurés, mais il ne les a pas précisées. 7. Les commentaires faits à la page 242, pour ce qui est du rapport primes capital, méritent considération par la Commission Parlementaire parce qu'il y a une possibilité d'une réduction du coût du capital pour les assurés. 8. Le rapport des actuaires Hébert, Le Houillier et celui de Gilles Blondeau sur le coût du régime proposé nécessite une réponse. De l'avis de monsieur Gauvin et moi-même, les critiques formulées reposent sur les aspects mal compris et elles ne sont pas valables. 9.Il appert que les implications de la recommandation numéro 50 sont presque universellement mal comprises. Par exemple, le droit pour l'assuré de traiter directement avec son assureur ne correspond pas à la situation actuelle vis-à-vis les compagnies qu'on appelle les "direct sellers". A titre d'exemple, voir le témoignage de la compagnie Allstate qui s'oppose fortement à une telle innovation.

IV Commentaires sur certains mémoires soumis à la Commission Parlementaire 1. Les victimes

A la page 6635 du journal des Débats, monsieur Gauvin a exprimé le voeu "que cette commission pourra entendre non seulement les parties directement intéressées dans l'administration des risques, mais qu'elle aura également l'occasion d'entendre les victimes elles-mêmes donner, en fait, l'explication du traitement qu'elles reçoivent". Jusqu'à présent, la Commission Parlementaire a entendu un seul mémoire de la part des victimes, celui de la famille Tansey. Les députés ont fait allusion au grand nombre de lettres reçues de leurs électeurs concernant les problèmes des victimes des accidents d'automobile sous le système actuel. Dans les circonstances, ces lettres doivent prendre la place des autres mémoires. En effet, les plus durement frappés par le système actuel sont les cas de décès et d'invalidité à long terme et permanente. Je suis persuadé que les députés vont tenir compte d u fait que ces victimes ont peu de moyens pour présenter leurs vues. 2. Les compagnies d'assurance

Personnellement, j'étais déçu du mémoire du BAC. Je considère que les remarques de monsieur Moreau lors de la présentation du mémoire ont beaucoup apporté à la solution du problème. A la page 11 de l'Introduction du rapport, le comité a rejeté le plan du BAC, pour des motifs que nous croyons avoir déjà clairement explicité. Le mémoire, en effet, semble ignorer le rapport Gauvin.

Les grosses différences dans les plans d'indemnisation du comité Gauvin et celui du BAC portent sur les indemnités accordées aux victimes dans les catégories suivantes:

Les cas de décès ou d'invalidité sérieuse, incluant les dépendants de ces victimes;

Les cas de ceux qui sont trouvés responsables sous le système actuel.

Le plan du comité Gauvin vise à les indemniser adéquatement, tandis que le BAC n'apporterait aucun changement dans les cas de décès et des victimes trouvées responsables, et seulement une légère amélioration dans le cas d'incapacité sérieuse.

L'autre lacune dans leur mémoire concerne la réduction des frais administratifs. Ils n'offrent aucune alternative aux recommandations du comité. 3. Les avocats

Les divers mémoires des avocats n'ont pas réussi à résoudre les problèmes exposés dans le rapport du comité. Le Barreau a fait un effort dans ce sens, mais leurs propositions laissent de côté les très graves questions de délais, de réadaptation des victimes et la sous-indemnisation des grosses pertes.

Dans les modifications qu'on peut apporter au système actuel, le problème fondamental est que, le plus qu'on décrète les règles de jeu pour les juges, le plus on approche un système d'assurance de protection individuelle où l'expérience démontre qu'on a très peu besoin de recourir aux tribunaux. 4. Les courtiers

Ces mémoires n'ont pas tenu compte des changements radicaux dans leur rôle qui résulteront des recommandations du comité, tant sur le niveau du plan d'indemnisation que sur celui de l'administration des compagnies d'assurance.

Leur attitude de rejet complet du rapport les a amenés à un paradoxe assez drôle, mais toutefois embarrassant pour le comité. Nous avons déclaré, à la page 359: "Quelles que soient les modifications apportées (c'est-à-dire à la mise en marché), les courtiers demeureront le principal réseau de distribution de l'assurance automobile." Dans leur témoignage devant la Commission Parlementaire, les courtiers se disent néanmoins incapables de porter un jugement sur le plan d'indemnisation proposé dans le rapport. Je comprends leur dilemme mais je crois qu'ils auraient dû nuancer davantage leurs remarques. Après tout, le comité les prône comme conseillers pour l'assuré, surtout sur la question des plans d'indemnisation. Il me semble qu'ils devraient admettre que la protection offerte par le plan proposé dans le rapport Gauvin est de beaucoup supérieure à celle existante, ou encore aux autres plans soumis à la Commission Parlementaire, sous la réserve, s'ils veulent la faire, d'une confirmation de l'évaluation. 5. La confédération des syndicats nationaux

Le mémoire de la CSN, comme je l'ai déjà souligné, traite presque exclusivement de l'étatisation. Le rapport Gauvin donne déjà une réponse détaillée à la position prise par la CSN. Je trouve drôle leur remarque à l'effet que nous n'aurions pas pris en considération le revenu sur les placements. En effet, on peut appliquer ces revenus de deux façons, soit contre les frais d'administration, soit contre les coûts de capital. Nous les avons traités de cette dernière façon (aux pages 235, 237 et 367 à 369), mais n'importe laquelle des deux méthodes étant utilisée, le résultat pour l'assuré restait le même. Si les députés le désirent, je peux leur démontrer, en retenant les chiffres donnés par le tableau, en page 20du mémoire de la CSN, que les

assurés en Saskatchewan et à Québec ont payé approximativement le même prix pour le coût du capital pendant les années récentes.

Beaucoup plus important que la question de l'étatisation est le fait que le plan d'indemnisation proposé par la CSN est très sensiblement inférieur à celui du comité Gauvin. Un assuré, aujourd'hui, est mieux protégé en Ontario, à New York, au Michigan et, avant l'étatisation, en Colombie-Britannique, qu'il ne l'est en Saskatchewan. Si on ajoute le fait que leur système de tarification est désuet et plein d'anomalies, on a de la difficulté à comprendre l'obsession de la CSN concernant le système de la Saskatchewan. Je crois qu'il est possible d'admirer l'efficacité de leur administration, tout en faisant des réserves sur les autres aspects de leur système.

Référer à la version PDF page B-653

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