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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mardi 30 mai 1972 - Vol. 12 N° 40

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Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la Justice

Etude des crédits

Séance du mardi 30 mai 1972

(Seize heures dix-huit minutes)

Préliminaires

M. PICARD (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Nous commençons l'étude des crédits du ministère de la Justice mais, auparavant, j'aimerais avoir le consentement des membres de la commission pour certains changements dans la représentation au sein de la commission des différents partis politiques. M. Harvey (Chauveau) remplace M. Bacon, M. Carpentier remplace M. Springate, M. Shanks remplace M. Tetley et ce pour la présente séance.

J'aimerais être relevé de l'obligation d'appliquer l'article 153, pour autant que les crédits sont concernés; cet article prévoit que seuls les députés membres de la commission ont droit de parole. Dans les autres commissions, on a toujours permis à tous les députés présents d'adresser la parole à l'occasion de l'étude des crédits.

M. HARDY: Entièrement d'accord. M. LE PRESIDENT: D'accord. M. PAUL: Agrée, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je demanderais au ministre de la Justice, avant de nous faire l'exposé de sa politique, de nous présenter les principaux hauts fonctionnaires qui l'accompagnent.

M. CHOQUETTE: J'ai ici, à ma droite, le sous-ministre, M. Robert Normand; le directeur général de la Sûreté, M. Maurice Saint-Pierre; le sous-ministre associé aux affaires civiles, M. André Desjardins; le sous-ministre associé aux affaires criminelles, M. Gérald Boisvert; le sous-ministre associé à l'administration, M. Camille Blier; le directeur général de la probation et des établissements de détention, un ami de trois personnes bien connues, M. Maurice Gauthier; M. Dorion, directeur général des greffes; le juge Ross, président de la Régie des loyers; Me Jean Alarie, directeur général du secrétariat, c'est-à-dire des bureaux d'enregistrement; M. Noël, directeur du service financier; M. Arsenault, de la Sûreté du Québec; M. Beaulieu, directeur du personnel au ministère de la Justice; M. Guy Ethier, de la Sûreté du Québec; M. Lemelin, directeur du service administratif; M. François Gendron, de mon cabinet, et Paul Rolland.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, je demanderais aux membres de la commission de nommer un rapporteur. Me permettez-vous de suggérer M. Carpentier, le député de Laviolette? Agrée.

M. BURNS: On peut débattre cela.

M. PAUL: C'est beaucoup de responsabilités, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je lui ai fait signe tantôt et il a semblé d'accord.

M. PAUL: Quant à moi, je lui fais confiance pour ça. Vous renoncez à votre compétence, M. le député des Iles?

M. BURNS: Le député des Iles de la Madeleine est en minorité ici.

Politique générale du ministère

M. CHOQUETTE: M. le Président, au moment d'aborder les crédits du ministère de la Justice, je pense qu'il convient que je situe l'action du ministère de la Justice dans le temps, tenant compte de ce qui a été réalisé l'année dernière et indiquant l'orientation que j'entends donner au ministère pour l'année prochaine ainsi que les diverses dimensions de l'action du ministère, c'est-à-dire tous les aspects de la vie sociale dans lesquels son action a un impact.

Je diviserai donc mon exposé en deux parties. Je tenterai, dans une première partie, d'exposer aux membres de la commission la politique générale que j'entends poursuivre au cours de l'année prochaine dans les diverses phases de l'action du ministère de la Justice tenant compte à la fois du passé et de l'avenir, comme je le disais tout à l'heure, et, dans une deuxième partie, d'exposer les grandes lignes des moyens financiers que nous entendons mettre en oeuvre pour réaliser ce programme de politique générale.

Quant à la politique générale du ministère de la Justice, je voudrais l'aborder sous divers titres. Le premier titre qu'il me semble important de mentionner dès le début de cet exposé est celui du maintien de l'ordre public et de la paix au Québec. Il me semble qu'il s'agit là non seulement d'une responsabilité essentielle et primordiale du ministère de la Justice, mais que les événements récents que nous avons connus m'obligent à dégager dès immédiatement ce devoir premier du ministère de la Justice de voir au maintien de l'ordre et de la paix publics.

Il me semble que c'est la fonction essentielle d'un Etat d'assurer la paix et l'ordre publics. Si un Etat n'assure pas cela à la population qu'il est chargé de protéger, tout le reste n'est que secondaire par rapport à ce devoir essentiel. Ceci est d'autant plus vrai dans une période de contestation comme celle que traverse le Québec depuis quelques années.

Je suis donc parfaitement conscient du fait qu'il s'agit là d'un des devoirs fondamentaux du

ministère de la Justice pour l'année qui va venir, et peut-être pour les années qui vont venir, d'assurer, en toute circonstance, que l'ordre public et la paix sociale soient maintenus. J'insiste donc sur cet aspect dès le début de mes observations.

A l'intérieur de ce cadre du maintien de la paix et de l'ordre, il me semble qu'il me faut insister sur des valeurs qui ont peut-être été oubliées, négligées ou écartées dans les dernières années, c'est-à-dire celles du respect de l'autorité de l'Etat et du respect de l'autorité des tribunaux. Ces valeurs, on a peut-être considéré, dans certains milieux et même dans plusieurs milieux, depuis quelques années, qu'on pouvait en faire abstraction.

A mon sens, les événements que nous avons traversés récemment nous obligent à remettre en lumière l'impératif fondamental qu'il y a pour toute société de maintenir l'autorité de l'Etat et celle des tribunaux. C'est à ces conditions que nous pourrons assurer un minimum d'ordre et de paix qui seront les gages de la prospérité et du progrès de la société québécoise. Sans assurer que cette autorité de l'Etat et cette autorité des tribunaux, que je ne voudrais voir s'exercer en aucune circonstance avec brutalité, puissent s'exercer pleinement et être ressenties dans tous les milieux sociaux, il est impensable et, à mon sens, illusoire de songer à promettre ou à faire croire au peuple que l'on puisse assurer son progrès et sa prospérité.

Je dis donc, M. le Président, que c'est là un des domaines de l'activité du ministère auquel j'entends porter une attention toute particulière au cours de l'année en cours.

Plus particulièrement en rapport avec les événements récents que nous avons connus, j'ai demandé à mes fonctionnaires de préparer un dossier que j'intitule "dossier intimidation". Ce sera pour relever les épisodes de violence, d'intimidation, de chantage que nous avons connus au Québec depuis quelques mois. Ce dossier sera déposé devant le public, dans une instance qui sera choisie, en temps et lieu, pour qu'il soit saisi des manoeuvres et des actions qui ont été perpétrées dans certains endroits du territoire du Québec et dans certains milieux du Québec et qui visaient à intimider, à faire chanter et à violenter la population.

Je suis heureux de l'issue de la période difficile que nous avons traversée, parce que, malgré tout, nous l'avons traversée sans incident majeur, sans violence extrême. Nous avons réussi, je crois, dans une période qui offrait un potentiel explosif assez considérable, on l'admettra, à maintenir quand même un ordre suffisant, dans des circonstances où des groupes importants de personnes étaient impliquées et devant des forces policières, en somme, pas particulièrement nombreuses. Nous avons réussi à le faire à travers certaines péripéties judiciaires, législatives et parlementaires que nous connaissons, avec la force publique dont nous disposions, mais également avec le concours — il faut l'admettre — de la population dans son ensemble qui a révélé, comme le gouvernement, un calme qui a facilité la tâche des autorités.

Mais, comme ministre de la Justice, je me dois de souligner et d'indiquer que des événements comme ceux que nous avons traversés étaient remplis de possibilités de catastrophes et même de cataclysmes. Si nous avons réussi à éviter tout cela, c'est sans doute dû aux qualités des uns et des autres, mais c'est contre certaines forces révolutionnaires qui sont à l'oeuvre dans notre société, n'en déplaise au sourire de certains députés qui sont autour de cette table.

J'ajouterai, M. le Président, non seulement certaines forces révolutionnaires, mais certains groupes de gangsters qui ont réussi à s'implanter dans des mouvements syndicaux légitimes et à détourner l'action normale et légale des travailleurs syndiqués. Je le dis franchement et ouvertement, M. le Président, parce que mon plus grand désir, c'est que le mouvement syndical fasse le ménage de sa propre maison et élimine ces éléments indésirables, qui sont sans doute minoritaires, je l'admets, mais qui, par leur action concertée, sont susceptibles d'entrafner des catastrophes sur le plan social que le ministre de la Justice ne permettra en aucune circonstance.

Par conséquent, je n'ai pas l'intention de laisser là les événements que nous avons connus et de dire que c'est un incident clos. L'incident n'est pas clos. L'incident sera étudié sous les aspects qu'il importe, au point de vue du maintien de l'ordre public et ceci, non pas dans un esprit vengeur ou de vindicte mais pour éviter au Québec une nouvelle aventure dans d'autres circonstances, plus tard, qui pourrait avoir des conséquences plus graves pour la société québécoise.

M. le Président, je suis donc, je pense, justifié, compte tenu de l'étendue des désordres que nous avons connus, de dire qu'à mon sens, aujourd'hui, dans le Québec, il s'agit là d'une des priorités essentielles du ministère de la justice et du gouvernement que de maintenir l'ordre public et la paix, je le répète, comme je le disais tout à l'heure, sans un exercice brutal de l'autorité mais toujours avec compréhension, et j'ajouterai avec fermeté.

Je voudrais, M. le Président, sur ce chapitre toujours, insister sur un aspect qui me parait sous-jacent au problème que je suis à examiner, celui du maintien de l'ordre public. Il est malheureux de constater que, dans la société québécoise actuelle, il y ait un tel désordre dans les idées, un désordre dans les idées à tous les niveaux de la société et même parmi ceux qui se targuent d'être les plus évolués, les plus instruits, ceux qui ont reçu une formation universitaire, ceux, en somme, à qui la société a donné le maximum de ses possibilités etc. Dans ces milieux, on constate un désordre général inapte à comprendre le fonctionnement normal d'un Etat, d'une société.

Je n'ai qu'à écouter certains intellectuels, entre autres, qui sont invités à la Société Radio-Canada, qui soutiennent des théories plus ou moins vagues, plus ou moins brumeuses, plus ou moins fondées et qui font passer ça auprès du peuple comme des valeurs fondamentales, alors qu'en réalité je crois qu'il faut revenir à l'essentiel, c'est-à-dire au respect de l'Etat, au respect des tribunaux, au respect des instances et des institutions sociales organisées, en place.

Ceci, je ne le dis pas pour écarter la critique à l'égard de ces instances de la société, mais pour dire qu'il est temps que le pendule revienne vers le centre. Cela fait assez longtemps qu'on s'en va vers la gauche à l'heure actuelle pour qu'on revienne à l'essentiel du fonctionnement d'une société. Récemment, au cours de la crise que nous avons connue, quand je voyais certains intellectuels proposer diverses solutions au problème et ne pas envisager les plus claires et les plus élémentaires, soit, que l'autorité publique, par ses institutions, devait s'affirmer, je me disais: Ces gens-là vivent en dehors du monde ordinaire. Mais la population a compris, et ceci est un grand réconfort pour le ministre de la Justice. Dans tous les milieux que j'ai fréquentés à part les quelques esprits plus ou moins égarés que je décrivais tout à l'heure l'action gouvernementale a été approuvée. Et ceci, à mon sens, nous en dit long sur le fait que notre société est encore saine et que la situation est loin d'être désespérée.

J'aborde maintenant une autre dimension importante de l'action du ministère de la Justice. C'est son action contre la criminalité sous toutes ses formes et à l'égard de certaines formes en particulier. Je suis heureux de constater que, depuis un certain nombre de mois, nous avons assisté à la disparition, sinon à la suppression, du terrorisme politique. Je ne me pose pas en prophète pour annoncer ce qui pourra ou ne pourra pas se produire, mais je dois quand même prendre acte de ce que, depuis une période de 5 à 6 mois, nous avons peu d'incidents terroristes à déplorer.

Je pense, à ce sujet, que le ministère devra continuer à exercer sa vigilance, qu'il ne devra pas relâcher sa surveillance et qu'il devra se montrer observateur et vigilant de façon à éviter toute recrudescence dans ce domaine.

Cela est sans doute vrai, mais je pense que l'action décisive et ferme que nous avons adoptée il y a plus d'un an, dans ce domaine-là, nous en avons récolté des fruits par la disparition du terrorisme, au moins dans la période où je parle. Cela nous montre qu'une action ferme et juste à la fois est susceptible d'entraîner des effets sur le plan de certaines formes de la criminalité.

J'ai donc l'intention, M. le Président, de continuer â poursuivre l'action du ministère de la Justice comme elle a été entreprise dans ce domaine-là. Dans le domaine du crime organisé, domaine qui n'a pas échappé à l'attention du ministère de la Justice, je suis heureux de confirmer certaines déclarations que j'ai déjà faites et d'annoncer à cette commission que nous avons mis sur pied une équipe extrêmement forte au sein du ministère de la Justice, composée de procureurs de la couronne d'expérience qui ont ma confiance entière, composée de policiers de la Sûreté du Québec et de la police de la Communauté urbaine de Montréal. C'est un groupe d'une cinquantaine d'hommes, en plus du personnel de bureau requis, auquel viendra s'adjoindre un certain nombre de policiers de la Gendarmerie royale du Canada, qui a accepté de collaborer avec nous dans l'action que nous entreprenons contre le crime organisé.

M. le Président, je ne voudrais pas à ce stade dire dans les moindres détails dans quelle phase de l'action du crime organisé nous avons l'intention d'oeuvrer prioritairement, mais je voulais, en vous indiquant l'étendue de l'opération que nous envisageons, vous en démontrer le sérieux et vous indiquer que nous avions la collaboration de toutes les forces policières. Nous avons également l'appui des meilleurs éléments parmi les procureurs de la couronne pour mener à bien cette lutte contre le crime organisé.

Finalement, M. le Président, dans le domaine de la criminalité en général, j'ai publié au mois de juillet l'année dernière un livre blanc sous le titre La police et la sécurité des citoyens.

Ce livre blanc a déjà commencé à être implanté dans certaines phases de l'action policière au Québec. J'entrevois, non pas pour la session dans laquelle nous sommes plongés à l'heure actuelle mais pour la session qui commencera l'automne prochain, de déposer un projet de loi-cadre prévoyant l'intégration régionale des forces policières municipales.

Nous aurons, je pense, appris beaucoup par l'expérience de l'intégration des forces policières de l'île de Montréal et je pense qu'il nous sera possible, dans le prolongement de la pensée qui était exprimée dans le livre blanc, et tenant compte de l'expérience montréalaise, de déposer un projet de loi-cadre qui permettra, au cours d'un certain nombre d'années, de réaliser l'intégration des forces policières sur une base régionale.

Je passe beaucoup de détails et d'aspects du livre blanc qui ont déjà commencé à être implantés parce que je veux, au moment de cet exposé, m'en tenir aux grandes lignes de la politique du ministère.

Un troisième aspect de la politique du ministère que je me dois de traiter et dont je dois reconnaître l'importance c'est la dimension sociale de l'action du ministère de la Justice. Comme nos honorables collègues le savent, le bill 70 a été adopté il y a déjà un certain temps et nous avons, â la suite de l'adoption de ce projet de loi, constitué au ministère, en particulier au niveau de la direction générale des greffes, une équipe de travail en vue de l'implantation de ce projet de loi.

Cette équipe de travail est active depuis un an, elle a fait les démarches auprès des autorités

locales pour situer les endroits où siégera la cour Provinciale, division des petites créances. On a mis sur pied un programme d'établissement de formulaires, on a établi les contacts avec le ministère des Travaux publics en vue du choix des locaux, notre programme de recrutement de personnel est établi et ce personnel devrait être recruté au cours de l'été qui vient, de telle sorte que j'entrevois que le bill 70 sera en fait implanté à compter de la date que j'avais déjà annoncée, c'est-à-dire le 1er septembre 1972.

Quant au bill 10, la Loi de l'aide juridique, comme mes honorables collègues le savent, il fait actuellement l'objet d'une étude par la commission parlementaire de la Justice. Je pense qu'il nous reste environ deux journées de séances à tenir et il nous sera possible, après avoir reçu les représentations des personnes qui sont venues nous exposer leur point de vue, d'amender le projet que j'ai déposé pour tenir compte des observations faites et de présenter un projet d'aide juridique dans sa forme définitive avant la fin de l'actuelle session et faire adopter ce projet de loi.

Pour le moment, je n'en dis pas plus parce que je voudrais indiquer que j'examine les observations qui nous sont faites en toute objectivité et qu'il me semblerait prématuré pour le moment d'indiquer aux députés ici présents dans quelle direction nous avons l'intention de nous orienter parce que je voudrais attendre que tous les témoins aient comparu avant de rendre jugement, si on me passe l'expression, malgré que je n'aie pas de jugement à rendre, mais j'aurai au moins un projet de loi à présenter au nom du gouvernement pour tenir compte de ces observations.

Un quatrième aspect de l'action du ministère de la Justice qui me semble avoir une grande importance dans le contexte actuel est celui de la réforme de l'administration de la Justice. A ce sujet, je tiens à communiquer aux députés ici présents que les études se font actuellement au ministère de la Justice dans divers domaines de l'administration de la justice en vue de présenter des projets de loi à l'Assemblée nationale. Il s'agit, entre autres, d'une réforme des tribunaux et en particulier de la régionalisation des cours municipales actuelles. Je ne pense pas être en mesure de déposer ce projet de loi à la session actuelle par manque de temps. Je pense qu'il devra venir à la session d'automne.

Nous poursuivons à l'heure actuelle des consultations auprès de divers groupes qui sont intéressés à la question et qui sont aptes à nous donner des conseils judicieux sur le projet de loi instituant un conseil de la magistrature.

J'ai déjà annoncé ce projet de loi, en d'autres circonstances. On sait qu'il s'agirait de former un conseil des juges en chef des diverses cours de façon à donner une autorité à ce groupe sur l'administration des tribunaux, sur la qualité de l'administration de la Justice dans les diverses juridictions, sur l'attitude et le comportement des magistrats, sur l'assistance que ce conseil pourrait donner au ministre de la Justice dans la nomination de nouveaux magistrats, ceci afin de garantir que n'accéderont à la magistrature que les meilleurs candidats. C'est dans cet ordre d'idées que le conseil de la magistrature est prévu. Je ne sais pas encore si je serai en mesure de présenter ce projet de loi à la session actuelle. De toute façon, il sera sûrement présenté l'automne prochain si, par manque de temps, je ne pouvais le faire avant la fin des travaux parlementaires de la session dans laquelle nous sommes.

Un troisième projet de loi qui fait actuellement l'objet d'études par un comité interministériel est le projet de loi instituant de façon permanente la Régie des loyers et rendant permanente la réglementation entre propriétaires et locataires. On sait que ceci a déjà été discuté entre nous à diverses époques de nos travaux parlementaires l'année dernière. Je suis heureux d'informer les membres de la commission que nous avons actuellement un projet de loi dont nous vérifions la portée auprès de divers ministères du gouvernement, entre autres le ministère de l'Industrie et du Commerce, le ministère des Affaires sociales ainsi que la Société d'habitation du Québec.

Dès que ces études auront été faites, je pourrai alors déposer le projet de loi. Je compte le faire à la session actuelle, non pas pour le faire adopter maintenant, mais pour permettre à la commission parlementaire de la justice de demander l'avis des personnes intéressées, de tenir des séances au cours de l'été ou au cours de l'automne, avant d'en suggérer l'adoption au cours de la prochaine session, de façon à ce que cette loi permanente des loyers soit en vigueur pour le 1er mai 1973 et même plusieurs mois avant. Car, on sait qu'en vertu des règles qui s'appliquent dans ce domaine comme dans le domaine contractuel des baux il importe que des avis soient donnés dans certains délais.

Par conséquent, il faut entrevoir, à mon sens, l'adoption de ce projet de loi pour avant ou pendant le mois de décembre 1972. Finalement, j'ajoute un dernier projet de loi que je compte présenter à la session actuelle, au sujet d'un certain nombre d'amendements au code de procédure civile. Ces amendements ont été élaborés conjointement par le ministère de la Justice, le Barreau et la magistrature, de façon à permettre l'accélération des procédures devant nos tribunaux civils. La question des délais en justice est un sujet de plaintes probablement universel et permanent.

Par conséquent, ce n'est pas un problème exclusivement québécois, mais c'est un problème qui est ressenti extrêmement vivement par le justiciable. Si on devait demander au justiciable, en général ou au moins à brûle-pourpoint, quel est son principal sujet de reproche à l'égard de l'administration de la justice, probablement, dans la majorité des cas, nous dirait-il que ce sont les délais judiciaires. Alors, le comité

tripartite, qui avait été institué il y a environ un an et dont j'ai décrit tout à l'heure la composition, a fait son travail.

Le travail est actuellement entre les mains de nos légistes au ministère de la Justice. Je compte pouvoir déposer ce projet de loi d'ici quelques semaines pour le faire adopter par la Chambre pour qu'il soit en vigueur le 1er septembre 1972, date à laquelle commence l'année judiciaire, après les vacances d'été. Ainsi les mesures qui seront annoncées s'appliqueraient au début de la prochaine année judiciaire.

M. le Président, ce sont là quelques mesures que j'entrevois à plus ou moins brève échéance et qui font suite et s'intègrent aux réformes et initiatives que nous avons déjà adoptées au ministère de la Justice, ceci avec le concours des honorables députés ici présents et du Parlement en général. Je voudrais ici faire une brève liste des lois qui furent adoptées par nous et qui, à mon sens, ont été des pierres apportées à l'édifice de la justice pour une meilleure administration de la justice.

M. PAUL: Est-ce que le ministre nous permettrait de nous référer aux deux publications du premier ministre qui sont...

M. BURNS: Le gouvernement Bourassa, deux ans après.

M. PAUL: Deux ans après, justement? Je pense que nous avons un éventail assez complet...

M. CHOQUETTE: Je voudrais, M. le Président, pour la compréhension des députés, faire une simple liste des projets de loi...

M. PAUL: Si je vous comprends, cela ne sera pas politisé, à votre avis.

M. CHOQUETTE: Pas du tout, pas du tout. M. PAUL: Très bien. Il y a une différence.

M. CHOQUETTE: Cela a seulement pour but, M. le Président, de montrer dans quel contexte les initiatives futures, que je viens de vous annoncer, se situent par rapport à ce que nous avons fait au cours de l'année dernière.

Alors, ces initiatives de l'année dernière, qui ont été votées et réalisées, sont les suivantes et je mentionne les plus importantes. Loi du conseil consultatif de la justice, Loi modifiant la Loi des jurés, Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool, Loi modifiant le code civil — en particulier, en rapport avec l'âge de la majorité, la légitimation des enfants adultérins et un certain nombre de mesures relatives aux personnes — Loi favorisant l'accès â la justice, Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels, Loi du régime de retraite de la Sûreté et amendements à la Loi de police.

Maintenant, je voudrais aussi faire part aux députés, à l'intérieur de cet exposé des politiques générales, de mon intention de publier, au cours de l'automne prochain, de préférence au début de l'automne, un livre blanc sur l'administration de la justice civile et l'organisation des tribunaux au Québec. Dans ce livre blanc, j'entends faire la revue de l'ensemble des mesures déjà adoptées, de celles que j'ai annoncées tout à l'heure ou qui seront en cours de réalisation et d'autres à venir. Ce sera une sorte de synthèse de la réforme que nous apportons au niveau de l'administration de la justice.

Ce livre blanc est, actuellement, en voie d'être écrit. Une équipe a été constituée au ministère de la Justice, avec le concours d'éléments de l'extérieur, soit de la magistrature, soit du Barreau. Je pense qu'il nous sera possible de montrer, en somme, quelles sont les principales lignes de force de la réforme de la justice que nous avons entreprise, de façon que cette réforme soit particulièrement bien comprise de tous les éléments qui participent à l'administration de la justice.

Ici, je m'adresse en particulier au député de Bourget, qui est un homme intelligent, sans aucun doute, mais qui n'a pas été mêlé intimement à l'administration de la justice. J'attire son attention sur le fait qu'un des grands problèmes de l'administration de la justice, c'est la complexité du système judiciaire. La procédure judiciaire, qu'elle soit civile ou criminelle, requiert beaucoup d'éléments humains et matériels à diverses phases du déroulement de son activité. Par conséquent, il faut le concours de diverses disciplines, que ce soit les juges, les avocats, les fonctionnaires, les policiers — enfin j'en passe — pour arriver à ce que la justice soit rendue.

Il me paraît particulièrement important, quand on aborde le sujet de la réforme de l'administration de la justice en général, que les positions soient bien claires, bien établies et que chacun des éléments qui constituent cette administration de la justice ait une perception claire et précise des réformes entreprises et de la direction que l'on poursuit, sans compter —je pense qu'on l'admettra — qu'il y a tout intérêt à ce que le public comprenne, au moins dans une certaine mesure — et dans la plus grande mesure possible — le sens des réformes judiciaires qu'un gouvernement veut entreprendre.

M. le Président, je terminerai cet exposé de la politique générale en mentionnant un aspect qui a une certaine importance dans le contexte actuel. C'est celui des relations fédérales-provinciales au niveau de l'administration de la justice.

Je dois dire, M. le Président, que dans ce domaine, contrairement à d'autres domaines de l'activité gouvernementale, en général, les relations du ministère de la Justice du Québec avec le ministère de la Justice fédéral sont empreintes de compréhension, d'intelligence, de bonne foi et surtout, dirais-je, d'une appréciation juste des responsabilités distinctes des deux niveaux de gouvernement.

Ceci ne veut pas dire qu'il n'y ait pas des niveaux où l'on doive s'interroger et même, peut-être, des niveaux de conflit à certaines occasions mais, en général, je dois exprimer ma satisfaction et celle des officiers de mon ministère dans leurs rapports avec les autorités fédérales.

J'indique tout de suite, M. le Président, qu'une des raisons pour lesquelles ces rapports sont peut-être assez heureux, c'est qu'en général l'administration des affaires de justice est de compétence provinciale, de telle sorte qu'il n'y a pas beaucoup d'endroits où il y a des collisions possibles avec les autorités fédérales.

M. LAURIN: Pas de zones grises.

M. CHOQUETTE: Pas de zones grises et, j'ajouterai à ce que dit le député de Bourget que l'administration des tribunaux et de la justice est principalement matière provinciale. C'est une matière qui, au point de vue constitutionnel, à mon sens, est très décentralisée. Ceci donne d'excellents résultats. C'est la raison pour laquelle, si je pouvais faire une observation de portée plus générale, je dirais que si notre fédéralisme, à l'instar du domaine de la justice, pouvait réussir à être décentralisé de la même façon, je pense qu'il n'y aurait pas lieu de mettre en cause le système politique canadien et le fédéralisme canadien.

M. HARDY: Il n'y aurait pas de Parti québécois!

M. CHOQUETTE: Je le regrette pour nos amis, cela représenterait leur disparition.

M. BURNS: C'est donc "plate" que ce ne soit pas comme cela partout, n'est-ce pas?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BURNS: C'est donc "plate"!

M. CHOQUETTE: Mais, M. le Président, je tenais à le signaler parce qu'il y a sans doute une leçon à tirer de l'expérience que nous vivons au ministère de la Justice. Je le dis, ce sont des propos d'ordre général. Je ne dis pas que c'est une politique que je préconise dans tous les ordres de gouvernement mais je dis que, pour notre part, c'est la situation. Si on pouvait utiliser ce modèle dans d'autres secteurs de l'action et de l'activité sociales, peut-être aurait-on un fédéralisme moins rempli des soubresauts que l'on connaft à l'heure actuelle.

Pour ce qui est du domaine de l'aide juridique ou de l'assistance judiciaire, sur lequel le député de Maskinongé m'a interrogé récemment, à la Chambre, je suis maintenant en mesure de préciser ce qui va se produire. Le ministre fédéral de la Justice a annoncé et m'a confirmé, par téléphone, qu'il voulait mettre un montant de $200,000 à la disposition de certaines cliniques judiciaires à travers le pays. J'ai fait des représentations au ministre de la Justice en lui disant qu'à mon sens, il n'était pas dans l'ordre que ces subventions soient versées directement aux cliniques d'aide juridique et que, pour ma part, comme ministre de la Justice du Québec, j'aurais préféré qu'il nous donne la part qui revient au Québec sur une base per capita ou sur une autre base équivalente.

Qu'il nous donne ces sommes que je pourrais distribuer aux cliniques judiciaires, étant donné que nous-mêmes nous leur donnons déjà certaines subventions. Par conséquent, même sur le plan administratif, il me semblait beaucoup plus opportun que nous ajustions la politique fédérale en ce qui regarde ces $200,000 et notre propre politique de subvention aux cliniques d'aide juridique.

Le ministre de la Justice fédéral a reconnu que mon point de vue était bien fondé. Sans qu'il se soit engagé à me donner les fonds pour que je les distribue, il m'a assuré qu'il y aurait consultation avec mon ministère et qu'en général ce serait sur l'indication du ministère de la Justice du Québec que les subventions seraient données à nos cliniques du Québec.

Mais — et ceci me parait beaucoup plus important pour l'avenir parce que, pour cette somme de $200,000, on admettra qu'elle a assez peu d'importance dans le contexte général — le ministre de la Justice fédéral m'a assuré que le gouvernement fédéral examine une politique d'aide générale à l'aide juridique et à l'assistance judiciaire à travers le pays et il m'a assuré que l'assistance financière qui serait donnée par le gouvernement fédéral passerait nécessairement par les gouvernements provinciaux. Les programmes d'aide juridique ou d'assistance judiciaire seraient ainsi élaborés par les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral ne viendrait que donner, soit par une subvention ou par un autre mécanisme de compensation, une assistance financière, les provinces étant libres d'utiliser ces fonds suivant leur optique dans le domaine de l'aide juridique ou de l'assistance judiciaire.

Alors, compte tenu de cette expression de politique générale, je ne crois pas opportun d'être trop rigoureux avec le ministre de la Justice fédéral pour ce qui est des $200,000, compte tenu aussi du fait que je suis satisfait des mécanismes de consultation établis entre nos deux ministères pour la distribution au Québec des fonds à l'aide juridique. Cela se fera de façon satisfaisante, à mon sens, d'autant plus qu'il s'agit simplement d'un geste plutôt symbolique de la part du gouvernement fédéral et sans lendemain véritable, le lendemain véritable étant la politique générale d'aide juridique.

Je crois qu'il y a non seulement lieu de se réjouir sur le plan de l'aide juridique et de l'assistance judiciaire aux défavorisés, d'une initiative fédérale dans ce domaine, mais qu'il y a lieu également de se réjouir de l'attitude

constitutionnelle adoptée par le ministre de la Justice fédéral dans un domaine qui nous touche particulièrement. Comme on le sait, la principale responsabilité dans le domaine de l'assistance judiciaire ou de l'aide juridique est provinciale et je suis heureux que le gouvernement fédéral le reconnaisse. Ceci conclut mes remarques sur la politique générale du ministère de la Justice telle que je l'entrevois.

Maintenant je pourrais passer, si vous le voulez bien, à certains points saillants des crédits budgétaires qui vous sont présentés aujourd'hui.

Premièrement, le total des prévisions budgétaires prévoit des dépenses, dans le domaine de la justice, de $126.6 millions. Ceci inclut des prévisions pour la révision des traitements des membres de la Sûreté du Québec et des cadres du ministère de la Justice. Ces prévisions de révision des traitements sont donc incluses dans ce chiffre de $126.6 millions.

Pour ce qui est des autres catégories d'employés du ministère de la Justice, leurs révisions de traitements ne sont pas incluses dans les prévisions budgétaires actuellement déposées. On sait en effet qu'au ministère des Finances on a prévu $59 millions pour faire face à ces échéances qui viendront au cours de cette année. De ces $59 millions, suivant nos estimations, $9 millions environ devraient être attribués au ministère de la Justice, de telle sorte que le total approximatif des dépenses du ministère de la Justice sera de $135.6 millions au cours de la prochaine année financière.

Ceci, M. le Président, représente, suivant nos chiffres, un accroissement des dépenses de 20.6 p.c. Je tiens compte des $9 millions, évidemment, qui ne se trouvent pas aux crédits. Je tiens compte aussi de certains plans, actuellement en voie d'élaboration, mais qui doivent être approuvés sous peu, qui envisagent l'accroissement des effectifs du ministère de la Justice, qui se situeront aux environs de $12,000 employés au cours de la prochaine année financière.

Par conséquent, il faut admettre, M. le Président, que l'accroissement des dépenses à la Justice est parmi les plus élevés des ministères du gouvernement. Quand aux accroissements qui sont prévus à l'intérieur de nos crédits tels que déposés, il faut dire que certaines des prévisions comprennent l'accroissement normal des traitements des agents de la Sûreté du Québec en vertu de leur convention collective actuelle, l'accroissement du personnel, comme je le mentionnais tout à l'heure, et un programme d'informatique à la sûreté.

Je mentionne que nous avons fait adopter par le conseil des ministres un projet d'implantation d'un système d'informatique extrêmement avancé, au coût d'environ $10 millions, qui sera réparti sur cinq années financières. Ce programme permettra de compiler les données nécessaires à la lutte contre la criminalité. Ce service sera à l'usage non seulement de la Sûreté du Québec, mais de tous les corps municipaux du Québec.

Alors, nous faisons un effort très particulier dans ce domaine, ce qui implique, il faut l'admettre, des dépenses considérables. Il y a également d'autres programmes ou développements nouveaux qui ont apporté des accroissements dans nos dépenses. Ainsi, l'instauration de la Commission de contrôle des permis d'alcool coûte au ministère de la Justice une somme de $2,400,000. Il est vrai que, dans le passé, nous avions la Régie des alcools qui agissait comme tribunal, mais, à ce moment-là, elle dépendait du ministère des Finances. Aujourd'hui, la Commission de contrôle des permis d'alcool, qui lui a succédé, voit ses dépenses imputées au ministère de la Justice.

Nous voyons également les revenus provenant du contrôle des permis d'alcool, imputés au ministère de la Justice et je pense que ces revenus se situent aux environs de $18 millions. Pour la Loi d'indemnisation des victimes d'actes criminels, nous avons prévu une somme approximative de $300,000. Pour la Loi favorisant l'accès à la justice, nous prévoyons des dépenses annuelles de $1.5 million. Pour le nouveau personnel requis à l'administration et aux affaires criminelles, en particulier avec l'organisation du "Strike Force" contre le crime organisé, nous prévoyons $250,000; il y a aussi diverses autres dépenses en rapport avec un contrôle plus serré des faillites frauduleuses.

Dans le domaine des bureaux d'enregistrement, nous entrevoyons également un accroissement de nos dépenses de $2 millions. Ceci résulte, je pense, en partie de la mise à traitement de certains bureaux qui ne le sont pas encore, de l'accroissement du personnel et de diverses autres dépenses.

Dans le domaine de l'assistance judiciaire, nous avons prévu, pour le moment, un accroissement de $500,000 par rapport aux dépenses de l'année dernière. Ceci, à mon sens, n'épuisera pas les besoins dans ce domaine, mais c'est le chiffre qui a été porté aux prévisions budgétaires, compte tenu de ce que la Loi de l'aide juridique n'était pas encore adoptée au moment où les prévisions budgétaires ont été déposées.

M. PAUL: Environ $2,300,000.

M. CHOQUETTE: Environ $2,300,000. M. le Président, je dois dire que nous avons institué au ministère de la Justice un service qui porte le nom provisoire de service de sécurité et qui est actuellement dirigé par l'ancien directeur général adjoint de la Sûreté du Québec, M. Raoul Jobin.

Ce service de sécurité regroupera le personnel mis à la disposition des membres du Conseil exécutif et d'autres personnalités de l'Opposition ou personnalités politiques qui requièrent une certaine protection. Plutôt que de laisser ce travail se continuer par des agents de la Sûreté, nous avons un programme en vertu duquel il

sera fait par des personnes qui agiront comme chauffeurs et gardes du corps. Ces gens subiront un certain entraînement dans ce domaine à l'Institut de police à Nicolet mais ils ne seront pas des policiers, tout en étant versés à la catégorie des agents de la paix.

Ce service de sécurité, pour lequel nous avons prévu $500,000, a pour but de réunir ces effectifs. On lui imputera les dépenses de la garde des personnes qui peuvent être plus exposées que d'autres à des actions criminelles.

Quant à la ventilation des dépenses ou des estimations du ministère de la Justice, je mentionnais tout à l'heure que, suivant une manière comptable ou une autre, nos estimations étaient de $126,625,000 ou de $135.6 millions. Je voudrais indiquer que sur ces chiffres totaux les salaires et traitements représentent $100,650,000, c'est-à-dire que du total de nos estimations la plus grande partie, soit environ 79.5 p.c, constitue des traitements, ce qui indique que le ministère de la Justice est un ministère de services.

J'ajouterai également, comme donnée générale, que sur le total des traitements payés par le gouvernement du Québec au cours du prochain exercice financier, soit $421,750,000, le ministère de la Justice en prend $100,650,000, soit un pourcentage de 23.8 p.c. Et nos effectifs, par rapport aux effectifs totaux du gouvernement, excluant les occasionnels, représentent 26 p.c. de l'ensemble de la fonction publique. Par conséquent, les postes autorisés au ministère de la Justice, qui se situent aux environs de 10,000 et plus, par rapport à un effectif total de la fonction publique de 40,000, représentent 26 p.c, soit environ le quart des effectifs gouvernementaux.

Je ne voudrais pas allonger cet exposé en donnant trop de détails fastidieux à mes honorables collègues. Je dirai, pour conclure, et pour indiquer le sérieux avec lequel les estimations budgétaires du ministère de la Justice sont préparées — en particulier, je voudrais reconnaître les hauts fonctionnaires, qui, à tous les niveaux, ont contribué à la préparation de ces estimations budgétaires ainsi que tous ceux qui ont collaboré avec le ministre au cours de l'année dernière — que par rapport à nos estimations de l'an passé, nous arrivons tout à fait à l'intérieur de nos crédits. Nous souffrons d'un excédent de 0.2 p.c. par rapport aux prévisions qui étaient déposées pour l'exercice financier de l'année dernière. Le budget actuel, je puis vous le dire, a été préparé par les mêmes personnes, dans les mêmes conditions et avec la même compétence.

M. LAURIN: Vous en souffrez vraiment?

M. CHOQUETTE: De quoi?

M. LAURIN: De l'excédent.

M. CHOQUETTE: On peut dire que nous avons calculé avec beaucoup de justesse, 0.2 p.c.

M. DROLET: Cela aurait été pire si cela avait été 0.8.c.

M. CHOQUETTE: Oui, d'accord. Excepté que je dois mentionner qu'à cause de certains incidents qui se sont produits au niveau de la Sûreté du Québec au cours de l'automne dernier nous avons été obligés de faire voter un budget supplémentaire que nos honorables collègues...

M. BURNS: Plaignez-vous à votre ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas pour me plaindre, mais je voulais quand même établir les faits avec une véracité totale et dire que nous avions calculé juste mais que ce budget supplémentaire de $2 millions a dû être voté pour réviser les traitements de la Sûreté. C'est la seule exception qui, je pense, était imprévisible lorsque les estimations budgétaires ont été préparées l'année dernière.

En concluant, juste une note pour indiquer que nous prévoyons un accroissement des revenus au ministère de la Justice de $9,100,000, ce qui portera notre budget à $36 millions pour l'exercice qui vient.

Sur ce, M. le Président, je termine mes observations.

M. LE PRESIDENT: Le leader parlementaire de l'Opposition officielle, le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais, en premier lieu, remercier le ministre de cette vue à vol d'oiseau qu'il vient de nous faire, de la projection envisagée par son ministère ainsi que pour certaines réalisations dont il nous a donné la liste.

Vous me permettrez également de saisir cette occasion pour renouer connaissance avec tous les officiers supérieurs du ministère de la Justice, dont je garde un excellent souvenir et qui, j'en suis sûr, constituent pour le ministre une pierre angulaire sur laquelle il peut s'appuyer pour tâcher de doter le Québec d'un ministère de la Justice qui corresponde à la mission même de ce ministère, soit celle du maintien de l'ordre et de la paix dans la société.

C'est dommage que la tribune de la presse brille à nouveau cet après-midi par son absence, parce que la population aurait eu avantage à entendre les grandes déclarations de principe que nous a exposées le ministre et qui étaient fort à point. Sans malice, je rappellerai certaines époques où le député d'Outremont siégeait de l'autre côté des banquettes qu'il occupe actuellement alors que, n'ayant pas l'expérience de l'administration de la justice, il ne voyait pas les mêmes problèmes qu'aujourd'hui. Je dénote

chez lui une amélioration qui est tout à son honneur.

Je n'ai pas été frappé par les propos du ministre responsable de la garde du Grand Sceau de la province ni de son compte rendu quant à ses activités de registraire en chef de la province. Mais, d'un autre côté, j'ai beaucoup aimé cette rétrospective des événements qui se sont déroulés et qui mettent la société constamment, depuis quelques années, en état d'alerte et de crainte.

La justice doit présider aux relations entre les hommes, et cette justice, Dieu sait comment aujourd'hui elle est attaquée de toutes parts, surtout si l'on considère que beaucoup de gens croient que le nombre constitue la justice et que la violence doit être la maîtresse du logis.

Le but que doit viser tout ministre responsable de la justice est d'adopter des politiques pour le maintien de l'ordre et de la paix. Cet ordre et cette paix ne pourront être obtenus que par la participation intelligente de ceux qui veulent sauvegarder nos institutions et qui ont réellement à coeur le développement économique du Québec.

Il nous faut nous rappeler que c'est le devoir fondamental de l'agent de la Sûreté du Québec, de l'agent de la paix et de tout citoyen conscient de ses responsabilités de participer sans réserve.

Sans pour cela être un délateur ou un mouchard, il doit collaborer avec l'autorité en place pour que notre société évolue dans l'ordre et la paix.

Quand on constate aujourd'hui l'acharnement avec lequel certaines gens s'attaquent à l'autorité gouvernementale, à l'autorité judiciaire, à l'autorité policière, on s'interroge avec raison quant au sort qui peut être réservé à la population du Québec. Que l'on aime ou non l'autorité, il faut la respecter, il faut s'y soumettre. Cette autorité de l'Etat, on doit la respecter, et si l'on prétend qu'elle doive être remplacée, il y a des moyens démocratiques de le faire.

De plus en plus on galvaude la justice, on attaque les tribunaux, on se moque de notre système judiciaire avec l'espoir d'y substituer un autre système. Mais répondrait-il, lui, aux véritables critères de justice qui doivent guider ceux qui ont charge de l'administration de la chose publique au Québec?

M. le Président, j'ouvrirai une très courte parenthèse pour inviter mon collègue, le ministre de la Justice, à entrer en communication avec les autorités fédérales responsables de la justice pour suggérer un amendement au code criminel afin que, dans l'avenir, le mépris de cour fasse l'objet d'une accusation particulière. Personnellement, je n'ai pas l'intention ici de blâmer l'autorité judiciaire, l'autorité de quelque juge que ce soit. Je suis sûr que le ministre partage mon point de vue, mais il n'est pas obligé de l'exprimer publiquement. Je me demande si l'on ne devrait pas faire les représenta- tions qui s'imposent pour que le mépris de cour ne soit pas laissé à la discrétion de celui qui se prétend en être victime et si l'on ne devrait pas fournir l'occasion à celui à qui on le reproche de faire face à une accusation et de se défendre suivant les règles de procédure et de preuve établies chez nous.

J'ai été très intéressé d'entendre le ministre nous faire part de la publication prochaine de certain livre blanc ou de rapports dans lesquels il pourrait signaler à la population les différentes manoeuvres d'intimidation déployées par les experts en la matière. Intimidation qui s'adresse à toutes les couches ou classes de la société. Il y a des gens qui, malheureusement, craignent ces intimidations ou ces chantages et plient devant eux. On ne peut leur reprocher leur capitulation, leur crainte, mais il en découle nécessairement, cependant, que du même coup, dans bien des secteurs, notre population se trouve déboussolée et inquiète. Elle plie l'échiné et craint pour sa propre sécurité.

Si l'on se rappelle les derniers événements qui se sont déroulés au Québec, il était curieux de questionner ceux qui avaient débrayé dans l'une ou l'autre des activités de notre économie, que ce soit dans la Fonction publique ou dans les services parapublics. Personnellement, je ne sais si j'ai rencontré 25 personnes qui étaient sympathiques, qui voulaient réellement débrayer. On leur posait infailliblement la même question, régulièrement la même question: Pourquoi avez-vous débrayé? Nous sommes obligés de le faire parce que nous craignons pour notre propre sécurité, pour nos biens, la vie de nos épouses et de nos enfants.

C'est une société qui court à sa propre perte si on admet comme mode de vie ce système d'intimidation et de chantage, souvent exercé par des gens qui n'ont aucun intérêt dans le problème particulier ou le cas d'espèce, mais qui, comme le signalait tout à l'heure le ministre, sont à la solde de puissances douteuses et se trouvent, en quelque sorte, mandatés pour créer un climat de crainte, d'hésitation chez cette population. Cette masse silencieuse se trouve, cependant, grandement soulagée et dégagée de toute inquiétude lorsque l'autorité en place, légalement constitutée, décide de prendre des mesures que les uns pourront condamner et que les autres pourront accepter, mais qui ont pour effet de rétablir un certain ordre social qui se trouvait grandement déséquilibré.

Le ministre a dit, avec une certaine confiance, avec un certain réalisme aussi, que le Québec était sorti du cataclysme auquel il était exposé, récemment, à la suite des événements que nous avons connus. Il a parlé de certaines forces révolutionnaires au sein de syndicats qui auraient, pour ambition première, de créer ou de provoquer une catastrophe sociale. Je me demande si le ministre ira jusqu'au bout de sa pensée et s'il portera des plaintes — cela devient une question de justice à l'endroit de ceux qui

ont dû faire face à des plaintes devant les tribunaux — contre tous ceux qui ont défié les décisions judiciaires ou l'autorité législative que constitue l'Assemblée nationale.

Le ministre se rappelle fort bien un certain cas, que je lui ai mentionné privément. J'ai l'assurance, cependant, qu'il a fait faire l'enquête appropriée. Je ne lui reproche pas d'avoir agi, jusqu'ici, avec une certaine indifférence. Peut-être que l'expérience des événements vécus l'invite à agir avec une extrême prudence afin de ne pas compromettre davantage les négociations qui sont, actuellement, en cours.

Chose certaine, c'est que l'indifférence ou l'absence de poursuites à l'endroit de gens qui ont commis les mêmes fautes que ceux qui ont été poursuivis devient un déni de justice. Ce n'est pas à l'occasion de signature d'une convention collective que l'on doit absoudre ceux qui ont enfreint les lois ou qui ont commis, dans certains cas, des crimes. J'espère que cette mentalité que nos syndiqués ont développée chez eux finira par tomber, car ils doivent distinguer entre, d'une part, un droit syndical et, d'autre part, l'obligation de respecter toutes les lois, qu'elles fassent ou non leur affaire.

M. le Président, le ministre a parlé d'une action assez percutante dont les résultats, du moins, sont apparents. C'est cette lutte contre la criminalité. Le ministre a parlé de la disparition du terrorisme politique. Je suis sûr que le ministre se rappelle cette rencontre que nous avions eue le 13 mai 1970, alors que j'avais cru de mon devoir d'analyser avec lui, à son invitation, tout ce problème de l'activité terroriste politique.

Prenons garde, M. le Président! Est-ce que, par hasard, on aurait décidé de changer de moyens d'action? Est-ce que ceux qui, aujourd'hui, publiquement, prêchent le remords et invitent leurs concitoyens à renverser le système établi par des moyens démocratiques connus n'ont pas d'agents qui oeuvrent à l'intérieur de certains mouvements et qui, du soir au lendemain, deviendront encore actifs? Je ne donne pas de noms, M. le Président. Peut-être que quelques-uns les reconnaîtront. Chose certaine, c'est que personne ne se reconnaît ici parce que nous ne sommes pas — et heureusement — de cette idéologie politique.

En politique, M. le Président, il faut toujours craindre les adhérents qui viennent se joindre à nous. Dans certains cas, ils constituent des passifs douteux. Je suis certain que la Sûreté du Québec reste constamment vigilante et que cette force d'action, de lutte contre la criminalité politique reste toujours en éveil. Sûrement, la collaboration demeure toujours excellente entre les spécialistes de la Sûreté du Québec, de la Sûreté municipale, maintenant de la Communauté urbaine de Montréal, et de la Gendarmerie royale, puisque nous assistons à un arrêt marqué d'actes de violence qui n'ont pas été sans compromettre gravement la situation économique du Québec.

La dernière poussée de violence remonte au mois de juin 1970, lorsque, dans l'espace de 29 jours, je crois, il y a eu éclatement de 17 ou 18 bombes ou bombettes, à l'intérieur du Montréal métropolitain. C'est par une vigilance constante, M. le Président, que l'on pourra réussir à mater ce que j'ai déjà appelé des invertébrés rampants, au grand scandale de certains papes du journalisme, m'accusant d'avoir usé de termes assez violents.

M. CHOQUETTE: Est-ce que vous référez à celui qui corrige les moeurs en "Ryan"?

M. PAUL: Je ne sais pas si c'est lui, mais certaines gens s'apprêtent de plus en plus à le qualifier de Chiniquy du journalisme.

Donc, M. le Président, dans ce domaine de la criminalité politique, je me réjouis avec le ministre de ce calme que nous voulons et souhaitons voir se prolonger pour la sécurité des gens, d'abord, et pour que nous puissions aussi envisager une certaine relance économique du Québec.

M. le Président, il arrive parfois des événements assez marquants. Lorsqu'il y a eu débrayage dans la fonction publique et dans les services parapublics, la veille au soir, avec quelques concitoyens de ma ville et de la région, nous rencontrions un groupe d'industriels que nous sollicitions à venir s'établir dans notre région de Maskinongé. Les nouvelles étaient constantes à l'effet que, le lendemain, il y aurait débrayage dans les services publics et parapublics, que les hôpitaux seraient fermés et ainsi de suite. Pas besoin de vous dire que nous n'avons pas reçu de nouvelles de ces bonnes gens, bien intentionnés, avec qui nous entretenions des relations assez fréquentes par des entrevues et des voyages que nous avions faits. Ces gens ne semblent pas intéressés, pour le moment, à s'établir au Québec. Des informations prises par de tierces personnes nous ont appris qu'ils avaient presque définitivement décidé de s'établir en Ontario.

Personnellement, je ne reprocherai pas au gouvernement de ne pas avoir rempli sa promesse de 100,000 nouveaux emplois, parce qu'il y a peut-être des facteurs qui sont au-delà de toute responsabilité administrative. Et j'espère que d'une part les syndicats, d'autre part le patronat et enfin le gouvernement finiront par s'arrêter, s'attabler ensemble pour analyser la situation économique et pour établir une politique de nature à répondre aux contingences du moment. Ils doivent établir une politique économique qui soit de nature à concurrencer les autres provinces pour que nous connaissions chez nous l'investissement requis et qui n'est pas sans contribuer à amener la sécurité sociale.

L'insécurité sociale ou le crime, on le retrouve assez souvent lorsqu'il y a dépression économique, lorsqu'il y a été de chômage endémique ou saisonnier. Et c'est dans ces circonstances que nous voyons une recrudescence du crime.

Je comprends qu'il y a le crime organisé qui, lui, ne connaît pas de saison, ne connaît pas d'événement parce qu'il est constamment en activité. Et, encore là, le ministre nous a fait part de la formation d'une équipe d'environ une cinquantaine de membres qui, recrutés tant au niveau de la Sûreté du Québec, de la Gendarmerie royale que de la police de la Communauté urbaine de Montréal, oeuvreront ensemble et établiront un véritable esprit de coordination d'activités policières.

Et M. Saint-Pierre se rappelle fort bien certaines rencontres que nous avons déjà eues dans le but d'établir, non seulement un climat de coopération, mais également un consentement et un climat de coordination. Et c'est par cette activité coordonnée que le ministère de la Justice et ceux qui ont charge de combattre le crime organisé pourront réussir dans la tâche immense qu'ils assument.

Le crime n'est pas particulier au Québec. La violence n'est pas particulière au Québec non plus. Mais, si nous étions capables d'éloigner l'un et l'autre, je me demande si les premiers bénéficiaires n'en seraient pas les citoyens du Québec eux-mêmes.

Le ministre nous a fait part de certaines réformes envisagées dans l'administration de la justice. Il nous a parlé d'une réforme des tribunaux et d'une régionalisation de nos cours municipales. Je ne sais si le ministre avait envisagé une restructuration au niveau des tribunaux administratifs ou si c'est une réorganisation à l'intérieur même de nos tribunaux de juridiction civile et de juridiction criminelle.

Je me demande si la justice ne serait pas plus rayonnante et mieux dispensée s'il y avait à l'intérieur de nos cours de justice certains spécialistes, à qui l'on devrait diriger certains cas et dont la fonction principale serait justement d'analyser, de juger, de disposer de certains problèmes économiques assez chatouilleux, assez complexes.

Sans vouloir déprécier les uns en faveur des autres, je me demande si, dans cette réforme de nos tribunaux qu'envisage le ministre, il n'y aurait pas également cette possibilité d'introduire une autorité qui serait donnée à nos juges en chef, non pas une autorité disciplinaire mais une autorité sur le partage des causes que l'on retrouve sur des rôles afin que des causes de même nature soient toujours référées à des juges qui deviendraient des spécialistes. On a beau être juge, ça ne nous apporte pas du même coup la polyvalence de la science.

Certains avocats qui, en raison de leur pratique, ont été des spécialistes dans une branche ou une facette du droit, deviendraient des experts, et ces juges, dont l'expérience de pratique a été reconnue, deviendraient peut-être plus expéditifs, et les justiciables qui se trouveraient devant eux se sentiraient en quelque sorte plus certains que leurs droits seront reconnus. Je ne parle pas de causes d'accidents d'automobile, je parle de causes d'expropriation et à caractère économique, de véritables causes qui sortent de l'ordinaire.

Le ministre nous a parlé d'un projet de loi du conseil de la magistrature, il nous en a parlé depuis deux ans, et nous souhaitons qu'il puisse présenter sa loi avant la fin de son terme, sinon, malheureusement, à ce moment-là il n'aurait pas le plaisir d'en être le parrain devant l'Assemblée nationale. Nous attendons beaucoup aussi de la loi que vous nous présenterez concernant les relations entre locataires et locateurs. Et je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas saluer d'une façon toute particulière et M. le juge Ross et M. Massé, de la Régie des loyers et de la commission des loyers, qui ont accompli un excellent travail dans les deux cas depuis près de vingt ans, sans vouloir les rajeunir l'un et l'autre.

Je me rappelle que le ministre, alors qu'il était comme il est encore aujourd'hui député d'Outremont, s'était fait le parrain d'une excellente motion, c'était édifiant à entendre. Jamais je n'aurais cru que le ministre fût si proche du peuple lorsqu'il nous a présenté une motion pour convoquer la commission parlementaire des Affaires municipales, pour étudier le problème du logement, surtout dans la ville d'Outremont. Et, dans un grand geste magnanime, le leader du gouvernement, qui était votre humble serviteur, a accepté cette motion et malheureusement la commission n'a pu siéger.

Mais il y a des principes à ce moment-là qui ont été exposés par le ministre et par tous les participants à ce débat qui ne peuvent être mis de côté.

Je me réjouis de, cette annonce que nous a faite cet après-midi le ministre à l'effet que le projet de loi qu'il soumettrait à l'Assemblée nationale, il n'en serait pas captif et qu'il serait sensible à tout amendement et surtout à la présentation de mémoires par les parties intéressées à cette loi qui mettra fin à une tradition qui s'est établie chez nous. Depuis 1941, nous avons une loi devenue traditionnellement annuelle, soit celle que l'on adopte à chaque session et qui a pour but de prolonger d'une année les relations entre locataires et locateurs. A ce moment-là, nous sommes dans la délicate obligation de changer le millésime de la loi sans cependant du même coup régler définitivement le problème ou adopter une politique véritablement sociale dans le but de protéger les droits des propriétaires et également les locataires devant les exigences parfois voraces de leur propriétaire. Je suis sûr que le ministre ne manquera pas de se référer à ceux qui ont une expérience dans ce domaine, soit surtout le juge Ross et M. Massé. M. le ministre, nous attendons votre loi.

Une fois de plus, je profite de l'occasion pour souhaiter la bienvenue aux journalistes. Quand viendra le temps de faire connaître la politique du ministère de la Justice dans le domaine de l'ordre et de la paix, nous verrons de ces barbus, de ces prétendus intellectuels, de

ces pseudo-réformateurs de la société qui dispenseront leurs propres nouvelles, qui communiqueront à la population leurs propres désirs sans connaître la justification des mesures que doit adopter ou qu'adopte le ministre de la Justice pour sauvegarder l'ordre et la paix dans notre société.

Fermant la parenthèse, je dis que cette loi que se propose de nous présenter le ministre de la Justice s'impose. Je sais que, l'an dernier, il y avait un projet de loi qui n'était pas terminé. Cette année, j'espère qu'on en est rendu à une étape plus avancée. Ce qui m'a frappé, cet après-midi, c'est la déclaration que le ministre nous a faite au sujet de consultations qu'il se propose d'avoir avec les autorités des affaires municipales et des affaires sociales pour que cette loi colle à la réalité, réponde à un véritable besoin sociologique.

Le ministre nous parle de certaines réformes ou de certains amendements qu'il apportera au code de procédure civile dans le but de faire disparaître des délais qui deviennent, dans certaines circonstances, de véritables dénis de justice. Quelles sont les véritables réformes que le ministère devrait envisager pour rendre la justice plus expéditive? Je crois que c'est en consultant le Barreau, nos juges, spécialement les juges en chef, que le ministère pourra peut-être adopter des lois et des amendements qui permettraient de disposer plus rapidement des causes qui encombrent les rôles et qui font que les justiciables sont parfois dans l'obligation d'attendre deux ou trois ans avant que leur problème soit définitivement réglé.

Le ministre nous a parlé des relations qui existent au niveau de la justice entre Québec et Ottawa. Il a été prudent et il a bien dit qu'en général les relations dans le domaine de la justice — et là j'ai écrit mot à mot car le ministre a parlé plus lentement à ce moment-là — sont empreintes de compréhension, d'intelligence, de bonne foi et d'appréciation juste des responsabilités distinctes des deux administrations.

Pourrais-je inviter le ministre à vendre sa recette à ses collègues du cabinet pour qu'ils trouvent moyen aussi d'obtenir cette même compréhension, cette même bonne foi, cette même intelligence chez des collègues ministériels fédéraux pour que la constitution qui nous régit encore soit respectée?

Le ministre nous a parlé de la reconnaissance que fait le ministre fédéral de la Justice que l'administration de la justice relève des provinces. Je crois que le ministre a parfaitement raison, que sur ce point les relations ont toujours été excellentes entre le Québec et Ottawa. Je comprends cependant qu'au niveau fédéral, certains ministres se prétendent les sauveurs de la race. Il y a ceux qui s'attribuent le mérite d'avoir passé à travers les difficultés appréhendées de révolte ou de crimes politiques durant le cours de l'automne dernier. Personnellement, je n'ai jamais été ému par les déclara- tions fantasques du Solliciteur général, M. Goyer, et j'ai toujours préféré la logique d'un véritable ministre de la Justice à celle d'un marchand de publicité.

Alors, j'espère que quand le ministre se réfère à des hommes en place et d'autorité à Ottawa il parle toujours du ministre titulaire de la Justice. Ce n'est pas que je veuille associer à ce même niveau de compétence le Solliciteur général...

M. FOURNIER: Cela s'en vient.

M. PAUL: ... du Québec. Mes relations sont trop excellentes avec lui pour que j'ose ainsi proclamer une telle vérité. Alors, le ministre devra continuer d'avoir l'oeil ouvert parce que c'est toujours au niveau des fonctionnaires que cet empiètement se fait petit à petit. Le ministre nous a apporté cet après-midi certaines explications au sujet de la politique fédérale à l'endroit des cliniques juridiques.

Je suis sûr que le ministre a été fort surpris lorsqu'à l'occasion de l'une des commissions parlementaires, mon collègue, le député de Maisonneuve et moi-même, je crois, nous avions, dans le cours des conversations, mentionné au ministre cette tentative d'intrusion des autorités fédérales dans le domaine de la justice.

Je souhaite sincèrement que le ministre soit plus que vigilant et qu'il réclame également... Le ministre a signalé que le fédéral disposerait d'une somme de $200,000 environ pour établir ou aider toutes les cliniques juridiques qui peuvent exister au Canada. Mais ce n'est pas cela qui me fatigue. Ce qui me fatigue un peu et ce qui m'inquiète — je ne dirai pas fatigue, parce que je n'ai pas la responsabilité administrative — mais ce qui m'inquiète — et sans vouloir pour autant enfreindre les règlements qui régissent l'Assemblée nationale ou notre assemblée délibérante — je crois que c'est l'article 85 du projet de loi no 10, où il est dit que le ministre de la Justice peut signer certaines ententes avec les autorités fédérales, de manière que l'aide juridique que l'on vise à appliquer par ce projet de loi soit, en quelque sorte, partagée, dans son application et dans son coût, par le Québec et par le fédéral.

Je souhaite que le ministre puisse réussir dans ses démarches, qu'il puisse obtenir tous les crédits qui lui sont nécessaires pour mener à bonnes fins les tâches qui lui incombent personnellement et pour que chacun des directeurs des différents services du ministère puisse s'acquitter de ses responsabilités administratives.

Je n'ai pas l'intention de tout analyser en détail, à ce stade de nos travaux, ou de faire une revue ou un éventail des différentes sommes attribuées aux différents articles du ministère.

Le ministre nous a parlé de l'imprévu qu'avaient entraîné les négociations fructueuses de son collègue, le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, avec la Sûreté du Québec et que cela avait motivé la présentation d'un budget

supplémentaire. De toute façon, je me réjouis que le ministre des Finances reconnaisse la nécessité des crédits que requiert le ministère de la Justice pour une bonne administration de la justice au Québec. Je me rappelle avoir plaidé contre le ministre, alors que tous deux, nous étions hors de la politique.

Connaissant l'intelligence du ministre, connaissant son astuce, mais dans toute l'acception du mot, je me demande comment il se fait que le ministre n'ait pas réussi, jusqu'ici, à obtenir du ministre des Finances des sommes d'argent plus généreuses ou plus complètes pour qu'il puisse, avec le mécanisme de l'aide juridique, le bill no 10, instaurer au Québec un véritable système de "Judicare". C'est une invitation que nous faisons de nouveau au ministre. Je crois que nous aurons l'occasion de faire des remarques appropriées à l'occasion de la deuxième lecture de ce projet de loi.

M. le Président, je m'en voudrais de ne pas me référer, comme l'a fait le ministre lui-même, à la loi no 70 qui doit entrer en vigueur le 1er septembre 1972. Je sais que M. Lemelin, du service du ministère, s'est grandement occupé de trouver les locaux appropriés pour que cette loi puisse fonctionner dès le mois de septembre. Mais ce n'est pas là mon inquiétude, M. le Président. Mon inquiétude, c'est l'indifférence —je regrette d'être obligé d'être dur à ce moment-ci à l'endroit du ministre — ou l'insouciance du ministre devant certaines revendications bien légitimes du Barreau. Je sais que le ministre avait demandé à un professeur d'université de faire une enquête sur les implications du projet de loi no 70. Je n'ai pas été consulté en tant qu'ex-ministre de la Justice ou en tant que député. J'ai été consulté par ce spécialiste —le ministre pourra dire son nom, il ne m'appartient pas de le dévoiler — en tant que bâtonnier de la section du Barreau de Trois-Rivières sur les implications de cette loi no 10.

Je me demande si le ministre ne devrait pas tenir compte du mémoire qu'il a reçu — je ne sais s'il a eu le temps de le lire lui-même — de certaines représentations qui lui furent faites par le Barreau. Avant, M. le Président, que je me réfère à ce texte, puis-je vous signaler qu'il est six heures?

M. LE PRESIDENT: La commission suspend ses travaux jusqu'à vingt heures quinze, ce soir, dans cette même salle.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

Reprise de la séance à 20 h 30

M. PICARD (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Si on me permet, j'aimerais que la commission approuve le changement suivant, à savoir que M. Pépin, de Sherbrooke, remplace pour cette séance M. Vézina, de Montmorency.

Agréé?

M. PAUL: Agréé.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, avant la suspension du dîner, j'avais brièvement rappelé au ministre l'attitude du Barreau concernant le projet de loi no 70. C'est une loi dont les principes sont excellents. Mais, ce à quoi s'est toujours opposé le Barreau et les membres du Barreau, c'est cette élimination complète de la présence des avocats devant le tribunal.

Je suis certain que le ministre a été informé de cette politique que, déjà, certaines compagnies d'assurance comme certaines maisons de finances ont adoptée, soit de recruter, comme employés, des avocats rayés du Barreau ou des licenciés en droit qui, eux, auront cette liberté — sous prétexte qu'ils sont des employés d'une corporation — de se présenter devant le tribunal.

Je ne dis pas, M. le Président, que toutes les compagnies et toutes les banques agissent de la sorte, et ce ne sont pas toutes les compagnies d'assurance. Mais, certains experts en assurances, avec qui j'ai eu l'occasion de discuter du problème, m'ont fait part des études un peu spéciales qu'ils faisaient par temps libres, le soir, pour se familiariser avec les grandes lignes du droit, pour être en mesure d'aller plaider au nom de la compagnie certaines réclamations dites de petites créances.

Ce que le Barreau désire, c'est permettre la présence de l'avocat aux frais de son client. Autrement, il est à craindre que nous ne répondions pas au principe ou au but visé par cette loi. Il va de soi que le justiciable, se présentant devant le tribunal aura à faire face à un expert, parce que ces avocats rayés ou ces employés des compagnies d'assurances, des banques ou des maisons de finances deviendront, en quelque sorte des experts. C'est beau de compter sur l'équité, mais je ne crois pas que les juges soient dans l'obligation de mettre de côté toutes les règles de la preuve.

Est-ce que ce ne sera pas les placer dans un certain état d'infériorité peut-être pire que celui qui existe présentement? C'est dans ce contexte que le Barreau a fait parvenir au ministre certaines recommandations.

Il faut garder ce principe qu'il ne devrait pas y avoir de frais taxables pour les causes en bas de $300 contre la partie qui succombe, pour autant que l'on respecte les conditions prévues

par la loi, que ce ne soit pas une corporation, etc.

Avant la suspension, je rappelais au ministre ce rapport qu'il avait commandé, avec raison, pour connaître la réaction du milieu. Ce n'est pas le fait que les avocats se voient priver de revenus qui les chatouille davantage, mais c'est cette brisure avec la tradition et cette liberté qu'a — et que devrait continuer à avoir — un justiciable d'avoir recours à un avocat de son choix.

Le ministre se rappelle cette visite fort intéressante qu'il faisait aux Trois-Rivières, dans le cours du mois d'octobre, à l'occasion du congrès des avocats de province. Ce n'est pas que j'aie endossé sans réserve les remarques de celui qui avait été délégué pour remercier le ministre, mais je sais que M. Normand, qui a assisté à tout ce congrès, n'a pas été sans comprendre le véritable animus qu'avaient les avocats en face de ce projet de loi. C'est pourquoi je ne désespère pas que le ministre veuille nous faire une demande à nous, de l'Assemblée nationale, de modifier la loi, pour sauvegarder ce principe essentiel de la liberté du choix de l'avocat.

Je n'invite pas le ministre à changer toute la structure ou l'économie de la loi, mais je suis sûr qu'une étude bien sérieuse, une lecture attentive de ce bref mémoire au ministre de la Justice sur la Loi favorisant l'accès à la justice l'invitera à apporter des amendements qui, à mon humble point de vue, s'imposent.

Je ne parle pas pour moi personnellement parce que peut-être qu'en politique comme en droit mon avenir est en arrière plutôt qu'en avant, mais je crois me faire l'interprète...

M. HARDY : Il y a des admissions juridiques qui sont un aveu judiciaire.

M. PAUL: C'est pris sous toute réserve. L'invitation que me font mes confrères et collègues, M. le Président, est retenue et c'est pris en délibéré.

M. CHOQUETTE: C'est tout simplement parce qu'ils veulent vous garder.

M. PAUL: Je le crois.

M. CHOQUETTE: Si vous voyiez le fond de leur pensée, on pourrait vous envoyer...

M. PAUL: M. le Président, j'ai trop de respect pour les conversations privées pour dévoiler les conversations que certains de mes honorables amis du Parti québécois ont eues avec moi. J'ai cru déceler chez eux un désir de me voir disparaître. Alors, je reviens, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Il n'est pas permis de prêter des intentions aux collègues.

M. PAUL: C'était plus que des intentions, M. le Président, c'était des désirs de leur part. Je reviens et j'abandonne ce sujet tout en invitant le ministre à reconsidérer cette recommandation que je trouve personnellement bien logique de la part du Barreau.

Je n'ai pas le droit et je n'ai pas l'intention de discuter du projet de loi no 250 et de la loi 251, évidemment. Il y aura d'autres occasions et d'autres milieux pour le faire. J'aimerais que le ministre, à moins qu'il préfère formuler ses remarques lorsque nous arriverons à la catégorie appropriée, nous fasse le point du travail effectué par l'Office de révision du code civil.

Je sais que M. Crépeau et toute son équipe...

M. CHOQUETTE: Il n'est pas ici ce soir, malheureusement.

M. PAUL: Non, ça ne fait rien, M. le Président...

M. CHOQUETTE: Les travaux de l'Office de révision avancent, mais la révision d'un code civil est un travail extrêmement complexe. M. Crépeau ne m'a pas indiqué qu'il sollicitait de délai additionnel à l'instar de la commission Gendron. Par conséquent, je crois que d'ici un an, peut-être deux, nous aurons des suggestions définitives de l'Office de révision. Je sais que, pour ma part, je reçois périodiquement des rapports sur des chapitres révisés. Pour le moment, je ne me suis pas mis à la tâche d'examiner les suggestions parce qu'il me semble qu'un code est un ensemble, commencer à examiner cela partiellement ne représenterait pas d'avantages réels. Je pense bien qu'avec l'intensité qu'y mettent le président et ceux qui l'assistent dans sa tâche de réviser le code civil, d'ici un an ou deux nous serons en mesure de présenter enfin au Parlement un nouveau code civil à être discuté.

M. PAUL: Dois-je comprendre que des remarques du ministre se dégage une intention arrêtée chez lui de ne pas procéder à l'amendement de certains chapitres du code civil?

M. CHOQUETTE: Non, excepté si ça devenait absolument nécessaire dans certains cas particuliers; d'ailleurs, nous amendons périodiquement le code civil dans certains domaines limités. Quant à reprendre des chapitres entiers, cela me paraît assez difficile. Le seul qui pourrait souffrir certains amendements, compte tenu de la loi que je mentionnais précédemment au sujet des relations entre propriétaire et locataire, ce serait peut-être le chapitre sur la location qui pourrait souffrir certains amendements à cette occasion.

Entre autres, je puis vous indiquer un amendement possible pour votre réflexion, c'est de changer la date légale de l'expiration des baux. La suggestion que j'ai à faire, à l'heure actuelle,

c'est que les baux devraient légalement se terminer le 30 juin.

M. PAUL: C'est cela.

M. CHOQUETTE: C'est la date qui serait la plus opportune dans l'année parce que c'est après l'année scolaire, c'est en général avant que les gens ne prennent leurs vacances, ce n'est pas immédiatement avant le début du travail ou l'année scolaire, c'est-à-dire le 1er...

M. BURNS: Je ne sais pas, mais est-ce utile, à ce stade-ci, qu'on en arrive aux détails des différents articles?

M. LE PRESIDENT: Toute cette question devrait être discutée à l'article 17.

M. BURNS: Je n'ai pas d'objection, si on veut le faire, mais alors il faudrait permettre au député de Portneuf et à moi-même d'intervenir.

M. CHOQUETTE: Je ne faisais que référence à la demande du député de Maskinongé. Je pensais que c'était d'intérêt général.

M. PAUL: Le ministre a bien fait, parce que j'avais justement une note pour l'inviter à considérer un amendement possible. D'un autre côté, je rejoins le rappel non pas au règlement mais les remarques du député de Maisonneuve. Nous pourrions peut-être garder cette économie que nous avons adoptée depuis le début de permettre une rétrospective générale de la part de chacun des représentants des partis; ensuite, nous pourrons analyser en détail chacun des problèmes.

Il y a un autre point sur lequel je veux glisser rapidement, c'est l'opportunité, pour le ministère de la Justice, de suivre cette politique en vigueur aux Etats-Unis en matière d'accidents d'automobiles, c'est l'indemnité "no fault"; c'est une politique qui a son application et qui a pour but de régler rapidement, quelle que soit la question de responsabilité, les dommages que peuvent encourir certaines personnes impliquées dans un accident d'automobiles. La loi n'a pas encore été concluante quant à ses avantages ou à ses inconvénients.

C'est tout simplement une invitation que je fais au ministre sans que j'aille jusqu'à lui recommander ou lui suggérer de présenter telle loi avant que l'on ait connu toutes les implications et être certain qu'il découle de véritables avantages juridiques d'une telle loi.

M. CHOQUETTE: Est-ce que le député me permettrait sur ce point-là de lui dire que ce n'est pas véritablement ma responsabilité malgré que je m'intéresse à ce problème? Le député de Maskinongé peut en être sûr, c'est plutôt du domaine du ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, qui a la compétence en matière d'assurance, qui a...

M. PAUL: C'est là où je ne rejoins pas du tout le ministre. Dans la suggestion que je lui fais il n'est pas question d'assurance. Il s'agit tout simplement de règlement de réclamations de la part de personnes impliquées dans un accident. Si le ministre se réfère à toute cette économie d'assurance en matière d'automobile, il a raison.

Un dernier point que je voudrais signaler au ministre c'est l'urgence qu'il y a d'amender l'article 91 du code de la route. A l'occasion de l'étude de la Loi du ministère des Transports, j'ai signalé au ministre cette dualité ou cette double interprétation qui existe chez nos juges des Sessions de la paix quant à la liberté qu'ils ont de suspendre ou de ne pas suspendre un permis de conduire d'un chauffeur trouvé coupable de facultés diminuées par la boisson. Le législateur ne fait pas d'obligation au juge mais lui donne plutôt la liberté ou l'option de suspendre ou non le permis de conduire.

Il y a des juges qui interprètent parfaitement le code criminel et je ne sache pas qu'ils se sentent obligés de suspendre le permis de conduire. Mais, il arrive qu'en vertu des dispositions de l'article 91 du code de la route le juge devient un fonctionnaire, un mandataire de l'Etat. Et, il est dit qu'il "doit", d'où une interprétation contradictoire de cet article de la part de nos juges. Il arrive que, dans le même palais de justice, un juge ne suspende pas le permis de conduire d'une personne qui en a réellement besoin pour gagner sa vie, en vertu de cette liberté qu'accorde le code criminel aux juges de ne pas suspendre le permis.

Le juge mettra de côté cette disposition de l'article 91 du code de la route. Je ne nommerai pas les districts judiciaires, mais il y en a d'autres qui se croient obligés de le suspendre. Je respecte l'interprétation juridique qu'ils font de l'article 91 du code de la route. D'un côté, ils ont la liberté de suspendre le permis et, d'un autre côté, d'après eux, ils n'ont pas cette liberté.

Dans certains palais de justice, là où il y a des juges résidents, l'individu, accusé d'avoir les facultés diminuées par la boisson, va plaider nécessairement non coupable devant tel juge, sachant que tel juge va suspendre le permis de conduire, qu'importe le métier ou la profession de celui qui est traduit devant lui, qui est trouvé coupable ou qui plaide coupable. Alors, le justiciable, sur les conseils de son avocat, va plaider non coupable et la cause revient la semaine suivante. Là, on va se présenter devant un autre juge qui lui, pas parce qu'il est plus humain, mais parce qu'il a une interprétation juridique différente — on sait que c'est fréquent en droit — mettra de côté les dispositions de l'article 91 du code de la route, se sentant exclusivement lié par les dispositions et par la liberté que lui accorde le code criminel.

Il ne s'agit pas d'adresser un blâme à l'une ou l'autre de ces écoles de pensée ou d'interprétation, mais cela jette de la confusion, du

discrédit sur la jsutice. Je pourrais donner au ministre le nom de certains juges qui m'ont parlé de ce problème et qui tous veulent être libérés de cette obligation que leur imposent les dispositions de l'article 91 du code de la route. S'il y avait possibilité d'amender ce règlement — je sais que M. Normand peut trouver une solution rapide — sans que l'on soit dans l'obligation d'attendre toute cette réforme ou ces amendements ou cette nouvelle loi qui devra être sûrement adoptée un jour, pour rendre le code de la route plus moderne, je sais que, dès maintenant, nous corrigerions une situation qui, dans certains cas, occasionne des tragédies.

Il est, à ma connaissance personnelle, qu'un juge, entre autres, a huit ou dix délibérés avec l'espoir que le législateur intervienne pour qu'il se sente normalement et intellectuellement libéré de l'obligation que, d'après lui, lui impose le législateur en vertu de l'article 91. Le ministre peut être assuré que je peux lui donner le nom de certains juges; je puis lui montrer de la correspondance; je puis l'inviter à communiquer avec eux, non pas que le ministère de la Justice doive ou peuve intervenir dans l'administration de la justice. Je suis même au courant que l'association des juges — je ne sais si c'est le terme exact —...

M. CHOQUETTE: Conférence des juges.

M. PAUL: ...la Conférence des juges a été également saisie de ce problème. Je crois que ce n'est pas créer une injustice. C'est tout simplement dans le but de permettre une interprétation uniforme de la loi. Personnellement, je respecte les juges qui ont une interprétation de la loi qui les empêche, d'après eux, de ne pas suspendre le permis de conduire comme, d'un autre côté, je respecte l'opinion de ceux qui disent: Bien, vu que nous sommes en matière criminelle, nous ne sommes pas liés par des dispositions d'un texte de loi provincial. Il s'agit, tout simplement, à mon humble point de vue, de clarifier une situation, de dégager la conscience de certains juges sans créer de favoritisme. Actuellement, la situation prête à confusion. Un justiciable ne peut comprendre l'interprétation que peut donner un juge qui dit à celui qui a plaidé coupable ou qui est trouvé coupable devant lui: Ecoutez, en vertu de la disposition du code criminel, j'ai la liberté de ne pas suspendre votre permis de conduire. Mais, en vertu des dispositions du code de la route, je suis dans l'obligation de suspendre votre permis. Alors qu'un compagnon de travail, quinze jours après, se présentant devant un autre juge pour la même infraction, bénéficie d'une clémence ou d'une discrétion du juge que lui accorde la loi.

C'est un point que je voulais, de nouveau, signaler au ministre. Je suis sûr qu'il pourra relire les propos qu'il avait tenus d'une manière réservée à l'occasion de l'étude du projet de loi modifiant la Loi des transports.

M. le Président, je m'excuse d'avoir peut-être été un peu long mais j'ai cru de mon devoir de toucher à quelques points de l'administration de la justice, avec l'assurance et un engagement moral de ma part, de collaborer, avec le ministre et ses conseillers, à une étude non pas expéditive des crédits mais une étude objective, de manière que nous puissions permettre au ministre de se pencher sur des lois bien importantes, comme celles dont il nous a fait part cet après-midi et surtout pour lui donner tout le loisir de présenter des amendements à la loi 70 et au code de la route. Je vous remercie, M. le Président, pour votre patience et votre indulgence.

M. LE PRESIDENT: Le député de Portneuf. M. CHOQUETTE: Me Drolet.

M. DROLET: M. le Président, c'est avec plaisir que j'ai l'intention d'exprimer brièvement mes vues et celles de mon parti sur l'orientation qu'a tracée le ministre cet après-midi.

Vous me permettrez quand même au début, M. le Président, de saluer tous les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice. L'année dernière, je n'étais pas le représentant du parti et je ne connaissais que quelques figures. Cet après-midi, le ministre nous a présenté tous ses hauts fonctionnaires. Comme diraient les gens de par chez nous, cela m'a l'air d'être du bon monde! Je sais que nous aurons, durant l'étude de ces crédits, les réponses aux questions que nous poserons lors de l'étude de chacun des articles du budget du ministère de la Justice.

Il n'est certainement pas facile, pour un simple député comme moi, de faire tout le tour d'horizon qu'a fait le ministre cet après-midi ou que vient de faire l'ancien ministre de la Justice, parce que, comme on le dit si bien, je ne suis qu'un simple avocat populaire, n'ayant aucun de ces titres. Quand même, je vais exprimer brièvement l'idée que le parti créditiste a toujours dégagée en ce qui concerne la justice au Québec.

Le ministre a commencé son intervention en nous disant qu'une priorité de son ministère était nécessairement le maintien de l'ordre et de la paix dans la province. C'est sûr que nous endossons ce point que le ministre a élaboré. Nous avons toujours été en faveur de l'ordre et de la paix, spécialement dans les situations assez difficiles où s'est trouvé le gouvernement depuis quelques années. Dans les années que nous traversons, il n'est certainement pas facile d'être ministre de la Justice. Dans les périodes de contestation que nous vivons, le gouvernement doit certainement s'adapter à cette situation. Nous l'avons toujours appuyé lorsqu'il a réclamé, si vous voulez, ce maintien de l'ordre et de la paix.

Toutefois, je dois quand même mettre le ministre en garde.

Tout en appliquant cette politique de la loi et l'ordre, comme on dit assez communément, je pense que le ministre devrait faire également attention, dans les situations les plus tendues, de ne pas amplifier ou dramatiser la situation. Nous avons peut-être vécu dans les semaines passées, des jours assez difficiles et parfois nous nous posions la question à savoir si la situation qui existait autour du parlement ne provoquait pas certaines gens qui voyaient toutes ces barrières, ces policiers et l'escouade antiémeute. Tout en maintenant la paix, l'ordre, le respect de la loi, il faut quand même faire attention pour ne pas dramatiser la situation.

Et je pense que, chaque fois que le ministre demandera le support, l'appui de l'Opposition dans les situations difficiles, lorsqu'il ne créera pas d'Etat policier, il aura toujours l'appui de notre parti.

Le ministre a souligné en deuxième lieu le respect de l'autorité, le respect de l'Etat, le respect des tribunaux. Là-dessus, nous devons appuyer fermement le ministre. J'ai remarqué à différentes occasions que certaines personnes qui ont des titres, soit des chefs de syndicats ou d'autres personnalités assez importantes au Québec foulaient aux pieds l'autorité. Et je me dis que les jeunes qui sortent des écoles et qui voient ces choses-là se disent: M. Untel qui a des titres, de hautes fonctions ne se gêne pas pour sacrer contre le gouvernement, contre les juges, contre le ou les ministres. Je pense que c'est certainement manquer de respect à l'autorité et ce n'est pas un exemple à donner à notre jeunesse.

Et ces gens-là viennent nous voir à nos bureaux et se posent des questions. J'ai justement un exemple typique. La fin de semaine où certaines personnes sont allées manifester devant la prison à Orsainville, j'ai reçu à mon bureau un pauvre cultivateur qui venait de se faire arrêter par la police. Le type était peut-être en état d'ébriété et il a commencé à enguirlander le policier qui l'a arrêté. Il a eu une condamnation plus sévère et c'était tout à fait normal. Mais, au même moment, il écoutait à la radio, comme la majorité de nous l'ont fait, un discours d'un chef syndical devant la prison d'Orsainville où on entendait seulement sacrer en parlant des juges, du ministre du Travail ou du premier ministre.

Ces gars-là circulent quand même et sont en liberté. Si on veut que tout le monde respecte l'autorité, il faut quand même que les lois soient respectées.

M. BURNS: Est-ce que le député voudrait qu'on arrête les gens parce qu'ils sacrent?

M. PAUL: Ce n'est pas lui, c'est Dumont.

M. DROLET: Non, écoutez, lorsqu'on entend dire des "Christ" de juge, des choses semblables... Quand on demande à nos jeunes dans les écoles de respecter l'autorité, je pense qu'il est tout à fait normal que ceux qui dirigent des mouvements, des partis politiques, encore plus à l'échelle de la province, sachent vivre. S'ils ne savent pas vivre, ils n'ont qu'à démissionner de leurs fonctions.

C'est dans ce sens-là que je vois le respect de l'autorité. Je suis convaincu que si le Québec a un gouvernement qui veut diriger la province dans la dignité, même si de temps à autre il doit être ferme, il aura le respect de tous ses citoyens.

Le ministre a parlé également de la situation que nous venons de vivre alors que, semble-t-il, nous étions au bord de la catastrophe. Le ministre a fait allusion au fait que dans le mouvement syndical on devait faire un ménage. Je crois que c'est tout à fait normal. Que ce soit dans un mouvement syndical, que ce soit dans un parti politique, dans n'importe quoi, de temps à autre un ménage doit se faire.

Si tout le monde jouait le véritable rôle qu'il doit jouer, je pense que ça irait beaucoup mieux. Que les hommes politiques qui sont à la tête de la province fassent de la politique de façon honnête et sincère, que les syndicats fassent du syndicalisme de façon honnête et sincère. Je pense donc que les deux peuvent jouer un véritable rôle au Québec et les tensions seront moins fortes, si tout le monde est à sa place.

Qu'on le veuille ou non, le régime dans lequel nous vivons, s'il n'est pas réformé par des hommes d'ordre, sera détruit dans le désordre, justement par des hommes de désordre. Le ministre a raison de demander que le respect de l'autorité soit maintenu dans la province de Québec.

Il a également parlé d'essayer de tenir le pendule plus au centre, car, depuis quelques années, ce pendule va vers la gauche. Là-dessus, il a certainement raison. En effet, nous l'avons crié depuis notre entrée ici, au Parlement; De plus en plus nous nous en allons vers la gauche, de plus en plus, nous nous dirigeons vers un Etat socialiste. Nous avons justement à la tête du pays un organisme qui est censé renseigner les gens — je parle de Radio-Canada — qui, assez souvent, empoisonne notre jeunesse. Je pense qu'un véritable ménage s'impose à cette société d'Etat.

Par la suite, le ministre a fait allusion à l'action contre la criminalité. Une enquête sur le crime organisé est censée débuter, je crois, vers le 15 septembre. Le ministre avait annoncé cette enquête-là, je crois, en février 1972. Dès ce moment-là, nous avions appuyé cette enquête. Même, nous avions dit au ministre, à ce moment-là, que nous trouvions curieux de voir qu'il annonçait une enquête en février et qu'elle ne débuterait qu'en septembre. Connaissant la façon de fonctionner des gens de la pègre et de la mafia, nous avions dit au ministre — d'ailleurs, j'avais échangé avec le ministre de la correspondance là-dessus — que ces gens-là pourraient se préparer à faire face à cette enquête vu

qu'elle avait été annoncée trop longtemps d'avance.

Cette enquête-là s'imposait et j'espère qu'elle donnera des résultats, que ce ne sera pas seulement une enquête comme on en a déjà trop vu dans la province, des enquêtes qui assez souvent n'ont servi qu'à placer certaines personnes et qui n'ont pas abouti à grand-chose. Alors, j'espère que cette enquête-là mettra véritablement knock-out le terrorisme au Québec et le crime organisé.

Le ministre a laissé voir que, dans le moment présent, au point de vue du terrorisme, c'était assez calme. Eh bien, il y a quand même, tous les jours, je crois, si on écoute les nouvelles, à Montréal, des meurtres, des règlements de comptes. Alors, je pense que la situation est, quand même, assez tendue. Il faut absolument que cet état de choses soit redressé dans la province de Québec.

Le ministre nous a parlé également du premier effort qu'il avait fait de réforme administrative à l'échelle de la justice par la publication de son livre blanc, en juillet 1971, je crois. A ce moment-là, nous avions étudié ce livre blanc et, par la suite, le ministre a annoncé quelques projets de loi. Il nous a annoncé également que certains autres projets de loi seraient déposés sous peu, concernant par exemple, l'intégration régionale des forces policières municipales. Il a également parlé du bill 10. Concernant ces projets de loi, tout comme le ministre, nous continuerons à entendre les mémoires qui nous sont présentés et, lorsque le bill sera étudié à l'Assemblée nationale, nous prendrons position.

Le ministre a également fait allusion à un autre projet de loi qu'il est sur le point de présenter concernant la magistrature, la qualité administrative, le comportement des magistrats et la nomination des nouveaux juges. Depuis deux ans, nous avions réclamé un tel projet de loi et nous serons très heureux de l'accueillir lorsque le ministre en fera le dépôt à l'Assemblée nationale.

La même chose concernant le projet de loi de la Régie des loyers. Je sais que, depuis quelques années, il existe certains problèmes entre propriétaires et locataires et, si le ministre a trouvé une solution par un projet de loi, nous serons très heureux de l'étudier à l'Assemblée nationale. Le ministre a également fait allusion à un deuxième livre blanc sur l'administration de la justice, qu'il doit présenter à l'automne, je crois. Encore là, s'il s'agit de nouvelles réformes, qu'il a déjà amorcées par la présentation de nouvelles lois à la suite de son premier livre blanc c'est tant mieux. Nous pourrons avoir de nouvelles lois qui faciliteront l'accès à la justice à tous les citoyens du Québec.

Le ministre a également fait allusion aux relations fédérales-provinciales, sujet dont nous entendons parler ces semaines-ci à l'Assemblée nationale. Le ministre nous a laissé voir que ses relations avec son collègue du fédéral étaient bonnes, même excellentes, et qu'il ne semblait pas y avoir de conflit. Tout comme mon collègue de Maskinongé, j'espère qu'il passera la bonne recette à certains de ses collègues du cabinet des ministres qui ne semblent pas l'avoir.

Je demande au ministre actuel de la Justice de continuer à négocier avec le fédéral mais toujours de façon très ferme avec ce gouvernement que je considère parfois très dangereux, surtout lorsqu'on sait qui le dirige. J'espère que le ministre de la Justice fédéral, qui, semble-t-il, a quelques dollars en trop — $200,000 qu'il serait prêt à verser aux cliniques juridiques — pourra verser ce montant d'argent aux provinces tel que le ministre de la Justice nous l'a dit cet après-midi. Les provinces, comme je connais le ministère de la Justice du Québec, sauront certainement dépenser à bon escient ces sommes d'argent. Ceci permettra au gouvernement fédéral de se mettre le nez où il a affaire et de ne pas le mettre dans nos affaires.

Le ministre a continué en nous parlant du budget total de $135 millions et des employés du ministère de la Justice. Je vais réserver ces choses-là pour un peu plus tard parce que nous allons étudier les articles un à un. J'aimerais quand même attirer l'attention du ministre, avant d'en arriver à l'article 14 sur la Commission de contrôle des permis d'alcool. Le ministre est au courant — nous avons déjà soulevé le problème à quatre ou cinq reprises — c'est au sujet de l'émission de permis de vente de cidre à des chafnes de magasins, comme Steinberg, alors que partout, dans nos comtés ruraux, nos petits épiciers du coin crient au secours. Lorsque nous serons à cet article, j'aurai certainement quelques questions à poser au ministre de la Justice.

Dans l'ensemble, le tout d'horizon qu'a fait le ministre, je l'ai revu d'une façon très brève, mais j'y reviendrai article par article. Je demande au ministre, en terminant, de rendre les lois qu'il a l'intention de présenter, plus humaines, un peu comme son collègue le ministre du Revenu nous l'a déjà dit, lorsqu'il a présenté cinq ou six projets de loi concernant son ministère. Il nous avait dit à ce moment-là: Je présente des lois pour humaniser le ministère du Revenu. Je demande au ministre de la Justice de rendre ces lois plus humaines car les petites gens — je parle assez souvent des petites gens parce que nous sommes justement dans des milieux ruraux — ont énormément de difficultés parfois à comprendre toute la complexité qui peut exister à l'échelle du ministère de la Justice.

Si les lois sont rendues plus faciles, plus accessibles, plus humaines, ce sera très louable et nous serons toujours derrière le ministre de la Justice.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, quitte à jeter

une note discordante dans le débat, je dois dire, dès le départ, que j'ai été très déçu par l'exposé du ministre de la Justice. En l'écoutant, je me rappelais les jours qui ont suivi le 29 octobre 1970 où des gens, qui savaient que je connaissais un peu le ministre de la Justice comme avocat, comme confrère de Montréal, me disaient: Que penses-tu de Jérôme Choquette comme ministre de la Justice? Et, très objectivement, j'avais répondu, à l'époque: Il nous fera sans doute un bon ministre de la Justice parce que c'est un vrai libéral, dans le bon sens du mot. Quand je dis; dans le bon sens du mot, il n'est évidemment fait aucune allusion au parti du même nom. J'avais passé cette remarque et j'avais maintenu cette opinion jusqu'au mois d'octobre 1970 où déjà j'ai commencé à être ébranlé dans cette opinion. Mais je me suis dit: C'est peut-être un égarement temporaire de la part du député d'Outremont.

Mais quand je l'ai entendu, cet après-midi, nous dire, sans pratiquement sourciller, que la première fonction du ministère de la Justice c'était le maintien de l'ordre, j'ai dit: Cela y est, je me suis sérieusement trompé ou il a changé en cours de route. Je me rappelle que, l'année dernière, lors de l'étude des crédits, j'avais dit au ministre de la Justice ma conception de cette fonction qui, à l'époque et peut-être encore aujourd'hui pouvait passer pour une conception idéaliste. J'ai toujours pensé qu'un ministre de la Justice était le reflet dans la population de ce qu'elle désire le plus, c'est-à-dire voir l'espèce de reflet de l'Etat protecteur et de l'Etat généreux. Et quand j'entends le ministre de la Justice nous dire que sa première fonction en tant que ministre de la Justice c'est d'assurer le maintien de l'ordre, je me dis qu'il y a quelque chose de grave qui se passe. Et là, je regarde les choses qui se sont passées dans les dernières semaines et je pourrais même dire dans les dernières années et ça me permet de comprendre un certain nombre de choses.

Permettez-moi, M. le ministre, de ne pas être d'accord avec vous en disant que la première fonction du ministère de la Justice c'est le maintien de l'ordre. La première fonction du ministère de la Justice c'est la protection de la collectivité. Vous allez me dire que je fends peut-être les cheveux en quatre, mais je pense que c'est significatif, à mon avis, de ce qu'on appelle généralement l'approche "law and order" d'un ministère de la Justice. A mon avis, d'abord et avant tout, ce que la population doit sentir dans l'administration de la Justice au Québec c'est la protection de la collectivité. Par le moyen du maintien de l'ordre, la paix, d'accord. Mais je trouve drôlement significatif qu'on dise que la première fonction soit le maintien de l'ordre.

Encore une fois, je ne veux vraiment pas fendre les cheveux en quatre, et je vous réfère au débat de l'année passée où, semble-t-il, le ministre avait été d'accord sur ma conception quand je lui parlais de l'Etat au sens protecteur, généreux du mot, c'est-à-dire ce que le petit peuple au Québec demande et ce qu'actuellement il requiert le plus, ce dont il a le plus besoin. Quand on tente d'interpréter ce besoin par le fait que l'opinion publique est contre un certain nombre de gens qui font des récriminations dans la société, je pense qu'on fait une grave erreur, qu'on ne comprend pas ce sens fondamental de ce besoin qui existe chez les gens. Ce n'est pas un besoin de "law and order" au sens habituel du mot, c'est un besoin de protection collective, ce qui est bien différent. Je pense qu'on regarde le dessous de la médaille alors que la face opposée nous est présentée, je pense que c'est le problème.

J'ai été étonné d'entendre le ministre de la Justice, dans le concept de ce que je viens d'exposer, nous dire que le pendule doit revenir au centre. Je lui pose la question: Qui est-il, lui, pour pour nous dire où est le centre? Qui est-il pour nous dire que ça doit aller au centre? Moi, je pense que c'est un problème primordial actuellement dans la société.

Est-ce ce que veut le Québec actuellement? Le Québec veut-il que les gens s'en aillent à un centre? Et quel centre, soit dit en passant? Qui va décider de ce centre? Il faut que je cite le ministre; je trouve ça trop drôle! Le 19 mars 1969, dans le débat auquel se référait le député de Maskinongé, cet après-midi, le ministre de la Justice, dans un très bon discours — soit dit en passant, à ce moment-là — sur la politique de logement, etc. analysait — j'ai pris la peine de le lire au grand complet — les divers principes de la commission Hellyer et il le faisait, je pense, de façon très compétente.

Vers la fin de son intervention, il nous disait; "Tout cela prouve en somme que nous vivons dans un monde très compliqué, que les choses ne peuvent pas se faire par la volonté d'un seul centre de décision, que tout cela demande la collaboration de nombreux centres de décision." Je pense que c'est cela peut-être que le ministre ne comprend pas. C'est que dans le Québec, tout phénomène partisan étant mis de côté — j'insiste sur cela, ce n'est pas une question de dire que l'Unité-Québec a tort, que les libéraux ont tort, que les créditistes ont tort et que nous sommes les seuls à avoir raison, pas du tout; mettons cela de côté et qu'on ne m'accuse pas de cela, ce n'est pas du tout dans ce sens que je le dis. —

Depuis 1969 et, soit dit en passant, c'était en mars 1969, c'est-à-dire bien avant les fameux événements d'octobre et novembre 1969, bien avant ce fameux bill no 63 qu'on a rentré de force dans la gorge de la population, depuis ce temps-là, il y a bien des choses qui ont changé. Cela m'étonne qu'un ministre de la Justice que je respecte énormément, comme homme, comme individu, ne comprenne pas qu'actuellement il se passe un certain nombre de choses au Québec qui ne peuvent pas être réglées par un simple énoncé de maintien de l'ordre et de la paix publique. Je pense — et je suis obligé d'y revenir, je m'excuse, si on est déjà presque un an et demi en arrière — que, déjà, il y avait des

signes de cette attitude lors de la crise d'octobre 1970. Il ne faudra jamais l'oublier, cette chose-là. Moi, je ne l'oublierai pas en tout cas. J'espère que l'ensemble de la population ne l'oubliera pas et, surtout, j'espère que le ministre de la Justice ne l'oubliera pas. Il y a quelque 450 personnes qui ont été arrêtées pour des périodes variant entre 15 jours et 4 mois, et comme bilan total de cela, on se retrouve, après avoir supprimé des droits fondamentaux pendant une période extraordinaire — même des pays qui sont renommés pour faire fi d'un certain nombre de droits fondamentaux se sont montrés complètement scandalisés par le fait qu'on ait mis de côté, pendant une période aussi longue, des droits fondamentaux — au bout de deux ans, maintenant qu'on peut le regarder à tête reposée, maintenant qu'on voit qu'il y a eu un certain nombre de procès, de tentatives de procès dans certains cas, on se retrouve dis-je à peu près avec une dizaine de personnes. Encore là, ce n'est pas encore certain, et je ne veux pas me prononcer sur un certain nombre de procès qui sont en cours, mais on se retrouve quand même... Non, M. le Président, je ne me suis pas prononcé, mais je pense que le chiffre est vérifiable. Il y a à peine une dizaine de personnes qui restent impliquées par ces événements. Impliquées, je ne me prononce aucunement sur une question de culpabilité ou de non-culpabilité sur le plan judiciaire...

M. LE PRESIDENT: Je remarque que le député de Maisonneuve se réfère à une situation qui existait alors, je le concède, en octobre 1970...

M. BURNS: Oui.

M. LE PRESIDENT: ... mais qui était tout simplement l'application de la Loi des mesures de guerre ordonnée par un autre gouvernement...

M. BURNS: Vous ne m'avez peut-être pas suivi, et je vous conseille de me suivre de très près.

M. LE PRESIDENT: Je vous ai suivi, et c'est justement pour cela que je vous rappelle à l'ordre.

M. BURNS: Avec tout le respect que j'ai pour vous, je pense que vous n'avez peut-être pas suivi le début de mon exposé. Je vous dis tout simplement que je cite cela à titre d'exemple de mon énoncé de base. Je dis que, dès ce moment, je sentais cette espèce d'attitude que je réprouve actuellement chez le ministre de la Justice et probablement dans l'ensemble de son ministère. Déjà, cela se faisait sentir. Et comme résultat de la crise d'octobre — je termine là-dessus, si c'est cela qui vous inquiète — comme résultat, je dis qu'on s'est retrouvé, après voir mis quelque 450 personnes derrière les barreaux en vertu des pouvoirs qui existaient et qui étaient évidemment de juridiction fédérale à l'origine, avec une dizaine de personnes environ véritablement impliquées. Encore là, ce n'est pas sûr, parce qu'elles sont encore devant les tribunaux.

Selon moi, quand le ministre de la Justice nous dit, et qu'il s'en inquiète, qu'actuellement il n'y a pas de respect de l'autorité des tribunaux, je pose très haut la question et je vous le dis sans aucunement sourciller: Est-ce qu'ils le méritent actuellement, l'Etat et les tribunaux, ce respect qu'on réclame à hauts cris à leur sujet? Je me pose très sérieusement la question.

Encore une fois, j'adresse ma critique au ministre de la Justice. Je la lui ai déjà faite en Chambre. Dans le conflit récent, j'ai mentionné, à l'occasion d'un débat, qu'il fallait très bien comprendre la situation. Je dis encore une fois ce que je disais tantôt: Ce phénomène de crise au Québec, il ne faut pas se gêner pour le dire, il y en a un. Que l'ensemble des Québécois se cherchent actuellement, il n'y a aucune espèce de doute là-dessus. Je vais dire comme le ministre: C'est sûr. Mais, plus particulièrement à ces moments-là, le ministère de la Justice, dans ma conception ou dans la conception de mon parti, doit être extrêmement prudent. Encore une fois, dans le conflit récent, en vue de maintenir, je ne sais vraiment pour quelle motivation, cette espèce d'image de "law and order", on a dit: On est en plein conflit. Le bordel est poigné au Québec. Cela ne fait rien, on va porter tout de suite plainte sur les injonctions.

A ma connaissance, dans les conflits ouvriers, c'est la première fois qu'un ministre de la Justice agit ainsi. En cela je rends hommage au député de Maskinongé, même si je n'ai pas toujours été d'accord avec lui dans le temps où il était ministre de la Justice et que j'étais de l'autre côté de la clôture, d'avoir, en certaines occasions, tenté de tenir compte de ce phénomène social du flou qui existait déjà au moment où il était ministre. Je rends surtout hommage au député de Missisquoi, alors qu'il était ministre de la Justice. Il avait très bien compris ça. Il le comprend encore, je crois. On l'a noté par certaines de ses dernières interventions. Quand un conflit social d'importance existe, on ne fait pas exprès pour aller mettre de l'huile sur le feu. Je pense que c'est ce qu'on a fait en procédant de la façon dont on a procédé alors que tous les esprits étaient surchauffés, tant par les interventions judiciaires que par l'intervention législative, le bill no 19. On n'a pas besoin d'insister là-dessus.

Qu'on prenne la peine de porter plainte, qu'on l'ait fait, je ne blâme pas le ministère. Mais il y a divers moyens de voir à ce que, tout en portant plainte, on ne surchauffe pas l'atmosphère. Je n'ai que quelques cas à vous citer, par exemple, dans les cas où il y a eu des plaintes pour le non-respect d'injonctions. Vous

avez eu le cas du SPEQ, le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec. Vous avez eu des gens qui ont été condamnés à la prison. Vous avez eu des gens dont la peine a été, d'ailleurs, purgée, c'est-à-dire 20 jours de prison dans le cas d'un certain nombre de directeurs du SPEQ. Je vous cite également le cas de la Commission des transports, en 1967, où, encore une fois, il y a eu des sentences de prison, où on est allé en appel. L'appel a réduit la sentence de prison, quelque neuf ou dix mois plus tard, à une amende. Mais au moins, dans ces cas, je pense, qu'on l'ait voulu ou qu'on ne l'ait pas voulu, il reste quand même qu'on n'a pas pris des décisions, surtout ce que je trouve plus important, on n'a pas forcé les tribunaux à prendre des décisions à un moment où l'atmosphère était surchauffée. Les décisions, je le dis en toute liberté et ayant bien pensé à ce que je dis, qu'on a vécues devant les tribunaux auraient fort probablement été toutes différentes si elles avaient été prises dans d'autres circonstances, dans d'autres moments et dans d'autres contextes.

C'est ça que je trouve significatif de toute cette attitude. Le ministre et les gens qui ont fait du droit criminel connaissent la fameuse motion de changement de venue. Au criminel, il y a une procédure qui fait que, lorsqu'on pense que les circonstances, le milieu, etc. peuvent nuire à l'accusé, la défense peut faire une motion qu'on appelle une motion de changement de venue pour transférer l'accusé de district judiciaire parce que le crime est peut-être trop crapuleux. Par exemple, le viol d'une adolescente de douze ans dans un milieu où vraiment cela va être bien difficile de juger objectivement un accusé. Cela existe au code criminel. On prend l'accusé, si le juge trouve qu'il y a danger d'injustice pour l'accusé, et on l'envoie dans un autre district judiciaire, de préférence un district où l'accusé va être noyé dans un grand nombre de causes.

Je fais l'analogie entre les deux cas. Je pense qu'en matière de ce qu'on vient de vivre on aurait dû, sinon faire un changement de venue puisque ce n'était pas possible en vertu des plaintes qui étaient portées, en vertu des demandes de mépris de cour qui étaient formulées parce qu'on était de juridiction civile, tout au moins, par analogie, utiliser le changement de venue et, en l'occurence, au lieu de changer de district judiciaire, changer de période de temps, attendre que le calme soit revenu.

Encore une fois, pour moi, c'est significatif de cette attitude de "law an order" qui, à mon avis, dans le cas que je viens de citer — et c'est encore plus grave — ne nuit pas simplement à l'image de l'Etat, du ministère de la Justice, mais nuit très sérieusement à l'opinion que le simple citoyen, le citoyen ordinaire — puisque c'est le mot à la mode actuellement — se fait de l'administration de la justice qui, soit dit en passant, n'est pas très populaire d'avance, actuellement, mais à part ces phénomènes, dans l'esprit de la population.

Je vous vois froncer les sourcils, M. le Président, mais nous sommes ici pour nous dire des choses et j'ai l'intention de les dire. Je ne pense pas commettre de mépris de cour en disant cela.

M. LE PRESIDENT: Pour une autre fois, il faut que j'admettre que je regrette d'être assis ici, parce que j'aimerais vous donner la réplique.

M. BURNS: M. le Président, je vous permettrai, sans aucunement riposter, de demander d'être remplacé. Vous viendrez vous asseoir et vous me donnerez la riposte. Cela me fera plaisir. Le député de Bourget se dit déjà prêt à aller vous remplacer comme président, si vous voulez venir vous asseoir.

M. le Président, je le dis et j'en ai pleinement conscience. Sur ce point, quand je vous ai vu froncer les sourcils, permettez-moi d'ouvrir cette parenthèse. Je me dis, tout simplement, que, si la justice, au Québec, n'est pas suffisamment forte pour recevoir de telles critiques, elle ne mérite pas, actuellement, d'être soutenue. Moi, je pense qu'elle mérite d'être soutenue. Cependant, elle mérite de recevoir ces critiques, parce que je pense aussi qu'elle est assez forte pour les subir.

M. CHOQUETTE: Le député me permettrait-il une question?

M. BURNS: Certainement, M. le Président.

M. CHOQUETTE: Le député m'accuserait-il, comme M. Laberge, de tripoter la justice?

M. BURNS: M. le Président, le ministre tente de me faire dire des choses que je n'ai pas dites. Peut-être que, dans les termes de M. Laberge, cela veut dire exactement la même chose. M. Laberge vous parle de tripotage de la justice; moi, je vous parle de mauvaise utilisation de la justice ou, au moins, d'utilisation intempestive de la justice.

Croyez que, dans les milieux populaires, il est très difficile à comprendre — peu importe l'opinion qu'on se fasse, d'une part, du ministère de la Justice, d'autre part, des chefs syndicaux — qu'en l'espace de quelques jours ou même de quelques semaines le cas des chefs syndicaux — je ne parle pas de Pepin, Laberge et Charbonneau, mais je parle des 50 autres aussi ou à peu près — soit venu devant les tribunaux avec une rapidité extraordinaire et que le jugement ait été rendu avec une rapidité extraordinaire. C'est très difficile à comprendre lorsque les gens font le parallèle avec leur propre petit accident d'automobile, qui trame devant les tribunaux pendant trois ou quatre ans.

Le ministre, je le sais, me dira que ce n'est pas le même cas. En matière d'injonctions et en matière de conflit, on agit de façon plus rapide. C'est vrai. D'autre part, c'est, quand même, le ministère qui avait l'initiative des procédures. Il

pouvait attendre un moment plus favorable pour faire entendre ces causes et, surtout, pour ne pas passer pour un Zorro national, pour ne pas passer pour un grand justicier, pour ne pas passer pour un esprit vindicatif.

Je pense que c'était important. Là, je vous donne ma conception. Nous sommes ici, d'ailleurs, pour cela. Je vous la donne sans aucune restriction, c'est-à-dire qu'il y a des restrictions, parce que j'utiliserais peut-être un autre langage, à l'occasion. J'essaie de vous donner mon opinion là-dessus. En somme, M. le Président, je pense que cette attitude, que je critique actuellement — on s'en est rendu compte dans d'autres domaines, comme dans celui de l'application d'un certain nombre de règles en matière de relations patronales-ouvrières — est teintée d'une incompréhension totale de la situation. Je le regrette très sincèrement. Encore une fois, ce ne sont pas des remarques d'ordre partisan. Ce sont des remarques à long terme. Ce que j'espère, c'est qu'on pourra à long terme s'en remettre au point de vue social, de ces attitudes.

Cela, à mon avis — encore une fois, je reviens à la magistrature elle-même — laisse entendre, dans l'esprit de la population, que non seulement le ministère public, non seulement le ministère de la Justice, non seulement l'Etat, mais les juges eux-mêmes se sentent personnellement visés dans ces cas.

Et ça aussi c'est un autre danger. Peut-être encore plus grave, encore une fois dans l'arrière-plan d'une société en mouvement. S'il y a quelqu'un ici qui soit prêt à me dire que la société actuelle au Québec n'est pas en mouvement, je suis prêt à écouter ses arguments, mais vous avez besoin de travailler fort pour me convaincre et convaincre bien du monde au Québec.

On a l'impression que les juges, par ce phénomène-là, se sentent directement visés. On n'a qu'à voir ce qui est arrivé récemment à un avocat du nom de Robert Lemieux — même si je disais un avocat de Montréal, tout le monde saurait que je parle de Robert Lemieux — qui fait tout simplement, à mon avis, son devoir et se fait rappeler à l'ordre. Et je ne suis pas le seul à le penser, le Barreau le pense aussi, le Barreau, la grosse organisation corporative de droite au Québec, pense ça aussi imaginez-vous! Quand il est rendu à penser ça, je me dis que je n'ai peut-être pas aussi tort que ça.

M. HARDY: Le Barreau veut sauver sa peau actuellement.

M. BURNS: Vous avez votre opinion personnelle sur le Barreau, mais il reste quand même que, quand le Barreau lui-même se plaint d'une telle situation, je me dis... Non, je vous dis que c'est un reflet d'une attitude du ministère de la Justice. Je ne critique pas le juge. Il est poigné là-dedans, dans cette situation-là. On a fait faire des choses. Qu'on me comprenne bien, je ne tente pas de prétendre que le ministre de la Justice prend le téléphone et appelle le juge, comme ça se faisait dans le temps de M. Duplessis. Je ne pense pas du tout ça de la part du ministre de la Justice. Du moins, je n'ai pas de preuve pour pouvoir le dire.

M. CHOQUETTE: Le député est un avocat d'expérience et un avocat intelligent au surplus. Est-ce qu'il trouve qu'il est normal, acceptable qu'un avocat expose dans des procédures, quelles qu'elles soient, ce qui serait, selon lui, les délibérations d'un jury? C'est un autre aspect de la situation qu'il faut prendre en considération.

M. BURNS: Vous m'avez, je pense, M. le ministre, très mal compris si vous posez la question que vous posez là. Je ne discute pas du tout comme tel du fait que Me Lemieux ait fait ou n'ait pas fait un certain nombre de choses. Ce n'est pas du tout ça que je fais. Qu'il l'ait fait, qu'il ait déclaré ça, il a peut-être tort, il a peut-être raison, ce n'est pas à moi à le juger, actuellement il y a d'autres instances qui devront le juger.

Mais quand je vous parle de juges qui se sentent personnellement visés, c'est que devant ça, de façon instanter, un tribunal ordonne —chose que je n'ai jamais vue, et j'aimerais bien qu'un des avocats à la table nous dise qu'il a déjà vu ça — au procureur de la défense de témoigner dans sa propre cause. Moi je n'ai jamais vu ça. Est-ce qu'il y a eu d'autres cas à votre connaissance?

D'une part, si ce n'est pas un juge — je ne parle pas du juge Barbeau comme tel, je parle des juges actuellement, le juge Barbeau se trouve être celui qui a fait ça — qui se sente personnellement visé, je ne comprends pas pourquoi il aurait fait ça.

Deuxièmement, que, de façon instanter aussi, il rende une décision sans prendre le temps d'y réfléchir. Et d'ailleurs le député de Maskinongé, de façon peut-être plus discrète que moi — mais en tout cas je ne veux pas interpréter son opinion — a laissé entendre que ce serait peut-être une bonne chose, dans les cas de mépris de cour, qu'on procède par voie d'accusation au lieu d'agir de façon sommaire.

C'est d'ailleurs l'opinion de la cour d'Appel du Québec. C'est d'ailleurs l'opinion d'un des juges probablement les plus respectables au Québec, l'honorable juge Lucien Tremblay —lui, le mérite, le titre d'honorable — le juge en chef de la cour d'Appel. Et justement ce même juge, dans la cause d'Hébert — je m'excuse auprès du ministre de la Justice, je lui ai déjà cité cette cause-là dans un autre débat, mais ça m'avait bien frappé — le juge en chef de la plus haute cour du Québec nous dit une bonne journée que les problèmes de mépris de cour c'est un problème d'ordre social, que ce qui était un mépris de cour en 1897 n'est peut-être pas un mépris de cour en 1972. Il le disait, lui, en 1955.

Je trouve ça drôlement important et encore une fois ce ne sont pas des critiques que j'adresse au juge. Je les adresse au ministre de la Justice pour ce que son action peut avoir d'effet, avoir d'influence non pas directe par le coup de téléphone mais par la présence constante du ministère de la Justice devant les tribunaux, cette influence qu'il peut avoir sur nos tribunaux. C'est un des rôles du ministère de la Justice, et si vous avez un bout de chemin à faire pour refaire cette image de protecteur de la société, de protecteur de la collectivité, de représentant de l'Etat généreux, je pense que c'est un des endroits où vous avez à le faire.

Il y aurait un tas de choses à dire là-dessus. De toute façon, je ne me laisserai pas aller plus longtemps. J'ai parlé du reflet vers le haut, vers les juges. Il y a le reflet aussi vers le bas, vers les policiers. Encore une fois, là-dessus, je ne blâme pas les policiers. Que des policiers se présentent casqués, masqués, matraqués ou en état de matraquage, si vous voulez, à un procès des trois chefs syndicaux, encore une fois, vous allez me dire que c'est un incident isolé.

M. CHOQUETTE: Tout à fait, dans les deux derniers mois.

M. BURNS: Bien, c'est un incident isolé. Evidemment, le ministre va nous dire ça. Moi, je vous dis: Ce n'est pas un incident isolé.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Maisonneuve veut insinuer que l'escouade qui était présente à ce moment-là s'apprêtait à matraquer les prisonniers?

M. BURNS: Bien, écoutez, avec une matraque dans les mains, je ne vous dis pas qu'ils s'apprêtaient, là, de façon intentionnelle, mais ils sont drôlement en état de matraquer qui que ce soit aux alentours.

M. HARDY: Qu'est-ce que vous faites de la légitime défense?

M. BURNS: Légitime défense de qui, devant les tribunaux?

Voyons donc! Le député de Terrebonne est assez intelligent pour ne pas poser une question comme celle-là.

M. HARDY: Je vous en parlerai tantôt.

M. CHOQUETTE: Mais qu'est-ce que vous faites du compte rendu du juge Côté dans son jugement sur ces incidents-là? Le juge Côté a quand même relaté les incidents qui se sont produits. Je pense que le juge Côté est un homme...

M. BURNS: J'ai lu le jugement du juge Côté. M. CHOQUETTE: Que je vous ai envoyé. M. BURNS: ...Oui. Je remercie, d'ailleurs, le ministre de me l'avoir envoyé. Je l'ai lu, le jugement. C'est, d'ailleurs, comme ça que j'ai appris la situation, parce que, le juge Côté — je prends sa parole là-dessus — nous relate tous les faits. Les faits que je vous cite là, concernant le procès des trois chefs syndicaux, sont relatés dans les premières pages de son jugement. Ce n'est pas du tout une critique à l'égard du juge Côté que je fais là. Qu'en 1972, dans un certain contexte social en ébullition, on retrouve peut-être les policiers les plus détestés actuellement au Québec, c'est-à-dire les gens de l'escouade antiémeute, dans une cour de justice, je dis que c'est incroyable. Ce n'est pas la faute des policiers, à part ça. Ce n'est pas une accusation aux policiers, même pas au chef des policiers, même pas aux officiers supérieurs.

Je dis que tout ça — puis, je reviens à ce que je disais tantôt — qui pouvait paraître un incident isolé, à mon avis, n'est pas un incident isolé, cela fait partie de cette conception sur laquelle je ne peux pas être d'accord de la politique que le ministre nous exposait en disant. Au ministère de la Justice, ma première fonction sera le maintien de l'ordre et de la paix.

En tout cas, je m'arrête là-dessus, parce qu'encore une fois ni les juges ni les policiers, à mon avis, ne sont responsables de cette situation-là. Il y a bien des gens à l'extérieur qui contribuent, malheureusement, à créer cette espèce d'hystérie collective et, surtout, le ministère de la Justice y contribue, des fois, de façon active, et, d'autres fois, de façon passive. Il a, au moins, le rôle de désamorcer ça.

M. CHOQUETTE: Si on vous écoutait...

M. BURNS: En général, si on m'écoutait, M. le Président, on m'interromprait moins souvent. Est-ce que c'est ça que vous vouliez me dire?

M. CHOQUETTE: Non, non, je regrette de vous avoir interrompu.

M. BURNS: J'ai terminé.

M. CHOQUETTE: Je répondrai plus tard.

M. BURNS: Vous allez répondre sans doute. Je suis certain que vous allez répondre. Je quitte ce domaine-là, tout simplement pour vous dire que cela a été, peut-être, ma grande déception. J'ai tenté, en moi-même, d'excuser le ministre de la Justice à certaines occasions, depuis qu'il est en fonction, mais je ne puis le faire après ces événements-là et, surtout, après la déclaration qu'il nous a faite. D'ailleurs, on voyait qu'il ressentait ce qu'il disait par la force avec laquelle il le faisait et la voix qu'il y mettait; c'était à ne pas s'y tromper, non plus.

Je pense que cette déception-là, il va falloir que le ministre fasse beaucoup pour me l'enlever. En tout cas, quant à moi, c'est ma conception non pas de l'homme qui est derrière le ministre, que j'estime toujours, mais du

ministre dans sa fonction. Il va falloir qu'il fasse énormément de choses pour que je reprenne mon opinion au sujet du ministre de la Justice.

On reviendra sur un certain nombre de choses. Quant au reste, je dois dire au ministre que ce qui me paraît être la marque de commerce, outre celle que je viens de critiquer, de son ministère, c'est un ministère de promesses faites à long terme et un ministère où il y a très peu de réalisations. Je ne les énumérerai pas. C'est peut-être l'obsession de refaire l'image que le ministre lui-même sent disparaître, cette image qui devrait exister. Je suis sûr que, dans le fond de lui-même, le ministre accepte beaucoup des remarques que je viens de lui faire, mais il sent le besoin constant de dire: Nous allons faire ceci.

C'est toujours assez extraordinaire, les déclarations du ministre. Par exemple, il nous a annoncé le bill 70, projet de loi sur lequel j'étais entièrement d'accord, le ministre s'en souviendra. Et je ne suis pas d'accord avec mon collègue de Maskinongé lorsqu'il nous dit qu'il faudrait en atténuer les effets vis-à-vis du Barreau, etc. Je trouve que c'est une bonne loi et elle doit rester comme cela, peu importe les cris que le Barreau pourra émettre, parce qu'encore une fois on vient rogner ses petits privilèges. Qu'est-ce que vous voulez? C'est cela.

On est rendu à une étape où il faut que les avocats sortent de ce domaine-là. Tous les jours, dans les bureaux d'avocats que je connais, dont le mien, on est obligé de dire à des gens: On va envoyer la mise en demeure, mais on ne prendra pas d'action parce qu'on va vous manger votre réclamation.

M. PAUL: Est-ce que mon collègue me permet une question?

M. BURNS: Juste une minute, laissez-moi terminer et je permettrai la question après. Constamment, on dit aux gens: Si le bill 70 vient en vigueur, allez par les voies que vous tracera cette loi de l'accès à la justice et ça ne vous coûtera rien ou ça vous coûtera des déboursés minimum, c'est-à-dire peut-être $10 de frais de signification et de timbres judiciaires, etc.

On en est encore à attendre cela, bien que cette promesse soit faite depuis au-delà de deux ans et que ce projet de loi ait été adopté. C'est vrai, je comprends le ministre et je vois tout de suite qu'il va me dire: Ecoutez, ça ne se met pas en vigueur tout de suite, un projet de loi comme celui-là. Je vais lui répondre: C'est vrai. Mais il fait depuis deux ans une annonce de charte des droits de l'homme qu'on n'a pas vue encore et Dieu sait qu'on en a besoin au Québec si les événements que j'ai décrits précédemment peuvent se vérifier dans les faits. On n'a pas encore de charte des droits de l'homme, on n'a pas encore la loi des huissiers pour se protéger des abus qui avaient été dénoncés dans le temps par la clinique juridique de Pointe Saint-Charles.

A l'époque, le ministre de la Justice, de bien bonne foi, bien intentionné encore une fois, à la suite des récriminations des gens de Pointe Saint-Charles, après une saisie de meubles chez des gens — meubles qui ne leur appartenaient même pas parce qu'ils avaient loué un meublé, se retrouvaient, du jour au lendemain, couchés sur un tapis — disait de bien bon coeur: Par une loi, je réglerai l'attitude des huissiers, etc. Encore une fois, on n'a pas de loi des huissiers, on ne sait pas où elle est rendue. Il y en aurait une série comme celle-là.

Par exemple, on en a une bonne ici, on en a des belles. Dans un document qui se vend $1 et qui s'intitule "Le gouvernement Bourassa deux ans après", on a des choses assez intéressantes. On nous dit qu'une vaste enquête sur le crime organisé a été annoncée.

C'est dans le bilan administratif, réformes et innovations majeures, page 79. On nous parle également de recherches, d'expériences pilotes. On nous parle des recherches qui sont effectuées afin d'établir un registre de l'état civil au Québec. Je ne sais pas où on en est rendu, peut-être que le ministre voudra nous le dire. D'autre part, une expérience pilote est présentement en cours afin d'étudier les effets de la décentralisation des forces policières. Cette expérience est menée par la Sûreté du Québec dans les régions de Sherbrooke et de Rimouski. Probablement qu'on en aura les résultats. Il se fait enfin des recherches sur la mécanisation éventuelle d'une partie du système judiciaire, sur la carte d'identité, le ministre l'a oubliée déjà, je pense qu'il nous a dit que c'était fini.

M. CHOQUETTE: La carte d'identité des fonctionnaires.

M. BURNS: ... des fonctionnaires... Probablement que le texte a été préparé il y a un certain temps... et sur la réforme de la direction générale... Il y a une série de choses comme ça. Je pourrais également lui sortir un certain nombre de promesses qu'il nous faisait l'année passée et que nous pourrions discuter un peu plus tard au cours des crédits. J'en cite simplement quelques-unes: un service de réglementation rattaché au bureau de la législation...

M. CHOQUETTE: Cela se fait et je pense que nous aurons la réglementation...

M. BURNS: Le ministre va nous donner toutes ses réponses tantôt.

M. CHOQUETTE: Certainement.

M. BURNS: Un service d'études et de recherche sur l'orientation générale du ministère, un service d'études et de recherche en matière de droit civil, pénal et constitutionnel — j'y reviendrai à l'occasion des crédits, je pense que

l'aspect constitutionnel est très important — rattaché au contentieux civil. Je pense qu'il y a peut-être lieu de le faire, mais de le faire vraiment, pas sous forme de promesses et d'arrêter de subventionner certains bureaux d'avocats privés. Je n'ai rien contre les bureaux privés, je fais partie d'un bureau privé personnellement. Un service de planification; je ne sais pas où le ministre en est rendu dans son service de planification. J'ai parlé tantôt des registres de l'état civil ainsi que de la charte des droits fondamentaux. On pourra parler également des amendements au code de procédure pour faciliter l'évolution des procédures. Le ministre nous dit qu'il projette encore une fois un projet de loi...

M. CHOQUETTE: Avant la fin de la session.

M. BURNS: Vous voyez, c'est ça le genre de critique que je fais quand je dis que c'est un ministère de promesses, qui nous fait des promesses, c'est beau, il n'y a aucune espèce de doute, mais cela nous amène deux ans, trois ans plus tard et, dans certains cas, il y en a un certain nombre qui ne sont même pas réalisées.

La dernière critique d'ordre général que je veux faire est reliée à mes deux premières critiques: d'abord, la conception que se fait le ministre du ministère de la Justice et, deuxièment, les promesses qui sont faites. C'est, à mon avis, le fait d'avoir laissé — et c'est un reproche que je fais au ministre de façon assez grave — dans un document partisan — et encore une fois c'est un reflet d'une attitude — faire du ministère de la Justice un élément de partisanerie du parti au pouvoir. Vous allez sourire, je vais vous donner quelques exemples, un ou deux. A la page 71 du document que j'ai cité tantôt: Le gouvernement Bourassa deux ans après — d'ailleurs je remercie le whip en chef de nous avoir fourni des copies ce matin, nous avons eu la chance de le lire depuis, c'est tombé pile — il y a des choses que je ne conçois pas de la part d'un ministère de la Justice.

On ne permet pas qu'un ministère de la Justice apparaisse comme partisan. Vous connaissez sûrement, et le député de Maskinongé et le député d'Outremont connaissent sûrement l'adage: Non seulement il faut que justice soit faite, il faut qu'apparence de justice soit faite. Cela a peut-être l'air cucu aux yeux de bien du monde mais c'est joliment important, à mon avis, qu'apparence de justice soit faite. C'est drôlement important qu'apparence de non-par-tisanerie — je fais encore l'analogie — existe en ce qui concerne le ministère de la Justice.

Alors, qu'est-ce qu'on retrouve? Je vais vous citer quelques exemples: dans le bilan législatif, il n'y a pas de doute que le ministre a fait adopter des projets de loi, je ne le nie pas. D'ailleurs, cela paraît...

M. CHOQUETTE: Pas seulement des projets...

M. BURNS: Non, non, il n'y a pas de doute. Seulement, écoutons ceci: Bill no 6, Loi modifiant la Loi de la régie des alcools. Remarquez que c'est un bilan de deux ans. Avantages pour la population: "cette loi autorise la Régie des alcools à délivrer des permis spéciaux aux personnes qui auront obtenu une concession de la ville de Montréal sur l'emplacement de Terre des Hommes. Il appartient au lieutenant-gouverneur en conseil, etc." Arrêtons cela. C'est exactement ce que le député de Maskinongé vient de dire. Cela se faisait depuis Terre des Hommes. Cela se faisait sous l'ancien gouvernement. On nous annonce cela comme des avantages à la population, alors que tout le monde ici et le ministre savent fort bien que tout ce qu'on a fait dans ce projet de loi, c'est de changer l'année. On a dit 1967-1968, on change cela pour 1968-1969. Finalement, il y a eu un changement de gouvernement au pouvoir, c'est devenu 1970-1971, 1972-1973 pour cette année, etc.

Je vous en donne un autre: Bill no 15. Loi modifiant la Loi d'interprétation. Ecoutez bien celle-là. Moi, je suis tombé en bas de mon siège. Avantages pour la population, toujours au pluriel: "cette loi assimile le samedi à un jour non juridique pour les fins d'enregistrement, vu qu'en vertu du bill no 14 les bureaux d'enregistrement ne seront pas ouverts le samedi". Bien, j'avais mon voyage quand j'ai vu les avantages pour la population. Le samedi, dans les cas d'enregistrement, on l'assimile à un jour non juridique. Il y en a d'autres.

M. CHOQUETTE: C'est un avantage aussi. Ne dites pas que ce n'est pas un avantage.

M. BURNS: C'est un avantage. Mais vous savez fort bien... You know what I am driving at, M. le ministre. Bill no 46. Avantages pour la population. Vous savez comment s'appelle le bill no 46 de 1970: Loi prolongeant et modifiant la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires.

M. CHOQUETTE: C'est excellent.

M. BURNS: Loi qui existe depuis 1951, et d'année en année, d'ailleurs, les critiques de l'Opposition — vous les avez entendues chaque année — ont dit tout simplement: Au moins, faites-la donc permanente cette loi. Depuis deux ans vous nous dites: On s'en reparlera sous l'article... Je suis content, le juge Ross aura sans doute certaines choses à nous dire là-dessus.

Je saute à la page suivante. Encore une fois, c'est une autre des réalisations du ministre. Loi no 282: Loi prolongeant et modifiant la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires. Encore une fois, avantages pour la population, au pluriel. On lit à peu près le même texte. J'admets que ce n'est pas tout à fait le même texte.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve est en train de critiquer le document...

M. BURNS: Non, non. M. le Président, je m'excuse. J'invoque le règlement. Vous êtes censé être neutre ici, et vous allez continuer de l'être.

M. LE PRESIDENT: Vous nous parlez d'une publication qui est strictement politique. Vous mentionnez les avantages qu'on donne...

M. BURNS: Non, non, je n'accepterai pas cela.

J'invoque le règlement. Je vous demande de continuer à être neutre. Vous n'avez pas à critiquer. Si je suis hors d'ordre, vous allez me le dire.

M. LE PRESIDENT: C'est ce que je vous dis.

M. BURNS: Dites-moi en quoi je suis hors d'ordre.

M. LE PRESIDENT: Vous êtes hors d'ordre parce que vous êtes en train d'éplucher un document strictement politique...

M. BURNS: Oui.

M. LE PRESIDENT: ... sous prétexte que vous êtes à...

M. BURNS: En quoi suis-je hors d'ordre?

M. LE PRESIDENT: ... étudier les crédits du ministère de la Justice.

M. BURNS: On parle de quoi, ici, sinon de politique, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: On étudie les crédits du ministère de la Justice.

M. BURNS: Avez-vous compris la nature de ma première critique? Laissez-moi donc terminer. Vous allez voir si vous êtes hors d'ordre ou si c'est moi. Vous allez voir ça. J'ai dit tantôt que je blâmais, troisièmement — j'ai trois critiques — le ministère de la Justice parce qu'il laissait faire de la partisanerie politique avec son ministère. Je suis en train de le lui prouver, M. le Président.

M. PAUL: M. le Président,...

M. BURNS: Si je n'ai pas raison, dites-le-moi. Et dites-moi en quoi je suis hors d'ordre là-dedans.

M. LE PRESIDENT: Ecoutez, le même argument pourrait être utilisé lors de l'étude des crédits du ministère de l'Education. On pourrait blâmer le ministre d'avoir laissé inscrire, dans cette brochure,...

M. BURNS: C'est là que vous vous insérez dans le mérite de la discussion, M. le Président. C'est cela que vous n'avez pas le droit de faire.

M. LE PRESIDENT: Là, vous êtes hors d'ordre parce que vous...

M. BURNS: Je ne suis pas du tout hors d'ordre, pas du tout!

M. PAUL: M. le Président, sur le rappel au règlement. Il faut comprendre qu'actuellement nous étudions les crédits du ministère de la Justice. Ce n'est pas une grosse vérité que je vous dis là.

D'un autre côté, l'argumentation du député de Maisonneuve est la suivante: Il faut à tout prix dépolitiser la justice et l'administration de la justice. Il reproche au ministre d'avoir laissé politiser la justice et il se sert d'un document politique pour illustrer sa pensée. Il se sert de ce document pour reprocher la décision qui a été prise — probablement à l'insu du ministre de la Justice — de publier de prétendues réalisations sociales du ministère de la Justice. Le député de Maisonneuve dit: M. le Président, je blâme le ministre de la Justice. C'est le troisième point de mes remarques de ce soir.

Je soumets, respectueusement, M. le Président, qu'à mon humble point de vue le député de Maisonneuve a parfaitement le droit, surtout dans le contexte de la présentation de sa critique, d'illustrer, comme il le fait, à l'aide d'un document politique, ses reproches à l'endroit du ministre de la Justice. Il dit que la justice doit être complètement dépolitisée pour que la population ait une grande confiance et pour combattre peut-être ce climat social, actuellement, que l'on constate autour de la justice.

M. LE PRESIDENT: La réplique que je peux donner, c'est que le député de Maskinongé, lui-même, vient de dire que cela a probablement été utilisé à l'insu du ministre de la Justice.

M. PAUL: Je ne dis pas que ce n'était pas de sa responsabilité par exemple.

M. BURNS: Le ministre nous le dira aussi, cela M. le Président, justement, n'est pas votre rôle de défendre le ministre à ce stade-ci. Je pense qu'il est assez grand pour se défendre tout seul. Il prend bien cela. Je le vois. Même si, parfois, cela fesse dur, les remarques que je lui fais, il prend cela avec un sourire, parce que c'est un grand monsieur et qu'il est capable de le prendre.

M. PAUL: Il a vu plus que cela, vous savez.

M. BURNS: Ne vous inquiétez pas, votre ministre n'est pas en danger.

M. LE PRESIDENT: Je ne suis pas inquiet.

M. BURNS: Bon!

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous continuer?

M. BURNS : Vous ajournez les travaux à dix heures? Je proposerais l'ajournement de nos travaux.

M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux sine die. Nous attendrons les instructions de l'Assemblée nationale demain, à trois heures.

(Fin de la séance à 21 h 56)

Séance du mercredi 31 mai 1972 (Seize heures cinq minutes)

M. PICARD (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

La commission de la justice continue ses séances pour l'étude des crédits du ministère de la Justice. La parole est au député de Maisonneuve.

M. BURNS: Merci, M. le Président. Je veux rassurer mon collègue de Terrebonne, d'abord, et lui dire que je n'ai pas 21 points à traiter dans les problèmes généraux. Hier, j'ai traité de trois points en particulier. Il ne m'en reste que trois à traiter très brièvement. Ce seront probablement les plus brefs des six que j'avais à traiter.

Hier, je me serais probablement lancé dans cette critique si on avait eu le temps de le faire, puisque c'était basé sur une déclaration très récente du ministre, aussi récente que la commission d'hier. Encore une fois, j'ai été étonné d'entendre le ministre nous parler de gangstérisme ou de banditisme à l'intérieur du syndicalisme. Que le ministre le croie, ce n'est pas mon problème, c'est le sien. Mais ce que j'ai remarqué, hier plus particulièrement, c'est qu'au moment où il fait une telle déclaration il y a un travail ou une enquête qui se fait. Donc, il n'est pas en mesure de nous livrer des conclusions définitives. C'est ce que je trouve grave.

Or, il lance une accusation de cette nature au début des travaux de la commission. Encore une fois, pour moi, c'est un signe de la non-compréhension d'il ministre de la situation actuelle au Québec. Plus particulièrement, au moment même où on se parle — peut-être pas au moment immédiat, dans le sens peut-être qu'on ne négocie pas actuellement — tout le monde sait qu'après les événements qu'on vient de connaître, il y a une espèce de rapprochement entre les parties. Une des parties, en l'occurrence, se trouve être l'Etat, se trouve être le gouvernement dont fait partie le ministre de la Justice. Je trouve absolument indécent qu'une déclaration de cette nature soit faite à ce moment-ci.

Ayant en vue ces deux choses-là, c'est-à-dire que les négociations reprennent actuellement de peine et de misère, après que de part et d'autre on ait subi des blessures qui ne sont pas encore complètement cicatrisées, d'une part, je trouve qu'on aurait dû peut-être pondérer une déclaration de cette nature, mais cela ne surprend pas, d'autre part, étant donné l'étendue que le ministre semble donner au champ d'action de son ministère. Cette déclaration a d'autant plus d'importance, à mon avis, encore une fois, que l'étude sur laquelle le ministre semble se baser n'est pas terminée. Ou bien elle est terminée et qu'il nous la livre, qu'il la rende publique et les gens pourront juger.

C'est la remarque que j'avais à faire là-dessus.

Cinquièmement, M. le Président, le ministre a eu l'air de dire qu'il était heureux que les événements récents n'avaient pas causé de troubles et que tout semblait être sous contrôle. Encore une fois, j'exprime l'inquiétude que le ministre ne se rende pas compte que l'administration de la justice, dans le domaine syndical plus particulièrement, et chez la masse des gens en général, cela ne veut plus dire grand-chose. Cela ne veut plus dire grand-chose, à cause d'un certain nombre de critiques que j'ai faites hier, de ce déphasage entre les gens qui subissent actuellement la justice et ceux qui sont là pour l'administrer. Qu'un ministre de la Justice ne soit pas conscient de ce fait, cela m'inquiète parce que plus tard — je ne le souhaite pas du tout — on aura peut-être des troubles à déplorer si ce clivage continue à se faire entre l'administration de la justice, à laquelle les gens ne croient vraiment plus ou à peu près plus, en général, et les gens qui sont appelés à l'administrer.

Finalement, M. le Président, ma dernière remarque, et c'est là-dessus que je vais terminer. J'ai entendu le ministre nous dire qu'heureusement, dans son ministère, il n'y avait pas de problème de relations fédérales-provinciales. Il n'y a, sans doute, aucun problème de relations fédérales-provinciales dans son ministère mais, à cause, à mon avis, d'une politique à courte vue du ministère lui-même. Je considère que, des problèmes, il y en aurait véritablement dans les relations fédérales-provinciales entre les deux ministères de la Justice si la politique du ministère n'était pas tellement à courte vue; il y a un domaine qui est très important, actuellement, dans lequel le ministère de la Justice québécois n'a aucune initiative législative, le ministre le sait fort bien, c'est en matière de justice criminelle.

Je ne veux citer comme exemple que le phénomène de la sécurité sur les chantiers. Je me souviens que l'année dernière j'ai reçu une longue lettre, de la part d'un substitut du procureur de la couronne à Montréal. D'ailleurs, il m'avait, à ce moment-là, permis d'en parler sans aucune difficulté. Il s'agit de Me Robi-chaud, qui m'avait écrit à la suite d'une de mes remarques à l'occasion de l'étude des crédits du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Il m'avait dit: Vous dites que le ministère public semble être très gentil à l'égard des entrepreneurs en ce qui concerne les poursuites pour négligence criminelle, dans le cas de décès de travailleurs de la construction sur les chantiers. Soit dit en passant, il s'en tue à peu près un par semaine depuis deux ans, à travers le Québec. Cela commence à être un problème grave. C'est un problème d'autant plus grave que les entrepreneurs, à mon avis, semblent se foutre complètement des amendes dont ils pourraient être l'objet, en vertu des règlements.

Or, à mon avis, il serait drôlement temps que, comme justement le substitut du procu- reur général me le mentionnait, certains amendements au code criminel soient faits. Si c'est devenu tellement difficile, dans ce domaine, de prendre des poursuites pour négligence criminelle, qu'on fasse amender le code. Mais je ne le cite qu'à titre d'exemple, pour montrer que le ministre, peut-être, oublie que tout ce domaine de la justice pénale, de la justice criminelle échappe à la juridiction du ministère québécois. Et tant qu'il restera comme cela, tranquillement, dans son coin, il est évident qu'il n'y aura pas de problèmes de relations fédérales-provinciales, dans ce domaine. C'est ce qui me fait dire que c'est une politique, à mon avis, à courte vue du ministère, qui fait qu'il nous dit, actuellement, qu'au moins, son ministère n'a pas de problèmes.

Ce sont les remarques générales que j'avais à faire, M. le Président. Vous ne pouvez pas dire que j'ai abusé aujourd'hui. J'avais justement ces trois points à compléter. Je termine ici mon exposé sur la politique générale. On reviendra sans doute à des questions d'ordre général, après.

M. LE PRESIDENT: Le député de Terrebonne.

M. HARDY: M. le Président, à ce stade de nos discussions, j'aurais quelques remarques à faire, remarques qui m'on surtout été inspirées par les propos qu'a tenus, hier soir, le député de Maisonneuve.

Le député de Maisonneuve a commencé ses remarques, hier soir, en reprochant au ministre de placer comme priorité, à son ministère, le maintien de l'ordre. Pour sa part, il a dit que, selon lui, la première priorité du ministère de la Justice devrait être la protection de la collectivité.

En toute déférence pour mon collègue, je dis, M. le Président, qu'il s'agit là d'une discussion purement académique. Protéger la collectivité, je suis parfaitement d'accord avec cet objectif. C'est évident que le rôle du ministère de la Justice, dans une société, c'est de protéger la collectivité. Mais comment un ministère de la Justice peut-il protéger la collectivité si, d'abord et avant tout, il n'assure pas le maintien de l'ordre?

Protéger la collectivité, c'est un objectif plus global que le maintien de l'ordre. C'est un objectif tellement global que cela dépasse largement les prérogatives et le domaine du ministère de la Justice. Protéger la collectivité, cela veut dire assurer un niveau de vie décent à la société, cela veut dire régler les problèmes sociaux, cela veut dire tout cela, protéger la collectivité.

C'est bien sûr que le ministre de la Justice ne peut pas en tant que ministre de la Justice assurer toutes ces priorités-là: problèmes sociaux, problèmes économiques. C'est d'autres instances du gouvernement qui doivent y arriver.

Au fond, la protection de la collectivité c'est un objectif global du gouvernement et le ministre de la Justice, pour sa part, doit travailler à cet objectif de la protection de la collectivité, en assurant le maintien de l'ordre. Là où il peut y avoir divergence, suivant l'idéologie à laquelle on appartient, suivant même des attitudes psychologiques que l'on peut avoir, c'est sur les moyens utilisés pour le maintien de l'ordre. Et là je reconnais qu'on peut différer sur les moyens, encore une fois suivant l'idéologie que l'on professe ou à laquelle on appartient.

Et je pense qu'en face du problème du maintien de l'ordre on peut partager les attitudes de deux façons. Il y a d'abord l'attitude permissive, c'est-à-dire une attitude où l'on est très libéral dans le sens philosophique du mot, où la police intervient le moins souvent possible. C'est ce que je qualifie d'attitude permissive.

Et à l'autre extrême il y a l'attitude restrictive, où évidemment on applique la loi d'une façon très rigoureuse, très draconienne. Et sans vouloir interpréter la pensée du ministre de la Justice, je pense que c'est dans cette orientation qu'il s'est dirigé. C'est que, dans les sociétés démocratiques libérales comme celles dans laquelle nous vivons, ces sociétés démocratiques ont en quelque sorte dans leur sein même une espèce de germe qui peut contribuer à les détruire.

A cause précisément de ce grand principe de la liberté, liberté de presse, de parole, liberté de tout, si à un moment donné cette liberté-là n'est pas canalisée jusqu'à un certain point, on débouche sur l'anarchie. Et, en débouchant sur l'anarchie, c'est la société libérale qui est détruite. L'histoire nous enseigne que, dans bien des cas, au moment où une société démocratique n'a pas su maintenir un minimum d'ordre, un minimum de restriction, alors qu'elle disparaît, très souvent elle est remplacée par une dictature, par un régime totalitaire.

C'est ce qui est arrivé dans l'histoire. Je pense donc que ceux qui ont la responsabilité d'administrer une société libérale, une société démocratique, doivent mettre tout en oeuvre pour assurer les libertés fondamentales, les libertés de l'homme — c'est évident, j'y souscris entièrement — mais tout en travaillant dans ce sens, ils doivent également prendre les moyens pour assurer que les lois soient respectées.

Si les lois ne correspondent pas aux situations sociales — c'est d'ailleurs la raison pour laquelle on siège de longues semaines et de longs mois dans un Parlement — qu'on change les lois, qu'on fasse en sorte que les lois répondent davantage aux impératifs d'une société en devenir, une société qui se développe, une société en mutation. Là-dessus aussi je suis d'accord avec le député de Maisonneuve. Il est évident qu'on vit dans une société en mutation. Mais tant et aussi longtemps qu'une loi existe, elle doit être respectée. Je dis qu'à partir du moment où un ministre de la Justice ou un gouvernement, pour toutes sortes de raisons, met en veilleuse l'application d'une loi, c'est là où on s'achemine vers l'anarchie, vers le désordre, et je ne peux pas accepter ça, encore une fois.

Si une loi n'est pas bonne, qu'on la change, qu'on l'amende. Mais aussi longtemps qu'une loi est dans les status, c'est le devoir du ministre de la Justice, c'est le devoir de ses fonctionnaires et c'est le devoir des tribunaux de voir à ce que cette loi soit respectée. Sans ça, on s'engage dans une route sans issue.

M. BURNS: Je m'excuse, est-ce que le député me permet une question?

M. HARDY: Oui.

M. BURNS: Est-ce que le député a compris que j'ai dit qu'il fallait mettre de côté les lois, hier dans mon exposé?

M. HARDY: Bien, j'ai compris...

M. BURNS: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. HARDY: J'ai compris qu'à certains moments...

M. BURNS: Vous relirez...

M. HARDY: Oui, je vous ai très bien relu. J'ai compris que le député de Maisonneuve disait qu'à certains moments, en certaines circonstances, en certaines occasions il fallait peut-être attendre, il ne fallait peut-être pas intenter des poursuites tout de suite, mettre de l'huile sur le feu, parce qu'il s'agit de certaines personnes, de certains gros bonnets. C'est ce que le député de Maisonneuve a dit.

M. BURNS: Je n'ai pas parlé de gros bonnets.

M. HARDY: Bien non, mais j'interprète...

M. CHOQUETTE: Les gros et les petits bonnets.

M. BURNS: J'ai parlé du contexte social, cependant.

M. HARDY: C'est ça, et moi je dis que quelles que soient les situations, parce que c'est M. Untel ou M. Untel...

M. BURNS: Je n'ai pas parlé de M. Untel, je m'excuse, mais ce n'est pas du tout de ça que j'ai parlé.

M. HARDY: De tel groupe d'ailleurs, ou de tel contexte sociologique, je dis que quand une loi existe tout le monde doit s'y soumettre...

M.BURNS: Même en mettant le feu après tout.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît ! J'aimerais faire remarquer au député de Maisonneuve qu'en vertu de l'article 97...

M. BURNS: Non, non, M. le Président, vous n'avez même pas besoin de me rappeler l'article. Je l'invoque assez souvent, alors...

M. HARDY: Je résume cette partie, M. le Président, en disant que je pense que c'est le devoir du ministre de proposer des amendements aux lois afin qu'elles correspondent davantage aux réalités sociales.

Mais, c'est aussi son devoir de faire appliquer et respecter les lois. Sans cela, il n'y a plus de fin.

Le député de Maisonneuve a également parlé de provocation de la part de policiers quant à leur costume ou aux instruments qu'ils pouvaient tenir dans leurs mains, à certains moments.

M. CHOQUETTE: Prenez M. Saint-Pierre, par exemple; il n'a pas l'air provocant du tout.

M. HARDY: J'ai eu l'occasion, l'an passé, d'approuver un collègue de la Chambre, qui appartient à la même formation politique que le député de Maisonneuve et qui avait soulevé un cas semblable. Je continue à croire la même chose. Je pense que les policiers, dans des circonstances difficiles, ont l'impérieux devoir d'exercer leur fonction sans matraquer les gens, sans les blesser inutilement; en d'autres termes, d'agir le plus humainement possible. Je pense que c'est une chose à laquelle toute personne vivant dans un Etat civilisé doit souscrire.

Mais il ne faut pas tomber dans l'excès contraire. Dans une situation comme celle que l'on a vécue, alors qu'il y a des attroupements, alors qu'on ne sait pas s'il n'y a pas deux ou trois fous — sans que ce soit organisé — dissimulés dans cette foule, que l'on reproche aux policiers d'être équipés pour faire face à une situation qui peut survenir de façon à se protéger eux-mêmes — il ne faut quand même pas demander aux policiers d'aller sur le bûcher ou de s'offrir en holocauste — et à éviter des choses désagréables, des choses que l'on pourrait regretter, je ne vois pas comment on peut le leur reprocher.

M. CHOQUETTE: M. Marcil boit vos paroles.

M. BURNS: Est-ce que le député me permet une question?

M. HARDY: M. Marcil boit mes paroles? C'est un chef syndicaliste, à part cela.

M. BURNS: Oui, que j'estime et respecte beaucoup, d'ailleurs. Justement, puisqu'on y fait référence, pour que M. Marcil comprenne bien le sens de l'intervention, est-ce que le député...

M. HARDY: Je pense que M. Marcil me comprend très bien. Le député de Maisonneuve n'a pas besoin de m'interpréter.

M. BURNS : Une minute ! Est-ce que le député de Terrebonne aurait l'amabilité, et pour M. Marcil et pour le député de Maisonneuve, de dire dans quel cadre je parlais des policiers casqués et autres? C'était dans une cour de justice, dans les circonstances que l'on connaît.

M. HARDY: Dans une cour de justice où il y avait un attroupement, où des gens avaient envahi la cour, etc.

M. BURNS: Vous n'y étiez pas.

M. HARDY: J'ai lu le jugement du juge et je n'ai pas de raison de ne pas croire l'honorable juge Côté. Quand on est rendu à prétendre que, parce qu'il y a des policiers qui ont un casque et un grand bâton, cela provoque, je dis que la société est vraiment malade. Si quelqu'un se sent provoqué parce qu'il voit un policier qui est là simplement pour maintenir l'ordre ce gars-là a quelque chose qui ne fonctionne pas.

Si les policiers commencent à donner des coups avant qu'il y en ait eu, c'est de la provocation; mais qu'un policier soit bien tranquille, sur place, et qu'il ait tout simplement un grand bâton dans ses mains, ce n'est pas de la provocation.

Je l'ai dit hier soir et je le répète, même si le député de Maisonneuve a cru bon de mettre en doute mon intelligence, c'est tout simplement de la légitime défense. C'est prendre les moyens pour éviter que des catastrophes se produisent et pour éviter que non seulement les policiers se fassent blesser inutilement mais même que des gens, des simples citoyens qui peuvent se trouver là par hasard se fassent blesser inutilement.

Je me réfère à la crise que nous avons vécue récemment. Je pense que les policiers ont des critiques assez souvent et même moi je suis un de ceux qui ont critiqué parfois les policiers non seulement comme député mais comme avocat. Il y a des occasions où les policiers manquent peut-être un peu de jugement, mais je pense que, s'il y a un cas où les policiers d'une façon générale se sont conduits impeccablement, c'est bien au cours des événements que nous avons vécus récemment. Je ne vois pas pourquoi il faudrait fendre les cheveux en quatre et leur reprocher de s'être équipés pour faire face à toute éventualité.

M. BURNS: Vous trouvez ça normal que, dans une cour de justice, vous retrouviez

l'escouade antiémeute casquée et armurée au grand complet?

M. HARDY: Je ne trouve pas ça normal d'une façon générale. Je ne voudrais pas que l'escouade antiémeute...

M. BURNS: C'est ce que j'ai dit hier.

M. HARDY: ... se trouve d'une façon générale dans les palais de justice. Mais, dans le cas auquel vous vous référez, je dis que oui c'était normal parce qu'on pouvait raisonnablement prévoir qu'il se produise des choses anormales.

M. BURNS: Parfait, alors nous ne pouvons plus discuter, c'est évident.

M. HARDY: C'est uniquement une question d'appréciation. Le député de Maisonneuve peut avoir une appréciation différente de la mienne, je le reconnais, mais moi je considère que c'est normal; le fait que les policiers aient été là n'a nui à personne, ça n'a privé personne de ses libertés et, si des troubles s'étaient produits, ils auraient été là pour y faire face.

Enfin, je termine, M. le Président, et là-dessus je n'ai vraiment pas compris le député de Maisonneuve.

M. BURNS: C'est ce que je remarque depuis le début.

M. HARDY: Je n'ai pas compris surtout quand le député de Maisonneuve a accusé le ministre de la Justice de politiser son ministère en se référant à un document publié par la commission d'information du Parti libéral du Québec. Voilà que le ministre de la Justice administre son ministère et fait voter des lois et voilà que, d'autre part, un organisme qui s'appelle le Parti libéral décide de prendre une citation du ministre, de prendre certaines lois et de les interpréter. Le ministre de la Justice n'a absolument rien à voir là-dedans; à ce que je sache, il n'est pas membre de la commission d'information du Parti libéral du Québec. Il l'a déjà peut-être été, je ne le sais pas,...

M. BURNS: C'est ce que j'aurais aimé, je l'ai dit hier...

M. HARDY: ... mais pour le moment il n'en est pas membre. Le ministre n'a rien eu a voir...

M. BURNS: J'aurais aimé que le ministre de la Justice nous dise cela lui-même.

M. HARDY: Le ministre de la Justice n'a eu rien à voir avec la préparation de ce document. Alors, comment peut-on l'accuser d'être partisan parce qu'un parti politique essaie de démontrer les avantages d'une législation adoptée? Cela pourrait être n'importe qui d'autre que le Parti libéral. Cela aurait pu être un journaliste qui aurait décidé de démontrer quels sont les bienfaits de telle ou telle loi. Est-ce que le député de Maisonneuve aurait accusé le ministre de la Justice de politiser son ministère parce qu'un journaliste, sympathique au Parti libéral, en aurait fait voir les avantages?

M. BURNS: Oui, mais c'est parce que le député d'Outremont n'aurait pas été élu sous la bannière...

M. HARDY: C'est bien plus grave que cela, ce que le député de Maisonneuve a fait. Si le député de Maisonneuve est logique avec lui-même, si j'ai bien compris son raisonnement, il demande au ministre de la Justice d'interdire au Parti libéral de se servir de ses lois et de montrer les avantages de ses lois. Bien oui, c'est une autre chose ou l'autre...

M. BURNS: Pas du tout.

M. HARDY: Ou bien le ministre de la Justice n'est pas responsable de ce qui est publié là ou bien il est responsable. S'il est responsable, c'est parce qu'on l'accuse de ne pas être intervenu pour empêcher le Parti libéral de publier le document qu'il a publié.

M. BURNS: Dans la forme...

M. HARDY: Dans la forme qu'il a.

M. BURNS: C'est ça.

M. HARDY: En d'autres termes, ce que le député de Maisonneuve demande au ministre de la Justice, c'est d'agir comme censeur vis-à-vis une publication du Parti libéral. Or, si le député de Maisonneuve demande au ministre de la Justice de censurer les publications du Parti libéral, il faudrait en même temps que le ministre de la Justice censure les publications du Parti québécois, que le ministre de la Justice censure les publications d'autres journaux. Alors que le député de Maisonneuve et le Parti québécois...

M. BURNS: C'est écoeurant, ça fait peur, votre affaire.

M. HARDY: Alors que le Parti québécois demande une plus grande liberté, alors que le Parti québécois demande une société encore plus démocratique, plus libérale, en même temps il demande au ministre de la Justice d'agir comme censeur de publications dans la province de Québec.

C'est là, M. le Président, que je dis que je ne comprends pas, absolument pas l'intervention du député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, en vertu de l'article 97, je ne peux pas laisser passer de telles remarques démagogiques de la part...

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: ... de la part du député de Terrebonne.

M. HARDY: Vous n'avez pas le droit de soulever de débat.

M. BURNS: Je ne soulève pas de débat. Je veux juste rétablir des faits. Je n'ai pas dit, hier, que je considérais que le ministre de la Justice se devait d'être le censeur de tous les documents qui pouvaient être publiés à travers le Québec, pas plus ceux qui paraissent dans les journaux que ceux qui paraissent dans les publications des autres partis politiques, mais qu'au moins, par action ou par omission, d'une façon ou de l'autre, je ne sais pas, j'aurais aimé entendre le ministre de la Justice nous le dire. Peut-être qu'il nous dira tantôt que, probablement par omission, il a laissé jouer la partisannerie politique, et je vous ai très bien cité les cas, hier.

Par exemple, lorsqu'il nous dit que c'est un avantage pour la population que le bill no 48 ait été adopté, concernant les enfants naturels, si vous avez remarqué, je n'ai pas cité celui-là. Je trouve véritablement que c'est un avantage...

M. HARDY: Qu'est-ce que le ministre de la Justice aurait pu faire devant cela?

M. BURNS: Je trouve qu'on a donné à un document un caractère politique, et on y a inséré des choses qui, véritablement, à toute personne intelligente capable d'analyse de texte, ont donné l'impression que ce document, y compris celui concernant la justice, était fait uniquement dans un but partisan, et c'est cela que je trouve malheureux, nocif et dangereux pour l'administration de la justice au Québec.

M. HARDY: Mais en quoi le ministre de la Justice est-il responsable de ça?

M. BURNS: Ce sera lui qui nous le dira tantôt.

M. HARDY: Bien!

M. BURNS: S'il nous dit qu'il n'est pas d'accord sur la forme que cela a pris, cette affaire, je vais le disculper. C'est tout.

M. LACROIX: M. le Président, est-ce qu'on me permettrait de poser une question au député de Maisonneuve?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je m'excuse, mais le député de Maisonneuve s'est prévalu...

M. LACROIX: Je demande la permission à la commission.

M. LE PRESIDENT: ... de l'article 97 qui lui donnait le droit de rectifier certaines déclarations qu'il avait faites hier. Maintenant qu'il a exercé ce droit, nous devons passer à autre chose, parce qu'il n'est pas permis d'avoir un débat sur ça.

M. LACROIX: Il n'est pas question de débat. Il y a seulement une chose que je voudrais faire remarquer au député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, à l'ordre! M. le Président, si je n'ai pas le droit de répondre à ça, vous avez rendu une décision.

M. LACROIX: Ce document n'a pas été...

M. BURNS: Est-ce que je vais avoir le droit de répondre à ça?

M. LACROIX: ... payé par le gouvernement, mais par un parti politique. S'il veut le critiquer sur la tribune publique, il le fera, comme nous nous permettons de le faire pour leur document.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs! Je ne peux pas permettre qu'on commence un débat sur cette question.

M. BLANK: Si on suit la logique du député de Maisonneuve, je devrai dire qu'en temps d'élections on ne pourra pas publier de propagande parce que le ministre sera ministre jusqu'après les élections, même s'il perd l'élection.

M. BURNS: Ce n'est pas ça.

M. BLANK: Ce n'est pas logique, votre affaire.

M. BURNS: Vous ne comprenez strictement rien...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BURNS: ... le député de Saint-Louis, comme les autres.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BURNS: Vous ne comprenez strictement rien.

M. BLANK: Le seul qui comprenne, c'est le député de Maisonneuve.

M. HARDY: En d'autres termes, il faut être péquiste pour comprendre.

M. BURNS: Pas du tout, pas du tout! Il y a, apparemment, bien des gens qui ont compris ce que j'ai dit.

M. LACROIX: Oui!

M. BURNS: Vous lirez quelques rapports des débats d'hier.

M. HARDY: J'aimerais que vous répondiez à ma question.

M. BURNS: Oui.

M. HARDY: Si vous aviez été ministre de la Justice, vous...

M. BURNS: Oui.

M. HARDY: ... et que votre parti ait publié un document semblable, qu'est-ce que vous auriez fait?

M. BURNS: Je ne l'aurais pas accepté, monsieur. Je n'aurais pas accepté ça.

M. HARDY: De quel droit, comme ministre de la Justice, pouvez-vous censurer?

M. BURNS: Je n'aurais pas accepté qu'on utilise des éléments aussi stupides.

M. HARDY: Donc, vous auriez, comme ministre de la Justice, censuré?

M. BURNS: Oui, j'aurais censuré mon propre parti.

M. HARDY: Ah! C'est ça! Très bien!

M. BURNS: Bien oui! C'est sûr! Mais mon propre parti, pas le vôtre!

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. HARDY: C'est ça que je voulais que vous disiez.

M. BURNS: Oui, j'aurais censuré.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Je rappelle le député de Maisonneuve à l'ordre !

M. BURNS: Je ne m'en cache pas.

M. HARDY: Le ministre de la Justice, censeur d'un parti politique!

M. BURNS: De mon parti politique. Cela est bien différent.

M. HARDY: Moi, en tant que...

M. BURNS: C'est ça, votre aspect démagogique que je n'accepte pas.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Je rappelle le député de Maisonneuve à l'ordre!

M. BURNS: Ecoutez, M. le Président, c'est quand même dégueulasse, ces affaires-là.

M. LE PRESIDENT: Il est bien défini, dans l'article 97, qu'il n'est pas permis d'avoir un débat...

M. BURNS: Bien, qui est-ce qui le fait le débat? C'est un gars...

M. LE PRESIDENT: ... lorsqu'un député exerce...

M. BURNS: ... qui connaît la procédure plus que vous et moi, à part ça.

M. LE PRESIDENT: ... son droit de réplique.

M. BURNS: Il est censé la connaître plus que moi.

M. LE PRESIDENT: Je considère qu'il n'y a pas de débat. La parole est au ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: M. le Président, sur la question...

M. LACROIX: Vous ne faites que ce que vous faites depuis longtemps. Mais Reggie Chartrand ne vous aurait jamais permis de vous censurer.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît !

M. CHOQUETTE: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice.

M. BURNS: Ces crédits sont bien partis! M. CHOQUETTE: ... je ne voudrais pas... M. LACROIX: Dix heures.

M. CHOQUETTE: Si le député des Iles-de-la-Madeleine me permet de donner la réplique à nos honorables collègues, ce que je ferai le plus brièvement possible, je dirai que l'intervention du député de Maisonneuve et sa critique à l'égard de la politique du ministère de la Justice ne m'ont impressionné en aucune façon.

Je considère, après avoir entendu l'ensemble de l'exposé du député de Maisonneuve, que celui-ci, tout comme son parti lors du débat de censure à l'égard du gouvernement, se situe à un niveau que je qualifierais de pharisaisme du libéralisme. Il est bien beau de reprocher à l'autorité, en particulier au ministère de la Justice qui a, au moins, la responsabilité de l'action policière comme de l'action judiciaire,

son action. Mais, au total, je considère que l'action qui a été prise par le ministère de la Justice depuis quelques mois a été des plus bienfaisantes sur le plan du maintien de l'ordre et de la paix dans le Québec.

Même si le député de Maisonneuve tente de démontrer les erreurs de jugement de la part du ministre, dans son domaine particulier, ou du gouvernement, dans son ensemble, eh bien, je ne pense pas que sa critique puisse porter à l'égard du ministère de la Justice.

Premièrement, il a admis lui-même, en certaines circonstances, à la Chambre — ceci est consigné au journal des Débats — que l'action policière, tout au cours des deux mois qui se sont écoulés, avait été une action éclairée. Evidemment, aujourd'hui, il nous apporte un incident...

M. BURNS: Je n'ai pas utilisé ces termes.

M. CHOQUETTE: Un instant, j'ai la parole. Vous vous rectifierez quand vous le pourrez.

M. BURNS: D'accord.

M. CHOQUETTE: Il a admis que l'action policière avait été une action éclairée et que le ministère de la Justice avait montré du doigté tout au cours des mois que nous avons connus. Aujourd'hui il relève un incident qui s'est produit une fois à la cour, à Québec, alors qu'en somme on peut ergoter d'une façon ou de l'autre sur l'opportunité de l'intervention de l'escouade antiémeute. Je considère que c'est là un pur incident qui n'a aucune espèce de valeur probante à l'égard de l'action policière dans son ensemble.

Par conséquent, sur ce plan je soumets que le député de Maisonneuve cherche d'une façon excessive à critiquer une action du ministère de la Justice, qu'il a reconnue, par ailleurs, être valable. Par conséquent, je ne peux pas croire à l'entière sincérité de ses propos.

Deuxièmement, sur le plan de l'action judiciaire, le député de Maisonneuve nous dit: Mais vous auriez dû attendre pour prendre des poursuites, vous auriez dû retarder. Mais retarder à quand? C'est la question que je lui pose. Retarder au mois de septembre, peut-être? Retarder au mois de décembre, retarder à l'année prochaine, alors que le député sait qu'on n'aurait pris aucune espèce de poursuite dans ces circonstances? Qu'avons-nous décidé de faire, M. le Président? Nous avons décidé de prendre les poursuites au moment où les incidents se produisaient, ceci sans en abuser par le nombre et de façon à faire ce que le député de Terrebonne reconnaissait, à mon sens, très valablement, tout à l'heure. C'est que, même dans des circonstances difficiles, il faut que l'action de la justice s'exerce de façon à canaliser l'usage de la liberté, plus particulièrement quand on est devant des phénomènes de masse ou des phénomènes de groupes, là où l'action est évidemment extrêmement difficile à contenir.

M. le Président, je ne voudrais pas allonger mes propos sur ce sujet, excepté pour dire que, pour une fois, le ministère de la Justice a pris ses responsabilités. Et voilà que le député de Maisonneuve trouve à redire parce que lui, au nom d'une espèce de pharisaisme de l'inaction, aurait préféré que le ministère de la Justice reste passif, laisse faire les événements qui se passaient dans le Québec et ne protège pas la population, dans des circonstances extrêmement difficiles. Eh bien! M. le Président, que le député de Maisonneuve le sache: Je suis extrêmement fier de l'action qui a été adoptée par tous les niveaux du ministère de la Justice, depuis deux mois. Il peut-être assuré que cela va continuer, n'en déplaise à ses critiques.

Je pense que cela situe assez bien nos positions. Je pense qu'aujourd'hui un gouvernement, même devant la difficulté de contenir des actions de groupes ou des actions de masse et même parfois des actions clandestines, doit prendre un certain nombre de moyens appropriés pour faire en sorte que les gens agissent dans la légalité, pour faire en sorte que les gens puissent ne pas se sentir menacés par des actions violentes collectives ou clandestines. Il me semble que cela est une vérité élémentaire. Si j'ai mis l'accent sur cela, au début de mes propos, à l'ouverture de l'étude des crédits du ministère de la Justice, c'est que je sens que dans la période que nous traversons, au Québec, à l'heure actuelle, un coup de barre est requis, un coup de barre est nécessaire, un coup de barre s'impose. Si le ministère de la Justice ne donnait pas ce coup de barre, il laisserait la province de Québec devenir un véritable panier de crabes, dans lequel tout le monde se boufferait, et ceci probablement au détriment de l'immense majorité de la population mais peut-être à l'avantage de ces petits groupes de révolutionnaires ou de bandits qui cherchent à nager en eaux troubles.

Il me semble que le député de Maisonneuve devrait être au moins capable, comme juriste, de reconnaître la validité de cette position, ce qui ne veut pas dire que j'envisage une action brutale ou une action, en somme, qui soit répressive à l'excès. Ceci veut dire qu'il faut ramener la société dans le droit chemin. Je pense que, dans les conditions actuelles, les responsabilités qui pèsent sur le ministère de la Justice sont très lourdes. Le député peut être assuré que, sans son concours, nous allons prendre nos responsabilités.

M. le Président, je conclus sur ce sujet, parce qu'il me semble que j'ai déjà explicité ma position avec assez de clarté et que je viens de le faire encore, de façon qu'il n'y ait pas d'équivoque.

Le député de Maisonneuve nous reproche, M. le Président, un dépliant publicitaire publié par le Parti libéral, qui fait état d'un certain nombre de réalisations, depuis deux ans qu'il

est au pouvoir. Un chapitre est consacré à la justice.

Je dois dire au député de Maisonneuve que c'est la première fois que je prends connaissance de ce texte et que, personnellement, je ne l'ai pas approuvé. Je dois dire que, sur le plan des principes, je ne trouve rien de répréhensible à ce qu'on expose dans un document de cette nature les lois et les réalisations du ministère de la Justice sur le plan administratif. Ceci ne touche en rien à l'administration de la justice, c'est-à-dire à la direction des procès. Ceci expose simplement certaines mesures adoptées au niveau gouvernemental pour faire avancer le niveau de la justice. Et on peut être d'accord ou n'être pas d'accord sur les mesures.

Je dirai au député de Maisonneuve qu'il n'a jamais voté contre les mesures que j'ai présentées à la Chambre. Je ne me rappelle pas que son parti ou lui-même ait voté contre une des 27 lois qui sont mentionnées dans ce bouquin publié par le Parti libéral.

M. BURNS: Je pense que le ministre a raison, je n'ai pas voté contre.

M. CHOQUETTE: C'est donc que les mesures lui semblaient bonnes. Et si les mesures lui semblaient bonnes, pourquoi ne seraient-elles pas exposées dans une publication de cette nature? Que l'éloge dépasse quelque peu parfois la valeur des projets de loi individuellement, je suis bien prêt à le reconnaître dans ce sens que des publicistes peuvent parfois se laisser aller à des exagérations.

M. BURNS: C'est exactement dans ce sens-là que je faisais ma critique.

M. CHOQUETTE: Alors, c'est une tempête dans un verre d'eau. Je note que dans le chapitre qui est consacré à la justice, on ne fait aucun état de la façon dont le ministre ou le ministère a dirigé les procès, parce qu'on sait qu'il s'agit là du domaine judiciaire et qu'on doit le séparer de la politique, ce en quoi je suis parfaitement d'accord sur le plan des principes. Je pense que la critique du député de Maisonneuve sur ce bouquin ne va pas chercher très loin.

Le député de Maisonneuve me fait des reproches d'avoir fait hier des déclarations qui seraient susceptibles de nuire à la négociation. Mais, encore là, je demande au député de Maisonneuve: Veut-il museler le ministre de la Justice? Veut-il que le ministre de la Justice mette la justice et le maintien de l'ordre public et de la paix à la remorque du reste de la politique? Est-ce que c'est le sens de la politique du député de Maisonneuve? Est-ce qu'il veut que la justice se taise et reste absente des débats qui ont lieu dans notre société et des problèmes, et qu'elle ne s'exprime que très faiblement? C'est ça en fait que le député préconise.

Il préconise l'absence de la justice. Je ne peux pas accepter que la justice ne s'insère pas dans l'actualité et la réalité telle que nous la connaissons au Québec. Je ne peux pas me fermer les yeux, comme le député de Maisonneuve, au nom d'une espèce de théorie abstraite à l'effet que la justice serait complètement en dehors de l'activité normale des individus. Au contraire, la justice, il faut qu'elle soit présente. Et c'est suivant cette formule que nous ferons que l'équilibre social sera conservé, que nous éviterons des abus et que la société retrouvera un cours normal dans le progrès et dans le changement, mais sans les excès et la violence que le député de Maisonneuve devrait réprouver. Je ne l'ai pas entendu dire qu'il réprouvait la violence. Peut-être y aurait-il intérêt à ce qu'il nous le dise un jour.

Ce à quoi je m'en suis pris, c'est justement l'action violente, le chantage, l'intimidation. Je pense que quand un climat de cette nature s'instaure dans une société il y a un très grand risque pour la liberté. Et, aujourd'hui, qui réprime réellement? Est-ce que c'est le ministère de la Justice? Est-ce que ce sont les policiers du Québec, qu'ils soient provinciaux ou municipaux? Pas du tout. L'action judiciaire et policière se passe en général à un très haut niveau. Qui réprime? Il me semble que ce sont ceux qui se font les artisans de la violence. J'aimerais bien que le député de Maisonneuve abonde au moins dans ce sens.

Mais s'il est incapable de le faire, nous tirerons nos propres conclusions sur ce qui l'anime. Je dis que par conséquent : je ne peux pas accepter qu'on se taise alors que des choses se passent, qu'il faut- les dire et qu'il faut les dire franchement et ouvertement. Le débat que nous avons entrepris depuis hier soir autour de cette table avec nos honorables collègues de tous les partis a sûrement sa valeur.

Il a un sens et il permettra de comprendre et de faire comprendre à l'opinion publique et de faire comprendre à des parties importantes de la société qui peuvent avoir ou ne pas avoir des raisons de contester qu'il faut que tout cela se déroule dans un minimum de légalité, dans un minimum d'ordre et de paix, sinon c'est l'assiette même de la société qui est en danger. C'est ce que j'ai cherché à démontrer hier et je maintiens mes avis sur ça. Je n'ai peut-être pas persuadé le député de Maisonneuve, mais j'ai la consolation, M. le Président, d'avoir fait mon devoir dans les circonstances actuelles.

Le député de Maisonneuve, M. le Président, a fait des reproches, a soulevé des cas où, à son sens, les tribunaux avaient rendu des décisions erronées ou des décisions qui, à son sens, étaient excessives ou encore des décisions qui n'étaient pas opportunes.

M. le Président, il est bien beau de chercher la bête noire chez les juges et dans les tribunaux. On trouvera nécessairement que la justice est imparfaite. Malheureusement, nous vivons sur terre et il n'y a pas de juges parfaits, il n'y a

pas de tribunaux parfaits, il n'y a pas de système judiciaire parfait. Par conséquent, on pourra toujours trouver des éléments, des incidents où il y a lieu de discuter le pour ou le contre d'une décision ou son opportunité.

Mais je pense, M. le Président, qu'il ne faudrait pas s'hypnotiser devant un certain nombre de ces incidents et dire que cela met en cause tout le système judiciaire, alors que les juges, le député de Maisonneuve devrait le savoir, comme avocat, sont quotidiennement exposés à la guérilla judiciaire, par un certain nombre d'accusés sinon d'avocats qui cherchent à détruire le système judiciaire tel qu'il existe, et qui ne jouent pas suivant les règles du jeu. Alors dans ces conditions, il est assez normal qu'à certaines occasions des juges deviennent impatients ou disent des choses exagérées ou excessives que l'on peut, jusqu'à un certain point, réprouver, et l'on peut trouver que les choses auraient pu mieux se passer. Il faut quand même reconnaître que l'origine du problème n'est pas dans la magistrature mais dans la contestation et la guérilla judiciaire qui a lieu au niveau des tribunaux. Je pense que le député de Maisonneuve, avec l'expérience qu'il a et comme avocat, devrait reconnaître que c'est là le facteur primordial des incertitudes actuelles de la justice, que je suis le premier à reconnaf-tre.

Alors, M. le Président, il faudrait quand même mettre les blâmes là où ils doivent être, et ils n'ont pas, à mon sens, à être imputés aux magistrats.

M. le Président, le député de Maisonneuve me fait grief de dire qu'à mon ministère il n'y a aucun problème constitutionnel. Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait aucun problème constitutionnel. J'ai dit que mes relations avec le ministère de la Justice fédéral étaient bonnes et que, sur le plan de l'aide juridique, j'entrevoyais une solution avantageuse pour le gouvernement du Québec et conforme à notre politique. Alors il ne faudrait quand même pas déborder le cadre de mes remarques. Maintenant, quant au contenu du droit criminel, en vertu de la constitution, et pour que ceci soit consigné au journal des Débats pour ceux qui ne le savent pas, c'est le gouvernement fédéral qui a la responsabilité du code criminel, jusqu'à nouvel ordre au moins.

Je suis quand même obligé d'accepter cela comme un fait. On me fait des reproches de ne pas avoir pris de mesures judiciaires à l'égard des accidentés du travail. C'est faux. C'est faux parce que, le député de Maisonneuve le sait, j'ai pris des mesures, à Montréal, pour accélérer l'audition des causes où il s'agissait d'infractions à la sécurité au travail. J'ai pris les mesures pour demander des amendes plus élevées au niveau de la sécurité sur les chantiers de travail. Ce sont des mesures, M. le Président qui ont été prises. Le député de Maisonneuve même s'il dit non, va être obligé de reconnaître les faits.

M. BURNS: Ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. CHOQUETTE: Vous avez passé ça sous silence, moi je vous permets de le dire ouvertement. Je dirai ceci maintenant. Si on apporte des amendements au code criminel en vue de prévenir les accidents du travail, c'est là une autre matière.

Sur ceci, je dirai au député de Maisonneuve que ce sujet est actuellement à l'étude au ministère de la Justice, justement afin de faire des représentations au gouvernement fédéral pour apporter des amendements de façon que, pour les accidents du travail qui se passent dans des circonstances où il y a négligence criminelle, nous puissions trouver une formule qui inciterait les entrepreneurs à être scrupuleusement honnêtes dans le respect de la réglementation de la sécurité au travail. Je peux assurer le député de Maisonneuve que c'est une question que j'ai confiée au sous-ministre associé aux affaires criminelles, Me Boisvert, qui étudie la question et qui fera, au moment opportun, les représentations appropriées au gouvernement fédéral.

Il y a tout un contexte dans lequel ces amendements peuvent être faits parce qu'on sait que la négligence criminelle existe déjà dans le code criminel. Il ne faudrait quand même pas oublier cela, la négligence criminelle est une accusation qu'on peut porter contre un entrepreneur. A la suite d'une enquête du coroner, c'est une accusation qui peut être portée. Là où il m'a semblé qu'on pouvait peut-être faire une percée nouvelle dans ce domaine, c'est de déterminer une infraction nouvelle dans le domaine des accidents du travail — comme nous le disions, puisque nous discutons de ce sujet — qui serait parallèle à ce qui existe au niveau de l'automobile. On sait qu'il y a des infractions que l'on peut commettre en vertu du code criminel dans la conduite d'une automobile. Et un entrepreneur, dans le domaine des accidents du travail, s'il commet une négligence équivalente à la faute requise pour la condamnation au criminel en matière d'automobiles, devrait peut-être être déclaré coupable. Ceci, à mon sens, serait de nature à inciter les entrepreneurs à observer plus strictement la sécurité sur leur chantier.

Je termine mes remarques, c'est tout ce que j'avais à dire en réponse au député.

M. LE PRESIDENT: Après l'exposé du ministre et au début... Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Je ne veux que rectifier certains faits, ce sera très bref. Je n'abuserai pas du temps de la commission, avec votre permission. J'ai nettement conscience que je ne pourrai pas convaincre le ministre, que je ne parle pas le même langage que lui, comme lui ne parle probablement pas le même langage que moi.

J'ai dit tout au long de mon exposé d'hier, de même que dans les quelques brèves remarques que j'ai faites à l'ouverture de la séance aujourd'hui, que le ministre ne semble pas avoir

compris. Il nous dit que la présence des policiers à la cour, à l'occasion du procès de MM. Pepin, Laberge et Charbonneau, est une tempête dans un verre d'eau. Il nous dit que la politisation que je blâmais dans le document — soit dit en passant, je suis bien content d'apprendre que le ministre l'a appris en même temps que nous; déjà, cela diminue énormément la responsabilité dont je faisais critique hier — était aussi une tempête dans un verre d'eau. Ce que j'ai tenté de dire...

M. CHOQUETTE: Est-ce qu'on rectifie, M. le Président?

M. BURNS: Oui, parce que vous avez pris chacun des points et, à chaque fois, vous m'avez dit: C'est une tempête dans un verre d'eau. Ce que j'ai dit hier, c'est que tout cela à partir de la crise d'octobre 1970, était des éléments qui m'amenaient aux conclusions auxquelles j'en étais arrivé, c'est-à-dire que le ministère ne semble pas, sur le plan social, comprendre qu'au Québec il y a des choses qui se passent, actuellement.

Le ministre semble vouloir dire que je lui suggère de museler la justice, de museler l'administration de la justice en disant qu'il faut peut-être retarder certaines poursuites parce que le moment n'est pas requis. Je n'ai pas parlé de museler, je n'ai même pas dit de ne pas déposer de plaintes. J'ai dit: Peut-être qu'il faudrait agir avec discernement dans ces cas-là

M. CHOQUETTE: Nous avons agi avec discernement, justement.

M. BURNS: Je prétends que non, et je continue.

M. CHOQUETTE: Alors, c'est une question de...

M. BURNS: Ce n'est pas ce que vous avez dit tantôt et c'est pour cela que je veux faire la rectification. Ce dont je parlais principalement, c'est une question du sens du "timing". Qu'est-ce que vous voulez? C'est aussi simple que cela. Il y a des choses qui ne se font pas à certains moments, si on a une préoccupation d'ordre social général, si on a une préoccupation de représentants de l'Etat auprès des citoyens, de l'Etat protecteur, comme je disais hier. Simplement pour satisfaire le ministre — je ne sentais pas le besoin de le faire mais vu que le ministre m'a mis sur le "spot" comme on dit — je n'ai aucune crainte à lui dire que je suis contre toute forme de violence.

La meilleure preuve, c'est que, comme les autres candidats du Parti québécois, j'ai pris la peine de passer par la même voie que lui, c'est-à-dire d'aller devant des électeurs et de tenter de me faire élire. Dans mon cas, heureusement pour moi et pour eux, j'ai réussi à me faire élire. Dans d'autres cas, ça n'a pas réussi.

Du seul fait que des gens prennent la peine de passer par la voie électorale, démocratique, pour accéder à ce fameux salon de la race, il me semble que, déjà, on n'a pas besoin de faire de longues péroraisons pour vous expliquer que nous sommes contre la violence. Si nous avions été pour, nous aurions fait exactement le contraire; nous n'aurions pas pris la peine de nous présenter à des élections et nous aurions moussé la violence autrement. C'est exactement ce que nous aurions fait.

Ce sont les quelques remarques que je voulais faire et peut-être les dernières. Quand le ministre me dit que la justice est imparfaite, c'est évident qu'elle est imparfaite. Tout le monde l'admet, les juges eux-mêmes l'admettent. Le juge en chef de la cour des Sessions de la paix à Québec, cette semaine, l'admet drôlement en critiquant l'attitude d'un de ses juges dans une cause. Je n'ai pas à y référer plus particulièrement; tout le monde l'admet. Que vous me disiez que la justice est imparfaite, ce n'est pas ça qui m'intéresse. Je dis que le ministère ne doit pas poser de geste pour contribuer à ce qu'elle soit davantage imparfaite. Ce n'est que ça et c'est le sens global, général qui sous-tend toute ma critique.

Hier, j'ai été bien précis quand j'ai dit: Quand on reproche des gaffes aux policiers, ce n'est souvent pas à eux qu'il faut les leur reprocher et ce n'est même pas, souvent, à leurs supérieurs; c'est très souvent à cette espèce d'attitude générale. Qu'à un moment donné on lance les juges dans cette espèce d'hystérie, dans ce traumatisme collectif au Québec, je dis qu'en grande partie le ministère de la Justice en est responsable par son attitude. Ce n'est pas du tout tenter de museler le ministère de la Justice.

M. CHOQUETTE: M. le Président, il faudrait quand même faire admettre au député que, depuis deux mois, l'attitude du ministère de la Justice a été d'un calme absolu et qu'en toute circonstance j'ai évité...

M. BURNS: Sûrement pas dans votre déclaration d'hier.

M. CHOQUETTE: Hier j'ai pensé que c'était opportun d'indiquer les faits. Ma déclaration d'hier ne comportait rien d'incendiaire. J'ai exposé les responsabilités du gouvernement et du ministère de la Justice. Durant les deux derniers mois, le ministre de la justice, puisqu'on le met au blanc, qu'a-t-il fait? Il a cherché à rétablir le calme au Québec par ses déclarations comme par l'action de la police et l'action judiciaire, et je pense qu'il y a réussi.

M. BURNS: Nous verrons avec le temps.

M. CHOQUETTE: Nous verrons toujours avec le temps.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, si vous vou-

lez, avant de procéder...

Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, le ministre préférerait-il que nous abordions encore quelques problèmes de portée générale ou s'il préférerait que nous en discutions à chacun des articles ou des différentes catégories?

M. CHOQUETTE: Comme vous voudrez.

M. BURNS: J'ai quelques questions d'ordre général qui ne sont plus des critiques. J'ai tenté de mettre le côté désagréable au début.

M. PAUL: Votre "motton" est passé.

M. BURNS: Nous sommes ici pour venir dire ce que nous pensons du ministère de la Justice. Si ça ne l'améliore pas, tant pis; si ça réussit à l'améliorer même un peu, tant mieux. Je voudrais poser une question, mais peut-être que mes autres collègues...

M. LE PRESIDENT: Il reste à savoir si nous devons encore discuter de l'exposé qu'a fait le ministre, des points qu'il n'a pas couverts dans son exposé ou si nous allons revenir et soulever les questions au fur et à mesure que nous arriverons aux articles.

M. BURNS: Mise a part la discussion d'ordre général...

M. LE PRESIDENT: Il sera toujours possible de prendre un article dans son ensemble et non pas de le discuter par catégorie.

M. BURNS: Je vais donner un exemple, M. le Président, où vous allez très bien comprendre que ça ne peut s'insérer nulle part dans un article, ce que je vais poser comme question au ministre. Je veux lui parler de l'affaire Dasken, à Hull.

Pouvez-vous me donner un article où je pourrais soulever ça?

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ça ne relève pas d'un règlement municipal?

M. BURNS: Non, voulez-vous me laisser poser la question et vous allez juger?

M. LE PRESIDENT: Si le ministre est d'accord.

M. BURNS: Je vais juste poser la question. Depuis quelques semaines, l'Association des propriétaires des jardins Taché, je crois, de Hull, qui s'était faite la promotrice d'une action devant les tribunaux, a obtenu, en première instance, une injonction contre un certain développement en hauteur dans une région à Hull, contrairement au règlement municipal. Elle a été déboutée en cour d'Appel et la décision en première instance, c'est-à-dire l'injonction, a été maintenue par la cour Suprême.

On se souvient que le député de Papineau, qui en était bien malheureux d'ailleurs à l'époque, avait parrainé un projet de loi visant à écarter ce règlement municipal qui, semble-t-il,... en tout cas, replacer les parties antérieurement à la date où l'action avait été prise.

Je reviens à ma question et c'est ça qui me préoccupe. Depuis quelque temps, il est question — ce sont des rumeurs peut-être, vous me direz, mais en tout cas — il est question qu'un projet de loi revienne devant la Chambre. Je veux savoir du ministre s'il va maintenir la position judiciaire. L'administration de la justice s'est prononcée, le plus haut tribunal du Canada, la cour Suprême, s'est prononcé et a donné raison à une des parties. Est-ce l'intention du ministre de laisser faire les promoteurs d'un certain bill qui viendrait changer la situation qui existe entre les parties? En passant, j'explique la raison de mon inquiétude. C'est que l'injonction, actuellement — et le ministre pourrait peut-être y jeter un coup d'oeil, lui qui est tellement fort pour voir à l'application des injonctions — n'est pas encore appliquée. Le jugement est quand même rendu depuis déjà, je pense...

M. PAUL: Jusqu'au 20 juin pour démollir.

M. BURNS: Ils ont jusqu'au 20 juin... Il va falloir qu'ils se dépêchent. Peu importe, est-ce que le ministre peut nous assurer qu'il n'acceptera pas, au nom du ministère de la Justice, qu'un projet de loi vienne devant la Chambre, pour mettre de côté, à toutes fins pratiques, le jugement de la cour Suprême?

M. CHOQUETTE: Voici, M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, M. le ministre. J'aimerais poser une question au député de Maisonneuve. Est-ce que toute cette question n'était pas basée sur le bill 96?

M. BURNS: Bill no 96 qui a été, lors de la dernière...

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ce bill est encore devant...

M. BURNS: On ne le sait pas. Je ne pense pas, parce que la dernière fois qu'il en a été question à la commission, parce que c'était un bill privé...

M. LE PRESIDENT: Mais si le bill apparaît...

M. BURNS: Non, il n'apparaît pas. Le bill a été mis au rancart. Mais je vais vous donner l'explication parce que je suis membre de la commission de l'Assemblée nationale. J'avais posé la question à la commission de l'Assemblée

nationale à un moment où le délai pour la présentation ou la représentation de bills privés de la dernière session n'était pas expiré. Je pense qu'on -avait jusqu'au début de juin ou à la fin de mai pour présenter de nouveau un projet de loi. A ce moment, lors de la dernière séance de la commission de l'Assemblée nationale, le fameux projet de loi Dasken, de Hull, n'était pas inscrit. Alors, il n'apparaît pas au feuilleton non plus actuellement.

M. LE PRESIDENT: Alors, le bill n'apparaissait pas au feuilleton. Maintenant, une autre question. Est-ce que le litige est devant les tribunaux, présentement?

M. BURNS: Non, non. C'est le jugement final de la cour Suprême.

M. LE PRESIDENT: La parole est au ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ai entendu dire qu'il était possible que la ville de Hull présente un projet de loi privé...

M. PAUL: Une pétition.

M. CHOQUETTE: ... qui viendrait ici pour étude. Je ne sais pas encore si nous avons le projet de loi dans son texte définitif. Je pense qu'il serait prématuré d'exprimer un avis sur ce projet de loi, car j'ai demandé aux officiers de mon ministère de faire une étude juridique de son contenu. J'ai demandé au sous-ministre d'examiner le contenu de ce projet de loi et de me faire rapport de façon à pouvoir prendre position. Mais il ne m'appartient pas, je pense, d'empêcher la présentation de projets de loi. Chacun, je pense bien, a le droit de présenter un projet de loi au Parlement. Ce droit appartient à tout le monde, y inclus la ville de Hull.

M. BURNS: Nous sommes bien d'accord là-dessus.

M. CHOQUETTE: Alors, le bien-fondé du bill sera étudié.

M. BURNS: Remarquez que le sens de ma question, M. le ministre, était beaucoup plus le suivant: quelle sera l'attitude du ministère de la Justice dans l'éventualité où un projet de loi, soumis à la Chambre, hypothétiquement voudrait mettre de côté une décision de la cour Suprême? Est-ce qu'il sera d'accord? C'est une question de principe que nous discutons pour maintenir la situation qui a été établie par le droit, constatée par les tribunaux?

M. CHOQUETTE: Je pense que répondre à cette question présentement serait donner une réponse prématurée à un problème pratique. J'en comprends toutes les implications. Je ne blâme pas le député de soulever la question.

Cela pose des questions de principes très considérables. C'est incontestable. Mais, pour le moment, je pense qu'il devrait me permettre de continuer mes études au ministère de la Justice et, au moment voulu, il saura exactement à quoi s'en tenir.

M. BURNS : Est-ce que je dois comprendre que le ministre n'est pas fixé, encore, sur la question de principe, à la base?

M. CHOQUETTE: J'étudie l'ensemble de ces questions.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. BURNS: Il n'est pas fixé sur la question de principe!

M. CHOQUETTE: Bien, j'ai des idées. Je veux dire que, pour le moment, je préférerais ne pas les exprimer.

M. PAUL: M. le Président...

M. BURNS: Vous voyez qu'il y a des fois où vous utilisez de la prudence dans vos déclarations et, dans d'autres cas, vous ne le faites pas.

M. CHOQUETTE: Bien oui, je ne peux pas toujours être pareil!

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Maskinongé.

M. PAUL: ... il y a eu une pétition introduc-tive de bills privés à l'Assemblée nationale nous prévenant que la ville de Hull aurait l'intention de présenter un projet de loi.

Je crois que la plus élémentaire décence n'irait pas jusqu'à demander aux législateurs d'adopter une loi pour donner un effet rétroactif aux fins de contourner un jugement de la cour Suprême. Mais est-ce que je pourrais inviter l'honorable ministre à exercer une certaine vigilance sur le bien d'une législation qui aurait pour effet d'abolir l'article 426 de la Loi des cités et villes, où l'on traite du problème des référendums dans les zones de construction, donnant du même coup une rétroactivité à cette abolition de l'article 426. Ce qui, indirectement, aurait pour effet ou pour résultat qu'on aurait le pouvoir de contrecarrer les dispositions du jugement de la cour Suprême? La ville de Hull se trouve grandement embarrassée avec ce jugement de la cour Suprême puisqu'elle a jusqu'au 20 juin pour se conformer au jugement qui a été rédigé par le juge Pigeon.

Alors, j'inviterais le ministre à être vigilant...

M. CHOQUETTE: Est-ce que c'est nécessairement un bon jugement?

M. PAUL: Oui, il n'est pas mauvais, très intéressant à lire...

M. HARDY: Compliqué.

M. PAUL: ... et surtout quand il n'ose pas analyser la valeur de l'opinion juridique que la ville de Hull a reçue de la part de son avocat.

M. FOURNIER: Le jugement n'est pas partagé par tous les collègues du juge Pigeon parce que le juge Abbot et le juge Judson sont...

M. PAUL: Oui, cela a été...

M. BURNS: Est-ce qu'on met en doute un jugement de la cour Suprême? Est-ce cela que vous faites?

M. PAUL: C'est un danger.

M. FOURNIER: Le dossier a été présenté.

M. PAUL: C'est un danger, et je suis sûr que Me Robert Normand, en charge de la législation, sera extrêmement prudent pour que, par la présentation d'un article anodin, soit la soustraction de la ville de Hull aux dispositions de l'article 426 de la Loi des cités et villes, on ne réussisse pas à obtenir indirectement ce que la plus élémentaire décence empêcherait de demander directement.

M. CHOQUETTE: Je remercie le député de Maskinongé d'attirer mon attention sur un argument basé sur la Loi des cités et villes. Vous pouvez être sûr qu'il sera pris en considération.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que les députés sont maintenant prêts à commencer l'étude article par article?

M. PAUL: Il y aurait peut-être un point, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: Est-ce que le ministre — je ne lui en fais pas de reproche — pourrait nous donner certaines informations sur l'activité de son ministère dans le domaine des faillites frauduleuses? Est-ce qu'il y a une recrudescence des faillites frauduleuses? Je sais que c'est un domaine extrêmement enchevêtré, extrêmement compliqué. Il y a quelques années, il y a eu une équipe affectée spécialement à l'étude des différents dossiers de faillites frauduleuses. Entre autres, un brillant avocat qui vient de la région de la ville de Saint-Jérôme était affecté à ce travail de recherche, d'étude. Ce travail se faisait en coordination avec des spécialistes de la Sûreté du Québec, avec des comptables.

Est-ce que cette équipe du ministère est toujours en fonction? Est-ce que cette équipe s'occupe toujours du domaine des faillites frauduleuses?

M. CHOQUETTE: Oui. Non seulement ça, mais le député de Maskinongé pourra noter que nous demandons un accroissement des crédits à ce titre justement. Je pourrai enfin attirer son attention sur l'article spécifique dont il est question. Mais il est sûr et certain que la criminalité économique, ce qui inclut les faillites frauduleuses, est un domaine dans lequel nous avons l'intention d'exercer une action énergique. Maintenant, je ne sais pas à quel brillant avocat le député de Maskinongé fait référence. Est-ce que ce serait Me Jean-Paul Roger?

M. PAUL: Non.

M. CHOQUETTE: Non! Qui est le brillant avocat?

M. PAUL: M. Cliche. Est-ce qu'il y est encore?

M. CHOQUETTE: Richard Cliche? M. Cliche est le coordonnateur du groupe de l'enquête sur le crime organisé.

M. PAUL: Le ministre peut-il nous dire s'il semble y avoir une diminution ou si on reste toujours à peu près au même niveau? C'est assez difficile.

M. CHOQUETTE: Je pense que je ne pourrais pas donner un avis très catégorique au député de Maskinongé sur l'évolution dans les faillites frauduleuses. Mon impression, c'est que la situation, de ce côté, ne s'est pas aggravée mais a eu tendance, jusqu'à un certain point, à se résorber; pas complètement, mais elle a perdu les proportions qu'elle a pu avoir, à certaines époques. Il y a cependant beaucoup d'autres domaines où la fraude s'exerce.

M. PAUL: Comme les incendies?

M. CHOQUETTE: Non, pas tellement dans le domaine des incendies, malgré que les incendies criminels soient toujours un problème. Mais il y a certaines autres activités frauduleuses comme celles des compagnies qui vendent des systèmes pyramidaux. Il y a d'autres domaines qui intéressent le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives et le ministère de la Justice, conjointement, dans lesquels des travaux se font à l'heure actuelle.

Ici, je ne voudrais pas faire état de certaines enquêtes spécifiques qui sont en cours, mais je peux assurer les honorables députés que des travaux très importants se font pour dépister certaines personnes qui se sont livrées à des activités économiques frauduleuses.

M. PAUL: Merci.

M. LE PRESIDENT: Avant de procéder, j'ai-

merais demander l'approbation des membres de la commission pour que l'on fasse un changement, à savoir que le député de Laviolette remplace le député de Notre-Dame-de-Grâce, pour la présente séance.

M. PAUL: Est-ce pour équilibrer la présence de Me Antoine Drolet?

M. LE PRESIDENT: Agréé. Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. le Président, j'ai fait une très brève référence, dans mon intervention du début, à cette fameuse charte des droits du citoyen ou des droits fondamentaux du Québec. A plusieurs reprises, dans le passé, il en a été question, même lors de l'étude des crédits, l'année dernière. Je me souviens que le ministre nous avait alors dit que la dernière partie du rapport, concernant les droits politiques, devait lui être soumise vers le 15 juillet. Je demande tout simplement au ministre où cela en est rendu. Y a-t-il eu, d'abord, un échange de correspondance avec M. Turner ou son successeur?

M. CHOQUETTE: M. le Président, je suis heureux que le député de Maisonneuve me pose cette question. J'aurais dû la relever parce qu'il l'avait mentionnée au cours de son intervention principale.

Nous avons fait des travaux très étendus en vue de l'adoption d'une charte des droits de l'homme. Je peux assurer le député que nous avons même recruté, pour ce travail, deux des meilleurs cerveaux juridiques capables de nous aider. J'ai un projet que nous pourrions adopter et qui, à mon sens, ne requiert aucune espèce d'autorisation ou de consentement des autorités fédérales parce que cette charte des droits de l'homme s'appliquerait à l'intérieur de la compétence provinciale exclusivement.

A mon sens, elle serait un document constitutionnel, une partie, en somme, d'une constitution possible du Québec qui aurait énormément de portée. Je ne me suis pas caché, depuis quelques mois, pour dire que ce qui avait retardé la présentation de ce projet de loi, c'était l'énonciation des droits linguistiques et des droits scolaires en particulier. Je le dis en toute franchise au député. L'énonciation de ces droits représente un réel problème, dans le contexte actuel. Compte tenu de la situation et des travaux de la commission Gendron, en plus des travaux qui se font au ministère de l'Education, au ministère des Affaires culturelles, j'ai pensé que le moment n'était pas opportun de déposer le projet de loi.

J'aurais pu, évidemment, le déposer sans mention des droits linguistiques.

Mais, là, il me semble que le gouvernement aurait été exposé à une double critique: critique de la part des tenants de l'énonciation de ces droits-là, dans une forme ou l'autre, et critique de la part des personnes qui auraient vu un secteur très important des débats politiques actuels absent d'un projet de loi aussi fondamental qu'une charte des droits de l'homme.

Dans ces conditions-là, j'ai pensé qu'il était préférable de laisser passer un peu de temps et je verrai si, à l'automne, ce sera le moment propice de les déposer.

M. BURNS: Est-ce que le peu de temps que vous voulez laisser passer, c'est le rapport de la commission Gendron?

M. CHOQUETTE: Comme je l'ai dit, c'est un des aspects. J'ai consulté mes collègues qui s'intéressent spécifiquement aux domaines scolaire et culturel. Ceux-ci m'ont dit que, eux aussi, poursuivaient certains travaux à l'intérieur de leur ministère sur ces questions-là et que, de cet ensemble, nous pourrions peut-être dégager une solution.

M. BURNS: Est-ce que, mis à part ce phénomène linguistique, le projet de loi — si on peut l'appeler comme tel — est couché sur papier?

M. CHOQUETTE: Il est couché sur papier dans sa douzième version, je pense. Je considère que ce serait un des projets de loi des plus avancés au monde dans ce genre.

M. BURNS: Et vous prévoyez ça pour l'automne?

M. CHOQUETTE: Je n'ose plus faire de promesse au député de Maisonneuve, étant donné qu'il m'a dit, dans sa critique, que j'avais fait beaucoup de promesses. Je n'ose plus lui en faire.

M. BURNS: Je les lui reproche après. Là, ce n'est pas une promesse que je vous demande; c'est une réponse à une question.

M. PAUL: A moi, est-ce que vous en feriez une?

M. CHOQUETTE: Au député de Maskinongé, probablement.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Maskinongé.

M. PAUL: Le ministre nous a parlé de deux brillants cerveaux qui ont été retenus pour la rédaction de cette charte qui pourrait régir les relations juridiques de tous les Québécois. Est-ce que ces gens-là travaillent de concert avec l'Office de révision du code civil?

M. CHOQUETTE: Je vais nommer les personnes, parce que je n'ai rien à dissimuler sous ce rapport-là. C'est M. F.R. Scott, l'ancien doyen de la faculté de droit de l'université McGill, qui est une autorité canadienne dans le

domaine, ainsi que M. Paul-André Crépeau, le président de l'Office de révision du code civil, qui se sont chargés du travail, avec la collaboration de nos légistes au service de législation, parmi lesquels il y avait Me Benoit Dufour.

M. BURNS: Une dernière question à ce sujet-là, quant à moi. Est-ce que la présence de Me Crépeau dans cette équipe — d'ailleurs, je suis d'accord avec le ministre sur la compétence des deux — est un signe que le ministre envisage d'intégrer cette loi au code civil ou s'il veut en faire une loi indépendante, autonome?

M. CHOQUETTE: Une loi indépendante et autonome, parce qu'elle a une portée générale à travers l'activité des citoyens. En fait, je la verrais comme le statut no 1 ou la loi no 1 des futures lois révisées du Québec. C'est une loi de base, en somme.

M. PAUL: Mais non inscrite dans le nouveau code civil?

M. CHOQUETTE: Non, malgré qu'elle ait des répercussions sur le droit civil. Je pourrais donner une idée du plan général de la loi. Il y a un énoncé d'un certain nombre de droits politiques, un énoncé des droits judiciaires, un énoncé des droits civils qui appartiennent à la personne. A ce niveau-là, cela aurait sûrement des répercussions ou une affinité avec ce qu'on trouve au code civil. En quatrième lieu, il y avait la création, si je me rappelle bien, d'une commission des droits de l'homme relativement aux problèmes de la discrimination, soit dans l'emploi, soit dans le logement, et à diverses autres activités de ce domaine-là. Cette commission avait certains pouvoirs et une certaine autorité.

M. LE PRESIDENT: Pas d'autres questions? Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: J'ai une autre question d'ordre général, très brève celle-là, beaucoup plus brève. L'année dernière, encore une fois, aux crédits de son ministère, le ministre — nous sommes chanceux, nous avons le même ministre depuis trois ans; nous pouvons lui reprocher de nous avoir annoncé quelque chose et de ne pas l'avoir fait — nous annonçait un service d'informatique, un service des méthodes et procédés, un service central de documentation, etc.

Plus particulièrement, il nous parlait d'un registre de l'Etat civil universel. Où en sont rendues toutes ces choses-là?

M. CHOQUETTE: Des décisions dans ce sens ont été prises au conseil des ministres. L'Office de révision du code civil ainsi que le service du secrétariat du ministère de la Justice, dirigé par M. Jean Alarie, étudient la question d'un nouveau système d'enregistrement des biens réels, des droits personnels. J'attends qu'on me donne un rapport dans ce domaine-là pour agir.

M. PAUL: Est-ce que la firme Ducharme et Déom travaille encore pour le compte du ministère?

M. CHOQUETTE: Oui, la firme Ducharme et Déom fait des travaux.

M. PAUL: Sur cette question bien précise?

M. CHOQUETTE: Je ne sais pas si elle travaille à cette question précisément, je ne crois pas. La firme Ducharme et Déom est une firme d'aviseurs en matière d'organisation du personnel et des services, et elle fait surtout des travaux au palais de justice de Montréal.

Administration

M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, nous allons commencer par l'article 1, catégorie de dépenses 1, traitements, salaires et allocations.

M. PAUL: A ce poste, M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous donner une affectation du nouveau personnel dont il entend retenir l'engagement? Je remarque qu'il y aurait augmentation d'environ 83 personnes. Et ces personnes-là seraient préposées à quel service du ministère?

M. BURNS: Est-ce que je peux poser au ministre, avec la permission du député de Maskinongé, une question incidente? Je vois qu'il y a, comme le député de Maskinongé le mentionne, 289 postes qui sont requis cette année par rapport à 206 qui étaient occupés l'année dernier, alors qu'il y en avait 250 d'autorisés, sauf erreur.

Est-ce que je peux savoir comment il se fait que l'année dernière on avait autorisé 250 postes? Il y en a eu 206 seulement qui ont été remplis et on en demande 287.

M. CHOQUETTE: L'accroissement demandé est de 83 postes. Ceci comprend principalement 50 postes pour le service de sécurité que j'ai mentionné hier, c'est-à-dire les agents de la paix dont la fonction serait d'agir comme gardes du corps des membres du Conseil exécutif, de certains députés de l'Opposition ou de certaines autres personnes susceptibles de requérir une telle protection.

Il y a également des modifications qui résultent du déménagement du ministère de la Justice, qui est maintenant situé dans l'ancien édifice de la Commission des accidents du travail, à 225 est Grande Allée. Les messagers, au nombre de 15, ont été transférés de différentes catégories budgétaires aux articles de l'administration. En plus, il y a quelques autres postes qui sont sollicités.

M. PAUL: Est-ce que le ministre est encore gêné, embarrassé par les postes non libérés au

sein du ministère en raison des congés préretraite? Est-ce qu'il y en a encore beaucoup?

M. CHOQUETTE: Non, non! Le sous-ministre me dit que nous avons eu des effectifs autorisés de 250 postes additionnels récemment qui nous permettent de régler ce problème pour plusieurs.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions à la catégorie 1? Adopté. Catégorie 2, contributions de l'employeur; pensions.

UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 3, services de transport et de communication.

M. PAUL: Quelle est la justification, M. le Président, pour avoir des crédits presque doublés à cette catégorie? Est-ce qu'on va trop vite pour le ministre?

M. CHOQUETTE: Oui, vous êtes d'une rapidité!

Des frais importants sont prévus pour l'information autour de la Loi favorisant l'accès à la justice. Des frais additionnels ont été prévus pour le Conseil consultatif de la justice, ainsi que pour le transport du personnel du service de sécurité qui sera imputé à cet article budgétaire, plutôt qu'à la Sûreté du Québec.

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire combien de postes seront créés pour l'application de la Loi 70?

M. CHOQUETTE: 290 postes, déjà approuvés.

M. PAUL: Vous prévoyez la nomination éventuelle de combien de nouveaux juges?

M. CHOQUETTE: C'est à l'étude.

M. PAUL: Est-ce que tous les postes sont actuellement comblés?

M. CHOQUETTE: Non, pas du tout.

M. PAUL: Est-ce que les concours sont encore ouverts pour les postes de greffiers, par exemple?

M. CHOQUETTE: Non, les concours ne sont pas faits encore; ils doivent se faire incessamment.

UNE VOIX: Ils sont terminés.

M. CHOQUETTE: Les concours sont terminés, me dit-on, et l'engagement est prévu pour juillet ou août.

M. PAUL: Le ministre, en consultant peut- être M. Lemelin, peut-il nous dire s'il a l'intention de demander à la Commission de la fonction publique d'ouvrir un nouveau concours ou s'il y a suffisamment de demandes actuellement? Voici pourquoi: Je sais que, dans ma région, il y a deux personnes qui sont toutes deux des avocats non pratiquants. Elles sont de sexe féminin, et ont épousé des avocats pratiquants. Or, elles ont été informées, un peu tard, de la tenue de ces concours par la Commission de la fonction publique. Je sais que la même situation se présenterait dans la région de Joliette.

Ces personnes-là, malheureusement, ne se sont pas inscrites à temps. C'est pour cela que je demandais au ministre s'il prévoyait la nécessité d'ouvrir un nouveau concours, alors que l'occasion serait donnée à ces personnes de s'inscrire et de participer au concours de la Commission de la fonction publique.

M. CHOQUETTE: Cela est fort possible. Pour le moment, je réserve mon avis, mais, si le député veut m'en parler ou en parler directement avec M. Lemelin, qui a la responsabilité de ce domaine-là, il est très loisible de le faire.

M. PAUL: Il me fait signe que non; il ne veut pas me parler.

M. CHOQUETTE: C'est M. Beaulieu qui s'en occupe, je m'excuse.

M. PAUL: D'accord, je vous appellerai, M. Beaulieu. J'ai l'autorisation du ministre.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3, adoptée? Adopté. Catégorie 4, services professionnels, administratifs et autres.

M. BURNS: M. le Président, on a parlé tantôt de la firme Ducharme, Déom et Associés. Je sais que, l'année passée, cette firme avait eu, je pense, $175,000 du montant prévu de $221,800. Cette année, le montant est plus que doublé, encore une fois; vous avez dit tantôt que la firme Ducharme, Déom et Associés était encore là. En somme, je vous demande la répartition et à qui va ce montant de $546,900.

M. CHOQUETTE: Je vous donne la répartition. Services juridiques requis, concernant la préparation de réglementations et de législations, $105,000; conseillers en administration et en informatique: a) implantation des transformations administratives du district judiciaire de Montréal, $82,000; b) études spéciales: 1-écoles de surveillants d'établissements de détention; 2- administration interne des établissements de détention; 3- divers, pour un total de $198,000. Information et perfectionnement du personnel de la justice, $97,800; diverses dépenses, $64,100, soit un total de $546,900.

M. BURNS: L'année dernière, également, je pense qu'on puisait dans ces montants les

sommes nécessaires au traitement d'un conseiller spécial auprès du sous-ministre. Est-ce que c'est encore exact? Ce conseiller spécial est-il devenu fonctionnaire permanent, ou quoi?

M. CHOQUETTE: Il s'agit de M. Fernand Lalonde, je pense...

M. BURNS: Je ne connais pas son nom, mais je me rappelle que vous aviez mentionné ça.

M. CHOQUETTE: ... qui est actuellement président de la Commission des valeurs mobilières du Québec.

M. BURNS: S'il y a un conseiller spécial auprès du sous-ministre, il n'entre pas dans cette catégorie.

Y en a-t-il un?

M. CHOQUETTE: Il demeure à notre budget pour le moment, mais il a été muté à la présidence de la Commission des valeurs mobilières.

M. BURNS: Il est considéré, à toutes fins utiles, comme un fonctionnaire. Parce que c'était considéré comme un service professionnel, l'année dernière.

M. CHOQUETTE: Pour le moment, il reçoit son traitement du ministère de la Justice mais, dans l'exercice de ses fonctions, il a toute la latitude de président de la Commission des valeurs mobilières. C'est une situation qui sera régularisée incessamment en ce sens qu'il n'est pas normal qu'il continue à recevoir son traitement de la Justice, mais étant donné que cette mutation s'est faite il y a seulement quelques mois, cet état de choses a duré depuis ce temps.

M. PAUL: Il ne sera pas non plus sous la responsabilité du ministère de la Justice.

M. CHOQUETTE: Non.

M. PAUL: Il appartiendra plutôt au budget du ministère des Institutions financières.

M. CHOQUETTE: Au budget du ministère des Institutions financières, mais il aura en somme la latitude...

M. PAUL: Je pense qu'ils ont un statut particulier en vertu de la création de la commission elle-même. Est-ce que ç'a été changé?

M. CHOQUETTE: Je ne suis pas sûr qu'il ait été nommé.

M. PAUL: Je ne sais pas s'il a eu sa permanence, mais je sais qu'il est là actuellement.

M. CHOQUETTE: Il est président pro tempore.

M. PAUL: J'espère que le ministre des Institutions financières verra à le nommer parce que je crois que c'est un excellent président à la Commission des valeurs mobilières et, dans les milieux concernés, on respecte beaucoup M. Lalonde.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le ministre accepte cette dépense?

M. TETLEY: Puis-je demander au député de Maskinongé de répéter sa recommandation?

M. PAUL: Voyez-vous, M. le Président, il m'arrive si peu souvent de féliciter le ministre que, quand je parle en bien de lui, il est tout étourdi.

M. TETLEY: C'était fait d'une voix très basse.

M. PAUL: Je disais, pour répondre à mon honorable ami, que la nomination de M. Lalonde a été très bien reçue et qu'elle est bien considérée dans les milieux financiers. Le ministre nous disait que c'est une nomination à caractère temporaire. Le ministre devrait envisager une permanence dans l'emploi — pas pour lui parce que lui il ne sera que de passage — car on voudrait que M. Lalonde soit permanent, si les conditions qu'on lui offre le satisfont.

M. TETLEY: Je vous remercie. Nous sommes tous les deux permanents.

M. BURNS: Dans votre cas, c'est moins vrai.

M. TETLEY: Peut-être, mais je vous remercie de vos gentilles paroles.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions à la catégorie 4?

M. BURNS: Oui, une dernière question. Dans le détail des $546,000 vous avez parlé de $64,100 de frais divers. Ce serait quoi?

M. CHOQUETTE: Je vais vous donner ça immédiatement. Ce sont pour des études diverses.

M. BURNS: A quel sujet? Mon comptable m'a toujours dit que les "divers", il ne fallait pas qu'ils soient trop, trop gros, ça inquiète l'impôt.

Probation des jeunes délinquants

M. CHOQUETTE: Il y a une étude sur le transfert de la responsabilité des jeunes délinquants au ministère de la Justice.

A ce sujet, je pourrais les signaler aux honorables députés, mais puisque je ne l'ai pas fait, peut-être que le Solliciteur général pourrait faire part aux honorables collègues des déci-

sions qui ont été adoptées récemment par le conseil des ministres à ce sujet.

M. FOURNIER: A la suite de discussions avec le ministère des Affaires sociales, un arrêté en conseil a été adopté établissant une formule de transfert de la probation du service des Affaires sociales au ministère de la Justice.

Il s'agira, dans un premier temps, de transférer tout l'effectif d'agents de probation du ministère des Affaires sociales à celui du ministère de la Justice, tout en conservant certaines autorités distinctes pour la probation des adultes et la probation des jeunes délinquants.

Il y aura aussi transfert éventuel des deux établissements pour les jeunes de Montréal et de Québec. Il y aura aussi certaines modifications dans l'administration des cours de Bien-être social. Le tout a été adopté en principe. Les travaux sont en marche dans le but d'un transfert assez rapproché du personnel de probation, et les modifications viendront quant à la Loi de la cour du Bien-être social.

Je dois dire, à ce stade-ci, que le personnel de probation du ministère de la Justice était inexistant en 1969 et qu'il a grossi. Aujourd'hui, c'est un service assez important qui couvre presque toutes les régions de la province...

M. PAUL: La loi a été votée en 1969. On ne pouvait pas avoir de personnel avant la loi.

M. FOURNIER: Justement. Ce qui, nécessairement, permet aujourd'hui de penser à un transfert. Avant aujourd'hui, nous n'avions pas de cadres suffisants de probation pour imaginer le. transfert du service des Affaires sociales au ministère de la Justice. Présentement, c'est possible.

M. PAUL: M. le Président, je me réjouis du résultat des démarches faites probablement par le Solliciteur général et le ministre de la Justice. Je crois que vous allez répondre parfaitement aux vues des juges de la cour du Bien-être social, et spécialement du juge en chef, l'honorable Lavallée.

Maintenant, j'inviterais le docteur Gauthier — parce que je crois que cela va relever de sa compétence — à ne pas voir venir avec méfiance tous les agents de probation du ministère des Affaires sociales. Ils n'ont pas la même mentalité et la même discipline que les agents de probation du ministère de la Justice. Malheureusement — et je me dois de le déclarer — je ne fais pas d'avancés, c'est à la suite de renseignements qui me furent donnés par des personnes en place, par différents juges alors que j'étais ministre de la Justice, il y a beaucoup de juges de la cour du Bien-être social qui ont eu à se plaindre du manque de compréhension, du manque de collaboration et du manque de respect des agents du ministère des Affaires sociales à l'endroit des juges de la cour du

Bien-être social et des ordonnances que ces mêmes juges émettaient.

Je crois et je souhaite que ces nouveaux agents de probation s'imbriquent et s'intègrent facilement dans la grande famille de la justice. Je désire attirer l'attention du directeur du service de probation sur ce point. J'en profite pour remercier publiquement mon collègue, l'ex-ministre de la Santé et du Bien-Etre social, l'honorable député de Montmagny, M. Cloutier, parce que nous... Même si ce n'était pas arrangé, je dois dire que j'avais trouvé chez le ministre un grand coopérateur et il avait compris tout le problème qui se posait et ce, dans le meilleur intérêt de l'administration de la justice et de la formation de nos jeunes délinquants.

J'ai eu l'occasion de le faire publiquement déjà, mais je crois qu'à l'occasion justement des remarques que vient de nous faire le Solliciteur général, je me devais d'attirer l'attention du docteur Gauthier sur ce point afin de ne pas les recevoir comme des éléphants dans un magasin de procelaine, mais peut-être tâcher de comprendre qu'ils n'ont pas la même formation et la même idéologie que les agents de probation du ministère. J'ai cru de mon devoir également de remercier, une fois de plus, mon collègue, le député de Montmagny, pour...

M. CHOQUETTE: Vos remerciements sont un peu tardifs à son égard, parce que cela fait quand même deux ans...

M. PAUL: Oui, mais c'est la première fois que cela se réalise.

M. CHOQUETTE: Ah bon!

M. PAUL: ... cela vient de se réaliser...

M. BACON: C'est la première fois qu'il vient à la commission de la justice, M. le Président.

M. PAUL: Non. C'est la première fois que cela vient de se réaliser. Le ministre nous dit qu'on vient d'adopter un arrêté en conseil.

M. CHOQUETTE: Oui, c'est vrai. M. PAUL: Bon. Alors, je sais...

M. CHOQUETTE: Vous attendiez cette circonstance.

M. PAUL: C'est ça. J'attendais le jour, ce jour ! Le jour H est enfin arrivé !

M. BACON: S'il n'était pas entré, on n'aurait peut-être pas dit la même chose.

M. PAUL: Je n'aurais pas dit ça. Je ne l'aurais pas moins pensé, par exemple.

M. LE PRESIDENT: Le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, juste un mot. Evidemment, tout le monde connaît la sobriété de parole du leader parlementaire. Il ne faut pas se surprendre s'il a attendu jusqu'à aujourd'hui pour le faire publiquement. Mais il l'avait fait privément.

M. LE PRESIDENT: Alors, catégorie 4.

M. BURNS: Sur ce point, est-ce qu'il va quand même rester un certain cloisonnement entre les deux types d'officiers de probation?

M. FOURNIER: Comme il a été mentionné, la formation des officiers de probation, pour adultes et jeunes délinquants, est un peu différente. Actuellement, nous fonctionnons avec un service dirigé par M. Ouellet. D'un autre côté, le service existe sous une autre direction, au ministère des Affaires sociales. Nous sommes en train de négocier la façon dont les organismes fonctionneront. Mais il y aura des structures différentes pour les deux, tout en aboutissant à une seule direction générale de la probation pour adultes et pour jeunes.

M. BURNS: Merci.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4. Adopté?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 5: Entretien et réparations?

UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. PAUL: Cela ne brise pas souvent au ministère!

M. LE PRESIDENT: Catégorie 5. Adopté. Catégorie 6: Loyers?

M. PAUL: Je comprends, M. le Président, que l'augmentation que l'on constate est l'augmentation normale des loyers que doit payer le ministère à l'occasion de renouvellements de baux. Ou cela couvre-t-il la location des différentes machines, telles que Xerox et toutes les autres, machines à polycopie, magnétophones?

M. CHOQUETTE: Il s'agit de machines à photocopier, $51,500; équipements d'informatique, $18,300; systèmes de télécopieur, $3,300; pour un total de $73,100. Ceci résulte de la création d'un service de photocopie, au sein de l'administration, qui desservira les différents centres de responsabilités qui ont été regroupés, dernièrement, dans de nouveaux locaux du ministère. Ceci occasionne la nécessité de crédits additionnels de $31,500.

M. PAUL: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 6. Adopté. Catégorie 7: Fournitures et approvisionnements?

M. BURNS: M. le Président, à la catégorie 7, j'aimerais que le ministre nous donne des détails étant donné que l'on constate une augmentation, sauf erreur, de 600 p.c. dans les fournitures et approvisionnements. Vous vous êtes mis à acheter cette année ou vous prévoyez acheter? Qu'est-ce qu'on achète cette année au ministère de la Justice?

UNE VOIX: Des juges!

M. BURNS: Ce ne sont pas des matraques, toujours! Ce n'est pas un stock de matraques en plomb!

M. CHOQUETTE: Il y a eu un changement dans la façon d'attribuer cette dépense.

Autrefois, elle était attnbuée aux greffes, je crois; maintenant, elle est située au niveau de l'administration.

J'attire l'attention du député de Maisonneuve sur la catégorie 15, imputations, $204,000, qui tient compte de l'implantation à d'autres articles des fournitures, de telle sorte que le montant net doit se lire $290,000, moins $204,000.

M. BURNS: Ce qui donne à peu près le même montant que l'année passée.

M. CHOQUETTE: Nous avons créé un magasin central. C'est la raison pour laquelle vous trouvez ce chiffre de $290,000. Ce magasin central, évidemment, en desservant les différents services du ministère, chargera à chacun d'entre eux leur quote-part.

M. BURNS: Cela devrait paraître aux greffes aussi, dans le sens inverse, j'imagine.

M. CHOQUETTE: Vous voulez dire à l'époque?

M. BURNS: Non, mais si vous dites qu'il y a eu...

M. CHOQUETTE: Oui, oui, sans aucun doute. Il y aura une réduction de ce côté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 7, adopté. Catégorie 8, matériel et équipement.

UNE VOIX: Adopté. M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 10, dépenses de transfert.

M. BURNS: M. le Président, là-desssus, j'aimerais que le ministre nous donne aussi des détails. Je mentionne plus particulièrement un problème qui relève de l'an dernier, où le

Barreau avait reçu une somme de $63,500 pour l'acquisition d'un immeuble où se donnent les cours de quatrième année de droit.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BURNS: Vu que, cette année, la catégorie correspondant aux subventions n'existe plus, je pense, est-ce que cette somme, si elle se répète, si elle est augmentée, peut apparaître aux dépenses de transfert, si on regarde la façon dont les diverses allocations sont faites aux catégories?

M. CHOQUETTE: Oui, le député a raison. Nous avons ici $59,000 pour l'acquisition d'immeubles où seront donnés les cours de quatrième année de droit. Par conséquent, c'est sous cette catégorie qu'on retrouve cette dépense.

M. BURNS: C'est donc reconduit cette année?

M. CHOQUETTE: C'est reconduit, oui.

M. BURNS: Pendant que nous sommes sur ce point, je pose la question au ministre: Est-il normal, dans le fond, pratiquement, de subventionner des corporations professionnelles, comme le Barreau à même les budgets du ministère de la Justice?

M. CHOQUETTE: C'est que nous nous étions engagés contractuellement avec le Barreau.

M. BURNS: Ah! C'est un contrat.

M. CHOQUETTE: Je crois que le total était de $250,000 environ. Alors, nous sommes obligés de verser annuellement une somme et ce, depuis 1969.

M. BURNS: Depuis 1969. Avant le 29 avril ou après?

M. CHOQUETTE: C'est le 29 avril 1970. M. BURNS: Ah! C'est vrai.

M. CHOQUETTE: Cela fait seulement deux ans que nous sommes au pouvoir.

M. BURNS: Moi, cela m'a paru tellement long!

M. PAUL: Pour la population, elle souffre depuis un siècle. Du moins, c'est l'impression qu'elle a. Mais je crois que cela avait été signé par M. Bertrand, alors qu'il était ministre de la Justice, au printemps 1969. Non, ce n'est pas moi.

M. CHOQUETTE: C'était à une époque où l'harmonie était plus grande entre le ministère de la Justice et le Barreau, pourrait-on dire.

M. BURNS: Est-ce que l'actuel ministre, maintenant que je sais qu'il a les mains libres vis-à-vis de la décision, mais peut-être pas vis-à-vis du contrat, trouve que c'est une politique normale de faire ce genre d'ententes avec des corporations professionnelles? Si, demain, la Corporation des opticiens d'ordonnances vous demandait la même chose pour ses étudiants, peut-être pas à vous, mais disons au ministère des Affaires sociales, est-ce que ce serait accepté?

M. CHOQUETTE: Tout dépend des circonstances.

Je pense bien que les corporations professionnelles, dans certaines circonstances, rendent service non seulement à leurs membres, mais à la collectivité en général. Dans le cas de l'immeuble du Barreau, évidemment, on l'utilise pour des cours de quatrième année. Je ne mettrais pas cette décision en doute.

M. PAUL: Et l'assistance judiciaire également.

M. CHOQUETTE: Il faut dire d'un autre côté, aussi, que le Barreau rend des services à la collectivité par un certain nombre de publications, qu'il encourt des frais...

M. PAUL: C'était aussi pour loger l'assistance judiciaire à Montréal.

M. CHOQUETTE: Oui, bien que l'assistance judiciaire ne loge plus dans l'édifice du Barreau, mais dans la côte de la Place d'Armes.

M. BURNS: C'est cette même corporation qui ne veut pas que le gouvernement se mette le nez dans son administration en vertu du bill 250.

M. CHOQUETTE: Le député a tout à fait raison, c'est exactement la même.

M. BURNS: Il faudrait peut-être le lui rappeler...

M. CHOQUETTE: C'est pour ça que j'ai demandé justement aux fonctionnaires de mon ministère de me ramasser les chèques de subventions au Barreau pour qu'on mette...

M. BURNS: Bien.

M. CHOQUETTE: ... ça sur mon bureau et qu'à un moment donné, au bout de quelques mois, je prenne le téléphone pour appeler le bâtonnier et lui dire: Vous savez, il y a ces chèques à distribuer.

M. BURNS: Cela me permet de faire un parallèle. J'espère que le ministre ne l'oubliera pas parce que c'est cette même commission qui siège également sur le projet de loi no 10. Je ne veux pas m'écarter non plus, mais je veux que le

ministre y pense d'ici la prochaine rencontre relativement au bill 10. Il semble y avoir une espèce de suprême mépris à la commission parlementaire de la justice pour accorder des sommes qui seraient administrées par une majorité de citoyens dans le cas des cliniques juridiques. Et on dit que c'est quand même nous qui payons, qu'il faudrait surveiller. Je me demande s'il n'y a a pas un parallèle à faire entre cette subvention énorme de $200,000 au Barreau et, chose qui serait aussi facilement admissible, l'administration d'un budget donné à une corporation majoritairement formée de citoyens.

M. CHOQUETTE: Je prends note de ce que dit le député, mais, blague à part, malgré certains points de désaccord qui peuvent exister entre le gouvernement et le Barreau, je ne me laisse aucunement influencer par ces questions relativement aux subventions que je considère que nous devons lui verser, soit en vertu de contrats ou en vertu d'autres obligations morales que nous pouvons avoir à l'égard de la corporation professionnelle. Je considère que ce serait indûment que je jouerais d'une influence quelconque auprès du Barreau pour l'amener à prendre une position ou une autre. J'ai confiance qu'avec les débats qui se déroulent en commission, en particulier sur le bill 10, et les autres débats qui se déroulent dans d'autres commissions, au bout d'un certain temps on aura formé un consensus suffisant autour de certaines initiatives du gouvernement, quitte à ce qu'on y apporte les modifications qui s'imposent pour faire en sorte que ces mesures soient bienfaisantes pour la population dans son ensemble.

M. LE PRESIDENT: Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. TETLEY: Est-ce que le ministre a l'intention de subventionner le nouveau syndicat des avocats? Est-ce que le syndicat a fait une demande?

M. CHOQUETTE: Il n'a pas fait de demande.

M. TETLEY: Vous n'êtes pas membre vous-même?

M. CHOQUETTE: Non.

M. BURNS: En vertu du code du travail, vous savez que vous n'avez pas. le droit de demander à quelqu'un dans un syndicat en formation s'il est membre ou non?

M. TETLEY: Bon.

M. PAUL : Est-ce que le ministre a l'intention de subventionner les ACEF?

M. TETLEY: Cela, c'est une autre question que vous n'avez pas le droit de poser, mais je peux répondre que j'étudie encore la question.

M. PAUL : M. le Président, je peux vous dire que je réserve la question pour l'an prochain.

M. LE PRESIDENT: Article 10, adopté. Article 11, autres dépenses?

UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 15, imputations?

M. PAUL: D'où viennent ces revenus, M. le Président?

M. CHOQUETTE: Les revenus? M. PAUL: Oui, les $204,000?

M. CHOQUETTE: Ce sont les charges du magasin des ministères aux divers services du ministère.

M. PAUL: Ah, très bien.

M. BURNS: C'est ce que vous mentionniez tantôt relativement au poste 7. Qu'est-ce que c'est, poste ou article?

UNE VOIX: Catégorie.

M. CHOQUETTE: Catégorie 7, exactement.

M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, j'aimerais donner un mot d'explication. C'est une directive que nous avons reçue du Secrétariat des commissions, à l'effet qu'autant que possible il ne faudrait pas utiliser l'expression poste budgétaire. J'ai donné les explications à une assemblée précédente et c'était une entente qu'il y avait eu entre le journal des Débats et le Conseil du trésor.

On avait réservé cette appellation de poste budgétaire pour un ministère. Lorsque vous référez à une dépense dans les crédits ici, à gauche de la colonne, le chiffre 2, par exemple, aux affaires criminelles, c'est l'article. Immédiatement en dessous, vous avez le chiffre 1, contentieux; c'est le sous-article et, immédiatement en dessous, ce sont les catégories de dépenses. Il peut y avoir des sous-catégories de dépenses et des sous-sous-catégories de dépenses. Si on a la collaboration de tout le monde, ce sera plus facile d'enregistrer les délibérations au journal des Débats et aussi, lorsque vous référerez au journal des Débats, vous allez plus facilement comprendre de quoi il s'agit.

Affaires criminelles

M. LE PRESIDENT: Alors, mettant en pratique ces nouvelles instructions, nous sommes maintenant à l'article 2, affaires criminelles, sous-article 1, contentieux criminel, catégorie

de dépenses 1, traitements, salaires et allocations.

Adopté?

UNE VOIX: Adopté.

M. PAUL: C'est un bon sous-ministre qu'il y a là.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3, services de transport et de communication?

UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 4, services professionnels, administratifs et autres?

M. BURNS: M. le Président, sur ce point-là, je sais que, l'année dernière, le détail de cette catégorie-là nous montrait $40,000 pour les comptables, $30,000 pour les avocats, $50,000 pour les enquêteurs.

Est-ce que le ministre peut nous dire si c'est à peu près dans le même style, dans la même proportion cette année dans ces services professionnels qui sont augmentés de $120,100 à $405,300?

M. CHOQUETTE: Ceci s'explique principalement par l'initiative qui a été prise de procéder à une enquête sur le crime organisé; cela comprend les honoraires d'avocats, $125,000; les honoraires de comptables, $125,000; les honoraires de comptables dans les faillites frauduleuses $80,000; les frais d'expertise toujours en matière de faillite $35,100; les honoraires d'avocats, pour des causes devant les tribunaux autres que des poursuites sommaires, $25,000.

M. DROLET: Est-ce que l'enquête sur le crime organisé va bel et bien débuter le 15 septembre tel que prévu?

M. CHOQUETTE: La date probable est le 15 septembre. Je veux dire à peu près au milieu de septembre. Il peut y avoir quelques retards, mais j'ai l'intention qu'on y procède.

M. BURNS: M. le Président, on avait discuté à d'autres occasions, de ce problème-là, mais je me pose tout haut la question. Si on a un besoin constant de ce genre d'experts, comptables, avocats, enquêteurs, etc., je me demande très sérieusement pourquoi on ne les engage pas au ministère, pourquoi on ne fait pas les représentations nécessaires à la fonction publique.

Je sais que le ministre nous avait déjà mentionné dans le passé que c'était des gens qui, dans bien des cas, justifiaient des honoraires assez élevés et que les barèmes de la fonction publique empêchaient un recrutement facile. Mais on est quand même arrivé à un système de substituts du procureur général ou d'avocats de la couronne assez permanent dans certains endroits; je pense à Montréal et à

Québec, je ne connais pas les autres endroits. On a quand même réussi à recruter de bons avocats, des avocats dont on ne peut pas dire qu'ils sont de seconde zone. On a réussi à les intégrer dans un certain barème de la fonction publique. Est-ce qu'il y a eu des discussions, entre le ministre de la Justice, sur ce point-là, et son collègue de la Fonction publique, jusqu'au 12 mai, M. L'Allier, et, après le 12 mai, M. Cournoyer?

M. CHOQUETTE: Je dirai qu'il y en a eu fréquemment et non seulement dans le domaine auquel le député se réfère, c'est-à-dire le domaine des avocats et des comptables, mais, dans d'autres domaines, du personnel de la justice.

Les barèmes qui sont établis ne nous facilitent pas le recrutement.

M. BURNS: Mais, envisagez-vous une ouverture? L'année dernière, c'était une catégorie qui parlait de $120,000, cette année on parle de $405,000, et en fait de quoi va-t-on parler l'année prochaine?

M. CHOQUETTE: Remarquez que...

M. BURNS: Il serait peut-être temps d'y penser et de trouver une solution à long terme. Si on a besoin constamment de recourir à ce genre de spécialistes et si la barrière de leur entrée dans la Fonction publique, c'est justement les barèmes de salaires, il y a quelque chose à faire là. Je pense qu'il est dans l'intérêt du ministère, de l'Etat en général de s'assurer des services permanents de ces spécialistes.

M. CHOQUETTE: Je partage l'avis du député de Maisonneuve.

M. BURNS: Vous allez continuer vos représentations auprès du ministre de la Fonction publique et du cabinet?

M. CHOQUETTE: Je voudrais simplement ajouter aux observations du député que les honoraires d'avocats payés à l'extérieur, je crois, cette année, sont les plus bas, depuis quatre ans. Ce qui indique que le recours à des services extérieurs d'avocats n'a pas augmenté mais s'est stabilisé d'une certaine façon.

Mais je n'ignore pas la dimension que le député explore, et je partage son avis que les barèmes devraient être revisés dans plusieurs cas.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4. Adopté.

Pourrions-nous terminer ce sous-article, je n'entrevois pas d'autre complication.

Catégorie 5, entretien et réparation. Adopté.

Catégorie 6, loyers. Adopté.

Catégorie 7, fourniture et approvisionnement. Adopté.

Catégorie 8, matériel et équipement. Adopté.

La commission suspend ses travaux jusqu'à demain dix heures, même salle.

(Fin de la séance à 18 heures)

Séance du jeudi 1er juin 1972 (Dix heures douze minutes)

M. PICARD (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

La commission de la justice poursuit l'étude des crédits du ministère de la Justice. Nous en sommes à l'article 2, sous-article 2, substituts du procureur général. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations?

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a encore des procureurs de la couronne à honoraires plutôt qu'à salaires? Si oui, quel pourrait en être le nombre?

M. CHOQUETTE: Nous en avons 139 à honoraires, sur environ 88 à temps partiel ou à temps plein.

M. PAUL: A temps partiel, ce sont probablement ceux-là qui agissent surtout à la cour du Bien-être social?

M. CHOQUETTE: Oui et dans les districts où nous n'avons pas de permanents.

M. BURNS: Est-ce que le recrutement est encore difficile, comme le ministre le mentionnait l'an passé, à cause des questions de salaires?

M. CHOQUETTE: Nous avons fait des concours. Certains concours se sont révélés infructueux, dans le sens qu'il n'y a pas eu de très bons candidats qui avaient été retenus. Mais on m'a dit que, récemment, nous avions tenu de nouveaux concours et que nous avions réussi à recruter un certain nombre de nouveaux procureurs de la couronne, en particulier, dans le district de Montréal et la région, qui ont les qualités voulues.

M. BURNS: Quel est l'éventail de salaire actuel? L'échelle, si vous voulez. Le minimum et le maximum?

M. CHOQUETTE: Le minimum est de $9,000 et le maximum de $21,000, pour des procureurs ordinaires. Mais, pour un procureur-chef, évidemment, le salaire est plus élevé. Pour un adjoint au procureur-chef, je crois que c'est un peu plus bas.

M. PAUL: Qui est le procureur-chef de la couronne à Montréal?

M. CHOQUETTE: C'est M. Stephen Cuddihy. Ses adjoints sont MM. Bélanger et Girouard.

A Québec, c'est Me Jean Drouin qui a comme adjoint, Me Maurice Lagacé. Maintenant, parmi les autres procureurs-chefs que nous avons à travers le Québec, il y a Me

Bertrand Laforêt, à Rivière-du-Loup, Me Roland Paquin, à Trois-Rivières, Me Maurice Roy était procureur-chef à Roberval, mais il vient d'être nommé juge de la cour du Bien-Etre social.

M. PAUL: Maurice Roy?

M. CHOQUETTE: Oui, il vient d'être nommé, il y a une semaine ou deux.

M. HARDY: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait me dire combien il y a de procureurs pour le district judiciaire de Québec, ici à Québec?

M. CHOQUETTE: Combien il y en a à Québec? Huit.

M. HARDY: Combien y en a-t-il à Saint-Jérôme?

M. CHOQUETTE: Quatre.

M. HARDY: Comment le ministre peut-il expliquer qu'il y ait le double de procureurs à Québec, alors que le nombre de causes, à Saint-Jérôme, est plus élevé qu'à Québec?

M. BURNS: Où est-ce Saint-Jérôme?

M. CHOQUETTE: C'est par l'ardeur au travail du Barreau de Saint-Jérôme que j'explique ça! Bon, on me dit qu'à Québec les causes inscrites en 1971 étaient au nombre de 4,666, tandis qu'à Saint-Jérôme il y en avait 3,141.

M. HARDY: Alors, vous voyez quand même — j'étais un peu dans l'erreu r— qu'il y a presque le double de procureurs pour la différence de 3,000 à 4,000.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. HARDY: Tout simplement, je ne veux pas que vous diminuiez le nombre de procureurs à Québec. Mais, connaissant assez bien la situation à Saint-Jérôme, je pense qu'il y aurait lieu, pour la bonne administration de la justice dans le district judiciaire de Terrebonne, que le ministre de la Justice se penche sérieusement sur la possibilité d'augmenter le nombre de procureurs à Saint-Jérôme. Evidemment, les procureurs de Saint-Jérôme, d'une façon générale, sont tellement brillants, tellement compétents que le ministère va les chercher assez régulièrement pour leur confier des responsabilités. Cela a été le cas de Me Cliche. Cela a été le cas de Me Cuddihy. Quand même, il ne faudrait pas exagérer car, bien sûr, nous sommes fiers du Barreau, du secteur de Saint-Jérôme et que nos gens puissent aider à l'administration de la justice, d'une façon générale, dans la province.

Par ailleurs, je pense que, précisément, les chiffres sont encore beaucoup plus éloquents

que tout ce que je pourrais dire. Vous avez 3,000 causes à Saint-Jérôme et 4,000 causes à Québec. Vous avez le double de procureurs à Québec. Il y aurait sûrement lieu de faire un ajustement et d'augmenter le nombre de procureurs à Saint-Jérôme.

M. CHOQUETTE: Je prends note des observations du député de Terrebonne. Je voudrais, cependant, ajouter que les procureurs de Québec s'occupent également du tribunal de la cour d'Appel. Vous comprenez, cela fait partie de leurs responsabilités. Ils ont des responsabilités additionnelles. Je crois que quelques-uns des procureurs de Québec sont itinérants, n'est-ce pas, M. Boisvert?

Ils s'occupent des enquêtes sur les incendies dans le district de Québec. Mais j'admets que la charge de travail est lourde pour nos procureurs, dans le district de Terrebonne.

M. HARDY: Je pourrais ajouter, entre autres — je n'ai pas de chiffres — que quant aux enquêtes du coroner, â cause d'une activité assez grande dans notre district, des accidents d'automobiles nombreux qui se produisent, il y a beaucoup d'enquêtes du coroner dans le district de Terrebonne, ce qui, évidemment, prend une partie du temps des procureurs.

Quant à la cour d'Appel, je ne sais pas exactement ce à quoi le ministre fait allusion mais dans un district comme chez nous, lorsque les causes qui ont été plaidées dans le district de Terrebonne vont en appel, ce sont les procureurs de Saint-Jérôme qui vont plaider ces causes à la cour d'Appel.

M. CHOQUETTE: Mais ici, â Québec, les procureurs de la couronne assument la responsabilité de pas mal de causes qui leur viennent d'autres districts judiciaires et qui sont portées en appel.

Maintenant, je voudrais, pour montrer jusqu'à quel point je suis sensible aux arguments du député de Terrebonne, lui dire que depuis un certain nombre d'années il y a eu un effort formidable de fait dans le district de Terrebonne, tant par les procureurs que par les juges, pour tenter de mettre les affaires judiciaires à jour.

M. HARDY: C'est exact.

M. CHOQUETTE: On se rappelle les arrérages qui existaient dans le domaine criminel, â une certaine époque, dans le district de Terrebonne. On accusait des gens, en vertu du code criminel, et ils n'avaient leur enquête préliminaire que six mois plus tard.

M. HARDY: Je suis bien heureux que le ministre souligne que c'est grâce à l'excellente collaboration des procureurs et des juges. Cela fait au moins deux étés où les juges siègent aussi régulièrement que pendant le reste de l'année, à

Saint-Jérôme, ce qui n'est pas le cas dans tous les districts judiciaires, je pense.

M. CHOQUETTE: En effet.

M. LE PRESIDENT: La parole est au bâtonnier de Trois-Rivières ou, si vous préférez, le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, d'abord, je dois apporter une correction. J'ai été limogé comme bâtonnier. Vous devriez donc dire ex-bâtonnier de Trois-Rivières.

M. HARDY: La coutume veut que, quand un avocat a été bâtonnier, on l'appelle bâtonnier le restant de ses jours.

M. PAUL: M. le Président, je vais préciser que cette coutume ne s'établit que pour le bâtonnier du Barreau de Québec et non pour les sections.

M. HARDY: Comme le député de Maskinongé à quasiment la compétence du bâtonnier du Barreau de Québec.

M. PAUL: M. le Président, je constate que le député de Terrebonne est quelque peu victime d'une jalousie de bon aloi.

M. CHOQUETTE: Oui mais, n'eût été que le bâtonnier de Trois-Rivières soit en même temps député de Maskinongé, il aurait probablement accédé au bâtonnat général.

M. PAUL: Non, non! Excepté que je dois dire, en toute humilité, que le bâtonnier de Trois-Rivières n'a pas voulu être reconduit dans son mandat, pour cette année. Je ne voulais pas être en lutte constante et en torture de conscience avec le ministre de la Justice, surtout au sujet des problèmes futurs à régler, dans le domaine de la justice.

Ce n'était pas le but de mon intervention.

M. LE PRESIDENT: La prochaine fois je me référerai au député de Maskinongé comme le député de Maskinongé, autrement ça fait des débats.

M. PAUL: Maintenant, comme membre du Barreau vivant dans un secteur tout près du Barreau des Laurentides, je me permettrai de féliciter mon collègue, le député de Terrebonne, d'avoir signalé les besoins du district judiciaire de Saint-Jérôme. Et ce n'est sans doute que par un oubli, explicable de sa part, qu'il n'a pas pensé à signaler un autre problème qui existe dans le Barreau des Laurentides, la situation dans le district judiciaire de Joliette.

Tout à l'heure, le ministre a mentionné qu'à Saint-Jérôme il fut un temps où un délai de 4 à 6 mois était nécessaire entre une accusation et une enquête préliminaire. Je crois que la situa-

tion est assez grave dans le district judiciaire de Joliette. Je sais que les procureurs et les juges font leur possible également pour corriger ce retard dans l'administration de la justice, mais à Joliette il y a un autre problème qui ne dépend pas du ministre de la Justice et je suis sûr que M. Lemelin pourrait corriger un peu ou appuyer ces remarques. C'est qu'il y a à Joliette un manque de locaux. C'est ça le problème. On n'a pas l'espace voulu pour loger tout le personnel de bureau.

C'est une situation qui est devenue grave. Le ministre tout à l'heure a mentionné la situation qui prévalait à Saint-Jérôme un certain temps, mais je crois que la construction du nouveau palais de justice a mis les locaux nécessaires pour l'administration plus expéditive de la justice. Et à Joliette, c'est regrettable mais un délai, qui constitue quasiment un déni de justice dans certains cas, est nécessaire au procureur de la couronne.

Je sais qu'il y a eu amélioration dans ce district judiciaire, mais il est sûrement possible de faire certaines réformes. Le problème en est un surtout de local que je voulais porter à l'attention du ministre pour tâcher que dans tout le Barreau des Laurentides il y ait un effort marqué aussi bien à Joliette qu'il l'a été à Saint-Jérôme.

M. CHOQUETTE: Je souscris entièrement aux observations du député de Maskinongé. Et je tiens à l'informer que des dispositions ont été prises avec le ministère des Travaux publics pour agrandir le palais de justice de Joliette. Parce que le problème à Joliette était plus un problème d'espace et de salles de cour disponibles pour permettre aux juges de siéger qu'un problème de couronne, ou de nombre de substituts.

J'admets cependant qu'à Joliette il y a aussi eu un accroissement considérable des causes criminelles. Le député peut être assuré que, dans un très bref délai, le palais de justice sera agrandi. Cela fait partie des priorités qui ont été arrêtées entre les ministères de la Justice et des Travaux publics et on m'assure que les travaux doivent commencer à très brève échéance.

M. PAUL: Je remercie le ministre pour l'information qu'il donne et qui sera à l'entière satisfaction des justiciables du district de Joliette.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions sur cette catégorie 1? Adopté.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3: Services de transport et de communication.

M. PAUL: C'est la première fois, M. le Président, que nous assistons à une réduction de crédits depuis le début. Je me demande si c'est une politique d'économie que le sous-ministre de la Justice, division criminelle, veut appliquer, mais je constate qu'il y a une réduction de frais de dépenses, le tout probablement à cause de la mutation de certains services à l'intérieur même du ministère, je suppose.

M. CHOQUETTE: Je pense bien, M. le Président, que nous nous sommes basés sur l'expérience de l'année dernière, pour arrêter le chiffre qu'on trouve ici.

M. PAUL: On est plus réaliste. M. CHOQUETTE: Oui.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3. Adopté. Catégorie 4: Services professionnels, administratifs et autres.

M. BURNS: Ici, M. le Président, j'ai une question à poser au ministre, même si la somme de cette année est à peu près de $100,000 inférieure à celle de l'année passée. On se souviendra que l'année passée il y avait $180,000, c'est-à-dire près de $200,000, qui étaient pour les fameux événements d'octobre, les cinq procureurs spéciaux, puis tout ce que ça comportait. Cela veut dire qu'en réalité, si on enlève ces $180,000, qui ne devraient pas revenir cette année, vous avez une augmentation réelle de $100,000 à cette catégorie. Est-ce qu'il y a quelque chose de spécial que vous prévoyez ou quoi?

M. CHOQUETTE: Bien, nous n'avons pas tellement de prévisions d'accroissement autres que dans un certain nombre d'enquêtes en cours à l'heure actuelle. Comme le député le sait peut-être, le ministère de la Justice et le ministère des Institutions financières ont porté des accusations relativement à certaines fraudes ou faux à l'occasion de certaines transactions de Bourse et il nous a fallu retenir les services de procureurs à l'extérieur pour nous occuper de ces causes.

M. BURNS: Est-ce que c'est à cause du domaine spécialisé que vous ne pouvez pas utiliser vos procureurs de la couronne?

M. CHOQUETTE: Il y a sûrement cet élément qui joue, plus le fait que nos procureurs, à Montréal, sont débordés de travail, avec les effectifs que nous avons. Ces causes sont d'une très grande importance et il est nécessaire d'y attacher un avocat — je ne dirais pas en permanence, qui travaille exclusivement sur cette question — qui doit suivre ces causes, parce que cela a impliqué des procédures d'extradition et toutes sortes d'autres démarches à l'étranger.

Nous avons cru, dans les circonstances, opportun de retenir les services d'un ancien procureur chef de la couronne, qui a fait ses preuves comme spécialiste en droit criminel.

M. BURNS: Qui?

M. CHOQUETTE: Gabriel Lapointe. Il y a aussi l'accroissement des affaires judiciaires. Il ne faut pas ignorer qu'un certain nombre de litiges, dans lesquels le ministère est engagé, impliquent des enquêtes extrêmement longues. Quand je dis "enquêtes", je ne veux pas dire des enquêtes au niveau policier ou au niveau du ministère, mais des enquêtes devant le tribunal.

Je donnerai, par exemple, le cas des poursuites qui résultent de l'enquête de la ville D'Anjou; il nous a fallu retenir les services d'avocats extérieurs, Jacques Bellemare, plus un autre procureur, assisté d'un de nos propres procureurs. Ces enquêtes requièrent, en somme, des services extérieurs.

M. HARDY: Est-ce que les frais de la commission d'enquête qui sera mise sur pied bientôt sont imputés à cet article?

M. CHOQUETTE: Non, je ne le pense pas, il y a un autre article. Je tiens à faire remarquer que, pour ce qui est de la commission d'enquête sur le crime organisé, j'ai donné mandat d'agir à des procureurs permanents de la couronne. Je ne dis pas que, le moment venu, ils ne pourront pas se faire assister, dans certains domaines particuliers, par un avocat qui aurait une compétence particulière et dont il faudrait retenir les services, mais le contrôle du travail préparatoire du "strike force" sur le crime organisé est entre les mains de procureurs permanents, de substituts du procureur général permanent et de policiers de la Sûreté du Québec et de la Communauté urbaine de Montréal.

M. PAUL: Dans les plaintes portées en vertu de certaines fraudes qui auraient été commises à la Commission des valeurs mobilières, je crois aussi qu'il y a une urgence à procéder pour rétablir le climat de confiance nécessaire aux activités de Bourse.

La Commission des valeurs mobilières est actuellement aux prises, depuis quelques années, avec une lutte soutenue, de la part du marché de Vancouver surtout, et également du marché de Toronto. Beaucoup de gens sont intéressés à inscrire leurs actions, leurs valeurs mobilières au marché de Vancouver. Alors, je crois que, dans ce cas, il y a une urgence à disposer de ces plaintes pour montrer diligence et un éveil constant de la part des autorités du ministère des Institutions financières et du ministère de la Justice pour enrayer toute fraude ou tout début de fraude que l'on pourrait retrouver dans ce milieu.

M. CHOQUETTE: Je peux répondre au député de Maskinongé qu'un certain nombre des accusations portées en rapport avec les fraudes auxquelles il fait allusion, fraudes boursières, procéderont lundi prochain. L'enquête prélimi- naire est fixée à ce jour-là. J'ajouterai aussi que nous avons l'intention de poursuivre ces causes avec une énergie qui ne sera atténuée d'aucune façon, dans le but d'assainir le climat du commerce des valeurs mobilières.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4. Adopté.

Catégorie 5: Entretien et réparations. Adopté.

Catégorie 6 : Loyers. Adopté.

Catégorie 7: Fournitures et approvisionnements. Adopté.

Catégorie 8: Matériel et équipement. Adopté.

Catégorie 11: Autres dépenses. Adopté.

Catégorie 14: Remboursements.

M. PAUL : Remboursement, M. le Président, ça vient de quoi? Ce ne sont pas les amendes payées.

M. CHOQUETTE: Non, ce sont les honoraires d'avocats qui travaillent pour le ministère de la Justice. Leurs honoraires sont remboursés par les accusés d'infractions au code de la route.

M. PAUL: Comment se fait-il que vous imputez ça à cette catégorie, pour le code de la route, alors que ça relève des affaires civiles et pénales?

M. CHOQUETTE: C'est parce que c'est en rapport avec les traitements des procureurs de la couronne. Un certain nombre de nos procureurs de la couronne s'occupent de ces causes.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 14, adopté.

Sous-article 3: Coroners et commissaires enquêteurs sur les incendies. Catégorie 1 : Traitements, salaires et allocations.

M. DROLET: M. le Président, je crois que c'est au sous-article 3 que nous pouvons parler des morgues.

M. CHOQUETTE: Oui.

Morgues dans les comtés ruraux

M. DROLET: Je voudrais savoir du ministre quelle est la politique du ministère concernant les morgues dans nos comtés, la façon de distribuer les morgues à chacun des directeurs de funérailles, et non seulement les distribuer mais les leur enlever.

M. CHOQUETTE: C'est suivant la qualité et la compétence.

M. PAUL: Est-ce qu'il faut être membre de l'Association des thanatologues?

M. CHOQUETTE: Je dirais que ce n'est pas nécessaire... Mais, d'un autre côté, ce n'est pas une marque noire...

M. BLANK: C'est le libre choix de la morgue.

M. CHOQUETTE: ... comme on dit, à l'égard de l'intéressé que d'être membre de l'Association des thanatologues.

M. DROLET: M. le Président, je vais détailler un peu plus pour souligner au ministre... Je n'étais pas censé intervenir à cette catégorie, mais je me suis justement rendu dans le comté hier et j'ai eu des nouvelles de différents directeurs de funérailles qui ont été avisés, par une lettre qu'ils ont reçue du ministère de la Justice, le 29 mai 1972, signée par M. Rodolphe Roy, qu'on avait coupé les territoires des directeurs de funérailles pour donner une autre morgue à un autre directeur de funérailles qui, lui, s'était juré, depuis le 29 avril 1970, d'avoir la morgue.

Un instant! J'ai des lettres ici...

M. CHOQUETTE: J'espère que la lettre n'était pas écrite...

M. PAUL: Il tient à entretenir des relations froides.

M. DROLET: M. le Président, des démarches ont été faites, en 1970 et en 1971, auprès du ministère de la Justice pour enlever certaines morgues à ceux qui les détenaient déjà pour les donner à cet individu qui est reconnu, soit dit en passant, pour un très bon libéral. Or, j'ai des lettres du ministère de la Justice, ici, qui confirmaient qu'aucun changement ne se ferait, parce qu'il ne servait absolument à rien de faire des changements, que tout était égal, que d'autres morgues ne seraient pas ouvertes. Quelque temps après le premier échec en 1970, le type en question a demandé une lettre de référence au candidat libéral défait. J'ai rencontré le ministre de la Justice à la sortie de la Chambre, le 26 février 1971...

M. PAUL: Pas la chambre d'embaumement, toujours...

M. DROLET: ... et le ministre de la Justice m'avait assuré que, lettre ou pas lettre du candidat libéral défait, ce n'était pas cela qui changerait les morgues dans le comté. Si les autorités avaient décidé qu'il n'y aurait pas de changement, il n'y en aurait pas.

Hier soir, on m'avise que trois morgues dans le comté ont vu leur territoire coupé pour en donner une, justement, au type en question qui s'est vanté d'être allé directement au ministère pour se faire donner la morgue. Je pense que c'est une chose anormale de procéder de cette façon. Je ne sais pas lequel de vos fonctionnaires a permis cette chose. Si c'était au moins un directeur de funérailles avec une clientèle valable, comme on dit, passe encore. Mais si on regarde à Donnacona les deux directeurs de funérailles,il y en a un qui, sur cent morts, en a 95 chez lui. L'autre n'a presque rien. Aujourd'hui on enlève la morgue à l'un pour la donner à l'autre, sous prétexte que le type est plus libéral.

M. CHOQUETTE: Auquel l'enlève-t-on? M. HARDY: A celui qui en a 95?

M. DROLET: Bien non, celui qui a présentement la majorité des morts chez lui...

M. HARDY: On lui enlève la morgue pour la donner à l'autre?

M. DROLET: Pour la donner à l'autre, justement.

M. HARDY: Justement, c'est pour rétablir l'équilibre afin que chacun puisse vivre.

M. DROLET: Un instant, un instant. Présentement,...

M. CHOQUETTE: Je ne trouve pas qu'il faille trafiquer sur la mortalité !

M. DROLET: Non, M. le Président. Cela semble faire rire, mais c'est une chose que je considère assez sérieuse. On assure les directeurs de funérailles du comté qu'il n'y aurait pas de changement, qu'il y avait assez de morgues dans le comté. On l'assure encore la semaine dernière par une autre lettre du ministère de la Justice. C'est votre secrétaire, Claude Vadeboncoeur, qui refuse un permis à M. Saint-Amant, de Sainte-Thècle, qui voulait ouvrir une morgue au Lac aux-Sables, dans Portneuf; on lui dit: Aucun changement; présentement, les divisions sont parfaites.

M. CHOQUETTE: Tout est sur la glace!

M. DROLET: C'est ça.

M. CHOQUETTE: Au frigidaire!

M. DROLET: Au même moment,...

M. CHOQUETTE: C'est au point mort!

M. DROLET: ... le 26 mai, votre secrétaire dit qu'il n'y aura pas de changement quant aux morgues. Le 29 mai, un autre fonctionnaire, M. Rodolphe Roy, avise les directeurs de funérailles de Saint-Basile, Donnacona et Pont-Rouge je crois, qu'on coupait leurs territoires; on leur donnait, si vous voulez, de petits territoires de rien pour donner le meilleur territoire à un autre directeur de funérailles qui est très heureux présentement parce qu'il crie à tout le monde qu'il l'avait dit, le 29 avril, qu'il aurait la morgue, et il l'a. Je trouve cela un peu dégueulasse, la manière dont cela s'est produit quand même.

M. PAUL: M. le Président, comme sous-question, j'ai écouté, avec beaucoup d'intérêt, les remarques du député de Portneuf. Je me suis demandé si la cause ne se répétait pas du fait que le ministre de la Justice aurait confié l'administration de ce service au Solliciteur général.

M. CHOQUETTE: Le Solliciteur général ne peut pas prendre la responsabilité...

M. FOURNIER: J'ai assez des prisonniers sans avoir à m'occuper des morts.

M. PAUL: Ah bon!

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas ça du tout. Maintenant, le député sait, probablement, que le problème des morgues est un problème...

M. HARDY: Crucial.

M. CHOQUETTE: Pas crucial, mais un peu difficile. Nous sommes appelés, au ministère de la Justice, à déterminer des territoires pour les différents propriétaires de morgues ou directeurs de funérailles. Ainsi, par exemple, on me faisait part que, dans certains comtés ou districts judiciaires, la rue était divisée en deux. Si un individu mourait dans un accident d'automobile, d'un côté de la rue, il était envoyé à telle morgue.

UNE VOIX: C'est ça.

M. CHOQUETTE: Et, s'il mourait de l'autre côté de la rue, il était envoyé à telle autre morgue. Il semble que ce commerce soit, jusqu'à un certain point, assez lucratif puisque nous voyons beaucoup de morgues surgir un peu à droite et- à gauche. Maintenant, j'ai demandé aux officiers du ministère de la Justice de préparer une politique qui serait beaucoup plus à long terme et qui introduirait moins de discussions au sein des différents propriétaires de morgues de façon à stabiliser la situation une fois pour toutes.

M. DROLET: Je pense, M. le Président, que lorsqu'il y a, justement, changement de morgues, on consulte normalement le bureau de la Sûreté du Québec et le coroner du comté. Les deux ont été consultés. J'ai la lettre de la Sûreté du Québec en main.

On dit, dans les deux cas, autant à l'échelle du coroner, le Dr Romain Plamondon, qu'à la Sûreté provinciale, qu'aucun changement ne s'impose, qu'au point de vue du millage et de tout ce que vous voulez, tout est en parfait ordre. Partout, depuis deux ans, on dit que tout est parfait: les autorités du ministère de la Justice, comme la Sûreté provinciale et le coroner. Or, hier, les gars sont avisés que leur territoire est coupé et que le meilleur territoire, si vous voulez, est donné à un autre.

M. CHOQUETTE: Le meilleur territoire? Ecoutez, je ne suis pas en mesure de répondre au député, au moment où il parle, parce qu'il soulève un cas particulier. J'ignore tout de ce cas. Je n'ai jamais été saisi de la question. Je vais examiner le problème avec Me Rodolphe Roy qui a pris cette décision, ainsi qu'avec M. Vadeboncoeur qui avait écrit une lettre, semble-t-il, contradictoire avec la décision prise. Je pourrai dire au député s'il y a lieu à révision ou si, à mon sens, la décision était bien fondée. Vous comprenez que tout le monde a le droit de vivre. Le député nous indiquait, tout à l'heure, qu'il semblait que la morgue en place avait un quasi-monopole. Peut-être qu'on a introduit une certaine concurrence.

M. DROLET: Pas nécessairement un monopole, M. le Président, mais je ferai remarquer au ministre que là où est la morgue, c'est un véritable directeur de funérailles. Il a les ambulances, les salons et tout, tandis que l'autre, c'est un réparateur de réfrigérateurs. Vous vérifierez pour voir si j'ai raison.

M. CHOQUETTE: Je vais vérifier.

M. HARDY: Pour lui, la morgue, c'est un "side-line"!

M. DROLET: C'est cela.

M. FOURNIER: Les morts sont bien conservés!

M. DROLET: J'espère que le ministre vérifiera cette chose parce que, de toute façon, on ne laissera pas cela mort.

M. CHOQUETTE: Bon. Je vais examiner le problème et j'en ferai part au député.

M. HARDY: Si le député de Portneuf est aussi efficace avec les vivants qu'avec les morts, il va faire un vrai bon député.

M. DROLET: C'est ce que les gens de Portneuf disent.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais poser une question à l'honorable député de Portneuf. Je pense tout haut. Le député de Portneuf aurait-il des objections à ce que toutes les morgues disparaissent pour qu'elles soient centralisées dans les hôpitaux?

M. DROLET: Je ne le sais pas. Je n'ai pas à répondre à cette question.

M. CHOQUETTE: Avez-vous des vues générales sur le sujet?

M. DROLET: Pas nécessairement. Ce n'est pas la question. La question est, tout simplement, qu'autant le ministère, autant les poli-

ciers du comté, autant le coroner disent qu'il n'y a pas lieu d'y avoir de changements et, au même moment, ils nous arrivent et font des changements par derrière. Le pire, c'est que le gars, lui, se bat la gueule. C'est clair? Hier soir, à Donnacona, il disait: Je l'ai eu. Je l'ai gagné, mon point. J'ai été au ministère et je l'ai eu.

M. HARDY: Sans passer par le député?

M. DROLET: Pas du tout. Je ne veux pas m'occuper de ces choses. La question, c'est que lui-même n'a pas plus de mandat que moi. Il n'a pas d'affaire à aller tripoter avec des fonctionnaires du ministère pour faire des changements semblables. C'est ce que je n'accepte pas.

M. CHOQUETTE: Tripoter est peut-être un gros mot, dans les circonstances, en attendant qu'on ait vérifié, parce que je sais que M. Rodolphe Roy est un parfait honnête homme. S'il a pris la décision, il doit y avoir certaines justifications. Le député ne sera peut-être pas d'accord. Mais je vais vérifier avec lui ce qui en est et je lui ferai part du résultat de ma petite enquête.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions sur cette catégorie des dépenses?

Catégorie 1, adopté.

Catégorie 3: services de transport et de communication. Adopté.

Catégorie 4 : services professionnels, administratifs et autres.

M. PAUL: Est-ce que ça comprend le salaire des coroners, des témoins, les taxes des témoins, la location des salles et toutes ces dépenses administratives, les salaires des commissaires-enquêteurs?

M. CHOQUETTE: Les coroners: $180,000; les morgues, incluant transport et garde des cadavres: $140,000; les témoins $58,000; médecins: $50,000; sténographes officiels: $10,000; autres honoraires: $17,000, soit un total de $455,000.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 5, entretien et réparations.

M. PAUL: Est-ce l'entretien et la réparation des réfrigérateurs dont parlait tout à l'heure le député de Portneuf?

M. CHOQUETTE: Non, des machines à bureaux.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 6, loyers, adopté.

Catégorie 7, fournitures et approvisionnements, adopté.

Affaires civiles et pénales

M. LE PRESIDENT: Article 3, affaires civiles et pénales. Sous-article 1 : contentieux général. Catégorie 1 : traitements, salaires et allocations.

M. BURNS: A cette catégorie, il semble y avoir une baisse sensible des traitements et salaires, est-ce qu'il y a une explication? Surtout qu'il n'y a que 3 postes, semble-t-il, de moins que ceux qui étaient autorisés l'année dernière.

M. CHOQUETTE: Il y a tout d'abord un transfert au sous-article 3-2. Ceci représente, on me dit, certains conseillers juridiques auprès de la cour du Bien-Etre social. Par conséquent, au lieu d'être comptabilisés à cette catégorie, on les trouvera à l'article 3-2, contentieux des ministères.

M. LE PRESIDENT: Une correction, M. le ministre, c'est la même catégorie, excepté qu'ils changent de sous-article, du contentieux général au contentieux des ministères.

M. CHOQUETTE: Votre remarque est très pertinente, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: C'est seulement pour le journal des Débats.

Catégorie 1, adopté.

Catégorie 3, Services de transport et de communication, adopté.

Catégorie 4, Services professionnels, administratifs et autres.

M. PAUL: Je présume que l'on tient compte des honoraires payés à des avocats pour s'occuper de causes particulières. Est-ce qu'il y aurait possibilité de connaître l'état de la cause de Redel vs le procureur général de la province de Québec? Je ne sais pas si M. Desjardins est ici. C'est ce fameux fonctionnaire "from B.C." qui était venu se promener à Québec. On l'avait bien reçu. Je sais qu'une action en dommages avait été prise. Est-ce que cette cause-là a été réglée hors cour?

M. CHOQUETTE: Cette cause n'a pas été réglée. Elle est toujours pendante devant le tribunal. Les procureurs de M. Redel qui sont de la ville de Québec, se sont engagés à nous fournir certains renseignements, en particulier des rapports médicaux, qui ne nous sont pas encore parvenus.

M. PAUL: Et je crois aussi que le procureur du ministère a été nommé juge de la cour d'Appel.

M. CHOQUETTE: Son bureau continue à occuper dans la cause.

M. PAUL: J'en profite pour féliciter le sous-ministre Desjardins de l'excellent travail accompli parce que je dois dire, après consultations et rencontres avec les avocats, qu'ils sont extrêmement bien reçus à ce service du ministère. Je m'en voudrais de ne pas remercier M. Desjardins pour la courtoisie et l'empressement avec lesquels il répond aux demandes d'information qui lui sont adressées par des avocats de pratique privée.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, adopté. Catégorie 5, entretien et réparations, adopté.

Catégorie 6, loyers, adopté.

Catégorie 7, fournitures et approvisionnements, adopté.

Catégorie 8, matériel et équipement, adopté.

Catégorie 11, autres dépenses, adopté.

Sous-article 2, Contentieux des ministères. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations.

M. BURNS: M. le Président, vu la réponse du ministre au sous-article 1 de l'article 3, je comprends difficilement le fait qu'il y ait une augmentation de 19 postes au sous-article 2, catégorie 1. S'il y a eu transfert de 19 personnes, il devrait en manquer 19 dans l'autre.

M. CHOQUETTE: A l'article 3, sous-article 1, catégorie 1, le député avait signalé une réduction, n'est-ce pas? Ce qui explique un accroissement à l'article 3-2-1.

Un montant de $199,500 a été prévu pour les postes qui ont été transférés du sous-article 3, catégorie 1.

M. LE PRESIDENT: Non, je crois que le député signale la différence dans le nombre d'employés.

M. BURNS: C'est ce que je ne comprends pas. Je comprends le transfert d'argent. Dans un cas, il y a une diminution d'à peu près $200,000 qui est reportée à 3-2-1.

M. CHOQUETTE: Il y a 12 employés transférés et sept postes additionnels.

M. BURNS: Oui, d'accord, mais je ne veux pas revenir à 3-1-1 où vous aviez 47 postes autorisés l'année dernière or, vous en demandez 44 cette année.

M. CHOQUETTE: C'est cela.

M. BURNS: C'est ce que je ne comprends pas, là.

M. CHOQUETTE: C'est parce qu'à 3-1-1 il y a probablement eu un accroissement du nombre de postes, malgré le transfert des 12 employés auxquels je me référais tout à l'heure. Ceci implique sans doute un certain accroissement à ce point de vue. Il s'agit probablement d'employés assez bien rémunérés qui sont transférés, ce qui explique le chiffre assez important par lequel est modifié l'article 3-1-1 et par lequel est modifié de la même façon l'article 3-2-1.

M. LE PRESIDENT: Alors, adopté. Catégorie 3, Service de transport et de communication, adopté. Catégorie 7, Fournitures et approvisionnements, adopté. Sous-article 3, Bureau juridique des lois de contrôle sur les alcools. Catégorie 1, Traitements, salaires et allocations.

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a encore beaucoup de causes pendantes au bureau juridique des lois de contrôle? Je m'excuse, ce n'est pas le bon service. Ce n'est pas la commission, je m'excuse. C'est parce que j'ai été grisé par le mot alcool en le voyant.

M. BURNS: C'est le service de M. Beaudry...

M. CHOQUETTE: Non, c'est le service de M. Louis Doyon, qui s'occupe des poursuites pénales résultant des infractions à la loi des alcools. Il n'a pas la responsabilité des procédures qui peuvent avoir lieu à l'intérieur de la Commission de contrôle des permis d'alcool, mais seulement des poursuites prises devant les tribunaux criminels.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Louis.

M. BLANK: Est-ce que la ville de Montréal peut entreprendre ses propres poursuites?

M. CHOQUETTE: Je crois qu'en vertu des pouvoirs qui ont été délégués à la police de Montréal, celle-ci est maintenant habilitée à intenter des poursuites devant la cour Municipale de Montréal.

Application de la loi de l'alcool

M. BLANK: Mais est-ce que le ministre de la Justice ou le ministère a un certain contrôle, parce que la ville de Montréal, dans certains cas, abuse de ces pouvoirs. J'ai vu ce matin dans la Gazette, je pense, un compte-rendu d'un jugement rendu par la cour d'Appel. La ville de Montréal, après que nous ayons voté la nouvelle loi de la Régie des alcools pour empêcher les gens d'aller en prison pour de petites infractions, porte en appel une cause où le juge a rendu une sentence d'une amende seulement en se basant sur la nouvelle loi. La ville de Montréal est donc allée en appel pour essayer de mettre un citoyen en prison pour une deuxième infraction, la deuxième infraction étant d'avoir une bouteille de vin dans une autre bouteille que celle de la Régie.

M. CHOQUETTE: Transvidage.

M. BLANK: Mais il y a beaucoup de causes comme ça devant la cour Municipale de la ville

de Montréal où les policiers de la ville de Montréal utilisent la Loi de la Régie des alcools pour d'autres fins.

M. HARDY: Je ne veux pas défendre les policiers de la ville de Montréal, mais dans le cas que souligne le député de Saint-Louis, ce n'est pas la faute des policiers si on est allé en appel, c'est plutôt celle des procureurs de la ville de Montréal.

M. BLANK: Je ne blâme pas les policiers, je blâme le procureur.

M. CHOQUETTE: En vertu de la Loi de commission de contrôle des permis d'alcool, il est maintenant loisible au procureur général de donner des responsabilités aux corps de police municipaux en matière d'infractions aux lois d'alcools et de permettre à ces corps de police municipaux d'intenter des poursuites sous leur propre responsabilité.

J'avais donné cette responsabilité au corps de police de la Communauté urbaine de Montréal, comptant que ceci permettrait un meilleur contrôle du commerce des boissons alcooliques. Evidemment, il faut que les corps de police et les procureurs qui les avisent fassent preuve de jugement dans leur façon d'agir. Ce n'est pas parce qu'on leur met un pouvoir entre les mains que c'est une raison d'en abuser. Je remercie le député de Saint-Louis de me signaler ce cas et il peut être assuré que nous allons examiner ce problème à savoir comment le corps de police de la Communauté urbaine de Montréal s'acquitte, à l'heure actuelle, de ses responsabilités dans ce domaine-là.

Il ne s'agit pas, à mon sens, de harasser les détenteurs de permis pour des infractions mineures; il faut évidemment que la loi soit respectée mais toujours en faisant usage de bon sens et de pondération. Le député de Saint-Louis peut être assuré que nous allons examiner le cas qu'il nous signale.

M. BLANK: J'ai vu deux plaintes portées contre un restaurant de première classe, pas un trou, dans le bas de la ville de Montréal, dans le bout de la rue Sainte-Catherine et de la rue University, deux jours de suite: une pour une annonce, à l'intérieur, d'un "cocktail hour" de 7 à 9 heures, et l'autre parce que sur le menu, dans une petite vitrine, le prix de la bière était inscrit. Deux plaintes différentes. Et suivant l'ancienne loi, le détenteur du permis est allé en prison pour un mois.

M. CHOQUETTE: Je vais examiner le problème et je ferai part de mes observations à ce sujet-là au président du conseil de sécurité publique, le juge Jacques Coderre. Il faut dire, d'un autre côté, que ceux qui sont poursuivis pour des infractions à la Loi des alcools trouvent souvent que les infractions pour lesquelles ils sont poursuivis sont mineures. En général, les accusés trouvent toujours qu'on n'avait pas de raison de porter plainte parce que c'était une affaire, en somme, qui n'avait pas d'importance, mais il faut assurer une certaine discipline dans le commerce des boissons alcooliques, je pense qu'on l'admettra.

M. BLANK: On pourrait faire la même chose que le service de santé de Montréal; si l'infraction est mineure, donner un avis de changer d'attitude sinon on va poursuivre. Les gens qui exploitent sans permis à Montréal reçoivent toujours un avis du service des permis avant qu'on prenne une poursuite. Je comprends que si, à un endroit, on vend de l'alcool frelaté, on vend après les heures, on vend à des mineurs, d'accord; mais quand c'est une infraction aux règlements, même des anciens règlements dont personne ne savait où ils étaient...

M. BURNS: Des offenses techniques.

M. BLANK: ... des offenses techniques, qu'une personne soit passible d'une peine d'emprisonnement, "mandatory", ce n'est pas logique.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, sur le même sujet. Le ministre se rappellera sans doute que lors de l'étude du projet de loi 44 nous nous étions inquiétés quant à l'absence de dispositions transitoires dans la loi. Il est arrivé que, depuis le mois de juillet dernier, maintes plaintes ont été jugées et rejetées par nos cours, par nos tribunaux d'instance criminelle ou de droit pénal parce que la commission de contrôle des permis d'alcool avait porté des plaintes pour des infractions commises en vertu de l'ancienne loi de la Régie des alcools du Québec.

La jurisprudence a été unanime et la revue juridique nous rapporte constamment des jugements qui sont dans la même voie, aux fins de rejeter ces plaintes, parce qu'on ne peut pas poursuivre en vertu d'un organisme pour des plaintes, pour des infractions commises à une loi totalement morte.

J'inviterais le ministre de la Justice à demander à M. Doyon, dans le but d'éviter des frais aux contribuables, aux justiciables, que le ministère prenne l'initiative de retirer toutes ces plaintes qui sont pendantes et qui présentent le même caractère d'absence de continuité ou d'existence juridique ou de bien-fondé en droit. Je parle des plaintes qui sont portées par la Commission de contrôle pour des infractions commises en vertu de la Loi de la Régie des alcools du Québec.

Je comprends facilement que le ministre n'a pas le temps de lire toutes les revues du Barreau, les revues de droit qui sont publiées. Sûrement que M. Doyon et M. Desjardins ont eu l'avantage de suivre cette jurisprudence

unanime de la part de nos juges. Alors, je me demande s'il n'y aurait pas avantage à ce que, dès maintenant, le ministre décide, dans le cas d'infractions commises en vertu de la Loi de la Régie des alcools du Québec,que la Commission de contrôle essaie de faire juger par nos tribunaux, qu'on en dispose immédiatement et qu'on renonce dès maintenant à cette tentative de poursuites qui s'avèrent toujours vaines devant nos tribunaux, parce que tous les juges ont été unanimes jusqu'ici, surtout si l'on prend le jugement qui vient d'être rendu par la cour d'Appel et dont a parlé, tout à l'heure, l'honorable député de Saint-Louis.

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ai donné instructions à M. Doyon de ne pas poursuivre les causes dans les cas où il s'agissait d'une infraction commise antérieurement à la mise en vigueur de la nouvelle loi, infraction qui n'aurait pas été retenue comme telle dans la nouvelle loi.

Je me suis dit: Puisque le législateur a décidé qu'une chose qui, autrefois, était une infraction n'en est plus une, il n'y a pas d'intérêt à poursuivre ces causes. Alors, le député peut être sûr que c'est la politique du ministère. Par contre, pour ce qui est des infractions qui existaient sous l'ancienne loi et qui continuent à être des infractions sour la loi actuelle, les poursuites doivent être continuées.

M. PAUL: La jurisprudence est allée plus loin que ça. Elle a établi — je pourrai citer au ministre toute une série de causes — qu'une plainte portée pour une infraction à la Loi de la Régie des alcools du Québec ne pouvait tenir aujourd'hui en vertu des dispositions de la Loi 44 de la Commission de contrôle des permis d'alcool. Alors, peut-être que M. Doyon pourrait réviser toute cette jurisprudence.

M. CHOQUETTE: Je vais examiner ce point de droit, mais il me semble que, si une chose était une infraction au moment de sa commission, c'est-à-dire sous l'empire de l'ancienne loi, on peut très bien intenter, même à l'heure actuelle, une poursuite en disant qu'au moment où elle a été commise c'était une infraction.

M. BLANK: C'est parce qu'elle n'existe plus.

M. PAUL: C'est ça.

M. CHOQUETTE: Le procureur général.

M. BLANK: La loi dit que c'est la Régie des alcools qui doit porter la plainte. Or, la Régie des alcools n'existe plus.

M. PAUL: C'est ça. C'est le point soulevé par le député de Saint-Louis. En vertu de l'ancienne loi, la plainte était portée par la Régie des alcools du Québec et, aujourd'hui, c'est le procureur général qui porte la plainte.

M. BURNS: Il y a, en plus, un vieux principe qui fait qu'en matière pénale — c'est une loi non écrite, mais je pense que tout le monde l'accepte — il faut toujours traiter l'accusé en vertu de la loi la plus favorable. C'est une tendance.

M. CHOQUETTE: C'est le principe que j'ai observé, mais le député de Maskinongé m'amène un point de droit additionnel, en disant qu'étant donné le changement de régime juridique toutes les poursuites et les infractions commises sous l'empire de l'ancienne loi tomberaient automatiquement, même si le caractère d'infraction, de faute, demeurerait en vertu de la nouvelle loi. C'est un point de droit, très intéressant, mais...

M. BLANK: C'est ce qu'a dit la cour d'Appel.

M. PAUL: C'est ça.

M. CHOQUETTE: Nous allons examiner cela.

M. HARDY: L'honorable président va prendre le tout en délibéré. Il va consulter les auteurs et rendra jugement.

M. LE PRESIDENT: Je me pose justement la question à savoir...

M. PAUL: Il y a un problème; nous ne pourrons pas en appeler de cette décision.

M. LE PRESIDENT: ... si ce ne serait pas ouvrir la porte à la possibilité, si on ne peut pas, à un moment donné, régler un problème, de simplement changer la loi.

M. CHOQUETTE: J'attirerais l'attention du député de Maskinongé sur l'article 12 de la Loi d'interprétation, c'est-à-dire le chapitre 1 de nos lois, que je vais lire: "L'abrogation d'une loi ou de règlements faits sous son autorité n'affecte pas les droits acquis, les infractions commises, les peines encourues et les procédures intentées; les droits acquis peuvent être exercés, les infractions poursuivies, les peines imposées et les procédures continuées, nonobstant l'abrogation".

M. PAUL: M. le Président, je ne conteste pas cet article. Je vous dis que c'est la décision unanime de nos juges actuellement.

Du fait que la RAQ n'existe plus, il y a un point de droit. Suivant les règles d'interprétation, il y a continuité, mais nos juges refusent de reconnaître les dispositions et l'application de cet article 12. Justement, comme le signalait le député de Saint-Louis, c'est parce que l'organisme qui avait charge de prendre les procédures n'existe plus. La RAQ n'existe plus.

M. CHOQUETTE: Mais cela m'étonne, parce qu'il me semble que ces poursuites étaient inscrites au nom du procureur général et lui, a continué. Le sous-ministre me dit qu'à son avis la jurisprudence a erré, mais, d'un autre côté, étant donné la décision de la cour d'Appel, nous n'allons quand même pas nous acharner et porter l'affaire à la cour Suprême.

M. PAUL: Vous n'oserez pas dire à la cour d'Appel qu'elle a erré?

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas que je n'oserais pas, parce que nous osons souvent. Mais dans le cas actuel, vu qu'il s'agit d'un petit nombre de poursuites et d'infractions, le jeu n'en vaudrait pas la chandelle.

M. PAUL: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Alors, si les membres de la commission n'ont pas d'objection, je vais laisser les avocats trancher cette question.

M. BLANK: Oui, mais ces choses-là sont à la ville de Montréal. Ce n'est pas le procureur général.

M. CHOQUETTE: Mais, même quand c'est la ville de Montréal qui exerce des poursuites, elle les exerce au nom du procureur général.

M. BLANK: Je crois que toutes les actions de la ville de Montréal étaient prises au nom de la RAQ.

M. CHOQUETTE: Ils ont été mal avisés de le faire.

M. BLANK: D'accord.

M. PAUL: M. le Président, bureau juridique des lois de contrôle sur les alcools.

M. LE PRESIDENT: Alors, catégories 1, 3, 4, 5, 7?

M. BURNS: M. le Président, à la catégorie 4. Je m'excuse, je pensais que vous vouliez dire seulement la catégorie.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, traitements, salaires et allocations? Adopté. Catégorie 3, services de transport et de communication? Adopté.

M. PAUL: Adopté, oui.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, services professionnels, administratifs et autres?

M. BURNS: Je vois qu'il y a eu une augmentation dans les services professionnels de l'ordre de quelque $115,000. Qu'est-ce qui se passe? Moi, je pose toujours la question sur cela.

Comme je l'ai mentionné hier et à d'autres catégories semblables, si on a besoin de services accrus dans une catégorie particulière, je trouve que la politique générale du ministère devrait tendre à embaucher du monde, si vraiment ce besoin est constant.

M. CHOQUETTE: Il l'est. Mais j'attire votre attention sur la catégorie 14 du sous-article 3; il y a des remboursements au montant de $118,000. C'est le coût des honoraires d'avocats payés par le ministère et remboursés par l'accusé qui doit être imputé contre l'accroissement des honoraires, à cause du changement des méthodes comptables aux nouvelles estimations budgétaires. Alors, il n'y a pas de changement radical.

M. PAUL: C'est la même chose, je pense, pour le code de la route.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, adopté. Catégorie 5, entretien et réparations, adopté? Adopté. Catégorie 7, fournitures et approvisionnements, adopté? Adopté. Catégorie 14, remboursements, adopté? Adopté.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Sous-article 4, bureau juridique du code de la route. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations?

M. BURNS: A ce sous-article la seule question que j'avais à poser était aux catégories 4 et 14. Mais c'est la même chose...

M. CHOQUETTE: Mutatis mutandis.

M. BURNS: Mutatis mutandis. C'est à peu près la même chose que 1'habeas corpus!

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté. Catégorie 3, services de transport et de communication, adopté. Catégorie 4, services professionnels, administratifs et autres, qu'il faudrait peut-être considérer en même temps que le sous-article 14, remboursements, adopté?

M. CHOQUETTE: Exactement.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 5, entretien et réparations, adopté? Adopté. Catégorie 6, loyers, adopté? Adopté. Catégorie 7, fournitures et approvisionnements, adopté? Adopté. Catégorie 8, matériel et équipement, adopté? Adopté. Catégorie 11, autres dépenses? Adopté. Sous-article 14, remboursements? Adopté.

Sous-article 5, service des réclamations. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations?

M. PAUL: Sur ce sous-article, est-ce que je

pourrais demander au ministre si cela comprend toutes les réclamations dirigées contre les différents ministères?

M. CHOQUETTE: A l'exclusion, je pense, du ministère de la Voirie, qui a conservé son propre service des réclamations. Maintenant, je pense qu'il y a des projets à plus ou moins long terme d'incorporation du service des réclamations du ministère de la Voirie à notre propre service. Ce n'est pas une question résolue encore à l'heure actuelle. Le service des réclamations du ministère de la Voirie a une responsabilité très spécialisée et en même temps assez étendue par le nombre de réclamations.

M. PAUL: Ce n'est pas toute la machinerie du ministère de la Voirie qui est assurée, je pense. Il n'y a qu'une partie d'assurée.

M. CHOQUETTE: J'ignore la situation.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté. Catégorie 3, adopté.

M. PAUL: Jusqu'à la catégorie 11, quant à moi, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, adopté. Catégorie 5, adopté. Catégorie 7, adopté. Catégorie 8, adopté. Catégorie 11, adopté.

Enregistrement

M. LE PRESIDENT: Article 4: Enregistrement, sous-article 1: Administration, catégorie 1 : Traitements, salaires et allocations.

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a encore beaucoup de registrateurs qui sont à honoraires?

M. CHOQUETTE : Il en reste quatre. M. PAUL: Seulement quatre.

M. HARDY : M. le Président, sans vouloir faire preuve de chauvinisme, je vais faire une nouvelle demande au ministre de la Justice quant au bureau d'enregistrement de la division de Terrebonne. A la suite des nombreuses représentations qui m'ont été formulées, à la fois par les notaires pratiquant dans cette région et des personnes directement impliquées, je vais demander au ministre s'il veut bien étudier la possibilité, dans la mesure des ressources financières dont il dispose, d'augmenter le nombre d'employés qui travaillent au bureau d'enregistrement de Saint-Jérôme. Alors que le nombre d'actes enregistrés a augmenté considérablement au cours des dernières années, le nombre d'employés est demeuré à peu près le même. Je n'ai pas les chiffres devant les yeux, mais, grosso modo, le nombre d'employés est resté stable alors que les actes enregistrés se multi- plient. Vous n'ignorez sans doute pas que cette région connaît un développement résidentiel extraordinaire, qu'il se fait des transactions immobilières très considérables et que, par le fait même, le volume de travail au bureau d'enregistrement se trouve d'autant accru. Je sais qu'il y a le problème des disponibilités du ministère, mais je pense qu'il y aurait lieu d'étudier sérieusement la possibilité d'accroître le nombre d'employés au bureau d'enregistrement de Saint-Jérôme.

M. CHOQUETTE: Je puis assurer le député que l'analyse des effectifs du bureau d'enregistrement auquel il fait allusion, le bureau d'enregistrement de Saint-Jérôme, est en train d'être faite à l'heure actuelle. Si l'analyse révèle la nécessité d'un accroissement de personnel, nous y procéderons.

M. LE PRESIDENT: Le député de Portneuf.

M. DROLET: Dans le même ordre d'idées, M. le Président, est-ce que les demandes qui avaient été faites par le bureau d'enregistrement de Cap-Santé pour un personnel supplémentaire ont été satisfaites?

M. CHOQUETTE: Une analyse sera faite dans tous les bureaux.

M. DROLET: Tous les bureaux. Maintenant, il y a des bureaux d'enregistrement, dont celui de Cap-Santé, qui demandent, depuis quelques années d'être reclassifiés. Est-ce que, pour le bureau d'enregistrement de Cap-Santé, qui est encore dans la classe quatre et qui était censé être reclassifié dans la classe trois, cela a été considéré?

M. CHOQUETTE: Ce problème est entre les mains de la Commission de la fonction publique quant à la reclassification du registra-teur et du bureau par le fait même.

M. DROLET: Cela peut prendre combien de temps...

M. CHOQUETTE: Vous savez que nous avons diverses catégories de bureaux d'enregistrement.

M. DROLET: C'est ça.

M. CHOQUETTE: Suivant l'importance de la catégorie, eh bien, cela commande un salaire plus élevé.

M. DROLET: C'est ça.

M. CHOQUETTE: C'est le problème. Maintenant, le problème des registrateurs est un problème véritable pour le ministère de la Justice, à l'heure actuelle. Je ne le cache pas aux membres de la commission. Nous avons des

gens qui se plaignent et, à mon sens, je dirais avec des arguments assez impressionnants, du niveau de traitements.

M. DROLET: M. le Président, je voulais savoir combien de temps cela pouvait prendre encore. C'est qu'ici, dans une lettre, justement, M. Raymond Roy, directeur des bureaux d'enregistrement, souligne que "dans le cas de Portneuf, nous avons recommandé que ce bureau passe de la classe quatre à la classe trois". A quel moment peut-on prévoir que ces choses vont...

M. CHOQUETTE: On me dit que la Fonction publique entend instaurer un nouveau système s'appliquant aux bureaux d'enregistrements et que cette catégorisation ne s'appliquera pas.

M. DROLET: Quand ce nouveau...

M. CHOQUETTE: Nous dépendons de la Commission de la fonction publique.

M. DROLET: Cela veut dire que cela va être long, telle qu'on la connaît!

M. CHOQUETTE: Tirez vos propres conclusions. Mais vous pouvez être sûr que de notre côté nous faisons des pressions très soutenues à l'égard de la commission pour avoir des solutions dans ce domaine.

M. DROLET: En ce qui concerne le personnel, je pense que le sous-ministre a dit, tout à l'heure, qu'il était à analyser la question d'ajouter du personnel. Est-ce que cela peut prendre également bien du temps?

M. CHOQUETTE: Ce travail se fait par la Commission de la fonction publique, je crois. Non, le travail se fait par nos analystes, au ministère, qui soumettent leurs conclusions â la commission qui, elle, les approuve, les modifie ou les désapprouve.

M. DROLET: Peut-on savoir à peu près dans combien de temps une réponse serait donnée?

M. CHOQUETTE: Vers la fin de septembre. M. DROLET: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, considérant l'aménagement du territoire de l'aéroport international de Sainte-Scholastique, le ministre peut-il nous dire s'il y a eu fusion ou annexion, par le bureau d'enregistrement de Saint-Jérôme, du bureau d'enregistrement de Saint-Eustache?

M. CHOQUETTE: L'ancien bureau d'enre- gistrement de Sainte-Scholastique est incorporé au bureau d'enregistrement de Saint-Eustache.

M. PAUL: Mais il y en a un à Saint-Eustache.

UNE VOIX; Il n'y en avait pas.

M. CHOQUETTE: Il n'y en avait pas.

M. PAUL: Il n'y en avait pas. Sainte-Scholastique est rendu à Saint-Eustache.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté? Adopté.

Catégorie 3: Services de transport et de communication. Adopté?

UNE VOIX: Oui.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 4, adopté. Catégorie 5, adopté. Catégorie 6, adopté. Catégorie 7, adopté. Catégorie 8, adopté. Catégorie 11, adopté.

M. BURNS: A la catégorie 8, j'avais une question.

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi. Catégorie 8, matériel et équipement.

M. BURNS: Qu'est-ce qu'on prévoit acheter avec cette augmentation de $65,000, à cette catégorie?

M. CHOQUETTE: C'est pour l'achat de cartes en vue de l'émission et du contrôle de la carte d'identité des fonctionnaires: $60,000; fournitures diverses, pour la carte d'identité: $5,000; imprimés, $5,000; fournitures et accessoires divers: $2,400, pour un total de $72,400.

M. BURNS: Pour la carte d'identité des fonctionnaires.

M. CHOQUETTE: Oui. Un programme a été mis sur pied pour prévoir l'émission d'une carte d'identité standard dans toute la fonction publique, ceci en vue de permettre l'accession facile des fonctionnaires aux édifices publics.

M. BURNS: Est-ce ajouté au budget de chacun des ministères?

M. CHOQUETTE: Le programme est centralisé au sein du ministère de la Justice et en particulier au sein de la section que dirige M. Alarie, de l'ancien secrétariat de la province. Un de ces jours, il faudra trouver une nouvelle désignation à ce service. On l'appelle ici enregistrement. Cela comprend évidemment le service d'enregistrement des biens réels, dont on a parlé tout à l'heure, mais cela comprend aussi les lettres patentes, les archives.

M. BURNS: Cela vaut pour tous les fonctionnaires, en somme.

M. PAUL: Cela ne comprend-il pas les enregistrements imposés par le bill 10, les régimes matrimoniaux?

M. CHOQUETTE: Oui, exactement. C'est un service de secrétariat, fondamentalement.

M. BURNS: Cela vaut pour l'ensemble des fonctionnaires. J'imagine que la fameuse carte viendra aux députés aussi.

M. CHOQUETTE: Les députés, comme le député de Maisonneuve, qui solliciteraient une carte. Nous pourrons voir à la lui émettre. Ceci lui permettra...

M. BURNS: Cela ne me pose pas de problèmes. Je suis connu.

M. PAUL: M. le Président, pourrais-je poser une question à M. Alarie? Le sous-ministre pourrait-il nous dire si cela comprend également l'enregistrement des partis politiques?

M. CHOQUETTE: Je crois que nous avons été appelés à donner un avis juridique sur ce problème récemment, avis qui fut donné au ministère des Institutions financières par un de nos conseillers juridiques et qui fut déféré, pour approbation, à notre contentieux civil. Il s'avère, suivant cet avis juridique, qu'il n'est pas permis d'incorporer un parti politique.

M. PAUL: Enregistré ou non.

M. CHOQUETTE: Enregistré. On peut toujours aller s'enregistrer dans un bureau d'enregistrement des raisons sociales.

M. HARDY: Ce n'est pas contre le règlement qu'on enregistre...

M. PAUL: Non, non. C'est en cour Supérieure.

M. DROLET: On semble satisfait.

M. CHOQUETTE: Vous satisfait-elle? Elle satisfait moins votre ancien chef, me dit-on.

M. HARDY: Je pense, M. le Président, qu'on est entièrement hors du sujet.

M. DROLET: S'il s'est mis les pieds dans les plats, cela ne me regarde pas.

M. HARDY: Nous sommes au bureau d'enregistrement, mais l'enregistrement des raisons sociales ne se fait pas dans le bureau d'enregistrement.

M. LE PRESIDENT: Il s'agissait d'établir ce fait. C'est établi. Alors, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. PAUL: Le ministre nous dit qu'il a obtenu une opinion juridique sur l'enregistrement même.

M. HARDY: Il aurait fallu qu'il nous parle de ça à l'article qui traite de la Direction générale des greffes.

M. PAUL: Ou aux morgues. Très bien.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 8. Adopté. Catégorie 11. Adopté.

Avant de continuer, messieurs, j'aimerais attirer votre attention sur une petite erreur qui s'est glissée à la séance du 30 mai. Je m'en excuse auprès des membres de la commission parce que je suis le responsable. J'avais recommandé la nomination du député de Laviolette, M. Carpentier, comme rapporteur. Or, M. Carpentier n'est pas membre en titre de la commission. Alors, j'aimerais qu'on fasse le changement. Puis-je suggérer M. Springate?

M. HARDY: Il faut donc recommencer tous nos travaux; nous n'avions pas de rapporteur. Nous retournons à l'article 1 et nous allons recommencer nos grands discours.

M. LE PRESIDENT: Alors, M. Springate, député de Sainte-Anne?

M. BURNS: Comme remarque générale, j'aurais...

M. LE PRESIDENT: Agréé? M. PAUL: Agréé.

M. LE PRESIDENT: Nous continuons avec le sous-article 2. Bureaux d'enregistrement. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations?

M. PAUL: On en a parlé.

M. CHOQUETTE: Nous en avons parlé prématurément.

M. LE PRESIDENT: Alors, toutes les catégories sont adoptées, y compris les remboursements.

Commission de police

M. LE PRESIDENT: Article 5, Commission de police du Québec. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations?

M. PAUL: Je profite de l'occasion pour remercier le ministre de nous avoir produit le rapport de la Commission de police.

M. HARDY : C'est surtout à cause de la couleur?

M. PAUL: Vous avez remarqué, M. le Président, je n'ai rien dit et je l'ai levé. Je voudrais poser une question au ministre. En vertu des derniers amendements que nous avons apportés à la Commission de police du Québec, est-ce que le ministre peut nous dire si tous les commissaires ont été nommés?

M. CHOQUETTE: Ils n'ont pas encore été nommés.

M. PAUL: Je crois que le nombre de membres a été porté de 5 à 9.

M. CHOQUETTE: Oui. Je tiens à dire au député de Maskinongé que des noms de candidats ont fait l'objet d'un examen très serré de la part des autorités du ministère de la Justice et que les nominations devraient se faire incessamment.

M. PAUL: Est-ce que vous avez beaucoup de postulants?

M. CHOQUETTE: Nous avons eu beaucoup de candidats. Nous avons examiné les qualités de chacun. Parmi ceux-ci, il y a d'anciens policiers ou des policiers actuellement en fonction. Il y a des gens qui ont d'autres spécialisations. Il s'agit, en somme, de faire un équilibre au sein de cette commission pour avoir, à la fois, des gens qui ont de l'expérience policière proprement dite, et, d'un autre côté, des gens d'autres disciplines qui peuvent apporter une contribution au fonctionnement de la commission qui prend de plus en plus de responsabilités, comme le signale le juge Gosselin dans le rapport auquel le député faisait allusion.

M. PAUL : Les demandes sont de plus en plus nombreuses.

M. CHOQUETTE : Je tiens à souligner ici — puisque le député mentionne la Commission de police — toute la collaboration que j'ai eue de la part de cette commission, en particulier dans la rédaction du livre blanc: "La police et la sécurité des citoyens".

M. PAUL: Surtout du commissaire Laperrière, je crois.

M. CHOQUETTE: Surtout du juge Laperrière qui, par la suite, fut nommé vice-président de la commission. Il était juge et membre, à ce moment-là. Mais j'ai eu énormément de collaboration du juge Gosselin, lui-même, président, de M. Normand Saint-Georges, le secrétaire, et d'autres personnes de la commission.

M. PAUL: MM. Tobin et Courtemanche.

M. CHOQUETTE: Ils n'ont pas été directement impliqués dans le travail de rédaction du livre blanc.

M. PAUL: Parce que c'était plutôt juridique.

M. CHOQUETTE: Nous avons eu également d'autres compétences extérieures, venant de divers milieux: M. Jean-Paul Gilbert, M. Guy Tardif qui est actuellement attaché au service de la police de la Communauté urbaine de Montréal et qui devient professeur à l'institut de M. Zabo.

M. PAUL: M. Saint-Aubin aussi?

M. CHOQUETTE: Non, pas directement. M. Boisvert, le sous-ministre associé aux affaires criminelles. Je trouve que cette commission s'avère très utile dans les circonstances actuelles, non seulement à cause du travail sur le livre blanc, mais dans toutes les phases de l'activité policière, tant au point de vue des enquêtes sur les corps policiers que pour son travail sur le plan de la réglementation des effectifs policiers, des qualités, des grades, et tout cela.

On sait qu'on a confié des responsabilités précises à la Commission de police en rapport avec la normalisation des grades des policiers de banlieue sur l'île de Montréal. Justement, M. Marcil, qui est ici présent, me faisait l'observation qu'il attendait les décisions de la commission qui a travaillé en collaboration avec les personnes intéressées à cette question, mais je pense que nous aurons les suggestions de la Commission de police à ce sujet d'ici peu de temps.

M. BURNS: Est-ce que le ministre est en mesure de nous dire à quel stade en est rendue l'intégration de la police de la Communauté urbaine de Montréal?

M. CHOQUETTE: D'abord le premier pas à poser c'est la normalisation des grades. Par la suite, je crois qu'il incombe au directeur...

M. BURNS: Où est-ce que c'en est rendu dans la normalisation?

M. CHOQUETTE: C'est justement le travail qu'accomplit la commission à l'heure actuelle.

M. BURNS: De façon unilatérale.

M. CHOQUETTE: Non, elle le fait suivant les suggestions faites à la commission parlementaire, lorsque nous avions entendu ce bill. Elle se fait en collaboration avec, si je me rappelle bien, les syndicats policiers intéressés et les chefs de police peut-être. Je ne me rappelle pas exactement.

M. BURNS: Les voitures sont dans le bleu poudre, on a remarqué ça.

M. CHOQUETTE: Les couleurs, aujourd'hui, ont perdu beaucoup d'importance.

M. PAUL: Quand elles sont sales elles sont pareilles.

M. CHOQUETTE: Même, quelqu'un me faisait une observation que la plaquette que nous avons émise il y a quelque temps sous le titre Justice avait la couleur bleue poudre qui plaît à l'oeil du député de Maskinongé.

M. PAUL: Le ministre a une tendance pour le beau.

M. CHOQUETTE: Je peux vous dire que ce n'est pas intentionnel.

M. BURNS: En somme dans le projet d'intégration complète, qu'est-ce qui reste à faire?

M. CHOQUETTE: Il y a ce premier pas de normalisation des grades. Deuxièmement, il y a des discussions à avoir avec la Fraternité des policiers de Montréal, qui a été en somme accréditée pour l'ensemble des policiers de l'île de Montréal au plan de la négociation d'une nouvelle convention collective de travail. Je sais qu'il y a eu des rencontres à ce sujet. Du côté du conseil de sécurité, on m'assure qu'on a examiné les conditions de travail et la question du fonds de pension des policiers parce qu'on sait qu'il y a des problèmes à ce sujet-là. On m'a même présenté des projets d'amendements à la Loi de la communauté urbaine en rapport avec le service de la police. M. Marcil m'a entretenu aussi de son intention de me suggérer peut-être quelques amendements que j'examinerai lorsque je les aurai reçus.

Par la suite, ce qui est à venir, c'est un plan d'intégration qui doit être dressé suivant la loi par le directeur du service. Ce plan doit s'élaborer avec la collaboration ou la consultation des municipalités intéressées, le conseil de la communauté urbaine ainsi que, je pense, les syndicats policiers intéressés.

Et ce plan, une fois qu'il a subi ce processus d'élaboration, doit être de nouveau soumis à la Commission de police pour une approbation finale et la commission pourra permettre des auditions sur des objections venant de municipalités ou d'autres personnes. Actuellement, le conseil de sécurité fonctionne, le directeur du service de police de la Communauté urbaine de Montréal, M. Daigneault, a été désigné. J'ai pris note dans les journaux qu'un nouveau plan de communication intercorps était en voie d'être instauré. Le processus jusqu'à maintenant se déroule peut-être, d'une certaine façon, un peu lentement, mais sûrement.

M. BURNS: Est-ce que le gouvernement a changé son attitude depuis le bill 281, à savoir sur la possibilité d'accorder une assistance financière à la Communauté urbaine de Montréal, pour cette intégration? Comme j'avais mentionné à l'époque, c'est un peu un projet pilote qui pourrait peut-être servir à d'autres intégrations régionales.

M. CHOQUETTE: Il y a sans doute des arguments très valables pour une subvention du gouvernement provincial au service intégré de la police de Montréal; je ne les nie pas, je crois qu'ils sont bien fondés. Le seul obstacle, ce sont nos propres disponibilités financières. C'est notre condition financière actuelle qui ne nous permet tout simplement pas de poser ce geste. Si la situation s'améliore, le député peut être assuré que le gouvernement n'hésitera pas à accorder une telle subvention.

M. PAUL: Est-ce que les relations sont bonnes entre le ministre des Finances et le ministre de la Justice?

M. CHOQUETTE: Elles sont excellentes, mais le ministre des Finances est obligé d'exercer un contrôle sévère sur les finances du gouvernement et je ne le blâme pas de cette attitude. Par contre, cela entraîne certains inconvénients au point de vue des nouveaux programmes que nous aimerions mettre en marche ou de l'attribution de subventions là où elles seraient méritées.

M. BURNS: Le ministre nous parle de la situation financière du gouvernement, mais il faudrait penser aussi à la situation financière des Montréalais. Quand je parle des Montréalais, je parle des habitants de l'ensemble du territoire de la Communauté urbaine de Montréal qui sont, dans la plupart des cas, déjà surtaxés et qui devront faire les frais de cette intégration. Je parle du coût de l'intégration elle-même et de choses aussi bêtes que l'uniformisation des costumes, etc., qui vont coûter des montants fantastiques.

M. CHOQUETTE: Le député a tout à fait raison, et je sympathise avec les contribuables de la région de Montréal, en étant un moi-même.

M. HARDY: Particulièrement ceux d'Outremont.

M. CHOQUETTE: Ceux d'Outremont comme les autres. Je ne dis pas que ceux d'Outremont sont nécessairement les plus touchés, tout le monde est touché. Ce qui me semble être le diagnostic que l'on peut porter sur la situation à Montréal, c'est que cette intégration aurait dû se faire il y a déjà longtemps. Ainsi, on n'aurait pas hérité d'une accumulation de problèmes financiers qui arrivent tout d'un coup au moment de l'intégration.

Je suis encore persuadé que la décision que nous avons prise l'année dernière d'intégrer les forces policières était la décision juste parce que si nous avions reporté la décision à plus tard, nous aurions continué à aggraver une situation administrative et financière déplorable au départ. Il fallait poser le geste et, évidemment, les contribuables en essuient le coût, à ce moment-ci, je ne le nie pas. Si cette chose avait pu être

faite comme à Toronto, en 1957, je pense que nous n'aurions pas tout ce problème financier qui découle de cette division entre 25 et 26 corps de police qui a prévalu jusqu'à l'année dernière.

A ce sujet, je mentionne que le budget total de la police intégrée de la Communauté urbaine de Montréal se situe aux environs de $80 millions cette année tandis qu'à Toronto, pour une population à peu près identique et un taux de criminalité peut-être légèrement inférieur, mais assez comparable, en somme, à celui de Montréal, le coût de la police ne dépasse pas $60 millions. Donc, le contribuable de Montréal paie 1/3 de plus que le contribuable de Toronto pour sa protection policière. Ceci en dit long sur le fait que cette mesure était due depuis longtemps, sans compter tous les autres aspects: la lutte contre le crime, une meilleure coordination...

M. BURNS: Comprenez-moi bien, M. le ministre, je ne suis pas contre cette intervention. Loin de là, j'étais l'un des premiers à la plaider.

M. CHOQUETTE: Je le sais bien.

M. BURNS: Je parle uniquement — si vous me passez l'expression — du "back-lash" sur le plan fiscal que cela peut faire pour une population qui est déjà, à mon avis, surtaxée. Je ne veux pas faire du chauvinisme à l'envers, mais c'est particulièrement vrai dans le cas des citoyens de la région de Montréal.

M. HARDY: Avec cette répartition sur l'ensemble de l'île, comme il y a des parties plus riches sur l'île, il peut y avoir un équilibre.

M. CHOQUETTE: M. le Président, si vous me permettez de rattacher les observations du député de Maisonneuve à ce que j'ai dit plus tôt dans ce débat, il y a certaines lois de gouvernement, certains principes de gouvernement auxquels on ne peut pas échapper. Un de ces principes est la bonne administration, l'ordre dans les finances comme dans tout autre matière.

M. BURNS: Est-ce une critique sur l'administration de M. Drapeau que vous faites?

M. CHOQUETTE: Non, je ne parle pas de cela.

M. BURNS: On vous écoute, je suis bien content. Il est temps qu'on lui dise qu'il administre mal.

M. PAUL: Attention, M. le ministre!

M. CHOQUETTE: Non, je n'ai fait aucun commentaire sur aucune administration mais il y a eu, en somme, un laisser-aller financier, je pense. Aujourd'hui, alors que le gouvernement tente de mettre de l'ordre dans tout cela, évidemment, c'est dur pour certains contribuables, pour beaucoup de contribuables.

M. BURNS: Surtout à ce moment-ci, quand on n'a même pas le plaisir de voir les ordures s'enlever des parcs de Montréal.

M. CHOQUETTE: Quoique ce matin les nouvelles semblaient plus favorables au point de vue d'un règlement avec les cols bleus.

M. PAUL: Il y a eu reprise des négociations ce matin.

M. CHOQUETTE: Oui?

M. LE PRESIDENT: A quel article est-ce?

M. BURNS: C'est une petite digression, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Alors, catégorie 1, adopté.

M. HARDY: Je vous incite, M. le Président, à nous rappeler à l'ordre.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3, adopté. Catégorie 4, Services professionnels, administratifs et autres? Adopté.

Catégories 5, 6, 7, 8, 11, 14. Adopté.

Sûreté du Québec

M. LE PRESIDENT: Article 6, Sûreté du Québec. Catégorie 1, traitements, salaires et allocations? Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, retournant à mon bureau hier soir, après l'ajournement, j'ai regardé, à vol d'oiseau, les différents crédits demandés par le ministre de la Justice. Tout d'abord, j'ai été surpris. En second lieu, je me suis arrêté et j'ai lu. En troisième lieu, je me suis interrogé, pour, ensuite, me contre-interroger, devenir torturé et, finalement, me perdre en conjectures de toutes sortes. Le ministre m'excusera si je pense tout haut. Premièrement, je constate que le nombre d'agents de la Sûreté du Québec demeurera, pour la prochaine année, le même qu'en 71/72. Je me suis demandé si, par hasard, M. Saint-Pierre, le directeur de la Sûreté du Québec, n'avait pas été assez bon plaideur. Je me suis rappelé mes relations avec lui, la ténacité, la logique de son argumentation. Je me suis dit: Ce n'est pas là que ça accroche.

Je me suis demandé: Est-ce que, par hasard, les gens de la Sûreté du Québec, par les relations qu'ils ont avec le public, ont tellement louangé le rôle efficace du ministre de la Justice dans les négociations avec la Sûreté du Québec qu'il en résulterait un désintéressement complet de la part d'aspirants candidats? Je me suis demandé: Comment se fait-il que l'on ait un

besoin accru de personnel à la Sûreté du Québec et qu'on ait jugé bon d'assouplir un peu les normes, tout en gardant la qualité des sujets et leur probité? Je me suis dit: Où s'en va la Sûreté du Québec et, surtout, la sécurité publique? Voilà les questions qui m'ont torturé, M. le Président.

M. CHOQUETTE: Je vais mettre fin à vos tortures. Au 29 février 1972, nous avions effectivement en poste, 3,738 policiers, membres de la Sûreté du Québec. Nous prévoyons, aux effectifs qui vous sont présentés, 4,039 membres, ce qui représente un accroissement d'environ 250 policiers. Par ailleurs, il faut dire que, depuis 1971, les effectifs de la Sûreté ont crû de 200 policiers, c'est-à-dire qu'entre le 1er octobre 1971 et le 29 février 1972, nous avons recruté plus de 225 policiers.

M. PAUL: Mais nous allons rester au même nombre l'an prochain.

M. CHOQUETTE: Sur papier, mais il reste des postes à combler.

M. PAUL: Voulez-vous avoir des hommes de paille?

M. CHOQUETTE: Non. Il reste 454 postes à combler. C'est pour ça que nous n'avons pas réclamé, cette année, de postes additionnels.

M. PAUL: Je suis soulagé, M. le Président.

M. HARDY: M. le Président, est-ce que la Sûreté rencontre des difficultés dans le recrutement ou si les candidats sont en nombre suffisant?

M. CHOQUETTE: Les candidats qui se présentent à la Sûreté sont très nombreux.

M. HARDY: Est-ce que l'offre est supérieure à la demande?

M. CHOQUETTE: Je dirais que oui, nettement. Nous avons beaucoup de demandes de la part de jeunes gens pour devenir agents de la Sûreté.

M. HARDY: Je comprends que ce n'est peut-être pas possible maintenant, mais, pour l'édification des députés d'abord et pour leur instruction aussi, il serait peut-être intéressant que nous connaissions quelles sont les normes, les exigences que l'on demande à un candidat aspirant au poste.

M. CHOQUETTE: C'est 5 pieds 8 pouces, une bonne santé, onzième année, 142 livres de poids, minimum.

M. LE PRESIDENT: Citoyen canadien.

M. CHOQUETTE: ... de citoyenneté canadienne...

UNE VOIX: Avez-vous l'âge?

M. CHOQUETTE: L'âge maximum est de 28 ans, 29 ans maximum.

M.HARDY: Est-ce qu'il y a des examens, lorsqu'il y a des entrevues, qu'on fait subir aux candidats sur le plan psychologique, sur le plan de l'équilibre...

M. CHOQUETTE: Oui et voici comment ces examens ont été préparés. On a posé une série de questions très élaborées aux agents de la Sûreté, aux caporaux et aux officiers, dans le but de déterminer le profil moyen du membre de la Sûreté du Québec. A même ce profil moyen, on a dégagé les qualités voulues chez un agent de police. C'est en fonction de cette analyse du cas dans son ensemble que les tests sont appliqués aux individus qui font des demandes pour entrer à la Sûreté du Québec.

M. HARDY: Maintenant, dans la formation, je ne sais pas si cela entre dans cet article. Je pense que nous pouvons le discuter de façon générale...

M. LE PRESIDENT: C'est à l'article 7, Institut de police du Québec.

M. HARDY: Ah bon! Alors je réserve ma question pour plus tard.

M. PAUL: M. le Président, nous n'avons pas d'objection à ce que le député de Terrebonne complète ses remarques.

M. HARDY: Cela s'enchaîne très bien. Alors, je voulais savoir si, dans le programme élaboré que l'on fait suivre aux étudiants, à l'Institut de police à Nicolet, on a songé ou si on songe actuellement à adapter ces programmes en fonction des nouveaux problèmes de la société québécoise? Les problèmes auxquels devaient faire face les policiers, il y a dix ou quinze ans, sont quand même assez différents de ceux auxquels ils doivent faire face maintenant. Je pense aux crimes politiques, je pense à tous ces aspects que nous connaissons.

Pour faire face à ces nouveaux problèmes de la criminalité, les policiers ont besoin d'avoir une formation différente, une formation qui s'applique à ces problèmes. Alors, au cours des dernières années ou actuellement, est-ce que des études sont faites en vue de modifier les programmes pour donner aux futurs policiers une meilleure formation pour faire face à ces nouveaux problèmes?

M. CHOQUETTE: Le député peut être sûr que nous tenons compte de cette dimension des

changements qui se sont produits dans la société. Par exemple, il est faux d'affirmer que le travail d'un policier soit principalement consacré à du travail policier comme tel, je veux dire, dans le sens étroit du mot, tels que enquêtes, patrouilles ou commission d'infraction, etc. L'analyse nous révèle que peut-être 75 p.c. du travail policier en général — et ceci s'applique aux polices municipales comme peut-être à la Sûreté du Québec — est en rapport avec certains problèmes de relations humaines, disputes dans les ménages, accidents, situations conflictuelles mais où il n'y a pas de crime.

Par conséquent, le policier d'aujourd'hui n'est pas exclusivement un limier ou un patrouilleur. Cette dimension, évidement, nous en tenons compte dans les cours de formation.

M. HARDY: Alors, est-ce que cela veut dire — je donne cela à titre d'exemple seulement — que dans le programme de formation des policiers, il y a des cours de psychologie, des cours de sociologie? D'une façon générale — il ne s'agit pas de faire des policiers des sociologues professionnels — est-ce que ce sont des disciplines qui font partie du programme de formation?

M. CHOQUETTE: Oui. Nous donnons même des cours sur l'attitude et la maîtrise d'eux-mêmes qu'ils doivent avoir, par exemple, face à des foules en état d'ébullition. A mon sens, c'est une des grandes qualités et des grandes exigences des policiers modernes que d'être capables de faire face à des événements violents ou potentiellement violents mais de garder un calme et une attitude qui n'offrent aucune prise à la provocation.

M. HARDY: C'est-à-dire une formation qui leur permet, tout en étant casqués et armés, de demeurer calmes et non provocateurs.

M. CHOQUETTE: Et de rester toujours...

M. BURNS: Vous ne craignez pas qu'avec tous ces cours les policiers ne suivent plus les ordres du ministère? Vous n'avez pas peur, non? Ce n'est pas une de vos craintes?

M. CHOQUETTE: Non.

M. BURNS: Une question sérieuse, celle-là. Puisqu'on parle des qualifications, des qualités requises et des normes, etc., comment se comparent la formation et les qualifications requises des membres de la Sûreté du Québec par rapport à celles de la Gendarmerie royale du Canada?

M. CHOQUETTE: En tout cas, elles se comparent à peu près également avec celles de la police de Montréal, je pense. Quant à la Gendarmerie royale du Canada, je dirais que c'est à peu près au même niveau. M. Springate m'en assure.

M. BURNS: Oui.

M. CHOQUETTE: C'est à peu près du même type. Je dirais que, dans la Gendarmerie royale, on a peut-être fait un effort particulier pour recruter des gens qui avaient une formation universitaire, ce que nous n'avons peut-être pas fait à notre niveau, à notre Sûreté du Québec.

Personnellement, je considère que, sans donner des avantage indus au départ ou même des avantages tout simplement à des policiers qui auraient une formation supérieure à celle qui est requise à la base — je pense que tout le monde, dans un corps policier, doit subir le même entraînement, gravir les échelons, suivre le même cours de formation et d'avancement — ce n'est pas désavantageux que l'on recrute des gens qui ont une formation supérieure à celle qui est requise par la Sûreté du Québec.

M. BURNS: Justement, je pense qu'à la police de Montréal cela s'est fait sur une base assez importante. Mais une fois que le candidat est dans le corps policier, est-ce qu'il y a quelque chose de prévu pour faciliter, même s'il n'a pas le cours universitaire en entrant, son perfectionnement universitaire, dans certains cas?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BURNS: Vous mentionniez, tantôt, quelqu'un, sans faire...

M. SPRINGATE: Aide financière, des bourses d'étude.

M. CHOQUETTE: Les corps policiers, tels que la Sûreté du Québec, mettent de plus en plus l'accent sur le perfectionnement du policier pendant qu'il est policier. Alors, on l'envoie suivre des cours et tout ça. Je ne dis pas que l'effort qui a été fait est nécessairement extraordinaire et que nous sommes à la limite, en somme, de ce que nous pouvons faire. Mais il y a sûrement une très grande incitation qui est...

M. BURNS: Prenons un cas concret: Un policier qui serait en fonction, actuellement, et qui aurait toutes les qualifications de base requises, est-ce qu'on lui faciliterait, à la Sûreté du Québec, comme on le fait beaucoup à la police de Montréal — par exemple, on en a un, ici, à la commission — la possibilité de faire son cours de droit? J'entendais le ministre parler de M. Saint-Georges, qui est justement un de ses collègues, qui est un de nos confrères et il était policier, à ce moment-là, quand il a fait son cours.

M. CHOQUETTE: On me dit oui, cela est la situation à la Sûreté du Québec.

M. BURNS: Cela existe aussi. M. CHOQUETTE: Oui.

M. HARDY: M. le Président, pour faire suite à ce que nous traitons actuellement et un peu aux remarques préliminaires que j'ai formulées hier, je pense que c'est un des aspects très importants dans la société dans laquelle nous vivons précisément pour arriver à faire cette synthèse.

Il s'agit de la nécessité du maintien de l'ordre dans la société et du respect des lois, tout en tenant compte des réalités sociologiques et de l'aspect humain qui se retrouve dans chacun des problèmes auxquels les policiers doivent faire face. Je pense qu'il est très important que le gouvernement et le ministère de la Justice consacrent de plus en plus de ressources à cet aspect de la formation des policiers et de leur perfectionnement.

Au point de départ — c'est pour cela que j'ai posé des questions — il faut avoir des sujets bien équilibrés sur le plan humain. Même si nous avions des gens bien savants, si ce sont des schizophrènes ou des gens qui souffrent de quelque maladie du genre, cela pourra difficilement faire de bons policiers. Alors, il faut avoir des gens qui sont, d'abord, bien équilibrés. C'est le point de départ lors de l'admission. Ensuite, que la formation soit de plus en plus poussée. J'entendais tantôt parler de formation universitaire. Je pense que, dans notre société, de plus en plus, nous devrons avoir des gens qui ont une formation universitaire dans les services de police. C'est en ayant, justement, cette formation de plus en plus valable que nous pourrons précisément assurer, je pense, ce grand impératif qui est le maintien de l'ordre, le respect des lois, tout en tenant compte de l'aspect sociologique qui existe dans les sociétés modernes.

M. CHOQUETTE: Je souscris aux observations du député de Terrebonne, mais j'ajouterai qu'à l'intérieur des corps policiers — il faut être en contact avec eux pour le savoir et l'apprécier — il y a un grand besoin — je ne sais pas si c'est à cause de la fonction, de la tradition qui existe ou de la formation qu'on y donne — d'homogénéité. En effet, même si ces gens proviennent de formations assez diverses, au fond, il y a un besoin d'esprit de corps. Cet esprit de corps se développe, en somme, par le fait qu'on gravit les échelons des corps policiers au fur et à mesure des années et suivant la compétence, évidemment.

J'ajouterais aussi qu'à mon sens ce qui fait un énorme tort à l'action de la police, sans qu'on s'en rende très bien compte, c'est que, malheureusement, une certaine bureaucratisation s'est instaurée dans les corps policiers. On exige du policier la rédaction de beaucoup de rapports. J'admets qu'il faut bien consigner les notes des policiers par écrit. Enfin, on ne peut pas se fier à la mémoire de chacun. Il faudrait, quand même, trouver un équilibre raisonnable entre les nécessités d'une grande organisation bureaucratique, comme un corps policier ou n'importe quelle administration, et, d'un autre côté, l'initiative personnelle et individuelle de chaque policier.

On sait qu'un policier qui est plongé dans un milieu pendant un certain temps, au bout d'une certaine période, connaît les gens du milieu. Il est renseigné sur les gens qui sont susceptibles de commettre des crimes. Il a des indicateurs qui vont simplement se confier à lui. Par conséquent, ce policier peut réellement donner sa pleine valeur et protéger adéquatement la société. Mais, quand on agit simplement en vertu de principes technocratiques ou bureaucratiques à l'intérieur des corps policiers, on élimine une bonne partie de l'efficacité de nos policiers sur le plan individuel. On empêche, en somme, la personnalité propre du policier de s'exprimer et de donner un résultat tangible pour la société.

A mon sens, c'est un des grands défis, en somme, de l'administration policière — comme de toute autre administration, je pense bien, mais, dans le secteur de la criminalité, c'est encore plus aigu qu'ailleurs — de surmonter l'espèce de bureaucratie qui a tendance à s'installer.

M. HARDY : Une autre question, M. le Président, s'il n'y a pas d'autres remarques sur cet aspect.

M. SPRINGATE: Je veux revenir sur quelque chose, mais allez-y.

M. HARDY: C'est une question qui peut paraître bien terre à terre, mais qui, je pense est importante si l'on songe à vouloir utiliser au maximum le temps et le talent des policiers. Je me suis souvent interrogé sur le bien-fondé de faire signifier, par des policiers, des sommations. Je pense que c'est vraiment un gaspillage de talent et d'énergie. Je pense qu'on pourrait remettre les sommations à des huissiers. Je n'ai pas de formule précise, à savoir si le ministère devrait avoir des huissiers à temps plein ou se servir des huissiers qui existent. Cela épargnerait tout le temps que des policiers passent à aller signifier ces sommations, soit pour le code de la route, pour la Régie des alcools, etc.

Je pense qu'il serait beaucoup plus efficace que ce travail de signification de procédure soit confié à des huissiers plutôt qu'à des policiers.

M. CHOQUETTE: Le député a raison en bonne partie et même des initiatives ont été prises pour faire en sorte que nos policiers n'accomplissent pas des fonctions que d'autres pourraient accomplir, tel le transport des prisonniers. La Sûreté a délaissé...

M. BURNS: ... la surveillance des routes, etc. Il avait été question à que ça se fasse par d'autres que des policiers.

M. CHOQUETTE: La surveillance des routes est une des grandes tâches de la Sûreté du Québec à l'heure actuelle.

M. BURNS: Je veux dire pour la vitesse et ces choses-là. N'a-t-il pas été question qu'on prenne des gens de formation moins importante?

M. CHOQUETTE: Il en est fortement question, surtout dans le domaine des contraventions sur les autos mal stationnées. Et je suis content que vous souleviez le problème devant M. Marcil ici présent pour qu'il vous donne, après la séance, son approbation à ce grand principe de l'amélioration de l'administration. Ce sont sûrement des mesures qu'il faut prendre. Et en prenant ce genre de mesures-là, je pense qu'on fait accomplir au policier sa véritable fonction et on permet à d'autres de gagner leur vie.

Cela permet aussi à l'administration, à long terme, de donner de meilleurs salaires aux policiers.

M. BURNS: Exactement ça.

M. CHOQUETTE: Tandis que si on les gaspille à faire des fonctions insignifiantes, comment peuvent-ils justifier des augmentations de salaire quand arrive le temps des conventions collectives? J'ajouterai aussi, pour faire suite aux observations du député de Terrebonne, que des amendements sont prévus à la Loi des poursuites sommaires. Je ne veux pas faire de promesse parce que le député de Maisonneuve pourrait peut-être les relever si elles ne sont pas remplies à échéance.

M. BURNS: Sûrement.

M. CHOQUETTE : Mais nous prévoyons des amendements pour permettre la signification des sommations par des personnes autres que des policiers. Et d'ailleurs des mesures du même genre ont été adoptées pour libérer les policiers de certaines de leurs fonctions.

M. HARDY: J'aurais une dernière observation. Cette observation a trait à l'aide que la Sûreté du Québec peut être appelée à donner à des petites municipalités. En général, le principe, si je comprends bien, c'est que la Sûreté du Québec couvre le territoire d'une municipalité lorsque cette dernière n'a pas de service municipal. Lorsque la municipalité a ses propres policiers, en principe la Sûreté du Québec ne doit pas intervenir pour les cas d'accidents d'automobiles ou les choses ordinaires.

Voici ce qui arrive dans le comté que je représente en particulier, dans le nord. Il y a une foule de petites municipalités qui n'ont pas les moyens d'avoir un véritable service de police. Elles ont parfois un ou deux policiers avec une formation plus ou moins valable.

Quand elles en ont un, cette personne, même si, en principe, elle est en service 24 heures par jour, 7 jours par semaine, en pratique il y a quand même certains moments où elle doit dormir.

Or, on sait que dans le nord de Montréal, de Saint-Jérôme à Saint-Jovite, il y a une activité très intense les fins de semaine: circulation, il y a beaucoup de gens qui viennent. Et à un moment donné, les services de police de ces municipalités sont vraiment débordés. Et j'ai à plusieurs reprises reçu des plaintes des conseils municipaux de ces municipalités à l'effet que ces municipalités semblaient avoir de la difficulté à obtenir la collaboration de la Sûreté du Québec.

Par exemple les municipalités demandent à la Sûreté du Québec, pour les fins de semaine, d'avoir un ou deux policiers pour les aider à assurer le maintient des lois de la circulation. On se trouve un peu dans un cercle vicieux. Si la municipalité n'a pas du tout de policier, elle est censée pouvoir obtenir les services de la Sûreté du Québec. Si elle en a un, la Sûreté dit: Vous avez votre service, nous n'y allons pas. Je me demande s'il n'y aurait pas possibilité...

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas le rôle de la Sûreté du Québec de venir en somme suppléer aux carences de la police sur le plan municipal.

C'est cependant le rôle de la Sûreté de venir se saisir d'enquêtes importantes lorsque des infractions peuvent être commises dans des municipalités, telles que des crimes graves et ces choses-là. Alors il ne faudrait quand même pas faire supporter à la Sûreté du Québec des responsabilités qui ne lui appartiennent pas en propre. Maintenant, je vais dire au député de Terrebonne que le secteur dont il est le député et les comtés environnants ont subi un développement démographique et économique très considérable depuis quelques années. C'est incontestable.

La population augmente, il y a énormément d'activités dans les Laurentides, au nord de Montréal. Je pense que c'est un des secteurs qui est probablement propice pour une intégration régionale des corps de police à plus ou moins brève échéance, tout comme la rive sud de Montréal le serait aussi à mon sens. Voici des secteurs où vous avez un grand nombre de municipalités, avec des corps de police municipaux de qualité très inégale. Il faudrait mettre de l'ordre là-dedans et assurer une meilleure coordination de la police.

Je pense que c'est ça le remède réel au problème soulevé par le député.

M. HARDY: M. le Président; j'apprécie très vivement que le ministre se propose de faire de notre région un des coins où l'intégration pourra se faire en priorité. Mais, même si je reconnais avec le ministre que ce n'est peut-être pas le rôle de la Sureté, je demanderais s'il n'y avait pas possibilité, en attendant que cette

intégration se fasse, que la Sûreté joue quand même un rôle supplétif. Il existe vraiment des problèmes assez graves dans ce domaine-là, en particulier dans la saison dans laquelle nous entrons. On pourrait peut-être augmenter, pour certaines périodes de l'année, le. nombre des policiers en devoir au poste de Saint-Jérôme ou au poste de Sainte-Agathe. Il se produit peut-être des accidents d'automobile en plus grand nombre dans ce secteur-là à cause d'une absence de surveillance adéquate que les municipalités sont incapables de fournir.

M. CHOQUETTE: Je prends bonne note de la situation particulière soulignée par le député de Terrebonne et M. Saint-Pierre le note également. Je suis sûr qu'il donnera l'assistance voulue qu'il pourra dans les circonstances.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! La commission suspend ses travaux...

M. BURNS: Si vous voulez adopter l'article de la Sûreté du Québec, j'aurais une seule question à la catégorie 2.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 2:

M. BURNS: Catégorie 2, contributions, 6-2.

M. LE PRESIDENT: Alors catégorie 1. Adopté. Catégorie 2: contributions de l'employeur.

M. BURNS: Je suis étonné, j'aimerais bien que le ministre me donne des précisions là-dessus, de voir les contributions de l'employeur aux pensions, sous la catégorie pensions — à moins que ce soit une faute de frappe, c'est possible, mais c'est ça que je veux clarifier. En 71/72, on avait $100,000 à cet article-là et on a $80,000 seulement en 72/73. C'est très étonnant.

M. CHOQUETTE: En apparence le député a raison, mais le chiffre de $80,000 ne comprend que les contributions de l'employeur au fonds de la Commission des accidents du travail. Cela ne comprend pas les contributions de l'employeur au fonds de pension des policiers de la Sûreté qui a été...

M. BURNS: C'est parce qu'on lisait: Contributions de l'employeur; pensions.

M. CHOQUETTE: C'est pour les pensions accordées...

M. BURNS: En vertu de la Commission des accidents du travail.

M. CHOQUETTE: ... à la suite d'accidents du travail.

M. PAUL: J'attire l'attention du député de Maisonneuve sur l'article S-ll.

M. BURNS: D'accord, mais je me demandais si c'était un autre type de contribution de l'employeur pour les fonds de pension. Je sais qu'il y a un article spécifique pour le régime de retraite, mais...

M. CHOQUETTE: C'est la classification, me dit-on, du Conseil de la trésorerie que nous devons employer. C'est un peu trompeur comme appellation, et ça ne vise que nos contributions aux accidents du travail.

M. BURNS: D'accord, je n'ai pas d'autres questions.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté. Est-ce que les autres catégories sont adoptées?

M. PAUL: Quant à moi, M. le Président, c'est d'accord.

M. LE PRESIDENT: Adopté.

M. BURNS: A la catégorie 14, j'aimerais savoir...

M. LE PRESIDENT: Catégories 3, 4, 5, 6, 7, 8, 11. Adopté Catégorie 14, Remboursements.

M. BURNS: Je voudrais simplement savoir de quelle nature sont ces remboursements. Est-ce que ce sont des cas où les services de la Sûreté du Québec sont prêtés à d'autres organismes qui remboursent, ou quoi?

M. CHOQUETTE: On me dit qu'il s'agit du traitement des membres travaillant pour l'Association des policiers provinciaux du Québec, $52,000; de la perte de temps des membres comptée à l'accusé, a) frais de témoins, $18,000, b) frais de signification, $158,000, pour un total de $176,000; autres remboursements, $3,500, pour un total de $231,500.

M. BURNS: Merci.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 14. Adopté. Catégorie 15. Adopté. La commission suspend ses travaux jusqu'à seize heures cet après-midi, même salle.

(Suspension de la séance à 12 h 6)

Reprise de la séance à 16 h 20

M. PICARD (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Institut de police

M. LE PRESIDENT: Si nous avons quorum, nous allons commencer. La commission de la justice continue l'étude des crédits du ministère de la Justice et nous en étions à l'article 7, catégorie 1.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire qui est maintenant directeur de l'Institut de police de Nicolet?

M. CHOQUETTE: M. Jean Lapointe, autrefois de la police de Montréal.

M. PAUL: Dans le conseil administratif, est-ce qu'il y a encore des représentants du ministère de la Justice?

M. CHOQUETTE: M. Normand Saint-Georges est le président du conseil d'administration; il a remplacé Me Boisvert, qui avait sollicité d'être libéré de ses responsabilités.

M. PAUL: Maintenant, est-ce que les travaux de transformation ont débuté à l'institut?

M. CHOQUETTE: Transformation architecturale?

M. PAUL: Oui.

M. CHOQUETTE: La salle de tir et la cuisine ont été approuvées quant aux transformations. Pour le reste, ou du moins pour l'ensemble de l'édifice, cela fait l'objet d'un examen selon le système PPB.

M. PAUL: L'an dernier, il me semble qu'à l'étude des crédits du ministère, le ministre nous avait annoncé son succès auprès du ministre des Travaux publics pour apporter des améliorations de l'ordre d'environ $1 million. C'était pour savoir si ces travaux-là avaient débuté. Cela n'ira peut-être pas jusque là, mais est-ce qu'on a commencé à transformer l'institut?

M. CHOQUETTE: Au point de vue de la salle de tir et de la cuisine, c'est approuvé et, par conséquent, les travaux doivent se faire.

M. HARDY: M. le Président, je comprends que ce problème de transformation est peut-être un peu en dehors des problèmes policiers, mais est-ce que je peux demander au ministre si l'on se préoccupe de conserver son architecture à cet édifice qui est l'ancien séminaire de Nicolet?

M. CHOQUETTE: Non seulement on s'en préoccupe, mais on ne peut pas faire autrement. Il est tellement ancien qu'il n'y a rien à faire.

M. LE PRESIDENT: Le séminaire ne relève pas des crédits du ministère des Affaires culturelles du tout.

M. HARDY: Cela m'inquiète un peu de voir...

M. BACON: ...qui décide de rejoindre à Nicolet.

M. CHOQUETTE: Cela m'inquiète un peu de voir qu'aux crédits des Affaires culturelles...

M. LE PRESIDENT: Discutez-vous des crédits des Affaires culturelles ou des crédits de la Justice?

M. CHOQUETTE: ... c'est la seule différence.

M. HARDY: M. le Président, je m'inscris en faux contre les propos du ministre de la Justice. Le ministre de la Justice vient de souligner un défaut fondamental que l'on retrouve dans tous les gouvernements, dans le nôtre comme dans les autres, c'est-à-dire cette absence de communication entre les ministères. Si le but premier du ministère de la Justice et des services de police est évidemment de protéger les citoyens, le ministère de la Justice doit se préoccuper également, lorsqu'il transforme des édifices historiques dont l'architecture est très précieuse, de conserver cette architecture. Ici au Québec, et ce n'est pas particulier à ce domaine, on peut peut-être passer pour un peu original lorsqu'on parle de ça, mais malheureusement, ici au Québec, d'une façon générale, beaucoup d'administrations, à tous les niveaux, mêmes les administrations municipales, se préoccupent peu de la conservation des monuments, de la conservation des choses qui ont une valeur non seulement culturelle mais économique. Si on ne garde pas certaines beautés du genre, c'est au tourisme qu'on nuit.

M. CHOQUETTE: Est-ce que le député de Terrebonne me cherche noise?

M. HARDY: Du tout! D'ailleurs, c'est plutôt le ministre de la Justice qui a mal pris mes remarques.

M. CHOQUETTE: Non, je pense que le député de Terrebonne devrait faire ses observations aux crédits des Travaux publics.

M. HARDY: Je voulais tout simplement m'assurer que le problème de la conservation d'un édifice aussi magnifique que le vieux séminaire de Nicolet entrait dans les préoccupations du ministre de la Justice. C'est tout ce que je voulais dire.

M. CHOQUETTE: Je peux dire au député de Terrebonne que ça entre tellement dans mes préoccupations que j'y pense presque tous les jours.

M. HARDY: Très bien!

M. PAUL: M. le Président, je n'ai pas le droit de prêter des intentions au ministre, mais je vais décrire ou traduire tout haut ce que j'ai ressenti au sursaut du ministre aux questions fort intelligentes du député de Terrebonne. Je croirais, moi, que le ministre de la Justice regretterait quelque peu les engagements de l'un de ses prédécesseurs aux fins d'aménager le séminaire de Nicolet en institut de police.

M. LE PRESIDENT: Connaissez-vous ce prédécesseur?

M. PAUL: Oui, et ce n'est pas moi.

M. CHOQUETTE: C'est sûrement un problème, mais évidemment, comme on le sait, Nicolet fut autrefois une grande ville cléricale. Or, depuis qu'il semble y avoir une désaffection pour l'Eglise, il y a eu par conséquent une réduction des effectifs dans la ville de Nicolet.

M. PAUL: On a remplacé cela par la police!

M. CHOQUETTE: Alors, on a remplacé cela par la police!

M. SPRINGATE: En parlant de l'institut, ce matin, le ministre a dit que les policiers qui travaillaient pour la Sûreté avaient la possibilité de suivre des cours à l'université ou des cours avancés. Est-ce que cela veut dire que dorénavant la Sûreté offre des bourses d'études comme à Montréal, à des policiers qui sont désireux de poursuivre leurs études? Et est-ce que les policiers de la Sûreté peuvent se prévaloir d'un diplôme de sciences policières comme celui donné à Montréal?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. PAUL: Je comprends que l'hésitation de la réponse ne figure pas au journal des Débats!

M. CHOQUETTE: Non. C'est marqué: Oui, ferme et catégorique !

M. SPRINGATE: M. le Président, j'ai posé cette question parce que, moi-même, j'ai bénéficié de bourses d'études, même si j'ai été obligé de rembourser à un certain moment. Mais est-ce que le ministre pourrait nous donner des détails? Est-ce comme à Montréal, où les frais de scolarité sont remboursés à 75 p.c. pour les cours généraux et à 85 p.c. pour les cours professionnels? Quel est le nombre?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. SPRINGATE: Vous ne le savez pas? Ou vous ne voulez pas le dire?

M. CHOQUETTE: Le nombre des personnes qui suivent des cours?

M. SPRINGATE: Oui. Est-ce que vous pourriez me dire cela plus tard?

M. CHOQUETTE: Immédiatement, M. le député. Je ne voudrais pas laisser passer cela.

M. PAUL : Aux dernières nouvelles, je pense qu'ils sont trois.

M. CHOQUETTE: Quant au nombre, je ne peux pas vous le dire. On me dit qu'il ne faudrait quand même pas comparer tout à fait la situation des agents de la Sûreté à ceux de la police de Montréal, pour la simple et bonne raison que beaucoup de nos effectifs de la Sûreté sont dispersés sur l'ensemble du territoire québécois et, par conséquent, à des endroits où il n'y a pas d'université. Mais je vais obtenir le renseignement directement quant au nombre de nos agents ou membres de la Sûreté inscrits à des cours universitaires et je le communiquerai au député.

M. SPRINGATE: Est-ce que le ministre pourrait penser à assurer aux policiers de la Sûreté le droit ou la possibilité de poursuivre leurs études dans les différents CEGEP de la province? Ce ne serait pas mauvais. La seule raison pour laquelle je vous pose des questions, c'est que je sais que le système de Montréal est excellent et j'aimerais voir un tel système s'établir à la Sûreté, afin de rehausser le rôle du policier et le professionnalisme même.

M. CHOQUETTE: La réponse à toutes les questions du député est: oui.

M. SPRINGATE: Parfait, M. le ministre.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a encore un tarif de $300 par cadet municipal qui suit des cours?

M. CHOQUETTE: La réponse est oui.

M. PAUL: Est-ce que le ministre envisagerait la possibilité de faire disparaître cette contribution municipale?

M. CHOQUETTE: La réponse est oui, mais...

M. PAUL: La réponse, l'an dernier, a été oui, mais je constate que, cette année, c'est encore: non. Je présume, M. le Président, mais je vais répondre pour le ministre: Lorsque le ministre des Affaires des Finances lui donnera les crédits nécessaires, il adoptera cette politique.

M. CHOQUETTE: La réponse est oui.

M. LE PRESIDENT: Toujours à l'article 7, Institut de police du Québec; catégorie 1, Traitements, salaires, et allocations.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté. La catégorie 3, Services de transport et de communication.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, Services professionnels, administratifs et autres.

M. PAUL: Cela comprend les professeurs qui enseignent.

M. CHOQUETTE: Les fournitures?

M. PAUL: Non. Nous sommes rendus plus loin que cela. Nous sommes rendus à la catégorie 4, Services professionnels, administratifs et autres.

M. CHOQUETTE: Je n'étais pas au bon article.

M. PAUL: Nous sommes encore à l'Institut de police du Québec.

M. CHOQUETTE: Oui, vous avez tout à fait raison, M. le député, comme d'habitude!

M. LE PRESIDENT: Catégorie 5, Entretien et réparations.

M. DROLET: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 6, Loyers.

M. DROLET: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 7, Fournitures et approvisionnements, adopté. Autres dépenses, adopté. Catégorie 14: Remboursements.

M. CHOQUETTE: Les remboursements représentent justement la contribution des municipalités pour leurs cadets auxquels le député de Maskinongé...

M. PAUL: Les $100,000 veulent dire cela.

M. CHOQUETTE: C'est ce que cela veut dire.

M. PAUL: Si je comprends bien, il y a une promotion tous les trois ou quatre mois.

M. CHOQUETTE: Tous les quatre mois.

M. PAUL: Il y a une promotion d'environ 75.

M. CHOQUETTE: Nous considérons que nous avons 300 cadets municipaux en moyenne par année. A raison de $300, cela fait $90,000 plus $10,000 pour des cours de perfectionnement pour des agents de police municipaux, ce qui fait un total de $100,000.

M. PAUL: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 14. Adopté. Catégorie 15: Imputations.

M. CHOQUETTE: C'est une imputation aux frais de la Sûreté pour les cadets de la Sûreté.

Institut de médecine légale

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 8: Institut de médecine légale et de police scientifique. Catégorie 1 : Traitements, salaires et allocations.

M. PAUL: Est-ce que le ministre a pu obtenir, avec la collaboration de la Fonction publique, l'engagement de tous les spécialistes que nécessitait l'Institut de médecine légale?

M. CHOQUETTE: La réponse est non. M. PAUL: Pas encore.

M. CHOQUETTE: Avec atténuation en ce sens qu'après discussion, nous avons réussi à améliorer sensiblement la situation au point de vue de ces spécialistes mais cela n'est pas une réponse définitive au problème.

M. PAUL: N'est-il pas vrai que le problème résulterait de cet écart de salaire que l'on peut obtenir dans la Fonction publique comparativement à celui qui est versé pour les mêmes fonctions professionnelles dans le secteur privé?

M. CHOQUETTE: Le député a raison, c'est exact. Le problème est encore plus aigu en ce qui concerne les pathologistes que nous avions â notre service et qui étaient payés à salaire...

M. PAUL: Surtout depuis la "Castonguette".

M. CHOQUETTE: ... compte tenu du programme d'assurance-santé qui existe actuellement et qui a haussé très considérablement les revenus de ces spécialistes.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1, adopté.

M. CHOQUETTE: Nous avons, par conséquent, offert de rémunérer les spécialistes en pathologie dont nous avons besoin sur une base de vacation.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3: Services de transport et de communication. Adopté. Catégorie 4 : Services professionnels, administra-

tifs et autres. Adopté. Catégorie 5 : Entretien et réparations. Adopté. Catégorie 6: Loyers. Adopté. Catégorie 7: Fournitures et approvisionnements. Adopté. Catégorie 8: Matériel et équipement. Adopté.

M. PAUL: Un instant, M. le Président. Est-ce que le ministre peut nous justifier l'augmentation approximative de $45,000 à ce service?

M. CHOQUETTE: Il s'agit en grande partie d'achats d'équipement spécialisé soit un microscope chromatographe Sealing Carloremeter...

M. PAUL: De toute façon, laissez-le là.

M. CHOQUETTE: ... au montant de $74,700. Ce sont des équipements scientifiques dont on a besoin au laboratoire.

M. PAUL: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 11: Autres dépenses, adopté.

Article 9 : Direction générale des greffes des cours de justice. Catégorie de dépenses no 1 : Traitements, salaires et allocations.

M. PAUL: L'augmentation du personnel mentionnée résulte probablement des implications de la Loi 70?

M. CHOQUETTE: Exactement, plus l'accroissement normal requis dans les greffes à travers le Québec.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Catégorie 2: Contributions de l'employeur, pensions, adopté. Catégorie 3: Services de transport et de communication, adopté.

M. PAUL: A la catégorie 4, M. le Président, à ce montant de $2,022,500 il est prévu un certain montant pour la planification de la maison Ducharme, Deom et Associés.

M. CHOQUETTE: Je ne crois pas, M. le Président. Je vais vous donner les chiffres compris à l'intérieur de cette somme de $2,022,500. Les frais de témoins, $700,000; les frais de jurés, $625,000; établissement du traitement des données dans le palais de justice et dans les greffes de la cour du Bien-Etre social, $250,000; mécanisation des opérations au service des dépôts volontaires à Montréal, $50,000, plus les frais de gardiennage et de sécurité dans un certain nombre de palais de justice ainsi que des frais de garde des jurés aux assises criminelles; finalement, des avances requises pour l'installation projetée d'un nouveau système comptable dans les greffes et un système d'émission de chèques, des sténographes officiels, du personnel de soutien, des interprètes, la cotisation des associations, des abonnements et des dépenses diverses pour un total de $2,022,500.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve. On nous avait informé que vous auriez peut-être quelque chose sur ce point.

M. BURNS: Non, c'est à l'article 10. M. DROLET: Non, c'est l'autre.

M. LE PRESIDENT: Lorsque nous avons débuté les travaux, on nous avait informé de cela.

M. BURNS: Vous voulez parler de l'article 10, probablement.

M. LE PRESIDENT: A l'article 9, catégorie 4.

M. BURNS: Oui, vous avez raison. Merci, M. le Président, vous êtes bien aimable.

M. LE PRESIDENT: Au moment de commencer nos travaux, vous l'aviez mentionné au Solliciteur général.

M. BURNS: Oui, d'accord, je l'avais mentionné au Solliciteur général, je l'en remercie, d'ailleurs. Les services professionnels, administratifs et autres, il y a là un problème d'informatique. Est-ce que l'augmentation est reliée à un phénomène d'informatique?

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas nécessairement un problème d'informatique mais de mécanisation des opérations dans certains services dont le service des dépôts volontaires, à Montréal et à Québec, ainsi que l'établissement de systèmes de traitement des données dans les palais de justice et les greffes des cours du Bien-Etre social.

M. BURNS: Quelle est la proportion affectée à ce montant?

M. CHOQUETTE: L'établissement du traitement des données au palais de justice et dans les greffes des cours du Bien-Etre social, $250,000; la mécanisation des opérations au service des dépôts volontaires, $50,000. M. Noël, de notre service financier, me dit que c'est une imputation, par le centre des données du ministère des Finances, pour des travaux d'informatique.

M. BURNS: Cela fait à peu près quoi, 10 p.c?

M. CHOQUETTE: Ceci représente $1,625,000. Evidemment, il y a les frais de témoins. Ceci représente plutôt $300,000. Les frais de témoins sont de $700,000 et les frais de jurés...

M. PAUL: ... est-ce dans les causes criminelles?

M. CHOQUETTE: Sans doute.

M. PAUL: Juste dans les causes cirminelles?

M. CHOQUETTE: Oui.

M. PAUL: A une enquête du coroner également?

M. CHOQUETTE: Oui, mais dans les causes civiles, cela ne nous incombe pas.

M. DROLET: Il a parlé des coroners et j'ai dit que c'était à l'article des morgues.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4, adopté. Catégorie 5: Entretien et réparations, adopté. Catégorie 6: Loyers, adopté. Catégorie 7: Fourniture et approvisionnements, adopté. Catégorie 8: Matériel et équipement, adopté. Catégorie 11: Autres dépenses, adopté. Catégorie 14: Remboursements.

M. BURNS: M. le Président, à la catégorie remboursements, je me souviens que, l'année dernière, le ministre nous avait dit qu'il étudierait la possibilité d'établir une entente avec le gouvernement fédéral pour obtenir des remboursements quant à l'utilisation des greffes par le fédéral. Est-ce qu'il y a quelque chose de nouveau à ce sujet? Je me souviens que l'année dernière on avait parlé de ce problème. Dans toutes les causes de matière fédérale comme la drogue et la fausse monnaie, par exemple, à toutes fins pratiques on se trouve à utiliser les bureaux administrés et maintenus par le gouvernement du Québec.

Le ministre, à ce moment-là, avait abondé dans mon sens à l'effet qu'il y aurait peut-être lieu de discuter de compensations possibles. Je vois que l'augmentation des remboursements passe de $30,000 à $40,000, il y a donc une augmentation de $10,000. Est-ce que les $10,000 seraient dus à une entente avec le fédéral ou s'il n'y en a pas eu?

M. CHOQUETTE: Il n'y en a pas eu, M. le Président, à ma connaissance.

Je ne sais pas si le ministère des Travaux publics aurait conclu certaines ententes en dehors de notre connaissance dans ce domaine-là. Je dois dire au député que nous n'avons pas fait de démarches auprès du gouvernement fédéral pour tenter de justifier une part des coûts encourus pour l'administration de la justice criminelle, en particulier concernant certaines infractions ou certains crimes commis en vertu de lois criminelles.

D'un autre côté, dans les domaines de la drogue, de la contrefaçon, des alambics, on sait que le gouvernement fédéral s'occupe des poursuites dans ces domaines. Il a constitué à Montréal un contentieux important de procureurs permanents qui s'occupent de ce travail-là, qui ne loge pas d'ailleurs au palais de justice, mais qui loge dans un édifice privé...

M. BURNS: Il y a des officiers de liaison qui sont en permanence au palais de justice, sauf erreur?

M. CHOQUETTE: La GRC, tout probablement, comme la police de Montréal, mais nous n'avons pas tenté de répartir les responsabilités ou les coûts. Après tout, c'est nous qui avons la responsabilité de l'administration de la justice. Je ne sais pas si des démarches dans ce sens seraient totalement justifiées. Je vais examiner le problème à la suggestion du député pour voir s'il y aurait lieu de faire une réclamation au gouvernement fédéral.

M. BURNS: Remarquez que, si le ministre me dit que ce n'est pas important comme service, ce qui est fourni aux organismes fédéraux, je n'insisterai pas outre mesure sur la question. Mais il semble que, vu de l'extérieur, il y a quand même une certaine importance à accorder à ces services, du moins dans la région de Montréal, pour ce que je connais.

M. CHOQUETTE: La cour fédérale a ses salles d'audience ainsi que ses bureaux de juges dans le palais de justice de Montréal. Il y a les agents de liaison de la GRC.

M. BURNS: Il y a souvent aussi la commission d'appel d'impôt qui siège. Je ne sais pas si ça se fait encore, mais elle siégeait à l'occasion dans les locaux du palais de justice à Montréal.

M. CHOQUETTE: Probablement. Je vais examiner le problème.

M. BURNS: En cherchant, je pense qu'on pourrait en trouver plusieurs.

M. CHOQUETTE: Je vais voir s'il y a lieu de pousser plus loin auprès des autorités fédérales. Je compte avoir un règlement assez avantageux au plan de l'aide juridique. Vous devrez tenir ça en considération.

M. BURNS: Cela pourra peut-être vous aider dans vos négociations sur l'aide juridique.

M. CHOQUETTE: Est-ce que vous avez des relations au gouvernement fédéral?

M. BURNS: Non, sauf que j'ai déjà négocié dans ma vie.

M. CHOQUETTE: Voulez-vous vous joindre à nous? Vous êtes le bienvenu.

M. BURNS: Vous savez, pour ce que ça pourrait vous aider d'une part et pour ce que ça pourrait me nuire, à moi, d'autre part!

M. CHOQUETTE: Peut-être qu'avec un léger changement d'optique sur certains problèmes, ça pourrait s'arranger.

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'on s'en va dans...

M. PAUL: Restons dans le côté pratique.

M. CHOQUETTE: Le député de Maskinongé aussi, lui ça requiert encore moins de changements.

M. BURNS: Est-ce que le ministre m'invite à la prochaine séance du cabinet?

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas moi qui fais les invitations.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 14. Adopté.

Etablissements de détention

M. LE PRESIDENT: Article 10: Direction générale des établissements de détention et du service de la probation. Sous-article 1 : Etablissements de détention. Catégorie 1 : Traitements, salaires et allocations.

Prison d'Orsainville

M. DROLET: Est-ce à cet article que je pourrais poser une question au solliciteur général concernant la prison d'Orsainville? Lorsque nous avions discuté des crédits, l'année passée, il y avait des sujets d'actualité. Lorsqu'on parlait d'Orsainville, c'était des évasions en grande quantité. Il semble cette année...

M. CHOQUETTE: Que c'est plus dur de sortir.

M. PAUL: Même que ça devient un hôtel de choix!

M. DROLET: Je demanderais au Solliciteur général, pour remédier à cette situation...

M. CHOQUETTE: Il n'y a pas que des va-nu-pieds à Orsainville, vous savez. J'espère que vous l'appréciez.

M. DROLET: ... qu'est-ce qui a été fait? Est-ce qu'il s'agissait d'une erreur dans la construction ou quoi?

M. FOURNIER : Ce n'était pas des erreurs dans la construction; c'était plutôt la finition totale de l'édifice.

Le mur extérieur n'avait pas été complété, de sorte qu'en le complétant et en mettant d'autres mécanismes de protection, nous avons pu empêcher les évasions. En fait, les deux dernières ont eu lieu le 12 août, de sorte qu'il y a au-delà de 9 mois sans évasion à Orsainville. Il y a eu une tentative mais les gens ne se sont pas rendus à l'extérieur du mur.

Ce qui restait à faire, c'est qu'il y avait un mur de pierre autour de l'édifice auquel était greffée une clôture de broche qui n'avait qu'une hauteur d'environ 6 ou 7 pieds, de sorte que les murs n'étaient plus sécuritaires à cet endroit.

Nous avons fait compléter le mur en question. Présentement il semble que la section à sécurité maximum offre cette sécurité. Il s'agit nécessairement de la section où sont détenus les prévenus. Les détenus, c'est-à-dire ceux qui sont déjà sous condamnation, ont un régime et des sections un peu plus faciles puisque ce n'est pas dans cette catégorie de gens que l'on retrouve les évasions.

Le problème des évasions s'est compliqué aussi à Orsainville, du fait que certaines personnes faisaient venir des personnes déjà condamnées au pénitencier. Et l'on a constaté que parmi les évasions qu'il y a eu, il s'agissait de personnes, déjà sous condamnation à vie ou autrement à des pénitenciers, qui étaient de passage à Orsainville pour fins de témoignage ou pour fins d'autres causes devant les tribunaux locaux. Et il est arrivé en certaines circonstances que ces gens ont été gardés à Orsainville des délais plus longs que nécessaire, de sorte que nous avons pris cette chose en considération pour empêcher que des gens condamnés au pénitencier ne viennent séjourner pour un, deux mois ou des périodes longues à Orsainville.

Des évasions en 1971, il n'y a qu'une seule personne qui est encore au large, un nommé de Varennes.

M. DROLET: Combien y en avait-il eu en 1971?

M. FOURNIER: Il y a eu 5 épisodes distincts, mais à chaque fois il y a eu plusieurs personnes, soit le 13 janvier: 5; le 8 mars: 1; le 17 avril: l;le 27 juin: 5 et le 12 août: 2.

M. DROLET: Sur les 14 il n'y en a qu'un qui n'a pas été retrouvé.

M. FOURNIER: Un nommé de Varennes qui s'est évadé le 27 juin.

M. DROLET: Si j'ai bien compris le Solliciteur général, au début, il a dit que depuis août 1971 il n'y a pas eu d'évasion?

M. FOURNIER: Pas à Orsainville.

M. DROLET: Combien y a-t-il de détenus à Orsainville présentement?

M. FOURNIER: Le chiffre pour le 30 mai: 119 détenus et 100 prévenus, ce qui fait 219.

M. PAUL: Est-ce que le ministre se rappelle du rapport préparé par l'ingénieur Ferland? Dans les conclusions de ce rapport, on pouvait lire que la construction était d'excellente qualité et qu'il restait certaines modifications mineures pour compléter la sécurité. Et je suis heureux d'apprendre que le Solliciteur général a pu s'entendre avec le ministère des Travaux publics pour compléter des travaux pour assurer la protection des détenus et des prévenus.

M. FOURNIER: Les travaux qui ont été complétés n'étaient pas exactement ceux prévus dans le rapport, mais une partie de ces travaux étaient dans le rapport.

M. LE PRESIDENT: Le député de Notre-Dame-de-Grâces.

M. TETLEY: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: L'an dernier, lors de la discussion des crédits, j'avais posé un très grand nombre de questions sur les établissements de détention, sur les services de probation, sur la formation des gardiens, sur la conception des prisons, sur la création d'une unité psychiatrique ou d'assistance psychologique dans les prisons. Malheureusement le Solliciteur général n'était pas là et le directeur des services de détention n'était pas là. Je suis convaincu que durant l'année ils ont eu le temps de prendre connaissance de mes questions et probablement qu'ils ont dû préparer des réponses élaborées et très au point. J'aimerais beaucoup entendre la réponse du Solliciteur général aux questions que je posais l'an dernier.

M. FOURNIER: Sans répondre directement et par ordre aux questions posées, je dois dire qu'au point de vue des maisons de détention — puisque l'autre article sera la probation — les activités et les démarches ont été multiples.

En premier lieu, il fallait enlever la responsabilité totale qui retombait continuellement sur le directeur général des établissements de détention et le service de la probation.

Nous avons consolidé le service de détention en faisant assumer à M. Labelle des responsabilités additionnelles dans ce service, de sorte qu'il n'a pas à se rapporter continuellement au directeur général, qui est déjà surchargé d'autres problèmes. La même chose s'est appliquée dans le service de probation, où le directeur de la probation, M. Ouellet, a été imbu de plus de pouvoirs relativement à ses activités, de sorte que le directeur général a plus de temps pour s'occuper de l'application des articles 19 et 20 et pour s'occuper de la planification générale du service, de même que des services de recherche absolument nécessaires en vue d'améliorer la situation.

Pour ce qui est des établissements eux-mêmes, nous avons tenté de voir de quelle manière nous pourrions répartir la population institutionnelle de façon à accomplir ce qui nous était imposé. Une chose excessivement importante et qui est en train de se réaliser, c'est la prison de Waterloo, qui est à sécurité minimale, mais du fait que nous n'avons pas encore tous les cadres voulus pour cette institution, nous ne pouvons y envoyer la majorité des détenus que nous voudrions voir à cet endroit.

Il faut bien comprendre que les détenus dans nos prisons sont des gens condamnés à moins de deux ans et qu'en fait, sur la quantité de condamnés, il y en a 70 p.c. qui le sont à moins d'un mois, de sorte que, dans cette optique, nous devons reviser un peu la situation des établissements pénitentiaires, puisqu'il n'est pas normal pour des personnes condamnées à de faibles sentences de vouloir prendre la clé des champs.

Ceux qui sont condamnés à moins d'un mois ne sont certainement pas justifiés de vouloir s'évader, de sorte qu'il est possible d'envisager des institutions de détention de genre peut-être un peu différent de ce qui existe dans certains endroits à cause de la vétusté des immeubles, comme par exemple celui de Sherbrooke, que j'ai visité, où s'il s'agit d'une institution extrêmement ancienne. Il y a aussi Trois-Rivières et Saint-Jérôme qui sont dans ce cas. Je comprends, mais dans cette optique, est-ce que...

M. PAUL: Ils n'ont pas de bons députés.

M. BACON: C'est parce qu'il y en a un qui a promis une nouvelle prison pendant 40 ans.

M. FOURNIER: Mais est-ce qu'il est nécessaire de construire des immeubles, dans l'optique des condamnations de moins d'un mois, les 70 p.c? Est-ce qu'il est nécessaire de construire des immeubles à sécurité maximale dans toutes les régions de la province?

Je suis présentement à faire une enquête, pour savoir la relation des détenus avec leur famille et leurs proches: correspondance, visites, etc. Si cette enquête démontre que les visites sont presque inexistantes, il y aura possibilité de ne pas avoir des prisons dans tous les villages. Nous pourrons avoir des prisons à certains endroits peut-être plus éloignés en payant peut-être le transport des parents qui veulent aller visiter les détenus, mais cette enquête est encore en marche et nous n'avons pas encore les statistiques voulues pour arriver à une solution à ce problème.

M. PAUL: M. le Président, l'an dernier, le Solliciteur général est allé en Europe. Il a visité différentes institutions pénitentiaires de la France, de l'Angleterre, de l'Italie.

M. FOURNIER :De la France seulement.

M. PAUL: En France seulement. Je me rappelle une déclaration assez prometteuse du ministre à son retour de voyage.

Il voulait changer tout le système qui existait au Québec, de temps immémorial ou du moins près de 100 ans.

Est-ce que le Solliciteur général, mon bon ami, pourrait nous dire, dans quelle voie il a actualisé et jusqu'à quel point il a matérialisé les grandes déclarations pieuses qu'il faisait au retour de son voyage?

M. FOURNIER: M. le Président, relativement à la visite que j'ai faite en France à l'occasion d'un congrès de criminologie qui se tenait à Versailles, j'ai eu l'occasion de visiter la prison de Fleury Miragis. C'est la prison la plus moderne mais une institution comme on le sait presque robot. En effet on enligne le détenu à un bout du corridor et étant donné qu'il ne peut pas sortir, il doit sortir à l'autre bout. Il est seul et c'est mécanique. Ce n'est pas le genre de prison qui m'a impressionné.

Ce qui m'avait impressionné c'était la façon dont on appliquait la détention. A l'intérieur de cette prison, des compagnies privées avaient des établissements auxquels travaillaient des détenus. Il s'agissait de détenus pour de courtes peines... Je dois dire que jusqu'ici on s'appliquait ou on s'applique à enseigner le français, l'anglais et les mathématiques mais que ce n'est pas en demande.

M. PAUL: Voici, il y a un avocat à Montréal qui y est allé la semaine dernière et qui a fait de la menuiserie toute la semaine.

M. FOURNIER: Il peut y avoir un peu de menuiserie. De sorte qu'à la suite de cette visite, nous avons constaté des...

UNE VOIX: Sa carte de compétence.

M. PAUL: On me dit que le ministère du Travail doit le poursuivre pour ça.

M. FOURNIER: ... de sorte que l'établissement d'industries à l'intérieur est quelque chose à laquelle nous pouvons penser. Maintenant, l'objectif plus facile, je crois, relativement à la réhabilitation à l'intérieur de la prison, est le suivant. La conclusion à laquelle je suis arrivé est qu'il est possible de fournir certaines activités aux détenus, en autant qu'il s'agisse de cours donnés pendant de courtes périodes. J'ai fait faire une étude pour savoir quelles étaient les matières qui pouvaient être enseignées dans une période de trois ou quatre mois. J'ai une liste sur laquelle nous travaillons de façon à tenter d'établir ces enseignements dans les maisons de détention.

Mais il y a plus. Il y a le système par lequel l'on enseigne certaines techniques mais graduellement. On va enseigner, par exemple la mécanique d'automobile, pendant deux semaines, on enseignera par exemple, le "muffler" et au bout de deux semaines la personne devient experte dans cette ligne et peut se trouver un travail dans ce domaine.

Nous sectionnons toute l'analyse ou plutôt le travail d'étude dans un métier quelconque plutôt que d'enseigner l'ensemble. Sur ceci les recherches se font. Evidemment le ministère de l'Education exige certaines qualifications, compétences avant de donner les diplômes, mais il y a certaines choses qui peuvent être enseignées par partie. De cette façon nous croyons pouvoir arriver à intéresser les gens qui sont détenus, qui sont là pour un mois. On peut alors leur dire que nous pouvons leur offrir tel travail.

Ceci à mon sens est une des solutions possibles. Nous avons aussi analysé ce qui se fait, le problème du "re entry", à la réentrée dans la vie normale. Cela se complique un peu puisque s'agit-il d'un domaine greffé à notre ministère ou au service de détention puisqu'il s'agit du pas suivant, le lendemain du départ de l'individu de l'institution. Il n'est plus sous probation ni rien. Je crois que même dans ce domaine, nous avons tenté de faire des approches auprès de bureaux de travail, de façon à voir s'il n'y a pas possibilité de trouver une solution à ce problème, pour que la personne qui sort puisse trouver son emploi.

Nous avons aussi certaines communications. Nous tentons de faire le relevé total des organismes qui s'occupent de réhabilitation. Par exemple, le Gentilhomme Rembourreur a reçu de l'aide gouvernementale, l'an dernier, de façon à permettre la continuité de ce service, ici, à Québec. Il existe des services un peu semblables à Chicoutimi. Il y en a un à Hull, qui fait aussi un service de rembourrage.

M. PAUL: C'est après leur libération, cela.

M. FOURNIER: C'est après leur libération, bien que nous participions de la façon suivante. Les directeurs de prisons sont autorisés, après analyse des cas, à permettre à un individu de sortir, durant sa dernière semaine, pour se rendre à cet endroit, travailler et commencer à se replacer pour pouvoir reprendre la vie normale. De cette façon nous pouvons participer et diriger ces gens vers une nouvelle vie, à leur sortie de l'établissement de détention.

M. LAURIN: M. le Président, les réponses du Solliciteur général sont très intéressantes, mais elles me paraissent quand même parcellaires et partielles aussi. Elles me paraissent équivaloir à ce que j'appelle, en médecine, un traitement symptômatique, c'est-à-dire qui s'applique aux symptômes mais non pas aux causes profondes qui sont à l'origine des maladies, en l'occurence les maladies sociales.

Le Solliciteur général n'est pas sans ignorer que notre système pénitentiaire fait l'objet de critiques de plus en plus sévères de la part de tous les spécialistes en sciences humaines et même de la part d'officiers très haut placés, dans les ministères de la Justice des différents pays et du nôtre en particulier.

Je ne prends pour exemple que la déclaration que faisait l'an dernier notre propre directeur des services des établissements pénitentiaires à un congrès de criminologues, où il se disait d'accord avec un M. Maloney, soit que nos prisons constituaient un échec, en ce sens que ce sont des écoles de récidivistes. M. Maloney avait affirmé, en effet, que 80 p.c. des prisonniers étaient des récidivistes. J'ai une autre

statistique, ici. Dans les pénitenciers fédéraux, 3,446 détenus, en 1970, sur 4,450 détenus, que contiennent toutes les prisons fédérales, étaient des récidivistes.

Un autre congrès organisé par le Centre international de criminologie a eu lieu à Montréal récemment. Il réunissait, justement, des ministres de la Justice, des hauts fonctionnaires autant que des spécialistes des sciences humaines, qui affirmaient à l'unanimité que l'emprisonnement, comme formule punitive, constituait une véritable faillite. Des analyses de criminologues également; ceux-ci se demandent pourquoi le taux de récidive atteint encore 20 p.c, même en période de phases de libération conditionnelle. Un article extrêmement intéressant, d'ailleurs, par Jean Lajoie, crimino-logue, paru dans le Devoir du 12 octobre 1971, que je soumets à l'attention du ministre et du directeur des prisons.

Si tout le monde s'entend, M. le ministre, pour affirmer que notre système pénitentiaire est actuellement un échec; si le ministre fédéral, M. Goyer, est d'accord lui-même pour déclarer que la révision du système pénitentiaire doit faire l'objet d'une conférence fédérale-provinciale, étant donné que ce système pénitentiaire a constitué un échec pour tout le pays et comme il s'agit d'un problème de juridictions conjointes, il doit y avoir, quand même, une articulation entre les deux ministères; si l'on prévoit une conférence fédérale-provinciale pour en discuter tous les aspects; si le rapport Prévost, qui a fait une critique quand même très rigoureuse et exhaustive de notre système, en arrive à la conclusion qu'il faut réformer, de fond en comble, notre philosophie, notre conception, notre optique; est-ce que le ministre peut nous dire si des mesures ont été prises à la suite de toutes ces critiques unanimes, de ce consensus, pour amener enfin une véritable humanisation, une véritable libéralisation de notre système de détention, afin qu'il corresponde non pas seulement aux nouvelles données des sciences humaines mais également à notre sens de la démocratie et à notre sens de la rentabilité du citoyen qui peut avoir fait un échec, dans sa vie sociale, mais qu'il importe de réinsérer le plus tôt possible dans le circuit normal de la société?

Encore une fois, je pose la question: Je ne pense pas que le traitement symptomatique soit suffisant ici. Il ne faut pas attendre qu'un détenu sorte de prison, qu'il soit mis en libération conditionnelle, qu'on lui donne un agent de probation. Mais je pense que cette philosophie doit nous amener à commencer nos efforts de réhabilitation dès le moment où quelqu'un entre dans une prison, que ce soit à titre de prévenu ou que ce soit à titre de détenu. Je veux bien être d'accord avec vous que 70 p.c. des clients de nos établissements y sont pour des peines de moins d'un mois, mais si vous ajoutez à ces détenus tous ceux qui y sont à titre de prévenus et qui, parfois, atten- dent leur procès durant très longtemps, durant des mois même parfois, est-ce que la population pénitentiaire ne s'en trouve pas considérablement augmentée? Est-ce que ces prévenus, justement parce qu'ils ne sont pas encore condamnés, ne sont pas justiciables — malgré toutes les précautions que je connais, qu'il ne faut pas influencer, en quoi que ce soit, le droit de défense ou l'admission de culpabilité des prévenus — est-ce que nous ne pouvons pas les aider au point de vue social et au point de vue psychologique à mieux comprendre pourquoi ils se trouvent dans cette situation délicate et ne pouvons pas leur offrir l'aide qu'il faut?

A mon avis, encore une fois, il faut prendre le taureau par les cornes, commencer au tout début et envisager une refonte de notre système pénitencier qui ne comporte pas que les éléments assez bien connus de probation, mais également d'autres éléments qui permettraient d'offrir aux prévenus, comme aux détenus, immédiatement, ce dont ils auraient besoin. Ceci implique beaucoup de choses. Cela peut comporter, par exemple, une architecture différente pour les prisons. Cela peut comporter un système de classification beaucoup plus adapté aux conditions particulières des détenus ou des prévenus. Cela peut comporter une formation particulière, et j'insiste là-dessus, de tout le personnel et, en particulier, des gardiens qui s'occupent, 24 heures par jour, des détenus. Ils devraient avoir une scolarité suffisante, une formation suffisante dans les sciences humaines. Cela peut comporter aussi une philosophie administrative de la prison qui est axée, peut-être qu'il faut la garder, sur la protection de la société. Cette conception doit être tempérée par une autre philosophie qui, elle, est axée sur la défense sociale, sur la réinsertion, sur la réhabilitation du détenu. J'aimerais savoir ce qui a été fait dans ce domaine au ministère de la Justice dans l'année qui s'est écoulée.

M. FOURNIER: Merci au député de Bourget des remarques qu'il a faites. Il a parlé de l'ensemble du sujet, qu'il faut nécessairement toucher et que nous tentons d'approfondir, de façon à apporter les éléments qu'il mentionne.

Cependant, il faut, dans tout ce problème, distinguer, entre les deux groupes de personnes qui sont incarcérées, les prévenus et les détenus. Pour ce qui est des prévenus, il est presque impossible de s'attarder à tenter de faire une réhabilitation puisque ces gens ne sont pas encore déclarés coupables...

M. LAURIN: C'est par assistance plutôt que par réhabilitation.

M. FOURNIER: ... de sorte qu'il faut nécessairement séparer les deux. Pour ce qui est des détenus, c'est sur ceux-là que nous nous attardons puisqu'ils ont été déclarés coupables d'une infraction ou d'un acte criminel; ce sont ceux-là qui nécessitent les soins de la société en vue de

les retourner dans le bon chemin puisque les autres, s'ils sont acquittés, ne sont pas coupables d'infractions ou d'offenses.

Au point de vue architecture, il y a beaucoup à faire. Comme on le sait, autrefois, les donjons ne permettaient pas l'entrée de la lumière, sauf d'une certaine lumière, par des "skylight", comme on les appelle. Il y a eu des modifications qui ont été faites dans l'architecture de certaines prisons, bien que certaines sont encore pas mal antiques au Québec. Mais nous pensons que les structures architecturales devraient être modifiées. Si le député visitait la prison de Waterloo, il constaterait...

M. LAURIN: Oui, je l'ai visitée.

M. FOURNIER: ... que c'est un endroit où, il me semble, l'on devrait avoir une grande partie des détenus plutôt que de les avoir dans d'autres endroits.

Pour ce qui est des gens, lorsqu'ils sont à l'intérieur de l'endroit de détention, nous analysons la possibilité — ceci, évidemment, présente peut-être un conflit d'autorité — d'avoir sous le directeur de la prison, en quelque sorte, de façon parallèle, une personne qui s'occuperait particulièrement des détenus, non pas pour fins de gardiennage, mais pour fins de réhabilitation. Ceci est à l'analyse. Il est assez difficile de trouver un directeur de prison qui cumulerait les qualifications et qui pourrait recevoir la confiance des individus incarcérés.

Tout ce domaine a connu un commencement au Québec et je m'en réjouis, jusqu'à un certain point. Nous avons une atmosphère, dans nos prisons, qui n'est pas celle qui existe dans d'autres provinces ou dans d'autres pays. Si vous avez constaté, vous avez vu qu'en Ontario, ils ont eu un "riot" ainsi que dans tous les états des Etats-Unis. Pour ce faire, j'ai réuni, à un moment donné, les directeurs des 40 prisons de façon à pouvoir discuter avec eux et tenter d'établir un certain climat dans ces endroits et de tenter d'établir aussi que ces gens ne sont là que de passage et qu'ils doivent retourner à un certain endroit, dans la société. En conséquence, il ne faut pas couper totalement les activités qu'ils avaient dans la vie ordinaire. C'est la direction vers laquelle nous nous en allons. Je crois...

M. LAURIN: Cette réforme, M. le Ministre, est-ce que vous avez sollicité...

M. FOURNIER: Un instant.

M. LAURIN: Ah bon! Excusez-moi.

M. FOURNIER: Nous nous sommes servis, en plus, de l'application des articles 19 et 20. Par ces articles, le directeur des établissements de détention a plein pouvoir pour accorder, dans certaines circonstances, certaines libérations conditionnelles ou autres. Le ministre de la Justice a donné certains critères d'application relativement à cette loi. Il y a aussi...

M. PAUL: C'est seulement pour les détenus en vertu d'infractions pénales.

M. FOURNIER: Oui. Mais...

M. CHOQUETTE: Il s'agit de peines de moins de deux ans.

M. PAUL: Moins de deux, oui.

M. LE PRESIDENT: Je ne voudrais pas que nous nous lancions trop dans la discussion de ces articles 19 et 20. Cela relève de la probation qui est le prochain article.

M. FOURNIER: Bien, je crois que nous avons pas mal touché...

M. CHOQUETTE: C'est tout ensemble. C'est une discussion générale sur le problème. Vous ne pouvez pas scinder ce problème en sections.

M. FOURNIER: J'ajouterais...

M. LE PRESIDENT: Vous les étudiez tous les deux ensemble.

M. CHOQUETTE: Bien oui.

M. BURNS: Cela va sauver énormément de temps.

UNE VOIX: Exactement.

M. FOURNIER: ... ceci. En plus des articles 19 et 20, en 1971, c'est-à-dire de novembre 1970 à novembre 1971, il y a eu 1,759 rapports présententiels, des rapports donnés aux juges de façon à ce qu'ils puissent donner la sentence la plus appropriée. En plus, il y a eu, durant la même période, des probations accordées à 2,349 personnes. Lorsqu'on mentionne que le système de détention n'est peut-être pas tout à fait approprié, il faut se rendre compte que présentement moins de personnes sont envoyées dans ces endroits. Enfin, les statistiques nous donnaient une variation de 1,700 à 2,000 personnes à la fin de chaque mois. Présentement, comme hier, il y en avait 1,270 dans tous les établissements de la province.

M. LAURIN: Dans cette réforme, M. le Président, est-ce que vous avez demandé l'aide du ministère des Affaires sociales? Est-ce que des groupes de travail conjoints ont été formés?

Est-ce que ces divers problèmes de conception, d'orientation, ont été étudiés de concert avec un ministère qui est destiné à se préoccuper, bien sûr, d'une façon impérative, de ces problèmes humains, de ces problèmes de réinsertion sociale.

M. FOURNIER: Je dois dire qu'il y a certainement des contacts réguliers avec le ministère des Affaires sociales, plus encore présentement. Une personne qui est prêtée par le ministère des Affaires sociales, au service du Solliciteur général, ceci depuis environ trois ou quatre mois, qui fait certaines études en vue de conseiller, dans l'application des différentes formules de probation, de sorte que les liens sont extrêmement rapprochés. De plus, tel que mentionné hier, le service de probation des jeunes délinquants est sur le point d'être transmis au ministère de la Justice.

M. LAURIN: Est-ce que, dans vos 40 prisons dont vous parliez tout à l'heure, vous faites un effort pour engager ou faire engager des spécialistes en sciences humaines, que ce soient des travailleurs sociaux, des psychologues, qui peuvent être justement mis au service soit des prévenus, soit des détenus, pour commencer au plus tôt possible ce travail de réhabilitation ou d'aide psychologique?

M. FOURNIER: Quant au personnel régulier des institutions, je dois dire que seules les grandes institutions bénéficient de services du genre. Quant aux petites institutions, il n'y en a pas. Présentement, il y en a 32 en opération, dont 30 pour hommes et 2 pour femmes. Mais les petites institutions ne bénéficient pas de ce service.

M. LAURIN: Ne pourrait-il pas, à la faveur de la loi 65, s'instaurer des rapports entre les centres locaux de services communautaires, par exemple, ou les hôpitaux régionaux qui comportent des services de psychiatrie et les prisons, des rapports organiques entre ces deux types d'établissements, afin qu'un concertation effective puisse être organisée au service des prévenus aussi bien que des détenus? Est-ce une suggestion que vous avez examinée?

M. FOURNIER: Je vous remercie de la suggestion. Je ne sais pas si le directeur a déjà... On m'informe que des tentatives se feront et qu'il y aura, dans chacune des régions, pour fins de pénitenciers, des travailleurs sociaux. Quant au problème des malades mentaux, le problème de l'aile D a été définitivement réglé récemment.

M. LAURIN: Il a été réglé. De quelle façon, M. le ministre?

M. FOURNIER: Le problème de l'aile D est un problème qui a duré assez longtemps. On sait qu'à la suite d'examens psychiatriques, certaines personnes étaient déclarées malades mentaux. A la suite de cette déclaration, soit que le ministre des Affaires sociales ou de la Santé émettait une ordonnance pour qu'ils soient admis dans un établissement privé...

M. LAURIN: A Pinel.

M. FOURNIER: ... comme Saint-Jean-de-Dieu. En plus de cela, dans certains cas, le lieutenant-gouverneur émettait des mandats de transport, soit à Douglas ou Saint-Jean-de-Dieu ou autres endroits. Mais il nous était impossible, malgré les mandats du lieutenant-gouverneur, malgré les ordonnances du ministre de la Santé, d'accomplir ce transfert puisque les institutions prétendaient soit qu'elles ne pouvaient recevoir M. Untel parce qu'elles n'étaient pas le genre d'institutions qui pouvaient les recevoir.

Mais ce problème est maintenant résolu. Il n'y a plus à...

M. LAURIN: Est-il résolu parce que Pinel a commencé à fonctionner et qu'on les transfère immédiatement à Pinel?

M. FOURNIER: Pinel a commencé à fonctionner.

M. LAURIN: Je soumets quand même respectueusement au ministre que ceci peut s'appliquer pour des détenus qui ont une maladie psychiatrique déclarée. C'est très important et je m'en réjouis. Mais il y a quand même nécessité, selon plusieurs spécialistes — je suis d'accord avec eux — d'instituer quand même, surtout dans les grandes prisons, un service d'assistance psychologique qui, en plus de prévenir la maladie mentale chez les détenus, peut, à un moment donné, aider certains détenus à passer une phase difficile de leur incarcération et aussi préparer la sortie, leur donner des conseils très judicieux en ce qui concerne leur insertion dans la société.

J'aimerais demander au ministre s'il existe de tels services dans nos prisons, et dans combien de prisons?

M. FOURNIER: Le service est organisé à Québec et à Montréal de la façon dont parle le député.

M. LAURIN: Est-ce que vous avez l'intention d'étendre ce service-là dans les autres prisons? Je remarquais, dans le dernier rapport de l'ombudsman, qu'il y avait encore...

M. FOURNIER : Absolument, ça devrait être étendu dans d'autres...

M. LAURIN: ... pas mal de plaintes faites par des détenus ou des prévenus quant au manque d'assistance et psychologique et psychiatrique et l'ombudsman leur donnait raison. Il demandait lui-même au minsitre de la Justice de penser le plus tôt possible à effectuer l'effort nécessaire de façon à satisfaire aux voeux et aux demandes légitimes de ces prévenus, de ces détenus. Est-ce que la situation a été corrigée à la suite de ce rapport de l'ombudsman?

M. FOURNIER: Les négociations sont en cours présentement, entre le service de la

détention et le ministère des Affaires sociales, de façon à régler de façon finale les cas psychiatriques et de continuer les démarches dans le but de régler les autres cas.

M. LAURIN : Mais est-ce que vous pensez aussi à créer des unités, mêmes petites, à l'intérieur des prisons, pour voir au dépistage ou à l'aide immédiate à ...

M. FOURNIER : Sur les établissements que nous avons, les 32, je dois dire ceci: à l'exception de Québec, Montréal Parthenais et Bordeaux, les autres prisons sont des prisons qui n'ont presque pas de clients, de sorte qu'il serait impossible, à l'intérieur de ces prisons-là, même les prisons régionales les plus grosses, c'est dans les 30, 40 et...

M. LAURIN: Quand le nombre de clients fait défaut — ce dont je me réjouis — c'est la raison pour laquelle je préconisais une concertation organisée avec les centres locaux de santé situés dans la même région.

M. FOURNIER : Je dois dire que nous avons fait certains pas en avant dans ce domaine puisque autrefois, toutes les personnes qui avaient besoin de soins psychiatriques étaient envoyées directement, soit à Bordeaux ou à Pinel, et que, maintenant, des ententes sont faites avec certains hôpitaux locaux, pour ces mêmes choses, de sorte qu'il n'y a pas aujourd'hui, le déplacement qui était rendu nécessaire.

M. LAURIN: En général, M. le ministre, je vous soumets respectueusement qu'il y aurait avantage à ce que le directeur de n'importe quel établissement de détention dans une région ait des contacts assez fréquents avec les responsables de l'assistance sociale, de la santé mentale et même de la santé physique, de la même région. Je pense que cela serait peut-être le premier dialogue à instaurer, que cela se répercuterait immédiatement sur la philosophie de l'établissement et que cela pourrait inaugurer, susciter un certain nombre de mesures hautement nécessaires dans ces établissements-là.

Une dernière question générale sur ce sujet. Etant donné que l'accent doit être mis de plus en plus sur la formation du personnel de garde, et étant donné que maintenant nous avons une institution à Montréal, qui serait capable, à mon avis en tout cas, de former ce personnel avec l'aide et l'incitation du ministère, aussi bien de la Justice que des Affaires sociales, est-ce que des mesures ont été prises, des mesures effectives, sérieuses ont été prises pour voir à ce que ce personnel de garde soit formé?

M. FOURNIER: Oui. Quant au personnel de garde, nous recevons des demandes de personnes qui suivent déjà certains cours au CEGEP d'Ahuntsic où des cours sont donnés et, de plus, il y a une école de surveillance pénitentiaire, mais je dois dire qu'avec la quantité de gardiens que nous avons, il est difficile de donner des cours aux nouveaux et de faire le recyclage des anciens...

M. LAURIN: Est-ce que le recyclage fait aussi l'objet de vos préoccupations?

M. FOURNIER: Absolument. Actuellement, c'est le recyclage qui se fait à l'école de surveillance pénitentiaire, et, quant au reste, le recrutement se fait beaucoup par le CEGEP d'Ahuntsic.

M. LAURIN: Est-ce que ces cours de recyclage se font selon un programme qui est fait par votre ministère ou par le ministère de l'Education ou par le ministère des Affaires sociales?

M. FOURNIER : C'est par notre ministère seulement.

M. LAURIN: Est-ce que c'est un cours assez long?

M. FOURNIER : Un cours de sept semaines.

M. LAURIN: Est-ce que vous pourriez nous communiquer le programme de ces cours-là?

M. FOURNIER: Oui, ça me fait plaisir.

M. LAURIN : En ce qui concerne le nouveau personnel, est-ce que vous avez élevé vos normes quant à la scolarité?

Est-ce que vous vous préoccupez de faire un examen un peu plus fouillé de la personnalité des gens appelés à devenir des gardiens?

M. FOURNIER: Nous avions augmenté les normes, mais nous avons eu une certaine difficulté de recrutement. Nous avons eu à tenir plusieurs concours à certains moments pour remplir les fonctions.

M. LAURIN: Pourtant il y a beaucoup de chômage.

M. FOURNIER: La scolarité a été augmentée de la 9ème à la lOème année, pour le moment. Nous avons encore certaines difficultés.

M. LAURIN: Ce n'est pas encore beaucoup, M. le ministre.

M. FOURNIER: Je comprends mais dans ce recrutement — surtout le fait que nous avons 40 établissements — il est difficile, dans certaines régions rurales de recruter des gens. Si nous les recrutons à Montréal, ils ne veulent pas se rendre dans les régions rurales.

M. LAURIN: De quelle façon peut-on com-

parer, par exemple, avec les critères que l'école de police de Nicolet a adoptés? Et de quelle façon peut-on comparer avec les critères pour l'engagement de gardiens appelés à faire le même travail, dans les autres provinces et au niveau fédéral? Selon les rapports que j'ai lus, il y a un écart assez marqué entre les critères que vous utilisez au Québec et ceux que les établissements fédéraux utilisent?

M. FOURNIER: La chose se reflète nécessairement dans les salaires aussi, les échelles de salaires qui sont payées à nos gardiens, agents de la paix...

M. LAURIN: C'est justement.

M. FOURNIER: ... et ceux de la police où la marge est très grande.

M. LAURIN: Est-ce que la reconsidération des salaires, si c'est ça l'obstacle, ne devrait pas être faite également?

M. FOURNIER: Ceci a fait l'objet d'analyses, par la Fonction publique, assez détaillées. Dans les négociations, ils ont fait une répartition. Les normes applicables ici ont été établies de la même façon que pour l'ensemble de la Fonction publique.

M. LAURIN: Est-ce que vous ayez l'intention de faire des pressions énergiques auprès du ministère de la Fonction publique, pour qu'il rehausse ses normes salariales, afin que vous puissiez appliquer vos normes pédagogiques?

M. FOURNIER: Lors des difficultés récentes, nous avons nécessairement analysé à fond cette situation, même tenté vis-à-vis de la Fonction publique de faire admettre certains critères, certains principes que nous avions mais qu'eux ne semblent pas avoir.

M. PAUL: Est-ce que le ministre est au courant que demain justement, la Commission de la Fonction publique, avant de débuter l'étude des crédits, doit entendre M. Pion, le président du syndicat des agents de la paix, tel qu'il avait été convenu avec le ministre de la Fonction publique à l'occasion de l'étude des mémoires qui ont été présentés, sur le projet de loi 19.

M. FOURNIER: J'ai entendu l'annonce aujourd'hui.

M. LAURIN: Quelle est la différence, M. le ministre, actuellement, entre les salaires au niveau fédéral et au niveau québécois pour la même catégorie de postes? C'est une question générale quand même. On ne parle jamais de cela, M. le Président. Ce problème, c'est la première année qu'on en parle. J'y tiens.

M. FOURNIER: Le salaire de base est le même mais en haut de l'échelle il y a 15 p.c. de différence entre les deux. C'est une des raisons évidemment des remarques et des demandes des gardiens de la paix, à l'occasion, puisque ceux qui travaillaient à Saint-Vincent-de-Paul recevaient un traitement de 15 p.c. plus élevé.

M. LAURIN: Etes-vous d'accord, M. le ministre, avec le fait que les critères pour l'engagement, le recrutement des gardiens de la paix, doivent être aussi élevés que pour l'engagement des policiers, étant donné le rôle très important que jouent ces gardiens auprès des détenus, dans une optique de réhabilitation?

M. FOURNIER: Ce n'est pas tout à fait le même travail que ces personnes sont appelées à accomplir. Même si l'on espère obtenir, à l'intérieur des établissements, du personnel aussi qualifié que possible, je crois qu'il faut penser plutôt à sélectionner certaines personnes particulières dont le travail serait du travail au-delà de celui de gardien, pour accomplir les fonctions auxquelles pense le député de Bourget.

M. LAURIN: Est-ce que vous seriez d'accord, M. le ministre, avec cette proposition de principe présidant à l'organisation des prisons ou dans les maisons de détention, il devrait y avoir pour les détenus comme pour les prévenus trois phases: une période d'isolement, de retraite où le sujet rencontre justement ces spécialistes qui peuvent l'aider. Deuxièmement une période de resocialisation; le sujet vient en groupe et fonctionne en atelier, comme vous le disiez tout à l'heure. Troisièmement, une période de préparation à la sortie où le sujet peut quitter l'institution pour trouver un emploi et visiter sa famille?

M. FOURNIER: Ceci s'applique, en quelque sorte, à Waterloo, où l'individu arrive d'une prison de la région de Montréal, soit de Bordeaux ou d'ailleurs. Durant sa première semaine à Waterloo, il est sujet à discussion, enquête, etc, où on lui...

M. LAURIN: Evaluation.

M. FOURNIER: De plus, on lui fait reconnaître qu'il peut ouvrir la fenêtre et prendre la clé des champs, mais que ça ne serait pas sage ni dans son intérêt de le faire. Cette première période se fait à Waterloo. Quant à la seconde, il se fait du travail à l'intérieur de l'établissement. Par la suite...

M. LAURIN: Est-ce que vous avez l'intention d'instaurer ce système, qui existe à Waterloo, dans toutes les autres prisons?

M. FOURNIER: Waterloo, présentement, n'a pas le nombre de personnes qu'il devrait avoir. Nous solutionnerions une grande partie du problème si nous pouvions prendre les

détenus d'autres endroits et les amener à Waterloo où ils pourraient être sujets à tout ce système qui serait bon pour leur réadaptation.

M. LAURIN: Maintenant, M. le ministre, est-ce que vous avez fait des efforts aussi en ce qui concerne la révision du système de classification pour répondre par exemple à cet objection courante où un détenu dont c'est la première offense peut se trouver à côté d'un détenu dont c'est la quinzième ou la vingtième. Il peut y exister une contamination d'un détenu à l'autre, ce qui constitue une école du crime ou une école de récidives.

M. FOURNIER: Ce dont parle le député s'applique dans les grosses prisons. Mais dans les autres prisons, prenons comme exemple, une prison régionale comme celle de Hull où il y a présentement 23 détenus et 12 prévenus, il est assez difficile de les séparer. Les autres endroits, comme Rimouski, il y a cinq détenus, quatre prévenus.

M. LAURIN: Je sais que cela s'applique davantage aux grosses prisons.

M. FOURNIER: Ces chiffres-là sont... c'est simplement...

M. LAURIN: Cela serait déjà beaucoup.

M. FOURNIER: C'est pour cela qu'il faut penser dans l'optique des grosses prisons.

M. LAURIN : Ce serait déjà beaucoup si on l'applique dans les grosses prisons. Est-ce que le ministère entend donner suite à cette recommandation du rapport Prévost, tome 5, aux pages 175 et 186 où on recommande de confier toutes les prisons au service des établissements de détention et de ne plus en laisser aucune à l'administration de la Sûreté?

M. FOURNIER: Actuellement l'administration de la Sûreté garde les détenus seulement durant la nuit. Ils sont transférés aux prisons. Tous les établissements de détention sont maintenus par le service. En fait, la Sûreté est dégagée ou sera dégagée du transport des prisonniers. Ce n'est pas de son domaine. Le rapport Prévost recommandait justement d'enlever cette charge à la Sûreté.

M. LAURIN: M. le Président, le ministre de la Justice a déjà publié un livre blanc et nous en promet d'autres sur des sujets très importants. Est-ce que le ministre de la Justice et le Solliciteur général ont l'intention aussi de publier un livre blanc sur cette question très importante? Elle n'a jamais fait l'objet d'un livre blanc. Elle donnerait précisément l'occasion au ministère de préciser sa politique suite à tout ce qui en a été dit dans le rapport Prévost et dans tant d'autres congrès. Est-ce qu'il n'y aurait pas intérêt à ce que le ministre précise, à l'intention de la population, sa pensée, sa philosophie, son orientation sur un problème tellement important pour le progrès d'une société?

M. FOURNIER : Des rapports ont été préparés dans le passé et en fait résultant de ces différents rapports et l'attitude que devait avoir le gouvernement, une loi a été adoptée en 1969. Des principes de base y ont été établis relativement au système de détention où on classifie en deux, les détenus, prévenus. On y a établi les articles 19 et 20. On y a établi certaines rémissions de peines statutaires. C'était déjà là une orientation qui s'est dégagée des différentes enquêtes. Refaire un nouveau livre blanc à la suite, je crois que les déclarations qui sont faites aujourd'hui donnent une idée de l'orientation que nous avons et le but que nous poursuivons.

M. LAURIN: M. le ministre, je vous soumets respectueusement que la population ne connaît pas beaucoup ce qui se fait dans votre ministère. Le travail, par exemple, du directeur des services des établissements de détention depuis qu'il est à son poste. Pour le connaître personnellement... Je sais que beaucoup d'efforts ont été faits, des réalisations ont été faites mais la population n'est pas au courant. Elle n'est pas au courant surtout du développement des idées du ministère dans ce domaine. Aussi bien pour des fins d'information que pour des fins d'orientation, cela me semblerait utile.

Je n'oublie pas aussi que je m'adresse à des ministres libéraux dans le sens le meilleur du terme et que, lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre et le ministre de la Justice dans "Québec au Travail" annonçaient une réforme des prisons du Québec pour les transformer en de véritables établissements de réhabilitation, un engagement formel. Est-ce que je peux demander au ministre de la Justice comment il entendrait aujourd'hui préciser cet engagement électoral?

M. FOURNIER: C'est dans cette direction que nous nous engageons de jour en jour. Le député a mentionné la question de publicité, etc.. Nous entendons, relativement à cela — mettre à la disposition des détenus — comme cela se fait dans d'autres Etats ou dans d'autres endroits — lorsqu'ils entreront en prison, des documents dans lesquels on leur fait constater les droits qu'ils ont, les visites, leurs relations familiales, à savoir — l'article 19 et l'article 20. Nous sommes à préparer des publications dans ce sens. Je comprends que, d'un autre côté, ce n'est pas un sujet qui exerce énormément d'attraction sur le public en général. Lorsqu'il se produit des événements graves à l'intérieur d'une prison, la publicité s'en empare, mais que nous mentionnions que nous avons l'intention de donner certains cours, de réhabiliter ces détenus, le plus souvent, la publicité manque pour cela.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: Sur ce point, l'engagement du premier ministre et du ministre de la Justice n'a pas été formel. Il n'était pas prévu dans l'engagement du parti libéral de réaliser ce programme avant le 31 décembre 1971, comme ce fut le cas pour l'engagement solennel des 100,000 nouveaux emplois avant le 31 décembre 1971. Personnellement, je ne reproche pas au ministre de ne pas avoir encore actualisé cette partie du programme libéral.

M. DROLET: Sur le même sujet, M. le Président, j'étais en train de lire les réalisations du Parti libéral après deux ans et, dans la page réservée au Solliciteur général — page 125 — dans les réalisations, il est écrit : "La réforme en profondeur du système pénitentiaire se fait depuis deux ans."

M. HARDY: Cela fait une heure qu'ils en parlent.

M. PAUL: Ils veulent surtout parler de son voyage en Europe.

M. BURNS: Sur ce point, M. le Président, le ministre nous disait tantôt qu'il n'était peut-être pas opportun de publier un livre blanc...

UNE VOIX: On a publié un livre rouge.

M. BURNS: ... mais, d'autre part, je pense que, l'an dernier, le ministre de la Justice, en l'absence du Solliciteur général, avait trouvé excellente la suggestion du comité de réunir la commission parlementaire de la justice pour étudier les problèmes de détention et de probation, les problèmes spécifiques que cela occasionnait. Est-ce que c'est toujours quelque chose qui est envisageable par une réunion de la commission parlementaire spécifiquement pour ces points?

M. FOURNIER: Je n'ai aucune objection, puisque cela a été aussi mon attitude relativement au problème de la détention. Dès que je me suis occupé de la question, j'ai tenté d'ouvrir aussi grandes que possible les portes et les fenêtres relativement â ce service parce que je croyais que ce que les gens ignoraient, ils en faisaient des épouvantails. C'est la raison pour laquelle les journalistes sont venus à un certain moment à Orsainville, et que, relativement aux problèmes qui existaient récemment à Hull, la prison a été ouverte totalement pour que les gens voient exactement les choses. Une personne qui n'a jamais pénétré dans une prison pense beaucoup plus mal que ce qui existe et je suis totalement en faveur d'aérer cette question puisque c'est une question où le public a le droit de savoir ce qui se passe. Ce ne sont pas des étrangers que nous avons là, ce sont des citoyens de la province qui ont commis certaines infractions et qui ont reçu certaines condamnations des tribunaux mais qui retourneront à la société.

M. BURNS: Est-ce que je dois comprendre la question du ministre comme un engagement de sa part à faire convoquer la commission parlementaire de la justice sur ce problème?

M. FOURNIER: Je devrai consulter le leader de la Chambre.

M. BURNS: Non, mais quant à lui...

M. FOURNIER: Quant à moi, je n'ai aucune objection.

M. BURNS: Je ne parle pas des possibilités.

Est-ce que ce serait également dans les vues du ministre qu'à cette rencontre de la commission parlementaire de la justice sur ces problèmes, il y ait des groupes qui puissent être entendus de l'extérieur, soit les agents de la paix eux-mêmes, des gens qui peuvent avoir des idées sur la réhabilitation, la probation, les conditions de détention, etc.?

M. FOURNIER: Nous obtenons régulièrement, évidemment, des rapports de la part de ces gens, des gardiens. Nous avons fait des enquêtes à ce sujet. Quant à l'étendue de la commission parlementaire, je voudrais analyser davantage la situation. Quant à la situation qui existe présentement dans les centres de détention, au stade actuel, réunir la commission parlementaire dans le but d'entendre certaines déclarations de la part d'agents de la paix ce ne serait pas approprié dans les circonstances actuelles de négociation.

M. BURNS: Je citais cela uniquement à titre d'exemple. Il y a un tas d'autres gens qui peuvent être intéressés, par exemple, il y a sûrement des criminologues qui ont un gros mot à dire à ce sujet.

M. HARDY: A condition qu'ils ne viennent pas se chicaner ici.

M. BURNS: Il y a sans doute des avocats qui sont préoccupés par cette situation, qui ont à voir des clients.

M. FOURNIER: Comme il a été mentionné précédemment, les rapports Ouimet et Prévost ont fait l'objet d'enquêtes publiques auxquelles des gens se sont présentés. Evidemment, cela fait déjà quelques années mais pas si longtemps que cela. A ce moment-là les groupements avaient été interrogés et les enquêtes...

M. LAURIN: A tort ou à raison, M. le ministre, dans beaucoup de secteurs de la population, il semble qu'il existe encore l'idée

d'une opposition entre l'optique purement sécuritaire des établissements de détention et l'optique réhabilitation, et je suis convaincu que, dans votre ministère, il n'y a pas opposition. Mais s'il n'y a pas opposition, il faudrait que la population le sache. S'il reste de l'opposition, il faudrait également qu'on puisse essayer de voir pourquoi il reste des oppositions afin d'essayer de voir comment réconcilier l'impératif de la sécurité du citoyen et la réhabilitation du citoyen. Peut-être qu'il n'y aurait pas de meilleur moyen que cette aération publique des vues du ministère avec des propositions qui seraient faites par divers groupes intéressés.

M. FOURNIER: Quant à nos vues relativement à la question sécuritaire et quant à la question de réhabilitation, nous envisageons la situation de la façon suivante: Le service de détention a un devoir à accomplir lorsque des gens lui sont confiés, il doit s'assurer que ces gens sont détenus aux endroits auxquels ils doivent être. La question de sécurité, nous l'appliquons relativement aux prévenus. Nous prenons les dispositions nécessaires de façon à ce que ces gens soient disponibles pour les procès. Quant aux détenus, nous appliquons des normes aussi larges que possible en vue de leur réhabilitation.

M. LAURIN: En tout cas, il me semble qu'une ouverture de ce problème convaincrait la population, que les efforts qui sont faits dans divers milieux ne sont pas vains, et sont entendus des autorités et donnent lieu à des réalisations. Autrement, on peut encore se poser des questions et se demander si on n'est pas en face de promesses ou de voeux pieux qui ne sont pas suivis de réalisations.

Dans le propre intérêt du gouvernement, il serait important et opportun qu'on procède à cette consultation plus fréquente de l'opinion publique, particulièrement la plus avertie.

M. le Président, est-ce que les deux ministres ont l'intention de donner suite aussi à cette recommandation du rapport Prévost en ce qui concerne le travail des détenus? Au tome 5, pages 169 et 186, on recommandait que le service des prisons du Québec et les organismes concernés directement ou indirectement revisent leurs positions face au travail des détenus, en s'inspirant de ce qui se fait ailleurs. Ailleurs, c'est-à-dire dans certains pays où on a réussi à rendre rentable l'administration du service des prisons et à faciliter la réinsertion des détenus dans le monde du travail en même temps.

M. FOURNIER: Sur ce point, je dois dire que nous n'avons pas présentement, au Québec, les objections qui existent dans d'autres endroits. Mais je dois dire que dans certains états, aux Etats-Unis, des objections formelles sont faites par les différents syndicats ouvriers parce qu'il s'agit en quelque sorte de "cheap labor".

Mais il arrive que les productions dans ces états-là servent simplement aux fins gouvernementales ou aux fins institutionnelles. Mais ça crée un problème, même si c'est appliqué ailleurs, puisque ce serait remplacer l'entreprise privée jusqu'à un certain point.

M. LAURIN: J'arrête là pour le moment mes questions, espérant les reprendre à l'occasion de cette commission parlementaire que vous nous promettez moralement. Et je vous remercie infiniment pour les réponses que vous avez bien voulu apporter à mes questions.

M. BURNS: Une autre promesse que, sans doute, l'année prochaine, on sera obligé de reprocher au ministre.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1. Adopté. Catégorie 2. Adopté. Catégorie 3. Adopté. Catégorie 4.

M. BURNS: Je remarque, encore une fois, une augmentation assez substantielle des services professionnels. Je me pose la question: Est-ce que la direction générale des établissements de détention manquerait de personnel pour avoir recours à des services professionnels et administratifs pour une somme de $479,700 alors que, l'année dernière, c'était prévu à $285,000?

M. FOURNIER: Dans ce montant, il y a des honoraires de $134,000 pour des psychiatres.

M. DROLET: Ils sont bien payés.

M. PAUL: Je comprends que leur travail se fait surtout chez les malades mentaux.

M. FOURNIER: Nous avions, jusqu'à récemment, des contrats avec les psychiatres et, depuis les dernières ententes, il s'agit de services qui sont payés à l'acte. De sorte qu'il y a une augmentation dans ce domaine...

M. BURNS: Ils ne sont pas régis par l'assurance-maladie?

M. FOURNIER: Il y a un nombre minimum d'heures pour lesquelles nous leur payons salaire et le reste... Ils étaient à plein temps et à salaire, mais maintenant ils sont payés à l'acte. Le Dr Daoust a démissionné comme fonctionnaire permanent. Ils sont payés à l'acte.

M. BURNS: Mais ils ne sont pas régis par l'assurance-maladie?

M. CHOQUETTE: Justement, les services psychiatriques ne sont pas régis par l'assurance-santé. Vous vous souvenez du grand débat...

M. BURNS: Comme je n'y ai pas recours tellement souvent, je ne m'en rends pas compte.

M. PAUL: Vous laissez ça au député de Bourget.

M. BURNS: Pas besoin, nous avons notre psychiatre portatif.

M. CHOQUETTE: Nous aussi quant à ça, j'ai le ministre de l'Education derrière moi.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 4. Adopté.

M. BURNS: Quel est le reste de la ventilation?

M. FOURNIER : Un montant additionnel de $49,000 pour des services de gardiennage de la guérite de la prison de Montréal et pour la garde dans les hôpitaux à cause de la hausse du taux horaire des agences de sécurité, ainsi que pour être en mesure de répondre à l'augmentation du volume de travail.

M. BURNS: C'est dire que vous manquez de personnel chez vos agents de la paix.

M. FOURNIER: C'est qu'à l'entrée de Bordeaux, il y a une espèce de clôture avant d'arriver aux automobiles et il y a des gardiens engagés.

M. BURNS: Vous parliez également des agents de sécurité lorsque vous amenez un prévenu ou un détenu à l'hôpital, j'imagine. Ce n'est pas une fonction qui est remplie par les agents de la paix eux-mêmes?

M. FOURNIER: La conduite de l'établissement de détention à l'hôpital se fait par le service de détention et, rendu à l'endroit, ce sont des gardiens engagés.

M. BURNS: Est-ce que ça complète?

M. FOURNIER: Ce serait $49,000 plus $134,000 qui compléterait la différence.

M. BURNS: Moi j'ai comme chiffre $479,000.

M. FOURNIER: Oui, j'ai donné simplement les augmentations, l'an dernier c'était $285,000. Si le député veut avoir l'ensemble des chiffres, c'est ceci: $134,000 honoraires pour soins psychiatriques; gardiennage de la guérite de la prison de Montréal et des gardes dans les hôpitaux, $119,000; confection d'uniformes, $54,700; honoraires des religieuses du Bon-Pasteur, maison Gomin, $46,800; — parce qu'il y a un contrat de signé avec elles pour le gardiennage à cet endroit — médecin et dentiste, $45,000; repas aux prisonniers, $35,000; repas aux surveillants, $25,000; assurance des véhicules moteurs, $15,000 et dépenses diverses, $5,200; pour un total de $479,700.

M. BURNS: Une dernière question sur le gardiennage: Quelle est la compagnie de sécurité qui a le contrat, est-ce que c'est une seule et même?

M. FOURNIER: SIS.

M. BURNS: Oui, je sais laquelle, Service d'investigation et de sécurité. Merci.

M. LE PRESIDENT: Article 10: Direction générale des établissements de détention et du service de la probation; sous-article 1: Etablissements de détention; catégorie 4: Services professionnels, administratifs et autres. Adopté. Catégorie 5: Entretien et réparations, adopté. Catégorie 6: Loyers, adopté. Catégorie 7: Fournitures et approvisionnements, adopté. Catégorie 8 : Matériel et équipement, adopté. Catégorie 11: Autres dépenses, adopté. Catégorie 14: Remboursements, adopté.

Sous-article 2: Service de la probation. On avait dit qu'on allait discuter les deux en même temps. Catégorie de dépenses...

M. BURNS: J'ai seulement une question à la catégorie 1, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 1: Traitements, salaires et allocations.

M. BURNS: A moins que ce soit une faute d'impression ou à moins que j'aie une mauvaise...

M. LE PRESIDENT: Vous avez dit 9?

M. BURNS: Catégorie 1. Sous-article 2 et catégorie 1. Comme je disais tantôt, à moins que ce soit une erreur d'impression ou une fausse impression que j'ai, je vois le même nombre de postes avec une augmentation de $210,000. Est-ce qu'on a appliqué la politique du 4.8 p.c. ou du 5.5 p.c. dans...

M. FOURNIER: Le chiffre de l'an dernier ne prévoyait qu'une proportion de l'année tandis qu'ici c'est pour toute l'année. Il y a des gens qui ont été engagés au cours de l'année et le chiffre de l'an dernier...

M. BURNS: Cela veut dire que les 95 postes de l'année dernière étaient autorisés mais pas tous occupés.

M. FOURNIER: Il y en avait treize à combler et, de plus, certains postes ont été remplis à certaines périodes de temps qui ne nécessitaient pas un budget d'un an, de sorte que là il y a un budget pour douze mois.

M. BURNS: Ce montant-là est selon la politique salariale du gouvernement évidemment.

M. CHOQUETTE: Quoique...

M. BURNS: J'avais peur qu'il y ait un écart là.

M. CHOQUETTE: ... il fallait que j'ajoute du rattrapage en plus du 4.8 p.c. qui s'est appliqué aux agents de la paix. Dans les offres gouvernementales aux agents de la paix, si je me rappelle bien, quitte à ce que je me corrige si j'étais dans l'erreur, mais...

M. PAUL: Vous n'en tenez pas compte dans vos estimations?

M. CHOQUETTE: Ah! oui.

M. PAUL: Vous en tenez compte? $59 millions? Je ne pense pas.

M. CHOQUETTE: C'est dans les finances, c'est vrai. Vous avez raison, M. le député.

M. LE PRESIDENT: Sous-article 2: Service de la probation; catégorie 1 : Traitements, salaires et allocations, adopté.

M. PAUL: M. le Président, quant à moi...

M. LE PRESIDENT: Catégorie 3: Services de transport et de communication, adopté. Catégorie 4: Services professionnels, administratifs et autres, adopté. Catégorie 5 : Entretien et réparations, adopté. Catégorie 7 : Fournitures et approvisionnements, adopté. Catégorie 8 : Matériel et équipement, adopté.

Article S 11: Régime de retraite des membres de la Sûreté du Québec. Vous remarquerez que c'est un nouvel article du budget. Il n'y avait rien de prévu l'an dernier.

M. PAUL : A toutes fins pratiques, c'est pour $1,000 seulement? Est-ce que le ministre peut nous dire d'où viennent les contributions pour une somme de $449,000?

M. CHOQUETTE: Voici la ventilation de cette somme: Contribution des membres, 8 p.c. de $41,922,000, soit $3,353,760; à déduire, contribution des membres au régime des rentes du Québec, $346,290; laissant une somme nette de contribution par les membres de $3,007,470; à ajouter, partie des contributions des membres prévues au budget des revenus afin de montrer une dépense nette de $1,000; à déduire, toujours, $2,558,470; laissant une somme nette de $449,000.

Le montant de $2,558,470 auquel je me suis référé tout à l'heure a été arrondi à $2,600,000 dans le budget des revenus.

M. LE PRESIDENT: Catégorie 2, adopté. Catégorie 14: Contributions.

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Il faudrait maintenant retourner à la page 143 pour l'article S 12: Loi de l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Vous remarquerez que c'est l'application d'une loi qui a été adoptée en 1971, et pour laquelle il n'y avait pas de dépenses équivalentes l'an dernier.

M. BURNS: Depuis l'adoption de cette loi, est-ce que des réclamations ont été formulées? Est-ce que nous pourrions avoir le détail?

M. CHOQUETTE: Il y a eu des réclamations, sans aucun doute.

M. BURNS: De mémoire, est-ce que vous vous souvenez de la date de la mise en vigueur de la loi?

M. CHOQUETTE: Je pense que c'est le 1er décembre 1971.

M. BURNS: Cette loi a été mise en vigueur le 1er mars?

M. CHOQUETTE: Oui, elle a été mise en vigueur le 1er mars 1972. Il y avait des années de rétroactivité, si vous vous souvenez bien.

M. BURNS: Oui, c'est vrai.

M. CHOQUETTE: Il y avait environ cinq ans. Nous avons désigné un de nos conseillers juridiques auprès de la Commission des accidents du travail pour s'occuper de ces réclamations. Je ne pourrais pas dire, au moment où je vous parle, combien de réclamations ont été présentées mais j'ai été informé qu'un certain nombre de réclamations ont été formulées.

M. BURNS: Est-ce que le ministre sait de quel ordre serait le montant des réclamations? Approximativement?

M. CHOQUETTE: Je n'ai aucune idée au moment où je vous parle.

M. BURNS: Est-ce que les membres de la commission pourraient recevoir la réponse éventuellement? Dans un document?

M. CHOQUETTE: Certainement. Nous pourrons vous faire parvenir un état des réclamations qui ont été formulées jusqu'à maintenant en vertu de cette loi, ainsi que d'autres détails pertinents depuis que la loi a été mise en vigueur.

M. BURNS: Je me souviens qu'une certaine publicité — quand je dis publicité, c'est vraiment une certaine publicité, qui n'était pas énorme — a été faite autour de la promulgation de ce projet de loi. Est-ce que le ministère a fait quelque chose pour faire connaître l'existence de cette loi? Je sais qu'il y a beaucoup de gens

qui, malheureusement, l'ignorent, même si les journaux en ont fait rapport. Il y a peut-être beaucoup de gens qui pourraient recourir à cette loi mais qui n'en connaissent pas l'existence.

M. CHOQUETTE: Au moment où la loi a été mise en vigueur, il y a eu une cérémonie à la Commission des accidents du travail, à laquelle ont participé le président de la commission, les commissaires, des officiers supérieurs du ministère de la Justice, mais je note la suggestion du député de garder l'affaire en somme...

M. BURNS: Je pense, par exemple, à un document comme celui que le ministre des Institutions financières avait fait publier. Il n'y a peut-être pas lieu de lui donner la même importance, parce qu'il y a peut-être moins de victimes d'actes criminels qu'il y a de victimes de banditisme commercial, mais je vois un document un peu de même style, un petit dépliant distribué dans toute la province par le ministre des Institutions financières pour faire la publicité de l'existence des droits du consommateur. Je pense que quelque chose d'analogue pourrait être fait.

M. CHOQUETTE: Je note la suggestion du député, je la trouve excellente de prime abord et je donnerai les instructions appropriées pour qu'on puisse préparer quelque chose de ce genre.

M. HARDY: Il faudrait bien que la publication ne montre pas les avantages de la loi.

M. BURNS: Je n'ai pas d'objection à ce que cela montre les avantages de la loi, pas du tout, parce que je présume qu'à ce moment-là ce ne sera pas un document politique en couleur rouge avec la photo du premier ministre dans sa plus récente coiffure...

M. PAUL: Est-ce que vous aimez mieux la photo du ministre de la Justice?

M. BURNS: Cela n'améliorerait pas grand-chose.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. Je ferai remarquer aux membres de la commission qu'il est 6 heures. Est-ce que vous avez l'intention de continuer les travaux?

M. HARDY: Je me demande si nous ne devrions pas continuer jusqu'à 6 h 30 et terminer nos travaux.

M. BURNS: J'ai encore une ou deux remarques à l'article S 18.

M. LE PRESIDENT: Je vais faire la lecture des articles et vous m'arrêterez au moment où vous aurez des remarques à faire. Toujours à la page 143. L'article 13: Assistance judiciaire.

M. PAUL: J'ai une question, M. le Président. Est-ce que le ministre a signé un autre contrat avec le Barreau du Québec au sujet de l'assistance judiciaire?

M. CHOQUETTE: Non.

M. PAUL: Excepté que le Barreau a été informé de cette disponibilité de $2,300,000 pour l'application de l'assistance judiciaire.

M. CHOQUETTE: Non M. le Président, étant donné le désaccord qui s'est produit récemment entre le ministère de la Justice et le Barreau...

M. PAUL: Vous parlez du 8 avril?

M. CHOQUETTE: Je ne sais pas si c'est le 8 avril, mais enfin dans le mois d'avril. Le Barreau n'a pas voulu reconduire les accords précédemment signés; le Barreau a préféré agir de la sorte pour le moment mais j'ai confiance.

M. PAUL: Ils attendent peut-être un appel généreux du ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: Ma générosité n'est pas illimitée. Maintenant, on me dit que l'élection d'un nouveau bâtonnier général aura lieu demain. Peut-être ceci est-il un commencement de relations plus étroites.

M. PAUL: Si c'était le même bâtonnier?

M. CHOQUETTE: Cela ne peut pas être le même. Ce n'est pas parce que je m'entends personnellement mal avec l'ancien bâtonnier général.

M. BLANK: L'ancien n'est pas là. M. PAUL: Non?

M. CHOQUETTE: Je tiens à signaler que je n'ai rien, personnellement, contre l'ancien bâtonnier général que je considère toujours comme un ami, malgré certains désaccords.

M. PAUL: J'ai remarqué que le ministre, à ce moment, était très attentif au discours.

M. CHOQUETTE: Certainement, j'étais attentif.

M. BACON: Il en est très satisfait.

M. BURNS: Relativement à cet article de l'assistance judiciaire, évidemment, c'est relatif à l'adoption du projet de loi 10, est-ce que le ministre est en mesure de nous dire qu'il prévoit que le projet de loi 10 sera en vigueur dans le courant de l'année?

M. CHOQUETTE: J'ai l'intention, M. le Président, aussitôt les auditions de la commission

parlementaire terminées, de revoir le projet dans son entier, d'y apporter les modifications qui s'imposent, de le présenter de nouveau en deuxième lecture à la session actuelle et de le faire adopter à la session actuelle. Actuelle, c'est-à-dire ne pas reporter la question à l'automne.

M. BURNS: A ce moment, on pourrait s'attendre à ce que le projet de loi soit en vigueur dès cette année.

M. CHOQUETTE: On pourra s'attendre à ce que...

M. BURNS: Je veux dire qu'il ne sera pas reporté quant à sa mise en vigueur...

M. CHOQUETTE: Il est sûr et certain... M. BURNS: ... à décembre 1972.

M. CHOQUETTE: Non. Il est sûr et certain que pour sa mise en vigueur dans son entier, il faudra penser à une date ultérieure pour nous donner le temps de nous organiser. Mais la commission des services juridiques sera instituée aussitôt après l'adoption du projet de loi et elle se mettra à la tâche de l'organisation générale de l'assistance judiciaire à travers le Québec.

M. LE PRESIDENT: Article 14: Commission de contrôle des permis d'alcool. Adopté?

M. HARDY: M. le Président... Permis d'alcool

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, article 13. Adopté. Nous revenons à la page 154 pour l'article 14: Commission de contrôle des permis d'alcool; catégorie 1: Traitements, salaires et allocations.

M. HARDY: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre.

M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer au député de Terrebonne que c'est un nouvel article au budget et que l'application de la nouvelle loi qui a été passée, qui a scindé les lois existantes...

M. HARDY: Mais ça ne change pas grand chose aux questions que je voudrais poser.

M. LE PRESIDENT: Il n'y a aucun chiffre correspondant pour l'année dernière.

M. HARDY: Les questions que j'ai à formuler n'ont rien à voir avec les chiffres qui auraient pu exister l'an passé.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Terrebonne dit qu'il ne s'intéresse pas aux crédits proprement dits?

M. HARDY: Je veux dire que je m'intéresse vivement à la Régie des alcools. Je voudrais savoir du ministre si des commissaires ont été nommés tel que l'autorise la loi votée récemment, les amendements à la loi autorisant le ministre à nommer temporairement des commissaires.

M. CHOQUETTE: Deux commissaires additionnels et temporaires ont été nommés à la séance du conseil des ministres, hier soir.

M. HARDY: J'en suis très heureux et j'espère que ça va...

M. CHOQUETTE: Me Raoul Provencher qui était conseiller et chef du contentieux à la Voirie et Me Alexandre Mierzwinski, qui était conseiller juridique auprès de la cour du Bien-Etre social, et qui, incidemment, a travaillé depuis six ou huit mois sur un document d'intérêt général mais qui traite surtout de l'administration de la justice dans le nord québécois, en particulier en rapport avec les problèmes des Esquimaux et des Indiens.

M. HARDY: M. le Président, je me réjouis vivement de cette annonce que le ministre vient de faire.

M. LE PRESIDENT: Adoption, dans ce cas.

M. HARDY: Non, j'ai quelques brèves remarques à ajouter. Il continuait malgré l'adoption, malgré que ça s'appelait maintenant la Commission de contrôle des permis d'alcool, à y avoir des retards absolument inacceptables entre le dépôt des demandes et l'audition desdites demandes. En particulier — je l'avais souligné en Chambre — ceci prenait un caractère encore plus grave, lorsqu'il s'agissait de ventes de commerce, c'est-à-dire que, après la vente d'un commerce d'hôtel, d'épicerie ou de restaurant, il pouvait s'écouler quatre mois, cinq mois, parce que maintenant il faut faire une nouvelle demande de permis, ce n'est plus un transfert, il n'existe plus de transfert.

C'était donc absolument inacceptable, ça plaçait les personnes en cause dans une situation précaire, on devait attendre un certain nombre de mois avant de compléter les contrats de vente. Je me réjouis et j'espère que ces nouvelles personnes pourront accélérer les auditions et les demandes et faire en sorte que les permis soient accordés ou refusés suivant le cas, mais dans un délai raisonnable.

Il y a un autre aspect que je voulais souligner, que j'ai déjà d'ailleurs souligné, mais qui me tient beaucoup à coeur, c'est le problème de la réglementation. J'ai eu l'occasion, à quelques reprises, de causer de ça avec le ministre. On nous avait dit que la nouvelle Commission de contrôle des permis d'alcool ne ferait pas comme l'ancienne régie, jugeant un peu à l'oreille et à l'oeil, appliquant certains critères une semaine et d'autres critères la

semaine suivante, avec le résultat que les gens se faisaient refuser des permis à un moment donné et que d'autres s'en faisaient octroyer parce que les commissaires avaient décidé d'appliquer tel ou tel principe.

Il était question d'avoir une réglementation précise, bien articulée, de façon que les gens qui voulaient faire des demandes sachent d'avance, à peu près, s'ils avaient une possibilité ou non de l'obtenir.

J'espère également que cette réglementation est en bonne voie de réalisation. J'ose formuler une suggestion. Avant que cette réglementation soit adoptée par le cabinet, par arrêté en conseil, je me demande s'il n'y aurait pas lieu, puisque ce serait une prolongation de la loi, une mise en application de la loi, que cette réglementation soit soumise à la commission parlementaire de la justice.

A ce moment-là, entre autres, si les règlements ne prévoient pas ou défendent que les clubs sociaux ou les oeuvres humanitaires se voient reconnaître le droit d'obtenir des permis pour vente de boisson, je m'opposerais très vivement à cette réglementation pour les raisons que j'ai déjà énumérées en Chambre.

Je sais que la commission Thinel, dans son rapport, prétend que la Commission de contrôle des permis d'alcool ne devrait pas accorder de permis de vente de boisson à des organismes sans but lucratif, à l'occasion d'une soirée, d'une danse ou autre chose. J'ai déjà eu l'occasion de dire que je m'oppose vivement à une telle prétention, qui n'a, à mon sens, aucune raison d'être. On prétend que ceci constituerait une concurrence déloyale à l'endroit des hôteliers, je trouve que c'est absolument absurbe de prétendre une chose semblable, puisque, lorsqu'une organisation, un club social fait une soirée quelconque, dans bien des cas, surtout en campagne, les hôtels ne peuvent pas les recevoir. Ils n'ont pas de salle suffisamment grande.

M. PAUL: Ils ne veulent pas les recevoir.

M. HARDY: Ils ne veulent pas, c'est le premier point de vue.

Le deuxième point de vue, c'est que la plupart de ces organismes n'en font pas d'abus. Il peut y avoir des abus, mais la très grande majorité ne font pas d'abus; ils tiennent une soirée ou deux par année, demandent à l'occasion de cette soirée un permis de vente de boisson et c'est à peu près leur seule source de revenu pour survivre.

On m'a déjà dit: Vous pouvez très bien faire des soirées semblables sans avoir de permis de boisson. C'est peut-être très beau, c'est peut-être très angélique — les Lacordaires font ça — mais l'ensemble de la population n'appartient pas aux ligues antialcooliques ou aux ligues Lacordaire et l'ensemble de la population aime bien, à l'occasion d'une danse ou d'une soirée quelconque, pouvoir consommer des boissons alcooliques.

C'est pourquoi, M. le Président, je résume en disant que j'espère qu'il y aura une réglementation précise. Je souhaite que ce projet de règlement soit soumis à la commission parlementaire de la justice. A ce moment-là, évidemment, on verra le troisième sujet, le problème des clubs sociaux ou des oeuvres humanitaires et on verra ce que le projet de règlement dit là-dessus.

M. LE PRESIDENT: Le député de Trois-Rivières. Auparavant, j'aimerais faire part aux membres de la commission que le député de Lévis remplace pour cette séance le député de Portneuf.

M. ROY (Lévis): Pour la fin de la séance. UNE VOIX: Adopté.

M. CHOQUETTE: La commission en est nettement améliorée.

M. LE PRESIDENT: Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: M. le Président, concernant l'application de la Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool, lorsqu'on avait étudié la loi à l'Assemblée nationale, il me semble qu'il avait été mentionné que, dans les cas de transfert, comme en faisait part le député de Terrebonne, on aurait un rôle spécial à la régie de façon à pouvoir être plus expéditif et plus rapide. Je considère que dans ce domaine-là on cause dans bien des cas préjudice au citoyen. Je comprends que le ministre a passablement de problèmes à la commission de contrôle, mais si on avait un rôle spécial dans les cas de transfert, cela serait pas mal plus facile et cela améliorerait les choses.

De même, je pense que les commissaires devraient faire plus qu'appliquer la loi. Je regarde dans ma ville, dans mon comté; on devrait faire un peu plus de recherche au point de vue du marché des alcools et ces choses-là, de façon à ne pas éparpiller les permis aux quatre coins, ce qui, dans bien des cas, soit financièrement ou pour un tas de raisons, cause préjudice à celui qui est déjà un tenancier et qui a depuis un certain nombre d'années un commerce bien organisé.

M. PAUL: Je fais une remarque au député de Trois-Rivières, vous voudriez que ce soit une profession quasi fermée?

M. BACON: Non, je ne veux pas tomber non plus dans l'erreur de faire un marché protégé, ce n'est pas mon intention.

M. CHOQUETTE: M. le président, si vous me permettez de répondre très brièvement aux interventions du député...

M. BACON: M. le Président, puis-je conclure...

M. CHOQUETTE: Aviez-vous conclu? M. BACON: Non.

M. PAUL: Autrement, il va avoir la péroraison prise dans la clôture!

M. BACON: De toute façon, j'insiste sur le point principal que j'ai voulu mentionner, M. le Président, c'est qu'on fasse plus que l'application d'une loi, qu'on fasse un peu de recherche dans les différentes régions de la province et que, dans les cas de transfert, on ait un rôle spécial de façon à être plus expéditif et à causer moins de préjudice aux citoyens. J'ai conclu, M. le ministre.

M. CHOQUETTE: M. le Président, lorsque cette commission a été réorganisée à la suite de l'adoption du bill 44, elle avait déjà des arrérages très considérables de demandes de permis qui avaient été logées précédemment et qui ont été maintenues devant la nouvelle commission. Par conséquent, la commission n'est pas partie en terrain vierge, elle est partie d'une situation où il y avait déjà des arrérages très considérables. De nouveaux commissaires ont été désignés. Il y a eu des problèmes de personnel, parce qu'il a fallu effectuer des changements ou des transferts de personnel entre la Société des alcools et la commission de contrôle, parce que les anciens employés de la Régie des alcools appartenaient à la Société des alcools.

Par conséquent, il y a eu un problème de relations de travail, un problème de détermination du personnel qui devait demeurer en permanence auprès de la nouvelle commission de contrôle. Il y a eu de nouvelles demandes dans l'intervalle, mais nous sommes parfaitement conscients des délais qui sont encourus indûment et nous essayons par tous les moyens possibles et imaginables de faire face à ces délais, de les minimiser.

Je puis assurer les membres de la commission qu'à l'heure actuelle nous émettons plus d'ordonnances chaque semaine qu'il y a de demandes qui entrent à la commission. Par conséquent, nous rattrapons peu à peu les retards qui avaient été encourus. J'espère que ceci ne sera pas considéré comme une promesse, parce que loin de moi l'idée de faire des promesses que je ne saurais remplir, mais on m'assure que dans une période de six à huit mois il sera possible d'arriver à des délais de quelques mois qui seraient normaux pour l'examen des demandes.

Maintenant, n'oubliez pas ceci, messieurs!

Beaucoup de gens se plaignent des délais à la Commission de contrôle des permis des alcools, je le reconnais et dans beaucoup de cas peut-être est-ce justifié. Il y a des gens qui se plaignent des délais parce que leurs demandes ne sont pas complètes souvent et qu'il manque tel document au dossier. On est obligé de leur écrire, envoyez telle chose. On leur demande ces renseignements et tout cela fait encourir des délais additionnels, relativement à leurs demandes, dont ces gens sont responsables. Mais ceci étant dit, j'admets qu'il y a un problème général de délais auxquels il faut que la Commission fasse face efficacement.

Dans le domaine de la réglementation, j'ai demandé aux commissaires, assistés d'avocats que je leur ai suggérés, de préparer une réglementation. Cette réglementation est en somme préparée à l'heure actuelle, de telle sorte que je n'aurais pas d'objections, dans un avenir rapproché, à la déposer à la commission de la justice pour qu'on puisse en faire un examen général pour savoir si elle est conforme à la loi, si elle est dans l'intérêt public. Donc le député de Terrebonne peut être assuré de ma bonne volonté dans ce domaine.

M. HARDY: Ce n'est pas une promesse.

M. CHOQUETTE: Mais ce n'est pas une promesse formelle. Troisièmement, pour ce qui est des associations sans but lucratif qui veulent tenir des soirées et obtenir un permis de banquet pour vendre des alcools, au cours de ces soirées, la Commission a déjà, à ma demande, revisé sa politique dans ce domaine. De sorte que des associations politiques des différents partis peuvent actuellement solliciter de tels permis et ainsi pouvoir vendre des alcools et se servir du produit de cette vente pour leurs fins, à la manière des clubs sociaux, pour leurs activités au niveau local. Par conséquent, il s'agit d'un problème auquel nous avons remédié. Quant à un rôle relativement au transfert, je prends note de la suggestion du député de Trois-Rivières et je la transmettrai aux autorités.

M. BURNS: Excusez, seulement un point pendant qu'on est sur le sujet des politiques du ministère à l'égard de l'application des permis. Je le dis d'avance, je ne demande pas au ministre de se prononcer sur quelque chose qui pourrait être devant la Commission de contrôle actuellement, je lui demande sa politique concernant la possibilité aux magasins à succursales d'avoir des permis de cidre. Je peux vous assurer, M. le ministre, qu'actuellement les petits épiciers que je connais sont très sérieusement préoccupés par cette situation. J'ai entendu, et sûrement les membres de la Commission ont reçu des représentations de l'Association des détaillants en alimentation qui représente pour la plupart, ce qu'on appelle les petits épiciers du coin. Leur grande crainte n'est peut-être pas, dans l'immédiat le fait qu'on confie aux magasins à succursales des permis de vente mais ils voient à ce moment une intrusion dans un domaine qui a toujours été considéré comme étant une façon de permettre au petit épicier de se relever, l'intrusion venant éventuellement dans le domaine de la vente de la bière. J'aimerais que le ministre nous dise la politique

du ministère et peu importe le problème qui peut être devant la Commission actuellement, sur a) la vente du cidre et b) la vente de la bière.

M. CHOQUETTE: Le député de Maisonneuve me tend des pièges fantastiques. Il devrait comprendre que quand un problème est devant une commission administrative, il doit être jugé à son mérite. Je serais très mal venu de me prononcer et d'influencer le tribunal dans la décision qu'il doit rendre parce que cela serait en quelque sorte me prononcer sur une matière qui est sub judice. Je suis sûr que le député ne voudrait pas m'imposer cela.

M. BURNS: J'ai pris toutes les précautions, M. le Président, pour lui dire que je ne demandais pas de se prononcer sur le conflit actuel ou le problème actuel qui est soumis à la Commission. D'ailleurs le ministre nous a mentionné tantôt qu'il a fait des pressions auprès de la Commission pour qu'elle change certaines de ses politiques en matière de décernement de permis pour les associations sans but lucratif. Personne ici ne l'a blâmé de s'être immiscé dans un domaine quasi judiciaire. C'est un domaine où justement la Commission, peu importe la décision qu'elle rendra, et c'est pour ça que je vous demande — j'ai bien compris votre réponse à la question qui vous était adressée l'autre jour par le député de Pertneuf, sauf erreur...

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BURNS: Mais, je veux dire que si jamais, peu importe la décision qui sera rendue, ça devient la politique du ministère de laisser les permis de vente de cidre et bière aux magasins à succursales, je vous assure que vous allez recevoir une avalanche de récriminations, de contestations de la part des petits épiciers qui, bien souvent, réussissent à boucler leur budget grâce à cette vente.

Là, il va falloir se poser la question si on doit les faire disparaître complètement ou non, ces petits épiciers. C'est ça la question qui se pose, que sous-tend cette question.

M. CHOQUETTE: Je suis parfaitement conscient de la gravité, du sérieux de la question, mais étant donné qu'un procès se déroule exactement sur cette question, je préférerais, pour le moment, ne pas exprimer d'avis.

M. BURNS: Mais, il risque d'en avoir constamment un procès sur cette question. Il y a risque que, dès que la décision de la Commission de contrôle sera rendue dans le cas de Steinberg, vous ayez une autre demande de Dominion et que vous ne puissiez pas vous prononcer encore et qu'ensuite, vous en ayez un d'un autre.

M. CHOQUETTE: Il peut y avoir lieu d'a- mender la loi ou d'amender la réglementation à ce moment-là.

M. BURNS: C'est ça que je veux dire. Moi, je vous demande simplement de dire que si nécessaire, on va amender la loi. C'est ça que je vous demande dans le fond. La Commission de contrôle décidera bien ce qu'elle voudra en vertu des règlements qu'elle a devant elle et de la loi. Ce n'est pas ce que je vous demande de régler là.

M. CHOQUETTE: Le député tente de faire une distinction, en somme, entre la politique générale dans un domaine et son application à un cas particulier; et je le comprends de tenter de tracer cette ligne frontière entre les deux questions. A mon sens, elles sont tellement intimement reliées dans le cas qui est pendant devant la commission, à l'heure actuelle, que le député me permettra d'attendre avant d'exprimer un avis formel.

M. BURNS: Est-ce que le ministre le fera après cette décision?

M. CHOQUETTE : Sans aucun doute.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais suggérer au ministre, timidement, en raison de l'heure avancée, cette possibilité d'octroyer des permis pour une période de trois ans, ou du moins, de deux ans au lieu d'une année. Je crois que ça libérerait d'autant la commission de tout le rouage administratif et qui paralyse certainement un grand nombre d'employés et de commissaires lorsque, à chaque printemps, au mois de mai, on est obligé de renouveler de 10,000 à 12,000 permis. Alors, c'est une suggestion que je fais au ministre sans ajouter aucun autre commentaire.

M. CHOQUETTE: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis.

M. ROY (Lévis): M. le Président, je voudrais demander à l'honorable ministre... Il m'a eu l'air, à propos de la vente du cidre, de sa distribution par les magasins à succursales d'être très prudent. Est-ce que le ministre pense que les déclarations que le premier ministre a faites...? Le 27 mars, il avait dit: Tant que je serai premier ministre, je ne permettrai jamais la vente de bière ni de cidre dans des Steinberg ou dans des magasins à succursales.

M. CHOQUETTE: Je crois que le député de Lévis étire un peu la déclaration du premier ministre, je pense qu'il avait dit de bière.

M. ROY (Lévis): De bière.

M. HARDY: Mais, il n'embrassait pas nécessairement le cidre.

M. ROY (Lévis): Non, mais c'est parce que vous aimez mieux porter un peu d'avance.

M. CHOQUETTE: Sur le plan de la bière, vous avez une déclaration catégorique...

M. ROY (Lévis): Oui.

M. CHOQUETTE: ... qui émane du premier ministre et que je reconnais qu'il a faite. Sur la question du cidre, il ne s'est pas prononcé aussi catégoriquement.

M. LE PRESIDENT: Article 14, est-ce que... M. PAUL : Adopté, quant à moi.

M. BURNS: Seulement une dernière question sur ça. Le ministre se souviendra — il y a fait référence tantôt — que lors de la division de la Régie des alcools en Société des alcools et Commission de contrôle, il y avait un certain nombre de problèmes qui s'étaient posés au niveau des employés devant être transférés d'un endroit à l'autre; et plus particulièrement — le ministre se souviendra, même je l'avais rencontré in camera pour lui faire part de certains de ces problèmes — qu'il y avait un danger, malgré la sécurité d'emploi que l'un des deux projets de loi, celui de la Société des alcools, assurait à ses employés, que, par voie de conséquence du transfert d'employés de la Commission de contrôle à la Société des alcools, il y ait des employés qui ne l'aient pas, la sécurité d'emploi. Est-ce que le ministre est en mesure de nous dire si ce problème est réglé définitivement?

M. CHOQUETTE: Je crois qu'il est réglé définitivement et de la façon suivante: nous avons dû appliquer les deux lois telles qu'elles étaient. Et nous avons dû, ainsi que je l'avais dit privément au député de Maisonneuve, donner l'option individuelle aux anciens employés de la Régie des alcools, section permis, soit de demeurer au sein de la Commission de contrôle des permis d'alcool et ainsi devenir fonctionnaires du gouvernement du Québec, soit de retourner à la Société des alcools du Québec, là où ils auraient été couverts par leur convention collective qui, autrefois, se prolongeait de la Société des alcools ou de la régie, en somme, distributrice d'alcool, au tribunal. Alors, déjà l'impasse existait.

Nous avons donc donné aux employés le choix de l'endroit où ils se sentaient le plus avantagés, soit demeurer au sein du tribunal, soit retourner à la Société des alcools. Un certain nombre ont choisi de rester avec le tribunal, la commission de contrôle, d'autres ont dit: Nous allons retourner à la Société des alcools. Les autorités de la Société des alcools nous ont dit: Nous n'avons pas besoin de ce personnel additionnel, parce que nous avons déjà trop de personnel, mais nous avons une clause de "bumping" au sein de notre convention collective. Alors, j'ai suggéré que même si elle devait appliquer la clause de "bumping" à certains employés de la Société des alcools qui perdraient leur emploi par la réinsertion des anciens employés dans le cadre des employés de la Société des alcools et que ceci affecterait les plus récents arrivés à la Société des alcools, j'ai dit au représentant du syndicat, Me Maurice Sauvé, que nous donnerions une priorité aux employés évincés de la Société des alcools de s'intégrer à la fonction publique et, en particulier, à la Commission de contrôle des alcools pour ainsi les récupérer et faire en sorte qu'ils ne perdent pas leur emploi.

Je pense qu'à la suite de ces pourparlers, les choses se sont arrangées relativement bien. On ajoute un dernier raffinement à ce projet qui avait été convenu, c'est que pour le moment, tant et aussi longtemps qu'on ne peut pas intégrer un employé à la Société des alcools, parce qu'il n'y a pas de poste, nous le conservons en poste à la commission de contrôle, de sorte que le problème a été aussi réglé de cette façon. Une entente a été signée.

M. BURNS: C'est une promesse que le ministre nous a faite lors de l'amendement de la loi et qu'il maintient...

M. CHOQUETTE: Et que j'ai réalisée.

M. BURNS: ... et ça me plaît de le souligner.

M. CHOQUETTE: Et que j'ai réalisée.

M. BURNS: Cela en fait une.

M. LE PRESIDENT: L'article 14 est adopté globalement. Article 15: Régie des loteries et courses du Québec.

M. PAUL: M. le Président, c'est l'organisme qui procure de bons revenus à la province. Je sais que le secrétaire de la commission Bélanger avait prévu un jour que le maximum de revenus pouvant découler d'une loterie provinciale serait de $11 millions alors qu'en réalité les chiffres sont de l'ordre de $30 millions et plus. M. le Président, je me rappelle à l'ordre, je n'ai pas le droit de discuter ici de tout ce problème, parce que la question que je viens de soulever relève du ministre des Finances, mais mon message est passé. Je vous remercie.

M. BURNS: M. le Président, une seule question d'ensemble sur l'article. On remarque qu'à peu près toutes les catégories sont haussées cette année. Est-ce qu'on doit conclure que la Régie des loteries et courses du Québec est en pleine expansion, que de nouvelles activités s'en viennent?

M. CHOQUETTE: Vous pouvez sûrement le conclure. Notre contrôle des bingos est beaucoup plus intense qu'il ne l'était et nos revenus qui en découlent ont crû considérablement. De plus, nous avons l'intention, à brève échéance, ce n'est pas une promesse, mais je le dis quand même, de réglementer le domaine des courses.

M. BURNS: Le pari hors-course?

M. CHOQUETTE: Non. Le domaine des courses proprement dit parce que la surveillance des courses se fait actuellement d'une façon interne par la Canadian Jockey and Trotting Association, mais l'un des objectifs de la Régie des loteries et courses est la surveillance des courses par une autorité extérieure et nous avons l'intention de donner suite à ces responsabilités légales qui se trouvent dans la Loi de la Régie des loteries et courses.

M. LE PRESIDENT: Article 15: Régie des loteries et courses du Québec. Adopté globalement.

M. BURNS: Juste une dernière question. La catégorie 14: Remboursement, de quoi s'agit-il?

M. CHOQUETTE: C'est la vente de cartes de bingo. La régie a standardisé les cartes de bingo pour éviter les fraudes. Vous savez qu'il est possible de fabriquer des cartes de bingo qui font en sorte que celui qui est détenteur de la bonne carte peut, je pense, probablement gagner le bingo.

M. HARDY: Pas aux églises, ça!

M. CHOQUETTE: Le ministère de la Justice est toujours très prudent à l'égard de toutes les catégories de la société.

M. LE PRESIDENT: Adopté. Article 16: Commission des loyers.

M. PAUL: M. le Président, j'aurais une question à poser au ministre. Je constate que le nombre d'employés ne figure pas.

M. CHOQUETTE: D'abord, ils ne sont pas régis par la Fonction publique à l'heure actuelle. Je pense qu'il faudra attendre que la loi instituant de façon permanente la Régie des loyers soit adoptée pour incorporer le personnel de la Régie des loyers au personnel de la Fonction publique. Je puis dire au député que notre effectif total s'élève au chiffre de 203 personnes.

M. PAUL: Comme sous-question, M. le Président, est-ce que le ministre a l'intention — et là, j'aimerais bien qu'il nous apporte des précisions, s'il est en mesure de le faire — de présenter sa loi concernant la location, avant l'ajournement d'été ou au cours de l'automne?

M. CHOQUETTE: C'est une intention, mais ce n'est pas une promesse.

M. PAUL: Très bien.

M. BURNS: Est-ce que je peux rappeler au ministre, incidemment, une de ses promesses, que ça devait être prêt le 15 octobre 1971?

M. CHOQUETTE: Mais, c'était prêt. M. PAUL: C'est 1972.

M. CHOQUETTE: Je dois dire quand même au député, puisque nous en sommes au chapitre des promesses qu'un certain nombre de ces promesses aurait été rempli si on n'avait pas connu des événements qui ont absorbé le ministère, depuis à peu près deux ou trois mois, dans le genre de crise que nous avons traversée. Ceci n'aide sûrement pas l'administration gouvernementale.

M. BURNS: Voyez-vous, je vous avait fait la suggestion de ne pas être si pressé de procéder avec vos injonctions; vous auriez pu faire votre travail normal.

M. CHOQUETTE: Il aurait fallu procéder plus tard.

M. BURNS: Bien oui! En temps normal.

M. PAUL: M. le Président, est-ce que c'est l'intention du ministre, une fois que la loi sera votée, de protéger les employés en place?

M. CHOQUETTE: C'est l'intention du ministre.

M. PAUL: C'est l'intention du ministre.

M. CHOQUETTE: Sans être une promesse à l'égard de tous.

M. PAUL: De tous, très bien; de tous, ce serait peut-être dangereux. D'un autre côté, je ne voudrais pas non plus que ce soit l'occasion d'un guillotinage.

M. CHOQUETTE: Pas du tout, M. le Président.

M. PAUL: Je connais trop l'honnêteté du ministre sur ce point pour lui prêter des intentions machiavéliques.

M. CHOQUETTE: Je n'en ai aucune.

M. PAUL: M. le Président, considérant l'efficacité du président, l'honorable juge Lionel Ross, qui assistait à nos délibérations — et ça doit lui rappeler de bons souvenirs, alors qu'il était parlementaire — personnellement, en tenant compte de la loi que nous garantit le ministre, sans nous la promettre, je serais prêt à

adopter globalement les différentes catégories relatives à la régie, mais je n'engage pas la liberté de parole de mes collègues, spécialement celui de Maisonneuve.

M. HARDY: Plus nous prendrons de temps, meilleure sera la loi.

M. BURNS: M. le Président, je dois quand même exprimer une inquiétude devant ce budget confronté avec l'annonce d'un nouveau projet de loi. Je remarque que le budget lui-même n'est pas sensiblement augmenté sur celui de l'année passée. Vous aviez $1,031,000, l'année dernière, qui étaient autorisés par rapport à $1,079,900 cette année. Ce qui me laisse croire — et c'est là mon inquiétude — que, dans votre projet de loi, il n'y aura pas d'extension territoriale telle qu'était une de nos remarques; non pas seulement de mon parti, mais des autres partis également.

M. CHOQUETTE: C'est parce qu'il est prévu, dans le projet de loi à être déposé, que les dépenses accrues pour la nouvelle régie seront payées par le fonds consolidé et non pas à même le budget ordinaire.

M. BURNS: Je suis content que vous m'enleviez une de mes inquiétudes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis.

L'article 16: Commission des loyers est adopté globalement.

L'article 17: Office de révision du code civil. Le député de Terrebonne.

M. PAUL: Le ministre nous a fait une revue assez...

M. HARDY: Est-ce que vous pouvez prévoir quand le projet total sera terminé?

UNE VOIX: De la Régie des loyers?

M. CHOQUETTE: Du code civil, on était rendu au code civil.

M. PAUL: Vous n'êtes pas assez vite, M. le ministre.

M. HARDY: En d'autres termes, quand pouvons-nous espérer avoir un nouveau code civil? Sans faire de promesse.

M. CHOQUETTE: Je ne fais pas de promesse, comme d'habitude; mais le sous-ministre me souffle: Fin 1973. On sait que, dans ce domaine, il est très possible d'être optimiste.

M. PAUL: Pour employer l'expression de l'ancien député de Champlain, c'est une espèce de "guide lines".

M. CHOQUETTE: C'est un genre de "guide lines", mais une fois que le projet sera déposé, le travail des parlementaires, plus particulièrement des juristes tels le député de Lévis, le député de Portneuf, le député de Trois-Rivières, le député de Sainte-Anne. Non, le député de Sainte-Anne...

M. PAUL: M. le Président, je vous ferai remarquer qu'il n'est pas notaire.

M. HARDY: Vous pouvez le faire voter, cela donnerait une chance!

M. CHOQUETTE: Quand le projet sera déposé, il incombera aux parlementaires de commencer à travailler; il est incontestable qu'un travail comme celui-là est très long.

UNE VOIX: De toute façon, ils passeront à l'histoire comme les grands pacificateurs.

M. CHOQUETTE: Probablement qu'on citera leur nom dans les livres d'histoire.

M. LE PRESIDENT: Article 17: Office de révision du code civil. Adopté globalement.

M. BURNS : Est-ce que l'échéancier qui était prévu pour la commission, en juin 1971, est respecté, à votre connaissance?

M. CHOQUETTE: Je ne pourrais pas certifier au député qu'il est respecté absolument.

M. BURNS: On y reviendra.

M. CHOQUETTE : Je n'en dis pas plus!

M. BURNS: J'attendais quelque chose d'ar-chibrillant de la part du ministre, mais il est arrêté là.

M. PAUL: Je vous le dirai, j'ai tout compris. M. LE PRESIDENT: Adopté. UNE VOIX: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Article S 18: Juges de la cour Provinciale, S.R., c. 20 et modifications.

M. PAUL: M. le Président, pensez-vous que j'ai une chance d'être nommé? Avez-vous des postes libres?

M. CHOQUETTE: Est-ce que le député de Maskinongé veut mettre un terme à sa carrière politique?

M. PAUL: Je prends la suggestion en délibéré. Est-ce que tous les postes sont comblés?

M. CHOQUETTE: Actuellement, oui, tous les postes sont comblés, sauf qu'il y a, évidemment, des vacances qui se produisent...

M. PAUL: A cause de l'âge de la retraite.

M. CHOQUETTE: L'âge de la retraite, les décès.

M. BURNS: Le juge Gagné est-il encore là?

M. CHOQUETTE: Le juge Gagné, son poste a été non pas annulé, mais nous avons dû désigner un juge additionnel de la cour du Bien-Etre social dans la région du Lac Saint-Jean où il y avait de très gros problèmes dans le domaine de la justice au niveau de la cour du Bien-Etre.

M. HARDY: Cela veut dire que, pour augmenter le nombre de juges, il faudrait amender la loi.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. HARDY : Je ne sais pas si je devrais faire la demande, ce n'est peut-être pas l'occasion aujourd'hui. Mais, je reçois énormément de plaintes de la cour du Bien-Etre social de Saint-Jérôme et, apparemment, on aurait absolument besoin d'un deuxième juge. Le juge qui est là actuellement ne suffit pas à la tâche dans le district.

M. PAUL: Je comprends, M. le Président, qu'on étudie globalement S 18, S 19 et S 20.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. LE PRESIDENT: Tout ce qui touche aux juges, à l'exception des régimes de retraite.

M. CHOQUETTE: Je pense que le juge en chef...

UNE VOIX: Est-ce le juge Baillargeon?

M. CHOQUETTE: Non, c'est le juge Raymond.

UNE VOIX: Raymond Raymond.

M. CHOQUETTE: Et je pense que le juge en chef de la cour du Bien-Etre social est bien d'accord sur le fait qu'il y a carence à Saint-Jérôme.

M. PAUL : Je serais bien surpris si le juge Lavallée ne vous avait pas écrit à ce sujet-là.

M. CHOQUETTE: Moi aussi, je serais très surpris. Je crois qu'il faudrait que je consulte les archives.

M. HARDY: Je peux peut-être faire la modeste suggestion à l'honorable ministre, de prévoir peut-être des amendements à la loi des tribunaux judiciaires pour augmenter le nombre de juges de la cour du Bien-Etre social. Et je préviens immédiatement le ministre que je n'ai aucun intérêt, puisque je n'ai pas le nombre d'années d'admission, au Barreau, voulu pour être nommé juge.

M. LE PRESIDENT: Alors, est-ce que les articles S 18, S 19 et S 20 sont adoptés globalement?

M. PAUL: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS : Non, non. Une minute. Je veux simplement poser une question au ministre. J'avais été assez frappé, en lisant dans Le Devoir du 24 janvier 1972, un énoncé de la part de M. le juge Fabien qui est le juge en chef des Sessions de la paix à Montréal — et ceci, lors de l'assermentation du juge Papineau — qui portait le titre suivant: "Le pouvoir judiciaire devrait administrer son propre budget." Et, entre autres, le juge Fabien disait, dans son allocution: "Il en résulterait une plus grande efficacité administrative, et cela permettrait de conserver plus intacte encore la notion d'un pouvoir judiciaire absolument indépendant et de faire disparaître la fausse théorie que l'on conserve en certains milieux, à l'effet que les juges peuvent être assimilés à des fonctionnaires." J'aimerais avoir les vues du ministre sur cette suggestion.

M. CHOQUETTE: J'ai répondu dans Le Devoir du lendemain.

M. BURNS: Probablement que je n'ai pas lu Le Devoir du lendemain.

M. HARDY: Votre service de recherche n'est pas complet.

M. BURNS : Je veux l'avoir de la part du ministre.

M. CHOQUETTE: Vos recherchistes ne vous donnent qu'un côté de la médaille!

M. BURNS: Vu que nous sommes au bon endroit, c'est peut-être le bon moment de nous donner cette réponse qui doit être, évidemment, très brillante.

M. CHOQUETTE: Je vais répéter la réponse que je donnais au Devoir. Les idées exprimées par le juge Fabien avaient peut-être une certaine valeur que je ne nie pas, mais un programme tel qu'il le proposait me semblait prématuré. Je croyais qu'il fallait au moins passer par une étape suivante, soit celle de renforcer l'administration de la magistrature dans son ensemble, sur l'exercice des fonctions des magistrats.

Cela veut dire que, sans confier au juge ou au juge en chef des responsabilités administratives

telles qu'administrer un budget, il y avait probablement lieu de confier à un conseil de la magistrature des responsabilités additionnelles en rapport avec les différents magistrats du Québec, dans les cours Provinciales que nous avons. Je ne sais pas si le député saisit exactement. C'est que je n'abondais pas avec le juge Fabien quant à l'extension des pouvoirs qu'il semblait rechercher au niveau de la magistrature. Mais j'étais prêt à concevoir qu'il y avait lieu de créer un organisme qui verrait à la bonne marche des affaires qui sont portées devant les juges, devant les magistrats, à élever le niveau de la magistrature et à agir, en somme, comme conseil d'administration, si je pouvais m'exprimer ainsi, des juges qui sont désignés et sur lesquels le ministre de la Justice ne prétend avoir aucune espèce de pouvoir disciplinaire ou réglementaire. Ils sont magistrats, ils appartiennent à un autre pouvoir, ils ont droit d'exercer leurs fonctions avec toute la latitude appropriée, sans intervention du pouvoir exécutif.

C'est dans cette direction que nous nous orientons et c'est jusqu'à ce point-là que nous nous orientons mais pas jusqu'au point qu'indiquait le juge Fabien.

M. BURNS: Je pense que ce qu'il faut comprendre surtout — sans vouloir me faire l'interprète du juge Fabien, parce que je ne lui en ai pas parlé — il a fait à plusieurs reprises des remarques de ce style — dans cette espèce d'énoncé ou de ce souhait, c'est qu'il déplore le fait que très souvent le juge en chef d'une cour ne peut pas satisfaire à certains besoins d'ordre immédiat parce qu'il est obligé de s'en référer à plus haut pour administrer le budget, parce qu'à un moment donné on lui donne des choses qu'il ne demande pas et parce qu'on ne lui donne pas des choses qu'il demande.

M. CHOQUETTE: Le juge Fabien a sûrement eu des problèmes, comme nos autres juges en chef et nos autres services gouvernementaux, avec un certain nombre de services du gouvernement, tels que les Travaux publics, la Fonction publique, etc. Alors, il est sûr et certain qu'il est en butte à des tracasseries administratives dont tout le monde souffre dans l'état actuel des choses.

On pourrait dire aussi, si le député me permet d'allonger un peu mes remarques sur ça, que les pouvoirs des juges en chef, dans les diverses cours, pour voir à ce que leurs cours fonctionnent bien et que leurs juges soient au travail et s'acquittent de leurs fonctions, font l'objet d'un examen au ministère de la Justice pour voir jusqu'à quel point il serait opportun de les augmenter.

M. BURNS: J'ai une autre question...

M. HARDY: Est-ce que vous avez un nouveau conseiller?

M. BURNS: Oui, c'est parce que je m'apprête à passer au cabinet du leader parlementaire!

M. le Président, une dernière question d'ordre général sur l'affaire des juges. Cela me fait penser que tantôt vous nous avez mentionné, à l'occasion d'une discussion concernant la Commission de contrôle de la Régie des alcools, une certaine étude de Me Mier Zwinski. Est-ce que dans son étude — ou est-ce que c'est prématuré que je pose cette question au ministre — il y a des recommandations quant à l'administration de la justice en général dans le Nord-Ouest québécois?

M. CHOQUETTE: Beaucoup de recommandations. Il s'agit d'un volume, si je me rappelle bien, d'une centaine de pages, au moins, qui a été préparé par une équipe composée de Me Mier Zwinski, M. Jean-Claude Duchesneau, le secrétaire du ministère de la Justice, de l'inspecteur Jean Tellier de la Sûreté du Québec, de M. Poitras, le directeur général de la Direction du Nouveau-Québec au ministère des Richesses naturelles, du caporal Vignault, je crois, qui fut autrefois officier en poste à Fort Chimo ou dans un des endroits du nord. C'est une revue complète des problèmes de l'administration de la justice dans le Nord Québécois, suivie d'un certain nombre de recommandations.

Je m'attends à rendre ce document public aussitôt que le temps me permettra de le voir dans ses moindres détails.

M. BURNS: De toute façon, votre intention est claire, là-dessus. Vous allez le rendre public.

M. CHOQUETTE: Sûrement. Il a été rédigé avec l'idée de le rendre public.

M. PAUL: Ce n'est pas une promesse, à ce moment-ci, c'est une décision, déjà.

M. CHOQUETTE: C'est une décision qui peut' retarder quelque peu.

M. HARDY: Soumise à une condition "suspensive".

M. CHOQUETTE: C'est une question de délais.

M. BURNS: C'est une question de conditions de territoire, cependant. C'est "suspensif," si j'ai bien compris le ministre.

M. PAUL: C'est une obligation conditionnelle.

M. CHOQUETTE: Si l'on veut !

M. PAUL: Par extension. Mais je ne voudrais pas partir en discussion avec le député de Trois-Rivières.

M. BURNS: J'ai une autre question là-dessus, M. le Président. A l'article S 18: Juges de la cour provinciale, on remarque à la catégorie 15 des imputations. Comme c'est du statutaire, cela m'étonne de voir une réduction des imputations. Est-ce que le ministre peut nous expliquer cette réduction?

M. CHOQUETTE: Etant donné la nomination du juge...

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, M. le ministre, j'aimerais rappeler que tous ces articles sont les montants de crédits autorisés par statut. Nous n'avons pas, à la commission, à les autoriser.

M. CHOQUETTE: Nous ne l'oublions pas, M. le Président.

M. BURNS: C'est justement l'objet de ma question. C'est pour cela que j'ai dit que cela m'étonne, parce que c'est du statutaire. Si vous regardez, habituellement, il y a une progression normale, à cause des salaires qui augmentent, etc. Habituellement, c'est relativement stable, ces crédits-là. Or, à la catégorie des imputations, on voit que l'année dernière, c'était un montant de $56,000. Cette année, c'est la moitié. Quelle est l'explication de cette réduction?

M. CHOQUETTE: L'explication est fort simple, M. le Président. C'est qu'avant la nomination du juge Laperrière comme vice-président de la Commission de police, nous imputions deux salaires de juge, les salaires des juges Laperrière et Dionne, ici, à la cour Provinciale, tandis que, depuis que le juge Laperrière est devenu attaché à la commission de police de façon permanente, nous n'imputons qu'un seul salaire de juge, soit celui du juge Dionne, qui est nommé commissaire ad hoc.

M. LE PRESIDENT: Alors, les articles S 18,

S 19 et S 20 sont adoptés globalement, et si nous revenons à la page 144, nous avons l'article S 21 : Régime de retraite des juges et des coroners, Statuts refondus 1964, chapitre 20 et modifications. Adopté?

M. BURNS: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Article S 22: Protection civile. Adopté?

M. PAUL: Non, M. le Président, j'aimerais que l'honorable ministre nous résume la politique de la protection civile relative au plan PPB.

M. CHOQUETTE: PPBS?

M. PAUL: Non, non. PPB: La planification de la programmation du budget. C'est une invitation que je fais au ministre, sans trop insister, tout en l'invitant à lire l'excellent rapport qui nous a été remis ces jours derniers concernant le plan PPB. Le tout est mentionné à l'article 29, et considérant que je trouve là les renseignements que je désire, je retire ma question.

M. LE PRESIDENT: Alors, est-ce que l'article S 22 est adopté?

M. BURNS: Adopté.

M. HARDY: Le député de Maskinongé est devenu un spécialiste pour nous faire des peurs !

M. LE PRESIDENT: Au nom de tous les membres de la commission, je désire remercier les hauts fonctionnaires qui accompagnaient le ministre et remercier tous les membres de la commission de leur bonne collaboration.

La commission est ajournée sine die.

(Fin de la séance à 18 h 49)

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