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Commission permanente de la justice
Projet de loi no 59 Code des loyers
Séance du mercredi 27 septembre 1972
(Dix heures treize minutes)
Préliminaires
M. LAMONTAGNE (président de la commission permanente de la
justice): A l'ordre, messieurs! Le but de la présente commission est
d'étudier le projet de loi 59 du code des loyers. Nous entendrons
aujourd'hui cinq organismes et, pour le bénéfice des membres de
la commission et de ceux qui sont venus nous rencontrer, je vais donner l'ordre
dans lequel les organismes seront entendus.
L'Association canadienne des employés de téléphone,
la Corporation des enseignants du Québec, Gaz métropolitain Inc.,
l'Association du camionnage du Québec Inc. et l'Association des
propriétaires de Québec Inc. Nous entendrons d'abord le ministre
et ensuite, un représentant de chaque parti politique; par la suite, les
représentants des associations devront présenter leur
mémoire dans un délai le plus raisonnable possible et les membres
de la commission poseront ensuite des questions. M. le ministre.
M. CHOQUETTE: M. le Président, chers collègues, au
début de ces séances d'étude prévues pour
l'audition des personnes et organismes intéressés au projet du
code des loyers, je pense qu'il convient d'exposer les principes qui ont
présidé à l'élaboration de ce projet de loi.
J'en développerai ensuite les grandes lignes. Le projet de code
des loyers vise à combler les nombreuses lacunes de la loi actuelle.
Comme vous le savez sans doute, cette loi avait d'abord été
adoptée par le gouvernement fédéral durant la guerre, dans
le but de contrôler les tendances inflationnistes suscitées par la
pénurie de logements à cette époque.
La loi fédérale était rétroactive et gelait
les loyers au prix qu'ils avaient le 11 avril 1941. Lorsque la cour
Suprême déclara que la loi fédérale était
inconstitutionnelle en avril 1951, le gouvernement du Québec la reprit
à son compte, telle quelle, pour un an et la reconduisit annuellement
jusqu'à maintenant.
Le caractère temporaire de la loi, les dispositions parcellaires
et sélectives de son champ d'application ajouté aux multiples
modifications subies entre-temps, c'est-à-dire au cours des
années, ont fini par créer un état de confusion tel qu'il
est difficile pour les municipalités et les citoyens de s'y retrouver
aujourd'hui.
La loi actuelle, c'est-à-dire la loi pour favoriser la
conciliation entre locataires et propriétaires, ne visait, à
l'origine, que les maisons construites avant 1951, dans certaines
municipalités énumérées dans la loi. Depuis 1968,
toutes les municipalités peuvent demander l'application de la loi pour
les maisons construites avant le 30 avril 1968.
Mais, il appartient aux municipalités d'en faire la demande.
Malheureusement, jusqu'à tout récemmennt seuls les
propriétaires avaient le droit de vote aux élections municipales
et plusieurs municipalités où existe un problème de
logement n'ont pas jugé bon de prendre avantage de la loi. Il en est
ainsi, par exemple, pour Montréal, Ste-Foy et Hull.
J'aimerais ajouter, pour donner une idée de la confusion qui
entoure la loi actuelle, qu'un conseil municipal a déjà
demandé au gouvernement d'être assujetti à la loi et que
les employés de la régie découvrirent par la suite que la
municipalité en question était soumise à la loi depuis dix
ans et le conseil municipal l'ignorait totalement. Ce qu'il faut retenir ici,
c'est que la loi actuelle, qui veut assurer une protection à une
certaine catégorie de consommateur, c'est-à-dire les locataires,
n'atteint son objectif que partiellement selon que la loi s'applique ou non au
logement et dans les municipalités où résident ces
locataires.
D'autre part, étant donné que la loi actuelle ne couvre
qu'une certaine catégorie de logement, il s'est développé
dans certaines municipalités ce que j'appellerais un double
marché. Une partie des logements est contrôlée tandis que
l'autre ne l'est pas, ce qui a provoqué des différences
considérables parfois, dans le prix de location.
Dans les logements non assujettis à la loi, des augmentations
abusives de prix de location sont de plus en plus fréquentes. Selon des
sondages récents de la Régie des loyers, on a relevé des
hausses variant de 15 p.c. à 25 p.c. dans certains cas. Il est difficile
aussi au locataire de savoir si son logement tombe sous l'effet de la loi, car
dans une même rue et parfois dans un même édifice, tous les
logements ne sont pas assujettis à la loi.
A l'heure actuelle, dans les cas d'éviction, seuls les baux
prolongés par l'effet de la loi pour favoriser la conciliation entre
locataires et propriétaires sont visés et quand des conflits
surgissent dans les cas où la loi ne s'applique pas, ce qui veut dire
dans la majorités des logements, les parties doivent suivre les
prescriptions du code civil et du code de procédure civile.
Dans tout cela, M. le Président, il ne faut pas oublier non plus
les employés de la Régie des loyers. S'il est vrai qu'à
cause de la durée annuelle de la loi actuelle, les propriétaires
et les locataires sont toujours dans l'incertitude, cela est encore plus vrai
des employés de la régie qui sont dans l'insécurité
et qui ne bénéficient pas des avantages de la protection de la
Loi de la fonction publique. Le nouveau code des loyers, que j'ai eu l'honneur
de déposer en première lecture à la fin de la
dernière session, vise à combler toutes ces carences. Il
est basé sur deux principes: le principe de la permanence et le principe
de l'universalité.
Mais, avant d'entrer dans les détails, j'aimerais, M. le
Président, dissiper certaines appréhensions qui ont leur source
dans une fausse interprétation du projet de loi. Je veux dire bien
clairement, M. le Président, qu'il est ni dans le texte, ni dans
l'esprit de la loi d'imposer un gel des loyers. Le projet de loi ne contient
aucune disposition de ce genre. Les contrôles imposés visent
uniquement à empêcher les hausses abusives de loyer. Le logement
présente des tendances nettement plus inflationistes que les autres
secteurs de la consommation. Ainsi, l'indice des prix à la consommation
était de 141.8 pour le logement en 1970 contre 129.7 pour l'indice
global des prix à la même époque. C'est donc dire qu'il y a
urgente nécessité de réprimer les abus dans ce secteur
essentiel de la consommation. Mais encore une fois, je tiens à le
préciser, il n'est pas question d'un gel des loyers.
Deuxièmement, il n'est pas question, dans la loi, de fixer les
taux de location des logements nouvellement construits. La loi prévoit
en effet qu'un nouveau logement ne tombera sous l'application de la nouvelle
loi que le 31 décembre de la deuxième année qui suit
l'année au cours de laquelle il est devenu habitable. C'est donc dire
que le loyer d'un nouveau logement sera établi suivant le libre jeu du
marché. La loi ne devra pas nuire à la construction domiciliaire.
Comme je le disais il y a un moment, la loi que nous proposons a un
caractère permanent. Elle fait disparaître l'incertitude qui
régit les relations entre locataires et propriétaires et met fin
à l'insécurité des employés de la Régie des
loyers. Elle a également un caractère universel dans ce sens que,
dans les agglomérations où elle s'applique, tous les logements
sans exception tombent sous le coup de la loi, dès la sanction de la
loi, pour tout local d'habitation qui était habité ou habitable
au 31 décembre 1971 et le 31 décembre de la deuxième
année qui suit l'année au cours de laquelle ils sont devenus
habitables pour les nouveaux logements.
A ce sujet, le projet de loi s'applique aux agglomérations de
5,000 habitants et plus. Seules des difficultés d'ordre administratif
nous ont empêchés d'étendre l'application de la loi
à tous les logements de toutes les régions du Québec. En
termes de pourcentage, la loi couvre 88.7 p.c. de tous les logements locatifs
répartis dans 278 municipalités du Québec.
Les autres 11.3 p.c. des logements locatifs sont répartis dans
les quelque 1,300 autres municipalités du Québec et, dans ces
municipalités, le gouvernement peut rendre la loi applicable sur
requête de 50 locataires, s'il y a lieu.
M. le Président, pour comprendre l'effet de cette loi sur notre
milieu, je rappelle qu'en 1966, par exemple, 59.5 p.c. des logements en milieu
urbain au Québec étaient des logements locatifs contre 36.4 p.c.
en Ontario et 43.2 p.c. au Canada. Montréal comptait à ce moment
67.1 p.c. de locataires et 32.9 p.c. de propriétaires, alors qu'à
Toronto la proportion était à peu près inverse, soit 38.3
p.c. de locataires et 61.7 p.c. de propriétaires.
Nous avons tenté de faire en sorte que les mécanismes et
les structures de l'organisme de contrôle soient simples afin que les
différends entre propriétaires et locataires soient
réglés de façon expéditive et, je tiens à le
préciser, sans frais. La structure que nous proposons comporte deux
niveaux. A la base, il y a un commissaire en chef des loyers, assisté de
commissaires et de commissaires adjoints, qui est chargé d'entendre en
première instance les demandes des locataires et des
propriétaires dans les cas prévus par le projet de loi. Si la
décision rendue ne satisfait pas les parties, elles peuvent en appeler
de la décision des commissaires à un tribunal des loyers qui est
composé de trois juges de la cour Provinciale. Ces deux étapes
peuvent être franchies en un court laps de temps.
Afin de prévenir les hausses abusives de loyer, le projet de loi
stipule que l'augmentation annuelle de loyer que les parties, soit locateur et
locataire, peuvent convenir entre elles ne peut excéder 5 p.c. Cette
disposition, M. le Président, ne signifie pas que nous consacrons le
droit à des hausses de loyer automatiques de 5 p.c. annuellement, pas du
tout. Il est en effet loisible au locataire de faire appel au commissaire des
loyers pour contester une demande d'augmentation inférieure à 5
p.c. Cette disposition ne signifie pas non plus que nous plafonnons toute
hausse de loyer à 5 p.c. par année. La loi permet, en effet, au
propriétaire de s'adresser au commissaire pour faire reconnaître
son droit d'exiger toute augmentation de loyer qu'il peut justifier et qui
excède 5 p.c.
Maintenant, M. le Président, j'aimerais mentionner rapidement
quelques autres aspects du projet de loi soumis à l'étude de
cette commission. Disons d'abord que, règle générale,
chaque bail, à sa date d'expiration, est prolongé automatiquement
jusqu'au 30 juin suivant cette date. Pour dissiper la confusion que cette
disposition du projet de loi a pu créer, j'aimerais préciser, M.
le Président, que cette prolongation automatique ne peut cependant
s'effectuer à l'encontre de la volonté des parties à un
bail.
La loi prévoit, en effet, que le propriétaire ou le
locataire peut, au moins 60 jours avant la fin du bail, donner à l'autre
partie avis de son intention de ne pas voir le bail prolongé
automatiquement pour un autre terme, soit jusqu'au 30 juin suivant. Cependant,
lorsqu'un tel avis aura été donné par le
propriétaire, le locataire qui le désire pourra s'adresser au
commissaire pour obtenir une prolongation de son bail. Cette mesure vise
à assurer le maintien
du locataire dans les lieux loués. La loi prévoit, d'autre
part, les raisons que le propriétaire peut opposer à une telle
demande de prolongation.
Notons enfin que la date du 30 juin mentionnée dans le code des
loyers est proposée comme date de terminaison des seuls baux
prolongés par l'effet de cette loi. Il faut donc comprendre que les
parties à un bail restent libres d'y stipuler le terme qui leur
convient. D'autre part, le projet énumère les causes que le
propriétaire et le locataire peuvent invoquer pour motiver le
commissaire à décréter la résiliation d'un bail. Le
projet énumère aussi les cas où le propriétaire
peut demander l'éviction du locataire.
D'autres dispositions de la loi visent à assurer que seront
effectuées les réparations prévues dans un bail ainsi que
toutes celles auxquelles oblige la loi ou un règlement municipal.
De plus, le projet prohibe certaines clauses abusives que l'on trouve
actuellement dans les baux.
Enfin, le projet de loi prévoit des pénalités en
cas d'infraction, en particulier lorsqu'il y a refus de louer pour divers
motifs de discrimination.
M. le Président, je n'entre pas davantage dans les détails
du projet de loi. Il y aura sans doute lieu de discuter de certains articles
particuliers à partir des représentations qui seront faites dans
les mémoires que les diverses associations présenteront devant
nous ainsi que dans les points de vues que nos collègues à cette
table voudront bien exprimer.
Avant de terminer, M. le Président, j'aimerais ajouter que le
projet de refonte du code des loyers que vous avez devant vous constitue le
résultat de deux années d'études. Divers
spécialistes ont pris part à son élaboration sans compter
les multiples consultations que nous avons eues avec les différents
groupements intéressés au projet. Il va sans dire que les
représentations des groupes intéressés et des personnes
qui manifestent un point de vue sur ce projet de loi sont bienvenues et que
j'étudierai avec la plus sérieuse considération toute
suggestion susceptible d'apporter des améliorations au contenu du projet
qui est présentement devant nous. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Merci beaucoup. Le député de
Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, ayant déjà eu la
responsabilité de l'application de la loi régissant les relations
entre locateurs et locataires, je dois vous signaler que c'est avec
intérêt que j'ai pris connaissance du texte de l'avant-projet de
loi ou du projet de loi 59 dit code des loyers.
Je n'ai pas ce matin à me prononcer sur les différents
principes du projet de loi, parce que nous n'en sommes pas à la
deuxième lecture du projet de loi. Il faut retenir, cependant, les
déclarations que nous a faites le ministre et surtout celle-ci, qu'il
prononçait au tout début de ses remarques, à l'effet que
le code des loyers devait combler certaines lacunes de la loi actuelle qui
régit les relations entre propriétaires et locataires. Sous
prétexte de corriger un mal, il ne faudrait pas cependant en
créer un autre. C'est pourquoi c'est avec beaucoup de réserve que
nous abordons l'étude de cette loi qui contient d'excellents principes
mais qui, sûrement, devra présenter des modalités
d'application à mon humble point de vue différentes afin de
satisfaire l'esprit du législateur et les excellents principes que l'on
veut atteindre avec cette loi. Ce qu'il y a d'intéressant à
noter, M. le Président, et je suis sûr que vous l'avez
remarqué comme tous les membres de la commission, c'est l'initiative du
Québec, en 1951, de légiférer en matière de loyers
à la suite du jugement de la cour Suprême qui avait
déclaré inconstitutionnelle la législation
fédérale. J'espère que cette attitude énergique du
gouvernement provincial de l'époque pourra servir d'exemple au
gouvernement actuel pour agir dans d'autres domaines qui sont de sa
compétence, au lieu d'être constamment à la remorque de
l'autorité centrale.
Je dis, M. le Président, que cette loi vient corriger une loi de
caractère permanemment annuel, parce que c'était toujours
à la toute fin d'une session que nous recevions une demande de la part
de la régie des loyers, spécialement de la part de l'honorable
juge Ross qui, soit dit en passant, mérite des félicitations
ainsi que tout son personnel pour le souci qu'ils ont toujours
déployé dans l'application d'une loi, dans des cadres confus.
Les recommandations qui nous ont été livrées ce
matin résultent, j'en suis sûr, en grande partie des excellentes
suggestions de l'honorable juge Ross et de tout son personnel qui ont
vécu une situation spécialement un peu perturbée dans la
région de Montréal et dans les grands centres où ils
avaient charge de l'application de la loi.
Cette loi, M. le Président, aura pour effet d'établir une
certaine sécurité chez les locataires et également, chez
les propriétaires, en autant que, en certaines circonstances dans
le cours de l'étude de la loi en commission ou plus tard nous
verrons à recommander au législateur, au ministre de la Justice,
d'apporter certaines modifications dans le sens des propos que tenait le
ministre de la Justice alors que, député d'Outremont comme
aujourd'hui, il avait parrainé à l'Assemblée nationale, la
formation d'une commission dite spéciale pour étudier le
problème des relations entre locataires et locateurs,
spécialement dans la ville d'Outremont, Montréal.
Le ministre, aujourd'hui, embrasse avec sa loi, non plus un territoire
donné qui est celui de la ville d'Outremont, mais également tout
le territoire du Québec et spécialement là où la
population dépasse les 5,000 âmes. Certaines mesures peuvent
paraître, comme le disait le ministre tout à l'heure, un peu
ambiguës dans la
rédaction du texte actuel de la loi, mais je suis sûr
qu'à la lumière des mémoires qui nous seront
présentés par les organismes, les individus ou les associations
qui s'intéressent de près aux relations entre locateurs et
locataires... Ils permettront au législateur de, peut-être, mieux
préciser et davantage le texte de loi, pour éviter une
interprétation qui deviendra parfois onéreuse de la part des
membres du nouveau tribunal du travail.
Je regrette, M. le Président, que l'on ne retrouve pas dans la
loi, des normes ou des critères de base qui devront servir
nécessairement d'apui ou de pierre angulaire, de la part de ceux qui
auront charge d'appliquer la loi. C'est peut-être un défaut que
l'on a retracé jusqu'ici. J'en avais parlé à
l'époque avec M. Gauron, M. le juge Ross, M. Massé et tous ceux
qui s'occupaient de l'application de la loi de la régie aux fins
d'établir des règles, des normes, des critères
d'évaluation ou d'appréciation de valeurs locatives des logements
dans un milieu donné.
C'était assez difficile que la régie inaugure dans ce
domaine dans des règles connues du public, parce que les critères
d'évaluation étaient différents d'un milieu à
l'autre. Mais, comme nous avons aujourd'hui la loi 48 dont l'application
deviendra un jour notoire, même si nous sommes encore dans la phase de
tâtonnements et d'interprétations dans ce domaine de
l'évaluation foncière, loi 48 et loi 20, je suis sûr que le
tribunal des loyers, de concert avec les hauts fonctionnaires compétents
du ministère de la Justice, pourra arrêter des critères
d'évaluation de loyers qui pourront s'appliquer, du moins je
l'espère, dans tout territoire du Québec qui deviendra
régi par cette nouvelle loi, ce nouveau code des loyers.
Est-ce qu'on devrait l'appeler code des loyers, je dis cela en passant,
je réfléchis tout haut, parce que le code a une portée
beaucoup plus étendue que le terrain que l'on veut couvrir par ce texte
de loi.
Il s'agit donc, M. le Président, pour vous, d'envisager
l'étude d'une loi dont le but premier est de mettre fin à
certaines hausses abusives des loyers. Ce n'est pas à l'étendue
du territoire du Québec que ces abus se présentent. Il faut tenir
compte que les locataires en sont surtout victimes dans les grands centres
comme Québec, Montréal, Hull, Sherbrooke, Verdun, Outremont, et
d'autres villes de même importance qui sont aux prises avec des
difficultés financières qui leur imposent souvent l'obligation de
hausser la taxe foncière ou l'assiette municipale des revenus, mais
peut-être que le ministre de la Justice pourrait se faire un excellent
interprète des municipalités auprès du ministre des
Finances et auprès du ministre des Affaires municipales pour que l'on
envisage une contribution plus généreuse de la part du
gouvernement provincial en faveur des municipalités. Ceci dispenserait
nos édiles municipaux d'imposer des taxes onéreuses, ce qui force
nécessairement le pro- priétaire à aller chercher chez le
locataire cette hausse de taxe.
Est-ce que c'est une question d'interprétation, de recouvrement
de cette taxe foncière haussée que l'on fait supporter par les
locataires? Personnellement, je ne crois pas que les locataires doivent
supporter indirectement cette hausse de taxe que l'on impose aux
propriétaires mais, d'un autre côté, peut-être que
les propriétaires aussi doivent être aidés dans cette
hausse constante de leur évaluation commandée par des services
publics toujours de plus en plus nombreux que l'on doit donner dans le secteur
de leur administration.
Le ministre a signalé que la législation pourrait avoir
également pour effet non pas seulement de mettre fin à une hausse
de loyer abusive dans certains cas. Je sais que ce n'est pas la
généralité d'une telle politique qui est appliquée
dans le Québec, mais dans certains endroits, c'est réellement
abusif de la part des propriétaires. A ce moment-là, cette loi
que nous sommes appelés à étudier aura sûrement pour
effet de mettre les locataires ou les gagne-petit à l'abri de mesures
abusives de la part de leur locateur. Pour ce qui a trait à la
sécurité des employés actuels de la régie, j'en
suis fort heureux, mais il ne faudrait pas que le ministre nous dise qu'il
présente une loi pour leur donner à eux la sécurité
de l'emploi. C'est une sécurité dont ils ont besoin, qui leur est
nécessaire pour les mettre à l'abri de tout souci matériel
et qui leur permettra de continuer à oeuvrer, de donner le meilleur
d'eux-mêmes dans l'accomplissement de leurs fonctions. Ce n'était
pas facile, j'en conviens, de donner la sécurité d'emploi aux
employés de la régie alors qu'à la base même de la
loi, il y avait un caractère dit temporaire. De 1951 à nos jours,
ceux qui avaient charge de l'application de la Loi, soit au ministère de
la Fonction publique ou à la Commission de la fonction publique,
refusaient toujours d'accorder un caractère de sécurité
aux employés de la régie sous prétexte que, par sa nature
même, la loi dans laquelle ils oeuvraient ou pour laquelle ils oeuvraient
avait un caractère temporaire, puisque c'était toujours d'une
année à l'autre que la loi était reconduite ou
continuée. Je me réjouis avec les employés de la
régie pour cette occasion qu'ils auront de trouver, par le
mécanisme de cette loi, la sécurité à laquelle ils
ont droit. Ceci ne pourra que créer d'excellentes relations entre, d'une
part, leurs officiers, et d'autre part, les officiers du ministère de la
Justice chargés de l'application de cette loi.
Je veux pour le moment, M. le Président, restreindre ainsi mes
remarques et je suis sûr que tous ceux qui s'intéressent au
problème, locateurs, locataires dans le Québec, seront vivement
intéressés par la portée des mémoires qui nous
seront présentés. Je suis sûr qu'à cette commission,
comme à toutes les autres commissions de l'Assemblée nationale,
nous pourrons procéder avec une aération d'esprit, une ouver-
ture d'esprit qui soit toujours non pas dans l'intérêt
immédiat ou partisan d'un parti politique, mais dans le meilleur
intérêt de la population du Québec.
Je m'en voudrais de ne pas féliciter le ministre de l'initiative
qu'il a prise et pour le respect de l'engagement qu'il avait pris au mois de
juillet 1970, engagement répété en 1971, lorsque nous
avons été appelés à étudier la loi
prolongeant les relations entre locateurs et locataires. Le ministre se
rappellera sans doute que, spécialement notre collègue de
Maisonneuve et moi-même, nous étions intéressés de
près à cette situation; nous n'avions pas oublié les
excellentes déclarations de principe du ministre de la Justice, alors
qu'il était le porte-parole de la Justice à un moment
donné à la suite de certains départs dans l'équipe
libérale.
M. CHOQUETTE: Par l'élévation à la magistrature,
c'est cela que vous voulez dire?
M. PAUL: Non, disons, M. le Président, que j'ai bien pesé
mon mot et que je ne voudrais pas ce matin chanter de mélodie. Encore
là, M. le Président, je constate que mon collègue
péquis-te veut m'entraîner sur une pente dangereuse. Je me
réserve et je crois que tous m'ont compris.
M. BURNS: C'est vous qui vous y êtes placé, cher
collègue.
M. PAUL : Non, je me suis placé sur le haut de la côte et
je m'y suis arrêté. Alors, disons que nous nous comprenons tous,
M. le Président. Quant à nous, de l'Unité-Québec,
vous pouvez être assuré de notre meilleure collaboration pour
tâcher de résoudre un problème d'une cruelle
actualité qui existe au Québec, aux fins d'établir
d'excellentes relations entre locataires et locateurs, et également pour
sauvegarder les intérêts du locataire et en même temps les
droits et obligations du locateur.
C'est dans cet esprit, M. le Président, que nous sommes
prêts à aborder l'étude du code des loyers, du projet de
loi no 59.
M. LE PRESIDENT: Le député de Richmond.
M. BROCHU: M. le Président, très brièvement, je
pense que nous connaissons globalement le problème qui existe au niveau
des réalités qu'entend toucher le projet de loi qui est devant
nous aujourd'hui. Je pense que ce n'est pas l'endroit pour décrire
toutes ces réalités. Nous sommes conscients du besoin d'une
réglementation afin de pallier certains problèmes qui existent,
mais nous aimerions, pour notre part, que cette réglementation soit
souple et surtout qu'elle soit une réponse adéquate à des
besoins précis et qu'en ce sens la loi réponde le plus
adéquatement possible à la réalité. Pour ma part,
j'aimerais réserver mes commentaires pour plus tard et je serais
prêt à passer à l'audition des mémoires que nous
avons devant nous afin que la lumière soit faite sur cette question et
que nous puissions, face aux recommandations qui pourront nous être
faites, apporter certaines modifications afin de bonifier davantage ce projet
de loi.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, le ministre de la Justice nous appelle
aujourd'hui à travailler et parfaire son projet du code des loyers. Il
s'agit là d'une mesure aussi attendue de la population que promise par
le gouvernement. Dès décembre 1970, on annonçait qu'une
refonte était en préparation et qu'une loi serait
présentée dans les mois suivants, promesse qui fut
réitérée à l'étude des crédits du
ministère de la Justice en 1971 et lors de l'étude du projet 46
à la fin de la même année.
Nous sommes soulagés de voir le ministre honorer sa promesse
d'autant plus que nous commencions à douter un peu de sa
sincérité, du moins quant au délai de présentation
du projet. Nous espérons que notre insistance à réclamer
ce code des loyers a été un aiguillon salutaire pour le ministre
et les fonctionnaires qu'il avait chargés de la refonte et que nos
propositions que la procédure parlementaire avait fait articuler sous
forme d'amendement à l'ancienne loi ont pu les aider dans leur travail,
sinon dans leur hâte de le mener à terme.
Les notes explicatives du projet de loi font état, en premier
lieu, du caractère permanent des mécanismes qu'il met en place.
Nous sommes heureux d'en féliciter le ministre de concert, sans doute,
avec ceux qui, comme nous, réclament cette mesure depuis plusieurs
années sans négliger cet élément dont
l'intérêt vient surtout du fait qu'il a tant tardé. Notre
attention se porte surtout sur les deux axes du projet, c'est-à-dire son
aire d'application, d'une part, et les mécanismes de conciliation,
d'autre part.
Nous avons déjà cherché à amender l'ancienne
loi de façon à en étendre les effets à toutes les
municipalités du Québec. Le ministre avait répondu
à ce moment-là qu'il faudrait savoir si l'état de crise
existe d'une façon suffisamment généralisée pour
nous faire abandonner le système en vertu duquel la décision
finale reposait sur les autorités locales. Force nous est de croire,
à la lecture de l'article 13 du projet, que cette crise existe puisqu'on
nous propose d'abandonner l'ancien système.
Toutefois, si le ministre s'est rendu à notre analyse des faits,
il n'a pas retenu notre solution. Il propose plutôt qu'il revienne au
cabinet d'apprécier les besoins de la population de chaque
municipalité. Pareille délégation des pouvoirs de
l'Assemblée nationale nous inquiète. On l'a vu, le gouvernement
prend souvent
beaucoup de temps à reconnaître les besoins sociaux. De
plus, cette délégation n'est accompagnée d'aucun
critère pouvant guider le cabinet dans quelques-unes, au moins, des
nombreuses décisions qu'il devra prendre.
Nous croyons donc qu'il revient au ministre de nous convaincre qu'il est
impossible d'étendre la loi à toutes les municipalités et
qu'il est impossible de restreindre les pouvoirs d'appréciation que
prévoit l'article 13 et soulager ainsi le cabinet de l'odieux
qu'entraîne toujours l'exercice de pouvoirs arbitraires. Tant que cette
démonstration n'aura pas été faite, nous continuerons de
maintenir que la loi devrait s'appliquer à toutes les
municipalités du Québec.
L'intervention du commissaire dans les relations entre les parties
à un bail est sensiblement différente de celle qu'on permettait
à l'administrateur sous l'ancienne loi. D'abord, la façon dont il
est amené à intervenir puis ses pouvoirs d'intervention sont
différents. Le texte proposé prévoit deux façons de
faire intervenir le commissaire dans la négociation d'un nouveau loyer
selon que la majoration dépasse ou non un certain seuil d'augmentation.
Nous sommes d'accord sur le principe; d'ailleurs, nous avons été
les premiers à proposer, lors du débat de 1970, la
détermination d'un index du taux d'augmentation des loyers.
Ce que nous ne pouvons accepter toutefois, c'est que la loi
établisse un seuil unique d'augmentation autorisable qui soit
généralisé à l'échelle de tout le
Québec. Une telle façon de procéder ne peut avoir comme
résultat que de rendre la loi ou bien injuste ou tout simplement
inefficace tant pour les propriétaires d'immeuble que pour les
locataires et ceci en raison du fait que les conditions économiques du
logement varient énormément d'un territoire à l'autre.
En effet, la détermination d'un seuil unique devra
forcément satisfaire certaines catégories de propriétaires
dont les frais inhérents à la propriété d'immeuble
subissent des hausses soutenues. C'est ce qui explique que le gouvernement ait
choisi un taux autorisé d'augmentation suffisamment élevé
pour être à l'abri de critiques des propriétaires,
indépendamment du fait que leurs immeubles soient localisés
à Montréal ou en Gaspésie. Et pourtant sur l'ensemble du
territoire, les conditions économiques inhérentes à la
localité ou aux différentes caractéristiques du logement
possédé ne justifient nullement des augmentations de l'ordre de 5
p.c. par année.
Rappelons à cet effet que le taux moyen d'augmentation annuelle
des loyers au Canada se situe pour la période 1961 à 1972
à quelque 2 1/4 p.c. Pour Montréal, l'indice des prix et des
loyers est encore plus bas, c'est-à-dire 1 1/2 p.c. d'augmentation
annuelle. Un taux de 5 p.c. risque donc non seulement de rendre
inopérantes certaines dispositions de la loi, mais également
d'encourager la croissance du coût des loyers à un rythme
supérieur aux augmentations moyennes observées au cours des
dernières années.
Certes, on dira que le locataire peut contester toute augmentation
inférieure à 5 p.c, comme le disait tantôt le ministre.
Mais, il demeure essentiel alors de ne pas perdre de vue que le seuil
détermine des conditions fort différentes d'adjudication par la
commission. Le principe du seuil vaut en autant qu'il touche la grande
majorité des augmentations clairement injustifiées, sinon cette
partie de la loi sera inopérante pour la majorité des citoyens.
Quant à l'autre possibilité, celle de réduire le taux
à 1 p.c, 2 p.c. ou 3 p.c, nul doute qu'on créerait ainsi de
nombreuses injustices à l'égard des propriétaires dont les
charges varient énormément d'une région à une
autre, qu'il s'agisse des assurances sur l'immeuble, des coûts de
réparation et d'entretien, des coûts du combustible, de
l'amortissement et, particulièrement, des taxes foncières.
Signalons à titre d'exemple qu'au cours des dernières
années, les charges du propriétaire de logement ont
augmenté plus rapidement à Québec qu'à
Montréal. Notons enfin qu'en facilitant la répétition
d'augmentations annuelles, l'Etat lui-même encouragerait les
propriétaires à pratiquer la répétition à
chafne d'augmentations annuelles de 5 p.c, particulièrement là
où les règles de l'offre et de la demande favorisent l'escalade
des loyers. C'est particulièrement le cas dans les grandes villes
où la rareté de l'espace disponible a pour effet de permettre la
formation de rentes foncières inacceptables. Aussi, en favorisant la
pratique d'augmentations répétées dans certaines zones
populeuses des grandes villes, la loi aurait pour effet de faire porter par les
populations défavorisées le prix d'une carence dans l'offre du
logement. C'est pourquoi nous recommandons que les taux à autoriser
soient fixés par le lieutenant-gouverneur en conseil selon les
conditions économiques particulières aux territoires et
municipalités et après avis du commissaire en chef.
Il reste un dernier élément essentiel pour nous à
un code des loyers, le bail type. Il s'agit là, pour nous, d'un point
fondamental sans lequel le projet que nous étudions maintenant ne peut
atteindre les objectifs que nous lui fixons. Nous en avons déjà
proposé un dès la première fois que la présente
Législature a étudié un projet de législation
modifiant la loi pour favoriser la conciliation entre locataire et
propriétaire. Le ministre, alors, sans exposer aucun argument contre le
fond de notre proposition, a répondu que le temps n'était pas
approprié et qu'il était encore trop tôt pour adopter un
projet dont son gouvernement aurait pu être satisfait. Invoquant aussi le
dernier rapport du comité du droit de louage de choses qu'il
était alors le seul de tous les participants au débat à
connaître, il a fait valoir qu'une étude approfondie de ce rapport
était
nécessaire avant d'imposer un bail type. Après que le
rapport ait été rendu public, nous avons été
à même d'apprécier la qualité des arguments du
ministre. Ce rapport, comme le disent les commissaires, concerne la
révision de ce qui est actuellement dans les articles 1605 à 1665
du Code civil. Bien sûr, les suggestions qu'on y trouve ne sont pas
étrangères au bail type, mais elles n'ont pas du tout le
même objet. En tout cas, elles justifiaient peu qu'on remette
indéfiniment l'adoption d'un bail type.
Quant à la proposition qui nous a alors été faite
de reprendre l'étude de cette question à la commission
parlementaire spéciale sur l'habitation et le logement, le ministre peut
seul répondre du sérieux et de l'honnêteté avec
lesquels elle fut lancée. Quoi qu'il en soit, nous avons maintenant en
main le rapport qu'a évoqué le ministre de même que le
texte de notre amendement et le texte d'autres projets de bail type qui ont
été élaborés depuis et nous espérons cette
fois pouvoir en discuter pleinement. Après 22 mois, le ministre ne peut
plus prétexter la surprise et le manque de données. Par ailleurs,
plusieurs dispositions du projet font aussi l'objet de notre
réflexion.
L'article 14 qui oblige le locataire à produire une
déclaration indiquant le loyer des locaux qu'il loue ou offre de louer
va permettre non seulement une application plus facile de l'article 65, mais
aussi une collecte de données très précises sur le
logement au Québec que souhaitent tous ceux qui travaillent à
l'élaboration d'une politique de l'habitation. Le second alinéa
de l'article 19 nous semble une excellente mesure de contrôle. Cette
mesure et les avis et demandes prévus aux articles 20 et 24 assurent une
meilleure protection des droits du locataire que les termes de notre
proposition de 1970. Cependant, nous nous étonnons que les
critères énoncés à l'article 21, à savoir la
considération de l'état de l'immeuble et de l'état des
parties dans la fixation d'un loyer juste et raisonnable ne s'appliquent qu'aux
décisions rendues sur une demande d'augmentation qui dépasse le
taux fixé. Sans doute faudrait-il rendre l'article 21 applicable aussi
aux décisions rendues sous l'article 26.
Quant au report de la date d'expiration des baux du 30 avril au 30 juin,
nous avons hâte d'entendre les justifications du ministre.
A première vue, nous préférons la seconde solution
du rapport préliminaire du comité du droit de louage de choses
et, ainsi, étaler sur toute l'année la date d'expiration et le
temps des déménagements.
Au sujet des reprises de possession, nous nous étonnons, lorsque
celles-ci sont justifiées par la conversion de l'immeuble en
établissement industriel ou commercial ou par le
réaménagement des loyers à l'intérieur d'un
même immeuble, de voir que les délais d'avis sont deux fois plus
courts que dans le cas d'augmentation du loyer.
Ces transformations d'un immeuble sont rarement urgentes et
découlent, le plus souvent, de projets vieux de plus de quatre mois. Il
ne serait pas abusif de prescrire les délais de l'article 20 pour les
demandes faites selon les articles 33 et 34. A propos du tribunal des loyers,
nous ne voyons pas pourquoi la recommandation du rapport du groupe de travail
sur les tribunaux administratifs, à l'effet que les décisions
soient motivées et publiées dans des recueils, n'a pas
été retenue. Cela ne contribuerait qu'à parfaire le droit
et la connaissance que peuvent en avoir les justifiables.
Il est enfin plusieurs autres points que nous espérons discuter
avec les témoins, de façon à parfaire le plus possible
cette loi fort importante puisque nous n'aurons plus, chaque année,
l'occasion de rappeler au gouvernement ses obligations envers les
locataires.
M. PAUL: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. PAUL: Je n'ai pas l'intention de passer des remarques sur les propos
tenus par mes collègues de Richmond et de Maisonneuve. Je voudrais
cependant faire appel à l'article 2, cinquièmement, de nos
nouveaux règlements dits code Lavoie, même si quelques-uns ne
l'aiment pas, pour me prévaloir d'une tradition qui veut qu'à
l'occasion de l'anniversaire de naissance du premier ministre et du chef de
l'Opposition, nous suspendions nos travaux pour quelques minutes pour
présenter nos hommages et nos voeux de bonne fête.
Comme c'est aujourd'hui la fête du chef de l'Opposition, le
député de Bellechasse, vous conviendrez que c'est avec beaucoup
de plaisir que je veux lui transmettre, au nom des collègues de
l'Unité-Québec, des voeux de circonstance. Ce n'est pas facile
d'être chef d'un parti politique. Les uns sont pris à vouloir
abrier les déclarations que peuvent faire certains ministres,
déclarations parfois embarrassantes. Les autres sont pris avec le
problème de l'enregistrement d'un parti politique ou non.
D'autres sont pris avec des déclarations tenues, d'une part, par
le chef parlementaire d'un parti politique et, d'autre part, par le chef ou
président extérieur de l'Assemblée nationale. Enfin,
d'autres sont pris avec des départs de collègues qui n'ont pu
accepter le résultat d'une convention. Ce qui reste de tout ça,
M. le Président, c'est que tous les députés, quelle que
soit leur allégeance politique, forment une grande famille et tous
partagent les difficultés du moment que peut connaître l'homme
public.
Tous également s'associent à l'événement
heureux qui peut marquer la vie d'un parlementaire et je suis sûr ce
matin, M. le Président, que tous les collègues, quelle que soit
leur allégeance politique, s'unissent à moi pour souhaiter au
député de Bellechasse toute la santé que requièrent
la tâche qu'il s'est imposée et l'idéal
qu'il vise, et pour rencontrer les aspirations du peuple
québécois.
Je suis sûr qu'il se console, ce matin, à la pensée
qu'il y a toujours un peu plus de 50 p.c. de la population du Québec qui
reste indécise quant au choix qu'elle sera appelée à faire
advenant les prochaines élections que nous souhaitons, quant à
nous, très prochaines. De toute façon, M. le Président, je
veux transmettre au député de Bellechasse des voeux de patience,
des voeux d'excellente santé. Je lui souhaite de garder son excellente
humeur et c'est ainsi qu'il aura la satisfaction d'avoir accompli beaucoup pour
ses concitoyens du Québec.
M. LE PRESIDENT: Le ministre de la Justice.
M. CHOQUETTE: M. le Président, j'ignorais ce matin, en m'en
venant à la commission de la justice pour cette première
séance sur le code des loyers, que cela concordait avec l'anniversaire
de naissance du chef de l'Opposition. Je vous félicite, M. le
député de Maskinongé, d'avoir rappelé
l'anniversaire de notre excellent collègue et de lui avoir
souhaité vos meilleurs voeux pour l'année qui va suivre.
Je crois, si vous me demandez mon avis personnel, qu'il aura besoin de
ces bons voeux dans l'année qui va suivre car il est incontestable que
le député de Bellechasse est appelé à rendre des
services à la formation politique qu'il dirige dans une conjoncture
historique très difficile. Je n'ai nul doute qu'il saura traverser les
difficultés actuelles dans lesquelles se trouve son parti. Il a
d'ailleurs déjà fait preuve de beaucoup de sens des
responsabilités dans ses interventions publiques en de nombreuses
occasions, et j'ai été en mesure d'admirer sa capacité de
garder son sang-froid et son jugement, même dans des circonstances
où il aurait pu tenter de profiter indûment de certaines
situations particulièrement critiques.
M. le Président, tout en étant des adversaires politiques,
il nous est quand même permis de nous estimer et je veux exprimer, au nom
de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, l'estime que
nous avons pour le chef de l'Opposition et lui souhaiter bonne santé et
beaucoup de courage.
M. LE PRESIDENT: Le député de Richmond.
M. BROCHU: M. le Président, c'est sûrement un hasard, ce
matin, que l'on remplace la conciliation entre locataires et
propriétaires juste au même moment de l'anniversaire de naissance
du chef de l'Opposition. Le député de Maskinongé a
décrit certaines situations où il y a beaucoup
d'expérience à prendre, il l'a fait avec beaucoup d'humour.
J'aimerais donc profiter de l'occasion, à mon tour, ici, pour offrir mes
meilleurs voeux au chef de l'Opposition, les meilleurs voeux de santé,
au nom de mon parti, le Ralliement créditiste du Québec et nos
meilleurs voeux de prospérité aussi, pour qu'il continue à
effectuer le travail qu'il a déployé en Chambre depuis que nous
le connaissons. Je pense que je me fais le porte-parole de tous mes
collègues à cet effet.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, pour une fois on ne dira pas que le
Parti québécois ne se joint pas aux autres partis. Il me fait
également plaisir de formuler mes meilleurs voeux de bonne fête au
député de Bellechasse. Comme le disait le député de
Maskinongé, ce n'est sûrement pas facile d'être chef de
parti et j'ajouterais surtout d'un parti comme celui-là. J'espère
que ses problèmes se sont allégés depuis quelque temps,
depuis que son parti a pu vendre certains intérêts. Très
sérieusement, je lui souhaite tout le succès possible dans son
entreprise de garder en vie son parti politique.
M. LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition.
M. LOUBIER: M. le Président, vous comprendrez mes sentiments de
gratitude à l'endroit de ceux qui ont très gentiment
transgressé les règles parlementaires et le code Lavoie et qui
ont voulu exprimer leurs sentiments personnels à l'occasion de cet
événement dont j'aurais souhaité qu'il passât
inaperçu. Mais je serai à même, à la fin de la
présente année, de pouvoir vous confirmer ou non si l'adage qui
veut que la vie commence à 40 ans a de véritables fondements et
si, subjectivement, il peut s'incarner dans la personne de celui qui parle.
Je voudrais remercier de façon particulière le
député de Maskinongé qui a ouvert le bal en cette
journée de fête pour les paroles et les propos qu'il a tenus
à mon endroit. J'aimerais souligner que je n'ai pas eu besoin de
psychanalyser sa déclaration pour reconnaître ses sentiments
d'amitié, de fidélité et de dévouement envers le
chef d'un parti. Est-ce que c'est le parti qui est en difficulté ou si
c'est le chef? On le verra au cours des prochains mois. Je voudrais,
également, en toute justice, remercier le député
d'Outremont qui, d'une façon très charmante et marquée au
coin d'un sérieux que j'ai apprécié aussi, a bien voulu
exprimer ses voeux.
Quant à mon ami de gauche, au sens physique du mot, le
député de Richmond, je tiens également à lui dire
que la façon avec laquelle il s'est exprimé, c'est
véritablement faire du bon crédit social auprès du chef de
l'Opposition et des autres collègues. Quant à mon frère
séparé de Maisonneuve, je voudrais lui dire un merci très
sincère également pour les voeux qu'il m'a adressés avec
une certaine petite allusion à l'état de santé du parti.
Je tiens
à lui dire que nous sommes en train de donner des vitamines
à cette formation politique, que nous essayons de faire maison neuve
pour que cela devienne de plus en plus intéressant pour...
M. BURNS: Pour Maisonneuve.
M. LOUBIER: ... les Québécois. Il y a tout de même
50 p.c, 52 p.c. de la population qui attendent
désespérément du parti Unité-Québec et qui
souhaitent de tout coeur puisqu'on veut infiltrer une coloration
politique à ces voeux, mais sur un ton bien amical, je le
reconnais et qui attendent énormément de nous. Nous
essaierons, sans tambour ni trompette, de faire notre petit bonhomme de chemin
en nous inspirant toujours d'un très haut degré de logique, de
raison, de bon sens; je pense que c'est ce dont nous avons le plus besoin au
Québec dans toutes nos transformations, dans tout ce monde en
ébullition, dans ce tourbillon de réformes sur les plans social,
économique et politique. J'ai été heureux d'entendre
répéter tout à l'heure que tous les députés
de cette chambre ici, nous travaillons tous, chacun avec nos convictions, avec
nos aspirations, pour que le Québec soit plus heureux, que le
Québec soit plus prospère. Quels que soient parfois nos
écarts de langage, quelles que soient nos attaques qui peuvent
être virulentes à l'occasion, je pense que ce ne sont pas les
hommes que nous voulons changer, modifier ou parfois détruire, mais
c'est plutôt, comme le dit très souvent le député de
Maisonneuve et comme je le dis à l'occasion, qu'il y a des
systèmes qu'il faut reviser et des objectifs qu'il faut corriger. Je
pense que, tous ensemble, nous travaillons très sérieusement et
très honnêtement en fonction d'un mieux-être au
Québec.
De toute façon, la journée a très bien
commencé, parce que ma petite fille qui a huit ans et qui zézaie
me disait ce matin: "Sarles en se levant m'a dit que c'était ta
fête. Ze te souhaite bonne fête." Elle m'a dit: "Tu ne m'embrasses
pas? " Alors, je lui dis: "Ecoute, c'est à toi de m'embrasser. Ce n'est
pas à moi, quand on souhaite un anniversaire à quelqu'un..." Elle
a dit: "Ze suppose que ça va être comme d'habitude, on ne te verra
pas de la journée ni de la soirée." Je pense que c'est un peu
vrai, que c'est difficile la politique parfois, pour tous et chacun de nous,
comme c'est difficile pour les locataires et les propriétaires parfois
de s'entendre, mais je souhaite de tout coeur que ce quarantième
anniversaire marque un véritable départ pour notre formation
politique et également pour celui qui vous parle. Je vous
réitère très sincèrement mes remerciements.
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons maintenant l'Association canadienne des
employés de téléphone et ses représentants.
Association canadienne des emplovés de
téléphone
M. MAHONEY: Avant de commencer, M. le Président, j'aimerais
présenter les officiers de notre association qui sont chargés de
répondre aux questions que pourrait susciter notre mémoire sur le
bill 59 qui a été soumis à cette commission.
Mlle Laurette Poirier, qui est vice-présidente représente
les membres féminins de notre organisation. A la droite de Mlle Poirier,
M. Georges-Henri Perron, qui est lui aussi vice-président de notre
organisation. Je suis Denis Mahoney, vice-président de notre
organisation; qui représentons les employés masculins de la
province de Québec.
Je crois, M. le Président, que vous serez d'accord avec nous que
le mémoire que nous avons soumis va dans le sens des voeux que vous avez
exprimés à l'effet qu'il soit succinct et qu'il couvre tout le
matériel qu'il a à couvrir de façon aussi brève que
possible.
Toutefois, nous avons retenu les services de la firme Rémillard,
Vézina, Sheehan, Pouliot et l'Ecuyer et avec votre permission,
j'aimerais que Me Sheehan présente notre mémoire à la
commission en notre nom.
M. SHEEHAN: Messieurs, l'association que j'ai l'honneur et le plaisir de
représenter voudrait discuter à peu près exclusivement
d'un seul point qui est couvert par le projet de loi tel que
rédigé présentement. Il s'agit des dispositions,
globalement, qui prolongeraient la date d'expiration des baux du 30 avril au 30
juin. Ces dispositions, si elles étaient adoptées telles que
rédigées, enlèveraient aux employés, aux membres de
l'association que je représente, et de façon
générale, aux employés de Bell Canada, toute
possibilité de vacances durant les mois de l'été. Les
employés des autres services publics, l'Hydro, les
déménageurs et autres, seraient affectés de la même
façon. Le problème d'assurer le service
téléphonique aux gens qui déménagent d'un endroit
à l'autre affecte la compagnie tout entière et tous les
employés de la compagnie dans la province qui sont au nombre de 20,000.
Cela nécessite, qu'on le sache ou non, trois mois de travail, non
seulement de travail ordinaire mais de travail acharné avec heures
supplémentaires continuellement durant trois mois. A l'heure actuelle,
les déménagements se font au mois de mai. Reporter cette date au
30 juin ne changerait rien à la situation. Nous voulons donc attirer
votre attention sur le fait que changer la date de déménagement
en bloc du 1er mai au 30 juin ne règle aucunement les problèmes
et les difficultés qui résultent de ce déménagement
en bloc. Il y a, vous pouvez l'imaginer facilement, des coûts
élevés de déménagement. Enfin, la coutume ou toute
loi favorisant ce déménagement ou mentionnant une date de
déménagement favo-
rise justement des déménagements qui ne se feraient
peut-être pas. Tout le monde déménage, alors, nous
aussi.
Nous suggérons que le texte de la loi soit amendé afin
d'encourager du moins des baux qui se termineraient tout le long de
l'année. Nous comprenons qu'il serait peut-être souhaitable que
les gens ayant des enfants d'âge scolaire aient la possibilité et
même le droit de déménager dans une période hors de
l'année scolaire, soit durant les vacances d'été ou celles
de Noël, peu importe. Mais nous soumettons que, pour atteindre ce but, il
ne serait pas nécessaire de préconiser un
déménagement en bloc de tous les locataires de la province de
Québec ou presque. Je ne sais pas si des études ont
été faites à cet égard par votre ministère,
mais tout le monde peut concevoir qu'il y a quantité de locataires sans
enfants d'âge scolaire, tels les rentiers, les célibataires, les
parents qui n'ont pas d'enfants d'âge scolaire ou à
l'école. Il faut mentionner aussi l'école primaire,
l'école secondaire. Ces gens-là n'ont aucun avantage quelconque,
il n'y a rien de spécial ou de sacré dans le 30 juin. Ils n'ont
aucun avantage à déménager le 30 juin.
M. CHOQUETTE: Ni le 1er mai.
M. SHEEHAN: Ni le 1er mai, bien d'accord. Même pour les parents
ayant des enfants à l'école, il faudrait réaliser aussi
que, de moins en moins, aujourd'hui, l'enfant demeure à
côté de son école.
Il s'agit d'écoles consolidées; enfin, on les
promène en autobus, surtout en dehors des grands centres, de telle sorte
que si l'enfant déménage d'un endroit à l'autre, il ne
s'éloigne pas nécessairement de son école, même s'il
le faisait durant l'année scolaire. Pour toutes ces raisons, nous
recommandons fortement que le projet soit amendé afin d'encourager les
baux qui se terminent tout le long de l'année et que l'on enlève
les dispositions des articles 22 et 23 tels que rédigés, qui
encouragent un déménagement en masse en plein été
pour tous les locataires de la province de Québec.
Vous allez me dire, M. le ministre, qu'il ne s'agit pas de dispositions
obligatoires et je suis d'accord. Mais, il faut quand même
j'imagine que vous serez d'accord avec nous être pratique et
réaliser que du moment qu'on mentionne un date dans la loi, que ce soit
le 30 juin ou le 30 octobre ou peu importe on favorise la coutume, on favorise
le déménagement en bloc et on le favorise pour tout le monde. Et
même tel que rédigé, l'article 23 je ne sais pas, en
tout cas à première vue, je n'en ai pas fait une étude
aussi approfondie que vous, M. le ministre à première vue
du moins, semble énoncer en toutes lettres qu'à compter du 30
juin 1974, sous réserve de la possibilité de donner un avis, tout
bail je ne vois pas de distinction ou d'exception là sera
prolongé automatiquement d'année en année jusqu'au 30 juin
suivant. Ce qui veut dire qu'aujourd'hui, non seulement on amène les
baux qui se terminent le 30 avril au 30 juin, mais on amène tous les
autres aussi. Je ne vois vraiment pas l'utilité de le faire.
En bref, M. le ministre, nous préconisons un système qui
donnerait le droit aux gens de choisir une date de déménagement;
s'ils le veulent, durant l'été, d'accord. Mais, pourquoi obliger
les gens, tout les gens à le faire, ceux qui ne veulent pas le faire,
sans les obliger de donner des avis, si vous voulez?
M. LE PRESIDENT: M. le ministre.
M. CHOQUETTE: Monsieur, j'ai écouté avec beaucoup
d'intérêt ce que vous avez dit au nom des employés de Bell
Téléphone et je crois que les représentations que vous
nous faites sont de portée générale et n'affectent pas
seulement une catégorie d'employés du Bell. Malgré que,
comme vous êtes des employés d'un important service public,
c'est-à-dire le téléphone, nous pourrions dire qu'elles
proviennent de cette revendication que vous avez exprimée au
début de vos observations à l'effet qu'imposer ou suggérer
trop fortement par voie législative la date du 30 juin empêcherait
les employés de ce service public qu'est le Bell Téléphone
ainsi que d'autres services publics de prendre leurs vacances durant la
période d'été.
Je suis d'accord avec vous sur un point. Dans la mesure du possible, il
faudrait rechercher que, dans les cas de baux qui ont des dates
indéterminées ou de baux qui se sont renouvelés sans un
écrit, par tacite reconduction, ils se prolongent d'une période
de douze mois en l'absence d'une volonté expresse manifestée par
le propriétaire ou le locataire de façon qu'en
général, la date de terminaison des baux ne soit pas
uniformément une date précise dans l'année. Par
conséquent, je vous suis jusqu'à ce point; il s'agit tout
simplement pour nous d'une question de formulation législative de cet
impératif, de faire en sorte que les baux ne se terminent pas à
une date unique dans l'année, tel que nous l'avons presque à
l'heure actuelle avec le 1er mai.
Vous dites que ceci serait la même chose avec la nouvelle loi qui
apporterait des modifications en repoussant la date de terminaison des baux au
30 juin.
Je peux vous assurer que nous allons apporter des modifications mais,
d'un autre côté, je crois qu'il faudrait tenir compte de ce que,
actuellement, c'est à la fois en vertu du code civil et en particulier
de l'article 1642 et à la fois en vertu d'une coutume qui s'est
instaurée au Québec, que le 30 avril ou le 1er mai sont devenues
les dates fatidiques des déménagements dans les
municipalités du Québec.
L'objet de l'article 22 et de l'article 23 du projet de loi que nous
étudions était, dans une certaine mesure, de casser cette
tradition et de ramener au 30 juin la date de terminaison des baux, qui
n'était pas autrement fixée par la volonté expresse des
deux parties, c'est-à-dire
propriétaires et locataires. Et ceci pour nous conformer aux
nécessités qui résultent de l'année scolaire dans
l'état actuel et pour nous conformer aux habitudes modernes de vie qui
ne sont pas du tout les habitudes rurales d'autrefois qui avaient
justifié, dans l'ancienne état des choses, la date du 30 avril ou
du 1er mai comme étant la date où les baux se renouvelaient.
Malgré que je ne sois pas en mesure de vous communiquer
aujourd'hui des amendements précis que nous allons apporter au projet de
loi, je puis vous dire que nous ferons en sorte que, dans une certaine mesure
et au moins pour la première année, le 30 juin sera une date qui
s'imposera. Pour le renouvellement des baux que nous allons prescrire par le
code des loyers et qui se faisait dans les anciennes lois jusqu'au 30 avril de
chaque année, peut-être, que, pour la première année
après l'adoption de cette loi, nous devrons dire qu'en l'absence de la
volonté expresse des parties, pour ce qui est des baux renouvelés
en vertu de la Loi du code des loyers, le 30 juin 1974 sera la date de
terminaison. Peut-être nous faudra-t-il dire cela, justement, pour casser
la tradition du 1er mai. Par ailleurs, nous envisageons que, pour les
années subséquentes et pour les autres conditions dans lesquelles
pourront se trouver des propriétaires et des locataires, il nous sera
possible de faire en sorte que l'article 23 du projet de loi se lise à
l'effet qu'un bail, à l'expiration de son terme, est prolongé
automatiquement, d'année en année, pour une période de
douze mois, aux mêmes conditions, évidemment, à moins de la
volonté manifestée par le propriétaire et le locataire.
Ainsi, nous adopterions le principe que vous avez soumis, tout à
l'heure, à l'effet que nous devrions, dans la mesure du possible,
favoriser le prolongement des baux pour une période de douze mois
à quelque date de l'année que ces baux se terminent. Ce sont les
amendements que nous étudions à l'heure actuelle.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.
M. PAUL: M. le Président, je suis sûr que le ministre a
parfaitement compris la portée du problème exposé par le
porte-parole de l'Association canadienne des employés du
téléphone, spécialement par la voix du procureur de cette
association. Comme le signalait si bien le ministre, il s'agit, à toutes
fins pratiques, dans peut-être 75 et 80 p.c. des cas aujourd'hui, d'une
coutume qui veut que la fin d'un terme d'un bail soit le 1er mai. Il y aura
certainement une éducation populaire à faire. Il faudra que les
commissaires, le code des loyers ou que le ministère de la Justice
même, surtout les professionnels, spécialement les avocats et les
notaires, informent leurs clients de cette liberté qu'ils ont de fixer
toute autre date que le début d'avril comme étant le point de
départ d'un bail pouvant régir la location d'un loyer.
Mais une chose m'inquiète quelque peu, et je voudrais que le
ministre m'éclaire là-dessus. Il a dit que, peut-être pour
la première année, on devrait retenir cette date du 30 juin 1974,
par exemple.
Il ne faut pas oublier non plus que les commissaires seront
embarrassés pour prolonger un bail et il faudra qu'ils prolongent
à une date fixe un bail pouvant régir les relations entre un
propriétaire et un locataire. Le commissaire qui reconduira le bail avec
une majoration de 3 p.c. ou de 4 p.c. dans le prix du loyer devra
nécessairement fixer un terme quant à l'échéance de
ce nouveau bail renouvelé.
Alors, il ne faudrait pas que, dans la loi, nous retrouvions une
disposition répétée comme celle que veut réserver
le ministre pour la première année. C'est pourquoi je parlais
tout à l'heure dans mes remarques de la nécessité
d'établir des critères ou une certaine liberté d'action
chez les commissaires pour établir des règlements qui devront
nécessairement être approuvés par le lieutenant-gouverneur
en conseil. Les commissaires devront avoir cette discrétion d'aller,
dans certains cas, dans leur prolongation, plus loin que le terme d'une
année.
Il s'agira justement pous ne pas déplacer ce bloc ou cette
coutume ancrée chez nous, pour ne pas déplacer du 1er mai au 1er
juillet ou au 1er octobre la date des déménagements ou la fin des
baux qui sont renouvelés ou prolongés par la régie dans le
cas d'un bail indéterminé dont le terme est incertain, suivant
les dispositions de l'article 1642.
C'est le problème. Même si nous nous appliquons à
convaincre les gens qu'ils ont cette liberté de changer cette coutume,
de fixer la période de leur choix pour la fin d'un bail, il restera
toujours, dans le contexte de la loi que nous voulons étudier, que les
commissaires chargés de son application et qui verront à
reconduire un bail ou à le renouveler devront nécessairement
fixer un terme.
Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'envisager la . possibilité
d'accorder au commissaire cette latitude de prolonger, dans certains cas, pour
une période de quinze, seize mois ou, dans d'autres cas, de douze mois,
en tenant compte du milieu où se trouve situé le logement en
cause et pour, comme le signalait si bien tout à l'heure le
vice-président de l'association et comme le ministre le disait
lui-même, ne pas créer encore un nouveau bloc de
déménagements massifs dans tout le Québec?
Ce n'est pas une solution facile si l'on tient compte que, d'un
côté, les représentations qui nous sont faites ce matin
sont attirantes. Nous aurons tout à l'heure d'autres mémoires qui
nous inciteront à envisager peut-être d'autres aspects de la loi.
Quant à moi, je retiens avec beaucoup d'intérêt les
remarques que nous ont
faites ce matin les porte-parole de l'Association canadienne des
employés de téléphone. Le ministre peut compter sur notre
collaboration pour disposer d'un des points majeurs de cette loi que nous
sommes appelés à étudier.
M. BROCHU: M. le Président, si vous permettez...
M. LE PRESIDENT: M. le Procureur, vous aviez demandé la parole
tout à l'heure?
M. SHEEHAN: Merci, M. le Président. Juste une question, M. le
ministre : Est-ce que je dois comprendre que vos conseillers vous ont
avisé qu'il y a quelque chose de néfaste dans un
déménagement le 1er mai, abstraction faite des parents qui ont
des enfants d'âge scolaire? Je me réfère aux autres
locataires. Qu'y a-t-il de mauvais dans un déménagement le 1er
mai et quel avantage y aurait-il à un déménagement
transposé au 30 juin?
M. CHOQUETTE: Ce n'est pas néfaste en soi. On peut
déménager en tout temps de l'année, et je pense que la
date importe peu. Mais il faut quand même tenir compte des
activités de la majorité des citoyens à certaines
époques de l'année. La raison pour laquelle nous avons
proposé une modification pour ce qui est de cette coutume ou de cette
présomption de date de terminaison des baux, au 1er mai, c'est
précisément à cause de l'année scolaire. C'est que
l'année scolaire se termine, en général, vers le 15
juin.
Par conséquent, nous préférons, quitte à
adopter une date, faire en sorte que cette date soit immédiatement
après la fin de l'année scolaire et que la date qui se trouverait
dans notre droit ne bouleverse pas l'année scolaire des enfants.
Nous tenons compte également des vacances que les gens prennent;
généralement, c'est en juillet et août. C'est la raison
pour laquelle nous n'avons pas proposé comme date le 1er août ni
le 1er septembre, parce que c'est justement immédiatement avant
l'année scolaire. Quant aux autres dates ou mois possibles dans
l'année, il va de soi que l'automne, l'hiver et même le printemps
ne sont pas des dates favorables pour une terminaison des baux. Comme je le
dis, je me rends parfaitement compte de la valeur des arguments que vous avez
soulevés, en ce sens qu'il ne faudrait pas faire revivre
complètement cette tradition du 1er mai sous une autre forme...
M. PAUL: A une autre date.
M. CHOQUETTE: A une autre date. Tel n'est sûrement pas le but du
législateur. Par conséquent, je crois qu'il serait
peut-être possible de tempérer le texte actuel des articles 22 et
23 pour ne pas faire revivre une nouvelle tradition aussi forte que celle qui a
prévalu dans le Québec en ce qui concerne le 1er mai. Mais
malgré tout, vous allez vous rendre compte de la difficulté que
nous avons si nous ne voulons pas maintenir celle du 1er mai que tout le monde
déplore, je pense, dans une certaine mesure. La date du 1er mai
entraîne un accroissement énorme de travail dans plusieurs
secteurs de l'activité économique; il serait donc plus opportun
que ce soit réparti plus uniformément à travers
l'année. Vous allez vous rendre compte que pour briser la tradition du
1er mai, il faut quand même adopter une autre date pour la terminaison de
certains baux dans le cas des baux à durée
indéterminée. Le député de Maskinongé a
suggéré que, plutôt que de suggérer une date, nous
donnions une discrétion à l'administrateur des loyers. Ce
pourrait être douze ou quinze mois. Je vois certains obstacles juridiques
à cette proposition, mais je vais l'étudier pour voir
jusqu'à quel point nous pouvons la retenir.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette.
M. CARPENTIER: C'est simplement une question d'information au sujet des
étudiants. Les étudiants doivent payer pour les mois de juin,
juillet et août, dans des endroits tels que Montréal,
Trois-Rivières, Québec, Sherbrooke, des loyers aussi
élevés que $150 allant jusqu'à $250 par mois, ce qui
représente un minimum d'au moins $450 par année, plus les frais
de leurs études. Et ces gens doivent louer un appartement pour douze
mois par année. Est-ce qu'il y aurait possibilité d'avoir des
clauses ou ententes spéciales pour les étudiants au niveau du
CEGEP, de l'université ou à différents niveaux? Parce que
ces étudiants arrivent.. Tout le monde sait très bien qu'ils
requièrent des bourses et des prêts pour fins d'études qui,
souventefois, passent uniquement pour des fins de loyer. C'est tout simplement
une suggestion que je porte à l'attention des membres de la commission:
Est-ce qu'il y aurait possibilité de faire une étude un peu
concrète sur ce cas? Parce que si nous posons la question au
ministère de l'Education au sujet des prêts et bourses: Est-ce que
nous payons pour l'éducation ou si nous payons uniquement pour les
loyers que les étudiants doivent payer pour douze mois par année?
... C'est tout simplement une question d'appréciation.
M. CHOQUETTE: Je note ce que dit le député de Laviolette
et nous allons réfléchir au problème.
M. LE PRESIDENT: Je demanderais aux membres de la commission de s'en
tenir aux questions à ceux qui représentent des organismes et de
ne pas entreprendre un débat en deuxième lecture sur le bill
lui-même. Le député de Richmond.
M. BROCHU: J'aimerais soulever deux points. Tout d'abord, je pense qu'on
semble
avoir comme objectif de vouloir éviter les remous que
créent les déménagements massifs avec tous les
problèmes qui s'ensuivent et qui sont connus de tous.
Deuxièmement, il est vrai qu'il y a une mobilité beaucoup plus
grande de la population depuis quelques années et je pense que cet
aspect aussi doit être considéré au niveau du cadre
législatif.
Mais je pense que le principal problème, lorsqu'on veut fixer une
autre date, c'est d'instaurer une autre coutume et l'effet prévisible
est surtout au niveau des propriétaires. Il sera peut-être
beaucoup plus facile, à ce moment-là, de recréer une autre
coutume, qui n'est peut-être pas tellement dérangeante parce
qu'elle se situe un mois ou deux plus tard. Mais on réinstalle
définitivement les baux à date fixe, soit à la fin de
juin, parce qu'il y aura eu dans le libellé de la loi une date
mentionnée, une date précise.
C'est surtout sur cet aspect-là, et je pense qu'il peut y avoir
automatiquement des préjudices causés à certains
locataires dans ce sens. Si une mobilité beaucoup plus grande, si une
latitude beaucoup plus grande était laissée dans ces
cas-là, il pourrait y avoir négociation selon les besoins de
chacun.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais rappeler à l'ordre le
député de Richmond, sans ça on n'en sortira plus.
M. BROCHU: Disons que c'est une question que je pose au ministre.
M. LE PRESIDENT: Les questions doivent s'adresser aux membres des
organisations et non pas au ministre. De toute façon, je viens d'avertir
les membres de la commission de ne pas faire une dissertation; nous avons cinq
organismes à entendre. Pas à toutes les fois.
M. BROCHU: M. le Président, le mémoire qui a
été déposé est suffisamment clair. Les points sont
précis et mon intervention est dans le but d'aller plus loin dans les
remarques qui ont été exposées. Je n'ai pas parlé
d'éducation, je m'en suis tenu au code des loyers qu'on veut proposer.
C'était peut-être pour souligner davantage une remarque qui avait
été faite par le député de Maskinongé et qui
était une préoccupation que j'avais personnellement, dans le sens
de la mentalité des propriétaires et de l'installation d'une
coutume nouvelle qui, dans le fond, ferait que le projet de loi n'atteindrait
pas ses objectifs.
Personnellement, je demande au ministre de considérer cette
question-là pour permettre une latitude plus grande, puisqu'on veut en
arriver à représenter une mobilité de population,
éviter de créer un remous de déménagement massif et
les problèmes qui s'en suivent dans ce que ces messieurs viennent de
décrire.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, je n'ai pas besoin de dire que je suis
d'accord sur la suggestion faite par l'association puisque dans mon
exposé du début, j'avais aussi fait cette suggestion. Mais comme
le député de Maskinongé, je m'inquiète un peu,
même pour une première année, qu'on indique la date du 30
juin. On va peut-être recréer une autre habitude. Je me demande,
en mettant dans le texte que les baux sont automatiquement continués
pour douze mois après leur date d'expiration, si, à ce
moment-là, on ne commence pas à mettre cette flexibilité
en doublant cela en plus et c'est ma deuxième suggestion
d'une publicité que le ministère de la Justice pourrait faire
auprès des citoyens à l'effet que le nouveau code des loyers, non
seulement ne bloque pas de date précise d'expiration de baux, mais
favorise un échelonnement tout au long de l'année.
Avec ces deux facteurs et j'insiste sur le deuxième
on n'enlèvera pas de l'esprit de la population cette espèce
d'idée que les baux se terminent le 1er mai, si on ne double pas
ça d'une espèce de campagne de publicité. C'est un peu
comme le ministre a fait ou que son collègue des Institutions
financières a fait à l'occasion de nouvelles loi de la protection
du consommateur ou quoi que ce soit.
Il s'agit donc de rendre la population consciente de cette
flexibilité et non pas seulement l'inclure dans le texte de loi. Mais
si, même pour une première année, on installe une date
comme le 30 juin, je crains bien qu'on créera une nouvelle habitude qui
sera le 30 juin.
M. CHOQUETTE: Mais il y a un gros problème juridique et je pense
que le député de Maisonneuve est très à même
de l'apprécier. C'est que, en vertu de ce projet de loi, il est dit
qu'en l'absence de désaccord ou d'expression de désaccord de la
part du locataire ou du propriétaire, les baux actuellement en vigueur
sont renouvelés pour une période de douze mois. N'est-ce pas?
C'était l'ancienne loi. Par conséquent, avec une nouvelle
loi qui, en somme, se fait le prolongement de l'ancienne loi, il faut
prévoir un renouvellement pour une période de douze mois. La
question est: Est-ce qu'on doit dire exclusivement le renouvellement pour une
période de douze mois?
Ou, est-ce qu'on doit aller plus loin et prévoir le
renouvellement pour une période de quatorze mois de façon
à en arriver au 30 juin, quitte à tempérer ce 30 juin sur
la question de l'année scolaire?
Comme je l'ai dit tout à l'heure, en réponse à
l'intervention du représentant des employés de Bell Canada, il
est sûr et certain que nous allons faire en sorte que, dans une certaine
mesure au moins, il y aura des renouvellements prévus pour douze mois et
qu'il n'y aura pas de date fixe. Mais est-ce qu'il ne faudra pas, en somme,
continuer à ce qu'il y ait une date, en somme, pour s'occuper des baux
dont personne ne
s'occupe, c'est-à-dire des baux pour des dates
indéterminées au code civil, que ce soit le 1er mai? Ce serait le
temps...
M. BURNS: Je signale au ministre, également, que s'il favorise le
déménagement au 1er juillet, il va empêcher les
Québécois de se réjouir le jour de la fête du
Canada. C'est une chose absolument...
M. CHOQUETTE: Est-ce que cela va faire beaucoup de peine au
député de Maisonneuve?
M. BURNS: Je me demandais si le ministre n'était pas en train de
glisser de notre côté.
M. PAUL: Peut-être que c'est inconsciemment!
M. LE PRESIDENT: Le député de Terrebonne.
M. HARDY: M. le Président, je serai très bref. Je tenterai
de ne pas faire de dissertation pour me soumettre d'une façon rigoureuse
aux directives de la présidence. Je veux tout simplement dire que
j'abonde dans le sens des demandes de l'association. Ce n'est peut-être
pas pour les mêmes raisons, parce que vous partez d'un problème
que je pourrais dire personnel, votre problème à vous, je ne vous
en blâme pas, chacun défend sa peau, mais un problème
personnel qui, comme on l'a vu à la lumière des discussions, a
quand même une importance globale. Par ailleurs, je crois à la
liberté contractuelle, même si je suis d'accord avec le ministre
de la Justice pour dire qu'il y a des difficultés juridiques d'en
arriver à assurer une certaine souplesse. Evidemment, ce n'est
peut-être pas tellement la mode de parler de la liberté
contractuelle aujourd'hui on est tellement pris par les problèmes
collectifs, les droits collectifs que quand on revient à la
liberté contractuelle, évidemment, on a l'air un peu
réactionnaire. Bien, quitte à passer pour un
réactionnaire, je crois encore à la liberté contractuelle,
à la liberté des individus. Si on laissait peut-être un peu
plus de liberté aux individus, peut-être qu'il y aurait certaines
choses dans notre société, sur le plan collectif, qui iraient
mieux. Tout ça pour dire que j'appuie entièrement le ministre
mais, encore une fois, je pense que ce n'est pas difficile de trouver une
solution. A première vue, sans avoir fouillé davantage la
question, on dit: "les baux dont personne ne s'occupe", mais ce n'est
peut-être pas tout à fait exact. Un bail commence à une
date, la journée où une personne entre dans un loyer, que ce soit
le 30 juin, le 5 juillet, il y a une date où on entre dans un loyer. A
mon avis, c'est à cette date que le contrat débute. Alors, si la
loi reconnaît que ces baux qui ne sont pas renouvelés par des
actes écrits, qu'on dise qu'ils se renouvellent pour douze mois. Si
j'entre dans un loyer le 5 septembre et qu'au bout du 5 septembre je continue
à rester là, bien, par tacite reconduction, mon loyer se
renouvellera jusqu'au 5 septembre de l'année suivante. Il me semble que
c'est assez facile de régler le problème.
M. CHOQUETTE: Je tiens à dire au député de
Terrebonne que j'ai déjà dit qu'il était acquis d'avance
qu'il y aurait une disposition dans la loi à l'effet que les
renouvellements se feraient sur une période de douze mois. C'est
sûr et certain. Alors, qu'on tienne ça pour acquis. Mais c'est
pour la première année.
M. HARDY: C'est pour partir.
M. CHOQUETTE: C'est pour partir. Est-ce que ce sera douze mois ou
quatorze mois?
M. HARDY: Cela n'est pas un gros problème. Je pense bien que
même les employés du service public accepteront, même si
cela arrive une année dans leur vie, d'avoir de petits problèmes
de vacances, je pense bien que vous allez y consentir, je pense que ce ne sera
pas un gros problème au point de départ. Après ça,
bien...
M. CHOQUETTE: Enfin, c'est la question qui reste en suspens.
M. LE PRESIDENT: Je remercie beaucoup les membres de l'Association
canadienne des employés de téléphone. Il semble que leur
opinion va être écoutée religieusement. Merci beaucoup.
M. MAHONEY: Merci, M. le Président.
Corporation des enseignants du Québec
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons maintenant la Corporation des
enseignants du Québec et son président, M. Charbonneau.
M. CHARBONNEAU: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres
de la commission parlementaire, ces quelques notes, que je veux
présenter au nom de la corporation, ont été
préparées par les services de notre bureau et en particulier avec
la collaboration de Me Lapierre qui m'accompagne et qui est conseiller en
relations de travail à la corporation. Elles ont été
également soumises à l'étude de notre conseil
d'administration et elles ont été portées à la
connaissance de nos syndicats de qui nous avons tiré des consultations
et des avis depuis quinze jours, depuis la reprise de l'année
scolaire.
Le gouvernement a enfin décidé de remplacer, par un code
de loyer, la loi temporaire qui était la loi pour favoriser la
conciliation entre locataires et propriétaires. Le projet de loi en
question se situe, sous plusieurs aspects, dans la ligne de ceux qui l'ont
précédé. La CEQ est
consciente qu'il ne permet de toucher qu'un aspect d'un des
problèmes les plus graves des Québécois, l'habitation,
problème sur lequel nous avons espoir d'être consultés dans
des lois plus globales très bientôt. La CEQ est également
consciente que le projet de loi, au point de vue du montant du loyer, ne permet
qu'un contrôle des augmentations et non pas des taux de base. D'autre
part, nous avons constaté avec intérêt que le gouvernement
a fait des pas en avant dans la protection des locataires sous les aspects
particuliers touchés par ce code. Nous croyons cependant que le
coût élevé du logement a des conséquences sociales
désastreuses et que les mesures adoptées pour remédier
à la situation ne doivent pas être des mesures
incomplètes.
Le code des loyers, nous l'admettons, s'attaque partiellement au projet
du logement et il doit apporter dans son domaine un ensemble de mesures
constituant un système de défense complet pour tous les
locataires contre les abus dont ils peuvent être victimes. La CEQ est
donc favorable au code des loyers présenté, mais elle croit qu'il
doit y avoir des modifications sur les points suivants: la question de
l'universalité, la question du 5 p.c, et certains autres pouvoirs du
commissaire.
En ce qui concerne l'universalité, nous ne voyons aucune raison
de faire une discrimination dans le code des loyers lui-même en ce qui
concerne le lieu entre les locataires. Nous avons pris note des
difficultés administratives prévues par le ministre concernant
l'extension immédiate de ce code des loyers à toutes les
localités et nous voyons qu'il y a un grand pas de l'avant de fait en
touchant déjà 88 p.c. au départ, mais nous devons
soutenir, quant à nous, que tous les locataires doivent
bénéficicier, en principe, par la loi, d'une égale
protection, quitte à ce qu'il y ait une assurance de cette protection
par étape prévue par le législateur ou par
réglementation. Mais il nous semble que dans le projet de loi, il ne
devrait pas y avoir au départ ce partage qui engendre, je crois, une
certaine inéquité pour certains groupes de locataires, même
s'ils peuvent demander à être couverts en formant des groupes de
50. Quand nous regardons la réalité, les localités de
moins de 5,000 de population, regrouper déjà 50 locataires pour
faire connaître le code des loyers et faire un mouvement dans ce
sens-là, je crois que c'est beaucoup demander dans des petits villages
ou les petites localités dont il s'agit.
On pourrait peut-être prévoir, à ce
moment-là, un nombre requis de locataires moindre de 50 pour montrer
vraiment que le législateur, en principe, est favorable à ce
qu'il n'y ait aucune discrimination ou différence de principe au
départ dans la loi elle-même. Nous devons aussi vous souligner
que, quant à nous, nous représentons des enseignants mais bien
aussi des locataires qui se retrouvent dans toutes les localités du
Québec, y compris celles de moins de 5,000 habitants.
Nous trouvons également nécessaire qu'un local qui devient
habitable soit immédiatement soumis à un contrôle afin
d'assurer, dès le départ, la fixation d'un loyer juste.
Nous savons que c'est une demande d'un esprit passablement
différent des propos préliminaires tenus par le ministre de la
Justice tout à l'heure, mais nous croyons que l'intervention de l'Etat
en matière de loyer doit se situer dans la ligne générale
des interventions de l'Etat dans la protection du consommateur.
Nous croyons que le loyer est un bien de consommation finalement ou
assimilable à un bien de consommation et qu'il prend une partie
suffisamment grande des dépenses annuelles d'une famille pour être
contrôlé, dans un certain cadre relativement souple mais
contrôlé quand même dès le départ par
certaines interventions du législateur et non seulement
contrôlé quant à un rythme d'augmentation. Si on ne
contrôle pas le départ ou la base, la fixation initiale du taux,
je crois que le reste devient plutôt un contrôle de fait, de
portée secondaire.
Troisième point, sous ce chapitre, c'est l'exclusion des
logements loués par un employeur à ses employés. A notre
avis, la loi en question doit s'appliquer et les baux doivent être
prolongés de la même manière que dans les autres cas. La
loi ne doit pas privilégier une catégorie de locateurs,
même s'il s'agit d'un employeur envers ses employés.
Le deuxième élément de notre intervention se
rapporte au taux de 5 p.c. La limite d'augmentation de 5 p.c. nous semble
ouvrir la porte à la perpétuation d'une situation
déplorable. Sans prétendre faire le tour de la question de fond
en comble, nous avons quand même relevé certaines statistiques
quant à l'indice des prix à l'habitation de 1961 à 1971.
Nous savons bien sûr que l'indice des prix à l'habitation est une
notion plus large que seulement l'aspect location. Tout de même, de 1961
à 1971, il y a eu une variation de plus de 3.5 par année en
moyenne. Je crois que quelqu'un a parlé tout à l'heure de 2.5
p.c. Alors, nous pensons que c'est nettement exagéré d'indiquer
dans la loi qu'il y ait une possibilité, sans trop de difficultés
administratives pour le locateur ou le propriétaire, de demander une
augmentation annuelle de 5 p.c. Nous pensons que c'est être beaucoup trop
large, que l'on pourrait parler de 3 p.c. dans la loi. D'autres parlent de
laisser un taux variable selon les régions. Nous avons
étudié brièvement ce point de vue mais, à
défaut de mieux, de pouvoir s'entendre sur une formule qui serait
forcément assez complexe, nous préférons émettre
l'opinion que 3 p.c. correspondrait beaucoup mieux à la
réalité des choses, en tout cas à une augmentation
admissible concevable du taux de loyer par année.
Troisième point. Si le propriétaire peut demander
d'augmenter son loyer au-delà de la limite, nous estimons que le
locataire devrait pouvoir, en contrepartie, demander une diminution, sans qu'il
soit nécessaire de baser sa
demande sur une diminution de services, comme le demande l'article 27.
Parce que nous n'avons pas vu que le propriétaire, pour avoir le droit
d'augmenter son loyer au-delà des limites, devait prouver augmentation
des services ou augmentation de la qualité des services. Nous ne voyons
pas pourquoi, en contre-partie, le locataire serait handicapé par une
telle restriction, à savoir de devoir prouver une diminution de
services, selon l'article 27. Le commissaire devrait pouvoir se baser sur des
critères déterminés pour diminuer un loyer comme pour
l'augmenter au-delà de la limite prévue par les articles 20 et
21. Ces critères, nous aimerions qu'ils soient les plus objectifs
possibles mais qu'ils ne soient pas soumis à des conditions
particulières telles que la fluctuation du marché,
c'est-à-dire, la disponibilité plus ou moins grande, ou la
rareté des loyers dans telle ou telle région.
Nous savons que ce facteur fait passablement varier le taux de base des
loyers ou le rythme d'augmentation des loyers dans certaines régions et
nous ne pensons pas que le législateur devrait permettre que les
consommateurs locataires soient soumis à ce genre de fluctuation qui est
conditionné souvent lui-même par des facilités au point de
vue prêt et qui sont dans le cadre des législations de l'Etat,
soit fédéral, soit provincial, puisque l'Etat permet, par ses
politiques d'aide à la construction de logements, qu'il y ait essor dans
telle ou telle région. Nous pensons que le consommateur ne devrait pas,
lui, avoir à écoper d'une espèce de conséquence
à ces politiques d'essor très, très rapide dans des
régions, ou manque dans d'autres régions au point de vue
disponibilité de logements.
Quant aux critères objectifs ou une espèce
d'échelle de normes au point de vue du logement, à notre avis,
ceci pourrait être élaboré de plusieurs manières,
mais nous faisons la suggestion qu'ils pourraient être
élaborés par le Conseil de protection du consommateur. Je sais
qu'il y a peut-être des difficultés au point de vue juridique ou
des mandats accordés à cet organisme, nous n'avons pas
étudié la question à fond, mais nous croyons, encore une
fois, qu'il est tout juste sain et réaliste de rappeler que le loyer, la
location d'habitation, toutes les politiques qui touchent cela doivent se
situer dans la ligne des politiques qui assurent une certaine protection aux
consommateurs en général. Le Conseil de protection du
consommateur n'a peut-être pas encore eu un mandat dans ce
sens-là, mais nous ne croyons pas qu'il soit, à première
vue, ridicule de croire que ces gens, quitte à se faire conseiller par
des personnes appropriées, à consulter tous les gens
intéressés, que ces gens-là puissent avoir une opinion
valable en la matière étant donné qu'ils étudient
plusieurs autres secteurs ou chapitres de la consommation au Québec.
Nous avons aussi quelques points d'un certain intérêt
à soumettre, à part ces trois points premiers.
Nous avons établi une certaine concertation dans la
préparation de ces notes avec la Fédération des
associations de locataires du Québec. Si nous avions parlé
après eux, nous aurions pu marquer notre appui à plusieurs des
recommandations qu'ils vous formulent. Tout de même, nous nous opposons
à la possibilité de reprise de possession, par le locateur, des
logements pour division ou conversion. Il nous paraît important, dans
plusieurs régions où il y a pénurie de logements
convenables, surtout de logements suffisamment spacieux pour des familles
d'au-delà de trois enfants, il nous parait important que le locateur ne
puisse pas reprendre son logement pour le subdiviser, le convertir en
appartements ou en pièces plus petites. Nous savons qu'il y a là
un profit habituellement admis, il y a un intérêt pour le
propriétaire ou le locateur à savoir plus d'unités petites
qui peut souvent l'amener à diviser ou à subdiviser les logements
spacieux, mais nous croyons que, du point de vue social, le législateur
devrait poser des restrictions sur cet aspect-là.
Nous avons pris note des dispositions que le projet de code contient au
sujet de la discrimination et elles nous semblent bonnes dans l'ensemble. Nous
suggérons toutefois d'ajouter, aux infractions déjà
mentionnées, le refus de louer en raison d'opinions politiques.
D'après certaines consultations faites auprès de nos syndicats,
c'est arrivé, dans certains cas, pour un motif non pas
allégué clairement, naturellement. Comme dans tout cas de
discrimination, quand a-t-on vu une affirmation claire dans ce
domaine-là de la part de celui qui refuse de louer?
M. CHOQUETTE: Mais dans l'état actuel des choses, M. Charbonneau,
est-ce que vous ne pensez pas qu'on pourrait ajouter aussi: pour opinions
syndicales? Les opinions syndicales, de nos jours, semblent assez
partagées, d'après ce que je vois, d'après le
résultat de certains votes qui sont exprimés.
M. CHARBONNEAU: Oui. Alors, la farce s'applique sans doute mieux
à d'autres, pour le moment, mais en tout cas j'ajouterais opinions
politiques et syndicales, si vous le voulez.
M. LOUBIER: M. Charbonneau, il s'agirait de ne pas tomber dans le
piège tendu par le ministre parce que ça pourrait
dégénérer en discussions très longues.
M.CHARBONNEAU: Mais nous voyons que les problèmes syndicaux
occupent toujours l'esprit du ministre, comme depuis plusieurs mois.
Nous avons aussi émis une certaine opinion concernant la
prolongation des baux. Nous avions déjà réclamé que
les baux se terminent de préférence le 30 juin plutôt que
le 1er mai. C'est, à notre avis, une question qui va dans le sens de
l'intérêt des élèves, des parents et des
enseignants que les déménagements se fassent en dehors de
la période d'activité scolaire, quoique vous soyez,
vous-même, sensible à ce genre d'arguments, certaines de vos
interventions l'ont bien révélé tout à l'heure. Il
est vrai que depuis la régionalisation du niveau secondaire, une
certaine partie du problème peut être atténuée en
autant qu'il s'agit de déménagement initial ou antérieur
parce que, du moment qu'on franchit un certain nombre de milles, on change de
secteur d'aménagment et la régionalisation ne règle pas le
problème.
Du côté donc de l'élémentaire, le
problème reste entier en dépit des changements de structure
scolaire. Les écoles restent où elles sont et du moment qu'on
change de localité d'un mille ou deux, je crois que,
généralement, on change également d'école
élémentaire. De nombreux problèmes se posent ainsi pour
les parents et pour les enseignants. Ce n'est pas seulement une question d'une
année. Le problème se pose également au niveau du
changement de lieu de travail pour un bon nombre d'entre eux, et que leur
contrat se renouvelle ou non le 1er mai, il reste que les deux derniers mois
doivent être des mois de prestation de service. La situation est
très difficile pour quelqu'un qui sait que l'année suivante il
devra enseigner à un autre endroit, à plusieurs milles. Il devra
payer à la fois pour mai, juin, parfois juillet et déjà
obtenir un logement pour l'année suivante. Alors, nous pensons qu'une
date se situant autour du 30 juin ou après, mais dans les mois
d'été, serait la meilleure façon de résoudre ce
problème.
Nous pensons que fixer une nouvelle date, comme le 30 juin, peut
engendrer une nouvelle habitude et une certaine rigidité qui peut aussi
favoriser une augmentation exagérée des prix demandés par
les agences de déménagement, comme le 1er mai d'ailleurs. Quand
tout arrive en même temps, il y a sûrement des frais pour ces gens,
ils les font payer par les gens qui se servent de leurs services. Donc, le 30
juin, le problème pourrait être un peu de même nature et
alors, il faudrait que le gouvernement surveille encore une fois
l'intérêt des consommateurs locataires et ne pas permettre un abus
de la part de ces agences de déménagement, un abus dans les prix,
s'il doit y avoir une autre date fixe. Mais nous suggérons vraiment aux
législateurs de permettre aux locataires et aux propriétaires de
convenir d'une autre date que le 30 juin, soit entre le 30 juin et le 1er
septembre. Cela pourrait répondre au problème soulevé par
ceux qui nous ont précédés ici. Il y aurait donc un
échelonnage sur une base de deux mois. Pour l'aspect scolaire, le tout
sera réglé, et en ce qui concerne la possibilité de
profits exagérés de la part des agences de
déménagement, je crois que ce serait réglé aussi,
étant donné que cela pourrait s'échelonner sur deux
mois.
Alors, si les deux parties, locataire et locateur, s'entendent pour une
date entre les deux, ce sera cette date. A défaut de s'entendre, il
pourrait y avoir une disposition qui parlerait du 30 juin.
M. CHOQUETTE: M. Charbonneau je tiens à vous indiquer que
l'intention du gouvernement n'a jamais été d'imposer une date aux
propriétaires et aux locataires. Ils ont toujours été
libres, remarquez bien, en vertu de l'ancienne loi, et ils auraient, de toute
façon, conservé leur liberté selon la loi que nous
proposons à l'heure actuelle. Mais toute la question est de savoir
jusqu'à quel point la loi doit favoriser une date. C'est là
où les écoles de pensées peuvent diverger, certaines
disant: Le gouvernement ne doit faire aucun effort en vue de favoriser une
date; et d'autres disant: A la rigueur, le gouvernement doit maintenir une date
suggérée pour les cas où les parties n'ont pu s'entendre,
c'est-à-dire le 30 juin.
Je suis particulièrement content que vous interveniez
immédiatement après les employés de la compagnie Bell qui
nous ont fait entendre un son de cloche intéressant, sans aucun doute,
mais vous, vous êtes particulièrement en mesure, je pense, de
renseigner les membres de la commission sur l'aspect année scolaire qui
était sous-jacent à la suggestion du 30 juin qui est contenue
dans le projet de loi. Je suis donc très heureux que vous arriviez
à ce moment-ci des débats.
M. CHARBONNEAU: M. le ministre, je crois qu'au fond, nos interventions
vont dans le sens de vos préoccupations et avec les assouplissements
possibles qui pourraient se situer durant la période
d'été, il y aurait vraiment une amélioration de la
situation. Mais quand vous dites qu'il s'agit de ne pas fixer dans la loi une
nouvelle date qui soit imperative, nous sommes tout de même conscients
que dans l'ancienne loi non plus, il n'y avait pas de date de fixée.
Mais tout de même, la mention du 1er mai a fait que l'habitude...
Enfin, il y a eu une convergence et finalement, on sait qu'il y a des
déménagements en très grand nombre le 1er mai, même
si ce n'était pas impératif par la loi. Cela a donc un effet
d'entraînement indéniable et il me semble que, à ce propos
le fait d'indiquer le 30 juin de la même manière, à savoir
que ce soit une suggestion, cela aura un effet d'entraînement qui sera
sain, mais cela laissera quand même deux mois aux gens pour se placer
autrement selon cette suggestion.
M. CHOQUETTE : Mais, concrètement parlant, actuellement dans le
système scolaire tel que nous l'avons au Québec, le
déménagement des parents le 1er mai... Est-ce que, d'après
vous, avec le nombre de déménagements que nous connaissons
habituellement à Montréal et dans les autres régions du
Québec à ce moment de l'année, ça apporte des
inconvénients majeurs pour les enfants qui sont dans notre
système scolaire, soit élémentaire, secondaire, CEGEP et
même universitaire? J'aimerais avoir votre point de vue comme une
personne qui
connaît ce domaine pratique pour que nous tenions compte de
l'importance de ce fait dans la loi que nous allons adopter
définitivement.
M.CHARBONNEAU: Dans ma réponse, j'exclus au départ le
niveau CEGEP et le niveau universitaire. A ces niveaux, les années
scolaires sont à peu près terminées le 1er mai; enfin,
ça va vers le 15 ou 20 mai. Le problème n'est pas vraiment grave
à ce niveau. Mais aux niveaux élémentaire et secondaire,
c'est très néfaste, un changement d'école pour un
élève le 1er mai.
Il y a un tas de dates qui seraient meilleures que le 1er mai. Le 1er
novembre, le 1er décembre, le 1er janvier, on peut plaider que c'est
relativement secondaire ou indifférent. Mais le 1er mai, alors
qu'arrivent les derniers contrôles, alors qu'entre en ligne de compte ce
qu'il a acquis durant l'année, imposer à des élèves
surtout ici, ça toucherait durement les élèves de
l'élémentaire continuer de leur imposer un changement de
professeurs, de contexte, d'école, de compagnons à cette date
c'est vraiment ce qu'il y a de plus néfaste qu'on puisse imaginer. Pire
que ça, ça pourrait être le 1er juin, mais à part
ça, c'est vraiment le maximum.
M. CHOQUETTE: Mais le déménagement des parents le 1er mai
entraîne-t-il nécessairement le transfert d'école de
l'enfant ou s'il peut continuer à fréquenter l'école
où il avait été inscrit depuis le début de
l'année?
M. CHARBONNEAU: Oui, cela rejoint les remarques que je faisais tout
à l'heure. Au niveau secondaire, depuis la régionalisation, le
déménagement, s'il est à courte distance, n'empêche
pas l'élève de continuer à aller à l'école
du secteur où il était, à cause du système de
transport qui lui facilite cela.
S'il s'agit d'un déménagement, ne serait-ce souvent que de
quinze, 20 ou 25 milles, il peut engendrer un changement de secteur
d'aménagement dans la commission scolaire régionale et à
ce moment, c'est vraiment un changement d'école et de contexte qu'on
impose au jeune.
A l'élémentaire, d'après ce que je sais, un
déménagement, même à courte distance, occasionne
généralement un changement d'école puisqu'il n'y a pas de
regroupement. Les écoles sont tout près du domicile des parents
et très souvent, à moins d'un mille, dans un arrondissement
immédiat.
A ce moment, c'est un contexte différent sur le plan scolaire
qu'on impose presque à tout coup, s'il y a un déménagement
de moindre importance...
M. LOUBIER: Monsieur...
M. CHARBONNEAU: ... même en milieu urbain.
M. LOUBIER: Si vous me permettez, M.
Charbonneau, est-ce que vous avez fait une analyse ou est-ce que vous
avez des statistiques sur le nombre de déplacements pour les parents qui
ont des enfants à l'élémentaire ou si vous n'avez aucun
document de base sur ça? Ce que je voudrais éviter, c'est qu'on
s'en tienne strictement au niveau des principes ou d'une école de
pensée, sans tenir compte des faits concrets.
Si cela rejoint 1 p.c. ou 1/2 p.c. de la population, est-ce que cela
vaut la peine de changer complètement les dispositions que nous avons
dans la loi? Si par ailleurs, vous avez des statistiques à l'effet que
cela rejoint un nombre considérable de personnes, cela pourrait
peut-être aider le législateur à prendre une autre
attitude.
M. CHARBONNEAU: En réponse à cela, je dois dire que nous
n'avons pas de statistiques récentes sur la question. Cependant, notre
expérience d'enseignants nous laisse croire que 10 p.c. à
l'élémentaire, c'est un chiffre qui est dans la normale des
choses. Trois sur trente.
M. LOUBIER: Maintenant, ces 10 p.c, est-ce qu'on les retrouve surtout
dans la région de Montréal ou dans la région limitrophe de
Montréal? Si tel est le cas, je ne pense pas que cela occasionne alors
de problème sérieux.
M.CHARBONNEAU: Je crois qu'il y a environ 325 ou 350 écoles
élémentaires seulement dans Montréal. C'est dire que, pour
les parents de Montréal, les changements par voie de
déménagement, même s'il ne s'agit pas de changement de
localité, peuvent imposer un changement d'école. Les
écoles élémentaires sont assez rapprochées des
lieux d'habitation des parents, à Montréal. Même là,
en milieu urbain, je crois que notre chiffre de 10 p.c. vaut. Par
région, je ne peux pas vous donner la réponse à votre
question, à savoir si c'est plus fort à Montréal
qu'ailleurs, en milieu urbain qu'en milieu rural. Notre expérience nous
laisse croire qu'à l'élémentaire trois sur trente,
c'est-à-dire 10 p.c, est un chiffre assez réaliste. Au
secondaire, il faudrait faire de nouveaux relevés, car il y a des
transformations de structures, mais ce doit être un peu moins fort.
M. CHOQUETTE: Le président de la Régie des loyers me
communique un fait pertinent à la discussion. L'année
dernière, au 1er mai, il y a eu 80,000 déménagements sur
l'île de Montréal. Alors, on peut calculer l'impact de ces
déménagements sur l'ensemble de la population, qui est d'environ
2,200,000 sur l'île de Montréal. Si on dit que la famille moyenne
est en moyenne de quatre personnes et une fraction, 80,000
déménagements impliquent environ 300,000 personnes qui ont
été dérangées sur une population de 2,200,000. On
peut dire qu'environ 10 p.c. de la population a subi un changement.
M. CHARBONNEAU: Ce qui veut dire un peu plus de 10 p.c, mais il faut
tenir compte de ceux qui déménagent sans enfant ou qui ont des
enfants d'âge non scolaire.
M. CHOQUETTE: Oui, c'est très approximatif. Environ 10 p.c.
M. LOUBIER: II y a le fait aussi que, pour plusieurs, selon un
pourcentage que je ne peux pas évaluer, c'est un
déménagement dans le même quartier ou à un coin de
rue plus loin. A ce moment-là, cela n'affecte aucunement les enfants, ni
les parents.
M. CHOQUETTE: Aviez-vous autre chose?
M. CHARBONNEAU: Nous avions à souligner que l'article 39 qui
permet à un locataire de résilier son bail lorsqu'il obtient la
permission de louer un logement à prix modique nous parait absolument
nécessaire pour permettre l'accès des familles peu
fortunées à ces logements. Nous espérons bien que cet
article sera maintenu. Quant à l'idée d'un bail type, nous avions
déjà réclamé devant l'Office de révision du
code civil qu'il y ait un bail type qui s'appliquerait obligatoirement au
louage de locaux d'habitation. Nous pensons qu'un tel bail type devrait
être incorporé au code et que ses dispositions devraient assurer
la protection des droits des locataires.
Un peu plus tard, sans doute, vous aurez l'occasion de prendre
officiellement connaissance de la formule de bail type suggérée
par le Groupement des locataires du Québec métropolitain et,
quant à nous, c'est une formule qui nous conviendrait. Nous souhaitons
avoir l'occasion de nous exprimer devant une commission parlementaire qui
traiterait d'ici peu de temps des problème globaux de l'habitation. Nous
pensons que cette législation que vous proposez maintenant constitue
quand même un certain pas en avant pour le secteur précis des
locataires au sens du projet de loi 56.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette.
M. CARPENTIER: A la page 4 de votre mémoire, vous mentionnez
à l'article 2: Discrimination: Les dispositions que le projet de code
contient au sujet de la discrimination nous semblent bonnes dans l'ensemble.
Nous suggérons cependant d'ajouter aux infractions déjà
mentionnées le refus de louer en raison d'opinions politiques. Est-ce
que vous pourriez expliciter un peu davantage ce que vous voulez dire par refus
de louer en raison d'opinions politiques?
M. CHARBONNEAU: Cela se situe dans le contexte de l'article du projet de
code de loyer. Il y a plusieurs sujets qui sont mentionnés comme pouvant
faire l'objet de discrimination.
Pour autant que je me souvienne, on parle de la langue, du sexe, d'une
foule de questions: la religion, le nombre d'enfants dans la famille. Nous
pensons qu'on peut ajouter le refus de louer pour des opinions politiques.
C'est une question de la part du législateur d'éviter qu'une
injustice soit créée à l'égard de certains
locataires potentiels parce qu'ils ont une opinion politique connue. Ce
pourrait devenir très difficile à certaines personnes, à
un moment donné, de loger dans certains arrondissements. Ce pourrait les
forcer à changer d'arrondissement ou même de localité si on
ne pouvait pas prévoir cette possibilité. On ajouterait
même pour ses opinions syndicales, selon la suggestion de M.
Choquette.
M. LOUBIER: Si vous me permettez, M. Charbonneau, est-ce que, dans votre
esprit, cela irait aussi loin qu'un propriétaire refuserait
hypothétiquement de louer à un membre influent du FLQ? C'est un
exemple que je donne. On pourrait en trouver d'autres. Est-ce que vous
considéreriez que le propriétaire n'en aurait pas le droit, parce
que le bonhomme dirait que ce sont des activités politiques uniquement
faites à sa façon? J'explicite davantage ma pensée. Je me
vois propriétaire et je sais qu'un tel est un membre influent du FLQ. Je
n'aimerais pas trop lui louer un appartement, pour toutes sortes de raisons,
les petits colloques, les petites bombes qu'on manufacture, etc. Je pense que
cela pourrait, si on introduisait ce terme, aller très loin et, entre
nous, je ne veux pas à ce moment-là vous prêter des
sentiments, des arrière-pensées. Pas du tout.
Mais, à ce moment-là, si on imbriquait ce terme, le
propriétaire, au moins de façon épidermique, ou en
surface, serait obligé de louer parce que le gars lui dirait: Je suis un
gars du FLQ, d'accord, je me fais de petites bombes, de petits pétards
mais vous n'avez pas le droit de refuser de me louer.
M. CHARBONNEAU: Est-ce que vous me permettez de poser certaines
questions avant de répondre une fois pour toutes? Est-ce que, dans
l'exemple que vous citez, quand vous parlez du FLQ, il s'agit d'un organisme
qui est hors la loi actuellement?
M. LOUBIER: Non, voici, je donnais un exemple.
M. CHARBONNEAU: Je comprends, oui.
M. LOUBIER: Non. Je pourrais vous en donner un autre. Vous savez fort
bien, M. Charbonneau, qu'il y a eu controverse à savoir si
c'étaient plutôt des prisonniers politiques, etc. Je pose cet
exemple comme je pourrais en choisir d'autres. Ainsi, quelqu'un arrivant de
l'extérieur et... je ne sais pas... vous en connaissez peut-être
plus que moi, des exemples?
M. CHARBONNEAU: J'ai moins de maisons à louer que vous.
M. LOUBIER: Pardon? Je n'en ai aucune. M. CHARBONNEAU: Excusez-moi.
M. LOUBIER: Si j'en avais une, peut-être qu'à ce
moment-là, ce serait bon d'inscrire: pour activités
syndicales.
M. CHARBONNEAU: Alors, notre réponse sur cette question ne fait
l'objet d'aucune hésitation quant au fond et non quant à
l'application à tel ou tel groupe particulier. C'est que, d'après
nous, l'occupation d'un logement ne doit pas contrevenir à l'ordre
public ou aux bonnes moeurs. Et là, nous prendrions la position
défendue dans le mémoire de la Fédération des
Associations des locataires du Québec, dans leurs commentaires en marge
de l'article 36. Vous avez un paragraphe qui souligne une position que nous
jugeons acceptable. L'occupation de certains lieux ne doit pas être
contraire à l'ordre public.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, le député de
Terrebonne.
M. HARDY: Dans le même sens que le député de
Bellechasse, supposons que je sois un propriétaire juif actuellement au
Canada et qu'un individu reconnu pour ses sympathies pour le mouvement
palestinien s'amène pour louer. Strictement pour des raisons politiques,
je pense que j'aurais des raisons de refuser. Je suis juif et je sais que le
bonhomme a des sympathies... Je refuserais donc de lui louer. Evidemment, on
peut prendre toutes sortes de prétextes mais, au fond, ce serait pour
des raisons politiques. Dans un cas pareil, même si, à
première vue, l'ordre public est garanti, vous ne croyez pas que,
psychologiquement, ce propriétaire aurait certaines raisons de craindre,
même s'il n'y a rien, à première vue. Même si le
locataire potentiel semble vouloir se conformer à toutes les lois,
à cause du contexte actuel, des faits qui se passent, ne croyez-vous pas
que, tout en admettant le grand principe de discrimination sur lequel tout le
monde s'accorde, je pense que c'est différent quand on arrive dans
l'application pratique. Puisque j'ai la parole, j'accroche une autre question
à cette première question, partant encore d'un fait bien concret,
il arrive très souvent, je ne sais pas à Montréal mais en
tout cas dans les milieux semi-ruraux, que des gens d'un certain âge
possèdent une maison à deux logements. Ce sont des rentiers, qui
ont accumulé certaines épargnes et se sont fait construire une
maison. Ils habitent un palier, un étage et ont des locataires à
l'autre étage.
Moi, j'imagine que ces gens-là encore là, c'est une
question purement psychologique mais c'est drôlement important
pourraient craindre certains locataires, à cause de leur aspect
extérieur, de leurs activités qui sont connues dans le village,
la municipalité. Ils pourraient avoir des craintes psychologiques de
leur louer. Si on rend la discrimination trop précise, on va obliger des
gens d'un certain âge à louer à des personnes qui, d'une
façon constante à l'année longue, vont les mettre dans un
"stress", vont les faire craindre. Je ne dis pas que leur crainte est
fondée ou non. Il ne s'agit pas de se poser la question, c'est une
question subjective, mais elle est là, la crainte. Est-ce qu'il n'y
aurait pas danger, même si le postulat est très bien, de placer
des gens dans des situations difficiles?
M. CHARBONNEAU: Puisque vous posez la question, votre question initiale
sur la nationalité et le reste, est-ce que vous voudriez suggérer
de retirer de votre projet de loi 73 l'article nous protégeant de la
discrimation?
M. HARDY: Non, justement, je ne l'ai pas posée sur le plan de la
nationalité, car ce n'est pas tellement la nationalité qui cause
un problème que certaines activités.
M. CHARBONNEAU: Vous avez parlé de Juifs, au départ, je
croyais...
M. HARDY: C'est parce que je voulais rattacher la question à un
cas bien précis à cause du contexte actuel. Mais il arrive que la
nationalité peut être greffée à un autre
problème. C'est pour cela que la question de la nationalité, je
la maintiendrais.
M. CHOQUETTE: Si le député de Terrebonne me le permet, M.
Charbonneau, si on lit le texte de l'article 73 sur la discrimination, on y
voit: En raison de la race, de la croyance d'ailleurs je pense que ce
devrait être plutôt les croyances la couleur, la
nationalité, l'origine ethnique, le lieu de naissance, la langue ou la
situation sociale de ce locataire. Je crois que les croyances, cela comprend
beaucoup de choses. Cela peut comprendre les opinions politiques ou
même...
M. HARDY: Dans l'interprétation générale, ce qu'on
a admis ici, c'est que, lorsqu'on parlait de croyance, de credo, on rattachait
plutôt cela à la foi qu'aux opinions politiques. En tous les cas,
je pense qu'il faudrait quand même être prudent pour ne pas placer
dans des situations difficiles des individus qui sont de bonne foi, des gens
parfaitement honnêtes, qui ne veulent pas être méchants
à l'égard de tel ou tel secteur de la société mais
qui peuvent avoir des raisons psychologiques valables. Il faudrait faire
attention.
M. BURNS: Faire attention aussi pour ne pas créer des
ghettos.
M. HARDY: Oui, oui.
M. BURNS: Créer un secteur où des gens qui ont certaines
opinions politiques vont résider parce que c'est la seule place
où ils peuvent le faire. Ce serait la création d'un ghetto.
M. HARDY: II faut éviter les deux dangers, je pense.
M. BURNS: Je suis d'accord avec le député de Terrebonne
que le mot croyance dans cette loi, ainsi que dans la loi concernant la
discrimination dans l'emploi, vise les croyances religieuses. Et si le ministre
veut lui donner une plus grande extension, je pense qu'il faudrait le signaler
clairement dans la loi. Parce que cela a toujours été
interprété ainsi. Cela vient du mot d'origine anglaise "creed".
On l'a adapté ici, on en a fait une traduction anglaise avec "belief"
mais je n'ai pas l'impression que nos tribunaux en tout cas, je ne suis
pas un expert lui donneraient cette étendue.
M. LE PRESIDENT: M. Charbonneau.
M. CHARBONNEAU: En ce qui concerne cette question de discrimination, il
ne faudrait pas en parler plus qu'il ne le faut, mais j'aimerais rappeler que
le problème s'est toujours posé sur le plan psychologique. Sur le
plan des principes, des textes de loi, généralement, on s'entend
pour avoir des textes assez généraux. Le problème que
soulève le député de Terrebonne est réel, mais on
doit essayer d'avoir des législations qui provoquent des ouvertures, qui
sont éducatrices, d'une certaine façon. Non pas qui suscitent
plutôt des possibilités de mettre des freins. La question des
ghettos est soulevée. Elle se pose aussi pour les étudiants d'un
certain âge. Parce qu'ils ont telle ou telle apparence, tel genre de
vêtements ou telle apparence physique, barbe, cheveux, etc., on n'a pas
à avoir peur de ces gens parce qu'ils sont habillés ou
coiffés de telle manière.
Je crois que cela est vraiment aller plus loin et quand on veut dire que
telle personne peut avoir des activités qui seraient contraires à
l'ordre public, à partir du seul indice qu'elle est de telle
nationalité ou qu'elle a émis telle opinion politique, je crois
que cela n'est pas admissible. Même si cela peut causer des
difficultés à des personnes d'un certain âge ne
possédant qu'un logement ou qui sont dans le milieu rural. Je crois que
le législateur n'a pas d'abord à se situer dans ce cadre. Il n'a
pas à favoriser à certains citoyens l'interprétation
d'opinion politique d'autres ou présumer que leurs activités
seront automatiquement hors la loi ou causeront un danger. A ce
compte-là, je ferai remarquer qu'on peut poser la question au sujet de
n'importe quel citoyen, savoir des hommes politiques, des syndicalistes,
n'importe qui. Il peut arriver que des gens, de n'importe quel métier
qu'ils soient, puissent poser des gestes hors la loi.
M. HARDY: Un ouvrier peut avoir peur de louer à un avocat parce
que selon la croyance populaire, les avocats sont des gens plus ou moins...
M. CHARBONNEAU: II ne faut pas présumer que les activités
de tel groupe de personnes seront contraires à l'ordre public, qu'ils
soient des étudiants habillés de telle ou telle manière,
qu'ils soient des personnes engagées dans telle ou telle formation ou
sens politique. Je crois qu'il faut aller au-delà de ça.
M. LOUB1ER: M. Charbonneau, vous insistez énormément sur
tous les droits, toute la latitude, toute la protection que l'on doit accorder
aux locataires. Je pense qu'il y a également certains droits et une
certaine latitude qu'il est important d'accorder aux propriétaires,
à moins que le terme même "propriétaire" soit
modifié et que ce bonhomme soit tout simplement au service de l'Etat
pour faire telle ou telle chose, sans utiliser et sans avoir les droits de sa
propriété. Je pense qu'il faut tirer une ligne mitoyenne.
Vous aviez raison d'insister tout à l'heure. Dans cette
philosophie moderne où est nécessaire la protection du
consommateur, vous assimilez à juste titre les locataires à cette
philosophie de la protection des consommateurs. Mais à moins de tout
changer notre système, il faut qu'il y ait également, du
côté des propriétaires, certains privilèges et
certains droits.
M. HARDY: Pas trop.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, le député de
Maskinongé.
M. BURNS: M. le Président, si vous permettez, dès qu'on
parle des privilèges et des droits du propriétaire, on oublie
complètement la fonction sociale de l'habitation. Et je pense que c'est
incompatible.
M. LOUBIER: Voici, ce n'est tellement pas...
M. BURNS: Je n'ai pas le droit d'avoir une maison qui peut loger des
gens si je ne favorise pas la fonction sociale de ce logement. Et à
partir du moment où on commence à mettre des latitudes et des
normes...
M. LOUBIER: Je comprends très bien, et c'est tellement vrai que
c'est pour ça qu'on intervient avec des lois pour protéger le
consommateur, protéger le plus profondément possible le
locataire. C'est là qu'on remplit véritablement cette obligation
sociale, mais d'autre part, il faut tout de même y aller avec une
certaine mesure dans la conjoncture dans laquelle nous vivons.
Si nous vivions dans un système socialiste, intégral ou
non, je changerais complètement mon argumentation, sauf que tant et
aussi longtemps que nous vivrons dans le système
actuel nord-américain, il faut accorder le plus de protection
possible à ceux qui sont défavorisés et adopter des lois
comme la Loi de la protection du consommateur.
C'est le rôle social que l'on veut atteindre mais pas à un
point tel qu'il n'y ait plus aucune possibilité d'exercer un droit de
propriété et que, à ce moment-là, on puisse dire
que l'expression "raisons politiques" a un sens très large et on peut
même permettre à n'importe qui de dire que vous êtes
obligé de le recevoir ou de l'héberger chez vous. Je pense que,
à ce moment-là, cela doit jouer un petit peu sur les deux
côtés et il faut prévoir la fonction sociale de
l'habitation dans un code du loyer tel que nous avons ici, mais seulement en y
allant avec une certaine mesure.
M. BURNS: Mais le député de Bellechasse a l'air de dire:
L'habitation a un petit peu une fonction sociale, elle n'en a peut-être
pas une au complet. Elle a une fonction sociale ou elle n'en a pas, c'est
tout.
M. LOUBIER: Ce n'est pas cela que j'ai dit.
M. BURNS: Vous dites oui, mais il ne faut pas aller trop loin.
M. LOUBIER : Sous prétexte de dire que cela a une fonction
sociale, on peut pousser beaucoup plus loin et dire que l'Etat, partout, devra
s'occuper non seulement de la propriété, de la construction, des
normes d'hygiène, de tout ce que vous voudrez, mais que,
également, ce sera l'Etat qui dictera dans tous les domaines aux
propriétaires quoi faire, quand le faire, à telle date, etc. et
que le propriétaire n'a aucun moyen de faire valoir ses droits.
Je pense qu'à ce moment-là, il y a une certaine
mesure.
M. BURNS: Si l'Etat agit dans le sens de la collectivité,
à ce moment-là, il n'y a pas de problème.
M. LOUBIER: Un instant. On le prévoit dans la loi, et je pense
que le député de Terrebonne l'a soulevé tout à
l'heure, il y en a encore plusieurs qui croient à la liberté
contractuelle et je pense qu'à ce moment-là, les termes d'un bail
sont écrits, conçus et accouchés selon le consentement des
parties.
M. LE PRESIDENT: S'il vous plaît, nous allons arrêter, nous
avons dépassé de beaucoup les bornes de la discrimination. Le
député de Maskinongé et le député de
l'Assomption sur le même sujet.
M. PAUL: M. le Président, je ne voudrais pas que M. Charbonneau,
par ma question, me prête l'intention de lui attribuer une sympathie
quelconque pour un parti politique, mais je me demande si cela correspondrait
à l'opinion que vous avez émise au nom des membres de la CEQ. Si
les membres de la commission et le législateur retenaient votre point de
vue d'affiliation politique et que, du même coup, on écartât
toutes ces possibilités qui nous ont été signalées
entre autres par le député de Terrebonne, si on disait, par
exemple, que le locateur ne peut pas refuser de louer en raison de la sympathie
ou de l'adhésion à un parti politique reconnu au sens de la Loi
électorale du Québec, est-ce que cela correspondrait à vos
vues?
M. CHARBONNEAU: II me semble que c'est une solution qui se situe
à mi-chemin, à savoir que là vous faites porter
l'amendement sur un parti politique reconnu.
M. PAUL: A un parti politique reconnu au Québec et, du même
coup, on pourrait mettre le propriétaire à l'abri de ces
poursuites ou de ces revendications de gens que l'on a décrits comme
étant des membres du FLQ ou encore des sympathisants palestiniens, pour
m'en rapporter exclusivement aux deux cas qui ont été
soulevés par les membres de la commission.
M. CHARBONNEAU: C'est une suggestion que, quant à nous, nous
pourrions étudier. Vos collègues l'étudieront aussi. C'est
sûr que, sous un certain aspect, cela a l'air très très
facile d'application, parce que les partis politiques reconnus au sens de la
loi, sans doute qu'on peut toujours les compter et qu'on peut toujours
s'entendre là-dessus. Mais il y a des opinions politiques que les gens
ont le droit d'avoir, qui ne se retrouvent dans aucun des partis politiques
reconnus aussi. Je ne crois pas qu'il soit de votre intention de dire que, sous
cet aspect des choses, il pourrait y avoir discrimination.
M. PAUL: En suivant votre raisonnement, voulez-vous laisser entendre ou
soumettre aux membres de la commission que, quelles que soient les idées
politiques d'un locataire, un propriétaire se devrait, et serait
obligé en vertu de la loi, d'accepter comme locataire celui-là
qui, à un moment donné, pourrait prêcher la révolte
au Québec? Il émettrait des opinions politiques et, du même
coup, on serait obligé de l'accepter.
M. CHARBONNEAU: Je crois qu'il ne peut pas refuser le logement à
une personne en vertu de ses opinions politiques, parce que ce serait
présumer que ces opinions conduisent inévitablement à des
activités qui sont contraires à l'ordre.
M. PAUL: Si c'est reconnu dans le milieu?
M. CHARBONNEAU: Si c'est reconnu dans le milieu, c'est une
hypothèse qui reste toujours à vérifier. Vous savez comme
c'est difficile à vérifier. Il y a des instances judiciaires
pour
reconnaître cela et on ne doit pas se fier à l'opinion
prévalant dans un milieu.
M. PAUL: II y a des déclarations de faits qui,
d'elles-mêmes, laissent supposer les intentions d'un individu et les
actes qu'il peut poser.
M. CHARBONNEAU: II me semble que c'est vraiment à l'ordre
judiciaire de reconnaître si une personne est hors la loi.
M. PAUL: A ce moment-là, vous placeriez le locateur dans
l'obligation de faire face à toute poursuite éventuelle. Il
aurait le fardeau de la preuve devant les commissaires de la régie, pour
dire: Je n'ai pas accepté parce que... si on accepte sans réserve
l'opinion que vous nous avez émise, la recommandation que vous nous
faites aux fins de retenir comme étant de la discrimination le fait,
pour un propriétaire, de regarder les opinions politiques, quelles
qu'elles soient, d'un réclamant ou d'un aspirant locataire d'un
logement.
M. CHARBONNEAU: Est-ce que le propriétaire a le fardeau de la
preuve dans le contexte du projet de loi présenté par le ministre
de la Justice?
M. PAUL: Oui, mais dans des cas bien déterminés. Mais, si
vous allez jusqu'à obliger le propriétaire à accepter un
locataire, même s'il avait des idées que tout le monde, à
l'exception peut-être de 0.5 p.c, pourrait condamner, je crois
qu'à ce moment-là nous ne rencontrons pas les buts des membres de
votre association.
Je dis les buts des membres de votre association, de la majorité
des membres de votre association et vous ne rencontriez pas non plus les
idées que vous voulez porter à notre attention ce matin.
M. BURNS: M. le Président, il ne faut pas oublier aussi que sur
toute cette question de poursuite, il faut bien lire l'article 77 qui met un
drôle de tempérament à ces poursuites-là. C'est le
procureur général qui intente les poursuites.
J'imagine que le procureur général, peu importe la
personne qui occupe le poste, peu importe qui travaille sous ses ordres, va
user de discernement dans des lois administratives comme celles-là. On
n'a jamais dit que le procureur général en prenait trop d'actions
jusqu'à maintenant.
M. HARDY: Vous nous assurez que vous ne serez jamais procureur
général?
M. BURNS: Ah! je ne peux pas vous assurer de ça, mais...
J'oserais même essayer de vous assurer du contraire.
M. CHARBONNEAU: Pour revenir brièvement sur la question de la
fonction sociale d'une législation comme celle-là qui a
été abordée tout à l'heure, M. Loubier disait
jusqu'à quel point on doit aller dans ce sens-là, on doit se
limiter, etc. Quant à moi, je pense que globalement, pour le
gouvernement du Québec, ça devrait être corollaire à
ce qui se fait à la réalité québécoise.
Quand on regarde les statistiques, on s'aperçoit que les citoyens du
Québec dépensent plus du côté logement à
Montréal et à Québec et dans la moyenne, dans l'ensemble,
que pour l'ensemble des citoyens canadiens.
A ce moment-là il me semble que, corollaire-ment, il devrait y
avoir un souci social plus poussé, pour correspondre plus simplement
à cet état de chose. Cela me semble être normal.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Je voudrais tout
simplement faire une mise au point. Certains membres de la commission, dont le
ministre, ont des engagements très tôt cet après-midi.
Comme plusieurs mémoires traitent des mêmes sujets, avec votre
permission, nous pourrions continuer à entendre tout le monde
jusqu'à la fin, tous les organismes, avant le déjeuner.
M. PERREAULT: On va être rendu à trois heures.
UNE VOIX: D'accord.
M.PERREAULT: II en reste trois, mais deux au moins traitent exactement
du même sujet.
M. LE PRESIDENT: Le député de Terrebonne.
M. HARDY: Seulement une brève question, M. Charbonneau. Est-ce
qu'il arrive à votre connaissance, assez souvent, que des locataires
et je parle entre autres de maisons où il y a plusieurs
habitations, je ne sais pas si c'est un mot français soient
"discriminateurs" ou s'opposent à ce que telle ou telle sorte
d'individus viennent?
Non pas le propriétaire, ce sont les locataires eux-mêmes.
Est-ce que cet aspect du problème a été porté
à votre connaissance?
M. CHARBONNEAU: C'est possible, mais à cela je vois deux
éléments de réponse rapide. La discrimination
exercée par des locataires n'est pas meilleure que celle exercée
par des propriétaires. Deuxièmement, la discrimination ou enfin
l'antipathie d'un groupe de locataires envers tel autre locataire dans un
même immeuble ne pourra se matérialiser que s'ils
réussissent à faire des pressions sur le propriétaire. La
décision finale devra quand même passer par lui.
M. HARDY: Vous reconnaissez que ça peut venir des locataires?
M. CHARBONNEAU: Et ce n'est pas mieux que dans le cas des
propriétaires.
M. HARDY: Je ne vous posais pas la question sur le plan qualitatif.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette.
M. CARPENTIER: Je suis heureux de constater que la question que j'ai
posée en premier lieu ait soulevé tant d'intérêt
chez les membres de la commission. Suite à ces remarques, quel serait le
processus que vous suggéreriez dans de pareils cas?
M. CHARBONNEAU: De discrimination?
M. CARPENTIER: Oui, de refus de louer en raison d'opinions politiques.
Quel est, d'après vous, selon les remarques des membres de la
commission, le processus que vous pourriez suggérer à la
commission pour régler ce genre de problème?
M. CHARBONNEAU: Nous suggérons les mêmes processus que ceux
qui sont prévus à l'article 73 pour les autres raisons, langue,
couleur, race, etc., la philosophie de base du projet de loi qui nous
occupe.
M. HARDY: Tout ce que vous suggérez, c'est qu'on ajoute, parmi la
liste de l'article 73, opinions politiques?
M. CHARBONNEAU: Cela manifesterait le libéralisme de ce
gouvernement.
M. CARPENTIER: Une autre question sur le rapport que vous avez
présenté, au sujet de la date du 30 juin que vous suggérez
dans l'intérêt des élèves, des parents et des
enseignants. Est-ce que vous croyez c'est une remarque que j'ai faite
tantôt lors de la présentation de l'autre mémoire
qu'il y a présentement un dérangement pour les étudiants
lorsqu'ils doivent subir des déménagements entre la date actuelle
et celle que vous suggérez?
M. CHARBONNEAU: C'est certain qu'un enfant qui doit s'adapter à
un nouveau contexte scolaire, le ou vers le 1er mai, subit un handicap. Ce
n'est pas toujours un handicap qui conduit à un échec, je veux
bien le croire, mais c'est une situation néfaste au point de vue
pédagogique et éducatif. Entre le 1er mai et le 30 juin, tout le
monde sait par expérience ce qui se passe dans les écoles, dans
les commissions scolaires. C'est la date des derniers contrôles, des
examens, des révisions, enfin de la démonstration des
connaissances acquises durant l'année. C'est le moment où un
élève doit s'être intégré à son milieu
scolaire, il doit avoir eu l'occasion à ce moment-là de surmonter
certaines difficultés qui existent à chaque année
scolaire. Sur le plan social, il doit être tout à fait au point,
de même que sur le plan des connaissances du milieu, des
règlements. Il doit avoir à l'esprit le genre de contrôle
des connaissances qu'il y a eu dans les mois précédents pour
savoir où il en est. L'enseignement varie un peu selon certaines
habitudes, certains contextes locaux. C'est un des plus mauvais moments
choisis. Pire que ça, il n'y a qu'une autre date, c'est le 1er juin.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Si on peut
demander la collaboration de tout le monde, une question très courte,
s'il vous plait.
M. HARDY: C'est assez important, M. le Président. Je veux bien
croire que le temps presse mais je pense que c'est assez important pour
permettre à tous les députés de poser toutes les questions
qu'ils ont à poser, étant donné surtout la
représentativité du témoin.
M. LE PRESIDENT: Cela ne m'empêche pas de demander de la
collaboration, pour éviter la grande dissertation politique que
quelques-uns ont tendance à faire.
Le député de Laviolette.
M. HARDY: Les notaires ne parlent pas, ils écrivent.
M. CARPENTIER: M. le Président, ce n'est pas mon intention de
faire une dissertation politique, loin de là. Je voudrais tout
simplement revenir à la page 5 du mémoire, à l'article 4:
Résiliation du bail par un locataire qui obtient un logement à
prix modique. L'article se lit comme suit: L'article 39 qui permet à un
locataire de résilier son bail lorsqu'il obtient la permission de louer
un logement à prix modique nous apparaît absolument
nécessaire pour permettre l'accès précisément des
familles peu fortunées à ces logements.
Ne croyez-vous pas qu'il n'y aura pas seulement les familles peu
fortunées qui vont se prévaloir de cet article de la loi et que,
du même coup, on ne brimera pas les droits de l'entreprise
privée?
Par exemple, vous avez quelqu'un, soit à Québec, à
Montréal, Sherbrooke ou Trois-Rivières, peu importe la ville,
où il y a surtout des centres universitaires, qui possède un
bail, il doit le respecter. Et tout simplement parce qu'il peut habiter un
loyer à prix modique, qui est souvent l'oeuvre d'initiatives locales ou
d'entreprises privées qui ont reçu des subventions
fédérales ou provinciales, il peut s'en aller à n'importe
quel moment, sans avis préalable, parce qu'il s'en va dans un logement
à prix modique.
Est-ce que vous ne croyez pas qu'il y a un danger pour l'entreprise
privée? C'est une remarque qui m'a été faite par de
nombreux propriétaires de maisons d'appartements, et je
pense que leur revendication est valable jusqu'à un certain
point. Que suggérez-vous à cet effet? Je pose la question
à M. Charbonneau.
M. CHARBONNEAU: II faudrait regarder les conditions requises de la part
d'une personne pour se prévaloir de ces logements à prix
modiques. Je ne crois pas que le problème se pose exactement comme vous
l'avez formulé, sauf erreur de ma part. Vous semblez émettre
l'opinion que n'importe qui peut se prévaloir de ces logements à
prix modiques.
D'après ce que j'en sais, sans tout savoir, il me semble qu'il
faut avoir certaines qualifications pour avoir droit à ces logements. Le
problème est beaucoup plus limité que posé par vous. Quant
à voir à protéger les intérêts des
entreprises privées, des constructeurs, je crois que si le
législateur a décidé de remplacer l'ancienne loi par cette
nouvelle, elle doit vraiment permettre que les programmes d'habitations
à loyers modiques soient utilisés, que les gens qui doivent s'en
prévaloir puissent le faire sans être empêtrés dans
des délais ou des complications juridiques. Que ce soit facile pour eux
puisque, d'une main, l'Etat investit ou consent des prêts ou quelque
forme d'aide pour qu'il y ait ces facilités ou ces avantages pour tel
type de citoyens, mais de l'autre main, il ne peut pas poser des contraintes
à ces gens-là pour les empêcher de s'en servir. C'est une
même caisse qui est là-dessous.
Il me semble qu'il devrait y avoir une convergence dans la loi
plutôt qu'une contradiction ou l'empêchement de l'une par l'autre.
Les citoyens doivent avoir le droit de se servir de ces mesures-là
puisque, finalement, ils financent directement ce genre de logements à
loyers modiques.
M. CARPENTIER: Je suis parfaitement d'accord, mais est-ce que vous
n'entrevoyez pas un certain danger envers certaines catégories de
personnes? Vous mentionnez précisément: permettre l'accès
des familles peu fortunées à ces logements. Ne croyez-vous pas
que ça s'est déjà produit? Que d'autres groupes de
personnes se prévalent des mêmes avantages?
M. CHARBONNEAU: Sur cette question, je n'ai pas de réponse
précise à faire parce que je ne peux pas savoir à quoi
exactement vous vous référez. Vous voulez sans doute dire qu'il y
a eu des abus, des gens qui se sont prévalus de ce type de logements
sans qu'ils soient les gens les mieux qualifiés pour s'en
prévaloir? C'est ça que vous voulez dire? Est-ce que ce sont
là des dérogations à la loi ou si ce sont des moyens
détournés tout en satisfaisant la lettre de la loi, de s'en
prévaloir?
M. CARPENTIER: Dans certains cas, c'est dans cette optique que les gens
portent plainte.
M. CHARBONNEAU: II y a sans doute une réglementation qui peut
voir à resserrer la vis, s'il le faut.
M. CHOQUETTE: Le problème du code des loyers.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: J'aimerais revenir sur un des paragraphes de votre
mémoire, à la page 4, sur la date de prolongation des baux. Vous
ajoutez, au second paragraphe de l'article 3: Cependant, la concentration des
déménagements favorisant l'augmentation des prix, nous
suggérons que le gouvernement étudie la possibilité de
permettre aux locataires et aux propriétaires de convenir d'une autre
date entre le 30 juin et le 1er septembre. Et vous avez ajouté: Par les
agences de déménagement. Que je sache, le prix des loyers
dépend aussi de l'offre et de la demande, de la disponibilité
dans l'économie où nous vivons, et plus il y a de logements
disponibles, plus il y a de chances d'avoir une plus faible augmentation de
loyer.
J'aimerais vous poser une question bien typique; il est malheureux que
le député de Maisonneuve ait dû s'absenter quelques
minutes, mais j'ai vécu dans le comté de Maisonneuve pendant de
nombreuses années.
On sait là-bas que les gens aiment à
déménager dans le quartier. Supposons que le 30 juin, il y a
1,000 logements disponibles dans le quartier Maisonneuve et que le 15 juillet,
plusieurs baux se termineraient. Alors on aurait plus que dix logements
disponibles pour quelqu'un qui veut déménager. On voit que deux
choses interviennent. Je veux avoir votre opinion là-dessus; le choix
est diminué pour la personne qui veut se loger convenablement et le fait
que l'offre n'est plus que de dix logements au lieu de mille, je crois qu'il y
a une tendance à augmenter le coût des loyers.
Tout à l'heure, dans votre mémoire, vous n'avez pas
spécifié si cela peut s'appliquer à toutes les agences de
déménagement. Je voudrais savoir si vous avez visé le
contexte économique.
M. CHARBONNEAU: Je crois avoir mentionné que nous nous opposions
à ce qu'il y ait une fixation du taux de base, soit la fixation du taux
d'augmentation, à ce que tout cela soit variable selon la
disponibilité des logements. Nous croyons que c'est un facteur qui
devrait être vraiment encadré par l'action du législateur.
S'il y a des poussées de construction dans telle ou telle région
du Québec, il est de notoriété publique que le
gouvernement n'est pas toujours très loin de cela. Il y a des
manières d'inciter la construction, soit au niveau des
municipalités ou au niveau du gouvernement. On ne devrait pas, s'il y a
pénurie de logements dans une région, pénaliser en plus le
locataire consommateur, quoique cela est un
effet déplorable de ce que vous appelez la Loi du marché.
Quant à nous, nous croyons que cela devrait être encadré et
c'est pourquoi nous avons l'autre demande de 3 p.c. comme norme au lieu de 5
p.c. Alors, en mettant le cran d'arrêt à ce niveau, c'est plus
près de la réalité que de la moyenne des augmentations et,
à partir de là, il doit y avoir discussion, mais ne pas permettre
l'ouverture à 5 p.c.
Enfin, je vous ferai remarquer que nous n'avons pas été
particulièrement précis dans ce deuxième paragraphe. Nous
suggérons que le gouvernement étudie la possibilité de
permettre aux locataires et propriétaires de convenir d'une autre date
entre le 30 juin et le 1er septembre. Cela ne veut pas dire qu'on ait une
opinion très précise, à savoir laquelle de ces dates est
la meilleure. Nous pensons qu'il y a quelque chose à faire, il y a une
idée à décortiquer et un profit à en tirer
plutôt que d'avoir le 30 juin comme date fixe.
M. PERREAULT: La question que je veux vous poser est celle-ci. Si en
étalant sur une longue période les différents baux, vous
avez moins de logements disponibles à une date donnée, qui est le
30 juin, alors que tout le monde déménage, vous avez un
très grand nombre de logis disponibles, il y a un choix pour le
locataire qui veut déménager. Si le bail du locataire se termine,
par exemple, le 15 juillet, dans le quartier Maisonneuve, il ne reste plus que
dix logements disponibles ce jour-là, le locataire n'a pas grand choix
à ce moment.
M. BURNS: II n'y a pas de locataire qui en cherche à ce moment.
Cela s'équivaut.
M. PERREAULT: Cela ne s'équivaut pas.
M. BURNS : Actuellement, vous avez un gros choix au mois de mai mais
vous avez beaucoup de gens qui en cherchent. Cela se vaut.
M. PERREAULT: Cela ne se vaut pas. L'autre question...
M. CHOQUETTE: Sauf si...
M. HARDY: Cela se vaut, il y a moins d'offres et moins de demandes.
M. PERREAULT : Non, ce n'est pas en relation directe, au point de vue
mathématique.
M. CHOQUETTE: II y a un autre aspect qu'il faudrait étudier en
temps et lieu quant à cette date de terminaison des baux, c'est la
question de l'industrie de la construction par rapport à ce
phénomène.
M. PERREAULT: Deuxième question que j'aimerais poser: Ne
croyez-vous pas qu'on pourrait faire deux classes de logements? Les logements
familiaux, les "bachelors" où les enfants ne sont pas affectés,
avec tous les immeubles d'habitation où les gens n'ont qu'un enfant en
bas de l'âge de l'école, ces logements pourraient
s'étaler... Ne croyez-vous pas que ce serait une solution de faire deux
classes de logements?
M. CHARBONNEAU: Ce serait déterminé par la grandeur du
logement?
M. PERREAULT: Par la grandeur du logement.
M. CHARBONNEAU: Problème à étudier.
M. PERREAULT: Parce que dans un "bachelor" où une personne reste
seule, soit un professeur, soit un employé de bureau, n'importe qui,
l'occupant peut facilement déménager sans affecter qui que ce
soit, il n'y a pas d'enfant, ou s'il y en a un, il est en bas âge.
M. CHARBONNEAU: Oui, mais c'est peut-être le moment de greffer
cette intervention. Les étudiants au niveau du CEGEP et au niveau
universitaire sont souvent appelés à payer sur une base de douze
mois.
C'est l'un d'entre vous, tout à l'heure, qui soulignait ce
problème. Je crois qu'il devrait y avoir plus de souplesse pour ces
gens. Peut-être que la formule que vous suggérez pourrait les
satisfaire en partie.
M. PERREAULT: J'ai vécu ce que vous avez dit, tout à
l'heure, pour les enfants d'école. J'ai vécu ça. Nous
avons fait de multiples déménagements. Je suis issu d'une famille
de onze enfants et c'étaient onze enfants qui changeaient
d'école. C'était tragique, ces changements dans notre vie.
M. BACON: II y en a qui ont mal tourné!
M. PERREAULT: Non, non! mais les parents, qui ont plusieurs enfants,
n'ont pas d'auto pour aller conduire leurs enfants à une école
plus loin. Il faut considérer ça.
M. BURNS: Que cela a été tragique!
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?
M. HARDY: Juste une question. M. Char-bonneau, vous avez parlé,
au début de vos remarques, du coût du logement. Vous avez dit
qu'à cause de l'inflation le coût du logement, c'était une
des choses les plus exorbitantes dans l'ensemble du coût de la vie. En
contre-partie, dans vos études à ce sujet, est-ce que vous avez
pu identifier quelles étaient les raisons de cet état de choses?
Quelles sont les raisons pour lesquelles le logement coûte si cher,
premièrement? Deuxièmement, est-ce qu'il vous a été
donné, dans vos études, de voir quelle est la
rentabilité des capitaux investis dans l'industrie du logement?
Est-ce que vous avez une idée de ce que les investissements rapportent
dans le domaine de l'habitation?
M. CHARBONNEAU: Je n'ai pas d'opinion précise quant â la
deuxième question.
M. HARDY: Le logement, vous ne savez pas ce que ça rapporte aux
gens?
M. CHARBONNEAU: Je ne peux pas vous dire si c'est 8 p.c, 7 p.c. ou 12
p.c. Je ne le sais pas. Mais, quant à la première question:
Pourquoi est-ce que ça coûte si cher? Ce qu'on entend dire
souvent, c'est que le Canada est, comme on sait, un pays froid. Les habitations
doivent être construites de telle et telle manière et cela
coûte cher. C'est normal que ça coûte cher. Si on
était dans le sud, cela coûterait moins cher.
Nous avons fait certains relevés du pourcentage des
dépenses de consommation affectées au logement pour une vingtaine
de pays. De tous ces pays, c'est au Canada que ça coûte le plus
cher. C'est un relevé tiré de l'Observateur de l'OCDE. Cela date
de 1966. Nous avons un relevé d'une vingtaine de pays. Au Canada, il
s'agissait, en 1963, d'un pourcentage de dépenses de consommation de
16.4 pour l'habitation. Donc, il serait au premier rang.
Nous avons aussi les statistiques pour la Suède, par exemple,
où on peut comparer le climat.
M. HARDY: C'est bien intéressant ce que vous dites, mais...
M. CHARBONNEAU: C'est pour éliminer au moins le facteur
climatique.
M. HARDY: ... on le sait. On admet que ça coûte plus cher.
Là, ce ne sont pas les raisons. Vous nous dites que ça
coûte plus cher. Vous avez mentionné une raison, le climat, mais
j'aimerais savoir s'il y en a d'autres, d'après vous, qui font que
ça coûte si cher. La réalité, c'est un fait. Les
statistiques, on peut les voir.
M. CHOQUETTE: La faible densité de la population par rapport au
territoire me paraît un facteur très important. Tout le monde sait
que le coût de l'infrastructure, c'est-à-dire des services
municipaux, que ce soit les égouts, l'eau, l'électricité,
se répercute sur le logement. Or, on sait que le Canada est un pays
à faible densité de population. Par conséquent, le
coût par unité de logement est plus élevé
probablement qu'ailleurs.
Un troisième facteur, c'est probablement les goûts des
Canadiens en matière de logement. Je pense qu'il faut tenir pour acquis
que les Canadiens veulent être logés plutôt confortablement
comparativement aux Européens et en particulier, peut-être, aux
Français. Ils veulent avoir un standard du côté du logement
qui se compare au standard américain. Alors, tout ça a des
répercussions, je pense, sur le logement moyen des Canadiens.
Le député de Terrebonne mentionne le coût de la
main-d'oeuvre. C'est sans doute un autre facteur très important.
M. BURNS: Comment expliquer cela alors que la main-d'oeuvre coûte
plus cher aux Etats-Unis?
M. CHOQUETTE: Probablement que le coût de la main-d'oeuvre
américaine est plus élevé dans la construction.
M. BURNS: Bien oui. Le taux de salaire est carrément plus
élevé aux Etats-Unis.
M. HARDY: Une dernière question, M. Charbonneau, qui se greffe
aux deux antérieures. Est-ce que vous considérez, quand
même, que l'on doit envisager le problème de l'investissement dans
le domaine de l'habitation? Quand on adopte une loi comme celle-là,
est-ce une des facettes que l'on doit envisager ou est-ce que l'on doit
totalement ignorer cet aspect?
M. CHARBONNEAU: Si on veut entreprendre une discussion sur tout le
problème de l'habitation, je crois qu'il y a d'autres occasions que les
séances sur le code des loyers pour ce faire. Même M. Choquette,
tout à l'heure, a dit à quelques-uns de ses collègues que
cela n'était pas tout le problème de l'habitation que nous
discutions ici, mais que c'est un aspect, soit la protection des droits des
locataires et des locateurs dans l'établissement d'un contrat de
location entre eux. Si on veut entreprendre une discussion sur l'ensemble des
politiques d'habitation, je crois que nous ferons tout notre possible, comme
organisme syndical, pour contribuer positivement à cette discussion et
en étudier auparavant tous les aspects avant de nous présenter
devant vous.
M. HARDY: Si je comprends bien votre réponse, vous
prétendez qu'une loi comme celle que nous étudions actuellement
ne peut avoir aucun effet sur le problème que je vous ai soumis.
M. CHARBONNEAU: C'est une interprétation abusive de ce que je
n'ai pas dit.
M. HARDY: Qu'est-ce que vous avez dit? Est-ce qu'une loi semblable,
selon vous, influence oui ou non les investissements?
M. CHARBONNEAU: Selon moi, cela influence de façon minimale les
investissements.
M. HARDY: C'est ce que je voulais savoir de vous.
M. CHARBONNEAU: C'est un aspect très parcellaire du
problème global de l'habitation que nous avons sous les yeux ici.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?
Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: Vous nous avez fait des remarques sur l'article 73 et vous
nous suggérez d'y ajouter l'aspect discrimination en raison d'opinions
politiques. D'autre part, je ne vous ai pas entendu nous suggérer
d'ajouter de la... Parce je pense qu'il y en a, à moins que quelqu'un me
dise que cela n'existe plus. Il y a une autre forme de discrimination qui
existe actuellement et que ne semble pas viser l'article 73, c'est celle du
nombre d'enfants dans une famille. Je ne sais pas comment on pourrait
l'exprimer dans une loi. Il est prévu ailleurs?
M. CHOQUETTE: A l'article 74.
M. BURNS: Ah bon! Je m'excuse. Cela m'a échappé.
M. CHOQUETTE: Lisez l'article 74.
M. BURNS: D'accord. J'ai passé vite sur l'article 74.
M. CHOQUETTE: Parce que l'article 74 porte exclusivement sur la question
des enfants.
M. BURNS: D'accord. Merci. J'ai comme sauté par-dessus.
M. CHARBONNEAU: Merci, messieurs. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons maintenant M. J.-H. Archambault,
vice-président du Gaz Métropolitain Inc.
Gaz Métropolitain Inc.
M. LAMONTAGNE: Je ne suis pas M. Archambault. Je suis assisté
aujourd'hui de M. Longval, le directeur du personnel du Gaz
Métropolitain et de M. Di Fruscia, gérant des relations avec les
abonnés. Je n'ai pas grand-chose à dire, sauf que j'appuie
entièrement les remarques faites par l'Association des employés
de Bell Canada. Je n'ai pas l'intention de lire le mémoire, il a
déjà été soumis. Ce que nous demandons de corriger
dans le projet de loi, ce sont les articles 22 et 23, qui concernent la date
d'expiration des baux. J'ai apporté à ce sujet certains documents
que l'on pourrait peut-être distribuer.
Le problème, M. le Président, c'est qu'en vertu de notre
convention collective et en vertu de conventions collectives antérieures
et présumément en vertu de conventions collectives qui suivront,
la période de vacances des employés de Gaz Métropolitain
commence le 1er juin et se termine à la fête du Travail, et les
employés ont le droit absolu de prendre leurs vacances durant cette
période à la condition qu'ils donnent un avis préalable de
la date à laquelle ils prendront leurs vacances. Alors, si on prend le
"rush" du 1er mai et si on le transporte le 30 juin, c'est déjà
assez compliqué le 1er mai, comme vous le verrez d'après les
tableaux que je vous présente, et si donc on le transporte le 30 juin,
on entre dans de très gros problèmes pour le public que le Gaz
Métropolitain dessert. Cela nous prend actuellement environ un mois et
demi pour nous remettre du gros déménagement du mois de mai dans
la région métropolitaine. Si ce déménagement se
faisait le 30 juin, à ce moment-là, nous serions obligés
de travailler avec la moitié ou les deux-tiers des effectifs normaux de
nos employés de services et de tous les employés qui doivent
s'occuper des changements, des déménagements et, à ce
moment-là, cela serait absolument impossible. C'est déjà
très difficile, avec notre personnel au complet et avec tout le temps
supplémentaire nécessaire, de donner le service au
déménagement du 1er mai. Mais nous vous soumettons que si le
déménagement se faisait le 30 juin, c'est-à-dire que si on
prenait la date magique du 1er mai et qu'on en faisait une nouvelle date
magique du 30 juin, il serait virtuellement impossible de donner un service
aussi bon que celui que nous donnons actuellement et effectivement, un service
auquel la population que nous desservons, comme service public, a le droit de
s'attendre.
Je comprends, M. le ministre, que vous avez suggéré tout
à l'heure qu'il y aurait probablement des changements dans les articles
22 et 23 mais que le problème était la première date de
continuation.
Je vous suggère que, si effectivement une première date,
juste pour une année, est fixée au 30 juin, ça
présente deux inconvénients.
Premièrement, par la suite les baux vont être
continués de douze mois en douze mois. Alors, ils risquent fort
d'être continués de 30 juin en 30 juin. Deuxièmement, le
seul fait pour le gouvernement, dans une loi, de suggérer une date,
même seulement pour une fois, a un gros effet psychologique sur les gens
qui ne sont pas trop sûrs quand ils vont faire terminer leur bail. Je
pense à l'exemple classique du couple qui se marierait le 15
décembre et qui déménagerait à cette date dans un
appartement. C'est peu probable que le propriétaire et le locataire
conviennent d'une date de terminaison du bail au 15 décembre. La coutume
c'est de mettre le 30 avril. Le bail va donc être pour un an et demi ou
deux ans et demi.
Une loi comme celle-ci, lorsqu'elle va être adoptée, va
avoir énormément d'impact sur le public en général.
Je pense que le seul fait de suggérer une date risque de la rendre
presque sacrée. Lorsque les gens vont se demander
quand ils vont faire terminer leur bail, la date du 30 juin va leur
venir presque automatiquement à l'esprit.
Il y a un problème pour les services publics. Je suis
persuadé que c'est la même chose pour l'Hydro-Québec; en
tout cas, on a entendu ce matin l'Association canadienne des employés de
téléphone chez Gaz Métropolitain, il y a la période
des vacances, les droits acquis des employés. Ce n'est pas une question
de les empêcher de prendre des vacances. Comme l'Association des
employés de téléphone le suggérait ce matin, ils
ont le droit absolu, en vertu de la convention collective, de prendre ces
vacances à ce moment-là. Effectivement, la majorité des
employés prennent leurs vacances au mois de juillet.
Cela commence au mois de juin tranquillement. La première semaine
il n'y en a virtuellement pas; la quatrième semaine, il y en a une
centaine sur à peu près 1,000 employés. Mais
à la deuxième semaine de juillet, on est déjà rendu
autour de 275 employés en vacances et, dans la troisième semaine,
ça dépasse les 330 ou 340. A ce moment-là, c'est
absolument impossible pour nous de donner au public on peut lui donner
un certain service le service auquel nous pensons qu'il a droit.
C'est à peu près les remarques que j'avais à faire.
S'il y a des questions techniques ou autres, ça me fera plaisir d'y
répondre.
M. LE PRESIDENT: Les documents que vous deviez distribuer...
M. LAMONTAGNE (Pierre): Ils sont ici, si quelqu'un veut les
distribuer.
Vous allez remarquer qu'il y a plusieurs documents auxquels je n'ai pas
fait référence. Ils sont là simplement pour expliquer
certaines habitudes de la compagnies. Le premier est une copie du
mémoire; ensuite vous avez une copie de la convention collective
c'est à l'article 12 que je faisais référence, les deux
premières lignes surtout. Les deux tableaux importants montrent le
nombre total d'employés en vacances, pour l'année 1972-1973, et
également les avis de déménagement reçus par Gaz
Métropolitain en 1971. Vous allez voir que la croissance se retrouve
entre mars et avril et, effectivement, c'est en avril que nous recevons la
majorité de nos avis de déménagement
Cela reflète simplement la situation du fameux
déménagement du 1er mai. Je suggère respectueusement qu'il
n'y ait pas de date, que les baux soient continués pour une
période de douze mois, peu importe quand ils finissent, en
espérant que, soit par l'entremise de ce bill, soit autrement, les
autorités gouvernementales puissent être capables de persuader les
gens de ne plus avoir de date sacrée pour leur
déménagement.
M. CHOQUETTE: Et le code civil qu'est-ce qu'on en fait?
M. LAMONTAGNE (Pierre): L'article 1642, si je me souviens bien, existe
depuis 1866. Je pense qu'il n'y a pas eu d'amendement.
M. CHOQUETTE: Si nous maintenons l'article 1642, sans le modifier,
est-ce qu'on ne perpétue pas la tradition existante? C'est le
problème que j'ai.
M. LAMONTAGNE (Pierre): Oui mais si je comprends bien, M. le ministre,
la Commission de révision du code civil et également une
commission spéciale, dont je ne me souviens plus du nom, ou bien ont
fait une étude, ou bien sont en train de faire une étude de ce
problème. Mais je pense que cette disposition, qui avait sûrement
sa raison d'être en 1866, ne l'a plus probablement aujourd'hui.
M. BURNS: La Commission de révision du code civil, d'ailleurs,
suggère une période de douze mois de l'occupation effective. Il
resterait une question de preuve, j'imagine, mais, sauf erreur, c'est ce
qu'elle suggère dans son document.
M. CHOQUETTE: Mais que peut-elle faire avec le dernier alinéa de
l'article 1642: "Si rien ne constate un montant de loyer pour un terme fixe, la
durée du bail est réglée par l'usage du lieu"? Faudrait-il
abolir l'usage?
M. LAMONTAGNE (Pierre): Je pense, M. le ministre, si vous me permettez,
qu'aujourd'hui, on voit très peu de baux qui ne sont pas écrits,
qui n'ont pas une date de commencement et une date de fin. Il y a eu
évidemment une époque où ce n'était pas toujours
comme cela mais je pense qu'aujourd'hui, dans l'immense majorité des
cas, quand quelqu'un loue une maison, il y a un bail de signé.
Une autre chose, c'est que l'article 1642... Non, l'article 1642
s'applique uniquement aux maisons, si je me rappelle bien.
M. CHOQUETTE: Oui, aux baux des maisons.
M. LAMONTAGNE (Pierre): C'est une disposition spéciale pour les
maisons.
M. LAMONTAGNE (Pierre): J'aurais dû apporter mon code civil.
M. CHOQUETTE: Alors, merci beaucoup, monsieur. Nous allons prendre votre
suggestion en considération.
M. LAMONTAGNE (Pierre): Merci, M. le ministre.
Association du camionnage du Québec Inc.
M. LE PRESIDENT: Nous entendrons main-
tenant l'Association du camionnage du Québec et son
représentant, M. Archambault.
M. BLOUIN: Je viens à la place de M. Archambault, je suis
Roméo Blouin, secrétaire de l'Association du camionnage du
Québec. J'ai à ma droite M. Fernand Couture, administrateur de
l'Association du camionnage du Québec et président de la section
des déménageurs de notre association. A ma gauche, M. Yves
Côté, qui est membre actif de l'association et directeur du
comité des déménageurs. Je demanderais à M. Couture
de vous faire part des remarques de notre association sur le bill 59.
M. COUTURE: Merci, M. Blouin. M. le Président, M. le ministre,
MM. les députés, je me fais le porte-parole de notre association,
en vertu d'un extrait du procès verbal d'une assemblée
générale annuelle, qui s'intitule "Elimination des
déménagements massifs le 1er mai."
L'Association du camionnage du Québec croit que les
déménagements massifs empêchent les compagnies de services
publics, téléphone, Hydro-Québec, nous-mêmes,
déménageurs, de donner à leurs usagers le rendement
habituel et obligent de 30,000 à 40,000 élèves, dans la
région de Montréal seulement, à changer d'école un
mois avant les examens.
Ailleurs au Canada, et dans la majorité des pays
européens, même en Russie, dont présentement, on entend
plutôt parler à cause du conditionnement physique, on voit les
gens déménager d'une façon normale, douze mois par
année, sans mouvement d'ensemble concentré dans une seule
période.
Les effets principaux d'une date ou d'une période fixe pour la
terminaison d'un bail, sont, pour les compagnies de déménagement:
L'impossibilité, pour toutes les compagnies, d'offrir le service
que le client serait censé attendre d'elles, à cause du
surcroît d'ouvrage dans une même période donnée.
L'obligation de faire des déménagements à des taux
et demi, à des tarifs doubles, ceci étant très
onéreux pour les locataires ou les propriétaires, à
l'occasion. L'impossibilité de donner un service
spécialisé nous nous vantons toujours d'être des
déménageurs spécialisés car le personnel
requis pour les déménagements est tout simplement introuvable. Il
est inconcevable de trouver du personnel compétent pour une
période de trois mois et encore moins si c'est à une date fixe.
Le manque d'équipement pour servir une clientèle, fait
qu'il est financièrement irréalisable d'acheter des
véhicules spécialisés pour les faire travailler quelques
mois et les laisser dans la cour pendant les autres mois de l'année.
Donc, investissement définitivement non rentable.
L'Association du camionnage de Québec Inc. recommande que
l'article 1642 du code civil de la province soit amendé de façon
que la présomption à l'effet que le bail prenne fin le 1er mai en
l'absence de toute stipulation contraire ne soit plus retenue, que le
même article soit amendé de façon que la durée du
bail soit d'une année à compter de la possession légale du
logement par le locataire.
Qu'une loi soit promulguée à l'effet d'empêcher les
propriétaires d'exiger de leurs locataires ayant des enfants à
l'école primaire que leur bail se termine durant l'année scolaire
afin de permettre à ces locataires de déménager le 1er
jour du mois de juillet, août ou septembre. Cette loi permettra
l'échelonnement des déménagements sur ces trois mois et
fournira aux parents, soucieux de l'instruction et de l'éducation de
leurs enfants, une occasion de leur faciliter la tâche.
Ceci n'empêche pas tous ceux qui n'ont pas d'enfants aux
études de déménager à toute autre date dans
l'année. Que le gouvernement participe, comme il le fait, je crois,
très bien actuellement, à une campagne d'éducation
populaire, afin de sensibiliser la population à toutes les
conséquences du déménagement massif le 1er mai.
Nous tenons à appuyer fortement le mémoire
présenté par nos prédécesseurs à la table
ici, soit l'Association canadiennne des employés du
téléphone et de tous les autres corps publics. Nous tenons
à les remercier du travail fait en ce sens qui va certainement
contribuer à instituer une période idéale de terminaison
de baux, pour toute la population, tant propriétaire que locataire.
Nous, déménageurs, serions très affectés par
le changement du 1er mai au 30 juin, car ceci restreindrait encore plus
l'efficacité de tous les services que nous pouvons donner aux personnes
qui doivent déménager. Une petite suggestion à M. le
ministre de la Justice, qui, selon le code civil, doit peut-être avoir
une date fixe: pour forcer les locataires à déménager
à l'année longue et en arriver à fixer une date de
terminaison de baux, il suffirait peut-être de fixer une date
impraticable et pour les locataires et pour les propriétaires. Nous
voulons parler d'une date comme celle du 1er janvier. Cette date ne serait
jamais acceptée étant donné la période des
fêtes, mais cette date serait le point tournant et les locataires
choisiraient eux-mêmes une date de terminaison de leurs baux.
Merci.
M. CHOQUETTE: J'ai pensé à votre idée.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y en a qui ont des questions
spéciales dans le même esprit que les mémoires
précédents?
M. PAUL: Dans le même esprit que les autres.
M. LE PRESIDENT: Je remercie beaucoup
les représentants de l'association. Nous entendrons maintenant
les représentants de l'Association des propriétaires de
Québec. Est-ce que vous voulez vous nommer, pour le
bénéfice du journal des Débats.
Association des propriétaires
M. TREMBLAY (Marcel): Marcel Tremblay, président de l'Association
des propriétaires, et le secrétaire-trésorier à ma
droite, et M. Va-chon, vice-président.
Me Gérald Coote n'a pu venir ce matin, de toute façon je
ferai moi-même la présentation du mémoire.
Voici, vous avez le mémoire et tout en étant un
résumé, on essaie de faire ressortir un peu les principaux
articles auxquels nous nous objectons, particulièrement l'article 39:
"Tout locataire ayant obtenu la permission de louer un local d'habitation dans
un domaine d'habitation à loyer modique administré par une
corporation constituée, conformément à l'article 55 de la
Loi de la Société d'habitation du Québec." Or, sur cela je
voudrais apporter la précision suivante: la Société
d'habitation du Québec a été formée pour
évacuer les zones grises et dans le but de la rénovation.
Or, nous voudrions qu'elle garde, à mon sens, cette
fonction-là, non pas devenir concurrente dans l'entreprise
privée. Alors, nous proposons que vous ajoutiez, à l'article 39 :
"Pour les logements dans les zones de rénovation et les logements
déclarés taudis."
Autrement dit, toute personne voulant entrer dans un HLM pourrait, dans
les soixante jours, si elle habite dans une zone de rénovation, parce
qu'après tout on ne doit pas sortir les gens d'un logement
adéquat dans le milieu privé pour l'entrer dans un HLM... Le but
de la Société d'habitation du Québec, ce n'est pas
d'entrer en concurrence avec l'entreprise privée, ce n'est pas de la
socialisation de l'habitation, je ne le crois pas, nous sommes en pays
démocratique. Alors, ce serait donc, à mon sens, très
judicieux d'introduire cet article-là pour ceux qui demeurent dans les
zones de rénovation.
Vous avez le rapport Martin, par exemple, ici à Québec,
qui précise d'une façon très claire les zones d'habitation
inadéquate. Il y a aussi des règlements annexés à
cela selon lesquels on peut déclarer un logement taudis. Alors, pour les
personnes demeurant justement dans une habitation qui est
déclarée taudis et dans une zone de rénovation... Alors,
nous n'avons pas objection à cet article, à condition qu'on y
ajoute ça; sans cela, réellement, nous croyons que l'article 39
devient préjudiciable pour toute l'industrie de la construction. J'ai
reçu de nombreux appels téléphoniques d'administrateurs de
compagnie d'assurances et je dois vous dire l'inquiétude de ces
gens-là qui administrent tout de même des fonds publics aussi. Et
je pense que si l'article 39 était adopté comme tel, il serait
très dangereux éventuellement pour les placements de capitaux de
l'industrie privée, c'est-à-dire de compagnies d'assurances qui
prêtent actuellement chez nous.
Quant aux articles 73 et 74, à 73 précisément on
parle de la situation sociale de ce locataire éventuel. Or, il est
très facile de mêler tout de suite les questions. Situation
sociale, autrement dit, si vous avez un type du bien-être social, si vous
avez un type qui est insolvable, c'est une situation sociale. A ce
moment-là, ce même individu sachant qu'il ne peut payer son
logement peut se servir de cet article-là pour se présenter au
commissaire des loyers et nous obliger, enfin, à payer une amende de
$1,000.
M. HARDY: Vous ne pensez pas que vous assimilez situation sociale avec
insolvabilité ou solvabilité?
M. TREMBLAY (Marcel): Bien, de toute façon, il y a les abus des
enquêteurs sociaux.
M. HARDY: Ce serait plutôt la situation financière. A un
moment donné, moi, je peux refuser de louer à quelqu'un à
cause de sa situation financière et je ne pense pas que ce soit
prévu par l'article 73.
M. TREMBLAY (Marcel): II y a les abus des enquêteurs sociaux, des
travailleurs sociaux, dans les bureaux du bien-être social. Quant
à moi, j'en suis victime pour quatre locataires. Ces gens-là se
sont introduits dans mes logements sous le conseil du service social et ils ont
été pendant un mois, deux mois, trois mois sans payer. Et ils se
réfugient maintenant dans les HLM. Alors, voyez-vous le jeu qui se fait
actuellement? Et le même gars du service social m'a dit: Si les articles
73 et 74 peuvent être adoptés, tu ne chiâleras pas
longtemps! Alors, de toute façon, je pense qu'il y a des abus dans toute
la politique sociale actuellement et nous ne sommes pas en pays socialiste. Il
arrive que certains fonctionnaires ont décidé d'introduire le
socialisme d'Etat ici.
M.HARDY: M. Tremblay, je pense que l'interprétation de votre
locataire, assisté social, n'est pas très juridique. Vous ne
devriez pas vous fier à lui, vous auriez été mieux de
consulter... Situation sociale et situation financière, ce n'est pas la
même chose.
M. CHOQUETTE: Me permettez-vous? Il peut y avoir une
ambiguïté sur le contenu exactement de "situation sociale". Enfin,
c'est peut-être une suggestion qui mériterait d'être
étudiée, remplacer "situation sociale" par "occupation". Parce
que le propriétaire a quand même le droit de considérer la
solvabilité du locataire éventuel.
M. HARDY: Oui, c'est sûr.
M. CHOQUETTE: Le propriétaire n'est pas
une oeuvre sociale, il faut qu'il puisse espérer normalement
recevoir son loyer tous les mois. Alors, je lance ce mot dans la discussion
pour être...
M. TREMBLAY: Ce serait bon d'inclure sous les conseils du
député de gauche, l'élément...
M. CHOQUETTE: Je suis à gauche par rapport à vous.
M. TREMBLAY: Ce serait aussi bon d'y inclure l'élément de
solvabilité.
M. CHOQUETTE: Mais non, on n'est pas obligé de l'inclure. Le
propriétaire va y penser, d'abord, qu'on n'exclut pas
l'élément de solvabilité; le propriétaire va
prendre ça en considération.
M. HARDY: Tout ce qui n'est pas défendu est permis.
M. TREMBLAY C'est parce que...
M. CHOQUETTE: Attention, n'oubliez pas une chose. Ces articles-là
contre la discrimination, il ne faut pas tellement avoir peur de ça,
monsieur. Parce que, avant qu'on réussisse à prouver qu'un
propriétaire a pratiqué la discrimination, ça prend une
preuve assez lourde. Il y a toutes sortes d'échappatoires possibles
à l'égard de causes comme ça. E ne faudrait pas
craindre.
M. TREMBLAY: Le juge devient le commissaire des loyers et on est presque
présumé coupable à ce moment-là. On va se
défendre.
M. CHOQUETTE: Mais il n'y a pas seulement des présomptions
à l'article?
M. TRREMBLAY :Oui mais, "commet une infraction et est passible d'au plus
$1,000". Mais qui est le juge de ça? C'est le commissaire.
M. CHOQUETTE: C'est un juge. Ce n'est pas le juge des loyers, c'est le
juge de la cour des sessions de la paix ou de la cour Provinciale.
M. TREMBLAY: C'est ça, c'est un juge...
M. CHOQUETTE: ... qui n'a rien à voir aux loyers.
M. BURNS: Un autre phénomène. Je reviens là-dessus
comme je le mentionnais tantôt, si c'est le procureur
général qui autorise une personne à intenter la poursuite,
ce n'est pas n'importe qui qui s'en vient sur la rue et qui porte une plainte.
Evidemment, il y a une dénonciation à l'origine, mais le
procureur général en vertu de l'article 77, doit autoriser une
personne à intenter des poursuites.
M. TREMBLAY: A l'article 74 qui découle de l'article 73,
où un type, par exemple, un Noir ou un Chinois, peut se servir de la
question raciale pour dire: On ne veut pas nous accepter. J'ai le cas d'une
religieuse de Hong Kong qui est arrivée avec sept enfants chez moi. Je
lui ai dit: Je ne peux pas accepter sept enfants dans un logement de trois
pièces.
Elle dit: Ecoutez docteur, chez nous, à Hong Kong, on peut
même demeurer 40 personnes dans 20 pieds carrés. Ne vous en faites
pas. De toute façon, je pense que c'est important de faire ressortir que
le propriétaire ne soit pas non plus comme...
M. CHOQUETTE: M. Tremblay, vous avez dans la loi les mots: "compte tenu
des conditions du logement", et cela s'interprète suivant les usages et
les coutumes québécoises, pas suivant les usages et coutumes
asiatiques.
M. TREMBLAY: C'est justement, les conditions du logement ne sont pas
définies.
M. CHOQUETTE: Oui, mais c'est une question de jugement. Le
bénéfice du doute va à l'accusé dans ce
domaine-là. Par conséquent, s'il y avait un doute à
l'égard d'une cause de discrimination pour ne pas avoir loué
parce qu'il y avait des enfants, c'est quand même l'inculpé qui a
le bénéfice du doute parce que le fardeau de la preuve appartient
à la poursuite.
M. TREMBLAY: Mais ici, on voit que toutes les amendes sont
données aux propriétaires. Il n'y a pas d'amende pour les
locataires, nulle part.
M. BURNS: Pourquoi y en aurait-il? Est-ce qu'il y a des articles
où vous trouvez qu'il devrait y en avoir?
M. TREMBLAY: Certainement, monsieur. Lorsqu'on locataire défait
tout un logement, lorsqu'un locataire...
M. BURNS: Faites votre suggestion et on va l'écouter.
M. TREMBLAY: ... on est obligé d'aller devant les tribunaux
ordinaires, on ne peut s'adresser au commissaire des loyers, on ne peut pas
avoir cet organisme qui permet ce qu'on appelle la conciliation entre locataire
et propriétaire.
M. BURNS: Faites vos suggestions aux endroits où vous trouvez
qu'il devrait y avoir des amendes contre les locataires, et on va les
écouter.
M. TREMBLAY: De toute façon, je pense qu'il devrait y avoir un
article qui parlerait justement du locataire qui brise le logement et qui
crée des problèmes vis-à-vis des autres
locataires, non pas simplement de le faire quitter la place parce que,
actuellement, c'est le phénomène de l'irresponsabilité. Le
gars n'a rien.
M. BURNS: Mais vous avez...
M. TREMBLAY: II sait qu'il ne sera pas saisi par personne, il n'a
absolument rien à perdre. Le type insolvable brise tout, il s'en va, il
n'y a aucune punition contre lui. Je pense que, de cette
façon-là...
M. CHOQUETTE: D'abord, vous avez une action en dommages,
premièrement.
M. TREMBLAY: Oui mais...
M. CHOQUETTE: Deuxièmement, il y a l'article 36. Vous l'avez lu
l'article 36? Il donne toutes sortes de droits aux propriétaires contre
les locataires qui se comportent mal dans les...
M. TREMBLAY: Oui, il peut le sortir si vous voulez. On peut
l'évincer, on peut recourir aux tribunaux ordinaires.
M. CHOQUETTE: Mais vous n'évoquez pas le droit pénal pour
mieux soutenir les propriétaires dans leurs droits à
l'égard des locataires, j'espère. Ce serait contraire à
toute l'évolution du droit depuis le Moyen-Age, à peu
près.
M. TREMBLAY: Non, mais de toute façon, je pense que le droit de
propriété est un droit, à mon sens, naturel qui existe
depuis que le monde est monde. Je crois que les propriétaires,
actuellement, sont devant l'alternative suivante: vis-à-vis le nombre
d'insolvables qui brisent les logements et qui créent des
problèmes, le commissaire n'intervient pas et ne fait que les
évincer. Bon, allez-vous en, on vous permet de vous en aller.
M. CHOQUETTE: Mais que voulez-vous qu'il fasse?
M. TREMBLAY: Actuellement...
M. CHOQUETTE: Qu'il leur donne une amende en plus?
M. TREMBLAY: II règne ce qu'on appelle un principe
d'irresponsabilité chez certains locataires.
Vous n'avez pas bien lu l'article 36 parce que vous en avez beaucoup de
recours. Je vais vous dire, au départ, que je suis très
sympathique au propriétaire; je ne m'en cache pas. Selon l'article 36 si
vous avez des locataires qui vous causent des tracasseries c'est pas mal
général vous pouvez vous adresser au commissaire pour
obtenir la résiliation du bail.
M. CHOQUETTE: Article 36 g), monsieur: "Que le locataire ou des
personnes dont il est responsable détériorent les lieux
loués".
M. TREMBLAY (Marcel): La seule peine que le commissaire a le droit de
lui imposer, c'est de quitter la place.
M. PAUL: Le point soulevé par le Dr Tremblay, c'est dans le cas
de mauvaise occupation.
M. TREMBLAY (Marcel): C'est ça.
M. PAUL: Ou de jouissance abusive des lieux loués.
M. TREMBLAY (Marcel): C'est ça.
M. PAUL: D'un autre côté, docteur, en vertu des amendements
que nous avons apportés à une loi que nous avons adoptée,
la loi 70, il est facile et rapide aujourd'hui de s'adresser à la cour
Provinciale pour obtenir immédiatement des procédures contre un
locataire qui aurait causé des dommages, pour autant que ces dommages
sont inférieurs à $300. Vous obtenez rapidement un jugement, sans
avoir à passer par tout le mécanisme déjà connu,
soit le recours à un avocat, l'action, la signification et tout ce que
vous voudrez.
M. TREMBLAY (Marcel): De toute façon, il y a peut-être
d'autres points, mais nous sommes d'accord sur les 5 p.c. d'augmentation. Nous
sommes aussi d'accord sur la date du 30 juin.
M. BURNS: Nous nous attendions bien que vous soyez d'accord.
M. TREMBLAY (Marcel): Maintenant, bien entendu, les petits
propriétaires en général sont inquiets et c'est normal.
Actuellement, les HLM ont vidé pratiquement tout l'entourage. J'ai, par
exemple, une veuve qui, actuellement, a cinq logements à louer, elle a,
tout de même, une famille de quatre ou cinq enfants et sa maison sera
saisie bientôt. Je pense que c'est très important qu'on apporte la
modification à l'article 39. Réellement, le HLM devient tout
simplement la concurrence normale à l'entreprise privée. Je pense
qu'il y a tout de même 70 p.c. des capitaux privés qui viennent
ici dans le domaine de l'habitation. La Société centrale
d'hypothèques et la Société d'habitation du Québec
n'ont pas les moyens d'introduire 70 p.c. des capitaux. Il faut tout de
même, à mon sens, en tenir compte. A l'article 39, je tiendrais
beaucoup, justement, à cette modification.
M. HARDY: Si on disait 90 jours au lieu de 60 jours?
M. TREMBLAY (Marcel): Le principe reste le même. La
Société d'habitation a été créée pour
les zones grises-, elle a été créée pour
évacuer les zones de rénovation et pour faciliter
justement la rénovation. Nous sommes d'accord sur ça, mais reste
le principe de la concurrence.
M. HARDY: Vous voulez que même une personne qui est
éligible à être locataire dans une habitation à
loyer modique termine son bail?
M. TREMBLAY (Marcel): Oui, c'est sûr. Si elle est dans un logement
adéquat, je pense qu'il est normal qu'elle respecte ça.
M. HARDY: Si, à un moment donné, cette personne paie chez
vous un loyer X et que ses revenus ne lui permettent pas de payer ce loyer,
vous voulez que ce soit l'aide sociale qui paie pour elle?
M.TREMBLAY (Marcel): Le citoyen canadien paie $280 par logement HLM, si
on rapporte les échéances de 40 ans à 25 ou 20 ans comme
dans l'entreprise privée. Je pense que ça peut répondre un
peu à votre question.
M. HARDY: C'est un autre problème sur lequel je suis
partiellement d'accord avec vous. C'est une grande fumisterie de
prétendre que les logis construits par des offices d'habitation
coûtent moins cher que ceux construits par l'entreprise privée; je
suis d'accord avec vous.
M. BURNS: M. Tremblay, ne trouvez-vous pas que votre problème va
être sensiblement diminué si vous n'avez pas de périodes
concentrées de déménagement? Si les dates d'expiration des
baux se répartissaient tout au long de l'année, ne trouvez-vous
pas que votre problème en serait d'autant diminué?
M. TREMBLAY (Marcel): Non, je ne suis pas d'accord.
M. BURNS: Vos dates d'expiration pourraient se répartir sur toute
une année et vous auriez des gens qui chercheraient des loyers tout au
cours d'une année.
M. TREMBLAY (Marcel): Je ne suis pas d'accord, parce que,
réellement, le petit propriétaire, surtout avec le bill 32 qui
dit qu'il devra engager quelqu'un, un courtier, pour faire la location des
logements, n'a pas les moyens de faire ça; seulement les gros ensembles
pourront le faire, pas le petit. Lorsque vous avez une période de
location précise, tous les gens s'y mettent pour faire la location. Le
petit propriétaire n'a pas les moyens d'engager des gens à
longueur d'année ou des courtiers, comme l'indique le bill 32.
M. BURNS: La raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est
qu'actuellement vous dites, dans votre mémoire, qu'il y a des
périodes au cours de l'année je pense que vous mentionnez
octobre...
M. TREMBLAY (Marcel): Du 15 novembre jusqu'au 30 avril.
M. BURNS: Bon, du 15 novembre au 30 avril de l'année suivante.
Vous dites que c'est particulièrement...
M. TREMBLAY (Marcel): Vous prenez un logement...
M. BURNS: ... difficile de louer à ce moment-là.
M. TREMBLAY (Marcel): ... non meublé; vous n'avez pratiquement
pas de demandes de ce temps-là.
M. BURNS: C'est ce que vous nous dites et je vous crois. Là, il
n'y a pas de problèmes. C'est de par la situation actuelle de la date
d'expiration des loyers quasi automatique au 1er mai. Si, au contraire, les
gens prennent l'habitude de déménager tout au long de
l'année, ne croyez-vous pas que votre affirmation ne pourrait être
soutenue? C'est-à-dire qu'entre le 15 novembre et le 31 avril cela ne
sera pas aussi difficile que cela de louer. C'est justement à cause de
la date de l'expiration que c'est difficile.
M. TREMBLAY (Marcel): Je tiens à la date d'expiration. Lorsqu'un
type s'intéresse à l'investissement dans une
propriété...
M. BURNS: J'essaie de vous démontrer que c'est autant dans votre
intérêt que dans celui de toute la population que cela soit
réparti.
M. TREMBLAY (Marcel): Je ne suis pas prêt à consacrer toute
mon année, abandonner ma profession pour me mettre simplement à
faire de la location de logements. On demandait tout à l'heure des
congés pour des gars de Bell Canada, etc. mais je pense que le
propriétaire a droit de temps à autre à des congés.
Il y a tout de même une situation épouvantable pour le
propriétaire.
M. BURNS: A moins d'être propriétaire de nombreux
logements, je ne pense pas que vous passerez votre année à
essayer de louer.
M. TREMBLAY (Marcel): Vous seriez surpris du nombre de démarches
qu'on fait.
M. BURNS: Si vous avez beaucoup de logements à louer, vous
êtes typiquement de ceux que vous mentionniez tantôt, qui peuvent
se payer des agents d'affaires pour ça.
M. TREMBLAY (Marcel): Non, pas dans mon cas.
M. BURNS: Je ne vous parle pas de votre cas, un propriétaire qui
a plusieurs logements est évidemment plus apte à le faire. C'est
du moins votre affirmation de tantôt.
M. TREMBLAY (Marcel): De toute façon, nous tenons à ce que
soit le 30 juin, tel que stipulé dans votre projet. Est-ce que le
secrétaire pourrait poser une question?
M. BEDARD: Dans la loi actuelle de la Régie des loyers, l'article
25 favorise les propriétaires quand les locataires sont en retard dans
le paiement de leur loyer. Le propriétaire peut l'évincer sans
passer par la régie. Pourquoi a-t-on enlevé cet article?
Il peut les envoyer à n'importe quelle période de
l'année, en janvier, mars, octobre.
M. BURNS: S'il y a quelque chose, c'est dans l'intérêt des
propriétaires, l'article 36 actuellement. Vous n'avez pas besoin de
passer par les tribunaux réguliers pour obtenir une
résiliation.
M. CHOQUETTE: A l'article 36 a), on dit: Que le locataire est en retard
de plus de quatre semaines dans le paiement de son loyer et que ledit loyer n'a
pas été payé avant l'audition tenue devant le commissaire.
Par conséquent, au lieu de trois semaines, c'est quatre semaines.
M. BEDARD: II faut qu'il passe par le commissaire tandis qu'à
l'article 25 il n'a pas besoin de tribunaux.
M. BURNS: C'est bien mieux pour vous comme ça.
M. BEDARD: Vous pensez?
M. BURNS: Vous n'avez pas besoin de passer devant les tribunaux. C'est
un tribunal administratif, qui est le commissaire, qui peut prendre la
décision. Cela vous épargne des frais. Vous n'avez même pas
besoin d'avoir un avocat.
M. BEDARD: Le commissaire peut retarder...
M. HARDY: Les avocats peuvent se plaindre de cet article, pas vous.
M. CHOQUETTE: Monsieur, vous avez aussi l'article 42: "Rien, dans la
présente loi, n'empêche...
M. BEDARD: Je le connais.
M. CHOQUETTE: Cela vous donne des recours à la fois au civil et
devant la commission.
M. BEDARD : Je trouve que le délai est trop long. Dans la loi de
la régie, c'est trois semaines; maintenant, c'est quatre semaines en
retard. Les gens qui investissent dans la propriété et qui ont
des locataires qui paient après quatre semaines trouvent le délai
trop long.
Parce que le bail spécifie bien que le paiement doit se faire le
premier jour du mois. Le code civil dit la même chose. On étend la
période pour payer sur plus de quatre semaines. On ne peut pas
évincer le locataire avant les délais fixés par les
articles 36 et 42. H n'y aurait pas lieu de raccourcir ces délais?
M. CHOQUETTE: On va y penser, monsieur, sérieusement.
M. TREMBLAY (Marcel): Le bill des droits de l'homme traite aussi de
l'article 73.
UNE VOIX: Cela contredit le bill des droits de l'homme.
M. TREMBLAY (Marcel): Non, cela infirme le bill des droits de
l'homme.
M. BURNS: On a pas de bill des droits de l'homme au Québec,
monsieur. C'est d'ailleurs une des critiques qu'on fait constamment au ministre
de la Justice.
M. TREMBLAY (Marcel): Vous avez un bill des droits de l'homme au
Canada.
M. BURNS: II ne s'applique pas aux lois provinciales.
M. PAUL: Pour le député de Maisonneuve, c'est un pays
étranger !
M. CHOQUETTE: Le député de Maisonneuve serait mieux de
s'occuper de ce qui se passe ici.
M. BURNS: Ce n'est pas moi qui le dis; c'est la cour Suprême qui
dit que cela ne s'applique pas aux lois provinciales, qu'est-ce que vous
voulez?
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez d'autres questions à
poser?
M. BEDARD: J'aurais une autre question générale qui est la
suivante: Le ministre de la Justice, au début de ses remarques, a dit
que la loi datant de 1941 a été abandonnée par le
fédéral parce que la cour Suprême l'avait jugée
inconstitutionnelle. Est-ce que la présente loi ne serait pas
inconstitutionnelle?
M. CHOQUETTE: C'est la loi...
M. BEDARD: Je ne suis pas avocat, moi!
M. CHOQUETTE: ...fédérale qui avait été
déclarée inconstitutionnelle. C'est donc qu'on était dans
un domaine de compétence provinciale. C'est la raison pour laquelle la
loi provin-
ciale de conciliation entre locataires et propriétaires, depuis
1951, a été valable et que celle-ci vient, en somme, en faire une
loi permanente.
M. HARDY: C'est une hypothèse. Elle sera peut-être
inconstitutionnelle. Mais attendez qu'on l'adopte avant de demander son
inconsti-tutionnalité.
M. TREMBLAY (Marcel): Peut-être que c'est hors d'ordre parce que
ce n'est pas le même bill, c'est le bill 32, mais il nous touche
également. Les petits propriétaires n'ont pas les moyens
d'engager un courtier pour louer leurs logements. Si vous pouviez nous apporter
quelque aide sur ça, parce qu'on n'a pas été averti de
ça, malgré toute l'implication du bill 32.
M. CHOQUETTE: Est-ce que c'est la loi...
M. TREMBLAY (Marcel): Des valeurs mobilières.
M. CHOQUETTE: ...des biens immobiliers?
M. TREMBLAY (Marcel): Oui. Parce que les petits propriétaires
n'ont pas les moyens d'engager justement des courtiers pour faire la
location.
M. HARDY: Elle n'est pas adoptée; elle est simplement devant la
commission. Vous pouvez vous présenter devant la commission
parlementaire.
M. BURNS: La commission des institutions financières.
M. TREMBLAY (Marcel): Oui. Il doit être tard un peu, n'est-ce
pas?
M. HARDY: Communiquez avec eux.
M. CHOQUETTE: Ecrivez à M. Tetley, le ministre des Institutions
financières.
M. PAUL: II va vous répondre.
M. LE PRESIDENT: On vous remercie beaucoup. La commission ajourne ses
travaux au...
M. CHOQUETTE: Au 17 octobre, si vous le voulez, à dix heures du
matin.
M. LE PRESIDENT: ...17 octobre, à dix heures du matin.
(Fin de la séance à 13 h 43)