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Version finale

30e législature, 3e session
(18 mars 1975 au 19 décembre 1975)

Le mercredi 28 mai 1975 - Vol. 16 N° 113

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Etude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

Commission permanente de la justice

Etude des crédits du ministère de la Justice

Séance du mercredi 28 mai 1975

(Dix heures vingt-cinq minutes)

M. Houde, Limoilou (président de la commission permanente de la justice): A l'ordre, messieurs!

Les membres de la commission, pour ce matin, sont les suivants: M. Beauregard (Gouin), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bellemare (Johnson), M. Bienvenue (Crémazie), M. Burns (Maisonneuve), M. Choquette (Outremont), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Desjardins (Louis-Hébert), M. Pagé (Portneuf), M. Perreault (L'Assomption), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Springate (Sainte-Anne), M. Sylvain (Beauce-Nord). M. Brisson (Jeanne-Mance) remplace M. Tardif (Anjou).

Le programme 2, élément 1. Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, on m'a laissé entendre que le programme 1 avait été adopté. Nous serions à l'étude du programme 2.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le programme 2, élément 1.

M. Caron: M. le Président, M. Springate est peut-être sur la route 20 ce matin.

M. Choquette: Je déplore son absence. J'aurais aimé qu'il soit ici, à la commission, pour nous parler de ses infractions au code de la route, ainsi que de celles commises par ses collègues qu'il dénonce si aimablement devant l'Assemblée nationale. Mais nous aurons peut-être la chance de le voir tout à l'heure et d'avoir une conversation avec lui.

M. Bédard (Chicoutimi): Nous n'avons pas eu la chance de connaître le nom du ministre qui était complice de ces excès de vitesse.

M. Choquette: Je sais qui est le ministre. Il a plaidé non coupable devant moi.

Le Président (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous revenons à l'étude des crédits.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela me rassure au moins sur un point. Vous n'êtes pas juge et partie.

M. Choquette: Je sais que je serais un juge douteux dans le cas actuel. Mais je suis content d'accueillir le député de Chicoutimi à cette commission parlementaire. Cela faisait longtemps que nous ne l'avions vu. Je suis content qu'il se promène avec la Justice contemporaine, de voir qu'il en a fait son livre de chevet, sa bible, son vade-mecum. Je suis très heureux de voir cela.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un bel effort de réflexion sur le justice, mais, de là à être en accord sur toutes les mesures, c'est une autre affaire!

Le Président (M. Houde, Limoilou): Le député de Chicoutimi. Elément 1, programme 2.

Enquêtes et expertises scientifiques

M. Bédard (Chicoutimi): A ce programme, je demanderais quelques explications générales de la part du ministre, sur les crédits qui sont affectés à chacun des postes, aux éléments 1 et 2.

M. Choquette: Très bien. Vous savez qu'il ne faut pas me poser de questions trop compliquées. Cela fait partie des règles du jeu.

M. Bédard (Chicoutimi): Si elles sont trop compliquées, on risque de ne pas avoir de réponse!

M. Choquette: Ou cela peut prendre du temps.

M. Bédard (Chicoutimi): Nous pourrons discuter de l'écoute électronique tout à l'heure.

M. Choquette: C'est une de mes spécialités.

M. Bédard (Chicoutimi): En attendant, je vais être à l'écoute du ministre.

M. Choquette: J'ai hâte que nous arrivions à ce sujet. Vous me posez des questions précisément sur l'élément 1.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Les éléments 1 et 2 du programme 2.

M. Choquette: Le programme 2 porte comme titre: Enquêtes et expertises scientifiques pour fins judiciaires. Dans ce programme, on trouvera les crédits affectés aux enquêtes du coroner, aux enquêtes des commissaires aux incendies, ainsi que les crédits à voter pour le fonctionnement des instituts médico-légaux tant de Québec que de Montréal.

M. Bédard (Chicoutimi): II y a des augmentations qu'on peut voir à chacun des éléments.

M. Choquette: Les motifs des augmentations?

M. Bédard (Chicoutimi): Cela se situe au niveau des salaires, je suppose.

M. Choquette: Evidemment, oui. Je crois qu'on peut facilement dire que, pour l'élément 1, il s'agit sûrement d'augmentations de traitements qui font augmenter les dépenses.

Quant à l'élément 2, l'augmentation est attri-buable à l'accroissement de nos coûts pour les services professionnels, car les pathologistes, ceux qui font les expertises, les autopsies sur les

cadavres, nous coûtent nettement plus cher qu'autrefois.

Il y a également le matériel et l'équipement scientifique qui sont requis pour le fonctionnement des instituts médico-légaux de Québec et de Montréal qui ont augmenté au point de vue des coûts. Tout cela a entraîné des dépenses additionnelles.

Je tiens à dire au député que, dans le domaine des coroners et des commissaires aux incendies, nous avons l'intention, tout probablement au cours de la prochaine année, de mettre sur pied un système complètement changé en matière de coroners et de commissaires aux incendies, de constituer un service composé de personnes qui agiront de façon permanente plutôt qu'à temps partiel.

M. Bédard (Chicoutimi): Justement, tout à l'heure, vous vous référiez à la Justice contemporaine.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): A la page 45 du livre blanc de la justice, je voyais qu'on annonçait, entre autres, la publication d'une étude sur le rôle des coroners, pour le printemps 1975.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Le dépôt a-t-il été fait?

M. Choquette: Non, je n'ai pas fait de dépôt, mais le programme, le mémoire de programme qui est relatif à la constitution de nouveaux services des coroners et des commissaires aux incendies a été préparé par le ministère de la Justice et est au point, a l'heure actuelle. Il ne nous reste plus, en fait, qu'à prendre des décisions législatives ou administratives en vue d'instaurer ce nouveau système de coroners et de commissaires aux incendies.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand peut-on prévoir le dépôt ou la publication de cette étude?

M. Choquette: II n'est pas habituel de publier ce genre de document, malgré que je doive dire que je n'aurai probablement pas d'objection à le faire au moment du dépôt des lois qui seront pertinentes à la réorganisation de tout ce domaine, de façon que l'Opposition voie ce sur quoi nous nous sommes fondés pour présenter de nouvelles lois dans ces domaines des coroners et des commissaires aux incendies.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne sais pas si le livre blanc s'est avancé un peu trop, mais, à la page 45, tel que je l'ai mentionné tout à l'heure, on spécifie, entre autres, ceci: "Toute l'organisation et le rôle des coroners ont fait l'objet d'une étude en profondeur au sein du ministère, récemment. Les conclusions de ces études doivent être rendues publiques au cours du printemps 1975."

M. Choquette: On me dit que, pour ce qui est des commissaires aux incendies et des coroners tous les travaux ont été effectués au ministère de la Justice et, en fait, pourraient être rendus publics à l'heure actuelle.

D'autre part, nos études ne sont pas encore complétées pour ce qui est de l'institut médico-légal, parce qu'il y a des changements à faire à ce niveau, à l'occasion des modifications dans ce programme. Mais, dès que ce sera complété, je n'aurai pas d'objection à déposer cela à l'Assemblée nationale.

M. Bédard (Chicoutimi): Parce que, s'il y a une partie qui pourrait être rendue publique, comme vous le dites, dès maintenant, il me semble qu'il y aurait avantage à ce que les conclusions en soient connues de manière à pouvoir faire l'évaluation avec les recommandations du livre blanc.

M. Choquette: Je peux promettre au député, je peux m'engager, vis-à-vis du député, à déposer à l'Assemblée nationale et à rendre public le résultat de nos études dès que les deux seront complétées dans leur forme définitive, car il y a un rapport entre les deux parties concernées. Il faudra que je tienne compte des deux parties concernées dans les positions que je prendrai publiquement pour dire dans quel sens nous allons nous orienter. Déposer simplement une partie, à l'heure actuelle, me semblerait un peu prématuré. Il n'y aura rien de secret dans ces travaux. Ils seront rendus publics.

M. Bédard (Chicoutimi): Simplement une autre question. Quand prévoyez-vous pouvoir rendre publiques ces deux parties?

M. Choquette: Probablement au début de juillet.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Dans le même chapitre du livre blanc de la justice, on faisait état — vous en avez parlé un peu tantôt — des effectifs et de l'organisation des coroners. Entre autres, on sait qu'à l'heure actuelle il y en a trois permanents et 99 à temps partiel.

M. Choquette: C'est exact.

M. Bédard (Chicoutimi): A la page 77 du rapport, il y a au moins cinq ou six recommandations qui sont faites dans le livre blanc.

Je pense que ce n'est pas nécessaire de les lire, mais je cite les principales, entre autres, que soit créé un poste de coroner en chef du Québec et que son titulaire soit chargé de diriger et de surveiller le travail des coroners dans l'ensemble du Québec; que les coroners nommés à l'avenir le soient, dans la mesure du possible, à titre permanent et possèdent une formation juridique. Le ministre pourrait-il me donner ses commentaires, pour autant que c'est possible présentement, sur chacune des recommandations qui paraissent dans le livre blanc?

M. Choquette: Toutes les recommandations qui sont contenues au livre blanc sont, en fait, des politiques du ministère de la Justice et du gouvernement. Cela ne veut pas dire qu'elles ne sont pas susceptibles d'être révisées, si quelqu'un nous démontre que nous avons eu tort. Mais, en l'absence d'une telle preuve, on peut tenir pour acquis qu'il est dans notre intention de légiférer et d'administrer dans le sens des recommandations qui sont incluses dans le livre blanc, de telle sorte que la législation que nous présenterons éventuellement pour réorganiser tous les domaines des coroners et des commissaires aux incendies prévoira la nomination d'un chef qui sera responsable de l'ensemble des coroners à temps plein, qui seront institués. Elle prévoira également que ceux qui exerceront dorénavant la fonction de coroners et de commissaires aux incendies devront avoir une formation juridique, soit avocat, soit notaire.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. D'ailleurs, je pense que, sur cet aspect du livre blanc, sur ces deux recommandations, entre autres, le Barreau du Québec s'est prononcé dans le même sens que le livre b!anc.

M. Choquette: Oui. Le Barreau s'est prononcé dans ce sens et Me Michel Robert, le bâtonnier, vient de prononcer récemment une conférence où il a demandé que, dorénavant, ies fonctions comme celles de coroners, de commissaires aux incendies, d'administrateurs à la Régie des loyers et autres fonctions judiciaires ou quasi judiciaires soient exercées par des gens ayant une formation juridique. Je n'ai pas d'objection à dire que je suis parfaitement d'accord sur cette demande du Barreau. D'abord, elle me paraît correspondre à une meilleure administration de la justice.

Deuxièmement, elle me paraît susceptible d'aider le Barreau, mais aussi, parmi le Barreau, des avocats et de jeunes avocats, qui sont produits de plus en plus grand nombre par nos facultés, et qui ont un peu de difficulté, compte tenu d'autres réformes qui sont apportées par le ministère et par le gouvernement.

M. Bédard {Chicoutimi}: Celles apportées et celles qui viendront.

M. Chioquette: Celles apportées ei ceiies qui viendront...

M. Bédard: (Chicoutimi): Comme le rapport Gauvin.

M. Choquette: ...sans souligner que celles qui viendront peuvent venir affecter la pratique du droit. Mais il me semble que cela correspond autant à une question d'amélioration de l'administration de la justice qu'à trouver des débouchés pour une profession qui peut en avoir besoin.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand prévoyez-vous pouvoir appliquer ces recommandations qui sont énoncées dans le livre blanc?

M. Choquette: Dans le domaine des coroners et des commissaires aux incendies?

M. Bédard (Chicoutimi): Dans le domaine des coroners.

M. Choquette: Je prévoirais facilement qu'on puisse penser légiférer l'automne prochain. Il est possible qu'on ne puisse pas recruter instanter et rapidement tous les coroners dont on aura besoin en vertu de la nouvelle loi. Cela pourrait être espacé dans le temps. On pourra garder certains coroners à temps partiel pendant une certaine période de temps, même a la suite de l'adoption de la loi.

M. Bédard (Chicoutimi): J'aurais une demande à faire, quitte à ce qu'on y donne suite dans le délai le plus rapide possible, tout en tenant compte des recherches qui sont peut-être nécessaires. J'aimerais avoir le dépôt de la liste des 99 coroners qui sont présentement en poste...

M. Choquette: C'est très facile. Nous allons la déposer cet après-midi.

M. Bédard (Chicoutimi): ...avec le nom et le district où ils agissent, la date d'entrée en fonction, les honoraires en 1974/75, ainsi que le nombre d'enquêtes qui ont été faites dans leur district respectif. J'aimerais également connaître le salaire des trois coroners permanents.

Ni. Choquette: Compte tenu des détails exigés ou demandés, cela peut prendre un peu plus de temps que je ne le prévoyais au début. Mais je m'engage à déposer la liste avec tous les renseignements demandés par le député dans les prochains jours.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Pour l'élément 1, M. le Président, je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Elément 1, adopté. Elément 2?

M. Bédard (Chicoutimi): A l'élément 2, j'aurais un cas particulier qui va rejoindre une situation de fond qui existe peut-être dans tout le Québec, mais le ministre me donnera les explications nécessaires là-dessus. C'est une lettre qui nous a été adressée par le Comité des citoyens de Lac-Mégantic qui réclamait récemment, dans une lettre qui a d'ailleurs été adressée à Me Jean Drouin, que la morgue de l'endroit soit déménagée de chez l'entrepreneur de pompes funèbres qui, à l'occasion de l'identification des corps par les familles, exerce des pressions indues pour obtenir la charge des funérailles.

De plus, le comité des citoyens faisait ressortir que les locaux qui sont mis à la disposition de la morgue seraient inadéquats, entre autres, pour une raison bien spécifique, c'est-à-dire que cet endroit ne possédait même pas de chambre froide.

Je pense que c'est difficile de parler de morgue adéquate s'il n'y a même pas de chambre froide. Il y a assez de la viande qui est avariée.

M. Choquette: En raison des plaintes qui ont été adressées au ministère de la Justice en rapport avec le fonctionnement de la morgue de Mégantic, nous avons demandé, conformément à nos habitudes en la matière, à la Sûreté du Québec d'enquêter sur cette morgue.

M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous enquêté? M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Quels sont les résultats?

M. Choquette: Nous n'avons pas le résultat de l'enquête encore, d'après ce qu'on m'a dit. Je n'ai pas reçu le résultat de cette enquête. Mais la Sûreté du Québec fait une enquête sur les allégations qui ont été formulées à l'égard des propriétaires.

M. Bédard (Chicoutimi): Je trouve que c'est une enquête qui est quand même longue pour les choses à constater. C'est en date du 9 avril que cette situation a été portée à notre attention, de même qu'au ministère de la Justice.

M. Choquette: On me dit...

M. Bédard (Chicoutimi): II y a des éléments là-dedans et il me semble que cela ne prend pas un grand enquêteur et une grosse enquête pour voir jusqu'à quel point c'est vrai.

M. Choquette: On nous dit que nous avons reçu cette lettre du 9 avril avec trois semaines de retard au ministère de la Justice.

M. Bédard (Chicoutimi): Même là.

M. Choquette: Attendez. Si vous ajoutez trois semaines au 9 avril, cela vous mène au début de mai.

Deuxièmement, le tout a été remis à la Sûreté du Québec au début de mai et il y a plusieurs enquêtes qui sont en marche par la Sûreté du Québec sur diverses morgues au Québec, de telle sorte que nous n'avons pas encore reçu le résultat de cette enquête.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est dans ce sens que je disais que cette situation peut rejoindre une situation qui se présente dans bien des régions du Québec. Je voudrais savoir du ministre jusqu'à quel point ses constatations lui permettent de vérifier que les éléments de cette situation se retrouvent ailleurs. Par exemple, est-ce l'habitude du ministère de la Justice de situer la morgue dans un salon funéraire, surtout dans des régions ou dans des endroits où il y a plusieurs propriétaires de salons funéraires?

M. Choquette: Nous sommes obligés de prendre les morgues privées, en fait, pour s'occuper des cadavres, parce que c'est le seul moyen que nous avons à notre disposition pour nous en occuper. Il arrive qu'il existe des plaintes à ce sujet, parce qu'en fait il peut y avoir différents problèmes qui se posent à la suite du fait que les entrepreneurs privés s'occupent bien ou mal de leurs fonctions.

Dans d'autres circonstances, nous avons tenté de demander aux hôpitaux de s'occuper de recevoir les cadavres et d'agir comme morgues, mais, dans la plupart des cas, cela nous a été refusé, les hôpitaux ne voulant pas s'en occuper.

En fait, nous sommes obligés d'accepter une situation qui, dans certaines occasions, est insatisfaisante.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que vous trouvez cela normal que les hôpitaux puissent le refuser?

M. Choquette: On me dit aussi que les règlements sur la santé ne permettent pas au ministre des Affaires sociales d'obliger les hôpitaux à agir comme morgues.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais ce que je vous demande, c'est si vous trouvez normal que les hôpitaux refusent, dans des régions ou des endroits où cela s'imposerait, que les cadavres soient déposés là plutôt qu'ailleurs.

M. Choquette: Cela dépend aussi des conséquences financières que cela aurait sur le fonctionnement des hôpitaux. Il faudrait prévoir des employés qui s'occuperaient des cadavres. Il faudrait ajouter à des budgets déjà assez lourds au point de vue de la santé publique. Il est peut-être vrai que la situation actuelle n'est pas parfaitement satisfaisante sur le plan pratique. Dans certains cas, on peut trouver à la critiquer, mais, en fait, il faut travailler avec les moyens du bord, les moyens financiers que nous avons, et instituer un système de morgues dans le Québec avec toutes sortes de budgets afférents. Pour le nombre de cadavres dont on a à s'occuper, cela pourrait être disproportionné.

M. Bédard (Chicoutimi): II reste que la situation mérite d'être analysée, parce qu'il est clair que, dans des districts judiciaires où il y a plusieurs entrepreneurs funéraires, c'est tout au moins un danger très réel qui peut se présenter, car si on place la morgue dans un salon funéraire en particulier, on ouvre la porte à la possibilité de pressions indues, tel que le laissait entendre le Comité des citoyens de Lac-Mégantic, de la part de ces entreprises funéraires par rapport aux autres.

M. Choquette: II est arrivé en certaines occasions des conflits entre différents entrepreneurs d'un même endroit pour avoir la morgue. Ce n'est pas nouveau, je pense. Au Québec, on a eu des exemples de cela à diverses occasions.

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne pose pas ces questions pour savoir s'il y a un réseau de patronage au niveau des morgues.

M. Choquette: Non, enfin, le mot serait affreux dans votre bouche mon cher ami.

M. Bédard (Chicoutimi): Patronage?

M. Choquette: II ne peut certainement pas être question d'une chose pareille. On a attiré notre attention sur des conflits qui ont eu lieu à certaines occasions. Le député, je crois, est un homme pratique. Il comprend facilement que, pour le ministère de la Justice, aller instaurer un système de morgues publiques ou, en somme, conscrire les hôpitaux pour agir comme morgues avec toutes les dépenses qui en découleraient, représente, vous savez, des dépenses additionnels pour le gouvernement. Il nous faut tenir compte de la question des frais qui découleraient d'une telle politique. Par contre, je comprends le problème. Dans le mémoire de programme qui sera déposé, comme je l'ai promis, au début du mois de juillet, le député pourra constater que la question est soulevée et qu'il y a une discussion sur le problème, en fait, peut-être avec certaines avenues menant au règlement de cette ou de ces situations.

M. Bédard (Chicoutimi): Oui, je pense que ce qui peut être important pour le moment, c'est qu'il y ait des critères très précis d'établis par le ministère afin que les entreprises funéraires qui, à l'heure actuelle, servent de morgues aient à répondre à des exigences très précises basées sur des critères très précis fixés par le ministère.

M. Choquette: Exactement. De toute façon, le député peut être sûr que nous ne traiterons pas le problème avec morgue.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est bien le moins qu'on puisse exiger du ministère de la Justice.

M. Choquette: Quoi qu'il s'agisse d'une question de morgue.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, à l'élément 2, certains articles de journaux ont été publiés à l'effet qu'il y avait plusieurs centaines de dossiers qui traînaient à la cour du Coroner de Montréal, entre autres.

Un de ces articles, qui remonte au mois de mars de cette année, parle de 300 dossiers qui, effectivement, traînent dans les classeurs de la cour du Coroner et affirme que cette situation est permanente et traîne d'année en année. Cette situation, on peut le deviner, a nécessairement comme conséquence de mettre dans l'embarras les familles des personnes concernées qui, souvent, attendent le certificat de décès pour réclamer le bénéfice de l'assurance et ouvrir une succession. Cette situation peut amener bien des désagréments qu'il me semble nécessaire d'éviter aux personnes qui sont déjà touchées par...

M. Choquette: II y avait une situation réelle qui existait à Montréal au point de vue des retards dans la tenue des cas de recherche ou des enquêtes du coroner. L'article que cite le député de Chicoutimi en rapport avec la situation qui existait en mars était relativement exact au point de vue de l'état des retards encourus. Nous avons décidé de prendre des moyens pratiques pour régler le problème.

Nous avons nommé trois coroners ad hoc, trois membres du Barreau, en fait, qui ont procédé dans ces divers dossiers en souffrance. Je peux dire au député qu'avec l'accélération du nombre d'enquêtes tenues à Montréal, la cour du Coroner sera à jour d'ici deux mois. Donc, on peut dire que le ministère a pris les moyens pour remédier à la situation qui existait.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela répond à un des éléments de l'article, disant qu'il y avait une rareté de personnel. Vous me dites que vous avez...

M. Choquette: On avait deux coroners permanents à Montréal. Il y en a un qui a eu des déboires, puisque le ministère a décidé de demander sa destitution par une demande à la fonction publique. Donc, ceci a fait qu'un des coroners ne pouvait plus agir. D'autre part, je pense que le service du coroner laissait à désirer d'une certaine façon au point de vue du travail, de la production de dossiers et du nombre d'enquêtes. Devant toute cette situation, nous avons décidé de nommer des coroners ad hoc, qui sont des avocats d'expérience.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que cette destitution a été demandée à cause de certaines irrégularités survenues dans l'application elle-même de la loi?

M. Choquette: Pas nécessairement dans les enquêtes elles-mêmes, mais dans des actes administratifs. Maintenant, le tout est sub judice d'une certaine façon, parce que la cause a été plaidée devant le délégué enquêteur Perrin, de la Commission de la fonction publique. Je ne voudrais pas exprimer un avis sur cette demande de la part du ministère de la Justice.

M. Bédard (Chicoutimi): Toujours à l'élément 2, concernant les expertises médico-légales et scientifiques, est-ce que le ministre pourrait me dire le nombre de pathologistes qui, à l'heure actuelle, oeuvrent pour le ministère?

M. Choquette: A Montréal, nous avons quatre pathologistes permanents. A Québec, nous en avons trois. A Rimouski, nous en avons un.

En plus de cela nous retenons les services de pathologistes dans les hôpitaux pour faire des autopsies, soit à Montréal, Québec ou dans d'autres régions où nous n'avons pas de pathologistes permanents. Là, nous les rémunérons à honoraires.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous nous avez parlé

de ceux qui étaient permanents. Quel est le nombre de ceux qui travaillent à honoraires?

M. Choquette: Le nombre de pathologistes à honoraires dont nous retenons les services? Même pour nos pathologistes à temps plein ou à temps partiel, parce qu'ii y en a certains qui sont à temps partiel, je tiens à dire au député de Chicoutimi que ceux-ci sont rémunérés sur une base contractuelle. Ils n'appartiennent pas à la fonction publique. Ils ont été engagés à des tarifs qui nous permettent d'entrer en concurrence avec les tarifs qui sont donnés aux médecins en vertu des lois d'assurance-hospitalisation et de la santé. En fait, ceci a amené la situation suivante où il nous est devenu, à toutes fins pratiques, impossible de recruter des pathologistes à temps plein pour devenir membres de la fonction publique et agir comme pathologistes auprès de l'institut médico-légal, quoique nous en ayons deux, les docteurs Valcourt et Authier, qui sont respectivement chefs de leur département, le premier à Montréal et le deuxième a Québec.

Par contre, il se produit que même nos pathologistes contractuels sont parfois trop débordés et il nous faut retenir des pathologistes dans les hôpitaux, lorsque le besoin se fait sentir. A ce moment, les pathologistes dans les hôpitaux sont payés à honoraires.

M. Bédard (Chicoutimi): J'aurais besoin de quelques renseignements. Comme tout à l'heure, dans le programme précédent, vous me les fournirez dans le délai le plus court possible. Premièrement, je voudrais savoir le nombre de pathologistes, pas seulement les permanents, mais également ceux qui sont temporaires.

M. Choquette: Oui.

M. Bédard (Chicoutimi): Le nombre de morgues et l'endroit où elles sont situées, les honoraires des pathologistes, les dates d'engagement et le mode de détermination de ces honoraires. Je pense que ce sont des renseignements que vous pourrez nous fournir.

M. Choquette: Très bien. D'ici quelques jours, je vous donnerai une liste faisant état de ces renseignements.

Le Président (M. Brisson): Elément 2, adopté? Programme 3, adopté?

Gestion interne

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être une question générale concernant le programme 3. J'aimerais que le ministre de la Justice nous explique les différentes augmentations qu'on peut vérifier dans les crédits à chacun des éléments du programme.

M. Choquette: Généralement, les accroissements de budget dans ce domaine sont...

M. Bédard (Chicoutimi): Si on prend l'élément 1, par exemple, on se rend compte que, de $1,609,000, il y a une augmentation de $4,301,000.

M. Choquette: Généralement, en ce qui concerne la Justice ou les crédits de la Justice, on peut tenir pour acquis que les augmentations demandées sont attribuables à des augmentations de traitements, ceci à cause du fait que le budget de l'ensemble du ministère de la Justice est, à 75%, un budget de traitements et de salaires. Donc, ceci est la règle générale. Dans la cas particulier, il y a des motifs...

M. Bédard (Chicoutimi): Dans l'élément 1, quand on voit passer cela de $1 million à $4 millions, il doit y avoir...

M. Choquette: Oui, la croissance dans ce cas est attribuable à d'autres facteurs que ceiui-là. Je vais vous en donner l'énumération. D'abord, il y a la création de la direction générale de la sécurité publique, pour laquelle il est prévu un budget de $500,000.

Ensuite, vous avez le service de recherche $390,000; le service de l'information $430,000; la Société québécoise d'information juridique, $550,000; l'achat d'un avion pour faciliter l'accès aux régions éloignées, le transfert et le transport de délinquants, la surveillance par la Sûreté, ia recherche de criminels, etc., $600,000; création d'un pool de secrétaires en vue de répondre aux besoins du ministère, $40,000; structuration du service de l'équipement et exécution de projets spécialisés en aménagement, $161,000; réorganisation du service de vérification interne, $74,400; intégration des cours municipales de Longueuil, Greenfield Park et Saint-Hubert, $43,000; divers projets d'informatique, $113,000; commission de réforme du droit, $100,000; honoraires des membres du groupe de travail sur l'habitation, $50,000, formant un total de $3,051,400.

En plus d3 cela, il y a lieu d'ajouter une augmentation due à l'application des conventions collectives incluant les révisions de traitements et les avancements d'échelon, $435,400; une augmentation basée sur la hausse de l'indice général des prix sur ies montants dépensés au cours des années antérieures, $216,800; hausse due à l'augmentation d'environ 20% du tarif des frais de déplacement accordés aux fonctionnaires en 1974/75, $93,000; diverses autres augmentations et diminutions, $72,000, pour un total de $3,868,600 qui s'ajoutent aux crédits prévus pour l'année 1974/75 de $1,609,900.

M. Bédard (Chicoutimi): Lorsque vous parlez de l'achat d'un avion qui a été nécessaire, est-ce que l'administration ou la responsabilité appartient au ministère des Transports du Québec ou au ministère de la Justice?

M. Choquette: L'achat de l'avion nous sera imputé, car c'est pour les besoins de la Sûreté, ainsi que pour les besoins de nos services de détention, en particulier dans le Bas-du-Fleuve. Le pilotage de l'avion serait confié ou effectué par le

service aérien du ministère des Transports. C'est le statut des hélicoptères de la Sûreté à l'heure actuelle.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant la nouvelle structure de la direction générale, nous aurons l'occasion d'y revenir dans un autre programme. Il y aurait un cas particulier que je voudrais souligner au ministre concernant le retard, les délais dans l'émission de certains chèques. En février dernier, des plaintes ont été faites concernant l'irrégularité des paiements de salaires à certains employés occasionnels, de même que le versement des chèques de remboursement de dépenses pour certains sténographes. On a allégué que la raison de ces retards était que les budgets étaient épuisés.

Je voudrais savoir de la part du ministre ce qui est arrivé. Est-ce que le problème a été réglé? Doit-on prévoir qu'il se présentera de nouveau à pareille date l'an prochain? On nous a laissé entendre, concernant les sténographes et certains autres employés, que l'Etat, d'une certaine façon, se finançait sur le dos des petits salariés du fait que ces derniers, n'ayant pas leur paie à temps, se voyaient dans l'obligation de contracter des emprunts, ce qui est totalement anormal. J'imagine que le ministre de la Justice conviendra qu'il est anormal que les petits salariés soient obligés de se financer et de payer certains frais d'emprunt parce que leur salaire ne leur est pas payé à temps.

M. Choquette: Le problème a existé, mais il a été réglé. D'ailleurs, le problème n'était pas causé par l'administration du ministère de la Justice, mais par le service de la comptabilité qui dépendait du ministère des Finances. Il était attribuable à la mise en oeuvre du système SYGBEC, un système de paiement de traitements par voie d'ordinateur.

Etant donné les retards encourus dans les paiements, vu la mise en place de ce système SYGBEC, une méthode plus expéditive de paiement a été mise en place à partir de comptes "in trust" et prévoyant des avances sur traitements, ce qui a fait que le problème a été réglé, de sorte que, pour le moment, il n'y a pas de tels retards dans le paiement des traitements. Il en reste peut-être un peu pour les fournisseurs, mais, vu l'instauration de comptes "in trust" et de petites caisses, ceci nous permet de régler le problème dans une large mesure.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-il réglé au point de pouvoir espérer que la même situation ne se reproduise pas à la même date l'an prochain, à cause de la date de déposition du budget?

M. Choquette: En général, on peut dire oui. On peut espérer que le problème ne se reproduira pas l'année prochaine, sauf, peut-être, pour les fournisseurs importants qui sont payés directement par le ministère des Finances. Là, le problème n'est pas entre nos mains, mais entre celles de ce ministère. Il faut cependant espérer que d'ici là les problèmes du ministère des Finances auront été réglés de façon satisfaisante.

Le Président (M. Brisson): Le programme 3, adopté?

M. Bédard (Chicoutimi): Au programme 3, je n'ai pas d'autres questions, M. le Président.

Protection de la société

Le Président (M. Brisson): Adopté. Le programme 4: Protection de la société, des citoyens et de leurs biens.

M. Bédard (Chicoutimi): Au programme 4, on peut voir qu'il y a des augmentations substantielles à l'élément 1, une diminution de crédits à l'élément 2 et une minime augmentation à l'élément 3. J'aimerais que le ministre nous donne des explications générales sur ces augmentations et diminutions.

M. Choquette: En général, ce programme comprend plutôt le paiement de salaires. Pour ce qui est de l'élément 1, il s'agit d'une croissance largement attribuable aux effets de la convention collective en vigueur avec l'Association des policiers provinciaux du Québec.

Pour ce qui est du deuxième élément, Enquêtes policières spécialisées, où l'on constate une réduction dans les dépenses, cette réduction n'est pas attribuable à une baisse des traitements, mais à une redistribution des effectifs à l'intérieur de ces deux éléments.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans quel sens cette redistribution s'est-elle faite?

M. Choquette: A l'intérieur de la Sûreté. C'est une redéfinition des tâches. Nous avions des policiers affectés aux enquêtes policières spécialisées autrefois et on retrouvera cela dans l'élément 1, Présence policière générale, où peut-être encore dans l'élément 3, Enquêtes reliées aux lois de la moralité et des alcools. La croissance du troisième élément est aussi attribuable aux effets de la convention collective en vigueur avec notre syndicat de policiers.

Le Président (M. Brisson): Le programme 4 est-il adopté?

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, au programme 4, à l'élément 1, concernant les constables spéciaux, j'aimerais savoir du ministre quels sont les prérequis pour obtenir un permis d'admissibilité?

M. Choquette: Constables spéciaux ou agents de sécurité?

M. Bédard (Chicoutimi): Constables.

M. Choquette: Devenir un constable spécial

dans une municipalité. La Loi de police prévoit le mode de nomination des constables spéciaux. Un constable spécial, me dit-on, est nommé par un juge sur l'approbation du procureur général, approbation qui est précédée d'une enquête généralement faite par la Sûreté du Québec. L'enquête consiste à vérifier si la personne est exempte d'un dossier criminel, peut-être aussi d'autres facteurs relatifs à la conduite du candidat en général. On me dit que les municipalités peuvent également les désigner de leur propre chef, semble-t-il, mais pour une période limitée, soit une période qui n'excède pas sept jours. Si une municipalité a besoin, à un moment donné, d'un renfort additionnel à cause de certaines circonstances, elle peut désigner des constables spéciaux qui, eux, n'obéissent pas aux critères ou au mode de nomination que j'ai mentionné tout à l'heure et qui restent en fonction pour une période très limitée.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que quelqu'un, selon les critères qui sont établis, pourrait être nommé constable spécial pour HydroQuébec et avoir un dossier judiciaire?

M. Choquette: Voici, là, j'ai l'impression...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est parce qu'il y a un cas qui nous a été souligné — je ne tiens pas à le nommer d'une façon particulière où on a établi que la personne en question qui a été nommée constable spécial pour Hydro-Québec a un dossier judiciaire. C'est clair, maintenant. Son cas a été soumis à l'attention du Protecteur du citoyen qui a dit ne pouvoir rien faire en l'occurrence, étant donné que l'employeur se déclarait quand même satisfait du travail effectué par ce constable.

M. Choquette: Le directeur général de la Sûreté du Québec me dit qu'Hydro-Québec a certaines normes d'embauche qui s'appliquent à ses constables et elle semblerait voir a ce qu'ils satisfassent à ces normes. Par la suite, ces mêmes constables sont soumis au processus de nomination s'appliquant aux constables spéciaux, que j'ai décrit tout à l'heure. Il semblerait surprenant qu'une personne avec un dossier judiciaire ait réussi à passer à travers la procédure que j'ai décrite.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être que je pourrai communiquer le...

M. Choquette: Peut-être la personne a-t-elle obtenu un pardon comme d'autres, n'est-ce pas? Cela serait possible. Le directeur général de la Sûreté me dit que, justement, on a eu un cas cette année où il y avait eu effectivement un pardon accordé, qui a permis à la personne d'être désignée constable spécial.

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que le ministre accepterait que nous lui fassions une communication privée du cas que je veux souligner...

M. Choquette: Oui. Ce serait une bonne idée.

M. Bédard (Chicoutimi): ...quitte à ce que le ministre me fasse parvenir ses commentaires.

M. Choquette: En effet. Vu le cas particulier, il n'y a pas d'intérêt à inscrire cela au journal des Débats ou à l'exposer publiquement...

M. Bédard (Chicoutimi): Je ne voudrais pas nuire...

M. Choquette: Non. Le député pourrait me donner le nom et je pourrai faire les vérifications voulues et lui donner le résultat de mes reche' ches.

M. Bédard (Chicoutimi): Si le cas est sympathique, cela peut même aller jusqu'à une demande de pardon de la part du ministère de la Justice pour cet individu plutôt...

M. Choquette: Merci.

M. Bédard (Chicoutimi): ... qu'une demande de révocation.

M. Choquette: Voici, si c'était pour un acte criminel, il faudra s'adresser au gouverneur général par l'entremise de M. Warren Allmand qui, lui, le demandera à la Commission des libérations conditionnelles.

M. Bédard (Chicoutimi): Votre grand ami, M. Allmand.

M. Choquette: Oui, mon grand ami, en effet. Si c'était une infraction provinciale, il appartiendra au lieutenant-gouverneur en conseil de donner le pardon.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Choquette: Malgré que je ne voie pas d'infraction provinciale qui empêcherait quelqu'un d'être désigné constable spécial, parce que l'empêchement doit être un crime. Je remercie le député de sa lettre. Je vais vérifier le cas.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Concernant la construction du quartier général de la Sûreté du Québec à Québec même, nous avons eu l'occasion de poser quelques questions lors de l'étude des crédits du ministère des Transports. Maintenant, à juste titre, on nous a demandé d'acheminer notre demande de renseignements au ministère de la Justice. Je voudrais savoir quand sera construit le nouveau quartier général et où il sera construit.

M. Choquette: Dans le programme de construction de la Sûreté du Québec, nous avons comme sujet principal cette année $5,210,000 pour la construction d'un nouveau quartier général pour la Sûreté. Nous prévoyons des dépenses de $3.2 millions en 1976/77, $1,210,000 en 1977/78 et $800,000 en 1978/79. Donc, les dispositions sont prises pour commencer la construction cette

année de nouveaux quartiers généraux pour la Sûreté ici, à Québec.

M. Bédard (Chicoutimi): A quel endroit?

M. Choquette: Sur le boulevard de la Capitale, au coin du boulevard Pierre-Bertrand. Je dirai au député de Chicoutimi, qui sera sûrement intéressé à l'entendre, que nous avons également des dispositions au sujet de la construction d'un poste à Chicoutimi. Nous avons prévu $1.8 millions qui seront dépensés comme ceci: $120,000 durant l'année 1976/77, pour la préparation de plans et devis, at $1,680,000, pour la construction et le mobilier d'un édifice, ceci pour l'année 1977/78.

M. Bédard (Chicoutimi): La construction se terminera en 1977/78.

M. Choquette: A peu près.

M. Bédard (Chicoutimi): Approximativement. Est-ce que le ministre est en mesure de me dire l'endroit précis?

M. Choquette: II ne faut pas le dire, il ne faut pas alerter les spéculateurs.

M. Desjardins: Le député a des amis?

M. Choquette: Pour ne pas alerter le ministre du Revenu.

M. Bédard (Chicoutimi): J'ai l'impression que vous en avez assez dit pour qu'il y ait une alerte générale.

M. Choquette: II n'est pas au courant. Maintenant, cela veut dire Chicoutimi ou la région, n'est-ce pas? C'est le grand Chicoutimi. Alors, cela ne veut pas dire Chicoutimi municipal; peut-être que ce sera la nouvelle ville du Saguenay qui s'étendra partout autour du lac Saint-Jean.

M. Bédard (Chicoutimi): A ce moment, vous en avez trop dit pour ne pas accepter d'être plus précis.

M. Choquette: Non, écoutez, je ne sais pas l'endroit. Donc, même si je voulais vous répondre, je ne le pourrais pas.

M. Bédard (Chicoutimi): Je comprends que vous me l'avez annoncé comme étant dans le comté de Chicoutimi.

M. Choquette: Dans la nouvelle ville...

M. Bédard (Chicoutimi): Dans la nouvelle ville du grand Chicoutimi.

M. Choquette: Dans le Saguenay.

M. Bédard (Chicoutimi): D'accord. Puisque vous êtes dans le domaine des nouvelles concernant le comté de Chicoutimi, l'an passé, vous aviez indiqué, concernant les techniques policières, qu'une décision avait été prise pour que des cours soient donnés au CEGEP de Chicoutimi.

M. Choquette: C'est-à-dire que le CEGEP de Chicoutimi, parmi huit autres CEGEP, soit habilité à donner le cours de techniques policières. Je crois que c'est une chose qui est en place et qui fonctionne effectivement. Il y a huit CEGEP, je pense, au Québec qui dispensent ces cours.

M. Bédard (Chicoutimi): Je dois vous informer que ce n'est pas commencé à Chicoutimi même. Je comprends que les intentions du ministère sont à cet effet.

M. Choquette: Justement, mon sous-ministre corrobore ce que vous venez de dire, qu'effectivement ce n'est pas commencé au CEGEP de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous d'autres... M. Choquette: D'autres bonnes nouvelles. M. Bédard (Chicoutimi):... bonnes nouvelles? M. Choquette: L'Etape.

M. Bédard (Chicoutimi): Je voulais justement vous poser une question sur le problème de l'Etape, au niveau de la sécurité du boulevard Talbot.

M. Choquette: Le député pourrait-il répéter sa question?

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant l'Etape, il y a la reconstruction qui se fait, mais j'imagine que...

M. Choquette: Mais, il y a lieu de...

M. Bédard (Chicoutimi):... c'est concernant la sécurité sur le boulevard Talbot. On a parlé d'adjoindre de nouveaux agents de sécurité afin de pouvoir mieux assurer la surveillance.

M. Choquette: Vous voulez dire ajouter plus d'effectifs policiers...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est cela.

M. Choquette: ... pour la surveillance de la circulation sur...

M. Bédard (Chicoutimi): Le boulevard Talbot.

M. Choquette: ... le boulevard Talbot. Nous avons ajouté quatre autres agents de police récemment. L'objectif total est de 24 policiers.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre pourrait-il nous dire de quelle manière ces gens sont équipés pour vraiment remplir leurs fonctions?

M. Choquette: De l'équipement? M. Bédard (Chicoutimi): Oui. M. Choquette: En voiture.

M. Bédard (Chicoutimi): Pas seulement cela. On sait que, dans les cas de tempêtes, sur le boulevard Talbot, on peut presque dire que la sécurité est nulle, à l'heure actuelle. Je ne voudrais pas faire un long débat là-dessus, parce que j'ai eu l'occasion, lors de la discussion des crédits du ministère des Transports, d'en parler assez longuement.

M. Choquette: On me dit qu'au cas de tempêtes les voitures sont arrêtées aux barrières et on incite ou on décourage les automobilistes d'emprunter le boulevard. Si des automobilistes sont mal pris sur le boulevard, ils peuvent être dépannés ou, enfin, tirés de leur mauvaise situation par l'utilisation de motoneiges. La Sûreté du Québec est munie de motoneiges dont elle fait usage pour aller rechercher des personnes qui sont prises dans des tempêtes dans le parc national.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant des agents de sécurité, on sait que c'est le ministère de la Justice qui délivre les permis d'agent de sécurité. Quelles sont les conditions prérequises pour donner ces permis?

M. Choquette: II y a une enquête par la Sûreté du Québec dans chaque cas, sur chaque candidat qui veut devenir agent de sécurité. Selon cette enquête, le ministère de la Justice donne le permis qui est annuel. Le permis d'agent, n'est-ce pas, car il y a aussi des permis d'agence, de firmes d'investigation et de sécurité qui obéissent à des critères plus sévères.

M. Bédard (Chicoutimi): Les agents sont-ils payés au salaire minimum?

M. Choquette: Les agents?

M. Bédard (Chicoutimi): Les agents de sécurité.

M. Choquette: Ce n'est pas le ministère de la Justice qui détermine les tarifs pour les agences de sécurité; elles sont libres de contracter avec des firmes, des sociétés ou le gouvernement, suivant le résultat de négociations bilatérales. Quant à la rémunération qui s'applique aux agents de sécurité qui travaillent à l'intérieur de ces firmes ou agences de sécurité, les salaires obéissent également à des négociations qui peuvent avoir lieu entre le personnel et les entreprises. Mais, ils sont toujours soumis aux critères de la Loi du salaire minimum. On sait qu'il y a des agents de sécurité qui sont armés et d'autres qui ne le sont pas. D'après l'expérience habituelle, les agents de sécurité qui se qualifient pour le port d'armes sont rémunérés à un taux supérieur à ceux qui ne font qu'exercer la surveillance.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant les contrats gouvernementaux des agents de sécurité, comment est-ce déterminé? Est-ce un taux horaire? Est-ce un pourcentage proportionnel au montant...

M. Choquette: Les taux sont horaires d'après le nombre d'agents de sécurité mis à la disposition du gouvernement dans tel service donné. Ces taux sont conformes à des normes qui sont adoptées par le Conseil du trésor, d'après la suggestion du ministère des Travaux publics.

M. Bédard (Chicoutimi): Lorsque vous embauchez des agents de sécurité, bénéficient-ils d'avantages comme l'assurance, la protection en cas de blessures ou d'accidents, de façon qu'au bout de la ligne leur famille soit protégée s'il y a décès dans l'exercice de leurs fonctions? Y a-t-il des conditions...

M. Choquette: II existe différents statuts possibles. S'il s'agit, par exemple, d'agents de sécurité qui travaillent principalement pour le ministère des Travaux publics, ils tombent sous le coup des normes s'appliquant à cette fonction à l'intérieur de la fonction publique. D'autre part, s'ils travaillent pour le gouvernement par l'intermédiaire d'une firme contractuelle, il s'agira pour l'employeur de prévoir les dispositions qui s'appliquent au point de vue de leur sécurité sociale. Maintenant, un agent de sécurité travaillant pour une firme privée et qui serait blessé pendant l'exercice de ses fonctions, je pense qu'il aurait un recours en vertu de la Loi des accidents du travail. Ce serait considéré comme un accident de travail s'il était blessé pendant l'exercice de ses fonctions d'une façon ou d'une autre, et même s'il y avait mortalité.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand on connaît les difficultés qu'ils peuvent rencontrer à la Commission des accidents du travail, au niveau de l'indemnité, peut-on envisager que le gouvernement puisse obliger les agences de sécurité privées à assurer obligatoirement ceux qu'elles emploient, pour que ces derniers ne soient pas condamnés à avoir seulement le salaire minimum, sans aucune autre sécurité que celle d'un recours possible en vertu du droit civil ou de la législation qui existe à la Commission des accidents du travail?

M. Choquette: Vous parlez d'une assurance-vie? Une assurance-salaire?

M. Bédard (Chicoutimi): Une assurance-salaire dans le cas de blessés, une assurance-vie lorsque les agents de sécurité meurent au devoir.

M. Choquette: Cela poserait le problème, vous savez, de distinguer ce groupe de personnes par rapport à d'autres personnes qui peuvent exercer des fonctions également dangereuses dans l'industrie ou autrement. Je n'ai pas l'impression que la fonction d'agent de sécurité comporte nécessairement plus de risques que celle, par exemple, d'un ouvrier dans la construction ou d'un ouvrier dans l'industrie, peut-être moins.

M. Bédard (Chicoutimi): Même dans le climat actuel?

M. Choquette: Même si un agent de sécurité peut être armé ou non armé. Vous savez, ce ne sont pas tous les agents de sécurité ou même tous les policiers qui subissent des agressions. On sait que cela fait partie, d'une certaine façon, des risques du métier. Heureusement je crois qu'en général on n'a pas à déplorer parmi les policiers ou les agents de sécurité plus de mortalités ou encore plus de victimes d'agressions que d'autres types d'accidents du travail qui peuvent toucher d'autres catégories sociales, de telle sorte qu'il n'est pas évident qu'il faille prendre plus en pitié ce groupe que d'autres groupes de la population.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant les agents affectés aux autoroutes, on sait que ceux-ci relèvent du ministère des Transports, mais ils ont quand même à subir à l'Institut de police un entraînement identique à celui des autres policiers québécois. Le ministre est sans doute au courant de leurs revendications pour obtenir le même statut et le même salaire que ce qui existe à la Sûreté du Québec. La Fédération des policiers elle-même n'y voit pas d'inconvénient, naturellement. Quelle est la position du ministre là-dessus?

M. Choquette: Les agents au service de l'Office des autoroutes ont comme statut juridique celui d'agents de la paix. Ils ont comme statut au sein de la fonction publique celui de gardiens constables. Ils se trouvent donc dans les catégories qui sont composées principalement de gardiens de prison, d'agents de la paix pour la chasse et la pêche, la conservation de la faune. C'étaient, enfin jusqu'à nouvel ordre, en somme, les normes qui les encadraient.

Récemment, ils m'ont fait parvenir un mémoire demandant que leur statut soit modifié et que, dorénavant, plutôt que d'être seulement des agents de la paix, ils deviennent des agents de police, avec un statut similaire à celui des policiers municipaux ou des policiers de la Sûreté du Québec. Leur association syndicale a fait des représentations dans ce sens depuis assez longtemps, mais ce n'est qu'il y a quelques mois, environ un mois ou deux, qu'on m'a fait tenir une argumentation qui tend à modifier leur statut, comme je le disais il y a quelques instants.

J'ai communiqué le contenu de ce mémoire au président de l'Office des autoroutes, M. Georges Tremblay. J'en ai communiqué le contenu à M. Paul Benoît, directeur général de la sécurité publiques au ministère de la Justice. J'en ai également communiqué le contenu à la Commission de police. Nous prévoyons, d'ici quelques semaines, après que le mémoire des agents des autoroutes aura été étudié par ces personnes ou ces groupes, avoir une réunion pour examiner leurs revendications et, par la suite, les rencontrer pour voir avec eux comment il nous serait possible d'améliorer leur statut, si les arguments qu'ils ont soumis militent en faveur d'un changement. Donc, je peux dire au député de Chicoutimi qu'aucune décision n'a encore été prise à ce sujet, mais que la question est à l'étude au gouvernement dans les différents secteurs intéressés.

M. Bédard (Chicoutimi): Parmi le groupe qui a fait cette demande, il y a aussi, je pense, les gardiens de l'Assemblée nationale, les constables spéciaux du ministère des Travaux publics.

M. Choquette: Non, je n'ai pas eu vent de demandes similaires provenant du personnel de l'Assemblée nationale, qui est affecté à la sécurité. Je n'ai pas eu, non plus, de revendication dans ce sens provenant de groupes appartenant au ministère des Travaux publics.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous êtes convaincu qu'ils verraient cette intégration d'un bon oeil.

M. Choquette: Je suis sûr qu'eux verraient cela d'un bon oeil parce que cela représenterait, sans aucun doute, des améliorations au point de vue du traitement. Mais toute la question serait de savoir si on peut identifier ces groupes à des policiers au sens de la Loi de police. Cela me paraît assez discutable de prime abord.

Par contre, il faut ajouter que nos associations de policiers, en particulier l'APPQ présidée par M. Guy Magnan, ont revendiqué à plusieurs occasions qu'on ne voie pas proliférer des services de sécurité parallèles aux services policiers, de telle sorte que ceci soit un moyen pour le gouvernement d'engager des personnes qui feraient un travail de policier et viendraient ainsi réduire la partie normale des fonctions de l'Etat qui sont attribua-bles à la police. C'est un thème général qui revient dans les prises de position publiques de M. Magnan.

Nous sommes sensibles au problème, mais il faut mentionner en terminant que, s'il y a effectivement une fonction policière dans n'importe quelle société qui doit être remplie par des policiers, il y a, à côté de cela, des fonctions spécialisées qui requièrent peut-être moins d'initiatives ou moins de responsabilités que celles de policier et qui méritent probablement un traitement quelque peu inférieur à celui des policiers.

M. Bédard (Chicoutimi): Parce que le rapport Gauvin avait souligné la possibilité de cette intégration des policiers qui s'occupent de la sécurité, à l'intérieur de la Sûreté du Québec, dans une sorte de division spéciale laquelle, avec d'autres effectifs qui s'occupent de surveillance routière, pourrait former un corps spécialisé en sécurité routière ou en prévention. Quelle est l'opinion du ministre?

M. Choquette: Je n'abonderais pas du tout dans le sens de la recommandation de la commission Gauvin à ce sujet, si elle était dans le sens qu'exprime le député, car nos policiers de la route, ici au Québec, appartiennent à la Sûreté du Québec et sont des agents de police en bonne et due forme. Je ne vois pas qu'il y ait lieu de former un genre de "highway patrol", comme cela existe

dans certains Etats américains, en y adjoignant, en plus des policiers affectés au travail de la route, certains inspecteurs qui sont à l'emploi du ministère des Transports.

Les inspecteurs du ministère des Transports font surtout le contrôle du poids des véhicules, ainsi que le contrôle des permis émis par la Commission des transports. Si on peut leur reconnaître une fonction utile à ce point de vue, qu'ils partagent d'ailleurs avec nos policiers de la Sûreté du Québec, je ne vois pas qu'il faille amputer la Sûreté du Québec de ses éléments qui, à l'heure actuelle, font du travail de la police de la route, car ces policiers, en plus de faire du travail de la police de la route, sont, à d'autres occasions, affectés à des enquêtes. Ils peuvent aussi, par l'évolution de leur travail et de leur carrière, être appelés à remplir d'autres fonctions policières. Tout cela fait partie d'un ensemble qu'il est utile de maintenir.

Comme me le dit le directeur généra! de la Sûreté du Québec avec beaucoup de bon sens, dans la police, aujourd'hui, il y a, je pense, un danger qui est celui de la surspécialisation des policiers laquelle fait que le policier cesse d'être un généraliste et qu'il se ferme les yeux à toute autre chose que ce qu'il est appelé à constater de par sa fonction spécifique.

Ainsi un policier de la route, qui est appelé à faire la police sur la route, ne faisait que constater des infractions comme celle du député de Sainte-Anne et fermait les yeux sur d'autres crimes parce que cela n'est pas dans son domaine, je pense que cela serait une police très bureaucratisée à laquelle on aurait abouti et que ceci aurait des effets très discutables, sinon néfastes à l'égard de la sécurité publique en général. C'est la raison pour laquelle nous mettons beaucoup l'accent à l'heure actuelle, au sein de la Sûreté, sur une attitude générale de la part de nos policiers qui fait qu'ils peuvent s'intéresser, tout au cours de leur travail, à tous les aspects qui concernent la sécurité du public, sans les cantonner ou les isoler dans une vocation étroite, même étriquée.

Je pense, M. le directeur général, que vous approuvez les propos que je tiens à ce moment. Si oui, voulez-vous incliner la tête? Alors, le directeur général m'approuve.

M. Bédard (Chicoutimi): Concernant le financement de la police, il en a peut-être déjà été question. Je sais que le ministre de la Justice est constamment en relation avec son gand ami, M. Allmand, pour réclamer de la part du fédéral les millions de dollars que le Québec est obligé de payer pour assurer sa force policière. Comme ce travail n'est pas fait par un corps fédéral, il serait normal qu'il y ait un remboursement du fédéral au gouvernement du Québec. Même le premier ministre, pour une fois, a été très clair concernant ce cas, en déclarant que la politique fédérale, face au financement de la police québécoise, est vraiment un cas de fédéralisme non rentable pour le Québec. D'autre part, il est peut-être moins explicite sur l'appui énergique qu'il semble vouloir donner au ministre de la Justice — vous me corrigerez si je fais erreur — concernant la bataille que le ministre a engagée sur ce point, à tel point qu'à un moment donné, on se demande si le ministre de la Justice n'est pas seul à se battre face à cette réclamation. Je voudrais savoir de la part du ministre où en est rendu le dossier de cette affaire et quelles sont les prochaines étapes qu'entrevoit le ministre dans sa lutte pour récupérer les millions de dollars qui, normalement, devraient nous être donnés par le fédéral.

M. Choquette: Le premier ministre est aussi sensible et conscient que moi de l'intérêt qu'il y a, pour le gouvernement du Québec, d'obtenir gain de cause à l'occasion de cette réclamation qui vise un secteur particulier de l'activité publique, à savoir celui de la police.

M. Bédard (Chicoutimi): Simplement sur ce point, quand vous dites que le premier ministre vous appuie, qu'il est aussi sensibilisé que vous à ce sujet, est-ce que vous approuvez sa manière de situer le débat dans le cadre plus global des négociations fédérales-provinciales, alors qu'en ce qui regarde le ministre de la Justice ii semble le situer dans un autre cadre que nous approuvons, soit que ce n'est que justice, si nous payons pour des dépenses que devrait faire le fédéral, que celui-ci nous rembourse?

M. Choquette: Je crois qu'au moment où la question a acquis le plus de notoriété ou, en fait, a figuré le plus dans l'actualité, c'était au moment où le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux avaient négocié des accords sur la péréquation, avec des dispositions très particulières relatives au coût du pétrole. Je crois que le premier ministre du Québec était relativement satisfait des accords conclus avec le gouvernement fédéral en ce qui concerne le pétrole. On sait qu'au point de vue du pétrole cela a donné des montants assez considérables, je pense. Je ne connais pas les chiffres, mais cela dépasse de beaucoup la réclamation en matière de police. Il va de soi que le premier ministre doit se situer dans un cadre général de négociations avec les autorités fédérales. Ce n'est pas qu'il n'accorde pas d'importance au domaine de la police, mais c'est que, dans sa stratégie, il mettait de l'avant des domaines qui étaient susceptibles de rapporter plus au gouvernement du Québec que d'autres susceptibles de rapporter moins. Il va de soi que, sur le plan de la police, c'était nettement moins intéressant, moins prioritaire, si l'on peut dire, que dans le domaine du pétrole et d'autres domaines aussi intéressant les finances du gouvernement du Québec. Ceci ne veut pas dire que le premier ministre était...

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre, lui, en fait une priorité?

M. Choquette: Bien, c'est-à-dire que non.

M. Bédard (Chicoutimi): Le ministre de la Justice.

M. Choquette: Non, mais, vu que c'est dans mon domaine, j'en parle peut-être plus que d'autres. C'est normal de garder l'opinion publique sensibilisée au problème, de garder les autorités fédérales constamment sur le qui-vive et de leur faire réaliser que nous n'avons pas l'intention de céder, même si nous n'obtenons pas gain de cause d'une façon aussi rapide que nous l'aimerions. C'est la raison pour laquelle j'en ai parlé sans doute plus que d'autres membres du conseil des ministres.

Il y a eu une conférence à Victoria, la semaine dernière, à laquelle je n'ai pas assisté parce que j'étais retenu ici, au Parlement à Québec, mais à laquelle mon sous-ministre a assisté. Cette conférence a réuni M. Allmand, ainsi que les solliciteurs généraux des autres provinces et d'autres ministres qui représentaient les gouvernements provinciaux du Canada. Une journée a été consacrée au problème de la renégociation des accords entre le gouvernement fédéral et les huit provinces contractantes qui acceptent les services de la GRC, suivant les modalités financières que vous connaissez, qui ont déjà été décrites et qui donnent à ces huit provinces contractantes des avantages financiers évidents et considérables; d'où la réclamation du gouvernement du Québec. Ce qu'il est intéressant de constater à la suite de cette réunion qui a eu lieu à Ottawa et de cette séance consacrée à ce problème particulier, c'est que le gouvernement fédéral veut offrir aux huit provinces contractantes des conditions financières inférieures à celles qui prévalaient au cours des dix dernières années, c'est-à-dire de 1966 à 1976. Le gouvernement fédéral voudrait que, dans l'avenir, il ne finance les services de la GRC affectée aux missions provinciales de police que jusqu'à concurrence de 40%. Il voudrait ne financer les services d'agents de la GRC affectés aux missions municipales de police que jusqu'à concurrence de 15% après le cinquième homme.

Les huit provinces canadiennes contractantes résistent d'une façon farouche à ces offres fédérales qu'elles jugent insuffisantes. A mon sens, elles ont pleinement raison, parce que, même si nous ne bénéficions pas nous-mêmes de ces avantages, il ne fait aucun doute que ces provinces sont appelées, pour la totalité d'entre elles, d'abord à faire face à un problème de criminalité accrue qui est manifeste à travers le Canada et à travers l'Amérique du Nord. Deuxièmement, elles sont appelées, en fait, à exécuter des décisions législatives fédérales, puisque le code criminel est une loi fédérale. Sans compter les autres lois adoptées par le gouvernement fédéral dans le domaine du crime, que ce soit la loi des cautionnements, que ce soit la loi des stupéfiants et toutes les lois, en somme, qui font partie du domaine du droit criminel. Je pense que la position des huit provinces contractantes soit très forte dans les conditions actuelles.

Elle est renforcée, de plus, par le fait de l'accord qui existe entre elles pour vouloir insister auprès du gouvernement fédéral afin que ce dernier reconduise les accords existant précédemment pour une autre période de dix ans, mais en prévoyant un financement des services de police de la

GRC dans les autres provinces à raison de 50%, qu'il s'agisse de police provinciale ou municipale. Il va de soi que, si les huit provinces contractantes réussissent à maintenir ou, disons, à faire plier le gouvernement fédéral et à faire accepter leur position, en somme à faire continuer pour une autre période de dix ans les conditions générales qui existaient précédemment, ceci sera un argument très fort en faveur du Québec et de l'Ontario pour obtenir une compensation financière équivalente.

D'autant plus que, dans une dernière lettre que M. Allmand m'a écrite à l'automne et à laquelle je n'ai pas répondu, mais à laquelle je me prépare à répondre incessamment, d'ici quelques jours, il dit que si le gouvernement fédéral consent des conditions financières très avantageuses aux huit provinces contractantes, c'est à cause des économies d'échelle qui seraient dérivées du regroupement des trois services de la police par des agents appartenant à la GRC. Or, à l'analyse, nous découvrons que la mission fédérale de police, c'est-à-dire le contrôle des aéroports, des stupéfiants, des drogues, et des autres matières qui intéressent la police fédérale, peut-être la sécurité nationale et tout, ne peuvent en aucune circonstance dépasser 10% de tous les effectifs policiers, municipaux, provinciaux et fédéraux.

Alors, commet peut-on expliquer, d'une façon raisonnable et honnête, qu'avec 10% au plus des effectifs appelés à remplir la mission fédérale, on fasse dériver de cela des économies d'échelle allant jusqu'à 50%, ce qui est le montant des subventions implicites qui existent dans les accords actuels? Je dis donc que tes arguments de M. Allmand, à ce point de vue, tombent d'eux-mêmes et qu'il est évident que le fédéral subventionne actuellement la police dans les huit autres provinces. Or, comme il est manifeste qu'il s'agit ici d'une fonction principalement provinciale que celle de la police et que le fédéral ne saurait revendiquer de plein droit et sur le plan constitutionnel les responsabilités en matière de police, qu'il ne les offre que par suite d'accords constitutionnels négociés bilatéralement avec chacune des huit provinces contractantes, je me demande sur quelle assise le gouvernement fédéral peut perpétuer l'état actuel des choses en vertu duquel il dénie au Québec et à l'Ontario une contribution financière équivalente à celle qu'il donne aux huit provinces canadiennes.

Dans ce contexte, je suis plutôt optimiste d'arriver à faire voir la lumière aux autorités fédérales, même si cette lumière semble avoir de la difficulté à percer dans l'obscurité où eiles semblent vouloir baigner. Je me dis qu'à force de répéter les mêmes arguments, à force d'insister et de démontrer jusqu'à quel point notre position est solide, le gouvernement fédéral n'aura pas d'alternative que de s'incliner et, s'il ne le fait pas, alors nous en tirerons les conséquences qui s'imposent.

M. Bétiard (Chicoutimi): Comment expliquez-vous que l'Ontario, qui est placée dans la même situation, ne semble pas, du moins publicitairement parlant, faire une bataille aussi énergique que celle que fait le ministre de la Justice?

M. Choquette: L'Ontario nous a donné son appui; elle a fait une réclamation similaire à celle du Québec, mais peut-être avec moins...

M. Bédard (Chicoutimi): Moins de fracas, sûrement.

M. Choquette: ... de fracas sans doute. C'est peut-être à cause de son style. Il faut se rappeler que le gouvernement est conservateur en Ontario. Il y a peut-être d'autres facteurs qui peuvent jouer, je ne le sais pas. Vous savez, entre le gouvernement fédéral et un gouvernement provincial conservateur, je ne sais pas quel est le climat des relations, quelles sont les zones en litige, comment l'aspect de la police figure dans tout cela. Il faudrait pouvoir aller voir à l'intérieur de leur jeu de cartes quelle est leur stratégie.

Le fait qu'ils y aillent piano ou, enfin, avec une certaine modération, sans dénier la valeur de notre position, peut s'expliquer par une foule de facteurs. Peut-être veulent-ils tout simplement nous laisser l'initiative dans ce domaine, quitte à prendre l'initiative dans d'autres domaines, car, à ce sujet, on peut dire qu'ils cnt été assez vigoureux à l'égard du fédéral sur le plan de toute l'organisation judiciaire actuelle qu'ils trouvent critiquable. Ce sont eux qui ont vraiment été les animateurs des positions provinciales prises à l'unanimité par les gouvernements intéressés contre un certain nombre d'empiétements du gouvernement fédéral dans le domaine de l'administration de la justice en général, c'est-à-dire dans le domaine des cours de justice, dans le domaine des fonctions des procureurs généraux des provinces. Il y a peut-être un partage naturel des tâches qui s'est fait entre le Québec et l'Ontario.

M. Bédard (Chicoutimi): Peut-être adoptent-ils cette attitude de manière que, s'il y a un non à la réclamation du ministre de la Justice du Québec, celui-ci soit le seul à supporter la défaite?

M. Choquette: Ils étaient présents à la conférence de Victoria la semaine dernière, me dit-on. Malgré qu'ils ne soient pas parmi tes huit provinces contractantes, ils ont adopté les mêmes positions que celles qui ont été réitérées par M. Robert Normand, mon sous-ministre, qui était présent, de telle sorte qu'il n'y a pas, je ne le pense pas, de calcul malsain dans leur attitude. Au contraire, je pense qu'ils seraient heureux de voir cette situation clarifiée une fois pour toutes.

M. Bédard (Chicoutimi): Une chose est certaine. Le ministre de la Justice du Québec n'a pas l'intention de céder ou de lâcher, parce que c'est au fédéral de céder, dans la bataille qu'il livre présentement. Peut-on dire qu'à l'heure actuelle le ministre de la Justice a des éléments suffisants pour croire qu'il y a de bonnes possibilités que le fédéral se rende à ses arguments?

M. Choquette: Je n'ai pas...

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que les chan- ces ont augmenté depuis que vous avez acheminé vos réclamations au fédéral?

M. Choquette: Je suis porté à croire que mes chances ont augmenté, parce que, quand j'ai présenté la chose la première fois, au mois de décembre 1973, je pense, par une réclamation formelle que j'ai faite à M. Allmand, c'était un domaine qui était peu connu du grand public et sur lequel il n'y avait pas d'études faites. Cela arrivait, en somme, d'une façon quelque peu saugrenue à l'époque, peut-on dire, puisque cette situation existait depuis beaucoup...

M. Bédard (Chicoutimi): Le Parti québécois avait parlé depuis déjà assez longtemps de ce cas de fédéralisme non rentable.

M. Choquette: Je pense que j'avais précédé le Parti québécois dans ce domaine, je le dis en toute modestie.

M. Bédard (Chicoutimi): On peut vous laisser avec votre illusion, mais de toute façon...

M. Choquette: Pour ce chapitre-là, je crois que j'étais en avance sur le Parti québécois, comme dans beaucoup de domaines d'ailleurs, mais enfin, dans celui-là en particulier.

Ceci n'a pas empêché le Parti québécois de me donner son accord. Je lui en suis reconnaissant et aussi envers les autres partis de l'Opposition, ici au Québec, de signifier leur acquiescement. Depuis ce temps, il y a eu un travail de sensibilisation très considérable auprès de l'opinion publique. Nous avons reçu des témoignages d'appui de partout au Québec — la documentation est très volumineuse — de telle sorts qu'on peut dire que nous avons réellement vendu l'affaire à l'opinion publique québécoise, malgré qu'il faille bien se rendre compte que les sommes en jeu ne sont pas considérables et ne bouleversent pas tout le fonctionnement du fédéralisme. En somme, il faut quand même être réaliste et les situer dans leur cadre.

J'ai bien confiance qu'un jour M. Trudeau, qui est un homme particulièrement intelligent, va se rendre compte qu'en fait la position québécoise est absolument inexpugnable.

M. Bédard (Chicoutimi): Y a-t-il d'autres étapes précises prévues?

M. Choquette: Je vais répondre à la lettre de M. Allmand, la semaine prochaine ou cette semaine, je ne le sais pas. Il y a d'autres réunions prévues avec les provinces à l'occasion de ces négociations en vue de la renégociation, en 1976, des contrats. On ne pourra pas, décemment, exclure le Québec et l'Ontario. Nous pourrons aller assister à ces négociations et réitérer notre argumentation.

J'ajoute finalement que le Sénat du Canada a été saisi du problème par l'intervention du sénateur Jean-Paul Deschatelets. Le sénateur Descha-telets a déposé une intervention sur laquelle il y a eu débat.

Sont intervenus alors le sénateur Martial Asselin, le sénateur Jean-Paul Desruisseaux et le sénateur Jacques Flynn. J'ai indiqué privément à ces sénateurs, qui sont des deux côtés de la Chambre, n'est-ce pas, que j'étais disposé à aller témoigner à un comité du Sénat sur les fondements de notre réclamation. Je m'attends à recevoir, d'ici peu de temps, une invitation du Sénat à aller expliquer la position du Québec dans ce domaine, ce que je ferai avec plaisir.

Le Président (M. Houde, Limoilou): Y a-t-il d'autres questions au programme 4?

M. Bédard (Chicoutimi): II y a d'autres questions, M. le Président. Comme vous pouvez le constater, il est midi et je pense qu'on avait prévu de suspendre la séance.

Le Président (M. Houde, Limoilou): C'est cela! La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h I)

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