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Version finale

32e législature, 1re session
(19 mai 1981 au 18 juin 1981)

Le lundi 15 juin 1981 - Vol. 24 N° 33

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de la Justice


Journal des débats

 

(Quinze heures vingt-six minutes)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire permanente de la justice est réunie pour étudier les crédits budgétaires du ministère de la Justice pour l'année 1981-1982.

Les membres de la commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M. Bisaillon (Sainte-Marie) à la place de M. Boucher (Rivière-du-Loup), M. Marguis (Matapédia) à la place de M. Brouillet (Chauveau), M. Dussault (Châteauguay) à la place de M. Reaumier (Nicolet), M. Charbonneau (Verchères), M. Dauphin (Marguette), Mme Juneau (Johnson), M. Kehoe (Chapleau) M. Lafrenière (Ungava) M. Marx (D'Arcy McGee), M. Rivest (Jean-Talon) à la place de M. Paradis (Brome-Missisquoi).

Les intervenants: M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Blank (Saint-Louis), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme Lachapelle (Dorion), M. Martel (Richelieu) et M. Pagé (Portneuf).

Il serait dans l'ordre de désigner un rapporteur maintenant. Mme Juneau vous voulez bien être le rapporteur.

M. Bédard: On ne peut pas être mieux servi.

Le Président (M. Desbiens): Alors Mme Juneau (Johnson).

Alors l'entente est gue vous ayez une intervention auprès des intervenants de la part du ministre et du représentant M...

Remarques préliminaires M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, tel gue c'est la coutume, dans quelques instants je ferai état du travail et des réalisations qui ont pu être faits au ministère de la Justice. Comme mon sentiment est à l'effet que tout cela a été possible grâce à un travail d'équipe, pour le bénéfice des membres de la commission, je voudrais présenter mes principaux collaborateurs. M. le sous-ministre, M. Daniel Jacoby; le sous-ministre associé à l'administration et registraire, M. Germain Hallé; le directeur du budget, très important en période de restrictions budgétaires, M. Jean-Claude Dubois; le nouveau sous-ministre associé au service judiciaire, M. Jacgues

Lachapelle; le sous-ministre associé aux affaires criminelles, M. Rémy Bouchard; le sous-ministre associé au personnel, M. Clément Ménard, nouveau sous-ministre; le sous-ministre associé à la probation et aux établissements de détention, M. Robert Ouellet, qui est absent temporairement; le sous-ministre associé aux affaires civiles et pénales, M. Paul-Arthur Gendreau; le sous-ministre associé aux affaires législatives, Me Alain Bisson; le sous-ministre associé à la sécurité publique, M. Pierre Verdon; le directeur général de la Sûreté du Québec qui viendra nous rejoindre un peu plus tard; le secrétaire du Conseil de la magistrature, M. Jean-Pierre Barrette; le président du Tribunal de l'expropriation, le juge Guy Dorion; la vice-présidente de la Commission des droits de la personne, qui assure l'intérim de la présidence, Mme Francine Fournier; le président du Comité de protection de la jeunesse, M. Jacques Tellier; le président de la Commission des services juridiques, Me Yves Lafontaine, qui sera avec nous ce soir; le secrétaire et directeur qénéral du fonds d'aide au recours collectif, M. Yves Lauzon; le président de la Régie des permis d'alcool, Me Ghislain K. Laflamme; le président de la Commission guébécoise des libérations conditionnelles, M. Maurice Gauthier; le président de la Commission de refonte des lois et règlements, M. Roch Rioux; le président de la Commission de police du Québec, le juge Roger Gosselin; et le directeur du Bureau de la protection civile du Québec, M. Paul Brown.

M. le Président... (15 h 30)

M. Rivest: M. le Président, je pense gue ma collègue, la députée de Johnson, va être d'accord avec moi. Je trouve que la direction du ministère de la Justice rassemble une équipe extrêmement compétente, mais je n'y vois pas beaucoup de femmes.

M. Bédard: On aura à discuter de ces dossiers au sujet de la place faite aux femmes au ministère de la Justice. Vous serez à même de constater que, sur ce point précis, le ministère de la Justice est à l'avant-garde de tous les ministères au Québec. D'ailleurs, c'est à ce ministère gu'a eu lieu la première expérience pilote et la première préoccupation en ce sens.

M. le Président, je remercie mon collègue de l'Opposition de m'avoir permis de

passer mon message.

Au cours de la dernière année financière, le ministère de la Justice a entrepris une série d'actions visant particulièrement à humaniser l'administration de la justice et à rendre plus accessible aux citoyens l'ensemble des services juridiques.

Dans le bilan des activités du ministère que je vais vous livrer, vous serez en mesure de constater cette préoccupation constante qui est la nôtre, de fournir à la clientèle les meilleurs services possible, ceci bien sûr, en tenant compte des restrictions budgétaires que les gouvernements doivent s'imposer dans la conjoncture actuelle.

Les sujets sur lesquels j'insisterai seront la législation, la lutte contre la criminalité, la violence, l'administration des services judiciaires, les services correctionnels, le dossier constitutionnel et les ressources humaines et financières.

À la législation, vous avez été en mesure, en tant que membres de l'Assemblée nationale, de constater notre préoccupation majeure au cours de la dernière année. Il s'agit, bien sûr, du droit de la famille.

Le projet de loi 89 instituant un nouveau Code civil portant réforme du droit de la famille est issu de l'intérêt particulier que le ministère a porté aux questions concernant la famille. C'était l'un des domaines dans le contexte de la réforme de notre droit civil qui avait souffert le plus de l'éparpillement et du vieillissement de nos dispositions législatives. C'est pourquoi, dans la première phase de la réforme, nous avons opté pour modifier le droit familial. Je n'insiste pas davantage sur cette pièce législative sinon pour en rappeler les deux principes de base: premièrement, l'égalité des époux entre eux et devant la loi, de même que dans la direction morale et matérielle de la famille et dans la prise en charge des responsabilités familiales; deuxièmement, la liberté des personnes dans la façon d'organiser leurs relations familiales de même que dans la prise des décisions qui concernent la famille.

Conscient cependant que les implications de cette loi devaient être bien comprises par la population, le ministère a mis sur pied dès le mois de mars dernier, un programmme d'information et de publicité destiné à renseigner la population sur le contenu des dispositions législatives en vigueur depuis le 2 avril 1981. Ces dispositions visent plus particulièrement les nouvelles règles sur la célébration du mariage et ses oppositions, les droits et devoirs des époux, l'effet du mariage en ce qui concerne la résidence familiale, la filiation, l'obligation alimentaire et l'autorité parentale. Notre programme d'information qui s'adressse à la population ainsi qu'aux groupes impliqués vise à faire connaître le nouveau droit de la famille.

Je vous ferai distribuer dans quelques minutes - il y a eu un retard explicable -les principales pièces produites dans le cadre de ce programme d'information publique. En plus d'une affiche et d'une brochure explicative générale, le ministère a produit trois dépliants pour informer la population sur les dispositions qui exigent des démarches précises telles que le changement de nom et la déclaration de résidence. Un audio-visuel a également été préparé pour informer les qroupes et les fonctionnaires qui ont à appliquer et à expliquer la loi aux citoyens.

Enfin, la revue Justice de ce mois a été consacrée à ce dossier. J'aimerais vous souliqner en passant que, à la suite d'un sondage auprès des lecteurs de la revue Justice - on va vous donner le dernier numéro - le comité d'évaluation des périodiques du gouvernement, mis sur pied par le Conseil du trésor, a statué sur le maintien de la revue et a recommandé qu'on prévoie même son expansion.

Parallèlement à ces travaux et en vue de les compléter, le ministère de la Justice a mis sur pied un groupe de travail chargé d'étudier les structures et le fonctionnement d'un éventuel tribunal de la famille. Ce groupe de travail doit déposer son rapport au cours de l'année 1981. Dans le domaine du droit de la famille, je puis vous annoncer, M. le Président, que cette semaine il y aura le dépôt d'une projet de loi concernant l'ajustement du Code de procédure civile à la loi 89, ce qui permettra de mettre en vigueur d'autres dispositions qui, c'est très compréhensible, n'avaient pu être mises en vigueur justement à cause du besoin d'adaptation ou d'ajustement du Code de procédure civile à notre Code civil, la nouvelle loi 89. Ce dépôt se fera probablement mardi ou mercredi.

M. le Président, l'année 1980 a également été marquée, dans le secteur du droit de la famille, par l'adoption de la loi 187, Loi pour favoriser la perception des pensions alimentaires, en vertu de laquelle le ministère a instauré des services d'exécution des jugements des pensions alimentaires non exécutées volontairement. La Direction générale des services judiciaires a procédé à la désignation de 120 percepteurs répartis dans 56 localités du Québec. Le service est en fonction depuis le mois de janvier 1981, tel que nous nous y étions engagés. Une campagne de sensibilisation et de publicité a été réalisée conjointement avec le ministère des Communications depuis le début de l'année. Les quelque 3000 demandes de perception reçues entre le 1er janvier et le 31 mars 1981 témoignent sans aucun doute de la pertinence du service offert.

Un autre projet a été adopté en 1980, soit le projet de loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives. Outre la mise en application des projets de loi 89 et

183, le ministère a procédé, en 1980, à la mise en oeuvre des lois sanctionnées en 1979, soit la Loi sur les permis d'alcool, la Loi sur la protection des personnes et des biens en cas de sinistre et la Loi modifiant la Loi de police. C'est en vertu de la Loi sur les permis d'alcool qu'a pu être créée la Régie des permis d'alcool du Québec qui remplace l'ancienne Commission de contrôle des permis d'alcool du Québec. Ce remplacement s'est concrétisé le 1er juin 1980.

Dès le départ, la régie a procédé à la révision de la réglementation existante et à l'amélioration de son fonctionnement administratif en vue de les adapter à l'économie générale de la loi. La régie s'est dotée de procédures plus simples et elle met l'accent sur le contrôle des conditions d'exploitation des permis plutôt que sur leurs conditions de délivrance. Elle porte également un intérêt particulier à l'ordre et à la tranquillité publique, de même qu'à la publicité et aux activités portant sur la vente et la consommation d'alcool.

De son côté, la Loi sur la protection des personnes et des biens en cas de sinistre crée également un organisme, le Bureau de la protection civile du Québec. Cet organisme opérationnel depuis le 1er septembre dernier est chargé d'élaborer une politique de prévention des sinistres, de mettre en oeuvre cette politique et d'en coordonner l'exécution. En février dernier, lors des inondations qui ont occasionné des dégâts un peu partout au Québec, le Bureau de la protection civile du Québec a collaboré avec la Sûreté du Québec et Urgence environnement pour évacuer les familles en danger et prendre les mesures d'urqence requises pour faire céder les embâcles qui s'étaient formés sur plusieurs cours d'eau du Québec.

Pour venir en aide aux victimes de ces inondations, le Bureau de la protection civile du Québec a également administré un programme d'aide financière, adopté par le gouvernement et destiné aux particuliers, aux agriculteurs, aux commerçants, aux petites entreprises et aux municipalités. Le Bureau de la protection civile a également participé activement à la préparation de la conférence fédérale-provinciale des ministres responsables des mesures d'urgence qui s'est tenue à Ottawa le 5 juin dernier.

Enfin, la Loi modifiant la Loi de police, qui est entrée en vigueur le 1er juin 1980, constitue une réforme importante sous divers aspects. En conférant à la Commission de police du Québec une fonction d'inspection, elle a précisé le mandat de celle-ci à l'égard de l'efficacité des services de police au Québec. Par les modifications que cette loi a apportées à la Loi sur le ministère de la Justice, le rôle de la Direction générale de sécurité publique a été précisé, en particulier, quant à la coordination des activités policières et quant à la prévention de la criminalité. Il faut aussi retenir, parmi les éléments majeurs de cette nouvelle loi, une redéfinition des responsabilités des municipalités du Québec à l'égard du maintien de services de police sur leurs territoires.

À ce chapitre, plusieurs municipalités se sont prévalues de la possibilité de requérir du gouvernement une dispense de maintenir un corps de police. Ces dossiers ont nécessité des études, tant de la part de la Commission de police du Québec que de la part de la Direction générale de la sécurité publique. Plusieurs de ces dossiers sont maintenant complétés et, sous peu, des décisions seront prises par le Conseil des ministres relativement aux demandes qui ont été faites et aux analyses qui en ont découlé.

M. le Président, de par sa vocation, il va de soi que le ministère de la Justice est particulièrement intéressé à développer l'accessibilité du droit et la qualité de la législation. Depuis 1979, un comité sur le droit à la portée de tous a été instauré au ministère. Son mandat est d'élaborer une philosophie de l'accessibilité au droit pour les justiciables et de proposer des moyens pour la mettre en oeuvre. Ce comité a poursuivi, pendant l'année 1980, les activités qu'il avait entreprises en matière de vulgarisation du droit.

L'une des activités les plus intéressantes du comité pour l'année 1980 a été l'élaboration, en collaboration avec la Commission des écoles catholiques du Québec, d'un projet pilote de cours de droit destinés aux étudiants des niveaux IV et V du secondaire. De plus, deux qroupes de travail ont produit leurs rapports en 1980. Les impacts des recommandations formulées par ces deux groupes sont présentement examinés en vue d'adopter des mesures qui favoriseront une meilleure accessibilité et une meilleure qualité de la législation.

Le premier groupe, sur la publication et la diffusion des textes législatifs et réglementaires, avait pour mandat d'étudier les moyens de réduire les délais de diffusion de la législation et de la réglementation au Québec. En plus des représentants du ministère de la Justice, il était formé de représentants de la Société québécoise d'information juridique, du ministère des Communications, de l'Éditeur officiel et du personnel de l'Assemblée nationale.

Le mandat du second qroupe de travail visait l'implantation d'un système informatisé pour le traitement des lois à toutes les étapes du processus législatif, dans le but de faciliter les modifications apportées au cours de ce processus. Y étaient représentés, en plus des organismes mentionnés au qroupe de travail précédent, la Commission de refonte

des lois et des règlements, la Direction générale des affaires civiles et pénales, ainsi que le ministère du Conseil exécutif.

En vue d'améliorer la qualité des textes législatifs, la Direction générale des affaires législatives a organisé, en collaboration avec le Conseil de la langue française, le troisième colloque international sur la rédaction des lois qui s'est tenu à Pointe-au-Pic, du 7 au 10 septembre 1980. Ce colloque a permis des échanqes entre les juristes du Québec et leurs collègues des pays européens sur les aspects linguistigues et culturels de la législation, les critères de répartition entre la loi et le règlement, l'informatigue juridique et la traduction des textes législatifs.

Un autre secteur où le ministère a été fort actif en 1980 est le dossier de la "déréglementation" et de la paperasse. Dans le cadre des mesures prises par le gouvernement pour contrer les effets néfastes liés à la croissance de la paperasse et de la réglementation, la Commission de refonte des lois et des règlements a accéléré son processus de mise à jour et de refonte des lois et des règlements. Le ministère a, en même temps, entrepris un inventaire exhaustif de la réglementation existante dans chacune de ses directions générales en vue de reconsidérer son utilité et de la simplifier au besoin. Le ministère a également désigné des représentants au sein des divers groupes de travail formés au ministère du Conseil exécutif en cette matière.

Après vous avoir brièvement, M. le Président, entretenu de la législation, j'aimerais maintenant vous parler de la lutte que le ministère mène contre la violence et la criminalité. Ainsi, à la suite des colloques régionaux sur la violence, qui ont été tenus par le ministère de la Justice, en 1979, en vue de sensibiliser l'ensemble de population sur la violence exercée à l'égard des femmes et des enfants, le ministère de ïa Justice a publié, à l'automne 1980, un rapport de chacun des onze colloques régionaux de même qu'un rapport global. Ces rapports ont ensuite été distribués aux participants. (15 h 45)

En vue de répondre aux besoins exprimés lors de ces colloques, le ministère de la Justice a mis sur pied, en 1980, un programme de subvention totalisant 500 000 % permettant la réalisation de plus de 160 projets visant à contrer la violence dénoncée lors des colloques régionaux. Le choix des projets a été guidé par les possibilités de réutilisation du matériel produit. Un groupe de travail, présidé par le sous-ministre associé à la sécurité publique, a déjà commencé à recueillir ce matériel et à en faire l'étude en vue de déterminer le suivi de ces colloques.

La lutte contre la criminalité économique sous toutes ses formes apparaît comme un des défis du ministère au cours des prochaines années. Un colloque a été tenu à l'Institut de police de Nicolet réunissant l'ensemble des intervenants de ce secteur. Ce colloque a permis aux participants de discuter sur l'ampleur du phénomène et sur les moyens pour en diminuer les conséquences. Le service des faillites et fraudes de la Direction générale des affaires criminelles compte d'ailleurs intensifier ses efforts quant à la prévention du crime économique par la coordination des divers agents qui interviennent dans ce domaine.

La Sûreté du Québec a poursuivi ses efforts en vue d'accroître la spécialisation de ses enquêteurs en matière de lutte contre la criminalité. La Direction générale de la sécurité publique, quant à elle, a axé son action sur la prévention du crime. L'année fut marquée par plusieurs réalisations: visites de services de police et rencontres avec les comités régionaux de prévention du crime, inventaire des initiatives et des programmes de prévention ainsi que des documents d'information utilisés dans le cours des divers projets, conception et réalisation d'un jeu permettant d'informer les élèves de niveau élémentaire sur les mécanismes de prévention en matière de sécurité et de santé, participation active à la campagne "Piquer c'est voler" notamment par la production de documents didactique et d'information.

Enfin la direction générale a joué un rôle de premier plan dans le cadre d'un programme spécial de prévention du crime gui s'échelonnera sur une période de trois ans dans le guartier de Limoilou, dans la ville de Québec. En effet, en plus d'assurer un soutien aux divers plans, la direction a été plus particulièrement chargée de l'évaluation du programme, et à cette fin, elle a dû concevoir et développer une méthodologie destinée à mesurer l'efficacité des différents projets qui seront mis en oeuvre.

Concernant l'administration des services judiciaires, comme on le sait, le réseau des greffes et des bureaux d'enregistrement constituent des charnières essentielles au bon fonctionnement du système judiciaire et l'amélioration de leur efficacité ne peut qu'entraîner des répercussions favorables sur les justiciables en leur fournissant des services adéquats et en réduisant les délais requis pour les leur fournir.

C'est pourquoi le ministère a favorisé, et continuera de le faire au cours de la présente année, l'information des justiciables sur le fonctionnement du système judiciaire, l'amélioration de ce système et de la situation des victimes et des témoins, de même que la consultation entre les divers agents qui oeuvrent à l'intérieur des services judiciaires.

L'accueil et l'information des justiciables dans les palais de justice ont retenu l'attention de la Direction générale des services judiciaires. À Québec, une expérience nouvelle de service d'accueil est présentement en cours: des fonctionnaires choisis sur une base volontaire assurent l'accueil, en rotation, dans le hall d'entrée du palais de justice aux heures d'affluence. Des expériences se déroulent également dans d'autres régions où la population apporte son aide morale et psychologique aux personnes qui le désirent: par exemple, à la Chambre de la famille de Montmagny et de Trois-Rivières. L'évaluation de ces expériences nous permettra de doter, nous l'espérons, les palais de justice d'un meilleur service d'accueil pour que les justiciables puissent se sentir à l'aise lorsqu'ils ont recours aux services judiciaires. Je pense que comme ministère, on doit tout faire à partir de l'information et de l'accueil, essayer de diminuer le stress des citoyens qui ont à se rendre au palais de justice, faire face à la justice, il faut employer l'expression, et faire en sorte que peut-être avec le temps et les efforts, les justiciables en viennent à croire que le palais de justice, cela peut être un endroit qui dispense de l'aide aux justiciables et non pas seulement un endroit où ce dernier se présente, soit pour se faire acquitter ou se faire condamner. Je crois que nos palais de justice peuvent avoir une vocation beaucoup plus importante que celle qu'ils avaient jusqu'à maintenant, face à l'humanisation de la justice.

Il nous est également apparu nécessaire de revoir la situation des victimes et des témoins dans notre système judiciaire. Les études que nous avons entreprises vont déboucher sur des mesures concrètes qui seront de nature à améliorer leur sort. Ainsi, la Direction générale des services judiciaires a prévu la création d'un dépliant d'information pour les témoins. La Direction générale de la probation et des établissements de détention, par sa direction des ressources communautaires, consacrera des budgets à des études et à des expériences pilotes auprès des victimes au cours de la prochaine année. La Direction générale des affaires criminelles déploie des efforts importants afin de favoriser une meilleure information auprès des victimes d'actes criminels, aux différentes étapes de l'enquête policière et de la procédure judiciaire, notamment en les informant lorsgu'une plainte a été portée en relation avec l'acte criminel dont elles ont été victimes et en les informant du résultat des procédures. Il arrive souvent que les témoins ou les victimes, sont naturellement informées au moment de la commission de l'acte, au moment de la comparution du prévenu, mais ne sont jamais informées très précisément des suites ou de la conclusion de l'ensemble des procédures gui ont pu être intentées. Je pense que ce serait important qu'il y ait un suivi de ce côté-là, une information, à ceux qui sont victimes d'actes criminels.

De la même façon nous avons intensifié la publicité concernant la possibilité pour des citoyens qui sont victimes d'actes criminels de pouvoir réclamer des dommages. Ce programme a déjà donné - on sera à même de le constater - des effets remarquables, puisque le nombre de réclamations et les sommes payées en vertu de ce programme d'indemnisation des victimes d'actes criminels a plus que doublé depuis un an ou deux. On en parlera en temps et lieu.

Pour réduire la présence des victimes à la cour, parce que ce n'est jamais un plaisir pour une victime de venir à la cour, il y a un système de divulgation de la preuve gui a été mis sur pied à Montréal. Les substituts du Procureur général ont convenu d'examiner, dans leur district respectif, comment cette formule pourrait être implantée avec la collaboration des juges et des avocats de la défense.

La remise des biens saisis aux victimes de vol constitue un autre sujet sur lequel le ministère s'est penché au cours de l'année dernière. Ce phénomène fait l'objet d'examen par un groupe de travail réunissant les principaux intervenants du ministère. Le groupe de travail se penche sur les moyens législatifs et administatifs susceptibles de favoriser la remise rapide à leur propriétaire des biens volés retenus comme pièces à conviction dans les procédures criminelles et sur les moyens d'assurer un meilleur contrôle sur la disposition des biens confisqués. Jusqu'à ce que le groupe de travail ait terminé ses travaux, les substituts du Procureur qénéral prennent l'initiative de voir à la remise des biens volés à leur propriétaire dans les meilleurs délais. À Montréal, un projet pilote de preuve photographique est en cours.

Cela peut paraître anodin, mais pour ceux qui en font l'expérience, qui ont eu à pratiquer le droit criminel, il arrive que des citoyens, non seulement ont été victimes d'un acte criminel, mais le sont presque doublement, dû au fait que certains objets qui ont été volés ne leur sont pas remis dans des délais qui sont raisonnables, étant donné la longueur des procédures. À ce moment-là, ils sont pénalisés presque une seconde fois. On va essayer de corriger cette situation.

De plus, il existe un phénomène gui est susceptible d'engendrer des coûts importants pour l'administration de la justice et de causer des inconvénients sérieux aux personnes impliguées dans des procédures judiciaires. Il s'agit de la remise des causes. L'ampleur du phénomène fait présentement l'objet d'études de la part du ministère, en collaboration avec la magistrature et le Barreau du Québec afin d'en évaluer les

conséquences sur l'administration de la justice et de proposer des solutions.

Il est important - je disais au début que c'était un travail d'équipe avec l'ensemble des fonctionnaires qui nous entourent - que les fonctionnaires du ministère soient éqalement sensibilisés aux problèmes des justiciables et étudient les moyens appropriés pour les résoudre. Ainsi, le congrès des substituts du Procureur général et celui des officiers de justice auront comme thème, au cours de la présente année, l'humanisation du processus judiciaire et les services aux justiciables.

Le ministère juge également important que les intervenants, dans l'administration de la justice, soient consultés, afin d'assurer une meilleure coordination dans les actions du ministère. Ainsi, le comité sur le support administratif aux tribunaux, qui réunit, en plus de certains hauts fonctionnaires du ministère les juges en chef et les chefs associés des tribunaux va continuer d'examiner l'ensemble des problèmes reliés au soutien administratif des tribunaux.

Le barreau et la magistrure sont également consultés au niveau des questions touchant la procédure civile. Récemment, un comité formé de représentants de ministère et de la Chambre des notaires a été mis sur pied pour échanger sur la réforme du Code civil et sur la pratigue notariale en regard des activités des bureaux d'enregistrement, notamment. Je tiens à souligner, en ce qui concerne les bureaux d'enregistrement, le projet piloté d'informatisation des bureaux de Montréal et de Laval. Le système est opérationnel depuis le 1er août 1980 à Laval et depuis le 2 septembre à Montréal. Ce nouveau système améliorera la qualité et la guantité des services offerts aux justiciables en assurant une plus grande exactitude des données et en permettant une consultation rapide des registres.

Concernant les services correctionnels qui sont un autre secteur où le ministère a été fort actif en 1980. La Direction générale de la probation et des établissements de détention s'est efforcée d'améliorer les conditions de détention des personnes incarcérées à l'aide, entre autres, d'un programme d'activités rémunérées pour les détenus tout en développant d'autres formules visant à diminuer le nombre des personnes gui auront à subir des peines d'emprisonnement - cela a été loin de régler tous les problèmes que l'on connaît parce que l'on connaît le problème d'engorgement des prisons. On en discutera peut-être un peu plus longuement. Une étude a été faite et nous sommes en mesure peut-être d'identifier les principales causes. Nous avons identifié les principales causes de cette situation et nous nous orientons très rapidement vers des solutions - la direction générale a éqalement négocié une entente entre le Venezuela et le

Québec. En effet, à la suite d'une décision que j'ai prise dans ce sens, la direction qénérale a implanté le programme des travaux communautaires dans l'ensemble du Québec. Le but de ce programme est de favoriser le remplacement, lorsque les circonstances le justifient, des sentences, des peines d'emprisonnement par l'exécution de travaux au profit d'organismes sans but lucratif. Ces travaux peuvent constituer une solution de rechange positive à l'incarcération des personnes condamnées, et favorise encore plus efficacement leur réinsertion sociale.

Parmi les autres activités de la Direction générale de la probation et des établissements de détention, il faut souligner les démarches gui ont été faites auprès du ministère des Affaires sociales en vue d'améliorer la qualité des services de santé offerts aux contrerevenants adultes. La direction a en effet développé des services spécialisés répondant aux besoins particuliers des personnes incarcérées comme, par exemple, les unités de psychiatrie légale et elle s'est efforcée de les rendre plus accessibles. Un groupe de travail sur l'incarcération à défaut de paiement d'amende s'est attagué à ce phénomène en vue de rechercher des solutions visant à la réduire. Le rapport gu'a produit ce groupe de travail fait l'objet présentement de consultation auprès du conseil consultatif de la Justice. D'ailleurs, je vous souligne gue le gouvernement a procédé à la nomination de nouveaux membres au conseil consultatif de la Justice. Le conseil étudie présentement le rapport sur l'incarcération à défaut de paiement d'amende. Je vous informe que le rapport a également été soumis au juge en chef de tribunaux pour avis.

En 1980, la direction qénérale a amorcé des échanges avec le gouvernement du Venezuela en matière d'administration des services correctionnels. Au printemps 1980, le ministère de la Justice a accepté d'envoyer au Venezuela un spécialiste des services de probation gui pendant une période de trois mois a agi comme conseiller dans l'organisation des services de probation vénézuéliens. Cette collaboration s'est poursuivie au cours du mois de septembre, iors du sixième congrès de Nations Unies sur la prévention du crime et le traitement des délinguants gui se tenait à Caracas. Comme prolongement de ces échanges, le Québec accueillait, en octobre 1980, une mission du gouvernement du Venezuela présidée par le ministre de la Justice de ce pays. Cette visite qui avait pour principal objet l'étude du fonctionnement et de l'orqanisation des services correctionnels du Québec a permis la signature d'un accord formel de coopération entre les gouvernements du Venezuela et du Québec. L'accord prévoit l'établissement de

programmes de coopération en matière de prévention et de contrôle de la délinquance et de réinsertion sociale des délinquants, en particulier en matière de probation et de détention, de services communautaires et de libération conditionnelle. Cet accord touche également la formation scientifique et professionnelle ainsi que l'échange des chercheurs et des spécialistes. (16 heures)

Concernant le dossier constitutionnel, M. le Président, je ne peux évidemment passer sous silence les efforts du ministère dans ce dossier. À la suite du dépôt, en septembre 1980, par le ministre fédéral de la Justice, d'un projet de résolution comportant adresse conjointe du Sénat et de la Chambre des communes aux fins de rapatrier l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 avec une formule d'amendement à la Constitution et une Charte des droits et libertés, le Québec a décidé, avec d'autres provinces, de contester judiciairement cette procédure en demandant à la Cour d'appel de quelques-unes de ces provinces un avis sur la légalité du projet de résolution.

Une question telle que le débat constitutionnel a nécessité durant l'année 1980 de la part de la Direction générale des affaires civiles et pénales et de la Direction générale des affaires législatives d'importants travaux de recherche et d'opinions juridiques qui ont par la suite servi à préparer les arguments juridiques du gouvernement du Québec sur les propositions fédérales de modifications constitutionnelles. Le ministère de la Justice est intervenu au nom du gouvernement du Québec devant la Cour d'appel du Manitoba, de Terre-Neuve et devant sa Cour d'appel ainsi que devant la Cour suprême du Canada.

La Direction générale des affaires civiles et pénales a de plus continué à fournir tout le support juridique nécessaire au gouvernement. Elle a été impliquée dans de nombreux dossiers dont plusieurs ont nécessité des débats devant les tribunaux. Qu'il suffise de mentionner les dossiers de l'expropriation de la Société Asbestos Limitée et celui de l'application du jugement Blaikie aux règlements municipaux et scolaires.

Enfin, M. le Président, et pour terminer mon exposé, voici quelques actions du ministère en ce qui concerne les ressources humaines et financières. De concert avec le Conseil du trésor, le ministère a entrepris, au cours de l'année dernière, l'évaluation de ses programmes. Jusqu'à présent, l'évaluation du programme de la Direction générale des services judiciaires et de celui de la Direction des travaux d'enregistrement a été réalisée. Est en cours présentement, l'évaluation du programme de l'aide juridique et de celui de la Sûreté du Québec.

Parallèlement à cette évaluation, se poursuivait la révision du plan d'orqanisation administrative supérieure du ministère qui a débuté au cours de 1979. Les premières approbations par le Conseil du trésor ont été obtenues au début de 1980 et portaient sur les directions générales des affaires civiles et pénales, de l'approbation des établissements de détention, de l'administration des affaires législatives et sur la Commission de refonte des lois et règlements.

Les dossiers portant sur la révision de la structure des directions générales de la sécurité publique, des services judiciaires du personnel, de la direction des bureaux d'enregistrement, de la Commission de police du Québec et du Comité de la protection de la jeunesse ont été soumis récemment au Conseil du trésor. Le ministère de la Justice est impliqué depuis déjà quelques années dans le processus d'application du programme gouvernemental d'égalité des chances dans l'emploi pour les femmes. Je rejoins la préoccupation évoquée par le député de Jean-Talon au début de notre rencontre.

En 1980, en vue d'améliorer sa participation, le ministère s'est doté d'un plan d'action assorti d'objectifs particuliers à chacun des secteurs de son activité de façon que l'ensemble du réseau de la justice soit impliqué dans ce programme. Des actions concrètes portant sur l'attraction du personnel féminin dans des secteurs d'emploi où les femmes sont peu nombreuses, sur la formation et le perfectionnement du personnel féminin, sur la planification des carrières et sur la sensibilisation de l'ensemble du personnel du ministère ont été identifiées. Leur réalisation s'échelonnera jusqu'au mois d'octobre 1981.

Le ministère de la Justice participe également activement au dossier de l'Année internationale des personnes handicapées. Le sous-ministre associé au personnel assure la coordination de ce dossier au ministère. Une des tables thématiques qui a été formée dans le cadre de ce programme concerne les droits des personnes handicapées. La responsabilité en a été confiée au ministère de la Justice. Les travaux ont consisté à inventorier les dispositions législatives et réglementaires ainsi que les différents progammes et services offerts par le ministère, à faire une mise à jour assurant la cohérence et au besoin la correction dans la terminologie employée dans les lois et règlements, à analyser les effets de leur handicap dans l'exercice de leurs droits, à informer les autres tables de concertation des lois et des règlements qui seront utiles à leurs travaux, à faire l'inventaire des difficultés identifiées et à proposer des avenues et modifications législatives possibles.

De plus, le ministère verra à mettre en oeuvre un plan d'action et d'égalité d'emploi

pour les personnes handicapées. Le ministère participe également à l'implantation d'un autre programme gouvernemental, soit le plan d'action à l'intention des communautés culturelles. Ce plan d'action a été rendu public par le ministère d'État au Développement culturel et scientifique, le 3 mars dernier. Il implique, entre autres, des actions visant à remédier au problème de sous-représentation des communautés culturelles dans la fonction publique québécoise et aux problèmes d'information auxguels sont confrontés les immigrants.

Enfin, le ministère participe activement à l'implantation du programme gouvernemental d'identification visuelle et auditive des fonctionnaires. Je considère important que les citoyens qui s'adressent à l'État reçoivent des services personnalisés et soient en mesure d'identifier nommément quelles sont les personnes dont ils ont eu des services, de manière que si des représentations doivent être faites, elles le soient à propos de personnes bien identifiées, de manière à pouvoir y apporter les correctifs nécessaires.

Concernant le budget - en terminant, M. le Président - pour l'année 1981-1982, le total des crédits du ministère de la Justice s'établit à 544 330 300 $. Si on compare ces chiffres au budqet des dépenses pour l'année 1980-1981, on constate une augmentation de 70 158 500 $, soit une augmentation de 15,2%. Ces crédits se répartissent entre 7 secteurs et .17 programmes. La majorité du budget, 82%, sera affectée à cinq proqrammes du ministère, dont 237 983 100 $ à la Sûreté du Québec, 85 727 700 $ à la garde des détenus et à la réinsertion sociale des délinguants, 60 402 500 $ au soutien administratif à l'activité judiciaire, 40 098 600 $ à l'aide aux justiciables et 22 491 900 $ à la formulation de jugements.

Sur les crédits additionnels de 70 158 500 S, une somme de 52 800 000 $ servira à défrayer le coût des révisions de traitement faisant suite à la mise en application des différents contrats de travail. À cette fin, des sommes de 28 900 000 $ sont prévues au niveau de la Sûreté du Québec, de 9 350 000 $ pour la direction générale de la probation et des établissements de détention, de 6 950 000 $ pour les fonctionnaires du système judiciaire.

Le reste de l'augmentation, soit 17 400 000 $, provient principalement, d'une part, du fait qu'il a fallu un montant additionnel de 9 000 000 $ concernant la contribution de l'employeur au régime de retraite des policiers et des juges et d'autre part, du fait que le ministère a inscrit dans ses crédits, une somme de l'ordre d'environ 6 700 000 $ pour la mise en application de différents projets, tel que la perception des pensions alimentaires, le nouveau plan d'organisation administrative supérieure de la direction générale des affaires législatives, la publication des règlements, le développement des systèmes informatisés.

Les effectifs du ministère de la Justice s'établissent, au 1er avril 1981, à 13 440 employés permanents et 629 employés occasionnels, soit un total de 14 069 personnes. L'effectif total du ministère, au 1er avril 1980, était de 13 983, dont 13 276 employés permanents et 707 occasionnels. L'augmentation totale de ces effectifs, du 1er avril 1980 au 1er avril 1981, a donc été de 86 postes, résultant d'une augmenation de 164 postes permanents et d'une diminution de 78 postes occasionnels.

Cette augmenation s'expligue ainsi. En ce qui concerne les permanents, du 1er avril 1980 au 31 décembre 1980, l'effectif a été porté de 13 276 à 13 425, comme l'indique le livre officiel des crédits, qui est entre vos mains, soit une augmentation de 149 postes. Depuis le 31 décembre 1980, 15 postes supplémentaires ont été créés pour une augmentation totale, durant l'année, de 164 postes permanents. Ce chiffre de 164 postes permanents est obtenu en additionnant les nouveaux postes obtenus par le ministère et en soustrayant les postes remis au Conseil du trésor, dans le cadre des compressions d'effectifs. Les postes nouveaux ou transférés sont pour les activités suivantes: transfert à la Sûreté du Québec des agents d'autoroute, comme vous le savez, 129 postes; intégration à la fonction publique des employés de la protection civile, 98 postes; personnel requis pour l'implantation du programme des pensions alimentaires, 57 postes; personnel requis pour l'implantation du district judiciaire de Laval, 17 postes; divers autres projets, 13 postes, pour un total de 340 postes. Comme la compression d'effectifs a été de 176 postes, nous obtenons notre chiffre de 164 postes permanents. Pour ce qui est des employés occasionnels, on constatera que ceux-ci sont passés de 707 à 629, pour une réduction de 78.

M. le Président, j'ai voulu par cet exposé présenter aux membres de la commission parlementaire de la justice un portrait des grandes orientations des actions du ministère, des réalisations administratives des différents secteurs d'activités et vous faire état des crédits que nous soumettons aux membres de la commission pour analyse et approbation.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: Avant de commencer, j'aimerais remercier le ministre et son chef de cabinet pour l'aide qui m'a permis d'arriver à l'heure aujourd'hui. Ce matin, j'ai

pris l'avion de Montréal pour Québec à 9 h 10. En arrivant à Québec, l'aéroport était fermé à cause de la brume. Nous sommes retournés à Montréal, celui de Montréal était fermé. Je suis donc arrivé à Bagotville à 11 h 30.

M. Bédard: On m'avait déjà informé.

M. Marx: Je n'ai pas fait de propagande à Bagotville contre le ministre, mais j'ai demandé à ma secrétaire de téléphoner à son cabinet. Il m'a envoyé une voiture pour me conduire à Québec. Je vous remercie une autre fois.

J'avais pensé demander un hélicoptère, mais je ne l'ai pas fait pour deux raisons: premièrement, je comprends que vous avez des coupures dans votre ministère, je n'ai pas voulu gonfler le déficit de l'État du Québec; deuxièmement, j'étais avec un fonctionnaire du bureau du Vérificateur général. J'ai pensé que ce serait mieux de montrer à ce fonctionnaire qu'on ne fait pas de gaspillage, soit dans l'Opposition, soit au ministère de la Justice. Je vous remercie une autre fois, M. le ministre.

M. Bédard: Vous avez bien analysé la situation, parce que j'aurais été obligé de vous refuser un hélicoptère, mais c'est avec plaisir...

M. Marx: Ah bon! J'étais dans la voiture de la Sûreté du Québec, avec les policiers qui font le trajet. Donc, cela n'a pas coûté quoi que ce soit à l'État.

Mes remarques d'ordre général seront très brèves. J'aimerais qarder mes remarques plus détaillées pour l'étude programme par programme. Premièrement, j'aimerais féliciter le ministre pour avoir été reconduit comme ministre de la Justice et comme Procureur général du Québec. Si le premier ministre pense à le muter un jour, il peut compter sur l'appui de l'Opposition officielle pour demander au premier ministre de le garder toujours en fonction.

Deuxièmement, j'aimerais également remercier, au nom de l'Opposition, les collaborateurs du ministre d'être venus en si grand nombre aujourd'hui. Mon amitié personnelle pour ceux et celles que je connais depuis des années, je comprends combien c'est difficile pour vous de vous rendre à l'Assemblée nationale, je comprends que vous avez des tâches urgentes à accomplir dans vos bureaux, soit ici, soit à Montréal, soit ailleurs. Je vous assure, encore une fois, que votre présence est grandement appréciée.

Vous comprenez que c'est le seul moment durant l'année où on peut poser n'importe quelle question au ministre. Il n'est pas tenu de répondre à nos questions, mais c'est un moment assez précieux dans notre système démocratique. Je vous remercie une autre fois d'être venu. Le ministre, bien sûr, peut compter sur notre coopération, sur la coopération de l'Opposition officielle. On va travailler en collaboration avec son ministère pour le bien-être de tous les Québécois, (lé h 15)

Le ministre a fait un bilan des activités et il a dressé un tableau très positif. Il va sans dire que je n'ai pas entendu d'autres choses, il y a vraiment des aspects très positifs dans son bilan. Comme vous le savez, l'Opposition a même voté pour certaines des lois que le ministre a déposées cette année à l'Assemblée nationale. Nous sommes très satisfaits de certains travaux que le ministère a faits cette année.

Notons en passant que le ministre n'a pas parlé de ses objectifs de l'an prochain, peut-être va-t-il revenir sur cette question.

En analysant ce que le ministre de la Justice a fait en fonction des objectifs qu'il a définis pour lui-même, on verrait qu'il n'a pas atteint ses objectifs, qu'il n'a pas atteint ses buts. Le ministre ou ses proches collaborateurs ont parlé, cette année et l'an dernier, de fournir à tous l'accessibilité à une justice efficace, humaine et personnalisée de même qu'une participation directe des citoyens à l'administration de la justice. À mon avis, je le répète, le ministre n'a pas atteint ses objectifs.

Comment peut-on parler de l'accès à la justice, s'il est impossible d'avoir accès à l'information juridique? Les avocats sont tout mêlés dans les lois du Québec; ils ne peuvent pas se retrouver dans les lois du Québec. Quand les avocats ne peuvent pas se retrouver dans les lois du Québec, il faut se demander comment un simple citoyen peut s'y retrouver. L'encombrement des rôles des tribunaux empêche que le système de justice soit efficace. Je pense que c'est évident.

Troisièmement, le ministre a-t-il humanisé notre droit pénal, a-t-il humanisé nos prisons? Qu'est-ce que le ministre a fait cette année pour protéger davantage les droits et libertés des Québécois? Le ministre n'a-t-il pas négligé de protéger les droits et libertés des femmes au Québec? Il me semble que le ministère de la Justice empêche que les citoyens participent vraiment à l'administration de la justice. Je vais revenir sur ces questions, lors de l'étude programme par programme du ministère. Ce sont quelques-uns des sujets, il va y en avoir d'autres sur lesquels on va s'arrêter durant cette étude.

J'aimerais aussi aborder la question du Code civil. L'Office de révision du Code civil a travaillé pendant 25 ans à refaire notre Code civil. C'est un excellent travail. Il semble qu'on va l'adopter à la pièce. Quand on aura terminé d'adopter le Code civil, il sera déjà désuet. Il y a quelque chose à faire dans ce domaine pour le bien-

être de tous les Québécois.

Savez-vous, M. le Président, qu'il existe au Québec aujourd'hui deux Codes civils. Il y a le Code civil de 1870, qui est officiellement le Code civil du Bas-Canada, mais qu'on appelle au Québec, depuis des années, le Code civil du Québec, mais, en 1980, on a instauré le Code civil du Québec. Il y a des articles dans le Code civil du Québec, comme l'article 425 peut-être, qui se trouvent dans les deux Codes civils du Québec. C'est très mêlant pour des avocats qui n'ont pas tout l'appui du ministère pour faire des recherchers, chercher les numéros d'articles, etc. Les deux codes portent les mêmes numéros d'articles pour des sujets différents. Cela cause passablement de problèmes. L'Office de révision du Code civil a été aboli déjà, il y a quelques années, parce qu'il avait fait tout son travail. Je répète une autre fois que le ministre doit penser - non pas à faire des études parce qu'on a déjà fait des études pendant des années pour remplir des tiroirs sérieusement à faire adopter tout le Code civil durant cette Législature et aussitôt que possible. Et s'il veut aller dans cette direction, il aura la coopération totale de l'Opposition officielle.

Un dernier point. Toutes les provinces, ou presque, et le gouvernement fédéral aussi, ont des commissions de réforme des lois. Je pense qu'il n'y a que le Québec qui n'a pas de commission de réforme des lois. Il me semble que c'est impensable qu'on continue à ne pas avoir de commission qui fasse des suggestions pour que les lois soient mises à jour d'une façon continue et je demande une autre fois au ministre de penser à une telle réforme. Je pense que les commissions de réforme des lois existent partout en Amérique du Nord et, j'imagine, à l'étranger aussi. C'est impensable qu'on reste encore au Québec sans une telle commission qui fait un travail exceptionnel ailleurs en Amérique du Nord, et surtout au niveau fédéral et dans les autres provinces.

C'est tout pour mes remarques préliminaires, à moins que mes collègues de l'Opposition officielle veuillent ajouter quelque chose.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Marc-André Bédard (réplique)

M. Bédard: Sur les quelques points soulevés par mon collègue de l'Opposition, quelques remarques brèves, parce qu'on aura l'occasion à chacun des programmes d'aller plus profondément au niveau des problèmes ou des principes qui peuvent être concernés.

Le député de D'Arcy McGee a parlé du peu de préoccupation, en tout cas, de la préoccupation insuffisante concernant la participation directe des citoyens à l'administration de la justice. Au contraire, je crois que, s'il y a un secteur où un effort, par comparaison à ce qui s'est fait dans le passé, a été fait, c'est bien celui-là, puisque maintenant les citoyens participent à la prise de décision importante dont ils étaient complètement écartés auparavant.

Voici quelques exemples: au Conseil de la magistrature, par exemple, qui est un organisme important au niveau de l'administration de la justice, nous avons tenu à ce qu'il y ait deux représentants du public, outre les avocats, juqes et membres du barreau, qui soient nommés, et c'est le cas présentement. C'est une innovation par rapport à ce qui se fait ailleurs. Prenez, par exemple, le choix des juges. Quel que soit le système auquel vous puissiez penser, sauf peut-être ceux où les juges sont élus directement par la population, les citoyens jusqu'à maintenant étaient absents du processus concernant le choix d'un juge. Maintenant, ils y sont présents puisque nous avons tenu à ce que les membres du jury soient composés non seulement du juge en chef, d'un représentant du barreau, mais également d'un représentant du public qui, même s'il n'a pas de formation légale, est en mesure d'expliciter son opinion et de faire valoir ses représentations, ce qui est également une innovation.

Je pense également à la Loi de la protection de la jeunesse où vous avez la présence de plusieurs représentants du public, entre autres les personnes désignées par le ministre de la Justice. Vous retrouvez là plusieurs policiers et plusieurs citoyens qui ont été nommés, qui ont un mot à dire quant à l'évaluation du cas de l'enfant et de sa référence soit au système judiciaire ou encore à un traitement social, ce qui n'était pas du tout le cas auparavant.

Je pourrais donner plusieurs autres exemples. Prenez par exemple tous les colloques qui ont été faits sur la violence. Pour une fois, le ministère de la Justice, face à un problème social d'envergure, n'est pas arrivé avec des solutions toutes faites, mais a eu la préoccupation d'aller voir la population, de tenir des colloques à cet effet, de manière que non seulement les solutions, mais l'analyse du problème se fasse par les citoyens, ce qui ne peut que contribuer à donner de bons résultats et à valoriser le citoyen au niveau de l'administration de la justice, ce qui fait que de plus en plus et nous essaierons d'avoir d'autres initiatives dans ce sens-là, de plus en plus le citoyen est mieux informé de ce qu'on appelle l'ensemble du rouage de la justice. Et, étant mieux informé, il est mieux placé pour faire valoir ses droits.

On l'évoquera tout à l'heure, nous avons fait un sondage concernant le taux de satisfaction des citoyens en ce qui a trait,

par exemple, au tribunal des petites créances. Vous serez en mesure de constater, heureusement, que cette satisfaction a un taux très élevé, ce qui veut dire qu'on n'a qu'à continuer dans ce sens.

Concernant l'accès à l'information également auquel référait le...

M. Marx: M. le ministre, je ne veux pas faire le débat maintenant, je veux faire le débat lors de l'étude des programmes. J'ai fait une affirmation, je n'ai pas apporté la preuve. Mais je suis prêt à apporter la preuve, quand on arrivera au programme, que, sur tout ce que vous avez dit, vous avez raison. Il y a peut-être 2000 Québécois qui sont impliqués dans l'administration de la justice, peut-être 3000. Pour moi, cela ne veut pas dire la participation des citoyens à l'administration de la justice. Mais je sais que vous avez raison dans ce que vous avez dit. Je ne conteste pas ce que vous avez dit.

J'ai fait des affirmations, je l'admets, et je n'ai pas apporté de preuves. Je vais apporter les preuves quand on abordera les programmes et cela va vous donner l'occasion de rejeter la meilleure preuve.

M. Bédard: Si mon collègue avoue qu'il a fait des affirmations sans apporter de preuves, vous conviendrez, M. le Président, que je serai, avec une telle admission, plus bref dans mes remarques qui suivent les siennes. Nous pourrions ajouter, au cours des progammes, tous les efforts qui ont été faits concernant par exemple l'accès à l'information juridique, l'accès des citoyens à l'information juridique auquel a référé mon collègue. Concernant le droit et la liberté des femmes, on n'est pas ici, excusez l'expression, pour se péter les bretelles, mais s'il y a un ministère qui a été sensible à la nécessité d'apporter des correctifs aux inégalités entre hommes et femmes, c'est bien le ministère de la Justice. Que ce soit par le biais de la loi no 89 ou par d'autres mesures législatives auxquelles je pourrai référer lors de l'étude des crédits, je crois que nous pouvons dire, non pas que tout est fait, loin de là, mais que la préoccupation de cette recherche de l'égalité des hommes et des femmes a été constante au niveau du ministère de la Justice et que les résultats sont là.

M. Marx: Un tout autre dossier, M. le ministre, que j'ai l'intention d'aborder quand on parlera de la Charte des droits et libertés de la personne. Je ne suis pas tout à fait disposé à admettre que vous ayez fait tout ce qui était possible pour mettre les femmes sur un pied d'égalité avec les hommes au Québec. Vous n'avez même rien fait dans un ou deux dossiers qui sont très pressants, là où la demande existe depuis des années, (16 h 30)

Le Président (M. Desbiens): Je comprends qu'il y aura reprise de tout cela au niveau des programmes.

Je vais demander que M. le ministre termine pour entreprendre autre chose.

M. Bédard: Je terminerai sur un point. Je suis d'accord avec le représentant de l'Opposition que tout n'est pas fait. Quelle serait notre raison d'exister si tout était fait? Quand on se compare, je pense qu'on peut se consoler, quand on compare l'action du ministère de la Justice par rapport à ce qui s'est fait les autres années.

Il y a un dernier point, qui est purement technique, concernant le Code civil. Je pense que le représentant de l'Opposition, le député de D'Arcy McGee, sait très bien que, si nous avons procédé par secteurs, pour ne pas dire par étapes, entre autres, celui concernant le droit de la famille, d'une façon prioritaire, c'est à la suite d'avis qui nous avaient été donnés par des spécialistes et de l'évaluation que nous avons faite de notre Code civil. On s'est rendu compte rapidement que c'est dans le domaine du droit de la famille qu'on assiste aux plus grands éparpillements et à la nécessité de faire...

M. Marx: II faut commencer quelque part, c'est évident, mais pouvez-vous nous faire la promesse que vous allez adopter le Code civil dans un laps de temps déterminé?

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Je continue: Les spécialistes nous avaient conseillé, si nous voulions aboutir plus vite que la réforme n'avait abouti, à y aller par secteurs précis. C'est ce que nous avons fait. Nous allons accentuer notre travail, notre vitesse de croisière. Au moment où je vous parle, il y a déjà des groupes d'étude au niveau du ministère concernant les personnes et les successions, entre autres, les contrats et obligations, ce qui représenterait, à ce moment, une large partie du Code civil et nous espérons déboucher assez rapidement avec une loi. Quand je dis rapidement, on sait quelle est la complexité de ce travail et je suis en mesure de dire que toutes les bonnes volontés sont employées au niveau du ministère pour que le travail avance le plus rapidement possible, tenant compte des circonstances.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Seulement une brève question. Le ministre peut-il nous dire s'il fera adopter tout le Code civil d'ici deux, trois, quatre ou cinq ans... cinq ans, c'est aller

loin. Est-ce qu'il a un projet? Envisage-t-il de faire cela dans quelques années? Cela peut durer des dizaines d'années. C'est déjà arrivé ailleurs, j'imagine.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bédard: Nous avons un projet d'échéancier que nous terminerons bientôt. Nous serons en mesure, le plus rapidement possible...

M. Marx: Le ministre déposera-t-il son projet?

M. Bédard: Je ne serai pas en mesure de le faire à la commission parlementaire.

M. Marx: Pas ici, mais une fois que ce sera terminé le ministre le déposera à l'Assemblée nationale?

M. Bédard: Sûrement, avec plaisir, et en faisant connaître toutes les complexités de la tâche.

M. Marx: Je ne vous blâme pas, avec tout ce que vous avez à faire. Je comprends qu'on en oublie ici et là. À l'Assemblée nationale, on demande toutes sortes de choses. On a des réponses: Oui, ce sera déposé. On revient, et on nous dit: On pose la mauvaise question au mauvais moment. On demande, on demande. On a des réponses: Oui, oui, oui, mais ce n'est jamais déposé. Je ne veux pas...

M. Bédard: Vous comprendrez que, à l'Assemblée nationale, je peux être maître des réponses, mais je ne suis pas maître des questions.

M. Marx: Souvent, dans le passé, j'ai demandé des documents. J'avais des promesses que ce serait déposé. Ce n'était jamais déposé. On a eu des élections, un référendum et ainsi de suite et on n'a jamais eu les documents.

M. Bédard: Ne soyez pas injuste. Nous avons toujours répondu rapidement à ce que vous demandiez.

M. Marx: Donc, nous aurons votre projet d'ici septembre, octobre, novembre ou décembre? Quand?

M. Bédard: D'ici septembre ou octobre, il y aura un échéancier qui sera rendu public, mais je tiens à vous le dire encore une fois, vous le savez très bien, cela a pris 25 ans pour faire la réforme du Code civil, soyez au moins réaliste. Je ne pense pas que mon collègue veuille faire de la politique avec cela, il connaît trop bien la complexité du travail. C'est un travail de spécialiste,

M. Marx: On a déjà le rapport depuis quelques années. Cela a pris quelques années seulement pour adopter le chapitre ou le livre sur la famille. Cela risque de prendre une autre génération et, quand tout sera adopté, ce sera désuet, il faudra recommencer. Je pense qu'il y a quelque chose...

M. Bédard: Je m'excuse, concernant le droit de la famille, nous avons procédé avec beaucoup de célérité surtout si on compare notre vitesse de croisière à celle de ceux qui nous ont précédés. Voyons donc! On a fait les analyses nécessaires, puis la législation, comme vous le savez, a été adoptée. Quand on parle de la loi 89, c'est une pièce de législation qui, dans certaines sociétés, peut prendre jusqu'à un an avant d'être adoptée alors que nous l'avons fait quand même assez rapidement parce que nous avions pu procéder préalablement aux consultations appropriées.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. le ministre, vous avez mentionné plusieurs démarches louables que vous avez faites depuis un an pour rendre la justice plus équitable et plus accessible aux citoyens. C'est juste une question générale. Mon collègue de D'Arcy McGee a mentionné tantôt l'encombrement des rôles en Cour supérieure, que c'est rendu à prendre trois ans dans le district judiciaire de Hull, où j'ai pratiqué le droit jusqu'à récemment, pour faire entendre une cause. Tant et aussi longtemps que la situation existe, et je pense que la même chose existe à travers la province dans les autres districts judiciaires...

M. Bédard: Dans d'autres provinces aussi.

M. Kehoe: ...je pense que l'accessibilité de la justice aux citoyens n'est pas un fait. Je me demande, dans l'ensemble, si des démarches concrètes ont été faites par votre ministère depuis les dernières années pour régler le problème?

M. Bédard: Assurément, des démarches ont été faites et à l'heure actuelle, tant avec le barreau qu'avec la magistrature, nous sommes à mettre au point des solutions gui pourraient être possibles mais on aura l'occasion d'en discuter peut-être plus longuement dans l'étude programme par programme. Vous êtes sans doute au courant d'une étude gui a été faite à Montréal par le barreau dont les conclusions ont été connues tout dernièrement...

M. Kehœ: Des études ont été faites et plusieurs démarches entreprises, mais est-ce que cela a commencé à régler en quelque sorte le problème? Je pense que le problème s'aqgrave et doit se régler d'une façon quelconque. Que ce soit dans le district judiciaire de Hull dont je suis plus au courant, mais généralement, par toute la province, je pense que le rôle de la Cour supérieure à Montréal c'est rendu que ca prend plus de trois ans pour faire entendre une cause.

M. Bédard: Alors, on aura l'occasion d'en discuter à ce programme et nous serons très heureux et très ouverts face à des suggestions qui pourraient être faites par nos amis et collègues de l'Opposition.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon sur des remarques générales.

M. Rivest: Oui, M. le Président, pour compléter peut-être, pour que le ministre puisse demander à ses gens d'apporter... Mon collègue a un certain nombre de dossiers sur les programmes, chacun des éléments de programme. Je voudrais d'abord demander au ministre - il le fera peut-être au moment des crédits ou tout de suite comme il le voudra selon son jugement - j'avoue que j'ai été assez étonné d'apprendre en fin de semaine qu'il y avait eu des demandes quelque part, ou enfin je ne sais pas d'où c'est venu ce besoin immense d'effectuer une réforme en profondeur de la Charte des droits et libertés de la personne. J'aimerais que le ministre puisse nous dire à quel besoin précis ça répond. La façon dont c'était présenté, à tout le moins en fin de semaine, c'était une réforme de fond en comble de cette loi qui est loin d'être une loi qui cause des problèmes. Je crois que c'est une loi qui a atteint ses objectifs, premièrement.

Deuxièmement, j'aimerais aussi que le ministre, au cours de l'étude des crédits, puisse nous dire les moyens qu'il envisage en ce qui concerne le suivi de la lutte contre le crime organisé, compte tenu de l'expérience que le Québec a vécue au cours des dernières années.

Troisièmement, j'aimerais que le ministre puisse nous indiquer la réaction de son ministère à la suite des recommandations et de la publication du rapport Paré, puisqu'un certain nombre des recommandations du rapport Paré le concernent, pas lui personnellement, mais son ministère au premier chef étant donné qu'il y a des questions de sécurité, des questions judiciaires.

Quatrièmement, et ce sont des questions que sans doute mon collègue de D'Arcy McGee pourra soulever de nouveau au moment des crédits, au niveau de ce que mon collèque a signalé, au niveau du comité de législation - je me permets d'insister, ca rejoint peut-être un peu indirectement la remarque de mon collègue - parce que les avocats de pratique privée s'inquiètent beaucoup de la tenue au point de vue technique des lois du Québec et surtout de la prolifération absolument incroyable des règlements, si bien qu'un avocat, d'après ce qu'on nous a soumis, n'est même pas en mesure de dire à son client l'état du droit. Il ne réussit pas lui-même à le savoir étant donné que les règlements sont quelquefois adoptés, d'autres fois non adoptés, réamendés, c'est un problème majeur, comme dit mon collèque de D'Arcy McGee.

Cinquièmement, je voudrais que le ministre nous donne la réaction de son ministère sur les décisions judiciaires qui sont rendues, en particulier au titre de la constitutionnalité de certains tribunaux administratifs. On a eu le Tribunal des transports, il y a la décision en Ontario au sujet de la Régie du logement et surtout, de la prudence législative que tant et aussi lonqtemps que les questions constitutionnelles afférantes à ce problème n'auront pas été réglées, la prudence législative que le ministre devrait manifester quand on adopte des lois au niveau de l'Assemblée nationale.

Je voudrais également que le ministre nous dresse un bilan complet des travaux de la commission Keable, coûts, etc. Je pense que c'est le moment maitenant. Surtout qu'il trouve l'occasion, au moment des crédits, de répondre directement à la question que le député de D'Arcy McGee lui a posée au sujet du principe de l'infiltration policière. Mon collègue de D'Arcy McGee va sans doute revenir là-dessus. Alors, pour l'instant, ce seraient des questions que je voudrais discuter avec le ministre. Sans doute qu'au fil des programmes, il y en aura d'autres qu'on pourra aborder.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, est-ce que...

M. Rivest: ...

M. Bédard: Vous êtes à même de constater, M. le Président, que ça représente pas mal de questions. Si mes collègues n'ont pas objection à me donner tout le temps nécessaire pour répondre...

M. Rivest: C'est ça, je vous le dis d'avance.

M. Bédard: ...ou si on préfère...

Le Président (M. Desbiens): ...attendre les programmes.

M. Marx: ...dans les programmes.

M. Bédard: ...à travers les programmes, discuter plus à fond.

M. Rivest: ...M. le ministre, je vous indique tout de suite ces sujets-là...

M. Bédard: Cela me fait plaisir.

M. Rivest: .. pour que vous puissiez demander à vos qens de préparer...

M. Bédard: Dites-vous une chose, je suis prêt à répondre à toutes ces questions et peut-être une...

M. Rivest: C'est dans ce sens, que le sachant...

M. Bédard: ...sur laquelle je pourrais donner tout de suite l'information à mon collègue de Jean-Talon, c'est la décision qui a été annoncée de procéder à une commission parlementaire concernant la Charte des droits et libertés. Cette décision a été motivée par le fait que plusieurs recommandations nous étaient faites par la Commission des droits de la personne, auxquelles nous n'avions pu donner suite encore, qui exigeaient un débat plus large. J'ai eu l'occasion, il y a quelques mois, de rencontrer plusieurs groupes qui avaient différentes préoccupations concernant des améliorations qui pourraient être apportées à la Charte des droits et libertés. Devant cette situation, tenant compte du fait que la Charte des droits et libertés a déjà plus de cinq ans d'existence, il me semble qu'il y avantage pour l'ensemble de la population à ce qu'une réflexion globale soit faite sur la Charte des droits et libertés.

Je puis assurer mes collègues que cette décision, dont j'avais informé le leader il y a quelques mois, était déjà prise dans mon esprit. Mais ellle se devait d'être entérinée par le Conseil des ministres, ce qui a été fait.

M. Marx: C'est très surprenant, pour moi, de voir dans les journaux, que c'est le leader qui annonce, durant votre conseil général, qu'on va avoir une commission parlementaire au mois d'octobre. J'ai pensé que c'était vous qui aviez la responsabilité de la Charte des droits et libertés de la personne. Premièrement, s'il y a quelque chose à dire...

M. Bédard: Je ne suis pas fort sur ces petites batailles, qui annonce le premier, il n'y a vraiment rien là. L'important, c'est que...

M. Marx: On ne veut pas vous mettre en contradiction avec le leader, jamais.

M. Rivest: L'important, c'est que vous indiquiez pourquoi.

M. Marx: C'est drôle d'annoncer ça durant un conseil général et de ne pas annoncer ca à l'Assemblée nationale. On est en session. Ce n'est pas comme lorsqu'on n'est pas en session. De toute façon, on devient habitué à ça, ça arrive souvent avec ce gouvernement.

M. Bédard: Ce n'est quand même pas l'annonce d'un projet de loi; c'est l'annonce d'une commission parlementaire. Je crois que le leader a ses droits et ses devoirs...

M. Rivest: On en reparlera tantôt, quelles sont les intentions... (16 h 45)

M. Bédard: L'important...

M. Rivest: Excusez-moi, mais ce que je voulais savoir, et ce que mon collègue va vous demander tantôt lorsqu'on arrivera à ce programme, guelles sont les intentions du gouvernement au niveau de la Charte des droits et libertés? Est-ce pour ajouter d'autres libertés, pour mieux assurer la protection des libertés ou bien, cette charte ne cause-t-elle pas des inconvénients? Dans quel sens? On ne fait pas une commission parlementaire pour le plaisir d'en faire. Il y a des raisons profondes qui vous amènent à réviser la charte.

M. Bédard: Je suis même surpris de voir le député de Jean-Talon poser la question. C'est évident que si on fait une commission parlementaire, c'est parce qu'on veut...

M. Rivest: Quels sont vos objectifs?

M. Bédard: ... améliorer la Charte des droits et libertés, faire en sorte d'évaluer jusqu'à quel point on peut répondre aux représentations qui seront faites à cette occasion par les différents groupes intéressés à ce que la charte soit réajustée à la nouvelle dimension sociale du Québec. Je pense, entre autres, aux avantages sociaux. Il y a bien d'autres secteurs, ce qui est tout à fait normal après cinq ans d'existence, qui peuvent être améliorés au niveau de la protection des droits et libertés.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que je comprends qu'on commence l'étude programme par programme?

M. Rivest: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous entendez étudier les programmes globalement ou procéder élément par élément et adopter globalement?

M. Bédard: Globalement. M. Marx: Globalement.

Formulation de jugements

Le Président (M. Desbiens): D'accord. Programme 1: formulation de juqements. Ce programme...

M. le ministre.

M. Bédard: Les membres de l'Opposition ont reçu l'essentiel des explications...

M. Marx: Oui, on aimerait remercier le ministre, on a reçu cela jeudi dernier...

M. Bédard: ... tel qu'entendu.

M. Marx: On a eu un jour de plus que les autres critiques de l'Opposition.

M. Rivest: L'efficacité du sous-ministre!

M. Bédard: Ce n'est pas cela. À la justice... C'est cela, l'accessibilité à l'inform ationl

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, tel que je l'avais promis, nous faisons distribuer aux membres de la commission, non seulement la revue Justice du dernier mois, mais également l'essentiel de la publicité qui a été mise au point pour l'information de la population en ce qui a trait au droit de la famille. Vous serez à même de constater qu'un travail magnifique a été fait par...

M. Rivest: Très bon. Là-dedans, on ne peut pas dire que vous êtes mauvais.

M. Bédard: ... les services du ministère.

M. Rivest: Les petites brochures, les petits dépliants et les posters, là-dedans, vous êtes forts.

M. Marx: II y a plus dans ce programme...

M. Bédard: On est à même de voir qu'il n'y a pas grandes critiques à faire. Allons-y!

M. Marx: II y a plus dans ce programme que des dépliants et des magazines. Il y a le problème de l'immunité des juges. J'imagine que le ministre est au courant de ce problème. J'aimerais avoir son opinion sur cette question. Le ministre a reçu le mémoire de la conférence des juges qui date du 27 février, et soumis au ministre de la Justice le 12 mars 1981. C'est un problème assez important. M. le sous-ministre va répondre à cette question.

M. Bédard: Je demanderais à M. Jacoby de répondre, le mémoire ayant été reçu au mois de février.

Effectivement, nous avons reçu le mémoire au mois de février. Nous sommes en train d'analyser les recommandations du mémoire. J'ai fait récemment, à l'exécutif de la conférence des juges, un compte rendu de la situation de nos études actuellement. Je pense que nous serons en mesure de réagir véritablement aux recommandations du mémoire d'ici environ un mois et demi ou deux mois. À la suite de cela, nous entendons discuter avec la conférence des juges de façon que, s'il y a des modifications législatives à apporter éventuellement, celles-ci puissent être faites à l'automne de cette année.

M. Marx: Qu'est-ce que vous entendez faire, M. le ministre? Est-ce que vous avez l'intention de légiférer pour régulariser cette situation?

M. Bédard: Si nous donnons suite aux recommandations ou aux représentations faites par les juges, il y aura naturellement nécessité avant de légiférer, tel que vous l'a dit tout à l'heure, Me Jacoby, je pense qui y aura avantage à faire l'analyse en profondeur de manière que cette législation réponde vraiment aux difficultés exprimées ou aux inquiétudes exprimées par les membres de la Législature.

M. Marx: Oui, parce que le problème soulevé par les juges n'est pas un problème tellement difficile à résoudre. Je pense que cela prendra une étude d'un mois, de deux mois, non pas une étude d'un an, de deux ans pour ne pas que les juges restent dans l'insécurité. Je trouve qu'il y a une situation d'injustice parfois, si on comprend qu'ils n'ont pas d'immunité quand ils rendent des jugements. Je pense que c'est primordial, si on veut avoir le respect de la justice, que les juges bénéficient d'une certaine immunité.

M. Bédard: II me semble qu'en termes de sécurité, il est nécessaire que cette immunité soit très étanche de manière que personne ne soit insécurisé, le juqe ayant à rendre des jugements de par sa tâche. Il n'est pas question, comme vous l'avez dit, comme vous l'avez souhaité, d'une longue étude, parce que, d'ici l'automne, nous pourrons agir normalement.

M. Marx: Le ministre peut-il prendre l'engagement de faire quelque chose durant la prochaine session?

M. Bédard: De vous informer très bien de ce que nous ferons.

M. Marx: Non pas de m'informer, de faire quelque chose? On ne veut pas revenir l'an prochain sans avoir l'étude et tout cela. II faut prendre des engaqements, non pas faire des promesses.

M. Bédard: Je sais que j'ai affaire à un nouveau critique.

M. Marx: Non.

M. Bédard: II a sa manière de procéder, sa manière de faire son travail. À moins qu'il ne me connaisse pas, je tiens à lui dire, dès le début de l'étude des crédits, que je ne suis pas une machine a enregistrer des dates pour produire des choses et des législations. Les législations pour moi, c'est quelque chose de très important. Qu'on y mette de la réflexion, je pense que cela va de soi. Je pense que cette manière de procéder est encore la plus rapide et la plus efficace, parce que, si vous regardez le nombre de législations faites, mises au point par le ministère de la Justice, depuis trois ou quatre ans, vous serez en mesure de réaliser rapidement qu'il y a là un volume beaucoup plus impressionnant que tout ce qui a précédé auparavant, tant en qualité qu'en quantité.

M. Marx: M. le ministre a oublié que j'ai étudié les crédits avec lui aussi l'an dernier.

M. Bédard: Je ne suis pas un encanteur public, je ne commencerai pas à donner des dates, des ceci, des cela.

M. Marx: Non, je ne veux pas qu'on donne des dates, mais je pense que c'est le moment de donner des assurances de faire quelque chose d'ici la fin de l'année.

M. Rivest: Avez-vous décidé?

M. Marx: Le ministre peut dire qu'il va faire quelque chose dans n'importe quel domaine. S'il ne donne pas de date, cela peut être cette année, l'an prochain, à la fin du siècle, s'il est encore ministre de la Justice.

M. Bédard: Cela se peut qu'à la fin du siècle on le soit encore, mais cela ne m'intéresse pas à ce point.

M. Marx: Peut-être qu'il se garde des programmes pour la fin du siècle. D'accord.

Le Président (M. Desbiens): Le programme 1 est-il adopté?

M. Rivest: C'est sur les juges.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Oui, je voudrais demander au ministre s'il a renouvelé les mises en garde qu'il a données contre certains de ses collègues qui se permettaient allègrement de commenter les décisions judiciaires et de tenir des propos qui, à l'égard du système judiciaire, relevaient d'une conception tout à fait politique de l'administration de la justice. Les recommandations, les commentaires formulés par le juge Deschênes sont-ils maintenant devenus une conviction profonde du ministre de la Justice? En particulier, encore récemment, le message inaugural du premier ministre parlant de la décision des juges de la Cour suprême au sujet de la constitutionnalité, d'abord préjugeant de la décision des juges de la Cour suprême, mais, néanmoins, il se permettait de dire: On sait bien que les juges ne sont pas nommés, sont élus, commençant déjà à discréditer le jugement de la Cour suprême. Ce genre d'attitude, avez-vous l'intention de maintenir le principe de l'indépendance...

M. Bédard: Premièrement...

M. Rivest: Le juge Deschênes vous a adressé des recommandations. On en a parlé l'an passé. Avez-vous fait quelque chose là-dessus?

M. Bédard: Le fait que le juge Deschênes nous ait adressé certaines représentations et le fait de les interpréter d'une façon aussi échevelée que le fait le député de Jean-Talon, ce sont deux choses. Je pense que tout est rentré dans l'ordre dans ce domaine et que pas plus sous notre gouvernement que sous d'autres gouvernements...

M. Rivest: Non, ce n'est pas de votre gouvernement qu'il s'agit.

M. Rédard: Je pense qu'il est tout à fait normal...

M. Rivest: Le juge en chef n'a jamais fait de commentaires.

M. Bédard: II ne faut pas exagérer non plus. Je pense qu'il est tout à fait normal qu'à un moment donné certaines remarques puissent être faites...

M. Rivest: Non, ce n'est pas normal.

M. Bédard: ...non pas à l'endroit des juges ou en leur qualité de juge mais à l'endroit de certains problèmes sociaux qui

peuvent être discutés, je crois que les précautions nécessaires sont maintenant le fait de tous les membres du Conseil des ministres, à l'effet de bien identifier la démarcation nécessaire pour que...

M. Rivest: Connaissant le lanqaqe du ministre, j'accepte les précautions nécessaires. Je comprends la périphrase, parce qu'avec le ministre, une phrase qui ne veut rien dire siqnifie quelque chose...

M. Bédard: ...c'est gentil, on voit que vous me connaissez bien.

M. Rivest: ...il dit que les précautions nécessaires ont été prises alors... Oui, je vous connais bien. Je veux que le ministre de la Justice, il me semble que cela convient et que c'est la conviction profonde et personnelle du ministre de la Justice de faire en sorte que, lorsqu'une décision judiciaire intervient, qu'elle plaise ou non au gouvernement, qui a été une partie, qu'on n'assiste pas aux commentaires qu'on a eus dans le passé et que les juges en chef, en particulier le juge Deschênes, ne soient pas obligés de faire l'intervention publique qu'il a jugé bon de faire. Il ne l'a pas fait d'une façon fortuite, il l'a fait parce qu'il y avait un problème et je sais que le ministre sur le plan personnel en est conscient et je lui réitère les préoccupations qu'on avait eues à l'Assemblée nationale à ce sujet.

M. Bédard: D'ailleurs, lors de ce débat à l'Assemblée nationale, j'avais très bien explicité mes préoccupations qu'il n'y ait pas d'ingérence de l'exécutif par rapport au judiciaire et vice versa, du judiciaire par rapport à l'exécutif et je pense qu'à partir du moment où la ligne de démarcation est bien respectée les problèmes sont...

M. Marx: Est-ce que le gouvernement est prêt à accepter sur le plan juridique la décision de la Cour suprême qu'on va bientôt avoir sur la question constitutionnelle?

M. Rivest: Ce serait malvenu de ne pas l'accepter, ce sont eux qui l'ont demandé.

M. Marx: Oui, mais il y a le premier ministre de Terre-Neuve qui a dit... Il y a le plan Peckford, je me demande si...

M. Bédard: S'il avait fallu que nous fassions la même déclaration que M. Peckford, je vois déjà les exclamations outrées qui seraient venues de l'autre côté de la Chambre...

M. Rivest: Tout à fait.

M. Bédard: ...présentement nous sommes devant la Cour suprême et nous attendons le juqement.

M. Marx: Donc, vous allez accepter le juqement tel quel, sur le plan juridique, sur le plan politique, c'est une autre question.

M. Rivest: II ne faut pas oublier que ce sont des juges non élus et nommés.

M. Bédard: Vous admettez que sur le plan politique, c'est autre chose, alors vous répondez à votre question en la posant.

M. Marx: Sur le plan juridique, le ministre va l'accepter, c'est cela?

M. Bédard: La responsabilité de rendre jugement appartient à la Cour suprême. Il est bien évident. À ce que je sache, c'est la dernière décision qui sera rendue, parce que les appels au Conseil privé sont maintenant d'ordre...

M. Marx: Vous allez accepter, vous n'allez pas demander un appel au Conseil privé, étant donné que c'est impossible.

M. Bédard: Vous savez comme moi que c'est de la dernière instance.

M. Marx: Je pense que ce ne serait pas un grand aveu du ministre de la Justice de dire ouvertement: Je vais accepter sur le plan juridique la décision de la Cour suprême du Canada. Il y a des radicaux de l'autre côté qui vont vous poser des questions, mais je ne pense pas que ce serait...

M. Bédard: Je n'aime pas faire des débats avant que ce ne soit le temps de les faire. C'est tout.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 1 est adopté. Adopté. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Est-ce que le ministre...

M. Rivest: Qu'est-ce que les ministres font en tournée cette semaine?

M. Bédard: Ce que font les ministres en tournée cette semaine, ce n'est en aucune façon pour passer des remarques concernant les juges de la Cour suprême ou la Cour suprême elle-même comme institution, mais ces ministres sont en tournée pour expliquer les effets dévastateurs qu'aurait le coup de force fédéral s'il devait se concrétiser malgré l'objection, non seulement du Québec, mais de la plupart des provinces et j'imagine qu'en temps et lieu, si nous avions à formuler une autre objection à ce coup de force du fédéral, à l'Assemblée nationale, nous pourrons, à ce moment-là j'espère, compter sur le concours de l'Opposition qui

regrette déjà amèrement de ne pas s'être solidarisée avec nous lors du dernier débat sur cette question.

M. Marx: Vous n'avez pas voulu accepter nos amendements.

M. Bédard: C'étaient des amendements inconvenants, vous voyez.

M. Rivest: Le premier ministre était d'accord sauf que le caucus n'était pas d'accord. (17 heures)

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Le ministre a-t-il un projet pour réformer les tribunaux administratifs du Québec? Cela est souvent demandé. Je demande au ministre s'il a un projet, peut-être pas pour ce mois-ci, pour les mois à venir. On va laisser tout cela comme...

M. Bédard: Je pense que vous le savez. Il y a déjà du travail qui se fait au niveau du ministère de la Justice. Mais ce travail peut difficilement être rendu à terme si on ne règle pas le problème constitutionnel, qui fait que tout ce secteur de l'administration de la justice est dans un état d'insécurité.

M. Marx: ... dans un état d'insécurité.

M. Bédard: Non seulement lors des conférences fédérales-provinciales, mais lors des discussions constitutionnelles...

M. Marx:... de faire une réforme des tribunaux administratifs du Québec. Je ne vois pas l'insécurité.

M. Bédard: Vous devriez allumer votre lanterne parce que la légalité de plusieurs de ces tribunaux est mise en doute à l'heure actuelle. Prenez le Tribunal des transports; vous savez quelle décision a été rendue. Nous sommes obligés de légiférer en conséquence.

En ce qui a trait à la Régie du logement, un jugement vient d'être rendu qui n'est pas très sécurisant pour l'ensemble de ce secteur; quoique la situation du Québec, du point de vue juridique, peut être différente de celle de l'Ontario. Vous pouvez être convaincu que si les propriétaires s'avisent de contester la Régie québécoise du logement, du point de vue constitutionnel, le ministère de la Justice, le gouvernement, luttera juridiquement avec ténacité, parce que nous croyons que ce n'est pas la même situation juridique qu'en Ontario.

M. Marx: Mais je pense que cela ne devrait pas empêcher le ministre de faire une réforme des tribunaux administratifs du

Québec. Il y a vraiment deux problèmes. La Cour suprême a dit, en ce qui concerne la loi de l'Ontario, que l'Ontario ne peut pas donner certains pouvoirs à un tribunal administratif, parce qu'il faut que des décisions sur certaines questions soient rendues par des juges. C'est la question en litige qui fut décidée par la Cour suprême.

Mais il ne faut pas oublier que même si le Québec rapatrie un jour - pas rapatrier, parce qu'on n'a jamais eu ce pouvoir - mais supposons que le Québec a le pouvoir de nommer des juges à la Cour supérieure. Cela ne veut pas dire que ce serait possible pour le Québec d'établir des tribunaux administratifs et de leur donner n'importe quel pouvoir. On voit mal qu'il y ait un tribunal administratif sur le mariage et que ce soit ce tribunal qui décide des questions du mariage.

Tout cela pour dire que ce n'est pas le problème constitutionnel qui empêche le ministre de faire quoi que ce soit, à mon avis. C'est parce que vous n'avez pas la volonté politique de faire la réforme maintenant.

M. Bédard: Vous pouvez l'affirmer si cela vous fait plaisir, mais je vous dis honnêtement que ce n'est pas le cas. Plusieurs, même parmi ceux m'ont précédé, ont eu cette préoccupation d'une réforme des tribunaux administratifs et je crois que la volonté y était. Mais c'est justement en approfondissant la situation qu'on se rend compte jusqu'à quel point ce n'est pas par une réforme administrative qu'on va régler le problème constitutionnel. Je voudrais que vous soyiez conscient de cela.

On parlait tout à l'heure du Tribunal des transports dont la sécurité juridique est plus que douteuse. J'évoquais aussi la décision concernant la Régie du logement, une autre décision concernant l'Office des professions du Québec, qui sont toutes à l'effet qu'il y a une...

M. Marx: La dernière décision n'a pas remis en cause la compétence de l'Office des professions.

M. Bédard: Peut-être que le représentant de l'Opposition se sent plus informé que l'ensemble de tous les premiers ministres et, de tous les ministres de la Justice de toutes les provinces, puisque lors des discussions constitutionnelles, toutes les provinces, à une exception près, étaient d'avis que la manière de trouver une solution était dans le sens de permettre aux provinces de nommer des juges de la Cour provinciale, dans le sens de faire les modifications nécessaires à l'article 96 -parce qu'on sait que tout le problème réside à l'article 96, ce sont les pouvoirs qui sont donnés au juge qui y sont déterminés - c'est

vraiment une décision, au point de vue juridique, fondamentale à prendre avant de s'orienter pour la mise en place d'une réforme, mais je suis d'accord avec vous...

M. Marx: Je vous ai donné des raisons pour vous démontrer que même si l'on a le pouvoir de nommer ses juges, on va avoir encore des problèmes en ce qui concerne les compétences des tribunaux administratifs. M. le ministre, je ne veux pas insister sur cela, il y a toujours la facilité de blâmer le fédéral ou la constitution pour tous les malheurs du Québec. Je pense vraiment qu'il y a la volonté politique de faire des réformes demandées entre autres par le barreau, je pense que l'on pourra les faire. Le barreau a demandé certaines réformes, je pense que cela serait injuste de dire que les membres du barreau, le comité du barreau n'a pas vu tous les problèmes constitutionnels et ainsi de suite. Je pense que c'est une excuse que vous nous donnez; j'accepte l'excuse pour ne pas faire telle et telle chose, mais pour moi c'est une question de volonté politique que vous n'avez pas dans ce dossier.

M. Bédard: M. le Président, mon collègue peut affirmer tant qu'il le voudra que c'est une question de volonté politique, mais il ne m'a pas prouvé qu'il a suffisamment d'information sur le sujet pour soutenir qu'il n'y a pas là fondamentalement un problème constitutionnel, parce qu'il est là. Comment procéder à une réforme globale de nos tribunaux administratifs alors que leur existence même fait l'objet de discussions devant les tribunaux et que les décisions sont loin d'aller dans le sens d'une sécurité juridique de nos tribunaux administratifs. Faut être logique et conscient que certaines réformes administratives soient faites, d'accord, et d'ailleurs dès l'automne il y aura un travail qui sera fait dans ce sens-là pour au moins améliorer ce qui existe déjà.

M. Marx: Cela a pris vingt minutes pour avoir la ....

M. Bédard: Faut savoir ce que l'on demande. Vous voyez c'est là l'importance de savoir poser la bonne question. Si vous m'aviez demandé des améliorations à ce qui existe déjà, d'accord.

M. Marx: Est-ce que ce serait des améliorations qui seraient des qains de réforme?

M. Rivest: Pour l'automne.

M. Bédard: Je n'aime pas qualifier ce que je fais de réforme, mais une chose est certaine, il y a sûrement des améliorations qui peuvent être apportées.

M. Rivest: C'est quoi cela?

M. Bédard: Nos fonctionnaires du ministère de la Justice sont là-dessus présentement.

M. Rivest: C'est quoi concrètement?

M. Bédard: Nos fonctionnaires du ministère de la Justice...

M. Marx: C'est quoi?

M. Rivest: Quelles améliorations? Les euphémismes du ministre sont devenus des améliorations. Je sais que vous voulez tout améliorer, mais c'est quoi que vous envisagez sur le plan administratif, un, deux, trois, quatre.

M. Bédard: Exactement.

M. Marx: C'est le sous-ministre qui va répondre.

M. Bédard: Un, deux, trois, quatre c'est peut-être beaucoup, mais...

Il a la même réaction que moi, vous l'avez remarqué parce que vos questions ne sont pas sérieuses.

M. Marx: On aimerait savoir si c'est vous le sous-ministre de l'an prochain quand on va lire le journal des Débats?

Le Président (M. Desbiens): Au nom du ministre.

M. Bédard: Pour ce qui est des orqanismes quasi judiciaires à part la question constitutionnelle, c'est certain que nous sommes en train de réévaluer différentes propositions qui ont été faites par le passé dont notamment parmi les hypothèses un regroupement du contentieux administratif au niveau d'une chambre spécialisée, proposition qui avait été faite en 1975 dans le livre blanc de M. Choquette, cela c'est une possibilité. Il y a certains regroupements de nature administrative qui peuvent être faits. Par ailleurs, il y a des éléments qui causent certains problèmes devant les tribunaux administratifs, le fait d'une part que plusieurs tribunaux administratifs n'ont pas de règle de procédure ou de rèqle de pratique. Lorsque dans certains cas ces tribunaux administratifs possèdent des règles de pratique et de procédure, on a constaté qu'il n'y avait pas nécessairement uniformité dans les règles de pratigue et de procédure, ce qui peut causer des désaqréments tant pour les procureurs au dossier que pour les justiciables.

Il est certain qu'indépendamment de la question constitutionnelle, on pouvait envisager l'élaboration d'un code de

procédures administratives de base auquel pourrait ajouter éventuellement chacun des tribunaux en fonction de la spécificité qui leur est propre, et cela c'est une étude qui est en marche actuellement et qui devrait, normalement si tout va bien malgré les compressions d'effectifs et de budget, déboucher dans le courant de l'année ou en 1982.

M. Marx: J'ai l'impression ici aujourd'hui que le ministère héberge une université, une faculté de droit. On fait des études sur tout. Éventuellement on va avoir des études et peut-être que d'ici quelques années on va même avoir des projets de loi. Je comprends, nous avons une autre réponse.

M. Bédard: Sauf que je me rends compte que, du côté de l'Opposition, vous n'approfondissez pas tellement les problèmes et vous faites des demandes avant de savoir ce que ça veut dire...

M. Marx: M. le ministre...

M. Bédard: Je vous dis... Bien, laissez-nous parler. Tout à l'heure, contrairement à ce que tous les experts au Québec disent, vous prétendiez que du point de vue constitutionnel il n'y a pas de problème fondamental concernant la revision de l'article 96 alors que c'est le noeud même du problème. Je pense que mes représentations depuis quatre ou cinq ans, au niveau des conférences fédérales-provinciales, ont justement été de clarifier une fois pour toutes l'article 96. Qu'on y apporte les modifications nécessaires. Je pense que, grâce à cette insistance durant trois ou quatre ans, le Québec a fait du chemin. Quand j'en ai parlé dans les premières conférences fédérales-provinciales, le Québec était seul à parler de la possibilité pour les provinces de nommer les juges des Cours supérieures, alors que maintenant lors des dernières conférences constitutionnelles, cette demande faisait presque l'unanimité des provinces.

M. Marx: Oui. Mais, M. le ministre, je ne peux pas prendre cette réponse comme une réponse sérieuse. Je vais vous dire pourquoi. Depuis 1867 on est pris avec l'article 96. Le premier ministre de la Justice au Québec aurait pu dire: Je ne peux rien faire en matière de tribunaux administratifs parce qu'on est poignés avec l'article 96. Depuis 1867, est-ce qu'on a légiféré dans ce domaine?

M. Bédard: C'est pas vrai ce que vous dites là.

M. Marx: Bien, c'est vrai.

M. Bédard: Non, parce qu'au moment où les tribunaux...

M. Marx: Parce que l'article 96 est dans la constitution depuis son adoption.

M. Bédard: Sauf qu'au moment où les tribunaux administratifs ont été mis en place, il n'y avait pas de discussion concernant l'article 96.

M. Marx: Bien oui.

M. Bédard: Et ça ne posait pas de problèmes.

M. Marx: La première décision était...dans quel arrêt? J'ai vu l'arrêt de John Deere ... en Saskatchewan, l'arrêt où on a décidé que les provinces peuvent établir des tribunaux administratifs de travail.

M. Rivest: C'était dans les années quarante.

M. Marx: Non, avant ça, peut-être les années vingt. L'idée, c'est que...

M. Rivest: Informez-vous!

M. Marx: ...on est poigné avec cet article 96 depuis la Confédération. Je ne veux pas faire un débat juridique, mais on est pris avec cet article 96 depuis la Confédération et on a fait beaucoup de progrès, des progrès énormes en ce qui concerne l'établissement des tribunaux administratifs. Parce que c'est essentiel qu'on ait des tribunaux administratifs, sinon le système ne fonctionnerait pas. Tout ce que je veux dire, en terminant, c'est que le ministre, à chaque question, pourrait bien répondre, et c'est son droit, qu'on est en train de faire des études. C'est son droit, peut-être qu'il fait des études. Ça peut être des études de deux pages; on a déjà demandé une étude dans cette commission ou dans une autre commission et on a eu une espèce d'étude de trois pages d'un bureau d'avocats qui n'étaient pas très forts. J'ai déjà eu des études de votre ministère, cela a pris peut-être cinq ou six semaines ou deux mois pour les avoir. Quand je les ai reçues, c'étaient des affirmations de trois pages. Ce n'est pas quelque chose de sérieux, mais c'est ca. Donc, on peut répondre à chaque question: On fait des études.

M. Bédard: Ce que vous dites n'est pas plus sérieux.

M. Marx: Je vais vous montrer l'étude, M. le ministre.

M. Bédard: Bien oui, puis?

M. Marx: Ce n'était pas une étude, c'était une lettre de trois pages pour dire oui.

M. Bédard: Une étude n'est pas nécessairement plus concluante narce qu'elle a cinquante pages au lieu de trois. Si un problème peut se résoudre en trois pages...

M. Marx: Quand elle a trois pages et ne contient rien, ce n'est pas mon opinion personnelle.

M. Bédard: Bien oui, mais c'est votre opinion personnelle. Je la respecte mais...

M. Marx: On va donner ca à n'importe quel juriste, M. le ministre, et si guelqu'un nous dit que c'est une étude sérieuse, je vais m'excuser.

M. Bédard: On ne sait même pas de quoi vous parlez. Vous parlez d'une étude... Soyez donc précis!

M. Marx: Vous pouvez répondre que vous êtes en train de faire des études à tout ce que je peux dire et on va accepter ca comme réponse.

M. Bédard: Comme vous pouvez dire n'importe quoi dans l'Opposition et demander n'importe quel projet de loi. Sauf une chose, c'est que, lorsqu'on dépose un projet de loi, j'ai toujours remarqué qu'une des premières questions de l'Oppositon était de nous demander si les études appropriées avaient été faites. C'est un souvenir que j'ai.

M. Rivest: Vous avez remarqué ça? Très perspicace.

M. Bédard: Ce qui est tout à fait normal à part ca. Ce qui fait qu'en termes de prudence législative...

M. Marx: Je pense que j'ai posé mon argument, vous avez posé le vôtre, M. le ministre. (17 h 15)

M. Bédard: Oui, oui...

M. Marx: Ceux qui liront les débats, un jour, trouveront la vérité.

M. Bédard: Soyez juge de votre point, je n'ai pas de point à faire.

M. Rivest: Une dernière question au ministre de la Justice.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Sur la dimension constitutionnelle. C'est vrai que cela a été évoqué, vous n'avez pas inventé le Pérou, parce qu'en 1971, cela était déjà évoqué à la conférence.

M. Bédard: Mais vous êtes d'accord avec moi que le contentieux constitutionnel existe depuis cinq ans.

M. Rivest: Oui, je suis d'accord, il existe...

M. Marx: Depuis les débuts de la...

M. Rivest: Vous irez voir à la faculté de droit, il y a une excellente étude par Jean-Claude Rivest...

M. Bédard: Que j'ai déjà vue.

M. Rivest: ...au niveau de la maîtrise. C'est une étude qui existe, qui a plus que trois pages.

M. Marx: La date, la date?

M. Bédard: Vous vous prenez un peu trop pour d'autres, vous voyez quel résultat cela donne.

M. Rivest: Non, parce que le ministre Jacques-Yvan Morin, à l'époque, m'avait très bien noté là-dessus, un homme de juqement.

M. Bédard: C'est d'ailleurs pour cela qu'il est au pouvoir, il a été réélu.

M. Rivest: Cela a été évoqué durant les conférences constitutionnelles, j'en conviens, lors des vacances, à la saison estivale du ministre, l'été dernier. Comment se fait-il que ce problème qui existe n'a pas été retenu parmi les douze sujets? Cela a tombé complètement à un moment donné, c'est-à-dire qu'on ne l'a pas ramené, malgré qu'il y a eu un consensus.

M. Bédard: C'est-à-dire qu'il y a eu un consensus au niveau des provinces, sauf peut-être une, mais l'opposition à cette demande est venue du fédéral qui, tout en reconnaissant qu'on avait des difficultés, qu'il y avait vraiment des difficultés pour les provinces concernant la mise en place des tribunaux administratifs, étant donné le contexte juridique, les porte-parole du fédéral n'ont quand même pas cru bon de s'impliquer dans le sens de donner suite à la demande qui a été faite par les provinces. Quand je vois le député de D'Arcy McGee dire qu'il n'y a pas de problème juridique au niveau de la mise en place des tribunaux administratifs, le ministre fédéral de la Justice, M. Chrétien, reconnaissait lui-même les difficultés et c'est justement pour les régler que les provinces s'étaient mises d'accord pour demander un amendement à

l'article 96 qui aurait réglé le problème.

M. Marx: Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de problème en vertu de l'article 96.

M. Bédard: Alors, je comprends.

M. Marx: Tout ce que j'ai dit, c'est que ce ne sera pas nécessaire d'attendre un amendement à la constitution afin de faire quoi que ce soit et vous savez bien que j'ai raison sur ce point.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bédard: ...nous n'avons pas entendu des amendements à l'article 96 avant d'y aller, même de la mise en place de certains tribunaux administratifs quasi judiciaires, je pense à la protection du territoire agricole. Nous l'avons fait parce que nous croyons que c'est une nécessité. Je pourrais faire le même raisonnement pour plusieurs autres tribunaux administratifs. Tout ce que je veux dire, je pense que le député de D'Arcy McGee en conviendra avec moi, c'est qu'à la sécurité juridique de l'ensemble de ces tribunaux administratifs, il y aurait une possibilité et il appartient au fédéral de clarifier la situation en donnant suite aux demandes des provinces.

M. Marx: Je répète une autre fois: même si on modifie la constitution, et ce sera aux provinces de nommer des juges des cours supérieures et des cours de comtés, on aurait un problème en ce qui concerne les compétences qu'on donne aux tribunaux administratifs. Tout ce que je veux dire, c'est qu'il ne faut pas que la réforme soit contremandée, parce qu'on attend de modifier la constitution. Cela peut prendre encore 75 ans avant qu'on touche à cet article. On va toucher au reste, il y a d'autres articles dans la constitution qui sont plus importants à modifier que l'article 96. Passons à autre chose, sinon on va se...

M. Bédard: On vous a indiqué tout à l'heure que justement, malgré le problème constitutionnel, nous n'hésiterions pas à approfondir le plus rapidement possible pour améliorer peut-être le fonctionnement de ceux qui existent, en tout cas, en ce qui a trait à la procédure, l'uniformisation de la procédure, d'autres éléments qui pourraient être apportés avec le temps, pour améliorer.

M. Rivest: On va améliorer.

M. Marx: On va poser la question l'an prochain pour voir si l'étude est préparée et disponible.

M. Bédard: J'aime ca vous voir réjouir d'avance comme ca.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 1 est adopté"?

M. Marx: II ne peut pas être... Adopté.

Soutien administratif à l'activité judiciaire

Le Président (M. Desbiens): Programme 1. Adopté. Programme 2. Soutien administratif à l'activité judiciaire. Est-ce que le programme 2 est adopté"?

M. Bédard: Je ne pense pas qu'il y ait des problèmes non plus. Programme 3.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 2 est adopté?

M. Rivest: C'est là-dessus, je pense, que le problème de mon collègue...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: J'en ai un très local, en passant... non, ce n'est pas ici. Pour la question des rôles, le ministre va nous dire qu'il va faire... La question des remises, c'est là-dedans, enfin, c'est toute l'administration de la justice. Je voudrais que le ministre, à part nous dire qu'il va faire des améliorations, comme il l'a dit dans son texte - je conçois qu'il y a une volonté, c'est un éternel problème, remarquez j'aimerais que le ministre nous dise très concrètement ce qu'il va faire à ce sujet au cours de la prochaine année. Est-ce qu'il y a des choses? Est-ce qu'il va parler à des gens? Est-ce qu'il va leur confier un mandat? Est-ce qu'il a de l'argent - c'est important - pour faire des choses? Qu'est-ce qu'il va faire? Je sais qu'il va me dire qu'il va consulter le barreau qui fait des études. Concrètement, dans l'année - on vous vote des crédits - qu'est-ce que vous allez faire pour répondre à la préoccupation que vous a signalée à nouveau le député de Chapleau?

M. Bédard: J'ai évoqué tout à l'heure certaines études qui ont été faites par le barreau et le travail qui avait été fait au ministère. Je demanderais d'une façon spéciale au sous-ministre chargé de ce secteur de donner le plus de renseignements possibles aux membres de la commission.

M. Rivest: Juste avant - je ne doute pas qu'avec le sous-ministre ce sera concret - l'an dernier, lors de l'étude des crédits, le ministre de la Justice nous avait donné des

délais. Il avait dit: En Cour d'appel, en moyenne, en 1980, au civil, cela prend quatre mois; au criminel, un mois...

M. Bédard: Si vous voulez arrêter de parler, on va vous donner...

M. Rivest: Je ne veux pas tout vous répéter. Je voudrais d'abord que vous nous indiquiez dans un premier temps si vous avez les précisions que vous nous aviez apportées l'an passé, et surtout que vous nous indiquiez quelle est l'amélioration. Si, par exemple, la moyenne, à la Cour supérieure à Montréal, se situait à neuf mois, j'imagine que l'excellente action et le travail du ministre au cours de l'année ont fait que c'est devenu huit mois, ou bien vous n'êtes pas en mesure de le dire cette année. Donc, vous avez laissé le problème complètement en blanc.

M. Bédard: Soyez sérieux! Les élections viennent d'avoir lieu. N'essayez pas de faire des points à tout moment.

M. Rivest: Vous nous avez donné des chiffres. Je ne fais pas de points.

M. Bédard: Vous savez très bien que le problème est très complexe, que depuis des années, que ce soit par l'action du ministre ou sans l'action du ministre, les délais deviennent beaucoup plus expéditifs. II y a des périodes où, que ce soit le travail qu'on voudra fait par le ministre de quelque parti politique que ce soit, les délais deviennent beaucoup plus longs. Donc, cela peut représenter au bout du compte des injustices envers les citoyens. C'est clair que c'est un problème qui préoccupe continuellement non seulement l'Opposition, mais le ministère de la Justice. Si mon collègue veut nous laisser la possibilité de le faire, nous allons lui donner l'essentiel des renseignements qui pourraient nous permettre certaines comparaisons avec le passé, mais ce qui est important, surtout en fonction de l'avenir, c'est de savoir quels gestes précis on pourra poser pour essayer d'améliorer la situation.

Le Président (M. Desbiens): Au nom du ministre?

M. Bédard: Oui. Pour avoir une vue d'ensemble de la situation, je pourrais rappeler les délais d'audition, un peu comme l'année dernière. À la Cour d'appel, présentement, ils varient de deux à cinq mois; à la Cour supérieure, c'est peut-être à cet endroit qu'on trouve les délais les plus longs; à plusieurs endroits, les délais sont d'environ dix mois.

Il y aurait peut-être lieu de signaler le cas de Montréal, c'est peut-être le cas le plus difficile. Je peux vous donner les délais; à Montréal - il y a une nomenclature un peu différente de ce qu'on retrouve dans d'autres districts judiciaires - ce qu'on appelle les causes urgentes, c'est sept mois; les causes ordinaires - c'est peut-être un peu technique, mais, enfin, il faut les prendre comme elles sont - les causes d'un jour sont de vingt-six mois, les causes urgentes de deux jours sont de quatorze mois, les causes ordinaires de deux jours sont de soixante-treize mois. Là-dessus, le barreau a fait une évaluation avec l'administration de la justice sur ces délais. En matière familiale, ils sont actuellement de onze mois. Les divorces par défaut sont de quatre mois; je pense qu'il y a lieu de souligner qu'il y a délais qui sont quand même relativement courts, quatre mois pour un divorce.

M. Blank: C'était le mois passé. C'est encore six mois maintenant.

Une voix: Cela empire au lieu de s'améliorer.

M. Bédard: Comme vous pouvez le voir, cela évolue d'un mois à l'autre...

Il y a énormément de fluctuations...

Dans huit mois, peut-être que cela sera revenu à deux mois et on ne saura pas exactement pourquoi.

Je m'excuse, les délais que je viens de donner datent de la fin du mois de mai. Il peut arriver que certains divorces, pour d'autres raisons que je n'ai pas ici évidemment, ce sont des moyennes - puissent prendre six mois, mais il reste que les délais qui ont été compilés à la fin du mois étaient de quatre mois en matière de divorce par défaut.

M. Kehoe: C'est justement la question que je veux poser.

M. Bédard: Est-ce qu'on peut lui permettre de terminer?

M. Kehoe: Je pensais qu'il avait terminé, je m'excuse.

Le Président (M. Desbiens): Oui, d'accord.

M. Bédard: Ce sont les délais pour la région de Montréal. Évidemment, il y a toujours Montréal qui pointe. Dans d'autres endroits, les délais sont quand même relativement plus courts que cela. Je note, par exemple, dans l'ensemble de la province qu'à la Cour provinciale les délais sont de huit à quinze mois. Évidemment, ils sont un peu plus longs de ce temps-ci à cause des vacances d'été. À la Cour provinciale, les délais aux petites créances sont relativement courts. Cela n'augmente pas plus de trois mois, mais peut-être qu'à la fin de l'été ils se prolongent de quatre ou cinq mois. À la

Cour des sessions de la paix, à Montréal, ils sont relativement courts. À la Cour criminelle, la Cour supérieure de Montréal, ils sont également relativement courts. Ils sont à l'espace d'un terme d'assise et je pense que ce sont des délais tout à fait acceptables. Évidemment, la situation la plus difficile est, comme on le mentionnait tantôt, à Montréal où le barreau s'est, entre autres, posé des questions sur la situation en matière des causes de deux jours et plus où il y a des délais quand même assez longs. Ce qui a été fait jusqu'à maintenant dans ce dossier, c'est une évaluation avec le barreau pour mettre sur pied - je pense que c'est une mesure bien concrète - un qroupe de juges qui s'occuperaient spécialement des causes de deux jours, comme il a été fait pour ce qu'on a appelé les causes de dix jours et plus. Je pense que l'expérience à Montréal et à Québec a donné des résultats quand même intéressants.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: La réponse donnée par le sous-ministre, c'est qu'il y a encore des études ou qu'il y a encore un comité qui a été formé pour régler le problème. Cela fait vingt ans que j'entends la même réponse du ministère de la Justice, qu'un autre comité a été formé. Concrètement... je viens de regarder les statistiques de l'année passée. Il n'y a aucun doute que la situation va en empirant. Elle est pire cette année que l'année passée. C'est rendu qu'il faut attendre 6 ans avant d'entendre une cause qui va durer deux jours et, dans d'autres cas, 26 mois pour une cause d'un jour à Montréal, et je suis absolument sûr que la situation est encore pire dans le district judiciaire de Hull. Je soutiens respectueusement qu'avec tout l'accès à la justice, l'humain et tout le reste, cela sort par la fenêtre vis-à-vis du citoyen qui attend 73 mois avant de faire entendre sa cause. Pendant ce temps, les témoins disparaissent ou oublient ce qui est arrivé; il y a un tas de choses qui se produisent. Alors, au bout du compte, quand la cause est entendue... à toutes fins utiles, il y a un règlement qui va survenir et la cause ne sera pas entendue.

Ce que je veux demander dans l'ensemble, c'est s'il y a quelque chose de concret fait par le ministère, autre que des études, autre que la formation de comités, pour tenter de réqler le problème.

M. Bédard: II y a quand même eu des choses qui ont été faites. Je pense, par exemple, à l'augmentation de la juridiction de la Cour provinciale de 3000 à 6000. Cela a guand même dégagé une partie des rôles, peut-être pas autant gu'on le voudrait, parce que l'inflation joue dans ce domaine. Il y a eu également l'élimination des causes sur les accidents d'automobile qui suscitaient des procès extrêmement longs et qui a tout de même dégagé. Ce qu'on peut dire, c'est que ce serait pire si...

M. Kehoe: Mais cela a empiré par la suite. La situation est encore plus sombre cette année.

M. Bédard: Le barreau le remarque comme vous et il est en mesure...

M. Kehoe: On ne parle pas au barreau, on parle au ministre de la Justice pour le moment. Quelle mesure prévoit...

M. Bédard: Si on n'est plus capable de vous donner le commencement d'une réponse sans que vous fassiez des remarques...

M. Kehoe: Arrêtez donc, répondez!

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Rivest: Vous ne pouvez pas gagner sur tous les plans, ce n'est pas bon la situation, que voulez-vous!

M. Bédard: C'est clair...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivest: Admettez-le et dites-nous ce que vous allez faire. C'est pourri comme situation. C'est cela qu'on vous dit.

M. Bédard: On vous a déjà dit qu'il y a des choses qui ont été faites. Quand j'ai fait adopter le projet de loi dans le sens d'augmenter la juridication de la Cour provinciale de 3000 à 6000, c'était justement avec cette préoccupation de diminuer les délais...

M. Kehoe: Mais cela n'a pas aidé. (17 h 30)

M. Bédard: ... de la même façon que, présentement, on essaie de voir si, au niveau de la communication de la preuve, il ne pourrait pas y avoir plus de faits que jusqu'à maintenant. Cela dépend aussi en grande partie, vous en conviendrez avec moi, des avocats et des juges et de l'ensemble de l'appareil administratif au niveau de la justice. Prenez par exemple le domaine criminel. Nous y avons poussé sur la communication de la preuve. Je pense que c'est un élément qui a fait que les délais sont très raccourcis, on est à même de le constater. Ce n'est pas tout à fait, j'en conviens, la même chose concernant le civil, cela peut être plus difficilement fait...

M. Kehoe: Justement, M. le ministre, d'année en année, la situation empire. Vous faites des changements, vous en avez mentionné quelques-uns, qui sont un genre de "bandage approach", mais de là à dire des programmes concrets qui tenteraient de régler des problèmes, c'est à cela que je veux en venir. Je sais que le problème est sérieux et complexe, mais cela n'empêche pas que les généralités que vous donnez ne répondent pas aux questions.

M. Bédard: Je pense que vous devez être conscient que tout ce que l'on peut faire au niveau du ministère de la Justice, demande nécessairement la collaboration du barreau, de la magistrature.

M. Kehoe: Je pense que vous l'avez.

M. Bédard: ...je crois que nous l'avons. Nous travaillons d'arrache-pied ensemble pour voir jusqu'à quel point on ne pourrait pas améliorer la situation mais on se rend compte que le problème est beaucoup plus complexe...

M. Kehoe: II n'y a pas de solution aux problèmes.

M. Bédard: ...qu'il ne peut paraître, qu'il n'y a pas de solution magique. Il y a des suggestions qu'on va peut-être approfondir un peu plus et je pense à une entre autre, à savoir diminuer la longueur des vacances judiciaires. Peut-être que c'est un élément qui pourrait être...

M. Rivest: Bon, est-ce qu'il y a une décision là-dessus.

M. Bédard: ...le rapport vient de nous être produit, soyez réalistes...

M. Rivest: Va-t-il y en avoir une dans l'année qui vient?

M. Bédard: ...oui, définitivement et d'autres suggestions de cet ordre là peuvent être évaluées.

M. Rivest: Bon! c'est au moins cela.

M. Blank: On n'a pas discuté tellement des causes contestées où le rôle des juges et des avocats peut jouer pour retarder les dossiers. Mais comment cela se fait-il que dans le domaine des jugements par défaut où il n'y a pas ce jeu-là - c'est-à-dire que je parle du jugement par défaut des cas simples comme ceux des comptes ou des chèques sans preuve - maintenant à Montréal, cela prend des mois pour avoir un jugement de protonotaire? Moi je me souviens quand j'ai commencé ma pratique, on faisait cela par écrit dans le plumitif; on avait cela le lendemain et, aujourd'hui, avec l'ordinateur, cela prend trois mois pour avoir un jugement par défaut. Si on prend une action devant la Régie des loyers, maintenant avec des baux commerciaux, cela prend trois, quatre, cinq mois avant d'avoir le jugement pour annuler le bail par défaut. Tout cela appartient au ministère de la Justice; il n'y a pas d'avocats dans ces jeux-là.

M. Bédard: Encore une fois, dans ce domaine, je connais très bien la situation à Montréal et les délais que vous donnez aujourd'hui en fin d'année judiciaire, ne seront pas ceux qu'on va connaître au mois de septembre pour une chose. On a constaté à la suite d'une étude avec le barreau, récemment, justement, que beaucoup de ces dossiers étaient retournés chez les avocats pour des irrégularités que je qualifierais d'embêtantes parce gue, dans le fond, ce sont strictement des pièces de procédure qui n'ont pas été rapportées par les avocats; ce sont souvent des documents imcomplets. On a calculé dans cela qu'il y avait rie 70% à 40% des dossiers qui revenaient parce qu'ils étaient imcomplets, et le barreau nous a demandé ce sur quoi on travaille - et je pense que c'est un projet précis - voulez-vous nous dire quelles sont vos exigences en matière de procédure de manière que tout le monde soit informé et qu'on puisse ensemble les corriger? Je sais qu'il y a un document de travail qui est en préparation actuellement et qui sera distribué à tous les avocats pour justement réduire... parce que ces officiers de justice, dont vous parlez, rendent à peu près 50 00o à 60 000 jugements par année, et si on les retourne à un avocat pour complément de dossier, il est évident que c'est long et finalement on réussit à reprendre deux, trois fois le dossier pour avoir un jugement et, pendant ce temps-là, tous les autres dossiers retardent et je crois gue cette mesure devrait nous apporter ries résultats à brève échéance de façon concrète. Si je peux ajouter une petite chose, récemment le juge Deschênes, à la Chambre de la famille, a inscrit sur les rôles une dizaine de mille causes. Ce sont des jugements rendus sur le banc par ries juges, mais qui ont occasionné chez nous les délais que l'on voit actuellement parce qu'il a fallu traiter ces dizaines de mille dossiers parce qu'ils n'étaient pas prévus.

M. Blank: Même après le jugement final du divorce, après les trois mois, on doit attendre trois mois de plus pour avoir le juqement signé.

M. Bédard: C'est cela. Dans ce domaine il y a eu une augmentation considérable de dossiers.

M. Blank: Je peux peut-être suggérer

de louer ou d'acheter un autre Xerox à Montréal. Pour avoir une copie du jugement certifié, cela prend trois semaines, seulement une copie du jugement. Même d'un dossier quelquefois, cela prend trois semaines. Ils mettent cela dans le Xerox et ils signent. C'est un manque de personnel ou un manque de machine? Je ne sais quoi.

M. Bédard: Je peux vous dire que c'était la situation il y a un mois et que présentement, cela prend 48 heures.

M. Blank: C'est maintenant 48 heures? Je vais vérifier cela.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Vous avez mentionné tantôt, M. le ministre, que vous prévoyez une étude en vue de raccourcir les vacances judiciaires pour une solution possible à l'encombrement du rôle. Concrètement, prévoyez-vous aussi le budget? Prévoyez-vous nommer plus de juges? Prévoyez-vous plus de locaux? Concrètement cette année, pas des études, pas des possibilités de comités conjoints avec le barreau; cela fait 20 ans qu'on entend parler de cela. On est à discuter du budget, actuellement, de cette année. Est-ce que vous prévoyez quelque chose dans votre budget pour tenter de régler le problème? Je trouve que c'est un problème majeur dans l'administration de la justice.

À toutes fins utiles, vous pourrez faire tous les beaux pamphlets, vous pourrez faire de la justice accessible aux citoyens, mais par contre, si cela prend 13 mois ou 26 mois pour faire entendre une cause, est-ce que la justice est vraiment là? C'est pour cela que je vous demande concrètement une réponse.

M. Bédard: Concrètement, si vous me demandez mon opinion à savoir si on règle le problème en nommant plus de juges, je vais vous dire catégoriquement non. On ne règle pas le problème.

L'an passé, les représentations de l'Opposition étaient à l'effet gu'on nommait trop de juqes ou qu'on ne nommait pas des juges avec suffisamment de critères d'évaluation. Cette année, vous arrivez avec une autre version.

Ce que je veux vous dire, à prime abord, c'est que quelqu'un qui regarde la situation peut penser que tous les problèmes des délais vont se régler en nommant plus de juges. Ce n'est pas le cas, vous le savez, je pense.

M. Kehoe: Je suis d'accord avec vous.

M. Bédard: Et même le barreau, dans l'étude qu'il a faite, conclut justement que ce n'est pas en nommant plus de juges qu'on va régler le problème, mais c'est par une collaboration plus étroite, une plus qrande bonne volonté de la part des avocats au niveau des délais. Prenez simplement les délais de remise: les demandes de remise sont beaucoup trop nombreuses. Ceci représente des délais accrus au bout de la ligne. Il y aurait peut-être une qrande collaboration à apporter entre juges et avocats, une possibilité de restreindre le nombre de remises et accélérer les délais.

M. Kehoe: Vous ne prévoyez pas de montants supplémentaires dans le budqet pour des locaux, pour des juges ou d'autres manières concrètes pour tenter de régler le problème. C'est encore la même chose. D'après vous, il faudrait que la solution soit trouvée parmi les avocats, les juges et...

M. Bédard: En collaboration avec le ministère de la Justice. Sincèrement, je ne crois pas que c'est en nommant plus de juges ou en améliorant des locaux qu'on va régler le problème des délais. Cela me semble assez évident de ce côté-là. À l'heure actuelle, vous êtes à même de le voir, tous les efforts sont orientés vers une consultation continuelle entre magistrature, barreau et ministère de la Justice, de manière à trouver les meilleures solutions possibles.

M. Kehoe: Cela n'avance à rien par exemple.

M. Bédard: Non. On vient de vous donner un exemple à la suite d'une question de votre collègue. C'est bien beau de dire qu'il n'y a rien qui avance, vous ne réglez pas la situation.

M. Kehoe: Le rôle est plus encombré que l'an passé, dans tous les districts.

M. Bédard: Ce que vous dit également le barreau: II faut tenir compte de la situation. Tout le monde le constate, c'est que de plus en plus les gens font valoir leurs droits. C'est une chose gue, depuis deux ans, on remarque d'une façon tout à fait spéciale. Peut-être à cause d'une meilleure information aux citoyens concernant leurs droits, à cause d'une meilleure accessibilité de la justice aux citoyens. C'est un avantaqe. D'un autre côté, cela apporte des problèmes qu'il va falloir essayer de résoudre le plus possible. On n'a pas de touches magiques, comme d'autres qui nous ont précédés ne l'avaient pas.

M. Rivest: Ce n'est pas personnel au ministre. Il prend tout pour des attaques personnelles. C'est un problème qui existait bien avant vous.

Le Président (M. Desbiens): M. le député He Marquette.

M. Bédard: C'est cela.

M. Rivest: On voudrait que vous ayez le mérite de l'avoir réglé. C'est cela qu'on veut.

M. Bédard: Ce que je veux vous dire, c'est que cela fait partie de nos priorités en termes de réflexion, mais faut quand même pas s'illusionner, je n'ai vraiment pas l'impression qu'on pourra régler le problème définitivement. On essaie d'améliorer la situation par exemple.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marquette.

M. Dauphin: M. le Président, si vous me le permettez, je vais vous parler un peu du Tribunal de la jeunesse, plus particulièrement dans la région de Kirkland où il y a un Tribunal de la jeunesse concernant les procès de délinquance, normalement c'est le lundi. Il y a à peu près 200 à 300 personnes dans la salle et seulement un juge, et souvent il faut y aller peut-être cinq, six fois, sept fois avant que cela passe. La dernière fois, il n'y avait pas de sténographe français, c'est constamment remis. Alors les parents naturellement se posent de sérieuses questions. Il n'y a plus d'avocats de pratique privée qui veulent y aller à cause de cela: perdre des lundis, perdre une dizaine de lundis comme cela en pratique privée, cela ne se fait plus.

M. Bédard: Est-ce que vous pourriez me permettre de prendre note de votre représentation, et avant la fin des crédits, je vous donnerai une réponse sur le problème particulier que vous évoquez

M. Dauphin: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le ministre, sur ce problème qui n'est pas de votre ressort personnel, mais tout le monde y va, le sous-ministre nous donne certaines mesures qui ont été prises, mais la difficulté est double. Vous faites de belles choses comme celles cela, c'est bien beau, mais ce que je veux dire au ministre - et je veux lui faire une demande précise - c'est le problème de l'accessibilité à la justice, les droits qu'on accorde aux citoyens. En pratique - on le constate, on a des avocats de pratique ici, ils vous le disent, et tout le monde vous le dit - ça prend des délais indus, et cela constitue, je ne sais pas si vous allez être d'accord avec moi, peut-être l'une des entraves majeures à l'idéal et à l'objectif que tout le monde a de l'accessibilité du citoyen à la justice, de l'humanisation, avec vos dépliants et vos discours...

M. Rédard: Je parlais même de l'injustice tout à l'heure, ce que cela peut représenter...

M. Rivest: Oui, c'est cela. Je suis d'accord avec cela. Mais chaque année, depuis peut-être les années soixante, où il y a eu beaucoup plus de droit, où le droit s'est développé, il y a toute la question des tribunaux administratifs; c'est un problème social qui existe et qui est fondamental. À ce sujet, tout le monde va collaborer: le Barreau, les juqes, les justiciables, etc. et l'administration également. Je pense que c'est le sens de la question de mes collègues. J'aimerais que le ministre de la Justice puisse dans les délais normaux de deux, trois ou quatre mois présenter à la population... Vous nous dites que vous consultez, le barreau, il est d'accord avec cela, il va présenter un mémoire, mais il me semble en tout cas, à moins que vous l'ayez et que vous puissiez le rendre public aujourd'hui - ce serait peut-être souhaitable, mais si vous ne l'avez pas, peu importe -présenter un plan d'action cohérent tenant compte de la complexité du problème, avec des objectifs précis, indiquant dans chacune des cours que le problème se présente de telle façon. Le ministère de la Justice a un proqramme - cela ne se réqlera pas dans un an, j'en conviens - de quatre ou cinq ans; enfin, peu importe, un programme cohérent de ce problème fondamental que toutes les administrations de la justice portent au Québec. Je sais que tous les intervenants font leur possible, les avocats, les fonctionnaires, etc. Chacun a sa part de responsabilité d'ailleurs là-dedans. Je pense qu'il y a seulement le ministre de la Justice qui peut exprimer cette volonté politique dans une déclaration publique, comme vous le faites, par exemple, sur la déréglementation, car il y a eu une intention manifeste du gouvernement d'essayer de réqler ce problème de la surréglementation de l'administration publique. Mais pour réqler ce problème du retard dans le processus judiciaire, il faut qu'on ait un document complet, un programme d'action, des budgets, du personnel, des moyens qui sont extrêmement variés - et le ministre l'a évoqué - et qu'on puisse l'apprécier et dire: Le ministère de la Justice est conscient de l'importance de ce problème et voici un document que le gouvernement s'enqage à réaliser en reqroupant les éléments.

Est-ce que ce type d'approche à ce problème ne serait pas, finalement, la réponse à ce que tout le monde essaie de faire valoir et que des statistiques,

forcément partielles et variables, qui nous sont fournies... Est-ce que le ministre comprend un peu ce que je veux avoir?

M. Bédard: D'accord. Ce type d'approche cadre définitivement avec la préoccupation que nous avons au niveau du ministère. Tout travail de consultation devant être fait sera fait et nous voulons aboutir, avant la fin de l'année, un plan d'action qui, les consultations ayant été faites, sera quand même connu du public et qu'on pourra évaluer. (17 h 45)

M. Kehoe: C'est quelque chose de concret.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le proqramme 2 est adopté? Adopté. Le proqramme 3 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Protection des droits et libertés de la personne

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Le proqramme 4 est-il adopté?

M. Marx: Non.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Au programme 4, j'ai été surpris, non, je n'ai pas été surpris. Je veux dire que mon collègue le député de Jean-Talon a été surpris cet après-midi quand vous avez présenté tous vos collaborateurs, M. le ministre, du fait qu'ils soient tous, sauf un, des hommes. Cela m'a aussi surpris qu'il n'y ait pas une femme qui puisse être sous-ministre ou sous-ministre adjoint. J'imagine qu'il y a beaucoup de femmes secrétaires dans les bureaux des sous-ministres, mais qu'on ne puisse pas trouver une femme pour être sous-ministre ou sous-ministre adjoint, ça me peine beaucoup. En me préparant pour les crédits, j'ai parcouru la liste des contractuels, des avocats qui ont reçu les uns des milliers de dollars, les autres des centaines de dollars. J'ai cherché le nom d'une femme. Quand j'en ai trouvé une, c'était un contrat de 35 $. Ceci n'est pas pour vous dire que vous n'avez pas un proqramme d'égalité des chances et tout ca, mais, dans les faits, c'est ca, et si on ne fait pas un effort très conscient, je pense qu'on aura le même problème d'ici cinq, dix ou quinze ans.

Parlant de la Charte des droits et libertés de la personne, le ministre doit être au courant que l'article 97 de la charte permet la discrimination contre les femmes en ce qui concerne les avantages sociaux. L'article 97 était au début un article transitoire, ça, c'était en 1975. Vous êtes ministre depuis cinq ans, ca vous a donné assez de temps pour faire des études et pour voir si c'était le temps de mettre les femmes sur un pied d'éqalité avec les hommes, oui ou non. Je pense que vous avez même eu des études et des rapports. Il y a le rapport Boutin, si vous vous souvenez. Vous avez la ou les recommandations de la Commission des droits de la personne pour abroqer l'article 97, en ce qui concerne les femmes.

L'autre jour, quand j'ai soulevé ce problème au salon bleu, la députée de Maisonneuve était d'accord avec moi pour qu'on fasse quelque chose dès cette semaine. J'imagine que la députée de Johnson serait d'accord avec moi pour qu'on fasse quelque chose dès ce soir. Je pense que le ministre peut nous dire qu'on va étudier la charte au mois de septembre ou octobre, on va penser, on va revoir, je vais demander à mon sous-ministre de répondre, je vais demander à un autre de faire une étude; je pense que c'est seulement du verbiage. Ce qu'on veut savoir maintenant, c'est pourquoi le ministre a attendu cinq ans et après cinq ans, il n'a rien fait en ce qui concerne cet article 97 qui était supposé être un article transitoire. Quand j'ai dit que le ministre avait néqliqé de protéger les droits des femmes, j'ai voulu parler de cette question, j'ai soulevé d'autres problèmes aussi, mais j'ai surtout parlé de cette question, parce que je trouve ca injuste. Beaucoup d'organisations de femmes ont fait des pressions sur les partis politiques et le Parti libéral a fait une proposition pour abroger l'article 97 en ce gui concerne les femmes, dans son programme électoral.

M. le ministre pourrait peut-être nous dire ce qu'il entend faire.

M. Bédard: Je trouve toujours...

M. Marx: Non, pas victime, le ministre...

M. Bédard: Oui, mais là, gu'est-ce que vous voulez...

M. Marx: Non, non...

M. Bédard: ...voulez-vous me laisser répondre?

M. Marx: Je vais vous défendre devant mon collègue de Jean-Talon.

M. Bédard: Je n'ai pas besoin d'être défendu. Sauf que je suis toujours surpris de la manière démagogique avec laguelle le député de D'Arcy McGee aborde...

M. Rivest: Vous n'avez pas besoin de revenir chaque fois.

M. Marx: Ce n'est pas démagogique, je vous ai présenté des faits, des faits.

M. Bédard: Parce que la préoccupation...

M. Marx: Ce n'est pas démagogique, la démagogie...

M. Bédard: Allez-vous me laisser répondre? Allez-y, finissez votre intervention, on parlera après.

M. Marx: II ne faut pas m'accuser de démagogie.

M. Bédard: Je vais vous le prouver.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre. Vous avez la parole.

M. Marx: Je m'excuse, je n'ai pas voulu faire de la peine au ministre.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre, vous avez la parole.

M. Bédard: Vous avez terminé? Je dis, M. le Président, que je suis toujours un peu surpris de la manière démagogique avec laquelle le député de D'Arcy McGee aborde tous les problèmes. Par exemple, quand il dit qu'il n'y a pas d'efforts soutenus qui ont été faits au niveau gouvernemental pour assurer une plus grande présence des femmes dans les postes d'importance, je crois que ce n'est tout simplement pas vrai. On est à même de constater que, depuis 1976, on retrouve plus de femmes dans des postes d'importance, comme sous-ministres et que cela n'a jamais été le cas auparavant. Également, au ministère de la Fonction publique, au ministère de la Justice, des études avaient été faites concernant la représentation des femmes à différents postes, différents secteurs d'activité. On était à même de constater, il y a trois, quatre ou cinq ans, que cette présence était définitivement non suffisante et non représentative. Il y a du travail qui a été fait et je suis en mesure de produire un document avec des chiffres à l'appui, des statistiques à l'appui. Dans chacun des secteurs d'activité moins un, en ce qui a trait au ministère de la Justice, le pourcentage de présence des femmes, que ce soit au niveau de cadres, de gérance, de cadres professionnels également, la représentativité des femmes a augmenté en termes de pourcentage. C'est une préoccupation qu'on a continuellement au ministère de la Justice. Cela nous a amené à donner certaines directives pour faire des représentations au niveau de la structure, et dans les jurys de sélection, on trouve le moyen d'y insérer une femme, ce qui n'était pas le cas auparavant, de manière - je pense que cela commence un peu - que parmi les personnes qui ont à décider d'un poste à combler, les membres de ce jury, on s'assure que les femmes soient représentées. C'est pour cela qu'au ministère de la Justice...

M. Marx: Est-ce la réponse du ministre?

M. Bédard: C'est terminé. Au ministère de la Justice, dans la formation de tous les jurys concernant les postes de cadres, les postes de professionnels, etc., nous nous assurons de la présence d'une femme. Ceci a contribué à augmenter la représentativité...

M. Marx: Au niveau des jurys, comment peut-on s'assurer qu'il y ait des femmes? Ce serait enfreindre la Charte des droits et libertés de la personne, de choisir les femmes. Les femmes veulent être égales...

M. Bédard: Soyez logiques un peu avec vos propos.

M. Marx: On ne peut pas choisir des femmes pour un jury, ce serait à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la personne et de la Déclaration canadienne des droits. Ce serait nettement illégal, de toute façon.

M. Bédard: Je vous demande seulement d'être logique avec le but que vous poursuivez. Je vous dis qu'à la fonction publique, nous avons posé des gestes très précis, de manière qu'il y ait une augmentation de la représentativité des femmes. Les gestes que nous avons posés sont sûrement appropriés, puisque les statistiques se sont améliorées sous ce rapport.

Concernant les autres représentations faites pour l'amélioration de la Charte des droits et libertés de la personne, je crois que la décision d'aller en commission parlementaire, de revoir l'ensemble de la charte est appropriée dans les circonstances, parce nous avions l'intention, du point de vue gouvernemental - c'était déjà fait dans un cas - de procéder, en ce qui a trait au programme de...

Nous avions déjà déposé une loi concernant les programmes d'action positive.

M. Marx: Cela n'a pas été déposé durant cette session, cela l'a été lors de la dernière Législature. Cela n'a pas été déposé durant cette session, ce n'était pas dans le discours inaugural du premier ministre.

M. Bédard: Oui, mais vous en êtes sur les détails.

M. Marx: M. le ministre, vous n'avez

pas déposé ce projet de loi...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Bédard: Oui, mais laissez-moi terminer.

M. Marx: II a été déposé durant la dernière Législature.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À l'ordre!

M. Marx: II ne faut pas induire la commission en erreur.

M. Bédard: Non, mais, ne vous induisez pas en erreur et n'induisez pas les qens en erreur non plus. Nous ne l'avons pas déposé parce que, justement, nous voulons aller plus loin. C'est très clair. À partir du moment où on demande une commission parlementaire, dans mon esprit, c'est très clair qu'à la suite des représentations des qroupes, à la suite des représentations des membres de la Commission des droits de la personne, tout ceci aboutira à une loi qui ira beaucoup plus loin que celle que nous avions déposée concernant les programmes d'action positive. Concernant l'âge, je crois que cela ira de soi. D'ailleurs, certaines études avaient été faites par rapport à un projet de loi qui est présentement en deuxième lecture, au niveau de l'Assemblée nationale, en ce qui a trait à l'abolition de l'âge comme motif pour hâter la retraite. Je pense que c'est un élément important.

M. Marx: C'est retiré, M. le ministre, c'est retiré ce projet de loi.

M. Bédard: Non.

M. Marx: Oui, le projet de loi sur l'âqe de la retraite, c'est retiré, parce que ce sont des promesses électorales qu'on a faites et qu'on a retirées après cela.

M. Bédard: Soyez donc sérieux!

M. Marx: Non, mais c'est retiré effectivement.

M. Bédard: II n'est pas retiré. M. Marx: Mais ce sera fait.

M. Bédard: Le leader du gouvernement lui-même a annoncé...

M. Marx: Ce ne sera pas adopté à cette session, ce sera peut-être déposé à une session subséquente, à la prochaine session.

M. Bédard: M. le Président, quand cela fait l'affaire du député de d'Arcy McGee, il est très technique; quand cela ne fait pas son affaire, il argumente autrement. Il sait très bien qu'à partir du moment où le projet de loi concernant l'abolition de l'âge de la retraite concernant le travail, sera adopté en deuxième lecture - et j'espère que l'Opposition sera d'accord à l'occasion d'une nouvelle session qui aura lieu à l'automne -ce projet de loi sera réintroduit au stade où il est rendu présentement et il sera adopté avant le mois de décembre, à moins que l'Opposition y fasse obstacle, je ne crois Das que ce sera le cas.

M. Marx: Non, mais on va avoir une commission qui va étudier ce projet de loi à une autre session.

M. Bédard: Vous avez présentement un projet de loi susceptible d'être adopté avant la fin de cette session concernant la fonction publique qui va être de nature à améliorer la situation concernant les femmes. Ce sont plusieurs gestes pratiques que je viens d'évoquer. Quand la commission parlementaire aura lieu, elle va nécessairement déboucher dans des délais rapides sur une législation qui ira beaucoup plus loin que celle que nous avions déposée avant cette session.

M. Marx: M. le ministre, je n'ai jamais dit - vous pouvez vérifier les textes - que vous n'avez pas fait d'efforts en ce qui concerne l'engagement des femmes, mais je constate que parmi vos autres fonctionnaires, on ne peut que le constater. Ce n'est pas un reproche que je vous fais, c'est une constatation. Si vous voulez prendre cela comme un reproche, libre à vous. Vous m'avez accusé d'être démaqogique, moi, je ne vous accuse pas d'être démagogique parce que vous ne l'êtes pas, mais vous êtes très habile, vous avez l'habilité de noyer le poisson, votre réponse, dans un verbiaqe. (18 heures)

J'ai posé une question très simple, au ministre, à savoir s'il va abroger l'article 80, oui ou non. C'est simple. Il ne faudra pas une commission parlementaire pour étudier cela au mois d'octobre ou novembre, et après, avoir un projet de loi au mois de février et peut-être qu'on va avoir une élection référendaire au mois de mars, donc pas de projet de loi qui sera adopté. Il n'v a pas d'étude à faire, tout est déjà fait, parce qu'on dit - permettez moi un anglicisme -c'est de "staller" l'affaire, c'est ce que vous êtes en train de faire, tout le monde me comprend. Si vous voulez "staller" l'affaire et s'il n'y a pas d'opposition de votre caucus, de la part des femmes députées, je ne comprends pas. Voyez la députée de Johnson qui n'a pas dit un mot sur un dossier aussi important.

M. Bédard: S'il vous plaît, M. le député, je pense qu'il y a une députation féminine à l'intérieur du Parti québécois qui est beaucoup plus agissante...

M. Marx: Je fais pression sur vous pour faire quelque chose.

M. Bédard: ... que quelque députation féminine que vous ayez pu avoir à l'intérieur de quelque parti politique que ce soit. Et c'est pour cela que nous avons abouti, comme vous l'avez dit tout à l'heure, à poser des gestes précis qui n'ont pas réglé tous les problèmes, mais qui constituent une amélioration par rapport à ce qui existait. Nous allons continuer notre volonté politique de continuer dans ce sens.

Et en ce qui a trait à la Charte des droits et libertés, je crois qu'il était indiqué, après les rencontres que j'ai eues avec de nombreux groupes à Montréal, il y a de cela déjà plusieurs mois, que quant à légiférer concernant la charte, il fallait ouvrir l'ensemble de la charte via une commission parlementaire et permettre à tous les groupes de venir s'exprimer. Et à ce moment-là, ce que je puis vous dire, c'est que j'ai la volonté politique que, cette commission parlementaire étant tenue dans des délais très rapides, elle aboutira à une législation qui, je le sais d'avance, ira beaucoup plus loin que celle que nous avions déjà déposée concernant les programmes d'action positive.

M. Marx: Pourquoi laisser les femmes dans une position d'inégalité encore des mois et des mois? Je sais que le ministre est de bonne foi. Je ne mets pas en cause sa bonne foi. La bonne foi, en vertu du Code civil, se présume. Il faut prouver la mauvaise foi et je ne pourrai jamais prouver la mauvaise foi du ministre. Donc, il est de bonne foi.

Je vais vous lancer un défi. Si vous voulez déposer un projet de loi demain matin à l'Assemblée nationale, pour abroqer l'article 97 en ce qui concerne les femmes, on va vous appuyer et ce sera adopter dans dix ou quinze minutes. Toutes les femmes seront sur un pied d'égalité avec les hommes. C'est cela le problème.

M. Bédard: Je m'excuse. On pourrait faire une très longue discussion là-dessus. Mais je ne suis pas sûr que c'est le meilleur moyen que vous êtes en train d'évoquer. Il y a moyen d'arriver à ce résultat en évitant beaucoup plus les tracasseries judiciaires que pourrait impliquer la formule que vous représentez...

M. Marx: ... judiciaires.

M. Bédard: Laissez-nous terminer, s'il vous plaît!

Concernant l'article 97, il faudrait que le député de D'Arcy McGee soit conscient qu'il y a quand même plusieurs opinions qui s'expriment à propos de l'article 97. Nous avons ici avec nous, nous avons la chance d'avoir avec nous, la vice-présidente, la présidente par intérim, de la Commission des droits et libertés de la personne, Mme Francine Fournier, qui pourrait peut-être nous faire part de certaines préoccupations.

Le Président (M. Desbiens): Avant de poursuivre, je dois constater qu'il est 18 heures et qu'il y a un consentement qui existe à l'effet de poursuivre les travaux jusqu'à 20 heures.

M. Marx: 20 h 15.

Le Président (M. Desbiens): 20 heures, 20 h 15?

M. Bédard: Nous sommes d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Maintenant on poursuit les travaux jusqu'à 20 h 15. Alors, madame.

M. Bédard: Sur la question de l'actuel article 90 de la charte, il s'agit de constater qu'il y a plusieurs interprétations quant à son abolition. Le rapport Boutin recommandait que les bases actuarielles sexuées continuent à être considérées comme non discriminatoires; la proposition et la recommandation de la Commission des droits de la personne est à l'effet de considérer des bases actuarielles sexuées comme discriminatoires. Alors, il y a des diverqences d'opinions qui méritent d'être discutées avant.

Si on recommande l'abolition de l'article 90, il n'y a aucun problème et la Commission des droits de la personne serait ravie de cette situation, mais il faut constater qu'il y a des opinions différentes sur ce qui remplacerait l'article 90. J'aimerais ajouter sur ce point-là que cet article permet actuellement la discrimination non pas seulement à l'égard des femmes, mais aussi sur la base de l'état civil, de l'âge, du handicap et de l'orientation sexuelle, et c'est assez important.

M. Marx: Je dois avouer, M. le Président, que j'étais commissaire à la Commission des droits de la personne et je pense que j'ai toujours été d'accord avec la position de la commission sur cette question. Je souliqne une autre fois que c'est un article transitoire, que le ministre de la Justice est au pouvoir depuis cinq ans et qu'il n'a rien fait depuis cinq ans sur cette question.

M. Bédard: Encore là, ce n'est pas vrai, M. le Président.

M, Marx: Qu'est-ce que vous avez fait concernant cet article?

M. Bédard: Concernant l'orientation sexuelle"?

M. Marx: Sur l'article, l'égalité des hommes, des femmes, c'est ce que nous discutons maintenant.

M. Bédard: Mais l'orientation sexuelle concerne tout le monde; pour avoir été longtemps à la Commission des droits de la personne, vous devriez le savoir.

M. Marx: Vous avez proposé une modification qui a été acceptée par l'Assemblée nationale, quelque chose qui a été demandé par la Commission des droits de la personne, mais on n'est pas en train de discuter de cela, on est en train de discuter de la disposition qui traite des femmes.

M. Bédard: M. le Président, je pense que la meilleure réponse vient de nous être donnée par la présidente par intérim de la Commission des droits de la personne qui exprime son opinion, qui est très claire dans le sens de ce qu'elle a dit. Elle exprime son opinion sur ce sujet, il y a différentes manières de voir les choses, que ce soit un groupe par rapport à un autre groupe. L'article en question, l'article 90, concerne également d'autres sujets de préoccupation sur lesguels, je crois, il y a avantage à ce qu'il y ait une commission parlementaire devant laquelle tous les courants d'opinions pourraient être exprimés, qui permettra...

M. Marx: Pourquoi le ministre n'a-t-il pas tenu une telle commission il y a deux ans, ou trois ans?

M. Bédard: On ne légifère pas à grande vitesse dans ce domaine-là.

M. Marx: Surtout quand cela concerne les femmes.

M. Bédard: N'essayez pas de vous faire le défenseur des femmes. Pour ce que vous avez fait jusqu'à maintenant, il n'y a rien d'impressionnant en termes de bilan. D'accord?

M. Rivest: Le Conseil du statut de la femme, c'est déjà pas mal.

M. Bédard: Je ne jouerai pas à ce jeu. Au niveau du ministère de la Justice, je vous l'ai évoqué par plusieurs exemples, ma préoccupation de l'avancement au niveau de la représentativité des femmes dans tous les secteurs d'activité, c'est une des préoccupations qui m'animaient lorsque j'ai fait adopter la loi 89. Ce sera la même préoccupation qui m'animera lorsque nous aurons à procéder à l'étude en commission parlementaire de la Charte des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: À deux reprises, mon collègue de D'Arcy McGee m'a pointée. C'est sûr qu'on veut avoir de l'avancement du côté des femmes. C'est bien certain. Mais quand j'ai pris connaissance de toutes ces choses qui nous ont été passées cet après-midi, dont j'avais entendu parler avant, concernant les nouveaux droits de la famille, je pense, M. le député de D'Arcy McGee, que vous devez voir qu'il y a eu de l'avancement. Du point de vue des femmes, en tout cas, d'après ce que j'ai lu, on a de l'avancement. D'après ce que je vois et d'après ce que je vis présentement, je crois qu'on a un pas de fait en avant. C'est sûr qu'il va y avoir une continuité à cela et que c'est à nous d'aider à ce que cela se fasse. Mais je suis très satisfaite jusqu'à maintenant de ce qui a été fait. J'espère que cela va continuer.

M. Marx: Seulement par ce gouvernement ou par le gouvernement précédent également?

Mme Juneau: Par le gouvernement qui est là.

M. Marx: Le gouvernement précédent a fait adopter la Charte des droits et libertés de la personne.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Bédard: M. le Président, tout ce que je sais, c'est que la députée de Johnson fait le travail de sensibilisation que vous évoquiez tout à l'heure auprès du caucus et auprès de tous ses collègues du gouvernement.

M. Rivest: Remarquable.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Au sujet de la charte et de l'annonce qui a été faite ces jours derniers, voici ma première question. Il y a, j'imagine, une décision du Conseil des ministres à ce sujet. J'aurais besoin d'éléments d'information. Est-ce que le ministre de la Justice a fait une recommandation précise au Conseil des ministres sur... Ce que je cherche à savoir - je ne fais pas de cachette

au ministre - c'est l'ampleur du mandat qui sera confié à la commission parlementaire. Là, dans la discussion, on a fait état du document d'Action positive, qui d'ailleurs ne concerne pas juste les femmes. Dans le document, on voit qu'il y a toutes les questions salariales, il y a même les gens des communautés culturelles qui ont peut-être bien du rattrapage à faire ou qui auraient besoin d'Action positive eux aussi, enfin tous les éléments qui sont mentionnés. Je comprends que ça, c'est un des éléments. Ce que je veux savoir du ministre c'est: Est-ce qu'il y a une décision ferme du gouvernement d'ouvrir complètement la Charte des droits et libertés de la personne? Est-ce qu'il y a une décision dans ce sens, écrite ou verbale, peu importe? Le ministre pourrait-il m'indiquer ca?

M. Bédard: J'ai évoqué, il y a de cela plusieurs semaines, au Conseil des ministres, l'opportunité d'ouvrir complètement, en termes d'études, l'ensemble de la charte, en faisant valoir les avantages qu'il y aurait d'avoir une discussion globale sur l'ensemble des droits et libertés au Québec, tenant compte quand même de l'évolution des cinq dernières années, tenant compte du fait que la charte, telle que nous la connaissons, existe, en termes d'application, depuis plus de cinq ans et qu'il y a lieu à une révision complète.

M. Rivest: D'accord.

M. Bédard: Mes représentations ont été acceptées dans le sens que nous ouvrions sur une commission parlementaire, ce qui veut dire ouvrir une discussion sur l'ensemble de la charte et de tout ce que ca peut représenter qui permettra à tous les groupes de citoyens de faire valoir leurs préoccupations d'amélioration de la charte.

M. Rivest: Oui, évidemment, c'est le ministre de l'amélioration.

M. Bédard: Je pense bien que c'est une fois que ces groupes auront été entendus, auront fait état de leurs préoccupations que je ferai des représentations précises au Conseil des ministres.

M. Rivest: Au Conseil des ministres, très bien. Mais ma préoccupation - tout à l'heure j'ai eu une petite discussion avec vos aides - c'est que déjà, dans les rapports annuels antérieurs de la commission, au fil des années, il y a toutes sortes de recommandations qui ont été faites, qui affectaient directement ou indirectement la rédaction de la loi, compte tenu de l'expérience des dossiers qui étaient acheminés à la commission. Qu'au bout de cinq ans on réévalue l'ensemble, c'est sans doute tout à fait légitime. Mais je voudrais -parce que le qouvernement prend une décision, comme vient de nous l'indiquer le ministre, une décision réfléchie, qui répond à une demande - savoir si le ministre a l'intention, au début des travaux ou peut-être avant, de demander à la Commission des droits de la personne, qui est quand même l'organisme le premier consulté - parce que la commission peut commencer tous azimuths et recevoir à gauche et à droite des recommandations qui vont lui venir d'un peu partout puisque c'est l'ouverture "at large" -de discuter, pour la bonne conduite des travaux de cette commission parlementaire, qu'il y ait un document d'orientation? Et le qouvernement lui-même, en ouvrant la loi, j'imagine, a un certain nombre - sans que ce soit décisionnel, parce qu'il ne faut pas télescoper - d'orientations qui doivent être données. On sait que le gouvernement a vécu avec la charte au niveau de ses lois et au niveau des règlements, même, à l'occasion, des difficultés qui étaient toujours embarrassantes, malgré que c'était inhérent à la loi, ce n'était pas toujours la faute du gouvernement. Je prends mes précautions pour que le ministre ne se sente pas victime. Mais je voudrais que, au début de la commission, le ministre songe à la possibilité - je ne lui demande pas de se commettre cet après-midi - de donner aux membres de cette commission un document qui émane soit de la commission ou du gouvernement et qui tracerait le cadre et le mandat. Par les réponses du ministre, le mandat est à ce point large que, finalement, est-ce que la question de la suprématie de la charte sur les lois et les règlements est le coeur du débat sur la non-discrimination? Est-ce que c'est un élément auquel vous avez songé, les difficultés administratives et législatives que le qouvernement a connues? Est-ce que ca fait partie des orientations, tout le problème de la discrimination positive? Je conçois que cela en soit un. Mais est-ce qu'on pourrait avoir un tel document d'orientation pour qu'on n'arrive pas ici et gue, boum, cela parte et que tout le monde... Est-ce qu'il y a des orientations? Quels sont les objectifs poursuivis par le gouvernement? Est-ce qu'on peut les avoir sur papier? (18 h 15)

M. Bédard: Les premiers objectifs d'une commission parlementaire, c'est de permettre à tous les qroupes de s'exprimer.

M. Rivest: Oui, mais...

M. Bédard: Mais ne me demandez pas de présumer alors qu'on va entendre des groupes. Je pense que ce n'est pas ce qu'a voulu dire le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Excusez-moi, M. le ministre. Je conçois cela et j'admets cela. Ce que je

veux, c'est que le gouvernement nous dise ses intentions dans un document écrit, élaboré, purement factuel, si vous voulez. Tous les faits que ce document contiendrait pourront être remis en question par les intervenants, bien sûr, mais au moins qu'on ne travaille pas dans le beurre, qu'il y ait une indication précise de ce que la commission parlementaire a comme mandat. Iî me semble que, de façon très pratique, ce serait bien facile de reprendre toutes les recommandations que la commission a faites dans ses rapports annuels...

M. Bédard: Je pense que nous pouvons prévoir plusieurs sujets qui seront évoqués devant la commission parlementaire. Il est évident que tous les documents et toutes les études que nous pourrons avoir en main à ce moment-là seront mis à la disposition des membres.

M. Rivest: Avant les travaux et qu'il y ait même un document d'orientation du gouvernement qui dise: Voici, on tient cette commission pour tel ou tel objectif, c'est ce que le qouvernement entend faire.

M. Bédard: Mais qu'est-ce que vous...

M. Rivest: Maintenant, on demande aux groupes s'ils sont d'accord ou pas et on est prêt à évaluer. Est-ce qu'on pourrait avoir un document?

M. Bédard: Ce que vous semblez dire, ce que vous semblez vouloir, c'est que le gouvernement se commette avant même d'entendre...

M. Rivest: Non. M. Bédard: Non?

M. Rivest: Non. C'est qu'il dise... Je ne veux pas que la commission fonctionne dans le beurre.

M. Bédard: Quand vous dites les intentions du gouvernement, dites donc précisément ce que vous voulez.

M. Rivest: Quand vous faites un sommet...

M. Bédard: Si ce sont les études, toutes les études qui ont pu être faites sur chacun des sujets...

M. Rivest: Non, ce n'est pas cela.

M. Bédard: ...qu'on croit qui vont être abordés, c'est avec plaisir et même je pense...

M. Rivest: Elles sont publiques, de toute façon.

M. Bédard: ...que c'est un devoir du gouvernement de mettre ces études à la disposition de tous les membres de la commission.

M. Rivest: Mais ce que je veux, c'est que le gouvernement, tout en respectant la décision de la commission parlementaire et le processus de décision, nous indique, d'une façon autre que ce qu'on lit dans les journaux ou ce que le ministre peut nous dire cet après-midi, les orientations, pourquoi il fait cela et quels sont ses objectifs. Par exemple, un objectif bien simple: est-ce que le qouvernement est d'accord ou non pour maintenir une charte des droits et libertés? Je vais commencer par cela.

Deuxièmement...

M. Bédard: Cela va de soi.

M. Rivest: II faut qu'il y ait des orientations. Sans cela, on va travailler avec des...

M. Bédard: Ce n'est pas une orientation pour un gouvernement, dans le contexte actuel, de dire qu'il veut que la charte des droits et libertés continue. Voyons donc! Soyez donc sérieux!

M. Rivest: Oui, mais...

M. Marx: Le gouvernement peut-il nous dire...

M. Rivest: Pour être plus concret...

M. Bédard: Si vous voulez savoir si le gouvernement va produire une liste des sujets qu'il aimerait voir aborder au niveau des discussions, sûrement. Mais le qouvernement ne se commettra pas avant que les groupes soient entendus.

M. Rivest: Non, je ne demande pas cela, mais une liste des sujets. Je comprends tout cela. C'est parce que je veux que le gouvernement indique - c'est lui qui mène -des orientations précises et dise: Voici, compte tenu de l'expérience et de notre évaluation, nous soumettons à la commission telle question, nous soulevons telle dimension, telle autre dimension. Nous avons des difficultés, par exemple, au niveau de la valorisation des droits de la femme. Comment pensez-vous qu'on devrait régler cela au niveau de la charte? Nous avons des difficultés au niveau de tel autre aspect de la charte. C'est cela que je veux avoir. Le danger de ces commissions tous azimuts, c'est que cela finit par être un immense verbiage et, finalement, le gouvernement tranche et on ne sait pas exactement, même

pour les mémoires.

M. Bédard: Dans ce sens-là, d'accord, pourvu qu'il n'y ait pas d'orientations du gouvernement dans le document.

M. Rivest: D'accord, parfait. M. Bédard: Je comprends.

Le Président (M. Desbiens'): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le ministre fait-il une distinction entre une charte enchâssée dans la constitution et une charte telle que la charte du Québec? Est-ce qu'il fait une distinction entre une charte enchâssée dans la constitution et une charte qui est simplement une loi ordinaire, comme la charte des droits du Québec d'aujourd'hui?

M. Bédard: Définitivement, il y a une distinction. On sait jusqu'à quel point cela peut être difficile, constitutionnellement parlant, d'arriver à des amendements. Quand une charte est enchâssée, on diminue d'autant les possibilités, les capacités d'amendements, la célérité avec laquelle certains pourraient être faits. Je crois que, justement parce que notre charte n'est pas enchâssée, il est possible, à quelque gouvernement que ce soit, de pouvoir, à un moment donné, procéder à des améliorations, à des modifications avec beaucoup plus de facilité que ce ne serait le cas si la Charte des droits et libertés était enchâssée. Maintenant, je ne sais pas si le député de D'Arcy McGee veut reprendre la discussion sur la constitution.

M. Marx: Non, non, on va reprendre ca en temps et lieu.

M. Bédard: En temps et lieu, je pense.

M. Marx: Les États-Unis ont une charte enchâssée dans la constitution. On peut toujours aller au-delà et donner plus de droits aux citoyens, c'est-à-dire en ne faisant pas d'amendements à la charte, mais en leur donnant plus de protection.

M. Bédard: J'espère que vous ne voulez pas dire par là que, du fait qu'une charte est enchâssée, cela donne plus de droits aux citoyens.

M. Marx: Non, mais c'est une meilleure protection.

M. Bédard: Non, je ne suis pas d'accord avec cela.

M. Marx: L'autre jour, dans les journaux, j'ai lu un argument assez curieux peut-être du premier ministre ou du leader, je ne me souviens pas de qui. Il disait: Le gouvernement est contre une charte enchâssée dans la constitution parce que cela va mettre le pouvoir dans les mains des juqes. Je pense qu'une charte, telle la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, c'est mettre le pouvoir dans les mains des juqes aussi parce qu'en fin de compte...

M. Bédard: Ah non! Là, vous voulez vraiment avoir une discussion de fond.

M. Marx: ... c'est eux qui décident de la portée de la charte.

M. Bédard: Non.

M. Marx: Je veux juste vous prévenir.

M. Bédard: C'est du sophisme, ce que vous faites là.

M. Marx: C'est du sophisme?

M. Bédard: Vous savez très bien qu'un des éléments importants du coup de force fédéral n'est pas seulement l'unilatéralisme de la démarche, c'est surtout le fait de vouloir imposer une charte fédérale qui aurait pour effet effectivement de remettre entre les mains des juqes des responsabilités qui sont actuellement exercées par les élus.

M. Rivest: Vous avez cela, dans votre proqramme du Parti québécois, le Québec souverain a une charte dans sa constitution et c'est entre les mains des juges. C'est exactement la même chose.

M. Bédard: Ce n'est pas parce que c'est dans un programme qu'on ne doit pas en faire l'évaluation.

M. Rivest: Je sais que, de la façon dont vous traitez le programme et les militants, c'est devenu une beauté! Cela n'a pas qrande importance, c'est vrai.

M. Marx: Passons à autre chose.

M. Bédard: Je n'ai pas l'impression que vous ayez de leçon à donner de ce côté-là.

M. Rivest: Nous, oui.

M. Bédard: Mais sûrement pas votre chef, si on en croit M. Wilson, le président du parti.

M. Marx: J'aimerais aborder un autre...

M. Rivest: Quelle attaque basse!

M. Bédard: Je ne trouve pas sérieuse

notre discussion avec l'Opposition aujourd'hui alors que nous avons la chance d'avoir avec nous la vice-présidente de la Commission des droits de la personne. Je crois qu'on pourrait mettre de côté notre manière partisane d'aborder les sujets pour profiter de la présence de la vice-présidente...

M. Marx: Je suis prêt à lui poser une question, avec la permission du ministre.

M. Bédard: ... de la Commission des droits de la personne.

Le Président (M. Desbiens): Avec la permission du président, vous pouvez y aller.

M. Marx: J'aimerais poser une question politique à la vice-présidente de la Commission des droits de la personne. De toute façon, la question est plutôt technique. Premièrement, j'admets que le ministre a suggéré certaines améliorations à la charte et elles ont été adoptées; quoiqu'il n'ait pas légiféré en ce qui concerne l'égalité des hommes et des femmes, en ce qui concerne les bénéfices marginaux, il a fait d'autres améliorations. Je sais que la commission a plus de responsabilités depuis quelques années, peut-être deux ou trois ans. Je sais que la commission aurait peut-être plus de responsabilités, mais pas plus de personnel, pas plus de ressources. Je me souviens que la commission a souvent demandé, dans son rapport annuel, qu'elle bénéficie de plus de ressources, de plus d'argent, etc., pour pouvoir décharger ses responsabilités.

M. Rivest: M. Parizeau ne veut pas.

M. Marx: ... M. Parizeau réponde à cela.

M. Bédard: C'est une demande...

M. Marx: Annuelle.

M. Bédard: ... que je crois...

M. Rivest: Légitime.

M. Bédard: ... légitime. J'irais même jusqu'à dire...

M. Marx: On va étudier cela.

M. Bédard: ... justifiée de la part de la Commission des droits de la personne. Des représentations ont été faites en ce sens, de la même façon que bien des organismes demandent régulièrement plus de subsides pour pouvoir procéder à leurs activités. J'avoue que jusqu'à maintenant, cette année, je n'ai pas eu la possibilité de donner suite à toutes les demandes légitimement acheminées...

M. Marx: Cela fait déjà quelques années.

M. Bédard: ... par la commission.

M. Rivest: Dites donc que vous ne pouvez pas cette année et que vous ne pourrez pas l'an prochain parce que vous n'avez pas d'argent. Cela va être clair.

M. Marx: La Commission de contrôle des permis d'alcool... les coupures...

M. Bédard: C'est évident que les restrictions budgétaires touchent tout le monde. C'est un peu comme la peste. Tous n'en meurent pas mais tous sont touchés.

M. Marx: Je ne veux pas faire un procès d'intention au ministre. Mais, dans une Commission des droits de la personne, quand on donne plus de responsabilités, moins de ressources et moins d'argent, on peut se demander quelle est la politique qouvernementale en ce qui concerne une telle commission?

M. Rivest: Les posters et les dépliants?

M. Bédard: Quand je vois le député de Jean-Talon charrier à propos des posters et de la publicité, il devrait comprendre que c'est justement pour l'information des citoyens, pour une meilleure accessibilité à la justice.

M. Rivest: Franchement, qu'est-ce que cela donne comme information? À qui est-ce qu'on s'adresse, qu'est-ce qu'on fait?

M. Bédard: Vous n'y comprenez vraiment rien. C'est très important que tous les citoyens et les citoyennes du Québec soient mis au courant des dispositions de la loi 99. Je vous trouverais au moins correct de retirer vos paroles.

M. Marx: M. le ministre, puis-je aborder un autre programme relié aux droits de la personne?

M. Bédard: Je dois dire que, malgré ces ressources sûrement limitées, la Commission des droits de la personne du Québec est parmi une des plus aqissantes en comparaison avec celles de toutes les autres provinces. C'est un travail vraiment sérieux qu'elle fait.

M. Marx: On y travaille sept jours par semaine. Elle va aboutir. J'aimerais aborder une autre question, M. le ministre, c'est le problème de la pornographie. Vous savez qu'il y a la pornoqraphie qui...

M. Bédard: Me permettez-vous un complément, maître, sur l'aspect des

ressources financières et humaines de la Commission des droits de la personne? On me fait remarquer à juste titre qu'à la suite de l'analyse, de l'étude en commission parlementaire et des décisions qui sont prises par le gouvernement en ce moment, il est évident qu'il faudra faire une réévaluation de l'ensemble des ressources financières et des ressources humaines de la commission.

M. Marx: Soit des coupures, soit des augmentations.

M. Bédard: C'est déjà commencé d'ailleurs. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'aimerais aborder, comme j'ai déjà dit, le dossier de la pornographie. Le ministre doit être au courant qu'il y a un problème de pornographie, c'est-à-dire que la pornographie est souvent accessible aux enfants. Dans cette pornographie, on voit souvent la violence faite aux enfants ou la violence faite aux femmes. Le problème, ce n'est pas de censurer la pornographie, mais de rendre la pornographie inaccessible aux enfants. Moi, j'étais déjà au courant d'une étude qu'on a faite sur cette question il y a trois ou quatre années pour dire ce qui arrive des études au ministère de la Justice. Le ministre a assisté, je pense, à un colloque organisé récemment par la Fédération des femmes du Québec sur cette question pour dire que c'est le temps d'agir, au moins pour protéger les mineurs. Maintenant qu'on a fait toutes les études et tenu tous les colloques, est-ce que le ministre va légiférer dans ce domaine ou le réglementer pour que vraiment la pornographie soit inaccessible aux jeunes enfants?

M. Bédard: Je m'excuse, avant de répondre au député de D'Arcy McGee, s'il a terminé sur la Charte des droits et libertés de la personne, nous pourrions libérer peut-être la vice-présidente, qui est avec nous?

M. Marx: Je vous pose la question, je la pose à la vice-présidente de la Commission des droits de la personne, est-ce que la pornographie l'intéresse en tant que protection des droits et libertés de l'enfant?

M. Bédard: C'est indiscutable. En termes généraux, les enfants sont des personnes aux termes de la charte. Sur cette question particulière de la pornographie et de l'accessibilité des enfants ou des mineurs à la pornographie, nous avions, il y a déjà quelque temps, réfléchi sur cette question et, à toutes fins utiles, renvoyé la décision ou l'action à prendre dans ce dossier au ministère de la Justice et au Comité de protection de la jeunesse. (18 h 30)

II est très difficile de travailler sur tous les dossiers à la fois et nous avions constaté que d'autres organismes pouvaient tout aussi bien que nous prendre des dispositions ou faire les analyses nécessaires. Nous avions fait une analyse préalable relativement courte que nous avions acheminée au ministre rie la Justice il y a déjà deux ans.

M. Marx: La vice-présidente peut-elle nous dire quand elle a envoyé cette étude au ministère de la Justice?

M. Bédard: Je m'excuse de ne pas pouvoir vous répondre plus précisément, mais je crois que c'était il y a deux ans. Cela doit être à peu près cela.

M. Marx: Au moins.

M. Bédard: D'ailleurs, c'est dans cet esprit que nous avions donné des directives spécifiques à tous les procureurs de la couronne de manière qu'une attention particulière soit attachée au fait que tout ce qui peut être pornographique soit hors de la portée des enfants. J'ai ici...

M. Marx: Mais comment les procureurs font-ils cela? J'aimerais savoir comment les procureurs font cela.

M. Bédard: ...avec moi le sous-ministre aux Affaires criminelles, M. Rémi Bouchard, qui va vous répondre.

Il y a quelques années, il y avait des directives en matière de poursuites sur la pornographie qui avaient été données au substitut du procureur général. Ces directives sont d'ailleurs connues; au colloque de la Fédération des femmes, on en a fait état. Ces directives ont particulièrement pour but de protéger les citoyens en général contre l'agression que constitue la pornographie, mais en particulier les enfants. Comme vous le soulignez, pour réussir de façon pratique, il y a eu un groupe de procureurs spécialement constitué pour conseiller les policiers, particulièrement les policiers de la Sûreté du Québec du groupe de l'ERAM, au niveau des interventions auprès des commerçants qui, à cette époque, distribuaient des journaux ou du matériel pouvant être considérés comme pornographiques. Bien sûr, lorsqu'il s'aqit de pornographie gui tombe sous le coup de la jurisprudence canadienne dans ce domaine, il est normal qu'il y ait des poursuites.

Par contre, il y a une espèce de zone grise ou limite dans cette matière et, à l'occasion de ces directives, on a voulu également que l'intervention des policiers se fasse auprès des commerçants pour que, même pour la pornoqraphie dite douce et qui peut dans certaines circonstances ne pas tomber sous le coup de la jurisprudence

canadienne, cette pornographie ou du moins cette littérature ou ces publications photographiques soient mises hors de la portée des jeunes enfants, c'est-à-dire ceux de moins de quatorze ans. I! est bien sûr qu'à l'époque, on avait également pensé se servir des lois qui concernent la protection de la jeunesse lorsqu'il y aurait des cas qui s'y prêteraient. Ces lois ont surtout été employées lorsqu'il s'agissait de spectacles donnés par les enfants, par contre, et très peu souvent en matière de publications ou de photoqraphies.

M. Marx: Je m'excuse. Je n'ai peut-être pas suivi comme il faut ce que vous avez dit, mais j'étais déjà au courant d'une partie de votre programme. Vous avez dit, si je me souviens bien, si je comprends bien, qu'on a demandé ou on a mis la pornographie hors de la portée des mineurs, des jeunes. Comment a-t-on fait?

M. Bédard: Non, c'est-à-dire qu'on a demandé une action des policiers, particulièrement les policiers de la Sûreté du Québec, à l'ERAM, pour faire en même temps que des poursuites, si nécessaire, si des publications véritablement pornographiques circulaient, une espèce d'action auprès des marchands qui distribuaient les revues connues qui ne tombent pas nécessairement sous le coup de la jurisprudence canadienne, mais qui peuvent peut-être pour des enfants être des revues trop osées. Alors, c'était aux commerçants de les mettre hors de la portée des jeunes de moins de quatorze ans, à tout le moins. Or, les policiers faisaient le tour des commerçants et les invitaient à faire ceci, comme d'ailleurs, à un moment donné, certains mouvements féministes ont encouraqé les gens à le faire eux-mêmes auprès de leurs commerçants locaux, mais cette action, en même temps que la politique de surveillance, se faisait par les policiers qui tentaient de convaincre les marchands de les mettre hors de la portée des enfants.

M. Marx: Pour vraiment avoir un programme effectif, il faut avoir une réglementation parce que même aujourd'hui, quand on va au magasin du coin, on voit beaucoup de pornoqraphie qui est vraiment déqoûtante, mais je suis très heureux...

M. Bédard: Je pense que...

M. Marx: ...d'avoir appris en détail qu'il y a un programme de dissuasion, si je peux le qualifier ainsi. Je pense que cela prendrait aussi une certaine réqlementation pour que les gens sachent que cela va à l'encontre de la loi. Je sais qu'il y a une ligne assez mince entre la censure et entre le fait de ne pas permettre que la pornographie soit accessible aux enfants, mais...

M. Bédard: Je pense que...

M. Marx: ... peut-être le ministre peut-il nous dire ce qu'il entend faire davantage dans ce domaine, parce que je pense que le problème existe encore?

M. Bédard: Je pense que le député de D'Arcy McGee connaît très bien la difficulté que nous avons, du point de vue jurisprudencel, à déterminer ce qui est pornoqraphique et ce qui ne l'est pas. On est conscient qu'il peut y avoir de la littérature déclarée non pornographique par les tribunaux, mais gui, d'autre part, pourrait être de nature à mettre en danger le développement d'un enfant. C'est conscient de ce problème qu'avec le comité de développement social, au ministère de la Justice - nous avons d'ailleurs déjà eu des réunions sur le sujet - nous essayons de voir comment on pourrait aboutir à une loi qui ne serait pas un retour à la censure, mais qui pourrait être de nature à répondre à cette préoccupation légitime exprimée par bien des qroupes. Vous êtes à même de constater que ce n'est pas facile.

M. Marx: C'est très réconfortant d'apprendre que vous êtes conscient de ce problème et que vous avez pensé à réqlementer ou légiférer davantage dans ce domaine. Je pense que ça répond à une demande.

M. Bédard: Certains groupes ont laissé entendre qu'il ne se faisait rien au niveau du ministère de la Justice par rapport à l'action policière. Au contraire, je n'ai pas les statistiques avec moi, mais les policiers ont agi dans bien des cas. Il est clair, par exemple, que lorsqu'une revue est déclarée pornographique et que c'est porté à l'attention des autorités du ministère de la Justice, il y a confiscation, si des plaintes sont portées.

M. Marx: Je pense qu'il y a un problème de terminologie. C'est l'obscénité qui est interdite par le Code criminel; la pornographie est permise, si on peut faire une distinction entre la pornoqraphie et l'obscénité.

M. Bédard: Vous rejoignez exactement le problème, je dirais, un peu juridique auquel nous avons à faire face. Bien des descentes policières ont eu lieu au cours des dernières années.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 4 est adopté?

M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: J'imagine que la Commission des droits de la personne se préoccupe de cela, le problème de l'infiltration policière. Est-ce que c'est à ce moment-ci que le ministre voudrait que nous en parlions?

M. Bédard: Quand nous étudierons le programme concernant la Sûreté du Québec.

M. Rivest: Très bien.

M. Bédard: C'est avec énormément de plaisir que je répondrai à la question.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 4 est adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Desbiens): Adopté.

M. Marx: Sans augmentation pour la Commission des droits de la personne.

M. Bédard: C'est ce que vous dites. M. Marx: C'est à discuter.

Aide aux justiciables

Le Président (M. Desbiens): Programme 5, Aide aux justiciables. Est-ce que le programme 5 sera adopté?

M. Marx: On va en discuter.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: La Commission des services juridiques.

M. Bédard: Au nom des membres de la commission, je remercie la vice-présidente de la Commission des droits de la personne d'avoir été présente.

M. Marx: J'aimerais aussi remercier la vice-présidente de la commission pour son travail à cette commission.

Commission des services juridiques. II faut dire tout de suite que le ministre précédent a fait adopter une très bonne loi sur l'aide juridique qui est vigueur depuis maintenant neuf ans. C'est cela?

M. Bédard: À peu près.

M. Rivest: II ne reconnaît pas les mérites...

M. Marx: J'aimerais commencer avec une petite question. Est-ce que le ministre serait favorable à l'application d'un ticket modérateur en ce qui concerne les services d'aide juridique? Le premier ministre et le ministre des Finances ont donné des indications à savoir qu'ils seraient d'accord pour qu'il y ait un ticket modérateur en ce qui concerne les services d'aide juridique. Comme cette loi relève de vous, M. le ministre, peut-être pouvez-vous nous éclairer.

M. Bédard: Premièrement, je pense que vous allez plus loin que ce qui a été dit. Il n'a jamais été fait référence à l'aide juridique, pour commencer.

M. Rivest: Bien voyons, c'était général.

M. Marx: Pas au salon bleu, c'est au journaliste qu'il a parlé de ça. Je suis sûr que le ministre...

M. Rivest: Êtes-vous en faveur, oui ou non. C'est ca la réponse. Vous êtes ministre de la Justice. Il me semble que c'est clair.

M. Marx: Est-ce que le ministre est en faveur oui ou non?

M. Bédard: Ça va sûrement faire plaisir au député de D'Arcy McGee, on n'a pas d'étude là-dessus.

M. Rivest: Oui mais c'est de vous qu'il est question. Êtes-vous en faveur oui ou non?

M. Bédard: C'est une décision qui...

M. Marx: Le député de Verchères, j'imagine, est contre.

M. Bédard: C'est une décision qui doit être prise. C'est le genre de décision qui doit être prise par le Conseil des ministres et le Conseil des ministres n'a pas encore statué.

M. Rivest: Et vous, vous n'avez pas d'opinion pour...

M. Bédard: J'ai une opinion très précise, mais je la ferai valoir là où il faut la faire valoir, au Conseil des ministres.

M. Rivest: Bon, il a pris la porte.

M. Marx: Quelqu'un a dit que c'est une très belle et très bonne réponse: c'était le député de Verchères. Tout le monde a eu ses ordres durant le conseil général.

M. Charbonneau: Le député de D'Arcy McGee veut vraiment répondre à ma place. Ça fait au moins deux fois qu'il...

M. Marx: Parce que j'aimerais avoir l'opinion du député de Verchères sur cette question. Ce serait très intéressant, étant donné ses préoccupations...

M. Charbonneau: Ce qui serait intéressant, c'est peut-être d'avoir des études qui nous permettraient de porter un jugement éclairé.

M. Marx: D'accord. On avait déjà...

M. Rivest: Attention, parce que votre collèque, le ministre d'État au

Dévelopopement social, M. Lazure, s'est prononcé sur la base des études en disant qu'il était contre.

M. Bédard: II n'y a rien qui dit qu'il n'a pas les études.

M. Rivest: Tantôt, il disait qu'il n'en avait pas. Mais vous, vous n'avez pas d'opinion comme ministre de la Justice? Vous administrez des proqrammes importants...

M. Bédard: J'ai des opinions et des habitudes. Mon habitude sur des sujets...

M. Marx: C'est de ne pas parler trop.

M. Bédard: ...comme ceux-là, qui doivent être décidés par le Conseil des ministres, c'est l'endroit prioritaire pour faire valoir ces opinions.

M. Marx: En ce qui concerne l'aide juridique, quelle est la position du ministre en ce qui a trait à la...

M. Bédard: ... au Saguenay-Lac-Saint-Jean pour avoir les résultats que vous connaissez...

M. Rivest: Là-dedans, vous avez des opinions.

M. Bédard: ... quand c'est le temps.

M. Rivest: Comme ministre de la Justice vous n'en avez pas.

M. Bédard: ... exprimées quand c'est le temps et les citoyens nous en sont redevables.

M. Charbonneau: On a les études qu'il faut pour ça.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Bédard: Dans Chicoutimi, les citoyens et citoyennes connaissent très bien mes opinions sur tous les sujets...

M. Rivest: Pauvre Louise, on avait une si bonne candidate.

M. Bédard: ...et ils nous ont réitéré leur confiance à 74%. D'accord?

M. Rivest: ... c'était un poster? Non?

M. Marx: Le ministre a-t-il une position ou une politique en ce qui concerne la participation des citoyens au système d'aide juridique?

M. Bédard: Est-ce que le député pourrait être plus précis?

M. Marx: Quand la loi sur l'aide juridique a été adoptée elle a prévu une certaine participation des citoyens dans l'administration de la justice, dans le système d'aide juridique. Est-ce que le ministre est favorable à une telle politique?

M. Bédard: On est toujours favorable, M. le Président, à une plus grande participation de la population. Je pense que le député devrait préciser sa question. Elle est trop facile?

M. Marx: À l'article 32 de la Loi sur l'aide juridique - je ne sais pas si j'ai la nouvelle ou l'ancienne version de la loi mais j'ai une version que je connais bien et je ne pense pas que la loi ait été modifiée - on dit: "Une corporation régionale a pour fonction principale de fournir l'aide juridique de la manière prévue par la présente loi et, à cette fin, dans le cadre des règlements et de toute entente conclue avec la commission, paragraphe d, de susciter l'institution d'un comité consultatif d'un maximum de douze personnes et de reconnaître un tel comité pour représenter les personnes économiquement défavorisées auprès d'un bureau ou d'une corporation locale d'aide juridique afin de faire des représentations relatives à l'application de la présente loi, donner son avis au directeur de bureau de la corporation locale sur les besoins des personnes économiquement défavorisées et, lorsque nécessaire, faire des recommandations à ladite corporation réqionale.

M. Bédard: M. le Président, nous avons justement la chance d'avoir avec nous le président de la Commission de l'aide juridique...

M. Marx: Parfait. Tout ce que j'aimerais...

M. Bédard: ...qui pourrait...

M. Marx: Vous ne m'avez pas laissé poser la question. La question est très précise: Est-ce qu'il y a des comités consultatifs qui ont été formés en vertu de l'article 32d de la Loi sur l'aide juridique?

M. Bédard: Je sais que des expériences ou des efforts ont été faits en ce sens. Maintenant, nous avons ici le président de la

Commission de l'aide juridique qui pourrait peut-être répondre à la préoccupation du député de D'Arcy McGee. (18 h 45)

M. Marx: Ce n'est pas ma préoccupation seulement, c'est votre préoccupation aussi, parce que vous avez parlé d'une plus grande participation.

M. Bédard: Ne vous choquez pas. Je vous dis que c'est votre préoccupation, j'espère que je n'ai pas fait d'erreur. C'est votre préoccupation, oui ou non?

M. Marx: Nos préoccupations.

M. Bédard: Écoutez, parlez pour vous, je vais parler pour moi et on n'aura pas de problèmes à la commission.

M. Marx: Ne parlez pas pour moi, vous parlez pour moi maintenant. D'accord.

M. Bédard: Vous en avez suffisamment de parler pour vous.

M. le député, je comprends que vous étiez en train de lire dans un manuel qui s'appelle Droits et pauvreté à la rédaction duquel vous avez participé, mais ça, ce n'est pas grave. Déjà, au niveau de la commission, vous avez douze personnes, au niveau des corporations régionales, il y a onze personnes; multiplié par douze, il y a déjà 144 personnes qui sont impliquées dans l'administration même de l'aide juridique. Il est vrai aussi qu'un des paragraphes que vous avez cités tantôt prévoit que les corporations doivent susciter des comités consultatifs au niveau des bureaux locaux.

Effectivement, la commission elle-même a moussé ces comités consultatifs et après environ deux ou trois ans, on s'est dit: Où en est-on rendu avec ça et qu'est-ce qu'il en est? Nous avons demandé une étude par une sociologue qui était à notre département de recherche à la Commission des services juridiques et le titre de son volume a été Participation ou illusion. C'est ça qu'était la conclusion, dans le fond. On s'est aperçu qu'il y avait beaucoup de comités consultatifs qui existaient sur papier seulement et d'autres qui fonctionnaient vaille que vaille. La grosse difficulté, c'est qu'on s'est aperçu que les citoyens sont prêts à participer, mais à condition d'avoir un problème spécifique et précis dans lequel ils peuvent avoir un intérêt.

Ce qui a remplacé, disons, ces espèces de comités sur papier, c'est ce qu'on peut appeler des comités ad hoc qui se créent à propos d'un problème particulier où des gens ont les mêmes intérêts. Disons dans un immeuble à logements, s'ils ont tous un même intérêt, ils vont tous se regrouper. C'est plutôt ces comités qu'on reconnaît que les comités sur papier. Ce sont des comités ad hoc qui ont un intérêt commun, parce qu'on s'est aperçu qu'effectivement on ne peut pas forcer quelqu'un à participer à quelque chose.

M. Marx: Puis-je demander au président de la Commission de l'aide juridique, avec votre permission, M. le Président, combien de comités permanents sur papier on a eus et combien de comités ad hoc on a?

M. Bédard: Je ne peux pas vous donner de chiffres là-dessus, je n'ai pas apporté avec moi cette étude. Mais, de mémoire, il y en avait 30 ou 40 qui existaient sur papier, à ce moment-là, parce que, dans chacun des bureaux, il était présumé y en avoir un. Certaines régions en ont fait sur papier, d'autres en ont fait quelques-uns qui ont fonctionné vaille que vaille et d'autres n'en ont pas fait.

Maintenant, combien il y a de comités ad hoc? Il s'en fait à peu près tous les jours; aussitôt qu'on problème est suscité et que les gens ont un intérêt commun, on va les voir. Ce comité fait ses représentations à l'avocat qui les conseille là-dessus et quelquefois va acheminer ça soit pour une solution au niveau des fonctionnaires ou pour une solution au niveau des procédures judiciaires.

M. Marx: Si je comprends bien, il n'était pas possible de mettre l'article 32d de la Loi sur l'aide juridique en vigueur à cause des raisons que vous avez évoquées et, maintenant, au lieu d'avoir des comités permanents, on a ce que vous avez appelé des comités ad hoc. Le comité ad hoc, c'est quoi, en pratique?

M. Bédard: On peut donner un exemple. À un moment donné, dans la région du ministre, l'année dernière, des fournisseurs d'huile refusaient de livrer de l'huile l'hiver si les assistés sociaux avaient seulement des barils de 45 gallons, parce qu'ils calculaient que ça ne valait pas la peine de se déplacer pour 45 gallons. Ces gens sont venus nous voir. On les a informés, on s'est mis à parler de poursuites éventuelles contre la loi des cartels, des choses semblables. Cela a pris un mois, mais ça s'est réglé et ils ont repris la livraison d'huile effectivement. Je peux vous donner plusieurs exemples. C'est ce genre de comités avec lesquels on fonctionne présentement.

M. Marx: Ces comités ad hoc travaillent avec des bureaux d'aide juridique, des cliniques surtout ou quoi? Est-ce que ce sont surtout des comités ad hoc qui vont aller à la clinique de Pointe-Sainte-Charles, à la clinique de Hull ou est-ce que ce sont des comités ad hoc qui se forment et travaillent avec des bureaux d'aide juridique?

M. Bédard: II n'y a pas de différence sur la façon de se comporter au niveau de ces différents comités. Certains ont une tradition plus longue peut-être, surtout dans des milieux urbains qui étaient déjà organisés; par contre, la même chose se produit aussi à la campagne, dans le milieu rural.

M. Marx: Je ne sais pas à qui m'adresser, est-ce que le ministre est en faveur des cliniques juridiques? Au début, quand la loi a été adoptée, le ministre était en faveur des cliniques juridiques de quartier. J'aimerais savoir quelle est la politique du ministre dans ce sens. Dans les cliniques juridiques de quartier, on a la participation des citoyens. Si vous parlez de la participation des citoyens dans l'administration de la justice, c'était là où traditionnellement on avait la participation des citoyens. J'aimerais savoir quelle est votre politique en ce qui concerne ces cliniques.

M. Bédard: Pour ce qui est de la participation des citoyens, je pense que ce n'était pas seulement là que cela se retrouvait. Tout à l'heure, on a fait état des différentes corporations régionales, de la présence des...

M. Marx: M. le ministre...

M. Bédard: Laissez-moi terminer, citoyens et citoyennes au niveau du fonctionnement de la structure. Concernant les cliniques en particulier, le député de

D'Arcy McGee doit savoir que c'est à la commission de décider de l'accréditation de cliniques.

M. Marx: Quelle est votre politique? Vous avez une idée de quoi faire, comme ministre. Non?

M. Bédard: Non, le ministre, sur ce sujet, n'a pas à avoir de politique. La Commission des services juridiques...

M. Marx: Votre opinion personnelle?

M. Bédard: ... est un organisme, à mon sens, suffisamment responsable pour prendre les décisions qui s'imposent lorsque des demandes sont faites dans ce sens.

M. Marx: Dans la loi, on parle de l'accréditation des cliniques juridiques.

M. Bédard: C'est ce que je vous dis. La loi prévoit aussi que cette accréditation est donnée par la Commission des services juridiques.

M. Marx: C'est facile d'avoir une politique en ce sens, en n'accréditant pas les cliniques. En n'accréditant pas les cliniques, cela démontre une politique et, en accrédiant les cliniques, cela démontre une autre politique.

M. Bédard: Vous parlez pour parler. La loi dit que l'accréditation de ces cliniques se fait par la Commission des services juridiques. C'est clair. Ce n'est pas par le ministre, c'est par la Commission des services juridiques.

M. Marx: Je vais poser la question au président de la Commission des services juridiques. Je vous pose la question. Est-ce que vous avez une politique en ce qui concerne les cliniques juridiques de quartier?

M. Bédard: D'abord, je peux simplement répondre comme président de l'organisme, je ne peux pas répondre au nom des onze autres commissaires. Je peux vous dire qu'à ma connaissance il n'y a pas de politique d'établie à la Commission des services juridiques quant à l'accréditation ou non de cliniques. On a fonctionné, selon les demandes qu'on a eues, sur une base ad hoc, c'est-à-dire qu'on doit examiner dans chacun des cas ce qu'il est possible de faire, suivant l'environnement, suivant les services qui sont déjà offerts dans ce coin. Effectivement, il n'y a pas eu de demandes d'accréditation de cliniques à la Commission des services juridiques depuis quatre ans.

M. Marx: L'impression que j'ai... D'accord.

M. Bédard: À ma souvenance.

M. Marx: L'impression que j'ai, c'est qu'au début on avait plusieurs cliniques. Maintenant, on reste avec deux, la clinique juridique de Pointe Saint-Charles et une autre clinique juridique à Hull. Je ne sais pas qui l'a fait, soit la commission, soit le ministre. Je ne sais pas qui a donné l'ordre ou qui a élaboré cette politique, mais on a fermé la clinique de Saint-Louis, je m'en souviens. L'impression qu'on a dans la population, c'est qu'il y a une politique à la commission ou au ministère de ne pas favoriser les cliniques juridiques au Québec et de concentrer le travail de la commission dans les bureaux d'aide juridique.

M. Bédard: D'abord, la commission n'a jamais reçu de directive, soit du ministère, soit du ministre à cet effet. Je pense que c'est important pour nous de garder notre autonomie vis-à-vis de cela. Deuxièmement, la clinique Saint-Louis n'a jamais été accréditée non plus.

M. Marx: Donc, elle n'était pas fermée!

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: M. le ministre, je suis d'accord avec mon confrère de D'Arcy McGee quand il dit: Le système d'aide juridique établi ici au Québec est un des meilleurs dans l'Amérique du Nord. Je vous en félicite.

M. Rivest: Ce n'était pas lui. C'est une loi libérale.

M. Kehoe: On l'applique actuellement. La question que je veux poser, c'est s'il y a une orientation, en ce qui concerne l'aide juridique, les permanents et la pratique privée. Evidemment d'après toute la publicité qui se fait actuellement, quand on confie un mandat, il faut passer par les permanents de l'aide juridique et les avocats de la pratique privée n'ont qu'une très petite portion des demandes il y a peu de causes qui sont confiées à la pratique privée. Est-ce qu'il y a une orientation, une philosophie de base pour faire en sorte que l'aide juridique soit dispensée exclusivement ou plutôt par les permanents de l'aide juridique. Pourriez-vous me donner la proportion?

M. Bédard: II n'y a pas d'orientation dans ce sens.

M. Kehoe: Mais la publicité qui se fait actuellement fait en sorte que c'est le résultat? Avez-vous des statistiques sur ces demandes?

M. Bédard: Nous avons les statistiques que vous demandez. Au début de l'aide juridique, si ma mémoire est fidèle, la proportion des clients qui choisissaient un praticien privé était de 22% ou 24%. Depuis ce temps, il y a eu une évolution constante vers la pratique privée, de telle sorte que les chiffres de l'année finissant en avril 1981 est de 30,4%.

M. Kehoe: II reste quand même que 70% des causes restent aux permanents de l'aide juridique. Vous avez un ordre de grandeur pour le moment?

M. Bédard: Cela dépend des districts, d'une façon globale, oui, dans certains districts.

M. Kehoe: La question que je pose, la publicité qui se fait, que ce soit dans les journaux et les autres médias, dont la télévision a pour effet de montrer que ce sont seulement des avocats de l'aide juridique, surtout des avocats permanents de l'aide juridique, qui prennent des mandats; non seulement cela, pour savoir si la personne est admissible ou non, il faut même se rendre au bureau de l'aide juridique où l'étude de l'admissibilité est faite et la décision prise. Le résultat, c'est justement ce que vous avez là, c'était de 22% à 24% et c'est maintenant 30%. C'est quand même un écart assez frappant, de 70% à 30% actuellement, et je demande si c'est une politique globale du ministère d'encourager le citoyen de s'adresser aux permanents de l'aide juridique. Le principe de base, c'est la liberté du choix, mais de la manière que c'est organisé, et que fonctionne l'aide juridique actuellement, celle-ci est dirigée vers les permanents, les avocats qui travaillent pour l'État, autrement dit.

M. Bédard: C'est définitivement le libre choix. Si telle était l'intention de la publicité que vous évoquez, elle n'a pas grand effet, au contraire, la place de la pratique privée augmente.

M. Kehoe: Ce n'est pas un libre choix à ce moment-là quand vous êtes obligé d'aller au bureau. La marge est de 70% à 30%. Cela fait neuf ans que c'est en vigueur et le rapport est encore plus que de deux pour un, 22% à 24% alors, 6% à 9% en neuf ans, et j'ai nettement l'impression, avec la publicité qui se fait actuellement, que l'obligation du contribuable de se rendre au bureau des permanents n'auqmentera pas davantaqe.

M. Rivest: C'est quoi la politique?

M. Kehoe: C'est ce que je vous demande, vous n'avez pas encore répondu. Quelle est l'orientation de la politique de base? Est-ce que vous voulez tout confier, à lonque échéance, aux permanents de l'aide juridique ou avez-vous le libre choix? Ce sont des paroles en l'air?

M. Bédard: Ce n'est pas notre politique. M. Kehoe: Qu'est-ce que c'est? M. Bédard: C'est le libre choix.

M. Kehoe: Mais vous faites en sorte que ce n'est pas le libre choix. Quand vous obligez...

M. Bédard: Là, vous y allez de votre opinion, de votre appréciation, que je respecte, mais les faits, à l'heure actuelle, sont quand même qu'une bonne partie de la pratique, des causes sont orientées vers la pratique privée. Ce pourcentage n'a pas diminué avec les années, il augmente et peut-être gu'il augmentera au fur des années.

M. Kehoe: Mais les statistiques sont là. Êtes-vous d'accord avec cette orientation que cela augmente davantage? Avez-vous des

programmes pour faire...

M. Bédard: Je n'ai absolument aucune objection à ce que cela augmente davantage. Ce qui est important...

M. Kehoe: Mais avez-vous des proqrammes...

M. Bédard: ...mais il n'y a pas de programmes à avoir, du moment que le principe du libre choix est respecté. À partir de ce moment-là, laissez jouer chacun des intervenants, la pratique privée d'une part et l'aide juridique. (19 heures)

M. Kehoe: Mais il est certain que, de la manière dont c'est administré, ce n'est pas le libre choix quand vous obligez le citoyen à aller là et que vous dites: On va s'occuper de l'affaire, si vous confiez le mandat. Il y a trois ou quatre avocats permanents qui sont ici, qui vont prendre votre cause. Est-ce que c'est le libre choix à ce moment-là? Ils sont déjà en place. Le citoyen est déjà au bureau permanent de l'aide juridique et on lui dit qu'il y a là quatre ou cinq avocats. On est obligé d'aller là. C'est cela le qros de l'affaire.

C'est justement ma question: Est-ce que cela coûte plus cher pour avoir des permanents? Dans l'ensemble, un mandat qui est confié, soit à des permanents ou à des qens de pratique privée, est-ce que le prix est le même?

M. Bédard: II y a justement une évaluation qui a été faite là-dessus.

Il y a deux ans, une firme comptable qu'on avait engagée pour faire une étude des coûts comparatifs entre ceux qui sont enqendrés par le réseau privé et ceux qui sont enqendrés par des avocats salariés, nous permettait de dire que dans le domaine matrimonial, par exemple, c'était le même prix, que ce soit fait par un permanent ou par un avocat de pratique privée.

Dans le domaine criminel, cela coûtait deux fois meilleur marché chez nous. Et dans toutes les autres causes civiles, c'était deux fois et demie meilleur marché quand c'était fait par un avocat salarié.

M. Kehoe: Par un avocat...? M. Bédard: Salarié.

M. Kehoe: Dans l'ensemble, cela coûte énormément moins cher à l'État de qarder cela avec les permanents. C'est d'aileurs la politique de base.

M. Bédard: C'est une décision politique qui a été prise à ce moment-là, quand on a dit, dans la loi, que ce sera un libre choix. Je peux vous dire que déjà, en commission parlementaire, en 1972, quand c'est venu sur le sujet, il y a des chiffres oui ont été donnés montrant que les gens ne connaissaient des avocats que dans 30% des cas.

Donc, pour être capable de faire un choix, il faut qu'ils connaissent les avocats. Il est normal qu'on en soit rendu à 30%, parce que c'était déjà cela qui était prévu à ce moment-là.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Le ministre nous a indiqué qu'il y avait eu une évaluation il y a deux ans. Est-ce que cette étude est rendue publique, est disponible?

M. Bédard: Nous l'avons donnée en conférence de presse à ce moment-là aussi. C'est possible de vous la faire parvenir si vous en manifestez la demande. Et elle doit être reprise aussi au mois de septembre ou avant le mois de septembre, et encore une fois l'année prochaine aussi.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Juste une petite question si vous permettez. J'aimerais demander au ministre s'il n'entrevoit pas une façon de favoriser les règlements suite à l'attribution de mandats d'aide juridique à des avocats de pratique privée, par exemple au niveau de la tarification. On se rend compte, en pratique, en le vivant tous les jours, qu'il y a plusieurs avocats de pratique privée qui ne favorisent pas le règlement justement parce qu'ils ne seront pas payés ou qu'ils auront à écrire une lettre sous l'article de considération spéciale. J'ai vécu en pratique, assez souvent, le fait d'avoir affaire avec un autre avocat de pratique privée, qui avait eu un mandat et qui voulait se rendre jusqu'à procès pour aller toucher des indemnités supplémentaires.

Je me demande si, sur le plan pratique, il n'y aurait pas une façon, dans l'avenir, d'entrevoir la possibilité de favoriser ces rèqlements. Cela épargnerait énormément d'arqent aux contribuables, la première des choses, et cela embourberait moins les tribunaux. Je me demande s'il n'y aurait pas une façon de voir à cela, parce que, en pratique, cela se vit.

M. Bédard: Je peux vous dire que nous avions cette préoccupation lors des dernières négociations, lorsque nous avons augmente le tarif concernant le plaidoyer de culpabilité.

M. Dauphin: Je vais vous donner un cas bien concret, que j'ai vécu, avant d'être élu député.

M. Bédard: D'un autre côté, par la tarification, il ne faut pas privilégier le plaidoyer de culpabilité au point où des droits de citoyen pourraient être également mis en danger parce que non suffisamment plaidés.

M. Dauphin: Mais cela se vit souvent au civil également, de faire affaire avec quelqu'un pour une action de 600 $, qui va se rendre à procès un an et demi plus tard, parce qu'il répond: Je ne suis pas payé, si je règle.

Je suis certain qu'il y aurait une façon d'essayer de trouver une solution à cela.

M. Bédard: Je crois que c'est une question de déontologie, chaque avocat, que ce soit de la pratique privée ou de l'aide juridique, devant avoir la préoccupation de servir prioritairement les intérêts de son client plutôt que ses propres intérêts.

M. Dauphin: Je suis d'accord avec vous. Mais on est pris quand même avec une situation qui ne se règle pas.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'ai une observation et une question. Toute cette loi a pris naissance à la fin des années soixante, au début des années soixante-dix. Le ministre de l'époque était un bon ministre de la Justice, je pense, Jérôme Choquette.

M. Bédard: Que je connais d'ailleurs.

M. Marx: Tous les Québécois ont beaucoup apprécié comme ministre de la Justice.

M. Bédard: Le Parti libéral aussi!

M. Marx: Le Parti libéral aussi, jusqu'à sa démission du Parti libéral.

Une voix: II est revenu depuis...

M. Bédard: C'est probablement le Parti libéral qui avait tort.

M. Marx: Sans faire de blague, je pense que M. Choquette a été un excellent ministre de la Justice qu'il a vraiment fait avancer les lois du Québec...

M. Bédard: C'est un ami.

M. Marx: ...c'est sous son mandat qu'on a fait adopter cette Loi sur l'aide juridique, la Charte des droits et libertés de la personne et d'autres lois. Ce n'est pas pour faire concurrence avec vous que je cite ces lois.

M. Bédard: Non, parce qu'on pourrait parler du droit de la famille et bien d'autres lois.

M. Marx: Non, parce que vous aurez encore cinq ans et vous ferez aussi de grandes choses j'en suis sûr. À l'époque, M. Choquette a eu l'idée d'avoir un système d'aide juridique qui aurait accès à trois choses. Premièrement, d'avoir des bureaux d'aide juridique, d'avoir des cliniques juridiques de quartier et aussi de permettre le libre choix à tous les Québécois.

Je pense que le système fonctionne plus ou moins bien en ce qui concerne les bureaux d'aide juridique et, en ce qui concerne le libre choix, il y a des accrocs que mes collègues ont soulevés. Mais je pense que la Loi sur l'aide juridique est vraiment un échec en ce qui concerne l'établissement des cliniques juridiques de quartier. Il y en avait quelques-unes au début, accréditées ou non, mais nous en avons eu quelques-unes au début des années 1970 jusqu'à 1975 ou 1976, et cela me surprend qu'un gouvernement qui se veut social-démocrate ne pousse pas dans cette direction où on a vraiment eu l'implication des gens de quartier dans l'administration de la justice, parce que c'était dans les cliniques juridiques de quartier qu'on a eu des citoyens qui s'intéressaient à l'administration de la justice, à l'organisation d'une clinique, ainsi de suite. Cela m'étonne un peu que, sous ce gouvernement, on n'avance pas dans cette direction; on reste avec deux cliniques d'aide juridique, une à Pointe Saint-Charles, c'était la première, et l'autre à Hull.

M. Bédard: M. le Président, je ne suis vraiment pas d'accord avec le député de D'Arcy McGee, en ce sens que je crois... Non, ce n'est pas une question de fait. Contrairement à ce gue dit le député de D'Arcy McGee, je crois que les bureaux d'aide juridigue fonctionnent relativement bien et je crois...

M. Marx: J'ai dit cela? Ce n'est pas le point que j'ai soulevé.

M. Bédard: ...mais oui, vous avez dit que c'était un peu un échec. Concernant le libre choix, je crois que la politique demeure la même. Qu'à un moment donné...

M. Marx: Maintenant, les cliniques juridiques de quartier...

M. Bédard: ...sur l'aspect de la publicité, certains accrocs puissent se faire, à ce moment-là, je pense que les efforts doivent être orientés en fonction de les corriger et, en ce qui a trait aux cliniques juridiques, je pense que le président de la

Commission de l'aide juridique l'a très bien spécifié tout à l'heure. Depuis trois ou quatre ans, ils n'ont pas eu de demandes. On ne peut quand même pas faire des reproches à qui que ce soit.

M. Marx: Je ne fais pas de reproches à qui que ce soit, mais je constate qu'il n'y a pas... Est-ce que je vais faire des reproches? Est-ce que je vais dire...

M. Bédard: Ne parlez pas d'échec, c'est simplement ce que je veux vous dire.

M. Marx: C'est un échec, parce que c'était le but de la loi. Cela faisait partie de la vision du ministre de l'époque, ce qui reflétait dans la loi et c'est un échec parce qu'on en a seulement deux, non pas cinq, dix, quinze ou vingt.

M. Bédard: Ce n'est pas nécessairement un échec, c'est tout simplement la constatation que les cliniques ont peut-être eu une performance moins concluante que prévu en ce qui a trait aux citoyens.

M. Marx: Est-ce que le ministre va me dire honnêtement qu'il pense qu'il y a une politique, soit dans son ministère, soit à la Commission de l'aide juridique, en ce qui concerne l'établissement des cliniques juridiques? Tout se fait au hasard, partout au Québec, y compris dans son ministère et à la Commission de l'aide juridique. S'il veut me dire qu'il n'y a pas de politique, que les gens qui viendront auront...

M. Bédard: Là, c'est vraiment le genre du député de D'Arcy-McGee. Mais non, on vient de dire sur cet aspect des cliniques, qu'il n'y a pas de politique au niveau du ministère puisque le président de la Commission de l'aide juridique l'a mentionné lui-même et la loi le mentionne. C'est à la Commission de l'aide juridique de donner l'accréditation lorsque c'est demandé. Or, il n'y a pas eu de demande depuis quatre à cinq ans. Arrêtez de conclure à des échecs ou quoi que ce soit.

M. Marx: Je pense que, si le ministre de la Justice voulait qu'il y ait plus de cliniques d'aide juridique de quartier au Québec, il pourrait, non pas donner d'ordre au président de la Commission de l'aide juridique, mais discuter de la question avec lui pour susciter qu'il y ait plus de personnes, de citoyens qui feront des demandes et, finalement, on aura plus de cliniques d'aide juridique. Si le ministre ne peut pas faire une telle chose, élaborer une politique dans ce sens, je m'excuse, il n'a pas de pouvoir, il a une apparence de pouvoir. Tout ce qu'il va dire, c'est: Moi, je ne peux rien faire, je n'ai pas de politique, le président a dit que... Je pense qu'il y a plus que cela.

M. Bédard: Non, mais vous avez l'air de découvrir le monde! La loi, elle est là, c'est à la Commission de l'aide juridique de donner les accréditations et il n'y a pas de demandes.

M. Marx: J'ai dit tout ce que j'avais à dire sur cela. L'autre point que j'aimerais soulever, parce que c'est aussi un objectif de la loi, c'est que la Commission de l'aide juridique, les bureaux, les cliniques, travaillent avec des qroupes populaires. Puis-je poser la question au président de la Commission de l'aide juridique? Est-ce qu'effectivement vous faites beaucoup de travail avec des groupes populaires?

M. Bédard: II y a deux types de service. Il y a un type de service qui, quant a nous, est absolument nécessaire, c'est le service curatif qu'on appelle. Quand un client vient au bureau et qu'il a un problème, il faut d'abord s'occuper de ce client et de son problème. On ne peut pas lui dire: II faudra que tu retournes à un qroupe et en fasses partie, c'est à ce moment-là qu'on traitera de ta cause. Par contre, on traite aussi de qroupes, c'est-à-dire qu'on va servir de conseillers, comme avocats aux groupes, et c'est bien certain qu'on va acheminer, autant que possible, le règlement de leurs problèmes devant des tribunaux ou des régies administratives, parce que, de plus en plus, on va devant les régies administratives et les tribunaux administratifs. Cela se comprend parce que le droit de la pauvreté, c'est d'abord un droit statutaire; le Code civil des pauvres, c'est le droit statutaire. On doit, pour aller plus rapidement et aussi faire avancer certains domaines, travailler en qroupe. Quant à moi, c'est peut-être la meilleure façon d'épargner aussi aux citoyens des démarches et d'épargner à l'État des frais.

M. Marx: Est-ce que vous faites beaucoup de consultations auprès des qroupes populaires?

M. Bédard: Dans le rapport annuel de l'année dernière, on fait état, dans chacune des corporations régionales, du nombre de réunions qui se font ordinairement le soir et la fin de semaine. Les informations vous sont données dans le rapport annuel de la Commission des services juridiques.

M. Marx: Est-ce que c'est vrai que la plupart des consultations auprès des grouoes populaires à Montréal se fait par des avocats de la clinique de Pointe-Sainte-Charles?

M. Bédard: C'est faux, tout à fait faux.

M. Marx: D'accord. M. le ministre, en terminant cette discussion, peut-être qu'il serait temps de revoir l'accès à la justice au Québec. C'est l'année des commissions. Pourquoi ne pas avoir une commission pour revoir la Loi sur l'aide juridique? Je pense que c'est aussi important que la Charte des droits et libertés de la personne et que cela entre dans les priorités du ministre. Le député de Verchères dit que c'est une bonne suggestion et que ce serait constructif. Alors, si on a le consentement des députés des deux côtés de la Chambre, il faut que le ministre marche.

M. Bédard: C'est peut-être constructif, mais cela va prendre des études et on a l'impression que vous êtes contre toutes les études.

M. Marx: Non, ce ne serait pas une étude, ce serait une commission; mais une chose que je peux vous dire, M. le ministre, c'est que vous n'avez jamais eu d'étude...

M. Bédard: Vous venez de comprendre ce qu'est la Commission des droits de la personne.

M. Marx: ...en matière d'ordre juridique, depuis que vous êtes ministre.

Une voix: Je ne sais pas.

M. Marx: Est-ce que le ministre est d'accord pour avoir une commission en ce qui concerne l'accès à la justice et ouvrir peut-être la Loi sur l'aide juridique, voir pourquoi on dépense 30 000 000 $ par année? Il y a bien sûr une partie qui vient du fédéral, le méchant gouvernement fédéral paie un petit peu en vertu des ententes.

M. Bédard: II y a 5 000 000 $ qui viennent du fédéral. C'est ce que vous voulez savoir?

M. Marx: Je veux simplement souligner qu'il y a un peu d'argent qui vient du fédéral, mais pas seulement au Québec, à toutes les provinces. Est-ce que c'est le temps de rouvrir la Loi sur l'aide juridique, l'accès à la justice? Je pense que cela va avec l'ouverture de la Charte des lois et des libertés; c'est tout un paquet et pouquoi ne pas discuter de tous les sujets en même temps? (15 h 15)

M. Bédard: C'est bien malheureux, mais je ne vois pas cela comme un paquet, un ensemble, comme le dit le député de D'Arcy McGee. Ce sont vraiment deux choses différentes.

M. Marx: II n'y aurait pas beaucoup de propagande à faire sur la Loi sur l'aide juridique; c'est ca, le problème.

M. Bédard: Sur l'accessibilité à la justice, j'invite quand même...

M. Marx: La "game", c'est la propaqande.

M. Bédard: ... le député de D'Arcy McGee à relire les notes dont j'ai fait part à la commission au début de ses travaux pour voir qu'il y a bien des efforts de faits par le ministère dans ce sens-là. De là à avoir une commission parlementaire sur une révision totale et complète de l'aide juridique...

M. Marx: Et sur l'accès à la justice.

M. Bédard: ... je dois avouer que je ne crois pas que ce soit une priorité au moment où on se parle.

M. Marx: II y a quelques minutes, j'ai démontré qu'il y avait des échecs en vertu de la loi actuelle.

M. Bédard: Non, justement, je ne suis pas d'accord avec le député de D'Arcy McGee sur ces échecs, comme il le dit.

M. Marx: Des buts non réalisés.

M. Bédard: Je ne voudrais quand même pas me répéter, mais je ne vois pas quel échec il y a concernant les bureaux d'aide juridique, concernant le principe même de la loi qui est le libre choix.

M. Marx: Les cliniques?

M. Bédard: Concernant les cliniques, il y a un problème au niveau de la demande.

M. Rivest: Encore une fois ... M. Marx: Non, d'accord. M. Rivest: ... orienté. M. Marx: Je pense que...

M. Bédard: Selon un sondage qui a été fait récemment, pas moins de 80% des clientèles servies par l'aide juridique se sont déclarées satisfaites des services rendus.

M. Rivest: Vous devriez en envoyez...

M. Bédard: Dans ce sens, je pense qu'il y a d'autres priorités gouvernementales.

M. Marx: Je n'ai jamais attaqué les services fournis par l'aide juridique, ce n'est pas le but de mes questions.

M. Bédard: J'espère.

M. Marx: Je n'ai jamais dit cela, j'ai posé des questions d'un autre ordre et il ne faut pas maintenant me faire dire ce que je n'ai jamais dire, de me donner des réponses à des questions que je n'ai pas posées et de noyer le poisson dans beaucoup de verbiage.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Bédard: Vous allez être noyé tantôt parce que, depuis quelque temps, je me demande qui fait du verbiaqe.

M. Rivest: Une dernière question, M. le ministre. Vous vous référez, de temps à autre, à des relevés d'opinions que le ministère fait sur les programmes. Est-ce que cela pourrait être rendu public, à un moment donné, une fois que cela aura servi?

M. Bédard: Le sondage auquel je me suis référé?

M. Rivest: Oui.

M. Bédard: C'est un sondage fait par l'aide juridique.

M. Rivest: C'est parce qu'il y a des appréciations.

M. Bédard: II a sûrement été rendu public.

M. Rivest: Pardon?

M. Bédard: II a sûrement été rendu public.

M. Rivest: Oui, d'accord, mais d'une façon générale on le demande à chaque ministère - même au fédéral, maintenant, ils le font, peut-être en retard - parce qu'évidemment les ministres, normalement, valorisent certains aspects du sondage et l'opinion publique n'est pas toujours en mesure d'apprécier le résultat de satisfaction ou d'insatisfaction d'une mesure gouvernementale. Dans le cadre des travaux de la commission Paré qui vont venir, j'espère que ces informations, après que le ministre ou le ministère s'en sera servi -c'est normal qu'il les qarde pendant un certain temps parce que c'est un instrument de travail interne - seront rendues publiques. Peut-il nous assurer que d'une façon systématique tous les sondages faits par l'administration publique seront rendus publics? Le ministre, à deux ou trois reprises depuis le début des crédits, nous affirme des choses comme: Le public est bien satisfait de ceci et de cela. J'imagine qu'il a oublié les chiffres qui sont moins favorables aux politiques gouvernementales.

M. Bédard: Quand je me suis référé à des sondages, très peu de fois, d'ailleurs, ils ont été rendus publics.

M. Marx: Ce n'est pas le ministère qui a fait le sondage, c'est la commission; le ministère n'a rien à voir avec les sondages de la commission.

M. Rivest: Non, celui de la commission a été rendu public, mais vous avez fait référence à un autre sondage, je pense. Est-ce que vous allez les rendre publics - ai-je une réponse du ministre? - les sondages en général faits au ministère de la Justice? Est-ce que vous vous engagez à les rendre publics une fois qu'ils auront servi pour les fins internes, sur quelque domaine que ce soit?

M. Bédard: Notre politique qénérale est de les rendre publics.

M. Rivest: Notre politique générale... Est-ce que vous vous engagez à les rendre tous publics?

M. Bédard: Oui, jusqu'à maintenant cela a toujours été fait.

M. Rivest: N'ajoutez rien, il a dit oui, et pour une fois que j'ai un oui!

M. Bédard: Oui, mais là, n'allez pas trop loin.

M. Rivest: Je savais qu'il était pour y avoir un "mais".

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 5 est adopté?

M. Bédard: N'interprétez pas trop.

M. Marx: Non, on a une autre question.

M. Rivest: Dans des délais raisonnables, bien sûr?

M. Bédard: C'est cela.

M. Rivest: II a oublié de le dire et je vais le dire pour lui.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Bédard: Oui, mais dans des délais raisonnables, comme le dit le député de Jean-Talon.

M. Marx: Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'aide juridique?

M. Rivest: Pas moi.

M. Marx: Non. Merci. J'aimerais remercier le président de la Commission des services juridiques...

M. Bédard: Je le remercie également au nom des membres de la commission.

M. Marx: ... de son intervention. Il y a l'aide au recours collectif. J'ai appris quelque part que le ministre de la Justice a créé un comité d'étude sur le recours collectif dont le double mandat était le suivant: examiner la loi en vue d'apporter, à la lumière de ses années d'activité, l'amendement qui rendrait l'organisme plus efficace; deuxièmement, étudier, conjointement avec le Barreau du Québec, la possibilité de fixer des horaires judiciaires propres au recours collectif. Est-ce que le comité a terminé son travail? Est-ce que le comité a acheminé des recommandations au ministre? Je signale, M. le ministre, que c'est une autre étude. Je pense que vous avez une université plutôt qu'un ministère de la Justice.

M. Bédard: Franchement, arrivez en ville et arrêtez de vous énerver à chaque fois que vous voyez une étude. Vous savez très bien que tout geste qui doit être posé d'une façon valable par un gouvernement doit être précédé d'études, comme toutes les lois doivent être précédées d'études. On ne légifère pas pour étudier après. On ne met pas des programmes au point...

M. Marx: Quand j'ai demandé une étude sur la Loi sur l'aide juridique, vous vous êtes énervé. Maintenant, il y a une étude sur...

M. Bédard: Vous parlez des études depuis le début de la commission. Vous avez l'air de vous en scandaliser. Comprenez donc une fois pour toutes que les études sont nécessaires.

M. Marx: Trop d'études et pas assez d'action.

M. Bédard: II n'y a jamais trop d'études.

M. Marx: II y a la façon de gouverner par conférences de presse et par études.

M. Bédard: Je ne pense pas que ce soit ma manière d'administrer que de le faire par des conférences de presse.

M. Charbonneau: En parlant d'études, on pourrait peut-être parler du nombre d'études que vous nous proposiez dans votre programme électoral pour gouverner.

M. Marx: M. le Président, c'est hors des crédits.

M. Rivest: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît. À l'ordre:

M. Bédard: Si vous aviez juste une légère idée du nombre d'études qui pouvaient être sur les tablettes et qui avaient été faites par le gouvernement précédent, je pense que là vous auriez de quoi vous scandaliser.

M. Marx: M. le ministre peut-il les déposer s'il veut bien?

M. Bédard: Nous y avons donné suite dans la plupart des cas, alors que le gouvernement précédent ne faisait rien.

M. Marx: Vous avez donné suite aux études du précédent gouvernement? Quelles lois?

M. Charbonneau: La loi sur le zonage agricole.

M. Marx: Quelle autre?

M. Charbonneau: La loi sur l'assurance automobile.

M. Bédard: Franchement, on ne commencera pas à vous faire la litanie des actions qui n'ont pas été entreprises par l'autre gouvernement.

M. Marx: Qui va répondre aux guestions en ce qui concerne le comité d'étude sur le recours collectif?

M. Bédard: Sur cette question, effectivement, le comité d'étude est en place et devrait faire rapport d'ici septembre. C'est à ce moment que les décisions seront prises.

M. Marx: Ce sera quand? M. Bédard: D'ici septembre.

M. Marx: Septembre. Il n'y a pas eu de discussion avec le ministre sur la question abordée. Est-ce que le ministre peut nous donner d'autres informations sur ces dossiers?

M. Bédard: Peut-être sur un point. Il y a eu plusieurs articles de journaux ou d'analyses à savoir que le recours collectif, en fait, la loi concernant le recours collectif s'avérait donner moins de résultats avait moins de succès qu'on ne l'aurait cru. J'ai demandé de faire un relevé du nombre de recours qui ont été inscrits ici au Québec en

fonction de cette loi par rapport aux autres provinces où il y a une telle loi. On s'aperçoit rapidement que contrairement à ce qui est souvent écrit et décrit notre loi concernant les recours collectifs est non seulement très bien perçue, mais très utilisée par comparaison à ce qui se fait dans les autres provinces.

M. Marx: Est-ce qu'on peut avoir le rapport que vous avez?

M. Rivest: Non, on ne peut pas?

M. Bédard: Depuis l'entrée en viqueur de la loi, 47 recours collectifs sont en marche.

M. Marx: C'est pour combien d'années?

M. Bédard: C'est pour un an, un an et demi.

M. Rivest: Est-ce qu'on peut avoir la note que vous avez?

M. Bédard: Je vous la donne. Vous avez simplement à ouvrir vos oreilles.

M. Rivest: Je ne voudrais pas que vous ne nous donniez que des extraits. Vous allez nous la donner au complet?

M. Bédard: Je le dis en souriant. Il y a 47 recours collectifs qui sont en marche. Le fonds d'aide a financé huit recours pendant l'année financière 1979-1980. Il en a financé 29 pendant l'exercice financier qui s'est terminé le 31 mars 1981, soit plus du triple. Ces chiffres démontrent que le fonds d'aide finance 78% des recours, et grâce au principe de la représentation créé par cette procédure, on évalue à 375 000 le nombre de citoyens du Québec dont les droits seront tranchés par les tribunaux via le recours collectif. C'est une bonne illustration d'une plus grande accessibilité à la justice.

M. Rivest: On ne peut pas avoir la note au complet? Vous lisiez parcimonieusement...

M. Bédard: Oui, je peux continuer. D'abord, je n'ai pas sauté de paragraphe.

M. Rivest: ...en disant: Hop! cette phrase-là, je la saute.

M. Bédard: Deuxièmement, je peux continuer. La note dit ceci...

M. Rivest: Donnez-la donc au complet, mon Dieu, même s'il y a des affaires qui ne fonctionnent pas dans les recours collectifs.

M. Bédard: Mais non! Mais non!

Qu'avez-vous à vous énerver, là?

M. Rivest: II n'y a pas de secrets là-dedans.

M. Bédard: Asseyez-vous, là! Ils sont rendus gu'ils veulent les copies des notes. Restez tranquilles!

M. Rivest: On veut être informé. On est ici... Ce n'est pas pour nous, c'est pour l'opinion publique.

M. Bédard: Je vous donne l'information. Avez-vous d'autres questions? On voit que cette donnée, continue la note, est fort intéressante en termes de coûts d'accessibilité à la justice. En effet, si l'on compare le coût d'un procès en recours collectif au coût des procédures individuelles devant le tribunal, les petites créances ou ailleurs, l'on réalise l'immense avantage en termes économiques.

Enfin, pour satisfaire pleinement la curiosité de ceux, dont le député de Jean-Talon, dont la seule quantité importe dans ce domaine, nous produisons en annexe A les récentes statistiques pertinentes pour les autres provinces.

M. Rivest: Oui.

M. Bédard: Ces statistiques démontrent que le Québec est de loin la province où cette procédure connaît le plus grand succès.

M. Marx: Je suis très heureux d'apprendre cela, M. le ministre.

M. Bédard: Vous avez le droit d'applaudir.

M. Rivest: C'est quoi le chiffre que vous avez là-dessus?

M. Marx: J'aimerais seulement poser une petite question. Dans les autres provinces, est-ce le même régime qu'au Québec? Au Québec, il faut avoir la permission de la cour pour faire un recours collectif. Dans les autres provinces, ce n'est pas nécessaire ou est-ce nécessaire?

M. Bédard: Je pense que d'une province à l'autre, quand même, cela varie.

M. Marx: Peut-être que le directeur du bureau de recours collectifs pourrait nous répondre.

M. Bédard: Je ne peux pas vous répondre d'une façon très détaillée, parce que, de toute façon, d'une province à l'autre, cela varie. Je pense que dans la plupart des provinces, c'est plus restrictif, mais je ne peux pas vous répondre de façon très

précise. Le principe existe. Généralement, c'est une règle de pratique, le "common law". Ce n'est pas une loi-cadre avec un fonds d'aide, sauf qu'il y a beaucoup de fluctuations dans les règles. C'est simplement sous forme de règles de pratique. C'est quand même différent.

M. Rivest: Si bien qu'il est difficile de comparer d'une province à l'autre. C'est ce que vous voulez dire?

M. Bédard: Effectivement.

M. Rivest: C'est dur de dire qu'on a la meilleure loi au Canada, en conséquence.

M. Bédard: Pour ajouter à cette information, dans les autres provinces, il n'existe pas de loi sur le recours collectif. Il existe certaines règles pratiques des tribunaux qui réglementent la recevabilité des recours collectifs. De manière générale, dans les autres provinces, comme on le mentionnait tout à l'heure, c'est extrêmement restrictif parce que la jurisprudence a élaboré des critères de façon, par exemple, que les actions en dommages, d'une manière générale, ne soient pas poursuivables par voie d'action collective. On peut constater, d'après les statistiques que nous avons, qu'il y a beaucoup plus de recours collectifs au Québec que pour l'ensemble de toutes les provinces canadiennes.

M. Marx: Peut-être avons-nous plus de recours au Québec parce qu'on finance le recours, c'est-à-dire qu'on paie l'avocat et les frais judiciaires, quoique dans d'autres provinces, je ne pense pas que ce soit le gouvernement qui finance ces recours.

M. Bédard: J'aimerais pouvoir donner la réponse, mais... Ce n'est pas financé dans les autres provinces...

M. Marx: Non, ce n'est pas financé dans les autres provinces. C'est seulement financé...

M. Bédard: ...sauf qu'il y a des plans d'aide juridique dans les autres provinces.

M. Marx: C'est cela.

M. Bédard: Finalement, s'il y a plus de recours au Québec, on pense que c'est parce que la loi est extrêmement précise, les critères sont précis dans la loi, ce qui n'existe pas dans les autres provinces qui n'ont que des règles de pratique qui contiennent quelques dispositions.

M. Marx: Le ministre a-t-il l'intention d'assouplir encore les critères en ce qui concerne ce recours collectif?

M. Bédard: Je préfère attendre, avant de me prononcer, les recommandations qui peuvent nous être faites par le comité. Comme on peut le voir, cela peut représenter rapidement un nombre très accéléré de recours. Cela peut des sommes très considérables, et je crois qu'on doit y aller... (19 h 30)

M. Marx: Dans une année de coupures, ce n'est pas la chose à faire.

M. Bédard: Non, ce n'est pas une question d'année de coupures, voyons donc, soyez loqigue! Ce n'est pas sérieux, ce que vous dites là. Ce n'est pas une question de coupures.

M. Marx: Dans une année maigre, ce n'est pas une chose à faire.

M. Bédard: Ce ne sont pas des sommes plus significatives qu'il ne le faut que ça représente. Je crois qu'il faut se placer sur un autre plan quand il s'agit de savoir si on doit assouplir ou non les règles.

M. Marx: Est-ce que le ministre va rendre ce rapport public ou s'il ne sera pas porté à l'attention du public?

M. Bédard: Vous n'aurez sûrement pas d'objection à ce que j'en prenne connaissance avant de voir s'il y a lieu de le rendre public ou pas.

M. Marx: Est-ce qu'il peut nous dire aujourd'hui s'il va le rendre public?

M. Bédard: Ma tendance est toujours de rendre public tout ce qui est possible.

M. Rivest: Ma tendance! Il y a deux mots de la langue française que vous ignorez, vous, ce sont les mots oui et non. C'est incroyable! Cela existe. On répond oui ou on répond non, et on le sait.

M. Bédard: Où êtes-vous?

M. Rivest: Je suis actuellement au programme 5, élément 2.

M. Bédard: Vous avez l'air perdu pas mal.

M. Rivest: Oui, non.

M. Marx: Est-ce gu'il y a d'autres questions?

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le proqramme 5 est adopté?

M. Rivest: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Le programme 5 est adopté. Le programme 6 sera-t-il adopté? Est-ce qu'il y a des questions sur ce programme?

Une voix: Non.

M. Bédard: Alors, adopté?

M. Marx: Est-ce que le ministre veut faire une déclaration?

M. Bédard: Je regardais les notes qu'on vous a fait parvenir.

Le Président (M. Desbiens): Le

Drogramme 6 est adopté. Programme 7, enregistrement officiel. Est-ce que le programme 7 est adopté.

M. le député de D'Arcy McGee.

Enregistrement officiel

M. Marx: Juste une guestion que quelgu'un m'a demandé de poser, mais je vais le faire dans l'intérêt public. Est-ce qu'il y a un bureau d'enregistrement, maintenant, à Granby? Je pense que n'a été un problème pendant des mois.

M. Bédard: Ce n'est plus un problème maintenant, il y a un bureau d'enregistrement à Granby.

M. Marx: Je félicite le ministre d'avoir ouvert un bureau d'enregistrement à Granby. Est-ce gue c'a été fait avant les élections ou juste après?

M. Bédard: Ce ne sont pas des choses qui me motivent.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce gue le programme 7 est adopté?

M. Marx: Est-ce qu'il y a d'autres...

M. Bédard: Je ne peux même pas vous dire si c'est avant ou après.

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: C'était un besoin et on y a répondu.

Le Président (M. Desbiens): Le programme 7 est adopté. Programme 8, contrôle des permis d'alcool.

Contrôle des permis d'alcool

M. Bédard: Nous avons avec nous le président du nouvel organisme, la Régie des permis d'alcool.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon, vous avez demandé la parole?

M. Rivest: Une guestion, guant à moi. Je voudrais m'informer des délais. Très souvent, on est sensibilisé par des gens gui s'adressent à la régie pour obtenir des permis de tous ordres et gui se plaignent des délais très très longs. Est-ce que vous avez des éléments à donner là-dessus, des statistiques ou les mesures que vous avez prises à ce sujet dans la dernière année?

M. Bédard: Précisément, les délais sont la préoccupation principale de la nouvelle régie. Au niveau des délais de l'ancienne commission, on pouvait s'attendre à obtenir un permis généralement en dedans de six mois. La régie est en train de réformer ces procédures pour tâcher d'émettre un permis, dans les cas non contestés, à l'intérieur de 30 jours et, dans les cas contestés, dans moins de 45 jours. Pourquoi ces chiffres? C'est parce gue la loi prévoit une prépublication de 15 jours dans les journaux, donc il faut s'adresser aux journaux, laisser s'écouler ces 15 jours et permettre de recevoir les oppositions. Donc, il est très pensable d'émettre, à l'intérieur de 30 jours, des permis dans les cas non contestés et dans 45 jours des permis dans les cas contestés. Toute la procédure est en train d'être modifiée dans ce sens et je pense qu'à ce moment-ci on a dû, chez les reguérants, constater gue la moyenne se situe peut-être aux alentours d'un mois et demi avec, malheureusement, encore des cas dans des régions excentrigues, c'est-à-dire en dehors de Montréal et de Québec où les délais sont un petit peu plus lonqs à cause du fait gue les régisseurs se déplacent une fois par mois pour aller entendre les causes sur place.

M. Rivest: Alors, vous auriez peut-être intérêt à rencontrer vos collègues gui s'occupent de l'ensemble de l'administration de la justice pour les inviter à obtenir des performances, mais comme on aura un plan d'action je suppose gu'on s'inspirera de la pratique.

M. Bédard: Encore là, M. le Président, mon collègue de Jean-Talon n'est pas très sérieux. Il a l'air d'oublier que justement cette loi a été votée à l'initiative du présent gouvernement avec comme préoccupation de faciliter les choses aux citoyens et je pense que le but est atteint. Il devrait au contraire...

M. Rivest: Vous vouliez que je vous félicite?

M. Bédard: Non, non.

M. Rivest: Non?

M. Bédard: Je n'ai pas besoin de ça.

M. Rivest: M. le Président, une question plus technique. La fameuse question qui a été soulevée dans l'opinion publique à savoir si oui ou non c'était légal, acceptable ou tolérable le fait que des gens se rendent dans des établissements, des restaurants en particulier, qui ne détiennent pas de permis et qu'ils apportent leur propre vin ou des choses comme ça. Il y a eu une espèce d'imbroglio entre différents porte-parole de votre côté. Quel est le sentiment du président ou du ministre là-dessus, comme vous voudrez?

M. Bédard: Effectivement, nous avons précisé que la loi est très claire dans le sens qu'une personne peut apporter des boissons dans un établissement qui n'a pas de permis et les consommer. Mais il ne faut jamais oublier que tout ca est conditionnel à l'acceptation du propriétaire. Le propriétaire demeure le propriétaire.

M. Rivest: Je m'excuse, on me parlait. C'est quoi la...

M. Bédard: Tout cela est conditionnel à l'acceptation du propriétaire de l'établissement. Il ne faut quand même jamais oublier...

M. Rivest: C'est légal?

M. Bédard: Oui, c'est légal.

M. Marx: Ça, c'est un avis juridique accepté au Québec parce qu'au ministère du Revenu on a donné des avis juridiques et après ca on a dit aux gens qu'ils devaient rembourser l'impôt parce que les avis juridiques n'étaient pas légaux. Mais je comprends que le ministre nous donne un avis juridique et que, si quelqu'un va dans un restaurant avec sa boisson et que l'établissement n'a pas de permis d'alcool, il ne sera pas poursuivi par le ministère de la Justice.

M. Bédard: Pardon. Prenez toute la réponse que je vous ai donnée. J'ai dit que c'était conditionnel à l'acceptation du propriétaire, qui demeure toujours le maître de sa propriété quand même.

M. Rivest: Parce qu'il y a eu un avis du contentieux d'une société qui était à l'effet contraire.

M. Bédard: Dans le fond, la situation est un petit peu une tempête dans un verre d'eau dans le sens suivant: En 1964, un individu a décidé d'apporter sa propre boisson dans un restaurant et une accusation a été portée contre lui. Il s'est défendu devant les instances régulières et un jugement de la Cour d'appel lui a donné raison disant qu'il est possible d'apporter sa boisson dans des établissements non détenteurs d'un permis d'alcool. Le jugement est là depuis 1964. S'il arrive qu'on en parle maintenant c'est qu'un autre individu a aussi décidé d'apporter sa boisson dans un établissement sans permis et que quelqu'un s'est opposé à ce qu'il le fasse. Lorsqu'on m'a contacté pour me demander mon avis là-dessus, j'étais au courant de la jurisprudence et je l'ai citée. Il est possible qu'on ait contacté quelgu'un d'autre qui a fouillé dans la loi pour trouver un texte clair qui dirait ça, mais c'était dans la jurisprudence et ca l'est depuis lors.

M. Rivest: Mais il y a l'autre aspect qui a été soulevé par des détenteurs de permis; est-ce qu'il n'y a pas danqer j'imagine que ça doit être très réduit comme pratique - d'une espèce de concurrence si tout le monde apporte sa boisson, son vin dans les restaurants, peu importe qu'ils soient ou non détenteurs d'un permis?

M. Bédard: Mais les inconvénients au fait d'apporter son vin sont assez importants. Quelqu'un qui veut aller passer son samedi soir avec son épouse, qui arrive avec son stock au restaurant, se ferait rapidement dire par sa femme qu'elle préférerait rester à la maison. Il y a aussi des inconvénients au fait d'apporter sa boisson.

M. Marx: À Montréal, il y a beaucoup de bons restaurants, de petits restaurants, où on encouraqe les gens à venir avec leur bouteille.

M. Rivest: J'ai déjà fait ca, moi. Vous me rassurez en disant que c'est légal.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau.

M. Kehoe: Le président de la réqie a dit tout à l'heure que ca prenait un avis de 30 jours quand ce n'est pas contesté et 45 jours quand c'est contesté, pour l'émission d'un nouveau permis. Quand il s'agit d'un transfert de permis déjà établi, surtout un hôtel, je sais pertinemment bien que, dans le district judiciaire de Hull, la régie vient siéqer, je pense que ce n'est pas à tous les mois; de toute façon, le délai, jusqu'à récemment du moins, est beaucoup plus long que ça, là il y a déjà un permis.

M. Bédard: La question des délais concernant les transferts nous avait préoccupé d'une façon tout à fait particulière, lorsqu'on a fait la loi et la loi prévoit beaucoup moins de difficultés et de

tracasseries que ce n'était le cas auparavant, de telle façon qu'on m'indique que ca peut, dans certains cas, se faire la journée même.

M. Kehoe: Ce n'est pas toujours le cas, parce que...

M. Bédard: II n'y a pas de publication.

M. Kehoe: II n'y a pas de publication maintenant?

M. Bédard: II n'y a pas de publication nécessaire.

En fait, il suffit que le nouveau propriétaire établisse qu'il répond aux autres exiqences de la loi. Il dépose sa demande et on peut lui donner satisfaction la journée même, puisqu'il n'y a pas de publication dans les journaux, s'il n'y a pas modification au permis, s'il veut exploiter exactement le permis de l'établissement qu'il acquiert...

M. Kehoe: Si c'est identique, ca peut être donné la même journée?

M. Bédard: La journée même, dans la journée.

M. Kehoe: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Dernière question. Des problèmes de permis d'alcool ont été soulevés ici à Québec, bien sûr, mais sans doute ailleurs dans la province, à propos de la "prolifération" des permis. C'est toujours une question d'appréciation personnelle que celle des permis d'alcool dans les sites ou les arrondissements historiques. Je veux dire qu'ici, on a vécu un moratoire ans le Vieux-Québec. Est-ce qu'il y a eu des développements dans la dernière année? Est-ce qu'il y a eu des décisions?

M. Bédard: Le développement qu'il y a eu découle encore de la nouvelle loi. Elle a introduit la notion de tranquillité publique. Quand les citoyens viennent faire la preuve à la régie que la tranquillité publique est menacée, évidemment, c'est une question d'appréciation de la preuve, si les réqisseurs sont convaincus que la tranquillité publique est menacée, le permis demandé est refusé. Dans le cas contraire, il est évidemment accordé.

M. Rivest: Qu'est-ce que vous allez faire dans le cas des citoyens du Vieux-Québec, le comité des citoyens qui s'oppose à l'émission d'un permis rue Sainte-Geneviève?

M. Bédard: Je vais laisser les régisseurs apprécier la preuve qui leur sera présentée?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'aimerais savoir s'il y a des villaqes ou des villes au Québec où il y a la prohibition, où la prohibition existe, où on ne peut pas vendre d'alcool en vertu d'une loi provinciale ou en vertu d'une loi fédérale?

M. Bédard: Je crois qu'il en reste. Un cas a été porté à ma connaissance hier, que je suis à vérifier. C'est à l'île des Soeurs, mais je ne peux vous dire que ça. Le cas a été porté à ma connaissance et j'ai demandé aux conseillers juridiques de faire la vérification.

M. Marx: En vertu de la loi fédérale ou en vertu d'une loi provinciale?

M. Bédard: En vertu d'un règlement municipal adopté en vertu de la loi provinciale.

M. Marx: C'est en vertu de la loi provinciale.

M. Bédard: C'est sous toutes réserves, j'ai à obtenir la vérification.

M. Marx: Je pense que, même aujourd'hui, si les citoyens d'une ville veulent, ils peuvent obtenir la tenue d'un référendum et faire en sorte d'obtenir la prohibition dans la ville. Je pense qu'il y a une ancienne loi fédérale; c'est pourquoi j'ai posé cette question, à savoir si c'est en vigueur quelque part au Québec.

La deuxième question que j'ai à poser, soit à M. le minsitre ou au président de la commission, c'est que, l'an dernier, lors de l'étude des crédits, le député de Saint-Laurent a trouvé qu'il y avait beaucoup d'employés pour le travail qu'on fait à la commission. J'aimerais savoir si on a fait des coupures au niveau de la commission et quel est le résultat. (19 h 45)

M. Bédard: Je pense que la constatation qui a été faite rejoint celle qu'on a faite également qu'il y a beaucoup d'employés qui travaillent dans ce secteur et qu'une politique de rationalisation pourrait nous amener à réduire le personnel. Cependant, il ne faut pas oublier qu'il v a une cinquantaine d'enquêteurs-inspecteurs qui font la vérification des établissements pour voir s'ils sont bien tenus, ce sont des contrôles d'exploitation. Des inspections, c'est toujours un peu subjectif, on pourrait avoir 5000 inspecteurs et estimer qu'on n'en aurait pas assez, en avoir 5 et estimer qu'on en aurait suffisamment. Au sujet de la quantité d'inspecteurs, on pense en avoir suffisamment

pour faire un ouvrage de contrôle acceptable, particulièrement avec ERAM et la police de la Communauté urbaine de Montréal.

En ce qui concerne le personnel de bureau chargé de l'étude des demandes, chargé du travail purement administratif, on pense qu'on est capable d'arriver à une compression administrative de beaucoup supérieure à celle qui nous est exigée par les compressions budgétaires actuelles.

M. Marx: Quand vous parlez de contrôle de l'exploitation, cela englobe les questions de moralité et tout ce qu'on fait sur les lieux. Est-ce cela?

M. Bédard: Cela englobe tout l'aspect respect des lois et des règlements relatifs à un débit de boisson et en collaboration avec la brigade de la Sûreté du Québec, qui s'appelle ERAM et les forces de la police de la Communauté urbaine de Montréal.

M. Marx: Juste une dernière question. Est-ce que vous avez moins d'employés cette année que l'an dernier, ou le même nombre ou plus?

M. Bédard: Nous en avons douze de moins à ce moment.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Louis.

M. Blank: Quand vous parlez de la collaboration de la CUM, est-ce gue c'est une escouade spéciale?

M. Bédard: Oui, c'est avec l'escouade chargée de la moralité ou de la surveillance des débits de boisson sur le territoire de la communauté urbaine.

M. Blank: Est-ce gue vous suivez les agissements de cette escouade? J'ai vu dans certaines occasions gu'on a utilisé la loi des ligueurs pour d'autres fins.

M. Bédard: Généralement, lorsqu'il y a des opérations d'application de la loi, des infractions en matière de boissons alcooligues ou de la Loi sur les permis d'alcool ou des règlements, c'est coordonné avec notre bureau. L'un de nos inspecteurs accompagne généralement les forces de la SPCUM lorsqu'elles agissent là-dedans. Il peut arriver évidemment qu'elles le fassent. Nous n'avons évidemment aucun contrôle sur la police de la Communauté urbaine de Montréal.

M. Blank: Avez-vous eu des plaintes de vos inspecteurs?

M. Bédard: Non.

M. Blank: Sur un autre sujet, je constate par les journaux et Dar les lettres que j'ai reçues de mon comté, dans mon comté, on a beaucoup de "street sales". On ferme une rue commerciale et on met sur les trottoirs toutes les affaires. C'est une vente du trottoir, particulièrement sur la rue Saint-Laurent. Cette année, on n'avait pas le droit de vendre de la boisson sur la rue, nonobstant que la ville de Montréal veut passer un rèqlement qui l'autoriserait. Est-ce votre intention de demander au ministre de faire un amendement à la loi de donner droit à ces qens de faire cela durant cette période? Vous n'avez pas le droit actuellement.

M. Bédard: Non, ce n'est pas notre intention, parce que la loi le prévoit déjà. On dit que pour vendre des boissons alcooliques, il faut être soit propriétaire, soit locataire du terrain où on se trouve, ou avoir la permission de celui qui est propriétaire du terrain. Si la ville de Montréal passait un règlement permettant la vente de boissons sur une partie qui est sa propriété, cela constituerait l'autorisation prévue dans la loi et la régie pourrait donner l'autorisation.

M. Blank: Oui, mais vous donnez un permis de terrasse. C'est un permis permanent. On ne parle pas d'un permis permanent, on parle d'un permis de deux ou trois jours.

M. Bédard: À ce moment, ce serait un permis de réunion pour l'événement gui amènerait des qens sur le trottoir.

M. Blank: Nonobstant le fait qu'il se vend... Je ne parle pas d'une réunion. Normalement, on le donne.

M. Bédard: Oui, mais c'est un permis de réunion. Il est appelé peut-être improprement "permis de réunion". Cela devrait, comme en anglais, être appelé "special event permit", un permis pour une activité spéciale.

M. Blank: Cela veut dire que je peux informer mes gens de la rue Saint-Laurent que s'ils obtiennent la permission de la ville de Montréal, ils peuvent avoir un permis de réunion de votre part.

M. Bédard: Oui, c'est permis dans notre réglementation et notre loi.

M. Rivest: Combien avez-vous d'employés cette année? C'est parce qu'il y a une espèce de petit imbroglio. Dans le livre des crédits, on nous dit que vous avez le même nombre, 183 l'an passé. Par contre, il y en a 13 qui sont disparus.

M. Bédard: Nous en avions 184 l'année dernière et nous en sommes en 172.

M. Rivest: Le livre des crédits indique 183 deux fois.

M. Bédard: C'est déjà de l'histoire ancienne. Au moment où il a été préparé...

M. Rivest: On ne peut pas se fier au livre des crédits.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est adopté?

M. Blank: J'ajouterais une chose. J'ai reçu à mon bureau pour la première fois il y a quelques semaines des jugements par écrit de la Régie des permis d'alcool. Avant, il n'y avait aucune jurisprudence. Les avocats étaient pris... Chaque cas était un cas d'espèce. Maintenant, avec cette jurisprudence qui est fournie par la régie, je peux féliciter M. Laflamme.

M. Bédard: Vous avez même des consultations gratuites à l'occasion de ces crédits, M. le député.

M. Blank: Ce sera pour mes électeurs. Quand mes électeurs me demandent conseil, il n'y a pas de facture.

M. Bédard: Je crois, M. le Président, que ce qui nous a été dit par M. le président, que nous remercions de sa présence, illustre bien la nécessité qu'il y avait de faire une réforme concernant cette loi et, pour le moment, on ne peut que s'en féliciter.

M. Rivest: On vous félicite.

M. Marx: Est-ce que vous avez fait des études sur ce projet de loi?

M. Bédard: Oui, avant de procéder, nous avons fait beaucoup d'études et si la loi s'avère aussi efficace, c'est parce qu'on savait où on allait.

M. Marx: M. le ministre peut-il nous fournir des copies de ces études, cela rendra notre travail plus...

M. Bédard: M. le député de D'Arcy McGee est curieux mais pas très travaillant, parce qu'il devrait savoir que toutes les études ont été rendues publiques quand on a fait l'étude de la loi.

M. Marx: Je parle des études qui n'ont pas été rendues publiques. Est-ce que cela existe chez vous?

M. Blank: Est-ce que le ministre est aussi à la réforme parlementaire?

M. Bédard: Réforme électorale. On ne discutera pas de la réforme électorale en discutant des alcools, s'il vous plaît.

M. Blank: Non, concernant ce que le député de D'Arcy McGee demande, j'ai une suggestion à faire au gouvernement. À l'Assemblée législative de l'Ontario, il y a un règlement de la Chambre qui dit: Après qu'une décision est prise par le Conseil des ministres, toutes les études qui donnent droit à cette décision sont données aux députés.

M. Bédard: C'est intéressant.

M. Marx: Le gouvernement est plus transparent en Ontario qu'au Québec.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est adopté?

M. Bédard: Nos députés ont tout ce qu'ils demandent...

M. Blank: Tout pour certains députés.

M. Bédard: ...tout ce qu'il faut pour pouvoir apprécier ou encore évaluer...

M. Marx: II faut dire cela au député de Sainte-Marie. En Chambre l'autre jour, il a dit que les députés n'ont pas tout ce qu'ils demandent et tout ce qu'ils font...

M. Rivest: Le député de Sainte-Marie n'est pas représentatif du caucus du Parti québécois. Le caucus est beaucoup plus servile.

M. Bédard: Le député de Sainte-Marie est un très bon député, d'ailleurs, les dernières élections l'ont prouvé amplement.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est adopté?

M. Rivest: Le député de Sainte-Marie n'est pas servile au pouvoir, il exerce sa vigilence critique, il faut quand même lui rendre cet hommage.

M. Bédard: Personne n'est servile au Parti québécois, la population l'a compris.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est adopté?

Une voix: Adopté.

Garde des détenus

et réinsertion sociale

des délinquants

Le Président (M. Desbiens): Adopté. Le

programme 9: Garde des détenus et réinsertion sociale des délinquants.

M. Marx: II y a beaucoup de questions en ce qui concerne le programme 9. On peut commencer par une autre étude qui a été faite par le gouvernement. J'aimerais demander au ministre si l'étude est terminée; elle concerne le projet de construction d'un nouvel édifice carcéral promis pour remplacer le centre de prévention Parthenais. Est-ce que cette étude est terminée?

M. Bédard: Elle est plus que terminée, nous y sommes allés de recommandations qui font l'objet d'une étude à l'heure actuelle au niveau du Conseil du trésor et des Travaux publics.

M. Marx: Ce sera pour remplacer l'édifice sur la rue Parthenais, c'est cela?

M. Bédard: Vous avez...

M. Marx: Cela coûtera combien?

M. Bédard: La construction qu'on envisageait pourrait représenter environ 30 000 000 $.

M. Blank: Vous n'avez pas retenu ma suggestion de le construire en face du palais de justice avec un tunnel.

M. Bédard: Je ne peux pas aller plus loin, mais je comprends...

M. Blank: Parce que le terrain appartient au gouvernement et c'est la meilleure place au monde.

M. Bédard: ...que dans cette période de restrictions budgétaires, ce sont des décisions plus difficiles à prendre...

M. Rlvest: Cela dépend du gouvernement.

M. Bédard: ...mais on va tenir compte des suggestions faites par le député.

M. Blank: Cela fait trois ans que je la fais.

M Marx: ... cela va coûter environ 30 000 000 $ parce que, dans une conférence de presse donnée par votre ministère, on a parlé de 40 000 000 $ et, dans cette année de compressions, il est bon de savoir que vous avez fait une compression avant même que l'édifice soit construit. Je vous félicite une autre fois, M. le ministre.

M. Bédard: Si on additionne toutes vos félicitations, ce sera impressionnant.

M. Marx: Quand je verrai le ministre des Finances, je lui dirai qu'à la Justice on fait des précompressions.

M. Rivest: Des précoupures. M. Marx: Des précoupures.

M. Bédard: Je suis sûr que de telles représentations auront un effet choc sur le ministre des Finances.

M. Rivest: Sur les...

Le Président (M. Desbiens): Vous avez d'autres questions?

M. Marx: Oui, j'ai quelques questions.

M. Rivest: Moi, j'en ai une que je veux poser. Il est survenu au cours des dernières années, au niveau des détenus, toutes sortes de problèmes dans les lieux de détention, toute la question des suicides dans les lieux de détention. Je sais que les responsabilités ne sont pas nécessairement directement celles du ministère de la Justice en tant que tel. J'exclus les prisons fédérales. Il y a également la question des prises d'otages qui, à l'occasion, ont fait l'objet de commentaires élaborés.

D'une façon générale, je voudrais demander au ministre ou au porte-parole du ministère les actes qui ont été posés par le gouvernement du Québec face à ces situations. Je ne veux pas qu'on s'attache à un cas en particulier, mais des recommandations ont été faites à l'occasion par les coroners. Je voudrais savoir, dans le sens constructif des choses, un peu le tyoe de préoccupations que vous avez à ce sujet.

M. Bédard: Comme vous le savez, dans le cas de chacun des suicides, pour prendre cet exemple d'abord, il y a une enquête publique du coroner qui est tenue et nous analysons attentivement les recommandations qui nous sont formulées.

Les recommandations qui nous ont été formulées au cours de la dernière année ont trait spécialement à l'amélioration des services de santé à l'intérieur des établissements de détention que nous dirigeons.

Je voudrais d'abord préciser que dans l'ensemble de nos établissements, même si le problème semble considérable, il y a eu sept suicides durant l'année 1980. Donc, le nombre est à peu près stable au cours des dernières années.

En matière d'amélioration des services de santé, pour suivre les recommandations qui nous sont formulées par les coroners, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le ministère des Affaires sociales. Nous en sommes venus récemment à un protocole

d'entente avec le ministère des Affaires sociales pour que, dans les plus petits établissements de détention principalement, les services de santé nous soient fournis par un établissement de santé, soit un centre hospitalier, soit un centre local de services communautaires. Nous sommes sur le point de signer les premières ententes à Hull et à Saint-Jérôme, ce qui, j'espère, pourra se faire au cours de ce mois-ci.

En matière de prise d'otages, la politique que nous suivons est essentiellement une politique qui vise d'abord, lorsque la situation se produit, à ne pas poser de qestes brusques qui risqueraient de mettre en péril l'intégrité de notre personnel ou des personnes détenues. Nous avons pris l'habitude de travailler en étroite collaboration avec la Sûreté du Québec qui vient à notre aide lorsque se produit une prise d'otages que nous ne pouvons pas dénouer immédiatement. Je dois dire que depuis plusieurs années ces événements, qui sont toujours fort pénibles et fort traumatisants pour ceux qui les vivent, se sont, dans nos établissements, terminés d'une façon relativement heureuse, c'est-à-dire sans effusion de sang, et sans blessures pour notre personnel.

M. Rivest: J'aimerais revenir, si vous le permetttez, sur la question des détenus. Je comprends qu'il y a une dimension santé, mais ce n'est pas la seule. Souvent, à tort ou a raison, on a indiqué que la façon... surtout ceux qui sont en transition, qui attendent leur procès ou qui viennent d'être arrêtés... Je comprends que sur n'importe quel individu cela produit un choc psychologique et c'est sans doute à ce genre de préoccupation à ce niveau, que l'intérêt que vous manifestez pour améliorer les services de santé se situe. Je comprends que c'est la définition que vous donnez.

Mais du côté des attitudes des officiers qui sont en place, des lieux également, des facilités de communication du détenu avec un avocat, il y a eu, au fil de chacun des dossiers, des incidents, des faits qui ont été contredits; il y a des choses de cet ordre qui ont été affirmées. Est-ce que vous vous préoccupez de ce genre de choses, de l'attitude des policiers? (20 heures)

M. Bédard: Lorsgu'on analyse la situation de chacun des suicides qui se sont produits au cours des trois ou cinq dernières années, les circonstances particulières où ces suicides se sont produits, il est extrêmement difficile de dégager des constantes. D'abord, il y a un très petit nombre de personnes impliquées et les situations personnelles varient énormément. Il est peut-être possible de faire en sorte que nous puissions davantage prévenir si, dès l'admission de la personne, nous sommes capables de diagnostiquer que telle personne risque de présenter des tendances suicidaires soit, par exemple, en examinant son histoire antérieure... Généralement, quelqu'un qui se suicide donne des signaux préalables; il s'agit de savoir les capter au bon moment. Nous allons tenter d'intensifier nos mesures de précaution dès l'admission des personnes. Nous ne sommes pas convaincus que nous aurons des résultats probants. Cependant, si nous réussissons à en prévenir quelques-uns, ce sera autant de gagné.

Deuxièmement, nous avons mis beaucoup d'accent pour former notre personnel aux techniques permettant de venir rapidement en aide à quelqu'un qui est découvert en train d'attenter à sa vie. Effectivement, les tentatives de suicide sont beaucoup plus nombreuses que les suicides et nous réussissons, dans bien des cas, à intervenir à temps. Grâce aux techniques de respiration artificielle, par exemple, de transport rapide en centre hospitalier, d'intervention rapide des médecins ou des infirmiers qui sont dans nos établissements, nous avons réussi, à de nombreuses occasions, à sauver la vie de personnes qui attentaient à leur vie.

M. Rivest: Vous me permettez? Est-ce que, dans l'ordre des moyens, vous avez actuellement dans les crédits - parce que cela implique des moyens, vous nous avez parlé des accords que vous avez signés avec les centres de santé communautaire ou les hôpitaux - dans l'ordre des moyens financiers, au niveau du personnel également.. Prenez, par exemple, comme ici à Québec ou à Montréal, raison de plus, dans des qrands centres comme ceux-là, il y a une circulation extrêmement dense de prévenus qui vont et viennent. Finalement, peu importe la nature même de l'infraction puisqu'une personne, pour toutes sortes de raisons qui lui sont propres - ce peut être une infraction bénigne - sa réaction est telle... Dans quelle mesure, sur le plan de la sécurité parce que vous devez traiter tous les cas, il y a un volume imposant de cas... Est-ce que vous avez des effectifs, des moyens, des crédits additionnels pour essayer d'avancer? C'est sûr que ceux que vous avez résorbés, enfin que vous avez évités, on ne vous en félicitera jamais parce que jamais personne le saura. On est plus porté à faire état des cas qui, malheureusement, ont...

M. Bédard: Dans les grands établissements comme les trois établissements qui sont à Montréal, soit Bordeaux, Parthenais, Tanguay, le Centre de réhabilitation de Waterloo et le Centre de détention de Québec, qui ont une capacité de 135 personnes ou jusqu'à 850 personnes dans le cas de Bordeaux, nous assumons, à même notre personnel, les services de santé. Il

n'est pas question dans ces établissements qui requièrent la présence de médecins ou d'infirmiers à temps plein de passer des ententes avec des établissements des affaires sociales. C'est dans le cas de petits établissements - la majorité de nos établissements sont de petits établissements d'une capacité de moins de 60 places - que ce protocole d'entente dont j'ai parlé pourra s'appliquer.

M. Rivest: Est-ce qu'il y a d'autres questions là-dessus?

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Ce n'est pas une question qui peut être localisée, mais un problème quand même assez sérieux et mon confrère de D'Arcy McGee pourra renchérir. Apparemment, en octobre 1980, le Conseil du trésor avait autorisé, dans son budget, la construction d'un centre de détention à LaSalle, naturellement sans consulter la population, vu que cela se trouve dans un quartier résidentiel ou presque résidentiel. J'aimerais savoir où en est rendu le dossier là-dessus parce que je reçois encore des appels téléphoniques tous les jours. Les personnes ont signé une pétition de 13 000 noms contre la construction de ce centre de détention parce que c'est quand même à proximité de leur résidence, et il peut y avoir des prises d'otaqes, etc. J'aimerais savoir ce qui arrive dans le cas de LaSalle.

M. Bédard: Effectivement, une décision avait été prise en ce sens. Malheureusement, le problème a été un peu trop politisé, ce qui n'a pas permis à chacun des arguments, quel qu'il soit, de se faire valoir à juste titre. C'est pourquoi nous allons recommencer une consultation avec la population et essayer de faire valoir tous les arguments qui militeraient en faveur de la réalisation de cette décision. Il y a un phénomène assez curieux: chaque fois qu'il est question de l'établissement d'une institution de détention, il y a toujours, au niveau de la population, certaines réactions négatives. Il faut le comprendre parce que bien des gens croient que la mise en place d'une telle institution dans leur voisinaqe peut constituer des dangers de toutes sortes, ce qui n'est pas le cas parce qu'on assiste, lorsque vient le temps de fermer une prison, à la même réaction de la population, mais dans le sens contraire; elle s'oppose à la fermeture pour d'autres raisons, à ce moment-là.

Maintenant, à la condition, de part et d'autre, de ne pas politiser le débat...

M. Marx: II n'est pas question de politiser le débat.

M. Bédard: Non, mais durant la campagne... Ce que je veux dire...

M. Marx: Vous avez parlé...

M. Bédard: Laissez-moi terminer et vous répondrez après. Je vous dis ce que je pense.

M. Marx: Oui, mais ça va prendre six des huit heures.

M. Bédard: Je ne vous ai pas dit où était la politisation, je vous dis ce que je pense. Je crois que durant la campaqne électorale on a trop politisé ce problème.

M. Marx: D'accord, mais cela dévalorise la position de 13 000 personnes.

M. Bédard: Et cela n'a pas permis, je crois, à chacune des argumentations de se faire valoir à son mérite. Cela peut expliquer, en grande partie, une pétition à laquelle réfère le député et qui a été acheminée au ministère, pétition dont nous tenons compte parce qu'effectivement nous allons recommencer une sensibilisation, une consultation de la population.

M. Dauphin: Cela aurait peut-être été bon de la consulter avant de prendre la décision.

M. Bédard: L'intention du ministère était dans ce sens. Cette consultation a presque concordé avec une période que vous connaissez bien, qui est plus agitée, la période électorale. Je crois que ca n'a pas aidé, tout simplement. Je n'ai pas de reproche à faire à qui que ce soit.

M. Dauphin: Mais la bâtisse n'a pas été achetée? Est-ce que vous êtes propriétaire de la bâtisse, maintenant?

M. Bédard: Oui, nous avons acquis cette bâtisse du fédéral et nous l'avons payée.

M. Marx: Combien, M. le ministre?

M. Bédard: Autour de 800 000 $. Nous pensons que l'emploi de ces bâtisses aux fins d'institutions de détention est nécessaire. Nous allons essayer de l'expliquer le mieux possible à la population.

M. Dauphin: C'est parce qu'on nous avait apporté l'exemple de Cowansville. Maintenant, Cowansville est à peu près à cinq milles des quartiers résidentiels; tandis que là, dans la ville de LaSalle, c'est en plein coeur d'un quartier résidentiel.

M. Charbonneau: Bordeaux, c'est en plein coeur d'un quartier résidentiel et

personne ne s'en plaint.

M. Dauphin: Où cela?

M. Rivest: Là, le problème est qu'il y en a qui s'en plaignent.

M. Charbonneau: Prenez Saint-Vincent-de-Paul, il y a des pénitenciers à sécurité maximale et supermaximale.

M. Blank: Quand Bordeaux a été construit, il n'y avait personne là.

M. Bédard: Une constatation...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le ministre.

M. Bédard: ... qui a été faite et qui n'est pas de nature à alerter une population, mais, au contraire, à la rassurer, c'est que la preuve est faite que, dans l'arrondissement où se trouve située une institution de détention, la criminalité est beaucoup moins grande, justement à cause de la proximité des lieux.

Durant la période électorale à laquelle j'ai référé tout à l'heure, on véhiculait auprès de la population le danger que constituaient les évasions, la proximité d'individus qui se doivent d'être incarcérés comme représentant un danqer, alors que ce n'est pas le cas. On sait très bien, lorsqu'il y a des évasions, que la première chose que font les gens qui s'évadent, c'est quitter les lieux et s'en aller loin; ce n'est pas rester dans le voisinage.

M. Dauphin: Maintenant, si toute la population environnante se prononce contre à la suite des différentes consultations que vous allez devoir faire, d'après ce que vous me dites, allez-vous la construire quand même?

M. Bédard: Je suis convaincu qu'une consultation qui se fait en dehors d'une aqitation inappropriée va donner des résultats positifs. Nous allons faire tout ce qui est humainement possible pour acheminer toutes les données aux citoyens pour qu'ils soient bien au fait. Nous comptons que ceci contribuera à changer l'impression actuelle.

M. Rivest: C'est 13 000 personnes. C'est difficile.

M. Dauphin: Je comprends ce que vous voulez dire, mais si ce n'est pas leur souhait, naturellement...

M. Marx: Si ce n'est pas le souhait des citoyens, qu'est-ce que vous allez faire? Vous allez construire ou ne pas construire? Supposons que 13 0.00 personnes signent une autre fois, qu'est-ce que vous allez dire? On aime la participation des citoyens, mais quand ce n'est pas quidé, on l'aime moins. C'est ça qu'on pose comme question.

M. Bédard: II y a un temps pour chaque chose. Il y a un temps pour les décisions.

M. Marx: Inutile de dire aux citoyens: S'il y a 15 000 citoyens parmi vous qui ne veulent pas cette prison, on ne va pas y construire la prison.

M. Bédard: Si vous avez une pétition de 15 000 qui la veulent et de 15 000 qui ne la veulent pas, qu'est-ce que vous faites? Je pense que ce n'est pas comme ca qu'il faut aborder le dossier. Je ne vous trouve pas très sérieux, au niveau de l'Opposition, d'aborder le sujet de cette façon.

M. Marx: On va tirer à pile ou face! On a une pétition de 13 000 noms et vous avez rejeté ca du revers de la main en disant que c'était durant une période politisée.

M. Charbonneau: Au contraire, le ministre a décidé, M. le Président. Le ministre vient d'indiquer qu'ayant reçu la pétition, il accepte de ne pas donner suite immédiatement au projet, de regarder la chose avec les gens, de leur donner plus d'information et de voir avec eux autres. C'est contraire à l'interprétation que vous donnez.

M. Dauphin: Pour continuer à user de mon droit de parole, si vous permettez, on ne tient pas à vous dire qu'on est contre l'implantation de prisons...

M. Bédard: Je trouve ces propos beaucoup plus sérieux.

M. Dauphin: ... sans aller dans le désert, il y aurait peut-être possibilité d'envisaqer des sites peut-être moins résidentiels. On nous a apporté, à un moment donné, l'aspect économique. Après consultation avec les autorités municipales, il était fortement question pour celles-ci d'installer des ateliers municipaux à ces endroits. On comprend que Bordeaux est surpeuplé, mais ce qu'on dit, c'est que, d'accord, il faut construire d'autres prisons sans nécessairement se concentrer sur un quartier résidentiel. On comprend cette population de se prononcer contre, elle a certaines hésitations, certaines craintes qu'on peut comprendre, mais votre décision avait été prise sans consulter les intéressés.

M. Bédard: C'est ce que je vous ai dit tout à l'heure. Il faut les comprendre, mais c'est ce qui nous incite aussi à revenir à la

charge en termes de consultation, d'information de la population en espérant que le résultat sera positif.

M. Dauphin: J'aurais juste une dernière question. Est-ce que c'est vrai que le directeur a été engaqé il y a déjà plusieurs mois?

M. Bédard: II y a une personne qui travaille sur ce projet et qui travaillait anciennement à l'établissement de Bordeaux. Il n'y a évidemment pas de directeur à l'établissement de LaSalle parce qu'il n'y a pas d'établissement à LaSalle. Si jamais l'établissement se réalise, il y aura, par les mécanismes habituels de nomination et de recrutement de la fonction publique, quelqu'un qui sera recruté. À ce moment-ci, il y a un chargé du projet de LaSalle, une personne qui va travailler en particulier avec les groupes de population pour faire l'information et l'animation dont on vient de parler.

M. Blank: À part cela, il y a des ingénieurs et des architectes qui travaillent sur les plans?

M. Bédard: Présentement? Non.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: J'ai une autre question. Sans doute que les collègues ministériels du ministre dans la région de Québec en ont parlé. C'est le Centre jeunesse de Tilly, qui vit une situation assez bizarre depuis un certain nombre d'années. Il y a là un conflit syndical. Je sais que le ministère des Affaires sociales a un certain droit de regard sur cette institution, mais, tout de même, les gens ont envoyé un mémoire au ministre de la Justice. D'ailleurs, dans ce dossier, ce qui a été représenté, c'est qu'il y a de la discrimination parce que c'est un centre à sécurité maximale, enfin, à sécurité assez serrée pour les jeunes à Québec. On tente actuellement - il y a des droits syndicaux en cause, on ne demande pas au ministre de se prononcer là-dessus - de faire en sorte d'éliminer les femmes qui y travaillent. Le syndicat et certains porte-parole se plaiqnent parce que le directeur de l'institution aurait fait valoir que les femmes ne pouvaient pas travailler dans cette institution, travailler à la réhabilitation des jeunes délinquants, parce qu'elles n'auraient pas la force physique ou quelque chose comme ça. On nous a fait ces représentations. Je les livre au ministre sous toutes réserves parce que je n'ai pas l'autre côté de la médaille, mais j'ai quand même indiqué aux gens que je porterais ce dossier à l'attention du ministre. (20 h 15)

M. Bédard: Effectivement, on a déjà porté le problème à mon attention, mais je dois vous dire que cela relève exclusivement du ministère des Affaires sociales. Je sais que vos collègues ont eu l'occasion d'en informer le ministre des Affaires sociales qui a à prendre les décisions en conséquence.

M. Rivest: D'accord, c'est un dossier particulier. Une autre question. Vous avez parlé, je pense, dans vos notes d'introduction des efforts que vous faites dans les prisons mêmes sur la réhabilitation, les emplois communautaires, etc. Je voudrais, puisque le ministre...

M. Bédard: Le travail rémunéré, etc., tout cela.

M. Rivest: ... a été bien sibyllin dans ses remarques préliminaires - je ne lui en fais pas reproche - savoir quelle est l'importance de ce programme en regard de la pratique habituelle, c'est-à-dire en termes de budget, l'effectif possible des détenus qui pourront être admis à ce programme. Est-ce que le ministre, très rapidement pourrait préciser?

M. Bédard: Vous me demandez de vous préciser le travail rémunéré ou...

M. Rivest: Le travail rémunéré ou ce que vous appelez dans le jargon un travail communautaire. En deux mots, parce qu'il est tard.

M. Bédard: II y a deux programmes, celui des travaux rémunérés à l'intention des détenus qui sont dans les établissements de détention du Québec et aussi le programme de sentences de travaux communautaires qui a été développé au cours des dernières années. Au niveau des travaux rémunérés, pour vous donner une idée de leur importance, les détenus du Québec qui ont travaillé l'an dernier ont gagné en rémunération environ 1 300. 000 $ et au-delà de 2000 détenus ont participé à ce programme dans les divers établissements de détention du Québec.

M. Rivest: Sur combien de détenus pour ce programme?

M. Bédard: À peu près 30 000 personnes sont passées dans nos établissements de détention l'an dernier. Cependant, il faut comprendre qu'à peu près le tiers sont des personnes prévenues et d'autres y viennent pour un très court séjour. Ce programme s'adresse aux personnes qui séjournent pendant un certain temps dans les établissements de détention.

M. Rivest: Et elles sont non prévenues, évidemment.

M. Rédard: Et non prévenues.

M. Rivest: Là-dessus, je voudrais simplennent dire...

M. Bédard: Les résultats obtenus à partir de la législation que nous avions faite.

M. Rivest: ...qu'au Québec - je ne sais pas ce qui se fait au niveau fédéral - au ministère, au cours des dernières années, on a manifesté une ouverture aux problèmes humains des détenus. Je pense bien qu'on ne peut pas faire autrement que d'encourager le ministère à se préoccuper de cela. Comme député, j'ai eu l'occasion de me rendre à Orsainville au moment du référendum, de causer avec les détenus et de voir pour la première fois ce qu'était une institution de détention. Effectivement, c'est la dimension première, mais, sur nos prisons, notre juridiction à ce titre est quand même assez limitée. Moi, ce qui m'avait bien frappé, chez ces 200 ou 300 détenus, c'était leur caractère, ils sont très jeunes et ils sont là pour des sentences très... Mais comme ce sont des infractions, pas seulement des infractions, mais aussi des actes criminels qui n'ont pas la gravité d'autres actes de ce côté-là, il me semble que le ministère - il a déjà commencé - ne devrait nullement hésiter à voter les budgets pour faire en sorte de réhabiliter cette portion de notre jeunesse qui aboutit malheureusement là... On a la chance, même si ce n'est pas sur une très grande échelle, de faire un travail qui ait peut-être davantage de qualité pour que cela devienne une priorité, le cas des détenus.

M. Bédard: Dans le domaine correctionnel, depuis trois ou quatre ans, je peux honnêtement dire que la réinsertion sociale a constitué une préoccupation constante en ce qui me reqarde. Au-delà du coût économique que représente une personne en prison, il y a également le coût social qui est énorme. Je crois que ces programmes, soit au niveau des travaux communautaires ou encore du travail rémunéré, contribuent et vont continuer de contribuer pour beaucoup à faciliter cette réinsertion sociale qui est nécessaire.

Le Président (M. Desbiens): II y avait une entente pour terminer à 20 h 15.

M. Marx: Je veux seulement...

Le Président (M. Desbiens): Une couple de questions?

M. Marx: ...poser une petite question, parce que le sous-ministre est ici ce soir et je ne veux oas qu'il revienne demain, si ce n'est pas nécessaire. J'ai seulement deux petites questions.

On sait qu'il y a des problèmes dans nos prisons en ce qui concerne les droits des prisonniers. Le ministre est-il en faveur d'une charte des droits des détenus? C'est une question assez simple, assez précise et qui demande une réponse précise.

M. Bédard: J'ai posé plusieurs gestes dans le sens que les droits des détenus soient respectés. Et, chose qui n'existait pas jusqu'à maintenant, on peut dire que dans les institutions pénitenciaires, dès l'entrée des détenus, un travail particulier se fait concernant l'information des détenus sur leurs droits.

M. Marx: Pour protéger davantage les droits des détenus, est-ce que vous êtes en faveur d'une charte des droits des détenus?

M. Bédard: Je ne crois pas qu'il y ait nécessité d'une charte...

M. Marx: II n'y a pas de nécessité... M. Bédard: ...spécifiquement parlant.

M. Marx: Vous n'êtes pas d'accord, donc. Est-ce que vous êtes...

M. Bédard: Je ne vous dis pas que je ne suis pas d'accord...

M. Marx: Si ce n'est pas nécessaire, vous n'êtes pas d'accord. Je trouve que ça pourrait être nécessaire. Peut-être que le ministre veut faire une étude, je ne sais pas. L'autre façon de voir le problème, et on fait ca dans certaines juridictions, c'est de nommer un protecteur du citoyen pour les prisons. Est-ce que le ministre est en faveur de nommer un protecteur du citoyen pour les prisonniers qui tombent sous sa juridiction au Québec?

M. Bédard: II n'y a pas de problème majeur. Il y a déjà un Protecteur du citoyen qui existe pour l'ensemble de la population du Québec. S'il faut commencer à nommer des protecteurs du citoyen pour chaque catégorie de citoyens...

M. Rivest: Oui, mais le Protecteur du citoyen...

M. Marx: Non, mais il y a une différence. Il y des chartes des droits des patients dans les hôpitaux...

M. Bédard: Laissez-moi terminer. Je pense que ça devient, au bout de la ligne, très peu raisonnable. Dans ce sens là je ne trouve pas la représentation du député de D'Arcy McGee très raisonnable...

M. Marx: Au fédéral, par exemple, il y a un protecteur du citoyen pour les prisonniers et je pense que ce n'est pas...

M. Bédard: Mais, nous en avons un ici, nous avons un Protecteur du citoyen.

M. Marx: II y a des protecteurs du citoyen et il y a quelqu'un de spécial pour les pénitenciers. Peut-être que le sous-ministre aimerait...

M. Bédard: Quand bien même vous me diriez qu'au fédéral il y a quelqu'un qui s'occupe d'une façon spéciale des pénitenciers, ici au Québec, je pense que c'est encore mieux, nous avons un Protecteur du citoyen auquel chaque citoyen peut s'adresser s'il se croit lésé.

M. Marx: Oui, mais je pense que pour les prisons ça prendrait quelqu'un de vraiment spécial. C'est difficile pour les prisonniers d'avoir accès au Protecteur du citoyen.

M. Bédard: Je ne partage pas votre philosophie parce que vous avez le genre de philosophie qui marginalise les gens et je n'ai pas l'intention de "marginaliser"...

M. Marx: Comment ça, je "marginalise"?

M. Bédard: Laissez-moi donc terminer.

M. Marx: Vous m'accusez de quelque chose.

M. Bédard: Je n'ai pas l'intention de "marginaliser" les détenus. Ce sont des citoyens à part entière, placés dans des situations particulières, qui ont toute latitude possible de faire valoir leurs droits. Je vous dis et je le répète, que ça ne s'était jamais fait sous d'autres gouvernements qui nous ont précédé. Mais depuis quelques années, il y a un travail tout à fait particulier qui se fait à la suite, d'ailleurs, d'une recommandation du Protecteur du citoyen, de sorte que lorsqu'un détenu entre en prison il soit bien mis au courant de tous ses droits, de tous ses devoirs aussi. Et nous le faisons.

Il y a, au bureau du Protecteur du citoyen du Québec, une personne qui est en particulier chargée du secteur des établissements de détention. Chaque année, au cours, je pense, des quatre dernières années et ce sera encore vrai cette année, le Protecteur du citoyen du Québec a consacré et consacre un chapitre particulier de son rapport annuel à une question qu'il étudie davantage en profondeur et qui concerne les établissements de détention du Québec. Le Protecteur du citoyen analyse chacune des plaintes qui lui sont déférées et il nous semble que, comme il est situé à l'extérieur du ministère de la Justice, sa crédibilité vis-à-vis des détenus qui portent plainte est un peu plus grande. Au niveau du gouvernement fédéral, le protecteur du citoyen se trouve à l'intérieur du service correctionnel du Canada, donc le service responsable d'administrer les pénitenciers, et il semble justement qu'il y a des questions de crédibilité qui ne se posent pas ici au Québec étant donné que le Protecteur du citoyen ne relève pas directement du ministère de la Justice et est vu comme un analyste plus impartial que s'il travaillait sous notre propre juridiction.

M. Marx: Oui, mais le bureau du Protecteur du citoyen est débordé. De toute façon, je retiens de ca que le ministre est contre une charte des droits des détenus parce qu'il ne trouve pas ca nécessaire. Il trouve que le mécanisme qui existe au Québec est suffisant en ce qui concerne la protection des droits des prisonniers par le bureau du Protecteur du citoyen du Québec. Donc, il n'y a rien à faire dans ce dossier parce que ça marche assez bien et que le ministre est satisfait.

M. Bédard: Je crois que vous êtes en mesure de vous rendre compte que cela marche assez bien, effectivement.

M. Marx: Moi, je ne pense pas que cela marche assez bien, mais j'essaie de résumer vos propos.

M. Bédard: II n'y a rien qui marche avec vous, mais peu importe.

M. Rivest: II y a un aspect que je ne voudrais pas qu'on laisse.

M. Bédard: Je voudrais peut-être corriger une impression qu'a laissée le député de Jean-Talon tout à l'heure concernant le travail rémunéré. Le fédéral n'a pas de politique de travail rémunéré au niveau des institutions.

M. Rivest: Je n'ai pas dit cela.

M. Marx: Juste une question sur le travail rémunéré.

M. Bédard: C'est à partir d'une loi que j'ai fait adopter ici à l'Assemblée nationale.

M. Rivest: Je voudrais dire un mot juste avant, M. le Président. Vous "ne permettrez au moins de le mentionner, parce que j'ai revu M. Pion, représentant des gardiens de prison, qui était ici. Où en sont rendues les représentations qui vous sont faites?

M. Bédard: Nous sommes dans une période de négociation. Mon collègue sait très bien que je ne ferai pas de remarques.

M. Rivest: Vous n'avez rien? Vous n'avez aucun...?

M. Bédard: On ne commencera pas à négocier sur la place publique. Vous êtes d'accord? À moins que, rendu dans l'Opposition, vous n'ayez vraiment changé complètement vos principes.

M. Rivest: On a eu des mauvais exemples.

Le Président (M. Desbiens): La commission de la justice ajourne ses travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 20 h 27)

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