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(Quinze heures vingt-six minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre,
messieurs!
La commission parlementaire permanente de la justice est réunie
pour étudier les crédits budgétaires du ministère
de la Justice pour l'année 1981-1982.
Les membres de la commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M.
Bisaillon (Sainte-Marie) à la place de M. Boucher
(Rivière-du-Loup), M. Marguis (Matapédia) à la place de M.
Brouillet (Chauveau), M. Dussault (Châteauguay) à la place de M.
Reaumier (Nicolet), M. Charbonneau (Verchères), M. Dauphin (Marguette),
Mme Juneau (Johnson), M. Kehoe (Chapleau) M. Lafrenière (Ungava) M. Marx
(D'Arcy McGee), M. Rivest (Jean-Talon) à la place de M. Paradis
(Brome-Missisquoi).
Les intervenants: M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Blank (Saint-Louis),
M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme Lachapelle (Dorion),
M. Martel (Richelieu) et M. Pagé (Portneuf).
Il serait dans l'ordre de désigner un rapporteur maintenant. Mme
Juneau vous voulez bien être le rapporteur.
M. Bédard: On ne peut pas être mieux servi.
Le Président (M. Desbiens): Alors Mme Juneau
(Johnson).
Alors l'entente est gue vous ayez une intervention auprès des
intervenants de la part du ministre et du représentant M...
Remarques préliminaires M. Marc-André
Bédard
M. Bédard: M. le Président, tel gue c'est la
coutume, dans quelques instants je ferai état du travail et des
réalisations qui ont pu être faits au ministère de la
Justice. Comme mon sentiment est à l'effet que tout cela a
été possible grâce à un travail d'équipe,
pour le bénéfice des membres de la commission, je voudrais
présenter mes principaux collaborateurs. M. le sous-ministre, M. Daniel
Jacoby; le sous-ministre associé à l'administration et
registraire, M. Germain Hallé; le directeur du budget, très
important en période de restrictions budgétaires, M. Jean-Claude
Dubois; le nouveau sous-ministre associé au service judiciaire, M.
Jacgues
Lachapelle; le sous-ministre associé aux affaires criminelles, M.
Rémy Bouchard; le sous-ministre associé au personnel, M.
Clément Ménard, nouveau sous-ministre; le sous-ministre
associé à la probation et aux établissements de
détention, M. Robert Ouellet, qui est absent temporairement; le
sous-ministre associé aux affaires civiles et pénales, M.
Paul-Arthur Gendreau; le sous-ministre associé aux affaires
législatives, Me Alain Bisson; le sous-ministre associé à
la sécurité publique, M. Pierre Verdon; le directeur
général de la Sûreté du Québec qui viendra
nous rejoindre un peu plus tard; le secrétaire du Conseil de la
magistrature, M. Jean-Pierre Barrette; le président du Tribunal de
l'expropriation, le juge Guy Dorion; la vice-présidente de la Commission
des droits de la personne, qui assure l'intérim de la présidence,
Mme Francine Fournier; le président du Comité de protection de la
jeunesse, M. Jacques Tellier; le président de la Commission des services
juridiques, Me Yves Lafontaine, qui sera avec nous ce soir; le
secrétaire et directeur qénéral du fonds d'aide au recours
collectif, M. Yves Lauzon; le président de la Régie des permis
d'alcool, Me Ghislain K. Laflamme; le président de la Commission
guébécoise des libérations conditionnelles, M. Maurice
Gauthier; le président de la Commission de refonte des lois et
règlements, M. Roch Rioux; le président de la Commission de
police du Québec, le juge Roger Gosselin; et le directeur du Bureau de
la protection civile du Québec, M. Paul Brown.
M. le Président... (15 h 30)
M. Rivest: M. le Président, je pense gue ma
collègue, la députée de Johnson, va être d'accord
avec moi. Je trouve que la direction du ministère de la Justice
rassemble une équipe extrêmement compétente, mais je n'y
vois pas beaucoup de femmes.
M. Bédard: On aura à discuter de ces dossiers au
sujet de la place faite aux femmes au ministère de la Justice. Vous
serez à même de constater que, sur ce point précis, le
ministère de la Justice est à l'avant-garde de tous les
ministères au Québec. D'ailleurs, c'est à ce
ministère gu'a eu lieu la première expérience pilote et la
première préoccupation en ce sens.
M. le Président, je remercie mon collègue de l'Opposition
de m'avoir permis de
passer mon message.
Au cours de la dernière année financière, le
ministère de la Justice a entrepris une série d'actions visant
particulièrement à humaniser l'administration de la justice et
à rendre plus accessible aux citoyens l'ensemble des services
juridiques.
Dans le bilan des activités du ministère que je vais vous
livrer, vous serez en mesure de constater cette préoccupation constante
qui est la nôtre, de fournir à la clientèle les meilleurs
services possible, ceci bien sûr, en tenant compte des restrictions
budgétaires que les gouvernements doivent s'imposer dans la conjoncture
actuelle.
Les sujets sur lesquels j'insisterai seront la législation, la
lutte contre la criminalité, la violence, l'administration des services
judiciaires, les services correctionnels, le dossier constitutionnel et les
ressources humaines et financières.
À la législation, vous avez été en mesure,
en tant que membres de l'Assemblée nationale, de constater notre
préoccupation majeure au cours de la dernière année. Il
s'agit, bien sûr, du droit de la famille.
Le projet de loi 89 instituant un nouveau Code civil portant
réforme du droit de la famille est issu de l'intérêt
particulier que le ministère a porté aux questions concernant la
famille. C'était l'un des domaines dans le contexte de la réforme
de notre droit civil qui avait souffert le plus de l'éparpillement et du
vieillissement de nos dispositions législatives. C'est pourquoi, dans la
première phase de la réforme, nous avons opté pour
modifier le droit familial. Je n'insiste pas davantage sur cette pièce
législative sinon pour en rappeler les deux principes de base:
premièrement, l'égalité des époux entre eux et
devant la loi, de même que dans la direction morale et matérielle
de la famille et dans la prise en charge des responsabilités familiales;
deuxièmement, la liberté des personnes dans la façon
d'organiser leurs relations familiales de même que dans la prise des
décisions qui concernent la famille.
Conscient cependant que les implications de cette loi devaient
être bien comprises par la population, le ministère a mis sur pied
dès le mois de mars dernier, un programmme d'information et de
publicité destiné à renseigner la population sur le
contenu des dispositions législatives en vigueur depuis le 2 avril 1981.
Ces dispositions visent plus particulièrement les nouvelles
règles sur la célébration du mariage et ses oppositions,
les droits et devoirs des époux, l'effet du mariage en ce qui concerne
la résidence familiale, la filiation, l'obligation alimentaire et
l'autorité parentale. Notre programme d'information qui s'adressse
à la population ainsi qu'aux groupes impliqués vise à
faire connaître le nouveau droit de la famille.
Je vous ferai distribuer dans quelques minutes - il y a eu un retard
explicable -les principales pièces produites dans le cadre de ce
programme d'information publique. En plus d'une affiche et d'une brochure
explicative générale, le ministère a produit trois
dépliants pour informer la population sur les dispositions qui exigent
des démarches précises telles que le changement de nom et la
déclaration de résidence. Un audio-visuel a également
été préparé pour informer les qroupes et les
fonctionnaires qui ont à appliquer et à expliquer la loi aux
citoyens.
Enfin, la revue Justice de ce mois a été consacrée
à ce dossier. J'aimerais vous souliqner en passant que, à la
suite d'un sondage auprès des lecteurs de la revue Justice - on va vous
donner le dernier numéro - le comité d'évaluation des
périodiques du gouvernement, mis sur pied par le Conseil du
trésor, a statué sur le maintien de la revue et a
recommandé qu'on prévoie même son expansion.
Parallèlement à ces travaux et en vue de les
compléter, le ministère de la Justice a mis sur pied un groupe de
travail chargé d'étudier les structures et le fonctionnement d'un
éventuel tribunal de la famille. Ce groupe de travail doit
déposer son rapport au cours de l'année 1981. Dans le domaine du
droit de la famille, je puis vous annoncer, M. le Président, que cette
semaine il y aura le dépôt d'une projet de loi concernant
l'ajustement du Code de procédure civile à la loi 89, ce qui
permettra de mettre en vigueur d'autres dispositions qui, c'est très
compréhensible, n'avaient pu être mises en vigueur justement
à cause du besoin d'adaptation ou d'ajustement du Code de
procédure civile à notre Code civil, la nouvelle loi 89. Ce
dépôt se fera probablement mardi ou mercredi.
M. le Président, l'année 1980 a également
été marquée, dans le secteur du droit de la famille, par
l'adoption de la loi 187, Loi pour favoriser la perception des pensions
alimentaires, en vertu de laquelle le ministère a instauré des
services d'exécution des jugements des pensions alimentaires non
exécutées volontairement. La Direction générale des
services judiciaires a procédé à la désignation de
120 percepteurs répartis dans 56 localités du Québec. Le
service est en fonction depuis le mois de janvier 1981, tel que nous nous y
étions engagés. Une campagne de sensibilisation et de
publicité a été réalisée conjointement avec
le ministère des Communications depuis le début de
l'année. Les quelque 3000 demandes de perception reçues entre le
1er janvier et le 31 mars 1981 témoignent sans aucun doute de la
pertinence du service offert.
Un autre projet a été adopté en 1980, soit le
projet de loi 96, Loi modifiant diverses dispositions législatives.
Outre la mise en application des projets de loi 89 et
183, le ministère a procédé, en 1980, à la
mise en oeuvre des lois sanctionnées en 1979, soit la Loi sur les permis
d'alcool, la Loi sur la protection des personnes et des biens en cas de
sinistre et la Loi modifiant la Loi de police. C'est en vertu de la Loi sur les
permis d'alcool qu'a pu être créée la Régie des
permis d'alcool du Québec qui remplace l'ancienne Commission de
contrôle des permis d'alcool du Québec. Ce remplacement s'est
concrétisé le 1er juin 1980.
Dès le départ, la régie a procédé
à la révision de la réglementation existante et à
l'amélioration de son fonctionnement administratif en vue de les adapter
à l'économie générale de la loi. La régie
s'est dotée de procédures plus simples et elle met l'accent sur
le contrôle des conditions d'exploitation des permis plutôt que sur
leurs conditions de délivrance. Elle porte également un
intérêt particulier à l'ordre et à la
tranquillité publique, de même qu'à la publicité et
aux activités portant sur la vente et la consommation d'alcool.
De son côté, la Loi sur la protection des personnes et des
biens en cas de sinistre crée également un organisme, le Bureau
de la protection civile du Québec. Cet organisme opérationnel
depuis le 1er septembre dernier est chargé d'élaborer une
politique de prévention des sinistres, de mettre en oeuvre cette
politique et d'en coordonner l'exécution. En février dernier,
lors des inondations qui ont occasionné des dégâts un peu
partout au Québec, le Bureau de la protection civile du Québec a
collaboré avec la Sûreté du Québec et Urgence
environnement pour évacuer les familles en danger et prendre les mesures
d'urqence requises pour faire céder les embâcles qui
s'étaient formés sur plusieurs cours d'eau du Québec.
Pour venir en aide aux victimes de ces inondations, le Bureau de la
protection civile du Québec a également administré un
programme d'aide financière, adopté par le gouvernement et
destiné aux particuliers, aux agriculteurs, aux commerçants, aux
petites entreprises et aux municipalités. Le Bureau de la protection
civile a également participé activement à la
préparation de la conférence fédérale-provinciale
des ministres responsables des mesures d'urgence qui s'est tenue à
Ottawa le 5 juin dernier.
Enfin, la Loi modifiant la Loi de police, qui est entrée en
vigueur le 1er juin 1980, constitue une réforme importante sous divers
aspects. En conférant à la Commission de police du Québec
une fonction d'inspection, elle a précisé le mandat de celle-ci
à l'égard de l'efficacité des services de police au
Québec. Par les modifications que cette loi a apportées à
la Loi sur le ministère de la Justice, le rôle de la Direction
générale de sécurité publique a été
précisé, en particulier, quant à la coordination des
activités policières et quant à la prévention de la
criminalité. Il faut aussi retenir, parmi les éléments
majeurs de cette nouvelle loi, une redéfinition des
responsabilités des municipalités du Québec à
l'égard du maintien de services de police sur leurs territoires.
À ce chapitre, plusieurs municipalités se sont
prévalues de la possibilité de requérir du gouvernement
une dispense de maintenir un corps de police. Ces dossiers ont
nécessité des études, tant de la part de la Commission de
police du Québec que de la part de la Direction générale
de la sécurité publique. Plusieurs de ces dossiers sont
maintenant complétés et, sous peu, des décisions seront
prises par le Conseil des ministres relativement aux demandes qui ont
été faites et aux analyses qui en ont découlé.
M. le Président, de par sa vocation, il va de soi que le
ministère de la Justice est particulièrement
intéressé à développer l'accessibilité du
droit et la qualité de la législation. Depuis 1979, un
comité sur le droit à la portée de tous a
été instauré au ministère. Son mandat est
d'élaborer une philosophie de l'accessibilité au droit pour les
justiciables et de proposer des moyens pour la mettre en oeuvre. Ce
comité a poursuivi, pendant l'année 1980, les activités
qu'il avait entreprises en matière de vulgarisation du droit.
L'une des activités les plus intéressantes du
comité pour l'année 1980 a été
l'élaboration, en collaboration avec la Commission des écoles
catholiques du Québec, d'un projet pilote de cours de droit
destinés aux étudiants des niveaux IV et V du secondaire. De
plus, deux qroupes de travail ont produit leurs rapports en 1980. Les impacts
des recommandations formulées par ces deux groupes sont
présentement examinés en vue d'adopter des mesures qui
favoriseront une meilleure accessibilité et une meilleure qualité
de la législation.
Le premier groupe, sur la publication et la diffusion des textes
législatifs et réglementaires, avait pour mandat d'étudier
les moyens de réduire les délais de diffusion de la
législation et de la réglementation au Québec. En plus des
représentants du ministère de la Justice, il était
formé de représentants de la Société
québécoise d'information juridique, du ministère des
Communications, de l'Éditeur officiel et du personnel de
l'Assemblée nationale.
Le mandat du second qroupe de travail visait l'implantation d'un
système informatisé pour le traitement des lois à toutes
les étapes du processus législatif, dans le but de faciliter les
modifications apportées au cours de ce processus. Y étaient
représentés, en plus des organismes mentionnés au qroupe
de travail précédent, la Commission de refonte
des lois et des règlements, la Direction générale
des affaires civiles et pénales, ainsi que le ministère du
Conseil exécutif.
En vue d'améliorer la qualité des textes
législatifs, la Direction générale des affaires
législatives a organisé, en collaboration avec le Conseil de la
langue française, le troisième colloque international sur la
rédaction des lois qui s'est tenu à Pointe-au-Pic, du 7 au 10
septembre 1980. Ce colloque a permis des échanqes entre les juristes du
Québec et leurs collègues des pays européens sur les
aspects linguistigues et culturels de la législation, les
critères de répartition entre la loi et le règlement,
l'informatigue juridique et la traduction des textes législatifs.
Un autre secteur où le ministère a été fort
actif en 1980 est le dossier de la "déréglementation" et de la
paperasse. Dans le cadre des mesures prises par le gouvernement pour contrer
les effets néfastes liés à la croissance de la paperasse
et de la réglementation, la Commission de refonte des lois et des
règlements a accéléré son processus de mise
à jour et de refonte des lois et des règlements. Le
ministère a, en même temps, entrepris un inventaire exhaustif de
la réglementation existante dans chacune de ses directions
générales en vue de reconsidérer son utilité et de
la simplifier au besoin. Le ministère a également
désigné des représentants au sein des divers groupes de
travail formés au ministère du Conseil exécutif en cette
matière.
Après vous avoir brièvement, M. le Président,
entretenu de la législation, j'aimerais maintenant vous parler de la
lutte que le ministère mène contre la violence et la
criminalité. Ainsi, à la suite des colloques régionaux sur
la violence, qui ont été tenus par le ministère de la
Justice, en 1979, en vue de sensibiliser l'ensemble de population sur la
violence exercée à l'égard des femmes et des enfants, le
ministère de ïa Justice a publié, à l'automne 1980,
un rapport de chacun des onze colloques régionaux de même qu'un
rapport global. Ces rapports ont ensuite été distribués
aux participants. (15 h 45)
En vue de répondre aux besoins exprimés lors de ces
colloques, le ministère de la Justice a mis sur pied, en 1980, un
programme de subvention totalisant 500 000 % permettant la réalisation
de plus de 160 projets visant à contrer la violence
dénoncée lors des colloques régionaux. Le choix des
projets a été guidé par les possibilités de
réutilisation du matériel produit. Un groupe de travail,
présidé par le sous-ministre associé à la
sécurité publique, a déjà commencé à
recueillir ce matériel et à en faire l'étude en vue de
déterminer le suivi de ces colloques.
La lutte contre la criminalité économique sous toutes ses
formes apparaît comme un des défis du ministère au cours
des prochaines années. Un colloque a été tenu à
l'Institut de police de Nicolet réunissant l'ensemble des intervenants
de ce secteur. Ce colloque a permis aux participants de discuter sur l'ampleur
du phénomène et sur les moyens pour en diminuer les
conséquences. Le service des faillites et fraudes de la Direction
générale des affaires criminelles compte d'ailleurs intensifier
ses efforts quant à la prévention du crime économique par
la coordination des divers agents qui interviennent dans ce domaine.
La Sûreté du Québec a poursuivi ses efforts en vue
d'accroître la spécialisation de ses enquêteurs en
matière de lutte contre la criminalité. La Direction
générale de la sécurité publique, quant à
elle, a axé son action sur la prévention du crime. L'année
fut marquée par plusieurs réalisations: visites de services de
police et rencontres avec les comités régionaux de
prévention du crime, inventaire des initiatives et des programmes de
prévention ainsi que des documents d'information utilisés dans le
cours des divers projets, conception et réalisation d'un jeu permettant
d'informer les élèves de niveau élémentaire sur les
mécanismes de prévention en matière de
sécurité et de santé, participation active à la
campagne "Piquer c'est voler" notamment par la production de documents
didactique et d'information.
Enfin la direction générale a joué un rôle de
premier plan dans le cadre d'un programme spécial de prévention
du crime gui s'échelonnera sur une période de trois ans dans le
guartier de Limoilou, dans la ville de Québec. En effet, en plus
d'assurer un soutien aux divers plans, la direction a été plus
particulièrement chargée de l'évaluation du programme, et
à cette fin, elle a dû concevoir et développer une
méthodologie destinée à mesurer l'efficacité des
différents projets qui seront mis en oeuvre.
Concernant l'administration des services judiciaires, comme on le sait,
le réseau des greffes et des bureaux d'enregistrement constituent des
charnières essentielles au bon fonctionnement du système
judiciaire et l'amélioration de leur efficacité ne peut
qu'entraîner des répercussions favorables sur les justiciables en
leur fournissant des services adéquats et en réduisant les
délais requis pour les leur fournir.
C'est pourquoi le ministère a favorisé, et continuera de
le faire au cours de la présente année, l'information des
justiciables sur le fonctionnement du système judiciaire,
l'amélioration de ce système et de la situation des victimes et
des témoins, de même que la consultation entre les divers agents
qui oeuvrent à l'intérieur des services judiciaires.
L'accueil et l'information des justiciables dans les palais de justice
ont retenu l'attention de la Direction générale des services
judiciaires. À Québec, une expérience nouvelle de service
d'accueil est présentement en cours: des fonctionnaires choisis sur une
base volontaire assurent l'accueil, en rotation, dans le hall d'entrée
du palais de justice aux heures d'affluence. Des expériences se
déroulent également dans d'autres régions où la
population apporte son aide morale et psychologique aux personnes qui le
désirent: par exemple, à la Chambre de la famille de Montmagny et
de Trois-Rivières. L'évaluation de ces expériences nous
permettra de doter, nous l'espérons, les palais de justice d'un meilleur
service d'accueil pour que les justiciables puissent se sentir à l'aise
lorsqu'ils ont recours aux services judiciaires. Je pense que comme
ministère, on doit tout faire à partir de l'information et de
l'accueil, essayer de diminuer le stress des citoyens qui ont à se
rendre au palais de justice, faire face à la justice, il faut employer
l'expression, et faire en sorte que peut-être avec le temps et les
efforts, les justiciables en viennent à croire que le palais de justice,
cela peut être un endroit qui dispense de l'aide aux justiciables et non
pas seulement un endroit où ce dernier se présente, soit pour se
faire acquitter ou se faire condamner. Je crois que nos palais de justice
peuvent avoir une vocation beaucoup plus importante que celle qu'ils avaient
jusqu'à maintenant, face à l'humanisation de la justice.
Il nous est également apparu nécessaire de revoir la
situation des victimes et des témoins dans notre système
judiciaire. Les études que nous avons entreprises vont déboucher
sur des mesures concrètes qui seront de nature à améliorer
leur sort. Ainsi, la Direction générale des services judiciaires
a prévu la création d'un dépliant d'information pour les
témoins. La Direction générale de la probation et des
établissements de détention, par sa direction des ressources
communautaires, consacrera des budgets à des études et à
des expériences pilotes auprès des victimes au cours de la
prochaine année. La Direction générale des affaires
criminelles déploie des efforts importants afin de favoriser une
meilleure information auprès des victimes d'actes criminels, aux
différentes étapes de l'enquête policière et de la
procédure judiciaire, notamment en les informant lorsgu'une plainte a
été portée en relation avec l'acte criminel dont elles ont
été victimes et en les informant du résultat des
procédures. Il arrive souvent que les témoins ou les victimes,
sont naturellement informées au moment de la commission de l'acte, au
moment de la comparution du prévenu, mais ne sont jamais
informées très précisément des suites ou de la
conclusion de l'ensemble des procédures gui ont pu être
intentées. Je pense que ce serait important qu'il y ait un suivi de ce
côté-là, une information, à ceux qui sont victimes
d'actes criminels.
De la même façon nous avons intensifié la
publicité concernant la possibilité pour des citoyens qui sont
victimes d'actes criminels de pouvoir réclamer des dommages. Ce
programme a déjà donné - on sera à même de le
constater - des effets remarquables, puisque le nombre de réclamations
et les sommes payées en vertu de ce programme d'indemnisation des
victimes d'actes criminels a plus que doublé depuis un an ou deux. On en
parlera en temps et lieu.
Pour réduire la présence des victimes à la cour,
parce que ce n'est jamais un plaisir pour une victime de venir à la
cour, il y a un système de divulgation de la preuve gui a
été mis sur pied à Montréal. Les substituts du
Procureur général ont convenu d'examiner, dans leur district
respectif, comment cette formule pourrait être implantée avec la
collaboration des juges et des avocats de la défense.
La remise des biens saisis aux victimes de vol constitue un autre sujet
sur lequel le ministère s'est penché au cours de l'année
dernière. Ce phénomène fait l'objet d'examen par un groupe
de travail réunissant les principaux intervenants du ministère.
Le groupe de travail se penche sur les moyens législatifs et
administatifs susceptibles de favoriser la remise rapide à leur
propriétaire des biens volés retenus comme pièces à
conviction dans les procédures criminelles et sur les moyens d'assurer
un meilleur contrôle sur la disposition des biens confisqués.
Jusqu'à ce que le groupe de travail ait terminé ses travaux, les
substituts du Procureur qénéral prennent l'initiative de voir
à la remise des biens volés à leur propriétaire
dans les meilleurs délais. À Montréal, un projet pilote de
preuve photographique est en cours.
Cela peut paraître anodin, mais pour ceux qui en font
l'expérience, qui ont eu à pratiquer le droit criminel, il arrive
que des citoyens, non seulement ont été victimes d'un acte
criminel, mais le sont presque doublement, dû au fait que certains objets
qui ont été volés ne leur sont pas remis dans des
délais qui sont raisonnables, étant donné la longueur des
procédures. À ce moment-là, ils sont
pénalisés presque une seconde fois. On va essayer de corriger
cette situation.
De plus, il existe un phénomène gui est susceptible
d'engendrer des coûts importants pour l'administration de la justice et
de causer des inconvénients sérieux aux personnes
impliguées dans des procédures judiciaires. Il s'agit de la
remise des causes. L'ampleur du phénomène fait
présentement l'objet d'études de la part du ministère, en
collaboration avec la magistrature et le Barreau du Québec afin d'en
évaluer les
conséquences sur l'administration de la justice et de proposer
des solutions.
Il est important - je disais au début que c'était un
travail d'équipe avec l'ensemble des fonctionnaires qui nous entourent -
que les fonctionnaires du ministère soient éqalement
sensibilisés aux problèmes des justiciables et étudient
les moyens appropriés pour les résoudre. Ainsi, le congrès
des substituts du Procureur général et celui des officiers de
justice auront comme thème, au cours de la présente année,
l'humanisation du processus judiciaire et les services aux justiciables.
Le ministère juge également important que les
intervenants, dans l'administration de la justice, soient consultés,
afin d'assurer une meilleure coordination dans les actions du ministère.
Ainsi, le comité sur le support administratif aux tribunaux, qui
réunit, en plus de certains hauts fonctionnaires du ministère les
juges en chef et les chefs associés des tribunaux va continuer
d'examiner l'ensemble des problèmes reliés au soutien
administratif des tribunaux.
Le barreau et la magistrure sont également consultés au
niveau des questions touchant la procédure civile. Récemment, un
comité formé de représentants de ministère et de la
Chambre des notaires a été mis sur pied pour échanger sur
la réforme du Code civil et sur la pratigue notariale en regard des
activités des bureaux d'enregistrement, notamment. Je tiens à
souligner, en ce qui concerne les bureaux d'enregistrement, le projet
piloté d'informatisation des bureaux de Montréal et de Laval. Le
système est opérationnel depuis le 1er août 1980 à
Laval et depuis le 2 septembre à Montréal. Ce nouveau
système améliorera la qualité et la guantité des
services offerts aux justiciables en assurant une plus grande exactitude des
données et en permettant une consultation rapide des registres.
Concernant les services correctionnels qui sont un autre secteur
où le ministère a été fort actif en 1980. La
Direction générale de la probation et des établissements
de détention s'est efforcée d'améliorer les conditions de
détention des personnes incarcérées à l'aide, entre
autres, d'un programme d'activités rémunérées pour
les détenus tout en développant d'autres formules visant à
diminuer le nombre des personnes gui auront à subir des peines
d'emprisonnement - cela a été loin de régler tous les
problèmes que l'on connaît parce que l'on connaît le
problème d'engorgement des prisons. On en discutera peut-être un
peu plus longuement. Une étude a été faite et nous sommes
en mesure peut-être d'identifier les principales causes. Nous avons
identifié les principales causes de cette situation et nous nous
orientons très rapidement vers des solutions - la direction
générale a éqalement négocié une entente
entre le Venezuela et le
Québec. En effet, à la suite d'une décision que
j'ai prise dans ce sens, la direction qénérale a implanté
le programme des travaux communautaires dans l'ensemble du Québec. Le
but de ce programme est de favoriser le remplacement, lorsque les circonstances
le justifient, des sentences, des peines d'emprisonnement par
l'exécution de travaux au profit d'organismes sans but lucratif. Ces
travaux peuvent constituer une solution de rechange positive à
l'incarcération des personnes condamnées, et favorise encore plus
efficacement leur réinsertion sociale.
Parmi les autres activités de la Direction générale
de la probation et des établissements de détention, il faut
souligner les démarches gui ont été faites auprès
du ministère des Affaires sociales en vue d'améliorer la
qualité des services de santé offerts aux contrerevenants
adultes. La direction a en effet développé des services
spécialisés répondant aux besoins particuliers des
personnes incarcérées comme, par exemple, les unités de
psychiatrie légale et elle s'est efforcée de les rendre plus
accessibles. Un groupe de travail sur l'incarcération à
défaut de paiement d'amende s'est attagué à ce
phénomène en vue de rechercher des solutions visant à la
réduire. Le rapport gu'a produit ce groupe de travail fait l'objet
présentement de consultation auprès du conseil consultatif de la
Justice. D'ailleurs, je vous souligne gue le gouvernement a
procédé à la nomination de nouveaux membres au conseil
consultatif de la Justice. Le conseil étudie présentement le
rapport sur l'incarcération à défaut de paiement d'amende.
Je vous informe que le rapport a également été soumis au
juge en chef de tribunaux pour avis.
En 1980, la direction qénérale a amorcé des
échanges avec le gouvernement du Venezuela en matière
d'administration des services correctionnels. Au printemps 1980, le
ministère de la Justice a accepté d'envoyer au Venezuela un
spécialiste des services de probation gui pendant une période de
trois mois a agi comme conseiller dans l'organisation des services de probation
vénézuéliens. Cette collaboration s'est poursuivie au
cours du mois de septembre, iors du sixième congrès de Nations
Unies sur la prévention du crime et le traitement des délinguants
gui se tenait à Caracas. Comme prolongement de ces échanges, le
Québec accueillait, en octobre 1980, une mission du gouvernement du
Venezuela présidée par le ministre de la Justice de ce pays.
Cette visite qui avait pour principal objet l'étude du fonctionnement et
de l'orqanisation des services correctionnels du Québec a permis la
signature d'un accord formel de coopération entre les gouvernements du
Venezuela et du Québec. L'accord prévoit l'établissement
de
programmes de coopération en matière de prévention
et de contrôle de la délinquance et de réinsertion sociale
des délinquants, en particulier en matière de probation et de
détention, de services communautaires et de libération
conditionnelle. Cet accord touche également la formation scientifique et
professionnelle ainsi que l'échange des chercheurs et des
spécialistes. (16 heures)
Concernant le dossier constitutionnel, M. le Président, je ne
peux évidemment passer sous silence les efforts du ministère dans
ce dossier. À la suite du dépôt, en septembre 1980, par le
ministre fédéral de la Justice, d'un projet de résolution
comportant adresse conjointe du Sénat et de la Chambre des communes aux
fins de rapatrier l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 avec
une formule d'amendement à la Constitution et une Charte des droits et
libertés, le Québec a décidé, avec d'autres
provinces, de contester judiciairement cette procédure en demandant
à la Cour d'appel de quelques-unes de ces provinces un avis sur la
légalité du projet de résolution.
Une question telle que le débat constitutionnel a
nécessité durant l'année 1980 de la part de la Direction
générale des affaires civiles et pénales et de la
Direction générale des affaires législatives d'importants
travaux de recherche et d'opinions juridiques qui ont par la suite servi
à préparer les arguments juridiques du gouvernement du
Québec sur les propositions fédérales de modifications
constitutionnelles. Le ministère de la Justice est intervenu au nom du
gouvernement du Québec devant la Cour d'appel du Manitoba, de
Terre-Neuve et devant sa Cour d'appel ainsi que devant la Cour suprême du
Canada.
La Direction générale des affaires civiles et
pénales a de plus continué à fournir tout le support
juridique nécessaire au gouvernement. Elle a été
impliquée dans de nombreux dossiers dont plusieurs ont
nécessité des débats devant les tribunaux. Qu'il suffise
de mentionner les dossiers de l'expropriation de la Société
Asbestos Limitée et celui de l'application du jugement Blaikie aux
règlements municipaux et scolaires.
Enfin, M. le Président, et pour terminer mon exposé, voici
quelques actions du ministère en ce qui concerne les ressources humaines
et financières. De concert avec le Conseil du trésor, le
ministère a entrepris, au cours de l'année dernière,
l'évaluation de ses programmes. Jusqu'à présent,
l'évaluation du programme de la Direction générale des
services judiciaires et de celui de la Direction des travaux d'enregistrement a
été réalisée. Est en cours présentement,
l'évaluation du programme de l'aide juridique et de celui de la
Sûreté du Québec.
Parallèlement à cette évaluation, se poursuivait la
révision du plan d'orqanisation administrative supérieure du
ministère qui a débuté au cours de 1979. Les
premières approbations par le Conseil du trésor ont
été obtenues au début de 1980 et portaient sur les
directions générales des affaires civiles et pénales, de
l'approbation des établissements de détention, de
l'administration des affaires législatives et sur la Commission de
refonte des lois et règlements.
Les dossiers portant sur la révision de la structure des
directions générales de la sécurité publique, des
services judiciaires du personnel, de la direction des bureaux
d'enregistrement, de la Commission de police du Québec et du
Comité de la protection de la jeunesse ont été soumis
récemment au Conseil du trésor. Le ministère de la Justice
est impliqué depuis déjà quelques années dans le
processus d'application du programme gouvernemental d'égalité des
chances dans l'emploi pour les femmes. Je rejoins la préoccupation
évoquée par le député de Jean-Talon au début
de notre rencontre.
En 1980, en vue d'améliorer sa participation, le ministère
s'est doté d'un plan d'action assorti d'objectifs particuliers à
chacun des secteurs de son activité de façon que l'ensemble du
réseau de la justice soit impliqué dans ce programme. Des actions
concrètes portant sur l'attraction du personnel féminin dans des
secteurs d'emploi où les femmes sont peu nombreuses, sur la formation et
le perfectionnement du personnel féminin, sur la planification des
carrières et sur la sensibilisation de l'ensemble du personnel du
ministère ont été identifiées. Leur
réalisation s'échelonnera jusqu'au mois d'octobre 1981.
Le ministère de la Justice participe également activement
au dossier de l'Année internationale des personnes handicapées.
Le sous-ministre associé au personnel assure la coordination de ce
dossier au ministère. Une des tables thématiques qui a
été formée dans le cadre de ce programme concerne les
droits des personnes handicapées. La responsabilité en a
été confiée au ministère de la Justice. Les travaux
ont consisté à inventorier les dispositions législatives
et réglementaires ainsi que les différents progammes et services
offerts par le ministère, à faire une mise à jour assurant
la cohérence et au besoin la correction dans la terminologie
employée dans les lois et règlements, à analyser les
effets de leur handicap dans l'exercice de leurs droits, à informer les
autres tables de concertation des lois et des règlements qui seront
utiles à leurs travaux, à faire l'inventaire des
difficultés identifiées et à proposer des avenues et
modifications législatives possibles.
De plus, le ministère verra à mettre en oeuvre un plan
d'action et d'égalité d'emploi
pour les personnes handicapées. Le ministère participe
également à l'implantation d'un autre programme gouvernemental,
soit le plan d'action à l'intention des communautés culturelles.
Ce plan d'action a été rendu public par le ministère
d'État au Développement culturel et scientifique, le 3 mars
dernier. Il implique, entre autres, des actions visant à remédier
au problème de sous-représentation des communautés
culturelles dans la fonction publique québécoise et aux
problèmes d'information auxguels sont confrontés les
immigrants.
Enfin, le ministère participe activement à l'implantation
du programme gouvernemental d'identification visuelle et auditive des
fonctionnaires. Je considère important que les citoyens qui s'adressent
à l'État reçoivent des services personnalisés et
soient en mesure d'identifier nommément quelles sont les personnes dont
ils ont eu des services, de manière que si des représentations
doivent être faites, elles le soient à propos de personnes bien
identifiées, de manière à pouvoir y apporter les
correctifs nécessaires.
Concernant le budget - en terminant, M. le Président - pour
l'année 1981-1982, le total des crédits du ministère de la
Justice s'établit à 544 330 300 $. Si on compare ces chiffres au
budqet des dépenses pour l'année 1980-1981, on constate une
augmentation de 70 158 500 $, soit une augmentation de 15,2%. Ces
crédits se répartissent entre 7 secteurs et .17 programmes. La
majorité du budget, 82%, sera affectée à cinq proqrammes
du ministère, dont 237 983 100 $ à la Sûreté du
Québec, 85 727 700 $ à la garde des détenus et à la
réinsertion sociale des délinguants, 60 402 500 $ au soutien
administratif à l'activité judiciaire, 40 098 600 $ à
l'aide aux justiciables et 22 491 900 $ à la formulation de
jugements.
Sur les crédits additionnels de 70 158 500 S, une somme de 52 800
000 $ servira à défrayer le coût des révisions de
traitement faisant suite à la mise en application des différents
contrats de travail. À cette fin, des sommes de 28 900 000 $ sont
prévues au niveau de la Sûreté du Québec, de 9 350
000 $ pour la direction générale de la probation et des
établissements de détention, de 6 950 000 $ pour les
fonctionnaires du système judiciaire.
Le reste de l'augmentation, soit 17 400 000 $, provient principalement,
d'une part, du fait qu'il a fallu un montant additionnel de 9 000 000 $
concernant la contribution de l'employeur au régime de retraite des
policiers et des juges et d'autre part, du fait que le ministère a
inscrit dans ses crédits, une somme de l'ordre d'environ 6 700 000 $
pour la mise en application de différents projets, tel que la perception
des pensions alimentaires, le nouveau plan d'organisation administrative
supérieure de la direction générale des affaires
législatives, la publication des règlements, le
développement des systèmes informatisés.
Les effectifs du ministère de la Justice s'établissent, au
1er avril 1981, à 13 440 employés permanents et 629
employés occasionnels, soit un total de 14 069 personnes. L'effectif
total du ministère, au 1er avril 1980, était de 13 983, dont 13
276 employés permanents et 707 occasionnels. L'augmentation totale de
ces effectifs, du 1er avril 1980 au 1er avril 1981, a donc été de
86 postes, résultant d'une augmenation de 164 postes permanents et d'une
diminution de 78 postes occasionnels.
Cette augmenation s'expligue ainsi. En ce qui concerne les permanents,
du 1er avril 1980 au 31 décembre 1980, l'effectif a été
porté de 13 276 à 13 425, comme l'indique le livre officiel des
crédits, qui est entre vos mains, soit une augmentation de 149 postes.
Depuis le 31 décembre 1980, 15 postes supplémentaires ont
été créés pour une augmentation totale, durant
l'année, de 164 postes permanents. Ce chiffre de 164 postes permanents
est obtenu en additionnant les nouveaux postes obtenus par le ministère
et en soustrayant les postes remis au Conseil du trésor, dans le cadre
des compressions d'effectifs. Les postes nouveaux ou transférés
sont pour les activités suivantes: transfert à la
Sûreté du Québec des agents d'autoroute, comme vous le
savez, 129 postes; intégration à la fonction publique des
employés de la protection civile, 98 postes; personnel requis pour
l'implantation du programme des pensions alimentaires, 57 postes; personnel
requis pour l'implantation du district judiciaire de Laval, 17 postes; divers
autres projets, 13 postes, pour un total de 340 postes. Comme la compression
d'effectifs a été de 176 postes, nous obtenons notre chiffre de
164 postes permanents. Pour ce qui est des employés occasionnels, on
constatera que ceux-ci sont passés de 707 à 629, pour une
réduction de 78.
M. le Président, j'ai voulu par cet exposé
présenter aux membres de la commission parlementaire de la justice un
portrait des grandes orientations des actions du ministère, des
réalisations administratives des différents secteurs
d'activités et vous faire état des crédits que nous
soumettons aux membres de la commission pour analyse et approbation.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Herbert Marx
M. Marx: Avant de commencer, j'aimerais remercier le ministre et
son chef de cabinet pour l'aide qui m'a permis d'arriver à l'heure
aujourd'hui. Ce matin, j'ai
pris l'avion de Montréal pour Québec à 9 h 10. En
arrivant à Québec, l'aéroport était fermé
à cause de la brume. Nous sommes retournés à
Montréal, celui de Montréal était fermé. Je suis
donc arrivé à Bagotville à 11 h 30.
M. Bédard: On m'avait déjà
informé.
M. Marx: Je n'ai pas fait de propagande à Bagotville
contre le ministre, mais j'ai demandé à ma secrétaire de
téléphoner à son cabinet. Il m'a envoyé une voiture
pour me conduire à Québec. Je vous remercie une autre fois.
J'avais pensé demander un hélicoptère, mais je ne
l'ai pas fait pour deux raisons: premièrement, je comprends que vous
avez des coupures dans votre ministère, je n'ai pas voulu gonfler le
déficit de l'État du Québec; deuxièmement,
j'étais avec un fonctionnaire du bureau du Vérificateur
général. J'ai pensé que ce serait mieux de montrer
à ce fonctionnaire qu'on ne fait pas de gaspillage, soit dans
l'Opposition, soit au ministère de la Justice. Je vous remercie une
autre fois, M. le ministre.
M. Bédard: Vous avez bien analysé la situation,
parce que j'aurais été obligé de vous refuser un
hélicoptère, mais c'est avec plaisir...
M. Marx: Ah bon! J'étais dans la voiture de la
Sûreté du Québec, avec les policiers qui font le trajet.
Donc, cela n'a pas coûté quoi que ce soit à
l'État.
Mes remarques d'ordre général seront très
brèves. J'aimerais qarder mes remarques plus détaillées
pour l'étude programme par programme. Premièrement, j'aimerais
féliciter le ministre pour avoir été reconduit comme
ministre de la Justice et comme Procureur général du
Québec. Si le premier ministre pense à le muter un jour, il peut
compter sur l'appui de l'Opposition officielle pour demander au premier
ministre de le garder toujours en fonction.
Deuxièmement, j'aimerais également remercier, au nom de
l'Opposition, les collaborateurs du ministre d'être venus en si grand
nombre aujourd'hui. Mon amitié personnelle pour ceux et celles que je
connais depuis des années, je comprends combien c'est difficile pour
vous de vous rendre à l'Assemblée nationale, je comprends que
vous avez des tâches urgentes à accomplir dans vos bureaux, soit
ici, soit à Montréal, soit ailleurs. Je vous assure, encore une
fois, que votre présence est grandement appréciée.
Vous comprenez que c'est le seul moment durant l'année où
on peut poser n'importe quelle question au ministre. Il n'est pas tenu de
répondre à nos questions, mais c'est un moment assez
précieux dans notre système démocratique. Je vous remercie
une autre fois d'être venu. Le ministre, bien sûr, peut compter sur
notre coopération, sur la coopération de l'Opposition officielle.
On va travailler en collaboration avec son ministère pour le
bien-être de tous les Québécois, (lé h 15)
Le ministre a fait un bilan des activités et il a dressé
un tableau très positif. Il va sans dire que je n'ai pas entendu
d'autres choses, il y a vraiment des aspects très positifs dans son
bilan. Comme vous le savez, l'Opposition a même voté pour
certaines des lois que le ministre a déposées cette année
à l'Assemblée nationale. Nous sommes très satisfaits de
certains travaux que le ministère a faits cette année.
Notons en passant que le ministre n'a pas parlé de ses objectifs
de l'an prochain, peut-être va-t-il revenir sur cette question.
En analysant ce que le ministre de la Justice a fait en fonction des
objectifs qu'il a définis pour lui-même, on verrait qu'il n'a pas
atteint ses objectifs, qu'il n'a pas atteint ses buts. Le ministre ou ses
proches collaborateurs ont parlé, cette année et l'an dernier, de
fournir à tous l'accessibilité à une justice efficace,
humaine et personnalisée de même qu'une participation directe des
citoyens à l'administration de la justice. À mon avis, je le
répète, le ministre n'a pas atteint ses objectifs.
Comment peut-on parler de l'accès à la justice, s'il est
impossible d'avoir accès à l'information juridique? Les avocats
sont tout mêlés dans les lois du Québec; ils ne peuvent pas
se retrouver dans les lois du Québec. Quand les avocats ne peuvent pas
se retrouver dans les lois du Québec, il faut se demander comment un
simple citoyen peut s'y retrouver. L'encombrement des rôles des tribunaux
empêche que le système de justice soit efficace. Je pense que
c'est évident.
Troisièmement, le ministre a-t-il humanisé notre droit
pénal, a-t-il humanisé nos prisons? Qu'est-ce que le ministre a
fait cette année pour protéger davantage les droits et
libertés des Québécois? Le ministre n'a-t-il pas
négligé de protéger les droits et libertés des
femmes au Québec? Il me semble que le ministère de la Justice
empêche que les citoyens participent vraiment à l'administration
de la justice. Je vais revenir sur ces questions, lors de l'étude
programme par programme du ministère. Ce sont quelques-uns des sujets,
il va y en avoir d'autres sur lesquels on va s'arrêter durant cette
étude.
J'aimerais aussi aborder la question du Code civil. L'Office de
révision du Code civil a travaillé pendant 25 ans à
refaire notre Code civil. C'est un excellent travail. Il semble qu'on va
l'adopter à la pièce. Quand on aura terminé d'adopter le
Code civil, il sera déjà désuet. Il y a quelque chose
à faire dans ce domaine pour le bien-
être de tous les Québécois.
Savez-vous, M. le Président, qu'il existe au Québec
aujourd'hui deux Codes civils. Il y a le Code civil de 1870, qui est
officiellement le Code civil du Bas-Canada, mais qu'on appelle au
Québec, depuis des années, le Code civil du Québec, mais,
en 1980, on a instauré le Code civil du Québec. Il y a des
articles dans le Code civil du Québec, comme l'article 425
peut-être, qui se trouvent dans les deux Codes civils du Québec.
C'est très mêlant pour des avocats qui n'ont pas tout l'appui du
ministère pour faire des recherchers, chercher les numéros
d'articles, etc. Les deux codes portent les mêmes numéros
d'articles pour des sujets différents. Cela cause passablement de
problèmes. L'Office de révision du Code civil a été
aboli déjà, il y a quelques années, parce qu'il avait fait
tout son travail. Je répète une autre fois que le ministre doit
penser - non pas à faire des études parce qu'on a
déjà fait des études pendant des années pour
remplir des tiroirs sérieusement à faire adopter tout le Code
civil durant cette Législature et aussitôt que possible. Et s'il
veut aller dans cette direction, il aura la coopération totale de
l'Opposition officielle.
Un dernier point. Toutes les provinces, ou presque, et le gouvernement
fédéral aussi, ont des commissions de réforme des lois. Je
pense qu'il n'y a que le Québec qui n'a pas de commission de
réforme des lois. Il me semble que c'est impensable qu'on continue
à ne pas avoir de commission qui fasse des suggestions pour que les lois
soient mises à jour d'une façon continue et je demande une autre
fois au ministre de penser à une telle réforme. Je pense que les
commissions de réforme des lois existent partout en Amérique du
Nord et, j'imagine, à l'étranger aussi. C'est impensable qu'on
reste encore au Québec sans une telle commission qui fait un travail
exceptionnel ailleurs en Amérique du Nord, et surtout au niveau
fédéral et dans les autres provinces.
C'est tout pour mes remarques préliminaires, à moins que
mes collègues de l'Opposition officielle veuillent ajouter quelque
chose.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Marc-André Bédard
(réplique)
M. Bédard: Sur les quelques points soulevés par mon
collègue de l'Opposition, quelques remarques brèves, parce qu'on
aura l'occasion à chacun des programmes d'aller plus profondément
au niveau des problèmes ou des principes qui peuvent être
concernés.
Le député de D'Arcy McGee a parlé du peu de
préoccupation, en tout cas, de la préoccupation insuffisante
concernant la participation directe des citoyens à l'administration de
la justice. Au contraire, je crois que, s'il y a un secteur où un
effort, par comparaison à ce qui s'est fait dans le passé, a
été fait, c'est bien celui-là, puisque maintenant les
citoyens participent à la prise de décision importante dont ils
étaient complètement écartés auparavant.
Voici quelques exemples: au Conseil de la magistrature, par exemple, qui
est un organisme important au niveau de l'administration de la justice, nous
avons tenu à ce qu'il y ait deux représentants du public, outre
les avocats, juqes et membres du barreau, qui soient nommés, et c'est le
cas présentement. C'est une innovation par rapport à ce qui se
fait ailleurs. Prenez, par exemple, le choix des juges. Quel que soit le
système auquel vous puissiez penser, sauf peut-être ceux où
les juges sont élus directement par la population, les citoyens
jusqu'à maintenant étaient absents du processus concernant le
choix d'un juge. Maintenant, ils y sont présents puisque nous avons tenu
à ce que les membres du jury soient composés non seulement du
juge en chef, d'un représentant du barreau, mais également d'un
représentant du public qui, même s'il n'a pas de formation
légale, est en mesure d'expliciter son opinion et de faire valoir ses
représentations, ce qui est également une innovation.
Je pense également à la Loi de la protection de la
jeunesse où vous avez la présence de plusieurs
représentants du public, entre autres les personnes
désignées par le ministre de la Justice. Vous retrouvez là
plusieurs policiers et plusieurs citoyens qui ont été
nommés, qui ont un mot à dire quant à l'évaluation
du cas de l'enfant et de sa référence soit au système
judiciaire ou encore à un traitement social, ce qui n'était pas
du tout le cas auparavant.
Je pourrais donner plusieurs autres exemples. Prenez par exemple tous
les colloques qui ont été faits sur la violence. Pour une fois,
le ministère de la Justice, face à un problème social
d'envergure, n'est pas arrivé avec des solutions toutes faites, mais a
eu la préoccupation d'aller voir la population, de tenir des colloques
à cet effet, de manière que non seulement les solutions, mais
l'analyse du problème se fasse par les citoyens, ce qui ne peut que
contribuer à donner de bons résultats et à valoriser le
citoyen au niveau de l'administration de la justice, ce qui fait que de plus en
plus et nous essaierons d'avoir d'autres initiatives dans ce sens-là, de
plus en plus le citoyen est mieux informé de ce qu'on appelle l'ensemble
du rouage de la justice. Et, étant mieux informé, il est mieux
placé pour faire valoir ses droits.
On l'évoquera tout à l'heure, nous avons fait un sondage
concernant le taux de satisfaction des citoyens en ce qui a trait,
par exemple, au tribunal des petites créances. Vous serez en
mesure de constater, heureusement, que cette satisfaction a un taux très
élevé, ce qui veut dire qu'on n'a qu'à continuer dans ce
sens.
Concernant l'accès à l'information également auquel
référait le...
M. Marx: M. le ministre, je ne veux pas faire le débat
maintenant, je veux faire le débat lors de l'étude des
programmes. J'ai fait une affirmation, je n'ai pas apporté la preuve.
Mais je suis prêt à apporter la preuve, quand on arrivera au
programme, que, sur tout ce que vous avez dit, vous avez raison. Il y a
peut-être 2000 Québécois qui sont impliqués dans
l'administration de la justice, peut-être 3000. Pour moi, cela ne veut
pas dire la participation des citoyens à l'administration de la justice.
Mais je sais que vous avez raison dans ce que vous avez dit. Je ne conteste pas
ce que vous avez dit.
J'ai fait des affirmations, je l'admets, et je n'ai pas apporté
de preuves. Je vais apporter les preuves quand on abordera les programmes et
cela va vous donner l'occasion de rejeter la meilleure preuve.
M. Bédard: Si mon collègue avoue qu'il a fait des
affirmations sans apporter de preuves, vous conviendrez, M. le
Président, que je serai, avec une telle admission, plus bref dans mes
remarques qui suivent les siennes. Nous pourrions ajouter, au cours des
progammes, tous les efforts qui ont été faits concernant par
exemple l'accès à l'information juridique, l'accès des
citoyens à l'information juridique auquel a référé
mon collègue. Concernant le droit et la liberté des femmes, on
n'est pas ici, excusez l'expression, pour se péter les bretelles, mais
s'il y a un ministère qui a été sensible à la
nécessité d'apporter des correctifs aux inégalités
entre hommes et femmes, c'est bien le ministère de la Justice. Que ce
soit par le biais de la loi no 89 ou par d'autres mesures législatives
auxquelles je pourrai référer lors de l'étude des
crédits, je crois que nous pouvons dire, non pas que tout est fait, loin
de là, mais que la préoccupation de cette recherche de
l'égalité des hommes et des femmes a été constante
au niveau du ministère de la Justice et que les résultats sont
là.
M. Marx: Un tout autre dossier, M. le ministre, que j'ai
l'intention d'aborder quand on parlera de la Charte des droits et
libertés de la personne. Je ne suis pas tout à fait
disposé à admettre que vous ayez fait tout ce qui était
possible pour mettre les femmes sur un pied d'égalité avec les
hommes au Québec. Vous n'avez même rien fait dans un ou deux
dossiers qui sont très pressants, là où la demande existe
depuis des années, (16 h 30)
Le Président (M. Desbiens): Je comprends qu'il y aura
reprise de tout cela au niveau des programmes.
Je vais demander que M. le ministre termine pour entreprendre autre
chose.
M. Bédard: Je terminerai sur un point. Je suis d'accord
avec le représentant de l'Opposition que tout n'est pas fait. Quelle
serait notre raison d'exister si tout était fait? Quand on se compare,
je pense qu'on peut se consoler, quand on compare l'action du ministère
de la Justice par rapport à ce qui s'est fait les autres
années.
Il y a un dernier point, qui est purement technique, concernant le Code
civil. Je pense que le représentant de l'Opposition, le
député de D'Arcy McGee, sait très bien que, si nous avons
procédé par secteurs, pour ne pas dire par étapes, entre
autres, celui concernant le droit de la famille, d'une façon
prioritaire, c'est à la suite d'avis qui nous avaient été
donnés par des spécialistes et de l'évaluation que nous
avons faite de notre Code civil. On s'est rendu compte rapidement que c'est
dans le domaine du droit de la famille qu'on assiste aux plus grands
éparpillements et à la nécessité de faire...
M. Marx: II faut commencer quelque part, c'est évident,
mais pouvez-vous nous faire la promesse que vous allez adopter le Code civil
dans un laps de temps déterminé?
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bédard: Je continue: Les spécialistes nous
avaient conseillé, si nous voulions aboutir plus vite que la
réforme n'avait abouti, à y aller par secteurs précis.
C'est ce que nous avons fait. Nous allons accentuer notre travail, notre
vitesse de croisière. Au moment où je vous parle, il y a
déjà des groupes d'étude au niveau du ministère
concernant les personnes et les successions, entre autres, les contrats et
obligations, ce qui représenterait, à ce moment, une large partie
du Code civil et nous espérons déboucher assez rapidement avec
une loi. Quand je dis rapidement, on sait quelle est la complexité de ce
travail et je suis en mesure de dire que toutes les bonnes volontés sont
employées au niveau du ministère pour que le travail avance le
plus rapidement possible, tenant compte des circonstances.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Seulement une brève question. Le ministre peut-il
nous dire s'il fera adopter tout le Code civil d'ici deux, trois, quatre ou
cinq ans... cinq ans, c'est aller
loin. Est-ce qu'il a un projet? Envisage-t-il de faire cela dans
quelques années? Cela peut durer des dizaines d'années. C'est
déjà arrivé ailleurs, j'imagine.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bédard: Nous avons un projet d'échéancier
que nous terminerons bientôt. Nous serons en mesure, le plus rapidement
possible...
M. Marx: Le ministre déposera-t-il son projet?
M. Bédard: Je ne serai pas en mesure de le faire à
la commission parlementaire.
M. Marx: Pas ici, mais une fois que ce sera terminé le
ministre le déposera à l'Assemblée nationale?
M. Bédard: Sûrement, avec plaisir, et en faisant
connaître toutes les complexités de la tâche.
M. Marx: Je ne vous blâme pas, avec tout ce que vous avez
à faire. Je comprends qu'on en oublie ici et là. À
l'Assemblée nationale, on demande toutes sortes de choses. On a des
réponses: Oui, ce sera déposé. On revient, et on nous dit:
On pose la mauvaise question au mauvais moment. On demande, on demande. On a
des réponses: Oui, oui, oui, mais ce n'est jamais déposé.
Je ne veux pas...
M. Bédard: Vous comprendrez que, à
l'Assemblée nationale, je peux être maître des
réponses, mais je ne suis pas maître des questions.
M. Marx: Souvent, dans le passé, j'ai demandé des
documents. J'avais des promesses que ce serait déposé. Ce
n'était jamais déposé. On a eu des élections, un
référendum et ainsi de suite et on n'a jamais eu les
documents.
M. Bédard: Ne soyez pas injuste. Nous avons toujours
répondu rapidement à ce que vous demandiez.
M. Marx: Donc, nous aurons votre projet d'ici septembre, octobre,
novembre ou décembre? Quand?
M. Bédard: D'ici septembre ou octobre, il y aura un
échéancier qui sera rendu public, mais je tiens à vous le
dire encore une fois, vous le savez très bien, cela a pris 25 ans pour
faire la réforme du Code civil, soyez au moins réaliste. Je ne
pense pas que mon collègue veuille faire de la politique avec cela, il
connaît trop bien la complexité du travail. C'est un travail de
spécialiste,
M. Marx: On a déjà le rapport depuis quelques
années. Cela a pris quelques années seulement pour adopter le
chapitre ou le livre sur la famille. Cela risque de prendre une autre
génération et, quand tout sera adopté, ce sera
désuet, il faudra recommencer. Je pense qu'il y a quelque chose...
M. Bédard: Je m'excuse, concernant le droit de la famille,
nous avons procédé avec beaucoup de célérité
surtout si on compare notre vitesse de croisière à celle de ceux
qui nous ont précédés. Voyons donc! On a fait les analyses
nécessaires, puis la législation, comme vous le savez, a
été adoptée. Quand on parle de la loi 89, c'est une
pièce de législation qui, dans certaines sociétés,
peut prendre jusqu'à un an avant d'être adoptée alors que
nous l'avons fait quand même assez rapidement parce que nous avions pu
procéder préalablement aux consultations appropriées.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: M. le ministre, vous avez mentionné plusieurs
démarches louables que vous avez faites depuis un an pour rendre la
justice plus équitable et plus accessible aux citoyens. C'est juste une
question générale. Mon collègue de D'Arcy McGee a
mentionné tantôt l'encombrement des rôles en Cour
supérieure, que c'est rendu à prendre trois ans dans le district
judiciaire de Hull, où j'ai pratiqué le droit jusqu'à
récemment, pour faire entendre une cause. Tant et aussi longtemps que la
situation existe, et je pense que la même chose existe à travers
la province dans les autres districts judiciaires...
M. Bédard: Dans d'autres provinces aussi.
M. Kehoe: ...je pense que l'accessibilité de la justice
aux citoyens n'est pas un fait. Je me demande, dans l'ensemble, si des
démarches concrètes ont été faites par votre
ministère depuis les dernières années pour régler
le problème?
M. Bédard: Assurément, des démarches ont
été faites et à l'heure actuelle, tant avec le barreau
qu'avec la magistrature, nous sommes à mettre au point des solutions gui
pourraient être possibles mais on aura l'occasion d'en discuter
peut-être plus longuement dans l'étude programme par programme.
Vous êtes sans doute au courant d'une étude gui a
été faite à Montréal par le barreau dont les
conclusions ont été connues tout dernièrement...
M. Keh: Des études ont été faites et
plusieurs démarches entreprises, mais est-ce que cela a commencé
à régler en quelque sorte le problème? Je pense que le
problème s'aqgrave et doit se régler d'une façon
quelconque. Que ce soit dans le district judiciaire de Hull dont je suis plus
au courant, mais généralement, par toute la province, je pense
que le rôle de la Cour supérieure à Montréal c'est
rendu que ca prend plus de trois ans pour faire entendre une cause.
M. Bédard: Alors, on aura l'occasion d'en discuter
à ce programme et nous serons très heureux et très ouverts
face à des suggestions qui pourraient être faites par nos amis et
collègues de l'Opposition.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon sur des remarques générales.
M. Rivest: Oui, M. le Président, pour compléter
peut-être, pour que le ministre puisse demander à ses gens
d'apporter... Mon collègue a un certain nombre de dossiers sur les
programmes, chacun des éléments de programme. Je voudrais d'abord
demander au ministre - il le fera peut-être au moment des crédits
ou tout de suite comme il le voudra selon son jugement - j'avoue que j'ai
été assez étonné d'apprendre en fin de semaine
qu'il y avait eu des demandes quelque part, ou enfin je ne sais pas d'où
c'est venu ce besoin immense d'effectuer une réforme en profondeur de la
Charte des droits et libertés de la personne. J'aimerais que le ministre
puisse nous dire à quel besoin précis ça répond. La
façon dont c'était présenté, à tout le moins
en fin de semaine, c'était une réforme de fond en comble de cette
loi qui est loin d'être une loi qui cause des problèmes. Je crois
que c'est une loi qui a atteint ses objectifs, premièrement.
Deuxièmement, j'aimerais aussi que le ministre, au cours de
l'étude des crédits, puisse nous dire les moyens qu'il envisage
en ce qui concerne le suivi de la lutte contre le crime organisé, compte
tenu de l'expérience que le Québec a vécue au cours des
dernières années.
Troisièmement, j'aimerais que le ministre puisse nous indiquer la
réaction de son ministère à la suite des recommandations
et de la publication du rapport Paré, puisqu'un certain nombre des
recommandations du rapport Paré le concernent, pas lui personnellement,
mais son ministère au premier chef étant donné qu'il y a
des questions de sécurité, des questions judiciaires.
Quatrièmement, et ce sont des questions que sans doute mon
collègue de D'Arcy McGee pourra soulever de nouveau au moment des
crédits, au niveau de ce que mon collèque a signalé, au
niveau du comité de législation - je me permets d'insister, ca
rejoint peut-être un peu indirectement la remarque de mon collègue
- parce que les avocats de pratique privée s'inquiètent beaucoup
de la tenue au point de vue technique des lois du Québec et surtout de
la prolifération absolument incroyable des règlements, si bien
qu'un avocat, d'après ce qu'on nous a soumis, n'est même pas en
mesure de dire à son client l'état du droit. Il ne réussit
pas lui-même à le savoir étant donné que les
règlements sont quelquefois adoptés, d'autres fois non
adoptés, réamendés, c'est un problème majeur, comme
dit mon collèque de D'Arcy McGee.
Cinquièmement, je voudrais que le ministre nous donne la
réaction de son ministère sur les décisions judiciaires
qui sont rendues, en particulier au titre de la constitutionnalité de
certains tribunaux administratifs. On a eu le Tribunal des transports, il y a
la décision en Ontario au sujet de la Régie du logement et
surtout, de la prudence législative que tant et aussi lonqtemps que les
questions constitutionnelles afférantes à ce problème
n'auront pas été réglées, la prudence
législative que le ministre devrait manifester quand on adopte des lois
au niveau de l'Assemblée nationale.
Je voudrais également que le ministre nous dresse un bilan
complet des travaux de la commission Keable, coûts, etc. Je pense que
c'est le moment maitenant. Surtout qu'il trouve l'occasion, au moment des
crédits, de répondre directement à la question que le
député de D'Arcy McGee lui a posée au sujet du principe de
l'infiltration policière. Mon collègue de D'Arcy McGee va sans
doute revenir là-dessus. Alors, pour l'instant, ce seraient des
questions que je voudrais discuter avec le ministre. Sans doute qu'au fil des
programmes, il y en aura d'autres qu'on pourra aborder.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, est-ce
que...
M. Rivest: ...
M. Bédard: Vous êtes à même de
constater, M. le Président, que ça représente pas mal de
questions. Si mes collègues n'ont pas objection à me donner tout
le temps nécessaire pour répondre...
M. Rivest: C'est ça, je vous le dis d'avance.
M. Bédard: ...ou si on préfère...
Le Président (M. Desbiens): ...attendre les
programmes.
M. Marx: ...dans les programmes.
M. Bédard: ...à travers les programmes, discuter
plus à fond.
M. Rivest: ...M. le ministre, je vous indique tout de suite ces
sujets-là...
M. Bédard: Cela me fait plaisir.
M. Rivest: .. pour que vous puissiez demander à vos qens
de préparer...
M. Bédard: Dites-vous une chose, je suis prêt
à répondre à toutes ces questions et peut-être
une...
M. Rivest: C'est dans ce sens, que le sachant...
M. Bédard: ...sur laquelle je pourrais donner tout de
suite l'information à mon collègue de Jean-Talon, c'est la
décision qui a été annoncée de procéder
à une commission parlementaire concernant la Charte des droits et
libertés. Cette décision a été motivée par
le fait que plusieurs recommandations nous étaient faites par la
Commission des droits de la personne, auxquelles nous n'avions pu donner suite
encore, qui exigeaient un débat plus large. J'ai eu l'occasion, il y a
quelques mois, de rencontrer plusieurs groupes qui avaient différentes
préoccupations concernant des améliorations qui pourraient
être apportées à la Charte des droits et libertés.
Devant cette situation, tenant compte du fait que la Charte des droits et
libertés a déjà plus de cinq ans d'existence, il me semble
qu'il y avantage pour l'ensemble de la population à ce qu'une
réflexion globale soit faite sur la Charte des droits et
libertés.
Je puis assurer mes collègues que cette décision, dont
j'avais informé le leader il y a quelques mois, était
déjà prise dans mon esprit. Mais ellle se devait d'être
entérinée par le Conseil des ministres, ce qui a
été fait.
M. Marx: C'est très surprenant, pour moi, de voir dans les
journaux, que c'est le leader qui annonce, durant votre conseil
général, qu'on va avoir une commission parlementaire au mois
d'octobre. J'ai pensé que c'était vous qui aviez la
responsabilité de la Charte des droits et libertés de la
personne. Premièrement, s'il y a quelque chose à dire...
M. Bédard: Je ne suis pas fort sur ces petites batailles,
qui annonce le premier, il n'y a vraiment rien là. L'important, c'est
que...
M. Marx: On ne veut pas vous mettre en contradiction avec le
leader, jamais.
M. Rivest: L'important, c'est que vous indiquiez pourquoi.
M. Marx: C'est drôle d'annoncer ça durant un conseil
général et de ne pas annoncer ca à l'Assemblée
nationale. On est en session. Ce n'est pas comme lorsqu'on n'est pas en
session. De toute façon, on devient habitué à ça,
ça arrive souvent avec ce gouvernement.
M. Bédard: Ce n'est quand même pas l'annonce d'un
projet de loi; c'est l'annonce d'une commission parlementaire. Je crois que le
leader a ses droits et ses devoirs...
M. Rivest: On en reparlera tantôt, quelles sont les
intentions... (16 h 45)
M. Bédard: L'important...
M. Rivest: Excusez-moi, mais ce que je voulais savoir, et ce que
mon collègue va vous demander tantôt lorsqu'on arrivera à
ce programme, guelles sont les intentions du gouvernement au niveau de la
Charte des droits et libertés? Est-ce pour ajouter d'autres
libertés, pour mieux assurer la protection des libertés ou bien,
cette charte ne cause-t-elle pas des inconvénients? Dans quel sens? On
ne fait pas une commission parlementaire pour le plaisir d'en faire. Il y a des
raisons profondes qui vous amènent à réviser la
charte.
M. Bédard: Je suis même surpris de voir le
député de Jean-Talon poser la question. C'est évident que
si on fait une commission parlementaire, c'est parce qu'on veut...
M. Rivest: Quels sont vos objectifs?
M. Bédard: ... améliorer la Charte des droits et
libertés, faire en sorte d'évaluer jusqu'à quel point on
peut répondre aux représentations qui seront faites à
cette occasion par les différents groupes intéressés
à ce que la charte soit réajustée à la nouvelle
dimension sociale du Québec. Je pense, entre autres, aux avantages
sociaux. Il y a bien d'autres secteurs, ce qui est tout à fait normal
après cinq ans d'existence, qui peuvent être
améliorés au niveau de la protection des droits et
libertés.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que je comprends qu'on
commence l'étude programme par programme?
M. Rivest: Oui.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous entendez
étudier les programmes globalement ou procéder
élément par élément et adopter globalement?
M. Bédard: Globalement. M. Marx: Globalement.
Formulation de jugements
Le Président (M. Desbiens): D'accord. Programme 1:
formulation de juqements. Ce programme...
M. le ministre.
M. Bédard: Les membres de l'Opposition ont reçu
l'essentiel des explications...
M. Marx: Oui, on aimerait remercier le ministre, on a reçu
cela jeudi dernier...
M. Bédard: ... tel qu'entendu.
M. Marx: On a eu un jour de plus que les autres critiques de
l'Opposition.
M. Rivest: L'efficacité du sous-ministre!
M. Bédard: Ce n'est pas cela. À la justice... C'est
cela, l'accessibilité à l'inform ationl
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bédard: M. le Président, tel que je l'avais
promis, nous faisons distribuer aux membres de la commission, non seulement la
revue Justice du dernier mois, mais également l'essentiel de la
publicité qui a été mise au point pour l'information de la
population en ce qui a trait au droit de la famille. Vous serez à
même de constater qu'un travail magnifique a été fait
par...
M. Rivest: Très bon. Là-dedans, on ne peut pas dire
que vous êtes mauvais.
M. Bédard: ... les services du ministère.
M. Rivest: Les petites brochures, les petits dépliants et
les posters, là-dedans, vous êtes forts.
M. Marx: II y a plus dans ce programme...
M. Bédard: On est à même de voir qu'il n'y a
pas grandes critiques à faire. Allons-y!
M. Marx: II y a plus dans ce programme que des dépliants
et des magazines. Il y a le problème de l'immunité des juges.
J'imagine que le ministre est au courant de ce problème. J'aimerais
avoir son opinion sur cette question. Le ministre a reçu le
mémoire de la conférence des juges qui date du 27 février,
et soumis au ministre de la Justice le 12 mars 1981. C'est un problème
assez important. M. le sous-ministre va répondre à cette
question.
M. Bédard: Je demanderais à M. Jacoby de
répondre, le mémoire ayant été reçu au mois
de février.
Effectivement, nous avons reçu le mémoire au mois de
février. Nous sommes en train d'analyser les recommandations du
mémoire. J'ai fait récemment, à l'exécutif de la
conférence des juges, un compte rendu de la situation de nos
études actuellement. Je pense que nous serons en mesure de réagir
véritablement aux recommandations du mémoire d'ici environ un
mois et demi ou deux mois. À la suite de cela, nous entendons discuter
avec la conférence des juges de façon que, s'il y a des
modifications législatives à apporter éventuellement,
celles-ci puissent être faites à l'automne de cette
année.
M. Marx: Qu'est-ce que vous entendez faire, M. le ministre?
Est-ce que vous avez l'intention de légiférer pour
régulariser cette situation?
M. Bédard: Si nous donnons suite aux recommandations ou
aux représentations faites par les juges, il y aura naturellement
nécessité avant de légiférer, tel que vous l'a dit
tout à l'heure, Me Jacoby, je pense qui y aura avantage à faire
l'analyse en profondeur de manière que cette législation
réponde vraiment aux difficultés exprimées ou aux
inquiétudes exprimées par les membres de la
Législature.
M. Marx: Oui, parce que le problème soulevé par les
juges n'est pas un problème tellement difficile à
résoudre. Je pense que cela prendra une étude d'un mois, de deux
mois, non pas une étude d'un an, de deux ans pour ne pas que les juges
restent dans l'insécurité. Je trouve qu'il y a une situation
d'injustice parfois, si on comprend qu'ils n'ont pas d'immunité quand
ils rendent des jugements. Je pense que c'est primordial, si on veut avoir le
respect de la justice, que les juges bénéficient d'une certaine
immunité.
M. Bédard: II me semble qu'en termes de
sécurité, il est nécessaire que cette immunité soit
très étanche de manière que personne ne soit
insécurisé, le juqe ayant à rendre des jugements de par sa
tâche. Il n'est pas question, comme vous l'avez dit, comme vous l'avez
souhaité, d'une longue étude, parce que, d'ici l'automne, nous
pourrons agir normalement.
M. Marx: Le ministre peut-il prendre l'engagement de faire
quelque chose durant la prochaine session?
M. Bédard: De vous informer très bien de ce que
nous ferons.
M. Marx: Non pas de m'informer, de faire quelque chose? On ne
veut pas revenir l'an prochain sans avoir l'étude et tout cela. II faut
prendre des engaqements, non pas faire des promesses.
M. Bédard: Je sais que j'ai affaire à un nouveau
critique.
M. Marx: Non.
M. Bédard: II a sa manière de procéder, sa
manière de faire son travail. À moins qu'il ne me connaisse pas,
je tiens à lui dire, dès le début de l'étude des
crédits, que je ne suis pas une machine a enregistrer des dates pour
produire des choses et des législations. Les législations pour
moi, c'est quelque chose de très important. Qu'on y mette de la
réflexion, je pense que cela va de soi. Je pense que cette
manière de procéder est encore la plus rapide et la plus
efficace, parce que, si vous regardez le nombre de législations faites,
mises au point par le ministère de la Justice, depuis trois ou quatre
ans, vous serez en mesure de réaliser rapidement qu'il y a là un
volume beaucoup plus impressionnant que tout ce qui a
précédé auparavant, tant en qualité qu'en
quantité.
M. Marx: M. le ministre a oublié que j'ai
étudié les crédits avec lui aussi l'an dernier.
M. Bédard: Je ne suis pas un encanteur public, je ne
commencerai pas à donner des dates, des ceci, des cela.
M. Marx: Non, je ne veux pas qu'on donne des dates, mais je pense
que c'est le moment de donner des assurances de faire quelque chose d'ici la
fin de l'année.
M. Rivest: Avez-vous décidé?
M. Marx: Le ministre peut dire qu'il va faire quelque chose dans
n'importe quel domaine. S'il ne donne pas de date, cela peut être cette
année, l'an prochain, à la fin du siècle, s'il est encore
ministre de la Justice.
M. Bédard: Cela se peut qu'à la fin du
siècle on le soit encore, mais cela ne m'intéresse pas à
ce point.
M. Marx: Peut-être qu'il se garde des programmes pour la
fin du siècle. D'accord.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 1 est-il
adopté?
M. Rivest: C'est sur les juges.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Oui, je voudrais demander au ministre s'il a
renouvelé les mises en garde qu'il a données contre certains de
ses collègues qui se permettaient allègrement de commenter les
décisions judiciaires et de tenir des propos qui, à
l'égard du système judiciaire, relevaient d'une conception tout
à fait politique de l'administration de la justice. Les recommandations,
les commentaires formulés par le juge Deschênes sont-ils
maintenant devenus une conviction profonde du ministre de la Justice? En
particulier, encore récemment, le message inaugural du premier ministre
parlant de la décision des juges de la Cour suprême au sujet de la
constitutionnalité, d'abord préjugeant de la décision des
juges de la Cour suprême, mais, néanmoins, il se permettait de
dire: On sait bien que les juges ne sont pas nommés, sont élus,
commençant déjà à discréditer le jugement de
la Cour suprême. Ce genre d'attitude, avez-vous l'intention de maintenir
le principe de l'indépendance...
M. Bédard: Premièrement...
M. Rivest: Le juge Deschênes vous a adressé des
recommandations. On en a parlé l'an passé. Avez-vous fait quelque
chose là-dessus?
M. Bédard: Le fait que le juge Deschênes nous ait
adressé certaines représentations et le fait de les
interpréter d'une façon aussi échevelée que le fait
le député de Jean-Talon, ce sont deux choses. Je pense que tout
est rentré dans l'ordre dans ce domaine et que pas plus sous notre
gouvernement que sous d'autres gouvernements...
M. Rivest: Non, ce n'est pas de votre gouvernement qu'il
s'agit.
M. Rédard: Je pense qu'il est tout à fait
normal...
M. Rivest: Le juge en chef n'a jamais fait de commentaires.
M. Bédard: II ne faut pas exagérer non plus. Je
pense qu'il est tout à fait normal qu'à un moment donné
certaines remarques puissent être faites...
M. Rivest: Non, ce n'est pas normal.
M. Bédard: ...non pas à l'endroit des juges ou en
leur qualité de juge mais à l'endroit de certains
problèmes sociaux qui
peuvent être discutés, je crois que les précautions
nécessaires sont maintenant le fait de tous les membres du Conseil des
ministres, à l'effet de bien identifier la démarcation
nécessaire pour que...
M. Rivest: Connaissant le lanqaqe du ministre, j'accepte les
précautions nécessaires. Je comprends la périphrase, parce
qu'avec le ministre, une phrase qui ne veut rien dire siqnifie quelque
chose...
M. Bédard: ...c'est gentil, on voit que vous me connaissez
bien.
M. Rivest: ...il dit que les précautions
nécessaires ont été prises alors... Oui, je vous connais
bien. Je veux que le ministre de la Justice, il me semble que cela convient et
que c'est la conviction profonde et personnelle du ministre de la Justice de
faire en sorte que, lorsqu'une décision judiciaire intervient, qu'elle
plaise ou non au gouvernement, qui a été une partie, qu'on
n'assiste pas aux commentaires qu'on a eus dans le passé et que les
juges en chef, en particulier le juge Deschênes, ne soient pas
obligés de faire l'intervention publique qu'il a jugé bon de
faire. Il ne l'a pas fait d'une façon fortuite, il l'a fait parce qu'il
y avait un problème et je sais que le ministre sur le plan personnel en
est conscient et je lui réitère les préoccupations qu'on
avait eues à l'Assemblée nationale à ce sujet.
M. Bédard: D'ailleurs, lors de ce débat à
l'Assemblée nationale, j'avais très bien explicité mes
préoccupations qu'il n'y ait pas d'ingérence de l'exécutif
par rapport au judiciaire et vice versa, du judiciaire par rapport à
l'exécutif et je pense qu'à partir du moment où la ligne
de démarcation est bien respectée les problèmes
sont...
M. Marx: Est-ce que le gouvernement est prêt à
accepter sur le plan juridique la décision de la Cour suprême
qu'on va bientôt avoir sur la question constitutionnelle?
M. Rivest: Ce serait malvenu de ne pas l'accepter, ce sont eux
qui l'ont demandé.
M. Marx: Oui, mais il y a le premier ministre de Terre-Neuve qui
a dit... Il y a le plan Peckford, je me demande si...
M. Bédard: S'il avait fallu que nous fassions la
même déclaration que M. Peckford, je vois déjà les
exclamations outrées qui seraient venues de l'autre côté de
la Chambre...
M. Rivest: Tout à fait.
M. Bédard: ...présentement nous sommes devant la
Cour suprême et nous attendons le juqement.
M. Marx: Donc, vous allez accepter le juqement tel quel, sur le
plan juridique, sur le plan politique, c'est une autre question.
M. Rivest: II ne faut pas oublier que ce sont des juges non
élus et nommés.
M. Bédard: Vous admettez que sur le plan politique, c'est
autre chose, alors vous répondez à votre question en la
posant.
M. Marx: Sur le plan juridique, le ministre va l'accepter, c'est
cela?
M. Bédard: La responsabilité de rendre jugement
appartient à la Cour suprême. Il est bien évident. À
ce que je sache, c'est la dernière décision qui sera rendue,
parce que les appels au Conseil privé sont maintenant d'ordre...
M. Marx: Vous allez accepter, vous n'allez pas demander un appel
au Conseil privé, étant donné que c'est impossible.
M. Bédard: Vous savez comme moi que c'est de la
dernière instance.
M. Marx: Je pense que ce ne serait pas un grand aveu du ministre
de la Justice de dire ouvertement: Je vais accepter sur le plan juridique la
décision de la Cour suprême du Canada. Il y a des radicaux de
l'autre côté qui vont vous poser des questions, mais je ne pense
pas que ce serait...
M. Bédard: Je n'aime pas faire des débats avant que
ce ne soit le temps de les faire. C'est tout.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 1 est
adopté. Adopté. M. le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: Est-ce que le ministre...
M. Rivest: Qu'est-ce que les ministres font en tournée
cette semaine?
M. Bédard: Ce que font les ministres en tournée
cette semaine, ce n'est en aucune façon pour passer des remarques
concernant les juges de la Cour suprême ou la Cour suprême
elle-même comme institution, mais ces ministres sont en tournée
pour expliquer les effets dévastateurs qu'aurait le coup de force
fédéral s'il devait se concrétiser malgré
l'objection, non seulement du Québec, mais de la plupart des provinces
et j'imagine qu'en temps et lieu, si nous avions à formuler une autre
objection à ce coup de force du fédéral, à
l'Assemblée nationale, nous pourrons, à ce moment-là
j'espère, compter sur le concours de l'Opposition qui
regrette déjà amèrement de ne pas s'être
solidarisée avec nous lors du dernier débat sur cette
question.
M. Marx: Vous n'avez pas voulu accepter nos amendements.
M. Bédard: C'étaient des amendements inconvenants,
vous voyez.
M. Rivest: Le premier ministre était d'accord sauf que le
caucus n'était pas d'accord. (17 heures)
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Le ministre a-t-il un projet pour réformer les
tribunaux administratifs du Québec? Cela est souvent demandé. Je
demande au ministre s'il a un projet, peut-être pas pour ce mois-ci, pour
les mois à venir. On va laisser tout cela comme...
M. Bédard: Je pense que vous le savez. Il y a
déjà du travail qui se fait au niveau du ministère de la
Justice. Mais ce travail peut difficilement être rendu à terme si
on ne règle pas le problème constitutionnel, qui fait que tout ce
secteur de l'administration de la justice est dans un état
d'insécurité.
M. Marx: ... dans un état d'insécurité.
M. Bédard: Non seulement lors des conférences
fédérales-provinciales, mais lors des discussions
constitutionnelles...
M. Marx:... de faire une réforme des tribunaux
administratifs du Québec. Je ne vois pas l'insécurité.
M. Bédard: Vous devriez allumer votre lanterne parce que
la légalité de plusieurs de ces tribunaux est mise en doute
à l'heure actuelle. Prenez le Tribunal des transports; vous savez quelle
décision a été rendue. Nous sommes obligés de
légiférer en conséquence.
En ce qui a trait à la Régie du logement, un jugement
vient d'être rendu qui n'est pas très sécurisant pour
l'ensemble de ce secteur; quoique la situation du Québec, du point de
vue juridique, peut être différente de celle de l'Ontario. Vous
pouvez être convaincu que si les propriétaires s'avisent de
contester la Régie québécoise du logement, du point de vue
constitutionnel, le ministère de la Justice, le gouvernement, luttera
juridiquement avec ténacité, parce que nous croyons que ce n'est
pas la même situation juridique qu'en Ontario.
M. Marx: Mais je pense que cela ne devrait pas empêcher le
ministre de faire une réforme des tribunaux administratifs du
Québec. Il y a vraiment deux problèmes. La Cour
suprême a dit, en ce qui concerne la loi de l'Ontario, que l'Ontario ne
peut pas donner certains pouvoirs à un tribunal administratif, parce
qu'il faut que des décisions sur certaines questions soient rendues par
des juges. C'est la question en litige qui fut décidée par la
Cour suprême.
Mais il ne faut pas oublier que même si le Québec rapatrie
un jour - pas rapatrier, parce qu'on n'a jamais eu ce pouvoir - mais supposons
que le Québec a le pouvoir de nommer des juges à la Cour
supérieure. Cela ne veut pas dire que ce serait possible pour le
Québec d'établir des tribunaux administratifs et de leur donner
n'importe quel pouvoir. On voit mal qu'il y ait un tribunal administratif sur
le mariage et que ce soit ce tribunal qui décide des questions du
mariage.
Tout cela pour dire que ce n'est pas le problème constitutionnel
qui empêche le ministre de faire quoi que ce soit, à mon avis.
C'est parce que vous n'avez pas la volonté politique de faire la
réforme maintenant.
M. Bédard: Vous pouvez l'affirmer si cela vous fait
plaisir, mais je vous dis honnêtement que ce n'est pas le cas. Plusieurs,
même parmi ceux m'ont précédé, ont eu cette
préoccupation d'une réforme des tribunaux administratifs et je
crois que la volonté y était. Mais c'est justement en
approfondissant la situation qu'on se rend compte jusqu'à quel point ce
n'est pas par une réforme administrative qu'on va régler le
problème constitutionnel. Je voudrais que vous soyiez conscient de
cela.
On parlait tout à l'heure du Tribunal des transports dont la
sécurité juridique est plus que douteuse. J'évoquais aussi
la décision concernant la Régie du logement, une autre
décision concernant l'Office des professions du Québec, qui sont
toutes à l'effet qu'il y a une...
M. Marx: La dernière décision n'a pas remis en
cause la compétence de l'Office des professions.
M. Bédard: Peut-être que le représentant de
l'Opposition se sent plus informé que l'ensemble de tous les premiers
ministres et, de tous les ministres de la Justice de toutes les provinces,
puisque lors des discussions constitutionnelles, toutes les provinces, à
une exception près, étaient d'avis que la manière de
trouver une solution était dans le sens de permettre aux provinces de
nommer des juges de la Cour provinciale, dans le sens de faire les
modifications nécessaires à l'article 96 -parce qu'on sait que
tout le problème réside à l'article 96, ce sont les
pouvoirs qui sont donnés au juge qui y sont déterminés -
c'est
vraiment une décision, au point de vue juridique, fondamentale
à prendre avant de s'orienter pour la mise en place d'une
réforme, mais je suis d'accord avec vous...
M. Marx: Je vous ai donné des raisons pour vous
démontrer que même si l'on a le pouvoir de nommer ses juges, on va
avoir encore des problèmes en ce qui concerne les compétences des
tribunaux administratifs. M. le ministre, je ne veux pas insister sur cela, il
y a toujours la facilité de blâmer le fédéral ou la
constitution pour tous les malheurs du Québec. Je pense vraiment qu'il y
a la volonté politique de faire des réformes demandées
entre autres par le barreau, je pense que l'on pourra les faire. Le barreau a
demandé certaines réformes, je pense que cela serait injuste de
dire que les membres du barreau, le comité du barreau n'a pas vu tous
les problèmes constitutionnels et ainsi de suite. Je pense que c'est une
excuse que vous nous donnez; j'accepte l'excuse pour ne pas faire telle et
telle chose, mais pour moi c'est une question de volonté politique que
vous n'avez pas dans ce dossier.
M. Bédard: M. le Président, mon collègue
peut affirmer tant qu'il le voudra que c'est une question de volonté
politique, mais il ne m'a pas prouvé qu'il a suffisamment d'information
sur le sujet pour soutenir qu'il n'y a pas là fondamentalement un
problème constitutionnel, parce qu'il est là. Comment
procéder à une réforme globale de nos tribunaux
administratifs alors que leur existence même fait l'objet de discussions
devant les tribunaux et que les décisions sont loin d'aller dans le sens
d'une sécurité juridique de nos tribunaux administratifs. Faut
être logique et conscient que certaines réformes administratives
soient faites, d'accord, et d'ailleurs dès l'automne il y aura un
travail qui sera fait dans ce sens-là pour au moins améliorer ce
qui existe déjà.
M. Marx: Cela a pris vingt minutes pour avoir la ....
M. Bédard: Faut savoir ce que l'on demande. Vous voyez
c'est là l'importance de savoir poser la bonne question. Si vous m'aviez
demandé des améliorations à ce qui existe
déjà, d'accord.
M. Marx: Est-ce que ce serait des améliorations qui
seraient des qains de réforme?
M. Rivest: Pour l'automne.
M. Bédard: Je n'aime pas qualifier ce que je fais de
réforme, mais une chose est certaine, il y a sûrement des
améliorations qui peuvent être apportées.
M. Rivest: C'est quoi cela?
M. Bédard: Nos fonctionnaires du ministère de la
Justice sont là-dessus présentement.
M. Rivest: C'est quoi concrètement?
M. Bédard: Nos fonctionnaires du ministère de la
Justice...
M. Marx: C'est quoi?
M. Rivest: Quelles améliorations? Les euphémismes
du ministre sont devenus des améliorations. Je sais que vous voulez tout
améliorer, mais c'est quoi que vous envisagez sur le plan administratif,
un, deux, trois, quatre.
M. Bédard: Exactement.
M. Marx: C'est le sous-ministre qui va répondre.
M. Bédard: Un, deux, trois, quatre c'est peut-être
beaucoup, mais...
Il a la même réaction que moi, vous l'avez remarqué
parce que vos questions ne sont pas sérieuses.
M. Marx: On aimerait savoir si c'est vous le sous-ministre de
l'an prochain quand on va lire le journal des Débats?
Le Président (M. Desbiens): Au nom du ministre.
M. Bédard: Pour ce qui est des orqanismes quasi
judiciaires à part la question constitutionnelle, c'est certain que nous
sommes en train de réévaluer différentes propositions qui
ont été faites par le passé dont notamment parmi les
hypothèses un regroupement du contentieux administratif au niveau d'une
chambre spécialisée, proposition qui avait été
faite en 1975 dans le livre blanc de M. Choquette, cela c'est une
possibilité. Il y a certains regroupements de nature administrative qui
peuvent être faits. Par ailleurs, il y a des éléments qui
causent certains problèmes devant les tribunaux administratifs, le fait
d'une part que plusieurs tribunaux administratifs n'ont pas de règle de
procédure ou de rèqle de pratique. Lorsque dans certains cas ces
tribunaux administratifs possèdent des règles de pratique et de
procédure, on a constaté qu'il n'y avait pas
nécessairement uniformité dans les règles de pratigue et
de procédure, ce qui peut causer des désaqréments tant
pour les procureurs au dossier que pour les justiciables.
Il est certain qu'indépendamment de la question
constitutionnelle, on pouvait envisager l'élaboration d'un code de
procédures administratives de base auquel pourrait ajouter
éventuellement chacun des tribunaux en fonction de la
spécificité qui leur est propre, et cela c'est une étude
qui est en marche actuellement et qui devrait, normalement si tout va bien
malgré les compressions d'effectifs et de budget, déboucher dans
le courant de l'année ou en 1982.
M. Marx: J'ai l'impression ici aujourd'hui que le
ministère héberge une université, une faculté de
droit. On fait des études sur tout. Éventuellement on va avoir
des études et peut-être que d'ici quelques années on va
même avoir des projets de loi. Je comprends, nous avons une autre
réponse.
M. Bédard: Sauf que je me rends compte que, du
côté de l'Opposition, vous n'approfondissez pas tellement les
problèmes et vous faites des demandes avant de savoir ce que ça
veut dire...
M. Marx: M. le ministre...
M. Bédard: Je vous dis... Bien, laissez-nous parler. Tout
à l'heure, contrairement à ce que tous les experts au
Québec disent, vous prétendiez que du point de vue
constitutionnel il n'y a pas de problème fondamental concernant la
revision de l'article 96 alors que c'est le noeud même du
problème. Je pense que mes représentations depuis quatre ou cinq
ans, au niveau des conférences fédérales-provinciales, ont
justement été de clarifier une fois pour toutes l'article 96.
Qu'on y apporte les modifications nécessaires. Je pense que, grâce
à cette insistance durant trois ou quatre ans, le Québec a fait
du chemin. Quand j'en ai parlé dans les premières
conférences fédérales-provinciales, le Québec
était seul à parler de la possibilité pour les provinces
de nommer les juges des Cours supérieures, alors que maintenant lors des
dernières conférences constitutionnelles, cette demande faisait
presque l'unanimité des provinces.
M. Marx: Oui. Mais, M. le ministre, je ne peux pas prendre cette
réponse comme une réponse sérieuse. Je vais vous dire
pourquoi. Depuis 1867 on est pris avec l'article 96. Le premier ministre de la
Justice au Québec aurait pu dire: Je ne peux rien faire en
matière de tribunaux administratifs parce qu'on est poignés avec
l'article 96. Depuis 1867, est-ce qu'on a légiféré dans ce
domaine?
M. Bédard: C'est pas vrai ce que vous dites là.
M. Marx: Bien, c'est vrai.
M. Bédard: Non, parce qu'au moment où les
tribunaux...
M. Marx: Parce que l'article 96 est dans la constitution depuis
son adoption.
M. Bédard: Sauf qu'au moment où les tribunaux
administratifs ont été mis en place, il n'y avait pas de
discussion concernant l'article 96.
M. Marx: Bien oui.
M. Bédard: Et ça ne posait pas de
problèmes.
M. Marx: La première décision était...dans
quel arrêt? J'ai vu l'arrêt de John Deere ... en Saskatchewan,
l'arrêt où on a décidé que les provinces peuvent
établir des tribunaux administratifs de travail.
M. Rivest: C'était dans les années quarante.
M. Marx: Non, avant ça, peut-être les années
vingt. L'idée, c'est que...
M. Rivest: Informez-vous!
M. Marx: ...on est poigné avec cet article 96 depuis la
Confédération. Je ne veux pas faire un débat juridique,
mais on est pris avec cet article 96 depuis la Confédération et
on a fait beaucoup de progrès, des progrès énormes en ce
qui concerne l'établissement des tribunaux administratifs. Parce que
c'est essentiel qu'on ait des tribunaux administratifs, sinon le système
ne fonctionnerait pas. Tout ce que je veux dire, en terminant, c'est que le
ministre, à chaque question, pourrait bien répondre, et c'est son
droit, qu'on est en train de faire des études. C'est son droit,
peut-être qu'il fait des études. Ça peut être des
études de deux pages; on a déjà demandé une
étude dans cette commission ou dans une autre commission et on a eu une
espèce d'étude de trois pages d'un bureau d'avocats qui
n'étaient pas très forts. J'ai déjà eu des
études de votre ministère, cela a pris peut-être cinq ou
six semaines ou deux mois pour les avoir. Quand je les ai reçues,
c'étaient des affirmations de trois pages. Ce n'est pas quelque chose de
sérieux, mais c'est ca. Donc, on peut répondre à chaque
question: On fait des études.
M. Bédard: Ce que vous dites n'est pas plus
sérieux.
M. Marx: Je vais vous montrer l'étude, M. le ministre.
M. Bédard: Bien oui, puis?
M. Marx: Ce n'était pas une étude, c'était
une lettre de trois pages pour dire oui.
M. Bédard: Une étude n'est pas
nécessairement plus concluante narce qu'elle a cinquante pages au lieu
de trois. Si un problème peut se résoudre en trois pages...
M. Marx: Quand elle a trois pages et ne contient rien, ce n'est
pas mon opinion personnelle.
M. Bédard: Bien oui, mais c'est votre opinion personnelle.
Je la respecte mais...
M. Marx: On va donner ca à n'importe quel juriste, M. le
ministre, et si guelqu'un nous dit que c'est une étude sérieuse,
je vais m'excuser.
M. Bédard: On ne sait même pas de quoi vous parlez.
Vous parlez d'une étude... Soyez donc précis!
M. Marx: Vous pouvez répondre que vous êtes en train
de faire des études à tout ce que je peux dire et on va accepter
ca comme réponse.
M. Bédard: Comme vous pouvez dire n'importe quoi dans
l'Opposition et demander n'importe quel projet de loi. Sauf une chose, c'est
que, lorsqu'on dépose un projet de loi, j'ai toujours remarqué
qu'une des premières questions de l'Oppositon était de nous
demander si les études appropriées avaient été
faites. C'est un souvenir que j'ai.
M. Rivest: Vous avez remarqué ça? Très
perspicace.
M. Bédard: Ce qui est tout à fait normal à
part ca. Ce qui fait qu'en termes de prudence législative...
M. Marx: Je pense que j'ai posé mon argument, vous avez
posé le vôtre, M. le ministre. (17 h 15)
M. Bédard: Oui, oui...
M. Marx: Ceux qui liront les débats, un jour, trouveront
la vérité.
M. Bédard: Soyez juge de votre point, je n'ai pas de point
à faire.
M. Rivest: Une dernière question au ministre de la
Justice.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Sur la dimension constitutionnelle. C'est vrai que
cela a été évoqué, vous n'avez pas inventé
le Pérou, parce qu'en 1971, cela était déjà
évoqué à la conférence.
M. Bédard: Mais vous êtes d'accord avec moi que le
contentieux constitutionnel existe depuis cinq ans.
M. Rivest: Oui, je suis d'accord, il existe...
M. Marx: Depuis les débuts de la...
M. Rivest: Vous irez voir à la faculté de droit, il
y a une excellente étude par Jean-Claude Rivest...
M. Bédard: Que j'ai déjà vue.
M. Rivest: ...au niveau de la maîtrise. C'est une
étude qui existe, qui a plus que trois pages.
M. Marx: La date, la date?
M. Bédard: Vous vous prenez un peu trop pour d'autres,
vous voyez quel résultat cela donne.
M. Rivest: Non, parce que le ministre Jacques-Yvan Morin,
à l'époque, m'avait très bien noté
là-dessus, un homme de juqement.
M. Bédard: C'est d'ailleurs pour cela qu'il est au
pouvoir, il a été réélu.
M. Rivest: Cela a été évoqué durant
les conférences constitutionnelles, j'en conviens, lors des vacances,
à la saison estivale du ministre, l'été dernier. Comment
se fait-il que ce problème qui existe n'a pas été retenu
parmi les douze sujets? Cela a tombé complètement à un
moment donné, c'est-à-dire qu'on ne l'a pas ramené,
malgré qu'il y a eu un consensus.
M. Bédard: C'est-à-dire qu'il y a eu un consensus
au niveau des provinces, sauf peut-être une, mais l'opposition à
cette demande est venue du fédéral qui, tout en reconnaissant
qu'on avait des difficultés, qu'il y avait vraiment des
difficultés pour les provinces concernant la mise en place des tribunaux
administratifs, étant donné le contexte juridique, les
porte-parole du fédéral n'ont quand même pas cru bon de
s'impliquer dans le sens de donner suite à la demande qui a
été faite par les provinces. Quand je vois le
député de D'Arcy McGee dire qu'il n'y a pas de problème
juridique au niveau de la mise en place des tribunaux administratifs, le
ministre fédéral de la Justice, M. Chrétien, reconnaissait
lui-même les difficultés et c'est justement pour les régler
que les provinces s'étaient mises d'accord pour demander un amendement
à
l'article 96 qui aurait réglé le problème.
M. Marx: Je n'ai jamais dit qu'il n'y avait pas de
problème en vertu de l'article 96.
M. Bédard: Alors, je comprends.
M. Marx: Tout ce que j'ai dit, c'est que ce ne sera pas
nécessaire d'attendre un amendement à la constitution afin de
faire quoi que ce soit et vous savez bien que j'ai raison sur ce point.
M. Bédard: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Bédard: ...nous n'avons pas entendu des amendements
à l'article 96 avant d'y aller, même de la mise en place de
certains tribunaux administratifs quasi judiciaires, je pense à la
protection du territoire agricole. Nous l'avons fait parce que nous croyons que
c'est une nécessité. Je pourrais faire le même raisonnement
pour plusieurs autres tribunaux administratifs. Tout ce que je veux dire, je
pense que le député de D'Arcy McGee en conviendra avec moi, c'est
qu'à la sécurité juridique de l'ensemble de ces tribunaux
administratifs, il y aurait une possibilité et il appartient au
fédéral de clarifier la situation en donnant suite aux demandes
des provinces.
M. Marx: Je répète une autre fois: même si on
modifie la constitution, et ce sera aux provinces de nommer des juges des cours
supérieures et des cours de comtés, on aurait un problème
en ce qui concerne les compétences qu'on donne aux tribunaux
administratifs. Tout ce que je veux dire, c'est qu'il ne faut pas que la
réforme soit contremandée, parce qu'on attend de modifier la
constitution. Cela peut prendre encore 75 ans avant qu'on touche à cet
article. On va toucher au reste, il y a d'autres articles dans la constitution
qui sont plus importants à modifier que l'article 96. Passons à
autre chose, sinon on va se...
M. Bédard: On vous a indiqué tout à l'heure
que justement, malgré le problème constitutionnel, nous
n'hésiterions pas à approfondir le plus rapidement possible pour
améliorer peut-être le fonctionnement de ceux qui existent, en
tout cas, en ce qui a trait à la procédure, l'uniformisation de
la procédure, d'autres éléments qui pourraient être
apportés avec le temps, pour améliorer.
M. Rivest: On va améliorer.
M. Marx: On va poser la question l'an prochain pour voir si
l'étude est préparée et disponible.
M. Bédard: J'aime ca vous voir réjouir d'avance
comme ca.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 1 est
adopté"?
M. Marx: II ne peut pas être... Adopté.
Soutien administratif à l'activité
judiciaire
Le Président (M. Desbiens): Programme 1. Adopté.
Programme 2. Soutien administratif à l'activité judiciaire.
Est-ce que le programme 2 est adopté"?
M. Bédard: Je ne pense pas qu'il y ait des
problèmes non plus. Programme 3.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 2 est
adopté?
M. Rivest: C'est là-dessus, je pense, que le
problème de mon collègue...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: J'en ai un très local, en passant... non, ce
n'est pas ici. Pour la question des rôles, le ministre va nous dire qu'il
va faire... La question des remises, c'est là-dedans, enfin, c'est toute
l'administration de la justice. Je voudrais que le ministre, à part nous
dire qu'il va faire des améliorations, comme il l'a dit dans son texte -
je conçois qu'il y a une volonté, c'est un éternel
problème, remarquez j'aimerais que le ministre nous dise très
concrètement ce qu'il va faire à ce sujet au cours de la
prochaine année. Est-ce qu'il y a des choses? Est-ce qu'il va parler
à des gens? Est-ce qu'il va leur confier un mandat? Est-ce qu'il a de
l'argent - c'est important - pour faire des choses? Qu'est-ce qu'il va faire?
Je sais qu'il va me dire qu'il va consulter le barreau qui fait des
études. Concrètement, dans l'année - on vous vote des
crédits - qu'est-ce que vous allez faire pour répondre à
la préoccupation que vous a signalée à nouveau le
député de Chapleau?
M. Bédard: J'ai évoqué tout à l'heure
certaines études qui ont été faites par le barreau et le
travail qui avait été fait au ministère. Je demanderais
d'une façon spéciale au sous-ministre chargé de ce secteur
de donner le plus de renseignements possibles aux membres de la commission.
M. Rivest: Juste avant - je ne doute pas qu'avec le sous-ministre
ce sera concret - l'an dernier, lors de l'étude des crédits, le
ministre de la Justice nous avait donné des
délais. Il avait dit: En Cour d'appel, en moyenne, en 1980, au
civil, cela prend quatre mois; au criminel, un mois...
M. Bédard: Si vous voulez arrêter de parler, on va
vous donner...
M. Rivest: Je ne veux pas tout vous répéter. Je
voudrais d'abord que vous nous indiquiez dans un premier temps si vous avez les
précisions que vous nous aviez apportées l'an passé, et
surtout que vous nous indiquiez quelle est l'amélioration. Si, par
exemple, la moyenne, à la Cour supérieure à
Montréal, se situait à neuf mois, j'imagine que l'excellente
action et le travail du ministre au cours de l'année ont fait que c'est
devenu huit mois, ou bien vous n'êtes pas en mesure de le dire cette
année. Donc, vous avez laissé le problème
complètement en blanc.
M. Bédard: Soyez sérieux! Les élections
viennent d'avoir lieu. N'essayez pas de faire des points à tout
moment.
M. Rivest: Vous nous avez donné des chiffres. Je ne fais
pas de points.
M. Bédard: Vous savez très bien que le
problème est très complexe, que depuis des années, que ce
soit par l'action du ministre ou sans l'action du ministre, les délais
deviennent beaucoup plus expéditifs. II y a des périodes
où, que ce soit le travail qu'on voudra fait par le ministre de quelque
parti politique que ce soit, les délais deviennent beaucoup plus longs.
Donc, cela peut représenter au bout du compte des injustices envers les
citoyens. C'est clair que c'est un problème qui préoccupe
continuellement non seulement l'Opposition, mais le ministère de la
Justice. Si mon collègue veut nous laisser la possibilité de le
faire, nous allons lui donner l'essentiel des renseignements qui pourraient
nous permettre certaines comparaisons avec le passé, mais ce qui est
important, surtout en fonction de l'avenir, c'est de savoir quels gestes
précis on pourra poser pour essayer d'améliorer la situation.
Le Président (M. Desbiens): Au nom du ministre?
M. Bédard: Oui. Pour avoir une vue d'ensemble de la
situation, je pourrais rappeler les délais d'audition, un peu comme
l'année dernière. À la Cour d'appel, présentement,
ils varient de deux à cinq mois; à la Cour supérieure,
c'est peut-être à cet endroit qu'on trouve les délais les
plus longs; à plusieurs endroits, les délais sont d'environ dix
mois.
Il y aurait peut-être lieu de signaler le cas de Montréal,
c'est peut-être le cas le plus difficile. Je peux vous donner les
délais; à Montréal - il y a une nomenclature un peu
différente de ce qu'on retrouve dans d'autres districts judiciaires - ce
qu'on appelle les causes urgentes, c'est sept mois; les causes ordinaires -
c'est peut-être un peu technique, mais, enfin, il faut les prendre comme
elles sont - les causes d'un jour sont de vingt-six mois, les causes urgentes
de deux jours sont de quatorze mois, les causes ordinaires de deux jours sont
de soixante-treize mois. Là-dessus, le barreau a fait une
évaluation avec l'administration de la justice sur ces délais. En
matière familiale, ils sont actuellement de onze mois. Les divorces par
défaut sont de quatre mois; je pense qu'il y a lieu de souligner qu'il y
a délais qui sont quand même relativement courts, quatre mois pour
un divorce.
M. Blank: C'était le mois passé. C'est encore six
mois maintenant.
Une voix: Cela empire au lieu de s'améliorer.
M. Bédard: Comme vous pouvez le voir, cela évolue
d'un mois à l'autre...
Il y a énormément de fluctuations...
Dans huit mois, peut-être que cela sera revenu à deux mois
et on ne saura pas exactement pourquoi.
Je m'excuse, les délais que je viens de donner datent de la fin
du mois de mai. Il peut arriver que certains divorces, pour d'autres raisons
que je n'ai pas ici évidemment, ce sont des moyennes - puissent prendre
six mois, mais il reste que les délais qui ont été
compilés à la fin du mois étaient de quatre mois en
matière de divorce par défaut.
M. Kehoe: C'est justement la question que je veux poser.
M. Bédard: Est-ce qu'on peut lui permettre de
terminer?
M. Kehoe: Je pensais qu'il avait terminé, je m'excuse.
Le Président (M. Desbiens): Oui, d'accord.
M. Bédard: Ce sont les délais pour la région
de Montréal. Évidemment, il y a toujours Montréal qui
pointe. Dans d'autres endroits, les délais sont quand même
relativement plus courts que cela. Je note, par exemple, dans l'ensemble de la
province qu'à la Cour provinciale les délais sont de huit
à quinze mois. Évidemment, ils sont un peu plus longs de ce
temps-ci à cause des vacances d'été. À la Cour
provinciale, les délais aux petites créances sont relativement
courts. Cela n'augmente pas plus de trois mois, mais peut-être
qu'à la fin de l'été ils se prolongent de quatre ou cinq
mois. À la
Cour des sessions de la paix, à Montréal, ils sont
relativement courts. À la Cour criminelle, la Cour supérieure de
Montréal, ils sont également relativement courts. Ils sont
à l'espace d'un terme d'assise et je pense que ce sont des délais
tout à fait acceptables. Évidemment, la situation la plus
difficile est, comme on le mentionnait tantôt, à Montréal
où le barreau s'est, entre autres, posé des questions sur la
situation en matière des causes de deux jours et plus où il y a
des délais quand même assez longs. Ce qui a été fait
jusqu'à maintenant dans ce dossier, c'est une évaluation avec le
barreau pour mettre sur pied - je pense que c'est une mesure bien
concrète - un qroupe de juges qui s'occuperaient spécialement des
causes de deux jours, comme il a été fait pour ce qu'on a
appelé les causes de dix jours et plus. Je pense que l'expérience
à Montréal et à Québec a donné des
résultats quand même intéressants.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: La réponse donnée par le sous-ministre,
c'est qu'il y a encore des études ou qu'il y a encore un comité
qui a été formé pour régler le problème.
Cela fait vingt ans que j'entends la même réponse du
ministère de la Justice, qu'un autre comité a été
formé. Concrètement... je viens de regarder les statistiques de
l'année passée. Il n'y a aucun doute que la situation va en
empirant. Elle est pire cette année que l'année passée.
C'est rendu qu'il faut attendre 6 ans avant d'entendre une cause qui va durer
deux jours et, dans d'autres cas, 26 mois pour une cause d'un jour à
Montréal, et je suis absolument sûr que la situation est encore
pire dans le district judiciaire de Hull. Je soutiens respectueusement qu'avec
tout l'accès à la justice, l'humain et tout le reste, cela sort
par la fenêtre vis-à-vis du citoyen qui attend 73 mois avant de
faire entendre sa cause. Pendant ce temps, les témoins disparaissent ou
oublient ce qui est arrivé; il y a un tas de choses qui se produisent.
Alors, au bout du compte, quand la cause est entendue... à toutes fins
utiles, il y a un règlement qui va survenir et la cause ne sera pas
entendue.
Ce que je veux demander dans l'ensemble, c'est s'il y a quelque chose de
concret fait par le ministère, autre que des études, autre que la
formation de comités, pour tenter de réqler le
problème.
M. Bédard: II y a quand même eu des choses qui ont
été faites. Je pense, par exemple, à l'augmentation de la
juridiction de la Cour provinciale de 3000 à 6000. Cela a guand
même dégagé une partie des rôles, peut-être pas
autant gu'on le voudrait, parce que l'inflation joue dans ce domaine. Il y a eu
également l'élimination des causes sur les accidents d'automobile
qui suscitaient des procès extrêmement longs et qui a tout de
même dégagé. Ce qu'on peut dire, c'est que ce serait pire
si...
M. Kehoe: Mais cela a empiré par la suite. La situation
est encore plus sombre cette année.
M. Bédard: Le barreau le remarque comme vous et il est en
mesure...
M. Kehoe: On ne parle pas au barreau, on parle au ministre de la
Justice pour le moment. Quelle mesure prévoit...
M. Bédard: Si on n'est plus capable de vous donner le
commencement d'une réponse sans que vous fassiez des remarques...
M. Kehoe: Arrêtez donc, répondez!
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Rivest: Vous ne pouvez pas gagner sur tous les plans, ce n'est
pas bon la situation, que voulez-vous!
M. Bédard: C'est clair...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Rivest: Admettez-le et dites-nous ce que vous allez faire.
C'est pourri comme situation. C'est cela qu'on vous dit.
M. Bédard: On vous a déjà dit qu'il y a des
choses qui ont été faites. Quand j'ai fait adopter le projet de
loi dans le sens d'augmenter la juridication de la Cour provinciale de 3000
à 6000, c'était justement avec cette préoccupation de
diminuer les délais...
M. Kehoe: Mais cela n'a pas aidé. (17 h 30)
M. Bédard: ... de la même façon que,
présentement, on essaie de voir si, au niveau de la communication de la
preuve, il ne pourrait pas y avoir plus de faits que jusqu'à maintenant.
Cela dépend aussi en grande partie, vous en conviendrez avec moi, des
avocats et des juges et de l'ensemble de l'appareil administratif au niveau de
la justice. Prenez par exemple le domaine criminel. Nous y avons poussé
sur la communication de la preuve. Je pense que c'est un élément
qui a fait que les délais sont très raccourcis, on est à
même de le constater. Ce n'est pas tout à fait, j'en conviens, la
même chose concernant le civil, cela peut être plus difficilement
fait...
M. Kehoe: Justement, M. le ministre, d'année en
année, la situation empire. Vous faites des changements, vous en avez
mentionné quelques-uns, qui sont un genre de "bandage approach", mais de
là à dire des programmes concrets qui tenteraient de
régler des problèmes, c'est à cela que je veux en venir.
Je sais que le problème est sérieux et complexe, mais cela
n'empêche pas que les généralités que vous donnez ne
répondent pas aux questions.
M. Bédard: Je pense que vous devez être conscient
que tout ce que l'on peut faire au niveau du ministère de la Justice,
demande nécessairement la collaboration du barreau, de la
magistrature.
M. Kehoe: Je pense que vous l'avez.
M. Bédard: ...je crois que nous l'avons. Nous travaillons
d'arrache-pied ensemble pour voir jusqu'à quel point on ne pourrait pas
améliorer la situation mais on se rend compte que le problème est
beaucoup plus complexe...
M. Kehoe: II n'y a pas de solution aux problèmes.
M. Bédard: ...qu'il ne peut paraître, qu'il n'y a
pas de solution magique. Il y a des suggestions qu'on va peut-être
approfondir un peu plus et je pense à une entre autre, à savoir
diminuer la longueur des vacances judiciaires. Peut-être que c'est un
élément qui pourrait être...
M. Rivest: Bon, est-ce qu'il y a une décision
là-dessus.
M. Bédard: ...le rapport vient de nous être produit,
soyez réalistes...
M. Rivest: Va-t-il y en avoir une dans l'année qui
vient?
M. Bédard: ...oui, définitivement et d'autres
suggestions de cet ordre là peuvent être
évaluées.
M. Rivest: Bon! c'est au moins cela.
M. Blank: On n'a pas discuté tellement des causes
contestées où le rôle des juges et des avocats peut jouer
pour retarder les dossiers. Mais comment cela se fait-il que dans le domaine
des jugements par défaut où il n'y a pas ce jeu-là -
c'est-à-dire que je parle du jugement par défaut des cas simples
comme ceux des comptes ou des chèques sans preuve - maintenant à
Montréal, cela prend des mois pour avoir un jugement de protonotaire?
Moi je me souviens quand j'ai commencé ma pratique, on faisait cela par
écrit dans le plumitif; on avait cela le lendemain et, aujourd'hui, avec
l'ordinateur, cela prend trois mois pour avoir un jugement par défaut.
Si on prend une action devant la Régie des loyers, maintenant avec des
baux commerciaux, cela prend trois, quatre, cinq mois avant d'avoir le jugement
pour annuler le bail par défaut. Tout cela appartient au
ministère de la Justice; il n'y a pas d'avocats dans ces
jeux-là.
M. Bédard: Encore une fois, dans ce domaine, je connais
très bien la situation à Montréal et les délais que
vous donnez aujourd'hui en fin d'année judiciaire, ne seront pas ceux
qu'on va connaître au mois de septembre pour une chose. On a
constaté à la suite d'une étude avec le barreau,
récemment, justement, que beaucoup de ces dossiers étaient
retournés chez les avocats pour des irrégularités que je
qualifierais d'embêtantes parce gue, dans le fond, ce sont strictement
des pièces de procédure qui n'ont pas été
rapportées par les avocats; ce sont souvent des documents imcomplets. On
a calculé dans cela qu'il y avait rie 70% à 40% des dossiers qui
revenaient parce qu'ils étaient imcomplets, et le barreau nous a
demandé ce sur quoi on travaille - et je pense que c'est un projet
précis - voulez-vous nous dire quelles sont vos exigences en
matière de procédure de manière que tout le monde soit
informé et qu'on puisse ensemble les corriger? Je sais qu'il y a un
document de travail qui est en préparation actuellement et qui sera
distribué à tous les avocats pour justement réduire...
parce que ces officiers de justice, dont vous parlez, rendent à peu
près 50 00o à 60 000 jugements par année, et si on les
retourne à un avocat pour complément de dossier, il est
évident que c'est long et finalement on réussit à
reprendre deux, trois fois le dossier pour avoir un jugement et, pendant ce
temps-là, tous les autres dossiers retardent et je crois gue cette
mesure devrait nous apporter ries résultats à brève
échéance de façon concrète. Si je peux ajouter une
petite chose, récemment le juge Deschênes, à la Chambre de
la famille, a inscrit sur les rôles une dizaine de mille causes. Ce sont
des jugements rendus sur le banc par ries juges, mais qui ont occasionné
chez nous les délais que l'on voit actuellement parce qu'il a fallu
traiter ces dizaines de mille dossiers parce qu'ils n'étaient pas
prévus.
M. Blank: Même après le jugement final du divorce,
après les trois mois, on doit attendre trois mois de plus pour avoir le
juqement signé.
M. Bédard: C'est cela. Dans ce domaine il y a eu une
augmentation considérable de dossiers.
M. Blank: Je peux peut-être suggérer
de louer ou d'acheter un autre Xerox à Montréal. Pour
avoir une copie du jugement certifié, cela prend trois semaines,
seulement une copie du jugement. Même d'un dossier quelquefois, cela
prend trois semaines. Ils mettent cela dans le Xerox et ils signent. C'est un
manque de personnel ou un manque de machine? Je ne sais quoi.
M. Bédard: Je peux vous dire que c'était la
situation il y a un mois et que présentement, cela prend 48 heures.
M. Blank: C'est maintenant 48 heures? Je vais vérifier
cela.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Vous avez mentionné tantôt, M. le
ministre, que vous prévoyez une étude en vue de raccourcir les
vacances judiciaires pour une solution possible à l'encombrement du
rôle. Concrètement, prévoyez-vous aussi le budget?
Prévoyez-vous nommer plus de juges? Prévoyez-vous plus de locaux?
Concrètement cette année, pas des études, pas des
possibilités de comités conjoints avec le barreau; cela fait 20
ans qu'on entend parler de cela. On est à discuter du budget,
actuellement, de cette année. Est-ce que vous prévoyez quelque
chose dans votre budget pour tenter de régler le problème? Je
trouve que c'est un problème majeur dans l'administration de la
justice.
À toutes fins utiles, vous pourrez faire tous les beaux
pamphlets, vous pourrez faire de la justice accessible aux citoyens, mais par
contre, si cela prend 13 mois ou 26 mois pour faire entendre une cause, est-ce
que la justice est vraiment là? C'est pour cela que je vous demande
concrètement une réponse.
M. Bédard: Concrètement, si vous me demandez mon
opinion à savoir si on règle le problème en nommant plus
de juges, je vais vous dire catégoriquement non. On ne règle pas
le problème.
L'an passé, les représentations de l'Opposition
étaient à l'effet gu'on nommait trop de juqes ou qu'on ne nommait
pas des juges avec suffisamment de critères d'évaluation. Cette
année, vous arrivez avec une autre version.
Ce que je veux vous dire, à prime abord, c'est que quelqu'un qui
regarde la situation peut penser que tous les problèmes des
délais vont se régler en nommant plus de juges. Ce n'est pas le
cas, vous le savez, je pense.
M. Kehoe: Je suis d'accord avec vous.
M. Bédard: Et même le barreau, dans l'étude
qu'il a faite, conclut justement que ce n'est pas en nommant plus de juges
qu'on va régler le problème, mais c'est par une collaboration
plus étroite, une plus qrande bonne volonté de la part des
avocats au niveau des délais. Prenez simplement les délais de
remise: les demandes de remise sont beaucoup trop nombreuses. Ceci
représente des délais accrus au bout de la ligne. Il y aurait
peut-être une qrande collaboration à apporter entre juges et
avocats, une possibilité de restreindre le nombre de remises et
accélérer les délais.
M. Kehoe: Vous ne prévoyez pas de montants
supplémentaires dans le budqet pour des locaux, pour des juges ou
d'autres manières concrètes pour tenter de régler le
problème. C'est encore la même chose. D'après vous, il
faudrait que la solution soit trouvée parmi les avocats, les juges
et...
M. Bédard: En collaboration avec le ministère de la
Justice. Sincèrement, je ne crois pas que c'est en nommant plus de juges
ou en améliorant des locaux qu'on va régler le problème
des délais. Cela me semble assez évident de ce
côté-là. À l'heure actuelle, vous êtes
à même de le voir, tous les efforts sont orientés vers une
consultation continuelle entre magistrature, barreau et ministère de la
Justice, de manière à trouver les meilleures solutions
possibles.
M. Kehoe: Cela n'avance à rien par exemple.
M. Bédard: Non. On vient de vous donner un exemple
à la suite d'une question de votre collègue. C'est bien beau de
dire qu'il n'y a rien qui avance, vous ne réglez pas la situation.
M. Kehoe: Le rôle est plus encombré que l'an
passé, dans tous les districts.
M. Bédard: Ce que vous dit également le barreau: II
faut tenir compte de la situation. Tout le monde le constate, c'est que de plus
en plus les gens font valoir leurs droits. C'est une chose gue, depuis deux
ans, on remarque d'une façon tout à fait spéciale.
Peut-être à cause d'une meilleure information aux citoyens
concernant leurs droits, à cause d'une meilleure accessibilité de
la justice aux citoyens. C'est un avantaqe. D'un autre côté, cela
apporte des problèmes qu'il va falloir essayer de résoudre le
plus possible. On n'a pas de touches magiques, comme d'autres qui nous ont
précédés ne l'avaient pas.
M. Rivest: Ce n'est pas personnel au ministre. Il prend tout pour
des attaques personnelles. C'est un problème qui existait bien avant
vous.
Le Président (M. Desbiens): M. le député He
Marquette.
M. Bédard: C'est cela.
M. Rivest: On voudrait que vous ayez le mérite de l'avoir
réglé. C'est cela qu'on veut.
M. Bédard: Ce que je veux vous dire, c'est que cela fait
partie de nos priorités en termes de réflexion, mais faut quand
même pas s'illusionner, je n'ai vraiment pas l'impression qu'on pourra
régler le problème définitivement. On essaie
d'améliorer la situation par exemple.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: M. le Président, si vous me le permettez, je
vais vous parler un peu du Tribunal de la jeunesse, plus
particulièrement dans la région de Kirkland où il y a un
Tribunal de la jeunesse concernant les procès de délinquance,
normalement c'est le lundi. Il y a à peu près 200 à 300
personnes dans la salle et seulement un juge, et souvent il faut y aller
peut-être cinq, six fois, sept fois avant que cela passe. La
dernière fois, il n'y avait pas de sténographe français,
c'est constamment remis. Alors les parents naturellement se posent de
sérieuses questions. Il n'y a plus d'avocats de pratique privée
qui veulent y aller à cause de cela: perdre des lundis, perdre une
dizaine de lundis comme cela en pratique privée, cela ne se fait
plus.
M. Bédard: Est-ce que vous pourriez me permettre de
prendre note de votre représentation, et avant la fin des
crédits, je vous donnerai une réponse sur le problème
particulier que vous évoquez
M. Dauphin: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: M. le ministre, sur ce problème qui n'est pas
de votre ressort personnel, mais tout le monde y va, le sous-ministre nous
donne certaines mesures qui ont été prises, mais la
difficulté est double. Vous faites de belles choses comme celles cela,
c'est bien beau, mais ce que je veux dire au ministre - et je veux lui faire
une demande précise - c'est le problème de l'accessibilité
à la justice, les droits qu'on accorde aux citoyens. En pratique - on le
constate, on a des avocats de pratique ici, ils vous le disent, et tout le
monde vous le dit - ça prend des délais indus, et cela constitue,
je ne sais pas si vous allez être d'accord avec moi, peut-être
l'une des entraves majeures à l'idéal et à l'objectif que
tout le monde a de l'accessibilité du citoyen à la justice, de
l'humanisation, avec vos dépliants et vos discours...
M. Rédard: Je parlais même de l'injustice tout
à l'heure, ce que cela peut représenter...
M. Rivest: Oui, c'est cela. Je suis d'accord avec cela. Mais
chaque année, depuis peut-être les années soixante,
où il y a eu beaucoup plus de droit, où le droit s'est
développé, il y a toute la question des tribunaux administratifs;
c'est un problème social qui existe et qui est fondamental. À ce
sujet, tout le monde va collaborer: le Barreau, les juqes, les justiciables,
etc. et l'administration également. Je pense que c'est le sens de la
question de mes collègues. J'aimerais que le ministre de la Justice
puisse dans les délais normaux de deux, trois ou quatre mois
présenter à la population... Vous nous dites que vous consultez,
le barreau, il est d'accord avec cela, il va présenter un
mémoire, mais il me semble en tout cas, à moins que vous l'ayez
et que vous puissiez le rendre public aujourd'hui - ce serait peut-être
souhaitable, mais si vous ne l'avez pas, peu importe -présenter un plan
d'action cohérent tenant compte de la complexité du
problème, avec des objectifs précis, indiquant dans chacune des
cours que le problème se présente de telle façon. Le
ministère de la Justice a un proqramme - cela ne se réqlera pas
dans un an, j'en conviens - de quatre ou cinq ans; enfin, peu importe, un
programme cohérent de ce problème fondamental que toutes les
administrations de la justice portent au Québec. Je sais que tous les
intervenants font leur possible, les avocats, les fonctionnaires, etc. Chacun a
sa part de responsabilité d'ailleurs là-dedans. Je pense qu'il y
a seulement le ministre de la Justice qui peut exprimer cette volonté
politique dans une déclaration publique, comme vous le faites, par
exemple, sur la déréglementation, car il y a eu une intention
manifeste du gouvernement d'essayer de réqler ce problème de la
surréglementation de l'administration publique. Mais pour réqler
ce problème du retard dans le processus judiciaire, il faut qu'on ait un
document complet, un programme d'action, des budgets, du personnel, des moyens
qui sont extrêmement variés - et le ministre l'a
évoqué - et qu'on puisse l'apprécier et dire: Le
ministère de la Justice est conscient de l'importance de ce
problème et voici un document que le gouvernement s'enqage à
réaliser en reqroupant les éléments.
Est-ce que ce type d'approche à ce problème ne serait pas,
finalement, la réponse à ce que tout le monde essaie de faire
valoir et que des statistiques,
forcément partielles et variables, qui nous sont fournies...
Est-ce que le ministre comprend un peu ce que je veux avoir?
M. Bédard: D'accord. Ce type d'approche cadre
définitivement avec la préoccupation que nous avons au niveau du
ministère. Tout travail de consultation devant être fait sera fait
et nous voulons aboutir, avant la fin de l'année, un plan d'action qui,
les consultations ayant été faites, sera quand même connu
du public et qu'on pourra évaluer. (17 h 45)
M. Kehoe: C'est quelque chose de concret.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le proqramme 2 est
adopté? Adopté. Le proqramme 3 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Protection des droits et libertés de la
personne
Le Président (M. Desbiens): Adopté. Le proqramme 4
est-il adopté?
M. Marx: Non.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: Au programme 4, j'ai été surpris, non, je
n'ai pas été surpris. Je veux dire que mon collègue le
député de Jean-Talon a été surpris cet
après-midi quand vous avez présenté tous vos
collaborateurs, M. le ministre, du fait qu'ils soient tous, sauf un, des
hommes. Cela m'a aussi surpris qu'il n'y ait pas une femme qui puisse
être sous-ministre ou sous-ministre adjoint. J'imagine qu'il y a beaucoup
de femmes secrétaires dans les bureaux des sous-ministres, mais qu'on ne
puisse pas trouver une femme pour être sous-ministre ou sous-ministre
adjoint, ça me peine beaucoup. En me préparant pour les
crédits, j'ai parcouru la liste des contractuels, des avocats qui ont
reçu les uns des milliers de dollars, les autres des centaines de
dollars. J'ai cherché le nom d'une femme. Quand j'en ai trouvé
une, c'était un contrat de 35 $. Ceci n'est pas pour vous dire que vous
n'avez pas un proqramme d'égalité des chances et tout ca, mais,
dans les faits, c'est ca, et si on ne fait pas un effort très conscient,
je pense qu'on aura le même problème d'ici cinq, dix ou quinze
ans.
Parlant de la Charte des droits et libertés de la personne, le
ministre doit être au courant que l'article 97 de la charte permet la
discrimination contre les femmes en ce qui concerne les avantages sociaux.
L'article 97 était au début un article transitoire, ça,
c'était en 1975. Vous êtes ministre depuis cinq ans, ca vous a
donné assez de temps pour faire des études et pour voir si
c'était le temps de mettre les femmes sur un pied
d'éqalité avec les hommes, oui ou non. Je pense que vous avez
même eu des études et des rapports. Il y a le rapport Boutin, si
vous vous souvenez. Vous avez la ou les recommandations de la Commission des
droits de la personne pour abroqer l'article 97, en ce qui concerne les
femmes.
L'autre jour, quand j'ai soulevé ce problème au salon
bleu, la députée de Maisonneuve était d'accord avec moi
pour qu'on fasse quelque chose dès cette semaine. J'imagine que la
députée de Johnson serait d'accord avec moi pour qu'on fasse
quelque chose dès ce soir. Je pense que le ministre peut nous dire qu'on
va étudier la charte au mois de septembre ou octobre, on va penser, on
va revoir, je vais demander à mon sous-ministre de répondre, je
vais demander à un autre de faire une étude; je pense que c'est
seulement du verbiage. Ce qu'on veut savoir maintenant, c'est pourquoi le
ministre a attendu cinq ans et après cinq ans, il n'a rien fait en ce
qui concerne cet article 97 qui était supposé être un
article transitoire. Quand j'ai dit que le ministre avait néqliqé
de protéger les droits des femmes, j'ai voulu parler de cette question,
j'ai soulevé d'autres problèmes aussi, mais j'ai surtout
parlé de cette question, parce que je trouve ca injuste. Beaucoup
d'organisations de femmes ont fait des pressions sur les partis politiques et
le Parti libéral a fait une proposition pour abroger l'article 97 en ce
gui concerne les femmes, dans son programme électoral.
M. le ministre pourrait peut-être nous dire ce qu'il entend
faire.
M. Bédard: Je trouve toujours...
M. Marx: Non, pas victime, le ministre...
M. Bédard: Oui, mais là, gu'est-ce que vous
voulez...
M. Marx: Non, non...
M. Bédard: ...voulez-vous me laisser répondre?
M. Marx: Je vais vous défendre devant mon collègue
de Jean-Talon.
M. Bédard: Je n'ai pas besoin d'être défendu.
Sauf que je suis toujours surpris de la manière démagogique avec
laguelle le député de D'Arcy McGee aborde...
M. Rivest: Vous n'avez pas besoin de revenir chaque fois.
M. Marx: Ce n'est pas démagogique, je vous ai
présenté des faits, des faits.
M. Bédard: Parce que la préoccupation...
M. Marx: Ce n'est pas démagogique, la
démagogie...
M. Bédard: Allez-vous me laisser répondre? Allez-y,
finissez votre intervention, on parlera après.
M. Marx: II ne faut pas m'accuser de démagogie.
M. Bédard: Je vais vous le prouver.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre. Vous avez la
parole.
M. Marx: Je m'excuse, je n'ai pas voulu faire de la peine au
ministre.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le ministre, vous avez la parole.
M. Bédard: Vous avez terminé? Je dis, M. le
Président, que je suis toujours un peu surpris de la manière
démagogique avec laquelle le député de D'Arcy McGee aborde
tous les problèmes. Par exemple, quand il dit qu'il n'y a pas d'efforts
soutenus qui ont été faits au niveau gouvernemental pour assurer
une plus grande présence des femmes dans les postes d'importance, je
crois que ce n'est tout simplement pas vrai. On est à même de
constater que, depuis 1976, on retrouve plus de femmes dans des postes
d'importance, comme sous-ministres et que cela n'a jamais été le
cas auparavant. Également, au ministère de la Fonction publique,
au ministère de la Justice, des études avaient été
faites concernant la représentation des femmes à
différents postes, différents secteurs d'activité. On
était à même de constater, il y a trois, quatre ou cinq
ans, que cette présence était définitivement non
suffisante et non représentative. Il y a du travail qui a
été fait et je suis en mesure de produire un document avec des
chiffres à l'appui, des statistiques à l'appui. Dans chacun des
secteurs d'activité moins un, en ce qui a trait au ministère de
la Justice, le pourcentage de présence des femmes, que ce soit au niveau
de cadres, de gérance, de cadres professionnels également, la
représentativité des femmes a augmenté en termes de
pourcentage. C'est une préoccupation qu'on a continuellement au
ministère de la Justice. Cela nous a amené à donner
certaines directives pour faire des représentations au niveau de la
structure, et dans les jurys de sélection, on trouve le moyen d'y
insérer une femme, ce qui n'était pas le cas auparavant, de
manière - je pense que cela commence un peu - que parmi les personnes
qui ont à décider d'un poste à combler, les membres de ce
jury, on s'assure que les femmes soient représentées. C'est pour
cela qu'au ministère de la Justice...
M. Marx: Est-ce la réponse du ministre?
M. Bédard: C'est terminé. Au ministère de la
Justice, dans la formation de tous les jurys concernant les postes de cadres,
les postes de professionnels, etc., nous nous assurons de la présence
d'une femme. Ceci a contribué à augmenter la
représentativité...
M. Marx: Au niveau des jurys, comment peut-on s'assurer qu'il y
ait des femmes? Ce serait enfreindre la Charte des droits et libertés de
la personne, de choisir les femmes. Les femmes veulent être
égales...
M. Bédard: Soyez logiques un peu avec vos propos.
M. Marx: On ne peut pas choisir des femmes pour un jury, ce
serait à l'encontre de la Charte des droits et libertés de la
personne et de la Déclaration canadienne des droits. Ce serait nettement
illégal, de toute façon.
M. Bédard: Je vous demande seulement d'être logique
avec le but que vous poursuivez. Je vous dis qu'à la fonction publique,
nous avons posé des gestes très précis, de manière
qu'il y ait une augmentation de la représentativité des femmes.
Les gestes que nous avons posés sont sûrement appropriés,
puisque les statistiques se sont améliorées sous ce rapport.
Concernant les autres représentations faites pour
l'amélioration de la Charte des droits et libertés de la
personne, je crois que la décision d'aller en commission parlementaire,
de revoir l'ensemble de la charte est appropriée dans les circonstances,
parce nous avions l'intention, du point de vue gouvernemental - c'était
déjà fait dans un cas - de procéder, en ce qui a trait au
programme de...
Nous avions déjà déposé une loi concernant
les programmes d'action positive.
M. Marx: Cela n'a pas été déposé
durant cette session, cela l'a été lors de la dernière
Législature. Cela n'a pas été déposé durant
cette session, ce n'était pas dans le discours inaugural du premier
ministre.
M. Bédard: Oui, mais vous en êtes sur les
détails.
M. Marx: M. le ministre, vous n'avez
pas déposé ce projet de loi...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!
M. Bédard: Oui, mais laissez-moi terminer.
M. Marx: II a été déposé durant la
dernière Législature.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À
l'ordre!
M. Marx: II ne faut pas induire la commission en erreur.
M. Bédard: Non, mais, ne vous induisez pas en erreur et
n'induisez pas les qens en erreur non plus. Nous ne l'avons pas
déposé parce que, justement, nous voulons aller plus loin. C'est
très clair. À partir du moment où on demande une
commission parlementaire, dans mon esprit, c'est très clair qu'à
la suite des représentations des qroupes, à la suite des
représentations des membres de la Commission des droits de la personne,
tout ceci aboutira à une loi qui ira beaucoup plus loin que celle que
nous avions déposée concernant les programmes d'action positive.
Concernant l'âge, je crois que cela ira de soi. D'ailleurs, certaines
études avaient été faites par rapport à un projet
de loi qui est présentement en deuxième lecture, au niveau de
l'Assemblée nationale, en ce qui a trait à l'abolition de
l'âge comme motif pour hâter la retraite. Je pense que c'est un
élément important.
M. Marx: C'est retiré, M. le ministre, c'est retiré
ce projet de loi.
M. Bédard: Non.
M. Marx: Oui, le projet de loi sur l'âqe de la retraite,
c'est retiré, parce que ce sont des promesses électorales qu'on a
faites et qu'on a retirées après cela.
M. Bédard: Soyez donc sérieux!
M. Marx: Non, mais c'est retiré effectivement.
M. Bédard: II n'est pas retiré. M. Marx:
Mais ce sera fait.
M. Bédard: Le leader du gouvernement lui-même a
annoncé...
M. Marx: Ce ne sera pas adopté à cette session, ce
sera peut-être déposé à une session
subséquente, à la prochaine session.
M. Bédard: M. le Président, quand cela fait
l'affaire du député de d'Arcy McGee, il est très
technique; quand cela ne fait pas son affaire, il argumente autrement. Il sait
très bien qu'à partir du moment où le projet de loi
concernant l'abolition de l'âge de la retraite concernant le travail,
sera adopté en deuxième lecture - et j'espère que
l'Opposition sera d'accord à l'occasion d'une nouvelle session qui aura
lieu à l'automne -ce projet de loi sera réintroduit au stade
où il est rendu présentement et il sera adopté avant le
mois de décembre, à moins que l'Opposition y fasse obstacle, je
ne crois Das que ce sera le cas.
M. Marx: Non, mais on va avoir une commission qui va
étudier ce projet de loi à une autre session.
M. Bédard: Vous avez présentement un projet de loi
susceptible d'être adopté avant la fin de cette session concernant
la fonction publique qui va être de nature à améliorer la
situation concernant les femmes. Ce sont plusieurs gestes pratiques que je
viens d'évoquer. Quand la commission parlementaire aura lieu, elle va
nécessairement déboucher dans des délais rapides sur une
législation qui ira beaucoup plus loin que celle que nous avions
déposée avant cette session.
M. Marx: M. le ministre, je n'ai jamais dit - vous pouvez
vérifier les textes - que vous n'avez pas fait d'efforts en ce qui
concerne l'engagement des femmes, mais je constate que parmi vos autres
fonctionnaires, on ne peut que le constater. Ce n'est pas un reproche que je
vous fais, c'est une constatation. Si vous voulez prendre cela comme un
reproche, libre à vous. Vous m'avez accusé d'être
démaqogique, moi, je ne vous accuse pas d'être démagogique
parce que vous ne l'êtes pas, mais vous êtes très habile,
vous avez l'habilité de noyer le poisson, votre réponse, dans un
verbiaqe. (18 heures)
J'ai posé une question très simple, au ministre, à
savoir s'il va abroger l'article 80, oui ou non. C'est simple. Il ne faudra pas
une commission parlementaire pour étudier cela au mois d'octobre ou
novembre, et après, avoir un projet de loi au mois de février et
peut-être qu'on va avoir une élection référendaire
au mois de mars, donc pas de projet de loi qui sera adopté. Il n'v a pas
d'étude à faire, tout est déjà fait, parce qu'on
dit - permettez moi un anglicisme -c'est de "staller" l'affaire, c'est ce que
vous êtes en train de faire, tout le monde me comprend. Si vous voulez
"staller" l'affaire et s'il n'y a pas d'opposition de votre caucus, de la part
des femmes députées, je ne comprends pas. Voyez la
députée de Johnson qui n'a pas dit un mot sur un dossier aussi
important.
M. Bédard: S'il vous plaît, M. le
député, je pense qu'il y a une députation féminine
à l'intérieur du Parti québécois qui est beaucoup
plus agissante...
M. Marx: Je fais pression sur vous pour faire quelque chose.
M. Bédard: ... que quelque députation
féminine que vous ayez pu avoir à l'intérieur de quelque
parti politique que ce soit. Et c'est pour cela que nous avons abouti, comme
vous l'avez dit tout à l'heure, à poser des gestes précis
qui n'ont pas réglé tous les problèmes, mais qui
constituent une amélioration par rapport à ce qui existait. Nous
allons continuer notre volonté politique de continuer dans ce sens.
Et en ce qui a trait à la Charte des droits et libertés,
je crois qu'il était indiqué, après les rencontres que
j'ai eues avec de nombreux groupes à Montréal, il y a de cela
déjà plusieurs mois, que quant à légiférer
concernant la charte, il fallait ouvrir l'ensemble de la charte via une
commission parlementaire et permettre à tous les groupes de venir
s'exprimer. Et à ce moment-là, ce que je puis vous dire, c'est
que j'ai la volonté politique que, cette commission parlementaire
étant tenue dans des délais très rapides, elle aboutira
à une législation qui, je le sais d'avance, ira beaucoup plus
loin que celle que nous avions déjà déposée
concernant les programmes d'action positive.
M. Marx: Pourquoi laisser les femmes dans une position
d'inégalité encore des mois et des mois? Je sais que le ministre
est de bonne foi. Je ne mets pas en cause sa bonne foi. La bonne foi, en vertu
du Code civil, se présume. Il faut prouver la mauvaise foi et je ne
pourrai jamais prouver la mauvaise foi du ministre. Donc, il est de bonne
foi.
Je vais vous lancer un défi. Si vous voulez déposer un
projet de loi demain matin à l'Assemblée nationale, pour abroqer
l'article 97 en ce qui concerne les femmes, on va vous appuyer et ce sera
adopter dans dix ou quinze minutes. Toutes les femmes seront sur un pied
d'égalité avec les hommes. C'est cela le problème.
M. Bédard: Je m'excuse. On pourrait faire une très
longue discussion là-dessus. Mais je ne suis pas sûr que c'est le
meilleur moyen que vous êtes en train d'évoquer. Il y a moyen
d'arriver à ce résultat en évitant beaucoup plus les
tracasseries judiciaires que pourrait impliquer la formule que vous
représentez...
M. Marx: ... judiciaires.
M. Bédard: Laissez-nous terminer, s'il vous
plaît!
Concernant l'article 97, il faudrait que le député de
D'Arcy McGee soit conscient qu'il y a quand même plusieurs opinions qui
s'expriment à propos de l'article 97. Nous avons ici avec nous, nous
avons la chance d'avoir avec nous, la vice-présidente, la
présidente par intérim, de la Commission des droits et
libertés de la personne, Mme Francine Fournier, qui pourrait
peut-être nous faire part de certaines préoccupations.
Le Président (M. Desbiens): Avant de poursuivre, je dois
constater qu'il est 18 heures et qu'il y a un consentement qui existe à
l'effet de poursuivre les travaux jusqu'à 20 heures.
M. Marx: 20 h 15.
Le Président (M. Desbiens): 20 heures, 20 h 15?
M. Bédard: Nous sommes d'accord, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Maintenant on poursuit les
travaux jusqu'à 20 h 15. Alors, madame.
M. Bédard: Sur la question de l'actuel article 90 de la
charte, il s'agit de constater qu'il y a plusieurs interprétations quant
à son abolition. Le rapport Boutin recommandait que les bases
actuarielles sexuées continuent à être
considérées comme non discriminatoires; la proposition et la
recommandation de la Commission des droits de la personne est à l'effet
de considérer des bases actuarielles sexuées comme
discriminatoires. Alors, il y a des diverqences d'opinions qui méritent
d'être discutées avant.
Si on recommande l'abolition de l'article 90, il n'y a aucun
problème et la Commission des droits de la personne serait ravie de
cette situation, mais il faut constater qu'il y a des opinions
différentes sur ce qui remplacerait l'article 90. J'aimerais ajouter sur
ce point-là que cet article permet actuellement la discrimination non
pas seulement à l'égard des femmes, mais aussi sur la base de
l'état civil, de l'âge, du handicap et de l'orientation sexuelle,
et c'est assez important.
M. Marx: Je dois avouer, M. le Président, que
j'étais commissaire à la Commission des droits de la personne et
je pense que j'ai toujours été d'accord avec la position de la
commission sur cette question. Je souliqne une autre fois que c'est un article
transitoire, que le ministre de la Justice est au pouvoir depuis cinq ans et
qu'il n'a rien fait depuis cinq ans sur cette question.
M. Bédard: Encore là, ce n'est pas vrai, M. le
Président.
M, Marx: Qu'est-ce que vous avez fait concernant cet article?
M. Bédard: Concernant l'orientation sexuelle"?
M. Marx: Sur l'article, l'égalité des hommes, des
femmes, c'est ce que nous discutons maintenant.
M. Bédard: Mais l'orientation sexuelle concerne tout le
monde; pour avoir été longtemps à la Commission des droits
de la personne, vous devriez le savoir.
M. Marx: Vous avez proposé une modification qui a
été acceptée par l'Assemblée nationale, quelque
chose qui a été demandé par la Commission des droits de la
personne, mais on n'est pas en train de discuter de cela, on est en train de
discuter de la disposition qui traite des femmes.
M. Bédard: M. le Président, je pense que la
meilleure réponse vient de nous être donnée par la
présidente par intérim de la Commission des droits de la personne
qui exprime son opinion, qui est très claire dans le sens de ce qu'elle
a dit. Elle exprime son opinion sur ce sujet, il y a différentes
manières de voir les choses, que ce soit un groupe par rapport à
un autre groupe. L'article en question, l'article 90, concerne également
d'autres sujets de préoccupation sur lesguels, je crois, il y a avantage
à ce qu'il y ait une commission parlementaire devant laquelle tous les
courants d'opinions pourraient être exprimés, qui permettra...
M. Marx: Pourquoi le ministre n'a-t-il pas tenu une telle
commission il y a deux ans, ou trois ans?
M. Bédard: On ne légifère pas à
grande vitesse dans ce domaine-là.
M. Marx: Surtout quand cela concerne les femmes.
M. Bédard: N'essayez pas de vous faire le défenseur
des femmes. Pour ce que vous avez fait jusqu'à maintenant, il n'y a rien
d'impressionnant en termes de bilan. D'accord?
M. Rivest: Le Conseil du statut de la femme, c'est
déjà pas mal.
M. Bédard: Je ne jouerai pas à ce jeu. Au niveau du
ministère de la Justice, je vous l'ai évoqué par plusieurs
exemples, ma préoccupation de l'avancement au niveau de la
représentativité des femmes dans tous les secteurs
d'activité, c'est une des préoccupations qui m'animaient lorsque
j'ai fait adopter la loi 89. Ce sera la même préoccupation qui
m'animera lorsque nous aurons à procéder à l'étude
en commission parlementaire de la Charte des droits et libertés de la
personne.
Le Président (M. Desbiens): Mme la députée
de Johnson.
Mme Juneau: À deux reprises, mon collègue de D'Arcy
McGee m'a pointée. C'est sûr qu'on veut avoir de l'avancement du
côté des femmes. C'est bien certain. Mais quand j'ai pris
connaissance de toutes ces choses qui nous ont été passées
cet après-midi, dont j'avais entendu parler avant, concernant les
nouveaux droits de la famille, je pense, M. le député de D'Arcy
McGee, que vous devez voir qu'il y a eu de l'avancement. Du point de vue des
femmes, en tout cas, d'après ce que j'ai lu, on a de l'avancement.
D'après ce que je vois et d'après ce que je vis
présentement, je crois qu'on a un pas de fait en avant. C'est sûr
qu'il va y avoir une continuité à cela et que c'est à nous
d'aider à ce que cela se fasse. Mais je suis très satisfaite
jusqu'à maintenant de ce qui a été fait. J'espère
que cela va continuer.
M. Marx: Seulement par ce gouvernement ou par le gouvernement
précédent également?
Mme Juneau: Par le gouvernement qui est là.
M. Marx: Le gouvernement précédent a fait adopter
la Charte des droits et libertés de la personne.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Bédard: M. le Président, tout ce que je sais,
c'est que la députée de Johnson fait le travail de
sensibilisation que vous évoquiez tout à l'heure auprès du
caucus et auprès de tous ses collègues du gouvernement.
M. Rivest: Remarquable.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Au sujet de la charte et de l'annonce qui a
été faite ces jours derniers, voici ma première question.
Il y a, j'imagine, une décision du Conseil des ministres à ce
sujet. J'aurais besoin d'éléments d'information. Est-ce que le
ministre de la Justice a fait une recommandation précise au Conseil des
ministres sur... Ce que je cherche à savoir - je ne fais pas de
cachette
au ministre - c'est l'ampleur du mandat qui sera confié à
la commission parlementaire. Là, dans la discussion, on a fait
état du document d'Action positive, qui d'ailleurs ne concerne pas juste
les femmes. Dans le document, on voit qu'il y a toutes les questions
salariales, il y a même les gens des communautés culturelles qui
ont peut-être bien du rattrapage à faire ou qui auraient besoin
d'Action positive eux aussi, enfin tous les éléments qui sont
mentionnés. Je comprends que ça, c'est un des
éléments. Ce que je veux savoir du ministre c'est: Est-ce qu'il y
a une décision ferme du gouvernement d'ouvrir complètement la
Charte des droits et libertés de la personne? Est-ce qu'il y a une
décision dans ce sens, écrite ou verbale, peu importe? Le
ministre pourrait-il m'indiquer ca?
M. Bédard: J'ai évoqué, il y a de cela
plusieurs semaines, au Conseil des ministres, l'opportunité d'ouvrir
complètement, en termes d'études, l'ensemble de la charte, en
faisant valoir les avantages qu'il y aurait d'avoir une discussion globale sur
l'ensemble des droits et libertés au Québec, tenant compte quand
même de l'évolution des cinq dernières années,
tenant compte du fait que la charte, telle que nous la connaissons, existe, en
termes d'application, depuis plus de cinq ans et qu'il y a lieu à une
révision complète.
M. Rivest: D'accord.
M. Bédard: Mes représentations ont
été acceptées dans le sens que nous ouvrions sur une
commission parlementaire, ce qui veut dire ouvrir une discussion sur l'ensemble
de la charte et de tout ce que ca peut représenter qui permettra
à tous les groupes de citoyens de faire valoir leurs
préoccupations d'amélioration de la charte.
M. Rivest: Oui, évidemment, c'est le ministre de
l'amélioration.
M. Bédard: Je pense bien que c'est une fois que ces
groupes auront été entendus, auront fait état de leurs
préoccupations que je ferai des représentations précises
au Conseil des ministres.
M. Rivest: Au Conseil des ministres, très bien. Mais ma
préoccupation - tout à l'heure j'ai eu une petite discussion avec
vos aides - c'est que déjà, dans les rapports annuels
antérieurs de la commission, au fil des années, il y a toutes
sortes de recommandations qui ont été faites, qui affectaient
directement ou indirectement la rédaction de la loi, compte tenu de
l'expérience des dossiers qui étaient acheminés à
la commission. Qu'au bout de cinq ans on réévalue l'ensemble,
c'est sans doute tout à fait légitime. Mais je voudrais -parce
que le qouvernement prend une décision, comme vient de nous l'indiquer
le ministre, une décision réfléchie, qui répond
à une demande - savoir si le ministre a l'intention, au début des
travaux ou peut-être avant, de demander à la Commission des droits
de la personne, qui est quand même l'organisme le premier consulté
- parce que la commission peut commencer tous azimuths et recevoir à
gauche et à droite des recommandations qui vont lui venir d'un peu
partout puisque c'est l'ouverture "at large" -de discuter, pour la bonne
conduite des travaux de cette commission parlementaire, qu'il y ait un document
d'orientation? Et le qouvernement lui-même, en ouvrant la loi, j'imagine,
a un certain nombre - sans que ce soit décisionnel, parce qu'il ne faut
pas télescoper - d'orientations qui doivent être données.
On sait que le gouvernement a vécu avec la charte au niveau de ses lois
et au niveau des règlements, même, à l'occasion, des
difficultés qui étaient toujours embarrassantes, malgré
que c'était inhérent à la loi, ce n'était pas
toujours la faute du gouvernement. Je prends mes précautions pour que le
ministre ne se sente pas victime. Mais je voudrais que, au début de la
commission, le ministre songe à la possibilité - je ne lui
demande pas de se commettre cet après-midi - de donner aux membres de
cette commission un document qui émane soit de la commission ou du
gouvernement et qui tracerait le cadre et le mandat. Par les réponses du
ministre, le mandat est à ce point large que, finalement, est-ce que la
question de la suprématie de la charte sur les lois et les
règlements est le coeur du débat sur la non-discrimination?
Est-ce que c'est un élément auquel vous avez songé, les
difficultés administratives et législatives que le qouvernement a
connues? Est-ce que ca fait partie des orientations, tout le problème de
la discrimination positive? Je conçois que cela en soit un. Mais est-ce
qu'on pourrait avoir un tel document d'orientation pour qu'on n'arrive pas ici
et gue, boum, cela parte et que tout le monde... Est-ce qu'il y a des
orientations? Quels sont les objectifs poursuivis par le gouvernement? Est-ce
qu'on peut les avoir sur papier? (18 h 15)
M. Bédard: Les premiers objectifs d'une commission
parlementaire, c'est de permettre à tous les qroupes de s'exprimer.
M. Rivest: Oui, mais...
M. Bédard: Mais ne me demandez pas de présumer
alors qu'on va entendre des groupes. Je pense que ce n'est pas ce qu'a voulu
dire le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Excusez-moi, M. le ministre. Je conçois cela et
j'admets cela. Ce que je
veux, c'est que le gouvernement nous dise ses intentions dans un
document écrit, élaboré, purement factuel, si vous voulez.
Tous les faits que ce document contiendrait pourront être remis en
question par les intervenants, bien sûr, mais au moins qu'on ne travaille
pas dans le beurre, qu'il y ait une indication précise de ce que la
commission parlementaire a comme mandat. Iî me semble que, de
façon très pratique, ce serait bien facile de reprendre toutes
les recommandations que la commission a faites dans ses rapports annuels...
M. Bédard: Je pense que nous pouvons prévoir
plusieurs sujets qui seront évoqués devant la commission
parlementaire. Il est évident que tous les documents et toutes les
études que nous pourrons avoir en main à ce moment-là
seront mis à la disposition des membres.
M. Rivest: Avant les travaux et qu'il y ait même un
document d'orientation du gouvernement qui dise: Voici, on tient cette
commission pour tel ou tel objectif, c'est ce que le qouvernement entend
faire.
M. Bédard: Mais qu'est-ce que vous...
M. Rivest: Maintenant, on demande aux groupes s'ils sont d'accord
ou pas et on est prêt à évaluer. Est-ce qu'on pourrait
avoir un document?
M. Bédard: Ce que vous semblez dire, ce que vous semblez
vouloir, c'est que le gouvernement se commette avant même
d'entendre...
M. Rivest: Non. M. Bédard: Non?
M. Rivest: Non. C'est qu'il dise... Je ne veux pas que la
commission fonctionne dans le beurre.
M. Bédard: Quand vous dites les intentions du
gouvernement, dites donc précisément ce que vous voulez.
M. Rivest: Quand vous faites un sommet...
M. Bédard: Si ce sont les études, toutes les
études qui ont pu être faites sur chacun des sujets...
M. Rivest: Non, ce n'est pas cela.
M. Bédard: ...qu'on croit qui vont être
abordés, c'est avec plaisir et même je pense...
M. Rivest: Elles sont publiques, de toute façon.
M. Bédard: ...que c'est un devoir du gouvernement de
mettre ces études à la disposition de tous les membres de la
commission.
M. Rivest: Mais ce que je veux, c'est que le gouvernement, tout
en respectant la décision de la commission parlementaire et le processus
de décision, nous indique, d'une façon autre que ce qu'on lit
dans les journaux ou ce que le ministre peut nous dire cet après-midi,
les orientations, pourquoi il fait cela et quels sont ses objectifs. Par
exemple, un objectif bien simple: est-ce que le qouvernement est d'accord ou
non pour maintenir une charte des droits et libertés? Je vais commencer
par cela.
Deuxièmement...
M. Bédard: Cela va de soi.
M. Rivest: II faut qu'il y ait des orientations. Sans cela, on va
travailler avec des...
M. Bédard: Ce n'est pas une orientation pour un
gouvernement, dans le contexte actuel, de dire qu'il veut que la charte des
droits et libertés continue. Voyons donc! Soyez donc sérieux!
M. Rivest: Oui, mais...
M. Marx: Le gouvernement peut-il nous dire...
M. Rivest: Pour être plus concret...
M. Bédard: Si vous voulez savoir si le gouvernement va
produire une liste des sujets qu'il aimerait voir aborder au niveau des
discussions, sûrement. Mais le qouvernement ne se commettra pas avant que
les groupes soient entendus.
M. Rivest: Non, je ne demande pas cela, mais une liste des
sujets. Je comprends tout cela. C'est parce que je veux que le gouvernement
indique - c'est lui qui mène -des orientations précises et dise:
Voici, compte tenu de l'expérience et de notre évaluation, nous
soumettons à la commission telle question, nous soulevons telle
dimension, telle autre dimension. Nous avons des difficultés, par
exemple, au niveau de la valorisation des droits de la femme. Comment
pensez-vous qu'on devrait régler cela au niveau de la charte? Nous avons
des difficultés au niveau de tel autre aspect de la charte. C'est cela
que je veux avoir. Le danger de ces commissions tous azimuts, c'est que cela
finit par être un immense verbiage et, finalement, le gouvernement
tranche et on ne sait pas exactement, même
pour les mémoires.
M. Bédard: Dans ce sens-là, d'accord, pourvu qu'il
n'y ait pas d'orientations du gouvernement dans le document.
M. Rivest: D'accord, parfait. M. Bédard: Je
comprends.
Le Président (M. Desbiens'): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: M. le ministre fait-il une distinction entre une charte
enchâssée dans la constitution et une charte telle que la charte
du Québec? Est-ce qu'il fait une distinction entre une charte
enchâssée dans la constitution et une charte qui est simplement
une loi ordinaire, comme la charte des droits du Québec
d'aujourd'hui?
M. Bédard: Définitivement, il y a une distinction.
On sait jusqu'à quel point cela peut être difficile,
constitutionnellement parlant, d'arriver à des amendements. Quand une
charte est enchâssée, on diminue d'autant les possibilités,
les capacités d'amendements, la célérité avec
laquelle certains pourraient être faits. Je crois que, justement parce
que notre charte n'est pas enchâssée, il est possible, à
quelque gouvernement que ce soit, de pouvoir, à un moment donné,
procéder à des améliorations, à des modifications
avec beaucoup plus de facilité que ce ne serait le cas si la Charte des
droits et libertés était enchâssée. Maintenant, je
ne sais pas si le député de D'Arcy McGee veut reprendre la
discussion sur la constitution.
M. Marx: Non, non, on va reprendre ca en temps et lieu.
M. Bédard: En temps et lieu, je pense.
M. Marx: Les États-Unis ont une charte
enchâssée dans la constitution. On peut toujours aller
au-delà et donner plus de droits aux citoyens, c'est-à-dire en ne
faisant pas d'amendements à la charte, mais en leur donnant plus de
protection.
M. Bédard: J'espère que vous ne voulez pas dire par
là que, du fait qu'une charte est enchâssée, cela donne
plus de droits aux citoyens.
M. Marx: Non, mais c'est une meilleure protection.
M. Bédard: Non, je ne suis pas d'accord avec cela.
M. Marx: L'autre jour, dans les journaux, j'ai lu un argument
assez curieux peut-être du premier ministre ou du leader, je ne me
souviens pas de qui. Il disait: Le gouvernement est contre une charte
enchâssée dans la constitution parce que cela va mettre le pouvoir
dans les mains des juqes. Je pense qu'une charte, telle la Charte des droits et
libertés de la personne du Québec, c'est mettre le pouvoir dans
les mains des juqes aussi parce qu'en fin de compte...
M. Bédard: Ah non! Là, vous voulez vraiment avoir
une discussion de fond.
M. Marx: ... c'est eux qui décident de la portée de
la charte.
M. Bédard: Non.
M. Marx: Je veux juste vous prévenir.
M. Bédard: C'est du sophisme, ce que vous faites
là.
M. Marx: C'est du sophisme?
M. Bédard: Vous savez très bien qu'un des
éléments importants du coup de force fédéral n'est
pas seulement l'unilatéralisme de la démarche, c'est surtout le
fait de vouloir imposer une charte fédérale qui aurait pour effet
effectivement de remettre entre les mains des juqes des responsabilités
qui sont actuellement exercées par les élus.
M. Rivest: Vous avez cela, dans votre proqramme du Parti
québécois, le Québec souverain a une charte dans sa
constitution et c'est entre les mains des juges. C'est exactement la même
chose.
M. Bédard: Ce n'est pas parce que c'est dans un programme
qu'on ne doit pas en faire l'évaluation.
M. Rivest: Je sais que, de la façon dont vous traitez le
programme et les militants, c'est devenu une beauté! Cela n'a pas qrande
importance, c'est vrai.
M. Marx: Passons à autre chose.
M. Bédard: Je n'ai pas l'impression que vous ayez de
leçon à donner de ce côté-là.
M. Rivest: Nous, oui.
M. Bédard: Mais sûrement pas votre chef, si on en
croit M. Wilson, le président du parti.
M. Marx: J'aimerais aborder un autre...
M. Rivest: Quelle attaque basse!
M. Bédard: Je ne trouve pas sérieuse
notre discussion avec l'Opposition aujourd'hui alors que nous avons la
chance d'avoir avec nous la vice-présidente de la Commission des droits
de la personne. Je crois qu'on pourrait mettre de côté notre
manière partisane d'aborder les sujets pour profiter de la
présence de la vice-présidente...
M. Marx: Je suis prêt à lui poser une question, avec
la permission du ministre.
M. Bédard: ... de la Commission des droits de la
personne.
Le Président (M. Desbiens): Avec la permission du
président, vous pouvez y aller.
M. Marx: J'aimerais poser une question politique à la
vice-présidente de la Commission des droits de la personne. De toute
façon, la question est plutôt technique. Premièrement,
j'admets que le ministre a suggéré certaines améliorations
à la charte et elles ont été adoptées; quoiqu'il
n'ait pas légiféré en ce qui concerne
l'égalité des hommes et des femmes, en ce qui concerne les
bénéfices marginaux, il a fait d'autres améliorations. Je
sais que la commission a plus de responsabilités depuis quelques
années, peut-être deux ou trois ans. Je sais que la commission
aurait peut-être plus de responsabilités, mais pas plus de
personnel, pas plus de ressources. Je me souviens que la commission a souvent
demandé, dans son rapport annuel, qu'elle bénéficie de
plus de ressources, de plus d'argent, etc., pour pouvoir décharger ses
responsabilités.
M. Rivest: M. Parizeau ne veut pas.
M. Marx: ... M. Parizeau réponde à cela.
M. Bédard: C'est une demande...
M. Marx: Annuelle.
M. Bédard: ... que je crois...
M. Rivest: Légitime.
M. Bédard: ... légitime. J'irais même
jusqu'à dire...
M. Marx: On va étudier cela.
M. Bédard: ... justifiée de la part de la
Commission des droits de la personne. Des représentations ont
été faites en ce sens, de la même façon que bien des
organismes demandent régulièrement plus de subsides pour pouvoir
procéder à leurs activités. J'avoue que jusqu'à
maintenant, cette année, je n'ai pas eu la possibilité de donner
suite à toutes les demandes légitimement acheminées...
M. Marx: Cela fait déjà quelques années.
M. Bédard: ... par la commission.
M. Rivest: Dites donc que vous ne pouvez pas cette année
et que vous ne pourrez pas l'an prochain parce que vous n'avez pas d'argent.
Cela va être clair.
M. Marx: La Commission de contrôle des permis d'alcool...
les coupures...
M. Bédard: C'est évident que les restrictions
budgétaires touchent tout le monde. C'est un peu comme la peste. Tous
n'en meurent pas mais tous sont touchés.
M. Marx: Je ne veux pas faire un procès d'intention au
ministre. Mais, dans une Commission des droits de la personne, quand on donne
plus de responsabilités, moins de ressources et moins d'argent, on peut
se demander quelle est la politique qouvernementale en ce qui concerne une
telle commission?
M. Rivest: Les posters et les dépliants?
M. Bédard: Quand je vois le député de
Jean-Talon charrier à propos des posters et de la publicité, il
devrait comprendre que c'est justement pour l'information des citoyens, pour
une meilleure accessibilité à la justice.
M. Rivest: Franchement, qu'est-ce que cela donne comme
information? À qui est-ce qu'on s'adresse, qu'est-ce qu'on fait?
M. Bédard: Vous n'y comprenez vraiment rien. C'est
très important que tous les citoyens et les citoyennes du Québec
soient mis au courant des dispositions de la loi 99. Je vous trouverais au
moins correct de retirer vos paroles.
M. Marx: M. le ministre, puis-je aborder un autre programme
relié aux droits de la personne?
M. Bédard: Je dois dire que, malgré ces ressources
sûrement limitées, la Commission des droits de la personne du
Québec est parmi une des plus aqissantes en comparaison avec celles de
toutes les autres provinces. C'est un travail vraiment sérieux qu'elle
fait.
M. Marx: On y travaille sept jours par semaine. Elle va aboutir.
J'aimerais aborder une autre question, M. le ministre, c'est le problème
de la pornographie. Vous savez qu'il y a la pornoqraphie qui...
M. Bédard: Me permettez-vous un complément,
maître, sur l'aspect des
ressources financières et humaines de la Commission des droits de
la personne? On me fait remarquer à juste titre qu'à la suite de
l'analyse, de l'étude en commission parlementaire et des
décisions qui sont prises par le gouvernement en ce moment, il est
évident qu'il faudra faire une réévaluation de l'ensemble
des ressources financières et des ressources humaines de la
commission.
M. Marx: Soit des coupures, soit des augmentations.
M. Bédard: C'est déjà commencé
d'ailleurs. M. le député de D'Arcy McGee.
M. Marx: J'aimerais aborder, comme j'ai déjà dit,
le dossier de la pornographie. Le ministre doit être au courant qu'il y a
un problème de pornographie, c'est-à-dire que la pornographie est
souvent accessible aux enfants. Dans cette pornographie, on voit souvent la
violence faite aux enfants ou la violence faite aux femmes. Le problème,
ce n'est pas de censurer la pornographie, mais de rendre la pornographie
inaccessible aux enfants. Moi, j'étais déjà au courant
d'une étude qu'on a faite sur cette question il y a trois ou quatre
années pour dire ce qui arrive des études au ministère de
la Justice. Le ministre a assisté, je pense, à un colloque
organisé récemment par la Fédération des femmes du
Québec sur cette question pour dire que c'est le temps d'agir, au moins
pour protéger les mineurs. Maintenant qu'on a fait toutes les
études et tenu tous les colloques, est-ce que le ministre va
légiférer dans ce domaine ou le réglementer pour que
vraiment la pornographie soit inaccessible aux jeunes enfants?
M. Bédard: Je m'excuse, avant de répondre au
député de D'Arcy McGee, s'il a terminé sur la Charte des
droits et libertés de la personne, nous pourrions libérer
peut-être la vice-présidente, qui est avec nous?
M. Marx: Je vous pose la question, je la pose à la
vice-présidente de la Commission des droits de la personne, est-ce que
la pornographie l'intéresse en tant que protection des droits et
libertés de l'enfant?
M. Bédard: C'est indiscutable. En termes
généraux, les enfants sont des personnes aux termes de la charte.
Sur cette question particulière de la pornographie et de
l'accessibilité des enfants ou des mineurs à la pornographie,
nous avions, il y a déjà quelque temps, réfléchi
sur cette question et, à toutes fins utiles, renvoyé la
décision ou l'action à prendre dans ce dossier au
ministère de la Justice et au Comité de protection de la
jeunesse. (18 h 30)
II est très difficile de travailler sur tous les dossiers
à la fois et nous avions constaté que d'autres organismes
pouvaient tout aussi bien que nous prendre des dispositions ou faire les
analyses nécessaires. Nous avions fait une analyse préalable
relativement courte que nous avions acheminée au ministre rie la Justice
il y a déjà deux ans.
M. Marx: La vice-présidente peut-elle nous dire quand elle
a envoyé cette étude au ministère de la Justice?
M. Bédard: Je m'excuse de ne pas pouvoir vous
répondre plus précisément, mais je crois que
c'était il y a deux ans. Cela doit être à peu près
cela.
M. Marx: Au moins.
M. Bédard: D'ailleurs, c'est dans cet esprit que nous
avions donné des directives spécifiques à tous les
procureurs de la couronne de manière qu'une attention
particulière soit attachée au fait que tout ce qui peut
être pornographique soit hors de la portée des enfants. J'ai
ici...
M. Marx: Mais comment les procureurs font-ils cela? J'aimerais
savoir comment les procureurs font cela.
M. Bédard: ...avec moi le sous-ministre aux Affaires
criminelles, M. Rémi Bouchard, qui va vous répondre.
Il y a quelques années, il y avait des directives en
matière de poursuites sur la pornographie qui avaient été
données au substitut du procureur général. Ces directives
sont d'ailleurs connues; au colloque de la Fédération des femmes,
on en a fait état. Ces directives ont particulièrement pour but
de protéger les citoyens en général contre l'agression que
constitue la pornographie, mais en particulier les enfants. Comme vous le
soulignez, pour réussir de façon pratique, il y a eu un groupe de
procureurs spécialement constitué pour conseiller les policiers,
particulièrement les policiers de la Sûreté du
Québec du groupe de l'ERAM, au niveau des interventions auprès
des commerçants qui, à cette époque, distribuaient des
journaux ou du matériel pouvant être considérés
comme pornographiques. Bien sûr, lorsqu'il s'aqit de pornographie gui
tombe sous le coup de la jurisprudence canadienne dans ce domaine, il est
normal qu'il y ait des poursuites.
Par contre, il y a une espèce de zone grise ou limite dans cette
matière et, à l'occasion de ces directives, on a voulu
également que l'intervention des policiers se fasse auprès des
commerçants pour que, même pour la pornoqraphie dite douce et qui
peut dans certaines circonstances ne pas tomber sous le coup de la
jurisprudence
canadienne, cette pornographie ou du moins cette littérature ou
ces publications photographiques soient mises hors de la portée des
jeunes enfants, c'est-à-dire ceux de moins de quatorze ans. I! est bien
sûr qu'à l'époque, on avait également pensé
se servir des lois qui concernent la protection de la jeunesse lorsqu'il y
aurait des cas qui s'y prêteraient. Ces lois ont surtout
été employées lorsqu'il s'agissait de spectacles
donnés par les enfants, par contre, et très peu souvent en
matière de publications ou de photoqraphies.
M. Marx: Je m'excuse. Je n'ai peut-être pas suivi comme il
faut ce que vous avez dit, mais j'étais déjà au courant
d'une partie de votre programme. Vous avez dit, si je me souviens bien, si je
comprends bien, qu'on a demandé ou on a mis la pornographie hors de la
portée des mineurs, des jeunes. Comment a-t-on fait?
M. Bédard: Non, c'est-à-dire qu'on a demandé
une action des policiers, particulièrement les policiers de la
Sûreté du Québec, à l'ERAM, pour faire en même
temps que des poursuites, si nécessaire, si des publications
véritablement pornographiques circulaient, une espèce d'action
auprès des marchands qui distribuaient les revues connues qui ne tombent
pas nécessairement sous le coup de la jurisprudence canadienne, mais qui
peuvent peut-être pour des enfants être des revues trop
osées. Alors, c'était aux commerçants de les mettre hors
de la portée des jeunes de moins de quatorze ans, à tout le
moins. Or, les policiers faisaient le tour des commerçants et les
invitaient à faire ceci, comme d'ailleurs, à un moment
donné, certains mouvements féministes ont encouraqé les
gens à le faire eux-mêmes auprès de leurs
commerçants locaux, mais cette action, en même temps que la
politique de surveillance, se faisait par les policiers qui tentaient de
convaincre les marchands de les mettre hors de la portée des
enfants.
M. Marx: Pour vraiment avoir un programme effectif, il faut avoir
une réglementation parce que même aujourd'hui, quand on va au
magasin du coin, on voit beaucoup de pornoqraphie qui est vraiment
déqoûtante, mais je suis très heureux...
M. Bédard: Je pense que...
M. Marx: ...d'avoir appris en détail qu'il y a un
programme de dissuasion, si je peux le qualifier ainsi. Je pense que cela
prendrait aussi une certaine réqlementation pour que les gens sachent
que cela va à l'encontre de la loi. Je sais qu'il y a une ligne assez
mince entre la censure et entre le fait de ne pas permettre que la pornographie
soit accessible aux enfants, mais...
M. Bédard: Je pense que...
M. Marx: ... peut-être le ministre peut-il nous dire ce
qu'il entend faire davantage dans ce domaine, parce que je pense que le
problème existe encore?
M. Bédard: Je pense que le député de D'Arcy
McGee connaît très bien la difficulté que nous avons, du
point de vue jurisprudencel, à déterminer ce qui est
pornoqraphique et ce qui ne l'est pas. On est conscient qu'il peut y avoir de
la littérature déclarée non pornographique par les
tribunaux, mais gui, d'autre part, pourrait être de nature à
mettre en danger le développement d'un enfant. C'est conscient de ce
problème qu'avec le comité de développement social, au
ministère de la Justice - nous avons d'ailleurs déjà eu
des réunions sur le sujet - nous essayons de voir comment on pourrait
aboutir à une loi qui ne serait pas un retour à la censure, mais
qui pourrait être de nature à répondre à cette
préoccupation légitime exprimée par bien des qroupes. Vous
êtes à même de constater que ce n'est pas facile.
M. Marx: C'est très réconfortant d'apprendre que
vous êtes conscient de ce problème et que vous avez pensé
à réqlementer ou légiférer davantage dans ce
domaine. Je pense que ça répond à une demande.
M. Bédard: Certains groupes ont laissé entendre
qu'il ne se faisait rien au niveau du ministère de la Justice par
rapport à l'action policière. Au contraire, je n'ai pas les
statistiques avec moi, mais les policiers ont agi dans bien des cas. Il est
clair, par exemple, que lorsqu'une revue est déclarée
pornographique et que c'est porté à l'attention des
autorités du ministère de la Justice, il y a confiscation, si des
plaintes sont portées.
M. Marx: Je pense qu'il y a un problème de terminologie.
C'est l'obscénité qui est interdite par le Code criminel; la
pornographie est permise, si on peut faire une distinction entre la
pornoqraphie et l'obscénité.
M. Bédard: Vous rejoignez exactement le problème,
je dirais, un peu juridique auquel nous avons à faire face. Bien des
descentes policières ont eu lieu au cours des dernières
années.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 4 est
adopté?
M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: J'imagine que la Commission des droits de la personne
se préoccupe de cela, le problème de l'infiltration
policière. Est-ce que c'est à ce moment-ci que le ministre
voudrait que nous en parlions?
M. Bédard: Quand nous étudierons le programme
concernant la Sûreté du Québec.
M. Rivest: Très bien.
M. Bédard: C'est avec énormément de plaisir
que je répondrai à la question.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 4 est
adopté?
M. Marx: Adopté.
Le Président (M. Desbiens): Adopté.
M. Marx: Sans augmentation pour la Commission des droits de la
personne.
M. Bédard: C'est ce que vous dites. M. Marx: C'est
à discuter.
Aide aux justiciables
Le Président (M. Desbiens): Programme 5, Aide aux
justiciables. Est-ce que le programme 5 sera adopté?
M. Marx: On va en discuter.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: La Commission des services juridiques.
M. Bédard: Au nom des membres de la commission, je
remercie la vice-présidente de la Commission des droits de la personne
d'avoir été présente.
M. Marx: J'aimerais aussi remercier la vice-présidente de
la commission pour son travail à cette commission.
Commission des services juridiques. II faut dire tout de suite que le
ministre précédent a fait adopter une très bonne loi sur
l'aide juridique qui est vigueur depuis maintenant neuf ans. C'est cela?
M. Bédard: À peu près.
M. Rivest: II ne reconnaît pas les mérites...
M. Marx: J'aimerais commencer avec une petite question. Est-ce
que le ministre serait favorable à l'application d'un ticket
modérateur en ce qui concerne les services d'aide juridique? Le premier
ministre et le ministre des Finances ont donné des indications à
savoir qu'ils seraient d'accord pour qu'il y ait un ticket modérateur en
ce qui concerne les services d'aide juridique. Comme cette loi relève de
vous, M. le ministre, peut-être pouvez-vous nous éclairer.
M. Bédard: Premièrement, je pense que vous allez
plus loin que ce qui a été dit. Il n'a jamais été
fait référence à l'aide juridique, pour commencer.
M. Rivest: Bien voyons, c'était général.
M. Marx: Pas au salon bleu, c'est au journaliste qu'il a
parlé de ça. Je suis sûr que le ministre...
M. Rivest: Êtes-vous en faveur, oui ou non. C'est ca la
réponse. Vous êtes ministre de la Justice. Il me semble que c'est
clair.
M. Marx: Est-ce que le ministre est en faveur oui ou non?
M. Bédard: Ça va sûrement faire plaisir au
député de D'Arcy McGee, on n'a pas d'étude
là-dessus.
M. Rivest: Oui mais c'est de vous qu'il est question.
Êtes-vous en faveur oui ou non?
M. Bédard: C'est une décision qui...
M. Marx: Le député de Verchères, j'imagine,
est contre.
M. Bédard: C'est une décision qui doit être
prise. C'est le genre de décision qui doit être prise par le
Conseil des ministres et le Conseil des ministres n'a pas encore
statué.
M. Rivest: Et vous, vous n'avez pas d'opinion pour...
M. Bédard: J'ai une opinion très précise,
mais je la ferai valoir là où il faut la faire valoir, au Conseil
des ministres.
M. Rivest: Bon, il a pris la porte.
M. Marx: Quelqu'un a dit que c'est une très belle et
très bonne réponse: c'était le député de
Verchères. Tout le monde a eu ses ordres durant le conseil
général.
M. Charbonneau: Le député de D'Arcy McGee veut
vraiment répondre à ma place. Ça fait au moins deux fois
qu'il...
M. Marx: Parce que j'aimerais avoir l'opinion du
député de Verchères sur cette question. Ce serait
très intéressant, étant donné ses
préoccupations...
M. Charbonneau: Ce qui serait intéressant, c'est
peut-être d'avoir des études qui nous permettraient de porter un
jugement éclairé.
M. Marx: D'accord. On avait déjà...
M. Rivest: Attention, parce que votre collèque, le
ministre d'État au
Dévelopopement social, M. Lazure, s'est prononcé sur la
base des études en disant qu'il était contre.
M. Bédard: II n'y a rien qui dit qu'il n'a pas les
études.
M. Rivest: Tantôt, il disait qu'il n'en avait pas. Mais
vous, vous n'avez pas d'opinion comme ministre de la Justice? Vous administrez
des proqrammes importants...
M. Bédard: J'ai des opinions et des habitudes. Mon
habitude sur des sujets...
M. Marx: C'est de ne pas parler trop.
M. Bédard: ...comme ceux-là, qui doivent être
décidés par le Conseil des ministres, c'est l'endroit prioritaire
pour faire valoir ces opinions.
M. Marx: En ce qui concerne l'aide juridique, quelle est la
position du ministre en ce qui a trait à la...
M. Bédard: ... au Saguenay-Lac-Saint-Jean pour avoir les
résultats que vous connaissez...
M. Rivest: Là-dedans, vous avez des opinions.
M. Bédard: ... quand c'est le temps.
M. Rivest: Comme ministre de la Justice vous n'en avez pas.
M. Bédard: ... exprimées quand c'est le temps et
les citoyens nous en sont redevables.
M. Charbonneau: On a les études qu'il faut pour
ça.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Bédard: Dans Chicoutimi, les citoyens et citoyennes
connaissent très bien mes opinions sur tous les sujets...
M. Rivest: Pauvre Louise, on avait une si bonne candidate.
M. Bédard: ...et ils nous ont réitéré
leur confiance à 74%. D'accord?
M. Rivest: ... c'était un poster? Non?
M. Marx: Le ministre a-t-il une position ou une politique en ce
qui concerne la participation des citoyens au système d'aide
juridique?
M. Bédard: Est-ce que le député pourrait
être plus précis?
M. Marx: Quand la loi sur l'aide juridique a été
adoptée elle a prévu une certaine participation des citoyens dans
l'administration de la justice, dans le système d'aide juridique. Est-ce
que le ministre est favorable à une telle politique?
M. Bédard: On est toujours favorable, M. le
Président, à une plus grande participation de la population. Je
pense que le député devrait préciser sa question. Elle est
trop facile?
M. Marx: À l'article 32 de la Loi sur l'aide juridique -
je ne sais pas si j'ai la nouvelle ou l'ancienne version de la loi mais j'ai
une version que je connais bien et je ne pense pas que la loi ait
été modifiée - on dit: "Une corporation régionale a
pour fonction principale de fournir l'aide juridique de la manière
prévue par la présente loi et, à cette fin, dans le cadre
des règlements et de toute entente conclue avec la commission,
paragraphe d, de susciter l'institution d'un comité consultatif d'un
maximum de douze personnes et de reconnaître un tel comité pour
représenter les personnes économiquement
défavorisées auprès d'un bureau ou d'une corporation
locale d'aide juridique afin de faire des représentations relatives
à l'application de la présente loi, donner son avis au directeur
de bureau de la corporation locale sur les besoins des personnes
économiquement défavorisées et, lorsque nécessaire,
faire des recommandations à ladite corporation réqionale.
M. Bédard: M. le Président, nous avons justement la
chance d'avoir avec nous le président de la Commission de l'aide
juridique...
M. Marx: Parfait. Tout ce que j'aimerais...
M. Bédard: ...qui pourrait...
M. Marx: Vous ne m'avez pas laissé poser la question. La
question est très précise: Est-ce qu'il y a des comités
consultatifs qui ont été formés en vertu de l'article 32d
de la Loi sur l'aide juridique?
M. Bédard: Je sais que des expériences ou des
efforts ont été faits en ce sens. Maintenant, nous avons ici le
président de la
Commission de l'aide juridique qui pourrait peut-être
répondre à la préoccupation du député de
D'Arcy McGee. (18 h 45)
M. Marx: Ce n'est pas ma préoccupation seulement, c'est
votre préoccupation aussi, parce que vous avez parlé d'une plus
grande participation.
M. Bédard: Ne vous choquez pas. Je vous dis que c'est
votre préoccupation, j'espère que je n'ai pas fait d'erreur.
C'est votre préoccupation, oui ou non?
M. Marx: Nos préoccupations.
M. Bédard: Écoutez, parlez pour vous, je vais
parler pour moi et on n'aura pas de problèmes à la
commission.
M. Marx: Ne parlez pas pour moi, vous parlez pour moi maintenant.
D'accord.
M. Bédard: Vous en avez suffisamment de parler pour
vous.
M. le député, je comprends que vous étiez en train
de lire dans un manuel qui s'appelle Droits et pauvreté à la
rédaction duquel vous avez participé, mais ça, ce n'est
pas grave. Déjà, au niveau de la commission, vous avez douze
personnes, au niveau des corporations régionales, il y a onze personnes;
multiplié par douze, il y a déjà 144 personnes qui sont
impliquées dans l'administration même de l'aide juridique. Il est
vrai aussi qu'un des paragraphes que vous avez cités tantôt
prévoit que les corporations doivent susciter des comités
consultatifs au niveau des bureaux locaux.
Effectivement, la commission elle-même a moussé ces
comités consultatifs et après environ deux ou trois ans, on s'est
dit: Où en est-on rendu avec ça et qu'est-ce qu'il en est? Nous
avons demandé une étude par une sociologue qui était
à notre département de recherche à la Commission des
services juridiques et le titre de son volume a été Participation
ou illusion. C'est ça qu'était la conclusion, dans le fond. On
s'est aperçu qu'il y avait beaucoup de comités consultatifs qui
existaient sur papier seulement et d'autres qui fonctionnaient vaille que
vaille. La grosse difficulté, c'est qu'on s'est aperçu que les
citoyens sont prêts à participer, mais à condition d'avoir
un problème spécifique et précis dans lequel ils peuvent
avoir un intérêt.
Ce qui a remplacé, disons, ces espèces de comités
sur papier, c'est ce qu'on peut appeler des comités ad hoc qui se
créent à propos d'un problème particulier où des
gens ont les mêmes intérêts. Disons dans un immeuble
à logements, s'ils ont tous un même intérêt, ils vont
tous se regrouper. C'est plutôt ces comités qu'on reconnaît
que les comités sur papier. Ce sont des comités ad hoc qui ont un
intérêt commun, parce qu'on s'est aperçu qu'effectivement
on ne peut pas forcer quelqu'un à participer à quelque chose.
M. Marx: Puis-je demander au président de la Commission de
l'aide juridique, avec votre permission, M. le Président, combien de
comités permanents sur papier on a eus et combien de comités ad
hoc on a?
M. Bédard: Je ne peux pas vous donner de chiffres
là-dessus, je n'ai pas apporté avec moi cette étude. Mais,
de mémoire, il y en avait 30 ou 40 qui existaient sur papier, à
ce moment-là, parce que, dans chacun des bureaux, il était
présumé y en avoir un. Certaines régions en ont fait sur
papier, d'autres en ont fait quelques-uns qui ont fonctionné vaille que
vaille et d'autres n'en ont pas fait.
Maintenant, combien il y a de comités ad hoc? Il s'en fait
à peu près tous les jours; aussitôt qu'on problème
est suscité et que les gens ont un intérêt commun, on va
les voir. Ce comité fait ses représentations à l'avocat
qui les conseille là-dessus et quelquefois va acheminer ça soit
pour une solution au niveau des fonctionnaires ou pour une solution au niveau
des procédures judiciaires.
M. Marx: Si je comprends bien, il n'était pas possible de
mettre l'article 32d de la Loi sur l'aide juridique en vigueur à cause
des raisons que vous avez évoquées et, maintenant, au lieu
d'avoir des comités permanents, on a ce que vous avez appelé des
comités ad hoc. Le comité ad hoc, c'est quoi, en pratique?
M. Bédard: On peut donner un exemple. À un moment
donné, dans la région du ministre, l'année
dernière, des fournisseurs d'huile refusaient de livrer de l'huile
l'hiver si les assistés sociaux avaient seulement des barils de 45
gallons, parce qu'ils calculaient que ça ne valait pas la peine de se
déplacer pour 45 gallons. Ces gens sont venus nous voir. On les a
informés, on s'est mis à parler de poursuites éventuelles
contre la loi des cartels, des choses semblables. Cela a pris un mois, mais
ça s'est réglé et ils ont repris la livraison d'huile
effectivement. Je peux vous donner plusieurs exemples. C'est ce genre de
comités avec lesquels on fonctionne présentement.
M. Marx: Ces comités ad hoc travaillent avec des bureaux
d'aide juridique, des cliniques surtout ou quoi? Est-ce que ce sont surtout des
comités ad hoc qui vont aller à la clinique de
Pointe-Sainte-Charles, à la clinique de Hull ou est-ce que ce sont des
comités ad hoc qui se forment et travaillent avec des bureaux d'aide
juridique?
M. Bédard: II n'y a pas de différence sur la
façon de se comporter au niveau de ces différents comités.
Certains ont une tradition plus longue peut-être, surtout dans des
milieux urbains qui étaient déjà organisés; par
contre, la même chose se produit aussi à la campagne, dans le
milieu rural.
M. Marx: Je ne sais pas à qui m'adresser, est-ce que le
ministre est en faveur des cliniques juridiques? Au début, quand la loi
a été adoptée, le ministre était en faveur des
cliniques juridiques de quartier. J'aimerais savoir quelle est la politique du
ministre dans ce sens. Dans les cliniques juridiques de quartier, on a la
participation des citoyens. Si vous parlez de la participation des citoyens
dans l'administration de la justice, c'était là où
traditionnellement on avait la participation des citoyens. J'aimerais savoir
quelle est votre politique en ce qui concerne ces cliniques.
M. Bédard: Pour ce qui est de la participation des
citoyens, je pense que ce n'était pas seulement là que cela se
retrouvait. Tout à l'heure, on a fait état des différentes
corporations régionales, de la présence des...
M. Marx: M. le ministre...
M. Bédard: Laissez-moi terminer, citoyens et citoyennes au
niveau du fonctionnement de la structure. Concernant les cliniques en
particulier, le député de
D'Arcy McGee doit savoir que c'est à la commission de
décider de l'accréditation de cliniques.
M. Marx: Quelle est votre politique? Vous avez une idée de
quoi faire, comme ministre. Non?
M. Bédard: Non, le ministre, sur ce sujet, n'a pas
à avoir de politique. La Commission des services juridiques...
M. Marx: Votre opinion personnelle?
M. Bédard: ... est un organisme, à mon sens,
suffisamment responsable pour prendre les décisions qui s'imposent
lorsque des demandes sont faites dans ce sens.
M. Marx: Dans la loi, on parle de l'accréditation des
cliniques juridiques.
M. Bédard: C'est ce que je vous dis. La loi prévoit
aussi que cette accréditation est donnée par la Commission des
services juridiques.
M. Marx: C'est facile d'avoir une politique en ce sens, en
n'accréditant pas les cliniques. En n'accréditant pas les
cliniques, cela démontre une politique et, en accrédiant les
cliniques, cela démontre une autre politique.
M. Bédard: Vous parlez pour parler. La loi dit que
l'accréditation de ces cliniques se fait par la Commission des services
juridiques. C'est clair. Ce n'est pas par le ministre, c'est par la Commission
des services juridiques.
M. Marx: Je vais poser la question au président de la
Commission des services juridiques. Je vous pose la question. Est-ce que vous
avez une politique en ce qui concerne les cliniques juridiques de quartier?
M. Bédard: D'abord, je peux simplement répondre
comme président de l'organisme, je ne peux pas répondre au nom
des onze autres commissaires. Je peux vous dire qu'à ma connaissance il
n'y a pas de politique d'établie à la Commission des services
juridiques quant à l'accréditation ou non de cliniques. On a
fonctionné, selon les demandes qu'on a eues, sur une base ad hoc,
c'est-à-dire qu'on doit examiner dans chacun des cas ce qu'il est
possible de faire, suivant l'environnement, suivant les services qui sont
déjà offerts dans ce coin. Effectivement, il n'y a pas eu de
demandes d'accréditation de cliniques à la Commission des
services juridiques depuis quatre ans.
M. Marx: L'impression que j'ai... D'accord.
M. Bédard: À ma souvenance.
M. Marx: L'impression que j'ai, c'est qu'au début on avait
plusieurs cliniques. Maintenant, on reste avec deux, la clinique juridique de
Pointe Saint-Charles et une autre clinique juridique à Hull. Je ne sais
pas qui l'a fait, soit la commission, soit le ministre. Je ne sais pas qui a
donné l'ordre ou qui a élaboré cette politique, mais on a
fermé la clinique de Saint-Louis, je m'en souviens. L'impression qu'on a
dans la population, c'est qu'il y a une politique à la commission ou au
ministère de ne pas favoriser les cliniques juridiques au Québec
et de concentrer le travail de la commission dans les bureaux d'aide
juridique.
M. Bédard: D'abord, la commission n'a jamais reçu
de directive, soit du ministère, soit du ministre à cet effet. Je
pense que c'est important pour nous de garder notre autonomie vis-à-vis
de cela. Deuxièmement, la clinique Saint-Louis n'a jamais
été accréditée non plus.
M. Marx: Donc, elle n'était pas fermée!
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: M. le ministre, je suis d'accord avec mon
confrère de D'Arcy McGee quand il dit: Le système d'aide
juridique établi ici au Québec est un des meilleurs dans
l'Amérique du Nord. Je vous en félicite.
M. Rivest: Ce n'était pas lui. C'est une loi
libérale.
M. Kehoe: On l'applique actuellement. La question que je veux
poser, c'est s'il y a une orientation, en ce qui concerne l'aide juridique, les
permanents et la pratique privée. Evidemment d'après toute la
publicité qui se fait actuellement, quand on confie un mandat, il faut
passer par les permanents de l'aide juridique et les avocats de la pratique
privée n'ont qu'une très petite portion des demandes il y a peu
de causes qui sont confiées à la pratique privée. Est-ce
qu'il y a une orientation, une philosophie de base pour faire en sorte que
l'aide juridique soit dispensée exclusivement ou plutôt par les
permanents de l'aide juridique. Pourriez-vous me donner la proportion?
M. Bédard: II n'y a pas d'orientation dans ce sens.
M. Kehoe: Mais la publicité qui se fait actuellement fait
en sorte que c'est le résultat? Avez-vous des statistiques sur ces
demandes?
M. Bédard: Nous avons les statistiques que vous demandez.
Au début de l'aide juridique, si ma mémoire est fidèle, la
proportion des clients qui choisissaient un praticien privé était
de 22% ou 24%. Depuis ce temps, il y a eu une évolution constante vers
la pratique privée, de telle sorte que les chiffres de l'année
finissant en avril 1981 est de 30,4%.
M. Kehoe: II reste quand même que 70% des causes restent
aux permanents de l'aide juridique. Vous avez un ordre de grandeur pour le
moment?
M. Bédard: Cela dépend des districts, d'une
façon globale, oui, dans certains districts.
M. Kehoe: La question que je pose, la publicité qui se
fait, que ce soit dans les journaux et les autres médias, dont la
télévision a pour effet de montrer que ce sont seulement des
avocats de l'aide juridique, surtout des avocats permanents de l'aide
juridique, qui prennent des mandats; non seulement cela, pour savoir si la
personne est admissible ou non, il faut même se rendre au bureau de
l'aide juridique où l'étude de l'admissibilité est faite
et la décision prise. Le résultat, c'est justement ce que vous
avez là, c'était de 22% à 24% et c'est maintenant 30%.
C'est quand même un écart assez frappant, de 70% à 30%
actuellement, et je demande si c'est une politique globale du ministère
d'encourager le citoyen de s'adresser aux permanents de l'aide juridique. Le
principe de base, c'est la liberté du choix, mais de la manière
que c'est organisé, et que fonctionne l'aide juridique actuellement,
celle-ci est dirigée vers les permanents, les avocats qui travaillent
pour l'État, autrement dit.
M. Bédard: C'est définitivement le libre choix. Si
telle était l'intention de la publicité que vous évoquez,
elle n'a pas grand effet, au contraire, la place de la pratique privée
augmente.
M. Kehoe: Ce n'est pas un libre choix à ce
moment-là quand vous êtes obligé d'aller au bureau. La
marge est de 70% à 30%. Cela fait neuf ans que c'est en vigueur et le
rapport est encore plus que de deux pour un, 22% à 24% alors, 6%
à 9% en neuf ans, et j'ai nettement l'impression, avec la
publicité qui se fait actuellement, que l'obligation du contribuable de
se rendre au bureau des permanents n'auqmentera pas davantaqe.
M. Rivest: C'est quoi la politique?
M. Kehoe: C'est ce que je vous demande, vous n'avez pas encore
répondu. Quelle est l'orientation de la politique de base? Est-ce que
vous voulez tout confier, à lonque échéance, aux
permanents de l'aide juridique ou avez-vous le libre choix? Ce sont des paroles
en l'air?
M. Bédard: Ce n'est pas notre politique. M. Kehoe:
Qu'est-ce que c'est? M. Bédard: C'est le libre choix.
M. Kehoe: Mais vous faites en sorte que ce n'est pas le libre
choix. Quand vous obligez...
M. Bédard: Là, vous y allez de votre opinion, de
votre appréciation, que je respecte, mais les faits, à l'heure
actuelle, sont quand même qu'une bonne partie de la pratique, des causes
sont orientées vers la pratique privée. Ce pourcentage n'a pas
diminué avec les années, il augmente et peut-être gu'il
augmentera au fur des années.
M. Kehoe: Mais les statistiques sont là. Êtes-vous
d'accord avec cette orientation que cela augmente davantage? Avez-vous des
programmes pour faire...
M. Bédard: Je n'ai absolument aucune objection à ce
que cela augmente davantage. Ce qui est important...
M. Kehoe: Mais avez-vous des proqrammes...
M. Bédard: ...mais il n'y a pas de programmes à
avoir, du moment que le principe du libre choix est respecté. À
partir de ce moment-là, laissez jouer chacun des intervenants, la
pratique privée d'une part et l'aide juridique. (19 heures)
M. Kehoe: Mais il est certain que, de la manière dont
c'est administré, ce n'est pas le libre choix quand vous obligez le
citoyen à aller là et que vous dites: On va s'occuper de
l'affaire, si vous confiez le mandat. Il y a trois ou quatre avocats permanents
qui sont ici, qui vont prendre votre cause. Est-ce que c'est le libre choix
à ce moment-là? Ils sont déjà en place. Le citoyen
est déjà au bureau permanent de l'aide juridique et on lui dit
qu'il y a là quatre ou cinq avocats. On est obligé d'aller
là. C'est cela le qros de l'affaire.
C'est justement ma question: Est-ce que cela coûte plus cher pour
avoir des permanents? Dans l'ensemble, un mandat qui est confié, soit
à des permanents ou à des qens de pratique privée, est-ce
que le prix est le même?
M. Bédard: II y a justement une évaluation qui a
été faite là-dessus.
Il y a deux ans, une firme comptable qu'on avait engagée pour
faire une étude des coûts comparatifs entre ceux qui sont
enqendrés par le réseau privé et ceux qui sont
enqendrés par des avocats salariés, nous permettait de dire que
dans le domaine matrimonial, par exemple, c'était le même prix,
que ce soit fait par un permanent ou par un avocat de pratique
privée.
Dans le domaine criminel, cela coûtait deux fois meilleur
marché chez nous. Et dans toutes les autres causes civiles,
c'était deux fois et demie meilleur marché quand c'était
fait par un avocat salarié.
M. Kehoe: Par un avocat...? M. Bédard:
Salarié.
M. Kehoe: Dans l'ensemble, cela coûte
énormément moins cher à l'État de qarder cela avec
les permanents. C'est d'aileurs la politique de base.
M. Bédard: C'est une décision politique qui a
été prise à ce moment-là, quand on a dit, dans la
loi, que ce sera un libre choix. Je peux vous dire que déjà, en
commission parlementaire, en 1972, quand c'est venu sur le sujet, il y a des
chiffres oui ont été donnés montrant que les gens ne
connaissaient des avocats que dans 30% des cas.
Donc, pour être capable de faire un choix, il faut qu'ils
connaissent les avocats. Il est normal qu'on en soit rendu à 30%, parce
que c'était déjà cela qui était prévu
à ce moment-là.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Le ministre nous a indiqué qu'il y avait eu une
évaluation il y a deux ans. Est-ce que cette étude est rendue
publique, est disponible?
M. Bédard: Nous l'avons donnée en conférence
de presse à ce moment-là aussi. C'est possible de vous la faire
parvenir si vous en manifestez la demande. Et elle doit être reprise
aussi au mois de septembre ou avant le mois de septembre, et encore une fois
l'année prochaine aussi.
Le Président (M. Dussault): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: Juste une petite question si vous permettez.
J'aimerais demander au ministre s'il n'entrevoit pas une façon de
favoriser les règlements suite à l'attribution de mandats d'aide
juridique à des avocats de pratique privée, par exemple au niveau
de la tarification. On se rend compte, en pratique, en le vivant tous les
jours, qu'il y a plusieurs avocats de pratique privée qui ne favorisent
pas le règlement justement parce qu'ils ne seront pas payés ou
qu'ils auront à écrire une lettre sous l'article de
considération spéciale. J'ai vécu en pratique, assez
souvent, le fait d'avoir affaire avec un autre avocat de pratique
privée, qui avait eu un mandat et qui voulait se rendre jusqu'à
procès pour aller toucher des indemnités
supplémentaires.
Je me demande si, sur le plan pratique, il n'y aurait pas une
façon, dans l'avenir, d'entrevoir la possibilité de favoriser ces
rèqlements. Cela épargnerait énormément d'arqent
aux contribuables, la première des choses, et cela embourberait moins
les tribunaux. Je me demande s'il n'y aurait pas une façon de voir
à cela, parce que, en pratique, cela se vit.
M. Bédard: Je peux vous dire que nous avions cette
préoccupation lors des dernières négociations, lorsque
nous avons augmente le tarif concernant le plaidoyer de culpabilité.
M. Dauphin: Je vais vous donner un cas bien concret, que j'ai
vécu, avant d'être élu député.
M. Bédard: D'un autre côté, par la
tarification, il ne faut pas privilégier le plaidoyer de
culpabilité au point où des droits de citoyen pourraient
être également mis en danger parce que non suffisamment
plaidés.
M. Dauphin: Mais cela se vit souvent au civil également,
de faire affaire avec quelqu'un pour une action de 600 $, qui va se rendre
à procès un an et demi plus tard, parce qu'il répond: Je
ne suis pas payé, si je règle.
Je suis certain qu'il y aurait une façon d'essayer de trouver une
solution à cela.
M. Bédard: Je crois que c'est une question de
déontologie, chaque avocat, que ce soit de la pratique privée ou
de l'aide juridique, devant avoir la préoccupation de servir
prioritairement les intérêts de son client plutôt que ses
propres intérêts.
M. Dauphin: Je suis d'accord avec vous. Mais on est pris quand
même avec une situation qui ne se règle pas.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: J'ai une observation et une question. Toute cette loi a
pris naissance à la fin des années soixante, au début des
années soixante-dix. Le ministre de l'époque était un bon
ministre de la Justice, je pense, Jérôme Choquette.
M. Bédard: Que je connais d'ailleurs.
M. Marx: Tous les Québécois ont beaucoup
apprécié comme ministre de la Justice.
M. Bédard: Le Parti libéral aussi!
M. Marx: Le Parti libéral aussi, jusqu'à sa
démission du Parti libéral.
Une voix: II est revenu depuis...
M. Bédard: C'est probablement le Parti libéral qui
avait tort.
M. Marx: Sans faire de blague, je pense que M. Choquette a
été un excellent ministre de la Justice qu'il a vraiment fait
avancer les lois du Québec...
M. Bédard: C'est un ami.
M. Marx: ...c'est sous son mandat qu'on a fait adopter cette Loi
sur l'aide juridique, la Charte des droits et libertés de la personne et
d'autres lois. Ce n'est pas pour faire concurrence avec vous que je cite ces
lois.
M. Bédard: Non, parce qu'on pourrait parler du droit de la
famille et bien d'autres lois.
M. Marx: Non, parce que vous aurez encore cinq ans et vous ferez
aussi de grandes choses j'en suis sûr. À l'époque, M.
Choquette a eu l'idée d'avoir un système d'aide juridique qui
aurait accès à trois choses. Premièrement, d'avoir des
bureaux d'aide juridique, d'avoir des cliniques juridiques de quartier et aussi
de permettre le libre choix à tous les Québécois.
Je pense que le système fonctionne plus ou moins bien en ce qui
concerne les bureaux d'aide juridique et, en ce qui concerne le libre choix, il
y a des accrocs que mes collègues ont soulevés. Mais je pense que
la Loi sur l'aide juridique est vraiment un échec en ce qui concerne
l'établissement des cliniques juridiques de quartier. Il y en avait
quelques-unes au début, accréditées ou non, mais nous en
avons eu quelques-unes au début des années 1970 jusqu'à
1975 ou 1976, et cela me surprend qu'un gouvernement qui se veut
social-démocrate ne pousse pas dans cette direction où on a
vraiment eu l'implication des gens de quartier dans l'administration de la
justice, parce que c'était dans les cliniques juridiques de quartier
qu'on a eu des citoyens qui s'intéressaient à l'administration de
la justice, à l'organisation d'une clinique, ainsi de suite. Cela
m'étonne un peu que, sous ce gouvernement, on n'avance pas dans cette
direction; on reste avec deux cliniques d'aide juridique, une à Pointe
Saint-Charles, c'était la première, et l'autre à Hull.
M. Bédard: M. le Président, je ne suis vraiment pas
d'accord avec le député de D'Arcy McGee, en ce sens que je
crois... Non, ce n'est pas une question de fait. Contrairement à ce gue
dit le député de D'Arcy McGee, je crois que les bureaux d'aide
juridigue fonctionnent relativement bien et je crois...
M. Marx: J'ai dit cela? Ce n'est pas le point que j'ai
soulevé.
M. Bédard: ...mais oui, vous avez dit que c'était
un peu un échec. Concernant le libre choix, je crois que la politique
demeure la même. Qu'à un moment donné...
M. Marx: Maintenant, les cliniques juridiques de quartier...
M. Bédard: ...sur l'aspect de la publicité,
certains accrocs puissent se faire, à ce moment-là, je pense que
les efforts doivent être orientés en fonction de les corriger et,
en ce qui a trait aux cliniques juridiques, je pense que le président de
la
Commission de l'aide juridique l'a très bien
spécifié tout à l'heure. Depuis trois ou quatre ans, ils
n'ont pas eu de demandes. On ne peut quand même pas faire des reproches
à qui que ce soit.
M. Marx: Je ne fais pas de reproches à qui que ce soit,
mais je constate qu'il n'y a pas... Est-ce que je vais faire des reproches?
Est-ce que je vais dire...
M. Bédard: Ne parlez pas d'échec, c'est simplement
ce que je veux vous dire.
M. Marx: C'est un échec, parce que c'était le but
de la loi. Cela faisait partie de la vision du ministre de l'époque, ce
qui reflétait dans la loi et c'est un échec parce qu'on en a
seulement deux, non pas cinq, dix, quinze ou vingt.
M. Bédard: Ce n'est pas nécessairement un
échec, c'est tout simplement la constatation que les cliniques ont
peut-être eu une performance moins concluante que prévu en ce qui
a trait aux citoyens.
M. Marx: Est-ce que le ministre va me dire honnêtement
qu'il pense qu'il y a une politique, soit dans son ministère, soit
à la Commission de l'aide juridique, en ce qui concerne
l'établissement des cliniques juridiques? Tout se fait au hasard,
partout au Québec, y compris dans son ministère et à la
Commission de l'aide juridique. S'il veut me dire qu'il n'y a pas de politique,
que les gens qui viendront auront...
M. Bédard: Là, c'est vraiment le genre du
député de D'Arcy-McGee. Mais non, on vient de dire sur cet aspect
des cliniques, qu'il n'y a pas de politique au niveau du ministère
puisque le président de la Commission de l'aide juridique l'a
mentionné lui-même et la loi le mentionne. C'est à la
Commission de l'aide juridique de donner l'accréditation lorsque c'est
demandé. Or, il n'y a pas eu de demande depuis quatre à cinq ans.
Arrêtez de conclure à des échecs ou quoi que ce soit.
M. Marx: Je pense que, si le ministre de la Justice voulait qu'il
y ait plus de cliniques d'aide juridique de quartier au Québec, il
pourrait, non pas donner d'ordre au président de la Commission de l'aide
juridique, mais discuter de la question avec lui pour susciter qu'il y ait plus
de personnes, de citoyens qui feront des demandes et, finalement, on aura plus
de cliniques d'aide juridique. Si le ministre ne peut pas faire une telle
chose, élaborer une politique dans ce sens, je m'excuse, il n'a pas de
pouvoir, il a une apparence de pouvoir. Tout ce qu'il va dire, c'est: Moi, je
ne peux rien faire, je n'ai pas de politique, le président a dit que...
Je pense qu'il y a plus que cela.
M. Bédard: Non, mais vous avez l'air de découvrir
le monde! La loi, elle est là, c'est à la Commission de l'aide
juridique de donner les accréditations et il n'y a pas de demandes.
M. Marx: J'ai dit tout ce que j'avais à dire sur cela.
L'autre point que j'aimerais soulever, parce que c'est aussi un objectif de la
loi, c'est que la Commission de l'aide juridique, les bureaux, les cliniques,
travaillent avec des qroupes populaires. Puis-je poser la question au
président de la Commission de l'aide juridique? Est-ce qu'effectivement
vous faites beaucoup de travail avec des groupes populaires?
M. Bédard: II y a deux types de service. Il y a un type de
service qui, quant a nous, est absolument nécessaire, c'est le service
curatif qu'on appelle. Quand un client vient au bureau et qu'il a un
problème, il faut d'abord s'occuper de ce client et de son
problème. On ne peut pas lui dire: II faudra que tu retournes à
un qroupe et en fasses partie, c'est à ce moment-là qu'on
traitera de ta cause. Par contre, on traite aussi de qroupes,
c'est-à-dire qu'on va servir de conseillers, comme avocats aux groupes,
et c'est bien certain qu'on va acheminer, autant que possible, le
règlement de leurs problèmes devant des tribunaux ou des
régies administratives, parce que, de plus en plus, on va devant les
régies administratives et les tribunaux administratifs. Cela se comprend
parce que le droit de la pauvreté, c'est d'abord un droit statutaire; le
Code civil des pauvres, c'est le droit statutaire. On doit, pour aller plus
rapidement et aussi faire avancer certains domaines, travailler en qroupe.
Quant à moi, c'est peut-être la meilleure façon
d'épargner aussi aux citoyens des démarches et d'épargner
à l'État des frais.
M. Marx: Est-ce que vous faites beaucoup de consultations
auprès des qroupes populaires?
M. Bédard: Dans le rapport annuel de l'année
dernière, on fait état, dans chacune des corporations
régionales, du nombre de réunions qui se font ordinairement le
soir et la fin de semaine. Les informations vous sont données dans le
rapport annuel de la Commission des services juridiques.
M. Marx: Est-ce que c'est vrai que la plupart des consultations
auprès des grouoes populaires à Montréal se fait par des
avocats de la clinique de Pointe-Sainte-Charles?
M. Bédard: C'est faux, tout à fait faux.
M. Marx: D'accord. M. le ministre, en terminant cette discussion,
peut-être qu'il serait temps de revoir l'accès à la justice
au Québec. C'est l'année des commissions. Pourquoi ne pas avoir
une commission pour revoir la Loi sur l'aide juridique? Je pense que c'est
aussi important que la Charte des droits et libertés de la personne et
que cela entre dans les priorités du ministre. Le député
de Verchères dit que c'est une bonne suggestion et que ce serait
constructif. Alors, si on a le consentement des députés des deux
côtés de la Chambre, il faut que le ministre marche.
M. Bédard: C'est peut-être constructif, mais cela va
prendre des études et on a l'impression que vous êtes contre
toutes les études.
M. Marx: Non, ce ne serait pas une étude, ce serait une
commission; mais une chose que je peux vous dire, M. le ministre, c'est que
vous n'avez jamais eu d'étude...
M. Bédard: Vous venez de comprendre ce qu'est la
Commission des droits de la personne.
M. Marx: ...en matière d'ordre juridique, depuis que vous
êtes ministre.
Une voix: Je ne sais pas.
M. Marx: Est-ce que le ministre est d'accord pour avoir une
commission en ce qui concerne l'accès à la justice et ouvrir
peut-être la Loi sur l'aide juridique, voir pourquoi on dépense 30
000 000 $ par année? Il y a bien sûr une partie qui vient du
fédéral, le méchant gouvernement fédéral
paie un petit peu en vertu des ententes.
M. Bédard: II y a 5 000 000 $ qui viennent du
fédéral. C'est ce que vous voulez savoir?
M. Marx: Je veux simplement souligner qu'il y a un peu d'argent
qui vient du fédéral, mais pas seulement au Québec,
à toutes les provinces. Est-ce que c'est le temps de rouvrir la Loi sur
l'aide juridique, l'accès à la justice? Je pense que cela va avec
l'ouverture de la Charte des lois et des libertés; c'est tout un paquet
et pouquoi ne pas discuter de tous les sujets en même temps? (15 h
15)
M. Bédard: C'est bien malheureux, mais je ne vois pas cela
comme un paquet, un ensemble, comme le dit le député de D'Arcy
McGee. Ce sont vraiment deux choses différentes.
M. Marx: II n'y aurait pas beaucoup de propagande à faire
sur la Loi sur l'aide juridique; c'est ca, le problème.
M. Bédard: Sur l'accessibilité à la justice,
j'invite quand même...
M. Marx: La "game", c'est la propaqande.
M. Bédard: ... le député de D'Arcy McGee
à relire les notes dont j'ai fait part à la commission au
début de ses travaux pour voir qu'il y a bien des efforts de faits par
le ministère dans ce sens-là. De là à avoir une
commission parlementaire sur une révision totale et complète de
l'aide juridique...
M. Marx: Et sur l'accès à la justice.
M. Bédard: ... je dois avouer que je ne crois pas que ce
soit une priorité au moment où on se parle.
M. Marx: II y a quelques minutes, j'ai démontré
qu'il y avait des échecs en vertu de la loi actuelle.
M. Bédard: Non, justement, je ne suis pas d'accord avec le
député de D'Arcy McGee sur ces échecs, comme il le
dit.
M. Marx: Des buts non réalisés.
M. Bédard: Je ne voudrais quand même pas me
répéter, mais je ne vois pas quel échec il y a concernant
les bureaux d'aide juridique, concernant le principe même de la loi qui
est le libre choix.
M. Marx: Les cliniques?
M. Bédard: Concernant les cliniques, il y a un
problème au niveau de la demande.
M. Rivest: Encore une fois ... M. Marx: Non, d'accord.
M. Rivest: ... orienté. M. Marx: Je pense que...
M. Bédard: Selon un sondage qui a été fait
récemment, pas moins de 80% des clientèles servies par l'aide
juridique se sont déclarées satisfaites des services rendus.
M. Rivest: Vous devriez en envoyez...
M. Bédard: Dans ce sens, je pense qu'il y a d'autres
priorités gouvernementales.
M. Marx: Je n'ai jamais attaqué les services fournis par
l'aide juridique, ce n'est pas le but de mes questions.
M. Bédard: J'espère.
M. Marx: Je n'ai jamais dit cela, j'ai posé des questions
d'un autre ordre et il ne faut pas maintenant me faire dire ce que je n'ai
jamais dire, de me donner des réponses à des questions que je
n'ai pas posées et de noyer le poisson dans beaucoup de verbiage.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Bédard: Vous allez être noyé tantôt
parce que, depuis quelque temps, je me demande qui fait du verbiaqe.
M. Rivest: Une dernière question, M. le ministre. Vous
vous référez, de temps à autre, à des
relevés d'opinions que le ministère fait sur les programmes.
Est-ce que cela pourrait être rendu public, à un moment
donné, une fois que cela aura servi?
M. Bédard: Le sondage auquel je me suis
référé?
M. Rivest: Oui.
M. Bédard: C'est un sondage fait par l'aide juridique.
M. Rivest: C'est parce qu'il y a des appréciations.
M. Bédard: II a sûrement été rendu
public.
M. Rivest: Pardon?
M. Bédard: II a sûrement été rendu
public.
M. Rivest: Oui, d'accord, mais d'une façon
générale on le demande à chaque ministère -
même au fédéral, maintenant, ils le font, peut-être
en retard - parce qu'évidemment les ministres, normalement, valorisent
certains aspects du sondage et l'opinion publique n'est pas toujours en mesure
d'apprécier le résultat de satisfaction ou d'insatisfaction d'une
mesure gouvernementale. Dans le cadre des travaux de la commission Paré
qui vont venir, j'espère que ces informations, après que le
ministre ou le ministère s'en sera servi -c'est normal qu'il les qarde
pendant un certain temps parce que c'est un instrument de travail interne -
seront rendues publiques. Peut-il nous assurer que d'une façon
systématique tous les sondages faits par l'administration publique
seront rendus publics? Le ministre, à deux ou trois reprises depuis le
début des crédits, nous affirme des choses comme: Le public est
bien satisfait de ceci et de cela. J'imagine qu'il a oublié les chiffres
qui sont moins favorables aux politiques gouvernementales.
M. Bédard: Quand je me suis référé
à des sondages, très peu de fois, d'ailleurs, ils ont
été rendus publics.
M. Marx: Ce n'est pas le ministère qui a fait le sondage,
c'est la commission; le ministère n'a rien à voir avec les
sondages de la commission.
M. Rivest: Non, celui de la commission a été rendu
public, mais vous avez fait référence à un autre sondage,
je pense. Est-ce que vous allez les rendre publics - ai-je une réponse
du ministre? - les sondages en général faits au ministère
de la Justice? Est-ce que vous vous engagez à les rendre publics une
fois qu'ils auront servi pour les fins internes, sur quelque domaine que ce
soit?
M. Bédard: Notre politique qénérale est de
les rendre publics.
M. Rivest: Notre politique générale... Est-ce que
vous vous engagez à les rendre tous publics?
M. Bédard: Oui, jusqu'à maintenant cela a toujours
été fait.
M. Rivest: N'ajoutez rien, il a dit oui, et pour une fois que
j'ai un oui!
M. Bédard: Oui, mais là, n'allez pas trop loin.
M. Rivest: Je savais qu'il était pour y avoir un
"mais".
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 5 est
adopté?
M. Bédard: N'interprétez pas trop.
M. Marx: Non, on a une autre question.
M. Rivest: Dans des délais raisonnables, bien
sûr?
M. Bédard: C'est cela.
M. Rivest: II a oublié de le dire et je vais le dire pour
lui.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Bédard: Oui, mais dans des délais raisonnables,
comme le dit le député de Jean-Talon.
M. Marx: Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'aide
juridique?
M. Rivest: Pas moi.
M. Marx: Non. Merci. J'aimerais remercier le président de
la Commission des services juridiques...
M. Bédard: Je le remercie également au nom des
membres de la commission.
M. Marx: ... de son intervention. Il y a l'aide au recours
collectif. J'ai appris quelque part que le ministre de la Justice a
créé un comité d'étude sur le recours collectif
dont le double mandat était le suivant: examiner la loi en vue
d'apporter, à la lumière de ses années d'activité,
l'amendement qui rendrait l'organisme plus efficace; deuxièmement,
étudier, conjointement avec le Barreau du Québec, la
possibilité de fixer des horaires judiciaires propres au recours
collectif. Est-ce que le comité a terminé son travail? Est-ce que
le comité a acheminé des recommandations au ministre? Je signale,
M. le ministre, que c'est une autre étude. Je pense que vous avez une
université plutôt qu'un ministère de la Justice.
M. Bédard: Franchement, arrivez en ville et arrêtez
de vous énerver à chaque fois que vous voyez une étude.
Vous savez très bien que tout geste qui doit être posé
d'une façon valable par un gouvernement doit être
précédé d'études, comme toutes les lois doivent
être précédées d'études. On ne
légifère pas pour étudier après. On ne met pas des
programmes au point...
M. Marx: Quand j'ai demandé une étude sur la Loi
sur l'aide juridique, vous vous êtes énervé. Maintenant, il
y a une étude sur...
M. Bédard: Vous parlez des études depuis le
début de la commission. Vous avez l'air de vous en scandaliser.
Comprenez donc une fois pour toutes que les études sont
nécessaires.
M. Marx: Trop d'études et pas assez d'action.
M. Bédard: II n'y a jamais trop d'études.
M. Marx: II y a la façon de gouverner par
conférences de presse et par études.
M. Bédard: Je ne pense pas que ce soit ma manière
d'administrer que de le faire par des conférences de presse.
M. Charbonneau: En parlant d'études, on pourrait
peut-être parler du nombre d'études que vous nous proposiez dans
votre programme électoral pour gouverner.
M. Marx: M. le Président, c'est hors des
crédits.
M. Rivest: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous
plaît. À l'ordre:
M. Bédard: Si vous aviez juste une légère
idée du nombre d'études qui pouvaient être sur les
tablettes et qui avaient été faites par le gouvernement
précédent, je pense que là vous auriez de quoi vous
scandaliser.
M. Marx: M. le ministre peut-il les déposer s'il veut
bien?
M. Bédard: Nous y avons donné suite dans la plupart
des cas, alors que le gouvernement précédent ne faisait rien.
M. Marx: Vous avez donné suite aux études du
précédent gouvernement? Quelles lois?
M. Charbonneau: La loi sur le zonage agricole.
M. Marx: Quelle autre?
M. Charbonneau: La loi sur l'assurance automobile.
M. Bédard: Franchement, on ne commencera pas à vous
faire la litanie des actions qui n'ont pas été entreprises par
l'autre gouvernement.
M. Marx: Qui va répondre aux guestions en ce qui concerne
le comité d'étude sur le recours collectif?
M. Bédard: Sur cette question, effectivement, le
comité d'étude est en place et devrait faire rapport d'ici
septembre. C'est à ce moment que les décisions seront prises.
M. Marx: Ce sera quand? M. Bédard: D'ici
septembre.
M. Marx: Septembre. Il n'y a pas eu de discussion avec le
ministre sur la question abordée. Est-ce que le ministre peut nous
donner d'autres informations sur ces dossiers?
M. Bédard: Peut-être sur un point. Il y a eu
plusieurs articles de journaux ou d'analyses à savoir que le recours
collectif, en fait, la loi concernant le recours collectif s'avérait
donner moins de résultats avait moins de succès qu'on ne l'aurait
cru. J'ai demandé de faire un relevé du nombre de recours qui ont
été inscrits ici au Québec en
fonction de cette loi par rapport aux autres provinces où il y a
une telle loi. On s'aperçoit rapidement que contrairement à ce
qui est souvent écrit et décrit notre loi concernant les recours
collectifs est non seulement très bien perçue, mais très
utilisée par comparaison à ce qui se fait dans les autres
provinces.
M. Marx: Est-ce qu'on peut avoir le rapport que vous avez?
M. Rivest: Non, on ne peut pas?
M. Bédard: Depuis l'entrée en viqueur de la loi, 47
recours collectifs sont en marche.
M. Marx: C'est pour combien d'années?
M. Bédard: C'est pour un an, un an et demi.
M. Rivest: Est-ce qu'on peut avoir la note que vous avez?
M. Bédard: Je vous la donne. Vous avez simplement à
ouvrir vos oreilles.
M. Rivest: Je ne voudrais pas que vous ne nous donniez que des
extraits. Vous allez nous la donner au complet?
M. Bédard: Je le dis en souriant. Il y a 47 recours
collectifs qui sont en marche. Le fonds d'aide a financé huit recours
pendant l'année financière 1979-1980. Il en a financé 29
pendant l'exercice financier qui s'est terminé le 31 mars 1981, soit
plus du triple. Ces chiffres démontrent que le fonds d'aide finance 78%
des recours, et grâce au principe de la représentation
créé par cette procédure, on évalue à 375
000 le nombre de citoyens du Québec dont les droits seront
tranchés par les tribunaux via le recours collectif. C'est une bonne
illustration d'une plus grande accessibilité à la justice.
M. Rivest: On ne peut pas avoir la note au complet? Vous lisiez
parcimonieusement...
M. Bédard: Oui, je peux continuer. D'abord, je n'ai pas
sauté de paragraphe.
M. Rivest: ...en disant: Hop! cette phrase-là, je la
saute.
M. Bédard: Deuxièmement, je peux continuer. La note
dit ceci...
M. Rivest: Donnez-la donc au complet, mon Dieu, même s'il y
a des affaires qui ne fonctionnent pas dans les recours collectifs.
M. Bédard: Mais non! Mais non!
Qu'avez-vous à vous énerver, là?
M. Rivest: II n'y a pas de secrets là-dedans.
M. Bédard: Asseyez-vous, là! Ils sont rendus gu'ils
veulent les copies des notes. Restez tranquilles!
M. Rivest: On veut être informé. On est ici... Ce
n'est pas pour nous, c'est pour l'opinion publique.
M. Bédard: Je vous donne l'information. Avez-vous d'autres
questions? On voit que cette donnée, continue la note, est fort
intéressante en termes de coûts d'accessibilité à la
justice. En effet, si l'on compare le coût d'un procès en recours
collectif au coût des procédures individuelles devant le tribunal,
les petites créances ou ailleurs, l'on réalise l'immense avantage
en termes économiques.
Enfin, pour satisfaire pleinement la curiosité de ceux, dont le
député de Jean-Talon, dont la seule quantité importe dans
ce domaine, nous produisons en annexe A les récentes statistiques
pertinentes pour les autres provinces.
M. Rivest: Oui.
M. Bédard: Ces statistiques démontrent que le
Québec est de loin la province où cette procédure
connaît le plus grand succès.
M. Marx: Je suis très heureux d'apprendre cela, M. le
ministre.
M. Bédard: Vous avez le droit d'applaudir.
M. Rivest: C'est quoi le chiffre que vous avez
là-dessus?
M. Marx: J'aimerais seulement poser une petite question. Dans les
autres provinces, est-ce le même régime qu'au Québec? Au
Québec, il faut avoir la permission de la cour pour faire un recours
collectif. Dans les autres provinces, ce n'est pas nécessaire ou est-ce
nécessaire?
M. Bédard: Je pense que d'une province à l'autre,
quand même, cela varie.
M. Marx: Peut-être que le directeur du bureau de recours
collectifs pourrait nous répondre.
M. Bédard: Je ne peux pas vous répondre d'une
façon très détaillée, parce que, de toute
façon, d'une province à l'autre, cela varie. Je pense que dans la
plupart des provinces, c'est plus restrictif, mais je ne peux pas vous
répondre de façon très
précise. Le principe existe. Généralement, c'est
une règle de pratique, le "common law". Ce n'est pas une loi-cadre avec
un fonds d'aide, sauf qu'il y a beaucoup de fluctuations dans les
règles. C'est simplement sous forme de règles de pratique. C'est
quand même différent.
M. Rivest: Si bien qu'il est difficile de comparer d'une province
à l'autre. C'est ce que vous voulez dire?
M. Bédard: Effectivement.
M. Rivest: C'est dur de dire qu'on a la meilleure loi au Canada,
en conséquence.
M. Bédard: Pour ajouter à cette information, dans
les autres provinces, il n'existe pas de loi sur le recours collectif. Il
existe certaines règles pratiques des tribunaux qui réglementent
la recevabilité des recours collectifs. De manière
générale, dans les autres provinces, comme on le mentionnait tout
à l'heure, c'est extrêmement restrictif parce que la jurisprudence
a élaboré des critères de façon, par exemple, que
les actions en dommages, d'une manière générale, ne soient
pas poursuivables par voie d'action collective. On peut constater,
d'après les statistiques que nous avons, qu'il y a beaucoup plus de
recours collectifs au Québec que pour l'ensemble de toutes les provinces
canadiennes.
M. Marx: Peut-être avons-nous plus de recours au
Québec parce qu'on finance le recours, c'est-à-dire qu'on paie
l'avocat et les frais judiciaires, quoique dans d'autres provinces, je ne pense
pas que ce soit le gouvernement qui finance ces recours.
M. Bédard: J'aimerais pouvoir donner la réponse,
mais... Ce n'est pas financé dans les autres provinces...
M. Marx: Non, ce n'est pas financé dans les autres
provinces. C'est seulement financé...
M. Bédard: ...sauf qu'il y a des plans d'aide juridique
dans les autres provinces.
M. Marx: C'est cela.
M. Bédard: Finalement, s'il y a plus de recours au
Québec, on pense que c'est parce que la loi est extrêmement
précise, les critères sont précis dans la loi, ce qui
n'existe pas dans les autres provinces qui n'ont que des règles de
pratique qui contiennent quelques dispositions.
M. Marx: Le ministre a-t-il l'intention d'assouplir encore les
critères en ce qui concerne ce recours collectif?
M. Bédard: Je préfère attendre, avant de me
prononcer, les recommandations qui peuvent nous être faites par le
comité. Comme on peut le voir, cela peut représenter rapidement
un nombre très accéléré de recours. Cela peut des
sommes très considérables, et je crois qu'on doit y aller... (19
h 30)
M. Marx: Dans une année de coupures, ce n'est pas la chose
à faire.
M. Bédard: Non, ce n'est pas une question d'année
de coupures, voyons donc, soyez loqigue! Ce n'est pas sérieux, ce que
vous dites là. Ce n'est pas une question de coupures.
M. Marx: Dans une année maigre, ce n'est pas une chose
à faire.
M. Bédard: Ce ne sont pas des sommes plus significatives
qu'il ne le faut que ça représente. Je crois qu'il faut se placer
sur un autre plan quand il s'agit de savoir si on doit assouplir ou non les
règles.
M. Marx: Est-ce que le ministre va rendre ce rapport public ou
s'il ne sera pas porté à l'attention du public?
M. Bédard: Vous n'aurez sûrement pas d'objection
à ce que j'en prenne connaissance avant de voir s'il y a lieu de le
rendre public ou pas.
M. Marx: Est-ce qu'il peut nous dire aujourd'hui s'il va le
rendre public?
M. Bédard: Ma tendance est toujours de rendre public tout
ce qui est possible.
M. Rivest: Ma tendance! Il y a deux mots de la langue
française que vous ignorez, vous, ce sont les mots oui et non. C'est
incroyable! Cela existe. On répond oui ou on répond non, et on le
sait.
M. Bédard: Où êtes-vous?
M. Rivest: Je suis actuellement au programme 5,
élément 2.
M. Bédard: Vous avez l'air perdu pas mal.
M. Rivest: Oui, non.
M. Marx: Est-ce gu'il y a d'autres questions?
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le proqramme 5 est
adopté?
M. Rivest: Oui.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 5 est
adopté. Le programme 6 sera-t-il adopté? Est-ce qu'il y a des
questions sur ce programme?
Une voix: Non.
M. Bédard: Alors, adopté?
M. Marx: Est-ce que le ministre veut faire une
déclaration?
M. Bédard: Je regardais les notes qu'on vous a fait
parvenir.
Le Président (M. Desbiens): Le
Drogramme 6 est adopté. Programme 7, enregistrement officiel.
Est-ce que le programme 7 est adopté.
M. le député de D'Arcy McGee.
Enregistrement officiel
M. Marx: Juste une guestion que quelgu'un m'a demandé de
poser, mais je vais le faire dans l'intérêt public. Est-ce qu'il y
a un bureau d'enregistrement, maintenant, à Granby? Je pense que n'a
été un problème pendant des mois.
M. Bédard: Ce n'est plus un problème maintenant, il
y a un bureau d'enregistrement à Granby.
M. Marx: Je félicite le ministre d'avoir ouvert un bureau
d'enregistrement à Granby. Est-ce gue c'a été fait avant
les élections ou juste après?
M. Bédard: Ce ne sont pas des choses qui me motivent.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce gue le programme 7 est
adopté?
M. Marx: Est-ce qu'il y a d'autres...
M. Bédard: Je ne peux même pas vous dire si c'est
avant ou après.
M. Marx: D'accord.
M. Bédard: C'était un besoin et on y a
répondu.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 7 est
adopté. Programme 8, contrôle des permis d'alcool.
Contrôle des permis d'alcool
M. Bédard: Nous avons avec nous le président du
nouvel organisme, la Régie des permis d'alcool.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon, vous avez demandé la parole?
M. Rivest: Une guestion, guant à moi. Je voudrais
m'informer des délais. Très souvent, on est sensibilisé
par des gens gui s'adressent à la régie pour obtenir des permis
de tous ordres et gui se plaignent des délais très très
longs. Est-ce que vous avez des éléments à donner
là-dessus, des statistiques ou les mesures que vous avez prises à
ce sujet dans la dernière année?
M. Bédard: Précisément, les délais
sont la préoccupation principale de la nouvelle régie. Au niveau
des délais de l'ancienne commission, on pouvait s'attendre à
obtenir un permis généralement en dedans de six mois. La
régie est en train de réformer ces procédures pour
tâcher d'émettre un permis, dans les cas non contestés,
à l'intérieur de 30 jours et, dans les cas contestés, dans
moins de 45 jours. Pourquoi ces chiffres? C'est parce gue la loi prévoit
une prépublication de 15 jours dans les journaux, donc il faut
s'adresser aux journaux, laisser s'écouler ces 15 jours et permettre de
recevoir les oppositions. Donc, il est très pensable d'émettre,
à l'intérieur de 30 jours, des permis dans les cas non
contestés et dans 45 jours des permis dans les cas contestés.
Toute la procédure est en train d'être modifiée dans ce
sens et je pense qu'à ce moment-ci on a dû, chez les
reguérants, constater gue la moyenne se situe peut-être aux
alentours d'un mois et demi avec, malheureusement, encore des cas dans des
régions excentrigues, c'est-à-dire en dehors de Montréal
et de Québec où les délais sont un petit peu plus lonqs
à cause du fait gue les régisseurs se déplacent une fois
par mois pour aller entendre les causes sur place.
M. Rivest: Alors, vous auriez peut-être
intérêt à rencontrer vos collègues gui s'occupent de
l'ensemble de l'administration de la justice pour les inviter à obtenir
des performances, mais comme on aura un plan d'action je suppose gu'on
s'inspirera de la pratique.
M. Bédard: Encore là, M. le Président, mon
collègue de Jean-Talon n'est pas très sérieux. Il a l'air
d'oublier que justement cette loi a été votée à
l'initiative du présent gouvernement avec comme préoccupation de
faciliter les choses aux citoyens et je pense que le but est atteint. Il
devrait au contraire...
M. Rivest: Vous vouliez que je vous félicite?
M. Bédard: Non, non.
M. Rivest: Non?
M. Bédard: Je n'ai pas besoin de ça.
M. Rivest: M. le Président, une question plus technique.
La fameuse question qui a été soulevée dans l'opinion
publique à savoir si oui ou non c'était légal, acceptable
ou tolérable le fait que des gens se rendent dans des
établissements, des restaurants en particulier, qui ne détiennent
pas de permis et qu'ils apportent leur propre vin ou des choses comme
ça. Il y a eu une espèce d'imbroglio entre différents
porte-parole de votre côté. Quel est le sentiment du
président ou du ministre là-dessus, comme vous voudrez?
M. Bédard: Effectivement, nous avons précisé
que la loi est très claire dans le sens qu'une personne peut apporter
des boissons dans un établissement qui n'a pas de permis et les
consommer. Mais il ne faut jamais oublier que tout ca est conditionnel à
l'acceptation du propriétaire. Le propriétaire demeure le
propriétaire.
M. Rivest: Je m'excuse, on me parlait. C'est quoi la...
M. Bédard: Tout cela est conditionnel à
l'acceptation du propriétaire de l'établissement. Il ne faut
quand même jamais oublier...
M. Rivest: C'est légal?
M. Bédard: Oui, c'est légal.
M. Marx: Ça, c'est un avis juridique accepté au
Québec parce qu'au ministère du Revenu on a donné des avis
juridiques et après ca on a dit aux gens qu'ils devaient rembourser
l'impôt parce que les avis juridiques n'étaient pas légaux.
Mais je comprends que le ministre nous donne un avis juridique et que, si
quelqu'un va dans un restaurant avec sa boisson et que l'établissement
n'a pas de permis d'alcool, il ne sera pas poursuivi par le ministère de
la Justice.
M. Bédard: Pardon. Prenez toute la réponse que je
vous ai donnée. J'ai dit que c'était conditionnel à
l'acceptation du propriétaire, qui demeure toujours le maître de
sa propriété quand même.
M. Rivest: Parce qu'il y a eu un avis du contentieux d'une
société qui était à l'effet contraire.
M. Bédard: Dans le fond, la situation est un petit peu une
tempête dans un verre d'eau dans le sens suivant: En 1964, un individu a
décidé d'apporter sa propre boisson dans un restaurant et une
accusation a été portée contre lui. Il s'est
défendu devant les instances régulières et un jugement de
la Cour d'appel lui a donné raison disant qu'il est possible d'apporter
sa boisson dans des établissements non détenteurs d'un permis
d'alcool. Le jugement est là depuis 1964. S'il arrive qu'on en parle
maintenant c'est qu'un autre individu a aussi décidé d'apporter
sa boisson dans un établissement sans permis et que quelqu'un s'est
opposé à ce qu'il le fasse. Lorsqu'on m'a contacté pour me
demander mon avis là-dessus, j'étais au courant de la
jurisprudence et je l'ai citée. Il est possible qu'on ait
contacté quelgu'un d'autre qui a fouillé dans la loi pour trouver
un texte clair qui dirait ça, mais c'était dans la jurisprudence
et ca l'est depuis lors.
M. Rivest: Mais il y a l'autre aspect qui a été
soulevé par des détenteurs de permis; est-ce qu'il n'y a pas
danqer j'imagine que ça doit être très réduit comme
pratique - d'une espèce de concurrence si tout le monde apporte sa
boisson, son vin dans les restaurants, peu importe qu'ils soient ou non
détenteurs d'un permis?
M. Bédard: Mais les inconvénients au fait
d'apporter son vin sont assez importants. Quelqu'un qui veut aller passer son
samedi soir avec son épouse, qui arrive avec son stock au restaurant, se
ferait rapidement dire par sa femme qu'elle préférerait rester
à la maison. Il y a aussi des inconvénients au fait d'apporter sa
boisson.
M. Marx: À Montréal, il y a beaucoup de bons
restaurants, de petits restaurants, où on encouraqe les gens à
venir avec leur bouteille.
M. Rivest: J'ai déjà fait ca, moi. Vous me rassurez
en disant que c'est légal.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Chapleau.
M. Kehoe: Le président de la réqie a dit tout
à l'heure que ca prenait un avis de 30 jours quand ce n'est pas
contesté et 45 jours quand c'est contesté, pour l'émission
d'un nouveau permis. Quand il s'agit d'un transfert de permis
déjà établi, surtout un hôtel, je sais pertinemment
bien que, dans le district judiciaire de Hull, la régie vient
siéqer, je pense que ce n'est pas à tous les mois; de toute
façon, le délai, jusqu'à récemment du moins, est
beaucoup plus long que ça, là il y a déjà un
permis.
M. Bédard: La question des délais concernant les
transferts nous avait préoccupé d'une façon tout à
fait particulière, lorsqu'on a fait la loi et la loi prévoit
beaucoup moins de difficultés et de
tracasseries que ce n'était le cas auparavant, de telle
façon qu'on m'indique que ca peut, dans certains cas, se faire la
journée même.
M. Kehoe: Ce n'est pas toujours le cas, parce que...
M. Bédard: II n'y a pas de publication.
M. Kehoe: II n'y a pas de publication maintenant?
M. Bédard: II n'y a pas de publication
nécessaire.
En fait, il suffit que le nouveau propriétaire établisse
qu'il répond aux autres exiqences de la loi. Il dépose sa demande
et on peut lui donner satisfaction la journée même, puisqu'il n'y
a pas de publication dans les journaux, s'il n'y a pas modification au permis,
s'il veut exploiter exactement le permis de l'établissement qu'il
acquiert...
M. Kehoe: Si c'est identique, ca peut être donné la
même journée?
M. Bédard: La journée même, dans la
journée.
M. Kehoe: D'accord.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Dernière question. Des problèmes de
permis d'alcool ont été soulevés ici à
Québec, bien sûr, mais sans doute ailleurs dans la province,
à propos de la "prolifération" des permis. C'est toujours une
question d'appréciation personnelle que celle des permis d'alcool dans
les sites ou les arrondissements historiques. Je veux dire qu'ici, on a
vécu un moratoire ans le Vieux-Québec. Est-ce qu'il y a eu des
développements dans la dernière année? Est-ce qu'il y a eu
des décisions?
M. Bédard: Le développement qu'il y a eu
découle encore de la nouvelle loi. Elle a introduit la notion de
tranquillité publique. Quand les citoyens viennent faire la preuve
à la régie que la tranquillité publique est
menacée, évidemment, c'est une question d'appréciation de
la preuve, si les réqisseurs sont convaincus que la tranquillité
publique est menacée, le permis demandé est refusé. Dans
le cas contraire, il est évidemment accordé.
M. Rivest: Qu'est-ce que vous allez faire dans le cas des
citoyens du Vieux-Québec, le comité des citoyens qui s'oppose
à l'émission d'un permis rue Sainte-Geneviève?
M. Bédard: Je vais laisser les régisseurs
apprécier la preuve qui leur sera présentée?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Marx: J'aimerais savoir s'il y a des villaqes ou des villes au
Québec où il y a la prohibition, où la prohibition existe,
où on ne peut pas vendre d'alcool en vertu d'une loi provinciale ou en
vertu d'une loi fédérale?
M. Bédard: Je crois qu'il en reste. Un cas a
été porté à ma connaissance hier, que je suis
à vérifier. C'est à l'île des Soeurs, mais je ne
peux vous dire que ça. Le cas a été porté à
ma connaissance et j'ai demandé aux conseillers juridiques de faire la
vérification.
M. Marx: En vertu de la loi fédérale ou en vertu
d'une loi provinciale?
M. Bédard: En vertu d'un règlement municipal
adopté en vertu de la loi provinciale.
M. Marx: C'est en vertu de la loi provinciale.
M. Bédard: C'est sous toutes réserves, j'ai
à obtenir la vérification.
M. Marx: Je pense que, même aujourd'hui, si les citoyens
d'une ville veulent, ils peuvent obtenir la tenue d'un référendum
et faire en sorte d'obtenir la prohibition dans la ville. Je pense qu'il y a
une ancienne loi fédérale; c'est pourquoi j'ai posé cette
question, à savoir si c'est en vigueur quelque part au
Québec.
La deuxième question que j'ai à poser, soit à M. le
minsitre ou au président de la commission, c'est que, l'an dernier, lors
de l'étude des crédits, le député de Saint-Laurent
a trouvé qu'il y avait beaucoup d'employés pour le travail qu'on
fait à la commission. J'aimerais savoir si on a fait des coupures au
niveau de la commission et quel est le résultat. (19 h 45)
M. Bédard: Je pense que la constatation qui a
été faite rejoint celle qu'on a faite également qu'il y a
beaucoup d'employés qui travaillent dans ce secteur et qu'une politique
de rationalisation pourrait nous amener à réduire le personnel.
Cependant, il ne faut pas oublier qu'il v a une cinquantaine
d'enquêteurs-inspecteurs qui font la vérification des
établissements pour voir s'ils sont bien tenus, ce sont des
contrôles d'exploitation. Des inspections, c'est toujours un peu
subjectif, on pourrait avoir 5000 inspecteurs et estimer qu'on n'en aurait pas
assez, en avoir 5 et estimer qu'on en aurait suffisamment. Au sujet de la
quantité d'inspecteurs, on pense en avoir suffisamment
pour faire un ouvrage de contrôle acceptable,
particulièrement avec ERAM et la police de la Communauté urbaine
de Montréal.
En ce qui concerne le personnel de bureau chargé de
l'étude des demandes, chargé du travail purement administratif,
on pense qu'on est capable d'arriver à une compression administrative de
beaucoup supérieure à celle qui nous est exigée par les
compressions budgétaires actuelles.
M. Marx: Quand vous parlez de contrôle de l'exploitation,
cela englobe les questions de moralité et tout ce qu'on fait sur les
lieux. Est-ce cela?
M. Bédard: Cela englobe tout l'aspect respect des lois et
des règlements relatifs à un débit de boisson et en
collaboration avec la brigade de la Sûreté du Québec, qui
s'appelle ERAM et les forces de la police de la Communauté urbaine de
Montréal.
M. Marx: Juste une dernière question. Est-ce que vous avez
moins d'employés cette année que l'an dernier, ou le même
nombre ou plus?
M. Bédard: Nous en avons douze de moins à ce
moment.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Saint-Louis.
M. Blank: Quand vous parlez de la collaboration de la CUM, est-ce
gue c'est une escouade spéciale?
M. Bédard: Oui, c'est avec l'escouade chargée de la
moralité ou de la surveillance des débits de boisson sur le
territoire de la communauté urbaine.
M. Blank: Est-ce gue vous suivez les agissements de cette
escouade? J'ai vu dans certaines occasions gu'on a utilisé la loi des
ligueurs pour d'autres fins.
M. Bédard: Généralement, lorsqu'il y a des
opérations d'application de la loi, des infractions en matière de
boissons alcooligues ou de la Loi sur les permis d'alcool ou des
règlements, c'est coordonné avec notre bureau. L'un de nos
inspecteurs accompagne généralement les forces de la SPCUM
lorsqu'elles agissent là-dedans. Il peut arriver évidemment
qu'elles le fassent. Nous n'avons évidemment aucun contrôle sur la
police de la Communauté urbaine de Montréal.
M. Blank: Avez-vous eu des plaintes de vos inspecteurs?
M. Bédard: Non.
M. Blank: Sur un autre sujet, je constate par les journaux et Dar
les lettres que j'ai reçues de mon comté, dans mon comté,
on a beaucoup de "street sales". On ferme une rue commerciale et on met sur les
trottoirs toutes les affaires. C'est une vente du trottoir,
particulièrement sur la rue Saint-Laurent. Cette année, on
n'avait pas le droit de vendre de la boisson sur la rue, nonobstant que la
ville de Montréal veut passer un rèqlement qui l'autoriserait.
Est-ce votre intention de demander au ministre de faire un amendement à
la loi de donner droit à ces qens de faire cela durant cette
période? Vous n'avez pas le droit actuellement.
M. Bédard: Non, ce n'est pas notre intention, parce que la
loi le prévoit déjà. On dit que pour vendre des boissons
alcooliques, il faut être soit propriétaire, soit locataire du
terrain où on se trouve, ou avoir la permission de celui qui est
propriétaire du terrain. Si la ville de Montréal passait un
règlement permettant la vente de boissons sur une partie qui est sa
propriété, cela constituerait l'autorisation prévue dans
la loi et la régie pourrait donner l'autorisation.
M. Blank: Oui, mais vous donnez un permis de terrasse. C'est un
permis permanent. On ne parle pas d'un permis permanent, on parle d'un permis
de deux ou trois jours.
M. Bédard: À ce moment, ce serait un permis de
réunion pour l'événement gui amènerait des qens sur
le trottoir.
M. Blank: Nonobstant le fait qu'il se vend... Je ne parle pas
d'une réunion. Normalement, on le donne.
M. Bédard: Oui, mais c'est un permis de réunion. Il
est appelé peut-être improprement "permis de réunion". Cela
devrait, comme en anglais, être appelé "special event permit", un
permis pour une activité spéciale.
M. Blank: Cela veut dire que je peux informer mes gens de la rue
Saint-Laurent que s'ils obtiennent la permission de la ville de
Montréal, ils peuvent avoir un permis de réunion de votre
part.
M. Bédard: Oui, c'est permis dans notre
réglementation et notre loi.
M. Rivest: Combien avez-vous d'employés cette
année? C'est parce qu'il y a une espèce de petit imbroglio. Dans
le livre des crédits, on nous dit que vous avez le même nombre,
183 l'an passé. Par contre, il y en a 13 qui sont disparus.
M. Bédard: Nous en avions 184 l'année
dernière et nous en sommes en 172.
M. Rivest: Le livre des crédits indique 183 deux fois.
M. Bédard: C'est déjà de l'histoire
ancienne. Au moment où il a été
préparé...
M. Rivest: On ne peut pas se fier au livre des
crédits.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est
adopté?
M. Blank: J'ajouterais une chose. J'ai reçu à mon
bureau pour la première fois il y a quelques semaines des jugements par
écrit de la Régie des permis d'alcool. Avant, il n'y avait aucune
jurisprudence. Les avocats étaient pris... Chaque cas était un
cas d'espèce. Maintenant, avec cette jurisprudence qui est fournie par
la régie, je peux féliciter M. Laflamme.
M. Bédard: Vous avez même des consultations
gratuites à l'occasion de ces crédits, M. le
député.
M. Blank: Ce sera pour mes électeurs. Quand mes
électeurs me demandent conseil, il n'y a pas de facture.
M. Bédard: Je crois, M. le Président, que ce qui
nous a été dit par M. le président, que nous remercions de
sa présence, illustre bien la nécessité qu'il y avait de
faire une réforme concernant cette loi et, pour le moment, on ne peut
que s'en féliciter.
M. Rivest: On vous félicite.
M. Marx: Est-ce que vous avez fait des études sur ce
projet de loi?
M. Bédard: Oui, avant de procéder, nous avons fait
beaucoup d'études et si la loi s'avère aussi efficace, c'est
parce qu'on savait où on allait.
M. Marx: M. le ministre peut-il nous fournir des copies de ces
études, cela rendra notre travail plus...
M. Bédard: M. le député de D'Arcy McGee est
curieux mais pas très travaillant, parce qu'il devrait savoir que toutes
les études ont été rendues publiques quand on a fait
l'étude de la loi.
M. Marx: Je parle des études qui n'ont pas
été rendues publiques. Est-ce que cela existe chez vous?
M. Blank: Est-ce que le ministre est aussi à la
réforme parlementaire?
M. Bédard: Réforme électorale. On ne
discutera pas de la réforme électorale en discutant des alcools,
s'il vous plaît.
M. Blank: Non, concernant ce que le député de
D'Arcy McGee demande, j'ai une suggestion à faire au gouvernement.
À l'Assemblée législative de l'Ontario, il y a un
règlement de la Chambre qui dit: Après qu'une décision est
prise par le Conseil des ministres, toutes les études qui donnent droit
à cette décision sont données aux
députés.
M. Bédard: C'est intéressant.
M. Marx: Le gouvernement est plus transparent en Ontario qu'au
Québec.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est
adopté?
M. Bédard: Nos députés ont tout ce qu'ils
demandent...
M. Blank: Tout pour certains députés.
M. Bédard: ...tout ce qu'il faut pour pouvoir
apprécier ou encore évaluer...
M. Marx: II faut dire cela au député de
Sainte-Marie. En Chambre l'autre jour, il a dit que les députés
n'ont pas tout ce qu'ils demandent et tout ce qu'ils font...
M. Rivest: Le député de Sainte-Marie n'est pas
représentatif du caucus du Parti québécois. Le caucus est
beaucoup plus servile.
M. Bédard: Le député de Sainte-Marie est un
très bon député, d'ailleurs, les dernières
élections l'ont prouvé amplement.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est
adopté?
M. Rivest: Le député de Sainte-Marie n'est pas
servile au pouvoir, il exerce sa vigilence critique, il faut quand même
lui rendre cet hommage.
M. Bédard: Personne n'est servile au Parti
québécois, la population l'a compris.
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 8 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Garde des détenus
et réinsertion sociale
des délinquants
Le Président (M. Desbiens): Adopté. Le
programme 9: Garde des détenus et réinsertion sociale des
délinquants.
M. Marx: II y a beaucoup de questions en ce qui concerne le
programme 9. On peut commencer par une autre étude qui a
été faite par le gouvernement. J'aimerais demander au ministre si
l'étude est terminée; elle concerne le projet de construction
d'un nouvel édifice carcéral promis pour remplacer le centre de
prévention Parthenais. Est-ce que cette étude est
terminée?
M. Bédard: Elle est plus que terminée, nous y
sommes allés de recommandations qui font l'objet d'une étude
à l'heure actuelle au niveau du Conseil du trésor et des Travaux
publics.
M. Marx: Ce sera pour remplacer l'édifice sur la rue
Parthenais, c'est cela?
M. Bédard: Vous avez...
M. Marx: Cela coûtera combien?
M. Bédard: La construction qu'on envisageait pourrait
représenter environ 30 000 000 $.
M. Blank: Vous n'avez pas retenu ma suggestion de le construire
en face du palais de justice avec un tunnel.
M. Bédard: Je ne peux pas aller plus loin, mais je
comprends...
M. Blank: Parce que le terrain appartient au gouvernement et
c'est la meilleure place au monde.
M. Bédard: ...que dans cette période de
restrictions budgétaires, ce sont des décisions plus difficiles
à prendre...
M. Rlvest: Cela dépend du gouvernement.
M. Bédard: ...mais on va tenir compte des suggestions
faites par le député.
M. Blank: Cela fait trois ans que je la fais.
M Marx: ... cela va coûter environ 30 000 000 $ parce que,
dans une conférence de presse donnée par votre ministère,
on a parlé de 40 000 000 $ et, dans cette année de compressions,
il est bon de savoir que vous avez fait une compression avant même que
l'édifice soit construit. Je vous félicite une autre fois, M. le
ministre.
M. Bédard: Si on additionne toutes vos
félicitations, ce sera impressionnant.
M. Marx: Quand je verrai le ministre des Finances, je lui dirai
qu'à la Justice on fait des précompressions.
M. Rivest: Des précoupures. M. Marx: Des
précoupures.
M. Bédard: Je suis sûr que de telles
représentations auront un effet choc sur le ministre des Finances.
M. Rivest: Sur les...
Le Président (M. Desbiens): Vous avez d'autres
questions?
M. Marx: Oui, j'ai quelques questions.
M. Rivest: Moi, j'en ai une que je veux poser. Il est survenu au
cours des dernières années, au niveau des détenus, toutes
sortes de problèmes dans les lieux de détention, toute la
question des suicides dans les lieux de détention. Je sais que les
responsabilités ne sont pas nécessairement directement celles du
ministère de la Justice en tant que tel. J'exclus les prisons
fédérales. Il y a également la question des prises
d'otages qui, à l'occasion, ont fait l'objet de commentaires
élaborés.
D'une façon générale, je voudrais demander au
ministre ou au porte-parole du ministère les actes qui ont
été posés par le gouvernement du Québec face
à ces situations. Je ne veux pas qu'on s'attache à un cas en
particulier, mais des recommandations ont été faites à
l'occasion par les coroners. Je voudrais savoir, dans le sens constructif des
choses, un peu le tyoe de préoccupations que vous avez à ce
sujet.
M. Bédard: Comme vous le savez, dans le cas de chacun des
suicides, pour prendre cet exemple d'abord, il y a une enquête publique
du coroner qui est tenue et nous analysons attentivement les recommandations
qui nous sont formulées.
Les recommandations qui nous ont été formulées au
cours de la dernière année ont trait spécialement à
l'amélioration des services de santé à l'intérieur
des établissements de détention que nous dirigeons.
Je voudrais d'abord préciser que dans l'ensemble de nos
établissements, même si le problème semble
considérable, il y a eu sept suicides durant l'année 1980. Donc,
le nombre est à peu près stable au cours des dernières
années.
En matière d'amélioration des services de santé,
pour suivre les recommandations qui nous sont formulées par les
coroners, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le
ministère des Affaires sociales. Nous en sommes venus récemment
à un protocole
d'entente avec le ministère des Affaires sociales pour que, dans
les plus petits établissements de détention principalement, les
services de santé nous soient fournis par un établissement de
santé, soit un centre hospitalier, soit un centre local de services
communautaires. Nous sommes sur le point de signer les premières
ententes à Hull et à Saint-Jérôme, ce qui,
j'espère, pourra se faire au cours de ce mois-ci.
En matière de prise d'otages, la politique que nous suivons est
essentiellement une politique qui vise d'abord, lorsque la situation se
produit, à ne pas poser de qestes brusques qui risqueraient de mettre en
péril l'intégrité de notre personnel ou des personnes
détenues. Nous avons pris l'habitude de travailler en étroite
collaboration avec la Sûreté du Québec qui vient à
notre aide lorsque se produit une prise d'otages que nous ne pouvons pas
dénouer immédiatement. Je dois dire que depuis plusieurs
années ces événements, qui sont toujours fort
pénibles et fort traumatisants pour ceux qui les vivent, se sont, dans
nos établissements, terminés d'une façon relativement
heureuse, c'est-à-dire sans effusion de sang, et sans blessures pour
notre personnel.
M. Rivest: J'aimerais revenir, si vous le permetttez, sur la
question des détenus. Je comprends qu'il y a une dimension santé,
mais ce n'est pas la seule. Souvent, à tort ou a raison, on a
indiqué que la façon... surtout ceux qui sont en transition, qui
attendent leur procès ou qui viennent d'être
arrêtés... Je comprends que sur n'importe quel individu cela
produit un choc psychologique et c'est sans doute à ce genre de
préoccupation à ce niveau, que l'intérêt que vous
manifestez pour améliorer les services de santé se situe. Je
comprends que c'est la définition que vous donnez.
Mais du côté des attitudes des officiers qui sont en place,
des lieux également, des facilités de communication du
détenu avec un avocat, il y a eu, au fil de chacun des dossiers, des
incidents, des faits qui ont été contredits; il y a des choses de
cet ordre qui ont été affirmées. Est-ce que vous vous
préoccupez de ce genre de choses, de l'attitude des policiers? (20
heures)
M. Bédard: Lorsgu'on analyse la situation de chacun des
suicides qui se sont produits au cours des trois ou cinq dernières
années, les circonstances particulières où ces suicides se
sont produits, il est extrêmement difficile de dégager des
constantes. D'abord, il y a un très petit nombre de personnes
impliquées et les situations personnelles varient
énormément. Il est peut-être possible de faire en sorte que
nous puissions davantage prévenir si, dès l'admission de la
personne, nous sommes capables de diagnostiquer que telle personne risque de
présenter des tendances suicidaires soit, par exemple, en examinant son
histoire antérieure... Généralement, quelqu'un qui se
suicide donne des signaux préalables; il s'agit de savoir les capter au
bon moment. Nous allons tenter d'intensifier nos mesures de précaution
dès l'admission des personnes. Nous ne sommes pas convaincus que nous
aurons des résultats probants. Cependant, si nous réussissons
à en prévenir quelques-uns, ce sera autant de gagné.
Deuxièmement, nous avons mis beaucoup d'accent pour former notre
personnel aux techniques permettant de venir rapidement en aide à
quelqu'un qui est découvert en train d'attenter à sa vie.
Effectivement, les tentatives de suicide sont beaucoup plus nombreuses que les
suicides et nous réussissons, dans bien des cas, à intervenir
à temps. Grâce aux techniques de respiration artificielle, par
exemple, de transport rapide en centre hospitalier, d'intervention rapide des
médecins ou des infirmiers qui sont dans nos établissements, nous
avons réussi, à de nombreuses occasions, à sauver la vie
de personnes qui attentaient à leur vie.
M. Rivest: Vous me permettez? Est-ce que, dans l'ordre des
moyens, vous avez actuellement dans les crédits - parce que cela
implique des moyens, vous nous avez parlé des accords que vous avez
signés avec les centres de santé communautaire ou les
hôpitaux - dans l'ordre des moyens financiers, au niveau du personnel
également.. Prenez, par exemple, comme ici à Québec ou
à Montréal, raison de plus, dans des qrands centres comme
ceux-là, il y a une circulation extrêmement dense de
prévenus qui vont et viennent. Finalement, peu importe la nature
même de l'infraction puisqu'une personne, pour toutes sortes de raisons
qui lui sont propres - ce peut être une infraction bénigne - sa
réaction est telle... Dans quelle mesure, sur le plan de la
sécurité parce que vous devez traiter tous les cas, il y a un
volume imposant de cas... Est-ce que vous avez des effectifs, des moyens, des
crédits additionnels pour essayer d'avancer? C'est sûr que ceux
que vous avez résorbés, enfin que vous avez évités,
on ne vous en félicitera jamais parce que jamais personne le saura. On
est plus porté à faire état des cas qui, malheureusement,
ont...
M. Bédard: Dans les grands établissements comme les
trois établissements qui sont à Montréal, soit Bordeaux,
Parthenais, Tanguay, le Centre de réhabilitation de Waterloo et le
Centre de détention de Québec, qui ont une capacité de 135
personnes ou jusqu'à 850 personnes dans le cas de Bordeaux, nous
assumons, à même notre personnel, les services de santé.
Il
n'est pas question dans ces établissements qui requièrent
la présence de médecins ou d'infirmiers à temps plein de
passer des ententes avec des établissements des affaires sociales. C'est
dans le cas de petits établissements - la majorité de nos
établissements sont de petits établissements d'une
capacité de moins de 60 places - que ce protocole d'entente dont j'ai
parlé pourra s'appliquer.
M. Rivest: Est-ce qu'il y a d'autres questions
là-dessus?
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marquette.
M. Dauphin: Ce n'est pas une question qui peut être
localisée, mais un problème quand même assez sérieux
et mon confrère de D'Arcy McGee pourra renchérir. Apparemment, en
octobre 1980, le Conseil du trésor avait autorisé, dans son
budget, la construction d'un centre de détention à LaSalle,
naturellement sans consulter la population, vu que cela se trouve dans un
quartier résidentiel ou presque résidentiel. J'aimerais savoir
où en est rendu le dossier là-dessus parce que je reçois
encore des appels téléphoniques tous les jours. Les personnes ont
signé une pétition de 13 000 noms contre la construction de ce
centre de détention parce que c'est quand même à
proximité de leur résidence, et il peut y avoir des prises
d'otaqes, etc. J'aimerais savoir ce qui arrive dans le cas de LaSalle.
M. Bédard: Effectivement, une décision avait
été prise en ce sens. Malheureusement, le problème a
été un peu trop politisé, ce qui n'a pas permis à
chacun des arguments, quel qu'il soit, de se faire valoir à juste titre.
C'est pourquoi nous allons recommencer une consultation avec la population et
essayer de faire valoir tous les arguments qui militeraient en faveur de la
réalisation de cette décision. Il y a un phénomène
assez curieux: chaque fois qu'il est question de l'établissement d'une
institution de détention, il y a toujours, au niveau de la population,
certaines réactions négatives. Il faut le comprendre parce que
bien des gens croient que la mise en place d'une telle institution dans leur
voisinaqe peut constituer des dangers de toutes sortes, ce qui n'est pas le cas
parce qu'on assiste, lorsque vient le temps de fermer une prison, à la
même réaction de la population, mais dans le sens contraire; elle
s'oppose à la fermeture pour d'autres raisons, à ce
moment-là.
Maintenant, à la condition, de part et d'autre, de ne pas
politiser le débat...
M. Marx: II n'est pas question de politiser le débat.
M. Bédard: Non, mais durant la campagne... Ce que je veux
dire...
M. Marx: Vous avez parlé...
M. Bédard: Laissez-moi terminer et vous répondrez
après. Je vous dis ce que je pense.
M. Marx: Oui, mais ça va prendre six des huit heures.
M. Bédard: Je ne vous ai pas dit où était la
politisation, je vous dis ce que je pense. Je crois que durant la campaqne
électorale on a trop politisé ce problème.
M. Marx: D'accord, mais cela dévalorise la position de 13
000 personnes.
M. Bédard: Et cela n'a pas permis, je crois, à
chacune des argumentations de se faire valoir à son mérite. Cela
peut expliquer, en grande partie, une pétition à laquelle
réfère le député et qui a été
acheminée au ministère, pétition dont nous tenons compte
parce qu'effectivement nous allons recommencer une sensibilisation, une
consultation de la population.
M. Dauphin: Cela aurait peut-être été bon de
la consulter avant de prendre la décision.
M. Bédard: L'intention du ministère était
dans ce sens. Cette consultation a presque concordé avec une
période que vous connaissez bien, qui est plus agitée, la
période électorale. Je crois que ca n'a pas aidé, tout
simplement. Je n'ai pas de reproche à faire à qui que ce
soit.
M. Dauphin: Mais la bâtisse n'a pas été
achetée? Est-ce que vous êtes propriétaire de la
bâtisse, maintenant?
M. Bédard: Oui, nous avons acquis cette bâtisse du
fédéral et nous l'avons payée.
M. Marx: Combien, M. le ministre?
M. Bédard: Autour de 800 000 $. Nous pensons que l'emploi
de ces bâtisses aux fins d'institutions de détention est
nécessaire. Nous allons essayer de l'expliquer le mieux possible
à la population.
M. Dauphin: C'est parce qu'on nous avait apporté l'exemple
de Cowansville. Maintenant, Cowansville est à peu près à
cinq milles des quartiers résidentiels; tandis que là, dans la
ville de LaSalle, c'est en plein coeur d'un quartier résidentiel.
M. Charbonneau: Bordeaux, c'est en plein coeur d'un quartier
résidentiel et
personne ne s'en plaint.
M. Dauphin: Où cela?
M. Rivest: Là, le problème est qu'il y en a qui
s'en plaignent.
M. Charbonneau: Prenez Saint-Vincent-de-Paul, il y a des
pénitenciers à sécurité maximale et
supermaximale.
M. Blank: Quand Bordeaux a été construit, il n'y
avait personne là.
M. Bédard: Une constatation...
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M. le
ministre.
M. Bédard: ... qui a été faite et qui n'est
pas de nature à alerter une population, mais, au contraire, à la
rassurer, c'est que la preuve est faite que, dans l'arrondissement où se
trouve située une institution de détention, la criminalité
est beaucoup moins grande, justement à cause de la proximité des
lieux.
Durant la période électorale à laquelle j'ai
référé tout à l'heure, on véhiculait
auprès de la population le danger que constituaient les évasions,
la proximité d'individus qui se doivent d'être
incarcérés comme représentant un danqer, alors que ce
n'est pas le cas. On sait très bien, lorsqu'il y a des évasions,
que la première chose que font les gens qui s'évadent, c'est
quitter les lieux et s'en aller loin; ce n'est pas rester dans le
voisinage.
M. Dauphin: Maintenant, si toute la population environnante se
prononce contre à la suite des différentes consultations que vous
allez devoir faire, d'après ce que vous me dites, allez-vous la
construire quand même?
M. Bédard: Je suis convaincu qu'une consultation qui se
fait en dehors d'une aqitation inappropriée va donner des
résultats positifs. Nous allons faire tout ce qui est humainement
possible pour acheminer toutes les données aux citoyens pour qu'ils
soient bien au fait. Nous comptons que ceci contribuera à changer
l'impression actuelle.
M. Rivest: C'est 13 000 personnes. C'est difficile.
M. Dauphin: Je comprends ce que vous voulez dire, mais si ce
n'est pas leur souhait, naturellement...
M. Marx: Si ce n'est pas le souhait des citoyens, qu'est-ce que
vous allez faire? Vous allez construire ou ne pas construire? Supposons que 13
0.00 personnes signent une autre fois, qu'est-ce que vous allez dire? On aime
la participation des citoyens, mais quand ce n'est pas quidé, on l'aime
moins. C'est ça qu'on pose comme question.
M. Bédard: II y a un temps pour chaque chose. Il y a un
temps pour les décisions.
M. Marx: Inutile de dire aux citoyens: S'il y a 15 000 citoyens
parmi vous qui ne veulent pas cette prison, on ne va pas y construire la
prison.
M. Bédard: Si vous avez une pétition de 15 000 qui
la veulent et de 15 000 qui ne la veulent pas, qu'est-ce que vous faites? Je
pense que ce n'est pas comme ca qu'il faut aborder le dossier. Je ne vous
trouve pas très sérieux, au niveau de l'Opposition, d'aborder le
sujet de cette façon.
M. Marx: On va tirer à pile ou face! On a une
pétition de 13 000 noms et vous avez rejeté ca du revers de la
main en disant que c'était durant une période
politisée.
M. Charbonneau: Au contraire, le ministre a décidé,
M. le Président. Le ministre vient d'indiquer qu'ayant reçu la
pétition, il accepte de ne pas donner suite immédiatement au
projet, de regarder la chose avec les gens, de leur donner plus d'information
et de voir avec eux autres. C'est contraire à l'interprétation
que vous donnez.
M. Dauphin: Pour continuer à user de mon droit de parole,
si vous permettez, on ne tient pas à vous dire qu'on est contre
l'implantation de prisons...
M. Bédard: Je trouve ces propos beaucoup plus
sérieux.
M. Dauphin: ... sans aller dans le désert, il y aurait
peut-être possibilité d'envisaqer des sites peut-être moins
résidentiels. On nous a apporté, à un moment donné,
l'aspect économique. Après consultation avec les autorités
municipales, il était fortement question pour celles-ci d'installer des
ateliers municipaux à ces endroits. On comprend que Bordeaux est
surpeuplé, mais ce qu'on dit, c'est que, d'accord, il faut construire
d'autres prisons sans nécessairement se concentrer sur un quartier
résidentiel. On comprend cette population de se prononcer contre, elle a
certaines hésitations, certaines craintes qu'on peut comprendre, mais
votre décision avait été prise sans consulter les
intéressés.
M. Bédard: C'est ce que je vous ai dit tout à
l'heure. Il faut les comprendre, mais c'est ce qui nous incite aussi à
revenir à la
charge en termes de consultation, d'information de la population en
espérant que le résultat sera positif.
M. Dauphin: J'aurais juste une dernière question. Est-ce
que c'est vrai que le directeur a été engaqé il y a
déjà plusieurs mois?
M. Bédard: II y a une personne qui travaille sur ce projet
et qui travaillait anciennement à l'établissement de Bordeaux. Il
n'y a évidemment pas de directeur à l'établissement de
LaSalle parce qu'il n'y a pas d'établissement à LaSalle. Si
jamais l'établissement se réalise, il y aura, par les
mécanismes habituels de nomination et de recrutement de la fonction
publique, quelqu'un qui sera recruté. À ce moment-ci, il y a un
chargé du projet de LaSalle, une personne qui va travailler en
particulier avec les groupes de population pour faire l'information et
l'animation dont on vient de parler.
M. Blank: À part cela, il y a des ingénieurs et des
architectes qui travaillent sur les plans?
M. Bédard: Présentement? Non.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre. M. le
député de Jean-Talon.
M. Rivest: J'ai une autre question. Sans doute que les
collègues ministériels du ministre dans la région de
Québec en ont parlé. C'est le Centre jeunesse de Tilly, qui vit
une situation assez bizarre depuis un certain nombre d'années. Il y a
là un conflit syndical. Je sais que le ministère des Affaires
sociales a un certain droit de regard sur cette institution, mais, tout de
même, les gens ont envoyé un mémoire au ministre de la
Justice. D'ailleurs, dans ce dossier, ce qui a été
représenté, c'est qu'il y a de la discrimination parce que c'est
un centre à sécurité maximale, enfin, à
sécurité assez serrée pour les jeunes à
Québec. On tente actuellement - il y a des droits syndicaux en cause, on
ne demande pas au ministre de se prononcer là-dessus - de faire en sorte
d'éliminer les femmes qui y travaillent. Le syndicat et certains
porte-parole se plaiqnent parce que le directeur de l'institution aurait fait
valoir que les femmes ne pouvaient pas travailler dans cette institution,
travailler à la réhabilitation des jeunes délinquants,
parce qu'elles n'auraient pas la force physique ou quelque chose comme
ça. On nous a fait ces représentations. Je les livre au ministre
sous toutes réserves parce que je n'ai pas l'autre côté de
la médaille, mais j'ai quand même indiqué aux gens que je
porterais ce dossier à l'attention du ministre. (20 h 15)
M. Bédard: Effectivement, on a déjà
porté le problème à mon attention, mais je dois vous dire
que cela relève exclusivement du ministère des Affaires sociales.
Je sais que vos collègues ont eu l'occasion d'en informer le ministre
des Affaires sociales qui a à prendre les décisions en
conséquence.
M. Rivest: D'accord, c'est un dossier particulier. Une autre
question. Vous avez parlé, je pense, dans vos notes d'introduction des
efforts que vous faites dans les prisons mêmes sur la
réhabilitation, les emplois communautaires, etc. Je voudrais, puisque le
ministre...
M. Bédard: Le travail rémunéré, etc.,
tout cela.
M. Rivest: ... a été bien sibyllin dans ses
remarques préliminaires - je ne lui en fais pas reproche - savoir quelle
est l'importance de ce programme en regard de la pratique habituelle,
c'est-à-dire en termes de budget, l'effectif possible des détenus
qui pourront être admis à ce programme. Est-ce que le ministre,
très rapidement pourrait préciser?
M. Bédard: Vous me demandez de vous préciser le
travail rémunéré ou...
M. Rivest: Le travail rémunéré ou ce que
vous appelez dans le jargon un travail communautaire. En deux mots, parce qu'il
est tard.
M. Bédard: II y a deux programmes, celui des travaux
rémunérés à l'intention des détenus qui sont
dans les établissements de détention du Québec et aussi le
programme de sentences de travaux communautaires qui a été
développé au cours des dernières années. Au niveau
des travaux rémunérés, pour vous donner une idée de
leur importance, les détenus du Québec qui ont travaillé
l'an dernier ont gagné en rémunération environ 1 300. 000
$ et au-delà de 2000 détenus ont participé à ce
programme dans les divers établissements de détention du
Québec.
M. Rivest: Sur combien de détenus pour ce programme?
M. Bédard: À peu près 30 000 personnes sont
passées dans nos établissements de détention l'an dernier.
Cependant, il faut comprendre qu'à peu près le tiers sont des
personnes prévenues et d'autres y viennent pour un très court
séjour. Ce programme s'adresse aux personnes qui séjournent
pendant un certain temps dans les établissements de
détention.
M. Rivest: Et elles sont non prévenues,
évidemment.
M. Rédard: Et non prévenues.
M. Rivest: Là-dessus, je voudrais simplennent dire...
M. Bédard: Les résultats obtenus à partir de
la législation que nous avions faite.
M. Rivest: ...qu'au Québec - je ne sais pas ce qui se fait
au niveau fédéral - au ministère, au cours des
dernières années, on a manifesté une ouverture aux
problèmes humains des détenus. Je pense bien qu'on ne peut pas
faire autrement que d'encourager le ministère à se
préoccuper de cela. Comme député, j'ai eu l'occasion de me
rendre à Orsainville au moment du référendum, de causer
avec les détenus et de voir pour la première fois ce
qu'était une institution de détention. Effectivement, c'est la
dimension première, mais, sur nos prisons, notre juridiction à ce
titre est quand même assez limitée. Moi, ce qui m'avait bien
frappé, chez ces 200 ou 300 détenus, c'était leur
caractère, ils sont très jeunes et ils sont là pour des
sentences très... Mais comme ce sont des infractions, pas seulement des
infractions, mais aussi des actes criminels qui n'ont pas la gravité
d'autres actes de ce côté-là, il me semble que le
ministère - il a déjà commencé - ne devrait
nullement hésiter à voter les budgets pour faire en sorte de
réhabiliter cette portion de notre jeunesse qui aboutit malheureusement
là... On a la chance, même si ce n'est pas sur une très
grande échelle, de faire un travail qui ait peut-être davantage de
qualité pour que cela devienne une priorité, le cas des
détenus.
M. Bédard: Dans le domaine correctionnel, depuis trois ou
quatre ans, je peux honnêtement dire que la réinsertion sociale a
constitué une préoccupation constante en ce qui me reqarde.
Au-delà du coût économique que représente une
personne en prison, il y a également le coût social qui est
énorme. Je crois que ces programmes, soit au niveau des travaux
communautaires ou encore du travail rémunéré, contribuent
et vont continuer de contribuer pour beaucoup à faciliter cette
réinsertion sociale qui est nécessaire.
Le Président (M. Desbiens): II y avait une entente pour
terminer à 20 h 15.
M. Marx: Je veux seulement...
Le Président (M. Desbiens): Une couple de questions?
M. Marx: ...poser une petite question, parce que le sous-ministre
est ici ce soir et je ne veux oas qu'il revienne demain, si ce n'est pas
nécessaire. J'ai seulement deux petites questions.
On sait qu'il y a des problèmes dans nos prisons en ce qui
concerne les droits des prisonniers. Le ministre est-il en faveur d'une charte
des droits des détenus? C'est une question assez simple, assez
précise et qui demande une réponse précise.
M. Bédard: J'ai posé plusieurs gestes dans le sens
que les droits des détenus soient respectés. Et, chose qui
n'existait pas jusqu'à maintenant, on peut dire que dans les
institutions pénitenciaires, dès l'entrée des
détenus, un travail particulier se fait concernant l'information des
détenus sur leurs droits.
M. Marx: Pour protéger davantage les droits des
détenus, est-ce que vous êtes en faveur d'une charte des droits
des détenus?
M. Bédard: Je ne crois pas qu'il y ait
nécessité d'une charte...
M. Marx: II n'y a pas de nécessité... M.
Bédard: ...spécifiquement parlant.
M. Marx: Vous n'êtes pas d'accord, donc. Est-ce que vous
êtes...
M. Bédard: Je ne vous dis pas que je ne suis pas
d'accord...
M. Marx: Si ce n'est pas nécessaire, vous n'êtes pas
d'accord. Je trouve que ça pourrait être nécessaire.
Peut-être que le ministre veut faire une étude, je ne sais pas.
L'autre façon de voir le problème, et on fait ca dans certaines
juridictions, c'est de nommer un protecteur du citoyen pour les prisons. Est-ce
que le ministre est en faveur de nommer un protecteur du citoyen pour les
prisonniers qui tombent sous sa juridiction au Québec?
M. Bédard: II n'y a pas de problème majeur. Il y a
déjà un Protecteur du citoyen qui existe pour l'ensemble de la
population du Québec. S'il faut commencer à nommer des
protecteurs du citoyen pour chaque catégorie de citoyens...
M. Rivest: Oui, mais le Protecteur du citoyen...
M. Marx: Non, mais il y a une différence. Il y des chartes
des droits des patients dans les hôpitaux...
M. Bédard: Laissez-moi terminer. Je pense que ça
devient, au bout de la ligne, très peu raisonnable. Dans ce sens
là je ne trouve pas la représentation du député de
D'Arcy McGee très raisonnable...
M. Marx: Au fédéral, par exemple, il y a un
protecteur du citoyen pour les prisonniers et je pense que ce n'est pas...
M. Bédard: Mais, nous en avons un ici, nous avons un
Protecteur du citoyen.
M. Marx: II y a des protecteurs du citoyen et il y a quelqu'un de
spécial pour les pénitenciers. Peut-être que le
sous-ministre aimerait...
M. Bédard: Quand bien même vous me diriez qu'au
fédéral il y a quelqu'un qui s'occupe d'une façon
spéciale des pénitenciers, ici au Québec, je pense que
c'est encore mieux, nous avons un Protecteur du citoyen auquel chaque citoyen
peut s'adresser s'il se croit lésé.
M. Marx: Oui, mais je pense que pour les prisons ça
prendrait quelqu'un de vraiment spécial. C'est difficile pour les
prisonniers d'avoir accès au Protecteur du citoyen.
M. Bédard: Je ne partage pas votre philosophie parce que
vous avez le genre de philosophie qui marginalise les gens et je n'ai pas
l'intention de "marginaliser"...
M. Marx: Comment ça, je "marginalise"?
M. Bédard: Laissez-moi donc terminer.
M. Marx: Vous m'accusez de quelque chose.
M. Bédard: Je n'ai pas l'intention de "marginaliser" les
détenus. Ce sont des citoyens à part entière,
placés dans des situations particulières, qui ont toute latitude
possible de faire valoir leurs droits. Je vous dis et je le
répète, que ça ne s'était jamais fait sous d'autres
gouvernements qui nous ont précédé. Mais depuis quelques
années, il y a un travail tout à fait particulier qui se fait
à la suite, d'ailleurs, d'une recommandation du Protecteur du citoyen,
de sorte que lorsqu'un détenu entre en prison il soit bien mis au
courant de tous ses droits, de tous ses devoirs aussi. Et nous le faisons.
Il y a, au bureau du Protecteur du citoyen du Québec, une
personne qui est en particulier chargée du secteur des
établissements de détention. Chaque année, au cours, je
pense, des quatre dernières années et ce sera encore vrai cette
année, le Protecteur du citoyen du Québec a consacré et
consacre un chapitre particulier de son rapport annuel à une question
qu'il étudie davantage en profondeur et qui concerne les
établissements de détention du Québec. Le Protecteur du
citoyen analyse chacune des plaintes qui lui sont déférées
et il nous semble que, comme il est situé à l'extérieur du
ministère de la Justice, sa crédibilité vis-à-vis
des détenus qui portent plainte est un peu plus grande. Au niveau du
gouvernement fédéral, le protecteur du citoyen se trouve à
l'intérieur du service correctionnel du Canada, donc le service
responsable d'administrer les pénitenciers, et il semble justement qu'il
y a des questions de crédibilité qui ne se posent pas ici au
Québec étant donné que le Protecteur du citoyen ne
relève pas directement du ministère de la Justice et est vu comme
un analyste plus impartial que s'il travaillait sous notre propre
juridiction.
M. Marx: Oui, mais le bureau du Protecteur du citoyen est
débordé. De toute façon, je retiens de ca que le ministre
est contre une charte des droits des détenus parce qu'il ne trouve pas
ca nécessaire. Il trouve que le mécanisme qui existe au
Québec est suffisant en ce qui concerne la protection des droits des
prisonniers par le bureau du Protecteur du citoyen du Québec. Donc, il
n'y a rien à faire dans ce dossier parce que ça marche assez bien
et que le ministre est satisfait.
M. Bédard: Je crois que vous êtes en mesure de vous
rendre compte que cela marche assez bien, effectivement.
M. Marx: Moi, je ne pense pas que cela marche assez bien, mais
j'essaie de résumer vos propos.
M. Bédard: II n'y a rien qui marche avec vous, mais peu
importe.
M. Rivest: II y a un aspect que je ne voudrais pas qu'on
laisse.
M. Bédard: Je voudrais peut-être corriger une
impression qu'a laissée le député de Jean-Talon tout
à l'heure concernant le travail rémunéré. Le
fédéral n'a pas de politique de travail
rémunéré au niveau des institutions.
M. Rivest: Je n'ai pas dit cela.
M. Marx: Juste une question sur le travail
rémunéré.
M. Bédard: C'est à partir d'une loi que j'ai fait
adopter ici à l'Assemblée nationale.
M. Rivest: Je voudrais dire un mot juste avant, M. le
Président. Vous "ne permettrez au moins de le mentionner, parce que j'ai
revu M. Pion, représentant des gardiens de prison, qui était ici.
Où en sont rendues les représentations qui vous sont faites?
M. Bédard: Nous sommes dans une période de
négociation. Mon collègue sait très bien que je ne ferai
pas de remarques.
M. Rivest: Vous n'avez rien? Vous n'avez aucun...?
M. Bédard: On ne commencera pas à négocier
sur la place publique. Vous êtes d'accord? À moins que, rendu dans
l'Opposition, vous n'ayez vraiment changé complètement vos
principes.
M. Rivest: On a eu des mauvais exemples.
Le Président (M. Desbiens): La commission de la justice
ajourne ses travaux jusqu'à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 20 h 27)