L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats de la Commission conjointe de la justice et des affaires sociales

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de la Commission conjointe de la justice et des affaires sociales

Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le jeudi 30 août 1973 - Vol. 13 N° 124

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi no 65 — Loi de la protection de la jeunesse


Journal des débats

 

Commission conjointe des affaires sociales et de la justice

Projet de loi no 65 Loi de la protection de la jeunesse

Séance du jeudi 30 août 1973

(Dix heures onze minutes)

M. CORNELLIER (président de la commission conjointe des affaires sociales et de la justice): A l'ordre, messieurs!

La commission conjointe des affaires sociales et de la justice reprend ce matin ses travaux. Elle doit entendre quatre mémoires. Le premier organisme appelé sera le Syndicats des fonctionnaires provinciaux. Alors, si les représentants du Syndicat des fonctionnaires provinciaux veulent bien prendre place, nous allons procéder immédiatement. Vous voudrez bien vous identifier.

Syndicats des fonctionnaires provinciaux

M. GRONDIN: M. le Président, mon nom est Henri Grondin, avocat. Je représente le Syndicat des fonctionnaires provinciaux. Je suis avec M. Marcel Ledoux et M. Camille Thomassin. M. Ledoux est vice-président du Syndicat des fonctionnaires. M. Thomassin travaille au ministère des Affaires sociales.

Nous avons présenté un mémoire qui est assez court. Vous devez l'avoir, je présume. Il a, en fait, deux pages. Nous avons, tout simplement, voulu affirmer devant la commission que nous étions solidaires de l'Association professionnelle des officiers de probation qui, elle, a soumis un mémoire assez élaboré. Nos principales revendications portent sur le fait que le statut et les fonctions des agents de probation ne sont pas définis dans la loi. On n'en parle nulle part.

Il y a aussi le fait qu'on considère que la loi n'insiste pas suffisamment sur le rôle de réhabilitation et de surveillance du jeune délinquant. Nous croyons également que le transfert de ce service du ministère des Affaires sociales au ministère de la Justice est susceptible d'apporter une philosophie différente qui ferait en sorte que les gens qui s'occuperaient des jeunes délinquants pourraient être portés à juger et à agir comme s'il s'agissait de délinquants adultes. C'est contre ça que nous en avons. Nous croyons véritablement qu'on devrait faire une distinction plus grande, en somme, entre la protection des jeunes délinquants et la protection des délinquants adultes.

En somme, c'est toute cette philosophie du projet de loi que nous n'aimons pas. Encore une fois, nous vous référons au mémoire de l'Association professionnelle des agents de probation qui, elle, a repris, en fait, beaucoup plus en détail chacune des idées que nous émettons ce matin.

Je ne sais pas si M. Ledoux veut ajouter quelque chose.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, Me Grondin. J'inviterais l'honorable ministre des Affaires sociales à faire des commentaires.

M. CASTONGUAY: M. le Président, je voudrais remercier les représentants du Syndicat des fonctionnaires pour ce mémoire. Simplement à titre d'information, est-ce que je pourrais leur demander s'ils ont assisté à la séance que nous avons eue au printemps pour discuter du mémoire des officiers de probation eux-mêmes?

M. GRONDIN : M. le ministre, parmi les gens qui sont ici ce matin, aucun n'y a assisté.

M. CASTONGUAY: Ah! bon.

M. GRONDIN: Nous ne savons pas si d'autres personnes effectivement y étaient. Evidemment, il y a eu des changements d'effectifs au Syndicat des fonctionnaires provinciaux depuis un an, et il est possible que d'anciens officiers y aient assisté, mais parmi les trois qui sont ici ce matin, il n'y en a pas.

M. CASTONGUAY: Nous avions eu à cette occasion une assez longue discussion portant sur le rôle de l'agent de probation, sur la clarification de la tâche de l'agent de probation, sur le point aussi que vous avez mentionné, savoir à quel endroit devrait se situer le service de protection de la jeunesse, sur le service de probation dans les structures et sur le problème de la décentralisation, de la régionalisation.

Quant à moi, étant donné cette longue discussion que nous avions eue et qui est rapportée d'ailleurs dans le journal des Débats, voici ma première question, quitte à revenir par la suite lorsque les autres membres auront posé leurs propres questions: Lorsque vous parlez de la nécessité de distinguer entre les jeunes délinquants et les délinquants adultes, pourriez-vous me donner un peu plus de détails? Si l'on distingue, c'est donc signe que l'on va prendre une approche quelque peu différente, sinon on ne ferait pas de distinction.

J'aimerais que vous nous donniez quelques indications sur les différentes approches qui devraient être prises selon qu'il s'agit d'un jeune délinquant ou de ce que vous qualifiez un jeune délinquant adulte. En second lieu, à quel moment va-t-on faire cette distinction? Est-ce qu'on peut la faire à partir d'une limite d'âge qui est fixée, à partir — comme ça a été suggéré hier matin — d'un degré d'avancement au plan scolaire ou s'il y aurait une autre possibilité?

M. GRONDIN: Je vous avoue, M. le ministre, que la question que vous posez là est fort complexe, mais je pense que c'est surtout comme philosophie de travail, si on peut dire.

L'officier de probation qui va avoir à aider un jeune. Il me semble qu'il doit le traiter peut-être un peu différemment que lorsqu'il s'agit d'un adulte.

C'est dans ce sens-là. Il est peut-être difficile d'expliquer exactement où se fait la limite entre un délinquant adulte et un jeune délinquant. La loi fait une distinction à 18 ans. J'avoue que peut-être à 18 ans des gens sont déjà adultes, d'autres ne le sont pas encore, mais la loi fait cette distinction à 18 ans. Jusqu'à présent, il y avait le ministère des Affaires sociales qui, lui, s'occupait des jeunes et il y avait un autre service différent pour les autres personnes. On se demande un peu pourquoi vous voulez mettre tout cela ensemble, fusionner tout cela sous le chapeau du ministère de la Justice. C'est, en somme, cela qui inquiète un peu les gens. Ils disent: Pour quelle raison veut-on changer cela? Est-ce qu'on veut enlever une certaine philosophie de la protection qu'on doit apporter aux jeunes? C'est cela qui inquiète mes clients.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Est-ce qu'il y a d'autres questions de la part des membres de la commission? Vous, M. Grondin, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. GRONDIN: Est-ce que je pourrais savoir si l'Association des officiers de probation est effectivement venue devant la commission ou si elle doit venir aujourd'hui?

M. CASTONGUAY: Nous avons eu... Attendez un peu, j'ai la liste.

M. GRONDIN: II y a un long mémoire qui...

M. CASTONGUAY: L'Association des officiers de probation du Québec.

M. GRONDIN: Oui.

M. CASTONGUAY: Nous les avons rencontrés, je ne me souviens plus, malheureusement, de la date précise, mais je sais que c'était au printemps et que nous avions eu une longue séance, un soir.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, les officiers de probation sont venus devant la commission parlementaire le 5 avril 1973 et on trouvera cela dans la quatrième séance de la commission. Ils ont fait un long témoignage devant la commission parlementaire.

M. GRONDIN: C'est cela. En somme, mes clients reprennent ce qu'il y avait dans le long mémoire que j'ai ici, le mémoire jaune. Je n'ai pas voulu répéter tout cela ce matin, vous les avez probablement entendus.

M. CLOUTIER (Montmagny): D'ailleurs c'est la raison, M. le Président, pour laquelle nous n'avons pas tellement de questions à poser aux représentants du syndicat, non pas parce que ce n'est pas intéressant, leur présence ici, mais parce qu'ils viennent ici appuyer la position prise par les officiers de probation. Alors, étant donné que nous avons eu un échange assez long avec les officiers de probation, je pense qu'on peut assumer qu'ils endossent les réponses qu'ils ont données.

M. GRONDIN: C'est ça, on endosse, en somme, le mémoire de l'association. Merci.

M. CASTONGUAY: Je ne sais pas si vous endossez nos réponses à certaines des questions qui avaient été posées.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors je vous remercie, M. Grondin, ainsi que vos collègues. J'inviterais maintenant l'Association générale des étudiants en psychoéducation à bien vouloir prendre place.

Association générale des étudiants en psychoéducation

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le porte-parole officiel de l'association voudra bien s'identifier et procéder à la présentation de son mémoire.

M. JOLY: Mon nom est Gaston Joly, président de l'Association des étudiants en psychoéducation à l'Université de Montréal. Il y a une première chose que j'aimerais dire avant la présentation de ce mémoire, c'est rappeler que ce mémoire a été préparé à la hâte, au mois de janvier, au moment de la rentrée scolaire, ce qui fait qu'il y a peut-être des éléments là-dedans qui sont sujets à discussion et même qu'on voudrait peut-être présenter autrement aujourd'hui.

La chose qui nous semblait importante à ce moment-là, quand nous avons décidé, les étudiants en psychoéducation à l'Université de Montréal, de rédiger un mémoire là-dessus, compte tenu du sérieux qui nous apparaissait dans le bill, de venir manifester d'abord notre accord sur plusieurs points de ce bill et aussi de dire comment nous, futurs professionnels qui serons sur le marché du travail dans un an, deux ans, ou trois ans, nous nous sentions concernés par certains aspects de ce bill.

Tout cela pour vous dire qu'on ne se présente pas ici comme des spécialistes d'une profession de la psychoéducation, mais comme de futurs professionnels qui envisagent dès à présent, à travers les stages qu'on peut faire dans les milieux de stage à l'intérieur de nos études régulières, comment on peut actuellement voir en quoi nous sommes concernés par ce bill.

Je ne reprendrai pas les éléments que nous avons soulignés dans notre mémoire, sauf peut-

être deux aspects. Un premier que nous soulignons au point de départ, dans notre introduction et à la page suivante également, à la page 2 dans le premier point, en disant qu'à la lecture de ce bill, il nous paraissait important à nous, de prévoir une collaboration entre les trois ministères qui nous semblaient mis en cause à l'intérieur de ce qu'on appelle la protection de la jeunesse, soit le ministère des Affaires sociales, de la Justice et de l'Education. C'est peut-être un énoncé bien général, mais, à travers les expériences que chacun et chacune d'entre nous, les étudiants, avons vécues soit au niveau des CEGEP ou au niveau des écoles secondaires polyvalentes, on se rendait compte qu'il est souvent important d'avoir non seulement des milieux qui soient plus humanisants, mais aussi de voir que quand on se frotte un peu plus au type de jeunes avec lesquels on est appelé à travailler, comment il y a des implications, à un moment donné, qui relèvent soit d'un ministère ou de l'autre. Et il nous apparaissait, en tous les cas, qu'à l'intérieur du bill, c'était une préoccupation qu'on y voyait et qu'on voulait souligner, nous, comme étudiants, comme étant extrêmement importante et en particulier, les aspects qui concernent le ministère de la Justice et des Affaires sociales. On semblait un peu perdu face à certaines choses qui étaient affirmées là-dedans et on se demandait un peu qu'est-ce que pouvait vouloir dire une collaboration entre ces différents ministères pour toujours le bien-être de l'enfant auprès de qui on travaille.

Une chose que je viens de souligner à l'instant et qu'on soulignait dans notre conclusion à ce moment-là, c'était d'assurer le plus possible, à l'intérieur d'un projet de loi comme celui-ci, des structures qui soient humanisantes pour l'enfant et éviter peut-être des choses dont souffrent actuellement des jeunes, soit dans les milieux scolaires qu'on connaît et à l'intérieur desquels plusieurs d'entre nous ont passé, que ce soit les CEGEP ou les écoles secondaires.

Disons que ce sont des éléments que j'aimerais actuellement souligner pour la présentation de notre rapport et on se soumet à vos questions.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: En premier lieu, je voudrais remercier l'association et ses représentants de nous avoir soumis ce rapport et de nous avoir indiqué leur intérêt dans ce projet de loi et les problèmes qu'il touche. A la lecture du rapport, je pense qu'il y a un aspect qui ne ressort pas et qui peut apporter certains éléments dans la formulation de réponses qui sont sollicitées dans ce mémoire. C'est celui de la protection des droits de l'enfant. On se questionne à un certain endroit, à la page 3, sur le rôle de l'Etat, et on dit qu'il semble important d'insister pour que l'Etat ne se substitue pas aux corps intermédiaires professionnels. Il est bien clair que, dans certains aspects de l'activité professionnelle, que ce soit des aspects syndicaux, que ce soit l'aspect du contrôle de l'exercice d'une profession, nous avons démontré, je pense, assez clairement, que nous faisions justement ces distinctions. Toutefois, il ne faut pas oublier ici que nous traitons d'enfants qui ont besoin de protection, nous traitons également de délinquants et le problème des droits de ces enfants est assez important. D'ailleurs, plusieurs organismes ont souligné devant la commission leur désir de voir des éléments d'une charte des droits de l'enfant inscrits dans ce projet de loi.

Je pense qu'il est assez important de se rappeler, en premier lieu, que ce projet de loi vise, dans une large mesure, cette protection des droits de l'enfant et, après ça, vise à assurer la mise sur pied des mécanismes nécessaires pour que ces droits soient respectés et, ensuite, que la protection soit apportée à l'enfant. Nous sommes bien conscients du fait qu'il est important d'éviter des structures trop rigides. Je pense que, sur ce plan, le projet de loi méritera d'être précisé de telle sorte que, par exemple, le service de protection de l'enfance n'apparaisse pas comme étant un service unique qui oeuvre à distance au niveau provincial. Je pense que cette préoccupation, qui est ressortie de bien des mémoires, nous la partageons. En fait, le texte du projet de loi tel que rédigé donne une fausse impression sur ce plan et doit être précisé.

Ceci étant dit, je pense aussi qu'il y a certains autres aspects.

Lorsqu'on nous demande de bien indiquer que le Service de protection de la jeunesse précise qu'il s'agit bien de professionnels, nous devrions ajouter aussi que, dans les expertises, on puisse inclure un rapport d'un examen psychiatrique. Nous n'avons justement pas voulu fermer la porte à un type d'expertise par rapport à un autre. Nous n'avons pas voulu préciser les types d'expertises. Je ne crois pas qu'il nous appartienne de le faire. Il s'agit plutôt de donner le cadre général ou les indications générales quant aux étapes qui doivent être franchies: constitution d'un dossier, nécessité d'expertises, sans préciser lesquelles.

De la même manière, quant au personnel du Service de protection, nous n'avons pas voulu faire des énumérations exhaustives. Nous avons voulu plutôt expliquer qu'il devrait s'agir de personnel représentant diverses disciplines. On sait, justement dans ces secteurs où l'évolution a été assez rapide, les dangers qu'il y aurait de vouloir donner une liste limitative des différents types de personnel, puisqu'un peut imaginer que, dans quelques années, cette liste serait plus ou moins adéquate, étant donné la création de nouveaux groupements ou de nouvelles techniques ou encore de nouvelles approches dans ce secteur de la rééducation de l'enfance en général.

Alors, cela aussi, je pense, mérite d'être précisé parce que le mémoire soulève un certain nombre de questions reliées à ces aspects. Quant aux questions, pour le moment, j'aimerais attendre pour voir si les autres membres de la commission en ont à poser. Je voulais apporter ces quelques précisions, pour le moment, quant à des interrogations que vous soulevez dans votre mémoire.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): M. le Président, je voudrais demander aux étudiants quel est le statut professionnel exact du psychoéducateur. Est-ce qu'il travaille surtout en établissement une fois ses études terminées? Voulez-vous nous préciser un peu la sphère d'activités qui est la vôtre et les responsabilités qui sont les vôtres? Vous parlez beaucoup du statut professionnel, vous insistez, vous faites même des suggestions quant à la façon dont devrait être rédigé le projet de loi.

M. JOLY: Au risque d'oublier des choses, parce qu'actuellement on n'est pas encore des professionnels, j'aimerais, tout juste avant de répondre à votre question, préciser que, quand on écrivait ce mémoire, on faisait référence aux expériences que nous faisons comme étudiants dans des milieux de rééducation qui sont bien précis, qui sont des milieux accrédités par l'école de psychoéducation de l'Université de Montréal.

Cela signifie que nous avons accès à un type de travail que remplit le psychoéducateur actuellement et un type bien précis qui se trouve être le travail de rééducation auprès d'enfants et d'adolescents ou adolescentes en milieu d'internat. C'est essentiellement le rôle d'un psychoéducateur que de travailler à la rééducation d'enfants ou d'adolescents. Maintenant, il y en a qui travaillent en internat, il y en a d'autres qui vont travailler dans des milieux où l'enfant n'est pas interne. Il y a aussi des psychoéducateurs qui vont travailler dans le domaine scolaire, en particulier à la CECM, à Montréal. Il y a une forte équipe de psychoéducateurs qui travaillent dans des écoles et des régions données, où il y a des classes spéciales organisées pour des enfants qui ont besoin de soins psychoéducatifs; ce sont des traitements qui regardent non seulement le rattrapage scolaire mais aussi l'équilibre affectif dans leur vie personnelle.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je voulais vous situer par rapport à tout l'ensemble de cette législation, le milieu dans lequel vous oeuvrez. Vous avez des contacts plus étroits avec le ministère de l'Education qu'avec les deux autres ministères.

M. JOLY: Non, c'est-à-dire que les maisons dans lesquelles nous oeuvrons actuellement — au risque de me tromper je peux dire cela — relèvent habituellement du ministère des Affaires sociales, sauf les psychoéducateurs qui peuvent travailler dans le domaine de la CECM, par exemple, à Montréal, où là, ils relèvent du ministère de l'Education.

M. CLOUTIER (Montmagny): C'est votre expérience professionnelle qui vous amène à vous poser des questions sur la limite d'âge que contient la loi, quant à la limite de 18 ans, le processus de rééducation qui ne durerait qu'un maximum de deux ans? Vous vous posez des questions là-dessus?

M. JOLY: J'aimerais préciser là-dessus que ce n'est pas notre expérience de professionnels, mais c'est notre expérience d'étudiants qui, en stage, travaillent dans des milieux bien précis.

M. CLOUTIER (Montmagny): Oui, j'ai dit l'expérience professionnelle, mais de la profession dans laquelle vous allez entrer. Vous êtes des étudiants. Vous allez entrer dans cette profession. C'est l'expérience globale de toute la profession que je voulais dire, des professionnels qui sont là, même à vous n'y êtes pas encore entrés.

M. JOLY: Je ne voudrais pas qu'on parle au nom des professionnels de la psychoéducation. Je pense qu'ils ont leur mot à dire. Ce qu'on veut dire c'est que je pense qu'il serait peut-être plus clair, pour nous, travaillant dans des institutions comme à Montréal, Boscoville, par exemple, où moi, personnellement, j'ai fait mes stages et où je me suis rendu compte qu'un traitement peut très bien, pour faire allusion à la remarque qu'on fait dans notre rapport, se faire en moins de deux ans, mais peut très bien se faire en plus de deux ans. C'est un peu dans cette optique qu'on disait: c'est arbitraire dans le sens où cela peut être moins, comme cela peut être plus de deux ans. Je crois qu'à ce niveau, la formulation est un peu ambiguë en disant: c'est nécessairement plus que deux ans. Cela peut être moins, comme cela peut être plus. C'est le terme de deux ans qui pouvait créer certaines difficultés pour nous.

M. CASTONGUAY: Je veux simplement ajouter ici que lorsque cette limite de deux ans a été inscrite, c'était justement à partir de la considération générale que je faisais au départ de la protection des droits de l'enfant. Et s'il y a nécessité de poursuivre au-delà de deux ans, rn croit qu'il devrait y avoir une nouvelle décision de la cour. On ne veut pas, par ces deux ans, indiquer que c'est le terme maximum et que tout traitement, à l'intérieur d'une telle période, doit être terminé ou encore pourrait s'avérer inutile s'il durait plus longtemps.

C'est pour que ça ne se prolonge pas au-delà d'une telle période sans qu'il y ait une nouvelle décision.

M. PAUL: Si le ministre permet, ce terme de deux ans est le maximum de l'ordonnance du juge pour le placement de l'enfant et non pas quant à sa réhabilitation ou à son traitement, si nécessaire.

M. CASTONGUAY: C'est ça.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Saint-Laurent.

M. PEARSON: Rien qu'une demande de renseignement. Vous dites que vous ne pouvez pas parler au nom des psychoéducateurs professionnels. Est-ce que votre mémoire a été fait en collaboration? Est-ce que vous avez consulté les psychoéducateurs professionnels? Est-ce qu'il y a eu des discussions sur les prises de position que vous prenez? Ou bien est-ce qu'eux-mêmes ont senti le besoin de préparer un mémoire?

M. JOLY: On a eu des échanges avec certains psychoéducateurs professionnels pour préparer ce mémoire, mais le mémoire tel qu'il est présenté est d'abord et avant tout le résultat d'un échange entre les étudiants en psychoéducation. Je crois —je ne sais pas si je me trompe — que les professionnels en psychoéducation ont aussi présenté un mémoire à la commission. Je ne pourrais pas exactement vous renseigner là-dessus.

M. PEARSON: En somme, vous avez l'impression que leurs prises de position ne seraient pas très éloignées de votre mémoire. Ce serait sensiblement...

M. JOLY: Je ne crois pas que ce soit très éloigné.

LE PRESIDENT (M. CorneUier): Le député de Dorchester.

M. GUAY: J'aurais une question à ajouter. Vous faites état des organismes qui existent en France. A la page 3 de votre mémoire, vous dites: "...il existe des organismes à initiative privée soutenus par l'Etat mais dirigés par des professionnels." Est-ce que ce n'est pas ce qui existe un peu ici? Est-ce que vous pourriez nous donner la différence entre ces organismes, nous dire de quelle façon ils travaillent comparativement à ce qui existe déjà ici au Québec?

M. JOLY: L'idée, quand on a souligné cette chose, n'était pas pour nous de faire des comparaisons avec ce qui existe ou ce qui n'existerait pas ici au Québec. C'était pour apporter une expérience où.en France, il y a des organismes qui sont directement gérés par l'Etat et d'autres organismes dirigés par des professionnels.

Les contacts qu'on a eus par certains de nos professeurs qui sont venus nous donner des conférences à Montréal et aussi les lectures qu'on peut faire des ouvrages qu'ils publient nous font nous rendre compte que finalement le travail peut-être le plus progressiste se fait dans ces institutions où les professionnels ont plus de latitude.

C'est un peu un souhait similaire qu'on fait. A ce moment, on ne s'est pas mis à regarder de façon très précise la loi telle qu'elle nous est présentée pour voir si elle permettait ou si elle ne permettait pas ça. C'était plutôt pour faire allusion à un type de chose qui existe dans un autre pays et montrer comment un travail professionnel peut être mené sérieusement à l'intérieur et en collaboration avec un gouvernement.

M. GUAY: La loi actuelle telle qu'elle est présentée, permettrait-elle — je vous pose la question bien directement — d'avoir ces organismes qui fonctionneraient de la même façon?

M. JOLY: Je pense qu'il y en a actuellement des organismes qui existent comme ça au Québec. Je ne sais pas si M. le ministre ...

M. CASTONGUAY: Je pourrais peut-être attirer l'attention sur l'article 11 du projet de loi et faire référence aux articles 5 et suivants qui sont sur le service de protection de la jeunesse, qui peut être décentralisé. Regardez le projet de loi, on ne dit pas si on doit tenir des bureaux régionaux, oui ou non, et nous avons au ministère une structure régionalisée.

Simplement dans le domaine de l'aide sociale, nous avons 140 bureaux. Alors, on dit à l'article 7: "Lorsqu'un employé d'un centre de services sociaux, un fonctionnaire ou employé de la cour, ou un fonctionnaire du service a connaissance ou est informé de l'existence d'une situation décrite à l'article 4, il en informe le directeur qui procède alors à une analyse". Alors, cela c'est préalable à l'action de la cour ou c'est pour déterminer ce qui peut être fait au départ. Est-ce que l'enfant doit être déféré à la cour? Est-ce qu'il doit être dirigé vers un centre de services sociaux? S'il est dirigé vers la cour, le juge peut éventuellement décider que c'est le centre de services sociaux qui doit prendre action, par exemple un placement en foyer nourricier, ou encore s'assurer que la famille va corriger les aspects qui peuvent mettre en danger le bon développement de l'enfant, sa sécurité, etc.

Le centre de services sociaux, on voit à l'article 11 quelle est sa fonction principale. On dit que, lorsqu'un dossier lui est transmis, il prend les mesures nécessaires pour assurer à l'enfant les services, la surveillance, l'éducation, les soins et les conseils propres à favoriser la sécurité, le développement et la santé de l'enfant. Alors, il peut faire appel à toute une gamme de services. Il est important aussi de se rappeler que les centres de services sociaux sont les agences de service social qui sont en voie

d'être regroupées dans des centres de services sociaux. Ces centres de services sociaux ne sont pas des émanations du ministère, ce sont des corporations où les parents, les usagers des services, les professionnels, etc. sont représentés. C'est la structure qu'on retrouve dans la loi 65 et ce n'est donc pas un organisme gouvernemental mais plutôt un organisme de l'extérieur. A l'intérieur de ces centres, les professionnels constituent un conseil des professionnels qui doit se préoccuper des aspects professionnels de l'organisation des services donnés par le centre de services sociaux. En plus, une fois que le centre de services sociaux a fait son propre travail, il peut diriger l'enfant vers des services d'éducation spécialisés, il peut le diriger vers des services de santé. Il y a toute une gamme de possibilités. Il n'est pas dit ici que c'est lui qui prend en main nécessairement, bien au contraire, les mesures qui doivent être prises. Alors, je voulais souligner ceci, pour ne pas donner l'impression que, par la Loi de la protection de la jeunesse, on veuille créer une nouvelle structure pour assurer les services qui soit une structure purement gouvernementale, bien au contraire. On reconnaît dans tous ces autres services auxquels j'ai fait allusion, dont on retrouve le cadre de fonctionnement dans la loi 65, l'apport de tous ceux qui peuvent apporter une contribution.

M. GUAY: Cela n'exclut aucunement des organismes à initiative privée...

M. CASTONGUAY: Pas du tout.

M. GUAY: ... même soutenus par l'Etat et à un moment donné dirigés par des professionnels qui pourraient oeuvrer dans le domaine s'ils ont un service à rendre.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Sainte-Marie.

M.TREMBLAY (Sainte-Marie): D'abord, je vous félicite de votre mémoire, qui est très technique. Je voudrais tout simplement avoir une explication. A la page 6 de votre mémoire, vous demandez qu'à l'article 4 du projet de loi on enlève l'adjectif "majeure" à la première ligne de l'article pour que le jeune puisse, dans certains cas, demander la protection de la cour. Souvent, c'est lui qui sait le mieux comment il est utilisé ou exploité. L'article 4 dit: "Toute personne majeure, y compris tout juge d'une cour de justice au Québec, doit faire part au directeur..." Je ne vous lirai pas tout l'article, vous l'avez probablement lu. Je ne vois pas en quoi le mot "majeure" peut enlever là-dedans le droit aux jeunes de demander la protection de la cour. Je ne sais pas si vous pourriez expliquer davantage votre demande d'amendement à l'article 4.

M. JOLY: Dans cette optique, ce qu'on voulait souligner avec cet article-là, c'est qu'on ne voyait pas comment, en y mettant le mot "majeure", un jeune qui n'est pas majeur, par exemple, pouvait intervenir à ce niveau-là. Je ne sais pas s'il y a des explications qui peuvent nous être transmises.

M.PAUL: II ne faut pas oublier dans le même article, à l'article 3, l'obligation qu'impose le législateur à un majeur, ce qu'il ne peut pas faire à l'endroit d'un mineur.

M. JOLY: Ah bon! Maintenant, s'il y a quelque chose, on est clair là-dessus, mais est-ce qu'il y a quelque chose dans la loi qui prévoit qu'un mineur peut, à un moment donné, loger une plainte ou quelque chose comme ça au sujet d'une certaine situation?

M. CASTONGUAY: II n'y a rien qui l'empêche.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Et le mot "majeure" à l'article 4, n'empêche pas le jeune de demander la protection de la cour.

M. CASTONGUAY: Pas du tout.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Maskinongé.

M PAUL: M. Joly, à la page 2 de votre mémoire, vous signalez la nécessité qu'il y aurait de faire entrer un troisième ministère dans l'application de cette loi. Vous nous parlez du rôle du ministère de l'Education. En quoi consisterait d'après vous, le rôle positif du ministère de l'Education en regard de la loi 65?

M. JOLY: Je pense que si on regarde très bien le texte, on ne propose pas, à moins que je me trompe sur les intentions des étudiants avec qui nous l'avons écrit, d'intégrer le ministère de l'Education dans ce projet de loi. Ce qu'il nous apparaissait important de souligner, nous, c'est que dans les milieux où on travaille, quand on travaille dans un milieu scolaire, par exemple, il y a des incidences de notre travail qui relèvent en dernier lieu souvent du ministère de l'Education. J'apportais l'exemple tantôt de gens qui travaillent au niveau de la CECM, des psychoéducateurs. Il est inévitable qu'il y ait des liens à faire avec tout le système d'éducation qui existe actuellement et la façon aussi dont se fait la rééducation et l'enseignement dans un processus de rééducation. Alors, à certains moments, on se rend compte qu'il y a un besoin pour nous, au niveau d'un travail concret, que tous ces éléments soient imbriqués ensemble.

Cela ne veut pas dire qu'on demande que le ministère de l'Education soit introduit dans la loi, mais pour nous, il nous semble important à ce niveau, quand on fait un travail concret avec les enfants, qu'il y ait des choses prévues là-dedans, des ententes interministérielles, je ne

le sais pas, pour permettre un travail plus adéquat, parce que travaillant en éducation avec un enfant, il a souvent un rythme d'étude différent, puis il y a aussi certaines conditions qui peuvent être mises à son niveau, au type d'enseignement qu'on lui apporte.

Alors, à ce moment, que ça puisse être facilité par un travail conjoint entre les différents ministères, on trouve que ce serait heureux.

M. PAUL: II ne faudrait pas que vous ayez l'impression qu'il y a une étanchéité à toute épreuve entre les ministères. Il y a cet échange constant d'informations, de recommandations de la part des ministères, avec un ministère concerné. Le point de vue que vous soulevez mérite notre attention et spécialement dans le but de corriger certains cas d'exception. Même si les exceptions deviennent, par leur addition, assez nombreuses, je pense que c'est un point qui devrait retenir notre attention.

M. CASTONGUAY: Est-ce que le député me permettrait un commentaire justement sur ce point?

M. PAUL: Oui.

M. CASTONGUAY: Etant donné que cette même remarque nous a été faite à l'occasion de mémoires antérieurs, nous avons repris la question avec les responsables du ministère de l'Education. Une raison pour laquelle on ne voyait aucune référence à ce ministère dans le projet de loi, c'est que les lois générales du ministère de l'Education font obligation au ministère d'apporter les services d'éducation de toute nature aux enfants. Enfin, j'avais déjà fait état, à l'occasion soit de l'étude des crédits du ministère ici ou de ce projet de loi, que nous avions un travail conjoint en cours qui a été amorcé, je pense, en 1967-1968 pour faire la révision des besoins en services d'éducation, les besoins en éducation des enfants dans les diverses institutions et pour tous les enfants qu'on pourrait mettre dans la grande classe d'enfants exceptionnels. Il y a eu des progrès assez sensibles d'effectués.

D ailleurs, pour ceux qui ont fait la visite de deux des institutions à Québec, nous avons constaté que les enfants, de façon générale, allaient soit à l'école publique ou à l'école de la commission scolaire de l'endroit.

Pour ceux qui n'étaient pas en mesure de le faire, des services d'éducation spécifiques étaient organisés sur place, jusqu'au moment où ils sont prêts à aller dans les services d'éducation pour l'ensemble des étudiants.

De toute façon, malgré ce travail, malgré les lois générales, nous avons examiné la possibilité, dans ce projet de loi, de faire référence plus spécifiquement à cette obligation d'apporter des services d'éducation ou de voir à l'éducation des enfants, de telle sorte que cette fonction qui est très importante ressorte également, même si elle est déjà couverte par les lois générales dans le domaine de l'éducation.

M. GUAY: J'aurais une question à ajouter, si vous me le permettez, M. le Président. C'est une question que je pose à tous les organismes qui viennent. Croyez-vous que c'est nécessaire ou essentiel, pour faciliter l'application d'une loi, qu'une charte des droits de l'enfant soit constituée?

M. JOLY: Je pense que, tantôt, quelqu'un a souligné cette question. Je pense que c'est M. le ministre qui soulignait cela au début. Je vous avoue que, de notre côté, il n'y a pas eu, au niveau des étudiants, de réflexions de façon bien précise sur cette question, d'une charte des droits de l'enfant.

M. GUAY: Maintenant, seriez-vous disposés à collaborer comme groupe, advenant le cas où une charte des droits de l'enfant devrait être élaborée?

M. JOLY: Sûrement. M. GUAY: Merci

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je remercie M. Joly de la présentation de son mémoire et de s'être prêté à ce dialogue. Cependant, je suis sûr que les membres de la commission apprécieraient beaucoup connaître le nom des personnes qui vous accompagnent, M. Joly.

MLLE SIGOUIN: Rachèle Sigouin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mlle Sigouin.

MLLE GAGNON: Jacqueline Gagnon.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mes hommages, Mlle Gagnon.

Est-ce que vous avez quelque chose à ajouter, M. Joly?

M. JOLY: Non, moi, je désirerais remercier les membres de la commission et tout le monde ici. Je pense que, pour nous autres, c'est une expérience un peu neuve que de venir comme étudiants à une commission parlementaire. C'est un peu stressant d'arriver devant tout cet appareil pour une première fois, mais je dois vous dire — c'est une impression bien personnelle — que je suis agréablement satisfait de cette rencontre, et j'en remercie tout le monde.

LE PRESIDENT (M. Croisetière): Merci bien, M. Joly.

Centre d'orientation, service psychologique

LE PRESIDENT (M. Croisetière): J'inviterais maintenant l'organisme: Centre d'orientation, Service psychologique.

MME GUINDON: Jeannine Guindon, directeur du Centre d'orientation, et M. Jean Métivier, psychologue spécialisé dans la réadaptation des enfants et des adolescents.

Tel qu'on l'a soumis dans notre mémoire, on a senti le besoin — tout l'organisme du Centre d'orientation, puisqu'on est au moins une quarantaine de professionnels d'une équipe multidisciplinaire qui nous penchons depuis une trentaine d'années sur ce travail dans la province — de véritablement aider l'enfance et l'adolescence inadaptées.

Je voudrais un peu souligner la composition de notre équipe multidisciplinaire puisque, dans le projet de loi, on parle d'équipe multidisciplinaire. Pour avoir dirigé ce centre depuis 27 ans, je sais que ce n'est pas facile de créer une équipe multidisciplinaire. Chez nous, on a toute cette équipe qui travaille ensemble: psychologues — puisqu'ils sont encore plus nombreux; on a 22 psychologues à temps complet — psychoéducateurs, psychiatres, psychanalystes, pédiatres et travailleurs sociaux. Toutes ces professions sont véritablement très préoccupées par la Loi de protection de la jeunesse et elles sont heureuses de voir qu'une telle loi est proposée.

Mais aussi ils aiment apporter certains points de vue qu'ils trouvent important de souligner pour que cette loi aide véritablement l'enfance inadaptée. Je ne répéterai pas ce qu'il y a dans mon mémoire, mais j'aimerais quand même souligner d'abord la composition de l'équipe multidisciplinaire. Ayant fondé la profession de psychoéducateur au centre d'orientation même, nécessairement on arrivera à un article où on demandera qu'on mette "professionnel" au lieu d'énumérer strictement certaines professions et, après ça, de mettre "fonctionnaire". On reviendra à ça un peu plus tard. J'aimerais souligner aussi le choix judicieux des mesures à appliquer à l'enfant dans le besoin et les critères de sélection du personnel. Vous savez, souvent, on parle de professionnels. Mais tous les professionnels, qu'ils soient psychologues, qu'ils soient psychiatres, ne sont pas formés auprès des enfants. Ce n'est pas par leur formation universitaire qu'ils ont une spécialisation auprès des enfants. J'aimerais souligner que ce personnel-là devrait être spécialisé et expérimenté dans le travail auprès des enfants avant qu'il ait les responsabilités qu'on lui donnera comme équipe multidisciplinaire. Je voudrais aussi souligner comment on croit que c'est vraiment à l'Etat d'assumer la responsabilité de fournir toute une gamme de ressources nécessaires à sa protection.

Pour avoir voyagé et avoir été appelée en consultation dans plusieurs pays, je crois, quand même, que notre province est assez bien pourvue en institutions. Les efforts devront porter plutôt sur la qualité du travail fait dans les institutions, sur la rénovation et sur la formation du personnel dans nos institutions. Il est sûr qu'il va falloir qu'il y ait des ressources nouvelles, mais il faudra surtout rénover les ressources actuelles pour qu'il y ait une gamme véritable de ressources dont les jeunes auraient besoin. Parce que, même si l'équipe multidisciplinaire pose un diagnostic, dit, par exemple, ce dont les jeunes auront besoin, si véritablement ça reste dans les dossiers ou même si on les confie à un officier ou à un agent de protection, le travail ne se fait pas à cause, souvent, du manque de formation du personnel en cours d'emploi. Je dis bien "en cours d'emploi" parce que, même si je dirige une école universitaire, je crois que les universités ne peuvent pas apporter ce qui est nécessaire aux professionnels qui sont dans la pratique auprès des enfants. Il faut qu'il y ait une formation en cours d'emploi.

J'ai aussi mentionné les structures administratives. Je n'ai pas mentionné de ministère, mais je crois que les structures administratives qui vont découler de cette loi devraient favoriser le contact humain avec les jeunes. Ce n'est que par ce contact humain qu'on peut penser à leur rééducation. Il faudra que les structures administratives soient faites de telle façon qu'on puisse véritablement penser à la réhabilitation, à la réadaptation et à la rééducation de ces enfants. Quant au ministère, c'est sûr que j'ai une préférence, même si je ne l'ai pas mentionné.

En reprenant quelques articles de la loi, j'ai souligné certains points et j'aimerais repasser les quelques articles où j'ai souligné certains points. Quand je dis je, je devrais dire que l'équipe a souligné ça.

D'abord, à l'article 3, on aimerait ajouter, "en aidant le milieu familial", pour retourner l'enfant dans son milieu naturel. Actuellement, quand on sait que le taux de divorce atteint ce que la Californie a actuellement, je crois que le milieu naturel est très difficilement celui qui peut toujours aider l'enfant. Mais ce milieu devrait être aidé.

Cela ne veut pas dire qu'on doive les envoyer dans les maisons de rééducation nécessairement. Il faudrait s'organiser pour aider ce milieu à fournir l'assistance éducative nécessaire. Parce que nos conditions sociales n'aident absolument pas la famille à donner cette assistance éducative à nos jeunes, actuellement.

Dans l'article 4, on avait enlevé "majeure". Comme je le soulignais, c'est surtout à cause des cas d'inceste; il y a 28 p.c. de la population dans nos maisons de rééducation pour jeunes délinquantes qui sont des cas d'inceste avec le père. A ce moment-là, il faut que ce soit l'enfant qui demande la protection. Mais j'ai compris que cela n'empêche pas cela. Mais je crois que même des soeurs plus vieilles, qui n'ont pas 18 ans, peuvent rapporter des cas d'inceste avec des jeunes. C'est pourquoi j'aurais voulu que ce soit mentionné. Mais je crois que j'ai compris dans la discussion de toute à l'heure que ceci peut se faire.

J'ai aussi fait la remarque pour le secret professionnel. Vous savez, les professionnels

sont souvent placés dans des circonstances où ils doivent apporter cette aide. Mais il faudrait que ce soit sans préjudice à leur secret professionnel. Comment garder la confiance des personnes qui s'adressent à nous comme professionnels, si véritablement on est appelé à livrer ce qui nous a été apporté sous l'éthique d'un secret professionnel?

A l'article 5, j'ai ajouté, puisqu'on a mentionné véritablement des professions: "travailleurs sociaux, psychiatres, psychologues, avocats ou autres fonctionnaires". Après les remarques de M. le ministre, qui disait qu'il ne voulait pas identifier des professionnels, il faudrait au moins ajouter "ou autres professionnels" pour permettre à d'autres professionnels de participer. Je le souligne surtout pour les psychoéducateurs parce que c'est la seule profession qui vive en contact direct avec les enfants 24 heures par jour. Les autres sont des spécialistes qui donnent des recommandations mais qui n'appliquent jamais leurs recommandations. Ce sont les psychoéducateurs, qui vivent 24 heures avec ces enfants, qui les appliquent, ces recommandations. Je crois qu'ils peuvent véritablement aider une équipe puisque les autres font purement des inferences ou des recommandations dont ils espèrent qu'elles vont bien marcher. Mais eux-mêmes ne sont pas appelés à les appliquer. Je ne dis pas cela seulement pour les psychoéducateurs mais pour d'autres professions aussi qui pourraient aider.

A l'article 6, on a ajouté, comme équipe, "le directeur du service" puisqu'on apporte beaucoup d'attention au directeur du service. On lui donne un rôle à jouer. Il sera recruté parmi les professionnels des sciences du comportement et devra avoir de l'expérience dans le domaine de l'enfance et de l'adolescence. On croit que cette nomination va avoir une énorme répercussion parce que cela va être la qualité de l'homme qui sera nommé, avec ses qualités et nécessairement ses qualifications professionnelles, qui va pouvoir aider. On aimerait qu'il ait une formation spécialisée.

Dans les commentaires à cet article, on dit bien que c'est du directeur du Service de la protection de la jeunesse que devrait relever toute décision administrative après consultation avec l'équipe multidisciplinaire bien qu'un droit de rappel de la décision doive être prévu pour mieux protéger l'enfant en certaines occasions. Un droit de rappel parce que, même avec une équipe multidisciplinaire, je crois qu'en certains moments il est essentiel qu'on se repenche sur un cas et qu'on puisse avoir un droit de rappel. On ne voudrait pas que le directeur ait le dernier mot pour chacun des cas nécessairement.

Dans l'article 8, dans le cadre d'une analyse, on voudrait qu'il soit ajouté: "Faite selon des normes professionnelles". Les décisions qui vont découler de cette analyse ont une telle importance qu'on croit que les observations qui seront consignées au dossier devraient être faites par des personnes d'expérience, des personnes très bien formées, capables d'établir un contact rapide avec un enfant, qui ont de l'esprit d'observation, un sens clinique et même pas n'importe quel professionnel, comme je le mentionnais.

A l'article 11, concernant les centres de services sociaux, on sait qu'avec toute la rénovation de la loi 65 pour ce qui est de l'organisation des services sociaux, les centres auront ce rôle — M. le ministre le mentionnait tout à l'heure — de voir à l'évaluation, à la surveillance, et tout, pour l'enfance inadaptée. On voudrait qu'une section spécialisée pour l'enfance et l'adolescence soit vraiment formée dans les agences de service social. Presque toutes nos agences sociales sont des agences à la famille, mais il n'y a aucune section, même chez les mieux constituées et les plus renommées, pour l'enfance et l'adolescence dans ces agences sociales à la famille. On croit qu'il est absolument essentiel qu'il y ait une section comme cela pour qu'on se penche véritablement sur l'enfant, sur les mesures, sur l'évaluation, et qu'il se fasse, comme je le disais, une formation en cours d'emploi avec tout ce personnel pour connaître les interventions nouvelles qu'il faut vis-à-vis de la jeunesse qui présente d'autres problèmes.

Nous avons été surpris par le problème de la drogue, et nos agences sociales, qui auraient dû être à l'affût de ces problèmes, ne sont pas capables de répondre à ces besoins. Il arrive qu'il faille créer continuellement de nouvelles ressources. Pourquoi? Parce que le personnel n'a pas été habitué à être à l'écoute de la clientèle, à étudier ses besoins et à se former continuellement en cours d'emploi. Qu'il y ait un perfectionnement, sans qu'on soit toujours obligé de fonder une nouvelle ressource pour répondre à de nouveaux besoins.

J'ai mentionné qu'à la cour on donne beaucoup de responsabilités aux juges et aux avocats et, véritablement, ce n'est pas parce qu'ils sont vraiment prêts à assumer ces responsabilités. Je crois qu'on a été favorisé pour certains juges que je connais très bien, après avoir véritablement travaillé avec eux, mais cela a été à cause de la qualité de la personne qui a bien voulu être à l'écoute et même devenir autodidacte dans ce domaine. On croit que les juges et les avocats devraient avoir une formation spécialisée quand on leur demande d'accomplir des fonctions comme ce travail auprès des enfants et des adolescents.

A l'article 24, une autre remarque. On trouve que c'est très bien de permettre que la personne ait le droit de connaître son dossier, mais il va certainement falloir faire des nuances, parce que les évaluations qui sont rédigées par des professionnels, surtout en ce qui concerne souvent des traumas psychiques, des problèmes inconscients chez la personne, ne pourraient pas être inclus comme telles dans le dossier qui serait remis à la personne en cause. Autrement,

les renseignements qui seront consignés dans ces dossiers seront tellement dilués que ce ne sera d'aucune utilité pour un autre professionnel qui prendra le dossier. Donc, on aimerait que les évaluations des professionnels soient enlevées du dossier avant qu'il soit remis au client, si on le remet au client.

A l'article 28, pour cet hébergement obligatoire, j'ai compris que les deux ans, dans la discussion tout à l'heure, n'étaient vraiment pas limitatifs, mais qu'il fallait retourner au juge. Dans la suggestion, je crois que j'ajoute en disant qu'il devrait y avoir une révision annuelle de l'effet des mesures prises à l'égard de l'enfant afin de modifier, s'il y a lieu, les recommandations subséquentes. Pour moi, un an dans la vie d'un enfant et d'un adolescent, c'est suffisant pour qu'il y ait une révision annuelle obligatoire.

Je crois qu'il mériterait d'y avoir une révision annuelle obligatoire pour voir si ce qu'on a décidé c'est véritablement ce qui aide le jeune, mais non pas le laisser deux ans et l'amener au juge après.

Plusieurs cas ont été portés à mon attention sur l'hébergement obligatoire après 18 ans, mais que ce soit avec le consentement des jeunes. Ce qui arrive, c'est qu'il y a une réserve dans l'admission des jeunes de 16 et 17 ans dans des internats de rééducation, dans les cas les plus pénibles et les plus difficiles.

Pourquoi? Parce qu'il est impossible de faire en un an une rééducation, une restructuration de la personnalité d'un jeune de 17 ans. Et si à ce moment on leur demande leur consentement, il se peut qu'en un an on puisse avoir gagné totalement le consentement du jeune. Mais dans d'autres cas, tout travail fait pendant un an serait remis en cause complètement et là les institutions vont s'organiser pour refuser les cas de 17 ans, si véritablement on ne peut pas poursuivre d'une certaine façon. Je ne sais pas comment, mais j'aimerais beaucoup attirer l'attention des législateurs sur ce point.

Enfin, je parle des normes d'accréditation dans les centres d'accueuil. Présentement, on sait quelle campagne il y a dans les journaux quant aux normes d'accréditation des foyers pour les personnes âgées. C'est très louable de le faire pour les personnes âgées, mais ce serait encore très souhaitable que ça se fasse pour nos centres d'accueil où notre jeunesse est amenée.

Et quant à ce problème de l'évaluation des normes d'accréditation selon la catégorie d'enfants, je crois qu'on a les ressources s'il y a des normes d'accréditation; la formation du personnel, les programmes d'activité rééducatifs, on est véritablement, actuellement à travailler ces aspects.

Et je dirais, pour bien frapper les législateurs, qu'il y a une dizaine d'années, le secrétaire général de l'Union internationale de protection de la jeunesse, qui est située à Genève, est venu faire ici une visite, pas une visite extensive, mais il a visité différents centres et il a dit, dans une lettre, que les institutions au Québec l'avaient frappé puisqu'il y avait un contraste saisissant entre le meilleur et le pire.

Et je crois qu'il est important qu'on puisse faire l'accréditation de ces maisons, la formation du personnel en cours d'emploi, et je crois qu'il y a eu des efforts depuis dix ans; mais dans ce qui était le pire, je ne suis pas certaine qu'il y ait tellement de changement depuis ce temps.

Je crois que dans ce qui était déjà recommandable il y a eu de l'évolution plutôt de ce côté. J'aimerais donc souligner cet aspect.

Et, avant de terminer, j'avais pensé peut-être à deux articles additionnels; un sur l'évaluation constante, par le Service de la protection de la jeunesse, des ressources existantes, des ressources à créer afin de répondre aux besoins changeants d'une population en évolution constante.

Je ne voyais pas ça encore dans les articles de la loi et je croyais que ce serait important que ce soit incorporé dans un des articles ou un article additionnel.

Un deuxième article. Je parlais, moi aussi, d'un comité de conseillers pour élaborer les politiques adéquates au but poursuivi dans la rééducation et la protection d'un jeune. Les étudiants ont mentionné cet aspect, mais quand on travaille avec l'enfant, et que les politiques sont différentes d'un ministère par rapport à l'autre, l'étanchéité d'un ministère, nous, on s'en rend compte beaucoup plus, je crois, que les fonctionnaires.

A ceux qui travaillent avec les enfants, c'est vraiment difficile de faire parler entre les ministères même quand ils sont fusionnés.

C'est très difficile même de faire parler à l'intérieur d'un même ministère quand il y a des fusions. Je sais que c'est difficile, cela prend du temps, les conversions ne sont pas instantanées, mais je crois qu'il faudrait penser à un comité aviseur seulement sur les politiques adéquates pour vraiment protéger la jeunesse. Quant à la mise en application des politiques, cela devrait revenir à un ministère. Mais, pour les politiques, je crois que les trois ministères seraient concernés.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, Mme Guindon.

L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: Je voudrais également vous remercier pour ce mémoire et pour les explications ou données additionnelles que vous nous avez transmises. J'aurais quelques commentaires ou quelques questions, selon le cas, à poser. Je vais suivre l'ordre dans lequel vous avez présenté votre mémoire.

En ce qui a trait à l'article 3, est-ce qu'il y aurait lieu d'apporter cet amendement ou non? C'est une question que nous allons examiner, mais je voudrais simplement attirer l'attention sur le fait que l'article 11 démontre que nous partageons cette philosophie générale.

En ce qui a trait à l'article 4, je crois que cela a été discuté, comme vous en avez fait état. Lorsque nous arrivons à l'article 5 — la même question arrive à d'autres endroits — vous insistez sur le terme professionnel dans rénumération ou dans les normes, etc. Ici, je voudrais simplement faire état d'un problème qui peut se poser, c'est que nous avons une législation touchant les corporations professionnelles. L'utilisation du terme professionnel réfère, qu'on le veuille ou non, à cet ensemble législatif. Nous avons vu les difficultés auxquelles cela a donné lieu dans la loi 65, lorsqu'à l'intérieur de certains établissements, par exemple les centres hospitaliers, il est prévu la création d'un conseil des professionnels. Il nous a fallu étendre la définition de professionnel parce qu'on ne voulait pas la restreindre purement et simplement aux membres des corporations professionnelles créées en vertu du code des professions et des autres lois. Il peut y avoir d'autres professionnels. C'est donc ici un point que je veux souligner au plan de la rédaction d'un tel texte de loi; c'est une difficulté qui se présente, mais je partage, comme je l'ai indiqué, votre préoccupation à l'effet qu'on ne doit pas, dans une telle équipe, se limiter nécessairement à l'énumération des professionnels qui sont indiqués dans le projet de loi. Alors, de quelle façon contourner la difficulté afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté? Je pense bien que ce n'est pas à moi d'apporter la réponse à ce moment-ci, mais le problème existe.

C'est la même chose en ce qui a trait à l'article 6. Je crois bien que, dans ce cas-là, on a deux options. A mon sens, dans la loi 65 on a voulu, dans toute la mesure du possible, prendre cette orientation-là, faire confiance que le directeur devra être compétent et avoir vraiment les connaissances nécessaires. Toutefois, encore là, je note l'observation qui a été faite. Nous allons l'étudier, mais elle pose encore la difficulté à cause de l'utilisation du terme professionnel. Toujours au sujet de cet article 5, dans le dernier paragraphe de vos commentaires, vous dites qu'un droit de rappel de la décision doit être prévu pour mieux protéger l'enfant à certaines occasions. Pourriez-vous m'expliquer ce que vous entendez par ce droit de rappel? Qui pourrait l'exercer? Auprès de qui? Comment cela fonctionnerait-il? Parce qu'ici, dans le projet de loi, même si cela n'est pas dit spécifiquement, il reste que, si le directeur jugeait qu'un cas doit aller dans telle direction, cela est toujours possible.

Par exemple, si on dit, à la suite de son analyse, que le directeur ferme le dossier, il est toujours possible pour quelqu'un de revenir et de demander qu'il soit ouvert à nouveau, en recommençant. Alors j'aimerais simplement voir, comme je le mentionnais, qu'est-ce que vous entendez par ce droit de rappel, auprès de qui, par qui peut-il être demandé, etc.?

MME GUINDON: Le droit de rappel serait demandé par les parents, parce qu'à certains moments, vous savez, comme je le disais, même une équipe professionnelle peut véritablement faire fausse route, après une étude. Le droit de rappel pourrait être exercé d'abord par les parents, mais aussi par d'autres professionnels qui ont suivi l'enfant avant qu'il soit, par exemple, confié à la Loi de protection, par des éducateurs qui connaissent l'enfant. Mais je verrais qu'à certains moments, on peut avoir eu un contact professionnellement avec un enfant et que les décisions prises par le directeur du service de la protection — puisque souvent, ces enfants vont de clinique en clinique ou ils ont été dans d'autres services-- je verrais que d'autres professionnels aient le droit de faire faire un rappel parce que la décision qui avait été prise ne serait pas, à leur point de vue, la meilleure pour l'enfant qui est concerné.

M. CASTONGUAY: Mais lorsque vous dites un droit de rappel ou faire faire un rappel, si je comprends bien, c'est qu'ils devraient garder la liberté ou la possibilité de pouvoir demander au directeur de rouvrir le dossier ou de le reconsidérer. C'est ça?

MME GUINDON: Oui, pour moi, c'est ça.

M. CASTONGUAY: A l'article 8, on tombe toujours dans le cadre d'une analyse faite selon des normes professionnelles. Le projet de loi indique la nécessité d'une équipe multidisciplinaire. Les personnes qui vont la composer auront une formation, devraient normalement avoir une formation adéquate. Certains seront membres de corporations professionnelles, d'autres ne le seront pas — ce qui ne leur enlève pas leur compétence — et chacun, il me semble, doit se comporter selon les exigences d'un exercice adéquat de sa profession.

C'est la raison pour laquelle, étant donné qu'il y a déjà d'autres mécanismes pour assurer un exercice conforme des diverses professions, nous n'avons pas repris ou introduit cette question de normes dans le texte. Cela ne veut pas dire, par contre, que nous ne partageons pas votre préoccupation. Il me semble clair que justement ces analyses, à cause des implications qui peuvent en découler, doivent être faites de la façon la plus consciencieuse, la plus complète et la plus objective possible.

De la même façon, à l'article 11, lorsque vous parlez du centre des services sociaux, que ce dossier soit confié à une section spécialisée pour l'enfance et l'adolescence.

Maintenant, nous avons traversé une première étape au plan des structures légales des centres des services sociaux. Nous avons un groupe de travail au ministère qui, en conjonction, en collaboration étroite avec les centres des services sociaux, est en voie d'élaborer l'organisation des centres des services sociaux, compte tenu des nouvelles responsabilités et des responsabilités qu'ils avaient déjà, pour assurer

justement que les centres des services sociaux soient en mesure de fonctionner, de telle sorte qu'ils assument pleinement chacune de leurs responsabilités.

Il n'est pas impossible que nous introduisions dans la loi 65, qui touche à l'organisation des services sociaux, une fois ce travail terminé, certains règlements qui fournissent des précisions comme nous l'avons fait, par exemple, pour les centres hospitaliers si on se réfère aux règlements de la loi 65. On voit que les règlements exigent la mise sur pied de certains comités, assignent clairement à certains officiers du centre des responsabilités bien claires.

Il est possible qu'une fois ce travail terminé — dans les règlements de la loi 65 nous avons déjà l'autorité législative pour le faire — il soit prévu la constitution obligatoire d'un tel service ou d'une telle section.

Encore là, je n'ai aucune divergence d'opinions quant aux buts que vous recherchez. Cela n'est pas nécessairement l'endroit ici pour le faire, il y a déjà un mécanisme et le travail est en cours présentement. Je pense bien que ce que vous indiquez ici est une préoccupation tout à fait légitime et dont on doit tenir compte.

A l'article 24, le problème du secret professionnel et des notes d'évaluation dans les dossiers est un problème réel. Lorsque nous allons procéder à la révision des mémoires, cette remarque, on va la noter et on va certainement étudier le bien-fondé de la représentation que vous faites. On nous a déjà souligné le danger de ne pas entourer les dossiers d'un certain nombre de protections, de telle sorte que ces dossiers demeurent significatifs, d'une part, et, d'autre part, que l'individu en cause, toutefois, ne soit pas privé du droit de savoir ce qui est contenu dans son dossier.

Nous allons examiner les dispositions de la loi 65 à ce sujet et voir s'il y aurait lieu de reprendre étant donné que le service de protection n'est pas couvert par la loi 65 — des dispositions analogues à celles que nous avons inscrites dans la loi 65. Ce problème s'est soulevé. Nous avons eu à le discuter dans le cadre de la loi 65 et on y a apporté un certain nombre d'ajustements pour essayer de répondre aux préoccupations que vous avez exprimées qui étaient celles exprimées, ici, par des membres de la commission et dans des mémoires touchant ces règlements.

A l'article 28, vous parlez de la nécessité d'une révision. Encore là, est-ce qu'on doit donner une échéance au moins annuelle ou une révision annuelle? L'article 26 traite du moment où la cour ordonne l'hébergement obligatoire. Si on regarde l'article 26, on dit que le centre des services sociaux est chargé par la cour de désigner un centre d'accueil ou une famille où peut être reçu l'enfant, de l'y conduire, d'assurer sur lui une surveillance adéquate, d'adresser à la cour des rapports périodiques sur l'évolution de l'enfant et ses déplacements et de faire à la cour de nouvelles recommandations s'il y a lieu.

En fait, on reprend dans l'article 26 la préoccupation, à moins que je manque un aspect, que vous exprimez en ce qui a trait à l'article 28. Vous dites que la révision devrait être annuelle. Ici, on a parlé de révision périodique, étant donné que dans certains cas cela peut être nécessaire de faire une révision plus fréquente et dans d'autres cas peut-être qu'un rapport annuel peut être suffisant. On n'a pas voulu fixer une échéance aussi précise que celle-là, mais l'esprit encore une fois est le même.

Quant au problème des enfants qui atteignent l'âge de 18 ans, alors qu'ils sont en voie de réadaptation à la suite d'un délit ou d'un jugement rendu en vertu de la Loi sur les jeunes délinquants, le problème nous a été soumis. D'ailleurs, nous l'avons vécu récemment de façon très précise et concrète, même en vertu de la loi actuelle. Je peux assurer sur ce plan que normalement nous devrions apporter des modifications au projet de loi de telle sorte qu'il n'y ait pas cette limite aussi rigide qui pourrait donner lieu aux conséquences que vous avez décrites et possiblement à d'autres conséquences qui se sont dégagées dans certains cas concrets, même en vertu de la loi actuelle.

Nous allons reprendre cette question au moment de l'étude détaillée du projet de loi.

En ce qui a trait à l'article 29, la direction de l'agrément, les centres d'accueil sont couverts par la loi 65 et la direction de l'agrément du ministère est autorisée à définir de telles normes, celles dont vous faites demande ici. Déjà la direction de l'agrément a fait de nombreuses visites, a fait de nombreux relevés dans les centres d'accueil pour les enfants. Le travail a porté davantage sur le respect de normes d'hygiène, de sécurité, etc., mais beaucoup moins sur les programmes d'éducation, de réadaptation. Nous en sommes conscients et nous sommes également conscients du fait, comme vous l'avez mentionné, que les programmes varient en qualité selon les institutions. Je pense bien que de l'admettre n'est pas critiquer les responsables de ces institutions. Nous sommes dans un domaine en pleine évolution, nous sommes dans un domaine où, il n'y a encore pas tellement longtemps, très peu était fait au Québec. Des progrès considérables ont été accomplis maintenant. Nous songeons présentement, au ministère, à mettre sur pied une équipe qui viendrait apporter son concours à la direction de l'agrément qui n'a pas tout le personnel pour faire cette évaluation. Cette équipe aura pour tâche justement de faire une révision de ce qui existe dans les divers établissements pour que les correctifs nécessaires soient apportés d'une part, et, en même temps, pour préciser davantage le vocation de chacun des établissements.

Nous sommes conscients, encore sur ce plan, les établissements ayant fixé eux-mêmes les

normes d'acceptation, qu'il existe des carences. Nous avons à vivre ces problèmes. Certaines catégories d'enfants sont extrêmement difficiles à placer étant donné que lorsqu'on regarde la gamme des établissements, leurs normes d'admission, ils sont pratiquement refusés un peu partout. C'est un travail que nous voulons effectuer, qu'il nous apparaît important d'effectuer même s'il y a eu déjà un progrès réalisé. D'ailleurs, la loi 65, encore sur ce plan, donne l'obligation aux établissements de soumettre pour approbation dorénavant leurs normes d'admission, ce qui n'était pas le cas par le passé. Antérieurement, — j'imagine que M. Cloutier a eu avis de ce problème — par la loi 65, nous avons déjà fait pression auprès de certains établissements pour qu'ils élargissent leurs critères d'admission et on nous a dit que ça n'était pas notre affaire, que c'était à eux de fixer de tels critères. C'est la raison pour laquelle nous avons introduit cette possibilité dans la loi 65. De la même manière, lorsque vous parlez de l'évaluation constante des ressources existantes, des ressources à créer, encore là, c'est un travail que nous devons faire. D'ailleurs, au cours de l'été, la direction de la planification du ministère, à ma demande, a dressé un inventaire des ressources et nous devons faire le point sur cet inventaire pour voir ce qui apparaît le plus urgent de compléter. Nous avons posé un bon nombre de gestes au cours des dernières années pour améliorer le réseau des ressources existantes et nous avons cru nécessaire de faire le point. Il s'agit pour nous, par les rapports que nous recevons de la direction de l'agrément, aussi par les fonctions qui sont celles du ministère, en vertu de la Loi du ministère des Affaires sociales, de procéder à cette évaluation et de corriger, au fur et à mesure que les ressources deviennent disponibles ou encore que des besoins qui doivent être comblés sont identifiés.

Encore sur ce point, c'est la raison pour laquelle nous n'avons pas introduit de telles dispositions dans la loi 65, mais l'obligation est là présentement. Quant à la nécessité de collaboration entre les trois ministères impliqués, je le partage complètement. Nous avons eu divers groupes de travail qui ont été constitués dans le temps et je pense bien qu'il s'agit de continuer dans cette voie.

Il y a eu tout le travail qui a été fait dans le domaine de l'enfance exceptionnelle, par exemple, de la façon la plus générale. De toute façon, je dois dire que je partage vos préoccupations sur ce plan.

A la suite de ces remarques, je réalise que j'ai beaucoup plus commenté que posé des questions. Si vous aviez des commentaires additionnels à formuler ou peut-être vous-même des questions...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mme Guin-don.

MME GUINDON: Lorsqu'on a travaillé sur ce projet de mémoire, c'était déjà à l'automne 1972, et depuis six mois, il y a eu véritablement du nouveau, et on s'en est aperçu, par exemple... Ce travail de la direction de l'agrément, cela était vraiment nouveau, cette année. Au moment où on a préparé le mémoire, on n'avait pas eu encore les répercussions de tout ça. Donc, je crois que, si l'équipe avait préparé le mémoire maintenant, il y aurait eu certains changements. Mais on ne les a pas faits, puisqu'il avait été soumis en janvier dernier.

A ce point de vue et sentant le fait de la réorganisation des services et qu'il y a, comme ça, des personnes qui se préoccupent des normes d'accréditation et de tout ça, et qu'il y a une poussée dans ce sens, on voulait être sûr que cela se fasse. On disait: Au moins dans cette loi, il faudrait peut-être l'incorporer, si véritablement, dans le projet de loi 65, cela ne se sentait pas au niveau de l'enfance et de l'adolescence. Mais je crois qu'actuellement, je suis d'accord qu'on sent déjà les effets du travail fait par ces directions.

M. CASTONGUAY: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Montmagny.

M. CLOUTIER (Montmagny): Mme Guin-don, quand vous parliez, tantôt, des ressources actuelles qu'il faudrait rénover et des ressources qui manquent et qu'il faudrait créer, est-ce que, d'abord, vous pensez à toute la province de Québec ou si vous pensez à une région en particulier, comme celle de Montréal, où il y a des besoins plus considérables qu'ailleurs? D'autre part, est-ce que vous pensez également à certains secteurs particuliers de l'enfance? Je fais allusion aux délinquants, par exemple, ou dans certains autres secteurs de la rééducation, où il s'agit de protection. L'aspect protection prime sur l'aspect délinquance.

Alors, est-ce que vous pourriez expliciter davantage? J'ai en mémoire l'observation que vous faisiez à un moment donné; vous rapportiez les paroles d'une personne qui avait visité le Québec et qui disait qu'il y avait le meilleur et le pire dans nos institutions.

MME GUINDON: Je crois qu'à cause même de la concentration de la population, Montréal a certainement été dans nos préoccupations et toute la communauté urbaine. Mais depuis un an ou un an et demi, même plus, peut-être deux ans, les régions, qui sont peut-être les plus éloignées, sont peut-être les régions les plus actives comme, par exemple, la région du Nord-Ouest québécois, la région d'Hauterive et autres. Ces gens viennent à Montréal; ils exigent des spécialistes qu'ils aillent les aider. Toute la région même se structure, s'organise et ils exigent nos services. On y est allé, parce qu'ils ont tellement intensifié leurs demandes qu'on croit que des équipes volantes multidisciplinaires devraient aller dans ces régions, avant que des spécialistes,

qui seront nécessaires, aillent s'établir définitivement dans ces régions. Ils ne veulent pas attendre ce temps. Mais avec de plus en plus de services de communication, on peut s'y rendre en une heure par avion. Les équipes de professionnels vont sur place travailler avec eux.

Donc, pour nous, les ressources. Surtout, on est très intéressé à aider des régions nouvelles où il n'y a pas de ces services. Parce que les conversions sont tellement difficiles, vous savez... Les contextes historiques sont tellement difficiles, que lorsque c'est une région nouvelle — on pense au Nord-Ouest québécois, parce qu'on travaille beaucoup avec ces gens — qui se structure, eh bien, on trouve cela très intéressant, parce qu'il y a une participation de la population, des professionnels et de tous. Ils sont intéressants à aider.

Je crois que les spécialistes ne peuvent pas faire autrement que de répondre à ces appels. Donc, je dirais qu'actuellement le rayonnement se fait au niveau provincial, face à nos préoccupations, surtout à cause des demandes expresses qui nous ont été faites. Je parle surtout pour l'organisme du centre d'orientation. Pour nous, toutes les régions ont leur importance.

Pour le genre d'enfants, on ne pense pas seulement à la délinquance, même c'est au point où, pendant des années, on souhaite qu'un acte délinquant soit posé par un adolescent de treize, quatorze et quinze ans, parce que, à ce moment-là, il va bénéficier des services. Mais s'il ne pose pas cet acte, il n'y a pas de services dans la région métropolitaine pour les enfants qui n'ont pas besoin d'être confiés à des services psychiatriques hospitalisés, ni confiés à des maisons de rééducation de délinquants. Toute la gamme — et c'est la plus grande partie de la population — des douze à seize ans, il n'y a aucune institution organisée pour répondre à ce problème. Je pourrais demander peut-être à M. Métivier de vous en parler. Il s'est occupé de faire une recherche dans la région de Montréal et la région de Deux-Montagnes aussi, pour voir les besoins de la population et demander quels genres de services devraient être créés dans la communauté urbaine. Au moins, qu'on commence par là où il y a une plus grande concentration de population.

M. METIVIER: On a parlé de créer et de rénover des institutions. Je pense que, justement pour ce qui est de la création d'une institution, je pourrais vous parler rapidement d'un projet qu'on a essayé de mettre sur pied, depuis une couple d'années. On s'est rendu compte, dans notre pratique professionnelle, qu'il y avait tout un groupe d'adolescents de douze à seize ans pour qui il n'y avait tout simplement pas de ressources dans la société. C'est une impression que tous les professionnels de notre milieu et d'autres milieux partageaient. On s'est arrêté à regarder, par une analyse approfondie, tous les dossiers qu'on avait ouverts, sur une période de six mois, et on s'est rendu compte qu'il y avait un tiers des enfants de douze à seize ans pour qui les services spécialisés offerts par les commissions scolaires n'étaient pas suffisants, qu'ils ne tombaient pas dans les milieux psychiatriques, qu'ils n'étaient pas des délinquants et qu'ils se retrouvaient, à ce moment-là, un peu dans le vide. Vous allez parler à peu près avec n'importe qui possédant une certaine expérience dans le domaine de l'enfance inadaptée et tout le monde s'entend sur cela. Avec les jeunes adolescents, garçons ou filles, on a un problème majeur. On a fait toute une série de démarches, même ici, avec un certain ministère. Les dossiers sont communiqués et on attend! On attend des réponses de ce côté-là.

Maintenant, pour ce qui est de rénover une institution, toujours un peu pour répondre au monsieur qui parlait du meilleur et du pire, tout à l'heure, je pense qu'il y a un problème vraiment majeur qui se situe autour de la sélection et de la formation du personnel. C'est quand même une des lignes de fond du rapport qu'on a fait. Je ne peux pas vraiment préciser, je trouve que ce n'est pas la place pour le faire ici, mais je pourrais nommer une institution nouvelle dont tous les bâtiments sont édifiés et on a besoin, tout d'un coup, au printemps, d'une centaine d'éducateurs et on se trouve face à un problème: on n'a pas de personnel spécialisé. A ce moment-là, on fait appel au Centre de la main-d'oeuvre du Canada pour trouver des personnes qui sont sans emploi et les préparer pendant une période de quatre mois à aller travailler avec des enfants présentant de très sérieux problèmes sur le plan socio-affectif. Finalement, à l'institution où on était, une sélection s'est faite, heureusement. Mais il a été très difficile de mettre cela en application car on s'est rendu compte que plus de 4/5 des personnes étaient vraiment inaptes à exercer dans ce domaine.

Je pense qu'il faut être conscient — et ça, c'est depuis toujours qu'on l'a constaté — que les inadaptés attirent beaucoup de personnes qui sont elles-mêmes inadaptées pour venir travailler dans ce domaine. De là l'importance primordiale donnée à la sélection, par exemple en psychoéducation. Il y a toujours eu des groupes très réduits d'étudiants depuis plusieurs années, 15, 20 ou 25 étudiants seulement, même si les besoins étaient beaucoup plus grands.

Si j'avais un commentaire général à faire, je dirais que, quelles que soient les structures administratives qu'on va mettre en place, si on ne met pas aussi parallèlement à ça, tous les moyens possibles en marche pour former des personnes, choisir celles qui vont travailler dans ces domaines, la réforme administrative n'apportera pas les résultats qu'on attend d'elle.

Je suis, par contre, assez heureux de constater, ce matin, que beaucoup de préoccupations se situent à ce niveau dans la réforme qui se vit

actuellement aux affaires sociales. Cela est probablement, quand même, dû à l'expérience qui a été vécue du côté de l'éducation où on s'est rendu compte, avec les années, qu'on avait beau faire la plus belle réforme administrative possible, penser à des grosses écoles polyvalentes, etc., si on oubliait l'enfant et les personnes qui travaillent avec lui, on ne change pas grand-chose, peut-être même qu'on y perd beaucoup de qualité.

M. CLOUTIER (Montmagny): Je vous remercie des précisions, M. Métivier. Vous parlez dans votre mémoire de l'évaluation constante des ressources existantes et des ressources à créer pour les adopter à la société changeante et aux besoins qui changent très rapidement aussi. Quand vous parlez de modifications aux institutions, vous ne parlez pas de modifications aux bâtisses, j'imagine. Vous parlez surtout des modifications aux programmes, de la qualification et de l'entraînement du personnel de façon à répondre aux nouveaux besoins qui naissent chez les enfants. Est-ce que c'est ça que vous voulez mentionner?

MME GUINDON: Oui, sûrement. Parce qu'avec les bâtisses, dans la province, on a eu assez de facilité la plupart du temps. Mais il s'agit d'être capable de constituer une équipe de personnes qui va vraiment établir les programmes de rééducation et d'avoir la possibilité, même avant de penser à la bâtisse, d'organiser cette équipe. Parce qu'il est plus facile de construire une bâtisse que de constituer une équipe qui va véritablement mettre en oeuvre un programme rééducatif. Et ça je le mentionne.

Boscoville est un centre qui est reconnu au point de vue international. Il n'y a pas de semaine où on n'a pas de délégation de tous les pays, au moins deux à trois par semaine, qui viennent voir ce qui se fait à Boscoville. C'est peut-être la seule institution où on a formé le personnel deux ans avant d'ouvrir la maison. Mais elle tient, la maison. Cela fait 22 ans qu'elle est ouverte et elle tient.

Mais on a eu deux ans pour former le personnel avant même et pendant que la bâtisse se faisait. Souvent, on nous dit: C'est un luxe. Mais non, ce n'est pas là qu'est le luxe. Je crois que, si on peut former l'équipe avant de commencer les bâtisses, on donne vraiment l'importance capitale aux ressources humaines qui vont faire le travail.

C'est vraiment de cela surtout qu'on voulait souligner l'importance.

M. CLOUTIER (Montmagny): Est-ce que, d'après vous, il faudrait également faire un effort assez intense pour décentraliser le personnel à travers les régions du Québec? Vous avez dit tantôt que vous étiez demandée de plus en plus en consultation. Vous avez été à Hauterive. J'imagine que c'est à l'institution de transition surtout qu'on vous a demandée. Il y a aussi d'autres institutions de transition qui ont été aménagées dans différentes régions du Québec. Est-ce que vous pensez qu'il y a possibilité de décentraliser, d'amener ce personnel dans ces régions, de façon que la clientèle ne soit pas transférée dans les institutions de Montréal, qu'on soit encore débordé, qu'on manque de place et que ça crée des problèmes au niveau des institutions de ces régions?

MME GUINDON: Oui, je crois que la décentralisation est à faire. Maintenant, penser d'amener tous les professionnels à demeurer dans ces régions, surtout quand ce sont des personnes qui sont hautement spécialisées, ça va retarder. Je crois qu'il faut plutôt regarder tous les moyens, même payer les transports de ces gens pour qu'ils puissent y aller. Ils sont prêts à y aller, mais pas à s'isoler dans leur pratique professionnelle et à aller demeurer dans la région nécessairement.

J'ai parlé de Hauterive. C'est sûr que cela coûte $72 pour aller de Hauterive à Montréal, mais si on apporte véritablement une qualité qui fait que cela aide tout le personnel qui est là, qui est en formation en cours d'emploi, on les aide dans la formation de leur personnel, on les aide dans la sélection de leur personnel, on les aide aussi dans les programmes qu'ils ont à faire vivre, par une consultation. Les gens qui sont sur place ne se découragent pas et ils peuvent continuer, apporter véritablement quelque chose, surtout qu'il s'agit d'institutions de transition, ce qui veut dire que les cas qui demanderaient une plus grande spécialisation peuvent être envoyés dans certaines institutions de la province qui se spécialisent plus particulièrement dans les surhandicapés ou ceux qui exigent des mesures encore plus intenses. Au moins, dans les régions, qu'on ait des ressources ordinaires pour la prévention et aussi pour une réadaptation jusqu'à un certain point. Je crois que cet aspect est ressenti et on croit qu'aider une région qui deviendra un prototype pour les autres régions dans la province est la seule façon dont on peut aider.

Si on est allé au Nord-Ouest québécois, cela a été à cause de cela. Toute notre équipe professionnelle a dit: Si on va les aider, ils veulent tellement le faire qu'on croit qu'ils vont au moins créer une région. S'il y avait une région qui était un peu un projet pilote, cela ferait de l'émulation pour les autres régions. Je crois que c'est seulement par une réalisation très concrète que les autres vont voir après ce qui se passe. Je sais, pour ne nommer que le centre d'orientation l'Etape à Val-d'Or, que des délégations de nouveaux centres de transition vont là pour véritablement se faire aider dans leur propre programme. Je crois que ce centre va aider les autres centres de transition dans la province. Je crois que cela est une vocation et une entraide qui peut se faire au niveau de toutes les régions et même de façon très décentralisée.

M. CASTONGUAY: Justement, j'aimerais faire un commentaire sur cette question des ressources. Je comprends que dans certaines régions, à Montréal plus particulièrement, il puisse exister des déficiences. Nous avons justement, comme vous l'indiquez, essayé de corriger les lacunes qui apparaissaient les plus aiguës. Je me rappelle, par exemple, les données qui ont circulé à certains moments dans une région comme l'Outaouais où on faisait état du grand nombre d'enfants qui, faute de ressources, se retrouvaient constamment dans les prisons ordinaires, les prisons communes. Alors, nous avons mis l'accent sur la décentralisation dans la création de centres de transition.

Je dois aussi, je pense, faire état du fait qu'au cours des années 1968 ou 1972 — ce sont à peu près les derniers chiffres dont je me souvienne — c'est le secteur des services à l'enfance qui a connu les plus fortes, les plus rapides augmentations au plan budgétaire. Cela aussi, je pense qu'il est bon de le mentionner, étant donné l'effort considérable qui a été fait.

Egalement dans ce contexte, étant donné cette augmentation rapide, étant donné les problèmes qui subsistaient lorsque nous avons introduit l'évaluation des programmes dans la nouvelle approche budgétaire du gouvernement, c'est précisément dans le secteur de l'enfance que nous avons fait de la révision. Un mémoire très détaillé, fouillé, volumineux a été préparé, un grand nombre de personnes ont été consultées, et une des choses les plus difficiles à juger est le rendement ou les résultats de ces divers programmes.

A l'exception d'une étude dont on nous a fait état ici et qui avait été effectuée au début des années 60 à Boscoville où on avait pu suivre les enfants, les jeunes, dans un certain nombre de cas, et voir ce qui leur était arrivé par la suite, il existe très peu de données qui permettent de juger de la valeur relative des divers types de programmes, des divers types d'établissements.

Je me souviens qu'à un certain moment — je pense bien que c'était pendant la période 1965-1970 — on avait mis énormément d'accent sur le foyer nourricier. Pour certains, le foyer nourricier était à peu près la réponse à tous les maux. Aujourd'hui, on en est revenu et on s'aperçoit que le foyer nourricier peut être fort utile, mais qu'il peut aussi présenter bien des déficiences ou qu'il ne peut pas répondre à certains types de problèmes.

Alors, ça, c'est une des choses aussi assez difficiles à évaluer présentement, parce qu'il y a très peu de données. Quel est le résultat obtenu, qu'est-ce qui arrive à la suite des interventions des divers types de services? Il faut faire attention, je pense bien, à ne pas aller trop vite, non plus, dans certaines formules, certaines orientations, de peur justement de le faire, à partir d'impressions plus ou moins fondées. Je tiens à souligner ceci, parce que cela m'a paru un des problèmes les plus difficiles dans ce secteur-là.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Dorchester.

M. GUAY: Je voudrais vous féliciter, Mme Guindon, pour la clarté de votre mémoire; tout est bien expliqué. Même si vous avez transposé, à l'article 5, un service de protection de la jeunesse, institué au ministère de la Justice, est-ce que, dans votre esprit, vous voyez la possibilité ou l'avantage que ce service relève d'un autre ministère que celui de la Justice?

MME GUINDON: Peut-être que je suis — je ne sais pas si je devrais dire le mot — conservatrice, mais je crois qu'avec ce qui déjà est réalisé au ministère des Affaires sociales, on sent que l'évolution est véritablement de ce côté-là. Je veux vraiment souligner, pour avoir eu au moins une vingtaine de délégations américaines cette année au centre d'orientation, qui viennent voir tous les programmes dans le Québec et qui cherchent elles-mêmes à régler le problème à la délinquance chez elles, eh bien, qu'elles nous considèrent comme très avantagés avec les ressources financières qu'on a à notre disposition. Je crois que, depuis quatre ou cinq ans, il y a véritablement eu un très grand progrès de ce côté-là. Le progrès étant ce qu'il est actuellement, je me demande pourquoi on changerait de ministère pour aller au ministère de la Justice, quand véritablement on sent que les structures du ministère des Affaires sociales seraient plus aptes à s'occuper de l'enfance et de l'adolescence.

A la Justice, même si on nomme de très bonnes personnes, l'orientation pourra devenir un peu punitive, qu'on le veuille ou non. Les pressions de la société peuvent y faire. Donc, pour moi, si on me demande ma préférence, je préférerais que ce soit véritablement au ministère des Affaires sociales que ça demeure, parce que, là, on n'aura jamais ces pressions sociales exercées autant sur le ministère des Affaires sociales que sur le ministère de la Justice contre l'enfant et l'adolescent.

M. GUAY: Dans un autre ordre d'idées, vous avez parlé du milieu naturel de l'enfant. Vous avez parlé également du nombre grandissant des divorces. Est-ce qu'il y a une incidence directe entre le nombre croissant des divorces et le taux de délinquance ou d'enfants inadaptés?

MME GUINDON: Pas sur le taux de délinquance, mais sur les enfants qui ont besoin de protection. Je dirais que de nombreux enfants ont besoin de protection, pour avoir vécu le drame que causent à leurs enfants les parents qui divorcent. Ils ont besoin d'avoir un équilibre à tout rompre, vous savez, quand ils sont attachés aux deux parents et que les parents divorcent et se remarient.

Je crois que ces enfants-là ont véritablement besoin d'une aide; il n'y a aucun enfant qui peut passer, je dirais, cette expérience et ne pas en être marqué. Je ne dis pas qu'il va être

déséquilibré, mais il va en être marqué. Je crois que, si on pense en termes de prévention, beaucoup de ces enfants auraient besoin d'une aide et d'une assistance pendant ces périodes où les parents divorcent.

M. GUAY: Cela signifie donc qu'il ne s'agirait pas de prendre directement à part l'enfant. On ne peut pas, dans ce travail, si on parle de prévention, s'occuper de l'enfant tout en oubliant le milieu familial que sont les parents.

Cela fait partie d'un tout et c'est indissociable.

MME GUINDON: Oui, parce que si, nous, on l'oublie, les enfants, eux, ne l'oublient pas. Ce sont leurs parents. Véritablement, il faut toujours penser qu'il faut faire un travail avec la famille, même la famille désunie, la famille à un parent. Quand il y en a au moins un qui peut véritablement aider dans le cheminement et dans la rééducation de l'enfant, je crois qu'il nous faut à tout prix aider ce parent à assumer peut-être une double responsabilité puisqu'il est seul désormais. Et je crois qu'il faut travailler. On dit "à la famille"; mais là, même quand la famille est désunie, je crois qu'il faut aider le parent qui assume l'aide, la protection et l'éducation des enfants, qui a la garde des enfants.

Je crois qu'il a besoin, par le fait même que le conjoint est parti, d'une aide véritable. On parle de tribunal de la famille et tout cela, je n'ai pas touché ces points. Mais je trouve que véritablement il est essentiel dans notre province, et peut-être plus qu'ailleurs, qu'on ait une aide de ce côté à la famille et que ce ne soit pas considéré comme d'autres causes dans des cours ordinaires.

M. GUAY: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Sainte-Marie.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Tout simplement une question, Mme Guindon. C'est plutôt votre avis. Vous avez mentionné à la fin de vos remarques le tribunal de la famille. A votre avis, l'institution d'un tribunal de la famille, est-ce que cela aiderait beaucoup à régler tous les problèmes que vous venez de mentionner? Est-ce que je pourrais avoir votre avis sur l'importance d'un tribunal de la famille dans la province de Québec?

MME GUINDON: Je crois qu'avec un tribunal de la famille peut-être qu'on pourrait prévenir des divorces. C'est tellement facile d'aller à cette solution du divorce qu'il faudrait une aide préalable. J'ai eu de l'expérience vis-à-vis d'un autre tribunal, le tribunal ecclésiastique qui demande des annulations de mariage. Fréquemment les gens qui sont venus nous demander une évaluation, parce que le tribunal ecclésiastique leur demandait une évaluation psychologique, beaucoup de ces gens ne voulaient pas véritablement se séparer et annuler leur mariage, mais ils en sont arrivés à cette situation. Avec l'aide qu'on leur apporte, fréquemment, ils sont prêts à réviser leur décision. Je ne dis pas qu'il y en a un très grand nombre mais un nombre assez important pour qu'on puisse quand même espérer qu'il y aurait un travail auprès de la famille et que plusieurs pourraient peut-être réviser leur décision plutôt que d'aller très vite à cette seule solution du divorce.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je remercie Mme Guindon et M. Métivier de leur mémoire et de leur participation.

Comité d'action pour

l'avancement de la justice relative

à la protection de la jeunesse

LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'inviterais maintenant le Comité d'action pour l'avancement de la justice relative à la protection de la jeunesse à bien vouloir prendre place.

MR CHANG: Mr President, members of the commission, because we are an anglophone group, is it possible we will be allowed to speak in English? Thank you very much.

First of all, if we can take this one minute to extend.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Excuse me, Mister. Would you please give your name and introduce the people who are with you?

MR CHANG: My name is Jim Chang. I am chairman of the Action committee for the advancement of justice for children and youth. On my left, is Mrs. Vera Jackson, member of our group. Also, of the Côte-des-Neiges black community project, Mrs. Claire Marse, of Verdun anti-poverty group.

We do wish to indulge at this time to also extend to Mr Claude Castonguay. We are very sorry he is going to leave us. Even though we have many differences, we feel that he is probably one of the best Social Affairs Minister Québec ever had. We express our regrets of your leaving but we wish you good luck, Mr Castonguay.

We do want to focus today some brief comments on bill 65, the Youth Protection Act.

We want to identify ourselves as a coalition of no income groups, anti-poverty groups, black groups, churches and social agencies who are trying to fight for a better deal for all the children here in Quebec.

I think, gentlemen, you agree with us,

perhaps, we talk by youth protection, we look at the basic needs of children and to me and to the rest of our group, it is our conviction, no among the professionnals, psychiatric diagnoses, psychological testings can ever replace what children, even grown-ups, need most: love, care, concern, understanding. We wish to say that the nature of our group is to make sure that those whose children often are found in detention center, reception center, they have a voice to speak, especially in view of this important piece of legislation.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Excuse me. M. le Président, est-ce que nous avons des copies en français de ce rapport? C'est parce que je n'en ai pas eu.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Vous avez les documents qui vous ont été remis, les mémoires 16 M, 16 MA, 16 MB. Alors, 16 MA est en français.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): II est en anglais.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): II y en a deux. Il y en a un en français et un en anglais. Il y a aussi 16 MB en français.

M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Parfait, merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): You may proceed, Mr Chang.

M. CHANG: All I am saying is that we are now reading word by word, trying to explain as well as we talk because the thing is not a scholastic contest but rather a matter of tremendous importance. As we say, we are no legal experts. If I reemphasize, we are now talking about basic things. If you can, gentlemen, picture in your mind, circles, concentric circles, child, family, community, by the time the states comes in, it is no relevant to the child, he doesn't know, he doesn't understand. The governement, as far as he is concerned, is something way behind his comprehension. Family he understands, loving supporting family he understands, a concerned community, a caring, supporting community, that, every child understands. This, we wish, could be legislated, that is if love could be legislated, but we cannot do. But, in its place, perhaps, we could have a charter of what the children rights are, once and for all. Now, don't think that we are the only ones who are talking about this. If we know the basic rights of children, the need for love, the need and also the privilege in a right to have the concern and a care of the larger group of the community, of the government, of the States, of the Ministry of Social Affairs and other government departments, perhaps they will be better protected.

We ask you to refer to november 1959, Declaration of children rights that was recorded by the United Nations. In terms of the bill itself, we ourselves know that the present system in a social welfare court system, there has been so much confusion between juridictions among the public service commission, Social Affairs and the Department of Justice. The accuracy of responsibility that the youth protection service as constituted now, we will now be put under the Department of Justice. Without the respect that the Department of Justice has to humanize itself, we fell that under Mr Castonguay's guidance, bill 65 or chapter 48, has already undertaken the biggest reorganization of health and social services in Quebec.

This, if it goes through in the present state, perhaps will end to confusion, which is inevitable. We do feel that the communication between the Department of Justice and the Department of Social Affairs should be very close as these matters, sometimes, often overlap.

The other thing is about the power of the Youth Protection Service Director. We see it is an overwhelmingly strong position, a powerful position. We feel this kind of thing may lead to abuse and more curiously we feel that perhaps if a child who needs help is seen at the Youth Protection Service under the Department of Justice, because perhaps often the police will intervene, the next thing is that he will be shifted to Social Affairs in the sense that he will be referred to the Social Service Centers. This is going to confuse many an ordinary family and many an ordinary child.

So it is our feelings. Perhaps the Social Affairs, with their recent merger of health and welfare services and the overseing in their mandate, the total looking after the reception centers and social services centers, will be continuing to be given this particular function.

That is perhaps the most important thing we want to stress as we ask you to visualize earlier the concentric circle. We are talking about prevention and often times that word prevention gets out because we have to put out so many immediate fires. We know that many people in Social Affairs have tried, for instance, to set up homes for boys who need protection, etc., and the community had resistance. But we do need active animation, information on why it has been beneficial not only to the boy or the girl in question but to the family, on why the community and the State at large should care, should be involved. The only way you can get their effective cooperation and collaboration, perhaps, is that you start with the planning right on the beginning with the community. We are, in other words, trying to deemphasize a technocratic depersonalized. inhuman type of society which technology has pushed us to at a spreading pace. And we wish, once and for all, to be people again, to be human. As I said

earlier, we can not legislate love. But if we can, in some way, show constructive ways, that is not psychiatrist labels and testings that are going to determine the future but rather the family who will become a source of strengh because the State will see that the low-income groups get practical financial ressources, that Service will be available especially in terms of opportunity to grow in peace. So many of the kids that are found in detention centers, in these reception centers have been forgotten by those respectable professionals. They become victims of the conveyer belt, referred from on place to another after while the child does not know who is his social worker, who is his probation officer. Nobody gives a darn. We hope that in your new legislation, gentlemen, you will seriously look at the realities of the situation: Laws are good but reality is what matters.

I am sorry that I have spoken with emotion, but this is a thing we have been fighting for a year anyway, and it is a group of people simply concerned about children. We have Mrs. Vera Jackson, a member of the committee, member of an ethnic minority, who has also visited the detention centers in the early part of the winter.

We would like her to say something about her own feelings. Thank you very much.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mrs Jackson.

MRS JACKSON: Thank you. I was appointed the Chairman of the Detention visiting group. We saw the four Detention Centers around Montreal: Notre-Dame-de-Laval, Centre d'accueil féminin, Saint-Vallier, Centre Berthelet. I think that we all were impressed that what we had believed to be true about these centers was actually true. Of course, the main thing, I think, was the lack of programs, the fact that kids could be put there for whatever period of time, with no educational facilities and nothing to do. In Centre Saint-Vallier, the kids were sitting watching television all day long. They get started on this merry-go-round and it just continues, I suppose, until a lot of them get lost in penitentiaries and that type of life.

More recently, we have been appraisers of a case with the fact that there is no any concerted effort to have these children treated medically, seen medically, when they go into the institutions. We have learned of a case of scabies in Saint-Vallier, which, you know is a very annoying ache, sort of a thing, and is contagious, if I am not mistaken. This, I think, because, the community is not permitted to visit, the community whose children are in the institutions, whose children are run afar of all the things, because of the fact of their economic conditions. When we went to Saint-Vallier, there was a sign on the door: No visiting permitted on Saturdays and Sundays. Parents who work during the week can not very well go five days a week to visit. The sign was taken down that day. I have no knowledge of whether it was replaced. It is very difficult for a mother on welfare to be able to travel to Centre Berthelet from Pointe Saint-Charles.

All these things are not conducive to rehabilitating a child who has done something which is considered illegal. And I think this is another reason why are unhappy with the intended shift from the Social Affairs Department to the Justice Department, because along with the word justice goes the word legal, law. It gives all kinds of connotations. I know kids who figure that it is a big thing to get arrested. It is a big thing to go up before the judge more than once and defy him, to go to the detention center because it makes you a man at 13, because you have been to detention and out again, you have proved something to yourself. So the system, as it has been up until now, is not working very well, even though the laws are there, supposedly to protect. And we would like to see the laws made more clear and made so that the actual reality be... You know, it is carried out the way it was intended to be.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Thank you, Mrs Jackson.

Any more comments, Mr Chang?

MR CHANG: I just want to say that just good intentions is not sufficent.

We have submitted to this commission a proposed system for helping children and youth in trouble. Maybe you have this. We are not going to read line by line so forth, but perhaps could I just highlight some of the main points. And perhaps there is again a certain number of principles involved.

We are suggesting here, if it is possible, to have decentralized what we call community rehabilitation centers, which will be very close to the local community service centers under chapter 48. It could easily fit into that kind of thing.

The main kind of thing is that the Court would be also decentralized, in the sense that the Court in a way will be less playing the role that it is being played to the present, rather they become a resource, for instance. The judges of the Court would be there or in the district where if a child needs to be determined whether he has been abused or neglected then the tradional functioning can come in with a judge as a resource right on a spot.

But we feel again every community has its own self culture, it is perhaps be prudent to make sure in those centers that local people, as well as the trained experts were sensitized and sympathetic to the kind of aspirations and the morals of the people who live there, that when a child comes in, they can truly give effective help.

We also wish not only to have group mass

kind of program, but individualized programs, where a child is looked as an individual human being. And we can see what ways they can be helped. And we do know children getting to trouble, sometimes on the spur of the moment, sometimes with a group of people, some wise guys want to do something and they all get involved, without knowing the consequences.

In those kinds of things, it could be perhaps best help by a team of people in those committee rehabilitation centers, where they can take a look at the problem, at the child, at the boys' home and school environment, etc., see what help could be given. If after some lenghts of time, be in months, it is not good enough that the child needs further help and even needs a Court intervention, then perhaps he could be referred.

The main thing again, let those diagnostics if you wish to use that term or the people that are in trouble to young people, they have their resources right in their own community as much as possible. They have also practical help be given individualized programs in the community, instead of sending child from center city in Montreal to Berthelet which is about 15 miles away, or Notre-Dame-de-Laval, miles away, which means a totally planned isolation, wittingly or unwittingly, this is a fact.

So this is the kind of concepts we have. And we hope that this kind of thing will not only be handled just by the Department of Social Affairs but by the Department of Education, Commerce, Industry, etc., all government departments which are concerned about young people.

Because the thing we all recognize is that children, young people, are in every nation the most precious asset. Thank you very much.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des Affaires sociales.

M. CASTONGUAY: M. le Président, I would like to thank Mr Chang for his kind words, first. I think that a general comment should probably be made. I have met with Mr Chang and some of his colleagues. They are deeply involved, they are very much worried about the problems of youth and I think they have pinpointed the areas where there are still great problems to be solved. At the same time, through their deep involvement and worries, they may not give a complete picture though because there are many very positive things that are being done in the field and a lot of progress has been covered, I think, over the years although I agree that a lot of progress still has to be covered.

It is also obvious that personal involvement, family involvement, community involvement is of the utmost importance and, as mentionned, it cannot be legislated and it has to be developped much more than it is at the moment. I agree that information, animation are necessary; although on this particular point, governments are in a very limited capacity since anything emanating from a government in this area is considered as being official information, etc. and I think that a lot of associations and groups that are being concerned with children should consider this problem. Each time I have had the occasion to meet with social service clubs, they have indicated to me that they are interested in the problems of youth, then, I have encouraged them very much to do so and to try to interest others in doing so.

Now with respect to more specific questions that were raised, the question of a charter or a definition of the rights of the children has been raised many times since we have gone into the public hearings with respect to this bill. It is obviously a question that we will have to review very carefully before this bill goes to the Assembly for approval.

I think the emphasis put on this particular question indicates to us that it is very necessary. Now, with respect also to le Service de protection and its relationship with either the Department of Justice and the Department of Social Affairs, well I must say, first, that this service and the director were seen, when the bill was drafted, as a service to protect the child. And the whole philosophy is to make sure that, with the proper service as few children as possible should be directed to the Court. And this should be the general approach that only after a careful examination of the situation children whom it is felt that it would be necessary to refer them to the Court should go there.

Maybe this is not too clear in the proposed bill, but this is something that we will clarify since it is really the purpose of setting up this service and the way we want to set it up. Now with respect to its relationship with either one or the other of the two Departments, again, the arguments put forward in favour of maintaining the relationship with the Department of Social Affairs have been very consistent and we will certainly review that question very carefully.

Now with respect to the detention centers that you have visited, I agree that in those you have visited, you have probably found those that are faced or with which we are faced with the most difficult problems. It has been said earlier that these centers or the services are not all of the same quality in Quebec.

I think that without being unfair for the persons responsible for these centers that you visited, those who have been faced with difficult situations and the department also. This is why, for example, with respect to Saint-Vallier, we have set up a new corporation, a new board of administrators and we have asked them for a program. We have told them we were ready to build something which would be much more appropriate for the children with respect to the others; where we have changed the board of administrators in June at the same time, as all

the other boards were changed. We hope that they will be able to continue, build and improve what was done by their predecessors. And we have put also a lot of pressure on some of them, for example, at Berthelet, so that they open more widely their doors. I remember, during the summer, some series of articles in the newspapers written by people who had been invited so that they could report. Well, I see all this and the discussion surrounding Bill 65 as an effort to let people know what is going on in this area, get them more impressed, get them more involved. I think just the fact that Bill 65 was presented, has created this opportunity to involve more people, to identify the most difficult problems and I am hopeful that we will see improvements in this area, in the months to come.

So, I do not have really any specific questions to ask at this time. I wanted rather to make these general comments following Mr. Chang's comments.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Are there any other members who would like to make comments on Mr Chang's representations?

Then, I wish to thank you very much, Mr Chang, and also, Mrs Jackson for your participation to this commission.

La commission doit maintenant ajourner ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 28)

Document(s) associé(s) à la séance