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(Dix heures seize minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
La commission parlementaire permanente du loisir, de la chasse et de la
pêche est donc réunie ce matin pour entendre des personnes et des
organismes en regard à des modifications à apporter à la
Loi sur la conservation de la faune.
Les membres de la commission parlementaire pour ce matin sont: M. Assad
(Papineau), M. Chevrette (Joliette), M. Gauthier (Roberval), M. Houde
(Berthier), M. Lafrenière (Ungava), M. Laplante (Bourassa), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Mailloux (Charlevoix), M.
Paré (Shefford), M. Perron (Duplessis), Mme Bacon (Chomedey).
Les intervenants sont: M. Dauphin (Marquette), M. Desbiens (Dubuc), M.
French (Westmount), Mme Juneau (Johnson), M. Lemay (Gaspé), M.
Grégoire (Frontenac) remplacé par M. Lachance (Bellechasse); M.
Léger (Lafontaine), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Saintonge
(Laprairie).
Il y aurait lieu immédiatement de nommer un rapporteur de la
commission.
M. Chevrette: M. le Président, je proposerais le
député Marcel Lafrenière d'Ungava.
Le Président (M. Bordeleau): Ungava. Cela va pour tout le
monde?
Une voix: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Le rapporteur sera donc le
député d'Ungava.
Avant de laisser la parole au ministre, pour vous donner un peu l'ordre
du jour, particulièrement pour les personnes qui sont ici et qui sont
intéressées par la commission, pour pouvoir mieux suivre nos
travaux, je vous donne rapidement la liste des intervenants qui vont
présenter un mémoire aujourd'hui, dans l'ordre dans lequel ils
devraient venir, à moins qu'on ne m'indique autre chose. En premier
lieu, il y aurait la Fédération québécoise de la
faune, suivie de la Société linnéenne du Québec,
l'Association de chasse et de pêche le Carcajou, Pointe-aux-Trembles
Inc., l'Association des outfitters du Québec, le groupe Cabou - on
m'avertit qu'ils veulent simplement déposer leur mémoire, la
Fédération québécoise des
SACERFS Inc., Fédération de tir à l'arc du
Québec Inc., finalement, le huitième organisme,
Fédération canadienne de la faune.
Avant de passer à la réception de mémoires, je
demanderais au ministre s'il a une courte introduction à faire.
M. Chevrette: Oui monsieur.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche.
Remarques préliminaires M. Guy
Chevrette
M. Chevrette: Merci. Bienvenue à tous mes
collègues, c'est la première fois qu'on aura à travailler
ensemble; j'espère qu'on aura des échanges fructueux.
Au départ, vous me permettrez de vous rappeler que le 21 juin
1982, l'Assemblée nationale a été informée de
l'intention du gouvernement de tenir une commission parlementaire dont le but
était de consulter les citoyens sur certaines modifications ou ajouts
que nous entendons apporter à la Loi sur la conservation de la faune et
de soumettre ensuite à la discussion publique certaines orientations et
moyens destinés à protéger les habitats fauniques.
Il faut bien avoir à l'esprit que la présente commission
parlementaire sert de consultation avant l'élaboration d'un projet de
loi et a pour but de trouver, de concert avec les citoyens, les moyens
d'améliorer la Loi sur la conservation de la faune. À cela
s'ajoute notre désir de simplifier la loi pour en faciliter la
compréhension par les quelque 800 000 Québécois et
Québécoises qui pratiquent des activités reliées
à la faune et de faire disparaître de la loi certaines
présomptions telles, par exemple, la simple possession d'une arme ou
d'un projecteur la nuit dans un endroit fréquenté par le gros
gibier qui associait automatiquement un usager à de la chasse
illégale.
Bien que nous jugions essentiels ces quelques assouplissements à
la Loi sur la conservation de la faune pour l'ensemble des usagers qui ont
à coeur la conservation de cette ressource renouvelable, nous croyons
opportun de proposer des mesures sévères contre ceux qui
transgressent des dispositions
légales et réglementaires qui ont pour effet de causer des
préjudices graves sur la faune. À cet égard, le montant
minimal et maximal des amendes pourrait être augmenté très
substantiellement. À défaut de paiement, le contrevenant serait
assujetti à la saisie de biens personnels équivalents. D'autre
part, des amendes imposées pour des infractions de type technique,
telles le port du permis de chasse, du droit d'accès, etc., pourraient
être maintenues à peu près au niveau actuel. Depuis
toujours, la protection des habitats fauniques a fait l'objet de
préoccupations de la part des adeptes de la chasse et de la pêche,
du piégeage et des principaux groupes voués à la
conservation des ressources fauniques. Les bases des nouvelles orientations en
cette matière sont largement explicitées dans un document
préparé par un groupe de travail du ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche dont le mandat était de définir
la problématique de la protection des habitats de la faune et de
présenter des recommandations.
La faune, il faut bien le dire, ne peut être dissociée
complètement de son habitat, le milieu dans lequel elle vit. Or, c'est
précisément ce que nous avons fait jusqu'à présent,
en centrant notre action réglementaire sur la faune uniquement et en ne
nous préoccupant pas tout autant de l'habitat. Avec plus de 650
espèces de vertébrés, l'idée de vouloir
protéger l'habitat de chaque espèce apparaît audacieuse ou
ambitieuse pour plusieurs. Une façon de simplifier le problème
est de regrouper ces espèces en quatre grands milieux fauniques: la
forêt, le milieu ouvert, le milieu riverain et le milieu
pélagique. Pour visualiser davantage la situation, voici comment les
espèces peuvent être réparties dans chacun des milieux.
Vous avez des tableaux, ici, à l'avant, pour tous ceux qui seraient
désireux de voir les statistiques et de voir comment se partage la
faune, vous pourrez les regarder. Pour la presse, je pense bien, ces tableaux
sont reproduits dans une pochette de presse qui sera remise à
chacun.
Il y a 158 espèces dans le milieu forestier, 83 espèces
dans le milieu ouvert, 301 espèces dans le milieu riverain et 125
espèces dans le milieu pélagique, pour un total de 660
espèces de vertébrés.
Si nous préconisons des moyens de protection pour la faune et son
habitat, c'est que nous sommes animés du désir d'assurer la
survie de l'ensemble de ces espèces et de maintenir les populations
actuelles pour le plus grand bien des générations actuelles et
futures.
Nous sommes aussi préoccupés par le maintien et même
par l'accroissement des retombées économiques engendrées
par l'exercice d'activités reliées à l'utilisation de la
faune, tant par le prélèvement de la faune que par son
observation.
Uniquement en dépenses directes engagées par les
pêcheurs, chasseurs et trappeurs sportifs, de même que par les
observateurs de la faune, on retrouvait, en 1980, 108 000 000 $ pour les
espèces associées au milieu forestier, 81 000 000 $ pour les
espèces associées au milieu ouvert, 404 000 000 $ pour les
espèces associées au milieu riverain et 42 000 000 $ pour les
espèces associées au milieu pélagique, pour un grand total
de 635 000 000 $. Ces dépenses ne couvrent pas la valeur comestible de
la chasse, des activités de subsistance des autochtones ou l'importance
des activités commerciales, pêche et chasse commerciales, etc., et
encore moins les retombées économiques indirectes de toutes ces
activités reliées à la faune.
Malgré le fait que nos chiffres soient des minima qui ne
représentent pas fidèlement la valeur économique de la
faune, force nous est d'admettre qu'il s'agit d'une valeur de première
importance qui se doit d'être conservée.
Pour lutter contre toutes les actions néfastes au milieu, il nous
fallait exprimer avec plus de précision ce qui était vraiment
essentiel à la faune en matière d'habitat.
C'est ainsi que nous proposons de protéger d'abord et avant tout
les habitats critiques, soit les habitats d'espèces animales rares
menacées ou en danger d'extinction. On peut citer, à titre
d'exemple, les dunes des Îles-de-la-Madeleine qui abritent les derniers
individus connus du pluvier siffleur du Québec.
Nous proposons également de protéger les habitats capitaux
qui jouent de façon permanente ou temporaire un rôle
déterminant dans le maintien ou le développement d'une population
faunique. Dans ce dernier cas, je pense aux lieux de concentration faunique
où les animaux deviennent particulièrement vulnérables.
Cela correspond, dans le milieu ouvert, aux aires d'alimentation et de
vêlage du caribou.
Dans le milieu forestier, nous ne retenons comme habitats capitaux que
les aires de confinement de l'orignal et du cerf de Virginie qui correspondent
grosso modo à 4% ou 5% du milieu forestier. Le milieu riverain, à
cause de sa forte productivité et sa singulière diversité
faunique, est considéré comme capital dans sa totalité.
Dans le milieu pélagique, nous ne retenons que les frayères et
les aires d'alimentation et de mises bas des mammifères-mer.
Cette courte liste d'habitats capitaux devrait, je l'espère bien,
convaincre la population que le ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche n'a pas l'intention de mettre en conserve l'ensemble du
territoire québécois. Nous désirons, non pas bloquer
toutes interventions dans les habitats critiques capitaux, mais uniquement
réglementer l'activité de telle sorte que ces
habitats puissent continuer à présenter un milieu de vie
acceptable pour la faune. La faune ne faisant pas dans ses habitudes de vie de
distinction entre la tenure des terres, il nous faudra songer à
étendre la réglementation autant aux terres publiques qu'aux
terres privées. Il y aurait donc une réglementation
générale qui devrait s'appliquer sur l'ensemble des habitats
critiques et capitaux par exemple, les normes de coupe forestière dans
les ravages de cerfs.
En plus de cette réglementation générale, nous
proposons un type d'affectation territoriale pour certains sites particuliers
pouvant justifier, après une analyse rigoureuse, une telle intervention
parce qu'ils sont soit singulièrement riches au plan productivité
ou diversité faunique, soit rares à l'échelle nationale ou
régionale, soit représentatifs d'un type d'habitat faunique ou
soit finalement nécessaires à une population exigeant des
conditions climatiques et de végétation.
Dans le cas où pour une protection d'un site particulier, nous
devrons intervenir sur un terrain privé, il faudra procéder, soit
à une entente comportant des mesures compensatoires ou soit à un
achat ou une location. Ces derniers éléments nécessiteront
de nouveaux besoins pécuniaires, mais compte tenu de la situation
économique difficile que nous traversons actuellement, nous verrons
à développer des mécanismes qui n'ajouteront pas au
fardeau financier de la population, mais qui solliciteront plutôt la
contribution des utilisateurs de la faune et la participation volontaire des
intéressés. A titre d'exemple, l'organisme "Canards
illimités" s'est engagé, dans un protocole d'entente qu'il a
conclu avec mon ministère dernièrement, à investir 9 000
000 $ au cours des cinq prochaines années dans la protection des zones
humides au Québec.
La formule d'un fonds spécial, telle qu'elle existe
déjà dans certaines autres provinces canadiennes, nous
permettrait, je pense, d'entraîner l'adhésion populaire et de
préciser la destination de l'argent. Ce fonds pourrait, bien sûr,
être géré par l'État seulement, mais il y aurait
sans doute de nombreux avantages à impliquer également le public
dans la gestion de ce fonds suivant une formule qu'on pourrait
développer ensemble.
Nous avons déjà affirmé que le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne peut ni ne veut assurer à
lui seul la protection des habitats. Nous escomptons donc solliciter, dans le
cas de la protection des sites particuliers, l'aide des municipalités
régionales de comté, nous associer aux divers organismes
privés et publics intéressés à la protection des
habitats de la faune et même conclure des ententes bipartites ou
multipartites. La réalisation de ce mandat par le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne peut s'effectuer sans une
concertation avec d'autres ministères, tels que celui de
l'Environnement, celui de l'Énergie et des Ressources et celui de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, dont les mandats
liés à l'utilisation d'autres ressources exercent une influence
sur la faune et son habitat.
La protection des habitats, à cause de ses nombreuses
interrelations, est un dossier complexe. C'est pourquoi il faudra s'attaquer,
en concertation avec divers groupes, associations, ministères et
organismes, je l'espère, à une action qui sera bien accueillie et
à laquelle on répondra avec une attitude compréhensive,
soucieux d'en arriver à la solution la plus juste et la plus efficace
possible pour l'ensemble des intervenants et des intéressés.
D'autre part, nous nous proposons de revoir dans son ensemble
l'affectation territoriale à des fins de conservation de la faune et de
son habitat, à cause de
l'hétérogénéité du réseau actuel des
réserves de chasse et de pêche et des réserves fauniques.
Rien présentement ne distingue les réserves fauniques des
réserves de chasse et de pêche en ce qui concerne la gestion de la
faune et encore moins la protection des habitats fauniques. (10 h 30)
Ne serait-il pas intéressant de retenir, par exemple, le
nominatif "réserve faunique" à des fins de protection des
habitats de certains types particuliers? Dans cette hypothèse,
qu'adviendra-t-il du réseau actuel des réserves fauniques et de
chasse et de pêche dont les vocations sont multiples et sans
dénominateur commun, notamment l'utilisation de la faune, le maintien
d'un service relié à la pratique de la chasse et de la
pêche, le contingentement et le contrôle des utilisateurs,
l'interdiction d'accès à des fins qui n'ont rien à voir
avec la faune? Actuellement, nous comptons sur les services d'environ 500
agents de conservation de la faune pour faire respecter les lois et les
règlements régissant la faune et participer à des
programmes d'éducation et de sensibilisation populaire. Nous proposons
que ces agents soient en plus mandatés dans l'application de certains
articles de la Loi sur la qualité de l'environnement et de la Loi sur
les terres et forêts notamment concernant le déversement des
déchets polluants dans la nature et les occupations illégales du
domaine public.
Dans cette mesure, il faut voir un effort accentué de la part du
gouvernement du Québec de faire respecter d'autres législations
et règlements ayant une incidence sur l'environnement et l'utilisation
des ressources, tout en visant une utilisation plus optimale des ressources
humaines gouvernementales qui évoluent déjà sur le
territoire. Dans le contexte économique actuel, on doit davantage
y penser.
En ces matières et en raison de leurs implications dans le
milieu, les quelque 1000 agents auxiliaires de conservation de la faune
verraient également leurs responsabilités élargies, pour
peu que le gouvernement du Canada accepte de modifier sa Loi sur les
pêcheries. À cet égard, j'ai renouvelé la demande de
mon prédécesseur auprès du fédéral pour
donner aux auxiliaires de la conservation de la faune la possibilité de
faire respecter le règlement de pêche du Québec. Le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a
déjà manifesté son intention de revoir l'orientation et
les moyens touchant la pourvoirie de chasse et de pêche au
Québec.
L'application de certaines mesures privilégiées
nécessite une revue des dispositions législatives et
réglementaires, dont les plus importantes concernent, d'une part, les
détenteurs de concessions de droits de chasse et de pêche et,
d'autre part, les entreprises oeuvrant dans les domaines public et foncier,
gérés par le ministère de l'Énergie et des
Ressources.
Pour les pourvoiries détenant des droits d'usage par bail avec le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il
apparaît important d'ajouter à la loi des dispositions favorisant
l'investissement, en fournissant certaines garanties d'indemnisation lorsque le
gouvernement doit mettre fin à ces concessions de droits d'usage. Pour
les pourvoiries oeuvrant dans le domaine public, mais sans concession de droits
d'usage, il y a lieu de prévoir, dans la loi, des dispositions
permettant aux gestionnaires des ressources fauniques de répartir
spatialement l'allocation de ces droits de commerce. L'introduction de la
notion de droit territorial d'hébergement permettra à ce
réseau d'hébergement en forêt dont la clientèle est
d'abord constituée de chasseurs et de pêcheurs sportifs, de se
développer, mais sans mettre les ressources en danger.
L'introduction de cet instrument de zonage dans la loi permettra au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche d'assumer son
mandat comme gestionnaire des ressources fauniques en étalant, d'une
part, sur le territoire la pression de chasse et de pêche issue de la
fréquentation de ces établissements commerciaux et en assurant,
d'autre part, à cette catégorie d'établissements
hôteliers un minimum de qualité d'expérience de chasse et
de pêche pour le type de clientèle qu'elle sollicite.
À titre d'information, il y a en ce moment 706 pourvoiries et
elles offrent 1 201 000 jours - récréation pour les
activités de chasse et de pêche. Les dépenses des chasseurs
et pêcheurs fréquentant les pourvoiries se chiffrent à un
minimum de 26 978 500 $, car à cela s'ajoutent les prestations de
services chez les pourvoyeurs eux-mêmes.
Des modifications aussi pourraient permettre que du gibier sauvage ou du
poisson soit servi dans un établissement public ou commercial lors de
fêtes familiales, par exemple, ou encore soit vendu à certaines
conditions, comme c'est le cas pour le lièvre. Il existe
présentement un important marché pour la commercialisation du
gibier et du poisson. Nous avons des demandes d'importation de chevreuil de la
Nouvelle-Zélande et du caribou des Territoires du Nord-Ouest. De plus,
les truites du Japon et du Danemark envahissent nos marchés depuis
plusieurs années. Faudra-t-il laisser accaparer le marché
québécois par les autres dans ce domaine? Nous croyons qu'en
contraignant l'importation, qu'en se donnant des techniques d'élevage
adéquates et de mises en marché à la page et qu'en se
donnant des contrôles appropriés on pourrait chercher à
développer au Québec une industrie dont le marché est
encore inexploité. Et que penser des possibilités d'exportation?
C'est un sujet délicat, j'en conviens. Même si je sais que, lors
de consultations récentes, ce projet a suscité un
intérêt mitigé, je vous convie à une
réflexion plus poussée, particulièrement sur les moyens
qui pourraient être retenus pour éviter une recrudescence de
braconnage favorisée par ou sous le couvert de la vente
légalisée de venaison ou de poisson. En d'autres mots, ici, ce
n'est pas parce qu'on aborde le sujet d'une manière officielle qu'il ne
faut pas penser aux répercussions; je crois qu'il faut regarder
déjà les conséquences d'un geste, si jamais on
décidait de favoriser cette vente.
Enfin, depuis cinq ans déjà, le gouvernement du
Québec confie la gestion de la faune à des associations
agréées dans les territoires publics, communément
appelées ZEC. Il y a 64 ZEC qui exercent leurs responsabilités
sur une superficie d'environ 44 000 kilomètres carrés dans des
secteurs situés généralement entre 100 et 200
kilomètres des centres de population. À titre d'exemple, en 1981,
au-delà de 1 500 000 jours-récréation ont
été enregistrés dans l'ensemble des ZEC. Bien que nous
voulions consolider et améliorer ce réseau au cours des
années qui vont suivre, nous désirons favoriser également
l'accessibilité à la faune dans les territoires plus près
des centres de population et encourager les propriétaires fonciers qui
sont souvent présents dans ces secteurs. Afin de permettre à ces
derniers de mieux contrôler l'accès des chasseurs, des
pêcheurs et des trappeurs à leur propriété, nous
proposerions une nouvelle disposition à la Loi sur la conservation de la
faune permettant à un regroupement de propriétaires fonciers,
impliqués formellement dans la gestion de la faune, d'intenter des
poursuites contre un chasseur, un pêcheur ou
un trappeur qui aurait accédé à leurs
propriétés sans la permission ou l'accord de ce groupe de
propriétaires.
C'est donc avec beaucoup d'intérêt et d'enthousiasme que
j'amorce avec vous cette ronde de consultations importantes pour les
différents utilisateurs, également pour les autres intervenants
et, bien sûr, pour la faune du Québec en général. Je
suis convaincu que je peux compter, d'ores et déjà, sur l'appui
de l'Opposition pour qu'on puisse faire de ces quatre jours de consultations
des journées enrichissantes qui nous permettront de présenter
à l'Assemblée nationale du Québec un projet de loi qui
sera le fruit d'un vaste consensus qu'on pourra dégager ici même.
Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais, en tout
premier lieu, demander au ministre s'il veut bien nous présenter ses
collaborateurs pour qu'on puisse les connaître, lui, comme moi, je
pense.
M. Chevrette: Étant tout nouveau, je vais essayer de vous
les présenter. D'abord, M. Poirier, qui est au bureau des
sous-ministres; ensuite, M. Henri Poupart, qui est de mon cabinet; M.
André Magny, directeur de la faune; M. Robert Joly, également un
employé à la faune; M. Raymond Sarrasin. Ensuite, il y a, de
l'autre côté, M. Baillargeon, du ministère; M. Louis Aubry,
M. Jacques Legault, M. Barras, M. LeFrançois, sous-ministre en titre; M.
Michel Cantin, M. Samson (pas le frère de Camil); M. Laurent Bernier, M.
Michel Bélanger, M. Michel Lepage, M. François Boisclair,
attaché politique, M. Claude Dépatie, à l'information et
Mlle Mireille Lafleur (celle qui se promène présentement), mon
attachée de presse.
M. Albert Houde
M. Houde: Merci beaucoup. M. le Président, au nom de
l'Opposition, j'aimerais en tout premier lieu...
M. Chevrette: J'en ai oublié un, M. Daniel Lapointe,
attaché politique.
M. Houde: ... féliciter le député de
Joliette pour sa nomination à titre de ministre responsable du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche. De même, nous tenons aussi à
souligner la collaboration de son personnel de cabinet, alors qu'il y a
quelques jours une rencontre exploratoire nous aura permis d'approfondir les
principaux éléments de ce projet de politique en matière
d'habitat faunique. D'un autre côté, nous ne pouvons nous
empêcher d'offrir au nouveau ministre nos plus sincères
condoléances. Comme il le sait sans doute, on a dit de son
prédécesseur que, bien que fortement impliqué dans le
monde du loisir, de la chasse et de la pêche, il semblait parfois
incapable de mesurer la portée et les effets des décisions qu'il
prenait. Sans vouloir intenter quelque procès, d'autres occasions nous
seront offertes pour lui démontrer que le zèle, dont il a
témoigné auprès des principaux agents du milieu faunique
et d'autres dossiers, s'est traduit bien souvent par de malheureux
dénouements. En effet, comment pouvez-vous, à la fois, être
à l'origine de nombreux litiges, plaire à tout le monde et donner
un plein rendement au sein d'un ministère qui devient de plus en plus
énigmatique ou embrouillé?
Par contre, aussitôt nommé, le nouveau ministre du Loisir a
eu la prudence de retarder les présentes audiences sur l'habitat
faunique. J'estime qu'une telle sagesse augure bien pour l'avenir,
habitués que nous sommes à la témérité et
à l'imprudence de son prédécesseur. Enfin, l'Opposition a
maintes fois été critiquée dans sa façon de
percevoir les grandes réformes entamées par l'actuel
gouvernement. Qu'il s'agisse des activités à caractère
culturel ou sportif, il faut croire que le temps nous donne peu à peu
raison si l'on en juge par les résultats. Bien qu'intéressant sur
le plan pédagogique, le virage entrepris sous les dimensions
idéologique et philosophique, lequel originait en grande partie du
programme du Parti québécois, s'atténue au gré de
la crise économique à laquelle est confronté le monde du
loisir.
À cela s'ajoute la mauvaise nouvelle parue ces derniers jours
à savoir que des programmes de subventions aux loisirs culturels, ainsi
que celles attribuées aux fins de financement de certaines
infrastructures de loisirs feraient l'objet de coupures en vertu d'un plan de
récupération pour l'année 1983-1984 dévoilé
par le président du Conseil du trésor.
En un mot, les grands rêves réalisés à coups
d'improvisation reliés à une philosophie d'accessibilité
facile et peu dispendieuse se transforment peu à peu en esprit
corporatiste où seuls les mieux nantis pourront s'offrir le loisir, du
fait de leur revenu plus élevé. Jusqu'à un certain point,
cela est dommage que les erreurs politiques et administratives commises depuis
1976 priveront nombre de Québécois de leurs activités
favorites. Le mythe entretenu par l'actuel gouvernement depuis bientôt
six ans, selon lequel la nature et les ressources naturelles du Québec
peuvent et doivent être accessibles à tous, est ainsi
crevé.
Nous simplifions de cette façon la fraude intellectuelle à
laquelle nous a confrontés le Parti québécois: à la
suite d'énoncés de principes, marqués au coin de la
démocratie et de la générosité publiés
dans un livre blanc en 1979, on avait omis de mentionner que l'offre ne
pourrait jamais rencontrer la demande des consommateurs de la faune et de la
nature.
Du même coup, M. le Président, je crois avoir touché
un point majeur qui sépare les deux principaux partis
représentés à l'Assemblée nationale. A tort, le
Parti libéral du Québec a été perçu comme
celui regroupant des militants dénués de toute philosophie
sociale en matière de loisirs. Si l'on prend le temps de lire les
discours libéraux, aussi bien sur le loisir culturel que sportif, on se
rendra compte que l'articulation de toutes ces politiques faisait l'objet de
récriminations de notre part. Dans le cas particulier de la politique
des zones d'exploitation contrôlée, notre bataille portait
davantage sur la nécessité d'ouvrir lesdits territoires de
façon progressive. Encore là, le temps nous donne raison car,
comme prévu, l'offre ne rencontre plus la demande sur le seul plan
financier de cette opération de "déclubage". D'aucuns ont,
d'ailleurs, qualifié la volte-face effectuée par le gouvernement
de "retour pur et simple aux clubs privés". (10 h 45)
Somme toute, il a fallu la sévérité de la crise
économique pour venir à bout de ce gouvernement et le rappeler
à l'ordre au strict plan de sa gestion désastreuse. Cependant, en
matière de faune aquatique et végétale, une autre crise se
dessinait au fur et à mesure de l'application des politiques où
on a fait fi des principes de base pour ce qui est de l'équilibre
écologique. Il faut avoir assisté aux différents
congrès du monde de la faune et du loisir en général, M.
le Président, pour se rendre compte jusqu'à quel point la
crédibilité gouvernementale est minée. Relativement
à la protection de la faune, il est évident que le dernier
congrès de gestionnaires des zones d'exploitation contrôlée
ne rejoint pas les vues du présent gouvernement. Souhaitons, en passant,
que l'oreille du nouveau ministre du Loisirs, de la Chasse et de la Pêche
soit plus attentive aux inquiétudes et aux problèmes vécus
par les gestionnaires des ZEC.
Depuis l'entrée en vigueur de cette nouvelle politique, en effet,
le présent gouvernement a cru que la signature de protocoles d'entente,
à laquelle seraient rattachés des moyens de contrôle,
aurait suffi à équilibrer le système écologique de
nos forêts et cours d'eau québécois. Or, aujourd'hui, force
est de constater que le monde animal et végétal, demeuré
insensible aux visées social-démocrates du gouvernement, prendra
du temps à se remettre des excès de consommation à la
suite de négligence au plan de l'entretien des infrastructures et de la
régénération des espèces.
Pour leur part, les gestionnaires des ZEC et des ZAC sont à bout
de souffle.
Passe encore que le seuil de rentabilité de leurs
activités n'ait pas été atteint, empêchant du
même coup toute expansion ou amélioration des équipements
mis à la disposition des usagers sportifs, mais nous condamnons
par-dessus tout la performance du gouvernement dans son incapacité de
perpétuer ce sens des valeurs de bénévolat et de
sensibilisation à la protection de la faune qui, quoi qu'on en dise en
1982, existait avant l'ouverture des territoires de chasse et de
pêche.
En ce sens, le nouveau ministre aura besoin de beaucoup d'appui des
milieux concernés pour l'aider à survivre dans cette
mosaïque mise en place depuis l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois. On sait que la période de restrictions
budgétaires affecte déjà les ressources allouées
aux fins de récréation, laquelle se traduit par un effort fiscal
plus grand pour les bénéficiaires, après leur avoir fait
miroiter le mythe de l'accessibilité à bon compte.
Dernièrement, l'ancien ministre allait jusqu'à remettre en cause
le principe de subvention d'équilibre budgétaire dans le cadre de
la politique des ZEC. D'ailleurs, à la lumière des articles parus
dans les différents médias locaux et régionaux
consacrés aux sports et aux loisirs, il est clair que le degré de
déception et d'insatisfaction demeure élevé
vis-à-vis du ministre...
M. Chevrette: Du ministère.
M. Houle: Du ministère, pardon. Le ministre peut donc
s'attendre à devoir se confronter à de dures
réalités dont nous faisions part, par exemple, lors de la
dernière séance des crédits de son ministère pour
l'année financière 1982-1983. Nous soulignons aussi qu'à
notre connaissance il n'était nullement question, lorsque fut
abordée la question des activités pour l'année à
venir, d'une mise en place de politique en matière d'habitats fauniques.
De là à penser que cette intention subite du ministère
viserait peut-être à réparer les bévues
conséquentes à la mise en place des ZEC, il n'y a qu'un pas. Au
cours des étapes subséquentes, le contenu et la portée de
la politique d'habitats fauniques confirmeront ou non des
appréhensions.
M. le Président, permettez-moi, si vous voulez bien, de passer la
parole à la députée de Chomedey pour la suite. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: M. le Président, je ne recommencerai pas les
félicitations. Mon collègue a été d'une grande
générosité envers le nouveau ministre. Je les
laisserai
s'arranger ensemble puisqu'il est porte-parole de cette commission
parlementaire.
J'aimerais parler des audiences que nous avons. Nous aimerions
certainement obtenir des éclaircissements de la part du ministre pour
nous assurer que nous parlons tous le même langage. Comme pour tout
projet politique, les agents des milieux concernés devront, une fois de
plus, s'habituer à un vocabulaire recherché, étant
déjà compris, que la devise pour les prochaines années se
résume tout simplement par "faire plus avec moins".
En premier lieu, quelques intervenants invités à cette
commission vont se référer à un projet de loi en
matière d'habitat faunique. Dans certains cas, on va jusqu'à
souhaiter que certains articles de cedit projet de loi soient modifiés,
tandis que, dans d'autres, on émet des réserves sur la
philosophie avancée par ce projet. Est-ce que le ministre nous aurait
réservé une primeur en cours d'audiences, sans que l'Opposition
ait eu vent d'un projet de loi? Sinon, le ministre pourrait-il nous confirmer
si, à un moment donné, une "ébauche" de loi circulait au
sein de son ministère? À notre connaissance, la documentation
disponible pour ces audiences se résumait à un document
synthèse de ce "projet de politique" précédé d'une
déclaration ministérielle, le tout appuyé par divers
documents techniques et statistiques sur la faune.
En second lieu, tout laisse croire qu'une certaine confusion s'est
installée aussi en ce qui concerne les termes. Par exemple, lorsqu'on
parle de "zonage faunique", comme en font foi certains chroniqueurs sportifs et
quelques intervenants, faut-il entendre par là que le ministre
réfléchit sur une façon nouvelle de découper
l'espace géographique du territoire québécois? Nous
croyons nécessaires des explications supplémentaires. De ce
côté nous estimons "surzoné" le territoire du
Québec, si l'on inclut les autres réformes mises de l'avant par
certains de vos collègues. L'Environnement, l'Agriculture, les Affaires
culturelles, les Affaires municipales constituent les principaux exemples
où l'accessibilité a maintes fois été remise en
cause à la suite des nombreuses réglementations, empêchant
systématiquement le développement de notre territoire et
multipliant les litiges entre les citoyens et chacun des ministères.
Sur ce zonage faunique, peut-être en gestation, l'Opposition aura
plusieurs questions et réserves, compte tenu des problèmes de
coordination et d'application qui émergeront. Par la même
occasion, le ministre pourrait peut-être nous faire part des principes
qui le guideront dans le cas de cette politique en matière d'habitats
fauniques pour ce qui est de la coordination de ces actions avec ses autres
ministères, incluant ou non un projet de zonage faunique. Son
prédécesseur en avait glissé un mot dans sa
déclaration ministérielle, sans toutefois nous indiquer de quelle
façon, par exemple, il entendait rapatrier des juridictions qu'il
jugerait utiles pour administrer une telle politique, juridictions actuellement
détenues par d'autres ministères impliqués dans la
conservation de la faune, comme celui de l'Énergie et des Ressources.
Nul n'ignore que le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation éprouve des difficultés majeures lors que le
temps est venu de choisir entre la protection agricole et le
développement du territoire. En fait, l'articulation des politiques et
programmes entre les ministères constitue la cheville de toute politique
qui en déterminera l'échec ou le succès. Avant que les
citoyens aient à payer un prix élevé, sans doute
aimeraient-ils en savoir plus long, eu égard au contexte
d'austérité où l'efficience des ressources disponibles
demeure le défi à réaliser.
Tout compte fait, M. le Président, les intervenants qui ont bien
voulu consacrer de leur temps pour nous présenter le résultat de
leur travail seront intéressants. Leurs témoignages nous
permettront d'apprécier de façon bien pratique le travail
entrepris par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, depuis
qu'il a donné le feu vert à une transformation des philosophies
et mentalités des agents du milieu. Il est indéniable qu'une
telle mutation n'était pas souhaitée de façon à la
fois aussi percutante et bouleversante au plan des habitudes acquises pour les
adeptes sportifs et les adeptes du plein air.
Ensuite, de cette présente discussion émergeront au grand
jour les intérêts de ces mêmes agents. En effet, la
protection de nos habitats fauniques et aquatiques constitue une fin en soi. Il
y a fort à parier que les moyens envisagés pour y parvenir seront
aussi nombreux qu'il y a d'intervenants. Ces intérêts pourront
varier sensiblement selon qu'il s'agira d'individus ou de groupes voués
à l'aspect commercial de notre potentiel faunique ou à son strict
aspect protection. Il reviendra aux politiciens de chercher une voie
susceptible de tamiser ces intérêts nécessairement
divergents.
Pour ce faire, ils devront penser en termes de maintien de la
qualité de la vie de tous les citoyens compte tenu de leur choix
d'activités dans un siècle dit de loisirs. C'est peut-être
cela qu'on appelle le bien commun qui, à son tour, indique une
façon de gouverner de manière que les attentes du milieu
convergent le mieux possible avec l'état de la situation.
D'ores et déjà, tous semblent unanimes à souhaiter
que le Québec revienne à un point d'équilibre. En bout de
ligne, la demande doit rencontrer l'offre, quitte à devoir
atténuer les appétits. L'Opposition se
dit prête à apporter des solutions susceptibles d'atteindre
cet objectif. Le Parti libéral du Québec estime, de plus, que le
souci écologique et l'esprit de conservation de la faune sont
suffisamment mûrs pour qu'un encadrement souple et efficace leur soit
proposé.
Nous retenons aussi en début d'audiences que le projet d'habitat
faunique dépasse le simple concept de protection et de conservation de
la faune. Il implique, comme l'indiqueront nos intervenants, un changement de
mentalités. Il induit également l'obligation de plusieurs autres
ministères québécois de redéfinir leur juridiction
en cette matière autant que le contenu même de leur programme, les
forçant ainsi à se soumettre à une concertation nouvelle.
Le document gouvernemental prend un soin particulier à esquisser les
mesures adoptées dans d'autres provinces et pays. Il semble à cet
égard que le Québec accuse un certain retard à
acquérir cette conscientisation que la faune est une constituante de
notre environnement périssable et non renouvelable lorsque
laissée pour compte.
Cependant, il faut garder à l'esprit que l'exploitation de nos
ressources naturelles provenant du sol et sous-sol québécois
faisait partie intégrante de notre patrimoine. En effet, les
activités qui y étaient reliées, en plus de mobiliser une
main-d'oeuvre qualifiée et nombreuse au Québec, comptaient pour
une bonne part de notre produit national brut. Au début de la
Confédération, par exemple, il faut se rappeler que la balance
commerciale du Canada, incluant le Québec, puisque les statistiques ne
pouvaient être isolées par province, était
déficitaire. Je cite: "Les produits animaux et agricoles, de même
que le bois représentaient plus des trois quarts de la valeur des
exportations." Un peu plus tard, vers 1920, on recensait pour la seule province
de Québec de 3000 à 5000 bûcherons. En plus de nous offrir
des marchés intéressants en ce qu'ils augmentaient nos
performances pour demeurer concurrentiels, le Québec était
reconnu comme une province riche sur le plan de la qualité de son
produit.
Ce qui était vrai au début de la
Confédération s'est aussi poursuivi trop longtemps, sans que les
gouvernements successifs croient à l'urgence de protéger la
nature. Ce n'est qu'au gré des transformations du marché et des
mentalités, vouées à un nouvel esprit écologique et
à la croyance de la pénurie imminente de nos ressources, que sont
nées les mesures disparates identifiées dans le document.
À notre avis, le Québec n'a pas à éprouver
un quelconque sentiment de culpabilité à l'égard de
l'épuisement d'une partie de nos ressources. Nous estimons, au
contraire, qu'elles furent exploitées pour et par des
Québécois, nonobstant la participation parfois indue des
multinationales. On ne saurait tout de même blâmer nos
ancêtres de n'avoir pu prévoir une telle issue. À cette
époque, le manque d'outils explique le peu de contrôle des
ponctions effectuées dans l'environnement québécois.
Enfin, et nous conclurons de cette façon, M. le Président, les
mesures législatives et administratives furent adoptées au pays
et ailleurs dans le monde à des époques diverses où la
crise économique n'avait pas atteint un seuil aussi crucial
qu'aujourd'hui.
C'est pourquoi l'établissement de programmes dispendieux et
soutenus à l'aide d'une lourde bureaucratie ne saurait avoir sa place
aujourd'hui. Par ailleurs, nous acquiesçons à toute idée
positive comme un renforcement d'un programme de renouvellement forestier,
actuellement en cours, lequel fait appel à la contribution de tous les
agents du milieu: gouvernements, compagnies, propriétaires de
boisés privés. Nous pensons aussi à d'autres formes de
mesures incitatives, telle la tenue d'un concours annuel où le meilleur
protecteur de l'habitat faunique québécois serait souligné
de façon particulière sur une base nationale, régionale ou
locale. Nous nous méfierons, par ailleurs, de toute opération
d'envergure dont les visées seraient strictement électoralistes
ou nullement fondées sur le plan du bon sens, alors que le
présent gouvernement éprouve des difficultés à
acquitter ses comptes courants.
Cela étant dit, M. le Président, les présentes
audiences offrent à tous les intervenants voués à la
protection de nos habitats fauniques une première occasion de
vérifier les actions gouvernementales et de franchir avec eux les
sentiers battus trop légèrement jusqu'à maintenant. Elles
permettent enfin d'amorcer une réflexion d'ensemble à laquelle
nous serons heureux de souscrire de façon aussi positive et
réaliste que possible.
Le Président (M. Bordeleau): Merci,
Mme la députée de Chomedey. M. le ministre, vous avez des
commentaires ou des réponses?
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: II m'a été posé quelques
questions. Tout d'abord, je voudrais vous remercier de vos
félicitations. Sans crainte, je les prends parce qu'après avoir
accordé la chance au coureur je sais bien ce qui m'attend. Je veux
profiter au moins du moment qui m'est donné pour les savourer. Je
répondrai à quelques-unes de vos interrogations avant de
permettre à nos gens de témoigner. Tout d'abord, je vous dirai
qu'en ce qui regarde le zonage faunique il
n'est pas question dans notre esprit d'en arriver à un
découpage du Québec style zonage agricole, si ça peut vous
rassurer. Je pense qu'on se doit, par exemple, d'avoir les pouvoirs de sauver -
je donne un exemple -un ravage de chevreuils qui serait menacé par une
coupe de bois. Si le ministère ou le ministre n'a pas les pouvoirs de
réglementer et d'imposer sa volonté, c'est un non sens. Il faut
se donner les outils nécessaires. Il faut donner au ministère les
outils nécessaires. (11 heures)
Deuxièmement, il faut également compter sur une
réglementation générale pour une protection à la
fois minimale et maximale face à certaines espèces. Il y a des
espèces qui sont menacées d'extinction. Je pense qu'il faut une
réglementation qui nous permette de légiférer ou de
décréter une zone d'extrême conservation, par exemple tel
territoire, qu'il soit public ou privé; sinon, on risquerait de voir
disparaître certaines espèces. C'est dans ce sens-là qu'il
nous faut une réglementation qui nous permettrait d'agir en faveur de la
protection même, de la conservation de la faune.
En ce qui regarde la concertation, ce n'est pas d'aujourd'hui. Mme la
députée de Chomedey a été ministre; elle sait
pertinemment qu'il existe toujours un certain contentieux entre certains
ministères. Ce sera à nous de nous concerter entre nous, au
niveau du gouvernement, pour assurer que le texte législatif
réponde le plus adéquatement possible aux visées du
ministère. Cela, c'est mon boulot et j'entends bien le faire le mieux
possible.
Pour ce qui est des petites attaques de notre ami de Berthier, qui
prétend que le socioculturel sera coupé, je lui dirai tout de
suite que, lorsque M. Bérubé a annoncé les coupures
budgétaires, ce sont des orientations générales qu'il a
annoncées. Lorsque vous verrez la budgétisation par programme,
vous verrez que le loisir socioculturel a peut-être augmenté. Il
s'agit, bien souvent, de certains éléments à
l'intérieur d'un programme qui ont peut-être énervé
certaines associations ou certains groupements qui s'occupent du loisir
socioculturel. Mais vous verrez qu'au programme socioculturel il y a une
série d'éléments et ceux qui ont été
affectés ne sont pas ceux qui touchent directement les organismes. Donc,
en temps et lieu, je vous le ferai connaître et vous serez sûrement
satisfait, M. le député de Berthier.
Maintenant, faire plus avec moins -c'est avec un sourire en coin que Mme
la députée de Chomedey me l'a sorti - c'est vrai que je me suis
plu à le dire depuis le début. Je suis surpris que l'Opposition
n'adhère pas à ce principe, puisque, quand on ne coupe pas, on
est des dépensiers et, quand on coupe, on détruit tout. Il faudra
que vous vous branchiez à un moment donné et que vous nous disiez
ce que c'est véritablement que de gérer comme du monde. Je pense
qu'on doit couper dans l'accessoire et essayer de sauvegarder l'essentiel. En
ce qui me concerne, je pense que c'est un véritable défi qu'on a,
c'est vrai, dans les années que nous traversons: tenter le mieux
possible de faire le maximum, faire preuve d'imagination, mais réaliser
tout autant avec moins de ressources. Je me plais à le dire et je
continuerai à le dire et je le dirai d'autant plus souvent que
l'Opposition me le dira avec un sourire en coin.
Je pense bien que j'ai fait le tour, à moins qu'il n'y ait
d'autres questions précises.
Mme Bacon: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Je serais tentée, M. le Président, de
demander au ministre - quand il dit "Faire plus avec moins", ça le fait
aussi sourire - si c'est ce qu'il voulait dire quand il a dit: "Agir au risque
de me tromper".
M. Chevrette: Ce n'est pas du tout la même chose.
Mme Bacon: Je pense qu'il ne faudrait pas qu'il fasse beaucoup
d'erreurs au moment où il agit.
M. Chevrette: Non, ce n'est pas ça. Vous mêlez deux
choses. Vous avez le droit.
Mme Bacon: Non, non. Je vous pose la question. Je veux quand
même que vous expliquiez votre façon d'agir.
M. Chevrette: Quand le journaliste titre: "Agir au risque de
faire certaines erreurs", c'est que je ne me compare pas à certains
politiciens. J'en ai connu dans les vieux partis qui ont siégé
pendant 25 ans et qui n'ont pas ouvert la trappe à l'Assemblée
nationale. J'en connais également à la Chambre des communes qui
sont là depuis 20 ans et qui n'ont pas encore ouvert la trappe, sauf
pour se lever pour voter. J'ai dit que je me classais parmi ceux qui se
permettaient d'avancer leurs idées, quitte, bien souvent, à faire
des erreurs, mais qui ont la décence et l'humilité de les
reconnaître et de recommencer dans la vraie voie. Je pense qu'agir
comporte nécessairement un risque d'erreur. Celui qui n'agit pas ne fait
pas d'erreur, mais il ne fait rien, il ne fait pas évoluer une
société.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Juste pour terminer cette intervention, j'aimerais
dire au ministre qu'il ne faudrait pas que ses erreurs coûtent trop cher,
parce qu'il ne pourrait pas faire beaucoup plus avec moins.
M. Chevrette: C'est justement, si je veux faire plus avec moins,
c'est que les erreurs seront en moins.
Mme Bacon: Alors, qu'il continue, mais il ne faudrait pas que
cela coûte trop cher.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela va pour les
remarques préliminaires. Nous sommes donc prêts à entendre
les personnes et les organismes.
M. Chevrette: Je voudrais aussi remettre ceci. Je m'excuse.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: On a fait allusion à un document de travail
qui a circulé; je m'excuse, il n'y a rien de caché à mon
ministère et je vous le remets.
Une voix: Merci.
Une voix: Publiquement, c'est encore mieux.
M. Chevrette: En voulez-vous d'autres?
Le Président (M. Bordeleau): Alors, je vous rappelle
simplement l'usage qui existe lorsque l'on reçoit des personnes et des
organismes. Comme nous avons huit organismes à entendre aujourd'hui,
afin que tout le monde puisse avoir son temps et ne pas trop décaler le
temps des dernières personnes, normalement, on s'en tient à peu
près à une heure par mémoire. Donc, on laisse environ 20
minutes aux personnes pour présenter leur mémoire et il y a 20
minutes d'accordées au parti ministériel et 20 minutes à
l'Opposition pour poser des questions. Bien sûr, cela peut varier un peu,
mais je demanderais aux organismes, ainsi qu'aux gens autour de la table
d'essayer de respecter cet horaire afin qu'on ne pénalise pas les
derniers en fin de soirée.
Alors, j'invite donc, dès maintenant, les représentants de
la Fédération québécoise de la faune à
s'avancer. Le représentant est M. Jean-Marie Laliberté. Je
demanderais à M. Laliberté de présenter les personnes qui
l'accompagnent. Il s'agit du mémoire 28M.
Fédération québécoise de
la faune
M. Laliberté (Jean-Marie): M. le Président, je me
présente, Jean-Marie Laliberté, président sortant de la
Fédération québécoise de la faune. Je
représente ici le président, M. Laurin, qui est retenu à
l'extérieur à cause de son travail. Je suis accompagné,
à ma droite, de M. Hardy, secrétaire général de la
fédération; à mon extrême droite, de M. Tremblay,
vice-président exécutif du même organisme, et à ma
gauche, de M. Boivin, vice-président de secteur selon nos
structures.
M. le Président, M. le ministre, MM. les représentants de
l'Opposition, nous voudrions d'abord offrir à M. Chevrette nos
félicitations pour sa toute récente nomination et lui souhaiter
tout le succès possible dans sa nouvelle carrière. Au nom de la
Fédération québécoise de la faune, je lui offre
toute la collaboration qu'il nous sera possible de lui apporter dans la
poursuite de nos objectifs communs.
Le présent mémoire est le fruit d'une consultation
provinciale, régionale et locale qu'a effectuée, depuis
l'été dernier, la Fédération
québécoise de la faune et représente, donc, les fruits du
travail de très nombreux bénévoles. Je tiens donc à
remercier le ministre et les membres de la commission de leur attention.
M. le Président, la Fédération
québécoise de la faune existe depuis 1945. Comme son nom
l'indique, la fédération est un organisme de regroupement
d'associations de toutes les régions du Québec. Deux cent
cinquante associations adhèrent actuellement à la
fédération et représentent directement ou indirectement
plusieurs centaines de milliers de chasseurs, de pêcheurs et d'amateurs
de plein air du Québec. Les structures de notre fédération
permettent à chacun des membres et à toutes les tendances de
s'exprimer; notre vie démocratique comporte, toutefois, des lourdeurs
inhérentes à un tel fonctionnement, mais nous pensons qu'elles
sont largement compensées par la valeur très
représentative des consensus que nous réussissons à
dégager.
Pour vous faire apprécier les valeurs que nous défendons
et qui nous motivent, je vous présenterai les grandes étapes de
l'histoire de notre mouvement; elles correspondent, d'ailleurs, à celles
qui ont marqué le milieu de la chasse et de la pêche au
Québec durant la même période. Au tout début, les
pionniers de la fédération ont, sans le dire, voulu faire
reconnaître et consacrer l'importance de nos activités
traditionnelles de chasse, de pêche et de plein air, en créant une
institution qui en porterait le nom. Aujourd'hui, avec des mots
différents de ceux de l'époque, nous dirions qu'ils ont voulu
faire reconnaître le fondement culturel, pour notre société
qu'ont été et que sont encore aujourd'hui ces activités
traditionnelles. Dans la période d'après-guerre, le Québec
a connu une industrialisation très accélérée; puis,
le nombre de chasseurs et de pêcheurs s'est mis
à augmenter très rapidement, de sorte que ces facteurs
combinés ont éveillé pour la première fois des
craintes au sujet de la pérennité de certains
éléments de notre faune.
La fédération comprit alors qu'il lui fallait
désormais travailler à la conservation de cette richesse et passa
à l'action. Transformée en groupe de conservation, la
fédération a réclamé des autorités qu'elles
protègent cette ressource et obtint, de fait, que des mesures
législatives protègent notre faune. Puis, au fil des ans, de
l'évolution de notre société et de ses impératifs
économiques, la mission de conservation de la FQF en vint à se
préciser encore davantage.
Depuis plusieurs années, la conservation de la faune veut dire
plus que la simple conservation du gibier. La conservation de la faune implique
la conservation de toutes et chacune des composantes de notre environnement et
la FQF prétend que le droit des citoyens du Québec à ce
patrimoine ne peut être aliéné. Selon nous, L'État
a, à cet égard, une responsabilité primordiale. En effet,
à quoi cela sert-il que la Fédération
québécoise de la faune et des dizaines d'autres organismes du
milieu multiplient les interventions éducatives, de
récupération ou de pression si l'État, au nom du bien
collectif, ne reconnaît pas lui-même ces éléments de
notre patrimoine comme du plus haut intérêt public?
M. le Président, la Fédération
québécoise de la faune croit que toute approche au redressement
de l'équilibre naturel qui ne serait pas globale et systématique
n'est pas acceptable; car, au point où nous en sommes rendus,
l'interaction et le dynamisme des agents perturbateurs dans l'environnement
sont tels qu'aucune intervention ponctuelle n'a de valeur à moyen et
long terme.
Bien pis, se contenter de demi-mesures n'a d'autre effet que d'accentuer
l'irréversabilité de certains processus de dégradation de
l'environnement et ne nous amènera, dans cinq ans, dix ans ou plus,
qu'à constater qu'il est trop tard. Bien sûr, le Québec est
vaste et ses ressources considérables, mais ne rien entreprendre pour
réparer les dégâts des 30 ou 50 dernières
années, c'est déjà compromettre ce qui reste. C'est aussi
agir, collectivement, bien mesquinement à l'égard des
générations à venir.
M. le Président, le 21 juin dernier, le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche nous annonçait son intention de mettre en
oeuvre de nouvelles orientations à l'égard de la protection de
notre patrimoine faunique, dont l'une des plus importantes serait la protection
des habitats fauniques. Ce faisant, le ministre rejoignait le voeu,
exprimé par la FQF depuis plusieurs années, auprès de
plusieurs intervenants dont le MLCP lui-même, que nous placions au sommet
de nos priorités communes la protection des habitats fauniques.
Le ministre rendait publique, à la même date, une
étude sérieuse sur le sujet. Préparée par une
équipe multidisciplinaire et multiministérielle de
fonctionnaires, cette étude, dite préliminaire, fait le tour de
la question, présente des analyses pertinentes et valables de la
situation et propose au gouvernement une série d'actions d'ordre
politique, législatives et administratives qui lui permettront d'assumer
des responsabilités nouvelles à l'endroit des habitats
fauniques.
Nous nous réjouissons, M. le Président, de l'étape
que vient de franchir notre gouvernement en nous dotant d'un premier document
de travail qui saura être utile à l'ensemble des
intéressés et des intervenants dans ce domaine. Nous nous
réjouissons, également, du leadership dont fait preuve le
ministre dans ce dossier, difficile pour lui à plusieurs égards.
Cependant, nous sommes loin de nous réjouir quant au but ultime que nous
poursuivons, car il est loin d'être atteint.
Plusieurs questions demeurent en plan, M. le Président. Les
consensus sur les actions à être entreprises, le partage des
initiatives et des responsabilités ne sont pas encore établis
mais, plus important encore la faisabilité des projets que nous
élaborerons pour en arriver éventuellement à une
protection effective des habitats fauniques, à l'intérieur d'un
échéancier adéquat, n'est pas encore
démontrée. Même les recommandations des fonctionnaires, si
raisonnables qu'elles nous paraissent, peuvent ne pas être
réalisables pour toutes espèces de raisons. (11 h 15)
En dépit de ces difficultés considérables,
avouons-le, qui nous attendent, nous acceptons à la
Fédération québécoise de la faune, de jouer le jeu
que nous propose le ministre. Nous l'appuierons dans la mission
pédagogique qu'il a entreprise. Nous participerons plus aux
consultations qu'il voudra tenir. Nous nous associerons à ses
démarches quand elles coïncideront avec les responsabilités
que nous pourrions devoir assumer dans ce dossier. Mais nous conserverons notre
indépendance, car elle nous permettra de ne jamais trahir le but que
nous poursuivons. Nous refuserons tout compromis trompe-l'oeil qui
déjouerait le but de la réforme que nous désirons voir
réaliser ou qui en atténuerait sensiblement la portée.
Nous voudrions, de notre côté, obtenir des
précisions de la part du gouvernement sur sa propre implication dans ce
dossier. Dans sa déclaration du 21 juin dernier, le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche laisse entendre qu'il a reçu l'appui
des ministres de l'Environnement et de l'Énergie
et des Ressources dans sa démarche visant à articuler une
politique à l'égard de la protection des habitats. L'étude
qui nous a, par ailleurs, été présentée, a
été réalisée par des fonctionnaires des trois
ministères. Cela veut-il dire que ces trois ministres et ces trois
ministères sont officiellement associés, du plus haut au plus bas
échelon, pour réaliser les recommandations du groupe de travail
pour la protection des habitats? Sinon, quel est le vrai tableau de la
situation au gouvernement? Sur quoi le milieu peut-il compter dans ses
démarches pour faire aboutir ce dossier? C'est très
important.
Dans l'image du concert harmonieux qu'on semble nous servir, il y a,
à notre avis, une fausse note: c'est l'absence à peine
chuchotée du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, un intervenant de taille dans le sujet qui nous
intéresse. Nous souhaiterions donc que le ministre nous apporte des
précisions à ce sujet afin que notre analyse de la situation soit
la plus exacte possible.
M. le Président, il est une remarque que nous tenons à
faire dans le cadre de nos commentaires sur le rapport des fonctionnaires
traitant de la protection des habitats fauniques. Comme vous l'aurez
remarqué vous-même, le nerf de leur étude se situe au
chapitre des recommandations. Or, ces dernières ne se regroupent que
sous deux titres, soit, d'une part, les actions gouvernementales et, d'autre
part, les actions ministérielles. Bien que ne doutant pas de la bonne
foi de ces fonctionnaires, nous éprouvons, cependant, en raison de la
formulation gouvernementale, l'impression que le milieu est
écarté, repoussé dans les galeries et condamné
à être à la remorque du gouvernement dans le grand plan de
la protection des habitats. Nous faisons cette remarque dans l'espoir que l'on
nous réponde que cette apparente mise de côté des
intervenants du milieu est involontaire et que l'on procédera
immédiatement au rajustement qui s'impose. Car le gouvernement
lui-même ne peut ignorer que c'est pour répondre aux pressions du
milieu qu'il a mis en oeuvre les mesures de protection qui sont aujourd'hui
inadéquates. Il ne peut, non plus, ignorer les contributions importantes
à la conservation de la faune et à la protection des habitats de
groupes comme Canards Illimités, pour ne citer qu'un exemple.
Bien sûr, le gouvernement nous invite à commenter les
orientations qu'il est à dessiner sur ses tables de travail, mais ces
orientations donnent l'impression que le milieu n'aura qu'un rôle passif
à jouer, qu'il sera spectateur de l'épopée
gouvernementale, alors qu'il en est l'instigateur. Nous pensons que cette
remarque représente l'opinion d'un éventail d'intervenants du
milieu bien plus large que notre seule fédération. Nous croyons,
donc, qu'il sera plus juste et aussi bien plus avantageux pour l'objectif
commun que nous poursuivons d'associer étroitement les
représentants du milieu tant à l'élaboration des
stratégies à développer qu'à la formulation et
à la mise en oeuvre des plans d'action partagés qui en
découleraient. Cela correspondrait davantage à la
réalité dynamique du milieu; l'effort commun serait mieux
partagé et plus soutenu.
Pour parler maintenant du mémoire gouvernemental, nous avons le
plaisir de reconnaître que les objectifs poursuivis par l'étude
des fonctionnaires rejoignent certaines préoccupations de la
fédération. Quant à l'étendue de protection qui est
suggérée, l'opinion voulant qu'il soit impossible de
protéger tous les habitats est réaliste et les propositions
relatives à la protection générale de l'ensemble des
habitats essentiels et à la protection particulière des cas
présentant le plus d'intérêt rallient notre
adhésion.
Examinons maintenant, une à une, les recommandations de cette
étude. En premier lieu, "que le gouvernement reconnaisse l'importance
des habitats de la faune." La Fédération québécoise
de la faune est d'accord avec cette recommandation, au nom même de ce
qu'elle défend depuis plus de 35 ans.
Deuxième recommandation: "Que le gouvernement adopte une
politique de conservation des habitats." La Fédération
québécoise de la faune est d'accord avec cette proposition qui
découle de la première, mais insiste pour que les intervenants du
milieu soient associés, d'égal à égal, à son
élaboration et qu'ils participent dans la mesure de leurs moyens (qui
pourraient être accrus, d'ailleurs, par le gouvernement) à sa mise
en oeuvre.
En troisième lieu, "que le gouvernement précise les
responsabilités des ministères et des autres gouvernements (les
gouvernements municipaux et régionaux) à l'égard de la
protection des habitats." La Fédération québécoise
de la faune est d'accord avec cette recommandation, si l'on tient compte de
l'inclusion du milieu dans la proposition telle que formulée à la
deuxième recommandation.
Quatrième recommandation: "Que le ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche se voie confier la responsabilité
d'assurer, par voie législative, une protection générale
aux habitats à laquelle toute personne sera soumise." La
fédération est d'accord avec cette proposition.
En cinquième lieu, "que le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche puisse assurer une protection temporaire d'habitats
particuliers menacés." La Fédération
québécoise de la faune est d'accord avec cette proposition, mais
exige que cette mesure d'intervention d'urgence soit incluse
immédiatement, M. le Président, à la Loi sur la
conservation, sans attendre la formulation du chapitre complet sur la
protection des
habitats.
Sixièmement, "que le ministère du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche prévoie des mesures compensatoires pour les
propriétaires privés consentant à protéger des
habitats fauniques admissibles." La Fédération
québécoise de la faune est d'accord avec cette proposition. "Que
le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche instaure un
fonds mixte, complémentaire à son budget, à des fins
compensatoires, autres que fiscales et géré
indépendamment." La Fédération québécoise de
la faune est d'accord avec la mise sur pied d'un fonds spécial aux fins
d'intervention rapide ou essentielle pour la protection d'habitats ou
même aux fins de développement à moyen et à long
terme. La Fédération québécoise de la faune croit
qu'un fonds mixte (public et privé), M. le ministre, répondrait
le mieux aux objectifs que nous voulons atteindre. La fédération
diffère, cependant, d'opinion quant au mode de financement de ce fonds
dont elle n'accepte pas déjà la nature strictement
gouvernementale.
Pour ce qui est des utilisateurs, la FQF est généralement
d'accord avec le principe voulant que l'utilisateur assume sa part dans le
partage des frais occasionnés par ses activités; mais dans le cas
particulier qui nous occupe, nous nous demandons à quoi peuvent bien
servir et ont bien pu servir les millions de dollars récoltés
depuis des années par le ministère sous forme de permis de
chasse, de pêche et de piégeage. Selon nous, à payer
largement le papier sur lequel ils ont été imprimés et la
bureaucratie nécessaire à son administration, si largement,
croyons-nous, que ces dizaines de millions ont dû servir à payer
d'autres choses que des aménagements réalisés pour la
protection et la conservation de notre patrimoine faunique national. Dans ces
conditions, nous nous élevons contre toute tentative qu'aurait le
ministère de surtaxer les chasseurs et pêcheurs du Québec,
comme le propose l'étude du MLCP.
Le fonds Fédération québécoise de la faune.
À notre avis, le fonds spécial à mettre sur pied devrait
comporter une mise de fonds initiale du gouvernement à être
renouvelée sur une base annuelle et correspondant à un
pourcentage à établir du prix actuel des permis de chasse et de
pêche.
Nous renouvelons au ministre notre proposition faite le printemps
dernier, au moment où il réintroduisait le permis de pêche;
celle-ci consistant en une offre d'assurance moyennant un léger
supplément au prix du permis que ferait notre fédération
à tout acquéreur de permis. Outre les indemnités et les
frais administratifs inhérents à un tel service, les fonds ainsi
recueillis serviraient intégralement et exclusivement à la
protection et à l'aménagement des habitats. Donc, à
l'effort gouvernemental s'ajouterait la contribution volontaire - c'est bien
souligné - des chasseurs et pêcheurs du Québec qui, en plus
de contribuer directement au financement de l'aménagement d'habitats
fauniques, bénéficieraient d'une protection personnelle
additionnelle en cas d'accidents.
Par ailleurs et enfin, pour compléter le financement de ce fonds
spécial, il faudra faire appel à la contribution volontaire,
là aussi, des grandes entreprises du Québec, dont plusieurs
justement utilisent largement le patrimoine collectif. Toute exclusion de ces
grandes entreprises du Québec au financement d'un tel fonds serait,
à notre avis, socialement et politiquement inacceptable. La gestion de
ce fonds serait confiée à ses contributeurs et serait
indépendante du gouvernement.
Huitième recommandation: "Que le ministère prévoie
des sanctions pour les récalcitrants, incluant l'obligation de
reconstituer l'habitat dans son état initial." La
Fédération québécoise de la faune est d'accord avec
cette proposition et insiste pour qu'elle soit retenue.
Neuvième recommandation: "que le ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche mette l'accent sur l'adhésion populaire
au programme de protection et mette de l'avant une consultation populaire." La
Fédération québécoise de la faune est d'accord avec
cette proposition, mais répète sa suggestion déjà
faite à la commission parlementaire d'associer véritablement les
instigateurs du mouvement auquel répond le ministère à
l'ensemble de la démarche qui nous mènera à la protection
des habitats.
Dixième recommandation: "En ce qui a trait aux ajustements
internes que proposent les fonctionnaires, nous signalons que les suggestions
d'une collaboration accrue avec le milieu et d'une information élargie
vont dans le sens de la FQF, mais, encore une fois, la conception
gouvernementale des relations gouvernement-milieu devrait être vue dans
l'optique que le ministère a presque toujours été à
la remorque du milieu dans le dossier de la conservation de la faune; il serait
souhaitable et même avantageux qu'il envisage maintenant de cheminer avec
des partenaires qui, encore aujourd'hui, sont forts du dynamisme de centaines
et de milliers de bénévoles."
M. le Président, en guise de conclusion au sujet du projet de
protection des habitats fauniques qu'entend enfin réaliser le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, nous voudrions
rappeler que, dans l'esprit même du ministère, nous n'en sommes
qu'aux préliminaires. Par ailleurs, lorsque le rapport que nous avons
étudié propose dans ses buts à poursuivre de stopper
l'hémorragie des pertes d'habitats, il
reconnaît lui-même l'urgence d'intervenir.
Or, comme il faudra mettre encore du temps pour élaborer la
politique à cet égard, pour franchir toutes les étapes de
conciliation à l'intérieur même du gouvernement et pour
partager les rôles et responsabilités des intervenants, nous
répétons au gouvernement qu'il serait plus que sage de profiter
de l'ouverture de la Loi sur la conservation que le ministre s'apprête
à faire prochainement pour inclure à cette loi une mesure
temporaire, que je qualifierais d'urgence, lui permettant d'intervenir pour
stopper temporairement sur des terres privées comme publiques toute
dégradation de l'environnement qui mettrait en péril des habitats
fauniques jugés d'importance.
Ne pas le faire, M. le Président, serait de
l'irresponsabilité, compte tenu de ce qu'il nous a été
donné de vivre depuis quelques années, seulement en termes de
dégradation grave d'habitats fauniques.
M. le Président, nous sommes heureux que le ministre
décide, à ce stade-ci, de réexaminer certains aspects de
la Loi sur la conservation, car plusieurs représentations en ce sens ont
été faites par de très nombreux individus, de même
que par des associations ou organismes dont ils sont membres. Nous comptons
dans ce cas, comme dans tous les autres où nous poursuivons des
objectifs communs, apporter au ministre une collaboration positive et la plus
objective possible. Cependant, nous tenons à être rassurés
de la part du ministre, au sujet de sa démarche. Nous voudrions
l'entendre nous dire que les modifications générales qu'il nous
propose feront l'objet, après cette commission parlementaire, d'une
autre consultation aussi formelle pour nous permettre d'apprécier et de
discuter le texte qui deviendra loi. Je le répète, nous exigeons
une autre commission pour de plus vastes consultations au niveau de la refonte
de ce projet de loi. Car si le ministre est à réviser aujourd'hui
une définition aussi fondamentale que "chasse", c'est que sa
formulation, mal adaptée à la réalité, a
causé bien des ennuis inutiles aux citoyens et citoyennes du
Québec.
Or, le seul document de référence officiel qui nous a
été remis pour formuler nos recommandations à cette
commission est très vague. En effet, il ne fait que définir les
intentions du MLCP et ne nous donne pas de projet de texte définitif de
ces propositions; il nous sera ainsi impossible de nous prononcer
définitivement autrement que sur les principes. Nous croyons, M. le
Président, que le ministre aurait tout intérêt à
soumettre aux intervenants qu'il convie à cette commission parlementaire
les modifications définitives qu'il présentera par la suite
à l'Assemblée nationale afin de profiter de
l'intérêt de bonne foi et des connaissances concrètes de la
réalité que nous lui offrons afin d'éviter toute
répétition d'erreur regrettée ensuite pendant longtemps.
(11 h 30)
Nous vous soumettons maintenant nos commentaires au sujet des projets de
modifications générales de la Loi sur la conservation de la
faune, en rappelant qu'ils ne seront définitifs que lorsque nous en
aurons vu et approuvé le texte. Par économie de temps et pour
nous en tenir à la période de 20 minutes réglementaire,
nous nous mettrons à ne présenter nos commentaires que sur deux
questions qui sont contenues dans ce chapitre, les articles 6 et 7.
Nous désirons cependant que toutes nos remarques soient
consignées au procès-verbal de la commission, avec toutefois une
modification à la remarque 6e, de notre mémoire où il
faudrait lire que la FQF n'est pas d'accord avec la proposition et croit qu'il
s'agit d'un cas d'éducation, point!
L'article 7 des modifications générales à la loi,
c'est servir et vendre de la venaison, poisson ou autre gibier indigène
du Québec. La Fédération québécoise de la
faune rejette cette proposition. De plus, elle s'y oppose de toutes ses
énergies. Ce n'est pas la première fois qu'un assaut de la sorte
est tenté à l'endroit de la faune indigène du
Québec. Ce qui nous surprend c'est qu'il vienne du MLCP lui-même
dans le cadre d'améliorations que l'on veut apporter à la loi de
la conservation.
À notre avis, s'il est une seule mesure de conservation qui ne
doit pas être changée dans l'actuelle loi, c'est bien celle-ci. La
preuve est faite depuis longtemps que les principales espèces de la
faune indigène du Québec sont justement celles qui sont les plus
difficiles à élever en captivité, à cause de leur
caractère de reproductivité, etc., ou en milieu artificiel, par
exemple, la truite mouchetée.
Nous connaissons tous le discours de l'agro-alimentaire sur le sujet et
celui des pourvoyeurs-restaurateurs. Nous savons tous également qu'il
est alléchant pour le grand public. Cependant, pour alléchante
qu'elle soit, cette proposition constitue le premier pas d'une marche qui
deviendra vite une course aux approvisionnements et qui, inévitablement,
accroîtra considérablement la pression sur les espèces
indigènes dont, nous le rappelions, tous connaissent la
fragilité.
Dans ce cas, l'argument voulant qu'une reproduction d'élevage
suffisante décourage les approvisionnements illégaux ne tient pas
parce que, pour soutenir la demande, il faudra y mettre un prix tel que le
gibier naturel sera toujours le plus recherché en raison des coûts
éminemment modiques de prélèvement qu'il
entraîne.
Nous attendons donc que le nouveau ministre, à qui l'on glisse
sans doute une première pelure de banane, assume
vigoureusement ses responsabilités dans ce dossier, pour que
cesse, une fois pour toutes, cette cabale dont on peut dire au mieux qu'elle
est un miroir aux alouettes.
À l'égard des pourvoiries, en ce qui concerne l'article 6,
la Fédération québécoise de la faune désire
faire la remarque suivante: Nous tenons à déclarer notre
intérêt pour le sujet car nous soutenons cette forme
d'activité. Deux raisons nous motivent. Premièrement, elles
facilitent l'accessibilité des Québécois à leur
territoire tout en contribuant à son développement et à sa
mise en valeur; elles entraînent des retombées économiques
importantes et avantageuses pour le Québec, particulièrement
lorsque la clientèle est de l'extérieur. Vos chiffres de ce
matin, M. le ministre, confirment cette affirmation. En ce sens, nous
considérons que les programmes gouvernementaux ne favorisent pas
suffisamment l'essor de celles-ci. Pourtant, il nous semble qu'elles pourraient
contribuer bien davantage aux retombées de l'industrie touristique du
Québec, si une politique gouvernementale cohérente et
articulée était mise en oeuvre.
Toutefois, la FQF tient à ce que les pourvoiries soient d'abord
et avant tout reconnues pour leurs activités de chasse et de
pêche; les interventions de la FQF se limiteront toujours à ce
secteur.
En conclusion, nous sommes globalement satisfaits des modifications
qu'entend apporter à la Loi sur la conservation de la faune le ministre
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, sous réserve, encore une
fois, d'en voir le texte définitif qui sera présenté aux
députés pour adoption.
Le ministre, dans sa déclaration ministérielle du 21 juin
dernier, présentait ces modifications comme l'aboutissement d'un
processus de simplification de la loi aux fins d'en faciliter la
compréhension par les personnes concernées et contribuer ainsi
à une meilleure protection de la faune. En ce sens, cependant, nous
sommes déçus. Déçus que ce processus de
révision annoncé depuis trois ans n'aboutisse qu'à ces
résultats. Bien sûr, entre-temps, le ministère a
développé une pensée au sujet de la protection des
habitats fauniques et c'est là, croyons-nous, que se situe le
véritable effort fait en vue d'approcher globalement, avec
cohérence et réalisme, sa mission de conservation de notre
patrimoine faunique.
Comme nous l'affirmions dans notre préambule à ce
mémoire, la conservation, c'est plus que la simple protection du gibier,
c'est la conservation de toutes et chacune des composantes de notre
environnement et l'approche habitat du MLCP répond à notre
façon de voir.
À cette mission de conservation du MLCP, une fois bien
orientée, nous aurions pu en ajouter une autre, soit celle de stimuler
la productivité des espèces par des aménagements aux
mesures adéquates, comme cela se fait pour l'oie blanche, pour ne citer
qu'un exemple.
Pour revenir à la démarche actuelle du ministère,
nous croyons que l'effort de simplification devrait être poussé
beaucoup plus loin. À des mesures réglementaires claires, simples
et réduites au minimum devrait s'ajouter un vaste programme
d'information et d'éducation qui serait mis en oeuvre par des organismes
du milieu et qui recevrait du ministère l'aide appropriée, comme
cela se fait actuellement, M. le Président, par le programme
expérimental conjoint MLCP-FQF en éducation,
sécurité et conservation de la faune. L'ensemble serait
chapeauté par une vraie loi-cadre sur la conservation et la protection
des habitats.
M. le ministre et MM. les membres de la commission, nous vous prions de
croire en notre sincérité et en notre désir de contribuer
positivement à la démarche que vous avez entreprise et que nous
vous invitons à poursuivre, en étroite collaboration avec des
organismes bénévoles du milieu. Nous souhaitons que la bonne foi
objective et la connaissance concrète de la réalité du
terrain et le désir profond de voir se maintenir, se mettre en valeur et
s'enrichir notre patrimoine faunique national sauront vous être
utiles.
Nous espérons que vous interpréterez notre démarche
comme relevant surtout d'un désir légitime d'équilibre
entre les diverses utilisations de nos ressources toutes aussi utiles les unes
que les autres, sinon avantageuses si elles sont faites dans le respect de
l'équilibre qui les a fait coexister harmonieusement avant
l'intervention de l'homme. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci M. Laliberté. En
demandant aux membres de la commission d'être le plus succincts possible
pour qu'on garde le temps, M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, vous me permettrez tout
d'abord de féliciter le présentateur du mémoire et de lui
dire que je ne doute pas de sa conviction. Il a manifesté
lui-même, par son intonation, toute la conviction qu'il avait. Je
voudrais vous dire que je suis agréablement surpris par le type
d'analyse que vous faites également, c'est une analyse profonde de tout
le projet qui vous a été soumis.
Parlant de ce projet, je voudrais bien démontrer ici,
publiquement - pour ne pas qu'on revienne sur cedit projet tout au cours des
audiences - que ce n'est qu'un projet, un canevas de travail interne. S'il n'y
a pas eu d'avant-projet de loi, c'est précisément parce que nous
voulions, au préalable, entendre les parties en commission parlementaire
d'une façon très large. Lorsque vous parlez d'une
deuxième commission parlementaire sur le projet de loi
définitif, je vous réponds tout de suite que c'est notre
intention de le faire, mais peut-être pas nécessairement de
façon généralisée. Cela peut être
sélectif comme on le fait, comme on s'entend régulièrement
avec l'Opposition pour dire que nous entendrons 8, 10, 12, 14 intervenants sur
le plan national, par exemple. Je ne peux pas tout de suite prendre
l'engagement de dire que ce sera une commission parlementaire "at large", mais
je peux vous dire qu'on en a l'intention, bien sûr, pour donner suite aux
suggestions qui nous seront faites tout au cours des audiences. Nous en
tiendrons sûrement compte en bonne partie dans la rédaction
finale, avant de le déposer en Chambre.
Je voudrais également me déclarer heureux du fait que vous
partagiez, en grande partie, les objectifs du groupe de travail. Je me rends
compte qu'il y a des divergences de vues mais, dans bien des cas, ce sont des
nuances et, dans d'autres cas, c'est peut-être un manque de clarté
ou de clarification de notre part. Dans l'ensemble, vous semblez partager les
objectifs et cela me réjouit.
Je voudrais vous dire tout de suite que même si vous soulignez que
nous n'en sommes qu'aux actions préliminaires, je peux vous assurer,
d'autre part, que nous sommes très convaincus, nous aussi, qu'il n'y a
pas de place pour des demi-mesures. Vous le soulignez clairement dans votre
exposé et nous avons cette même conviction qu'il n'y a pas de
place pour des demi-mesures, mais qu'il faut y aller avec détermination,
soyez assuré de cela.
J'aurai cependant une question à vous poser, si vous voulez en
prendre note. J'aimerais que vous me disiez ce que vous entendez par des
mesures préliminaires ou temporaires que vous avez soulignées
tantôt?
C'est aussi vrai d'affirmer que nous avons eu la collaboration de deux
ministères en ce qui regarde l'environnement et
l'énergie-ressource et que, vraiment, il y a eu un travail de
concertation intéressant. Cependant, je ne voudrais pas donner
l'impression que c'est l'unanimité totale. Il serait utopique de croire
que l'appareil gouvernemental est mobilisé en entier et qu'il endosse
totalement notre vision des choses. Je voudrais aussi vous dire que si nous
n'avons pas, dès le début, impliqué le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, c'est que nous
désirions tout d'abord définir plus précisément la
problématique avant de nous lancer dans une concertation sur des bases
plutôt ambigUes. On voulait d'abord voir clair nous-mêmes avant de
commencer à régler le contentieux éventuel avec le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
Je puis vous dire aussi à ce sujet que, même s'il y avait
des divergences très profondes avec le MAPA sur certains sujets, il y a
déjà des rapprochements qui se font. Au moment où on se
parle, je puis vous dire qu'il y a un dialogue entre le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et j'ai bon espoir d'aplanir
plusieurs difficultés.
J'avoue, cependant, que je saisis mal la crainte que vous avez que le
milieu soit écarté puisque le fait de convoquer une commission
parlementaire et de vous laisser vous exprimer ne présume en rien de la
mise de côté des gens plus tard. D'autant plus que je suis un peu
d'accord sur le mode de gestion mixte dont vous parlez. Est-ce uniquement au
niveau du texte qui a circulé? C'est de là que vient votre
perception ou si vous avez d'autres propositions concrètes à
faire? Comment verriez-vous la gestion mixte, par exemple? Qui devrait
être représenté? Sans doute la Fédération
québécoise de la faune, mais est-ce qu'il y a d'autres gens qui
devraient aussi participer à cette gestion? Vous pourriez
peut-être répondre à ces deux points-là et je
reviendrai avec d'autres questions.
M. Laliberté: M. le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): M.
Laliberté.
M. Laliberté: Je vais répondre en partant du
dernier point. En indiquant, dans le mémoire, les raisons de nos
craintes, c'est parce qu'on a vécu des exemples dans le passé. On
n'est pas sans se souvenir des exemples du passé, alors que des
responsables en place nous disaient: Vous allez être consultés,
nous consulterons. Soudainement nous étions face à une prise de
position sans consultation; on était consultés après que
les décisions avaient été officiellement prises.
C'était un peu jeter de la poudre aux yeux des chasseurs et
pêcheurs du Québec dans ces questions de gestion. Je sais que
c'est peut-être vous amener à patiner sur une glace mince quand on
parle du sujet, mais il vaut mieux casser la glace et même se mouiller un
peu les pieds et vous faire voir nos appréhensions concernant la
méthode de consultation. On aime bien la méthode de consultation
que vous avez actuellement. C'est pour vous dire qu'elle doit se continuer. Les
pêcheurs, les chasseurs et les utilisateurs des ressources de la faune du
Québec ne doivent pas servir d'amortisseurs aux décisions choc
d'un gouvernement qui doit être à notre service, et non pas les
citoyens au service du gouvernement. C'est un principe
général.
Maintenant, votre première question, et aussi le deuxième
volet de votre deuxième question, quant à savoir qui seraient
les
gestionnaires. Sans doute, M. le ministre, le mémoire appelle
trois paliers de gestionnaires. Les gestionnaires de ce fonds seraient des
gestionnaires du gouvernement, des gestionnaires de "Jos Public" et des
gestionnaires des entreprises qui participeraient à ces mises de fonds
pour l'aménagement de ces habitats. Alors, M. le ministre, je pense
qu'il y a lieu d'en venir à un consensus sur le mode de
représentation au sein de ce bureau administratif.
Comme mesure préliminaire et temporaire, c'est fort simple, M. le
ministre, nous voudrions que vous agissiez immédiatement dans le cadre
de la loi, en ouvrant la loi pour inclure ce que nous vous recommandons pour la
protection. On sait par expérience que ça va prendre encore
passablement de temps avant que vous ayez les pouvoirs, dans le cadre d'une
nouvelle loi, pour contingenter les actions de corporations ou d'individus
envers la faune et ses habitats. En agissant immédiatement, par des
mesures préliminaires à l'intérieur de la loi actuelle,
ça vous donnerait le pouvoir d'avoir au moins un droit de regard sur des
activités qui ne sont pas trop alléchantes, odorantes pour
certaines espèces ou certains milieux fauniques. (11 h 45)
M. Chevrette: Si je ne me trompe pas, vous aimeriez voir un
principe de portée générale donnant le pouvoir au ministre
ou au ministère d'intervention directe face à des actes concrets
qui peuvent mettre en péril la conservation de la faune ou qui peuvent
détruire certains habitats fauniques. Est-ce que c'est cela?
M. Laliberté: C'est cela, M. le ministre.
M. Chevrette: D'accord. Maintenant, vous préconisez qu'un
fonds soit alimenté par une partie du prix du permis...
M. Laliberté: ... du prix actuel du permis...
M. Chevrette: ... oui, c'est-à-dire par des sommes qui
sont gérées par le fonds consolidé de la province. Ne
craignez-vous pas que ce serait trop facilement à la merci des coupures
du Conseil du trésor?
M. Laliberté: M. le ministre, je ne sais pas de combien
sont les redevances du gouvernement envers les pêcheurs et les chasseurs
depuis que les permis existent. C'est vrai, vous me direz, on a des agents de
conservation, on a un programme d'ensemencement, on a des programmes de
recensement des populations, on a une équipe de biologistes. D'accord,
mais pour les autres millions - vous nous avez garroché un paquet de
chiffres tout à l'heure démontrent que l'industrie de la chasse
et de la pêche rapporte depuis des années des centaines de
millions au gouvernement - je pense que le gouvernement, maintenant, est en
redevance. La fédération ne veut pas que ces sommes, pour ce
futur fonds, proviennent de l'augmentation des permis. A cause de ces
redevances, elles devront être puisées à un pourcentage de
2% ou 3% de la valeur des permis. C'est de la cuisine, mais nous ne voulons pas
une nouvelle augmentation des permis. Quant à cette redevance que le
gouvernement a envers les utilisateurs, je pense qu'il est temps de prouver la
bonne volonté du gouvernement et de la rétablir envers les
pêcheurs et les utilisateurs.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: II y a peut-être un chiffre que je pourrais
vous donner. La vente de permis rapporte 8 000 000 $, qui sont retournés
d'ailleurs; également, pour la conservation de la faune, on
dépense 35 000 000 $, au ministère, ce qui fait un total de 43
000 000 $ pour la conservation de la faune, présentement. C'est un
chiffre que je vous donne au moins à titre d'information.
Il y a aussi un dernier point sur lequel je voudrais vous entendre. Je
vais vous demander si vous ne dramatisez pas un peu trop en vous imaginant que
les braconniers partiront à la chasse au gibier pour écouler tout
cela dans les marchés, les épiceries et un peu partout. Il y a un
point sur lequel vous êtes catégorique, et vous avez même
élevé la voix. J'ai dit: En voilà un qui est
décidé de combattre à tout prix. Avec tous les
règlements et la loi - on sait que toutes les viandes doivent être
approuvées, il y a un paquet d'inspecteurs, même que les
épiciers trouvent qu'il y en a trop - sur quoi votre crainte est-elle
fondée pour y avoir mis autant d'insistance?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Laliberté.
M. Laliberté: M. le ministre, M. le Président, si
la fédération - lorsque je représente la
fédération, je représente les centaines de milliers
d'utilisateurs - et moi-même avons mis une telle insistance, c'est que ce
sujet a fait l'objet de consultations dans toute la province. Autrement dit, ce
qu'on a écrit là, ce n'est pas une décision
rêvée, c'est du terre à terre. Comme on l'explique dans le
mémoire, notre fédération avait des éléments
qui étaient en faveur de l'ouverture de cette loi, d'autres la
contredisaient, mais lorsque nous sommes venus en période de
consultation, en mai, juin, juillet et à venir jusqu'à la semaine
dernière, de tous les coins de la province,
les groupements qui représentent les membres nous ont dit: La
fédération doit défendre énergiquement la
proposition dont nous vous avons fait part, M. le ministre.
M. Chevrette: C'est sur l'ensemble, toutes les
espèces.
M. Laliberté: C'est sur l'ensemble.
M. Chevrette: Si l'on vous consultait par exemple sur diverses
espèces bien particulières, est-ce que vous auriez une
argumentation aussi radicale? Ou si on y allait à la pièce, par
exemple, en tenant compte du fait qu'il entre du gibier étranger...
M. Laliberté: Je ne veux pas mordre à
l'hameçon, M. le ministre.
M. Chevrette: On n'est pas à la pêche, on est
à la chasse.
M. Laliberté: M. le ministre, tout ce que je peux vous
dire, lors des consultations qu'on a menées, il y a peut-être eu
certains cas, mais ce qui manque de votre part, du gouvernement, ce sont les
certitudes. Lorsqu'on analyse les dédales, les complications, les
contrôles, tout cela, c'est là réellement que tout devient
zone grise; puis, je comprends très bien les personnes qui ont à
faire analyser et à prendre des décisions dans ce sens, mais, de
là, par la loi, à valider la vente de certaines espèces
particulières, je crois que vous pourriez nous consulter à
nouveau - je peux au moins vous ouvrir cette porte, M. le ministre - pour
certaines espèces. S'il y a quelqu'un qui veut acheter des lions en
Afrique, les élever et les commercialiser au Québec, les faire
abattre, peut-être qu'on pourra considérer des choses comme
celles-là, M. le ministre.
M. Chevrette: Vous auriez pu prendre un animal
québécois aussi. Je n'ai pas parlé de safari, moi. Je
considère que vous seriez disposé à être
consulté, au moins.
M. Laliberté: On est disposé à être
consulté.
M. Chevrette: C'est déjà pas mal; si je suis
obligé de m'y rendre, j'irai vous voir.
M. Laliberté: C'est cela, d'accord, M. le ministre, parce
qu'actuellement c'est la quincaillerie des contrôles de tout cela qui
manque; il n'y a rien d'explicité, puis vous voudriez avoir notre
approbation. M. le ministre, cela n'a pas de sens.
M. Chevrette: Je vous remercie beaucoup de votre
témoignage.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Alors, M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Ma première
question s'adresse au ministre.
Étant donné que l'ex-ministre Duhaime du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche avait annulé le permis de pêche, il
n'y avait plus d'assurance; qu'est-ce que le ministre entend faire aujourd'hui,
avec le nouveau permis de pêche, en ce qui concerne l'assurance? Est-ce
qu'il y a une protection? Est-ce qu'il va y avoir une protection?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: II est prévu qu'on pourrait ajouter cette
dimension au permis de pêche, mais les permis de pêche, on n'en
parlera pas trop, c'est devant les tribunaux, on va se fier aux juges; dans
leur sagesse, ils vont rendre un jugement, éventuellement; on se
soumettra à leur décision. En ce qui concerne la partie assurance
qui pourrait être ajoutée au permis, on a des discussions à
l'intérieur du ministère présentement; on fera
connaître notre position officielle très prochainement.
M. Houde: Merci, M. le ministre.
Ma deuxième question s'adresse à M. Laliberté. M.
Laliberté, j'aimerais vous poser deux questions. Premièrement,
est-ce que cela vous rapporte quelque chose, comme organisme, les permis de
chasse et de pêche? Est-ce qu'il y a une partie qui vous revient,
à vous autres?
M. Laliberté: En fonction signe de piastre?
M. Houde: Oui.
M. Laliberté: Non. Actuellement, aucune; à part
certains de nos organismes membres de la fédération qui font la
vente de permis; ils sont rétribués sur une base de commission,
mais, directement à la fédération, absolument pas.
M. Houde: Deuxième question, M. Laliberté.
J'aimerais avoir des précisions en ce qui concerne la contribution
volontaire des chasseurs et des pêcheurs du Québec. Est-ce que
vous voulez donner plus de précisions là-dessus?
M. Laliberté: Oui, sûrement. Depuis que le permis a
été aboli, l'assurance a tombé de facto. Depuis ce temps,
les utilisateurs ont mandaté des représentants, lors de nos
délibérations, et réclament, par voie de
résolution, à tous les ans, qu'une assurance soit
rattachée au permis. Cette mesure a déjà été
appliquée au Québec; elle a rendu
de nombreux services à des personnes qui sont tombées dans
le besoin suite à des accidents lors d'excursions de pêche, entre
autres. Réellement, cette mesure est réclamée,
provincialement, par un très grand nombre d'utilisateurs. Nous, on le
propose sur une base volontaire. Ce n'est pas un tordage de bras qu'on veut
faire avec une assurance. Le type qui veut avoir une protection additionnelle
défrayera cette protection à un coût très minime.
Quand je dis "très minime", il n'est pas question de plus de 5 $, plus
de 3 $, plus de 2 $; c'est très populaire, dans les études
préliminaires qu'on a faites dans le dossier.
M. Houde: Je vous remercie beaucoup de la présentation de
votre mémoire, M. Laliberté.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je voudrais revenir sur le
rejet catégorique mentionné dans le mémoire de la
fédération, à la page 23, quant à la
possibilité qu'évoquait le ministre que certaines espèces
puissent être mises en vente. Je voudrais parler d'une espèce
assez québécoise: la truite mouchetée. Plus tard, il y
aura des gens représentant les pisciculteurs qui nous donneront un autre
son de cloche.
On constate forcément que cette espèce, depuis la
libéralisation - j'imagine pour des raisons tangibles, pour faire en
sorte que tous les Québécois puissent avoir accès à
nos ressources fauniques - a été pressurée, mise en danger
dans certains coins du Québec. Il y a également le
phénomène des pluies acides et du mercure qui ont amené
cette espèce probablement à des dangers assez certains. À
certains moments, on entend même dire, au ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche, qu'il est dangereux de la consommer plus que
tant de fois par semaine. J'ai toujours été un de ceux qui,
nonobstant la libéralisation de tout le territoire à l'ensemble
de nos concitoyens, n'ont jamais trop compris pourquoi les pêches
sportives étaient aussi tardives que le début de septembre, alors
qu'on sait pertinemment qu'à compter de la troisième semaine
d'août, la truite est rassemblée et ne peut avoir la protection
nécessaire. Il y a des abus flagrants qui se font alors que
l'espèce ne peut pas se défendre comme elle se défend en
période normale. Je comprends mal, par contre, devant le fait de toute
cette truite mouchetée qui est élevée actuellement, qu'on
soit tellement craintif qu'un braconnage éhonté se fasse de la
réserve faunique et que cette truite pourrait être introduite chez
l'épicier ou ailleurs pour consommation. J'imagine que le gouvernement
pourrait avoir certains contrôles selon lesquels aucune truite ne
pourrait être mise en marché à moins qu'elle ne soit
étiquetée ou "taggée", peu importe l'appellation qu'on
voudra donner.
Je voudrais que vous éclairiez un peu la commission parce que je
suis un de ceux qui, essayant de combattre le braconnage sous toutes ses
formes, comprennent mal vos raisons profondes et celles de votre milieu, qui
est assez éclairé sur le sujet et que vous avez consulté.
Je sais que M. Bellemare et d'autres, de même que plusieurs
fédérations se sont opposées radicalement à une
telle possibilité, mais il ressort comme le disait le ministre dans son
introduction, qu'on assiste actuellement, au Québec, à la venue
de cette alimentation qui nous est servie un peu partout. Pourquoi ceux qui
sont dans cette activité, qui sont parfois nombreux dans certaines
régions du Québec, ne pourraient-ils pas, à des conditions
que détermine le gouvernement et avec l'accord des
fédérations, avoir une possibilité, avec les
contrôles appropriés, que ce soit mis en marché? Qu'y
a-t-il, dans votre esprit, comme danger particulier qui menacerait l'ensemble
de la faune qu'on veut protéger?
M. Laliberté: M. le Président, on va passer
à des exemples réels. On va prendre l'exemple de la truite
arc-en-ciel qu'il est actuellement possible d'acheter dans les
supermarchés. Actuellement, les pisciculteurs peuvent fournir, au risque
de me tromper, peuvent inonder le marché pour répondre à
la demande, mais tel n'est pas le cas. On trouve beaucoup de truites
importées parce que les autres pays peuvent produire à des
coûts moindres. Donc, d'une part, cela n'empêchera pas
l'importation par le Québec de cette espèce ou des espèces
que vous mentionnez, M. le député. (12 heures)
D'autre part, c'est aussi dû à la fragilité de
l'espèce et aux coûts que cela nécessite pour la produire.
Les pisciculteurs vont être en mesure de vous démontrer que ce
n'est pas facile, non plus, de produire une truite mouchetée pour mettre
sur le marché; il y a des coûts inhérents à cela.
Cela voudra dire que le coût de mise en marché va être assez
élevé, ce qui va faire miroiter, pour les braconniers, des gains
possibles. À ce moment-là, il sera facile pour eux de
récolter, dans les coins qui sont encore potentiellement valables, des
populations indigènes de truites pour les mettre sur le marché
à un prix moindre, mais qui demeurera encore très
alléchant. Il y a une question d'offre et de demande là-dedans.
Dans les analyses qui ont été faites, l'offre qui sera faite sur
le marché sera tellement élevée que ce sera toujours
attrayant pour le braconnier - ou un braconnier potentiel - de dire: Je
recueille 200 livres de truites par année, cela me fait un beau "side
line", cela
me paye un voyage de chasse. Je les mets sur le marché par le
biais d'un hôtelier qui n'est pas trop contrôlé, etc. Il y a
un ensemble de mesures qui font que les gens demeurent bien alertes
là-dessus.
Vous avez aussi mentionné le phénomène des pluies
acides qui tendent à faire diminuer la population de truites
mouchetées. Il y a le phénomène, aussi, de la pression de
pêche. On sait que le Québécois est un amateur de
pêche: lorqu'on dit qu'il y a plus d'un million d'adeptes de la
pêche au Québec, cela commence à faire des gens qui se
déplacent en vue de recueillir cettre ressource. La preuve, c'est
qu'actuellement cette ressource a besoin d'un support par des ensemencements,
par des études biologiques, etc. Actuellement, les membres de notre
fédération ne sont pas prêts à voir une ouverture de
la loi dans le sens de commercialiser spécifiquement la truite
mouchetée.
M. Mailloux: Si je vous comprends bien, nonobstant le fait que
les prix seraient plus élevés que pour celles qui viennent du
marché d'importation, et nonobstant le fait que certains
Québécois voudraient acheter une nourriture plus
québécoise que japonaise, votre fédération croit
que le braconnier pourrait - nonobstant l'obligation qui serait faite à
tout pisciculteur de détenir un permis de vente, au risque de perdre son
permis et de payer des amendes importantes - vendre la truite directement
à certains utilisateurs ou autres, envahir le marché à des
conditions moindres et mettre les ressources en danger.
M. Laliberté: C'est exact, monsieur. M. Mailloux:
C'est votre jugement.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la député
de Chomedey.
Mme Bacon: Je voudrais féliciter M. Laliberté et sa
fédération du mémoire bien articulé qu'ils nous
présentent ce matin. Il faut continuer l'articulation de ce
mémoire et de la politique du ministère. J'aimerais que M.
Laliberté, peut-être, développe davantage quelle
articulation des politiques du ministère il verrait avec les autres
ministères concernés? Le ministre ne nous le dit pas beaucoup
dans ses remarques d'introduction et même dans ses remarques
subséquentes. Je comprends qu'il y a des responsabilités de
ministre à son ministère et qu'il veut définir la
problématique - c'est ce qu'il nous a dit tantôt - mais j'aimerais
que vous, M. Laliberté, vous nous le disiez davantage, de façon
aussi bien articulée que vous l'avez fait tantôt dans votre
mémoire. Comment voyez-vous cette articulation des politiques avec les
autres ministères?
M. Laliberté: Je ne voudrais pas jouer au politicien,
Madame.
Mme Bacon: Laissez-nous cela, M. Laliberté.
M. Laliberté: Mais, par contre, dans le concret du
présent, lorsqu'on regarde les guerres internes, on va prendre un cas
bien de chez nous: les battures de Kamouraska. Vous aimez cela, M. le ministre,
vous rappeler ce dossier?
M. Chevrette: Je me le rappelle.
M. Laliberté: Lorsque des juridictions d'un
ministère vis-à-vis d'un autre n'étaient pas clairement
déterminées, lorsque les droits de gérance d'un
ministère vis-à-vis de la ressource en place n'étaient
pas, non plus, clairement définis, on a vu à quels
problèmes on s'est heurtés, nous, les utilisateurs de ces
ressources, dans le cas particulier des battures de Kamouraska. On pourrait
citer la rivière Nouvelle; on pourrait citer, aussi,
l'aménagement des quelque cent rivières qu'on dit faire pour
augmenter le potentiel agricole du Québec, alors qu'on se pose encore de
nombreuses questions sur certains plans d'eau sur les raisons de tels
aménagements. On détruit plus qu'on aménage, en fin de
compte. Il y a une équipe qui doit travailler de concert à
réaliser ce but qui est de protéger les habitats. On a de grandes
propriétés privées au Québec. Le ministère
des Richesses naturelles ne peut pas faire tout ce que votre ministère
ou les chasseurs souhaiteraient voir dans l'aménagement des habitats
pour les cervidés, entre autres.
Aux yeux du public, et aux nôtres, nous qui devons travailler avec
des gens de votre ministère, il semble qu'il y ait trop de conflits
interministériels dans l'application d'une politique cohérente
d'aménagement d'habitats. C'est pourquoi nous avons appuyé
fortement ce que nous vous disons. On sait que le ministère de
l'Agriculture est très fort, très puissant. L'agro-alimentaire,
aujourd'hui, c'est important. Mais est-ce tellement important qu'on doive
sacrifier le peu de ressources fauniques qu'il nous reste pour les 6 000 000
d'utilisateurs québécois? Je vous dis, M. le ministre, qu'il est
urgent, selon la suggestion que je vous ai faite tout à l'heure,
d'ouvrir immédiatement la loi pour incorporer un principe et permettre
d'agir immédiatement vis-à-vis de certains projets.
Mme Bacon: Est-ce que, M. Laliberté, vous trouvez
qu'ouvrir immédiatement la loi serait la solution à tous les
maux? Est-ce que cela aplanirait l'ensemble des difficultés auxquelles
ont à faire face ces ministères qui ont de la difficulté
à s'entendre au niveau des différentes responsabilités?
De
quelle façon? Vous ne le voyez que de cette façon ou en
voyez-vous une autre?
Je comprends que chaque ministre veut assumer sa responsabilité,
mais il va falloir un jour ou l'autre qu'on s'entende. On sait que cela
crée des problèmes. Est-ce que vous avez une façon autre
que d'ouvrir la loi? C'en est déjà une.
M. Laliberté: D'après les analyses qu'on a faites
et d'après les suggestions que l'on reçoit, nous ne voyons pas
d'autre moyen rapide et efficace que celui-là, savoir ouvrir
immédiatement la loi. Il ne faut pas attendre à demain, il va
être trop tard; au taux de dégradation que nous vivons
actuellement au Québec, il va être trop tard. Prenez un habitat
dans la taïga, on ne coupe pas de forêt dans la taïga, on rase
actuellement l'habitat. On détruit les frayères, les
sédiments détruisent les frayères. Tous les
écosystèmes sont court-circuités. Pourquoi? Parce qu'on a
trop d'intervenants qui n'interviennent pas. On se passe la balle. Nous, du
milieu, qui essayons de préconiser une saine gestion du peu de
ressources qui restent, nous heurtons réellement à des bornes de
ciment. Et personne ne semble prendre de décisions ou prendre des
responsabilités envers les décisions qu'ils ont à
prendre.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre, une
petite dernière.
M. Chevrette: Monsieur, j'ai interprété votre
demande. Je me permets de la réinterpréter pour être
certain que j'ai bien compris. Devant l'urgence de sauver certains habitats,
vous voudriez voir au moins, dans un premier temps, un amendement permettant
une intervention immédiate sans pour autant avoir un plan
intégré ou un zonage intégré. C'est uniquement pour
être capable de poser des gestes ponctuels devant l'imminence de la
disparition d'un habitat quelconque. Si c'est ce que j'ai compris, vous pouvez
me le confirmer.
M. Laliberté: Je vous le confirme. Dans un premier temps,
on pose les balises. On cerne le problème en posant des balises par une
ouverture de la loi, ce que vous ne pouvez pas faire actuellement, M. le
ministre. Cela incombe à d'autres ministères qui ne veulent pas
prendre de responsabilités.
M. Chevrette: Je vous ai dit qu'on était
déterminé à intervenir. Je vous remercie. Je vous
félicite de votre mémoire et j'espère que vous apporterez
la même attention lorsqu'on vous soumettra le projet de loi officiel.
Vous viendrez nous témoigner votre satisfaction, toute aussi grande que
celle d'aujourd'hui.
M. Laliberté: Je vous remercie. Je remercie aussi les
membres de la commission. Nous demeurons disposés à collaborer au
moment des consultations. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull, rapidement. On a déjà dépassé l'heure un
peu.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je comprends
très bien la position de la Fédération
québécoise de la faune et son appréhension
vis-à-vis du gouvernement qui, depuis quand même trop longtemps,
aurait dû modifier la loi actuelle. Le ministre, ce matin, dans son
introduction, mentionnait, à la page 10: Nous avons déjà
affirmé que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche ne peut ni ne veut assurer à lui seul la protection des
habitats. Nous escomptons donc solliciter, dans le cas de la protection des
sites particuliers, l'aide des municipalités régionales de
comté.
Je trouve que c'est beaucoup trop facile de s'en rapporter constamment
aux municipalités régionales de comté. Le ministre
délégué à l'Aménagement et au
Développement régional a mentionné que dans le contexte
actuel il y avait uniquement l'aménagement du territoire qui devait
être touché par les municipalités régionales de
comté. Mais, depuis quelques mois, à peu près tous les
ministres touchent aux municipalités régionales de comté
en tentant de leur donner de nouvelles responsabilités, sans pour autant
mettre les sommes d'argent nécessaires pour favoriser l'instauration de
certaines politiques dans les municipalités régionales de
comté.
Ce qui me préoccupe énormément, M. le
Président, ce matin, c'est qu'il y ait déjà un
avant-projet de loi déposé, alors qu'il y a une loi existante qui
commanderait certaines modifications immédiates. Je partage les
mêmes opinions que la fédération, je me demande si ce n'est
pas simplement reporter à plus tard des décisions qui devraient
être prises immédiatement. J'ose souhaiter que le ministre
retiendra les appréhensions et les préoccupations de la
fédération, tenant compte du fait qu'il y a un danger
immédiat, qu'il y aurait des répercussions et qu'il serait
important de souhaiter que des correctifs soient apportés le plus
rapidement possible. Je regrette que le ministre soit absent et j'espère
que nous pourrons, dans les prochaines semaines ou au cours de la commission
parlementaire, étudier éventuellement le projet de loi, lequel
nous n'avions malheureusement pas eu avant et qu'on a pu obtenir par
l'entremise de certains milieux. Je ne sais pas si la fédération
avait en sa possession ce projet de loi ou cet avant-projet de loi. Il aurait
été sûrement intéressant que vous ayez pu
l'avoir avant qu'on vous demande de venir faire vos
énoncés et qu'on vous commande un travail. J'aimerais savoir, de
M. Laliberté, si vous aviez ce document avant votre venue ici ce
matin.
M. Laliberté: M. le membre de la commission, ce n'est pas
le format que vous me montrez actuellement dont nous sommes en possession. Il
s'agit plutôt d'un document de travail qui a circulé à
l'intérieur d'un ministère que nous avons dû analyser et
faire circuler au sein de nos organismes membres dans toute la province.
M. Rocheleau: Est-ce que c'est l'énoncé du ministre
Lessard, au mois de juin, que vous aviez en votre possession?
M. Laliberté: Nous avions l'énoncé du
ministre Lessard, c'est un énoncé vague, c'est un encadrement.
Pour la réglementation, rien n'y apparaît.
M. Rocheleau: Ah bon!
M. Laliberté: La seule documentation de la
réglementation qu'on ait vue c'est dans un document de travail qui n'est
pas un projet de loi.
M. Rocheleau: J'espère qu'on vous remettra avant votre
départ le document que nous avons, lequel tient compte, à toutes
fins utiles, d'un avant-projet.
M. Chevrette: M. le Président, je comprends que le
député de Hull n'y était pas tantôt. J'ai fait la
précision. Il est vrai qu'un document interne a circulé; je ne
l'ai pas caché, je l'ai donné à l'Opposition tantôt,
à sa demande. Ce document a aussi circulé au sein de certaines
fédérations. On ne peut quand même pas, entre vous et moi,
empêcher nos travailleurs en région, nos travailleurs au niveau
national, nos fonctionnaires de réfléchir. On en reçoit
quotidiennement, des avis de fédérations, d'associations. Je peux
vous le dire carrément, il n'y a aucune décision au Conseil des
ministres. La décision du Conseil des ministres est
précisément de tenir une commission parlementaire avant
d'élaborer un projet de loi définitif. J'ai pris l'engagement
tantôt de vous reconsulter d'une façon peut-être
sélective cette fois-ci, non pas "at large", mais vous serez
consultés.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre.
Mme Bacon: J'aurais juste une question, M. le Président.
Moi, j'appellerais cela un avant-projet de loi, quand on le regarde, ou
peut-être une réflexion très profonde de la part des
fonctionnaires du ministère. Est-ce qu'il y a des groupes qui ont
été mis au courant de ce document dont nous avons demandé
le dépôt ce matin? (12 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: II y a eu des consultations
interministérielles. Je suis convaincu qu'au niveau de l'environnement,
par exemple, il y a des organismes touchés par le ministère de
l'Environnement qui ont eu des documents en main, c'est clair. Il y en a eu au
niveau de notre ministère, des organismes qui ont eu le document, sans
doute aussi. Cela n'empêche absolument pas une expression d'opinion.
L'expression d'opinion portait sur le cadre fixé dans la
déclaration de M. Lessard du 21 juin 1982. Vous allez me dire que les
documents circulent. Je comprends qu'ils circulent, les documents. On peut en
donner à ceux qui n'en ont pas, il n'y a pas de problème
là-dessus. Tout ce qui peut circuler pour mieux nous aider à
préparer un projet de loi qui entraînera un plus large consensus,
tant mieux.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, je regrette, je n'avais pas
tout à fait fini tantôt. Je comprends que le ministre mentionne
que ce n'est peut-être pas un avant-projet de loi, qu'on ne peut pas
empêcher ses fonctionnaires de réfléchir. Au contraire, on
leur souhaite de réfléchir davantage. Je considère que la
Fédération québécoise de la faune est
sûrement un organisme qui aurait dû avoir en sa possession les
réflexions des hauts fonctionnaires de votre ministère. On aurait
pu nous apporter, ce matin, une touche différente dans
l'appréhension qu'ils semblent dénoter à
l'intérieur de leur mémoire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, je déplore que la
Fédération québécoise de la faune n'ait pas eu le
document. Je peux vous dire une chose: II y a un excellent mémoire
présenté par la Fédération québécoise
de la faune. L'importance d'un document est donc beaucoup mitigée. Je
pense que ces gens-là ont des idées sur la Loi sur la
conservation de la faune depuis 35 ans, m'a-t-on dit tantôt. Je pense
qu'ils ont des documents de travail tout aussi valables que les nôtres.
Je vous félicite, messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre! Oui, M. le
député de...
M. Houde: M. le Président, je voudrais savoir du ministre:
sur l'ordre de qui les fonctionnaires ont eu à réfléchir
sur ce fameux document en question qui nous est donné seulement ce
matin. Moi, je ne sais pas, je suis un nouveau député, cela ne
fait que deux ans que je suis ici, mais, pour ma part, j'aurais aimé
voir cette brique avant ce matin à 10 heures.
M. Chevrette: On n'est pas pour faire un "chiard" avec la brique.
Je pense qu'au sein de tous les ministères circulent des documents de
travail. Quotidiennement, nous recevons des revendications: quand ce ne sont
pas les ZEC, ce sont les SACERF; quand ce ne sont pas les SACERF, ce sont les
Outfitters; quand ce ne sont pas les Outfitters, c'est la
fédération; quand ce n'est pas la fédération, c'est
le Conseil de la faune. Quotidiennement, nos fonctionnaires discutent avec ces
messieurs et ces dames, et il est tout à fait normal qu'on me
présente, comme ministre, des amendements possibles et éventuels.
Ce qui est très important, cependant, c'est qu'avant de se geler dans le
béton, le ministre consulte officiellement, tâte le pouls de la
population pour avoir le consensus le plus large. Il me semble qu'on suit un
processus tellement normal que l'Opposition pourrait nous féliciter.
M. Houde: M. le ministre, combien de groupes ont lu le
rapport?
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre s'il vous
plaît!
M. Houde: M. le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. M. le ministre, combien
d'organismes ont reçu ce rapport avant aujourd'hui?
M. Chevrette: Je ne le sais pas. Imaginez-vous que j'ai
été assermenté le 9 septembre, M. le député
de Berthier. Vous dites que vous êtes un nouveau député et
moi je suis un nouveau ministre. Je ne le sais pas. C'est peut-être 22,
mais il y en avait peut-être 23. C'est peut-être 32 ou c'est
peut-être 19. Je ne le sais pas.
Mme Bacon: M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Je vais donner la chance au coureur, le nouveau
ministre, mais il a toute une batterie de fonctionnaires derrière lui.
On peut attendre. Il peut peut-être poser la question: Combien de
documents ont circulé? Il a parlé...
M. Chevrette: Combien ont été imprimés
à la direction régionale de Montréal? Je ne le sais
pas.
Mme Bacon: Mais il y a quand même des fonctionnaires
derrière ça.
M. Chevrette: II n'y a pas un fonctionnaire qui peut me dire,
ici, le nombre qui est sorti.
Mme Bacon: Combien de groupes... Si le ministre voulait bien me
laisser parler, M. le Président. Combien de groupes ont reçu cet
exemplaire? Je pense qu'il y a des fonctionnaires derrière le ministre
qui sont capables de lui donner la réponse. Il va apprendre qu'il peut
consulter ses fonctionnaires avant de nous donner la réponse.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
Mme Bacon: Combien de groupes ont eu cet exemplaire en main? On
peut suspendre et demander...
Le Président (M. Bordeleau): Non, M. le ministre. À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Vous voulez avoir une réponse?
Mme Bacon: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: On est allé à l'interne, qui a sorti
des exemplaires, c'est fort possible. Mais on ne sait pas combien il y en a eu
à l'extérieur. Mais à l'interne, par exemple, je sais
qu'un groupe l'a eu formellement, c'est le Conseil de la faune. Je suis
sûr qu'ils l'ont eu parce qu'ils ont été consultés
pour émettre une opinion. Le Conseil de la faune relève
directement du ministre; on a le droit de lui remettre les documents en main.
Comme le ministre du Travail fait avec le Conseil consultatif du travail. Je ne
vois pas pourquoi on fait un plat à ce stade-ci sur un document de
travail, alors qu'on est en consultation pour rédiger un projet de loi
final à la suite des audiences publiques.
Mme Bacon: M. le Président, si le ministre me laisse la
parole, j'aimerais quand même reconnaître que ce document a
circulé au Conseil de la faune avant que l'Opposition en reçoive
des exemplaires. Je pense qu'il aurait été normal, avant qu'on
s'assoie ici ce
matin, que les groupes aient été saisis de ce document et
que, évidemment, l'Opposition en ait aussi des exemplaires, avant
d'arriver à cette commission parlementaire.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Je vous ferai remarquer que le ministre du Travail,
régulièrement, soumet des questions au Conseil consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre.
Mme Bacon: ...
M. Chevrette: Non, non, je m'excuse. Ce n'est pas un projet de
loi. Vous n'avez aucun projet de loi devant vous. C'est une commission
parlementaire préalable à l'élaboration d'un projet de
loi. Je vous dis qu'il est coutume, au sein des ministères qui ont des
conseils consultatifs, d'aller sonder les reins et les coeurs des personnes qui
sont nommées expressément pour donner des avis. On n'a pas pris
la décision de déposer un avant-projet de loi; on a pris la
décision en juin d'aller plutôt vers une commission parlementaire
avant de rédiger un projet de loi qui, lui, serait déposé
à l'Assemblée nationale.
En d'autres mots, on sait qu'il y a des points de vue contradictoires -
vous allez le voir au cours des audiences - qui s'exprimeront ici. Il y en a
qui sont pour la commercialisation, d'autres qui sont contre; il y en a qui
voudraient qu'on soit pour des actions très radicales et
immédiates pour la sauvegarde des habitats; d'autres qui disent: Prenez
votre temps, scindez le projet en deux. On aura tout cela. Il faudra se faire
une idée à partir du large consensus qui se dégagera, un
point, c'est tout. Je ne vois pas en quoi un ministre est obligé d'aller
voir l'Opposition avant de consulter son comité consultatif.
Mme Bacon: Je ne donne pas d'ordre au ministre, mais je pense que
nous sommes encore dans une grande démocratie où on peut
s'exprimer. Je comprends qu'il veuille défendre les faits et gestes de
son ministère auprès de ses fonctionnaires, et c'est très
bon. Mais en ce qui concerne cet avant-projet de loi que nous avons devant nous
ce matin, est-ce que le ministre s'engage à en donner une copie à
chacun des groupes qui viendront nous rencontrer au cours de cette semaine?
M. Chevrette: Certainement.
Mme Bacon: Est-ce que le ministre s'engage à en envoyer
une copie à chacun des groupes concernés?
M. Chevrette: Certainement.
Mme Bacon: J'aimerais quand même ajouter que le ministre
est tout nouveau au Conseil des ministres, mais il y a certains de ses
collègues qui sont là depuis plus longtemps, qui nous ont
déjà sorti des papiers comme cela, des avant-projets de loi en
disant que ce n'était pas cela le projet et loi et ils nous sont
arrivés avec un projet de loi qui était exactement la même
chose. Alors, je pense qu'il faudrait que le ministre soit très prudent
et, au moins, fasse une véritable consultation au cours de cette
semaine.
M. Chevrette: Je suis tellement prudent que je vous en ai
donné une copie.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, je vous remercie, M.
Laliberté, ainsi que les personnes qui vous accompagnent. On peut
continuer, mais je pense qu'on n'aura pas le temps d'entendre un autre
mémoire. On devrait normalement terminer à 12 h 30. Alors, on
suspendra donc nos travaux sine die. Pour les gens qui sont ici, cela veut dire
qu'on devrait normalement reprendre après la période des
questions, soit vers 15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 22)
(Reprise de la séance à 16 h 11)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît.' La commission permanente du loisir, de la chasse et de la
pêche reprend ses travaux qui avaient été suspendus pour le
dîner. J'appellerais dès maintenant la Société
linnéenne du Québec, représentée par M.
Benoît Gauthier, président. M. Gauthier, si vous voulez vous
présenter, ainsi que les personnes qui vous accompagnent.
Société linnéenne du
Québec
M. Gauthier (Benoît): À ma gauche, Mme
Hélène Beaulieu, biologiste, et, à ma droite, Me Claude
Wallot, avocat, tous deux du comité environnement, et moi-même,
Benoît Gauthier, écologiste de carrière et président
de la Société linnéenne du Québec.
M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs de la
commission, la Société linnéenne du Québec,
organisme sans but lucratif regroupant 500 membres et oeuvrant depuis 52 ans
dans le domaine de la vulgarisation et de la protection de la nature, est
heureuse de participer à cette commission parlementaire convoquée
par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
La linnéenne est bien concernée par cet avant-projet de
loi sur la conservation de la faune, puisque la protection des espèces
biologiques du Québec et de leur milieu
naturel, les habitats, est l'une de ses grandes préoccupations
quasi depuis son origine. La société linnéenne a plusieurs
fois pris position publiquement par la voie d'articles de journaux, de
mémoires, de publications sur plusieurs dossiers environnementaux
proches de la conservation de la faune. Pour n'en citer que quelques-uns: les
parcs de la vallée de la Jacques-Cartier, de la Gaspésie, des
Grands Jardins, les battures de Beauport, notamment le projet de l'autoroute
440 et le projet d'extension du port de Québec, le Bois de Coulonge, les
marais de Kamouraska et bien d'autres, depuis une dizaine d'années. La
société linnéenne s'est aussi fait connaître par ses
excursions sur le Saint-Laurent afin de sensibiliser le grand public à
des espèces ou à des habitats menacés, concernant les
baleines et les oies blanches. Depuis le printemps 1982, elle coordonne
également le retour du merle bleu, un oiseau jadis commun, mais devenu
plutôt rare aujourd'hui dans le Québec. En outre, la
linnéenne organise des conférences publiques à l'Aquarium
de Québec pour faire connaître et protéger la flore et la
faune du Québec.
Naturellement, notre intervention va porter sur la partie du mandat que
veut se donner le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
au chapitre de la protection des habitats et sur les dispositions qu'il entend
prendre à l'égard des espèces rares ou menacées
d'extinction.
Comme premier aspect, nous trouvons que la loi actuelle sur la
conservation de la faune est désuète ou assez inadéquate.
La Loi sur la conservation de la faune trouve ses fondements, en 1944, avec la
Loi sur la chasse et la pêche. Malgré les modifications
importantes apportées depuis, notamment en 1969, en 1978 et en 1979,
où on assiste à la création des réserves fauniques
ZAC et ZEC, la loi consiste surtout pour le public en des règlements de
chasse et de pêche. En somme, il s'agit plus d'une loi qui régit
l'exploitation de la faune que sa conservation. À notre avis, la
présente loi ne répond plus aux préoccupations
véhiculées par le ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche et à son évolution des dernières
années. En effet, la définition de la réserve faunique,
ajoutée en 1978 à la loi, ouvrait la porte à un
aménagement intégré et à l'utilisation optimale et
rationnelle des ressources. Aussi, la création des réserves, des
ZAC et des ZEC, a rendu accessibles les ressources fauniques du territoire
québécois et a amené des individus, des groupes et des
administrations locales et régionales à participer à la
conservation et à la gestion de leur environnement. L'implantation d'un
réseau de parcs québécois, voués en partie à
la conservation, a fait de même; elle a permis à la population un
plus grand contact avec les milieux naturels, tout en sensibilisant les
citoyens au besoin de préserver ces milieux et de profiter pleinement
d'autres milieux par une variété d'activités
récréatives de plein air. Ainsi, la présente loi ne
répond plus aux exigences tant fauniques que sociales du Québec,
partiellement exprimées dans d'autres textes de lois provinciales.
Ailleurs, plusieurs provinces canadiennes et plusieurs pays ont compris
qu'il n'y a pas d'avenir pour la ressource faunique et pour tout le patrimoine
naturel sans la préservation d'un minimum d'habitats de qualité.
Ils se sont alors dotés d'une législation et d'une
réglementation visant une protection d'ensemble des habitats essentiels
aux espèces - non seulement celles assujetties à la chasse,
à la pêche ou au trappage - mais également une protection
ponctuelle des sites particuliers.
Notre deuxième point porte sur les modifications à
apporter à la loi et les moyens d'application. La Société
linnéenne du Québec donne son appui au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui, en tant que gardien prioritaire
de la faune au Québec, veut officiellement reconnaître sa
responsabilité dans la protection des habitats fauniques du
Québec tant sur les terres privées que publiques. Afin de
réaliser pleinement le mandat de la conservation faunique, la
linnéenne propose qu'un chapitre entier de la Loi sur la conservation de
la faune soit spécialement consacré à la protection des
habitats fauniques essentiels et à la sauvegarde des espèces
fauniques et floristiques rares ou menacées d'extinction.
Dans ce chapitre, on pourrait trouver les mesures législatives ou
les précisions suivantes à savoir: une définition
élargie de la notion de "faune", y incluant toutes les espèces de
vertébrés et d'invertébrés du Québec,
exploitables ou non; les définitions d'"habitat faunique" et d'"habitat
faunique essentiel"; la désignation des habitats fauniques essentiels
à protéger, tels les habitats humides et riverains, et ceux
soumis même aux coupes forestières intensives; les mesures
légales et administratives nécessaires, de même que les
conditions auxquelles devrait se soumettre tout intervenant désirant
agir sur ces milieux; une réglementation sur le harcèlement des
animaux; l'établissement d'un statut spécial et la publication
d'une liste officielle pour l'ensemble des espèces animales et
végétales rares, uniques ou menacées d'extinction,
l'établissement d'une liste visant la protection de ces
représentants et prohibant leur exploitation, leur commercialisation ou
leur cueillette. On a le cas de l'ail des bois, par exemple, qui est
très difficile à protéger à l'heure actuelle. Il
faudrait également qu'il y ait un contrôle du commerce des animaux
et des plantes à l'intérieur du Québec.
En ce qui concerne les moyens d'application, l'étude faite par le
groupe de
travail pour la protection des habitats au sein du ministère
suggère plusieurs moyens d'application intéressants. Certains
méritent d'être mentionnés aux membres de la commission;
par exemple: les programmes gouvernementaux d'aménagement et de
préservation des habitats qui sont développés; le fonds
spécial, dont on attend beaucoup; les mesures d'incitation et les
programmes d'éducation favorisant l'adhésion populaire tant chez
les usagers de la faune que chez les propriétaires privés, les
groupes de citoyens, les promoteurs et les développeurs de l'entreprise
privée ou publique; également la sauvegarde des habitats
riverains et des zones humides, selon la solution française par le
Conservatoire du littoral et des rivages lacustres ou de la loi
américaine appliquée dans plus d'une trentaine d'États
américains.
Le troisième point concerne brièvement la portée
d'une nouvelle loi et le problème de juridiction. La portée d'une
nouvelle loi qui serait à écrire ou d'un chapitre de loi. La Loi
sur la conservation de la faune doit s'articuler selon une nouvelle philosophie
qui pourrait être à l'exemple de la loi américaine,
intitulée "Fish and Wildlife Conservation Act" et qui pourrait
établir clairement que "la faune a une valeur écologique,
culturelle, éducative, économique et que la conservation et la
gestion de celle-ci passent par le maintien et par la restauration des
espèces animales et végétales via un environnement
productif."
Dans ce contexte, la Société linnéenne du
Québec recommande que le MLCP se dote de moyens d'intervention rapides
et souples qui favoriseront l'implication et l'adhésion populaire, tant
en milieu privé qu'en milieu public.
Nous souhaitons que cette loi ait des dents, qu'elle donne des pouvoirs
clairs au ministère et que la procédure d'évaluation et
d'examen des impacts et des contraintes fauniques reçoive autant
d'attention que les intérêts des autres ressources. Rappelons, par
exemple, que le drainage agricole et la coupe forestière sont encore
exclus des études d'impact du ministère de l'Environnement
malgré l'impact réel sur la faune.
En ce qui concerne le problème de juridiction, l'application de
cette nouvelle Loi sur la conservation de la faune pourrait poser des conflits
de juridictions entre les deux niveaux de gouvernement, fédéral
et provincial, mais surtout entre les différentes instances
québécoises ministérielles, supramunicipales et
municipales. En effet, plusieurs lois québécoises touchent la
juridiction du territoire ou du patrimoine biologique. Ce sont la Loi sur la
qualité de l'environnement, la Loi sur les réserves
écologiques, la Loi sur le régime des eaux du ministère de
l'Environnement. On trouve également des pouvoirs légaux au
ministère de l'Énergie et des Ressources qui affectent les
habitats forestiers, humides et riverains. On peut mentionner aussi la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme du ministère des Affaires
municipales, qui donne beaucoup de droits en matière de zonage. Il y a
la Loi sur les arrondissements culturels, historiques et naturels du
ministère des Affaires culturelles. On peut aussi mentionner la
protection des érablières, sous l'égide du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Et
la liste est plus longue, nous croyons, que toutes celles qui sont
énumérées dans le texte que le gouvernement a soumis pour
la consultation. Bien souvent, l'énumération des textes de loi
était assez rapide et balayée rapidement pour passer à une
loi essentiellement sous l'égide du ministère.
La législation québécoise sur la protection des
habitats, des espèces fauniques et floristiques peut être,
à notre avis, partagée par l'un ou plusieurs des
ministères concernés par la conservation et la protection du
patrimoine naturel. L'important est que ces lois se complètent et
assurent réellement une protection entière pour tous les
habitats, pour toutes les espèces animales et végétales
dans l'ensemble du Québec. Nous croyons qu'en précisant les
responsabilités au niveau municipal, supramunicipal et
ministériel il est possible pour le gouvernement québécois
de favoriser un aménagement intégré du territoire
québécois et une utilisation optimale et rationnelle des
ressources biologiques. Cela nécessite donc une volonté politique
évidente et une concertation nationale sur les objectifs et les moyens
à mettre de l'avant.
Finalement, la société linnéenne est toujours
heureuse de participer à ces débats et réflexions publics
portant sur la conservation de la nature. Depuis une dizaine d'années,
les débats ont surtout eu lieu parmi les groupes environnementaux;
aussi, la tenue de cette commission parlementaire comble une lacune certaine et
devrait sans doute permettre au ministère d'améliorer ses outils
législatifs et administratifs en matière de conservation.
La société linnéenne considère le
présent travail en commission parlementaire certes indispensable, mais
encore très préliminaire, car il reste assez difficile de
percevoir la volonté gouvernementale dans ce projet de réforme.
Nous souhaitons donc que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche s'associe avec le ministère de l'Environnement dans une
réflexion plus globale, de manière à préserver
adéquatement notre patrimoine naturel et collectif dans l'ensemble du
Québec. Il serait peut-être encore utile de produire un livre
vert, à notre avis, portant à la fois sur l'utilisation des
ressources naturelles et sur la conservation à long terme de ces
ressources.
Souvent, la Société linnéenne du Québec
poursuit son action de vulgarisation et de conservation envers et contre tous.
C'est assez surprenant de dire cela. Vous avez peut-être des exemples
à l'esprit; nous, nous en avons. Il va sans dire qu'elle attend beaucoup
de la présente démarche entreprise courageusement, surtout en
matière de conservation, par le ministre et le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. le Président, nous vous remercions de nous avoir permis
d'être entendus par la commission.
Le Président Bordeleau: M. le ministre, avez-vous des
questions?
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais remercier tout
d'abord M. Gauthier et les gens qui l'accompagnent pour leur exposé. Je
voudrais profiter de l'occasion pour vous féliciter publiquement et
féliciter votre société pour les nombreuses
réalisations de vulgarisation que vous faites en regard de la protection
de la nature en général. Cela mérite réellement
d'être souligné. En particulier, j'ai lu vos prises de position,
lesquelles sont régulièrement bien articulées en ce qui
concerne les dossiers environnementaux. Mes félicitations.
Je suis heureux de constater que vous appuyez, règle
générale, dans ses grandes lignes la position du
ministère. Vous avez sans doute raison de souligner que certains
problèmes vont surgir, qu'on aura des difficultés à
départager les juridictions. Cependant, malgré toute la
complexité de ce dossier, je pense qu'on est capable d'en arriver
à une solution si tout le monde y met de la bonne volonté. Vous
me suggérez de mettre des dents à la loi, si j'ai bien compris
votre mémoire. Vous me dites aussi d'évaluer d'une façon
très précise tous les impacts. Je dois vous préciser
là-dessus qu'il n'est pas de notre intention, cependant, de faire du
chevauchement avec les études d'impact du ministère de
l'Environnement. À ce stade-ci, nous songeons beaucoup plus à
fixer des normes réglementaires relatives au maintien de chaque type
d'habitat, auxquelles toute personne devra se soumettre. Il faut bien
comprendre qu'il ne s'agit pas - et je voudrais vous entendre là-dessus
- de nous demander de faire du dédoublement avec le rôle qui est
dévolu au ministère de l'Environnement.
Deuxièmement, vous nous demandez -j'ai deux ou trois questions,
de sorte que je vais vous les poser d'un seul trait et vous pourrez y
répondre par la suite - qu'un chapitre de la Loi sur la conservation de
la faune soit spécialement consacré à la protection des
habitats fauniques. D'autre part, si vous assistez à l'ensemble des
auditions, vous verrez que d'autres groupes nous proposent de scinder
complètement les deux parties, de faire une loi-cadre sur les habitats
fauniques et une loi-cadre sur la protection. J'apprécierais
connaître votre point de vue sur ce sujet.
Également, concernant la sauvegarde des espèces
floristiques rares ou menacées, comment la conciliez-vous à
l'intérieur d'une loi se rapportant d'abord et avant tout à la
conservation de la faune et de son habitat?
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. Gauthier ou les
personnes qui vous accompagnent. M. Gauthier.
M. Gauthier (Benoît): Je peux répondre pour le
premier aspect. Est-ce qu'on devrait avoir une loi-cadre sur l'exploitation et
une autre loi-cadre sur l'aspect de la conservation? Je pense que toutes les
avenues sont bonnes et excellentes si on voit clair dans la démarche, je
dirais, administrative et gouvernementale, parce que la loi reflète les
volontés selon lesquelles on veut aller. Si on connaissait la place par
les acteurs qui va être prise... Plusieurs ministères ont fait des
cheminements inouïs qu'on ne retrouve pas dans la démarche du
ministère. Par exemple, le ministère de l'Environnement a
plusieurs outils bien à lui qu'il utilise en milieu privé,
particulièrement, alors que le ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche était souvent en milieu public. Vous avez
également plusieurs sections au ministère de l'Énergie et
des Ressources qui ont travaillé dans le domaine de la conservation. Si
tous ces acteurs se mettaient ensemble, je pense qu'on pourrait parler de
loi-cadre sur la conservation. Si les acteurs veulent demeurer
séparés avec leurs juridictions, peut-être qu'à ce
moment-là il faut parler de chapitres dans la loi. À ce
moment-là, ce sont, je dirais, des fragments qui ne sont pas pris par
les autres qui sont mis sous la tutelle d'une loi qui appartient au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. C'est pour
ça que, si la loi-cadre était poussée par plusieurs
ministères qui s'occupent déjà de la conservation à
leur manière, avec des niveaux multiples d'intensité, ce serait
assez facile d'avoir une loi-cadre sur la conservation. Ce serait plus
sain.
Il y a l'autre facette que vous avez soulevée. Je ne sais pas si
je vais la laisser à un de mes collègues. Est-ce que tu veux y
répondre? (16 h 30)
Mme Beaulieu (Hélène): Oui. Concernant les
espèces floristiques, la flore, on se surprend encore que, dans
l'optique du document du Groupe habitat, on parle d'habitat, mais d'habitat
dans le sens réservé pour la faune. Finalement, on devrait
considérer que, dans cet habitat, il y a la flore et que ça fait
un ensemble. Dans notre
esprit, quand on parle de conservation de l'habitat, on trouve que
ça devrait aussi englober la flore. Je ne sais pas si ça
répond à la question de M. le ministre.
M. Gauthier (Benoît): II y a un autre aspect que M. le
ministre a soulevé, c'est que vous n'entendez pas faire de la
duplication avec le ministère de l'Environnement. On est bien heureux de
vous entendre dire ça. Si vous aviez dit que vous vouliez faire de la
duplication, ça nous aurait surpris. Que vous ne vouliez pas en faire,
c'est bien heureux. Mais ce à quoi on s'attendrait, ce serait que, dans
certains dossiers qu'on a vécus, il y ait, je dirais, une
démarche collégiale, non pas une duplication, mais une sorte de
collaboration de certains ministères qui sont voués l'un et
l'autre à la conservation de la qualité du milieu ou de la
qualité de l'environnement. Ce qu'on souhaite, nous, ce n'est pas une
duplication, comme vous l'avez dit, mais une collaboration soutenue et
très très serrée.
M. Chevrette: Je voudrais rappeler ce que j'ai dit ce matin. Au
niveau du ministère de l'Énergie et des Ressources et de celui de
l'Environnement, il y a un comité interministériel qui a
fonctionné à fond de train pendant plusieurs mois. Je pense qu'il
y a vraiment une concertation à ce sujet. Je pense qu'on s'entend pour
dire qu'il faut protéger les habitats fauniques. Il est bien
évident, cependant, qu'on ne peut pas éparpiller le pouvoir
central de décision. Quand on veut sauvegarder, il faut centraliser le
pouvoir de décision à un seul endroit. On pense que cela
relève du MLCP, bien sûr, mais cela peut se faire en
collaboration; vous avez entièrement raison. Il nous faudra aussi
ébranler les colonnes du temple pour avoir l'ensemble des
responsabilités qui ne sont pas dévolues au MLCP
présentement, mais qui le seront lorsqu'on pourra déposer une loi
qui nous permettra de décréter que telle zone est, par exemple,
d'une extrême importance, d'une extrême fragilité pour la
conservation. Cela peut se faire pour les terres privées comme pour les
terres publiques. C'est ce qu'il faut bien comprendre dans le document qui a
circulé et qui a fait l'objet d'inquiétudes ce matin. Ce n'est
pas inquiétant, c'est un document de travail et j'espère qu'on
pourra l'améliorer avec ce que vous nous direz. Je vous remercie aussi
de votre témoignage. Si mes collègues ont d'autres
questions...
Une voix: Allez-y donc. Mme Bacon: Je vais y aller.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Je pense que votre
document est très explicite dans les préoccupations que vous
exprimez. Maintenant, il est évident que vous soulignez la
difficulté d'articuler les lois et les règlements qui sont
éparpillés un peu au sein de plusieurs ministères, comme
nous l'avons fait ce matin au moment de l'ouverture de cette commission
parlementaire. Nous souhaitons, nous aussi, une cohérence quant à
l'application des lois en conformité avec les juridictions municipales
et supramunicipales.
Vous indiquez, à la page 6 de votre dossier, que vous souhaitez
qu'un ministère s'associe avec le ministère de l'Environnement -
vous venez d'en parler avec le ministre - dans une réflexion plus
globale. Vous avez mentionné, dans votre réponse, que vous aviez
eu des cas bien précis où vous auriez souhaité, je pense,
cette association entre le ministère de l'Environnement et le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Nous sommes
d'accord que ce serait peut-être la meilleure façon de faire cette
articulation des politiques dans un consensus des différents
ministères. Mais est-ce que vous pourriez être encore plus
précis? Quand vous parlez d'une réflexion plus globale, est-ce
qu'il y a des endroits ou des dossiers bien précis où vous avez
senti que, si cette réflexion avait été faite en accord
avec le ministère de l'Environnement, cela aurait été plus
facile de trouver un règlement à certains problèmes?
M. Wallot (Claude): Sur le problème de l'articulation des
lois, je pense qu'on le signale comme étant le problème global.
C'est assez curieusement comme cela que cela arrive, mais c'est aussi dans la
mesure où on a deux ministères séparés qui vivent
indirectement de la ressource de l'environnement, c'est-à-dire que la
chasse, la pêche et le tourisme puisent beaucoup leurs richesses dans la
qualité de la faune sous toutes ses formes. On a l'impression -et on
s'est dit cela dans notre réflexion sur le document - que c'est, en
réalité, la première loi qui vise non pas à
empêcher la pollution, mais à favoriser l'environnement. C'est la
première loi qui vise à protéger la ressource fondamentale
à la base de l'environnement comme tel, les milieux fauniques, les
écosystèmes fauniques, etc. C'est la première loi qui
s'attaque à cela. Dans cette mesure, il n'y a pas de duplication, parce
que, jusqu'à maintenant, la plus grande partie des activités du
ministère de l'Environnement consiste surtout, je dirais, à
lutter contre la pollution et, assez curieusement, on y autorise plus de tuyaux
de béton qu'on y protège l'environnement comme tel. C'est curieux
à dire, mais c'est comme cela. Par la loi projetée ici, on en
arrive à une valorisation des ressources de
base de l'environnement. Je ne vois pas qu'il y ait duplication, mais je
pense que le ministère va se voir confier une tâche très
importante et, en fait, qui nécessite, sans doute, des actions
immédiates, comme le soulignait la Fédération
québécoise de la faune, ce matin, démarche que nous
appuyons, à savoir qu'une modification immédiate à la loi
soit faite pour permettre au ministre d'intervenir dans certains dossiers
très précis.
Je vais laisser mon confrère expliciter davantage les
problèmes qui ont pu être soulevés.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Gauthier.
M. Gauthier (Benoît): Madame a demandé ce que
devrait être une réflexion plus globale. Lorsque l'on lit les
documents du ministère, on se rend compte très vite que cela
concerne les vertébrés et, si on poussait l'analyse, parfois, ce
sont les plus gros. Lorsqu'on parle d'habitats, cela commence par les plantes,
cela commence par les plus petits organismes, souvent les
invertébrés. Alors, on se serait attendu à une
réflexion complète sur l'habitat. Dans la plupart des documents,
on parle beaucoup plus de la faune que de l'habitat lui-même. Toute la
dimension habitat, dans toutes ses facettes, est déficiente.
L'autre aspect déficient, c'est que - M. le ministre l'a dit
lui-même - cela concernait 4% ou 5% du milieu forestier
québécois. Vous avez dit cela ce matin. On ne voit pas pourquoi
cela ne concernerait pas l'ensemble du milieu forestier sauf que, dans notre
esprit, on ne doit pas parler tout le temps de conservation intégrale.
La conservation, souvent, cela ne va pas à l'encontre de l'utilisation
du territoire. La démarche qu'on voit, on dit: Comme on ne peut pas
faire de la conservation intégrale en milieu forestier, on se
réfugie sur 4% ou 5% du territoire, qui ne sera convoité par
personne. À ce moment-là, il y a 95% du territoire où on
trouve qu'il y a des lacunes considérables en matière de
conservation de l'habitat. On pourrait en énumérer d'autres.
Lorsqu'on arrive en milieu privé, c'est la même chose. Lorsqu'on
arrive en milieu ouvert, c'est la même chose. C'est pour cela qu'on dit
qu'il y aurait peut-être encore lieu d'écrire un livre vert non
pas de 200 pages, mais peut-être de 25 ou 30 pages, un livre
gouvernemental plutôt qu'une démarche ministérielle.
Là, on a plutôt une avenue proposée par un
ministère. Il est difficile de voir l'avenue proposée par le
gouvernement en matière de conservation parce qu'on aboutit plutôt
à un fractionnement de la conservation dans les textes. En
réalité, on pourra peut-être y voir d'autres facettes, mais
les textes reflètent plutôt un fractionnement de la conservation
qu'une globalité de l'aménagement de la faune au
Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, Mme la
députée de Chomedey.
Mme Bacon: En fait, vous appuyez la demande qui nous a
été faite ce matin par le groupe qui a présenté son
mémoire, qui souhaitait tout de suite une ouverture de la loi pour
donner des pouvoirs supplémentaires au ministre, ce qui réglerait
une partie du problème actuel, en attendant que d'autres gestes soient
posés. Pour vous, c'est un appui?
M. Gauthier (Benoît): À court terme, on est
d'emblée pour appuyer la Fédération
québécoise de la faune parce qu'on a vécu des dossiers
où personne n'avait de réponse. C'était plutôt le
ministère qui développait la ressource qui avait plus d'outils
que le ministère qui voulait non pas nécessairement bloquer tout
le projet, mais rationaliser l'approche des projets mis de l'avant. Alors,
à court terme, il est sûr qu'il faut que les outils du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche soient un peu
plus précis, parce qu'au niveau de l'habitat, c'est assez
problématique.
Mme Bacon: Vous débordez de la faune, au fond, vous allez
beaucoup plus loin quand vous parlez d'habitat.
M. Gauthier (Benoît): Disons que je ne déborde pas
de la faune lorsque je parle d'habitat parce que la faune, je dirais
plutôt que c'est une facette de l'habitat.
Mme Bacon: Les plantes et les fleurs, on déborde un
peu...
M. Gauthier (Benoît): Disons qu'on n'évacue pas la
faune lorsqu'on parle de l'habitat. Lorsqu'on parle de la forêt, on
n'enlève pas la faune qui y circule...
Mme Bacon: Non, non.
M. Gauthier (Benoît): Si je vous parle de l'habitat, on
sous-entend la faune qui est insérée à
l'intérieur.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je ne sais si c'est parce
que je vieillis, je suis toujours en contradiction. Tantôt, lorsque vous
avez présenté votre mémoire, à la nomenclature de
quelques dossiers qui vous ont fait connaître valablement dans le
Québec, il y en a deux en particulier qui ont retenu mon attention et je
vous ai davantage identifié.
Vous avez parlé de la route 440 sur les berges de Beauport. Je
pense qu'on n'était pas d'accord dans le temps, pas plus qu'on ne l'est
aujourd'hui et je ne vous en fais pas grief, loin de là, parce qu'on a
connu le règne des ingénieurs, le règne des architectes,
et, aujourd'hui, on connaît le règne d'autres
spécialités qui ont à coeur la protection de la nature
sous toutes ses facettes. On faisait miroiter dans le temps, de la part des
écologistes et d'autres spécialités, que la construction
d'une route sur les battures de Beauport allait faire disparaître une
bonne partie des oies blanches. En contradiction, je prétendais,
à ce moment-là, que l'habitat était tellement vaste, soit
sur la rive nord, soit sur la rive sud du Saint-Laurent, que cela
n'était pas quelques cents pieds ou quelque mille pieds qui mettraient
en danger cette espèce. J'ai été estomaqué, l'an
passé, de constater que le volier semblait augmenter d'une année
à l'autre. Quand je vois ces oiseaux un peu partout sur l'ensemble des
lacs du comté, de même que sur les rives du fleuve, je ne pense
quand même pas que c'était le seul habitat qu'ils avaient.
Vous avez aussi parlé de votre action lors de la création
du parc des Grands Jardins, qui est en partie dans le comté que je
représente, Charlevoix. Cela devait probablement viser deux fins et
d'abord une faune aquatique importante et assez facilement renouvelable, pour
autant qu'elle était protégée. Tant et aussi longtemps que
le gouvernement a fonctionné avec le système des clubs qu'il
possédait et que les gardiens ont été sur place, je pense
qu'on s'est même servi de certains des lacs de cet endroit pour
ensemencer un peu partout les lacs appartenant au gouvernement du Québec
sur ces territoires. Depuis quelques années, vu une surveillance moins
grande, on constate, forcément, que la réserve a diminué
et qu'il faudra que le gouvernement intensifie son action de surveillance.
La deuxième facette qui vous invitait, à ce
moment-là, je pense, à protéger les Grands Jardins - et je
dis maintenant que les gens de Charlevoix, tous les gens du milieu n'ont pas
été assez consultés - c'est le problème qui est
né avec la possibilité d'implanter dans les Grands Jardins, en
raison du lichen qui y existait, des caribous qui, il y a peut-être cent
ans, séjournaient dans Charlevoix et qui, en raison de certains
phénomènes naturels, ont émigré vers la
Basse-Côte-Nord.
On pourra peut-être me répondre, avant que j'argumente plus
longtemps que c'est un de mes collègues, alors que j'étais
titulaire de ce ministère, qui a implanté ces caribous. Je pense
que c'était louable comme tentative; cela a coûté assez
cher. Il y en avait environ 45. Après quinze ans, combien a-t-on encore
de caribous dans le parc des
Grands Jardins? Peut-on me le dire?
M. Chevrette: 70 caribous. (16 h 45)
M. Mailloux: Environ 70 caribous. Cela veut dire qu'on bouscule
une compagnie forestière qui est la plus grosse industrie de Charlevoix,
alors qu'elle importe déjà des matières premières
de l'Abitibi. Toute la réserve forestière dont nos travailleurs
ont besoin. Quand vous fermez Schefferville, vous savez ce que cela veut dire,
les loisirs avant les "jobs"? Actuellement, on constate qu'on a
dépensé, non pas des centaines de milliers de dollars, mais des
millions de dollars pour un troupeau de caribous qui, je pense - si je me
trompe, vos fonctionnaires rectifieront dégénère
d'année en année, étant donné que c'est de la
même famille et que la reproduction n'est pas assez valable. Quand je
constate qu'on ne peut même pas tuer de loups, qui prennent tout le
cheptel qui naît, année après année, pourquoi
continuerait-on de protéger les Grands Jardins, le lichen qu'il y a
là, pour un troupeau qui commence à coûter une fortune au
gouvernement alors qu'on a fait la preuve, après 15 ans, qu'il n'est pas
possible de le ramener dans un endroit semblable? C'est la question que je vous
pose.
On est, nous autres, les représentants d'un comté
où il y a passablement de chômage. Je veux bien accepter, pour
toutes les fins que vous visez, qu'on fasse l'impossible pour tâcher de
donner le plus de loisirs possible aux gens, et c'est le problème qu'a
le ministre avec le titulaire d'Énergie et Ressources et d'autres, mais
il y a également les "jobs" qu'il faut protéger, qui entrent en
contradiction avec des activités à des fins
récréatives.
Est-ce qu'on doit continuer, malgré que c'était louable de
la tenter, une expérience qui s'est avérée un fiasco
lamentable? Je dirai au ministre, qui est un nouveau titulaire au
ministère, de faire l'étude des coûts après les 15
ans. Il va s'apercevoir que cela aura coûté une fortune et, dans
les restrictions budgétaires actuelles, ce n'est pas possible de
continuer. Si on protège les Grands Jardins seulement pour cela, qu'on
fasse l'état du dossier pour savoir si cela doit se perpétuer et
arriver en contradiction avec les opérations des compagnies qui,
normalement, font vivre les gens du milieu.
Ce que je voulais faire ressortir, c'est que, malgré tout le
respect que j'ai pour tous ceux qui veulent conserver le plus possible le
milieu naturel de manière que la ressource puisse se perpétuer
pour les générations qui viennent, il demeure qu'il y a certaines
conditions à établir et qu'il faut voir lorsque des
contradictions se produisent dans un domaine, si ce n'est pas toujours le
secteur économique qui l'emporte. J'écoutais récemment la
plupart des interlocuteurs de
Charlevoix. Tantôt, ils feront appel au titulaire actuel afin
qu'il revoie la loi qui a fait en sorte que les Grands Jardins soient
déclarés zone de récréation et de conservation.
Cela entre en contradiction directe avec l'industrie qui fait vivre les gens du
milieu.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. Gauthier.
M. Gauthier (Benoît): C'est très intéressant,
ce que vous avez dit. Vous avez pris deux exemples sur lesquels on a
travaillé. Vous avez un exemple qui est hautement productif, à
savoir les battures de Beauport. Vous avez un autre exemple qui est "peu
productif", entre guillemets, au point de vue de la matière
végétale, c'est-à-dire les Grands Jardins. Les habitats
humides, on nous dit qu'ils comptent parmi les habitats qui rapportent le plus
d'argent, au ministère en tout cas et, j'imagine, à la
collectivité des Québécois, et cela est
démontré par les graphiques. Vous avez tous les graphiques. Ceux
qui dépassent tous les autres en matière de revenus, ce sont les
habitats humides, et les battures de Beauport sont de ces habitats. Ils sont
parmi les meilleurs habitats qui sont décrits dans les chapitres qui
sont là.
Alors, qu'on les perde, qu'on mette des routes dessus qui auraient sans
doute pu être placées ailleurs, à notre avis, c'est un
appauvrissement collectif. Alors, si vous voulez parler d'économie,
à notre avis, la route est tout à fait désavantageuse du
point de vue économique. Sauf que ce n'est pas toujours comme cela qu'on
amène les dossiers. On dit: Cela va créer 100 emplois pendant un
an. Après cela, on verra, on fera d'autres routes ailleurs. Alors, la
route 440 a été placée dans un des habitats les plus
productifs et on dit qu'elle aurait pu être placée ailleurs. Ce
n'est pas indispensable de mettre toutes les routes le long du fleuve. La
Transcanadienne, qui se déroule à l'intérieur des terres,
est un exemple qui démontre qu'on n'est pas obligé de toutes les
mettre sur les battures du Québec.
Il y en aurait long à dire sur le Saint-Laurent et sur l'aspect
de l'oie blanche, mais on va passer au sujet des Grands Jardins. À notre
avis, c'est un habitat qui a été déclaré peu
productif au point de vue de la matière ligneuse. Est-ce que le
découpage a été excédentaire et a pris les
meilleures forêts du Québec? Ce n'est pas notre point de vue. Le
découpage était tellement ratatiné à la toute fin
que celui qui voulait couper des arbres dans ce secteur, à notre avis,
causait un autre appauvrissement pour le dépens de la
collectivité du Québec. Couper des arbres qui auront de la
difficulté à repousser, c'est faire fortune en peu de mois, mais,
lorsqu'on pense à long terme, à notre avis, ce serait
peut-être faire fausse route.
Quant aux Grands Jardins, on pourrait dire que le zonage qui a
été fait s'est peut-être réduit à sa plus
simple expression.' C'est un endroit peu productif et, si les compagnies
forestières sont intéressées à y aller, à
notre avis, il y a peut-être un besoin flagrant de matières
ligneuses, mais je ne suis pas sûr que ce ne soit pas un appauvrissement
pour la collectivité du Québec de posséder un habitat
aussi froid. On voudrait toujours être dans le chaud, mais cela, c'est un
habitat froid qui est à la portée des grandes populations du
Québec. On n'est pas obligé d'aller se promener dans le
Grand-Nord du Québec pour voir ce qui fait une des richesses du
Québec, la toundra. Pour connaître ce qu'est le Québec, la
toundra, on n'est pas obligé d'aller dans le Nord du Québec. On
peut se déplacer sur très peu de distance et, heureusement, c'est
dans votre comté, c'est dans le comté de Charlevoix. Il est
possible que ce ne soit pas assez mis en évidence, que ce ne soit pas
assez connu et que la population ne traduise pas plus cela pour la circulation
et le tourisme mais, à notre avis, c'est un potentiel pour le
Québec habité, le Québec méridional d'avoir des
habitats aussi froids à si peu de distance. Je ne sais pas si je
réponds à toutes vos questions mais c'est en tout cas une des
réponses qu'on peut donner.
M. Mailloux: Cela répond en partie à mes
observations sauf que si...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: ... vous me le permettez, c'est un fait qu'a
l'intérieur même, au centre même des Grands Jardins, la
ressource forestière est à peu près absente. Le parc des
Grands Jardins, par contre, à mon sens et de l'avis des gens de
Charlevoix, a englobé une très grande partie de forêt, ce
qui met en cause partiellement les opérations d'une compagnie. Quand on
fait un parc de conservation comme les Grands Jardins, les gens peuvent aller
du Québec métropolitain ou du Montréal
métropolitain constater sur place l'intérêt qu'ils peuvent
retrouver à l'intérieur d'une forêt assez
diversifiée.
À deux ou trois reprises cette année, après la
création du parc des Grands Jardins, j'y suis allé moi-même
et j'ai constaté une situation à mon sens anormale. On y visait
des fins récréatives et des fins d'observation. Or, je serais
soucieux que le ministère fasse le décompte des gens qui y sont
allés pour des fins simplement visuelles et de ceux qui y sont
allés pour jouir de la ressource faunique qu'il y a là, la
pêche, etc.
Incidemment, à un moment donné, j'étais très
loin à l'intérieur des Grands
Jardins, par une température où, normalement, les mouches
sont assez abondantes dans le coin. Je me suis retrouvé avec quatre
personnes venant d'aussi loin que Paris. Elles étaient venues en
voilier, je ne sais pas grâce à qui, dans une région de
Québec, visiter les Grands Jardins. Mais elles se demandaient ce
qu'elles étaient venues faire là, à se faire manger par
les mouches, et sans permis de pêche. Elles avaient simplement le droit
de regarder. Il faudrait peut-être, forcément, qu'une
réflexion se fasse à savoir si, en dehors de la
possibilité que les gens continuent à visionner tout ce qu'il y a
là-dedans et à admirer ce qu'il y a on n'a pas tenu compte
suffisamment des impératifs d'autres activités. C'était
mon propos.
Le Président (M. Bordereau): Je vous remercie. Je
remercie, donc, la Société linnéenne du Québec. Un
petit mot pour le député de Berthier.
M. Houde: M. le président et ceux qui vous accompagnent,
je voudrais, d'abord, vous féliciter pour votre magnifique
mémoire. Je vois que vous êtes prêts à offrir votre
collaboration pour qu'enfin la faune soit de plus en plus
protégée au Québec. C'est ce que j'avais à dire.
Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Gauthier, ainsi que
les autres personnes avec vous.
J'appellerai donc maintenant l'Association de chasse et pêche le
Carcajou, Pointe-aux-Trembles Inc. Alors, vous êtes Mme Pauline
Lafleur-Bessette, je présume?
Association de chasse et pêche le Carcajou,
Pointe-aux-Trembles Inc.
Mme Lafleur-Bessette (Pauline): Oui.
Le Président (Bordeleau): Si vous voulez nous
présenter la personne qui est avec vous.
Mme Lafleur-Bessette: M. Maurice Bessette, président de
l'association.
Le Président (Bordeleau): D'accord.
Mme Lafleur-Bessette: M. le Président, M. le ministre, MM.
les membres de la commission, la présentation de ce mémoire est
axée davantage sur les résultats de mes propres
expériences vécues plutôt que sur des piles de documents
s'empoussiérant sur des tablettes. En effet, le contenu de ce
mémoire fait partie intégrante de notre vie de tous les jours se
concrétisant et se reflétant à l'intérieur des
cadres qui régissent le développement des composantes de notre
société actuelle.
Il est admis dans tous les précis d'écologie que tous les
êtres vivants de notre planète occupant un espace sont liés
entre eux par un réseau complexe d'interactions. Cette définition
précise clairement que les uns dépendent indéniablement
des autres pour survivre.
Comme je l'écrivais, le 8 septembre dernier, à
l'intérieur d'une chronique du journal L'Avenir de l'Est de
Montréal, "le principe fondamental des structures des organismes
sociaux, des associations pour la protection de la faune et de l'environnement,
qu'elles soient à but lucratif ou non, ont pour but premier d'instruire
le sportif à son appartenance à la vie végétale et
animale. Des cours éducatifs sur l'observation des espèces
fauniques et florales sont donnés régulièrement à
leurs membres dans le but de les convaincre du rôle social qu'ils ont
à jouer au sein de notre environnement québécois. Ils
n'oublient pas qu'en tant qu'organismes sociaux il est de leur devoir
d'idéaliser la collectivité à la conservation des
espèces qui nous entourent actuellement, car c'est du chasseur et du
pêcheur actuels que dépendront les générations
sportives futures, ainsi que l'espérance de vie des ressources
fauniques". Mais est-ce vraiment suffisant, car, quoi que nous puissions dire
ou faire, nous n'atteignons vraiment qu'une seule partie de la population
intéressée.
Cette question d'existence et de dépendance de la survie d'une
espèce, quelle qu'elle soit, est toujours remise en question et
constitue une règle morale acquise par tous les groupements de notre
société. La morale est une éthique qui concerne les
moeurs, les habitudes et les règles de conduite définies par
l'ensemble des lois qui régissent cette même
société.
Malheureusement, l'éducation de la société ne
rencontre pas toujours l'acceptation de la limite. L'instauration du rodage sur
le plan de l'éducation aux valeurs demeure, évidemment, de toute
première importance et devrait être exigée de toute urgence
par la présente commission. L'édification d'un programme
d'enseignement spécialisé où les principales orientations
seraient les suivantes: la conservation de la faune, la conservation de
l'environnement, la survie en forêt, l'orientation en forêt, etc.
-ces différentes orientations devraient être obligatoires; je le
mentionne entre parenthèses parce qu'on s'aperçoit, à
discuter avec les gens, qu'il n'y en a pas beaucoup qui savent grand-chose, et
on tourne en rond et autres matières susceptibles de préserver
notre environnement biologique pourraient être mises sur pied dès
le primaire pour s'accentuer davantage au secondaire, et ainsi de suite. Ainsi,
nous rejoindrions les fondements mêmes de l'enseignement, à savoir
qu'il est possible de former une société par micro-regroupement
aujourd'hui afin d'obtenir une population
consciente et sensibilisée au problème à la
prochaine génération.
Dans le contexte actuel, cette question de l'éducation aux
valeurs se rapporte directement à la conduite du chasseur et du
pêcheur, ainsi que du vacancier lorsqu'il entre dans les bois. Un
troupeau d'éléphants en fuite ne ferait pas plus de dommage
à notre écosystème que cette meute de destructeurs
épris de soi-disant liberté. Ils bouleversent et chambardent leur
environnement immédiat de façon outrageante pour un si beau pays
que le nôtre.
L'éducation du public n'est pas une mince affaire, je sais, mais
elle devrait être rendue possible avant l'obtention d'un permis de port
d'arme. N'a-t-on pas rendu possible ce système avec l'émission
des permis de conduire? Présentement, de la manière que vont les
choses, on remet dans les mains d'un enfant ou d'un adulte insensible au
problème une arme avec laquelle il peut tuer n'importe qui, n'importe
quoi et ce, sans information complémentaire. Doit-on appeler cela une
conscience de Québécois et laisser les qu'en-dira-t-on s'empiler
davantage sur notre compte, car chaque Québécois est un peu
braconnier? Ainsi le veut la tradition, dit-on. (17 heures)
Revenons sur cette question d'arme, si vous le voulez bien. Combien,
parmi les chasseurs, sont conscients de la force de l'arme ainsi que celle de
la charge qu'ils auront à employer pour les différents gibiers?
Pas beaucoup. Nous voyons régulièrement des tireurs de longue
portée venir pratiquer sur le champ de tir avec du 180 grains et tenir
leur carabine à l'épaulée, comme s'il s'agissait d'une
pelle? Le chasseur sait-il que la 303 achetée au surplus du coin,
à un prix abordable pour ses poches, n'est pas adéquate pour la
chasse au chevreuil pour des raisons sécuritaires, car elle devrait
être vérifiée par un armurier expérimenté en
raison de son dispositif de sécurité, et ce pour sa propre
sécurité à lui? Sait-il que seule la 308 ou la 270
chargée à 150 grains est suffisante pour la chasse au chevreuil?
Sait-il qu'une 308, qu'une 270 ou une 303 chargées de 150 grains sont
suffisantes pour tuer un animal comme le caribou? Sait-il qu'un gibier
mortellement atteint n'a pas nécessairement besoin de quatre ou cinq
balles pour mourir plus vite? Sait-il aussi que toute carabine semi-automatique
devrait être retirée du marché en raison de la
rapidité de son tir car, d'une part, le gibier n'a aucune chance de s'en
sortir tandis que, d'autre part, le chasseur québécois n'est pas
prêt mentalement à posséder cette arme, qu'il prend
d'ailleurs pour une mitraillette?
Mon opinion vous déconcerte plus ou moins, je m'en doute un peu.
Mais si vous aviez comme moi durant des années parcouru la
Côte-Nord et le Nouveau-Québec, plus rien ne vous surprendrait.
Des horreurs d'après-chasse, j'en ai vu plus souvent qu'à mon
tour. Par exemple, on retrouve régulièrement près des lacs
des restes de poissons en état de décomposition avancée,
trop petits pour faire une belle prise peut-être, mais qui auraient pu
grandir et se développer si on leur en avait laissé l'occasion.
Que dire du caribou, dont l'existence fut si souvent menacée que les
spécialistes ont dû ouvrir un dossier pour pouvoir le
protéger par n'importe quel moyen? Doit-on vous sensibiliser au fait
qu'il est inutile de tuer deux ou trois fois le même animal? Si vous
pouviez voir les dégâts que fait une balle en entrant dans la
viande, vous en seriez surpris. Ne va-t-on pas à la chasse pour se
nourrir de l'animal et non pour le simple plaisir de le tuer?
L'éducation aux valeurs sur les conditions de conservation
demeure évidente puisqu'il semble que le chasseur
québécois ne soit pas sensibilisé au fait qu'entre
possibilité et nécessité de se nourrir, il n'existe aucune
relation. Pourtant, les deux termes possèdent autant de mobilité
qu'il faut pour assurer des réserves alimentaires. Je ne crois pas
créer de sophisme en dissertant ainsi sur mon opinion. La fuir serait la
preuve d'un esprit sans courage et sans discernement.
Bien entendu, nous possédons au Québec une faune et une
flore qui sont magnifiques, mais il semble que nous ne soyons pas encore
accoutumés à en prendre soin. Au lieu de cela, nous
préférons donner nos impressions, formuler nos objections
plutôt que nous appliquer avec persévérance à
développer des principes.
Après le survol rapide du contenu de ce texte, on ne peut pas
éviter de parler des sentences. Mais, en réalité, quelles
peuvent être les sentences imposées à un individu qui
déroge aux conditions fondamentales de la vie sociale? Personnellement,
j'opterais davantage pour une punition sur le plan psychologique. Cela fait
plus mal que n'importe quelle amende. Je proposerais des cours obligatoires
dans les différentes catégories antérieurement
citées, si le chasseur ou le pêcheur récalcitrant veut
retrouver son permis de chasse ou de pêche, en plus d'avoir à
payer une forte amende.
Au gouvernement, nous demandons l'augmentation du nombre des agents de
conservation de la faune pour enrayer le braconnage; l'augmentation des amendes
et l'emprisonnement, à plus longue échéance, s'il le faut,
dans certains cas; l'obligation de suivre des cours de tir avant de remettre
définitivement un port d'arme.
Les idées énergiques déconcertent quelquefois, mais
pensez bien que c'est là le système de base de l'éducation
actuelle, celui-là même qu'on apprend à nos enfants
à
l'école. Telles sont nos recommandations dans le cadre de cette
commission, redonner par tous les moyens à notre société
québécoise le sens des valeurs qu'elle a
décentralisé depuis une couple de générations.
Je remercie la commission de m'avoir entendue.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, Mme Bessette. M. le
ministre.
M. Chevrette: Vous venez de nous exposer, à mon avis, une
conception bien personnelle. Comme vous le dites dès les
premières lignes: C'est le fruit de mon expérience personnelle.
Vous faites allusion, tout au cours de votre message, au manque
d'éducation dès le bas âge.
Êtes-vous au courant qu'actuellement le MLCP dispense un cours sur
une base régulière dans toutes les régions?
Mme Lafleur-Bessette: Je regrette, je n'étais pas au
courant.
M. Chevrette: Un cours qu'on appelle communément PESCOF,
qui permet à tout individu désireux de s'inscrire pour obtenir
son permis, de s'instruire sur le maniement des armes. Vous savez
également, à titre de renseignement personnel, que nous avons au
moins une quinzaine de commissions scolaires, que je sache, déjà
affiliées qui dispensent ce cours dans le cadre d'un programme
régulier. Nous faisons aussi des efforts réguliers, au sein de
notre ministère, pour tâcher d'y intéresser les autres
commissions scolaires.
Mme Lafleur-Bessette: D'accord.
M. Chevrette: C'est peut-être peu, mais c'est
déjà un point de départ fort important.
Vous dites dans votre exposé que vous préféreriez
des punitions psychologiques plutôt que des amendes.
Mme Lafleur-Bessette: Oui.
M. Chevrette: Et vous recommandez des amendes plus fortes.
Mme Lafleur-Bessette: Oui.
M. Chevrette: Comment interpréter ça?
Mme Lafleur-Bessette: Quand je parle de punitions psychologiques,
je pense qu'on devrait faire comme on le fait pour les enfants à
l'école, retourner les gens, les obliger. En fait, je pense que ces
cours devraient être obligatoirement passés en bonne et due forme,
non seulement en théorie mais en pratique, avant l'émission d'un
permis de port d'arme. Pour ceux qui dépassent vraiment les bornes, je
pense que cela devrait être davantage obligatoire. M. Bessette: M.
le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Bessette.
M. Bessette (Maurice): Pour répondre à la question
de Pauline, le cours de maniement d'armes, à mon point de vue, c'est un
zéro. Ce n'est pas une chose... Si c'est votre gouvernement à
vous qui l'a sorti, c'est un zéro, ce n'est que du négatif. On a
donné un cours chez nous, à notre association, et le type qui
donnait les cours a donné les réponses à tout le monde.
Les gens ont passé avec des 100%. Ne venez pas me dire que votre cours
est efficace, il ne l'est pas. Je trappe et je vais à la chasse depuis
20 ans et je n'ai encore jamais vu un chasseur qui était prudent, sur la
quantité que vous sortez et les cours que vous leur donnez. Ce sont des
gars vraiment dangereux.
M. Chevrette: Mais vous...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: Vous mettez en doute la valeur même du cours
d'une dizaine ou d'une douzaine d'heures qui existe depuis 1973, en particulier
sur le maniement d'armes, et qui donne d'une certaine façon les bases
d'une sécurité minimale. C'est ce qui existe. On ne vous dit pas
que c'est parfait, mais de là à juger que c'est un zéro...
On pourrait bien partir la première année avec un fusil dans les
mains pour montrer à manier une arme, si on suivait le cheminement que
vous semblez développer, mais il m'apparaît que votre
mémoire, sans juger la réponse de monsieur, parle d'inculquer aux
jeunes, dès le bas âge, le souci ou la notion de conservation en
même temps que de leur donner à l'école des notions tout au
moins théoriques, si j'ai bien compris, plutôt que pratiques, mais
exiger un cours pratique qui corresponde à un cours de conduite
automobile, par exemple...
S'il y a une partie sur laquelle je suis passablement d'accord avec
vous, c'est sur celle d'inculquer aux jeunes dès le bas âge cette
notion de sécurité, cette notion de conservation. Je pense que
cela se fait de plus en plus, et même au niveau des toutes
premières années à l'école. On donne le souci de
l'environnement, chose que ceux de notre génération - je parle de
la députée de Chomedey et de moi-même - n'avaient
peut-être pas. Aujourd'hui, je sais qu'on a cette notion, qu'on donne
cette notion aux jeunes, ce souci de l'environnement, ce souci de la
conservation d'ordre général. J'espère que cela
débouchera sur quelque chose de plus
tangible à l'avenir. Mais de là à juger d'une
façon aussi radicale, madame... Vous comparez cela à un troupeau
d'éléphants qui entre en forêt. Bonne mère du ciel!
Je ne peux croire que les Québécois sont tous... Vous en avez
peut-être vu une petite "gang" de quatre ou cinq et vous reliez tout cela
à l'ensemble des chasseurs et pêcheurs québécois. Je
suis réfractaire à cette façon de globaliser les choses,
alors que... J'admets avec vous qu'il y en a qui sont "grelots", en bon
canadien, on en a...
M. Bessette: M. le ministre, M. le ministre, excusez!
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît!
M. Chevrette: ... mais, de là à
généraliser, il me semble que c'est un peu fort. Non?
M. Bessette: M. le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez
répondre, oui, M. Bessette.
M. Bessette: Écoutez, pendant combien de temps allez-vous
en forêt durant l'année?
Mme Lafleur-Bessette: On a vécu là...
M. Chevrette: Vous seriez surpris. Je suis né aux abords
du bois, mon cher monsieur.
M. Bessette: Je suis là, monsieur...
M. Chevrette: À Saint-Côme, pas loin de la ZEC de
Lavigne de M. Lajeunesse. C'est presque dans le bois.
M. Bessette: Si vous répondez ainsi, c'est parce que vous
n'êtes pas au courant. Je cours les bois à longueur d'année
et vous pouvez mettre 65% des chasseurs québécois, monsieur, qui
sont un danger public. Je peux vous amener à bien des endroits, si vous
êtes prêt à venir avec moi, je vais vous montrer des
orignaux qui ont été tués, monsieur, par pur accident. Les
gars ont dit: Ah! Ce n'est pas un chevreuil, on va le pousser sur le
côté. Ne me dites pas qu'il n'y a qu'une petite poignée de
ces chasseurs, il y en a de bien grosses poignées.
M. Chevrette: Vous êtes en train de me dire que...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: ... vous seriez une minorité capable de
bénéficier de sport de la chasse, en particulier...
M. Bessette: Non, non, ce n'est pas là-dessus... Non, non,
excusez-moi.
M. Chevrette: C'est ce que vous me dites.
M. Bessette: Non, la seule chose qu'on...
M. Chevrette: Vous me dites qu'il y a 65% des chasseurs qui ne
savent pas ce qu'ils font là! C'est la majorité qui ne savent pas
ce qu'ils font là!
M. Bessette: Je suis d'accord avec vous, mais, avec les permis
que vous émettez aujourd'hui et avec les cours que vous donnez, je vous
dis une chose...
Mme Lafleur-Bessette: Seulement des cours théoriques, ce
n'est pas suffisant...
M. Bessette: ... si vous continuez comme cela, dans dix ans, mon
cher monsieur, il n'y aura plus de faune ni de flore parce que c'est comme des
troupeaux d'éléphants qui entrent là-dedans. Allez
à Mont-Laurier, mon cher monsieur, pour vous enfarger dans les chasseurs
qui tirent sur n'importe quoi. Ce n'est pas quelque chose de nouveau.
Renseignez-vous là-dessus et vous aurez toute l'information.
Le Président (M. Bordeleau): Alors...
M. Chevrette: II faudra que je me renseigne parce que j'ai
été à la chasse et je n'en ai pas rencontré tant
que cela.
M. Bessette: Cela doit être dans votre cour.
M. Chevrette: Pardon?
M. Bessette: Cela doit être dans votre cour.
M. Chevrette: Non, cela aurait dû être dans la
vôtre.
M. Bessette: Non, loin de la mienne.
Le Président (M. Bordeleau): S'il vous plaît! S'il
vous plaît! Alors, M. le député de Marquette.
M. Dauphin: Oui. Évidemment, au nom de l'Opposition, je
vous remercie pour votre mémoire, qui est effectivement assez direct,
soit dit en passant. Le ministre a fait état tantôt des punitions
psychologiques. Vous faites état qu'on pourrait obliger les gens
à suivre des cours...
Mme Lafleur-Bessette: Oui, sûrement.
M. Dauphin: ... pour recouvrer leur permis et vous faites
état d'amendes plus fortes. Voyez-vous autre chose que cela ou si vous
limitez cela à des cours, pour un récalcitrant, un mauvais gars?
On lui fait prendre des cours.
Mme Lafleur-Bessette: II y a sûrement des amendes plus
fortes. Ces cours devraient être obligatoires. Je le
répète, je le fais souvent, mais enfin, je pense que c'est cela.
Si on ne connaît pas quelque chose, c'est bien sûr qu'on n'est pas
conscient de ce qui se passe et on est moins sensibilisé, c'est normal,
mais, si on est au courant de ce qui se passe, disons que, déjà,
on tient pour acquis que - je ne sais pas - telle espèce faunique est en
voie de disparition. Pour quelqu'un de logique - je ne parle pas de quelqu'un
d'illogique, je parle toujours d'une personne logique - quand on est conscient
de ce qui se passe, il me semble que la logique veut qu'on prenne les mesures
nécessaires pour régler le problème.
M. Dauphin: Évidemment, c'est sûr qu'on ne peut pas
être contre la vertu. Je pense que tout le monde qui est à cette
table aimerait mieux que tout le monde se comporte bien à 100%, qu'on
respecte la faune et tout cela, mais il faudrait probablement presque un agent
de conservation pour chaque chasseur sur le plan pratique.
M. Bessette: Non, pas nécessairement. Écoutez bien,
on donne des cours de maniement d'armes pendant une journée. Mais s'il
fallait ensuite prendre ces types et les amener, comme je l'ai fait, au champ
de tir, avec des cibles mouvantes, si vous aviez été là,
je pense que vous auriez vous-même eu peur. On a fait des cibles avec des
animaux, des enfants et des adultes photographiés. La plupart des gars
qui sont venus avec moi et qui ont suivi le même cours ont
été dans le champ avec nous et ils ont tué tout ce qu'il y
avait là. Ils ont tué des enfants, des adultes et tout. Donc, les
gens ne connaissent pas les calibres. C'est à cela qu'on veut en venir.
On ne veut pas dire que tout le monde est pareil, mais ceux qui sortent de ces
cours sont vraiment dangereux...
Mme Lafleur-Bessette: C'est un manque d'éducation.
M. Bessette: II y a une éducation à donner.
Mme Lafleur-Bessette: L'éducation, ce n'est pas un
problème.
M. Dauphin: Je voulais vous dire aussi, en terminant...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Je tiens à vous
dire aussi en terminant, en ce qui me concerne en tout cas - je ne sais pas si
j'ai des collègues qui ont d'autres questions - que, effectivement, sur
le fait de commencer à la base, à un niveau
élémentaire, je suis entièrement d'accord avec cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis. (17 h 15)
M. Perron: J'aurais deux questions à vous poser, madame.
La première: Vous mentionnez la Côte-Nord - parce que je suis
député du comté de Duplessis - dans quel coin
étiez-vous à ce moment-là? Est-ce que c'était dans
le bout de Schefferville?
Mme Lafleur-Bessette: Sept-Îles et Schefferville, oui.
M. Perron: Vous parlez des gens qui entrent dans le bois pour
chasser le caribou, par exemple, et qui font des ravages dans certains cas,
même au niveau de l'environnement. Je crois que vous avez vécu
quelques expériences, mais je voudrais seulement souligner une chose,
c'est que depuis deux ans il y a une grande coordination entre le
ministère de l'Environnement et le ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour justement obliger pratiquement tous les
chasseurs qui vont à Schefferville chasser le caribou dans le nord, qui
vont à la pêche au nord et aux alentours de Schefferville,
à respecter l'environnement. Il y en a même qui ramènent au
complet tout ce qu'ils ont comme déchets. Cela est un gros pas en
avant.
La question que je désire vous poser est celle-ci: Lorsque vous
parlez d'éducation aux jeunes, est-ce que vous pensez, dans votre
optique, comme citoyenne du Québec, que le ministère de
l'Éducation devrait rendre obligatoire un cours, par exemple,
hebdomadaire ou un cours mensuel sur cette question d'éducation sur la
flore et la faune?
Mme Lafleur-Bessette: Oui, monsieur, effectivement.
M. Perron: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'écoutais
certains commentaires que
monsieur émettait tantôt. Je vous avoue que je dois
partager certaines de ses opinions, quand on traite du maniement des armes et
des cours qui se donnent pour l'obtention du permis de port d'arme.
C'était une initiative louable, je crois, en 1973, mais qui aurait
dû depuis ce temps être sensiblement améliorée,
tenant surtout compte du fait qu'aujourd'hui, je crois, on a abandonné
les baux privés communément appelés "leases" et qu'on a
pratiquement ouvert, le territoire du Québec à la grandeur,
à l'exception de certains parcs. J'aimerais qu'on réponde
à cela.
On a parlé tantôt d'éducation. Je crois qu'on
devrait favoriser, tant au niveau élémentaire que secondaire, des
cours pour ceux qui sont intéressés au maniement des armes et
à la chasse, et même à la chasse à l'arc ou autre.
Mais il y a aussi une question très importante, c'est celle de la
pollution, pollution non seulement visuelle, mais on a pu constater au cours
des dernières années que malheureusement la forêt est
pratiquement devenue un dépotoir à ciel ouvert dans plusieurs
régions du Québec et qu'on ne semble pas avoir le personnel
suffisant pour apporter les correctifs nécessaires à cette
pollution. Tantôt, dans l'une de vos recommandations, qui était
relativement sobre, parce que vous ne l'expliquiez pas, vous mentionniez qu'on
devrait augmenter le nombre d'agents de conservation.
Mme Lafleur-Bessette: C'est exact.
M. Rocheleau: Est-ce que vous pourriez expliciter le nombre que
vous souhaiteriez voir en région ou dans différentes
régions?
Mme Lafleur-Bessette: M. le ministre disait cet avant-midi qu'il
y a 500 agents de conservation de la faune, si j'ai bien compris, à
temps plein et qu'il y en a 1000 comme auxiliaires. D'accord? Cela fait 1500
personnes pour tout le territoire, et là-dessus il y en a 750 qui
travaillent et 750 qui sont en congé, parce que de temps en temps il
faut prendre un congé; c'est certain, c'est normal, on ne peut pas
toujours travailler. Ce qui veut dire qu'il y a 750 agents de conservation au
travail, disons, à temps plein, pour un territoire grand comme la
province de Québec. Ce n'est pas beaucoup cela, à mon point de
vue.
M. Rocheleau: Maintenant, M. le Président, dans vos
commentaires...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Étant donné que vous semblez avoir
une expérience très intéressante de la chasse, de la
pêche, sûrement, et du trappage, j'aimerais vous entendre traiter
de la qualité de nos agents de conservation. On a parlé de la
quantité, peut-être pas suffisante; pourriez-vous nous parler de
la qualité?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Bessette.
M. Bessette: Pour ce qui est de la qualité des agents de
la faune, c'est très bien, mais excepté, comme mon épouse
l'a dit tantôt, qu'il n'y en a pas assez...
Mme Lafleur-Bessette: Ils ne sont pas en nombre suffisant.
M. Bessette: J'ai guidé des gens à Barraute. Dans
le même nuit, il s'est tué onze orignaux en braconnage. On est
allé avertir le garde-chasse; le garde-chasse n'était pas
là, mais il était là; il ne voulait pas se déranger
pour cela. Avait-il peur? Qu'avait-il? On ne le sait pas. À Barraute, il
s'en est tué onze durant la nuit. Cela n'est pas du braconnage
ordinaire. Des gars étaient assis sur le toit de leur camion, avec des
chaises, avec leur carabine et d'autres se promenaient dans les champs, un peu
partout. Est-ce parce qu'on manque de personnel ou est-ce parce que les
gardes-chasse ont peur? Cela se voit partout. Le monde a peur d'en parler, mais
je n'ai jamais eu peur d'en parler. Cela se passe ainsi un peu partout. Cela
s'est passé à Joliette et à Barraute et cela se passe
encore de même ailleurs.
M. Rocheleau: M. le Président, Joliette est dans le coin
du ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. S'il vous
plaîti...
M. Chevrette: Si c'est en pleine ville, il ne peut pas l'avoir
vu.
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: ... j'ai une autre question. Je comprends
qu'à cause des compressions budgétaires, le ministre est
peut-être mal placé ou peut-être bien placé pour
faire des recommandations tenant compte du nombre quand même restreint
des agents de conservation, mais j'aimerais peut-être entendre vos
commentaires en ce qui concerne les auxiliaires. Prétendez-vous que les
auxiliaires qui sont rattachés aux zones d'exploitation
contrôlée, aux ZEC, sont suffisamment autorisés ou
qualifiés, s'ils ont des pouvoirs ou s'ils ne devraient pas en avoir?
J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Bessette: Non. Ils devraient avoir
plus de pouvoirs, ils n'en ont pas assez. Si les gars traversent une des
ZEC, si c'est seulement un auxiliaire, le gars qui va passer à
côté va lui dire: "Écoute, le "flo", assis-toi". Les gars
continuent. Cela s'est vu, je l'ai vu faire. Il faudrait qu'ils aient plus
d'autorité, ces gars-là. Ils n'en ont pas. Même s'ils
voulaient faire quelque chose, les gars n'ont pas été
assermentés, j'en suis à peu près sûr.
M. Chevrette: On pourrait peut-être corriger des choses,
mais il ne faut quand même pas laisser donner de fausses
réponses.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. M. le ministre.
M. Bessette: Non, je ne donne pas de fausses réponses,
monsieur.
M. Chevrette: Je m'excuse, mais les auxiliaires ont tous les
pouvoirs à l'exception de l'arrestation. Donc, le pouvoir de porter
des...
M. Bessette: C'est cela.
M. Chevrette: ... plaintes formelles. S'il y a un "fin-fin" qui
envoie promener un agent auxiliaire, ce dernier peut prendre le numéro
des plaques, l'identification du gars. Le pouvoir d'arrestation est le seul
qu'il n'a pas et je dois vous dire que, là-dessus, j'ai
déjà, comme ministre, parce que cela relève d'un
amendement à la loi du fédéral, écrit à mon
collègue fédéral pour lui demander de nous donner plein
pouvoir également quant aux auxiliaires.
Sur la notion même de conservation, il faut quand même dire
qu'il y a des associations qui, depuis 25 et 3D ans, travaillent auprès
de centaines et de centaines de leurs membres sur la notion de conservation et
sur la notion de sécurité. Il ne faut pas croire, à vous
écouter, que le Québec est en danger, même quand on a eu le
déclubage. Je vais vous donner une statistique: avant 1970, il y avait
de 20 à 25 personnes qui mouraient annuellement au Québec. Depuis
l'avènement des cours, qui ont évolué, soit dit en
passant, ce n'étaient pas des cours plats, à part peut-être
les premiers cours donnés en 1973. C'est vrai que c'était un
cours de maniement d'armes: "Prends-le de même, mets-le pas de même
et fais attention à cela." Mais les cours ont évolué
depuis, il y a même des cliniques qui suivent et complètement
certains cours dans certains milieux, si bien qu'on se retrouve avec des
statistiques depuis 1979, à seulement deux ou trois accidents mortels
annuellement. Donc, il y a eu une évolution au niveau des associations.
Il y a une prise de responsabilités au niveau des dirigeants de
plusieurs groupements au Québec. Je ne dis pas qu'il n'y a pas motif
à amélioration, j'en conviens. Je ne voudrais cependant pas qu'on
donne l'impression qu'on dramatise au bout la situation. Il y a quand
même une évolution trop lente peut-être, à notre
point de vue, mais, à mon avis, qui est suffisamment marquante pour
qu'on le souligne. On ne doit pas toujours regarder le côté noir
d'un problème, on doit aussi regarder l'évolution permanente qui
s'effectue, tant au niveau des cours, tant au niveau des statistiques
elles-mêmes qui ne demandent pas... Moi, je félicite les gens au
Québec qui prennent leurs responsabilités dans leurs groupements,
dans leurs associations et qui prennent les devants même sur les
gouvernements, parce qu'on sait que l'État providence... On ne doit pas
toujours se fier à l'État, il y a des groupements qui ont pris
leurs responsabilités et il y a des associations. La
Fédération québécoise de la faune, entre autres, a
toujours travaillé sur le cours lui-même, sur le contenu du cours
lui-même et appuie régulièrement le gouvernement dans ses
démarches. Donc, il ne faudrait pas laisser croire à la
population, tout simplement, que cela se dégrade, cette histoire. Au
contraire, cela s'améliore, et si on avait les ressources
financières nécessaires, on pourrait faire plus, j'en conviens.
Le jour où on pourra accréditer même les agents, par
exemple, des ZEC, où on pourra accréditer les gardiens, par
exemple, des clubs, des pourvoiries, on améliorera encore davantage
notre situation, c'est bien évident. C'est une démarche qui est
plutôt lente, mais vers laquelle on tend tout le monde ensemble, je
pense.
Le Président (M. Bordeleau): Vous aviez terminé, M.
le député de Hull?
M. Rocheleau: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Rocheleau: ... disons que cette commission parlementaire a
été commandée dans le but de questionner ceux qui sont ici
présents. L'interprétation devrait être analysée
dans chacun des cas, mais je pense que, à moins de faire erreur,
à moins que le ministre ne veuille mettre le bâillon, les gens qui
sont questionnés peuvent sûrement répondre de la
façon qu'ils veulent bien répondre, et cela sera à nous,
après...
M. Chevrette: Ils défendent le Parti libéral.
M. Rocheleau: On est capable de se défendre tout seul, M.
le ministre, ne vous en faites pas. Quant à ceux à qui on adresse
des questions - on pourra l'interpréter de la façon qu'on voudra
bien après - il n'en demeure pas moins que les gens qui sont
appelés, pas nécessairement à la barre des
témoins, mais qui nous apportent des commentaires, doivent faire,
nécessairement, les commentaires qu'ils jugent opportuns, tenant compte
qu'ils sont des gens du milieu, des gens qui sont bénéficiaires
de ces services qui nous sont offerts par nos différents
ministères.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va?
M. Rocheleau: Je n'ai pas d'autres questions en ce qui me
concerne, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix, vous me faites un signe?
M. Mailloux: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Allez-y.
M. Mailloux: Relativement aux auxiliaires qui ne sont pas
mandatés pour exécuter certains travaux que font les
gardes-chasse, quand on dit: Si on pouvait les habiliter en ajout, c'est
toujours l'éternel problème des conventions des agents de la
faune qui empêchent le ministère d'aller au-delà des
pouvoirs actuels qui sont donnés aux auxiliaires.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: La Loi sur les pêcheries relève du
fédéral et on n'a pas eu l'amendement sur cette loi. En ce qui
regarde la conservation, on peut, par nous-mêmes, par notre propre loi,
donner des pouvoirs aux agents auxiliaires tout comme aux agents...
M. Mailloux: II n'y a pas un éternel problème de
convention de travail des agents de la paix qui fait que les auxiliaires ne
pouvaient...
M. Chevrette: Vous savez qu'il y a eu du brasse-camarades dans
cela?
M. Mailloux: Oui.
M. Chevrette: Vous savez que c'est tout scindé.
Maintenant, le groupement des agents est scindé en accréditations
distinctes. Actuellement, je pense que nos agents de conservation de la faune
se retrouvent dans une seule unité d'accréditation, en
négociation d'ailleurs, on en entend parler dans les journaux ces
temps-ci. Ils ne sont plus regroupés avec les autres, où il y
avait des conflits de juridiction, effectivement.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci. Oui, M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: J'aurais seulement une question au ministre,
suivant celle que mon collègue de Charlevoix a posée: Est-ce que,
au point de vue de l'efficacité chez nos agents de conservation, le
ministre pourrait m'indiquer s'il y a eu des améliorations dans les
négociations? On prétend que la dernière convention est
échue depuis 23 mois. Est-ce que, au point de vue de
l'efficacité, quand nos agents de conservation ont à
négocier leur mieux-être collectif, cela ne va pas à
l'encontre, peut-être, de l'efficacité, quand on prend autant de
temps à régler un problème qui...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Le problème vient du fait suivant. Je ne
voudrais pas qu'on déborde du cadre de la commission parlementaire,
mais, en réponse à votre question, M. le député de
Hull, je dois vous dire que, tout d'abord, concernant le problème de la
négociation, on vient à peine de commencer à
négocier, parce qu'on était en instance d'accréditation
devant le Tribunal du travail, en contestation perpétuelle depuis un an
et demi. Cela a pris, je pense, vingt mois à se régler devant le
Tribunal du travail. Pour ce qui est de la négociation comme telle, il y
a eu une négociation intensive vers la fin d'octobre ou le début
novembre, mais ils viennent à peine d'être
accrédités. Donc, le problème n'est pas la lenteur des
négociations comme la lenteur dans le processus d'accréditation.
La négociation relève du ministre de la Fonction publique.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Je remercie M. et
Mme Bessette. Un mot... Vous voulez ajouter quelque chose, M. Bessette? (17 h
30)
M. Bessette: Je voulais dire au ministre qu'il continue à
mettre des couvertes comme ça et la faune va bien se conserver.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. et Mme Bessette.
J'appelle donc maintenant l'Association des outfitters du Québec
représentée par M. André Chassé, président.
M. Chassé, peut-être une suggestion avant que vous commenciez
votre mémoire. Je me demande si ce ne serait pas possible de
résumer ou, en tout cas, de dire l'essentiel. Je constate qu'il est
assez volumineux. Je voudrais autant que possible ne pas retarder trop les
autres mémoires qui nous seront présentés. Est-ce que
c'est possible pour vous?
Association des outfitters du Québec
M. Chassé (André): On va essayer de faire notre
possible. On s'est permis de souligner certaines choses en attendant. On va
essayer de résumer le mieux possible.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Si vous voulez, au
début, nous présenter les personnes qui sont du groupe.
M. Chassé: Si vous me permettez, mon nom est André
Chassé, président de l'Association des outfitters du
Québec. À mon extrême gauche, il y a Mme Farrar qui est la
présidente, M. Réal Mélançon qui est
vice-président du conseil exécutif et Me Pierre Lapointe qui est
notre conseiller juridique et qui fera la lecture et le dépôt du
document.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez y aller, M.
Lapointe.
M. Lapointe (Pierre-L): Mme Bacon, M. le Président, MM.
les députés, d'abord les remerciements d'usage au ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour nous avoir donné
l'occasion d'être entendus. Notre association est composée des
seuls pourvoyeurs, il faudrait le préciser ici, qui offrent nourriture
et hébergement sur un territoire sur lequel ils possèdent ou non
des droits exclusifs de chasse, de pêche et de piégeage.
Nous croyons être un maillon extrêmement important de
l'industrie touristique québécoise, puisque nous offrons au
public un service unique qui constitue peut-être la principale attraction
touristique du Québec. Nous croyons, avec le ministère, que notre
industrie est appelée à absorber une forte proportion de
l'accroissement de la demande d'utilisation de la faune prévue pour les
prochaines années. Notre industrie est capable, comme semble le vouloir
le ministre, de devenir le véritable réseau d'hôtels en
forêt dont fait état la déclaration ministérielle de
M. Lessard. Nous avons pour ceci deux demandes principales qui constituent la
totalité de notre mémoire.
La première, c'est qu'il faudrait que nos entreprises soient
construites sur des bases financières, juridiques et commerciales
solides, qui permettent non seulement leur survie artisanale, mais
également leur développement commercial pour le plus grand bien
de l'économie québécoise tout en assurant un meilleur
service à ceux et celles qui veulent pratiquer la chasse, la pêche
et le piégeage. Et en second lieu, il faudrait que l'environnement ou
habitat faunique soit suffisamment protégé et
développé pour qu'il continue, à notre avis, d'être,
et de loin, la principale attraction touristique du Québec.
En matière de développement de la pourvoirie qui est notre
premier chapitre, nous voudrions nous attaquer d'abord au bail d'occupation,
c'est-à-dire à ce contrat en vertu duquel nous possédons
certains droits sur un territoire.
On remarque, selon ce que l'on a reçu à ce jour, qu'aucune
attention n'est apportée à la principale demande des pourvoyeurs,
soit celle d'être partie à un bail qui constitue la condition sine
qua non de l'existence d'entreprises économiquement viables et capables
de se développer. En effet, les baux que le ministère fait
présentement signer aux pourvoyeurs sont à ce point
unilatéraux qu'ils apparaissent comme léonins en n'accordant
aucun moyen au locataire de financer des immobilisations parfois fort
importantes et en dévalorisant l'investissement lui-même.
À titre d'exemple, le bail est d'une durée maximale de
neuf ans et n'est assorti d'aucune option de renouvellement. Le loyer n'est pas
déterminé. Le locateur, c'est-à-dire le ministère,
n'a aucune obligation autre que celle de fournir une carte délimitant le
territoire, de faciliter l'accès à l'information gouvernementale
relative au même territoire et d'informer le locataire des orientations
du ministère. Ce sont les seules obligations du ministère.
On impose au locataire une série d'obligations presque toutes
aussi imprécises les unes que les autres et à ce point larges
qu'elles pourraient permettre en tout temps au locateur de considérer le
locataire comme en défaut. Par exemple, on y retrouve une multitude
d'obligations imprécises: Maintenir le territoire sous bail en tout
temps; des immobilisations d'une valeur minimum de, où il n'y a personne
qui nous dit ce qu'est la valeur; entretenir un réseau routier sans nous
dire jusqu'à quel point, etc. Je pense à une multitude
d'exemples; si l'on veut qu'on y revienne, on le fera avec plaisir.
Aucune limite n'est imposée au droit du ministre de refuser un
transfert de bail, une sous-location, un transfert d'actions, une cession ou
une vente des immobilisations. Et, enfin, la pire d'entre toutes: il peut
être mis fin au bail avant son expiration par le ministre, pour fins
d'intérêt public, sur simple avis de six mois et sans aucune
obligation de dédommager le locataire.
Il est bien entendu qu'on sait très bien que ni le ministre, ni
aucun de ses fonctionnaires n'a l'intention aujourd'hui d'utiliser les pouvoirs
discrétionnaires que lui donne le bail pour brimer le pourvoyeur.
Cependant, la simple existence de ces pouvoirs jointe au manque de
précisions du bail rend tout à fait impossible l'autofinancement
de l'entreprise à être exercée sur le territoire. Par
exemple, parce que le bail ne comporte aucune option de renouvellement et
aucune obligation de rachat des immobilisations à son expiration, le
coût de toutes les immobilisations doit
être amorti sur la période non expirée du bail.
Quant aux améliorations initales, le problème est un peu moins
important, vu la possibilité d'amortir sur une période de neuf
ans. Il en va autrement cependant pour les améliorations qu'un locataire
voudrait apporter en cours de bail.
Parce que les officiers du ministère chargés des relations
avec les pourvoyeurs ont comme obligation de s'intéresser au seul aspect
faunique et n'ont que peu de compréhension des problèmes
financiers et commerciaux affrontés par les pourvoyeurs, il est
très difficile d'obtenir les solutions qui permettraient à ceux
des pourvoyeurs qui le désirent de se conduire en véritables
entrepreneurs.
Parce qu'il peut être mis fin au bail avant son terme et pour une
cause aussi large que l'intérêt public, aucune institution
financière ne peut accepter de prêter sur des immobilisations avec
une table de remboursement correspondant à la table d'amortissement.
Parce que le locataire est soumis à toutes les conditions qui pourraient
être imposées de temps à autre, par règlement, et
qu'il ne peut faire aucune construction ou amélioration sans
l'autorisation du ministre qui, peut également refuser sans raison tout
projet d'exploitation et de protection de la ressource faunique, le locataire
pourvoyeur est en fait traité comme un employé du
ministère qui n'a aucune garantie de revenu, mais qui doit quand
même assumer les risques reliés à son investissement.
Pour permettre à la commission de juger de la jutesse de nos
observations, qu'il suffise de vérifier la qualité des baux qui
nous gouvernent auprès d'un organisme comme la Société de
développement industriel et de lui demander si elle accepterait
d'investir à titre d'actionnaire ou de prêteur sur la foi d'un
titre d'occupation d'aussi piètre qualité.
Afin de pallier ces carences et de permettre à ceux des
pourvoyeurs qui le désirent d'assurer le développement de leur
entreprise, nous demanderions que la loi autorise le ministre à accorder
des baux compatibles avec les besoins réels des locataires pourvoyeurs
et l'objectif que le ministre dit vouloir poursuivre, d'un réseau
d'hôtels en forêt, soit un bail qui comporterait les clauses
usuelles des baux d'occupation où des immobilisations importantes
doivent être faites par le locataire.
Ainsi, il nous semblerait essentiel que le ministre ait le droit de
consentir des baux possédant, entre autres, les caractéristiques
suivantes: La durée du bail continuerait à être de neuf
ans, mais le locataire bénéficierait de trois options successives
de renouvellement de cinq ans. Les mots "pourvoirie" et "pourvoyeur" seraient
définis.
Il serait explicitement prévu qu'un commerce de pouvoirie
pourrait être exercé par une compagnie. On comprendrait
très bien qu'à ce moment-là la loi pourrait obliger une
personne physique à qualifier la compagnie. Les obligations du locateur
seraient définies et comprendraient entre autres l'obligation de motiver
son refus d'autoriser une demande de transfert du bail. Une obligation serait
créée en fin de bail de dédommager le locataire, et non le
locateur, pour les améliorations laissées sur les lieux.
L'évaluation du montant du dédommagement suivrait les
règles normales d'expropriation dans tous les cas où le
non-renouvellement interviendrait pour une cause autre que
l'intérêt public et serait basée sur le plus bas du
coût de remplacement ou de la juste valeur marchande de l'entreprise dans
le cas de non-renouvellement de bail pour un motif d'intérêt
public. Une telle clause, à peu près semblable, existait
auparavant, mais le ministère a décidé de l'enlever
unilatéralement, il y a quelques années.
Une moins grande discrétion serait laissée au ministre de
changer les termes d'un bail par voie de réglementation, de façon
qu'il soit dans l'obligation de dédommager le locateur de l'effet de
réglementation lui créant des charges directes additionnelles.
Les droits consentis donneraient aux locataires le contrôle de toutes les
activités de plein air dans le territoire et des pouvoirs accrus
seraient consentis aux pourvoyeurs pour faire respecter les lois et
règlements existants. Le loyer serait déterminé à
l'avance, quitte à introduire une clause d'indexation. Le locateur ne
pourrait mettre fin unilatéralement au bail avant l'expiration de
celui-ci, sauf par voie d'expropriation. L'ensemble du bail refléterait
une forme quelconque de confiance envers le locataire plutôt qu'une forme
d'asservissement aux dictées du ministère.
Une procédure serait introduite pour permettre la vente, la
cession ou le transfert des actifs loués ou des actions de la compagnie
détenant le bail. De plus, le transfert d'actions ou d'actifs serait
automatique dans les cas où il serait rendu nécessaire par suite
de l'ouverture d'une succession ou d'une reprise de possession des actifs par
une banque à charte ou une autre institution financière reconnue.
Ce serait évidemment la seule façon de donner des actes de
fiducie pour se financer.
Avant de terminer ces quelques remarques relatives au bail, nous
suggérerions que tous les baux existants, dont plusieurs ne se
termineront qu'en 1990, soient renégociés ou amendés de
façon qu'ils reflètent les éventuelles dispositions d'une
loi qui donnerait suite à nos demandes ou, à défaut, que
l'objet de celle-ci soit introduit directement dans la loi qui
mentionnerait
explicitement que telles nouvelles dispositions auraient
préséance sur les baux existants.
Deuxièmement, en ce qui a trait au développement de la
pourvoirie elle-même, c'est-à-dire de notre industrie. Comme nous
l'avons dit au début du présent mémoire, nous serions
heureux d'être partie au réseau d'hôtels en forêt
auquel le ministre fait allusion, en demandant cependant qu'on se rende compte
que nous serions surtout des auberges en forêt et non pas des
hôtels en forêt. Nous avons exprimé au titre
précédent la condition primordiale qui peut permettre à
notre profession de se développer comme industrie. Nous allons
maintenant tenter de faire ressortir quelques-unes des conditions qui seront
nécessaires pour que cette industrie puisse s'épanouir et
prospérer pour le bénéfice de ses membres et du
public.
Notre industrie, comme toutes les autres, doit, pour continuer son
épanouissement, être assurée que des conditions
artificielles ne soient créées qui permettraient de multiplier
les services d'hébergement en forêt et enlèveraient la
rentabilité à l'ensemble des entreprises exerçant cette
activité. Il est en effet fort significatif que le taux d'occupation des
immobilisations des pourvoyeurs est présentement inférieur
à 50% et ce, sur une période de six mois, soit une utilisation
des immobilisations inférieure à 25% sur une base annuelle.
Nous sommes conscients des fortes pressions que font, entre autres, les
ZEC pour obtenir des droits d'hébergement, ce à quoi nous nous
opposons avec véhémence. Nous avons cependant été
surpris de constater, au deuxième alinéa de la page 5 du document
accompagnant la déclaration ministérielle, que le ministre ouvre
la porte à ce que des permis de pourvoirie soient accordés dans
des zones d'exploitation contrôlée, sans plus de précision.
(17 h 45)
Or, M. le Président, il y a des limites à la concurrence
que peuvent subir les pourvoiries, qui ne pourront se développer ni
même survivre sans faire un profit suffisant qui leur permette de
s'améliorer. Une enquête maison que nous avons faite auprès
des membres de notre association démontre d'ailleurs que bien peu de
ceux-ci font un profit suffisant pour accorder aux pourvoyeurs un simple
salaire décent.
Or, ces limites seraient d'autant plus facilement atteintes que la
concurrence proviendrait d'entreprises qui ont toutes été
financées par l'État et qui bénéficient de
l'auréole que ne manque pas de leur donner auprès du
ministère le fait qu'elles soient censées être des
entreprises sans but lucratif, même si nous présumons que, dans
bien des cas, certains de leurs employés bénéficient de
revenus plus substantiels que ceux de la très grande majorité des
pourvoyeurs.
Nous comprenons très bien les objectifs poursuivis par
l'État qui désire démocratiser l'accès à la
pratique des activités en forêt. Nous comprenons beaucoup moins
bien le préjugé extrêmement favorable dont
bénéficient les ZEC auprès d'une grande partie des
fonctionnaires de l'État, lorsqu'on constate ce qu'elles sont devenues
dans bien des cas. En accordant à des gens le droit de se
déguiser en pourvoyeurs à l'intérieur des ZEC, on aura
bouclé la quadrature du cercle et on aura recréé, sous le
couvert de la démocratie et dans une apparente légalité,
l'équivalent des anciens clubs privés qu'on a voulu abolir. Une
telle situation existe déjà à bien des endroits, par
exemple, lorsque le ministère nomme les ZEC administrateurs
délégués des immobilisations des anciens clubs
privés et il ne suffirait maintenant plus que de l'universaliser et de
la légaliser en permettant aux ZEC et/ou à des personnes
liées à elles d'offrir des services d'hébergement aux
membres.
Les pourvoyeurs demandent également depuis longtemps de
définir les diverses exclusivités dont ils sont censés
bénéficier, soit celle d'hébergement et celles de chasse,
de pêche et/ou de piégeage.
Quant à l'exclusivité d'hébergement, nous
remarquons, à la page 5 du document explicitant la déclaration
ministérielle, que le ministre désire que la pourvoirie demeure
une entreprise axée sur la pratique d'activités de chasse et de
pêche en déclarant que "le droit territorial d'hébergement
accorderait au titulaire d'un permis de pourvoirie l'exclusivité de
l'offre d'hébergement sur un territoire pour la pratique des
activités de chasse, de pêche et/ou de piégeage". Ainsi,
l'exclusivité de l'offre d'hébergement ne s'appliquera pas
à celui qui désire pratiquer une autre activité sur le
territoire.
Deuxièmement, nous constatons de même que le ministre ne se
propose pas d'élargir la notion de droits exclusifs qu'il peut accorder
aux termes de l'article 56 de la loi en ajoutant aux droits exclusifs de
chasse, de pêche et de piégeage les droits exclusifs d'exercice
des autres activités récréatives sur le territoire,
incluant le camping, la photographie, le canoë, la motoneige, etc.
Or, la rentabilité d'une pourvoirie est directement
proportionnelle à la maximisation de l'utilisation des services
d'hébergement, elle-même fonction de la qualité de
l'organisation du territoire et de la sécurité qui est
accordée à chacun des participants aux activités
récréatives. En ne possédant pas le contrôle de
toutes les personnes désirant utiliser le territoire, le pourvoyeur
perdra l'utilisation, dans certains cas, d'une partie fort importante de
celui-ci et, en saison de chasse, diminuera la qualité de la
sécurité dont il est ou non responsable.
Encore là, les pourvoyeurs ont beaucoup de difficulté
à comprendre que les pourvoyeurs exerçant une activité en
forêt autre que la chasse, la pêche ou le piégeage,
bénéficient d'un préjugé tellement favorable
auprès du ministère que l'on ne croit pas que leurs
activités en forêt méritent autant d'être
surveillées et contrôlées que celles des chasseurs et des
pêcheurs. L'habitat faunique risque autant, sinon plus, d'être
détruit par celui qui porte un appareil photo ou qui conduit une
motoneige ou qui fait un feu de camp devant sa tente que par celui qui porte
une canne à pêche ou une arme à feu.
Nous lisons, dans les documents du ministère, que le
législateur se prépare à permettre de servir ou vendre de
la venaison ou du poisson, mais que l'on ne parle pas encore de cette
incongruité qui défend aux pourvoyeurs d'apprêter pour
consommation sur place les prises de leurs clients. Il s'agit, comme vous
pouvez vous l'imaginer, M. le Président, d'une disposition de la loi
très difficilement applicable et qui provient d'une
interprétation restrictive des actuels articles 33, 46.1 et 78 de la
loi, défendant de servir dans un établissement public ou
commercial, donc, une pourvoirie, du gros gibier ou du poisson dont la vente
est interdite par règlement. Il nous semble qu'une disposition
législative impossible à appliquer, qui oblige à toutes
sortes de contorsions légalistes et qui incite des milliers de
pêcheurs et de chasseurs à se moquer du législateur,
devrait être abolie en ce qui concerne la consommation des prises des
clients dans les pourvoiries.
Nous avons peu traité du problème particulier de ceux des
pourvoyeurs qui ne possèdent pas de droits exclusifs de chasse, de
pêche et de piégeage sur le territoire sur lequel ils ont un droit
exclusif d'hébergement. Nous sommes d'opinion que le refus du
ministère d'accorder à ces pourvoyeurs des droits exclusifs de
chasse, de pêche et de piégeage, sur un certain territoire, est
justifié lorsqu'il s'inscrit dans le cadre de l'accessibilité de
la population à la ressource faunique, mais nous soumettons qu'il ne
l'est pas du tout lorsqu'il est motivé par des critères
appliqués étroitement et n'ayant aucune commune mesure avec cet
objectif d'accessibilité.
Comme nous le disions plus haut au sujet de la rentabilité de
l'entreprise de pourvoirie et comme nous en discuterons plus bas au sujet de la
protection de l'habitat faunique, la rentabilité de l'entreprise de
pouvoirie est conditionnelle à ce que le pourvoyeur soit en mesure
d'offrir à sa clientèle un accès planifié à
une ressource faunique existante. Pour survivre, le pourvoyeur qui offre
l'hébergement doit faire connaître le territoire qu'il dessert au
public en général, dont il tire sa clientèle, contribuant
par le fait même à l'achalandage et, par voie de
conséquence, à la détérioration de ces territoires.
Ainsi, la survie même de l'entreprise d'hébergement sera mise en
péril par une trop grande utilisation d'un territoire qui ne
représente plus d'intérêt pour le type de clientèle
intéressée aux services d'hébergement.
Pour ces raisons, nous voudrions nous assurer que l'État se rende
compte que le pourvoyeur qui possède des droits exclusifs de chasse et
de pêche est le meilleur protecteur de la ressource faunique qu'il veut
conserver, ne serait-ce que dans le but d'assurer sa propre survie, et qu'il y
aurait lieu de faciliter l'obtention des droits exclusifs de chasse et de
pêche à ceux des pourvoyeurs qui ne possèdent que des
droits exclusifs d'hébergement, entre autres, en interprétant de
façon libérale - par opposition à restrictive - les
critères d'émission de droits exclusifs de chasse et de
pêche énoncés au règlement.
Ceci pourrait être fait, premièrement, en permettant
l'octroi de droits exclusifs de chasse et de pêche à moins de 60
kilomètres d'un village ayant une population moindre qu'un certain seuil
dans certaines régions où l'industrie de la chasse et de la
pêche est particulièrement importante, à des pourvoyeurs
bénéficiant déjà de droits exclusifs
d'hébergement.
Deuxièmement, en s'assurant que le ministère accepte
lui-même d'appliquer les dispositions de l'article 3 de tel
règlement qui permet d'augmenter encore d'environ 10 000
kilomètres carrés la superficie globale de territoire sur lequel
le ministère peut délivrer des droits exclusifs de chasse et de
pêche, de façon à favoriser l'octroi de tels droits
exclusifs aux pourvoyeurs qui ont déjà investi dans des services
d'hébergement.
De toute façon, il serait important que le ministère
constate que tout territoire sur lequel des droits d'hébergement sont
délivrés, que ce soit à des pourvoyeurs ou à des
villégiateurs, nécessitera à plus ou moins long terme un
contrôle de l'exploitation et des efforts particuliers de conservation et
que la personne qui est la plus apte à s'acquitter de cette fonction est
le pourvoyeur, qui a déjà investi dans son entreprise
d'hébergement.
De toute manière, il serait nécessaire pour le
ministère de coordonner les activités qu'il permet, dans les
territoires libres, avec l'activité propre du pourvoyeur y offrant des
services d'hébergement, de façon à assurer à la
fois la protection du territoire et celle du pourvoyeur: à titre
d'exemple, le ministère devrait s'abstenir d'émettre des droits
de piégeage dans le rayon commercial des pourvoiries qui veulent se
rentabiliser en offrant des services d'hébergement à la
clientèle intéressée au piégeage, en s'abstenant
d'octroyer des droits exclusifs
d'hébergement à des entreprises trop rapprochées
les unes des autres et en cessant d'émettre des baux d'occupation du sol
à des fins de villégiature dans le rayon commercial des
pourvoiries.
Ainsi, il nous apparaît que nous serons d'autant plus capables de
nous développer comme industrie et de devenir un véritable
réseau d'hôtels en forêt que l'environnement
économique et juridique créé par la législation, la
réglementation et le pouvoir discrétionnaire des fonctionnaires
nous permettra de vivre et de nous épanouir.
Or, les activités que nous exerçons nous obligent, en
fait, à nous adresser continuellement à trois ministères
différents, soit ceux de l'Énergie et des Ressources; du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, et de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme. Or, personne jusqu'à maintenant n'a semblé au MLCP se
soucier de notre santé économique et de notre participation au
développement économique du Québec et ce, parce que les
officiers du MLCP interprètent, à bon droit selon nous, la
vocation du ministère comme étant celle de gérer la faune
et son habitat et non d'assurer la prospérité des entreprises qui
en dépendent. Notre éloignement du MIC, qui s'abstient trop
souvent d'intervenir dans ce qu'il croit, quant à lui, être la
responsabilité du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, nous empêche de bénéficier des services que le
MIC offre aux autres composantes de l'activité économique
québécoise. Comme nous devons avant tout être des
entrepreneurs, nous croyons donc qu'il y aurait lieu de ramener la
totalité de notre activité économique sous l'égide
du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme où nous
pourrions, selon nous, trouver beaucoup plus facilement réponse aux
problèmes autres que ceux reliés à la protection de la
faune qui nous concernent. Quant à ce dernier rôle, nous serions
désireux de continuer à l'assumer de concert avec le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
La protection de la faune. Nous sommes très heureux de constater,
à la page 6 de la déclaration ministérielle, que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est conscient
que, pour maximiser l'efficacité de ses interventions, il tentera chaque
fois que cela sera possible de s'associer aux divers organismes privés
et publics intéressés à la protection des habitats de la
faune et même de conclure des ententes bipartites ou multipartites avec
eux.
Nous sommes en effet l'un de ces organismes d'autant plus
intéressé que la propre survie économique et commerciale
de nos membres est elle-même liée à la protection des
habitats de la faune. En conséquence, nous avisons le ministre que nous
serions heureux et désireux de collaborer avec lui dans la poursuite de
l'objectif qu'il énonce. À cet effet, et parce qu'une telle
entente bipartite suppose que les deux parties s'entendent sur la façon
d'atteindre l'objectif, nous nous permettons de suggérer ici
quelques-uns des moyens que nous préconisons.
Comme nous l'avons dit plus haut en ce qui a trait à la
protection des habitats, il ne nous semble aucunement souhaitable ni possible
de faire une différence entre un utilisateur du territoire faunique, qui
porte une arme à feu ou une canne à pêche, et un
utilisateur qui y exerce une autre activité récréative. En
conséquence, nous répétons qu'il y aurait lieu de confier
au pourvoyeur la responsabilité du contrôle de toutes les
activités récréatives sur son territoire, afin que le
partenaire, soit le gouvernement, soit ensuite en mesure de lui demander de
rendre compte de l'accomplissement de ses obligations.
En effet, le type d'activités exercées par chacun des
utilisateurs des services reliés à la faune n'est pertinent qu'en
ce qui a trait aux problèmes reliés à la conservation des
animaux eux-mêmes. À l'instar du ministre et de l'Union
internationale pour la conservation de la faune et de ses ressources,
citée par lui à la page 2 de sa déclaration
ministérielle, nous sommes conscients que "la conservation n'est pas un
secteur limité, mais un processus qui recoupe tous les secteurs et qui
devrait être pris en compte par tous les secteurs". Nous ajoutons
à cela que nous pourrons être des agents de conservation d'autant
plus efficaces que nous aurons le contrôle et la responsabilité de
toutes les activités récréatives qui s'exercent sur le
territoire sur lequel nous avons des droits exclusifs.
Voici notre deuxième recommandation. De même, pour
permettre aux pourvoyeurs d'accomplir leurs obligations dans le territoire sur
lequel ils ont des droits exclusifs, il y aurait lieu de s'assurer que tous les
pourvoyeurs aient le titre d'auxiliaires de la protection de la faune sur leur
territoire ainsi que les obligations en découlant et que la Loi sur la
protection de la faune regroupe sous un même toit toutes les infractions
relatives non seulement à la conservation de la faune, mais
également à la conservation et à la protection de ses
habitats. Nous souscrivons donc à l'opinion du ministre à ce
sujet, mais en élargissant les pouvoirs non seulement des agents de
conservation de la faune, mais également ceux des auxiliaires.
Une autre des façons d'assurer l'objectif de protection de
l'habitat faunique que recherche le ministre serait de s'assurer que la
subdivision du territoire pour fins récréatives soit faite de
façon rationnelle. Par exemple, on retrouve des lacs ou des routes qui,
d'un côté, font partie d'une ZEC et, de l'autre, d'une pourvoirie
et sur
lesquels personne ne connaît sa juridiction. On octroie à
des ZEC des territoires immenses qu'elles n'ont pas la capacité de
gérer, tout en refusant d'en annexer des parties à des
pourvoiries qui seraient géographiquement plus en mesure d'y exercer un
contrôle efficace. On accorde des permis de villégiature formant
des enclaves sur des lacs sur lesquels les pourvoyeurs sont censés avoir
juridiction. On avise six mois à l'avance que tous les squatters qui
auront construit un chalet à telle date pourront faire légaliser
leur titre d'occupation, et j'en passe.
Comme les autres voeux pieux prononcés par les divers
intervenants qui ont voulu améliorer la qualité de
l'environnement, nous croyons en effet que le voeu du ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche demeure lettre morte aussi longtemps qu'il n'aura
pas accepté de prendre les moyens pour rationaliser la
répartition du territoire et qu'il n'aura pas confié à
chacune des parties intéressées des responsabilités
proportionnelles à leurs capacités et à leurs
désirs et intérêts de protéger l'habitat
faunique.
Quatrième recommandation. La déclaration
ministérielle prévoit elle-même que l'un des moyens
à utiliser pour assurer l'objectif de protection de l'habitat est
l'augmentation des pénalités dans les cas d'infraction à
caractère biologique grave. Nous souscrivons entièrement à
cette décision. Nous nous permettons cependant de faire remarquer au
ministre que l'augmentation du montant des amendes, suivant qu'il s'agit d'une
première ou d'une seconde infraction, nous semble un mode
périmé de législation puisqu'un braconnier ne se fait
jamais prendre lors d'une première infraction et que, peu inquiet des
conséquences d'une telle première infraction, il poursuivra
souvent son activité jusqu'à une première condamnation
qu'il ne craint pas. En conséquence, nous suggérons que les
pénalités prévues pour une première infraction
soient elles-mêmes fortement augmentées plutôt que les
seules pénalités pour les infractions subséquentes.
En conclusion, afin de ne pas abuser du temps qui nous est
accordé, et on sait qu'on l'a déjà fait, nous nous
permettons de référer la commission et le législateur aux
nombreuses résolutions adoptées à l'un ou l'autre de nos
congrès, que nous avons déjà fait parvenir aux officiers
du ministère; ces résolutions font état de nos
préoccupations particulières et ne devraient pas faire l'objet
d'une audition par une commission parlementaire.
Avant de terminer, nous nous permettons toutefois de vous inciter
à écouter avec beaucoup d'attention les demandes contenues dans
notre mémoire qui ne se veut rien d'autre que l'appel d'un groupe
d'entreprises toutes composées d'entrepreneurs trop individualistes et
jaloux de la qualité de leur vie, désireux d'améliorer non
seulement leur condition personnelle, mais également la qualité
des services qu'ils offrent, et désireux d'atteindre à un niveau
d'excellence dont bénéficiera tout le Québec
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Lapointe. M. le
ministre.
M. Chevrette: Compte tenu de certains engagements, nous allons
demander à nos invités de revenir à la barre à 20
heures précises, puisqu'on a de part et d'autre des engagements. Donc,
on reprendra la période de commentaires et de questions après le
souper. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): La commission suspend ses
travaux jusqu'à ce soir, 20 heures, en espérant que tout le monde
sera là.
(Suspension de la séance à 18 h 03)
(Reprise de la séance à 20 h 09)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît'
Mesdames et messieurs, la commission du loisir, de la chasse et de la
pêche reprend donc ses travaux. Je vous remercie toutes et tous de votre
ponctualité.
Lors de la suspension, nous en étions à la période
des questions concernant le mémoire de l'Association des outfitters du
Québec.
M. le ministre, je vous donne priorité.
M. Chevrette: M. le Président, messieurs, j'ai
écouté avec beaucoup d'attention votre mémoire. J'ai
quelques commentaires à faire avant de passer aux questions.
Tout d'abord, vous avez fait longuement état du fameux bail. Je
comprends bien qu'il faille discuter clairement devant les parlementaires du
bail d'occupation, en tout cas du bail qui vous permet de construire, que vous
obtenez du ministère de l'Énergie et des Ressources pour une
période d'une vingtaine d'années. J'espère que vous faites
la distinction par rapport au bail que vous obtenez du MLCP qui, lui, vous
donne le privilège du droit de chasse, de pêche et de "trappage"
d'une durée de neuf ans.
Je vous dis tout de suite que j'ai trouvé intéressante la
suggestion que vous nous faites en ce qui regarde le 9-5-5-5. Cependant, je
suis convaincu que Me Chassé devra me soutenir dans mes efforts pour
faire amender la Loi sur les pêcheries parce
que je ne pourrais pas me rendre à sa demande sans obtenir au
préalable des amendements précis. Tout ce que je peux faire,
c'est de vous offrir un renouvellement du bail actuel dans la conjoncture des
lois actuelles.
D'autre part, sur le bail, vous faites énormément allusion
au fait que vous n'avez pas l'exclusivité du territoire. Effectivement,
je l'ai fait vérifier et cela ne fait pas tellement longtemps. Si je
comprends bien votre mémoire, vous voudriez être les
propriétaires fonciers, à toutes fins utiles, par la signature du
bail, puisque vous parlez des usagers de toute nature. Est-ce à dire que
vous iriez jusqu'à vouloir en interdire l'accès, par exemple, aux
personnes intéressées à y cueillir des fruits sauvages,
comme les bleuets ou les framboises?
Le Président (Bordeleau): M. Chassé ou M.
Lapointe.
En tout cas, l'un ou l'autre.
M. Chevrette: L'un ou l'autre.
Le Président (Bordeleau): M. Lapointe.
M. Lapointe: II est vrai, M. le ministre, que l'état de la
législation ne vous permet probablement pas de faire tout ce que vous
voudriez faire. Nous avons dans nos gouvernements des exécutifs qui ont
également des moyens de se concerter. Autant nous comprenons qu'il vous
soit impossible de donner suite à tout ce que nous voulons, autant nous
vous disons qu'il nous fera extrêmement plaisir de vous appuyer dans tout
ce que vous feriez auprès des organismes ministériels qui ont
pour objet de planifier le travail de divers ministères pour obtenir ce
qu'on désirerait.
Quant à la deuxième question que vous posez relativement
à l'interdiction d'accès à de tierces parties, je crois,
M. le ministre, que vous n'avez pas lu avec attention notre mémoire.
Nous avons dit que tout ce que nous voulions était le contrôle des
activités récréatives - et nous le disons à
quelques reprises - sur notre territoire. Or, la cueillette des framboises,
c'est hors de tout doute une activité récréative. Nous ne
voulons pas en interdire l'accès sur notre territoire. Nous voulons -
comme pour toutes les autres personnes qui veulent faire de la
récréation sur notre territoire - avoir la possibilité de
contrôler de telles activités.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. le ministre.
M. Chevrette: En d'autres termes, si ces gens utilisent vos
chemins, par exemple, il pourrait y avoir un droit de passage à payer,
mais vous avez besoin d'identification pour cela.
M. Lapointe: II n'y a personne de nous qui l'exige, il n'y a que
les ZEC qui exigent un droit de passage.
M. Chevrette: Mais je suppose que vous en avez un.
M. Lapointe: Non, c'est surtout pour des questions de protection,
entre autres dans la période de chasse. Vous allez me dire qu'il ne se
cueille pas beaucoup de framboises dans la période de chasse, mais
parlons des photographes. Dans la période de chasse, un territoire
normal ne peut pas être utilisé par plus de trois ou quatre
groupes de chasseurs à l'orignal en même temps. Si une personne
fait une activité photographique dans le territoire, cela nous
enlève le quart de l'utilisation du territoire, pour des raisons de
sécurité.
M. Chevrette: D'accord. Vous avez parlé de votre
inquiétude sur le nombre éventuel de pourvoyeurs. Je pense que
vous avez été mis au courant de notre structure administrative
par laquelle nous visons à consolider le réseau actuel, qui est
de 180 pourvoyeurs à droits exclusifs. Vous avez parlé du
renouvellement des baux. Je peux vous dire que, jusqu'à maintenant, il y
en a 110 qui ont été renouvelés. Il y en a une dizaine sur
lesquels on a eu certaines modifications et une centaine qui ont
été renouvelés automatiquement. Il y en a environ vingt
qui sont en processus de renouvellement et une quarantaine qui sont toujours en
vigueur et qui viendront à échéance.
Là-dessus, également, je puis vous dire que, dans l'esprit
du ministère, il n'est pas question de donner des pourvoiries à
des endroits extrêmement rapprochés. Vous y avez fait allusion
tantôt. On a même discuté avec votre groupe d'une distance
d'au moins 60 kilomètres et nous avons dit que nous interdirions les
développements ou encore les endroits de villégiature dans le
contexte de la nouvelle politique. Je pense que cela correspondait à vos
désirs, tout au moins au niveau des discussions qui ont eu lieu. Est-ce
que je fais erreur?
M. Lapointe: La réponse à cette question est
double, M. le ministre. Lorsque cela a été discuté, le
problème était énormément plus grave que celui-ci.
Nous occupions des territoires, nous croyions que nous avions des droits
exclusifs et, pour des raisons quelconques, nous n'avions pas de droits
exclusifs. Alors, les discussions qui ont eu lieu à ce moment-là
avec le ministère, c'était vraiment pour lui demander de
s'assurer qu'on ait des droits exclusifs le plus rapidement possible parce que
cela devenait quelque peu dangereux.
Quant à l'idée d'obliger que les
pourvoiries soient relativement éloignées des centres
urbains, oui, nous y souscrivons, M. le ministre, et la demande qu'on fait
présentement, c'est strictement dans le cas des pourvoiries n'ayant
présentement pas de droits exclusifs dans certaines régions qui
sont particulièrement propices, où les pourvoiries sont une
partie importante de l'économie, et où l'éloignement de
villages de très petites dimensions le permettra. Mais dans
l'état actuel, de la façon que le décret a
été rédigé, cela signifie que le moindre petit
village de 100 ou 150 habitants, parce qu'il est là, nous ne pouvons
être à moins de 60 kilomètres de ce petit village. Je suis
tout à fait d'accord, M. le ministre, qu'il faut que vous
légifériez pour empêcher qu'on soit trop rapprochés
des centres urbains, mais c'est la définition de centre urbain qui
pourrait être retouchée.
M. Chevrette: Que je sache, M. Lapointe, les droits acquis ne
sont pas touchés par le décret. C'est en fonction des
nouveaux.
M. Lapointe: Mais une très grande quantité de baux
ont été signés, par exemple, ces derniers temps, et nous
sommes en période de signature. Je pense que, pendant les deux
prochaines années, il y a aura probablement 90% des baux qui auront
été signés de nouveau. Alors, c'est vrai, vous avez raison
dans le sens que cela ne touche pas aux droits acquis, c'est certain.
M. Chevrette: Dans ce contexte, est-ce que cela vous paraît
moins difficile comme normes? Vous n'aviez quand même pas l'air de trop
rechercher la concurrence dans votre exposé.
M. Lapointe: Non, ce n'est pas exact, M. le ministre. Au
contraire, nous avons dit que nous occupions 15 000 kilomètres
carrés et nous suggérons au gouvernement d'ajouter 10 000
kilomètres carrés. M. le ministre, je m'excuse de vous reprendre
pour la seconde fois, mais vous avez mal lu.
M. Chevrette: M. Lapointe, si je vous ai compris... Ah non! on ne
se dispute pas, on se comprend. Si je vous ai bien compris, vous visiez la
rentabilité des pourvoiries existantes.
M. Lapointe: Des pourvoiries.
M. Chevrette: Quand vous parlez d'ajout, ce n'est pas
nécessairement d'ajouter au nombre des pourvoiries, cela peut être
d'en agrandir certaines qui existent pour les rentabliser davantage.
M. Lapointe: Nous n'avons pas du tout parlé de ce sujet,
M. le ministre. Lorsque nous avons parlé dans notre mémoire de
territoires, nous avons fait allusion - et le chapitre 1.4, je pense, est
précis strictement aux pourvoiries qui n'ont pas présentement de
droits exclusifs. Nous disons que nous aimerions que l'activité
économique de ces pourvoiries sans droits exclusifs soit
protégée en interprétant la réglementation de
façon libérale, de façon qu'on regarde
précisément leur cas et qu'on essaie de leur donner des droits
exclusifs, parce que, et c'est ce qu'on dit dans le mémoire, nous
constituons un certain danger.
Ces pourvoiries, à droits non exclusifs, annoncent leurs
activités "at large", dans les divers médias et elles attirent
plus de gens dans les territoires libres où elles se trouvent parce
qu'elles annoncent les activités générales de leur
territoire. Or, elles n'ont pas de contrôle sur les activités de
leur territoire. Alors, on dit: Parce qu'elles n'ont pas de contrôle,
elles contribuent d'une certaine façon à la
détérioration de leur territoire. On suggère de regarder
s'il n'y aurait pas possibilité d'accorder des droits exclusifs à
ces gens et, à cet effet, de libéraliser quelque peu les normes
du décret de 1981.
M. Chevrette: Oui, d'accord. Un dernier point. Vous souhaitez
pratiquement échapper au MLCP, si ce n'est pour la dimension de la
protection de la faune, et vous souhaitez être régis par le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Je vous avoue
carrément ne pas très bien comprendre pourquoi, puisque c'est
grâce à la matière première, à la faune
elle-même, si vous constituez votre propre entreprise, si vous êtes
un entrepreneur, c'est grâce à la denrée première
que nous, nous avons la responsabilité de protéger.
Il m'est apparu, en lisant votre texte, que ce qui vous manquait,
c'était plutôt la dimension de la promotion extérieure pour
vous amener de l'eau au moulin, et était la raison qui vous faisait
pencher en faveur du ministère du Tourisme, de l'Industrie et du
Commerce, plutôt qu'autre chose. En tout cas, vous n'avez pas
semblé me faire, vous ne m'avez pas fait la preuve, la
démonstration qu'il y avait un autre avantage que celui-là.
J'aimerais vous entendre là-dessus, parce que je considère que,
si c'était le cas, vous devriez vous battre à ce moment-là
pour que tout l'aspect de la gestion de la faune, y compris la promotion pour
les pourvoiries, relève du MLCP. Cela m'apparaîtrait encore
beaucoup plus logique.
M. Lapointe: Premièrement, j'admire votre "logisme", si
les choses pouvaient se dire comme cela. Vous dites dans votre assertion que
nous aimerions être à l'Industrie et au Commerce si ce n'est que
pour la dimension de la protection de la
faune. Premièrement, ces mots "si ce n'est que" sont beaucoup
plus importants que vous ne le laissez supposer, parce que nous savons que ce
que nous avons à vendre à la clientèle, ce sont justement
des possibilités de chasser et de pêcher.
Vous dites que nous voudrions être là et que c'est
seulement pour la dimension "eau au moulin". Je crois, M. le ministre, que vous
nous avez mal compris. Nous croyons qu'à votre ministère, vous
avez en matière de protection de la faune des gens extrêmement
compétents; cependant, nous pensons qu'à votre ministère,
il n'y a personne qui soit capable de comprendre les problèmes
qu'affronte entrepreneur. Nous ne savons pas ce qu'il faut faire, M. le
ministre, et nous suggérons à ce moment-là de nous mettre
sous l'autorité de gens qui connaissent mieux nos problèmes que
les gens de votre ministère. Pourquoi? Parce que ce qui nous a le plus
frappés dans la déclaration ministérielle du mois de juin,
c'est justement - et nous y souscrivons, comme nous le disons à quelques
reprises - cette volonté du ministre de faire de nous un réseau
d'hôtels ou d'auberges en forêt. Si c'est cela sa volonté -
et j'ai bien dît que nous y souscrivons - on doit nous donner des outils
pour qu'on le devienne, et nous ne trouvons pas normal, M. le ministre, le type
de bail que l'on nous fait signer - vous avez pratiqué le droit comme
moi cela n'a pas de bon sens.
Présentement, il n'y a pas un seul pourvoyeur qui ait
été capable de se financer sur son bail et on leur demande de
changer les termes du bail. Premièrement, ils n'ont pas reçu
d'instruction pour les changer et, deuxièmement, dans des cas
précis, ils nous disent: "De toute façon, nous n'en avons pas le
pouvoir, parce que la loi interdit spécifiquement, entre autres, des cas
de dédommagement en fin de bail." À ce moment-là, nous
disons: Ou bien le ministère se donne les moyens pour nous
considérer comme des entrepreneurs, comme partie intégrante de
l'économie québécoise, ou bien le ministère dit:
"Je ne m'occuperai que de gestion de la faune et, s'il vous plaît, faites
vos affaires avec le MIC." Mais c'est une suggestion, M. le ministre, que l'on
fait et cela n'a rien à faire avec la compétence des officiers du
ministère dans la gestion de la faune.
M. Chevrette: Je dois reconnaître candidement qu'il y aura
toujours un contentieux tant et aussi longtemps qu'on ne clarifiera pas les
lois actuelles. Que voulez-vous? La promotion relève du ministère
de l'Industrie et du Commerce; la gestion relève du MLCP et l'occupation
relève du ministère de l'Énergie et des Ressources. On
doit composer, en tout cas, dans la conjoncture actuelle, avec cela. Face aux
habitats, je me retrouve avec un ministère en plus, sinon deux. Donc, il
est évident que cela devient extrêmement litigieux et qu'on devra,
sur le plan interministériel, clarifier les choses une fois pour toutes
si on veut vraiment exercer efficacement la gestion. Je suis d'accord avec
vous.
Il y a aussi un point sur lequel je veux vous donner mon accord
immédiat. Je pense que je l'avais témoigné à un
groupe avant vous. Sur les auxiliaires chez les pourvoyeurs, je suis
entièrement d'accord et je pense que c'est même heureux que vous y
souscriviez tout de suite et, dès qu'on pourra faire amender les lois,
cela pourra nous permettre d'avoir un meilleur réseau d'agents de la
conservation qui pourront jouer non seulement le rôle de policiers
enquêteurs, mais aussi un rôle préservatif. Je pense qu'on a
toujours axé nos mesures sur le ticket, comme on dit en bon
québécois, plutôt que sur la prévention. Plus on
aura un réseau bien établi, que ce soit au niveau des zones
d'exploitation contrôlée ou au niveau des pourvoyeurs, avec la
combinaison et l'aide de nos agents plus j'ai la conviction profonde qu'on
pourra assurer une meilleure protection et je suis heureux que vous y
souscriviez. Je vais m'arrêter là pour permettre à mes
collègues de poser des questions, quitte à revenir à la
fin.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Papineau.
M. Assad: Me référant à
l'avant-dernière question du ministre concernant les
préoccupations et la question des baux, etc., votre association a-t-elle
déjà fait des représentations au ministère
concernant vos préoccupations et vos difficultés? Si oui, quelle
sorte de compréhension avez-vous perçue dans le passé?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lapointe.
M. Lapointe: M. Chassé est une partie impliquée;
moi, je n'ai pas de pourvoirie, c'est plus facile pour moi de
répondre.
M. Rocheleau: Vous n'avez pas eu de menaces?
M. Lapointe: Non, pas du tout, d'aucune façon. On avoue
que nous avons également, à titre de pourvoyeurs, nous le
répétons continuellement, un très gros défaut,
c'est celui d'être avant tout des artisans et des gens qui sont
pourvoyeurs beaucoup plus parce qu'ils aiment le métier et qu'ils aiment
la vie en forêt que pour des raisons économiques. Au niveau du
ministère, de la même manière, nous soupçonnons
très fortement plusieurs d'entre eux d'être là parce qu'ils
aiment la vie en forêt, parce
qu'ils aiment les activités qui ont trait à la protection
des habitats et à la faune, mais pas particulièrement pour des
raisons économiques. Ce qu'on a l'impression qui se passe dans les
relations avec les ministères... Oui, il y a eu des demandes; oui,
certains pourvoyeurs ont essayé de négocier leur bail; oui,
malgré les pressions que l'association a pu faire, seulement une dizaine
de nos propres membres ont refusé de signer le bail qui est
demandé par le ministère. C'est donc que nous ne sommes pas
particulièrement forts auprès de nos propres membres. Mais,
effectivement, on se permet de témoigner qu'il y a eu beaucoup
d'incompréhension de nos problèmes économiques de la part
du ministère, mais les relations demeurent excellentes. Tout à
l'heure, en sortant, je parlais avec un officier du ministère, je lui
disais: Pour faire la preuve de ce que l'on dit, pourquoi ne venez-vous pas
à la banque avec moi? On va essayer, sur la foi de votre bail, de
négocier un financement. Après cela, vous allez sortir en
pleurant. Mais, effectivement, s'ils ne nous croient pas, on va exiger, on va
demander au ministre qu'il vienne avec nous, on va lui demander d'obliger un
d'entre eux à venir avec nous pour voir ce que c'est qu'une
négociation de financement.
M. Assad: Peut-être une deuxième question, M.
Lapointe. Il n'y a pas de doute que l'interprétation de la loi
donnée par les officiers du ministère est un obstacle pour les
pourvoyeurs, c'est-à-dire que la loi est là, mais elle est
peut-être assez vague, même trop vague et, forcément, les
officiers du ministère sont portés à donner
l'interprétation de la façon qu'ils voient les choses. (20 h
30)
M. Lapointe: Je vais vous répondre en tant qu'avocat. Le
défaut de toutes les lois depuis quelques années, c'est
justement, à mon avis, d'être extrêmement larges ou, selon
ce que l'on préfère, de manquer beaucoup de précision.
Effectivement, elles sont à ce point larges, et je parle des lois que je
connais, qu'elles soient provinciales ou fédérales, je ne fais
pas de politique... Évidemment, le fait que les lois sont plus larges,
cela donne ouverture à moins de facilité de la part des
dirigeants d'un ministère, je parle du ministre et du sous-ministre,
cela leur donne sûrement moins de possibilité d'exiger que les
choses se passent de telle façon, mais là, nous sommes dans un
domaine théorique.
Présentement, si on revient à notre domaine précis,
nous avons dit, par exemple, que nous ne sommes pas d'accord, que la loi ne
permet pas au ministre de s'engager à indemniser le locataire qui ferait
des immobilisations en cours de bail. À ce moment, ce qu'on nous
répond, c'est que, comme la loi ne le dit pas précisément,
c'est un cas précis; à ce moment, ils n'ont pas le droit de le
faire. Moi, j'ai essayé de répondre à ceci, mais, comme la
loi ne le dit pas précisément, vous devriez interpréter
cela comme vous donnant le droit de le faire. Le danger de ces lois
imprécises, c'est de donner beaucoup de place à
l'interprétation. Et comme bien d'autres, j'ai bien peur du document de
travail sur la Loi sur la conservation de la faune dont nous avons obtenu
copie. J'en ai bien peur, comme avocat, purement et simplement. Dans son
contenu, il y a bien des choses qui ont du sens, mais, comme avocat, je trouve
l'imprécision des termes absolument extraordinaire, la définition
du mot "chasser", la définition du mot "pourvoirie", la
définition du mot "pourvoyeur". C'est ce genre de choses qui me fait
extrêmement peur.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Duplessis.
M. Perron: M. le Président, à la page 8 de votre
mémoire, ce dont vous parlez justement, vous venez de soulever la
question de pourvoirie et de pourvoyeur. Vous mentionnez, au troisième
paragraphe: "Les mots "pourvoirie" et "pourvoyeur" seraient définis et
il serait explicitement prévu qu'un commerce de pourvoirie pourrait
être exercé par une compagnie".
Il y a une question que je me pose, parce que je ne l'ai pas
rencontrée dans le mémoire. Votre définition du mot
"pourvoyeur" et du mot "pourvoirie", tels que vous les concevez, est-ce que
vous pourriez l'expliciter, nous donner la définition que vous seriez
intéressé à lui donner, comme association?
M. Lapointe: Effectivement, j'ai pris cela dans un document,
mais, pour en arriver à cette phrase, c'est à même le
projet que l'on avait. Dans le projet, le mot "pourvoirie" nous semble
acceptable jusqu'à un certain point. Je vous donne la définition
du projet qui est à la page 3, l'avant-dernier alinéa:
"Pourvoirie: toute entreprise offrant dans le domaine public, contre
rémunération, des prestations touristiques - qu'est-ce que cela
veut dire, des prestations touristiques? j'aimerais qu'on le précise -
directement orientées vers la chasse, la pêche ou le
piégeage, prestations qui comportent obligatoirement
l'hébergement sur les lieux mêmes de la pratique de
l'activité".
Cela correspond à ce que l'on est, mais pour autant qu'on fasse
attention à "prestations touristiques", ce qu'est le touriste et,
deuxièmement, que l'on définisse bien le mot "chasse", parce
qu'à ce moment... Là, je m'excuse, cela risque d'être
technique comme conversation, mais le mot
"chasse", dans moult endroits, je pense, par exemple, à un
auxiliaire de la faune de la région de Joliette, s'interpréterait
ainsi: un chasseur qui se promène dans les bois avec une carabine non
chargée, une arme non chargée, n'est pas présumé
être un chasseur, parce que son arme n'est pas chargée. Lorsqu'on
veut faire appliquer les choses, que fait-on? Sa réponse a du sens,
mais, à ce moment, il faut donc faire attention à la
définition du mot "chasse".
Deuxièmement, lorsqu'on arrive après cela au mot
"pourvoyeur" on dit " une personne physique qui pratique une activité de
pourvoirie". Donc, cela nous dit précisément qu'un pourvoyeur ne
pourra pas être une compagnie, parce que cela doit être une
personne physique. C'est un genre d'assertion qui appelle à la prudence,
si ces choses passent telles quelles. J'ai été très
heureux ce matin d'entendre le ministre nous dire qu'il y aura une commission
parlementaire. D'ailleurs, il devrait y en avoir plus souvent pour nous
permettre de réviser les termes un petit peu comme cela, mais,
effectivement, il faudrait faire attention à ce type de
définition et être certain qu'on n'a pas besoin d'une personne
physique pour être pourvoyeur, si l'on veut faire comme dans le cas
d'autres lois, comme, par exemple, celle de la Commission de contrôle des
permis d'alcool, où l'on dit: Une compagnie peut détenir un
permis d'alcool, mais cela prend une personne pour qualifier la compagnie.
Présentement, dans le texte proposé, cela n'y est pas.
Évidemment, en ce sens, nous, on se sert un peu de ce que l'on a pour
mettre le législateur en garde contre certaines définitions qui
nous font peur.
M. Perron: J'ai une autre question, maintenant. Cela remonte
à ce que posait comme question, tout à l'heure, le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche et cela se rapporte au
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. Est-ce que vous
pourriez dire aux membres de cette commission s'il y a des pourvoyeurs ou des
pourvoiries qui font partie de votre association qui ont approché, par
exemple, le crédit touristique, pour obtenir, en vertu de la loi no 37,
certaines conditions financières favorables aux pourvoyeurs et aux
pourvoiries?
M. Lapointe: Je sais que certains ont approché le
crédit touristique et je sais que la réception est
intéressante. Je sais également que beaucoup trop de nos
pourvoyeurs qui sont des artisans n'ont même pas pensé à
approcher le crédit touristique; je me nuis en donnant une
réponse comme cela, je le sais, mais ceux qui ont approché le
crédit touristique, à ma connaissance, ont été bien
reçus. Il y a quelqu'un ici...
M. Perron: Cela vient justement avec une question que je voudrais
poser. Vous avez mentionné tout à l'heure les définitions
qui sont données dans les baux, par exemple, par rapport à
certains termes: la longueur du bail, le fait que vous n'avez seulement qu'un
bail d'occupation. Cela ne vous cause-t-il pas certains problèmes
relativement aux prêts possibles ou aux garanties de prêts
prévus dans la loi no 37?
M. Lapointe: Tout ce que l'on peut obtenir, ce sont des
subventions ou des prêts qui sont donnés sur un fonds de commerce
et non sur des immobilisations. A part cela, par exemple, on ne peut pas se
qualifier pour des prêts de la SDI ou des rabais d'intérêt
ou autre chose, parce que nous n'avons pas d'immobilisations à donner en
garantie.
M. Perron: Donc, vous visez exactement le même
problème que lorsque vous faites face à un gérant de
banque?
M. Lapointe: C'est exactement la même chose.
M. Perron: Avec la loi sur le crédit touristique?
M. Lapointe: Exactement.
M. Perron: Cela m'amène à ma dernière
question. On sait que le gouvernement du Québec a créé, il
y a trois ans, je crois, les associations touristiques régionales.
Est-ce que vos relations avec les associations touristiques régionales
sont bonnes, plus ou moins bonnes ou mauvaises? Parce qu'une des tâches
que doivent Effectuer les associations, c'est justement de faire la promotion
du tourisme régional, y incluant, bien entendu, les pourvoiries.
Le Président (M. Bordeleau): M. Chassé.
M. Chassé: Je pourrais tout simplement répondre, si
vous me le permettez, dans le sens qu'actuellement, concernant les associations
touristiques régionales, on devrait poser la question en région
nous-mêmes à nos membres, mais je ne pourrais pas répondre
davantage.
M. Lapointe: Encore une fois, ceux parmi les membres qui nous en
ont parlé ne se plaignent pas du tout de leurs relations avec les
associations touristiques régionales. À ce sujet-là, vous
remarquerez que plusieurs réponses qu'on vous donne ont trait à
la forme de contrôle que l'on a sur les membres. Nous aussi, nous aurions
une demande importante à faire au ministère et à ses
officiers. Étant donné la nature de ceux qui sont nos membres, le
type de personnes qu'ils sont, nous avons énormément
de difficulté à les embrigader à l'intérieur
d'une association. Dans le cas de certains autres organismes gouvernementaux -
je pense par exemple à toutes les relations de la Société
des alcools du Québec et les divers fabricants - elle a obligé
tous les intervenants à se regrouper en association.
Il me semble qu'il pourrait y avoir un avantage pour le ou les
ministères concernés à tenter d'aider l'association
à embrigader ses membres, de façon que le ministère ait un
nombre d'interlocuteurs le moins important possible. À ce
moment-là, il me semble que le ministère serait beaucoup plus en
mesure de connaître ce que sont nos problèmes, ce que sont nos
grandeurs et ce que sont nos faiblesses. Nous osons dire -nous n'en avons pas
parlé dans le mémoire, parce que nous trouvions difficile
d'admettre froidement comme cela quels étaient nos torts - que nous
aimerions que le ministère nous aide à le faire.
M. Perron: Merci beaucoup, M. Lapointe.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je serai assez bref puisque
je pense qu'à quelques exceptions mineures près, je suis en
parfait accord avec le mémoire qui a été soumis par
l'Association des outfitters du Québec. Je viens d'un comté
où les deux formules existent, soit celle qui a été
innovée par le Parti québécois au moment où il y a
eu la libération des clubs privés et, dans mon comté,
existent également de nombreuses pourvoiries.
En réponse à la question que posait tantôt
l'honorable député de Duplessis, je dirais que, chez nous, il y a
une association touristique qui est en vedette cette année. Le tourisme
y a augmenté de 30% et un des éléments de base de
l'attrait touristique de Charlevoix en dehors de sa beauté naturelle, ce
sont les faunes aquatique et terrestre qu'on retrouve chez nous. Je dois dire
que l'association touristique a été en parfait accord avec les
pourvoyeurs qui, chez nous, ont fait un travail admirable.
M. le Président, au moment où - je n'ai pas à le
cacher - le gouvernement du Parti québécois a mis en place les
zones d'exploitation contrôlée, je crois que la libération
pour le grand public s'en venait de toute façon. Je ne veux pas
contester la mesure qu'a apportée le gouvernement à ce
moment-là, mais je pense que la formule qui aurait dû être
élargie était effectivement la formule des pourvoiries dans tout
le Québec pour la raison suivante... Et je ne conteste pas le travail
accompli par les ZEC, loin de là. Il ressort que, quand on fait face
à des pourvoyeurs - on l'entend dire par presque toutes les associations
de sauvegarde et de protection de la faune qui viennent ici -rares sont ceux
qui peuvent avoir autant de raisons de protéger la faune qu'eux. Ils ont
un investissement à protéger, une clientèle à
protéger et ils savent pertinemment que, s'il y a des abus sur le
territoire, la valeur de la pourvoirie va aller en décroissant de
façon assez accentuée.
Étant profane dans cette matière, j'ai quand même
sursauté tantôt quand le ministre a parlé de la Loi sur les
pêcheries et je me suis demandé, à ce moment-là,
s'il parlait d'une loi québécoise ou fédérale.
C'est pour cela que je suis allé lui demander le renseignement en
privé. En fait, il s'agissait de la loi fédérale qui
interdit au gouvernement provincial une autorisation qui dépasse les
neuf années des baux consentis actuellement.
Je pense que l'Opposition est prête à collaborer s'il y a
une négociation possible entre les deux ordres de gouvernement pour que
cette période soit pas mal plus longue que celle que la loi
fédérale prévoit actuellement. Par contre, entre-temps,
quand on regarde l'ensemble des détails que comprend un bail de
pourvoyeur et l'imprécision qu'il y a presque à chacun des
articles, il est indéniable que c'est presque dans l'obscurité
que les pourvoyeurs sont obligés d'agir. Je suis de ceux qui pensent -et
je crois que mon parti le pense aussi -que, si le prédécesseur du
ministre actuel, M. Lessard, a invité les pourvoyeurs à un
réseau d'auberges en forêt - plutôt auberges qu'hôtels
- à moins qu'en cours de route, il n'y ait violation radicale à
la loi par un pourvoyeur en particulier, j'imagine mal qu'un gouvernement ne
devrait pas amender sa loi, de telle sorte que, s'il y a des investissements
importants que les pourvoiries devront faire pour donner un réseau
d'auberges acceptable au public voyageur, il n'y ait pas un
dédommagement advenant que, en cours de route et sans violation des lois
de la chasse et de la pêche, la personne soit évincée.
Je comprendrais mal que des pourvoyeurs fassent des investissements de
plusieurs centaines de milliers de dollars avec une épée de
Damoclès constamment au-dessus de la tête et que, pour toutes
sortes de raisons autres que des infractions à la Loi sur la chasse et
la pêche, ils soient évincés du territoire. (20 h 45)
De toute façon, M. le Président, je souscris au
mémoire des pourvoyeurs en espérant que, comme ils l'ont fait
dans le passé, ils reçoivent quand même quantité de
ceux qui s'en vont en forêt pour toutes sortes d'activités. Je
pense qu'un des résultats qu'on a obtenus de la part des pourvoiries
chez nous est qu'il m'est rarement arrivé, en vingt années de
vie
politique, de voir des infractions dans les pourvoiries de Charlevoix.
Je pense que c'est quand même un constat qu'on doit faire. C'est une
viabilité qui a assuré que la faune est quand même toujours
abondante après tant d'années.
Je félicite l'association du mémoire qu'elle a
présenté en espérant que le titulaire du ministère,
qui semble assez réceptif aux suggestions faites, voudra y donner
suite.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Chevrette: M. le Président, si vous permettez...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: ... je vais tout de suite répondre à
un point. Ce matin même, à l'ouverture de la commission
malheureusement, le député de Charlevoix n'y était pas, ce
n'est pas par agressivité que je dis cela - j'ai annoncé
précisément que la loi comporterait cette dimension
d'indemnisation. Je pense que nous nous en sommes rendu compte
nous-mêmes. On ne peut pas permettre et exiger même, dans certains
cas, de l'investissement, c'est-à-dire qu'on a une provision à
l'effet d'indemniser éventuellement, surtout si ce n'est pas à
cause d'infractions majeures, comme vous le disiez si bien.
Me Lapointe, je voudrais vous poser une toute petite question. Si le
ministère de l'Énergie et des Ressources prolongeait le temps
d'occupation, est-ce que ce serait une solution pour obtenir des garanties
bancaires?
M. Lapointe: Les garanties bancaires sont données sur deux
actifs que l'on a. Premièrement, sur les immobilisations;
deuxièmement, sur la possibilité de rentabiliser ces
immobilisations. Pour les immobilisations, c'est assurément le
ministère de l'Énergie et des Ressources; quant, à la
possibilité de rentabiliser ces immobilisations, c'est votre
ministère. Je ne peux pas répondre plus
précisément, cela dépend des cas. Mais, comme vous le
savez, on a tous pratiqué le même métier. Vous dites
à la banque: D'accord, j'ai tels actifs à donner en garantie;
cela va. Maintenant, elle nous demande de lui prouver qu'on fera de l'argent
avec cela et, pour le prouver, on doit montrer nos droits exclusifs et ce qu'on
en fera. C'est assez vague comme réponse, mais...
M. Chevrette: D'accord. J'ai réussi, dans certains cas, en
faisant prolonger des baux d'occupation, à obtenir des prêts de
certaines institutions bancaires. Mais, comme vous dites, ce n'est pas
automatique, il faut quasiment se battre à chaque institution bancaire.
Si, bien sûr, on pouvait arrimer à la fois les droits exclusifs
avec le droit d'occupation, je suis bien d'accord avec vous, mais, compte tenu
que j'ai maintenant l'assurance que le député de Charlevoix
m'aidera, on ira ensemble à Ottawa pour régler cela.
M. Mailloux: Je n'y vais pas souvent.
M. Lapointe: II y a une notion en droit, M. Chevrette, qui
pourrait être très intéressante et qui a été
oubliée. On pourrait revoir tous ensemble la thèse de M. Jean-Guy
Cardinal à ce sujet; c'est la notion des droits de superficie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je veux,
premièrement, féliciter l'Association des outfitters du
Québec pour la présentation de leur mémoire et certains
points qui semblent les préoccuper danvantage. Je considère, dans
le contexte actuel, que les pourvoyeurs du Québec sont des
intrépides, tenant compte du fait qu'ils sont assujettis à un
bail pour lequel il y a un paquet de conditions, tenant compte de la
réglementation et d'une possibilité de suspendre ou de
révoquer en tout temps le permis ou le bail autorisé par le
ministre. Il est bien évident, M. le Président, que cela m'aurait
surpris de ne pas entendre en commission parlementaire un ministre ou un
député du côté ministériel tenter de mettre
le blâme sur le fédéral pour toutes sortes de raisons. Il
est bien évident qu'un bail de neuf ans peut, pour toutes sortes de
façons, être renouvelé annuellement et toujours avoir
l'année subséquente au bail, sans pour autant créer de
contrainte. Mais c'est une façon que le côté
ministériel a entreprise depuis déjà quelques
années; alors, on est habitué de l'entendre, on se permet de
l'entendre peut-être trop souvent.
Dans la préparation ou dans le bail comme tel, ce n'est
sûrement pas le gouvernement fédéral qui a pondu la formule
de bail de neuf ans. Je considère que l'interprétation du bail et
les directives que le ministre a à l'intérieur du bail de
révoquer, et patati et patata, pour toutes sortes de raisons, tenant
compte qu'il peut même aller aussi loin que, s'il aime le pourvoyeur ou
s'il ne l'aime pas, il peut pratiquement annuler son bail.
De toute façon, dans l'introduction, ce matin, le ministre
mentionnait - et je me permets de le lire de nouveau - "II faut bien avoir
à l'esprit que la présente commission parlementaire sert de
consultation avant l'élaboration d'un projet de loi." Son avant-projet
de loi, il l'a déposé ce matin. Il est
bien évident que l'avant-projet, on a eu la possibilité,
dans l'Opposition, d'en prendre connaissance au cours des dernières
heures. Il n'y a rien de très rafraîchissant là-dedans. Ce
sera certainement à revoir d'une manière complète.
Je ne sais pas si c'est l'ancien groupe de fonctionnaires de votre
ministère qui ont préparé cet avant-projet ou si c'est
votre nouveau groupe, mais il n'en demeure pas moins qu'il y a
énormément de correctifs à apporter et il sera
intéressant d'en discuter plus en profondeur éventuellement. Il y
a des points qui sont inquiétants dans le document que vous avez
déposé, M. le ministre, et lorsqu'on tient compte des zones
d'exploitation contrôlée, on retrouve ici que le ministre pourrait
fixer les' conditions d'exploitation de commerce. Est-ce qu'on va aussi loin
que prétendre que les ZEC pourraient fonctionner, soit faire de
l'hébergement, de la restauration ou même faire de la concurrence
aux pourvoyeurs actuels de la façon qu'on peut le retrouver à
l'intérieur de l'avant-projet que vous avez déposé?
J'aimerais, d'une part, que le ministre puisse m'en informer, étant
donné que ce document est maintenant déposé et qu'on peut
certainement se poser des questions. Si j'étais pourvoyeur, je me
poserais de sérieuses questions, à savoir si le gouvernement
veut, parallèlement, créer une concurrence aux pourvoyeurs qui,
actuellement, que je sache, ne sont pas subventionnés par l'Etat. C'est
peut-être une des seules entreprises au Québec, actuellement, qui
ne bénéficient pas de subvention. J'espère qu'on n'aura
pas à les subventionner prochainement, mais il n'en demeure pas moins
que j'aimerais que le ministre réponde à cette question, si c'est
possible, et je continuerai après.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Certainement, monsieur, je vais vous
répondre immédiatement.
Je sais pertinemment qu'il y a dix-huit ZEC sur une soixantaine qui font
présentement de l'hébergement et, à mon sens,
conformément aux lois et aux réglementations, cela
m'apparaît permissif. Je n'en dirai pas plus; dans la conjoncture
légale actuelle, cela me paraît, tout au plus, des autorisations,
des permissions. Le problème est entier, il n'y a aucune décision
de prise; il n'y a surtout pas d'orientation de prise par le nouveau ministre.
Au contraire, je me réserve le droit de trancher cette question qui est
globale parce que, si on permet à certains et qu'on refuse à
d'autres, on doit avoir une politique unique face à des groupes. J'aurai
à trancher face à l'ensemble des ZEC et non pas seulement pour
dix-huit qui ont bénéficié, à court terme, de
location d'édifices du gouvernement et pour d'autres qui
s'apprêtaient à vouloir en bâtir pour faire de
l'hébergement, mais le problème est entier; la décision
n'est pas prise. Je peux vous jurer de mon siège que je n'ai aucune
orientation de prise là-dessus. Au contraire, j'ai demandé quels
sont les impacts sur les pourvoiries. Cela a été une des
premières questions que j'ai posées et j'ai demandé qu'on
me fasse un rapport.
Deuxièmement, que vous le vouliez ou pas, je vais en profiter
pour vous répondre. Le chapitre F-14 de la loi dit que le ministre ne
peut pas accorder un bail de plus de neuf ans, si ce n'est sur la
discrétion du lieutenant-gouverneur en conseil qui pourrait le faire. Je
n'ai pas voulu remettre la chicane du fédéral et du provincial
sur la table; je suis allé montrer à votre collègue de
Charlevoix le texte de loi lui-même.
M. Rocheleau: M. le Président, écoutez. Le
Président (M. Bordeleau): M. de député de Hull.
M. Rocheleau: ... je pense que je m'en tiens actuellement au bail
de neuf ans, mais c'est la formulation du bail de neuf ans qui serait
intéressante à voir et aussi les pouvoirs que le ministre a de
suspendre ou de révoquer ou de refuser, tenant compte du fait
qu'actuellement les pourvoyeurs au Québec oeuvrent pendant un certain
nombre de mois par année. Certains obtiennent des licences ou des permis
de la Société des alcools. Peut-être qu'il y en a certains
qui n'en obtiennent pas, que c'est un service; je ne le sais pas. Je ne
voudrais pas aller plus en profondeur, mais j'ai l'impression, M. le ministre,
qu'on pourrait, si on voulait simplement créer des problèmes pour
rien, pratiquement prendre un pourvoyeur en délit constant, tenant
compte de l'ensemble des règlements qui existent. Si on voulait tous les
fermer, on pourrait sûrement le faire. C'est dans ce sens que je dis que,
si un pourvoyeur a à faire un financement de ses investissements, il est
bien évident qu'avec un bail qui porte tellement de clauses, cela peut
lui créer des difficultés certaines.
De plus, M. le ministre, je suis très heureux que vous ne soyez
pas fermé ou que vous n'ayez pas envisagé d'aller plus loin dans
la possibilité de permettre aux ZEC de faire une concurrence directe aux
pourvoyeurs, dans le sens que les ZEC dans l'ensemble ont
bénéficié jusqu'à aujourd'hui de subventions du
gouvernement, du ministère et, par leurs subventions, cela leur permet
d'agir, pas nécessairement à meilleur prix, mais probablement
à concurrencer avec les pourvoyeurs qui actuellement... Je pense que,
sur à peu près 800 000 pêcheurs, chasseurs et autres, ils
en tirent à peu près 160 000;
c'est presque 20% qui fréquentent quand même la
pourvoirie.
D'autre part, M. le Président, M. Lapointe aimerait
peut-être apporter des commentaires là-dessus, mais j'ai une autre
question qui me préoccupe. La semaine dernière, nous avons
entendu, lors de la commission parlementaire sur le revenu, la question des
pourboires dans les services de restauration et d'hôtellerie, les
pourboires obligatoires de 15%. Je me pose la question à savoir si, au
niveau des pourvoyeurs, le gouvernement imposait, par le ministère du
Revenu, un pourboire obligatoire de 15%, quel problème cela pourrait-il
créer, si cela crée un problème aux pourvoyeurs?
J'aimerais entendre les commentaires de M. Lapointe là-dessus.
M. Lapointe: M. le député, dans notre cas, cela
nous donnerait certainement d'immenses places à l'arbitraire parce que,
dans le fond, les gens qui mangent chez nous... Parce que j'imagine que le
projet de loi dont on parle, c'est pour les employés de restaurants, je
pense, n'est-ce pas?
M. Rocheleau: Des restaurants, des services ou des
hôtelleries.
M. Lapointe: C'est cela, mais pas le coût de la chambre.
Nous, dans notre cas, la quasi-totalité des pourvoyeurs ne servent des
repas que sur une formule à forfait où cela coûte tant de
dollars incluant la nourriture, le logement et ainsi de suite. Nous ne pouvons
pas être d'accord avec cela parce que cela laisserait tellement de place
à l'arbitraire que d'exiger un peu plus cher ou un peu moins cher pour
le repas et un peu plus cher ou un peu moins cher pour la pension. (21
heures)
Deuxièmement, nous sommes de petites entreprises. Nous sommes
nombreux. Une petite enquête maison et on s'aperçoit qu'une grosse
pourvoirie a de seize à vingt employés au maximum et une petite
pourvoirie a cinq ou six employés. Évidemment, plus on fait de la
paperasse... Parce que, lorsqu'on parle de ces lois ou de cette
réglementation, on parle également de la façon de les
appliquer et cela ne vous regarde pas beaucoup, mais cela demeure de la
paperasse. Évidemment, dans notre cas, nos gens ne sont pas
particulièrement bien équipés pour remplir de la
paperasse. Nous ne nous sommes pas penchés particulièrement sur
le problème, mais nous avons l'impression que, pour nous, cela ne
donnerait absolument rien et que le type de travailleur qu'on a chez nous n'est
pas une personne habituée à recevoir des pourboires, il est
payé à l'heure. Celui qui part, à la fin, très
souvent, parce qu'il est très satisfait, va laisser une somme
forfaitaire qui sera séparée entre les guides, entre tout le
monde, finalement. M. Rocheleau: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci. Mme la
députée...
M. Rocheleau: J'aurais une autre question à poser...
Le Président (M. Bordeleau): Oui... M. Rocheleau:
... au ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Au ministre?
M. Rocheleau: Étant donné qu'il est très
coopératif ce soir.
Le Président (M. Bordeleau): Si vous pouviez le faire
rapidement, s'il vous plaît!
M. Rocheleau: On peut en profiter, c'est un nouveau ministre.
M. Chevrette: Je ne sais pas pourquoi vous dites "ce soir", je
suis toujours comme cela.
M. Rocheleau: Ah oui? C'est parce que je m'en suis aperçu
ce soir.
M. Chevrette: Vous êtes en retard.
M. Rocheleau: Dans l'avant-projet de loi du ministre, M. le
Président, à l'article 7 - je voudrais simplement avoir une
indication de la part du ministre, je pense que cela tient compte aussi des
pourvoyeurs et de l'ensemble de la conservation de la faune -on dit: "Tout
agent de conservation de la faune et tout fonctionnaire qui gèrent
directement le travail d'un agent de conservation de la faune". Est-ce que le
ministre pourrait être un peu plus explicite là-dedans? Quand il
mentionne "tout fonctionnaire", est-ce que cela veut dire que les agents de
conservation, éventuellement, pourraient avoir comme patron "M.
N'importe-Qui" qui est fonctionnaire? C'est à l'article 7 de votre
avant-projet de loi.
M. Chevrette: Je ne sais à quoi vous vous
référez. L'article 7 se lit comme suit... D'ailleurs, ce n'est
pas "mon" projet de loi, c'est un document de travail, qui n'a jamais
été adopté au Conseil des ministres. Le seul mandat que
j'ai du Conseil des ministres, c'est d'écouter les gens en commission
parlementaire avant de rédiger un projet de loi qui sera
déposé à l'Assemblée nationale. Mais si vous faites
référence au document de travail que vous m'avez demandé
ce matin et qui a été déposé, à l'article 7,
je ne lis pas la même chose que vous.
M. Rocheleau: C'est à la page 6. À moins qu'il n'y
ait deux avant-projets.
M. Chevrette: Article 7, page 6.
M. Rocheleau: Article 7. J'espère que c'est le même
que vous, M. le ministre; c'est peut-être un autre que j'ai.
M. Chevrette: On ne doit pas avoir le même. "Aux fins de
l'exercice des fonctions prévues à l'article 3"?
M. Rocheleau: C'est cela.
M. Chevrette: "... un agent de conservation de la faune et un
fonctionnaire qui gèrent directement le travail d'un agent de
conservation de la faune, sont agents de la paix". C'est cela que vous
voulez?
M. Rocheleau: Bien, écoutez...
M. Chevrette: Qu'est-ce que vous voulez savoir
là-dessus?
M. Rocheleau: Je ne sais pas si j'ai le même document que
vous, je vais aller vous le montrer.
M. Chevrette: Bon! Venez me le montrer. Vous circulez tellement,
je ne vois pas pourquoi vous vous amusez avec les documents de travail, on va
vous les donner tous.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on peut continuer,
en attendant, Mme la député de Chomedey? S'il vous plaît:
S'il vous plaît! Un ou une à la fois. Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Je voudrais quand même, M. le Président,
que le ministre écoute ce qu'on a à dire, je pense que c'est
très important, c'est un nouveau ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Je pensais que c'était
une question à nos invités.
Mme Bacon: Non. J'aurais une question à poser au ministre.
Il dit que ce projet de loi préliminaire n'a pas été
accepté encore au Conseil des ministres. Mais, est-ce qu'il peut nous
dire qu'il a été refusé par le comité des
priorités?
M. Chevrette: Je ne saurais vous le dire du tout, parce que je
n'étais pas là à l'époque.
Mme Bacon: Est-ce que le ministre s'engage à s'informer et
à nous donner la réponse demain?
M. Chevrette: Je prendrai les informations. J'ai
été assermenté le 9 septembre et c'est un document qui est
daté de juin. Vous comprendrez que je ne peux pas connaître toutes
les péripéties, tous les itinéraires des documents qui
circulent au sein du gouvernement. Dès que c'est imprimé à
plus de cinq copies, vous en avez tout de suite une. Je ne vois pas pourquoi je
serais obligé de tout vous donner.
Mme Bacon: M. le Président, le ministre pourrait
peut-être s'informer auprès de ses fonctionnaires qui sont ici.
Ils doivent connaître quand même le cheminement d'un document.
M. Chevrette: Oui, je prendrai information, parce que, concernant
le comité des priorités, je dois vous dire que ce ne serait que
le sous-ministre en titre qui saurait si c'est allé au
secrétariat exécutif et si c'est passé au comité
des priorités. Moi, ce que je sais de formel, cependant, c'est que le
Conseil des ministres a mandaté M. Lessard, mon
prédécesseur, pour écouter d'abord les gens en commission
parlementaire avant de rédiger un projet de loi. Donc, en ce qui me
concerne, je ne suis lié par aucun document, j'écoute les gens,
je verrai à faire rédiger un projet de loi, compte tenu des
orientations que je retiendrai des expressions d'opinion qui sont faites ici,
et non seulement par rapport au projet de loi. Je tiendrai compte
également des remarques qui me sont faites comme, par exemple, la
clarification des baux des pourvoyeurs. Cela se fait, une rencontre entre deux
exécutifs, entre un exécutif et un ministre. Et cela se fait une
rencontre entre deux contentieux. Cela se bâtit et cela se clarifie, des
clauses de baux. Quand on veut être effectif, on en est capable. Soyez
sans crainte là-dessus, on va l'être.
Mme Bacon: Remarquez, M. le Président, que je suis
très heureuse de voir le ministre se démarquer un peu de
l'ancienne administration de son ministère et...
M. Chevrette: Je n'essaie pas de me démarquer. J'essaie de
prendre ce que j'ai à faire, c'est tout.
Mme Bacon: Je n'ai pas terminé, M. le ministre - ...
regarder d'un oeil nouveau des éléments nouveaux qui lui sont
soumis par les différents groupes et qui donnent un peu plus de
sérieux, je pense, M. le Président, aux consultations que nous
faisons avec les groupes qui sont ici présents.
J'aurais deux questions. La première, M. Lapointe, c'est que,
malgré un document bien étoffé, il y a deux questions qui
me viennent à l'esprit. À la page 12, vous vous dites conscients
des pressions des ZEC, par
exemple, pour obtenir des droits d'hébergement et vous semblez
déplorer une espèce de préjugé favorable envers les
ZEC.
Est-ce que votre groupement a fait des études pour savoir quelle
serait l'augmentation de la clientèle, pour les pourvoyeurs, si vous
obteniez le droit d'hébergement?
M. Lapointe: Si les ZEC obtenaient le droit...
Mme Bacon: Non, si les pourvoyeurs obtenaient les droits
d'hébergement. Et les ZEC, si on les donnait aux ZEC? Est-ce que cela a
été fait entre les deux?
M. Lapointe: II y a une clientèle qui est probablement
extrêmement grande pour ce type de service.
Mme Bacon: Non, mais si les droits étaient donnés
aux ZEC?
M. Lapointe: Mais, d'un autre côté, on a
donné ce matin des dimensions, on a dit qu'il y avait, si on se le
rappelle, 500 pourvoyeurs qui ont 12 000 kilomètres carrés et
qu'il y a quelque 60 ZEC qui ont quelque 60 kilomètres carrés.
Alors, vous vous imaginez, au départ, ce qu'une ZEC a à comparer
à nous. Elle a à peu près dix fois plus de territoire en
général que l'on en a. Deuxièmement, elle a des moyens
financiers. L'État a participé à son financement et,
troisièmement, bien souvent, elle a des gens qui ont des
mentalités différentes des nôtres. Quatrièmement, et
c'est peut-être le pire, c'est qu'elles ont l'auréole, c'est moi
qui le mentionne, celle d'être des entreprises à but non lucratif.
Évidemment, bien des personnes, je n'ai pas dit tout le monde, mais bien
des gens prêtent une oreille plus attentive à des organismes
à but non lucratif. Nous croyons qu'avec les moyens qu'elles ont, les
moyens de tout ordre que je viens de décrire, les quatre, elles seraient
capables de nous faire une concurrence qui ferait extrêmement mal,
d'autant plus que, dans les circonstances actuelles de notre organisation, nous
sommes incapables de nous défendre. Nous avons 120 ou 130 membres. Nous
avons des gens qui vivent dans le bois à longueur d'année et nous
avons des gens... Entre autres, se défendre, c'est quoi? C'est pour cela
qu'on parle du MIC.
Il y a entre autres des expositions. Cette semaine, par exemple, il y a
le SIAL à Paris, il y a des expositions qui se font partout dans le
monde. Il serait extrêmement intéressant, M. le ministre,
qu'à un moment donné, le ministère - nous, nous ne sommes
pas capables, nous ne sommes pas organisés pour aller à ces
expositions - que les divers ministères, même en nous les
facturant par la suite, nous disent: On va prendre 200 pieds carrés pour
un kiosque à telle exposition qui semble intéressante et on va
vous en louer, on va vous en sous-louer une partie. Et puis, même
là, c'est ce type de service dont on aurait absolument besoin.
Présentement, nous ne sommes pas équipés pour les rendre,
à un tel point que vous-mêmes, vous avez une fausse impression.
Vous pensez qu'une grande partie de nos clients sont des étrangers,
j'entendais cela ce matin. Ce n'est pas exact. Encore une enquête maison,
nous n'avons probablement pas plus de 10% de nos clients qui sont des
étrangers. Là où vous avez des clients étrangers,
ce sont dans des endroits très au nord, ou dans des rivières
à saumon. Évidemment, l'étranger vient ici pour rechercher
des prises qui donnent beaucoup de prestige, mais il ne vient pas ici, sauf
l'excellent pêcheur, pour de la mouchetée, ou il ne vient pas ici
pour pêcher de la truite en général, ni même pour le
chevreuil, d'ailleurs, parce que les étrangers, au sud, sont bien mieux
équipés que nous autres.
Si les ZEC, avec les moyens qu'elles ont, décidaient de nous
faire concurrence, cela nous ferait extrêmement mal. J'entendais des
Français, Mme Bacon, dire que, si l'on voulait se donner la peine de
travailler tout le monde ensemble et de créer des industries... Vous
savez que, pour un gars qui part de Paris, une chasse en Pologne, pendant sept
jours, coûte 10 000 $, c'est de cela qu'on parle. Nous, on est encore ici
à demander 75 $, 80 $ et 85 $ par jour; c'est tout ce qu'on fait.
À un moment donné, qu'on nous donne des outils et qu'on
arrête de nous considérer comme des artisans, qui vont
continuellement s'occuper de jouer aux gardes-chasse à leur place.
Finalement, on ne coûte pas cher et on ne nous paie pas. On est des
auxiliaires de protection de la faune, on ne nous paie pas de salaire, on
s'occupe du territoire, on leur paie quelques dollars de taxe.
Selon une autre enquête que je faisais, chaque fois, qu'un
pourvoyeur se fait pêcher 8000 poissons dans des lacs, il ne demande rien
à personne. À la fin de l'année, il en réensemence
8000. Il n'y en a pas d'autres organismes qui font des choses comme cela. Je
pense que c'est nous qui devrions bénéficier d'un
préjugé extrêmement favorable. On n'a jamais rien
demandé à personne et non seulement on protège, mais on
permet à ce que l'on a de devenir un petit peu meilleur.
Mme Bacon: Une autre question, M. le Président, c'est la
relation entre le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme
et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Quelle
juridiction le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme
pourrait-il céder au ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche qui pourrait vous
aider davantage? Ou bien préférez-vous négocier
directement avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme? Laquelle des deux solutions serait la meilleure ou serait le plus
favorable aux pourvoyeurs?
M. Lapointe: Mme Bacon, tous les services pour un entrepreneur
sont au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. C'est
comme cela que le gouvernement a structuré ses affaires. Evidemment, si
nous n'étions pas au ministère de l'Industrie, du Commerce et du
Tourisme, ce qu'il nous faudrait, ce seraient des liens directs. Cela n'existe
pas. Les lois, comme je le dis à tous mes amis, ce sont des hommes qui
les appliquent, des hommes qui existent, des hommes et des femmes, c'est
populaire comme expression maintenant.
Mme Bacon: Merci.
M. Lapointe: Quand il y a...
Mme Bacon: D'ailleurs, surtout le ministre de l'Industrie, du
Commerce et du Tourisme le dit souvent.
M. Lapointe: Quand il y a des gens dans un ministère qui
sont en mesure de discuter de ces problèmes, cela va bien. Mais la
vocation que l'on a donnée au MLCP en a été une de
protection de la faune. À ce moment, il me semble que le
ministère, s'il ne veut pas le faire comme on le propose, ce qu'il y
aurait de plus simple, ce serait peut-être de déléguer
certaines de ses fonctions qui ont trait à l'"entrepreneurship" à
des gens qui, sans vouloir être bête, connaissent cela bien mieux
que lui.
Mme Bacon: Un genre de délégation de pouvoirs qui
vous permettrait de négocier davantage?
M. Lapointe: Là, je risque de m'embarquer quand je vous
parle de cela. D'ailleurs, la façon de déléguer à
l'intérieur des gouvernements, j'en ai déjà assez entendu
parler de ces pouvoirs délégués et du delegatus non potest
delegare. Je ne veux pas m'embarquer dans cela.
Mme Bacon: Si vous ne voulez pas vous embarquer, je vais demander
au ministre ce qu'il pense de cela, cela va le forcer à nous
écouter.
Est-ce que le ministre croit que, si le MIC cédait des
juridictions au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche,
cela faciliterait davantage la survie ou la vie des pourvoyeurs? En même
temps, les relations entre votre ministère et les pourvoyeurs seraient
peut-être facilitées par ce transfert de juridiction. Est-ce que
le ministre serait prêt à aller jusqu'à négocier
avec le ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme?
M. Chevrette: Madame, si, demain matin, j'avais les fonds pour
assurer un programme de crédits...
Mme Bacon: J'ai parlé de juridiction, M. le ministre.
M. Chevrette: Je vais vous répondre, mais je commence par
les fonds, parce que cela est important. Je pense bien qu'ils ont bien plus
confiance aux fonds qu'au reste, dans les circonstances actuelles.
Mme Bacon: Je ne sais pas. La volonté politique... (21 h
15)
M. Chevrette: II est bien évident que plus les
juridictions sont concentrées, moins il y a de sujets contentieux au
niveau des ministères. Si on suivait cette logique-là, par
contre, il n'y aurait qu'un seul ministère au gouvernement. Admettons au
départ que, dans les circonstances, en ce qui regarde le
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, rendre les
pourvoyeurs admissibles à un programme de crédits ne
relève pas nécessairement de mon ministère. Cela pourrait
très bien continuer à se faire par le ministère de
l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, qui ferait son boulot. Pas de
problème.
D'autre part, prenons par exemple la promotion pour les pourvoiries.
Cela pourrait faire partie de mon propre ministère. Je le pourrais,
à l'intérieur d'un programme précis. Monsieur disait
même qu'il se fait de la promotion qui devient de la concurrence
déloyale par rapport au système de pourvoiries actuel. À
ce moment-là, si la promotion des pourvoiries relevait d'un même
et unique ministère, on pourrait les traiter sur un pied
d'égalité, avec les énoncés qu'il faut. Par
exemple, il y a cette année une revue qui intégrera - je pense
bien ne pas faire une grande révélation - à la fois la
liste des pourvoyeurs et la liste des ZEC, pour permettre à des
personnes d'avoir dans un seul recueil l'ensemble des données. Si jamais
un budget de publicité était réparti pour faire en sorte
que nos ZEC soient annoncées, que nos pourvoiries
québécoises soient vantées, je pense qu'on pourrait avoir
un programme de communications tout aussi bon que d'autres ministères.
Cela pourrait aller dans l'esprit même du ministère. C'est une
conception. Je pense que ce qui a été développé par
M. Lapointe, c'est beaucoup plus cette promotion entrepreneur-artisan. C'est
cela qu'ils ont voulu développer. Ils ont dit: On se considère
comme des entrepreneurs, des artisans. On ne voudrait pas qu'on nous
considère comme des
groupements qui ont une préoccupation de faune, qui ne sont pas
à but lucratif. On est des entrepreneurs, on a droit à nos
profits, on investit du capital de risque et on a assez de difficulté
à avoir même des emprunts bancaires, de grâce, laissez-nous
donc auprès du ministère qui a la responsabilité de la
promotion comme telle. C'est comme cela que je l'ai compris.
Je pense qu'on pourrait, avec les ressources financières, rendre
le même service. Je le pense bien.
M. Lapointe: Jusqu'à un certain point, M. le ministre - je
m'excuse - quand vous dites qu'on pourrait s'arranger, d'une part, avec le MIC
et, d'autre part, avec vous, pour autant que vos officiers comprennent que
notre obligation est d'abord de satisfaire aux obligations du MIC... Celui-ci
ne prête pas sur n'importe quoi ou à n'importe quel titre. C'est
ce lien que nous avons de la difficulté à faire.
M. Chevrette: Le problème est entier, je suis bien
d'accord avec vous. Je comprends qu'on n'a pas réglé la fameuse
question litigieuse de savoir si on peut prêter à quelqu'un qui
n'offre pas cette garantie de longévité nécessaire, par
exemple autant sur l'occupation que sur le bail d'exploitation. Pour
rentabiliser une chose, est-ce qu'on va prêter 100 000 $ à un
pourvoyeur qui risque, au bout de neuf ans, d'être obligé de
fermer ses portes, quand c'est la dixième année qu'il serait
rentable? Je comprends tous les problèmes que vivent les pourvoyeurs et
soyez assurés qu'il y aura des rencontres subséquentes. Il y aura
des démarches qui seront faites au niveau du gouvernement
fédéral, il y aura des démarches qui seront faites
auprès de mes collègues du ministère de l'Énergie
et des Ressources pour essayer de trouver une solution à ce
problème. J'en suis tout à fait conscient. Je le sais. J'ai
travaillé avec certains d'entre vous, des particuliers qui sont venus me
rencontrer et je sais qu'il est véritable, le problème que vous
vivez. Investir dans le capital de risque, à ce moment-là, ce
n'est pas un cadeau.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. le
ministre. Mais, avant de vous donner la parole, M. le député de
Charlevoix, je voudrais demander la collaboration de tout le monde parce qu'au
train où on est parti - j'ai voulu être très large
jusqu'à maintenant - ou bien on ne se couchera pas ou bien il y aura des
personnes qui seront brimées tantôt dans leur droit de parole. Je
voudrais simplement que les membres de la commission soient bien conscients de
cela parce que j'ai à tenir le temps. On est actuellement depuis une
heure et quarante-cinq minutes sur le mémoire des pourvoyeurs du
Québec. Je ne veux brimer personne, encore là, mais, si on
continue à décaler le temps, je me demande ce qui arrivera des
derniers mémoires.
M. le député de Charlevoix, en vous demandant d'être
concis.
M. Mailloux: M. le Président, c'est un dernier
éclaircissement que je voudrais faire relativement au dernier paragraphe
de la page 15. Cela concerne la consommation sur place. Si je vais dans un club
gouvernemental, j'ai droit à tant de prises, que j'y reste une
journée, deux jours ou trois jours, et j'ai droit de faire cuire mes
prises sur place. Probablement que, dans les ZEC, c'est le même
phénomène qui se produit. Au moment où on va dans une
pourvoirie, en raison du fait que c'est un établissement commercial, il
est, semble-t-il, interdit de faire cuire de la truite ou tout gibier pris sur
place.
Je comprends qu'à la première partie de la page 16, on a
raison de faire les observations qu'on fait, parce que je pense qu'il n'y a pas
beaucoup de monde qui pourrait se satisfaire d'une exigence semblable. Je pense
qu'il y aurait lieu quand même de clarifier cette loi au moins pour les
gens qui vont en forêt. Si je prends quelques truites, celles que j'aime
manger, ce sont celles que je vais pouvoir déguster dans les heures qui
suivent parce que, trois ou quatre jours plus tard, je pense que personne n'est
tellement intéressé. Je pense qu'il y aurait lieu quand
même, à la demande de l'association, que ce soit
clarifié.
M. Chevrette: Vous avez raison.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Quand M. le député de Hull disait
tantôt qu'on pourrait prendre tout le monde en flagrant délit de
violation de lois, je le comprends. Mais je pense bien que, de ce
côté-là, il n'y a pas eu d'exagération quand
même, à quelques exceptions près. Vous pourriez
peut-être m'en sortir une ou deux, mais il reste quand même que
ça n'a pas été prohibitif. Mais je comprends que ça
nécessite de la clarification. Je suis d'accord avec vous.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Un
petit mot de la fin, M. le député de Hull?
M. Rocheleau: Non, non. J'ai posé une question...
M. Chevrette: C'est vrai que vous m'avez posé une question
tantôt et je voudrais vous dire que vous êtes en avance sur nous.
Vous avez le document de mars et
nous étions dans le document de juin. Donc, vous voyez que vous
êtes en avance.
Ce que je veux vous dire, c'est que l'article, tel que
rédigé... Anciennement, la loi disait: Un agent de la faune est
un agent de la paix. Nous, on dit: Un agent de la faune et son supérieur
sont des agents de la paix, parce que ça leur permet de faire des
actions conjointes. Anciennement, la loi ne permettait pas au supérieur
de faire une action conjointe avec l'agent de la faune qui, lui, était
déclaré agent de la paix, alors que son supérieur ne
l'était pas, de sorte que le libellé "l'agent de conservation et
son supérieur sont des agents de la paix" permet aux deux individus
simultanément de faire des actions conjointes.
M. Rocheleau: Maintenant...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: C'est que de la façon que c'était
écrit, M. le Président, on semblait d'avance déterminer
que les supérieurs des agents de conservation seraient effectivement, ou
dorénavant, des fonctionnaires qui n'auraient pas nécessairement
la formation d'un agent de conservation. Ce pourrait être...
M. Chevrette: C'est parce que, telle qu'elle était
rédigée, la loi ne permettait vraiment pas aux
supérieurs... La loi disait: "L'agent de conservation de la faune est un
agent de la paix". Si son supérieur se présentait avec lui,
même si c'était un agent de conservation supérieur à
l'autre, cela ne permettait pas de mener des actions conjointes. On a dit: On
est aussi bien de corriger la situation, parce qu'il y a des supérieurs
qui allaient donner un coup de pouce, comme on dit, un coup de main à
son employé. En disant: "L'agent de conservation et son supérieur
sont des agents de la paix", cela permet aux deux individus de mener une action
conjointe tout en étant dans un cadre de légalité. On
pouvait contester légalement le fait qu'un supérieur agisse
simultanément avec un collègue parce que c'était mal
défini dans la loi.
M. Rocheleau: M. le Président, vous semblez nous presser,
mais il y a des questions relativement importantes qui touchent un domaine
très important, soit celui des pourvoyeurs. Je voudrais que le ministre
puisse me dire si, au niveau de la location des terrains qui sont
dévolus à un pourvoyeur, on tient compte de l'évaluation
foncière pour déterminer le loyer ou si le loyer est fixé
selon le nombre d'acres, la grandeur du territoire occupé.
M. Chevrette: C'est par décret. Je vais vous donner la
réponse, c'est technique. C'est la superficie.
M. Rocheleau: C'est la superficie.
Alors, on ne tient pas compte de l'évaluation foncière.
Si, dans une région, l'évaluation peut être
prédéterminée par...
M. Chevrette: Non. Je ne me souviens plus du numéro du
décret, mais on tient compte de la superficie. C'est tant...
M. Rocheleau: C'est la même chose pour tout le monde?
M. Chevrette: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Alors, M. le
député de Berthier.
M. Houde: M. le Président, d'abord, votre mémoire
est très bien, je veux vous féliciter en passant. Vous êtes
bien catégoriques; lorsque vient le temps de négocier le bail,
soit pour l'annuler ou autre chose, vous aimeriez être consultés
avant qu'une décision finale soit prise. C'est cela que vous voulez?
M. Lapointe: Assurément. Nous espérerions bien que
quelqu'un du ministère nous invite et nous dise peut-être ce que
devrait contenir un bail. Ici, nous avons une série de
représentations assez vagues. Le ministère a des avocats. Il
existe des baux, vous savez, dans les nouveaux centres commerciaux. On sait
qu'on va en gagner, mais qu'on va en perdre aussi, parce que le locateur se
garde également pas mal de droits. Maintenant, des baux de ce type - le
nôtre a quatre pages - je suis en train d'en faire un pour un gros centre
commercial qui prend de l'expansion à Montréal et le mien aura
à peu près 175 pages, juste pour vous dire ce qu'est la
différence.
M. Houde: Est-ce qu'il y a eu déjà des formulations
de faites de votre part, venant des pourvoyeurs, auprès des
autorités en place...
M. Lapointe: On a essayé, mais, pour être
franc...
M. Houde: ... auprès du ministre?
M. Lapointe: ... ce n'est pas son domaine de discuter de baux.
Présentement, le ministère n'est pas équipé - je
m'excuse, M. le ministre - pour faire ce genre de choses. Peut-être qu'on
pourrait suggérer au ministère d'emprunter quelqu'un du
ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme ou quelque chose du
genre pour discuter avec nous autres.
M. Houde: Merci beaucoup, M. le pourvoyeur, encore une fois.
Est-ce que vous êtes équipé pour le faire, M. le
ministre?
M. Chevrette: Non. Je vais demander à Me...
M. Houde: Pas encore.
M. Chevrette: ... Lapointe de me présenter un
prototype.
M. Houde: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M.
Lapointe, ainsi que les personnes qui vous accompagnent.
M. Lapointe: Je peux en présenter un dans le cas où
je serais locataire et non locateur.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci.
M. Chevrette: Je vous remercie beaucoup et à une prochaine
rencontre très bientôt...
M. Lapointe: Merci de nous avoir entendus.
Une voix: ... plus fructueuse.
Le Président (M. Bordeleau): Le cinquième
mémoire provient du groupe Cabou. C'est un mémoire pour
dépôt seulement. À moins qu'on ne me dise le contraire, il
est pour dépôt seulement. Alors, le mémoire sera
déposé. Nous procéderions... Je l'ai dit ce matin pour
ceux qui écoutaient, mais...
M. Houde: Oui, c'est vrai, vous l'aviez dit.
Le Président (M. Bordeleau): Nous procéderions
immédiatement à l'étude du mémoire no 16. Je vous
indique en passant qu'il en reste trois à voir ce soir, selon notre
horaire de ce matin. Il s'agit du sixième mémoire, celui de la
Fédération québécoise des SACERF Inc., le
mémoire no 16, effectivement. Le groupe est représenté par
M. Guy Lemieux. Si M. Lemieux veut bien se présenter. Mémoire no
16.
Une voix: II y a une erreur, c'est une question d'estampe.
Le Président (M. Bordeleau): II y a beaucoup
d'annexés là-dedans; cela ne fait rien.
Est-ce que M. Lemieux est présent?
Fédération québécoise des
SACERF Inc.
M. Lajeunesse (Bernard): M. Lemieux n'est pas ici actuellement,
M. le Président, à cause d'engagements à
l'extérieur de Québec. Alors...
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous pouvez
d'abord vous présenter et nous présenter les autres
personnes?
M. Lajeunesse: Parfait!
Le Président (M. Bordeleau): Avant de vous donner la
parole, je voudrais vous signaler qu'il est déjà tard. Je ne
voudrais pas vous priver non plus de votre droit de parole, mais je vous
demanderais autant que possible de faire rapidement le résumé de
votre mémoire pour permettre le maximum de questions de la part des
membres de la commission. Vous pouvez y aller, monsieur. (21 h 30)
M. Lajeunesse: M. le Président, M. le ministre, messieurs
du gouvernement, mesdames et messieurs de l'Opposition, permettez-moi, en
premier lieu, de me présenter.
Je m'appelle Bernard Lajeunesse, vice-président de la
Fédération québécoise des SACERF. À ma
droite, M. Arthur Lavoie, secrétaire; à mon extrême droite,
M. Roland Grand, trésorier; à ma gauche, M. André Verrier,
administrateur, tous membres de la Fédération
québécoise des SACERF, organisme qui, comme il est
mentionné dans notre mémoire, représente au-delà de
20 ZEC au Québec.
Je ne lirai pas tout le mémoire présenté par notre
organisme, compte tenu du temps, je voudrais plutôt le résumer.
Également, je désirerais, si cela nous est permis, commenter
certains articles du document qui nous a été remis par le MLCP et
de l'avant-projet de loi remis ce matin à la commission parlementaire et
préparé par la Direction générale de la faune en
regard de la déclaration du ministre le 21 juin 1982.
Il va de soi qu'à la suite de ces commentaires, nous serons en
tout temps disponibles pour renseigner la députation
ministérielle ou celle de l'Opposition, si elle le juge à propos.
Notre désir à tous, c'est qu'une loi de la conservation de la
faune puisse être adoptée dans le plus court délai. Ce
dernier point n'est pas le moindre, puisqu'il s'agit de réaliser le tout
pour que les générations futures puissent elles aussi
bénéficier de cette faune et dire que nous l'avons
exploitée rationnellement et non que nous avons été des
braconniers légaux.
Nous avons pris connaissance du document de travail intitulé:
Vers une protection des habitats fauniques au Québec. Comme la politique
énoncée dans ce document nous convient dans l'ensemble, nous
ne parlerons pas plus profondément sur le sujet. En tant que
gestionnaires de la faune et des territoires des ZEC au Québec, nous ne
pouvons que souscrire à ce qui apparaît en général
dans ce document.
Une des conditions essentielles pour assurer à notre faune sa
survie, c'est, à notre avis, de créer une loi de la conservation
qui ait des dents, une loi claire, nette, précise, sans
ambiguïté. À quoi serviraient des millions
dépensés dans un processus d'habitats fauniques, si nous ne
sommes pas capables de contrer le braconnage au Québec et ses effets
irréparables sur la faune? Nous aurions à ce moment-là de
magnifiques habitats fauniques, mais la faune ne pourrait pas être au
rendez-vous.
Avant de commenter les propositions qui apparaissent dans notre
mémoire, je voudrais porter à votre attention le point suivant:
il s'agit d'un commentaire défavorable au document de travail
intitulé: Vers une protection des habitats fauniques au Québec,
préparé, j'imagine, par différents fonctionnaires de
différents ministères, y inclus celui du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Nous ne pouvons concevoir que nous
n'ayons pas fait mention, dans ce document, du travail des associations de
chasse et de pêche à qui votre ministère a confié la
gestion, l'exploitation, l'aménagement et la protection des territoires
des ZEC au Québec. Ces travailleurs bénévoles empreints
d'idées et de courage, qui depuis cinq ans maintenant participent
à une exploitation rationnelle de notre faune et du territoire et ce,
souvent envers et contre tous, méritaient, à notre avis, au moins
un certain égard.
Vous comprendrez qu'après avoir entendu tout ce que j'ai entendu
ici aujourd'hui, j'en aurais beaucoup à dire, compte tenu de votre
exposé sur le temps tantôt. Si on se réfère à
notre mémoire, au paragraphe 1... Je vais me contenter d'aller
plutôt aux propositions qu'à tous les attendus. Par contre, le
paragraphe 1 mérite certains attendus et ce, en regard de la
déclaration du ministre du 21 juin.
Lorsque nous avons pris connaissance, M. le Président, de la
déclaration ministérielle pour tenir aujourd'hui cette commission
parlementaire, nous avons vu une phrase qui nous a fait sursauter tous et
chacun, et c'est celle-ci: Nous voulons faire disparaître de la loi toute
forme de présomption à l'égard de ceux qui pratiquent la
chasse et le piégeage. J'espère, M. le ministre, que vous
n'agirez pas dans ce sens et que le législateur laissera toute forme de
présomption dans la loi de la conservation de la faune, car, n'en
déplaise à certains biologistes du MLCP, il est utopique de
croire que tous les citoyens sont respectueux des lois et ne les violent pas.
Je les invite, personnellement, à s'épingler un insigne d'agent
ou d'auxiliaire de la conservation de la faune et à se rendre
directement sur le terrain voir ce qui se passe. À ce moment-là,
ils verront non pas des poissons dans un aquarium à des fins
d'étude, mais des citoyens en possession des meilleures armes et
équipements, prêts à tout pour faire pression sur cette
faune, principalement l'orignal et ce, par tous les moyens légaux et
illégaux.
Nous sommes convaincus, tous les citoyens ne sont pas tous des
braconniers, mais je peux vous dire que plusieurs milliers d'entre eux
pratiquent le braconnage sous une forme ou sous une autre et ce,
volontairement, par ignorance ou par une trop grande tolérance de
l'autorité. En comparaison, et en se référant à la
loi des véhicules automobiles, tous les citoyens ne sont pas des
criminels au volant. Dernièrement, notre gouvernement nous disait
combien les décès avaient diminué, combien les accidents
avaient diminué, combien les dégâts matériels au
niveau des véhicules automobiles avaient diminué. Tout ceci par
une simple mesure: augmentation très forte des amendes et des points
d'inaptitude.
Nous aimerions, M. le ministre, que vous fassiez la même chose en
regard de la Loi sur la conservation de la faune. À cet égard,
notre faune ne s'en portera que mieux et les citoyens pourront en tirer les
bénéfices qu'ils sont en droit d'en attendre. Peut-être
pourrons-nous voir un jour au Québec des habitats fauniques bien
structurés s'implanter comme dans certains États
américains que j'ai pu personnellement visiter.
Notre proposition est directement reliée à la
présomption. On ne modifiera certainement pas notre position compte tenu
de l'avant-projet de loi ou document de travail qui nous a été
remis ce matin. Nous estimons qu'on ne doit pas donner trop de latitude aux
chasseurs au Québec, parce qu'il est assez facile pour eux de s'en
prendre. Lorsque je regarde les agents de conservation, et les auxiliaires
à ce niveau, lorsqu'on est sur le terrain pour travailler, ce n'est pas
toujours rose pour ces auxiliaires.
À la proposition no 2, la définition du mot "chasser",
certains organismes en ont fait mention avant nous, nous avons pu lire dans
l'avant-projet de loi ou document de travail du ministère la
définition du mot "chasser" qui est sensiblement la même que dans
les projets de loi antérieurs. Nous aimerions voir, dans la
définition du mot "chasser", "toute personne qui a en sa possession en
forêt une arme à feu, un arc et/ou un piège est
présumée faire l'action de chasser et - à ce
moment-là, nous ne l'avons pas ajouté dans notre mémoire,
on l'a ajouté ici - et/ou trapper, selon le cas."
Nous avons eu à vivre en forêt des expériences cet
automne, au niveau de la chasse à l'orignal, qui ont été
déplorables, tant au niveau des ZEC qu'au niveau des pourvoyeurs
principalement; je ne ferai pas mention des parcs, il y a une autre
législation à ce niveau. Mais, dans notre cas, cela a
été quasiment dramatique, le comportement des citoyens qui se
promenaient. On les arrêtait, entre autres, pour
références. Je peux vous dire que je suis auxiliaire à la
conservation depuis cinq ans, et ce, pratiquement à temps plein. On a eu
à certains moments à vérifier les allées et venues
de citoyens qui chassaient ou qui avaient une arme, on présumait qu'ils
chassaient. On les arrêtait et on leur posait des questions; on nous
répondait: "Je ne chasse pas." - "Oui, tu chasses, tu as une arme
à feu." - "Non, je ne chasse pas, je me promène". - Mais, tu as
une arme à feu et montre-la donc, elle est peut-être
chargée." - "Oui, elle est chargée, mais je ne chasse pas, c'est
pour ma protection". Les citoyens ont développé une sorte, je ne
sais pas comment dire, d'attitude vis-à-vis de la loi pour se trouver
des moyens de ne pas être inculpés. Mais, lorsqu'on a le dos
tourné ou qu'on est parti de ces lieux, ils continuent de chasser; c'est
bien certain. D'ailleurs, je ne compléterai pas ici tout le processus
des agents de conservation qui ont fait un tas de causes dans notre
région, principalement à Joliette, où j'ai eu à
travailler avec les agents à ce niveau. Mais c'est fantastique ce que
peuvent faire les citoyens, pas tous, c'est bien sûr; il va falloir
parfois pénaliser les bons citoyens au détriment des mauvais.
Au niveau des amendes, nous sommes entièrement d'accord avec le
mémoire du ministère, c'est un document de travail qui nous a
été remis par la Direction générale de la faune. On
est d'accord pour que les amendes soient haussées, surtout au niveau des
graves infractions biologiques, mais il ne faudrait pas non plus penser
à laisser des amendes qui sont faibles au niveau technique, car cela
serait trop facile pour les citoyens de répéter indûment
ces infractions parce que l'amende n'est pas chère. À notre sens,
une amende aujourd'hui, si on regarde les amendes au niveau des
véhicules automobiles, devrait être au moins de 60 $, si ce n'est
100 $ comme minimum pour quelque infraction que ce soit à la Loi sur la
conservation de la faune et à celle des habitats fauniques qui s'en
vient à la suite de cette commission parlementaire.
Au sujet de la proposition no 3, j'ai pu, par les années, me
rendre compte que certains organismes, comme les pourvoyeurs demandaient, dans
un même document de travail, le droit d'une association de poursuivre un
individu qui a violé la Loi sur la conservation de la faune sur un
territoire déterminé. Notre proposition no 3: Nous proposons que
la moitié de l'amende imposée à toute personne
trouvée coupable d'infraction sur une ZEC soit versée à
l'association mandatée par le ministre pour la gestion de cette ZEC.
Compte tenu que d'autres organismes ont ce privilège, nous aimerions
avoir le même. Pourquoi? Il faut bien comprendre que nos employés,
lorsque nous sommes auxiliaires de la conservation, la grosse majorité
du temps, ce sont des bénévoles ou des gens très peu
payés, compte tenu du travail qu'ils ont à faire et des
implications que cela comporte. Bien entendu, lorsqu'un employé doit
aller en cour et encourir des frais, c'est l'association qui a la gestion du
territoire qui doit contribuer pécuniairement à aider cet
employé et, bien souvent, les causes sont entendues en hiver et
l'employé est en chômage. Alors, on doit l'aider pour aller
témoigner. Nous, les associations auxquelles on a confié cette
gestion et cette protection du territoire, on n'a pas la possibilité de
retirer aucun montant des amendes. Cela nous cause des frais et des
problèmes. M. le ministre pourrait avec les hauts fonctionnaires,
regarder ce qui pourrait être fait dans la loi, à ce sujet.
Notre proposition no 4, au niveau de la protection des habitats. Ici,
compte tenu que déjà on aménage nos territoires avec les
biologistes du ministère... même si à certains moments on
ne semble pas d'accord avec eux, on fait des aménagements fauniques
actuellement sur les territoires des ZEC et on fait des ensemencements, n'en
déplaise à certains qui pourraient dire que nous n'en faisons
pas. Alors, on ne peut qu'encourager la protection des habitats et
l'aménagement des habitats au Québec et insister fortement pour
qu'un chapitre ou une loi sur les habitats fauniques au Québec soit mis
de l'avant par les législateurs.
À l'article no 5 de notre proposition: Responsabilités
élargies des agents de conservation de la faune. En regardant rapidement
le document de travail ou l'avant-projet de loi qu'on nous a remis, rapidement,
j'ai pu constater ce que cela comportait et on n'est pas tous d'accord sur tous
les points, principalement celui-là. Si on enlève la
présomption, si on diminue, au niveau du mot "chasser"... la loi, ce que
cela représente, par contre, nous, on demande plus. On demande ce que
les agents de conservation avaient autrefois, qui leur a été
enlevé il y a quelques années, je ne pourrais pas vous dire la
date exacte. On demande à élargir les pouvoirs des agents de
conservation sur les territoires du Québec, principalement les
territoires qui sont sous l'autorité du ministère ou du
ministère de l'Énergie et des Ressources, les terres de la
couronne, comme on les appelle, où il y a des chalets de construits. On
demande le droit de perquisition pour un agent de
conservation. Je sais que ceci va créer des remous, mais
lorsqu'on vit sur le terrain depuis cinq ans comme on le fait, je vais vous
donner un exemple pourquoi nous demandons cela. L'agent de conservation ou
l'auxiliaire qui voit ces choses se produire, je ne voudrais pas nommer de noms
pour ne pas blesser des personnes ou des organismes. Sur un lac, vous avez dix,
douze, quinze, trente, cinquante chalets; à l'intérieur de nos
territoires, je vais parler de nos territoires, les associations de chasse et
de pêche, les ZEC. À partir de là, ces gens qui
détiennent un bail du ministère de l'Énergie et des
Ressources, un bail de courte durée ou huit ans, sont là; il
n'est pas nécessaire pour eux d'être membres de notre
organisation; par contre, ils doivent payer un forfait pour pêcher s'ils
ne sont pas membres. Il est assez difficile pour nous, cela occasionnerait
beaucoup de frais à savoir que ces gens pêchent le matin,
capturent leurs dix truites, s'en vont à leur chalet le midi,
dînent, mettent les truites dans le réfrégirateur,
retournent à la pêche tout l'après-midi. (21 h 45)
On les a vus pêcher le matin, on savait qu'on les avait
interceptés et qu'ils avaient dix truites, tout était
légal. L'après-midi, on les revoit sur le lac, à la
pêche, encore une fois. À partir de là ils prennent sept ou
huit truites, selon que la truite veut mordre et puis, ils s'en retournent dans
leur chalet. Le soir, après souper, ils vont à la pêche
à la mouche; ce qui fait que l'individu ou le propriétaire,
surtout le propriétaire d'un chalet, parce que pour les autres
utilisateurs de nos territoires, ce n'est pas la même question; on peut
au moins vérifier dans les tentes ou tentes-roulottes ou ces choses, ce
qu'il y a là-dedans, s'il y a quelque chose qui va à l'encontre
de la Loi sur la conservation de la faune. Les chalets, c'est impossible,
à moins d'obtenir un mandat de perquisition. Je ne sais pas si la
députation tant ministérielle que de l'Opposition a
déjà essayé d'avoir un mandat de perquisition. Moi, je ne
savais pas trop ce que c'était, parce que je ne m'étais jamais
compliqué la vie à savoir que si on veut venir chez moi fouiller,
je n'ai rien à cacher. Mais lorsque j'ai demandé aux agents de
conservation de fouiller certains chalets parce que j'étais en mesure de
le justifier... Vous savez qu'il faut passer en cour pour avoir un mandat de
perquisition. Cela prend des sacrées bonnes raisons. Il faut que l'agent
aille en cour et les chefs de district s'impliquent. C'est tout un
système que les juges, compte tenu du droit, des libertés et tout
ce qui s'ensuit, c'est tout un problème. Et lorsque je regarde... Vous
m'excuserez, je vous ai vu lever la main, M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: Ce que je voulais savoir, c'est quand vous parlez
des chalets de villégiature, ce sont ceux-là, les chalets des
anciens clubs privés, j'imagine?
M. Lajeunesse: C'est cela. M. Mailloux: D'accord.
M. Lajeunesse: Et ceux qui sont bâtis depuis ce temps, en
supposant qu'on va prochainement légaliser, en tenant compte d'un
certain arrêté en conseil qui va permettre cette chose. Ce sont
ces chalets effectivement dont on parle.
Chez nous, sur notre territoire, je vais me prendre en exemple, vous
m'excuserez. Je vais plutôt prendre l'exemple de mon ami Verrier qui, lui
aussi, est dans le secteur de Berthier; chez nous, on a 245 chalets. On a 245
chalets dont les familles viennent régulièrement à la
pêche. Vous imaginez quelle pression la truite peut subir, et ce qu'il
peut se capturer. On ne peut même pas aller voir dans les chalets. J'ose
espérer que le ministre et ses fonctionnaires essaieront
d'insérer dans la Loi sur la conservation de la faune, tout au moins, le
droit à un agent de conservation... Pas nous, les auxiliaires, on ne
veut pas cela; mais au moins un agent, dans différentes conditions,
autorisé par son chef immédiat, pourrait sur les territoires de
la couronne, aller perquisitionner ou aller, s'il le juge à propos,
vérifier si la Loi sur la conservation de la faune a été
violée pour tout gibier, poisson, piégeage d'animaux à
fourrure. Il pourrait, comme autrefois, aller dans ces résidences
secondaires, faire des perquisitions.
À titre d'exemple, je recevais cette semaine un petit document de
notre municipalité qui disait qu'une nouvelle loi avait
été appliquée pour les chiens dans les
municipalités. Vous excuserez l'exemple.
Le Président (M. Bordeleau): Je ne voudrais pas vous
presser, mais je vous avais demandé de résumer votre
mémoire et nous en sommes rendus à vingt minutes à peu
près. Alors, j'espère que vous allez pouvoir terminer dans les
prochaines minutes.
Une voix: Je me couche tard...
M. Lajeunesse: Cela va être dans un autre domaine. Alors,
je voyais dans notre municipalité qu'on passait quelque chose pour les
chiens, qu'il y avait des auxiliaires autorisés par règlement
à pénétrer dans les maisons privées pour voir si
l'application d'un tel règlement sur les chiens était conforme.
Un chien pourrait être dans ma chambre et l'auxiliaire, pour une
municipalité, aurait le droit de venir dans la chambre voir si j'ai un
chien. Je ne vois pas pourquoi si on peut le faire pour des chiens, on ne
pourrait pas le faire pour des humains.
À l'article no 6 de notre mémoire, on
parle des zones d'exploitation contrôlée. M. le
Président, avec votre permission, les citoyens ou les
députés pourront lire cette partie s'ils prennent connaissance de
notre mémoire. Je vais passer outre à cela et, compte tenu de
toutes ces implications au niveau de la nouvelle loi, du nouveau projet de loi,
nous aurons sûrement l'occasion dans un colloque ou des réunions
ultérieures avec le ministère et le ministre d'en discuter.
La proposition no 7. Notre position est semblable à celle de la
Fédération québécoise de la faune, à savoir
servir et vendre de la venaison, poisson ou autre, dans des
établissements commerciaux. Notre position est simple, nous nous
opposons à toute idée de vendre ou servir du poisson ou de la
viande d'animaux sauvages - ne serait-ce que lors des fêtes familiales -
dans un endroit public.
On s'oppose à toute forme, compte tenu surtout des pressions que
cela va créer sur la truite mouchetée, la truite indigène,
l'orignal, le chevreuil, le cerf de Virginie. On espère que le ministre
prendra cette proposition en considération et celles des organisations
antérieures qui ont sensiblement fait la même.
Dans notre proposition no 8, quant aux animaux rares, nous souscrivons
à cet objectif du ministère sans aucun autre commentaire pour le
moment.
À notre proposition no 9, à Divers, toujours en relation
avec le document de la Direction générale de la faune, dans
l'ensemble nous souscrivons à tous ces alinéas, à
l'exception de trois dans lesquels, compte tenu du document
déposé ce matin, nous voudrions intervenir, non pas pour modifier
notre position comme telle, mais pour au moins nous expliquer, à savoir
qu'une tierce personne... On veut prévoir, dans la nouvelle Loi sur la
conservation de la faune, qu'un citoyen, dans le cas où un gibier
pourrait créer des dommages, pourra faire intervenir une
troisième personne. Nous sommes contre cette proposition dans la loi. Je
pense qu'un citoyen aujourd'hui, avec tous les mécanismes qu'il a, est
capable de protéger sa propriété, et, s'il a besoin d'aide
des agents, je crois qu'ils pourront y aller à ce moment. Cela met trop
large la possibilité de la tierce personne, ce qui pourrait arriver.
J'ai une question à poser au ministre. En ce qui a trait à
l'importation ou à l'entrée au Québec d'animaux venant
d'autres pays, nous aimerions que dans l'article de la loi il soit
mentionné s'il s'agit d'animaux morts ou vivants. Il n'y a rien qui en
indique le sens. Je vais revenir sur cela, M. le Président, juste le
temps de le trouver, je vais passer à autre chose.
Deux autres articles de loi qui n'apparaissent pas et qu'on laisse aller
dans le nouveau projet de loi. Nous sommes contre ces deux articles. D'abord,
le port du dossard. Depuis des années le ministère, par une
publicité à coup de milliers, si ce n'est pas de millions de
dollars, incite le citoyen pour sa protection et pour la protection de ses
concitoyens à porter le dossard orange pour chasser. Il nous semblerait
néfaste du soir au matin, après quatre ou cinq années de
publicité, qu'on enlève le port du dossard obligatoire au
Québec, surtout après tant d'années de travail.
Aujourd'hui, les citoyens sont conscients de cela, tout le monde le porte, ils
sont minoritaires ceux qui ne le portent pas. Bien souvent il n'y a pas
d'infraction de faite, compte tenu de l'éducation qu'on doit faire des
citoyens en forêt.
Au sujet du remisage des armes à feu, le ministère semble
aller à enlever le remisage des armes à feu dans un étui
le jour dans un véhicule automobile. Nous nous opposons à cet
article de loi. Nous préconisons que l'arme à feu dans un
véhicule automobile le jour peut être transportée si elle
remisée dans un étui. Le fait de ne pas la mettre dans un
étui incite, et on en sera rendu aux anciens termes, à ce que le
magasin de l'arme soit dans la main du chasseur quasiment dans l'automobile, si
cela n'est pas pris après l'arme; on aura des difficultés encore
plus grandes à faire respecter la loi. Déjà, tous nos
citoyens sont conscients de cela. On en a arrêté tant et plus.
C'est marginal les infractions. Pourquoi enlever quelque chose qui est
déjà là et qui est bien pour autre chose qui pourrait
être néfaste et permettre à un citoyen de sortir de son
automobile rapidement si l'arme n'est pas dans un étui
insérée? À partir de là il peut tirer rapidement du
véhicule automobile. Bien souvent, il tirera à travers la
fenêtre. Le fait que l'arme soit insérée, au moins il faut
qu'il prenne le temps de descendre de son automobile et de la charger. Il
serait possible pour le ministère, pour le législateur de laisser
cette disposition de la loi.
Le Président (M. Bordeleau): M. te député de
Hull.
M. Rocheleau: Est-ce que vous faites une distinction dans les
armes, soit à gros calibre ou fusil?
M. Lajeunesse: La loi ne fait pas de distinction. Toute arme
à feu dans un véhicule en forêt doit être
remisée dans un étui fermé, un étui conçu
spécialement pour cela. Le texte de loi est assez clair
là-dessus. On ne fait pas de...
M. Rocheleau: C'est simplement un commentaire que
j'émettais. C'est qu'à la chasse à la perdrix, entre
autres, c'est compliqué en maudit d'avoir cela dans un
étui constamment.
M. Lajeunesse: On prêche chez nous, et je suis d'accord sur
ce principe, notre organisation est d'accord sur le principe de participation;
que le citoyen marche un peu, cela sera bon pour sa santé. Qu'il marche
au lieu de chasser... D'ailleurs, le ministre disait ce matin - je l'entendais
- que depuis quelques années il n'y a eu que quelques accidents mortels
dus aux armes à feu dans la province; cela a diminué
sensiblement. Je ne voudrais pas que, l'an prochain ou dans deux ans, une loi
comme celle-ci permette que des citoyens se blessent ou qu'il y ait des
accidents mortels, compte tenu que depuis quelques années on en
déplore beaucoup moins. Il n'y en a eu que trois ou quatre, selon ce que
M. le ministre nous a mentionné ce matin.
Au niveau de tous les autres articles, au niveau de Divers, dans notre
mémoire, à la proposition no 9 et dans les autres, nous sommes
d'accord avec le ministère. Je vais essayer d'être rapide, c'est
difficile tout ce qui peut se discuter dans une commission pour la
première fois. Dans notre mémoire, vous lirez, messieurs de la
députation ministérielle et de l'Opposition, à la page 7,
les articles 10, 10.1, etc., le zonage intégré. Nous sommes
d'accord avec le zonage intégré qui comporte les mêmes
zones de chasse et de pêche pour toute la province. Il n'y a pas de
problème. Il y a une nouveauté qu'on suggère au
législateur, compte tenu des pressions que certains gibiers subissent,
c'est d'émettre des permis individuels ou des permis de groupe pour la
chasse à l'orignal, de réintroduire le permis de chasse à
l'ours comme il l'était autrefois, attaché avec le permis de
chasse à l'orignal. Le permis de chasse à l'orignal pourrait
être plus cher pour un citoyen quand on ne veut pas le brimer dans ses
droits de chasser individuellement, il pourrait être moins cher per
capita s'il était collectif. Si le ministère ne voulait pas, pour
une raison ou pour l'autre, attacher le permis de chasse à l'ours comme
il l'était autrefois avec le permis de chasse à l'orignal, au
moins que la chasse à l'ours ne soit pas superposée à
celle de l'orignal, compte tenu encore des problèmes juridiques que cela
comporte et de l'argent qu'on perd. Cela serait long à tout vous
expliquer. J'aurai l'occasion de revenir sur le sujet dans des réunions
ou consultations ultérieures possiblement. Je voudrais, par contre, que
les députés prennent connaissance de la proposition 10 de notre
mémoire. Cela pourrait devenir intéressant pour la faune au
Québec, compte tenu de la pression que peuvent faire subir à
l'orignal 125 000 chasseurs.
Au niveau de la chasse à l'arc à l'orignal, nous faisons
une proposition mais nous ne sommes pas des spécialistes. S'il
était possible aux fonctionnaires de prévoir dans la loi que la
chasse à l'orignal à l'arc soit permise aux arcs à poulies
seulement. Que les arcs conventionnels soient interdits compte tenu du fait
que, bien souvent, des gens ne sont peut-être pas capables
d'étirer l'arc comme il se doit, la pression n'est pas ce qu'elle
devrait être. Il faudrait au moins les obliger à chasser avec un
arc à poulies -il y a des spécialistes que j'ai vus qui ont
préparé des mémoires à ce niveau - pour ne pas
blesser de gibier pour rien, surtout l'orignal qui est un animal excessivement
fort au niveau de sa peau et de son ossature. Il serait important de voir
à modifier la chasse à l'arc à l'orignal avec des arcs
à poulies seulement.
Nous aurons l'occasion de reparler de votre proposition 10.4, plan de
protection conjoint. Je ne veux étirer le débat. À propos
des aéronefs, M. le Président, avec votre permission, je vais
passer la parole à mon ami Arthur Lavoie, du Lac-Saint-Jean, qui a
certainement des choses à vous dire là-dessus. (22 heures)
M. Lavoie (Arthur): Bonsoir.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Lavoie.
M. Lavoie: J'ai la permission, M. le Président?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, oui, vous pouvez y
aller.
M. Lavoie: Je puis prendre la parole? Merci beaucoup.
Au niveau des aéronefs, nous sommes en face d'un problème,
d'un cancer assez généralisé. Je vais risquer un chiffre
assez conservateur en disant que 60% du territoire est infesté par des
gens qui ne savent pas dans quel but utiliser un avion. Un avion est fait pour
se rendre à un endroit où, normalement, il n'y a pas de routes et
où il n'y a pas de voies d'eau navigables. Ce n'est pas ce qui se
produit dans le moment puisque les chasseurs sont constamment harassés
et par le bruit et par les avions durant toute la période de la
chasse.
J'espère que vous avez lu les considérants. On va en
relire quelques-uns tout à l'heure; on va aller assez vite,
rassurez-vous. J'en vois qui regardent l'heure; ne vous découragez pas.
Il y a un objectif ici, que plusieurs groupes ont mentionné, c'est la
protection de la faune. Ne vous en déplaise, ça fait cinq ans
qu'on a bâti les ZEC, qu'on est parti avec, et ça fait cinq ans
qu'on travaille dedans bénévolement, à 50 réunions
de quatre heures au moins par année, en plus des comités et ce
que vous voudrez, en plus du chialage de tous les membres qui devaient
supposément aller dans
le bois gratuitement, ce qui n'est pas le cas. La parenthèse est
fermés.
Si vous me le permettez, M. le Président, je voudrais distribuer
à cette noble Assemblée une copie d'une photo. Est-ce que c'est
possible?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, oui, c'est possible.
M. Lavoie: Bon.
Le Président (M. Bordeleau): Je voudrais simplement qu'un
membre de la commission se porte bénévole pour les
distribuer.
M. Lavoie: S'il vous plaît, pour les distribuer, y compris
aux journalistes.
La photo que vous avez en main... Il n'en reste plus, gardez-les. Avec
votre permission, M. le Président, tout à l'heure je voudrais
faire jouer un petit enregistrement qui n'a pas été fait ici.
Est-ce que ce serait possible?
Le Président (M. Bordeleau): M. Lavoie, je m'excuse,
mais...
M. Lavoie: Ce n'est pas possible?
Le Président (M. Bordeleau): ... on va
s'en...
M. Lavoie: Cela va durer à peu près quinze secondes
et ça ne retardera pas l'assemblée, ça va être un
petit bruit de fond très agréable parce que j'ai l'intention de
vous emmener faire un petit tour à la chasse qui se pratique au
Québec. Il n'y en a pas beaucoup qui en ont parlé.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, pour quinze secondes
on peut y aller.
M. Lavoie: D'accord?
Le Président (M. Bordeleau): Oui.
M. Lavoie: Alors, l'avion que vous avez devant vous est typique
de ceux qui survolent la forêt tout l'automne à une altitude
extrêmement dangereuse et qui empêche les vrais chasseurs sportifs
de chasser l'orignal de façon vraiment sportive. Alors, j'ai pris la
peine d'apporter mon appareil en forêt moi-même - parce que les
plaintes sont astronomiques et viennent de partout - pour photographier cet
avion qui venait de faire une dizaine de tours au-dessus d'une montagne et
avait probablement localisé un original parce que, lentement, il
s'éloignait vers la droite pour aller le tuer plus bas. Ce n'est pas
scandaleux ce que je vous dis là. C'est tous les jours ce qu'on vit en
forêt. Parce que nous sommes en forêt.
On est dans la gestion des ZEC mais on est aussi en forêt. Ce
qu'on vous dit, c'est parce qu'on le vit, ce n'est pas parce qu'on l'a lu dans
les livres. D'accord? Je voudrais bien qu'on s'entende là-dessus.
Veux-tu me donner le magnétophone, s'il vous plaît? Quand,
le matin, à six heures et demie, les pieds gelés, vous
réussissez à voir un orignal qui vous casse une branche, vous
lancez un deuxième appel de la femelle, le petit cri doux, pour le faire
approcher, voyez ce qui vous arrive. Vous me direz si c'est de la chasse
sportive. Il faut dire que cela a été enregistré avec un
petit magnétophone, (enregistrement) II tournoie, il cherche l'orignal
à une altitude très dangereuse. Vous voyez comme c'est reposant.
Imaginez que vous avez pris une semaine de vacances, que vous avez payé
100 $, plus les autres frais pour chasser en toute quiétude, et ce qui
arrive, c'est cela durant huit jours. Cela, c'est un avion.
Alors, la loi là-dessus est muette, à toutes fins utiles.
Je parle d'un avion. On en est rendu au parachutage et il y a des
hélicoptères qui se promènent. Il n'y a évidemment
rien qui empêche un individu de tirer en parachute ni de se lancer en
parachute. Il n'y a rien de prévu pour ça. Alors, on en est rendu
là. On est rendu au point où des gens se transforment, à
l'automne, en tueurs à gages. Ce sont les guides pour un
propriétaire d'avion de Roberval - c'est inscrit dans une
déclaration assermentée ici - qui, durant la chasse qui commence
en haut - c'est pour cela qu'on demande le zonage intégré - dans
la zone K2, je pense, en haut de Hl, trois semaines avant ont affirmé,
sur déclaration assermentée, avoir tué sept ou huit
orignaux pour ce monsieur de Roberval. Ils étaient rendus tout
près de la ZEC et ils en avaient déjà tué un; ils
avaient son foie dans un sac; tout était normal. Alors, le monsieur
-évidemment, il ne s'agit pas de poursuivre dans ce cas - et ceux qui
m'ont fourni cette déclaration avaient très peur de le faire
parce que c'est du terrorisme tout simplement. Le monsieur se promène
avec sa boîte d'allumettes et dit: "Je suis bénéficiaire de
l'aide sociale, il n'y a pas de problème." En d'autres mots: "Ferme ta
boîte, parce que je sais où est ton camp." En termes clairs, c'est
cela que ça veut dire. C'est cela, la chasse à l'orignal au
Québec présentement. C'est une déclaration.
J'ai une autre déclaration que vous avez peut-être lue.
Quelqu'un monte sa tente et, à un moment donné, il trouve un
billet dans sa tente disant: Attention! Vous êtes entouré de
quatre groupes de chasseurs. Les noms sont là; ils sont écrits.
Attention! On est là; vous êtes là, les endroits sont
marqués d'un X et c'est là que vous êtes. On
découvre qu'il y a un seul lac qui est fait en forme de - j'allais dire
de feuille
d'érable, mais disons - de trèfle et c'est la seule voie
d'eau; la seule façon d'avoir accès à ce plan d'eau, c'est
en avion. Alors, tirez les conclusions que vous voulez. Le but de cela est
d'attirer l'attention du ministère sur un cancer qui est en train de
dégénérer en batailles rangées. Il y a des avions
disparus; vous ne saviez pas que, depuis trois ou quatre ans, il y a des avions
disparus, on n'a jamais su pourquoi ni comment. Si cela continue, il en
disparaîtra d'autres. Il y a même des gens qui se demandent s'ils
ne devront pas communiquer avec le Liban pour avoir les batteries de la
DCA.
Je vous dis franchement, ils sortent de la ZEC, ils nous regardent et
disent: Vous allez nous régler cela. Quand ils disent cela, ils nous
regardent comme si l'on était le ministère. Or, que je sache,
depuis 1977, nous sommes de drôles de collaborateurs du ministère.
On fait à peu près tout ce qu'il veut, mais du profit et de la
réglementation, on n'en a presque pas. C'est pour cela qu'on demandait
un décret à l'article 6, sur lequel on reviendra sûrement
au colloque de janvier, qu'on espère obtenir et on a offert notre
collaboration à ce sujet.
Dans l'opération gestion-faune, l'accessibilité est
donnée, d'accord? On est à préparer des plans de gestion
qui sont encore théoriques - c'est beau - mais il restera à avoir
les moyens d'appliquer ce plan de gestion et de le faire observer.
Présentement, c'est l'anarchie presque totale en ce qui a trait à
la chasse surtout. C'est pour cela que nous disons que, peu importe le
ministère qui a une juridiction là-dessus ou le gouvernement,
c'est le temps de mettre un frein à cela et cela prend une loi avec des
dents et des ailes. Ce n'est pas peu dire, mais la situation est rendue
tellement grave que les gens sont en train de se faire justice eux-mêmes.
Est-ce qu'on attendra qu'il y ait des meurtres, s'il n'y en a pas
déjà eu? C'est tout cela qu'on veut dire.
En ce sens, étant donné qu'un avion est fait normalement
pour aller dans des endroits où il n'y a pas de chemins ni de voies
d'eau, on proposerait tout simplement d'interdire les aéronefs dans tous
les endroits où il y a des voies d'accès par terre ou par eau
pour permettre aux chasseurs moyens, pour qui on a créé les ZEC -
c'est pour le chasseur moyen, le commun des mortels, qu'on a créé
les ZEC - de pratiquer leur sport sans être écoeurés par
les mieux nantis de la société. Ce sont des termes clairs; c'est
précis. D'accord? Présentement, ils ne peuvent pas le faire.
Alors, si l'on ne fait rien, d'ici peu, ce sont évidemment les
pourvoiries qui feront des millions parce qu'on n'est plus
intéressé à venir chez nous. C'est bien clair;
d'accord?
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous avez
terminé, M. Lavoie?
M. Lavoie: Je voudrais achever...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, j'apprécierais
beaucoup...
M. Lavoie: Je sais que vous l'apprécierez et moi aussi;
j'en vois qui regardent l'heure. Nous sommes quand même des gestionnaires
de ZEC, nous avons à coeur la conservation de la faune, nous savons
qu'il est tard...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, oui, je comprends tout
cela, M. Lavoie.
M. Lavoie: ... mais je dois retourner à Aima et je
travaille demain matin.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, sauf qu'il y a une
règle qui existe par laquelle on tente d'accorder une heure par
mémoire. On dit: Environ vingt minutes pour résumer le
mémoire.
M. Lavoie: Est-ce qu'on a dépassé l'heure?
Le Président (M. Bordeleau): Cela fait quand même 45
minutes.
M. Lavoie: Je termine...
Le Président (M. Bordeleau): Je pense que j'ai
été assez large jusqu'à maintenant.
M. Lavoie: Oui, c'est fini. Je termine simplement en disant que,
comme organisme gestionnaire de ZEC, collaborateur du gouvernement, c'est un
peu pour... C'est la même proposition que celle que la
Fédération québécoise de la faune a faite ce matin.
Nous tenons à ce qu'il y ait un suivi de cette loi, et nous tenons
à y être à part entière avant que la
rédaction finale soit faite. C'est tout comme résumé.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci. M.
Lajeunesse.
M. Lajeunesse: M. le Président, j'ai oublié, dans
un exposé - cela ne sera pas long, quinze secondes - il faut arriver
à une conclusion et après cela aux questions, s'il y en a.
Concernant le document de travail que la Direction
générale de la faune nous a remis, notre fédération
a pris connaissance dans le document du ministère LCP de l'exposé
du ministère sur la pourvoirie au Québec. Nous sommes d'accord
sur cet énoncé. De plus, après avoir pris connaissance du
mémoire de l'Association des outfitters du Québec, entendu cet
après-midi, nous les appuyons fortement, pour ce qui est d'une partie de
leur mémoire, et nous demandons au ministre d'agir le plus
rapidement possible, compte tenu de la situation. Bien sûr que
d'après l'exposé de mon ami Arthur, il y a certains pourvoyeurs
qui, s'ils ne vous en ont pas parlé, subissent les mêmes
préjudices que les nôtres dans les ZEC.
Comme conclusion, si vous me le permettez, M. le Président, nous
remercions tous ceux et celles qui nous ont écoutés ou qui liront
notre mémoire. Mous l'avons fait dans le but de favoriser une
exploitation rationnelle de notre faune et un développement de ses
habitats. Noua espérons que ces deux éléments
contribueront à une saine gestion et à la conservation de notre
patrimoine faunique. Nous remercions le gouvernement de cette commission
parlementaire, car elle nous a permis de nous exprimer sur un sujet qui nous
tient à coeur. Nous espérons, M. le ministre, que vous agirez
sans vous tromper et que, tant du côté ministériel que de
l'Opposition, on vous facilitera la tâche pour l'adoption, à
l'Assemblée nationale du Québec, d'une nouvelle loi de la
conservation et des habitats fauniques. Vous pouvez compter sur notre
entière collaboration en tout temps.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre, vous
avez des questions, des commentaires, toujours les plus concis possible?
M. Chevrette: Oui. Je vais commencer par quelques commentaires,
sûrement. D'abord, je vais tenter d'agir sans me tromper, même
concernant mes questions et de mes commentaires.
D'abord, M. Lajeunesse, je suis obligé de vous dire bien
candidement qu'il y a deux écoles de pensée concernant la
conservation ou le rôle des agents de conservation de la faune. Une
école de pensée préconise que nos agents de la faune ne
soient pas nantis de pouvoirs plus grands que ceux d'un policier.
Tout criminel qui tue ou qui vole est présumé innocent. Or
vous nous demandez de maintenir la présomption de culpabilité
pour celui qui détient un fusil qui ne serait dans un étui, et un
chasseur qui aurait un "flashlight" la nuit ou un fanal est
présumé chasser la nuit. Je pensais qu'on était rendu en
1982 et qu'on pouvait se permettre de renverser le fardeau de la preuve et de
faire en sorte que ce soit l'agent de la conservation de la faune qui soit
obligé de faire la preuve qu'un individu a chassé. Cela ne semble
pas être l'approche que vous préconisez.
J'aimerais que vous me disiez tout à l'heure, pourquoi. Cela me
paraît être plus fort, que le sort qu'on réserve aux
meurtriers, aux accusés de droit commun, arrangez cela comme vous le
voudrez, aux criminels eux-mêmes.
Deuxièmement, ne croyez-vous pas que le fait de partager les
primes, surtout si on s'en va vers l'accréditation des agents de la
faune, va transformer vos agents accrédités en shérifs ou
chasseurs de primes pour pouvoir gonfler les goussets des différentes
associations ou groupements? C'est dangereux cela. Je ne voudrais pas passer
pour certains policiers de ville, qui reçoivent des ordres de mettre des
"tickets" parce que le budget baisse en ville. Cela me paraît tout
à fait dangeureux, pour le moins, d'avoir une approche du genre. (22 h
15)
Je vous demande si vous ne feriez pas mieux de vous aligner - et
là, je me tromperais peut-être moins - derrière la
théorie qui veut qu'on doit éliminer les niaiseries qui peuvent
permettre du zèle, créer des infractions à partir de
stupidités, mais punir ces gestes carrément illégaux d'une
façon beaucoup plus radicale. Quelqu'un qui tue hors saison ou qui tue
hors territoire, qui défonce les quotas, etc., c'est punissable d'une
amende beaucoup plus sévère que celle qu'il y a là, mais
qu'on enlève au moins des tentations. Que ce soit un agent de la faune,
un agent auxiliaire ou que ce soit un policier, il y a toujours une tentation,
à un moment donné et selon l'humeur, d'agir d'une façon
radicale ou pas, selon la journée et le visage du bonhomme qu'on
rencontre. Il me semble que cela pourrait être une approche plus
humanitaire plutôt que d'en faire des policiers, d'en faire des agents
éducateurs en même temps que ce contrôle nécessaire
en temps et lieu pour les véritables infractions.
Un autre aspect me frappe, et là je ne voudrais pas faire sourire
Mme la députée de Chomedey, depuis tantôt, j'ai
commencé à calculer le nombre de ministères que je devrais
rencontrer pour rédiger mon projet de loi, vous venez d'en ajouter deux
autres: la Justice et les Transports, puisque vous me demandez d'interdire le
transport aérien. Et au niveau de la justice, le mandat de perquisition,
c'est le ministre de la Justice qui le permet, et c'est la magistrature en
plus. Vous le savez, la politique ne doit pas s'ingérer dans les
questions relevant de la magistrature. Je ne sais pas comment je vais faire
pour faire plaisir à tout le monde. Seulement depuis le matin, je suis
rendu à douze ministères et la magistrature.
J'ai une autre question avant de vous redonner la parole. La chasse
à l'arc, entre vous et moi, j'aimerais que vous me disiez si ce n'est
pas plus le contrôle et la maîtrise de ton arme qui joue, quand tu
vas à la chasse, que l'instrument lui-même. Si vous n'avez aucune
notion, vous avez beau mettre le calibre le plus précis avec la lentille
qu'il faut dessus, vous savez très bien que si vous n'avez pas de
pratique, si vous n'êtes jamais allé à la chasse, vous
allez tirer un peu tout croche et vous pouvez aussi bien blesser...
Vous dites que vous allez réserver cela exclusivement à un
type d'arc. Ne croyez-vous pas que c'est plutôt sur la connaissance de
l'arme elle-même par le chasseur que doivent porter nos efforts
plutôt que de barrer certaines catégories. Je serais heureux de
vous entendre là-dessus.
Remarquez bien, surtout venant de votre propre milieu, M. Lajeunesse, je
suis convaincu que vous allez me donner des réponses très
adéquates, qui me permettront de ne pas me tromper quand je
rédigerai la loi. Je vais vous écouter.
M. Lajeunesse: M. le Président, compte tenu que je n'ai
pas fait de déclaration, il se pourrait que je me trompe. Quant aux
connaissances de la chasse à l'arc, c'est bien sûr que s'il se
donnait des cours par le ministère ou des éléments, comme
le certificat de chasseur, on ne s'en porterait que mieux. Lorsque j'ai
mentionné d'abord que nous n'avons pas une expérience approfondie
de l'arc, j'ai bien mentionné que c'était au niveau de la chasse
à l'arc à l'orignal. Compte tenu de son ossature, de sa peau, de
la force et de la grosseur de ce gibier, si une personne de 100 livres a un arc
conventionnel, qu'on appelle, pour arriver à une pression de 45 livres,
elle doit l'étirer jusqu'au bout, et si elle n'a pas la capacité
de le faire, comme on l'a vu, la flèche ne fait, à une distance
de 75 à 100 pieds, que pénétrer légèrement
dans un orignal. Elle pourrait pénétrer plus profondément
dans un chevreuil. Je vais m'arrêter là, M. le Président,
compte tenu de mes connaissances limitées à ce niveau.
Ce n'est qu'à titre de suggestion que nous avons apporté
cet argument. Quant au nombre de ministères, j'ose espérer
qu'avec le nombre de fonctionnaires que vous avez, le nombre de
ministères ne doit pas être un problème pour vous, si nous,
les gestionnaires des ZEC, on a affaire à six ministères
continuellement pour régler nos problèmes, et dans bien des cas,
bénévolement. Quant à la stupidité, vous avez
mentionné l'aspect humanitaire, on pourrait se référer, M.
le ministre, à notre discussion du 3 mars 1978, à l'Auberge des
Gouverneurs de Joliette, où vous me répondiez à une
question que je vous posais que tous les citoyens ne sont pas des "gorlots" et
vous l'avez mentionné ce matin. Alors, je pourrais vous dire que
lorsqu'on demande des lois plus sévères, c'est justement pour ces
"gorlots".
Au mois de mars, je n'avais pas connaissance du dossier comme
aujourd'hui, mais je peux ajouter, pour avoir vécu depuis cinq ans en
forêt, huit mois par année, 24 heures par jour, que je
n'exagère pas. Certains de vos fonctionnaires vont être en mesure
de vous le confirmer, je peux vous dire qu'il y a un maudit paquet de
"gorlots". Vous m'excuserez l'expression, M. le Président. Quant
à présumer que la nuit, si cela... La présomption,
c'est-à-dire, la présomption, M. le ministre? La
présomption que vous avez mentionnée, c'est qu'autrefois cela
existait. Si c'est possible, que le législateur la remette pour les
agents de conservation au niveau des territoires de la couronne au
Québec, principalement pour les chalets à l'intérieur des
ZEC. C'est nous qui sommes touchés par cela; les pourvoyeurs ne le sont
pas, parce qu'il n'y a pas de chalets privés sur les territoires des
pourvoyeurs, encore moins dans les parcs et les réserves fauniques. Si
ce n'est pas possible d'avoir la présomption...
M. Chevrette: II faudrait faire une distinction entre le mandat
de perquisition... Je pense qu'on se trompe ici.
M. Lajeunesse: Un mandat de vérification, si vous aimez
mieux.
M. Chevrette: Non, non, mais il y a deux choses dans votre
exposé. Vous avez demandé d'introduire le mandat de perquisition
pour les agents de conservation. Cela, c'est une chose, mais vous avez aussi
dit que vous nous demandiez d'étendre la présomption à
autre chose, si possible, non seulement celle qui existait, mais à autre
chose, également. Ce que je vous ai demandé, c'est s'il ne serait
pas mieux d'enlever ce qui est techniquement, souvent, des bebelles secondaires
qui agacent l'ensemble de la population, puis conserver certaines infractions
techniques. Je ne veux pas abolir tout cela, ce n'est pas cela que j'ai dit,
mais qu'on mette plutôt l'accent sur les véritables infractions
qui mettent en cause la conservation de la faune: la chasse hors territoire,
hors saison, des gars qui défoncent les quotas, qui chassent dans un
temps illégal n'importe quel gibier. Vous le savez, vous en connaissez,
moi aussi j'en connais. Ce que je veux vous dire, ce que je veux vous demander
là-dessus, c'est si vous ne prévoyez pas que cela serait
avantageux de doubler, s'il le faut, tripler, s'il le faut, les amendes pour
les véritables infractions, mais laisser tomber les petits
éléments qui agacent la population en général.
M. Rocheleau: Je suis d'accord avec vous.
M. Lajeunesse: Je n'aurai pas beaucoup d'appui, d'après ce
que je peux voir. Non, la présomption au niveau des agents pour faire
des causes, s'ils sont obligés, en vertu de la nouvelle loi... Si on
abolit la présomption, il faudra que les agents soient sur place
lorsqu'ils comparaîtront devant les tribunaux, devant les juges, pour
répondre aux questions qui leur seront posées. Il faudra, pour
eux, être capables de justifier que l'individu est
en possession d'une arme à feu la nuit avec un projecteur et
qu'il y avait effectivement un orignal au bout, pour faire la preuve. À
ce niveau, vous comprendrez que si vous enlevez la présomption, c'est
faciliter à ces grands braconniers la possibilité de continuer
leurs actes, à mon sens.
M. Chevrette: Je vous donne raison, M. Lajeunesse...
M. Lajeunesse: Parce que l'agent de conservation...
M. Chevrette: Je veux m'excuser, je vous donne raison. Là,
ce n'est plus de la présomption; quand il y a un orignal au bout de
l'arme à feu, cela devient une preuve constituée, ce n'est plus
de la présomption. Je suis d'accord avec vous. Par exemple, si je suis
étendu, que je dors dans mon sac de couchage et que j'ai un fanal
à côté de moi, s'il y a un agent de conservation qui arrive
et me voit avec un fanal, je suis présumé, en vertu de l'ancienne
loi, être chasseur de nuit...
M. Lajeunesse: Dans un...
M. Chevrette: À ce moment-là, dans mon concept
à moi, je dis que si le bonhomme avait la lampe de poche allumée
et cherchait l'orignal, c'est une autre paire de culottes. Mais s'il est
couché dans son sac de couchage, cela arrive, sous un arbre, le fanal
à côté de lui, là, l'agent de la paix
l'éclairé et dit: Tu es présumé coupable mon
"chum". Une infraction! Est-ce que vous trouvez cela correct?
M. Lajeunesse: M. le ministre, sur l'exposé que vous
faites, en partie, je suis d'accord, mais la présomption, elle est ici.
L'individu qui circule la nuit en forêt avec un projecteur, en vertu de
la loi, est présumé chasser. Je ne pense pas que les agents de
conservation soient assez mesquins pour faire des causes dans l'exposé
que vous venez de faire, mais lorqu'on voit des individus armés de gros
calibres qui se promènent la nuit en forêt ou dans un canot sur un
lac avec un projecteur ou "radar light", vous m'excuserez l'expression en
anglais, la présomption est de dire: Monsieur, tu chasses la nuit. Si tu
es dans ta tente ou ta tente-roulotte avec un projecteur, la loi te le permet
si tu veux t'éclairer. Mais, au moment où tu as une arme à
feu avec toi et que tu te promènes la nuit en forêt, et que tu
n'es pas couché, il y a une marge. C'est sur cela que je voudrais que le
ministère se penche pour donner une chance aux agents de conservation de
faire un travail préventif, de ne pas donner trop de chances. Plus on va
donner de chances aux braconniers, moins on va avoir de gibier.
Quant au partage des primes, si ce n'est pas possible - c'est une chose
qu'on demande - de partager les primes compte tenu qu'on va nous
répondre, comme dans certains domaines des permis de chasse ou de
pêche, qu'on demande des contributions, que cela va au fonds
consolidé ou je ne sais trop, quelque chose du genre, au moins, qu'on
nous donne à nous, les associations à qui on a confié la
gestion, qu'on prévoit dans la loi, peut-être le
législateur, de permettre aux associations de poursuivre les individus.
À ce moment, au moins, on pourra récolter des dommages.
Actuellement, on ne récolte rien, on fait les frais pour poursuivre des
individus, les fonds vont au ministère du Revenu, j'imagine, ou au
ministère des Finances. Les pourvoyeurs ont le droit, en vertu de la
loi, de poursuivre un individu sur leur territoire et les dommages que le juge
peut accorder sont versés au pourvoyeur. Alors, on demande la même
chose.
Dans l'exposé du document de travail du ministère du
Loisir, de la Direction générale de la faune, on en fait mention
pour de nouvelles associations, M. le ministre, que vous voulez créer,
dans l'Estrie, par exemple, pour la chasse au cerf de Virginie, créer
des associations agréées de propriétaires pour participer,
directement sur leur ferme, à une plus grande exploitation de la faune
là-bas. Alors, déjà, vous préconisez de donner
à ces gens le droit de poursuivre s'il y a quelque chose; pourquoi nous,
dans la loi, nous n'aurions pas le même droit de poursuivre? Si une
association veut poursuivre, elle prendra le moyen de poursuivre, mais si elle
ne veut pas le faire, elle continuera comme aujourd'hui à remettre aux
agents de conservation de son district ses rapports d'événements,
comme on procède aujourd'hui.
Dans les grosses causes, comme la chasse à l'orignal la nuit ou
les armes à feu chargées à plein dans les
véhicules, les amendes sont excessives. Que vous les gardiez, je n'ai
pas d'objection mais, si cela nous cause des préjudices au niveau de la
faune sur nos territoires, s'il y a des dommages, on voudrait bien en retirer
quelque chose. Notre exposé est à ce niveau. Je ne sais pas si je
me suis fait bien comprendre.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord vous
féliciter pour le magnifique rapport que vous venez de faire ainsi que
la musique, c'est la première fois qu'on entend de la musique ici. Ma
première question...
Le Président (M. Bordeleau): De la musique d'avion.
M. Houde: De la musique d'avion, oui. Avec la photo, c'est
quelque chose de bien qu'on voit ici. Ma première question serait la
suivante, à M. Lajeunesse, s'il veut bien me répondre. Qu'est-ce
que vous pensez de l'idée du ministre de créer une nouvelle
direction de la faune?
M. Lajeunesse: J'aurais voulu aborder le sujet. Je vous remercie
de la question, M. le député de Berthier. Ce n'est pas tant ce
dont on a peur, il y a un organisme avant nous qui en a fait mention, je pense,
ou une question a été posée par le député de
Hull tantôt, à savoir que les fonctionnaires vont devenir des
agents de conservation. J'ai eu des informations, je ne me cacherai pas pour le
dire, vendredi dernier à ce sujet. Ce que nous ne voudrions pas, c'est
que les fonctionnaires du ministère qui vont devenir des agents
remplacent à courte échéance, M. le ministre, selon les
informations que j'ai pu obtenir, ou à longue échéance,
les chefs de district et les sous-chefs de district des agents de conservation
pour qu'un jour on soit géré, au Québec, seulement par des
biologistes, n'en déplaise à ces messieurs.
M. Chevrette: Pourrais-je demander à M. Lajeunesse, il
faudrait quand même qu'on dise... Je ne sais pas si c'est l'heure, mais
qui a sorti cela, concernant les agents de conservation de la faune, qui a
sorti cela? Sortez-nous cela, c'est important.
M. Lajeunesse: Cela s'est discuté, M. le ministre,
à différents niveaux.
M. Chevrette: Ce qui a été dit tantôt, M.
Lajeunesse, je vais le répéter parce que c'est une question de M.
le député de Hull. M. le député de Hull a
été très précis, il faisait référence
à un texte qu'il avait devant lui. Il m'a demandé ceci, en tout
cas, l'esprit de sa question était: Pourquoi disons-nous l'agent de
conservation et son supérieur? C'est parce que l'ancienne loi disait que
l'agent de conservation est un agent de la paix et cela empêchait son
supérieur de mener des actions conjointes avec l'agent de la paix. Ce
que j'ai donné comme explication, et cela a satisfait le
député de Hull... Vous n'êtes pas sûr? On continuera
à s'expliquer demain. Ce que j'ai répondu est ceci: En
plaçant les mots "l'agent de conservation et son supérieur sont
des agents de la paix", cela permettait aux deux de travailler conjointement
sur une même cause. C'est tout ce que j'ai expliqué. S'il y a des
bobards dans l'air, sortez-les-nous pour qu'on comprenne. (22 h 30)
M. Lajeunesse: Ce ne sont pas des bobards parce que je doutais,
M. le ministre, des informations qu'on me donnait. Elles ont pu être
confirmées lorsque la commission nous a remis ce matin l'avant-projet de
loi ou le document de travail ayant trait à la future loi sur la
conservation de la faune, qui peut être changée, bien sûr.
Ce n'est peut-être pas la vraie loi qui va être proposée,
mais on voit très bien à l'article mentionné par le
député de Hull que les agents de conservation et les
fonctionnaires en vertu d'une telle autorité seront nommés agents
de la paix. J'aimerais poser une question au ministre ou à un de ses
fonctionnaires, si le ministre ne peut pas me répondre. Actuellement,
les chefs de district sont des agents de conservation, à moins qu'on ne
me prouve le contraire. Les sous-chefs de district sont des agents de
conservation; automatiquement, ils sont des agents de la paix. M. le ministre,
vous m'excuserez, mais, lorsque vous mentionnez que les...
M. Chevrette: Ils ne sont pas nommés dans la loi.
M. Lajeunesse: ... chefs de district et les sous-chefs de
district ne peuvent pas - je ne sais pas quel terme vous utilisez collaborer
avec leur agent - je mets en doute ce que vous dites, compte tenu que ces chefs
de district et ces sous-chefs sont des agents de conservation. Ce sont des gens
qui ont gradué là, qui étaient agents autrefois.
M. Chevrette: M. Lajeunesse, les chefs de district et les
sous-chefs ne sont pas nommément dans la loi appelés "agents de
la paix", c'est ce que j'ai dit. Quand on apporte des correctifs à une
législation, c'est pour enlever toute ambiguïté et toute
contestation légale.
M. Lajeunesse: J'apprends cela. C'est nouveau. En tout cas, notre
peur en ce qui concerne l'article du député de Hull, qui est
mentionné dans le texte, c'est que des biologistes - non pas parce que
j'en veux aux biologistes; je travaille tous les jours avec eux - en viennent
dans quelques années à remplacer les chefs de district et les
sous-chefs et prennent l'ensemble du territoire du Québec, ainsi que les
agents de conservation sous leur autorité directe ou quasi directe par
la loi sur l'habitat faunique et selon les documents qu'on nous a remis
aujourd'hui. C'est notre point de vue.
Le Président (Bordeleau): M. le député de
Berthier.
M. Houde: Ma deuxième question. Pour vous, est-ce que le
projet d'habitat faunique constitue la solution au problème que vous
venez d'expliquer? Mon autre question va peut-être s'adresser plus
à l'autre du Lac-Saint-Jean. Est-ce que vous remettez en
cause toute la politique des ZEC, M. Lajeunesse?
M. Lajeunesse: Pour répondre au député de
Berthier, on ne remet pas en cause la politique des ZEC. Depuis cinq ans, on
est d'accord avec la politique des ZEC et on a pu avec l'accord de l'ancien
ministre - j'ose espérer qu'on aura la collaboration du nouveau ministre
pour continuer dans le même sens - travailler avec ses fonctionnaires
à rendre plus agréable la vie dans les ZEC. Rien n'est remis en
cause. Au sujet des habitats fauniques, j'ai mentionné que notre
organisme et nous-mêmes, à titre individuel, sommes d'accord avec
le principe de créer des habitats fauniques. C'est bien sûr qu'il
va être facile au début d'en créer dans certaines
régions particulières, mais il va falloir penser aussi, à
l'avenir, à en aménager où cela s'impose. C'est pour cela
que, faisant référence à notre exposé du
début, je dis: II faut avoir une loi pour conserver ce qu'il nous reste;
en même temps, faisons une loi pour des habitats fauniques, ceux qu'on
peut aménager actuellement. En même temps, il faut penser à
plus tard et aménager de nouveaux habitats fauniques où ce serait
possible pour donner une chance à une région comme la
nôtre, Joliette, Rawdon, Berthier, Saint-Côme, où il y a du
gibier qu'on peut protéger.
Quand je parle d'aménager un territoire, ce n'est pas dans le
sens des aménagements - n'en déplaise au ministère -que
j'ai vus à l'île d'Anticosti il y a deux ans. Arriver sur
l'île et faire des tranchées de mille pieds de long et vingt pieds
de large avec un D-7. On dit qu'on aménage à ce moment-là.
Il y a assez d'hommes en chômage... C'est une réflexion
personnelle. À titre de chasseur, j'y vais assez
régulièrement et j'ai été ébahi de voir
cela. J'ai dit: Qu'est-ce que vous faites là? Ils ont dit: On fait des
aires pour que les gens puissent chasser. C'est le chemin principal et, de
chaque côté, on rentre un bulldozer et, sur mille pieds de long,
on ouvre sur vingt pieds de large. Et là on "bull" cela d'un tas
à l'autre bout. Vous ne me ferez pas accroire qu'il n'y a pas assez de
monde sur l'île pour travailler, pour bûcher mille pieds de long et
vingt pieds de large avec des scies mécaniques, au lieu de
"démancher" tout le terrain comme vous le faites. C'est cela que j'ai
vu, il y a deux ans. J'ai hâte, samedi matin, quand je prendrai l'avion
pour la rivière MacDonald, de voir ce qu'ils ont fait depuis ce
temps-là.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va? M. le
député de Duplessis.
M. Perron: M. le Président, dans le mémoire qui est
présenté par les SACERF, je voudrais passer aux aéronefs
en faisant le commentaire suivant. Il y a environ un an -c'est lié
à la plainte qui est faite par la fédération - une plainte
a été faite au ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche indiquant qu'il y avait des avions, durant la chasse à
l'orignal et même la chasse au caribou, qui se promenaient sur le grand
lac Mannic et le petit lac Mannic au nord de Port-Cartier et de
Sept-Îles. On avait même enlevé les portes de ces fameux
avions pour tirer le gibier des airs. Je n'ai jamais eu de résultat
jusqu'à maintenant de cette plainte qui a été faite par
certains membres du club de chasse et pêche de Gagnon. Je présume
que, si cela ce passe là, cela doit sûrement se passer ailleurs au
Québec, en Abitibi-Témiscamingue, ainsi que plus loin au nord du
Québec.
Vous mentionnez que la loi devrait avoir des dents. Dans certaines
associations de chasse et pêche, dans certaines ZEC, on a
considéré la possibilité pour le ministère de
tripler, de quadrupler les amendes et même d'aller jusqu'à imposer
la prison dans certains cas précis. On sait qu'au moment où on se
parle il y a plusieurs saisies qui sont effectuées par les agents du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, ainsi que par la
Sûreté du Québec. Ces saisies font en sorte que le
ministère ramasse dans des entrepôts un paquet d'équipement
qui ne peut pas être libéré tant et aussi longtemps que le
juge n'a pas rendu son verdict. Spécialement dans ma région, il
manque même de place à l'intérieur des entrepôts pour
ce genre de saisies. Est-ce que vous seriez d'accord qu'on enlève les
saisies -saisies d'armes à feu, d'autos, de bateaux, de moteurs de
bateaux, etc - quitte à faire un chiffre approximatif de ce que c'est
comme équipement, mais à le laisser au chasseur ou au
pêcheur en question et ajouter leur valeur à l'amende globale?
Qu'on écrive: C'est tant pour telle ou telle infraction. Je vous pose la
question parce que cela court dans les associations actuellement.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lajeunesse.
M. Lajeunesse: II y a une partie de la question à laquelle
je vais me hasarder à répondre. Ce serait bien plus à un
avocat comme Me Lapointe de répondre. Je ne suis pas avocat, avec le peu
d'étude que j'ai faite dans ma vie. M. le député de
Duplessis, faire une chose semblable, je pense que cela compliquerait le
travail du législateur de déterminer chaque type d'infraction
dans la loi. Comment pourrais-je dire cela? Je ne voudrais pas m'aventurer trop
sur un terrain semblable compte tenu, comme je l'ai dit tantôt, que je ne
suis pas avocat. Je pense que ça entraînerait trop de
complications pour le législateur de préparer une loi dans
ce sens.
J'ai repassé rapidement, ce matin, les articles du document de
travail sur la loi et je crois que des articles relèvent de ça
dont les pénalités sont extrêmes. Si on s'en tient à
cette partie du document, il me semble, au départ, que je dois me
féliciter que les amendes soient fortes. Des sommes de 2000 $ à
3000 $ pour des gros cas de braconnage, on est parfaitement d'accord avec
ça et ça se fait ailleurs, dans d'autres États. Je suis
d'accord avec le ministre et j'espère que l'Opposition ne fera pas
d'opposition systématique là-dessus. On pourra peut-être
demander à l'Opposition de faire de l'opposition systématique si
on s'aperçoit, lorsque le projet de loi sera déposé en
première lecture, qu'il y a des choses qui ne sont pas conformes ou qui
nous semblent ne pas être conformes ou qui ne répondent pas aux
voeux des citoyens et de la commission aujourd'hui. Dans ce sens,
j'espère que la députation de l'Opposition ne fera pas
d'opposition.
Ce qui est écrit là - je l'ai lu rapidement ce midi,
à l'heure du déjeuner -me semble être assez bien
préparé quant à ce que vous venez de mentionner, M. le
député de Duplessis. Quant à l'autre partie, il est bien
sûr que, si on saisit un avion ou des biens, et qu'on les entrepose,
c'est tant mieux parce que ça va pénaliser ces gens. L'amende
pour ces gens qui sont bien nantis, qui ont normalement des fortunes, ce n'est
pas un problème de la payer. C'est parfois plus facile pour eux de payer
3000 $ d'amende que pour un citoyen ordinaire qui travaille à la
journée. Je le respecte, ce citoyen, de payer 100 $ d'amende pour une
infraction technique. À mon sens, il serait préférable de
laisser la saisie, même si ça peut compliquer l'entreposage, parce
que ça pénalise beaucoup plus la personne et, la prochaine fois,
elle va y penser deux fois avant de commettre une infraction.
Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, M. le
député? Maintenant, sur les portes d'aéronefs et autres
choses, je vais laisser mon ami Arthur vous répondre.
M. Perron: Si j'ai soulevé ça, c'est parce que, par
personne interposée, il arrive très souvent que des personnes qui
ont été condamnées, lorsque c'est vendu aux
enchères, par exemple, dans certains cas, reviennent et rachètent
l'équipement, de toute façon.
Le Président (M. Bordeleau): M. Lavoie, pouvez-vous
compléter la réponse?
M. Lavoie: Oui. M. le député de Duplessis, pour ce
qui est des saisies de matériel, je suis heureux de voir que vous avez
des hangars pleins et je serais également heureux qu'une souscription se
fasse pour en construire, de ces hangars, parce que vous allez en manquer. Sauf
que, quelle que soit la quantité de hangars que vous aurez, même
si vous avez tous les hangars à bauxite et d'aluminium du Canada,
ça ne réglera pas le problème du chasseur moyen qui se
fait rabattre son orignal, comme la photo que vous avez. Non seulement cela,
mais il y a le bruit à tout moment du jour, il se fait écoeurer
à la journée. Sur les douze jours où je suis allé
à la chasse cet automne, cela a été dix jours parce que,
les deux autres jours, il faisait un temps de canard. C'est tout simplement
ça.
Il y a eu une proposition de vous transférer dix
ministères, M. le ministre. Je sais que ce n'est pas possible, mais, au
bout du compte, l'année prochaine, que vont faire les chasseurs? Faire
venir la DCA du Liban? Il est là le problème. Le problème
va recommencer et la personne qui a pris ses vacances pour aller à la
chasse ne peut pas partir, faire 25 milles dans le bois, revenir en bas
chercher un agent et l'amener par la main et dire: Regarde, il est là.
Il n'a rien pour faire une preuve. Je suis déjà moi-même
allé à Roberval chercher un agent de la GRC. J'ai
découvert, après coup, après avoir passé une
journée avec lui, que l'avion qu'il allait prendre avec moi pour aller
voir si vraiment le monsieur rabattait, c'était un avion de la
même compagnie de laquelle l'autre monsieur avait loué aussi pour
aller rabattre. Faisant de la radio amateur depuis 10 ans, je sais très
bien ce qu'on fait avec une radio. Je sais très bien que l'autre dira:
Attention, je pars avec XYZ, salut. J'ai dit: Ne perdez pas votre temps, je
vais m'en retourner chez nous; merci, salut caporal de la GRC. Vous êtes
bien gentil. Il n'y a rien là. J'ai perdu ma chasse et c'est tout.
Alors, c'est comme cela partout et c'est la question que je vous pose,
M. le ministre, et je la pose au nom de tous les chasseurs qui sont
écoeurés à l'année par cela, pendant quinze jours,
à tel point que l'animal se fourre dans des bois sales et cela fausse
toutes les données du chasseur terrestre. On s'en va dans les petits
sapinages où les pauvres bêtes sont toutes traumatisées
pendant quinze jours; elles se demandent quelle sorte de guerre il y a. Tu le
lèves et il fait 50 pieds, il se tourne et il te prend pour un OVNI.
Cela n'a pas de bon sens! Vous avez beau rire, cela n'a pas de sens.
Écoutez, cela n'a pas de sens. Des points comme cela touchent la ZEC et
vous allez nous régler cela. Quand ils parlent de nous, ils pensent
à vous parce qu'ils savent qu'on est mandaté par vous autres.
Pour l'année prochaine, je n'ai pas de solution. Les gens diront:
Qu'est-ce que tu as fait? Je ne sais pas ce qu'on fera. Si vous me dites que
c'est le fédéral, cela ne règle pas le problème.
C'est pour cela que la présomption est drôlement importante.
Quand
tu vois un avion qui se promène pendant une heure à 50
pieds de la tête des arbres, il n'est pas censé compter les
champignons qu'il y a en bas, je ne le croirais pas. Il est censé faire
quelque chose, il me semble. Alors, il faudra faire quelque chose. (22 h
45)
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Mme la
députée de Chomedey.
Mme Bacon: Je n'aurai pas de question, M. le Président,
mais je voulais quand même assurer les membres de la
fédération des SACERF, qui sont ici, de notre
compréhension de leur problème.
Personnellement, j'essaierai, quand même, de sensibiliser
davantage peut-être les collègues, compte tenu du dossier que vous
nous avez préparé. Vous avez fait plusieurs fois mention du
document de travail; pour moi, en tout cas, c'est un projet préliminaire
du ministère. Vous savez qu'on en est peut-être au no 2; il peut y
avoir un no 3, un no 4, selon ce que le Conseil des ministres dira au nouveau
ministre. Alors, il faudrait peut-être attendre avant de dire que
l'Opposition s'opposera systématiquement. On attendra d'avoir la version
finale si vous le voulez bien, quitte peut-être à vous poser des
questions supplémentaires, à savoir si vous êtes d'accord
ou pas, pour voir où sera ou non notre opposition.
D'ici ce temps, j'aimerais quand même souligner - vous vous dites
des gestionnaires bénévoles, et je sais qu'il y a un travail
extraordinaire qui a été fait par les gens de votre groupe - que
nous ne sommes pas insensibles; au contraire, nous sommes très
conscients de ce travail. La députation du parti que je
représente fera en sorte de vous apporter autant que possible la
compréhension de vos problèmes, mais aussi l'appui moral et
l'acceptation de certaines des propositions que nous fera le ministre. Je ne
dis pas l'ensemble des propositions, mais la majorité des propositions,
si elles sont acceptables et pour nous et pour vous.
M. Lajeunesse: Merci, Mme la députée de... Je ne
connais pas tous les comtés. Je ne suis pas député. Alors,
c'est assez difficile pour moi de répondre comme à
l'Assemblée nationale. Alors, Mme Bacon, merci. Je pensais que vous
auriez offert à notre organisme un appui financier aussi. C'est une
blague en passant.
Pour terminer, si vous, les partis et le ministre, me le permettez,
l'exposé d'Arthur, j'aimerais, M. le ministre, si c'est possible, vous
poser une question et si, compte tenu de votre arrivée récente
dans le dossier, vous ne pouvez pas répondre, peut-être que les
hauts fonctionnaires pourront me répondre. Dans le comté de
Duplessis, au nord de Schefferville, Wabush, Gagnon, Ungava, tout ce coin, on
a, je crois, fait une loi dans le passé concernant les aéronefs.
Il était interdit de survoler en rond, tout un paquet d'affaires, pour
les caribous, parce qu'on sait très bien, si, on se reporte sept, huit
ans, dix ans en arrière, que c'était la vogue de survoler en
avion les caribous, avec des compagnies aériennes ou privées,
puis de rabattre les caribous vers les lacs. Là, on amerrissait et on
tirait dans le tas, vous excuserez l'expression. N'y a-t-il pas eu, depuis
quelques années, une loi ou un décret qui a été
sorti par le ministère interdisant cette forme de vol d'avions? C'est la
question, que je pose au ministre ou à ses hauts fonctionnaires.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: II existait un règlement, effectivement, qui
empêchait de poursuivre le gibier pour l'entraîner dans des
endroits spécifiques afin de le tirer. C'est un fait.
M. Lajeunesse: Est-ce que cela ne serait pas possible, M. le
ministre, de l'ajouter à l'orignal dans certaines grandes zones au
Québec ou s'il y a des complications concernant le
fédéral?
M. Chevrette: L'article 32 de la loi actuelle le prévoit.
On peut passer une réglementation en fonction du non-dérangement
du gibier.
M. Lajeunesse: L'article 32, M. le ministre, du projet
déposé?
M. Chevrette: De la loi actuelle.
M. Lajeunesse: De la loi actuelle, chapitre 61. D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va?
M. Lajeunesse: Cela va, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Vous avez une question, M. le
député de Hull?
M. Rocheleau: Non, on y a répondu et cela traitait de
l'opposition systématique: on n'a jamais fait cela.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup. Alors, je
remercie, d'abord, les gens de la Fédération
québécoise des SACERF de s'être présentés. Je
passerai immédiatement au nouveau groupe qui est la
Fédération du tir à l'arc du Québec Inc. M.
Aumais.
Fédération de tir à l'arc du
Québec
M. Aumais (Georges): Bonjour, M. le Président, M. le
ministre, messieurs les membres de la commission. Je tiens à
présenter M. Gilbert Saint-Laurent, de la Fédération du
tir à l'arc, à titre de directeur technique; à ma gauche,
c'est M. Richard Lecours, agent de développement; moi-même, je
suis le représentant du dossier pour le comité de chasse à
l'arc. On est mandatés par la Fédération de tir à
l'arc pour vous présenter l'actuel dossier. On représente 85
clubs, regroupant près de 3000 membres affiliés, en
règle.
M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, au nom des nemrods désireux d'augmenter la valeur
récréationnelle de la chasse, nous vous remercions du temps et de
l'attention que vous accordez à la présentation de ce
mémoire qui est le fruit de plus de deux ans de travail de
bénévoles voués à une cause pour laquelle ils n'ont
ménagé aucun effort malgré leurs moyens limités.
Les artisans du mémoire sont avant tout des chasseurs qui investissent
année après année des sommes de temps et d'argent
considérables dans la pratique de leur loisir. L'importance de leur
contribution à la société sur le plan de l'économie
et du tourisme est loin d'être négligeable. En échange, il
nous apparaît bien légitime de vouloir contribuer à la
réforme de la Loi sur la conservation de la faune en mettant notre
expérience du domaine cynégétique au service du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Conscients que le temps de l'audition que vous nous accordez est
limité, nous abordons donc immédiatement la présentation
de notre mémoire.
Introduction. De nos jours, la chasse est sans aucun doute un
élément important du patrimoine culturel et
récréationnel d'un nombre sans cesse croissant de
Québécois. À juste titre, le Québec, par son
accessibilité et ses vastes territoires giboyeux, est
considéré comme un paradis sur le plan cynégétique,
mais le système écologique est sensible aux prises de position et
aux lois qui régissent l'aménagement de la faune par les
autorités compétentes.
Dans notre province, cette responsabilité incombe au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et, à ce
jour, nous avons tout lieu de croire que les gens du MLCP ont bien accompli
leur besogne. En 1981, puis en 1982, le MLCP instaurait une saison de chasse
à l'orignal à l'arc dans la plupart des régions du
Québec et permettait une meilleure accessibilité pour la
récolte du chevreuil pour les chasseurs à l'arc. Il est
évident que cette mesure pouvait se justifier dans le but de rapatrier
un nombre croissant d'adeptes de cette discipline qui devaient s'exiler
outre-province pour pouvoir profiter au maximum de cette forme de chasse. Une
autre mesure justifiant cette prise de position est que le MLCP semble
désireux d'augmenter les possibilités
récréationnelles que peut offrir la chasse. Certaines
études non officielles estiment que le chasseur à l'arc consacre,
en forme de loisirs inhérents à la chasse à l'arc, quinze
fois plus de temps que le chasseur avec arme à feu.
Il demeure qu'à la suite de l'instauration de ces saisons de
chasse pour les chasseurs à l'arc par le MLCP plusieurs observations et
commentaires ont émergé de toute part, certains d'aspect positif,
d'autres d'aspect négatif. Il importe donc d'éviter toute
subjectivité.
Il est évident que toute décision à venir qui a
pour effet de favoriser soit la chasse avec arme à feu ou la chasse
à l'arc va susciter des commentaires selon la prise de position des
individus, ces derniers tenant pour acquis que les privilèges de chasse
au Québec sont des droits incommutables. Ces mêmes gens doivent
comprendre que l'avenir de la chasse comme on la connaît aujourd'hui peut
être mis en péril du fait que les pressions de chasse et le nombre
de chasseurs augmentent d'année en année et que la récolte
à l'intérieur d'un cheptel est limitée.
Déjà, plusieurs nemrods se plaignent de saisons trop courtes
surtout pour le gros gibier et de la densité élevée du
nombre de chasseurs dans les endroits accessibles à la masse,
hypothéquant, par le fait même, les chances de réussite des
chasseurs les plus sérieux, ainsi que leur sécurité.
Pratiquée dans un contexte favorable, la chasse à l'arc se
veut une alternative pour le chasseur qui veut profiter d'un séjour plus
long dans la nature. La portée efficace - j'insiste sur le mot efficace
- de l'arc et de l'arbalète étant de beaucoup limitée, le
chasseur consciencieux doit restreindre son aire d'opération,
connaître davantage l'animal convoité et pratiquer son tir s'il
veut conserver un pourcentage d'efficacité dans la récolte du
gibier, ce qui permet à un même territoire d'accepter davantage de
chasseurs et une saison plus longue sans pour autant mettre en danger la survie
du cheptel.
La Fédération de tir à l'arc du Québec, via
son comité de chasse, s'est fixé comme objectif d'oeuvrer pour la
promotion et la valorisation de la chasse à l'arc au Québec
à la demande de ses membres. Le personnel de ce comité de chasse
présidé par M. Hubert Leurs, est composé de onze personnes
toutes sélectionnées en fonction de leur expérience
pertinente comme administrateurs, chasseurs, moniteurs et archers. De plus, ces
gens ont prouvé par le passé qu'ils sont aptes à mener
à bien différents projets par une étroite collaboration et
une très grande disponibilité. Ils ont déjà mis sur
pied une ronde provinciale de tir de chasse dont la portée
prépondérante est axée sur la valeur
éducative de la chasse à l'arc, tout en servant sur les parcours
à la participation et à la compétition lors des tournois
de chasse.
Le présent dossier est une autre réalisation de ce
comité, qui a nécessité l'apport d'intervenants de
différentes sources, la consultation d'études, de documentation
et des réglementations existant dans d'autres provinces et États
en matière de chasse à l'arc et de chasse en
général. Les réformes suggérées sont
présentées dans le cadre du fascicule Chasse Québec qui
est le résumé officiel de la Loi sur la conservation de la faune
et de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs au
Québec.
Ces suggestions de réformes peuvent sembler exhaustives pour
certains, mais le comité de chasse de la Fédération de tir
à l'arc du Québec Inc., estime que leur adoption permettrait non
seulement d'éliminer la plupart des préjudices vis-à-vis
des chasseurs à l'arc et à l'arbalète, mais aussi
d'être le point de mire en Amérique du Nord en ce domaine.
Plusieurs points des réformes suggérées vont
assurément choquer, certains chasseurs à l'arc par leur
sévérité en matière de contrôle, mais la
crédibilité de ces derniers en dépend vis-à-vis des
autres chasseurs et de la population en général.
Les dates suggérées pour la chasse à l'arc et
à l'arbalète sont nécessaires pour promouvoir ce qui peut
devenir une industrie florissante pour le tourisme et l'économie. Les
propriétaires terriens, les fermiers et les municipalités sont
dans l'ensemble plus tolérants à accepter les chasseurs à
l'arc sur leur propriété à cause de la portée
limitée de cette arme. On peut même entrevoir la
possibilité d'un revenu d'appoint pour ces derniers en échange de
certains privilèges accordés aux chasseurs. Le nombre de
chasseurs à l'arc, a jusqu'à cette date, été
limité par le manque de possibilités offertes pour
intéresser la masse à cette forme de récréation.
Avec des changements appropriés, on peut évaluer en se basant sur
les statistiques existant chez nos voisins ontariens et américains que
le potentiel de chasseurs à l'arc est de 10% à 35% du nombre de
chasseurs existant dans la province.
En souhaitant un développement prompt et efficace de ce dossier,
la Fédération de tir à l'arc de la province, par
l'entremise de son comité de chasse, demeure à votre
entière disposition. (23 heures)
Chasse-Québec. On met entre parenthèses 1983-1984. Ce sont
des suggestions au gouvernement du Québec et au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche de règlements de chasse pour
l'année prochaine. On fait peut-être pression, mais je pense que
c'est drôlement important surtout pour ce qui concerne la chasse à
l'arc.
Au niveau des définitions, on rajoute celles de
l'arbalète, de l'arc, de l'arc tendu, de l'arme de chasse, du certificat
d'archer et de plusieurs outils qui se rattachent à la chasse à
l'arc et à la chasse en général.
Dans le document, si on regarde les articles 1.2, 1.3, 1.6, 1.8, 1.14 et
1.16, on voit que la popularité croissante de la chasse à l'arc
permet à un plus grand nombre de non-initiés d'y accéder.
Il devient alors important de bien définir les outils qui s'y
rattachent. Les articles 1.5 et 1.11 concernent la définition d'arme de
chasse. Cette définition permet d'englober la quasi-totalité des
engins de chasse généralement utilisés pour les fins de la
chasse et ajoute un contrôle vis-à-vis de l'utilisation pour les
armes autres que les armes à feu. L'article 1.12, le gros gibier. En
italique, on a inscrit l'ours comme gros gibier. En élevant l'ours au
rang du gros gibier, on élimine l'utilisation de chiens pour la chasse
de ce gibier. Ceci est trop souvent un prétexte pour chasser avec une
arme de fort calibre, accompagné d'un ou de chiens, dans un territoire
fréquenté par le chevreuil, l'orignal et le caribou. C'est une
situation qui existe présentement.
Nous en arrivons à l'article 2, permis, certificat de chasseur et
certificat d'archer. On ajoute, dans le présent règlement - et
c'est classé dans l'article 2.3 - que la chasse au petit gibier et
à d'autres espèces, effectuée au moyen d'un arc ou d'une
arbalète, est autorisée pour les personnes de moins de seize ans,
à la condition d'être accompagnées par une personne
âgée d'au moins vingt et un ans. Dans un mémoire, on a
parlé de la formation des jeunes à la chasse. Le certificat de
chasseur "armes à feu" n'étant pas accessible aux enfants de
moins de douze ans pour des raisons évidentes de sécurité,
il devient important d'offrir une alternative au parent ou au tuteur d'un
enfant de moins de douze ans qui désire initier ce dernier à la
chasse. C'est pour cela que nous l'avons ajouté.
L'article 2.6: "Pour obtenir l'un des permis des catégories 1
à 11, tableau 1, tout résident doit produire son certificat de
chasseur et/ou son certificat d'archer, selon le cas, et tout
non-résident doit produire un document du Québec, de sa province
ou de son pays établissant qu'il a été reconnu apte
à se servir d'armes à feu pour la chasse et/ou le certificat de
l'archer reconnu par la National Bow-Hunter Education Foundation Program et par
la Fédération de la chasse à l'arc." Cela a
été mis au point en fonction de l'établissement
obligatoire d'un cours de sécurité ayant trait à la chasse
à l'arc. Nos positions sont claires là-dessus. Nous voulons que
le cours soit obligatoire pour les chasseurs à l'arc, selon un
programme. Cela
reste à compléter, mais ce sera déjà un
départ.
L'article 2.7. On mentionne qu'un permis n'est pas valide: "s'il n'a pas
été validé en fonction de l'arme de chasse utilisée
pour le gros gibier". Si vous regardez, dans le tableau VI, à la page
35, on fait la présentation d'une nouvelle forme de permis pour l'an
prochain. Naturellement, c'est une suggestion. Le permis que l'on
présente - vous pouvez le voir dans le mémoire - a certains
avantages. Il permet l'utilisation de la même carte du certificat de
chasseur et de l'archer. On n'a qu'à y ajouter, à la suite des
numéros sur la carte, des codes. C'est-à-dire que, sur la petite
carte verte, on aurait simplement à ajouter des codes à la suite
du numéro. On pourrait utiliser la même carte tant pour l'archer
et pour le chasseur à la carabine.
Il permet aussi d'établir des statistiques bien définies
au sujet des chasseurs de gros gibier qui chassent exclusivement à
l'arc, ou à l'arbalète, ou encore exclusivement avec des armes
à feu, ou encore de celui qui veut profiter des deux formes de chasse.
Ainsi, on pourrait arriver à des statistiques bien précises. Il
permet d'éliminer le permis exclusif émis pour le chasseur
à l'arc ou à l'arbalète. Ce permis serait disponible chez
tous les dépositaires. Il offre une source de revenus
supplémentaires au MLCP provenant de ceux qui veulent se
prévaloir des deux formes de chasse. Il ne pénalise pas les
chasseurs exclusifs à l'arc ou aux armes à feu. Il élimine
certaines pressions de chasse du fait que certains hésiteront à
se prévaloir de la possibilité d'utiliser les deux formes de
chasse à cause du double déboursé à l'achat. Tout
est indiqué sur le même permis; donc, moins de paperasse.
Évidemment, le principal désavantage est celui du double
déboursé pour celui qui veut profiter de la chasse à l'arc
et de celle avec armes à feu pour le gros gibier, car son choix devra
être précisé lors de l'achat du permis, puisque,
après, il ne pourra pas le modifier.
À la page 42, je complète au sujet de ce permis que l'on
suggère. Chaque type de chasse confère des avantages qui lui sont
propres et le chasseur devra débourser une somme en fonction de ces
avantages et privilèges que lui accorde son permis. Avec l'instauration
du certificat d'archer obligatoire, l'ancienne forme du permis régulier
est désuète. De plus, il importe d'éviter certains
préjudices vis-à-vis de celui qui détient seulement un
certificat de chasseur ou un certificat d'archer. Le principal argument qui ira
à l'encontre de ce type de permis est que la personne qui voudra se
prévaloir de la chasse à l'arc ou à l'arbalète et
de celle avec armes à feu devra débourser le double à
l'achat dudit permis. Il est bien important que cet individu comprenne qu'il
débourse une somme en échange de droits et privilèges de
chasse et qu'il ne doit pas faire d'association avec la qualité de sa
chasse. S'il récolte un gros gibier, il doit s'estimer
privilégié que ce soit en saison à l'arc ou en saison avec
arme à feu. Cela comprend l'article 2.7.
Nous arrivons maintenant à la partie III: Saison, prises,
possession. On ne rajoute rien là-dedans au niveau des règlements
actuels.
À la partie IV, Interdictions, article 4.2, on fait un ajustement
en fonction de la chasse à l'arc. On dit: "II est interdit, dans ou sur
un véhicule ou un aéronef, d'avoir en sa possession, de
déposer ou de transporter une arme à feu chargée, ou un
arc tendu ou une arbalète tendue; dans ou sur un véhicule ou un
aéronef, d'avoir en sa possession ou de transporter une arme à
feu non chargée, ou un arc non tendu ou une arbalète non tendue
sauf si cette arme de chasse est insérée dans un étui
fermé ou déposée dans le coffre du véhicule; de
tirer un coup de feu ou une flèche d'un véhicule ou d'un
aéronef."
Il y en a qui pensent que cela a l'air bizarre de tirer une
flèche d'un véhicule... La loi, présentement, permet
à un chasseur de s'installer dans la boîte d'un "pick-up" et de
tirer une flèche. Il est prêt à tirer avec une
arbalète ou avec un arc. Ce n'est pas commode, direz-vous, mais c'est
faisable. Nous voulons apporter une précision là-dessus.
Au plan des interdictions, on ajoute, à l'article 4.5e: "II est
interdit de chasser un animal à la nage." C'est une chose qui va
à l'encontre de l'éthique du chasseur sportif. Au paragraphe c,
on dit: "II est interdit d'utiliser des moyens artificiels autre qu'une lunette
d'approche". À l'astérisque, on ajoute une définition des
moyens artificiels: "Désigne tout dispositif de détection de
chaleur ou de son, tous les télescopes ou lunettes d'approche
électroniques, ainsi que les mires lumineuses de sources
électriques, électroniques ou phosphorescentes."
Aujourd'hui, on le sait, il y en a qui mettent des mires avec une petite
pile de lampe de poche sur les arcs. C'est une incitation au braconnage et nous
voulons éliminer cela, à toutes fins pratiques.
Article 4.7: "II est interdit pour le chasseur à l'arc ou
à l'arbalète d'être en possession d'une arme à feu
lorsque ce chasseur à l'arc ou à l'arbalète chasse un gros
gibier pendant la saison du gros gibier avec arc et/ou arbalète
seulement."
Article 4.8: "II est interdit d'installer un perchoir ou tout dispositif
qui a pour effet d'endommager les arbres. L'installation d'un perchoir
permanent est autorisée seulement si l'on possède une permission
écrite du propriétaire terrien. Tout perchoir doit être
identifié de façon évidente avec le nom et l'adresse de
l'utilisateur." Je pense
que c'est bien clair. L'utilisation du perchoir est de plus en plus
fréquente. C'est une technique de chasse empruntée chez nos
voisins américains. Déjà, on a remarqué certains
abus de la part des chasseurs peu conscients de l'environnement et de la
propriété d'autrui. Il faut établir un contrôle
contre de tel fait. Il devient urgent de légiférer l'usage de ces
perchoirs pour revaloriser l'image du chasseur en général.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Aumais...
M. Aumais: Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que je pourrais vous
demander...
M. Aumais: ... d'accélérer?
Le Président (M. Bordeleau): d'accélérer? Au
rythme où l'on va, j'ai l'impression que ce sera passablement long.
D'après mon temps, ça fait déjà vingt minutes que
vous résumez votre mémoire.
M. Aumais: D'accord. C'est parce que nous, cela fait dix ans
seulement qu'on attend.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, je vous comprends
très bien.
M. Aumais: Je pensais que je pouvais prendre dix minutes.
Le Président (M. Bordeleau): Mais je ne voudrais pas que
d'autres attendent encore plus que vous. J'essaie d'être le plus
équitable possible.
M. Aumais: Oui, mais on n'a pas choisi notre tour, n'est-ce
pas?
Le Président (M. Bordeleau): Pardon?
M. Aumais: Avec tout le respect que je vous dois, M. le
Président, nous n'avons pas choisi notre tour.
Le Président (M. Bordeleau): Non. Moi, non plus, je n'ai
pas choisi votre tour. Cela s'est fait par d'autres.
M. Aumais: D'accord. Je vais essayer de me soumettre.
Le Président (M. Bordeleau): Comme je l'ai
mentionné au début, ce matin, pour tout le monde, si vous
étiez là, normalement on essaie de s'en tenir à vingt
minutes. Je vous dis simplement que cela fait vingt minutes.
M. Aumais: D'accord, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Mais si on constate que vous
avez...
M. Aumais: Je ne m'attarderai pas aux recommandations. Je vais
présenter cela d'une façon assez rapide.
M. Chevrette: Vous avez déjà perdu cinq minutes
à vous deux.
M. Aumais: C'est ça. Nous insistons sur le fait qu'il est
interdit "de passer ou de chasser sur un terrain privé sans la
permission écrite du propriétaire". C'est toujours inscrit dans
le code d'éthique du chasseur à l'arc. Nous demandons
d'éliminer, à l'année, le port du survêtement
orangé fluorescent pour le chasseur à l'arc et à
l'arbalète. Toutefois, on fait une mise en garde. Je ne la lirai pas, je
vous laisse le soin de la lire. Si cela est enlevé, ce sera inscrit dans
le règlement. D'accord?
Transport, enregistrement du gibier. On demande, pour le chasseur
à l'arc ou à l'arbalète à l'orignal, un coupon de
transport seulement. Au sujet des deux coupons de transport, il avait
été dit qu'à cause des pressions de chasse, enfin, pour
les éliminer, je pense, au plan de la récolte du chasseur
à l'arc, la récolte n'est pas suffisante pour qu'on soit
obligé d'émettre deux coupons de transport dans son cas. Le
chasseur qui chasse à l'arc doit être encouragé de
façon assez substantielle.
Au sujet des réserves fauniques, nous aimerions que le
ministère s'attarde sur la possibilité d'ouvrir des
périodes de chasse à l'arc dans les réserves fauniques. Je
pense que cela a été négligé dans le passé.
Dans le document, à la page 22, vous allez constater qu'il reste des
suggestions à faire étudier par des personnes plus
compétentes que nous.
Maintenant, nous arrivons aux tableaux. Cela va résumer, en gros,
ce que l'on demande. À la page 29, le permis de petit gibier, on l'offre
en un seul permis, soit celui avec arme à feu, ou à l'arc ou
à l'arbalète. Mais pour celui qui veut chasser le gros gibier, il
va falloir qu'il choisisse en fonction de l'arme de chasse utilisée, tel
que je l'ai expliqué précédemment dans le permis que l'on
propose.
À la page 30, saisons de chasse sportive, limites de prises et de
possession. À l'orignal, on demande un décalage entre les
chasseurs à la carabine et les chasseurs à l'arc, parce qu'il est
bien frustrant de voir que les chasseurs à la carabine "retontissent"
sur le terrain des chasseurs à l'arc, parfois une semaine d'avance.
Nous, nous sommes en train de chasser. S'il y avait une semaine d'intervalle
entre les deux, cela permettrait à chaque groupe de chasser
adéquatement et cela laisserait le temps à l'orignal de se
reposer des chasseurs à la carabine. Eux, ils seraient satisfaits et
nous, vu qu'ils
n'empiéteraient pas sur nos plates-bandes, nous serions
satisfaits aussi. Nous demandons deux jours de plus pour la chasse à
l'orignal.
Pour la chasse au chevreuil, afin d'éviter que le monde vienne
dépenser son argent outre-province et aussi pour permettre un
contrôle adéquat de la femelle et du faon, nous demandons que la
période de chasse soit du 15 octobre au 30 novembre. Comme je le disais
dans mon introduction, c'est pour favoriser la promotion de la chasse à
l'arc au Québec. Il n'y a jamais rien eu pour encourager le chasseur
à l'arc québécois. (23 h 15)
L'ours noir. On a parlé de l'élever au rang du gros
gibier. On ajoute aussi un autre alinéa, une deuxième note, pour
la saison été-automne pour l'ours noir. Cela va être un peu
en accord avec les gens des SACERF. "Il est interdit de chasser l'ours noir
pendant la saison de l'orignal, du caribou et du chevreuil, sauf si on a un
permis valide pour l'un ou l'autre des gibiers ci-décrits, dont la
saison a son cours dans lesdites zones de chasse." Cela veut dire que, si tu
n'as pas ton permis de chasse à l'orignal, tu ne peux pas chasser l'ours
pendant la saison de l'orignal. Cela te prend un permis valide. Cela se fait
ailleurs, ce n'est pas un précédent, mais ce serait
peut-être un précédent au Québec. Mais c'est une
mesure respectée ailleurs et on entend la soumettre pour qu'il y ait des
améliorations en ce sens parce qu'il y a des abus.
Les ZEC. Quelle sera la position des ZEC vis-à-vis des chasseurs
à l'arc pour la saison de l'orignal? Je ne le sais pas, mais je pense
qu'il y a un gros potentiel et qu'il y a tout lieu de s'attarder davantage,
parce que l'arc est une arme adéquate pour chasser l'orignal, à
des conditions bien spécifiques. Cela prend un encadrement et des cours.
Je pense qu'on est en mesure, avec le programme PESCOF et avec les suggestions
qu'on apporte, de corriger les situations.
Finalement, on parle des arcs et des arbalètes. Pour l'ours ou
l'orignal, on a des études qui peuvent appuyer ces chiffres. Pour l'arc,
on demande une pression de 25 kilos pour l'orignal et pour l'ours à 71
centimètres - c'est à la page 33 - pour le caribou et le
chevreuil, une pression de 20 kilos ou plus à une extension de 71
centimètres; pour le coyotte, le loup, le porc-épic, le renard et
le lynx roux, une pression de 15 kilos ou plus à une extension de 71
centimètres; pour l'arbalète, on demande une pression de 54 kilos
ou plus, avec une course de la corde de 30 centimètres ou plus.
J'insiste sur cela: Si la course de la corde n'a pas 30 centimètres,
elle n'a pas l'efficacité suffisante pour transmettre l'énergie
à la flèche; les lames n'ont pas d'efficacité. 45 kilos
pour le caribou et le chevreuil, et là, on est moins
sévère pour le coyotte, le loup, le porc-épic, le renard
et les autres gibiers. L'arc à poulies doit avoir une pression
réglée en fonction du gibier qu'on chasse. L'arc conventionnel.
On demande d'ajouter, pour celui qui n'a pas 71 centimètres de long, un
kilo pour chaque 3 centimètres d'allonge en moins. C'est un ajustement
pour l'arc conventionnel, c'est-à-dire l'arc long ou l'arc
recourbé.
Les flèches. On demande des flèches, que ce soit de
l'arbalète ou de l'arc, de 60 centimètres ou plus. On demande
l'identification, le nom et l'adresse des chasseurs sur leurs flèches.
Les pointes. On demande 22 millimètres, mais on ajoute une
précision: à deux lames ou plus, en acier, les tranchants lisses,
sans bardes et bien aiguisées.
Cela résume essentiellement notre mémoire. Quand je parle
de 22 millimètres à deux lames ou plus, en acier, les tranchants
lisses, sans bardes et bien aiguisées, c'est parce que je peux vous
présenter les pointes de 22 millimètres. Vous chassez l'orignal
avec cela. En voulez-vous d'autres? Techniquement parlant, cette pointe a 22
millimètres de diamètre. Est-ce une flèche pour l'orignal?
C'est pour cela qu'on précise. Chaque détail qu'on mentionne est
bien spécifique et c'est pour éviter tout compromis et toute
interprétation erronée au niveau de l'utilisation de ces engins.
Cela c'est une pointe pour le poisson, pour la pêche à l'arc et
cela aussi, pour ceux qui ne sont pas initiés. On en a plusieurs. Si
vous voulez qu'on vous les passe ou si vous voulez les regardez tantôt,
vous êtes libres de le faire. C'est seulement pour vous donner un exemple
du fait qu'il y a énormément de lacunes sur le plan de
l'interprétation. On a des programmes de faits pour préparer
éventuellement des cliniques pour les vendeurs d'arcs, parce qu'on a des
bons vendeurs d'arcs, mais des mauvais conseillers. Le rôle de la
fédération en est un d'éducation et on est en voie de la
faire avec des propositions semblables.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre.
M. Chevrette: Je voudrais demander à monsieur... Je ne me
souviens plus de son nom.
Le Président (M. Bordeleau): M. Aumais.
M. Chevrette: M. Aumais. J'ai comme l'impression, à la
lecture de votre mémoire -vous me répondrez très
candidement oui ou non - que vous avez pris la réglementation et que
vous avez essayé de l'adapter en fonction de votre
fédération ou de votre
groupement. Est-ce que je me trompe en affirmant cela?
M. Aumais: C'est pour mieux servir les intérêts du
chasseur à l'arc. C'est vrai.
M. Chevrette: D'accord. Bon.
M. Aumais: On a aussi relevé certaines lacunes au niveau
de la chasse en général.
M. Chevrette: D'accord. Je vais vous poser deux questions, dans
ce cas, sur l'orientation de la loi, parce que la majorité de vos
recommandations relève de la réglementation et non pas de la
législation. À cet égard, l'âge pour un
détenteur d'arme à feu est régi par le Code criminel; le
perchoir, par le Code civil. La très grande majorité de vos
suggestions et recommandations est de l'ordre de la réglementation et
non de la législation. Je vais quand même vous poser une question.
Vous avez entendu parler, puisque vous êtes ici depuis belle lurette, des
habitats fauniques. Est-ce que vous avez pu vous faire une idée du type
de protection qu'on doit y faire? Est-ce que vous jugez opportun qu'on ait un
zonage intégré au niveau des habitats fauniques? Est-ce qu'on se
doit d'avoir des pouvoirs dans l'immédiat pour protéger - parce
que la Fédération québécoise de la faune est venue
nous dire que cela prendrait immédiatement un amendement à la
législation - les habitats fauniques et certaines espèces
menacées, etc? Est-ce que vous pourriez nous faire vos commentaires
là-dessus?
M. Aumais: Si on parle des réserves fauniques, vous parlez
de celle de Papineau-Labelle?
M. Chevrette: Je ne parle pas nécessairement des
réserves que nous avons, de ce qu'on appelle nos réserves
fauniques qui sont constituées. Je devrais plutôt utiliser le mot
"habitat"; on a parlé toute la journée des habitats
fauniques.
M. Aumais: Oui, disons que...
M. Chevrette: Par exemple, des endroits humides...
M. Aumais: Oui, monsieur.
M. Chevrette: ... où on a de la sauvagine, des ravages de
chevreuil, etc.
M. Aumais: J'ai bien compris votre question. Dans la
présentation de notre mémoire, on a dit que plusieurs personnes
n'étaient pas des spécialistes dans le domaine. L'intervenant qui
m'a précédé l'a mentionné, il y a eu certains
balbutiements.
Nous venons ici à titre de spécialistes de l'utilisation
de l'arc pour des fins de chasse. On n'est pas qualifiés pour juger ces
choses que vous mentionnez; enfin, dans mon cas, je ne suis pas
qualifié.
M. Chevrette: Je suppose que vous voulez continuer à
chasser à l'arc le plus longtemps possible?
M. Aumais: Oui.
M. Chevrette: Pour ce faire, il faut conserver la faune le plus
possible.
M. Aumais: Exactement. Ce ne sont pas, comme je l'ai
mentionné dans mon introduction, les chasseurs à l'arc qui vont
vider les bois. Avec le taux d'efficacité de l'arc, le pourcentage de
récolte est si minime comparativement aux autres formes de chasse qu'on
peut accepter facilement d'avoir sept ou huit chasseurs à l'arc autour
d'un lac, sans pour autant avoir l'impression qu'on se marche sur les pieds.
Alors que si vous mettez un chasseur à la carabine sur un lac, n'allez
pas en mettre deux, parce que vous allez avoir deux balles dans l'orignal.
C'est cela que je veux dire. Dans ce sens, la chasse à l'arc, on
l'interprète comme une forme de conservation, parce qu'elle offre
beaucoup de loisir. C'est cela qu'on veut offrir aux gens: une forme de loisir.
On augmente la valeur récréative et de loisir de la chasse, parce
qu'on passe beaucoup de temps dans le bois sans pour autant faire de dommage au
cheptel.
M. Chevrette: Vous avez sans doute lu un article de journal,
à un moment donné, qui faisait état d'un quasi-scandale de
la chasse à l'arc, dernièrement?
M. Aumais: Oui, monsieur.
M. Chevrette: Je rendrai publique, si possible demain ou
après-demain, une lettre des compagnons en question confirmant que c'est
totalement faux, de sorte que cela pourra dégonfler certains ballons,
à savoir que la chasse à l'arc constitue pour la faune...
M. Aumais: Un moyen inefficace.
M. Chevrette: ... quelque chose de très négatif
comparativement aux armes à feu. On sait très bien que c'est faux
de par des statistiques; d'abord, parce que les chiffres, ça ne ment
pas. Je pense qu'il serait bon pour la commission qu'on ait cette contrepreuve
qui sera déposée. Je la déposerai moi-même ici. On
va l'avoir demain. Je ne l'ai malheureusement pas en ma possession
présentement.
M. Aumais: On apprécie beaucoup votre intérêt
à ce sujet. Disons que vous avez été tenu au courant de
tous les détails de ce dossier. Vous avez toutes les pièces en
main. Si vous continuez à regarder les différents intervenants et
chroniqueurs sportifs, il y en a d'autres qui ont pris position et il y en a
même un qui nous a donné l'occasion de répliquer. Le
monsieur en question a admis la publication de cette lettre. Il a
commencé à comprendre que son intérêt n'était
pas de nous démolir, mais plutôt de voir où étaient
les lacunes. Lui-même a admis que c'était une façon de
pousser les choses pour qu'il y ait une meilleure législation au niveau
de la chasse à l'arc. Présentement, à 40 livres, à
28 pouces, c'est urgent de légiférer là-dessus parce que
c'est inadéquat. Ce n'est pas précisé. Nous faisons la
mention d'une façon bien précise de ce que cela prend pour
éviter des façons détournées d'avoir de
l'équipement inapproprié.
M. Chevrette: Dernière question. Vous participez aux cours
qui sont donnés aux archers. Considérez-vous, parce que vous
faites la suggestion d'émettre un permis pour le chasseur à
l'arc, que ce cours doit être obligatoire pour l'émission du
permis éventuel?
M. Aumais: Dans les plus courts délais possible,
monsieur.
M. Chevrette: D'accord, merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. M. le ministre, je
voudrais vous poser une question avant de la poser aux intervenants qui sont
là-bas. Pourquoi voudriez-vous déposer le document sur le
scandale du tir à l'arc? À ce que je sache, ils ne l'ont pas
demandé, je pense.
M. Chevrette: C'est purement à titre d'information. C'est
parce que je sais...
M. Aumais: Je peux répondre, monsieur.
M. Chevrette: ... qu'un préjudice a été
causé. J'ai été mis au courant. Si vous ne le voulez pas,
je vais le garder. Pas de problème.
M. Houde: S'ils le veulent...
M. Chevrette: Je m'offre purement et simplement à le
faire. Vous m'avez demandé des documents ce matin, je vous en donne.
Vous n'êtes pas content que je vous en offre?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Aumais.
M. Aumais: Disons que, si les documents qu'on a fait parvenir au
ministre sont déposés, tous les membres, députés de
l'Opposition comme députés ministériels, vont avoir
l'occasion de prendre connaissance que l'histoire qui a été
contée a été biaisée. On a voulu éviter
toute confrontation pour éviter de blesser des personnes sur le plan
personnel, parce qu'on a tout de suite détecté que cette histoire
était montée de toutes pièces. C'était fait par des
archers non initiés, non préparés, avec des
équipements inadéquats. On a fait enquête là-dessus.
Le ministre a les documents pertinents à ce sujet. Celui qui est
responsable de la publication de cet article, vous pouvez communiquer avec lui.
Ce même monsieur, dans un article du 27 août de la Presse, à
titre de collaborateur spécial, il prenait déjà position
contre la chasse à l'arc à l'orignal et il a même
attaqué le programme PESCOF de tir à l'arc. Aujourd'hui, je pense
qu'il est en mesure, à défaut de se rétracter, de
s'ajuster.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord, merci.
M. Houde: M. Aumais, je voudrais d'abord vous féliciter en
tant que porte-parole de l'Opposition. Il y a beaucoup de travail de fait
à l'intérieur de ce mémoire. J'aimerais vous poser la
question suivante: Êtes-vous capable de me dire, en 1980-1981, 1981-1982,
combien avez-vous tué d'animaux sauvages à l'arc? Avez-vous des
chiffres?
M. Saint-Laurent (Gilbert): 96 orignaux ont été
abattus. Ce sont les relevés du MLCP. 96 orignaux ont été
abattus et 136 chevreuils.
M. Houde: Est-ce que cela a augmenté de l'année
passée à cette année?
M. Saint-Laurent: Cette année, on prétend que cela
va être un peu moindre.
M. Houde: La raison est qu'il y a un peu moins de gibier,
quoi?
M. Saint-Laurent: Peut-être une question de quantité
de gibiers aussi. Ce n'est certainement pas le nombre de chasseurs qui a
diminué. Certainement pas. C'est peut-être le contraire. Mais on
ne l'explique pas pour l'instant. On n'a pas les chiffres, d'ailleurs.
M. Houde: Je vous remercie. (23 h 30)
M. Chevrette: Est-il exact que c'est parce que, dans certaines
zones, on permettait la chasse à la carabine
simultanément d'une zone à une autre? On me dit que, dans
la zone F-1, par exemple -vous devez en avoir entendu parler - on permet le tir
à l'arc à des dates différentes de la zone H-1 et,
simultanément, on a une chasse à la carabine dans une zone qui
côtoie l'autre, alors que dans l'autre c'est à l'arc. Cela a une
incidence.
M. Saint-Laurent: Effectivement, iorsque dans deux zones qui se
côtoient on a une chasse à l'arme à feu et une chasse
à l'arme blanche, cela ne peut pas être bon pour la chasse
à l'arc, la chasse à l'arme blanche. Il y a des populations qui
présentent des demandes; des conseils de municipalité même
présentement font des pressions pour obtenir des périodes de
chasse exclusivement à l'arc et ce, dans le but, justement, de
protéger leur territoire et de protéger leur cheptel, leur
population.
M. Chevrette: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie M. Aumais,
ainsi que les autres personnes qui vous ont accompagné, de vous
être présentés devant la commission.
M. Aumais: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): J'appellerai donc la
Fédération canadienne de la nature. Il s'agit, je présume,
de M. Mead, ainsi que de M. Bédard. Je vous demanderai, tout simplement,
de vous présenter.
Fédération canadienne de la
nature
M. Mead (Harvey): M. Harvey Mead, ici, et M. Yves Bédard.
M. Bédard représente le Club des ornithologues, qui est un groupe
associé à la fédération au Québec. Je pense
qu'à cette heure je n'essaierai pas de lire le mémoire, MM. les
députés et M. le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous en saurai
gré.
M. Mead: J'ai mis la hache dans cela au cours de la
journée. Il y a une demi-heure, je l'ai brûlé. Le
mémoire va se résumer comme cela. De toute façon, il y a
juste quelques points qu'on voulait souligner et qui n'ont pas
été soulignés au cours de la journée.
Je pourrais commencer en disant que le fait d'introduire l'habitat
essentiel dans la Loi sur la conservation de la faune comporte un changement
majeur. Partant de là, on a décidé de vous encourager
à faire des changements encore plus importants. On veut mettre en cause
la notion d'habitat. On se réfère au rapport du groupe habitat et
aux déclarations ministérielles de l'ex-ministre Lessard; je
crois qu'elles ont été retenues en grande partie par le ministre
Chevrette ce matin.
Dans le rapport du groupe habitat, il y a des allusions à
quelques reprises à la Stratégie mondiale de la conservation. Je
crois qu'il est important de souligner que cet accent s'est perdu en cours de
route. La notion d'habitat dans les documents qu'on a pu consulter est
associée étroitement à la faune et surtout aux
vertébrés. Nous proposons, en nous basant sur la stratégie
mondiale, d'y substituer la notion d'écosystèmes ou de processus
écologique essentiel, qui est la notion retenue même par le groupe
de travail. Dans ce contexte, nous voulons porter une attention peut-être
pas égale aux plantes et aux animaux.
Nous croyons que le temps est venu -le temps est même passé
- d'introduire une telle loi dans le contexte québécois. C'est,
en fait, le but de notre mémoire de souligner cette suggestion.
J'aimerais résumer brièvement quelques éléments qui
vous permettent déjà d'agir. La nouvelle politique des parcs
délimite 44 régions naturelles dans la province. Nous croyons
qu'il y a déjà une possibilité inhérente à
la politique du ministère pour conserver une quarantaine d'habitats
qu'on voudrait appeler des écosystèmes. On voit bien que c'est
difficile et que cela prendra du temps, mais vous avez déjà
l'outil pour la protection d'un certain nombre d'écosystèmes.
Dans la Loi sur les réserves écologiques, le gouvernement a un
autre outil qui a été très peu utilisé, mais qui
est encore très valable quant à la conservation
d'écosystèmes.
Je reviendrai là-dessus parce qu'il y a une
ambiguïté. Nous la voyons en lisant les deux textes: celui de la
déclaration ministérielle et celui du rapport du groupe. Dans la
déclaration ministérielle, on fait presque exclusivement
référence aux espèces menacées. Dans le rapport du
groupe - nous sommes très intéressés par ce rapport - on
fait plutôt allusion à la faune en général, aux
vertébrés en général, peu importe qu'ils soient
menacés ou non. C'est un peu difficile. Quant aux espèces
menacées, j'y reviendrai. S'il s'agit de toutes les espèces
fauniques auxquelles nous ajoutons les espèces végétales,
la Loi sur les parcs et la Loi sur les réserves écologiques sont
déjà deux bons outils qui n'ont pas été très
bien utilisés jusqu'à maintenant. Il y a 23 sites au
Québec qui ont été recommandés pour faire partie du
programme biophysique international. Aucun de ces sites n'a été
retenu. Ce sont des sites sélectionnés par des experts et la
recherche est déjà faite. Nous croyons que ce serait un premier
pas d'inclure ces sites dans le réseau des territoires
protégés au Québec. Il y a donc 44 régions
naturelles pour la Loi sur les parcs et 23 sites pour les réserves
écologiques. Je passe les frayères, les haltes
migratoires et les ravages. Ce sont les outils qui existent
déjà.
Quant aux modifications à la Loi sur la conservation de la faune
que nous vous encourageons à faire - nous n'avons aucun commentaire sur
les aspects de la chasse et de la pêche; d'autres ont pris la peine de
vous donner des détails sur le sujet - je voudrais diviser mes
commentaires en deux parties. Premièrement - et cela m'étonne -la
loi que je crois être la plus importante comme point de départ
relativement à la protection des espèces menacées est une
loi américaine qui date de 1973. La Loi sur les espèces
menacées. Mais ce n'est pas mentionné dans le rapport. Je n'en ai
pas entendu parler lors des discussions entourant cette question.
C'est une loi, qui a été renouvelée en avril
dernier. En pleine crise, sous Reagan, du point de vue de l'environnement aux
États-Unis, cela a pu passer. Les recommandations des scientifiques
quant à l'utilité d'une diversité génétique
et de la protection de toutes les espèces ont prévalu sur des
arguments économiques qui, finalement, ne tenaient pas debout. Aucun
projet valable n'a été retardé ou arrêté,
depuis trois ans, par la Loi sur les espèces menacées aux
États-Unis. Cela, c'est sur un très grand territoire. Donc, ce
que je suggère, M. le ministre, si vous êtes
intéressé, c'est de vous remettre une copie de cette loi, pas
pour que vous la copiiez, mais quand même ça vous donnerait un
point de départ qui manque, je crois, dans la recherche du groupe
habitat. D'après nous, c'est la loi principale qui pourrait vous guider
pour une protection des espèces menacées au moins.
Quant aux espèces non menacées, je pense que le rapport du
groupe habitat -d'ailleurs, il y a une autre présentation, dont je n'ai
pas vu le texte en entier, mais dont j'ai quand même eu une esquisse - et
le mémoire du Conseil des réserves écologiques vont aussi
donner des détails qui, selon les rapports que j'ai eus, sont
très intéressants. Donc, pour les espèces non
menacées, il y a toutes sortes d'activités qui peuvent être
entreprises, des actes que le gouvernement peut poser sans que cela implique
l'acquisition de territoires. À ce propos, nous endossons le rapport du
groupe habitat. Il était soigné et très bien pensé.
Le défaut principal - et c'est un sérieux défaut - c'est
qu'il se limite aux vertébrés. Il devrait certainement inclure
toute la faune et on ne comprend pas pourquoi les vertébrés sont
les seuls animaux visés.
Nous croyons essentiel que les plantes soient aussi incluses. Comme seul
exemple à vous suggérer, l'ail des bois est en train de subir de
lourdes pertes dans la province depuis qu'il est mis sur le marché. Il y
a moyen d'empêcher cette sorte de commerce des espèces
indigènes.
Je pense que ce que nous vous proposons n'est pas une loi de la
conservation de la faune, mais une loi de la protection des espèces
indigènes, composée peut-être de deux chapitres ou d'une
dizaine, mais, de toute façon, de deux parties principales: une qui
porte sur les espèces menacées et une autre, sur les
espèces non menacées. En essayant de comprendre le
problème que voit le groupe de travail - je perds ma phrase - je crois
que sa préoccupation concerne les espèces qui ne sont pas
menacées, mais dont il est important de garder la population au niveau
actuel, comme les chevreuils, les orignaux. Vous vous occupez de ça
depuis très longtemps.
Le problème est, justement, la perte d'habitats pour ces animaux.
Nous n'avons pas de suggestions précises. Nous croyons que dans le
domaine de la faune le rapport est très bon. Dans le domaine des
plantes, vous avez des gens à qui vous pouvez faire appel pour des
conseils, mais nous croyons très important que vous vous penchiez sur
cette possibilité d'une loi des espèces indigènes.
En terminant, je pourrais peut-être soulever deux petits doutes.
Dans le cas du parc du Mont-Tremblant, il y avait un ravage de chevreuils dans
ce coin et, pour une raison qu'on ne comprend pas, le parc ne l'a pas compris,
vous ne l'avez pas utilisé. Dans le parc Saguenay, vous avez
certainement une des espèces les plus en danger, c'est le béluga.
Je n'ai pas pu assister aux audiences publiques concernant ce parc, mais le
plan du gouvernement exclut de la protection la baie Sainte-Marguerite et les
rivages du Saint-Laurent, à l'embouchure, qui sont des sites
d'alimentation pour le béluga. Ce sont deux cas où vous aviez la
chance de mettre en pratique vos préoccupations pour les habitats et
vous ne l'avez pas fait, sauf erreur.
Je pense que le béluga, dans le Saguenay, vous le mentionnez dans
le bouquin, mais le plan de parc tel que proposé n'offre pas une
protection pour l'animal. Je crois que l'heure est maintenant passée.
(23 h 45)
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup. M. le
ministre, avez-vous des commentaires ou des questions?
M. Chevrette: Je me rends compte que vous allez exactement dans
le même sens que la Société linnéenne ce matin. Je
ne prolongerai pas mes commentaires, sauf que je voudrais vous poser une couple
de questions. Quand vous faites allusion au Mont-Tremblant, vous parlez de son
redécoupage qui a exclu, je suppose...
M. Mead: Selon les rapports que j'ai
entendus, même le ravage a été détruit, mais
peut-être que vos conseillers peuvent...
M. Chevrette: Mais en vertu du nouveau découpage, je
suppose?
M. Mead: Oui, oui. En fait, c'était un des points du
litige.
M. Chevrette: Quand il y a eu un amendement et qu'il y a eu un
arbitrage entre, je suppose, le ministère de l'Énergie et des
Ressources et le MLCP, on a dû pour des fins économiques
concéder les "cunits" de bois nécessaires à l'alimentation
des scieries, etc. C'est vrai dans les circonstances qu'il y a sans doute eu
une portion assez vaste du parc du Mont-Tremblant qui a été
cédée au ministère de l'Énergie et des Ressources
et qui a effectivement été amputée au parc du
Mont-Tremblant. Je vous confirme que c'est vrai parce que je connais le coin et
je sais qu'il y a eu, par la suite, une coupe de bois, à l'endroit
même dont vous parlez. Pour les autres, ce n'est pas définitif,
nous sommes à en désigner le pourtour. Ce serait peut-être
prématuré de dire que cela ne sera pas inclus parce qu'on est en
train justement de faire une étude finale pour en désigner les
limites en ce qui regarde le fjord du Saguenay.
M. Mead: Bravo!
M. Chevrette: Dans votre mémoire, vous semblez avancer
qu'on vise l'ébauche d'une politique de conservation écologique.
Je vous ferai remarquer que la Loi sur les parcs et la Loi sur les
réserves écologiques nous permettent la protection des
écosystèmes particuliers. C'est vrai que l'accent a
été mis, bien sûr, sur la conservation des
vertébrés, mais il n'y a rien d'impossible, rien qui nous
empêche d'étendre davantage.
M. Mead: C'est pour cela que je vous encourage à faire une
nouvelle loi pour la protection des espèces indigènes,
sûrement.
M. Chevrette: Les espèces menacées par exemple,
pourraient être incluses.
M. Mead: Oui. D'ailleurs, le groupe habitat part des
espèces pour définir l'habitat. L'habitat est essentiel pour la
survie de l'espèce. Alors, je pense que la loi américaine est, il
me semble, une bonne façon de se conduire dans ce domaine, justement,
à partir des espèces en cause et en cherchant un moyen pour les
conserver. Ce n'est pas toujours seulement un habitat qu'il faut conserver. Il
faut peut-être arrêter le commerce, etc.
M. Chevrette: D'accord.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Lorsque vous parlez de
23 sites, quelle est la superfice de ces sites, monsieur, s'il vous
plaît?
M. Mead: Excusez-moi.
M. Houde: Quand vous parlez de 23 sites, quelle est la superficie
de ces sites?
M. Mead: Ce sont des sites assez restreints. C'est dans l'optique
de l'actuelle réserve écologique. En fait, cela varie, mais ce
sont presque tous des sites restreints.
M. Chevrette: Est-ce que vous parlez des 23 sites des
réserves écologiques du ministère de l'Environnement?
M. Mead: Non, non. Il y en a juste cinq, je crois. Le
ministère de l'Environnement gère actuellement cinq
réserves.
M. Chevrette: II y en a eu 23 de choisies et il y en a 5...
M. Mead: Non, il y en a 23 qui sont proposées par l'UICN,
l'Union internationale pour la conservation de la nature. D'accord?
M. Chevrette: Oui. Il y en a cinq de retenues, vous dites?
M. Mead: Ces cinq n'ont rien à voir avec les 23 sites.
Aucun des 23 sites n'a été retenu.
M. Chevrette: Aucun?
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Berthier, vous pouvez continuer.
M. Houde: La deuxième question: D'après vous,
est-ce que le ministre possède suffisamment d'outils actuellement et
est-ce qu'il pourrait se passer de grandes réformes coûteuses et
bureaucratiques?
M. Mead: S'il possède assez d'outils? M. Houde:
Oui, à l'heure actuelle. M. Mead: Non.
M. Houde: Comme la loi sur les réserves fauniques.
M. Mead: Mais la réserve faunique, finalement, est
très compliquée à voir. C'est difficile de voir cela comme
un outil vraiment efficace pour la conservation des espèces et cela ne
concerne pas les espèces
menacées. S'il y a une loi qui concerne les espèces
menacées au Québec, c'est la Loi sur les réserves
écologiques et c'est très restreint.
M. Houde: Est-ce que quelques amendements suffiraient?
M. Mead: Je ne le pense pas. M. Houde: Non.
M. Mead: II y a deux lignes dans toute la loi qui porte sur
l'habitat. C'est pour cela que j'ai commencé en disant que le processus
que vous déclenchez, c'est un processus majeur, il porte sur un
changement majeur à la législation québécoise, mais
c'est essentiel de le faire. Non, je ne pense pas que des changements mineurs
peuvent faire quoi que ce soit dans ce domaine.
Le Président (M. Bordeleau): Oui. M. le ministre.
M. Chevrette: En d'autres termes, vous dites, qu'il faut
absolument un zonage intégré.
M. Mead: Dans ces mots, aujourd'hui, je ne comprends pas ce que
cela veut dire exactement.
M. Chevrette: Je vais y aller d'une autre manière parce
que, nous autres, déjà, dans notre jargon, on mêle les
gens. En d'autres termes, il faut se donner les pouvoirs nécessaires
d'intervention pour sauvegarder les habitats à leur état naturel,
si je me fie à tout ce que vous avez dit, non seulement les habitats en
termes de faune, mais aussi en termes de flore.
M. Mead: C'est cela.
M. Chevrette: Cela va jusque-là, dans votre cas.
M. Mead: Ce n'est pas nécessairement de l'acquisition de
territoire. Le groupe habitat, justement, propose toutes sortes de moyens
autres.
M. Chevrette: Exact. Cela peut être une
réglementation, mais pas nécessairement de l'expropriation, comme
il y en a qui le pensent.
M. Mead: C'est cela.
M. Chevrette: II y en a qui tout de suite voyaient des millions
d'expropriations parce qu'on s'apprêtait à réglementer sur
les habitats. Absolument pas.
M. Mead: Nous vous encourageons quand même pour les 39 ou
40 régions qui restent pour la politique des parcs. Cela se trouve quand
même des régions éloignées. Nous vous encourageons
vraiment. Ce sont des parcs de conservation qui devraient s'implanter là
et, si on pense conservation, c'est un des moyens de protéger les
espèces. Alors, c'est certain que nous vous encourageons quand
même à mettre en branle d'autres parcs. Les premiers
étaient difficiles et on comprend cela. On félicite, d'ailleurs,
le ministère de ce travail.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Berthier.
M. Houde: Monsieur, est-ce qu'un groupe comme le vôtre
aimerait savoir les implications financières d'un projet gouvernemental
comme celui-là?
M. Mead: Certainement, j'aimerais le savoir. Mais comme simple
exemple, quand même; dans le cas de Kamouraska, tout le marais aurait pu
être acheté pour 600 000 $ et on vise rarement des territoires
aussi difficiles à acquérir. Normalement, le territoire est
déjà dans le domaine public. La politique des parcs met cela
comme un des critères, une des priorités. Premièrement, si
on a le choix, on prend le domaine public plutôt que privé. C'est
tout à fait normal. On ne suggère pas de mettre des dizaines de
millions de dollars dans l'acquisition de territoire. Vous avez le domaine
public, mais gérez-le pour la conservation.
Je pourrais dire ceci en réponse à M. Mailloux qui n'est
pas avec nous: Justement, toute cette législation essaie d'éviter
qu'on soit obligé de réimplanter, à coups de millions, des
espèces ou des populations d'espèces qui seront
éliminées à court ou long terme par des actes...
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. Houde: M.
le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Berthier.
M. Houde: ... est-ce que vous avez fait faire des études
là-dessus pour voir quel serait le coût?
M. Chevrette: Toute la prévision qui est faite, c'est en
fonction du fonds mixte, qu'on prévoit déjà dans le
document de travail qu'on vous a remis. Est-ce que je peux présumer,
déjà, du coût d'acquisition? Ou est-ce que, après
les auditions, je ne me tournerai pas plutôt vers une
réglementation pure et simple qui me permettra, de conserver les
habitats à leur état naturel, sans avoir à mettre des
millions et des millions? S'il me pose la question, c'est qu'il
désirerait me tendre un petit piège à cette
heure, vous savez, et que je lui dise naïvement: Cela va être
10 000 000 $ que j'ai prévus. Ce n'est pas vrai, je ne donnerai pas de
chiffre parce que, dépendant de ce qui se dégagera comme
consensus durant les auditions, il se peut que j'opte en particulier pour une
réglementation très serrée et qu'on s'entende beaucoup
plus sur une réglementation. On verra. On dit qu'on n'est pas
figé dans le béton. Pourquoi lancer des chiffres qui pourraient
faire rigoler l'Opposition?
M. Houde: M. le ministre, peut-être que vous pourriez
déposer un document sur des études que vous avez faites à
ce jour.
M. Chevrette: Déposer des études sur des
chiffres?
M. Houde: Non, écoutez, comme vous avez été
prêt à en déposer et à en demander, tout à
l'heure, peut-être que vous pourriez déposer des études qui
sont faites à ce jour. On aimerait les voir. Celui-là n'est
peut-être pas à jour, mais en tout cas. Pas question de
déposer des documents?
M. Chevrette: Voyons! Vous me demandez d'annoncer d'avance
quelles seront les décisions définitives du gouvernement. Vous
avez demandé un document, on vous l'a remis. Si vous en voulez d'autres,
on regardera et on vous les donnera. Je crois que pour le groupe habitat, on
vous a remis le document. Ne l'avez-vous pas eu?
M. Houde: Cela ne prend pas de consensus lorsqu'il y a
déjà un document de déposé ici.
M. Chevrette: Non. Vous savez que c'est un document de travail.
Même si vous me torturiez jusqu'à 2 heures, je vais rester avec
vous autres et je vais vous amuser. Je vais vous répondre que c'est un
document. Vous l'avez posée en Chambre cet après-midi; vous
l'avez posée à douze reprises ici et, demain matin, lorsque vous
allez continuer à me le demander, je vais vous dire que c'est un
document de travail, que je ne suis pas gelé dans le béton et que
des orientations seront prises à la suite des auditions que l'on fait
présentement. Je pense que, les témoins l'ayant compris, on
pourrait peut-être ajourner.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Mead.
Avez-vous un commentaire, M. Bédard?
M. Bédard (Yves): J'aimerais ajouter un petit mot à
propos du financement. Il y a une proposition pour ce qui est du financement de
ces projets. Il y a un fonds spécial qui serait réservé
pour l'acquisition et le maintien de certains écosystèmes. Il y a
la proposition, entre autres, d'avoir un timbre, une taxe spéciale sur
le permis de chasse pour ce qui est des chasseurs. Cela existe partout aux
États-Unis. Je crois que c'est une bonne façon de
récupérer de l'argent parce qu'on sait que le timbre sert
seulement à la faune: ça ne servira pas à payer des
fonctionnaires. Quand c'est un montant qui est à part sur leur permis,
c'est déjà bien vu. Aussi, il existe à certains endroits
des taxes spéciales sur le matériel d'observation, les guides
d'oiseaux, etc. Ces gens utilisent la faune comme les chasseurs et, de toute
façon, je suis certain qu'ils seraient prêts à faire leur
effort et à gonfler ce montant pour avoir un fonds de roulement.
M. Chevrette: Alors, on a déjà l'exemple de groupes
qui ont investi. Je pense que Canards Illimités a investi 500 000 000 $,
excusez-moi 9 000 000 $; je me trompe toujours avec une autre chose. C'est 9
000 000 $ sur cinq ans? Donc, il y a déjà des groupes
intéressés à investir, c'est un fait. Ce fonds mixte sera
constitué de différentes manières. Il y en a qui nous
proposent une taxe spéciale sur le permis qu'on émet, mais il y a
mille et une autres façons, comme vous le dites, d'aller chercher les
fonds nécessaires. Cela dépendra toujours également du
type de réglementation qu'on vise, c'est clair.
M. Bédard (Yves): Le fait que c'est dans un fonds
indépendant, c'est beaucoup mieux perçu, il me semble, que
lorsque cela s'en va dans les bourses du Conseil du trésor où
l'argent se perd et qu'on ne voit pas ce qui se passe et à quoi cela
sert.
M. Chevrette: Un retour direct. M. Mead: Une
dernière remarque.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Mead.
M. Mead: La Fédération canadienne de la nature
n'est pas la Fédération canadienne de la faune. Il y a eu un peu
de confusion, apparemment, aujourd'hui. Les deux groupes sont en contact. Nous
publions "Nature Canada" et c'est ainsi que nous sommes connus. D'ailleurs,
nous travaillons avec les groupes québécois pour essayer de
lancer une revue de langue française au Québec qui porte sur les
mêmes sujets. Nous ne sommes pas la Fédération canadienne
de la faune.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, M. Mead. M.
le député de Hull.
M. Rocheleau: M. le Président, j'aimerais simplement
apporter une correction
au ministre; il semble être un peu fatigué. On nous a
remis, ce matin, l'avant-projet de loi préparé par l'ex-ministre
M. Lessard. On a un certain cadre juridique à l'intérieur de
cela, mais il y a sûrement des hypothèses, parce qu'on demande une
réforme en profondeur. Après avoir entendu tous ces
mémoires, aujourd'hui, je pense qu'il y a des suggestions qui sont
très intéressantes, mais qui vont demander des recherches, des
implications financières importantes. Je pense qu'il est important de
demander au ministre s'il y a des prévisions budgétaires tenant
compte d'études qui devront être faites tant pour l'habitat que
pour la protection générale de la faune. Le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche a-t-il fait des prévisions ou
a-t-il une collaboration quelconque d'experts-conseils dans le domaine?
Le ministre pourrait, en nous quittant ce soir - il a été
relativement sage toute la journée - utiliser les dernières
minutes pour nous tenir au courant, tenant compte que votre avant-projet de
loi, plusieurs l'avaient eu avant nous. On l'a eu seulement ce matin. Alors,
s'il y avait un cadre financier d'attaché éventuellement à
cela, on aimerait pouvoir en prendre connaissance, s'il y avait
possibilité.
Le Président (M. Bordeleau): Voulez-vous répondre,
M. le ministre?
M. Chevrette: Oui. (Minuit)
M. Rocheleau: Dans le respect d'une Opposition réaliste et
logique avec elle-même.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: Vous avez reçu ce matin un document de
travail que vous avez demandé et vous avez reçu avant cela, je
crois, le document de travail du groupe habitat. L'essentiel de toutes les
suggestions est dans ces deux documents, qui ne sont pas un avant-projet de
loi, comme vous le prétendez. Ce n'est qu'un document de travail interne
qu'on vous a remis, avec la gracieuseté du ministre. Très
gracieusement on le soumet à votre attention. J'espère que vous
allez le lire parce que vous avez la mauvaise version. Vous avez la version de
mars. Vous êtes un peu en retard dans vos nouvelles.
M. Rocheleau: On ne sait plus combien il y a de versions.
M. Chevrette: Ce qui prouve qu'on a le droit de
réfléchir, qu'on a le droit de changer d'idée et qu'on va
changer encore d'idée à mesure que les gens vont nous donner des
idées. Je peux vous répéter qu'il y a différentes
façons de s'assurer une saine protection et je pense que les suggestions
qui nous seront faites nous permettront d'apporter des réponses beaucoup
plus précises, beaucoup plus justes, à la lumière des
consensus qui se dégageront. Je vous conseille de continuer à me
poser des questions sur l'avant-projet. Cela me forme le caractère. Je
vais devenir un homme très patient devant vous.
Le Président (M. Bordeleau): Je remercie MM. Mead et
Bédard d'avoir été si patients. La commission ajourne ses
travaux à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 0 h 02)