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(Dix heures dix minutes)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente du loisir, de la chasse et de la pêche
reprend donc ses travaux pour remplir son mandat qui est aux fins d'entendre
les personnes et les organismes en regard des modifications à apporter
à la Loi sur la conservation de la faune.
Les membres de notre commission pour aujourd'hui sont: MM. Chevrette
(Joliette), Gauthier (Roberval), Lafrenière (Ungava), Laplante
(Bourassa), Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Paré
(Shefford), Perron (Duplessis), Mme Bacon (Chomedey), MM. Dauphin (Marquette),
Houde (Berthier), Vaillancourt (Orford).
Les intervenants sont: M. Desbiens (Dubuc), Mme Juneau (Johnson), MM.
Lachance (Bellechasse), Léger (Lafontaine), LeMay (Gaspé), Assad
(Papineau), Maciocia (Viger), Pagé (Portneuf), Rocheleau (Hull),
Bisaillon (Sainte-Marie).
Comme nous avons un horaire très rempli, je vous donne d'abord la
liste des intervenants pour que tous puissent savoir un petit peu dans quel
ordre ils vont passer.
Je le donne dans l'ordre avec les changements reçus ce matin. En
premier lieu, l'Association des biologistes du Québec - une inversion
à partir d'une entente entre les parties et les intervenants
concernés - en deuxième lieu, le Conseil
Attikamègue-Montagnais; en troisième lieu, le Regroupement des
organismes nationaux de loisir du Québec; ensuite, un groupe de neuf
nations indiennes du Québec; le Conseil de bande réserve indienne
(nation huronne); l'Alliance laurentienne des Métis et Indiens sans
statut Inc.; la Société Makivik; le Grand conseil des Cris du
Québec, et, finalement, la Nation des Naskapis.
Avant de commencer, M. le ministre, avant de vous donner la parole,
à partir de l'expérience d'hier, je voudrais prévenir tout
le monde que j'ai l'intention aujourd'hui d'être beaucoup plus rigide et
beaucoup plus directif sur la limitation du temps. Je pense que c'est pour
rendre justice à tout le monde, pour ne faire attendre personne. Vu
qu'on a neuf organismes à entendre, j'ai l'intention de les entendre
tous. Cela va prendre une certaine rigueur et je vous avertis dès
maintenant que la règle de l'heure jouera, c'est-à-dire une heure
par mémoire, de sorte qu'après vingt minutes, j'interromprai les
intervenants s'ils n'ont pas terminé leur mémoire et on devra
procéder aux questions pour terminer l'heure, soit quarante minutes de
questions, à tour de rôle. La démocratie veut que l'on
tente de rendre justice à tout le monde au maximum.
Je demanderais à ceux qui prévoient déjà, au
cours de la journée, avoir de trop gros mémoires de tenter au
préalable de les simplifier, de faire en sorte, en tout cas, qu'ils
puissent entrer dans les vingt minutes, soit en coupant des pièces, soit
en me disant, au micro, ce qui sera le plus important pour le journal des
Débats. Pour le reste, je pense que ce qui est important est que les
membres de la commission puissent poser des questions pour éclaircir
certains points. Dans ce sens, il faut laisser plus de temps aux questions et
réponses qu'à la lecture des mémoires. Car je
présume que les mémoires ont été déjà
lus par les membres de la commission.
Avant d'entendre le premier groupe, M. le ministre.
M. Chevrette: Je voudrais simplement répondre à la
question de Mme la député de Chomedey, qui me demandait hier si
le document de travail qui lui a été remis hier matin
était passé par le comité des priorités. La
réponse est non.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Est-ce que vous me permettez une question très
rapidement, M. le Président? Est-ce que ce document ou un mémoire
concernant ce document avait été présenté au
Conseil des ministres?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Je ne saurais vraiment pas vous dire.
Mme Bacon: Le ministre peut demander à son sous-ministre
qui est derrière lui, s'il vous plaît!
M. Chevrette: Je peux vous dire qu'il y a eu des discussions sur
le plan interministériel, à des comités. Vous m'avez
demandé précisément si cela était
allé au comité des priorités, c'est non. Je sais que les
gens, après discussion en comité interministériel, avaient
décidé de ne pas en faire un projet de loi, mais plutôt
d'opter -et cela fut la recommandation au Conseil des ministres - pour entendre
les gens avant de préparer quoi que ce soit.
Mme Bacon: Donc, cela a été présenté
au Conseil des ministres, cela a été discuté au Conseil
des ministres.
M. Chevrette: Le Conseil des ministres a donné le mandat
au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche d'aller en commission
parlementaire.
Mme Bacon: Est-ce qu'il y a longtemps?
M. Chevrette: Je pourrais vous sortir la date; vers le mois
d'août, me dit-on.
Mme Bacon: Et c'est après cela qu'on a
décidé d'aller en consultation auprès des groupes
concernés?
M. Chevrette: Cela avait été annoncé
dès le mois de juin qu'on allait en consultation là-dessus.
Mme Bacon: Au moment où existait le projet de loi.
M. Chevrette: C'était à un comité
ministériel avant. On avait suggéré d'aller en commission
parlementaire. Les dates de commission n'ont été
confirmées qu'au mois d'août. Quand je suis arrivé, je n'ai
fait que reporter les dates de commission parlementaire, si vous vous
rappelez.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelle donc dès
maintenant l'Association des biologistes du Québec. J'imagine que ce
sera le président, M. Gérard Massé. M. Massé, si
vous voulez bien vous présenter ainsi que les gens qui vous accompagnent
et commencer le résumé ou la lecture de votre mémoire.
Association des biologistes du Québec
M. Massé (Gérard): Merci. Je vous présente
les membres de l'association qui m'accompagnent. A ma droite, M. Jacques
Prescott, qui est responsable de notre comité sur les espèces
menacées au Québec; à gauche, Mme Claudette Journeau,
vice-présidente de l'Association des biologistes du Québec.
M. le Président, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, madame et messieurs de la commission parlementaire.
Je vais sauter les premières pages de notre mémoire pour
aller directement aux commentaires de l'Association des biologistes du
Québec.
L'Association des biologistes du Québec tient à
féliciter le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ainsi
que le groupe de travail pour la protection des habitats pour avoir
réalisé l'important document intitulé: La protection des
habitats fauniques au Québec. Avec ce rapport, nour croyons que le
ministre a maintenant en main un outil que ses prédécesseurs
n'avaient pas. De fait, ce rapport identifie bien les exigences de la faune et
laisse clairement ressortir que, sans des habitats de qualité, cette
faune ne saurait se perpétuer. De plus, on identifie les
activités d'altération d'habitats, leurs répercussions sur
la faune et, finalement, on y fait un bon inventaire des moyens que le
gouvernement peut prendre pour les conserver. On y suggère même
des moyens qui permettraient de trouver l'argent pour ce faire.
Avant d'aller un peu plus loin, j'aimerais ouvrir une parenthèse
et identifier certains moyens afin de trouver l'argent. D'abord, dans le
document du groupe, il y a un chapitre spécial sur la question:
où trouver l'argent? On est d'accord que les utilisateurs, les
chasseurs, les pêcheurs et les trappeurs en paient une partie et que
l'État en paie l'autre au nom des autres utilisateurs, peut-être
un peu moins évidents ceux-là, comme les observateurs qui sont
très nombreux, d'autant plus que, tel que mentionné dans le
document, 2 000 000 $ seulement suffiraient annuellement à
protéger les habitats, alors que les recettes fiscales provenant de la
pratique des activités reliées à l'utilisation de la faune
ont été, en 1980, pour le gouvernement provincial, de 58 000 000
$ et, pour le gouvernement fédéral, de 40 000 000 $, ce qui fait
un total de 98 000 000 $.
Si on ne parle pas des sommes perçues par le
fédéral, on peut quand même dire que la province en retire
58 000 000 $ et, par rapport aux 2 000 000 $ qu'il suffirait d'investir dans la
protection des habitats, je pense que c'est très rentable.
Un autre moyen qui est d'ailleurs suggéré par le groupe,
c'est qu'une partie du montant des permis aille à la protection des
habitats fauniques. Je pense que l'idée est déjà
acceptée d'avance. Vous vous souviendrez probablement de tous les
tollés de protestation qui ont émané des
utilisateurs-pêcheurs lorsque le permis de pêche a
été aboli au Québec. Ces gens savaient bien que la
totalité de leurs 3 $, le montant du permis à l'époque,
allait dans les coffres de la province, mais ils s'imaginaient que, si la
province en avait un peu plus, il y aurait des retombées pour la
faune.
Alors, je reprends où j'ai quitté dans le texte. Nous
désirons faire connaître au
ministre notre accord sur le concept à deux volets pour la
protection.
Le premier, une réglementation générale. Une
réglementation générale devrait s'appliquer à la
protection de divers types d'habitats essentiels tels les ravages, les
frayères, le milieu riverain et tout autre lieu de concentration
faunique. Nous désirons signaler au ministre l'importance du milieu
riverain pour la faune. C'est pourquoi nous recommandons que la partie la plus
utilisée du milieu riverain, soit la zone humide - on se
réfère à la figure 1 - soit intégralement
protégée par le réglementation générale.
Pour ce qui est de la zone sèche du milieu riverain, son utilisation est
plus variable et des normes quant à l'utilisation du sol devraient
être définies.
Le deuxième volet, la protection des sites particuliers. Par
cette réglementation, le MLCP devrait pouvoir protéger les
ravages et les frayères exceptionnels, les sites rares à
l'échelle nationale ou autres lieux essentiels à la faune. Nous
n'avons pas l'intention de commenter davantage ce document, mais nous
considérerions inconséquent un gouvernement qui, connaissant
maintenant parfaitement la situation, n'agirait pas. Il en va de la
satisfaction de 800 000 citoyens qui pratiquent les activités
reliées à la faune et y dépensent annuellement 750 000 000
$. De plus, il ne faudrait pas faire mentir les nombreux dépliants
touristiques sur lesquels abondent orignaux, chevreuils, canards, truites,
saumons et dorés.
Nous désirons signaler au ministre que le temps ne joue pas en sa
faveur. C'est pourquoi nous aimerions lui rappeler les graves problèmes
auxquels sont confrontés certains pays européens, dont la France,
suite à un laisser-aller en matière de protection d'habitats.
Brièvement, en France particulièrement, on croyait avoir
trouvé la solution à la perte graduelle des habitats fauniques en
y pratiquant l'élevage d'animaux sauvages dans le but de les
libérer dans la nature, non pas essentiellement pour la chasse
immédiate, mais aussi pour suppléer à une reproduction
naturelle devenue déficiente à cause de la perte d'habitats
propices.
Après quelques décennies seulement, cette activité
que l'on appelle le "lâcher" a engendré quatre problèmes
majeurs. Le premier: les possibilités d'élevage de certains
animaux sauvages, dont la perdrix grise et le canard malard, ont fait perdre de
l'importance à divers types d'habitats et, conséquemment, leur
protection a diminué. On pourrait dire sur ce sujet qu'on a
enlevé à la nature la responsabilité de produire la faune
sauvage; en perdant cette responsabilité, elle a perdu beaucoup de gains
et l'attention des gouvernements; on l'a négligée; on ne l'a pas
protégée et elle s'est détériorée
davantage.
Le deuxième: les habitats étant altérés, la
reproduction naturelle diminua aussi. Pour y remédier, on augmenta
l'élevage. Le nombre d'éleveurs, la quantité d'animaux
élevés et les superficies recevant "le lâcher"
augmentèrent donc. C'est ainsi que l'élevage d'animaux sauvages
devint une industrie importante.
Biologiquement, on assista alors à deux modifications
importantes, et l'on doit dire que l'on assiste à des modifications
biologiques; c'est extrêmement grave, parce que les conditions ont
été établies au cours des millénaires et si, en
quelques décennies, les comportements animaux sont modifiés,
c'est extrêmement grave sur la reproduction des espèces.
Premièrement, les animaux d'élevage, une fois
libérés dans la nature, se croisent avec les animaux sauvages;
des études ont clairement démontré que cela se traduit par
un indice de reproduction considérablement diminué.
Deuxièmement, les animaux perdent, à des degrés divers,
leur méfiance envers l'homme; ce qui rend la chasse, semble-t-il, moins
excitante.
Finalement, le gouvernement français, voulant corriger cette
situation devenue précaire et évidente aux yeux des chasseurs,
n'a pas pu, après plus de dix ans d'efforts, empêcher la situation
de se détériorer. Il s'est révélé impossible
de renverser la vapeur pour deux raisons majeures. La première: une fois
perdus, les habitats fauniques coûtent beaucoup plus cher à
récupérer qu'ils n'en coûtaient à protéger.
De plus, dans bien des cas, la situation est irréversible. On ne change
pas de place un gratte-ciel construit dans ce qui était auparavant un
marais.
J'aimerais vous faire part d'une petite anecdote sur ce point. Il y a
quelques années, a eu lieu, à Longueuil, le congrès de la
Fédération québécoise de la faune, congrès
qui avait lieu dans un hôtel de cette ville, et le maire de la place
était tout fier de dire aux congressistes qu'à l'emplacement
même où le congrès se tenait, il y avait autrefois un grand
marais à grenouilles et à canards, et que, aujourd'hui, il peut y
recevoir dans un bel hôtel. Tout cela fut dit devant la
Fédération québécoise de la faune.
Je poursuis. La troisième raison majeure pour laquelle la France
n'a pu renverser la vapeur est celle-ci: Comme "le lâcher" est devenu une
industrie faisant vivre des milliers de personnes, le gouvernement
français, pour des raisons sociales évidentes, n'a jamais pu
interdire, ni même restreindre cette activité.
On peut dire qu'ici, au Québec, ces milliers de personnes qui
n'élèvent pas de faune sauvage pour la libérer dans la
nature, ce sont nos pourvoyeurs, ce sont nos ZEC et ce sont tous les gens
reliés à la faune.
Nous pensons que l'expérience que vit la France est pour nous une
sorte de vision sur le futur. Tirons-en profit et évitons de
commettre les mêmes erreurs en protégeant
adéquatement nos habitats. Or, ce n'est pas parce qu'on aime
particulièrement rapporter des expériences d'outre-mer, mais
c'est parce qu'elles peuvent nous faire comprendre ce qui peut se passer ici et
ce qui est en train de se produire ici. Parce que nous devons quand même
dire que nous avons des exemples vivants de cette situation au Québec.
Par exemple, la récupération à des fins agricoles des
marais salés du Bas-du-Fleuve peut causer la perte de 35% - je dis bien
35% - des habitats que constituent les marais salés dans tout le
Québec pour une récupération de seulement 0,007% de terre
agricole. Je pense que ce n'est peut-être pas là que le ministre
voudrait voir les vaches du Québec dans le trèfle jusqu'aux
genoux.
Alors, on a d'autres exemples un peu plus positifs. Par exemple, si on
se réfère à la baie Lavallière, un habitat faunique
par excellence au Québec au sud du lac Saint-Pierre, qui a
été drainé à des fins agricoles au début de
l'année 1930 et qui n'a jamais rapporté les fruits qu'on
espérait, il a été remis en eau pour des fins fauniques
dernièrement. Je pense qu'on est en train de vivre certaines situations
très encourageantes de ce côté.
Concernant les espèces rares, menacées ou en voie de
disparition, j'aimerais bien laisser la parole à notre responsable de ce
comité, lequel va vous entretenir sur le sujet.
M. Prescott (Jacques): M. le ministre, MM. les
députés, mesdames, messieurs et membres de la commission. Nous
trouvons extrêmement pertinente la modification à la Loi sur la
conservation de la faune qui tient compte de la protection des espèces
animales rares, menacées ou en voie de disparition. Pourtant, nous
déplorons que l'amendement proposé à la Loi sur la
conservation de la faune ne prévoie aucune mesure de protection des
plantes rares ou menacées. Il est pourtant impératif que de
telles mesures soient également prises concernant les plantes. En effet,
de récentes recherches entreprises par une équipe de chercheurs
du Jardin botanique et de l'Institut botanique de Montréal mettent en
évidence la situation précaire de plusieurs espèces de
plantes indigènes.
L'ail des bois, que peut-être la plupart d'entre nous a
goûté, qui est une plante qu'on apprécie pour ses
qualités gastronomiques, est actuellement une victime reconnue par de
nombreux naturalistes de l'absence de législation concernant la
protection des espèces végétales. La mise en marché
de cette plante dans les épiceries pourrait mettre en péril
l'existence même de cette plante au Québec. L'Association des
biologistes du Québec a entrepris, à ce sujet, une vaste campagne
de sensibilisation auprès du public et, le 20 avril dernier, nous avons
remis au ministre de l'Environnement une pétition de plus de Il 000
signataires qui réclamaient l'adoption d'une réglementation
interdisant la vente dans les épiceries et les commerces en
général de l'ail des bois sauvage.
À ce propos, j'aimerais rappeler à certains d'entre vous
que le ginseng, plante reconnue, semble-t-il, pour ses qualités
aphrodisiaques, était une plante qu'on retrouvait en assez grande
abondance sur le territoire du Québec et, maintenant, elle est quasiment
disparue de la carte parce qu'on en a fait une exploitation extrêmement
importante au début de la colonisation et les années qui
suivirent.
Récemment, l'ABQ a attiré l'attention du public sur une
liste de plus de 33 espèces d'animaux sauvages indigènes au
Québec pour lesquelles il existe de bonnes raisons de croire qu'elles
sont en péril. Je vous ai fait remettre, ce matin, un exemplaire de ce
document de couleur orangée dans lequel vous aurez la liste de ces
espèces. Certaines d'entre elles, dont le carcajou, le faucon
pèlerin, le bar rayé et l'éperlan nain, sont dans une
situation extrêmement précaire et plusieurs spécialistes
craignent pour leur survie sur notre territoire.
Récemment, en faisant un relevé de la documentation sur le
sujet, je me suis aperçu que, effectivement, il y avait 35
espèces d'animaux rares menacées ou en voie de disparition sur le
territoire du Québec. Depuis les quelques mois où on a produit la
première étude, on s'aperçoit que le dossier a
évolué de façon alarmante. C'est pourquoi, devant cette
situation, l'ABQ s'évertue, depuis quelques années
déjà, à faire comprendre à la population la
nécessité de protéger adéquatement les plantes et
les animaux rares ou menacés. Il y a quelques mois, le document que vous
avez en main, nous l'avons publié avec l'aide financière du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et nous vous
remercions de cette collaboration. (10 h 30)
Pour ceux qui sont intéressés à en savoir plus long
sur le dossier des espèces menacées, le dernier numéro de
la revue Bio, publiée par l'Association des biologistes, donne un
aperçu plus en détail de la situation et, surtout, de la
déficience de la législation à cet effet.
Nous avons récemment présenté à la
commission parlementaire étudiant le projet de loi no 55 qui modifiait
la Loi sur la qualité de l'environnement, une ébauche de projet
de loi visant à protéger les plantes et animaux menacés.
À notre grand regret, le législateur n'a pas modifié la
Loi sur la qualité de l'environnement de façon à tenir
compte de nos suggestions à ce propos. La question de savoir quel
ministère devrait
assumer la protection des espèces animales et
végétales rares menacées ou en voie de disparition nous
préoccupe peu. Par contre, ce qui nous intéresse au plus haut
point, c'est qu'elles soient protégées au plus tôt et le
plus adéquatement possible. Pour cette raison, nous avons cru bon
d'annexer à notre mémoire une section vous faisant part de notre
réflexion sur ce que pourrait contenir la Loi sur la conservation de la
faune, concernant cet aspect.
Je ne vous lirai pas l'annexe au complet qui se trouve à partir
de la page 13, mais je veux simplement signaler une erreur qu'on a faite
inconsciemment, dans la définition de "faune du Québec",
où on a oublié d'inclure, dans la définition de faune,
mammifère et oiseau, mais on dit dans cette définition que la
faune du Québec inclut tout reptile, batracien, invertébré
et poisson qui sont des groupes souvent oubliés lorsqu'on fait une
législation, en particulier les reptiles, les batraciens et les
invertébrés. Je vous demanderais d'ajouter au texte les mots
"mammifère" et "oiseau". Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va? Oui.
M. Massé: Oui. Alors, je poursuis?
Le Président (M. Bordeleau): Vous voulez... Cela fait
presque vingt minutes. Je pourrais vous donner quelques minutes pour
conclure.
M. Massé: D'accord, c'est peut-être suffisant. Il y
a quand même le troisième point que nous jugeons très
important. Il s'agissait de trois points importants. Le troisième en est
un. À la lecture des règlements relatifs à la Loi sur la
conservation de la faune, nous constatons que, sous l'appellation de
réserve faunique, on avait placé un peu de tout en tentant
d'atteindre divers objectifs fort hétérogènes, mais sans
protéger l'habitat.
Il est plus que temps que le MLCP se donne, par l'entremise des
réserves fauniques, la possibilité de remplir adéquatement
son rôle de protection des habitats fauniques qui, croyons-nous, a
été considéré trop mollement jusqu'à
maintenant. Avec cet outil, le MLCP aura enfin la possibilité de parler
d'affectation prioritaire du territoire pour la faune dans une optique
d'aménagement intégré et d'utilisation rationnelle.
Si vous me permettez, j'aimerais quand même discuter du point 4 et
les autres points, je pense, sont, pour l'Association des biologistes, un peu
moins importants.
La responsabilité élargie des agents de conservation.
Comme le MLCP est doté d'un réseau de surveillants qui couvre
tout le Québec, nous pensons que les agents de conservation de la faune
pourraient avec avantage faire appliquer certains articles de la Loi sur la
qualité de l'environnement et de la Loi sur les terres et forêts.
Toutefois, nous devons faire remarquer au ministre que les agents de la
conservation de la faune peuvent très bien actuellement, en vertu de la
Loi sur les pêcheries, article 33 notamment, faire des causes concernant
les rejets de substances nuisibles ou délétères dans les
cours d'eau.
Finalement, nous croyons que, en matière de protection de
l'environnement, ce n'est pas tant les textes de loi qui font défaut,
mais plutôt une volonté politique de les appliquer. En cette
matière, les exemples ne manquent pas. Concernant le petit bout que je
viens de lire sur la responsabilité des agents de conservation, M. le
ministre, on devrait peut-être avoir un éclaircissement sur un
arrêté en conseil qui date de 1973 et qui demande aux agents de la
conservation de la faune de ne pas faire appliquer les articles de la Loi sur
les pêcheries.
Je pense que, si le ministre voulait que ces agents fassent appliquer la
Loi sur les pêcheries, ce serait peut-être bon de regarder si c'est
encore en vigueur. Je peux vous en déposer une copie.
M. Chevrette: Est-ce que vous pouvez donner le numéro pour
qu'on puisse vérifier immédiatement?
M. Massé: II s'agit du numéro 4589-73. M.
Chevrette: Un moment.
Le Président (M. Bordeleau): On essaiera de vous donner
une réponse, monsieur.
Est-ce qu'on peut procéder aux questions, aux commentaires, M. le
ministre?
M. Chevrette: Tout d'abord, je suis heureux de constater que
l'association adhère aux principes, aux concepts même de
protection et je vous souligne qu'il n'est pas non plus dans notre intention de
mettre une industrie d'élevage d'animaux sauvages afin de sauver les
habitats. Je ne pense pas que cela soit l'optique du MLCP.
Cependant, j'ai deux questions à vous poser et qui vont vous
obliger à expliquer davantage. À la page 1 de votre
mémoire, vous traitez de réglementation générale.
J'aimerais que vous m'explicitiez davantage la nature et les composantes de
cette réglementation. Vous basez presque toute votre argumentation sur
ce principe, c'est une réglementation de portée
générale.
Le Président (M. Bordeleau): M. Massé.
M. Massé: II me fait bien plaisir, M. le ministre, que
vous me permettiez de préciser ce point. Dans le fond, c'est la
substance
même de la protection des habitats fauniques. À
l'Association des biologistes, on considère, en ce qui concerne les
sites particuliers... Je reviendrai à la réglementation
générale, mais je pense que, pour bien saisir l'argumentation, il
faut commencer par les sites particuliers que l'on appelle exceptionnels. On
pense, à ce moment, à des sites comme le cap Tourmente, des sites
à très fort potentiel et reconnus de tout le monde. Ces sites se
protègent, à certains égards, d'eux-mêmes, vu leur
importance et la reconnaissance qu'ils ont de la part du public et des
gouvernements. Ils doivent tout de même être protégés
par des statuts particuliers. Cela représente peut-être, grosso
modo -c'est une évaluation un peu personnelle -20% des espaces fauniques
au Québec. On considère que les 80% qui restent, c'est aussi
important, parce que cela représente 80% et ce ne sont pas des sites
vraiment exceptionnels. Ce sont des berges de cours d'eau, ce sont des
frayères non exceptionnelles, ce sont des ravages non exceptionnels et,
si cela représente 80% des habitats, le reste doit être
protégé. Je pense qu'on ne peut pas vraiment protéger cet
ensemble d'habitats répartis sur tout le territoire en disant: à
telle place, il y a un arrondissement à protéger, à une
autre place, il y a un arrondissement à protéger. Cela prend une
réglementation générale qui va spécifier que, tel
type d'habitat, sans en donner les limites et les contours, doit être
protégé parce que c'est prioritaire pour la faune, même si
ce n'est pas exceptionnel comme le cap Tourmente.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre.
M. Chevrette: Vous dites également dans votre
mémoire qu'il est plus que temps que le MLCP se donne, par l'entremise
des réserves fauniques, la possibilité de remplir
adéquatement son rôle de protection. J'aimerais également
que vous m'expliquiez dans quel cas une telle protection devrait être
accordée.
M. Massé: On peut penser surtout peut-être à
des réserves fauniques sur le territoire privé, là
où l'installation d'une réserve faunique devient très
difficile parce que les propriétaires peuvent jouir de leur territoire
un peu de la façon qu'ils voudraient le voir. L'instauration d'une
réserve faunique dans ces lieux, actuellement, ne donne pas vraiment les
moyens de compenser ces gens pour une affectation différente de leur
territoire. Je pense que cela vient avec des mesures financières qui
sont couplées à ces statuts-là dans le territoire
privé.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: J'aurais plusieurs commentaires. Je vais laisser
mes collègues poser d'autres questions. Je voudrais au moins faire deux
brefs commentaires. Sur la venaison, vous êtes d'une prudence
extrême. Je peux peut-être vous rassurer en vous disant que nous
aussi, nous considérons que c'est un problème extrêmement
complexe et qu'il faudrait, à notre avis, faire une consultation
très spécifique sur le sujet lui-même.
Quant à la présomption, vous parlez de la maintenir en ce
qui a trait à l'infraction. Ne croyez-vous pas que c'est un peu
prohibitif par rapport à d'autres types d'infractions, même plus
graves, que nous vivons collectivement comme peuple et comme
société et où la présomption de culpabilité
n'existe pas, mais bien la présomption d'innocence? Je pense, par
exemple, à tout voleur ou tout meurtrier arrêté qui
bénéficie de la présomption de l'innocence avant
même d'être jugé, avant même d'être cité
à son procès. Dans le cas de la chasse et de la pêche,
quelqu'un est présumé coupable, par exemple, s'il est
trouvé en possession d'un fanal ou d'une lampe ou d'une lampe de poche
et d'une arme à feu, il est présumé coupable et doit
prouver son innocence. Ne croyez-vous pas qu'on doit harmoniser la
législation dans ce sens-là?
Le Président (M. Bordeleau): M. Massé.
M. Massé J'ai deux points à relever parce qu'il ne
m'a pas laissé la chance de terminer. Après la venaison, j'avais
quelque chose à dire. Je reviendrai au deuxième point. Cela doit
être considéré avec une extrême prudence. Au fond, ce
n'est pas de la prudence, on attend d'avoir le libellé de la loi parce
que tout est là-dedans, même la façon dont on va s'y
prendre pour le faire. On n'est pas opposé à cela, mais on veut
connaître, avant de donner un avis officiel, la manière dont le
tout sera libellé.
Concernant le deuxième point sur la présomption, je pense
qu'il faut aller beaucoup plus loin en arrière que les dernières
années. Il faut savoir de quelle façon vos agents de la
conservation de la faune travaillaient dans le passé; si cette
présomption est arrivée dans le décor, ce n'est pas pour
rien. Je pense qu'avant d'enlever quelque chose, il faut toujours se demander
de quelle façon on en est venu à cela. Si vous interrogez bien
des gens, ils vous diront qu'une loi relative à la chasse, dans laquelle
il faut démontrer vraiment que le type était en train de chasser
pendant la nuit, c'est très difficile. C'est absolument impossible dans
la majorité des cas, il faut
le prendre sur le fait en train de tirer la gâchette. À
toutes fins utiles, cela ne se fait pas.
Si vous enlevez la présomption de chasser - ce n'est quand
même pas un acte criminel comme un meurtre, un vol - je pense que c'est
une chose qui doit rester pour l'application pratique de votre loi.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Cela va, M. le
ministre. M. le député de Berthier.
M. Houde: Merci M. le Président. Je voudrais d'abord vous
féliciter de votre magnifique mémoire. Vous venez de
répondre à la question que je désirais vous poser. Je vais
passer la parole à Mme la députée de Chomedey.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: J'aurais peut-être deux petites questions. La
première couvre un peu votre texte aux pages 6, 8 et 14. À la
page 6, vous déplorez le fait que l'amendement proposé à
la Loi sur la conservation de la faune ne prévoit aucune mesure de
protection des plantes rares ou menacées. De telles mesures sont
impératives pour vous; je pense que vous l'avez expliqué
tantôt en faisant la lecture. Par contre, à la page 8, il est
évident que le réaménagement des responsabilités ou
juridictions des ministères n'est pas votre responsabilité. C'est
la responsabilité du gouvernement. Je pense qu'il est très
important de bien délimiter les responsabilités de chacun des
ministères. Tout cela se tient, au fond, et je pense que vous serez
d'accord avec moi là-dessus. Je pense que le ministère de
l'Environnement a une grande responsabilité, ce qui fait que, lorsque
vous proposez, à la page 14, que nul ne peut détruire,
transformer, perturber l'habitat d'une espèce animale ou
végétale rare, cela fait partie des responsabilités du
ministère de l'Environnement. Je pense que c'est cette articulation des
responsabilités entre les ministères qui est importante.
Pourriez-vous expliciter davantage votre vision des choses sur ce sujet? Parce
qu'il n'y a pas que la faune qui vous préoccupe, il y a aussi toutes ces
espèces rares de plantes, de fleurs. Vous allez beaucoup plus loin que
la faune.
M. Massé: On va au-delà de la faune. On s'occupe de
ses habitats et on veut aussi s'occuper de la flore, même si ce ne sont
que des espèces végétales et, dans bien des cas,
commerciales. On n'aimerait pas les voir commercialisées et on voudrait
les voir protégées parce qu'il y a un besoin évident,
urgent et criant de le faire. Lorsqu'on a proposé au ministère de
l'Environnement, le printemps dernier, lors du dépôt du projet de
loi no 55 qui modifiait la Loi sur la qualité de l'environnement,
d'inscrire dans son projet de loi - cela aurait été une occasion
formidable de le faire, je pense bien - la protection des espèces rares
et menacées au Québec, cela n'a pas été fait.
Nous ne nous préoccupons pas de la guerre des clochers. On
voudrait le voir au plus tôt et on pense que la révision de la Loi
sur la conservation de la faune est une autre occasion qui pourrait être
prise par un autre ministre. C'est pour cela qu'on frappe, pour la seconde
fois, à la porte du gouvernement du Québec. Et après-coup,
si cela est mêlé dans la Loi sur la conservation de la faune et
dans la Loi sur l'environnement, on est conscient que c'est plus difficile
à comprendre peut-être - nous n'en sommes pas certains - plus
difficile à appliquer. Si la volonté y est, ce n'est quand
même pas si compliqué que cela. On pourrait, dans un autre temps,
refaire un bill omnibus et regrouper tout cela dans une seule loi. On aurait,
dans une seule loi, la protection des espèces animales et
végétales menacées au Québec. Je pense que, devant
l'urgence, il faut bien frapper là où les portes s'ouvrent et la
révision de la Loi sur la conservation de la faune en est une et que le
ministre devrait s'en servir. (10 h 45)
Mme Bacon: Je comprends que cela ne vous préoccupe pas,
mais cela vous cause des problèmes.
M. Massé: À nous, non, mais aux futurs utilisateurs
de la faune. Si on veut maintenir notre patrimoine faunique et
floristique...
Mme Bacon: II faut mettre un peu d'ordre.
M. Massé: ... il faut mettre un peu d'ordre.
Mme Bacon: D'accord. Ma deuxième question, M. le
Président. Vous parlez abondamment, dans votre projet, de
l'expérience française et vous nous dites que c'est en quelque
sorte une vision sur l'avenir. Est-ce que vous pouvez nous dire comment vous
pouvez qualifier cette vision du MLCP, en ce moment, sur la protection de la
faune? Est-ce que vous la qualifiez de vision futuriste?
Le Président (M. Bordeleau): M. Massé.
M. Massé: J'aimerais que vous synthétisiez un peu
votre question.
Mme Bacon: J'aimerais que vous me disiez si vous voulez y
répondre ou non.
M. Massé: Je vais y répondre.
Mme Bacon: C'est parce que vous...
M. Chevrette: Elle aurait voulu que vous répondiez
non.
Mme Bacon: Non, non. Je veux au moins savoir ce que les groupes
concernés en pensent parce qu'on est là pour cela, pour en
discuter.
M. Massé: Oui, c'est parce que j'ai mal saisi votre
question, c'est tout simplement ça.
Mme Bacon: Vous nous parlez de l'expérience que la France
vit et vous dites que c'est pour vous, en quelque sorte, une vision sur
l'avenir. Est-ce que ce qui vous est offert par le MLCP est une vision
futuriste qui apporterait un règlement au problème de la
protection de la faune? Vous savez ce que je veux dire, M. Massé.
M. Massé: Je sais ce que vous voulez dire. Je pense que
les intentions du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, on les connaît. Le ministère a déposé
ses intentions de protéger la faune, il a l'intention d'adopter un
projet de loi, mais le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche n'a pas nécessairement l'opinion du Conseil des ministres.
Il est évident que les exemples de la France que je vous ai
donnés pourraient être, pour le Québec, une situation
réelle dans quelques décennies, parce que c'est
déjà commencé dans les régions urbanisées
où on commence à faire un peu d'élevage, on commence
à "artificialiser", on commence à perdre et on a perdu beaucoup
d'habitats aussi. C'est déjà commencé et je pense que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche doit, dès
maintenant, se donner un outil législatif pour remplir son mandat. C'est
le gouvernement du Québec qui va donner à ce ministère
l'outil législatif pour protéger les habitats fauniques au
Québec et je pense - on va voir les intentions, pour répondre
à votre question - qu'avec l'outil qu'il va se donner et son importance,
on va voir quelle grandeur le jardin du ministère va avoir. On veut
savoir quelle est la grandeur du jardin qu'il va cultiver avec l'outil qu'il va
se donner.
Mme Bacon: M. Massé, si on ouvrait immédiatement la
législation existante pour assurer une protection immédiate ou
une plus grande protection de la faune, votre groupe serait-il satisifait?
M. Massé: Si on ouvrait...
Mme Bacon: Si on ouvrait immédiatement la
législation existante, parce que c'est long quand même tout le
processus des commissions parlementaires. On a deux projets de loi, deux
avant-projets qui ont été déposés devant nous hier.
Il y en a d'autres qui peuvent arriver. On a dit qu'on était allé
au Conseil de ministres qui les a retournés. Il y a des mémoires.
Vous savez comme moi que c'est un processus très lent, ce processus
législatif, avant que la loi soit déposée. Est-ce que si,
dès maintenant, le ministre demandait une ouverture de sa loi, de
revenir devant le Parlement et de se donner les outils nécessaires pour
assurer une meilleure protection immédiate... J'essaie d'aider le
ministre, M. le Président.
M. Massé: Je suis déçu de vous entendre dire
cela parce qu'on pensait qu'il le ferait.
Mme Bacon: Bien, je vous demande votre avis.
M. Massé: On attend cela.
Mme Bacon: Cela veut dire que vous seriez d'accord pour qu'il le
fasse immédiatement.
M. Massé: On avait tenu pour acquis que cela se ferait.
Nous n'attendons pas une loi dans dix ans, ni même dans deux ans. Pour
nous, c'est tout de suite qu'il faut que le débat... Le débat est
ouvert et je ne pense pas qu'il soit fermé. Quant à nous, notre
participation, ce matin, ce sont les premières pages de notre dossier.
On n'est pas ici pour s'en retourner et tout oublier. On est là, on
commence à être là et on le sera jusqu'à ce que la
protection des habitats soit une chose réelle.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Duplessis. Mais j'avais reconnu M. le
député de Hull avant.
M. Perron: Merci, M. le Président. Ma question touche la
pourvoirie. Les modifications proposées à la loi s'inspirent du
projet de politique ministérielle concernant la pourvoirie qui
suggère de restreindre la portée de la définition de
pourvoirie aux établissements commerciaux qui offrent au moins le
service d'hébergement aux adeptes des activités de chasse, de
pêche ou de piégeage. Ceux qui pourvoient aujourd'hui à des
services, mais sans hébergement, tels les guides, ceux qui louent des
embarcations, de caches, des cabanes pour la pêche sur la glace, pourront
continuer à offrir ces services, mais sans devoir détenir un
permis de pourvoirie à cet effet.
Ma question est la suivante: Si les services de cette catégorie
de commerce demeure disponibles aux adeptes des activités de chasse et
de pêche, mais sans détenir de permis de pourvoirie, quelles
objections d'ordre faunique voyez-vous à ce que le
gouvernement n'exerce plus un contrôle sur l'offre de cette
catégorie de service?
Le Président (M. Bordeleau): Alors, M. Massé.
M. Massé: Ce sont des pourvoyeurs qui, assez souvent,
exploitent des territoires publics, à notre connaissance. Alors, je
pense que c'est un peu regrettable qu'on ne considère pas ce type de
pourvoirie qui donne des services à un très grand nombre
d'usagers au Québec. N'étant plus considérés comme
des pourvoyeurs, je pense qu'ils ne sont plus enregistrés,
catalogués et ne feront peut-être plus partie du répertoire
des pourvoyeurs du Québec. Ces gens ne seront peut-être plus
répertoriés et retomberont dans l'oubli. Sur la forme,
peut-être que l'avenir nous le dira. Je ne sais pas si le
ministère aura quand même une orientation à donner sur les
services que ces gens développeront, sur l'évolution du nombre de
pourvoyeurs de ce type qui n'auront plus besoin de permis, sur l'augmentation
de l'utilisation de la faune, à cause de l'augmentation ou de la
diminution possible de ces gens. Ce n'est peut-être pas bon pour le
ministère d'oublier ces gens. Je pense qu'ils ont un effet sur le
prélèvement par les services qu'ils rendent; ils occasionnent une
utilisation plus poussée de la faune et je pense que le ministère
devrait quand même gérer un peu ce type de pourvoirie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Une dernière question. Maintenant, je voudrais
revenir à la question qu'a soulevée Mme la députée
de Chomedey en rapport avec les espèces menacées, que ce soit
dans le domaine floristique ou dans le domaine animal. On sait qu'actuellement
il existe aux États-Unis une loi-cadre qui protège certaines
espèces dans les deux sens, si ma mémoire est bonne. Est-ce
correct de dire que vous seriez d'accord pour qu'au plus vite une loi
différente de la loi générale existe et protège ces
espèces en question? En d'autres mots, ressortir les espèces
rares qui sont en voie d'extinction et les inclure dans une loi spéciale
à cet effet.
M. Massé: Je pense qu'on a quand même un peu
répondu à cela tantôt, lorsqu'on a dit que dans
l'immédiat on aimerait que ces espèces soient
protégées au plus tôt. La révision de la Loi sur la
conservation de la faune est une occasion et, après coup, le
gouvernement pourrait présenter un projet de loi omnibus qui
regrouperait le tout. Mais nous pensons qu'on doit se servir de la porte qui
est présentement ouverte dans la révision de la Loi sur la
protection de la faune, inscrire une protection pour ces espèces et
favoriser dans un deuxième temps un regroupement de toutes ces formes de
protection qu'on devrait accorder aux espèces animales et
végétales rares et menacées au Québec.
M. Perron: Donc, puisque nous avons des amendements prévus
dans la loi actuelle, vous aimeriez qu'on inclue ces espèces, mais, dans
un deuxième temps, qu'on revienne avec un autre projet de loi qui
s'étende à toutes les espèces, y inclus l'espèce
floristique.
M. Massé: II répondra peut-être... Je vais
ajouter quelque chose...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Prescott.
M. Massé: ... J'aimerais quand même dire
avant...
Le Président (M. Bordeleau): Non, M. Massé.
M. Massé: ... ou répéter ce que j'ai dit,
c'est que, lorsqu'il y a une volonté d'appliquer ces articles dans la
loi, que ce soit dans la Loi sur la protection de la faune ou dans la Loi sur
le ministère de l'Environnement du Québec, je pense qu'on peut le
faire; c'est peut-être un peu plus compliqué, mais ce n'est pas un
obstacle majeur.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. Prescott:
C'est bien évident...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Prescott.
M. Prescott: ... qu'il y a plusieurs pays et même plusieurs
provinces canadiennes qui ont des lois spécifiques qui protègent
les espèces végétales et animales rares ou menacées
et en voie de disparition et, quant à moi, en tant que responsable du
comité sur les espèces menacées, je me suis souvent
demandé pourquoi on ne devrait pas avoir une législation vraiment
spécifique nous aussi, étant donné qu'elle est
relativement simple à développer et relativement simple à
appliquer même, vu que, par exemple, le Canada est membre de la
Commission internationale sur le trafic des espèces rares et
menacées; puis, il y a déjà, au point de vue des
frontières canadiennes, des inspecteurs qui surveillent le trafic de ces
espèces. On pourrait également penser aux agents de conservation,
qui pourraient avoir un rôle à jouer dans le trafic de ces
espèces à l'intérieur de la province.
Je répète à nouveau que nous profitons de la
tribune qui nous est offerte aujourd'hui pour signaler la carence de la
législation à
cet effet. Je crois malgré tout qu'il y a des points dans la
législation ou dans le projet de loi sur la conservation qu'on
étudie actuellement qui pourraient être amendés
favorablement pour protéger ces espèces. Naturellement, c'est un
souhait qu'on exprime d'avoir une législation spécifique.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'aurais
peut-être une question à poser à M. Massé: Tenant
compte du rôle du biologiste et du rôle de l'agent de conservation,
on entend dire parfois à travers les branches qu'il semble y avoir
manque de concertation ou manque de collaboration. Cela nous arrive parfois et
j'aimerais que vous précisiez un peu le rôle que vous jouez
concernant la recherche, les études, les données, etc. quant
à l'application du règlement comme tel, s'il y un un
chevauchement ou une action parallèle quelconque qui se fait.
M. Massé: Est-ce que je peux...
Le Président (M. Bordeleau): M. Massé.
M. Massé: ... vous demander de préciser votre
question? Est-ce que vous vous adressez à l'Association des biologistes
du Québec?
M. Rocheleau: Je ne sais pas, si vous représentez en
même temps ceux qui sont à l'emploi du gouvernement et qui sont
attitrés comme fonctionnaires auprès des différents
ministères et qui touchent soit à la conservation...
M. Massé: On représente quand même ici les
biologistes du Québec et on aimerait faire valoir les points de vue
d'aspect faunique et biologique reliés au présent
débat.
M. Rocheleau: D'accord. Mais on sait que l'application de la loi
actuelle ou de la loi à venir demande une concertation auprès des
principaux agents. Je voudrais simplement avoir votre opinion sur le rôle
que joue actuellement l'agent de conservation, lorsque vous mentionnez qu'on
devrait l'affecter au point de vue de l'environnement, de ceci ou de cela,
à savoir s'il y a concertation entre les deux éléments,
soit le biologiste, qui s'occupe tout particulièrement de la recherche,
de l'analyse, des données, ainsi de suite, et l'agent de conservation
qui a à appliquer le règlement.
M. Massé: II y a deux points. Le premier, c'est que les
biologistes sont très sensibilisés dans tout le Québec
à tous les problèmes environnementaux; les problèmes de
pollution, les problèmes de destruction d'habitat, et c'est ce qu'on est
venu dire ici aujourd'hui.
Dans le débat d'aujourd'hui, il y a quand même une question
qui a été posée concernant le rôle des agents de la
conservation de la faune, qui pouvaient, qui pourraient, qui devraient faire
appliquer les articles de la Loi sur la protection de l'environnement. On a dit
qu'actuellement ces agents pouvaient faire appliquer certains articles de la
loi, notamment la Loi sur les pêcheries, et qu'on n'était pas
certain qu'ils le faisaient. On a trouvé dans nos recherches le document
qu'on est venu me...
M. Rocheleau: Vous êtes en...
M. Massé: ... me prendre. J'en ai d'autres exemplaires. On
n'est pas certain que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, par ses agents de conservation, veut vraiment faire appliquer des
articles de loi, peu importe la loi, parce qu'il y a différentes lois
pour la protection de l'environnement.
M. Rocheleau: Oui, mais, M. le Président, il faut quand
même comprendre que...
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: ... les ordres viennent quand même du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Si les agents de
conservation ont une ordonnance pour ne pas appliquer tel ou tel article du
règlement, ils ne le font pas. C'était en ce qui a trait aux
relations, à savoir si, concernant les relations entre les agents de
conservation qui sont sur le terrain...
M. Massé: En ce qui concerne les agents, les biologistes
de mon association, on ne nous a jamais référé les
problèmes que vous mentionnez.
M. Rocheleau: Parfait;
Le Président (M. Bordeleau): Cela va?
M. Rocheleau: Cela va.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre, vous avez
quelque chose à ajouter, le petit mot de la fin.
M. Chevrette: Oui. Je voudrais dire à monsieur que je
ferai les recherches nécessaires, parce que cela concerne le
ministère de l'Environnement. Je verrai à vous répondre
précisément. Quant à l'article 33 de la Loi sur les
pêcheries, je peux vous
répondre tout de suite que ç'a été
déclaré anticonstitutionnel par un jugement de la Cour
suprême et que c'est de compétence provinciale. C'était
relatif justement à la pollution des cours d'eau; cela relevait des
provinces dans la Loi sur les pêcheries. On pourrait vous faire sortir le
jugement qui déclare inconstitutionnel l'article 33 de la loi
fédérale sur les pêcheries. (11 heures)
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M.
Massé, ainsi que les personnes qui vous accompagnent, Mme Journeau, M.
Prescott et M. Duchesneau.
J'appelle maintenant le deuxième groupe, le Conseil
Attikamègue-Montagnais.
M. Chevrette: M. le Président, nous devons prévenir
immédiatement les gens que...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: ... les membres de la commission seront
probablement forcés de quitter pendant une demi-heure, puisque nous
avons reçu ordre d'être en Chambre à Il h 30 pour
l'étude des crédits. Donc, il ne faudrait pas que le groupe soit
surpris qu'on interrompe son témoignage.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, on attendra qu'on nous
fasse signe qu'on a besoin du ministre en Chambre et on suspendra à ce
moment pendant une demi-heure.
C'est M. René Simon, le président, je crois?
Les gens du Conseil Attikamègue-Montagnais sont-ils
présents? Si vous voulez bien vous avancer, présenter les
personnes qui sont avec vous et procéder à la lecture ou au
résumé de votre mémoire.
Conseil Attikamègue-Montagnais
M. Simon (René): Je voudrais vous aviser, contrairement
à la prévision qui avait été faite au départ
pour la présentation de notre organisme, qu'il a été
prévu que quatre chefs seraient avec moi aujourd'hui. Hier, après
discussion avec ces chefs, on a décidé de faire la
présentation de notre mémoire avec les deux
vice-présidents, c'est-à-dire, à ma droite, M. Paul
Bellefleur, vice-président des Montagnais et, à ma gauche, M.
Ernest Ottawa, vice-président des Attikamègues.
M. le Président, je voudrais aussi par la présente vous
aviser que notre organisme est en réunion à Québec, en
l'occurrence les chefs des Attikamèques et des Montagnais se trouvent
présents ici dans la salle. Je les ai invités pour la
présentation de notre mémoire et pour aussi vous démontrer
le sérieux de cette commission.
Si vous voulez bien, M. le Président, je peux commencer la
présentation de notre texte.
Le Président (M. Bordeleau): Vous pouvez y aller.
M. Simon: II y a quelques semaines, nous avons
présenté un texte reflétant assez bien la pensée
attikamègue et montagnaise sur tout ce qui touche droits et territoires
ancestraux, notre mode de vie, notre culture, de même que la perception
quant à l'approche du développement de divers ordres sur ces
mêmes territoires et leur impact sur nos populations. Aujourd'hui, nous
voudrions être plus concrets en faisant une présentation plus
réaliste devant cette commission.
Mon exposé comportera trois volets: dans un premier temps, je
définirai ce que sont les droits des Attikamègues et des
Montagnais concernant l'exploitation des ressources fauniques. Par la suite,
j'analyserai différents types de négation de ces droits par les
gouvernements et autres intervenants dans le dossier, tels les associations de
pêcheurs et de chasseurs sportifs, les associations de trappeurs, les
chroniqueurs de chasse et de pêche et certains biologistes. Finalement,
dans le contexte des négociations avec le gouvernement du Québec,
j'indiquerai quelques principes fondamentaux sous-jacents à nos
positions de base.
La nature des droits des Attikamègues et des Montagnais sur
l'exploitation faunique. Nos droits sur l'exploitation des ressources fauniques
sont directement issus de nos droits de premiers occupants du sol
québécois aux droits aboriginaux et de premiers exploitants
connus de ces ressources. Ils découlent aussi de nos droits de nation
souveraine, qui n'ont jamais été aliénés ni par
cession librement consentie, ni par traité, ni par conquête
armée. Ces droits, nous affirmons les détenir toujours même
si les représentants politiques affirment le contraire. C'est d'ailleurs
la position que nous avons affichée clairement dans notre texte
préliminaire des revendications soumises au gouvernement du Canada et du
Québec en 1979.
De fait, nous sommes demeurés maîtres de nos territoires
ancestraux et de leurs ressources jusqu'à ce que les grands
développements forestiers, hydroélectriques, miniers et autres
viennent nous en dépouiller progressivement.
La prise de possession par la force est un fait accompli et la
façon des non-Indiens d'assurer leur propre souveraineté sur des
territoires et des ressources qu'ils convoitent pour leur enrichissement
personnel. Nous avons toujours considéré cette démarche
comme illégitime, car elle va à l'encontre
des principes de philosophie et de droit indien; ces principes sont
fondés sur la propriété collective des terres et de leurs
ressources, ainsi que sur leur utilisation selon les besoins de chacun. Les
notions collectives et de partage sont le fondement de la pensée
indienne en ces domaines. De là notre souci de préserver la
nature et d'assurer le renouvellement constant de ses ressources au profit des
autres utilisateurs et pour le bien-être des générations
futures.
Votre philosophie et votre droit sont fondés sur des principes
inverses: sur la notion de propriété privée et de
jouissance exclusive par des individus ou des corporations à
l'accès aux principales ressources au détriment des autres
membres de la société.
Comme on peut facilement le constater, un tel système conduit
logiquement à l'abus et au gaspillage des ressources renouvelables et
non renouvelables et à une répartition illégale des
richesses collectives.
Nous avons toujours refusé jusqu'à maintenant ce
modèle de société, c'est pourquoi nous sommes
considérés par vous comme des pauvres matériellement, mais
nous savons que nos rapports communautaires nous rendent plus riches
socialement.
Certains de nos droits aboriginaux, en particulier nos droits de chasse,
de pêche et de trappe, ont été reconnus à divers
degrés par différents actes législatifs et
différentes instances. Je citerai l'Acte de capitulation de 1760, la
Proclamation royale de 1763, différents traités, le rapport de la
commission Dorion sur l'intégrité du territoire du Québec,
le jugement Malouf, l'entente de la Baie James, le rapport du juge Berger, la
nouvelle constitution du Canada, etc.
Le texte de la proclamation royale est particulièrement clair en
ce qu'il réserve pour l'usage exclusif des Indiens les territoires
situés en dehors du territoire du gouvernement du Québec, qui
venait alors d'être créé par l'Angleterre pour administrer
les établissements français de la vallée du Saint-Laurent.
Il est bien évident que cette proclamation ne venait pas créer
des droits amérindiens, mais elle ne faisait que les reconnaître.
Selon les avis de plusieurs juristes, les effets de cette proclamation
demeurent toujours en vigueur, bien que, par la suite, plusieurs
législations et pratiques, ainsi que la cession aux provinces du
contrôle des ressources naturelles par l'Acte de l'Amérique du
Nord, britannique en aient réduit la portée.
Notre position en ce qui concerne nos droits de souveraineté sur
nos territoires et sur l'exploitation de la ressource faunique ne se fonde pas
sur cette reconnaissance partielle par la législation canadienne, mais
bien sur des droits de premiers occupants, tel qu'affirmé
précédemment. Si j'ai voulu souligner au passage cette
reconnaissance partielle de nos droits, c'est pour démontrer que,
contrairement à ce que beaucoup de chasseurs, pêcheurs, trappeurs
et chroniqueurs non indiens affirment à tort et à travers,
différents textes de loi et prises de position gouvernementales nous
reconnaissent des droits spécifiques différents de ceux des
non-autochtones, en particulier en ce qui concerne l'exploitation des
ressources fauniques.
Exemple de négation de ces droits. Nos droits aboriginaux
existent bel et bien, comme l'ont reconnu de nombreux juristes,
législateurs et gouvernements, mais ces derniers s'empressent rapidement
d'en diminuer la portée en prétextant leur nature
imprécise, et de les réduire souvent à des droits
résiduels d'usufruit sur les ressources fauniques, comme c'est le cas en
particulier au Québec.
Examinons rapidement les attitudes du gouvernement
québécois et de quelques autres intervenants sur cette question,
les droits des Amérindiens.
Le gouvernement du Québec. Nous savons que le gouvernement du
Québec a découvert l'existence des droits aboriginaux des Indiens
du Québec à l'occasion du jugement Malouf le 15 novembre 1973.
Jusque-là, le Québec avait toujours favorisé le
développement des ressources forestières, hydrauliques,
minières en territoires indiens comme s'ils étaient
inoccupés et inutilisés en raison de la complète ignorance
des groupes indiens qui pourtant les exploitaient depuis des temps
immémoriaux. Le jugement Malouf, même s'il fut renversé
quelques jours plus tard par trois juges de la Cour d'appel totalement
voués aux intérêts de la société
québécoise, a eu pour effet de forcer le gouvernement du
Québec à négocier pour la première fois avec des
autochtones l'accès aux territoires et à leurs ressources.
Si les Cris, les Inuits et les Naskapis, qui n'avaient pas connu
jusque-là le développement industriel effréné, ont
pu bénéficier d'un contexte et d'appuis exceptionnels, il en fut
tout autrement pour d'autres groupes indiens touchés plus tôt par
la pénétration de la grande industrie sur leur territoire de
chasse.
Depuis l'entente de la Baie-James, les grands projets de
développement des ressources en territoires non conventionnés ont
continué à aller de l'avant sans que l'on tienne compte vraiment
de la présence, de l'opinion et des besoins des Indiens. Coupes de bois
à blanc, routes forestières, barrages hydroélectriques,
zones d'exploitation contrôlée se planifient à peu
près comme si de rien n'était.
Dans le domaine plus particulier des ressources fauniques, le
Québec s'affirme comme l'unique gestionnaire de la faune par
le biais de son ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche. Les Indiens pour leur part n'ont jamais accepté cette
vision des choses pas plus qu'ils n'ont accepté les coupes à
blanc, les inondations de leur territoire, les détournements de
rivières, les trous de mines, etc. Ils continuent à se
considérer comme les seuls maîtres de leurs territoires ancestraux
et les premiers gestionnaires des ressources fauniques qu'ils connaissent mieux
que n'importe quel aménagiste ou planificateur du ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Par la multiplication des arrestations, des saisies d'armes et de
gibier, des poursuites en cour - pour votre information, à l'heure
actuelle, nous avons à peu près 200 causes qui attendent de
passer au ministère de la Justice et cela, uniquement pour le groupe
attikamègue-montagnais - en un mot, par des tracasseries de toutes
sortes, nous nous sommes vite rendu compte que le gouvernement du Québec
voulait imposer sa loi sur nos territoires. Beaucoup d'entre nous, en
conséquence, ont limité leur activité traditionnelle ou
l'ont pratiquée plus ou moins en cachette pour échapper à
ces tracasseries. Nous avons pensé un moment qu'une entente
signée en 1967 entre le ministre Gabriel Loubier et l'Association des
Indiens du Québec mettrait fin à cet état de choses. Nous
avons continué à être harcelés par les gardes-chasse
jusqu'à l'établissement d'un moratoire en 1980, et même ce
moratoire n'a pas été respecté par le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Le répit fut de courte
durée, car le même gouvernement créait en 1979 les ZEC dans
le cadre de son opération Gestion faune. Cette démocratisation de
l'action ressources fauniques a eu pour effet d'augmenter
considérablement la chasse et la pêche en territoire indien, comme
en témoignent les données statistiques récentes du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche contenues dans le
rapport intitulé Aménagement et utilisation de la faune du
Québec, avril 1981.
On estime à 1 361 812 le nombre de pêcheurs sportifs,
à 519 648 celui des chasseurs sportifs, à 12 000 le nombre
d'orignaux tués, à 830 000 celui des canards et des oies, etc. On
viendra nous dire ensuite que ce sont les quelque 30 000 Indiens du
Québec qui massacrent la faune du Québec. Pour nous, il est clair
que cet accès aux ressources fauniques par un nombre
incontrôlé d'exploitants se fait d'abord au détriment de la
population indienne qui chasse et pêche pour s'alimenter et non pour le
plaisir ou pour collectionner des trophées.
Nous pensons que cette voie est un cul-de-sac et qu'il y aura de moins
en moins de gibier pour satisfaire tout le monde. Nous songeons à une
solution tout autre, moins rentable sur le plan politique, il est vrai, mais
à laquelle nous reviendrons plus loin.
En septembre 1980, le gouvernement du Québec, par la voix de son
premier ministre, nous reconnaissait des droits historiques qu'il s'empressait
de nier du même souffle en nous refusant tout contrôle sur les
ressources de nos territoires. Au début de la même année,
SAGMAI nous présentait un document intitulé Les
Amérindiens et les activités de chasse et pêche, qui peut
être considéré comme un exemple de la négation par
le Québec de nos droits ancestraux concernant l'exploitation des
ressources fauniques. (11 h 15)
Je profite donc de cette occasion pour vous faire connaître
certaines de nos réactions à ce document. En premier lieu, dans
ce texte, on glisse très rapidement de la notion de droits
imprécis et de droits d'usufruit à celle de privilèges
accordés par le gouvernement du Québec aux Indiens. Ainsi, dans
la seule partie consacrée à la définition des objectifs et
principes de base de la politique proposée s'étendant de la page
56 à la page 62, le mot "privilèges" apparaît huit fois.
Par contre, il est question ailleurs dans le texte des "droits des blancs".
Nous ne sommes évidemment pas d'accord avec cette conception
plutôt réduite de nos droits. Nous ne sommes pas d'accord non plus
avec le principe d'accessibilité générale à des
ressources fauniques limitées énoncé à la page 56,
pas plus qu'avec la notion de partage égal avec l'ensemble des 6 000 000
de Québécois. Que nous resterait-il sur cette base? À peu
près rien.
Ce projet est fondé essentiellement sur les réserves
à castor créées par les fonctionnaires des gouvernements
fédéral et provincial dans les années 1940 et 1950 et qui
ont eu pour effet de réduire de façon importante les territoires
traditionnels de chasse et de pêche au profit des non-autochtones.
Nos activités sur le territoire ne se résument d'ailleurs
pas au piégeage mais nous dépendons de la chasse et de la
pêche pour notre alimentation. Nous refusons donc que les territoires
communautaires de chasse soient limités aux réserves à
castor et nous refusons d'être catalogués comme trappeurs. Nous
avons d'ailleurs entrepris de faire la cartographie de nos territoires et nous
nous en servirons pour étayer nos revendications.
En ce qui concerne la gestion des ressources fauniques en territoire
amérindien et le contrôle des activités et de
l'exploitation, nous réclamons plus que la formation et la nomination de
gardes-chasse amérindiens et nous voulons exercer notre pleine
responsabilité en tant que gouvernement local en ce domaine, sans
être subordonnés au ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
Dans son ensemble, le document ne
propose rien de neuf, il propose tout simplement le maintien du statu
quo actuel et son officialisation par une législation
appropriée.
Les autres intervenants. En raison du temps limité dont je
dispose, je passerai rapidement sur les positions anti-indiennes
défendues par plusieurs intervenants sur la question des droits
d'accès des Indiens aux ressources fauniques: associations de
pêcheurs, chasseurs, trappeurs, chroniqueurs de chasse et de pêche,
biologistes. Les interventions, qui semblent de plus en plus concertées,
tellement elles sont devenues systématiques, concernent trois types de
ressources essentielles aux Indiens: le saumon, le caribou et les animaux
à fourrure.
Le saumon. Beaucoup a été dit et écrit depuis
quelques années sur ce qu'on appelle souvent la guerre du saumon. La
plupart d'entre vous, vous connaissez sans doute le rôle qu'ont
joué certains chroniqueurs de chasse et de pêche avec leurs
écrits à caractère raciste et mal documentés. On
retrouve aussi cet état d'esprit au sein de certaines associations de
pêcheurs sportifs au saumon qui ont pris récemment des positions
violemment anti-amérindiennes. Je fais référence en
particulier aux mémoires des associations et regroupements
québécois intéressés à la pêche
sportive du saumon de l'Atlantique relativement aux revendications des
Amérindiens du Québec. Ce texte, qui se veut le résultat
d'une recherche approfondie et de la consultation avec plusieurs juristes
experts, est truffé, selon nous, d'erreurs ponctuelles, d'affirmations
gratuites et révèle une méconnaissance des autochtones, de
leur histoire et de leurs droits.
La revue de la situation du saumon dans les différentes
rivières de la Gaspésie et de la Côte-Nord est à
faire mourir, pour quelqu'un qui connaît un tant soit peu les
données locales. Les arguments apportés sont le plus souvent de
l'ordre du oui-dire et du qu'en dira-t-on. À titre d'exemple, il faut
avoir passablement de culot pour affirmer que le saumon est disparu de la
rivière Bersimis au début des années 1960, à cause
des Montagnais de cette même réserve, alors que même
Hydro-Québec reconnaît aujourd'hui que c'est la construction du
barrage qui en est la cause. Ce genre d'affirmation n'a de
crédibilité auprès de personne, sauf de ceux qui ont tout
intérêt à ce que les Amérindiens soient tenus
éloignés des rivières à saumon, en faveur de la
pratique de leur loisir préféré, la pêche au saumon
à la mouche. À titre d'information, je sais qu'au gouvernement du
Québec on entame un processus de négociation. Lorsqu'on parle de
revendications autochtones, surtout du côté
attikamègue-montagnais, à l'heure actuelle, on revendique cinq
rivières sur une possibilité de 110 au
Québec. Encore là, je pense que le gouvernement du
Québec a pris l'initiative justement d'envoyer son escouade
anti-émeute de la Sûreté du Québec il y a deux ans,
ceci à titre d'information personnelle.
Dans le même ordre d'idées, la revue Salmo-salar
publiée par l'Association des pêcheurs sportifs au saumon du
Québec, a présenté dans son numéro de
décembre 1981 un article carrément raciste sous le titre: Des
Indiens qui n'en sont pas. C'est dans le but de discréditer les
Montagnais des Escoumains qui réclament des droits de pêche au
filet à l'embouchure de la rivière du même nom.
Certaines personnes prétendent que les Indiens massacrent le
saumon. Elles oublient de mentionner que nous ne prenons en fait que 3% de tout
le saumon qui se reproduit dans les rivières québécoises,
alors que les pêcheurs sportifs en prennent 10% et les pêcheurs
commerciaux 12%. Selon les statistiques du gouvernement du Québec de
1980, citées dans Presse libre en septembre 1981, les plus grands
utilisateurs de la ressource saumon québécoise sont en fait les
pêcheurs du Groenland et de Terre-Neuve qui en capturent respectivement
25% et 26%. Mais comme ils sont loin et inaccessibles, il est plus facile de
s'attaquer aux Indiens et d'en faire les boucs émissaires.
Le caribou. À la suite de comptes rendus de supposés
massacres de caribous par des autochtones des Territoires du Nord-Ouest, on a
tenu à soulever un fait semblable au Québec, plus
précisément sur la Côte-Nord, dans la région de
Sept-Îles. Cette fois les avancés du chroniqueur se fondaient sur
les déclarations d'un garde-chasse ainsi que sur l'article d'un
biologiste publié dans la revue Sentiers en 1981. Par inférence,
mais sans preuve directe, l'auteur de l'article attribue la diminution des
caribous de la Côte-Nord essentiellement à la surchasse des
Montagnais. Nous connaissons maintenant bien certains types de raisonnement.
L'augmentation de la population des caribous, comme c'est le cas à la
rivière Georges, est attribuable à la vigilance des biologistes,
alors que sa diminution est sans doute attribuable aux Indiens. J'inviterais
donc certains biologistes à être plus prudents lorsqu'ils font des
exposés soi-disant scientifiques en ce qui concerne le déclin des
caribous. Nous leur suggérons d'accorder une attention toute
spéciale aux causes industrielles de la diminution du caribou et
d'autres ressources, par exemple, les coupes de bois, les voies de chemin de
fer, les barrages, les réservoirs, la pollution, les pluies acides,
etc.
Nous pensons aussi qu'ils devraient douter un peu plus de la
validité de leur inventaire aérien et des projections de
populations qu'ils en tirent. Nous les invitons aussi à venir nous
consulter, car nous
croyons qu'ils pourraient apprendre beaucoup de la bouche de nos vieux
chasseurs sur les caribous et autres espèces qu'ils étudient. En
tant qu'universitaires, ils semblent avoir du mépris pour nos
connaissances empiriques, mais nous leur ouvrons quand même la porte dans
le but d'échanger nos connaissances. Nous venons justement de poser des
jalons pour qu'une collaboration s'établisse dans le cadre d'un projet
sur l'exploitation des ressources fauniques par les Montagnais de la
Basse-Côte-Nord que nous devrions réaliser conjointement avec le
Centre des études nordiques de l'Université Laval.
Le Président (M. Bordeleau): Je m'excuse. Je vous signale
que ça fait 20 minutes que vous parlez. Est-ce que je peux vous demander
de conclure? Je peux vous donner quelques minutes pour terminer votre
exposé.
M. Simon: Disons, en gros, que je vais parler de la
reconnaissance de nos droits d'exploitation des ressources fauniques et des
négociations avec le gouvernement du Québec, pour conclure le
texte.
Il y a quelques mois, les représentants du conseil
attikamèque rencontraient le premier ministre, M. René
Lévesque, dans le but de renouer les négociations sur les droits
territoriaux, négociations qui avaient été amorcées
en septembre 1980 et qui avaient achoppé en cours de route pour
différentes raisons, dont les opérations policières sur
certaines rivières à saumon et l'imprécision
gouvernementale relative à certains principes de base contenus dans nos
revendications.
Trois de ces principes concernent d'ailleurs directement nos territoires
et leurs ressources fauniques. En voici la teneur:
Principe no 5. Nous nous opposons à tout nouveau projet
d'exploitation des ressources de nos territoires par les membres de la
société tant et aussi longtemps que nos droits n'auront pas
été reconnus.
Principe no 6. Nous voulons contrôler à l'avenir
l'exploitation de nos territoires et de leurs ressources.
Principe no 7. Nous voulons favoriser principalement le
développement des ressources renouvelables de nos terres par rapport
à celui des ressources non renouvelables.
Appliqués plus spécifiquement au domaine de l'exploitation
des ressources fauniques sur nos territoires, ces principes peuvent se traduire
par les positions suivantes: premièrement, aucun projet de
développement des ressources affectant directement ou indirectement les
ressources fauniques de nos territoires ne doit se faire sans notre
consentement; deuxièmement, sur les territoires ancestraux, les
Attikamèques et les Montagnais doivent avoir la priorité et au
besoin l'exclusivité de l'exploitation des ressources fauniques. Les
exploitants non autochtones ne pourront y avoir accès qu'à la
condition qu'un surplus de ressources non exploitées ait
été clairement déclaré sans danger pour
l'équilibre écologique; troisièmement, que les
Attikamègues-Montagnais exercent la pleine responsabilité en tant
que gouvernement local indien en ce qui concerne la réglementation et le
contrôle des activités de chasse, de pêche, de trappe par
des Indiens ou des non-Indiens; quatrièmement, qu'en conséquence,
des Attikamègues et des Montagnais soient formés à la
connaissance et à la gestion des ressources fauniques de leurs
territoires ancestraux en tenant compte des connaissances acquises par les
vieux chasseurs; cinquièmement, la mise sur pied d'un programme de
soutien des activités traditionnelles.
Voilà, en gros, quelques principes de base sur lesquels
s'appuieront nos négociations dans le secteur de l'exploitation des
ressources fauniques. Comme par les années passées, une
négociation plus limitée est engagée en ce qui concerne
les rivières à saumon. Ce sont, en gros, les divers points que
nous voulions faire valoir à cette commission parlementaire. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci beaucoup, M. Simon,
d'avoir résumé un peu la pensée de votre mémoire.
M. le ministre.
M. Chevrette: Vous me permettrez d'abord, M. Simon, de vous
trouver fort habile, puisque vous profitez de la commission parlementaire qui,
en fait, doit s'interroger sur la Loi sur la protection de la faune
elle-même pour traiter de vos négociations et passer vos messages.
C'est votre droit le plus strict. Malheureusement, je dois vous dire que je
n'ai pas le mandat, et surtout que je n'aurai pas l'indélicatesse de me
mêler de vos négociations puisque je n'en ai pas le mandat. Au
contraire, je dois souhaiter toutes les chances possibles pour que cette
négociation aboutisse dans les meilleurs délais.
Que je sache, vous êtes en train de préparer votre
mémoire, je pense, avec la collaboration des deux paliers de
gouvernement, en termes de subventions, pour tâcher de remettre au
coordonnateur vos positions respectives avant de vous réinstaller
à la table de négociation. C'est bien le portrait exact qui
existe?
M. Simon: À l'heure actuelle, disons que, quand on parle
de revendications à notre niveau, c'est-à-dire au niveau du
conseil attikamègue, c'est qu'il y a beaucoup de choses qui se sont
déroulées dans l'espace de deux ans. Je sais qu'il y a eu des
accrochages avec les mandataires, surtout
ceux du gouvernement du Québec, quant au processus à
amorcer. Puis, dernièrement, je sais que, de notre côté,
nous avons nommé le négociateur qui va représenter les
intérêts des Attikamègues et des Montagnais. On pense bien
que le processus va s'amorcer dans les plus brefs délais. Mais, la
raison pour laquelle nous nous sommes présentés à la
commission, c'est qu'il y a bien des choses qui se passent lorsqu'on parle de
négociation. Notamment lorsqu'on a fait part de nos principes au
gouvernement du Québec, le gouvernement nous a répondu qu'on
n'avait aucun droit de veto sur quelque développement que ce soit. Alors
nous, en tant qu'Attikamègues et Montagnais, ça nous laisse dans
une situation quelque peu délicate. Ce qui arrive, je pense, c'est qu'on
fait une présentation devant cette commission. S'il y a des
modifications à la Loi sur la conservation de la faune ou s'il y a un
réaménagement du territoire sur lequel on veut revendiquer, la
même réponse va nous revenir d'ici un an ou deux, on dira: II y a
eu une commission parlementaire qui a siégé là-dessus,
à ce moment-là, vous auriez peut-être dû
émettre votre opinion. C'est le genre de réponse qu'on
reçoit à l'heure actuelle des gouvernements.
M. Chevrette: Je ne sais pas si ça peut vous rassurer
mais, tel que j'interprète les directives, les normes et les lois qui
sont édictées, ce serait l'entente dont vous conviendriez qui
prévaudrait. C'est ce qu'on me dit, en tout cas, de vous transmettre
comme réponse.
Vous savez fort bien, de toute façon, qu'en 1982, on doit
s'interroger sur la faune elle-même. Elle n'est pas aussi abondante
qu'elle l'était et la clientèle augmente, vous l'avez
souligné vous-même dans votre mémoire. Vous dites que M.
Lévesque a, dans un premier temps, affirmé que vous aviez des
droits historiques et, dans un deuxième temps, les a niés. Je
suppose que ça fera partie de vos propres négociations entre vous
et le SAGMAI. Je ne peux que vous souhaiter bonne chance concernant vos
négociations comme telles.
En ce qui concerne le MLCP, cependant, je voudrais vous annoncer tout de
suite que, quant à nous, nous sommes prêts à amorcer
dès maintenant le programme de recherche qui nous permettrait
d'évaluer scientifiquement le potentiel biologique de chacune des
rivières de la Côte-Nord et nous souhaitons toujours que vous y
soyez très impliqués. C'est à vous de nous faire
connaître votre position sur le sujet, si vous êtes
intéressés ou pas. Également, nous aimerions
procéder à la création d'un groupe de travail
composé de non-autochtones et de Montagnais, dans le but de
déterminer le mode de participation des Montagnais à la gestion
des rivières à saumon de la Côte-
Nord. Si cela vous intéresse toujours, j'aimerais que vous nous
le fassiez savoir.
Enfin, on pourrait également amorcer des discussions entre le
ministère et le CAM en vue d'établir le plan de pêche au
saumon de 1983-1984 pour les Montagnais de la Côte-Nord. Dès que
vous nous ferez signe, il nous fera plaisir d'amorcer ces discussions avec
vous. (11 h 30)
M. Simon: J'aurais un commentaire, M. le ministre, à ce
sujet. Peut-être que je n'ai pas été assez explicite tout
à l'heure. Quand on parle de revendications autochtones, pour nous, il y
a tout le concept des droits aboriginaux à définir. Maintenant,
c'est ce point qui a achoppé au cours des discussions que nous avons
eues antérieurement avec le gouvernement du Québec et le
gouvernement fédéral aussi. Tant et aussi longtemps que la notion
de droits aboriginaux et la notion traditionnelle de territoires ancestraux
attikamègues et montagnais ne seront pas définies, on ne pourra
jamais arriver précisément à des ententes, un peu dans le
sens que vous en parliez, par la formation de comités, etc.
Pour nous, la négociation que l'on veut entreprendre a un
caractère politique. Ce qui arrive à l'heure actuelle, quand on
parle de négociation, c'est qu'on fait face à des fonctionnaires
qui, eux, n'ont d'autre choix que d'appliquer la réglementation qui est
en place actuellement. C'est un point qui nous touche personnellement et l'on
veut aussi amorcer le processus dans le sens que je le dis, c'est-à-dire
d'essayer dans la mesure du possible de politiser la négiciotion du
conseil attikamègue et de toucher à toute la question des droits
et de la définition des territoires indiens.
M. Chevrette: On a déjà conclu des ententes dans
certains domaines. Je pense, par exemple, à la signature d'une entente
avec les bandes montagnaises de Sept-Îles et de Maliotenam.
Une voix: Maliotenam.
M. Chevrette: Cela a été fait. On peut faire encore
des ententes sans préjudice pour vos négociations. Je pense que
cela clarifierait des choses à court terme, ne croyez-vous pas? En
précisant au départ, M. Simon, que ce serait sans
préjudice à la négociation entre le CAM et le SAGMAI.
M. Simon: Je ne veux pas trop critiquer le gouvernement du
Québec, mais quand on parle de différents ministères avec
lesquels on aurait des points à transiger, c'est toujours la même
argumentation qui revient. On est appelé en tant que politiciens, en
tant qu'élus des populations attikamègues et montagnaises
à transiger avec des
fonctionnaires qui, comme je le disais tout à l'heure, ont des
directives précises à respecter. Pour nous, c'est très
difficile de créer des précédents dans ce sens. Je sais
qu'il y a eu des semblants d'ententes, notamment pour les rivières
à saumon concernant la Natashquan. On remarque que, lorsqu'on parle
d'ententes sur les rivières à saumon, l'impression que j'ai,
c'est qu'on essaie de restreindre justement le champ d'activité que les
Attikamèques veulent demander quand on parle de négociation.
À l'heure actuelle, on nous donne des parcelles de
rivières, en nous disant: Contentez-vous de ce qu'on vous donne, avec
telle réglementation. Vous avez tant de journées à
respecter, vous avez tant de filets à poser; c'est la
réglementation qu'on vous fixe. Quand on décide de parler de
revendications d'une façon générale, les ministères
reviennent en nous disant: Cela ne relève pas de notre domaine, cela
relève d'un autre palier. Mais quel palier? Quelle sera la forme
utilisée par le gouvernement du Québec? Est-ce que ce sera un
comité spécial qui sera créé pour justement
clarifier la notion de droits? Justement, les ententes dont on parle à
l'heure actuelle ne se ramènent pas à des parcelles de
rivières à saumon. Il y a certaines bandes qui demandent d'avoir
le contrôle total d'une rivière. Ce sont tous des points qui
achoppent lorsqu'on parle de revendications avec les gouvernements.
M. Chevrette: N'est-il pas exact qu'au cours des quatre ou cinq
dernières années il y a eu respect intégral des secteurs
de pêche, par exemple?
M. Simon: Qu'est-ce que vous entendez par respect
intégral?
M. Chevrette: On a respecté les ententes qu'on avait
conclues. On a conclu des ententes avec vous? On avait conclu des ententes sur
certains territoires, sur certains secteurs...
M. Simon: Disons que pour les secteurs, ce sont uniquement ceux
qui concernent les rivières à saumon.
M. Chevrette: Oui, d'accord, c'est exact, mais est-ce que cela a
été respecté de la part de mon ministère?
M. Simon: Cela a été respecté d'une certaine
façon. Je sais qu'il y a eu entente mutuelle entre les parties,
c'est-à-dire entre les bandes impliquées et le ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Comme je vous le dis, il y a des
faits qui accrochent là-dedans. Je vais vous donner un exemple bien
précis. Si on parle de la population de la Romaine, qui compte 600
personnes, à côté d'elle, il y a une rivière qui
appartient à la Québec North Shore. La corporation comme telle a
sept actionnaires et elle a réussi à faire passer au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche le message
suivant: Ce que vous allez dire aux Indiens, c'est que le nombre de prises de
saumon va être égal au nombre de prises que les sept actionnaires
vont avoir. Si, les sept actionnaires prennent 100 saumons, c'est 100 saumons
qui vont être autorisés pour une population de 600 personnes. Ce
sont toutes des choses qu'il va falloir éclairer dans l'avenir.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le ministre?
M. Chevrette: Que je sache, on ne serait pas rendu là,
mais on serait prêt à discuter avec vous autres
là-dessus.
M. Simon: C'est-à-dire que, dans les discussions, qu'on a
amorcées depuis deux ans, surtout pour la rivière Romaine, je
sais qu'on a soulevé ce point, c'est impensable de faire le partage du
saumon entre sept actionnaires, et une population, montagnaise qui veut vivre
son mode de vie tradionnel. Elle regroupe 600 personnes, cela fait deux ans,
qu'on en parle, et il n'y a jamais eu de solution concrète de
proposée.
M. Chevrette: Je réitère, M. Simon, que, sans
préjudice, et j'insiste, sans préjudice aux négociations
entre le CAM et le SAGMAI, comme ministère, on est prêt à
s'asseoir avec vous autres et à discuter, quitte à se rencontrer
pour discuter d'un cadre de discussion bien précis, on est ouvert
là-dessus, mais, je pense qu'on aurait avantage au moins à court
terme à régler certaines situations.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député d'Orford. M. le député de Hull.
M. Rocheleau: Ah bon! Vous êtes revenu dans mon
comté!
Le Président (M. Bordeleau): Non, mais j'avais compris que
c'était M. le député d'Orford qui désirait avoir la
parole.
M. Rocheleau: Je voudrais profiter de l'occasion pour remercier
le conseil et son président, M. Simon.
Il est bien évident qu'on n'a pas traité tellement de
l'avant-projet de loi, non plus que des autres recommandations; ce qui vous
préoccupe, c'est certainement la protection de la faune. Je crois que le
mémoire de SACERF nous a démontré très clairement
hier soir que si on se doit modifier les politiques du ministère en ce
qui concerne la chasse, la pêche et la protection de la flore,
les grands responsables ne sont certainement pas vous. Par contre, nous
sommes particulièrement intéressés à certaines
revendications que vous avez faites et que vous faites constamment
auprès du gouvernement; malheureusement, pour l'instant, nous ne sommes
pas au pouvoir. Quand nous le serons, ce sera peut-être plus facile
d'avoir des rapports plus concrets avec vos organismes.
Je tiens à vous remercier. Nous aurons l'occasion d'entendre
d'autres groupes représentant aussi d'autres conseils et d'autres
membres de réserves indiennes. Cela pourrait nous donner une certaine
indication sur vos revendications. Nous vous offrons notre collaboration. Si on
n'a pas la même influence que le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche auprès du premier ministre, remarquez tout de même
que si on peut vous être d'un aide quelconque, nos services vous sont
offerts.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie, M. Simon,
ainsi que les personnes qui vous accompagnent. On me dit qu'en haut, on a
besoin du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour les
crédits; je suspendrai donc la séance pour une demi-heure. On
devrait reprendre nos travaux à 12 h 10, avec le Regroupement des
organismes nationaux du loisir du Québec, qui, j'espère, sera
ici, à ce moment-là.
La commission suspend ses travaux jusqu'à 12 h 10.
(Suspension de la séance à Il h 39)
(Reprise de la séance à 12 h 57)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, mesdames et
messieurs, s'il vous plaît:
La commission reprend donc ses travaux qui ont été
suspendus tantôt. Je m'excuse auprès des personnes qui attendent,
sauf que ce n'est pas de notre ressort ni de celui du ministre, non plus que
des gens de l'Opposition, en tout cas pour ce qui est de la commission.
M. Chevrette: Ils ont posé des questions trop longtemps.
C'est leur faute.
M. Houde: Qu'est-ce que vous voulez?
Le Président (M. Bordeleau): De toute façon, on va
reprendre immédiatement, parce qu'il ne faut pas non plus accentuer le
retard qu'on a déjà pris. Je demanderais aux gens du Regroupement
des organismes du loisir du Québec qui, je pense, sont
déjà là, de nous présenter leur mémoire
immédiatement. On verra dans le temps si on continue ou de quelle
façon on suspend nos travaux cet après-midi.
M. le ministre.
M. Chevrette: Je demanderais à l'Opposition de ne pas
réclamer l'ajournement à 13 heures, mais qu'on donne notre
consentement immédiatement pour que le RONLQ présente son
mémoire. Comme ce sont des gens disponibles, on viendrait les interroger
après la période des question cet après-midi.
M. Houde: Je suis entièrement d'accord à vous
entendre et à dîner après.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Si c'était toujours comme cela, cela irait
bien.
RONLQ
Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. Bélec?
C'est cela?
M. Bélec (Pierre): Oui.
Le Président (M. Bordeleau): Si vous voulez nous
présenter les personnes qui sont avec vous, et y aller de votre
mémoire.
M. Bélec: Je vous présente M. Pierre Trudel, qui
est le directeur général de la Fédération
québécoise du canot-camping, et M. André Daigle, qui est
l'agent de développement de la table du plein air du regroupement. De
fait, le mémoire que nous vous présentons, c'est au nom des
organismes qui forment le secteur du plein air. Il y en a un assez bon nombre,
comme vous le voyez, c'est-à-dire l'Association québécoise
pour le tourisme équestre et l'équitation de loisir;
l'Association québécoise des groupes d'ornithologues amateurs: la
Fédération des sociétés d'horticulture et
d'écologie; la Fédération québécoise de
camping et de caravaning; la Fédération québécoise
de la montagne; la Fédération québécoise de
naturisme; la Fédération québécoise des
activités subaquatiques; la Fédération
québécoise du canot-camping; Sentiers-Québec; la
Société québécoise de spéléologie; la
Société québécoise du plein-Air;
Vélo-Québec; les Scouts et Guides du Québec;
l'Organisation pour le tourisme étudiant au Québec et
l'Association des camps du Québec. Cela fait pas mal de monde. Toujours
est-il qu'ils sont d'accord avec ce qu'on va vous dire.
Premièrement, pour nous, il s'agit d'une fréquentation de
la nature qui soit douce et harmonieuse et la moins perturbatrice possible du
milieu naturel. Qu'est-ce que nous venons faire à une commission
parlementaire s'occupant de la loi de la faune? C'est que, tout d'abord, nous
ne
sommes pas contre la chasse et la pêche ni opposés à
la chasse et à la pêche et que, d'autre part, dans la conception
que nous avons de la fréquentation de la nature, c'est-à-dire du
plein air, nous englobons l'observation de la faune et de la flore, ce dont il
a été question amplement ce matin, les activités de
randonnées extensives en nature, la pêche et la chasse de
subsistance lors de ces randonnées et, de plus en plus, nous
l'espérons, grâce à des contacts avec les organisations de
chasse et de pêche, avec des gens qui sont d'accord sur une façon
décloisonnée d'envisager la chasse et la pêche. Nous
croyons d'ailleurs que les chasseurs et les pêcheurs ont les mêmes
intérêts que les autres amateurs de plein air. Le document sur les
habitats fauniques associe heureusement et il a bien raison les
écologistes à ces deux groupes de chasseurs et pêcheurs,
d'une part, et d'amateurs de plein air d'autre part et je dirais aussi
malheureusement, d'autre part, parce que nous les voyons ensemble. (13
heures)
L'essentiel selon nous n'est pas une question de dénomination ou
de clocher, c'est de faire comprendre à ces trois groupes qu'ils ont les
mêmes intérêts et ceci dans tous les sens de l'expression.
Tous, chasseurs, pêcheurs et amateurs de plein air et écologistes
s'intéressent à la nature, cette réalité qu'on ne
peut pas couper en petits morceaux. De plus, ils ont intérêt
à s'associer de plus en plus pour préserver la nature. C'est
à ce rapprochement que nous nous sommes employés depuis quelques
années en élargissant le concept de plein air pour en venir
à lui faire désigner l'ensemble des relations harmonieuses et
actives qu'une personne entretient avec la nature à des fins
récréatives et éducatives.
En ce sens, nous croyons que le comité sur les habitats fauniques
pose un jalon historique important quand il place aussi l'observation de la
faune sur le même pied que le prélèvement. Nous croyons que
c'est un geste porteur d'avenir qui, à lui seul, a une grande valeur de
protection pour la faune elle-même. En effet, si cette attitude devient
officielle et s'il devient valorisé, reconnu publiquement et socialement
d'entrer dans le milieu naturel autant pour observer que pour pêcher,
alors les comportements de milliers de personnes seront progressivement
modifiés. Le chasseur revenu bredouille qui aura au moins vu son orignal
reviendra moins frustré. Le pêcheur qui se sera
intéressé toute la journée aux évolutions des
oiseaux aquatiques oubliera qu'il ne rapporte pas son quota de pêche et
il aura passé une bonne journée. On verra davantage de femmes et
de familles dans nos réserves. En définitive, la faune
québécoise sera appréciée plus globalement et par
plus de gens. C'est ce que nous pensons que peut produire une approche globale
de plein air dans ce cas particulier de la récréation
reliée à la faune.
Deuxième chose que nous voudrions dire en plus de notre
conception de la relation avec la nature, nous voulons dire oui au rapport du
comité sur les habitats fauniques. Selon nous - et je vous cite notre
page 1 -"il était temps de remplacer la préoccupation
anachronique pour la préservation des seules espèces dites
nobles, pour se préoccuper enfin de toutes les espèces sauvages
et principalement, non seulement des animaux individuellement ou en groupe mais
de leurs habitats." J'ajouterais que nous sommes spontanément en accord
avec ce que vous ont dit ce matin les gens de l'Association des biologistes
pour inclure dans un projet de protection également la flore, puisque,
si l'on parle de l'observation comme étant une activité
importante, l'observation de la faune et l'observation de la flore en milieu
naturel doivent spontanément se compléter. On ne pourrait pas
concevoir une approche un peu écologique sans associer les deux ensemble
puisqu'elles constituent des chaînes alimentaires et ont des rapports
quotidiens.
La troisième de nos demandes est qu'il nous semble
nécessaire d'avoir le plus tôt possible une typologie des
territoires naturels et des modes de conservation de ces territoires dans leur
intégrité qui soient appropriés. La carte routière
du Québec a beaucoup de taches vertes. Nous voulons que ces taches
vertes demeurent sur la carte routière du Québec, que cela
s'appelle des parcs ou que cela s'appelle des réserves; pour faire
image, je pense que c'est cela notre position. La Loi sur les parcs nous fait
certainement avancer dans la bonne direction puisqu'elle protège
l'intégrité et la qualité des parcs classés. Mais,
sur la quarantaine de parcs et réserves actuels et non classés,
on peut espérer qu'une vingtaine seront classés parcs de
récréation et parcs de conservation. Qu'arrivera-t-il du reste?
Pour l'instant, il n'existe rien de tel, à notre avis, dans le cas des
réserves de chasse et de pêche. Il nous semble urgent de
protéger le territoire des réserves par une loi. Un
arrêté en conseil -les législateurs en conviendront - ne
constitue pas, pour un territoire, la protection la plus sûre. Il est
important d'établir une typologie des réserves, précisant
leur vocation, leur choix effectif et la protection de leur territoire. Cela
exige, selon nous, une réflexion approfondie et un débat public
à tenir le plus tôt possible, car cette commission est comme une
entrée en matière dans le vaste domaine de la faune, mais tous
les sujets - parce qu'il n'y a pas de proposition concrète à cet
effet - comme celui-là ne peuvent être traités ni
débattus de façon claire. Je pense qu'il faut absolument y
revenir.
La déclaration ministérielle de juin de M. Lessard parle
globalement de trois types
de territoires qui sont actuellement classés réserves de
chasse et de pêche: ceux qui présentent une richesse faunique
indéniable et où la récréation intensive, quant
à nous, pourrait se pratiquer, tout comme dans les parcs de
récréation et de conservation on pratique la pêche;
également, les territoires à vocation plus nettement
récréative entendue de façon globale et d'un moindre
potentiel faunique. Alors, ces territoires, quant à nous, doivent
être protégés et sont également importants, d'autant
qu'on les trouve assez souvent près des villes. Qu'on pense à des
choses classées réserves de chasse et de pêche, comme le
parc de la Côte-Sainte-Catherine, par exemple. Enfin, il y a certainement
des zones de protection absolue.
Déjà là, on a un zonage ou une typologie initiale
et je pense qu'il faudrait qu'elle soit développée. On pourrait
aussi relier à cette opération de réflexion sur la
protection des espaces récréatifs d'autres types de zonage,
comme, par exemple, un plan de préservation des rivières à
caractère patrimonial, des types de zonage récréatifs
pouvant s'appliquer, sans léser les droits des propriétaires,
à des terres privées, mais qui ont un intérêt
récréatif. Dans ce sens, il nous faut, à notre avis, de
nouveaux instruments d'intervention. Après un bon début, qui est
celui de la politique des parcs du Québec, un autre bon début,
qui est cette politique des habitats fauniques, je pense qu'on devrait se
mettre à l'invention d'instruments pour diversifier notre typologie des
espaces récréatifs et les protéger d'une façon
légale.
D'ailleurs, je voudrais rappeler au ministre que le programme du parti
gouvernemental, à ce chapitre précisément des
réserves de chasse et de pêche, dans sa nouvelle formulation,
demande qu'il y ait conservation dans leur limite actuelle des réserves
de chasse et de pêche et, deuxièmement, pousse tout à fait
spontanément dans le sens de la gestion déléguée de
ces territoires, puisque - en tout cas, nous le comprenons de la même
façon -les ressources du ministère ne sont pas indéfinies
et il se peut fort bien que la gestion déléguée soit la
forme souhaitable ou la seule possible pour maintenir quelque opération
d'accueil et d'activité sur ces territoires. Il nous semble important
que, qui que ce soit qui les gère, ils soient protégés le
plus possible dans leur limite actuelle.
J'en viens au quatrième point qui est celui de la gestion
déléguée. À l'heure actuelle, une certaine
variété d'organismes gèrent les territoires publics
à des fins récréatives. On connaît les ZEC, on
connaît les pourvoiries. De notre côté aussi, nos membres,
nos clubs, nos organismes, comme les bases de plein air, proposent au grand
public une fréquentation selon l'approche globale dont je vous ai
parlé tout à l'heure. Les résultats économiques de
cette approche globale n'ont pas été calculés aussi bien
que, par exemple, pour le phénomène de la motoneige, des armes
à feu ou des grosses embarcations. Les modèles
économétriques qui ont été développés
dans le passé pour juger de l'efficacité économique de tel
ou tel genre d'activité, nous semble-t-il, ont tous été
développés à partir des gros achats que les gens faisaient
pour pratiquer leur activité. Quand il s'agit d'une
récréation massive mais n'utilisant pas de véhicules
coûteux ou de moyens coûteux, on n'a pas vraiment calculé ce
que cela signifiait. On commence à le faire; d'ailleurs, l'observation
de la faune dans le cadre de ce document de travail sur les habitats fauniques
pose des jalons dans ce sens. C'est une direction dans laquelle nous croyons
qu'il faut aller. Mais nous pensons qu'il faut davantage regarder de
près toute cette fréquentation de la nature selon une approche
globale et mesurer l'ensemble des petits impacts économiques, qui sont
très nombreux et qui sont ceux d'une fréquentation familiale,
d'une fréquentation toute simple et douce de la nature qui, à
notre avis, mais sans qu'on puisse l'affirmer, représentent des
retombées économiques au moins aussi grandes, sinon davantage,
que celles d'activités spécifiques calculées à
partir des gros achats que font les gens pour les pratiquer.
Dans ce sens, par exemple, la gestion déléguée de
certains territoires actuellement classés réserves de chasse et
de pêche intéresserait grandement un certain nombre d'organismes
que nous représentons. Que ce soit directement une
fédération, que ce soit une association régionale ou un
club local, que ce soit une base ou un centre de plein air ou un service plein
air, il y a un certain nombre d'organismes qui sont intéressés
par ça. Je prends comme exemple la réserve La Vérendrye.
Dans la réserve La Vérendrye, l'activité dominante, si je
ne me trompe, d'après les statistiques que j'ai pu consulter au cours
des dernières années, c'est le canoë-camping. Or, il y a des
associations, il y a une fédération qui serait prête
à gérer cette réserve. Je vous donne un autre exemple: le
parc Kénogami au Saguenay. Il y a une base de plein air, qui s'appelle
la base de plein air CEPAL et qui est un intervenant touristique majeur dans la
région, qui attend la réponse à l'effet de gérer le
parc Kénogami et ces organismes seraient tout à fait
désireux de les gérer en respectant les limites de ces
territoires et en faisant en sorte qu'ils demeurent vraiment sous l'empire de
l'État et d'une loi qui en préserve absolument les limites. Dans
le fond, c'est une offre de services que nous vous faisons ce matin.
Nous pensons également qu'à l'égard des autres
types de gestionnaires délégués
que sont les ZEC et les pourvoiries, il y aurait lieu, dans la nouvelle
rédaction de la loi, d'élargir les mandats et d'élargir
les conceptions à autre chose que le service de chasse et de
pêche. Nous pensons que la loi devrait indiquer à cet effet des
voies de développement et des mandats possibles que ces organismes
pourraient assumer dans le sens du plein air. À notre avis, tout milite
en ce sens. Je vais vous donner un certain nombre de raisons.
Premièrement, il y aurait une meilleure éducation du
public à voir plus grand et à retirer de la fréquentation
de la nature des expériences récréatives plus
satisfaisantes. On aurait dans ces territoires une fréquentation plus
grande des femmes et des familles. On assurerait une protection accrue de
l'environnement et de la faune parce que les gens qui iraient là ne
chercheraient pas qu'à tuer ou qu'à prendre des poissons. Nous
n'avons rien contre cela, mais on peut aussi, tout en allant chasser, chercher
autre chose et, comme je le disais tout à l'heure, quand on n'a pas
tué son chevreuil ou quand on n'aura pas rapporté son quota, on
en revient quand même satisfait. À notre avis, il y aurait une
diminution de la pression de prélèvement.
Le développement économique des organismes qui font de la
gestion déléguée nous semblerait plus prospère dans
la mesure où ils seraient mandatés, autorisés,
incités à élargir l'éventail des activités
qu'ils proposent au public qui viendrait sur les territoires. En ce sens, la
modification du permis de pourvoirie allant vers l'hébergement nous
paraît une clarification heureuse.
Pour terminer sur une anecdote, ça éviterait des
situations parfois quelque peu ridicules comme celle d'un pourvoyeur voulant
empêcher le passage sur son territoire d'un sentier de randonnée
pédestre et, évidemment, de gens voulant y marcher. Alors,
grâce à la collaboration intelligente, je pense, des
fonctionnaires impliqués, il y a eu ou il y aura bientôt une
entente à ce sujet, mais, malheureusement, il semble que la seule
entente possible avec ce pourvoyeur en particulier - c'est tout près de
votre comté, M. le ministre; il s'agit du service de plein air de la
Mattawinie et d'un pourvoyeur de la région - il faudra que le territoire
du pourvoyeur soit restreint parce qu'il ne peut pas comprendre.
En tout cas, nous pensons qu'il y a des intérêts communs
entre tous ces gens. Nous nous employons à les rapprocher plutôt
qu'à les dénoncer. À notre avis, la loi et la politique
devraient faire quelque chose pour que tous ces gens sentent qu'ils ont les
mêmes intérêts et qu'ils travaillent davantage ensemble dans
le sens de la protection et de la récréation globale en nature.
C'est la contribution que nous avons voulue faire à la commission.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Bélec. Je me
demande s'il ne serait pas plus intelligent de continuer quelques minutes en
posant les questions immédiatement plutôt que de vous faire
revenir à 16 heures. Je fais la suggestion, bien sûr, et les
membres de la commission sont toujours...
M. Houde: Je pourrais poser une question?
Le Président (M. Bordeleau): Oui; directement ou
après, M. le ministre?
M. Houde: Non, non. À lui...
Le Président (M. Bordeleau): Oui? M. le
député de Berthier.
M. Houde: Est-ce que vous êtes ici pour
l'après-midi? Est-ce que vous êtes prêt à dîner
ici sans trop vous en imposer?
M. Bélec: ...
M. Houde: Pourquoi? C'est parce que j'ai un caucus à 14
heures et que je n'ai pas dîné. Mais, si vous êtes pour
repartir après, on va vous passer tout de suite.
M. Bélec: Nous repartirions vers Montréal pour y
travailler.
Une voix: Vous n'avez qu'à répondre qu'il faut que
vous partiez tout de suite après.
M. Houde: Je veux être honnête, mais je voudrais
qu'il soit honnête aussi.
M. Bélec: De fait, si vous terminez de poser des
questions, on va partir après.
M. Houde: D'accord, allez-y. (13 h 15)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Je remercie l'Opposition de sa grande
compréhension. Je voudrais d'abord me déclarer heureux du fait
que vous adhérez aux principes, aux concepts en tout cas qui se
dégagent des documents de travail auxquels vous avez eu accès,
j'en suis sûr. Je trouve intéressant en particulier ce que vous
dites de la gestion déléguée. J'aimerais vous en entendre
parler un peu davantage, même si vous nous avez donné un exemple
à partir d'une réserve faunique. Est-ce que vous verriez cette
administration déléguée à l'intérieur de
certains parcs, par exemple, pour gérer un poste d'observation ou
d'interprétation de la nature? Est-ce que vous voyez cela comme
règle générale ou si
vous reliez cela exclusivement à la conservation des
habitats?
M. Bélec: Je pense que je l'entends d'une façon
générale. Évidemment, quand vous me dites parc, dans un
parc classé de récréation ou de conservation, j'imagine
bien que le ministère voudra y déposer son image, être
présent dans un service de première ligne le plus possible et
qu'alors la gestion déléguée se fera davantage pour des
services spécialisés. Mais, s'il s'agit des réserves de
chasse et de pêche qui ne seraient pas classables comme parcs de
récréation ou de conservation, nous l'entendons plus comme de
l'ensemble des fonctions de gérance d'un territoire qui seraient
assumées par le même gestionnaire auquel serait
délégué ce mandat.
M. Chevrette: Vous parlez aussi dans votre mémoire,
à quelques endroits, vous soulevez la question du partage des
responsabilités entre mon ministère, celui de l'Énergie et
des Ressources, et celui de l'Environnement. Avez-vous des suggestions ou des
commentaires sur la nature et l'étendue d'un tel partage?
Le Président (M. Bordeleau): M. Bélec.
M. Bélec: Je dois vous dire que ma connaissance des
mandats et des réglementations spécifiques n'est tout de
même pas assez exhaustive pour me permettre des affirmations
péremptoires. Mais il m'a toujours semblé, premièrement,
que l'élargissement du mandat des agents de conservation, c'est une
chose excellente. J'inclinerais toutefois à dire que le Québec
aurait probablement avantage à avoir une seule et unique police de
l'environnement, gérée par un seul et même
ministère, et qu'à cet effet, le ministère de
l'Environnement me paraîtrait plus désigné pour exercer la
fonction de police; les fonctions biologiques, les fonctions de recherche, de
regénération ou de préservation de la faune, devraient
rester au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Je
sais que c'est une affirmation un peu grosse, mais personnellement je l'ai
toujours vue comme cela. Bien sûr, cela supposerait également -
puisqu'on parle de partage de responsabilités - que le ministère
de l'Environnement cesse de réclamer d'être le maître
d'oeuvre de la politique des espaces verts en milieu urbain, par exemple, chose
que j'ai toujours trouvée, personnellement, ridicule. Je vous dis le
fond de ma pensée. Je ne sais pas s'il y a de mes collègues qui
pourraient discuter sur cela aussi.
M. Trudel (Pierre): Je pense que cela résume passablement
notre pensée également.
M. Chevrette: Vous étendez la notion de chasse et de
pêche à celle de plein air. Je trouve cela amusant comme
idée, mais ne craignez-vous pas des conflits entre les utilisateurs?
M. Bélec: II y a toujours des conflits possibles entre
tous les types d'utilisation de la nature et on peut les multiplier d'une
façon très large.
M. Chevrette: Je vous dis cela, parce que, hier soir il y en a un
qui a témoigné ici, il était très tard; il nous
décrivait un gars avec un appareil photo, et je vous dis que cela
n'avait pas l'air à faire son affaire. Vous, vous nous arrivez ce matin
en nous disant: II faudrait peut-être étendre la notion de chasse
et de pêche à la notion de plein air également.
M. Bélec: Pour continuer dans la ligne de ce que je viens
de vous dire tout à l'heure avec beaucoup de franchise, je trouve que la
presse spécialisée de chasse et de pêche, malheureusement,
insiste beaucoup trop sur les différences et à l'encontre des
intérêts mêmes de la conservation de la nature, comme je
l'ai expliqué, je pense, tout à l'heure. L'intérêt
des chasseurs et pêcheurs et l'intérêt des autres amateurs
de la nature, c'est que la nature soit protégée. Par la suite, on
verra comment on peut arbitrer la présence en nature, et la façon
d'y aller. Je pense qu'il est de l'intérêt de la qualité de
l'expérience récréative des chasseurs et des
pêcheurs d'avoir une vue plus large et de se faire répéter
qu'ils sont plus que des gens qui vont en nature pour chercher cela.
Finalement, ce qu'on dit des gens, c'est cela qui conditionne autant leur
comportement que ce qu'ils ont en dedans d'eux. Si vous vous mettez à
dire à quelqu'un: Mais quand tu vas là, tu penses à
d'autres choses, tu regardes, tu éprouves, c'est plaisant. Cette
personne va dire: Oui. C'est tout cela qu'on veut servir quand on te sert. Je
pense que c'est une approche de psychologie sociale qu'il faut
développer à cet égard.
Pour ce qui est des conflits d'usage, il y en a autant entre les gens
qui veulent se promener en bateau à moteur ou en canot, les gens qui
veulent aller à ski, dans la forêt, et ceux qui veulent y aller
à raquette. Il ne faut pas s'arranger pour qu'ils se cognent les uns sur
les autres. Alors, il est certain qu'en exacerbant les différences on
arrive à des conflits; il y en a des conflits dans le paysage, mais
notre contribution a toujours voulu être et voudra toujours être
celle du rapprochement, parce qu'on est convaincu qu'ils ont les mêmes
intérêts. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre
question pleinement, par exemple.
M. Chevrette: Oui. Je désirerais faire
clarifier un point. Vous dites que vous voulez utiliser un territoire,
telle une ZEC ou une pourvoirie, mais que vous ne voulez pas vous obliger
à recourir aux services d'hébergement et de guide. Par contre,
vous déclarez même que les pourvoiries ne sont pas des organismes
d'hébergement; en plus de cela, vous affirmez cela. À ce
moment-là, je vous demanderais si vous croyez qu'un amateur de la nature
devrait payer quelque chose à un pourvoyeur qui entretient, par exemple,
les sentiers, les chemins, etc.
M. Bélec: Une de vos affirmations me chicote un peu. Il se
peut qu'il y ait quelques différences dans le texte, parce que c'est un
texte qu'on a fait très rapidement et qui a été...
M. Chevrette: ... compris, moi.
M. Bélec: ... amplement retouché, mais... Si vous
me permettez de le dire verbalement, comme je l'ai dit tout à l'heure,
on était content de voir la modification du sens du permis de pourvoirie
aller vers l'hébergement, parce que cela levait l'ambiguïté,
à savoir que le pourvoyeur gérait le fonds de terrain, alors que
ce n'est pas cela.
M. Chevrette: C'est exact.
M. Bélec: Le reste de la question...
M. Chevrette: D'ailleurs, ils l'ont affirmé hier soir;
c'est pour cela que j'ai peut-être mal interprété votre
texte. Hier, cela a été très clair, de la part des
pourvoyeurs eux-mêmes. Ils ne demandent pas la gérance du fonds de
terre, ils demandent l'exclusivité du droit de chasse, de pêche et
d'hébergement sur le territoire.
M. Bélec: Pour ce qui est du principe de l'utilisateur
payeur, on est d'accord avec cela à condition qu'il y ait certains
services analogues, par exemple... Je ne sais pas, Pierre, peut-être que
tu pourrais ajouter quelque chose.
M. Trudel: II est bien évident...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Trudel.
M. Trudel: ... que les amateurs, entre autres, de
canoë-camping sont bien prêts à utiliser un parcours,
l'accès au parcours, payer pour y avoir accès. On ne voudrait pas
faire revivre des exemples de la guerre des autoroutes, mais cela ne nous tente
pas d'avoir des postes à péage sur les rivières. Ce qu'on
est intéressé à faire, en collaboration avec les ZEC,
c'est d'y avoir accès aux points de départ. S'il y a des terrains
de camping "sauvage" auxquels on peut avoir accès, qui auront
été aménagés par la ZEC, on est bien prêt
à participer à ces coûts, c'est la même chose dans le
cas d'un portage entretenu. Ce qu'on ne veut pas, c'est de se faire facturer
des frais pour des services qui ne sont pas rendus. Je crois que c'est assez
normal.
M. Bélec: L'affirmation...
Le Président (M. Bordeleau): M. Bélec.
M. Bélec: ... du bas de la page 9: L'obligation d'avoir
recours aux services d'hébergement, d'une part, et aux services de
guide, on entendait par là l'hébergement en chalet, en auberge,
alors que beaucoup voudront camper. Mais il y en a beaucoup, sans doute, qui
désireraient utiliser ces services. Il faut que chacun, à la fois
celui qui fournit le service et celui qui peut l'acheter, ait dans la
tête qu'il est possible d'aller loger chez un pourvoyeur, même s'il
n'est pas d'une excursion de chasse. Cela fait faire de l'argent aux
pourvoyeurs, dans le fond.
Par contre, le principe d'utilisation du guide, je crois, de toute
manière, que c'est quelque chose de tout à fait facultatif pour
tout le monde.
M. Chevrette: Vous avancez qu'il serait intéressant de
bâtir un code de déontologie. Est-ce que vous avez
déjà des idées là-dessus? Est-ce tout simplement
une offre de collaboration que vous nous faites?
M. Bélec: En général, chacune des
fédérations s'est bâti quelque chose qui ressemble à
cela, d'une façon plus ou moins globale. Il y a déjà du
travail de fait et cela me fera plaisir de vous faire parvenir l'ensemble des
instruments qui ont été créés à cet effet;
cela pourrait, d'ailleurs, devenir assez englobant et intéressant pour
tout le monde.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. M. Bélec, est-ce
que vous êtes plus favorable à l'extension des ZEC plutôt
que des pourvoiries? Si on regarde un peu votre texte, je n'ai pas la page,
parce que cela est un résumé.
Le Président (M. Bordeleau): M. Bélec.
M. Bélec: C'est entre les deux yeux. Je vous avoue que je
ne me sens pas la compétence pour répondre réellement
à cette question. C'est une question de réalisme
économique, à mon sens; ce n'est même pas tout à
fait - je parle vraiment en profane -
une question d'accessibilité. Il me semble qu'il y a beaucoup
d'institutions, il y a beaucoup d'organisations; l'important, surtout dans le
contexte actuel, c'est qu'elles vivent bien les unes comme les autres.
M. Houde: D'accord. Ma deuxième question. Dans le cas des
territoires à vocation récréative globale, la
gérance devrait être confiée à un organisme à
but non lucratif. Est-ce que vous avez plus confiance à des
bénévoles, finalement, qu'à quelqu'un qui est payé
par Pierre, Jean, Jacques, par le gouvernement, si vous voulez?
M. Bélec: Je m'adonne à être payé par
je ne sais qui, Pierre, Jean, Jacques, cela dépend ce que cela veut
dire.
M. Houde: Non, cela veut dire que ce soient des
bénévoles ou que vous soyez payés par quelqu'un. Ce sont
des bénévoles ou bien vous êtes payés, c'est ce que
je veux dire.
M. Bélec: Oui, il y aurait, de toute façon, des
gens qui seraient payés là-dedans. Souvent, l'image qu'on a,
quand on évoque un organisme sans but lucratif, c'est une affaire qui
fait pitié et qui est vraiment mal organisée. C'est malheureux.
Moi, j'en connais qui sont très bien organisées et qui ne font
pas pitié du tout...
M. Houde: Et qui sont à but non lucratif?
M. Bélec: ... qui sont efficaces et qui sont à but
non lucratif. L'intérêt que je vois dans un organisme sans but
lucratif, c'est qu'il y a aussi autour toute une - pour employer une expression
anglaise atmosphère de "goodwill", c'est-à-dire que beaucoup
d'agents politiques, administratifs, sociaux gravitent autour, dans le milieu
où cet organisme est enraciné, parce qu'il est fatalement
enraciné dans le milieu, cet organisme sans but lucratif, enfin le genre
de ceux dont on parle ici. Cela amène beaucoup plus de collaboration,
d'action que ce qui est effectivement payé en salaire.
A notre point de vue, c'est un intérêt, c'est un moteur de
développement. Cela assure aussi une certaine orientation
idéologique. C'est un peu une réaction qu'il y a là
à l'égard d'une façon un peu cartésienne en tout
cas qu'on n'accepte pas globalement - qui est présente dans un volet de
la nouvelle politique des parcs. Elle dit: On va donner aux organismes sans but
lucratif les affaires qui ne rapportent pas tellement et qui fonctionnent plus
ou moins, par exemple, organiser l'interprétation de la nature et amener
le monde dans le bois. Mais s'il s'agit d'héberger les gens, de leur
donner à manger et de leur louer des canots, alors là, on va
confier cela à des gens qui sont "business minded" et leur permettre de
faire de l'argent avec cela...
M. Houde: Des "money-makers"...
M. Bélec: II me semble qu'il y a moyen de mettre la soupe
et le dessert devant les mêmes personnes.
M. Houde: Bon, ma dernière question, vous y
répondrez si vous voulez. Peut-être que vous ne serez pas capable,
non pas parce que vous ne le savez pas, mais en tout cas... Lorsque vous
parliez tantôt de la pourvoirie dans mon comté - c'est mon
comté, ce n'est pas celui du ministre, mais bien le mien - si j'ai bien
compris, est-ce que vous voulez diminuer son territoire?
M. Bélec: Ah non! Non.
M. Houde: J'aimerais que vous précisiez, parce que cela a
passé vite tout à l'heure.
M. Bélec: Non, cela n'a jamais été
l'intention... Il s'agit du Pavillon Basilières. Cela n'a jamais
été l'intention du service de plein air de la Mattawinie de
réclamer que le territoire du pourvoyeur soit restreint. Sauf que le
pourvoyeur s'est entêté, apparemment, à concevoir son droit
comme un droit territorial et il a fait tout ce qu'il devait faire - c'est
relativement facile d'effaroucher le monde - pour que le monde ne vienne pas
sur ce terrain. Il disait: Quand j'amène des gens chasser ou
pêcher sur mon territoire et qu'ils voient des "gorlots" se promener -
c'est ma citation - sur des sentiers, ils se disent: Qu'est-ce qu'ils font
là eux autres? Nous sommes venus ici et nous avions des droits
exclusifs, comment cela se fait-il qu'ils y soient? Je comprends un peu son
raisonnement, sauf que c'est toute la façon de concevoir pourquoi
quelqu'un va dans la nature. Si un chasseur est incapable de penser que
quelqu'un puisse aller dans la nature seulement pour se promener, eh bien, on a
un problème. C'est ce qu'il faut faire comprendre à la
population, qu'on puisse vouloir aller se promener dans la nature pour toutes
sortes de bonnes raisons.
M. Houde: Oui. C'est un peu ce que l'intervenant du
Lac-Saint-Jean disait hier soir. C'est qu'ils se sont installés dans un
endroit donné pour aller à la chasse et il y en a d'autres qui
les - excusez le mot -"écoeurent", si vous voulez, qui les talonnent
pour les expulser ou encore pour aller chercher le gibier qui est
déjà là. Les gars se pensent chez eux, mais en fin de
compte tout le monde est chez lui dans le Québec, que ce soit dans un
territoire ou un autre. Lui, il pense que c'est à lui et que
personne
d'autre n'a le droit d'aller sur son territoire.
M. Bélec: C'est le problème. Cela lui a
peut-être été mal expliqué, dans le temps. Cela
demande des pédagogues.
M. Chevrette: De toute façon, il reste une chose qui est
très claire, c'est que les baux à droits exclusifs ne rendent
personne propriétaire foncier, qui que ce soit. Donc, c'est seulement
l'exclusivité du droit de pêche, de chasse, de piégeage et
de trappage.
M. Houde: M. Bélec, ainsi que votre équipe, je vous
félicite et je vous remercie beaucoup. C'était très
bien.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Merci beaucoup. Je voudrais ajouter à ce que
vous avez dit, tout à l'heure, au sujet des organismes à but non
lucratif, une chose qu'il est important de considérer aussi. C'est qu'il
y a un maudit paquet d'organismes à but non lucratif, au Québec,
actuellement, qui emploient du personnel payé. On rencontre cela dans
les ZEC, on rencontre cela à peu près partout. Alors, il faudrait
considérer cela aussi. C'est un peu pour répondre à la
question que soulevait le député de Berthier. (13 h 30)
M. Bélec: Mais, si vous me permettez, M. le
député...
Le Président (M. Bordeleau): Faites... Oui.
M. Bélec: J'aimerais ajouter qu'il y a deux domaines, en
particulier, où l'Etat intervient et où cela se produit. Cela se
produit dans le domaine des affaires sociales où vous avez les
corporations sans but lucratif qui emploient beaucoup de monde et qui donnent
des services. Aussi, cela se produit massivement dans le domaine du loisir,
mais cela n'est jamais mesuré. Encore là, personne ne semble
s'être donné la peine de mesurer l'impact économique des
corporations à but non lucratif qui engageaient du monde et qui
créaient des services pour la population du Québec.
En loisir, c'est extrêmement important, parce qu'on n'a pas fait
une révolution sociale comme celle qu'on a faite dans le domaine de
l'éducation et des affaires sociales, où on vous garantit des
services par employés de l'État interposés. En loisir, il
faut que l'on travaille avec le dynamisme des bénévoles et les
gens engagés par le milieu pour créer des services. Nous avons
donc une dynamique très spéciale d'entreprise privée
à but non lucratif qu'il faudrait reconnaître
économiquement dans le domaine du loisir.
M. Perron: Justement, sur ce que vous venez de mentionner, je
suis parfaitement d'accord avec vous pour qu'on se fasse une nouvelle
mentalité afin de faire en sorte que les organismes à but non
lucratif soient considérés comme ayant un apport
économique dans le milieu et qu'on ne leur donne pas seulement des
peccadilles, enfin ce que personne ne veut avoir. En fait, c'est ce que j'ai
compris de votre intervention.
M. Bélec: On s'est bien compris.
M. Perron: J'ai une autre question à vous poser. Dans
votre mémoire, vous parlez d'un débat public sur les
réserves fauniques. Est-ce que vous pourriez dire aux membres de la
commission de quelle façon vous verriez ce fameux débat public?
Est-ce que cela devrait se faire dans les milieux de l'éducation? Est-ce
que cela devrait se faire dans les écoles primaires, secondaires? On
peut aussi ajouter un paquet d'organismes. Est-ce que cela devrait se faire au
plan régionnal, local ou national?
M. Bélec: D'abord, il y a la proposition de base sur
laquelle cela devrait se faire, si vous me permettez de commencer à
répondre sur ce point. On a une politique des parcs qui amène des
consultations dans chaque région chaque fois où il est question
de reconnaître ou de classer un parc. Cela a beaucoup de mérite
d'avoir commencé à faire cela ainsi et cela permet de
procéder méthodiquement. Mais, chaque fois qu'il y a de ces
consultations, le problème se pose partout, on dit - et le ministre se
le fait dire, je pense, chaque fois où il va en consultation - Oui, mais
les parcs urbains; oui, mais les autres espaces privés à vocation
récréative; oui, mais... oui, mais ça... Il faudrait en
arriver, le plus tôt possible, à une proposition un peu plus
globale. Mais sans la faire très globale, simplement dans le cas de ces
terres publiques identifiées à vocation récréative
faunique, parce que vous avez des réserves de chasse et de pêche
où il n'y a pas beaucoup de chasse à faire là ou
peut-être seulement un peu de pêche.
Mais, dans ce cas, le prendre globalement et avoir une consultation
élargie là-dessus, laquelle pourrait se tenir dans un certain
nombre de centres du Québec, en sollicitant, comme le font les agents
d'information du ministère, au sujet des audiences sur les parcs, les
différents groupes du milieu.
M. Chevrette: Vous avez entièrement raison...
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: ... parce que les gens butent sur les mots. On a
seulement à décréter que c'est un parc de
récréation, les gens n'étudient même plus le concept
de l'aménagement qu'on leur présente à l'intérieur
du parc, et vice versa. On leur présente un parc dit de "conservation":
même s'il y a des aires de récréation, personne ne les
voit, parce que le mot "conservation" a obnubilé tout le monde, a fait
buter tout le monde et on ne discute même plus du schéma
d'aménagement lui-même. Cette notion est à revoir. Il
faudrait peut-être parler de parcs québécois, enlever les
qualificatifs, pour permettre aux gens, peut-être, de s'ouvrir les yeux
sur les concepts d'aménagement et de nous donner le fond de leur
pensée sur la proposition qu'on leur présente.
Je vous remercie infiniment. Je considère que c'est une belle
expérience de concertation que vous venez de faire et
l'expérience s'avère heureuse au RONLQ. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie
également, M. Bélec, ainsi que les deux autres personnes avec
vous.
La commission ajourne ses travaux sine die. Ce que cela veut dire, en
pratique, c'est qu'il y a la période des questions, en Chambre, à
15 heures, et que l'on reprendra ici vers 16 heures; bien sûr, cela
dépendra surtout de l'Opposition, mais nous ne pouvons pas reprendre
vraiment avant 16 heures.
Alors la commission ajourne ses travaux sine die.
(Suspension de la séance à 13 h 34)
(Reprise de la séance à 16 h 13)
Le Président (M. Bordeleau): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire du loisir, de la chasse et de la pêche
reprend donc ses travaux qui avaient été suspendus pour l'heure
du dîner. Nous commencerons cet après-midi par le mémoire
no 32, des neuf nations indiennes du Québec: Abénakis,
Algonquins, Attikamèques, Cris, Hurons, Micmacs, Mohawks, Montagnais et
Naskapis.
Je pense que M. Max Gros-Louis est ici. Si vous voulez nous
présenter les personnes qui vous accompagnent et procéder
à la présentation de votre mémoire. Je vous rappelle,
comme à d'autres ce matin, que le temps est limité. Afin de
rendre justice à tout le monde, veuillez vous en tenir à environ
vingt minutes pour la présentation du mémoire pour permettre des
questions ensuite. M. Gros-Louis.
Neuf nations indiennes du Québec
M. Gros-Louis (Max): Merci, M. le Président. M. Gerry
Pelletier à ma gauche, un Mohawk d'Oka. Il y a une chose à
déplorer, c'est qu'il ne parle que l'anglais. C'est dommage que nous
n'ayons pas eu la traduction, parce qu'il y a beaucoup d'Indiens qui parlent
seulement l'anglais, comme seconde langue, bien entendu. On avait pensé
présenter nos mémoires en indien, mais on s'est dit qu'il n'y
aurait pas beaucoup de monde qui comprendrait. Alors, je vais présenter
le mémoire en français et, si on a des questions à poser
en anglais, M. Pelletier pourra y répondre.
M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, je voudrais prendre cette occasion pour remercier les membres de la
commission parlementaire de nous permettre de présenter notre
mémoire au nom des neuf nations du Québec. Quand je parle des
neuf nations du Québec, je parle des Abénakis, Algonquins,
Attikamègues, Cris, Hurons, Micmacs, Mohawks, Montagnais et Naskapis qui
regroupent environ 37 000 Indiens du Québec.
C'est pour moi un grand honneur et privilège de parler au nom de
mes frères et soeurs autochtones et de vous présenter nos
problèmes en ce qui concerne les droits de chasse, de pêche et de
trappage. Une de nos préoccupations majeures est l'empiétement
sur nos droits aborigènes de votre Loi sur la conservation de la faune.
La reconnaissance et l'acceptation auprès de tous les gouvernements non
autochtones pour nos droits de chasse, de pêche et de trappage sont
attendues depuis longtemps. Nous avions espéré qu'une
préoccupation d'une telle importance aurait du être abordée
avec des résultats positifs.
Dans le passé, nous avons présenté divers
mémoires et déclarations aux différents comités des
gouvernements provincial et fédéral. Ces mémoires
traitaient des questions de chasse...
M. Chevrette: M. Gros-Louis, nous allons permettre
immédiatement à Mme Louise Mercier d'être interprète
auprès de M. Pelletier. D'accord? Donc, il pourra vous entendre dans sa
propre langue.
M. Gros-Louis: Si vous le permettez, on a quand même
présenté notre mémoire en français et en anglais.
Je crois qu'on va le lire au complet. On posera les questions après.
Durant qu'on le lit, il pourra certainement suivre en anglais sur sa copie.
Merci beaucoup.
Ces mémoires traitaient des questions de chasse, de pêche,
de trappage, ainsi que
d'autres mémoires qui ont produit peu sinon aucun résultat
positif. Pour la grande majorité des nations indiennes du Québec,
la chasse, la pêche et le trappage sont essentiels à leur survie.
La chasse, la pêche et le trappage sont un style de vie et, en tant que
tels, sont pratiqués à l'année longue dans tous les
territoires et les eaux du Québec. Nos activités traditionnelles
sont fondées sur nos droits aborigènes d'utiliser et d'habiter
les territoires de nos ancêtres. Ces droits nous procurent un moyen de
continuer notre pratique traditionnelle et sont une expression concrète
de notre héritage indien.
Par conséquent, si le gouvernement du Québec impose des
restrictions sur les droits de chasse, de pêche et de trappage des
nations indiennes du Québec, c'est un refus catégorique de nous
accorder nos droits à un style de vie important. Depuis toujours, nous,
les neuf nations indiennes, avons utilisé et habité ce
territoire. Notre culture est parmi les plus anciennes et les plus nobles du
monde. Nous adhérons depuis toujours aux directives originales du
Créateur dans cet endroit que nous appelons notre terre. Nous sommes les
fidèles gardiens spirituels de notre territoire. Un de nos principes de
base est l'utilisation et la protection du travail du Créateur,
c'est-à-dire la chasse, la pêche et le trappage.
La Loi sur la conservation de la faune prévoit l'interdiction de
la chasse et de la pêche pendant certaines saisons. Elle impose des
restrictions et des limites sur la possession du poisson et du gibier. En plus,
ladite loi établit des conditions restrictives pour la chasse et la
pêche à l'intérieur de certaines catégories de
territoires au Québec.
Les Indiens du Québe", en tant que nations souveraines, ont
indiscutablement un statut privilégié quant à leurs droits
de chasse, de pêche et de trappage. Ces droits des nations indiennes du
Québec doivent inclure mais ne sont pas limités aux principes
suivants: 1) le droit de chasser, pêcher et piéger en tout temps
de l'année; 2) le droit de chasser, pêcher et piéger dans
tous les territoires du Canada; 3) le droit d'exploiter du poisson et du gibier
par des moyens traditionnels; 4) le droit de transporter, posséder et
utiliser du poisson et du gibier; 5) le droit d'exploiter toutes les
espèces de la faune; 6) le droit d'utiliser personnellement et
communautairement du poisson et du gibier; 7) le droit de faire des
échanges de cadeaux ou des échanges de poisson et de gibier entre
les nations indiennes.
Depuis l'arrivée des Européens et leur régime
d'oppression, la Loi sur les Indiens et, par la suite, des conventions et
traités illégaux ont été imposés sur les
premières nations indiennes. Nous avons été témoins
d'un processus graduel de négation et de dérogation de nos droits
d'une façon délibérée, processus qui cherche
à abolir nos droits aborigènes, nos privilèges et notre
héritage tels que légués par le Créateur. Ceci est
une tentative de génocide. L'histoire a démontré que ce
processus insidieux n'a pas détruit l'Indien et que des crimes aussi
atroces se sont avérés dommageables, mais n'ont pas réussi
à nous détruire. Nous sommes des nations qui ont la
souveraineté et des droits et nous avons, de plus, le droit de faire des
représentations particulières dans le domaine de la chasse, de la
pêche et du trappage, lequel est un de nos droits inhérents.
Je voudrais affirmer que les droits aborigènes des Indiens de
chasser et de pêcher ont été reconnus et confirmés
par la couronne britannique par proclamation royale en 1763. Elle est
annexée à l'endos du document. En tant que tels, ces droits
aborigènes sont des droits réels reconnus par la loi britannique
et ils existent encore en faveur des Indiens parce que la proclamation royale
de 1763 a la valeur juridique d'un statut parlementaire et n'a jamais
été révoquée. Enfin, le Conseil privé a
décidé que la préoccupation des Indiens dans les
territoires prévus par la proclamation de 1763 est "une
préoccupation autre que celle de la province", selon la signification du
chapitre 109 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.
Donc, il est nécessaire de conclure que la nature juridique de
cette loi aborigène est celle d'un droit "in re" accordant aux Indiens
un titre légal partageant ainsi le droit à la
propriété du territoire et conférant un droit aux Indiens
de récolter de cette terre les produits de la chasse et de la
pêche et d'en disposer à leur gré. Ce droit indien,
étrangement semblable à la servitude perpétuelle du droit
commun, "accable" toujours l'ensemble du territoire actuel du
Québec.
Malgré ce qui précède, le gouvernement du
Québec, par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche et la Loi sur la conservation de la faune, a souvent et continue
toujours de poursuivre les Indiens pour des supposées infractions
à la loi provinciale relative à la chasse et à la
pêche. Des procédures juridiques ont été
intentées contre les Indiens sans tenir compte de l'endroit où
ces supposées infractions ont été commises, qu'elles
soient sur le territoire ou non. De plus, cette dernière observation
nous permet de constater l'urgence du problème parce qu'il y a des
bandes qui ne possèdent ni réserve ni propriété
privée. Ces bandes sont considérées par les
autorités provinciales comme étant complètement
assujetties à la loi provinciale, tout comme n'importe quel citoyen du
Québec.
Ce mémoire espère atteindre plusieurs objectifs, telle la
reconnaissance du statut
particulier des Indiens de cette province, qu'ils aient une
réserve ou non, et qui sera ratifié par la loi; un arrêt
des procédures juridiques pour des supposées infractions aux lois
et règlements provinciaux sur la chasse et la pêche; le retrait
des procédures juridiques déjà intentées contre les
Indiens à cet égard et, particulièrement, un traité
entre le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, d'une
part, et les nations indiennes du Québec, d'autre part, lequel
traité reconnaîtra le droit des Indiens à chasser et
à pêcher dans la province de Québec.
Conclusion. Les nations indiennes du Québec ont indiscutablement
un statut privilégié relativement à la chasse et à
la pêche, leur mode de vie traditionnel. La loi française, la
couronne britannique et les tribunaux l'ont reconnu. D'ailleurs, la province de
Québec a même légiféré en rapport avec ce
statut et presque tous les traités négociés avec les
nations indiennes du Canada l'ont formellement confirmé. Toutefois, la
présente est aussi déterminante pour les Indiens que par le
passé et on peut se demander pourquoi il y a un traitement
différent lorsque ce qui est recherché est un droit que les
nations indiennes veulent et désirent exercer.
Quoi qu'il en soit, les nations indiennes du Québec sont d'avis
que l'occasion leur est offerte d'affirmer leurs droits. À cette fin, ce
mémoire est une démarche importante pour l'établissement
du statut précis des nations indiennes du Québec à
l'égard de leurs droits et l'adoption des moyens nécessaires pour
que leurs droits leur soient reconnus.
En terminant, nous voulons faire les recommandations suivantes.
Premièrement, que les droits et titres aborigènes soient reconnus
et acceptés, incluant la chasse, la pêche, le trappage et les
droits d'exploitation. Deuxièmement, que les règlements de la
pêche au Québec, la Loi sur la convention concernant les oiseaux
migrateurs et la Loi sur la conservation de la faune du Québec ne
s'appliquent pas aux nations indiennes du Québec. Troisièmement,
que l'expression "excluant les Indiens" soit insérée dans les
lois ci-dessus.
Quatrièmement, que toutes procédures légales contre
ces Indiens qui ont été arrêtés en rapport avec les
lois mentionnées ci-dessus soient retirées. Cinquièmement,
que cesse le harcèlement par les agents de la loi à
l'égard des Indiens qui sont supposés avoir violé les lois
et règlements de la chasse et de la pêche. Enfin, que le
gouvernement du Québec honore et respecte les ententes satisfaisantes
relatives aux droits de chasse, de pêche et de trappage des nations
indiennes du Québec. Merci. Les neufs nations indiennes du
Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Gros-Louis. Alors,
M. le ministre, vos commentaires et vos questions.
M. Chevrette: Ce sont un peu les mêmes commentaires que
j'ai faits à votre ami Simon ce matin que je vais
réitérer. Je comprends que vous représentez neuf nations
mais, parmi celles-ci, il y en a un bon nombre qui n'ont pas, à ma
connaissance, encore exprimé le désir de tenir des discussions
aussi globales et fondamentales avec le gouvernement que celles qui ont eu
lieu, par exemple, avec les Montagnais et les Attikamègues.
M. Gros-Louis: On doit vous dire ici qu'on a été
mandatés par les neuf nations, après avoir eu des
réunions, et ce document a été rédigé par
les neuf nations.
M. Chevrette: D'accord. Ce que je veux dire, M. Gros-Louis,
c'est: Est-ce que vous avez demandé au gouvernement, comme tel, d'avoir
des ententes particulières, par exemple, pour vous faire
reconnaître des droits historiques, comme le premier ministre l'avait
affirmé aux Attikamègues-Montagnais? Est-ce que vous avez fait
cette demande précise et formelle au gouvernement du Québec?
M. Gros-Louis: Non. Le gouvernement du Québec n'a pas
encore fait de demande aux Indiens. On croit que, présentement, il
appartiendrait au gouvernement du Québec de faire des demandes et c'est
urgent. Si vous voulez que vos gens aient des droits de chasse et de
pêche sur nos territoires, je crois qu'il serait urgent que le
gouvernement du Québec entre en communication avec les neuf nations
indiennes pour faire cette demande afin qu'on puisse commencer à
discuter des endroits où on vous donnera le droit de chasse et de
pêche, des endroits où vous pourrez prendre du saumon. On n'a pas
encore touché au territoire indien, mais on croit que nous avons encore
des droits innés sur le territoire et que présentement le
gouvernement du Québec n'a aucun droit de légiférer sur
nos territoires et sur les Indiens du Québec. Alors, je
suggérerais à M. le ministre - et ce serait urgent - que le
gouvernement du Québec demande aux Indiens de venir le rencontrer pour
discuter de ces choses.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Je pense bien que vous allez admettre, cependant,
que ce n'est pas au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
d'entreprendre avec les neuf nations des discussions précises. Si ma
mémoire est fidèle, cela relève de l'Exécutif
même du
gouvernement, de M. Lévesque, lui-même.
M. Gros-Louis: M. le ministre, je suis heureux d'entendre que
cela relève directement de l'Exécutif, car on nous a toujours -
pour employer un terme anglais -"switchés" à des fonctionnaires
qui ont un mandat précis - d'ailleurs, cela a été dit dans
le premier mémoire par les Montagnais - et qui, souvent, ne nous
reçoivent pas; ne veulent pas nous recevoir et ne peuvent jamais nous
donner de réponse. Nous serions sûrement prêts à
discuter avec l'Exécutif du gouvernement du Québec.
(16 h 30)
M. Chevrette: De toute façon, je peux vous dire qu'en ce
qui regarde mon ministère - je vais vous réitérer ce que
je disais à M. Simon ce matin - si jamais vous étiez
intéressés à entreprendre des discussions, sans
préjudice à des ententes plus globales ou plus précises
qui viseraient à vous reconnaître des droits historiques,
personnellement, je serais prêt à vous rencontrer pour en
définir les cadres de discussion. Je peux vous dire cela. Naturellement,
je n'ai pas le mandat d'entreprendre la négociation d'une convention
parce que cela ne relève pas de mes pouvoirs comme tels, mais je peux
vous dire que je reçois vos doléances et que je les acheminerai
à qui de droit, à M. Lévesque lui-même. Je l'ai
même avisé durant la période des questions cet
après-midi que je lui préparerais un mémoire complet
à la suite de l'audition de tous les mémoires des Inuits,
Indiens, Cris, Montagnais, etc., de l'ensemble des groupes d'Amérindiens
qui se présenteraient devant nous. On lui acheminera un mémoire
précis avec les recommandations précises de chacun des
groupes.
Je voudrais vous remercier d'avoir témoigné. Je voudrais
vous souhaiter entre amateurs de hockey, une excellente saison. Je vous regarde
chaque fois et c'est amusant.
M. Gros-Louis: Merci beaucoup. J'espère que les ministres
du gouvernement du Québec ne joueront pas aussi mal que les Nordiques
ont joué hier.
M. Chevrette: Je m'aperçois que si on pouvait vous compter
comme joueur de défense...
M. Gros-Louis: M. le ministre, bien entendu, vous avez
remarqué que dans notre mémoire on fait ici mention de lois; on
parle de la Convention sur les oiseaux migrateurs, qui est une loi du
gouvernement fédéral. Bien entendu, dans les pourparlers,
lorsqu'on se rencontrera, on aimerait que ce soit tout de suite un "three
part", un comité tripartite...
M. Chevrette: Un triangle.
M. Gros-Louis: ... un comité de trois parties et qu'on ne
soit pas obligés de prendre une petite entente ici, de signer un
traité ici, qui sera, après cela, ramené à Ottawa.
On voudrait discuter avec tous les gens qui sont concernés tout de
suite.
M. Chevrette: Avez-vous des démarches de faites
déjà avec le fédéral?
M. Gros-Louis: On a commencé un peu, mais, comme je le dis
dans le mémoire, cela fait vingt ans que je suis le grand chef de la
nation huronne et cela fait vingt ans qu'on fait des démarches; et
jamais personne ne prend au sérieux ce qu'on a dit et ce qu'on a
demandé. Je dois vous dire que les neuf nations indiennes du
Québec sont sérieuses. On a des droits et, pour faire
reconnaître ces droits, nous allons les exercer envers et contre
tous.
M. Chevrette: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci.
M. Gros-Louis: Excuse me. Mr Pelletier would like to say
something.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. Pelletier.
M. Pelletier (Gerry): Just one more thing I wanted to add to what
Chief Gros-Louis has just finished saying. The longer we wait, more and more of
our people are being arrested, and the cases are being built up and it creates
hardships for our people to keep postponing these cases from time and time
again. If nothing does happen, we will start issuing warrants to non Indian
people hunting and fishing in our lands. Thank you.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Thank you, Mr
Pelletier. M. le député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, en remerciant M. Gros-Louis
et ceux qui l'accompagnent du mémoire qui est présenté
à la commission, l'Opposition comprend que le mémoire s'adresse
aux autorités gouvernementales qui ont actuellement les décisions
entre les mains.
M. le Président, je ne voudrais pas que les nations
aborigènes s'imaginent qu'en posant moins de questions ou qu'en ne
posant pas de questions on méprise ces mémoires; nous constatons
très bien la valeur des arguments que vous avancez. Cependant, vu
l'exclusion que vous demandez pour l'ensemble du peuple fondateur qui comprend
l'ensemble des nations aborigènes, notre
formation politique avait décidé de faire l'étude
des mémoires qui, aujourd'hui, seront présentés.
Étant donné que c'est une section très spéciale,
dont certaines demandes peuvent être incluses dans la loi, mais que cela
ne touche pas de la même façon les nations indiennes, que cela les
touche peut-être plus profondément, on voudrait que certains
spécialistes en la matière, à la suite des informations
supplémentaires que vous donnerez à cette commission, en fassent
l'étude pour nous permettre de porter un meilleur jugement et de donner
au ministre les informations que l'Opposition voudra bien lui fournir à
ce moment.
La seule chose sur laquelle je pourrais insister à ce moment-ci,
étant donné l'intervention supplémentaire qui vient
d'être faite par M. Pelletier, est la suivante. Si le ministre, qui n'est
pas le ministre de la Justice, peut quand même, pour adoucir les
négociations qui s'en viennent avec l'ensemble des nations
aborigènes, faire en sorte que son collègue soit invité
à regarder ce dossier attentivement et satisfaire une partie de la
réclamation qui est transmise par M. Pelletier, nous l'invitons à
regarder cette question de plus près. Mais, je ne voudrais pas que vous
pensiez que, si nous ne posons pas de questions supplémentaires, comme
nous l'avons fait à différents groupes d'intervenants au sujet de
la conservation de la faune, s'est par dérision à l'endroit des
mémoires. C'est parce que c'est un problème très
particulier qui concerne toutes les nations aborigènes: des droits que
vous revendiquez comme peuple fondateur, que vous mentionnez et que
décrivez très bien. Nous allons les soumettre aux
spécialistes de notre caucus afin que le parti ministériel soit
pressenti de la position que nous voudrions adopter.
M. Chevrette: De mon côté, je peux...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le ministre.
M. Chevrette: ... confirmer que j'ai pris l'engagement, moi
aussi, d'acheminer à chacun des ministres concernés un
mémoire particulier qui tiendra compte de l'ensemble des
mémoires. Soyez assurés de cela.
M. Gros-Louis: Je tiens à vous remercier...
Le Président (M. Bordeleau): M. Gros-Louis.
M. Gros-Louis: ... M. le député, de la mention que
vous avez faite. Ce n'est pas souvent qu'on se fait dire qu'on est un peuple
fondateur. On a toujours entendu dire que les peuples fondateurs,
c'étaient les deux peuples immigrants: les Français et les
Anglais. Alors, merci beaucoup.
M. Mailloux: C'est parce que ma famille est arrivée ici
très tôt, vers l'année 1700. Elle a eu la chance de
connaître, dans le temps, le peuple fondateur.
M. Gros-Louis: Si vous le permettez, vous étiez là
dans le temps de Champlain, celui qui a fait le premier "trading post".
M. Mailloux: Des ancêtres.
M. Gros-Louis: Oui. Vous voyez qu'on était
déjà reconnu comme une nation. Si on n'avait pas
échangé ces poissons, ces fourrures et ces viandes sauvages, vous
ne seriez peut-être pas là parce qu'ils seraient tous morts.
M. Mailloux: Nos ancêtres seraient disparus.
M. Gros-Louis: Alors, ce qu'on vous demande, c'est encore la
reconnaissance de ces droits qu'on avait comme nation. Bien entendu, vous allez
voir, dans d'autres mémoires qui vont suivre, qu'on veut se gouverner
nous-mêmes et qu'on est aussi capables de faire des lois sur la
conservation de la faune qui seront appliquées rigoureusement.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Max Gros-Louis.
M. Gros-Louis: Merci beaucoup de nous avoir entendus.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous invite donc à
demeurer assis pour le prochain mémoire qui est celui du Conseil de
bande de la réserve indienne de la nation huronne. Comme il y a de
nouvelles personnes avec vous, vous pourriez peut-être nous les
présenter, M. Gros-Louis?
Conseil de bande de la réserve indienne de la
nation huronne
M. Gros-Louis: Certainement. Merci beaucoup, M. le
Président. J'aimerais vous présenter celui qui va lire le
mémoire, qui est l'assistant du Grand chef des Hurons, M. Denis Picard,
et le président du comité de chasse, de pêche et de
trappage des Hurons, M. Pierre Gros-Louis.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. Picard.
M. Picard (Denis): M. le Président, M. le ministre, MM.
les membres de la commission parlementaire, c'est pour moi un grand honneur et
privilège de parler au nom de mes frères et soeurs Hurons et de
vous
présenter nos problèmes en ce qui concerne les droits de
chasse, de pêche et de trappage. Une de nos préoccupations
majeures est l'empiétement sur nos droits aborigènes de votre Loi
sur la conservation de la faune. Le respect et la non ingérence sur tous
les gouvernements non-autochtones de nos droits de chasse, de pêche et de
trappage sont attendus depuis longtemps. Nous avions espéré
qu'une attitude d'une telle importance aurait dû être primordiale
pour tout gouvernement.
Dans le passé, des organismes indiens ont présenté
divers mémoires et fait des déclarations aux différents
paliers des gouvernements provincial et fédéral. Ces
mémoires traitaient de chasse, de pêche et de trappage, ainsi que
d'autres mémoires qui ont produit peu, sinon aucun résultat
positif.
Les Hurons, conscients des torts causés à la nation,
réclament que le gouvernement québécois respecte le statut
précis de la nation huronne. Pour nous, Hurons, notre vie sociale,
culturelle et économique est basée sur la chasse, la pêche
et le trappage. C'est aussi un style de vie qui, en tant que tel, est
pratiqué à l'année longue dans tous les territoires et les
eaux du Québec. Nos activités traditionnelles sont fondées
sur nos droits aborigènes d'utiliser et d'habiter les territoires de nos
ancêtres. Ces droits nous procurent un moyen de continuer notre pratique
traditionnelle et sont une expression concrète de notre héritage
indien.
Par conséquent, quand le gouvernement du Québec impose des
restrictions sur les droits de chasse, de pêche et de trappage de la
nation huronne, c'est un refus catégorique de nous accorder nos droits
à un style de vie important et à notre survivance sociale,
culturelle et économique. Depuis toujours, les Hurons ont utilisé
et habité le territoire. Notre culture est parmi les plus anciennes et
les plus notables du monde. Nous adhérons, depuis toujours, aux
directives originales du Créateur dans cet endroit que nous appelons
notre terre. Nous sommes les fidèles gardiens spirituels de notre
territoire. Un de nos principes de base est l'utilisation et la protection du
travail du Créateur, c'est-à-dire la chasse, la pêche, le
trappage et les activités qui y sont reliées.
Les autochtones indiens vivant à l'intérieur de l'actuelle
province de Québec ne peuvent et ne doivent en aucun cas être
perçus comme formant une ou plusieurs minorités, au même
titre que celles dont les membres sont arrivés plus récemment sur
ce territoire. Ce sont, en effet, les descendants des hommes et des femmes qui,
il y a au-delà de 7000 ans et même plus, dès que la fonte
des glaciers et l'assèchement des sols le permirent, ouvrirent le
Québec à l'occupation humaine et en assurèrent durant
au-delà de 7 millénaires et même plus l'exploitation et la
conservation. Plutôt que de promouvoir la protection et le
développement des cultures autochtones, le gouvernement
québécois devra s'engager à régler le très
lourd contentieux politique autochtone dans l'honneur, la justice, la
dignité et le respect des droits collectifs.
Voici un bref historique de la bande des Hurons de Lorette.
Période précédant l'arrivée des Européens.
Les explorateurs, les congrégations religieuses, les notaires, les
historiens et les archéologues sont loin d'avoir tout dit au sujet des
tribus amérindiennes. Ce qu'ils en savent très
précisément date de la période où ils sont
arrivés en Amérique. Les Indiens hurons Wendat en langue huronne
occupaient originalement avant l'arrivée des premiers Européens
en Amérique un vaste territoire. Le mode de vie pratiqué par les
Indiens d'alors consistait en une vie nomade. Les Indiens d'alors jouissaient
de la liberté fondamentale de parcourir, à leur gré, de
vastes territoires pour s'installer, de temps à autre, aux endroits les
mieux adaptés pour le développement de la bande individuelle.
Période de 1534 à 1650. Aux environs de 1534, la
population huronne était d'environ 200 000 membres. Plusieurs
épidémies successives apportées par les Européens
abaissent la population des Indiens hurons à quelques milliers. Vers
1650, durant ce temps, l'occupation du territoire par les Indiens hurons
s'avérait de moins en moins dense, à mesure que la population des
Indiens décroissait.
La dispersion de 1650. Un groupe de 300 Hurons, se voyant
confronté à ces problèmes majeurs, décida de
quitter la baie Géorgienne pour venir s'installer à la limite
nord-est de son territoire ancestral. Les Indiens occupant actuellement la
réserve de Lorette proviennent directement de ces 300 Hurons.
Après 1650, ces Hurons n'ont occupé qu'une partie du vaste
territoire qui était jadis occupé par la grande nation huronne.
(16 h 45)
Période de 1651 à 1667. En 1651, l'arrivant
européen était en pleine campagne de lotissement. Les concessions
et les seigneuries étaient alors distribuées par les
Français sans même qu'ils aient eu le respect de demander aux
premiers occupants du pays l'autorisation de s'y implanter. C'est en 1651
qu'apparut pour la première fois l'idée de parquer dans les
réserves, territoires confinés, les Indiens vivant aux alentours
de la région de Québec. En cette année 1651, la Compagnie
de la Nouvelle-France, dans le désir de parquer les peuples errants,
soit la nation huronne, iroquoise et toutes les autres nations, de la
Nouvelle-France octroyait aux Hurons la seigneurie de Sillery. L'année
1667 marqua de nouveaux déboires pour les Hurons de Lorette. A la suite
de plusieurs actes illégitimes et illégaux, les Hurons furent
dépouillés une
autre fois de leurs possessions.
Période de 1667 à 1699. L'année 1669 marqua la fin
de la possession de la concession de Sillery par les Indiens hurons. Les
Jésuites, sous prétexte que les Hurons n'occupaient plus cette
concession, passèrent un acte qui permit de reprendre la concession qui
avait été octroyée aux Indiens huit ans auparavant.
Comment peut-on à la fois donner et enlever à un groupe ce qui
lui appartient de droit comme premier occupant? Le vrai prétexte de
cette transaction, selon Léon Gérin, (référence:
Royal Society of Canada, Proceedings and Transactions, Second Série,
Vol. VI) était que les colons français requéraient ces
terres pour des fins agricoles.
En comparant les conditions de vie des Hurons avant l'arrivée des
Français en Amérique avec les conditions qui ont existé
pour les années 1534 à 1669, du statut de possesseurs et
propriétaires du territoire essentiel à leur survie, à la
chasse, à la pêche, à la trappe et à l'exploitation,
en l'espace de 150 années le statut de l'Indien a été
ramené à celui d'un individu ne pouvant occuper que les terres
incultes ou celles qui ne sont pas occupées par le citoyen
français.
Période de 1699 à 1742. Les Hurons se virent
confinés à résider sur des terres incultes aux alentours
de la réserve actuelle de Lorette.
Période de 1742 à 1897. Durant cette époque, les
Indiens de Lorette durent abandonner une partie importante de ce qui
était leurs habitudes ancestrales. La culture, qui était une des
bases fondamentales de la société huronne, dut être
oubliée car les terres avoisinant la région de Lorette
étaient très pauvres. Afin de pallier ce manque entre les
années 1742 et 1900, les Hurons de Lorette intensifièrent leurs
activités de chasse, de pêche et de trappage.
Le statut d'alors des Hurons vis-à-vis du gouvernement canadien
était celui d'un habitant qui pouvait utiliser les terres de la couronne
pour ses besoins, sans qu'aucune loi québécoise ne
définisse exactement le droit de ces occupants. Il appert, du consensus
qui se dégage de ces lois, qu'on permettait aux Hurons d'occuper les
terres de la couronne, sans en être, toutefois, propriétaires
parce qu'ils en avaient été dépouillés. 1897 marqua
le début de l'existence de la réserve faunique du parc des
Laurentides. Parce que les lois québécoises refusaient
systématiquement de respecter les droits ancestraux des Indiens, le
gouvernement du Québec n'a pas cessé de harceler les Hurons de
Lorette et de les empêcher d'utiliser leurs territoires ancestraux de
chasse et de pêche. Ces harcèlements ont pris la forme de
poursuites judiciaires, d'intimidations et de menaces, de destruction des
caches à nourriture et abris des Indiens. Le moins que l'on puisse dire
est que le genre de traitement infligé par les représentants
(gardes-chasse, fonctionnaires provinciaux, politiciens) d'une
société dite civilisée à l'endroit des Indiens
manqua à cette période totalement de respect, et il en est ainsi
au moment où je vous présente ce mémoire. Ce n'est pas
inclus dans le texte, mais on peut se demander parfois de quel
côté sont les sauvages.
Si l'on compare le statut des Indiens de notre époque à
celle la précédant, on se rend compte que, du statut d'occupant
toléré sur les terres de la couronne, l'Indien est devenu un
hors-la-loi. Cependant, dans toutes les causes présentement devant les
tribunaux, aucun Huron n'est accusé d'avoir enfreint les règles
de conservation de la nature, selon les us et coutumes huronnes. Il est, par
exemple, accusé de ne pas être détenteur du permis de
chasse ou de pêche de la majorité "ingérente". Quelque
vingt causes ont été entendues et les Hurons ont eu à se
déplacer dans les districts de Mont-Laurier, La Malbaie, l'Estrie etc.
Ces causes ont occasionné du stress pour ces individus, des
dépenses et des déplacements inutiles parce que, finalement, tous
les Hurons qui ont été accusés ont été
acquittés. D'ailleurs, ces jugements ont été mal
interprétés ou mal compris aussi par nos journalistes.
L'Indien huron tient à faire remarquer que, durant toutes ces
années, il n'a pas cessé d'aider les Européens en leur
apportant ses connaissances géographiques du territoire, en guidant
l'homme blanc où il devait se rendre et en risquant sa vie pour
combattre à côté des Français. Pour tous ces
bénéfices, le gouvernement du Québec, depuis des
décennies, n'a pu exprimer sa reconnaissance envers l'Indien huron qu'en
refoulant l'Indien dans sa réserve et en ignorant tous les droits
ancestraux des Hurons de Lorette. De plus, le Huron n'est reconnu par le
gouvernement québécois que lorsqu'il sert de guide et d'esclave
pour les sportifs. Aussitôt qu'il s'affranchit, il est restreint dans ses
propres droits et même il devient un hors-la-loi.
Vous trouverez donc, ci-après, des propositions sous forme de
recommandations de la Nation huronne concernant la chasse, la pêche, le
trappage, ainsi que les activités qui y sont reliées. Afin que
ses membres puissent pratiquer leurs activités ancestrales de chasse, de
pêche, de trappe ou de cueillette et qu'ils puissent graduellement
reprendre contact intimement avec leurs origines, la Nation huronne recommande:
1) Qu'un territoire permettant à la Nation huronne de pratiquer ses
activités ancestrales, soit la chasse, la pêche, la trappe et la
cueillette, soit défini et reconnu mutuellement par traité comme
étant la propriété des Hurons et que seuls les membres de
cette nation bénéficient de l'usage de ce territoire. 2) Que le
gouvernement du Québec respecte les
règlements relatifs à la conservation de la faune
élaborés par les Hurons. 3) Que le gouvernement du Québec
respecte le droit des Hurons de chasser, pêcher et trapper partout au
Québec et en tout temps. 4) Que toutes les procédures judiciaires
instituées et intentées contre les Hurons et se rapportant
à la chasse, la pêche et la trappe soient retirées.
Motifs qui incitent les Hurons à faire respecter leurs droits de
chasse, de pêche et de trappe. Les raisons qui justifient les Hurons de
faire respecter leurs droits s'inspirent autant des notions
d'équité qu'au point de vue plus strict, de la justice.
Raisons faisant appel à l'équité. L'étude
des rapports entre Européens et Hurons depuis l'arrivée des
premiers Français en Amérique démontre clairement que les
Hurons ont été dépossédés graduellement de
leurs territoires sans aucune compensation. De plus, l'étude de ces
rapports, Européens versus Hurons, démontre que la collaboration
et les services ont été rendus presque à sens unique.
L'Indien a apporté ses expériences de vie en forêt, (la
survie des premiers Blancs) et ses connaissances de la géographie du
pays (les Hurons ont servi de guides aux explorateurs). Le Huron a même
risqué sa vie en combattant aux côtés des Français.
En retour, les Français n'ont pas respecté le droit aux terres
que nous occupons depuis toujours et nous ont fait chasser de tous les lieux
qui nous permettaient de garder contact avec nos origines et nos coutumes.
En ce qui concerne les considérations d'ordre social, il faut
remarquer que l'entrave érigée par le gouvernement
québécois concernant la chasse, la pêche et la trappe a
modifié considérablement le mode de vie ancestral des Indiens,
qui consistait à mener une vie nomade en parcourant, à leur
gré, de vastes territoires pour s'installer de temps à autre aux
endroits convenant le mieux au développement individuel de chaque groupe
d'individus. Ceci a brimé la liberté fondamentale des Indiens de
circuler dans toutes les forêts du Québec, peu importe la
période de l'année.
En ce qui concerne les considérations qui s'inspirent de la
justice et du droit, le contentieux autochtone est d'une transparence
indiscutable. Il renvoie à des prétentions territoriales
fondées sur l'ancienneté de l'occupation, de l'utilisation et de
l'exercice d'une souveraineté certaine. De tels droits furent
confirmés par une clause que la France avait inscrite dans l'acte de
capitulation de Montréal, clause reprise en 1763 dans la proclamation
royale émise par la couronne britannique. Les couronnes française
et anglaise n'étaient pas strictement tenues d'inclure de telles clauses
garantissant des droits aux autochtones. Si elles l'ont fait, c'est que
l'existence de ces droits ne devait soulever aucun doute pour personne.
Dans ce dossier, la majorité francophone ne doit pas se limiter
ou limiter sa perception à des erreurs historiques à redresser,
encore moins à une reconnaissance de droits en vue de les mieux
éteindre. Si le contentieux politique se doit d'être
réglé de façon positive, c'est parce qu'un tel
règlement demeure la condition fondamentale à la conservation de
la culture et au développement de la Nation huronne. Le gouvernement du
Québec ne peut envisager de légiférer sur la culture et le
développement d'un autre peuple, mais doit s'engager dans la mise en
place d'un protocole d'assistance technique, économique et culturelle
établi entre deux partenaires égaux et souverains.
Par l'obtention du respect de leurs droits, les Hurons n'entendent pas
céder, renoncer, abandonner et transporter par les présentes
toutes leurs revendications, leurs droits, leurs titres et
intérêts autochtones, quels qu'ils soient.
Mesdames et messieurs du gouvernement, cessez de tourner autour du pot.
Avant d'imaginer quelque mesure que ce soit pour, prétendument,
protéger et développer la langue et la culture autochtones, il
faut s'attaquer de plein fouet au contentieux politique, sinon, toutes vos
générosités seront suspectes, coûteuses, inefficaces
et inutiles. Nous refuserons toute convention fondée sur l'extinction de
nos droits. Cela ne signifie pas qu'on veuille refouler la présence de
l'influence blanche et qu'on soit contre le progrès. Bien au contraire,
nous voulons nous faire un avenir valable. Mesdames et messieurs, tant que vous
ne réglerez pas le contentieux avec les autochtones sur la base de
l'égalité réciproque, aucun de nous ne pourra se
définir parfaitement comme peuple. Merci.
Le Président (M. Perron): Merci, M. Gros-Louis. M. le
ministre.
M. Chevrette: Tout d'abord, je disais tantôt que, pour fins
de négociations, de reconnaissance de droits historiques, c'était
au premier ministre lui-même qu'il fallait adresser la demande de
négociation. Il a un organisme mis sur pied qu'on appelle le SAGMAI,
à qui il confie des mandats, bien sûr. Mais, c'est le premier
ministre, en tant que tel, qui en est responsable.
En ce qui regarde le rôle du MLCP, du ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, on peut négocier des ententes ad hoc,
sans préjudice aux négociations d'ententes particulières
qui relèvent du premier ministre lui-même. En ce sens, il est
loisible à mon ministère, pour des cas particuliers, d'en venir
à des ententes particulières, mais pour la reconnaissance de
droits historiques ou
ancestraux, comme vous le mentionnez, cela relève non pas de la
compétence du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, mais de l'Exécutif qui est représenté par M.
Lévesque.
J'aimerais bien discuter avec vous. Ce serait peut-être
très intéressant qu'on puisse faire une demi-heure de discussion
uniquement sur la notion de droits. Vous savez combien ça fait de temps
qu'on discute de ces droits et, si quelqu'un le sait, vous le savez encore bien
mieux que moi. Vous pourriez me sensibiliser sans doute longuement à
tout ça, mais je pense que j'ai pris l'engagement, comme je l'ai dit
tantôt au groupe qui vous précédait, d'acheminer vos
revendications au premier ministre lui-même. J'ai pris l'engagement de
lui préparer un mémoire spécifique présentant les
commentaires que vous avez émis aujourd'hui et, si jamais vous jugez que
des ententes particulières ad hoc, sans préjudice à une
entente sur la reconnaissance des droits historiques, pourrient être
conclues entre mon ministère et votre groupe, il me fera plaisir de vous
rencontrer et d'établir un cadre de discussion. Mais, comme je le dis,
la reconnaissance de droits historiques relève directement du cabinet du
premier ministre.
Je vous remercie d'avoir témoigné, de nous avoir
sensibilisés et soyez assurés que vos demandes seront
acheminées vers la bonne filière, bien précise, que vous
connaissez.
M. Picard: Est-ce que je pourrais vous poser une question, M. le
ministre, s'il vous plaît?
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Picard.
M. Chevrette: Oui.
M. Picard: Nous sommes en commission parlementaire pour
l'étude d'un avant-projet de loi qui affectera les chasseurs et les
pêcheurs. Je voudrais savoir si vous avez l'intention, à partir de
la loi, de venir en contradiction avec l'émission des permis faite par
les gouvernements indiens? C'est-à-dire que, dans votre avant-projet de
loi, pour chasser et pêcher, l'individu ou le citoyen
québécois devra se procurer un permis. Les gouvernements indiens
émettent présentement des permis. Je voudrais savoir si votre
projet de loi obligera les Indiens à se conformer à votre loi?
(17 heures)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Je ne peux pas présumer ce qu'il y aura dans
le projet de loi parce que c'est l'Opposition qui me ramassera. Au moment
où l'on se parle, il y a une loi qui existe, d'accord? Si je fais des
audiences publiques, c'est précisément en fonction
d'élaborer un projet de loi qui sera déposé sans doute
après les fêtes, à la reprise de la nouvelle session. Mais
au moment où l'on discute, il y a eu des documents de travail qui ont
circulé à gauche et à droite, c'est vrai. L'Opposition a
appelé cela un avant-avant-projet de loi; elle a le droit d'appeler cela
comme elle voudra. Moi, je considère que ce sont des documents de
travail qui ont circulé; je ne peux pas présumer ce qu'il y aura
dans le projet de loi. Il est évident qu'en ce qui me concerne, je suis
lié par la "Loi de la magistrature", en ce sens que je devrai
édicter les règles de fonctionnement pour l'ensemble des citoyens
du Québec, oui, je pense bien. Est-ce que ce que vous me demandez
spécifiquement... Par exemple, je suppose qu'il y ait un permis
signé de la main de M. Max Gros-Louis. Si la loi était
édictée, stipulant que chaque citoyen du Québec, de
quelque nationalité qu'il soit, doit détenir un permis - et je
suppose que la loi dise cela - effectivement, vous contreviendriez à la
loi, c'est vrai, je suis obligé d'être franc avec vous, cela ne me
sert à rien d'être menteur. Je suppose que c'est dans ce sens que
vous me posiez la question.
M. Picard: C'est cela.
M. Chevrette: Mais comme je vous le dis, le projet de loi sera
déposé aux alentours de mars, avril, quelque chose du genre.
Probablement qu'il y aura... J'ai pris un engagement aussi hier matin parce que
ces messieurs et dames m'ont reposé des questions
régulièrement. Ils m'ont demandé si je m'engageais
à reconsulter les gens lorsque le projet de loi serait
rédigé. J'ai dit qu'il y aurait sans doute une consultation qui
pourrait ne pas être aussi élargie, qui serait sélective,
mais qu'il y aurait une deuxième consultation.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que cela va? M. le
député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, les remarques que je faisais
précédemment quant au mémoire qui a
précédé s'appliquent également à
celui-là. Je voudrais par contre poser une couple de courtes questions.
Il a été question d'une multitude de plaintes qui ont
été portées à l'endroit des nations
aborigènes. On a parlé d'une multitude. Est-ce qu'on me dirait,
d'abord, dans un premier temps, le nombre de plaintes, le nombre de celles qui
sont réglées et le nombre de celles qui sont en suspens?
Approximativement.
M. Gros-Louis: Est-ce que vous parlez des Hurons seulement?
M. Mailloux: Les nations aborigènes.
M. Gros-Louis: À travers le Québec, il a
été fait mention d'au moins 200 plaintes tout à l'heure,
avec le Montagnais. Vous en retrouverez tout à l'heure probablement dans
le mémoire des Cris. Ici, on en avait une trentaine et pas seulement
des... On a déclaré les infractions, on intente des poursuites et
on a été obligé d'aller en cour. Il était
censé y avoir un moratoire, mais on ne l'a jamais appliqué aux
Hurons. C'est une question qu'on aurait aimé poser, mais on n'est pas
pour aller dans tous les petits détails; on l'a appliqué pour
certaines bandes indiennes, mais on a oublié de l'appliquer pour les
Hurons qu'on poursuivait en cour.
M. Mailloux: Est-ce que vous diriez qu'il y a eu plusieurs
centaines de plaintes qui ont été portées contre
l'ensemble des aborigènes?
M. Gros-Louis: Oui, oui, plusieurs centaines de plaintes.
M. Mailloux: Est-ce que la nature de plaintes portées vise
des infractions dont se rendent coupables mes concitoyens blancs, dont on a eu
une démonstration assez particulière hier soir par les SACERF, ou
si ce sont des plaintes qui sont portées parce qu'un aborigène
n'aurait pas de permis de pêche suivant la loi actuelle, pas de permis de
piégeage ou autre, émis pour l'alimentation des Indiens?
M. Gros-Louis: Pour les Hurons, on doit vous dire qu'aucune
plainte n'a été portée pour des gens qui auraient fait du
braconnage, comme vous l'appelez, qui auraient tué beaucoup de gibier,
qui en auraient laissé perdre ou qui en auraient vendu, aucune! Les
seules plaintes portées, les seules causes qui ont été
amenées en cour, c'est tout simplement parce qu'on ne respectait pas le
permis émis par la nation huronne...
M. Mailloux: Que vous contestez d'ailleurs.
M. Gros-Louis: Exactement.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous voulez
ajouter quelque chose, M. Picard?
M. Picard: Oui, c'est une question.
Le Président (M. Bordeleau): C'est une question, vous
pouvez y aller; est-elle adressée au député de Charlevoix?
Non?
M. Picard: Non.
Le Président (M. Bordeleau): Non. C'est lui qui avait la
parole, mais je peux la changer.
M. Picard: Non. C'est à M. le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. Picard, allez-y.
M. Picard: Je ne veux pas accuser le gouvernement actuel d'avoir
pris des décisions qu'il n'a pas prises, parce que dans le temps
c'étaient des libéraux qui étaient au pouvoir. On
siège à une commission parlementaire, qui a pour objectif de
protéger l'habitat. Je trouve qu'elle aurait dû arriver avant le
développement des travaux de la Baie-James. On aurait alors pu
épargner beaucoup de territoires et beaucoup d'habitats. Ma question est
la suivante: Sur les territoires indiens, existent-ils des habitats pour les
animaux? Je souhaite que la loi ne vienne pas, encore une fois, empiéter
sur nos territoires, comme le fait la loi no 101, par exemple.
M. Chevrette: Je vais vous retourner une question, M. Picard.
Est-ce à dire que vous n'aimeriez pas qu'une loi vienne renforcer la
protection de vos propres habitats?
M. Picard: Je crois que nos gouvernements sont capables de
protéger les habitats des animaux.
M. Chevrette: D'accord, si c'est dans ce sens; c'est que je
comprenais mal que vous ne soyez pas en faveur de la protection des habitats,
c'est pour cela.
M. Picard: Absolument.
M. Chevrette: Je saisis mieux maintenant.
M. Gros-Louis: II y aurait un point que j'aimerais vous rappeler.
Il s'agit de l'historique et les gens l'oublient. Vous trouvez peut-être
que nos mémoires sont directs. On doit vous dire une chose, vous vous
rappelez que vous n'avez jamais voulu notre participation. Vous n'avez jamais
voulu qu'on soit citoyens canadiens, qu'on soit citoyens
québécois. N'oubliez pas que tout ce que les Hurons
possèdent, comme pays, c'est un quart de mille par un demi-mille pour
1200 personnes. Je ne sais pas si on restreignait les... C'est vrai que la
province de Québec est toute petite et qu'elle est toute peuplée
dans son ensemble, il y a des villes partout, il n'y a plus de place pour les
Indiens, cela doit être pour cela, que l'on nous accorde seulement un
quart de mille par un demi-mille.
On doit aussi vous dire que vous n'avez
jamais voulu qu'on fasse partie de votre gouvernement. Vous nous avez
défendu de voter; on a le droit de vote au Québec depuis douze
ans seulement, droit, d'ailleurs, qu'on n'a pas accepté, et qu'on
n'utilise pas, parce que vous nous l'avez donné peut-être un peu
tard. Maintenant on est content que vous nous ne l'ayez pas donné, parce
qu'on aurait été assimilés, probablement. C'est pour cela
qu'on veut revenir dix ans en arrière, vous nous considériez
alors comme une nation, et on veut que cela recommence. On est une nation, et
on veut traiter avec vous comme nation. Il y a aussi, une autre chose, qui nous
a été défendue partout au Canada; on n'a pas eu plus le
droit de vote au Canada, bien entendu, peut-être il y a quelques
années, avant qu'on accorde le droit de vote aux femmes. N'oubliez pas,
que les Indiens n'avaient pas le droit de s'inscrire à
l'université jusqu'en 1954.
Si on n'a pas voulu qu'on soit citoyens canadiens, si on n'a pas voulu
qu'on participe au développement du grand pays qui est le Canada, qu'on
participe au profit, qu'on nous laisse au moins la base de notre culture, la
chasse, la pêche et le piégeage. On est capable de faire des lois
qui vont protéger ce gibier. Ainsi nos gens pourront pouvoir vivre aussi
de toutes ces choses. On pourra probablement avoir des pourvoyeurs, qui seront
capables d'être de bons pourvoyeurs connaissant très bien la
chasse et la pêche.
C'est seulement pour vous rappeler ces trois étapes: On n'a pas
eu le droit de participer au gouvernement du Québec, pour
défendre les droits des Indiens; on n'a pas eu le droit de participer au
gouvernement du Canada et on n'a même pas le droit de s'instruire. Si
tout cela nous a été défendu dans un pays libre, un pays
civilisé, comme disait, M. Picard, tout à l'heure, de quel
côté sont les sauvages? Ce qu'on vous demande, messieurs,
mesdames, aujourd'hui c'est de respecter les droits originaux des Hurons. Quand
on discutera avec vous, on discutera définitivement comme une nation
avec une autre. Merci beaucoup.
Le Président (M. Bordeleau): Merci M. Gros-Louis.
J'appellerai le prochain groupe. Il s'agit de l'Alliance laurentienne
des Métis et Indiens sans statut Inc., soit M. Fernand Chalifoux,
président et M. Claude Riel-Lachapelle. Je leur demanderais de
s'approcher. Avant de vous donner la parole, comme je constate que votre
mémoire est assez volumineux, et comme on avait raison d'en parler il y
a quelques minutes aussi, je souhaiterais que vous puissiez le résumer
ou peut-être ne pas le lire au complet, vous en tenir à
l'essentiel, à cause du temps, bien sûr, et à cause du
vingt minutes que j'entends respecter autant que possible. M.
Riel-Lachapelle.
Alliance laurentienne des Métis et Indiens sans
statut
M. Riel-Lachapelle (Claude): M. le Président, M.
Chalifoux, président, s'est absenté cet après-midi. Je
vous présente, à ma droite, M. Réal Leblanc et, à
ma gauche, M. Pierre-Paul Charland.
Comme vous l'avez dit, avant de commencer l'étude du
mémoire, M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, nous allons mettre de côté les droits historiques et
les droits de propriété, car l'histoire a démontré
que l'Indien était toujours défavorisé lorsqu'il se
présentait devant des tribunaux de la société dominante.
Si vous le permettez, nous allons commencer le mémoire.
Le mémoire a été préparé par
l'Alliance laurentienne des Métis et Indiens sans statut du
Québec. Il se divise de la façon suivante. D'abord, une section
consacrée aux droits historiques et aux droits de
propriété des autochtones; ensuite, des informations
quantitatives sur les prises de chasse et de pêche au Québec, tant
par les Blancs que par les autochtones; troisièmement, la violation des
territoires de chasse et de pêche par les non-autochtones et enfin, les
conclusions. Par la suite, vont venir s'ajouter les annexes que je vous invite
à lire.
À la page 14, la récolte faunique terrestre et
ailée au Québec. Regardons de plus près les diverses
activités de chasse et de pêche se pratiquant au Québec.
Ici, nous allons exclure les activités traditionnelles.
Premièrement, la chasse. Il existe deux types de chasse au
Québec, soit la chasse commerciale et la chasse
récréative. La chasse commerciale. Il y a deux espèces
animales qui sont chassées à cette fin, soit le lièvre et
le phoque. L'un pour sa chair, l'autre pour son pelage et sa chair. La capture
et la récolte du lièvre sont régies par le gouvernement
provincial par la Loi sur la conservation de la faune. La mise en marché
de cet animal est bien limitée à des périodes
précises au cours de l'année, selon les régions de la
province. Malheureusement, pour le moment, nous n'avons aucune donnée
permettant de mesurer adéquatement la proportion de la récolte de
ce gibier annuellement.
Le phoque: contrairement à la récolte du lièvre,
l'activité de chasse au phoque est de juridiction
fédérale. Pour ce qui est des données concernant cette
activité, mentionnons qu'en 1980, il y a eu une estimation de 32 258
spécimens capturés qui sont attribués à la
récolte québécoise. Près de 20 000
spéciments furent récoltés par deux phoquiers le long du
golfe Saint-Laurent; le reste, 13 258 spécimens de la récolte,
est prélevé par divers chasseurs non autochtones le long du
littoral du golfe
Saint-Laurent, soit la Côte-Nord et les
Îles-de-la-Madeleine.
D'après l'Organisation des pêches de l'Atlantique du
Nord-Ouest, l'organisme international qui est responsable des données
scientifiques sur les populations actuelles des phoques, la population des
phoques a été évaluée à 180 000
spécimens. On a estimé à seulement 10 000 les
spécimens capturés par les autochtones pour tout le nord du
Canada.
La chasse récréative. La chasse récréative
regroupe des chasseurs québécois (non autochtones) dont le nombre
a été estimé à 520 000 individus en 1980. Ils
consacrent à cette activité 3 800 000 jours, dont 1 800 000 jours
à la poursuite du gros gibier.
L'orignal est sans contredit le plus gros gibier recherché par
cette population de chasseurs. Il y a eu au-delà de 100 000 adeptes qui
se sont procuré annuellement leur permis de chasse pour une
récolte totale de 12 000 orignaux.
Le second animal recherché par ce groupe de chasseurs est l'ours
noir. L'intérêt sportif tend à augmenter, mais sa
récolte demeure relativement faible, soit environ un millier de
spécimens.
Pour ce qui a trait à la chasse de la faune ailée, elle
est clairement récréative et le nombre d'adeptes
s'élève à 65 000. Ils consacrent environ 600 000 jours
à la pratique de ce sport. La récolte annuelle de la chasse aux
oiseaux migrateurs est estimée à 123 000 spécimens
tués, dont 43% se composent de canards barboteurs, 26% de canards
plongeurs et 7% en ce qui concerne les bernaches et les oies blanches.
Pour ce qui est de la pratique de la chasse au petit gibier ailé
terrestre, il est démontré que les chasseurs
québécois pratiquent cette activité pendant un total de 2
500 000 jours de récréation. Cet effort de chasse a une
récolte annuelle de 2 200 000 lièvres et de 1 200 000 perdrix.
(17 h 15)
La pêche. Tout comme l'activité de chasse,
l'activité de pêche existe sous deux types - nous excluons
toujours la pêche de subsistance, qu'on verra dans un chapitre plus loin
- soit la pêche commerciale et la pêche récréative ou
sportive.
Le prélèvement annuel de la ressource ichtyologique dans
les eaux québécoises se chiffre à plus de 77 000 tonnes
métriques. La répartition se lit comme suit: 80% est pour la
pêche commerciale, 18% pour la pêche récréative et
seulement 2% pour la pêche de subsistance.
La pêche commerciale. L'activité de la pêche
commerciale relève autant de la juridiction fédérale que
de la juridiction provinciale.
Il y a plusieurs espèces de poissons récoltés qui
n'ont pas une haute cote de popularité auprès des populations
autochtones du Québec. Ceci s'explique par divers facteurs autant
culturels que socio-économiques, surtout en ce qui a trait à la
pêche provenant d'activités côtières et
hauturières.
La pêche récréative. Pour ce qui est de la
pêche commerciale intérieure, cette activité se pratique
à l'intérieur des terres et la récolte annuelle est
d'environ 647 500 tonnes métriques de poissons composées, entre
autres, de spécimens comme la barbotte, l'anguille et la perchaude.
La pêche récréative a, pour sa part, un
prélèvement de 13 134 tonnes métriques de poissons. Les
espèces les plus récoltées sont le brochet, les
salmonidés et le doré.
Un chapitre important de la pêche récréative est la
pêche au saumon. Sans trop s'étendre sur ce sujet, nous croyons
qu'il est intéressant de donner ici quelques chiffres. Ces
données ont été confirmées par le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche de l'époque, M. Lessard, et
regroupent celles du rapport Carter sur le saumon en 1968. On voit très
bien dans ce schéma qu'à peine 3% des prises du saumon de
l'Atlantique sont attribuables à la pêche amérindienne.
Revenons maintenant aux activités de subsistance. Par
définition, les activités de subsistance sont des
activités pour vivre et pourvoir à ses besoins afin de combler
certains besoins autant alimentaires que vestimentaires.
Présentement, au Québec, la chasse de subsistance fait
l'objet d'ententes spéciales entre le gouvernement et la population
autochtone. Ces ententes sont souvent appliquées à des
communautés locales et elles ne sont pas vraiment précises; elles
sont sujettes à mettre le doute sur de telles pratiques, car elles ne
sont jamais définitives, mais provisoires et temporaires.
La caractéristique de la chasse dite de subsistance est la grande
variété d'espèces animales convoitées. Citons
l'orignal, le caribou, la perdrix, le lièvre, le castor, etc.
Pour ce qui est de la pêche, elle est estimée à
seulement 1808 tonnes métriques de poissons. Différentes
espèces de poissons sont ainsi récoltées.
Nous savons que par le passé beaucoup d'associations sportives,
de regroupements pour la protection de la faune ont été
créés; tous sont des organismes non autochtones qui ont eu et ont
encore un mépris de l'autochtone et qui ne reconnaissent en aucun cas
les besoins du peuple autochtone à une récolte faunique de
subsistance.
Ces organismes ne connaissent rien de la culture indienne et
métisse. Ils se basent sur des préjugés et
véhiculent une image fausse et malhonnête de l'autochtone à
l'ensemble de la population québécoise.
Il est donc important, dans ce présent mémoire,
d'écarter leurs prises de position et
leurs études, qui sont des préjudices, si nous voulons
regarder objectivement la récolte faunique des autochtones.
Voici les faits. Il y a environ 50 000 Métis et Indiens sans
statut vivant au Québec. Cela regroupe en fait plusieurs nations et
communautés métisses réparties sur l'ensemble du
territoire québécois. Il est bien évident que ces
individus ne pratiquent pas en tout temps une activité de chasse, de
pêche et de trappe.
D'après les chiffres officiels qui sont fournis par le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il y a une
population de 520 000 individus non autochtones actifs qui, en 1980,
jouissaient du privilège de la chasse. Ils consacrent au-delà de
2 millions de jours à cette activité. La quantité de
viande de gibier ainsi récoltée est incroyable: 12 000 animaux
tués en 1980, 123 000 spécimens de la faune ailée
migratrice, 2 200 000 lièvres et 1 200 000 perdrix. Pour la chasse
commerciale, la majorité des phoques tués le sont par des
chasseurs non autochtones.
L'activité de pêche est similaire. La quasi totalité
des prises est effectuée par des Blancs. Il y a des milliers de tonnes
métriques de poissons qui sont recueillies sans qu'un seul autochtone
n'intervienne. Mentionnons qu'à peine 3% des prises de saumon de
l'Atlantique sont attribuables aux autochtones.
Nous pourrions ainsi continuer à étaler plusieurs chiffres
et statistiques sur le sujet.
Le comble, les Québécois et Canadiens ont l'affront de
s'affirmer propriétaires de ces richesses fauniques en dérobant
ainsi la faune à la population autochtone.
Le patrimoine faunique est autochtone et non québécois ou
canadien.
De plus, ils poussent même l'arrogance jusqu'à affirmer que
la pêche, la chasse et la trappe de subsistance sont dérisoires.
Il n'en demeure pas moins évident que les autochtones ont, en pratiquant
librement la chasse, la pêche et la trappe, le droit d'assurer pleinement
leur santé physique et leur identité propre et cela, aux
dépens du plaisir des chasseurs et pêcheurs sportifs.
Il serait très périlleux d'accepter certaines affirmations
qui laisseraient l'impression que plus personne au Québec ne devrait
recourir à la chasse, à la pêche et à la trappe pour
se nourrir. Nul ne peut privilégier l'industrie sportive de la chasse et
de la pêche au détriment du bien-être d'un peuple.
L'accès aux ressources fauniques devrait être accordé aux
autochtones en premier lieu.
La violation de nos territoires de chasse et de trappe. Ici au
Québec, des Blancs et des groupes de chasseurs ont acquis des
privilèges particuliers sur les terrains de chasse et de pêche.
Ils se sont emparés de nos terrains ancestraux et ont formé des
clubs privés. La plupart de ces invididus étaient des
étrangers à la province. Au moment où ces droits ont
été acquis par ces invididus, les chasseurs autochtones dont les
territoires étaient ainsi absorbés se sont plaints, mais il n'y
avait personne pour recevoir leurs plaintes. Les propriétaires et les
membres du gouvernement qui avaient fait les ententes vivaient au loin et ne
pouvaient être rejoints. De plus, les gardes-chasse qui avaient la
tâche d'assumer la protection de ces territoires, nos territoires
ancestraux, ont agi avec arrogance envers notre peuple. Ignorants du
système et sans pouvoir d'aucune sorte, le trappeur autochtone ne
pouvait qu'accepter les déclarations du genre "c'est la loi" ou "c'est
le gouvernement qui loue des terres", etc.
Les autochtones ne reçurent absolument rien en échange des
territoires ainsi réquisitionnés. Depuis toujours, le
gouvernement s'est, pour sa part, montré indifférent quand les
droits de notre peuple étaient en cause. Par la suite, en 1978, quand le
gouvernement du Québec a aboli les droits exclusifs de chasse et de
pêche dans la province, il a agi de la manière habituelle. Il a
établi un système où l'énoncé de politique
déclarait que de nouveaux règlements en ce domaine visaient
à donner aux citoyens du Québec la plus grande priorité,
la plus grande responsabilité dans la gestion, la conservation et
l'utilisation des ressources de la province en matière de chasse et de
pêche.
Intrusion des zones d'aménagement et de conservation et des zones
d'exploitation, de conservation, soit les ZAC et les ZEC, sur nos territoires
ancestraux. À l'avènement du nouveau système, le
gouvernement décidait que les territoires québécois
seraient divisés en 50 ZAC. Chaque ZAC avait comme superficie environ
3000 milles carrés. Ces zones étaient, par la suite,
subdivisées en territoires plus petits appelés ZEC. Elles varient
en superficie de 500 à 2000 milles carrés. La gestion de la
conservation de la faune a été placée sous la juridiction
de groupes et d'organismes locaux, par exemple les groupes affiliés
à la Fédération québécoise de la faune, dont
les pourvoiries.
Quand le nouveau système a été annoncé, le
gouvernement du Québec s'est donné pleins pouvoirs en rejetant
les droits des autochtones et leurs biens. Le gouvernement s'est emparé
des terres et dans son mouvement d'expansion, il a donné pouvoir
à des membres et à des conseils d'administration de toutes sortes
d'organisations sportives qui étaient, elles, composées
uniquement de Blancs.
Par oubli ou par décision, les Métis et les Indiens sans
statut du Québec ne furent jamais considérés, soit avant
soit après l'implantation du nouveau système. Nous
considérons cette attitude comme un mépris
et un vol de notre patrimoine faunique. Les divers peuples autochtones
du Québec n'ont pas été consultés et cette
pratique, en Afrique du Sud, s'appelle apartheid. En ayant cité
antérieurement des chiffres sur la récolte faunique
effectuée au Québec, le lecteur jugera qu'un braconnage
systématique de la part des non-autochtones s'est installé sur
nos terres et nos territoires de trappe.
Qu'en ont retiré les Métis et les Indiens sans statut?
Rien. Où sont les retombées économiques? Sûrement
pas du côté des autochtones. Le pillage systématique dans
notre territoire nous a laissés démunis et nous n'avons aucun
autre recours que de percevoir des allocations d'aide sociale. Un immense
sentiment de frustration, face à l'impossibilité dans laquelle
nous nous trouvons de faire valoir nos droits règne dans notre peuple.
On nous a tout retiré et nous ne pouvons même pas partager ce
"privilège" que la société dominante avait
accaparé. Nos territoires de trappe ont été envahis par
des non-autochtones qui en retirent notre gibier, nos animaux à
fourrure. Les Métis et les Indiens sans statut se sont vu nier le droit
particulier en tant qu'autochtones et n'ont pas accès aux
réserves de castors. Nous sommes contraints de participer au
système des terrains de trappe enregistrés des Blancs.
Pour nous, ce régime nous a continuellement
défavorisés collectivement. Nous ne voulons pas de ce
régime. Nous voulons la pratique de nos droits de trappe sur nos
territoires et non sur les territoires qui nous ont été
assignés par le gouvernement. Et présentement, pour y arriver,
nous devons vivre dans l'illégalité. Nous avons le droit, par
notre culture, à la libre circulation sur nos terres. Pour nous,
l'accès à nos terres est peut être plus qu'une
activité de trappe. C'est avant tout notre mode de vie, nous en avons
retiré notre propre identité, notre propre conscience en tant que
peuple. Nous refuser cette identité, c'est accepter de nous faire vivre
dans des conditions inacceptables.
La majorité de notre peuple vit au-dessous du seuil de la
pauvreté; au-delà de 80% des gens de notre communauté sont
sans emploi. Beaucoup de nos gens vivent dans des maisons non isolées,
n'ayant ni eau courante, ni électricité. Nous avons un
réel besoin de la chasse, de la pêche et de la trappe. C'est une
question de survie pour un peuple.
Lorsque les Blancs sont entrés dans la foret, ils ont
pillé sans merci les ressources sans tenir compte des temps à
venir. Ce ne sont pas les populations autochtones mais les autres qui devraient
être contraintes de limiter leur chasse et être repliées sur
des territoires étroitement surveillés.
Car les autochtones savent veiller au repeuplement faunique et à
ne pas épuiser les ressources parce qu'ils en ont besoin pour subsister.
Peut-être bien qu'ils pourraient diriger les Blancs dans leurs
expéditions et leur enseigner l'écologie.
En conclusion, en tant que peuple autochtone, nous nous reconnaissons
comme un peuple distinct de la société blanche du Québec,
et ayant le droit de disposer de nous-mêmes.
Nous profitons de ce présent mémoire pour indiquer au
gouvernement du Québec ce qui suit: Premièrement, que nous ne lui
reconnaissons pas la compétence de légiférer et de nous
dicter ses lois. Deuxièmement, qu'il est urgent de mettre en place les
dispositions permettant la reconnaissance de notre souveraineté sur nos
terres ancestrales, cela en tant que première nation et ayant des droits
historiques de chasse, de pêche et de trappe. Troisièmement,
qu'à l'avenir nous traiterons et discuterons avec le gouvernement du
Québec d'égal à égal. Quatrièmement, qu'il
doit ériger des structures qui permettront à nous, Métis
et Indiens sans statut, de contrôler l'exploitation de nos terres et
d'assumer le développement de leurs ressources. Nous espérons que
le gouvernement du Québec saura comprendre notre position, et que le
temps est venu pour la nation métisse et indienne sans statut de se
prendre en main.
La société blanche a depuis toujours ignoré les
droits, les traditions et les valeurs qui nous ont été
léguées par nos parents, les parents de nos grands-parents, etc.
La société blanche a toujours profité au maximum du
Métis et de l'Indien sans statut, sans jamais exprimer en retour une
certaine forme de gratitude. C'est pourquoi, dorénavant, nous avons
l'intention de prendre en main notre développement en tant que peuple
autochtone, en réaffirmant notre souveraineté sur nos terres pour
le bien-être futur de nos enfants. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Je vous remercie M.
Riel-Lachapelle.
M. le ministre, pour questions et commentaires.
M. Chevrette: M. le Président, vous me voyez, je ne dirai
pas dans l'embarras mais presque, puisque votre statut est nettement
différent de celui des groupes qui ont témoigné
jusqu'à maintenant. Comme groupement, je me demande exactement quelle
serait la procédure la plus adéquate à vous
suggérer pour revendiquer vos droits très précis. Je suis
loin de nier le droit de revendiquer des droits, loin de là; sauf qu'il
n'y a pas une juridiction dans les lois actuelles à laquelle je peux
vous greffer, à toutes fins utiles. Compte tenu du fait que vous
prétendez, dès le départ, que vous avez des droits
établis ancestraux mais que vous n'avez pas de statut reconnu, je suis
vraiment perplexe pour commenter votre
mémoire, purement et simplement.
M. Riel-Lachapelle: M. le ministre, pour répondre à
votre question, je dois vous informer que depuis la nouvelle Constitution du
Canada les peuples autochtones regroupent les Indiens, les Inuits, et les
Métis.
M. Chevrette: C'est en vertu de l'article 35, si j'ai bien
compris. Vous le rattachez à l'article 35 de la nouvelle Constitution.
Cependant, est-ce que cela a été défini
concrètement ou si cela le sera dans un avenir rapproché?
M. Riel-Lachapelle: Cela a été défini
concrètement.
M. Chevrette: C'est-à-dire que c'est inclus.
M. Riel-Lachapelle: C'est inclus. M. Chevrette: Comme
définition. M. Riel-Lachapelle: Comme définition.
M. Chevrette: Est-ce que la définition des droits comme
tels a été explicitée ou si cela ne fera pas l'objet de
discussions ultérieures?
M. Riel-Lachapelle: Cela fera une discussion dans les prochains
mois, le printemps prochain avec tous les groupes autochtones, incluant les
Métis, les Indiens et les Inuits. (17 h 30)
M. Chevrette: Dans le contexte actuel, j'aurais pu vous dire: Au
même titre que les autres groupes qui ont un statut reconnu, suivez la
procédure normale qui est prévue pour le Québec.
M. Riel-Lachapelle: M. le ministre, je voudrais préciser
que votre gouvernement, il y a deux ans, a reconnu par décret toute
descendance indienne sur le territoire québécois en ne
reconnaissant pas la loi fédérale sur les Indiens.
M. Chevrette: Voulez-vous répéter votre
question?
M. Riel-Lachapelle: J'ai voulu vous informer du fait que votre
gouvernement ne reconnaît pas la loi fédérale, le "Indian
Act", et a reconnu comme étant autochtone toute personne de descendance
indienne au Québec.
Le Président (M. Bordeleau): II faudrait que vous
demandiez la parole, M. le député de Berthier. Je peux vous la
donner, sauf pour le fonctionnement des micros. M. le député de
Berthier.
M. Houde: Est-ce que c'est la convention qui a été
signée pour la Baie-James, l'article 3?
M. Riel-Lachapelle: Cela n'a aucun rapport avec la convention de
la Baie-James. C'est le gouvernement du Québec qui, il y a environ deux
ans, a fait un décret ministériel ne reconnaissant pas la loi
fédérale, appelée communément "loi sur les
Indiens", et a reconnu comme étant autochtone toute personne de
descendance indienne. D'ailleurs, pour de plus amples informations, vous n'avez
qu'à consulter le SAGMAI. Vous y trouverez les réponses dans ce
domaine.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Quand vous parlez du décret, M. Lachapelle,
vous parlez de quel décret?
M. Riel-Lachapelle: II y a à peu près deux ans de
cela...
M. Chevrette: Je vais vous expliquer pourquoi. Vous dites qu'on a
passé un décret; si vous me l'identifiiez, je pourrais y faire
référence et vérifier.
M. Riel-Lachapelle: Je peux vous donner... Oui, allez-y.
M. Chevrette: Parce que j'ai l'impression qu'on est loin de nier
la loi sur les Indiens. On se base précisément sur l'article 88
pour conclure des ententes. C'est pour cela que je suis surpris...
M. Riel-Lachapelle: Je ne pourrais pas vous donner...
Le Président (M. Bordeleau): Pour être sûr que
vous ne parliez pas tous en même temps parce que l'enregistrement est
impossible, je voudrais laisser terminer le ministre et je vous redonnerai la
parole immédiatement après, M. Lachapelle. Vous pouvez y
aller.
M. Riel-Lachapelle: Pour de plus amples informations, allez
consulter le ministère du Revenu parce que cela fait plus de deux ou
trois ans que les Métis ne paient plus de taxes et cela a
créé bien des problèmes au niveau du gouvernement du
Québec. C'est justement à cause de ce décret.
M. Chevrette: C'est donc le décret sur les revenus.
M. Riel-Lachapelle: Oui. Automatiquement, quand le gouvernement a
reconnu les Métis comme faisant partie du peuple autochtone, nous
n'étions plus
assujettis à la loi sur le revenu.
M. Chevrette: Je peux vous répondre avec certitude sur un
point, quitte à vérifier le reste. L'article 88 de la loi sur les
Indiens nous permet précisément d'appliquer notre Loi sur la
conservation de la faune. On ne peut pas du même souffle dire qu'on nie
la loi sur les Indiens.
M. Riel-Lachapelle: M. le ministre, dernièrement, il y a
la cause de M. Walter Moosehunter de la Saskatchewan. Il avait
été condamné par la province pour avoir tué un
orignal, violant ainsi leur loi sur la conservation de la faune. C'est
allé jusqu'à la Cour suprême et celle-ci a très
clairement démontré que l'article 88 ne s'appliquait pas aux
nations autochtones.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Un instant, je vais vérifier. Vous
comprendrez que c'est assez complexe. Je pourrais continuer à vous poser
des questions sauf que cela deviendrait très technique. Est-ce que vous
savez si, en Saskatchewan, il existait un traité...
M. Riel-Lachapelle: La cause en question...
M. Chevrette: ... entre la nation autochtone de la Saskatchewan
et le gouvernement de la Saskatchewan?
M. Riel-Lachapelle: C'est un Indien reconnu par le gouvernement
fédéral, donc c'est un Indien...
M. Chevrette; Ce n'est pas cela que je vous demande, ce n'est pas cela
que je vous pose comme question.
M. Riel-Lachapelle: ... enregistré, probablement un Indien
sous traité.
M. Chevrette: Est-ce qu'il y avait un traité existant
entre la nation autochtone de la Saskatchewan et son gouvernement?
M. Riel-Lachapelle: Probablement que oui.
M. Chevrette: Si vous me répondez oui, cela change
complètement l'approche par rapport à ici où il n'y a pas
de traité. C'est ça qui est la différence fondamentale.
Quand vous me donnez l'exemple... Je veux bien vous croire sur parole, mais
dès que vous m'affirmez qu'il y a un traité, dès qu'on
accepte de signer un traité, on se soustrait à la
législation. Ici, il n'y a pas de traité, donc on ne peut pas se
soustraire à la législation. C'est la différence
fondamentale dans l'exemple que vous me donnez. Donc, je comprends bien que
vous pouvez me donner l'exemple de la Saskatchewan; vous pourriez m'en apporter
de plusieurs endroits aussi. C'est vrai qu'on a le droit de faire des
traités. On peut avoir un traité spécifique avec la nation
huronne, ce qui aurait pour effet de vous soustraire à toutes sortes de
lois québécoises. C'est un fait, mais du moment qu'il n'y a pas
de traité, c'est la loi de portée générale qui
prévaut.
M. Riel-Lachapelle: Mais de toute façon, M. le
ministre...
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lachapelle.
M. Chevrette: Et vous m'avez donné un exemple d'un cas
précis où un traité existait.
M. Riel-Lachapelle: De toute façon, M. le ministre...
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lachapelle.
M. Riel-Lachapelle: ... les traités, c'est bien
typiquement pour l'ouest du Canada. Au Québec, en excluant la Convention
de la Baie-James, il n'y a jamais eu de traité. Qu'on soit Métis
ou Indien reconnu, on aura toujours le même problème avec vos
permis de chasse. Quand nous, en tant que peuple, nous allons dans la
forêt, nous sommes toujours en contradiction avec vos gardes-chasse. Mais
nous, c'est notre culture que d'aller dans le bois. Nous n'allons pas dans le
bois comme sport ni comme loisir ni comme récréation. Nous allons
dans le bois pour nourrir nos familles. Je pense que c'est un manque. Que ce
soit un Indien sous traité ou un Indien sans traité, que ce soit
un Indien reconnu par le "Indian Act" ou non, le problème est qu'au
Québec, on n'a pas la paix dans notre bois. C'est la seule chose.
M. Chevrette: Vous avez fait dévier complètement la
conversation. Là où on discutait, vous avez dit qu'on niait la
loi sur les Indiens. Je vous ai dit que non. Vous m'avez donné un
exemple montrant que c'était possible; vous m'avez donné
l'exemple d'un type qui avait tué un orignal, mais vous m'avez
donné l'exemple d'un type, cependant, qui appartient à une nation
qui a signé un traité avec son propre gouvernement. Je vous ai
dit que ce n'est pas la même chose ici, car il n'y a pas de
traité. Malheureusement, c'est ça la situation. À ce
moment-là, les citoyens sont couverts par la loi de portée
générale, c'est un fait. Je ne discute pas du bien-fondé
de vos arguments, je discute purement et simplement à partir de
l'exemple que vous m'avez donné.
M. Riel-Lachapelle: M. le ministre.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lachapelle.
M. Riel-Lachapelle: On va laisser la Saskatchewan et on va
revenir ici au Québec. J'ai lu en fin de semaine que dans le district de
Mistassini, justement, un Métis s'était fait confisquer ses
pièges par les agents de conservation. Il trappait. C'est allé en
cour. Je peux vous donner le numéro de la cause. Le juge a
acquitté le Métis, qui a prouvé qu'il était
Métis.
Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. le
député de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je pense que le
mémoire dont la commission vient de prendre connaissance est assez
révélateur de la situation. On sursaute un peu quand on regarde
le document très élaboré que vous soumettez pour
étude à cette commission et qui fait la part des choses entre ce
qui vous a été réservé, qui est très peu, et
ce que mes concitoyens québécois ont pris sur l'ensemble de la
ressource dans tout le Québec. Je pense bien que votre mémoire,
de même que ceux qui l'ont précédé, donne quand
même une dure leçon à tous ceux qu'on accuse de mal
utiliser les ressources et de s'en servir à des fins pour lesquelles on
pourrait éviter de détruire l'ensemble des ressources fauniques
du Québec.
Il y a une question qui me vient à l'esprit. Je sais que les
gouvernements précédents, dont j'ai fait partie, comme celui
d'aujourd'hui, étaient pris avec un problème très
particulier. Comme peuple fondateur qui revendique un statut particulier dans
les lois de chasse et de pêche, au fur et à mesure que la province
de Québec a évolué, des lois vous ont été
enlevées successivement. Vous mentionnez dans votre mémoire
qu'antérieurement, durant l'existence des clubs privés, on vous a
tassés tranquillement, on vous a repoussés et que vous aviez
même de la difficulté à trouver les responsables de tels
agissements. Quand la libération de l'ensemble des clubs privés
est arrivée, la formation des ZEC, est-ce que cette opération a
davantage reculé et repoussé les territoires sur lesquels vous
pouviez auparavant oeuvrer pour les fins que vous mentionnez, comme
l'alimentation etc.
M. Riel-Lachapelle: Oui. Pour vous répondre sur la
situation des dernières années. Les Indiens non statués,
qui n'étaient pas reconnus comme tels par le gouvernement
fédéral, et les Métis vivaient en, ce qu'on appelle
squatters, en ce sens, qu'ils avaient pris des terres de la couronne et, de
génération en génération, ces familles
s'étaient installées sur ces parcelles de territoire de la
couronne. Il n'y avait aucun acte notarié, aucun titre de
propriété comme tel; disons que c'était
légué, comme j'ai dit, comme squatters. Quand il y a eu le
lancement de l'opération Gestion, il y a des familles qui se sont vues
prises par l'encadrement, soit des ZAC et des ZEC, et qui n'ont pas pu subvenir
à leurs besoins parce qu'elles ont été exclues du
territoire, elles ont été - comment dire? Je cherche le mot -
rejetées du territoire. Quand même, ces familles vivaient depuis
des générations sur ces lopins de terre. Mais elles n'avaient
aucun acte notarié. Ces familles ne pouvaient pas vivre, selon la loi
fédérale, sur les réserves indiennes. Elles vivaient donc
à l'extérieur des réserves indiennes qui, bien souvent, au
nord du Québec sont les terres de la couronne. Donc, cela a
affecté énormément de familles métisses et
indiennes nons statuées, quand est venu le temps de faire les ZEC et les
ZAC. Ces mêmes familles se sont retirées du territoire
lorsqu'elles ont voulu aller sur leurs territoires ancestraux: elles se sont
vues devant une barrière; c'était le même club. Cela a
affecté énormément les activités traditionnelles de
trappe. Les familles ne pouvaient plus circuler en forêt.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Charlevoix.
M. Mailloux: II y aurait peut-être une quantité de
questions à poser, mais j'ai l'impression que devant l'abondance des
matières qui sont soulevées dans les rapports, je pense que,
autant de la part du gouvernement que de celle de l'Opposition, il sera
nécessaire d'aller plus en profondeur dans les études
ultérieures, avant que le projet de loi ne soit avancé.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: D'autant plus que cela déborde
carrément le mandat de la commission... On est toujours à cheval
entre la négociation suprapolitique par rapport au mandat qui est
clairement dévolu à la commission qui est relatif à
l'encadrement pour la conservation de la faune et la sauvegarde des
habitats.
M. Mailloux: La seule interrogation que j'aurais à
l'esprit devant l'ensemble des mémoires qui sont soumis par les
autochtones est la suivante: Est-ce que, dans la législation qu'aura
à apporter le gouvernement, lors d'une modification à la loi, il
ne devra pas être nécessaire d'aller plus en profondeur qu'on y a
été comme gouvernement et que vous avez pu y aller aujourd'hui et
voir de quelle façon certains correctifs pourraient être
apportés visant les
autochtones, qui ont quand même des droits assez
spécifiques ici à l'intérieur du pays?
Le Président (M. Bordeleau): Alors, merci. Je vous
remercie M. Riel-Lachapelle ainsi que M. Leblanc et M. Charland.
J'appelle donc maintenant la Société Makivik, le
mémoire no 25, représentée par M. Johnny Peters et
Siméonie Walukturuk. Oh! Je m'excuse, il y a eu une inversion. Alors, il
s'agirait plutôt de... De l'accord des deux prochains, on a
inversé le septième avec le huitième. On entendrait donc
immédiatement le grand conseil des Cris; le mémoire no 15. Alors,
M. Diamond, M. O'Reilly et les personnes qui les accompagnent.
Mr. Diamond, you can present the people who are with you and go on to
the "mémoire" but, right now, I just want to say to you that I would
appreciate that you summarize some parts of your paper, because, I think, it is
so long. Is it O.K., Mr. Diamond?
Grand conseil des Cris du Québec
M. Diamond: Thank you, Mr. President. I am Billy Diamond, the
Grand Chief and the chairman of the Cree Regional Authority for the Grand
Council of the Cree of Québec. We have the president of the Cree
Trappers Association, Thomas Coon, the director of traditional pursuits for the
Cree Regional Authority, Henry Mianscum and two legal counsels, Peter Hutchins,
on my right, and Mr. James O'Reilly, on my left. (17 h 45)
Mr. Chairman, I just want to highlight the brief. However, I want to
point out that we would like to enter the brief into the record. Will that be
done?
Le Président (M. Bordeleau): Yes, it could be done.
M. Diamond: There is also an additional comment to the brief on
which we have copies here, that can be made available to you, Mr. Chairman, and
to the members of the commission. Mr. O'Reilly will give those to you.
Le Président (M. Bordeleau): All right.
M. Diamond: The Grand Council of the Crees and the Cree Regional
Authority brief to this parliamentary commission is very long. I will just make
some comments to it, so that we can be available for questions.
First, the James Bay Northern Québec Agreement creates a special
legal regime for hunting, fishing and trapping in chapter 24 of the James Bay
Northern Québec Agreement.
The agreement also provided there would be special legislation to
reflect this special legal regime for hunting, fishing and trapping. This
legislation was passed in 1978. It is an Act respecting hunting and fishing
rights in the James Bay and New Québec Territories. This legislation is
good and basically respects chapter 24 of the James Bay Northern Québec
Agreement. The act respecting hunting, fishing rights in the James Bay and New
Québec Territories takes precedence over the Wild Life Conservation Act,
section 3.
Therefore, the Wild Life Conservation Act only applies to the James Bay
and New Québec Territories, the territory covered by the James Bay and
Northern Québec Agreement to the extent that it is not incompatible with
special legislation or the agreement.
However, amendments to the Wild Life Conservation Act are very important
to us. We are supposed to be specially consulted about them and we have not
been consulted. Attempts could be made through the amendments to reduce our
rights even though this contravenes both the James Bay and Northern
Québec Agreement and the special legislation.
Even if there is no deliberate attempt to reduce our rights and even
though our rights take precedence over the Wild Life Conservation Act, much
confusion could be caused in the territory through amendments to the Wild Life
Conservation Act if great care is not taken to live up to the letter and spirit
of the commitments in the James Bay and Northern Québec Agreement and
the special legislation.
Furthermore, we are quite satisfied with the hunting, fishing and
trapping rights which we have under the James Bay Agreement and the special
legislation. Much of the implementation in these areas is also
satisfactory.
However, there have been some very serious problems of implementation
that we have outlined in our brief. These must be resolved immediately. We are
especially unhappy that the coordinating committee of the Hunting, Fishing and
Trapping is not being properly consulted in regard to the proposed amendments.
Some of the implementation problems are as follows:
Although, the Crees, the Inuits, the Naskapis won a Superior Court
judgment confirming our interpretation of the right of first refusal on
outfitting, Québec has broken its word to us and appealed that judgment.
That judgment was a declaratory judgment. It was not an injunction, it was a
declaratory judgment, and we had agreed that we would stand by that judgment,
but the Government of Québec has taken that case and gone to appeal.
Worse, we are still being deprived of effective exercise of this important
right. This right is good for thirty years and seven years have gone by
without
any development in respect to this right.
Recently, Propair has applied to establish outfitting facilities in
category three (3) lands. The Québec Government is supporting this
application which, in our view, should be subject to our right of first
refusal. We cannot accept that our right of first refusal can be circumvented
by a corporate reorganization.
Québec has removed the authority of Cree tallymen as auxiliary
conservation officers after they had been sworn in through the adoption of the
1978 amendments to the Wild Life Conservation Act.
Québec is not financing or adequately supporting native people as
conservation officers despite a commitment in the James Bay and Northern
Québec Agreement.
Québec is not respecting its promise during the agreement
negotiations to recognize Cree hunting, fishing and trapping rights outside the
territory, particularly in the Mistassini area. There are Cree trap lines
there. Non native hunting and fishing controls are not as strong as they should
be. With regard to the amendments proposed, our comments are in our brief. We
are quite concerned about some of these as to their effect on our rights, but
we really cannot properly comment on these until we have studied the text of
the proposed amendments. We insist strongly though that the Government and the
Legislature of Québec respect the letter and spirit of their commitments
to us in the James Bay and Northern Québec Agreement, in this special
legislation and in the other legislation relating to the agreement, especially
the Act approving the James Bay and Northern Québec Agreement. As we
mentioned in our brief, we support some of the objectives of the proposed
amendments such as the protection of habitats, the increasing wild life
sanctuaries, but these must not be used as an excuse to lessen our rights.
Finally, we think our hunting, fishing and trapping rights, as well as
those of the other Indians of Québec, are now recognized and guaranteed
by the new Constitution of Canada. This must be taken into account by the
Québec Government and Legislature.
We conclude by asking you to make sure that any amendments to the
Wild-Life Conservation Act do not prejudice our rights or special hunting,
fishing and trapping regime. We also ask you to resolve immediatly the serious
problems we have raised in our brief and amend any statutes and regulations
which are inconsistent or incompatible with the James Bay Northern
Québec Agreement and the special legislation. Thank you, Mr.
Chairman.
Le Président (M. Bordeleau): Thank you, Mr. Diamond. M. le
ministre ou M. le député de... M. le ministre.
M. Chevrette: Je tiens à vous remercier de votre
exposé et je tiens tout d'abord à vous assurer qu'on a lu le
mémoire, qu'on l'a analysé et que mon ministère n'a jamais
eu l'intention d'éroder ou de diminuer les droits des Cris en
matière de chasse, de pêche et de piégeage, droits qui ont
été acquis lors de la signature de la Convention de la Baie-James
et du Nord québécois, quand on a proposé d'apporter
certaines modifications à l'actuelle Loi sur la conservation de la
faune. Le régime spécial qui est prévu dans la Loi sur les
droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie-James et du
Nouveau-Québec continuera de s'appliquer, sauf s'il est modifié
selon la procédure prévue dans la convention même de la
Baie-James. Il ne faut pas s'inquiéter et considérer que les
propositions de modification à la Loi sur la conservation de la faune
représentent un amendement à la convention. Je vous rappelle
cependant que le régime spécial de chasse, de pêche et de
piégeage dont jouissent les bénéficiaires cris s'applique
dans le territoire bien déterminé que l'on désigne sous le
nom de territoire dans la loi.
Il est évident que la Loi sur la conservation de la faune a des
liens étroits avec la loi sur les droits de chasse et de pêche
dans les territoires de la Baie-James et du Nouveau-Québec. Et il est
bon que les bénéficiaires, tout comme le comité conjoint
de chasse, de pêche et de piégeage, se préoccupent de ce
dossier afin que leur régime de chasse et de pêche ne soit pas
modifié sans leur consentement. La présente consultation est
ouverte à l'ensemble des Québécois et les
bénéficiaires le sont à part entière. Vous rappelez
souvent dans votre exposé que tout règlement et toute
modification à des règlements existants qui pourraient affecter
le régime doivent être soumis à l'examen du comité
conjoint. Nous en sommes très conscients et nous respecterons cette
obligation. Dans la partie 2, les pages 13 à 23 de votre exposé
concernent des problèmes que les Cris rencontrent dans l'application du
régime de chasse, de pêche et de piégeage en vertu de la
loi sur les droits de chasse, de pêche et de piégeage dans les
territoires de la Baie-James et du Nouveau-Québec. Je note tous ces
commentaires, mais je considère que ce n'est pas l'endroit pour discuter
de ces problèmes. Nous pourrions en discuter à une autre
occasion. En ce qui concerne également l'annexe additionnelle que vous
avez déposée aujourd'hui, elle relève carrément de
l'application même de l'entente de la Baie-James et c'est vraiment au
niveau du comité conjoint auquel à la fois le gouvernement du
Québec et vous-mêmes êtes représentés tout
comme le gouvernement
fédéral, qu'il faudra discuter de ces problèmes
précis et particuliers.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Me
demande-t-on la parole? M. Diamond want to... M. Diamond.
M. Diamond: Well, I appreciate the fact, Mr. Chairman, that the
Minister mentioned some comments to the brief. It is for reasons of
apprehension that we are here and we know that the Crees have special rights in
the James Bay Territory and we know that there are special legislations
applying to the Crees, but what we are saying is that we must implement those
rights properly and let us quit bickering in respect to the application of that
implementation of the agreement. We know that there is a joint committee and,
for the information of everybody, that committee has not met since November
1977 and we refused to meet with that committee because we wanted someone
senior that can make decisions to represent Québec on that joint
committee. You know, we are having very serious difficulties in respect to the
implementation of the agreement. If it was not brought up to this committee, it
would hide in your bureaucratic cells. For seven years now, we have been trying
to get certain decisions and for seven years we have lost our rights to
exercise our right of first refusal. Are we going to wait another seven years?
You know, if the problems are not solved, it is going to cause deterioration of
relations between the Crees and the Government of Québec. Relations are
bad as they are right now, but we cannot go on another seven years here.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre. (18
heures)
M. Chevrette: Je crois qu'affirmer qu'il n'y a pas eu de
rencontre depuis 1977, c'est fort. Il me semble que statutairement, dans la loi
sur la Baie-James, en vertu de l'entente vous êtes obligés de
tenir des réunions trois ou quatre fois par année. Si mes
renseignements sont bons, la semaine dernière même, il y a eu une
rencontre tout à fait spéciale pour discuter du problème
que vous nous soulignez aujourd'hui concernant Propair Inc. La commission
parlementaire comme telle ne peut pas discuter de sujets spécifiques qui
ne sont pas de son ressort. C'est pour cela que je vous conseille fortement
d'acheminer vos revendications là où elles doivent
l'être.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Diamond.
M. Diamond: Mr. Chairman, pardon me, Mr. Minister, but we are not
talking about the same thing. I am talking about the joint committee where
Canada, Québec and the Crees are represented, the native people, in
section 28 of the James Bay and Northern Québec Agreement. That joint
committee was supposed to facilitate any problems related to the implementation
of the agreement. The committee that you are talking about is the Coordinating
Committee under section 24 of the James Bay Agreement. That coordinating
committee on hunting, fishing and trapping is meeting regularly and they are
voting on issues, there is a question whether some of the votes are legal, but
they are meeting regularly. It is the other committee that I am talking about
which has not met. So, just for...
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. Oui, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Mr. Diamond, you are talking about the Senior
Committee...
M. Diamond: Yes.
M. Perron: ... inside the agreement.
M. Diamond: Yes, the Joint Economic and Social Development
Committee. The Minister is talking about the Coordinating Committee on Hunting,
Fishing and Trapping. I understand what the Minister is saying.
Le President (M. Bordeleau): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: He was talking about the one under his jurisdiction,
he was not talking about the other one, because the Senior Committee is
depending on another Minister.
M. Diamond: That is correct.
M. Perron: When you were talking about some senior Members of the
Government of Québec on the committee, were your talking about the
Senior Committee or the other one, the one concerning hunting?
M. Diamond: The joint committee, the Social and Development
Committee.
M. Perron: Okay. Thank you.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: M. le Président, I wish to thank Mr. Diamond
for I would say the complete brief that he has presented us today. As a Member
of the Opposition, I am sure that what the Minister has just said would be of
reassurance to you for the
implementation of the agreement. I guess we are more aware after reading
your brief and I think it is a good occasion for you to make people from the
Government and from the Opposition more aware of your needs and also your
preoccupations.
As far as we are concerned, we want to make our Members of the
Opposition know more about your needs and your aspirations. Since we were also
part of the former Government, we wish to reassure you also that we will see
with the Minister - at least on this Committee - that implementation of the
agreement is put forward as soon as possible, that meetings are made or in the
near future. I think you are right to ask for meetings and that is the only way
that an agreement can come to a conclusion.
As far as we are concerned, I think the briefs of today are very
important both for the Government people and also the Members of the
Opposition.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Diamond.
M. Diamond: Mr. Chairman, I would like to thank the Member for
her comments, I am reassured but I just want to make sure that everybody...
Mme Bacon: ... is reassured?
M. Diamond: I am reassured, but I want to have the right to
exercise those rights and that is what causing our concern. The Crees have
certain rights. For example, the Crees have rights outside the James Bay
territory. Those have to be discussed. I know that I will bring it again in
negotiations and there are other withnesses that alluded to the same question,
but something has to be done and it is not being done. So, with all respect to
the Minister, we would like to see some action.
Le Président (M. Bordeleau): Mme la députée
de Chomedey.
Mme Bacon: Could I ask one question to Chief Diamond? Have you
already discussed this matter, I mean previously, with the Members of the
Government over the last few years?
M. Diamond: Mr. Hutchins can make comments to that.
M. Hutchins (Peter): Yes, Mr. President. If I can answer to my
recollection, there has been one meeting on the subject of Cree rights outside
of the territory that was held, I believe, in 1976-1977, shortly after the
signing of the agreement. What we would like to emphasize is that this matter
of
Cree harvesting rights and activities outside of the territory was
identified prior to the signing of the agreement. It was clearly stated at that
time that there were Crees harvesting outside of the territory as defined, that
it was a problem that had to be dealt with and there was an undertaking by
Québec to deal with it after the signing of the agreement as a matter
which was perhaps too complicated to deal with legally at the time of the
agreement, but it was to be dealt with immediately after the signing and has
not been dealt with.
M. Diamond: Mr. Chairman, just another point on the question of
the rights outside of the territory. There are Court cases pending which were
started by the Department of Justice against Crees. The Montagnais that trap
around there do not get arrested. But Crees, when they trap around there, get
arrested and Thomas Coon, the president of the Trappers Association, was
charged himself and brought to Court, and he is before the Court. So, you know,
do you follow one thing with the Montagnais and another with the Crees? We did
not settle those rights outside of the territory, so, we would like to get down
to rediscuss that.
Le President (M. Bordeleau): Mme la députée de
Chomedey.
Mme Bacon: Could I ask one question? The problems that you have
with the Minister of Justice would be from the people being caught outside of
the territory, not inside?
Une voix: That is correct.
Mme Bacon: They would be outside?
M. Diamond: That is correct, Mr. Chairman.
Le Président (M. Bordeleau): Avant d'aller plus loin, je
voudrais quand même souligner qu'il est passé 18 heures et,
à partir de notre mandat, j'ai besoin du consentement des membres pour
pouvoir continuer. Alors, je vous le signifie. Cela va? M. le
député de Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. I have just one
question, Mr. Diamond. If you have legal rights, what prevents you from
exercising those rights, I mean, if there is an agreement that was signed
between parties, how come you cannot exercise your rights today? I mean, if
there is an agreement, an agreement is an agreement.
M. Diamond: You really want to open that floor?
M. Rocheleau: I do not want too long of an answer, but...
M. Diamond: Mr. O'Reilly.
Le Président (M. Bordeleau): M.
O'Reilly, si vous voulez répondre.
M. O'Reilly (James): I would say that the Crees are exercising
those rights and they are fighting with all the recourses that are available to
them. The problem is that, as he was saying, there are court cases. There is a
difference in interpretation. There is enforcement the conservation officers of
Québec interpret it one way; the Crees interpret it perhaps another way,
and there are a lot of disputes which could have been avoided and which should
still be avoided. We have enough disputes with Québec as well as with
Canada in many areas. We do not need more in these areas where we thought it
was quite clear.
But one comment that I will make on that entire issue is that if the
parties could come to an understanding as to what is practical in relation to
enforcement and there could be a forum, some kind of place where the parties
could meet - and it is not always a conflictual situation - maybe quite a few
of these problems could be resolved. There are certain questions of principle
where it is before the Courts and they will keep going before the Courts. But
there are others which should not be questions of principle, which really are
questions of good common sense. Those problems should have been solved before
now.
We are thinking in terms of some of the difficulties of interpretation
with the Coordinating Committee. There is a question of letter and there is
also a question of spirit. Some provisions of the agreement are somewhat
ambiguous. They could go either way. Now, it depends if you want to take a very
very literal interpretation and go one way or you want to take an intentional
interpretation and say: This is what the parties meant; we should get on with
that. We find that in some of the problems that have been mentioned in the
brief, there is an extremely literal and adversarial interpretation which is
taken by the Government of Québec. It is not in all of the problems, as
chief Diamond says, it is really a remarkable contrast that in certain
Departments there is a very wide interpretation given to reach the spirit and,
in other Departments, it is extremely narrow. I would not call it legalistic
because I do not agree that it is a legal interpretation.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord. M. Rocheleau:
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Thank you, Mr.
Diamond, and to the people who are with you to have presented your paper to the
commission.
M. Diamond: Thank you very much.
Le Président (M. Bordeleau):
J'appellerais maintenant les représentants de la
Société Makivik (mémoire no 25) représentée
par Mlle Lorraine Brooke et Me John Lemieux. Je voudrais vous indiquer aussi,
comme je l'ai fait pour d'autres, que j'apprécierais que vous puissiez
résumer le mémoire, comme il est assez volumineux, pour tenter
d'entrer dans les vingt minutes accordées pour la présentation du
mémoire. C'est à vous de décider ce qui serait le plus
important de dire; ce sera inscrit au journal des Débats.
Si vous voulez bien vous identifier et présenter les personnes
qui vous accompagnent au cas où je n'aurais pas les bons noms.
Société Makivik
M. Walukturuk (Siméonie): I am
Siméonie Walukturuk, member of the execu-tive committee of
Makivik. With me, our legal adviser, John Lemieux, and the head of our research
department, Lorraine Brooke.
Mme Mercier (Louise): Une simple question de procédure,
s'il vous plaît, M. le Président. M. Walukturuk va lire le
document en anglais. Voulez-vous une traduction en français? On me dit
que c'est la même chose, sauf qu'on va sauter quelques paragraphes.
Le Président (M. Bordeleau): Non, le mémoire peut
être lu en anglais directement. Il sera transcrit en anglais au journal
des Débats. Vous pouvez y aller.
M. Walukturuk: I will read only parts of this brief, but I want
the whole brief recorded. We are pleased, on behalf of Northern Québec
Inuit, to submit a brief to the Parliamentary Commission on Recreation, Fish
and Game. We also welcome this opportunity to discuss with the members of the
Commission our recommendations and concerns with respect to the Government's
proposal.
Makivik Corporation is an Inuit association whose membership comprises
all of the Inuit beneficiaries of the James Bay and the Northern Québec
Agreement. Makivik was created by a special Québec Statute in 1978
pursuant to that agreement. We are the representative Inuit Native Party for
purposes of that agreement, including matters pertaining to the special
hunting, fishing and travelling regime established for
Northern Québec Inuit and James Bay Crees under that agreement.
There are approximately 5500 Inuit in Northern Québec, which forms part
of the territory covered by the James Bay and Northern Québec Agreement.
The part of the territory we use and occupy and in which we have the
predominant population is about one third of the total area of Québec.
We live in 14 coastal communities located, with the exception of Chisasibi,
north of the 55th parallel. (18 h 15)
We appear before you, therefore, as an Association which represents
people with perhaps the largest regional territorial interests in the province.
Of equal significance, the three native groups with primary rights and
interests in the territory, namely Northern Québec Inuit, James Bay
Crees and the Naskapis of Schefferville, represent a population of
approximately 16 000 who rely heavily on hunting, fishing and trapping for
their subsistence.
Furthermore, our interests in appearing before you goes beyond that of
an interested person or bodies who were the subject of the Government's
invitation. It is in fact both of legal and contractual nature based on the
premises both of the James Bay and Northern Québec Agreement and related
legislation. A specific object of Makivik's Charter is the exercise of
functions vested in it by the agreement and the legislation implementing it.
One of such functions is the participation in the supervision and management of
the hunting, fishing and trapping regime established in our territory through
the appointment of Inuit members to the Hunting, Fishing and Trapping
Coordinating Committee established for that purpose. To the extent that the
proposed amendments affect that regime, we consider it the mutual obligation of
Makivik and the Government to consult each other through whatever form
available.
The purposes of this brief, I will explain briefly. Through the James
Bay and Northern Québec Agreement, the Québec Government has
recognized and confirmed the special rights of the Inuit and aboriginal peoples
with respect to the pursuit of our past and present hunting, fishing, trapping
and related activities. The Wild-Life Conservation Act has established one
regime for the conservation of wildlife. As previously mentioned, however, the
James Bay and Northern Québec Agreement has given rise to the
establishment of a special hunting, fishing and trapping regime for the
territory covered by the agreement which comprises an area covering
approximately three fifths of the Province of Québec.
Our regime governs among other things the hunting, fishing, trapping and
outfitting rates for both natives and non-natives in this territory. One
purpose of this brief is to comment on the minutes of the proposed amendments
to the Wild Life Conservation Act. Equally, however, our purpose is to examine
the effect that such an amendment would likely have on our hunting, fishing and
trapping regime. We are concerned that the adoption of legislation of general
application, whether in statute or regulation form, will have the effect of
amending, derogating from or otherwise changing our hunting, fishing and
trapping regime. Since the coming into force of the James Bay and Northern
Québec Agreement on October 31, 1977, we have had on many occasions to
point out to the Department of Recreation, Fish and Game the conflicts which
proposed regulations would create if adopted. We take this occasion to bring
this continued problem to the attention of the Commission.
Before giving the summary of our specific comments, we would make two
general observations with respect to the document released by the Government
following the Minister's statement of June 21st 1982.
First, we agree with the general thrust of the amendments. If the
legislation which is eventually tabled and adopted follows the proposals, the
existing province wide regime will be realigned in favour of the protection of
wildlife habitats. We agree with that goal.
Secondly, we would observe that, while an outline of the amending
legislation is given, the absence of the draft text or precise proposals makes
it difficult to give precise comments or recommendations in some areas. While
this exercise may not be premature, it leads to the observation that a second
stage of consultation is necessary and will likely be more meaningful.
I will now summarize our comments and recommendations. If you need more
details and full discussion, you are referred to pages 13 to 31 of our
brief.
In recognition of the priority status of the hunting, fishing and
trapping regime established by the James Bay and Northern Québec
Agreement and implemented by an Act respecting hunting and fishing rights in
the James Bay and New Québec Territories, any amendments to the
Wild-Life Conservation Act which conflict with our regime shall expressly not
apply in the James Bay and New Québec Territories.
If conservation officers and auxiliary conservation officers are to have
more responsibilities, the Government must clearly indicate, both in their
training and in the laws which they apply, those provisions of the Wild-Life
Conservation Act.
The Environment Quality Act and the Lands and Forests Act do not apply
in the James Bay and New Québec Territories. In recognition of the
obligations under the James Bay and Northern Québec Agreement
and the legislation implementing it, the Government must formally advise
and consult with the native parties to that agreement in connection with
legislative proposals like the ones presently under review which can affect our
rights under that agreement.
The Government must submit the present proposals and similar future
proposals to the Hunting, Fishing and Trapping Coordinating Committee for its
advice and furthermore must formally consult the Coordinating Committee before
tabling draft legislation on such proposals.
Now, I have some specific comments. The definition of the term "hunt"
should not be nailed but should instead be clarified to state that activities
such as pursuing or following an animal, if hunting, if carried out for the
purpose of taking an animal, if necessary, certain outdoor activities, for
example, wildlife photography, can be specifically excluded from the
definition. The Government must avoid any redefinition of hunting having the
effect of authorizing, in our territory activities involving wildlife which
would lead to conflicts with the exercise by the native people of their
harvesting rights.
We agree with the abolition of the present sense found in articles 31
and 37 of the Wild Life Conservation Act, but the Act should retain the general
provisions against such activities. Any exceptions permitted by regulations
should be limited in number. We generally agree with the proposed amendments to
division 14 concerning penalties and fines, but, in the case of confiscation of
personal property of someone who does not have enough money to pay the fine,
the amendments should allow some discretion to the courts, particularly where
subsistence hunters is involved. They must have their hunting equipment for
their livelihood.
The interministerial working group on wildlife habitat protection should
formally consult the native parties of the James Bay and Northen Québec
Agreement, both directly and through the Hunting, Fishing and Trapping
Coordinating Committee, so as to allow any new habitat protection measures that
would apply in the James Bay and New Québec Territories. In recognition
of its obligations under the James Bay and Northern Québec Agreement and
under the Act respecting the hunting and fishing rights in the James Bay and
New Québec Ter-ritories, the Government must allocate the funds required
to continue the training of native conservation officers and to provide the
jobs and infrastructures required to insure adequate enforcement of
conservation laws in the James Bay and New Québec Territories.
With respect to the redefinition of the term "wildlife sanctuary" in the
proposed Gov-ernment regulations establishing the terms and conditions
attaching to the future use of such sanctuaries; they should be tabled at the
same time as the proposed amendments to the Wild-Life Conservation Act in this
regard. With respect to the amendments concerning outfitting activities, the
Government must insure that with respect to their application in the James Bay
and New Québec Territories such amendments are compatible with the
exercise by the native peoples of their exclusive outfitting rights and of the
right of first refusal with respect to outfitting activities.
In recognition of the Inuit economic development objectives, Northern
Québec Inuit and the Government of Québec should pursue
discussions concerning the possibility of our commercial sale of the products
of our harvesting activities to non-native purchasers. Specific proposals are
now being developed and we look forward to presenting these to the Department
of Recreation, Fish and Game. The Government of Québec must recognize
that amendments to the Wild-Life Conservation Act or the adoption of
regulations authorizing non-native hunting activities for the purpose of
commercial exploitation would be without effect in the James Bay and New
Québec Territories. Such amendments must state that they do not apply in
those territories.
We agree with the principle of protection of rare and endangered
species. Amendments to the Wild-Life Conservation Act in this regard should
contemplate both partial and total hunting restrictions. If applied in the
James Bay and New Québec Territories, they should first be applied to
persons hunting commercially or for sport and only secondarily to native
persons harvesting for personal or community use. Any decision declaring a
species rare or endangered or in need of special protection in the James Bay
and New Québec Territories must involve the participation of native
peoples through the Hunting, Fishing and Trapping Coordinating Committee.
Lastly, with respect to the proposed prohibition against the possession
or introduction of wildlife from other provinces or countries, amendments to
the Wild-Life Conservation Act should envisage regulations allowing the
introduction of new species or specific terms and conditions established by the
government.
L'intervenant s'exprime dans sa langue. (18 h 30)
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Chevrette: Vous me dites que vous présentez ce
mémoire au nom de 5500 Inuits du Québec qui
bénéficient d'un régime
spécial de chasse, de pêche et de piégeage qui vous
a été accordé à la suite de la signature de la
convention de la Baie-James et du Nouveau-Québec ainsi qu'aux autres
bénéficiaires Cris et Naskapis, ce qui représente, selon
votre estimation, environ 16 000 citoyens québécois.
Je dois vous dire que si j'ai convoqué cette commission
parlementaire, ce n'est pas pour vous soumettre des textes précis et
définitifs à inclure dans une loi, mais plutôt dans un
objectif de discussion générale concernant certains thèmes
majeurs qui pourront aboutir à la présentation de modifications
précises. Je n'ai jamais songé, par ce procédé,
à remettre en question le régime de chasse, de pêche et de
piégeage dont vous bénéficiez actuellement en vertu de la
Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la
Baie-James et du Nouveau-Québec. Je sais fort bien que tout
règlement qui pourrait affecter ce régime doit être soumis
à l'attention du comité conjoint de chasse, de pêche et de
piégeage où se retrouvent des représentants de votre
société.
Vous mentionnez que l'information se rapportant à cette
commission ne vous a pas été envoyée. Nos dossiers
indiquent que toute la documentation se rapportant à cette commission a
été envoyée au bureau de votre société
à Montréal, au 4898 ouest, rue Maisonneuve, Westmount,
Québec. Je sais fort bien que la Loi sur la conservation de la faune et
la Loi sur les droits de chasse dans les territoires de la Baie-James et du
Nouveau-Québec sont interreliées et que la première ne
peut être modifiée sans consulter le comité conjoint, si
elle affecte le régime de chasse, de pêche et de piégeage
du territoire. Les terres de catégorie 3 sont des terres publiques et
tous les Québécois peuvent y avoir accès pour exercer des
activités de chasse et de pêche. Il importe que la
législation protège la faune qui s'y retrouve.
Vous faites beaucoup de commentaires quant à l'application de la
Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la
Baie-James et du Nouveau-Québec. Je prends note de ces commentaires,
mais je considère que ce n'est pas le but de la présente
commission de discuter de ces problèmes. Vous faites aussi des
commentaires précis quant aux divers points se rapportant à la
modification éventuelle de la Loi sur la conservation de la faune. Je
vous en remercie, en vous assurant qu'ils seront examinés attentivement
par les spécialistes de mon ministère.
Je suis particulièrement heureux de constater que vous vous
ralliez à notre intention de nous impliquer davantage dans la protection
des habitats fauniques. Tout comme vous, nous admettons que souvent
l'exploitation des ressources ne s'est pas faite en harmonie avec les besoins
de la faune et c'est justement la situation que nous désirons modifier.
Je prends bonne note de votre désir d'être consultés sur le
mode d'application de nouvelles mesures de protection des habitants dans les
territoires de la Baie-James et du Nouveau-Québec. Je vous remercie.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. Des
commentaires? Non? Mme la députée de Chomedey.
Mme Bacon: Mr. President, I would have only maybe one question
coming from your brief. Concerning the conflit between the hunting and fishing
rights in the James Bay and the Wild-Life Conservation Act, I think there is a
mention of article 3 of the Conservation Act of the James Bay. I just want to
know if you have, in case of conflict, any statistics concerning any recourses
that you have had in the past on article 3 of the Wild-Life Conservation
Act.
M. Walukturuk: I will let my legal adviser answer that
question.
Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'il faut
revenir?
Mme Bacon: Is there any large number of recourses coming out of
the conflict?
Le Président (M. Bordeleau): M.
Lemieux.
M. Lemieux (John): Mr. President. There are no statistics as to
the number of conflicts that have arisen. The incompatibility provision that is
found in section 3 is a fall back provision. We hope not to have to rely and
the Inuits and the Crees hope not to have to rely on the incompatibility
provision. This exercise is aimed at that, at drawing to the attention of the
members of the Commission the existence of this other statute, the fact that it
has priority status in the James Bay and New Québec Territories and the
fact that any amendments which are proposed to the Wild-Life Conservation Act
should take that into account, should in fact clearly state that they do not
apply in that territory but as to your question and to if there are any
statistics and so far as conflicts are concerned, the answer is we have not had
to keep them. Each time that they have arisen or that there has been a
possibility of a conflict, we have drawn it to the attention of the
Department.
Le President (M. Bordeleau): Thank you. D'autres questions ou
commentaires? Cela va? M. le ministre cela va aussi?
Thank you, Mr. Walukturuk and the
people who are with you.
M. Walukturuk: Thank you.
Le Président (M. Bordeleau): J'appelerai maintenant le
dernier groupe...
M. Chevrette: On vous reverra au mois de décembre, Me
Lemieux.
M. Lemieux: C'est trop tard.
M. Chevrette: Sur le projet de loi no 83.
Le Président (M. Bordeleau): ... qui représente la
nation des Naskapis. Je pense que c'est M. Guanish.
Nation des Naskapis
M. Mameameskum (John): M. Mameameskum.
Le Président (M. Bordeleau): M. John Mameameskum.
M. Mameameskum (John): I will be presenting this brief on behalf
of the Naskapis Band Council. First of all, I would like to introduce Chief Joe
Guanish on my right, Paul Wilkinson, our advisor on the Coordinating Committee,
and I would like to make a correction. I am not the Chef adjoint", I am the
Chief's side-kick.
I would like to start now. The brief submitted to this Parliamentary
Commission by the Grand Council of the Crees of Québec and the Cree
Regional Authority summarizes the history of the James Bay and Northern
Québec Agreement and an Act respecting hunting, fishing rights in the
James Bay and New Québec Territories.
We wish to draw this Commission's attention to the following additional
facts: 1. The Naskapi Indians are some 400 persons who today reside in
Schefferville and hunt throughout an intensive area in Northern Québec.
2. The Naskapi Indians were not signatories to the James Bay and Northern
Québec Agreement, but, on January 31, 1978, certain parts of section 24
of the James Bay and Northern Québec agreement were amended to provide
for the inclusion of the Naskapis in the so-called hunting, fishing and
trapping regime 3. Also on January 31, 1978, the Naskapis, the Government of
Québec and the Government of Canada, the James Bay Crees, the Inuit of
Québec and certain other parties signed the North-Eastern Québec
Agreement. Chapter 15 which dealt with certain of the harvesting rights of
Naskapis beneficiaries. 4. The Government of Québec approved, gave
effect to and declared valid the North-Eastern Québec Agreement by an
Act approving the North-Eastern Québec
Agreement. 5. An Act respecting the hunting and fishing rights in the
James Bay and New Québec Territories was amended by an Act which
respected the legislation provided for in the North-Eastern Québec
Agreement and other amending legislation to give specific legislative effect to
the said amendments to the section 24 of the James Bay and Northern
Québec Agreement and to section 15 on the North-Eastern Québec
Agreement.
The position of the Naskapis is that we do not object to any of the
proposed amendments provided that they in no way conflict with, detract from,
modify or in any other way affect our harvesting rights or the so-called
principal of conservation as established by the above cited agreements and
legislations. We reserve our position until we have studied the text of any
actual amendments that may be proposed to the Wild-Life Conservation Act.
Paragraphs 24.4 and 24.36 and 24.37 of the James Bay and Northern Québec
Agreement and sections 82 and 83 of an Act respecting hunting and fishing
rights in the James Bay and New Québec Territories which provide for a
special twofold consultation with the Hunting, Fishing and Trapping
Coordinating Committee prior to action by the Government of Québec. We
are grateful to have been able to present our views to this Commission. We look
forward as one member of the Coordinating Committee, to be consulted again.
Thank you.
Le Président (M. Bordeleau): Thank you, Mr. Mianscum. M.
le ministre.
M. Mameameskum: Mameameskum.
Le Président (M. Bordeleau): I am sorry, excuse-me.
M. Chevrette: Je pense bien, M. le Président, que les
commentaires que j'ai faits pour les deux groupes précédents, les
groupes touchés par l'entente de la Baie-James, ont été
très bien compris par les intervenants puisque eux-mêmes, dans
leur texte, sont bien conscients qu'on ne peut amender quelque loi qui aurait
une incidence sur eux. La loi de la Baie-James prime l'entente de la
Baie-James, prime toute modification qu'on pourrait éventuellement en
porter. Donc, c'est bien sûr que cela peut avoir des influences au niveau
de la négociation, mais il n'en demeure pas moins qu'on doit les
consulter en recourant au comité conjoint. Je vous remercie cependant
d'avoir accepté de donner votre point de vue devant les membres de cette
commission et j'ose espérer que vous suivrez de près le
dépôt de la législation qui devrait venir après les
fêtes et qui touchera, je l'espère, non seulement des
modifications à la Loi sur la conservation de la faune dans sa forme
actuelle, mais qui ajoutera une dimension spécifique pour la
sauvegarde des habitats fauniques.
Nous avons des espèces en danger d'extinction et nous devons,
comme gouvernement, je pense, légiférer, sauvegarder ces
espèces en danger. Je vous remercie beaucoup de votre participation.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Marquette.
M. Dauphin: Je voudrais vous remercier. I would like to thank you
for your brief. I am reading in your page no 2 - it must be the same thing in
English - that you are approving all of the modifications, but with the reserve
that it does not have to be in conflict with the rights that you have right
now, your territorial rights. So, do you have any presumption that, within the
modifications they want to put on, some of them would be against your
rights?
M. Mameameskum: It does not say we approve. We said: We do not
object. Approve and object are two different words, Mister, and we have the
same concerns as the Crees and Inuit.
Le Président (M. Bordeleau): D'accord? Une autre question,
M. le député de Duplessis?
M. Perron: Yes. I would like to say hello to Chief Guanish from
Schefferville at the same time. I would also like to thank you for the
presentation of your brief. I hope you did understand what the Minister said
about the James Bay Agreement concerning the fact that the Bill which is going
to be presented in 1983 will not touch the James Bay Agreement.
M. Mameameskum: The Naskapi Agreement. I mean, they are
both...
M. Perron: Yes, I now, the James Bay Agreement and the
New-Québec Agreement concerning your part, anyway, because you are part
of the agreement.
M. Mameameskum: There are two separate agreements. You must
understand it.
M. Perron: Yes, that is right, but it will not touch that either,
either one of them.
M. Mameameskum: I hope that I have your word on that.
M. Perron: Yes. That is what the Minister said, anyway.
M. Mameameskum: O.K. Thank you. M. Perron: O.K. Thanks a
lot.
Le President (M. Bordeleau): D'accord. D'autres questions?
Non?
M. Houde: M. le Président...
Le Président (M. Bordeleau): Attendez un peu.
Le Président (M. Bordeleau): Mr.
Mameaskum...
M. Mameameskum: Mameameskum.
Le Président (M. Bordeleau): Anyway... Maybe next time, I
will pronounce it better. Right now, I would like to thank you for the
presentation of your brief at our Commission.
Je pense que nous allons maintenant terminer nos travaux, à moins
que quelqu'un ne veuille les prolonger.
M. Houde: Je voudrais prolonger. M. Chevrette: M. le
député...
Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le
député de Berthier, vos commentaires
M. Houde: J'aimerais les prolonger de 30 secondes, M. le
Président. J'aimerais bien connaître le programme pour demain.
Étant donné qu'il y a onze mémoires, allons-nous les
écouter tous? Va-t-on les écouter tous demain?
M. Chevrette: C'est le programme pour demain.
Le Président (M. Bordeleau): C'est le programme pour
demain.
M. Chevrette: Vous venez d'affirmer vous-même qu'il y a
onze mémoires.
M. Houde: Ces organismes sont-ils tous convoqués pour
demain?
Le Président (M. Bordeleau): On va lui permettre de
terminer sa question.
M. Chevrette: Ils sont tous convoqués pour demain.
M. Houde: Ils sont tous convoqués pour demain?
M. Chevrette: Oui.
M. Houde: Merci.
M. Chevrette: Vous pouvez cependant
juger qu'il y a cinq mémoires qui sont relativement brefs, mais
vous vous rappellerez qu'au départ, on pensait terminer en trois jours.
On est obligé d'ajouter une quatrième journée et,
d'après ce qu'on peut voir, on en aurait eu besoin de cinq.
M. Houde: Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. J'espère que
j'aurai la collaboration des membres de la commission comme je l'ai eue
aujourd'hui. La commission ajourne ses travaux sine die.
M. Houde: À 10 heures, demain matin.
Le Président (M. Bordeleau): Non, non excusez-moi. On
ajourne jusqu'à 10 heures demain matin.
(Fin de la séance à 18 h 48)