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(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Bordeleau): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Si vous voulez vous asseoir. S'il vous plaît! À l'ordre!
Mesdames et messieurs. La commission permanente du loisir, de la chasse et de
la pêche reprend ses travaux pour continuer à entendre les
mémoires sur les modifications à apporter à la Loi sur la
conservation de la faune.
Pour les fins de la séance d'aujourd'hui, les membres de la
commission sont: Mme Bacon (Chomedey), MM. Chevrette (Joliette), Dauphin
(Marquette), Gauthier (Roberval), Houde (Berthier), Lafrenière (Ungava),
Laplante (Bourassa), Lévesque (Kamouraska-Témiscouata),
Paré (Shefford), Perron (Duplessis), Vaillancourt (Orford).
Les intervenants sont: MM. Assad (Papineau), Bisaillon (Sainte-Marie),
Desbiens (Dubuc), Lachance (Bellechasse), Mme Juneau (Johnson), MM.
Léger (Lafontaine), LeMay (Gaspé), Maciocia (Viger), Pagé
(Portneuf), Rocheleau (Hull).
Avant de débuter, je vous donne un aperçu de l'ordre du
jour. Comme hier, je tenterai d'être assez strict sur le temps parce que
nous avons onze mémoires à entendre et je voudrais bien que tout
le monde puisse se faire entendre.
Le premier groupe sera le Conseil de la faune. En deuxième lieu,
à la suite d'une entente entre les parties, il a été
convenu que le mémoire no 23, soit celui des Cerfs d'Abitibi Inc. - un
petit mémoire - soit présenté. Suivront le groupe STOP,
l'Association des pêcheurs commerciaux de saumon de la province de
Québec, le Syndicat des pisciculteurs du Québec, l'Union des
producteurs agricoles, M. Jean-Pierre Fillion, à titre personnel, la
Fédération des associations pour la protection de l'environnement
des lacs (FAPEL), le Club du chien rapporteur de Montréal, le Cercle
canadien du chenil, le Club de chasse à courre de l'Estrie, qui est le
onzième groupe.
S'il n'y a pas de remarques préliminaires, j'inviterais
immédiatement le premier groupe, soit le Conseil de la faune,
représenté par M. Vincent, c'est bien cela? Non.
Conseil de la faune
M. Richard: Gilles Richard, membre du conseil.
Le Président (M. Bordeleau): M. Richard, oui. Si vous
voulez nous présenter les autres personnes et y aller avec la
présentation de votre mémoire.
M. Richard (Gilles): M. Serge Vincent, secrétaire du
conseil. Il y a également Mme Micheline Jobin qui fait l'arrière
plan. C'est bien ce que tu as dit.
Mémoire du Conseil de la faune concernant la Loi sur la
conservation de la faune. Le Conseil de la faune, organisme qui joue un
rôle consultatif auprès du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, est chargé d'étudier les meilleurs
moyens de résoudre les problèmes concernant la faune et de faire
rapport de ses constatations au ministre. Il a pour objet le devenir de la
faune et le champ d'application de la Loi sur la conservation de la faune.
S'acquittant de son mandat, le conseil a, à plusieurs reprises,
émis des avis au ministre sur la Loi sur la conservation de la faune
existant à ce moment-là et est heureux de ce que le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche ait entrepris de présenter une
nouvelle loi.
Depuis l'adoption du projet de loi no 71, modifiant la loi de 1969,
chapitre 58, sanctionné le 22 décembre 1978 et devenant ainsi le
chapitre C-61, c'est-à-dire la loi actuelle, les membres du conseil
souhaitaient que des changements soient apportés à cette loi.
Nous ne pouvons donc que nous réjouir d'une telle intention. Le conseil
propose des modifications en profondeur à l'ancien texte, modifications
qui s'inscrivent dans le voeu que le projet de loi que déposera le
ministre soit une véritable Loi sur la conservation de la faune et non
une loi régissant la chasse et la pêche au Québec telle que
se présente la loi actuelle, soit le chapitre C-61.
Le conseil a tenté de saisir l'esprit de la loi actuelle. Il n'y
est pas arrivé. Sans doute cela est-il dû au fait que cette loi
vise davantage à régir la chasse au Québec qu'à
mettre en application une politique de conservation de la faune. Cette loi
n'est orientée ni vers la conservation ni vers la gestion de la faune et
encore moins vers la protection des habitats terrestres ou aquatiques.
D'ailleurs, nulle part dans le texte a-t-on défini "faune" et "habitat".
Depuis lors, et déjà, le ministre a bien peu de recours contre
ceux qui ont et qui pourraient endommager ou détruire les
habitats.
Le conseil souhaite que la nouvelle loi ait un caractère positif
plus évident; qu'elle ne soit pas faite uniquement de contraintes ou
d'interdictions qui s'appliquent surtout aux chasseurs et aux pêcheurs.
Une nouvelle loi, repensée dans son ensemble, pourrait insister afin de
provoquer un nouveau comportement de la part de tous les utilisateurs de la
faune au Québec. En mettant en valeur l'aspect récréatif
de la chasse, cette loi devrait susciter, auprès du grand public, une
meilleure compréhension de la valeur et du rôle de la faune. Il ne
faut pas oublier que la conservation touche aussi tous ceux qui sont
concernés par le milieu naturel, le plein air, et non seulement les
chasseurs et les pêcheurs.
Le conseil a souhaité, dans le passé, que le ministre
produise une nouvelle loi sur la conservation de la faune qui serait simple et
amputée des technicités qui ont fait du projet de loi no 71,
devenu le chapitre C-61, une loi que nous considérons restrictive,
abusive et enfin une mauvaise loi. On retrouve ces énoncés dans
l'avis du Conseil de la faune du 10 décembre 1980, au même
sujet.
Les principales modifications et ajouts tels qu'exposés dans la
déclaration ministérielle du 20 juin, que le ministre entend
apporter à la loi, sont pour la plupart conformes aux désirs
exprimés par le conseil dans ses avis antérieurs. Nonobstant ce
fait, le texte qui suit traite de chacune des modifications du document.
Modifications proposées par le document au chapitre C-61,
c'est-à-dire la loi actuelle. Lorsqu'on parle de présomptions, on
exprime l'idée suivante: L'intention de modifier le terme "chasser" afin
de restreindre la portée beaucoup trop large de celle-ci est conforme au
désir du conseil. Afin de bien faire la distinction entre
l'activité de consommation et celle de non-consommation, il serait
souhaitable d'introduire l'acte de possession d'une arme.
La deuxième modification majeure concernant l'abolition de la
présomption de chasser la nuit est conforme aux voeux du conseil; pour
cela, il faut se reporter à l'article 31.
Quant à l'abolition de la présomption, à l'article
37, concernant la vente de fourrure, le conseil ne saisit pas la
nécessité de l'abolir, le commerce de la fourrure ne faisant pas
jusqu'à aujourd'hui sujet d'une préoccupation majeure; donc
possiblement, pas de contrôle adéquat de la part du MLCP.
En ce qui concerne les amendes, les intentions du ministre à ce
chapitre épousent celles du conseil et ce dernier ne peut que l'appuyer.
Le conseil insiste cependant pour atténuer les amendes pour les
contraventions de nature technique exemple: armes à feu dans les
véhicules, ces articles n'ayant aucune incidence sur la conservation de
la faune.
Protection des habitats. Dans sa déclaration ministérielle
du 22 juin 1982, le ministre fait ressortir des points qui, de l'avis du
conseil, sont fondamentaux dans la bonne gérance de la faune. La
protection des habitats permanents et temporaires de lieux de rassemblement se
doit aussi à la sauvagine pendant ses migrations. Le conseil souhaite
donc que le ministre statue afin de créer des aires de repos tout au
long des couloirs qu'empruntent les migrateurs au Québec. (10 h 15)
Quant à la sollicitation d'une contribution des utilisateurs de
la faune, le conseil en profite pour annoncer qu'il présentera un avis
au ministre sur la création d'un fonds spécial destiné
à acquérir, protéger ou aménager des habitats
fauniques. L'essence de la provenance des sommes qui constitueraient le fonds
serait liée étroitement à la vente des permis de chasse et
de pêche.
Quant au paragraphe traitant de l'association possible du
ministère à des organismes privés et publics, le conseil
ne peut qu'en souhaiter la réalisation dans les meilleurs délais.
Nonobstant l'intention du ministre de traiter de la protection des habitats
dans la Loi sur la conservation de la faune, le conseil recommande fortement de
promouvoir une loi distincte sur la protection des habitats fauniques. Nous ne
croyons pas que les lois actuelles sur l'environnement aient
protégé, du moins jusqu'à maintenant, les habitats
fauniques intéressants. Nous n'avons qu'à nous rappeler certaines
constructions de routes le long des rivières à saumons, certains
travaux de draguage de ces rivières et certains remplissages de
frayères et de marécages, particulièrement près de
Montréal, au lac Saint-Louis.
Responsabilités élargies des agents de conservation. Le
conseil souhaite vivement que les agents de conservation de la faune appliquent
certains articles de la Loi sur la qualité de l'environnement et de la
Loi sur les terres et forêts qui ont une incidence directe sur la faune
et son habitat. Nous croyons que ces gens étant présents partout
dans la province, il serait avantageux qu'ils soient utilisés à
cette fin.
Concernant les auxiliaires de la faune qui verraient leurs
responsabilités élargies, le conseil croit qu'il y aurait lieu de
déterminer leurs champs de responsabilités par règlement
et de presser le gouvernement fédéral de les reconnaître,
particulièrement en ce qui concerne les pêcheries et les oiseaux
migrateurs.
Réserves fauniques. Le conseil voit d'un bon oeil la
redéfinition du concept de
réserve faunique. Le conseil croit également que le
ministre doit se prévaloir de mécanismes pouvant lui permettre,
sans ambiguïté, de décréter des statuts particuliers
sur des portions de territoires en accord avec les articles qui traitent de la
protection des habitats.
Citons comme exemple certains territoires à statut particulier
qui, aux yeux du conseil, pourraient grandement aider la faune: aires de repos,
zones où la chasse aux oiseaux migrateurs est interdite durant une
période donnée; refuges d'oiseaux migrateurs, secteur où
la chasse et le dérangement sont interdits; sanctuaires fauniques,
endroits où sont restreintes les activités de
prélèvement ou d'utilisation de la faune, et ravages, qui sont
des aires d'hivernement des grands cervidés.
En ce qui concerne les pourvoiries, le conseil accepte en principe les
amendements, modifications ou nouveaux articles relatifs aux pourvoiries. Il
souligne à ce chapitre des éléments que la loi devrait
comporter, tout en incluant les activités de plein air ou toute autre
activité récréative, ce qui semble ne pas être
indiqué, être absent des définitions actuelles. Dans le cas
de certains détails sur les rapports avec la pourvoirie, ici on
mentionne, quant à l'avis de début des travaux, par exemple que
le détenteur d'un permis de coupe de bois ou le détenteur de
droits miniers devrait aviser le locataire 24 mois à l'avance de tous
travaux prévus sur son territoire de façon que le pourvoyeur
puisse s'organiser, dans le but de protéger le sportif qui a
réservé un territoire, pour qu'il jouisse pleinement de son
droit, et de planifier les investissements des pourvoyeurs.
Dans le cas de la révocation de baux, de confirmation et
d'indemnisation de l'article 62, cet article devrait être conservé
comme tel et non modifié.
Dans le cas des expirations de baux, l'article 64 ne doit pas être
modifié. Cependant, nous suggérons d'y ajouter: Le ministre
indemnisera le locataire dans le but de promouvoir la pourvoirie et d'avoir des
pourvoyeurs qui n'hésiteront pas à investir et qui ne
lésineront pas sur le service.
En ce qui concerne les fins de bail, au chapitre des indemnités,
si le ministre met fin au bail, qu'il tienne compte de la valeur de
remplacement au lieu de la valeur réelle.
Quant aux droits du locataire, nous suggérons cet article de
droit nouveau: Le bail confère au locataire le droit de poursuivre en
son propre nom toute personne qui contrevient, sur le territoire faisant
l'objet du bail, à une disposition de la présente loi ou des
règlements. Le locataire peut aussi réclamer des dommages de
cette personne, s'il y a lieu.
Servir et vendre de la venaison, du poisson ou autre. Le Conseil de la
faune s'est, à plusieurs reprises, opposé à la
commercialisation de l'omble de fontaine et maintient une position similaire
face à la vente de venaison. Cependant, il accepte que l'on modifie la
loi, en permettant de servir dans un établissement public de la chair
d'animaux sauvages lors de fêtes familiales et lors de "soupers
bénéfices" aux fins de projets concernant l'aménagement de
la faune. Dans ce dernier cas, il est nécessaire que la provenance soit
identifiée, contrôlée et soit faite sous forme de dons aux
organisateurs de la soirée.
Animaux rares, menacés ou menacés d'extinction. Le conseil
est d'accord que des dispositions en ce sens soient incluses dans la loi.
Chasse, piégeage et pêche sur les terrains privés.
Le conseil a réalisé que l'introduction d'une mesure de
protection à un groupement de propriétaires privés ne peut
se faire sans échange. Si cet échange favorise un accès
à un plus grand nombre d'utilisateurs, le conseil appuie le ministre.
Par contre, si ces clubs privés, particulièrement de l'Estrie,
s'opposent à recevoir plus de chasseurs et de pêcheurs, qu'ils en
assurent eux-mêmes la note.
Indemnités et assurance. Le conseil recommande fortement d'abolir
ce chapitre de la loi. L'assurance rattachée aux divers permis n'a aucun
effet sur la faune ou sur son devenir. Le conseil croit en sus que la vente
d'assurance ne devrait pas faire partie du mandat du ministre.
Nous endossons à l'unanimité le désir de simplifier
l'interprétation de la loi et de clarifier les responsabilités du
ministre. En principe, nous approuvons les modifications proposées dans
la section "Divers" du document de consultation, sauf celles relatives à
l'abandon de chair comestible. Dans ce cas, nous sommes d'avis que seuls les
trappeurs aient l'autorisation d'utiliser de la chair comestible pour leurs
pièges. De plus, nous croyons que d'autres articles devraient être
simplifiés, modifiés ou ajoutés. Nous désirons
particulièrement que cela s'étende aux définitions. Pour
cela, il faudrait revenir au chapitre C-61 où on a, à la section
1, les définitions.
Le gros gibier. En incluant l'ours dans le gros gibier, on devrait
modifier le règlement qui interdit l'usage de chiens pour chasser le
gros gibier et ne permettre que la chasse à l'ours avec chiens de
chasse, de façon à ce qu'il n'y ait pas de contradiction.
Véhicule. Exclure remorque motorisée lorsque
utilisée comme résidence temporaire ou permanente. Rayer le mot
"terrestre".
Zone d'exploitation contrôlée. Nous croyons que les mots
"à des fins de récréation de plein air, notamment
d'exploitation de la faune" devraient être ajoutés.
Définition à ajouter: petit gibier, que nous ne retrouvons
pas à l'article 1, mais qui est identifié dans les
règlements. On se demande si tout ce qui n'est pas gros est petit,
où se situent l'ours et le loup, si le lièvre et la perdrix font
partie de notre faune. Cela manque de clarté.
Il faut aussi définir le mot "faune", le mot "habitat", le mot
"tanière" - on va y revenir - les animaux à fourrure et les
pourvoiries. Il faut aussi définir les concours de chiens de chasse et
les entraînements de chiens de chasse. Nous croyons que le certificat du
chasseur devrait comporter le numéro d'assurance-maladie au lieu du
numéro d'assurance-sociale. La raison fondamentale à cela, c'est
que les gens, particulièrement ceux de l'Ontario, qui ont des
propriétés au Québec se servent de leur numéro
d'assurance sociale, qui est fédéral, en donnant une adresse plus
ou moins fictive au Québec, qu'ils aient une propriété ou
non, et ces gens ne paient pas ce qu'ils devraient payer. Deuxièmement,
si jamais ils perdent leur permis, tout ce qu'ils ont à faire, c'est
retourner chez eux et revenir chasser avec un permis de non-résident.
Donc, ils peuvent se soustraire à la loi actuelle.
À l'article 2, dans les devoirs du ministre, peut-être
faudrait-il ainsi modifier la première phrase: Le ministre doit veiller
à la conservation de la faune et à la gestion de ses
habitats.
À l'article 17, certificat du chasseur. Nous sommes d'avis que
l'acte de chasser, peu importe la façon, ne devrait être permis
qu'à ceux qui détiennent un certificat, qu'ils chassent avec arme
à feu, arc, arbalète ou même qu'ils piègent le
gibier, et qu'ils soient soumis à la réglementation de tout le
monde, en particulier que les trappeurs portent le dossard si le
règlement force les chasseurs à porter le dossard.
À l'article 20, chasse la nuit et chasse interdite. Ceux qui
chassent la grenouille la nuit, où se situent-ils? Ne sont
déterminés nulle part par règlement les animaux permis
tels les batraciens. Il faudrait spécifier cela.
À l'article 27, qui concerne le droit de chacun de tuer tout
animal qui cause des dommages, on devrait exclure tout animal
considéré comme gibier, parce que si les gens commencent à
tirer sur les perdrix parce qu'elles viennent manger les graines de leur
parterre et s'ils tirent sur les chevreuils, comme cela s'est fait dans
l'Outaouais, parce qu'ils vont grignoter des arbrisseaux, il n'y aura plus de
limite.
En ce qui concerne les actes prohibés, il est interdit
d'endommager ou de détruire la tanière d'un animal. On revient
à ce qu'on a dit tout à l'heure quant aux définitions. Le
terme "tanière" n'est pas défini, et il y a le gîte, le
terrier, la hutte, la cabane et tout un éventail d'expressions qu'il
faudrait corriger. Il faut donc définir et préciser toute la
portée du terme "tanière", auquel il faudra sans doute donner un
sens élargi, plus englobant.
M. Richard: Dans les exceptions, on mentionne: "Toutefois, il est
permis de tirer d'une embarcation motorisée, un gros gibier, à la
condition que ce ne soit pas à la suite d'une poursuite et que le moteur
de l'embarcation soit à l'arrêt." Le conseil est d'avis que cette
exception doit être retirée et que ce ne soit plus possible de
procéder comme cela.
Offre d'achat ou vente de gros gibier. Nous sommes d'avis que, dans le
cas d'un commerce qui détient un permis d'un autre ministère,
comme dans le cas des auberges ou autres établissements de ce genre, il
doit y avoir suspension automatique de ce permis lorsque les
propriétaires ont été trouvés coupables d'achat ou
de vente de gros gibier. C'est toujours le même problème qui se
présente: on capture le braconnier, l'hôtelier est condamné
à payer un certain montant d'amende. Ce qui arrive, c'est que
l'hôtelier continue à faire de l'argent en vendant de la
bière et du whisky tandis que le braconnier, souvent, fait de la prison.
Et si on le frappait là où cela lui fait mal, c'est-à-dire
en lui enlevant son permis, cela aurait plus de poids.
Le Conseil de la faune désire aussi ajouter certains
éléments sur le saumon. Le Conseil de la faune profite de cette
commission parlementaire afin d'instruire ses membres sur la
responsabilité de l'État face à la survie du saumon
atlantique.
Le ministre responsable des pêcheries a rencontré les
membres du Conseil de la faune et a dévoilé des mesures que son
ministère devait entreprendre cette année afin d'éliminer
les captures accidentelles du saumon. Le conseil n'a observé aucun
résultat tangible des présumés efforts que devait
entreprendre le MAPA, c'est-à-dire le ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, afin de réduire et
d'éliminer la capture accidentelle du saumon par les pêcheurs
commerciaux dans les estuaires ou encore par les exploitants de pêche
à fascines. Ces derniers utilisent une technique de pêche qui
s'avère aussi meurtrière pour le saumoneau qu'efficace pour le
saumon adulte. D'ailleurs, pour la plupart, les détenteurs de permis
pour ce type de pêche n'ont rien de commun avec les pêcheurs bona
fide. Ce sont souvent des commerçants, des artistes, des professionnels
ou autre, même des fonctionnaires qui, par le truchement de permis du
MAPA, contribuent à une forte diminution des stocks de saumon.
La survie du saumon dépend, en grande partie, de
l'intégrité des responsables de la gestion de la ressource et de
l'application
des lois qui peuvent aider ou lui nuire.
Le conseil a, à plusieurs occasions, produit des avis concernant
le saumon et, devant cette commission, il insiste pour que des mesures urgentes
soient prises afin d'assurer la survie de cette richesse renouvelable pour peu
qu'on lui en donne la chance.
Il faut mettre en place un système d'enregistrement et
d'étiquetage de tout saumon vendu commercialement.
Il faut bannir toute pêche commerciale au moyen de fascines et
toute pêche au filet maillant à 2 km de part et d'autre des
embouchures des rivières à saumon.
Il faut augmenter le nombre des agents de conservation ou auxiliaires
sur les rivières à saumon afin de pouvoir les affecter aux heures
et aux lieux où les braconniers commettent leurs méfaits.
Il faut retirer le permis de tout contrevenant qui est condamné
pour une infraction aux règlements de la pêche commerciale ou
sportive lorsqu'il s'agit du saumon. Et il faudrait que les amendes pour les
infractions qui touchent directement l'espèce saumon soient
augmentées. Merci, messieurs.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. Richard.
M. le ministre, avez-vous des questions et des commentaires?
M. Chevrette: Oui, M. le Président. Tout d'abord, je
voudrais remercier les représentants du Conseil de la faune et vous
annoncer que votre mandat sera renouvelé très bientôt, pour
un an. Vous pourrez dire à votre consoeur, qui est seule
présentement, qu'elle aura, pour l'an prochain, une compagne. On aura
une deuxième femme au Conseil de la faune. Elle se sentira moins seule,
je l'espère.
Je me rends compte que vous adhérez sensiblement à
l'ensemble des principes qui ont été soumis dans le document de
travail du groupe interministériel. Je trouve passablement
intéressante l'idée de votre recommandation de la promotion de
deux lois distinctes, une pour les habitats et une qui consisterait à
amender la Loi sur la protection de la faune qu'on a présentement. Je
vous assure que je vais les regarder très sérieusement. Il me
semble que cela pourrait permettre deux discussions passablement
intéressantes, cela nous permettrait de traiter avec sérieux les
deux aspects. Je vais me faire une idée d'ici peu de temps sur cela,
mais je considère que cette recommandation est passablement
intéressante et elle vaut la peine d'être fouillée. (10 h
30)
Vous parlez également de protection et, chaque fois que vous
parlez des aires de repos, vous dites que le gouvernement devrait intervenir.
Je pense que vous allez plus loin que nous. Si vous avez remarqué dans
le document de travail qui a circulé, on parlait d'une
réglementation générale nous permettant une intervention
pour les endroits menacés, mais on se gardait aussi une porte pour des
interventions ponctuelles dans certains endroits. Par exemple, des
interventions ponctuelles pour les endroits particuliers, soit un endroit
où la productivité et la diversité faunique sont
singulièrement riches, ou encore dans un endroit qui comporte une
espèce rare à l'échelle nationale ou régionale, ou
encore un type d'habitat faunique qui est très représentatif, ou
encore nécessaire à une population animale exigeant des
conditions climatiques de végétation.
Mais est-ce que j'ai bien interprété votre mémoire
en disant que vous, vous voulez, non pas une intervention ponctuelle, mais une
intervention spécifique et permanente dès le départ.
Le Président (M. Bordeleau): M.
Vincent, vous avez la parole.
M. Vincent (Serge): Merci, M. le ministre. Il n'est pas du tout
dans l'intention du conseil de s'opposer aux intentions que le ministre
Lessard, à ce moment, a exprimées dans sa déclaration
ministérielle, et que vous avez reprises à peu près dans
les mêmes termes. Le conseil est intéressé à des
instruments flexibles. Quand on parle d'aires de repos, par exemple, en ce qui
concerne les oiseaux migrateurs, cela ne demande pas une étude
exhaustive. Dans une aire de repos, sa seule préoccupation c'est d'en
interdire la chasse à une espèce donnée pendant une
période précise. Finalement, c'est simplement une
législation, un règlement qui dirait que, dans tel secteur de
telle route à telle route, il n'y a pas de chasse pendant une
période donnée. Cela ne demande pas de négociation avec
les propriétaires de terrains privés, cela ne demande pas une
procédure parlementaire; tout ce que cela demande, c'est un
règlement, L'application étant donné que l'aire de repos,
c'est saisonnier. Quand on pense aux oiseaux migrateurs, les aires de repos, le
printemps et l'automne sont importants. Il y en a que c'est strictement
l'automne, il y en a que c'est le printemps et il y en a d'autres que c'est le
printemps et l'automne. Mais l'hiver, on peut quand même continuer
à faire la chasse au renard, à faire le trappage du rat
musqué et ces choses-là dans ces territoires publics ou
privés. C'est strictement un endroit où on pourrait dire
facilement: Écoutez, il n'y a pas de chasse cette année. Par
exemple, au canal de Beauharnois, où le ministère a l'intention
de créer une réserve, le canard
est limité. On a fait des aménagements et depuis au moins
trois ans, les chasseurs se gavent à l'automne dans des
aménagements et, des sites de nidification. Nous croyons que c'est
à peu près le seul endroit où les canards se reposent
pendant leur périple d'automne. Ce sont simplement des instruments
très flexibles qu'on verrait, nous.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le ministre.
M. Chevrette: Vous avez parlé également du saumon.
Je voudrais vous dire tout de suite que pour la saison de 1983 le
règlement sur la pêche au Québec a été
amendé de concert avec le MAPA. On peut même vous annoncer tout de
suite que la pêche au filet maillant dans les zones
déterminées en face des rivières à saumon sera
défendue, de sorte que cela réglera en partie les fameuses
pêches dites accidentelles. Le MAPA est d'accord avec nous
là-dessus. Donc, votre idée a sûrement fait du chemin.
Deuxièmement je voudrais vous poser une question. Vous dites dans
votre mémoire que vous aurez à émettre très
bientôt un avis sur le fonds spécial. Je suis heureux d'apprendre
que vous aurez un avis précis à me donner. Cela me sera sans
doute utile mais actuellement est-ce que votre réflexion est
suffisamment avancée pour que vous puissiez répondre à
deux ou trois petites questions? Premièrement, est-ce que vous voyez un
fonds constitué exclusivement de l'argent de l'État ou voyez-vous
un fonds constitué de l'argent provenant de groupes
intéressés à la conservation des habitats?
M. Richard (Gilles): Nous croyons que l'implication personnelle
de chacun des individus est une des meilleures formules pour faire
reconnaître la responsabilité directe qu'a cet individu dans
l'aménagement et la protection des habitats. En fait, c'est parce que
lui en fait une récolte. Il y a d'autres utilisateurs qui ne font pas de
récolte, qui font une consommation sans récolte, et nous croyons
que ces gens-là seraient intéressés. Aux endroits
où cette expérience a été tentée,
particulièrement aux États-Unis, cela a eu un certain
succès. Dans nos réflexions, nous sommes allés
jusqu'à dire que c'est extrêmement important que l'utilisateur
soit avisé de ce qui arrive de son argent. Après consultation
auprès d'un certain nombre de chasseurs et de pêcheurs, on s'est
rendu compte qu'il a l'impression qu'il ne sait pas à quoi sert son
argent. Sur deux volets, nous croyons qu'il serait prêt à
participer mais à la condition de savoir où cela va. Il faudrait
que cela devienne de l'argent spécifique dans ce domaine-là.
Jusqu'à maintenant nous en sommes là.
M. Chevrette: On nous a exposé - je ne me souviens pas
quel groupe - un des premiers groupes qui a témoigné devant la
commission nous a parlé de délégation de pouvoirs au
niveau de la gérance de ce fonds. En d'autres mots, il ne voulait pas
que ce soit l'État qui gère exclusivement ce fonds. Est-ce que
vous avez des idées sur la gestion de ce fonds? Par qui cela devrait-il
être géré?
M. Richard (Gilles): Jusqu'à maintenant, nous ne nous
sommes pas penchés suffisamment sur cela, je crois, pour être
capables de donner une opinion et, pour ma part, je ne ferais que donner une
opinion personnelle. Au Conseil de la faune, nous ne sommes pas rendus à
ce point-là, mais dans les remarques que nous allons vous
présenter bientôt, nous allons, je l'espère, aller
jusqu'à ce point-là.
M. Chevrette: Un peu plus loin dans votre mémoire, vous
suggérez que les pouvoirs du ministre soient "de veiller à la
conservation de la faune et à la gestion de ses habitats."
Qu'entendez-vous par "gestion des habitats"?
M. Richard: Disons que ça nous vient peut-être de ce
qu'on considère une confusion actuelle, à cause de la
quantité de ministères qui sont impliqués dans la gestion
des habitats, à cause de l'utilisation étendue de ces habitats
pour d'autres fins que la conservation de la faune. Nous croyons, par exemple,
que - d'ailleurs, je l'ai mentionné -dans certains cas, il n'y a pas eu
suffisamment de protection apportée par d'autres ministères. Nous
croyons que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
est mieux placé pour gérer ces habitats.
M. Chevrette: Je vais passer la parole à un autre, quitte
à revenir à la fin.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, M. le ministre. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président, ma question
s'adresserait à M. le ministre. Je voudrais savoir ceci, en ce qui
concerne les démêlés qu'il a eus avec l'ancien ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche en ce qui a trait aux dirigeants du
Conseil de la faune qui ont fait l'objet d'expulsions au début de
l'année. Est-ce que vous pouvez dire ce qui s'est passé?
M. Chevrette: Voulez-vous préciser votre question? Je n'ai
eu de démêlés avec personne et ne vous arrangez pas pour
mettre la chicane entre eux et moi.
M. Houde: Ce n'est pas vous que
j'attaque directement.
M. Chevrette: Vous pourriez peut-être demander à M.
Vincent. Est-ce qu'il y a eu des démêlés? Je ne suis pas au
courant.
M. Vincent: Non; je n'ai pas compris. Je comprends mal.
M. Houde: Non, non. Je voudrais savoir...
M. Chevrette: II n'y a personne qui comprend; il n'y a que lui,
il me l'a dit.
M. Houde: J'aimerais savoir du ministre, en ce qui concerne son
prédécesseur, en ce qui a trait aux dirigeants du Conseil de la
faune qui ont fait l'objet d'expulsions au début de l'année, fin
décembre 1981 et début décembre 1982...
M. Chevrette: Je vais demander au secrétaire. Franchement,
je n'étais pas au courant et deuxièmement, je ne suis pas au
courant des chicanes...
M. Houde: M. Rocheleau, vous pourriez répondre?
M. Chevrette: ... troisièmement, je ne les cherche pas,
mais si vous voulez répondre, M. Vincent, répondez.
M. Vincent: Ce que j'ai à répondre
là-dessus, c'est que des expulsions, au Conseil de la faune, il n'y en a
pas. Le ministre nomme à tous les ans des membres du conseil. Mais, des
expulsions... Je ne comprends pas votre intervention.
M. Rocheleau: M. le Président, l'an passé, le
ministre Lessard, au mois de décembre 1981, faisait une
déclaration à l'effet que le Conseil de la faune n'était
pas représentatif du milieu. Est-ce qu'aujourd'hui il l'est devenu?
M. Vincent: De fait, c'est la Fédération
québécoise de la faune et non pas le Conseil de la faune. Si je
ne me trompe pas, je pense que la déclaration du ministre à ce
moment-là concernait la Fédération
québécoise de la faune et non pas le Conseil de la faune, le
conseil étant un conseil consultatif qui a agi pendant plusieurs
années à titre privé auprès du ministre mais qui
est devenu plus public avec la venue de M. Lessard comme ministre en titre.
M. Chevrette: Je n'étais pas au courant, de toute
façon, et personnellement, ce que j'ai fait cette année - je vais
vous le dire avant que me posiez la question parce qu'il n'y a pas de cachette
- j'ai fait faire le tour des quinze membres. Il y en a, je crois, trois qui
n'ont pas demandé de renouveler leur mandat, ils
préféraient quitter; j'en ai ajouté deux autres, un homme
et une femme, qui seront nommés très prochainement.
M. Houde: M. le ministre, excusez-moi, ce n'est pas le bon groupe
qui est ici. C'est la Fédération de la faune, parce que l'ordre
des dossiers a été changé ce matin.
M. Chevrette: Je m'excuse, moi aussi. Je suis très heureux
de constater que je n'ai pas de problèmes avec vous.
M. Houde: Pas avec nous.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous avez
terminé, M. le ministre?
M. Chevrette: Oui.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: En ce qui concerne la vente de l'assurance et les
indemnités, étant donné que ce n'est pas le ministre qui
doit en faire partie, qui en fera partie d'après vous?
M. Richard (Gilles): Nous croyons que c'est une activité
qui devrait être confiée à d'autres gens que ceux du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Par exemple, la
Fédération québécoise de la faune, qui est
quelquefois fortement critiquée, cela lui ferait peut-être une
occupation et un revenu d'appoint et nécessiterait peut-être de
moins gros subsides de la part du ministère. De toute façon,
c'est eux qui l'avaient lancée à l'époque et cela pourrait
être continué - c'est une suggestion - mais nous ne croyons pas
que cela devrait faire partie de tout le système entourant la protection
de la faune. L'assurance, c'est de l'assurance, c'est une industrie, cela ne
concerne pas la protection de la faune.
M. Chevrette: Si vous me permettez d'intervenir dans le
débat. Est-ce que M. le député de Berthier me le
permet?
M. Houde: Oui, oui, allez-y.
M. Chevrette: Merci. Tout d'abord, en ce qui concerne la chasse,
cela a été conservé; en ce qui concerne la pêche,
cela a été enlevé. J'ai regardé cela tout
dernièrement; c'est une somme qui équivaut à environ 200
000 $ sur le plan provincial. On s'est interrogé, mais finalement, on
n'a pas pris de décision. On se demande si l'on ne devrait pas confier
les 0,25 $ ou à peu près que cela représente par
pêcheur à une compagnie d'assurance privée. On ne le
sait
pas. Pour ce qui est de gérer un fonds d'assurance, l'État
comme tel n'est pas un assureur au sens strict du mot, ni un ministère
de l'État, de sorte que j'aurai à prendre une décision
d'ici quelques mois, mais je retiens votre suggestion. On pourrait
peut-être rendre service à un plus grand nombre en leur
suggérant une procédure très souple. En plus, cela
pourrait être automatique avec une compagnie. Il pourrait y avoir une
négociation avec une compagnie privée et, automatiquement,
l'argent leur est envoyé et vous êtes peut-être
assuré par une meilleure couverture aussi.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, dans la première page
d'introduction du mémoire, le conseil consultatif dit ceci dans le
dernier paragraphe à la première page: "Le conseil propose des
modifications en profondeur à l'ancien texte, modifications qui
s'inscrivent dans le voeu que le projet de loi que déposera le ministre
soit une véritable loi sur la conservation de la faune, et non une loi
régissant la chasse (et la pêche)..." Un peu plus loin, on
remarque que vous semblez dire qu'actuellement... Dans mon esprit, la
conservation de la faune et les infractions vont quasiment de pair, s'il n'y a
pas d'infraction, c'est difficile forcément de conserver la faune.
Qu'est-ce que vous voulez dire exactement, si ces deux choses ne se rejoignent
pas?
M. Richard (Gilles): Les deux se rejoignent, mais, en
réalité, si on fait une loi sur la conservation de la faune - et
c'est ce pourquoi on insiste beaucoup sur la question de l'habitat - quelle que
soit la réglementation que vous adoptez, si votre habitat fait qu'il n'y
a plus de gibier - je fais une comparaison extrême - alors, qu'il
s'agisse de n'importe quelle loi sur la conservation quand les animaux qui
devraient être protégés ne sont plus là, cela ne
sert à rien. Donc, la question de l'habitat prend son importance.
Deuxièmement, dans les applications de la réglementation
qui ont été faites, j'ai des mémoires du conseil du 10
décembre 1980 transmis au ministre Lessard et les chiffres que nous
avons disent ceci: il est reconnu qu'en 1979-1980, l'année de
l'application de la loi no 71, celle que nous considérons comme
n'étant pas tellement une bonne loi, les causes entendues se sont
chiffrées à 85% comme causes techniques et dans ces 85% qui
n'ont, en fait, aucune incidence sur la conservation du gibier, le quart est de
formalité administrative, comme un permis qu'on a oublié de
signer car à l'époque, il fallait avoir le permis sur soi,
sinon... On n'avait pas tant de temps. Des détails comme ceux-là.
De mauvais permis émis par le vendeur. Vous vous présentez et le
vendeur, à cause de son ignorance, vous vend un mauvais permis. Vous
partez à la chasse avec le mauvais permis. Si un garde-chasse
vérifie, vous êtes en contravention. (10 h 45)
On s'est rendu compte que 85% des causes - ce sont des chiffres qui ont
été obtenus - étaient de ce genre. Alors, cela n'a pas
d'incidence sur la vraie protection de la faune. Par contre, le gars qui
remplissait un marécage, il n'y avait personne qui allait le voir en
1979-1980, pour lui dire: Vous détruisez un habitat favorable à
la faune. C'est cela.
M. Mailloux: Si je comprends bien, c'est que vous demandez au
ministère de viser à ce que son action porte plutôt sur la
protection des habitats ou des aires dont la faune aquatique ou terrestre a
besoin, que sur des infractions techniques. Mais j'imagine quand même
que, dans la loi actuelle, pour ceux qui détruisent des habitats - il y
a peut-être le fait des aboiteaux et des choses semblables, où la
loi n'est pas trop claire -que vous contestez, devait quand même
prévoir des infractions pour ceux qui détruisaient un
habitat.
M. Vincent: II est bien entendu...
M. Mailloux: C'est l'accent que vous voulez mettre sur la
protection à sa base.
M. Vincent: C'est un accent là-dessus et un accent,
également, sur les gens qui causent un véritable tort à la
faune. Je pense aux bandits de la faune, ceux qui en font une
commercialisation, actuellement. Je pense aux réseaux de braconniers
organisés qui sont plus structurés que la pègre à
Montréal; cela est important. C'est également important d'enlever
d'amputer les technicités à cette loi. Par exemple, on remet une
contravention à une personne qui n'a pas fermé
complètement l'étui de son arme à feu, ouvert de deux
pouces. Cela n'a aucune incidence sur la faune elle-même. C'est important
d'amputer toutes ces technicités à la loi. On met cela dans des
règlements, mais que la loi soit une véritable loi où on
touche les gens qui causent du tort à la faune. Qu'on touche, par
exemple, des gens, - lorsqu'on parle d'une loi sur l'habitat, on a
demandé que le ministre statue et ait sa propre loi sur la protection
des habitats -ou des promoteurs qui, avec la bénédiction du
ministère de l'Environnement - je ne sais pas qui - ont
été engagés, qui ont passé le bulldozer dans la
rivière Matane, qui ont détruit tout le haut de la rivière
Matane dans un parc, qui était dans une réserve appartenant au
ministère. Le potentiel de cette rivière a été
réduit de la moitié. Cela
va prendre combien de temps à revenir? Vingt ans. C'est pour cela
que nous voulons que soient amputées les technicités.
M. Richard (Gilles): On peut en mentionner quelques autres, des
amusantes, comme quelqu'un qui est à la chasse au gibier migrateur; il
lève une perdrix, il tire sur la perdrix. S'il n'a pas le dossard sur le
dos, d'après le règlement actuel, c'est une infraction, parce que
le règlement dit: Pour chasser le petit gibier, cela prend le dossard.
Qu'est-ce qu'il y a... Bon! Le permis non signé, c'est une infraction.
Le mauvais permis obtenu du vendeur. L'arme à feu dans le
véhicule. Une arme à feu, dans un coffre arrière du
véhicule, même si elle est chargée, cela n'a aucune
incidence sur la faune. C'est peut-être un danger pour le chasseur, mais
de là à enlever le permis de chasse ou des conditions semblables.
Nous croyons que ce sont deux types complètement différents. Il y
en a qui sont de nature technique et il y en a d'autres qui concernent vraiment
la protection de la faune.
M. Mailloux: Je vais poser des questions dans deux autres ordres
d'idées. À la page 7 du mémoire, vous revenez sur les
révocations de baux, quant aux pourvoiries, aux expirations de baux puis
les fins. Est-ce que, dans la loi actuelle - on en parlait hier, je crois, au
moment où les pourvoiries se sont fait entendre - il y avait
déjà des prévisions relativement à l'indemnisation
advenant que...
M. Chevrette: Justement, dans ma déclaration d'ouverture
de ces audiences, je prévoyais une...
M. Mailloux: Donc, vous appuyez l'indemnisation pour autant qu'il
n'y a pas de défaut d'une personne, de contravention des lois de la
chasse et de la pêche, à l'indemnisation d'une personne qui serait
évincée d'un territoire.
M. Richard (Gilles): Maintenant, dans les cas de pourvoiries - je
vais revenir au but premier du Conseil de la faune qui est de protéger
la faune et, dans le cas des pourvoiries, c'est un peu par ricochet, parce que
quand même les pourvoyeurs sont - en tant qu'hôteliers de la
forêt comme on les appelle - des gens très impliqués dans
la protection de la faune et nous croyons qu'ils doivent travailler avec de
meilleurs instruments. Quant à la précision de l'analyse qui a
été faite concernant les avis de début des travaux, les
révocations de bail et l'expiration du bail ne sont que quelques points
qui nous ont été apportés par des gens qui sont
pourvoyeurs et qui rencontrent tous les jours ces difficultés.
Nous ne sommes pas allés beaucoup plus en profondeur, mais nous
croyons que la pourvoirie a son rôle à jouer au Québec et
que plus on fournira à ces gens des outils et plus on leur facilitera la
tâche, plus ils pourront donner un niveau de service élevé
au public et ils seront mieux placés pour protéger
eux-mêmes la faune.
M. Mailloux: M. le Président, j'ai un dernier point. Il
est possible qu'une autre fois je sois en désaccord avec le conseil
consultatif, avec d'autres intervenants et avec des journalistes, mais j'ai
l'impression qu'on se cache la vérité. Je veux parler du point 7,
de servir et de vendre de la venaison, du poisson ou autre. Je ne fais pas de
procès d'intention, loin de là, parce que j'imagine que tous ceux
qui sont contre cela actuellement ont des raisons profondes de penser que si
c'est permis par les pisciculteurs et par l'agro-alimentaire, il y aura
peut-être un élargissement du braconnage actuel.
Je suis dans un comté passablement touristique et cela fait un
bon bout de temps. J'ai souvent vu consommer du poisson sur la table des
endroits publics. Je conviens que cela venait des braconniers à ce
moment. Je pourrais même mentionner un exemple que tous se rappelleront.
Dans un hôtel de mon comté, à un moment donné, je
pense que c'était l'Association hôtelière du Québec
qui, réunie, avait invité le ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche. À un moment donné, les gardes-chasse sont
arrivés et ont enlevé tous les plats sur la table. On a vu cela
chez nous. Pas besoin de vous dire que tout le monde était
estomaqué.
M. Richard (Gilles): Tout le monde était estomaqué,
c'est le cas de le dire.
M. Mailloux: À présent, il y a une question que je
me pose comme profane en la matière. On m'a déjà
donné une carabine et je n'ai jamais tiré de balles de ma vie. Je
ne suis pas un chasseur, loin de là. Je suis un pêcheur sportif et
quand cela ne veut pas mordre à la mouche, je m'en vais. Je sais qu'il y
a des braconniers et je sais qu'il y en a qui abusent. De toute façon,
on en a eu des démonstrations assez profondes cette semaine. Mais
actuellement, ce sont tous des gens qui vont mourir, ceux qui sont dans la
pisciculture, partout dans la province. Je ne suis pas capable de comprendre
comment il se fait que... Je conviens que le prix de dumping peut être
plus bas, venant du Japon ou d'autres provinces. Pour autant qu'il y aurait des
lois avec des dents susceptibles de faire en sorte que chaque hôtelier ou
restaurateur, quand il servirait hors la loi, puisse perdre son permis
d'hôtelier ou de restaurateur et que le pourvoyeur qui se ferait prendre
en infraction soit pénalisé de la même façon, je ne
suis pas capable de
comprendre pourquoi on pense qu'il y aurait un élargissement tel
du braconnage. Il se fait actuellement, le braconnage, sous toutes ses
formes.
J'aimerais que le conseil consultatif me dise réellement si j'ai
tort et que d'autres ont tort, mais qu'on nous le dise. Cela n'est pas tant une
poussée de l'agro-alimentaire; c'est quand même une situation de
fait qu'on connaît actuellement.
M. Richard (Gilles): C'est qu'actuellement il n'y a pas une
très grande quantité d'espèces dont on pourrait faire le
commerce. Si on repense à tous nos gros gibiers, l'ours est difficile
à contrôler parce que quelquefois il a une maladie, cela
prendrait...
M. Mailloux: Surtout d'une certaine sorte de poisson. Je
pense...
M. Richard (Gilles): Ah! vous parlez de la truite
mouchetée, pour ne pas la nommer.
M. Mailloux: Non, non. Je n'ai pas de cachette.
M. Richard (Gilles): Nous nous sommes opposés à
cela au Conseil de la faune après avoir - parce que notre conseil est
très représentatif de tous les endroits de la province - obtenu
de la part de nos gens qui venaient de l'extérieur des grandes villes...
Moi, je suis montréalais, Serge aussi. Il y en a d'autres qui sont
québécois. Nous n'avons peut-être pas la même
sensibilisation que les gens, en particulier, de la Côte-Nord, de la
Gaspésie, etc. Maintenant, les gens qui ont parlé de la
commercialisation estiment qu'il y a un contrôle relativement facile
à faire à cause de la dimension des truites. On appelle cela une
truite portion, une truite de restaurant. Il faut qu'elle ait telle dimension;
il faut qu'elle ait été congelée. Il faut que cela soit en
paquets de deux, de quatre ou de six, selon la quantité qu'on veut
mettre sur le menu et différents éléments comme
ceux-là. Quand on tombe dans le steak de chevreuil, d'orignal et de
caribou, un des cas qui est arrivé, c'est une histoire de renne. En
fait, le renne est de la même espèce que le caribou, ce ne sont
que deux sous-espèces.
M. Mailloux: Excusez-moi si je vous arrête. Dans mon
esprit, vous aviez compris que, quand je parlais des piscicultures, je ne
parlais pas du lièvre et d'autres choses, je parlais du poisson, de la
truite...
M. Richard (Gilles): Vous parlez strictement de saumon.
M. Mailloux: Essentiellement.
M. Richard (Gilles): Repassons la situation du saumon, du poisson
en général, mais on va parler du saumon parce qu'au sujet du
saumon, il y a eu un certain contrôle, enfin, on espère qu'il va y
avoir un certain contrôle sur les prises accidentelles. Il semblerait
qu'il y a un paquet de commerçants qui s'approvisionnent en prises
accidentelles. Or, s'il n'y a pas de méthode de contrôle de chacun
des saumons qui sort de l'eau, que cela soit commercial ou non, on ne pourra
pas savoir lequel aboutit à la table du restaurateur. Alors, dans le cas
de la truite mouchetée, il y a des avantages et des
désavantages.
Nous, au Conseil de la faune, nous en avons conclu que cela pourrait,
dans certains coins de la province, risquer de mettre en danger certaines
populations locales. Je pense au nord de Montréal où il y a
très peu de truites mouchetées et où il y a des centres
extrêmement importants au point de vue touristique. Aller contrôler
tout ce qui se passe en ce qui concerne la truite mouchetée durant
l'hiver à partir de Saint-Sauveur jusqu'à Sainte-Agathe,
où il y a peut-être une population de 150 000 personnes, nous
considérons qu'il y aurait des difficultés et nous croyons qu'il
faudrait faire la preuve, et très sérieusement, soit par
étiquetage ou autrement, qu'il n'y aura pas cela. Quand on va en dehors
des grands centres, nous sommes d'avis que le restaurant qui vend de la poutine
à Hauterive, Baie-Comeau ou quelque part sur la Côte-Nord, demain
matin, il peut vendre de la truite si elle est permise.
M. Mailloux: Je pense bien que...
M. Richard (Gilles): Là, le contrôle devient
difficile à cet endroit. C'est cela, notre point.
M. Mailloux: Dans mon esprit, en ce qui concerne les
piscicultures et la truite mouchetée, comme prémisse, il faudrait
absolument que chaque détenteur de permis de pisciculture ait une
étiquette ou un étiquetage numéroté et que personne
ne puisse s'en servir. Je pense que cela serait quand même un
contrôle assez radical. En tout cas...
M. Vincent: Je voudrais ajouter quelque chose. Nous croyons qu'il
peut y avoir un contrôle, un très bon contrôle à
partir des pisciculteurs, mais là où le problème revient,
c'est au niveau des receleurs et des établissements hôteliers.
Actuellement, on sait que sur la Côte-Nord, dans la plupart des
restaurants, on peut manger de la truite mouchetée. Cela existe
actuellement, c'est de la truite qu'on a braconnée, c'est de la truite
illégale et on le fait avec la bénédiction de tout le
monde dans le coin, parce que c'est le seul poisson qu'on a dans le coin, dans
nos lacs et nos rivières. Nous
autres, à Montréal, on n'a pas de problème, on a de
la barbotte, on a de la perchaude et du doré, même qu'on n'a plus
le droit de le manger parce qu'on ne nous le recommande pas à cause du
mercure. L'avis du conseil. Le conseil s'est penché sérieusement
sur le document, l'a étudié, l'a déchiffré et a
entendu également le ministre de l'Agriculture. Il a passé une
heure avec le ministre de l'Agriculture à parler strictement sur ce
point. Il était là avec ses acolytes. Finalement, le conseil, a
pris la décision de s'opposer avec véhémence à
toute commercialisation de la truite mouchetée, parce que c'est de la
truite indigène et que c'est le seul endroit en Amérique du Nord
où on en retrouve en quantité industrielle. Le conseil s'oppose
également à la vente dans les établissements publics de
toute viande de gibier, de gros gibier.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
soulever le fait que votre mémoire est un des meilleurs mémoires
que nous ayons eus ici devant cette commission; vous touchez
énormément de points qui sont très importants. Je voudrais
vous poser quelques questions en ce qui a trait, par exemple, aux
espèces fauniques et floristiques, surtout floristiques. Vous êtes
d'accord pour que des dispositions relatives aux animaux rares, ou
menacés d'extinction soient incluses dans la Loi sur la conservation de
la faune, nonobstant cet accord. J'aimerais savoir si le Conseil de la faune
accepterait que la protection des espèces fauniques et floristiques soit
assurée par une loi spécifique et, dans l'affirmative, quel
ministère devrait, selon vous, en avoir la juridiction. Cela est ma
première question, je reviendrai à propos du saumon tout à
l'heure.
M. Richard (Gilles): D'après ce que nous avons obtenu
jusqu'à maintenant, nous croyons que pour couvrir dans l'ensemble ce que
vous venez d'énoncer, surtout si vous incluez la flore, cela revient
à une question d'habitat, d'une part, et, ensuite, de territoires
privilégiés. C'est là où on a proposé
différents systèmes qui permettent de privilégier certains
territoires à ces fins de protection. (11 heures)
Deuxièmement, nous sommes d'avis que c'est le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui devrait voir à
l'application de cette loi pour différentes raisons: parce qu'il est sur
les lieux partout dans la province, que son personnel actuel est très
familier avec toutes ces situations et parce qu'il est directement
impliqué. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche a un groupe d'agents de conservation qu'on a souvent
considérés comme des gens qui avaient un rôle de gendarme.
Nous croyons que le rôle est beaucoup plus poussé que cela. Quand
on parle de protection floristique, ce n'est pas juste un gendarme, ce n'est
pas seulement donner un billet pour infraction à quelqu'un qui se
ramasse à la place où il ne devrait pas être, c'est
quelqu'un qui voit à protéger ces territoires en contrôlant
l'accès, en limitant les quantités selon ce qui a
été fixé par réglementation. Nous croyons que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche est le mieux
placé pour cette protection actuellement.
M. Perron: Merci. Maintenant, je voudrais revenir à la
question du saumon. Vous mentionnez dans votre mémoire la question des
filets maillants, vous dites qu'on devrait les éloigner d'à peu
près deux kilomètres de l'embouchure des rivières.
Très souvent, on les voit à quelque 150 ou 200 pieds de
l'embouchure de la rivière. D'ailleurs, il y a des pêcheurs
commerciaux qui font en sorte de les rapprocher très souvent...
M. Richard (Gilles): Dans la rivière. M. Perron:
Oui, dans la rivière.
M. Richard (Gilles): C'est cela, ils étirent les deux
kilomètres à zéro.
M. Perron: C'est cela, exactement.
Je voudrais vous poser quelques questions ici, concernant les
chalutiers. Il arrive très souvent, faute de réglementation,
parce que les chalutiers peuvent presque embarquer sur la terre ferme...
À certains moments, parce que, par exemple, sur la Côte-Nord, dans
le comté du Duplessis, il y a seulement un endroit où il y a une
zone qui n'est réservée qu'aux pêcheurs côtiers et
où les chalutiers ne peuvent pas se rendre du tout, c'est pour les
engins fixes à la pêche commerciale, par exemple, aux poissons de
fond... C'est la zone du village de Brador qui va jusqu'à la
frontière du Labrador, une zone qui a six kilomètres de longueur
sur trois de largeur, cela veut dire du nord au sud. Il arrive très
souvent - et de cela, il y a des gens qui se plaignent, surtout les
pêcheurs sportifs au saumon, surtout les pêcheurs sportifs à
la truite; en d'autres mots, ceux et celles qui pratiquent seulement la
pêche sportive au lieu de la pêche commerciale -que, lorsque le
saumon commence à monter dans les rivières, vous voyiez des
chalutiers 24 heures sur 24 qui se rapprochent de l'embouchure des
rivières et qui font un cercle régulièrement pour,
justement, prendre ce qui est possible de prises accidentelles. Comme Conseil
de la faune, est-ce que vous
avez étudié cette partie spécifique, en d'autres
mots, les problèmes que le pêcheur sportif vit avec cela et les
problèmes que cela pourrait causer aussi à la montée du
saumon dans les rivières? Est-ce que vous avez une étude de faite
sur cela? Est-ce que vous avez déjà fait des recommandations?
M. Richard (Gilles): En général, mais nous n'avons
pas de détails; c'est presque de la pêche hauturière dont
vous parlez, les pêches avec chalutiers qui viennent nuire au saumon. Si
l'on avait eu des rapports disant que cela était aussi nocif que les
captures accidentelles faites par des pêcheurs commerciaux bona fide ou
non, nous nous y serions opposés avec la même énergie, mais
nous n'avons pas eu ces détails sur cette zone en particulier.
M. Vincent: Je voudrais ajouter que si notre recommandation de
bannir de l'embouchure des rivières tout moyen de pêche à
fascines ou de filets maillants, on peut ajouter "aux espèces de gros
bateaux", si cela est nécessaire... Finalement, c'était à
portée de ce que l'on voulait dire, c'est qu'on n'en veut plus de
pêche commerciale dans les embouchures de rivière; et cela se
tient à cela, que cela soit avec n'importe quoi. Le conseil, par
exemple, est prêt à accepter que les gens pèchent à
la ligne dormante...
M. Richard (Gilles): Des palangres.
M. Vincent: ... des palangres, il n'y a pas de problème,
parce que le saumon est un poisson de surface. Mais toutes les autres
espèces de moyens qui sont utilisés... Votre cas de la
Côte-Nord, je ne le connaissais pas, je vous remercie de me l'avoir
souligné.
M. Perron: Si je vous le soulève, c'est justement parce
qu'il y a deux ans il y a eu des pêcheurs sportifs qui ont tiré
sur des chalutiers pour les éloigner de l'embouchure de la
rivière Moisie. À ce moment, je crois qu'il y aurait
peut-être lieu, et je vous demande si c'est possible pour vous, de
regarder cet aspect. On sait que tout le chalutage relève actuellement
de la loi et des règlements du fédéral, puisque c'est en
haute marée et que les permis de chalutage sont émis par le
gouvernement fédéral. Il reste cependant que c'est un
problème qui existe depuis plusieurs années et qui peut nous
causer des blessures à un moment donné parce que les
pêcheurs sportifs sont en maudit je ne vous le cache pas.
M. Vincent: On vous remercie de nous avoir passé le
message. Le conseil étudiera certainement ce petit
problème-là. Je pense que même si c'est le gouvernement
fédéral, le conseil doit donner des avis au ministre mais, en
tant qu'individus, les membres du conseil peuvent faire ce qu'ils ont à
faire. En tant qu'individu, je suis membre du l'Association des pêcheurs
sportifs du saumon du Québec. J'en suis l'un des gouverneurs, l'un des
fondateurs et je ferai certainement quelque chose. Je ne pense pas que le
conseil lui-même le puisse mais on ne sait jamais.
M. Perron: Juste un dernier commentaire...
M. Vincent: Cela dépend du ministre.
M. Perron: Juste un dernier commentaire sur cette question. Je
suis heureux que vous sembliez prendre une telle décision. Je voudrais
souligner que les chaluts sont très bien équipés. Par
exemple, ils sont équipés de sonars pour les fonds de mer et ils
peuvent aller très souvent assez près de la terre ferme. Ce qui
arrive, c'est qu'ils peuvent pêcher, avec leurs filets maillants qui sont
attachés derrière le chalut, dans des eaux très peu
profondes. Ils peuvent le faire. Très souvent, même à huit
ou dix mètres.
Le Président (M. Paré): Je voudrais seulement vous
rappeler que nous avons onze mémoires à entendre aujourd'hui. Si
on veut se limiter à une heure et accélérer un peu, cela
fait déjà une heure que nous sommes sur le même dossier. Je
vous inviterais à être assez rapide. M. le député de
Hull.
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Il semblerait que
ces affaires-là n'arrivent qu'à moi. J'aimerais avoir certains
commentaires que je considère relativement importants. On a parlé
de protection de l'habitat. Je pense que ce sont toutes des choses que nous
souhaitons mais il y a un point relativement important dans la loi ou dans
l'avant-projet de loi qu'on a pu examiner. Je ne pense pas que le chasseur et
le pêcheur soient ceux qui créent la détérioration
de la faune. Elle est créée davantage par la pollution, par le
braconnage. Je me pose la question à savoir si une étude a
été faite qui tienne compte du point de vue du braconnage, des
dégâts occasionnés par le braconnage au Québec
actuellement, proportionnellement au nombre de chasseurs - il y a à peu
près 800 000 chasseurs et pêcheurs qui fréquentent nos
forêts. Quelle proportion de détérioration de la faune
peut-on attribuer au braconnage?
M. Richard (Gilles): Selon les chiffres qu'on a obtenus, on s'est
rendu compte que dans la plupart des infractions relevées, 85% des
infractions étaient techniques et que celles-ci n'avaient pas beaucoup
d'incidence sur la faune. Cela laisse 15% d'infractions
relevées chez les gens qui peuvent mettre la faune en danger.
Dans les prises de chaque année, on fait des rapports sur le gros
gibier. J'essaie de me souvenir d'un rapport qui est sorti récemment
où on parle du nombre de prises pour le gros gibier et où on
indique aussi les causes autres que celles occasionnées par la chasse,
c'est-à-dire les accidents, les morts, les prédateurs, et on
inclut le braconnage.
J'ai remarqué que le braconnage dans ces chiffres - que je n'ai
pas sous les yeux -ne semblait pas représenter un très fort
pourcentage. Il faut aussi se mettre dans la tête qu'il y a beaucoup de
gibier rapporté de la chasse qui peut avoir été
braconné. Quelqu'un qui tue un gros gibier peut certainement attendre le
lendemain pour l'enregistrer. S'il a été tué de nuit ou
tué d'un véhicule en marche, il n'y a pas moyen de
contrôler cette partie-là. Ce braconnage met-il en danger la
faune? Si on connaît chaque année la quantité de gibier qui
a été abattu et si on a un contrôle de nos populations, on
ne le croit pas. Par contre, le gibier qui peut avoir été vendu,
braconné industriellement, tué en très grande
quantité et non enregistré, pour celui-là nous n'avons pas
de chiffres récents. Dans les relevés de base, il ne semble pas
que l'incidence soit très forte par rapport à d'autres
facteurs.
M. Rocheleau: II y a un point, M. le Président, en somme
c'est une réflexion. Personnellement, je suis chasseur et pêcheur
depuis plus de 30 ans et ce que je considère, c'est que, pour celui qui
est chasseur et pêcheur, c'est une évasion du milieu urbain que de
s'en aller en forêt pour être tranquille et ne pas être
achalé. Actuellement, de la façon qu'on peut interpréter
certains règlements, au point de vue de la technicité, cela me
fait un peu penser à une convention collective qui nous dit tout ce
qu'on n'a pas le droit de faire et qui ne nous informe pas de ce qu'on peut
faire. Je me demande si vous avez déjà fait des recommandations
sur les infractions majeures en ce sens que les pénalités
devraient être de beaucoup plus élevées et que le processus
judiciaire soit plus rapide qu'il ne l'est actuellement? Peut-être que
certaines recommandations pourraient être faites, parce qu'on sait qu'il
y a des infractions commises en 1982 qui vont être entendues à la
fin de 1983. Je considère qu'actuellement on devrait renforcer nos
règlements dans le but de permettre à nos agents de conservation
de faire davantage des causes qui tiennent debout en cour pour que ce soit plus
rapide au point de vue de l'exécution.
Je trouve qu'on se fout un peu de la réglementation parce qu'on
sait qu'on va être traduit en cour dans un an ou un an et demi.
Même s'il y a des saisies de carabines, si le voisin de celui qui
utilisait la carabine en forêt déclare qu'elle lui appartient, la
cour lui remet sa carabine parce qu'elle n'appartenait pas à celui qui a
commis l'infraction. Je considère que, au niveau des infractions, si on
veut réellement tenir compte du fait qu'il y a des choses qu'on veut
interdire en forêt, il faudrait avoir des pénalités en
conséquence. C'est un peu comme brûler un feu rouge. Si cela ne
coûte que 20 $, on prend le risque, mais si cela coûte 500 $, il ne
prendra peut-être plus ce risque.
Dans cette optique, je ne sais pas si vous avez fait des recommandations
pertinentes parce qu'il y a un point, M. le Président, que je voudrais
souligner. Il y a quelques années, on a obligé de garder le fusil
dans son étui quand on chasse la perdrix ou autre chose. Je
considère que ce sont des technicités pour lesquelles on institue
des amendes, pour lesquelles on saisit des fusils et ce n'est sûrement
pas cela qui crée une détérioration de la faune et ce
n'est sûrement pas cela qui crée le plus grand nombre de
problèmes en forêt. Je pense qu'on devrait penser à des
choses plus importantes et, en passant, peut-être augmenter le nombre
d'agents de conservation. Si on a 800 000 chasseurs et pêcheurs pour 500
agents de conservation, je considère que c'est, à toutes fins
utiles, laisser le Québec dans les mains de 500 personnes pour y faire
une certaine surveillance. J'aimerais entendre vos commentaires
là-dessus.
M. Richard: À la page 4, nous avons mentionnné, en
ce qui concerne les amendes: "Les intentions du ministre à ce chapitre
épousent celles du conseil et ce dernier ne peut que l'appuyer..."
C'est-à-dire, d'arriver avec des amendes plus sévères pour
les infractions sérieuses et peut-être moins sévères
pour les infractions techniques. On insiste sur le fait que le conseil insiste
sur l'atténuation des amendes pour les contraventions de nature
technique. C'est assez clair.
Quant aux détails que vous apportez, nous avons
déjà, dans l'analyse de la réglementation, fait des
suggestions assez précises sur un étui plus ou moins fermé
et la présence d'armes à feu chargées ou pas
chargées à l'intérieur d'un véhicule, et ces
choses-là.
Quant aux agents de conservation, autres et auxiliaires, le rapport
entre le nombre d'agents de conservation par rapport à la population et
le nombre de chasseurs au Québec est relativement élevé,
d'une part. D'autre part, nous croyons que les auxiliaires, qui coûtent
beaucoup moins cher dans le contexte des compressions budgétaires
actuelles, devraient être plus utilisés, avec formation et tout
cela. C'est
peut-être là qu'il y aurait des dépenses. C'est un
peu dans la veine de ce que vous dites.
Le Président (M. Paré): D'accord. Je vous
inviterais à conclure, M. le ministre.
M. Chevrette: M. le Président, je partage passablement
l'analyse faite par le député de Hull en ce qui concerne les
technicités en comparaison des vraies offenses. C'est un peu ma
philosophie aussi. Je pense qu'il va falloir, conjointement, l'Opposition et le
gouvernement, rehausser l'amende vis à vis les vraies infractions et les
rendre plus efficaces à court terme. (11 h 15)
Je voudrais remercier également le Conseil de la faune pour son
mémoire. Sans doute qu'on fera appel à vous pour des avis plus
spécifiques; je dois aussi vous dire que je partage votre point de vue
en ce qui regarde les agents auxiliaires. Je pense qu'on pourrait permettre
l'accréditation d'agents auxiliaires dans les pourvoiries, dans les ZEC
et même, dans certaines associations; cela nous permettrait
peut-être d'assurer une plus grande protection à un coût
minime. Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Vincent
et M. Richard. J'inviterais maintenant les représentants des Cerfs
d'Abitibi à prendre place, s'il vous plaît.
M. Poitras, probablement. D'accord, je vous invite à
présenter votre mémoire.
Les Cerfs d'Abitibi
M. Poitras (René): M. le ministre, M. le Président
de la commission, tous les membres de cette assemblée, c'est en
qualité de président-fondateur du groupe Les Cerfs d'Abitibi que
je me présente aujourd'hui devant vous. Cette compagnie a
été créée il y a quelques années dans le
seul but de rendre accessible aux non-chasseurs la venaison de nos
forêts. Ces non-chasseurs le sont souvent pour des raisons de
santé, d'économie ou de temps manquant durant la période
de chasse automnale ou simplement parce qu'ils n'aiment pas chasser. Cette
faune leur appartient aussi et ils ont le droit d'en user.
Une demande officielle a été faite au ministre il y a
quelque temps où il était proposé qu'on puisse
élever des cerfs en enclos restreints pour ensuite en faire l'abattage
et vendre cette viande aux restaurateurs et boucheries autorisés.
Nous proposons des méthodes de contrôle. Le
propriétaire de ces petits enclos aurait à tenir un cahier
où seraient enregistrés les naissances, décès,
achats et ventes de ces bêtes et serait sujet à des
vérifications périodiques et imprévues de la part des
agents de conservation.
L'abattage des bêtes se ferait dans les abattoirs régionaux
déjà en place et les carcasses des cerfs, à l'instar des
autres animaux de boucherie, seraient munies d'un sceau par le ministère
de l'Agriculture. Tous ces contrôles ne nous coûteraient presque
rien, car les fonctionnaires nécessaires à ce travail de
surveillance sont déjà en place.
J'irai cette fois plus loin et je demande au ministre de permettre la
vente d'un animal abattu en forêt durant la période de chasse
autorisée. Cette vente pourrait se faire au moment de l'enregistrement
de la prise devant un officier autorisé dans les postes de
contrôle du ministère, un peu comme cela se fait pour une
automobile.
Seuls les acheteurs munis d'un permis spécial pourraient
être autorisés à faire ces achats. L'animal serait
toutefois débité et muni d'un sceau comme pour la viande
d'élevage.
Je crois que le temps est maintenant venu de faire confiance aux
mécanismes de contrôle onéreux que nous avons mis en place
et de permettre l'essor de petites entreprises innovatrices en ouvrant la porte
à un nouveau genre de commerce, celui de la venaison.
Je vous remercie de votre attention et je suis prêt à
répondre à vos questions.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le ministre.
M. Chevrette: Oui. M. Poitras, concernant l'élevage du
gibier, la question de l'approvisionnement pour partir les élevages se
pose comme telle: Selon vous, où devraient pouvoir s'approvisionner les
nouveaux éleveurs?
M. Poitras: Actuellement, au Québec, il y a
déjà des gens qui élèvent du chevreuil dans... Il y
a des gens qui ont déjà des permis pour élever des
chevreuils au Québec; quelques personnes en ont une couple de centaines,
il y en a en Ontario, il y en a dans d'autres provinces aussi. Ce ne sont pas
nécessairement des cerfs de Virginie, il y a des cerfs
différents, les "fallow deers", ce qu'on appelle le cerf japonais, il y
a toutes sortes d'animaux comme cela.
M. Chevrette: Ils peuvent donc s'approvisionner à partir
de ceux qui font l'élevage présentement.
M. Poitras: Oui.
M. Chevrette: Maintenant, dans le cas du gros gibier abattu en
forêt - vous avez traité de cet aspect - n'y a-t-il pas un danger
très imminent qu'un braconnier abatte plusieurs animaux et les vende par
l'intermédiaire de parents ou d'amis non
chasseurs qui se seraient procuré un permis de chasse?
M. Poitras: C'est possible. Je n'ai pas cerné cette partie
de la question. Le travail que j'ai fait depuis plusieurs années, c'est
surtout pour l'élevage des animaux en enclos.
M. Chevrette: Mais, vous connaissez des gars qui ont l'oeil et la
main rapides et qui pourraient tuer quatre ou cinq orignaux, par exemple...
M. Poitras: Oui, facilement.
M. Chevrette: ... qui font acheter trois ou quatre permis par
trois ou quatre de leurs amis et qui font vendre cela directement... Est-ce que
vous n'auriez pas de mécanisme à nous suggérer pour
contrôler cela?
M. Poitras: La loi actuelle exige deux permis pour tuer un
orignal. En admettant que quelqu'un soit très bon braconnier pendant
trois semaines et qu'il réussisse à en tuer
énormément, cela lui prendrait plusieurs amis, je crois, pour
réussir à trouver deux permis pour chacun de ces animaux et pour
passer devant l'agent de conservation à l'intérieur du nombre de
semaines où est permise la chasse. Je pense que cela lui prendrait pas
mal d'amis et pas mal d'organisation pour arriver à faire assez de
ventes de ces animaux, premièrement, pour s'enrichir et, ensuite, pour
arriver à nuire à la faune.
M. Chevrette: Je vais vous poser une question très
sérieusement.
M. Poitras: Oui.
M. Chevrette: Pensez-vous que c'est compliqué - je veux
abattre le matin à 7 heures - de se trouver un gars et d'acheter deux
permis en l'espace d'une couple d'heures pour sortir ton orignal?
M. Poitras: D'accord, mais il faut le trouver l'orignal. Je dis:
Le gars, il a beau être bon chasseur, dans trois semaines...
M. Chevrette: Après qu'il a été abattu. Les
trois quarts du temps, vous savez fort bien que cela ne se fait pas avant, cela
se fait après, en l'espace d'une heure ou deux.
M. Poitras: Je suis d'accord avec vous que le permis se trouve
après, c'est facile, mais je parle du gars qui doit trouver une
cinquantaine d'orignaux pendant les trois semaines de chasse, ou 100 orignaux.
Il faut que ce soit un maudit bon chasseur.
M. Chevrette: Oui.
M. Poitras: Avant que cela puisse nuire à la faune et
avant qu'il soit notable que cela nuise de façon flagrante...
M. Chevrette: J'ignore pourquoi, vous avez le droit d'avoir vos
raisons personnelles, mais si vous vous êtes présenté
devant nous pour mousser la vente en fonction de l'élevage...
M. Poitras: Oui.
M. Chevrette: Ne pensez-vous pas qu'on encourt des risques
inutiles en l'ouvrant aux animaux sauvages comme tels?
M. Poitras: Je suis d'accord avec vous.
M. Chevrette: Tenez-vous plus à l'un qu'à
l'autre?
M. Poitras: Je tiens surtout à l'élevage en
enclos.
M. Chevrette: Très bien. Dernière question. Votre
proposition de permettre la vente du gibier abattu en forêt vise-t-elle
seulement le gros gibier, qui fait actuellement l'objet d'un enregistrement
obligatoire, ou bien toutes les espèces de gibier, telles que la
perdrix, le canard, l'oie?
M. Poitras: Je visais surtout le gros gibier, justement parce
qu'il faut passer devant un agent de conservation pour enregistrer cet
animal.
M. Chevrette: D'accord.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le
député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. J'aimerais savoir si
vous avez fait des démarches auprès du ministère de
l'Agriculture en ce qui concerne l'inspection de ces bêtes, lorsqu'elles
sont...
M. Poitras: J'ai rencontré les gens du ministère
fédéral de l'Agriculture, au service de l'hygiène des
viandes, et je me suis informé de la façon de procéder
pour obtenir ces permis et des abattoirs qui ont le droit d'émettre les
sceaux d'inspection des viandes. On m'a dit qu'il y avait déjà
des abattoirs un peu partout; par exemple, à l'intérieur de la
province de Québec, soit qu'on ait le permis provincial ou le permis
fédéral. C'étaient déjà des choses en place.
Cela serait très facile, par exemple, si un éleveur décide
de tuer tous ses animaux ou si un éleveur de la région d'Amos, en
Abitibi, où il y a un abattoir avec un permis fédéral, ce
serait facile, une semaine, de dire: D'accord, tu veux sortir ton bétail
de chez vous? On enlève tout le boeuf, on nettoie tout cela et
on prend une semaine pour faire l'abattage des cervidés
seulement. Il n'y aurait pas de complication à ce niveau.
J'ai par la suite contacté les gens des... Je ne connais pas le
terme exact, mais les gens qui se promènent dans les restaurants, par
exemple, et qui vérifient les viandes qui se trouvent là, et tout
cela, il existe déjà des mécanismes en place et la loi est
là. Tu n'as pas le droit d'avoir dans un restaurant de la viande
où le sceau n'est pas appliqué sur les pièces de la
viande.
M. Houde: Je vous remercie, M. Poitras.
Le Président (M. Paré): Merci. M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Je ne vous cache pas,
M. Poitras, que, lorsque j'ai lu dans votre court mémoire que vous
parliez d'élever des cerfs de Virginie en enclos, jusqu'à ce
jour, j'étais en principe d'accord dans la mesure où il y aurait
des contrôles énormes là-dessus. Mais lorsque vous parlez,
par exemple, de la vente d'un animal abattu en forêt, je peux vous dire
une chose tout de suite, c'est que je serai probablement toujours contre cet
aspect de la question.
Vous mentionnez surtout le cerf de Virginie comme pouvant faire partie
d'un élevage en enclos. La question que je désirerais vous poser
est celle-ci: Considérant que le cerf de Virginie est plutôt
difficile d'élevage en enclos - à moins que je me trompe -
pourquoi ne vous dirigez-vous pas plutôt vers le cerf mulet? C'est ma
première question.
Ma deuxième question: Au point no 4, vous proposez d'autoriser la
vente du gibier abattu en forêt. Vous mentionnez que la vente pourrait se
faire au moment de l'enregistrement de la prise devant un officier
autorisé. Pourriez-vous préciser un peu plus cette question? Je
reviendrai avec une troisième question par la suite.
M. Poitras: Le genre de cerf, que ce soit du cerf mulet, que ce
soit du cerf rouge ou du cerf de Virginie, élevé dans un enclos,
je ne pense pas que le ministère puisse nécessairement avoir un
mot bien important à dire là-dessus parce qu'il demeure que si
vous prétendez que le cerf mulet serait plus facile à
élever ou que le cerf de Virginie serait plus difficile, je pense que
cela relève du domaine de l'entreprise privée. Si la personne qui
investit de l'argent pour élever un animal dans l'espoir d'en faire un
profit; si elle prétend avoir les connaissances techniques pour
élever cet animal et que cela rend l'entreprise rentable, une fois
l'animal débité, que ce soit un cerf mulet, un "fallow deer" ou
un autre genre de cerf, je pense que les cerfs se ressemblent pas mai. Ce
serait difficile de contrôler une fois qu'il est débité et
rendu au restaurant de dire quelle sorte de cerf c'est exactement. À mon
avis, cela relève seulement de l'entrepreneur lui-même, de la
personne qui y a investi de l'argent de choisir quelle sorte de cerf serait
plus rentable d'après elle.
M. Chevrette: Non, mais comme gouvernement qui peut autoriser -
juste 30 secondes - on peut favoriser la mise en valeur de notre propre
richesse chez nous avant de penser à l'importation, d'accord?
M. Poitras: Je suis d'accord. M. Chevrette: Merci.
M. Perron: Je faisais justement allusion à la question des
espèces indigènes. C'est pourquoi je vous posais cette question.
Pourquoi des espèces indigènes? On sait que les risques de
braconnage, surtout dans les cas que vous mentionnez, l'abattage en
forêt, et ensuite passer dans un abattoir et vendre cela à une
personne qui a déjà un permis. Cela peut être vendu
à l'encan comme une automobile ou quelque chose comme cela. Les risques
seraient très élevés, en ce qui me concerne, le
braconnage.
La dernière question que je voudrais vous poser. Connaissez-vous
actuellement une province canadienne ou un État américain qui
procède de cette façon, soit par l'élevage en enclos ou
encore, par l'abattage en forêt et la vente par la suite?
M. Poitras: Je pense qu'en Europe, en France, aujourd'hui,
lorsqu'un chasseur abat son gibier, ce dernier appartient automatiquement au
gouvernement; c'est au gouvernement à en faire la vente. Actuellement,
il y a des pays, comme la Nouvelle-Zélande, qui font l'élevage du
cerf. C'est rendu une grosse industrie là-bas. C'est en train de
rivaliser avec l'élevage du mouton. Il semble qu'ils le font avec
beaucoup de succès. Je ne me rappelle pas exactement la sorte de cerf;
je ne le dirai pas sans...
M. Perron: Si je comprends bien, au Canada, il n'y a aucune
province qui a cette pratique, ni aux États-Unis.
M. Poitras: Non. Ni aux États-Unis. M. Perron:
Merci, M. Poitras.
Le Président (M. Paré): Désirez-vous
conclure, M. le ministre?
M. Chevrette: Merci, monsieur, de votre témoignage.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Poitras,
pour votre présentation.
J'inviterais maintenant le groupe STOP à prendre place,
représenté par son président, M. Mallory.
Bonjour, M. Mallory. Je vous inviterais à présenter la
personne qui vous accompagne et à faire la présentation de votre
mémoire.
STOP
M. Mallory (Charles): J'ai avec moi M. Roger de La Durantaye,
responsable en chef de ce dossier. Il va commencer la lecture de notre
mémoire.
M. de La Durantaye (Roger): M. le ministre, MM. les
députés, mesdames et messieurs, notre mémoire exploite
tout particulièrement la problématique des espèces rares
et/ou menacées.
Depuis plus d'une décennie, des groupes populaires formés
de citoyens et de citoyennes militent pour la conservation d'un milieu de vie
viable. Parmi ceux-ci, STOP oeuvre plus particulièrement pour la
protection de l'environnement, pour la rationalisation, l'exploitation et pour
la consommation des ressources naturelles.
En douze ans d'engagement dans la communauté, STOP s'est
intéressée à plusieurs problèmes reliés
directement à la pollution de l'eau et de l'air, au transport urbain et
à l'énergie, pour ne nommer que ceux-là. Voilà
maintenant que la protection des espèces rares et/ou menacées
compte parmi nos sujets prioritaires. Loin d'être une prise de conscience
récente, cette perspective de la conservation de la faune et de la flore
en général a particulièrement atteint une dimension qui
nous apparaît comme critique et ce, surtout chez nous à
Montréal.
Les différentes parties de ce mémoire veulent saisir cette
problématique et proposer une philosophie qui puisse nous conduire vers
un plus grand respect de ces ressources. Nous commencerons avec des
réflexions sur le projet ministériel. Par la suite, il y aura une
présentation de la situation, telle que perçue par notre
cheminement, au sujet des espèces rares et/ou menacées.
Finalement, nous nous interrogerons sur le pourquoi de la conservation et la
relative du quoi conserver. Nous discuterons des dispositions
législatives déjà en vigueur, avant de commenter les
amendements appropriés.
Objet de la loi. L'histoire nous enseigne que le Québec n'a pas
toujours su conserver ses ressources naturelles. Dans les parcs que nous avions
- parc des Laurentides, parc du Mont-Tremblant, parc de la Gaspésie - le
législateur a dû intervenir afin de protéger la faune qui y
habitait. D'où la présente Loi sur la conservation de la faune.
Aucune personne consciente des relations écologiques ne voudrait mettre
en doute cette initiative.
De plus, STOP est heureux de constater cette nouvelle
préoccupation du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche quant à l'importance de l'habitat. Le concept et
l'importance de l'habitat sont des éléments essentiels à
une compréhension de la problématique écologique et du
rôle des êtres humains dans cette dynamique.
Par contre, STOP identifie deux difficultés majeures relatives
à ce projet et qui, dans les faits, se traduisent par des limitations:
le fait qu'il ne touche pas à la flore et que l'approche est trop
économique quant à l'appréciation de ses valeurs. On se
limite, dans cette approche, aux seules espèces par lesquelles on a
trouvé une utilité économique, que ce soit l'attrait de la
peau ou la beauté. On ignore les autres éléments qui, dans
les systèmes écologiques, font que nous sommes reliés les
uns aux autres. Ensemble, nous participons de la vie sur terre.
STOP propose alors que la loi en question soit orientée avec un
mandat plus vaste. Dès lors, elle pourrait être nommée "Loi
de la protection de la faune et de la flore". Cette nouvelle direction
conduirait à la protection des espèces rares et/ou
menacées qui ne sont pas suffisamment protégées à
l'heure qu'il est. Toutes les espèces fauniques et floristiques doivent
donc être protégées avec leur habitat, et non seulement
celles qui sont rentables économiquement.
STOP réclame cette intervention immédiate de
l'Assemblée nationale afin de conserver pour toujours le patrimoine
génétique et naturel du Québec.
Par ailleurs, nous constatons qu'une telle intervention suscitera un
autre problème, toujours lié au premier: la préservation
d'habitats sauvages en milieu urbain. Les aires de protection principales se
trouvent à une certaine distance de la ville, ce qui n'assurera pas la
survivance d'un minimum d'habitats dans les régions
métropolitaines. Elles aussi ont besoin de cet environnement et STOP
suggère alors un amendement à la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme à cette fin.
Présentation de la situation. La polysémie du mot
situation nous conduit à le définir comme étant "cet
ensemble de relations concrètes qui, à un moment donné,
unissent un sujet ou un groupe au milieu dans lequel il doit vivre et agir".
Force est de constater que plusieurs espèces de la faune et de la flore
ne peuvent, pour des raisons que nous aurons à identifier, vivre dans un
milieu qui leur est spécifique. La notion d'habitat nous enseigne qu'une
espèce tant animale que végétale se doit de correspondre
à des conditions d'habitation -milieu géographique, mode
d'organisation -
qui lui sont particulières.
Or, depuis que l'urbanisation a repoussé la forêt, les
champs, la plaine en des lieux bien particuliers, depuis que la technologie est
couplée à un mode d'organisation qui favorise l'exploitation
intense des marais, des tourbières, des forêts ou des lacs,
plusieurs habitats se sont vus transformés à un point tel que
certaines espèces ne s'y sont plus reconnues.
Il ne faudrait pas négliger le fait que l'utilisation de produits
chimiques sous forme d'arrosage, de pesticides, d'engrais ou autres, contribue
à un empoisonnement des espèces dont la survie est actuellement
compromise. D'autres facteurs comme l'escalade, les cueillettes de toutes
sortes, les barrages, les lignes à haute tension ou le drainage de
certains sols, contribuent dans chaque cas à mettre la survie de
certaines espèces en danger.
Ces énumérations non exhaustives veulent simplement
signifier que si nous continuons à nous développer sans le souci
de ce qui nous entoure, nous finirons inéluctablement par faire
périr d'autres espèces animales ou florales. La question qui se
pose en ce moment est: Pourquoi conserver, c'est-à-dire maintenir en bon
état, préserver de l'altération et de la destruction des
espèces qui sont rares et/ou menacées?
Pourquoi conserver des espèces rares et/ou menacées? Avant
de vous livrer nos arguments pour la conservation, il serait à propos de
définir ce que nous entendons par "espèces rares et/ou
menacées". Une petite étude nous a démontré qu'une
douzaine de termes étaient employés par seulement quatre groupes
actifs dans la conservation, pour présenter le vocabulaire relatif
à ce dossier. Voilà que nous avons identifié les adjectifs
"rare" et "menacé" pour désigner les espèces que nous
voulons conserver. Par rare, nous entendons toute espèce appartenant
à la faune et à la flore indigène qui, en raison de ses
caractéristiques biologiques ou parce qu'elle ne se rencontre plus
qu'à la limite de son habitat, ou pour toute autre raison, existe en
petit nombre ou se trouve dans des régions très restreintes du
Québec. Par menacé, nous entendons toute espèce
appartenant à la faune et à la flore indigènes assujettie
à la disparition à plus ou moins long terme, si les facteurs qui
la rendent vulnérable ne sont pas corrigés.
Trois raisons majeures soutiennent le fait que nous devons conserver
intactes ces espèces que nous désignons comme rares et/ou
menacées. Premier argument: le potentiel génétique. La
science écologique nous a bien démontré qu'avant de porter
un jugement sur tout facteur naturel, il fallait interpréter le milieu
en regard de l'union de ses parties au tout. Pris dans cette dynamique, chaque
élément revêt toute son importance. Isolée, elle ne
sera qu'une couleuvre ou qu'un orignal à chasser. L'histoire nous
enseigne que plusieurs espèces animales et florales se sont
éteintes alors que d'autres ont subi un processus d'évolution.
Les processus de cette sélection naturelle et d'évolution nous
sont encore très mal connus. En conséquence, seuls les individus
bien adaptés survivent et se reproduisent. Bob Ingraham, de la
Fédération canadienne de la faune, nous décrit d'une
façon très pertinente l'évolution d'un petit animal qui,
il y a déjà 500 millions d'années, a donné
naissance au cheval que nous connaissons aujourd'hui. Si nous exterminons une
espèce, nous détruisons peut-être la richesse de demain.
Détruire une espèce équivaut aussi à priver
l'organisation naturelle d'une composante indispensable à son
dynamisme.
L'ingérence humaine dans le contrôle et l'exploitation
naturelle a cette répercussion que nous éliminons des
travailleurs actifs dans les cycles naturels tout en privant l'avenir d'une
regénérescence nécessaire. Notre ignorance en ce sujet est
telle que nous ne pouvons prévoir la portée de nos actes.
Voilà que préserver une diversité génétique
peut, d'une façon certaine, assurer l'environnement contre les
bêtises de l'humain.
Deuxième argument: le rapport de l'être à son
environnement. Bien que nous ayons une technologie qui conditionne notre
rapport à la société, il demeure que plusieurs personnes
cherchent à échapper à cette stérilité en
cherchant un milieu qu'ils nomment naturel. À nous de nous demander
pourquoi la ville ne l'est pas. Nous ne pouvons plus faire fi des études
qui prouvent que l'environnement modifie nos comportements et notre
épanouissement. Une ville comme Montréal, qui regroupe la
moitié de la population québécoise, n'a pas vraiment de
lieux où la population puisse observer la faune et la flore, tout en
fuyant le stress de la ville. Ainsi, le libre rapport et tout l'enseignement
qu'une personne peut tirer de l'observation des milieux naturels, de la faune
et de la flore contribuent à son équilibre physique et
psychologique. Priver la personne de ce contact équivaut à une
aliénation évidente. Nous reviendrons un peu plus loin sur ces
aspects.
Troisième argument: la chasse et la pêche sportives. Une
attitude plus pragmatique nous fait constater que ces sports
représentent un revenu non négligeable à l'heure où
l'économie est en crise. Nul doute que les espèces
chassées ne sont pas encore incluses parmi les espèces rares et
menacées. Par contre, avec l'exploitation des richesses minières
et forestières qui ont une incidence inévitable sur la
transformation des habitats, il faut envisager la possibilité que ces
espèces soient, un jour ou l'autre, significativement touchées.
À cette fin,
sachons prendre les mesures qui s'imposent afin que leur statut ne
change. Ces trois points spécifiques nous permettent maintenant
d'identifier avec plus de précision ce qu'il faut conserver. La faune,
la flore et certains habitats retiennent tout particulièrement notre
attention.
La faune. Par faune, nous signifions toute espèce animale
indigène; les espèces introduites et naturalisées seront
considérées au même titre que les espèces
indigènes. Il s'ensuit que toute espèce de ce type qui correspond
de par son état à la description des espèces rares et/ou
menacées devra être conservée.
Par flore, nous signifions toute espèce végétale
vasculaire ou invasculaire, indigène au Québec. Les
espèces introduites et naturalisées seront
considérées au même titre que les espèces
indigènes. Tout comme la faune, la flore qui correspond aux normes des
espèces rares et/ou menacées devra être conservée.
Nous attirons tout particulièrement votre attention sur la flore. Aucune
législation québécoise ne préserve l'ensemble de la
flore en tant que telle. STOP demande que la flore soit
considérée au même titre que la faune dans toute
législation ultérieure les concernant. Les arguments
avancés au point 3.2 sont aussi valables pour la flore.
L'habitat. Par habitat, nous désignons l'environnement
géophysique particulier à la survie d'une espèce. Tout
comme une maison, ce lieu doit contenir toutes les interactions complexes qui
la caractérise. Ainsi, la martre ou le pékan, tous deux sur notre
liste d'espèces rares et/ou menacées, exige une forêt
coniférienne mature et ce, sans altération de l'habitat. Il en
est de même de la fauvette de Kirkland qui est menacée parce que
son habitat, un peuplement de pins gris non mature, est lui aussi
menacé.
Il va sans dire que le lien très étroit entre l'habitat et
l'espèce devra être considéré dans toute sa
complexité. Maintenant, comment, suivant le contexte présent,
peut-on conserver la faune, la flore et l'habitat?
M. Mallory: Les lois actuelles. Il y a plusieurs lois qui
couvrent ce sujet et nous avons déjà identifié des lacunes
au sein de la Loi sur la conservation de la faune. Avant de définir
comment ces lacunes pourraient être comblées, regardons les points
forts de cette loi, ainsi que les autres dispositions législatives en
vigueur.
La Loi sur la conservation de la faune vise surtout à
contrôler la chasse, la pêche et le piégeage des
espèces animales. Le contrôle s'effectue par deux moyens:
premièrement, par le contrôle des activités des chasseurs
et, deuxièmement, par la protection de l'habitat assuré par les
réserves de terre.
Le gouvernement veut apporter des changements à cette loi afin de
mieux contrôler l'habitat des espèces économiquement
valables. Les contrôles des activités de l'homme sont presque
uniquement limités par les règlements de la chasse. Mais la
pratique de loisirs modernes tels que la randonnée, l'escalade et la
cueillette, met aussi des espèces en danger.
Il y a trois sortes de réserves de terre qui relèvent de
cette loi: les réserves fauniques, les zones d'aménagement et de
conservation et les zones d'exploitation contrôlées. Si la
dernière n'est plus qu'un parc de chasse, les deux autres offrent de
meilleures possibilités pour la conservation des espèces
sauvages. Tout en critiquant les limitations de ce projet, STOP constate que
ces deux outils principaux doivent être retenus.
La Loi sur la qualité de l'environnement. Cette loi vise à
protéger l'environnement par un contrôle des actions de l'homme,
surtout face à la limitation de la pollution. Ces règles sont
générales et ne diffèrent pas selon la
particularité d'une espèce qui pourrait être
affectée.
Toutefois, le ministre de l'Environnement est responsable de
l'élaboration d'une politique de protection de l'environnement. Il se
doit de conseiller le gouvernement et ses ministres afin de protéger les
espèces vivantes qui peuvent inclure autant la faune que la flore. Cet
article démontre une certaine confusion qui existe dans la juridiction
du problème, mais il ne représente pas une lacune totale du
pouvoir administratif.
La Loi sur les parcs. Cette loi, qui est de la responsabilité du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, vise à
protéger l'environnement naturel pour la jouissance des
Québécois. Les parcs de conservation assurent prioritairement la
protection permanente des territoires représentatifs des régions
naturelles du Québec et des sites exceptionnels. Le public peut y
accéder à des fins éducatives et
récréatives. Par contre, le public est exclu des petites zones de
préservation extrême identifiées à
l'intérieur de ces parcs.
La Loi sur les réserves écologiques. Cette loi permet
l'établissement des réserves écologiques. Les limitations
de leur usage sont tout à fait semblables aux zones de
préservation extrême dans les parcs, sauf qu'elles sont
gérées par un autre ministère, soit le ministère de
l'Environnement.
En résumé, il y a plusieurs lois qui touchent au
problème. Au niveau de la réserve des terres, il y a toute la
législation en vigueur qu'on peut imaginer. Cette approche se limite
plus ou moins aux terres domaniales. C'est au niveau du contrôle des
activités de l'homme qu'on peut constater une lacune législative.
Seuls la chasse et le
rejet des polluants sont assujettis à la
réglementation.
Quant au problème de la protection de l'habitat en milieu urbain,
on n'y fait presque pas allusion. La Loi sur la qualité de
l'environnement protège le milieu d'une façon
générale, mais ne touche pas spécifiquement à la
protection d'un territoire particulier.
La protection des espèces rares et/ou menacées. La Loi sur
la conservation de la faune semble être le meilleur endroit pour que
puisse s'exercer une responsabilité quant à la protection des
espèces, que l'on désigne par rares et/ou menacées, et
aussi de leur habitat. Cela représentera peut-être une
réorientation de la loi, en effet, une nouvelle mission. (11 h 45)
En termes d'amendement, ce qui est le plus important sera la
nécessité de réglementer certaines activités
humaines qui risquent d'endommager les espèces rares et/ou
menacées ou leur domaine vital. Nous désignons par "vital" la
superficie requise à une espèce pour retrouver tous les
éléments nécessaires à son cycle de vie. Ou encore,
sous un générique plus englobant, nous pouvons parler d'aire
écologique primordiale. Les ravages, couloirs de migration, terrains de
vêlage, aires de nidification, peuplements phytologiques, frayères
sont des exemples de ces aires.
Une autre façon de préserver les animaux et la flore
serait d'émettre une liste officielle, révisée
annuellement par arrêté en conseil, qui recenserait les
espèces rares et/ou menacées. Les espèces de cette liste
seraient automatiquement frappées d'interdit - chasse, cueillette, etc.
- et leurs habitats automatiquement protégés par
règlement. Cette proposition contient une dimension implicite qui se
manifeste dans la recherche. Plusieurs données incomplètes ou
tout simplement manquantes font qu'il s'avère impossible de juger du
statut de certaines espèces. Cette recherche revêt donc un
caractère vital.
À vrai dire, tout commence par l'éducation. Pour que notre
intervention gagne en clarté, nous allons identifier deux principaux
volets, celui de l'adulte et celui de l'enfant. Outre le ministère de
l'Éducation, il vous incombe de diffuser une information qui rende
compte de la situation de la faune et de la flore au Québec. À
l'exemple d'une éducation dynamique, cette pédagogie introduirait
des personnes à la réelle évolution de certains habitats
et des contraintes que les espèces ont à subir.
Rien n'empêche que des programmes subventionnés soient
réalisés par des personnes ou des groupes oeuvrant dans ce
domaine. L'école, les camps de vacances ainsi que les divers mouvements
de conservation et d'animation représentent des lieux
privilégiés. À titre d'exemple, vous pouvez
référer à une expérience d'éducation,
à l'écologie similaire à celle proposée qui eut
lieu au centre d'interprétation écologique Les Palissades
à Saint-Siméon ainsi qu'au camp Minogami au cours de
l'été 1980.
De plus en plus d'adultes découvrent des sites naturels et
pratiquent un sport de plein air. Il va de soi que ce prosélytisme
implique une ignorance et une inexpérience de ces habitats. Toujours par
le biais de personnes ou de groupes qui sont constamment en contact avec ces
gens, vous pouvez les soutenir dans une démarche qui conduirait cette
portion de la population vers un meilleur respect de l'environnement.
La protection de l'habitat sauvage en milieu urbain. Dès que nous
abordons la question de la protection des habitats fauniques et floriques dans
le milieu urbain, STOP constate que ces territoires ne sont pas régis
par les lois qui visent à protéger les espèces en milieu
naturel. Les chambardements que subissent ces habitats incitent les animaux
à se déplacer. Les activités humaines en sont la
principale cause.
Lorsqu'une volonté s'affirme pour protéger une
espèce, les principaux critères qui s'appliquent pour conserver
cette dernière sont la santé de cette population ainsi qu'un
écosystème qui offre le moins d'inconvénients à son
bon développement. Il ne faudrait pas négliger le fait que l'eau
et l'air pollués de la ville et l'omniprésence de l'humain dans
ce territoire particulier n'offrent pas les conditions requises à la
protection des espèces. Il s'ensuit que pour protéger ces
espèces fauniques et floriques, de grands parcs doivent être
désignés à l'extérieur de la zone urbaine ou
métropolitaine. Cette zone se doit d'être grande afin d'offrir un
milieu de vie et de croissance qui soit de qualité.
Lorsque nous examinons la carte du territoire québécois,
nous voyons que les parcs dans la région de Montréal ne sont pas
grands. Le mont Saint-Bruno, le parc Paul-Sauvé ainsi que les îles
de Boucherville en sont des exemples. De plus, les endroits
désignés comme zones de préservation sont si peu
significatifs, c'est-à-dire si petits, que les espèces qui y
vivent sont restreintes à quelques hectares de réelle
préservation. Alors, il faut trouver un moyen afin de protéger un
minimum viable d'habitats sauvages dans ces milieux. Aussi faut-il
reconnaître que la superficie du territoire appartenant à la
couronne dans la région métropolitaine est toujours minime, mais
l'achat n'est pas une solution réaliste. Déjà, nous
trouvons que les municipalités régionales de comté doivent
identifier des territoires présentant un intérêt d'ordre
écologique dans leurs schémas d'aménangement exigé
par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
On peut noter également qu'il y a des
procédures particulières, précisées un peu
plus dans la loi no 55, 1982, à suivre quant aux zones d'inondation.
STOP constate que les éléments les plus critiques et les plus en
danger sont les terrains riverains. Les berges jouent un rôle essentiel
dans la productivité écologique. Par contre, il est
évident que ces terrains sont recherchés par les
aménageurs, l'accès à une rivière étant une
valeur particulière depuis le régime seigneurial.
C'est peut-être une heureuse coïncidence que les inondations,
qui posent un danger non négligeable à la construction des
bâtiments, se porte sur ces mêmes terrains riverains. STOP propose
qu'un régime de contrôle assez restrictif concernant la plaine
inondable soit introduit sous forme d'amendement à la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. Pour nous, les valeurs essentielles
à conserver par ce geste sont écologiques. L'homme vit
intégralement avec la nature, l'écologie et ce qu'il
reconnaît ou qu'il ignore. De plus, nous serons contents de constater que
les maisons ne subiront plus de dommages, donc seront protégées,
et que les coûts de dédommagement découlant des inondations
permettront d'épargner de l'argent. Cela représente une valeur
économique importante. STOP espère que vous trouverez judicieux
d'agir en ce sens.
Tout de même, toutes les valeurs écologiques ne se trouvent
pas sur les rives. Il faut alors aller un peu plus loin. L'article 5,
paragraphe 5 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit être
plus direct en déterminant, peut-être par règlement, les
normes minimales que les MRC doivent rencontrer. Cela peut prendre la forme
d'une superficie minimale de leurs territoires, en pourcentage, qui doit
être identifiée aux fins de la conservation de l'habitat pour la
faune et la flore.
M. le Président, un dernier mot de la part de M. de La
Durantaye.
M. de La Durantaye: En conclusion. Alors, nous vous remercions de
votre attention tout en espérant fortement que les quelques points que
nous avons soulignés seront pris en considération.
Pour STOP, les éléments essentiels demeurent la protection
intégrale des espèces de faune et de flore, rares et/ou
menacées. Comme il le fut démontré, il ne peut se
manifester sans qu'une législation sévère protège
l'habitat. STOP souhaite que l'urgence de cette situation saura être
contrée avec célérité. Merci.
Le Président (M. Bordeleau): Merci, messieurs. La parole
est au ministre.
M. Chevrette: Vous êtes sans doute le cinquième ou
le sixième groupe qui, dans son mémoire, nous invite à
lier les espèces fauniques et floristiques dans toutes les interventions
visant la préservation de certains habitats. Je vais vous avouer que
cela devra se faire en concertation, tout au moins avec les autres
ministères en cause et, en particulier, celui de l'Environnement et
peut-être aussi celui de l'Aménagement, ce dont je vous parlerai
tantôt de toute façon.
Vous soulignez également que notre approche semble vouloir se
limiter à ne considérer que les espèces auxquelles on
trouve une utilité économique. Sans vouloir vous contredire, je
vous ferai remarquer que nous considérons toutes les espèces de
vertébrés du Québec sur un même pied quant au besoin
de protéger leur habitat. Nous avons aussi voulu dire que la protection
des habitats entraîne, directement ou indirectement, des retombées
économiques. C'est peut-être ce qui vous a fait penser qu'on
voulait considérer exclusivement les espèces qui comportaient des
retombées économiques directes.
Dans notre revue des lois actuelles, vous signalez également que
la Loi sur la conservation de la faune peut assurer la protection de certains
habitats via les réserves de terres. Actuellement, cette
possibilité est limitée et c'est pourquoi nous prévoyons
un type d'affectation territoriale dans laquelle la protection de l'habitat de
la faune serait prioritaire à toute intervention.
Vous relevez, je pense très judicieusement, que la Loi sur la
qualité de l'environnement protège le milieu d'une façon
générale, mais ne touche pas spécifiquement la protection
du territoire particulier. Je pense que vous avez entièrement
raison.
Concernant la protection des espèces rares et/ou menacées
et leur habitat, vous dites qu'il s'agit peut-être d'une
réorientation de la Loi sur la conservation de la faune et qu'il vous
semble être le meilleur endroit pour y exercer une responsabilité.
Là-dessus aussi je pense, et c'est avec plaisir que je vous dis qu'il
n'y a pas de doute quant à cette nouvelle mission que le MLCP veut
assumer pleinement.
Je vous rappelle toutefois que nos préoccupations
débordent largement ce cadre des espèces menacées, car
nous voulons protéger tous les habitats essentiels par une
réglementation générale applicable à tous les
intervenants. Au chapitre de l'éducation, je trouve également
votre approche très intéressante puisque je pense que vous
l'abordez d'une façon réaliste. Vous savez pertinemment que ce
n'est pas un seul ministère qui peut transmettre ces notions et ces
valeurs. Vous y voyez un rôle à jouer par les organismes et je
trouve cela très intéressant.
Quant aux zones de préservation près des villes ou en
banlieue, vous avez sans doute raison de considérer que la protection
est minime. Vous nous avez donné des exemples sur lesquels j'aurai
à étudier
personnellement aux audiences publiques des 8, 9 et 10 décembre
prochain quant au mont Saint-Bruno, les îles de Boucherville etc., mais
je peux vous dire qu'on a une loi maintenant qui nous permet d'intervenir,
comme ministère, c'est la Loi sur l'aménagement, la loi no 125,
qui oblige les MRC à se bâtir un schéma
d'aménagement. Je crois qu'en vertu des articles Il et 16 -je les donne
sous réserve - mais je sais que je dois, comme ministre, donner des avis
face à la protection de certains types d'habitats. Je l'ai
déjà fait pour les Iles-de-la-Madeleine et la MRC de l'endroit a
accepté les recommandations du MLCP. J'ose espérer que ce sera
aussi facile dans tous les schémas d'aménagement. Mais nous
avons, à notre ministère, une équipe de
spécialistes qui, sur chacun des schémas d'aménagement,
analysera les endroits névralgiques, stratégiques et l'on ne se
gênera pas pour donner notre point de vue et faire incorporer aux
schémas d'aménagement cette notion de protection des habitats
fauniques. C'est-à-dire on a au moins quelques outils et on a
l'intention de s'en servir le plus adéquatement possible.
J'aurais deux petites questions à vous poser. La première:
Vous dites qu'aucune loi québécoise ne préserve l'ensemble
de la notion de conservation des habitats de la flore et de la faune. Comment
voyez-vous cela? Vous dites qu'il faudra beaucoup d'imagination, mais encore
là, est-ce que vous avez des idées? Est-ce que votre
réflexion est allée plus loin que de vous interroger sur un type
de loi sur des grands principes ou si vous avez des recettes à nous
suggérer?
Le Président (M. Pagé): M. Mallory.
M. Mallory: Nous sommes moins avantagés que vous en ce qui
concerne la rédaction des lois, M. le ministre. En principe, je pense
que c'est votre problème. C'est à nous de critiquer. En essayant
de vous aider dans cette tâche, nous avons mentionné les deux
outils que nous voyons essentiels et qui sont: les réserves de terres et
les limitations sur les actions de l'homme pour qu'on puisse sur certains
terrains, même sur des terrains privés, contrôler l'escalade
en faveur des oiseaux dans la période de nidification ou cette sorte de
choses, alors il y aura une réglementation plus vaste sur ce plan.
Actuellement, selon la loi actuelle, il s'agit d'une réglementation de
la chasse quant aux conditions pour avoir droit de porter des armes à
feu, etc. Il s'agit donc d'élargir les différentes
activités qui doivent être réglementées. C'est un
autre conseil, il est peut-être inadéquat. Mais, comme je l'ai
dit, nous avons peu d'expérience sur la rédaction des lois.
M. Chevrette: Non, mais vous faites le constat qu'il y en a
peut-être trop, qu'il y en a plusieurs en tout cas. Si c'est
peut-être inadéquat dans chacun des cas, est-ce que vous nous
suggérez de faire une seule loi qui engloberait le tout ou une meilleure
coordination entre les lois existantes? Cela m'apparaît ambigu. (12
heures)
M. Mallory: II serait impossible de penser à une seule loi
qui engloberait tout, comme cela, il y aurait une loi qui les inclurait toutes.
Vous avez une législation annuelle de deux cents lois j'imagine. Nous ne
disons pas qu'il faut en avoir une. C'est clair, qu'il faut en avoir plusieurs
qui peuvent toucher à différents aspects, mais chacune doit avoir
un objectif principal touchant un certain aspect. Dans ce sens, nous ne voyons
aucune loi qui cerne effectivement les deux problèmes dont nous avons
discuté. Je veux souligner le point que vous avez mentionné, je
crois, qui est l'essentiel de vos commentaires. Ce qui est important, c'est une
coordination entre les différents ministères impliqués
dans tout le dossier, soit l'Agriculture, les Pêcheries et
l'Alimentation, les Affaires municipales, en plus des ministres de
l'Environnement et de la Chasse et de la Pêche. Le problème
primordial est peut-être d'effectuer une bonne coordination.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Lorsque vous
suggérez de protéger la flore, avez-vous une idée du
territoire qui serait touché par cette mesure?
M. de La Durantaye: Je crois que c'est assez difficile de
répondre, parce qu'en faisant l'inventaire, on a voulu justement
reporter sur une carte les principales espèces floriques. On s'est rendu
compte qu'il y en avait au-delà de 300, qui sont présentement
dénommées comme étant rares ou menacées. Puis, en
raison de la diversité végétale reconnue au Québec,
et parce que ces espèces se retrouvent à différents
endroits, c'est difficile de limiter vraiment une zone. Alors, pour nous, ce
serait plutôt de faire le travail suivant: identifier les principales
zones, qui peuvent être potentiellement parlant préservées,
préservées dans un sens vraiment élargi, et dans
lesquelles on peut retrouver aussi des espèces animales. Alors, à
ce moment-là, on pourrait retrouver un dynamisme interne, comme on dit
là-dedans. Ne pas faire comme actuellement, isoler certaines zones
où on dit: On va avoir une forêt de pins qui est
représentative d'un certain climat québécois; puis, on va
avoir une autre forêt d'épinettes. Essayer de voir dans un milieu
quand même assez vaste,
parce qu'on considère, par habitat, un milieu où on peut
retrouver justement une population florale qui puisse être
représentative.
Il y a une autre dimension à cette question. Si, je prends
l'exemple de l'ail des bois, on cerne le territoire où on peut retrouver
l'ail des bois, puis, à ce moment-là, on rejoint l'Association
des biologistes qui dénonçait justement la cueillette trop forte.
On demande qu'on puisse légiférer dans ce sens pour
peut-être avoir un certain endroit comme celui-là, qui puisse
être interdit justement à la cueillette de cette espèce.
Alors, je crois qu'on peut jouer sur plusieurs pôles dont l'un où
il faudra avoir un habitat beaucoup plus grand, qui engloberait d'ailleurs
beaucoup plus d'espèces. Dans un deuxième lieu, choisir des
endroits comme, par exemple, pour l'ail des bois, où il serait interdit
de faire la cueillette. La même chose pour une certaine espèce de
fougère, d'ailleurs.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Duplessis.
M. Perron: Merci, M. le Président. Votre mémoire,
en tout cas, démontre qu'il y a plusieurs ministères qui
devraient s'impliquer ou qui sont actuellement impliqués dans le cadre
de la protection de l'environnement et des territoires. Cependant, j'aurais une
question à vous poser. Si, dans l'hypothèse où, par
exemple, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pourrait
décréter certains territoires du Québec comme étant
des territoires... Admettons plutôt que le gouvernement
décréterait que certains territoires devraient être
protégés quant à la faune et à la flore. Selon
vous, est-ce que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche devrait avoir juridiction sur ces territoires? Cela pour
empêcher les complications parce que, comme vous le savez, nous, comme
députés -je crois que même les membres de l'Opposition
seront d'accord avec moi là-dessus - on fait face très souvent -
lorsqu'on a certains dossiers qui nous arrivent - à plusieurs
ministères qui s'impliquent dans ces mêmes dossiers. C'est dire
qu'il a dédoublement dans certains cas. Qu'est-ce que vous en pensez? Si
c'était le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
qui prenait cette juridiction sur des territoires donnés, non pas sur
l'ensemble du Québec? Par exemple les réserves, les parcs, les
agrandissements ou d'autres territoires, sous d'autres formes, qui pourraient
être décrétés?
Le Président (M. Paré): M. Mallory.
M. Mallory: Merci. Vous demandez effectivement que nous fassions
le choix entre différents ministères. Pour nous, comme vous avez
reformulé votre question au début, si le gouvernement du
Québec décide de décréter, c'est en effet pour le
citoyen, parce que nous sommes un groupe de citoyens. C'est au gouvernement de
s'organiser. Ce n'est pas au citoyen de s'engager dans le gouvernement.
Évidemment, les citoyens impliqués dans le gouvernement feront
partie de cette décision, mais, si c'est un ministère ou un autre
ou si on doit avoir effectivement un ministère avec toutes les
responsabilités de l'environnement et du loisir, de la chasse et de la
pêche, c'est une question qu'on doit poser au premier ministre quant
à sa conception de l'organisation du gouvernement. Nous sommes d'accord
qu'on ne doit pas avoir un dédoublement inutile de toutes les
activités gouvernementales. Nous demandons qu'il y ait une protection
dans le domaine. On ne répond pas. Je sais...
M. Perron: Personnellement, je suis enclin à penser que,
sur la question de la flore et de la faune, le ministère du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche devrait avoir juridiction sur des territoires
concernés. Plusieurs mémoires ont soulevé les
dédoublements.
À la page 7 de votre mémoire, vous faites allusion aux
opérations forestières et aux opérations minières.
Au deuxième paragraphe, vous mentionnez, et je cite: "Par contre, avec
l'exploitation des richesses minières et forestières qui ont une
incidence inévitable sur la transformation des habitats, il faut
envisager la possibilité que ces espèces soient un jour ou
l'autre significativement touchées. À cette fin - et c'est
là-dessus - sachons prendre les mesures qui s'imposent afin que leur
statut ne change pas." Comme vous le savez, dans les territoires du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, comme dans
certaines réserves et dans certains parcs, il y a effectivement des
opérations forestières qui se font. On sait aussi que ces
opérations forestières, d'ailleurs, comme dans le comté de
Charlevoix, ont beaucoup d'incidence sur l'économie du
Québec.
Vous mentionnez: "Sachons prendre les mesures qui s'imposent." Je
voudrais savoir de quelle façon vous verriez les opérations
forestières se poursuivre, tout en respectant la faune et la flore. On
ne peut pas abolir les opérations forestières pour
protéger uniquement la flore et la faune parce qu'on se ramassera avec
une économie complètement chutée.
M. de La Durantaye: On peut remarquer qu'au Québec il y a
eu plusieurs modes de coupe de bois. Encore récemment, dans l'Estrie, je
crois, on a fait justement certaines expériences, on voulait couper par
bandes. Il s'agit d'observer quelles sont les
meilleurses coupes de bois qui vont être plus respectueuses de
l'environnement. Il ne faut pas faire une coupe à blanc qui
détruit complètement l'habitat, mais en faire une qui peut
respecter l'une et l'autre de ces dimensions. Je pense qu'encore aujourd'hui,
certaines universités font des recherches pour savoir quel serait le
mode de coupe qui pourrait être le plus utile pour la commercialisation
en touchant le moins possible l'environnement naturel.
Pour des raisons strictement écologiques, on est contre la coupe
à blanc, mais on croit qu'il y a peut-être un mode d'exploitation
tel qu'on puisse avoir une exploitation forestière et aussi conserver
certains habitats.
M. Perron: Cela m'amène à une dernière
question. Lorsque vous mentionnez la coupe de bois par bandes, savez-vous
qu'une expérience a été faite sur l'île d'Anticosti,
que l'on appelle dans le jargon la coupe en damier, exactement comme un damier?
On coupe 600 pieds, on laisse 600 pieds et les pointes se rejoignent,
savez-vous cela?
M. Mallory: Nous ne connaissons pas cette expérience
particulière, mais c'est exactement le genre de choses... Je veux
seulement ajouter une chose.
Économiquement, il n'est pas du tout prouvé qu'en
respectant seulement les valeurs économiques, la coupe à blanc
soit le meilleur moyen de couper dans les forêts, et le problème
implique un autre exemple de l'importance de la coordination. Je pense qu'il
n'y a aucune participation du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche du ministère de l'Environnement dans la préparation
des plans de gestion de cinq ans, si on regarde ce qui a été
fait. C'est la sorte de choses qu'il faut éviter à l'avenir.
M. Perron: Merci beaucoup.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, je n'ai pas envie de
résoudre le dilemme dont vient de parler mon collègue de
Duplessis, pas plus que le dilemme dans lequel est pris le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche. Comme il y a quantité de
responsabilités interministérielles qui visent la protection de
la faune sous tous ses aspects, je ne pense pas que nos intervenants soient en
mesure, forcément, de répondre à cette question.
Je voudrais vous féliciter de votre mémoire. Le
problème que je veux soulever, j'aurais pu le soulever, probablement,
devant les biologistes. Je pensais, par contre, que, ce matin, le conseil
consultatif en aurait fait davantage état. Depuis le début de la
commission, on a eu quantité d'exemples que des espèces avaient
diminué considérablement au Québec. On nous a donné
les raisons de la diminution des espèces, on vient de parler des
opérations forestières, minières et autres. On a
également parlé du braconnage éhonté qui se fait
à travers le Québec. Ce matin, j'entendais dire que les
pêcheurs et les chasseurs n'étaient pas responsables. Je ne
partage pas tout à fait l'opinion de mon collègue, parce que je
pense qu'ils sont également partie à la situation, les
pêcheurs ou les chasseurs, pas seulement les braconniers, parce que tout
pêcheur et chasseur est un braconnier en puissance. Il est possible,
également, qu'au moment où le gouvernement a
libéralisé l'ensemble du territoire, on l'ait soumis à une
pression, on le constate aujourd'hui, qui a été peut-être
poussée un peu trop loin. Je ne voudrais pas faire de débats
à ce sujet, mais je pense que c'est une situation connue.
Je voudrais vous donner l'exemple, en dehors de ces raisons qui sont
quand même significatives de la diminution des ressources, d'un autre
sujet dont vous parlez, qui ne regarde pas tellement le ministère du
Loisir, mais qui regarde la ressource dont il a la protection. Je vous
mentionnerai un exemple que j'ai pu suivre moi-même en tant que
résident dans un comté où il y a beaucoup de lacs. Ce sont
deux lacs qui sont - cela va vous amener au coeur du sujet - sur des terrains
privés, deux vastes lacs qui n'ont pas été soumis à
la pression dont on parle par la libéralisation, très bien
protégés, où aucun braconnage ne peut s'effectuer. Il y a
quinze ans, quand on se présentait sur ces lacs où il y a une
pêche plus que modérée, un pêcheur qui sortait des
lacs moins de deux ou trois truites de trois, quatre ou cinq livres faisait
rire de lui. Votre prédécesseur a visité récemment
ces lacs dont je parle. Au cours des années, malgré qu'aucun
braconnage n'ait pu être effectué, qu'aucune coupe de bois n'ait
été faite depuis peut-être trente ou trente-cinq ans,
qu'aucun travail n'ait pu changer l'aspect des lieux et de l'environnement, au
fur et à mesure, on s'est aperçu que la faune aquatique, de ce
qu'elle était à ce moment... Elle a non pas diminué, un
peu, si vous voulez, mais disons qu'en dernier ressort, il y a un an, deux ans,
personne n'a été capable de prendre un poisson qui
dépassait à peu près une livre, personne. Et l'on se pose
la question, comme l'environnement n'a pas été
altéré, à savoir si certaines substances
nécessaires à la survie du poisson ont pu manquer. Je suis de
ceux qui pensent que c'est l'arrosage. Les pluies acides ont tellement
altéré la condition de l'eau un peu partout dans le Québec
que la faune aquatique et la flore sous tous ces aspects en ont pris pour leur
rhume.
(12 h 15)
Je pense que cela, on ne peut pas le nier, parce que l'exemple que je
donne est catégorique. Tout ce que vous espéreriez comme
protection qui soit accordée à un milieu donné, depuis
trente ans, ce milieu l'a, sauf certains arrosages ou certaines pluies acides
qui ont pu l'endommager. Et quand on pose un problème semblable, on se
dit ceci: Est-ce qu'on arrête forcément la survie des usines
à papier, devant la lutte à la tordeuse des bourgeons? Est-ce
que, de la façon que les arrosages sont effectués - je ne suis
pas pilote - certains ministères prennent une précaution en
disant: Devant tel vent dominant, veuillez faire votre navigation
aérienne à tant de distance des lacs ou des rivières
à saumon? Je pense bien que les pluies acides et les arrosages
altèrent la qualité de l'eau de façon telle qu'on arrive
à des exemples semblables.
Je ne sais pas si le ministre, par le biais de ses biologistes, ou
vous-mêmes, pouvez me donner une réponse. Dans quel dilemme est
placé le gouvernement, devant le fait qu'il faut continuer à
laisser vivre nos gens? Je sais que chez nous, j'ai deux usines à
papier. Je veux bien qu'elles vivent parce que c'est l'essence même de ce
qui peut être organisé comme travail chez nous. Comme on a besoin
de la matière, de la ressource faunique sous tous ces aspects, devant
l'industrie touristique qui est importante chez nous, comment faire un juste
milieu là-dedans? Comment tâcher de combattre davantage les pluies
acides sur le territoire? C'est un des aspects de la protection de la faune et
de la flore dont on ne peut parler devant cette commission, mais qui est quand
même une des raisons sur lesquelles on devra se pencher si on veut que
les ressources puissent continuer à exister.
Si vous avez des observations à faire sur l'exemple que j'ai
donné, je pourrai donner le nom des lacs en question, des personnes qui
l'ont déjà visité, au ministère ou ailleurs. C'est
un exemple qui ne peut être démenti en aucune façon, que
j'ai vécu pendant quinze ans, mais qui me laisse perplexe devant la
diminution de la ressource en quantité et en qualité.
M. de La Durantaye: Je tiens à vous féliciter
d'amener le problème parce que c'est quand même rare que des gens
puissent faire des liens entre les différents secteurs de
l'environnement et différents secteurs politiques aussi, pour qu'on
puisse apprendre à traiter les problèmes d'une façon
beaucoup plus polyvalente que sectarisée comme on le fait
habituellement. Je dirais qu'un des caractères des groupes populaires,
c'est d'amener justement cette dimension; par exemple, STOP a comme dossier
très actif la participation populaire aux pluies acides, la
participation politique pour essayer de trouver des moyens de résoudre
le problèmes des pluies acides. On est aussi impliqué en ce qui a
trait aux arrosages. Ce qu'on essaie de faire, c'est de trouver des moyens qui
sont tout de même assez polyvalents, qui sont interreliés pour
contrer ce problème, lequel, dans l'ensemble, dans une dimension
très générale, est un problème politique, un
problème social. Alors, c'est remettre en cause l'articulation sociale
qu'on a présentement et c'est être capable de voir, autant au
niveau des ministères, autant au niveau du gouvernement que de la
population, quel jeu peut intervenir justement dans toute cette dimension. Ce
sont tous des problèmes qui sont interreliés; je crois qu'il est
vrai de dire qu'on ne peut pas faire fi d'une dimension sans considérer
l'autre. Pour le mémoire qu'on présentait ici, on prenait action
au sujet des espèces rares et/ou menacées, mais on aurait pu
faire intervenir les pluies acides pour dire que c'est aussi un secteur
très important, surtout dans le cas des lacs, les taux de mercure qui
montent, les métaux lourds et l'acidification assidue qu'on constate
présentement. En ce sens, tout ce que l'on peut dire, je crois, c'est de
noter qu'il devrait y avoir une meilleure coordination entre les
différents ministères pour que le problème soit
traité d'une façon générale plutôt que
particulière comme cela se fait actuellement.
M. Mallory: Si je peux ajouter ceci, c'est exactement pourquoi
nous avons discuté des autres lois en vigueur. La question des pluies
acides tombe comme forme de pollution sous la Loi sur la qualité de
l'environnement pour autant que les polluants sont émis au
Québec; ils sont pas mal même au Québec, mais il y a aussi
le problème de l'extérieur. Cela devient tout de suite un
problème social de relations extérieures de première
importance. En ce qui a trait aux arrosages, le ministère de
l'Environnement, par le biais du Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement... J'ai remarqué, je ne sais pas s'il est toujours
là, le président du bureau qui est en arrière de la salle.
Les gens étudient actuellement le problème des arrosages par la
mer. Ce sont des exemples très pertinents des problèmes à
caractère environnemental qui peuvent venir à un endroit qui
semble être intouché par les humains. Il est très important
d'avoir cette sorte d'approche globale au problème. Cela souligne
toujours la question de la coordination entre les différents
ministères qui interviennent effectivement sur le problème des
habitats. Cela peut être même des fois comme la mer, c'est un
ministère économique, mais ses interventions et les interventions
des groupes auxquels il s'intéresse, comme les compagnies
forestières, ont un impact très important sur le problème
qui semble être restreint au
début à la question des espèces rares et/ou
menacées. Mais ce n'est pas du tout une petite question.
C'est pourquoi STOP, qui est un groupe de citoyens qui s'occupent de
l'environnement et des problèmes de l'environnement en
général, se présente devant vous. C'est pour apporter
autant que possible une approche large à vos
délibérations.
M. Chevrette: Je tiens à vous remercier beaucoup de votre
mémoire.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Marquette.
M. Dauphin: Merci beaucoup, M. le Président. En mon nom
également, je tiens à vous remercier de votre excellent
mémoire. Comme vous l'avez souligné avec raison dans votre
mémoire, la moitié de la population du Québec habite
l'agglomération montréalaise. Vous êtes sûrement au
courant du projet gouvernemental, le projet Archipel, qui touche tous les
Montréalais et particulièrement quelqu'un comme moi qui
représente Lachine et LaSalle. Cela nous touche très
particulièrement. J'aimerais avoir également l'opinion du
ministre - il n'a été nommé que depuis quelques semaines
relativement aux habitats fauniques - je n'ai évidemment pas les
ressources du gouvernement - entre autres celui des hérons. Apparemment,
les rapides de Lachine constituent non seulement un site historique presque
unique en Amérique du Nord, mais, quant aux habitats fauniques, nous
aurions, dans ce coin-là, d'énormes ressources. Maintenant,
puisque vous oeuvrez autant au niveau de l'environnement qu'au niveau des
loisirs, de la chasse, de la pêche et de la faune, avez-vous une position
bien arrêtée sur...
Une voix: Oui.
M. Dauphin: ... le dossier Archipel, sans qu'on se lance dans un
dilemme...
M. Mallory: STOP est membre d'une coalition de groupes qui
s'intéressent au problème de la gestion de l'eau dans l'archipel
de Montréal, association qui s'appelle l'Association environnement
Archipel. Nous avons participé à la décision et
nous appuyons ses recommandations, en ce sens qu'il doit y avoir un inventaire
de toutes les ressources fauniques et floratiques dans la région et
surtout sur les berges. Toutes les berges doivent être
inventoriées pour identifier les ressources qui y existent. Nous devons
aussi identifier la sorte de réserve qui peut être
appliquée dans chaque cas pour qu'il y ait une certaine proportion de
réserves écologiques, de parcs, d'espaces verts qui ont toujours
une importance dans la protection de l'habitat. Nous sommes heureux de
constater que le ministère de l'Environnement, par la Direction des
réserves écologiques et sites naturels, a lancé une telle
étude aux fins d'identifier les valeurs existantes dans toute la
région de l'archipel. Nous appuyons ce geste et nous attendons
attentivement les résultats de cette étude qui nous viendront
l'année prochaine.
M. Chevrette: Là-dessus également, M. le
Président, je voudrais me permettre de répondre, parce que la
question m'a aussi été adressée. En ce qui concerne les
fonctionnaires de mon ministère, ils ont été très
précis et n'ont pas voulu donner une opinion ferme sur la
faisabilité ou la réalisation du projet sans qu'on ait
complété toutes les études nous démontrant qu'il
n'y a pas d'impact, ou démontrant qu'il y en a, mais on se prononcera,
en tant que ministère, uniquement lorsqu'on aura le résultat des
études finales.
M. Dauphin: Une dernière question, M. le ministre. C'est
parce que, après des conversations avec certains de vos fonctionnaires,
il est question que le ministre ait vraiment un pouvoir d'intervention dans un
éventuel projet de loi.
M. Chevrette: Évidemment, en ce qui regarde les habitats,
si on va vers une loi qui ne donne pas exclusivement des pouvoirs
d'expropriation ou de zonage permanents, je pense qu'on devra avoir une loi qui
donne au ministre les pouvoirs d'une intervention ponctuelle dans certains
secteurs. Je donnais certains types d'intervention ponctuelle qu'on pouvait
avoir. Par exemple, un fort potentiel ou une rareté maximale d'une
espèce menacée pourrait permettre au ministre, dans un projet de
loi, d'intervenir directement à des moments précis dans le temps.
Je pense que ce serait tout à fait normal si on ne veut pas s'aligner
sur un carrelage de la province. On en a beaucoup contre les zonages
très permanents, vous le savez, mais, d'autre part, ayant la
responsabilité d'assurer la conservation, il faudra au moins que j'aie
le pouvoir d'assurer la conservation de certaines espèces et de poser
des gestes dans le temps d'une façon ponctuelle pour différentes
raisons. Cela fera aussi partie du projet de loi. Je ne dis pas que ce sera
facile à régler. Je puis vous dire une chose, en tout cas, c'est
que j'aurai la volonté de l'inclure.
M. Dauphin: Autrement dit, si j'ai bien compris, si jamais les
études démontrent effectivement un impact tout à fait
négatif sur la faune, les habitats, le ministre entend se servir de son
influence pour, je ne dis pas mettre un "stop" à tout le projet,
mais
sensibiliser quand même...
M. Chevrette: C'est évident et, au bout de la course, il
n'y a pas de cachotteries entre vous et moi, il y aura sans doute des formes
d'arbitrage. Si jamais le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
juge que c'est impossible, je maintiendrai mon opinion par rapport aux
responsabilités qui me sont dévolues par la loi de mon propre
ministère et le serment d'office que j'ai fait et c'est le gouvernement
qui tranchera le différend, s'il y a différent, entre des
ministères. Je puis vous dire que j'assumerai mes
responsabilités.
M. Dauphin: On va vous suivre à la lettre, M. le
ministre.
M. Chevrette: Je n'en doute pas, monsieur.
Ajournement jusque vers 14 heures.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous voulez
conclure?
Je voudrais vous remercier, MM. Mallory et de La Durantaye, pour la
présentation de votre mémoire et vous rappeler que nous allons
poursuivre à notre prochaine séance vers 15 heures. Le prochain
groupe sera l'Association des pêcheurs commerciaux de saumon de la
province de Québec. Donc, la commission suspend ses travaux
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise de la séance à 16 h 24)
Le Président (M. Paré): À l'ordre, s'il vous
plaît;
Les travaux de la commission du loisir, de la chasse et de la
pêche reprennent pour entendre les personnes et les organismes en regard
des modifications à apporter à Loi sur la conservation de la
faune. J'inviterais maintenant les représentants de l'Association des
pêcheurs commerciaux de saumon de la province de Québec à
se présenter ici, à l'avant, s'il vous plaît.
M. Chevrette: Avant que vous fassiez les présentations, je
voudrais officialiser une entente conclue entre les deux formations politiques,
à savoir que nous n'arrêterons pas à 18 heures, comme cela
devait être le cas automatiquement, pour reprendre à 20 heures et
filer jusqu'à 22 heures. Nous avons pris l'entente de commencer
immédiatement et d'aller jusqu'à l'épuisement de la liste
des invités. L'Opposition et le gouvernement sont d'accord.
Le Président (M. Paré): D'accord. Les
représentants sont M. Maurice Gagné, président, et Mme
Lucille Gagné, secrétaire. Je voudrais seulement rappeler au
départ qu'on essaiera de limiter les interventions, tel qu'on l'avait
dit, à une heure par mémoire, si possible. Je demanderais
à ceux qui prendront la parole d'essayer de limiter la
présentation à 20 minutes. Alors, allez-y, M. Gagné, s'il
vous plaît, dans la présentation de votre mémoire.
Association des pêcheurs commerciaux de saumon
de la province de Québec
Mme Gagné (Lucille): Je vais le présenter, si vous
n'avez pas d'objection...
Le Président (M. Paré): Absolument pas.
Mme Gagné: M. le ministre, M. le Président et
messieurs les commissaires, nous sommes délégués pour
représenter l'Association des pêcheurs commerciaux de saumon de la
province de Québec. J'ai à mes côtés M. Maurice
Gagné, président de ladite association. Je pense que tout le
monde le connaît assez bien ici.
Je tiens d'abord à vous remercier de l'occasion que vous nous
procurez aujourd'hui de faire entendre le point de vue des pêcheurs
commerciaux de saumon de la province de Québec dans le concert quelque
peu criard de tous ceux qui revendiquent des droits en ce qui touche le roi de
nos eaux. J'aimerais apporter une petite correction en ce qui a trait à
l'introduction du mémoire que je vous ai apporté. On laisse
sous-entendre qu'il s'agit d'une association qui regroupe les pêcheurs
commerciaux de Maria jusqu'à pointe à Fleurant. C'était
vrai au début; maintenant, l'association vise tous les pêcheurs
commerciaux de saumon de la province de Québec. Sur cela, je commence
vraiment mon historique.
L'historique de la situation des pêcheurs commerciaux de saumon de
la province de Québec. Au cours des années 1970, on constata une
diminution dans les stocks de saumon du Québec. On accusa les
pêcheurs commerciaux de saumon d'être responsables de cette baisse.
Le gouvernement fédéral décida donc d'interdire la
pêche commerciale en Gaspésie puisqu'on jugea que ces secteurs
étaient beaucoup plus vulnérables que les autres. Le ban sur la
pêche commerciale devait exister de 1972 à 1976 inclusivement,
soit la période jugée nécessaire pour permettre la
régénération des stocks de cette espèce dans les
rivières.
Maintenant, situons-nous en 1972. Les pêcheurs commerciaux de
saumon ont dû se plier aux exigences des gouvernements et abandonner leur
travail pour une période soit-disant de cinq ans. Cette décision
d'interdire la pêche commerciale du saumon fut prise
unilatéralement puisque, jamais, les pêcheurs ne furent
consultés à ce sujet. Ce
fut une décision qui leur fut imposée.
Seuls les pêcheurs commerciaux de saumon virent leurs droits de
pêche suspendus. Tous les autres ont continué à
pêcher, autant les autochtones que les pêcheurs sportifs. Pourtant,
les pêcheurs commerciaux avaient une fonction très noble et
très importante, soit celle de nourrir le peuple, leur peuple, soit 6
000 000 de personnes.
Dès 1972, on a vu naître un braconnage
éhonté, une augmentation des prises accidentelles et un
marché noir très bien structuré. Il ne pouvait en
être autrement, puisqu'en éliminant les pêcheurs commerciaux
de saumon, on créait par le fait même une pénurie de saumon
frais sur les marchés locaux et une impossibilité de pouvoir se
procurer légalement ledit poisson.
Vous comprendrez certainement que la population gaspésienne n'a
pu accepter de se priver de consommer de ce saumon, puisque celui-ci est
ancré dans nos moeurs et dans notre mode de vie.
Aujourd'hui, en 1982, quels sont les résultats de ce ban? Tous
les spécialistes sont unanimes pour dire que le ban n'a pas eu le
succès escompté; mais, pire encore, qu'il n'avait pas
prévu l'impact que cela aurait quant au braconnage, aux prises
accidentelles, etc. C'est d'ailleurs ce qu'il ressort d'une réunion
tenue à Moncton les 1er, 2 et 3 novembre 1982, assemblée qui
s'appelait North East Atlantic Salmon Workshop, et à laquelle
assistaient de grands spécialistes venus du Canada et des
États-Unis. Ils avouèrent qu'ils ont perdu le contrôle de
la situation et qu'ils assistent impuissants à la disparition des plus
prestigieux de nos poissons. Le ban sur la pêche commerciale fut une
erreur monumentale. Voyons à ce qu'il n'y en ait pas d'autre.
Le journaliste André-A. Bellemare du journal Le Soleil, qui est
ici, je crois, écrivait dans un article, en date du 5 mars 1982 - il y a
une erreur dans les mémoires, c'est écrit le 5 novembre, veuillez
corriger, c'est le 5 mars 1982 - intitulé La pêche commerciale du
saumon doit reprendre, que le ban sur la pêche commerciale n'avait pas
donné le résultat escompté. Pire encore - et je cite
textuellement - on avance dans les milieux spécialisés qu'il y a
eu une plus forte récolte du saumon de l'Atlantique, au cours des
dernières années, qu'avant l'interdiction de la pêche
commerciale du saumon. Un peu plus loin, dans son texte, on peut lire:
Voilà pourquoi, en 1981, l'ancien sous-ministre adjoint, M. Armand
Leblond, pressait le ministre de l'époque, M. Lucien Lessard, de
reprendre, dès 1981, la pêche commerciale du saumon en
précisant que les pêcheurs commerciaux de saumon seraient les
meilleurs agents de conservation de la faune pour combattre le braconnage ainsi
que les prises accidentelles.
En 1971, les pêcheurs commerciaux de saumon ont été
reconnus coupables d'avoir provoqué la diminution des stocks de saumons
géniteurs remontant la rivière.
En 1982, on s'aperçoit que le nombre de saumons géniteurs
dans les rivières n'a pas augmenté et pourtant, pendant cette
période de dix ans, les pêcheurs commerciaux de saumon n'ont pas
pêché. Alors, que s'est-il passé? Pour avoir
été reconnus coupables d'un acte qu'ils n'ont d'ailleurs pas
commis, on leur infligea une sentence de dix ans d'abstention d'exercer leur
fonction, soit celle de nourrir le Québec. Durant cette période
de suspension des activités de pêche commerciale, on a
observé une augmentation de pêche dans les rivières en plus
d'une forte interception des saumons à l'embouchure de celles-ci.
Nous avons des piscicultures naturelles. Aménageons-les de
manière à les préserver. Surveillons-les. Laissons le
saumon y monter afin qu'il puisse s'y reproduire. Le problème consiste
en un manque de géniteurs. Laissons les saumons tranquilles dans leur
endroit de frai, car ceux qui s'y sont rendus sont trop précieux pour
être détruits. Il ne faut pas oublier que seul un faible
pourcentage de saumons remontent les rivières, soit ceux que la nature a
sélectionnés pour la reproduction, et que, lorsqu'ils atteignent
la rivière, trop souvent ils connaissent une fin tragique, soit celle
d'être accrochés au bout d'une ligne. Ce seul geste a pour effet
de détruire irrémédiablement des centaines de saumons.
Cet été, 19 pêcheurs gaspésiens ont
été autorisés à tendre leurs filets pour se
partager un quota de 30 000 livres, soit 1590 livres chacun. Ce saumon vendu
à la coopérative des pêcheurs au prix de 2,50 $ la livre
équivaut à un revenu de 3975 $ par année. C'est leur seul
revenu. Nous nous trouvons donc à un niveau beaucoup plus bas que celui
du seuil de la pauvreté. Ces pêcheurs ont des équipements
de pêche de plusieurs milliers de dollars, certains ont même des
agrès qui valent 50 000 $.
Pour ce qui est de tous les autres qui n'ont pas été
autorisés par le MLCP à tendre leurs filets, leur revenu est pour
la plupart égal à 0 puisqu'ils n'ont pas de revenu provenant de
la pêche parce qu'ils n'ont pas pêché et qu'en plus le MLCP
refuse de leur donner la compensation qu'ils recevaient antérieurement.
Il ne faudrait surtout pas oublier que les pêcheurs commerciaux de saumon
n'ont, pour vivre, que les revenus qu'ils tirent de la pêche.
Attendu que le ban du saumon n'a pas donné les effets
escomptés, mais qu'en plus il n'a eu pour seul effet que de priver les
pêcheurs commerciaux d'exercer leur travail et de les punir
illégalement pour les fautes commises par d'autres;
Attendu que le ban du saumon a eu
pour effet de priver les consommateurs en générai, et la
population gaspésienne plus spécifiquement, de pouvoir se
procurer légalement du saumon;
Attendu que le ban du saumon a eu pour effet d'ouvrir la porte à
un braconnage éhonté de la part des Blancs et des
autochtones;
Attendu que le ban du saumon a eu pour effet de ne permettre que la
pêche en rivière, soit celle qui touche directement au stock de
saumon qui a la tâche capitale de reproduire l'espèce;
Attendu que le ban du saumon a eu pour effet de priver pendant dix
années consécutives les pêcheurs commerciaux de saumon de
l'exercice normal de leur métier et de leur mode de vie;
Attendu que les rivières à saumon sont des sanctuaires de
reproduction de l'espèce, lieux privilégiés qui ne
devraient être dérangés d'aucune façon;
Attendu que ce ne sont pas les pêcheurs commerciaux de saumon qui
sont responsables du peu de géniteurs dans les rivières;
Attendu qu'en vertu du document daté du 1er juin 1972 le MLCP
s'engageait à compenser tous les pêcheurs commerciaux de saumon
qui n'étaient pas autorisés par le MLCP à tendre leurs
filets, et ce, jusqu'à ce que la pêche commerciale soit
rouverte;
En résumé, nos revendications sont les suivantes: Nous
proposons que la pêche commerciale du saumon reprenne dès 1983
pour tous les pêcheurs commerciaux de saumon qui n'ont pas vendu leurs
agrès;
Nous proposons que la pêche commerciale du saumon reprenne
dès 1983, afin de remettre légalement du saumon sur les
marchés locaux et pour faire obstacle au braconnage et aux prises
accidentelles;
Nous proposons que les pêcheurs commerciaux de saumon soient
autorisés à pêcher sans quota, puisque l'effort de
pêche est grandement diminué, environ de 60%, soit le pourcentage
des pêcheurs commerciaux qui ont vendu leurs agrès de
pêche;
Nous proposons que la saison de pêche soit du 15 mai au 15
août, comme avant l'imposition du ban, soit pour donner la chance aux
pêcheurs de choisir pendant cette période leur meilleur temps de
pêche;
Nous proposons que la pêche en rivière soit formellement
interdite, tenant compte du fait que la rivière est le sanctuaire de
reproduction et que le saumon ne remonte la rivière que dans l'unique
but de se reproduire;
Nous proposons que les pêcheurs commerciaux de saumon qui n'ont
pas été autorisés par le MLCP à tendre leurs filets
en 1982 reçoivent la même compensation que par les années
passées et, de plus, qu'elle soit indexée au coût de la
vie;
Nous proposons que les pêcheurs commerciaux de saumon qui ont
été autorisés par le MLCP à tendre leurs filets en
1982, mais qui ont fait un revenu inférieur à la compensation
annuelle qu'ils recevaient antérieurement, soient compensés par
le gouvernement pour la différence.
Vous remerciant du temps que vous m'avez accordé et
espérant avoir pu décrire la situation telle qu'elle est, nous
souhaitons recevoir une réponse positive de votre part. Sur ce, je
cède, la parole au président de la fédération qui
saura sûrement ajouter quelques faits saillants à mon
exposé.
Le Président (M. Paré): Merci. M. Gagné.
M. Gagné (Maurice): Je suis un pêcheur commercial,
mais j'aimerais dire aux membres de la commission que je ne suis pas un
pêcheur commercial comme les autres parce que, pendant les quinze
dernières années pendant lesquelles j'ai pêché
commercialement, je pêchais du saumon vivant pour la reproduction.
C'était pour le gouvernement du Québec, et j'ai été
payé. Je n'ai pas fait cela seulement pour des prunes, c'est vrai, mais
ces quinze années ont été les plus belles années de
ma vie. Et à Moncton, l'autre jour, lorsque les gens de la côte du
Pacifique, du Connecticut et tous ceux qui étaient présents sont
venus me dire que c'étaient les saumons que j'avais mis dans
l'étang de Maria, ces saumons donc, la mère, la grand-mère
et peut-être même l'arrière-grand-mère que j'avais
pris dans mes bras et que j'avais endormis pour pouvoir les manipuler, pour les
mettre dans des "ponteaux" et que nous avions déposés dans
l'étang de Maria. Je pense qu'un homme peut avoir un orgueil
légitime d'entendre cela.
Je suis un malade de la reproduction. Dans l'Est du Canada, nous avons
les dons de la Providence, comme Roméo le disait si bien: "The God
giving privilege", nous avons d'immenses rivières aux eaux limpides et
froides, qui sont vraiment des sanctuaires propices à l'élevage
du saumon. Nous avons les plus beaux pacages au monde qui sont le
détroit de Davis aux alentours du Groenland, la terre de Baffin sous les
glaces du pôle nord, etc. Nous avons aussi le Gulf Stream qui
entraîne, dans sa course continuelle, toutes les richesses des mers du
Sud; il vient les déverser sur les bancs de Terre-Neuve, dans le golfe
Saint-Laurent et dans le détroit de Davis et retourne contourner encore
les mers des Sargasses, frisant les côtes de l'Afrique et ramenant encore
toute cette richesse pour former les pacages les plus abondants du globe.
Le gouvernement fédéral a mis à la disposition de
l'Est du Canada 300 000 000 $ pour reproduire du saumon. Je ne comprends pas
trop pourquoi on ne ne pige pas dedans comme le font, la Nouvelle-
Écosse, le Cap-Breton et Terre-Neuve. Je me pose cette question:
Pourquoi ne pourrait-on pas reproduire du saumon? Si nous avons un manque de
saumon, c'est parce qu'il manque des géniteurs dans les
rivières.
Les pisciculteurs ont une abondance de truite. Ils ne savent pas quoi
faire avec la truite. N'y aurait-il pas moyen d'engager ces spécialistes
qui ont fait un véritable succès de l'élevage de la
truite, pour élever du saumon, afin que tout le monde ait du saumon? Je
crois que je vais terminer sur ces remarques.
Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Paré): Merci. La parole est au
ministre.
M. Chevrette: Oui, M. le Président, j'aurais quelques
petites questions. Une toute première à M. Gagné.
M. Gagné, vous venez de parler d'une somme de 300 000 000 $ de
disponible. Quand cette somme fut-elle annoncée et engagée
formellement?
M. Gagné: Je suis aussi représentant des
pêcheurs commerciaux de la province de Québec aux pêches et
aux océans, au "Salmon Board", cela a été
déclaré là par un officier du fédéral. J'ai
oublié son nom, mais cela serait assez facile de retrouver les traces de
cela.
M. Chevrette: C'est sûrement en ce qui a trait à un
document de travail. On n'a pas eu d'annonce ferme et formelle, ni du
trésor fédéral, ni d'un homologue ou un vis-à-vis
fédéral annonçant qu'il y a 300 000 000 $, que je sache.
Soyez assuré d'une chose, s'ils ont 300 000 000 $ à donner, on va
y aller en courant, je serai le premier en tête.
Cela dit, je voudrais vous poser une question. Vous parlez de la
diminution des stocks de saumon. Selon vous, est-ce que l'interception des
pêcheurs commerciaux de Terre-Neuve et du Groenland y est pour beaucoup
dans la baisse des stocks?
M. Gagné: Oui, tous ceux qui touchent au saumon. Nous, les
pêcheurs commerciaux, on ne peut pas dire qu'on ne prend pas des saumons
qui vont remonter les rivières, même si on est certain qu'ils ne
remontent pas tous les rivières.
M. Chevrette: Est-ce que leur interception a une importance par
rapport au Québec?
M. Gagné: Cela en a certainement, parce qu'ils prennent de
nos saumons. Il faut donner une petite chance aux Terre-Neuviens, même
s'ils nous ont volé le Labrador et que là ils prennent une grande
partie de notre saumon, et ils veulent avoir encore un passage gratuit sur le
Québec. Eux, ils récoltent du saumon, ils sont très bien
organisés à part cela. Il faut aller voir là-bas pour
s'apercevoir qu'ils ont un avantage sur nous.
M. Chevrette: Vous nous demandez d'ouvrir la pêche
commerciale pour 1983. Je vous dis tout de suite que nous projetons d'autoriser
la reprise de la pêche commerciale en 1983, avec un nombre réduit,
cependant, par rapport au ban de 1972. Je voudrais vous demander de m'expliquer
pourquoi vous n'accepteriez pas... Mme Gagné a affirmé qu'il
n'était pas question de fixer de quota. Mme Gagné, dans son
mémoire, a dit qu'elle voulait la reprise des pêches commerciales
en 1983 mais qu'elle ne voulait pas l'établissement d'un quota. Je vous
demande très sérieusement: Ne pensez-vous pas qu'on doive
négocier un certain quota, avec vous-même, avec vos
représentants, votre organisme et votre association?
M. Gagné: Cela fait dix ans qu'on ne pêche pas
certaines catégories, M. le ministre, et, dans certains coins, cela fait
onze ans, et on est tombé à 40% de ce qu'on avait. Il me semble
qu'on a diminué le quota, l'effort de pêche on l'a
diminué.
M. Chevrette: En 1972, il se pêchait 150 000 livres par
année en Gaspésie. Et c'était 150 000 livres exclusivement
par la pêche commerciale. Cette année, en 1982, il s'est pris par
la pêche sportive 80 000 livres; par la pêche commerciale, 30 000
livres; par les autochtones, 30 000 livres, pour un total de 140 000 livres.
Vous dites que les stocks baissent - ce sur quoi je suis d'accord - qu'il y a
interception par Terre-Neuve et le Groenland, et vous nous demandez de rouvrir
la pêche commerciale "at large" et sans quota. Vous ne pensez pas qu'on
pourrait au moins négocier conjointement, le MLCP et votre association,
un certain quota?
M. Gagné: Est-ce que cela donnera, une négociation,
que vous allez payer la différence indexée au coût de la
vie?
M. Chevrette: Je ne commencerai pas à faire la
négociation ici. Je vous demande si vous acceptez le principe au moins
de vous asseoir et d'essayer de négocier. C'est seulement cela que je
veux dire. Si vous me dites que cela ne sert à rien, ne viens pas nous
voir, on ne veut rien savoir d'une négociation, je vais être
obligé de l'imposer unilatéralement. Je vous dis que je suis
déjà disposé, à titre de ministre, à donner
des directives précises, à ce qu'on s'assoie et qu'on
négocie quelque chose de valable. (16 h 45)
M. Gagné: C'est certain qu'on ne fermera pas les portes.
Je pense qu'on est tous prêts à aider. Ce matin, j'ai entendu dire
qu'il n'y aurait plus de pêche dans les embouchures de rivières
à filets maillant. La pêche accidentelle est beaucoup plus
compliquée que ça. Une chose dont je puis vous assurer, c'est que
les agents du gouvernement, même si ce sont de très bons hommes,
ne pourront pas faire le travail d'un pêcheur commercial. Quand on arrive
sur les quais de la Gaspésie et qu'on voit 25 ou 30 saumons, qui ont
été pris la veille dans une rivière, dans une fosse
à saumons, on n'a pas besoin d'être témoins, on le
connaît le saumon, on le voit, parce qu'ils ont des marques quand ils
viennent de la rivière, marques qu'ils n'ont pas dans la mer. On dit au
gars: Dans quelle fosse tu l'as pris? Il va dire: La fosse à Jos. ou
quelque chose comme ça. Lui le sait et nous aussi on le sait, parce
qu'on a toujours manipulé du saumon.
M. Chevrette: Qu'est-ce que vous proposez pour corriger les
pêches accidentelles?
M. Gagné: Nous ne sommes venus vous demander aucune
subvention, on n'en a jamais eu, et ça se perd dans la nuit des temps.
Là, je voudrais changer de discours. Bien là, je l'ai perdu.
Mme Gagné: Qu'est-ce que tu proposes pour combattre les
prises accidentelles?
M. Gagné: C'est la police qu'on va vous fournir
gratuitement, est-ce qu'il y a moyen de négocier cette
affaire-là? Des quotas ou pas de quotas?
M. Chevrette: C'est négociable.
M. Gagné: Je voudrais dire quelques mots sur ça
parce que je l'ai bien en mémoire. Il s'agit des droits acquis. Pour
moi, la pêche au saumon se perd dans la nuit des temps, on a
essayé de trouver qui l'avait commencée. Le plus près
qu'on en est venu, c'est que les Blancs l'avaient otée aux indiens,
parce que les indiens pêchaient dans la rivière même. On
pêchait longtemps avant que le gouvernement ait émis des permis de
tentures, parce qu'on a en mémoire un permis assez vieux - 1860 - et
avant ça, je ne peux pas dire les années, mais la loi que les
pêcheurs avaient, c'était une entente faite entre eux, c'est qu'un
type qui voulait pêcher à un endroit y allait après que la
glace était fondue, ou même quand il y avait encore de la glace,
et il mettait sa bouée. Cela voulait dire qu'il allait pêcher
là cette année là.
Alors, la question des droits acquis, si ça fait 200 ou 300 ans
que des gens font un travail dans un tel endroit, il me semble qu'on ne devrait
plus dire qu'ils n'ont pas de droits acquis. Je pense que ces gens-là
sont utiles à la société parce qu'ils ont
créé eux-mêmes leur propre emploi et ils continuent de
créer leur propre emploi. Parce que les pêcheurs commerciaux, et
je le répète, n'ont jamais eu de subvention. Là on vous
demande de payer les cobayes, comme on pourrait dire - depuis dix ans qu'ils
servent de cobayes, disons que le gouvernement a une petite dette envers eux -
pour l'année dernière, où ils n'ont pas
pêché, comme il est dit dans le rapport, et ceux qui ont
pêché mais qui n'ont pas pêché pour le montant de la
compensation indexée au coût de la vie; il y a dix ans, ce
n'était pas tout à fait les mêmes revenus qu'en 1982 .
M. Chevrette: Mais, en 1972, M. Gagné - on va essayer de
se comprendre et de parler au moins le même langage - c'est le
fédéral qui a arrêté la pêche en
Gaspésie, oui ou non?
M. Gagné: Oui.
M. Chevrette: Parfait. Il a payé ou indemnisé
jusqu'en 1980, oui ou non?
M. Gagné: Oui.
M. Chevrette: En 1981, c'est exclusivement le gouvernement du
Québec, seul, qui a apporté une indemnisation, oui ou non?
M. Gagné: Oui.
M. Chevrette: En 1982, vos dossiers sont à l'étude,
c'est vrai, il n'y a pas eu de paiement. Donc, on parle le même langage.
Parfait, j'aime ça les choses claires. Donc, ce que je vous dis comme
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, c'est que je suis
prêt à m'asseoir avec votre organisme, à négocier la
reprise en 1983, bien sûr, avec un nombre réduit parce que vous
savez qu'il y a eu des négociations de conduites avec un certain nombre
pour le rachat des équipements. Vous savez que cela a été
fait. Il y en a pour qui c'est réglé, c'est bâclé;
pour d'autres, c'est en règlement ou en voie de règlement. Est-ce
que c'est d'accord jusque-là? Donc, on continuera les efforts dans ce
sens. Ce que je vous demande, comme ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, c'est d'être disposé à entamer une
négociation pour la reprise d'une pêche commerciale en
Gaspésie dès 1983, mais en établissant certaines normes,
certains quotas, je pense qu'on se devra de le faire, et en essayant de
trouver, j'espère, une recette -je ne dirai pas la recette miracle parce
que je ne pense pas que cela existe - peut-être avec votre collaboration,
pour éviter les
pêches accidentelles, éviter le marché noir de la
vente du saumon. Nous sommes prêts à faire cette recherche avec
vous. S'il faut asseoir les gens du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation avec ceux du ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, on le fera aussi. Nous sommes
disposés à faire cela. Je vous remercie d'être venus nous
exposer votre cas.
M. Lincoln: M. le Président, je sais que je ne suis pas
intervenant à cette commission, mais j'aurais voulu poser deux ou trois
petites questions.
M. Chevrette: Je suis prêt à accorder mon
consentement.
Le Président (M. Paré): S'il y a consentement, il
n'y a pas de problème, M. le député de Nelligan.
M. Lincoln: Je voudrais expliquer que je ne viens pas ici en
connaissance de cause -ce n'est pas quelque chose que je connais beaucoup
personnellement - mais on m'a confié le dossier des pêches
maritimes parce que, dans notre parti, on considère que ce dossier est
relié en grande partie au commerce extérieur. Votre
député, qui est chef de notre parti, m'a beaucoup parlé de
ce sujet qui l'intéresse parce qu'il est de la Gaspésie. J'aurais
voulu vous poser quelques questions, pour l'information et pour me renseigner.
Des deux côtés, celui de l'Opposition et celui du gouvernement, un
représentant du Parti québcéois et un représentant
du Parti libéral iront à une conférence à Halifax
dans les jours qui suivent, la semaine prochaine. Alors, les informations que
vous me donnerez nous aideront certainement beaucoup d'un côté
comme de l'autre, j'en suis sûr.
Ce que je voulais vous demander a trait au nombre de pêcheurs. Et
vous faites référence à cela dans votre mémoire
à l'article 4, impact économique. Il y avait 107 pêcheurs
en 1968; ensuite, il n'en est resté que 86 d'actifs en 1971,
d'après ce que vous dites ou si c'est...
Mme Gagné: ... je vous suis...
M. Lincoln: ... au no 4, impact économique.
Mme Gagné: Oui, oui.
M. Lincoln: Pouvez-vous me dire si les pêcheurs qui ont
quitté la pêche commerciale au saumon sont allés dans
d'autres secteurs de pêche? Est-ce qu'ils reviendront à la
pêche au saumon, éventuellement? Est-ce qu'ils sont retirés
complètement ou s'ils ont été dans d'autres secteurs de
pêche commerciale?
M. Gagné: Je ne peux pas vous dire le pourcentage de ceux
qui sont restés à la pêche et de ceux qui sont partis.
Comme de raison, quand l'homme est décédé et que la femme
a vendu son équipement, cela arrête là. Mais on en
connaît plusieurs dans notre coin qui ont continué à
prendre du hareng, de la morue et à vivre de la compensation qu'on
recevait.
M. Lincoln: Combien y a-t-il de pêcheurs de saumon qui
restent maintenant en tout, d'après ce que vous savez?
M. Gagné: Moins de 300, si l'on compte de Blanc-Sablon
à Pointe-à-la-Croix.
M. Lincoln: Vous demandez qu'on retire le quota dans votre
mémoire. Je dois dire que - d'accord, ce n'est pas en connaissance de
cause - ayant parlé de cela à certains collègues qui en
connaissent plus, il me semble que ce n'est pas un problème simple
à régler parce que vous avez les pêcheurs sportifs qui
veulent continuer à pêcher et vous avez les pêcheurs
commerciaux qui voudraient ne pas avoir de quota. Je suis tout à fait
d'accord avec le ministre que, dans ces choses, une négociation va
produire un compromis acceptable d'un côté et de l'autre.
Une question hypothétique. Si on retirait le quota, il n'y a plus
de quota, est-ce qu'il n'y aura pas plus de pêcheurs qui vont venir
pêcher? Est-ce que cela va faire une plus grande pêche? Au lieu de
300, vous aurez un nombre qui va s'accroître parce que le quota a
été retiré.
M. Gagné: Je ne crois pas, parce qu'il est difficile
d'avoir un permis de pêche au saumon; je ne pense pas qu'ils en
émettent d'autres, parce que c'est toujours restreint, cette
affaire.
M. Lincoln: Dans votre esprit, ce serait le même groupe qui
a des permis maintenant qui auraient un accès beaucoup plus large
à la pêche au saumon.
M. Gagné: Oui.
M. Chevrette: ... qui ont été achetés, M. le
député, parce qu'il y en a qui ont accepté par voie de
négociation de vendre leur équipement.
M. Gagné: Oui, c'est cela.
M. Chevrette: Selon les chiffres officiels ou à peu
près, il resterait environ 90 ou 91 permis. On est en négociation
avec un certain nombre; si on conclut des ententes avec ce nombre-là,
supposons qu'il
reste une cinquantaine de permis officiels, c'est avec cette
cinquantaine-là, et par le biais de leur association qu'on accepterait
de négocier pour la reprise en 1983.
M. Gagné: Je ne sais pas si M. le député
avait demandé la totalité des pêcheurs de la province de
Québec.
M. Lincoln: Oui, des pêcheurs commerciaux.
M. Gagné: De Blanc-Sablon à pointe à
Fleurant, moins de 300.
Mme Gagné: Moins de 300 au Québec.
M. Chevrette: Vous parlez de la Basse-CÔte-Nord.
M. Lincoln: Non, je parlais en général.
M. Chevrette: Mes chiffres ne sont que pour la
Gaspésie.
M. Gagné: La Gaspésie, il reste 40% de ce qu'on
était en 1971; à peu près cela, grosso modo.
M. Lincoln: Votre association est provinciale, si je comprends
bien.
M. Gagné: Oui.
M. Lincoln: Vous regroupez tout le mouvement. Vous pensez que, si
la pêche était ouverte, le nombre de 300 pêcheurs
n'augmenterait pas sensiblement, à cause de la question des permis. Vous
avez un contrôle par les permis.
M. Gagné: Nous, on n'a jamais demandé d'avoir plus
de permis. Peut-être qu'il y aurait moyen d'ajuster cela, parce qu'on ne
devrait pas être plus de 20 000 sans avoir une tenture à saumon,
pour fournir du saumon sur le marché local. Si on compare Terre-Neuve,
qui a 6600 pêcheurs de saumon, à part ceux qui pêchent entre
cela, à Québec, je crois qu'on n'a pas beaucoup notre part. C'est
une alouette avec un éléphant, pas mal.
Le Président (M. Paré): Avez-vous terminé,
M. le député? La parole est à vous, M. le ministre.
M. Chevrette: M. Gagné, en tout cas, je vous remercie
d'être venu témoigner. J'espère une chose, c'est qu'on
pourra entamer des négociations le plus rapidement possible, parce que
notre idée, c'est de vraiment permettre la pêche commerciale
dès 1983, comme vous le demandez dans votre mémoire. On
espère être capable de s'entendre sur des limites raisonnables, en
essayant d'allier à la fois la pêche sportive et la pêche
commerciale. C'est le rôle qu'a mon ministère, et j'entends bien
essayer de le réussir avec la collaboration de votre association et des
autres ministères concernés. Je vous remercie beaucoup
d'être venus.
Le Président (M. Paré): Merci de la
présentation de votre mémoire.
J'inviterais maintenant les représentants du Syndicat des
pisciculteurs du Québec à venir à la table. Le groupe est
représenté par M. Louis-Philippe Filion, président.
Syndicat des pisciculteurs du Québec
M. Filion (Louis-Philippe): M. le Président, je vous
présente, à ma droite, M. Yvon Nadeau, vice-président du
syndicat, et, à ma gauche, M. Jacques Bonneau, secrétaire du
syndicat.
Le Président (M. Paré): Merci. Je vous inviterais
à faire la présentation de votre mémoire en vous rappelant
d'essayer de le présenter dans 20 minutes, dans la mesure du possible,
s'il vous plaît!
M. Filion (Louis-Philippe): M. le Président, M. le
ministre, mesdames et messieurs, permettez-nous d'abord de féliciter M.
Guy Chevrette de sa nomination au poste de ministre du Loisir, de la Chasse et
de la Pêche. Nous lui assurons notre plus franche collaboration dans les
domaines relevant de sa juridiction. Nous tenons également à
souligner l'esprit de collaboration et de consultation de la Direction
générale de la faune, particulièrement du service des
piscicultures avec lequel nous entretenons des rapports très cordiaux,
malgré que nos opinions divergent sur certains points particuliers.
Les représentations faites aujourd'hui par le Syndicat des
pisciculteurs le sont pour et au nom de tous les détenteurs de permis de
pisciculture de catégorie 1, c'est-à-dire les piscicultures
commerciales. Déjà, un organisme gouvernemental, soit la
Régie des marchés agricoles du Québec, reconnaît le
Syndicat des pisciculteurs du Québec comme le seul porte-parole des
pisciculteurs commerciaux. Cette accréditation fut accordée
à la suite d'une demande d'approbation du plan conjoint et à
laquelle les pisciculteurs ont donné leur appui à plus de
82%.
M. le Président, en passant, dans la mise en application du plan
conjoint qui est en vigueur depuis l'automne 1981, il y a des problèmes
qui nous empêchent d'aller plus loin actuellement - et on va en parler
tout à l'heure - c'est principalement la question des permis, parce que
les pisciculteurs actuellement doivent se diviser en quatre
catégories, soit deux d'incubation pour l'ensemencement des
truites de table, et les étangs de pêche. Donc, plus loin au cours
du mémoire, on va vous parler, si vous voulez, des problèmes
causés principalement par le chevauchement de certaines juridictions du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche.
Notre présentation comportera deux volets distincts.
Premièrement, nous procéderons à la communication du
mémoire déjà déposé à cette
commission pour ensuite terminer par des commentaires concernant la
problématique de la commercialisation de la truite mouchetée
d'élevage. (17 heures)
Mémoire déjà communiqué. Le Syndicat des
pisciculteurs est heureux de profiter de l'occasion qui lui est offerte pour
faire part aux membres de la présente commission parlementaire et au
gouvernement du Québec des modifications qu'il désire voir
apporter à la Loi sur la conservation de la faune, à la
réglementation qui l'accompagne ainsi qu'aux rôles respectifs du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en
ce qui a trait aux pisciculteurs. L'industrie piscicole étant assujettie
à d'autres lois, vous nous permettrez également de formuler
certaines observations que nous jugeons opportunes relativement à ces
lois.
Pour mieux situer les problèmes actuels des pisciculteurs du
Québec, nous avons choisi tout d'abord d'effectuer un bref exposé
sur l'évolution de l'industrie piscicole. Nous aborderons ensuite
successivement les principaux problèmes auxquels doivent faire face les
pisciculteurs, soit la vente de la truite mouchetée d'élevage
pour fins de consommation, l'émission des permis de production et les
solutions que nous envisageons.
Évolution de l'industrie piscicole. C'est au gouvernement du
Québec que revient l'introduction de la pisciculture dans cette
province. Cette activité avait alors comme finalité de fournir
les produits nécessaires au repeuplement des eaux publiques et
privées pour soutenir la pêche sportive. C'est surtout à
partir de 1966 que l'industrie piscicole commence à diversifier sa
production lorsque, par décret, le gouvernement autorise les
pisciculteurs à vendre la truite arc-en-ciel pour la consommation. Peu
à peu, des investisseurs privés s'intéressèrent
à cette production et le gouvernement mit en place la législation
et les règlements nécessaires pour contrôler cette
activité qui avait alors, nous le répétons, une
finalité essentiellement reliée à la gestion de la faune.
La Loi sur la conservation de la faune, dans sa forme actuelle, est
adoptée en 1969 et le règlement relatif à la vente de
certains poissons entre en vigueur en 1973.
À la suite de l'évolution de la pisciculture et son
orientation vers des activités de plus en plus commerciales, le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui a
juridiction sur les piscicultures à la fois en vertu de la Loi sur la
conservation de la faune et du règlement de pêche du Québec
adopté en vertu de la Loi fédérale sur les
pêcheries, signé en 1977, avec le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, un
protocole d'entente répartissant entre eux les responsabilités
relatives à la pisciculture. Le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation devient alors responsable, dans le cas des
piscicultures privées, de tous les aspects de production,
d'élevage, de financement et d'assistance technique de même que de
la commercialisation pour fins de consommation et du contrôle sanitaire.
De son côté, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche demeure responsable, en ce qui concerne les piscicultures
privées, de l'émission des permis de pisciculture, des
autorisations de vente, de transport, d'ensemencement, d'exportation et
d'importation, des certificats sur la santé des poissons, des
activités qui ont un impact sur la faune du milieu naturel, de la
détermination et de l'application des normes de qualité des
stocks de poissons destinés au repeuplement et à l'importation.
Ce ministère demeure également responsable de l'application du
règlement sur la santé des poissons ainsi que de la certification
des piscicultures privées dont la production, en tout ou en partie, est
destinée au repeuplement.
L'opération gestion de la faune et l'assouplissement de la
réglementation relative aux étangs de pêche devaient
modifier encore plus profondément la finalité de l'industrie
piscicole, l'opération gestion de la faune faisant chuter de
façon dramatique le marché des produits d'ensemencement et les
étangs de pêche devenant un moyen important d'écouler la
production.
Par ailleurs, au moyen de deux décrets en date du 2 mai 1979, le
gouvernement du Québec faisait du produit de la pisciculture
destiné à la commercialisation un produit agricole au sens de la
Loi sur la mise en marché des produits agricoles, reconnaissant ainsi la
réorientation de la pisciculture vers l'agro-alimentaire. À la
suite de ces décrets, les pisciculteurs eurent à se prononcer,
à l'automne 1981, sur un projet de plan conjoint élaboré
par le syndicat. Ce projet de plan conjoint fut adopté
conformément aux modalités prévues à la Loi sur la
mise en marché des produits agricoles, sous la supervision de la
Régie des marchés agricoles du Québec et est en vigueur
depuis le 2 décembre 1981, date de sa publication dans la Gazette
officielle du Québec.
C'est toute cette suite d'événements qui a fait que,
maintenant, l'industrie piscicole est beaucoup plus associée à la
chaîne agro-alimentaire qu'aux activités reliées à
la gestion de la faune et qu'une révision des lois et règlements
touchant la pisciculture est nécessaire pour consacrer ces changements
d'orientation. C'est donc dans cet esprit que nous vous soumettons les
observations qui suivent.
La vente de la truite mouchetée d'élevage pour la
consommation. La vente de la truite mouchetée d'élevage pour la
consommation a soulevé des débats très émotifs
surtout auprès des chroniqueurs de la vie au grand air.
Récemment, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche exprimait, dans un document de consultation, son intention de
légaliser la vente de cette espèce de poisson pour la
consommation. Les consultations auprès des organismes traditionnellement
opposés à cette législation n'ont rien apporté de
nouveau sinon de confirmer l'aspect essentiellement émotif et
irrationnel du débat.
Sur cette question, le syndicat est d'avis que le problème
fondamental réside dans l'impossibilité de différencier
morphologiquement la truite mouchetée indigène de la truite
mouchetée provenant de lignées domestiques. Le syndicat a
déjà fait savoir aux autorités gouvernementales, et il le
réaffirme aujourd'hui, qu'il ne s'oppose aucunement à ce qu'un
règlement impose l'identification de la truite mouchetée
provenant de l'élevage pour ainsi la différencier de la truite
indigène. Il faudrait cependant que le mode d'identification soit
suffisamment souple et peu dispendieux, car c'est un coût qui sera
assumé intégralement par les consommateurs.
D'autre part, l'adoption du plan conjoint de mise en marché par
les pisciculteurs signifie que le syndicat a désormais le pouvoir
d'organiser la mise en marché des produits piscicoles,
c'est-à-dire du poisson et des oeufs de poisson produits à des
fins commerciales. Le syndicat tient à souligner qu'il entend utiliser
tous les pouvoirs qui sont à sa disposition par l'entremise de la Loi
sur la mise en marché des produits agricoles et de son plan conjoint.
Dans cette optique, nous croyons fermement que les activités de mise en
marché des produits piscicoles visés par le plan conjoint ne
devraient plus être soumises à l'autorisation du ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, ni être sujettes à
la Loi sur la conservation de la faune.
Le problème de la vente de la truite mouchetée
d'élevage pour fins de consommation constitue un des principaux
problèmes résultant de l'actuel chevauchement de juridiction
entre le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et le
ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. L'article 1 du règlement
relatif à la vente de certains poissons, conformément à la
Loi sur la conservation de la faune, interdit actuellement de vendre, d'offrir
ou d'exposer en vente, d'acheter ou de faire le commerce à l'état
mort de plusieurs poissons dont la truite mouchetée. L'article 3 dudit
règlement est au même effet en ce qui concerne la truite
mouchetée vendue à l'état vivant.
Étant donné la réorganisation de la pisciculture
vers l'industrie agro-alimentaire, il nous apparaît évident que ce
règlement est maintenant totalement inadéquat et ne tient pas
compte de la réalité. Étant donné que la Loi sur la
conservation de la faune a essentiellement pour but de protéger les
espèces animales sauvages, c'est-à-dire dont la reproduction se
fait en pleine nature, il serait logique que les poissons élevés
dans les piscicultures pour fins de consommation ne soient plus visés
par cette loi, puisqu'il ne s'agit plus d'espèces sauvages mais
plutôt d'espèces domestiques.
En conséquence, le syndicat demande que les articles 1 et 3 du
règlement relatif à la vente de certains poissons soient
modifiés de façon à soustraire la truite mouchetée
domestique de l'application de ces articles et informe la commission qu'un
règlement portant sur l'identification de la truite mouchetée
d'élevage pour la consommation a été adopté par le
syndicat en vertu du plan conjoint qu'elle administre et que ce
règlement a été déposé à la
Régie des marchés agricoles du Québec pour
approbation.
L'émission des permis. Un autre problème important
résultant de la juridiction concurrente en matière de
pisciculture est celui de l'émission des permis. Actuellement,
l'émission de permis pour faire l'élevage du poisson est
obligatoire en vertu de la Loi sur les pêcheries, d'origine
fédérale, et du règlement de pêche du Québec
adopté en vertu de cette loi.
À l'article 2 du règlement de pêche du
Québec, on définit le mot ministre comme signifiant le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en ce qui a trait
à la pêche commerciale dans les eaux à marée,
à l'exception du saumon Atlantique Anadrome, et le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, en ce qui a trait aux pêches
commerciales et sportives du saumon Atlantique Anadrome, et aux pêches
autres que la pêche commerciale dans les eaux à marée.
Cela signifie donc qu'en ce qui concerne les activités
reliées à la pisciculture, c'est au ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche que le règlement de pêche du
Québec confie la juridiction. Les articles 28 (1) à 17 dudit
règlement établissent entre autres que nul ne peut exploiter un
établissement de pisciculture
sans détenir un permis d'exploitation émis annuellement
par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui est
chargé de l'administration, de l'application de ces articles. D'autre
part, l'article 42 de la Loi sur la conservation de la faune établit
également que nul ne peut exploiter un établissement piscicole
s'il ne détient un permis délivré à cette fin par
le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui a
juridiction pour l'application de cette loi.
L'adoption d'un plan conjoint de mise en marché et les
consultations effectuées auprès de tous les producteurs ont
permis d'établir un consensus très fort suivant lequel les
pisciculteurs exigent que le contrôle de l'émission des permis de
production soit désormais sous la responsabilité du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
par le biais de la Régie des marchés agricoles du Québec.
La principale raison soutenant cette exigence est que le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne peut exercer quelque forme de
contingentement de permis que ce soit alors que la Régie des
marchés agricoles du Québec peut le faire en vertu des pouvoirs
qui lui sont conférés par la Loi sur la mise en marché des
produits agricoles. Il nous semble également évident que la
juridiction du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche en
ce qui concerne les piscicultures privées est maintenant anachronique,
compte tenu de l'évolution des activités piscicoles vers
l'agro-alimentaire.
Le syndicat demande donc au gouvernement du Québec, dans un
premier temps, d'amender l'article 42 de la Loi sur la conservation de la faune
de façon que les établissements piscicoles privés ne
soient plus soumis à l'obligation d'obtenir un permis du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et que la
juridiction relative à ces permis soit transférée au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation par
le biais de la Régie des marchés agricoles du Québec. Dans
un deuxième temps, pour qu'il y ait concordance entre la Loi sur les
pêcheries et la Loi sur la conservation de la faune, le syndicat demande
également au gouvernement du Québec de faire les démarches
nécessaires pour obtenir du gouvernement fédéral que soit
modifié l'article 2 du règlement de la pêche du
Québec, de façon que le ministre chargé de l'application
du règlement dans le cas des piscicultures soit désormais le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Une première conclusion avant l'autre document: L'industrie
piscicole est à la croisée des chemins. Ici on continue sur le
document qui vous a été distribué tout à
l'heure.
L'argument principal utilisé par certains chroniqueurs de plein
air qui s'opposent à la commercialisation de la truite mouchetée
d'élevage est une augmentation possible du braconnage. Ces journalistes
ont, à notre avis, complètement tort pour de multiples raisons
dont les suivantes: Premièrement, plusieurs personnes responsables de la
protection de la faune dans d'autres provinces et aux États-Unis
où ce poisson est commercialisé pour la consommation ont
été consultées. Voir les documents annexés
provenant de l'Ontario, des Maritimes et de l'État du Maine. Ainsi, avec
le document qui vient de vous être présenté, vous avez un
document venant de la province de l'Ontario, où il y a la
légalisation de la truite mouchetée de l'élevage, et on va
vous dire ce que l'on pense du braconnage. Vous avez un document des
Pêches et Océans du Canada concernant les provinces maritimes;
avec ce document, vous avez de la législation s'y rapportant. Même
en sortant du Canada, vous avez les documents concernant justement le Maine,
nos voisins du Sud, aux États-Unis, où il y a la
légalisation; ils vous parlent de ce qu'ils pensent du braconnage,
enfin, vous avez des textes de législation, des documents de
l'État du Maine.
Donc, cela veut dire qu'actuellement, en dehors du Québec, juste
en ce qui fait le tour du Québec, c'est possible, la truite
mouchetée d'élevage est légalisée.
M. le Président, il y a quelque chose qui est un peu choquant et
qui, à notre avis, nous semble un peu irrationnel dans tout cela; vous
avez ici un type qui a une très bonne réputation pour produire de
la truite fumée et, pour répondre à des clients du
Québec qui veulent avoir de la truite fumée et pour que cela soit
légal, cette personne est obligée d'acheter sur le marché
du Québec de la truite mouchetée pêchée dans les
provinces maritimes qui se vend légalement au Québec; elle peut
la fumer et elle peut la vendre. Mais le même pisciculteur ne peut pas
prendre sa propre truite mouchetée, la faire fumer et la vendre
légalement. Dans les trois provinces qui nous entourent où la
légalisation de la truite mouchetée d'élevage existe, la
commercialisation se fait aux environs de la province. Les documents vous ont
été produits. M. Nadeau dit que c'est à nos portes. (17 h
15)
Deuxièmement, en commercialisant la truite mouchetée, le
braconnage diminuera, car le consommateur pourra obtenir un produit frais, de
taille uniforme, de coloration saumonée, à chair ferme et
disponible douze mois par année.
Troisièmement, les truites vendues par les pisciculteurs seront
moins chères que celles vendues par les braconniers. Ces pêcheurs
illégaux se décourageront presque tous face à cette
nouvelle concurrence
venant des pisciculteurs, car il leur sera à peu près
impassible d'écouler leurs produits dont le commerce ne s'avérera
plus rentable. Pourquoi acquérir au prix de 5 $ à 10 $ la livre
des truites que les pisciculteurs offriront en vente à 3 $ ou 3,50 $ la
livre?
Quatrièmement, la qualité du poisson vendue par les
braconniers laisse souvent à désirer, à la suite d'un
séjour dans l'auto trop longtemps après la mort du poisson,
marques laissées par des filets maillants, chair molle à
goût discutable alors que, capturés dans les frayères, ce
sont des poissons de toutes les tailles, etc.
M. le Président, les mêmes arguments négatifs ont
également été mis de l'avant il y a quelques années
pour que soit interdite la capture à la ligne de la truite
mouchetée d'élevage dans les étangs de pêche. C'est
exactement la même chose qui revient et à laquelle on a eu
à faire face il y a quelques années. L'expérience a
prouvé - parce qu'à un moment donné, nous avons eu la
permission de le faire - que ces arguments étaient sans fondement et les
craintes non justifiées. Au contraire, la pêche en étang
contribue à soulager la pression de pêche de la truite
mouchetée indigène.
La commission serait sans doute intéressée à
prendre connaissance d'un document traitant de la commercialisation de la
truite mouchetée d'élevage élaboré par le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Ce document a
été transmis à quelques organismes pour consultation en
mai dernier et il résume très bien la situation. Je crois que
vous avez ce document, messieurs de la commission, document qui a
été transmis à différents organismes, qui a
été très bien fait et qui donne une très bonne
idée. Ce document faisait lui-même suite à d'autres
documents, dont l'un qui avait été préparé par MM.
Serge Gonthier et Yvan Turgeon et transmis à M. Luc Samson, le 17
décembre 1981. Il y avait aussi d'autres documents dans le même
genre dont un autre préparé par M. Yvan Turgeon, biologiste du
MLCP, et M. Pierre Landry, biologiste-agronome du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec,
concernant la légalisation de la commercialisation de la truite
mouchetée d'élevage.
Pour finir de rassurer les personnes qui doutent de l'efficacité
des mesures de contrôle et qui pourraient appréhender la
complicité de quelques pisciculteurs avec des braconniers, le Syndicat
des pisciculteurs a déjà le mandat d'une de ses assemblées
générales de faire en sorte que la réglementation relative
à l'émission de permis contienne une disposition afin de faire
révoquer le permis d'un pisciculteur qui se serait rendu coupable de la
vente de truite mouchetée indigène. L'intérêt
même des pisciculteurs fera que l'État québécois
aura à sa disposition plus de 400 agents bénévoles de la
conservation de la faune.
Une autre objection à la commercialisation de la truite
mouchetée d'élevage tient à ce que le prestige de
l'espèce indigène aurait à souffrir de la grande
disponibilité du produit provenant de l'élevage. Certains ont
même avancé que les pourvoyeurs pourraient voir leur chiffre
d'affaires baisser par suite des possibilités de se procurer ce poisson
à l'épicerie du coin. Nous affirmons qu'il s'agit là d'un
faux problème car le véritable but de la pêche sportive
consiste beaucoup plus à se mesurer à un adversaire dont la
finesse et la ruse sont reconnues qu'à emplir le panier de pêche.
Les pêcheurs sportifs ne représentent pas plus de 20% de la
population du Québec et bien des personnes qui ne peuvent se rendre en
forêt pour toutes sortes de raisons pourraient bénéficier
de ce produit s'il était disponible.
Un autre fait qu'on peut vous rapporter est que nous-mêmes, les
pisciculteurs...
Le Président (M. Paré): M. Filion, est-ce que je
peux vous demander d'essayer de conclure assez rapidement parce que le temps
qui était alloué est un peu dépassé? Alors, vous
pouvez continuer, mais essayez de conclure rapidement.
M. Filion (Louis-Philippe): L'identification de l'origine de la
truite mouchetée d'élevage constitue la garantie que le poisson
vendu ne provient pas d'un réseau de braconnage. Le règlement
d'identification élaboré par le syndicat respecte en tous points
les modes de contrôle de la vente de l'omble de fontaine d'élevage
prônés dans le document de consultation, dont on a parlé,
du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, publié
en avril 1982.
La future Loi sur la conservation de la faune pourrait renfermer des
dispositions qui seraient qu'une truite mouchetée ne se conformant pas
aux exigences du règlement serait une truite braconnée, avec les
conséquences que cela impose.
En raison de la qualité des produits de l'élevage
piscicole québécois, plusieurs dégustations ont
été effectuées tant au Canada qu'au États-Unis et
ont démontré qu'il existe des possibilités réelles
d'exportation, principalement en truites fumées. Le produit ainsi
exporté doit provenir d'un atelier détenant un permis et sous
l'inspection de Pêches et Océans Canada. Dans le même ordre
d'idées, les ventes en gros dans le réseau intraprovincial
devront être effectuées par des ateliers détenant un permis
et sous l'inspection du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation du Québec. Nous croyons donc que l'obligation de
détenir un permis et
d'être soumis à l'inspection sanitaire est de nature
à rassurer ceux qui peuvent encore avoir quelques inquiétudes
à ce sujet.
Maintenant, je puis vous dire que nous avons reçu une suggestion,
justement de M. Bellemare, selon laquelle la truite fumée
d'élevage au Québec pourrait se vendre sous l'appelation de
truite du Québec, tout simplement. Cela simplifierait certains
problèmes de la faune ou du moins il y aurait moins
d'appréhensions de ce côté-là. Je puis vous dire que
j'en ai causé avec mes confrères et que nous acceptons cette
très belle suggestion. Nous sommes prêts à l'étudier
et à la mettre en application, parce que nous nous dirigeons vers une
marque de commerce qui pourrait très bien être
celle-là.
Le syndicat a mené une campagne de sensibilisation à
l'objectif de commercialisation de la truite mouchetée d'élevage
en 1980. Un grand nombre d'organismes publics et d'associations ont
donné leur appui à la démarche des pisciculteurs, dont
l'Union des producteurs agricoles, plusieurs chambres de commerce, plusieurs
conseils municipaux et conseils économiques.
S'il plaît à votre commission de prendre connaissance de
ces documents, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
pourra sans doute vous les fournir. Cette même année, 1980, au
Salon de l'agriculture et de l'alimentation de Montréal, une
pétition a été signée par plus de 2000
Québécois appuyant la demarche relative à la
légalisation de la vente de la truite mouchetée d'élevage.
Cette pétition fut également transmise au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
D'ailleurs, on sait que c'est une truite de qualité. La meilleure
preuve nous vient des gens de la faune parce que, souvent, lorsque la
pêche n'a pas été à la hauteur des talents
démontrés, ils arrêtent aux piscicultures pour
compléter. Nous sommes heureux de les voir et de les revoir.
M. Chevrette: Ne vous embarquez pas là-dessus, il y en a
pour qui ce sont d'autres raisons.
M. Filion (Louis-Philippe): Plus récemment, une lettre de
la Corporation professionnelle des diététistes du Québec,
dont copie est annexée au présent mémoire, donnait l'appui
de ses professionnels de la santé à la démarche du
syndicat visant à rendre disponible à l'ensemble des
Québécois un aliment de très haute valeur nutritive. Parce
que mon temps est avancé, je ne la lirai pas, mais vous l'avez au
dossier et elle est très explicative.
On a dû distribuer des petits modèles de truites. C'est
justement ça, M. le ministre, que les Holiday Inn ont sur leurs tables
et c'est bien annoncé comme de la truite fraîche. À titre
de renseignement, après enquête, il s'agit de la truite
congelée venant de l'Idaho. Je pense qu'on pourrait leur fournir de la
bonne truite mouchetée fraîche du Québec, sous le nom de
truite du Québec, et ils en seraient davantage satisfaits.
Nous avons mentionné dans notre mémoire que le
contrôle de l'émission des permis devrait être assumé
par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. Vous comprendrez notre attitude par suite de l'augmentation
phénoménale du nombre de permis de pisciculture commerciale
émis depuis deux ans. En 1980, il y avait moins de 200 détenteurs
de permis. Ils sont plus de 400 à l'automne 1982. L'augmentation de la
production accompagnée de possiblités de ventes moindres conduit
à une situation où plusieurs pisciculteurs sont dans de
sérieuses difficultés financières. Nous ne croyons pas
qu'il soit nécessaire au ministère du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche de contrôler l'émission des permis pour pouvoir
acheter des produits d'ensemencement destinés aux eaux publiques et
privées. Nous croyons et demandons... Nous comprenons, si vous voulez,
les points de vue du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, mais nous demandons qu'une politique d'accréditation soit
élaborée afin de déterminer les normes sanitaires et les
qualités physiques du poisson destiné à l'ensemensement.
Et cela ferait partie de notre réglementation.
Nous sommes donc d'opinion que l'application des règlements sur
le transport de l'ensemencement et la préservation de la qualité
du poisson peut également se faire sans que le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne contrôle les permis.
En conclusion, la majorité de la population du Québec
acceptera-t-elle encore longtemps d'être privée d'un produit
essentiellement québécois, qu'elle devrait pouvoir normalement se
procurer facilement? En plus de limiter les importations en provenance des pays
étrangers, la vente de la truite mouchetée d'élevage pour
la consommation procurera emplois et revenus à quelques centaines de
Québécois, ce qui est fort important dans le présent
contexte économique, surtout si l'on considère qu'on a de l'eau
en quantité et en qualité au Québec.
Votre attention est également attirée sur l'urgente
nécessité qu'il y a à soumettre vos recommandations afin
que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche puisse,
par proposition de décret au Conseil des ministres, faire modifier
rapidement le règlement relatif à la vente de certains poissons
pour permettre la commercialisation de la truite mouchetée
d'élevage pour la
consommation. Cette urgence résulte de la grande
difficulté financière provoquée par des inventaires
considérables et l'impossibilité d'en disposer. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Paré): Merci, M. Filion. La parole
est maintenant à vous, M. le ministre.
M. Chevrette: Je vous remercie moi aussi. J'ai quelques
commentaires, mais, avant cela, je voudrais essayer de saisir un bout qui m'a
échappé. Vous m'avez parlé d'une petite truite
fumée: est-ce que vous avez dit qu'un pourvoyeur faisait fumer de la
truite mouchetée?
M. Filion (Louis-Philippe): Ce n'est pas un pourvoyeur, c'est un
pisciculteur. Il est justement ici dans la salle à part cela.
M. Chevrette: II fait fumer de la truite...
M. Filion (Louis-Philippe): mouchetée.
M. Chevrette: ... mouchetée, qui vient de...
M. Filion (Louis-Philippe): ... des
Maritimes.
M. Chevrette: Et où est-ce qu'il la vend?
M. Filion (Louis-Philippe): Au Québec, j'imagine. Est-ce
que c'est bien cela?
M. Chevrette: Ah non! Ne le demandez pas et ne me dites pas
qui.
M. Filion (Louis-Philippe): D'accord.
M. Chevrette: Je vous dirai pourquoi tantôt.
Premièrement, vous avez deux points bien précis et deux
éléments bien importants dans votre exposé: la
légalisation de la vente - je pense qu'on a tous bien compris - et
également la modification qui viserait à changer de
ministère pour l'émission des permis. C'est à peu
près les deux points qui ressortent le plus de votre mémoire.
Vous savez également qu'il y a eu des consultations, malgré le
document de travail du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, et vous avez vous-même fait état de ces
consultations. Donc, il y a une petite côte à remonter,
d'après ce que vous avez pu voir. Je suis surpris de votre demande de
transfert des permis, cependant, puisque vous commercialisez
présentement la truite arc-en-ciel. On demeure le principal
émetteur de permis. Si vous n'avez pas de problème avec la truite
arc-en-ciel, je ne vois pas pourquoi vous recherchez une juridiction
différente pour la truite mouchetée. On ne vous crée pas
de problèmes pour la truite arc-en-ciel; si jamais on légalisait
la vente de la truite mouchetée, je ne verrais pas pourquoi on vous
créerait plus de problèmes. J'espère vous entendre
là-dessus. D'autant plus que la loi-cadre de mon ministère nous
rend les seuls et uniques responsables de la conservation de la faune à
tous les niveaux; même en termes de reproduction - vous savez fort bien,
que vous le vouliez ou pas, qu'il en restera une forte portion qui sera
gardée pour le déversement dans les lacs et dans les
rivières - cela relève directement de ma juridiction, à
moins que vous ne m'arriviez avec une proposition disant qu'il y aurait deux
types de pisciculteurs: l'un pour l'élevage exclusif pour fins de
consommation et l'autre exclusivement, pour l'encemensement dans les lacs. Je
ne sais pas si c'est cela que vous avez voulu dire, mais ce n'est pas ce qui
ressort d'une façon claire de votre texte en demandant le transfert des
juridictions; cela ne m'apparaît pas précis dans votre
mémoire. Je voudrais vous laisser répondre là-dessus.
J'aurai d'autres questions immédiatement après.
M. Filion (Louis-Philippe): M. le ministre, on vous a dit qu'en
1980, il y avait 200 permis de pisciculture au Québec; actuellement, on
dépasse 400 permis. C'est que cela se multiplie tellement qu'on est dans
une situation comme celle qui se présente pour le porc au Québec.
On arrive à un cas de surproduction; on voudrait contingenter le nombre
de permis. (17 h 30)
Nous en avons parlé avec les autorités de votre
ministère. Nous sommes moralement convaincus qu'elles pensent un peu la
même chose, mais elles n'ont pas le pouvoir légal de faire quoi
que ce soit à ce sujet. Elles nous ont bien affirmé que,
lorsqu'une demande de permis leur était transmise, pour autant qu'elle
réponde aux normes, vous, vous deviez l'émettre. Or, par la
Régie des marchés agricoles, ce contingentement est possible. On
est même d'accord, surtout pour l'ensemensement et certaines choses, que
vous ayez un droit de regard, et c'est votre devoir. Mais vis-à-vis du
contingentement des permis, si vous voulez, vous n'avez, selon les informations
qui nous ont été transmises, aucune possibilité. Cette
possibilité existe par la Régie des marchés agricoles. Il
y a déjà eu quelques rencontres. C'est la principale raison, de
ce côté. Qu'est-ce que les pisciculteurs disent? Est-ce que, au
lieu d'avoir, comme actuellement, un permis de l'environnement, un permis de
ceci et de cela, un permis du MLCP, tout cela, il n'y aurait pas
possibilité d'avoir un permis et, ensuite, d'avoir des normes
d'accréditation, en ce qui vous concerne, et que ceux qui
fournissent l'ensemencement répondent à telle et telle
qualification? D'autant plus que le syndicat, pour les besoins de la cause, la
question des permis... Ce qui actuellement ne se fait pas chez vous. On divise
les permis en quatre: les oeufs d'incubation; l'ensemencement des eaux
publiques et privées; la truite de table; les étangs de
pêche. En classant cela ainsi, par catégorie, cela va être
possible, plus facile, du moins, de voir à quel endroit il y a d'autres
permis à attribuer et puis où à d'autres endroits,
effectivement, il y a surproduction.
Au Québec, on dit qu'on aura l'autosuffisance lorsqu'il y aura
environ mille tonnes de truite. On sait que le facteur de conversion,
actuellement, c'est à peu près une tonne et demie de
moulée pour une tonne de truite. Si on prend le nombre, on sait que les
pisciculteurs n'achèteront pas de la moulée, ils n'ont pas besoin
de l'acheter. Actuellement, qu'y a-t-il? Avec la coopérative, la
compagnie Ewos, avec Purina, etc., on arrive quasiment à mille tonnes.
On a 1400 tonnes de moulée. Présentement, on est très
près de l'autosuffisance. La potentialité n'est pas atteinte,
parce qu'il y en a plusieurs qui sont en fonctionnement depuis seulement un ou
deux ans, et on arrive à un goulot d'étranglement. Or, le premier
contingentement, c'est la question des permis. Actuellement, nonobstant les
bonnes dispositions, vous n'auriez pas les possibilités légales
de le faire, alors que, par la Régie des marchés agricoles, ce
serait possible. Effectivement, cela se fait dans d'autres productions
agricoles. Je ne sais pas si l'explication est plus claire que ce que vous avez
entendu.
M. Chevrette: Je comprends beaucoup plus. J'aurais quelques
questions additionnelles. Premièrement, j'ai rencontré un
pisciculteur qui, depuis vingt ans, exploite une pisciculture, me dit-il. Il
peut me mentir un peu sur les bords, c'est peut-être dix-neuf, mais
est-il exact de prétendre que vous ne pourriez pas, même avec un
permis annuel, assurer annuellement, c'est-à-dire quotidiennement, les
livraisons de poisson frais? Est-il exact que la période de gestation de
la truite mouchetée rend les chairs très molles, donc impropre
à la consommation pour une période de novembre à
février, par exemple? Excusez-moi, de septembre à
février?
M. Filion (Louis-Philippe): J'inviterais M. Nadeau à
donner la réponse.
M. Nadeau (Yvon): Je croirais, qu'il y aurait une période
où cela ne serait pas impossible, mais on peut développer des
lignées où la sexualité de la truite est plus tardive. En
faisant une sélection, comme cela il serait possible, en ne choississant
pas de la trop grosse truite, de faire un produit qui serait livrable douze
mois par année. Je fais des oeufs d'incubation et, lors du frai, on met
de côté, la première année ou pour un an et demi, un
très grand nombre de truites qu'on consomme et qui sont aussi bonnes que
celles du printemps.
Il y aurait la période de septembre, après une
période d'eau chaude, où la truite est un peu moins bonne.
Pratiquement toutes les piscicultures modernes sont capables aujourd'hui
d'élever en eau froide et de faire un produit conditionné. Je
crois que votre pisciculteur en question ne connaissait pas tout à fait
son affaire, d'après moi. Cela fait aussi 20 ans que j'en fais.
M. Chevrette: II y a petit bout de vrai puisqu'il y a
peut-être des périodes dangereuses.
M. Nadeau: C'est faisable à condition de mettre la truite
disponible pour le marché une semaine ou deux à l'avance dans de
l'eau froide parce que les chairs se rafermissent rapidement.
M. Chevrette: D'accord.
M. Filion (Louis-Philippe): Vous avez raison, M. le ministre, en
soulevant ces choses. Quant au syndicat, il y a deux choses sur lesquelles on
veut être très sévère. Premièrement, sur
l'identification au point de vue marque de commerce, parce que vous connaissez
les implications dans les "trade marks" et même la truite du
Québec. Deuxièmement, sur le contrôle de la qualité.
On a l'intention d'être extrêmement sévère de ce
côté, parce que justement il y a une nouvelle mise en
marché, on va être au début. Des travaux ont
été faits par le MAPAQ, d'ailleurs, dans ce domaine; cela va
être sous le contrôle des abattoirs. On a commencé
l'étude de règlements extrêmement sévères de
ce côté, parce qu'il va falloir que cela passe par des postes de
contrôle, qu'il y ait négociations comme pour les plans conjoints
sur le lait, etc. On tient beaucoup à la qualité parce qu'on ne
vise pas seulement le marché québécois. On vise le
marché des États-Unis et de l'Ontario. Il y a quelqu'un que
j'aurais aimé voir présent ici, M. Berra du fumoir Saint-Antoine,
parce qu'il prétend qu'avec une bonne truite mouchetée, la truite
du Québec, une fois fumée, il y a des possibilités
d'exportation en Europe. Il est censé être de retour le 20, mais,
malheureusement, il est encore en Europe. Il est allé faire un "survey"
là-bas.
M. Chevrette: Tantôt, je vous disais qu'il est strictement
interdit... J'ai eu la chance de réviser la Loi sur la conservation de
la faune au Québec et, pour votre information, le règlement
relatif à la vente
de certains poissons, vente de poissons à l'état mort,
cela comprend le poisson fumé, il est interdit de vendre, d'offrir ou
d'exposer en vente - pas très loin, c'est un fait - et même
vivant... C'est aux pages 95.01 et 95.02 de la loi, vous pourrez
vérifier. Actuellement, effectivement, c'est strictement interdit.
M. Filion (Louis-Philippe): Même si c'est de la truite
achetée légalement et que l'on avait le droit de vendre
légalement au Québec?
M. Chevrette: Ce n'est pas ce que dit la loi.
M. Filion (Louis-Philippe): Je comprends, M. le ministre, pour
quelle raison vous ne vouliez pas avoir de précisions concernant le nom
du pisciculteur.
M. Chevrette: Je ne cours pas après les infractions.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Charlevoix.
M. Mailloux: M. le Président, au nom de l'Opposition, je
voudrais remercier M. Filion et son groupe du mémoire et des documents
supplémentaires qui nous ont été fournis. Je constate
également, étant donné un engagement que j'aurai dans
quelques minutes, qu'il ne me sera pas possible d'écouter le
mémoire présenté par un de mes concitoyens au nom de
l'UPA, M. Bouchard, qui appuie la légalisation de la vente et le
transfert de juridiction. Je m'excuse auprès de M. Bouchard, mais je
connais bien la position de l'UPA à ce sujet.
M. le Président, malgré les appréhensions, je suis
personnellement favorable à une commercialisation qui soumettrait les
piscicultures à une réglementation avec des dents. Je pense que
j'en ai déjà parlé au fur et à mesure des
mémoires qui ont été présentés devant cette
commission.
Une réglementation à laquelle seraient soumis
également tous les utilisateurs quels qu'ils soient, les retaurants, les
hôtels et autres, afin que personne ne sache qu'il agit dans
l'obscurité et que le détenteur de permis d'hôtel, de
restaurant ou de pisciculture pourrait être condamné à des
amendes extraordinaires ou à des annulations.
À ces conditions, je suis un de ceux qui pensent qu'on est rendu
à un point où il va falloir modifier les règlements
existants. Je ne voudrais me prononcer en aucune façon sur le tranfert
de juridiction que vous souhaitez au ministère de l'Agriculture dans le
domaine de l'agro-alimentaire. C'est là un problème
éternel qui existe entre les différents ministres et les
différents ministères. Je laisse à celui qui est titulaire
actuellement le soin de décider dans ce sens.
L'Opposition ne voudrait pas non plus repousser du revers de la main
l'ensemble des appréhensions qu'on a senties venant de groupes assez
importants qui, malgré le braconnage éhonté qu'on constate
actuellement de la part de beaucoup trop de gens, ont manifesté des
dangers indiquant que la vente de la truite mouchetée en
commercialisation pourrait apporter une recrudescence de ce braconnage, ce que
je ne crois pas.
Vous dites que les pisciculteurs sont financièrement en danger.
La situation financière de ceux dont on a fait une étude sommaire
des activités révèle une vérité de La
Palice. Est-ce que vous êtes en mesure de pouvoir concurrencer le prix du
dumping des autres provinces? Est-ce que la province de Québec est en
mesure, elle-même, de faire en sorte que ce dumping soit moins nocif
qu'il ne l'est actuellement si, par hasard, le gouvernement décidait
d'aller vers une certaine forme de commercialisation?
Tantôt, le ministre a apporté l'argument suivant. Dans
certaines périodes, la truite mouchetée d'élevage en
pisciculture ne pourrait être mise sur le marché dans des
conditions acceptables. Je pense que, quand on mange de la truite
pêchée de manière sportive en certaines périodes de
l'année, en certaines périodes automnales, que cela soit un
chroniqueur sportif, moi-même ou d'autres, à un moment
donné, quand cela arrive à la période de frai ou aux
approches, il n'y a personne qui est trop intéressé à en
manger quand il connaît le moindrement la qualité de la truite
prise dans des périodes autres que celle-là. Il est possible que,
si jamais le gouvernement décidait de modifier et de permettre une
réglementation très sévère pour aller vers une
commercialisation qui est souhaitée, dans des périodes
déterminées de l'année, il soit défendu de la
mettre en marché si, par hasard, on n'est pas capable de faire la preuve
nécessaire que le produit devrait satisfaire à toutes les
exigences d'une saine consommation.
Je me pose la question suivante. On parle beaucoup, actuellement, des
pluies acides, du mercure qui s'ajoute sans cesse; le ministère, que ce
soit celui de l'Agriculture ou celui du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, invite les consommateurs à consommer moins de poisson pour
éviter les dangers du mercure. Quant aux arrosages, aux pluies acides de
toutes sortes qui affectent l'ensemble des cours d'eau et les étangs de
ferme, il y en a qui sont assez exposés, est-ce qu'on n'a pas une
garantie que tous ces dangers sont moins probants et moins réels quand
il s'agit des piscicultures? Est-ce que le mercure n'est pas aussi nocif? Ce
sont des observations que je voulais faire; je voudrais en faire d'autres, mais
je
m'aperçois que mon temps s'écoule, que je vais être
obligé de partir. J'aimerais que vous me fassiez quelques observations
quant à ce que je viens d'avancer, en vous disant que, personnellement,
je suis favorable à ce que certains droits soient accordés aux
pisciculteurs, qui leur étaient refusés dans le passé.
M. Filion (Louis-Philippe): Pre-mièrement, concernant le
dumping. Actuellement, dans l'arc-en-ciel congelée -pas l'arc-en-ciel
fraîche comme il est question dans le dépliant - il y a du dumping
américain. (17 h 45)
Prenons des faits, à quelques sous près. Ils vont vendre
de la truite de l'Idaho, si vous voulez, sur le marché de New York, 1,95
$ et ils vont la vendre à Montréal, 1,60 $; cela, c'est du
dumping pur. Maintenant, à ce sujet, on peut intervenir par un autre
moyen qui est le suivant: on nous a parlé d'un plan national de mise en
marché de la truite au Canada. Nous sommes censés avoir une
rencontre avec les producteurs de l'Ontario et des provinces de l'Est,
justement afin de mettre sur pied un plan national pour agir au niveau des
accords du GATT, avec des quotas d'importation et tout cela.
Là, nous avons une possibilité, mais, disons, qui est en
dehors d'ici. D'un autre côté, les acheteurs potentiels de truite
du Québec, appelons-la pour le moment comme cela, que nous avons vus
nous affirment qu'il n'y aurait aucun problème de vente pourvu qu'il y
ait au moins une différence de 0,50 $ la livre entre ce qui leur vient
de là-bas, nonobstant le dumping, et ce qu'on pourrait mettre en
marché.
Là, je tâche d'aller assez rapidement. Vous avez dit, c'est
vrai dans certaines périodes, que la truite est plus molle, c'est le
temps de frayer et tout cela. Maintenant, vous savez qu'en élevage
captif il y a certaines choses qu'on est capable de faire et qui ne se font pas
dans la nature. M. Nadeau vous en a donné les détails. Ainsi, si
on veut faire frayer une truite plus tôt parce qu'on veut avoir nos oeufs
en captivité, à ce moment, il s'agit d'organiser des conditions
de clarté qui sont différentes et les oeufs, on va les avoir plus
tôt. On peut assez facilement, comme M. Nadeau vous l'a expliqué,
faire varier ces choses. À part cela, il y a des périodes, c'est
normal, où plus de truites sont appelées à être
mises en marché ou qui s'en vont aux usines. À ce moment, il
s'agirait tout simplement de les congeler pour les vendre à des
périodes qui seraient plus creuses.
Concernant les pluies acides et le mercure, vous avez un dépliant
du ministère de l'Environnement qui vous a été
distribué. En ce qui concerne la truite mouchetée il n'y a aucune
restriction quant aux périodes d'abstention entre deux repas de poisson.
Vous voyez en haut, truite mouchetée, aucune. En tout cas, vous n'aurez
qu'à regarder cela. Mais la question des pluies acides, c'est un gros
problème. Un pisciculteur de chez nous, que vous connaissez très
bien personnellement, à un moment donné, vérifie son pH le
matin, il est à 7,5; il arrive une grosse pluie de 4 à 5 heures
et, là, il voit les truites qui commencent à retourner. Il
reprend son pH, il était rendu à 5 et les truites mouraient.
À ce moment, grâce au changement d'eau, avec la différence
de 2,5, ce n'est pas un très grand étang de pêche... Je
peux nommer le pisciculteur, c'est M. Auguste Bouchard, de
Côte-Saint-Antoine, Baie-Saint-Paul et ...
M. Mailloux: M. Filion, je vous arrête. Est-ce à
dire que les pluies acides dans un lac assez vaste ce serait moins un danger
que dans un étang assez réduit? Là, vous me dites que,
forcément, il faut que l'eau se renouvelle très vite si on ne
veut pas que la contamination monte très rapidement. Est-ce à
dire que, dans une étendue plus grande, le mercure doit monter moins
vite, j'imagine?
M. Filion (Louis-Philippe): À cause du volume d'eau, la
variation sera certainement moins grande. Vous avez certainement des
scientifiques au ministère. J'imagine qu'à cause principalement
au volume d'eau, la variation serait moins grande, je n'ai pas fait de travail
là-dessus.
M. Mailloux, lorsqu'on parle des pluies acides et lorsqu'on voit les
gens de la faune, on se dit: Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité...
On aurait du travail à faire, par exemple, un genre de recours collectif
concernant les pluies acides et toutes les délimitations, etc. En tout
cas, je sais que le temps avance, je ne sais pas si cela a répondu
à vos questions, M. Mailloux.
Le Président (M. Paré): M. le ministre, pour
conclure.
M. Chevrette: Vous m'en avez posé une, d'une certaine
façon, tantôt. Je voudrais préciser qu'en relation avec le
contingentement des pisciculteurs, quant à l'émission des permis,
on peut vous affirmer aujourd'hui qu'on va travailler en concertation, selon la
règle de la mise en marché des produits agricoles. Je pense que
vous avez peut-être raison sur cela; l'obligation qui nous est
dévolue de par loi, c'est la conformité aux normes. D'une
certaine façon, on a l'obligation d'émettre le permis, un peu
comme d'autres ministères qui disent qu'après avoir émis
un permis de conformité, ils n'ont pas le choix, il faut qu'ils
émettent des permis d'exploitation.
On retrouve cela dans plusieurs lois, en
particulier, dans la Loi sur la qualité de l'environnement, par
exemple. Quand le ministère de l'Environnement a émis un
certificat de conformité pour l'exploitation d'un dépotoir
régional, il est obligé d'émettre un certificat
d'exploitation; nous, c'est la même chose. Quand des gens arrivent et que
cela répond à des normes, on a l'obligation d'émettre le
permis. On va regarder cela de très près, cet aspect bien
précis que vous nous avez soulevé. On va travailler de pair avec
la Régie de la mise en marché des produits agricoles, mais, pour
le moment, je vous dis que je ne suis pas prêt comme ministre à
abandonner mes juridictions. Soyez assurés que je vais regarder
l'ensemble de votre dossier d'une façon très précise. Ne
soyez pas surpris d'être appelé à entamer des discussions
bien précises avec le MLCP pour clarifier plusieurs choses. On ne peut
pas non plus s'embarquer dans une aventure sans être certain au
départ, vous le savez comme moi. On va sûrement poser beaucoup de
questions à votre organisme. Vous allez sans doute nous répondre
adéquatement, vous n'avez pas l'air gêné pour nous
répondre.
M. Filion (Louis-Philippe): Nous avons hâte de recevoir
votre appel, M. le ministre.
M. Chevrette: On va finir les audiences et, après cela, on
vous appellera. Je vous remercie.
M. Filion (Louis-Philippe): Merci beaucoup.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Filion,
pour la présentation de votre mémoire au nom du Syndicat des
pisciculteurs du Québec.
J'inviterais M. Jacques Proulx, président de l'Union des
producteurs agricoles, pour la présentation de son mémoire.
Union des producteurs agricoles
M. Bouchard (Jean-René): M. le Président, M. le
ministre, MM. les députés, j'aimerais tout d'abord souligner
l'absence de M. Proulx. On m'a demandé de présenter le
mémoire en son nom. Je m'appelle Jean-René Bouchard, membre de
l'exécutif de l'Union des producteurs agricoles.
Depuis quelques années, l'UPA s'est intéressée au
dossier des pisciculteurs. Dans un premier temps, les pisciculteurs ont
demandé que le poisson d'élevage soit reconnu produit agricole au
sens de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles et, dans un
deuxième temps, ils ont demandé d'être reconnus producteurs
agricoles au même sens de la Loi sur les producteurs agricoles. Dans ces
deux cas, l'UPA s'est montrée favorable aux reconnaissances ci-haut
mentionnées.
Par la suite, les pisciculteurs ont demandé à l'UPA de les
aider à l'organisation syndicale des pisciculteurs et c'est à
partir de ce moment-là que le travail d'organisation a
débouché sur la mise en place du Syndicat des pisciculteurs du
Québec, lequel organisme est actuellement reconnu par l'UPA pour
représenter ce groupe de producteurs agricoles. Ensuite, l'UPA a
donné son appui au Syndicat des pisciculteurs pogr que ces derniers
obtiennent l'administration d'un plan conjoint qui est en vigueur depuis le 2
décembre 1981.
Un plan conjoint est essentiellement un ensemble de pouvoirs qui peuvent
être mis en application par l'administration d'un plan lorsque la
Régie des marchés agricoles du Québec autorise l'adoption
des règlements concernés. Dans le cas de la pisciculture, il
semble nécessaire et évident, pour assurer le bon fonctionnement
de ce plan conjoint, que la Régie des marchés agricoles du
Québec puisse mettre en application les dispositions de l'article 85 de
la Loi sur la mise en marché des produits agricoles qui se lit comme
suit: "La Régie peut en outre, par ordonnance: a) décréter
qu'aucune personne ne peut accomplir une activité faisant partie de la
production ou de la mise en marché d'un produit commercialisé si
elle ne possède un permis à cette fin émis par la
régie; b) déterminer les conditions que doit remplir toute
personne qui demande un permis ou son renouvellement et les renseignements
qu'elle doit fournir; c) déterminer des catégories de permis et
des classes de porteurs de ces permis de même que les conditions et les
restrictions afférentes à chaque catégorie et à
chaque classe; d) déterminer la forme et la teneur des demandes de
permis ainsi que la forme et la teneur de ces permis et établir un tarif
des honoraires exigés pour la délivrance et le renouvellement des
permis."
Il est évident que, si l'exercice de ces pouvoirs prévus
à la Loi sur la mise en marché des produits agricoles est
subordonné à l'émission de permis par le ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il semble évident que
l'esprit de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles soit
beaucoup atténué.
L'UPA a toujours défendu les politiques qui permettent aux
producteurs agricoles de prendre en main l'organisation de toute la mise en
marché de leur production et c'est avec beaucoup d'énergie que
les producteurs agricoles du Québec ont revendiqué, pendant de
nombreuses décennies, l'obtention d'une Loi sur la mise en marché
des produits agricoles, justement, pour leur permettre de se regrouper et de
négocier l'offre de leur production. Pour pouvoir réaliser cet
objectif, il est évident que le contenu de la loi a dû mettre
à leur disposition des mécanismes qui permettent de
contrôler également la production, si besoin en est, tels que
requis
par une production comme celle de la pisciculture, puisqu'il est
évident qu'à très court terme il est possible de
réaliser une surproduction qui serait préjudiciable. Il nous
apparaît évident que la même autorité légale
qui surveille l'organisme habilité pour administrer le plan conjoint des
pisciculteurs puisse exercer un contrôle relatif de la production.
C'est à la suite d'une analyse de cet aspect du dossier que l'UPA
appuie la position du Syndicat des pisciculteurs du Québec pour demander
au gouvernement du Québec que les pouvoirs relatifs au contrôle
des établissements piscicoles passent sous la juridiction du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et
qu'ils soient exercés par le biais de la Régie des marchés
agricoles du Québec.
L'UPA est également d'accord pour que le gouvernement
fédéral établisse la concordance avec le ministère
chargé d'appliquer ces mesures de contrôle.
M. le ministre, ce n'est pas inclus dans le mémoire, mais l'UPA
s'est prononcée sur la demande du Syndicat des pisciculteurs sur la
commercialisation de la truite mouchetée. Quand on considère
quand même l'importance des investissements dans ce secteur pour certains
producteurs, qu'il y a présentement une mise en marché qui n'est
pas organisée, je pense qu'il est important que le gouvernement du
Québec accorde la vente de la truite mouchetée dans les
établissements commerciaux au Québec afin de rentabiliser
l'exploitation de ces producteurs. On sait aussi que le gouvernement les a
aidés à mettre en place ces structures de production,
peut-être sans prévoir une mise en marché bien
organisée pour que ces gens-là puisse vivre de leur
production.
C'est pour ces raisons, M. le ministre, que l'UPA demande de faire suite
aux demandes du Syndicat des pisciculteurs.
Le Président (M. Paré): Merci, M. Bouchard. La
parole est à vous, M. le ministre.
M. Chevrette: M. Bouchard, je vous remercie de votre
mémoire. Je comprends que vous apportez un appui concret. D'ailleurs,
vous avez remarqué qu'on vous a placés immédiatement
après. C'était calculé. Je suis bien conscient que le fait
d'avoir émis passablement de permis crée une situation
embarrassante pour plusieurs pisciculteurs. D'ailleurs, même à mon
ministère, on a des hypothèses sur la table; on n'a pas encore de
conclusion. On a regardé la propre concurrence que nous exercions
nous-mêmes par rapport au réseau des piscicultures. On est
resté muet et bouche bée devant cela, on s'interroge
drôlement. On sait pertinemment que l'une des hypothèses que l'on
regarde très sérieusement, c'est de voir jusqu'à quel
point, nous du gouvernement, nous ne pourrions pas conserver la partie
recherche, par exemple, en pisculture, quitte à laisser à
l'entreprise privée le soin d'être les seuls à pouvoir
alimenter les ZEC ou les pourvoyeurs et à travailler dans le sens de
l'ensemensement, en tout cas, pour cette partie.
Pour ce qui est de la production, je ne répéterai pas ce
que j'ai dit tantôt. Je pense qu'il faudra travailler de pair avec les
organismes et sur le plan interministériel également. Je vous
remercie beaucoup d'avoir apporté votre appui, tout d'abord. Et puis je
vous dis qu'on n'est pas insensible, au contraire. Dans mon allocution de
départ, j'ai voulu, personnellement, lancer le débat parce qu'on
a besoin de s'interroger très sérieusement. On sait que le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est
prêt à l'étendre très rapidement; on sait tout cela.
Par contre, il y a des juridictions qui nous sont propres et dont il nous faut
aussi tenir compte du point de vue de l'ensemble des intervenants. On
s'interrogera très sérieusement et on va sûrement donner
des réponses incessamment.
M. Bouchard: M. le ministre, vous savez que votre gouvernement,
par le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, a quand même subventionné plusieurs organisations
pour la mise en place de cette production. Il faudrait quand même
être conséquent avec les politiques d'un ministère et
limiter la vente de cette production. Cela a des conséquences quand
même importantes. (18 heures)
M. Chevrette: C'est tellement conséquent qu'on
s'interroge, justement, sur la propre concurrence, la pression de la
concurrence qu'on exerce nous-mêmes. Donc, c'est déjà
à l'étude. Je peux vous dire que j'ai déjà lu un
bon paquet de rapports là-dessus. Il ne faut pas prendre de
décisions à la légère, surtout lorsqu'on vient
d'entrer dans un ministère mais, si je peux me permettre de vous dire
cela aujourd'hui, c'est parce que j'ai lu quelque chose là-dessus. J'en
ai discuté avec les dirigeants de la faune et on aura nous-mêmes
à prendre des positions très précises et,
espérons-le, dans le meilleur intérêt des pisciculteurs
eux-mêmes.
M. Bouchard: Je tiens à vous remercier, M. le ministre,
pour le temps que vous nous avez accordé pour présenter notre
court mémoire d'appui. Souhaitons que les demandes des pisciculteurs se
concrétisent.
M. Chevrette: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Paré): La parole est au
député... Un instant, M. Bouchard, s'il vous plaîti
M. Dauphin: Cela va être très court, M.
Bouchard.
Le Président (M. Paré): La parole est au
député du comté de Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président.
Au nom de l'Opposition, effectivement, on vous remercie également
pour la présentation de votre mémoire. Nous avons
évidemment constaté que vous appuyez le Syndicat des
pisciculteurs. On a été à même de constater aussi
que le ministre entend être très réceptif, après les
audiences de mardi prochain, afin de rencontrer les principaux intervenants
pour négocier sur une base sérieuse toutes vos revendications. On
vous remercie encore une fois.
Le Président (M. Paré): On vous remercie beaucoup,
M. Bouchard, pour la présentation de votre mémoire. Je
demanderais maintenant à M. Jean-Pierre Fillion de se présenter
à la table pour la présentation d'un mémoire, à
titre personnel.
M. Fillion (Jean-Pierre): M. le Président...
Le Président (M. Paré): Bienvenue, M. Fillion. Vous
pouvez faire la présentation de votre mémoire.
M. Jean-Pierre Fillion
M. Fillion (Jean-Pierre): Merci, M. le Président. M. le
ministre, MM. les membres de la commission, je présente le
mémoire à titre personnel, mais c'est aussi après
certaines consultations auprès de citoyens de la région. Je tiens
à souligner tout de suite, étant donné que c'est
personnel, que je ne représente aucun organisme, donc, aucun
intérêt particulier. Mon seul but, c'est tout simplement
d'apporter des commentaires. Cela vise tout simplement la conservation, la
protection de la faune.
Je me suis basé, pour mon mémoire, sur le document de
travail de réforme de la loi; on m'a dit que c'était un document
de travail, que ce n'était pas une volonté de modification de la
Loi sur la conservation de la faune. Donc, je vais y aller point par point,
ceux que j'ai jugé pertinent de commenter.
Dans le document de travail, on propose de modifier substantiellement le
montant des amendes. Évidemment, c'est peut-être tout simplement
une indexation normale. À mon avis, on a oublié de
considérer que le braconnage actuel est peut-être différent
du braconnage qu'on a connu dans le passé. Dans le passé, on
pouvait considérer le braconnage, pour certains, comme un besoin vital
de subsistance, ce qui est absolument inacceptable aujourd'hui.
J'ai fait une petite comparaison, j'ai comparé, par exemple,
l'impact du vol d'un matériel comme une machine à écrire
dans un bureau de ministère et celui d'un orignal. C'est une comparaison
peut-être assez bizarre, vous allez comprendre, pourquoi. Une personne
qui est reconnue coupable du vol de cette machine à écrire est
passible d'un emprisonnement de dix ans. Une machine à écrire,
cela vaut environ 1000 $, tandis qu'un orignal, je considère que le
braconnage est un vol pur et simple. Certains individus ont fait des
enquêtes sur l'impact économique, disons, d'un orignal
prélevé. On peut le considérer de deux manières
aussi: les montants d'argent investis par le gouvernement pour sa gestion et sa
protection et les impacts économiques de sa chasse, de son
prélèvement légal. Vous conviendrez que ce n'est presque
pas comparable, l'impact économique d'un orignal et d'une simple
machine.
Ce à quoi je veux en venir, c'est que, sans nécessairement
y aller tout de suite d'une peine d'emprisonnement de dix ans pour un
braconnage grave, biologique, il faudrait peut-être commencer à
penser à traiter les braconniers au même titre qu'on va traiter un
vulgaire cambrioleur, par exemple. Non seulement c'est valable au point de vue
économique, mais il faut aussi se rendre compte que le braconnage touche
un patrimoine faunique. Ce sont des êtres vivants et, dans une certaine
mesure, à un certain point donné, les espèces
visées par certains types de braconnage ne pourront plus se
perpétuer.
On traite aussi toutes les espèces sur le même pied, je
suis bien d'accord, mais peut-être que, pour essayer de décourager
certains types de braconnage, on pourrait être encore plus
sévère qu'on le propose et que je le propose moi-même pour
des espèces menacées ou en voie de disparition, selon la
définition de certains: par exemple le saumon de la Gaspésie et
le caribou de la Gaspésie. Le caribou de la Gaspésie, le petit
troupeau de la Gaspésie, le nombre d'individus est assez bas. Pour
décourager la poursuite du braconnage, parce qu'il y en a, on pourrait
faire un cas séparé pour ces espèces.
Prenant exemple sur les chroniques qu'on voit dans la revue
Protégez-vous, on pourrait peut-être identifier, dans certains
journaux spécialisés - je ne sais pas si cela se fait - les
personnes reconnues coupables de braconnage et aussi les établissements
reconnus coupables de recel, tout simplement rendre cela public dans une
chronique, de façon que ce soit facilement accessible à la
population et ce sera à la population de
juger quelle mesure prendre contre ces établissements.
Je tiens à souligner que le braconnage ne sera évidemment
pas enrayé du jour au lendemain par l'augmentation des amendes.
Parallèlement à l'augmentation des amendes pour le braconnage qui
devient absolument urgente on devra aussi continuer, privilégier et
encourager les programmes d'éducation en milieu scolaire. Donc, on
s'adresse à ce moment-ci à la génération montante.
Même si on hausse les amendes à des taux auxquels on voudrait bien
les monter, ce n'est pas ce qui va résoudre le problème en
général. C'est plutôt un problème de conception
globale de notre faune.
L'autre point dont je voudrais discuter est peut-être un point
majeur du document de travail, du projet, c'est celui de rendre la protection
des habitats sous l'aile protectrice du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche. À mon avis, si le ministère a
émis cette volonté de protéger légalement les
habitats, c'est évidemment parce qu'il y a un constat d'absence de
protection vraiment légale des habitats fauniques. On n'a qu'à se
rappeler des faits assez récents. Par exemple, les battures de Beauport,
les battures de Kamouraska, l'exploitation forestière dans certains
milieux fragiles puis, il paraît qu'on l'a mentionné, les
interventions du ministère de l'Énergie et des Ressources avec la
machinerie lourde dans des rivières à saumon, dans des fosses et
durant le frai.
Malgré toutes les lois actuelles, ces faits ont été
commis et il n'y a absolument personne qui a pu les empêcher. À
mon avis, l'inclusion, à l'intérieur de la Loi sur la
conservation de la faune, de la protection des habitats est non seulement
nécessaire mais urgente. Cette volonté d'inclure la protection
des habitats peut être crainte par certains autres responsables du
domaine public, mais je tiens à souligner que ces plaintes sont non
justifiées parce que le ministère semble vouloir se limiter aux
habitats dits essentiels pour certaines espèces fauniques. Donc, en
termes de superficie, on m'a dit que cela touche beaucoup moins de 10% des
superficies utilisables ou dont la gestion revient à d'autres
ministères. Donc, il n'y a pas lieu de s'alarmer et puis...
D'accord, en ce qui concerne les habitats fauniques, je conclus tout
simplement en disant que ce n'est pas le moment - d'après ce qu'on a
entendu, on a entendu certains commentaires avant de venir ici - de commencer
à se poser des questions sur qui devrait protéger les habitats
fauniques. Chacun tire la couverture de son côté. Mais, à
mon avis, il y a un intervenant le ministère qui vient de
décider: Bon! Les habitats ne sont pas protégés, on va les
protéger. Ce n'est pas le moment de se poser la question à savoir
à qui cela devrait revenir, à mon avis. Le ministère du
Loisir, de la Chasse et Pêche détient l'expertise, non seulement
pour la faune, mais aussi pour les habitats, donc, c'est à ce
ministère que devrait revenir la protection des habitats.
Il y a d'autres petits points... Bien, des petits! J'y ai
été dans l'ordre. Il est question d'augmenter la
responsabilité des agents de la faune, des agents de conservation de la
faune au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je
partage cette volonté. Cela pourrait aider dans certains cas, surtout en
regard de l'application de certains règlements de la Loi sur la
qualité de l'environnement. Parce que l'environnement et la faune sont
intimement liés et par l'occasion qu'ont les agents de parcourir, non
seulement les habitats fauniques, mais l'environnement en
général, cela pourrait faciliter l'application, non seulement de
la loi de la faune, mais la Loi sur la qualité de l'environnement. Cela
sensibiliserait peut-être aussi les agents sur les raisons de
protéger l'habitat, l'environnement en général et non
seulement les espèces.
On a eu aussi des volontés pour réviser, si on peut dire,
la question des réserves fauniques. Il est évident qu'au
Québec on a une panoplie de réserves fauniques avec toutes sortes
de types de gestion et il n'y a rien de très clair là-dedans. Il
est évident qu'il y en a certaines qui vont devoir disparaître. On
n'a qu'à penser aux parcelles résiduelles du parc de la
Gaspésie, c'est évident qu'elles devront disparaître, parce
qu'elles ne correspondent à rien de particulier relativement aux
territoires avoisinants. Par contre, dans les réserves qui resteront et
si cela va dans la même lignée que la protection des habitats
fauniques, il devra être primordial d'accorder, dans ces réserves,
la priorité à l'exploitation faunique. Autrement dit, je prends
le cas de la réserve Matane, il y a de l'exploitation forestière
dans cette réserve, à mon avis, non seulement pour l'orignal qui
s'y trouve, mais aussi pour le saumon, c'est la ressource faunique qui devra
être prioritaire dans les futures réserves fauniques. Si d'autres
exploitants - je reviens à l'exploitation forestière -
émettaient le désir de prélever eux aussi de la
matière ligneuse dans la réserve, cela devrait être fait en
tenant compte de la faune. Autrement dit, les normes d'exploitation
forestière devraient être assujetties à l'exploitation
faunique, aux espèces fauniques présentes, autrement dit, c'est
d'appliquer le petit guide qui a déjà été
rédigé en collaboration avec Énergie et Ressources et
Loisir, Chasse et Pêche.
Concernant la vente commerciale de gibier. C'est peut-être le seul
point de la proposition qui me fait émettre certaines
hésitations. C'est évident que je n'ai pas fait d'enquête
approfondie auprès de chasseurs, de
pêcheurs et autres associations, mais je perçois certains
problèmes de conception et d'application. La volonté
réelle du ministère devrait peut-être être plus
clairement exprimée, parce qu'on parle aussi de vente commerciale de
gibier. (18 h 15)
Les intervenants précédents se sont limités
à la truite mouchetée. Mais il faut penser aussi qu'il y a
d'autres espèces de gibier au Québec. Moi, ce qui me
préoccupe beaucoup, c'est le caribou, par exemple. C'est un exemple qui
pourrait être très local, mais à mon avis, il est
très important. La vente commerciale de caribou par exemple; on m'a dit
que la vente commerciale de caribou provenant de l'Alaska était permise
à Montréal. Je ne sais pas si c'est vrai mais dans la future loi,
il faudrait être très prudent, concernant la vente commerciale du
gibier, de façon à éviter des abus. Je reviens sur le
caribou. Est-il possible de distinguer un caribou de la Gaspésie d'un
caribou de l'Alaska? Je ne sais pas. Puis il faudrait être très
prudent. Il faudrait analyser les portées de ce règlement.
Je ne suis pas foncièrement contre la légalisation de la
vente de certains types de gibier, mais à mon avis, il faudrait adopter
une très très grande prudence parce que, même si certains
individus ou certains groupes disent que la truite de pisciculture devrait
être du ressort de certains autres ministères, il faut toujours
avoir présent à l'esprit qu'en termes d'espèce faunique,
la truite de pisciculture et la truite indigène, c'est la même
espèce. Et puis, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche devra toujours maintenir à mon avis l'expertise sur ces
espèces.
Je voudrais sauter quelques petites recommandations pour alléger
la réunion, mais je reviendrais sur les questions de saumon et de
capture accidentelle. J'ai été témoin, il y a quelques
années, de la saisie par les agents de la conservation de la faune, de
la saisie de filets contenant du saumon évidemment, 80 saumons, dans la
zone littorale du fleuve en Gaspésie. La saisie avait été
faite et les filets étaient là, le saumon était dedans,
mais ils ont été obligés de retourner aux pêcheurs
en question la totalité des saumons pour la simple raison que ce
n'était pas leur juridiction, autrement dit, qu'ils n'avaient aucune
juridiction sur le saumon dans l'estuaire.
Quant à changer la loi pour inclure la protection des habitats
fauniques, on pourrait peut-être penser à ce qu'on pourrait faire
pour le saumon dans l'estuaire, concernant notamment l'inclusion de la
responsabilité du saumon dans l'estuaire. Plus concrètement, ce
serait de donner des pouvoirs légaux aux agents, non seulement pour la
surveillance mais aussi pour la saisie parce que, évidemment, si on sait
que la surveillance du saumon dans l'estuaire est confiée au
ministère de l'Agriculture, de Pêcheries et de l'Alimentation,
c'est évident qu'ils n'ont pas le personnel et la préoccupation
axée sur le saumon. Donc, on devrait donner aux agents de la faune un
pouvoir légal sur la surveillance, sur la saisie des engins de
pêche dans les zones de l'estuaire et du golfe. Je voudrais
m'arrêter là pour mon intervention sur les principaux points.
Le Président (M. Paré): Merci M. Fillion. Alors, M.
le ministre, si vous voulez.
M. Chevrette: Je voudrais vous remercier et vous demander
d'abord: vous nous avez posé une question, à savoir s'il
était difficile ou facile de distinguer un caribou du Québec d'un
caribou de l'Alaksa? Ais-je bien compris?
On peut très facilement aujourd'hui avec des sérums
différencier les deux. D'ailleurs, je pense qu'on a eu des causes. C'est
grâce aux tests sérologiques qu'on a pu établir assez
facilement la distinction. Ceci dit, vous manifestez une vive opposition
à la mise en marché du gibier sauvage. Moi, je dois vous dire que
le document de travail dans lequel on en parle n'arrive pas à la
conclusion - d'ailleurs, la consultation l'a démontré - de la
commercialisation du gibier sauvage mais beaucoup plus du gibier
d'élevage. Effectivement, il y en a qui sont venus plaider en faveur de
la commercialisation du gibier sauvage, cela c'est vrai. Mais la consultation
est beaucoup axée vers la commercialisation du gibier d'élevage.
On a un problème cependant et c'est le caribou, un problème que
vous avez soulevé. Je ne sais pas si je vous ai mal compris, mais en ce
qui concerne le caribou c'est un problème inverse à celui
d'autres espèces, c'est qu'on a un surpeuplement. On a 300 000 caribous,
par exemple.
M. Fillion (Jean-Pierre): Oui, dans le Nord.
M. Chevrette: Pardon?
M. Fillion (Jean-Pierre): Dans le Nord.
M. Chevrette: Dans le Nord. On sait qu'il y a des
problèmes d'alimentation qui peuvent créer des maladies et des
épidémies assez grandes. Si on en avait eu à
commer-cialiser en termes de gibier sauvage et peut-être d'une
façon ponctuelle, c'est-à-dire dans le temps, on aurait pu
prendre le caribou. On a même certains chroniqueurs qui nous ont
suggéré de permettre la chasse au mois de mars par exemple pour
le caribou. Ils ont dit: Vous rendriez service au troupeau lui-même et
vous pourriez peut-être permettre à certaines pourvoiries de faire
quelques dollars
dans une période morte. C'est vrai qu'on a eu ce type de
suggestion. C'est un problème qu'on étudie présentement au
ministère. Dans le reste, pour ce qui est du gibier sauvage, quand vous
parlez de commercialisation, la consultation ne visait pas cette partie,
même s'il y en a qui sont venus en traiter.
Maintenant, à la page 6 de votre mémoire, vous avez
écrit que concernant la possession d'animaux sauvages étrangers
on pourrait rendre la loi plus sévère. À quel genre
d'animaux faites-vous référence d'abord? Quels pouvoirs
réglementaires devrions-nous inscrire dans la loi?
M. Fillion (Jean-Pierre): Ce point visait surtout ce qui suivait.
La phrase se poursuit, rendre la loi beaucoup plus sévère en ce
qui touche certains autres animaux; je parlais des chiens, des animaux
domestiques.
M. Chevrette: Vous ne faisiez pas allusion à
l'entrée d'animaux sauvages de l'extérieur du Québec?
M. Fillion (Jean-Pierre): Non, disons que c'est un genre
d'approbation en un certain sens pour la volonté d'émettre
certains règlements sur la possession ou l'entrée d'animaux
étrangers. J'aurais aimé qu'on inclue aussi la
réglementation sur les animaux domestiques déjà
entrés au Québec. C'est tout simplement un prétexte, cette
proposition de règlement, pour proposer des mesures plus
sévères concernant les chiens. Je fais tout simplement allusion
aux dommages que les chiens peuvent causer aux cerfs de Virginie dans certains
ravages.
M. Chevrette: Croyez-vous que le fait de permettre la vente du
gibier d'élevage peut avoir des incidences sur la récolte du
gibier sauvage?
M. Fillion (Jean-Pierre): Je ne suis pas en mesure de
répondre actuellement à la question. Est-ce que je pourrais
revenir, s'il vous plaît, à votre première question?
M. Chevrette: Oui.
M. Fillion (Jean-Pierre): Vous avez dit que j'émettais une
vive opposition, je me suis mal exprimé. Je me pose de vives questions,
ce n'est pas une vive opposition, sur la vente de gibier, mais ce sont des
doutes, il ne faut pas agir à la légère dans ce dossier.
D'accord, je prêche pour mon clocher, le Bas-Saint-Laurent et la
Gaspésie. Je reviens toujours au caribou, vous dites que les
méthodes actuelles permette de distinguer la provenance du caribou. Si
la vente du caribou est légalisée, est-ce qu'on va, dans tous les
établissements ou dans toutes les localités, avoir les moyens de
déterminer la provenance du caribou?
D'accord, il y a peut-être des problèmes de surpeuplement
dans le Nord, mais je considère le caribou de la Gaspésie comme
l'élément faunique le plus important en termes de patrimoine,
parce que c'est un troupeau quasiment vestige; il faut vraiment lui apporter
toute l'attention nécessaire, que ce soit poursuivre ou améliorer
les inventaires ou le suivi. Il faut être très prudent dans
l'adoption de règlements concernant la même espèce, mais
d'autres troupeaux par rapport au troupeau de la Gaspésie.
Le Président (M. Paré): La parole est au
député du comté de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. M. Fillion, quelle forme
devrait prendre l'aide financière aux territoires non
protégés d'après vous?
M. Fillion (Jean-Pierre): Ce serait une aide financière ou
technique. Peut-être pour informer la salle, c'est une petite
recommandation à la fin pour appuyer financièrement et
techniquement les organismes qui ont le souci de protection des habitats et de
la faune. Ce sont peut-être des groupements qui... Ce seraient tout
simplement des subventions pour créer des programmes de sensibilisation
par des groupes locaux, des groupes locaux qui normalement -là je ne
fais pas allusion à des groupes nécessairement de faune, la
fédération québécoise de la faune ou des groupes
locaux essentiellement axés sur le prélèvement, la chasse
et la pêche mais sur d'autres types de groupes - eux, tout en faisant la
promotion de la faune et de ses habitats, n'ont peut-être pas les moyens
d'élaborer des programmes de sensibilisation de la population. Ce
seraient peut-être de petites subventions permettant de monter une
exposition ou tout simplement permettre de réaliser ou de diffuser un
dépliant ou une affiche quelconque sur des éléments
fauniques locaux pour la préservation et la sensibilisation du
public.
M. Houde: Un peu pour suivre les autres.
M. Fillion (Jean-Pierre): Suivre...
M. Houde: Suivre les autres groupes qui sont déjà
reconnus tandis qu'eux n'ont pas les moyens. Si on leur accordait de l'argent,
cela les aiderait. C'est de cette façon-là que vous le voyez.
M. Fillion (Jean-Pierre): Quand vous dites les autres, ce sont
les autres organismes...
M. Houde: Oui.
M. Fillion (Jean-Pierre): Pas pour suivre les autres, parce
qu'ils n'ont pas nécessairement les mêmes buts. Il y en a qui vont
simplement exister pour la simple et pure protection des habitats ou de
l'environnement. On en a un chez nous, c'est le Conseil régional de
l'environnement dont l'objectif est la protection de l'environnement, purement
et simplement. Il n'est pas question d'utilisation autre.
M. Houde: Merci. M. Dauphin.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Marquette.
M. Dauphin: Je vous remercie M. Fillion. J'aurais deux courtes
questions. Vous parlez à un moment donné, dans votre
mémoire, qu'il y aurait peut-être lieu, en remplacement de
l'emprisonnement de façon exécutoire, d'obliger les
récalcitrants, les délinquants à suivre des cours
d'aménagement et conservation de la faune. Je voudrais savoir s'il ne
vaudrait pas mieux être préventif que curatif. Pour obtenir un
permis de port d'arme, c'est environ deux heures de cours actuellement. Ne
devrait-on pas, avant de donner le droit de chasse, si vous me permettez
l'expression, leur permis de port d'arme exiger un cours plus sérieux,
plus avancé?
M. Fillion (Jean-Pierre): Je ne pense pas qu'on puisse inclure
cela dans une loi d'obliger de donner un cours pour un permis de port
d'arme.
M. Dauphin: Ou une réglementation.
M. Fillion (Jean-Pierre): Ce que je voulais dire ce
n'était pas dire de leur donner des cours d'aménagement de la
faune, c'était de les faire participer à des travaux
d'aménagement, que ce soit - je n'en ai pas en tête là - le
nettoyage d'une frayère ou la construction d'un établissement,
d'une structure pour aider la faune. C'est de les faire participer à ces
travaux-là. Peut-être seraient-ils mieux sensibilisés aux
pourquoi et aux comment.
M. Dauphin: Une deuxième question, si vous me permettez.
Plusieurs intervenants avant vous et vous-même avez fait état
justement de l'élargissement du rôle de l'agent de conservation de
la faune. La plupart ont dit qu'il manquait de ressources humaines à ce
niveau-là. Dans votre région -vous êtes du coin de
Rimouski, si j'ai bien compris?
M. Fillion (Jean-Pierre): Oui.
M. Dauphin: Quelle est la situation au niveau des agents de
conservation de la faune dans votre région? Est-ce qu'il y en a
suffisamment, selon vous?
M. Fillion (Jean-Pierre): II faut pren-dre... C'est un
débat qui risque de durer assez longtemps. Il y a deux limites dans le
nombre d'agents de la faune. Il y a la limite zéro et la limite un agent
derrière chaque citoyen, essayer de déterminer exactement
où se situe le nombre d'agents qualifiés nécessaire
à la protection de la faune, c'est physiquement impossible. La plupart
du temps cela dépend des ressources financières des organismes.
(18 h 30)
M. Dauphin: Si j'ai bien compris votre réponse, dans votre
région, ça va?
M. Fillion (Jean-Pierre): En termes de nombre, je n'ai pas dit
que ça allait. J'ai dit que c'est passablement difficile de
déterminer si le nombre d'agents de conservation de la faune suffit
à la tâche. Même si on doublait ou triplait le nombre,
est-ce que les problèmes diminueraient? Je n'en suis pas
persuadé. C'est évident qu'on a besoin de plus de personnel pour
couvrir de plus grands territoires, mais il y en a toujours qui vont trouver le
moyen de s'en sortir même s'il y a deux fois plus d'agents. Il y a des
problèmes de ce côté-là certainement, mais je ne les
ai pas quantifiés. C'est évident. Puis, est-ce qu'on doit mettre
l'accent sur l'engagement d'un nouveau personnel ou plutôt sur la
sensibilisation des générations montantes? Cela revient toujours
à une question d'argent. Je sais bien que si la volonté du
ministère pouvait se réaliser sans devoir passer par le Conseil
du trésor, il y aurait peut-être beaucoup plus d'agents de
conservation. Mais, il y a des procédures à suivre.
Le Président (M. Paré): M. le ministre.
M. Chevrette: Dans votre région, M. Fillion, il y a 80
agents réguliers à temps plein, 60 occasionnels et 120
auxiliaires. C'est un bassin assez respectable merci. Je suis passablement plus
d'accord avec l'approche de la sensibilisation des organismes, l'implication
des organismes du milieu et l'éducation de la génération
montante. Ce n'est pas toujours par des "tickets" qu'on corrige tout. Si on
pouvait simplifier la loi, enlever les technicités qui créent
beaucoup d'emmerdements, punir d'une façon plus évidente les
vraies coupables et faire de l'agent de conservation un éducateur
plutôt qu'un shérif, on pourrait peut-être arriver à
quelque chose de plausible à moyen terme et à long terme.
Cela dit, je vous remercie pour votre témoignage.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup, M. Fillion,
pour la présentation de votre mémoire.
J'inviterais maintenant M. André Nault à présenter
un mémoire au nom de la Fédération des associations pour
la protection de l'environnement des lacs. Je vous demanderais, comme aux
autres intervenants avant vous, M. Nault, d'essayer de faire une
présentation qui se limite à 20 minutes, si possible.
FAPEL
M. Nault (André): Avec plaisir. M. le Président, M.
le ministre, les membres de la commission, bonsoir.
FAPEL, mieux connue pour ses efforts visant à protéger les
lacs, ne se préoccupe pas moins de la protection des cours d'eau. L'un
des objectifs vise d'ailleurs à promouvoir auprès du public la
préservation et l'amélioration de la qualité de
l'environnement des lacs et des cours d'eau. Dans le mémoire que nous
présentons aujourd'hui sur la Loi sur la conservation de la faune, nous
prenons en considération les habitats de tous les plans d'eau.
Nous tenons, en premier lieu, à féliciter le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour son
intérêt dans le domaine de la protection des habitats. Rappelons
toutefois que les préoccupations de FAPEL et de ses associations, sans
négliger les habitats de quelques espèces spécifiques,
couvrent tous les milieux naturels situés dans les limites des lacs et
des cours d'eau et leur encadrement forestier. Dans ce cadre, FAPEL
s'intéresse plus particulièrement aux milieux naturels les plus
sensibles: les rives et le littoral.
Dans les articles proposés ou modifiés par la nouvelle Loi
sur la conservation de la faune, nous avons choisi d'en commenter deux:
l'article Il et l'article 6.
L'article 11: "Le gouvernement peut autoriser le ministre à:
premièrement, acquérir de gré à gré, louer
ou exproprier tout terrain qu'il juge nécessaire pour la conservation de
la faune et de son habitat; deuxièmement, accepter tout don ou legs de
propriété lorsqu'il juge que celle-ci représente un
intérêt particulier pour la faune et son habitat."
FAPEL estime tout à fait normal et souhaitable que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche se dote du
pouvoir d'acquérir des terrains ou d'accepter des dons ou legs de
propriété pour protéger certains habitats de la faune et
l'encourage même à favoriser cette forme de protection.
Loin de faire double emploi avec le ministère de l'Environement,
responsable des réserves écologiques, ou le ministère de
l'Énergie et des Ressources, ces nouveaux pouvoirs permettront d'ajouter
de nombeux sites à la banque des sites naturels déjà sous
le protection du gouvernement du Québec.
L'article no 6: "Le gouvernement peut, par règlement, pour en
assurer la protection, permettre ou prohiber toute modification de l'habitat de
la faune, et en fixer les conditions ou normes." Le principal
intéressé n'est pas là.
Le Président (M. Paré): Je dois vous mentionner que
tous les responsables du ministère sont là présentement et
que le ministre a déjà pris connaissance de votre dossier; donc,
vous pouvez poursuivre.
M. Nault: Cet article 6 est carrément inacceptable. Il
ouvre la porte à la création, au sein du MLCP, d'une structure
parallèle à celle du ministère de l'Environnement. Il ne
tient aucun compte des situations prévues par le règlement
relatif à l'évaluation et à l'examen des impacts sur
l'environnement, pas plus qu'il ne tient compte de la présence
quotidienne du ministère de l'Environnement dans le domaine de la
protection des rives et du littoral des lacs et cours d'eau.
FAPEL ne nie pas que certains habitats, les ravages du cerf de Virginie
ou de l'orignal, par exemple, échappent à toutes fins pratiques
au contrôle du ministère de l'Environnement. FAPEL ne nie pas, non
plus, que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
puisse se doter de certains pouvoirs complémentaires pour
protéger certains habitats très spécifiques. Mais FAPEL
considère que la formulation du nouvel article 6 place le MLCP en
situation de conflit avec le ministère de l'Environnement en lui donnant
une juridiction générale sur tous les habitats et en l'impliquant
dans l'élaboration des normes générales dans un domaine
déjà sous la juridiction du ministère de l'Environnement.
FAPEL s'oppose catégoriquement à ce que l'on crée de
toutes pièces une nouvelle situation de conflits du genre de celle que
nous avons connue pendant plusieurs années et qui impliquait le
ministère des Richesses naturelles et les Services de protection de
l'environnement.
Un court rappel historique fera mieux comprendre notre position face
à cet article. Avant la création du ministère de
l'Environnement, le ministère des Richesses naturelles et les Services
de protection de l'environnement se partageaient la juridiction sur les rives
et le littoral des lacs et des cours d'eau. Le ministère des Richesses
naturelles pouvait intervenir uniquement sur les aménagements du
littoral des lacs et cours d'eau du domaine public. Il n'avait aucune
juridiction sur les rives et aucune juridiction sur le littoral des lacs et
cours d'eau du domaine privé. Les Services de protection de
l'environnement, mieux équipés légalement,
détenaient un mandat général de
protecteur de l'environnement et deux articles, les articles 20 et 22,
leur donnaient le pouvoir d'agir pour protéger les rives et le littoral
des lacs et des cours d'eau du domaine privé.
Ce partage de juridiction, ajouté au fait que le ministère
des Richesses naturelles ne manifestait aucune préoccupation
écologique, créa de sérieux conflits. Heureusement, le
gouvernement décidait en 1980 de créer un ministère de
l'Environnement pour éliminer ce conflit. La protection des rives et du
littoral est aujourd'hui mieux assurée et elle est articulée
entièrement à partir de préoccupations
écologiques.
Pour éviter un dédoublement inacceptable dans le domaine
des rives et du littoral, le MLCP se doit d'abord d'appuyer les efforts du
ministère de l'Environnement et de ne proposer de normes que pour les
habitats fauniques qui le préoccupent directement.
Insérées dans la Loi sur la qualité de l'environnement ou
dans les règlements qui en découlent, ces normes pourraient
répondre de façon encore plus précise à ses propres
préoccupations.
Le groupe de travail pour la protection des habitats, dans son document
d'information, intitulé Vers une protection des habitats fauniques au
Québec, souligne qu'il faut à tout prix "éviter les
dédoublements et d'éventuelles guerres de clocher". Or, l'article
6 mène carrément au dédoublement. Cette contradiction
tient au fait que le groupe de travail, dans son analyse des "moyens actuels de
protection", présente une vue très fragmentaire des efforts qui
sont faits par le ministère de l'Environnement dans le domaine des rives
et du littoral des lacs et des cours d'eau.
Il existe, au sein du ministère de l'Environnement, une Direction
de l'aménagement des lacs et des cours d'eau, qui dirige un programme de
protection des rives et du littoral, doublé d'un programme de
régénération des rives. Vous avez, d'ailleurs, cela dans
les brochures de presse que l'on vous a remises, brochures qui ont trait aux
rives et au littoral. Donc, l'efficacité de cette direction n'est plus
à démontrer. Elle prône l'aménagement naturel des
rives et du littoral. Elle offre même la possibilité de
rétablir le profil naturel des rives qui ont été
dégradées dans le passé.
La Direction de l'aménagement des lacs et des cours d'eau traite
tous les cas de dégradation des rives et du littoral qui ne sont pas
couverts par le règlement sur l'évaluation et l'examen des
impacts sur l'environnement. Il s'agit de la très grande majorité
des cas, comme le souligne si bien le groupe de travail pour la protection des
habitats, qui rappelle, dans son document, que les pertes d'habitats fauniques
découlent surtout d'une multitude de petites interventions. Cette
juridiction devrait être soustraite de l'article 6 proposé par le
MLCP.
Enfin, il faut souligner que les efforts du ministère de
l'Environnement touchent aussi les plaines d'inondation des lacs et des cours
d'eau. La protection des plaines d'inondation est d'une importance capitale,
autant pour la faune ailée que pour certains poissons qui les utilisent
en temps de frai. Or, le ministère de l'Environnement peut, à la
fois, utiliser la Loi sur le régime des eaux et la Loi sur la
qualité de l'environnement pour les protéger. Cette juridiction
devrait aussi être soustraite de l'article 6 proposé par le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Nous nous sommes permis, pour votre information, de joindre à ce
mémoire quelques brochures qui donnent des détails additionnels
sur les politiques du ministère de l'Environnement, dans le domaine des
rives et du littoral des lacs et des cours d'eau. On peut y constater que le
ministère s'est impliqué directement et va même plus loin
en permettant la participation active des citoyens et en favorisant
l'implication des municipalités dont plusieurs, d'ailleurs, ont
déjà adopté le règlement proposé par le
ministère de l'Environnement.
Nous terminons en rappelant que la création du ministère
de l'Environnement a été entièrement justifiée par
la nécessité d'avoir un ministère spécifique
chargé de veiller à la protection de l'environnement. Lui enlever
des juridictions serait donc un recul impensable. Le partage des juridictions
serait un dédoublement inacceptable du point de vue de la gestion des
fonds publics. En résumé, FAPEL souhaite ardemment que le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche s'implique de
plus en plus dans le domaine de la protection des habitats fauniques. FAPEL
insiste pour que cette implication se fasse de façon
complémentaire, sans créer de nouveaux conflits de juridictions
avec d'autres ministères et principalement avec le ministère de
l'Environnement. Merci.
Le Président (M. Paré): Merci, M. Nault. La parole
est au ministre.
M. Chevrette: Je vous remercie également. Je voudrais vous
dire tout de suite qu'il n'est pas de l'intention du MLCP de laisser glisser sa
juridiction entre ses doigts pour qu'elle aille vers l'Environnement, d'aucune
façon. Nous sommes prêts à travailler en concertation avec
le ministère de l'Environnement, mais nous croyons que nous avons
l'expertise professionnelle, technique, pour être capables de faire face
à la musique, d'édicter des règlements concrets, des
normes précises pour sauver les habitats. Cela dit, j'aurais quelques
questions
à vous poser. Tout d'abord, vous ne désirez pas voir la
Loi sur la conservation de la faune étendre sa portée
jusqu'à permettre la protection du milieu riverain, alors que vous
acceptez qu'elle assure la protection des autres milieux. Votre conception ne
comporte-t-elle pas aussi des dangers de chevauchement de
responsabilités et de difficultés de compréhension dans
l'esprit du public?
Le Président (M. Paré): M. Nault.
M. Nault: Pourriez-vous préciser davantage votre question,
M. Chevrette?
M. Chevrette: En d'autres mots, vous-même, vous dites que
la Loi sur la conservation de la faune peut étendre sa portée
jusqu'à permettre la protection du milieu riverain, alors que vous
acceptez qu'elle assure la protection des autres milieux. Je voudrais savoir
si, dans votre propre conception, il n'y a pas des dangers de chevauchement.
Expliquez-moi cela. (18 h 45)
M. Nault: Du tout, pour la bonne et simple raison que le
ministère de l'Environnement est très très peu
impliqué dans les autres milieux fauniques que vous avez
évoqués. D'accord? Le ministère de l'Environnement, au
plan des lois déjà existantes, est déjà très
impliqué au niveau du littoral et des rives. FAPEL a lutté
pendant longtemps pour qu'on puisse avoir une ligne de protection sur le bord
des lacs lors des coupes forestières, entre autres. Ce sont
déjà des luttes qui ont été faites. FAPEL a
lutté pendant quatre ans, de 1975 à 1979, pour la création
du ministère de l'Environnement. Deux ans après la formation du
ministère de l'Environnement, on a lutté pour qu'il y ait un seul
programme des lacs et non pas deux, comme le programme des lacs du
ministère de l'Énergie et des Ressources et le programme des lacs
du ministère de l'Environnement, parce que les idéaux
écologiques du ministère de l'Environnement étaient
strictement basés sur la participation des citoyens, dans le but de
protéger l'environnement riverain.
L'environnement riverain protège environ 80% de votre population
et des espèces que vous voulez protéger présentement,
selon vos propres chiffres. On souligne ceci dans le livre de travail: "II faut
noter, cependant, que ce processus ne sera mis en branle, selon l'article 22,
que s'il y a émission de contaminants dans l'environnement." C'est faire
une évaluation de l'article 22 tout à fait biaisée, parce
que l'article 22 se lit comme suit. Il exige un certificat avant
"d'ériger, de modifier une construction, d'entreprendre l'exploitation
d'une industrie quelconque, l'exercice d'une activité ou l'utilisation
d'un procédé industriel s'il est susceptible d'en résulter
une émission, un dépôt, un dégagement ou un rejet de
contaminants dans l'environnement ou une modification de la qualité de
l'environnement."
On souligne qu'une modification de la qualité de l'environnement,
cela va en plein dans le sens de l'idéal de ce que vous voulez
protéger par votre article 6. C'est déjà existant.
M. Chevrette: Supposons qu'on scinde en deux la question de la
conservation, les normes techniques ou les amendes, etc., et qu'on fasse une
loi spécifique pour la sauvegarde des habitats fauniques, est-ce que
vous conserveriez toujours la même conviction que la protection du milieu
riverain devrait être soustraite à cette loi?
M. Nault: Je ne suis pas avocat; j'aimerais que vous
précisiez davantage le sens de votre question.
M. Chevrette: D'accord. Je suppose, que, demain matin, je
décide qu'il y aura deux projets de loi au lieu d'un. En d'autres
termes, au lieu de traiter des habitats fauniques ou de la sauvegarde des
habitats fauniques dans le projet de loi sur la conservation de la faune, j'en
ferais un spécifique sur les habitats fauniques, est-ce que vous
conserveriez la même opinion?
M. Nault: Les habitats fauniques de quels milieux?
M. Chevrette: Les milieux riverains. C'est vous qui en avez
parlé. Vous dites que cela doit être exclu de cette loi et relever
de la Loi sur la protection de l'environnement.
M. Nault: Oui, parce qu'elle les protège
déjà.
M. Chevrette: En termes d'habitats fauniques? Vous
considérez que la Loi sur la qualité de l'environnement
protège tous les habitats fauniques en milieu riverain.
M. Nault: On fait mention, dans votre document de travail, de cas
de remblai qui est une attaque à l'habitat faunique.
M. Chevrette: Vous trouvez qu'on a eu du succès, vous, sur
les endiguements; vous trouvez qu'on a eu du succès sur le drainage;
vous trouvez qu'on a eu du succès, jusqu'à ce jour, sur
l'exploitation forestière en milieu riverain?
M. Nault: M. le ministre...
M. Chevrette: Voici ce que je veux vous dire, M. Nault; je ne
veux pas
m'obstiner. Vous pouvez avoir gagné une petite guerre
théorique, mais sur le plan pratique, ce sont les résultats
concrets que je cherche.
M. Nault: Oui, mais...
M. Chevrette: Qu'est-ce que vous avez gagné
concrètement sur l'endiguement et le drainage? Expliquez-moi cela.
M. Nault: Je ne peux pas vous donner le nombre exact de cas. Je
vais donner strictement le cas de mon lac. Au lac Saint-Georges, à
l'été 1980 et 1981, on a eu cinq cas où il y a eu de
l'empiétement sur le milieu riverain. Les cinq cas ont été
rapportés au programme des lacs et des actions ont été
prises pour corriger cela. Après discussion avec les intervenants, tous
ont fait des corrections de bon coeur, comprenant par la suite pourquoi des
correctifs devaient être faits. Cela n'a peut-être pas valu aux
endiguements de grosses affaires. Vous avez eu des personnes du
ministère de l'Environnement qui ont travaillé là-dessus.
Je dois avouer sincèrement que le travail qu'elles ont fait n'a pas
été "vargeux", pour la protection de ce qui était
déjà existant. Alors, même si c'est le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui a cette juridiction, on va avoir
affaire à des hommes. On connaît déjà ceux qui sont
là dans le programme des lacs. Ils font "une maudite bonne job". Il
serait très facile pour un agent de la conservation de la faune, s'il y
a un cas de remblai sur le bord d'un lac, où qu'il soit, de
téléphoner et de dire: Programme des lacs, il y a un cas de
remblai là-bas. Ce serait faisable à mon sens; ce serait
simplifier les choses.
M. Chevrette: Si c'est votre conviction, je ne veux pas vous
l'enlever. Je veux seulement vous mettre en garde. On a une Loi sur la
qualité de l'environnement; si on n'a pas un pouvoir spécifique
de faire, par exemple, des interdictions ponctuelles à des moments
précis, je pense que ce serait compliquer davantage les juridictions. Je
vous donne un exemple...
M. Nault: Vous demanderez pour une interdiction ponctuelle,
d'accord?
M. Chevrette: Non, mais écoutez...
M. Nault: Vous demanderez aux gens du ministère de Travaux
publics qui ont fait un remblai sur le bord du lac d'Argent, s'ils n'ont pas eu
un arrêt ponctuel. Ils leur ont dit: Vous allez m'arrêter cela et
tout de suite. Ils n'ont pas eu le choix, ils ont arrêté parce que
ce qu'ils faisaient n'étaient pas écologique. D'accord? Ils
voulaient défaire le milieu que vous voulez protéger. Il est
déjà protégé par une loi très
spécifique qui est la Loi sur la qualité de l'environnement aux
articles 20 et 22.
M. Chevrette: Mais, selon la Loi sur la qualité de
l'environnement, vous êtes obligé de faire la preuve qu'on
défait le décor naturel.
M. Nault: C'est bien facile à faire.
M. Chevrette: Oui, c'est facile à faire? Il y a plusieurs
qui ont dit que c'était bien facile à faire?
M. Nault: Bien...
M. Chevrette: II s'en fait encore de l'endiguement. Ils ont
été obligés d'aller devant les tribunaux civils...
M. Nault: Ce n'est pas en dédoublant la loi...
M. Chevrette: II y a des brefs d'évocation.
M. Nault: ... M. le ministre, qu'on va empêcher les autres
cas de remblai, les autres cas d'endiguement de se faire. Ce n'est pas ainsi,
c'est peut-être en donnant l'information à l'intérieur
même de votre ministère qu'il y a déjà une loi
existante; cette information peut être passée sur l'autre
bord.
M. Chevrette: La Loi sur la qualité de l'environnement
a-t-elle l'orientation de sauvegarder les habitats naturels pour la faune?
Cette prérogative ou ce pouvoir relève-t-il de
l'Environnement?
M. Nault: Je dois vous répondre par une comparaison, je
n'ai pas le choix. La loi du feu rouge est-elle faite pour que la personne
arrête au feu rouge? Effectivement, elle est faite pour que la personne
arrête au rouge, mais il y a un biais à la loi qui dit que, si le
gars traverse au feu rouge, il y a de fortes chances qu'il ait un accident.
Donc, par ricochet, la loi du feu rouge a aussi l'effet de protéger les
citoyens des accidents. La Loi sur la qualité de l'environnement a aussi
comme biais de protéger les habitats; cela me semble évident.
M. Chevrette: C'est bien que ce soit le souci constant de
l'Environnement.
M. Nault: C'est le plus grand voeu que je nous fais,
franchement.
M. Chevrette: Si j'avais la conviction aussi forte que vous je
n'aurais pas besoin de me donner de pouvoirs pour
sauvegarder tous les habitats fauniques dans le milieu riverain,
monsieur. Je peux vous dire que je ne présenterais pas une loi pour le
plaisir.
M. Nault: J'espère que le ministère de
l'Environnement aura l'agressivité que vous avez à vouloir
protéger vos propres juridictions.
M. Chevrette: C'est le contraire. Si on est deux à
vraiment vouloir sauvegarder le milieu naturel, ce sera seulement plus
fort.
M. Nault: Mais la loi est déjà là, pourquoi
ne vous en servez-vous pas?
M. Chevrette: Vous êtes un des rares...
M. Nault: M. le ministre, si vous êtes deux à vous
servir de la même loi, des mêmes articles de la loi, cela ne
renforcerait-il pas déjà celle déjà existante? On
parlait de mêler les citoyens; vous allez les mêler davantage en en
faisant deux. Cela me semble évident. Prenez-en une, les articles 20 et
21 sont là.
M. Chevrette: Je pense qu'on ne discute pas du même point.
Je vais vous donner un exemple, moi aussi. Je ne vous donnerai pas l'exemple du
feu rouge; je vais vous donner un exemple bien concret. Il se peut fort bien
qu'il ne se passe absolument rien d'anormal sur le bord d'un des beaux lacs que
vous protégez, la FAPEL, mais que, pour sauvegarder une espèce,
j'aie besoin d'émettre une interdiction de circuler à un endroit
spécifique, le considérant comme zone d'extrême
fragilité. Ce n'est pas la Loi sur la qualité de l'environnement
qui peut empêcher cela; c'est le ministre du MLCP, par sa loi et les
pouvoirs qu'il va se donner dans sa loi. Cette partie, vous ne la comprenez
pas. C'est pour cela que vous me jugez agressif, alors que moi, je vous juge
ignorant de la dimension que je veux apporter.
M. Nault: Je vous juge agressif de vouloir protéger vos
propres juridictions.
M. Chevrette: Mais non, ce n'est pas une question de juridiction,
c'est plus que cela. Je ne cherche pas à défendre ma juridiction
pour le plaisir de défendre une juridiction. Ce que je veux vous
expliquer, c'est que moi, je ne peux pas demander au ministre de
l'Environnement - suivez bien mon raisonnement, vous allez comprendre
-d'émettre une interdiction de non-circulation sur le bord d'un lac.
Lui, tout ce qu'il a à dire: II ne faut pas que cela bouge, il faut que
cela reste naturel, alors que moi, par réglementation, je peux
empêcher toute chasse, tout piégeage, tout trappage, en tout
temps, pendant une période de deux ans, pour une raison X. Si je n'ai
pas le pouvoir, même si j'appelais le ministre de l'Environnement pour
lui dire: Voudrais-tu mettre quelque chose là... Il faut que je
crée l'infraction par rapport à une réglementation et une
réglementation, il faut que j'aie le pouvoir de la faire pour
l'interdire.
M. Nault: FAPEL ne nie pas, non plus, que le ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche puisse se doter de certains pouvoirs
complémentaires pour protéger certains habitats très
spécifiques.
M. Chevrette: Dans ce cas, vous êtes d'accord avec moi?
M. Nault: Mais, on ne travaille pas au plan des cas de
remblai.
M. Chevrette: Non, mais je ne regarde pas qu'un seul cas, je
regarde le tout. Si vous parlez des juridictions, vous avez dit...
M. Nault: Non, non. Il y a déjà quelque chose, la
lumière rouge est là, la lumière rouge protège
l'habitat.
M. Chevrette: Ou bien je vous ai mal compris. Vous m'avez
affirmé tantôt que, pour vous, le milieu riverain n'avait pas
besoin d'être protégé par le MLCP, puisque la Loi sur la
qualité de l'environnement le protégeait déjà.
M. Nault: Dans 80% des cas.
M. Chevrette: C'étaient vos propres mots.
M. Nault: Oui.
M. Chevrette: J'oublie les chiffres. Oublions 80% ou 20%. Ne
serait-ce que 5%, j'aurais le devoir, pour la conservation, de faire quelque
chose. C'est ma prétention.
M. Nault: Dans les cas bien spécifiques comme cela, M. le
ministre, encore une fois, je ne suis pas avocat, mais je suis certain que vous
arrivez au Conseil des ministres et que vous dites: Sur le lac Saint-Georges,
il faut passer un règlement spécial et il faut que cela passe
tout de suite parce qu'il y a une espèce spécifique qui est en
danger. D'abord, les propriétaires autour d'un lac déjà
habité ne seront certainement pas contre votre intervention.
M. Chevrette: Mais pour pouvoir le faire...
M. Nault: Mais vous avez déjà pas mal tous les
moyens pour le faire présentement.
M. Chevrette: Non, il faut que j'aie une loi-cadre me le
permettant.
M. Nault: Oui, mais avec votre loi-cadre, qu'est-ce que vous
allez faire?
M. Chevrette: Je vais m'en servir.
M. Nault: Si vous prenez votre loi seulement pour avoir le cadre
et que, déjà, tout ce qui est dans le cadre est là,
qu'est-ce que cela vaut?
M. Chevrette: Je ne peux pas faire un règlement si je n'en
ai pas le pouvoir par une loi. D'accord? Il faut que j'aie un pouvoir qui m'est
délégué par une loi pour être capable de faire
sanctionner un règlement, c'est bien évident. Je ne dis pas que
la Loi sur la qualité de l'environnement ne m'aide pas, dans bien des
cas; je vous dis que pour avoir des...
M. Nault: Mais le MLCP ne s'est jamais servi de cette Loi sur la
qualité de l'environnement, en de très rares occasions, encore
des occasions peut-être plus disparates que les cas spécifiques
pour lesquels vous voulez faire une loi cadre.
M. Chevrette: Non, d'accord je ne veux pas m'obstiner plus
longtemps. Je ne cherche pas un affrontement, je cherche simplement à
vous dire...
M. Nault: Moi non plus, je ne cherche pas un affrontement; je
cherche à essayer...
M. Chevrette: ... que j'ai des responsabilités que vous ne
semblez pas comprendre, mais cela, c'est votre droit. Je vous remercie.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: M. Nault, lorsque vous faites des demandes
auprès du ministère de l'Environnement, est-ce que vous avez
certains problèmes? Par exemple, vous allez faire venir le
ministère de l'Environnement pour un cas spécifique et il
règle le cas. Dans un autre endroit, pas mal identique, il ne
règle pas le cas. Est-ce que cela vous arrive quelquefois?
M. Nault: Quand on fait affaires directement avec le programme
des lacs, soit à Montréal ou à Québec, au niveau
central, le programme des lacs administré par la Direction
générale de l'aménagement des lacs et des cours d'eau,
l'action est rapide.
M. Houde: C'est rapide, ils viennent vite pour vous dire quoi
faire.
M. Nault: Oui.
M. Houde: Est-ce que cela arrive dans certains cas qu'ils vont
être plus larges que dans d'autres cas? C'est cela que je veux savoir,
parce que j'en ai des problèmes comme cela dans mon comté.
À une place, ils vont tout faire, il vont tout arranger, autrement dit
ôtez-vous, on passe. Mais, dans d'autres cas, il semblerait que la loi ne
serait pas assez sévère. J'ai fait ce que je pouvais faire et
là, mon ouvrage est terminé, arrangez-vous avec. Cela vous
arrive-t-il parfois? (19 heures)
M. Nault: Le programme des lacs présentement travaille de
concert avec les associations qui sont dans le milieu. S'il y a eu un
problème d'interprétation, ce problème a pu exister
à cause d'une des associations qui était peut-être
très inactive à propos d'un lac.
M. Houde: Je vais vous nommer la FAPEL de
Saint-Gabriel-de-Brandon. Avez-vous entendu parler des problèmes qu'il y
avait? Non? Ils ont fait des plaintes et cela a bougé un peu. À
Saint-Gabriel-de-Brandon, la FAPEL a fait des plaintes auprès de
l'Environnement et, à un moment donné, les gens se sont
butés...
M. Nault: Ce n'est pas avec une loi-cadre, non plus du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qu'on va
être capable d'arrêter les régates de
Saint-Gabriel-de-Brandon.
M. Houde: C'est le riverain. Je ne parle pas de régates.
Si des régates ont eu des problèmes, le ministre Léger
m'avait dit dans le temps: Pour autant que les gens respecteront les
règlements pour faire le plein d'essence, comme il faut, je n'y peux
rien, mais, s'ils ne les respectent pas, on va les arrêter. Heureusement,
ils les ont respectés. Je ne parle pas des régates. Ce sont les
riverains du lac Maskinongé. Comme ils n'avaient plus de pouvoir, on ne
peut plus rien faire. Même, on a déjà des lettres qui sont
en cours à l'heure actuelle et cela ne bouge plus; cela fait
déjà quatre, cinq mois. Quelqu'un de l'Environnement m'a dit: Mon
ouvrage est terminé, je n'ai plus rien à faire, bonjour. C'est
pour cela que je vous demandais si vous aviez des cas semblables.
M. Nault: Si on travaille au niveau des cas spécifiques,
on aura des cas spécifiques qui marchent et d'autres cas
spécifiques qui ne marcheront pas. Je ne peux pas vous répondre
là-dessus.
M. Houde: D'accord, merci.
Le Président (M. Paré): Merci, M.
Nault, pour la présentation de votre mémoire.
M. Chevrette: Je peux vous assurer qu'on va travailler en
concertation avec l'Environnement.
M. Nault: Bien, j'espère, parce qu'on va être
là à surveiller afin que les juridictions ne se soient pas
dédoublées.
M. Houde: Vous avez l'air d'un gars qui veut surveiller
aussi.
Le Président (M. Paré): Alors, merci pour la
présentation de votre mémoire.
Maintenant, le mémoire du Club du chien rapporteur de
Montréal, représenté ici par son directeur, M. Denis
Goulet. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui représente le groupe?
Une voix: Ils ne sont pas arrivés.
Le Président (M. Paré): Bon, on va sauter à
l'autre. Je demanderais aux représentants du Cercle canadien du chenil
de se présenter. Messieurs, je vous demanderais de vous présenter
et, ensuite, d'essayer de respecter ce qu'on a dit, 20 minutes de
présentation.
Cercle canadien du chenil
M. d'Etcheverry (Pierre): M. le Président, M. le ministre,
MM. les commissaires, mon nom est Pierre d'Etcheverry, je suis avocat du bureau
de Byers Casgrain. Nous avons reçu mandat du Cercle canadien du chenil
de faire la présentation devant vous, en compagnie du
représentant de ce cercle pour le Québec, en ce qui concerne les
chiens courants de race beagle. Je vais me contenter de résumer
brièvement.
Le Président (M. Paré): Je m'excuse. Est-ce que
vous voudriez présenter la personne qui vous accompagne?
M. d'Etcheverry: Je m'excuse. Il s'agit de M. Germain
Dussault.
Le Président (M. Paré): Merci.
M. d'Etcheverry: Le Cercle canadien du chenil est une corporation
constituée en vertu de la Loi sur la généalogie des
animaux, chapitre L-10 des Statuts refondus du Canada. Il y a
présentement au Canada au-delà de Il 000 membres dont
au-delà de 1000 vivent et résident dans la province de
Québec. Il y a des structures nationales au sein desquelles on retrouve
des représentants des dix provinces canadiennes, de même que des
deux territoires et des structures décentralisées au niveau
local, dont fait partie M. Dussault qui est avec moi.
Ceux qui peuvent devenir membres du cercle sont des associations, des
clubs, des organismes, des individus, toute personne ou groupe de personnes qui
s'intéressent au développement et à l'amélioration
de la race canine au Canada.
Les objectifs du cercle en témoignent très
précisément. Son objectif principal est "l'encouragement et le
développement de la race canine au Canada" par plusieurs moyens, dont
l'un sur lequel j'entendrais insister particulièrement puisqu'il fait
l'objet des représentations qui sont faites ici, c'est-à-dire
l'application de règlements, la surveillance des concours
d'efficacité pour les chiens de race, des concours de chasse
simulée et de l'entraînement des chiens de race. Dans la poursuite
de cet objectif, les membres du cercle veulent et doivent entraîner leur
chien tout au long de l'année. Ils doivent tenir des chasses
simulées tout au long de l'année. Les seuls buts poursuivis, et
il est important de le noter, lors des chasses simulées ou des
entraînements sont de développer les qualités de la race en
question et jamais de tuer ou de blesser l'animal, le petit gibier ou l'oiseau
qui fait l'objet de la poursuite qui est faite par les chiens qui sont
entraînés ou qui participent à des concours, à des
épreuves de pistage.
Depuis 1978, modification de la définition du mot "chasser" dans
la Loi sur la conservation de la faune. Le libellé est à ce point
général et large qu'il est devenu maintenant légalement
impossible d'entraîner régulièrement les chiens de chasse
à toute période de l'année et de tenir des concours et des
épreuves de pistage en d'autres moments que ceux où la chasse au
petit gibier est permise, qui sont loin d'être ceux où il est
préférable de tenir les concours auxquels on se livrait
auparavant et auxquels on se livre dans les autres provinces et territoires du
Canada.
Bien entendu, le cercle ne met pour aucune considération en cause
les objectifs visés par les restrictions législatives et
réglementaires qui concernent la chasse et qui visent les époques
où elle est permise ou défendue et reconnaît sans aucun
doute les bienfaits que ces restrictions ont sur la conservation et la
protection de notre faune. Cependant, il considère que la loi ou la
réglementation devrait permettre l'entraînement et le dressage des
chiens courants, des chiens d'arrêt, des chiens rapporteurs à
longueur d'année et la tenue des concours d'efficacité sur le
terrain à tout moment de l'année pour les cinq raisons suivantes.
Le cercle est d'avis, premièrement, que ces activités ne sont pas
nuisibles à la faune ni à son équilibre. Les chiens
courants qui pistent le lièvre n'attrapent pas le gibier, les chasseurs
ne sont pas armés, les oiseaux qui sont utilisés
pour les chiens pointeurs sont des cailles et des perdrix-bartavelles
qui sont utilisées sans qu'elles soient blessées. Elles sont
étourdies, placées à des endroits stratégiques; ce
que l'on vise, ce n'est pas à tuer l'animal ou à le blesser;
c'est à le faire identifier et localiser par le chien pointeur. En ce
qui concerne l'entraînement ou les concours des chiens rapporteurs, les
oiseaux qui sont utilisés sont des oiseaux d'élevage qui, la
plupart du temps, sont importés, qui ne proviennent pas de notre faune
et qui sont utilisés à l'état mort pour le travail des
chiens et leur entraînement; morts ou vivants, selon les circonstances,
mais de toute façon il ne s'agit pas d'oiseaux provenant de notre
faune.
Deuxièmement, les meilleurs moments de l'année pour la
tenue des concours d'efficacité sur le terrain des épreuves de
pistage sont à des périodes où la chasse aux oiseaux et au
petit gibier est prohibée par la loi actuelle, c'est-à-dire
celles pendant lesquelles il n'y a pas de couvert dans la forêt,
où le temps est frais, en conséquence le printemps,
principalement le mois d'avril. Par ailleurs, il faut bien préciser que
l'entraînement et les concours tenus durant les périodes de chasse
autorisées, qui sont présentement les seules pendant lesquelles
les chasses simulées peuvent être faites, entraînent des
dangers sérieux pour les chiens, pour les entraîneurs de chiens et
possiblement pour les chasseurs qui ne sont pas membres du club. On n'a
qu'à penser aux pièges qui sont tendus par les chasseurs ou les
trappeurs et aux conséquences qu'ils peuvent avoir pour les chiens qui
parcourent la forêt.
Troisièmement, et je tiens à le souligner, ces concours
attirent dans la province de Québec de très nombreux amateurs qui
viennent en grande majorité des autres provinces du Canada, des
États-Unis et souvent d'Europe. Il ne faut pas ignorer l'apport
touristique que cela peut présenter. Les concours durent tous au moins
une journée et plusieurs d'entre eux durent plusieurs jours au cours
desquels les participants doivent, évidemment, se loger et se nourrir
dans la région où se tient le concours en question.
Évidemment, ils vont profiter de leur visite dans la province de
Québec pour jouir de l'environnement touristique immédiat de
l'endroit où ils se trouvent et ils vont occasionnellement, et
même souvent, prolonger leur séjour pour se rendre à
d'autres attractions touristiques dans la province. Il faut bien comprendre
aussi que les régions où on tient les concours de chasse
simulée sont des régions de campagne que le tourisme est moins
appelé à fréquenter, puisqu'on ne fait pas courir des
chiens au centre-ville, mais dans des boisés, dans les campagnes, si
bien que tous ceux qui ont des motels, des petits établissements
d'hôtellerie ou de restauration dans des endroits isolés et qui
annuellement n'ont que quelques occasions pour boucler leur budget pourraient
en profiter davantage si ces concours pouvaient être tenus à toute
période de l'année, s'ils n'étaient pas tenus
outre-frontières, comme nous sommes dans l'obligation de le faire
maintenant, à la frontière de l'Ontario, par exemple.
Il y a dans la province de Québec six clubs de chiens courants de
race beagle qui réunissent environ 200 membres. Chaque club de chiens
courants beagle voudrait tenir chaque année, en avril et en octobre, un
concours d'efficacité qui, bien sûr, est ouvert non seulement aux
membres du club, mais à tous les participants et, en conséquence,
à tous les membres de clubs du Canada et d'ailleurs, en Amérique
et dans le monde. Je vous signale que chaque concours attirait et attire encore
maintenant ailleurs que dans la province de Québec entre 80 et 100
participants dont la moitié viennent de l'extérieur. Il en va de
même pour les clubs de chiens d'arrêt et les clubs de chiens
rapporteurs qui au total tiennent une quinzaine de concours annuels.
Comme la loi actuelle empêche la tenue de ces concours à
tout moment de l'année, la province se prive d'un afflux de visiteurs
imposant dont elle pourrait bénéficier sans pour autant,
croyons-nous, que la faune en soit perturbée. Il faut bien comprendre
aussi que les résidents du Québec qui sont membres de ces clubs
sont désavantagés lorsqu'ils participent à des
compétitions ou à des concours qui sont tenus à
l'extérieur du Québec parce qu'ils sont incapables de
s'entraîner ici à longueur d'année et leurs chiens sont
moins bons. Ils en sont empêchés par nos restrictions
législatives, si bien que les concours sont tenus ailleurs que dans la
province et les Québécois qui s'intéressent au
développement de la race canine sont de plus en plus les perdants.
Le cercle tient à souligner en terminant l'exposé de ses
motifs que la province de Québec est la seule au Canada qui ne permet
pas encore l'entraînement et le dressage des chiens de chasse dans un
cadre contrôlé et la tenue d'épreuves d'efficacité
à n'importe quel moment de l'année par le biais des chasses
simulées. (19 h 15)
Le cercle donne, dans son mémoire, l'exemple du
législateur ontarien qui, en 1980, s'est aperçu de la
nécessité de permettre cela pour les sportifs et les amateurs de
chiens de race et qui leur a permis d'entraîner leurs bêtes et de
tenir des concours d'habileté et d'efficacité sur le terrain, en
permettant le dressage des chiens dans un cadre contrôlé et
à longueur d'année. Les responsables du ministère ontarien
concerné se sont vraisemblablement
appuyés sur des rapports de biologistes qui ont certainement
étudié la question de fond en comble et ils ont reconnu que
l'entraînement et les concours ne nuisaient pas à la faune de leur
province. Nous ne voyons pas pourquoi cela pourrait nuire plus à la
faune de la nôtre qui est, pourtant, assez similaire.
Il faut bien comprendre aussi que plus les chiens de chasse vont
être bien entraînés, plus la race sera de qualité et
meilleurs seront les résultats obtenus lorsqu'on fait de la chasse avec
des chiens pendant les périodes autorisées. Il y aura, en
conséquence, moins de gaspillage et le nombre de prises
rapportées par les chasseurs va certainement être dans une
proportion beaucoup plus près du nombre de coups de feu tirés. Il
y aura moins d'animaux qui ne seront pas rapportés ou identifiés
par les chiens.
En conséquence, le cercle propose un amendement au paragraphe e)
de l'article 1 de la loi, qui est mentionné à la page 10 du
mémoire. C'est une façon d'aborder la question. Ce pourrait
être aussi une exclusion ou une permission par voie réglementaire,
comme le ministre en aura le pouvoir dans la loi, mais peut-être que
cette permission devrait être plus générale que la loi ne
le permet présentement de le faire de façon ponctuelle dans un
processus qui risque d'être parfois trop lourd et certainement
très discrétionnaire.
Alors, voilà pour la présentation du mémoire.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup. Oui?
M. d'Etcheverry: Avant de terminer, M. le Président, je
voudrais déposer, comme je l'annonce dans le mémoire, la
pétition qui a été signée par au-delà de
2000 personnes et qui était adressée au ministre de
l'époque, en avril dernier, M. Lessard, et qui appuie les
recommandations faites présentement dans le mémoire du
cercle.
M. Chevrette: Vous avez le droit de la distribuer. Formellement,
il n'y a pas de dépôt.
Le Président (M. Paré): II ne peut pas y avoir de
dépôt, mais, si vous voulez la distribuer, nous allons la
prendre.
M. Chevrette: Je prends acte que vous me faites parvenir une
pétition.
Le Président (M. Paré): D'accord. Merci pour la
présentation du mémoire. Je demanderais au ministre qui a
reçu la pétition de prendre la parole.
M. Chevrette: Je vous ai écouté atten- tivement,
maître, et vous avez eu soit un lapsus, ou bien vous m'avez ouvert une
porte parce que, dans votre mémoire, vous me dites que,
premièrement, vous demandez que l'entraînement et les concours se
fassent à longueur d'année et, dans la conclusion, vous avez dit:
"dans des périodes déterminées".
M. d'Etcheverry: J'ai dû mal m'exprimer, M. le ministre. Je
pense que le mémoire soutient que les concours puissent se faire
à longueur d'année. J'ai peut-être précisé
dans un cadre contrôlé, cependant. Le contrôle, dans ce que
je voulais souligner, ne visait pas la période.
M. Chevrette: Est-ce que vous considérez qu'au printemps,
en pleine période où la majorité du gibier se reproduit,
il est normal qu'on laisse se tenir les concours, quand même?
M. d'Etcheverry: Je vais laisser M. Dussault répondre
à cela.
M. Dussault (Germain): Oui. Disons que cela s'est fait pendant
maintes années avant sans sûrement nuire à la population du
gibier poursuivi, que ce soit des canards, parce qu'ils se servent des animaux
domestiques. Quant aux lièvres, disons que tout le monde sait que
ça va prendre plus de pressions que les concours qui sont faits par les
beagles pour pouvoir en abaisser la population au point d'en venir à
leur extinction.
M. Chevrette: Mais est-ce que vous ne jugez pas que vous venez
troubler, perturber l'ensemble des animaux qui vivent potentiellement dans un
endroit quelconque en pleine période de reproduction?
M. Dussault (Germain): Disons que le gibier poursuivi, dans le
cas d'un beagle, c'est le lièvre. Les petits levrauts ne laissent pas de
senteur et la mère, non plus, d'ailleurs. Alors, le printemps, c'est
presque toujours le mâle qui sera poursuivi. Je ne crois pas que cela
dérange du tout la faune.
M. d'Etcheverry: D'ailleurs, cela lui fait faire de l'exercice,
ce qui est excellent pour le lièvre.
M. Chevrette: Et cela le rend meilleur en période de
chasse.
M. d'Etcheverry: D'ailleurs, sans tourner la chose en ridicule,
il faut bien comprendre que le lièvre qui est poursuivi par les chiens
est mort de rire. Il ne se fait jamais attraper. Il est aussi fin...
D'ailleurs, c'est un animal qui est poursuivi par tellement de
prédateurs: le renard, le hibou et autres, que ce n'est pas le beagle
qui mange de la moulée en cage pendant toute l'année qui le
dérange beaucoup. Cela lui fait faire un tour dans son bois et il
le sème à volonté. Alors, la perturbation, que ce soit au
printemps ou autre, je pense que...
M. Chevrette: Est-il exact que vous pouvez lâcher en
même temps une centaine de chiens?
M. Dussault (Germain): Dans les concours de beagles, s'il y a de
80 à 100 participants, c'est séparé en quatre classes
différentes. D'abord, il y a deux grandeurs de beagle. Il y a des
beagles qui ont jusqu'à treize pouces de haut et il y a ceux qui ont
entre treize et quinze pouces; ensuite, on sépare les sexes, les
mâles et les femelles ne courent pas ensemble. Cela veut dire que cela
peut être un maximum d'environ 25 chiens.
M. d'Etcheverry: 25 chiens lâchés en même
temps.
M. Dussault (Germain): À la fois, oui. Ce sont des
concours de meutes.
M. Chevrette: La demande spécifique que vous nous faites
ici aujourd'hui, est-ce un cadre Identique à celui qui existait en
Ontario, par exemple?... Vous avez dit qu'il n'y avait aucune province
canadienne qui avait le cadre juridique qu'on avait. Je vous retourne la
question: La demande que vous nous faites et la façon dont vous nous la
faites, le contenu que vous nous demandez, est-ce la même chose que ce
qui existe au Nouveau-Brunswick et en Ontario, par exemple?
M. d'Etcheverry: Ce n'est pas identique, c'est similaire.
M. Chevrette: Est-ce que vous vous contenteriez de quelque chose
de similaire?
M. d'Etcheverry: Sûrement, on serait très heureux de
ce qui est là.
M. Dussault (Germain): Les concours sont ouverts à
l'année. Les gens demandent la permission au directeur régional.
Le directeur régional donne la permission au club en question pour faire
le concours. Le même procédé existe pour l'individu qui
doit demander la permission au directeur pour pouvoir entraîner ses
chiens pour le concours.
M. Chevrette: Merci.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Marquette.
M. Dauphin: Merci, M. le Président. Je tiens
également à vous remercier de votre mémoire. On a fait
allusion à l'Ontario; d'ailleurs, vous y faites allusion à
l'intérieur même de votre mémoire. M. le ministre parlait
du Nouveau-Brunswick, mais dans les autres Législatures provinciales,
c'est permis à l'année aussi, si j'ai bien compris?
M. Dussault (Germain): Oui. Les seules autres provinces où
il n'y a pas de concours de beagles au Canada sont la Colombie britannique,
l'Alberta et la Saskatchewan. Disons qu'elles n'ont pas de participants,
éventuellement, donc pas de concours. Dans toutes les autres provinces -
je suis allé dans toutes les provinces maritimes - au Québec et
en Ontario, c'est permis. Elles font deux concours, d'ailleurs, comme dans
notre demande. Chaque club fait un concours au printemps et un concours
à l'automne.
M. Dauphin: Vous m'excuserez de mon ignorance, mais ici, au
Québec, est-ce que c'est permis à certaines périodes?
M. Dussault (Germain): Ce n'est pas permis présentement au
printemps; c'est permis selon la loi de la...
M. Dauphin: L'automne, c'est permis. Aux États-Unis,
est-ce que c'est la même chose?
M. Dussault (Germain): Aux États-Unis, disons que chaque
État peut avoir son mécanisme différent d'exemption. Cela
dépend des régions.
M. Dauphin: Oui, oui.
M. Dussault (Germain): Oui. Une chose est certaine, par exemple,
tous les États américains ont un mécanisme d'exemption
pour procéder aux concours de chasse simulée.
M. Dauphin: Ici, M. le ministre, à votre connaissance,
qu'est-ce qui motive l'interdiction? Est-ce que c'est le fait qu'au printemps,
effectivement, en période de reproduction, vous considérez que
c'est...
M. Chevrette: II y a aussi un contexte légal. C'est
qu'actuellement la loi ne m'autorise pas à réglementer, si j'ai
bien compris la législation actuelle, de sorte que, face à une
éventuelle législation, il faudrait que je m'attribue le pouvoir
de réglementer d'une façon systématique et
d'établir un mécanisme d'autorisation, comme ils disent sur le
plan. Cela peut être un processus comme celui que vous comparez, soit le
directeur régional qui puisse juger l'opportunité de le faire
selon les régions. Il y a peut-être des régions où
on devra même l'interdire, compte tenu de l'espèce animale qu'on a
sur les lieux. Il y a plusieurs choses
qu'il faut analyser, mais cela est étudié dans le contexte
présent.
M. Dussault (Germain): Moi, j'ai des beagles et je les
entraîne. C'est certain que je n'irai pas dans un bois où il y a
du gros gibier en quantité, évidemment, pour ne pas me
créer de problèmes. Les endroits où on va entraîner
les beagles, en général, sont surtout fréquentés
par le petit gibier, le lièvre, etc. De fait, on s'exclut de tous les
problèmes qui pourraient s'ensuivre si on courait après du gros
gibier ou d'autre gibier.
Le Président (M. Paré): Merci beaucoup de la
présentation de votre mémoire.
J'appellerais maintenant les gens pour la présentation du
mémoire du Club de chasse à courre de l'Estrie. Bonsoir. La
présentation doit être faite par M. Charles Bergeron,
président, accompagné de M. Richard Bergeron, secrétaire.
Allez-y pour la présentation de votre mémoire.
Club de chasse à courre de l'Estrie
M. Bergeron (Charles): D'abord, je veux vous souhaiter le
bonsoir, M. le ministre, M. le Président, MM. les conseillers. Je vous
remercie de nous avoir donné la possibilité de présenter
notre mémoire devant l'Assemblée. Si vous me le permettez, on va
laisser M. Richard Bergeron lire le mémoire tel quel. Il n'est ni
très long ni très compliqué. Cela va raccourcir notre
intervention.
M. Bergeron (Richard): M. le ministre, les dirigeants du conseil
d'administration de notre association réunis lors de leur
dernière assemblée du 14 septembre 1982, tiennent tout d'abord
à vous féliciter de votre récente nomination au sein de
notre Assemblée nationale. Nous espérons que celle-ci apportera
des échanges fructueux pour le bien-être des sportifs du plein air
du Québec.
Notre association a des objectifs similaires à tout autre
organisme représentant certains individus ou associations. Aussi,
ceux-ci sont-ils orientés spécifiquement pour
l'entraînement et la chasse à l'aide de chiens courants, nos
précieux auxiliaires.
À l'aube d'une nouvelle saison, nous avons projeté de vous
soumettre les neuf recommandations suivantes. Première recommandation:
II est recommandé que l'entraînement pour la chasse au raton
laveur au chien courant puisse s'effectuer également dans les zones A3,
B1 et B2. Deuxième recommandation: II est recommandé que
l'entraînement de la chasse au renard au chien courant puisse s'effectuer
également dans les zones A3, Bl et B2.
Troisième recommandation: II est recommandé que la chasse
au raton laveur pendant la nuit soit permise dans les zones Al, A2, A3, A4, Bl,
B2 et E. Quatrième recommandation: II est demandé d'annuler le
procédé d'enregistrement pour pratiquer la chasse au raton laveur
de nuit, le milieu dans lequel se réalise ce genre de chasse
étant dorénavant au courant des habitudes englobant cette
activité sportive. Cinquième recommandation: II est
recommandé, bien que non obligatoire, que le chasseur de raton laveur de
nuit porte une lampe frontale pour plus de sécurité et que la
tension maximale soit de quatre volts. Sixième recommandation: II est
recommandé, pendant la période de chasse, que toute personne se
promenant en forêt, particulièrement (trappeurs, skieurs de
randonnée ou raquetteurs) porte le dossard obligatoire. En effet, ce
sont eux qui sont les plus en danger. Septième recommandation: II est
recommandé de rajouter le Black and Tan à la liste des chiens
pour pratiquer la chasse au raton laveur pendant la nuit. Huitième
recommandation: II est recommandé de considérer l'ours noir
américain comme un animal à fourrure et non comme un gros gibier.
Neuvième recommandation: II est recommandé qu'un service
spécial au sein du ministère du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche soit créé afin que l'autorisation d'offrir certaines
activités - exemple le "field trial" et les concours impliquant les
chiens courants - soit acheminée plus rapidement qu'autrefois.
En vous remerciant d'avance de votre attention, veuillez croire, M. le
ministre, en nos sentiments de haute considération. Le Club de chasse
à courre de l'Estrie Inc.
Le Président (M. Paré): Merci, M. Bergeron. La
parole est à vous, M. le ministre.
M. Chevrette: Je me rends compte, à la lecture même
de votre mémoire, que cela relève beaucoup plus du niveau de la
réglementation que de la législation. Si vous regardez l'ensemble
de vos propositions, je pense que cela nécessite beaucoup plus
d'amendements au règlement que d'amendements à la loi. Donc, vous
savez très bien que les règlements viennent après. Cela
dépend des ministères; pour certains ministères, cela
vient en même temps. Je dis cela pour l'Opposition parce que je sais que
cela va leur faire plaisir. Vous avez des suggestions par rapport à la
réglementation, en particulier. (19 h 30)
Cependant, il y a quand même une couple de choses que je
désire vous demander. Comparativement au chien rapporteur qui, lui, ne
chasse pas, il va cueillir le gibier et l'amène, je me suis
laissé dire que les chiens courants chassaient. Est-ce que je
fais une erreur d'interprétation ou est-ce que ce sont des menteurs qui
m'ont informé?
M. Bergeron (Richard): M. le ministre, je vais laisser le soin au
président de notre association de vous répondre.
M. Bergeron (Charles): D'abord, je désirerais que vous
m'expliquiez ce que vous voulez dire par le terme chasser. Est-ce que vous
voulez dire qu'il attrape la proie ou...
M. Chevrette: II attrape, il gobe oui.
M. Bergeron (Charles): Non. Cela peut se produire, mais ce sont
des cas très rares.
M. Chevrette: Est-ce qu'il poursuit?
M. Bergeron (Charles): Pardon?
M. Chevrette: Est-ce qu'il poursuit?
M. Bergeron (Charles): II poursuit jusqu'à ce que la proie
grimpe dans un arbre. Disons qu'avec la définition actuelle de chasser,
ce serait chasser, si cela reste tel quel.
M. Chevrette: II ne se contente pas d'aller le cueillir.
M. Bergeron (Charles): II ne peut pas l'attraper parce que...
M. Chevrette: C'est cela, mais il vous le met à la
portée de la vue.
M. Bergeron (Charles): II nous le met à la portée
de la vue et c'est à nous de faire le choix de le prendre ou de ne pas
le prendre. L'animal est intact, la seule chose est qu'il va être
essoufflé peut-être épeuré, mais il n'est aucunement
blessé.
Tout dépend du cas. Le trappeur, s'il attrape un raton laveur
dans un piège, même si le raton laveur n'a aucune valeur, il est
obligé de l'abattre. Nous, si on attrape un raton laveur - on appelle
cela un petit "ragoton" de printemps - qui est tout maigre et qui n'a pas de
valeur, on a le choix de le laisser là, on n'est pas obligé de
l'abattre.
La même chose va se présenter pour l'ours ou pour les
autres sortes de gros gibier, comme le lynx, le "bobcat" ou le coyote; ils ne
grimpent pas, c'est certain. Mais lorsqu'on chasse l'ours le printemps qu'on
grimpe une ourse, on a le choix de la tuer ou de ne pas la tuer. Si un trappeur
attrape une ourse dans un piège, je le vois assez mal aller la
déprendre. Il va être obligé de l'abattre. L'an dernier, je
suis allé à plusieurs reprises dans des chasses à courre,
avec des chiens courants à l'ours; je pourrais vous dire que, sur sept
fois qu'on est allés à la chasse, on a abattu deux ours. Les
autres fois, soit on a pris de petits ours qui étaient grimpés
dans des arbres ou des femelles qui avaient eu des petits. À ce
moment-là, si on les tuait, il fallait tuer les petits aussi. Alors, on
ne les a pas tuées, on les a laissées, là. On a pris les
mâles seulement ou les ours assez gros qui valent la peine d'être
chassés. Parce qu'en réalité, le principe de chasser
à courre, ce n'est pas de tuer tout ce qu'on voit ou tout ce que les
chiens peuvent lever; c'est d'être capable, premièrement,
d'entraîner des chiens et de les faire fonctionner au gibier que l'on
veut chasser, puis d'être capable de choisir le gibier que l'on veut
prendre, sans être obligé de l'abattre chaque fois qu'on
lève un gibier.
M. Chevrette: Parlant d'entraînement, pourriez-vous me
donner les modalités réglementaires qui pourraient encadrer
l'entraînement? Est-ce qu'il vous en vient à l'idée?
M. Bergeron (Charles): Pour la chasse au raton laveur de nuit, je
croirais qu'il ne faudrait pas commencer l'entraînement avant le mois de
septembre, premièrement parce que avant cela, un petit raton laveur
né en mai n'a pas grand chance de se sauver d'un chien courant. Disons
qu'au mois de septembre il est capable d'avoir le temps de grimper dans un
arbre avant d'être atteint par le chien. Ensuite, les zones
fréquentées par le raton laveur dans le mois de septembre ne sont
pas encore fréquentées par le gros gibier tels le chevreuil ou
l'orignal. Au mois de septembre, comme cette année, là où
il y avait encore des cerises en quantité, le raton laveur est
demeuré là presque jusqu'au milieu du mois d'octobre. À ce
moment-là, il n'y a pas de danger pour le gros gibier. Je n'ai pas
entendu dire, encore, même en octobre alors que c'est permis
d'entraîner qu'il est arrivé des choses qui pourraient nuire
à la faune ou au gibier existant dans l'environnement.
M. Chevrette: Êtes-vous au courant que, dans votre propre
région, il y a un bon nombre d'organismes et d'utilisateurs qui veulent,
au contraire, soustraire le plus possible les chiens courants de la chasse?
M. Bergeron (Charles): On est au courant. On les a
rencontrés à l'assemblée régionale des associations
de conservation et de chasse et pêche. Disons qu'il y avait une trentaine
d'organismes représentés, ce qui fait à peu près
une soixantaine de candidats qui votaient; quant à nous, nous
étions deux. Quand nous sommes arrivés, comme la chasse à
courre n'est pas très connue dans la province de Québec et
qu'elle est très mal
connue lorsqu'elle est connue, ces gens croient, comme vous le disiez
tout à l'heure, que, lorsqu'on laisse partir un chien courant dans la
forêt pour chasser ou pour l'entraîner, il va tuer tout ce qu'il
voit. Dans cet ordre, on a essayé de s'expliquer devant la
régionale et de faire comprendre ce qu'était exactement le but et
quelle était la façon de fonctionner. On n'a pas réussi,
de toute façon, à faire pénétrer cela. Les
idées étaient faites; on était des nouveaux qui
arrivaient. Peut-être qu'il y avait une lacune du côté de la
fédération des chasseurs avec chiens courants de ce
côté-là, parce qu'il n'y a jamais eu tellement
d'information donnée aux gens sur la chasse à courre et sur la
façon dont cela fonctionne. Alors, les gens sont libres de penser ce
qu'ils veulent et, ne connaissant pas mieux, ils y pensent négativement,
vu que, dans le passé, surtout dans le secteur des Cantons de l'Est, il
y a beaucoup de cas de braconnage avec des chiens dans certaines zones. Les
gens ne l'ont pas oublié. Quand ils voient arriver quelqu'un qui chasse
à courre, ils s'imaginent tout de suite que les gars sont là pour
braconner; c'est automatique. C'est très difficile d'arriver et de
parler avec des gens et de leur faire comprendre cela, à moins de les
prendre un par un et de leur expliquer la chose. À ce moment-là,
le gars comprend, mais, devant toute une assemblée où les gens se
connaissent tous et sont déjà prêts à vous recevoir,
c'est très difficile de s'expliquer.
Lors de cette assemblée, on a rencontré le directeur du
secteur de l'Estrie, M. Bouchard. On lui a posé la question, s'il avait
des causes à présenter à l'assemblée, des cas de
gens qui ont commis une infraction ou qui ont été pris en dehors
des zones ou des limites de chasse ou qui n'avaient pas fait leur
enregistrement. Il n'avait aucune cause à présenter. Moi, je
présume que les gens qui vont à ces assemblées apportent
une opposition assez considérable et qu'il nous est difficile de
renverser. C'est pour cela qu'on a voulu se présenter ici avec un
mémoire, pour expliquer ce qu'il en est exactement. On n'a jamais
refusé de rencontrer ces associations et d'essayer de leur expliquer la
chose. De toute façon, cela n'a pas réussi à passer.
M. Chevrette: Mais on me dit que vous avez passablement raison.
C'est méconnu, c'est un fait. Vous avez du travail à faire pour
vous faire reconnaître effectivement.
M. Bergeron (Charles): De ce côté, il n'y a jamais
eu beaucoup de choses de faites, parce qu'au début on a commencé
à chasser et on ne parlait pas. On n'était pas ennuyé; on
n'avait pas de loi pour ou contre. On fonctionnait avec le garde-chasse, on
l'appelait et on lui disait: On va à un tel endroit ce soir, on va
être là, libre à lui de venir vérifier. À un
moment donné, quand l'association a pris de l'ampleur, on s'est rendu
compte que dans certains endroits, il pouvait y avoir danger que les gens
ambitionnent, parce qu'il n'y avait pas de règlements. Alors, on a fait
une demande au gouvernement pour avoir une réglementation sur la chasse
à courre pour qu'il n'y ait pas d'abus. Tout de suite après
l'adoption de cette réglementation, on est le seul endroit de la
région où on ne peut pas chasser. Nos membres nous ont dit: On
aurait mieux fait de se fermer la boîte et de rester comme on
était. C'est un peu vrai, mais, en réalité, cela aurait pu
donner lieu à de l'abus. On a connaissance qu'en certains endroits il y
en a eu. Malheureusement, les gens n'ont pas été pris, mais on
l'a su et on s'en est occupé.
M. Chevrette: En d'autres mots, vous venez nous dire: On ne veut
pas que la bonne foi pénalise.
M. Bergeron (Charles): Pardon?
M. Chevrette: Vous ne voulez pas que votre bonne foi vous
pénalise.
M. Bergeron (Charles): C'est un peu cela qui se produit.
M. Chevrette: D'accord. Je vous remercie. On va regarder cela de
très près.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Je vous félicite
pour votre mémoire, il n'est pas long, mais il est bon. À la
première page, en bas, à la recommandation 3, je voudrais savoir
si les zones Al, A2 et tout cela, sont aux alentours de Sherbrooke ou bien si
c'est passablement.
M. Bergeron (Charles): Présentement, les zones qui sont
ouvertes à la chasse sont les zones Al, A2 et E sud.
M. Houde: Qu'est-ce que c'est Al, A2? Je ne suis pas
chasseur.
M. Bergeron (Charles): C'est Drummondville jusqu'à Wotton,
si on part de ce côté. Disons que, de Sherbrooke, c'est à
une trentaine de milles. Si on va du côté E, c'est du
côté de Brome, dans ce coin, Granby, là, c'est encore plus
loin.
M. Houde: Vous ne traversez pas le fleuve?
M. Bergeron (Charles): Non.
M. Houde: Bon. D'abord, le trappage que vous faites pour les
ratons laveurs -
dans notre coin, nous appelons cela des chats sauvages, c'est la
même chose - c'est toujours pour la fourrure?
M. Bergeron (Charles): Pour la fourrure.
M. Houde: Toujours pour la fourrure. Est-ce que vous avez
passablement de prises là où il y a du blé d'Inde, du
maïs-grain?
M. Bergeron (Charles): La plupart du temps, étant
donné que la chasse aux ratons laveurs ouvre seulement au mois ne
novembre...
M. Houde: Le maïs-grain est déjà parti.
M. Bergeron (Charles): ... le maïs est déjà
parti. Je sais que, dans la région où nous sommes, nous, les
propriétaires, qui cultivent le maïs-grain ont beaucoup d'ennuis
avec le raton laveur.
M. Houde: C'est pour cela que je vous demandais cela
tantôt.
M. Bergeron (Charles): Ce qui arrive à ce
moment-là, c'est que des gens sont engagés pour le trapper dans
les mois de juillet et août; alors, les fourrures ne sont pas bonnes,
première chose. On le tue absolument pour rien, tandis que nous, on
pourrait l'éloigner facilement, sans le blesser, sans être
obligés de le tuer; il n'y aurait pas de problème, cela
réglerait leur cas.
M. Houde: Je vous remercie beaucoup.
M. Chevrette: M. le Président, moi aussi, je vous
remercie. Ce n'est pas fini?
Le Président (M. Paré): M. le député
de Marquette.
M. Dauphin: J'aurais seulement une petite question, si vous me le
permettez. Dans votre recommandation no 9, vous demandez qu'un service
additionnel soit créé et vous parlez de certains délais
qui seraient très longs. En pratique, quels sont ces délais?
M. Bergeron (Charles): C'est d'environ deux mois.
M. Dauphin: Environ deux mois.
M. Bergeron (Charles): Disons qu'on tient deux
compétitions annuelles l'été, soit dans le mois de juillet
et à la fin d'août. On envoie une demande écrite au
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour avoir
l'autorisation de tenir cette compétition. C'est une chasse
simulée sans armes, sans que l'animal puisse être touché,
on calcule par des points, pour la compétition. Alors si on veut tenir
une compétition en juillet, il faut envoyer une lettre en mai ou au
début de juin.
M. Houde: Cela vous pénalise d'une certaine façon.
C'est pour cela que vous aimeriez avoir une amélioration de service
quant aux délais. Pour vous, qu'est-ce qu'un délai
raisonnable?
M. Bergeron (Charles): Je dirais environ un mois pour qu'on ait
au moins le temps de se préparer, savoir si on peut avoir l'autorisation
et ne pas avoir à s'organiser à la dernière minute.
M. Houde: Je suis persuadé que le ministre en a pris note
et qu'il est d'accord avec vous là-dessus.
M. Chevrette: Effectivement, il y a un rapport qui doit
être produit. M. Lessard avait pris l'engagement de produire un rapport
sur ce que vous dites. Je pense bien que nous serons en mesure de le rendre
public d'ici un certain temps. Il faut d'abord que cela passe à la
Direction générale de la faune. J'en prendrai connaissance et,
ensuite, on le rendra public.
M. Bergeron (Charles): Merci. M. Chevrette: D'accord.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous voulez
conclure?
M. Chevrette: Non. Je voudrais remercier ces gens, mais, comme il
y a un groupe, M. le Président, qui n'est pas arrivé, ce que je
vous suggère et ce que je suggère à l'Opposition,
étant donné qu'il ne reste à entendre qu'un seul groupe,
à qui, par précaution, on a pu avoir dit, comme il était
dans les derniers, qu'il passerait entre 20 heures et 22 heures, c'est de
suspendre jusqu'à 20 heures. À 20 heures, on revient et on
constate si ces gens y sont ou n'y sont pas. Ils doivent être ici au
début des périodes, c'est clair; il n'y a pas d'heure
précise. On leur demande d'être ici à des périodes
fixes; donc, s'ils ne sont pas dans la salle à 20 heures, on ajournera
sine die. Êtes-vous d'accord?
M. Houde: D'accord.
Le Président (M. Paré): Pour commencer, je veux
remercier M. Bergeron pour la présentation de son mémoire
à la commission. Merci beaucoup. Les travaux sont suspendus
jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 19 h 45)
(Reprise de la séance à 20 h 02)
Le Président (M. Paré): D'accord. On reprend les
travaux pour entendre le mémoire du Club du chien rapporteur de
Montréal, représenté par M. Denis Goulet. Je vous invite
à présenter votre mémoire et à présenter la
personne qui vous accompagne.
Club du chien rapporteur de Montréal
Inc.
M. Goulet (Denis): La personne qui m'accompagne est M. Jean
Gélinas, présentement le président du Club du chien
rapporteur de Montréal. M. le ministre, M. le secrétaire de la
commission, messieurs, nous sommes heureux de saisir l'occasion qui nous est
donnée de collaborer humblement à la révision de la loi
sur la faune et de faire entendre un point de vue qui nous tient
énormément à coeur. Ce point de vue touche divers aspects,
dont la récolte de la sauvagine, la récréation de plein
air et la conservation du patrimoine faunique, le tout rattaché à
l'apport que représente le chien rapporteur comme compagnon et
instrument de chasse.
Il est presque incroyable qu'encore en 1982, dans l'esprit de beaucoup
de chasseurs de sauvagine, le chien rapporteur demeure l'apanage de quelques
experts. Pourtant, le dressage et l'entretien d'un chien rapporteur ne
dépassent en rien les capacités de l'ensemble des chasseurs. Au
contraire, en dehors de la chasse elle-même, le dressage contribue
à la bonne forme physique et du maître et de la bête. Il
peut même devenir une passion...
Mais revenons à la chasse. Si, pour rapporter une limite de
canards, soit six, un chasseur doit tuer une douzaine d'oiseaux parce que la
moitié se perd dans les joncs, il s'agit là d'une lourde
hypothèque sur la rentabilité d'une telle récolte, sur sa
valeur sportive et sur le maintien du troupeau de sauvagines. Combien de fois
les propriétaires de chiens rapporteurs ont recueilli au marais de
nombreux canards sans tirer un seul coup de feu, simplement en laissant leur
chien vagabonder dans les joncs. En bref, disons qu'un chasseur qui
possède un chien rapporteur bien entraîné, s'il fait mouche
six fois, se retrouvera avec six oiseaux dans sa gibecière, car son
compagnon les aura récupérés. Alors, le chasseur revient
heureux, son chien saute d'enthousiasme et les oiseaux migrateurs ne subissent
pas de pression inutile. Jusqu'ici, nous avons parlé de la sauvagine,
mais le chien rapporteur est aussi un excellent collaborateur en forêt.
Il n'a pas son pareil pour récupérer les gelinottes
tombées dans les broussailles denses.
Avant de faire un certain nombre de recommandations qui, à notre
sens, contribueraient à rehausser la qualité du sport tout en
favorisant la conservation de la faune, nous voudrions insister sur le fait
qu'il ne faut pas être un expert pour dresser un chien qui est
destiné à devenir un compagnon de chasse. Il n'est pas
nécessaire, non plus, de faire partie d'un club. Les clubs constituent,
cependant, des lieux importants pour rencontrer des cynophiles qui donneront de
précieux conseils aux nouveaux amateurs. En fait, les trois clubs de
chiens rapporteurs du Québec représentent des endroits
d'éducation populaire où les chasseurs apprennent que le seul
plaisir de la chasse n'est pas de tirer, tirer et encore tirer. Les membres des
clubs se font un point d'honneur de respecter la loi, de devenir des amateurs
qui communient avec la nature et qui tentent d'en percer les secrets. Si nos
trois clubs québécois recrutent ensemble quelque 100 membres,
alors que les 16 ou 17 clubs ontariens regroupent plus de 2000 membres, les
conditions de développement des clubs seraient-elles différentes
dans les deux provinces? La réponse est formellement oui. Si nous
désirons vraiment reconnaître le chien rapporteur comme un
véritable outil de conservation, il nous faut absolument poser des
gestes favorisant le fait que nous les retrouvions plus fréquemment aux
côtés des chasseurs.
Première recommandation: Attendu que tout chasseur et chasseuse
ayant acquis les permis nécessaires ont un droit légitime au
plaisir de la chasse; attendu que le plaisir légitime est
constitué de différents actes comme se camoufler appeler,
identifier, juger les distances, tirer, récupérer et enfin
déguster l'oiseau; attendu que les chiens rapportent des oiseaux qui
n'ont pas été abattus par leur propriétaire; attendu que
dans la loi actuelle ces oiseaux rapportés par les chiens doivent
être comptabilisés dans la limite quotidienne des
propriétaires; attendu qu'il est difficile d'évaluer
l'état de conservation de ces oiseaux; attendu qu'ainsi les
propriétaires de chiens sont privés d'un aspect important du
plaisir de la chasse; attendu que les propriétaires de chiens
contribuent largement à la conservation des espèces (lorsqu'on
dit propriétaire, on peut aussi l'entendre au sens de tout chasseur
accompagné d'un chien dûment accrédité) il est
recommandé que tout chasseur accompagné d'un chien de chasse
dûment accrédité voie sa limite quotidienne de possession
augmentée de deux canards de marais.
Deuxième recommandation: Attendu qu'il est reconnu qu'un
très grand nombre d'oiseaux migrateurs tués ou blessés ne
sont pas récupérés; attendu que les pertes sont
particulièrement concentrées dans les endroits où la
végétation aquatique est dense; attendu que les chasseurs dans de
telles situations, même munis de bottes-culottes ou d'embarcations, sont
généralement dans l'impossibilité de retrouver
l'oiseau abattu; attendu que dans ces dites situations le seul
véritable moyen de respecter l'esprit de l'article 42, alinéa a,
du résumé de la Chasse et pêche 1982-1983, qui se lit comme
suit: "II est interdit d'abattre, d'estropier ou de blesser un oiseau migrateur
sans avoir les moyens adéquats pour récupérer un oiseau et
faire tout son possible pour récupérer immédiatement ledit
oiseau", le seul véritable moyen, disons-nous, est que le chasseur soit
accompagné d'un chien rapporteur dûment accrédité,
il est recommandé que des zones géographiques répondant
aux descriptions ci-haut mentionnées soient désignées et
exclusivement réservées à des chasseurs accompagnés
de chiens rapporteurs dûment accrédités.
Troisième recommandation: Attendu que l'on reconnaît
généralement l'utilité pour le chasseur d'être
accompagné d'un chien rapporteur et tout particulièrement dans
les zones ci-haut mentionnées; attendu que ce chien doit posséder
les qualités pertinentes qui lui permettront de jouer son rôle de
conservateur de la faune; attendu qu'il est nécessaire que des gens
compétents portent un jugement sur les capacités de la
bête, il est recommandé que les chiens soient soumis à des
tests d'aptitudes afin d'être accrédités et
enregistrés comme tels et que les clubs de chiens rapporteurs reconnus
deviennent les lieux et agents d'accrédition.
Quatrième recommandation: Attendu que les clubs de chiens
rapporteurs sont des lieux d'éducation populaire; attendu que leur
rôle rejoint la conservation de la faune; attendu qu'à lui seul le
dressage peut devenir un véritable sport et qu'il peut s'exercer aussi
lors de compétitions; attendu que les clubs pourraient devenir les lieux
d'accréditation des chiens de chasse de la sauvagine; attendu qu'il est
démontré par la pratique américaine et ontarienne qu'en
aucun cas de tels exercices de dressage ou de compétition ne menacent la
faune et la flore des lieux; attendu que les chiens rapporteurs dûment
accrédités sont des bêtes dressées et constamment
contrôlées par leur maître; attendu qu'en aucun cas de tels
chiens ne peuvent devenir des chiens errants qui traquent le gibier, il est
recommandé de permettre que des chasseurs accompagnés de chiens
rapporteurs dûment accrédités puissent chasser dans les
parcs et les ZEC du Québec, de permettre en temps opportun la tenue de
compétitions dans les parcs par les clubs reconnus et d'autoriser
à certaines conditions le dressage dans certains territoires
publics.
En conclusion, nous espérons que les membres de la commission
recevront ces recommandations avec une oreille très attentive. D'aucuns
pourraient croire que, dans la démarche de la commission parlementaire,
la nôtre constitue un objet accessoire et qu'elle n'intéresse
qu'un nombre limité de personnes. Au contraire, nous croyons
sérieusement que le chien rapporteur peut devenir un apport sur le plan
de la récréation et surtout sur le plan de la conservation de
notre patrimoine faunique. Respectueusement, Denis Goulet et Jean
Gélinas qui est président du Club du chien rapporteur de
Montréal.
Le Président (M. Paré) Merci beaucoup. La parole
est à vous, M. le ministre.
M. Chevrette: Je vous remercie également. On a failli se
manquer.
M. Goulet: On vous remercie d'avoir attendu.
M. Chevrette: On a présumé qu'on vous avait dit que
vous ne passeriez pas avant 20 heures.
M. Goulet: C'est cela.
M. Chevrette: C'est ce qu'on avait pensé. On a bien
pensé pour une fois. Tout d'abord, je vous ferai remarquer que la
majorité de vos préoccupations se situent beaucoup plus au niveau
de la réglementation qu'au niveau de la loi. La majorité de vos
recommandations se situent très bien dans le cadre des
règlements. Je pense qu'on pourra incorporer bon nombre de vos
recommandations au niveau de la réglementation, mais non au niveau de la
loi.
Cependant, je voudrais vous faire certains commentaires. Vous nous
demandez, par exemple, d'augmenter la limite de prise de un à deux
canards. Je vous ferai remarquer que cela ne relève pas du gouvernement
provincial, mais bien du gouvernement fédéral. C'est la Loi sur
les oiseaux migrateurs, mais je ne sais pas quel article; l'article 4.2. C'est
cela. Vous devrez leur faire des revendications. Remarquez bien qu'on peut vous
aider dans ce sens-là, mais actuellement la limite est de un canard et
cela relève de la Loi sur les oiseaux migrateurs, qui est de
compétence fédérale.
À ma connaissance, rien n'interdit légalement de chasser
dans une ZEC avec un chien rapporteur, sauf qu'il y a une question que je veux
vous poser. Lorsque vous mentionnez le mot "parc" dans votre mémoire,
faites-vous référence à une réserve faunique?
M. Goulet: Oui. Le plus bel exemple qu'on peut prendre dans notre
cas, c'est le parc Plaisance à Montebello qui, je crois, est une
réserve faunique. Lors de nos compétitions, on demande au
ministère la permission d'utiliser les terrains à des dates
où parfois certaines personnes peuvent présumer qu'il y aura des
problèmes au
niveau de la faune. C'est dans ce sens-là que nous l'avons
indiqué, pour pouvoir tenir des compétitions aux périodes
où c'est rentable pour nous. Il y a certains temps de l'année
où il y a de la rivalité avec l'Ontario à cause du fait
que le parc Plaisance est situé à l'ouest du Québec, donc
près de l'Ontario. La comparaison est là. Il y a 16 ou 17 clubs,
alors qu'au Québec nous n'en avons que 3, un à Chicoutimi, un
à Québec et un à Montréal.
M. Chevrette: J'ai demandé si vous faisiez allusion aux
réserves fauniques parce que cela est bien différent. Dans les
parcs, il n'est pas question d'autoriser la chasse, de quelque nature qu'elle
soit. Le parc Plaisance est une réserve faunique, il a le statut de
réserve faunique et on peut avoir là des activités de
chasse et de pêche, alors que dans les parcs on ne permet que la
pêche.
M. Goulet: Comme dans le parc de Mastigouche et le parc de
Joliette, on peut aller à la chasse à la perdrix, mais on n'a pas
le droit d'amener notre chien.
M. Chevrette: Au parc du Mont-Tremblant, il y a eu fusion, il
faut faire attention. Il y a la réserve de Mastigouche, qui est une
réserve faunique, et le parc du Mont-Tremblant, qui est la fusion de
l'ancienne réserve Joliette, un nouveau découpage entre le parc
du Mont-Tremblant et l'ancienne réserve Joliette. Il est
constitué en parc et il n'est pas question de chasser là. Le
nouveau découpage a exclu bon nombre de territoires, cependant. Mais la
réserve de Mastigouche est une réserve faunique.
M. Gélinas (Jean): Mais la majeure partie était le
parc Plaisance à Montebello. C'est notre cheval de bataille.
M. Goulet: Pour nous, c'est l'endroit important pour tenir nos
compétitions en mai.
M. Chevrette: Je voudrais avoir des précisions sur
l'importance de l'entraînement de ces animaux et savoir de quelle
façon l'entraînement et les compétitions diffèrent
de la chasse.
M. Gélinas: Tous les tests que l'on fait lors d'une
compétition sont similaires à la chasse. Si les
compétitions ont lieu, c'est dans le but de forcer les gens à
entraîner leurs chiens et ceci de façon sportive et amicale, dans
le sens que plus la personne va entraîner son chien, meilleure sera la
chasse. C'est dans ce but que l'on fait des compétitions. La
compétition que l'on fait au mois de mai, durant la grande fin de
semaine, c'est une compétition de grande envergure qui implique, quand
même, 250 inscriptions de chiens, ce qui est quand même beaucoup,
et le budget est assez gros.
M. Chevrette: Si je comprends bien, vous ne vous opposez pas
à une réglementation ou à un encadrement.
M. Gélinas: Du tout. On ne s'oppose pas à un
encadrement pour autant que, dans cet encadrement, on ait une place où
on pourra continuer à utiliser nos chiens, ce qui est un apport, je
pense, à la conservation de la faune, à faire
l'entraînement et à tenir nos compétitions. On vous dit
qu'il y a trois clubs au Québec, mais au plan national il y a des
compétitions qui se tiennent pour les chiens rapporteurs. En Ontario, il
y a 16 ou 17 clubs. Pour avoir des chiens compétitifs, on se doit de
faire le plus de compétitions possible et d'avoir l'occasion
fréquemment de concourir avec les chiens. C'est pour cela que l'Ouest du
Québec est très important pour nous, parce que c'est à
proximité de l'Ontario et que les gens peuvent se déplacer plus
facilement. Aujourd'hui, à cause du coût du transport, c'est un
sport un peu dispendieux.
M. Chevrette: Je vous remercie.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: MM. Goulet et Gélinas, je vous remercie du
magnifique mémoire que vous nous avez présenté. Les
recommandations que vous avez faites, nous les avons très bien
entendues, tout comme le ministre, d'après ce que je peux voir. Nous
tiendrons compte des gestes qu'il va poser et on essaiera de faire pour le
mieux à la suite de votre mémoire.
M. Gélinas: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Paré): Est-ce que vous voulez
conclure, M. le ministre?
M. Chevrette: Je vais sûrement conclure. On s'excuse de ne
pas avoir été ici lorsque vous êtes arrivés.
M. Houde: On y était, nous autres.
M. Goulet: On vous remercie de nous avoir entendus et aussi de
nous avoir attendus. M. le ministre, vous avez démontré un
certain intérêt. Le mémoire a été
préparé par deux personnes qui ont écrit un livre au
printemps; Mme Dénommé, qui est avec nous, est une de ces
personnes. On pourrait vous le remettre et, si jamais vous avez quelques
minutes de loisir pour l'examiner, cela vous donnera des exemples concrets de
ce que sont le dressage des chiens et les compétitions. C'est le premier
et le seul
livre sur les chiens rapporteurs en français. Il a
été édité le printemps dernier et Mme
Dénommé en est l'auteur avec M. Langevin.
M. Chevrette: Je vais remercier officiellement Mme
Dénommé et je vous garantis que je vais le lire et vous faire mes
commentaires par écrit.
Mme Dénommé (Noëlla): Cela me ferait bien
plaisir.
M. Chevrette: Je vous remercie infiniment. À
bientôt, j'espère.
M. Houde: M. le ministre.
Le Président (M. Paré): M. le député
de Berthier.
M. Houde: M. le ministre, est-ce que vous auriez
l'amabilité de nous prêter l'exemplaire après ou de nous en
faire faire une copie?
M. Chevrette: Mon cher monsieur, si j'avais la conviction que
l'Oppostion pouvait le lire, cela me ferait plaisir de lui en faire des
photocopies. Mais comme je n'ai pas cette assurance...
M. Goulet: On peut présumer de la chose et en offrir un
à l'Opposition.
M. Chevrette: Vous prenez un très grand risque, mais
ça ne fait rien, je pourrai lui permettre une séance
spéciale pour le lui expliquer. Je vous remercie.
M. Houde: M. le ministre, je pourrais ajouter quelque chose. Je
n'ai pas de fonctionnaire derrière moi. Lui a la chance d'avoir des
fonctionnaires qui vont pouvoir en faire la lecture et lui transmettre
l'information. Moi, il va falloir que je le lise, mais cela va me faire bien
plaisir et je remercie beaucoup les deux dames d'en arrière.
M. Chevrette: Je dois vous dire que ce qu'il vient de dire a
été soufflé par son fonctionnaire.
Le Président (M. Paré): Là-dessus, je
voudrais vous remercier, M. Goulet, pour la présentation de votre
mémoire. La commission ajourne ses travaux jusqu'à mardi
prochain, 10 heures.
(Fin de la séance à 20 h 20)