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Version finale

27e législature, 6e session
(25 janvier 1966 au 18 avril 1966)

Le mardi 8 mars 1966 - Vol. 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

L'assurance-maladie


Journal des débats

 

L'ASSURANCE-MALADIE

(Dix heures et trente de l'avant-midi)

M. BONIN (secrétaire des comités de l'Assemblée législative): A titre de secrétaire des comités de l'Assemblée législative, je demanderais au comité de l'assurance-maladie de bien vouloir élire un Président, un Président conjoint et un secrétaire.

M. HARVEY: Je propose que l'honorable George Marler, conseiller pour la région d'Inkerman au Conseil législatif, et le député de Lévis, M. Roger Roy, agissent comme présidents conjoints du comité de l'assurance-maladie.

M. BONIN: Vous n'avez pas d'objection, messieurs?

M. ASSELIN: Messieurs il me fait plaisir de seconder cette proposition.

M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie): Messieurs, je vous remercie de m'avoir choisi comme Président pour les représentants de l'Assemblée législative et soyez assurés que j'ai été des plus surpris lorsque le député de Jonquière m'a proposé à cette fonction.

Je crois que, d'abord, nous devrions nous choisir un secrétaire pour ce comité. Je suggérerais, si vous n'avez pas d'objections, M. Jacques Morency qui est conseiller juridique au ministère de la Santé et qui est membre du comité de recherches pour l'assurance-santé et qui, j'en suis sûr, serait un aide précieux pour le comité conjoint des deux Chambres.

Messieurs, je demanderais au secrétaire de distribuer les rapports du comité de recherches si des membres n'en ont pas en leur possession. De plus, je suggérerais aussi que les mémoires qui sont présentement déposés chez le greffier des comités, les mémoires des associations ou d'individus, soient distribués à chacun des membres, afin qu'ils puissent en prendre connaissance avant de contacter ou de demander à ces personnes de venir se faire entendre devant le comité conjoint.

M. MARLER: M. le Président, je me demande si je ne peux pas faire quelques suggestions quant aux travaux du comité. J'ai eu l'avantage, hier après-midi, de rencontrer M. Castonguay qui a été le Président du comité de recherches que le cabinet a nommé le 9 avril 1965. Nous avons passé presque tout l'après-midi ensemble afin de discuter des travaux du comité. Evidemment, je dois vous avouer que je suis dans la même situation que les membres du comité, en ce sens que je n'en sais pas plus que vous autres. J'ai parcouru assez rapidement le rapport de onze volumes qui a été déposé il y a quelques semaines. Je ne prétendrai pas que je le comprends parfaitement, mais, depuis que je l'ai lu en fin de semaine, je me suis posé plusieurs questions à savoir de quelle façon le comité doit procéder afin d'accomplir son travail aussi rapidement que possible et, deuxièmement, de le faire de la façon la plus efficace.

Je me disais, après avoir causé avec M. Castonguay hier, que probablement la meilleure chose à faire, comme point de départ, serait de consacrer nos séances, la semaine prochaine, à l'examen du rapport du comité de recherches. Je pense qu'au lieu d'en faire la lecture, volume par volume, au comité, ce qui sera un travail extrêmement fastidieux, il vaudrait mieux que les membres du comité de recherches nous donnent un résumé des explications de chacun des volumes, de façon à ce que, à la fin de nos séances de la semaine prochaine, nous possédions assez bien le contenu des onze volumes qui ont été déposés en Chambre.

En même temps, il faudrait songer aux délégations, aux corps publics qui veulent présenter des mémoires. M. Roy vient d'en parler et M. Castonguay me faisait la suggestion hier, premièrement, que le comité adopte une espèce de formule de convocation et des règlements en ce qui concerne la présentation des mémoires; deuxièmement, que le comité de recherche nous fasse parvenir un résumé et une copie de chaque mémoire déjà présenté, et que nous fixions des séances avec un certain ordre. Je pense que nous pourrons peut-être demander à M. Boudreau, dans quelques instants — parce que M. Castonguay n'a pas pu venir ce matin — de nous donner une espèce d'aperçu des noms des corps publics qui ont déjà présenté des mémoires. Il y en a plusieurs qui s'intéressent à l'aspect assurance, d'autres qui s'intéressent à la partie des soins médicaux, des soins dentaires: les pharmaciens, les maisons qui vendent des produits pharmaceutiques. Je pense qu'il y a nécessairement une division à faire dans les représentations de façon à ce que le comité consacre peut-être plusieurs séances à l'étude de la partie des médicaments, d'autres séances aux dentistes etc. de façon à procéder de la façon la plus ordonnée possible.

Cela m'amène à faire la suggestion suivante aux séances du comité, je vous assure que c'est une suggestion tout simplement. Je pense que nous pouvons siéger deux fois par jour, mardi, mercredi et jeudi, et ne pas siéger le soir. Non pas parce que nous ne sommes pas capables de

siéger trois fois par jour, mais il ne faut pas oublier qu'il y a une tâche qui incombe en même temps au comité de recherches et M. Castonguay m'a exprimé l'avis que ce serait extrêmement difficile pour le comité de tenir tête aux travaux qui vont s'abattre avec trois séances par jour le mardi, le mercredi et le jeudi.

Alors, évidemment je ne pense pas que c'est logique d'adopter une règle définitive et inflexible, mais je pense que de principe nous devons tenir deux séances mardi, deux séances mercredi, deux séances jeudi de façon à ce que tout le monde soit au courant. Et qu'on tâche d'éviter ce que je pourrais appeler des séances surprises, en disant: « Eh bien! on va siéger le vendredi aussi! » Je sais, ayant été député, combien c'est malcommode de ne pas savoir exactement de ce que nous allons faire d'une semaine à l'autre. Alors, si le comité peut accepter cette suggestion, je pense que nous pourrons inviter M. Boudreau à nous exposer brièvement les mémoires que nous avons reçus et nous expliquer en somme l'idée du comité en ce qui concerne la marche des affaires devant ce comité.

M. LE PRESIDENT: Avant que M. Boudreau prenne la parole, je lui demanderais de présenter les membres du comité de recherches sur l'assurance-santé.

M. MARLER: Oui, c'est bien.

M. LE PRESIDENT: ... et ainsi que les collaborateurs dans ce travail.

M. HARVEY: Auparavant il faut s'entendre sur deux séances par jour, mardi, mercredi et jeudi.

M. HARDY: M. le Président, est-ce que cela signifie que nous siégons le mardi matin?

M. HARVEY: Je pense que, pour la plupart des députés, c'est assez difficile de prévoir une séance, pour le mardi matin.

M. MARLER: C'est difficile pour tout ie monde. C'est évident.

M. HARVEY: On serait mieux de siéger le mardi soir.

M. LE PRESIDENT: Pour la journée du mardi, qu'il y ait une séance le mardi après-midi et le mardi soir.

M. MARLER: Parce que, évidemment, la Chambre siège mardi après-midi...

M. HARVEY: A trois heures.

M. LE PRESIDENT: Alors, disons mardi après-midi et mardi soir, mercredi et jeudi matin et après-midi.

M. HARVEY: Cependant pour les séances de l'après-midi, je crois que nous devrons commencer peut-être une demi-heure ou trois quarts d'heure après l'ouverture de la Chambre afin qu'on puisse assister comme députés à l'ordre du jour.

M. VAILLANCOURT: Après l'ordre du jour.

M. MARLER: Cependant cela serait beaucoup plus commode de siéger l'après-midi et le soir, n'est-ce pas, que le matin et l'après-midi.

M. HARVEY: Alors on peut commencer pro forma à trois heures.

M. MARLER: On peut siéger jusqu' à six heures n'est-ce pas et de huit à dix...

M. HARVEY: Pour le mardi.

M. VAILLANCOURT: Le mardi, ce serait trois heures et demie parce que l'on commence à trois généralement. Trois heures et demie à six heures et le soir...

M. MARLER: Le jeudi soir, c'est extrêmement malcommode, évidemment, parce que cela veut dire...

M. HARVEY: Le mercredi soir, la Chambre ne siège même pas. Alors, je crois qu'on devrait s'en tenir à ça, à l'exception du mardi, pour permettre aux députés de l'extérieur de s'en revenir de leur comté, le mardi matin. Les gens de Montréal arrivent vers une heure et demie. On devrait siéger, d'après moi, mardi, dans l'après-midi et dans la soirée, et mercredi et jeudi, en matinée, et l'après-midi.

M. ASSELIN: Le mardi, ce serait à 3 heures trente?

M. CLOUTIER: Le mardi, ce serait à 3 heures trente, et les autres journées, à 3 heures.

M. MARLER: Je n'aime pas beaucoup l'idée de siéger le jeudi soir.

M. VAILLANCOURT: Mardi, 3 heures trente de l'après-midi, huit heures le soir; mercredi, 10 heures trente et 3 heures, le soir, on aurait

congé comme la Chambre; jeudi, 3 heures, le soir à 8 heures; vendredi, 11 heures...

M. CLOUTIER: Non, pas le vendredi.

M. MARLER: Je pense qu'il ne faut pas oublier qu'il y a du travail à accomplir entretemps, je pense qu'on doit supprimer le jeudi soir.

M. VAILLANCOURT: Mais si on passe une motion, on peut laisser la porte ouverte, quitte à ne pas siéger toujours après ça.

M. MARLER: J'aimerais mieux siéger au besoin, mais non pas fixer...

M. ASSELIN: J'aimerais mieux siéger le jour. Jeudi, on devrait siéger dans la matinée et l'après-midi plutôt que le soir.

M. MARLER: N'y aurait-il pas moyen de siéger jeudi matin?

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. VAILLANCOURT: Jeudi matin, oui, et jeudi après-midi...

M. MARLER: Et jeudi après-midi, oui, mais pas jeudi soir. Non, pas jeudi soir?

M. VAILLANCOURT: Moi, j'ai mis les heures comme la Chambre.

M. RENAUD: Mardi après-midi et mardi soir, ça siège en Chambre.

UNE VOIX: Pour ma part, j'aimerais mieux siéger jeudi soir que jeudi avant-midi.

UNE VOIX: C'est embêtant pour beaucoup de gens, vous allez voir des absences assez nombreuses, j'ai peur.

M. MARLER: M. le Président, je ne sais si je puis faire une motion, afin que nous ayons peut-être quelques sujets de discussion quant aux heures de séances, mais je pense que siéger le jeudi soir comporte presque nécessairement des absences parce que, je parle quant à moi, je sais que, si j'étais obligé de passer le jeudi soir à Québec, cela veut dire que je ne pourrais pas revenir chez moi, ça veut dire, vendredi complètement perdu. Maintenant, je comprends que, dans d'autres cas, surtout pour les députés qui sont obligés d'être en Chambre vendredi, ça les dérange beaucoup moins. Mais je me demande si nous pourrions peut-être, comme point de départ, proposer des séances mardi après-midi, disons à trois heures,...

UNE VOIX: Trois heures et trente.

M. MARLER: Disons à trois heures et trente, le mardi soir à huit heures, mercredi à dix heures et demie, à trois heures, jeudi à dix heures et demie et trois heures.

M. HARVEY & DES VOIX: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, je demanderais à M. Thomas Boudreau de présenter les membres de son comité, du comité de recherches ainsi que les collaborateurs de ce comité et de nous faire un bref exposé du rapport. M. Boudreau.

M. THOMAS BOUDREAU: Merci, M. le Président, M. Castonguay me prie de l'excuser. Il aurait bien aimé être ici ce matin, malheureusement des engagements qu'il avait pris il y a très longtemps l'ont empêché d'être parmi nous. Je vous présente d'abord M. Morency, que vous connaissez bien, le secrétaire de notre comité, M. Jacques Casgrain, membre de notre comité, assistant-surintendant des assurances, M. Jacques de la Chevrotière, directeur général aux Services de santé du Québec, membre de notre comité, Mlle Francine Beaudoin, économiste, membre de l'équipe de recherches, M. Guy Demers, sociologue, membre de l'équipe de recherches et M. René Dussault, conseiller juridique auprès du comité.

D'autres membres de l'équipe de recherches n'ont malheureusement pas pu être ici ce matin, il s'agit de M. Lucien Tessier, de Mlle Micheline Nadeau ainsi que de M. Gilles Paquet, professeur à l'université Carleton qui était conseiller économique auprès de notre comité, ainsi que du Dr Pierre Jobin, conseiller médical.

Pour ce qui est du calendrier de travail, je pense que les suggestions suivantes mériteraient peut-être d'être envisagées étant donné les délais qui doivent être observés dans la préparation du rapport final. Il avait été envisagé que d'ici le 15 mars, le comité conjoint pourrait étudier le rapport que le comité de recherches a préparé. Il est édivent qu'à cette occasion, les membres du comité de recherches sont à votre entière disposition pour répondre à toutes les questions que vous pourriez avoir concernant chacun des volumes de ce rapport. Lorsque vous étudierez chacun des rapports en particulier, les collaborateurs qui auront contribué à chacun des volumes seront parmi vous, si vous le souhaitez,

pour répondre à vos questions. Les audiences publiques pourraient avoir lieu du 15 mars au 30 avril. Je pense qu'il faudra envisager le 30 avril comme la limite maximum pour les audiences. Si elles se prolongeaient plus longtemps, il serait peut-être difficile de procéder à temps à la rédaction du rapport. Ceci donne un mois et demi. Mais il faut considérer que pendant ce mois et demi, du 15 mars au 30 avril, il y aura la relâche pour le congé de Pâques. Ceci laisse la période allant du 1er mal jusqu'à une période encore indéterminée. On pourrait peut-être envisager le 1er juin pour la rédaction du rapport final, devant contenir les recommandations relatives au futur régime d'assurance-maladie. Pendant tout le déroulement des travaux du comité conjoint, le comité de recherches offre évidemment sa collaboration et nous faisons les suggestions suivantes sur la forme que pourrait prendre cette collaboration: Nous avons songé à préparer, pour chacun des organismes qui comparaîtraient devant vous, un dossier qui vous sera remis quelques jours avant que l'organisme soit convoqué, dossier qui comporterait les documents suivants: d'abord une liste des membres de la délégation qui comparaîtra, ensuite, certains renseignements relatifs à l'organisme, par exemple, l'âge de l'organisme, quels sont ses buts, quels éléments de la population, de la société il représente, ensuite certaines notes ou un très court résumé du mémoire que ces organismes vous soumettent, et enfin, une liste de questions que la lecture des mémoires a pu soulever ou des questions que vous aimeriez poser à ces délégations. Par ailleurs, au comité de recherches, nous avons organisé une équipe de travail qui procèdera le plus rapidement possible à l'analyse des mémoires afin justement de préparer ces questions et de codifier ces mémoires sous une forme qui pous permettra de les utiliser plus facilement, au moment de la rédaction du rapport.

Enfin, si vous le jugez opportun, le comité de recherches est à votre disposition pour préparer un projet de rapport qui vous sera soumis et à partir duquel vous pourrez retrancher, ajouter, modifier et qui pourra constituer éventuellement avec le travail que vous y ferez, le rapport du comité conjoint.

Pour ce qui est du calendrier des audiences, nous avons déjà, grâce aux lettres qui ont été envoyées par les organismes qui ont exprimé le désir d'être entendus, nous avons pu regrouper tous ces organismes en un certain nombre de catégories de telle sorte qu'il soit possible de les convoquer dans un ordre qui sera assez logique et qui permettra de recevoir en même temps les organismes qui ont des intérêts com- muns, ce qui permettra de moins disperser l'attention.

Voici, en premier lieu, la façon dont nous avons cru possible de regrouper ces organismes. Ils sont regroupés en huit catégories. D'abord, les consommateurs de soins et les contribuables. Du côté des contribuables, jusqu'ici, seulement la Chambre de commerce a exprimé le désir d'être entendue. Le premier groupe, consommateur de soins contribuables regroupera les syndicats ouvriers, par exemple, et la Chambre de commerce. Ensuite, les assureurs. Deux organismes ont exprimé le désir d'être entendus, ceux que j'ai mentionnés; C.Il.LA., Canadian Health Insurance Association, et la Croix-Bleue; ensuite les institutions hospitalières, ensuite les professions de la santé que nous avons mises en deux groupes; le premier: médecins, dentistes et pharmaciens et le second groupe: les para-médicaux, les para-dentaires et extra-médicaux, par exemple, les techniciens, les thérapeutes, chiropraticiens, etc.,

Cinquième groupe; les producteurs et détaillants de produits pharmaceutiques.

Sixième groupe; les organismes bénévoles.

Septième groupe; les individus.

Et enfin, divers; ceux que nous n'avons pu classer dans un des groupes précédents.

Comme, calendrier d'audience, maintenant, une suggestion. Ce serait de rencontrer d'abord, le groupe des assureurs. Je pense que c'est une occasion d'obtenir une vue assez générale de l'ensemble du problème et de ses complexités administratives. Dans ce groupe, deux organismes ont exprimé le désir d'être entendus. Ils pourraient être les premiers, soit la Croix-Bleue et la Canadian Health Insurance Association.

Ensuite pourraient venir les consommateurs de soins et les contribuables dont la Chambre de commerce qui comme j'ai mentionné, a exprimé le désir d'être entendue et j'imagine qu'on peut s'attendre à des mémoires de syndicats, comme la CSN ou la FTQ.

En troisième lieu, pourraient venir ensuite les gens qui apporteront des problèmes un peu plus techniques, un peu plus précis; les professions de la santé. A ce jour nous avons un bon nombre de mémoires de ces groupes. Par exemple, l'assocaition médicale de la province de Québec a soumis son mémoire de même que la société dentaire de Québec, l'association des pharmaciens d'hôpitaux, et le collège des pharmaciens et aussi un certain nombre de professions para-médicales.

Par la suite, pourraient venir dans l'ordre, les institutions hospitalières, les producteurs

et détaillants de produits pharmaceutiques, les organismes bénévoles, les individus et les groupes divers.

M. VAILLANCOURT: Combien y a-t-il d'organismes qui ont soumis leur mémoire?

M. THOMAS BOUDREAU: Actuellement, nous avons reçu vingt-deux mémoires. Au total, une trentaine d'organismes ont exprimé le désir d'en soumettre. Je pense qu'on peut s'attendre à un maximum de cinquante. Je serais surpris que cela dépasse cinquante. Et en général, pour vous rassurer, ils sont assez courts.

M. BERTRAND: Est-ce qu'il y a une date limite?

M. THOMAS BOUDREAU: Voici, comme je le mentionnais tout à l'heure, pour ce qui est des audiences d'une part, je pense que ce serait difficile que ça dépasse le 30 avril. Mais maintenant, pour pouvoir établir le calendrier le plus rapidement possible, je pense que les gens devraient être avisés d'une façon ou d'une autre que ceux qui désirent soumettre un mémoire devraient en exprimer l'intention, au plus tard, d'ici le 11 du mois courant, et le faire parvenir, au plus tard, le 18 du mois de mars. Enfin, je pense que ce n'est pas un délai trop court. Depuis l'automne dernier, des déclarations dans les journaux ont paru, disant que la date limite serait vers la fin de janvier. Je pense maintenant que les gens qui avaient l'intention d'en préparer, doivent être à peu près prêts. Il s'agit, maintenant, je pense de fermer l'échéance à ce sujet-là et je pense bien que le 11 mars, pour exprimer le désir de soumettre un mémoire, et le 18 pour les faire parvenir, cela devrait être suffisant. Ce qui permettrait d'établir, dès la semaine prochaine, le calendrier.

M. BERTRAND: Est-ce que ces mémoires sont longs?

M. THOMAS BOUDREAU: En général, ils sont assez courts.

M. BERTRAND: Assez courts.

M. THOMAS BOUDREAU: Assez courts, oui, deux que l'on a reçus jusqu'ici du moins.

Maintenant, un dernier détail. Nous avons pris contact avec les gens qui ont accompli un rôle un peu semblable au nôtre auprès de certaines commissions, en particulier la commission Laurendeau-Dunton. Ils nous ont affirmé que le dé- roulement des audiences est une chose assez importante et ils ont suggéré, par exemple, de dire aux organismes qui viennent de ne pas lire le mémoire devant le comité, ce qui est une perte de temps qui peut être assez longue, puisque les mémoires ont déjà été distribués, et que les membres les ont à leur disposition. Les audiences doivent surtout servir à poser des questions et à échanger des opinions. Nous avons donc préparé un projet de lettre de convocation qui vous sera soumis et dans laquelle on mentionne que les organismes invités auront quelques minutes au début pour exposer rapidement leur point de vue, le but de leur visite et qu'ensuite, il y aura une période de questions. Je pense que ceci fait le tour de la question.

M. COITEUX (Duplessis): Combien de temps à l'avance ces mémoires seront-ils distribués?

M. THOMAS BOUDREAU: Je pense qu'étant donné que plusieurs mémoires sont arrivés, il y aurait peut-être lieu de les remettre à mesure qu'ils arrivent. Donc dès maintenant pour ceux qui sont arrivés.

M. MARLER: De façon à ce qu'on les ait avant la séance.

M. THOMAS BOUDREAU: Oui, et là, comme je vous le disais tantôt, pour les dossiers d'information sur chaque organisme, il est difficile de vous les remettre dès maintenant parce qu'ils ne sont pas prêts. Mais on commence à les monter et j'espère qu'au moins deux ou trois jours avant la convocation, pour chacun de ces organismes-là, nous pourrons vous les remettre. Mais ce sont des dossiers très courts de deux, trois ou au maximum quatre pages, juste pour donner l'information minimale sur l'organisme qui se présentera devant vous.

M. HARVEY: C'est bien ça.

M. MARLER: M. Boudreau, voulez-vous nous donner lecture du projet de lettre que vous devez envoyer aux différents organismes parce que je pense que le comité doit se prononcer sur la forme de la lettre de façon à ce que l'on s'entende sur la réglementation qu'on semble y suggérer.

M. THOMAS BOUDREAU: Alors, voici la lettre: « Le comité conjoint sur l'assurance-maladie serait heureux de recevoir des représentants de votre organisme le 15 mars, ou à une date appropriée, à 2 h p.m. dans la salle du comité des bills privés, édifice A, Hotel du gouvernement,

Québec. A cette occasion, une seule personne sera autorisée à agir comme porte-parole pour votre groupe et elle pourra évidemment faire appel à d'autres personnes, si elle le juge nécessaire. Une période de dix minutes est prévue au début de la séance pour la présentation de votre mémoire. Il ne sera pas nécessaire d'en faire la lecture car les membres du comité auront déjà eu l'occasion d'en prendre connaissance. Cette présentation, de même que la discussion qui suivra, pourront se faire en français ou en anglais. Veuillez donc nous faire parvenir le plus rapidement possible le nom des personnes qui vous représenteront, leur titre au sein de votre organisme et le nom de celle que vous désignerez comme porte-parole officiel. Si la date et l'heure que nous vous proposons ne vous conviennent pas, veuillez nous en aviser immédiatementpar téléphone, au numéro suivant: 693-6300 ».

M. LE PRESIDENT: Adopté. Est-ce que les dates limites sont acceptées pour la présentation des mémoires?

M. VAILLANCOURT: Vous avez dit le 18 mars?

M. LE PRESIDENT: Le 11 mars pour aviser de leur intention de présenter un mémoire et le 18 mars pour présenter le mémoire. Est-ce adopté?

M. MARLER: La seule question que je me pose, c'est de savoir si le délai jusqu'à la fin de la semaine prochaine n'est pas un peu court. Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux dire le 15 mars et, disons, le 21 mars. Effectivement, il n'y a pas de différence, sauf que le délai semble très court. Il faut que vous décidiez d'ici à la fin de la semaine prochaine si vous allez venir et deux ou trois jours...

M. ASSELIN: Il faudrait leur donner quinze jours.

M. MARLER: Je pense que le comité ne doit pas s'exposer à la critique et fermer la porte très brusquement et avec très peu d'avis.

M. BERTRAND (conseiller législatif): Mais est-ce que pendant cette période-là, on va demander à ceux qui ont déjà présenté des mémoires de venir?

M. MARLER: Oui. Le temps ne sera pas perdu.

M. COITEUX (Duplessis): Maintenant pour ce qui est de la façon d'aviser les intéressés, est-ce que vous allez publier un avis général dans tous les journaux de la province? Dans les endroits reculés, allez-vous publier un avis dans les journaux locaux?

M. MORENCY: Voici, messieurs. On a déjà publié deux annonces dans les journaux, il y en a eu une au mois d'octobre pour demander aux gens de préparer des mémoires; j'ai les texte ici. il y en a eu une autre en janvier qui disait en substance ceci: Déclaration du premier ministre...

Alors, c'était une déclaration que le premier ministre a faite le 25 novembre concernant les mémoires et dans laquelle il disait justement que les gens pourraient venir présenter un mémoire, etc. Puis les dates d'audition seront sans doute fixées par le comité conjoint de l'Assemblée législative et s'adressent au comité et des autres intéressés. Alors il y a eu deux annonces dans tous les quotidiens de la province. Déjà il a été dit aux gens de se préparer, à la télévision et à la radio.

M. BERTRAND: Dans les quotidiens.

M. MORENCY: Oui, dans les quotidiens. J'ai la liste des quotidiens qui les ont publiées.

M. BERTRAND: Ils ne sont pas tellement nombreux.

M. MORENCY: Non, il n'y en a pas tellement. Cela, c'est jusqu'au mois de janvier et au mois d'octobre.

M. THOMAS BOUDREAU: Pas de pression spéciale sur les hebdos?

M. MARLER: Je pense qu'il serait utile, comme précaution, de publier des avis semblables. Proposez-vous que ce soit publié dans tous les hebdos du monde?

M. LE PRESIDENT: Je trouve que la proposition que vous faites donnera plus de sens...

M. RENAUD: Plus de latitude.

M. LE PRESIDENT: ... M. Boudreau est-ce que le 19 mars...?

M. RENAUD: Si on s'entendait sur le principe de quinze jours de délai pour manifester l'intention...

M. LE PRESIDENT: Quinze jours cela veut

dire le 17, ou le 25. Cela fait trois semaines pour présenter le mémoire. Cela serait suffisant. Entre le 18 et le 25.

M. LE PRESIDENT: Cependant messieurs, il serait bon de savoir de quelle manière nous allons aviser les associations, d'une date limite pour leur intention de soumettre un mémoire et d'une date limite pour l'entrée du mémoire. Est-ce par annonce?

M. MARLER: M. le secrétaire attire mon attention sur un fait brutal: c'est que le comité n'a pas d'argent à sa disposition.

M. VAILLANCOURT: Je croyais que les journaux publieraient cela gratuitement.

M. BERTRAND: Je pense que le comité pourrait demander aujourd'hui dans son rapport de bien mentionner que les journaux couvrent la séance de ce matin. Je crois que ce serait suffisant.

M. MARLER: On a besoin de la collaboration gratuite des journaux.

M. CLOUTIER: Des quotidiens.

M. MARLER: Je pense que si les journaux voulaient publier cette décision... on en parlera en Chambre peut-être. Il y a un rapport préliminaire du comité, qui sera présenté en Chambre surtout pour faire rapport de l'élection des Prési- dent et secrétaire et on pourrait peut-être saisir cette occasion pour mentionner les dates limites.

M. LE PRESIDENT: Oui, présenter cela à la Chambre.

M. BERTRAND: D'ailleurs tous les journaux vont accepter là.

M. MARLER: Et tous les hebdos évidemment aussi.

M. LE PRESIDENT: Cependant vous remarquez que ce matin, il y a enregistrement de l'organisation du comité.

Il y aura aussi, je pense bien, enregistrement lorsque nous entendrons chacun des représentants des associations qui présentent des mémoires ainsi que, si nous avons besoin de les faire paraître, les représentations des officiers supérieurs de certains ministères.

M. BERTRAND: M. le Président, est-ce que je pourrais vous interrompre? C'est que les journalistes, en arrière de moi, voudraient savoir exactement ce qui a été décidé au point de vue des dates, il semble y avoir de la confusion.

M. MARLER: Oui. C'est très compréhensible.

M. LE PRESIDENT: La date limite pour les associations qui ont l'intention de présenter un mémoire; le 18 mars, et la date d'entrée du mémoire: le 25 mars, date limite pour l'entrée des mémoires. Et ces mémoires doivent être présentés en cinquante copies, je crois, tel que mentionné dans la déclaration du premier ministre, lorsqu'il a décidé de former un comité conjoint.

Au sujet de l'enregistrement des discussions, tel que je viens de vous le mentionner, ça se fera lorsqu'il y aura présentation de mémoires,ou lorsque nous demanderons à un officier supérieur d'un ministère de venir répondre à des questions que nous aimerions lui poser pour compléter notre information. Cependant, si l'occation se présente, lorsque nous siégerons in camera, si nous avons, peut-être, des informations confidentielles à demander à certaines personnes, par exemple à un membre du comité de recherche, je demanderais que le secrétaire nous soumette des minutes pour ces séances-là, et ces minutes seront distribuées à chacun des membres du comité afin que nous ayons un dossier complet des séances qui sont tenues in camera et en audience publique, lorsqu'il y a enregistrement.

J'ai eu un entretien avec M. Massicotte qui s'occupe de l'enregistrement, et il m'a informé qu'à chaque journée nous pourrons avoir le brouillon des débats. Cependant, quant à l'impression de ces débats, je crois que cela pourrait retarder un peu, à cause de l'immense travail que cela occasionne à tout ce personnel qui doit enregistrer à la Chambre en même temps qu'ici, lorsque nous siégerons dans l'après-midi. Mais il offre la collaboration de ses employés, et il m'a assuré que cela donnera satisfaction aux membres du comité conjoint.

M. MARLER: Cela nous donnera en même temps l'occasion de repasser le compte rendu de tout ce que nous avons dit.

M. LE PRESIDENT: Sûrement.

M. MARLER: Alors, M. le Président, si je comprends bien la situation, le travail d'organisation est plus ou moins accompli et, à la prochaine séance, mardi après-midi, je suppose que

nous devons attendre, de la part des membres du comité de recherche, non pas tout simplement un exposé très sommaire, mais une exposition qui pourrait peut-être remplacer la lecture de chacun des volumes et c'est à ce moment-là, n'est-ce pas, que les membres du comité pourront poser aux experts des questions qui ressortent presque nécessairement de l'exposé du document. Je pense bien que c'est ça que M. Boudreau... M. Morency m'a dit qu'il espère que le sommaire qui doit être donné au comité ne doit pas remplacer la lecture des onze volumes par chacun des membres du comité, surtout le volume onze.

Alors on va proposer l'ajournement. Je pense que nous allons convoquer les gens pour la semaine du 15.

M. LE PRESIDENT: Cependant, j' aimerais aussi vous faire remarquer que le secrétaire m'a dit qu'il aurait besoin d'une secrétaire afin qu'elle puisse prendre les notes nécessaires, lors de nos discussions. Actuellement, nous n'avons personne. Je pense que je pourrais me charger de demander au Président de la Chambre de nous fournir les fonds nécessaires pour l'engagement de cette personne. Avez-vous d'autres questions concernant l'organisation du comité?

M. CLOUTIER: Il serait peut-être bon, à la fin de chaque séance, de prévoir l'ordre du jour de la séance suivante...

M. LE PRESIDENT: Oui, oui.

M. CLOUTIER: ... pour savoir un peu à quoi s'en tenir, pour planifier un peu notre travail et savoir si on a du travail spécial à préparer en vue de la séance suivante. Ainsi on s'attachera plus particulièrement à ce point-là.

M. LE PRESIDENT: Lorsque nous convoquerons les associations devant le comité, je crois qu'il va falloir tracer le programme une semaine à l'avance, afin de les diviser et puis de constater si ces gens peuvent venir se faire entendre.

M. CLOUTIER: Même avant les séances. M. LE PRESIDENT: Ah oui!

M. MARLER: Et je suppose que fatalement on va se tromper, on va s'attendre à ce que quelqu'un prenne toute la soirée, puis il va peut-être prendre la moitié seulement,

M. LE PRESIDENT: C'est ça.

M. MARLER: En d'autres cas, au lieu de prendre seulement un après-midi, ça va aller à deux ou trois...

M. CLOUTIER: Oui, oui, ça peut être assez flexible. Mais tout de même, d'une manière générale, il faudrait...

M. BERTRAND: C'est possible que les gens ici, à un moment donné, s'il reste deux associations, et, si ça représente trois quarts d'heure, que ça continue un peu plus tard.

M. VAILLANCOURT: Il faut laisser guider l'organisation...

M. MARLER: Je pense qu'on devrait commencer, n'est-ce-pas, avec la Croix-Bleue et ensuite le Canadian Health Insurance Association. Est-ce qu'on peut, peut-être, compter que nous pouvons prendre la Croix-Bleue, la Canadian Health Insurance Association et la Chambre de Commerce: trois séances sur les journées des 15, 16 et 17.

M. THOMAS BOUDREAU: Plus que ça, je pense.

M. MARLER: On pourra peut-être laisser ça au secrétariat, parce qu'il pourrait s'arranger avec les organisations pour savoir combien de temps elles vont prendre. Et il y a peut-être des gens qui pourraient parler sans long avis et ils pourraient boucher des trous si nous en avons.

M. MORENCY: Monsieur, est-ce que vous voulez les avoir? Disons qu'on les aurait le 15 ou le 16, et non le 17 ou en avoir...

M. THOMAS BOUDREAU: Je pense que l'on pourrait en avoir deux mardi après-midi, peut-être autant le mercredi et puis le jeudi en avoir peut-être trois, un le matin et deux l'après-midi. Ou le mardi, au début de l'après-midi, il pourrait y en avoir un et ensuite le soir; nous pourrions en avoir mercredi et en avoir jeudi.

M. MARLER: Moi, je pense que ce serait préférable le mercredi parce que si...

M. MORENCY: Mardi, mercredi, le 15 est disparu... c'est toujours plus long qu'on ne le pense, parce que les questions amènent d'autres questions, alors le 15 ou le 16. On doit peut-être avoir une séance additionnelle avec le comité des recherches, n'est-ce pas, pour discuter...

M. LE PRESIDENT: Je suggère que le 15 et le 16, nous convoquions les premières associations et je demanderais à M. Boudreau de déterminer quels seraient les organismes qui pourraient venir se faire entendre durant ces journées et garder le jeudi comme soupape en cas d'un besoin de temps plus grand pour la présentation des mémoires. Est-ce que vous croyez que le travail pour la semaine du 15 vous conviendrait?

M. HARVEY: Quels seraient les organismes qui viendraient le 15?

M. LE PRESIDENT: Je demanderai à M. Boudreau de nous donner une idée des organismes qu'il pourrait convoquer dans cette semaine, du 15.

M. THOMAS BOUDREAU: Dans la semaine du 15, ce sera la première semaine qu'on siégera.

UNE VOIX: Mardi en 15.

M. THOMAS BOUDREAU: Disons qu'en gros, il me semble possible peut-être de recevoir quatre, au maximum cinq, mais probablement environ quatre organismes cette semaine-là. Alors il y aurait d'abord Croix-Bleue et Canadian Health Insurance Association et ensuite viendrait la Chambre de commerce qui, elle aussi, a un point de vue assez général sur la question. Et par la suite, s'il y a du temps, alors là dans l'ordre de ceux que l'on connaît maintenant: l'Association médicale de la province de Québec, qui est la branche provinciale de l'Association médicale canadienne, la Société dentaire de Québec, et je pense bien que ce sera la limite. S'il y avait encore du temps, ensuite viennent l'Association des pharmaciens d'hôpitaux, le Collège des pharmaciens. Mais je pense que ce sont les organismes, les premiers surtout, qui pourraient être entendus.

M. VAILLANCOURT: Mais la semaine prochaine...

M. MARLER: Quatre ou cinq...

M. THOMAS BOUDREAU: Le 15... Je pense bien que ça va être i peu près quatre. Je vais regarder de nouveau les mémoires, le temps qu'on imagine que ça prend, quels sont les mémoires très importants. S'ils ont beaucoup de choses à ajouter, il faudrait prévoir peut-être toute une demi-journée, de trois heures à six heures, sinon, eh bien! peut-être qu'on peut en mettre deux si c'est plus court, alors c'est pour ça que j'hésiterais à dire si c'est quatre ou cinq.

M. HARVEY: Ce serait quatre pour la prochaine.

M. THOMAS BOUDREAU: Alors quatre peut-être

M. HARVEY: Alors ce seraient la Croix-Bleue, Le Canadian Health Association, la Chambre de commerce de la province...

M. THOMAS BOUDREAU: Et ensuite l'Association médicale de la province de Québec.

M. VAILLANCOURT: A quelle date, ça? MM. HARVEY et BOUCHARD: Le 15 et le 16.

M. RENAUD: Est-ce que vous avez les mémoires?

M. HARVEY: Alors, la Société dentaire de Québec ne sera pas convoquée pour le 15.

M. THOMAS BOUDREAU: Non. Il se peut que l'ont ait le temps, mais s'il était possible là, ce serait la cinquième qui pourrait être là dans cette semaine.

M. MARLER: Je pense que l'on pourra recommencer la semaine prochaine, n'est-ce pas, avec toute l'affaire...

M. LE PRESIDENT; Cependant, pour terminer notre réunion de ce matin, je demanderais à M. Boudreau de nous faire un exposé sommaire du rapport qui a été préparé par les experts et si vous avez des questions à lui poser, je suis sûr qu'il se fera un plaisir de vous donner les réponses appropriées. M. Boudreau.

M. THOMAS BOUDREAU: Merci, M. le Président. Ainsi qu'on l'a déjà mentionné, la semaine prochaine nous serons à votre disposition et étant donné le nombre de séances prévu, six environ, l'on peut compter qu'à ce moment-là une moyenne de deux volumes par séance pourrait être discutée et, évidemment, nous serons à votre disposition pour en discuter avec vous. Maintenant je pense, ainsi que le mentionnait M. Morency qu'il y aurait grand profit à faire précéder ces réunions-là de la lecture des mémoires, en d'autres mots, à en faire au moins une lecture rapide. C'est pour ça que je pense qu'il serait peut-être intêres-

sant, non pas d'en faire maintenant un résumé, mais d'essayer d'exposer de quelle façon nous avons conçu l'ensemble parce que, même si c'est dix pièces séparées, il existe un certain lien dans tout ce travail-là.

Le problème que nous nous sommes posé, étant donné que nous n'avions pas de recommandation à faire, mais que nous devions essayer au départ de déblayer le terrain, c'était d'essayer d'apporter des éléments de solution aux problèmes suivants; premièrement, quelle quantité de ressources doivent être mises dans le domaine de la santé, par les individus et par le gouvernement, et deuxièmement, comment les services doivent être organisés pour être le plus efficaces possible.

Je pense que dans cette optique-là, le volume crucial et peut-être le plus important, ce serait le volume No 7. Malheureusement, peut-être le trouverez-vous un peu aride; il est peut-être écrit dans un langage un peu compliqué, mais je pense que malgré tout, surtout vers la fin, vous allez voir qu'il débouche sur des conclusions passablement concrètes. Le problème qu'on essaie de résoudre dans ce volume-là, c'est justement de fixer quels sont les critères en vertu desquels on peut choisir tel type ou tel autre type d'intervention du gouvernement; quels sont les critères en vertu desquels on peut choisir de mettre telle quantité de ressources plutôt que telle autre dans la santé; quels sont les critères en vertu desquels on peut choisir si on doit assurer tel soin plutôt que tel autre; jusqu'où on doit aller et comment tout le système doit être organisé.

Evidemment, ces critères-là ne peuvent pas fonctionner à vide, mais s'insèrent dans un contexte socio-économique très défini et c'est pour ça que tout l'ensemble des autres volumes a pour but d'examiner ce contexte-là. Alors les premiers volumes, je saute le 1, j'y reviendrai tout à l'heure, les volumes 2, 3, 4 et 5 sont descriptifs et donnent un aperçu du contexte qui existe maintenant. Comme par exemple le volume 2 qui décrit ce qui existe maintenant dans les domaines public et privé pour ce qui est de l'assurance-maladie et des régimes de soins et le volume 3 qui donne un aperçu des aspects constitutionnels, enfin certains problèmes relatifs aux relations fédérales-provinciales.

Le volume 4 nous donne certaines perspectives grâce à l'étude qui y est faite de régimes de pays étrangers, ce qui donne des points de repère assez intéressants et enfin le volume 5, lui, étudie les régimes d'autres provinces du Canada, régimes qui fonctionnent en des milieux qui ressemblent au nôtre.

Voici donc, les éléments descriptifs du con- texte dans lequel s'insère tout ceci, ou des exemples de contextes qui peuvent nous servir. Les autres volumes qui accompagnent le volume 7, que j'ai décrit comme étant un volume crucial, sont, enfin les volumes 8, 9 et 10; eux décrivent ce que j'appellerais des contraintes dont devra tenir compte le futur régime.

Une contrainte dont vous estimez certainement l'importance est le coût et mode de financement, c'est le volume 8 qui essaie d'estimer justement ce que coûterait aux individus et ce que coûterait à la province l'instauration de diverses formes d'assurance-maladie. Je pense évidemment, après avoir fixé les critères de choix, que c'est un point de vue qui se doit d'être considéré.

Ensuite le volume 9, qui parle de l'organisation, suggère certaines formules d'organisation des services et essaie de tenir compte de ces suggestions-là, des différents éléments qui doivent participer à l'administration, à la distribution et à l'organisation des services, quels rôles peuvent être envisagés pour ces divers éléments-là. Je pense, par exemple, aux divers ministères; je pense aux professions, aux corps intermédiaires et le reste, quel rôle ils peuvent jouer, quel accueil ils peuvent faire à divers types de solution.

Et enfin, le volume 10, qui traite des effectifs médicaux, essaie de répondre à la question: Est-ce que oui ou non nous avons assez de médecins à l'heure actuelle pour réaliser les différents régimes auxquels nous pouvons songer?

A travers tout ça, il y a un autre volume dont je n'ai pas parlé qui est un volume de référence surtout, c'est le volume 6 qui est un résumé du rapport d'une commission royale que vous connaissez certainement, une commission royale du gouvernement fédéral, la Commission Hall, qui a fait un rapport extrêmement considérable et volumineux sur la question. Nous avons cru utile de le résumer dans une quarantaine de pages.

Maintenant, évidemment, il y a le volume 1, qui, lui, est un volume de présentation qui fournit à un moment donné un résumé de ce que sont les autres volumes. Et aussi un deuxième chapitre essaie d'apporter une explication, ou si l'on veut une justification du rôle de l'Etat dans le domaine de la santé. Je pense que c'est au départ une question qui est valable. Est-ce que la distribution des soins médicaux aux gens doit relever exclusivement de l'initiative individuelle et de l'initiative privée? Ou est-ce qu'il y a une certaine justification à ce que le gouvernement intervienne? Et la réponse à cette question-là, évidement, nous donne dé jà des indications quant à la limite ou jusqu'à quel point le gouvernement

devrait s'occuper de cette question-là.

Enfin, je pense que ceci explique un peu la logique selon laquelle on a essayé de concevoir l'ensemble de ces travaux-là. Cela demeure malheureusement fragmentaire. Il y a autre chose qui reste à être exploré, mais je pense que c'est un déblayage qui a une certaine utilité.

M. Morency mentionne que nous avons fait préparer, que nous serons en mesure de vous remettre dès la semaine prochaine une photocopie de quelque trois cents recommandations que le rapport Hall a soumises à la fin de son étude. C'est assez intéressant de voir tous les domaines dans lesquels on peut faire des recommandations. Maintenant, il est à noter que la commission Hall avait un mandat extrêmement vaste. Elle devait explorer non seulement le problème de l'assurance-maladie, de la distribution immédiate des soins, mais de toute l'organisation du domaine de la santé. Elle a examiné le domaine hospitalier, le domaine des soins psychiatriques dans les hôpitaux et à domicile, le domaine de l'enseignement et de la recherche dans la santé, celui de l'hygiène, enfin tout ce qui de près ou de loin se rapporte au domaine de la santé, ce qui évidemment était une tâche extrêmement large et considérable.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, auriez-vous des questions à poser à M. Boudreau?

UNE VOIX: Des félicitations à lui adresser pour son bel exposé.

M. LE PRESIDENT: C'est tout. Est-ce que nous pourrions ajourner au mardi 8 mars à 3 heures 30?

M. MARLER; Je propose qu'on fasse rapport à la Chambre de cette séance.

M. LE PRESIDENT: Oui, il faudrait faire rapport aujourd'hui.

La séance est ajournée au 8 mars, à 3 heures 30.

Séance du 8 mars

(Trois heures et trente-cinq de l'après-midi)

M. MARLER (Président du comité de l'assurance-maladie): Messieurs, je demanderais d'abord au secrétaire de donner communication au comité d'une lettre reçue de l'Association médicale de la province de Québec par les présidents conjoints.

M. MORENCY: M. le Président, voici, c'est daté du 4 mars. « Monsieur le Président, messieurs les membres du comité parlementaire,

Le 14 février dernier, notre secrétaire honoraire, le docteur De Guise Vaillancourt, avait l'honneur de vous faire parvenir un mémoire expliquant le point de vue de notre association sur l'assurance-maladie. Un comité conjoint, formé des délégués du collège des médecins et chirurgiens, de l'association médicale du Québec, de l'association des bureaux médicaux, et de l'association des médecins de langue française, se réunissait pendant ce temps dans le but de préparer un document qui ferait valoir l'opinion de toute la profession sur cette mesure de sécurité sociale.

Ce document a maintenant été rédigé. Il contient non seulement le point de vue de notre association, mais celui de tous les groupes médicaux les plus importants de la province qui font l'unanimité sur cette question. Puisque ce mémoire conjoint représente nos idées aussi bien que celles des autres associations, la nôtre n'a plus sa raison d'être. En conséquence, je vous demanderais de ne tenir compte dans vos délibérations que du mémoire que vous recevrez incessamment du comité conjoint.

Avec mes remerciements anticipés, je vous prie de croire, Messieurs, à l'expression de mes sentiments dévoués.

Le Président,

Normand-J. Béliveau, m.d., Association médicale de la province de Québec »

M. LE PRESIDENT: En effet, messieurs, laissez-moi vous dire qu'il y a une espèce de consolidation de plusieurs mémoires qui, à mon sens, doivent raccourcir un peu le travail du comité. Je pense que ce serait logique si on demandait au secrétaire de s'entendre avec le collège des médecins et chirurgiens quant à la date à laquelle le collège doit présenter son mémoire au comité de façon à organiser le programme aussi efficacement que possible.

Si c'est bien la volonté du comité, je demanderais au secrétaire de procéder de cette façon.

Avant de faire l'examen pour procéder à l'étude des rapports individuels, je crois qu'il serait utile que M. Morency fasse part au comité des démarches concernant la présentation par les différents organismes de leurs mémoires, parce que depuis la dernière réunion, il s'est

mis en communication avec plusieurs corps publics, et je pense qu'il serait utile que le comité soit informé du résultat de ces entretiens.

M. MORENCY: Tout d'abord, nous avions envoyé une lettre de convocation à la Canadian Health Insurance Association pour mardi, à l'Association d'hospitalisation du Québec pour mardi aussi, dans l'après-midi, à la Chambre de Commerce de la province de Québec pour mercredi matin, à l'Association médicale de la province de Québec pour mercredi après-midi, et au collège des pharmaciens du Québec pour jeudi matin de la semaine prochaine. Alors, j'ai eu un appel de la Canadian Health hier, me demandant s'il était possible de remettre à plus tard. J'ai dit évidemment que je ne pouvais pas prendre de décision, qu'il y avait une réunion du comité aujourd'hui, qu'une décision serait prise, mais qu'il y avait probablement possibilité de remettre leur audition à plus tard.

Quelques minutes après, la Croix Bleue, l'Association d'hospitalisation du Québec m'a appelé pour demander la même chose, une remise à plus tard. Alors, j'ai fait la même réponse. Et aujourd'hui, nous avons une lettre de l'Association médicale, celle que je viens de lire, qui demande évidemment de ne pas considérer son mémoire.

Cela veut dire que pour la semaine prochaine, nous n'avons que deux organismes qui sont dûment convoqués, c'est-à-dire la Chambre de Commerce de la province de Québec, pour mercredi matin, et le Collège des pharmaciens du Québec pour jeudi matin. Nous avions prévu deux séances mardi et les deux se sont défilées devant une remise, et une autre pour mercredi après-midi, mais c'est la même situation. Alors, pour la semaine prochaine, nous avons seulement deux organismes.

Par ailleurs, j'ai préparé rapidement ce matin au bureau un horaire d'audition pour tous les organismes qui ont présenté un mémoire jusqu'à maintenant. Et cet horaire, en tenant compte de la vacance du 31 mars au 19 avril, et il s'agit là d'une question à régler dans quelques minutes peut-être, mais en tenant compte de cela, nous avons des audiences actuellement jusqu'au 20 avril, j'en ai une le 20 avril; évidemment, il reste encore un peu d'espace là, mais nous en avions 22, nous en avons 21, cela nous porte au 20 avril.

Alors maintenant, si vous le désirez, nous pouvons convoquer tous ces gens-là dans l'ordre prévu, et enfin s'il y avait d'autres choses que vous désirez, je ne sais pas...

M. LE PRESIDENT: M. Morency, combien d'audiences avez-vous fixées?

M. MORENCY: Le 19 avril, mardi, il y en a une l'après-midi et il y en a deux le soir. Le 20, j'en ai une l'après-midi. Maintenant, il faut prévoir d'autres mémoires. Nous savons que le collège des médecins doit nous faire parvenir un mémoire, et il y aura sûrement d'autres organismes qui vont nous en faire parvenir aussi. Il va sans dire que nous avons essayé de préparer ce calendrier en gardant des périodes suffisamment longues; il aurait été possible évidemment de comprimer un peu plus, mais je ne crois pas que cela aurait été juste et raisonnable de le faire, à cause des jours de séance, les mardi, mercredi et jeudi.

M. LE PRESIDENT: Dans les circonstances, il paraît que vous préférez qu'il n'y ait pas de travail mardi prochain, ce que je trouve très regrettable parce que je pense que de façon générale le comité aimerait terminer ses séances aussi rapidement que possible, en donnant justice aux intéressés qui veulent paraître devant le comité. Mais de manquer complètement une ou deux séances mardi prochain serait très regrettable à mon avis.

Serait-il possible, M. Morency, de boucher ce trou-là? Je ne songe pas à boucher des trous en faisant des discours inutiles, je ne pense pas à cela. Evidemment, ceux qui sont députés savent que cela joue un rôle très important dans la politique, mais pas dans les séances de ce comité. Pensez-vous qu'il serait possible d'en trouver d'autres qui pourraient venir mardi prochain?

M. MORENCY: Bien, voici le problème, c'est que c'est aujourd'hui mardi, ça nous laisse une semaine. Maintenant, l'idée de convoquer des organismes tels que la Canadian Health et la Société d'hospitalisation, c'est que nous voulions commencer avec des organismes importants; nous ne voulions pas commencer avec des individus qui ont tout de même un intérêt moindre, enfin, c'était la raison. Mais si le comité le désire, on peut essayer de convoquer des individus; maintenant, je ne sais pas si c'est possible. Actuellement, le premier groupe qui se présenterait, c'est la Chambre de Commerce de la province de Québec.

M. RENAUD: Cela m'irait.

M. MORENCY: Ce serait excellent. Pour ce qui est de mardi, c'est peut-être un peu tôt. Peut-être que demain on verra comment l'étude du rapport du comité des recherches progresse. Peut-être qu'on va réaliser qu'il serait bon de ne pas terminer jeudi et d'en reporter une partie à mardi, je ne sais pas. Nous allons voir

cela beaucoup mieux demain qu'aujourd'hui, je crois. A ce moment-là, il y aura peut-être lieu de prendre une décision pour mardi.

M. LE PRESIDENT: A première vue, je suis d'avis personnellement qu'il serait tout-a-fait logique que le secrétaire informe les deux associations, la Canadian Health Insurance et la Croix Bleue, qu'en fixant la séance à mardi prochain pour leurs représentations, le comité a bien l'intention que ces deux associations qui avaient déjà produit des mémoires viennent nous les expliquer. Et je pense que sans prendre une attitude trop radicale, je serais tenté de demander au secrétaire de dire à ces associations qu'il ne semble pas que le comité sera disposé à accorder un délai, pour voir ce que cela peut donner. Justement, je ne sais pas si c'est bien l'idée des membres du comité, mais j'ai bien peur que si nous accordons des remises continuellement cela va aller jusqu'à Noël.

UNE VOIX: Quelles raisons ont-ils données? Ils n'étaient pas prêts, quoi?

M. MORENCY: Non, dans le cas de la Canadian Health, on nous dit que le vice-Président de la compagnie est dans l'Ouest. Il ne doit pas revenir avant une certaine période. Et dans le cas de l'autre, c'est le Président qui est en dehors et qui ne reviendra pas avant le début d'avril.

Maintenant, il y a une chose qu'il ne faut pas oublier de mentionner, c'est que ces deux organismes venaient la première journée et qu'ils le savaient que c'était la première journée. Il a été dit qu'on commencerait à recevoir des délégations le 15, alors, il faut commencer à quelque part.

M. LE PRESIDENT: Le secrétaire pourra peut-être en parler d'ici à la séance de demain matin, et nous faire rapport, disons à l'ouverture de la séance à dix heures et demie. Et là, nous déciderons à nouveau de ce que nous devons faire.

M. MORENCY: D'accord. Voici, pour faire suite à la demande du comité concernant les délais de présentation, vous avez dû voir, en tout cas si vous ne l'avez pas vu, c'est publié aujourd'hui dans les journaux, une annonce qui a été publiée dans les quotidiens de langue française et de langue anglaise de la province, qui dit évidemment ce que le comité avait décidé l'autre jour, à savoir, délai de présentation jusqu'au 25 mars, et que les gens ont jusqu'au 18 mars pour signifier leur intention de présenter un mémoire. Cela a été fait aujourd'hui.

M. Marler me demandait où on avant trouvé l'argent, alors j'ai dit: « On l'a trouvé ».

M. LE PRESIDENT: Cela montre que le système budgétaire a été complètement saboté par les gens qui veulent faire du bien!

Alors, messieurs, si c'est bien le plaisir du comité, j'inviterais M. Castonguay, à qui nous voulons souhaiter la bienvenue, à commencer en nous donnant des explications plus ou moins sommaires; n'est-ce pas que vous avez l'intention de parler du premier volume?

M. CASTONGUAY: Si c'était possible. Merci. Vous permettez que je reste assis?

M. LE PRESIDENT: Sûrement, à moins que le comité ne s'y objecte, et c'est peu probable.

M. CASTONGUAY: Alors voici. J'aimerais vous faire une brève présentation du premier volume, et ce soir, nous pensions pouvoir vous faire une présentation des volumes 2 et 3.

Dans le premier volume, nous décrivons au tout début, dans une introduction générale, le mandat du comité; sans vouloir parler longtemps de cette question, je voudrais simplement faire remarquer que nous n'avions pas évidemment comme mandat de faire des recommandations. Alors si à quelques endroits, nous avons tiré des conclusions dans nos exposés, où nous avons semblé pencher en faveur d'une solution plutôt qu'une autre, cela a été uniquement pour le déroulement de l'argument en question, d'unepré-sentation qui se tenait, d'un exposé. Ce n'était pas dans le but de vouloir influencer les membres du comité.

Une question que nous avons eu à décider, et qui était assez délicate, fut de délimiter le travail que nous faisions, qu'est-ce que nous devions couvrir, qu'est-ce que nous ne devions pas couvrir. Une première chose que nous avons laissé tomber, qui ne nous semblait pas réellement appartenir à cette étude-là, c'était celle de la question de la protection du salaire en cas de maladie; nous avons pensé que c'était beaucoup plus de la nature des lois du type assurance-chômage, accidents du travail et régime de rentes que de la nature de l'assurance-maladie, tel que nous le comprenons, protection contre les frais des soins médicaux, les médicaments, etc. Alors, c'était la première des choses que nous avons dû faire.

Une deuxième chose, c'est que n'étant pas appelés à faire des recommandations, nous n'avons pas pu non plus aborder la question des changements dans les politiques gouvernementales qui

pourront devenir nécessaires, par exemple, les politiques du ministère de la Santé vis-à-vis la formation de nouveaux médecins. Nous avons plutôt abordé l'étude des effectifs médicaux, et nous avons donné un portrait de la question, mais nous n'avons pas dit: «Voici. Il serait bon peut-être de réenvisager le programme des bourses accordées aux étudiants qui veulent se spécialiser, etc. » Il n'y aurait pas eu de limites au genre d'études de ce genre-là que nous aurions été obligés de faire, et elles auraient été plus ou moins pratiques, étant donné que nous ne pouvions pas recevoir de représentations; nous aurions effectué en quelque sorte le travail que le comité conjoint doit faire.

Ce sont les deux premières qualifications de nature générale à la présentation de notre rapport.

Dans les travaux du comité, encore là sur le problème plus particulier de l'assurance maladie, le temps qui nous a été accordé a été suffisant, je crois, pour que nous fassions notre travail. Malgré tout, nous avons été obligés de faire diligence; nous avons eu en outre à traiter d'une question particulière au cours de nos travaux, c'est-à-dire préparer à l'intention du gouvernement un rapport sur l'assistance médicale, ce qui a pris passablement de notre temps. Nous avons donc dû faire certaines options; c'est qu'au lieu d'étudier dans tous les domaines des soins tout ce qui pouvait être étudié, par exemple, les effectifs de toutes les professions, nous nous en sommes tenus à la question des effectifs, disons à l'étude des effectifs chez les médecins. Nous avons laissé de côté pour l'instant dans ce rapport les effectifs chez les pharmaciens, chez les dentistes, chez les ophtalmologistes, etc., mais nous avons plutôt accumulé une documentation sur ces sujets-là, et si vous désirez que nous produisions certaines pièces ou encore que nous en poussions l'étude, nous le ferons avec grand plaisir. Nous avons plutôt centré notre travail sur la question des soins médicaux qui sont, pour plusieurs raisons, les plus importants, d'abord par le montant des frais qu'ils représentent pour les personnes qui sont malades, au point de vue médecine préventive, etc., et le genre de modèle d'études que nous avons faites, toujours pour les soins médicaux, pourrait être utilisée si nous devions pousser les études plus loin du côté des soins dentaires, des soins pour les yeux, etc.

Alors, encore là, nous n'avons pas voulu indiquer une préférence et dire que le régime devrait contenir uniquement la protection des soins médicaux, à l'exclusion des autres soins; nous avons plutôt voulu présenter un modèle d'études et après cela, si le régime devait couvrir autre chose que les soins médicaux, nous ferons les études que vous nous demanderez de faire.

Nous avons aussi à l'occasion de nos travaux participé aux conférences fédérales-provinciales qui ont eu lieu depuis le mois de juillet dernier et aussi à une conférence interprovinciale des ministres de la Santé en novembre dernier, Nous avons pu également suivre sur ce plan-là le déroulement des événements jusqu'à présent, et d'ailleurs nous faisons rapport sur cette question dans le volume 3.

Nous avons aussi étudié, en prenant comme point de départ, les différentes questions couvertes par la documentation qui était disponible, mais nous avons, dans le cas de l'étude des régimes d'assurance-maladie, effectué une tournée dans quatre pays d'Europe et dans trois provinces canadiennes. A ce sujet-là, nous avons présenté, comme vous l'avez vu, deux volumes et les renseignements que nous avons rapportés de ces voyages en plus d'être consignés ici, le sont dans des dossiers que nous avons au local du comité, et qui sont d'une nature peut-être un peuplus confidentielle, mais qui sont naturellement à votre disposition. Il y a bien des gens qui nous ont parlé en toute liberté, sachant fort bien, parce que nous le leur avions dit, que leurs opinions n'apparaîtraient pas dans les rapports rendus publics: si elles avaient été rendues publiques, ces gens-là auraient préféré ne pas exprimer d'opinion, par suite de leurs fonctions, par suite de différentes circonstances. Nous avons, en plus des rapports qui sont publiés, une série de dossiers sur toutes les entrevues que nous avons eues dans les organismes que nous avons visités en Europe et dans les provinces canadiennes.

Si vous voulez les consulter, ils sont à votre disposition.

Quant au contenu lui-même du rapport ou des différents volumes, M. Boudreau vous en a donné une description à votre première séance, alors, je ne crois pas qu'il soit tellement utile de revenir sur cela, et à moins qu'il n'y ait des questions à ce stade-ci, je passerais au contenu du volume 1.

Dans le premier chapitre du volume 1, nous avons premièrement voulu situer l'assurance-maladie par rapport à la sécurité sociale. Je pense que c'est une question qui est assez primordiale.

Est-ce que l'assurance-maladie entre dans la sécurité sociale comme une des mesures qui doivent en faire partie ou est-ce quelque chose qui relève purement et simplement de l'entreprise privée où l'Etat n'a aucune raison de jouer un rôle?

Deuxièmement, après avoir fini de situer

d'une façon très générale l'assurance-maladie, par rapport à la sécurité sociale et pour fixer encore davantage cette question-là, en plus de la prendre sur le plan des principes, nous avons étudié, d'une façon assez brève, le développement de la sécurité sociale en Europe et en Amérique du Nord et après, plus particulièrement, au Canada et au Québec, pour essayer de déceler pour quelles raisons ce développement-là a été différent et aussi si cela indique, pour l'avenir de l'assurance-maladie, une orientation qui devrait être différente ici au Québec et au Canada.

Après cela, une fois cette chose-là fixée, nous sommes passés à la question de la profession médicale et l'effort social dans le domaine de la santé toujours par rapport à la plus grande question de l'assurance-maladie et de la sécurité sociale. Et finalement, nous avons pour fixer les esprits le plus rapidement possible sur ce en quoi consiste les régimes d'assurance-maladie, essayé de dégager les caractéristiques que l'on retrouve dans la majorité des régimes d'assurance-maladie.

Pour ces quatre questions-là, si vous me permettez, j'ai souligné, ce qui à mon avis dans le rapport, constitue les parties les plus importantes et je pourrais vous en faire une lecture assez rapide. Il y a énormément de matière étudiée et faire cet exposé-là verbalement, j'ai l'impression que sur certains points, je ne rendrais peut-être pas l'idée exactement, ou je pourrais oublier des détails et affecter le processus normal de l'exposé.

En ce qui a trait à l'assurance-maladie et la sécurité sociale, on est parti du principe, que le but de la sécurité sociale était de garantir à chaque homme ou chaque personne qu'en toute circonstance il sera mis à même d'assurer dans des conditions convenables, sa subsistance et celle des personnes à sa charge. C'est le but ultime de la sécurité sociale. Nous disions après...

M. LE PRESIDENT: A quelle page êtes-vous, monsieur?

M. CASTONGUAY: Je suis à la page 17. Alors, ça, ça serait notre définition de la sécurité sociale. C'est le principe abstrait, disons. Comment, maintenant, réaliser la sécurité sociale? Or, nous disons, au-haut de la page 18, que la sécurité sociale pouvait être considérée comme étant l'addition, la conjonction de trois politiques différentes. La première était une politique économique commandée par le souci du plein emploi, la seconde, une politique d'équipement sanitaire d'orgainisation médicale permettant de lutter contre la maladie en la prévenant d'abord, en la soignant ensuite dans les meilleures conditions possibles, politique qui trouve son complément naturel dans une politique d'équipement technique permettant de prévenir les accidents du travail et les maladies professionnelles. Troisièmement, une politique de répartition des revenus tendant à modifier la répartition qui résulte du jeu aveugle des mécanismes économiques pour adapter les ressources de chaque individu et de chaque famille aux besoins de cet individu et de cette famille, compte tenu de toutes les circonstances qui peuvent affecter l'évolution de ces ressources.

Et après, nous soulignons que pour chacune de ces politiques il y a déjà dans la législation au Québec des lois ou des législations qui touchent à chacune. Alors, c'est une définition qui nous paraissait raisonnable en regard du contexte québécois, et d'ailleurs dans chacune de ces trois politiques-là, il y eu des efforts faits pour en arriver à atteindre les buts indiqués.

Alors, nous pouvions énoncer à la fin de cette première partie-là, que l'intégration de l'action collective en matière de santé à une politique générale de sécurité sociale est largement admise dans la majorité des sociétés modernes, incluant le Québec, à l'exception toutefois des Etats-Unis. Aussi, croyons-nous utile pour expliquer une telle différence de conception, étant donné toujours cette exception des Etats-Unis, de tracer brièvement un parallèle entre le développement de la sécurité sociale en Europe et en Amérique du Nord. Et c'est ce que nous faisons, à la seconde partie. Nous établissons premièrement, et avec maintes références qui sont données dans la bibliographie, qu'en Europe le développement de la sécurité sociale a précédé de beaucoup celui en Amérique du Nord, dû au fait, premièrement, que les phénomènes de l'industrialisation, de l'urbanisation se sont produits énormément plus vite en Europe qu'ici; ils ont commencé en Europe vers le début du XIX siècle. Ici, par exemple, au Québec, le mouvement des populations, l'éxode des campagnards vers les villes est quelque chose qui est encore en voie de se réaliser.

Alors, cela c'est une des premières constatations qui expliquent cette différence-là. Une deuxième, c'est qu'en Europe, les chambardements amenés par l'industrialisation et l'urbanisation, se sont faits dans des conditions excessivement laborieuses avec énormément de misère pour les populations, ce qui a amené un développement beaucoup plus rapide de la sécurité sociale dans ces pays-là, par rapport à

l'Amérique du Nord.

Il n'y a pas à notre avis de raisons fondamentales entre la conception de la sécurité sociale, disons en Amérique du Nord, et en Europe, c'est plutôt un phénomène de décalage dans le temps qui s'est produit, dû à l'urbanisation, l'industrialisation qui sont arrivés beaucoup plus tard ici qu'en Europe, et dans des conditions beaucoup moins laborieuses.

La deuxième série d'aspects particuliers du développement de la sécurité sociale que nous avons voulu faire ressortir est plus particulière au Québec et au Canada. Et à ce sujet-là, nous disons au bas de la page 20, « il ne faudrait pas conclure toutefois que le décalage dans le temps, entre l'industrialisation et l'urbanisation en Europe occidentale et en Amérique du Nord, constitue la seule explication d'un dé calage analogue dans le développement de la sécurité sociale. Certains aspects particuliers de ce développement au Canada et au Québec doivent nécessairement être mentionnés. Les problèmes que l'on reconnaît aujourd'hui comme des problèmes sociaux étaient considérés en 1867, comme des problèmes individuels ne requérant aucune intervention publique, sauf sur le plan local.

Ceci s'explique en partie, par la très grande dispersion géographique de la population à cette époque. Ainsi, en vertu de l'acte de 1867, « ici si vous me permettez une pause, toutes ces affirmations-là que nous faisons, sont toutes appuyées sur des textes d'auteurs sérieux et les sources sont données dans les bibliographies à la fin de chacun des chapitres ou à la fin des volumes. «Le gouvernement fédéral fut investi des responsabilités que l'on jugeait, alors, importantes et le domaine du bien-être social devait être laissé aux provinces, sans même que des obligations leur soit imposées à ce sujet. « Et ici, on dit: « The Fathers of the Confederation, clearly thought, they were assigning the provinces the unimportant and inexpensive functions of government, among which education, hospitals, charities, and municipal institutions were then reasonably numbered. »

Alors ici, on retrouve quelque chose de particulier qu'on ne retrouve pas dans les pays d'Europe, soit la juridication sur la sécurité sociale au plan des provinces au lieu de la retrouver au plan du gouvernement central. Ceci a aidé à affecter nécessairement le développement de la sécurité sociale surtout si l'on considère les moyens financiers que les provinces avaient et que certaines ont encore pour faire face au problème posé par le développement d'une politique de sécurité sociale. Et c'est pour cela, qu'à la page 22, au haut, nous disons: «Aucune politique générale de sécurité sociale n'a pu ainsi se con- crétiser de telle sorte que chaque nouvelle étape devait nécessiter de longs débats sur les principes en cause. De même, et ceci est significatif, chaque nouvelle mesure ne pouvait toujours s'intégrer harmonieusement aux mesures existantes comme partie d'un ensemble bien équilibré. Et, alors que l'assurance-hospitalisation universelle vient à peine d'être instaurer au Québec, il demeure donc en quelque sorte nécessaire de reprendre l'examen de l'ensemble de la question, quant aux aspects complémentaires de l'assurance-maladie ».

Alors, ça c'est notre opinion, disons, sur cette question-là, que nous ne pouvons pas trouver dans le développement de notre sécurité sociale, sauf en ce qui a trait à la juridiction, des lignes directrices, disons, qui nous permettraient de bien tracer dans quel cadre s'insèrent les mesures complémentaires de l'assurance-maladie en plus de celles de l'assurance-hospitalisation.

Alors, ça c'est la dernière partie de l'exposé, en fait le problème était étudié dans son ensemble. On ne peut donc procéder dans le cadre d'une continuation bien facilement.

Nous passons, après ça, à la question que nous avons intitulée: la profession médicale etl'effort social dans le domaine de la santé.

En premier lieu, nous établissons, disons que la maladie c'est un problème social, que ce n'est pas uniquement un problème individuel, que c'est un problème qui dépasse l'individu pour plusieurs raisons; et nous citons à cet effet-là, diverses déclarations. Il y en a un grand nombre de déclaration ou de chartes. Nous avons pensé que les plus intéressantes étaient peut-être la déclaration de Philadelphie, qui a été faite à l'occasion d'un congrès sous l'égide de l'Organisation Internationale du Travail. La partie que nous avons fait ressortir, qui apporte plus de précision, est à la page 23, le paragraphe g. La déclaration affirme qu'une protection adéquate de la vie et de la santé des travailleurs dans toutes les occupations est essentielle.

Nous prenons après ça la Déclaration universelle des droits de l'homme qui a été acceptée par l'Assemblée générale des Nations-Unies, en décembre 1948 et on dit que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et celui de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que les services sociaux nécessaires. Elles a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse, etc. Et nous reprenons après, une dernière charte, celle des pays membres du conseil de l'Europe. Mais avant de le faire, nous citons par quelques commentaires, nous mentionnons qu'à notre avis, le

droit à la santé est un droit aussi fondamental que le droit à l'éducation, au travail. Nous mentionnons, naturellement, un peu plus tard que ces droits sont, jusqu'à un certain point, relatifs étant donné que l'exercice de ces droits dépend des moyens et des disponibilités.

Nous situons après, à la page 24, encore pour mieux préciser que l'assurance-maladie fait partie de la sécurité sociale ou que la maladie est un problème social, en affirmant que l'influence de l'état de santé des divers groupes de la population, sur l'ensemble de la vie et du développement des sociétés, tant du point de vue social et culturel que du point de vue économique, est un fait reconnu. On dit : « Qu'une élévation sensible du niveau de vie d'une population ne saurait d'ailleurs éliminer un tel problème, celui de l'élévation du niveau de santé ». Et à ce sujet-là, nous avons cité la charte sociale des pays membres du conseil de l'Europe, signée en 1961, qui représente à notre avis, la codification la plus récente en matière de sécurité sociale. Et en dépit de la hausse considérable du niveau de vie en Europe occidentale, au cours des dernières années, les pays membres ont voulu en proclamant dans cette charte, les droits fondamentaux de leurs citoyens et inclure le droit à la protection de la santé. On dit qu'une telle proclamation constitue un refus d'accepter la thèse selon laquelle le droit à la protection à la santé pourrait cessé d'être une préoccupation de l'Etat lorsque le niveau de vie suffisamment élevé.

Alors, l'assurance-maladie par rapport à la sécurité sociale, puis la maladie un problème social, et ensuite, en premier lieu, les droits et les devoirs des médecins dans le domaine de la santé étant donné qu'il est toujours de plus en plus question, je crois bien dans le bon sens du mot, de la socialisation de la médecine ou plutôt de donner un aspect social plus développé à l'exercice de la médecine. Et nous disons; l'effort social dans le domaine de la santé suppose une mobilisation de toutes les forces vives de la société. Les professionnels de la santé ont une responsabilité considérable dans ce domaine. Aussi nous semble-t-il essentiel d'expliciter brièvement ce que peuvent être les droits et les devoirs de la profession médicale, en cette matière.

Et sur cette question-là qui, naturellement, touche d'excessivement près la profession médicale, comme elle touchera, selon les modalités du régime, les autres professions, telles que les pharmaciens, les dentistes, etc., nous n'avons pas voulu ici, exprimer d'opinions sur la question. Nous nous sommes contentés de reproduire des travaux qui ont été faits à l'occa- sion d'un congrès, le congrès des Affaires québécoises tenu à l'Université Laval en octobre 1965, congrès auquel participaient un grand nombre de médecins, congrès qui avait été organisé par les étudiants de la faculté de médecine, en collaboration avec les autorités de l'université.

Alors, nous publions ce qui constituait selon les données ou les résultats des travaux de ce congrès, les droits des médecins dans un régime d'assurance-maladie. Ensuite, nous donnons ce qui constitue les devoirs généraux des médecins envers les malades et les devoirs des médecins les uns envers les autres. Ceci pour situer le plus rapidement possible quel genre de problème l'établissement d'un régime d'assurance-maladie pourrait créer vis-à-vis la profession médicale et les autres professions, si un tel régime était élaboré de telle sorte qu'on ne tiendrait pas suffisamment compte de ces professions-là. M. le Président, croyez-vous que ces extraits devraient être lus au complet?

M. LE PRESIDENT: Quelle est la volonté du comité? Est-ce que tout le monde a lu cette partie du rapport. Je pense que dans les circonstances l'on peut se dispenser de la lecture.

M. CASTONGUAY: Très bien.

Maintenant, nous passons, à la suite de cet exposé où nous avons situé brièvement l'assurance-maladie par rapport à la sécurité sociale, le fait que la maladie n'était pas un problème individuel mais revêtait aussi un aspect social et avant d'aller plus loin, nous avons bien voulu établir quels étaient les droits et les devoirs d'une profession, comme la profession médicale. Puis nous ressortons les principales caractéristiques des régimes d'assurance-maladie.

Je crois que c'est peut-être la partie la plus importante pour bien vous situer. Si vous me permettez, je vais lire les deux pages ou les trois pages qui suivent et s'il y avait des questions, ça me ferait plaisir d'y répondre à mesure que j'avance, si c'est votre désir. « L'énoncé de ces divers droits et devoirs soulèvent nécessairement de nombreuses questions relativement à l'élaboration d'un régime d'assurance-maladie. Un tel régime doit aussi s'intégrer harmonieusement à la politique socio-économique de l'Etat, ce qui nécessite donc un examen de l'ensemble de la question sur un plan plus concret. L'expérience des autres pays et provinces dans le domaine des régimes de soins, constitue une source précieuse de données et de leçons qui ne sauraient être ignorées dans cet examen. C'est pourquoi le comité a cru nécessaire de dégager les principales caractéris-

tiques des régimes dont les analyses descriptives sont présentées dans les volumes 4 et 5. Cette analyse des caractéristiques pourrait, en outre, tenir lieu, jusqu'à un certain point, de définitions de l'assurance-maladie tout en permettant de faire le point sur l'évolution que connaissent tous les régimes. L'étude sur l'utilité de l'assurance-maladie, présentée au chapitre suivant, complètera cet examen pratique. »

Alors, les types de régimes en premier lieu, et ça c'est assez important, il y a trois options possibles à faire sur les types de régimes. « Il est essentiel au départ de souligner qu'un grand nombre de facteurs entourant l'établissement des divers régimes nationaux dans chaque pays a fortement influencé leur conception. Avec le temps, la conception de ces régimes a évolué de manière plus ou moins marquée selon les pays de façon qu'ils s'adaptent à l'ensemble des nouveaux facteurs socio-économiques environnants. « C'est ainsi que l'on peut maintenant distinguer en Europe occidentale et en Amérique du Nord, trois types génétiques de régime. « Premièrement le régime de soins, dont l'objectif est d'accorder à l'ensemble de la population, sans égard aux moyens financiers, à l'age, au sexe et à l'occupation, les meilleurs soins et services disponibles. Ce type de régime peut être considéré comme le plus audacieux au point de vue social ».

M. COITEUX (Duplessis): Auriez-vous l'obligeance, M. Castonguay, de nous dire ce que vous entendez par audacieux? Est-ce que c'est seulement question de finance ou s'il y a d'autres idées...?

M. CASTONGUAY: C'est celui qui veut résoudre le plus de problèmes. C'est-à-dire qu'on essaie de mettre à la disposition de la population tous les soins possibles sans qu'il soit question, en aucune façon, des moyens financiers des individus. Tout le monde est assuré pour tous les soins possibles. Ce n'est pas de l'assurance en fait, on met des services à la disponibilité de toute la population.

M. RENAUD: M. Castonguay...

M. CASTONGUAY: C'est pour cela que nous avons évité de dire régime d'assurance-maladie, nous l'avons appelé régime de soins.

M. RENAUD: Un tel régime se trouve en Grande-Bretagne, est-ce qu'il y a d'autres pays qu'en Angleterre?

M. CASTONGUAY: Dans les pays occidentaux, disons à notre connaissance, non. Dans les pays plutôt socialistes, comme les pays autour de la Russie, là il y a des formules qui se rapprochent du régime de soins.

M. RENAUD: Dans les pays occidentaux, il n'y a que la Grande-Bretagne qui a un tel régime comme celui que vous venez de mentionner?

M. CASTONGUAY: A notre connaissance oui.

M. ASSELIN: Quand vous dites « le plus audacieux », je reviens à la question qui a été posée tout à l'heure, voulez-vous dire audacieux au point de vue finances publiques ou audacieux comme principe?

M. CASTONGUAY: Disons que...

M. ASSELIN: Comme principe de sociologie.

M. CASTONGUAY: Selon les chiffres qu'on vous donne dans le volume 4, c'est audacieux au point de vue conception, c'est aussi audacieux au point de vue finances publiques parce qu'il semble bien, et on l'indique avec références à l'appui, que l'on a voulu trop faire et que les dépenses qui ont été consacrées à la consommation ont retardé ou ont diminué de façon défavorable les dépenses d'investissement dans le domaine de la santé. Par exemple, la construction des hôpitaux semble avoir retardé passablement, le développement des effectifs médicaux semble aussi avoir retardé. A un moment donné, même la rémunération des médecins, leurs conditions de travail au point de vue de leur cabinet, au point de vue des recherches, etc. semble en avoir même souffert à tel point qu'il y a eu un exode vers les autres pays. On a eu un exemple concret ici en Saskatchewan, il y a quelques années, lorsqu'il y a eu des difficultés avec les médecins; il y a un bon nombre de médecins qui, pratiquement sans avis, sont venus s'établir en Saskatchewan. Quant à leurs conditions de pratique, l'on peut peut-être conclure qu'elles n'étaient pas tellement bonnes, s'ils ont décidé comme ça, sans avis de déménager.

Alors, cela a été audacieux au point de vue de la conception, et possiblement aussi un peu trop audacieux au point de vue des ressources disponibles.

M. LUSSIER: Ce régime-là a été instauré au cours de la seconde grande guerre. Est-ce que depuis ce temps-là, ils ont eu la possibilité de corriger ces lacunes-là...?

M. CASTONGUAY: Il a été conçu au cours de la guerre et c'est peut-être une raison pour laquelle il a été conçu de façon aussi audacieuse pour donner, semble-t-il, d'après les textes que nous avons, un espoir à la population. Le rapport Beveridge, sur lequel il est basé, a été rendu public au cours de la guerre. Le gouvernement, qui était un gouvernement de coalition, s'est engagé à donner suite à ce rapport-là, et ce fut une sorte d'encouragement à la population qui était privée de toutes sortes de façons, et dont l'état de santé s'était détérioré passablement. Le régime a été établi en 1948 dans un climat bien particulier. Par la suite, diverses modifications y ont été apportées. On a été obligé, par exemple, à certains moments d'imposer des charges, lors de l'achat des médicaments. Selon les changements de gouvernement, on a éliminé ces charges-là, on les a imposées, on les a augmentées. Il n'y a pas eu de modifications fondamentales dans la conception du régime.

Est-ce qu'il y a eu des occasions d'effectuer des changements? Bien, là, ça devient je pense, une question plutôt à caractère politique et je ne suis pas en mesure de juger.

M. COITEUX (Duplessis): Cette première option-là, est-ce que ça veut dire que c'est la seule...

M. CASTONGUAY: Disons que ça se rapproche davantage d'une fonctionnarisation de la médecine. Je pense qu'aujourd'hui, la maladie étant un problème social, les médecins admettent eux-mêmes que dans l'exercice de leur profession, il y a un aspect social. Alors, disons qu'un tel régime rapproche plus la profession médicale du fonctionnarisme, ce qui est quelque chose de passablement différent et possiblement beaucoup moins désirable.

M. COITEUX (Duplessis): Merci beaucoup.

M. ASSELIN: A votre avis, est-il possible, pour un état comme le Québec par exemple, de commencer par un régime moins avancé, moins audacieux, si vous voulez, disons le régime B, le régime d'assurance-sociale, et lui faire subir une évolution ou des transformations qui l'acheminent vers le type A des soins, ou bien s'ils sont tous tellement différents qu'il faut qu'ils restent dans ce type de régime? Est-ce que vous comprenez ma question? Je ne sais pas si je l'exprime bien.

M. CASTONGUAY: Oui, je comprends, M. Asselin, disons que je crois bien qu'il n'y a pas une formule qui ne permette pas d'évolution. Chaque genre de régime peut évoluer dans le temps, à mon avis.

M. ASSELIN: Alors, il serait possible de commencer par faire quelque chose de moins audacieux, moins onéreux, disons, pour les finances publiques, qui pourrait au fur et à mesure des ressources du gouvernement ou de la collectivité évoluer vers un type plus avancé, plus audacieux, si vous voulez une expression, afin de lui faire subir une évolution qui serait un perfectionnement, qui donnerait des services plus considérables à la population. Est-ce qu'il serait possible d'évoluer dans ce sens-là?

M. CASTONGUAY: Bien, disons que c'est l'expérience de la plupart des trois autres pays que nous avons visités et dont nous avons étudié les régimes. Il y a eu une évolution continuelle en France, en Belgique, en Suède, une évolution marquée.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, voulez-vous, peut-être, nous donner des exemples de la façon où on va pouvoir commencer sur une échelle moins considérable.

M. CASTONGUAY: Bien, il y a divers modes d'étapes qui peuvent être envisagés. Sur le plan du champ d'application, par exemple, je peux vous donner l'exemple de la France. Ici, j'essaie un peu d'être prudent en prenant des exemples à l'extérieur parce que les organismes qui vont venir peuvent, à un moment donné, je ne sais pas, penser que ce que je dis ici, ce serait tenter d'influencer trop dans une direction ou dans une autre. Alors, si vous n'avez pas d'objection sur ce genre de question-là, j'aimerais mieux vous répondre par les parallèles, sur ce qui existe ou ce que j'ai vu à l'extérieur...

M. RENAUD: On ne vous en demandera pas davantage.

M. CASTONGUAY: Je vous remercie. Alors, en France, par exemple, il y a un premier régime qui a été établi pour les salariés. Alors on a couvert les salariés et leurs dépendants, première des choses. Par la suite, on a étendu la couverture aux travailleurs agricoles. Par la suite on a étendu le champ d'application du régime à certaines catégories de pensionnés, pensionnés de guerre, etc. Alors, on sent que ce qu'ils ont voulu faire, en premier, c'était de couvrir leur population active, la population qui produit et leurs dépendants. Deuxièmement, on a pris celle qui était dans la meilleure condition au point de vue revenu, celle qui pouvait financer un tel régime. On est ensuite passé aux tra-

vailleurs agricoles avec un régime, qui, si ma mémoire est bonne, comporte une couverture un peu moins grande. Après cela, on a couvert chez les pensionnés de guerre qui, pour diver ses raisons, méritaient une considération des plus particulières du pays pour des raisons assez évidentes, alors ça c'était un genre d'étapes sur le plan du champ d'application. Après ça sur le plan des soins couverts, bien on a commencé par les soins médicaux, par des médicaments, des soins dentaires, mais chaque fois qu'une personne devait faire appel au régime, on a imposé des charges assez élevées que l'assuré devait payer à ce moment-là. A mesure que les années ont passé, on a réduit sensiblement le montant de ces charges. Cela est un autre genre d'étape.

Après ça, par exemple, dans certaines catégories de soins ou de services, on peut faire un choix. On a fait par exemple un choix dans les médicaments. Au lieu de couvrir tous les médicaments prescrits, on a pu dire, voici pour une certaine série de médicaments, à l'avenir, il n'y aura plus de frais. Alors, des médicaments qui peuvent être utilisés pendant de très longues périodes, l'exemple classique c'est l'insuline dans les cas des diabétiques ou encore des médicaments qui sont très dispendieux et qui sont absolument nécessaires pour sauver la vie du patient au moment où il en a besoin, comme par exemple dans les cas d'affections cardiaques.

Alors, au début une charge pour tous les médicaments prescrits, et plus tard on a tendu à éliminer ces charges pour certains genres de médicaments ou certaines maladies. C'est un troisième type d'étapes qui peuvent être envisagées si on ne veut pas faire tout à la fois. Mais ça, c'est possible, à mon avis, dans les trois genres de régime, dans les trois types de régime.

Est-ce que ceci répond à la question?

M. CADIEUX: Je pense que ce n'est pas plus lucratif, mais je pense qu'il est toujours plus facile d'ajouter que d'en retrancher.

M. CASTONGUAY: Je n'exprime pas d'opinion, je mentionne...

M. LE PRESIDENT: Je pense que le conseiller est assez intelligent pour comprendre que c'est plus facile de donner que de reprendre.

M. FORTIER: Donnez moins et ajoutez plus. Parce qu'au moins en Grande-Bretagne, ils ont restreint les privilèges après quelques temps...

UNE VOIX: Après l'établissement...

M. FORTIER: Ils ont restreint les privilèges.

M. RAYMOND: En partie.

M. CASTONGUAY: Le second genre de régime ou le second type, disons le régime d'assurance-sociale dont l'objectif est de protéger la population assurée, c'est là le mot-clé, la population assurée contre les frais résultant de la maladie. Ce type de régime qui constitue essentiellement une mesure d'assurance-sociale comporte le paiement de primes ou de cotisations de la part des assurés et, pour la plupart des soins, certains paiements de la part des bénéficiaires lors de la réception des soins ou de l'utilisation des services. Alors là on se rapproche beaucoup plus de l'assurance que de services.

M. RENAUD: Est-ce que le deuxième régime est uniquement payé sur la base de primes ou s'il y a une participation dans certains pays de l'aide gouvernementale, en plus des primes?

M. CASTONGUAY: Dans les trois pays que nous avons visités, que nous avons étudiés, à l'exclusion de l'Angleterre, en France, ce régime est financé uniquement à même les cotisations des assurés. D'un autre côté, les cotisations des assurés, depuis un certain nombre d'années ne suffisent plus à couvrir les coûts du régime, alors l'Etat fait des avances à la sécurité sociale qui est un organisme pratiquement gouvernemental, et ces avances-là, si elles ne sont jamais remboursées, éventuellement deviendraient la part de financement du gouverne ment.

En Belgique et en Suède, depuis longtemps le principe du financement avec participation de l'Etat, des employeurs et des travailleurs est reconnu et établi directement dans la législation. Même, on y fixe une part bien précise de ce qui doit être supporté par chacune des trois parties.

M. RENAUD: Une contribution qui participe, en Suède, dites-vous?

M. CASTONGUAY: En Suède et en Belgique.

M. RENAUD: En Suède aussi?

M. CASTONGUAY: En Suède aussi, oui. Et

la part que doit supporter l'Etat est fixée ainsi que la part de la population, des travailleurs et des employeurs. Alors, si les travailleurs et les employeurs désirent une protection plus grande, le coût augmente automatiquement; si le coût des services augmente, les primes augmentent automatiquement; si l'utilisation des services augmente, augmentation automatique des primes. Alors, les finances du régime sont rendues beaucoup plus claires au point de vue de la population.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, est-ce que je dois comprendre qu'aux endroits où ces plans d'assurance-sociale existent que presque la totalité de la population profite de l'assurance-maladie?

M. CASTONGUAY: C'est une des grandes caractéristiques ça encore que nous mentionnons ici au haut de la page 31. On dit: « Dans les régimes d'assurance-sociale, la tendance consiste à étendre le champ d'application constamment afin d'atteindre éventuellement l'ensemble de la population ». Par définition, le régime de soins, lui, s'applique à l'ensemble de la population en Angleterre. Mais, dans les autres régimes, que ce soit du type 2 ou du type 3, c'est la tendance que nous avons constatée partout, soit dans les provinces canadiennes ou dans les pays d'Europe de vouloir étendre le champ d'application à l'ensemble de la population.

M. LE PRESIDENT: Mais cela, il me semble, implique n'est-ce-pas qu'il y a un pourcentage peut-être plus ou moins important de gens qui ne sont pas couverts par le système d'assurance?

M. CASTONGUAY: Nous donnons les pourcentages dans les études des régimes que nous présentons. De mémoire, je ne me souviens plus exactement des chiffres, mais en Belgique on approche d'une couverture assez universelle. En Saskatchewan, c'est atteint, c'est la pleine couverture. En Alberta, ils ont dépassé... ça varie entre 80% et 85% de la population qui est assurée. En Suède, si ma mémoire est bonne, c'est à peu près l'ensemble de la population qui est assurée. Alors, dans tous ces pays ou provinces la partie non assurée de la population est, soit très faible ou si elle n'est pas tellement faible, si c'est quelque chose comme 15%, 20% et le pourcentage a tendance à diminuer graduellement, assez rapidement.

M. RENAUD: M. Castonguay, en Suède et en Belgique, considérez-vous que le rôle de l'Etat demeure, par sa contribution, un rôle supplétif?

M. CASTONGUAY: Non.

M. RENAUD: Alors, comment le définiriez-vous?

M. CASTONGUAY: C'est une question qui est assez longue à répondre, mais si vous le permettiez, sur celle-là, lorsque nous passerons à l'étude de ces régimes-là, je pense que la réponse pourrait ressortir plus clairement. Je ne voudrais pas juste l'affirmer comme cela, avec quelques explications sommaires qui pourraient plutôt indiquer une impression de ma part de quelque chose réellement basé sur les faits. Je crois que ça ressort assez clairement dans la description de ces régimes-là, de quelle façon le tout s'intègre avec la politique sanitaire de ces gouvernements-la.

M. LE PRESIDENT: Je voudrais poser juste une autre question au sujet de ceux qui ne profitent pas de l'assurance-maladie. Vous avez, cité le cas de l'Alberta, vous avez dit en effet qu'il y avait 85% de la population qui est assurée, laissant évidemment 15% qui ne l'est pas. Est-ce qu'on peut identifier une catégorie de la population disant, d'une façon générale, ces gens-là ne sont pas couverts par l'assurance-maladie? Prenons les gens qui nous viennent à la pensée. Ceux qui profitent de l'assistance publique, disons, sont-ils couverts par le plan dans l'Alberta?

M. CASTONGUAY: En Alberta, il y a un régime qui couvre depuis un bon nombre d'anné'es les personnes qui reçoivent de l'assistance publique, assistance aux invalides, assistance aux mères nécessiteuses; ces formes d'assistance-là, ça existe depuis un bon nombre d'années en Alberta.

Maintenant, pour savoir qui n'est pas couvert dans le résidu, qui sont ces personnes-là, il faut d'abord voir quelle est la nature du régime en Alberta. C'est un régime facultatif.

M. LE PRESIDENT: Alors, c'est-à-dire que ceux qui n'ont pas besoin d'assurance ne s'assurent pas.

M. CASTONGUAY: Pas nécessairement. UNE VOIX: Ceux qui n'en veulent pas. M. CASTONGUAY: Pas nécessairement. On

a établi... Si vous voulez, je peux vous lire la description du régime facultatif, en premier, lieu...

M. LE PRESIDENT: Je comprends, parce que là c'est marié un peu avec l'assurance-sociale.

M. CASTONGUAY: Au bas de la page 29...

M. KENNEDY: M. Castonguay, j'aurais une question, au cours de vos entrevues que vous avez eues, est-ce que vous avez pu extraire le principe qui a amené les pays, comme la Belgique et la Suède, je crois, à établir un plan avec participation des contribuables, sous forme de primes, tandis que dans le cas de la Grande-Bretagne, c'est un cas où tout est couvert pas l'Etat, excepté depuis quelques années, il y a eu des changements.

M. CASTONGUAY: En Grande-Bretagne, il y a aussi paiement de primes de la part des employés, de la part de leurs employeurs...

M. KENNEDY: Ce n'était pas tout à fait semblable.

M. CASTONGUAY: ...tout le monde est couvert, la protection n'est pas rattachée au paiement des primes, en Angleterre. Que vous payiez des primes ou non, vous êtes couverts, mais si vous êtes un travailleur, vous devez payer une prime. Dans tous ces pays-là, le raisonnement est le suivant, c'est qu'il y a une partie de la population qui est active et il y a une partie de la population qui est inactive. La partie de la population active finance tous les biens et services qui sont mis à la disposition de l'ensemble de la population, qu'elle soit la population active ou inactive. Et on répartit les coûts d'une façon qui semble la plus équitable possible en faisant porter une partie de ces coûts par les salariés et une partie par leurs employeurs qui ont aussi une responsabilité. Ils reçoivent les services de leurs employés, alors ils doivent donc assumer une certaine responsabilité vis-à-vis leur santé. Et cette partie assumée par chacun peut varier selon les genres de soins. Il y a des soins qui sont des soins d'une nature un peu plus publique et d'autres qui sont d'une nature un peu plus privée, comme la vaccination. Cela c'est un soin disons purement public. Si une personne ne se fait pas vacciner, elle met en danger tout le monde, alors là il n'est pas question de savoir si la personne désire ou non se faire vacciner, elle doit l'être. Je pense que c'est accepté aujourd'hui et il n'est pas question de dire à l'individu, vous allez payer votre vaccination directement comme si elle veut obtenir un meilleur appareil auditif, par exemple, ou des lunettes plus élégantes, là, on se rapproche de plus en plus de choses qui sont privées.

Selon les catégories de soins, on voit que la participation de chacun varie. Par exemple, les médicaments prescrits, bien, il y a certainement plus de raisons pour que, disons on demande à d'autres que l'individu de participer dans les coûts. Si, par exemple, on entre dans des médicaments non prescrits, du genre médicaments pour éliminer le mal de tête, les aspirines, bien là je pense que ce n'est pas tout à fait de la même nature. Alors, on retrouve des répartitions des coûts qui varient selon la nature des soins, et généralement pour les grandes maladies où il y a hospitalisation, disons il n'y a pas de frais dissuasifs, hospitalisation prolongée.

M. KENNEDY: Alors on peut dire à ce moment-là que comme principe de base, tous les pays ont reconnu que l'individu avait d'abord et premièrement envers lui-même une responsabilité pour ses soins médicaux.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. KENNEDY: Que la première responsabilité du moins est une responsabilité indéniable.

M. CASTONGUAY: Juste l'instinct de survie et je pense, le bien-être de l'individu sont assez forts pour cela.

M. KENNEDY: Non, mais c'est parce que je veux simplement dire ceci, il y a une tendance, certaines personnes disent: Tout le monde va payer pour nous autres! C'est assez courant, actuellement.

M. BRISSON: M. Castonguay, l'employé paie mais le rentier paie-t-il? S'il absorbe simplement la part de l'Etat, il absorbe simplement une part, tandis que l'employeur et l'employé absorbent deux parts.

M. CASTONGUAY: Dans les pays que nous avons visités, les rentiers ne paient pas sur leurs rentes. S'ils sont rentiers, aujourd'hui, un jour ils ont été dans la population active et ils ont payé à leur tour. Ils ont payé de différentes façons. S'ils n'avaient pas de sécurité sociale, de régime d'assurance-maladie, à ce moment-là, ils ont payé leurs primes directement. Ils ont payé aussi de toutes sortes d'autres façons par les investissements qui ont

permis à leurs descendants ou générations suivantes de bénéficier de tout l'équipement qui existe, les hôpitaux, etc. Alors, généralement, sur les rentes, les pensions, iln'yapas de contribution. Par exemple, par contre sur les revenus de placement, bien là, par l'impôt en fait, eux sont appelés à payer indirectement, c'est-à-dire dans la part supportée par l'Etat.

M. BRISSON: Seulement dans la part supportée par l'Etat.

M. CASTONGUAY: Dans la plupart des cas, oui.

M. BRISSON: Mais comme l'individu, par contre, il ne paie pas comme l'employé et l'employeur, comme l'employé, surtout.

M. CASTONGUAY: C'est généralement juste les employés, les employeurs, sur le revenu du travail, et l'autre partie de l'Etat, bien on considère que cela couvre ce qui provient de revenus de placements, etc.

M. BRISSON: Dès l'instant qu'un groupe social est couvert, disons comme en France où on a procédé graduellement, est-ce que la cotisation devient obligatoire? Est-ce que cette catégorie-là se doit d'être...

M. CASTONGUAY: Bien ça, c'est la distinction entre le régime d'assurance-sociale et le suivant. Si vous voulez, je vais vous donner la description suivante.

Le régime facultatif dont l'objectif est de rendre l'assurance-maladie accessible à l'ensemble de la population et ou l'Etat joue un rôle supplétif, c'est dans ce genre de régime-là que l'Etat joue le rôle supplétif. Les deux principales caractéristiques de ce type de régime, fondé sur une extension de l'assurance-maladie privée, consistent dans le paiement total ou partiel des primes par l'Etat pour les personnes à faibles revenus et dans l'obligation imposée aux assureurs reconnus d'accepter tous les risques. Le premier régime de ce type a été établi en Alberta à la fin de 1963. Deux autres provinces, la Colombie Britannique et l'Ontario possèdent maintenant des régimes analogues. Il est intéressant de souligner que ces trois provinces jouissent des niveaux de vie les plus élevés au Canada et qu'une proportion assez élevée de leur population était déjà assurée contre la maladie avant l'établissement de ces régimes. Un régime de même nature dont la couverture et le champ d'application sont limités, entrera en vigueur aux Etats-Unis, le 1er juillet 1966.

Alors, pour revenir à la question je crois de M. Marler, à savoir, s'il y a possibilité d'identifier les 15 ou 25% en Alberta qui ne sont pas assurés aujourd'hui, c'est assez difficile, mais par déduction, il y a moyen de savoir à peu près qui ils sont, je crois. Lorsque ce régime-là a été établi, il y a deux ans et demi, trois ans, il y avait environ 65% de la population de 1'Alberta qui était déjà assurée. Ces gens assumaient le paiement de leurs propres primes. Depuis ce temps-là, le pourcentage a passé de 65% à environ entre 80 et 85%. Il y a un certain nombre de personnes qui ont demandé de recevoir un subside du gouvernement, tel qu'expliqué ici, un subside partiel contre le paiement de leurs primes. Les sondages faits par le gouvernement ont démontré que la plupart des personnes qui ont demandé des subsides étaient déjà assurées avant l'établissement du régime.

Donc, tout comme avant l'établissement du régime le 15 à 20% qui reste est constitué en apparence de personnes dont les revenus sont très élevés et qui disent, on peut supporter ces frais-là peut importe ce qui arrive et de personnes dont les revenus sont très bas mais qui ne sont pas des assistés sociaux.

M. RENAUD: C'est parce que l'on est dans un régime facultatif.

M. CASTONGUAY: Oui. Ceux qui ont des revenus très élevés, pour eux, leurs habitudes n'ont pas changé. Pour ceux dont le revenu était très bas, mais qui n'étaient pas des assistés sociaux, l'offre du gouvernement de payer 50% de leurs primes n'était pas encore suffisante pour eux, pour qu'ils s'assurent. Alors, il semble que cela s'est stabilisé jusqu'à un certain point pour ces deux groupes-là.

Et c'est pourquoi le gouvernement a annoncé en Alberta son intention d'augmenter les subsides au cours de la présente session de leur législature, de telle sorte que pour les personnes à très faibles revenus, le gouvernement paiera de 80 à 90% de leur prime pour essayer de couvrir toute la population sauf la partie de la population dont les revenus sont suffisants etpour qui l'assurance ne signifie rien.

M. FORTIER: il y a toujours un modérateur. M. CASTONGUAY: En Alberta?

M. FORTIER: Toutes les personnes peuvent pouvoir faire quelque chose.

M. CASTONGUAY: En Alberta, telle que la loi est présentement, les personnes qui sont

des assistés sociaux ne paient rien. Tous les autres qui sont assurés paient soit 50% de la prime, s'ils n'ont aucun revenu imposable, 25% de la prime s'ils ont un revenu imposable qui n'excède pas $500 et la pleine prime si le revenu imposable excède $500.

M. RENAUD: M. Castonguay, en Alberta, vu que c'est facultatif ceux qui ne veulent pas contribuer, est-ce qu'ils ne seront pas imposés même dans leur impôt sur le revenu pour tout ce qu'ils paient?

M. CASTONGUAY: Bien la façon dont ils sont imposés est une façon indirecte. C'est qu'ils doivent naturellement par les différentes sources de revenus du gouvernement contribuer à payer les subsides.

M. ASSELIN: Ils paient des taxes générales. il n'y a pas de taxe spécifique pour cela, ce sont des taxes générales.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. ASSELIN: Est-ce qu'ils doit y avoir une enquête sur les moyens de chaque individu, pour les fins des subsides?

M. CASTONGUAY: C'est basé sur la déclaration d'impôt de l'année précédente. La personne déclare ce qu'elle a rapporté comme revenu imposable et le gouvernement accepte ça comme étant une déclaration valide sans faire d'enquête étant donné qu'ils n'ont pas de perception d'impôt directe en Alberta.

M. VAILLANCOURT: Il se trouve à y avoir un maximum, comme je peux voir.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. VAILLANCOURT: Si c'est basé sur les rapports d'impôts, il y a un maximum de prime.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. VAILLANCOURT: Admettons qu'un type qui fait $5,000 va payer moins qu'un autre qui gagne $10,000.

M. CASTONGUAY: La prime n'est pas rattachée au revenu, c'est celle chargée par les assureurs parce qu'en Alberta les gens s'assurent auprès de compagnies d'assurances ou auprès d'une société qui a été établie par les médecins, Alberta Medical Services Ltd. Alors ce sont ces sociétés-là qui fixent leurs propres primes mais dans la loi sur les services médicaux, il y a un maximum qui est fixé sur la prime que les sociétés privées peuvent charger.

M. RENAUD: Est-ce que la prime est uniforme, en Alberta?

M. CASTONGUAY: Elle varie selon que la personne est soit un individu célibataire, soit une personne mariée avec une seule personne à charge, soit une personne mariée avec plus d'une personne à charge. Elle peut varier aussi selon l'assureur et aussi elle peut varier s'il s'agit d'un groupe, d'une assurance collective.

M. RENAUD: Merci.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, ce serait peut-être une bonne chose de suspendre la séance jusqu'à cinq heures moins cinq pour donner un peu de repos à M. Castonguay? Alors, nous allons suspendre jusqu'à cinq heures moins cinq.

M. LE PRESIDENT: Le quorum est rétabli. Alors voulez-vous continuer, M. Castonguay?

M. CASTONGUAY: Certainement.

M. THEBERGE: M. Castonguay pourriez-vous résumer en quelques mots les trois articles avec les différences essentielles de chacun, comme prime, question de soins, question d'adaptation.

M. CASTONGUAY: Certainement. Me permetteriez-vous juste de finir...

M. , THEBERGE: Oui.

M. CASTONGUAY: ... sur la couverture, le champs d'application,...

M. THEBERGE: Très bien.

M. CASTONGUAY: ... les structures, le financement et là on va pouvoir revenir, et là je crois que les caractéristiques vont peut-être ressortir plus clairement.

M. THEBERGE: Très bien.

M. CASTONGUAY: Alors sur la couverture, on dit que la règle générale est celle de la couverture de tous les soins et services soit les soins du médecin ou du spécialiste à domicile, au bureau ou à l'hôpital b) les soins hospitaliers

et de convalescence c) les médicaments d) les soins dentaires e) les soins oculaires f) les prothèses, les soins infirmiers, les services ambulanciers et g) les soins de réadaptation. Le régime d'assurance sociale comporte en général des frais modérateurs dont les montants diffèrent, selon les divers soins, d'un régime à l'autre.

Ces frais modérateurs sont généralement réduits ou éliminés dans le cas des affections graves ou prolongées. Alors la règle générale c'est de tout couvrir éventuellement ou immédiatement et de charger certains montants lorsque la personne reçoit les soins ou les services. Dans le régime britannique de soins qui, en principe ne devait point en comporter, c'est-à-dire des frais modérateurs, les frais modérateurs ont été imposés pour divers soins depuis son établissement, étant donné la hausse considérable des coûts.

Quant au champ d'application dans les régimes d'assurance sociale, la tendance consiste à étendre le champ d'application afin d'atteindre éventuellement l'ensemble de la population. Par définition, le régime de soins s'applique à l'ensemble de la population, tel est le cas en Grande-Bretagne et en Saskatchewan. Les personnes assujetties au régime demeurent toujours libres, toutefois, de se faire soigner à titre privé. Les frais que doit alors assumer le malade varient selon les catégories de soins et d'un régime à l'autre. Alors même s'il est question de régime obligatoire, l'obligation à ce moment-là est posée sur le paiement des primes ou des taxes ou des contributions. Mais il n'y a pas obligation à la fois pour l'individu de prendre les soins donnés dans le cadre du régime, il peut toujours se faire traiter à titre privé, mais là il paie deux fois.

Structures administratives et consultatives

Les structures administratives et consultatives diffèrent passablement entre les divers régimes car dans tous les pays on a voulu autant que possible élaborer à partir des structures qui existaient avant l'établissement des régimes. Toutefois, ces structures possèdent plusieurs caractéristiques en commun. A l'échelon supérieur, on retrouve soit un ministère, soit une commission à caractère représentatif chargé de la tutelle et du contrôle général du fonctionnement du régime. Aux échelons inférieurs, des réseaux de caisses régionales et locales chargées de la gestion proprement dite du régime.

La Grande-Bretange est quelque peu différente à ce sujet, car il existe trois grands services dont la gestion est confiée à des conseils à caractère représentatif. Dans tous les régimes il existe des organismes consultatifs nationaux et dans la plupart des cas, ils sont assistés par des organismes consultatifs régionaux. La composition de ces organismes à caractère représentatif varie selon leur but respectif.

Nous avons une étude, je crois que c'est le volume huit, où il y a des analyses de structures administratives et consultatives qui sont données. Finalement afin de coordonner l'action des divers organismes de sécurité sociale, il existe en France une inspection générale de la sécurité sociale dont le rôle est d'exercer un contrôle supérieur sur les organismes et services de l'ensemble du système de sécurité sociale. Ici c'est un organisme tout à fait particulier qui joue non pas le rôle, disons, de l'auditeur de la province, c'est-à-dire une simple vérification comptable auprès des divers organismes des ministères et une vérification pour déterminer si la loi a réellement été appliquée.

L'inspection générale va plus loin que cela, elle examine, elle inspecte les organismes pour voir aussi si la législation, pas uniquement dans le domaine de l'assurance-maladie, dans toute la législation sociale, correspond encore aux besoins, pour essayer d'éviter que des lois qui, à un moment donné ont pu être très désirables ou encore efficaces, par le passage du temps, deviennent moins efficaces ou même à certains moments peuvent avoir un mauvais effet. Cet organisme-là inspecte constamment sur ce plan-là. C'est un plan supérieur à celui de l'auditeur, disons-nous ici. Aussi cet organisme inspecte pour voir si certains organismes pourraient avoir des politiques contradictoires. Ce qui est fort possible.

On peut avoir un ministère qui recherche un but d'une façon et un autre ministère recherche le même but mais en s'y prenant d'une autre façon. Il peut y avoir réellement annulation des efforts. Il peut y avoir aussi multiplications des tâches. Si vous avez trois ministères qui doivent, par exemple, attribuer différents genres de prestations. Si une personne est invalide, au lieu d'avoir trois équipes d'inspecteurs, ce qui peut fort bien exister, cette inspection-là regarde s'il n'y aurait pas moyen d'unifier cela en une seule équipe d'inspecteurs. Si on définit par exemple l'invalidité de trois façons différentes, l'inspection va regarder pour déterminer si réellement il y a raison de définir l'invalidité de trois façons différentes. Nous avons donc mentionné l'Inspection générale ici, même si elle n'est pas dans le cadre de l'assurance-maladie directement. Etant donné que ce genre d'organisme nous a paru excessivement intéressant et un peu unique et possiblement désirable ici au Québec. Alors on a voulu le mentionner au passage.

Financement

L'assurance-maladie est financée par des contributions de la part des assurés, des employeurs et de l'Etat, sauf en France où l'Etat ne contribue pas. Bien que les formules utilisées diffèrent beaucoup, elles tendent généralement à fixer la répartition à long terme du coût entre les parties. C'est-à-dire bien fixer précisément à l'avance quelle est la part supportée par chacune des parties. Les contributions des travailleurs sont toujours prélevées sur la tranche de leur revenu du travail qui n'excède pas un certain plafond. En fait le même principe que pour le régime de rentes ici, c'est-à-dire, les travailleurs ne paient pas un pourcentage sur leur revenu sans limite; lorsqu'ils ont atteint un certain montant de revenu, ils ne paient pas sur l'excédent.

Même s'il ne s'agit pas d'une caractéristique proprement dite des régimes, on doit noter que l'augmentation rapide de leur coût constitue un des problèmes majeurs que présentent ces régimes.

Vous allez voir dans les études des régimes des pays européens que l'augmentation rapide des coûts constitue dans chacun des cas, sauf possiblement en Suède pour des raisons particulières, constitue un problème excessivement sérieux.

M. RENAUD: M. Castonguay, est-ce que dans ces cas-là cela veut dire une participation plus grande du gouvernement?

M. CASTONGUAY: Bien prenez, par exemple, en France où l'Etat ne doit pas enprincipe contribuer, aujourd'hui par le truchement des avances pour combler les déficits de la sécurité sociale, l'état contribue et là forcément, il va falloir que quelque chose se fasse. Il y a une commission qui étudie le financement de la sécurité sociale en France parce qu'ils en sont rendus au point où une nouvelle politique devra être élaborée.

En Belgique, vous avez probablement vu dans les journaux au cours des dernières semaines, qu'il y a eu un malaise assez prononcé avec les médecins. Ce malaise ou ces difficultés ajoutées à d'autres difficultés ont fait qu'il y a eu un changement de gouvernement. On notera dans le volume quatre, lorsque nous décrivons le régime de la Belgique, que nous disons que lorsque le nouveau système de financement du régime belge qui a été adopté il y a deux ou trois ans sera réellement mis à l'épreuve, cela va constituer une épreuve du régime qui va être assez difficile à traverser. On ne pensait jamais d'avoir dit si juste lorsque l'on a étudié ce régime-là.

En fait cela n'a pas dépassé nos espérances, mais cela a dépassé ce qu'on aurait pu pouvoir prédire comme problème.

Maintenant laparticipation et la rémunération des praticiens. En aucun cas les praticiens sont-ils tenus de participer obligatoirement au régime de soins ou d'assurance-maladie. Dans tous les cas leur adhésion se fait au moyen de la signature d'une entente ou convention.

La convention fixe le mode de rémunération du praticien et généralement contient les dispositions nécessaires au respect de la liberté d'exercice du praticien. Sauf en Grande-Bretagne où les médecins sont salariés ou rémunérés selon le système de la capitation. Les médecins sont généralement rémunérés à l'acte médical. La conciliation des impératifs contradictoires que posent d'une part la nécessité du contrôle finan-cier et le maintien de la qualité des soins, et d'autre part, le respect de la liberté d'exercice des praticiens et la protection de la population, constitue les problèmes les plus épineux du régime de soins et d'assurance-maladie. Il y a deux impératifs qui sont jusqu'à un certain point contradictoires, le désir de donner des soins de grande qualité et le contrôle financier et d'un autre côté, après cela, le respect de la liberté d'exercice des praticiens et après cela protection de la population.

M. ASSELIN: M. Castonguay, un médecin qui n'aurait pas signé une entente, une convention, pourra-t-il traiter un assuré qui bénéficie d'une assurance d'Etat?

M. CASTONGUAY: Dans tous les pays que nous avons visités, c'est le cas. Il a la liberté de traiter toute personne, qu'elle soit assurée ou qu'elle ne le soit pas. Cependant, selon les pays, il est plus ou moins facile pour une personne de faire un choix selon les coûts additionnels qu'elle doit supporter lorsqu'elle décide de se faire soigner par un médecin qui n'est pas conventionné. La personne est obligée de payer la prime de l'assurance-maladie et, si elle se fait soigner privé ment, en Angleterre par exemple, elle doit assumer tout les coûts incluant le coût de l'hospitalisation à partir du premier sou.

Ici, au Québec, par exemple, dans un régime du type de l'Angleterre ou de la France, la personne qui ne veut pas se faire traiter par un médecin conventionné, qui va chez un médecin privé, serait obligée de payer non pas seulement le supplément pour sa chambre, si elle prend une chambre privée, mais aussi le per diem qui est payé à l'hôpital.

M. ASSELIN: Directement cela mettrait le médecin qui n'a pas signé de convention dans une situation d'infériorité par rapport à l'autre au point de vue de traiter les assurés.

M. CASTONGUAY: Alors, c'est pour cela que vous retrouvez uniquement en dehors des médecins conventionnés, pas uniquement mais disons, de façon plus générale, soit les médecins de très grande renommée...

M. ASSELIN: Les grands spécialistes.

M. CASTONGUAY: ... les grands spécialistes ou, encore, vous les retrouvez dans certains pays comme, disons en France, concentrés dans une région excessivement prospère où les gens se disent: Bien, payer deux fois pour nous, on est prêt à faire cela.

M. KENNEDY: Est-ce qu'il y a des risques pour les médecins qui viennent de signer une convention?

M. CASTONGUAY: Disons que c'est une question que j'aimerais mieux que vous posiez aux médecins qu'à moi. Non c'est une question, je pense qui s'adresse mieux à eux. On a vu qu'un problème social dans la maladie...

M. KENNEDY: Ça va dépendre...

M. CASTONGUAY: Maintenant pour revenir à votre question de tantôt, si vous voulez ce qui distingue, comme caractéristiques les trois grandes catégories de régimes, je crois que l'on peut dire que le régime de soins, lui, couvre indistinctement la population sans rattacher la couverture au paiement des primes. Le paiement de primes n'est pas rattaché à la couverture. La personne est couverte, qu'elle paie ses primes ou non.

M. THEBERGE: Pas pour chaque acte médical, autrement dit il n'y a pas de frais modérateurs.

M. CASTONGUAY: Normalement il ne devrait pas y avoir de frais modérateurs dans le régime de soins. Tous les soins devraient être couverts d'après la conception du régime de soins. Dans l'assurance, le régime d'assurance sociale, seules les personnes qui sont assurées ou leurs personnes à charge, normalement devraient être assurées. Et là, participation de l'assuré lorsqu'il reçoit des soins, paiement de frais modérateurs. Cela je pense que c'est la distinction entre ces deux régimes-là. Le régime facultatif comporte les mêmes caractéristiques que le régime d'assurance sociale, sauf que la personne n'est pas tenue de s'assurer, elle décide de s'assurer si elle le désire. Et pour les personnes à faible revenu, l'Etat intervient en payant un subside. Je pense que ce sont les trois distinctions qu'on peut faire.

Sur les autres points, structures administratives, financement, participation, rémunération des praticiens etc. on retrouve les mêmes caractéristiques, peu importe le genre.

M. THEBERGE: Dans le deuxième groupe c'est plutôt des groupes dans les cas d'assurances sociales, des groupes qui sont compris. Parce que dans le troisième groupe ce sont les individus qui décident par eux-mêmes.

M. CASTONGUAY: Dans le deuxième groupe en fait, l'assurance sociale est dans la plupart des pays le prolongement des formes de protection mutuelle du passé. Soit mutuelle sur le plan des localité ou des métiers ou des professions et à un moment donné à mesure que ces mutuelles ont pris de l'ampleur, et à mesure que leurs problèmes de financement sont devenus plus complexes, à mesure que les problèmes des professions se sont rapprochés de plus en plus, l'on a réalisé en plus que la maladie, la santé devenaient un problème auquel l'état devait s'intéresser. Ces mutuelles se sont transformées graduellement pour former aujourd'hui des organismes de sécurité sociale. Alors tout cela, c'était plutôt basé au début sur les groupes.

M. TREPANIER: Qu'est-ce qui détermine le secteur de ceux qui ne sont pas couverts par le régime d'assurance sociale?

M. CASTONGUAY: Là on tombe dans une question qui est excessivement difficile, en fait c'est une des question fondamentales, à laquelle vous devrez donner la réponse. Je peux vous donner les indications.

M. TREPANIER: Mais en France par exemple, ils ont un régime d'assurance sociale.

M. CASTONGUAY: En France, voyez ils ont pris une approche, d'après ce que nous pouvons voir, qui est la suivante: ils ont pris des mutuelles et les ont graduellement englobées dans la sécurité sociale.

M. TREPANIER: Il y a quand même un facteur obligatoire au régime de l'assurance sociale.

M. CASTONGUAY: Aujourd'hui, oui, oui. Alors pour elles, les personnes qui s'étaient déjà groupées, c'étaient en premier lieu des salariés, ceux qui avaient des revenus. Alors, leur ordre d'entrée, disons, dans le régime a été un peu différent de ce qu'il pourrait être ici.

Ici, cela devient pratiquement un problème qui peut être envisagé de deux façons, soit un problème de justice sociale ou un problème en fait, qui a des implications économiques. On peut dire: Il serait plus important de couvrir les enfants pour les soins dentaires étant donné que si une personne rendue à un certain âge, ses dents sont mauvaises, il n'est plus temps d'essayer de la récupérer. Alors on va essayer de couvrir en premier lieu les enfants ». Alors ici, de la façon dont je vois cela, de la façon dont le problème semble se présenter, l'ordre de priorité ou la façon que les gens ont été couverts en Europe, ne pourrait pas nous servir de modèle ici. Ici il s'agira plutôt de déterminer si l'Etat a raison d'investir dans tel domaine ou de laisser les individus libres de s'assurer eux-mêmes et si l'Etat a une responsabilité dans tel domaine. Les ressources étant limitées, à quel endroit est-ce que le rendement est le meilleur, est-ce que l'on doit essayer de tout assurer tout de suite quel est l'ordre de priorité?

M. MARTIN: Est-ce que dans les pays que vous avez visités, en plus de l'étude que vous avez faite des régimes, il vous a été donné d'entendre la critique que l'on pouvait y faire7

M. CASTONGUAY: Dans tous les pays que nous avons visités, nous avons rencontré des organismes du même type dans chacun des pays. Nous avons premièrement visité des organismes administratifs de l'assurance-maladie dans chacun des pays. Nous avons rencontré des représentants des syndicats et des organismes groupant les médecins. Nous avons rencontré des représentants des employeurs et nous avons rencontré des représentants des employés. Et nous nous étions dressé avant notre départ une série de questions et nous avons, à chacun des endroits, naturellement la conversation a pu dévier, mais nous avons fait un effort pour toujours poser cette même série de questions-là, de la même façon dans chacun des endroits visités, pour pouvoir après cela comparer les réponses. Dans un certain nombre de cas, si l'on constate que les réponses des quatre secteurs sont identiques, bien là sans avoir fait une étude excessivement approfondie, on n'a pas pu faire de sondages, mais par ces quatre réponses-là, si elles sont identiques, qu'on peut imaginer que c'est assez exact comme commentaires.

Alors on a pu constater après avoir rencontré une couple d'organismes, on pouvait pratiquement pressentir à l'avance à l'intérieur d'un pays quelles seraient les réponses des autres. Nous en avons visité en tout et partout une cinquantaine. Alors même des fois en allant voir un organisme, après en avoir visité trois, quatre dans un pays, on pouvait pratiquement deviner les réponses qu'on aurait. Ces réponses-là venaient comme une confirmation de ce que nous pouvions penser à ce moment-là;

M. CLOUTIER: M. Castonguay, dans ces pays que vous avez visités et dans les régimes étrangers que vous avez étudiés, est-ce que vous avez constaté qu'on a tenu compte, dans une proportion assez appréciable des caractéristiques locales, ou de certaines traditions ou de certaines structures qui existaient déjà, ou si on a réellement innové?

M. CASTONGUAY: Beaucoup en fait. On a essayé d'en tenir compte beaucoup et même à certaine endroits un peu trop. Par exemple, il y a certaines choses qui ont été conservées qui, à prime abord, seraient difficilement acceptables par la population ici. Vous voyez, par le système des mutuelles, auxquelles je faisais allusion, anciennement les gens s'assuraient auprès de leur mutuelle qui était une mutuelle locale, et s'ils avaient un paiement à recevoir ils allaient au bureau de la mutuelle, à la caisse, et ils se faisaient rembourser. Ces mutuelles-là étaient constituées naturellement d'après les formes régulières des mutuelles, elles avaient un conseil, des représentants des mutuallistes, et il y avait l'administration.

Alors, lorsque la sécurité sociale a été établie, on n'a pas défait les mutuelles locales, les caisses, aujourd'hui on les appelle les caisses, et ces conseils d'administration. Vous avez en France des centaines de caisses locales qui ont chacune leur conseil d'administration et, aujourd'hui, il est à peu près impensable d'imaginer que l'administration pourrait être centralisée pour faire utilisation d'équipement un peu plus moderne, un peu plus adéquat; alors les gens sont encore obligés de se soumettre à des choses comme la suivante; ils vont faire une visite chez le médecin qui leur coûte, disons $5, la sécurité sociale leur en paie $3; alors là ils paient le $5 à leur médecin, prennent leur facture acquittée, vont se faire rembourser $3 à la sécurité sociale, vont faire la ligne et attendent de recevoir leurs $3. C'est bon de garder les institutions existantes, de ne pas tout chambarder, mais des fois, ça peut devenir lourd. Et dans ce cas-là on a vu certaines lourdeurs, à certains endroits. En Angleterre un autre type

de difficulté qui semble exister, et ceci nous fut mentionné pratiquement partout, c'est que les hôpitaux anciennement étaient un secteur du domaine de la santé, qui étaient administrés par des conseils autonomes; vous aviez après ça les praticiens et vous aviez les autorités locales, disons ce qui pourrait se comparer peut-être aux unités sanitaires ici, mais un peu plus élaboré que ça. Cela existait sans trop de cohésion dans le passé et même des fois en opposition. On a perpétué ces secteurs dans le régime aujourd'hui de telle sorte que les trois secteurs du régime, au lieu de collaborer, semblent bien souvent être beaucoup plus intéressés à surveiller leur empire respectif que d'améliorer la qualité des services qui sont donnés. Il ne s'agit pas d'une opinion personnelle, c'est même indiqué dans une des brochures officielles du gouvernement anglais que nous citons dans notre rapport. C'est donc un genre de maintien des anciennes structures qui n'a pas été réellement au bénéfice de la population.

M. FORTIER: Alors, M. Castonguay, ça m'intéresse moi parce que d'ailleurs les médecins vont vous en parler. Les médecins sont-ils satisfaits des lois établies au point de vue assurance-maladie, et est-ce que les patients sont satisfaits des soins qu'ils reçoivent des médecins?

M. CASTONGUAY: Là vous posez une question difficile. Si vous voulez on va procéder par étapes. On va prendre en premier lieu, en Angleterre, et là ce sont des opinions que je ne vous donne pas comme étant la vérité absolue. On n'a pas été là tellement longtemps, ce n'est pas possible je pense dans un voyage comme celui-là ou même dans l'étude des textes de se faire une opinion définitive qui peut viser juste. A part cela, si de façon générale on pense avoir obtenu une réponse assez exacte aux questions que vous posez, c'était celles-là qui nous préoccupaient naturellement, nous avons pu faire totalement erreur. Mais voici. En Angleterre, d'après ce que nous avons pu voir, chez les médecins premièrement, les spécialistes semblent être raisonnablement satisfaits de leur sort et les spécialistes semblent opérer à l'hôpital, pratiquer à l'hôpital. Les omnipraticiens semblent assez malheureux de leur sort, ils se disent surchargés, mal rémunérés, obligés de pratiquer dans des conditions plus ou moins bonnes et aussi surchargés de formules administratives qu'ils doivent compléter, non pas nécessairement pour l'assurance-maladie, mais en vertu de toute sorte d'autres lois. On leur demande des certificats, on demande aux employés des certificats lorsqu'ils sont malades, on demande des certificats si la personne demande un genre de pension etc... Du côté de la population, il n'y a aucun doute que les campagnes ou les régions ou la population n'est pas trop forte en nombre, il y a eu une grande amélioration. Anciennement, il y avait une grande disparité dans les effectifs, or le régime a corrigé ça, jusqu'à un certain point. Dans les grandes villes, je pense bien qu'encore là, la réaction de la population varie selon le niveau de revenu des individus. Dans les quartiers disons plus populeux à revenus moins élevés, j'ai l'impression que les gens, même s'il peuvent critiquer le régime à certains moments ne le rejetteraient pas et désirent le garder. Les personnes à revenus plus élevés, à mesure qu'on monte dans l'échelle de revenus, je pense que là on trouve une plus grande proportion de gens qui sont plus ou moins satisfaits, et la preuve est qu'il semble y avoir déjà plus de 1 million de personnes qui se sont assurées, en plus de la sécurité sociale, pour pouvoir se faire traiter à titre privé. C'est très onéreux en Angleterre, parce que vous assumez deux fois le coût au complet.

En France, la question se pose différemment, je crois. En France, le régime fonctionne passablement de façon différente. Chez les médecins premièrement, il y a des conventions pour chacun des départements. Alors il y a à peu près 5 ans, dans un bon nombre de départements le nombre requis de médecins qui avaient adhéré au régime n'était pas suffisant pour que le régime s'applique dans le département. Alors, à ce moment-là la sécurité sociale effectuait des paiements beaucoup plus bas que ceux effectués dans les départements où la majorité des médecins étaient conventionnés. Il s'agissait d'une pression mise par la sécurité sociale pour forcer les médecins par le truchement de l'opinion publique à se conventionner, à entrer dans le régime. Il y a eu des modifications au régime il y a 4 ans, et aujourd'hui, dans la plupart des départements, sauf dans les départements où le niveau de vie est le plus élevé, comme celui autour de Paris, le département de la Loire je crois, en tous les cas quelques départements, cinq, six, la majorité des médecins est conventionnée.

Alors c'est donc signe que les médecins acceptent mieux le régime qu'ils l'acceptaient il y a 5 ou 6 ans. Maintenant, à l'intérieur de la profession il y a une scission qui n'est pas, comme en Angleterre, entre les spécialistes et les omnipraticiens; elle est plutôt sur le plan géographique. Il y a une fédération qui couvre sur le plan géographique toute la France mais qui ne groupe pas tous les médecins.

C'est la fédération qui accepte le régime; il y a l'autre fédération qui groupe des médecins situés dans ces régions-là où la majorité n'est pas conventionnée et qui combat le régime. Eux ne sont pas conventionnés, et à ce moment-là, pour la population dans ces régions plus riches, ça donne un grand nombre de médecins pour la population qui peuvent être consultés à titre privé. Les pénalités sont moindres qu'en Angleterre lorsque vous voulez être consulté à titre privé. Alors, disons qu'il y a une soupape plus grande en France, et du côté des médecins et du côté de la population. On croit aussi qu'on entend moins parler des difficultés apportées par l'assurance-maladie en France qu'on en a entendu parler en Angleterre. Je pense que ça, à notre avis, c'est à peu près le portrait tel qu'on l'a vu là.

M. FORTIER: Oui bon! Maintenant une question qui m'intéresse énormément et aussi d'actualité, est-ce que vous croyez actuellement, je vais mettre ça aussi simple que possible, dans certaines de nos régions éloignées on manque de médecins, d'omnipraticiens, est-ce que vous croyez qu'un régime d'assurance-maladie va favoriser la pratique médicale dans les centres ruraux?

M. CASTONGUAY: Bien là, c'est une opinion purement personnelle, mol je dirais que oui.

M. FORTIER; Vous croyez que oui.

M. ASSELIN: M. Castonguay, sur le même sujet, quelles ont été vos constatations en Alberta au sujet de la satisfaction de la population, des médecins etc.. sur les mêmes sujets que vous venez de parler de l'Angleterre et de la France?

M. CASTONGUAY: Voici: En Alberta, les médecins se sont groupés il y a un bon nombre d'années. Ils ont formé ce qu'ils appellent le Alberta Medical Services Plan, le nom de la société c'est Alberta Medical Services Limited, qui est une société composée de médecins, sans but lucratif, et qui offre à la population la protection contre les frais des soins médicaux complète, moyennant paiement d'une prime. Alors ils ont couvert par cette société-là aller jusqu'en 1962 je crois à peu près 60% de la population qui était déjà assurée, alors tout cela a été fait volontairement et par l'initiative des médecins sans aucune pression ou sans aucun stimulant de la part du gouvernement.

C'était donc une bonne indication, ce système-là fonctionnait à la satisfaction de la population et des médecins. La loi qui a été passée en Al- berta, le but de cette loi-là, a été d'étendre l'application de ce régime à commandite médicale et aussi de ne pas exclure les sociétés privées d'assurance. Cela n'est pas un régime du même type que les autres. Les médecins en fait avaient pris l'initiative de rendre l'assurance disponible à la population. Il semble qu'en Alberta, la population et les médecins sont très satisfaits des arrangements qui existent.

M. RENAUD: Qu'elle est la situation actuellement dans notre province, en autant qu'il s'agit des membres assurés etc...

M. CASTONGUAY: Ici nous avons une...

M. RENAUD: Je sais que c'est dans un volume.

M. CASTONGUAY: Cela va venir ce soir, disons en très bref résumé, la situation telle qu'on l'a vue par les chiffres c'est qu'il y a à peu près 43% de la population qui est assurée, Ces personnes-là sont assurées par deux ou trois genres de sociétés; les compagnies d'assurances à capital-actions d'une part, les compagnies d'assurances mutuelles, l'Alliance mutuelle, l'Assurance-vie Desjardins etc,... et deux sociétés d'un caractère plus particulier, celle qui est appelée la Croix-bleue, l'Association d'hospitalisation du Québec, et la Mutuelle des Services de santé du Québec. Ces deux dernières sociétés-là ayant été formées, ce sont des mutuelles, principalement par des médecins, mais elles n'offrent pas le genre de protection qui est offerte dans le régime du type de l'Alberta, sauf dans quelques régions très limitées. Ils offrent plutôt le genre de protection que les autres assureurs offrent qui est de deux types, un paiement selon le genre d'acte médical, sans référence à une échelle d'honoraires, une société va payer $2 pour une visite, une autre va payer $3.

M. RENAUD: Je comprends. M. CASTONGUAY: Une autre $4. M. RENAUD: Merci.

M. LE PRESIDENT: Nous continuons avec le rapport de M. Castonguay.

M. CASTONGUAY: Dans le deuxième chapitre nous avons donné certains éléments pour déterminer la justification qui peut exister pour l'intervention de l'Etat dans le domaine de la santé, de façon générale, et aussi dans le domaine de l'assurance-maladie de façon plus parti-

culière, sans tirer de conclusions. Nous donnons plutôt des éléments qui permettent de juger ou d'apprécier jusqu'où va cette responsabilité. Alors, à la page 34, nous avons trois types. Le premier c'est que, de toute évidence, il semble que la maladie est réellement une des causes de la pauvreté. A ce sujet-là j'ai souligné certaines des parties qui peuvent être les plus intéressantes. On dit au haut de la page 35, « ainsi qu'on le fait remarquer dans un des documents préparés pour la conférence fédérale-provinciale sur la pauvreté, tenue à Ottawa en décembre 1965, les maladies de longue durée peuvent réduire le revenu familial, et même diminuer ou annihiler de façon permanente la capacité de gain du soutien de famille.

Alors, une des premières causes de pauvreté est due à la maladie. Il semble donc évident que les maladies ou incapacités chroniques soient des causes potentielles de pauvreté en particulier lorsqu'elles affectent la population mâle comprise dans les groupes d'âges formant la population active ». Un peu plus loin on dit: « On y mentionne en effet que les personnes de sexe masculin recevant un faible revenu, et comprises dans le groupe d'âge de 25 à 44 ans représentaient 14% des individus de ce groupe d'âge mais devaient supporter 30% des jours d'incapacité ». Dans ce deuxième extrait, ce qui est prouvé dans ce deuxième document, c'est que plus on baisse dans les revenus des travailleurs, plus on voit que les personnes sont invalides ou absentes pour cause de maladie, plus leur nombre augmente. Il y a une relation encore là.

Plus bas nous ajoutons, au bas de la page: « Par ailleurs, l'expérience plus que proportionnelle en termes de jours d'incapacité, supportée par les récipiendaires de bas revenus dans les groupes d'âge où se recrute la population active laisse entrevoir la possibilité que leur bas revenu puisse avoir été causé du moins en partie par leur mauvais état de santé ». Alors il y a un lien réel. D'après toutes ces statistiques on n'en a cité que quelques-unes, il y en a des masses de ce genre, de ce type qui ont été compilées où on relie réellement la maladie comme cause de la pauvreté et dans l'autre sens aussi, la pauvreté comme cause de maladie, avec l'effet de perpétuation d'une génération à l'autre.

On dit à la page 36 justement, au miliieu de la page: « Or, une des formes les plus anciennes et les plus acceptables de sécurité sociale est l'assistance financière aux indigents. Mais apparemment le concensus semble maintenant se faire autour de l'idée qu'il n'est plus suffisant d'identifier les indigents et de les assis- ter financièrement, mais qu'il faut essayer de déceler les raisons de leur indigence et s'efforcer d'éliminer les causes de la pauvreté. Par conséquent, dans la mesure où l'on peut établir que la maladie est une cause de pauvreté et que les personnes à faibles revenus ne peuvent efficacement se procurer les moyens d'améliorer leur santé, il semble qu'une action publique ou collective dans le domaine de la santé est justifiée ».

Et nous citons un extrait du mémoire de la province de Québec ici, à la conférence sur la pauvreté; dans ce mémoire il était dit: « Une telle politique d'assistance sociale implique que des ressources importantes soient consacrées à identifier les facteurs qui ont contribué à l'apparition de cas individuels ou collectifs d'assistance. Cette identification des causes permet alors de recourir à ceux des services gouvernementaux qui peuvent corriger la situation ».

Maintenant, l'aspect complémentaire, la santé ou les dépenses dans le domaine de la santé peuvent être considérés, non pas uniquement comme des dépenses de consommation, mais aussi contenir une composante d'investissement. Alors on dit: « Dans le passé, les soins avaient été surtout considérés comme des biens de consommation, depuis quelques années cependant on en est venu à réaliser que les dépenses dans le domaine de la santé pouvaient être considérées comme un investissement en capital humain et que comme tel, le rendement social qu'on pouvait en escompter était relativement élevé ». Et à la page 37, après avoir élaboré un peu plus que ça, à partir du mémoire soumis par le Collège des médecins au gouvernement de la Province en septembre 1964, il y a la question fondamentale à laquelle il faut répondre: « Jusqu'à quel point l'amélioration du capital humain dans une société favorise-t-il le progrès économique ? ».

C'est un investissement et jusqu'où est-ce que ça peut favoriser? Nous avons certaines données que nous avons ressorties, toujours à la page 37. Irving J. Goffman, c'est un économiste qui a étudié la question ici au Canada, mentionne que le taux brut de mortalité est tombé de 10.2 par 1,000 habitants en 1931, à 7.8 en 1960. Ce résultat serait attrlbuable en majeure partie à la baisse de la mortalité infantile et de la mortalité chez les adolescents dû à l'élimination presque complète des maladies contagieuses et infectieuses.

A la suite de ces progrès médicaux, l'âge moyen au décès est passé de 44 ans en 1931, à 61 ans en 1960. A l'heure actuelle l'espérance de vie à la naissance, est de 67 ans pour les

hommes et de 73 pour les femmes pour l'ensemble du pays. Cette hausse de l'espérance de vie en plus de prolonger la période d'activité des travailleurs et, par conséquent, d'augmenter le rendement des investissements en capital humain signifie qu'une proportion considérable de la main-d'oeuvre actuelle, possiblement 10%, a survécu jusqu'à maintenant à cause de la baisse de la mortalité depuis 1930. Pour l'année 1960 seulement, cette main-d'oeuvre supplémentaire a probablement, ajouté entre $1 milliard et $2 millards au revenu national du Canada. Alors c'est une façon de mesurer approximativement l'investissement.

On dit maintenant ici, c'est très intéressant pour ce que est de la maladie, Goffman estime qu'au Canada elle cause en moyenne une absence du travail d'au moins cinq jours par an. Pour 1962, ceci aurait signifié 27 millions d'hommes-jours, soit plus que la perte occasionnée par toutes les grèves et « lock-out » qui ont eu lieu au Canada depuis 1947. Alors ce que nous avons voulu montrer ici c'est qu'il y a beaucoup d'efforts consacrés pour régler les conflits ouvriers. Il y a peut-être aussi un aspect investissement pour réduire les pertes occasionnées par la maladie.

Finalement la troisième justification qui peut être considérée comme étant réelle, c'est...

M. KENNEDY: Le paragraphe que vous venez de citer, l'histoire d'hommes-jours, est-ce que vous avez la source de cette affirmation-là?

M. CASTONGUAY: Oui, si vous regardez à la page 61, on a cité un peu plus haut, nous avons cette référence-là, à la page 34, « Some Fiscal Aspects of Public Welfare in Canada ». On a cette référence-là si vous voulez...

M. KENNEDY: parce qu'actuellement il y a énormément de gens qui prennent des jours de maladie seulement par convention; ils leur sont attribués, ça s'ajoute à leurs vacances...

M. CASTONGUAY: Mais là, il n'estime lui que celles causées par la maladie, il fait abstraction de toutes ces choses-là...

M. KENNEDY: ... c'est ça que je voudrais savoir si ces jours sont authentiquement des jours de maladies ou si ça comprend les vacances...

M. CASTONGUAY: Il essaie d'estimer à partir des jours d'absence quels sont ceux qui sont réellement dus à la maladie...

M. KENNEDY: Il y en a qui ont des jours d'absence de maladie et puis qui ne sont pas malades.

M. CASTONGUAY: Même en supposant que son estimation n'aurait pas été réaliste, il reste que la perte est tellement forte, 27 millions d'hommes-jours, même si on coupait ce chiffre de moitié, c'est encore quelque chose de significatif.

M. KENNEDY: Je voulais vous demander la question parce que je sais, par exemple, que dans une certaine catégorie de fonctionnaires civils, ils peuvent s'accumuler à peu près cinq semaines de vacances dans l'année en tenant compte des jours de maladie et puis de tous les autres facteurs...

M. CADIEUX: C'est ce qui explique pourquoi il y a plus d'absences parmis les plus jeunes parce qu'ils sont plus intéressés à aller à la chasse.

M. KENNEDY: Peut-être, oui. c'est fort possible. C'est pour ça que je veux savoir s'il faisait abstraction de ce facteur.

M. CASTONGUAY: Il dit qu'il estime, alors il a tenu compte.

Maintenant, la caractéristique du marché des soins, c'est peut-être un peu plus aride, mais c'est assez intéressant malgré tout comme troisième justification. On dit à la page 38, au premier paragraphe: Dans le cadre d'une allocation optimum, — Il faut vous dire qu'il y avait des économistes dans notre comité — dans le cadre d'une allocation optimum des ressources disponibles dans la société, il existe un niveau donné de consommation de soins qui correspond à une satisfaction maximum des besoins de la collectivité. Pour des raisons dont nous essaierons de donner plus bas un aperçu sommaire nous ne pouvons compter sur les mécanismes normaux des marchés pour réaliser cette allocation optimum des ressources et ce niveau souhaitable dans la consommation médicale... C'est cette défaillance partielle des mécanismes des marchés dans le cas des soins qui constitue, à notre avis, le principal argument en faveur d'une intervention publique dans le domaine de la santé.

En fait, tout cela pour dire que la nourriture ça va bien,une personne est capable de déterminer si elle a faim ou si elle n'a pas faim; pour l'habillement elle est capable de déterminer si elle veut s'habiller plus ou moins bien; pour l'automobile, elle est capable de déterminer si

ses moyens lui permettent d'acheter une plus grosse ou une plus petite automobile. Dans le domaine des soins la personne n'est pas en mesure d'apprécier de la même façon si elle a besoin de soins, si elle reçoit des bons soins, même si parfois elle n'exagère pas dans l'utilisation qu'elle peut faire des médicaments, etc. Alors les mécanismes réels de marché ne jouent pas en plus du fait que la maladie est quelque chose d'imprévisible, et personne ne sait à quel moment la maladie le frappera, encore moins chez sa femme et ses enfants, s'il s'agit d'une personne mariée. Il y a donc un aspect différent dans le cas de la maladie qui fait que les mécanismes réguliers du marché ne peuvent pas jouer.

M. KENNEDY: M. Castonguay, vous dites qu'une personne ne peut savoir déterminer par elle-même la totalité des soins médicaux dont elle a besoin. Je ne vois pas ce que cela vient faire dans l'assurance-maladie. Est-ce qu'il va y avoir un mécanisme qui déterminera qu'une personne ne veut voir le médecin quatre fois par année ou trois fois par année?

M. CASTONGUAY: C'est que, il n'agit pas de la même façon tout à fait, mais le mécanisme va marcher.

M. KENNEDY: Bien moi je parle d'une personne qui se sent malade évidemment.

M. CASTONGUAY: Autrement dit la question c'est que l'Etat — remarquez que je n'essaie pas de donner la réponse — est-ce que l'Etat joue un rôle supplétif ou est-ce que l'Etat a un rôle plus que supplétif. Si on accepte le fait que les mécanismes réguliers de marché jouent, on peut dire toutes les personnes qui gagnent un revenu vont s'assurer — selon leurs besoins — parce qu'une des premières allocations qu'elles vont faire, elles diront: Il faut que je me nourrisse, que je me loge, que je me soigne. Mais si les mécanismes de marché réguliers ne jouent pas et que les gens qui passent à ce qui leur est le plus évident, ou qui leur donne le plus de satisfaction immédiate, ils remettent les soins médicaux plus loin dans leur ordre de priorité. Ils se disent, bien ça, j'y ferai face à ce problème lorsqu'il se présentera. Parce fait-là vous avez une population qui est en moins bon état de santé, une population qui s'absente plus souvent de son travail, qui donne lieu à des problèmes sociaux parce qu'avec la pauvreté il y a généralement d'autres problèmes sociaux qui s'y rattachent. La question se pose donc: Est-ce qu'il y a une justification pour une intervention de l'Etat dans ce domaine ou est-ce que l'Etat doit jouer un rôle purement supplétif?

M. CLOUTIER: Il y aurait moins de médecine préventive.

M. RENAUD: Il y auraplus de médecine préventive.

M. KENNEDY: Cela se rattache à l'aspect préventif de la sécurité sociale.

M. CASTONGUAY: La balance du raisonnement, c'est à peu près ça en fait qui ressort. Ce n'est pas nécessaire, je crois, de lire les autres parties, il y a un autre élément additionnel, c'est ce qui est appelé en termes d'économistes, les économies extermes. C'est un autre point de vue qui est assez intéressant, qui n'est peut-être pas convaincant pour un non initié, et moi je m'inclus dans cette catégorie, celui des économies externes; vous pouvez le voir de façon assez évidente du côté de la vaccination. Par exemple, si la vaccination n'était pas obligatoire une personne qui a une maladie contagieuse, à un moment donné, peut occasionner une épidémie et comme perte, ça peut être désastreux. Alors, c'est peut-être un cas extrême, les maladies contagieuses, mais de la même façon une personne qui se maintient soit par ignorance ou soitpar manque de revenu, en mauvais état de santé, crée en fait des charges pour la balance de la société en ce sens qu'elle ne donne pas son plein rendement. Alors si les soins médicaux et divers autres genres de soins lui sont accessibles et qu'elle peut se maintenir en un meilleur état de santé, d'ailleurs il y a plus de bien-être pour elle, il y a une économie indirecte pour le reste de la population.

Alors c'est une question de degré cette histoire-là, il s'agit de l'évaluer, ce n'est pas quelque chose d'absolu, je n'essaie pas de faire une thèse ici, mais il y a certains éléments de réponses aux questions que vous vous posez et, qui sont là.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que c'est tout M. Castonguay?

M. RENAUD: Je pense bien que c'est un exposé de principes d'ailleurs excessivement intéressant.

M. LE PRESIDENT: C'était extrêmement intéressant. Alors le comité est ajourné à ce soir, 8 heures et si j'ai bien compris vos intentions, M. Castonguay, vous allez tâcher de nous donner le sommaire des volumes 2 et 3, n'est-cepas...

M. CASTONGUAY: Exactement ça.

M. LE PRESIDENT: ... premièrement le volume 2, qui a trait au régime public au Québec, le régime privé au Québec et ensuite dans le volume 3, les aspects constitutionnels des relations fédérales-provinciales, et ensuite un sommaire de la législation dans le domaine de la santé.

M. CASTONGUAY: Exactement ça.

M. LE PRESIDENT: Alors le comité est ajourné à 8 heures.

Reprise de la séance à 8 h p. m.

M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie): Je demanderais à M. Jacques Morency et à M. Jacques de la Chevrotiêre de nous donner des explications au sujet du volume n, régimes publics et régimes privés au Québec.

M. de la CHEVROTIERE: M. le Président, avec votre permission, je peux rester assis?

M. LE PRESIDENT: Sûrement.

M. de la CHEVROTIERE: M. le Président, le volume no il traite des régimes privés et des régimes publics de même que de certains régimes bénévoles dans la province de Québec Pour ma part, je vous parlerai des régimes privés qui font l'objet du chapitre premier de ce volume.

Ce chapitre premier se divise en deux parties et la première partie est relativement courte quant au texte et j'ai pensé que, si c'était l'assentiment des membres du comité conjoint, je pourrais en faire la lecture. Je pense que ça sera peut-être plus court que de donner des explications sur les tableaux parce qu'en somme le texte est très bref et correspond aux données statistiques.

Il y a un court historique au début, où l'on dit ceci: « Avant 1940, dans la province de Québec l'activité des assureurs dans le domaine des frais médicaux était à peu près nulle. Lorsque ces frais étaient couverts, c'était le plus souvent, en vertu de clauses secondaires de police d'assurance générale ayant trait aux accidents d'automobiles, à la responsabilité civile, etc. C'est au cours des années 1940 que commença vraiment l'assurance-maladie. La Quebec Hospital Service Association, Croix-Bleue fut fondée en 1942 et offrait alors une protection contre les frais d'hospitalisation seulement. « En 1946, une autre société québécoise, le Service de santé du Québec, fut mis sur pied et offrait dès le départ une protection contre les frais d'hospitalisation et aussi contre les frais médicaux encourus à l'hôpital, au cabinet du médecin ou à domicile. « Un bon nombre de compagnies d'assurance-vie commençait à cet effet à offrir des contrats surtout collectifs, mais aussi individuels d'assurance-maladie. Jusqu'à nos jours le volume d'affaires, en ce domaine, s'est accru constamment d'année en année. « Les statistiques à notre disposition concernant les primes et les prestations ne nous permettent pas d'établir une distinction entre, d'une part, les frais médicaux et d'autre part, les autres risques qui rendent à la maladie ou aux accidents, comme la perte de revenu, la perte de membres, le décès accidentel, l'invalidité temporaire ou permanente, les frais hospitaliers. Pour cette raison, il est difficile de mesurer isolément l'expansion de l'assurance contre les frais médicaux. Néanmoins, le tableau 1, qui nous fait constater l'essor rapide et considérable qu'a connu l'assurance-accident-maladie dans la province, nous permet de supposer que l'assurance contre les frais médicaux, a suivi la même tendance. Nous savons, toutefois qu'en 1964 le montant des primes d'assurance contre les frais médicaux s'élevait à $56,800,000 soit plus de la moitié de toutes les primes d'assurance-accident-maladie qui ont été payées dans la province ». « D'après le tableau 1, on peut voir qu'en 25 ans, le volume des primes souscrites pour l'assurance-accident-maladie se serait multiplié 40 fois. Vous voyez, dans le tableau 1, qu'en 1940, dans toute la province de Québec et par tous les assureurs privés, il a été perçu $2,600,000 de primes pour de l'assurance-accident-maladie, alors qu'en 1964, il y a eu $105 millions de payé par les citoyens de la province ».

Je rappelle ici que ces primes englobent non seulement les frais médicaux proprement dits, mais certains frais ou certains risques connexes à la maladie ou aux accidents. « Champ d'application. Le nombre de personnes assurées contre les frais médicaux dans la province de Québec, s'est accru constamment d'année en année depuis vingt ans. En 1964 on estimait à 2,393,550 le nombre de personnes assurées par des régimes privés, comparativement à 1,500,000 en 1955, à 1,780,000 en 1958 et 2,100,000 en 1961. De 1955 à 1964, la population assurée a augmenté de 52.4%. De 1961

à 1964, cette augmentation a été de 13.4%. C'est une augmentation considérable mais une vue plus réaliste de la situation exige que nous considérions la proportion de la population qui est protégée par des régimes privés. Il est alors possible de connaître globalement le degré de protection contre la maladie dont le résident de la province de Québec bénéficie et de voir comment ces derniers se comparent à ce point de vue avec les autres canadiens. « En 1955, 34.8% de la population était protégé en vertu d'un régime privé et en 1964 ce pourcentage atteignait 43.1%. Au tableau 2, qui est à la page suivante, nous constatons qu'en 1955, la province de Québec en ce qui concerne la population assurée par des régimes privés, était au troisième rang avec 34.8%, comme nous l'avons vu et en 1964, cette proportion était passée à 43.1%. Il est à remarquer, cependant que la province de Québec a reculé par rapport aux autres provinces, elle se trouve au sixième rang. Elle a fait du progrès mais moins que les autres provinces ».

Je pense que c'est surtout...

M. MARLER: ... vous expliquez ce ralentissement, de cette façon-là, par le fait qu'on a institué le système d'assurance-hospitalisation.

M. de la CHEVROTIERE: Je ne crois pas, M. Marler, je pense que de fait, l'instauration du régime d'assurance-hospitalisation a plutôt été un stimulant à l'assurance-maladie. Plusieurs personnes qui bénéficiaient d'assurance-hospitalisation privée et qui ont été libérées de l'obligation de s'assurer privément, à cause de l'instauration du régime public d'hospitalisation, se sont à ce moment-là assurées contre la maladie. Je pense que la raison principale qui a fait que, dans la province de Québec, les régimes privés d'assurance-maladie ont fait moins de progrès que dans les autres provinces, c'est le fait qu'ici, on y revient d'ailleurs un peu plus loin dans le texte, c'est que nous n'avons pas dans la province de Québec, ce qu'on appelle communément les régimes conventionnels, qui existent dans toutes les autres provinces du pays.

Les régimes conventionnels sont des régimes qui ont été mis sur pied par des sociétés provinciales d'assurance-maladie qui elles-mêmes, dans la plupart des cas tout au moins, on été mises sur pied par la profession médicale de chaque province. L'association médicale canadienne qui a des divisions dans chaque province a organisé, il y a déjà plusieurs années, dans toutes les provinces du Canada, sauf au

Québec, des sociétés d'assurance à but non lucratif spécialisées dans le domaine des frais médicaux proprement dits. Ces sociétés ne s'occupaient pas d'assurance-hospitalisation, mais uniquement des soins médicaux proprement dits.

Le noeud de ce genre d'assurance, le point important qu'il faut retenir, c'est que les médecins de ces provinces ont convenu avec ces organisations d'accepter en paiement final de leurs services, un certain tarif d'honoraires. Ce qui faisait que dans les autres provinces du pays les citoyens pouvaient, sur une base collective et même individuelle, obtenir un contrat d'assurance de ces sociétés et avoir la garantie, en somme, que leurs soins médicaux seraient couverts entièrement par leur contrat d'assurance. Ici dans la province de Québec, de tels régimes conventionnels n'existent pas ou du moins existent très peu et à titre quasiment expérimental. De toute façon, ça n'a pas exercé d'influence et je pense que c'est une des raisons qui font que les régimes privés se sont moins développés ici que dans d'autres provinces.

M. KENNEDY: M. de la Chevrotière, je voudrais m'assurer d'une chose. Votre $105,500,000 de primes au tableau 1, se rattache aux 43.1% de la...?

M. de la CHEVROTIERE: Pas du tout. Je dois d'abord dire, j'aurais peut-être dû commencer par ça que les statistiques, surtout de ces années-là, nous manquent terriblement. Nous n'avons aucune donnée sur les soins médicaux proprement dits. Nous en avons pour les toutes dernières années, peu d'ailleurs pas autant que nous aurions voulu, et nous avons dû nous contenter des statistiques qui englobent l'assurance-accident-maladie et non pas seulement les soins médicaux.

M. KENNEDY: Cela comprend la perte de salaire?

M. de la CHEVROTIERE: Oui, c'est ça, la perte de salaire, même le décès accidentel et des choses comme cela. C'étaient tout simplement les statistiques du début, pour indiquer d'une façon générale la tendance, la croissance, de l'assurance-accidemt-maladie, mais nous pouvons conclure, je pense, à peu près à coup sûr, que l'assurance-soins-médicaux, proprement dite a suivi à peu près la même courbe.

M. KENNEDY: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Les prestations comprennent aussi l'hospitalisation, pour l'année 1964?

M. delaCHEVROTIERE: Oui. Les prestations comprennent tout ce que les assureurs qui font des affaires dans la province de Québec, ont payé en 1964 pour toute réclamation touchant de près ou de loin la maladie, que ce soit de la perte de salaire, de l'hospitalisation, des soins médicaux, enfin toute la gamme des risques.

A la page 6, si vous permettez, nous allons continuer la lecture: « Même si au cours des dernières années la proportion de la population assurée a augmenté de façon significative elle demeure que moins de la moitié de la population est protégée en vertu d'un régime privé. Si nous comparons le champ d'application du Québec avec celui des autres provinces, nous constatons que la province de Québec en 1964, se trouve au sixième rang », ce que nous avons vu tout à l'heure, « précédée de l'Ontario et de toutes les provinces de l'ouest ainsi que du Nouveau-Brunswick. Seule la Nouvelle-Ecosse et l'Ile-du-Prince-Edouard et Terre-Neuve passent après Québec ».

M. KENNEDY: Vous avez pu établir les raisons qui font que la province de Québec était en retard par rapport aux autres provinces.

M. de la CHEVROTIERE: La raison principale que nous avons vue nous, je pense que c'est celle que je viens d'expliquer au sujet des régimes conventionnels qu'on trouve ailleurs et on va voir plus loin d'ailleurs que dans les autres provinces, une importante partie de la population qui est assurée en vertu d'un régime privé, a préféré ce genre de régime parce qu'il lui accordait justement une sécurité quasi totale, a peu près absolue. Alors que dans la province de Québec certains se plaignent que les contrats d'assurance émis par les assureurs ne couvent pas entièrement, soit que les prestations prévues sont inadéquates, soit même si elles sont jugées adéquates, que rien n'empêche ceux qui rendent des services de demander une somme supérieure. C'est sûrement une des raisons principales, mais il y en a sûrement d'autres aussi d'ordre économique. L'industrialisation dans la province de Québec n'est pas aussi poussée qu'en Ontario ou en Colombie-Britannique et comme on sait que l'assurance-maladie se vend principalement sur une base de groupe dans l'industrie, avec contribution de l'employeur, il peut se faire, si l'on compare à des provinces comme l'Ontario ou la Colombie, que ce soit une explication.

Mais cela n'en est sûrement pas une, vis-a-vis la Nouvelle-Ecosse ou le Nouveau-Brunswick.

M. DUPRE: Est-ce qu'il y aurait plus de groupes d'assurance-groupe dans le Québec, qu'ailleurs?

M. de la CHEVROTIERE: Vous voulez dire plus de groupes d'assurés ou plus de groupes d'assureurs?

M. DUPRE: Non, d'assurance en groupe par industrie, comme la Croix-Bleue par exemple?

M. de la CHEVROTIERE: Il y en a beaucoup ici d'assureurs, mais je dirais que la majorité sont des sociétés ou des compagnies qui font un très faible volume d'assurance-maladie. Dans la province de Québec, il y a 277 assureurs, mais il faut dire sur ce nombre, il y en a à peine plus d'une vingtaine dont le chiffre d'affaire de primes en assurance-accident-maladie dépasse $1 million de dollars par année. Tous les autres, soit que ce soient de toutes petites sociétés ou des compagnies d'assurance-vie qui n'ont à peu près pas développé ce secteur-là, ont un chiffre d'affaires assez limité en assurance-maladie.

A la page 6, au dernier paragraphe, un aspect qu'il est important de souligner, c'est la portion du marché que les assureurs dans le domaine de l'assurance privée contre les frais médicaux ont réussi à s'approprier. Dans chaque province le nombre de personnes protégées par des régimes publics varie de sorte que lorsque nous comparons dans chaque province le nombre de personnes assurées en vertu de régimes privés par rapport à la population totale, la comparaison est quelque peu boiteuse. En d'autres termes, si dans les provinces il y a des régimes publics gouvernementaux qui assurent une plus ou moins grande proportion de la population, évidemment ce qui reste à assurer est peut-être plus ou moins grand et c'est là-dessus, pour avoir une idée plus juste, qu'il faut se baser pour déterminer la clientèle possible des assureurs privés.

Et si l'on fait ce relevé-là, on constate que la situation de la province de Québec est peut-être encore moins intéressante que celle des autres provinces.

Vous avez ces statistiques-là à la page 8 au tableau 3. Vous avez d'une part, pour chaque province la population totale et ensuite le nombre de personnes assurées, d'abord dans les régimes privés et ensuite dans les régimes publics. Et la quatrième colonne indique juste-

ment le nombre de clients possibles pour les assureurs privés.

M. TREPANIER: Mais par régimes publics dont il est fait mention ici, vous entendez ce qui est mentionné à la page 16, le système des Anciens combattants...

M. de la CHEVROTIERE: C'est ça.

M. TREPANIER: ... exception faite de la Saskatchewan...

M. de la CHEVROTIERE: Oui, d'accord.

La Saskatchewan est hors de cause et c'est pour ça évidemment qu'elle n'apparaît pas dans le tableau en question.

Alors vous voyez dans ce tableau 3 que dans la province de Québec il n'y a que 43.4% du marché possible qui est effectivement assuré. En fait, la province de Québec est au huitième rang à ce moment-là, suivie par l'Ile-du-Prince-Edouard.

Dans le tableau 4, vous avez les personnes assurées selon le type de protection qu'elles ont par leur contrat d'assurance, il n'a pas été très facile de faire ces chiffres et l'on ne peut pas d'ailleurs dire que la question est absolument tranchée.

Quand on dit protection limitée, on réfère généralement à des contrats d'assurance qui couvrent, par exemple, uniquement les soins médicaux alors que ceux-ci sont rendus, disons, en cours d'hospitalisation ou, dans les cas d'accidents, à domicile ou au bureau, mais, d'une façon générale qui ne couvrent pas les services médicaux courants qui sont rendus au cabinet du médecin ou au domicile de l'assuré. Alors que sous le titre de protection complète on désigne davantage les contrats qui couvrent les soins de médecins, qu'ils soient rendus à domicile, au cabinet du médecin ou à l'hôpital.

Et on constate ici, n'est-ce pas, que dans la province de Québec, sur le nombre total de personnes protégées, il y en a 40% qui ont une protection qu'on peut qualifier de complète, d'une façon générale, et la différence 59.2% qui ont une protection limitée.

Si vous comparez aux autres provinces, vous voyez que partout ailleurs la majorité des assurés bénéficient d'une protection complète et ce, pour la raison que j'ai expliquée tantôt et que je peux bien répéter brièvement: c'est que les sociétés à commandite médicale mises sur pied ou suscitées par les divisions de chaque province de l'Association médicale canadienne offrent à leurs assurés, un contrat complet qui couvre tous les types de soins médicaux, de quelque nature qu'ils soient, en autant qu'ils sont rendus par des médecins ayant accepté d'avance le tarif de ces sociétés. Ce qui fait que les assurés bénéficient d'une protection totale quand ils vont chez le médecin; ils n'ont pas même à se préoccuper de voir à leur compte: le médecin envoie ses comptes directement à l'assureur, celui-ci les paie et l'assuré n'a jamais d'excédent à payer. C'est sûrement une des raisons qui fait que dans la province de Québec, étant donné l'absence de régime conventionnel, on a moins d'assurés d'une façon générale et moins d'assurés qui ont une protection complète.

M. COITEUX (Duplessis): Dans le régime conventionnel, monsieur de la Chevrotière, doit-on tirer comme conclusion que le régime conventionnel ptut offrir plus de protection à un prix moindre?

M. de la CHEVROTIERE: Ce n'est pas nécessairement une question de prix quant à la prime, par exemple. La prime peut être assez élevée. De fait d'ailleurs, en Ontario ou dans d'autres provinces, les sociétés auxquelles je faisais allusion tantôt, vendent leurs contrats d'assurances à des taux de primes relativement élevés, dans certains cas sûrement plus élevés qu'une compagnie d'assurances qui offre un plan à couverture étendue qu'on appelle communément un « major medical plan », mais la protection n'est pas la même.

En réalité, le régime conventionnel peut coûter assez cher, mais au moins il a cet énorme avantage que l'assuré est entièrement couvert, alors qu'avec les plans de type « major medical », l'assuré doit lui-même au départ payer, c'est un peu comme l'assurance-automobile, une franchise qui est habituellement de $25 ou $50, c'est à lui à payer cela d'abord. Ensuite, l'assureur paie, disons 80% de l'excédent, ce qui veut dire que l'assuré, à ce moment-là, est obligé de payer la première tranche, plus 20%du solde. Alors, un régime de ce genre est sûrement meilleur marché que les régimes conventionnels; mais d'autre part, il coûte plus cher à l'individu parce que lorsqu'il est malade, il faut qu'il débourse la franchise et qu'il débourse une partie ou proportion des frais encourus.

M. MARLER: Et on nous a dit cet après-midi que dans le cas de l'Alberta, c'est une société sans but lucratif. Dans la plupart des cas, ce sont des compagnies qui désirent faire un profit avec ce plan d'assurance, n'est-ce pas?

M. de la CHEVROTIERE: Les sociétés des autres provinces qui offrent des plans conven-

tionnels sont toutes des sociétés à but non lucratif.

M. MARLER: Ce qui veut dire que l'élément « profit »,...

M. de la CHEVROTIERE: Il n'y en a pas. Pas du tout.

Je ne veux pas y revenir, M. le Président, mais à la page 10, au dernier paragraphe, on explique ce que je viens de dire, c'est peut-être mieux dit ou expliqué ce phénomène du plan conventionnel des autres provinces.

La page 11 porte sur le même sujet, mais avec peut-être un peu plus d'explications que je ne vous ai données.

M. MARLER: M. le la Chevrotière, je vois dans le paragraphe que vous venez de nous citer, que le fait que les médecins sont groupés a eu une amélioration considérable sur le genre de régime, etc., qu'il a été facile de s'entendre sur les tarifs.

Mais quelle est la situation avec les assureurs dans le Québec? Est-ce qu'ils ont tous établi une espèce de tarif ou est-ce que cela varie d'un assureur à l'autre?

M. de la CHEVROTIERE: C'est très variable, M. le Président. Chaque assureur, à toutes fins pratiques, établit ses propres tarifs, et j'imagine évidemment qu'il essaie de les baser sur la pratique courante ou se tenir assez près du tarif officiel, mais je dirais que d'une façon générale, ce qui a primé dans bien des cas dans la province de Québec, cela a été une question de coût ou de prime. Et lorsqu'un assureur a affaire à un client, que ce soit un individu ou un groupe, je pense surtout à un groupe, et que ce client veut un plan d'assurance qui ne lui coûte pas plus que tant de dollars de prime par mois, à ce moment-là, l'assureur peut être appelé ou forcé indirectement à offrir un contrat dont les honoraires ou les prestations ne sont pas très élevées.

Il y a beaucoup d'assureurs, la plupart peut-être, qui ont plusieurs genres de tarifs chirurgicaux. Alors, ils offrent à leurs clients le tarif numéro 1, qui prévoit d'excellents honoraires ou des prestations relativement élevées pour chaque acte chirurgical posé; si le client ne veut pas parce que cela suppose une prime trop élevée, il va lui offrir le tarif numéro 2, proportionnellement...

M. MARLER: Le tarif est en fonction de la prime, alors?

M. de la CHEVROTIERE: Dans bien des cas, sûrement.

M. FORTIER: Ils n'ont jamais demandé par exemple au Collège des médecins et chirurgiens d'établir des tarifs généraux?

M. de la CHEVROTIERE: Je ne sais pas s'il y a eu des demandes officielles faites au collège des médecins, mais je peux vous dire que les assureurs auraient été bien heureux s'il y en avait eu. Pas de doute! Il y avait un tarif général, mais je pense que c'était un tarif minimum. C'est un tarif qui ne lie pas le praticien.

Le tableau 5, M. le Président, à la page 12, fait peut-être ressortir encore ce que nous avons dit il y a quelques instants au sujet des régimes conventionnels. Evidemment, la province de Québec n'est pas citée dans ces chiffres, puisque, comme je l'ai dit tout àl'heure,il n'y avait pas de régime conventionnel dans la province. Et on constate que dans les autres provinces, la proportion des assurés qui sont protégés par des régimes conventionnels est relativement forte, surtout si l'on considère que ces sociétés sont peu nombreuses. En général, c'est variable, mais il n'y en a jamais plus de deux dans une même province. En Ontario, par exemple, il y a le P.S.L, qui est le Physicians' Services Incorporated, qui est la plus importante, il y en a une seconde, la Windsor Medical Association, qui, elle, fait des affaires uniquement dans deux comtés dans la région de Windsor; P.S.I, couvre le reste de la province. Il n'y a que deux sociétés qui offrent des régimes conventionnels en Ontario, et qui ont à faire face à une concurrence de tous les grands assureurs du pays, c'est-à-dire au moins vingt-cinq ou trente très importants assureurs. Malgré tout, on voit qu'en Ontario, ils ont couvert et couvrent en 1964 43% des assurés. Et la raison de cela, encore une fois, c'est parce qu'ils offrent des régimes conventionnels à protection totale, chose que nous n'avons pas connue dans la province de Québec.

A partir de la page 13, M. le Président, si vous voulez qu'on continue, nous donnons des renseignements complémentaires que nous n'estimons peut-être pas aussi importants que ceux que nous avons déjà regardés brièvement, mais qui peuvent quand même être, avons-nous cru, d'un certain intérêt pour les membres du comité conjoint.

On voit au tableau 6, à la page 14, le nombre des personnes protégées dans la province de Québec par tous les genres de régimes, régimes qu'on appelle à but non lucratif et les autres

qu'on appelle les régimes commerciaux. Je pourrais peut-être ici ouvrir une parenthèse, M. le Président, pour dire que cette distinction entre régimes commerciaux et régimes à but non lucratif remonte à plusieurs années en arrière et que c'est la terminologie qu'on emploie à la division de la recherche et de la statistique du ministère de la Santé fédéral, mais que certains assureurs dits commerciaux s'objectent en soi à être catalogués comme assureurs commerciaux, en particulier les compagnies mutuelles, par exemple, qui prétendent... je ne juge pas du tout de la question, mais je signale simplement que c'est peut-être un départage qui peut être jugé un peu arbitraire. Quoi qu'il en soit, c'est comme cela que les statistiques sont fournies, nous les avons présentées de la même façon.

Vous voyez que dans la province de Québec, en tout et partout, il y a un million de personnes qui sont protégées par des régimes à but non lucratif, et un million et demi par des régimes commerciaux.

Au tableau 7 de la page suivante, nous donnons des primes perçues par des régimes à but non lucratif et des régimes commerciaux. Malheureusement, vous l'avez sans doute constaté, pour les années 1955, 1958 et 1961, il n'a pas été possible d'obtenir des chiffres des primes perçues par les régimes commerciaux. Mais nous en avons eu tout de même pour l'année 1964, c'est peut-être la plus intéressante parce que la plus récente, et on constate alors qu'en 1964, les régimes à but non lucratif ont perçu $21 millions de primes et les régimes commerciaux, $35 millions, pour un grand total de $56 millions. Et les prestations versées se sont établies dans le premier cas à $20 millions pour les régimes à but non lucratif et dans le cas des régimes commerciaux, à $28 millions. Donc, en 1964, il a été perçu en primes pour des soins médicaux, cette fois-ci cela s'applique uniquement à des soins médicaux et non pas à tous les autres genres de risques inhérents à la maladie, $56,800,000 au total et il s'est payé à ces assurés $48,700,000.

A la page suivante, au tableau 8, vous avez le nombre de personnes assurées dans la province de Québec par des régimes privés. D'abord et aussi selon le genre de protection accordée par leur contrat, dans le cas des sociétés à but non lucratif à commandite médicale. Il faudrait bien que j'explique ici ce terme, dans la province de Québec, il y a deux sociétés qui bénéficient de la commandite médicale, ou en d'autres termes, qui sont reconnues par la profession médicale, l'association médicale du Québec; dans les autres provinces, les sociétés reconnues par les sociétés médicales, on les appelle les « doctor sponsored plan ». La meilleure traduction que l'on a trouvée, c'est société à commandite médicale, et il y a deux sociétés dans la province de Québec à but non lucratif qui sont reconnues par la profession médicale, du moins l'association médicale du Québec, mais pour les raisons que je vous ai expliquées tantôt, elles n'offrent quand même pas de régime conventionnel. Et ces deux sociétés assurent un peu plus d'un million de personnes, dont 821,000 par un régime à protection limitée et 189,000 par un régime à protection complète. Les sociétés à but non lucratif protègent donc 18.2% de la population de la province de Québec. Les assureurs commerciaux protègent, 27.4% de la population du Québec, et les régimes publics qui s'adressent aux anciens combattants, aux indiens, etc., protègent 1% de la population. Ce qui fait en chiffre brut 2,586,000 personnes ou 46.5%. Mais il a fallu déduire de ce nombre pour raison de double compte, un certain nombre de personnes qui ont plus d'un contrat d'assurance, soit 139,000 personnes, pour arriver en fin de compte au chiffre dont on a parlé au début, un chiffre total net d'assurés à travers le Québec, quel que soit le genre de protection ou le genre d'assureurs de 2,446,000 personnes ou 44%, incluant les personnes protégées par un régime public qui sont en tout petit nombre, 1%.

Le tableau de la page 19, le tableau 9, donne le nombre de toutes les compagnies qui font des affaires d'assurances accident-maladie dans la province de Québec. En 1964, elles étaient 217, et de ce nombre, il y en avait 30 qui étaient des compagnies qui avaient leur siège social dans la province de Québec. Vous avez un tableau correspondant à la page suivante. Dans le cas des sociétés de secours mutuel, dans la province, il y avait en 1964 soixante assureurs, soixante sociétés de secours mutuel, dont quarante-sept avaient leur siège social dans la province de Québec. Il faut dire ici, je pense, que la très grande majorité de ces sociétés de secours mutuels sont de toutes petites associations, dont les activités s'exercent à l'intérieur d'un groupe particulier ou à l'intérieur d'une entreprise; cela peut être une association des employés de Steinberg's, par exemple. En fait, il y a seulement trois sociétés sur les soixante qui ont une activité vraiment provinciale.

Dans le tableau de la page suivante, on donne une information qui peut être d'un certain intérêt.

C'est la liste des assureurs, de quelque nature qu'ils soient, dont le chiffre d'affaires au point de vue primes perçues en accident-maladie dans la province de Québec en 1964 a

été de $1 million et plus. Et on a ajouté, à titre d'information encore, le chiffre d'affaires total que ces entreprises font dans la province de Québec. Le premier chiffre est le chiffre total des primes qu'elles ont recueillies dans la province de Québec, le deuxième est le chiffre des primes qu'elles ont recueillies pour fins d'assurance accident-maladie.

Le dernier tableau donne encore à titre d'information purement et simplement, le partage des assureurs selon trois catégories; les compagnies à fonds social, les compagnies mutuelles et les sociétés de secours mutuels, en indiquant les noms de celles qui ont fait des affaires pour au moins $200,000. Mon dernier mot, M. le Président, sera pour attirer votre attention sur le fait que nous avons essayé de savoir quelle pouvait être la contribution des employeurs dans la province de Québec, au coût de ces régimes privés d'assurance-maladie? D'après les sondages que nous avons faits auprès de quelques compagnies d'assurances, nous en sommes venus à la conclusion que en moyenne, ou de façon gênérale, à une très petite marge d'erreur près, les employeurs paient environ 50% de la prime de leurs employés, de la prime d'assurance accident-maladie. Peut-être pas tout à fait, mais presque, ce qui voudrait dire que dans la province de Québec, en 1964, les employeurs dans l'ensemble, auraient contribué environ $25 millions, pour défrayer le coût partiel, évidemment, de l'assurance-maladie privée.

M. MARLER: Est-ce que cela comprend seulement les soins médicaux ou est-ce que ça comprend en outre la perte du salaire par le malade?

M. de la CHEVROTIERE: Ceci porte sur les frais médicaux seulement.

M. MARLER: Seulement.

M. de la CHEVROTIERE: Seulement. Mais évidemment, les employeurs paient sûrement, dans un bon nombre de cas, dans les mêmes proportions pour l'assurance-salaire et certains autres bénéfices marginaux. Mais ce $25 millions c'est uniquement en ce qui concerne les soins médicaux proprement dits.

M. FORTIER: Combien de personnes ça peut couvrir $25 millions?

M. de la CHEVROTIERE: On a dit qu'il y avait 2,400,000 personnes assurées et le nombre de personnes assurées par des contrats de groupe est à peu près de 90% de ce nombre. Ce qui voudrait dire, à peu près, en chiffre rond, 250,000 personnes. Mais il s'agit là d'une moyenne. Il y a des employeurs qui ne paient aucune contribution au coût de la prime de leurs employés; il y en a d'autres qui paient tout. Le plus souvent ce qu'on rencontre c'est à peu près 50%.

M. MARLER: Et cela couvre aussi les membres de la famille de l'ouvrier? N'est-ce pas?

M. de la CHEVROTIERE: Oui, absolument. Dans le cas des pères de famille, l'assurance couvre la femme et les enfants jusqu'à un certain âge qui est variable mais le plus souvent c'est jusqu'à 21 ans.

M. LE PRESIDENT (Roy): Aussi pour le soutien de famille?

M. de la CHEVROTIERE: Vous voulez dire par exemple...

M. LE PRESIDENT: ... un célibataire qui est soutien de famille?

M. de la CHEVROTIERE: Non, normalement non.

M. RENAUD: En somme il y a 43.1% de la population qui est assurée ainsi?

M. de la CHEVROTIERE: C'est ça. M. RENAUD: Pour des soins partiels?

M. de la CHEVROTIERE: C'est-à-dire qu'ici il faut faire une distinction, je pense. Une partie d'entre eux ont une couverture partielle, une autre partie ont une couverture, je dirais complète quant à l'étendue mais pas quant à la hauteur, si je peux dire. Je vais essayer de m'expliquer autrement. L'étendue est peut-être à peu près totale dans le sens que tous les genres de services médicaux sont couverts, mais ils ne sont pas nécessairement couverts à 100%. Ainsi dans un cas la visite médicale à domicile est payée mais selon un tarif qui n'est pas nécessairement celui qui sera demandé par le médecin.

M. RENAUD: Et quelle est la proportion entre les services étendus et les services partiels?

M. de la CHEVROTIERE: C'est à peu près

45%, 55%, ou plutôt 40/60, 40 étant les régimes complets et 60 les régimes partiels, à peu près.

M. RENAUD: Merci.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions à poser à M. de la Chevrotière sur les régimes privés?

M. RENAUD: Pas quant à moi.

M. LE PRESIDENT: M. de la Chevrotière, je vous remercie pour l'exposé que vous venez de faire et je demanderais à M. Jacques Morency de nous parler des régimes publics.

M. MORENCY: Alors voici M. le Président. Le chapitre suivant est consacré aux régimes publics, il y en a de deux sortes dans la province: Il y a d'abord des régimes fournis par le gouvernement Provincial et ceux fournis par le gouvernement Fédéral. Sur ceux fournis par le gouvernement Provincial, il y en a évidemment un, qui est universel, et les autres sont des régimes particuliers. Le régime universel, tout le monde le connaît, c'est l'assurance-hospitalisation qui a été instaurée le 1er janvier 1961. Alors nous avons ici, dans les quelques pages qui suivent, fait une courte étude de la loi de l'assurance-hospitalisation. Si vous le désirez, on peut la passer ou...

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'on peut passer cette partie.

M. MORENCY: D'accord.

M. MARLER: Peut-être le seul point que M. Morency pourrait peut-être nous faire ressortir c'est en somme la quantité de services d'hospitalisation qui sont donnés dans les cliniques externes. Parce que si je comprends bien la situation actuelle, il y a une partie n'est-ce pas, qui est présentement gratuite?

M. MORENCY: Oui, c'est exact.

M. MARLER: Pouvez-vous peut-être nous décrire sommairement la partie qui est, si vous voulez, exclue du plan actuel.

M. MORENCY: Bien voici. C'est comme vous le savez; les services externes, on part d'une liste là. Il y a la chirurgie mineure et les soins d'urgence. Les soins d'urgence évidemment sont couverts pour tout le monde pourvu qu'ils soient fournis dans les 24 heu- res. Par exemple, quelqu'un qui a un accident et qui se présente à l'hôpital dans les 24 heures de l'accident sera traité. Evidemment on parle toujours de patients externes; de quelqu'un qui se casse un bras ou enfin qui a une coupure quelconque etc. va être traité gratuitement. Quand je dis gratuitement, cela comprend tous les services fournis à l'hôpital mais ça ne comprend pas les honoraires du médecin qui doivent toujours être payés par le client. Maintenant la deuxième partie, c'est ce qu'on appelle la chirurgie mineure. Evidemmentc'est un terme générique qui comprend toute sorte d'opérations et de traitements. Il y a une liste qui est fournie aux hôpitaux. On constate une chose c'est que depuis que c'est commencé la liste n'a pas diminué mais elle a allongé continuellement. On y ajoute des opérations ou des traitements continuellement. Maintenant, donner cette liste-là ce serait fastidieux; le plus souvent ce sont des termes techniques, je pense bien qu'on doit s'en passer, mais on peut dire que le principe à la base de tout cela c'est que tout ce qui touche au diagnostic n'est pas payé par l'assurance-hospitalisation. Par exemple, si quelqu'un veut aller tout simplement, ne se sent pas trop bien et décide d'aller à l'hôpital et qu'il dit: « Docteur je voudrais bien savoir qu'est-ce que j'ai? » même si c'est en clinique externe, le gouvernement ne paiera pas. C'est la partie traitement, lorsque le diagnostic est posé, la partie traitement, et là encore évidemment c'est limité pour toute sorte de raisons. Par exemple vous avez la question des examens radiologiques. On sait très bien que tous les examens radiologiques ne sont pas encore assurés en clinique externe. Cela fait longtemps qu'on en parle, mais je pense qu'il y a une raison qui est évidente pour tout le monde, c'est que déjà les services de radiologie dans les hôpitaux sont surchargés et que si on les assure, cela va créer des problèmes. Il y en a qui ont dit, oui c'est très bien, si vous ne voulez pas le faire dans les hôpitaux, faites-le ailleurs. Alors, ce genre de problème-là ce sont les raisons pour lesquelles ces choses-là ne sont pas assurées. Mais, en général, c'est la partie traitement et c'est défini, là encore, comme je vous dis, je ne voudrais pas... d'ailleurs je ne l'ai pas ici, la liste des traitements, mais ça couvre pas mal la partie externe actuellement. Mais toujours les honoraires des médecins doivent être payés, quand je parle du médecin, je parle du médecin qui traite la personne, comme pour le patient interne, par exemple, si ont est obligé de prendre un examen ra-diographique, le radiologiste est payé par l'hôpital, alors à ce moment-là il n'y aura pas de

charge, même pour un patient externe. Le médecin par exemple de laboratoire, s'il a besoin par exemple d'un examen de laboratoire à l'hôpital bien ceux-là sont payés par l'hôpital mais le médecin traitant lui doit être payé par le patient. Ce n'est pas couvert par l'assurance-hospitalisation.

M. MARLER: Qu'est-ce qui arriverait, M. Morency, si le plan d'assurance-maladie était instauré? Est-ce que cela va avoir un effet considérable sur les cliniques externes?

M. MORENCY: Considérable, vous voulez dire dans...

M. MARLER: S'il y a plus de gens qui vont fréquenter la clinique.

M. MORENCY: Bien probablement. Mais, je pense qu'il est difficile d'évaluer ça parce que par contre, si tous les honoraires de médecins sont payés à l'hôpital et au bureau du médecin, alors est-ce que les gens iront nécessairement à l'hôpital, est-ce qu'ils ne préféreront pas plutôt aller voir le médecin à son bureau, à son cabinet? C'est probablement ce qui va arriver, alors c'est difficile d'établir je pense, de donner un chiffre.

M. FORTIER: Il y a des patients qui vont se faire examiner au bureau du médecin et le médecin pourra comme en médecine générale par exemple, s'il y a quelques examens il pourra envoyer le patient à la clinique externe pour avoir un examen de sang ou peut-être certains examens qui vont être absolument indispensables. Et d'ailleurs ceci empêchera un jour d'être obligé d'hospitaliser un patient pour trois ou quatre jours pour subir des examens alors que ça pourra se faire facilement à la clinique externe et éviter qu'il y ait trois ou quatre jours d'hospitalisation. On pourrait avoir un seul examen de laboratoire...

M. MORENCY: C'est ça.

M. FORTIER: ... qui va être suffisant, alors que si vous hospitalisez un patient pendant quatre jours, là il rentre dans toute la gamme d'examens habituels.

M. MARLER: Je soulève la question tout simplement parce que je sais qu'il y a des cliniques externes aux hôpitaux de Montréal qui sont déjà débordées et en dépit du fait qu'il y a un petit honoraire à payer, et je me demande si, en effet, on instaure un système d'assuran- ce-maladie si l'inondation ne sera pas encore plus complète qu'elle l'est actuellement. Evidemment, c'est une question d'opinion de savoir quel sera l'effet du plan mais c'est un facteur dont il faudra tenir compte.

M. MORENCY: D'ailleurs il est difficile à déterminer l'augmentation que ça pourrait produire immédiatement, il y en aura une immédiate mais je pense qu'à la longue, ça va probablement s'atténuer et ça aura pour effet, comme le disait le Dr. Fortier, de diminuer le nombre d'hospitalisations. Est-ce qu'il y a d'autres questions sur l'assurance-hospitalisation?

M. VAILLANCOURT: Ce qui veut dire que ça diminuerait l'assurance-hospitalisation, ça réduirait les montants que ça coûte à l'assurance-hospitalisation.

M. MORENCY: Bien voici, il faut faire attention. Tous les coûts augmentent alors ça va probablement augmenter quand même le coût de l'assurance-hospitalisation comme tous les autres, va probablement augmenter le coût des salaires, le coût du matériel et tout! Mais ce qu'on veut dire c'est que probablement les gens iront peut-être moins à l'hôpital, ou tout au moins, ils resteront moins longtemps. Et à ce moment-là, je pense, c'est extrêmement profitable que si au lieu d'avoir disons une moyenne de séjour de douze jours, vous baissez votre moyenne à dix jours, ça veut dire à ce moment-là que vous allez pouvoir hospitaliser plus de gens, plus de gens qui ont besoin de services qui vont pouvoir les avoir et à ce moment-là ça veut dire que dans certains cas, par exemple, où vous avez des demandes d'agrandissement, bien vous pourrez peut-être retarder les agrandissements, retarder les investissements considérables parce que vous aurez des plus grandes disponibilités de lits. Parce qu'en somme le problème de l'hôpital c'est ça, c'est d'avoir une rotation, évidemment en prenant soin le plus possible des patients, c'est de prévenir, je pense,la santé publique, mais après ça, on doit se placer sur un aspect pratique, c'est d'avoir le plus grand nombre possible de patients dans un lit, c'est ça, en définitive, alors c'est ça qu'on atteindrait d'une façon indirecte, si vous voulez, mais je pense que c'est un moyen sûr de l'atteindre.

M. FORTIER: D'ailleurs, il y a beaucoup de gens qu'on soigne actuellement dans les hôpitaux qui pourraient peut-être, avec un ser-

vice semblable, être traités à domicile!

UNE VOIX: Il y en a beaucoup qui n'auraient pas besoin de soins!

M. MARLER: Mais Je pense qu'il y a une tentation tout à fait naturelle à un médecin qui est très sympathique de mettre son patient dans un lit d'hôpital pour faire payer ainsi par la province tous les frais pour les radiographies plutôt que de l'envoyer à la clinique où il est obligé de les payer entièrement.

M. MORENCY: C'est ça. Maintenant, dans la loi évidemment on dit qu'il doit y avoir...

M. MARLER: C'est naturel!

M. MORENCY: La question il doit y avoir nécessité médicale pour une hospitalisation. Alors ça veut dire, en fait, que par exemple une personne désirait un check-up ne devrait pas être hospitalisé aux frais de la province, mais on sait très bien...

M. MARLER: Ce n'est pas nécessairement un « check-up » mais c'est la question du médecin qui est un peu...

M. MORENCY: Je le donne à titre d'exemple, mais on sait qu'il y en a beaucoup.

M. FORTIER: On pourrait en faire un principe.

M. MORENCY: C'est ça.

M. VAILLANCOURT: Mais actuellement est-ce que l'assurance-hospitalisation paie pour un « check-up »?

M. MORENCY: Bien voici, théoriquement non, mais en fait, oui, parce que ce qui arrive c'est que le médecin admet son patient sous un diagnostic quelconque et on sait très bien qu'une personne qui va à l'hôpital, bien ils finissent toujours par lui trouver quelque chose, même si c'est pas grand chose, ils lui trouvent toujours quelque chose.

M. FORTIER: Mais à la fin de tout ça, parce qu'il faut tout de même envisager la question d'une façon très sérieuse. Personnellement, je suis convaincu, je pratique dans un centre rural, que le jour où, mettons que les soins médicaux seront payés, les autres médecins vont probablement dire la même chose, je suis convaincu qu'il y aura moins de patients qui seront hospitalisés et si on a quelques services externes, à la clinique externe, qui sont donnés on sauvera certainement énormément de jours d'hospitalisation.

M. MORENCY: D'accord.

M. RENAUD: C'est normal, je crois.

M. VAILLANCOURT: Oui parce qu'actuellement j'ai remarqué que plusieurs allaient à l'hôpital pour un check-up et ils le rentraient sur un diagnostic quelconque puis ça passait et c'était payé par l'assurance-hospitalisation.

M. BERTRAND: Pourquoi être accepté sans le consentement, sans le médecin!

M. FORTIER: Oui mais seulement voici. Il ne faut pas non plus penser que les médecins les admettent seulement pour un check-up parce que bien des fois par exemple, vous allez avoir quelqu'un qui a des douleurs à l'estomac, on va l'admettre et on va trouver quelque chose aussi. On a peut-être raison aussi.

M. BERTRAND: Pour des douleurs intestinales il fait des ulcères probablement que l'hôpital...

M. VAILLANCOURT: S'ils admettent un gars qui se décide d'aller passer un check-up, bien c'est parce qu'il a un bobo en quelque part!

M. LE PRESIDENT: Est-ce tout pour les questions sur l'assurance-hospitalisation?

M. RENAUD: Il pourrait avoir son check-up sans aller à l'hôpital.

M. LE PRESIDENT: M. Morency.

M. MORENCY: Alors, nous avons évidemment aussi énuméré d'autres régimes qui ont un caractère tout à fait fragmentaire. Vous avez par exemple les Accidents du travail, tout le monde connaît la Commission des accidents du travail, alors là encore je me demande si c'est nécessaire de lire le texte, je ne crois pas que ce soit nécessaire. La Commission des accidents du travail et puis vous avez évidemment l'Assistance publique, et nous aurons sous peu le régime pour les assistés sociaux. Et enfin vous avez le gouvernement fédéral qui lui, par certaines mesures protège, moins de 1% de la population. Vous avez les Indiens, les Esquimaux, vous avez les membres des Forces armées, la Gendarmerie royale et les Anciens combattants,

et cela constitue ce qui existe dans la province actuellement au point de vue régimes publics de soins.

M. MARLER: M. Morency, je sais que c'est le gouvernement qui s'occupe en grande partie, de la tuberculose et aussi des maladies mentales. Mais, quelle est la situation dans les autres provinces où on a instauré un système d'assurance-maladie? Est-ce que la tuberculose est comprise comme maladie assurée, si vous voulez!

M. MORENCY: Oui.

M. MARLER: Et pour la maladie mentale aussi.

M. MORENCY: Oui, pour la maladie mentale aussi.

M. MARLER: On peut toujours tenir compte de la dépense faite par le gouvernement dans ces domaines-là, n'est-ce pas?

M. MORENCY: Evidemment, pour ces deux maladies-là vous pensez probablement à l'assurance-hospitalisation mais c'est pas encore réglé.

M. RENAUD: Comme la maladie mentale c'est payé à 100% par le gouvernement.

M. MORENCY: Non, il n'est pas exact de dire que c'est payé à 100%, le gouvernement paie la totalité du coût des soins de santé nécessaires aux personnes indigentes. Les personnes qui ne sont pas indigentes ne paient peut-être pas la totalité mais paient au moins une partie du coût de l'hospitalisation. Il y en a qui paient la totalité, il y en a d'autres qui paient une partie et les personnes indigentes, évidemment, le gouvernement paie la totalité.

M. RENAUD: C'est la même chose pour les tuberculeux, n'est-ce pas?

M. COITEUX: Je pense que c'est à 100% ça. M. BERTRAND: Le sanatorium à 100%.

M. MORENCY: Mais lorsqu'on parle des tuberculeux, ce sont les gens hospitalisés, les tuberculeux et les malades mentaux.

M. RENAUD: Lorsqu'on parle de gens hospitalisés qui sont entrés dans un sanatorium, est-ce que le prix n'est pas payé par le gouvernement?

M. MORENCY: Sur la partie sanatorium, je ne voudrais pas faire d'affirmation, je pourrai vérifier et vous le laisser savoir, mais sur la partie des malades mentaux, je suis certain que ce sont seulement les malades indigents pour qui le gouvernement paie en totalité. Les autres évidemment pourraient payer seulement une partie, c'est possible, parce qu'il y a différentes catégories, mais il y en a qui paient.

M. MARLER: Les comptes publics démontrent qu'il y a une espèce de contribution faite par les patients privés qui se chiffre si je me rappelle bien autour de $2 millions où $2 1/2 millions sur un total qui est beaucoup plus considérable.

M. RENAUD: Est-ce qu'il serait possible de connaître la proportion qui est payée par le gouvernement, pour les malades mentaux et pour les tuberculeux, si vous pouviez nous fournir...

M. LE PRESIDENT: Et M. Morency, si je comprends bien la situation, c'est plutôt l'hospitalisation qui est visée dans les deux budgets...

M. MORENCY: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: ... il ne s'agit pas des centres médicaux?

M. MORENCY: Bien voici, il y en a un certain nombre, par exemple, pour les malades mentaux, les psychiatres, par exemple, qui travaillent dans les hôpitaux mentaux sont rémunérés par l'hôpital alors à ce moment-là évidemment ça comprend une partie de soins.

Alors s'il n'y a pas d'autres questions, on peut terminer les deux volumes au chapitre 3 à Organismes bénévoles.

Comme vous le savez, il y a de très nombreux organismes bénévoles au Canada et, en particulier, dans la province. Maintenant à la page 34 au deuxième paragraphe, on parle des quelques initiatives qui seront toujours nécessaires et il ne faudrait pas croire que l'avènement d'un régime de soins si complet soit-il puisse en éliminer la nécessité. En fait ces organismes — on parle des organismes bénévoles évidemment — continueront à rendre des services essentiels; et un peu plus bas, si l'on s'en rapporte à l'expérience qu'ont connue d'autres pays, on s'aperçoit que la création d'un régime public d'assurés ne diminue pas le rôle de l'initiative bénévole bien qu'elle puisse le modifier. La variété et la faculté d'adaption de ces organismes leur donnent une souplesse et

constituent une de leurs caractéristiques importantes.

Je pense qu'il ne faut pas oublier que tout de même les organismes très nombreux, à caractère bénévole, qui rendent de très grands services, je pense bien que même s'il y a un régime, il ne faut pas s'imaginer que le besoin va disparaître au complet.

M. RENAUD: Il faudrait les conserver.

M. MORENCY: Absolument.

M. RENAUD: ... sur une base de charité.

M. MORENCY: Alors messieurs, il n'y a pas d'autres questions? Cela termine le volume no 2. On pourrait peut-être passer au volume no 3.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous des questions à poser pour le volume no 2?

Je demanderais à M. Jacques Casgrain de donner un sommaire du volume no 3: Aspects constitutionnels, Relations fédérales-provinciales.

M. CASGRAIN: M. le Président, il serait quand même prétentieux de la part du comité de vouloir donner un cours de droit constitutionnel à un comité qui compte des experts en droit constitutionnel parmi ses membres. Mais nous avons cru, en saine logique, après avoir comme vous l'avez entendu cet après-midi proposé une définition de la sécurité sociale et démontré, avec succès je crois, que l'assurance-maladie constituait une forme particulière bien déterminée de la sécurité sociale, nous avons cru, pour persister dans notre logique, qu'il convenait de situer, très sommairement évidemment et puis surtout brièvement, la sécurité sociale et l'aspect assurance-maladie, la sécurité sociale dans son cadre constitutionnel. Alors inutile de dire, je pense bien, qu'en 1867 quand L'Acte de l'Amérique du Nord britannique a été adopté, les Pères de la Confédération n'entrevoyaient sûrement pas les dimensions gigantesques que prendrait la sécurité sociale au pays, dans les provinces et surtout les proportions considérables des budgets des provinces et du gouvernement fédéral que la sécurité sociale requerrait.

On ne trouve donc aucune mention de la sécurité sociale comme thème dans l'Acte de 1867. On trouve une vague allusion à l'hospitalisation, si je puis dire, au paragraphe 11, en effet, on constate qu'il est question d'asiles, d'hospices, d'hôpitaux et de refuges dans les limites de la province. Evidemment à l'époque où la Constitution fut adoptée, la sécurité sociale prenait plutôt une forme personnelle et communautaire et c'était les communautés religieuses qui s'occupaient du soin des indigents, des malades, des vieillards et c'était aussi la famille qui assumait une responsabilité à aller voir des membres de cette famille-là qui pouvait être éprouvée par les choses que j'ai dites.

On trouve, évidemment, à l'article 92, paragraphe 13, qui est bien formel et puis on voit bien que la propriété et les droits civils relèvent de la juridiction provinciale. A venir jusqu'à l'après-première guerre, si je peux dire, les mesures de sécurité sociale, dans la province et au pays en général, étaient pour le moins clairsemées. On a vu après la première guerre l'avènement des pensions de vieillesse vers 1927 mais ce qui s'est produit, c'est plutôt qu'en 1935 le Parlement fédéral a adopté 4 grandes mesures sociales: la Loi de la limitation des heures de travail, la Loi du repos hebdomadaire, la Loi du salaire minimum et la Loi de l'assurance-chômage. Les trois premières de ces lois ont été référées à la cour Suprême et les juges de la cour Suprême se sont partagés également sur leur constitutionnalité et le Conseil privé, appelé à se prononcer, a déclaré que ces trois lois-là étaient inconstitutionnelles. Alors en ce qui concerne la Loi de l'assurance-chômage, là également, référence à la cour Suprême mais la majorité de la cour Suprême a déclaré cette loi-là inconstitutionnelle et le Conseil privé a confirmé la décision de la cour Suprême.

Par la suite s'est présenté, au début de la deuxième guerre, un projet de loi d'assurance-chômage et à cette occasion, la Constitution a été amendée dans des circonstances assez particulières pour prévoir à l'article, au paragraphe 2 bis de l'article 91, la juridiction fédérale en matière d'assurance-chômage. Alors pour ce qui concerne les pensions de vieillesse jusqu'à 1951, à partir de 1936 jusqu'à 1951, on avait des pensions de vieillesse contributoires pour les vieillards de 70 ans et plus, mais plus j'avance en âge moins je trouve que l'on est vieillard à 70 ans, à tout événement en 1951 une nouvelle loi des pensions de vieillesse a été adoptée par la Législature de Québec et à cette occasion-là, dans cette loi-là de 1951, on a introduit un article, autorisant un amendement à la Constitution. C'est devenu l'article 94-A de la Constitution reconnaissant la juridiction fédérale en matière de pensions de vieillesse mais en ayant bien soin de souligner que toute législation fédérale relative aux pensions de vieillesse ne devait pas porter atteinte aux lé-

gislations présentes et futures des provinces dans ce domaine. Alors je pense bien quand on sait que de ce moment-là il a été pas mal accepté, reconnu et admis, que la sécurité sociale, sous toutes ses formes, constituait une juridiction provinciale. D'ailleurs si on se rapporte au rapport de la commission Réal Sirois, on voit en toutes lettres dans ce rapport qu'en matière de sécurité sociale, la juridiction provinciale est la règle et la juridiction fédérale, l'exception. La commission Tremblay, évidemment, a souligné également qu'en matière de sécurité sociale l'initiative de l'avenir des provinces et puis la commission Hall, quand elle a étudié l'assurance-maladie a eu bien soin de mentionner que la compétence première en matière d'assurance-maladie relevait des provinces. Le problème qui s'est toujours posé, qui est en voie de solution graduelle d'une manière satisfaisante, c'est que les revenus se trouvant à Ottawa et puis les responsabilités se trouvaient à Québec en matière de sécurité sociale. On a pu constater au cours des récentes conférences fédérales-provinciales, particulièrement la conférence de juillet 1965, que dans les propositions fédérales concernant l'assurance-maladie, il y a une clause spécifique qui exclut le précédent que l'assurance-maladie est la responsabilité entière des provinces. On a déjà remarqué que dans le domaine de l'assurance-hospitalisation, le Québec se prévalant de son droit d'option, a signifié son intention de se retirer de ce programme-là à frais partagés et également à la conférence de juillet 1965, il a été dit assez clairement par le porte-parole de la province, l'honorable premier ministre, que si l'assurance-maladie, si un régime public d'assurance maladie devait être installé dans Québec, que là encore Québec se proposait par la formule du recours à des voies de crédit non seulement d'impôt sur le revenu mais possiblement sur les profits des compagnies d'obtenir une compensation fiscale inconditionnelle de façon à ce que dans le domaine de la sécurité sociale, Québec, selon l'expression classique actuelle, soit Maître chez nous.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous des questions, messieurs?

Je demanderais à M. Castonguay de nous parler des relations fédérales-provinciales dans le domaine de la santé.

M. CASTONGUAY: Dans la question des relations fédérales-provinciales, nous n'avons pas voulu faire un historique de cette question, étant donné que l'intérêt aurait été plutôt académique. Alors nous sommes partis uniquement de la question d'assurance-hospitalisation pour indiquer, tel que M. Casgrain l'a indiqué, qu'en 1965 la province a invoqué son droit d'option et que c'était la première étape d'une évolution qui doit aboutir, en ce qui a trait à ce régime, en 1970 à la substitution d'une compensation fiscale définitive à l'aide financière fédérale en vertu des dispositions du programme conjoint en question. Nous n'avons pas cru que pour ce qui précédait, l'assurance-hospitalisation ou la formule d'option en ce qui a trait à l'assurance-hospitalisation, qu'il y aurait eu tellement intérêt à relater les différents chapitres des relations fédérales ou provinciales dans ce domaine.

En ce qui a trait maintenant à un aspect un peu plus particulier des relations fédérales-provinciales, nous avons pensé qu'il était utile de souligner que le comité d'étude sur l'assistance publique, qui a présenté un rapport au gouvernement du Québec, le rapport Boucher en 1963, mentionnait que l'analyse de l'état de santé de la population avait amené ce comité à recommander au gouvernement de conclure avec la profession médicale des ententes en vue d'assurer aux personnes dans le besoin les soins médicaux nécessaires. Alors on peut, je crois, tracer entre la recommandation de ce comité-là et l'annonce par le gouvernement il y a quelques mois d'une loi sur l'assistance médicale, on peut faire le lien entre les deux; et où ça se relie cette question-là aux relations fédérales-provinciales, c'est qu'en 1965, le gouvernement fédéral a annoncé son intention d'élargir son aide financière dans le cadre des lois d'assistance pour inclure les divers soins médicaux, médicaments, soins dentaires, etc., dont les frais pourraient être payés en ce qui a trait aux assistés sociaux. Cet élargissement des lois du fédéral peut possiblement être relié à une recommandation d'un comité du Québec et le gouvernement a annoncé son intention de donner suite à cette recommandation du Comité d'étude sur l'assistance publique.

Maintenant, en 1961, lorsque l'assurance-hospitalisation a couvert l'ensemble des provinces, le gouvernement fédéral a formé la Commission royale d'enquête sur les services de santé, la commission Hall, qui a présenté son rapport, trois ans plus tard, en 1964 et qui affirme dans la Charte de santé des canadiens qui est proposée par la commission, l'article 4 de cette charte, la compétence première des gouvernements provinciaux en matière de santé. Alors les propositions du gouvernement fédéral, en ce qui a trait à l'assurance-maladie, prennent leur origine dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur les services de santé et, tel que déjà mentionné, la commis-

sion recommandait que l'administration des régimes et les modalités des régimes soient confiées aux provinces. A partir de cette décision du gouvernement, qui a été annoncée à la conférence fédérale-provinciale des premiers ministres de juillet 1965, la conférence qui a suivi en septembre, conférence fédérale-provinciale des ministres de la Santé, une en novembre, conférence interprovinciale des ministres de la Santé uniquement, et finalement conférence fédérale-provinciale en janvier 1966, ce sont toutes des conférences qui ont été une suite de cette conférence de juillet 1965.

Nous avons reproduit ici, étant donné l'importance de la conférence fédérale-provinciale de juillet 1965, la déclaration intégrale du premier ministre de la province en ce qui a trait à l'assurance-santé. Nous n'avons pas voulu la commenter, ce n'était pas notre rôle, nous n'avons pas non plus voulu l'analyser, ce n'était pas non plus notre rôle. Alors est-ce que vous croyez, M. le Président, qu'il y a lieu de lire cette déclaration du premier ministre de la province?

Maintenant le communiqué de presse. Le communiqué de presse qui a été lu à l'issue de la conférence du premier ministre, cette conférence de juillet 1965, donne les grandes lignes des propositions fédérales relatives à l'assurance-maladie. Si vous le permettez, je vais lire la partie du communiqué qui est laplus intéressante et qui définit en fait les propositions. Tout ce qui a suivi par la suite n'a servi qu'à clarifier les propositions du fédéral.

Le premier ministre du Canada a souligné à la conférence les principes de base dont le gouvernement fédéral entend s'inspirer pour collaborer avec les gouvernements provinciaux en vue de mettre tous les canadiens en mesure de bénéficier de l'assurance-santé. Le régime prévu comprendrait au départ tous les services assurés par les médecins et s'appliquerait universellement. Les gouvernements provinciaux en assumeraient la gestion et les services seraient assurés à tous les bénéficiaires se déplaçant d'une province à l'autre. Si les provinces acceptaient cette proposition, le gouvernement fédéral consentirait à assumer 50% du coût national desprogrammes d'assurance-santé. On a aussi étudié la possibilité de créer une caisse fédérale d'aide à la santé quipermettrait d'intensifier les travaux de recherches et de formation essentiels au régime de l'assurance-santé de la plus haute qualité. Il a été décidé que les ministres de la Santé se réuniraient au début du mois de septembre en vue de définir plus précisément la forme à donner à ce projet d'assurance-santé. Les provinces ont proposé que les dispositions soient prises relativement aux soins hospitaliers à donner aux malades mentaux et aux tuberculeux dans les mêmes conditions financières que celles qui valent pour les autres services hospitaliers. Le gouvernement fédéral a convenu de prendre cette proposition en considération en même temps que d'autres questions d'ordre financier. La conférence a examiné le régime d'assistance publique du Canada en vertu duquel le gouvernement fédéral devra partager le coût d'un programme complet d'assistance publique fondé sur les besoins des citoyens y compris des dispositions provisoires quant aux soins médicaux à assurer aux bénéficiaires des prestations de bien-être. Alors, en résumé, le gouvernement fédéral posait quatre conditions ou quatre critères à la subvention de son aide financière. Premièrement, que le régime établi couvre tous les soins médicaux et chirurgicaux; deuxièmement, que son application soit universelle; troisièmement, qu'il soit administré par les provinces; quatrièmement, que la protection ou encore que les avantages soient transférables. Et, en plus, le gouvernement fédéral proposait la formation d'une caisse d'aide à la santé. A la conférence de septembre 1965, conférence fédérale-provinciale, les quatre critères proposés par le gouvernement fédéral ont été discutés afin de pouvroir apporter des précisions et je crois que la principale des précisions qui a été apportée est indiquée au milieu de la page 14 où il est dit d'après les discussions qui ont eu lieu entre les fonctionnaires et les autres, là, c'est le ministre de la santé nationale qui parle: Il semble exister un malentendu voulant que notre offre se limite à $14, rien de plus. A la vérité le montant de $14 représentait la meilleure estimation que nous avons eue à notre disposition lors de la réunion de juillet. Ceux d'entre vous qui étaient présents à la réunion se souviendront que même ce chiffre a été mis en doute. Je tiens à préciser que nous avons l'intention de contribuer la moitié du coût national par tête des régimes d'assurance-médicale sur la base des meilleures estimations disponibles lors de leur mise en vigueur. Si vous avez encore quelques craintes à ce sujet, permettez-moi d'ajouter que s'il devient évident que ces premières estimations ont besoin d'être revisées, nous les modifierons de façon rétroactive au besoin.

M. CASTONGUAY: Alors, il est précisé clairement que le gouvernement fédéral s'engageait à verser la moitié de la moyenne du coût national per capita à une province qui établissait un régime rencontrant les normes données. Il a été aussi, de plus, établi au cours de cette conférence, —

et cela n'apparaît pas dans la déclaration officielle d'ouverture du ministre national, ni dans le communiqué qui a été émis au terme de la conférence — que, par application universelle, le gouvernement fédéral serait satisfait d'un régime qui couvrirait, au départ, environ 90% de la population. Il y a eu une petite marge de latitude accordée sur cette deuxième condition et, finalement, malgré que ce n'est jamais ressorti bien clairement, de façon définitive, il semblerait que les régimes a commandite médicale, sans but lucratif, pourraient être considérés comme étant des régimes administrés par les provinces, en autant que les provinces seraient représentées dans l'administration de ces régimes et possiblement aussi soumises à l'audition de l'auditeur des provinces. Les provinces comme l'Alberta, par exemple, l'Ontario, le Manitoba, etc., ont exprimé beaucoup de réserves sur l'obligation imposée par le gouvernement fédéral à l'effet que l'administration devait être publique dans son sens le plus strict. On a fait valoir auprès du gouvernement fédéral, dans ces provinces, qu'un régime établi par les médecins, sans but lucratif, si le gouvernement y était représenté dans l'administration, que l'auditeur était représenté, que ce serait possiblement beaucoup plus satisfaisant pour les citoyens de ces provinces qui y avaient adhéré volontairement, plutôt que de tout défaire et recommencer à neuf. Alors, il semblerait que le gouvernement fédéral accepte cette demande des provinces, mais cela n'a jamais été établi clairement, à notre connaissance.

M. MARLER: Mais, le « sans but lucratif », c'est l'essentiel, si j'ai bien compris?

M. CASTONGUAY: Oui.

M. TREPANIER: M. Castonguay, la proposition fédérale n'exige pas la contribution de la population.

M. CASTONGUAY: Sur la question du mode de financement de la partie à la charge d'une province, le gouvernement fédéral n'a pas posé de condition. En fait, ce que le gouvernement fédéral a voulu faire, c'est d'établir quatre grandes normes, il n'est pas entré dans les modalités. La première, l'universalité. Et leur but est évident, c'est d'établir des standards dans un domaine comme celui-là, pour avoir une certaine uniformité à travers les provinces. Alors, l'universalité, la couverture complète des soins médicaux et chirurgicaux, la transférabilité, si un citoyen déménage d'une province à l'autre et l'administration, étant donné la présence de fonds publics, avec certaines garanties quant à ces fonds.

M. VAILLANCOURT: Est-ce que cela inclut les médicaments aussi?

M. CASTONGUAY: Le gouvernement fédéral ne s'est pas engagé à couvrir autre chose que la moitié du coût, la moyenne nationale du coût des soins médicaux, mais il a dit que selon l'expérience et lorsque le désir deviendrait évident à travers le pays que tel service soit couvert, que là, sa contribution pourrait éventuellement être augmentée pour couvrir une part du coût des médicaments et des autres soins.

M. VAILLANCOURT: Maintenant, la caisse de dépôt; si le gouvernement fédéral paie 50% des frais de l'assurance-santé, à quoi va servir la caisse de dépôt? Je crois que c'est un montant de $500 millions?

M. CASTONGUAY: Ah! là, je m'excuse, la deuxième partie de la proposition était la caisse d'aide à la santé. Justement, à la conférence de juillet, le gouvernement fédéral a fait cette proposition d'établir une caisse d'aide à la santé. A la conférence de septembre, le premier ministre a fait une déclaration et il y a peut-être lieu que j'en lise certains extraits qui apparaissent à la page 15, étant donné que ça précise le rôle de cette caisse de la santé, et après cela on verra, par une conférence subséquente, ce qu'il en est advenu.

A la page 15, le premier ministre du Canada a fait la déclaration suivante: « Lors de la conférence fédérale-provinciale de juillet dernier, j'ai annoncé que le gouvernement se proposait de créer une caisse d'aide à la santé qui supplémenterait ces propositions d'assurance-médicale. Cette caisse aiderait à la construction et à l'aménagement d'installation de recherches et à la formation sanitaire. Le gouvernement fédéral aiderait ainsi les provinces à améliorer la qualité des soins médicaux dont disposent les Canadiens. Après avoir écouté les points de vue des provinces a la conférence de juillet, le gouvernement fédéral a songé à fixer l'importance de la caisse ». « Puisque le ministre de la Santé nationale et du Bien-Etre social rencontre aujourd'hui et demain les ministres provinciaux de la Santé, afin d'élucider ces questions, j'ai le plaisir de vous annoncer que le gouvernement a décidé d'affecter $500 millions à cette caisse. Nous proposons que la caisse en question entre en vigueur le 1er janvier prochain, puisqu'il faudra de longs préparatifs pour le genre de

projets qu'elle aidera à financer. Les ressources de la caisse seront disponibles pendant quinze ans. C'est dire qu'environ $33 millions, en moyenne, seront disponibles chaque année aux fins du régime. Le but fondamental de cette caisse est d'aider à former le personnel spécialisé plus nombreux qu'exigeront les services prévus par l'assurance médicale. Grâce à elle des subventions fédérales importantes seront disponibles pour la construction, la rénovation et l'aménagement d'établissements de recherche, d'hôpitaux d'enseignement, d'écoles de médecine et d'instituts de formation pour le nouveau personnel sanitaire. » « Les subventions provenant de la caisse ne pourront pas servir à défrayer le coût d'administration de ces établissements ». Alors je crois que c'est l'essenteil...

M. VAILLANCOURT: Cela répond aux questions.

M. CASTONGUAY: ... de ce qui a été annoncé en septembre. Maintenant en septembre, la conférence des ministres de la Santé a formé un comité, dont on donne le mandat et la composition aux pages 16 et 17, pour étudier justement les modalités de la Caisse d'aide à la santé. Il y a une note au bas de la page 17; « à la demande du Québec, il fut convenu que ce comité ferait rapport, non pas au ministre fédéral de la Santé comme tel, mais bien plutôt à ce dernier en sa qualité de Président de la conférence des ministres de la Santé. Il s'agissait là d'une distinction importante indiquant clairement que les ministres provinciaux de la Santé ne reconnaissaient pas l'autorité du ministre fédéral de la Santé pour recevoir un rapport de ses collègues provinciaux. »

Alors ce comité s'est réuni les 21 et 22 octobre 1965 et ils ont fait rapport. Ce rapport, au moment où notre rapport a été écrit, n'avait pas encore été remis à la conférence plénière. Cela s'est fait à la fin de janvier et j'ai ici le communiqué final de cette conférence dont je puis vous donner lecture des extraits les plus importants et aussi vous faire tirer des photocopies. Je l'ai eu cet après-midi. Maintenant, en novembre 1965, toutefois, il y a eu une conférence des ministres de la Santé sur la question de la transférabilité. Cette conférence a été tenue à Winnipeg et, en résumé, ce qui est indiqué à la page 18: on dit que les ministres ont accepté le principe de la transférabilité entre les provinces et ont défini à cette fin une protection de base qui constituerait en quelque sorte un dénominateur commun aux fins de la transférabilité. Alors, pour la transférabilité, à cette conférence de Winnipeg, il a été convenu que la première des choses à faire dans un régime, soit un régime facultatif ou un régime du type d'assurance sociale, pour ne pas priver les citoyens qui déménagent d'une province à l'autre de leur protection, qu'il y avait lieu au moins d'établir une certaine protection minimum, de telle sorte que la protection puisse se marier d'une province à l'autre raisonnablement bien. Toutes les provinces ont accepté le principe de la transférabilité à ce moment-là.

En plus d'adopter une résolution recommandant au gouvernement fédéral d'inclure les hôpitaux pour malades mentaux et pour tuberculeux dans le régime d'hospitalisation, tout comme en juillet la demande avait été faite au gouvernement fédéral d'inclure ces deux services dans l'assurance hospitalisation, cela a été refait de nouveau en novembre. Les ministres présents à la conférence ont noté que leurs discussions n'engageaient pas leurs gouvernements respectifs à participer au régime fédéral. C'était un engagement de principe sur la transférabilité.

M. CLOUTIER: ... le seul principe de la transférabilité qu'il y a eu accord jusqu'à maintenant.

M. CASTONGUAY: A ce jour il semble bien que oui. Maintenant en janvier 1966, il y a eu une nouvelle conférence fédérale-provinciale tenue à Ottawa, le 31 janvier, le 1er février 1966 et au terme de cette conférence, le communiqué suivant a été émis. Il y a une introduction de nature générale et après cela on dit ce qui suit, et si vous me le permettez, je vais lire le texte; il est assez bref. « In reviewing the report, the ministers accepted the principle of special assistance... là on parle de la Caisse d'aide à la santé... to the four Atlantic provinces, in the amount of $25 million dollars. » Alors pour la Caisse d'aide à la santé, sur le $500 millions, il a été décidé en premier lieu de prendre une première tranche de $25 millions et de l'accorder au cours des années aux provinces de l'Atlantique. Quant aux $375 millions qui restaient, on dit que la conférence « also accepted the principle of per capita allocation of a major portion of the fund. » Alors sur le $375 millions il y a... sur le $475 millions, je m'excuse, il y en a une partie importante qui n'a pas encore, qui n'avait pas encore été déterminée. Certaines provinces disaient que cela devait être plus, d'autres, moins, qui devrait être alloué aux provinces sur une base per capita. Et on dit « the matter of allocating the remainder of the fund was left for further study ». La raison de la balance qui pourra être allouée sur une base

autre que per capita, c'est pour tenir compte de certaines installations hospitalières, par exemple, l'Institut neurologique de Montréal qui, à toutes fins pratiques, est là pour l'utilité pratiquement de la moitié du pays.

Si dans certains endroits où il y a une concentration de médecins de haute compétence, où il se fait de la recherche sur une plus grande échelle et que tout le pays en bénéficie, il ne serait pas juste dans l'allocation d'une telle caisse qu'elle soit allouée entièrement sur une base per capita étant donné que les provinces en question où ces institutions très particulières, très spécialisées sont localisées, ces provinces-là devraient supporter des coûts qui sont très élevés alors que l'ensemble ou une grande partie du pays en bénéficie.

Très bientôt, le gouvernement fédéral qui devra naturellement légiférer sur cette caisse, annoncera sa décision quant à la partie qu'il croit qui devrait être allouée per capita et l'autre partie sur une autre base. Maintenant pour l'allocation de ces fonds, il a été décidé qu'un comité, un conseil consultatif serait formé, et voici ce qu'il en est dit; « in considering the position of the advisory commitee, the ministers decided that a body of this kind should consist of representatives of federal and provincial ministers of Health. The advisory committee would be empowered to call upon professional bodies for advice on technical matters. » Différentes associations comme l'Association médicale canadienne, avaient demandé d'être représentées au conseil consultatif. La conférence, à l'unanimité a décidé que le conseil consultatif a décidé de recommander au gouvernement fédéral que le conseil consultatif soit composé uniquement de représentants des ministres de la Santé étant donné qu'il n'était question que de fonds publics et, par contre, de donner le pouvoir au conseil consultatif de former des comités pour étudier certains aspects plus particuliers, par exemple la recherche, la formation, etc... « The ministers aggreed with the recommendations of the ad hoc technical committee on the terms of reference of the fund and the functions of the advisory committee. » Et là le point important « as previously aggreed, it was confirmed that request for assistance would come from the provincial governments. » Personne ne pourra s'adresser directement à la Caisse d'aide à la santé. Les demandes devront passer en premier lieu par les gouvernements des provinces et être approuvées premièrement par les gouvernements des provinces; deuxièmement « these requests would then be dealt with, according to the principles recommended by the ad hoc committee. »

Alors en ce qui a trait à la Caisse d'aide à la Santé, très bientôt, normalement en fonction de ces décisions de principe ou de ces recommandations de la conférence fédérale-provinciale, la législation devrait être déposée à Ottawa. Il semblait bien que la date du 1er janvier serait maintenue, c'est-à-dire les projets dont l'étude a commencé au 1er janvier, par la suite pourront bénéficier de l'aide de la caisse s'ils sont acceptés par le conseil consultatif et par les gouvernements provinciaux respectifs.

UNE VOIX: M. Castonguay, cette caisse-là, est-ce que cela va être un supplément que le gouvernement fédéral accorde actuellement à la construction d'hôpitaux, je crois qu'il donne $1,000 par lit...

M. CASTONGUAY: Voici, ce programme arrive pratiquement à échéance, je crois que c'est en 1967. Il en a donc été question et voici ce qui est dit: « the Minister of National Health and Welfare announced the federal government's readiness to extend the existing hospital construction grants program for an additional period of two years beyond March 31st 1968 ». Alors le programme est prolongé du 31 mars 1968 au 31 mars 1970. « The minister of Health of the province of Quebec indicated that in the case of such extension, his province may have to consider an alternative fiscal arrangement which would be defined in the tax structure committee » En définitive, en conclusion, la fonction de la politique du gouvernement qui a été annoncée à plusieurs reprises, à ma connaissance du moins, sur les retraits inconditionnels des programmes de cette nature, le ministre de la Santé lors de la conférence, s'est objecté à ce qu'on prolonge un tel programme qui obligeait d'une certaine façon, le gouvernement à dépenser exactement en fonction des priorités établies par ces programmes, en dehors de ses propres décisions.

Alors quelle va être la décision?...

M. RENAUD: En somme c'était de la recherche...

M. CASTONGUAY: ... sur la construction, non des frais d'administration d'établissement pour la recherche, la formation des effectifs dans les divers domaines de la santé.

M. LE PRESIDENT: Vous n'avez pas d'autres questions?

M. CASTONGUAY: Il y a le tout dernier paragraphe qu'il est peut-être bon de lire étant donné qu'entre la conférence de septembre et

celle de janvier, il y a eu une élection. Alors il est dit ce qui suit au sujet de l'assurance-santé: « In discussing medical care insurance, several provinces accepted the federal proposals and indicated their readiness to commence programs by July 1st 1967.

Certain provinces however were unprepared to make definite commitments at this time. The Minister of National Health and Welfare again expressed the adherance of the Federal government to the four principles and its objective to commence Federal contributions of Provincial Medical Welfare plans on a nationwide basis by July 1st, 1967. » Alors, dans les provinces qui ont accepté en principe la proposition du gouvernement fédéral, il semblerait qu'il y a premièrement la Saskatchewan qui ne peut que bénéficier de cette aide, le Nouveau-Brunswick et apparemment l'Ile-du-Prince-Edouard. De toute façon il y en a six, dont l'Ontario, 1'Alberta, La Colombie-Britannique, la province de Québec n'avaient pas donné de réponse définitive, qui n'avaient pas signifié leur intention du gouvernement fédéral quant à sa proposition pour le 1er juillet 1967.

M. MARLER: Monsieur Castonguay, vous avez parlé tout à l'heure des indigents n'est-ce pas, et si j'ai bien compris l'offre du fédéral, c'est de participer jusqu'à 50% pour les soins médicaux, les médicaments et les soins dentaires.

M. CASTONGUAY: Tous les soins en fait pour les indigents. Même, ça pourrait couvrir les soins infirmiers et les soins oculaires.

M. MARLER: Evidemment, cela va plus loin n'est-ce-pas que l'offre à quatre conditions dont nous venons de parler.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions, messieurs?

M. VAILLANCOURT: Si je comprends bien que le 50% que le gouvernement est prêt à donner, la balance, l'autre 50% serait défrayé une partie par la province et une partie par celui qui veut s'assurer.

M. CASTONGUAY: C'est une décision que vous devrez prendre.

M. VAILLANCOURT: Selon la décision qui sera prise, je crois, à 100% par la province.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. VAILLANCOURT: Les indemnités seront déterminées en temps et lieu.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. VAILLANCOURT: Non, mais ce que je veux préciser, moi, c'est que le fédéral paie 50%, alors il nous reste à déterminer l'autre 50%.

M. CASTONGUAY: Il faut faire attention, ici, c'est 50% de la moyenne nationale, alors, il est évident qu'en Ontario, par exemple, les coûts sont plus élevés et au Québec aussi, que les coûts de certaines provinces, comme à Terre-Neuve, au Nouveau-Brunswick...

M. VAILLANCOURT: C'est la moyenne nationale.

M. CASTONGUAY: Dans une province à coût élevé, la contribution fédérale peut être inférieure au 50% du coût de cette province. Ici, d'après les études que nous avons faites, on arriverait approximativement à peu près au niveau de la moyenne du coût national. C'est une question qui, advenant l'établissement d'un régime, devrait être négociée avec les médecins. Le coût exact sera, jusqu'à un certain point, fonction des résultats de telle négociation.

M. BLANK: Sur la question que M. Vaillancourt a posée, en calculant ce 50% on va déduire du coût des primes qui peut-être seraient versées par des particuliers ou ce 50% vient-il du montant « gross cost »? C'est ça que je demandais.

M. BRISSON: Autrement dit, supposons qu'on a une prime, mettons pour le Régime des rentes, si on charge à tant de la personne, est-ce que le $14 va être versé, déduction faite des primes que nous recevrons ou sur le coût total?

M. CASTONGUAY: Ah! Sur le coût total. En fait, il va y avoir nécessairement une comptabilité du coût de tous les régimes en opération dans les diverses provinces, pour voir le coût réel des déboursés en prestations, la moyenne va être faite et après cela sera évaluée sur une base per capita pour chacune des provinces.

M. RENAUD: Maintenant, est-ce qu'il y aune formule de « opting out », comme on dit, par laquelle la province paierait directement, par

une compensation dans la taxe actuelle? C'est cela, si je comprends bien?

M. MARLER: Excepté que la formule d'option ne changerait pas la convention fédérale. Il s'agirait de l'établir sur une moyenne nationale et la compensation fiscale serait ajustée en conséquence, si je comprends bien.

M. CASTONGUAY: Et il n'a pas été dit, sur cette question-là non plus que « 1'opting out » pour obtenir des points d'impôt, si l'option était accordée, signifirait d'autre part l'abandon des quatre conditions.

M. COITEUX (Duplessis): M. Castonguay voudrait que la moyenne approximative soit d'environ $15 par tête. Disons théoriquement, ce n'est pas tout à fait cela, mais disons théoriquement qu'actuellement la population du Québec est de 6 millions, ce qui ferait dans les environs de $90 millions. Les premiers chiffres qui ont été publiés dans les journaux dépassaient cela trois fois.

M. CASTONGUAY: Les $14 dont on a fait mention ici, c'était la moitié, c'était la contribution du fédéral,...

M. COITEUX (Duplessis): Ah bon!

M. CASTONGUAY: ... alors le coût, en fait, d'après leurs estimations a dû être de $28. Mais ils ont revisé ces estimations et ils s'aperçoivent que c'est beaucoup plus près de $35 maintenant...

M. COITEUX (Duplessis): Ah bon!

M. CASTONGUAY: ... et nous, indépendamment de leurs estimations, nous étions arrivés à peu près de $35 tel qu'indiqué à ce moment-là.

M. VAILLANCOURT: Par tête totale.

M. FORTIER: Maintenant pour me renseigner, est-ce que cela comprend tout les soins médicaux?

M. CASTONGUAY: Seulement.

M. FORTIER: Dentistes, médecins, chirurgiens, spécialistes, mais pas les médicaments.

M. CASTONGUAY: Ah non! Dans les soins médicaux et chirurgicaux, c'est-à-dire ceux définis à l'article 44 de la Loi médicale...

M. FORTIER: Médecins et chirurgiens.

M. CASTONGUAY: Exactement. Cela ne comprend pas les soins dentaires, les soins oculaires...

M. FORTIER: Ah bon!

M. RENAUD: Si la formule « opting out » peut être exercée, cela deviendrait un régime strictement provincial pas nécessairement subordonné aux conditions, aux quatre conditions que fixe le régime fédéral. Cela ne veut pas dire que cela ne pourrait pas le comporter quand même, mais cela serait indépendant, est-ce cela?

M. CASTONGUAY: Il n'a jamais été dit, par le gouvernement fédéral dans les déclarations que je vous ai lues dans les communiqués, qu'une équivalence fiscale accordée par le gouvernement fédéral signifierait qu'à la fois le gouvernement fédéral n'insisterait plus sur ces quatre conditions. Je crois qu'à ce jour c'est l'intention du gouvernement fédéral de continuer d'insister sur ces quatre conditions même s'il y a équivalence fiscale.

M. RENAUD: Je comprends. Merci.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il des questions messieurs?

M. BRISSON: Tout cela compris, les médicaments, tous les frais compris, combien cela pourrait-il coûter par tête?

M. CASTONGUAY: Bien, il y a une étude sur cela, je pense que c'est une question difficile de donner juste le chiffre, vous allez voir, il y a tellement de qualifications à faire à tout cela. Je peux vous dire que pour les médicaments et les soins médicaux, nous avons évalué le coût à $308 millions. Mais encore là, il faut qualifier ce coût. Tout cela est décrit dans une des études.

M. VAILLANCOURT: Cela, on va passer là-dessus, probablement...

M. CASTONGUAY: Demain ou après-demain probablement, je crois.

M. LE PRESIDENT: Est-ce tout?

M. TREPANIER: M. Castonguay, j'insiste et je reviens sur ce qui vient d'être dit mais dans la proposition fédérale, on mentionne que

premièrement un régime doit offrir tous les services offerts par les médecins, ce qui ne comprend pas nécessairement dentistes et autres.

M. CASTONGUAY: Non.

M. MARLER: ... et, est-ce que je dois comprendre que cela ne comprend pas les soins oculaires?

M. CASTONGUAY: Exactement. Excusez, sauf ceux donnés par un ophtalmologiste. L'ophtalmologiste en fait est un médecin au sens...

M. MARLER: Oui c'est cela, à condition qu'il soit un médecin qui donne des soins.

M. CASTONGUAY: Oui. Mais lorsque vous passez de l'ophtalmologiste à l'optométriste ou à l'opticien là cela ne serait plus couvert.

M. VAILLANCOURT: Est-ce que cela couvre les services du chiro?

M. LE PRESIDENT: Messieurs, il resterait la législation dans le domaine de la santé qui pourrait être exposée par M. Jacques Morency. Croyez-vous que nous pouvons procéder?

M. MORENCY: M. le Président, ce fut très très court.

M. LE PRESIDENT: Même en fait, je me demande, je pense qu'il y aurait probablement, que les membres peuvent le lire. Je ne sais pas s'il y a des questions. Est-ce que vous voulez peut-être... Selon la loi des hôpitaux et la loi des trois principales professions, les dentistes, les médecins et les pharmaciens et quelques lois du ministère de la Santé. Maintenant je pense bien que cela peut être lu. Ce sont de très courts résumés. Ceux qui veulent le lire ou s'il y a des questions, cela évidemment, je laisse cela à votre discrétion.

M. MARLER: Je crois qu'on peut dispenser M. Morency d'expliquer les lois que certaines personnes présentes ont dû voter, à un moment donné.

M. MORENCY: De toute façon, M. le Président, si les membres les lisent et s'il survient des questions à leur esprit, je pense que je vais être encore avec le comité quelque temps. Cela me fera plaisir de tenter d'y répondre à leur convenance.

M. MARLER: Sans préjudice à notre droit de vous interroger à une autre séance.

M. CLOUTIER: M. le Président, j'aurais une question très sérieuse à poser. C'est le seul volume où on ne donne pas la liste des membres du comité de recherche. Est-ce qu'on a voulu garder l'anonymat, parce qu'il s'agissait des relations fédérales-provinciales?

M. CASTONGUAY: C'est le premier volume qui a été envoyé à l'impression, et lorsqu'il est revenu, on s'est dit qu'il serait bien utile de mettre la liste des membres du groupe de recherche, alors si quelqu'un veut demander des renseignements, il saura quels sont les membres de ce groupe. Dans les autres volumes on a donc apporté cette modification.

M. MARLER: M. le Président, il y a juste une question que je veux soumettre au comité. D'après la motion qui a été adoptée à l'Assemblée législative, le quorum des membres de l'assemblée est fixé à neuf. Le conseil qui a nommé six membres du comité a fixé le quorum de ses membres à trois et je me suis aperçu par la suite que ces neuf membres plus trois, évidemment, ça fait douze, mais la difficulté que je vois dans les deux motions c'est qu'au cas où, par malheur, quatre conseillers s'absentent d'une séance, nous n'aurons pas le quorum nécessaire. Donc, je voudrais proposer, j'en ai déjà causé avec M. Asselin, le leader de l'Opposition au conseil et je voudrais proposer que le comité accepte l'idée que le quorum soit fixé à douze membres, sans exiger qu'il y ait nécessairement trois membres du conseil législatif. Et si la proposition est acceptée, je pense que M. Roy, mon co-Président, doit présenter un rapport, on présentera chacun un rapport à notre propre Chambre et on adoptera l'amendement nécessaire de façon à éviter la possibilité de siéger sans avoir le quorum.

M. RENAUD: Merci bien monsieur. UNE VOIX: Personne n'a d'objection.

M. MARLER: Cela va vous permettre de vous absenter.

M. VAILLANCOURT: Cela peut arriver. Nous avons les conseillers législatifs, nous avons six députés.

M. RENAUD: En tout cas, ça va marcher!

M. LE PRESIDENT: Messieurs, y a-t-il d'autres questions?

M. RENAUD: Non, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'assemblée est ajournée à demain matin, à dix heures trente.

Séance du 9 mars

(Dix heures et demie de l'avant-midi)

M. MARLER (Président du comité): A l'ordre, messieurs! Alors messieurs, si vous voulez bien, je voudrais demander d'abord à M. Morency de nous faire rapport de sa discussion avec la Canadian Health Association et la Croix-Bleue.

M. MORENCY: M. le Président, j'ai appelé ce matin M. Foster de la Canadian Health à Toronto. Il était évidemment désappointé et il m'a dit qu'il serait ici, tel que prévu, mardi prochain. Par après, j'ai appelé la Croix-Bleue, la Société d'hospitalisation du Québec et elles étaient très heureuses. Mais enfin, celui à qui j'ai parlé, qui est le vice-Président, m'a dit qu'il rejoindrait le Président aujourd'hui, qui est en vacances, je ne sais pas trop où en dehors de la province, probablement dans le sud et qu'il communiquerait de nouveau avec moi cet après-midi. Je leur ai dit évidemment, suivant les instructions que vous m'avez données hier, qu'à cause de la cédule très courte, il n'avait pas le choix, il fallait qu'il soit ici mardi. De toute façon Canadian Health va y être et probablement la Croix-Bleue et, de toute façon, elles vont me rappeler dans le courant de la journée.

M. LE PRESIDENT: Alors, nous aurons une séance mardi après-midi à trois heures et demie.

M. MORENCY: De toute façon, nous vous aviserons lorsque ce sera confirmé. Maintenant, si vous permettez, il y a un petit problème. C'est que sur la présentation des mémoires, il avait été prévu, lors d'une déclaration du premier ministre, que tous les mémoires devaient être présentés en cinquante copies. Alors il arrive que nous en recevons deux en une seule copie. Evidemment, ce sont des individus qui ne sont probablement pas trop fortunés. Je ne les connais pas, mais f imagine que c'est le cas. J'aimerais que le comité nous donne une directive à savoir si nous devons les refuser tout simplement ou si nous devons les accepter. Enfin, quel est votre point de vue?

DES VOIX: On devrait les accepter.

M. LE PRESIDENT: La seule difficulté que je vois personnellement, c'est que si un individu envoie un mémoire sur une page, j'admets que ce n'est pas difficile de faire des copies. Mais supposons qu'on arrive avec dix pages, quinze pages et vingt pages, qu'est-ce que nous allons faire? Allons-nous demander au comité de faire tout ce travail-là?

M. KENNEDY: Il y a des machines à polycopier. Ce n'est pas un problème.

M. LE PRESIDENT: Je comprends que le gouvernement est organisé pour faire des copies de n'importe quoi mais, par contre, le comité s'est déjà prononcé sur cette question-là et je me demande si nous devons revenir sur cet aspect de notre décision. Je pose la question au comité.

M. MARTIN: Il faudrait inviter les autres aussi à faire la même chose, ceux qui pourraient présenter des mémoires. Il faudrait leur dire de n'en envoyer qu'une copie et nous ferons les copies.

M. MORENCY: Voici. Les directives ont été données de faire parvenir cinquante copies et encore hier, j'ai écrit à des gens qui m'ont demandé des informations pour leur dire que les mémoires devaient être envoyés en cinquante copies selon les directives qui avaient déjà été données.

M. BRISSON: Ecrivez-leur et demandez leur d'envoyer leur mémoire en cinquante copies.

M. LE PRESIDENT: Je pense que c'est une décision sensée de dire: « Le règlement, si on peut l'appeler ainsi, s'applique à tout le monde ». C'est évident que cela n'empêche pas l'individu qui a une bonne idée d'en transmettre une copie à un membre du comité qui lui-même pourra peut-être faire valoir l'opinion devant ce comité. Mais d'accepter une lettre, disons de n'importe qui comme un mémoire à ce comité, je trouve que ce n'est pas conforme au bon sens.

M. MORENCY: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il autre chose, M. Morency?

M. MORENCY: Non.

M. LE PRESIDENT: Alors nous allons reprendre l'étude des rapports et il s'agit ce matin du volume 6, des conclusions du rapport. Alors, M. Boudreau, voulez-vous commencer?

M. BOUDREAU: M. le Président, nous parlerons d'abord du volume 6 qui s'intitule: Résumé du rapport de la commission royale d'enquête sur le service de Santé. Il s'agit d'une commission royale qui a été formée en 1961 par le gouvernement fédéral et dont le mandat était très considérable. En fait ce mandat se reflète dans le rapport de la commission, rapport en deux volumes dans lequel on traite d'une foule de problèmes relatifs à la santé et que j'énumère rapidement, quitte à revenir, dans un moment sur les aspects plus particulièrement reliés à l'assurance-maladie.

Je mentionne rapidement ce dont on parle dans le rapport de la commission Hall. D'abord on y parle du personnel de santé, des installations sanitaires, par exemple les hôpitaux, les cabinets de médecins et le reste; on y parle de la recherche, on y parle de toutes ies sources de fonds pour la recherche et l'enseignement ainsi que pour la distribution des soins; on y parle du recrutement et de la formation dans les diverses professions sanitaires; on y parle du financement des divers secteurs de la santé, de l'état de santé de la population, évidemment de l'assurance-maladie, de l'industrie pharmaceutique; on y fait aussi des projections relatives au produit national brut, relatives aux dépenses publiques et relatives aux dépenses dans le domaine de la santé. On y parle du problème des statistiques dans le domaine de la santé, du problème des organismes bénévoles, de l'administration des services de santé ainsi que des services de santé dans le Grand-Nord.

Mais je pense que ce qui nous intéresse plus particulièrement et ce que nous avons davantage essayé de faire ressortir dans le volume 6, ce sont les aspects plus directement reliés aux problèmes de l'assurance-maladie. Nous avons regroupé ces problèmes dans le volume 6 de la façon suivante. D'abord au chapitre I, nous parIons des facteurs qui ont influencé l'évolution de la distribution des soins dans le passé, facteurs qui continuent à jouer encore à l'heure actuelle. Il s'agit d'abord de facteurs démographiques, comme par exemple la densité de la population, son vieillissement graduel, en d'autres mots, la structure changeante des divers groupes d'âge, ensuite la technologie du monde de la santé qui évolue de façon extrêmement rapide et qui influence énormément la façon dont les soins sont dispensés et évidemment le coût de ces soins. En troisième lieu, il y a l'augmentation de la demande de soins due à l'augmentation du niveau de vie, due à l'augmentation du niveau de l'éducation des gens également et enfin le rôle grandissant du gouvernement dans le domaine de la santé.

Il serait peut-être intéressant de lire ce que le rapport Hall appelle la charte de la santé, qui est un document très court et qui contient en définitive les principes sur lesquels ont insisté les commissaires de la commission Hall. Vous retrouvez cette charte à la page 5. Elle affirme que la réalisation des normes de santé les plus élevées au bénéfice de notre population devrait devenir un objectif de la politique nationale. Le mieux à faire pour réaliser cet objectif est d'établir un régime de santé complet et universel pour la population canadienne, régime mis en oeuvre en conformité avec l'évolution du régime constitutionnel du Canada, fondé sur le libre choix et sur les professions et institutions libres et autonomes; financé par des régimes de paiements anticipés c'est-à-dire des régimes d'assurance réalisés avec la collaboration entière du public, des professions médicales, des organismes privés, de tous les partis politiques et des gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux; orienté vers l'utilisation la plus efficace des ressources de santé de la nation pour atteindre les plus hauts niveaux de bien-être physique et mental, c'est en somme l'esprit dans lequel le rapport Hall est constitué.

Maintenant dans notre deuxième chapitre du volume 6, soit le résumé du rapport, nous avons parlé du problème des effectifs. Nous avons résumé ce que dit le rapport Hall sur la question des effectifs dans le domaine de la santé.

Le rapport mentionne que la proportion médecins-population s'est améliorée au cours des dernières décennies au Canada mais souligne, par ailleurs, qu'il existe une forte disparité dans la répartition géographique de ces effectifs. C'est un problème qui se reproduit d'ailleurs à l'intérieur de la province de Québec où les effectifs médicaux sont répartis selon une très grande disparité.

Par ailleurs, du côté des effectifs médicaux, le rapport Hall ne conclut pas à un déficit où à un manque de médecins pour l'ensemble du pays mais suggère plutôt que les investissements du côté éducationnel pour la formation des médecins soient haussés afin de maintenir tout au moins le rapport médecins-population au niveau où il est présentement.

Du côté des dentistes le rapport est moins optimiste. Il souligne une pénurie de dentistes et suggère aussi des investissements pour haus-

ser le rapport dentistes-population.

Du côté des infirmières, le rapport souligne également une pénurie d'infirmières.

Le rapport parle aussi, évidemment, des autres groupes: personnel médical et para-médical.

Au troisième chapitre, nous avons...

M. COITEUX (Duplessis): Pardon, M. Boudreau, avant que vous alliez plus loin, est-ce que vous avez des chiffres qui seraient la formule idéale au point de vue population, disons par médecin, en tenant compte du système médical actuel? Je ne parle pas de prévoir pour l'avenir. Quel serait le nombre idéal d'habitants par médecin, dans les normes qu'on connaît actuellement par l'exercice de la médecine et les soins qu'on donne ?

M. BOUDREAU: Non pas dans l'hypothèse d'un régime d'assurance-maladie mais dans le contexte de pratiques libérales qui existent maintenant. Est-ce que c'est ce que vous voulez dire?

M. COITEUX (Duplessis): Oui, c'est ça!

M. BOUDREAU: C'est assez difficile de suggérer un nombre idéal parce que ça varie selon le niveau de revenus des diverses régions, et selon les habitudes de consommation des gens. En fait, même l'organisation mondiale de la santé ne s'est jamais risquée à suggérer un nombre idéal de façon absolue. Je pense qu'il faut s'adapter à divers contextes.

De toute façon, mentionnons qu'une étude faite par le Collège des médecins il y a environ un an et qui s'appliquait au contexte de la pratique médicale telle qu'elle se fait maintenant, mentionnait qu'il existe actuellement au Québec une certaine pénurie de médecins et le Collège des médecins évaluait cette pénurie à environ, 1,000 médecins, ce qui, en fait, aurait permis, si on avait pu augmenter la population médicale d'environ 1,000 médecins, de porter le rapport médecins-population à 140 médecins par 100,000 habitants. Il semblait que ceci était suggéré par le Collège des médecins comme une proportion optimum: 140 médecins par 100,000 habitants.

M. KENNEDY: Par 100,000 habitants?

M. TREPANIER: Un par moins de 1,000 de population?

M. BOUDREAU: C'est ça, oui! C'est la façon dont le collège avait cité ces chiffres. Nous, dans notre rapport, on parle de 840 habitants par médecin. On fait le rapport inverse. On peut toujours calculer la réciproque. Je pense que 140 médecins par 100,000 habitants correspondraient à peu près à 725 habitants par médecin.

M. ROY: M. Boudreau, par rapport médecins-population, est-ce que vous comprenez les spécialistes et les chirurgiens?

M. BOUDREAU: Nous comptons tous les médecins dans ce rapport. Je mentionne, par exemple, que, pour les dentistes, le rapport Hall mentionne qu'au Canada il existe un dentiste pour 3,108 habitants alors que la commission Hall croit que le rapport idéal serait de 1 pour 2,450.

Maintenant, pour reprendre la question qui m'était posée tout à l'heure relativement au nombre idéal de médecins actuellement au Canada, il existe environ un médecin pour 840 habitants et la commission Hall n'a pas suggéré que ce rapport-là, que cette proportion-là soit modifiée. Donc on peut conclure que dans l'esprit du rapport, il représente un certain optimum. Les recommandations du rapport Hall visent à investir suffisamment dans des facultés de médecine pour maintenir cette proportion. Donc, je pense, en visant dans le contexte actuel à environ 800 personnes par médecin, qu'on a un chiffre qui semble à peu près satisfaisant.

M. VAILLANCOURT: Combien y a t-il de médecins dans la province de Québec?

M. BOUDREAU: Actuellement au Québec, le nombre total de médecins est d'environ 7,000.

M. FORTIER: Avez-vous, juste pour une information, une proportion entre ceux qui font la pratique générale, les omnipracticiens, les autres classes de médecins?

M. BOUDREAU: Pour l'ensemble de la profession médicale du Québec, il y a environ 29% de médecins qui font de la pratique générale, il y en a 45% qui font de la pratique spécialisée, environ 20% qui sont des résidents dans les hôpitaux et le reste, environ 5 ou 6%, des administrateurs, des professeurs, des chercheurs, des gens qui font de la médecine industrielle.

M. MARLER: Tout cela fait l'objet du rapport numéro 10, n'est-ce pas, M. Boudreau?

M. BOUDREAU: Exactement, tout ceci est reproduit dans le volume numéro 10. Maintenant, au chapitre 3, pour ce qui est du régime de soins, la commission Hall a recommandé en premier lieu, un régime universel, c'est-à-dire s'appli-

quant à toute la population; en deuxième lieu,on a recommandé que la couverture inclue tous les soins médicaux, tous les soins dentaires des enfants (et ceci de façon progressive en élargissant peu à peu le groupe des enfants) des femmes enceintes et des indigents; que le régime inclue ensuite tous les médicaments prescrits, qu'il inclue les lunettes pour enfants et assistés sociaux; qu'il inclue les prothèses, les soins de réadaptation, les jambes artificielles, les bras artificiels, ces choses-là; qu'il inclue également les soins d'infirmiers àdomicile, et évidemment qu'il intègre les soins hospitaliers déjà dispensés en vertu d'un autre régime. Donc, c'était un régime très ambitieux, et dont on recommandait la mise sur pied pour 1966.

Les coûts de ce régime, vous les retrouvez aux pages 22 et 23. Je pense que je ne vous enterrerai pas avec trop de chiffres. Tous les chiffres tels qu'ils avaient été estimés par la commission sont reproduits dans ces deux pages-là. Et dans la page 23, nous avons isolé ce qui pourrait se rapporter tout particulièrement à la province de Québec. Maintenant, il faut mentionner que ces estimations datent déjà de quelques années, le premier volume de la commission étant sorti en 1964, et qu'en fait de nombreuses revisions ont été faites depuis, et à Québec et à Ottawa, par rapport à ces chiffres-là, et qu'il est assez évident qu'ils sont sous-évalués. A ce point de vue là, le volume numéro 8 de notre rapport qui s'intitule « Coût et financement » vous suggère les rajustements qu'il faut faire pour arriver à des chiffres un peu plus réalistes.

Pour ce qui est du financement, qui est traité au chapitre 4, la commission Hall a suggéré qu'il n'y ait pas de frais modérateurs, c'est-à-dire pas de montant à payer par le patient au moment où il reçoit des soins et elle suggérait que 50% du coût du régime soient financés par le gouvernement fédéral à même ses revenus généraux et que les autres 50% soient financés par les provinces selon une formule laissée à la discrétion des provinces. Mais le rapport Hall favorisait évidemment, pour ce qui est du financement au niveau provincial, la formule des paiements anticipés, c'est-à-dire la formule de l'assurance sociale.

La commission a fait des études assez intéressantes relativement à la capacité de l'économie de supporter un tel régime et à ce point de vue-là elle est, je pense, assez optimiste. La commission Hall a évalué qu'en 1961, 5.4% du produit national brut étaient dépensés dans le domaine de la santé, y compris les investissements et aussi l'achat des soins proprement dits. Selon la commission, si les régimes tels qu'ils existaient en 1964, avaient été maintenus jusqu'en 1971, sans l'introduction d'un régime général tel qu'elle le préconisait, cette proportion du produit national brut qui était de 5.4% en 1961 serait passée à un pourcentage se situant entre 5.5 et 5.8% environ en 1971. Maintenant, dans l'hypothèse où le régime qu'elle recommandait était introduit, alors à ce moment-là la proportion du produit national brut dépensée dans le domaine de la santé serait passée de 5.4% à un pourcentage se situant entre 6 et 6.3%.

M. TREPANIER: 5.8% si ça continue comme c'est actuellement?

M. BOUDREAU: C'est ça.

M. TREPANIER: Et 6.4%, si le régime proposé est accepté.

M. BOUDREAU: C'est ça. Je pense que vous allez retrouver ces données-là, je n'ai pas la page ici, mais...

M. LE PRESIDENT: Page 27.

M. BOUDREAU: Page 27, merci. C'est sur de telles données que la commission Hall s'est basée pour estimer que le Canada pouvait se permettre un tel régime sans hausser les taxes, et elle avait fait les estimations sur l'augmentation du produit de la taxe à Ottawa, compte tenu de l'augmentation des revenus. Etant donné la façon progressive dont les taxes sont recueillies, c'est-à-dire que plus les revenus sont élevés, plus le pourcentage est élevé, une augmentation d'un pour cent dans le revenu national signifie une augmentation de plus d'un pour cent dans le produit de la taxation. Se basant sur ces calculs-là, elle avait estimé que selon les modes de financement proposés, il serait possible d'introduire le régime préconisé sans augmentation de taxes. Mais il y avait évidemment, sous-jacentes àça, des hypothèses peut-être un peu irréalistes quant à l'évolution des dépenses dans les autres secteurs, par exemple l'éducation, la voirie, etc. Et évidemment aussi, il faut se rappeler qu'au niveau de chaque province, les priorités à établir, à un moment donné, peuvent varier aussi. Il se peut que dans une province le système éducationnel, le système de voirie étant dans un stade plus avancé que dans une autre province, il y ait plus de choses disponibles que dans cette autre province pour le domaine de la santé. Enfin les chiffres de la commission Hall sont des chiffres ou des agrégats au niveau national et qui doivent évidemment être rajustés lorsqu'on veut tenir compte du contexte particulier à la province de Québec.

Enfin, pour ce qui est de la formule administrative suggérée par la commission Hall — je résume rapidement — c'est ce que vous trouvez au chapitre 5 de notre résumé. La commission Hall recommande d'abord une administration au niveau provincial qui se ferait par ce qu'on appelle une commission provinciale sanitaire, pour administrer l'assurance-maladie. Cette commission serait représentative des diverses parties intéressées, soit le gouvernement, les professionnels de la santé et le public. Elle serait en définitive responsable au ministre de la Santé. Parallèlement à ceci existeraient les autres services du ministère de la Santé qui, eux, s'occuperaient plus particulièrement de l'hygiène publique et des subventions. Voilà, M. le Président, le résumé du résumé du rapport Hall.

M. LE PRESIDENT: M. Boudreau, nous avons touché très sommairement à la recommandation de la commission, au rapport concernant les frais modérateurs, et si j'ai bien compris ce que vous avez dit tout à l'heure, la commission Hall semble recommander qu'il n'y ait pas de frais modérateurs. Depuis que j'ai lu ce volume-là, je me pose la question suivante: inviter un médecin à venir chez le patient, c'est-à-dire à son domicile ça coûte ordinairement plus cher que lorsque vous allez directement au médecin, n'est-ce pas, à son bureau. Mais si l'Etat doit payer les honoraires du médecin, n'y aura-t-il pas nécessairement l'encouragement pour le patient de dire: « Ce n'est pas moi qui dois payer le surplus, alors j'invite le médecin à venir chez moi »? Et si je ne me trompe pas, le médecin aura énormément de difficultés à l'autre bout du téléphone de savoir si réellement il doit venir ou non. Alors si nous acceptions cette thèse qu'il n'y a pas de frais modérateurs pour les visites à domicile, je me demande, si cela, en somme, ne serait pas mortel pour les médecins, dans le sens que les patients voudraient toujours que le médecin passe chez eux et s'il n'y a aucun découragement, s'il n'y a aucun ticket modérateur. Je me demande s'il faut réellement concevoir un plan d'assurance-maladie où il n'y a pas ce découragement qui, à mon sens, est de nature à noyer la profession médicale avec des demandes que les médecins viennent à domicile. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. BOUDREAU: Voici, M. le Président. Je pense que d'abord on peut envisager les frais modérateurs comme étant un mécanisme grâce auquel on peut atteindre trois buts différents. On peut songer à utiliser les frais modérateurs premièrement comme étant un certain complément au financement du régime. Je pense qu'à cet égard, si on examine la situation d'assez près, on s'aperçoit que, compte tenu des coûts d'administration supplémentaires qui seraient impliqués, ça ne pourrait pas représenter un mécanisme de financement extrêmement important. Peut-être qu'on pourrait réaliser...

M. LE PRESIDENT: Je pense que nous devons être d'accord sur ce point-là.

M. BOUDREAU: En deuxième lieu, ça peut être envisagé comme un mécanisme visant à diminuer la consommation dans son ensemble afin de ne pas exercer trop de pression sur les disponibilités en effectif et en installation physique. A ce point de vue-là aussi, je pense qu'il y a un certain nombre de remarques qu'on doit faire. Premièrement, du côté de la chirurgie, il est assez difficile de songer à des abus, enfin ce n'est pas tellement flagrant; du côté de l'obstétrique également, c'est comme vous dites du côté des visites qu'il faut le plus craindre de tels abus. Mais dans leur ensemble, il est assez difficile de déterminer ce que sont les abus, et ce qui n'est pas des abus. C'est pour ça que, dans l'ensemble, je pense qu'il faut être assez prudent avant d'envisager l'adoption de tickets modérateurs pour l'ensemble des visites tout au moins.

Maintenant le problème que vous avez soulevé là rejoint le troisième objectif qui peut être envisagé dans l'utilisation des tickets modérateurs: c'est celui de l'orientation de la consommation, non pas dans le but de la diminuer mais de l'orienter peut-être de telle sorte qu'elle soit un peu moins coûteuse et qu'elle permette au médecin de travailler de façon un peu plus efficace, c'est-à-dire de voir plus de malades dans une journée. Et je pense que c'est une chose qui doit être regardée de très près. Je vous avoue que personnellement je n'ai pas d'idée arrêtée là-dessus, mais je pense qu'à la lumière surtout du fait qu'au Québec la structure de consommation est un peu différente des autres provinces en ce sens qu'il est exact qu'ici la proportion des visites effectuées à domicile est plus élevée qu'ailleurs, ce qui peut impliquer un prix plus élevé, il y aurait peut-être lieu d'envisager certains mécanismes pour corriger cette chose-là. Et possiblement, comme vous le dites, le ticket modérateur appliqué exclusivement aux visites à domicile pourrait être un mécanisme à envisager. Maintenant, il s'agit à ce moment-là de considérer quel serait le coût d'administration de cette chose-là et s'il y a des personnes qui doivent en être

dispensées, étant donné leur faible revenu et quel devrait être le niveau de ce ticket pour qu'il ait l'efficacité voulue.

M. LE PRESIDENT: Je me suis posé la question, en effet je me suis dit: « Est-ce que ça peut être le médecin, en somme, qui se prononcerait sur la responsabilité du patient au moment de la visite ? » Si, par exemple, j'ai tout simplement un mal de tête et que je demande au médecin de venir me voir, je pense qu'il doit être un peu scandalisé de mon attitude et qu'il doit, en effet, je ne dis pas me punir, — c'est un mot facile — dans ce cas-là il doit dire: « Moi, pour ce qui est de mes honoraires je vais vous les charger personnellement ».

Par contre, s'il se rend compte au domicile que le patient réellement ne pouvait pas venir chez lui, là il dira: « Certainement. D'accord. »

Je suis d'accord, M. Boudreau, que nous ne devons pas envisager de frais modérateurs dans ces circonstances comme étant un revenu. Ce serait insignifiant. C'est plutôt pour empêcher que les services du médecin soient accaparés par des gens paresseux qui ne veulent pas se donner la peine d'aller chez lui.

M. DALLAIRE: Je suis d'accord, M. le Président, parce qu'automatiquement bien des fois nous sommes dérangés soit dans le jour, à l'heure des consultations au bureau ou la nuit, non pas par des gens qui auraient les moyens financiers de payer eux-mêmes la visite du médecin, mais bien des fois par des gens qui n'ont pas les moyens de payer le médecin. Ce sont ces gens-là qui, assez souvent, vont exiger que nous passions à domicile au lieu de venir, eux, consulter au bureau, alors qu'ils pourraient venir facilement nous consulter pour une maladie quelconque. A ce moment-là ils exigent que le médecin se dérange, sachant qu'ils ne paieront pas plus au bureau qu'à domicile; ils font marquer les comptes, alors ils ne paient pas plus. Ce sont ces gens-là qui assez souvent sont les plus exigeants au point de vue soins médicaux.

Comme je vous dis, ce n'est pas l'individu moyen qui a les moyens financiers de payer $5 pour une visite ou consultation qui va exiger que le médecin se rende à domicile, mais bien souvent celui qui n'a pas les moyens financiers et sachant, qu'il aille au bureau ou qu'il fasse venir le médecin, qu'il ne paiera jamais. Alors lui exige, il téléphone et retéléphone pour dire au docteur: « Bien, tu ne viens pas? Il faut que tu viennes ». Alors on a beau poser un tas de questions au téléphone, on ne réussit pas à délimiter si c'est oui ou si c'est non. On lui donne le bénéfice du doute et bien des fois on arrive à domicile pour constater que le monsieur ou la madame aurait pu venir facilement au bureau. Deuxièmement, je pense que nous serons à ce moment-là peut-être débordés de visites à domicile et que nous ne pourrons pas répondre à toutes les demandes parce que souvent nous ferons à ce moment-là des visites plus ou moins utiles ou nécessaires à domicile, alors que ces gens auraient pu venir nous consulter au bureau.

M. LE PRESIDENT: Même le temps que vous consacrez à vos voyages vous empêche de servir des clients pendant cette période-là.

M. TARDIF: Suggérez-vous que ce soit le médecin qui décide si oui ou non il y a abus?

M. DALLAIRE: Je pense que même à ce moment-là il faut tout de même donner le bénéfice du doute au téléphone.

M. TARDIF: Le médecin aurait peur d'être mal vu si, à un moment donné, un client ou une cliente s'aperçoit qu'il est obligé de verser un certain montant d'argent parce que le médecin a décidé ça. Il va faire la grimace puis il va dire: « Tu n'avais qu'à décider autrement et c'est l'Etat qui aurait payé. Ils vont voir le médecin plutôt comme un collecteur.

M. DALLAIRE: Ou bien encore ils nous disent: « Je n'ai pas de voiture, s'il faut payer un taxi, je vais vous payer, je vais payer votre voyage ».

M. THEBERGE: Je ne pense pas qu'on puisse laisser au médecin le choix de décider si oui ou non il doit charger, si oui ou non on a raison de le faire venir. Cela met le médecin dans une position très désagréable et je suis convaincu que les médecins n'aimeraient pas à prendre cette décision-là.

M. LE PRESIDENT: Je ne pensais pas pour un seul instant, ayant réfléchi moi-même aux difficultés, que le comité soit appelé à trouver une solution séance tenante. Mais je pense que c'est un aspect de la question que l'équipe des spécialistes, le comité de recherche doit discuter parce qu'il me semble que fatalement c'est un point qu'il faudrait trancher lorsqu'il s'agira de dresser le rapport...

M. DALLAIRE: Alors, M. le Président, je pense que le médecin sera très mal placé pour dire à l'individu: « Toi, pour ta maladie pour ta visite, c'est toi qui paies ». Et puis au voisin: « Bien non! ». Parce que Baptiste va ren-

contrer Arthur et il va lui dire; « Moi, ça ne m'a rien coûté ». Alors l'autre individu va dire: « J'étais malade moi aussi, il m'a fait payer $5 alors que toi... » Non, je pense que la profession médicale acceptera très facilement la décision prise par les autorités à ce moment-là et je pense qu'on ne peut pas juger nous autres non plus à domicile du mode de paiement du patient. Je pense qu'à ce moment-là, on ne peut pas demander cela aux médecins.

M. RENAUD: On ne peut pas demander ça aux médecins. Ce n'est pas leur rôle.

M. DALLAIRE: Non, ce n'est pas leur rôle. M. LE PRESIDENT: Docteur Raymond.

M. RAYMOND: M. le Président, les gens du comité ont fait un excellent travail. Quelle est votre expérience dans d'autres pays que vous avez visités relativement à cette question au point de vue achalandage du médecin qui est demandé en dehors de son bureau? Quelle est votre expérience?

M. CASTONGUAY: C'est une question dans laquelle on pourra donner plus de détails dans l'étude des régimes des divers pays.

M. LE PRESIDENT: Lorsqu'on sera rendu là. Alors, si c'est bien le sentiment du comité, nous allons peut-être laisser tomber cette question-là pour le moment, laissant aux spécialistes le soin de trouver une solution intelligente, ingénieuse et pratique.

M. CASTONGUAY: Dans l'étude des rapports sur les régimes des divers pays, nous avons toujours une section attachée justement au mode de contrôle sur les abus possibles, la consommation médicale.

M. LE PRESIDENT: La question diffère.

M. BOUDREAU: C'est certainement un problème qui doit être fort important parce que non seulement dans le volume sur les régimes des divers pays mais même dans le volume sur les coût et financement, nous y revenons et nous mentionnons, comme vous l'avez fait, pour ce qui est des visites à domicile, que c'est certainement un point qui mériterait d'être scruté de façon très attentive.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que je conclus, M. Boudreau, que c'est là le résumé du volume 6?

M. BOUDREAU: Oui.

M. LE PRESIDENT: Alors nous allons continuer maintenant avec le volume 7, à moins qu'il n'y ait des membres du comité qui désirent poser des questions sur le résumé de la commission Hall. Sinon, M. Boudreau, voulez-vous poursuivre avec le volume 7?

M. BOUDREAU: Le volume 7, qui s'intitule « Critères de choix », représente, à mon avis, le document central de toute notre étude. C'est peut-être malheureusement le document le plus complexe aussi et ceux qui s'y sont attaqués l'ont peut-être trouvé un peu aride. Je vais essayer de dire à la fois rapidement et simplement ce que nous avons essayé de faire, de démontrer et de trouver dans ce volume No 7.

En bref, le but que nous nous étions fixé au début était de trouver des critères sur lesquels nous puissions fonder des décisions relatives au degré d'intervention de l'Etat et relatives au type d'intervention qui était souhaitable. L'approche que nous avons utilisée pour répondre à ces problèmes, pour réaliser ce but, est basée sur deux éléments principaux. En premier lieu, nous avons essayé de découvrir ce qu'étaient les préférences des Québécois, ce que les Québécois désiraient, voulaient en matière de santé. Nous avons essayé de découvrir quelles étaient ces préférences-là en analysant un certain nombre d'indices, selon lesquels les Québécois avaient révélé leurs préférences: des discours, des mémoires, des causeries et le reste. La conclusion à laquelle nous en sommes arrivés, pour ce qui est de ces préférences-là, nous l'avons exprimée dans ce que nous appelons un consensus, c'est-à-dire que nous avons cru percevoir que tout le monde s'entendait au moins sur un minimum de ce que devrait être l'action de l'Etat dans le domaine de la santé. Ce consensus-là est reproduit à la page 34 du rapport et si vous voulez bien, je peux vous le lire, c'est très court. Il se rapporte à l'action de l'Etat. Alors on lit: a) « que le gouvernement supplémente le marché lorsque celui-ci est déficient.» Ceci veut dire que lorsque...

M. VAILLANCOURT: Quel volume?

M. BOUDREAU: Il s'agit du volume 7. C'est dire que lorsque les individus laissés à eux-mêmes pour l'achat de leurs soins médicaux ou autres ne peuvent obtenir un niveau satisfaisant de soins, alors là l'Etat doit certainement intervenir pour que la consommation atteigne un niveau satisfaisant. En deuxième lieu: « qu'il agisse de façon à tirer parti des externalités présentes

dans le secteur des services sanitaires.» Ceci veut dire que, dans certains secteurs de la santé, je prends comme exemple la vaccination, il existe de très grands avantages pour toute la société à ce que chaque individu en consomme.

En d'autres mots, les avantages ne sont pas seulement recueillis par l'individu qui consomme le soin mais par les autres. Et ceci fait que de tels biens, comme la vaccination, sont vraiment un bien social ou un bien public et, dans de telles circonstances, il est évident que pour que de tels soins soient consommés, au niveau satisfaisant, il faut que le gouvernement intervienne parce qu'il s'agit là d'un problème social, ceci a d'ailleurs déjà été réalisé dans le domaine de la vaccination.

En troisième lieu, « qu'il corrige à l'occasion des structures de consommation périmée». J'ai mentionné tout à l'heure, M. le Président, que peut-être au Québec, les gens faisaient trop venir le médecin à domicile, ce qui est peut-être quelque chose que nous avons hérité du passé, alors que les moyens de communication étaient moins faciles et que les cliniques médicales étaient moins organisées. Si maintenant la pratique moderne de la médecine est plus efficace, si les gens vont davantage à la clinique ou au cabinet du médecin, eh bien il s'agit peut-être d'établir le mécanisme pour corriger peu à peu ces choses-là.

Quatrièmement, « qu'il rappelle constamment à la population ce que ces demandes veulent dire en termes de ressources pour la société ». Ceci veut dire que lorsque la société met à la disposition de ses membres des soins supplémentaires, je pense qu'elle doit en même temps s'efforcer de faire réaliser aux gens que s'ils obtiennent ces soins-là, il y a un coût, coût qui s'exprime évidemment en termes financiers, mais coût aussi qui s'exprime en termes d'autres choses que la société n'aura pas. Si vous mettez, cette année, $300 millions dans la santé, ce sont $300 millions qui n'iront pas à l'éducation, ni aux routes ni à d'autres secteurs. Et je pense qu'il est important que tout ceci soit bien réalisé pour que les soins faits soient le plus judicieux possible et rendent les gens le plus satisfaits possible.

Et enfin, « qu'il utilise la contrainte aussi peu que possible mais autant que nécessaire afin que, dans l'intérêt général, une allocation optimale des ressources entre les secteurs de la santé et les autres secteurs et à l'intérieur du secteur de la santé soit réalisée au moindre coût en argent et en personnel ».

En d'autres mots, une fois qu'on a décidé quelle quantité de ressources, quels sont les soins qu'on veut fournir, il s'agit de l'organiser pour que tout ceci fonctionne le plus efficacement possible, compte tenu du fait qu'étant en démocratie ou enfin vivant avec des êtres humains — ce ne sont pas des machines — et qu'il faut, je pense, envisager les évolutions de la façon la plus graduelle et la plus souple possible.

Donc ceci est le premier élément sur lequel nous avons fondé ce volume qui avait pour but d'établir certains critères de choix. Le deuxième élément est peut-être un peu plus technique et se fonde sur la distinction entre ce que nous appelons des biens publics, des biens privés et, entre les deux, des biens non privés.

Et ici je donne les exemples qui vont aider à comprendre. Un bien public c'est un bien qui est fait de telle sorte que si une personne s'en sert ou le consomme, elle n'enlève rien aux autres en général. Aussi c'est un bien dont la consommation par un individu est très favorable aux autres. Je prends comme exemple un phare de navigation. Si un individu consomme les services du phare, ça n'enlève rien aux autres. Et aussi en général, par exemple, dans la vaccination que je mentionnais tout à l'heure, si un individu se fait vacciner, c'est aussi favorable aux autres. On réalise assez facilement que pour de tels biens ou pour de tels services, il est assez essentiel que l'Etat se préoccupe d'y investir et de les fournir aux gens, sinon ils ne seront pas fournis en quantité suffisante.

La Défense nationale, les routes sont aussi des exemples de ce type de biens-là qu'on appelle des biens publics, ou des biens sociaux. A l'autre extrême, il y a ce qu'on appelle des biens purement privés qui sont caractérisés à l'inverse des biens publics par le fait que ce qu'un individu consomme est automatiquement enlevé aux autres individus et aussi caractérisé par le fait que ce qu'un individu consomme de ces biens-là n'est pas nécessairement favorable aux autres.

L'exemple typique, c'est celui de la nourriture. La quantité consommée par un individu est enlevée aux autres et le fait qu'un individu consomme de la nourriture n'est pas nécessairement favorable aux autres. Et disons là, pour simplifier à l'extrême, parce qu'il y a beaucoup de choses dont il faut tenir compte, qu'on peut entrevoir que dans la mesure où un bien est privé, sa consommation, sa production, son financement doivent être davantage laissés à l'initiative privée. Dans la mesure où un bien est un bien public ou social sa production, son financement, sa consommation doivent être laissés en plus grande partie à l'initiative collective ou publique.

Entre les deux types extrêmes que j'ai mentionnés, bien publics et bien privés, il y a ce

que l'on appelle les biens non-privés qui sont un mélange des deux et un mélange plus ou moins différent ou à composantes publiques plus ou moins importantes. Là on ne peut faire le raisonnement que dans la mesure où la composante publique ou sociale est importante, alors dans cette mesure-là, l'intervention de l'Etat doit être plus importante. Nous avons situé en général la santé dans ce secteur de biens non-privés qui sont un mélange de biens publics et nous nous sommes servis de cette catégorisation des biens pour établir les priorités. En d'autres mots, la première approche basée sur les préférences des Québécois servait à définir un consensus sur lequel tout le monde s'entendait. Mais le deuxième élément, la définition de ce que c'était le bien de la santé, nous a servi davantage à établir les priorités, quelles étaient les choses les plus urgentes à fournir et ainsi de suite allant aux choses qui nous apparaissaient peut-être selon ce raisonnement-là, les moins urgentes et les moins nécessaires.

En terminant, pour compléter tout ce raisonnement, nous avons divisé vis-à-vis chaque bien ou vis-à-vis la production du bien santé ou la production de la santé, nous avons divisé ce secteur-là en trois parties, soit la partie consommation, la partie production et la partie financement. Et par conséquent, nous avons estimé qu'il était possible, théoriquement du moins, d'envisager une action des individus et une action de l'Etat à ces trois niveaux-là; financement, production et consommation. Il nous est apparu — et ceci est mentionné aussi dans ce volume — que c'était probablement du côté du financement, dans les circonstances actuelles, compte tenu des contraintes en effectif, compte tenu aussi des résistances qu'on peut rencontrer dans le milieu, que c'était probablement au départ du côté du financement que l'intervention du gouvernement serait la plus facile et la plus souhaitable alors qu'elle serait peut-être plus difficile à ce stade-ci au niveau de la consommation et de la production. Au niveau de la production, par exemple, rendre tous les médecins automatiquement des fonctionnaires, pourrait poser des problèmes assez considérables.

UNE VOIX: Je pense que oui!

M. BOUDREAU: Et aussi du côté de la consommation, forcer les gens à consommer en telle quantité, à aller chez tel individu plutôt que chez tel autre, à avoir un rendez-vous annuel à telle heure, etc. pourrait aussi, dans le contexte sociologique actuel, poser des problèmes. C'est donc par conséquent du côté du financement que nous avons appliqué nos critères davantage.

Cela, je pense, M. le Président, résume le volume numéro 7.

M. BERTRAND: Très bonne synthèse.

M. MARLER: Y a-t-il des questions que le comité désire poser à M. Boudreau sur les critères de choix? Seriez-vous prêts à présenter le volume suivant? C'est le numéro 4, n'est-ce pas?

M. CASTONGUAY: Oui.

M. MARLER: Le volume 4, c'est le régime d'assurance-maladie de certains pays.

M. CASTONGUAY: M. le Président, le volume 4 contient la description que nous avons faite des régimes des cinq pays ainsi que quelque analyses brèves sur des questions telles que le financement, la demande des soins, les contrôles exercés.

Maintenant, une des premières difficultés que nous avons rencontrées dans la préparation de cette étude-là, c'est celle de l'analyse des textes.

Il est excessivement difficile de se faire une idée exacte de ce qui existe réellement à certains endroits, parce que les textes, même semblant venir de sources assez officielles sont assez souvent contradictoires. Ce qui démontre davantage que toute la question de l'assurance-maladie est un sujet assez chargé d'émotions et de passions, non seulement ici au Canada — comme on a pu le voir en Saskatchewan il y a trois ou quatre ans — mais aussi en Europe.

Alors, c'est pour cette raison, tel que nous l'indiquons dans le début du volume, que nous nous en sommes tenus plutôt à des études descriptives, que nous n'avons pas voulu exprimer, dans ce volume-là, trop d'opinions nous-mêmes. Comme je le mentionnais, nos opinions sont consignées dans les rapports que nous avons faits sur chacune des visites aux différents organismes que nous avons visités. Maintenant, dans le choix des pays étudiés — d'abord il était inutile d'essayer d'en étudier un nombre à n'en plus finir — ce que nous voulions surtout dégager, c'étaient les principales caractéristiques des régimes d'assurance-maladie et notre choix s'est arrêté sur les pays suivants. Premièrement, l'Angleterre. Etant donné que c'est un régime d'une nature assez particulière, il a été l'objet de beaucoup de controverses; on en entend parler constamment dans les journaux, dans différentes revues; il a été étudié et critiqué peut-être plus que n'importe quel autre régime, en tous les cas, en autant que nous

sommes concernés ici au Canada.

Nous avons ensuite étudié le régime général de la France. Etant donné qu'il s'agit là d'un régime d'assurance sociale par opposition au régime anglais qui est un régime de soins, tel que nous avons fait la distinction hier. Dans les deux cas, pour la France et l'Angleterre, nous avons pensé qu'il y avait une raison additionnelle qui pouvait être intéressante dans l'étude de ces deux régimes. C'est que nombre de médecins, ici, de pharmaciens, de professeurs, etc. ont fait des stages en France, en Angleterre et ont acquis une certaine connaissance des régimes de ces pays. En plus de cela, en plus des professionnels, un certain nombre aussi de personnes, qui ont émigré de ces pays au Canada ou encore des Canadiens qui sont allés vivre pour d'autres raisons en France, ont été en mesure d'apprécier jusqu'à un certain point le fonctionnement de ces systèmes de ces deux régions.

Maintenant, nous avons aussi étudié ce qui se passait en Belgique. Etant donné que c'est un pays voisin de la France, pour une bonne partie de la population, une certaine partie, l'usage de la même langue, alors, il y a certainement eu une influence de la France sur la Belgique. Et malgré qu'en France il semble y avoir un certain équilibre au sujet de l'assurance-maladie, ce n'est pas tout à fait le cas en Belgique. Alors, nous avons voulu essayer de déterminer pourquoi cette différence entre la Belgique et la France, où il s'agit de deux régimes de conception à peu près analogue. Finalement, nous avons étudié le régime de la Suède. La Suède, pour différentes raisons, est dans toutes les questions de sécurité sociale, un pays qui présente beaucoup d'intérêt, un pays dont la sécurité sociale est très développée et où malgré tout, il y a l'existence d'une entreprise privée très forte. Nous avons étudié le régime de la Suède aussi pour d'autres raisons qui sont les suivantes: c'est qu'il y a certaines caractéristiques assez intéressantes entre le Québec et la Suède. Les deux ont des territoires très grands, le même genre de climat, une population qui ne diffère pas tellement — en Suède 7 millions et demi et ici 5,600,000 — dispersée sur deux grands territoires aussi bien en Suède que dans la province de Québec, un niveau de vie assez semblable. Par exemple, on a noté que le produit national brut per capita en 1962 était de $2,080 en Suède alors qu'il était de $1,974 dans la province de Québec.

Il y a un certain nombre d'analogies encore là ou de caractéristiques qui se ressemblent.

Chaque régime en Europe ou dans les provinces de l'Ouest colle, si vous me permettez l'expression, aux conditions locales d'une façon assez surprenante.

M. MARLER: En effet, les conditions que je pourrais appeler les conditions pré-existantes, n'est-ce pas, il fallait que le plan se cadre avec les traditions et les moeurs du pays en question.

M. CASTONGUAY: Et les habitudes, etc.

Alors, nous avons présenté les études dans notre volume dans l'ordre que nous avons suivi lorsque nous avons fait le voyage. Mais pour l'étude ici, je proposerais un ordre un peu différent. En premier lieu, je proposerais que nous passions au régime de la Suède. Ce régime est beaucoup plus simple à décrire et beaucoup moins complexe en apparence, du moins. Vous en avez la description à compter de la page 69. Le régime d'assurance-maladie suédois a été établi dans sa forme actuelle en janvier 1955, — alors, c'est quelque chose d'assez récent encore — et il a comme objectif de neutraliser les conséquences financières qu'entraîne la maladie. Ce qui est intéressant, c'est que les dispositions du régime et aussi sa structure administrative s'intègrent très bien dans les autres dispositions de sécurité sociale existantes en Suède et, aussi, au point de vue administratif, aux autres organismes administratifs, tel qu'on le verra plus loin. C'est un point ça aussi assez important. On en a parlé brièvement hier mais il ne semble pas y avoir conflit entre l'administration du régime et les structures qui existent pour le domaine complémentaire de la santé, ce qui est un point assez important. Au point de vue de la couverture, si on prend en premier lieu les soins médicaux, d'une façon générale tous les soins donnés par les médecins sont couverts, y compris la physiothérapie.

Le remboursement à l'assuré est effectué à raison de 75% du tarif d'honoraires. On utilise en Suède le système de remboursement, c'est-à-dire l'assuré paie le médecin, reçoit une facture acquittée et se présente à la caisse de sécurité sociale pour se faire rembourser 75% des honoraires.

Maintenant, il est indiqué au sujet du remboursement qu'il n'est pas tenu compte des dépassements d'honoraires. Il y a une raison particulière; c'est que l'organisation de la profession médicale en Suède est un peu différente d'ici, on le voit à page 75. Les médecins peuvent être divisés, en Suède, en trois catégories:

Il y a les médecins en pratique privée, deuxièmement, il y a les officiers médicaux régio-

naux et, finalement, il y a les médecins d'hôpitaux. Si on prend les médecins d'hôpitaux, en grande partie ce sont des spécialistes; quant aux médecins en pratique privée, vous avez principalement des omnipraticiens et un certain nombre de spécialistes; les officiers médicaux régionaux sont en grande partie encore une fois des omnipraticiens mais eux, pratiquent dans des endroits où il y avait un manque de médecine. Alors les officiers médicaux régionaux existent en très grande partie pour atténuer ou essayer de solutionner le problème de la mauvaise distribution géographique des médecins qui existait avant l'établissement du régime; ils sont environ au compte de 800 et ils sont rémunérés en partie à salaire et en partie à honoraire. Vous les retrouverez principalement à l'extérieur des grandes villes.

M. FORTIER: J'aurais juste une question qui m'intéresse énormément.

M. CASTONGUAY: Oui, docteur.

M. FORTIER: Est-ce qu'il y a une méthode, par exemple, en Suède, ici il faudra dire par un médecin: « Vous allez être prescrit à telle place où il manque un médecin ». Est-ce qu'ils ont des avantages spéciaux pour ça?

M. CASTONGUAY: Bien voici...

M. FORTIER: Si je demande ça, par exemple nous autres on sait qu'on manque de médecins dans les centres ruraux, alors est-ce qu'il y a ici une méthode pour que ces centres-là aient des médecins? Est-ce qu'on favorise le médecin spécialement ou est-ce qu'il n'a pas d'obligation là-bas au médecin d'y aller?

M. CASTONGUAY: Bien, disons que ce n'est pas du dirigisme complet qui consisterait à dire à tel médecin vous allez à tel endroit ou à tel endroit. Nous disons qu'il y a un certain contrôle et tout médecin peut aller en pratique privée s'il le désire mais à ce moment-là, s'il y a déjà saturation, il n'aura aucune aide de l'Etat pour s'établir. Par contre, s'il y a un manque, l'Etat va aider de différentes façons en payant un salaire, etc. Deuxièmement, le médecin qui pratique à titre d'officier médical régional, lui ne peut pas charger de dépassements d'honoraires lorsqu'il traite un patient. En plus de ça, il est obligé de donner un certain nombre d'heures de travail pour son salaire et peut consacrer le reste à la pratique privée. Il ne peut pas charger de dépassements d'honoraires tandis que les médecins en pratique privé peuvent en charger.

Alors les assurés, et toute la population est assurée à toutes fins pratiques, tentent plutôt d'aller voir les médecins d'nôpitaux qui eux non plus ne peuvent pas charger de dépassements d'honoraires et les officiers médicaux régionaux. Mais il n'y a pas de dirigisme complet. On voit qu'en Angleterre, par contre, c'est peut-être un petit peu plus contrôlé sur cet aspect-là, quant à l'endroit où les médecins peuvent s'établir.

M. BLANK: Maintenant, les cours médicaux sont payés par les étudiants ou si c'est la gratuité scolaire? Les médecins, les étudiants qui prennent les cours médicaux...

M. CASTONGUAY: Oui.

M. BLANK: ... ce sont des cours gratuits ou qu'ils sont obligés de payer eux-mêmes?

M. CASTONGUAY: franchement, sur cette question-là, M. Blank, il faudrait que je m'informe...

M. BLANK: Peut-être que le gouvernement va donner des subventions spéciales à des gens pour faire un contrat pour telle ou telle année qu'il va pratiquer en dehors de la ville.

M. CASTONGUAY: Je ne croirais pas. De toute façon, ça ne nous a pas été mentionné. Il y a cinq universités en Suède...

M. BLANK: Parce qu'ici, au Canada, on nous donne l'armée canadienne qui va payer les cours aux étudiants médicaux pour passer cinq ans dans l'armée.

M. CASTONGUAY: En Suède, on n'en a pas entendu parler et pourtant on a rencontré un certain nombre de personnes. S'il y avait eu quelque chose de ce côté-là je crois que ça nous aurait été mentionné ou qu'on l'aurait vu. Il y a cinq universités en Suède et il y a aussi une certaine immigration vers la Suède de médecins des pays Scandinaves. Alors même s'il y a un petit problème de distribution géographique, il ne semble pas y avoir un gros problème au point de vue effectif.

M. COITEUX (Duplessis): M. Castonguay, vous avez mentionné tantôt que le remboursement était fait au patient directement sur une base de 75%, qu'est-ce qui se produit en Suède lorsque quelqu'un n'a pas les moyens d'acquitter? Par exemple, au point de départ, il sait qu'il va être remboursé. S'il reçoit un compte de $300

d'un médecin, alors il faut tout de même qu'il l'ait, le $300 avant d'avoir le reçu pour être remboursé.

M. CASTONGUAY: Cela c'est un des problèmes. On en traite brièvement dans la question du financement. Nous allons y revenir après avoir vu les autres soins, vous allez voir que cette possibilité là n'est pas tellement forte malgré tout.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, j'ai à l'esprit une question tout à fait semblable, je me disais, même si le patient a les moyens de payer le 75%, qu'est-ce qu'il arrive dans le cas d'un indigent qui n'a pas le 25%? Est-ce qu'il a une dette sur le dos jusqu'à la fin de ses jours?

M. CASTONGUAY: Je pense que la réponse va ressortir graduellement. Si nous prenons, premièrement, les soins hospitaliers, nous voyons que l'hospitalisation est gratuite dans tous les hôpitaux publics. Quels que soient la nature et la durée de la maladie et les médecins des hôpitaux étant salariés, la personne, l'assuré ne reçoit pas de note d'honoraires pour les soins par exemple, qui impliquent des frais assez élevés. On dit, la couverture du régime comprend l'hospitalisation dans une salle publique, les soins médicaux et chirurgicaux, les examens de dépistage de la maladie, les transfusions de sang, les examens radioscopiques et les médicaments. Alors ce qui reste en fait, ce sont plutôt des honoraires, de façon générale, pour les visites à domicile, au bureau et à la clinique externe; il y a alors juste le 25% du tarif régulier d'honoraires.

Alors, déjà là, vous voyez que les notes très élevées sont moins fréquentes. Si ça créait un problème, l'administration de l'assurance-maladie est très décentralisée en Suède et confiée, ainsi que l'administration des autres organismes dans le domaine de la santé, aux autorités municipales et régionales qui, elles, sont aussi responsables des problèmes des indigents, des problèmes d'assistance. Alors si une personne, étant un indigent, n'est pas en mesure de payer cette partie-là qui, comme on le voit, ne peut pas être très élevée, à ce moment l'autorité locale va l'aider à payer cette part qui reste.

M. LE PRESIDENT: Ce que je n'aime pas à première vue dans le système, lorsque le patient consulte le médecin, c'est qu'il ne veut pas à la suite contracter aucune obligation quelconque envers le médecin. Personnellement, j'espère que si le comité vient à une décision, on trouvera une façon d'avoir un plan d'assurance-ma- ladie de façon à nettoyer complètement les relations financières entre patient et médecin une fois, disons, la guérison complète.

M. CASTONGUAY: Sur ce point-là, il y a déjà une différence appréciable entre les habitudes, par exemple, dans les pays comme la Suède, la France et le Canada. Ici, les compagnies d'assurance transigent de plus en plus directement avec le médecin. Essayer de faire machine arrière, ce qui n'est pas tellement désirable dans le sens que vous mentionnez, irait aussi à l'encontre des habitudes qui sont pas mal établies, habitudes prises de transiger...

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, je n'ai pas d'objection personnellement quant au paiement directement par le fonds d'assurance, si on peut parler ainsi ou par le patient lui-même. Ce que je peux déclarer, c'est qu'il y a un règlement définitif et que la maladie ne soit pas suivie d'une longue relation financière de débiteur et créancier entre le fonds ou le médecin et le pauvre patient.

M. CASTONGUAY: Oui, oui.

M. LE PRESIDENT: Qu'il soit riche ou non, je pense qu'il est essentiel que le règlement soit définitif.

M. TREPANIER: M. Castonguay, j'ai cru comprendre tantôt que les services donnés dans les cliniques externes n'étaient pas couverts par l'assurance-hospitalisation, est-ce exact?

M. CASTONGUAY: Voici, si c'est un traitement ou une consultation qui pourrait être faite à domicile ou au cabinet du médecin, on encourage les gens à aller à la clinique externe justement dans le sens du problème qui était mentionné plus tôt afin d'éviter aux médecins de se déplacer constamment.

Là, le médecin traite en clinique externe tout comme il le ferait au bureau ou au domicile. La différence est sur le plan des honoraires du médecin» Il n'y a pas hospitalisation du patient. Le patient, l'assuré, sait qu'il n'y aura pas de dépassement d'honoraires tandis que, s'il va au bureau de médecin ou si le médecin va à son domicile, le médecin peut charger plus que le tarif officiel, enfin il est libre de charger ce qu'il désire. L'assuré présente sa note et reçoit 75% de remboursement du tarif officiel. Si le médecin est un médecin de grande réputation, il peut lui charger le double du tarif officiel. L'assuré ne reçoit donc que la moitié en fait de la note d'honoraires comme remboursement et peut-être

moins que la moitié. Tandis que s'il va à la clinique externe, il est assuré qu'il n'aura qu'à payer 25% du tarif officiel. Il sait exactement à l'avance ce qu'il sera appelé à payer.

M. TREPANIER: Ce que je veux dire, c'est plutôt ceci: Est-ce que les services que reçoit le patient à la clinique externe sont couverts par l'assurance-hospitalisation contrairement à ce qu'il y a ici?

M. CASTONGUAY: S'il y a chirurgie mineure et qu'il n'y a pas hospitalisation, ce genre de traitement-là est couvert tout comme s'il y avait hospitalisation; et ceci dans le but de ne pas surcharger inutilement l'occupation des lits.

M. FORTIER: Le patient est obligé, — par exemple, il n'y a pas de restriction dans la loi — il est obligé de payer ce que lui demande le médecin à son bureau privé. Tandis que le médecin qui va à la clinique externe de l'Hôpital il y a un tarif, il se doit d'accepter ce tarif-là.

M. CASTONGUAY: Exactement. Est-ce que ça répond à votre question, M. Trépanier?

M. TREPANIER: Pas tout à fait. Ici actuellement, dans la province de Québec, lorsqu'un patient va en clinique externe pour un examen radiologique, il doit payer lui-même les frais de cet examen, si c'est pour fins de diagnostic. Il y a une situation analogue en Suède?

M. CASTONGUAY: Pas à notre connaissance.

M. TREPANIER: Les services en clinique externe, les services dispensés par l'hôpital et non par le médecin, à la clinique externe, ils sont payés par l'assurance-hospitalisation.

M. CASTONGUAY: A notre connaissance, oui. M. RENAUD: Dans la proportion de 75%.

M. CASTONGUAY: Non, 75% des honoraires du médecin. Les autres frais...

M. CLOUTIER: Est-ce qu'en Suède, il n'existe pas d'autres mécanismes qui relèvent de la sécurité sociale qui paient la partie de 25% qui reste pour les indigents qui ne peuvent pas rencontrer cette partie-là.

M. CASTONGUAY: La, ce sont les municipalités, les conseils régionaux ou les conseils de comté, qui ont beaucoup plus de responsabilités qu'ici au point de vue des indigents, qui paient ces montants-là, qui remboursent ces montants-là.

M. BERTRAND: C'est une espèce d'assistance publique.

M. CASTONGUAY: Exactement. Au lieu d'être administré par le gouvernement, ça ne fait pas partie disons des grandes lois sociales, ce sont plutôt des législations au niveau des villes.

M. CLOUTIER: C'est dans ce sens-là que vous disiez que le régime est intégré à ce qui existe actuellement, la collaboration entre les structures actuelles et le plan lors de l'instauration.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. CLOUTIER: C'est une caractéristique dont notre régime devra tenir compte.

M. CASTONGUAY: C'est très important. Maintenant, pour les soins couverts dans les hôpitaux par la sécurité sociale, ils sont donnés dans les hôpitaux publics par les médecins attachés à ces hôpitaux. Le malade qui désire être traité par un médecin privé, doit s'adresser à un hôpital privé et à ce moment-là, il paie la totalité des frais. Les statistiques indiquent que le secteur privé dans l'hospitalisation ne représente que 2.7% du nombre des lits dans les établissements hospitaliers et 3.3% dans les établissements pour malades mentaux. Les hôpitaux sont publics et ce ne sont pas nécessairement des propriétés du gouvernement central mais plutôt des propriétés des autorités régionales, municipales.

Les médicaments sont divisés en deux catégories; on a touché à cette question-là brièvement hier. Vous voyez, à la page 70, l'on dit que les médicaments prescrits pour le traitement des maladies chroniques, tel que l'insuline pour le diabète, cette première catégorie de médicaments fait l'objet d'abord d'une liste qui est remise à tous les pharmaciens. Et ces médicaments-là sont entièrement gratuits en autant que l'assuré social est concerné. Les autre médicaments prescrits par un médecin, eux, ne sont pas tout à fait gratuits. En effet, on dit que le malade doit payer les premiers $0.60 pour chaque ordonnance, et 50% du solde. Vous voyez que c'est un frais dissuasif ou un frais modérateur qui est relativement élevé, 50% du solde du coût des médicaments.

Maintenant, il est indiqué que tout comme l'industrie pharmaceutique, les pharmacies relè-

vent de l'initiative privée. Elles sont la propriété de pharmaciens tout comme ici. Simplement, un pharmacien n'a le droit d'être propriétaire que d'une pharmacie et les médecins n'ont pas le droit, sauf dans certaines régions éloignées, d'être propriétaires de pharmacies.

M. RENAUD: Ils ont droit à trois dans la province de Québec?

M. CASTONGUAY: Les soins dentaires. Certains soins dentaires, sont couverts en cas de maladie s'ils sont donnés par un dentiste dans une polyclinique du service dentaire publique, dans une école de dentistrie ou dans un hôpital général. Ici, je crois qu'il est important de noter que c'est en cas de maladie. En outre, ces soins sont aussi couverts au cours d'une grossesse, dans les deux cent soixante-dix jours qui suivent la maternité. On nous a mentionné qu'il y avait une pénurie de dentistes. Alors on donne les soins dentaires aux catégories de personnes qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire à l'occasion d'une maladie et aussi dans les cas de grossesse pour les femmes. Comme pour les soins médicaux, l'assuré reçoit un remboursement égal à 75% du tarif d'honoraires officiel. Et on nous a dit, au moment où nous étions là, que l'étude de la question d'étendre possiblement les soins dentaires à plus de personnes se poursuivait à ce moment-là.

Maintenant pour les soins de maternité, les règles générales de l'assurance-maladie s'appliquent; l'hospitalisation est gratuite et vous avez le remboursement partiel des soins médicaux et des médicaments avant et après la grossesse. Si la mère n'est pas hospitalisée, ce qui libère possiblement un lit, alors là il y a une allocation qui est versée pour l'aider à rencontrer les dépenses que ça occasionne, les dépenses additionnelles. En plus il y a des soins de maternité qui sont donnés gratuitement dans un réseau de cliniques publiques pour mères et enfants. Ces cliniques vont conseiller des femmes qui sont enceintes et, après la naissance, vont aussi contribuer et traiter les mères et les enfants.

Il y a les frais de déplacement qui sont aussi couverts. Les frais de déplacement du malade jusqu'à l'hôpital public le plus rapproché sont remboursés, les frais de déplacement de l'hôpital au domicile ainsi que pour les consultations auprès d'un médecin sont remboursés partiellement, soit l'excédent de $0.80. Ici encore, on tend à vouloir attirer les personnes vers les hôpitaux plutôt que de laisser les médecins se promener d'un bord et de l'autre et perdre passablement de temps. En plus d'être un économie de temps pour les médecins, ceci permet souvent l'élimination de deux ou trois consultations étant donné que l'équipement nécessaire pour les examens, les analyses etc. est disponible.

M. CLOUTIER: Est-ce qu'il existe une décentralisation des hôpitaux dans le domaine de la maternité, des cliniques de maternité des petits hôpitaux tels qu'on les conçoit ici?

M. CASTONGUAY: En Suède, il y a tout un plan d'organisation des établissements hospitaliers. Ils sont obligés d'investir beaucoup. Les problèmes ne sont pas tous réglés, mais le pays a été divisé en un certain nombre de régions et à l'exception de quelques grands services tout à fait particuliers, par exemple, qui correspondraient à l'Institut de neurologie à Montréal, chaque région a une organisation assez balancée.

Vous retrouverez des hôpitaux généraux possiblement dans chaque partie de la région de telle sorte que les personnes n'ont pas à couvrir des distances épouvantables. Vous retrouvez, après ça, comme services plus spécialisés rattachés à ces hôpitaux-là ou comme unité séparée les différents autres services hospitaliers qui doivent exister. Alors il y a un plan d'ensemble. Tout ne semple pas complété mais il y a certainement eu énormément de fait dans ce domaine-là. La même chose pour les cliniques. On semble encourager énormément la formation, l'établissement de cliniques permettant aux médecins de se grouper, de se consulter entre eux, de se tenir plus facilement au courant des développements de la science médicale et aussi d'établir, à l'intérieur de leurs cliniques, des laboratoires pour les analyses qui peuvent être faites là, l'équipement nécessaire pour les examens.

M. CLOUTIERs Avez-vous fait une étude spéciale des dépenses d'investissement qui ont été amenées à être faites par l'instauration d'un régime d'assurance-maladie dans ces pays-là?

M. CASTONGUAY: Nous ne l'avons pas fait, M. Cloutier. D'un autre côté, je crois qu'on peut déceler ici, d'après la façon dont le régime est constitué qu'on n'a pas voulu tout couvrir. « D'abord dans la catégorie des soins couverts, il y en a qui ne le sont pas du tout. Par exemple, vous remarquez que les soins infirmiers à domicile ne semblent pas couverts. Vous avez les soins oculaires qui ne sont pas couverts. Il n'est pas question de prothèse. On a voulu couvrir une gamme de soins assez complète et aussi répartir les dépenses de consommation là où elles semblaient les plus utiles comme pour les médicaments, par exemple,

pour les maladies chroniques, les soins dentaires, les personnes enceintes. Alors on a essayé d'utiliser de la meilleure façon possible les dépenses allant à la consommation alors que dans d'autres pays, comme en Angleterre, on avoulu tout couvrir. D'un autre côté, on a réalisé en allant en Angleterre, par comparaison avec la Suède, qu'il semble y avoir un problème épouvantable au point de vue équipement. On nous a dit qu'il y avait encore des hôpitaux qui avaient été construits comme logement temporaire pour les soldats au cours de la première guerre et qui sont encore utilisés en 1966, comme hôpitaux. Vous pouvez voir quel genre de conditions existent. Tandis qu'en Suède, le problème des hôpitaux ne semble pas du tout présenter ce genre de situation. Il semble y avoir un équipement hospitalier adéquat et qui se remplace, c'est-à-dire les plus vieux établissements sont démolis et remplacés par de nouveaux et il semble y avoir une distribution à travers le pays beaucoup plus adéquate. Il y a des foyers pour convalescents, pour personnes âgées. C'est beaucoup plus balancé. On n'utilise pas dans les hôpitaux pour traitements actifs des lits pour des convalescents ou des personnes âgées.

M. FORTIER: Est-ce que les gens en Suède sont très satisfaits de ce régime-là?

M. CASTONGUAY: Encore là, les opinions que nous avons recueillies à ce sujet-là viennent des quatre catégories d'organismes que nous avons visités, le gouvernement ou les organismes de sécurité sociale, les médecins, les syndicats ouvriers et les organisations d'employeurs.

A chaque endroit on nous a dit, et c'est consigné dans nos rapports « qu'il y a des améliorations à faire, mais compte tenu de nos rescources, compte tenu des disponibilités le système est probablement le meilleur que nous pouvons nous payer à ce stade-ci. » Et ça, aussi bien chez les syndicats ouvriers, que chez les médecins, que chez les employeurs et le gouvernement.

M. MARLER: La question que M. Cloutier a posée me semble certainement un aspect qui nous intéressera plus tard n'est-ce pas, parce que fatalement le comité doit se poser la question suivante: Si nous recommandons un plan d'assurance-maladie, avons-nous l'équipement suffisant pour répondre à la demande peut-être croissante, la demande plus grande qui existerait par la suite de la mise en vigueur d'un tel plan.

Evidemment, ce n'est pas le temps d'en parler. Mais il faudra en parler éventuellement.

M. CASTONGUAY: Et aussi de la question complémentaire, si vous me permettez, est-ce que nous engageons dans les dépenses de consommation une partie telle de nos ressources que pour les dépenses d'investissements, il n'en restera pas suffisamment dans l'avenir?

M. ROY: Absolument.

M. COITEUX (Duplessis): Est-ce que les soins de maternité couvrent la fille-mère?

M. CASTONGUAY: Oui. Et les allocations qui sont versées à la naissance pour le linge qui est nécessaire, la diète particulière qu'un bébé nécessite, sont payés aussi bien à la femme mariée qu'à la fille.

M. ROY: M. Castonguay, est-ce que les soins donnés dans les cliniques sont semblables à ceux donnés dans les unités sanitaires?

M. CASTONGUAY: Ici au Québec? M. ROY: Ici au Québec.

M. CASTONGUAY: Savez-vous ça peut vous paraître étrange, mais je ne suis pas tellement tellement familier avec les soins qui sont donnés dans nos unités sanitaires. M. Morency étant du ministère de la Santé, étant au courant de cette question, il y a eu tellement d'autres choses à couvrir que je n'ai pas tellement étudié cet aspect-là. Peut être M. Morency pourrait nous donner certains renseignements.

M. MORENCY: A ma connaissance les unités sanitaires ne donnent pas de soins tel quel. Il se fait beaucoup de prévention, on va visiter les familles; à l'occasion il va se donner peut-être certaines injections, par exemple, certains vaccins et c'est à peu près tout ce qui se donne. Il ne se donne pas de véritables soins comme ceux qui peuvent se donner dans une clinique. C'est surtout un travail de prévention qui se fait par les unités sanitaires.

M. TREPANIER: Les soins dentaires.

M. MORENCY: Cela ne se donne pas à l'unité sanitaire elle-même. Le principal travail des unités sanitaires en est un de prévention.

Il y a un bureau où est logée l'unité sanitaire et les gens, à l'occasion, peuvent amener leurs enfants pour un examen, etc., mais ausi-sitôt qu'il est question de donner des soins autres qu'un vaccin, on les réfère soit au médecin, ou à l'hôpital. On ne donnera pas de soins à l'unité sanitaire.

M. ROY: M. Castonguay, ma question était de savoir si les soins donnés dans les cliniques, en Suède, dans les cliniques publiques sont semblables à ceux donnés dans les unités sanitaires.

M. CASTONGUAY: Disons que ça serait plutôt les soins donnés dans nos cliniques externes ici qui correspondraient à ces soins-là.

Quant au champ d'application, en 1955, environ 70% de la population était couverte volontairement pas des sociétés d'assurances auxquelles l'Etat versait des subsides. C'était des sociétés, dans la majeure partie des cas, du type mutuelle. C'est à partir de ces mutuelles qu'on a élaboré le régime couvrant l'ensemble de la population et c'est ce qui explique, comme nous le verrons un petit peu plus loin, la présence, l'existence de caisses un peu partout à travers le pays. L'assujettissement au régime est obligatoire pour tout citoyen suédois ou étranger domicilié en Suède, à compter du mois où il atteint seize ans. L'assurance des parents couvre les enfants qui n'ont pas seize ans, alors c'est la couverture de l'ensemble de la population. Les assurés doivent s'inscrire à la caisse d'assurance locale ou régionale du territoire où ils résident. Maintenant, dans les structures administratives et consultatives, avant de passer au réseau des caisses, il y a une chose qui est assez intéressante à souligner, c'est le système un peu particulier de gouvernement en Suède. Naturellement c'est un régime de mode démocratique, il y aun parti au pouvoir, il y a un parti d'opposition mais il est noté, et à ce sujet nous avons référé à un texte officiel pour ne pas donner des impressions mais essayer de donner le portrait le plus exact.

A la page 72, on note à la fin du premier paragraphe, qu'il est important de se rappeler que les administrations gouvernementales locales jouent un rôle significatif et, de façon particulière, elles se sont vues confier les tâches essentielles dans le domaine de la santé nationale. Cela c'est une première chose, les gouvernements locaux jouent un rôle important dans le domaine de la santé.

Maintenant au niveau, disons, du gouvernement central, les ministères suédois sont responsables au point de vue politique, ils établissent les grandes lignes des politiques qui orientent l'activité gouvernementale, mais leur activité principale, l'activité principale des ministères est reliée au domaine de la législation et des estimations budgétaires.

Maintenant, si on passe plus loin, au dernier paragraphe, et c'est là que ça ressort plus clai- rement, on dit: le gouvernement national suédois a ceci de particulier que la majeure partie de l'administration n'est pas confiée aux ministères eux-mêmes mais plutôt à des organismes autonomes, centralisés, soit les commissions nationales. Ces commissions contrôlent et dirigent l'activité gouvernementale et les diverses institutions publiques, conformément aux directives émanant de la législation et des décisions du Cabinet. Les commissions ne relèvent pas d'un ministre mais de la Couronne. Le ministre des Affaires sociales n'est pas, par conséquent, dans une position d'autorité relativement au directeur général de la commission nationale de la santé. Ce dernier relève en effet du roi en conseil. Les commissions nationales possèdent ainsi une large mesure d'autonomie. Alors c'est une chose qui, je crois, dans l'étude d'un régime comme celui-ci doit être mentionnée. Et là, il y a deux commissions qui se partagent le domaine de la santé, la commission nationale de la santé, la commission nationale de l'assurance sociale. La commission nationale de la santé contrôle les services nationaux sanitaires et pharmaceutiques et a comme fonction première de contrôler le traitement des malades dans les hôpitaux privés et publics. En outre, cette commission, a la juridiction complète sur le personnel médical, les hôpitaux et pharmacies et sur les autres institutions. Il n'y a pas d'organisme qui correspond aux collèges en Suède, les collèges des médecins, des pharmaciens, c'est cette commission qui joue le rôle du collège.

M. MARLER: Il faut discipliner un médecin qui...

M. CASTONGUAY: Contrôler l'admission à la pratique, etc.

M. FORTIER: Est-ce qu'il y a des médecins dans cette commission-là?

M. CASTONGUAY: Oui, le directeur général est un médecin de grande réputation. Maintenant, la commission nationale de l'assurance sociale est chargée de l'administration du régime d'assurance-maladie. Alors, vous voyez, les tâches sont réparties bien précisément entre les deux commissions, l'une qui s'occupe de planification, de mettre en application la législation, le contrôle de l'exercice, etc. L'autre remplit la fonction de l'assureur, la commission nationale d'assurance-maladie.

M. MARLER: Est-ce que je dois comprendre, M. Castonguay, que dans ces domaines-là la commission qui administre le régime d'as-

surance-maladie est autonome dans le sens qu'elle décide elle seule si les primes doivent être augmentées ou non?

M. CASTONGUAY: Au point de vue de l'augmentation...

M. MARLER: En effet, la commission n'est pas autonome dans le sens qu'elle envoie son compte au gouvernement lui disant: j'ai besoin de $20 millions ou $100 millions, je ne sais pas quoi, et ainsi peut être défoncer le budget du gouvernement.

M. CASTONGUAY: Elle n'a pas pleine autonomie financière, justement. Ceci en plus de la législation et des contrôles budgétaires, est réservé aux ministères et au gouvernement. Ce sont les deux principales fonctions réservées aux ministères et au gouvernement, celle de la législation, l'application des règlements nécessaires à l'application de la législation et les contrôles budgétaires. Après ça, en-dessous de cette préoccupation-là, ça tombe dans les commissions.

L'administration du régime même est décentralisée, étant donné que l'on a continué les caisses telles qu'elles existaient, d'une part, par suite de la nécessité d'avoir des bureaux régionaux, étant donné le système de remboursement des assurés et aussi pour établir le lien avec les autorités locales qui s'occupent plus particulièrement des indigents.

Il y a donc trois raisons qui existent et pour lesquelles il y a décentralisation. Alors on n'a pas perpétué, comme il semble être le cas en France jusqu'à un certain degré, le réseau des caisses pour la simple raison de conserver ce qui existait. En Suède, il semble y avoir une raison bien particulière pour cette situation-là.

Il y a des caisses régionales en premier lieu et il y a des caisses locales. On indique qu'il y a 28 caisses régionales, 630 locales et que chaque caisse a un conseil d'administration, ce qui intéresse plus particulièrement les gens au niveau local à la bonne administration du régime d'autant plus, comme nous le verrons plus loin, que les taux peuvent varier d'une région à l'autre selon l'efficacité de l'administration.

M. ROY: M. Castonguay, est-ce que les frais d'administration de cette caisse régionale et locale sont élevés?

M. CASTONGUAY: Pas tellement, non. Ici, je ne crois pas que ce soit indiqué clairement, nous n'avons pas eu tellement de chiffres, mais si ma mémoire est bonne, dans nos rapports nous indiquons 6% des prestations versées, ce qui n'est pas tellement élevé. Maintenant, on indique justement la composition de la caisse nationale d'assurance à la page 74, on dit qu'elle a un caractère représentatif. Il en est de même des caisses régionales et locales. Alors il y a un effort de fait pour permettre à toutes les parties intéressées de participer en autant que c'est possible.

Quant au financement, l'assurance-maladie est financée, comme on l'indiquait hier, ça c'est la règle générale, par les assurés, les employeurs et par l'Etat. On voit que l'évaluation des coûts est effectuée par la commission nationale de l'assurance sociale pour chaque caisse régionale. Le taux de contribution de l'assuré varie selon la caisse à laquelle il appartient. Si dans une région les taux sont plus élevés, bien les assurés auront tendance à demander de l'administration de la caisse quelles en sont les raisons. Il peut s'agir d'inefficacité au point de vue administratif; ça peut, par contre, être aussi dû à d'autres raisons: par exemple dans les régions à l'extérieur des villes, où il y a eu un exode vers les villes, il peut y avoir une plus grande concentration de personnes âgées qui nécessitent plus de soins médicaux. A 1 'intérieur des villes, dans un quartier moins à l'aise, il peut y avoir peut-être un état de santé un peu moins élevé. Ceci peut avoir une certaine influence sur les taux.

M. COITEUX (Duplessis): Est-ce que ces fonctionnaires-là qui sont payés par l'Etat, est-ce qu'ils ont un entraînement spécifique en pré-vision que ça devienne une profession, un genre de profession? Est-ce que c'est une option qu'un jeune étudiant, par exemple, peut se diriger vers l'administration supérieure au conseil?

M. CASTONGUAY: Bien, dans l'administration des caisses nous avons visité par exemple la caisse qui couvre la ville de Stockholm. Au lieu d'avoir un grand nombre de petites caisses, il y a juste une grande caisse régionale. Cette caisse semble être administrée d'une façon aussi efficace que n'importe quelle entreprise privée. Il y a toutes les taches, il y a des comptables, il y a des avocats, il y a des médecins-conseil pour faire la vérification des demandes de paiements, il y a des officiers de personnel, il y a un personnel complet comme on pourrait en retrouver dans une société d'assurance, par exemple. Le tout semble très efficace comme administration.

La contribution pour l'assurance-maladie est payée par toutes les personnes qui sont inscrites auprès d'une caisse mais il y a deux distinc-

tions: les personnes qui ont atteint 67 ans ou qui reçoivent une pension en vertu du régime général de rentes ne contribuent pas et elles demeurent assurées. Il en est de même pour les personnes dont le revenu imposable au cours d'une année est inférieur à $480. Cette disposition inclut en même temps les chômeurs ou les personnes qui ne sont que des travailleurs occasionnels. Alors le montant de la contribution est fixé par la commission d'assurance sociale pour chaque caisse après consultation et la...

M. LE PRESIDENT: Cela veut dire que les rentiers sont obligés de payer.

M. CASTONGUAY: S'ils ont un revenu imposable qui dépasse $480 et s'ils reçoivent par contre une pension en vertu du régime général de rentes, ce qui signifie qu'ils ont été des travailleurs à un moment donné, là ils ne paient pas, ils sont exemptés.

M. KENNEDY: Même s'ils sont bien fortunés, même s'ils sont des gros... ils sont exempts du fait qu'ils reçoivent une pension du régime de rentes.

M. CASTONGUAY: Ils paient indirectement en ce sens que l'Etat contribue. On voit, à la page 75, que la contribution de l'Etat s'élève à 50% du coût de l'assurance-maladie, exemption faite de l'hospitalisation. Mais dans l'hospitalisation, on a vu que les assurés étaient traités gratuitement lorsqu'ils se présentent à l'hôpital. L'Etat verse des subsides distincts aux autorités régionales et locales pour les hôpitaux et en plus de ça, les hôpitaux étant la propriété de ces autorités locales et régionales, ces autorités ont un pouvoir de taxation qui est beaucoup plus fort à ma connaissance, que le pouvoir de taxation des municipalités, par exemple, ici, étant donné qu'elles ont une plus forte responsabilité dans le domaine de la santé. Alors, les personnes fortunées naturellement sont appelées à payer à deux ou trois endroits, de façon indirecte peut-être, mais à deux ou trois endroits. Et s'ils ont été des travailleurs à un moment donné, on considère qu'ils ont apporté leur contribution à l'économie de l'Etat, du pays et que, rendus à 67 ans, s'ils ont droit à une rente, au lieu de hausser le montant de la rente pour leur permettre de payer les primes à l'assurance-maladie, on tient compte dans le montant de la rente qui leur est versée du fait qu'ils n'ont pas de paiement à faire pour l'assurance-maladie.

M. CLOUTIER: Est-ce qu'il y a une relation entre ce $480 et leur loi de l'impôt sur le revenu ou le régime de rentes?

M. CASTONGUAY: Régime de rentes. En fait, ici dans le régime de rentes, il y a un montant de $600 qui correspond à ce $480, alors c'est la même relation.

M. KENNEDY: M. Castonguay, quand vous parlez du $480 imposable, c'est imposable en vertu du régime de rentes, non pas imposable en vertu de la loi de l'impôt sur le revenu?

M. CASTONGUAY: Non, imposable en vertu du régime de rentes, ou de la sécurité sociale. On a toujours la même tranche de revenu en Suède qui est sujette à des contributions pour les assurances sociales de diverses sortes, que ce soit pour les allocations familiales, que ce soit pour les accidents du travail, que ce soit pour l'assurance-chômage, l'assurance-maladie, les rentes. Les employés, les employeurs, l'Etat contribuent à toutes ces assurances sociales et toujours en ce qui a trait aux employés et aux employeurs, sur la même tranche de revenu, le premier $480 étant exempt. Entre $480 et $6,000 contribution, et au-dessous exemption de contribution.

M. LE PRESIDENT: Quand vous parlez de revenu imposable, est-ce qu'il y a déduction par exemple pour les enfants?

M. CASTONGUAY: C'est le revenu brut du travail. Nous avons d'ailleurs le texte de la loi suédoise, leur loi d'assurance sociale nationale traduite en anglais. Sur ces questions-là, s'il était nécessaire à un moment donné de préciser plus exactement, c'est une excellente traduction, la loi est excessivement claire.

Maintenant les employeurs eux aussi contribuent et au lieu de contribuer pour l'assurance-maladie un montant qui est identifié pour chacun de leurs employés, ils contribuent 1.5% du total des salaires versés à leurs employés, sauf que la partie du salaire de l'employé excédant $4,500 n'est pas comprise dans le calcul. Alors, l'employeur prend sa liste de salaire et exclut tous les montants au-dessus de $4,500 et, chaque mois, il envoie 1.5% de ce total comme contribution pour l'assurance-maladie. Et la contribution de l'employeur est répartie entre l'assurance-maladie proprement dite et les allocations de maladie, parce qu'il y a des allocations en Suède en cas de maladie. La sécurité sociale prend tous ces revenus-là, provenant

des trois sources, et les alloue entre les diverses caisses.

Nous avons dit quelques mots de la profession médicale au sujet de leur statut. La question des effectifs maintenant est assez intéressante.

A la page 76, l'on indique que les effectifs sont jusqu'à un certain point insuffisants. D'ailleurs la présence des 800 officiers médicaux régionaux en est un indice, puisqu'on nous a dit que ce n'était pas une partie intégrante du système. On préfère que les médecins s'établissent librement et on n'aime pas être obligé de les encourager à s'établir dans une région donnée et de travailler à salaire, mais c'est un mal nécessaire. Il y a environ 400 nouveaux médecins qui graduent chaque année dans leurs cinq facultés de médecine. Selon les estimations officielles, le nombre annuel de nouveaux médecins devra doubler entre 1970 et 1980. On voit donc qu'il y a aussi, en prévision de l'avenir, certains problèmes quant aux effectifs médicaux et il faut remarquer aussi qu'en Suède, leur population est beaucoup plus stationnaire qu'ici. Enfin, la population est restée à 7 l/2 millions depuis une cinquantaine d'années.

M. ASSELIN: Les officiers médicaux régionaux, quelle formation professionnelle ont-ils?

M. CASTONGUAY: De façon générale, ce sont des omnipraticiens qui, au début de leur carrière, au lieu d'aller s'établir dans les grands centres et d'être, jusqu'à un certain point en concurrence avec les médecins de plus grande renommée qui ont une pratique établie, pourront accepter d'aller faire un stage pour un certain temps comme officier médical régional. Mais ce sont des médecins au même titre que les autres.

M. FORTIER: Est-ce qu'ils sont payés à salaires fixes?

M. CASTONGUAY: Ils ont un salaire mais, pour ce salaire-là, ils s'engagent à travailler un certain nombre d'heures. Une fois ces heures effectuées, ils sont libres de pratiquer à honoraires.

M. BERTRAND: Est-ce qu'il y a une raison particulière que la population soit stationnaire?

M. CASTONGUAY: Disons que là, franchement, là il serait assez difficile de répondre à cette question, M. Bertrand. Je pense qu'il y a une foule de raisons qui entrent dans une telle question. Je dirais que le pays encourage l'aug- mentation des naissances, et malgré tout, il ne semble pas que l'on ait beaucoup de succès, il y a les moeurs qui sont différentes, c'est peut-être une cause, ce n'est certainement pas à cause de la pauvreté dans le pays parce qu'il semble y avoir un niveau de vie assez élevé partout, ça ne semble pas être disproportionné,...

M. BERTRAND: Je pense que c'est la même chose au Danemark, d'ailleurs, que j'ai visité et où il semble y avoir de l'aisance partout. Même aux entrées de Copenhague, les taudis ça n'existe pas, c'est l'Etat qui a réparé les vieilles maisons, les vieilles masures et c'est loué à des prix excessivement bas. Moi, j'ai été épaté de ces petits logements-là. Maintenant la population n'a pas beaucoup augmenté au Danemark quand même, c'est presque stationnaire.

M. CASTONGUAY: Le Danemark est très petit comme territoire. En Suède, M. Morency mentionne quelque chose, c'est qu'il y a une crise du logement qui est assez forte pour différentes raisons. On a affecté beaucoup plus d'investissements dans le développement de la production et dans certains autres secteurs et il semble que le secteur du logement a souffert, il y a réellement une crise du logement en Suède. On nous a dit qu'un couple qui se marie, pour avoir un logement de deux ou trois pièces, attend assez longtemps avant de l'obtenir, il y a peut-être un autre facteur à additionner.

M. BERTRAND: Nécessairement dans la préparation de leur budget c'est plus facile que dans un pays où la population augmente graduellement et se multiplie avec les années.

M. CASTONGUAY: Oui. Pour eux.

M. BERTRAND: C'est plus facilement applicable et prévisible.

M. CASTONGUAY: Il y a un problème pour eux, c'est que la partie de la population inactive est plus élevée qu'ici au Canada et que dans la province de Québec. L'immigration, par exemple, se fait généralement à partir de 35 ans en descendant. Les immigrants arrivent avec leurs enfants. Il ne semble pas y en avoir tellement au-delà de 45 ans, d'après les statistiques du ministère. Alors c'est un apport considérable à la population active, que la Suède n'a pas.

En plus de la question des effectifs médicaux, il est mentionné qu'au point de vue de l'équipement hospitalier, bien qu'il soit excellent qu'il n'est pas tout à fait suffisant.

En ce qui a trait aux dentistes, aux autres

professions de la santé, on nous a dit qu'il y avait certainement un manque de dentistes au moment où le régime a été établi. La question est étudiée de nouveau.

Maintenant, on souligne le fait qu'il n'y a pas d'Ordre ou de Collège des médecins. Il ne semble pas que ceci crée de difficultés. Il y a une seule association qui groupe tous les médecins et c'est un facteur qui, je crois, ajoute énormément à la stabilité des relations entre la sécurité sociale et les médecins.

On va voir qu'en Belgique, plus tard, une des cause probables des difficultés c'est la multiplicité des organisations qui groupent les médecins. Et jusqu'à un certain point on retrouve une situation un peu analogue ici, dans la province de Québec.

M. FORTIER: Avant déterminer, M. Castonguay, je remarque un chiffre qui est marqué ici qu'il existe quinze lits d'hôpitaux par 1,000 habitants. C'est beaucoup ça?

M. CASTONGUAY: Bien là, il faut remarquer là...

M. FORTIER: Juste pour l'information là?

M. CASTONGUAY: ...ce que ça comprend. Si on inclut les lits pour convalescents, si on inclut les lits pour malades chroniques etc. ce n'est peut-être pas si élevé.

M. FORTIER: Ah bon! M. ROY: M. Castonguay... M. CASTONGUAY: Oui.

M. ROY: ...est-ce que l'assurance-hospitalisation est financée, en Suède, par les contribuables, les employeurs et l'Etat comme l'assurance-maladie?

M. CASTONGUAY: Partout, dans tous les pays que nous avons visités l'assurance-hospitalisation en fait n'est pas séparée. C'est une partie intégrante de l'assurance-maladie. En fait, à mon avis, si on fait ici une distinction entre l'assurance hospitalisation et la balance, c'est que dans le temps elle a été établie en premier lieu. Mais, à mon avis, c'est une partie intégrante de l'assurance-maladie. Et si elle n'en était pas une partie intégrante, il y a un grand danger que la même situation qui existe en Angleterre se reproduise, c'est-à-dire le fractionnement et les conflits. Le tout doit, à mon avis, être élaboré de telle sorte qu'aussi bien en ce qui a trait à la planification, à l'administration des services hospitaliers,, des unités sanitaires, la planification et l'élaboration de l'équipement hospitalier ça relève disons du ministère, mais le tout ne peut pas être conçu séparément de la planification que le ministère va faire en ce qui a trait aux besoins d'effectifs en médecins etc. De la même façon, quant au fonctionnement de l'assurance-maladie, distinguer entre l'assurance-hospitalisation et les autres parties de l'assurance, serait une cause de difficultés futures sérieuses parce que l'on établirait des cloisonnements artificiels, à mon avis.

Le médecin ne pratique pas à l'extérieur de l'hôpital. En fait, le médecin peut pratiquer aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur et tout ça doit être tenu en ligne de compte. On ne peut pas sectionner. En Europe c'est la constatation générale et du côté du financement il n'y a donc pas de distinction, l'employé, l'employeur, l'état contribuent au même titre à l'assurance-hospitalisation qu'aux autres secteurs de l'assurance-maladie.

M. MARLER: Vu ce qu'il existe actuellement dans le Québec, M. Castonguay, ce serait difficile n'est-ce pas de fusionner le tout, si nous envisageons une contrubution de l'individu?

M. CASTONGUAY: Au point de vue du financement, il serait peut être difficile d'imposer une contribution pour l'assurance-hospitalisation, d'autant plus qu'ici l'équipement hospitalier diffère de celui de la Suède. En Suède, il semble y avoir excessivement peu de chambres privées. Ici il y a beaucoup de chambres privées, il y a un certain nombre de salles communes. Tous les gens, en ce qui à trait à l'assurance-hospitalisation sont traités exactement sur le même pied. Donc, que ce soit financé à même les revenus généraux du gouvernement, il n'y a pas tellement objection, à mon avis. Si le patient veut avoir des soins meilleurs, ou une meilleure chambre, là il doit payer la différence. Alors, du côté du financement, que la formule soit différente, ça ne devrait pas empêcher l'intégration de l'assurance-hospitalisation à l'assurance-maladie. Même si le mode de financement était différent.

M. MARLER: La difficulté que je vois évidemment, je n'ai pas pensé très sérieusement aux conséquences, mais actuellement on peut dire que l'hospitalisation, les frais se partagent entre le provincial et le fédéral. Je sais que nous avons exercé la formule d'option, mais disons à toutes fins pratiques que les frais sont

partagés entre deux gouvernements. D'après les conversations qu'on a eues jusqu'à date, on envisage contribution de l'employeur, contribution de l'employé, contribution possible des personnes qui ne sont ni employeurs ni employés et aussi du gouvernement provincial, et comme on l'a dit hier soir, du gouvernement fédéral. Donc, si le financement se fait par d'autres goupes, dans les deux cas, je vois difficilement en pratique, comment vous pourrez fusionner les deux services. Parce que nous sommes souvent en face du problème: Est-ce que ce coût-là ou, ces frais-là s'appliquent à l'hospitalisation? Est-ce que ça s'applique aux soins médicaux?

Je pense qu'il y a fatalement une difficulté, évidemement, je n'ai pas eu l'avantage d'avoir pensé à cette question-là bien profondément, mais à première vue il y a une difficulté de comptabilité qui sera assez difficile en pratique.

M. CASTONGUAY: Cela peut naturellement donner une certaine lourdeur administrative, la nécessité d'une comptabilité distincte, mais même si l'assurance-hospitalisation était maintenue séparément de l'assurance-maladie, il faudrait des comptabilités distinctes. Si c'était intégré à tout point de vue, au point de vue administratif, mais que les comptabilités demeurent distinctes, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir...

M. MARLER: Mais prenons donc la radiographie comme un exemple. On en parlait hier soir. Si le médecin envoie son patient pour occuper un lit dans l'hôpital, c'est l'hospitalisation qui le paie, actuellement. Si par contre la radiographie se fait en dehors de l'hôpital, un service qui est assez bien organisé dans les grands centres, là ça passerait sur le dos des soins médicaux, et donc il y aura toujours une espèce de complication entre les deux systèmes.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. MARLER: Evidemment, ce ne sont pas les gros problèmes, ce sont les petits problèmes d'administration qui viendront nous embêter continuellement.

M. CASTONGUAY: D'un autre côté, on a déjà dans les deux jours, la journée d'hier et celle d'aujourd'hui, décelé certaines choses ou certains gestes possibles qui peuvent compliquer énormément la vie et l'efficacité. Alors, il s'agit de peser, à mon avis, les difficultés possibles qui pourraient résulter si les deux adminis- trations étaient séparées par rapport aux difficultés administratives qui pourraient résulter d'une administration conjointe.

M. MARLER: Et évidemment, je pense qu'il y a une distinction à faire entre l'administration commune et une comptabilité. Il ya beaucoup d'autres facteurs aussi à tenir en ligne de compte par exemple sur le contrôle, le contrôle disons, des soins donnes, assez souvent si les deux administrations sont séparées, vous allez voir si un médecin abuse disons, en autant qu'il traite son patient à l'extérieur de l'hôpital et là, si le patient est hospitalisé, et sous une administration différente, vous n'aurez pas l'histoire antérieure. Alors, au point de vue seulement des contrôles, ça pourrait être excessivement difficile. Si une personne est hospitalisée et que c'est une administration distincte, vous ne pouvez pas référer au diagnostic antérieur qui avait été fait, par contre c'est une continuité et vous pouvez peut-être exercer un contrôle financier un peu plus efficace, et il y a une nécessité de contrôle, il y a certains contrôles, il y en a des formes élégantes, il y en a des formes qui ne touchent pas à la liberté d'exercer du médecin, et étant donné les sommes... il n'y a pas moyen d'éviter ces formes de contrôle-là. Sectionner l'administration, c'est réduire à mon avis, l'efficacité de ces contrôles-là de la moitié.

M. RENAUD: Vous dites que ça pourrait se faire, malgré un programme de comptabilité différente.

M. CASTONGUAY: A ce sujet-là si c'est une suggestion que je pouvais faire au comité je crois qu'il serait intéressant pour le comité de convoquer à un moment donné le directeur de l'assurance-hospitalisation pour voir quelles sont ses vues. C'est lui qui doit faire face à tous ces problèmes quotidiens, ces problèmes pratiques, et je n'aimerais pas me prononcer et insister trop sur un point alors que lui peut avoir des vues bien différentes des miennes, ayant vécu tous ces problèmes-là.

M. CLOUTIER: Et en Suède et dans ces pays que vous avez visités il n'y a pas eu coïncidence entre l'instauration des deux régimes, l'assurance hospitalisation et l'assurance-santé.

M. CASTONGUAY: Les mutuelles couvraient les divers soins hospitaliers, médicaux etc... et on a continué le tout dans le régime. On n'a pas dit au moment où le régime fut établi: On prend uniquement l'hospitalisation. On a pris toute la

gamme des soins déjà couverts, les soins oculaires ne sont pas couverts. On a fait bien attention d'établir des tickets modérateurs, des frais dissuasifs, où c'était possible et on a fait attention aussi, par exemple, de ne pas payer tout le coût des médicaments. On a préféré donner un éventail plus complet de soins que de passer par tranches et tout couvrir lorsqu'une tranche est englobée. C'est une approche différente.

M. LE PRESIDENT; Est-ce qu'il y a autre chose à ajouter sur la Suède, messieurs?

M. CASTONGUAY: Sur la Suède, il y a la question de la demande et du contrôle des soins. Si vous le permettez je peux vous en dire quelques mots rapidement. Cela apparaît à la page 77. On voit que la moitié des consultations médicales sont données dans les services externes des hôpitaux et cette proportion ne cesse d'augmenter, et ils y tiennent énormément.

M. LE PRESIDENT: A cause de la gratuité peut-être.

M. CASTONGUAY: D'une part et aussi pour une plus grande efficacité.

M. LE PRESIDENT: Les deux peut-être.

M. CASTONGUAY: Naturellement les gens ont tendance à se faire traiter en clinique externe étant donné qu'ils sont assurés quant aux honoraires, c'est 25% du tarif officiel, et c'est voulu comme ça. Le gouvernement, s'il avait intérêt à repousser les gens des cliniques externes, dirait; « Les personnes devront payer, tout comme s'ils vont au bureau du patient, le dépassement d'honoraires que le médecin jugera approprié ». On sent qu'il y a réellement ici le jeu des frais dissuasifs et il y a relation entre les soins médicaux et l'hospitalisation. On voit la nécessité de coordonner les deux, une tentative d'orienter la population vers les cliniques externes.

C'est un exemple de coordination des services pour une plus grande efficacité.

On mentionne aussi que la pratique en groupe tend à se développer par suite de l'existence du ticket modérateur pour les soins médicaux courants, la liberté tarifaire des médecins en pratique privée et une certaine pénurie de médecins et d'hôpitaux. Les autres formes de contrôle sur la demande des soins sont très limitées. Il ne semble pas y avoir de contrôle, d'examen de la pratique des médecins, qui soit excessivement poussé. Il semble y avoir une très bonne compréhension de la part des médecins et de la population aussi. Les contrôles ne sont pas tellement poussés, malgré tout les médecins ne semblent pas se plaindre d'être appelés à donner des soins qui ne sont pas nécessaires. Du côté des médicaments, là c'est un peu plus difficile et on a vu que les frais modérateurs étaient très élevés. On dit: « Le contrôle de l'augmentation du coût des médicaments en vertu du régime d'assurance-maladie semble constituer un des seuls problèmes majeurs auquel la Commission nationale d'assurance-sociale doit faire face », un des seuls problèmes majeurs. Il ne semble pas en effet que le contrôle au moyen des tickets modérateurs soit suffisant. Les différentes possibilités visant à solutionner ce problème sont présentement à l'étude. Il y avait une commission au moment où nous sommes allés qui étudiait cette question.

M. LE PRESIDENT: Alors en somme pour ce qui est, il y a la liberté de l'assuré de choisir son propre médecin, d'aller chez le médecin que je pourrais appeler conventionné ou le spécialiste ou celui qui va lui charger des honoraires supérieurs au tarif habituel et la liberté pour le médecin de s'installer n'importe où. Evidemment s'il s'installe dans un endroit où il y a déjà, disons trop de médecins, il le fait à ses propres risques. Peut-il devenir médecin conventionné s'il veut se placer à un endroit où il y a déjà assez de médecins?

M. CASTONGUAY: Bien, il semble qu'on ne ferme pas à ce moment-là les régions directement comme on le fait en Angleterre, mais, étant donné que le médecin va être obligé de survivre en concurrence avec ses compères, il y a un équilibre qui s'établit jusqu'à un certain point.

M. LE PRESIDENT: Il y a une loi économique...

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. TREPANIER: Dans une région où il y a beaucoup de médecins, où il y a un nombre plus que suffisant, est-ce qu'il peut y avoir des officiers médicaux régionaux?

M. CASTONGUAY: Non. Les officiers médicaux régionaux, d'après ce qu'ils nous ont dit, c'est une formule qu'ils sont obligés d'accepter comme un moindre mal pour solutionner le pro- blème des régions où il n'y a pas suffisamment de médecins.

M. FORTIER: Dans une région désignée?

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions qu'on veut poser à M. Castonguay concernant le système en Suède? Sinon, je pense que nous devons nous réjouir du progrès que nous avons réalisé ce matin et remettre à cet après-midi à trois heures la suite de ce volume. Donc, s'il n'y a pas d'objection, nous allons dire que la séance du comité est ajournée à trois heures.

Reprise de la séance à 3 h 42 p.m.

M. LE PRESIDENT (Roger Roy): A l'ordre, messieurs. Je demanderais à M. Castonguay de continuer les renseignements sur les régimes d'assurance maladie en certains pays.

M. CASTONGUAY: Ce matin nous avons passé la description du régime de la Suède. Il semblerait que pour éviter la confusion, que le mieux serait maintenant d'aller à ladescription du régime de la France qui est du même type, il est peut-être un peu plus complexe dans son organisation. La description en est donnée à la page 33 du volume.

Maintenant, si vous me permettez ici, il y a une certaine série de choses qui sont analogues aux dispositions que nous retrouvions dans le régime de la Suède. Je pense qu'il n'est pas tellement intéressant de savoir si le pourcentage des frais dissuasifs est 80% en France, alors qu'il est de 75% en Suède. Ce genre de détail-là, si vous voulez, je peux les passer et puis souligner, en ce qui a trait à la France, les caractéristiques qui sont plus intéressantes et qui diffèrent de ce qu'il y a en Suède.

Alors en France, une des premières caractéristiques, on l'a mentionné hier, c'est qu'il y a des régimes distincts selon les catégories de travailleurs. Vous avez donc un régime par exemple pour les travailleurs salariés, vous avez un régime pour les travailleurs agricoles, vous avez un régime, par exemple, pour les travailleurs des mines et vous avez en outre une certaine série de régimes. Je crois qu'il y en a sept ou huit à ma connaissance. Ici, ce que nous faisons, c'est l'étude du régime général qui couvre les salariés, c'est-à-dire la plus grande partie, c'est le régime le plus important au point de vue du nombre de personnes assurées.

Ce régime a origine en 1928 et il a été modifié à deux reprises. Ceci indique le besoin d'adaptation, le besoin d'évolution. Il y a eu une refonte assez sérieuse en 1945 et, on indique à la page 34, que l'on a abondonné définitivement le principe du remboursement intégral au profit du principe d'imposer des frais de dissuatifs. Malgré cette refonte qui, en 1945, devait permettre l'élargissement du régime pour couvrir éventuellement toute la population et aussi permettre, disons, que la profession médicale participe plus complètement au régime, elle eut un succès limité. En mai 1960, il y a eu une nouvelle refonte du régime d'assurance-maladie et là il y a de nouveaux éléments qui ont été introduits dans le régime ou de nouveaux principes qui ont été consacrés plus clairement. On va les voir graduellement à mesure qu'on va en prendre la description.

Dans le régime d'assurance-maladie français, il y a deux parties: prestations en nature et paiement de salaire en cas de maladie. Les prestations en espèce ou plutôt c'est l'inverse, prestations en nature, soit remboursement des frais en cas de maladie, et prestations en espèce, soit paiement d'un salaire en cas de maladie. Notre étude a porté toujours, pour être logique avec la présentation, sur les remboursements effectués en cas de maladie.

Alors de façon générale, l'assurance-maladie comporte la couverture des frais de médecine générale et spéciale, des frais des omnipraticiens, des spécialistes, des soins et des prothèses dentaires, des frais pharmaceutiques, des appareils de diverses sortes, des frais d'analyse, des examens de laboratoire, des frais d'hospitalisation et de traitements dans des établissements de cure, des frais de transport et des frais d'intervention chirurgicale pour l'assuré et les membres de sa famille. En fait, c'est la couverture de tous les soins possibles, mais avec frais dissuasifs ou frais modérateurs.

Les règles générales ou fondamentales, disons, permettant le respect de l'exercice libre de la médecine sont consacrées, l'assuré choisit librement le médecin, le patient peut choisir son médecin. Le médecin est libre de prescrire, etc.

Il y a une particularité, une chose que l'on ne retrouve pas en Suède dans ce que nous avons discuté, c'est que la France est divisée en territoires aux fins des conventions avec les médecins. On a dit un mot à ce sujet hier. Dans certains territoires et dans certains départements les médecins ont refusé, ou il n'y en a pas tellement un grand nombre qui ont décidé d'adhérer au régime. Dans ces cas, il y a des tarifs dits d'autorité qui sont imposés, c'est-à-dire que les assurés sociaux sont remboursés à un tarif moindre que dans un département où les médecins se sont conventionnés

en majorité. Naturellement la population, dans un tel département, impose une certaine pression auprès des médecins pour qu'ils se conventionnent. Il y a un jeu de ce côté-là. On permet aussi dans un département la convention individuelle. Alors, même si les médecins, comme bloc, refusent de signer la convention, le médecin peut signer individuellement une convention et les personnes qui se font traiter par lui sont remboursées au tarif régulier.

Vous avez donc un jeu pour forcer la profession d'une certaine façon, en ce sens que même si les dirigeants d'un syndicat départemental sont contre la signature des conventions, les médecins peuvent individuellement par suite de ces pressions-là, signer éventuellement. La sécurité sociale peut obtenir un nombre suffisant de médecins conventionnés. Naturellement, ce sont des genres d'outils que la profession médicale, disons, n'aime pas trop, et ce sont des outils qui, je pense bien, doivent être utilisés uniquement s'il n'y a pas moyen d'en arriver à des solutions autrement.

En ce qui a trait à l'hospitalisation, il y a des frais modérateurs en France qui sont fixés à 20% du coût de journée ou du per diem et la caisse à laquelle l'assuré appartient, paie la différence de 80% à l'hôpital. Parce qu'on a encore en France, tout comme en Suède, un réseau de caisses primaires, de caisses régionales. L'assuré social peut se faire hospitaliser dans une clinique privée, mais là, il doit obtenir l'approbation de la caisse avant de le faire. Alors disons que c'est peut-être un petit peu moins sévère qu'en Suède à ce sujet-là, il y a un plus grand nombre d'hôpitaux privés.

Quant aux frais pharmaceutiques, il y a encore là des frais modérateurs mais qui ne sont pas tout à fait de la même forme qu'en Suède. En Suède on a vu qu'il y avait un paiement de $0.60 par prescription plus 50% de l'excédent. En France il y a des frais de 20% sauf que dans certaines maladies, telles que celles que nous avons déjà mentionnées, les frais modérateurs peuvent être soit réduits ou même éliminés. Les soins dentaires, même chose, il y a encore des frais, le patient doit payer 20% des frais, il y a des soins additionnels qui sont couverts, tels les cures thermales qui sont une particularité des régimes de la France et de la Belgique. Les caisses détiennent, dans certains cas, certains établissements et ça leur donne un certain attrait au point de vue de leurs assurés, c'est une façon de recruter ces établissements dont ils sont propriétaires.

Quant au champ d'application c'est réellement contraire à la Suède où toute la population est assurée. Ici, c'est réellement l'assu- rance sociale. Uniquement les personnes qui sont affiliées à une caisse sont assurées et même si le régime est obligatoire, si une personne ne paie pas sa contribution à la caisse, elle est privée de la protection de l'assurance-maladie alors qu'en Suède la couverture, ou l'adhésion au régime, est obligatoire mais si la personne ne paie pas ses primes on lui impose une pénalité mais elle n'est pas privée de la protection du régime d'assurance-maladie. Alors qu'ici, c'est beaucoup plus collé sur le principe de l'assurance. Une personne qui ne paie pas n'est pas assurée.

M. MARLER: Cela doit simplifier l'administration énormément.

M. CASTONGUAY: En Suède, exactement, parce que lorsqu'une personne présente une demande de paiement, il n'est pas question d'aller voir si elle a payé ses contributions.

Dans les structures administratives encore, c'est un peu le même système. Il y a une caisse nationale, il y a des caisses régionales, il y a des caisses primaires. En théorie, les caisses primaires sont autonomes, ce sont les anciennes mutuelles; en pratique leur autonomie aujourd'hui ne touche qu'à certaines particularités de l'administration, elles sont obligées de suivre les règlements de la sécurité sociale quant à leur mode d'administration. Au point de vue autonomie financière, il n'y a aucune autonomie financière parce que lorsqu'une caisse ne boucle pas au cours d'une année, elle reçoit une compensation de la sécurité sociale. Par contre, une caisse qui fait un surplus est obligée de le verser à l'organisme central. Les caisses reçoivent un certain montant pour leur administration et les économies qui peuvent être faites sur l'administration servent, il y a une certaine part qui reste la propriété de la caisse. Les caisses utilisent ces surplus à l'établissement de différentes maisons de convalescence, etc. Ils ont certains camps de vacances et c'est une façon pour elles d'attirer des assurés à leur propre caisse alors que ces assurés iraient possiblement à une autre caisse.

Il y a, en plus, dans les structures administratives, en plus de la caisse nationale, les caisses régionales, les caisses locales une couple d'organismes qui doivent être mentionnés. D'abord il y a les unions de recouvrement; ces organismes ne s'occupent que d'encaisser les cotisations. Vous avez donc toute une structure d'encaissement des cotisations, vous avez toute une structure de paiement des prestations.

M. MARLER: Dans le système en France, a-t-on la perception à la source ou non?

M. CASTONGUAY: Excusez-moi, oui c'est le système de perception à la source, et les sommes sont déduites par les employeurs et envoyées aux unions de recouvrement qui elles sous les directives de la caisse nationale de sécurité sociale, attribuent les montants aux caisses régionales et aux caisses locales. C'est un système assez lourd.

La caisse nationale de sécurité sociale a un caractère assez représentatif. Elle coordonne sur le plan national aussi l'action sanitaire et sociale des organismes. Elle assure le contrôle des opérations mobilières et immobilières des caisses. Alors en plus de s'occuper de la répartition entre les caisses primaires, combler les déficits, attribuer les surplus entre les caisses qui ont fait des déficits, elle contrôle aussi les opérations mobilières et immobilières et aussi l'action sanitaire et sociale des caisses, parce que les caisses primaires ne jouent pas uniquement le rôle d'assureurs, elles jouent un certain rôle au point de vue action sanitaire, médecine préventive, accidents, etc.

Les caisses sont groupées dans une fédération nationale, la fédération nationale des organismes de sécurité sociale. C'est donc leur façon, en plus de la structure, de se faire entendre auprès des autorités gouvernementales. En fait c'est un vestige, jusqu'à un certain point, à mon avis, du temps où elles avaient un plus grand degré d'autonomie. Bien que les caisses aient conservé un certain degré d'autonomie et qu'elles constituent une structure à l'extérieur des ministères, le ministère du Travail a le rôle de tutelle et de contrôle sur la sécurité sociale. Graduellement, tout ce qui touche à la sécurité sociale en France, s'en va donc graduellement sous l'autorité de plus en plus complète du gouvernement, aussi bien au point de vue administratif qu'au point de vue financier.

Il y a des services administratifs centraux et régionaux, les directions à l'intérieur du ministère du Travail. On voit que la planification dans le domaine de la sécurité sociale ne se fait plus à l'extérieur du ministère mais à l'intérieur et vous avez, comme on le mentionnait hier, l'inspection générale de la sécurité sociale qui est un organisme tout à fait particulier à la France.

Il est indiqué ici que l'inspection générale exerce un contrôle supérieur sur les organismes et services de l'ensemble du système. Le contrôle et la vérification d'organismes donnent lieu à l'établissement de rapports contradictoires, les conseils d'administration des caisses répondent aux observations présentées dans ces rapports et les contrôles ultérieurs permettent de vérifier s'il a été tenu compte des remarques formulées. Alors l'inspection essaie toujours de voir à ce que les caisses aient une administration aussi efficace que possible. On dit aussi que l'inspection générale effectue en outre des études générales dans le cadre d'un programme annuel défini par le ministre du Travail qui est à la fois Président du comité de coordination de la sécurité sociale.

C'est probablement ce rôle-là de l'inspection générale qui est le plus intéressant et qui pourrait donner comme résultat que la législation dans le domaine de la sécurité sociale évolue passablement mieux que dans le passé en fonction des développements ou des besoins d'évolution.

Vous avez aussi, depuis 1962, c'est-à-dire depuis la dernière refonte, le Conseil supérieur de la sécurité sociale et le Haut Comité médical. Il a comme fonction d'établir les modes de contrôle qui peuvent être jugés possibles sans qu'il en résulte atteinte à la liberté d'exercice des différentes professions. Alors pour donner une idée, car c'est un problème qui existe dans tous les régimes, peu importe le genre de régime, nous avons donné à la fin, à l'appendice 1, un extrait du premier rapport de ce Haut Comité médical sur le fonctionnement et l'organisation du contrôle médical. Je pense bien que pour l'instant ce n'est pas l'idée de lire ici ou de discuter ce rapport, mais je l'indique au passage étant donné que forcément c'est une des questions qui devra être abordée et je crois que le problème est posé de façon assez claire et assez complète. Les difficultés que toute forme de contrôle peut présenter, les problèmes qui peuvent résulter des contrôles trop serrés y sont abordés.

Dans le financement, c'est le même principe: employés et employeurs et ceci sur une tranche des revenus ne dépassant pas un certain maximum. On voit qu'en France, comme en Suède, il y a un taux de contribution qui couvre les différentes législations sociales.

Il est indiqué à la page 45, au milieu de la page, que l'ensemble des risques couverts par les assurances sociales ou de maladie, maternité, invalidité, décès, vieillesse donnent lieu à une cotisation unique de 20.25% du salaire ci-dessus défini, c'est-à-dire le salaire qui va jusqu'à environ $2,700, dont 14.25% à la charge de l'employeur et 6% à la charge de l'assuré.

Alors, il y a un taux global pour toutes les assurances sociales. Et vous voyez que le taux est passablement élevé.

Pour les travailleurs âgés de plus de 65ans, le taux est réduit. Et pour les personnes seules âgées de plus de 70 ans, si elles doivent en-

gager quelqu'un, par exemple un infirmier ou quelqu'un pour vivre avec elles étant donné leur âge, elles ne sont pas appelées à contribuer sur le salaire qu'elles doivent payer pour ces personnes-là.

On indique que l'employeur est obligé de prélever les contributions sur le salaire: aussi on traite, aux pages 45 et 46, du système de répartition des revenus de contributions parmi les caisses.

Maintenant, il est assez intéressant de voir l'évolution des coûts du régime qui sont indiqués à la page 47. En premier lieu, nous avons donné la progression des coûts, de 1957 à 1963, en unité par rapport à un indice de 100 en 1957. On voit que l'indice a passé de 100 à 260.04% alors que le nombre d'assurés n'a augmenté que de 18%, que les salaires n'ont augmenté que de 61% pendant cette période et que le prix de détail ou l'indice des prix de détail n'a augmenté que de 45%. On voit donc que l'augmentation des coûts du régime est de beaucoup plus élevée que n'importe quel autre indice qui pourrait permettre de déterminer un accroissement, disons normal, des coûts du régime.

Vous voyez aussi, par rapport au revenu national, que les prestations payées ou servies en vertu du régime d'assurance-maladie prennent une partie de plus en plus grande du revenu national. Le pourcentage est passé de 1957 à 1963 de 1.89% à 2.78%. Il est évident qu'il y a un problème de contrôle des coûts. Et c'est pour ça qu'à la page 48 on constate tel qu'il est indiqué, que la Commission des prestations sociales a été formée. Cette commission qui a été présidée par l'inspecteur général des finances, a essayé de tracer, de donner les perspectives des dépenses de la sécurité sociale jusqu'en 1970. Cela, je pense que c'est en fonction du plan. Et une seconde commission étudie les moyens de freiner les dépenses de l'assurance-maladie. Alors il y a un problème sérieux.

M. MARLER: M. Castonguay, si le principe de ce plan-là était de répartir le coût des soins parmi les assurés, j'aurais pensé qu'à la fin d'une année, lorsqu'on a constaté que les dépenses dépassaient les recettes qu'on aurait augmenté les prix, la base des contributions. Mais je suppose, par ce que vous l'avez dit hier, que ce n'est pas ça qui est arrivé.

M. CASTONGUAY: Exactement!

M. MARLER: Ils ont maintenant les prix au même niveau en dépit d'une augmentation très marquée des dépenses.

M. CASTONGUAY: Vous voyez, il y a peut-être un phénomène qui explique ça aussi. D'abord il y a la hausse considérable des coûts. Deuxièmement, les caisses sont divisées dans leurs opérations; celle qui fait un profit d'opération est obligée de céder son profit et celui-ci sert à la caisse qui fait une perte. Alors il n'y a rien qui encourage l'efficacité administrative. D'autant plus que les conseils d'administration des caisses locales sont élus et que les membres des caisses reçoivent certains honoraires, alors ils ont donc intérêt à être élus. Et en plus de ça, les syndicats ouvriers, comme le Congrès général du travail, semblent avoir un très grand nombre de ses représentants qui siègent sur les conseils d'administration des caisses primaires ce qui donne un certain pouvoir politique.

Vous avez donc deux ou trois éléments qui font qu'au niveau de l'administration des prestations, du contact avec le public, tout semble porter les administrateurs à payer le plus largement possible et à fermer les yeux sur les abus. Alors cette décentralisation qui subsiste n'est certainement pas le type de décentralisation qui semble ajouter à l'efficacité du régime, au contraire.

M. MARLER: C'est l'encouragement à la dépense locale, c'est ça?

M. CASTONGUAY: Quant à la profession médicale, on dit que dans l'ensemble elle demeure pour l'essentiel, une profession libérale. Les médecins peuvent s'établir librement, sous réserve naturellement d'avoir leur diplôme ils peuvent s'établir où ils veulent et aucune directive ne leur est donnée. Il n'y a même pas de programme, à notre connaissance, comme en Suède tendant à favoriser l'établissement de médecins dans les régions où il n'y en a pas suffisamment. C'est l'assurance, encore là, qui semble primer alors que d'autres considérations, tel que vouloir rendre les soins accessibles à toute la population, semblent passer au second plan.

Les médecins sont groupés dans des syndicats professionnels et, comme je vous l'indiquais hier, il semble y avoir une scission qui existe depuis le décret du mois de mai 1960. Cette scission entre les médecins n'est pas tellement entre les omnipraticiens par exemple les spécialistes, mais plutôt sur le plan régional,c'est-à-dire entre les médecins des régions les plus riches et les médecins des régions moins riches.

Nous comparons, à la page 50, les effectifs médicaux et les effectifs en pharmaciens, le

nombre de lits d'hôpitaux en France avec certains autres pays. On voit, par exemple, et ceci est donné par 100,000 habitants, qu'il semble y avoir contrairement à ce que l'on peut penser, moins de médecins par 100,000 habitants en France qu'en Angleterre. Par contre, on n'a pas semblé dire que les médecins étaient aussi surchargés en France qu'en Angleterre. Ces choses sont assez difficiles à réconcilier.

Vous voyez, par exemple, qu'en Russie il semble y avoir un nombre extraordinaire de médecins par 100,000 habitants. Bien, là, il y a un genre spécial de médecins qui, ici, ne seraient pas considérés comme des médecins au même titre. Ce sont plutôt des infirmiers de calibre supérieur.

Alors c'est assez difficile de faire ce genre de comparaison-là.

Maintenant, étant donné les difficultés de faire ces comparaisons nous avons donné les conclusions d'une analyse sur les effectifs médicaux, elles sont indiquées au milieu de la page 50. On dit: « La France est en position d'infériorité, sa densité médicale étant en position de retrait par rapport à la communauté européenne ». On indique; moins 25%. L'étude des dix dernières années dénote une détérioration. Troisièmement, les perspectives basées sur les données acquises, en dehors de toute extrapolation, sont pessimistes. On souligne le fait qu'il existe une mauvaise répartition géographique des médecins.

M. MARLER: Ce sont les conséquences du plan, n'est-ce pas, parce que les médecin est libre d'en faire partie ou non.

M. CASTONGUAY: Exactement. Et on ne nous a pas parlé d'exode des médecins vers l'extérieur de la France. Il n'a pas été question de ça. Alors, il ne semble pas que les médecins soient tellement malheureux, au contraire.

Maintenant, dans le secteur hospitalier, encore là il semble y avoir certains problèmes. On semble dire, dans une étude que nous citons, et ça correspond passablement à ce que nous avons entendu, que depuis vingt ans, il n'y a pas eu suffisamment d'investissements dans ce secteur et qu'il y a eu possiblement des dépenses de consommation trop élevées dans le domaine de la santé par rapport aux investissements. Malgré tout il semble bien que ce problème soit beaucoup moins aigu qu'il ne l'est en Angleterre.

Quant à la demande et au contrôle des soins, ce qu'on constate au point de vue des coûts se reflète jusqu'à un certain point ici et fait partie du problème. Encore là, il semble que c'est le problème des médicaments qui est le plus aigu. Justement, à ce sujet-la, à la page 52, nous avons pensé que ça pourrait vous intéresser de voir ce que le directeur général de la sécurité sociale disait au point de vue du problème de contrôle des médicaments. « Le malade aime sortir de chez son médecin avec une longue ordonnance. Il évalue la qualité du médecin au coût de l'ordonnance et le médecin sait trop bien que s'il ne prescrit pas certains médicaments, certains de ses collègues le feront. Cet abus de prescription, nous en avons vu le chiffre tout à l'heure, dans le coût de la pharmacie. Mais ce n'est peut-être pas le seul côté préoccupant. Un certain nombre de professeurs de médecine commencent à considérer, en effet, que l'abus de pharmacie joue un rôle non négligeable dans la pathologie française actuelle et qu'il en est probablement de même dans d'autres pays. Sans doute, la législation de la sécurité sociale n'est-elle pas seule responsable de cela, il y a aussi l'évolution psychologique, l'anxiété des classes dirigeantes et bien d'autres éléments. « Mais il existe là un sérieux problème.

C'est donc une chose que l'on n'a pu s'empêcher de constater. Dans tous les pays que nous avons visités, le problème de la prescription des médicaments semble être le plus difficile. Et en plus du problème des coûts, il y a un problème additionnel qui est mentionné ici, c'est que si les médicaments sont rendus trop facilement disponibles à la population, ce n'est pas nécessairement toujours un service qui est rendu. Cela peut avoir, à un moment donné de mauvais effets.

Nous indiquons ensuite les formes de contrôle. Il y a des commissions paritaires qui reçoivent les plaintes ou étudient les cas où il semble y avoir abus. Donc, toujours la commission paritaire pour que ce ne soit pas uniquement des fonctionnaires de la sécurité sociale qui exercent les divers contrôle.

Finalement, l'assurance privée continue de subsister jusqu'à un certain point, malgré la présence de la sécurité sociale, pour assurer les personnes qui désirent des soins privés et assurer la partie de la population qui n'est pas couverte par les régimes.

Ceci complète dans les grandes lignes ce que nous avons donné de la description du régime français de sécurité sociale dans l'assurance-maladie.

M. FORTIER: M. Castonguay, en Suède et en France, est-ce qu'il y a un contrôle de renouvellement des prescriptions médicales?

M. CASTONGUAY: Dans la plupart des endroits, de mémoire, les prescriptions sont données pour une période de temps limitée. On ne permet pas... une prescription ne serait pas remboursée si elle était donnée, disons, pour une quantité qui couvrait deux ans. Il y a généralement une période limitée. La prescription ne peut être renouvelée plus d'une fois dans certains endroits sans qu'il y ait une nouvelle ordonnance, c'est-à-dire sans que le médecin ne donne une nouvelle prescription. La personne ne peut donc pas, au bout de trois mois, se présenter librement à nouveau et faire compléter sa prescription de trois mois en trois mois. Il y a une limitation sur les quantités et aussi dans le temps pour empêcher que la personne ne répète indéfiniment.

Ceci ne semble pas exister partout. En Saskatchewan et en Alberta, en ce qui a trait aux assistés sociaux, par exemple, ces modes de contrôle existent. Et d'ailleurs les pharmaciens et les médecins demandent justement ce genre de contrôle qui, à leur point de vue, est nécessaire à la protection de la population.

M. FORTIER: parce que dans un hôpital par exemple, on a fait l'expérience chez nous. On a établi un contrôle très sévère sur les prescriptions. Il faut maintenant délimiter exactement le nombre de tablettes et le nombre de jours et on a diminué le nombre de médicaments d'au moins 50%.

M. MARLER: Tout en limitant la période...

M. FORTIER: Ou l'avalanche pour le renouvellement de la prescription.

M. CASTONGUAY: Vous voyez, ceci est aussi bien important. En Angleterre, par exemple, les gens devaient payer deux shillings, soit à peu près une trentaine de cents, pour une prescription. Alors les médecins prescrivaient en plus grande quantité de sorte que les patients n'avaient pas à payer de nouveau les frais dissuasifs. Des prescriptions étaient données dont les quantités étalent beaucoup trop abondantes, et par conséquent, il y avait pertes de médicaments.

M. FORTIER: La nomination des médecins dans les hôpitaux relève-t-elle du bureau médical de l'hôpital ou de l'administration générale des caisses nationales?

M. CASTONGUAY: La sécurité sociale n'a pas à voir à la nomination des médecins dans les hôpitaux. Il semble qu'en France le système hospitalier repose davantage sur les hôpitaux privés que dans les autres pays. Disons même que la situation se compare beaucoup avec ce que nous avons ici au Canada, dans la province de Québec

M. ROY: Quelle est l'importance de la contribution de la part de l'Etat français.

M. CASTONGUAY: Vous voyez, l'Etat ne contribue pas directement. En principe la sécurité sociale est encore à la charge totale des travailleurs et des employeurs. La seule façon que l'Etat a été appelé à contribuer jusqu'à maintenant c'est en comblant les déficits de la sécurité sociale. Si la sécurité sociale n'est jamais en mesure de combler ces déficits, il s'agira d'une contribution permanente. C'est la raison pour laquelle l'Etat, s'étant aperçu qu'il est appelé à contribuer d'une façon indirecte à la sécurité sociale, il veut bien savoir maintenant de quelle façon il contribuera à l'avenir et quelle sorte de contrôle additionnel pourrait s'avérer nécessaire. C'est la raison de la formation de cette commission que nous mentionnons.

M. MARLER: Alors on est porté à penser que ce que je pourrais appeler la part résiduai-re pourrait nécessairement retomber sur les assurés n'est-ce pas, en principe?

M. CASTONGUAY: En principe, oui.

M. MARLER: Parce qu'autrement il me semble que cela veut dire qu'on est en train de créer des surprises très désagréables pour le gouvernement qui à un moment donné constaterait qu'il y a un déficit de je ne sais pas quoi dans le fonds et nous savons combien ce serait difficile pour le gouvernement, non pas seulement de trouver une somme, disons, de $20 millions, mais d'être obligé, après le fait, d'imposer une taxe spécialement pour combler un déficit qui probablement se répétera d'année en année du moment que vous acceptez le principe d'un déficit.

Personnellement, peut-être que je suis un peu conservateur dans ce domaine-là, je reconnaîtrais le devoir de l'Etat de combler une insuffisance temporaire, une insuffisance qui pourrait se produire au cours de l'année ou même après une année et sur une base temporaire, exclusivement avec l'idée que les assurés, dont les patrons et les employeurs et les employés, devraient par une augmentation du prix combler le déficit de la première année ou de la deuxième année et ainsi de suite, de façon à ce que la population qui va bénéficier des avantages du plan le paie, de façon à éviter ce qui, à mon sens,

serait malheureux, c'est-à-dire la demande des soins additionnels payés toujours par l'Etat, payés toujours par d'autres.

Je pense que c'est logique de dire, si nous allons avoir des soins plus étendus, des avantages considérables, que les assurés eux-mêmes doivent supporter une bonne partie du surcroît additionnel, ce qui pourrait peut-être freiner dans une certaine mesure les appétits démesurés.

M. CASTONGUÀY: Exactement. Je crois que c'est peut-être, si vous me permettez cette remarque, le meilleur endroit pour une personne comme vous, de faire preuve de conservatisme.

M. MARLER: Etant donné que j'ai vécu assez longuement, je... Evidemment, je ne suis pas conservateur dans d'autres choses, mais...

M. CLOUTIER: M. Castonguay, si j'ai bien compris votre exposé, le coût de la partie administrative en France est beaucoup plus onéreux qu'en Suède.

M. CASTONGUAY: Il est assez difficile de déterminer le vrai coût de l'administration. Il semble que la structure administrative soit assez lourde, pour savoir le coût exact de l'administration, il faudrait additionner les coûts des caisses primaires, des caisses régionales, des caisses centrales, des unions de recouvrement. A quoi s'élève une telle addition? C'est assez difficile. Je ne crois pas qu'on ait pu trouver de statistiques exactes. Mais le tout doit être assez dispendieux.

M. CLOUTIER: Tout de même, il ressort de cette étude que l'augmentation de la demande de soins en France est réellement le problème majeur auquel on doit s'attaquer.

M. CASTONGUAY: Il y a un problème d'augmentation de demandes de soins. Le système semble même encourager dans une certaine mesure les abus au niveau des caisses; l'administration des caisses primaires n'a aucun intérêt, en fait, à refuser des paiements de prestations. Il y a le fait que les conseils des caisses primaires soient élus. Et il y a des honoraires qui sont payés aux membres des conseils et il semble, d'après ce que nous avons pu voir, que les membres des conseils se recrutent en grande partie dans les syndicats ouvriers ou dans une bonne part parmi les membres du congrès général du travail. Ceci leur donne une influence assez forte. Et il y a une relation assez évidente entre le Congrès général du travail et un des partis politiques. C'est donc un outil qui est très fort pour eux et, contrairement à ce qu'on avait pu penser, le Congrès général du travail a l'air de bien voir le système de sécurité sociale dans sa forme actuelle. Je ne sais pas s'il est possible de faire le lien, c'est assez délicat d'analyser des attitudes comme celles-là, mais ça n'ajoute certainement pas à l'efficacité du régime. Mais l'augmentation des coûts ne correspond peut-être pas nécessairement à une augmentation réelle des besoins de soins de la population.

Quelle est la part exacte de l'abus et quelle est la part exacte due à une augmentation réelle, je ne suis pas en mesure de répondre.

M. MARLER: J'ai juste une question que je voudrais poser à M. Castonguay. Il semble avoir été dit au début qu'il peut y avoir plusieurs catégories d'assurés, dans le sens, je pense que M. Castonguay a parlé de la classe agricole et les mineurs etc., est-ce qu'il est possible que chaque classe paye une prime différente ou est-ce que c'est toujours le même prix?

M. CASTONGUAY: Il y a des primes différentes selon les régimes parce que les avantages ne sont pas les mêmes dans tous les régimes.

M. MARLER: Alors cela veut dire que vous ajoutez inutilement aux complications, aux frais d'administration, je crois que c'est évident.

Si par exemple les mineurs profitent de tels ou tels avantages, mais la classe agricole est limitée, il faudra toujours savoir à quelle classe appartient le patient en question, puis qu'est-ce qu'on peut lui donner gratuitement etc. Je ne trouve que des complications tout à fait inutiles.

UNE VOIX: Cela complique le système évidemment.

M. ROY: M. Castonguay, croyez-vous que dans l'ensemble la population semble satisfaite de ce régime de l'assurance-santé?

M. CASTONGUAY: Je tenterai de répondre différemment. Je pense bien que la population n'accepterait pas qu'on cesse ou qu'on mette terme au régime d'assurance-maladie en France. C'est assez difficile de savoir. Disons qu'en Suède il semblait que réellement les gens avaient l'air relativement satisfaits. En France, les gens ont certainement l'air plus satisfaits qu'en Belgique, d'après ce que l'on a pu voir. En Angleterre, c'est un peu le même genre de réponse. Je pense bien que la population n'accepterait

pas que le régime soit discontinué, mais je pense que les gens sont plus inquiets en Angleterre quant à ce qui va se produire dans l'avenir qu'en France. C'est une question de degré qui est assez difficile à percevoir et je pense que ça s'établit mieux par comparaison comme cela.

M. TREPANIER: M. Castonguay si j'ai bien compris, les différentes catégories de bénéficiaires de l'assurance proviennent de l'établissement progressif de l'assurance-santé en France, qui d'abord a été appliquée aux salariés, ensuite à la classe agricole et ainsi de suite. Maintenant à l'article c), vous mentionnez des régimes complémentaires...

M. CASTONGUAY: Oui.

M. TREPANIER: Est-ce que, à ce moment-là ça couvre d'autres personnes parce qu'il me semble que tout le monde est pas mal couvert par a) premièrement, deuxièmement, troisièmement et b).

M. CASTONGUAY: Les régimes complémentaires, disons ici qu'on parle plutôt de la sécurité sociale dans son sens le plus général et non uniquement de l'assurance-maladie. Sur le plan des rentes, des pensions, il y a le régime général pour les salariés et dans diverses entreprises pour complimenter les pensions il y a des régimes complémentaires. Par régimes complémentaires, on veut donc plutôt dire des régimes qui couvrent les pensions, pensions d'invalidité, pensions de vieillesse, possiblement des allocations de salaire en cas de maladie. De façon générale, du côté de l'assurance-maladie, il ne semble pas y avoir tellement de régimes complémentaires organisés par les employeurs, ce sont plutôt les individus, au moyen de contrats auprès de sociétés privées d'assurances, qui s'assurent pour se faire traiter sur une base privée.

Maintenant, et c'est un simple détail, pour vous montrer la complexité de cette histoire-là, je pense qu'on nous a dit qu'il y avait même un régime particulier pour les clercs, des greffes de notaires de Paris.

M. MARLER: C'est épouvantable.

M. CASTONGUAY: C'est pour ça que je voudrais mentionner que sur certains détails nos connaissances sont un peu vagues, il n'y a pas moyen de faire un inventaire complet, je pense, à moins d'étudier le tout très longuement.

M. TREPANIER: Alors c'est peu souhaitable que cette situation...

M. TARDIF: Et, M. Casgonguay, j'imagine qu'on a jugé à propos de classifier les régimes comme ça, où il devait y avoir des avantages quelconques. Quels étaient les avantages?

M. CASTONGUAY: La raison est historique. Ces groupements se sont formés en mutuelles, dans le passé. Les mineurs, par exemple, ont senti le besoin de se protéger collectivement, alors éventuellement les mutuelles ont donné naissance aux régimes de sécurité sociale protégeant les mineurs, les salariés, les agriculteurs, et chacun ayant des problèmes différents au point de vue des âges de retraite, des moyens financiers et chacun étant un petit peu plus individualiste qu'ailleurs, ils ont voulu établir chacun leur régime bien particulier. Au point de vue des avantages, il ne semble pas y en avoir tellement parce qu'on sent qu'un effort énorme est fait pour essayer d'unifier, de centraliser, jusqu'à un certain point.

M. RENAUD: En d'autres termes ça continue à se développer dans les mimes structures, c'est ça?

M. CASTONGUAY: Oui. Tout le système que nous décrivons par exemple au point de vue recouvrement des prestations, des contributions et distributions des revenus de contributions parmi les caisses, c'est excessivement lourd et finalement ça ne rime pas à grand chose, parce que les caisses n'ont pas d'autonomie financière. Celle qui a un surplus le donne au profit de celles qui ont des déficits. Tout donne donc sur papier l'apparence d'une certaine autonomie alors qu'en fait il n'y en a pas.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions? M. Castonguay, amenez-nous, à votre choix, dans un autre pays.

M. CASTONGUAY: Je pense que le plus logique serait celui de la Belgique où disons, l'on retrouve beaucoup d'analogie avec le régime d'assurance-maladie français. C'est un régime qui tire ses sources encore des sociétés mutuelles et, là, les sociétés mutuelles ont encore un plus grand degré d'autonomie.

Elles ont réellement l'autonomie financière. Au lieu de repasser sur tous les points, ici, je crois que ce qui est plutôt important de mentionner, c'est qu'il y a cinq réseaux de caisses mutuelles. Il y a les mutualités chrétiennes, il

y a les mutualités des travailleurs professionnels, les mutualités neutres, les mutualités des salariés, et je pense qu'il y en a une pour les non chrétiens, les protestants. Tout le système prend donc des couleurs politiques, raciales, religieuses qui créent, en apparence en tous les cas, des conflits assez prononcés. Si on ne nous l'avait pas tellement répété à divers endroits, ce n'est pas le genre de commentaire que j'avais fait verbalement, j'aurais préféré laisser cela consigné dans les dossiers ici, quitte à ce que vous en preniez connaissance autrement. Il y a donc des caisses autonomes, et cinq réseaux complets. Chaque réseau couvre par des caisses régionales et primaires le territoire de la Belgique qui n'est pas tellement grand. Les caisses reçoivent pour s'administrer un montant fixe, un pourcentage fixe de prestations. Alors plus elles paient de prestations, plus naturellement la part qu'elles reçoivent pour s'administrer est élevée. Donc, encore là, le système est définitivement conçu à l'encontre de l'efficacité. Ceci ressort très évidemment dans l'expérience au point de vue du coût. Le régime a été conçu en 1944 avant même que la guerre soit finie et, en 1963, on a essayé de corriger la situation par une nouvelle loi. Le gouvernement a voulu établir des contrôles et c'est ce qui a donné lieu évidemment à la grève qui a eu lieu en 1964. Cette grève a laissé des marques assez profondes, en autant qu'on a pu voir et chez les médecins et dans la population. C'est le genre de chose qui doit certainement être évité si l'on peut en juger par ce qui s'est passé en Belgique.

Et justement, M. Marler, ce que vous disiez tantôt correspond exactement ici au portrait, à la leçon qu'on peut tirer du régime de la Belgique. Lors de la refonte, on a dit: En principe, l'Etat paiera un certain pourcentage des coûts du régime, soit 95% tel qu'indiqué à la page 61, 95% des dépenses afférentes aux prestations visant les maladies sociales. Les maladies sociales sont la tuberculose, le cancer, les longues affections. En outre, 27% des prévisions budgétaires relatives aux soins gratuits dispensés aux pensionnés, veuves, invalides, orphelins, plus le montant requis pour couvrir les cotisations des chômeurs. Il est aussi dit, et ceci est assez important, que malgré le principe selon lequel l'Etat assume une partie fixe des coûts, l'Etat assumerait pour les deux années suivantes tout écart qui ne serait pas comblé par les contributions des employés, des employeurs et la partie fixe que l'Etat devait assumer, au cours des deux premières années suivant la nouvelle loi. L'on n'a pas fait réellement face aux problèmes, on l'a reporté pour deux ans et lorsque le problème s'est produit, c'est- à-dire en 1966, on a vu ce qui s'est produit récemment. On a vu par les journaux, que le gouvernement essayait de nouveau de contrôler certains des coûts, et demandait aux médecins d'accepter certaines concessions au point de vue des montants payés par la sécurité sociale pour les soins donnés dans les hôpitaux. Les autres points particuliers du régime en Belgique ne sont pas directement inhérents au régime. Un fait à signaler, c'est qu'il y a un grand nombre d'associations qui ont groupé les médecins dans le passé et, à un moment donné, c'est-à-dire lors de l'adoption de cette loi, en 1963, les médecins se sont fédérés dans une grande chambre syndicale. Pas longtemps après, une scission à l'intérieur de cette chambre s'est de nouveau produite et il y a une fédération rivale des syndicats qui s'est développée en parallèle. Il semble que c'est un phénomène qui mérite d'être mentionné. Où il y a plusieurs syndicats groupant les médecins, les relations sont plus difficiles que lorsqu'il n'y a qu'un groupe réellement représentatif des médecins. Et ici, dans la province de Québec, disons qu'il y a plus d'une association. Il y a deux fédérations de syndicats pour les omnipraticiens et les spécialistes qui groupent un grand nombre de médecins dans chacune d'elles. Si la multiplication des organismes groupant les médecins devait devenir un phénomène dans la province de Québec, ce serait regrettable. Je crois que c'est une leçon qui devrait être retenue, car les relations deviennent alors excessivement plus difficiles.

A la page 62 on indique justement la courbe depuis la nouvelle loi et des dépenses de l'assurance-maladie. On voit que les coûts montent en flèche, 11 milliards de francs belges en 1964, on voit que, pour 1966, deux ans plus tard, on en arrive à 21,800,000,000. Le franc belge vaut deux sous, alors c'est assez élevé.

M. TREPANIER: Cela ne serait pas plutôt des millions?

M. CASTONGUAY: Oui, mais s'il y en a 11 millions, ça fait 11 milliards à ce moment-là. C'est 11 millions.

M. MARLER: Avez-vous une idée de ce que ça représente par tête?

M. CASTONGUAY: Attendez un peu. 11 milliards, la population est d'environ 9 millions...

M. MARLER: On peut dire en chiffre rond 2,000 francs par année par tête. Evidemment les soins sont plus étendus que ceux dont nous avons parlé.

M. CASTONGUAY: Mais toute la population n'est pas assurée, ça c'est un problème qui doit être considéré dans ce calcul. Ce n'est pas facile de sortir le coût par tête. C'est indiqué je crois quelque part. De mémoire, il y a à peu près 7 millions à 7,500,000 sur les 9 millions qui sont assurés.

M. MARLER: Alors ça n'a pas beaucoup d'intérêt, parce que ça ne prouve rien.

M. CASTONGUAY: Alors il y a possiblement la question des effectifs qui pourraient être assez intéressants à étudier ici, étant donné encore certaines analogies entre Québec et la Belgique. Au point de vue de la population, il n'y a pas un écart considérable. A la fin de 1962, on indique qu'il y avait 13,000 médecins dont 11,800 exerçaient effectivement la médecine. On voit donc que le nombre des omnipraticiens est beaucoup plus élevé que le nombre de spécialistes et il ne semble pas en Belgique exister de pénurie sérieuse de médecins. Il y a cependant le problème de la distribution géographique. On indique certains chiffres, à la page 65. Pour indiquer la disparité, dans une province, il y a 20.9 médecins par 10,000 habitants alors que dans une autre province il n'y en a que 7.3.

M. FORTIER: Est-ce que le médecin se plaint d'avoir beaucoup de formules à remplir?

M. CASTONGUAY: En France, en Angleterre, en Belgique où cette plainte quant au nombre de formules à remplir est formulée, il ne semble pas que ce soient les formules à remplir pour l'assurance-maladie. Le patient paye le médecin qui donne simplement un reçu et c'est le patient qui se fait rembourser. Ou les médecins se plaignent qu'ils ont beaucoup de formules à remplir, ça ne vient pas de l'assurance-maladie, ça vient plutôt de tous les autres certificats qu'ils doivent donner pour toutes sortes d'autres programmes.

M. MARLER: Par exemple en France on m'a dit que les médecins sont beaucoup dérangés par les travailleurs, les ouvriers qui s'adressent aux médecins disant j'ai mal à l'estomac et il va chez le médecin pour avoir le certificat ce qui donne évidemment aux médecins un honoraire quelconque, mais ça donne à l'ouvrier 3 jours de congé payé. Alors, il y a un encouragement à aller voir le médecin chaque fois qu'on a un mal de tête.

M. CASTONGUAY: Ce phénomène, ou cette crainte, qui est souvent exprimée à l'effet qu'un régime d'assurance-maladie surchargerait de toute une paperasse comme on dit que c'est le cas en Europe, ce n'est pas exact parce qu'ils sont surchargés, en autant qu'on a pu voir non pas à cause du régime d'assurance-maladie, mais pour d'autres raisons comme celles que vous mentionnez.

M. MARLER: Est-ce que ces autres ministères par exemple qui ont besoin de ces certificats ne pouraient pas être appelés à en refuser?

M. CASTONGUAY: Il y a une plainte à l'effet que les médecins sont dans une bien mauvaise situation avec ces fameux certificats. S'ils les refusent, leur patient est plus ou moins de bonne humeur, finalement il va voir un autre médecin, et il obtient son certificat éventuellement. Les médecins se disent: On est aussi bien de les donner, alors qu'est-ce que ça vaut? En outre, est-ce que nous sommes capables nous, comme médecins, d'évaluer si telle maladie ou tel dérangement empêche réellement la personne de travailler? Surtout lorsqu'il s'agit disons des invalidités qui donnent droit à un salaire pour une certaine période. Il faudrait être en mesure de déterminer quel est réellement ce qu'on demande à la personne à son travail, jusqu'à quel point ses capacités physiques sont taxées. Beaucoup de certificats sont donnés, ça prend énormément de temps et on se demande quelle est leur valeur réelle. Même si on essaie de faire honnêtement notre travail, nous ne pouvons le faire de façon satisfaisante. Il semble que ce problème soit plus aigu en Angleterre où les patients doivent s'inscrire sur la liste d'un médecin. Si le médecin refuse de donner un certificat, la personne dit: « Très bien, enlevez mon nom sur votre liste ». Elle fait ensuite une campagne auprès de ses parents et amis pour que tous leurs noms soient enlevés de la liste du médecin. Ce sont des moyens de persuasion assez forts.

M. FORTIER: Du chantage. Est-ce que les médecins sont satisfaits en général de leur revenu avec ces formules d'assurance-là?

M. CASTONGUAY: Il semble y avoir un écart assez considérable entre le revenu des médecins de la Belgique et ceux de la France. C'est quelque chose qui nous a surpris, le revenu des médecins est passablement plus faible en Belgique qu'il ne l'est en France. Dans les pays comme en Suède, on essaie de part et d'autre de donner aux médecins un revenu qui corresponde à

sa position par rapport aux autres professions et il semble qu'on est capable de réaliser ça.

M. MARLER: Cela semble s'être réalisé passablement dans la Saskatchewan.

M. CASTONGUAY: En Saskatchewan les revenus sont excellents. En France, les médecins ont l'air satisfaits de leurs revenus étant donné qu'ils ont droit aux dépassements d'honoraires pour diverses raisons, s'ils acquièrent une certaine notoriété, etc...

Il ne semble pas y avoir tellement de problèmes. Les spécialistes dans les hôpitaux semblent satisfaits aussi. En Angleterre, il y a une distinction à faire entre les spécialistes qui travaillent dans les hôpitaux et les médecins de famille, les omnipraticiens, à l'extérieur des hôpitaux. Là, il y a un décalage entre les revenus.

En ce qui a trait à la Belgique, disons que c'est une description assez sommaire, mais c'est un système tellement complexe, je crois que d'essayer d'en prendre connaissance rapidement comme ça, pourrait plutôt tendre à apporter de la confusion sur ce que nous savons de la France et de la Suède et ne pas donner tellement plus de clarification sur ce qui existe en Belgique. D'ailleurs, on dit au début de notre rapport, et nous savions fort bien que ce rapport circulerait, essayer de déterminer exactement à quoi correspond la réalité du régime belge d'assurance-maladie est très difficile. Alors qu'en écrivant la description nous n'étions pas capables de le faire exactement, essayer de le dire verbalement en quelques minutes, je pense que ce serait encore plus difficile.

M. LE PRESIDENT: Il me semble qu'il serait utile qu'au cas où il y a un point saillant du système belge que nous serions tentés d'adopter ici au Québec parce que ça fait bien notre affaire, ça se marie aux habitudes québécoises, mais tout simplement pour connaître ce qui se passe en Belgique, je trouve que c'est assez aride, à moins qu'il y ait quelque chose de tangible.

M. CASTONGUAY: Comme chose à éviter possiblement.

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. CASTONGUAY: Alors, si vous me permettez, je vais passer à la description du régime de la Grande-Bretagne.

M. ROY: Peut-être avant de commencer, on pourrait peut-être prendre un repos de dix mi- nutes jusqu'à cinq heures.

Alors, messieurs. M. Castonguay, vous avez la parole.

M. CASTONGUAY: M. le Président, le dernier régime qui est décrit ici, je crois qu'il devrait être analysé, c'est celui de la Grande-Bretagne. Une description sommaire du régime des Etats-Unis est donnée à la fin. Etant donné que ce régime ne couvre que l'hospitalisation, sur une base facultative pour les personnes âgées, nous l'avons décrit à titre de référence, puisqu'il est toujours intéressant de savoir ce qui se fait aux Etats-Unis, mais je ne crois pas qu'il y ait tellement à tirer de cette législation qui n'est pas d'ailleurs encore en vigueur. Si vous me permettez, je vais passer à la description sommaire du régime de la Grande-Bretagne qui est d'une conception tout à fait différente, comme nous l'avons mentionné hier dans la définition des types de régimes. C'est un régime de soins qui a été conçu au cours d'une période un peu spéciale.

Les objectifs du régime, nous les avons reproduits à la page 10, mais je ne crois pas qu'il soit utile d'en donner la lecture, ce sont ceux qui avaient été définis au début du régime. C'était plutôt les objectifs qui étaient audacieux dans ce régime. On voulait tout faire pratiquement à la fois et en une seule étape. On voulait donner à la population tous les soins sans qu'il n'en coûte rien directement, sauf quant aux primes d'assurance sociale.

Quant à l'organisation, et pour comprendre le régime de soins anglais, on doit faire abstraction de ce qu'on a vu dans les autres pays. En fait, ce sont des services qui sont constitués et ce sont les services qui donnent les soins à la population. Vous avez cinq grands services dans le domaine de la santé: le service d'hygiène public, le service national de santé, le service de santé scolaire, le service de médecine du travail et le conseil de la recherche médicale. Disons que ce que nous avons étudié en plus de détails ici, c'est le service national de santé. On voit à la page 13, l'organisation et on distingue trois grandes catégories. Au centre, il y a les conseils exécutifs, assistés par des comités professionnels; il y a à droite les conseils régionaux d'hôpitaux et il y a, à gauche, les autorités régionales et municipales de la santé. Premièrement, à droite, c'est tout ce qui touche aux hôpitaux incluant les spécialistes qui pratiquent presque exclusivement à l'intérieur des hôpitaux. Vous avez tout à fait à droite les hôpitaux d'enseignement qui constituent une quatrième catégorie ou une quatrième branche.

Les conseils exécutifs, eux, touchent plus particulièrement aux professions, à l'exception des spécialistes, c'est-à-dire, les médecins, les dentistes, et voient à l'administration de la distribution des médicaments, les services pour les yeux. A gauche, vous avez les autres aspects de la médecine qui sont la responsabilité des autorités municipales et régionales de la santé: protection de la mère et de l'enfant, infirmières visiteuses, les soins à domicile, prévention des maladies, traitement et surveillance médicale, vaccination, immunisation, ambulance, etc.

Ces trois grandes sections, nous avons voulu les montrer très clairement, dès le début de la description du régime, parce qu'en fait ce sont des unités particulièrement distinctes même dans l'opération du régime de santé en Angleterre, il y a des régions et il y a des conseils régionaux pour les hôpitaux; chaque conseil a un certain groupe d'hôpitaux sous sa juridiction et chaque hôpital a un conseil d'administration. Les budgets, les directives, etc, les hôpitaux d'ailleurs sont la propriété de l'Etat, tout ça émane du ministère de la Santé où il y a un sous-ministre associé en charge de cette section. Vous avez une autre section, les conseils exécutifs. Il y a dans les différentes régions et ce sont eux qui voient à l'organisation et à la distribution des soins par les praticiens. Ces conseils exécutifs sont à caractère représentatif mais, encore-là, ils reçoivent leurs directives du ministère. Ce ne sont pas eux qui fixent les échelles de salaire ou de rémunération des médecins, c'est fixé par négociation entre le ministère et les différents organismes groupant les médecins. Il s'agit plutôt de fonctions administratives pour ces conseils.

Quant aux autorités régionales, ça touche de moins près à ce qui correspond à l'assurance-maladie. Donc, je crois que l'on peut en faire abstraction. La plupart des médecins en Angleterre font partie du service national de la santé. On indique que, pour les omnipraticiens, 97%de la population fait appel à leurs services. Les autres 3% comprennent les personnes qui font appel aux médecins privés. Elles sont donc en très petit nombre.

Les personnes ont le libre choix du médecin. Le médecin a le choix de refuser un patient. Ces libertés fondamentales sont respectées mais le système fonctionne d'une façon tout à fait particulière et ceci, spécialement pour les omnipraticiens. Chaque omnipraticien a une liste de noms sur laquelle il peut inscrire jusqu'à 3,500 noms s'il pratique seul. S'il pratique en groupe, le nombre de personnes qu'ils peuvent avoir conjointement sur la liste peut être un petit peu plus élevé étant donné qu'entre eux deux méde- cins peuvent se diviser un peu mieux le travail. De la même façon pour les dentistes. Il y a une organisation qui est aussi sous l'autorité des conseils exécutifs. Les personnes se font placer sur la liste du dentiste et se font traiter. Pour les médecins, il n'y a aucun frais dissuasif. Ils vont voir le médecin lorsqu'ils en ont besoin et le médecin est rémunéré selon le nombre de noms sur sa liste.

M. MARLER: Indépendamment du nombre de visites, son salaire ou son traitement est fixé en fonction exclusivement du nombre de gens qui figure sur la liste.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. MARLER: Maintenant, s'il est chanceux, les gens ne viennent pas le voir, il n'est pas trop dérangé.

M. CASTONGUAY: On encourage d'une certaine façon les listes pas trop nombreuses en donnant un montant pour les 600 premières personnes sur une liste. La rémunération du médecin par tête est à un certain niveau. De 600 à 1,500, le montant par tête est plus élevé et au-dessus de 1,500, le montant par tête baisse de nouveau, pour encourager les médecins à ne pas avoir un nombre excessif de noms sur leur liste. Une fois ceci établi, peu importe le nombre de visites, l'omnipraticien reçoit sa rémunération. Ce système a donné lieu à certaines difficultés. Des raffinements continuels ont été apportés au mode de rémunération pour essayer d'abord d'encourager les médecins, les omnipraticiens à se grouper, il y a des primes qui sont versées par exemple pour les médecins qui s'établissent dans les milieux éloignés où il n'y a pas beaucoup de médecins, il y a des primes qui sont données aux médecins qui commencent dans leur pratique, pour les aider. Ces primes-là au début vont en décroissant. Il y a différents raffinements qui sont apportés à la formule de rémunération mais le système à la base demeure celui de la rémunération per capita.

M. TREPANIER: M. Castonguay, ne disiez-vous pas tantôt que le patient avait la liberté de choisir son médecin?

M. CASTONGUAY: Oui.

M. TREPANIER: Comment conciliez-vous cet énoncé avec la liste des patients que le médecin fait lui-même?

M. CASTONGUAY: S'il n'aime pas le médecin chez qui son nom est inscrit, il le fait rayer, va chez un autre médecin et demande que son nom soit inscrit sur la liste de l'autre médecin. Il y a une procédure de changement de noms sur les listes. C'est assez lourd.

M. MARLER: Ce doit être désagréable parce qu'on est obligé d'avertir le médecin qu'on en cherche un autre.

M. CASTONGUAY: Si vous êtes en voyage et que vous tombez malade, que vous n'avez pas naturellement votre nom sur la liste d'un médecin dans la ville ou dans la région où vous tombez malade, il y a une procédure de traitement d'urgence et le médecin est remboursé à ce moment à taux particulier, étant donné qu'il a traité une personne qui n'était pas sur sa liste. C'est assez lourd comme système.

M. TARDIF: Et qui peuvent avoir des contrôles où peut-il s'assurer pour le nom d'un médecin...

M. CASTONGUAY: Disons qu'il y a moins de liberté qu'ici. On lui fixe une certaine période de vacances par année, on lui fixe un certain temps pour l'étude, on lui donne certains montants s'il va étudier pour parfaire ses connaissances et se tenir à date. Alors, il est beaucoup moins libre. Cela est pour l'omnipraticien. Pour le spécialiste qui est à l'intérieur d'un hôpital, la rémunération est beaucoup plus élevée et il y a différentes formes d'encouragement au mérite. Il y a toute une catégorie de façons de donner une certaine reconnaissance au mérite dans la spécialisation. La rémunération des médecins spécialistes peut être assez élevée. Elle peut aller au-delà de $25,000 alors qu'ils n'ont absolument aucun frais de perception de leurs honoraires. C'est un revenu garanti tandis que les omnipraticiens, en autant que l'on peut voir, qui ont à défrayer le coût de leurs bureaux, etc., et qui ont des heures beaucoup plus difficiles font un traitement de l'ordre de $8,000 à $9,000. Il y a donc une différence énorme.

Tous les genres de professions donnent des soins selon le même système. Il y a les opthamologistes, les dentistes, c'est tout le temps le même système. Pour les médicaments, il y a un système un peu particulier. Les pharmaciens sont propriétaires de leur pharmacie, de leur officine. La plupart des pharmaciens ont adhéré au système et contrairement aux autres genres de soins, il y a des frais dissuasifs, ou plutôt il y avait des frais dissuasifs. Au début, il n'y en avait pas, on en a imposé et peu de temps après le dernier changement de gouvernement, les frais dissuasifs ont été éliminés. Ce changement a eu une influence assez considérable sur le nombre de prescriptions données et les quantités prescrites.

Anciennement, les frais dissuasifs pour les médicaments étaient de deux shillings, environ $0.30 par prescription. Les médecins avaient tendance à prescrire en grande quantité et, en plus de ça, il y avait un certain nombre de prescriptions qui n'étaient jamais complétées. Lorsque les frais ont été éliminés, le nombre de prescriptions complétées a augmenté énormément et la quantité par prescription a baissé. Immédiatement après l'élimination des frais dissuasifs, le coût des médicaments ou la quantité des médicaments a augmenté d'à peu près 25% si ma mémoire est bonne.

M. TREPANIER: Donc actuellement il n'y a plus de frais dissuasifs pour les médicaments, non plus que pour les soins donnés par les médecins.

M. CASTONGUAY: Aucun frais. Les seuls frais qui restent, c'est pour les choses comme les verres, et, encore là, sont-ils limités, certaines protèses, la denture. La personne a le choix d'un certain nombre de montures pour les lunettes standard. Si elle veut un certain genre de monture un peu plus élaboré, elle doit payer. Mais le principe est celui de l'élimination des frais dissuasifs sauf pour des articles particuliers comme des protèses, les appareils et les dents.

M. TREPANIER: Ce que j'avais cru comprendre hier, c'est que le régime avait commencé sans aucun frais modérateur mais ensuite en avait vu... Alors, ce n'est pas ça.

M. CASTONGUAY: Ils en ont imposé et, par la suite, ils les ont éliminés. L'on voit que malgré les objectifs visés, il y a d'autres réalités dont ils ont été obligés de tenir compte. On a tenu plus ou moins compte selon les événements politiques. Aujourd'hui, il n'y en a plus de façon générale, sauf pour les verres, les protèses, évidemment.

Dans tout ce réseau de conseils pour les hôpitaux, pour les médecins, qui ont un rôle de gestion et de consultation, tous les membres des conseils agissent à titre gratuit, sans aucun honoraire. On nous a dit qu'il y avait quelque chose comme 10,000 personnes, je crois, qui siègent sur divers comités et divers conseils et qui jouent un rôle nécessairement utile, sans aucune rémunération.

M. MARLER: Tout ça suppose une espèce de régionalisation du système. Est-ce que cela veut dire qu'un médecin peut établir dans le nord de l'Angleterre dans le choix pour sa liste de quelqu'un qui est à Londres.

M. CASTONGUAY: Voici, pour les spécialistes, il semble que les échelles de salaires ne varient pas dans l'ensemble du pays, sauf que possiblement il y a un boni de vie chère dans la région de Londres. Pour les omnipraticiens, on ajoute pour le médecin qui est dans une région éloignée, un boni d'isolement. On ajoute, pour le médecin à ses débuts qui s'établit dans une région éloignée, où il y a un manque de médecins, une prime pour l'aider à s'établir. Le niveau de rémunération peut différer d'une région à l'autre pour ces raisons, mais, en dehors de ces bonis, la rémunération per capita est uniforme pour l'ensemble du pays.

M. RENAUD: Vous dites que c'est une moyenne de $8,000 à $10,000 par année pour les omnipraticiens.

M. CASTONGUAY: Oui.

M. VAILLANCOURT: Quelle était la moyenne des salaires avant l'assurance-santé.

M. CASTONGUAY: Cela date du temps de la guerre. Je ne le sais pas et le coût de la vie a augmenté beaucoup depuis cette époque.

M. MARLER: Et d'ailleurs, c'était un des griefs. Ce ne sont pas des revenus suffisants.

M. CASTONGUAY: Exactement. Les spécialistes toutefois ne semblent pas se plaindre de façon générale.

M. MARLER: Ils sont établis principalement dans des milieux urbains.

M. CASTONGUAY: Ils sont surtout à l'intérieur des hôpitaux. L'omnipraticien n'est pratiquement pas admis dans l'hôpital. C'est le spécialiste qui pratique à l'intérieur de l'hôpital alors il a tout l'équipement qu'il lui faut, il est beaucoup mieux rémunéré, il n'a pas de frais à supporter personnellement. On n'a pas senti qu'il y avait le même genre de problème du côté des spécialistes.

M. TREPANIER: Est-ce qu'il y a des traitements ou des consultations médicales donnés dans les cliniques externes comme en Suède par exemple, en Grande-Bretagne?

M. CASTONGUAY: Dans les hôpitaux, il y a des cliniques externes, mais il n'y a pas le même genre de distinction étant donné que tout le système est unifié. Ce sont des services que le gouvernement met à la disposition de la population. S'il y a des soins que le médecin ne peut pas donner à son bureau et qui ne nécessitent pas l'hospitalisation, ils sont donnés dans ce qui correspond à la clinique externe. On a semblé constater là-bas, et cela nous a été dit à plusieurs reprises que les médecins, les omnipraticiens ne soignaient pas réellement. Ils voient les gens et s'il y a le moindrement de difficultés ou quelque chose qui ne peut pas être soigné avec un médicament très simple, immédiatement on envoie le malade à l'hôpital ou à la clinique externe. L'omnipraticien ne soigne pratiquement pas, il visite une série de gens et il les dirige plutôt. C'est une des plaintes de l'omnipraticien, ils disent; Nous sommes surchargés, nous ne faisons pas tellement de médecine, nous faisons une médecine très peu intéressante et excessivement ingrate. Ce n'est pas nous qui faisons la médecine.

M. DALLAIRE: En résumé, ce sont les individus ou les patients qui les dirigent.

M. CASTONGUY: Oui.

M. FORTIER: D'ailleurs, est-ce que le patient a le droit d'aller voir un spécialiste sans avoir un papier de l'omnipraticien?

M. CASTONGUAY: Normalement, l'hospitalisation doit être faite sur prescription du médecin et comme le spécialiste pratique à l'intérieur de l'hôpital, il semble bien que tous les patients passent en premier lieu par l'omnipraticien.

M. VAILLANCOURT: Il a le droit en Suède et en Belgique.

M. CASTONGUAY: D'aller voir directement le spécialiste?

M. VAILLANCOURT: D'aller voir directement le spécialiste.

M. CASTONGUAY: Là ils ne sont pas tous concentrés dans les hôpitaux.

M. MARLER: M. Castonguay, en vous écoutant et surtout en pensant à la situation d'Angleterre où vous avez, si vous voulez, trois méthodes de remboursement de traiter les médecins, vous avez le gars qui reçoit une prime d'isolement, vous avez un autre qui reçoit une

espèce... et vous avez l'autre disons celui du marié, mais le médecin moyen qui semble toucher un salaire qui est basé sur le nombre de personnes inscrites sur la liste. Est-ce que c'est concevable pensant à la santé au Canada, de croire que nous pouvons peut être avoir un système un peu semblable? Il est évident qu'un médecin qui pratique à Montréal doit payer des dépenses de bureau plus considérables que celui qui pratique en campagne, n'est-ce pas? Cela veut dire que ça lui coûte plus cher pour une consultation d'un quart d'heure ou d'une demi-heure que ça coûterait en campagne. Par contre, envoyer les gens dans des extrémités des comtés surtout dans les coins excentriques de la province, me semble-t-il, semble condamner le médecin à avoir un nombre probablement insuffisant de patients, et je songe personnellement à la possibilité de lui donner non pas ce que j'appellerais une prime d'isolement, mais plutôt un revenu garanti, un revenu assuré, parce que depuis longtemps nous cherchons le moyen d'encourager les médecins à se placer ailleurs que dans les centres. Sauf, que d'après ce qu'on m'a dit, évidemment, je ne suis plus du Cabinet, mais je me rappelle qu'à un moment donné nous avons parlé de la question, et nous avons constaté des difficultés énormes parce qu'il n'y avait pas moyen de contrôler ce que touchait le médecin qui a été établi sous cette formule-là. Avec le système d'assurance-maladie tout serait payé effectivement par le gouvernement, on saura combien on aurait versé aux médecins; alors, il serait très facile avec un tel système de donner un supplément pour porter le total de ses honoraires à un chiffre de x, et de cette façon peut être encourager le médecin à s'établir en campagne. La question que je pose, évidemment je ne cherche pas à avoir une réponse immédiate, mais ne faut-il pas penser, ne faut-il pas tenir compte du fait qu'il y a des différences de coût pour les médecins, dans le sens que celui qui travaille au milieu des grands centres a des dépenses beaucoup plus considérables par heure que son collègue qui travaille dans une petite ville de campagne. Ne faut-il pas envisager cette distinction dans le tarif ou ce que le client paiera disons dans de telles circonstances?

M. CASTONGUAY: Sur ce point-là je réalise que vous ne posez pas une question demandant une réponse immédiate...

M. MARLER: C'est exact.

M. CASTONGUAY: ... je crois qu'il y a une distinction importante avec l'Angleterre. C'est que là-bas le niveau des revenus des omnipra-ticiens est relativement bas, alors toutes ces considérations doivent être réflétées de façon beaucoup plus évidente dans la rénumération. Si avec l'établissement d'un régime, ici, qui donnait un revenu aux médecins passablement élevé, et ceci pourrait s'effectuer même assez souvent dans les centres à l'extérieur des villes, étant donné que pour chaque acte médical le médecin est assuré d'être rémunéré, peut être qu'immédiatement il y aura une certaine tendance naturelle à ce que. cette différence dans la distribution des médecins entre les villes et les campagnes s'élimine naturellement. Quelque chose qui...

M. MARLER: Je ne veux pas en venir à un jugement définitif, mais je ne puis pas m'empêcher de croire, premièrement, que l'acte médical spécifique doit avoir la même valeur, n'est-ce pas, que ce soit à Sherbrooke, Montréal, Matane ou en campagne. Par contre nous savons, parce que c'est un fait, que ça coûte beaucoup plus cher à Montréal que ça coûte à Matane, par exemple. Et on songe peut être au profit un peu plus tard, qui entre en ligne de compte. En effet, faut-il avoir un tarif uniforme pour les actes médicaux ou faut-il avoir certaines régionalisations dans le tarif de façon à tenir compte des circonstances que j'appellerais des dépenses. Elles sont différentes dans les petits centres que dans le cas de Montréal, Québec, etc.

M. COITEUX (Duplessis): D'ailleurs actuellement on en a. Moi, dans mon comté, j'ai deux cas d'espèce. Par exemple, le docteur à l'Hôpital de Blanc-Sablon, qui est à l'extrémité est de la province près de Terre-Neuve, retire du gouvernement un salaire je crois qui se rapproche $14,000, plus les revenus qu' il a de ses actes médicaux, mais qui d'après les statistiques lui ont donné à date $2,300. Cela comprend les opérations... On l'appellait à Havre-St-Pierre mais seulement dans un bureau beaucoup moindre parce que là je pense qu'on donne un salaire de base $4,000, ou $5,000, et là il peut compléter avec sa pratique privée étant donné que les gens sont plus en mesure de le faire. Alors ça s'applique déjà actuellement. Seulement que là, étant donné que l'on n'avait pas le soutien que la nouvelle loi veut nous donner... Mais on va avoir la nouvelle loi du service aux indigents, les gens qui ne sont pas capables de payer, et alors là, ça va aider, ça va encourager énormément ces médecins à rester là; ça va en encourager d'autres à y aller.

M. MARLER: Je pense que c'est presqu'un avantage évident qu'on doit pourvoir dans un plan d'assurance-maladie, qu'il y aura certainement en campagne des médecins qui vont faire des revenus très considérables.

M. FORTIER: Si vous voulez par exemple que des jeunes médecins aillent s'installer en campagne, il faut certainement leur procurer des avantages assez importants.

M. MARLER: Certainement.

M. FORTIER: Parce que je ne vois ce qu'un jeune médecin qui sort de l'université, qui s'en va en campagne alors qu'il peut avoir maintenant des bourses pour se spécialiser et être assuré déjà d'avoir un revenu très convenable dans un centre plus grand, pourquoi irait-il s'installer loin? il va perdre un peu ses contacts avec des confrères. Il faut leur donner les avantages assez importants. Maintenant est-ce que ça peut plus être uniquement des encouragements d'ordre monétaire? il y a autre chose possiblement. Est-ce que l'encouragement, peut être le paiement des transports des patients vers ces pratiques en groupe des médecins ne sont pas aussi des formes d'allégement du fardeau du médecin de campagne? il n'est pas obligé de faire tout le temps la tournée, on tend à vouloir amener plutôt les patients vers lui, et l'on tend aussi à le faire pratiquer en contact avec d'autres confrères où là on peut se subdiviser les heures, établir un genre de service de garde où on fait la rotation. Déjà, ça ce sont des choses qui peuvent avoir plus d'importance pour le médecin qu'une addition à son revenu.

M. MARLER: L'addition au revenu, c'est toujours un encouragement, c'est surtout ça.

M. CASTONGUAY: Mais je peux vous dire aussi qu'ils quittent les campagnes non pas parce que le revenu n'est pas suffisant, mais plutôt parce qu'ils sont en train d'y laisser leur santé ou ne peuvent plus suffire à la tâche.

M. FORTIER: Est-ce qu'il n'y a pas un système de rotation dans certains pays, où par exemple on va pratiquer dans une campagne pendant quatre ou cinq ans et reviennent à de plus grands centres après?

M. CASTONGUAY: Il y a différents modes. Comme en Suède. Disons en Angleterre, étant donné que nous sommes dans l'étude de ce régime, on établit par région quel est le nombre de médecins par mille de population, il y a des barèmes établis et on divise les régions en quatre catégories, il y a des régions qui sont déclarées comme étant fermées, il y a suffisamment de médecins, alors on ne permet pas à un nouveau médecin de s'établir sauf si c'est le fils d'un médecin qui pratique déjà là.

Après ça, il y a un autre type de région qui vient immédiatement par la suite, où on ne permettra pas de façon générale aux médecins de s'établir, sauf dans des circonstances spéciales mais un peu moins spéciales que dans la première catégorie, il y en a une autre catégorie, une troisième où il y a définitivement un manque de médecins. La dernière où il y a réellement une pénurie, et là les encouragements à l'établissement sont encore plus grands. Alors, ceci constitue un genre d'approche.

M. FORTIER: D'ailleurs, le praticien général maintenant qui va s'installer dans un centre rural, si on donnait les avantages économiques il y a d'autres avantages aussi. C'est qu'il y a des cours qui se donnent maintenant pour le garder au courant de la science médicale et ensuite il aura le droit aussi d'avoir sa spécialité en pratique générale, qui là le rehausse, qui devient spécialiste comme tous les autres. Alors, si on pouvait lui trouver une méthode peut être intéressante au point de vue monétaire, je crois que ç a pourrait aider le médecin de campagne.

M. MARLER: Lorsqu'on parle d'encouragement, évidemment c'est un terme qui est assez global, je comprends que des additions monétaires ça encourage, il y a peut-être d'autres façons de l'encourager sans que ce soit nécessairement monétaire. La diversité et la vie rurale peuvent être un encouragement.

M. CASTONGUAY: Il y a un autre phénomène. On demande ici dans la province de Québec qu'une personne soit citoyen canadien pour qu'elle puisse pratiquer. Cela tend à augmenter le nombre des spécialistes. Pour devenir citoyen ça prend cinq ans, si vous venez de l'extérieur. Les personnes qui viennent s'établir ici, pendant les cinq ans où ils sont résidents, prennent une spécialité. Possiblement que c'est un autre changement en vue d'un régime d'assurance-maladie, qui mériterait d'être étudié. La citoyenneté n'a pas rien à faire avec la capacité d'un médecin d'exercer. On pourrait lui demander de faire un stage sous la surveillance d'autres médecins de milieux hospitaliers pour voir s'il est compétent, et après, lui permettre de pratiquer avant cinq ans. On pourrait lui donner la permission de pratiquer en certains milieux où il y a un manque de médecins.

M. MARLER: Alors, ces conditions ne s'appliquent pas aux Etats-Unis par exemple, la question de la nationalité?

M. CASTONGUAY: Vous voulez dire pour un médecin, par exemple qui arriverait d'Europe aux Etats-Unis?

M. MARLER: Oui.

M. CASTONGUAY: A ma connaissance ils ont à se soumettre à des examens qui sont assez sévères mais ça ne repose pas sur la nationalité.

M. MARLER: Ce n'est pas nécessaire pour lui qu'il devienne citoyen américain?

M. CASTONGUAY: Non, pas à ma connaissance, parce qu'il y a un bon nombre de médecins canadiens qui vont justement aux Etats-Unis pratiquer. Alors, il y a réellement plus d'un moyen d'essayer de résoudre ce problème. Maintenant le champ d'application du régime en Angleterre est universel, ce n'est pas rattaché au paiement des primes. Toute personne née sur le sol britannique peut être traitée et même les visiteurs en provenance de l'étranger, à moins, qu'ils ne soient allés là spécifiquement pour se faire soigner. Tout le monde est admis au régime. Le financement, bien le paiement des primes par les personnes n'est pas requis pour déterminer si une personne est admissible aux soins ou non. C'est tout à fait détaché. Tout le monde est admissible aux soins, mais il y a des primes qui doivent être payées par les travailleurs, leurs employeurs, et le gouvernement, à même les revenus généraux, paie le solde du côut. On indique, à la page 24, au bas de la page les montants de primes payés, des montants arbitraires excessivement faibles. Et on indique après le coût du service national de santé au haut de la page 24, et on voit que les coûts augmentent rapidement. Vous allez voir dans certains des mémoires qui sont présentés qu'on exagère beaucoup les erreurs dans les estimations de coûts qui ont été faites au début du régime. Vous allez voir un mémoire par exemple, où il est dit qu'en Angleterre le coût initial a augmenté de 500% au bout d'une année. Il reste que l'augmentation des coûts est assez rapide et crée un problème en Angleterre. Il y a un système un peu particulier pour les contributions, elles sont perçues hebdomadairement par l'achat de timbres comme pour l'assurance-chômage ici.

M. MARLER: Est-ce que l'employeur fait cette contribution?

M. CASTONGUAY: L'employeur fait une contribution, oui. Une contribution qui est plus faible que celle de l'employé dans le cas des travailleurs-salariés.

On voit au bas de la page 24 que pour un homme, la contribution hebdomadaire est de $0.38 alors qu'elle n'est que de $0.09 pour un employeur et elle est fixe pour l'employeur, peu importe s'il s'agit d'un homme, d'une femme ou d'une personne de moins de 18 ans.

Maintenant, quant aux effectifs médicaux en Angleterre, c'est assez difficile d'analyser cette question étant donné qu'il ya eu certainement beaucoup d'émigration de médecins anglais vers l'extérieur et il y a eu immigration de médecins en provenance par exemple du Pakistan et des Indes. Comme on l'indique à la page 31, on voit qu'il y a eu une certaine augmentation en nombre pas tellement forte. Il est difficile de dire si réellement la situation est aussi bonne qu'elle pouvait l'être il y a 20 ans, ou moins bonne. Tout dépend de la qualité des médecins qui sont partis et de la qualité des médecins qui sont venus pour les remplacer. On voit que l'augmentation des médecins d'hôpitaux est beaucoup plus forte, ça indique justement que les spécialistes dans les hôpitaux sont mieux traités, que leur profession a plus d'attrait et qu'il y a un moins grand problème de ce côté. Les pharmaciens sont assez stationnaires, les ophtalmologistes sont en régression et il y a une légère augmentation de dentistes, malgré que, là aussi, il semble y avoir une grande pénurie.

Maintenant, les médecins sont groupés dans la « British Medical Association ». En plus, il y a aussi les collèges, mais disons que la « British Medical Association » correspond à 1' «Ontario Medical Association» et que les collèges jouent le même rôle que notre collège ici dans la province de Québec. Cette association joue le même rôle que 1» « Ontario Medical Association » joue en Ontario, c'est-à-dire qu'elle voit principalement à la défense des intérêts économiques des médecins membres de cette association.

Il y a un autre point à mentionner, je crois, en Angleterre, c'est que malgré le coût élevé pour se faire traiter privément et le fait que les spécialistes dans les hôpitaux ne peuvent consacrer qu'une partie limitée de leur temps à la pratique privée, il y a un nombre grandissant de personnes qui s'assurent pour pouvoir être traitées à titre privé. On indique à la page 32 que le nombre d'assurés augmente constamment et que c'est un signe de déséquilibre du régime, étant donné que lorsque le régime a été établi en 1948, on avait justement voulu faire disparaître cette distinction qui existait dans

le passé entre les assistés sociaux et les assurés auprès de compagnies privées, ce qui donnait lieu à deux niveaux de qualité de soins. Graduellement, ce phénomène se reproduit de nouveau. Il y a certainement, je pense bien, une leçon à tirer de ceci.

M. MARLER: Est-ce que le nombre de médecins qui semble à première vue, si je regarde à la page 31, est-ce que le nombre de médecins est relativement plus considérable que dans le Québec?

M. CASTONGUAY: 39,000.

M. MARLER: Pour une population de combien? 44 millions?

M. CASTONGUAY: Disons 44 millions et 39,000 médecins, alors ça veut...

M. MARLER: Cela veut dire...

M. CASTONGUAY: Un petit peu moins, je crois. Ici, si on prenait..

M. MARLER: Cela veut dire en somme, 1,100, 1,200 patients par médecin, tandis que, c'est-à-dire de population par médecin, tandis que chez nous c'est 850...

M. CASTONGUAY: A peu près un par 850. C'est assez difficile, il faut voir aussi la proportion des médecins qui sont dans des fonctions administratives et le nombre de médecins qui pratiquent.

M. MARLER: Cela demande évidemment une étude approfondie des statistiques pour se rendre compte des faits.

M. CASTONGUAY: Dans les nombres, il n'y a pas un écart énorme entre les deux.

Mademoiselle Beaudoin dit que c'est un par 960 en Angleterre et ici c'est à peu près un par 850 au Canada. Alors l'écart n'est pas tellement élevé.

M. LE PRESIDENT: D'autres question, messieurs.

M. TREPANIER: M. Castonguay, nous avons parlé hier du danger qu'il y aurait, par l'instauration d'un régime d'assurance-santé, que les médecins soient accaparés par les nombreuses visites à domicile. Vous voyez comme moyen de remédier à ce danger-là le fait d'exiger des frais modérateurs. S'il n'y en avait pas aux vi- sites de bureaux, d'en exiger dans les visites à domicile, ou tout au moins de les augmenter. Est-ce qu'il n'y aurait pas un autre moyen de parvenir à cette fin-là? Je ne sais pas si c'est ce que veut dire ce que j'ai vu ici à la page 13: les infirmières visiteuses. Est-ce que l'on entend par là des infirmières qui auraient pour fonction de visiter à domicile les malades et en somme dégager le médecin de cette obligation-là pour les cas normaux?

M. CASTONGUAY: Eh bien, disons il y a déjà ici dans la province de Québec des organismes d'infirmières visiteuses. Vous en avez par exemple attachées à l'hôpital Ste-Justine, le service social médical, et le but justement de ce centre est de permettre aux patients d'une part de sortir le plus rapidement possible de l'hôpital, lorsqu'il est suffisamment mieux. Les infirmières vont le visiter à domicile pour voir à ce que les médicaments soient bien donnés, pour refaire les pansements s'il y a lieu, etc... ce qui soulage nécessairement le médecin qui n'est pas obligé de faire ce travail. D'un autre côté, même si la formule pouvait être intéressante, il y a une autre chose qu'il faut mentionner, c'est qu'il semble y avoir une pénurie énorme d'infirmières dans la province de Québec, et surtout d'infirmières bien qualifiées. Elles sont déjà en trop petit nombre pour suffire à la demande à l'intérieur des hôpitaux, alors même si la solution, en théorie, pourrait paraître intéressante, en pratique initialement du moins, je crois qu'elle ne donne pas tellement de possibilités.

M. TREPANIER: Est-ce que vous voyez l'encouragement de cette formation d'infirmières et une possibilité intéressante de solutionner le problème?

M. CASTONGUAY: Franchement, à ce stade-ci, je ne suis pas assez au courant, personnellement, des problèmes que pose le recrutement.

M. TREPANIER: Non, mais en principe.

M. CASTONGUAY: Ah, en principe, ça semble excessivement intéressant comme idée, mais est-ce que la réalisation en est possible? Il semble que c'est assez difficile d'intéresser les jeunes filles à devenir infirmières, leur carrière aussi est relativement courte, un bon nombre se marient, un bon nombre vont pour un stage à l'extérieur voir du pays. Il semble y avoir un problème assez chronique dans ce secteur quant à l'insuffisance du nombre d'infirmières.

M. DUPRE: Cela existe à Montréal, ça. La Métropolitain, chaque fois que ma femme a un bébé, la Métropolitain avait une infirmière qui passait pendant un nombre X de jours jusqu'à ce qu'elle ait des ordonnances du médecin pour lui donner des conseils.

M. BRISSON: Mais ça fait longtemps. UNE VOIX: Elle est bonne!

M. FORTIER: M. Castonguay, en résumé, par exemple, les visites de nuit, il faut tout de même se fier un peu aussi à l'éthique des médecins. Je crois devoir dire que chez les médecins il y en a encore qui sortent la nuit. Seulement, ce qui arrive, c'est que moi je sais que ceux qui pratiquent dans mon bout, avec moi, on connait assez bien nos malades, alors on sait que quand un me demande, lui, il est malade. Alors vient un moment où on peut pas mal juger. Alors, est-ce que vous ne croyez pas que l'on devrait se fier à l'éthique professionnelle des médecins tout en ajoutant peut-être un montant. On donnait l'exemple concret qu'en Gaspésie on va voir un malade, mettons un voisin, et que l'on charge $5 et qu'on met ça même à$8, il y aurait déjà un intérêt suffisant et d'autant plus que le médecin, après tout, a une responsabilité vis-à-vis de ses confrères et vis-à-vis du Collège des médecins. S'il sait qu'il y a un cas urgent, il va y aller.

M. CASTONGUAY: Définitivement docteur, d'ailleurs sur cette question, disons que nous avons indiqué ceci à titre de guide, ou pour indiquer notre façon de voir les choses. Les médecins, par leurs organismes, vont se présenter devant le comité, vont pouvoir vous en dire beaucoup plus long et beaucoup plus en connaissance de cause sur cette question que nous pouvons en dire. Cela, nous l'admettons.

M. RENAUD: Je pense bien que les médecins vont se charger, docteur, les médecins vont se charger de nous poser la question lorsqu'ils vont venir devant nous. Je le crois.

M. FORTIER: Oui.

M. VAILLANCOURT: Ils vont certainement nous faire des suggestions.

M. MARLER: Quant à moi, je suis convaincu que d'une façon générale nous n'aurons pas d'abus de la part des médecins. J'admets qu'il y a probablement des cas où il y a des abus, de la part des médecins, et je suppose qu'il sera tout à fait naturel que de tels abus soient réprimés plutôt par le collège des médecins qu'autrement. Par contre, ce que j'envisageais lorsque j'en parlais plus tôt aujourd'hui, c'est l'abus par le patient qui a la passion d'avoir des médecins chez lui et qui les amène à toute occation possible. Si je ne me trompe, nous avons eu l'occasion d'en causer privément M. Castonguay, et vous envisagez que si nous avons un plan d'assurance-maladie, il y aura nécessairement des ordinateurs qui vont, à un moment donné, ou à la fin de l'année, nous dire quels sont les services rendus, non pas par le médecin mais à chaque patient dans le Québec, et vous serez averti par la machine, en passant les cas, de la personne qui aurait demandé 25 fois des visites à la maison; et je suppose que la correction de l'abus, ce sera de notifier le médecin qui a fait les visites que l'on pense que les visites à domicile sont trop nombreuses, et peut-être que les mécecins tâcheront de réprimer l'abus. Evidemment la difficulté c'est que une fois qu'on commence, c'est difficile de faire machine arrière, il est difficile d'apporter des frais dissuasifs à un moment donné, alors c'est un problème que nous devons envisager et étudier avant de faire la...

M. CASTONGUAY: Il est évident que la collaboration des médecins est encore ce qui est le plus important. Vous avez par exemple les régimes dont on a parlé en Ontario, en Alberta, les régimes à commandite médicale. Ce sont alors les médecins qui font face à tous ces problèmes-là eux-mêmes, sans aucune intervention de l'extérieur, et on n'entend pas dire que ces régimes donnent lieu à des abus même si le patient est traité sans devoir payer un supplément au médecin. La forme de contrôle la meilleure est donc encore celle que les médecins s'imposent collectivement et individuellement, et leur désir de collaborer avec le régime.

M. MARLER: Sauf, M. Castonguay, évidemment je ne puis pas dire que c'est en Ontario, mais disons en Alberta, la compagnie d'assurance pourra dire: c'est un gars qui est trop dispendieux comme risque, alors je ne l'assure pas.

M. CASTONGUAY: Non, mais... M. MARLER: ... son contrat.

M. CASTONGUAY: Dans les régimes à commandite médicale, ils ne semblent pas faire une sélection individuelle. Les gens sont assurés moyennant paiement d'une prime qui est la même pour l'ensemble de la province de l'Alberta.

Les sociétés privées d'assurance, elles, font une sélection et peuvent aussi refuse les personnes. Mais avec l'établissement des régimes facultatifs comme en Alberta, les sociétés n'ont plus le privilège de refuser un assuré.

M. MARLER: Même après une expérience entrêmement malheureuse?

M. CASTONGUAY: Exactement.

Alors, ce qui est fait à ce moment-là, c'est qu'il y a divers moyens de contrôle et d'éducation des médecins; il peut y avoir des médecins-conseils qui vont voir les médecins fautifs pour essayer de les remettre sur la bonne voie et...

M. TREPANIER: Mais en Angleterre, quel est, est-ce qu'il y a un problème de ce genre-là, au sujet de ...

M. CASTONGUAY: Les omnipraticiens, se sont définitivement plaints. On le voit dans la littérature et ce genre de remarques à l'effet que l'omnipraticien est débordé de demandes de toutes sortes qui sont très fréquentes.

M. TREPANIER: Une dernière question, M. Castonguay. Est-ce que le système d'assurance-santé en Angleterre, selon vous, diffuse des soins de santé suffisants à la population?

M. CASTONGUAY: Là, c'est une question... d'appréciation relative. Le niveau de vie en Angleterre est définitivement moins élevé qu'ici, par exemple. Alors toute proportion gardée par rapport au Canada, peut-être que nous trouverions ce qui se passe en Angleterre comme étant insuffisant. Par contre il semble que lorsqu'on se reporte à leur point de départ, en Angleterre, au lendemain de la guerre, il y a eu une amélioration pendant un bon nombre d'années, mais aujourd'hui l'on semble perdre du terrain. C'est donc assez relatif, je pense bien qu'il n'y a pas personne qui peut dire en Angleterre qu'il n'est pas traité lorsqu'il y a réellement nécessité médicale. Peut-être que ça prend un peu plus de temps, peut-être qu'il y a moins d'attention individuelle, mais est-ce que la santé de la population s'en ressent ou si c'est une question de satisfaction ou d'agacement individuel, c'est assez difficile à évaluer.

M. RENAUD: M. Castonguay, est-ce que vous avez examiné la question du coût du système d'assurance-maladie en Angleterre, comparativement au système de la Belgique, de la France.

M. CASTONGUAY: Les régimes couvrant des choses différentes, les comparaisons sont excessivement difficiles. En Angleterre, vous couvrez tout par le service national de la san- té; en Suède vous ne couvrez que certains soins et il y a des frais modérateurs, c'est excessivement difficile. Il reste que pour l'économie de l'Angleterre leur service semble être joliment plus difficile à supporter qu'il ne l'est en Suède. Je pense que c'est à peu près la seule réponse que l'on peut donner.

M. RENAUD: En rapport du budget total en Angleterre avec le budget des autres pays, avez-vous fait une comparaison du coût de ce service?

M. CASTONGUAY: Encore là, les montants affectés, la proportion du produit national brut affecté ou du budget national affecté à un service de ce genre, ne donne pas une réponse complète. Il y a une étude publiée justement à ce sujet à la fin du volume 8. C'est impossible en fait de tirer une comparaison comme celle-là. Vous voyez, en Suède les employeurs assument une bonne part des charges, alors ça se reflète dans les structures des salaires, les coûts sont répartis différemment. Aux Etats-Unis, il n'y a aucun régime d'assurance-maladie, il n'en reste pas moins que l'on affecte aux dépenses relatives à la santé peut-être plus proportionnellement per capita qu'en Angleterre, même compte tenu du niveau de vie. Naturellement il en reste moins pour d'autres services. C'est simplement les mécanismes pour diriger l'argent, les ressources dans les services de santé qui changent en fait. Le poids de ces services, sur l'économie du pays, que ce soit par le truchement de régime public ou purement par l'entreprise privée, peut être même plus lourd dans un pays qui n'a pas de régime d'assurance-maladie. Alors, c'est excessivement difficile d'essayer de faire des comparaisons entre les pays.

Nous sommes allés par exemple au marché commun dans lequel vous avez cinq pays qui sont groupés et où ce genre de questions a été étudié. On nous a remis des études, et encore là, il n'y a aucune conclusion qui peut être tirée de ces études qui sont assez détaillées, quand à savoir exactement quelle porportion de la richesse ou des ressources d'un pays est affectée à ce secteur, ça prend des formes tellement indirectes.

M. RENAUD: Je comprends. Merci.

M. LE PRESIDENT: D'autres question, messieurs? M. Castonguay, je vous remercie au nom du comité pour les explications additionnelles que vous venez de donner sur le régime d'assurance-maladie dans certains pays.

Il est six heures, nous ajournons à demain matin, à dix heures trente.

(à suivre)

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