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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 13 juin 1978 - Vol. 20 N° 130

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 92 - Loi sur la consultation populaire


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 92

(Onze heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi no 92. Les membres de la commission sont les suivants: M. Bédard (Chicoutimi), M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Vaillancourt (Jonquière), M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. Godin (Mercier), M. Clair (Drummond) remplacé par M. Beauséjour (Iberville), M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par...

M. Lavoie: M. Gratton.

Le Président (M. Clair): ... M. Gratton (Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Levesque (Bonaventure) remplacé par M. Lavoie (Laval), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont M. Bertrand (Vanier) remplacé par M. Fallu (Terrebonne), M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay)...

M. Grenier: M. Brochu remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).

Le Président (M. Clair): M. Brochu (Richmond) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Dussault (Châteauguay), M. Guay (Taschereau), M. Lavoie (Laval)...

M. Lavoie: Remplacé par M. Ciaccia.

Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Lévesque (Taillon)...

M. Lavoie: Remplacé par M. Lalonde!

Le Président (M. Clair): M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont) remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

M. Lavoie: Juste à la dernière minute. Il remplace M. Raynauld.

M. Gratton: C'est juste s'il n'avait pas été au Parlement, à la grande joie du ministre.

Campagne référendaire Comités nationaux (suite)

Le Président (M. Clair): Messieurs, au moment où nous avons ajourné nos travaux hier, j'avais pris en délibéré la recevabilité de la motion du député de Marguerite-Bourgeoys à savoir d'ajouter à la fin de l'article 21 l'alinéa suivant: Un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire sans nécessairement adhérer à un comité national. On s'entend que c'était bien là qu'on en était rendu. Pour disposer de la recevabilité de cette motion, je ferai premièrement appel au titre de la section dans laquelle on se retrouve, la Section 1 s'intitule en effet: Comités nationaux. A I article 21 comme tel, on retrouve deux principes qui sont I'introduction, si on veut, du mécanisme de mise en place des comités nationaux. L'amendement proposé est relativement distinct des principes contenus à l'article 21 qui est finalement un article technique. Au premier alinéa, on prévoit l'obligation pour le secrétaire général de donner certains avis et, à l'alinéa 2, on prévoit la possibilité pour les membres de l'Assemblée nationale de "s'inscrire auprès du directeur général des élections en faveur d'une des options soumises à la consultation populaire."

Même si l'article 21 comme tel ne constitue à proprement parler que l'annonce des comités nationaux, il me paraît que ce serait un peu tatillon de la part du président de déclarer l'amendement irrecevable parce que prématuré, puisque, finalement, le titre de la section est "Comités nationaux". Je pense que le président doit veiller à ce qu'on ne traite pas de questions de façon prématurée, mais la discrétion que je dois exercer dans ce cas me porte plutôt à laisser l'initiative aux députés et, même si le lien est ténu entre l'article 21 et la motion, à interpréter favorablement ce lien, pour, sur ce point, considérer l'amendement recevable, même si, encore une fois, il aurait peut-être été plus opportun de le présenter à l'article 22 ou à l'article 23. Le titre de la section étant "Comités nationaux", je préfère quand même laisser l'initiative aux députés, considérant qu'il n'y a pas de principes fondamentaux de mis en cause.

Le deuxième point sur lequel proprio motu je me suis penché, c'est celui de savoir si l'amendement contredit, s'oppose, met à l'écart un principe déjà adopté par l'Assemblée nationale. Le chapitre VIII prévoit la constitution de comités nationaux avec une obligation qualifiée — si je peux me permettre l'expression — pour tous les électeurs, groupes ou partis politiques de se rattacher aux-dits comités nationaux. De sorte qu'il est bien clair qu'à titre de président, je ne pourrai admettre, déclarer recevables des amendements qui s'opposeraient de front à ce principe déjà admis en deuxième lecture.

A la lecture de l'amendement proposé, cependant, deux mots m'apparaissent importants, soit les mots "sans nécessairement adhérer à un comité national", de sorte qu'encore là, en exerçant ma discrétion, malgré l'affirmation que j'ai faite selon laquelle je ne déclarerai recevable aucun amendement qui s'opposerait au principe déjà affirmé dans la deuxième lecture, les mots "sans nécessairement" me laissent présumer qu'il y aurait des modalités qui seraient précisées à d'autres articles par le même proposeur de cette motion d'amendement, qui éviteraient de contredire ce principe de front. En conséquence, compte tenu du fait que le

député de Prévost, je pense, a déjà affirmé, à quelques reprises qu'on doit favoriser, autant que faire se peut, la discussion, c'est sûrement un cas d'amendement qui est à la limite même de la contradiction du principe affirmé en deuxième lecture; cependant, en exerçant, au meilleur de mes connaissances, la discrétion qui m'est confiée, je pense que les mots "sans nécessairement" me permettent de considérer que l'amendement proposé ne heurte pas de plein front le principe affirmé en deuxième lecture au sujet des comités nationaux et, dans les deux cas, concernant les deux arguments, tant en ce qui concerne le rattachement de l'amendement proposé à l'article 21, plutôt qu'à un autre amendement, que sur la question de savoir si oui ou non l'amendement proposé contredit un principe affirmé en deuxième lecture, j'exerce ma discrétion dans le sens de déclarer cet amendement recevable.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vous remercie, M. le Président, de votre décision. Il a fallu le changer à la dernière minute — je m'en excuse — étant donné une question technique de recevabilité. D'habitude, on les fait dactylographier et distribuer.

M. le Président, en effet, le principe de la loi, comme vous l'avez dit tantôt, c'est que l'on doive appartenir au comité national pour participer au référendum. Vous avez sûrement songé, sans les mentionner, aux exceptions qui sont contenues au paragraphe 26, à savoir que ne sont pas considérées comme des dépenses réglementées un certain nombre de dépenses, y compris 5300 par personne pour des réunions. Donc, déjà, le principe souffre des exceptions, mais nous trouvons que ces exceptions ne sont pas suffisantes.

Que le projet de loi 92 constitue une atteinte à nos libertés fondamentales, c'est clair, c'est admis, et pour la nième fois depuis 1976, le gouvernement se voit rappeler à l'ordre par la Commission des droits de la personne. C'est la raison pour laquelle nous faisons l'amendement, pour élargir, pour injecter une mesure de liberté qui m'apparaît absolument essentielle dans le genre de société dans lequel on veut vivre. (11 h 45)

Le cas qui nous occupe, à l'article 21, concerne la liberté d'expression et d'association. En imposant le carcan des comités nationaux, on limite la liberté des gens de s'exprimer. Je pense que tous l'ont reconnu. Le gouvernement, s'il accordait plus d'importance aux libertés fondamentales des gens qu'à son option séparatiste, devrait en rougir jusqu'aux oreilles et s'affairer à faire disparaître à jamais ces violations des droits fondamentaux des gens. Mais que nous offre-t-il? Je pense. M. le Président, qu'étant donné l'économie de la délibération que vous nous avez permise, hier, sur l'article 21, étant donné que le ministre lui-même, lorsque nous avons abordé ce chapitre, a fait connaître un projet d'amendement, l'a fait même distribuer, je pense que vous me permettrez, étant donné que cet amendement se veut la réponse à nos critiques, vous me permettrez d'en faire état.

On nous offre des comités affiliés. Lesquels? Quels seront leurs droits? Quel sera le fonctionnement? Quel contrôle sur leurs dépenses devra imposer le comité national? On ne le dit pas. La commission a lancé l'idée des comités affiliés pour sortir de l'impasse qui était créée par la contradiction des objectifs, à savoir, d'une part, le contrôle des dépenses mais à l'intérieur d'une structure fermée, et d'autre part, l'objectif de la commission de protéger les libertés fondamentales des gens. Mais la commission ne les a pas définis. A la page 7, la commission dit: "II faudra, bien sûr, assurer une répartition proportionnelle des revenus entre le groupe majoritaire et le groupe affilié, selon les critères qui pourront être précisés pour chaque comité national, le cas échéant, dans ses règlements." Elle a lancé la perche au gouvernement, espérant que le gouvernement ferait son boulot, définirait le concept qui a été pensé et lancé par la commission, mais I'amendement ne définit pas davantage les droits, les limitations, le mode de fonctionnement des comités affiliés.

Voyons le raisonnement de la Commission des droits de la personne. A la page 6, elle dit ceci: En pratique, cependant, le contrôle des dépenses impliquant nécessairement le contrôle de toute la stratégie de la campagne référendaire pour chacun des comités nationaux, il se peut que des groupes refusent de se joindre au comité national correspondant à leur option, de crainte de se voir indûment brimés dans leur liberté d'expression, par exemple parce qu'ils préféreraient mettre davantage I'accent sur une approche sociale ou culturelle plutôt que sur la dimension économique du problème débattu". Donc, la raison pour laquelle la commission pense que les libertés sont brimées, c'est à cause du contrôle des dépenses. Je pense que c'est évident que c est justement à cause de I objectif du contrôle des dépenses que le gouvernement a impose la structure fermée des comités nationaux et qui brimait la liberté des gens de participer au référendum...

M. le Président, est-ce que je peux continuer? Je n'aime pas les interruptions du ministre. S'il a une question à me poser, je pourrai y répondre, mais pas en plein milieu d'une discussion.

C est donc l'objectif du contrôle des dépenses qui vient en conflit avec I'autre objectif, soit la liberté des gens. La commission poursuit: Alors, dans le but d'éviter le boycottage des comités nationaux et la multiplication des groupes oeuvrant hors de I'organisme-parapluie et d'atténuer significativement la contrainte pesant sur la liberté d association et d'expression, la commission propose d introduire la notion de statut d'affiliés pour les individus et groupes qui ne voudraient pas s'associer à la stratégie globale décidée par le comité national, tout en étant d'accord avec I'objectif visé en définitive ". C'est clair, d'après la commission, que c'est pour sortir les groupes et individus de ce carcan qu on suggère la création de groupes affiliés. Donc, c est à cause du contrôle que le projet de loi impose des carcans, conclut la commission. Alors sortons les gens brimés par

le biais des comités affiliés. Mais les a-t-on vraiment sortis du carcan? Oui, si on les a libérés des contrôles puisque ce sont les contrôles qui les brimaient. Contrôles qui au départ les brimaient, de l'avis même de la commission. Non, s'ils sont encore soumis aux contrôles. Or, les comités affiliés sont encore et toujours soumis aux contrôles de la loi, d'après les autres dispositions de la loi. Par conséquent, ils sont encore soumis à la brimade de la structure du carcan.

M. Fallu: Vous faites de beaux syllogismes.

M. Lalonde: Je pense que c'était clair, mais que l'analyse devrait être faite parce qu'on a référé à cette intervention de la commission, mais on n'en a pas fait d'analyse jusqu'à maintenant. On a simplement lancé un mini-amendement de trois lignes qui donne le droit de créer par règlement... Naturellement, lorsque le gouvernement se trouve coincé, on se réfère à des règlements. Heureusement que dans ce cas-ci, il ne s'agit pas de règlements du gouvernement. C'est la façon dont on a cueilli, ni plus ni moins, de la part du gouvernement, la suggestion de la commission. On ne peut pas reprocher à la commission de ne pas avoir tout prévu. Elle ne fait pas des lois. Ce n'est pas à elle de les faire, de toute façon, mais on doit reprocher au gouvernement d'avoir fait semblant d'emprunter l'idée de la commission sans l'avoir élaborée et sans lui avoir donné une charpente, sans en avoir établi les tenants et aboutissants, sans avoir corrigé le mal dont souffrait le comité national au niveau des libertés individuelles, sans avoir fait disparaître cette imposition, cette contrainte qui, de l'avis de la commission, existait au niveau du comité national.

Dans l'état actuel de l'amendement du ministre, cela équivaut à dire que ceux qui ne sont pas d'accord, ceux qui ne veulent pas rester dans la maison — la maison, c'est le comité national, c'est la structure — on ne les sort pas de la maison, mais on les envoie dans la cave. On dit: Vous restez, mais ailleurs dans la même structure. Cela équivaut à peu près à cela, étant donné que les contrôles doivent demeurer.

La démonstration du député de Jonquière à la suggestion de notre amendement, à savoir que des groupes peuvent exercer leur droit à la dissidence, leur droit d'opinion et d'association en dehors du comité national, se voulait un argument par l'absurde. Il n'a réussi qu'à démontrer, en ridiculisant les gens, le peu de confiance qu'il leur fait. D'ailleurs, la réponse immédiate qui est venue et qui est tellement facile — c'est malheureux qu'on ait recouru à la facilité — c'est que même l'article 26. avec les S300, si on y appliquait le même raisonnement que le député de Jonquière, permettrait à des gens, en dehors des comités nationaux, de dépenser à peu près S1 800 000 000. C'est tellement absurde de penser que les gens vont aller jusque là.

M. Bédard: S1 800 000 000 pour des assemblées.

M. Paquette: Pour des assemblées. S300 l'assemblée.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Lalonde: Si c'est la seule liberté que le gouvernement nous laisse, on va s'assembler.

M. Bédard: A l'intérieur des comités.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs.

M. Lalonde: M. le Président...

M. Lavoie: Carcan...

M. Lalonde:... en laissant aux individus et aux organismes intermédiaires et sans but lucratif, la liberté de dépenser leur argent. C'est le but de notre amendement. En ce faisant, si on assiste à plus de publicité, je préfère cet inconvénient à la disparition de leur liberté. Au fond, c'est le choix qui nous est offert. En interdisant les dépenses aux sociétés commerciales, le résultat, même s'il dessine un déséquilibre entre les deux options, aura quand même le caractère démocratique de représenter l'opinion publique librement exprimée.

D'ailleurs, quand on parle de contrôle des dépenses électorales et qu'on veut rappliquer de façon carrée aux dépenses référendaires, je pense qu'on doit s'imposer l'analyse suivante, un peu de rétrospective. Pourquoi, au départ, est-ce devenu comme cela, le désir des démocraties de contrôler les dépenses électorales? C'est pour mettre fin à cette longue et vieille tradition qui existait depuis des centaines d'années et qu'on appelle l'achat de charges publiques.

Malheureusement, selon les dépenses électorales de certains autres secteurs électoraux, par exemple au niveau municipal, le coût des élections devient tellement exorbitant relativement aux revenus officiels qui sont attachés à la charge que n'importe quels doutes et n importe quels soupçons sont justifiés. Alors, c'est cela qu'on a voulu faire disparaître, au départ — cela fait plusieurs années; ce n'est pas venu depuis un an — en faisant le contrôle des dépenses électorales. Quelqu'un est élu à une charge. Si cela coûte $100 000 pour se faire élire marguillier, il y a quelque chose qui ne marche pas, à moins que ce ne soit le cas très exceptionnel d'un mécène.

M. Godin: C'est à peu près cela.

M. Lalonde: A ce moment-là, quand c'est généralisé, c'est un cancer qu'on a voulu faire disparaître lorsque, d'ailleurs, le Parti libéral a commencé à imposer le contrôle des dépenses électorales, il y a plus de dix ans.

Au niveau référendaire, il n'y a personne qui est éiu. Il y a seulement des idées qui sont communiquées. Il y a seulement des schémas qui sont développés. Il y a seulement une persuasion qui est faite. C'est différent. Oui, il faut quand même éviter l'orgie épouvantable qui pourrait

limiter le libre arbitre, au fond, I'exercice du raisonnement individuel. Oui, il faut l'éviter, mais il faut peut-être s'imposer un exercice de réflexion différent en ce qui concerne les dépenses référendaires qu'en ce qui concerne les dépenses électorales parce que ce n'est pas le même mécanisme, ce n est pas le même objectif. Dans le cas des dépenses référendaires, on n'échange, au fond, que des idées. Naturellement, vos idées sont rattachées à des intérêts, oui. Aucun doute que certains seront pour une idée, non pas seulement abstraitement, mais concrètement à cause des effets concrets dans la réalité. D'autres pourraient avoir I'opinion contraire pour des intérêts aussi de même nature. Mais il n'y a pas de charge attachée au oui ou au nom. Il me semble que cela devrait imposer au gouvernement le soin, l'obligation de réfléchir davantage plutôt que, simplement d un seul trait de plume, enlever les libertés aux gens en les forçant à se réunir à l'intérieur d'un comité national.

C'est ce que mon amendement veut changer, M. le Président. Laissez-moi lire, en terminant, le dernier paragraphe de réflexion de la Commission des droits de la personne sur cette suggestion qu'elle a faite des comités affiliés. Et on voit jusqu'à quel point la commission est fort consciente de ne pas avoir tout réglé, au contraire, en faisant cette suggestion. Je cite: "Est-il besoin, pour terminer, de rappeler au gouvernement que les règlements régissant les comités nationaux seront assujettis à la Charte des droits et libertés de la personne, et de lui souligner les nombreux écueils pour les droits et libertés de la personne qui jalonnent nécessairement la recherche de l'égalité stricte entre les options." C'est une interrogation qui demeure, surtout de la façon avec laquelle le ministre a simplement emprunté le mot sans y mettre de chair, en ne faisant aucun effort pour élaborer le concept, la notion qui a été proposée par la commission.

Il me semble que pour voter contre l'amendement, M. le Président, on devrait démontrer... Ici, j'ouvre une parenthèse, M. le Président. On a déjà annoncé qu'au niveau du financement, nous aurons des amendements qui vont faire la suite de cet amendement que je propose. Mon amendement seul, tel quel, ouvrirait une porte trop grande et les dispositions concernant le financement vont se trouver, comme vous l'avez dit hier, dans votre décision, dans la deuxième section, de sorte que nous allons compléter la construction que nous offrons à la commission dans un autre endroit.

Ceux qui seront contre mon amendement, M. le Président, compte tenu non seulement de cet amendement mais des autres qui vont venir, devront démontrer comment on peut, dans un gouvernement, alors que l'on se félicite de vouloir consulter la population, comment on peut le faire en limitant indûment la liberté des gens de s'exprimer, de s'associer comme ils le veulent lors de l'exercice de leurs droits.

Est-ce qu'on a peur, de l'autre côté de la table, que le jeu normal de la démocratie soit fait? Est-ce qu'on a peur que le résultat de ce jeu normal de la démocratie soit défavorable à des options que le gouvernement voudrait mettre de l'avant? Je l'ignore. Mais à moins que le ministre de la Justice, responsable devant l'Assemblée nationale de l'application de la Charte des droits et libertés de la personne, ne puisse démontrer un dossier absolument transparent au niveau des libertés fondamentales, tous les soupçons et toutes les spéculations seront possibles. (12 heures)

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, cet amendement qui a été déposé hier soir faisait suite au premier qui avait été jugé irrecevable à cause de l'implication financière, principalement, à l'article 21. Sur celui-ci, M. le Président, je dois vous dire: Le principe des comités nationaux qui apparaît a l'article 8 n'est pas nécessairement mauvais et n'implique pas que bon non plus. Il est sûr que ce contrôle des dépenses qui sera fait par ces comités nationaux va obliger des personnes a vivre ensemble, à cohabiter alors qu'on n'a pas les mêmes us et coutumes. Cela pose des problèmes.

Moi, je dois vous dire, M. le Président, que la motion qu'on a devant nous aujourd'hui ne mentionne pas d'aspect financier; autrement il aurait été jugé irrecevable, mais il ne le dit pas non plus. A partir de là, j'entendais, hier soir, le député de Gatineau qui disait: Bien moi, qu'il y en ait des orgies, cela ne me dérange pas, ou à peu près dans ces termes...

M. Gratton: Non, non, non.

M. Grenier: J'irai au journal des Débats et cela reflète assez bien la pensée du discours hier soir.

M. Gratton: M. le Président, question de règlement en vertu de l'article 96.

M. Grenier: Je m'excuse, orgies de dépenses, je veux dire.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau, vous invoquez le règlement.

M. Gratton: Oui, M. le Président.

M. Paquette: En vertu de l'article 96?

M. Gratton: Oui.

M. Paquette: Vous devrez le faire après l'intervention.

M. Gratton: On peut le faire avec le consentement du député. Je sais que le député de Mégantic-Compton ne me refusera pas de rectifier ce qu'il vient d affirmer, puisqu'il sait lui-même ce que j'ai dit hier; je n'ai pas souhaité qu'il y ait des orgies de dépenses référendaires. Mais j'ai dit

qu'entre plus de liberté et moins de contrôle et plus de contrôle et moins de liberté, je préférais la première solution.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je suis justement à l'opposé du député de Gatineau.

M. Gratton: Vous êtes pour contrôler.

M. Grenier: Oui, contrôler. J'aime mieux voir contrôler certaines orgies au risque que des groupes puissent plus difficilement s'exprimer. Je m'explique. Cela peut faire rire, parce qu'il y en a qui ont le rire facile.

M. Lavoie: Oui, cela fait rire.

M. Grenier: J'aime mieux choisir cette option et je serai en arrière d'une option comme celle-là, je la défendrai tout le long, à mesure que cela viendra dans les autres articles qui vont impliquer des investissements financiers. Je défendrai cette option.

Je n'accepterai certainement pas qu'à l'article 21 on puisse permettre des individus, des groupes et des partis, et je nomme des gens ici rien que pour le "fun", rien que pour voir ce que cela donnerait si on mettait des individus, par exemple, capables de se monter une équipe, puis d'avoir des sommes d'argent. Je vois arriver un Marcel Chaput, capable d'aller se chercher de l'argent et partir sans limite de fonds. Ce serait beau. Je vois arriver un Jean Lesage, avec beaucoup de prestige dans le Québec encore, président d'un certain comité qui se ramasse de la finance et qui part défendre une option. Je vois aussi arriver un individu qui est un Québécois, un nommé Trudeau, qui est à Ottawa actuellement, qui décide comme individu de se ramasser des fonds et de venir défendre son option à titre d'individu. Ce sont des individus. Je vois arriver des groupes, par exemple, c'est l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, on va rencontrer mon bon ami qui est président des Fils du Québec qui va nous arriver. Il nous a dit qu'ils étaient 6 millions dans son groupe et il m'a même dit que je faisais partie de son groupe, je ne savais pas cela.

M. Lavoie: Cela ne me surprendrait pas. M. Lalonde: On se le demande. Le Président (M. Clair): A I ordre!

M. Grenier: Ah, oui! Les libéraux qui font flèche de tout bois m'écoeurent des fois, quand j'entends des réflexions de ce genre, surtout quand cela vient du leader. Si cela venait d'un "back-bencher" libéral, cela ne me dérangerait pas trop.

M. Lavoie: Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est...

M. Grenier: On fait des raisonnements de ce genre, et j'entends le leader libéral faire des farces là-dessus, tâcher de faire une mise au point en parlant d'individus et de groupes, c'est cela l'amendement des libéraux, ce matin, Jésus Marie! C'est cela que nous amène Lalonde. Est-ce qu'on va se laisser passer cela? J'espère qu'il y aura des gens assez sérieux qui vont comprendre une fois pour toutes qu'on ne peut accepter des orgies comme on en propose là-dedans, sans limite, à l'exemple de la loi du fédéral, qu'on a rejetée, qui a valu une motion en Chambre. On le rejette, ce référendum. Vous ne viendrez pas nous copier un référendum semblable à celui d'Ottawa, qui ne propose rien. Où les Fils du Québec vont-ils prendre leur argent? J'aurais peur de cela. J'aurais peur de l'Ordre de Jacques-Cartier. J'aurais peur des fonds du candidat Bill Shaw, dans l'ouest de Montréal, pour une campagne référendaire. On ne peut pas les accepter comme groupes. Cela peut faire sourire les libéraux, qui sont pour les orgies. Cela ne me dérange pas qu'ils optent pour cette option, ils sont pour cela.

M. Bédard: Vous vous amusez avec les droits et libertés et vous oubliez le principal!

M. Grenier: II y aurait des groupes farfelus, à part de ceux qui arriveraient, M. le Président. Il nous arriverait toutes sortes de groupes farfelus à part cela. La liberté des individus, il y a aussi une limite à cela. La liberté des uns finit là où le droit des autres commence. En campagne référendaire, je ne veux pas que les ondes soient payées et entretenues par les Fils du Québec, je ne veux pas de cela. Je ne veux pas avoir sur les ondes l'Ordre de Jacques-Cartier, trois heures par jour, et je ne veux pas avoir sur les ondes un Marcel Chaput, un Trudeau et un Lesage, avec les finances qu'ils vont amasser. Ils vont être capables d'en amasser; Dieu sait qu'ils en sont capables!

Il y aurait les partis politiques aussi, parce que c'est cela... Les partis politiques, cela paraît bien lorsque ce sont des partis qui sont autour de la table ici, mais le leader parlementaire du Parti libéral devrait se rappeler qu'il nous a dit, hier, qu'il y en avait sept. Cela veut donc dire qu'on va voir arriver le Parti rhinocéros, le Parti communiste aussi, pendant les campagnes référendaires. Je ne veux pas que le Parti communiste envahisse les ondes pendant la campagne référendaire pour venir vendre ses théories. Je n'en veux pas! Alors, je vous dis qu'à partir de là, le droit des uns finit là où le droit des autres commence. Mon droit de citoyen du Québec, c'est de ne pas entendre les théories communistes pendant la campagne référendaire, ne pas entendre les Fils du Québec, ne pas entendre l'Ordre de Jacques-Cartier et le candidat Bill Shaw aussi souvent que le Parti libéral, l'Union Nationale, le Parti pénépiste. C'est mon droit de Québécois, il commence là.

Je pense que les arguments que j'ai valent bien les rires sarcastiques de mes voisins de droite. Je dois vous dire une chose. Même si, actuellement, le Parti libéral dit qu'il faut être

soupçonneux, face au gouvernement, il faut se méfier quand j'entends — c'est effrayant ce qu'on entend de ce côté-ci de la table et je commence à avoir mon voyage, ce matin — le leader parlementaire libéral dire qu'il avait donc confiance à l'ancien ministre qui était ici, ce grand démocrate. Il n'y a rien qu'il ne dit pas de l'ancien ministre, je l'ai même entendu le traiter de menteur autour de cette table...

M. Lavoie: II y a des démocrates menteurs aussi!

M. Grenier: Ah oui, faites-nous rire!

Une telle bouffonnerie, même si cela se suit d'une semaine à l'autre, je ne peux pas l'endurer, j'en suis incapable. Ce matin, la motion que j'ai, je vais la défendre et la défendre pour notre formation politique, elle va avoir du sérieux. On n'acceptera certainement pas de se faire dire des choses dans un tel amendement et que cela ait un semblant de sérieux de ce côté-ci de la table. Je ne l'accepterai pas et je ne voterai certainement pas pour un tel amendement.

Le gouvernement nous a dit que la question serait limpide, qu'elle serait claire. On n'a pas fait préciser encore si à la question on répondrait par un oui ou un non. Mais l'ancien ministre l'a dit, ainsi que le ministre actuel, il va y avoir une question claire et un rapport clair. Je dis que le gouvernement qui n'est pas capable d'obtenir une réponse claire s'embarque dans des problèmes après un référendum. Il n'y a personne qui veut, des deux côtés de la table, que la question recommence le lendemain du référendum. On était tanné, avant les dernières élections, et n'oubliez pas qu'on peut bien faire porter pas mal de poids sur l'actuel gouvernement, on peut bien l'accuser de toutes sortes de choses, mais je pense que l'ancien a été accusé pas mal aussi avant les élections, parce que de 102, il est tombé à 26. Il y a des gens qui n'en voulaient plus de ce gouvernement, il faut bien se rappeler cela.

A partir de cela, M. le Président, soupçon pour soupçon, je lui fais confiance dans le moment, on verra ce qui arrivera. Si la réponse devait être un oui ou un non, il ne se pose pas de problème. A partir de là il faudra se faire une opinion et entrer soit dans le oui, soit dans le non, cela ne pose aucun problème. Cela pose des problèmes à certains partis politiques qui peuvent retirer des finances d'un autre gouvernement, ailleurs, à d'autres paliers et qui voudraient avoir toutes sortes de groupes qui pourraient se former. Pour eux, oui, cela peut poser des problèmes. Mais, pour moi, bien honnêtement ce sera un référendum qui va se régler entre Québécois, celui-là, et je ne permettrai jamais, dans aucun amendement, qu'on ouvre la porte à toutes sortes de gens qui pourraient financer le Parti communiste ou des formations politiques, tous les groupes possibles qui pourraient nous arriver par voiliers du gouvernement central, et on sait à qui je fais allusion. Jamais! Jamais je n'accepterai un amendement de ce genre. J'aime mieux voir les libertés des autres finir là où les miennes commencent que d'opter pour cette orgie de dépenses qui pourraient être amenées au Québec et faire que l'après-référendum sera encore plus pénible que ce qu'on se prépare à voter. Ils vont le gagner avec de tels moyens, mais "too much is too much" à un moment donné, on ne peut pas tout accepter non plus. C'est cette position que je défendrai et je ne vous cache pas que la position que je défends au comité référendaire dont je fais partie, est celle-ci. Je pense que je la défendrai tout le temps.

Nous attendrons la question, honnêtement, nous attendrons la question, puis les personnes qui veulent être honnêtes vont attendre que la question se pose. Il y aura des jours où on se battra sur les autres articles pour tâcher de donner le plus de tranparence possible, le plus de temps possible aux personnes de se faire une opinion là-dessus. Ce sera le sens de mes interventions et je ne vous cache pas que jamais je n'accepterai un amendement qui est aussi farfelu que celui qu'on nous propose ce matin. Cela revient à ce que je vous disais hier. Après dix heures du soir, vous savez, il n'y a pas bien des choses sérieuses qu'on peut proposer.

Le Président (M. Clair): Le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys a encore trouvé le moyen de triturer le rapport de la Commission des droits de la personne et de nous dire: On a encore là un projet de loi qui attaque nos libertés. Cela dépend de ce qu'on entend par "nous", par "nos" libertés. En fait, la Commission des droits de la personne est consciente de la difficulté de ce projet de loi qui est, encore une fois, de concilier l'égalité des chances dans l'information, puis le droit aux citoyens de ne pas se faire embourber dans un paquet de propagande qui va à sens unique, et, d'un autre côté, la liberté d'expression. Dans ce débat fondamental, M. le Président, l'Opposition libérale privilégie les émetteurs au lieu des récepteurs des messages. Elle dit: II faudrait permettre à tous ceux qui veulent parler, qui veulent expédier des dépliants, faire des assemblées, de dépenser à peu près sans limites, à peu près sans contraintes. Le droit du citoyen là-dedans? Le droit du citoyen d'avoir une information équilibrée, égale de chacune des options, la plus égale possible, de ne pas se faire enterrer par de la propagande d'un bord ou de l'autre, qu'est-ce qu'on en fait là-dedans? M. le Président, pas grand-chose.

Le député de Marguerite-Bourgeoys dit: Vous avez bien peur de laisser fonctionner le jeu normal de la démocratie. Si c'est cela, votre démocratie, on n'en veut pas. On n'en veut pas d'une démocratie qui permet aux gens qui ont le plus d'argent dans la société de maintenir leur pouvoir en inondant les citoyens de propagande et en ne leur permettant pas de faire des choix éclairés et véritables, en étant informés également sur les deux bords. Il faut que ce soit bien clair au départ, M. le Président.

Je demanderais aussi au député de Marguerite-Bourgeoys s'il pense que la Loi électorale est une atteinte aux libertés fondamentales. Dans la Loi électorale, ce sont seulement les partis politiques qui peuvent dépenser et, si le groupe untel, le syndicat untel ou la compagnie une telle ou le Conseil du patronat veulent participer à une élection, ils sont

obligés de s'acoquiner avec un parti politique. Alors, M. le Président, il faudrait arrêter de charrier là-dessus, cesser de triturer et de dénaturer le rapport de la Commission des droits de la personne dont le ministre a annoncé qu'il retenait la principale recommandation concernant les groupes affiliés.

La deuxième point que je voudrais mettre en évidence, M. le Président, c'est que cet amendement et les autres qui nous sont annoncés en complément ne règlent pas le problème fondamental des tiers partis et des groupes minoritaires dans des comités nationaux. Je voudrais lire une partie du document de la conférence de presse du Parti libéral qui dit: "Au cas où un parti déciderait de ne pas adhérer à un comité national et qu'il voudrait dépenser plus que $3000, les dispositions de la loi 2 s'appliquent, agent officiel et tout cela. Mais ils ajoutent ceci: "Les partis politiques seraient cependant fortement incités à travailler au sein des comités nationaux, dans la mesure où une partie de leurs dépenses référendaires leur serait éventuellement remboursée par l'Etat".

En somme, c'est clair. Ils disent aux tiers partis; Vous allez pouvoir dépenser plus que $3000 en dehors des comités nationaux, mais nous, on va garder les fonds publics, on va garder les subventions de l'Etat, parce qu'évidemment, ce ne sont que les comités nationaux qui vont pouvoir dépenser les subventions gouvernementales. Or, le député de Marguerite-Bourgeoys dit: Avec les groupes affiliés, le gouvernement voudrait faire passer les tiers partis et les autres partis d'Opposition de la maison à la cave. Moi, je dirais qu'avec l'amendement libéral, on ne les envoie pas dans la cave; on les met dans la rue, on les met carrément dans la rue. On leur dit: Si vous voulez dépenser plus que $3000, vous n'aurez pas une "cenne ' des fonds de l'Etat.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont, je m'excuse de vous interrompre; je voudrais simplement m'assurer que vous avez bien pris connaissance de l'amendement pour respecter la pertinence du débat. Parce qu'étant donné que j'ai déclaré le premier amendement prématuré, je pense qu'on peut se douter qu'à un moment donné il reviendra; on aura le loisir de revenir là-dessus. Alors, je voudrais simplement vous rappeler le corridor qui est tracé. (12 h 15)

M. Paquette: M. le Président, je pense... Oui, oui. ce n'était pas nécessaire parce que, sauf tout le respect que je vous dois, je pense que cet amendement nous annonce d'autres amendements qui viennent. Pour comprendre la portée de cet amendement, il faut le placer dans le sens de l'intervention du député de Marguerite-Bourgeoys qui nous dit qu'un peu plus loin ils vont avoir des arrangements de type financier. C'est pour cela que je pense qu'il est important de dire cela et de dire qu'avec ce groupe d'amendements, dont celui-ci est le premier qui ouvre la porte aux autres, c'est pour cela qu'il faut le battre. La deuxième raison pour laquelle il faut le battre, c'est qu'on va envoyer les tiers partis non pas dans la cave, mais carrément dans la rue. Et on sent, derrière cela, l'intention de l'Opposition libérale de monopoliser les comités nationaux et les fonds publics à ses propres fins et de dire aux autres partis: Vous allez pouvoir sortir, regardez, la liberté d'expression, vous allez pouvoir sortir du comité, faire votre campagne à part. Sauf qu'on oublie de dire que c'est seulement les comités nationaux qui vont pouvoir disposer des fonds publics et que les tiers partis n'auront pas une maudite "cenne " pour fonctionner.

Alors, je pense que non seulement à cause du premier aspect que j'ai soulevé, l'Opposition officielle a une drôle de conception de la démocratie qui privilégie les riches au détriment du droit des citoyens d'être informés de façon équilibrée. Mais en plus, elle attaque la liberté d'expression des tiers partis en les privant des fonds publics dont ils vont avoir besoin, comme les autres, pour faire connaître leur option. Encore une fois, si c'est le genre de liberté, si c'est le genre de Québec des libertés que l'Opposition libérale veut installer au Québec, je pense qu'elle va être longtemps dans l'Opposition et cela va être très bien pour les Québécois!

Le Président (M. Clair): M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, nous avions de la difficulté à nous entendre avec l'Opposition sur bien des points, entre autres des points majeurs au niveau des principes qui sont à l'intérieur de ce projet de loi, à savoir l'instauration de comités nationaux, contrôle des dépenses. Je croyais qu'il y avait une possibilité d'en venir à s'entendre par rapport à certains amenuisements qui pourraient être apportés, certaines exceptions qu'on dit insuffisantes qu'on pourrait inclure. Mais je me rends compte que les possibilités de s'entendre sont très minimes, à moins que l'Opposition officielle change d'attitude. Cette résolution, cet amendement proposé par l'Opposition officielle, à mon humble avis, est la négation même du principe contenu à l'intérieur du projet de loi qui est la formation de comités nationaux et à l'intérieur desquels doivent être les partis politiques. Et c'est la négation même d'un autre principe qui est le contrôle des dépenses — sur lequel je ne m'étendrai pas — qui représente un des moyens qui est essentiel pour nous au niveau des principes. Les comités nationaux, comme vous le savez, représentent le moyen, un des moyens pour contrôler effectivement ces dépenses. Leur résolution met en cause, complètement, le principe de la formation de comités nationaux. Et, pour nous, c'est bien beau de parler des droits et libertés à la manière dont le fait le député de Marguerite-Bourgeoys, ce qui n'éclaire personne, mais il faut quand même regarder la Charte des droits et libertés de la personne avec beaucoup plus de sérieux que ne l'a fait le député de Marguerite-Bourgeoys. Je l'invite quand même à lire les considérants qui précèdent la Charte même des droits et libertés de la personne où sont explicités très clairement certains principes, où on dit — c'est normal — "Considérant que tous les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité et ont droit à une égale protection de la loi. Considérant

que le respect de la dignité de l'être humain et la reconnaissance des droits et libertés dont il est titulaire constituent le fondement de la justice et de la paix — on est tous d'accord là-dessus. Il faut continuer de lire aussi — considérant que les droits et libertés de la personne humaine sont inséparables des droits et libertés d'autrui et du bien-être général."

M. le Président, comme le député de Marguerite-Bourgeoys, il ne faut pas parler des droits et libertés comme si on parlait d'un jouet avec lequel on s'amuse et avec lequel on essaie de mêler tout le monde. Il ne faut pas parler du jeu de la démocratie comme si on parlait d'un jouet avec lequel on essaie de mettre de la poudre aux yeux de tout le monde. Le gouvernement a quand même été très prudent concernant la présente loi. Nous avons en main deux opinions de la Commission des droits de la personne, laquelle nous dit qu'il y a des écueils, des difficultés et qu'il faut être très prudent comme gouvernement. Par contre, elle dit des choses qui sont essentielles qu il faudrait peut-être rappeler aux membres de l'Opposition officielle.

Entre autres, dans la première opinion de la Commission des droits de la personne, celle-ci dit textuellement qu'elle souscrit aux objectifs du livre blanc à savoir la démocratisation de nos institutions politiques, I'association directe des électeurs à la gouverne de l'Etat, l'élargissement progressif de la participation populaire. Je le dis textuellement. La commission se réjouit de trouver, dans le livre blanc sur la consultation populaire au Québec, le principe fondamental de l'égalité entre les individus, tel que reconnu — c'est cela qui est important — par la Charte des droits et libertés de la personne. La commission se réjouit de retrouver, dans le livre blanc, l'autre principe non moins important affirmé dans la Loi sur le financement des partis politiques, soit celui d une meilleure réglementation des revenus et dépenses politiques.

Depuis le début, nous assistons à des déclarations de principe de l'Opposition officielle a savoir qu'ils sont d'accord avec la constitution de comités nationaux, qu'ils sont d'accord avec le contrôle des dépenses. Mais nous nous retrouvons toujours avec des amendements. Celui-ci en est la meilleure illustration. Ce sont des amendements qui vont à l'encontre de ces principes fondamentaux avec lesquels ils nous disent être d'accord.

Ou l'Opposition va reconnaître que cet amendement vient en contradiction — pour autant qu'ils y croient — avec le principe même de la nécessité de comités nationaux ou encore que l'Opposition — j'entends l'Opposition officielle — nous dise très clairement qu'ils sont contre les comités nationaux et le contrôle des dépenses.

Or, nous croyons que la formation de comités nationaux a l'intérieur desquels s'insèrent les partis politiques est un principe fondamental de la loi. Ce n'est pas le projet de loi qui me le dit. comme ministre responsable de l'étude de ce projet de loi, mais c'est l'Assemblée nationale elle-même qui a voté ce principe et qui a voté aussi le principe du contrôle des dépenses. Je ne vois pas en quoi je pourrais m'écarter de quelque manière que ce soit de ces principes clairement exprimés en deuxième lecture.

Nous croyons, M. le Président, à cette formule des comités nationaux qui, comme l'a dit le député de Mégantic-Compton, n'est pas parfaite comme formule, qui amène certaines contraintes. La Commission des droits de la personne le dit aussi. Toutes choses étant pesées, cela représente quand même, à notre humble opinion, le meilleur instrument qui puisse nous permettre de présenter a la population des options précises. Pour cela, la population et les citoyens ont des droits. Entre autres, ils ont le droit fondamental que le législateur mette en place un mécanisme qui soit le plus valable possible afin d'en arriver a proposer aux citoyens des options précises pour qu ils puissent exercer leur jugement de la façon la plus éclairée possible, de la même manière, comme on l'a dit tantôt, qu ils sont en droit d'exiger qu'il y ait une réglementation concernant les dépenses afin que les deux options puissent avoir des chances égales de s exprimer le plus objectivement possible, afin que ces citoyens puissent exercer leur jugement.

L'esprit qui prévaut à la nécessité de comités nationaux, c'est nécessairement de trouver le mécanisme qui permet de présenter à la population les options les plus précises possible. Je pense que l'électeur, lors d'un référendum, doit être en mesure d'exercer un choix véritable. Ce n'est pas une campagne électorale. Ce n'est pas un choix entre des partis politiques. C'est un choix au niveau d'idées. Il faut faire la différence essentielle entre une consultation populaire, une campagne électorale où on a à choisir des hommes, un gouvernement, et une consultation populaire où on propose une idée sous forme de question ou sous forme de projet de loi à une population. Le débat se fait sur des idées. A l'heure actuelle, le Parti libéral, avec sa proposition, voudrait, autrement dit. faire en sorte que cette consultation populaire qu'on essaie d'avoir devienne, en fait, une bataille uniquement partisane. Cela, jamais nous ne l'accepterons. C'est pour cela que nous croyons à la formule des comités, malgré les inconvénients que cela peut représenter, puisque c'est une formule qui peut permettre de mieux définir des options que si vous envoyez dans le décor quatre ou cinq partis politiques, toute une série de groupes qui voient chacun les choses à sa manière et. à la fin du compte, au lieu d'éclairer la population, viennent la mêler à un point tel qu'elle n'est plus capable d'exercer valablement son jugement.

Lorsqu'on croit à des options — ce sera aux députés à faire leur choix, en temps et lieu, que ce soit n'importe quel référendum — je pense qu'on doit aussi croire qu'en donnant une information objective à la population, celle-ci souscrira à l'option dans laquelle on s'est inscrit.

Concernant les comités nationaux, puisque c'est le principe de tout ce chapitre, vous me permettrez de revenir à ce que disait le leader du gouvernement et parrain de ce projet de loi. lors du discours en deuxième lecture, afin de montrer

à l'Opposition la nécessité des comités nationaux. Je cite: "C'est aussi pour permettre aux citoyens de bien s'informer sur les différentes options soumises à la consultation populaire que le gouvernement souhaite, par le biais de la limitation des revenus et des dépenses, par l'octroi d'une subvention de départ égale aux représentants de chacune des options, que chaque parti ait une chance égale de se faire valoir auprès des électeurs". Une chance égale, cela rejoint les considérants qui prévalent à la Charte des droits et libertés de la personne. "Cet objectif de l'égalité des chances vise d'abord à favoriser la liberté de l'électeur — il en a une liberté, l'électeur, lui — et à le mettre à l'abri de toute tentative de manipulation publicitaire ". Même si vous essayiez de nous convaincre que si on laissait les portes ouvertes, il n'y aurait pas de danger de manipulation publicitaire, à ce moment-là, vous seriez complètement irresponsables de prétendre cela et complètement irresponsables d'ouvrir des portes qui permettraient cette manipulation au niveau de la population. Ce sont ces portes qu'on essaie de fermer; pas le droit des personnes, des individus, des groupes, des partis politique à émettre leur opinion lors d'une consultation populaire. On essaie de fermer le plus de portes possible qui ouvrent la voie à la manipulation populaire, publicitaire ou la manipulation de la population sous quelque forme que ce soit.

Je continue, M. le Président, avec les propos du parrain même de ce projet de loi. "Le projet de loi cherche à permettre à l'électeur d'approfondir un enjeu pendant une campagne référendaire, et ce dans les meilleures conditions possible. En ce sens, lors d'un référendum, la formule des organisations-parapluies ou les comités nationaux, si on veut les appeler comme cela, permettra, à mon avis, une clarification du débat qui ne peut être que favorable à l'électeur. (12 h 30)

En plus de permettre à l'électeur qui veut défendre une option d'utiliser un autre véhicule que celui du parti politique, la formule du comité national est souple, car ses structures, sa composition, la nomination de son président sont laissées aux députés qui se regroupent sous une même option. En proposant le regroupement des différents acteurs, le gouvernement actuel simplifie le débat — la population a le droit à cela, qu'on trouve des moyens de simplifier le débat pour qu'elle puisse mieux exercer son jugement — pour les électeurs qui peuvent ainsi percevoir plus clairement les différences entre les options que s'il y a foisonnement d'acteurs et de thèses défendues."

M. le Président, voilà pourquoi fondamentalement nous croyons à la nécessité de comités nationaux à l'intérieur desquels doivent s'inscrire les partis politiques — ce n'est pas une campagne électorale, on l'a dit, et, encore une fois, je ne reviendrai pas là-dessus — afin de permettre — c'est un des principes de la loi — une expression plus claire de l'option des citoyens. C'est aussi le moyen pour contrôler les dépenses, parce qu'il n'y en a pas d'autre moyen de contrôler les dépenses.

La meilleure preuve, c'est le genre d'amendement que vous venez de nous proposer où vous ouvrez toutes les portes et celui qu'on a entendu hier — je ne discuterai pas là-dessus — qui, lui aussi, ouvre toutes les portes à toutes les dépenses possibles et imaginables.

Le député de Marguerite-Bourgeoys nous a parlé longuement de l'opinion de la Commission des droits de la personne. M. le Président, on pourrait y revenir. Il semble avoir oublié certains passages qui me semblent très importants. D'abord, la commission à la page 5, reconnaît qu'il peut y avoir une contrainte dans le fait d'assujettir des groupes ou des partis politiques à rejoindre un comité national. On ne vous a jamais dit le contraire. C'est clair qu'il y a certaines contraintes, parce qu'on établit des règles du jeu.

Il ne faut jamais oublier les considérants de la Charte des droits et libertés de la personne où on dit que "les droits et libertés de la personne humaine sont inséparables des droits et libertés d'autrui et du bien-être général. " II ne faut jamais l'oublier. Lorsqu'on étudie des projets de loi spécifiques, cela représente toujours une contrainte. Prenez la Loi électorale où on a fixé les dépenses. Cela représente des contraintes. Est-ce que cela veut dire que c'est mauvais pour le bien-être général et pour le bien d'autrui? Au contraire, je pense que personne ne sera en désaccord si je dis que la Loi électorale, qui a justement imposé des contraintes en matière de financement, a contribué à assainir nos moeurs électorales, nos moeurs politiques. La loi 2 concernant le financement des partis, a amené des contraintes. C'est clair. Le fait qu'il y ait des contraintes, cela ne veut pas dire, comme essaie de le faire voir le député de Marguerite-Bourgeoys, qu'on est en train de fouler aux pieds, les droits et libertés de la personne, qu'on est en train de fouler aux pieds toutes les règles de la démocratie. Il y a un bout à jouer avec cette notion de droits et libertés de la personne et cette notion de la démocratie. Il faut la replacer dans un contexte, celui de la vraie démocratie. Les vrais droits et libertés de la personne, cela se situe dans un contexte, comme le dit la charte, de poursuite du bien-être d'autrui, de poursuite du bien-être général. Il ne faut jamais l'oublier et c'est ce qu'oublie continuellement le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Parti libéral, avec son slogan "le Québec des libertés", essaie de poser continuellement avec son grand frère fédéral — je ne donnerai pas d'exemples, mais cela fait rire des bouts — au seul défenseur des droits et libertés de la personne. Ils viennent nous dire, et je l'ai entendu au cours de ce débat par le leader de l'Opposition: Vous autres, le gouvernement, vous êtes plutôt orientés vers la préservation des libertés collectives, alors que nous, du Parti libéral, ce sont les droits et libertés individuels. Ce n'est pas vrai, cela. Ce n'est pas vrai du tout. Vous essayez de vous conter des histoires, parce que, si vous aviez été si soucieux de cela des droits et libertés de la personne lorsque vous étiez là au pouvoir, je pense que vous ne seriez pas dans l'Opposition aujourd'hui.

M. Lalonde: Cela fait mal.

M. Bédard: Non, cela ne fait pas mal du tout. Ce qui fait mal, par exemple, au député de Marguerite-Bourgeoys et à l'Opposition officielle, c'est l'avis de la Commission des droits de la personne. Avant qu'on l'ait, vous avez essayé de charrier à tout vent qu'on était en train de fouler aux pieds tous les droits et libertés individuelles avec ce projet de loi du référendum. Vous vouliez une opinion de la Commission des droits de la personne. Vous avez tellement insisté que vous en avez eu, une opinion. Une opinion qui vous a dit que la Commission des droits de la personne souscrivait entièrement à la démocratisation de nos institutions politiques, à l'association directe des électeurs à la gouverne de l'Etat, à l'élargissement progressif de la participation populaire, au principe fondamental de l'égalité entre les individus tel que reconnu par la Charte des droits et libertés de la personne, à l'autre principe non moins important affirmé dans la loi sur le financement des partis politiques qui est celui d'une meilleure réglementation des revenus et des dépenses. Vous l'avez eue l'opinion. Je pense qu'elle est assez claire. A l'intérieur de ces grands principes, parce que c'est là-dessus surtout qu'il est important de se pencher, à partir du moment où un projet de loi sur ces grands principes respecte les droits et libertés fondamentales, on peut discuter sur la manière de l'améliorer, mais pas, par exemple, essayer de tout remettre en question avec le genre d'amendement que vous nous avez apporté.

Il y a eu une deuxième opinion de la commission. Vous en avez voulu, des opinions de la Commission des droits de la personne, sauf que quand cela ne fait pas votre affaire, c'est la Commission des droits de la personne qui est dans l'erreur. On a mal interprété, selon vous, l'avis de la Commission des droits de la personne. Là, vous redevenez ce que vous pensez être, les seuls défenseurs des droits et libertés de la personne. A ce moment, même les avis de la Commission des droits de la personne, cela ne veut plus rien dire pour vous autres. J'en ai assez de vous voir continuellement essayer de discréditer un projet de loi sous cet angle du respect des droits et libertés de la personne.

Lisez-la comme il faut, l'opinion. Elle dit ceci, on va la lire avec vous autres, et on va vous aider à la comprendre, je l'espère. Quoique je ne me fasse pas d'illusion là-dessus. A la page 5, elle reconnaît, dans les deux paragraphes, qu'il y a des contraintes, c'est clair, à obliger des personnes et des groupes à participer ou à s'inscrire dans des comités.

M. Lalonde: Bon.

M. Bédard: Ce n'est pas sorcier, on le savait. Arrêtez d'essayer de nous convaincre qu'il n'y a pas de contrainte, mais oui il y en a, des contraintes, c'est clair. Il y a des contraintes quand on a un contrôle des dépenses. Vous devriez lire un peu plus l'avis de la commission qui dit ceci: "De l'avis de la Commission des droits de la personne, l'atteinte aux libertés d expression et d'association qui peut se dégager de cet assujettissement dont je viens de parler — doit d abord être vue — lisez-le comme il faut l'avis — doit d'abord être vue a !a lumière de l'objectif qui est poursuivi ici — pas ailleurs, quand ils disent "ici", c'est dans le projet de loi dont on parle — et auquel elle souscrit entièrement..." Elle ne souscrit pas a moitié, elle souscrit entièrement, comprenez-vous? C'est cela que cela veut dire. Si vous êtes capable de me dire que cela veut dire autre chose, c'est clair qu'on ne se comprendra jamais... "à savoir, assurer aux différentes options soumises à la consultation populaire une chance égale de faire valoir leurs avantages". Cela rejoint les considérants de la Charte des droits et libertés de la personne, et c'est souligné "chance égale".

M. Gratton: Continuez.

M. Bédard: Tout ce que vous nous proposez, c est quoi? Cela ressemble à quoi, par rapport au principe fondamental des chances égales? Voyons donc! Dites-le carrément que vous n'êtes pas pour les comités, que vous n êtes pas pour le contrôle des dépenses. C'est tout, je ne vous en voudrai pas plus que cela. Mais arrêtez de niaiser, par exemple, avec les droits et libertés de la personne, pour essayer de cacher que vous êtes fondamentalement en désaccord sur la constitution de comités nationaux, sur la possibilité de se donner un mécanisme pour présenter à la population des options claires et précises pour qu'elle puisse se prononcer. Dites-le donc clairement.

La commission continue en disant ceci — on est d'accord avec elle — :"La mise en oeuvre de l'égalité des chances entre les diverses options comporte nécessairement — mais oui. elle ne nous apprend rien, on dirait que vous sortez des nues — une part de contrainte — bien oui, c'est vrai — et jusqu'à nouvel ordre, la commission ne demande pas mieux que de l'accepter dans son principe. Elle le sait qu'il y a des contraintes et cela ne change pas son idée, elle est d'accord sur les principes fondamentaux qui sont dans ce projet de loi — cependant, dit-elle — oui, on va y aller au bout, vous ne l'avez vraiment pas comprise l'opinion de la commission — c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Gratton: "Mesure" souligné.

M. Bédard: Oui, il y a une contrainte, il faut essayer de trouver les balises — oui, c'est souligné...

M. Lalonde: N'interrompez pas.

M. Bédard: C'est souligné, mais écoutez jus-qu'à la fin!

C'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore. Le projet... Je ne citerai pas seulement des extraits qui font mon affaire, on va la prendre l'opi-

nion de la commission; on est tanné de s'entendre parler des droits et libertés de la personne à peu près, comme le fait continuellement le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Allez!

M. Bédard: "Cependant, c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore." Nous aussi, c'est pour cela qu'on essaie d'amener des amendements qui vont peut-être améliorer les choses. Entre autres, la notion de statut affilié ou de groupes affiliés, si vous la compreniez comme il le faut, si vous nous laissez le temps, on va vous l'expliquer et vous allez voir que cela répond aux objections que vous avez émises, vous-mêmes, dans le document que vous avez présenté à la presse où vous disiez: Oui, mais cela ne donne pas le droit aux différents groupes d'avoir leur propre contenu, leur propre stratégie, leurs propres idées sur la sensibilisation, leurs propres idées concernant l'action de sensibiliser la population, que ce soit du point de vue culturel par rapport à l'économique ou au social. Sauf que, avec notre amendement, cela répond à cela. L'amendement de statut affilié, c'est ce que cela veut dire, quand on veut le comprendre, c'est l'obligation, pour les comités, de définir des règles et des règlements qui permettront une certaine liberté de stratégie, au niveau de l'action, pour ces groupes affiliés, qu'ils s'appellent Société Saint-Jean-Baptiste, chambre de commerce ou parti politique que peut représenter, par exemple, le député de Rouyn-Noranda ou le député de Beauce-Sud.

Ils disent ceci: "Cependant, c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore. Le projet de loi no 92 ne contribue pas toujours...". C'est vrai et c'est pour cela qu'on a amené des amendements, parce qu'ils nous font d'autres recommandations. "... ne contribue pas toujours...". Cela n'a pas réglé tous les problèmes, je le sais, mais on va essayer de les régler. Si on les réglait à 90%, parce que vous n'avez sûrement pas, jusqu'à maintenant, des amendements qui nous permettent de les régler de quelque manière que ce soit, au contraire. "Cependant, c'est la mesure de la contrainte qui l'inquiète encore et le projet de loi no 92 ne contribue pas toujours, il faut bien le dire, à en situer les paramètres exacts. Une première réponse se trouve sans doute dans les règlements eux-mêmes qui régiront, en vertu de l'article 23, les matières relatives au bon fonctionnement des comités naitonaux et la façon dont ils seront constitués." Avez-vous vraiment réalisé ce que cela veut dire? Vous qui prétendez être les vrais et les seuls défenseurs des droits et libertés de la personne, des droits fondamentaux des individus. On va vous donner une occasion en or, une occasion rêvée de montrer que vous êtes respectueux de tous les groupes qui voudront bien s'affilier à l'intérieur du comité dont vous ferez partie. Nous, nous sommes capables de relever ce défi du côté gouvernemental, à savoir de rédiger des règlements qui sont respectueux des groupes, des droits de ceux qui voudront s'incorporer à un comité plutôt qu'à un autre. Relevez donc le défi, vous autres. Si vous avez tant que cela le monopole de la vérité, en termes de droits et libertés de la personne, vous ne devez pas avoir peur de relever le défi d'avoir l'obligation de faire des règlements qui, effectivement, obtiendront l'assentiment de la Commission des droits de la personne. C'est ce que la commission a dit, une première réponse, c'est la réglementation. Elle ne dit pas que c'est le gouvernement qui doit faire la réglementation, elle dit que ce sont les comités qui doivent faire une réglementation et, sur cette réglementation, la commission dit: Nous allons avoir l'oeil, nous allons I examiner. C'est son droit, en vertu de la loi, de façon générale, de porter une opinion sur les réglementations qui viendront de la plupart des différents comités.

Voilà. Vous le voulez le respect des droits et libertés individuelles? Nous le voulons aussi et je suis convaincu que nous le voulons encore plus que vous. Il n'y a même pas de comparaison. Vous avez l'occasion rêvée là, en vous inscrivant à un comité, en travaillant aux règlements de fonctionnement de ce comité, de respecter ce que vous prétendez être les seuls capables de respecter.

Une autre suggestion que nous fait la commission, c'est le statut affilié. Je ne reviendrai pas là-dessus. Je trouvais que cela avait de l'allure, quand j'ai lu toutes les notes — j'essaie de les trouver — du leader de l'Opposition. Lors d'une conférence de presse, je ne sais pas à quelle date, il disait ceci, à un moment donné, à la page 6 de ses notes... D'abord il commençait par dire qu'il était d'accord sur les comités nationaux, qu'il était d'accord sur le contrôle des dépenses... (12 h 45)

M. Lavoie: De la même façon que cela existait en Angleterre.

M. Bédard: ... qu'il était d'accord que des orgies de dépenses cela représentait au bout de la ligne la violation des droits des citoyens. C'est un droit fondamental cela aussi. Il disait, à l'article 6: "Sous aucun prétexte le gouvernement n'a cependant le droit d'imposer à quiconque veut participer à la campagne référendaire de le faire nécessairement à l'intérieur d'un comité donné, de se conformer nécessairement aux règlements de ce comité".

Notre projet de loi prévoit qu'il y a des personnes, des individus ou des groupes qui pourront ne pas s'incorporer au comité. Cependant, ayant fait l'exercice de leur libre choix, il y a des contraintes qui sont dans la loi et qu'il est normal d'avoir dans la loi quand on croit au contrôle des dépenses. Il disait également: "Sous aucun prétexte le gouvernement n'a cependant le droit d'imposer à quiconque veut participer à la campagne référendaire de se conformer nécessairement aux règlements de ce comité, d'accepter nécessairement de travailler sous la direction d'un président et avec les membres de ce comité". Nous, on n'a pas peur de travailler en association dans le comité. Je ne sais pas qui viendra dans le comité, mais on le dit au départ, il faut travailler ensemble. On croit au même objectif, même si on n'a peut-être pas les mêmes moyens, si, on a peut-

être des nuances sur la manière de voir les choses.

Il faut trouver un moyen. J'admets que dans le projet de loi initial, peut-être que cela ne ressortait pas clairement. Même si c'était l'esprit qui sous-tendait le projet de loi, cela ne resssortait pas clairement cette idée ou cette nécessité de respecter quand même des stratégies d'action, des contenus d'idées, même si des gens partagent le même objectif. Avec raison, le leader de l'Opposition, dans sa conférence de presse, soulignait que le gouvernement n'a pas le droit d'imposer à quiconque de se conformer nécessairement aux règlements de ce comité, d'accepter nécessairement de travailler sous la direction d'un président et avec les membres de ce comité et d endosser nécessairement le contenu, les formes et le style d'action de ce comité.

Cela mérite réflexion. La Commission des droits et libertés de la personne a réfléchi justement sur cela. A quelle conclusion en est-elle venue? A la conclusion d'inscrire dans la loi la possibilité de groupes affiliés qui, dans la réglementation des comités, serait respectés quant à la stratégie qu'on entendraitadopter son contenu, son mode d'action. C'est le statut affilié. C'est exactement ce que dit la Commission des droits et libertés de la personne, en disant ceci: "En pratique cependant le contrôle des dépenses impliquant nécessairement — elle est très lucide, la Commission des droits de la personne, ce que n'est pas l'Opposition officielle à l'heure actuelle — le contrôle de toute la stratégie de la campagne référendaire pour chacun des comités nationaux, il se peut que des groupes refusent de se joindre au comité national correspondant à leur option de crainte de s'y voir indûment brimés dans leur liberté d'expression, par exemple, parce qu'ils préféreraient mettre davantage l'accent sur une approche sociale ou culturelle plutôt que sur la dimension économique du problème débattu". Ils ont vu le problème. L'Opposition officielle, le Parti libéral, n'invente rien en nous parlant de ce problème. Nous l'avions vu, nous aussi. On essaie normalement et valablement de trouver une solution, pas en foulant aux pieds, par exemple, les principes fondamentaux du projet de loi, mais en les respectant. C'est ce qu'a fait la commission qui respecte les principes fondamentaux du projet de loi.

Et elle nous dit la manière d'en sortir. "Alors, dans le but d'éviter le boycottage des comités nationaux et la multiplication des groupes oeuvrant hors de l'organisme-parapluie et d'atténuer signifi-cativement la contrainte — parce qu'on ne pourra pas complètement la faire disparaître, bon — pesant sur les libertés d'association et d'expression, la commission propose d'introduire la notion — c'est quoi, la solution? — de statut d'affiliés pour les individus et groupes qui ne voudraient pas s'associer à la stratégie globale décidée par le comité national, tout en étant d'accord — et c'est un critère, c'est normal pour un comité national, c'est ce que la commission veut dire — avec l'objectif visé en définitive".

C'est le moyen qu'elle nous propose. Ce n'est pas un moyen, — la commission en est consciente, et on en est conscient, — qui règle tous les problèmes.

Mais il me semble, après analyse très sérieuse— et le gouvernement en a fait l'analyse aussi — que c'était une suggestion qui était très valable, dont l'esprit, s'il n'était pas très explicité dans le projet de loi initial, était quand même dans le projet de loi initial. Cette recommandation tend à particulariser ou à mieux identifier peut-être le moyen d'en sortir, et nous y donnons suite. Ce sont les deux principales recommandations de la commission. Ce sont les principaux facteurs, à savoir la réglementation de la part des comités qui doivent respecter les droits et libertés de la personne; deuxièmement, le statut d'affiliés qui permet une plus grande liberté d'expression et d'action des groupes à l'intérieur des comités nationaux.

Mais en aucune place dans cette opinion vous ne verrez la commission se dire en désaccord avec les comités nationaux, se dire en désaccord avec le contrôle des dépenses, se dire en désaccord avec le fait que les partis politiques doivent s'inscrire dans les comités nationaux. Jamais! C'est ce que vous devez retenir.

Je vais vous dire bien franchement, — j'ai été bien long et je m'en excuse — que je n ai pas l'intention de revenir sur cela. Je vois, dans ce chapitre, qu'il va y avoir peut-être bien des amendements qui vont venir dans le même sens. J'aime autant avoir pris le temps d'exprimer bien carrément ma conviction personnelle qui rejoint, à mon sens, les principes mêmes qui ont été votés en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, plutôt que de revenir continuellement sur cela à chacun des amendements. J'espère avoir exprimé le plus correctement possible mes convictions profondes et je ne peux faire autrement que d'être heureux de voir que I'Union Nationale, parson représentant, partage cette manière de voir les choses.

Sur les manières d'améliorer le projet de loi à l'intérieur du respect de ces principes fondamentaux, vous allez me trouver prêt à entendre ceux qui ont des suggestions constructives à faire. Mais pour tout amendement, toute résolution ou motion oui serait à l'encontre des principes mêmes, je n aurai pas besoin de refaire toujours le même énoncé. Je l'ai fait une fois pour l'ensemble de ce chapitre. Vous saurez pourquoi je ne serai pas en accord et pourquoi je recommanderai, chacun étant libre, à ceux qui sont avec moi dans le travail, au niveau de cette commission, d'exprimer leur désaccord là-dessus. Merci. M. le Président.

Le Président (M. Clair): Merci. M. le député de Laval.

M. Lavoie: Oui. M. le Président. C'est sans doute un des amendements clés de ce projet de loi où nous différons totalement d'opinion avec le gouvernement sur cet excès de restrictions, de contrôles et de contraintes.

Je me demande comment le gouvernement pourra voter contre I'amendement qui se lit comme suit: "Un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire sans nécessairement adhérer à un comité national". Je vais respecter la pertinence du débat. En permettant, tel que notre amendement le

suggère, à un électeur, à un groupe ou à un parti politique de participer à la campagne référendaire sans adhérer nécessairement à un comité national, cela s'applique à d'autres articles du projet de loi concernant les modalités de cette participation avec des contrôles de dépenses que nous avons établies dans le document que nous avons rendu public la semaine dernière, entre autres...

M. Fallu: Question de règlement, M. le Président.

M. Lavoie: Bon, cela va bien.

Le Président (M. Clair): M. le député de Terrebonne invoque le règlement.

M. Fallu: C'est une question très technique. Hier soir, lorsque M. le Président nous a fait lecture — j'allais dire "nous avait dicté" — de l'improvisation, au coin de la table, du député de Marguerite-Bourgeoys, j'ai noté, pour ma part, l'expression "sans nécessairement adhérer à un comité national"...

M. Lavoie: C'est cela.

M. Fallu: ... alors que je trouve ce matin "sans nécessairement appartenir à un comité national"

M. Lavoie: Adhérer ou appartenir...

M. Fallu: J'aimerais savoir...

M. Lalonde: Quelle est la distinction?

M. Lavoie: Quelle est votre sémantique sur cela? Voulez-vous me laisser parler? Je n'ai pas interrompu une seule fois le ministre de la Justice.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Fallu: J'aimerais savoir l'amendement que nous débattons, le verbatim.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est important.

Le Président (M. Clair): Malheureusement, je n'ai pas entre les mains l'original.

M. Vaillancourt (Jonquière): Apportez-les!

Le Président (M. Clair): Effectivement, il y a une erreur dans la copie manuscrite qui vous a été distribuée. Au lieu du mot "appartenir", on devrait lire le mot "adhérer ".

M. Lavoie: Je voudrais invoquer l'un ou l'autre, il n'y a pas grande différence. Il n'y a aucune différence.

M. Lalonde: II faut appartenir pour adhérer.

M. Fallu: Je voudrais m'excusez auprès du député de Laval de l'interruption.

M. Lalonde: Très important. Merci.

M. Lavoie: Je me réfère à une intervention de fond.

M. Samson: Oui, je vous connais.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Je disais donc que nous proposons qu'un électeur, un groupe et un parti politique, dans le respect des libertés fondamentales, puisse participer à la campagne référendaire en dehors des comités-parapluies, en dehors des carcans, selon certaines modalités que nous apporterons par la suite, à savoir des contrôles de dépenses comparables à celles prévues dans la loi 2. Entre autres, les souscriptions réservées uniquement aux électeurs, ne permettant à aucune société commerciale ou compagnie à but lucratif d'y participer, dans les limites des contributions limitées à l'électeur, tel que prévu par la loi 2, limitées à S3000, divulgations pour des souscriptions en haut de $100, rapports, etc. Je pense d'ailleurs que ce sont des limites convenables et raisonnables qui viennent du gouvernement actuel et qui sont comprises dans la loi 2.

C'est sûr que nous sommes contre cette exagération de dépenses de publicité et autres. Nous l'avons carrément établi. Entre cela et défendre à un électeur, à un groupe ou à un parti politique de participer à la campagne référendaire, je crois c'est attaquer à sa base même la charte qui nous régit. Il y a des droits. Je me demande comment le ministre de la Justice pourra proposer de voter contre cet amendement, lorsque cela vient carrément en contravention des dispositions, entre autres, de l'article 3 de la charte où il est dit: "Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles que la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association." Cela vient également en contravention flagrante à l'article 10 de la charte où il est dit: "Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale ou la condition sociale."

M. le Président, il est près de 13 heures, je pense que je pourrais continuer après le déjeuner.

Le Président (M. Clair): La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

Reprise de la séance à 15 h 14

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi 92. Au moment où nous avons suspendu nos travaux a 13 heures, c'est le député de Laval qui avait la parole sur une motion du député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, je disais donc que l'article que nous étudions actuellement est un article clé dans ce débat. C'est l'endroit précis je crois où on doit profiter de cet article, en somme, pour faire un débat de fond sur la philosophie prônée par le parti ministériel et celle présentée ou soutenue par l'Opposition officielle.

M. Bédard: Si vous me permettez? Quel est l'amendement? Je sais qu'on a parlé de changer un mot. Est-ce qu'il a été changé?

Le Président (M. Clair): L'amendement se lit comme suit. Ajouter, à la fin de l'article 21, l'alinéa suivant: Un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire sans nécessairement "adhérer" — au lieu d'appartenir" — à un comité national.

M. Lavoie: Dans cet amendement, nous établissons un principe. Nous n'allons pas dans les modalités du champ d action, des limites ou de ce qui sera permis de faire par un électeur, un groupe ou un parti politique qui n'adhère pas à un comité-parapluie. Pour vous prouver notre bonne foi, dans ce que nous avons présenté, nous nous accrochions le plus possible à certains principes ou à certaines modalités déjà établies dans la loi 2. Nous nous sommes accrochés à des montants prévus à la loi 2. Si le gouvernement trouve que ces montants sont trop élevés, ce que nous présentons dans les modalités, dans les moyens que pourra avoir un électeur, un groupe ou un parti, si le gouvernement trouve que les montants que nous proposons, que nous avons cueillis dans la loi 2 sont trop élevés, c'est plutôt comme une suggestion que nous faisons au gouvernement. Si vous voulez les modifier, si vous trouvez que c'est trop S3000 pour un groupe ou un syndicat — toujours un groupe sans but lucratif — pour respecter la liberté d'association, si vous trouvez que c'est trop pour un électeur qui a le droit de contribuer à un comité-parapluie ou à un parti politique, en vertu de la loi 2, diminuez-le. C'est une ouverture qu'on fait au gouvernement. Nous ne sommes pas dans le béton, mais nous voulons, par contre, tout en limitant les moyens d'action des électeurs, des groupes et des partis politiques qui n'adhèrent pas a un comité national, respecter, à la base même, les impératifs de la Charte des droits et libertés de la personne.

Je dis que vous allez trop loin dans votre projet de loi et je crains même que votre projet de loi pourrait être attaquable devant les tribunaux. Ce n'est pas un avis juridique que je donne et je veux garder un certain ton à ce débat. Je ne veux pas en faire un débat de politicaillerie; c'est une question de principe. Je dis que le ministre va trop loin dans ses contraintes, dans ses restrictions, dans son contrôle. Je crains même — c'est une opinion personnelle — que ce projet de loi no 92 pourrait être attaqué devant les tribunaux une fois adopté, parce qu'il y a quand même une charte qui existe. J'ai lu, ce matin, l'article 3 qui reconnaît dans la charte aux individus des droits fondamentaux d'expression, d'association et de réunion. L'article 10 répète ces mêmes droits.

Ce n'est pas pour rien qu'il y a les articles 50, 51 et 52 de la charte que je vais vous lire. Article 50. La charte doit être interprétée de manière à ne pas supprimer ou restreindre la jouissance ou I'exercice d'un droit ou d'une liberté de la personne qui n y est pas inscrit ".

Article 51. La charte ne doit pas être interprétée de manière à augmenter, restreindre ou modifier la portée d'une disposition de la loi, sauf dans la mesure prévue par l'article 52".

Je vous lis l'article 52: "Les articles 9 à 38 — je vous ai cité tout à l'heure des droits fondamentaux dont on fait mention à l'article 10; c'est compris dans cette fourchette des articles 9 à 38 — prévalent sur toute disposition d'une loi postérieure — il s'agit d'une loi postérieure ici — qui leur serait contraire, à moins que cette loi n'énonce expressément s'appliquer malgré la charte". C'est ce que vous aviez fait dans le projet de loi 101. Il y avait une disposition — je pense que c'est à l'article 172 — ou vous disiez que cet article s appliquait nonobstant les dispositions de la charte. A la suite de la mise en garde de la Commission des droits de la personne, vous avez retiré cet article de la loi 101. Je me demande si en limitant et en établissant des contraintes que nous avons dans le projet de loi no 92, ce projet de loi ne pourrait pas être attaquable devant les tribunaux. Je vous assure que cela ferait une belle jambe au ministre de la Justice. Il est dit, à I article 99, que c'est le ministre de la Justice qui est responsable de l'application de la charte.

Je voudrais également vous citer certains propos d'un parlementaire dont on doit respecter l'opinion. C'est un parlementaire qui est membre du Parti québécois. Je vous cite, entre autres, des propos tenus par M. Jacques-Yvan Morin — on connaît l'expérience de juriste de M. Jacques-Yvan Morin — lors de l'adoption de la charte, le 12 novembre 1974. Je le cite, à la page 2751 du journal des Débats: "C'est l'un des buts essentiels d'une charte authentique, d'une charte digne de ce nom. que d'assurer les libertés publiques des citoyens. Je pense, en particulier, à la liberté de penser, à la liberté d'exprimer ses idées et de se grouper pour les défendre. L'exercice de ces libertés, dans une démocratie, ne saurait être subordonné à des restrictions — ces libertés ne peuvent être subordonnées à des restrictions — autres que celles qui, expressément prévues dans la loi, constituent des mesures absolument nécessaires au respect des droits et libertés d'autrui, à la sauvegarde de la paix publique et à la prévention du crime".

Je vous dis que ces libertés fondamentales, les gens, que nous connaissons depuis toujours, au Québec, on n'a pas le droit de les subordonner

—c'est le terme de M. Jacques-Yvan Morin — ou de les assujettir, entre autres, à l'option obligatoire, dans le cas A ou B, de les subordonner à des objectifs. Les objectifs, c'est ce qui couvre vos organismes et vos groupes affiliés. Ces libertés fondamentales ne sont pas négociables et je n'accepte pas les propos tenus par le ministre ce matin, lorsqu'il dit que notre formule simplifie le débat. Vous avez dit que la formule que nous employons — ce sont les mots exacts que vous avez employés — la formule de comités nationaux simplifiait le débat. C'est ce que vous avez dit et je dis que c'est mauvais. Vous n'avez pas le droit de subordonner des libertés en vue de simplifier un débat. Je crois que, dans notre système démocratique, on doit même amplifier un débat. C'est là qu'on se détache, c'est là qu'il y a un fossé qui nous sépare.

Je continue également avec les propos tenus, la même journée, par M. Jacques-Yvan Morin, sur la question de la charte. En 6e lieu, les libertés publiques auxquelles il est fait mention de manière un peu trop rapide à l'article 3 du projet de loi —c'est la charte, lorsqu'on l'a étudiée — c'est-à-dire les libertés de religion, de pensée, d'expression, sont déjà protégées dans une large mesure par le droit public de ce pays. En dehors de la charte. C'est respecté par le droit public de ce pays. Dans la tradition britannique, c'est la jurisprudence qui joue ce rôle en l'absence de constitution écrite, mais nombreux sont les cas de conflits de compétences qui ont démontré que le Québec peut fort bien — et n'a pas hésité à le faire dans le passé, surtout à l'époque de Duplessis — brimer les libertés fondamentales. Je songe par exemple à la loi du cadenas, à l'affaire Roncarelli, à l'affaire Saumur, à l'affaire Switzman et combien d'autres qui ont démontré qu'une loi provinciale, bien que ses compétences soient limitées, peut empiéter de façon très abrupte sur les droits de la personne. Et c'est mon opinion que votre loi 92, avec ses contraintes et ses restrictions, empiète.

Je respecte votre opinion, je vous demande de respecter la mienne et je dis que vous empiétez, de façon très abrupte, ce sont les mots de M. Jacques-Yvan Morin, sur les droits de la personne. Je me pose la question, et c'est là que la membrane est mince: Où commencent, où finissent les restrictions, les contraintes, les contrôles dans les questions de droits fondamentaux? D'ailleurs, ce n'est pas uniquement une petite digression pour répondre aux propos du député de Mégantic-Compton, nous ne voulons pas qu'il y ait des disproportions entre les deux camps. Nous voulons un contrôle des dépenses, j'ai dit de quelle façon, nous ne permettrons à aucune société commerciale ou autres de contribuer. Nous voulons que les principes de la loi 2 s'appliquent, limitent; si c'est trop fort S3000 pour un référendum — il y a S3000 qui sont prévus dans la loi 2 pour un individu — diminuez. Un groupe, un syndicat, un parti politique qui ne veut pas faire partie d'un comité-parapluie — j'ai donné S3000 qui est la limite qu'un individu peut donner — si pour une campagne référendaire vous trouvez que c'est trop élevé, baissez à $1000.

Mais, si vous fermez les portes, si vous êtes trop hermétiques, vous empiétez sur la liberté des gens. D'ailleurs c'est facile à dire, de la part du député de Mégantic-Compton, que les libéraux voudraient une orgie de dépenses, etc. Nous avons été les premiers à les limiter après l'époque duplessiste en 1963, que nous avons été les premiers à limiter les dépenses lors d'une campagne électorale. Je vais être conséquent, je crois que vous attachez trop d'importance à l'argent. On dirait que cette question vous obnubile, on dirait que cela vous frustre. Je vais vous donner des exemples. J'ai connu l'époque de Duplessis, j'étais candidat en 1956. J'ai passé dans le tordeur, comme les autres. Lorsque, dans les campagnes électorales, l'Union Nationale dépensait dix fois plus dans les comtés, les orgies électorales ne venaient pas du Parti libéral, elles venaient de l'Union Nationale. Poussez votre principe des orgies de dépenses que nous voulons contrôler nous-mêmes et que nous avons déjà commencé à contrôler, ayant été les premiers à restreindre les dépenses électorales en 1963. Si on pousse votre propos à l'infini, les libéraux n'auraient jamais pu prendre le pouvoir en 1960, ceux qui ont connu l'orgie de dépenses qu'on connaissait à l'époque duplessiste. Si cela avait eu tellement d'importance, cette publicité, cet argent, les frigidaires dans les comtés, les libéraux n'auraient jamais renversé l'Union Nationale dans le temps.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est pour cela que vous n'avez pas passé...

M. Lavoie: Laissez-moi donc finir, je ne vous attaque pas là!

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que je pourrais vous poser une question?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: On en était au douzième projet de la loi 2. C'est justement la difficulté qui se présentait. Si cela n'a pas été adopté, c'est justement à cause de cette difficulté, à savoir comment ne pas empiéter sur le droit des gens. D'ailleurs, aux Etats-Unis les limites de dépenses dans les campagnes électorales ne sont pas acceptées, même en dehors... parce que c'est contre...

M. Paquette: Les Etats-Unis ne sont pas un modèle de démocratie!

M. Lavoie: ... la constitution américaine. Il y a eu un jugement de la Cour suprême disant que les dépenses et les moyens d'action des candidats durant les élections, cela est inconstitutionnel aux Etats-Unis. Vous voyez la difficulté que cela présente.

M. Paquette: II est temps qu'ils réforment leur constitution.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Lavoie: Si on pousse à l'extrême, aux Etats-Unis, on prétend que le Parti républicain est beaucoup plus près de la haute finance que le Parti démocrate. Si on attache une importance absolue aux moyens d'argent et de publicité, si on pousse cela à l'extrême, disant que c'est l'argent qui contrôle les décisions électorales et les référendums, cela voudrait dire que les démocrates ne seraient pratiquement jamais au pouvoir aux Etats-Unis parce que les républicains sont plus près des forces d'argent.

Un autre exemple. En Norvège, où il y a eu un référendum sur l'appartenance au Marché commun, tous les partis politiques, "l'establishment " du Parlement, tous les partis politiques, labour, conservateur, libéral et autres étaient pour l'appartenance au Marché commun. Ils ont perdu. C'est le peuple... Il y a eu un mouvement des "grassroots" de 130 000...

M. Paquette: Vous parlez de la Norvège!

M. Lavoie: ... qui s'est élevé contre cela, qui est parti de la base, des ouvriers et des artisans qui ont fait battre l'appartenance de la Norvège. C'est sûr qu'il y avait beaucoup plus d'argent pour le camp du oui, même s'il n'y avait pas les contraintes qu'on a là. Il y avait une liberté en dehors des comités qui existait en Norvège. Il n'y avait aucune limite de participation et de dépenses. C'est facile de caricaturer, comme l'a fait hier soir le député de Jonquière, avec nos montants de $3000 si tous les syndicats participaient. Je vais répondre à votre argument. Voulez-vous ne pas m'interrompre, ne pas m'inciter?

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne vous ai pas interrompu. Je ne vous ai pas parlé.

M. Lavoie: Vous venez de m'interrompre.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai parlé au ministre. J'ai le droit de parler au ministre. (15 h 30)

Le Président (M. Clair): A l'ordre. Messieurs, je vous invite à être respectueux.

Une Voix: II ne faudrait pas parler plus fort que celui qui a la parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne m empêcherez pas de parler à celui qui est à côté de moi. Je n'ai pas parlé plus fort.

Le Président (M. Clair): Messieurs, si vous interrompez celui qui a la parole, ne vous surprenez pas, par la suite, si vous êtes vous-mêmes interrompus. Je vous invite à être respectueux du droit de parole des uns et des autres. M. le député de Laval, vous avez encore trois minutes.

M. Lavoie: Je dis, M. le Président, que c'est trop facile de caricaturer comme le faisait le député de Jonquière hier, en disant: Si toutes les associations, les Elks, les Kiwanis, les Richelieu, tous les syndicats dépensaient $3000. Je vais vous donner un exemple pratique, qui a été vécu il y a à peine trois ans en Angleterre, où il n'y avait aucune limite de dépenses autant pour les individus que les groupes, les syndicats et, plus que cela, pour les compagnies commerciales. C'était quand même un référendum qui avait soulevé l'opinion publique en Angleterre, sur lappartenan-ce au Marché commun. Il y avait ces deux comités auxquels les gens n étaient pas obligés d'adhérer. Le comité du oui a dépensé dix fois plus que le comité du non. Savez-vous combien il a dépensé pour un pays de 50 millions d'habitants? Un million et demi de livres sterling, ce qui fait, grosso modo, S3 millions. Il y avait des contributions de $50 000, S30 000 et $25 000 faites par les compagnies. J'ai le livre ici. On donne la liste de tous les souscripteurs.

Il ne faut quand même pas charrier. Même si les centrales syndicales, dans chacune des régions avaient le droit de le faire, pensez-vous qu elles les dépenseraient toutes, leurs $3000? Il ne faut pas exagérer. Pensez-vous que tous les clubs Kiwanis, Richelieu ou d'autres embarqueraient et dépenseraient nécessairement $3000. Je pense bien que votre argumentation... Il faut quand même faire confiance, jusqu'à une certaine limite, à la démocratie.

Encore une fois, je n'accepte pas les propos du député de Mégantic-Compton ce matin. Il ne veut pas avoir de communistes dans son groupe. Il ne faudrait pas que les communistes envahissent la campagne référendaire ou d'autres. Vous retournez a l'époque de Roncarelli et de la loi du cadenas. Vous n'êtes pas loin de Sadate qui. il y a un mois, justement par un référendum, a éliminé tous les partis d'Opposition. Qu'est-ce que vous avez a rire? Sadate a éliminé, il y a un mois par un référendum, tous les partis d'Opposition en Egypte. Selon les propos du député de Mégantic-Compton, je vous dis qu'on n'est pas loin d'éliminer les oppositions. Moi, je vous dis que mes principes, c est que les communistes, les Chaput, les Fils du Québec ont tous le droit de parole au Québec. Je fais assez confiance à la population.

Vous aurez probablement des problèmes avec votre carcan dans l'option du oui, si vous arrivez avec une formule de souveraineté-association en pantoufles pour ne pas faire peur aux gens. Comment allez-vous intégrer, même comme groupe associé, des Vallières ou peut-être des Fils du Québec qui veulent, eux, une séparation brutale du Québec avec le reste du Canada? Même s'ils la veulent, la séparation brutale, ces gens ont le droit de s'exprimer, ils ont le droit de se réunir et ils ont le droit de défendre leur cause. C'est cela, la démocratie.

M. le Président, je termine en faisant une mise en garde à l'égard du ministre de la Justice. S'il tient ses positions comme iI entend le faire même avec ses comités associés, je crains fort que votre loi pourrait être — cela ne serait pas gai, je pense, pour le ministre de la Justice — assez facilement attaquée devant les tribunaux. Je vois quelle crédibilité pourrait avoir un tel projet de loi. Soyez

assurés que si vous gardez vos positions, vous êtes loin d'un consensus. En ce qui nous concerne, cela va être un gros non à votre loi.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, je vous remercie. Ce qui se passe ici, c'est qu'en toute bonne foi le gouvernement cherche une solution à ce problème, au problème de l'égalité des chances, au fond. Le moyen qu'on a trouvé, c'est la création de deux comités nationaux: un pour le oui, un pour le non, chacun doté par le gouvernement de sommes à dépenser en fonction du nombre d'électeurs dans le Québec. Chacun de ces deux comités aurait également le loisir, sur le modèle de la Loi électorale, de recueillir des fonds dont le total ne dépasserait pas un certain maximum.

Il est peut-être important de remettre cela dans une certaine perspective. A cette fin. j'ai fait sortir les discussions de la commission permanente de la constitution, le 27 novembre 1969, sur la loi 55 qui était une loi sur les référendums. Les principales interventions de cette époque portent sur la même question de l'égalité des chances. Je voudrais citer quelques-uns des ancêtres politiques de nos amis d'en face, entre autres M. Jean Lesage, qui porte bien son nom en l'occurrence. Egalement, on avait amené à la table en tant qu'expert M. Jean-Claude Rivest, qui était recher-chiste pour le Parti libéral. M. Rivest dit: On doit au moins prévoir une égalité des chances. Deuxièmement, M. Lesage dit: Supposons qu'on ferait le référendum sur le français; est-ce qu'il serait juste, à ce moment, que le gouvernement, par l'Office d'information et de publicité, et les partis politiques, à même leurs fonds électoraux, fassent de la publicité pour le oui et laissent les opposants presque sans source de revenus?

Est-ce que ce serait juste? Donc, il vise l'égalité des chances. Il vise l'égalité des budgets. C'est une question très importante, dit-il. Il va même plus loin, il évoque le fameux référendum, le dernier qu'on ait eu au Canada et qui est celui sur la conscription de 1942 où — on en parlera plus tard — la question est d'une ambiguïté absolument invraisemblable. Mais je reviens à ce que disait M. Lesage évoquant ces souvenirs de 1942. Des souvenirs très vifs en ce qui le concerne. Il dit: A ce moment, en 1942, sur la question du plébiscite, sur la mobilisation des troupes ou la conscription, comme on disait dans le temps, le gouvernement s'était prononcé pour le oui. Le premier ministre du Québec s'était prononcé pour le oui. Les partis politiques fédéraux, avec leurs caisses électorales, s'étaient chargés de la publicité.

Les opposants, dont je faisais partie, n'avaient pas de sources de revenus. Nous avons dû faire des sacrifices financiers considérables. C'est M. Lesage qui dit cela. Je poursuis: Ce qui est arrivé, c'est que dans le Québec, avec le bénévolat, nous avons eu une vaste majorité de la population qui a dit non. Mais nous n'avons pas pu aller plus loin parce que nous n'en avions pas les moyens. C'est depuis ce temps, dit-il, que j'ai peur des référendums à la fédérale, à la libérale fédérale, les référendums où il n'y a qu'un paquet d'argent donné à une partie. Et c'est une préoccupation qui est également présente dans les interventions, en tant qu'expert à cette même commission parlementaire, de Me Pierre Beaudoin, qui est conseiller juridique du gouvernement, à ce moment.

Mais avant de passer à Me Beaudoin, je voudrais évoquer une autre citation de M. Jean-Claude Rivest, encore amené comme expert par les libéraux, qui sont à cette époque comme maintenant l'Opposition officielle. M. Rivest parle d'une nécessité qu'il y aurait de créer un conseil constitutionnel. La proposition de l'Union Nationale, nous l'avons acceptée de bonne grâce parce qu'elle émanait d'une volonté d'améliorer le projet de loi. L'autre règle que M. Rivest souhaite voir établir, c'est l'établissement des normes d'équité pour toutes les tendances. Il dit: "Grâce à de telles règles, je pense — je cite au texte — que cela pourrait être une forme capable de pondérer ce déséquilibre qui existait dans la loi fédérale. " Je reviens à ce que Me Pierre Beaudoin disait; il se posait des questions sur les dépenses référendaires ou électorales. On se rend compte que la réflexion à l'époque n'allait pas très loin dans le domaine de la limitation des dépenses électorales. On reconnaissait ce plafonnement dans la Loi électorale existante en 1966, mais on n'osait pas faire le pas suivant qui aurait consisté à étendre les règles, reconnues par cette Assemblée nationale ici, du plafonnement des dépenses en campagne référendaire.

Entre-temps qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président? Il y a eu le référendum britannique de 1975 où la mère de notre Parlement a fait un autre pas en avant. Tout cela se situe...

M. Lavoie: La belle-mère.

M. Godin: La belle-mère, d'accord.

Et tout cela se situe dans la réflexion démocratique d'une solution à des problèmes concrets que les Parlements, les partis ont vécu ailleurs qu'ici. On a vu, par conséquent, le pire exemple d'un référendum injuste cité comme tel par M. Lesage qui, aujourd'hui, dans un autre document, dénonce encore le référendum par une espèce de tête-à-queue ou de "U turn" dont on trouve peu d'exemple dans les annales du parlementarisme. En tout cas, il n'est plus ici, il a le droit de se tromper et surtout le droit de dire ce qu'il veut sans être contesté, ce qui n'est pas notre cas puisqu'on ne fait que se contredire les uns les autres. Mais du choc des idées doit jaillir la lumière, je suis d'accord avec vous là-dessus, et je ne mets pas en doute votre bonne foi, M. le député de Laval, ni celle du député de Marguerite-Bourgeoys. Je dis que nous devons trouver une solution qui nous fasse résoudre le problème de l'égalité des chances, principe reconnu par votre parti, par M. Jean Lesage, le président de la campagne référendaire du non, si j'ai bien compris, qui, à l'époque, se posait les mêmes questions que nous aujourd'hui.

II ne semble pas qu'il y ait d'autre solution que celle qui a été retenue par les Britanniques dans leur référendum sur l'entrée dans le Marché commun: la création de deux comités nationaux. Je ne dis pas que c'est le dernier mot. le nec plus ultra; je ne dis pas que c'est le Bon Dieu qui parle dans ce document que je vais vous citer. Je dis que cela indique la direction que ces Parlements, ces partis, ces citoyens ont suivie pour raffiner le processus. Au fond, ce qu'on fait ici. c'est qu'on tente de raffiner le processus.

Vous n'êtes pas sans ignorer ce que La Rochefoucauld disait: Dans certains cas c'est la liberté qui opprime et c'est la loi qui libère. Je pense que si vous laissiez jouer totalement la liberté de dépenser de l'argent dans une campagne référendaire...

M. Lavoie: Mais elle n'est pas totale.

M. Godin: ... sur quelque sujet que ce soit...

M. Lavoie: J'ai des restrictions sévères.

M. Godin: D'accord... vous auriez à ce moment... De deux maux, il faut choisir le moindre. M. le député de Laval. C'est ce que nous tentons de faire ici, M. le député de Laval... Oui. M. le Président de deux maux, on doit choisir le moindre. Le moindre, il nous a paru que c'était d'encadrer de la façon la plus large possible les tenants du oui et les tenants du non avec une porte ouverte, qui est dans la loi, d'un montant à dépenser de $300. Mais en même temps, la loi n'interdit pas aux gens de s'exprimer, d'écrire aux journaux. La loi n'interdit pas aux gens de dire tout ce qu'ils ont à dire. Elle leur interdit de dépenser, parce qu'à ce moment nous risquerions de nous retrouver devant ce que le député de Gatineau a appelé hier une orgie de dépenses. Je tiens bien à dire qu'il n'a parlé que d'orgie de dépenses pour l'instant. Peut-être que le reste viendra plus tard, mais pour l'instant il ne s'agit que de dépenses.

D'autre part, il y a une autre citation du député de Gatineau que je voudrais rappeler ici. Il a dit dans un journal de sa région: Je viens dans les commissions parlementaires pour mettre le bordel. Je m'excuse. M. le Président, mais je pense que la solution, l'amendement proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys équivaudrait à mettre le bordel dans la campagne référendaire. Si un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne sans adhérer à un comité national, donc dépenser de l'argent, on arrive à des situations absurdes.

J'étais a Boston, il y a environ un an. Il y avait un référendum, à l'occasion d'une campagne électorale municipale, sur, si je me souviens bien, la possibilité de percevoir une taxe auprès des entreprises qui polluaient la rivière Saint-Charles qui traverse la ville de Boston.

Aux Etats-Unis, ils n ont pas de limite aux dépenses, de sorte que vous avez vu les grands pollueurs nationaux, comme les raffineries de pétrole et autres, dépenser des sommes fantasti- ques pour défendre le "no" à cette taxe qui les aurait frappés. C'est précisément devant ce genre de problème que nous risquons de nous retrouver si nous adoptons la motion du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lavoie: Qui avait gagné le référendum? Je ne connais pas le dossier.

M. Godin: Je n ai pas su le résultat, mais je pense que cela avait été battu. La taxe n'a jamais pu être "levied", comme ils le disent, perçue, en français.

Donc, si vous laissez un référendum, sur quelque question que ce soit, naviguer en dehors des cadres qui s'inspirent d'ailleurs de la loi anglaise, on risque de se retrouver devant le bordel ou le "Racine Greater Show", pour citer quelqu'un ici qui avait des amis de l'autre côté. C'est la raison pour laquelle on ne peut pas accepter, a moins qu'il n'y ait des propositions qui résolvent le problème soulevé par M. Lesage. votre conseiller, en 1969, et par Me Jean-Claude Rivest. d'ouvrir la porte à des orgies de dépenses, à des bordels ou a des "Racine Greater Show . On ne peut pas accepter que des groupes d'intérêts puissants, qui ne voudraient pas... Prenons comme exemple, dans le cadre de cette loi générale. un référendum sur la constitution canadienne. Les Québécois sont 4% de la population du continent nord-americain. Si on laissait la porte ouverte. M. le Président, vous avez 96% de la population de ! autre bord qui peuvent bien être contre le fait qu'il y ait plus de pouvoirs pour le Québec. Déjà, il y a une "gang" à Ottawa qui est contre, il y a une "gang" au Québec qui est contre, peut-être qu'il y a d'autres provinces canadiennes qui seraient contre, peut-être que des Etats américains seraient contre. Si vous laissez la porte ouverte, si vous admettez cela, tout est possible. N'importe qui peut venir ici et participer a une campagne du référendum québécoise sur I'avenir de sa propre constitution ou de sa propre place...

M. Lavoie: Est-ce que le députe oublie que je limite les contributions a un électeur du Québec? Suivart les impératifs de la loi 2, il n'y a aucune contribution de compagnie, aucune contribution d'en dehors du Québec.

M. Godin: Vous avez remis cela en doute, tout à l'heure.

M. Lavoie: C'est important, citez-moi correctement!

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

(15 h 45)

M. Godin: Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que cet amendement, sous le dehors de vouloir défendre le droit d'association, le droit de parole. qui n'est nulle part brimé dans notre loi... Nulle part on interdit aux gens de dire ce qu'ils ont a dire: on leur dit: Dites-le en éditorial, dites-le en lettre aux lecteurs, dites-le de toute manière possible.

M. Lalonde: Dites-le devant votre miroir!

M. Godin: Dites-le en conférence de presse, dites-le en assemblée publique.

M. Lalonde: Dans votre bain!

M. Godin: II peut s'organiser autant d'assemblées publiques, à $300, au Québec, que les gens veulent en organiser. Alors, de qui cela brime-t-il les droits? Ce que nous craignons, c'est de...

M. Lalonde: A votre blonde!

M. Godin: Est-ce que j'ai encore la parole, M. le Président? Je me suis fait un devoir de ne pratiquer d'aucune façon...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Godin: ... la pollution par le bruit. Or, j'en suis victime présentement et j'invoquerai bientôt le ministre de l'environnement pour venir prendre une mesure de la pollution par le bruit que j'ai à subir de mes amis d'en face.

Je suis à la veille de terminer, M. le Président. Le comité des non, au Marché commun anglais, il serait peut-être bon de voir comment cela a fonctionné là-bas. Je cite en anglais et je traduirai après. Le comité des non "was necessarily an uneasy coalition", était nécessairement une coalition pas facile, ou difficile à vivre dedans — pardonnez-moi le mauvais français — parce que, dit-on, il y avait l'extrême droite et l'extrême gauche qui étaient contre la participation au Marché commun. Par conséquent, ils ont semblé trouver des difficultés à se regrouper, mais ils l'ont fait quand même, M. le Président. Ils se sont habitués à vivre ensemble. Je suis tout à fait d'accord avec les propos du député de Laval, M. le Président, que ni le Parti communiste, ni les maoïstes, ni les trotskystes, ni l'Union bolchévique, qu'on connaît tous les deux pour avoir participé à Joliette à une mini-campagne référendaire où je constatais d'ailleurs — c'est peut-être cela qui les défend ici — que les Rouges, les extra-Rouges — pas les rouges au sens libéral du terme, mais au sens international, les communistes, les maoïstes — étaient pour le non au référendum, M. le Président.

M. Lavoie: Ils se sont abstenus de voter au référendum. Dites donc la vérité, la vérité a ses droits. Ils se sont abstenus, à Joliette.

M. Godin: Sur la constitution. M. le Président...

M. Lavoie: Ils se sont abstenus à Joliette, ils ne pourraient pas tenir une campagne d'abstention, en vertu de la loi 92.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Godin: Pas dans la campagne préréféren- daire. Ils se sont regroupés en Angleterre, M. le Président, et cela a été, comme ils disent, "an uneasy coalition", coalition compliquée. Mais cela s'est quand même fait, et tous ces groupes se sont dotés d'un comité exécutif, ont réussi à produire un document demandant aux gens de voter non. "Why you should vote no", document dont nous avons ici, en annexe à ce livre, un résumé. "Why you should vote no". Il y avait de toutes les tendances là-dedans, mais au-delà de ces divisions artificielles en ce qui concernait le oui ou le non au Marché commun, ils se sont regroupés, puis ils se sont entendus, en fin de compte. Et si vous regardez la liste des défenseurs du non, il y avait les femmes contre le Marché commun, le Front national, les partis marxistes, certains libéraux, certains conservateurs, certains membres du Parti travailliste. Tout ce monde a marché sur ses frontières à lui et s'est regroupé dans un comité. Le comité avait même le loisir de ne pas accepter en son sein des groupes, en vertu de ces règlements dont il s'était doté. Je ne dis pas qu'un comité du non, par exemple, à l'occasion d'une campagne référendaire quelconque sur quelque sujet que ce soit ne pourrait pas voter, exclure des groupes. Ces groupes auraient le loisir, en vertu d'un des articles de la loi 92, de faire des assemblées publiques, d'envoyer des lettres aux journaux, de faire connaître leur opinion par tous les moyens que ce soit, sans dépenser une "tôle", parce que les dépenses relèveraient des deux comités nationaux. Et à notre avis, M. le Président, les abstentionnistes pourraient également faire des assemblées publiques, à $300 de la "shot", ils pourraient envoyer des lettres aux journaux, ils pourraient se manifester d'une façon ou d'une autre, ils pourraient faire connaître leur opinion, mais sans qu'il leur en coûte une "cenne", sauf les $300 de convocation.

Je pense que c'est ainsi que les intérêts réels du peuple québécois, dans quelque référendum que ce soit, sont le mieux défendus. S'ils ont d'autres propositions à faire que d'ouvrir la porte à tous les abus, et en fin de compte à anéantir — je dis bien à anéantir — le sens même de l'article 21, qu'il les fasse et on les étudiera en toute bonne foi, comme on a étudié depuis le début, depuis un an et demi et plus que nous sommes ici, leurs propositions. On a retenu celles qui ne venaient pas en contradiction avec les principes qu'on s'est donnés comme gouvernement. Si on se trompe sur nos principes, il y aura des élections dans trois ans, trois ans et demi, ou même avant — on ne sait pas — et le peuple nous jugera, nous évaluera, nous balaiera comme ils ont balayé 70 députés de l'autre côté, dont un premier ministre. Ils nous balaieront. On accepte ce jeu-là comme ils l'acceptent. Je ne vois pas pourquoi on devrait, à l'occasion d'une loi-cadre, venir en contradiction avec ses principes mêmes sous prétexte de la liberté de tous de faire tout. A ce moment-là, on risque de se retrouver, pour reprendre l'expression du député de Gatineau, dans le bordel. C'est précisément ce qu'on veut éviter.

M. le Président, on trouve que les sujets qui peuvent faire l'objet d'un référendum sont assez

importants et un référendum n est bon — c est M. Jean-Claude Rivest qui le disait en 1969 en commission parlementaire — que si on n'en abuse pas. Par conséquent, si on en fait tous les six mois, à un moment donné cela devient une farce. Il ne faut en faire que de façon réservée et sur des sujets d'importance. Et dans cette perspective il nous apparaît essentiel... Et ce que nous voulons faire avec les comités nationaux se situe exactement et tout à fait dans le sens, dans I'esprit de la fameuse loi électorale du Québec qui limite les dépenses gouvernementales. Et le député de Laval citait tout à I'heure le cas des Etats-Unis. Peut-être que la Cour suprême des Etats-Unis a décidé que cela violait la constitution américaine de limiter les dépenses, mais il n'est pas sûr que cela viole le sens commun ou le droit en soi. Il n'est pas sûr que la constitution américaine ne gagnerait pas à être améliorée aussi, parce que ce système a amené les Américains au Watergate, a amené M. Nixon a devenir un auteur à succès et à démissionner comme président des Etats-Unis. Donc, à première vue, la loi américaine amène plus de torts que de bien. La loi qui ne plafonne pas les dépenses amène plus de mal que de bien; exemple, le Watergate qui a ébranlé tout le continent et même une partie du monde.

Dans ces secteurs-là, malgré que nous soyons un petit pays — et on doit la réflexion là-dessus à nos amis d'en face, dans le temps où ils avaient un peu de jarnigoine, semble-t-il; on se demande où elle est rendue — je pense qu'on a indiqué le chemin à suivre à certaines démocraties. Et ce qui m'étonne c'est que, après avoir vu la lumière, ils veulent retourner dans l'ombre. Après avoir compris où résidait le respect de la démocratie le plus certain, ils veulent retourner au duplessisme que le député de Laval dénonçait tout à l'heure. Nous, étant à cet égard plus libéraux que les libéraux, nous leur disons: Mais non, ne faites pas cette erreur. Restez dans le sillon que vous nous avez tracé vous-mêmes car nous estimons qu'il est bon! Nous estimons que là-dessus vous ne vous êtes pas trompés. On les torpille assez souvent sur les erreurs qu'ils ont faites, au moins je dois reconnaître qu ici ce n'est pas une erreur.

Ce qui m'étonne, c'est que, attiré un peu par la force d'inertie vers l'erreur, après en être sorti, il va y retourner, M. le Président, comme un chien malade retourne dans sa cage même quand la chaîne est coupée. Je dis que pour toutes ces raisons — je termine là-dessus — la motion du député de Marguerite-Bourgeoys à I article 21 contrevient à l'esprit même qui est dans l'article 21, qui est dans la Loi électorale, qui est dans les plus beaux fruits, les plus beaux joyaux de la réflexion des partis politiques au Québec, qui tendent a limiter les dépenses. Cela démolit cela. Par conséquent, c'est inacceptable, surtout dans des matières comme celles qui seraient soumises au peuple par voie de référendum. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. En somme, si je résume tout ce que j'ai entendu depuis ce matin, ici, à la commission parlementaire, et même tout ce que nous avons entendu depuis les quelque trois semaines...

Le President (M. Clair): Vous avez la parole, M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président. Je disais donc que si on veut résumer tout ce qui a été dit ici ce matin, et même tout ce qui a été dit depuis les trois semaines que la commission parlementaire siège, il y a quand même un certain consensus qui se dégage. C'est que tout le monde est pour la vertu. La où on ne s'entend pas, c'est sur la façon de pratiquer la vertu.

Quant a la motion d'amendement qui nous est présentée par le Parti libéral, je me suis référé à la conference de presse et au document qui a été rendu public le 7 juin 1978 et qui dit ceci: "Les revenus et dépenses référendaires. L'Opposition officielle souscrit d'emblée au principe de la réglementation des dépenses et des revenus référendaires. Il y a certainement lieu, dans I'intérêt public, de chercher à l'avance d'empêcher les abus dans ce domaine. De tels abus seraient assurément contraires à la liberté des Québécois". Un peu plus loin, c est-à-dire dans les trois lignes suivantes, à la page numéro sept du document on lit: Tel que rédigé, cependant, le projet de loi no 92. loin de protéger cette liberté des Québécois, constitue une violation directe des droits fondamentaux des citoyens et des groupes' .

Si je me réfère à ce que j'ai entendu de la part du Parti québécois, notamment à ce que le ministre de la Justice nous a dit ce matin, le grand problème, ce qui me semble I'unique problème, c'est de trouver une formule pour contrôler les dépenses en vue d'éviter les abus. L'intervention qu'a faite mon collègue, le député de Mégantic-Compton, de l'Union Nationale, mérite d'être retenue. Il ne veut pas lui non plus qu'on ouvre la porte a tous les abus et qu'il se dépense, dans le Québec, des millions et des millions de dollars pour lessiver le cerveau des Québécois afin de leur vendre des idées qui pourraient être contraires a leurs intérêts. Nous souscrivons sans restriction à ce principe. A mon avis, là où la formule n'est pas encore trouvée, c'est quand il s'agit de concilier le fait qu'on doit trouver des formules pour contrôler les dépenses et le fait qu'on devrait quand même respecter le droit de parole des citoyens du Québec et leur liberté d'association. Le grand débat est là. En toute objectivité, ce n'est pas facile.

Je regarde l'amendement du Parti libéral qui se lit comme suit: "Un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire sans nécessairement adhérer à un comité national ". Tout à l'heure, mes collègues du Parti québécois ont parlé de bordel. Je ne serais pas porté a partager cette opinion. Cependant, je devrais ajouter que c'est incomplet. On ne peut

pas se satisfaire d'une simple déclaration comme celle-là.

M. Lavoie: II y a des modalités. (16 heures)

M. Roy: II y a des modalités à apporter. Il ne faut pas oublier — c'est là qu'il faudra s'interroger — que, si la motion était rejetée telle quelle et qu'on n'accepte pas le principe même de cette motion, cela veut dire qu'un électeur, un groupe ou un parti politique ne peut pas participer à la campagne référendaire sans adhérer à un comité national.

L'amendement dit ceci:"Un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire sans nécessairement adhérer à un comité national". Si on rejette cela, prenons l'inverse ou bien je ne comprends rien. Si on prend l'inverse, cela veut dire qu'un électeur, un groupe ou un parti politique ne peut pas participer à la campagne référendaire sans nécessairement adhérer à un comité national. On accepte l'amendement ou on ne l'accepte pas.

M. Paquette: Voyons donc!

M. Bédard: Cela, c'est une déclaration de principe dans la loi, par exemple, à l'article 26.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

M. Roy : Je comprends, M. le Président. Contrairement à mes habitudes selon lesquelles, j'ai parfois tendance à interrompre mes collègues, je me suis bien gardé ce matin d'interrompre qui que ce soit. C'est la première fois que je prononce un mot aujourd'hui, à cette commission parlementaire. C'est tellement vrai que ce n'est pas facile que je reprends le document dont ont fait état le leader parlementaire de l'Opposition et le ministre de la Justice. Je reprends ici le rapport qui nous a été remis par la Commission des droits de la personne. Dans le haut de la page 8: "Que dire sinon qu'il s'agit d'un minimum. De plus, si ces trois articles, 23, 26 et 27, du projet de loi donnent une certaine idée de la mesure de la contrainte que représentera au niveau de la participation au débat référendaire la centralisation de toute la campagne à l'intérieur des comités nationaux, l'équation difficile entre plusieurs droits et libertés qu'a tenté de réaliser le gouvernement dans ce projet de loi présente encore des inconnues qui empêchent la commission de se prononcer catégoriquement sur son succès ou son échec. Les objectifs sont louables — je suis d'accord et je souscris aux objectifs — la mécanique de la mise en oeuvre est précise, mais tout cela peut-il fonctionner sans danger pour les libertés d'opinion, d'expression ou d'association? C'est la question que la commission se permet de poser de nouveau au gouvernement en lui recommandant une dernière fois la plus grande prudence dans la voie difficile où il s'est engagé. "C'est exact que c'est une voie difficile dans laquelle le gouvernement s'est engagé. Il ne faut pas oublier que, si quelqu'un devait se lever au Québec, pendant la campagne référendaire et attaquer dure- ment le gouvernement et même l'Assemblée nationale sur le fait qu'on empêche des citoyens de se prononcer individuellement". Je donnerai des exemples en posant des questions au ministre tout à l'heure. Je pense que des questions méritent d'être posées. Il va falloir que, très sérieusement et très objectivement, calmement, on cherche à trouver des réponses à ces questions.

C'est là qu'est la grande question. Avant de prendre le cas des individus, il y a un point que je voudrais soulever. Tous les objectifs auxquels le gouvernement souscrit, auxquels nous souscrivons et auxquels le gouvernement tient mordicus, je me demande si le gouvernement a songé sérieusement de quelle façon il pourra les appliquer. Il va falloir songer à l'application, il va falloir songer aux méthodes qu'on va utiliser. Par exemple, si la loi devait être violée, y aura-t-il des sanctions, y aura-t-il des arrestations? Il faut penser à toutes ces choses.

Je vais poser les questions suivantes au ministre parce que je n'ai pas de réponses, aujourd'hui. Je ne m'en cache pas. Comment les gens vont-ils se situer par rapport à la loi si, par exemple, une personne accepte d'aller prononcer des conférences devant un club social et que cela lui demande des déplacements, que cela lui demande des dépenses personnelles, même si on lui remboursait une partie de ses dépenses? A titre d'exemple, prenons un ex-député, membre de l'Assemblée nationale, de quelque parti que ce soit, un homme qui a été reconnu comme étant un homme de solide jugement, et à qui s'identifie encore un certain pourcentage de la population. Je ne pense pas à M. Lesage, à ce moment-là; je pense à un ex-député de n'importe quel parti politique du Québec qui serait invité devant un club social, qui ferait une bonne conférence à l'occasion de la campagne référendaire et qui, à la suite de l'impact que cette conférence pourrait créer, serait également invité à aller prononcer des conférences ailleurs.

Est-ce que cela veut dire que ce citoyen québécois qui fut député au Québec — je ne parle même pas du député fédéral, mais je pourrai y revenir tout à l'heure — aurait le droit d'accepter des invitations d'aller prononcer des conférences devant des clubs sociaux. On pourrait parler d'un député acadien, d'un député ontarien. On parle d'une limite de $300. Le club social qui inviterait quelqu'un et qui, pour tâcher de contribuer à ce qu'une bonne information soit diffusée pour faire connaître les deux côtés de la médaille, en s'iden-tifiant comme un club neutre pendant la campagne référendaire, inviterait des orateurs qui sont en faveur du oui et également des orateurs qui sont en faveur du non, qui organiserait ces débats à l'occasion de dîners auxquels assisteraient 200, 300, 400 personnes qui souscrivent $6, $8, $10 pour payer le dîner, est-ce que ce serait considéré comme des moyens détournés pour participer à la campagne référendaire?

Comment ces associations et ces groupes pourraient-ils s'inscrire dans un comité, si les groupes s'identifient comme neutres, s'ils veulent faire connaître les deux options à leurs membres, s'ils veulent inviter des personnes, des tenants,

des propagandistes des deux options à leurs membres? C'est une question à laquelle j'aimerais qu'on me réponde. Si ce sont des clubs neutres, je me demande à quelle option ils pourraient s'affilier, à quel comité parapluie ces gens pourraient s'affilier? On sait très bien, M. le Président, et je le dis de façon très sérieuse, que dans toutes les campagnes politiques au Québec, dans tous les grands débats, dans les CEGEP, dans les universités, on dispose de budgets pour organiser des colloques et inviter des participants à des colloques.

Il y a peut-être très peu de membres autour de cette table qui n'aient pas accepté, à un moment donné, de participer à un de ces colloques dans nos CEGEP et dans nos universités. Est-ce que cela veut dire que les CEGEP et les universités qui voudront organiser des colloques durant la campagne référendaire et inviter des panelistes des deux côtés, des panelistes qui s'occupent du oui. des panelistes qui sont des propagandistes du non, et pour lesquels l'université disposerait de budgets pour la tenue de ces colloques, pour défrayer les dépenses des invités, ne pourront pas le faire? J'aimerais qu'on me réponde, M. le Président. J'aimerais qu'on nous réponde de façon très sérieuse parce que je ne sache pas que ce soit là l'intention du gouvernement. Je ne sache pas que ce soit l'intention d'aucun membre autour de cette table d'empêcher que des débats de cette nature soient objectifs. Je pense aux CEGEP, aux universités, même certaines écoles polyvalentes, mais je prends surtout les CEGEP et les universités, parce qu'ils s'adressent à des étudiants qui ont l'âge de voter — au rôle qu'ils ont joué durant les campagnes électorales qui ont contribué à faire connaître les programmes des différents partis politiques, et les colloques qui ont eu lieu ont permis aux différents partis politiques d'avoir la même tribune, d'avoir le même temps de parole, d'avoir la même écoute auprès des personnes qui assistaient à des conférences, à ces colloques pendant les campagnes électorales. Est-ce que ce serait interdit pendant la campagne référendaire?

Est-ce que, nécessairement, s'il y a un ou deux ou trois ou plusieurs CEGEP dans le Québec qui désirent mousser, faire de l'activité pendant la campagne référendaire, ils seraient tenus de s'enregistrer à un comité parapluie? Et s'ils s'enregistrent à un comité parapluie, étant donné qu'ils adopteraient supposément une attitude neutre, alors à quel comité ces organismes pourraient-ils s'affilier ou de quel organisme pourraient-ils faire partie?

M. le Président, — c'est la troisième question que je pose — on a parlé d'une loi-cadre. J'aimerais peut-être oublier la question constitutionnelle qu'on a peut-être trop souvent à l'esprit autour de cette table, et parler d'une loi-cadre. A l'occasion d'un référendum organisé, piégé, qui pourrait soulever un groupe de citoyens, un groupe d'hommes et de femmes, un grand comité pour dénoncer le référendum lui-même, qu'arriverait-il, M. le Président, si les dispositions qu'on semble vouloir introduire de bonne foi pour atteindre des objectifs fort louables étaient appliquées.

Je pense. M. le Président, qu'à ce niveau, il va sûrement falloir qu'on prenne le temps nécessaire, quitte à prendre encore quelques jours additionnels, pour nous dire, donc, devant la commission parlementaire ici. quels sont les moyens que le gouvernement entend prendre pour permettre à un électeur, à un groupe ou à un parti politique qui désire participer à la campagne référendaire, mais qui n'est pas intéressé à adhérer à un comité national, de répondre aux exigences de la loi pour qu'on n'ouvre pas la porte à des abus et des orgies de dépenses. Je pense que la question se pose à ce niveau. On risque d'embarquer tout le monde dans le comité des oui et dans le comité des non: je pense que ce n'est pas là l'intention de mon collègue, le député de Mégantic-Compton, qui pourrait se trouver assis sur la même tribune que les communistes pendant la campagne référendaire. Si on oblige tout le monde à aller dans les comités nationaux, il va y avoir des assemblées qui vont être fort disparates. Il va y avoir toutes sortes de gens assis sur la même tribune.

En ce qui me concerne, je serais bien intéressé au moins de choisir mes alliés pour tenir les réunions. Je pense que mon collègue, le député de Mégantic-Compton, c'est exactement la même chose aussi. M. le Président, la question que nous devons nous poser aujourd'hui ce n'est pas de savoir si on doit enrégimenter malgré eux les électeurs et les groupes, mais essayons donc de trouver une formule qui nous permettrait d'avoir un compte rendu des dépenses et un certain contrôle sur les dépenses. Il faudrait prévoir un mécanisme qui serait assez souple, mais tout en étant assez efficace pour permettre d'éviter les abus que tout le monde dénonce autour de cette table. Je dis tout le monde, parce que je pense que tout le monde ne voudrait pas qu'il y ait des abus pendant cette campagne et que les millions coulent à flots.

Aussi, il y a peut-être un dernier point auquel on n'a peut-être pas pensé tellement souvent. On a dit tout à l'heure autour de cette table que, dans certains endroits du monde, tous les parlementaires s'étaient ligués pour faire voter un référendum et que la population avait dit non. N'oublions donc pas que les citoyens du Québec sont des gens intelligents capables de prendre leurs responsabilités et de faire des distinctions qui s'imposent, lorsqu'il y a trop d'abus. On ne pense peut-être pas assez ici au bon sens populaire de notre population de chez nous qui sait faire les distinctions qui s'imposent quand le moment est venu et qui sait très bien s'apercevoir quand il y a trop d'argent mis dans une campagne. Je me rappelle les élections de 1960, j'ai participé à la campagne électorale de 1960. J'ai aussi participé à la campagne électorale de 1973 alors que j'ai été le seul élu sur la rive sud du Saint-Laurent parmi tous les députés de l'Opposition. J'ai dû lutter contre une montagne d'argent. La montagne d'argent a influencé les gens mais n'a pas influencé l'issue de l'élection dans mon comté. Pourquoi? parce que quand même la population est là avec son bon jugement. Je pense qu'on devrait tenir compte de ce fait que la population du Québec n'est pas

dupe, si jamais il devait se déceler des abus. C'est tout, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Merci. M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, le ministre de la Justice, ce matin, a dit du Parti libéral du Québec qu'il se croyait le seul défenseur des droits et libertés des citoyens.

M. Bédard: Pardon?

M. Gratton: Je dis que le ministre a dit ce matin que le Parti libéral du Québec se considérait comme le seul défenseur des droits et libertés fondamentales des Québécois. Je ne pense pas que ce soit là notre prétention, mais je dirai que la performance du Parti québécois, depuis qu'il est au pouvoir, ne nous a pas convaincu que lui, il se souciait plus qu'il ne faut du respect de ces libertés et droits fondamentaux. Je ne ferai pas de démagogie là-dessus, bien au contraire, je citerai simplement le cas de la loi 2, le cas de la loi 101 et les deux avis qu'on a reçus par rapport au projet de loi no 92 à l'appui de cette affirmation.

De toute façon, je pense qu'il faut s'en remettre à l'avis de la Commission des droits de la personne, que le ministre a d'ailleurs longuement cité ce matin. L'interprétation qu'il en a faite l'a amené à conclure que toutes les réserves exprimées par la commission, par rapport à cette section sur les comités nationaux, sont automatiquement satisfaites par l'introduction à l'article 23 de la notion des groupes affiliés aux comités nationaux. (16 h 15)

M. Bédard: Question de règlement. En toute honnêteté je n'ai pas dit que cela réglait toutes les contraintes, mais, selon l'avis de la commission, c'était de nature à les diminuer de façon très significative. J'ai bien dit qu'à moins de rêver aux lois parfaites, il y aura toujours certaines contraintes, comme, dans toute loi qu'on vote, il y a toujours eu certaines contraintes. Comme la loi électorale que vous avez votée, dans votre temps; la Loi sur le financement des partis, sous le présent gouvernement. Il s'agit de voir les droits et libertés de la personne dans un contexte global des droits d'autrui et des droits d'ordre général.

M. Gratton: M. le Président, je suis fort aise de la précision que vient d'apporter le ministre, parce que je lui dirai tout de suite que je conviens avec lui que l'amendement qu'il apportera à l'article 23 sera dans la direction ou effectivement servira à assouplir les contraintes dont il parle et dont la Commission des droits de la personne parle, par rapport à ces citoyens ou groupes qui, tout en partageant l'objectif visé par un comité national, ne souscrivent pas à la stratégie globale de ce comité.

M. le Président, le ministre, lui, devra convenir avec moi que cet amendement à l'article 23 ne réglera pas, mais pas du tout, le cas des libertés d'opinion, d'expression ou d'association des citoyens ou groupes partisans d'une option non représentés dans la question, dont la Commission des droits de la personne parle et dont a fait état le député de Beauce-Sud, avant moi. Je ferai remarquer au ministre que la formule proposée par le député de Laval, au nom de l'Opposition officielle, laquelle a été rendue publique dans la presse la semaine dernière et qu'il a également reprise ici, à la commission, elle, répond aux interrogations de la Commission des droits de la personne par rapport à ces groupes et citoyens.

Le ministre ce matin — en tout cas, je ne pense pas qu'il puisse le nier — nous a dit: L'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys est la négation même du principe des comités nationaux et du principe du contrôle des dépenses référendaires. Je regrette, M. le Président, mais ce n'est pas du tout correct que de dire cela, parce que le ministre sait fort bien que I amendement que nous proposons, qui vise à spécifier qu'un électeur, un groupe ou un parti politique peut participer à la campagne référendaire, sans nécessairement adhérer à un comité national, ne représente pas l'ensemble de notre proposition. C'est strictement l'énoncé d'un principe qu'on doit inclure à l'article 21, puisqu'il s'agit du premier article de cette section qui traite des comités nationaux. Il n'y a pas un seul membre de la commission qui ne sait pas déjà que cet amendement devra être accompagné d'une série d'autres amendements qui viendront spécifier dans quelle mesure et selon quels critères cette liberté pour l'électeur, pour le groupe ou pour le parti politique de participer au référendum sans adhérer à un comité national, sera possible. Ce ne sont pas des cachettes qu'on fait; ce ne sont pas des mystères ou des choses qu'on veut taire. On l'a inscrit dans un texte, justement, pour que ce soit clair.

Regardons ensemble, très brièvement, de quoi il s'agit. Pour les individus, ce que nous proposons c'est, à toutes fins pratiques, de porter le maximum de $300, qui est contenu à l'article 26 alinéa h), à $3000. Parce que le montant de $3000 est inscrit dans la Loi du financement des partis politiques, la loi 2. Ce n'est pas nous qui l'avons inventé, on ne l'a pas pris quelque part dans un panier, ce chiffre magique de $3000; on l'a pris dans la loi 2 sur le financement des partis politiques. C'est tout ce qu'on propose dans le cas des citoyens. Il n'est pas question qu'ils puissent dépenser plus, il n'est pas question qu'ils puissent le faire de façon occulte. Bien au contraire, on spécifie que, pour un montant au-delà de $100, il doit y avoir divulgation. Donc, pas de manipulation par je ne sais combien de millions de Québécois qui viendraient, avec les $3000, changer ce principe ou nier ce principe de l'égalité des chances. Il ne faut quand même pas charrier!

Dans le cas des groupes, de quoi s'agit-il? Encore là, il s'agit d'un groupe qui ne se retrouverait nulle part dans un comité national quelconque, non seulement sur la stratégie, mais sur le fond de la question. Ce n'est pas nous, non plus,

qui avons les premiers découvert ces groupes-là. La Commission des droits de la personne dit à la page 8 de son rapport: "Plus exactement, ce que voulait faire préciser la commission, c'est la marge de manoeuvre permise en campagne référendaire aux citoyens et organismes qui ne favorisent ni l'une ni l'autre des options soumises au référendum ou qui encore voudraient intervenir à un niveau différent de celui qui aurait été fixé dans la question". Elle donne l'exemple de ceux qui voudraient le faire en prônant l'abstention, soit en se prononçant sur la qualité du débat, soit en voulant coiffer de l'objectivité ou de la neutralité la plus stricte leur participation à la campagne référendaire, dans le cas par exemple d'associations et de groupes qui voudraient faire un travail d'information sur les différentes options auprès de leurs membres."

M. le Président, ce sont ces groupes, ces citoyens-là dont on ne règle pas le cas avec I'amendement que proposera le ministre de la Justice à l'article 23. Ils ne sont pas couverts, eux; ils n'en auront pas de liberté d'expression et d'association. Dans sa conclusion sur ce thème, à la page 9, la commission dit: Et cette réponse sera vitale. Surtout si le législateur n'accepte pas d'introduire la notion de groupe affilié mentionnée antérieurement. Il l'accepte, le gouvernement; j'en suis fort aise. Cela règle le cas de ceux qui sont d accord avec l'objectif d'un comité national, mais qui ne sont peut-être pas d'accord avec la stratégie. Parfait, on vient d'améliorer, on vient d'assouplir les contraintes.

Mais lisons la dernière ligne: "puisqu'alors vraisemblablement le nombre de ces groupes s en trouverait accru. Alors, si le nombre de ces groupes se trouve accru par le fait qu'on n'introduit pas la notion des groupes affiliés, c'est qu'il y en a déjà, des groupes de ce genre qui sont brimés. Ce sont ces groupes, M. le Président, que la formule proposée par l'Opposition officielle vise à libérer, si vous me passez l'expression, en permettant, comme la Loi sur le financement des partis politiques l'a fait, non pas aux compagnies et aux corporations, mais aux syndicats, aux associations, coopératives etc., à même leurs fonds propres, de dépenser un montant total n'excédant pas $3000, soit en participant ou en versant une contribution à un comité national, soit en finançant une initiative ou une activité de leur choix. Encore là, on introduit la même notion qui existe dans la loi 2, c'est-à-dire divulgation pour toute contribution de plus de $100.

Je conviens avec les ministériels que probablement là où on accroche, c'est lorsque, dans notre proposition, on ajoute qu'un tel groupe, syndicat, association, coopérative qui désire dépenser plus que $3000 devra obtenir I'autorisation d'un officier référendaire et deviendra alors soumis aux règlements de la loi sur le financement des partis politiques en ce qui concerne entre autres... On nous fait alors l'énumération des dispositions de la loi 2. Si c'est cette partie sur laquelle les ministériels accrochent, au lieu de rejeter du revers de la main la motion d'amendement qu on présente à l'article 21 et qui introduit le principe permettant à des groupes et à des individus de participer, qu'on accepte cela et qu'on amende plutôt, au moment où on sera rendu là, l'article en question. Qu'on la fasse disparaître, cette possibilité pour un groupe et pour un parti politique, parce que, dans le cas des partis politiques, c est la même formulation qu'on propose. Qu'on la fasse disparaître et qu on limite cela à $3000, de la même façon qu'on le fait dans le cas d'un groupe pour le financement des partis politiques.

Je dis donc, M. le Président, que, si la formule que I'Opposition officielle propose, dans son ensemble... Je répète qu'on ne doit pas considérer l'amendement que le député de Marguerite-Bourgeoys a proposé à l'article 21 comme étant l'ensemble de ce que nous proposons. Ce serait trop facile et ce serait de la démagogie inexcusable. Ce n'est pas du tout cela qu'on propose. On propose des choses très spécifiques, des choses qui collent aux dispositions de la Loi sur le financement des partis politiques, de la Loi électorale. C'est très clair, c'est même sur papier, blanc sur noir, de façon que personne ne se méprenne.

D'ailleurs, il est peut-être bon de rappeler que si nous avons cru bon de proposer une telle formule, c'est à l'invitation et même à la demande expresse du ministre responsable de la réforme électorale qui, à la fin des travaux de la commission parlementaire qui avait entendu des organismes intéressés par le livre blanc, nous avait proposé trois possibilités de solution avec, toujours, l'objectif de contrôler les dépenses, dans le respect des libertés et des droits des citoyens. Il avait proposé trois formules, et on a retenu, dans le projet de loi, la première qui était la même que dans le livre blanc, avec certains assouplissements, j'en conviens. C'est à la demande du ministre que nous avons fait cette proposition. Et on est loin de croire que c'est la formule parfaite. Le ministre reconnaissait ce matin que, même avec la notion de groupes affiliés à un comité national, il reste encore des contraintes. Je lui dirai que, même avec la formule proposée par l'Opposition officielle, il y a encore des contraintes. Le seul but qu'on vise, en faisant cette proposition, c'est d'assouplir ces contraintes le plus possible.

Je répète donc que l'amendement dont nous discutons à l'article 21 n'est pas une invitation à I'orgie de dépenses dont a parlé le député de Mégantic-Compton. Et je dirai au député de Mégantic-Compton que, s'il voulait se donner la peine de travailler à la bonification du projet de loi, il ne tirerait pas des conclusions aussi facilement qu'il l'a fait ce matin. Mais je suppose que c'est moins forçant pour l'Union Nationale de faire de la petite politique partisane à cette commission que de tenter de comprendre d'abord ce dont il s'agit dans la proposition de l'Opposition officielle et, si elle ne fait pas son affaire, de tenter de l'améliorer. Mais les affirmations du député de Mégantic-Compton selon lesquelles la formule que nous préconisons est une invitation à l'orgie des dépenses, et le fait qu'il replace dans un contexte tout à fait différent de celui où nous retrouvions hier soir les propos que j'ai tenus à ce

sujet, ce n'est pas à l'honneur du député de Mégantic-Compton. Et si l'Union Nationale se satisfait des déclarations d'engagement moral qu'ont fait le ministre responsable de la réforme électorale aussi bien que le ministre de la Justice à cette commission, voulant que la question soit claire, nette, permettra aux citoyens québécois de se prononcer sans entraves, je veux bien accepter les déclarations et les engagements moraux, mais il me semble — et sans en reprendre les détails — que l'Union Nationale devrait, mieux que quiconque, savoir que les engagements moraux d'un gouvernement ne valent pas un texte de loi clair et limpide. Et c'est tout ce que nous proposons.

Et je dirai que le député de Beauce-Sud m'a énormément plu tantôt parce qu'il s'est bien gardé de descendre dans la petite partisanerie. Il a compris, effectivement, que l'amendement à l'article 21 qu'a proposé le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas l'ensemble de la proposition que vous faites. Et je pense que le député de Beauce-Sud n'est pas reconnu comme un ami ou un allié du Parti libéral du Québec et ce n'est pas ce qui l'a motivé à tenir les propos qu'il a tenus. Il reconnaît que le Parti libéral, avec la proposition qu'il a rendue publique la semaine dernière, s'est tout simplement rendu à l'invitation du gouvernement de tâcher de rechercher un consensus pour faire de cet outil de la démocratie, comme on l'a appelé au début de la commission parlementaire, qu'on est en train de se donner avec le projet de loi no 92, un outil crédible en lequel l'ensemble des Québécois auront confiance. (16 h 30)

En terminant, M. le Président, j'aimerais faire appel au sens du "fair play" du ministre de la Justice pour qu'il admette, au moins, le bien-fondé de notre motion d'amendement à l'article 21. C'est évident que, si cet amendement devait être adopté relativement à l'article 21, d'autres amendements de concordance avec notre document seraient proposés aux articles subséquents. Mais qu'il admette que toute cette formule n'est pas une invitation, n'est pas la négation du principe du contrôle des dépenses, loin de là.

L'ouverture de ce côté-ci n'est pas une ouverture strictement dans les mots, M. le Président. Quant à moi, je prends à témoin mes collègues du Parti libéral; s'il y a lieu de modifier la proposition que nous faisons dans certaines de ses modalités, nous accepterons volontiers d'en discuter, non pas pour perdre du temps, mais strictement dans l'unique but de bonifier le projet de loi et d'en arriver à ce consensus que tous prétendent chercher depuis maintenant près d'un an. Mais on aboutit à cette commission — je suis peiné de devoir l'admettre — à un refus systématique du gouvernement de vouloir considérer quelque proposition sérieuse que ce soit de l'Opposition officielle sur les grands principes du projet de loi qui sont, d'une part, les comités nationaux et, d'autre part, l'article 6 dont nous avons dû suspendre l'étude.

M. le Président, c'est en toute ouverture que j'invite le ministre à reconnaître au moins avec nous que ce que nous proposons n'est pas l'élimination du principe du contrôle des dépenses. Ce n'est pas non plus la négation du principe des comités nationaux; c'est une formule sûrement pas parfaite, mais qui pourrait possiblement être améliorée. C'est une formule qui assouplirait les contraintes dont on parle tous et qui sont inhérentes à toute formule ou toute méthode de contrôler les dépenses durant la campagne référendaire.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je fais suite à l'invitation qui est faite par le député de Gatineau voulant qu'on discute des contraintes ou encore qu'on évalue quelles seraient les dépenses permises par un groupe, un individu, une association ou un parti politique qui ne voudrait pas adhérer à un comité national. Il faudrait considérer cela là où il faut que cela soit considéré, par exemple, lorsqu'on discutera de la section II concernant les dépenses réglementées et les dépenses qui sont non réglementées, où nous serons au bon endroit. On n'est pas ici pour faire des énoncés de principe. On est là pour les concrétiser dans des articles bien précis. Il ne faut pas oublier ce que c'est faire de la législation.

A la section II, aux articles 25 et suivants, on parle des dépenses réglementées — je m'adresse au député de Beauce-Sud — des dépenses non réglementées, on traite, d'une façon spécifique, des moyens qui pourraient être à la disposition des individus, des groupes ou des partis politiques qui ne voudraient pas adhérer à un comité national; ce sera I endroit tout indiqué pour en discuter. C est à ce moment que nous pourrons échanger sur des possibilités. Par exemple, les $300 dont vous parlez, qu'on puisse en discuter par rapport à la proposition que vous faites des $3000. Il faut se situer au bon endroit. On n'est pas là pour faire une série d'articles d énoncés de principe. On est là pour que les articles, pour que les dispositions qui sont dans un projet de loi fassent qu'au bout de la ligne l'ensemble de ces dispositions dégage non seulement une impression mais une conviction pour tous et chacun de nous que les droits et libertés de la personne ont été respectés, que des contingences ou des contraintes ont été amoindries. C'est là qu'on va en discuter, mais d'une façon pratique. Là, au niveau de la section dont nous traitons et des articles que nous abordons, entre autres l'article 21, nous en sommes au niveau du principe de la formation de comités nationaux, de comités provisoires, de la manière de s'y insérer, de la technique, de l'ensemble des dispositions qui feront qu'il y aura une procédure à suivre qui sera très claire pour ceux qui veulent adhérer aux comités nationaux. C'est cela, le principe de l'ensemble de cette section et de ces articles qui sont contenus dans cette section.

Dans ce sens, l'amendemen tque vous proposez, je le maintiens, va à l'encontre d'un des principes fondamentaux de la loi au niveau de la nécessité.

M. Lalonde: M. le Président, si on me le permet, j'ai une question de règlement à soulever. Il me semble que ces propos contredisent la décision de la présidence, à savoir que l'amendement est recevable. S'il avait été à l'encontre de la loi ou d'un principe de la loi, la présidence aurait dû déclarer qu'il était irrecevable.

M. Bédard: Rappelez-vous— moi, je l'ai noté et très bien, à part cela — que lorsque la présidence a accepté, a dit qu'elle voulait faire preuve d'ouverture d'esprit, permettre le plus de discussions, donner la chance au coureur, je suis parfaitement d'accord, elle a dit, en même temps, qu'on en était à la limite ténue de ce qui pourrait être permis et de ce qui ne pourrait pas être permis. Je pense, là-dessus, que la présidence a très bien fait en prenant cette décision. Il faut arrêter de se donner des cadres tellement rigides qu'on ne pourra pas discuter, en fait, du projet de loi. Je pense que lorsqu'on parle des comités nationaux — vous êtes d'accord? — on ne peut pas discuter cela article par article. Il faut discuter cela dans un ensemble. C'est dans cet esprit qu'hier, je trouvais que la meilleure manière d'aborder le sujet, ce n'était pas d'esssayer de jouer techniquement article par article, mais de se permettre une discussion libre qui d'une heure dont on avait parlé du début est devenue deux heures. Même si cela continuait aujourd'hui, je crois que c'est dans un ensemble qu'on doit essayer d'évaluer l'ensemble des principes qui sont contenus là.

C'est dans ce sens que je vous dis que l'amendement, tel qu'il est proposé, va à l'encontre d'un principe fondamental de la loi parce que ouvrir la campagne référendaire aux partis politiques changerait l'objectif de la loi qui veut que l'on consulte la population au-delà des partis politiques pour obtenir un avis non partisan qui permette à un gouvernement, sur des questions importantes, de prendre des décisions plus éclairées. Cet amendement va à l'encontre du projet de loi qui veut que la campagne référendaire — c'est cela, l'esprit d'une campagne référendaire ou d'une campagne de consultation — se fasse au-dessus de toute option partisane. On sait qu'il se peut qu'à l'occasion d'une consultation, il y ait des députés qui sont au pouvoir qui décident, par rapport à une option, d'être avec des députés qui sont dans l'Opposition. L'inverse peut être également vrai. Nous sommes dans une loi-cadre. Il ne faut pas l'oublier. Il faut le raisonner à partir du respect d'un principe.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval invoque le règlement.

M. Lavoie: Je ne peux pas accepter, pour les fins du débat, les déclarations du ministre.

Une Voix: La pertinence.

M. Lavoie: Non, pas seulement la pertinence. Sur la question de règlement, je ne peux pas accepter que notre amendement soit contre le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi, tel que je le conçois, c'est d'instituer un système de consultation populaire. C'est cela, le principe... Je peux finir?

M. Bédard: M. le député, si c'est une intervention, vous aurez le droit...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une interruption.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, je pense que le point que vous soulevez ne constitue pas, à proprement parler, une question de règlement. Il s'agit d'une matière à interprétation de l'amendement que vous avez proposé. Dans la mesure où le ministre demeure dans la pertinence du débat, je pense que, hormis que vous exerciez votre droit prévu à l'article 96, il ne s'agit pas d'une question de règlement.

M. Lavoie: C'est également contre la décision que vous avez rendue.

M. Bédard: Mais non, ce n'est pas contre la décision.

M. Lavoie: Si cela avait été contre le principe, notre motion n'aurait pas été acceptée, M. le Président.

M. Bédard: D'ailleurs, le député de Marguerite-Bourgeoys a concouru avec moi pour dire que le président...

M. Lalonde: Faisant preuve d'une grande générosité.

M. Bédard: Je suis heureux que vous soyez généreux, mais je sais que vous êtes quand même toujours d une certaine logique.

M. Lalonde: Je vais en profiter pour soulever une autre question de règlement, M. le Président. Le ministre, dans ses derniers propos, s'attache au parti politique et dit qu'on ne peut pas permettre l'amendement parce qu'on parle d'un parti politique. Cela deviendrait partisan. Je voudrais, au nom de la pertinence, qu'il relise I'amendement. L'amendement parle d'un électeur, d'un groupe ou d'un parti politique".

M. Bédard: Si vous me laissez continuer, je vais essayer...

Le Président (M. Clair): Je ne pense pas qu il s'agissait d'une question de règlement. M. le ministre.

M. Lalonde: Oui, une question de pertinence.

M. Bédard: M. le Président, alors, sur la question des partis politiques, je crois que cet amendement va justement à l'encontre du projet de loi qui veut que la campagne référendaire se fasse au-dessus de toute politique partisane, dans le sens du parti politique. Ce serait le cas si on ouvrait la campagne référendaire à un parti politi-

que avec autant de largesse sur le plan financier. Je ne m'étends pas là-dessus; on en discutera quand viendra le temps aux articles concernant les dépenses réglementées ou non réglementées. Justement, l'esprit de la formation de ces comités nationaux, c est de permettre une information plus objective de la population concernant les options, c'est de permettre une définition plus précise des options afin que la population puisse mieux se prononcer.

M. le Président, même la Commission des droits de la personne ne suggère pas un tel amendement. Elle propose plutôt d'élargir les comités nationaux en y insérant des groupes affiliés, mais tout en sauvegardant le principe voulant que la population serait mieux informée si les opinions étaient rassemblées sous des options claires et précises. Je trouve qu'il faut penser toute notre mécanique non pas en fonction de nos intérêts personnels ou de nos intérêts partisans — on a le droit d'en avoir, des intérêts partisans — mais en fonction de la population que l'on veut consulter, envers laquelle on est redevable, on est responsable de se donner des mécanismes qui nous permettent de lui présenter des options les plus claires possible, de rendre le débat le moins compliqué possible, quoiqu'on ne puisse pas éviter toutes les complications, de manière qu'elle puisse exercer son jugement.

M. le Président, c'est dans ce sens que je dis que l'amendement est contre un des principes de la loi. Ouvrir la campagne référendaire à des partis politiques, même avec des dépenses réglementées plus substantielles que ce que propose le projet de loi, ce serait transformer une campagne référendaire en une campagne électorale. Ce n'est surtout pas cela qu'on veut. Ce n'est surtout pas cela, je pense, que l'Opposition veut: qu'une campagne de consultation devienne une campagne proprement électorale. Si c'est cela, écoutez... M. le Président, si on veut une campagne électorale, il y a des mécanismes qui permettent à un gouvernement de déclencher des élections et de faire une campagne électorale. Si c'est une consultation de la population, c'est une voie différente et ce sont, par conséquent, des mécanismes différents qu'on doit mettre au point ensemble, en s aidant.

Je ne vous dis pas qu'on a le monopole de la vérité. Je vous dis, par exemple, que les recommandations ou encore les propositions qui nous sont faites par l'Opposition — cela n'est pas faire preuve d'étroitesse d'esprit; je pense bien qu'on a le droit à nos principes à l'intérieur de certains projets de loi — doivent s'inscrire à l'intérieur du respect de certains principes auxquels nous tenons comme gouvernement. M. le Président, le leader de l'Opposition m'a fait à deux reprises, hier soir et encore tantôt, des mises en garde comme ministre de la Justice responsable de la Commission des droits de la personne, à savoir de ne poser aucun geste qui soit de nature à ce qu'une loi adoptée devienne contestée et soit contraire à la Commission des droits de la personne.

Je le remercie de sa mise en garde. Je peux lui dire que c'est une de mes préoccupations pas seulement comme ministre responsable de la Commission des droits de la personne, mais je dirais comme tout citoyen qui croit en une option, quelle qu'elle soit — comme l'Opposition peut croire en une option — et qui veut essayer de se donner tous les mécanismes possibles pour qu'une consultation de la population ne soit pas une farce, mais qu elle s'inscrive dans un cadre bien précis qui sauvegarde l'égalité des chances par, par exemple, un des moyens dont on a parlé, à savoir, le contrôle des dépenses. Le leader de l'Opposition m'a mis en garde de ce côté. Je peux I'assurer que je vais prendre toutes les précautions nécessaires, non seulement personnellement mais avec l'aide de tous ceux qui sont ici à la commission, parce qu'on a tous avantage à faire une loi qui ne soit pas l'objet de contestation. Je pense que c'est clair. (16 h 45)

Moi aussi je me permettrai de lui faire une mise en garde. Qu'il ne pense pas que je l'accuse, que j'accuse l'Opposition officielle. Sous le couvert de défendre les droits et libertés individuelles, il ne faut pas que cela donne comme résultat, quand on parle du contrôle des dépenses, de préserver une liberté, pas les libertés et les droits individuels, mais une liberté qui serait celle du renard dans le poulailler, c'est-à-dire cette liberté que peuvent représenter les forces de l'argent, de pouvoir dépenser autant qu'ils le veulent pour en arriver au résultat de fausser une consultation.

Moi. j'y crois à la liberté des opinions. Je ne crois pas que ce soit parce que quelqu'un a le porte-monnaie plus fourni ou mieux garni que son opinion est nécessairement meilleure, qu'elle a le droit nécessairement d'être plus véhiculée que l'opinion de quelque individu qui ne serait pas fourni au niveau des moyens financiers. C'est dans cet esprit que je dis. sous le couvert de défendre les droits et libertés de la personne, prenons garde de défendre la liberté du renard dans le poulailler.

A cette argumentation au niveau du contrôle des dépenses, j'ai écouté le leader de l'Opposition avec beaucoup d'attention, qui nous apportait certains exemples. Il nous disait, entre autres — je n'ai pas à qualifier, je prends ses exemples —: On a gagné en 1960 contre le parti de l'Union Nationale, puis on a gagné contre les forces de l'argent, on a gagné contre le patronage, les forces de l'argent, etc. Cela a pris 25 ans pour gagner, 20 ans qu'ils ont été au pouvoir.

M. Lavoie: Pas tout à fait.

M. Bédard: Je suis convaincu que si le Parti québécois ne s'était pas donné les moyens financiers — mais entre l'exagération puis ce qu'il faut pour essayer de faire valoir des idées, ce sont deux choses — si le Parti québécois ne s'était pas, malgré toute sa bonne volonté, malgré le fait qu'il aurait pu avoir raison sur toute la ligne — et c'est vrai pour le Parti québécois comme pour n'importe quel autre parti — s'il ne s'était pas donné les

moyens financiers, on n'aurait peut-être pas eu le 15 novembre 1976 aussi rapidement. Les forces de l'argent, on a beau dire, à un moment donné, on en vient à bout.

Vous savez, il y a une question de délai. Si cela prend 50 ans, est-ce qu'on va être assez hypocrites pour refuser de contrôler les dépenses en calmant sa conscience en se disant: Si on ne gagne pas le premier référendum, on gagnera le deuxième, on gagnera le troisième, on gagnera dans 50 ans? Est-ce qu'on va laisser ce pouvoir financier empêcher l'expression — ce à quoi ont droit les citoyens — l'expression de leurs intentions, l'expression de leurs convictions? Je pense qu'il faut y arriver le plus rapidement possible. Et la manière d'y arriver le plus rapidement possible et le plus sécuritairement possible, c'est justement — parce qu'il faut penser à l'après-référendum — qu'au lendemain du référendum, chacune des parties, chacune des options, pour quelque référendum que ce soit, ait la conviction qu'il y a eu un mécanisme, qui n'était pas parfait, mais qui permettait quand même aux diverses options de se faire valoir, qui a eu un contrôle des dépenses, qui a été de nature à assurer une égalité des chances. C'est important un référendum, c'est important une consultation populaire, mais c'est important aussi après une consultation populaire puis après un référendum.

Même si on diffère d'opinion, tant qu'on a la conviction que les règles du jeu sont égales pour tout le monde, on est capable d'accepter de perdre n'importe quelle option, quelle qu'elle soit. Je pense qu'il faut se donner les moyens, et c'est cela qu'on essaie de faire aujourd'hui. On n'essaie pas de brimer les droits et libertés individuelles, on essaie de se donner un mécanisme le plus parfait possible, qui va satisfaire les uns et les autres, mais qui ne sera pas surtout orienté en fonction de nos intérêts à nous, en fonction du fait qu'il faut se donner de mécanismes qui nous fassent gagner, en fin de compte. A ce moment, on ne se comprendra jamais. C'est pour cela que c'est une loi-cadre. Quelque référendum que ce soit, quelque importante que puisse avoir une consultation populaire, je pense qu'elle doit se situer à l'intérieur d'un cadre démocratique qu'on va se donner, pas parfait, mais suffisamment à point.

M. le Président, c'est dans ce sens que je crois que l'amendement qui nous est proposé va à I encontre du principe, au niveau des partis politiques. On va parler des moyens qu'on donne, au niveau des groupes, on va essayer de leur donner le plus de moyens possible, tout en ayant à l'idée la sauvegarde des droits et libertés dont parle continuellement l'Opposition. La même chose pour les individus; on va essayer d'avoir cette préoccupation présente à l'esprit continuellement lorsqu'on décidera des dépenses réglementées et des dépenses non réglementées. Par exemple, le député de Beauce-Sud nous a donné certains exemples. Je pense que c est surtout là que se situeraient les questions posées par le député de Beauce-Sud. La loi, déjà, répond à plusieurs de ses questions. S'il prend la peine de lire correctement les articles 25 et 26, presque toutes ses questions ont leur contenu à ces articles.

M. Roy: Oui. Si vous me permettez, j'ai une question à poser pour avoir une bonne explication du ministre.

M. Bédard: Oui.

M. Roy: Ce qui n est pas dit dans la loi, du moins ce que je n ai pas saisi dans la loi, c est si un groupe social qui décide de tenir des colloques doit être inscrit. Il a droit à un certain minimum de dépenses à faire, mais doit-il nécessairement s inscrire pour tenir ces colloques? C est là qu est le point.

M. Bédard: C'est là qu on discutera. Je ne peux pas arriver avant le temps; je pense que c est là qu'on va avoir à en discuter.

Au chapitre où nous sommes, nous discutons d'un mécanisme bien précis qui est celui des comités nationaux. Nous discutons aussi — et je comprends qu on diverge un peu — du principe du contrôle des dépenses. C'est bien beau de dire que I'argent ne change rien, mais parfois l'argent contribue à perpétuer des situations inacceptables, parfois pendant 20 ans, parfois pendant 25 ans. A moins d'être des gens qui se mettent la tête dans le sable, on a l'obligation, non seulement comme législateurs responsables, mais comme citoyens responsables, d'y penser sérieusement. C'est ce que j'ai à dire à ce stade-ci, M. le Président.

M. Roy: II faut faire attention pour ne pas enfermer les victimes. On parle des puissances de I'argent. Tantôt, le ministre parlait du renard et du poulailler. Il y a deux façons de protéger...

M. Bédard: Non, du renard dans le poulailler!

M. Roy: ... les poules. Les enfermer ou se débarrasser du renard.

M. Bédard: On pourra peut-être en discuter! Mais il y a certains renards — vous en conviendrez avec moi — qu il faudra toujours accepter dans une société, à moins de brimer les droits et libertés de la personne. La seule manière de limiter leurs dégâts — je ne parle pas de respecter leurs droits et libertés — c'est quand même, comme législateurs et comme citoyens responsables, de se donner des règles précises, comme on s en est donné avec la loi sur les élections, avec la loi sur le financement et comme on veut s'en donner quand il s agit d'une consultation.

M. Grenier: II y a aussi les bêtes puantes qui saignent les poules aussi!

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys et...

M. Roy: Prenez Beauce-Sud si vous me permettez.

M. Bédard: Le député de Beauce-Sud parlait des possibilités pour des clubs sociaux, à l'occasion de soupers organisés, d'inviter des gens qui ne sont pas dans le comité; il est évident qu'ils ont le droit de les inviter, il est évident que ces gens ont le droit d'y aller. Quelqu'un qui croit à une option ou à une autre peut faire certaines dépenses personnelles par exemple. Je ne parle pas du conférencier qui, à coups de $1000 comme rémunération, va multiplier les conférences. Il se peut que, à un moment donné, on puisse douter si c'est pour les $1000 ou ses convictions qu'il fait la tournée de la province. Ce sont des choses...

M. Roy: Mais où cela arrête et où cela commence?

M. Bédard: Où cela arrête, on le dit. On pourra en reparler au bon moment. C'est qu'on permet à des groupes une réunion, les frais qu'on pense normaux pour organiser une réunion puis recevoir quelqu'un qui peut exprimer des idées. La même chose concernant les individus. Quand vous allez arriver aux dépenses réglementées et non réglementées, vous allez être surpris de voir jusqu'à quel point, en fait, tout individu, tous les individus peuvent participer, ainsi que les groupes, tout en n'étant pas à l'intérieur. C'est là qu'on en discutera.

Le Président (M. Clair): Messieurs, j'ai permis les questions au député de Beauce-Sud parce que celui-ci n'avait pas épuisé son temps de parole. Cependant, messieurs, le député de Gatineau, qui a épuisé son temps de parole, requiert l'autorisation de poser une question. Je pense bien que pour une trentaine de secondes, personne n'aura d'objection. Son droit de parole est épuisé.

M. Godin: On va vous faire une faveur. M. Paquette: Si c'est une idée nouvelle.

Le Président (M. Clair): Je vous offre ma protection pour une trentaine de secondes, M. le député de Gatineau.

M. Grenier: Vous n'avez pas mon consentement, moi.

M. Godin: Mais cela ne constitue pas un précédent, M. le Président. M. le Président...

M. Grenier: J'aimerais bien qu'il me le demande, c'est bien important.

M. Gratton: Moi, je n'ai rien à demander, c'est le président qui s'occupe de cela.

M. Grenier: Cela me tenterait bien de ne pas le lui donner.

Le Président (M. Clair): Si vous voulez vous formaliser, messieurs, son droit de parole est expiré.

M. Grenier: Non, non, accordé.

M. Gratton: M. le Président, je voudrais simplement demander au ministre...

M. Godin: Premièrement, cela prouve que les limites ont du bon. Deuxièmement, est-ce que cela va constituer un précédent?

Le Président (M. Clair): Cela n'a jamais la valeur d'un précédent.

M. Godin: D'accord. C'est pour les droits, puisqu'on parle de droits depuis qu'on est ici.

M. Lalonde: Non, la générosité ne crée jamais de précédent.

Le Président (M. Clair): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Je voudrais simplement demander au ministre s'il est convaincu qu'en adoptant l'amendement qu'on propose à l'article 21, il s'agit effectivement d'une négation d'un principe fondamental du projet de loi. Il dit qu'il veut que la consultation populaire se fasse au-delà de la partisanerie politique, et pourtant toute l'économie du projet de loi vise, par exemple à l'article 22, les députés membres d'un parti politique...

M. Bédard: Là vous parlez du comité provisoire.

M. Gratton: Oui, mais qui va adopter les règlements? Je ne voudrais pas faire de discours là-dessus parce que je n'en ai pas le droit, mais est-ce qu'il ne craint pas qu'à ce moment-là on pourra faire des règlements qui feront intervenir la partisanerie quelque chose de rare?

M. Bédard: Oui, mais chaque parti, chaque comité sera jugé. J'ai dit tantôt que c'était un défi qu'on avait à relever, de quelque option qu'on soit, de faire des règlements qui soient respectueux de la Charte des droits et libertés de la personne et respectueux des différents groupes qui pourront vouloir adhérer à un comité.

M. Gratton: On y reviendra à l'article 22.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Bédard: Je me suis permis d'intervenir parce que, M. le Président, je ne dis pas que c'est futile l'amendement qui a été présenté, mais je voulais expliciter pourquoi, avec conviction, en fait, on était contre. C'est parce qu'on sait qu'on va en rediscuter l'application lors de l'étude des articles 25 et 26.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier, vous allez devoir requérir le même consentement, parce que votre droit de parole est également épuisé.

M. Lalonde: Un tout petit consentement.

M. Godin: Une petite question de rien. Est-ce que les...

M. Gratton: On va le faire, mais à titre de faveur.

M. Lalonde: Et de privilège.

M. Godin: M. le Président, les règlements d'un comité national devront-ils être soumis au conseil ou... Il n'y a pas...

M. Bédard: II y a un comité national...

M. Gratton: Au jugement de l'opinion publique.

M. Godin: Cela, c'est votre règlement.

M. Bédard: L'opinion publique, c'est très fort. La même chose, la Commission des droits et libertés de la personne peut les regarder, peut donner des opinions là-dessus, peut-être. Moi je pense qu'il y a la possibilité...

M. Lalonde: Mais c'est d'une largesse!

M. Bédard: ... ou la précaution de chacun des comités quand ces règlements seront à point, peut-être de les soumettre ou d'aller les soumettre pour analyse au niveau de la commission. Chaque comité...

M. Lavoie: Vous n'avez même pas soumis votre projet de loi en commission.

M. Bédard: Chaque comité. Bien oui, mais on...

M. Godin: C'est le Québec des libertés, M. le Président.

M. Bédard: On ne fera pas un débat, on n'a pas soumis le projet de loi et il reste une chose, c'est que l'opinion n'est pas si contraire à ce qui est contenu dans le projet de loi, mais on ne fera pas un débat là-dessus.

Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion...

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, le même consentement.

M. Lalonde: Non, non, M. le Président, vous m'avez dit qu'il me restait trois minutes, je crois.

Ce matin vous m'avez dit cela. En fait vous me l'avez dit comme cela.

Le Président (M. Clair): Vous avez raison, vous avez encore trois minutes.

M. Lalonde: J'ai conclu que ce n'était pas trois heures. Mais avant cela, je voudrais poser une question au ministre. Est-ce qu'il se rend compte, parce qu'il a dit tantôt qu'il était ouvert à des changements qui respectaient les objectifs recherchés, mais plus loin, au niveau du financement, pour réconcilier les deux objectifs importants, à savoir la liberté et aussi le contrôle des dépenses. Est-ce qu'il se rend compte qu'en votant contre l'amendement il se trouve à empêcher la commission de reconsidérer un amendement semblable? (17 heures)

M. Bédard: Ce que j'ai dit, c'est qu'une loi. ce n'est pas un ensemble d'articles, ce n'est pas 200 articles qui sont des énoncés de principes. Il y a certains principes qui émergent d'une loi. le principe du contrôle des dépenses, le principe de l'égalité des chances, différents principes. Mais on ne met pas cela dans chacun des articles. Vous ne voyez pas l'égalité des chances dans le projet de loi. a aucun des articles! Pourtant, c'est un des principes essentiels de ce projet de loi. Pour faire un projet de loi. on part de certains principes qu'on veut respecter, mais, article par article, les contenus doivent être tels, du point de vue de la mécanique de rédaction, qu'en ressorte l'image du respect des principes qu on a mis de l'avant.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Maintenant, est-ce que. techniquement, s ils votent contre notre amendement, on ne pourra pas le rapporter un peu plus loin, si jamais il devient acceptable en fonction d'autres aménagements?

M. Bédard: On en est aux questions des principes. Je pourrais bien arriver et dire: Je suis d'accord avec votre amendement, mais sujet à la section II du projet de loi. Est-ce qu'on serait plus avancé? On ne serait pas plus avancé.

M. Lalonde: II faudrait le suspendre à ce moment-la. Si vous votez contre, on ne pourra pas le rapporter.

M. Bédard: Je pourrais bien prendre toutes les questions de principe et dire: Je suis d'accord, mais sujet à l'application de la présente loi. On ne serait pas plus avancé. Je pense que l'essentiel de ce que vous vouliez amener, cela va pouvoir se discuter, pas nécessairement au niveau de l'amendement tel que libellé, de celui que vous avez présenté, lorsque nous allons discuter des articles 25. 26. des dépenses, etc. C'est là que va se dégager, comme je vous l'ai dit une ouverture. On aura une discussion globale. Vous allez peut-être vous rendre compte que, dans les articles 25 et 26. dans les dépenses accordées, c'est bien plus large qu'on peut le penser. Il y en a qui ont parlé de S1

milliard qu'il sera possible de dépenser. Si vous êtes conséquents avec cela, j'espère que vous ne voulez pas que cela soit plus que $1 milliard au niveau des possibilités. Je badine un peu sur ce point, mais je crois que c'est là qu'il faut discuter.

M. Lavoie: Est-ce que je peux solliciter le consentement pour une très brève question?

Une Voix: Avec faveur.

M. Lavoie: L'article 22 prévoit que les règlements sont adoptés par les députés qui font partie d'un comité provisoire. On a parlé tout à l'heure des comités affiliés. Je pense bien que c'est normal que, dans les règlements, le comité du oui ou du non dise: Pour que les groupes puissent s'affilier à nous ou s'intégrer, vous allez respecter I'option et les objectifs du groupe.

M. Bédard: L'objectif fondamental. D'ailleurs, la Commission des droits de la personne — je ne veux pas m'avancer plus qu'il ne le faut — semble dire assez clairement qu'il y a un objectif. C'est clair qu'a partir du moment où un groupe veut embarquer il faut qu'il respecte l'objectif.

M. Lavoie: L'objectif, bon. M. Bédard: Les moyens?

M. Lavoie: Je vous pose I'hypothèse suivante et je ne veux pas en faire une question politique.

M. Bédard: Mais je ne veux pas m'avancer.

M. Lavoie: Dans le référendum que nous avons tous à l'esprit, supposons que la question du groupe majoritaire gouvernemental serait la souveraineté-association, mandat de négocier ou d'instituer au Canada la souveraineté-association du Québec, et que vous auriez un groupe comme les Fils de la liberté qui dise: Non, nous, c'est la séparation totale. Ce ne sont plus les mêmes options, ni les mêmes objectifs. Comment va faire un groupe comme celui-là pour participer à la campagne référendaire? Donnez-moi une réponse à cela.

M. Paquette: Ils vont être pour ou contre. C'est tout.

M. Bédard: Je ne veux pas...

M. Paquette: S'ils sont contre, ils vont voter contre.

M. Bédard: Je ne veux pas préjuger de ce que seraient les règlements des différents comités. A partir du moment ou ils sont respectueux des droits et des libertés de la personne, qu'ils ont des critères qui se défendent très bien devant la population... Si quelqu'un ne respecte pas ces critères objectifs, il y a des moyens à ce moment-là... C'est pour cela qu'on a prévu dans la loi...

C'est un choix. Disons qu'ils ne veulent être ni dans un comité, ni dans l'autre...

M. Lavoie: Disons qu'ils ne veulent ni l'un ni l'autre, que peuvent-ils faire?

M. Bédard: On en parle dans les articles 25 et 26.

M. Lavoie: Disons qu'ils sont 2000 membres bona fide, que peuvent-ils faire?

M. Bédard: Je ne veux pas embarquer dans toute la mécanique, mais c'est très simple. C'est un choix d'être dans un comité ou pas.

M. Lavoie: Ils ont le choix de rester en dehors des comités.

M. Lalonde: Ils ont le droit de se fermer ou de parler.

Le Président (M. Clair): Messieurs...

M. Lalonde: M. le Président, il me reste trois minutes.

M. Bédard: Vous n'êtes pas correct. M. Godin: Un instant.

Le Président (M. Clair): Comptons 30 secondes. Il reste deux minutes et demie au député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je n'en aurai pas assez pour repasser tous les arguments, pas à cause de leur valeur, cela prendrait du temps. Il y en a eu plusieurs. Par exemple, le député de Rosemont m'a dit qu'on met les autres partis dans la rue, par mon amendement. C'est faux. C'est techniquement faux. Les autres partis ont le choix de venir dans le comité ou non, s'ils veulent bénéficier du remboursement. Il y a une hésitation à venir dans le comité...

M. Paquette: M. le Président, me permette-riez-vous des...

M. Lalonde: II me reste deux minutes. Sur la motion principale on pourra en reparler. Cela m'apparaît donc faux. On a beaucoup invoqué la loi électorale pour dire: Vous avez vous-même passé la loi électorale qui limite les dépenses. Mais là où on fait la confusion, et où on entretient l'ambiguïté, c'est que, dans la loi électorale, on ne limite pas les partis. Si on le faisait, je suis sûr que mon voisin de gauche, le député de Mégantic-Compton, serait le premier à s'opposer. Il est membre d'un troisième parti en nombre, à l'Assemblée nationale. Ce serait à bon droit qu'il s'opposerait à ce que, dans la loi électorale, on limite le nombre des partis à deux et qu'on oblige tous les électeurs à ne pas s'impliquer dans le débat électoral ou à faire partie d'un des deux

partis. C'est ce qu'on fait actuellement avec la structure carcan.

M. Bédard: Vous rendez-vous compte...

M. Lalonde: On oblige les gens soit à participer, alors il faut que ce soit dans une des deux options, soit à ne pas participer, sauf peut-être à la faveur de l'article 26, avec des contraintes, des limitations. La Commission des droits de la personne dit, au début... M. le Président, est-ce que je pourrais avoir la parole?

Le Président (M. Clair): Vous avez la parole.

M. Lalonde: Merci. M. le Président. Le ministre parlait tantôt des S300. Qu'il n'oublie pas qu'en haut de la page huit de son opinion, la Commission des droits de la personne, à propos de cette ouverture très minime, dit: "Que dire, sinon pu il s'agit d'un minimum". C'est un minimum et la commission l'affirme. La comparaison de la loi électorale vis-à-vis de cette loi référendaire m apparaît boiteuse et injuste.

Ce que l'on veut, c'est limiter les dépenses. Parfait. Si nos $3000 sont trop élevés, qu'on en discute. Qu'on dise que c'est $2000 ou $200. Enfin, on peut en arriver à un consensus, mais qu'on ne mêle pas les gens. C'est en limitant les options, la participation à des parapluies, à des comités nationaux qu'on brime la liberté et l'association. Ce n'est pas en...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, deux minutes et demie, c'est vite passé. C'est déjà fini.

M. Lalonde: M. le Président, tout ce que j'ai à dire, je vais le dire sur la motion principale. Je n'ai pas parlé, d'ailleurs.

M. Grenier: M. le Président, combien de temps me reste-t-il sur l'amendement?

Le Président (M. Clair): II vous reste neuf minutes.

M. Grenier: Je ne prendrai pas mes neuf minutes bien sûr. L'appréciation que j'ai donnée cet avant-midi sur l'amendement qui est présenté par le député de Marguerite-Bourgeoys, je la maintiens, bien sûr. Je la maintiens parce que je sais que le gouvernement a fait son nid. Et à notre façon de nous battre, une fois qu'on a fait valoir nos arguments et qu'on sait que le gouvernement a fait son nid. on tente d'en sortir. On tente de passer à autre chose. Se battre à un. on se bat moins longtemps qu'on se bat à trois, surtout lorsqu'on n'a pas toujours l'intention d'utiliser nos 20 minutes. Malgré l'allusion que faisaient différents députés du Parti libéral à mon argumentation de cet avant-midi, je la maintiens. Je sais qu'on va procéder aux articles suivants principalement à l'article 26. On sait que les individus auront leur mot à dire. Je sais que ce seront des cas d'exception qui arriveront. Il est sûr que si la question était la souveraineté-association, il y aurait des cas marginaux. C'est sûr que les Fils du Québec seront probablement mal à l'aise dans la question du oui au référendum. Il est sûr que le représentant de M. Shaw, de Notre-Dame-de-Grâce, va être mal à l'aise aussi, dans la question du non. Cela n'ira pas assez loin des deux côtés. Cela demeure quand même des cas marginaux.

Il reste qu'à l'intérieur de cela il y a des questions qui ressembleraient à celle-là, celle vers laquelle on semble se diriger; il n'y a pas un malaise profond dans les comités nationaux. Si la question devait avoir tous ces volets— de toute évidence, je dis cela depuis le début — à savoir qu'on peut offrir dans cette question soit la séparation, par exemple, l'indépendance et la souveraineté-asssociation ou bien, encore, l'autodétermination, là, je peux vous dire une chose, c'est qu'il y aura de l'hésitation de la part de plusieurs groupes, plusieurs partis politiques, entre autres. Je vois M. Roy naviguer là-dedans, je vois M. Samson, l'Union Nationale et le Parti libéral. Je vois également le représentant de M. Shaw dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce. Ce ne sera pas encore assez loin. Il faudrait une position pour le statu quo pour certains de ceux-là. C'est même trop pour les provinces.

D'après moi, ce ne sera pas une question limpide, ce ne sera pas une question claire, ce ne sera pas une question qui amène une réponse précise et claire, comme on le dit depuis ledébut. A ce moment-là, il y a une limite à charrier aussi. Il y a une limite à le dire. Quand on est une formation politique qui demande un référendum depuis près de dix ans, on veut aussi, dans les faits, passer au référendum. Je ne voudrais pas appartenir à une formation politique qui dit: On veut le référendum et, ensuite, ne pas vouloir la loi, ou poser des gestes, perdre tant de temps, comme si on ne voulait pas la loi. C'est à cela que je faisais allusion.

Ce qui s'est dit, de ce côté-ci, je passerai vite dessus. On en a fait bien d'autres. On en a fait de pires que cela à l'ancien ministre qui a quitté. Quand j'entendais le leader parlementaire qui a dit qu'il était passé dans la tordeuse de Duplessis, il serait mieux de passer dans la tordeuse d'épinette parce qu'elle extermine jusqu'au dernier, elle. Cela me fait sourire quand j'entends cela.

M. Lavoie: C'est gentil, cela. C'est très gentil.

M. Grenier: Ce serait gentil, si cela allait comme cela, des interventions. C'est comme cela que l'Union Nationale n'aimait pas à se préoccuper et votait à la légère, comme l'a dit le député de Gatineau. C'est désagréable de se faire dire cela, de ce côté-ci de la table. On fait notre travail. S'il est un membre assidu à la commission, c'est celui qui vous parle actuellement. Je fais des débats tels que je dois les faire. Quand on me dit qu'on choisit les positions faciles, non, on ne choisit pas les positions faciles. Je veux répondre selon les aspirations des Québécois. Je ne suis commandé par personne, moi par aucune formation politique autre que la mienne, ici. Jen'ai de comptes à rendre à personne à Ottawa. Je donne ma position.

M. Lavoie: Sauf à M. Clark.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: Ne vous en faites pas. C'est peut-être à ce moment-là qu'on aura des choses sensées qui se diront, quand on sera débarrassé de celui qui est là. Quand le journal La Presse dit qu'il y a du personnel de soutien qui devrait se recycler et aller à Montréal rencontrer le nouveau chef du Parti libéral, je pense que ce sont les gens assis à la table qui devraient aller se recycler. Ce n'est pas le personnel de soutien.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: Ce n'est pas moi qui l'ai mis à l'honneur, c'est votre chef qui I'a mis à l'honneur en lui demandant de se rendre à Montréal et de le rencontrer une couple de fois par semaine. Je pense bien que je vais faire savoir à M. Ryan que ce n'est pas lui qui a besoin d'être recyclé. Il a l'air d'être plus dans le courant que certains autres.

M. Lavoie: Vous devriez aller en pèlerinage.

M. Grenier: M. le Président, la différence, c'est qu'on ne fera pas de ce référendum une question électorale, nous. On va passer nos arguments.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: Tout à l'heure, ce que vous avez dit était fort désagréable pour moi, M. le député de Gatineau; je me suis tu. J'ai eu cette politesse, moi. Pourtant, on est allés à la même école. On aurait dû apprendre les mêmes choses. Comme on n'a pas le même niveau intellectuel, on n'apprend pas aussi vite l'un que l'autre.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grenier: De grâce, oui! M. le Président, on ne fera pas de campagne électorale autour de la loi, nous. C'est cela, la différence, peut-être, entre les deux formations. On a vu que le gouvernement a fait son nid. Je sais qu'il y a des anomalies dans les comités nationaux. Je l'ai signalé, le gouvernement l'a signalé et on le signale. Il faut arrêter et il faut passer à autre chose. C'est cela, notre but et c'est cela qu'on a compris, nous autres, depuis qu'on est revenus ici, à Québec. Il y a des changements. On ne doit plus continuer d'être ce qu'on a reproché tout à l'heure à un ancien gouvernement qui était celui de l'Union Nationale, à ce moment-là, et auquel on a fait allusion. On ne veut pas être cela. On ne veut pas être comme la dernière formation libérale qu'il y a eu, non plus. On ne veut pas être cela. On veut être un parti qui a décidéd'étre efficace, ici, au Québec. C'est le but de notre formation.C'est désagréable de se faire dire des choses comme il s'en est dit tout à l'heure. On va faire notre travail comme on doit le faire ici.

Les comités nationaux, ce n'est pas une fin, bien sûr, ce sont des outils. Ils sont importants. On le sait et on le réalise. Je sais que les groupes que j'ai cités cet avant-midi, les Fils du Québec seront malheureux autant que l'autre groupe du député de Notre-Dame-de-Grâce, là-bas; ils seront malheureux dans l'une ou l'autre des formations. C'est ce que je voulais dire. S'ils ne veulent pas adhérer, ils en auront les moyens, mais ils représentent quand même des écarts, ils représentent des extrémistes, des extrêmes dans la province, ce monde. On ne peut pas faire une loi pour embarquer tout le monde également. Cela n'est pas possible. Cela n'arrive pas. (17 h 15)

Si la question devait être celle qu'on entend sur le référendum qu'on a à l'esprit, j'ai l'impression qu'on va ramasser dans cette loi, dans l'une ou l'autre des options, à peu près à 95% des Québécois qui vont se satisfaire de l'une ou l'autre des options. D'ailleurs, M. le Président, vous n'êtes pas sans savoir que même actuellement, il existe un comité préréférendaire à Montréal et je voisine le député de Rouyn-Noranda, je voisine le député de Beauce-Sud, je voisine également le député de Laval, je voisine d'autres personnes qui sont dans d'autres comités, et je n'ai pas l'impression que cela va si mal que cela...

Ah oui, lui, j'aime mieux ne pas en parler trop longtemps. On en a vu d'autres là-dedans.

M. Godin: "Strange bedfellows".

M. Grenier: II reste une chose, c'est qu'il y a moyen de s'entendre et pourtant ce n'est pas du monde qui partage les mêmes opinions. Arrêtons, de grâce, de faire ici des heures et des heures de travail pour en arriver à des éléments de solution qu'on va probablement trouver acceptables dans quelque temps quand on aura usé assez d'heures. Maintenant, cette différence, c'est que pour nous — c'est notre façon de faire une Opposition qui ne plaît peut-être pas à certaines personnes — pour moi, ce qui vient du gouvernement, ce n'est pas nécessairement mauvais au départ. J attends de voir la preuve. Quand ce n'est pas prouvé que c'est nécessairement mauvais, on appuie, à ce moment. C'est ce qui fait la différence avec d'autres.

Oui, on a appuyé quand cela a été le temps. Il faut admettre que tout ce qui s'est fait par ce gouvernement n'a pas été nécessairement mauvais, comme semble toujours le dire l'Opposition libérale.

M. Lalonde: Pas toujours.

M. Grenier: Bon. Ce qu'il faut préparer actuellement, je pense...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs.

M. Grenier: Votre temps est épuisé, cela fait longtemps. J'aimerais bien qu'on me laisse terminer.

Le Président (M. Clair): A I'ordre, s'il vous plaît.

M. Lavoie: Avez-vous une formule pour adhérer au oui? Je vais vous la signer tout de suite.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît. Messieurs, M. le député de Mégantic-Compton...

Une Voix: On va l'avoir.

Le Président (M. Clair): A I ordre, s'il vous plaît.

M. Bédard: Si j'ai bien compris les propos du député de Mégantic-Compton concernant la question, il se réservait de la connaître évidemment avant de dire oui ou non. Il y en a d'autres qui ont décidé de dire non avant de la connaître.

M. Lalonde: Nous autres, on connaît des ajournements.

Le Président (M. Clair): Messieurs, avant de...

M. Grenier: M. le Président, je voudrais terminer...

Le Président (M. Clair): Avant de redonner la parole au député de Mégantic-Compton — ce que je vais dire s'adresse tant aux ministériels qu'aux députés de l'Opposition officielle — celui-ci est seul à représenter sa formation politique au niveau des membres de cette commission. Je pense qu'il ne peut pas compter sur d'autres pour faire du bruit. Je vous prierais donc d'être respectueux de son droit de parole. M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, je termine avec cela. J'espère bien que les gens qui peuvent être présents ici et les media d'information jugeront les minus habens de ma droite qui n'ont pas encore compris qu'on peut avoir un droit de parole ici, qu'on peut ne pas partager les mêmes opinions à l'occasion et qu'on a le droit de s'exprimer. M. le Président, ce qu'on veut dans cette loi, nous, ici, c'est qu'on sait que le gouvernement a des idées, qu'il exprime dans ses articles de loi. Nous allons nous battre honnêtement en faisant nos amendements, tel qu'on l'a dit et tel qu'on continue de le faire, et ensuite, on va tenter de faire en sorte que les gens se sentent sécurisés autant que c'est possible et qu'ils sentent après le référendum qu'on n'a pas été "hold-uppé" d'un bord ou de l'autre.

Ce qu'il faut préparer dans cette loi, c'est déjà l'après-référendum. C'est pour cela que je voudrais que cela fasse, quand c'est possible, bien sûr, le plus large consensus, mais la formule des comités nationaux n'est pas nécessairement mauvaise. Si on prenait l'autre, elle ne serait pas non plus nécessairement bonne. C'est là-dessus qu'il faudrait s'entendre et j'ai hâte de voir venir les autres articles. Dans le moment, pour celui-là, je vais vous dire une chose, c'est que l'amendement qui a été proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys, je le trouve moins bon que la formule des comités nationaux et je voterai contre.

Le Président (M. Clair): II n'y a pas d'autres intervenants sur ma liste, je demande si la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys sera adoptée.

M. Lalonde: Adopté.

M. Lavoie: Adopté.

Une Voix: Appel nominal.

Le Président (M. Clair): L'appel nominal est demande. Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre l'adoption de la motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys. M. Bédard (Chicoutimi).

M. Bédard: Contre, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt (Jonquière).

M. Vaillancourt (Jonquière): Contre. Le President (M. Clair): M. Godin (Mercier). M. Godin: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Beauséjour.

M. Beauséjour: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Gratton.

M. Gratton: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Grenier.

M. Grenier: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Laberge.

M. Laberge: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavoie.

M. Lavoie: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Paquette.

M. Paquette: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Roy.

M. Roy: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Samson... A l'ordre, s'il vous plaît. Le résultat est le suivant: Pour la motion, 3. Contre, 7. La motion est rejetée.

M. Bédard: M. le Président, nous sommes prêts à voter sur l'article 21.

M. Lalonde: M. le Président, sur l'article 21...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... je pense que je n'ai pas tellement pris de temps. J'ai présenté un amendement seulement. Tous les arguments qui militaient en faveur de la motion d'amendement et qui seraient contre le règlement comme tels sont valides en ce qui concerne le plaidoyer qu'on peut faire à l'encontre de l'article 21.

C'est à l'article 21 que se dessine le carcan que le gouvernement a décidé d'imposer aux Québécois en ce qui concerne un débat référendaire. On a assimilé la nécessité de contrôler les dépenses référendaires à la nécessité de contrôler les dépenses électorales. Je pense que j'ai eu l'occasion, un peu plus tôt, de faire la distinction entre la nécessité de contrôler les dépenses électorales pour empêcher l'achat de charges publiques et celle de contrôler les dépenses référendaires pour empêcher des excès en ce qui concerne la manipulation de l'opinion publique. Ce sont deux situations différentes.

Je pense que le gouvernement devrait s'imposer une réflexion pour nous proposer des mécanismes différents, parce que les situations sont différentes. Mais non, on a simplement appliqué tout le mécanisme de contrôle des dépenses électorales au contrôle des dépenses référendaires, sauf qu'on s'est buté au problème des options. C'est vrai que ce serait difficile de contrôler les dépenses de façon globale, disons, au niveau référendaire si on avait plus que deux options, si on permettait des dépenses à l'extérieur de structures bien étanches comme on le fait actuellement. C'est vrai que ce serait plus difficile.

D'ailleurs, je me souviens que le ministre de la Justice tantôt disait quelque chose comme ceci: II n'y a pas d'autre moyen. C'était la conclusion qu'il apportait. Je ne pense pas que ce soit vrai. Je pense qu'on pourrait, quitte à réexaminer le projet de loi, que ce soit au niveau des contributions individuelles ou autrement, s'arranger pour qu'il n'y ait pas cet excès, cette exagération de dépenses globalement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, l'amendement a été défait; nous en sommes maintenant à parler sur l'article 21. Je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys est complètement en dehors de la pertinence du débat lorsqu'il parle du contrôle des dépenses.

M. le Président, je pense que vous auriez même intérêt à lire à haute voix l'article 21 où on parle des devoirs ou des charges que doit remplir le secrétaire général de l'Assemblée une fois que la question est adoptée et où on parle des délais qui sont accordés aux députés pour s'inscrire dans l'une ou l'autre des options. Mais en aucun endroit, M. le Président, dans cet article, on ne parle du contrôle des dépenses. Je vous soumets bien respectueusement que les dépenses réglementées et non réglementées sont aux articles 25 et 26. Bien calmement, je vous dis que vu que nous avons été très souples quant à la pertinence du débat, que nous avons permis une discussion générale et globale de tout le chapitre, maintenant, je pense qu'il serait de mise qu'on étudie les articles l'un après l'autre et qu'on s'en tienne à la pertinence du débat, c'est-à-dire à l'étude de la motion principale qui est constituée ici par l'article 21 lui-même.

M. Lalonde: M. le Président, il est étrange d'entendre le député de Jonquière plaider de cette façon, alors que le ministre, il y a quelques minutes, vantait les vertus d'une délibération plus large. Mais, quand même, c'est son droit de le faire. Sur la question de règlement...

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement.

M. Lalonde: ... je vous ferai remarquer que c'est à l'article 21 qu'on plante le clou en ce qui concerne la limitation des options. C'est ici qu'on dit, dans le deuxième alinéa, que le secrétaire général de l'Assemblée doit faire parvenir à chaque membre de l'Assemblée nationale un avis à l'effet que celui-ci peut s'inscrire en faveur dune des options soumises à la consultation populaire. On a demandé pourquoi, M. le Président, et vous avez justement permis des délibérations là-dessus. On a dit: c est pour le contrôle des dépenses. La seule raison, c'est pour le contrôle des dépenses.

M. Bédard: Là vous vous excitez, n'importe quel mot donnerait ouverture...

Le Président (M. Clair): Un instant. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, pour disposer de la question de règlement soulevée par le député de Jonquière, j'aimerais vous rappeler que, à mon point de vue, comme je l'ai déjà indiqué d'ailleurs, l'article 21 fait surtout état de deux principes: soit celui des obligations du secrétaire général de l'Assemblée nationale d informer le directeur général des élections d'un certain nombre de choses et, deuxième obligation, celle qui est faite aux députés de s'inscrire auprès du directeur général des élections en faveur d'une des options soumises à la consultation populaire.

Vous avez raison sur le fait que, dès l'article 21, tous les députés ont l'obligation de s'inscrire en faveur de l'une ou l'autre des options. Cependant, il s'agit là non pas du principe même de l'article 21, mais d'un aspect qu'on retrouve in fine à l'article 21. Je vous prierais d'être très attentif à la pertinence du débat concernant l'article 21. Je ne veux pas être plus restrictif qu'il ne le faut mais, quand même, je pense que ce n'est pas être restrictif que de rappeler à un député qu'il aura l'occasion, à un autre endroit peut-être, de discuter avec plus de pertinence d'un point de vue qu'il défend.

M. Bédard: M. le Président, est-ce que vous continuez la discussion sur...

M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie de votre décision.

M. Bédard: Est-ce que le député de Marguerite-Bourgeoys me permettrait une chose sur cet article?

M. Lalonde: C'est pertinent?

M. Bédard: Oui, je le crois. Enfin, on verra après!

Des représentations ont été faites, hier soir, par le député de Mégantic-Compton — et je crois que d'autres les ont également évoquées — concernant le délai de sept jours qui se situait, tel que rédigé, à l'intérieur de l'avis de trois jours que devait faire parvenir, à chaque membre de I'Assemblée nationale, le secrétaire général de l'Assemblée, aux fins d'informer le député qu'il pouvait adhérer à une option ou à une autre. Je n'ai pas d'objection que ces sept jours soient en dehors des trois jours, qu'ils soient additionnés aux trois jours. Je ne suis pas un technicien, mais cela permettrait de lire l'article comme suit: "II doit également, dans les trois jours, faire parvenir à chaque membre de l'Assemblée nationale du Québec un avis à l'effet que celui-ci peut, dans les sept jours qui suivent, s inscrire auprès du directeur général des élections en faveur d'une des options soumises à la consultation populaire".

M. Gratton: Mais, là, vous venez de couper dans le délai de 20 jours de I article 13.

M. Bédard: Non, cela ne coupe rien.

M. Gratton: C'est bien sûr! Si vous enlevez trois jours durant lesquels les députés vont être convoqués par le président général des élections et adopter les règlements, etc.

M. Bédard: Non, si vous n êtes pas d'accord...

M. Lalonde: Pour allonger cela, il faut allonger le reste.

M. Roy: II faut allonger les 20 jours nécessairement.

M. Bédard: Non, pas nécessairement.

M. Lalonde: Non, pas nécessairement, mais cela comprime le reste.

M. Bédard: C'est qu'on a quand même fait ressortir I'importance de faire des règlements. En tout cas, dans cette optique, cela n'empêche pas...

M. Gratton: Vous prenez trois jours pour faire les règlements, en prolongeant... C'est sûr, cela saute aux yeux. On ne pourra pas être convoqué à la réunion où on va accepter les règlements avant dix jours, si vous mettez les sept jours successifs aux trois jours.

M. Bédard: Disons qu on a deux choses à concilier. J'essaie de le faire, peut-être que je me trompe. D'abord, donner le temps aux parlementaires, peut-être deux ou trois jours de plus, pour faire les règlements, puisque c'est un des éléments importants, au niveau du fonctionnement du comité, ou encore il y a I'autre préoccupation qu'on peut avoir que cela enlève peut-être trois jours de délai à des groupes pour s'inscrire...

M. Gratton: C'est là où il y aurait peut-être...

M. Bédard: En faisant l'évaluation — et je ne veux pas en faire une longue discussion — je serais d'accord.

M. Lalonde: C'est une ouverture. Je pense qu'il faut l'examiner à sa valeur. Par contre, on peut étendre cela à 20 jours à 25 ou 30 jours...

M. Bédard: Je n'appelle même pas cela une ouverture, c'est une réaction à certaines représentations qui ont été faites.

M. Lalonde: M. le Président, je remercie le ministre de son ouverture. Il reste que...

(17 h 30)

M. Bédard: Je vous remercie de votre fermeture...

M. Lalonde: M. le Président, je ne suis pas fermé du tout.

M. Bédard: ... d'esprit.

M. Lalonde: Je ne suis pas du tout fermé à la suggestion du ministre. Je pense que c'est une ouverture oui mérite d'être examinée, sauf qu'il est vrai que, si on limite les vingt jours — quoique c'est un minimum — et on ouvre trois jours à l'intérieur, on enlève trois jours pour le reste, c'est mécanique. M. le Président, cela ne touche quand même pas le principe: ce qui est important dans cet article, c'est qu'on voit là déjà l'obligation pour les députés de s'inscrire pour l'une ou l'autre des options et leur impossibilité qu'ils puissent militer à I'extérieur des comités nationaux. C'est ce qui m'apparaît le défaut essentiel de ce projet de loi en ce qui concerne l'organisation du référendum.

On a tenté de l'ouvrir, cela a déjà été fermé, M. le Président, mais je dois vous expliquer pourquoi je suis contre. On tente d'assimiler cette loi à la Loi électorale, mais jamais dans la Loi électorale on n'aurait le culot de limiter le nombre des partis, le nombre des mécanismes, le nombre des instruments politiques que sont les partis politiques. Le comité national est un instrument politique aussi pour le référendum. Dans la loi on les limite, à telle enseigne qu'on ne pourra pas militer à l'extérieur, sauf en ce qui concerne le bénévolat et les quelque $300 que l'on permet pour une réunion dans l'articie 26, mais je vais enfreindre le

règlement, M. le Président, si je continue dans cette ligne.

M. le Président, comment convaincre le gouvernement que la limitation des comités nationaux est une atteinte directe aux libertés fondamentales? Ce n'est pas parce qu'on limite plus tard les dépenses — on y verra quand on arrivera là — c'est parce qu'on limite le nombre de canaux au travers desquels les citoyens peuvent s'exprimer, peuvent militer, peuvent dépenser de l'argent; cela prend de l'argent, tout le monde le sait, pour vivre et pour s'exprimer. C'est parce qu'on limite ce nombre de canaux, comme le dit le deuxième alinéa de l'article 21, qu'on brime. C'est reconnu par la Commission des droits de la personne, c'est de là et non pas de la limitation des dépenses que vient la brimade, que vient la contrainte.

La commission a tenté vaillamment, il faut le reconnaître, d'ouvrir ce carcan en suggérant des comités affiliés, mais il va de soi que, si on conserve le même contrôle un peu plus loin, on arrive au même résultat. La contrainte demeure; au lieu d'avoir un comité, on aura un comité et trois, quatre, cinq ou cent sous-comités, mais on aura quand même une seule enveloppe et un seul contrôle. On continuera à être dans une situation où on brime la liberté d'association, la liberté d'expression des gens. Il me semble que c'est extrêmement important. Je vois qu'il semble que les journaux intéressent plus le membre que mes propos. M. le Président, on voit jusqu'à quel point...

M. Bédard: Vous ne disiez pas cela à mon endroit.

M. Lalonde: Non, pas à l'endroit du ministre.

M. Bédard: Je n'ai aucun journal dans les mains.

M. Lalonde: Non, non, pas à l'endroit du ministre, le ministre est très attentif. J'aimerais par exemple qu'il tente de s'imposer cette réflexion, à savoir que ce n'est pas la limitation des dépenses, le contrôle des dépenses qui briment, c'est la structure. Si par exemple vous disiez à chaque citoyen: Vous avez le droit de dépenser $1...

M. Bédard: Si je comprends bien la ligne de force du député, c'est qu'on laisse de côté le contrôle des dépenses; là c'est la structure.

M. Lalonde: Bien c'est cela, parce que je n'ai pas le droit de parler du contrôle des dépenses c'est plus loin.

M. Bédard: Oui. oui, très bien.

M. Lalonde: II faut que je m'en tienne à la structure, qui est à l'article 21. Si vous disiez, par exemple, on permet $1 par chaque citoyen pour dépenser à un référendum. A ce moment-là, quelles que soient les structures, chacun aurait sa liberté, limitée, pour éviter justement l'orgie des dépenses dont on parlait tantôt. J'emprunte le mot à d'autres. Mais on laisserait aux gens la liberté de s'exprimer comme ils veulent, quand ils veulent, alors que pour des raisons qui m'apparaissent beaucoup plus appartenir au paternalisme d'Etat — ce qui est très mauvais, ce que je refuse et ce qui va d'ailleurs militer en faveur de mon vote contre cet article — on devrait justement ouvrir, pour donner la liberté aux gens de s'exprimer, mais en limitant les dépenses autrement. Pourquoi, nécessairement, justement en s'inspirant d'un paternalisme d'Etat, imposer à la population deux canaux d'expression seulement? C'est cela qui est inacceptable. On est pour, peut-être, on l'a dit, des comités nationaux pour organiser le débat. Je n'aime pas le mot "simplifier" le débat que le ministre a emprunté à son collègue le député de Maisonneuve, parce que quand on commence à simplifier un débat, on peut terminer en manipulant l'opinion publique. Il faut faire confiance à l'intelligence des gens.

M. Bédard: Je l'ai apporté...

M. Lalonde: Quand bien même on aurait 12 comités ou 36 comités, pourvu que, globalement, on ait un certain contrôle sur les dépenses, les gens sont assez intelligents pour croire ceux qui sont crédibles. Qu'on fasse confiance aux gens. Cet article et les articles qui suivent sont dans le même sens, ils sont odieux au niveau de la liberté d'association. Malheureusement l'amendement qui a été suggéré par le ministre un peu plus loin ne réglera pas le problème. Donc, nous allons voter contre cet article.

M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 21 sera-t-il adopté?

M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté. M. Grenier: Sur division.

M. Lalonde: Naturellement, sur division, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Adopté sur division.

M. Lalonde: En fait, M. le Président, si ce n'est pas trop tard, je demanderais un vote nominal. Je voudrais enregistrer mon vote; que ce soit dans le journal des Débats que les députés libéraux sont contre cet article.

M. Bédard: C'est avec plaisir que je voudrais enregistrer le mien aussi, M. le Président, parce que cela répond à mes convictions.

Le Président (M. Clair): Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre l'adoption de l'article 21.

M. Vaillancourt (Jonquière): Avec le consen-

tement, on peut reprendre le vote pour qu'il soit nominal.

Le Président (M. Clair): Je pense qu'on n'a pas avantage à être formaliste sur cette question.

Veuillez indiquer si vous êtes pour ou contre l'adoption de l'article 21. M. Bédard (Chicoutimi).

M. Bédard: Pour.

M. Grenier: Avant le vote, c'est bien sûr que l'amendement a été rejeté tout à l'heure? On ne revient pas sur cet amendement? Là, on vote sur le principe des deux articles?

M. Bédard: Sur l'article.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur l'article.

M. Godin: II tente d'influencer le vote. Il y a un règlement qui interdit cela.

Le Président (M. Clair): C'est l'article tel qu'il apparaît au projet de loi. J'insiste là-dessus. M. Bédard (Chicoutimi).

M. Bédard: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Vaillancourt (Jonquière).

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour.

Le Président (M. Clair): M. Godin.

M. Godin: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Beauséjour.

M. Beauséjour: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Gratton.

M. Gratton: Contre.

Le Président (M. Clair): M Grenier.

M. Grenier: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Laberge.

M. Laberge: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Paquette.

M. Paquette: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Lavoie.

M. Lavoie: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Roy. M. Samson. Le résultat est le suivant. Pour l'adoption de l'article 21, 6; contre, 3. L'article 21 est adopté.

M. Grenier: M. le Président, je m'excuse... Mais les trois jours, il n'y a eu que les trois jours d'ajoutés à cela, il n'y a pas eu autre chose dans les propositions du ministre?

Le Président (M. Clair): II n'y a rien eu.

M. Bédard: J'ai dit que j'étais prêt à donner suite à votre suggestion qui permettrait de prolonger le délai, de sept jours, passer à dix jours. Au njveau du délai qui est donné pour faire les règlements, permettre...

M. Grenier: Si on enlève les trois jours, cela ne change rien du côté des trois jours.

Le Président (M. Clair): L'article 21 est adopté tel qu'il apparaît...

M. Bédard: Je comprends que vous votez contre à cause des trois jours?

M. Grenier: Oui.

M. Lalonde: Est-ce que vous allez changer quelque chose?

M. Bédard: Non, je voulais juste savoir...

M. Lalonde: Allez-vous le reporter à 10 jours ou si vous avez retiré votre suggestion?

Le Président (M. Clair): II n'y a pas eu d'amendement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Tel que rédigé dans le projet de loi.

M. Gratton: M. le Président, je pense qu'il y aurait lieu de clarifier cela pour dissiper l'inquiétude du ministre. Il se demande comment il se fait que le député de Mégantic-Compton a voté contre ! adoption de l'article 21. C'est cela qui préoccupe le ministre.

M. Vaillancourt (Jonquière): L'article 22, M. le Président.

M. Bédard: Le député de Mégantic-Compton... M. Godin: On est dans l'illégalité.

M. Bédard: ... ma dit que c'était à cause du délai de trois jours. Ce n'est pas à cause du principe.

M. Gratton: Depuis quand demande-t-on...

M. Vaillancourt (Jonquière): L article 22, M. le Président.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Gratton: Depuis quand se permet-on en commission ou à I Assemblée nationale de demander des explications sur un vote après qu'il a été pris et que la décision est rendue? Le député de Mégantic-Compton devrait être libre de voter contre ou pour un article quelles que soient ses raisons. C'était tout.

M. Bédard: Je pense que vous avez raison. Je n'ai pas posé de question, d'ailleurs. C'est le député de Mégantic-Compton qui a ajouté quelque chose.

M. Grenier: Je m'excuse, M. le Président. C'est arrivé au moment du vote. J'ai posé une question parce que je n'étais pas ici pendant qu'on en a discuté tout à l'heure à la table. J'ai voulu avoir une précision là-dessus et cela s'est fait au moment du vote. Le ministre précise ce que j'étais en train de lui dire sans que ce soit enregistré. C'est à cause des trois jours.

M. Gratton: Est-ce que le député de Mégantic-Compton conviendra avec moi que je protège ses droits.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, l'article 22.

M. Grenier: J'ai compris cela. Si je t'embrasse, c'est pour mieux t'étouffer, mon enfant. J'ai compris cela aussi.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs. J'appelle maintenant l'article 22. L'article 22 sera-t-il adopté?

M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté. M. Gratton: Un instant, M. le Président.

M. Paquette: Avez-vous un autre amendement irrecevable?

M. Gratton: M. le Président, est-ce une invitation?

M. Lalonde: L'humour du député de Rosemont est inversement proportionnel à sa pertinence.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs. J'ai appelé l'article 22. Quelqu'un désire-t-il intervenir sur l'article 22?

M. Lalonde: Oui, M. le Président. J'aurais une question à poser au ministre sur l'article 22.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Le ministre peut-il nous expliquer comment le directeur général des élections va déterminer les électeurs qu'il va choisir à former un comité provisoire? On dit, dans la dernière phrase, que "ces électeurs doivent être choisis parmi les personnes publiquement identifiées à cette option". Est-ce qu'il n y aurait pas lieu d'expliciter? Cela donne quand même une latitude ou une discrétion assez surprenante et inusitée au directeur général des élections qui est un fonctionnaire.

M. Bédard: Je vous dis sincèrement que je trouve que c'est assez formidable — peut-être que je rejoins votre idée — comme disposition. Le projet de loi prévoit quand même tout. Je trouve que cette précision est dans l'article même, lorsqu'on dit que, si le directeur général des élections a à se former un comité parce qu'aucun député ne s'y inscrit, il peut le faire à partir d'électeurs, au nombre de 20, qui doivent — elle est là, l'explication, claire et précise — être choisis parmi les personnes publiquement identifiées à cette option. Je ne vois pas quelle explication supplémentaire je pourrais donner. Prenez le cas de l'avortement. Que ce soit pour le oui ou pour le non, il n'y a personne dans un des comités. Mais on sait qu'il y a des personnes qui se sont affichées publiquement contre. Il y en a d'autres qui se sont affichées carrément pour. Je pense que c'est une bonne précaution de faire l'obligation au directeur général des élections de ne pas choisir 20 de ses amis, mais de choisir 20 personnes qui, dans l'opinion publique, sont carrément identifiées à une option.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, merci. M. Lavoie: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: Je n'ai pas les amendements spécifiques, mais si je me rappelle bien, dans la Loi des cités et villes, concernant les référendums, il y avait une disposition suivant laquelle les personnes qui s'opposent ou sont favorables à une option peuvent aller s'inscrire. Est-ce que ce ne serait pas préférable de dire que ces électeurs — le nombre pourrait être entre 3 et 20, je n'ai pas d'objection — pourraient être choisis parmi les électeurs qui en font la demande dans les délais prévus au premier alinéa? (17 h 45)

M. Bédard: Je trouve que la suggestion a du bon. Le seul handicap que j'y vois, c'est que les électeurs, les citoyens ne sont pas aussi familiers que des parlementaires peuvent l'être avec des procédures, avec les délais qui sont impartis dans des projets de loi. Il me semble que cela pourrait donner — je ne l'affirme pas — comme résultat que des personnes bien identifiées à une certaine option ne seraient pas choisies parce qu'elles ne connaissent pas toute la technique de la loi.

M. Lavoie: Ce serait quand même une meilleure garantie que de laisser cela à l'entière discrétion du...

M. Bédard: Je ne le sais pas. Comment le formuleriez-vous? On ne prévoit pas qu'il y ait des inscriptions avant le comité provisoire. Là. on en est toujours à la formation du comité provisoire qui, lui, après cela, va se donner des règlements.

M. Lavoie: Dans le premier cas, c'est prévu que les députés s'inscrivent dans les sept jours, premier alinéa. Rien n'empêche que, s'il y a une question qui est soumise au gouvernement, qui fait l'objet d'un débat de 35 heures, si jamais il n'y a pas de députés, au moins, ce sera connu dans la population. A défaut de députés — cela me surprendrait énormément — il y aurait quand même des citoyens qui pourraient aller s'inscrire au bureau du directeur général des élections. Il y aurait un délai. Ce serait encore une meilleure précaution.

M. Bédard: Me donnez-vous une minute?

M. Godin: ... initiative, en fait, que les citoyens prennent l'initiative de s'inscrire.

M. Lavoie: Ils en prendraient entre 3 et 20, parmi ces 100.

M. Bédard: C'est peut-être dans ce sens qu'on met les mots "peut inviter au moins 3 ou 20 électeurs à former le comité provisoire en faveur de cette option". De la même manière, j'imagine, qu'il peut inviter des gens, étant donné qu'il n'y a pas de député dans le comité, inviter des gens à s'inscrire et à choisir 3 ou 20 personnes.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je ne veux pas prolonger le débat mais je me pose une question. En supposant qu'il n'y ait pas de député qui s'inscrive à une option, on laisse un pouvoir discrétionnaire au directeur qui peut inviter. Pourquoi ne pas lui faire obligation d'inviter? Cela prend deux comités provisoires, un de chaque côté. C'est vrai que, pratiquement, il va inviter. Pourquoi y aurait-il une objection majeure à ne pas mettre "doit inviter"? Il faut qu'il se forme un comité provisoire.

M. Godin: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: Pour rester...

M. Bédard: Ecoutez, on peut en discuter encore, mais on est vraiment dans le théorique par dessus...

M. Godin: M. le Président, m'avez-vous reconnu?

M. Bédard: Je ne dis pas si c'était une consultation de la population à partir d'initiatives populaires ou encore un autre genre de consultation. Mais à partir du moment où on sait que c'est un des principes de la loi que c'est une consultation populaire d'initiative gouvernementale, je vois mal qu'un gouvernement décide de consulter la population sur un sujet donné et qu'il ne se retrouve aucun député dans une des options si c'était une question apportée par le gouvernement. Quoique, théoriquement, cela peut être possible.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, pour rester sur le terrain du député de Laval, la loi n'interdit pas que ce que le député propose se passe. Dans la mesure où elle ne l'interdit pas, je ne vois pas pourquoi... Enfin, on n'ajouterait pas grand-chose à le mettre. Effectivement, si un groupe veut manifester en dehors, si aucun député ne manifeste d'intérêt pour une option, un groupe qui manifesterait de l'intérêt se ferait sûrement connaître au président et, à l'intérieur de ce groupe, il pourrait choisir les gens qu'il veut provisoirement nommer à la tête du comité. Ce comité, un peu plus tard, deviendra un comité national et décidera de ses règlements, qui est président et tout cela.

Mais il n'y a rien dans la loi qui interdise, même sans qu'on le mette nommément, le processus du député de Laval. Donc, si vous aviez une formulation immédiate à soumettre...

M. Lavoie: Le rôle de quoi?

M. Gratton: M. le Président, il y a aussi un autre aspect de tout cela en supposant qu'on en est rendu au point où il n'y a aucun député qui s'inscrit auprès d'une option donnée; il y aura un minimum de sept jours qui se seront passés, à ce moment. Les brefs référendaires peuvent être émis 20 jours après l'adoption de la question, donc treize jours après le délai prévu à l'article 22. Cela donne donc treize jours au président général des élections pour inviter ces gens à former un comité provisoire, non pas un comité national, à tenir une première réunion qui, bien entendu, suppose qu'il y a eu préparation de règlements, puisque cette première réunion ils doivent effectivement élire un président et adopter des règlements. On s'expose à ce moment à ce que le comité provisoire n'ait pu dans le temps adopter ses règlements avant l'émission du bref référendaire. Je ne sais pas si c'est une question très grave que cela puisse se produire, mais sûrement que ce ne serait pas idéal.

J'aimerais savoir ce que le ministre pense de tout cela et si peut-être il n'y aurait pas lieu de reconsidérer...

M. Godin: Vous craignez qu'il n'y ait pas

de non lors du référendum sur le rapatriement de la constitution?

Le Président (M. Clair): A l'ordre.

Une Voix: C'est une loi-cadre, M. le député.

M. Gratton: C'est un exemple que je donne.

M. Bédard: Je pense que le leader de l'Opposition ou les membres de l'Opposition aussi, tout ce qu'on en est ici, on réalise que cela peut être assez théorique. Maintenant, cela peut se traduire en pratique, une situation telle que celle dont le député de Gatineau vient de parler.

M. Gratton: Je n'en fais pas une question fondamentale, mais je préviens le ministre que cela pourrait arriver qu'un comité provisoire doive adopter ses règlements, après l'émission des brefs.

M. Bédard: C'est pour cela que je serais porté à croire qu'il faut garder la même formulation, de manière à permettre, étant donné le mécanisme, une initiative rapide de la part du président des élections qui invite — comme vous l'avez mentionné, c'est un comité provisoire — rapidement des gens carrément identifiés à une option à venir former le comité provisoire. Il faut que cela se fasse quand même assez rapidement pour que ces derniers aient la possibilité de mettre au point des règlements.

M. Gratton: D'accord.

M. le Président, une autre question, la dernière. Lorsqu'on parle des députés qui s'inscrivent auprès du directeur général dans le délai de sept jours, est-ce que l'esprit de la loi est que si, moi, en tant que député à l'Assemblée nationale, en prenant l'exemple que le ministre évoquait lui-même dans le cas de l'avortement où la question serait: Etes-vous pour ou contre l'avortement? et que moi, en tant que député, je ne serais ni pour ni contre, je serais pour l'avortement pour des raisons médicales, mais contre l'avortement pour des raisons morales, et que je voudrais préconiser ou promouvoir l'abstention, est-ce qu'à ce moment, l'interprétation qu'on peut faire de l'article 22 me permettrait de m'inscrire à titre d'abstentionniste, si vous voulez, et est-ce que le président général des élections aurait le loisir ou la possibilité de déclarer ou de décider qu'il y aura un comité national d'abstention?

M. Bédard: Moi, je pense que ce serait quand même une situation assez spéciale. Des élections, c est fait pour que tout le monde vote. Je comprends qu'il y en a qui peuvent ne pas voter, mais essentiellement, pour l'ensemble de la population, des citoyens, c'est pour que les gens expriment leur vote. De la même manière qu'une consultation populaire est orientée de façon que les gens expriment leur opinion, ce qui n'empêche pas le fait qu'il y a des gens qui peuvent ne pas vouloir exprimer leur opinion. Il me semble qu'une question qui serait posée par le gouvernement et qui amènerait l'obligation de la formation d'un comité de I'abstention, pour être réaliste, cela pourrait s'avérer nécessaire si, au cours du débat sur la question ou du débat sur le projet de loi, il semble ressortir que ce serait peut-être indiqué qu'il y ait la formation d'un comité. Cela va dépendre du débat, des demandes qui peuvent être exprimées au cours d'un débat. S'il s'avère très clair qu'un gouvernement, parce qu'il a à prendre ses responsabilités, doive aller dans ce sens, j'imagine que c'est le débat sur la question ou sur le projet de loi qui l'éclairera dans ce sens.

M. Gratton: Ce serait la garantie qu'auraient les députés. A ce moment, s'il s'agit d'un projet de loi, il n'y a pas de problème parce qu'on peut inclure l'amendement voulu dans le projet de loi. S'il s'agissait d'une résolution qui contiendrait...

M. Bédard: S'il s'agit d'une question, s'il s'agit d'une motion présentant une question, comme on l'a dit hier, il y a un débat où on a droit à des amendements et à des suggestions. Cela pourrait s'énoncer à cette période.

M. Gratton: Qu'il y ait un comité national d'abstention?

M. Lavoie: Cela n'est prévu d'aucune façon.

M. Bédard: Non. on le dit d'une façon hypothétique.

M. Gratton: Mais c'est quand même une hypothèse qui n'est pas impossible.

M. Bédard: Je vous ai répondu sur cela.

M. Lavoie: Disons que vous posez une question dans un référendum constitutionnel: Accordez-vous le mandat au gouvernement de négocier la souveraineté-association? Il y a des gens qui peuvent dire: Je suis contre le oui et le non dans cela, M. Johnson, en 1966, prônait égalité ou indépendance. C'est ce qui était sa politique, égalité ou indépendance. Il n'a pas exigé de référendum pour cela, il n'a pas exigé un mandat pour cela.

M. Beauséjour: S'il y a des abstentions, il y aura des "peut-être".

M. Lavoie: Apportez donc une contribution positive. Cela s'est vu dans des référendums que des gens, à cause de la question qui ne leur donnait pas satisfaction, voulaient former un comité d'abstention et cela n'est pas prévu dans le projet de loi.

M. Grenier: Est-ce que cela se défendrait logiquement de dépenser de l'argent pour demander aux gens de ne pas se prononcer?

M. Lavoie: Oui, cela se fait par des annonces

dans les journaux. Cela s'est fait dans certains pays: des gens prônent l'abstention à cause de la question incompréhensible.

M. Roy: II n'y a pas de finances publiques qui interviennent là-dedans.

M. Lavoie: Pas de finances publiques, mais ils n'auraient même pas le droit de mettre des annonces dans les journaux.

M. Bédard: Dans une élection, il y a des grands principes et je ne vois pas comment on peut les changer. Une élection est orientée pour que les gens expriment leur vote. S'il y en a qui ne veulent pas l'exprimer, ils ont une possibilité, c est l'abstention. C'est leur problème.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rosemont.

M. Bédard: Une consultation, c'est pour que les gens expriment leur accord avec une option ou avec une autre, essentiellement. Ceci n'empêche pas les gens de ne pas vouloir s'exprimer. Ils ont des moyens qui sont prévus dans la loi. s'ils ne croient pas en une option ou dans une autre.

M. Gratton: II n'y a pas de moyens prévus dans la loi. Ils ont le droit de vote, c'est tout. Ils peuvent dépenser S300 chacun.

M. Bédard: II y a tous les...

M. Gratton: Vous êtes en train de nous donner raison sur toute l'argumentation qu'on a faite à l'article 21.

M. Bédard: Ce que je vous ajoute, c'est qu'il y a un débat qui va avoir lieu. Que ce soit sur le projet, cela ne pose pas de problème, comme vous le dites: cela peut se soumettre.

M. Gratton: II y a un débat qui a lieu présentement et cela ne change pas grand-chose au projet de loi. Qu'on puisse en débattre et qu'on puisse faire des motions d'amendement, si elles sont toutes rejetées par le gouvernement, cela ne nous mène nulle part.

M. Bédard: Sauf que le gouvernement aura à prendre la responsabilité politique, par exemple, de ses décisions.

M. Gratton: Ce n'est pas ce dont il s'agit, M. le Président, il ne s'agit pas de dire le gouvernement devra en subir les conséquences électorales et tout cela. Si on veut consulter la population, il faut supposer que la raison ou le sujet de la consultation vaut toute cette dépense. Alors si on arrive avec un résultat que personne ne peut interpréter d'une façon ou d'une autre, parce que les abstentionnistes n'ont pas pu promouvoir leur cause, pourquoi tenir une consultation populaire?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député me permet-il une question?

M. Gratton: Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): A partir du moment où la loi parle d'une inscription en faveur d'une des options, la définition même du mot opter, c'est décider, choisir nécessairement. Ne croit-il pas que s'abstenir ce n'est pas une option, à moins que l'abstention soit l'une des hypothèses, l'une des options soumises. La question peut comprendre un oui, un non, une abstention. Mais à partir du moment où la question, supposons, prévoit un oui et un non, l'option consiste nécessairement à décider oui ou non. S'abstenir ce n est pas opter.

M. Gratton: Est-ce que je pourrais répondre?

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, c'est la question que je pose.

M. Gratton: Si l'Assemblée nationale, ne nous le cachons pas, le parti au pouvoir, dans le cas d'un gouvernement majoritaire, s'il décide, lui. qu'il ne peut y avoir que deux options, le oui ou le non, il décide d'avance pour les Québécois qu'il n'y a pas de valeur pour ceux qui voudraient s abstenir. C'est de ce dont il s'agit. La liberté, ce n est pas de décider pour les autres, ce qu'ils peuvent faire et ce qu'ils ne doivent pas penser.

M. Beauséjour: La question, M. le Président, il a la liberté, il ne vote pas.

M. Gratton: Justement, s'ils ne vont pas voter, ils ne s expriment pas...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Gratton: ... en fonction de leurs convictions.

M. Grenier: Est-ce que ces gens-là qui n ont pas l'intention d'aller voter, ont vraiment l'intention de mener une campagne? Vous allez me rappeler la campagne qu'a faite le PQ contre...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs. Est-ce qu'on adopte l'article 22?

M. Gratton: ... en 1972. Parce que cela n'a pas été un succès pour le PQ en 1972, cela ne veut pas dire que cela ne pourrait pas l'être pour d'autres...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! A moins qu il y ait consentement pour adopter l'article 22. il est dix-huit heures...

M. Vaillancourt (Jonquière): Nous serions disposés à l'adopter, M. le Président.

Le Président (M. Clair): II est dix-huit heures, la commission ajourne sine die.

(Fin de la séance a 18 heures)

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