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(Quinze heures cinquante-huit minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît:
Le commission de la présidence du conseil et de la constitution
est réunie aux fins d'étudier les programmes du Conseil
exécutif, ainsi que le programme du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche concernant le RIO.
Les membres de cette commission sont: M. Bédard (Chicoutimi)
remplacé par M. Brouillet (Chauveau); M. Gendron (Abitibi-Ouest)
remplacé par M. Payne (Vachon); M. Landry (Laval-des-Rapides)
remplacé par M. Dussault (Châteauguay); M. Lazure (Bertrand)
remplacé par M. Rochefort (Gouin); M. Levesque (Bonaventure), M.
Lévesque (Taillon); M. Marois (La Peltrie) remplacé par Mme Harel
(Maisonneuve); M. Marx (D'Arcy McGee); M. Morin (Sauvé) remplacé
par M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Ryan (Argenteuil), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce).
Les intervenants sont: M. Forget (Saint-Laurent), M. Gratton (Gatineau),
M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Paquette (Rosemont) et M.
Rivest (Jean-Talon).
Pour les besoins de cette commission, compte tenu que nous avons des
programmes différents qui vont faire en sorte que différentes
personnes vont être amenées à être ici au niveau des
ministres en particulier, nous accepterions une proposition afin que les
membres de la commission de part et d'autre puissent changer selon les sujets
qui seront discutés. Est-ce que vous êtes d'accord?
Une voix: D'accord.
Le Président (M. Jolivet): Je dois aussi vous rappeler que
vous avez plusieurs articles à regarder aujourd'hui et qu'on peut aller
jusqu'à minuit. Dépendant du temps qu'on prendra pour chacun des
programmes, il pourra toujours être question d'aller un petit peu plus
loin au cours de la soirée si nécessaire. Mais, d'une
façon ou d'une autre, il faut passer à travers l'ensemble de nos
programmes.
J'appelle donc le programme 1. M. le premier ministre.
Remarques préliminaires M. René
Lévesque
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, M. le chef
de l'Opposition, mes chers collègues, je ne ferai pas un discours. On
est plutôt ici pour passer notre examen. Je voudrais simplement insister
sur deux ou trois points qui, je pense, rejoignent l'intérêt
préliminaire qui a été manifesté à propos de
ces crédits.
D'abord, il y a eu des demandes de renseignements, comme l'an dernier
d'ailleurs, de la part de l'Opposition. On y a répondu de notre mieux;
enfin, j'ai le cahier ici et je pense que vous avez eu tous les renseignements
dont vous aviez besoin pour étoffer vos questions. Dans l'ensemble,
à partir du programme 1 jusqu'à la fin, ça se
présente, je crois, sans grands changements, de la même
façon que l'an dernier. Comme vous le savez, on a maintenu, après
les élections, le système, la structure, si on veut, des
ministres d'État, coordonnateurs et pilotes des priorités dans
leurs comités respectifs. Tel que ça s'enchaîne, si j'ai
bien vu l'ordre du jour de la commission, chacun de mes collègues sera
appelé à venir à la fois défendre sa part des
crédits et aussi, je pense bien, le fonctionnement de son secteur.
Maintenant, je voudrais vous présenter rapidement quelques-uns
des principaux collaborateurs qui m'accompagnent. Je pense qu'il est important
que vous les identifiiez de nouveau. Il y a, juste derrière moi, le
secrétaire général, M. Louis Bernard; il y a M. Boivin,
chef de cabinet, et, adjoint administratif à M. Boivin, M. Gilles
Tremblay; derrière, modestement cachée, il y a Mme Martine
Tremblay, adjointe de M. Boivin aux politiques ou aux affaires
gouvernementales. Il y en a un certain nombre d'autres, dont M. Gourdeau, parce
qu'il y a un point particulier qui concerne SAGMAI, c'est-à-dire
l'ensemble des politiques concernant les Amérindiens, qui a
été placé sous l'égide du Conseil exécutif
et M. Gourdeau dirige ce secteur. Il y a aussi d'autres collaborateurs qui sont
du secrétariat ou du cabinet, pour nous aider à répondre
aux questions de l'Opposition. Je suis à vos ordres.
Le Président (M. Jolivet): Avant de
laisser la parole à M. le chef de l'Opposition, il faudrait dire
que j'ai oublié de nommer un rapporteur, quelqu'un qui va rapporter. M.
Payne, de Vachon? M. Payne sera rapporteur.
M. le chef de l'Opposition.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, ainsi que l'a dit le premier
ministre, nous avons reçu un cahier documentaire en réponse
à des questions que nous avons formulées et peut-être
pourrait-on essayer de procéder rapidement à l'examen des postes
plutôt administratifs afin de réserver un peu de temps à
des sujets de nature politique et, le plus possible on pourra qarder du temps
pour les sujets politiques, le mieux ce sera pour nous.
Il y a un premier sujet qui doit être examiné, c'est la
liste du personnel, ainsi que les rémunérations. Sujet aux
compléments que voudra apporter mon collèque le
député de Jean-Talon, j'ai fait un examen comparatif du personnel
qui était à l'emploi du bureau du premier ministre au 1er janvier
1980, ainsi qu'au 1er janvier 1981. J'ai trouvé très peu de
modifications, je pense qu'il y a une différence d'une unité
à peu près et, par conséquent, il n'y a pas lieu de
s'attarder beaucoup là-dessus. Les seules questions que je voudrais
poser à ce sujet sont les suivantes. Je pense qu'il y avait trois
personnes au bureau du premier ministre en date du 1er janvier 1981 qui
étaient contractuelles, Mme Evelyne Dumas, M. Boisjoli et M.
Dupré. Est-ce qu'il y aurait moyen de savoir les sujets ou les objets
pour lesquels ces trois personnes étaient à l'emploi du bureau du
premier ministre à ce moment-là et si elles le sont encore?
M. Lévesque (Taillon): Dans le cas de Mme Dumas, elle y
est encore, elle a été un peu malade ces derniers temps, mais
elle doit revenir très bientôt et elle va demeurer, jusqu'à
nouvel ordre, contractuelle. Les deux autres cas, vous parliez de M. Michel
Boisjoli et de M. Yves Dupré. Dans le cas de M. Boisjoli, c'était
un attaché de recherche à titre contractuel qui travaillait avec
M. Claude Mallette, qui s'occupait beaucoup de la question constitutionnelle,
bien sûr, les contenus. Son mandat s'est terminé, dans le cas de
M. Boisjoli, le 13 février 1981.
Dans le cas de M. Dupré, c'était un conseiller en
communications qui, lui aussi, a travaillé beaucoup du côté
des communications en ce qui concerne - on le sait, il y a eu un effort
à faire du côté de l'opinion publique - le problème
constitutionnel et aussi à la préparation et à la mise en
marche, si vous voulez, à l'organisation du sommet de Montréal.
Dans son cas, le mandat est terminé depuis précisément le
27 février 1981, parce que, les sujets en question étant
couverts, il n'y avait pas de raison de le prolonger.
Questions générales
M. Ryan: On avait entendu dire pendant la période qui a
précédé le référendum qu'une extension du
bureau du premier ministre avait été organisée à
Montréal; si mes souvenirs sont bons, c'était du
côté du Loews Concorde, au complexe Concordia, sur l'avenue du
Parc. Je ne vois aucune trace de cela dans les listes de personnel qu'on nous
soumet. Est-ce que c'était un fait qu'il y avait un bureau assez bien
équipé qui avait été organisé à
Montréal et, à ce moment, où se trouveraient les
données relatives à ce bureau?
M. Lévesque (Taillon): Vous en retrouvez un certain nombre
ici. C'est parce que ce bureau qui, d'ailleurs, va être
transféré et rapetissé, va se réinstaller au
Complexe Desjardins à cause de l'espace et pour une somme plus modeste,
parce qu'il y avait des augmentations de loyer qui étaient
prévues. Vous retrouverez de ceux qui étaient là ou de
ceux qui y sont encore tous les noms ou à peu près tous les noms
dans la liste du personnel. C'est sûr qu'il y a eu, à partir de
cabinets différents... Que vous soyez d'accord ou pas, vous avez eu
l'occasion de critiquer parfois, mais cela demeure important qu'on ait un
certain nombre d'attachés qui sont, dans le jarqon, appelés des
agents de liaison, qui sont du personnel politique, on ne l'a jamais
caché, mais qui nous permettent de garder de bons contacts avec les
problèmes régionaux et avec aussi du personnel régional
gui se trouve un peu partout au Québec. Cela a été
gonflé dans le sens suivant au cours de la période
électorale, c'est que ce personnel politique a été
mobilisé de façon plus précise pour des
échéances électorales comme on l'a fait dans les autres
partis pour autant que du personnel était disponible. Maintenant,
normalement, chacun rentre chez soi, ceux qui continuent d'être dans le
secteur public. Ceux qui étaient là, en grande partie, vous les
trouvez dans la liste des attachés politiques ou des agents de liaison;
ils sont dans votre liste du 1er janvier 1981. Je pourrais vous en identifier
certains, mais ils sont tous là.
M. Ryan: Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir une liste
complète de ceux qui étaient à ce bureau pendant la
période qui a précédé le
référendum?
M. Lévesque (Taillon): Certainement, parce qu'ils ne sont
pas distingués sur la liste suivant le lieu où ils
travaillent.
Dans la plupart des cas, ils sont
retournés ailleurs.
M. Ryan: Évidemment, ce sont des personnes qui ont pu
être détachées d'autres ministères également
pendant cette période.
M. Lévesque (Taillon): C'est cela.
M. Ryan: Y aurait-il moyen d'avoir une liste complète de
tout le personnel avec la durée de travail, peut-être la
rémunération également? Je pense que cela
compléterait l'information.
M. Lévesque (Taillon): La rémunération n'a
pas changé, sauf que la durée de travail, vous allez l'avoir.
M. Ryan: Sur ceux qui ne seraient pas sur la liste, qui seraient
ajoutés, cela va?
M. Lévesque (Taillon): On pourrait vous avoir cela d'ici
la fin de la semaine.
M. Ryan: Les augmentations de traitements qui ont
été accordées aux personnes qui sont sur la liste du
bureau du premier ministre, cela a été fait suivant quelles
normes?
M. Lévesque (Taillon): Je pense que, si vous permettez, je
demanderai à M. Gilles Tremblay, qui s'occupe de la partie
administrative du cabinet, de vous donner les paramètres essentiels.
Les augmentations de traitements ont été données
sur la base du statut des employés concernés. Si c'étaient
des secrétaires particuliers, des secrétaires particuliers
adjoints nommés sous l'ancienne loi, ces gens ont des augmentations
automatiques au 1er janvier de chaque année.
Pour ce qui est des employés de soutien qui sont permanents, ces
gens-là sont rémunérés suivant le traitement de la
fonction publique, plus une prime de cabinet qui est de l'ordre de 10%.
Les employés de soutien qui ne sont pas permanents, ces
gens-là sont rémunérés suivant le traitement de la
fonction publique découlant de leur classification, plus une prime de
cabinet de l'ordre de 15%.
Ceux qui ont été nommés sous la nouvelle loi, les
attachés politiques ou directeurs de cabinet, ces gens-là sont
rémunérés suivant les barèmes de la Commission de
régie interne de l'Assemblée nationale.
M. Ryan: Je constate - j'ai fait une addition provisoire sujette
à correction - que la somme des traitements qui étaient
prévus au 1er janvier 1980 donnait à peu près 860 000 $,
si je compte bien, et la somme des traitements, si on se base sur la liste au
1er janvier 1981, cela donnerait 980 000 $ à peu près, soit une
différence de 120 000 $. Je pense qu'il y a seulement une
différence d'une unité dans les personnes employées.
Est-ce que cela voudrait dire que votre taux moyen d'augmentation aurait
été de l'ordre de 12% ou 13%? Est-ce possible?
M. Lévesque (Taillon): Ce qui peut arriver, c'est que
certains employés ont changé quand même de fonction. Ils
ont obtenu des responsabilités additionnelles. Il y a certains
employés de soutien qui ont pu, par exemple, assumer certaines fonctions
au niveau d'attachés politiques, ce qui représente
évidemment des augmentations de salaire, compte tenu du fait qu'il
s'agit de promotions. Mais, de façon générale,
étant donné que les deux listes que vous avez au 1er janvier 1980
et au 1er janvier 1981 ne comprennent que les cadres, si vous prenez l'ensemble
des employés qui travaillent au cabinet du premier ministre, au niveau
de l'utilisation de la masse salariale, ce sont des données similaires,
des montants similaires.
M. Ryan: Très bien. Je pense que, pour ce poste, c'est
suffisant. Il y a un autre poste que je voudrais examiner, c'est celui des
subventions à divers organismes. On nous a fourni une liste des
organismes qui ont reçu des subventions au cours des derniers mois. J'ai
fait une constatation en examinant cette liste. D'abord, le budget originel
prévoyait des sommes totales à ce poste de 1 100 000 $ et on a
dû, par des additions subséquentes, porter ce total à 1 837
000 $, c'est-à-dire une augmentation en cours d'année d'à
peu près 65%. Je constate en outre, en examinant les dates où on
été pris les engagements de verser ces subventions, que pendant
la période d'avril et de mai 1980, c'est-à-dire dans les semaines
qui ont immédiatement précédé la tenue du
référendum, il y en a eu pour 850 000 $, c'est-à-dire
qu'on avait engagé dès ces deux mois à peu près 80%
du budget prévu pour toute l'année. Je voudrais demander au
premier ministre si ces subventions ont été consenties ou
promises à ce moment-là afin de promouvoir les
intérêts référendaires du gouvernement ou si cela a
été fait dans un climat de totale impartialité et de total
détachement.
M. Lévesque (Taillon): Probablement, la réponse est
tellement dans le sens de la deuxième partie de la question qu'il me
semble que cela va sauter au yeux encore cette année. Parmi les gros
chiffres que vous trouvez, il y a le Festival d'été de
Québec qui, évidemment, demande quand même une subvention,
très vite et aussi vite que le budget le permet, et cela n'avait pas
été prévu l'an dernier au budget. C'est une des additions
que vous trouvez dans le total qui
a monté de 735 000 $, et il est fort probable que cela va revenir
encore cette été, d'une autre façon, très
bientôt, si ce n'est déjà fait. Et vous avez le
comité organisateur des rencontres francophones qui vient chaque
année au mois de juillet et qui doit nécessairement à
partir d'avril ou mai avoir une garantie de son budget. Cela est un autre des
gros morceaux autour de 300 000 $ à 400 000 $.
M. Ryan: Celui-là n'était pas compté, c'est
venu après le référendum, le 6 juin, M. le premier
ministre.
M. Lévesque (Taillon): Oui! Cela je ne le sais pas, j'ai
l'impression que c'est avant le mois de juin.
M. Ryan: C'est écrit ici.
M. Lévesque (Taillon): Quand même le 20 mai.
M. Ryan: Ici nous avons le 6 juin. D'accord, très bien, le
20 mai, 175 000 $.
M. Lévesque (Taillon): C'est marqué ici, la
première tranche le 20 mai.
M. Ryan: Comment expliquez-vous qu'il y ait eu cette avalanche de
subventions pendant les deux premiers mois? Ensuite, il a fallu augmenter ce
budget de 65% dans une année où vous-même avez dit à
maintes reprises qu'il fallait resserrer les vis de l'administration
après qu'on l'eut dit nous-mêmes, évidemment, en provoquant
toutes sortes de réactions amusées du côté du
gouvernement. On était bien content de voir que vous vous étiez
rendus à l'évidence, mais comment expliquer cette augmentation de
65% alors que partout on serrait les cordons et que, pour des secteurs
très vitaux, on se sent obligé d'effectuer des coupures?
M. Lévesque (Taillon): J'avoue que fort possiblement la
même chose va arriver encore cette année. Je répète,
que ce soit juin, mai, peu importe, mais le plus vite possible, la
réunion des francophones qui est maintenant en train de devenir une
tradition, et qui représente environ 400 000 $, il faut l'engager assez
vite dans l'année.
Je vous ferais remarquer que, parmi les chiffres du début de
l'année aussi, ou enfin des environs du début de l'année,
il y avait la contribution assez massive à la Eondation Lionel-Groulx
qui avait été prévue depuis une couple d'années, de
toute façon, le Festival d'été, je ne reviendrai pas
là-dessus. Mais ce sont de gros morceaux. Et ces gros morceaux partent
assez régulièrement vite chaque année, parce qu'ils sont
presque devenus institutionnalisés.
En cours de route, il y a également des problèmes qui nous
sont venus plus vite, et ils viendront peut-être encore vite les
problèmes équivalents, et qui représentaient de gros
morceaux. Par exemple, la question du rabbinat sépharade qu'il a fallu
traiter dès le début, le SOS-Italie, les Arméniens...
Tout ce que je peux vous dire, c'est très simple, c'est ceci.
Normalement, chaque année, au bout de trois mois, une bonne partie de ce
budget de subventions est engagée et il y a des imprévus qui
arrivent en cours de route, qui s'ajoutent. On essaie de les réduire le
plus possible, mais la plupart du temps, si vous regardez la liste, ce sont des
choses qui n'ont pas été prévues ailleurs. Il y a toujours
des choses comme cela qui arrivent dans la société qui nous
semblent exiger un certain soutien. C'est ce qu'on fait.
M. Ryan: Le piano que vous aviez promis pendant la campagne
référendaire, je pense que c'est à une maison d'accueil de
Sherbrooke, on ne le trouve pas là-dedans. (16 h 15)
M. Lévesque (Taillon): Le piano? Non, ce sont des
appareils de télévision.
M. Ryan: Ah oui! Est-ce que c'est compris dans cette liste-ci ou
si cela a été payé à même un autre
budget?
M. Lévesque (Taillon): De toute façon je ne sais
pas s'ils ont ajouté un piano, si cela ne venait pas de nous autres.
M. Ryan: ...
M. Lévesque (Taillon): II y a une maison de personnes
âgées à Sherbrooke où il y a des personnes qui sont
vraiment très peu mobiles et qui avaient, pour toute pâture, au
point de vue télévision, de petits appareils noir et blanc. On
sait qu'à cet âge c'est quand même une des façons,
non seulement d'embellir la vie, mais de rester un peu en contact avec
certaines choses qui se passent. Je n'ai pas besoin de vous dire que ce ne sont
pas des comités de lecture, la vue baisse. Tout ce qu'ils avaient,
c'étaient de petits appareils noir et blanc. Ils ont fait une demande
qui représentait la somme astronomique d'environ 7000 $ pour quelques
appareils de télévision en couleur - c'est cela que ça
voulait dire - que le budget de cette maison pour personnes âgées
ne pouvait pas prévoir.
M. Ryan: Est-ce que cela émargeait à ce budget-ci?
On ne le trouve pas dans la liste; est-ce que vous pourriez nous indiquer
exactement où cela a été inscrit?
M. Lévesque (Taillon): II me semble que cela serait venu
des Affaires sociales après certaines pressions.
M. Ryan: II y avait un budget là aussi?
M. Lévesque (Taillon): II y a quand même des
budgets, des crédits périmés, etc. Ce qui m'a mis le feu,
c'est que cela a pris, je pense, six mois avant que cela se règle dans
les chinoiseries administratives.
M. Rivest: Ce genre de problème qu'évoque le
premier ministre, je pense bien qu'il est conscient que cela n'existe pas
qu'à Sherbrooke. Est-ce que les demandes qui seraient adressées
au premier ministre venant d'autres personnes qui ont les mêmes besoins
tels que décrits par le premier ministre seraient reçues d'une
façon aussi favorable?
M. Lévesque (Taillon): Si le député de
Jean-Talon continue à pousser, on va être obligé d'avoir un
article spécial au budget pour les télécouleurs. Il me
semble que ça tombe sous le sens que les budgets devraient
prévoir quelque chose comme cela pour des gens de ce groupe d'âge
pour qui très souvent c'est un des liens essentiels qui leur restent
avec la vie normale et la vie de la société. Chacun son
opinion.
M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait savoir quelles sommes sont
prévues au chapitre des subventions à des organismes de toute
sorte pour l'exercice 1981-1982?
M. Lévesque (Taillon): Pour 1981-1982, les sommes qui
seraient prévues: rencontres francophones de Québec, 350 000 $ -
comme je vous l'ai dit, c'est presque institutionnalisé - 475 000 $
déjà pour le Festival d'été de Québec;
l'Église arménienne Sourp Hagop, c'est une subvention en deux
tranches qu'on a consentie aux Arméniens qui font un effort remarquable
dans leur communauté pour s'équiper.
M. Ryan: C'est plutôt le total qui m'intéresse.
M. Lévesque (Taillon): Alors, c'est une deuxième
tranche de 100 000 $ et puis, finalement, les subventions que l'on peut appeler
discrétionnaires; ce qui est prévu serait 247 500 $ au moment
où on se parle. Et le total vous le trouvez à 1 172 000 $ au bas
de 1 dans la page des crédits, à ce qu'on appelle transfert.
M. Ryan: Très bien. Alors, c'est ce qui est prévu
pour cette année alors que, l'an dernier, vous avez eu des
déboursés à ce poste de 1 835 000 $.
M. Lévesque (Taillon): C'est cela, le total. Je ne peux
pas garantir au chef de l'Opposition que, selon les circonstances -parce que
c'est très serré, il y a déjà trois gros morceaux
qui partent au départ - ou que tout ce qui se passe un peu partout dans
le Québec n'est pas prévu, à certains moments, il ne
faudra pas faire un effort additionnel. Ce n'est pas du gaspillage, je ne le
pense pas; il peut arriver qu'on soit obligé d'augmenter un peu en cours
de route.
M. Ryan: Je m'excuse, je reviens à des renseignements que
vous commenciez à fournir. Est-ce que vos collaborateurs qui vous
accompagnent pourraient nous remettre une liste de toutes les subventions qui
ont été promises, versées ou engagées entre le 15
février et le 13 avril?
M. Lévesque (Taillon): Oui, je suppose. Il n'a pas
dû y en avoir beaucoup, on n'avait pas le temps.
M. Ryan: Payables plus tard. Payables sur livraison de la
marchandise.
M. Lévesque (Taillon): Du 15 février au 13
avril?
M. Ryan: Oui.
M. Lévesque (Taillon): D'accord, mais j'ai quand
même l'impression qu'il ne doit pas y en avoir beaucoup, c'était
épuisé ou à peu près. On n'avait plus d'argent.
M. Ryan: Maintenant, je pose une question d'intérêt
public. Les organismes qui pourraient être intéressés
à recourir à vos bons offices, est-ce qu'ils peuvent s'adresser
à leur député? Comment ça se fait en
général? Faut-il qu'ils aient une relation spéciale avec
le Parti québécois, ou si vous recevez avec une égale
sympathie des demandes d'aide en provenance de comtés
représentés par des députés de l'Opposition? Est-ce
que vous avez déjà fait un calcul...
M. Lévesque (Taillon): Si vous regardez, vous allez en
trouver de tous les genres.
M. Ryan: Pardon?
M. Lévesque (Taillon): La procédure normale c'est
qu'on s'adresse d'abord au ministère concerné, pour autant qu'on
puisse identifier le ministère que ça concerne. S'il n'y a pas de
budget ou s'il n'y a pas de crédits de prévus, parce qu'on ne
veut pas se marcher sur les pieds non plus - il y a des crédits de
subventions, etc., dans la plupart des ministères - à ce
moment-là, on est un peu comme le dernier recours la plupart du temps.
On me souligne que dans le cas, par exemple, des Arméniens qui, je
pense, sont reconnus comme une communauté qui fait un gros effort, Mme
Lavoie-Roux de L'Acadie les a puissamment appuyés dans leurs demandes,
ce qui est normal.
M. Ryan: À propos des voyages, est-ce qu'on pourrait avoir
un compte-rendu du coût complet de la visite que le premier ministre a
faite à Paris il y a quelques mois? On a des éléments ici,
on n'a pas tout et évidemment on a des frais de voyage de quelques
personnes qui accompagnaient le premier ministre, mais on n'a pas l'ensemble
des dépenses de ce côté-là.
M. Lévesque (Taillon): Oui, on peut le faire mais il
faudrait récupérer... Cela peut se faire rapidement; il y a une
partie qui évidemment était portée par le budget normal,
de mon bureau, mais aussi une partie pour les autres ministres, qui
était portée entre autres, par le budget des Affaires
intergouvernementales. On peut récupérer ça et faire la
somme totale.
M. Ryan: Cela va. Il y a quelques-uns de vos collaborateurs qui
voyagent avec des coûts plutôt modestes;, je ne sais pas si c'est
une règle générale, c'est pour ça que je suis
intéressé à voir l'ensemble. En regardant les coûts
encourus par quelques voyageurs individuels, je me disais: Si c'est la
règle générale, on n'aura pas trop de reproches à
faire. Mais j'aimerais voir l'ensemble pour avoir une idée...
M. Lévesque (Taillon): D'accord.
M. Ryan: Je sais qu'on avait parlé d'un montant total
d'à peu près 175 000 $. Je ne sais pas à combien ca s'est
élevé.
M. Lévesque (Taillon): On va être obligé,
comme je vous l'ai dit, de récupérer la partie des
dépenses qui était assumée par les Affaires
intergouvernementales. On va combiner les deux et on vous donnera le total.
M. Ryan: On constate ailleurs...
M. Lévesque (Taillon): Soit dit en passant, pour rassurer
le chef de l'Opposition, vu qu'une des directions normales
d'intérêt politique qui revient chaque année, c'est la
France et les pays de l'ouest de l'Europe, aux environs de la fin de juin - je
ne sais pas pourquoi ca adonne toujours comme ça qu'il y a beaucoup de
choses qui semblent "effervescer" en Europe vers la fin de juin - à
cause des conditions politiques qui sont quand même de transition en
France, on a décidé de couper au maximum, jusqu'à
l'automne en tout cas, le nombre de gens qui iraient traiter de sujets urqents
en juillet ou en août.
M. Ryan: Dans les renseignements qu'on nous a donnés, il
est fait mention de deux publications qui étaient distribuées
gratuitement: la publication Rencontre et la publication OSE. Est-ce que c'est
la politique du gouvernement de continuer à distribuer ces revues
gratuitement ou si vous entendez
M. Lévesque (Taillon): Vous les avez vues? On pourrait
vous en passer une couple.
M. Ryan: Oui, nous les avons vues, merci. Ou si vous
entendez...
M. Lévesque (Taillon): Dans le cas de Rencontre, il y a un
comité qui travaille à l'ensemble des publications - je ne parle
pas seulement de celles-là - pour voir si on ne devrait pas essayer,
dans la plupart des cas, en tout cas partout où c'est possible, de
rentabiliser les publications, c'est-à-dire les vendre, ce qui a
été fait dans le cas des consommateurs avec beaucoup de
succès. Alors, il y a une étude qui se fait là-dessus. Je
dois dire que pour ce qui est de OSE, il reste à voir quelle forme
prendra le programme OSE et en même temps quelle sera la conclusion du
comité là-dessus.
Pour ce qui est de Rencontre, qui s'adresse surtout aux
Amérindiens, je pense qu'il n'est pas question - c'est quatre fois par
année, c'est modeste - d'essayer de rentabiliser cela. Je pense qu'on
doit la maintenir telle quelle si on veut rejoindre la clientèle en
question.
M. Rivest: Ce n'est peut-être pas le même programme,
mais je pense en tout cas... à moins que M. Ryan ait d'autres questions?
Sur les Amérindiens, au moment de la commission parlementaire sur la
constitution, on a reçu ici tout un groupe d'Amérindiens ou
d'Inuits. M. Gourdeau est très au courant parce qu'il était ici.
Ils en avaient profité pour souligner un ensemble de griefs assez
imposants qui avaient plus ou moins de rapport avec notre sujet qui
était proprement constitutionnel. À ce moment-là, j'avais
suggéré que maintenant que les ententes, entres autres, de la
Baie-James sont en route... Je sais que le gouvernement a un certain nombre de
difficultés. Le gouvernement peut-il songer - pas ce printemps-ci ou
même au cours de l'été ou peut-être au cours de
l'automne - qu'une commission parlementaire se réunisse en un forum
public quelconque pour regarder l'ensemble du problème des
Amérindiens et du gouvernement du Québec, les ententes, les
préoccupations qu'ils ont? Ils en avaient un certain nombre que vous
connaissez sans doute. Je ne sais pas si M. Gourdeau ou quelqu'un d'autre a
transmis cette suggestion que j'avais faite au niveau de la commission
parlementaire. Pour en avoir causé avec M. Gourdeau, il n'était
pas contre ou enfin...
M. Lévesque (Taillon): Je ne vois pas comment on pourrait
être contre. Enfin, il
est sorti pendant quelques instants. C'est une question qui s'adresse
plutôt au centre de décision politique. Je ne m'engagerai pas pour
l'automne, mais je dirais que dans le cadre d'une année, d'ici au
printemps prochain ou quelque part par là, si les circonstances le
moindrement s'y prêtent, ce serait bon de faire le point. Vous savez
à quel point cela peut être complexe, par exemple, à cause
du nombre de bandes et de nations. Les citoyens amérindiens ne sont pas
très nombreux, mais l'extraordinaire complexité qu'il y a dans
les composantes de ce total fait que ce n'est pas facile de s'y retrouver. Mais
je pense que ce serait indiqué à un moment donné, et pas
trop loin, de faire le point parce qu'il y a des ententes signées. Il y
a la façon assez laborieuse souvent dont on peut les appliquer parce
qu'on rencontre beaucoup de négligence et de méfiance des deux
côtés qu'on essaie d'atténuer. Il y a également avec
les Attikamègues et les Montagnais des pourparlers qui ont
commencé à s'engager. Il y a le problème qu'on a
actuellement autour du saumon avec nos concitoyens micmacs en Gaspésie.
Puis, il y a encore autre chose que j'oublie. Ce serait bon de faire le point.
Je vous dirais, en principe, d'accord. À propos de la commission
parlementaire qui a été mentionnée, on n'en a plus
reparlé, mais il me semble que cela pourrait être une bonne
idée. Pas se couler dans le ciment pour dans trois ou quatre mois, mais
avant trop longtemps. Il faut aussi qu'ils soient d'accord.
M. Rivest: M. Gourdeau sait ce dont on avait parlé. Enfin,
le premier ministre vient de nous indiquer qu'on le fera sans doute, à
un moment ou l'autre, selon la décision qui pourra être prise par
le gouvernement. Très simplement, l'objet de ma suggestion était
que, voyant et constatant qu'il y avait toutes sortes de réclamations ou
de qriefs ou même d'offres de collaboration dans certains secteurs depuis
la signature des ententes de la Baie-James et, même
antérieurement, depuis qu'on s'occupe finalement du
Nouveau-Québec et des populations qui y vivent, ce ne serait
peut-être pas une mauvaise chose que l'Assemblée nationale, dans
un forum qui pourrait être une commission parlementaire ou autre chose,
regarde l'ensemble de la question pour voir où on en est rendu au
Québec avec l'ensemble du problème des populations autochtones,
soit à l'automne ou au printemps prochain. Comme le premier ministre
nous a indiqué... d'accord.
M. Lévesque (Taillon): Je pense que les autochtones
eux-mêmes désirent qu'il se fasse quelque chose dans ce sens. Ils
n'ont pas parlé, à ma connaissance, de commission parlementaire,
mais c'est sûr que, trois ans après la première rencontre
qu'il y avait eu entre le gouvernement et les chefs indiens, ce serait leur
désir d'en avoir maintenant une autre pour pouvoir débattre,
à la lumière des difficultés qui ont été
vécues, à la lumière des obstacles rencontrés et
aussi des choses qui ont été accomplies, des façons
d'améliorer les choses dans l'avenir. Il faudrait les consulter
aussi.
M. Rivest: Oui.
Publicité
M. Ryan: Au chapitre de la publicité, en 1980-1981, on a
dépensé, sous la responsabilité du bureau du premier
ministre, à des fins de publicité des sommes s'élevant au
total à plus de 550 000 $. Je voudrais demander des précisions
sur certaines de ces dépenses. D'abord, comment cela de fait-il que ces
dépenses aient émargé au budget du bureau du premier
ministre? Deuxièmement, je vois une dépense de 63 328 $ pour la
publication d'un journal de liaison à l'intention des
municipalités régionales de comté. Quelle était
cette affaire? Je ne sais pas de guoi il s'agissait. Est-ce que c'était
un journal destiné aux municipalités? Cela ne pouvait pas
être destiné aux municipalités régionales de
comté qui n'étaient pas créées à ce moment,
à ma connaissance. (16 h 30)
M. Lévesque (Taillon): C'est à propos de la loi 125
et de la mise en place progressive des municipalités régionales
de comté. Il y a eu des comités de zone, comme vous le savez, de
consultation d'organisés. Ce journal de liaison - il aurait pu porter un
autre nom - était tout simplement une publication qui leur permettait,
qui permettait à tout le monde de voir plus clair dans la perspective
ouverte par la loi 125. Cela découlait du fait que la loi 125 propose
tel et tel objectifs et qu'il y avait des comités de consultation qui
avaient été organisés pour sonder l'opinion des
élus municipaux, en particulier. C'est toujours vrai quand il y a une
nouvelle mesure qui est assez vaste, il y avait beaucoup de demandes de
renseignements. Cela a permis de tenir le contact le mieux possible. La raison
pour laquelle c'est là, c'est qu'au début, c'était le
ministre d'État à l'Aménagement - donc, dans le bloc qui
est relié au Conseil exécutif - qui avait à piloter ce
projet des municipalités régionales de comté
découlant de la loi 125.
C'est la même chose exactement pour les autres sujets
publicitaires que vous trouvez là, dans les réponses qu'on a
fournies d'avance à l'Opposition. Le Secrétariat permanent des
conférences socio- économiques, je pense que cela va de soi,
c'est relié à l'Exécutif. Le programme OSE, je pense que
je n'ai pas besoin de revenir dessus, c'est normal. C'est le ministre
d'État
au Développement économique qui est surtout
impliqué. La Commission d'étude sur la formation des adultes
relève, je pense, du ministre d'État au développement
culturel. C'est l'Exécutif encore. La Commission d'enquête sur la
mine Belmoral, je pense que c'est essentiellement là, parce qu'il n'y
avait pas de budget ailleurs et qu'il a fallu décider vite, enfin on le
sait. Le Secrétariat à la condition féminine, c'est
relié à l'exécutif. La publication de la question
référendaire qui, je crois, était nécessaire dans
les circonstances, revenait aussi normalement à l'Exécutif.
M. Rivest: Bonne question, vous aviez raison.
M. Ryan: Savez-vous la part de cette somme, de 386 000 $ qui est
allée aux journaux quotidiens de langue française, de langue
anglaise, aux publications ethniques, aux journaux hebdomadaires et aux
médias électroniques? Pourrait-on avoir un partage de ces
dépenses...
M. Lévesque (Taillon): Oui.
M. Ryan: ... suivant les différents types de médias
pour savoir exactement...
M. Lévesque (Taillon): En fait, le placement
médias, dit-on, était autour de 360 000 $, ce qui veut dire que
tout le bloc était essentiellement au placement médias. Le reste,
je suppose que c'était de la conception ou de la mise en place. Mais on
peut vous donner le détail, si vous voulez.
M. Ryan: Je vois qu'il n'y a aucune somme prévue, en
1981-1982, à ce poste-ci. Comment expliquez-vous cela? Est-ce que vous
pensez qu'il n'arrivera aucun besoin ou des budgets plus substantiels ont-ils
été prévus dans d'autres sections?
M. Lévesque (Taillon): Pas que je sache. C'est simplement
qu'on n'a pas à en prévoir au départ. On ne voit pas
pourquoi on en prévoirait quand il n'y en a pas de prévu. Si cela
se produit en cours de route, on fera appel au fonds de suppléance et ce
sera dans les totaux de l'année. On aura à les justifier, mais
pour l'instant, on n'en voit pas. Alors, on n'en a pas inscrit.
Cela peut être financé soit par les crédits
périmés dans les différents programmes ou, si les
crédits périmés ne sont pas suffisants, par le fonds de
suppléance. C'est la règle qu'on a suivie jusqu'à
maintenant, parce qu'il est difficile de prévoir.
M. Ryan: En ce qui touche la publicité gouvernementale, je
voudrais demander au premier ministre s'il a l'intention, au cours des
prochains mois, d'énoncer par écrit des règles directrices
visant à assurer que la publicité gouvernementale ne servira pas
à des fins politiques.
M. Lévesque (Taillon): Je pense que cela, je pourrais dire
au chef de l'Opposition qu'on se le répète constamment entre
nous. Quels que soient les autres rôles de l'Opposition, elle a son
rôle de chien de garde que les citoyens lui ont confié. Si elle
voit des choses, qu'elle nous le dise, mais je fais une exception - là,
peut-être qu'on ne s'entendra pas sur le sens de "politique" -c'est que
pour autant que va continuer, quant à nous, l'urgence constitutionnelle,
telle qu'elle se présente, je dois dire tout de suite au chef de
l'Opposition que - nous considérons cela sûrement hautement
Politique, avec un P majuscule; cela touche le statut même du
Québec et ses droits, ses intérêts les plus fondamentaux -
on va continuer, selon ce qui va se passer, évidemment, le cas
échéant, à engager des sommes de ce côté pour
rejoindre nos concitoyens sur les implications éventuelles de ce qui
peut se passer dans ce domaine. Mais, pour le reste, s'il s'agit de politique
partisane au sens de favoriser le gouvernement, je ne pense pas que cela se
produise. De toute façon, les règles sont déjà
très strictes et c'est à nous de nous surveiller.
M. Ryan: En toute objectivité, M. le premier ministre, ne
trouvez-vous pas, si le gouvernement dépense, disons, 3 000 000 $ au
service d'une campagne comme celle qui a eu lieu en décembre, janvier et
février, juste à la veille d'une campagne électorale alors
que lui défend une position qui, sur certains points, est semblable
à celle de l'Opposition et sur d'autres est différente, est-ce
que vous ne trouvez pas que cela donne un avantage indu au gouvernement en
campagne électorale? On s'en va en campagne électorale et vous
avez conditionné les esprits pendant trois mois en pigeant à
même les fonds gouvernementaux. L'Opposition n'a aucune espèce de
moyen de faire valoir son point de vue pendant ce temps-là, même
s'il peut également être orienté vers le service des
intérêts du Québec conçu, à certains
égards, de manière différente.
Mais je trouve que s'il n'y a pas de normes qui sont fixées... Je
vais vous donner un autre exemple. Pendant la campagne électorale, nous
circulions, il m'arrivait d'être en voiture, par exemple, et j'entendais
une avalanche de messages de propagande des ministères; et là ce
n'était pas de la propagande politique, mais on aurait dit qu'il y en
avait plus à ce moment-là. C'est dans ce sens que je vous demande
si vous avez l'intention d'énoncer des règles avec l'appui
ou le concours, au besoin, de l'Opposition, qui serait prête
à vous aider là-dessus parce que cela crée une impressions
de déséquilibre qui suscite une irritation, une frustration
profonde. On se dit, d'un côté, on travaille comme des
forcenés pour trouver des moyens de financement pour nos campagnes qui
soient au-dessus de tout reproche et, en même temps, on voit que les
fonds publics sont utilisés. Il y a trois exemples, il y a eu la
campagne pendant la période de l'hiver autour du
référendum, cette avalanche de messages publicitaires en
provenance de ministères et il y a eu aussi une pluie de promesses de
subventions qui ont été faites par des candidats du gouvernement
pendant la période électorale. Nous soutenons qu'à ce
moment-là cela crée un déséquilibre profond dans
l'aptitude de chaque camp à rejoindre raisonnablement le citoyen moyen
pour lui transmettre son message. Si on devait accentuer l'orientation de ce
côté-là, s'il ne devait pas y avoir des normes claires,
édictées, publiques, connues, ayant été
discutées, il me semble que les correctifs qu'on aura apportés
à nos moeurs électorales risquent d'être annulés par
des nouveaux abus, plus typiques de l'époque où nous sommes, qui
créent un débalancement non moins profond que celui auquel vous
avez essayé de remédier.
M. Lévesque (Taillon): Écoutez, je dois vous dire
qu'à partir de novembre jusqu'à février inclusivement,
à cause de ce qui se produisait... Il ne faut pas oublier qu'on est dans
un régime à deux niveaux; je sais bien que le chef de
l'Opposition a droit à ses sentiments au niveau provincial mais il y a
également les libéraux fédéraux, il y a un
gouvernement à Ottawa qui ne se gênait pas pour faire toute la
propagande possible de son côté dans un sens qui, nous, nous
paraît tout à fait inacceptable pour le Québec, et cela
nous a paru comme un devoir pour le gouvernement.
M. Ryan: Et nous autres, si vous permettez...
M. Lévesque (Taillon): Sur l'essentiel, je reviens sur ce
que disait le chef de l'Opposition sur l'attitude de l'Opposition, il nous a
semblé tout le long du chemin - mais peu importe qu'il y ait des
distorsions entre les points de vue sur certains aspects du projet
constitutionnel - qu'on a quand même maintenu une ligne qui pouvait
rejoindre tout le monde et à laquelle l'Opposition dans l'ensemble
pouvait se relier dans la publicité constitutionnelle,
c'est-à-dire le caractère unilatéral, le chambardement
sans l'accord, si vous voulez, des Québécois ou des autres
provinces, jusqu'à un total de huit. Et on l'a interrompue après
s'être posé des questions, on a interrompu cette campagne pour la
campagne électorale. On l'a coupée immédiatement,
justement parce que là on s'est dit que peut-être les gens
pourraient faire le lien.
Il y a des budgets prévus. On a dit aux ministères:
Tassez-vous en grande partie pendant cette période de campagne
publicitaire sur la constitution, ce qui explique qu'il n'y a pas eu avalanche
- enfin le chef de l'Opposition a eu l'impression qu'il y avait eu avalanche -
mais les ministères ont repris ce qui restait de leurs budgets qui
avaient été tassés littéralement pendant quelques
mois de façon à reprendre leur publicité normale, qui
n'avait rien à voir avec la campagne électorale, enfin une
publicité d'information, c'est l'impression que j'en ai.
M. Ryan: Non, le gouvernement vous rend plus heureux, le
gouvernement veille plus à vos besoins, le gouvernement veille à
votre santé et finalement vous créez une illusion de
bien-être ou d'abondance de services de la part du gouvernement qui
à mon point de vue est particulièrement malvenue en
période électorale. Je crois que vous devriez avoir des normes,
au moins de ce côté-là, et cela vaudrait la peine de
l'étudier.
M. Lévesque (Taillon): Est-ce qu'on devrait interrompre?
Écoutez, la question peut se poser. Honnêtement, je me pose la
question. Les budgets publicitaires prévus par les ministères,
normalement, n'ont rien à voir avec quoi que ce soit de partisan, ce
sont des lois qu'il s'agit d'expliquer et des programmes dont il s'agit de
rappeler l'existence aux citoyens; cela se fait tout le temps et je pense que
c'est normal. On est dans une période de médias d'information
électroniques et écrits, surtout électroniques, cela
coûte cher; toutes les entreprises publiques et privées sont
obligées de s'en servir pour faire savoir ce qu'elles ont à
dire.
On peut toujours se poser la question; est-ce que pendant la campagne
électorale, qui dure maintenant un mois, on devrait interrompre tout
cela, c'est-à-dire geler les budgets? Peut-être. Je ne le sais
pas.
M. Ryan: Ou donner des directives précises pour que, de
part et d'autre, on ait l'assurance qu'on va être traités avec
équité, sur une base d'égalité.
M. Lévesque (Taillon): À ce moment-là, une
base d'égalité voudrait dire quoi? Cela voudrait dire que
l'Opposition aurait un budget publicitaire pendant une période
électorale, qui viendrait des fonds publics. On n'en a pas pour les
partis, d'aucune façon.
M. Ryan: Ce que je veux dire par là, c'est beaucoup plus
simple. Nous aurions la sensation honnête de ne pas être
écrasés par un volume de publicité émanant du
gouvernement dans cette période, de manière inusitée ou
désordonnée.
La question que je vous posais tantôt -je suis content de voir
qu'il y a quand même un élément d'ouverture - c'est: Est-ce
que vous êtes prêt à envisager - on en a pour bien d'autres
sujets - que des normes écrites soient formulées à ce
sujet au cours des prochains mois pour qu'on s'en aille vers un régime
où on saura plus à quoi s'en tenir?
Vous parliez tantôt de la publicité gouvernementale du
fédéral qui était, d'après vos propres termes, si
j'ai bien retenu, inacceptable pour le Québec. Moi, je vais plus loin;
je vous dis inacceptable tout court. Je l'ai dit souvent en Chambre, je le
répète ici: inacceptable tout court. Ce genre de propagande, je
ne l'accepte pas plus de mon gouvernement, non plus, je vous le dis. Et je ne
pense pas qu'on puisse répondre sur une longue durée à un
mal par un mal. Il me semble qu'on doit essayer de dépasser ce qui nous
apparaît comme un abus objectif. À ce moment-là, au bout de
la ligne, cela va être la loi du plus fort qui va l'emporter. Si
Québec peut mettre 2 000 000 $, Ottawa va en mettre 6 000 000 $. Si le
secteur privé en met 60 000 000 $, le secteur public va en mettre 200
000 000 $, etc. C'est dans cet esprit que j'attire votre attention sur le
problème, et je pense que vous savez que cela procède de
considérations sincères.
M. Lévesque (Taillon): Oui, je pense. Je dois faire
remarquer au chef de l'Opposition qu'une campagne arrive, et une autre arrive
et ce ne sont pas toujours les mêmes réactions. Nous, on a eu
l'impression d'être devant une iniquité absolument inqualifiable
au moment de la campagne référendaire. Je me souviens -
plutôt vers la fin tout de même - que le chef de l'Opposition a,
lui aussi, exprimé des doutes très sérieux
là-dessus. Pour ce qui est de la dernière campagne
électorale, je dois dire une chose que me rappelait il y a un instant le
secrétaire général. Les budgets qui ont été
votés et à même lesquels on a fait une ponction importante
pour ce qui est de la constitution pendant quelques mois n'ont
été augmentés d'aucune façon jusqu'à la fin
de l'exercice financier. Ce sont les restants qui ont servi aux
ministères à reprendre leur place, si vous voulez.
On peut se poser la question que se posait le chef de l'Opposition. On
va regarder cela. On pourrait même, d'ici quelque temps, discuter,
à partir du ministère des Communications, une politique
publicitaire pour le gouvernement où l'Opposition donnerait son "input",
de façon qu'on ait peut-être de meilleures balises.
Il y a une chose que je voudrais relever. Je comprends qu'on est au
lendemain d'une campagne électorale. Il y a mes collègues ici, je
ne pense pas qu'ils puissent se sentir tellement visés. Le chef de
l'Opposition a fait une remarque un peu malheureuse en parlant de la pluie de
promesses de subventions pendant la campagne électorale. Je ne crois pas
qu'il y ait eu d'abus de ce côté-là. Il y en a
peut-être eu localement dans des coins - des deux côtés, je
pense que cela doit arriver - mais une chose est certaine: il n'y avait rien
là-dedans, sauf des programmes régionaux - je pense que
l'Opposition devait en faire aussi, on a vu un brouillon à un moment
donné; on ne l'a pas revu après - de développement, de
règlement de certains problèmes. Et cela était
approuvé dans notre façon de voir la campagne électorale.
Mais des pluies de promesses de subventions, je ne sais pas s'il y a de mes
collègues qui veulent...
M. Ryan: Des pluies de subventions. Des députés qui
se promenaient avec des chèques qu'ils allaient distribuer à
gauche et à droite, il y en a eu beaucoup de cela, M. le premier
ministre. Nous autres, nous ne pouvions pas le faire parce que nous n'avions
pas accès à la bourse publique.
M. Laplante: Seulement pour vous donner un exemple, j'avais deux
chèques de subventions hors normes où mon budget n'était
pas épuisé. Je me suis abstenu de les donner pendant la campagne
électorale. Je les ai donnés après la campagne.
M. Ryan: Je ne vous ai pas mis en cause.
M. Laplante: Non, mais je vous cite un exemple de
député.
M. Ryan: Je ne vous ai pas mis en cause vous-même, M. le
député de Bourassa, mais je vous dis que nous avons
été témoins à travers le Québec... Nous vous
soumettrons des faits. Bien entendu, nous n'avons pas eu le temps de
compléter nos enquêtes.
M. Lévesque (Taillon): Je pense que le chef de
l'Opposition admettra que ce genre de comportement pendant la campagne
électorale, on peut essayer de le restreindre le mieux possible. Le
député de Bourassa vient de donner un sacré bon exemple du
genre de contrôle qu'on a exercé les uns et les autres sur nos
propres consciences. Mais la perfection dans ce domaine, ni d'un bord ni de
l'autre, on ne la verra jamais.
M. Ryan: On discutait de publicité, on pourrait
peut-être essayer de rester là-dessus. On a dit ce qu'on avait
à dire sur ce point-là. Je suis content de voir qu'il n'y a
pas de sommes qui aient été prévues au budget de
1981-1982 pour ce poste. Il me semble que c'est préférable qu'il
n'y en ait pas au bureau du premier ministre, en principe, sauf que j'admets
que des exceptions puissent survenir en cours de route.
M. Lévesque (Taillon): C'est cela. Je ne peux pas garantir
qu'il n'y en aura pas. (16 h 45)
M. Ryan: En tout cas. Juste une autre question en rapport avec
les chiffres qu'on nous a fournis. Je crois qu'il y a une liste assez
considérable de personnes qui ont reçu... Oui, il y a quelque
chose?
M. Rivest: Est-ce que je peux ajouter une chose sur la
publicité? Lors de l'étude des crédits du ministère
des Affaires intergouvernementales, en marge de la campagne "Faut pas se faire
avoir", j'ai appris - je pense que c'était assez évident de toute
façon - que cette campagne, par exception, étant donné
probablement sa nature, ce n'est pas le ministère des Communications qui
en a été le maître d'oeuvre, mais le ministère des
Affaires intergouvernementales. Du moins, c'est ce que le ministre des
Communications, M. Bertrand, m'a indiqué, et ce que le ministre des
Affaires intergouvernementales m'a confirmé. Le chef de l'Opposition et
le premier ministre ont fait des ouvertures sur le plan de la pratique ou de
l'éthique dans ce domaine. C'est une des choses qui inquiètent
évidemment, à tort ou à raison, les gens qui regardent les
campagnes publicitaires. Le chef de l'Opposition parlait d'un
déséquilibre, par exemple, avec le thème "Faut pas se
faire avoir" et, pour ne pas se faire avoir, "Faut rester forts", d'accord. En
tout cas à tort ou à raison, il y en a qui font ce lien et les
gens en publicité se greffent là-dessus. Cela peut être une
interprétation, et cela crée vraiment un
déséquilibre parce que, vous savez, le gouvernement - pas vous
personnellement, ou même le gouvernement actuel - sait exactement... Mon
inquiétude....
M. Lévesque (Taillon): On pourrait faire le même
lien entre "Faut pas se faire avoir, et "Pour du vrai progrès au
Québec".
M. Rivest: Non, ce serait moins fort pas mal. Ce n'est pas cela
mon point. C'est que lorsque le gouvernement, à même les fonds
publics, s'adresse à une firme de publicité qui lui
suggère un certain nombre de thèmes... Le ministre des Affaires
intergouvernementales nous a informés à la commission qu'un
comité - d'après ce qu'il nous a dit, sauf erreur, il me semble
que c'est cela - interministériel de ministres a décidé
finalement du thème. Est-ce que cela est exact? Je ne voudrais pas mal
interpréter M. Morin, malgré que c'est toujours difficile
d'interpréter. C'est cela? C'est à peu près cela la
démarche?
M. Lévesque (Taillon): La démarche c'était,
écoutez... je pense que j'ai pigé un morceau, mais j'en ai perdu
un petit bout...
M. Rivest: A un moment donné, vous avez
décidé de faire la campagne de publicité "Faut pas se
faire avoir"; vous vous êtes adressés à une agence.
L'agence vous a suggéré un certain nombre de thèmes,
compte tenu du contenu et du message que vous vouliez véhiculer, qui
était sans doute légitime dans les circonstances. Cela avait
d'abord été enlevé au ministère des Communications.
Il y a eu un comité interministériel, au niveau des ministres,
qui aurait décidé et du budget et du thème. Je vous
demande de songer à cela dans les remarques du chef de l'Opposition,
parce que cela, c'est une affaire qui émarge aux fonds publics. J'ai
posé la question au ministre des Affaires intergouvernementales,
à savoir si du personnel politigue, nommément, en particulier le
cabinet du premier ministre, du personnel politique dont, par la nature
même de ses fonctions, les liens sont aussi étroits avec
l'administration publique et avec le parti qui est le parti ministériel,
je me suis informé au ministre des Affaires intergouvernementales,
dis-je, si du personnel du cabinet du premier ministre avait assisté
à ces réunions.
M. Lévesque (Taillon): Plus que cela. Ecoutez, on est dans
la position où il a été décidé que cela
devait être piloté essentiellement par les Affaires
intergouvernementales et l'Exécutif. Je suis responsable du gouvernement
à ce niveau, et mon cabinet a un certain nombre de compétences
reconnues, qui sont des Québécois aussi particulièrement,
intensément préoccupés par la même question. On est
dans la position du clientt vis-à-vis d'une agence, ce qui est normal. A
ce moment-là, il y a eu un comité interministériel qui a
été formé, auquel se sont ajoutés techniquement des
gens du cabinet du premier ministre et des Affaires intergouvernementales.
M. Rivest: Cela va. Mais le point que je voulais souligner, quand
le chef de l'Opposition illustrait tantôt le déséquilibre,
c'est que ces gens du cabinet du premier ministre, que ce soit n'importe quel
premier ministre, quand on parle de règles, ces gens-là parlent,
vivent et sont en contact étroit et permanent avec les gens qui
travaillent au sein d'une formation politique, et c'est normal, ils sont
là dans une certaine mesure pour cela. Mais à partir du moment
où, à
même les fonds publics, on décide une campagne de
l'envergure de celle qui a eu lieu et que, au niveau, à tort ou à
raison, des interprétations, il y a une espèce de correspondance
ou de charnière dans les campagnes de publicité, les
publicitaires vont vous dire que pour une bonne campagne de publicité,
vous commencez avec un thème, vous dévoilez le premier plan et
après cela... on peut à tort ou à raison
interpréter cela, et dans ce sens, M. le premier ministre, je ne veux
pas - vous répondrez tantôt si vous me permettez juste de
compléter. Dans ce sens-là, l'absence de règles
d'éthique et de garanties là-dessus crée un
déséquilibre profond parce que, sans vouloir faire de
procès d'intention, il reste qu'une question qu'on peut soulever, c'est
que, sachant au mois décembre qu'il y aurait vraisemblablement des
élections au printemps, on ait décidé d'un thème
donné et que déjà on ait pu, à l'occasion, parce
que ce sont les mêmes personnes qui circulent et qui se parlent, penser
au deuxième thème. À ce moment-là, les gens qui
étaient bien d'accord avec votre première démarche en
termes de publicité - je pense que c'était le cas, entre autres,
de l'Opposition officielle -se trouvent pris dans la situation. Bien pratique.
Là, je l'ai fait sous forme interrogative, mais, si je vous disais ma
conviction profonde, peut-être que ça vous scandaliserait, mais je
pense que vous pouvez l'inférer des propos que je tiens.
M. Lévesque (Taillon): Oui, oui. J'infère,
j'infère et je comprends qu'on infère. Mais il demeure qu'on a
agi du côté constitutionnel presque en catastrophe. On
réagissait, quand même, à quelque chose qui se passait
à Ottawa et qui, quant à nous, était un danger, enfin un
poison vif. On a réagi en catastrophe dès le mois de novembre,
enfin aussitôt qu'on a vu clair dans les intentions d'Ottawa. Il s'est
formé un comité et on n'avait pas le temps de passer à
travers tous les rouages - ce sera probablement vrai une autre fois - les
mécanismes, etc. On a essayé de faire ca convenablement, sans
partisanerie, en "checkant" ce qui se passait, surtout à la
télévision parce que c'est là que, forcément,
l'impact est le plus visible. Maintenant, je vous dirai une chose.
Inférez si vous voulez, mais il reste que c'est un groupe tout à
fait différent, au niveau de la conception, et forcément
financé par le parti dans ce cas-là, et de la mise en marche de
la campagne électorale, qui a travaillé. Autrement dit, ce
n'était pas le même groupe.
M. Rivest: Je sais que le premier ministre ne serait
peut-être pas en mesure de me le dire, mais la question qu'on peut se
poser et qui, sans doute, est normale: Honnêtement, est-ce que le premier
ministre pourrait - je pense qu'il ne pourrait pas le faire - nous assurer,
parce qu'il y a une différence entre les fonds publics et les fonds du
Parti québécois, qu'en aucun temps la démarche
publicitaire suivie à l'intérieur de la campagne pour lutter
contre le projet de rapatriement n'a été communiquée,
individuellement par les personnes qui se connaissent et qui travaillent
ensemble, à une formation politique qui s'adonne à être sa
formation politique? Je pense que le premier ministre peut dire: Je n'accepte
pas ca ou je ne suis pas d'accord avec ça, mais est-ce que, en
réalité, le premier ministre pourrait en toute certitude - et
personne ne pourra jamais le vérifier - nous affirmer une pareille
chose? Le simple fait qu'il ne puisse pas le faire, est-ce que ça
n'illustre pas la préoccupation du chef de l'Opposition sur ce
déséquilibre qui est introduit par la pratique actuelle - c'est
vrai autant au fédéral, remarquez, on l'a souligné
tantôt - de nos gouvernements qui font des campagnes publicitaires de
slogans et de thèmes politiques?
M. Lévesque (Taillon): Je ne pourrais pas faire des
affirmations comme ca. C'est quasiment dire ce qui se passe dans l'esprit de
tout le monde et quelle est leur psychologie. Il est évident qu'il peut
y avoir, forcément, une sorte de côté vases communicants
dans un truc aussi intense et deux trucs qui se suivent aussi rapidement. Je
vous ferai remarquer tout de même, juste comme ca - je ne veux pas
reprendre le débat - que nous, on comptait très fermement, enfin
au début, qu'en ce qui concerne les droits, la question
unilatérale, etc., on pourrait s'entendre avec l'Opposition sur une
motion en Chambre. Il n'y avait plus d'actif pour personne. Il y avait un actif
additionnel pour l'ensemble des Québécois, par exemple. À
ce moment-là, les questions que pose actuellement le
député de Jean-Talon n'auraient pas à se poser. Mais on a
été déçus là-dedans, ce n'est pas de notre
faute, vous l'admettrez, on a fait tous les efforts possibles et imaginables
pour avoir une sorte de front commun ici au Parlement.
M. Ryan: Mais, ca n'efface quand même pas le
problème de fond, M. le premier ministre. Quand le gouvernement s'engage
dans des programmes de dépenses publicitaires visant à promouvoir
ses opinions politiques il crée, par le fait même, un danger qui
doit être examiné de très près. Je l'ai dit souvent:
Que ca émane du gouvernement fédéral et du gouvernement
québécois, le problème est absolument le même. Je ne
trouve pas qu'on a des explications satisfaisantes là-dessus. Je
comprends le contexte et tout ca, mais je dis encore une fois que, pour ceux
qui luttent contre le gouvernement dans une
période immédiatement préélectorale ou dans
une période électorale, ça crée un
déséquilibre des chances devant lequel toutes ces
simagrées que nous faisons pour faire reproduire en quatre copies des
reçus de contributions de 0,50 $ et de 1 $ risquent d'être
dévaluées dans l'esprit de ceux qui sont appelés à
faire ces contributions-là. Ils vont dire: Nous autres, on donne 0,50 $
ou 1 $, on fait des gros sacrifices et, pendant ce temps-là, ils pigent
dans la caisse du gouvernement à fond de train pour promouvoir leurs
idées et créer un climat préparatoire.
M. Lévesque (Taillon): Je ne l'accepte pas. Enfin, le chef
de l'Opposition peut le dire, mais je ne l'accepte pas.
M. Ryan: Je vous le dis en toute fermeté à part
ça.
M. Lévesque (Taillon): D'accord.
M. Ryan: Je vous pose le problème et j'aimerais qu'on
continue de l'examiner.
M. Lévesque (Taillon): On a fait une...
M. Ryan: Si le gouvernement a des choses à nous
communiquer là-dessus, nous serons très intéressés
à les entendre.
M. Lévesque (Taillon): On a organisé une
première campagne strictement pour réagir à ce qui se
passait à Ottawa. On n'a pas essayé de la lier à la
deuxième, on ne pensait qu'à une chose à la fois. Que des
gens, dans leur esprit, comme le disait le député de Jean-Talon,
aient pensé, bien sûr, qu'un jour ou l'autre on s'en allait en
campagne électorale et qu'on ait formé un groupe... Mais on a
formé un autre groupe, à même les fonds du parti cette
fois-là, pour préparer cela, et c'était strictement
compartimenté; on n'était pas pour jouer aves les fonds publics
pendant la campagne électorale. D'autre part, je répète au
chef de l'Opposition ce que j'ai dit tout à l'heure, si on peut arriver
à définir de façon plus précise des règles
publicitaires, on pourrait les discuter et Dieu sait que cela ferait notre
affaire nous autres aussi.
M. Rivest: J'accepte le commentaire du premier ministre, sauf
qu'il y a d'autres indices. Je ne veux pas ouvrir tout le débat. Mais
quand au fil des jours et des semaines, par exemple, on réfère au
document de notre ami Jean-François Cloutier qui avait connu un certain
écho, où les gens... La tenue de ce document, sur le plan de
l'éthique, soulevait au moins une interrogation drôlement
profonde. Je comprends que le premier ministre a désavoué ce
document, mais en dehors même de sa connaissance, je ne mets pas en
cause...
M. Lévesque (Taillon): Ce n'était pas un
effort...
M. Rivest: Ce sont des indices qui soulèvent des
inquiétudes sur le plan des principes qui sont indiscutables. C'est dans
ce sens que le chef de l'Opposition, je pense, l'a fait, de demander au premier
ministre d'indiquer qu'il voulait le faire - on verra l'an prochain ce que cela
aura donné, sa réflexion - de voir à cette
possibilité surtout quand il s'agit de questions politiques.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: Une courte question. Étant donné les
compressions budgétaires qu'on a et tous les services que l'État
donne gratuitement à partir des services de santé et autres -
cela peut s'étendre au ministère des Terres et Fôrets -
est-ce qu'on a l'intention de faire une publicité éducative et
d'augmenter le budget publicitaire relativement aux services que
reçoivent les usagers pour les informer du coût, de la
façon dont ils doivent être utilisés et les sensibiliser au
fait qu'à chaque fois qu'un dollar est dépensé cela sort
de leur poche?
M. Lévesque (Taillon): On pourrait peut-être
demander à nos vis-à-vis de l'Opposition, je trouve que cela
pourrait être une excellente idée. Évidemment, il ne s'agit
pas de jeter du bon argent près du mauvais, mais ce serait une bonne
idée que d'essayer quelque chose dans ce sens-là. Il me semble
que seraient de mise une espèce de modération dans l'emploi des
services et une meilleure perception du coût sans cesse croissant des
services. Je lisais, aujourd'hui, dans la Gazette de Montréal, je pense
que c'est aujourd'hui, un article à propos de "the taxation in
Québec", etc., qui est rempli de choses assez éclairantes. Par
exemple, il y a une sorte de témoignage qui est rendu au Québec.
On dit: Au Québec, à part les gens qui ont un revenu de $23 000
et moins, on paie plus de taxes, plus d'impôts qu'ailleurs, grosso modo.
Pour ceux dont le revenu est de $23 000 et moins on a réussi tant bien
que mal à rétablir une position convenable vis-à-vis de
l'Ontario.
Une voix: ...
M. Lévesque (Taillon): Dans l'ensemble. D'accord, moins
pour les célibataires. Mais il reste qu'il y a aussi ceci, c'est qu'il y
a un témoignage de rendu au Québec mais c'est un
témoignage somptueux, si vous voulez. Dans certains secteurs très
coûteux comme les services de santé, par exemple, et le domaine de
l'éducation, les salaires des
enseignants étant l'essentiel du budget de l'Éducation, le
Québec traite mieux - et c'est vrai aussi pour la fonction publique -cet
ensemble public de services qu'ailleurs au Canada. Par ailleurs, regardons le
poids relatif d'autres facteurs, et je vais donner un exemple, il est
très bien expliqué là. Tu paierais sacrement moins de
taxes si tu t'en vas en Alberta, mais si tu as le malheur d'avoir à
t'acheter une maison ou à te loger et que tu fais le compte de tout,
bien, tu es encore - jusqu'à nouvel ordre, en tout cas, cela peut
changer d'année en année - plus avantagé au Québec
au point de vue du poids général des charges que tu portes comme
contribuable. Il y a toutes sortes de contraintes qui font que c'est devenu
presque impossible maintenant de dire qu'on va mathématiquement comparer
les fiscalités parce que c'est devenu de la chinoiserie invraisemblable
et chacun peut trouver ce qu'il veut. Il y a même un gars qui est
cité à un moment donné dans cet article et je trouve cela
très bon. Il dit: Chaque fois qu'un gars vient me demander ce que je
pense du système de taxation, comme expert, tout ce que je lui demande
c'est: Qu'est-ce que tu veux prouver? Veux-tu prouver qu'il y en a trop ou si
tu veux prouver que c'est raisonnable? Je peux te prouver les deux, si tu veux.
(17 heures)
C'est devenu un fouillis comme cela. On le ressent d'ailleurs souvent
à l'Assemblée nationale. Ce que dit le député de
Bourassa, sur une sorte de vérité des prix, un peu, et de
meilleure perception de ce que cela coûte, il me semble que ce pourrait
être un domaine où on devrait faire un effort, même
publicitaire. Cela me paraît logique. Pour l'instant, je pense qu'il n'y
a pas de programmes précis qui ont été prévus.
M. Ryan: On voulait garder un petit peu de temps pour les
questions politiques. Juste une dernière question de caractère
administratif. Nous avons reçu une liste des personnes qui ont des
contrats du gouvernement pour faire toutes sortes de travaux. Cette liste
comprend peut-être une centaine de noms. Je voudrais demander au premier
ministre s'il y a des études, parmi celles qui sont mentionnées
ici, qui ont été mises à la disposition de l'Opposition et
du grand public, à sa connaissance.
M. Lévesque (Taillon): Oui, sûrement. Vous voyez que
c'est relié ici à l'Exécutif. C'est vrai dans d'autres
ministères. Il y a la commission sur l'accessibilité... la
commission Paré, le Secrétariat au développement culturel,
le Secrétariat au développement économique, le Conseil de
la politique scientifique, etc. Cela déboule jusqu'en bas. À
partir des responsabilités assumées par mes collègues, les
ministres d'État, ou par certains organismes qui relèvent de
l'Exécutif, l'idée d'avoir toujours le plus possible de
contractuels pour des travaux à faire et qui vont se terminer nous
paraît meilleure - c'est un principe - que d'avoir des permanents qu'il
faut recaser après. Cela étant dit, cela dépend des cas,
mais je suppose que la plupart des études peuvent être disponibles
si on les demande, c'est pour cela qu'on en donne la liste. Je ne vois pas
pourquoi...
M. Ryan: Ce que nous avons observé depuis quelques
années, M. le premier ministre, c'est que ce genre d'études en
général est gardé pour l'usage exclusif des ministres et
de leurs proches collaborateurs et que très peu sont mises à la
disposition de l'Opposition et des autres citoyens. J'ai remarqué que la
commission Paré, dans le rapport qu'elle vient de publier, formule un
certain nombre de recommandations à cette fin. C'est un aspect sur
lequel je trouve que certaines recommandations ne vont pas assez loin. Il me
semble que lorsque vous avez reçu des études d'experts-conseils,
par exemple, et que nous sommes appelés à examiner une
décision du gouvernement ou même un projet de loi, un livre blanc
ou un énoncé de politique, on devrait mettre à la
disposition de l'Opposition, à ce moment, le plus grand nombre possible
de pièces documentaires. Jusqu'à maintenant, le gouvernement ne
nous a pas été très utile dans ce sens. Je prends
seulement les principales études qui sont ici, les plus
intéressantes n'ayant pas été mises à notre
disposition. Cela traîne dans les tiroirs des ministres. Il me semble
qu'il n'y a pas de politique de la part du gouvernement de ce
côté. On l'a vu dans des débats récents à la
Chambre. Il y avait toutes sortes d'études qui avaient été
faites. Il faut se les procurer, comme cela existait dans mon temps. Il y a eu
des périodes où il y avait un petit peu plus d'ouverture de ce
côté. Ce qu'on peut se procurer d'intéressant, trop
souvent, il faut se le procurer de manière subreptice. Je ne sais pas si
le gouvernement pourrait d'abord examiner cette liste et nous fournir un
exemplaire de tous les rapports de ces études qu'il peut rendre
disponibles sans difficulté. On ne sait même pas que ces
études ont été faites en général. On
l'apprend en regardant des documents comme ceux-ci. On ne peut pas les demander
quand on n'en connaît même pas l'existence.
M. Lévesque (Taillon): Est-ce que je pourrais simplement
dire un mot...
M. Ryan: Oui.
M. Lévesque (Taillon): ... qui est celui-ci: On
reçoit très peu de demandes. Parfois, il y a des gens qui nous
disent un peu
partout dans le paysage, pas seulement ici au parlement: On est
noyés sous l'avalanche des nouvelles lois, des nouveaux
règlements, de toutes sortes de choses qui expliquent tout ce qui se
passe. Évidemment, on ne se tire pas la tête la première
dans des distributions à n'en plus finir qui coûtent quand
même de l'argent, sauf que si on nous demande des choses - c'est assez
rare qu'on en demande, sauf en Chambre parfois - sur un point ou l'autre,
à part certaines exceptions - il y en a même dans le rapport de la
commission Paré - qui vont de soi, tout peut être disponible. Je
suis très heureux de voir que le chef de l'Opposition trouve maintenant
que le rapport de la commission Paré ne va pas assez loin, parce qu'il y
a quelques semaines, pendant la campagne électorale, comme ancien
journaliste, son opinion semblait assez tiède sur l'opportunité
de ce genre d'ouverture faite par une loi.
M. Ryan: Je garde bien des réserves de ce
côté, M. le premier ministre. Que vous disiez: Oui, ceci n'est pas
permis, ou: Non, cela n'est pas possible, vous savez comme moi que la zone
d'amélioration dans ce domaine va être quand même assez
limitée. Dans le rapport de la commission Paré -malgré les
choses positives que j'ai dites à ce sujet - il n'y a pas de
recommandation qui soit de nature à faire fondre toutes les
réserves ou les doutes que j'ai pu exprimer à ce sujet.
M. Lévesque (Taillon): Toutes les réserves...
M. Ryan: Je vous demande si, dans cette liste, vous pouviez nous
communiquer ce qui est susceptible d'être mis à notre disposition
immédiatement, sans réserve, cela ferait bien notre affaire.
Deuxièmement -c'est une recommandation que je formule à
l'intention du gouvernement - si l'habitude pouvait se créer, lorsque
des rapports d'experts-conseils sont soumis à un ministre dans le
cheminement de celui-ci vers une décision, de mettre ces rapports
à la disposition de l'Opposition plus tôt et surtout au moment
où on a des attitudes à exprimer, je pense que cela
améliorerait beaucoup les choses.
M. Lévesque (Taillon): Vous vous souvenez peut-être
que la commission Paré, enfin la commission information et
liberté fait une distinction, si j'ai bonne mémoire, entre des
analyses, si vous voulez, des commentaires sur tel et tel sujets qui
mènent à une décision et des recommandations. On a eu tout
ce pétrin, par exemple, avec votre collègue, le
député de Nelligan...
M. Ryan: Stablex.
M. Lévesque (Taillon): ... et le ministre de
l'Environnement à propos de rapports qui étaient des rapports
intérimaires, des analyses intérimaires dans lesquelles il y
avait des recommandations qui n'ont pas été retenues. Cela arrive
tout le temps. En faire un gros plat comme cela, cela ne me paraît pas
faire avancer les choses tellement, mais enfin, chacun son opinion, on est des
deux côtés de la Chambre. Je pense qu'on va analyser - tout le
monde va le faire - les recommandations de la commission Paré à
ce point de vue et on verra. Il faut toujours qu'il y ait des restrictions. Par
exemple, une qui va de soi, c'est que, pendant un certain nombre
d'années, des choses qui émanent du trésor doivent quand
même demeurer confidentielles. Sinon, ce sont les fonctionnaires du
trésor qui ne pourront littéralement plus faire leur travail
à tête reposée. Je pense que ceux qui ont connu
l'administration publique comprennent cela.
Les décisions de l'exécutif, par définition, les
décisions du Conseil des ministres, avec tout ce que cela entraîne
forcément de "give and take", comme on dit en anglais, de discussions,
tout cela est consigné dans des rapports et il faut que cela demeure
là où c'est, sauf quand, par exemple, un ancien premier ministre
- M. Bourassa l'a fait quelques fois - demande de vérifier certaines
choses, parce qu'il est mis au bâton, si vous voulez, à propos de
telle ou telle décision qui avait été prise. Par
définition, il a le droit d'aller consulter, mais il faut que, pendant
un certain nombre d'années, cela reste comme cela. Certaines
restrictions comme celles-là sont inévitables, mais il me semble
que cela ouvre la porte très large. Cela ne sera jamais parfait, le chef
de l'Opposition a raison, mais cela ouvre la porte très large à
une série de paramètres auxquels on pourrait se fier une fois que
l'Assemblée nationale aura tout mâché cela et que la loi
sera adoptée.
Pour ce qui est des choses évoquées ici...
M. Ryan: Mais, selon cette distinction que vous évoquez,
M. le premier ministre, toutes les études que vous avez refusé de
rendre publiques sur le fonctionnement du fédéralisme canadien et
son impact pour le Québec, le pouvoir exécutif pourrait
décider que ce sont des analyses, que ce ne sont pas des études
spécialisées. On dirait: Ce sont des analyses et, en vertu des
recommandations du rapport Paré, on pourrait décider de les
garder confidentielles. Cela ne changerait pas grand-chose.
M. Lévesque (Taillon): Si on suit les recommandations de
la commission Paré dans ce cas-là, il y aurait une commission
quand même où le gouvernement serait obligé de faire valoir
son point de vue.
M. Ryan: Oui, après qu'on aura pris connaissance de
l'existence des documents.
M. Lévesque (Taillon): Je reviens à ce que vous
disiez à propos des études qui sont là.
M. Ryan: Oui, très bien.
M. Lévesque (Taillon): II y en a qui ont été
publiées, parce qu'il y en a qui ont été commandées
justement pour être publiées. Il y en a qui ne l'ont pas
été, mais elles devraient dans l'ensemble toutes être
disponibles, si elles sont encore valables. Moi, j'aimerais mieux que
l'Opposition nous dise lesquelles l'intéressent, plutôt que de
commencer à dire: On vous envoie deux tonnes de papier. En principe,
elles devraient toutes être disponibles.
M. Rivest: M. le Président, sur le même sujet,
participant à la commission avec deux éminents ex-journalistes,
je remarque que, sur la liste des contractuels -cela m'étonne - il y a
un certain nombre de journalistes qui acceptent des mandats, des journalistes
qui sont appelés, de par leurs fonctions, à commenter
l'actualité. Par exemple, ils peuvent participer à des colloques
ou à des choses comme cela. J'imagine qu'ils sont libres de dire ce
qu'ils veulent, mais, quand je vois, par exemple, un journaliste, qui est
très connu, qui fait certainement un bon travail comme journaliste, qui
participe à l'organisation d'un sommet économique, je
m'inquiète un peu de cette pratique, parce que je vois mal comment ce
même journaliste va pouvoir commenter un événement
politique qui est drôlement important, soit le sommet économique
de Montréal. Sans en faire un plat, j'inviterais le premier ministre
à peut-être essayer, dans toute la mesure du possible,
d'éviter ce genre de choses.
M. Lévesque (Taillon): Écoutez, je ne peux pas
m'engager, pour la bonne et simple raison que je n'ai pas remarqué que
cela changeait tellement le comportement de ceux qui sont à
l'éditorial ou au reportage. Ils disent ce qu'ils ont à dire.
D'un autre côté, c'est un des bassins de compétence
rédactionnelle; il n'y en a pas tellement de disponibles. Il est
arrivé depuis quelques mois que des grèves ont duré
pendant longtemps. Ces gens étant en disponibilité, il y en a un
grand nombre d'entre eux que vous allez voir, étant en
disponibilité, donner un coup de main - enfin j'ai vu des gens de
Radio-Canada, etc. - cela ne les empêchera pas de faire leur reportage
convenablement. Cela nous paraissait un trou, une cheville; tu as besoin
d'avoir telle et telle collaboration écrite et ces gens-là sont
habitués à le faire et terriblement disponibles à ces
moments-là.
Donc je ne peux pas prendre d'engagement là-dessus.
M. Rivest: Non!
M. Lévesque (Taillon): Non. Parce qu'il y a...
M. Rivest: Quand cela émarge aux fonds publics, quand ce
sont des journalistes qui...
M. Lévesque (Taillon): C'est depuis toujours. Ce n'est pas
le député de Jean-Talon qui va me raconter des choses
là-dessus, j'ai vu les dossiers des gouvernements
précédents...
M. Rivest: Oui, donnez moi un cas, citez-moi un cas.
M. Lévesque (Taillon): Je vais vous en apporter une
platée.
M. Rivest: Vous vous rappelez cette formule, citez moi un
cas.
Le Président (M. Jolivet): Le député de
Châteauguay.
M. Dussault: M. le Président. Cela sera un peu
dépassé ce que je vais dire, je m'excuse, parce que j'aurais
voulu intervenir tout à l'heure au moment où il était
question de publicité gouvernementale. C'est au sujet des propos que
tenait le chef de l'Opposition relativement à la publicité
gouvernementale qui aurait, selon ses dires, influencé le vote
populaire. Je trouve que le chef de l'Opposition est un peu mal placé
pour venir nous parler ce langage, lui qui a tenté de se faire
élire avec de l'arqent olympique, cet argent qui est venu par coups de
50 000 $ et 100 000 $ engraisser la caisse électorale du Parti
libéral et c'est avec cet argent qu'ils se sont fait élire. Je
pense qu'on est mal placé pour parler de transparence à un parti
au pouvoir quand on a encore cet arqent. Il paraît qu'il en reste 750 000
$ dans la caisse électorale du Parti libéral? C'est donc avec cet
argent-là, dans les prochains jours, les prochaines semaines, qu'ils
vont tenter de faire accroire à la population que ce sont des gens purs
et qu'ils peuvent, dorénavant, former le parti au pouvoir.
M. Ryan: M. le Président, question de privilège, M.
le Président, question de règlement.
M. Dussault: C'est important, M. le Président, gu'on me
laisse terminer, il n'y a pas de question de privilège, je pense, en
commission parlementaire, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de question de
privilège en commission parlementaire, il n'y a que des questions de
règlement. Si c'est une question de règlement, je suis prêt
à l'entendre.
M. Ryan: Je pense que ce sujet-là est complètement
en dehors de la question qu'on examine ici et je rappellerai au
député que ce problème dont il parle a fait l'objet du
travail d'une commission d'enquête. S'il voulait se reporter aux
résultats de la commission d'enquête et aux recommandations de
cette commission, il serait bien plus proche de la vérité qu'avec
les insinuations complètement fausses qu'il rapporte. On ne sait
même pas, ces contributions dont il parle quand il affirme que cela
provient des Jeux olympiques, il ne sait même pas, ce n'est même
pas démontré dans le rapport et...
M. Lévesque (Taillon): Je suis obligé de dire au
chef de l'Opposition que j'ai lu le rapport et que les recommandations, c'est
une chose; on doit respecter une commission même si on a l'occasion
quelquefois de la critiquer, mais ses recommandations ne correspondent pas au
dossier tel qu'il apparaît dans l'ensemble du rapport, y compris celui
sur les relations très réelles, c'était avant le chef de
l'Opposition...
M. Rivest: Allez-vous écrire un livre vous aussi sur le
rapport Malouf?
M. Lévesque (Taillon): ...mais très réelles
entre le bureau de l'ancien premier ministre, certains hauts fonctionnaires et
tout ce sparage...
M. Ryan: Mais qui est-ce qui nous dit que ces sommes-là
n'ont pas été dépensées à ce
moment-là? C'est une discussion qui est complètement
déphasée.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, le
député de Châteauguay, vous avez la parole.
M. Dussault: M. le Président, je ne voulais qu'inviter le
chef de l'Opposition à lire mon discours de jeudi dernier à
l'Assemblée nationale où je parlais de la transparence, de
l'obligation de la transparence, pour l'Opposition autant que le pouvoir, de
façon que ces gens-là puissent être crédibles quand
ils nous parleront dorénavant de ces choses-là. J'ai
demandé, lors de mon discours, que le Parti libéral remette au
trésor public les 700 000 $ devenus 1 500 000 $, maintenant, avec les
taux d'intérêt composés. Je pense qu'il est important que
la transparence soit faite de ce côté-là. Le jour où
véritablement on aura une preuve tangible de franchise,
d'honnêteté de l'Opposition de ce côté-là, il
me semble qu'on pourra écouter avec beaucoup de foi les remarques du
chef de l'Opposition sur la publicité gouvernementale et les effets que
cela peut avoir sur le vote des citoyens. Si je pouvais faire une motion, M. le
Président, aujourd'hui ici...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous savez très bien que vous ne pouvez pas le faire cependant.
M. Dussault: ...je le ferais. Que l'Opposition officielle remette
au trésor public les 700 000 $ olympiques qu'elle a dans sa caisse
électorale. Merci M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.
La question constitutionnelle
M. Ryan: Une fois fini cet exercice de diversion qui n'a rien
à voir avec le sujet d'aujourd'hui, je voudrais en venir à un
sujet plus large, le rôle du premier ministre et de ses collaborateurs
dans le développement de la question constitutionnelle. J'ai
remarqué que, l'an dernier à deux reprises, le gouvernement a
trouvé très important de convoquer la commission parlementaire de
la présidence du conseil et de la constitution pour la saisir de
problèmes qui avaient surgi. (17 h 15)
D'abord, au mois d'août 1980, on a convoqué la commission
pour l'inviter à discuter des négociations constitutionnelles qui
étaient en cours à ce moment-là, surtout pour faire parler
les députés de l'Opposition, les représentants du
gouvernement livrant très peu de choses quant aux intentions du
gouvernement sur les positions qu'il s'apprêtait à
défendre. On a essayé par tous les moyens de savoir quelle
était la position du gouvernement sur tel et tel point. C'était
extrêmement difficile.
Ensuite, on nous a convoqués de nouveau, si mes souvenirs sont
bons, au mois de décembre et au mois de janvier. Mais depuis les
élections le premier ministre a signé, avec les premiers
ministres de sept autres provinces, si mes souvenirs sont exacts, un texte dans
lequel on propose une formule d'amendement constitutionnel, entre autres, qui
est extrêmement complexe - dont on va dire un petit mot tantôt - et
engagé un processus qui est important. Et là, on s'apprête
à engager le Québec dans une nouvelle série de
démarches faisant suite au jugement qu'on attend de la Cour
suprême.
Cette fois-ci, le premier ministre a apposé sa signature à
une formule d'amendement constitutionnel qui lie le Québec, vu que le
premier ministre l'a signée, et il n'y a jamais eu de rapport
à
l'Assemblée nationale. Il n'y a jamais eu de convocation de la
commission parlementaire pour examiner cette formule.
Je voudrais demander au premier ministre s'il entend avant longtemps
soumettre cette formule à l'examen critique d'une commission
parlementaire.
M. Lévesque (Taillon): Très rapidement, je voudrais
revenir sur le passé un petit peu, et, sans m'inscrire en faux,
j'aimerais compléter un peu ce que vient de dire le chef de l'Opposition
surtout à propos d'août 1980. Je me souviens qu'en plein
été, à la demande de l'Opposition - c'était une
demande insistante et qui était logique - de mettre la commission, en
l'occurrence, au courant de comment cela se déroulait, de ce qu'on
pouvait prévoir, on était dans une position un peu
compliquée, c'est le moins qu'on puisse dire, parce qu'on s'en allait
à cette fameuse semaine du mois de septembre 1980.
Contrairement à ce que dit le chef de l'Opposition - on pourra
référer au journal des Débats ou au rapport de la
commission - le ministre des Affaires intergouvernementales a ouvert aussi
largement qu'il le pouvait la rencontre par un préambule qui a
duré une bonne partie de la première séance, en disant:
Voici où on en est, voici d'où cela vient, voici comment nous on
voit cela, voici comment on essaie de se préparer. Et tout était
clairement exposé.
Ensuite, il s'agissait pour l'Opposition de dire - il y a eu pas mal de
discussions de fond là-dessus - Oui, on est d'accord ou pas d'accord,
mais, enfin, d'être mise au courant. Cela a été fait.
Pour ce qui est de l'accord dont parle le chef de l'Opposition, l'accord
que j'ai été appelé à discuter et ensuite à
signer avec mes collègues des autres provinces deux jours après
les élections, je ferais remarquer - et je pense qu'on pourrait
probablement se mettre d'accord là-dessus - que pour maintenir ce qui
nous apparaît essentiel, le front commun des huit provinces, il a fallu
mettre de l'eau dans notre vin, admettons-le, par rapport à des
positions traditionnelles. Je pense que l'Opposition, comme nous, d'ailleurs,
avait commencé à faire cela depuis le coup de force
fédéral, en disant non plus que cela doit venir comme
couronnement d'une réforme constitutionnelle, mais que peut-être,
au moins, si quelque chose de convenable était amorcé...
Et finalement, on s'en est tenu...
M. Rivest: ... historique, on se faisait rabâcher cela, et
vous la brisez quelque temps après.
M. Lévesque (Taillon): Écoutez, lorsque le
péril est dans la demeure, on essaie de réduire les
dégâts. Je considère, en conscience, qu'on doit faire cela.
Maintenant, cet accord, qui a été signé deux jours
après les élections, est conditionnel d'abord à
l'adhésion également de deux autres provinces et du
fédéral, et ce n'est pas tout à fait à l'horizon
pour l'instant. Deuxièmement, il est bien spécifié
qu'avant qu'il ne puisse s'appliquer, éventuellement, le cas
échéant, il serait soumis à la ratification de
l'Assemblée nationale. Autrement dit, il y aura un débat complet,
le cas échéant, sur le contenu de cet accord.
Je sais qu'en ce qui concerne la formule d'amendement, l'Opposition
garde ses préférences pour une autre formule. C'est une question
de juqement. Ce sera étudié comme le reste à ce
moment-là. Pour l'instant, il nous paraît que dans le sens d'un
possible statut particulier, la formule de retrait avec pleine compensation -
il a fallu discuter longuement avec nos collègues des autres provinces,
certains d'entre eux en tout cas, pour faire accepter cela - nous permettrait
d'aller dans cette direction le cas échéant. Dieu sait qu'on n'en
est pas là.
M. Rivest: Juste une question. Pendant la période des
questions, j'ai posé une ou deux questions au premier ministre à
ce sujet. J'en avais une troisième qui était la suite, quand
j'évoquais l'article 3 de cette entente. Lorsque le premier ministre
parlait, enfin, de renégocier le fédéralisme, vous nous
avez dit que c'était pour défendre les droits des provinces. Je
vous ai indiqué dans ma question que c'était quand même
plus que cela parce que c'est une renégociation; donc, on refera les
institutions, etc. Il n'y a pas de limites.
L'autre question que j'avais voulu vous poser, c'était: À
partir du moment où vous acceptez - je comprends toutes les conditions,
le caractère conditionnel de l'entente - sur le plan des principes,
comme premier ministre du Québec, de vous inscrire dans cette
démarche, imaginez - vous la situation dans laquelle vous vous
retrouveriez comme chef du Parti québécois s'il fallait que cela
marche? S'il fallait que cela marche, le renouvellement de la
fédération canadienne dans laquelle vous vous inscrivez, est-ce
que vous signeriez une entente? Parce que, quand vous signez le document, en
acceptant de renéqocier le renouvellement de la fédération
canadienne, vous ne prenez pas juste une démarche; vous acceptez la
destination ultime qui est celle du renouvellement de la
fédération canadienne.
Je sais que le premier ministre va, dans sa réponse sans doute,
au fil de ses phrases, changer de chapeau, mais je voudrais que vous restiez
comme premier ministre du Québec. Et c'est cela, au fond, que vous
êtes. Je comprends le contexte, je comprends le caractère
constitutionnel, mais
vos partenaires, M. Lougheed, enfin tous les autres, eux autres, ils
font plus qu'une alliance circonstancielle entre eux. Ils ne sont pas d'accord
avec la démarche du gouvernement fédéral, mais dans leur
esprit -je ne pense pas les mal interpréter - il y a un endossement qui
n'est nullement mis en cause du principe fédéral. Dans la
situation un peu ambiguë - c'est le moins qu'on puisse dire - où se
trouve le premier ministre, à ce titre, la signature René
Lévesque a certainement moins de valeur ou, enfin, on ne peut pas
l'interpréter avec le même contenu politique au titre de
l'adhésion pleine et entière au régime
fédéral canadien. C'est cela l'ambiguïté profonde,
finalement, de votre situation.
M. Lévesque (Taillon): Mais oui. On a tous nos
ambiguïtés qui nous sont imposées à l'occasion, puis
je pense que l'Opposition - je répète ce qu'on a dit en Chambre -
devrait peut-être faire un gros effort pour sortir de certaines de ses
propres ambiguïtés.
M. Rivest: On n'est pas au gouvernement nous autres; on n'est pas
dangereux.
M. Lévesque (Taillon): Non, mais il reste quand même
que vous êtes l'Opposition officielle; vous représentez 46%, ce
qui est quand même important, je pense, des votes des citoyens et ils ont
le droit de savoir un peu clairement où vous logez. Nous, on essaie de
le dire de notre mieux et on croit que notre position est respectable. Elle a
été respectée de 1976 jusqu'en 1981 sans aucune cachette
dans des négociations très ardues. Je me souviens de Regina dont
je parlais cet après-midi en Chambre où il a fallu, quand
même, discuter avant de faire introduire dans le communiqué d'une
conférence des premiers ministres en 1978, je pense - en tout cas,
à Regina, à celle qui a eu lieu là -un nouveau partage des
pouvoirs qui était la clef même, et qui demeure la clef de tout
renouvellement de la structure constitutionnelle. II a fallu discuter durement
avec nos collègues pour dire: Oui, mais n'oubliez pas qu'il faut quand
même quelque part un chapeau qui dise, parce qu'autrement ce serait de
l'hypocrisie, que nous, nous croyons qu'une meilleure voie est celle que nous
proposons pour l'avenir. Mais, dans le contexte actuel, il est évident
que le meilleur fédéralisme possible, la meilleure constitution
possible, tout le monde va être pour.
M. Rivest: Vous signeriez?
M. Lévesque (Taillon): Je signerais pour le temps
présent, ce qui ne nous empêcherait pas du tout de continuer
à dire qu'il y a une meilleure formule. Maintenant, la question du
député de Jean-Talon, entre nous, le moins que je puisse dire,
c'est qu'elle est hautement hypothétique, parce que ce qui arrive, c'est
ceci: Vous avez à Ottawa un premier ministre fédéral dont
les visées ont toujours été exactement à l'inverse
et continuent d'être encore plus exactement à l'inverse que jamais
de tout ce qu'on peut considérer comme les intérêts
fondamentaux du Québec.
Alors, partant de là, il faut avec bonne foi, avec bonne
volonté, comme on l'a fait en 1979-1980, reprendre, le cas
échéant, à supposer que, la négociation sur la
constitution. Il y a des choses aussi importantes que la
télévision, la radio, tout le domaine des communications, les
ressources, l'identité même du Québec, son droit de
déterminer son propre avenir, qui ont été laissées
à la table. Si jamais on retourne à la table, on reprendra la
discussion pour voir si cela mène quelque part. Je ne fais pas la
politique du pire. Je ne demande pas qu'on manque notre coup, parce que ce
serait mieux si on avait, pendant qu'il dure, un fédéralisme
respirable. Je dois avouer très honnêtement au
député de Jean-Talon que sa question, pour l'instant,
hélas, ne me gêne pas beaucoup parce que cela reste terriblement
hypothétique tant qu'on aura le régime qu'on a à
Ottawa.
M. Ryan: Je pense à ça. Quand est arrivé le
projet fédéral, vous avez fait tout un baratin sur une
série de thèmes en particulier, par exemple, vous avez dit: Nous
autres, la première chose que nous allons demander dans une
réforme constitutionnelle ce sera l'affirmation du droit à
l'autodétermination pour le Québec. Là vous arrivez avec
une formule d'amendement qui risque d'engager l'avenir pour longtemps si elle
était acceptée. Comme vous avez mis votre signature au bas,
ça doit être signe que vous la prenez quand même un petit
peu au sérieux. II n'est pas question de ça du tout. Cela veut
dire que, si on s'en tenait à la lettre de cette formule-là, il
pourrait très bien arriver qu'on vous dise: Rien, là, vous
voudriez faire la souveraineté-association, mais vous avez
accepté une formule en vertu de laquelle ce n'est pas possible;
ça demanderait l'adhésion du Parlement fédéral puis
de celui-ci ou de celui-là pour que ce soit possible. Je pense que c'est
une des implications de la formule que vous avez acceptée jusqu'à
maintenant. Il y en a beaucoup d'autres. Si, par exemple, une majorité
de provinces et le Parlement fédéral décidaient de
modifier la péréquation, d'éliminer la
péréquation de la constitution, il n'y a rien qui garantit qu'on
pourrait la conserver avec cette formule que vous avez. Votre "opting out"
à ce moment-là ne vaudrait pas cher parce que vous vous
retireriez d'une subvention d'à peu près
2 000 000 000 $ par année pour le Québec; ça n'y
est pas. Si vous vouliez obtenir, par exemple, vu que l'Ontario ne veut pas
embarquer dans l'article 133, que le Québec soit soustrait aux
obliqations qui en découlent, il faudrait que vous ayez l'assentiment du
Parlement fédéral, de par votre propre signature. C'est une chose
que vous avez acceptée en acceptant cette formule-là. Le
lieutenant-gouverneur - on parle beaucoup de son statut - tout le monde se rend
compte qu'à la longue il faudra un jour qu'on ait une institution
à ce niveau qui soit peut-être plus typique de ce qu'est notre
peuple. Là, vous soumettez ça au veto de
l'Île-du-Prince-Édouard; c'est soumis d'après votre formule
au veto de l'île-du-Prince-Édouard. Je ne veux pas minimiser
l'importance politique de l'Île-du-Prince-Édouard, mais c'est pour
vous montrer qu'autant c'est facile de faire la critique d'une formule mise de
l'avant par un autre, autant c'est difficile d'arriver soi-même à
une formule qui ne donne pas naissance à d'autres objections non moins
sérieuses.
Toute modification dans la composition de la Cour suprême qui
viserait à favoriser une meilleure représentation du
Québec au sein du plus haut tribunal du pays serait sujette, si j'ai
bien lu la formule, au veto de l'île-du-Prince-Édouard. Je
pourrais continuer et c'est pour ca que je vous disais tantôt qu'il
serait excellent que le plus tôt possible cette formule soit
examinée par la commission parlementaire de la présidence du
conseil et de la constitution. Je pense qu'il y aurait des choses utiles qui
pourraient être dites dans le meilleur intérêt du
Québec. Je dis ceci en me rappelant un événement en
particulier. Un jour il est arrivé qu'il y avait eu une entente entre
des provinces à Montréal, qui n'a pas semblé retenir
beaucoup l'attention du gouvernement fédéral à ce
moment-là, et par la suite on s'est servi de passages de cette entente
pour dire: Comme vous avez dit oui, on a le droit de le faire à votre
place. J'admets que moi-même je n'accepte pas ce raisonnement du
tout.
M. Lévesque (Taillon): D'autant plus qu'ils faussaient les
faits.
M. Ryan: Pardon? Oui, à part ça, c'est très
bien. Mais je vous dis que je ne voudrais pas que ça passe au dossier
historique du Québec que nous avons tous accepté cette
formule-là les yeux fermés parce que le premier ministre du
Québec avait apposé sa signature dans l'euphorie d'une
période qui suivait immédiatement l'élection. Je voudrais
qu'on enregistre que l'Opposition a exprimé très clairement son
désir de pouvoir l'examiner publiquement avec le gouvernement dans les
meilleurs délais.
M. Lévesque (Taillon): Je vous ferai remarquer juste une
chose. Je suis d'accord avec le chef de l'Opposition, non pas sur tout ce qu'il
dit à propos de la formule mais sur la perspective dans laquelle il se
situe pour la suite. Je répète que cet accord est conditionnel
à ce que d'abord et avant tout le premier ministre fédéral
retire son projet. À partir de là, "it is a new ball game", comme
ils disent en anglais. Il est évident que, s'il ne retire pas son projet
et si on continue sur la lancée, ça ne s'applique pas. Le plus
vite on verra clair dans les intentions fédérales après
l'opinion de la Cour suprême, le plus vite il sera soumis à
l'Assemblée nationale. Cela peut partir d'une commission parlementaire,
mais il faut que ce soit ratifié, le cas échéant, par
l'Assemblée nationale. C'est écrit textuellement dans l'accord
qui a été donné. Je n'entrerai pas dans le détail
de la formule parce que je sais que le chef de l'Opposition en
préfère une autre, l'Opposition en pousse une autre. On a
retardé ça jusqu'après les élections, on aurait pu
le faire bien longtemps avant mais, d'une certaine façon le chef de
l'Opposition va comprendre. J'ai expliqué à mes collègues
des autres provinces que je me voyais mal, au moment où on entrait en
période électorale, ne sachant pas qui serait le prochain
gouvernement, signer quoi que ce soit. Cela a été de peine et de
misère qu'on les a convaincus d'attendre parce qu'il y avait une sorte
de panique qui s'était développée par rapport au 1er
juillet et à l'avalanche possible des événements. Alors,
on a retardé, on a signé mais sous conditions, et c'est moi qui
l'ai exigé, d'ailleurs, dans les discussions qu'on a eues, que ce soit
d'abord, évidemment à condition que le fédéral
abandonne son projet et, deuxièmement, que ce soit ratifié par
l'Assemblée nationale. Autrement dit que ma signature soit
discutée à l'Assemblée nationale. Je ne peux pas engager
l'Assemblée nationale, qui est souveraine, dans ces matières. (17
h 30)
II me semble que ca devrait rassurer le chef de l'Opposition sur les
éventualités.
M. Ryan: Pas complètement, je vais vous dire pourquoi.
L'expérience passée nous a enseigné que quand on arrive
parfois au stade de la présentation d'un texte au Parlement, il est trop
tard, les gouvernements ont été tellement engagés...
M. Lévesque (Taillon): À la commission, si on
veut...
M. Ryan: La commission, c'est très bien, et dans les
meilleurs délais. Je pense que ça permettrait de faire du
tamisage avant qu'il ne soit trop tard.
M. Lévesque (Taillon): Pas avant que Trudeau ait
décidé si oui ou non...
M. Ryan: À Victoria, vous vous souvenez de ce qui est
arrivé, et, sans doute, le député de Jean-Talon va s'en
rappeler mieux que nous, parce que nous étions... Moi, j'ai toujours
été dans l'opposition toute ma vie, ça ne chanqe rien...
Mais à Victoria on discutait, j'allais même dire qu'on manipulait
des textes depuis des mois et des mois, et personne dans le grand public...
M. Lévesque (Taillon): C'est toujours compliqué,
ces affaires-là.
M. Ryan: ...n'était au courant. Monsieur avait
donné son assentiment ici, monsieur là, monsieur là, et
quand est arrivé le revirement d'opinion de dernière heure, les
autres ont eu l'impression qu'on les laissait tomber parce que la parole
semblait avoir été donnée à plusieurs reprises.
C'est ce que je voudrais éviter. Il faut que la réaction vienne
assez vite, pour que vous puissiez dire, au nom du Québec: Notre affaire
a suscité des objections auxquelles je n'avais peut-être pas
pensé et, à ce moment-là, ce serait peut-être bon...
Je pense que sur cette question, M. le premier ministre, malgré tous les
quolibets qu'on peut se lancer de temps à autre, nous avons tous
à coeur l'intérêt du Québec d'abord. Chacun essaie
de le servir à sa manière, mais ces questions...
M. Lévesque (Taillon): Non, il faut regarder ça au
mérite.
M. Ryan: ...on est capable de les regarder au mérite, dans
le meilleur intérêt du Québec.
M. Lévesque (Taillon): D'accord. Mais vous avez les
garanties...
Le Président (M. Jolivet): Je dois comprendre que le
programme 1 serait adopté? Que le programme 2 serait adopté? Non,
excusez-moi, le programme 2 va revenir à la réforme
électorale. Le programme 3. Ce seraient les programmes 1 et 3 qui
seraient adoptés.
M. Rivest: On se trouve à adopter les crédits du
lieutenant-gouverneur.
Le Président (M. Jolivet): C'est ça, au programme
1.
M. Lévesque (Taillon): Oui, si vous avez des questions,
allez-y, mais c'est à peine...
M. Rivest: II est sujet à la formule d'amendement.
M. Lévesque (Taillon): Je retiens ce que le chef de
l'Opposition a dit, mais il n'a pas fait de motion - on ne peut pas faire de
motion - pour abolir cette partie des crédits.
Le Président (M. Jolivet): Merci à vous tous. Nous
pouvons passer au programme 7, Promotion du droit et du statut de la femme.
Promotion du droit et du statut de la femme
M. Lévesque (Taillon): C'est Mme Marois.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Lévesque (Taillon): Merci beaucoup, merci, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez commencer, Mme la
ministre, vous avez la parole.
Remarques préliminaires Mme Pauline
Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je vais me permettre,
au départ, de présenter les personnes qui m'accompagnent
aujourd'hui. À ma gauche, Mme Christine Tourigny, qui est la
secrétaire générale associée à la condition
féminine et, à ma droite, Mme Claire Bonenfant, qui est la
présidente du Conseil du statut de la femme. Comme, j'ai compris qu'on
avait très peu de temps négocié, malheureusement, pour le
dossier de la condition féminine, je vais prendre peu de temps pour
présenter brièvement les principales réalisations, tant du
secrétariat que du Conseil du statut de la femme. Je pourrai, par la
suite, répondre aux questions de l'Opposition et aux questions des
autres membres de la commission.
Je pense que le dossier de la condition féminine commence
effectivement à être intégré aux rouages
administratifs, malgré le fait qu'il reste encore
énormément à faire. Je pense qu'on ne peut pas nier,
d'autre part, que la mise en place du secrétariat et son articulation
avec les répondantes des différents ministères commencent,
à notre avis, à porter fruit. La cohérence des politiques
et des activités gouvernementales est beaucoup mieux assurée que
par le passé. On s'en est rendu compte tout au cours de l'année.
Si le document et la politique d'ensemble Pour les Québécoises:
égalité et indépendance demeure encore à la source
des grandes réalisations de l'année, la connaissance interne des
dossiers et la préoccupation de plus en plus présente de
répondre aux besoins de 52%, je le dis
encore, de la population amènent les ministères à
s'engager dans de nouvelles avenues. À ce titre et sous le signe de la
consolidation, je sens, de la part des collègues ministres responsables
au plan sectoriel de l'ensemble du dossier de la condition féminine,
parce qu'il faut bien se rendre compte que c'est dans chacun des
ministères sectoriels que s'assume la réalisation de la politique
d'ensemble, un effort constant et très présent à ce
niveau.
Cette année, on a donc vu le mûrissement d'une des mesures
les plus importantes pour l'égalité et l'indépendance des
femmes. Cette mesure, la plus importante, a été évidemment
assumée par le ministère de la Justice. Je parle ici du Code
civil qui porte réforme du droit de la famille. Il demeure, cependant,
que l'envergure de cette réalisation ne vient pas atténuer,
d'autre part, les autres réalisations qu'on a faites relativement
à ce dossier. Je vais me permettre d'en souligner quelques-unes.
Cependant, on retrouvera tout ce dont je vais parler ici dans un bilan qui a
déjà été publié par le secrétariat en
mars dernier et qui fait état des actions gouvernementales en
matière de condition féminine pour 1980-1981. Ce document est
beaucoup plus exhaustif que ce que je vais apporter maintenant sur les
réalisations. J'en ai retiré un certain nombre qui me
paraissaient importantes, entre autres, l'adoption de la loi 83 qui vient
favoriser la perception des pensions alimentaires, qui a été mise
en vigueur le 1er janvier 1981. On se rend compte, dans l'ensemble de ses
composantes, parce que certaines de ses composantes avaient déjà
été adoptées préalablement, qu'il y a une
très grande utilisation du service. En mai 1981, 4407 personnes
s'étaient prévalues du service.
Je souligne, d'autre part, la tenue de colloques régionaux sur
l'humanisation des soins à la naissance, sous le titre Accoucher ou se
faire accoucher; les suites données au colloque sur la violence, dont,
entre autres, la préparation d'un protocole médical pour les
victimes de violence, ainsi que le programme de formation des policiers
dispensé à Nicolet, programme qui a été
modifié en vue d'inclure l'aspect violence faite aux femmes.
Il y a eu, bien sûr - quelque chose dont on est assez fiers -
l'implantation de la politique d'égalité en emploi pour les
femmes dans la fonction publique qui est conforme à
l'échéancier. La preuve qu'on peut bien travailler quand on croit
à ce qu'on fait. Les ministères et organismes se sont
donné un plan d'action - certains sont, évidemment, plus
progressistes que d'autres - qui démontre la volonté
gouvernementale d'améliorer la situation.
Actuellement, on a 75 agents ministériels qui ont
été chargés de ce dossier et qui sont nommés. Les
statistiques de cette année - on pourra en parler plus tard -montrent
une nouvelle tendance puisque les femmes augmentent en nombre, alors que toute
la fonction publique vit une compression des effectifs depuis
déjà trois ans. On le sait assez maintenant puisqu'on parle de
compressions budgétaires. Malgré l'effort consenti, on reste
cependant bien conscient qu'on ne peut pas changer le portrait de toute une
fonction publique en l'espace d'un an. Je pense que c'est sur un certain nombre
d'années qu'on pourra y arriver.
Une autre mesure que je voudrais souligner aussi, c'est la mise sur pied
de Logirente, qui est un programme d'allocation-logement pour personnes
âgées. Ainsi, un montant égal à 75% de
l'écart entre le loyer effectivement payé et 30% du revenu de la
personne y est versé. On sait tous et toutes que les femmes
représentent la majeure partie des personnes âgées.
Un dernier élément que je voudrais souliqner et qui est
une collaboration extrêmement intéressante entre le Conseil du
statut de la femme et le secrétariat d'État, c'est la publication
d'un répertoire des programmes de subventions du gouvernement du
Québec qui fait état de l'ensemble des programmes de subventions
susceptibles d'intéresser les groupes de femmes à
l'intérieur du Québec.
Je pense donc à ce titre que l'année en cours a permis
à des ministères de constater combien était, d'autre part,
superficielle la connaissance de la condition de vie des femmes dans certains
secteurs d'activités. Des statistiques et des études font
défaut, et de façon très importante. Plusieurs
ministères ont donc senti la nécessité de pousser un peu
plus loin la connaissance des besoins et des conditions de vie des femmes et
ont entrepris des études, des analyses, des recherches. Là
encore, je souliqne un certain nombre d'entre elles et ce n'est pas
exhaustif.
En santé mentale, entre autres, une étude sur
l'efficacité du traitement de groupe pour les femmes est entreprise. Il
y a une enquête sur les femmes et le marché du travail, en
collaboration avec le ministère des Affaires sociales, le
ministère du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, le ministère de l'Éducation de
même que le secrétariat, une recherche sur la situation de la
femme immigrante, une autre recherche sur les conditions de travail des
immigrants et immigrantes dans le secteur de l'entretien ménager
d'édifices et la confection du vêtement - on sait que c'est assez
important au Québec - une recherche sur la condition physique des
Québécoises -c'est assez nouveau et on est assez fier de cela -
l'évaluation - j'en ai déjà parlé - du programme
d'allocations de maternité qui
vient combler en partie le délai de carence de l'allocation de
maternité de l'assurance-chômage, une étude sur les
coûts d'un congé de maternité qui serait remboursé
à 90%, sans toutefois changer les règles d'admissibilité,
une étude critique du programme fédéral
d'assurance-chômage maternité, une évaluation du programme
sur l'intégration - réintégration des femmes sur le
marché du travail, une analyse - je pense que c'est important - des
clauses discriminatoires dans les conventions collectives - le ministère
du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ainsi
que la Commission des droits de la personne sont associés à
l'intérieur de cette étude - l'évaluation du programme sur
les travailleurs et les travailleuses à domicile, l'évaluation du
programme sur les travailleurs et travailleuses selon le mode de travail au
rendement. Un autre comité de travail du Conseil du trésor qui
fonctionne en collaboration avec le ministère de la Fonction publique
est à établir un système qui va répondre aux
exigences de la Charte des droits et libertés de la personne, à
savoir à travail équivalent, salaire égal. La
révision de l'évaluation et de la rémunération des
emplois à concentration féminine devrait être
complétée d'ici trois ans.
Le résultat de l'ensemble de ces études et un certain
nombre d'autres que je n'ai pas énumérées ici va
effectivement, je pense, donner des assises solides pour les ministères
dans le but de les voir intervenir plus tard de façon un peu plus
cohérente et un peu plus articulée.
Pour prévenir toute crainte qu'on pourrait avoir dans le sens que
de nombreuses études sont en cours, quand en verra-t-on les
résultats? Dans l'ensemble de celles-ci, à quelques exceptions
près, on prévoit les résultats pour d'ici la fin de
l'année 1981, ce qui s'avère très intéressant et
vient nous alimenter en termes d'actions futures.
Je voudrais maintenant passer au Conseil du statut de la femme qui, au
cours de la dernière année, a pu enfin, je pense, se consacrer
exclusivement à son propre mandat, n'ayant plus finalement à
jouer le rôle de suppléance qui est assumé, d'une part, par
le secrétariat et, d'autre part, par les ministères et la
présence des répondantes à l'intérieur de ces
ministères.
Évidemment, on repart toujours de la parution du bilan Pour les
Québécoises: égalité et indépendance, qui
est essentiellement la politique d'ensemble de la condition féminine. On
a fait cette année une mise à jour avec les associations
provinciales. Ceci a été une de grandes préoccupations du
conseil et une de ses grandes réalisations dont, je pense, le conseil
est fier.
D'autre part, le conseil a aussi poursuivi son travail de recherche et a
publié un certain nombre de documents, cette année, parce que le
conseil tente d'orienter ses recherches dans une perspective d'action:
Syndicalisation: droit à acquérir, outil à
conquérir, qui est une recherche sur les travailleuses non
syndiquées, une réflexion aussi sur les politiques familiales et
l'allocation de garde et enfin une description et une analyse des diverses
mesures fiscales. On sait que cela fait l'objet de beaucoup de discussions et
qu'il faudra aborder ce dossier au cours du mandat.
D'autre part, le conseil a aussi publié un certain nombre de
brochures. Quand on dit "publié" il se charge aussi de la diffusion dans
l'ensemble des groupes de femmes et auprès de la population, ce qui est
aussi intéressant. Il a diffusé des brochures comme "Projets de
femmes: Recyclage et retour au travail", "Ménopause: Parlons-en,
parlons-en mieux", "L'image des femmes dans la publicité", "La
publicité sexiste, c'est quoi?" et, enfin, une dernière qui me
semble très intéressante comme outil de revendication pour les
femmes: "Discriminer".
Ce qui est dit ici n'exclut pas, d'autre part, la participation et la
collaboration du conseil à de nombreuses autres actions. Je me permets
là encore d'énumérer un certain nombre d'entre elles: Le
prix Déméritas 1981, dont on a fait état il y a à
peine quelques semaines, la poursuite de la régionalisation,
c'est-à-dire l'implantation du conseil en région, dans l'ensemble
du Québec, la poursuite de la campagne de contre-publicité, la
réalisation d'émissions radiophoniques sur la discrimination et
la participation à l'élaboration du guide pour
l'élimination du sexisme dans les communications gouvernementales, ce
gui est coordonné par le Conseil des directeurs des communications. (17
h 45)
Je termine en disant: Voici la place qu'occupe la condition
féminine. La tâche est, évidemment, très lourde.
Elle est de tous les instants et couvre tous les tableaux. Quand je parle de
condition féminine, je dis: C'est la vie. Or, c'est beaucoup, la vie.
Les réalisations de l'année marquent, à mon point de vue,
un pas dans cette difficile accession des femmes à l'autonomie,
autonomie que j'aimerais, bien sûr, voir à la portée de
toutes les Québécoises, quel que soit leur choix de vie. Dans ce
sens, l'établissement d'une politique familiale, la
généralisation des services de garde en milieu scolaire, une
politique fiscale qui répondrait aux besoins de toutes m'apparaissent
comme étant quelques-uns des outils nécessaires pour permettre
aux Québécoises d'occuper leur place.
Il faudra que les femmes québécoises soient
essentiellement vigilantes et présentes dans cette perspective. Je vous
remercie, M.
le Président.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. D'abord, je dois
dire que je regrette que nous n'ayons que trois quarts d'heure pour
discuter.
Mme Marois: Je le regrette aussi.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas un reproche que je vous fais. Je
pense que le reproche doit être adressé aux leaders; enfin
peut-être que je les accuse injustement, en tout cas à qui de
droit.
Mme Marois: Ce n'est pas votre intérêt qui
manquait.
Mme Lavoie-Roux: Non ce n'est pas une question
d'intérêt, mais essayer de faire le tour de la condition
féminine en trois quarts d'heure, une fois par année, cela
m'apparaît un peu ridicule. Alors à qui de droit, peut-être
que quelqu'un un jour relira ce qu'on a dit ou ne le relira pas.
Le Président (M. Jolivet): Aux négociateurs du
temps.
Mme Lavoie-Roux: Mme la ministre a fait état de
réalisations du ministère d'État à la Condition
féminine. D'une façon générale, je pense qu'on est
encore dans des choses très générales, exception faite
pour deux choses. D'abord, la perception des pensions alimentaires, qui est une
loi qui remonte à l'année précédente mais dont on a
retardé l'application pendant six mois, si bien que, finalement,
l'organisme qui devait s'en occuper est entré en fonction en janvier.
L'autre est, évidemment, la révision du Code civil; ici je pense
que c'est exact de dire qu'il y a eu un pas dans le sens d'une plus grande
autonomie des femmes.
Cette révision du Code civil est un travail de longue haleine,
qui remonte à quelque vingt années, qui a été
déposé et dont tout le processus a été
extrêmement lent, mais je pense que c'est véritablement un pas
vers l'autonomie, même s'il y a encore bien des choses à critiquer
à l'intérieur de la révision qui a été
faite.
Je m'inquiète un peu du nombre d'études. La ministre a
voulu nous rassurer en disant, à ceux qui s'inquiètent qu'on
parle beaucoup d'études et de la façon dont ceci va se traduire,
qu'elle est fort encouragée et pense qu'elles seront terminées en
fin d'année 1981.
Je voudrais vous rappeler à cet égard -et peut-être
pourra-t-elle éventuellement nous donner une réponse - que,
dès 1975 ou 1976, le Conseil du statut de la femme remettait une
étude qui, d'ailleurs, a été intégrée dans
le livre Pour les Québécoises: égalité et
indépendance, sur les prototypes sexistes dans les manuels scolaires.
Nous sommes rendus en 1981, dans l'année fiscale 1981-1982. L'an
dernier, à ce moment-ci, quand j'ai posé quelques questions au
ministre d'État à la Condition féminine du temps - j'en
avais, d'ailleurs, posé à l'Éducation - on venait de
rendre public, en décembre 1980, le plan d'action du ministère de
l'Éducation sur les correctifs à apporter que l'on connaît
depuis au moins cinq ans. C'est pour cela que les études, en soi, c'est
bon, mais souvent cela ne débouche pas sur l'action ou d'une
façon très lente.
Également, Mme la ministre a fait état du programme de
l'égalité en emploi. Je dois vous dire que peut-être on a
officialisé les gestes là-dessus, mais que ce programme
d'égalité en emploi remonte même avant 1976 et que tout est
extrêmement lent. Quand on regarde les statistiques et que Mme la
ministre se console en disant que les femmes continuent d'augmenter dans la
fonction publique alors que, d'une façon générale, on
assiste à des compressions, je dois dire, là-dessus, que la
nature des compressions est de moins en moins évidente quand vous
regardez les statistiques générales de l'augmentation des emplois
dans la fonction publique, puisque, de 1976 à 1980 ou au début de
1981, il y avait eu 12 000 personnes de plus dans les organismes publics,
parapublics et la fonction publique en général. Il y a
peut-être des ministères qui ont diminué en nombre, mais
dans l'ensemble - je ne veux pas entrer dans un débat qui touche
davantage le ministre des Finances - je veux dire qu'il faut être
très prudents quand on dit que les femmes continuent d'augmenter. Encore
faudrait-il que Mme la ministre nous dise à quel niveau elles continuent
d'augmenter et quel est le salaire de ces femmes.
Je rappellerais peut-être au ministre -je ne lui en fais pas
reproche, elle vient d'arriver - que, quand vous regardez le salaire des femmes
dans la fonction publique, par exemple, au 31 mars 1981, excluant les
occasionnelles, les étudiantes et celles à temps partiel, 85,4%
de tout l'effectif féminin de la fonction publique du Québec
gagnent moins de 18 000 $. Et si vous étendez cela à
l'échelle de 20 000 $, c'est 88,6% des femmes. Mais tenons-nous-en
à 18 000 $, qui est quand même un salaire moindre. J'ai eu
l'occasion de dire en Chambre qu'il n'y a que des femmes qui se trouvent encore
avec des salaires en bas de 18 000 $ dans la fonction publique.
Je comprends que c'est de bonne guerre pour un gouvernement, et je pense
qu'on a dit à Mme la ministre que c'est cela qu'il
fallait faire, commencer par parler des réalisations du
gouvernement. Mais quand elle examinera cela d'un peu plus près, elle
verra que la réalité n'est peut-être pas toujours aussi
optimiste que certains gestes ou certaines observations un peu superficielles
-encore une fois, je ne veux pas l'accuser de superficialité, mais je
parle en général -peuvent le faire croire.
Je voudrais pour ma part, poser des questions, parce que l'an dernier,
la ministre s'était engagée à certaines choses... Je
voudrais savoir où on en est dans ces réalisations. Mais je
voudrais, d'une façon générale, aborder le problème
de la condition féminine, pour autant que l'Opposition est
touchée, par le biais, je ne sais pas si en l'occurrence le terme est
très juste, de la pauvreté. Là-dessus, je voudrais
simplement, compte tenu du temps que nous avons, il est déjà 17 h
55, rappeler à la ministre d'État à la Condition
féminine l'étude du Conseil de développement social
canadien sur la femme et la pauvreté, qui remonte à l'automne
1979, si je ne m'abuse, et d'après lequel la femme du Québec est
la femme la plus pauvre au Canada - enfin, toutes proportions étant
gardées - même en tenant compte des Maritimes, si ma
mémoire est bonne. Je ne parle pas d'une moyenne canadienne, il y avait
des chiffres pour chacune des provinces. La femme Québécoise
était la plus pauvre. J'ai même ici entre les mains un avis du
Conseil de planification et de développement du Québec - cela
c'est bien, bien québécois, alors on ne met pas cela en doute;
d'ailleurs je pense que jamais l'étude du conseil de bien-être n'a
été mise en doute, sans faire de blague - adopté à
la 42ème assemblée régulière le 19 mai 1981. Je ne
sais pas si vous en avez pris connaissance.
Mme Marois: Cela a été publié
aujourd'hui.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, on l'a entre les mains. On dit: La
part des pauvres au Québec est substantiellement inférieure
à la part moyenne du revenu des pauvres des pays industrialisés.
Environ 1 000 000 de Québécois vivent sous le seuil de la
pauvreté dont 600 000 arrivent à peine à satisfaire leurs
besoins élémentaires. Et là on donne les moyennes pour une
dizaine de pays, l'Allemagne, les États-Unis, la France, etc. La moyenne
canadienne est à 3,9 et on donne la part du revenu avant impôt des
20% de la population les plus pauvres dans différents pays; pour le
Canada dans son ensemble c'est de 3,9 et pour le Québec c'est de 3,7.
C'est pourquoi je veux aborder le problème des femmes, par la
pauvreté; cela rejoint aussi l'autonomie des femmes, je pense que les
deux ne se dissocient pas.
Sans mettre de côté toutes les actions qui ont
été entreprises, que ce soit dans le domaine scolaire, dans le
domaine de l'éducation, dans le domaine de la santé ou dans
d'autres domaines, il faudrait que le gouvernement apporte une attention toute
particulière à cet aspect de la pauvreté chez les femmes,
quel que soit leur âge, peut-être sauf... encore s'agirait-il de
femmes professionnelles, je pense que dans l'ensemble les femmes sont
assurément plus pauvres que les hommes et le deviennent de plus en plus
au fur et à mesure qu'elles vieillissent. Même les femmes qui
vivent dans un foyer traditionnel sont aussi considérées comme
très pauvres là où les revenus des familles, si elles ne
sont pas sur le marché du travail, se situent en bas de la moyenne des
revenus de la population.
Pourquoi il est important de l'aborder par ce biais-là? C'est
parce que la pauvreté apporte avec elle un tas d'autres facteurs. Par
exemple, il est plus facile de discriminer contre les gens qui sont pauvres.
C'est plus difficile pour les gens qui sont pauvres de faire valoir leurs
droits. Et - je me répète, je le reconnais - la majorité
de la population touchée par la pauvreté se retrouvant chez les
femmes, je pense qu'il est absolument important que le gouvernement se penche
là-dessus d'une façon plus particulière.
On avait annoncé pour l'automne 1980, je pense que c'était
votre prédécesseur, au féminin, qui nous en avait
parlé... En juin 1980, alors que nous parlions du rapport Boutin - je ne
reviens pas là-dessus parce que je l'aborde à tous les
ministères et de toute façon ça tombe dans le vide - elle
avait dit: Pour une première fois un mandat vient d'être
donné au comité de développement social auquel je vais
participer, c'est-à-dire que je vais collaborer avec le ministre
d'État au Développement social pour, au cours de
l'été qui vient, produire pour le gouvernement du Québec
un plan d'action s'appuyant sur le rapport Boutin et qui touche essentiellement
les groupes de femmes entre 50 et 65 ans. Là, je ne vois pas tout
à fait la relation quelle faisait avec le rapport Boutin, enfin, c'est
peut-être assez loin, mais je pense qu'elle avait aussi à l'esprit
le fait que ces femmes requéraient une attention toute
particulière. Je voudrais ici faire état de la proposition que
nous avions dans le programme de notre formation politique au cours de la
campagne électorale et qui, à mon point de vue d'ailleurs,
était la seule ou la plus importante. Si le gouvernement peut trouver
des mécanismes qui soient meilleurs tant mieux, mais, dans le contexte
de contraintes budgétaires actuel, qu'au moins, pour les personnes
seules - je l'avais mis pour les personnes seules, parce que ça peut
être des hommes aussi - de 60 ans à 65 ans, on comble la
différence entre les prestations de l'aide sociale et les revenus qui
proviennent - enfin, ça ne les
mettra pas millionnaires, personne - de la sécurité de la
vieillesse, plus le supplément de revenu garanti. Parce que vous vous
trouvez là avec un écart qui me paraît tout à fait
injuste. À cause des dispositions de la Loi sur la
sécurité de la vieillesse et à cause des prestations
d'aide sociale, vous avez une marge de près de 75 $ à 80 $ qui
peut nous sembler un peu ridicule, mais, pour des gens qui doivent vivre avec
331 $ au lieu de 411 $ ou 412 $, c'est quand même une différence
énorme.
En tout cas, si le gouvernement a des disponiblités pour agir
davantage et toucher un plus grand nombre de personnes, c'était pour
notre parti un objectif extrêmement important. C'était le seul
envers lequel nous pensions pouvoir nous engager et que nous pensions pouvoir
respecter a ce moment-là. J'aimerais, sans partisanerie, que le
gouvernement le réexamine et que le plus tôt possible, au moins
dans ce tout petit secteur - je pense que c'est presque symbolique, finalement
- on allège un peu les responsabilités que les femmes ont. (18
heures)
Je vais passer à des questions. La première, je vais
demander à Mme la ministre de me fournir des données sur la
fonction publique, sur le travail qui s'est fait dans chacun des
ministères, c'est-à-dire l'accroissement sur deux années,
pour voir l'accroissement à tous les niveaux de fonctionnement, enfin
cadres supérieurs, cadres intermédiaires, professionnels, etc,
dans chacun des ministères. En passant, j'ai eu l'occasion de le dire
à la Chambre, il y a des ministères où c'est vraiment tout
à fait ridicule, le ministère de l'Environnement, le
ministère du Travail. Comme je le dis toujours, si je faisais le tour de
tous les ministères, j'arriverais probablement dans la majorité
à cette constatation que ça bouge extrêmement lentement, je
dirais que c'est presque de l'immobilisme. Faisons entrer en ligne de compte le
fait que les femmes sont de plus en plus instruites, enfin, une partie des
femmes, ou accèdent à des études supérieures ou
sont sorties en beaucoup plus grand nombre des universités ou des
cégeps, avec des techniques administratives ou une formation
professionnelle plus avancée qu'il y a dix ans, parce que ce sont des
produits de l'intégration dans les cégeps des années 1967.
On voit que cette progression est à peu près insignifiante et
peut-être qu'il y a une diminution dans certains ministères. Alors
on se dit qu'il n'y en a pas de progrès. Tout ce qu'on se dit entre
nous, c'est que, de part et d'autre, on est rempli de bonne volonté et
qu'on y croit tous, mais que cela ne se concrétise pas. Je lui avais
demandé ces chiffres. Je lui avais demandé d'autres chiffres que
j'oublie. Si elle en a pris note, peut-être qu'elle les aura et qu'elle
nous fera une surprise.
Je voudrais connaître les objectifs du ministre pour
l'année qui vient et les objectifs du gouvernement. Je comprends que
vous nous avez fait part d'un certain nombre de recherches qui sont en cours et
qui devraient peut-être éventuellement aboutir sur de l'action. Je
veux également demander à Mme la ministre quelles sont ses vues
sur certaines choses. Par exemple, les coupures budgétaires, et
là encore je vais vous citer ce rapport qui n'est pas le mien, on
imagine toujours que cela a plus de valeur: "Les plus démunis face au
marché du travail commencent d'ailleurs à souffrir des coupures
budgétaires et des contrôles bureaucratiques de plus en plus
nombreux qui leur sont imposés, ce qui en l'absence d'une politique de
main-d'oeuvre et d'une politique de plein emploi élargit davantage les
inégalités." Il faut se rappeler qu'on a identifié dans
ces groupes les jeunes, les handicapés et les femmes. Je pense que cela
touche aux femmes. Quelles sont les actions que Mme la ministre entend prendre
au sujet des coupures budgétaires? Elles touchent les garderies, on en a
fait la démonstration l'autre jour. Il n'y a peut-être pas de
coupures, mais il n'y a pas d'augmentation. D'ailleurs, on a admis que
c'était gelé.
Dans tout le domaine de l'éducation populaire, de
l'éducation des adultes, il y avait vraiment des efforts qui avaient
été consentis et qui allaient en grandissant au fur et à
mesure des disponibilités. De quelle façon ceci touche-t-il les
associations féminines ou l'éducation des adultes qui
s'intéressent particulièrement à la
réintégration des femmes sur le marché du travail et enfin
à diverses modalités d'éducation. Vous avez l'AFEAS qui a
un grand nombre d'activités dans ce sens et il y a des organismes
familiaux, etc. Est-ce que ces gens-là se sont trouvés
touchés par les coupures budgétaires?
Je voudrais également demander au ministre - je vais vous les
poser toutes comme cela, parce qu'on n'a pas beaucoup de temps - quelle est sa
position vis-à-vis de la politique fiscale du gouvernement, eu
égard à la déduction des frais de garde d'enfants pour les
femmes au travail. Je ne voudrais pas tourner le fer dans la plaie, Mme la
ministre, mais je vais vous citer au texte: "Je n'ai rien contre une politique
familiale - commente Mme Marois - si cela peut servir à améliorer
le tissu social, si cela peut rendre hommes et femmes plus à l'aise - je
suis d'accord avec vous - si cela respecte
l'hétérogénéité, etc." Je saute quelques
lignes. " ... Mais si on veut parler d'une politique nataliste qui risque de
cantonner les femmes au rôle de reproductrices, alors je suis absolument
contre. D'une part, ces mesures n'ont pas d'effet réel sur la
natalité." On avait déjà eu l'occasion de dire cela en
Chambre.
"C'est prouvé partout et, d'autre part, l'égalité
passe d'abord par l'indépendance familiale." On se trouve dans le moment
devant deux mesures, l'allocation de disponibilité, dont je ne sais si
on peut l'appeler comme cela, car c'est plutôt une espèce de
substitut aux frais de garde gu'une allocation de disponibilité, parce
gu'une allocation de disponibilité à 400 $ ou 600 $ par
année, enfin, c'est mieux gue ne rien avoir du tout - je pense qu'il ne
faut pas non plus exagérer - et il y a aussi la fameuse politigue
d'accès à la propriété. Je n'ai encore entendu
aucun membre de ce gouvernement dire: On peut être d'accord avec la
politigue d'accès à la propriété, mais les
éléments qu'on a voulu y faire entrer, gui, dans le fond,
semblent vouloir s'orienter vers un désir, avoué ou pas,
conscient ou inconscient, de dire: Si les femmes restent à la maison, si
elles assument les tâches d'éducation des enfants, cela vous vaut
des avantages, appelons-les fiscaux dans un sens très large, je pense
que d'abord cela ne règle pas les problèmes financiers des femmes
et cela n'assure pas d'autonomie financière aux femmes, il faut bien se
le dire. Je l'ai dit pour les 600 $, je dis la même chose pour les
modalités gui entoureraient le projet d'accès à la
propriété s'il est maintenu tel quel.
Par contre, les femmes demandent depuis longtemps - vous avez
peut-être devant vous ou pas loin de vous une résolution du Cercle
des fermières - de pouvoir participer au Régime de rentes du
Québec, quitte à ce qu'elles-mêmes puissent fournir leur
quote-part. Elles ne demandent pas de cadeaux; elles demandent cela et je pense
que cela a des effets à moyen terme et à long terme beaucoup plus
sûrs gue ce gu'on prévoit dans l'accès à la
propriété, entre autres, et dans
l'allocation-disponibilité.
Il y a également toute la guestion gue la déduction
d'impôt pour la femme soit transférée à la femme,
etc. Il y a beaucoup d'aspects technigues dans ces questions-là, mais,
si on s'orientait vers des dispositions comme celle-là ou d'autres gue
vous connaissez peut-être et gue je ne connais pas, je pense que
là on pourrait dire gu'on pose des gestes dans le sens de l'autonomie
des femmes. Je dis gu'il faut permettre aux femmes qui choisissent de rester
à la maison d'assumer leurs fonctions pleines et entières d'une
façon satisfaisante sans les marginaliser pour l'avenir au plan
financier. C'est bon, c'est excellent.
D'un autre côté, il ne faut pas, pour arriver à
cette fin, prendre des mesures qui ne sont pas les bonnes, gui vont
peut-être à long terme les marginaliser davantage gu'elles ne le
sont, parce gue, vous savez, lorsgue les enfants seront élevés,
les 600 $ gu'elles recevaient annuellement seront évaporés depuis
un bout de temps et l'accès à la propriété encore
davantage. Alors, ce sont ces guestions-là qui m'inquiètent
beaucoup. Qu'on donne du support à la femme au foyer, d'abord, cela
assurera certainement - et vous en parlez, du tissu social - une
stabilité à la vie familiale et cela rendra peut-être les
pressions internes moins difficiles. Tout cela est très bon, il faut
permettre aux femmes de faire des choix, mais il ne faut pas, en se dirigeant
vers cela, faire une espèce de recul.
On a mis à la disposition des femmes ou des jeunes filles des
moyens d'arriver à une plus grande autonomie financière. Il ne
faudrait pas à ce moment-ci aller à contre-courant. Je n'accuse
personne mais je voudrais simplement que le gouvernement
réfléchisse là-dessus et qu'il y réfléchisse
pas simplement dans une perspective - je ne voudrais pas avoir l'air de faire
de la démagogie; tous les gouvernements sont coupables de la même
chose - électoraliste, mais vraiment dans une perspective de moyen et
long termes. J'ai l'impression gu'à l'heure actuelle les gestes gui sont
posés ne vont pas dans ce sens.
J'arrête ici, parce gu'on va être rendu à 6h 30.
Réponse de la ministre
Mme Marois: Vous avez soulevé beaucoup de questions, Mme
la députée de L'Acadie. Je vais les reprendre en partant du
début de vos interventions pour finir sur les éléments gui
sont un peu plus globaux. Cela va, M. le Président?
Mme Lavoie-Roux: Ce n'était pas pour le journal des
Débats, mes protestations.
Le Président (M. Jolivet): Une question technique.
Mme Marois: Vous êtes revenue sur le projet de loi 83 dont
on a peut-être retardé l'application. Moi, je le vois dans une
perspective où on s'est davantage donné les moyens pour... Je
vais attendre que Mme la députée de L'Acadie soit
présente.
Le Président (M. Jolivet): On va suspendre guelgues
instants, pour gue rien ne soit inscrit au journal des Débats.
Mme Marois: Merci, M. le Président.
Vous parliez de la loi 83 dont on a retardé l'application. Moi,
je le vois beaucoup plus dans une perspective où on a voulu mettre en
place l'ensemble des éléments pour nous permettre de faire en
sorte qu'on réponde adéguatement. Et on se rend compte que,
même si on a pris ce temps, il y a encore un certain nombre de lacunes et
de difficultés. Dans ce sens-là, je me dis gu'il fallait quand
même se donner le
temps pour le mettre en place et faire en sorte que ce système
soit efficace le plus possible dès le départ.
Oui, je suis optimiste sur les études et les résultats des
études qu'on attend. Si mon optimisme ne s'avère pas
réaliste, je poserai les gestes en conséquence pour que cela
devienne réaliste. Je pense qu'effectivement il y a du travail intensif
qui se fait par l'intermédiaire des répondantes dans les
différents ministères. Dans ce sens-là, on est
assuré de leur collaboration et de leur aussi grande volonté que
nous de voir aboutir l'ensemble de ces études.
D'autre part, vous reveniez aussi au départ sur une étude
que le Conseil du statut de la femme avait faite concernant les prototypes
sexistes dans les manuels scolaires. Je puis vous dire que la grille
d'évaluation des stéréotypes discriminatoires contenus
dans les manuels est chez l'éditeur actuellement et, donc, utilisable
dès l'été. Là encore, sur ce que vous souleviez, on
aboutit.
Quant à l'égalité en emploi, j'aimerais y revenir
de façon générale, pour tout l'aspect du volet des
salaires et tout cela, dans l'ensemble de ce que j'appelle la
sécurité du revenu ou l'autonomie financière des femmes.
On y reviendra. Je vais plutôt revenir avec un certain nombre de
données sur les femmes dans la fonction publique, ce que vous m'aviez
effectivement demandé et que j'ai ici avec moi. Je ne l'ai
malheureusement pas ventilé par ministère, mais je pense que
déjà ce qui est ici est extrêmement intéressant.
Si l'on parle des emplois supérieurs, je vais tout simplement
vous donner les pourcentages et je reviendrai avec des nombres absolus par la
suite. Au niveau des emplois supérieurs, en 1978-1979, on a connu une
hausse de 2.06%; en 1979-1980, de 2.05%, donc léger recul, et, en
1980-1981, de 3.7%, une nette hausse. Au niveau de la gérance
intermédiaire dans l'ensemble de la fonction publique toujours, et cela
au 31 mars, on parlait...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on pourrait avoir une copie des
chiffres, s'il vous plaît?
Mme Marois: Oui certainement. Je les ai sur fiches, je pourrai
vous les refiler... en 1978-1979, de 12.21%; en 1979-1980, de 12.3% et, en
1980-1981, de 13.2%. J'ose espérer que c'est l'effet de nos mesures. Ce
sont évidemment des pourcentages.
Chez les professionnels, on parlait, en 1978-1979, de 14.33%; en
1979-1980, de 15.4%; en 1980-1981, de 15.8%.
Cela veut dire quoi en nombre absolu? En 1979, des femmes à des
postes de cadres: 57; en 1980: 71 et, en 1981: 108. Là où cela
m'apparaît extrêmement intéressant, c'est que dans la
dernière année on a ajouté 72 cadres dans la fonction
publique québécoise, en chiffres absolus, dont 37 femmes et 35
hommes. Sur deux ans, on a 170 cadres de plus, dont 51 femmes et 119 hommes.
Là, je pense que ce sont des points importants qu'on a marqués.
La performance m'apparaît extrêmement intéressante.
(18 h 15)
D'autre part, au niveau des professionnels, sur 218 professionnels
ajoutés pendant l'année 1980-1981, 90 sont des femmes, et pour
une période de deux ans, puisque vous me l'aviez demandé, de 1979
à 1981, il y a eu 642 postes de professionnels de plus, dont 259
à des femmes. Je pense que ce sont des victoires qu'on gagne
progressivement au sein de la fonction publique et que, dans ce sens-là,
les politiques d'égalité en emploi y ont été pour
beaucoup.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, est-ce que madame la
ministre permettrait une question de plus, parce qu'on va se perdre de nouveau?
Quand vous nous donnez les chiffres de tout à l'heure, vous dites: En
telle année il y a eu 2%, il y a eu 3%, il y a eu 13%, etc....
Mme Marois: C'est-à-dire que dans les emplois
supérieurs, par exemple, c'était 57....
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'est pas cela ma question. Je voudrais
qu'elle nous les donne en fonction du total, parce qu'il peut bien y avoir eu
chez les femmes une augmentation de 2%, cela ne veut pas dire 2% ou 13% si vous
le prenez dans l'ensemble de la fonction publique. Alors, ça peut
être intéressant dans l'ensemble, mais je pense qu'il faut,
après ça, le faire à l'intérieur. Vous l'avez fait
dans le cas des cadres supérieurs.
Mme Marois: Oui, c'est ça. Effectivement, quand je parle
de chiffres absolus, je pense que c'est de ca qu'on parle. Je peux
peut-être répéter les derniers éléments que
j'ai déjà donnés.
Mme Lavoie-Roux: Mais ça nous laisse combien comme
pourcentage maintenant dans l'ensemble de la fonction publique?
Mme Marois: Ce sont les pourcentages que je vous mentionnais tout
à l'heure, c'est-à-dire, par exemple, dans les emplois
supérieurs, actuellement, en 1980-1981, 108 sur 2934...
Mme Lavoie-Roux: Ah oui.
Mme Marois: ... soit 3,7%. Ce sont ces
pourcentages-là.
Mme Lavoie-Roux: C'est le pourcentage
que je veux.
Mme Marois: Les pourcentages que je vous donnais concernaient
l'ensemble du personnel de la fonction publique, soit chez les emplois
supérieurs, la gérance intermédiaire ou les
professionnels.
Mme Lavoie-Roux: Alors, 3?
Mme Marois: 3,7% dans les emplois supérieurs, en
gérance intermédiaire, 13,2% et, chez les professionnels, 15,8%.
Là où il y a eu des pas intéressants, c'est au niveau des
emplois supérieurs et de la gérance intermédiaire. De
1979-1980 à 1980-1981, dans les emplois supérieurs, on passe de
2,5% à 3,7%; en gérance intermédiaire, de 12,3% à
13,2%. Par la suite, je vous ai donné les chiffres absolus. Comme je le
disais dans le texte de présentation, ce n'est pas en un an qu'on vient
modifier des proportions aussi importantes actuellement et c'est dans ce
cadre-là aussi qu'on a prévu l'implantation de programmes de
redressement progressif. Nous sommes très conscients, on ne se leurre
pas, c'est évident, que 3,7%, ce n'est rien compte tenu des objectifs
qu'on voudrait atteindre. À la limite, on voudrait être, je me
dis, 52%. Surtout qu'on sait qu'un tiers des femmes se trouvent actuellement
sur le marché du travail, je me dis que, dans cette
perspective-là, à tout le moins proportionnellement, on devrait
retrouver un tiers des femmes.
Mme Lavoie-Roux: Un tiers des femmes sont sur le marché du
travail?
Mme Marois: Oui, selon certaines catégories et selon le
temps partiel et selon l'ensemble des ventilations qu'on peut faire. Dans cette
perspective, l'implantation de programmes de redressement progressif nous
apparaît essentielle si on veut faire le rattrapage nécessaire.
Les chiffres qu'on a là, même s'ils sont extrêmement
encourageants, ne font que nous démontrer l'importance de ce
rattrapage.
Cela m'amène aussi à aborder ce que vous avez
souligné à différents moments relativement soit à
la pauvreté des femmes, soit au salaire des femmes. La moyenne des
salaires des femmes n'est pas particulièrement intéressante si
85,4% d'entre elles ont moins de 18 000 $. Évidemment, si le salaire
industriel, qui est en train d'être réanalysé, se situe
autour de ça, ce n'est effectivement pas tellement intéressant.
Mais je pense que c'est un résultat de l'histoire. Dans ce sens, on est
à essayer de corriger toute cette vie dans laquelle on se trouve
maintenant et, aussi, relativement à la pauvreté. On sait que les
rapports que vous citiez mentionnent que les femmes les plus pauvres se
trouvent chez les personnes seules, âgées ou au-delà d'une
certaine tranche d'âge, ce qui est de moins en moins vrai, je pense, chez
les jeunes personnes ou chez les professionnelles qui se situent de plus en
plus au niveau de leurs collègues masculins.
C'est le problème fondamental qu'on a à aborder et M.
Lazure pourra peut-être y revenir tout à l'heure dans son
intervention. On est à regarder tout l'ensemble du système de
sécurité du revenu, entre autres, on y retrouve effectivement ce
que je disais tout à l'heure, des femmes âgées et des
femmes seules très pauvres, des familles monoparentales dont la
majorité de chefs sont des femmes qui sont aussi en deçà
d'un seuil de pauvreté acceptable. Dans cette perspective, la
révision de l'ensemble de notre système de sécurité
du revenu devrait nous permettre d'arriver à établir des revenus
se situant au-dessus du seuil de pauvreté pour les femmes, par exemple
pour l'ensemble des catégories considérées inaptes, dans
certains cas, au travail, de telle sorte que les personnes qui sont
identifiées comme aptes au travail se retrouvent dans des programmes de
retour au travail très articulés, très intenses et
très importants.
L'étude que vous identifiiez tout à l'heure concernant le
CPDQ, le conseil de planification, arrive aussi à ces mêmes
conclusions, je pense; du moins je l'ai lue aussi rapidement que vous, compte
tenu que je l'ai eue aujourd'hui. Dans ce sens, on a affaire à un
problème d'envergure, un problème historique qui part
essentiellement de très loin. Si, à 60 ans, les femmes sont
pauvres maintenant, c'est qu'elles n'ont pas participé au Régime
de rentes, elles n'ont pas effectivement travaillé, elles n'ont pas
assumé de fonctions rémunératrices dans notre
société. Alors, c'est évident que ce à quoi on
arrive aujourd'hui, ce sont les résultats de tout ce qu'on a vécu
de par le passé.
Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce que vous entendez faire?
Mme Marois: Dans cette perspective, j'ai déjà un
peu parlé de ce qui me paraît important d'aborder, d'une part, au
niveau de la sécurité du revenu, j'ai déjà dit
ça, dans le sens où, en révisant l'ensemble de la
structure, on devrait faire en sorte que les gens les plus pauvres, les plus
démunis et inaptes au travail puissent avoir des sommes importantes pour
s'assumer et vivre, entre autres, les personnes âgées pour
lesquelles on ne peut pas songer maintenant à des programmes de retour
au travail. L'étude du Conseil du statut de la femme est
extrêmement intéressante dans cette perspective, entre autres, la
syndicalisation des femmes, parce que là aussi, à cause de
l'absence de cette syndicalisation, on les
retrouve souvent dans des emplois mal rémunérés, en
deçà de toute espèce de qualité acceptable. Pour
moi, ce sont des mesures qui me paraissent importantes et qu'on devra prendre
pour essayer de corriger la situation. D'autre part, tous les programmes
d'égalité en emploi qu'on met en place viennent aussi intervenir
et viennent jouer sur l'ensemble des éléments que vous soulignez,
dans le sens où si on retrouve plus de femmes chez les professionnels
avec peut-être moins d'expérience, c'est évident qu'elles
se situent immédiatement dans les tranches de salaire les moins
élevées. Si, progressivement, on se permet de faire un certain
rattrapage, on les retrouvera aussi à des postes importants ou à
des postes de gestion là où elles doivent avoir leur place de
toute façon, permettant par le fait même d'augmenter le revenu
moyen de l'ensemble des femmes du Québec, parce que ce sont des mesures
qui me paraissent aller dans le sens de ce que je soulignais au
départ.
J'aimerais toucher un petit peu l'ensemble des éléments
sur lesquels Mme Lavoie-Roux est intervenue, entre autres, les coupures
budgétaires. Je pense qu'il a été dit par le ministre de
l'Éducation, relativement à l'éducation des adultes, par
exemple, qu'il y aurait un effort important de fait pour essayer que les
compressions soient moins importantes à ce niveau et que les
résultats du rapport de la commission Jean devraient aussi nous
permettre de réenligner les budgets relativement à
l'éducation des adultes.
Dans ce secteur de l'éducation des adultes, il faudra
peut-être faire des choix. On sait que l'ensemble de ce qui se fait pour
l'éducation des adultes est très vaste comme spectre de champs
d'activité. Qu'on pense à des cours essentiellement de type
culturel jusqu'à des cours de formation professionnelle en vue d'un
retour sur le marché du travail. Dans une perspective où
effectivement, les ressources deviennent moins importantes et où, il
faut rationaliser, peut-être que les choix devront aller dans le sens
d'un plus grand partage des fonds, d'un plus grand réenlignement des
fonds dans la perspective d'un retour des femmes sur le marché du
travail où là aussi, je pense, on poursuit les objectifs
d'abaisser le taux de pauvreté des femmes de l'ensemble de la
collectivité québécoise. Pour moi, c'est un des
éléments sur lesquels je voudrais pouvoir travailler, à la
suite des résultats de la commission Jean, relativement à la
formation professionnelle, entre autres.
Mme Lavoie-Roux: Oui...
Le Président (M. Jolivet): Juste une minute, parce que Mme
la députée de Maisonneuve a demandé de poser au moins une
question.
Mme Marois: Je n'ai pas fini...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'elle me permet juste...
Mme Marois: Je n'ai pas fini. Cela ne vaudra pas pour le budget
1981-1982. Si vous attendez le rapport de la commission Jean, vous allez
peut-être faire les adaptations pour l'année suivante, mais pas
pour l'année en cours. Je vous posais la question pour l'année en
cours.
Mme Marois: Je pense que, pour l'année en cours, il y a
déjà, de la part du ministre de l'Éducation, une forme
d'engagement à réviser les budgets alloués à
l'éducation des adultes. On parle même actuellement de 10 000 000
$. C'est déjà quelque chose qui m'apparaît
intéressant à ce moment-ci, compte tenu de l'ensemble de ce qu'on
demande à notre collectivité québécoise concernant
les compressions. Je pense que cela a été clair, cela a fait
l'objet de débats depuis déjà près de deux mois,
à tout le moins depuis qu'on a repris nos travaux, ici à
l'Assemblée nationale. Dans ce sens, je suis consciente que les
compressions qu'on vit un peu partout touchent aussi les femmes, comme elles
touchent l'ensemble de notre collectivité. Chacun doit en prendre un
petit morceau et vivre avec.
Cependant, dans l'éducation des adultes, je pense qu'il a
nettement été dit que des efforts seraient faits pour faire en
sorte qu'on y remette des budgets quand même importants. 10 000 000 $, ce
n'est pas n'importe quoi à ce moment-ci.
Je reviens, d'autre part, sur ce que vous avez mentionné
relativement aux politiques fiscales ou aux politiques natalistes qu'on
pourrait prétendre poursuivre par l'intermédiaire d'engagements.
Je vous réfère à un document qui a été fait
par le Conseil du statut de la femme et qui est une réflexion
extrêmement intéressante. Un article, entre autres, dit: "Peut-on
concilier natalisme et féminisme?" À l'intérieur de cela,
il est clairement dit que ce n'est pas une mesure, peu importe même si on
avait l'intention qu'elle soit natalisme, qui viendra effectivement à
avoir une influence, et même Henripin le reconnaît lui-même,
sur le taux de fécondité. Ce sont des mesures d'une tout autre
importance et qui devraient couvrir effectivement l'ensemble des secteurs de
notre société, que ce soit le secteur des loisirs, que ce soit le
secteur des garderies, une politique de retour ou de participation au
marché du travail, des congés de maternité, ce sont des
mesures d'une envergure beaucoup plus importante que toute espèce de
petites "mesurettes" qu'on pourrait imaginer qui auraient un effet sur le taux
de fécondité. Ici, c'est dit en toutes lettres par
différentes personnes qui sont
interviewées dans la revue. Dans ce sens-là, même si
on pouvait nous dire: Ah! telle mesure a un petit relent de natalisme, je pense
que, dans les faits, effectivement, il est inimaginable - vous l'aviez
dit-vous-même que 400 $ ou 600 $ aient autant d'importance quand on sait
ce que coûte un enfant ou le fait d'assumer un enfant.
Mme Lavoie-Roux: C'est que le peu de disponibilités
financières que vous avez - je m'excuse d'interrompre la ministre - je
ne vous en fais pas reproche, mais vous l'utilisez à ces
fins-là.
Mme Marois J'aimerais revenir là-dessus, parce que je ne
pense pas que ce soit à ce point vrai. Entre autres, vous m'avez
parlé de l'allocation...
Mme Lavoie-Roux: Regardez les services de garderies.
Mme Marois: On va parler de l'allocation-disponibilité. La
déduction pour frais de garde, qu'est-ce que cela apportait à
l'ensemble des femmes du Québec? Cela coûtait au gouvernement du
Québec 19 000 000 $, la déduction pour frais de garde. Ce qu'on
donne par ce qu'on appelle l'allocation-disponibilité, c'est 170 000 000
$ d'argent neuf qui est retourné à l'ensemble des femmes du
Québec. Dans ce sens-là, qu'on ne vienne pas me dire
qu'effectivement il n'y a pas un certain avantage que quelqu'un acquiert
à l'intérieur de cela. J'ai les chiffres ici. On sait aussi,
d'autre part, que la moyenne des déductions utilisées par les
personnes qui se prévalaient de la déduction pour frais de garde,
entre autres, était de 1051 $, ce qui est donc très loin des 2000
$ des 4000 $ et des 6000 $ qu'il était possible d'utiliser comme
déduction. Pourquoi? Parce qu'on revient encore aux problèmes
essentiels et aux problèmes de base qui font que les femmes, en
majorité, sont à des salaires très bas, sont souvent au
salaire minimum. Donc, cela ne les servait absolument pas. Dans ce
sens-là, un crédit sous forme d'allocation familiale devient
beaucoup plus intéressant pour les femmes du Québec à ce
moment-ci.
Évidemment, ce sont les tranches de salariés qui sont
beaucoup plus élevés dans la structure qui paient une partie de
la note et je ne le nie pas. On a un certain nombre de calculs, que je n'ai pas
avec moi ici, mais qui nous disent qu'au-delà d'un certain salaire, d'un
certain seuil de salaire, cela vient les pénaliser. Mais cela ne les
pénalise pas, d'autre part, pour des sommes extrêmement
importantes, on parle de sommes de 3 $, de 80 $, de 100 $. Si on est à
un salaire de 30 000 $ ou de 35 000 $ et que cela nous pénalise, sur une
année, de 100 $, compte tenu du gain qu'on apporte pour l'ensemble des
femmes du Québec, je pense qu'on aurait tort de remettre en question
cette mesure dans cette perspective. (18 h 30)
Si vous me dites le coût d'opportunité, à savoir la
façon dont on aurait pu utiliser cet argent, évidemment, c'est
à l'infini les possibilités, vous le savez comme moi; on vient de
faire état d'un certain nombre de celles qui devraient être
faites, au cour des années à venir. Mais c'est un choix, et ce
choix a été fait. Je pense qu'il vient quand même
répondre à un certain nombre de besoins et à une certaine
forme de réconciliation, là où on a voulu faire une
espèce de dichotomie, je dirais môme créer des conflits
entre la femme qui assume ses enfants à la maison pendant un certain
temps où elle joue, et on l'a reconnu, un certain rôle social et
la femme qui se retrouve sur le marché du travail, qui de toute
façon ne bénéficiait pas de la déduction pour frais
de garde de façon importante; on parle de 19 000 000 $ versus 170 000
000 $.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si Mme la ministre le
permet; je ne l'interromprais pas si ce n'était le fait qu'on est
censé avoir fini depuis une demi-heure, autant pour moi que pour elle.
Toutes les femmes qui travaillent à l'extérieur de la maison
gagnant plus de 7000 $ par année, dans la grande majorité,
qu'elles aient un, deux ou trois enfants, se verront pénalisées,
par rapport à l'ancien système, de montants allant de 60 $
jusqu'à 761 $ selon leur revenu et le nombre d'enfants. À tire
d'exemple, une femme avec trois enfants et qui gagnait 13 000 $ pouvait retenir
une économie d'impôt de 1095 $ avec l'ancien système, par
rapport aux 700 $ qui lui seront versés cette année.
M. le Président, voici ce que je ne comprends pas. Je suis bien
d'accord que vous donniez 600 $ aux femmes à la maison qui
éduquent leurs enfants à temps plein, mais pourquoi, pour
répondre à ce besoin... Vous disiez qu'il y avait une
espèce de dichotomie que l'on voulait corriger; je pense que ce sont
deux problèmes différents, il y a le problème du revenu
des femmes à la maison et le problème des femmes qui travaillent.
Pourquoi...
Mme Marois: Non, je ne pense pas que j'aie dit cela,
effectivement. Ce que j'ai dit au contraire, c'est que cela ne
pénalisera que très peu de gens et d'ailleurs j'aimerais que vous
me donniez l'origine de ces chiffres, parce que moi je possède d'autres
chiffres, des études faites par le ministère des Finances. Je
pourrais vous les faire parvenir, je ne les ai pas avec moi, et c'est à
des salaires beaucoup plus élevés que cela
qu'on devient pénalisé. On parle d'une moyenne de 20 000
$; et à 25 000 $ au moment où il y a, par exemple, deux ou trois
enfants, et je ne voudrais pas, comme je veux m'attaquer à la
fiscalité... On parlait aussi à ce moment-là de salaire
moyen, pour la famille, de 38 000 $. Je m'excuse mais on ne pénalise pas
des gens qui, effectivement, profitaient de la déduction pour frais de
garde et qui se trouvaient dans des tranches de revenu beaucoup moins
importantes. Au contraire, on favorise ces femmes.
Mme Lavoie-Roux: Si vous avez des chiffres qui ont
été préparés par le ministère des Finances,
au lieu de discuter à vide...
Mme Marois: Ceux que je vous ai donnés au niveau des
moyennes s'avèrent justes et je pourrai vous faire parvenir l'ensemble
des autres éléments, vous permettant de faire une analyse plus en
profondeur autour de cela.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
Maisonneuve, vos questions.
Mme Harel: II reste très peu de temps.
Le Président (M. Jolivet): C'est déjà
écoulé depuis longtemps.
Mme Harel: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si c'est
symptomatique de l'intérêt que nos collègues masculins
respectifs portent à ce dossier pour qu'on soit entre nous ou
presque.
Mme Marois: C'est à se poser des questions.
Mme Lavoie-Roux: C'est toujours comme cela.
Mme Harel: Ou presque. C'est l'exception qui confirme la
règle.
Mme Lavoie-Roux: Je dois vous dire que le député de
Laurier devait être ici, sauf qu'il a été retenu pour une
autre commission.
Mme Marois: Alors nous aurions été...
Mme Harel: Je vais être brève parce que ce sont
surtout des questions. Je tiens pour acquis, et avec raison je pense, qu'on
partage des deux côtés de cette table la même
problématique telle que décrite par Mme la députée
de L'Acadie sur la pauvreté des femmes et on sait toutes, d'ailleurs,
que plus on est âgée, plus on est pauvre quand on est une
femme.
Comme dans la conjoncture des compressions budgétaires actuelles
on ne puisse malheureusement pas envisager des programmes qu'on aurait cru
possible de réaliser il y a peu, je pense que tout au moins on doit
s'assurer que nos lois qui ont été adoptées dans les
années précédentes vont trouver en matière
d'application toute la rigueur qui s'impose. Je vais faire une petite
parenthèse en passant pour féliciter le Conseil du statut de la
femme et sa présidente pour un très grand nombre de brochures, je
pense particulièrement à celle qui porte sur la syndicalisation
des femmes, non seulement une brochure qui met en lumière la situation
de discrimination faite aux femmes au travail, mais qui incite également
à l'action. Je pense que c'est la première brochure
gouvernementale qui incite également à la syndicalisation
massive.
Je reviens donc à certains problèmes d'application. Je
pense par exemple qu'on peut espérer et je pense qu'en dehors de cette
mesure qui assurerait l'admissibilité de femmes qui font le choix de
rester à la maison à la Régie des rentes, il n'y a pas
véritablement de mesures sérieuses pour contrer la
pauvreté des femmes âgées. Mais dans le contexte, on peut
tout au moins espérer que dans l'application des indemnités de
rentes de la Régie des rentes, et cela est un problème qui se
pose beaucoup dans un comté comme Maisonneuve, où le pourcentage
de femmes veuves est très élevé et où d'ailleurs le
pourcentage de personnes âgées est le double de la moyenne du
Québec... Je reviens donc à ce problème d'indemnité
pour le conjoint survivant. Actuellement, la Régie des rentes alloue une
indemnité moindre au conjoint survivant que l'indemnité qu'aurait
eue le survivant lui-même s'il avait survécu. C'est donc dire que
la femme veuve se retrouve dans une situation qui est beaucoup plus difficile
malgré le fait que son conjoint ait cotisé à la
régie.
Il y a également le problème du congé de
maternité. Vous avez certainement entendu parler de ce jugement
récent de la Cour provinciale à savoir qu'être
congédiée pour le motif qu'on est enceinte n'était pas un
motif de discrimination prévu à l'article 10 de la charte. C'est
en Cour d'appel. On voit bien, même dans l'application de nos lois, qu'il
y a là matière à interprétation restrictive aussi
de la part des tribunaux et nécessité d'intervention. Je pense
également à toute la question de la perception, de l'indexation
des pensions alimentaires qui devait être mise en vigueur le 1er
août 1980, si ma mémoire est bonne, et qui ne l'est pas encore.
Cela retarde donc une mesure qui s'impose, compte tenu de l'augmentation du
coût de la vie.
J'aimerais aussi aborder la question du choix en ce qui concerne cette
allocation de disponibilité. Je pense qu'au minimum, ce qu'on doit
rechercher, c'est que les femmes
puissent faire des choix sans être pénalisées. Donc,
qu'elles puissent faire le choix - je pense qu'on doit souhaiter qu'il y ait
des programmes qui leur laissent ce choix -notamment en termes soit d'exemption
pour frais de garde ou d'utilisation de l'allocation dite de
disponibilité. Cela n'est pas possible présentement et je pense
que c'est dans le fait que ce ne soit pas possible que c'est
préjudiciable aux femmes.
Il y a eu des campagnes antisexistes qui ont eu une bonne écoute
dans la population, mais je pense qu'il nous faut souhaiter, compte tenu
même des discussions qu'on a ici cet après-midi, puisque nous
partageons toutes le point de vue que les enfants n'appartiennent pas qu'aux
femmes, mais qu'ils appartiennent aux femmes et aux hommes qui les font, qu'il
y ait une campagne sur le partage des rôles parentaux. Et cette campagne,
à mon point de vue, s'avère extrêmement nécessaire
pour valoriser la relation père-enfant.
Le Président (M. Jolivet): Mme la ministre.
Mme Marois: Je pense que la députée de Maisonneuve
soulève effectivement des questions qui nous préoccupent. Je
pense, entre autres, à tout le congé de maternité
québécois dont on parle depuis si longtemps et qui,
effectivement, est une mesure qu'on veut voir refaite dans l'ensemble de ses
composantes. Je pense que c'est à ce titre, entre autres, qu'on va avoir
des choix.
Si on parle d'allocations pour frais de garde ou d'allocations de
disponibilité, je pense que là aussi, en soi, c'est
évidemment une mesure insatisfaisante, si elle ne s'inscrit pas dans une
perspective globale et de cohérence où on retrouve des services
de garde accessibles à l'ensemble des femmes québécoises
et, je dirais, des hommes québécois, justement, si on veut
commencer à parler de rôles différents.
Je pense que ce que la députée de Maisonneuve a
souligné, ce sont effectivement des préoccupations de ce
gouvernement et de mon ministère, sur lesquelles on se penche et on se
penchera. Tout le problème de la fiscalité des femmes, entre
autres avec la participation au Régime de rentes, c'est toujours et
essentiellement le problème de la participation des femmes ou de
l'accès des femmes au marché du travail. Là aussi
l'étude du conseil sur la syndicalisation des femmes est un outil
essentiel, je pense, à ce qu'on veut vouloir vivre dans notre
société québécoise.
Je vais terminer, M. le Président, en citant un tout petit
paragraphe d'une phrase...
Le Président (M. Jolivet): Avant que vous terminiez, Mme
la députée de L'Acadie a peut-être encore une couple de
questions. Mme Marois: Encore?
Mme Lavoie-Roux: Une chance que je reviens à 20 h 15.
Mme Marois: Je suis disponible, madame.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais seulement vous faire remarquer trois
choses. Je ne veux même pas de réponse.
Mme Marois: Donc, ce ne sont pas des questions, mais des
commentaires.
Mme Lavoie-Roux: C'est l'un et l'autre. Mme Marois: Je
vais les recevoir.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que Mme la députée de
Maisonneuve en a signalé un, soit cette décision qui a
été rendue par la Cour provinciale. Mais le respect des
conditions minimales de travail laisse énormément à
désirer. Cela est relié à une foule de choses comme
l'organisation de la Commission des normes minimales du travail et ainsi de
suite. Évidemment, on était tous heureux et tout le monde a dit:
C'est une belle loi. Il y a beaucoup de lois généreuses qui se
votent, mais dont l'application reste toujours extrêmement en souffrance.
Comme, dans ce cas, cela touche particulièrement les femmes, je vous
invite, Mme la ministre, à faire un examen plus approfondi du respect de
cette loi.
On a parlé tout à l'heure de certaines études qui
seraient faites. Vous avez parlé, enfin, d'un projet qui avait
été fait autour de l'accouchement. Je voudrais simplement vous
signaler - je n'ai pas malheureusement les statistiques et je ne crois pas que
vous les ayez, vous non plus, cette fois-là - que les ligatures de
trompes étaient de 25 888 en 1975, elles sont rendues à 26 756 en
1979; les hystérectomies étaient à 13 931 en 1975, elles
sont à 14 245 en 1979. Par contre, le nombre de césariennes avec
ou sans stérilisation - et cela c'est assez inquiétant - est
passé de 8 009 en 1975 à 13 308 en 1979, soit une augmentation de
66,1%. Alors, je sais qu'il a eu le colloque sur l'accouchement, mais, l'an
dernier, celle qui vous a précédée nous disait qu'elle
avait fait de la santé sa priorité pour l'année.
Evidemment, même si on avait les statistiques pour 1980, je pense
bien que cela ne serait pas différent; il faudrait au moins s'assurer
que cela n'ait pas augmenté. Je veux vous dire que c'est toujours un
problème aigu et que, si vous regardez dans le domaine de la maladie
psychiatrique, vous retrouvez exactement 1 pour 2 du point de vue des femmes et
du point de vue de
l'utilisation de certaines formes de traitements psychiatriques, etc.
Alors, je ne veux pas de réponse, mais cela m'apparaissait important de
vous signaler que ces points-là n'ont pas été
réglés. Parce que cela ça remonte même avant le
livre sur l'égalité et l'indépendance; cela a
été repris au moment du livre sur l'égalité et
l'indépendance et puis, pendant ce temps-là, tous ces chiffres
indiquent une augmentation et non pas une diminution à moins que vous
n'en ayez une pour 1980. En tout cas, on pourra s'en reparler l'an prochain. On
ne les aura pas avant l'an prochain, on peut juste travailler avec les chiffres
qu'on a.
Le Président (M. Jolivet): En conclusion.
Mme Marois: En conclusion...
Mme Lavoie-Roux: II reste les prisons des femmes, madame; je ne
vous demanderai pas d'information.
Mme Marois: Mais c'est dommage que l'on termine comme cela parce
que effectivement j'ai un peu d'information à vous donner, même si
elle est limitée.
Mme Lavoie-Roux: Si vous pouvez me la donner, d'accord. J'avais
posé des questions l'an dernier. L'an dernier, on avait comme raison ou
excuse qu'il y avait le transfert des femmes de Kingston à
Montréal, mais cela avait déjà été
prévu l'année d'avant et on est encore dans les mêmes
problèmes. Vous avez des femmes qui sont détenues à la
prison de Bordeau et, même si on les a mises dans un beau petit quartier,
apparemment, où elles ne voient pas d'hommes, d'après ce que les
journaux nous rapportaient, j'exagère à peine, il reste que je ne
pense pas qu'on ait trouvé des bonnes solutions au problème sans
compter tout ce qui n'est pas à la disposition des femmes de la prison
Tanguay. Paraît-il qu'il y a une prison pour les femmes à
Québec où c'est la même situation. Je ne la connaîs
pas, mais je vous le signale en terminant, M. le Président.
Mme Marois: Alors, je termine en disant que je prends bonne note,
effectivement, des derniers éléments que vous avez
soulignés. Quand je parlais de consolidation dans l'année
à venir, entre autres, c'est le respect - Mme Harel le soulignait
tantôt et vous le soulignez à votre tour - des lois que
nous-mêmes on a adoptées qui sont des pas importants dans
l'avancement du dossier de la condition de vie des femmes, que ce soient les
normes minimales de travail ou un ensemble d'autres lois qu'on a mises en place
ou d'autres mesures qu'on a mises en place.
D'autre part, justement, les colloques sur "accoucher ou se faire
accoucher" visaient un peu à faire le point et à
réfléchir autour de l'ensemble des problèmes que vous avez
soulevés relativement à la santé des femmes tant au niveau
des problèmes vécus relativement aux ligatures de trompes, aux
césariennes qu'à toute autre espèce de problème
soulevé et vécu à ce moment par l'ensemble des
Québécoises.
D'autre part, je vous souliqne que le conseil va publier très
prochainement une recherche sur la santé des femmes. Alors, c'est
à suivre sûrement parce que cela pourrait peut-être venir
répondre à certaines interrogations que vous avez vous-même
soulevées et que je soulève moi-même et qui m'apparaissent
importantes. (18 h 45)
Je termine sur la prison Tanguay, puisque vous soulignez un petit peu
certains problèmes vécus. On parlait entre autres l'année
dernière d'une maison de transition, maison de transition qui existe,
qui s'appelle d'ailleurs la maison de transition
Thérèse-Casgrain, administrée par la société
Elisabeth Fry et qui est ouverte depuis août dernier -il faut quand
même le mentionner - et pour laquelle il y a une participation du
ministre de la Justice à raison d'un per diem qui est accordé
à cette maison de transition.
Mme Lavoie-Roux: Cela a quand même été une
initiative privée.
Mme Marois: Oui, mais je pense qu'il n'y a pas
nécessité...
Mme Lavoie-Roux: Je m'attendais à une maison de transition
du gouvernement. Cela en aurait fait deux.
Mme Marois: Je ne voudrais surtout pas remettre en question,
nécessairement, toute espèce d'entreprise privée qui
viendrait, en collaboration avec le gouvernement, améliorer la condition
de vie des femmes du Québec.
Mme Lavoie-Roux: On aurait deux maisons de transition et
là on se retrouve avec seulement une.
Mme Marois: On commence par une et éventuellement on
pourra en avoir deux. Je me dis qu'on ne peut pas tout faire à la
fois.
Mme Lavoie-Roux: Bien, celle-là ne vous a pas
coûté cher.
Mme Marois: On y va progressivement. Elle coûte
effectivement au gouvernement un certain montant qui peut cependant
apparaître relativement important si on le regarde de façon
globale.
Je termine en citant la revue dont je parlais tout à l'heure, la
Gazette des femmes, et qui rejoint une préoccupation que Mme Harel nous
présentait. On dit: "II n'y a pas trente-six solutions au
problème, les primes symboliques et même les privilèges
plus importants qu'on serait prêt à accorder à la
travailleuse ne sont pas suffisants pour résoudre le dilemme à
long terme. Le vrai remède passe par le partage des tâches
familiales et j'ajouterai par une économie progressive au plan financier
des femmes du Québec." Merci, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, c'est peut-être
triste de terminer sur cette note-là. Sur le partage des tâches
familiales à l'intérieur de la famille, j'aimerais rappeler qu'il
a fallu que l'Opposition officelle se batte contre le gouvernement pour faire
inclure ce partage des tâches. Je dois dire, pour être tout
à fait honnête, qu'on avait eu l'appui, et c'est ce qui a
influencé le ministre de la Justice à bouger - si je me souviens
bien c'était le député de Deux-Montagnes... Bien oui,
c'est le député de Taschereau. Je dois vous dire que le
gouvernement n'était pas du tout disposé et que, si on l'a eu,
c'est grâce à l'Opposition.
Mme Marois: Je vous remercie de reconnaître cependant que
le gouvernement a aussi compris ce dont il s'agissait et est intervenu.
Merci.
Le Président (M. Jolivet): Comme j'ai le dernier mot, je
vais suspendre jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 48)
(Reprise de la séance à 20 h 14)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous reprenons les travaux de la commission de la présidence du
conseil et de la constitution qui étudie les crédits du Conseil
exécutif ainsi que du programme du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche concernant la RIO.
Avant de commencer avec l'article suivant, qui est le programme 14,
Développement social, j'aimerais faire mention, à la suite d'une
demande de la députée de L'Acadie, que nous avions oublié,
au Conseil exécutif, le programme 7, Promotion du droit et du statut de
la femme. Mme la députée aurait peut-être une question
à poser à ce moment-ci.
Mme Lavoie-Roux: C'est bien difficile d'adopter cela, on n'a
même pas eu de crédits là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): Cela a été vite
avant le souper. Est-ce que vous voulez avoir de la documentation?
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais avoir les crédits en
détail du Conseil du statut de la femme comme on nous les remet
d'habitude.
Le Président (M. Jolivet): Donc, on va faire transmettre
le message.
M. Lazure: Oui, malheureusement, je n'étais pas conscient
qu'on attendait cela de moi.
Mme Lavoie-Roux: On va les accepter sous condition.
Le Président (M. Jolivet): Donc, le programme 7 est
adopté.
Mme Lavoie-Roux: Vous ferez le message, par exemple.
M. Lazure: Oui, je vais faire le message.
Développement social
Le Président (M. Jolivet): Oui, le ministre va le faire.
Le développement social, programme 14. Est-ce que vous commencez par
l'Office des personnes handicapées?
M. Lazure: On va passer au développement social, si vous
le permettez?
Le Président (M. Jolivet):
Développement social, allons-y pour le programme ... C'est
seulement le programme 14?
M. Lazure: Oui. Le développement social.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lazure: Les crédits sont évidemment inclus dans
les crédits globaux du Conseil exécutif que vous avez
discutés cet après-midi avec le premier ministre. Je suis
prêt à répondre à des questions si l'Opposition en a
sur la partie des crédits de l'Exécutif qui sont affectés
au développement social. Pour guider un peu la discussion, on peut les
diviser. Ce ne sont pas des crédits énormes, la partie qui touche
le ministère d'État au développement social.
Mme Lavoie-Roux: Vous en auriez un comme cela, M. le ministre,
pour nous?
M. Lazure: J'en ai seulement un là. J'en ai un pour le
ministère, ce qu'on
appelle le Secrétariat au développement social. Ce sont
des documents de travail.
Mme Lavoie-Roux: J'appuie le député de Vachon.
M. Lazure: Je suis sûr que cela vous intéresse. Je
tiens pour acquis que cela vous intéresse. Je n'ai pas d'objection
à donner des copies mais je n'en ai pas. Demain, dès demain. Ce
n'est pas malin, le premier des deux documents, encore une fois,
énumère les dépenses du développement social qui se
chiffrent pour la partie des fonctionnaires, si vous voulez, la fonction
publique, secrétariat, à 600 000 $ par année, tandis que
l'autre partie est une dépense de 370 000 $ qui touche les membres du
cabinet. M. le député de Jean-Talon a l'air de dire que c'est
bien raisonnable.
M. Rivest: Je ne savais pas que c'était pour les membres
du cabinet...
M. Lazure: J'ai toujours eu confiance à son jugement.
M. Rivest: ...vraiment.
Mme Lavoie-Roux: Combien y a-t-il de membres dans votre cabinet,
M. le ministre?
M. Lazure: Pour ce qui est de 1981-1982, l'année fiscale
courante, il y a trois personnes dans mon cabinet. Il y a un chef de cabinet
qui s'appelle Mme Nicole René, il y a un attaché de presse qui
s'appelle Normand Saint-Hilaire et une attachée politique qui s'apppelle
Anne Bernard. Trois personnes.
Mme Lavoie-Roux: Trois fidèles.
M. Lazure: Voilà, qui étaient au ministère
des Affaires sociales que vous connaissez bien.
Mme Lavoie-Roux: Le montant de 300 000 $, c'est pour vous et ces
trois membres?
M. Lazure: Non, il y a du personnel de soutien. Je vous ai
donné le nom des membres du cabinet qui sont affectés directement
au ministère d'État au Développement social, ici à
Québec. Comme vous le savez, dans le budget de chaque ministère,
on inclut, aussi le personnel politique qui fait équipe avec le
ministre-député. Donc, en plus des trois personnes que je viens
de nommer, il y a aussi trois personnes qui travaillent dans le comté.
Il y a quelques personnes qui sont du personnel de soutien. Dans le moment, ici
à Québec, il y a deux secrétaires, il y a un
commissionnaire; deux secrétaires et un commissionaire, c'est tout.
Mme Lavoie-Roux: Cela va, ça va. C'était seulement
pour vous...
M. Lazure: Adopté?
Mme Lavoie-Roux: On peut bien les adopter, mais on va poser des
questions après, parce que, de toute façon, ils vont être
adoptés. Là, ce n'est pas tout de suite l'office.
M. Lazure: Non.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Est-ce que le ministre pourrait nous
dire quels sont les objectifs - comment on appelle ca? - du ministère
d'État au Développement culturel...
M. Lazure: Social.
Mme Lavoie-Roux: ...social, pour l'année 1981-1982? Quels
sont vos objectifs?
M. Lazure: L'objectif principal demeure toujours celui d'assurer,
au nom du Conseil des ministres, la plus grande cohérence possible, la
plus grande logique possible entre des programmes ou les projets de
législation qui vont émaner de différents
ministères qui ont une vocation sociale. Il y a huit ministères
à part le nôtre qui font partie du comité de
développement social.
Quant aux thèmes qui vont retenir notre attention plus
spécialement au cours de l'année qui vient, il y a la
continuation de certains travaux qui sont déjà commencés,
touchant la sécurité du revenu, en particulier l'aide sociale. Il
y a un groupe de travail qui est à l'oeuvre depuis environ un an. On
devrait compléter pour cet automne, dans quelques mois, les travaux.
Il y a aussi toute la partie sécurité du revenu, mais,
cette fois, pour les personnes âgées. On a déjà
rendu public un document préliminaire, il y a environ quatre ou cinq
mois. Nous continuons à élargir le champ des études du
ministère d'État au Développement social à tout ce
qui touche la sécurité du revenu des personnes
âgées, particulièrement les régimes de retraite
publics et les régimes de retraite privés. Cela inclut
l'âge de retraite, cela inclut la préretraite, cela inclut la
transférabilité des plans de retraite. Effectivement, ce sont les
deux principaux dossiers qui continuent d'être très actifs et qui
sont déjà commencés.
Un troisième, c'est celui du supplément au revenu de
travail. Il existe depuis déjà deux ans et demi environ un
régime de supplément financier au revenu de travail pour le bas
salarié. Ce régime de supplément au revenu de travail est
en train d'être évalué par nos équipes à la
fois pour évaluer l'impact que cela a eu, mais aussi dans le
but d'y trouver certaines améliorations. Finalement, dans les
nouveaux objectifs, les nouveaux thèmes qui vont faire l'objet de nos
études, il y a ce vaste mandat d'une politique de la famille.
Nous avons eu des travaux préliminaires de la part du Conseil des
affaires sociales et de la famille depuis environ un an et demi. L'objectif du
gouvernement, par le biais du développement social, est d'en arriver
à formuler une politique gouvernementale de la famille. Ce sont
essentiellement les principales questions qui retiennent notre attention. C'est
déjà une grosse commande.
M. Rivest: Où allez-vous prendre les crédits?
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne sais pas si le
ministre a pris connaissance du rapport de l'OPDQ, du Conseil de planification
et de développement du Québec, sur les inégalités
socio-économiques et le marché du travail.
M. Lazure: Je ne l'ai pas lu de la première à la
dernière page, mais je sais de quoi il s'agit.
Mme Lavoie-Roux: Je ne vous ferai pas la lecture, vous allez
certainement trouver le temps de le faire; on indique que la part du revenu des
pauvres au Québec est substantiellement inférieure à la
part moyenne du revenu des pauvres des pays industrialisés. On dit
qu'environ 1 000 000 de Québécois vivent sous le seuil de la
pauvreté, dont près de 600 000 arrivent à peine à
satisfaire leurs besoins élémentaires. Plus de 500 000 personnes
sont assujetties au régime de l'aide sociale et les jeunes
chômeurs, les familles monoparentales, ainsi que les veuves viennent en
grossir les rangs. Près de 300 000 Québécois - cela a
dépassé les 300 000 maintenant - sont en chômage.
M. Lazure: C'est basé sur les statistiques de quelle
année?
Mme Lavoie-Roux: Je l'ai reçu aujourd'hui. En tout cas, il
y a plus de 300 000 chômeurs, si c'est cela que vous voulez diminuer, M.
le ministre.
M. Rivest: Un bon qouvernement!
M. Lazure: Je soupçonne que c'était en 1975.
Mme Lavoie-Roux: Voyons donc! M. Rivest: 200 000 en
1976.
M. Lazure: Basé sur des études
démographiques de quelle année?
Mme Lavoie-Roux: Écoutez...
M. Lazure: C'est parce qu'il y a toujours un décalage d'au
moins quelques années, deux, trois ou quatre ans.
Mme Lavoie-Roux: Attendez, si vous voulez que j'aille voir la
bibliographie. En tout cas, ils l'ont déposé aujourd'hui. Ces
recommandations datent du 21 mai 1981.
M. Lazure: Les recommandations du rapport d'aujourd'hui, oui
d'accord. La question...
Mme Lavoie-Roux: Adopté à la 42e assemblée
régulière du 19 mai 1981. Je pense que cela regarde votre
gouvernement, M. le ministre.
M. Lazure: Oui, sans doute.
Mme Lavoie-Roux: Ce qui est intéressant ou qui est
inquiétant plutôt, c'est que, quand on fait la part du revenu des
pauvres au Québec par rapport au Canada -je laisse de côté
les pays industrialisés - la part du revenu, avant impôt, des 20%
de la population la plus pauvre est de 5,9%, en Allemagne - on cite un certain
nombre de pays, les États-Unis, la France, etc. - de 3,9% au Canada et
de 3,7% au Québec. C'est d'ailleurs ce qu'on avait trouvé
également dans l'étude du Conseil canadien de
développement social - le ministre s'en souviendra - de décembre
ou de l'automne 1979 où, finalement, c'étaient les femmes du
Québec qui étaient les plus pauvres, même après le
Nouveau-Brunswick et d'autres provinces des Maritimes, ce qui est était
assez étonnant, et la plupart des provinces, je pense au moins cinq ou
six provinces sur dix paient un supplément de revenu à leurs
personnes âgées, à part le Régime de
sécurité de vieillesse et le supplément au revenu
garanti.
Ensuite, on ajoute un peu plus loin: "Les plus démunis face au
marché du travail commencent d'ailleurs à souffrir des coupures
budgétaires et des contrôles bureaucratiques de plus en plus
nombreux qui leur sont imposés, ce qui, en l'absence d'une politique de
main-d'oeuvre et d'une politique de plein emploi, élargit davantage les
inégalités." Je pense que c'est un problème qui est
posé d'une façon globale. Le ministre va dire: On est à
évaluer le régime de sécurité du revenu. Où
en êtes-vous dans vos travaux? De quelle façon ceci va-t-il
apporter une solution au problème qui est ici? Enfin, quand le
gouvernement entend-il agir? C'est vrai que, dans un cas de coupures
budgétaires, c'est souvent les plus démunis qui écopent.
On l'a vu par exemple...
M. Lazure: M. le Président, il est vrai, surtout si on
regarde le groupe des personnes âgées au Québec, que tout
près des deux
tiers ont besoin, pour justement se maintenir à peu près
au seuil de la pauvreté ou juste au-dessus, du supplément au
revenu garanti. C'est une constatation. Cela ne découle pas des actions
du gouvernement du Parti québécois; c'était la même
constatation, en 1975, sous le gouvernement libéral.
Nous avons posé des actes quand même pour améliorer
le sort de ces personnes âgées, depuis 1976. Exemple, le programme
de Logirente qui apporte à environ 27 000 ou 28 000 ménages de
personnes âgées une assistance financière mensuelle pour
leur permettre de continuer à habiter dans leur logement et, en
même temps, de pouvoir profiter, de façon moins minimale, de
certaines choses de la vie. C'est un programme que le gouvernement a
l'intention d'étendre, puisqu'il a bien démarré et qu'il
est populaire. Il aide plusieurs milliers de personnes âgées. Nous
avons pris l'engagement, durant la campagne, de l'étendre aux 55 ans et
plus et nous allons le faire.
Deuxième exemple d'action prise depuis quelques années
pour les personnes âgées qui sont encore plus démunies au
plan financier, la construction d'habitations à loyer modique. Nous
avons construit, en quatre ans, plus de deux fois le nombre de logements...
Mme Lavoie-Roux: C'est inexact.
M. Lazure: ... qui avaient été construits par le
Parti libéral, par le gouvernement du Parti libéral de 1973
à 1976. Je vous mets au défi de prouver le contraire.
M. Rivest: Vous n'avez pas le droit de lancer un défi,
c'est interdit par le règlement.
M. Lazure: De 1973 à 1976, le gouvernement Bourassa a
complètement négligé la construction des habitations
à loyer modique.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends que le premier ministre vous ait
mis sur la voie d'évitement, vous n'avez pas encore changé.
M. Lazure: Oh! cela, ce n'est pas... D'habitude, vous êtes
plutôt correcte. (20 h 30)
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais je trouve que vous aussi, vous
charriez, M. le ministre.
M. Lazure: Mais démontrez-moi avec des chiffres que cela
n'est pas exact.
Mme Lavoie-Roux: On les a eues assez longtemps, ces discussions,
franchement.
M. Lazure: Je parle des habitations à loyer modique, des
HLM. Allez chercher les chiffres à la Société d'habitation
du Québec.
M. Rivest: Actuellement, ils sont plus occupés à
autre chose.
M. Lazure: Vous avez beaucoup d'entrées, vous pouvez avoir
des bons contacts. Allez chercher les chiffres de logements construits de 1973
à 1976 et comparez 1977 à 1980-1981. Vous allez voir qu'on en a
construit deux fois plus que ce qui avait été construit.
Troisièmement, et c'est peut-être à cela, de
façon anticipée, que réagissait la députée
de L'Acadie, j'allais parler des centres d'accueil.
Mme Lavoie-Roux: Allez-y, on va vous écouter.
M. Lazure: Et je ne vais pas citer de chiffres. La
députée de L'Acadie sait fort bien que nous avons, dans l'espace
de trois ou quatre ans, construit beaucoup plus de centres d'accueil pour
personnes âgées, dont la santé physique ou mentale est
diminuée, qu'il ne s'en était construit dans les trois, quatre ou
cinq ans auparavant. Beaucoup plus.
M. le Président, j'ai donné quelques exemples, en
réponse à la question de la députée de L'Acadie.
Qu'est-ce que le gouvernement actuel fait pour soulager les difficultés
financières de nos personnes âgées? J'ai donné trois
exemples. Nous avons l'intention de continuer. Par exemple, nous avons
déposé un projet de loi qui, dans un premier temps, va au moins
abolir la discrimination quant à l'âge de la retraite. Si la
personne, à 65 ans, a encore la santé physique, mentale, la
motivation pour travailler, qu'au moins on la laisse travailler pour qu'elle
maintienne un certain niveau de revenu. Dans un deuxième temps, nous
avons l'intention, à l'automne, d'améliorer les conditions pour
permettre la retraite anticipée, en particulier pour la personne de 60
ans qui a travaillé plusieurs années et qui a un degré
d'invalidité de 25% ou moins, qui a droit de prendre une retraite avec
une prestation d'invalidité non pas de 25%, mais de 100%.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Juste un instant. Mme la
député de L'Acadie et, ensuite, M. le député de
Vachon.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je trouve amusant de
voir le ministre éviter le problème de fond. Vous pouvez bien me
parler de toutes les lois que vous avez adoptées depuis 1976. Le
problème avec lequel je vous confronte, c'est que les gens sont plus
pauvres au Québec qu'ailleurs. Vous dites que c'était la
même chose avant 1976. Mais avant 1976, il n'y avait pas 300 000
chômeurs au Québec. Avant 1976, les revenus des
bénéficiaires de l'aide sociale étaient en bas du seuil de
la pauvreté. Mais ils sont encore plus loin du seuil de la
pauvreté depuis que vous êtes au pouvoir qu'ils ne
l'étaient auparavant. Depuis 1976, pourquoi le Québec
éprouve-t-il autant de difficultés? Pourquoi, à l'heure
actuelle, où, d'une part, vous essayez de composer et de faire
dévier la discussion, les déficits sont-ils si grands? C'est par
un manque d'entrées de revenus. Ce sont des faits réels.
Alors, demain, on va discuter de la loi sur l'âge de la retraite
et sur la retraite flexible, parfait, mais ce que je vous dis, c'est qu'on est
ici, au Québec, avec 300 000 chômeurs, avec des gens plus pauvres
au Québec que dans le reste du Canada, avec des femmes
âgées plus pauvres ici que dans le reste du Canada. Je vous
demande ce que vous allez faire. Vous me répondez: On a fait tant de
logements. C'est une chose, mais, pour régler le problème
fondamental, qu'est-ce que vous allez faire?
M. Lazure: M. le Président, je pense que c'est fondamental
qu'on donne à la personne âgée la chance d'être
logée dans un habitat convenable.
Mme Lavoïe-Roux: On ne s'obstine pas là-dessus.
M. Lazure: Les besoins fondamentaux, c'est être
logé, nourri, habillé.
Mme Lavoie-Roux: II faut avoir de quoi se nourrir.
M. Lazure: Je suis surpris que la députée de
L'Acadie trouve cela secondaire, l'habitation. Cela m'étonne
beaucoup.
Mme Lavoie-Roux: II n'a pas changé.
M. Lazure: En plus, M. le Président, quand on dit que les
personnes âgées au Québec ont les revenus les plus bas au
Canada, il faut ajouter aux revenus nets, en espèces sonnantes, les
services qui sont gratuits pour les personnes âgées. Nous avons au
Québec un plus grand nombre de services gratuits ou quasi gratuits que
dans la plupart des autres provinces. Par exemple, le programme Logirente, il
n'existe que dans deux autres provinces au Canada, en Saskatchewan et au
Manitoba. Il y a plusieurs programmes qui coûtent plusieurs millions de
dollars par année. Si on faisait la transposition de ces montants on se
rendrait compte que, finalement, il n'est pas exact de dire que la personne
âgée est celle qui est la plus mal en point au Canada. Il faut
tenir compte des programmes sociaux, des programmes de santé qui ne sont
pas comptabilisés dans les chiffres qui sont donnés par la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président. Mais on a droit à
20 minutes, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, ce n'est pas ça.
C'est parce que j'entendais trop de bruit pour le moment. Mme la
députée de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre est un peu
dérouté par ce qu'il pense être un manque de souci de ma
part à l'égard des personnes âgées. Je comprends que
c'est de bonne guerre de dire ça. D'abord, il faudrait rappeler au
ministre que la population des personnes âgées continue de
s'accroître, et je ne reviendrai pas sur les vieux débats. Le
problème que j'ai posé, c'est pour l'ensemble de la
société québécoise, M. le Président. Qu'on
construise des places en centres d'accueil, parfait, Logirente dans la mesure
où il s'applique à un nombre... Là je demanderais au
ministre s'il a l'intention de le réviser parce que ça touche
vraiment à un nombre beaucoup plus petit que ce qu'on croyait. C'est
dans l'ensemble, et je vois bien que le ministre n'a pas de réponse et
qu'il fait de la diversion sur des choses qui sont bonnes en elles-mêmes
et avec lesquelles on est d'accord, mais je pense que le problème
réel, le problème social du Québec, c'est un
problème qui, j'en suis sûre, tracasse le ministre, c'est vraiment
la pauvreté d'une grande partie de notre population. Des personnes
âgées, on peut s'en parler longtemps, on s'en est
déjà parlé longtemps en d'autres circonstances, mais
ça touche l'ensemble de la population.
Vous avez ici 250 000 jeunes qui cherchent de l'emploi au Québec.
L'écart de chômage chez les jeunes entre le Québec et
l'Ontario était de 5,9% pas plus tard que l'automne dernier. Il y a une
légère baisse, l'écart s'est rétréci un peu.
Cet écart existe depuis 1976, il est très grand. Je veux bien que
le ministre nous parle de toutes ses bonnes choses, mais il reste qu'il y a
quand même une réalité. D'ailleurs, c'est ce qu'on signale.
Dans ce rapport-là on met beaucoup l'accent sur le fait que les plus
vulnérables dans la situation économique et sociale du
Québec présentement, ce sont les jeunes, les femmes et les
personnes handicapées. C'est dans ce sens-là que je demandais au
ministre quel est son plan d'ensemble à l'égard de... Je pense
bien qu'il n'y en a peut-être pas beaucoup.
M. Lazure: M. le Président, juste brièvement. La
députée de L'Acadie en a pour tout le monde, elle commence avec
les personnes âgées, ensuite elle parle des jeunes.
Mme Lavoie-Roux: Non, j'ai parlé des trois au
début.
M. Lazure; Vous avez parlé de la performance
économique mais je veux simplement rappeler à la
députée de L'Acadie ce qui a été rappelé
à nos adversaires politiques durant la campagne et qui ne leur faisait
pas plaisir. L'éditorial du journal de Toronto, le Financial
Times...
M. Rivest: Ah non! Ne nous arrivez pas avec ça.
M. Lazure: Mais oui, mais oui. M. Rivest: C'est ridicule.
M. Lazure: ...qui disait...
Mme Lavoie-Roux: Où vous en aviez coupé la
moitié!
M. Lazure: Je ne vous ai pas interrompue! Cela fait mal.
Mme Lavoie-Roux: Cela ne fait pas mal du tout! Non, continuez,
continuez!
M. Lazure: L'éditorial du journal financier de Toronto,
qui s'appelle Financial Times, a répété, ils ont
même récidivé quelques mois avant l'élection, et le
titre, à toutes fins utiles, ça voulait dire que la meilleure
performance économique au Canada...
M. Rivest: 300 000 chômeurs.
M. Lazure: ...c'est au Québec depuis trois ans...
M. Rivest: C'est plus qu'un titre, ça c'est du monde.
Occupez-vous en.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, s'il
vous plaît!
M. Lazure: Le député de Jean-Talon grimpe dans les
rideaux, M. le Président, il faut le retenir.
M. Rivest: Bien, 300 000 chômeurs ça suffit,
monsieur!
M. Lazure: M. le Président, personne de l'autre
côté de la table ne peut nier que le rendement économique
du Québec depuis trois ans, sous le gouvernement du Parti
québécois, a été supérieur à celui de
toutes les provinces du Canada sauf l'Alberta et je termine
là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vachon.
M. Payne: Je ne voulais pas intervenir, M. le Président,
mais, lorsque j'entends les propos de la députée de L'Acadie,
j'aimerais citer quelques exemples de réalisations en ce qui concerne la
performance sociale.
Je vois que, entre 1969 et 1976, si on veut inscrire quelque chose au
procès-verbal, il y a eu 19 000 logements sociaux de construits. Il y en
a maintenant plus de 33 000 de construits et 14 000 en voie de construction.
Cela exclut le programme de LOGIPOP qui vise les coopératives
d'habitation. Aussi un autre exemple, soit le programme de supplément au
loyer ainsi que le remboursement d'impôt foncier et, finalement, le loi
107 qui vise à créer la Régie du logement.
De plus, le ministre a mentionné la question de lits dans les
centres d'accueil. C'est assez extraordinaire, la performance sociale. Il y
avait, si ma mémoire est fidèle, jusqu'à 1976, pas plus de
46 lits de créés par année dans les centres d'accueil.
M. Lazure: Par année, pendant trois ans.
M. Payne: Également, si ma mémoire est
fidèle, 1231 lits par année ont été
créés par le gouvernement actuel depuis 1976. M. le
Président, je m'adresse à la députée de L'Acadie
pour son édification.
Mme Lavoie-Roux: Voulez-vous que je recommence la guerre des
chiffres? Vous avez assez menti là-dessus, M. le Président, qu'on
va faire une guerre pour aller chercher les chiffres qui viennent du
ministère des Affaires sociales et qui prouvent que c'est absolument
faux ce que vous avancez, M. le député de Vachon.
Le Président (M. Jolivet): Mais madame, d'une façon
ou d'une autre le député de Vachon...
Mme Lavoie-Roux: II a droit de le dire, mais j'ai droit de dire
que c'est faux.
Le Président (M. Jolivet): Je n'ai pas dit qu'il avait le
droit de le dire; j'allais simplement dire qu'il avait le droit de parole.
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Vachon.
Mme Lavoie-Roux: J'ai...
M. Payne: Je vois que c'est très difficile de faire face
à la réalité en ce qui concerne la performance sociale. Je
termine en disant qu'il y avait à ce moment-là...
Mme Lavoie-Roux: ... les commissionnaires du cabinet.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît;
M. Payne: ...au delà de 6000 lits de créés.
Je demanderais au ministre...
M. Rivest: Ce n'est pas une période
d'autogratification.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît!
M. Payne: J'étais pour dire qu'il y avait 6000 lits de
créés dans les 71 nouveaux centres d'accueil. À mon humble
avis, c'est une réalisation sociale d'envergure dont je suis très
fier.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Berthier, si j'ai bien compris, vous avez une question à poser. Il ne
faudrait pas oublier, cependant, que nous avons encore le programme 14 à
regarder et qu'il reste environ 15 minutes.
M. Rivest: On va prendre le temps qu'il faut.
Le Président (M. Jolivet): Cela ne me dérange
d'aucune façon, chers députés, on finira à 2 heures
plutôt qu'à 1 heure.
M. Houde: Merci, M. le Président. Étant
donné que c'est l'année des handicapés... J'y
reviendrai.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voulais simplement
demander au ministre, maintenant que je réalise bien que le
député de Vachon est le commissionnaire du cabinet... On l'a vu
avec le Dr Laurin, on le voit maintenant avec le ministre d'État au
Développement social.
M. Rivest: C'est la déformation des gens qui ont...
Mme Lavoie-Roux: ... qui ont été trop longtemps
dans le bureau des ministres d'État.
Je voulais demander au ministre s'il a l'intention de modifier le
régime de supplément du revenu au travail pour que les familles
avec trois enfants y aient accès.
M. Lazure: M. le Président, j'ai dit tantôt qu'une
étude est en cours non seulement pour l'évaluation du programme
à ce jour, mais aussi en vue de l'améliorer. Quand je dis
l'améliorer, une des possibilités, c'est justement de
l'étendre aux clientèles dont vous parlez, mais ce n'est pas
décidé.
Mme Lavoie-Roux: Dans le rapport du Vérificateur
général, il y avait une note disant qu'il y avait eu du
trop-versé, de mémoire, de l'ordre de quelque 2 000 000 $ au
régime de supplément du revenu de travail. Est-ce que le ministre
peut nous dire quelles en sont les raisons?
M. Lazure: II y a plusieurs raisons. Dans certains cas, les gens,
de bonne foi, n'ont pas déclaré tous les revenus, un peu comme
à l'aide sociale. Il arrive parfois que des déclarations, de
bonne foi, soient incomplètes ou inexactes. Dans ces cas, on fait
arrangement avec la personne pour qu'il y ait une compensation. Dans d'autres
cas, il a pu y avoir erreur de la part de l'administration. Là aussi,
comme pour l'aide sociale, les gens ne seront pas obligés de rembourser
si l'erreur est la nôtre plutôt que la leur. La principale raison a
été la non-déclaration de revenus qui n'étaient pas
perçus au moment où la personne faisait sa déclaration,
mais qui auraient dû être anticipés et qui sont venus par la
suite.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces sommes ont été
récupérées?
M. Lazure: Une partie sera récupérée
là où les revenus n'étaient pas exacts, selon la
déclaration, et quand les gens eux-mêmes conviennent que ce
n'était pas exact; alors, ce sera récupéré sur une
certaine période.
Mme Lavoie-Roux: Le ministre n'a peut-être pas ce
renseignement ce soir, mais s'il pouvait nous indiquer le nombre de personnes
qui ont pu se prévaloir de Logirente et le nombre de personnes qui
sont... (20 h 45)
M. Lazure: Logirente, c'est environ 27 000 ménages.
Mme Lavoie-Roux: Quelles avaient été vos
prévisions?
M. Lazure: C'était plus, mais je ferai remarquer à
la députée de L'Acadie que je ne suis pas le ministre responsable
de ce programme. C'est de mémoire...
Mme Lavoie-Roux: C'est parce que vous l'avez mentionné.
C'est pour cela que je vous en parle.
M. Lazure: Je sais fort bien que les prévisions
étaient plus élevées, peut-être que c'était
entre 30 000 et 35 000. On a atteint 27 000 me dit-on.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, je n'ai pas d'autres questions
sur cette partie du budget. On reviendra l'an prochain pour examiner la
performance du ministre qui
vient d'être consacré dans son nouveau rôle.
Le Président (M. Jolivet): Programme 14, Direction et
gestion de l'Office des personnes handicapées du Québec.
M. le député de Berthier.
M. Houde: Merci, M. le Président. Comme je le disais
tantôt, étant donné que c'est l'année des
handicapés, je me dois...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai eu un oubli. Est-ce
qu'on me permettrait de revenir sur une question?
M. Lazure: Oui, bien sûr. Toujours aussi souple de ce
côté.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît. Nous
pouvons revenir au député de Berthier.
Mme Lavoie-Roux: Non. Je voulais demander au ministre, lui qui
dit - je ne mets pas cela en doute - qu'il y a une politique sociale pour
l'ensemble des citoyens du Québec, et que, justement, ce rapport fait
état de la pauvreté d'un grand nombre et qu'on entend
également parler de la possibilité que le gouvernement introduise
un ticket modérateur pour les services de santé, si le ministre
pourrait nous dire de quelle façon ceci se concilie,
particulièrement, avec ses objectifs à lui qui, j'en suis
sûre, doivent être de rendre accessibles le plus possible les
services de santé et les services sociaux justement à cette
population qui est une population démunie, et à celle qui est
moins démunie, mais dont les revenus aussi sont modestes.
M. Lazure: M. le Président, mon commentaire sera
très bref et je vais répéter la réponse du premier
ministre à l'Assemblée nationale il y a quelques semaines quand
cette question des frais modérateurs a été soulevée
par un membre de l'Opposition. Le premier ministre a fait d'abord remarquer que
c'était une question à l'étude, une question fort complexe
et que si jamais le gouvernement appliquait des frais modérateurs, le
gouvernement ferait en sorte que cela ne pénaliserait pas les plus
démunis de la société.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes quand même ministre
responsable du Développement social, quelle est votre opinion à
vous?
M. Lazure: Je trouvais cela curieux que vous ne me l'ayez pas
demandée.
Mme Lavoie-Roux: J'ai voulu rester dans le général,
mais...
M. Lazure: Mon opinion est connue. On n'a pas encore
démontré - c'est pour cela qu'on a besoin de plus d'études
à mon avis -qu'il y avait un abus significatif des services
médicaux. Je vais m'en tenir aux services médicaux, parce qu'un
frais modérateur à la Régie des loyers, ce genre de ticket
modérateur, je pense que ce n'est pas du tout comparable au frais
modérateur quand il s'agit de services de santé. À mon
avis, la preuve n'est pas faite qu'il y a abus, sauf pour le cas individuel que
chacun ou chacune peut citer, dans sa famille ou dans son voisinage, d'une
tante, d'une belle-soeur ou d'une voisine qui va trop souvent chez le
médecin. Si la voisine va trop souvent chez le médecin, il faudra
peut-être s'arrêter et examiner pour voir si elle n'est pas
à la recherche d'un service qui peut être un service social - la
députée de L'Acadie comprend bien à quoi je fais allusion,
puisqu'elle a pratiqué le service social - ou un service psychologique.
Il ne faut pas tenir pour acquis que la personne qui va chez le médecin,
à l'hôpital ou au cabinet du médecin, et à qui,
après l'examen objectif ou l'examen radiologique, peu importe, le
médecin dit: Je ne trouve rien, n'a pas une souffrance quelconque,
qu'elle soit physique ou psychologique. Cela ne veut pas dire qu'elle n'a pas
besoin d'un service. Très souvent, quand chacun cite ces cas
folkloriques d'abus de recours aux services médicaux, il s'agit de
personnes qui ont des problèmes réels mais qui ne sont pas
perçus dans un examen physique médical objectif.
Premièrement, je ne suis pas convaincu qu'on a un abus important
de recours aux services médicaux. Deuxièmement, même si on
avait un abus, je ne suis pas sûr qu'imposer un ticket modérateur,
en soi, diminuerait ces abus-là. L'expérience a été
faite ailleurs. En Saskatchewan, par exemple, ils ont eu l'assurance
complète pendant plusieurs années, hopitalisation et
médicale, et, pendant trois ans, ils ont payé le ticket
modérateur de 1968 à 1971. Ils l'ont retiré depuis 1971 et
toute la documentation qui sort de la Saskatchewan démontre que le
ticket modérateur avait pénalisé principalement les plus
démunis dans la société. En effet, si vous mettez votre
frais modérateur assez élevé pour qu'il diminue la
consommation, à ce moment-là, il fait mal aux gagne-petit et,
s'il n'est pas tellement élevé, il n'empêche pas la
consommation excessive.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: J'ai une question additionnelle. Ce que vous venez
d'exprimer, finalement, vous l'aviez exprimé, et cela a fait la
manchette d'un grand quotidien, en disant que vous étiez contre le
ticket modérateur.
M. Lazure: Une précision: J'exprimais des
réserves.
M. Rivest: Vous étiez contre, de toute façon, et je
pense bien que ce soir aussi, si on lit à travers les lignes. Pourquoi
ne le dites-vous pas pour alimenter la discussion avec votre collègue,
le ministre des Finances? Ce serait public, avec toute la transparence et plus
clair.
M. Lazure: Je viens de le dire, au moment où on se
parle.
M. Rivest: Vous faites un grand détour avec toutes sortes
de phrases. Le leader parlementaire attend et il avait l'air impatienté
par votre réponse.
M. Lazure: Je vous donne des explications et je pensais qu'avec
votre "curiosité élémentaire vous auriez voulu savoir
pourquoi je n'étais pas d'avis qu'il fallait imposer un ticket
modérateur dans le moment.
M. Rivest: II n'est pas contre, mais il n'est pas d'avis
que...
M. Lazure: Premièrement, j'ai un avis bien clair. Le
député de Jean-Talon a ou bien trop mangé ou pas assez
mangé ou mal mangé, mais, M. le Président, j'ai
exprimé l'avis que la surconsommation n'est pas démontrée,
d'une part, et, d'autre part, que le ticket modérateur n'a pas l'effet
escompté partout où on l'a essayé.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Berthier. Jamais deux sans trois.
Direction et gestion de l'Office des personnes
handicapées
M. Houde: Étant donné que c'est l'année des
handicapés, je parlerai quelques instants de leurs problèmes
à la suite des rencontres que j'ai pu avoir avec eux dans mon
comté. M. le Président, nous avons en face de nous un
gouvernement qui a décidé de réduire la taille de ses
dépenses. Chose étonnante, dans le langage du gouvernement,
l'économie équivaut à des coupures budgétaires
aveugles. J'ai examiné les coupures du ministre des Finances; elles
concernent, dans l'ensemble du secteur des Affaires sociales,
particulièrement la clientèle la plus démunie soit
socialement, physiquement, soit encore financièrement. Pensons aux
enfants inadaptés, défavorisés, aux malades chroniques,
pour ne citer que ces quelques groupes. Alors, que ce gouvernement
social-démocrate - en tout cas, c'est l'image qu'il veut se donner -
admette une chose, que ses coupures représentent un sabrage aveugle dans
des dépenses qui n'auraient dû être touchées qu'en
dernier recours, parce qu'elles touchent les personnes les plus démunies
et les plus faibles. Pour un gouvernement social-démocrate, chapeau.
Le gouvernement sait fort bien que ce ne sont pas les handicapés
et les assistés sociaux qui pourront manifester devant le parlement.
Alors, que fait-il? Il coupe dans leur budget. Cette attitude est empreinte de
lâcheté, d'autant plus que ce gouvernement prétend aider
les handicapés par des campagnes publicitaires. Je regrette, ces
contrats de publicité servent plus les amis du gouvernement que les
handicapés. Il faut croire que le gouvernement, par les temps qui
courent, est lui-même handicapé. Mais revenons aux faits: le
gouvernement aurait-il oublié que la personne handicapée
constitue pour le Québec une ressource humaine au même titre que
les citoyens bien portants? Aurait-il oublié que les invalides ont le
droit d'être traités d'égal à égal et de
participer à l'essor du Québec? Aurait-il oublié que la
personne handicapée a des droits incessibles? Si oui, M. le
Président, et je l'espère, il faudra que le gouvernement
arrête d'abord de faire payer aux plus démunis le prix de son
gaspillage et de ses déficits. Il faudra qu'il apporte
immédiatement les programmes d'aide financière qui feront de la
personne handicapée une personne véritablement autonome. Il
évitera de créer de nouvelles structures administratives et, au
contraire, laissera aux associations de personnes handicapées le soin de
se prendre en main. Il adoptera immédiatement des programmes
spécifiques pour encourager l'intégration de la personne
handicapée au marché du travail. Il adaptera le transport,
l'hébergement, le loisir, l'appareil gouvernemental en fonction d'une
plus grande accessibilité aux invalides. C'est ce qu'il devrait faire
plutôt que de flamber l'argent des contribuables en publicité
tapageuse.
En cette année internationale des personnes handicapées,
laissez-moi adresser un hommage particulièrement chaleureux aux
handicapés pour l'effort formidable qu'ils font pour s'intégrer
à notre monde. C'est à notre tour d'amorcer un changement; c'est
au tour du gouvernement de corriger les erreurs passées et de montrer
à tous les Québécois qu'il n'a pas oublié une
partie importante de la société. M. le Président, c'est au
tour du gouvernement d'agir - je l'espère sincèrement - avec le
plus de célérité possible. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, je suis un peu surpris du ton
du député de Berthier. Je vais mettre cela sur le dos un peu de
l'inexpérience, mais le député de Berthier va
se rendre compte assez rapidement que ce gouvernement-ci, pour les
handicapés en particulier, a pris ses responsabilités. Bien
sûr qu'il reste encore énormément à faire,
énormément. Si on ne regarde que le livre des crédits de
cette année, 1981-1982, on se rend compte que le budget de l'Office des
personnes handicapées du Québec passe de 17 487 000 $ à 19
258 000 $. Je n'appelle pas cela sabrer dans le budget, comme le
député de Berthier le prétendait tantôt. Au
contraire, l'Office des personnes handicapées, de même que
l'Office des services de garde, pour donner un autre exemple, sont deux
organismes gui n'ont pas vu leur croissance ralentie; au contraire, la
croissance continue. C'est le gouvernement actuel du Parti
québécois qui a fait adopter par l'Assemblée nationale la
loi 9, Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées. Une
des conséquences de cette loi, c'est la création de l'office.
Quand le député de Berthier dit que le gouvernement devrait,
plutôt que de faire des annonces, donner le droit de parole aux personnes
handicapées, je vais lui rappeler là aussi...
M. Houde: L'argent.
M. Lazure: ... ce que son expérience encore insuffisante
l'a empêché de savoir; je vais lui rappeler que le conseil
d'administration de l'Office des personnes handicapées est
composé exclusivement, à part Mme la présidente qui est
à ma droite, de personnes handicapées elles-mêmes ou de
parents d'enfants handicapés. Le conseil d'administration de l'Office
des personnes handicapées, en d'autres termes, est aux mains des
personnes handicapées elles-mêmes. Je pense que c'est le plus beau
qeste de confiance qu'un gouvernement peut faire envers les personnes
handicapées. Peut-être qu'on pourrait ajouter quelques
commentaires ou Mme la présidente pourrait les ajouter. Quand il s'est
agi de distribuer certaines sommes d'argent importantes à l'occasion de
l'année des personnes handicapées, nous avons, à 90% ou
95%, suivi les demandes des groupes de personnes handicapées dans tout
le Québec. Je rappelle au député de Berthier que notre
gouvernement a aussi créé, il y a environ deux ans, une
allocation familiale spéciale pour les enfants handicapés qui
habitent à domicile, 66 $ par mois. C'est un geste concret que le
gouvernement du Parti québécois a posé. (21 heures)
Finalement, dans le domaine du transport, là aussi le
député tombe bien mal parce gue depuis un an et demi, ou deux
ans, environ, à la suite de la loi, toutes les commissions de transport
urbaines au Québec - c'est sûr que ce n'est pas complet, que ce
n'est pas idéal - ont maintenant un service spécial de transport
pour les personnes handicapées, et un certain nombre de
municipalités ont aussi ce service de transport.
Le Président (M. Jolivet): Peut-être que Mme la
présidente...
M. Lazure: Peut-être que Mme la présidente peut
ajouter, soit sur le transport ou soit sur...
Il y a peut-être confusion par rapport à
l'élément de la publicité. Dans le cadre de l'année
internationale, le ministère des Communications avait un budqet de 200
000 $ pour la publicité. Or, le ministère des Communications a
fait faire une production audiovisuelle qui est reprise par les médias,
mais gratuitement. Alors, le ministère des Communications ne paie pas de
temps ou d'espace. Le reste de ce budget de 200 000 $ sert à soutenir le
travail des agents de Communication-Québec qui travaillent avec les
associations de personnes handicapées pour leur permettre d'avoir une
meilleure prise sur les médias pendant leur année
internationale.
J'essayais de situer un peu votre intervention par rapport à la
publicité.
Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'ai quelques questions.
Je vais essayer de le faire rapidement. J'aimerais d'abord avoir des
explications sur le pourcentaqe du budget total du programme qui est
consacré à la direction et à l'administration. Selon mes
calculs, il y aurait 20% du budget total qui serait consacré à
l'administration et à la direction. Si je me trompe, je rectifierai.
Ceci me semble élevé dans le budget global. Première
question.
Deuxième question, nous avons assisté, le 8 mai dernier,
à la démission des 23 représentants régionaux des
handicapés du Québec du Comité québécois
pour l'Année internationale des handicapés. Je voudrais, d'une
part, dans le budqet qui a été alloué, je pense que
c'était 1 000 000 $ qui avaient été alloués
directement à l'office pour l'année internationale...
M. Lazure: Pour l'année internationale, 700 000 $.
Mme Lavoie-Roux: Comment cette somme a-t-elle été
distribuée et à quels organismes l'a-t-elle été? Et
selon quels critères? Je reviendrai avec d'autres questions.
M. Lazure: M. le Président, sur le premier volet de la
question, effectivement, si on regarde au sous-programme 03, Direction et
administration, c'est environ
20%. Mme la députée de L'Acadie a raison. Mais il faut
faire attention. Ces 20% du budget total de l'office ne servent pas seulement
à des fins administratives habituelles. Ils servent aussi à des
fins de services. Et je m'explique. Il y a un programme de plans de services
personnels, individuels, aussi bien qu'un programme d'aide matérielle.
Ce sont des programmes qui - et quant à cela, le travail adapté
aussi - sont dispensés par ce personnel qui est soi-disant
administratif. Je pense que le titre du sous-programme n'est pas exact,
lorsqu'on dit Direction et administration, parce que c'est tout le personnel
professionnel, incluant aussi, dans le montant de 4 000 000 $, le 1 000 000 $
d'aide matérielle.
Mme Lavoie-Roux: II y aurait peut-être lieu de le ventiler
pour une autre année.
M. Lazure: Moi, je retiens cette petite discussion et je pense
qu'il y aura lieu de mieux expliquer ce sous-chapitre. Mme la
présidente...
Le Président (M. Jolivet): Vous avez d'autres
questions?
Mme Lavoie-Roux: J'avais deux autres questions.
M. Lazure: Sur les 500 000 $?
Mme Lavoie-Roux: Sur les 500 000 $. À quels organismes?
S'il y a une liste que vous pouvez nous remettre, cela simplifiera. On n'a
même pas besoin d'en parler.
M. Lazure: On pourra la remettre, la liste.
Cela a déjà été rendu public il y a trois
semaines environ, par communiqué de presse. Mais je vous envoie les
détails.
Mme Lavoie-Roux: Quels étaient les critères?...
C'est cela qui a fait l'objet de critiques, j'imagine, et c'est relié
à la démission des 23 personnes; c'est un des facteurs
reliés à la démission.
M. Lazure: II y a eu beaucoup de malentendus et de quiproquos. Il
y a eu 700 000 $ alloués à l'année internationale, 200 000
$ au ministère des Communications, 500 000 $ administrés par
l'office pour des projets réalisés par des personnes
handicapées et on a, nous, formé - c'était le désir
de notre conseil d'administration - un comité québécois de
l'année internationale. Chacune des régions du Québec - on
pensait qu'on en aurait onze, mais il y en a eu vingt-trois -s'est
formée, avec ses associations, un comité régional de
l'année internationale. Ce comité régional de
l'année internationale a nommé au comité
québécois de l'année in- ternationale des
représentants, contrairement au comité fédéral qui,
lui, fut formé à la suite de nominations politiques faites par la
ministre de la Santé et du Bien-être. Ces personnes, plus des
représentants des associations provinciales, après consultation -
nous leur avons fait des propositions et ils y ont apporté beaucoup de
corrections - ont élaboré des critères d'attribution de
ces projets de l'année internationale.
Ensuite, à la demande générale, nous avons fait un
découpage de cette enveloppe: 100 000 $ sur l'exercice financier
précédent et 400 000 $ dans l'actuel, et on a donné
à chacun des comités une enveloppe régionale qui contenait
un budget de fonctionnement pour le comité de l'année
internationale, budget qui court toujours et qui a été
versé. La première tranche de 100 000 $ a été
attribuée très tôt en 1981. La deuxième tranche des
400 000 $ est distribuée et je pense que les chèques sont partis
cette semaine parce qu'on en a reçu copie. Il y a eu un retard dû
aux élections et au Conseil du trésor. Par ailleurs, ce sont les
associations elles-mêmes qui nous ont fait des recommandations, qui ont
approuvé les projets, qui avaient approuvé les critères et
on a respecté leurs recommandations à 90% ou 95%. Toute cette
information-là était dans les communiqués de presse qu'on
a émis il y a deux semaines environ et dont je vous envoie copie. C'est
fait par région et c'est fait à l'échelle provinciale
aussi.
Il reste quelques grenailles, des projets qu'on avait refusés
où les gens sont revenus en disant: Reconsidérez-les. Alors, il
reste quelques milliers de dollars pour nettoyer tout ce montant d'argent.
Alors, les démissions des délégués au
comité québécois, je pense qu'elles sont dues à une
certaine insatisfaction d'un mode de travail à cause d'un trop grand
nombre de personnes qui ensuite se sont beaucoup plus intéressées
au partage des sommes d'argent et à retourner dans leur région
faire chacun son projet. Aussi, je comprends très bien que c'est
beaucoup plus satisfaisant pour un groupe qui réunit des associations
dans une région de travailler dans sa région que d'essayer de
travailler à l'échelle provinciale où on a moins de prise
sur les événements et où c'est beaucoup plus exigeant.
Ce qu'on va faire, nous, demain, on va proposer aux personnes qui
restent à ce comité québécois, dont le noyau
principal reste les huit membres du conseil d'administration qui sont, eux,
issus des associations, un programme où on va être plus
dirigistes, plus concrets dans les actions qu'on va proposer.
Le Président (M. Jolivet): Je ne veux pas
empêcher... Oui, mais juste un instant avant parce que je voudrais
clarifier une chose. Je suis obligé de faire respecter le
temps et, au moment où on se parle, on est déjà une
heure et quart en retard.
Mme Lavoie-Roux: II y a une heure qui n'était pas de notre
faute.
Le Président (M. Jolivet): Non, non.
Mme Lavoie-Roux: L'heure d'avant le souper, de la séance
de l'après-midi.
Le Président (M. Jolivet):
Indépendamment de ça, je ne voudrais pas discuter de
ça, je dis simplement que nous sommes une heure et quart en retard. Le
problème qu'on a, c'est qu'on va terminer beaucoup plus tard pour
l'ensemble de ceux qui restent permanents ici à cette
Assemblée.
Mme la députée de L'Acadie, avez-vous d'autres
questions?
Mme Lavoie-Roux: Oui, sur les centres de travail adapté.
Actuellement il y aurait une trentaine de centres de travail adapté au
Québec et certains ne fonctionneraient plus qu'à 10%, dont ceux
de La Sarre, de Rouyn et de Ville-Marie. La présidente peut simplement
nous envoyer les statistiques; ça évitera une réponse trop
longue, si on pouvait avoir les statistiques de l'office sur le fonctionnement
de ces centres. Il y a également des problèmes du même
ordre qui se présentent à Polytech à Sherbrooke, à
l'Atelier des Vieilles-Forges à Trois-Rivières, à
l'Atelier de réadaptation au travail de la Beauce. Le problème
qui est signalé - et vous me corrigerez si je suis dans l'erreur -c'est
une mauvaise coordination entre l'office et les ateliers. Un reproche
général est adressé à l'office gui, selon les dires
de ces personnes, détournerait la loi 9 de son véritable but, la
normalisation, et que l'office privilégierait l'autofinancement à
très court terme des centres de travail adapté plutôt que
leur vocation sociale de réadaptation et de réinsertion, ce gui
mettrait - selon les intéressés, les personnes touchées -
plusieurs CTA dans une situation financière précaire, même
si au départ ils ont été financés par l'office de
la protection des personnes handicapées du Québec. Est-ce qu'il y
aurait actuellement un document de l'office qui circule, expliquant cette
politique ou la nouvelle politique de l'office et, s'il existe un tel document,
est-ce qu'on pourrait en avoir des copies?
M. Lazure: II n'y a pas de nouvelles politiques de l'office,
c'est toujours la même politique, adoptée en mars 1979.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Lazure: II n'y a pas eu de déviation, le ministre peut
vous dire l'objet de la rencontre qui a eu lieu il y a deux semaines avec tous
les CTA.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lazure: M. le Président, nous avons convoqué, la
présidente de l'office et moi, les représentants des 28 centres
de travail adapté, il y a deux semaines, pour une journée
d'étude justement, et on a fait des mises au point. Il y a encore un
certain nombre de centres de travail adapté qui étaient autrefois
des ateliers protégés pour personnes handicapées, qui
continuent d'avoir comme principale fonction une espèce de vocation
sociale. Il faut bien comprendre que, suite à la loi 9, il y a deux
types d'ateliers, de lieux de travail pour des personnes handicapées,
à part le marché réqulier du travail. Il y a le Centre de
réadaptation pour adultes, le CRA, où la personne
handicapée physiquement ou mentalement ne reçoit pas le salaire
minimum, elle reçoit une certaine allocation et c'est une personne qui
n'est pas en mesure de remplir des tâches avec un rendement
significatif.
C'est un lieu de travail où l'approche sociale est
prédominante, où les besoins en réhabilitation
psychosociale priment sur la réhabilitation de travail à
proprement parler, tandis que le centre de travail adapté est
véritablement une entreprise, une PME, il faut se le dire bien
clairement, où la personne est, dans une grande mesure,
réhabilitée, réadaptée. Elle n'a pas, à
cause de son handicap, tout ce qu'il faut pour travailler immédiatement
sur le marché régulier du travail. Cependant, elle peut
travailler avec un rendement de 30%, 50% ou même 75%. Elle reçoit
le salaire minimum, cette personne.
En conclusion, sur ce premier point, il faut que les centres de travail
adapté se voient - et la plupart se voient comme ca -comme des lieux de
travail le plus proche possible du marché régulier du travail.
Deuxième remarque sur la question de la députée de
L'Acadie, notre budget consacre 14 000 000 $ pour environ 1200 places, 1200
personnes handicapées qui fréquentent les centres de travail
adapté, donc tout près de 1200 $ par place par année. Nous
payons en entier le salaire minimum, nous payons aussi les investissements. Il
n'est pas exact de prétendre qu'il y a...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vous ferai remarquer
que ce n'est pas moi qui ai prétendu ca.
M. Lazure: Non, mais certains centres de travail adapté
ont prétendu que le financement n'était pas adéquat. Le
financement est adéquat et il est clair que
nous avons des problèmes de gestion avec quelques-uns des 28
centres de travail adapté, dont, justement, Poly-Tek, de Sherbrooke.
Le Président (M. Jolivet): En terminant...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): ...je vais être
obligé de clore le débat.
Mme Lavoie-Roux: Envoyez-nous-le par la poste, le nombre de
personnes...
M. Lazure: Je vous envoie...
Mme Lavoie-Roux: ... vous allez m'envoyer la liste, je voudrais
avoir le nombre d'enfants handicapés qui sont intégrés
présentement dans les garderies, si possible. Je voudrais vous demander
si la demande de subvention du Comité d'intégration des
handicapés physiques du Québec a été
réglée? C'est une demande qui venait de leur part pour la
formation d'auxiliaires familiales qui, justement, oeuvraient dans des CLSC
pour prodiguer des services à domicile à des personnes
handicapées. Où en êtes-vous dans ce problème de
services à domicile pour les personnes handicapées? (21 h 15)
Un dernier point et après ça, qu'est-ce que vous voulez,
on recommencera l'an prochain, c'est la question des coupures
budgétaires actuellement, qui affectent l'éducation des adultes -
même si le ministre dit que ça ne nous affecte pas - qui affectent
l'éducation des adultes, qui affectent les CSS et qui affectent les
écoles privées qui ont la responsabilité de donner de
l'éducation à des enfants handicapés. On a eu ici des
représentations qui ont été faites par onze écoles
privées qui s'occupent d'enfants handicapés et je pense que, le
ministre en conviendra, ces écoles jouent souvent un rôle
complémentaire par rapport au secteur public qui, à cause de
handicaps multiples, ne peut pas les intégrer.
Du côté de l'éducation des adultes, il y avait des
centres d'éducation, des CTA, qui accueillaient des professeurs, par
exemple, des professeurs de français: ou ces professeurs vont être
rayés à cause des coupures au budget de l'éducation des
adultes. Ce sont les seuls points que je voulais énumérer. Le
reste, c'est à la grâce de Dieu.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Lazure: En conclusion, oui, nous allons fournir le plus de
renseignements possible, je le ferai remarquer à la
députée de L'Acadie, surtout sur les dernières questions,
qui touchent beaucoup plus le ministère de l'Éducation que
l'Office des personnes handicapées, mais la présidente de
l'Office des personnes handicapées va essayer de faire la coordination
pour envoyer le maximum de renseignements à la députée de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Moi, des renseignements, M. le Président,
vous savez, j'en aurai un peu plus sur mon pupitre, soit, mais ce qui me
tracasse vraiment, c'est que la présidente de l'Office des
handicapés, ou l'Office des handicapés, je ne voudrais pas
centrer cela sur une personne, a la responsabilité de s'assurer que des
écoles fournissant des soins à l'enfance inapdaptée ou
à des enfants handicapés ne ferment pas à cause des
coupures budgétaires du gouvernement actuel. Cela me semble fondamental.
Avant même qu'on parle de grands projets, je pense que ce qui est en
place, il faut au moins s'assurer de le garder, je vous souligne le
problème et je pense que, s'il y a des représentations à
faire, elles doivent être faites.
M. Lazure: Pour nous intégrer, il y a eu un projet de
financement à partir d'une étude de notre service de recherche
qui assure amplement le développement de ce projet, qui était
très valable, la formation des auxiliaires dans les CLSC pour donner des
services à domicile.
Mme Lavoie-Roux: À celui-ci, vous n'avez pas
répondu, vous ne lui avez pas accordé de fonds? Vous lui en avez
accordé finalement?
M. Lazure: Oui, cela fait déjà longtemps, et ce
n'est pas à l'intérieur des subventions, c'est à partir
d'un projet de recherche, un projet pilote, qui est très valable
d'ailleurs.
Pour ce qui est des écoles privées qui s'occupent des
personnes handicapées, je peux rassurer la députée de
L'Acadie, je demande à la présidente de l'office de
vérifier, je ne pense pas qu'il y en ait, comme le croit la
députée de L'Acadie, qui soient en danger de fermeture, je ne
pense pas. Si oui, de toute façon, nous allons demander à
l'Office des personnes handicapées...
M. Rivest: Dans la région de Québec, encore cet
après-midi, j'ai parlé au directeur...
M. Lazure: Bon, quel est le nom de l'école?
M. Rivest: Je l'ai à mon bureau, de toute façon, je
le communiquerai à Madame la présidente.
M. Lazure: On apprécierait beaucoup le savoir.
Mme Lavoie-Roux: II y en a onze qui se trouvaient dans une
situation très difficile, financièrement, à cause des
nouvelles règles budgétaires.
M. Lazure: L'office, cela fait partie de ses fonctions de faire
la promotion de toute personne handicapée, de son développement,
et on s'assurera qu'aucune de ces écoles n'est en danger.
Le Président (M. Jolivet): Programme 14,
adopté?
Mme Lavoie-Roux: Adopté.
Régie des installations olympiques
Le Président (M. Jolivet): Affaires parlementaires, M. le
ministre responsable de la RIO, programme 9, page 19-19, crédits du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. M. le ministre
a-t-il des commentaires préliminaires?
Remarques préliminaires M. Claude
Charron
M. Charron: Je vais, M. le Président, m'entendant sur le
sujet de nos échanges avec les députés de l'Opposition,
garder cela pour la période des échanges. Je serai bref et,
à la demande du leader parlementaire du gouvernement, je vais m'en tenir
uniquement à la subvention qui figure dans le livre des
crédits.
L'année dernière, pour l'année financière de
la Régie des installations olympiques, la subvention totale du
gouvernement du Québec était de 4 700 000 $ et les
députés découvrent cette année qu'elle est de
l'ordre de 5 200 000 $. J'explique l'écart défavorable,
c'est-à-dire les 500 000 $, de la façon suivante, mais
peut-être qu'une distribution du document en question nous permettra...
M. Bélanger, la description de l'écart, est-ce qu'elle est
incluse? On va le remettre aux députés membres de la commission
à l'instant. Il y a eu une augmentation des revenus à la
Régie des installations olympiques, mais il y a eu une augmentation des
dépenses légèrement supérieure, ce qui fait la
différence dans la subvention gouvernementale. Quand je dis
l'augmentation des revenus, c'est que les loyers du village olympique nous ont
rapporté 1 068 000 $, ce qu'on avait par rapport à 1979-1980, au
moment où nous n'étions pas à pleine location. Nous avons
eu un revenu exceptionnel, les restants du COJO, une petite réserve qui
nous a été versée en fonction de la loi de 252 000 $.
J'expliquerai aux députés les détails s'ils le
désirent.
Nous avons eu des revenus supérieurs, des activités dans
le stade, dans les piscines, dans le vélodrome, de 1 061 000 $. Par
contre, il y a des revenus d'intérêts que nous avions
l'année d'avant au chapitre des revenus et qui ne figurent plus, ayant
utilisé à peu près les fonds disponibles. Nous avons perdu
270 000 $ au chapitre des revenus et il y a eu des diminutions de revenus des
exercices antérieurs d'environ 68 000 $, ce qui fait une augmentation
nette des revenus de l'ordre d'environ 2 043 000 $.
Si vous allez à l'augmentation des dépenses de la RIO,
vous voyez le portrait plus vaste. Le coût de l'énergie au stade
et dans l'ensemble du parc a augmenté de 787 000 $. Les
intérêts sur des emprunts à court terme, 325 000 $; on y a
goûté nous aussi sur le taux d'intérêt. Les
augmentations salariales représentent la plus grosse somme, 1 320 000 $,
au personnel de la régie. Les dépenses excédentaires au
budget, c'est-à-dire le déficit de l'année dernière
essentiellement dû au combat de boxe et à ses conséquences,
796 000 $. L'augmentation des autres dépenses - au besoin, on les
décrira en détail - 1 429 000 $ et il y a des
événements qui ne se représentent plus dans les
dépenses - c'est évident que nous n'organiserons pas d'autres
combats de boxe au cours de l'année 1980-1981 et probablement pour les
années à venir 1 073 000 $. Il y a eu une subvention qui est
maintenant payée par la société d'habitation au village
olympique. Donc, c'est une dépense en moins, de même qu'à
la construction, puisque désormais les dépenses qui devaient
venir à cause de l'arrêt des travaux de la construction sont des
dépenses que nous avons de moins à payer. Bref, le total explique
la différence. L'augmentation des dépenses est de 2 500 000 $ et
l'augmentation des revenus, de 2 000 000 $ environ, ce qui veut dire qu'il nous
faut augmenter la subvention de fonctionnement de 500 000 $ et la porter
à 5 200 000 $.
Voilà pour ce qui est du tableau financier. Je vais vous donner
quelques notes préliminaires et M. Saulnier et moi serons prêts
à avoir un échange sur l'autre aspect de la question qui concerne
moins l'administration budgétaire de la régie,
c'est-à-dire l'avenir du parc lui-même et du stade en particulier.
Je veux dire un mot sur l'avenir du parc.
L'ensemble des autres installations. En ce qui concerne le
vélodrome, les piscines et le centre Paul-Sauvé qui fait ses
frais, le député verra dans l'augmentation des revenus de 1 061
000 $ que cela fonctionne à peu près à pleine
capacité. Dans ce sens, s'il y a des rajustements, ils seront favorables
à la régie et non pas défavorables au cours de
l'année. Le stade aussi d'ailleurs fonctionne à
pleine capacité. Je crois qu'il ne reste que peu de jours
disponibles dans le calendrier possible de la saison et des saisons avec les 81
matches des Expos quand il y en a 81, les parties des Alouettes, le nouveau
locataire que constitue le Manic de Montréal actuellement et les
événements comme le motocross d'il y a quelques semaines. Il n'y
a à peu près plus de dates disponibles pour des
événements dans le stade à tel point, par exemple, le
travail de l'équipe de la RIO a été remarquable. Nous
avons eu plusieurs événements très serrés dans une
période de temps qui nous ont permis quand même d'honorer tous ces
événements pour utiliser le stade à son maximum. Le stade
sera évidemment plus utilisable, et l'investissement collectif
énorme qu'il représente sera un peu plus supportable -nous le
croyons toujours, tout comme l'ensemble de la collectivité - le jour
où nous pourrons utiliser cet investissement 365 jours par année.
Pour qu'on l'utilise 365 jours par année, dans le climat où nous
sommes, il faut le couvrir.
Pour le couvrir, il y a loin de la coupe aux lèvres,
c'est-à-dire qu'il y a loin entre la décision qouvernementale et
la décision de tout le monde de se rendre à l'idée qu'il
faudrait bien mettre un toit sur cet équipement, et sa
réalisation. En 1978, le gouvernement du Québec a
décidé, à la suite d'un examen très attentif
mené par une commission indépendante du gouvernement, de se
rendre à la solution recommandée par le comité Marsan,
c'est-à-dire qu'à l'unanimité, on nous recommandait de le
couvrir, et quatre sur cinq nous recommandaient de l'utiliser selon le concept
original. Après examen, c'est ce que nous avons décidé de
faire et, au tout début du printemps 1979, la construction du
parachèvement du stade débutait avec une enveloppe
budgétaire qui a été, à ce jour,
singulièrement respectée. Il n'y a pas eu de problème de
février 1979 jusqu'à juin 1980.
En juin 1980, au moment où nous avions dépensé sur
le site il y a 16 000 000 $ de dépensés jusqu'à maintenant
- environ 12 000 000 $ ou 13 000 000 $, peu importe pour le moment, le tocsin
d'alarme est arrivé. On s'est aperçu que, pour le déficit
en précontrainte, c'est-à-dire la base même du mât -
déficit que nous savions existant, le déficit dans sa
capacité de porter des poids - les solutions inventées pour
corriger ce déficit et pouvoir poursuivre la construction se
révélaient insuffisantes. La compagnie d'assurances et tous les
ingénieurs - je m'en souviendrai toute ma vie - dans les jours qui ont
suivi le référendum de mai 1980, m'ont saisi de cette
difficulté dont j'ai saisi le Conseil des ministres par la suite, pour
nous mener à la décision maintenant connue.
J'explique tout de suite aux députés membres de la
commission que, comme je l'ai dit lors de la conférence de presse par
laquelle j'annonçais la décision du gouvernement, ce
déficit dans la base du mât nous était connu, mais pas dans
son ampleur. Les députés découvriront, dans le document
que je vais distribuer tout de suite et nui émane de la
Société d'énergie de la Baie James, qu'encore aujourd'hui,
le déficit s'avère plus grand que prévu.
C'est-à-dire, pour parler en termes très clairs, qu'à
chaque fois que nous ajoutons du poids sur la base, nous faisons courir un
risque terrible à l'ensemble de la structure. En fait, les chiffres que
nous avons - ils datent de mars 1976, dans la ruée préolympique,
alors qu'on faisait tout pour terminer vite - révèlent
qu'à la voile avant, pour reprendre les termes techniques, soit la
partie du mât qui fait face aux spectateurs lorsqu'ils sont dans le
stade, il manque 22% de béton par rapport à ce qui devrait s'y
trouver pour supporter le poids total du mât qui sera d'une hauteur
d'environ 640 pieds. On ne parle pas de n'importe quelle structure, c'est
à peu près la Place Ville-Marie. Chaque côté du
mât est en déficit de 18%. C'est un problème majeur. (21 h
30)
Tant et aussi longtemps qu'on ajoutait les étages directement sur
le trognon du mât, qui nous était resté au moment des Jeux
olympiques, c'était encore un poids, tout déficitaire que soit la
base du mât, qu'il pouvait supporter. Le danger est arrivé
lorsque, plus on en ajoutait, plus on sentait que les pattes avaient
tendance... D'ailleurs, dans le document, on identifie très exactement
les endroits où toute construction ultérieure à celle qui
est là risque de faire apparaître des fissures et des fissures
graves qui peuvent affecter l'ensemble. Ce qui fait que j'ai pris la
décision, avec l'assentiment du Conseil des ministres, d'arrêter
les travaux à ce moment. Je ne vous dirai pas que je m'en fous
éperdument, mais je suis prêt à faire face à la
musique de ceux qui, à cor et à cri, un peu aveuglément -
je ne veux pas manquer à leur bonne foi - me disent à chaque
fois: Qu'est-ce que vous attendez pour terminer le stade olympique de
Montréal? Quant à moi, je n'attendais rien, le gouvernement
n'attendait rien et procédait à la décision, mais je
n'autoriserai pas la reprise des travaux, je ne ferai pas courir ce risque
là à cet investissement, d'une part, et aux milliers de vies
humaines qui peuvent s'y trouver au moment où la catastrophe se
produirait, tant et aussi longtemps que je n'aurai pas l'assurance que la
structure dans son ensemble va tenir. Je ne ferai pas de recommandations au
Conseil des ministres, tout désireux que je sois moi-même de voir
le stade parachevé, si je n'ai pas cette assurance.
Dans les circonstances, après des
semaines de tergiversations au cours de l'été 1980 et avec
l'arrivée très heureuse dans le dossier du président
actuel de la régie et de sa compétence reconnue par l'ensemble de
la collectivité québécoise, nous avons ensemble
décidé de recommander au Conseil des ministres, après
consultation auprès des intéressés, bien sûr, de
confier cet épineux problème collectif, c'est-à-dire ce
stade à parachever, à ce que nous avions de meilleur comme
ingénieurs et comme compétence technique au Québec et qui
se comparent, d'ailleurs, à n'importe quelle compétence du genre
au monde entier, à tel point qu'ils sont eux-mêmes
sollicités sur d'autres chantiers du monde. Je veux parler de ceux qui
ont fait leur marque dans la réalisation de LG 2, LG 3, les
ingénieurs et tout l'appareil de la Société
d'énergie de la Baie James. C'est de l'histoire connue par cette Chambre
même puisqu'il nous a fallu faire une loi pour modifier la Loi sur la
Société d'énergie de la Baie James et obtenir
l'autorisation de le faire.
Ils se sont donc mis à l'oeuvre avec un double problème,
avec un double objectif: trouver la solution qui nous permettrait de renforcer
une fois pour toutes la base du mât et, évidemment, nous indiquer
combien de temps cela prendrait pour le faire une fois la solution
trouvée; à quels coûts additionnels et aussi régler
le problème de la toiture. Le problème de la toiture,
d'après plusieurs personnes - je lis toutes sortes de choses
là-dessus, je dois vous dire qu'il y a toutes sortes de Tit-Jos
Connaissant qui parlent à travers leur chapeau là-dessus, on
dirait que tout le monde a déjà bâti un stade comme
ça, tout le monde sait comment le faire - est le problème de la
fixation de la toile et de son cousaqe, puisqu'il s'agirait de chapiteaux qui
seraient retirés. Je dois dire, contrairement aux rumeurs qui circulent
et sans dire que ce problème est entièrement solutionné et
le rapport de la Société d'énerqie de la Baie James le dit
- que les études sont suffisamment avancées à l'heure
actuelle dans le découpage pour nous permettre de regarder ce
problème avec un optimisme que le temps ne démentira pas.
Le problème en ce qui concerne la toiture est son
étanchéité. Puisqu'il s'agit d'une chose mobile, là
où elle rejoindra la structure de l'anneau technique actuellement, il
faut s'assurer qu'il n'y ait pas échappement d'air et entrée
d'air froid à l'intérieur du stade, ce qui anéantirait la
valeur d'un stade couvert. Autrement dit, quand la toile descend, il faut
qu'elle couvre tous les orifices d'air ce qui fait que le stade chauffé
pendant l'hiver ne constituera pas une perte d'énergie et que l'air
froid n'y pénétrera pas. C'est ce que, techniquement, il reste
à réaliser et non pas le problème de coudre et de
découper la toile, contrairement, encore une fois, à ce qui a pu
être écrit.
Sur l'un et l'autre dossier confié à la
Société d'énergie de la Baie James depuis le 1er novembre
1980, j'ai reçu en mai dernier, avec M. Saulnier, un rapport verbal de
la Société d'énergie de la Baie James parce que, comme
n'importe quel citoyen du Québec, j'étais content de savoir que
cette question était entre les mains des meilleures personnes
imaginables au Québec dans ce domaine, mais j'avais hâte de
connaître les résultats non seulement pour savoir quand on
pourrait annoncer aux Québécois que la solution était
trouvée et que les travaux reprendraient, mais aussi pour
connaître le coût et le calendrier des réalisations. Or,
quand nous nous sommes rencontrés, il y a quelques semaines, on m'a
communiqué verbalement l'essentiel de ce qui vient d'être
livré, quelques jours plus tard, à l'ensemble du public
québécois, c'est-à-dire qu'on m'a dit trois choses, la
première, qu'il faudra étudier... Plus on fouille ce dossier,
plus c'est complexe, plus c'est difficile. Il s'agit d'un édifice de la
hauteur de Place Ville-Marie et, en plus de ça, incliné; c'est
une structure qui n'a été faite nulle part au monde et
l'architecte qui l'a conçue est absolument peu collaborateur. On avance
un peu dans l'inconnu, ce que nous savions. De toute façon, toute
toiture sur un stade qui n'est pas prévu pour recevoir une toiture fixe,
ce serait aussi avancer dans l'inconnu. Prendre le risque de faire reposer une
structure permanente sur un édifice qui n'est pas
prédisposé à la recevoir, ce serait aussi, quand on
avancerait, dans ce domaine, de l'inconnu.
Donc, première chose qu'on m'a transmise verbalement à
cette époque - on le trouvera dans le dossier - ca prendrait plus de
temps et plus de sous, bien sûr, pour poursuivre l'étude
complète que le gouvernement a confiée à la
Société d'énergie de la Baie James par l'entremise de la
RIO. Par contre, on m'a communiqué des informations préliminaires
intéressantes. Tout en disant que ca prendra plus de temps et plus
d'argent pour avoir une étude très complète sur l'avenir
et les possibilités de parachèvement du stade, on me dit, par
ailleurs, que depuis novembre dernier... Tout le pedigree des études est
dans le document déposé; c'est, à la lettre, le document
que le président de la régie et moi-même avons reçu.
Je remets aux députés actuellement l'intégral de ce
document qui émane de la société, sauf la signature de M.
Laliberté, qui n'est pas là, mais l'essentiel des informations
s'y retrouve; c'est à partir de cette information que la décision
de la RIO a été prise.
Le deuxième élément que l'on me communiquait, c'est
qu'à la lumière de ce que l'on possède déjà
comme information ça
va prendre beaucoup plus de temps que les optimistes 27 mois qu'on avait
prévus pour le parachèvement du stade. Les raisons sont
parfaitement décrites là-dessus; plus on avance dans les
étages, plus la plate-forme de travail est réduite, plus il est
difficile de travailler, plus la complexité est grande. On ne s'en tire
pas en bas de 40 mois. C'est ce qu'on dit dans ce dossier. Peut-être,
lorsque l'étude sera terminée, on le dira d'une manière
plus précise, mais, selon ce que nous communique la
Société d'énergie de la Baie James, on en a pour une autre
bonne période de 40 mois de travail pour parachever le stade, ce qui
nous conduit au printemps 1985 quant à l'utilisation, tout étant
terminé et fini.
La deuxième chose que l'on dit, c'est que
l'échéancier modifié du stade a pour effet, bien
sûr, d'avoir des répercussions sur les coûts et que, plus on
va mettre du temps, plus l'inflation augmentera. D'abord calculée
à 8% ou à 9% dans les belles années d'il y a deux ou trois
ans, elle doit être, d'une manière réelle, calculée
à 12% ou à 15% dans ce domaine. Tout ça pour en arriver
à cette conclusion - je me soumettrai aux questions par la suite -
qu'à la lumière de ces informations verbales, d'une part, nous
avons demandé, M. Saulnier et moi, à la Société
d'énergie de la Baie James, dans l'intérêt public, si elle
était suffisamment sûre à ce moment-ci de cette information
qui est de première importance, de la transmettre, par écrit,
à la régie, pour qu'elle délibère.
La régie a effectivement délibéré la semaine
dernière, à partir du document que les députés ont
entre les mains aujourd'hui. La décision de la régie, que
j'endosse entièrement, est de se dire: À la lumière de ce
que nous savons déjà, le coût additionnel imputé et
l'échéancier prolongé nous invitent à demander
à la Société d'énergie de la Baie James de regarder
d'autres solutions à l'intérieur même du budget qui lui a
été voté, qui est dans le document, 2 300 000 $.
Ce résultat devrait nous être connu vers la fin de
l'été. M. Saulnier pourra vous donner des précisions quant
aux ententes prises entre la Régie des installations olympiques et la
Société d'énergie de la Baie James, mais à partir
de ce phénomène, on sera devant un éventail possible de
choix. S'il y a lieu de prendre une autre décision que celle que le
gouvernement a prise en 1978, c'est à la lumière de ces
données qui sont aussi publiques que celles qui sont aujourd'hui
publiques que se prendra cette décision.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
Questions sur le stade olympique
M. Rivest: M. le Président, je remercie le ministre de cet
historique. J'ai l'impression que vous vous en allez avec un autre stade
olympique au-dessus du premier. Je comprends toutes les difficultés
techniques auxquelles vous avez à faire face. Le ministre nous a
indiqué les étapes, à partir des déficits au niveau
de la structure, qu'il a situés à l'origine. Cela fait maintenant
cinq ans qu'il a, à toutes fins utiles, la responsabilité de ce
dossier, en termes d'études autour du mât, est-ce que le ministre
pourrait nous indiquer le total des sommes qui ont été
dépensées, aux termes des mandats à des firmes
d'ingénieurs, etc. Il y a eu toute une série de mandats auxquels
viennent s'ajouter les derniers mandats qui ont été
confiés, parce que avant de confier une responsabilité à
la Société d'énergie de la Baie James, il y a eu des
tentatives, le ministre a pris des engagements, s'est avancé. Ses
experts lui indiquaient... Je voudrais avoir les dépenses totales, tout
ce qui se rapporte au mât: études, salaires, projets, solutions,
entreposage de la toile, transport, enfin tous les éléments. Il
serait peut-être temps qu'on sache où on en est jusqu'à
maintenant autour de cette question.
M. Charron: D'accord. J'ai le chiffre ici qu'on me communique
à l'instant. Au total, en experts-conseils et en honoraires -il s'agit
bien du mât...
M. Rivest: Oui, tout ce qui concerne le mât.
M. Charron: Le total est de 1 445 500 $ en experts-conseils et
honoraires. J'ajouterais là-dessus, pour qu'il y ait un tableau exact,
parce que ces dépenses ont eu lieu depuis la décision
gouvernementale de parachever le mât. Ce sont des études
d'experts-conseils.
M. Rivest: Décisions qui remontent... La date
précise?
M. Charron: 1978.
M. Rivest: Entre 1976 et 1978?
M. Charron: C'est le comité Marsan.
M. Rivest: Combien cela avait-il coûté?
M. Charron: 700 000 $. Le comité Marsan a examiné
toutes sortes d'hypothèses pour nous recommander d'y aller selon le
concept original, une fois le concept original décidé pour sa
réalisation...
M. Rivest: Vous avez eu vos problèmes...
M. Charron: ... c'est le chiffre que j'ai communiqué au
député.
M. Rivest: C'est la totalité des dépenses qui,
jusqu'à maintenant...
M. Charron: À l'exclusion - à ce que me dit M. le
sous-ministre - de la Société de l'énergie de la Baie
James, dans la question du député.
M. Rivest: Non, y compris la Société
d'énergie de la Baie James.
M. Charron: La Société d'énergie de la Baie
James, il faut...
M. Rivest: Ce que je veux avoir, on est rendu en 1981, depuis
1976, il y a encore des études qui sont en cours, depuis la
dernière décision, cette décision que le président
et le ministre ont annoncée ces jours derniers, qu'est-ce qu'on a
dépensé pour le mât?
M. Charron: Je récapitule. Jusqu'à la
décision gouvernementale, les études techniques en
experts-conseils sous l'égide du comité Marsan, ont
coûté 700 000 $. Dans l'exercice de 1978 à novembre 1980,
au moment où les travaux étaient sous la direction de la
régie même et qu'elle faisait appel à des experts-conseils
et à des firmes d'ingénieurs, nous avons dépensé 1
445 000 $. Le mandat de la Société d'énergie de la Baie
James, qui n'est pas encore totalement dépensé, mais il y a une
enveloppe de prévue de 2 300 000 $, mais sur ce montant, la
Société d'énergie de la Baie James...
(21 h 45)
Lorsque la RIO, si vous me permettez l'expression, a embauché la
Société d'énergie de la Baie James comme gérant du
parachèvement, nous avons prévu une enveloppe de 2 300 000 $ pour
ces études sur les problèmes que j'ai évoqués
tantôt et auxquels on lui demandait de trouver une solution et, à
ce jour, sur l'enveloppe de 2 300 000 $, 960 000 $ ont été
dépensés, depuis novembre dernier.
M. Rivest: En gros, c'est...
M. Levesque (Bonaventure): Dépensés ou
enqagés?
M. Rivest: À ce jour, sur le mandat de la
société?
M. Charron: Dépensés et engagés; 300 000 $
dépensés et 960 000 $ engagés. Ah! d'accord,
payés.
M. Rivest: C'est 960 000 $ engagés...
M. Levesque (Bonaventure): Non, c'est plus que cela, les
engagements.
M. Charron: 1 800 000 $. M. Levesque (Bonaventure):
D'engagés. M. Rivest: 1 800 000 $. La toile? M. Charron:
La toile?
M. Rivest: L'entreposage de la toile, etc., gui est je ne sais
pas où.
M. Charron: La toile est entreposée à
Port-Saint-Louis-du-Rhône. C'est en banlieue de Marseille. Tous les
équipements, à l'exception d'un petit appareillage qu'on appelle
ralingue, sont fabriqués et livrés à Montréal. Ils
sont entreposés dans les garages de la régie. La toile est
toujours là-bas, mais elle est entreposée sur des mandrins. Elle
est tressée, découpée par bandes, c'est-à-dire par
laizes, des bandes de tissu, de matériel. Elle est donc
découpée en longueur pour chacune des bandes. Il reste maintenant
à faire la découpe des cônes et la couture. On est rendu
à cette étape. Mais tous les équipements de levage, les
treuils, les boomerangs, tout l'accastillage, les câbles, etc. sont tous
livrés. Ils sont tous ici à Montréal. J'imagine que c'est
une question qui sera posée. Il n'y a pas de frais d'entreposage
mensuels, parce que c'est inclus dans le contrat.
M. Rivest: En gros, incluant le mandat confié à la
société d'énergie dont 1 800 000 $ auraient
été engagés pour l'instant - je comprends que 900 000 $
sont payés, c'est bien cela? - plus...
M. Charron: Oui, c'est cela.
M. Rivest: ... 1 400 000 $ plus 700 000 $. Est-ce que ce serait
le total?
M. Charron: Oui.
M. Rivest: Cela ferait, grosso modo, 3 000 000 $ ou 4 000 000 $
depuis quatre ans, en gros, qui préparent une décision
définitive au sujet du mât, une décision et une formule qui
ne sont pas encore trouvées.
M. Charron: Non, c'est là que le député
tombe dans l'erreur, je pense, qu'il pourrait éviter. La décision
est prise. Quand vous dites que toutes ces sommes sont dépensées
pour en arriver à une décision, la décision est prise, on
ne dépenserait pas...
M. Rivest: La décision est prise, sauf que ce que je veux
dire, c'est...
M. Charron: On a dépensé 700 000 $
avant de prendre la décision.
M. Rivest: ... que vous ne savez pas encore ce que sera le toit
du stade. C'est cela que je veux dire. Ces dépenses incluent, j'imagine,
puisque c'est le mandat de la société, les derniers
développements dont le ministre a fait état. C'est compris dans
le montant. Mais, en termes d'études, 3 500 000 $ ou 4 000 000 $ ont
été investis pour en arriver éventuellement à
savoir ce qui effectivement couvrira le stade olympique.
M. Charron: C'est exact.
M. Rivest: Je ne demanderai pas au ministre s'il trouve que,
depuis cinq ans - je comprends qu'il y a eu des difficultés techniques
majeures - la conduite de ce dossier, avec toutes les difficultés et
tout l'arrière-plan qu'a évoqués le ministre lui
apparaît quelque chose de raisonnable et s'il est satisfait du processus
qui a été suivi à cet égard?
M. Charron: Vous n'avez pas besoin de me le demander parce que je
vais vous le dire spontanément. Que ce soit cette somme ou toute
l'énergie consacrée à ce dossier depuis cinq ans, s'il y
en a un qui en n'a jamais souhaité... Et je pense que vous m'avez
déjà entendu dire, quand j'étais de votre
côté, que je ne souhaitais pas du tout me retrouver dans cette
situation. On a fait un investissement collectif d'environ 800 000 000 $. Ce
bout, vous en savez plus que moi. Après avoir fait un investissement
collectif de 800 000 000 $, on ne devrait pas être encore en train de
dépenser de l'argent pour chercher une solution pour couvrir le stade.
Cela ajoute au ridicule de la situation. Mais le ridicule a commencé en
1972. Quant à moi, le problème est que tout le monde dit:
À Montréal, cela prend un stade couvert, à cause du climat
de fou dans lequel nous vivons. Par ailleurs, pour avoir les Jeux olympiques,
cela 'prend un stade ouvert, sinon vous n'obtenez pas les Jeux olympiques
d'été. Alors, on a imaginé ce concept unique au monde. Et
le gouvernement de l'époque a endossé. Je me souviens d'avoir vu
la maquette ici-même, dans ce salon où nous étudions les
crédits ce soir. C'est là qu'a commencé le vice de tout le
système.
Quand la Société d'énergie de la Baie James a
réuni des experts internationaux, ils ont regardé cela et n'en
finissaient plus de découvrir la complexité de cette affaire. Un
des étrangers - je crois que c'est l'Américain qui est membre du
comité d'experts - nous a posé bêtement - je dis
bêtement, mais d'une façon très sensée - la
question: Voulez-vous me dire pourquoi vous vous êtes lancés dans
cette galère?
On a expliqué le dilemme. Cela nous prend à la fois un
stade couvert et cela nous prenait un stade ouvert pour les jeux
d'été. Il nous a dit: Pourquoi n'avez-vous pas fait un stade pour
tenir les jeux, et le finir par la suite, même s'il y avait eu un
chantier aux alentours? Il vous aurait coûté éminemment
moins cher, il serait terminé depuis des années - il s'en est
terminé à peu près cinq ou six dans le monde entier depuis
ce temps - et vous auriez eu les deux. Vous auriez eu les jeux
d'été et, une fois les visiteurs partis, vous repreniez les
travaux là où ils étaient arrêtés.
Je leur ai répondu: Vous me posez une question. Il faudrait
demander à ceux qui étaient au gouvernement à cette
époque de vous répondre. Cela a l'air qu'on a voulu les deux
à la fois, en permanence. Depuis ce temps-là, même cinq ans
après les Jeux olympiques, on est obligé de dépenser de
l'argent, comme vous le dites - vous avez bien raison de le dire - pour essayer
de trouver une solution.
On se pose même la question à savoir si cela va tenir - on
en est même là - à cause de la façon dont cela a
été construit en 1976. Des déficits de l'ordre de 20%,
pour la base du mât, c'est un problème majeur dans une
construction. Je dis qu'au-delà de la complexité du dossier, si
cela avait été bien coulé et bien fait, non pas dans une
ruée dans le genre qu'il fallait qu'on arrive le 17 juillet, coûte
que coûte... Si les 22% qui manquent avaient été mis
à ce moment-là, normalement le parachèvement aurait
dû se faire sans difficulté par la suite.
Mais là on s'aperçoit que le vice est dans les pattes du
mât. Il faut chercher. Il faut dépenser de l'argent pour
chercher.
M. Rivest: D'accord. Sur les déclarations de M. Saulnier,
vous avez évoqué, dans votre récente conférence -de
presse, deux chiffres: Celui de 52 000 000 $ de plus que prévu, le
mât.... Voulez-vous me rappeler combien était prévu pour le
mât? Deuxièmement, vous avez évoqué également
- le ministre permettra que M. Saulnier nous dise exactement ce que cela vise,
d'une façon précise, le montant de 110 000 000 $ dont vous avez
parlé pour parachever le mât dans sa conception originale.
M. Charron: Une somme de 35 000 000 $ a été
votée durant l'exercice 1977-1978. Par la suite, une somme de 65 000 000
$ a été votée, elle, durant l'exercice 1978-1979. On a
ajouté... Juste avant que M. Saulnier continue, je veux indiquer au
député pourquoi, sur les documents, il y a une inscription de 35
000 000 $ et une autre de 65 000 000 $. On entrera dans les détails
par la suite.
Les 35 000 000 $ de 1977, c'était pour le parachèvement du
stade, que l'on finisse le mât ou pas. Il fallait les mettre de toute
façon. Donc, on aurait décidé de laisser le stade
complètement ouvert, de ne jamais ajouter une once de béton sur
les étages, qu'il aurait fallu quand même, au lendemain des Jeux
olympiques - parce que l'oeuvre était vraiment inachevée jusque
dans les fonds - ajouter 35 000 000 $. C'est pour cela qu'on a distingué
les deux. Il fallait ajouter 35 000 000 $ et on l'a fait. Les 65 000 000 $, la
deuxième colonne, cela vient explicitement de la décision de
faire le toit-mât. Allez-y, monsieur, je vous en prie.
Alors, en octobre 1980, une première révision de budget,
après la commission parlementaire, a amené une majoration de 4
600 000 $ sur les 65 000 000 $; en 1981, il y a une autre révision au 31
mars portant sur la structure, la première phase de pose de
béton, de 3 300 000 $, la toiture mobile, ce qui n'était pas
prévu originalement, et les frais imputés pour 800 000 $ et,
enfin, le mandat de la SEBJ pour 2 300 000 $. Ce qui nous amène à
74 400 000 $ et le budget additionnel requis pour compléter selon le
concept original de juin 1981 est de 47 200 000 $, ce qui amène une
majoration de 52 000 00 $ et qui porte le budget total, comprenant les autres
travaux dont le ministre a parlé portant sur d'autres parties des
ouvrages des installations, à 121 600 000 $. Évidemment, c'est
toujours en regard du budget de 65 000 000 $.
M. Rivest: Oui, c'est cela.
M. Charron: Si je prends le total, c'est 156 600 000 $.
M. Rivest: Le ministre est-il...
M. Charron: Oui, un mot pour inviter les députés
à prendre le document de la Société d'énergie de la
Baie James à la toute dernière page, la page 22. Voici
l'explication de cet écart que nous annonce maintenant la
Société d'énergie de la Baie James. De façon
préliminaire, jusqu'ici, si nous allons jusqu'au bout, c'est 52 000 000
$ de plus qu'il faudra ajouter. La description est là. 65% des 52 000
000 $ sont attribuables à l'escalade des coûts. C'est simplement
la clause inflationniste, si vous voulez. On dit simplement, mais c'est quand
même 33 000 000 $ sur 52 000 000 $. 15% de cette augmentation sont
attribuables aux services de gérance, d'administration de chantiers qui
doivent être fournis sur une plus longue période. 13%, c'est pour
les imprévus qu'on calcule habituellement à 8% de la valeur des
travaux. Le renforcement du mât; on a maintenant trouvé la
solution pour renforcer le mât, c'est-à-dire y ajouter une
cinquième patte - un peu comme une chaise qui ne tient pas - qui
s'avancera jusque dans le milieu du stade, pas dans le milieu, mais dans
l'enceinte du stade - j'espère que ce ne sera pas jusque dans le milieu
- et cela représente 7% de la somme de 52 000 000 $, ce qui veut dire
environ 3 500 000 $.
M. Rivest: Je remercie le ministre de ces informations.
Évidemment, je sais que le ministre ne peut pas aller plus vite que le
vent dans ce domaine parce que c'est extrêmement complexe, mais cette
ventilation sur laquelle il a attiré notre attention, à la page
22, 65% de l'écart de 52 000 000 $, est attribuable à l'escalade
des coûts. Tout retard dans le contexte économique actuel
constitue vraiment des coûts extraordinaires.
M. Charron: C'est exact. Je vous assure que quand j'ai appris de
la Société d'énergie de la Baie James qu'on ne pouvait pas
nous livrer la marchandise avant 1985, dans l'hypothèse où on
reprendrait les travaux cet automne, pas avant encore 40 mois, je me suis dit:
Cela doit avoir un effet sur les coûts, surtout en cette période
où on n'est plus à 8%, mais à 12% et à 15%
actuellement. En plus, l'intérêt, on le paie comme tout le monde
et cela aussi a changé. Ils m'ont dit: Oui, vous allez voir quel effet
cela a sur les coûts et je l'ai ici. Seulement, je les considère
très honnêtes, plutôt de me raconter des romances et de me
dire que ce sera fini dans deux ans - et que je dise au public que dans deux
ans il va l'avoir - de spécifier qu'il y en a pour 40 mois. (22
heures)
M. Rivest: Dans le document, dont on va prendre connaissance
d'une façon détaillée, M. Saulnier donne l'état
exact; je remercie le ministre à ce sujet. Le ministre a indiqué
tantôt qu'il avait tous les chiffres. Comme je le lui avais dit l'an
dernier, étant donné l'histoire de ce fameux dossier, c'est
peut-être la meilleure façon de procéder autant pour le
ministre que pour la régie de dévoiler au fur et à mesure,
même si ce sont des choses désagréables, les surprises qui
ne cessent de nous arriver avec ce fameux stade. Quant à moi, compte
tenu des informations qui sont publiques, je n'aurai pas d'autres questions eu
égard à certaines autres choses.
Administration de la régie
Je voudrais revenir, si le ministre me le permet, sur la régie
elle-même et sur l'administration. Votre combat de boxe, vous nous avez
dit que vous n'aviez plus l'intention de vous lancer là-dedans. Combien
a coûté à la régie cette aventure?
II y avait l'assurance; est-ce que vous avez été
payé? Vous nous aviez parlé d'une assurance que vous aviez prise
sur le déficit.
M. Charron: En résumé, la régie avait
contracté deux assurances: une pour 1 000 000 $ et l'autre pour 600 000
$. Actuellement, elle a engagé des procédures pour recouvrer le
montant de la protection qu'elle a payé.
M. Rivest: Mais il a fallu que vous engagiez des
procédures.
M. Charron: J'ai compris que les assureurs, jusqu'ici,
n'admettent pas certains éléments de la réclamation
portant surtout sur le chiffre des recettes du combat.
M. Rivest: Je cherche la citation. Je vais poser ma question
à M. Saulnier. L'an dernier, le ministre avait été
plutôt rassurant sur la couverture de l'assurance lorsqu'il disait,
à la page b-14893: "Le risque pris par la Régie des installations
olympiques dans l'organisation de ce combat est très peu
élevé, du fait que je n'ai personnellement autorisé la
sollicitation de ce combat de boxe à Montréal que lorsque nous
avons eu l'assurance - c'est le cas de le dire - auprès d'une firme, que
toute entrée de fonds inférieure aux bourses sollicitées
etc."
Je comprends que le ministre n'avait pas scruté à la loupe
les éléments de son contrat d'assurance et que ...
M. Charron: Non!
M. Rivest: ... dans une certaine précipitation d'une
date... À quelle date était ce combat? On a parlé de la
précipitation du 17 juillet.
M. Charron: Le 20 juin, on va en fêter l'anniversaire.
M. Rivest: II s'en est permis une petite qui risque de
coûter à la régie un certain montant.
M. Charron: Je veux répondre - je ne sais pas si c'est une
question - ou ajouter mon fion à celui du député de
Jean-Talon. À l'époque où je faisais cette affirmation,
que j'admets aujourd'hui péremptoire, l'assurance de 1 600 000 $...
M. Rivest: Téméraire, pas péremptoire. M.
Charron: Téméraire.
M. Rivest: Péremptoire, ca n'a rien à voir avec
ça.
M. Charron: Mais péremptoire aussi à partir du
fait...
Une voix: Péremptoirement téméraire!
M. Charron: ... que les informations étaient suffisantes
pour le faire. Une assurance de 1 600 000 $ me paraissait le maximum de ce que
nous avions. Si nous avons, au-delà de cette assurance, eu à
encourir un déficit comme celui qui figure dans les chiffres que j'ai
donnés au député tantôt, c'est que dans notre
recherche de recette, nous avons dépensé plus que ce que nous
aurions normalement dû faire à la régie. Cela veut dire que
dans la dernière semaine et dans les derniers jours du combat, au moment
où je donnais ces informations au député, la régie
- cela a été la responsabilité de sa direction à
l'époque -voyant que la vente de billets n'allait pas aussi
merveilleusement que prévu sur le marché américain, entre
autres, s'est lancée dans une publicité à grand
déploiement dans les médias d'information américains,
à la télévision, etc. ce qui a eu pour effet que les
dépenses encourues par la régie au lieu d'être de 5 100 000
$ pour l'organisation du combat furent à peu près 1 000 000 $ de
plus. C'est exact, 6 100 000 $. Ces décisions ont eu pour effet de
gruger toute chance que même au-delà de l'assurance de 1 600 000
$, on l'ait. C'est une expérience, je l'ai dit dans les jours qui ont
suivi... Il y a eu comme un bouton de panique de pressé qui a eu pour
effet de gruqer à peu près toute la sécurité que
nous avions gagnée par le contrat d'assurance.
M. Rivest: Mais cela vous a coûté, enfin, vous ne le
savez pas encore parce qu'il y a eu une contestation judiciaire. D'accord.
Autre question, j'en ai une ou deux encore, si vous permettez, M. le ministre.
Un problème qui vous affecte, qui vous chagrine sans doute
personnellement énormément et qui me laisse assez
indifférent personnellement, la grève du baseball, des joueurs de
baseball.
M. Charron: Je parierais que vous voulez me proposer comme
médiateur.
M. Rivest: C'est-à-dire oui et non parce que vous seriez
tellement intéressé à ce que cela se règle
rapidement que vous ne regarderiez pas aux millions. Du fait que les Expos ne
jouent pas, qu'il n'y ait pas d'entrées et pas de services connexes
à une partie de baseball, est-ce que la régie perd de
l'argent?
M. Charron: Oui.
M. Rivest: Elle n'a pas d'assurances?
M. Charron: On en parlait entre nous au dîner ce soir.
J'estime que c'est la cinquième partie ce soir qui est annulée
à
cause de la grève des joueurs de baseball, donc des Expos et cela
nous a probablement fait perdre jusqu'ici 100 000 $.
M. Rivest: Vous n'avez pas d'assurances?
M. Charron: Non, pas là-dessus. M. Rivest: Ce n'est
pas possible?
M. Charron: Ce serait beaucoup trop cher pour les risques
encourus. Écoutez, c'est la deuxième grève en neuf ans. On
paierait plus qu'on a.
M. Rivest: Parce que les propriétaires de clubs de
baseball en ont une après un certain nombre...
M. Charron: Les propriétaires, oui, mais pas les
locataires du stade. J'ai lu les chiffres.
M. Rivest: Vous faites affaires avec les
propriétaires.
M. Charron: Oui, mais on a un bail. On n'a pas les mêmes
clauses qu'ailleurs. J'ai lu dans les journaux comme le député,
qui ne lit peut-être pas ces pages avec le même enthousiasme que
moi...
M. Rivest: Je ne les lis pas du tout.
M. Charron: On disait que la ville de Philadelphie avait perdu 80
000 $ en deux jours. Nous c'est un peu moins coûteux que ça. Si on
prend une moyenne de 25 000 spectateurs par match, au cours des cinq matches
annulés - on a perdu plus s'il était pour y avoir plus de monde -
on a perdu à peu près 100 000 $ depuis le début de la
grève.
M. Rivest: Une autre question rapide. On a évoqué
tantôt M. Taillibert. Il y a eu un contrat que j'ai vu dans les journaux
de quelque 100 000 $. Vous l'avez réengagé. C'était
pourquoi exactement? Il y a des qens qui sont étonnés qu'on
redonne un contrat à M. Taillibert. Deuxièmement, sa contestation
de ses honoraires, où est-ce que cela en est rendu?
M. Charron: C'est rendu en cour. Taillibert, puisque justement
nous sommes en cour...
M. Rivest: Puisqu'il faut l'appeler par son nom.
M. Charron: ... je me qarderai de faire des commentaires qui
pourraient être mal interprétés ou être
utilisés à l'encontre de la régie. J'écrirai dans
mes mémoires ce que je pense de ce personnage un jour. Le cas
Taillibert, lorsque nous avons engagé la Société
d'énergie de la Baie James dans ce dossier, une des conditions, un des
voeux exprimés par la Société d'énergie de la Baie
James était de pouvoir, afin de s'acquitter de son mandat, reprendre
contact avec l'architecte puisqu'on risquait d'aller plus vite en allant
à la source même des calculs. Je n'ai pas émis d'objection.
Ils m'ont posé la question. Je leur ai répondu très
franchement. Je n'ai pas émis d'objection à la condition qu'on
considère ses services à l'extérieur du passé parce
que, pour le passé, je n'ai pas besoin de vous dire qu'il y a une
mésentente totale. Nous avons payé jusqu'à ce jour 6 800
000 $ à M. Taillibert.
M. Rivest: Sur combien de réclamés?
M. Charron: Le total de ce qu'il réclame actuellement, en
fait, c'est 10 000 000 $ pour son oeuvre et 16 000 000 $ monétaire pour
"érosion", comme il est dit dans l'action qu'il nous a intentée,
et intérêts. Donc, il nous réclame au total 26 000 000 $.
Il y a une grande marge, mais cela va se régler devant les tribunaux en
bonne et due forme et je crois que, lorsqu'on présentera notre cas, on
sera bien équipé là-dessus. Alors, tout contact avec M.
Taillibert, dans l'exercice du contrat avec la Société
d'énergie de la Baie James, doit être à part. Il y en a
donc eu un d'établi pour le montant qu'a signalé le
député, c'est-à-dire 110 000 $.
M. Rivest: Très bien. En terminant, M. le ministre a
parlé de l'état de la location et dans l'ensemble du parc
olympique. Il a parlé un peu du village, tantôt, dans ses
remarques. Concernant l'ensemble du parc olympique, vous avez dit que le stade,
entre autres, était occupé, à toutes fins utiles, presque
à sa pleine mesure. Êtes-vous satisfait, M. le ministre, de
l'accessibilité des services autour du stade dont la population peut
bénéficier à cause de la présence de ces
installations dans le parc, l'ensemble du parc?
M. Charron: Les nouvelles que j'en ai, M. le Président...
Je vais plutôt considérer cette question comme un voeu...
M. Rivest: Oui, oui.
M. Charron: ...et si c'est un voeu, je l'endosserai.
M. Rivest: Je le fais chaque année.
M. Charron: Dans le mandat de la RIO, l'ouverture,
l'accessibilité de ses installations collectives aux
Québécois, je pense que le conseil actuel de la RIO, dans la
mesure du
possible, s'acquitte de cette mission avec honneur.
M. Rivest: Merci, M. Saulnier et M. le ministre.
Le Président (M. Jolivet): Programme 9 du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche, adopté?
M. Rivest: Adopté avec un voeu: Bonne chance!
M. Charron: Merci beaucoup. Réforme
électorale
Le Président (M. Jolivet): Oui. Nous passons à la
Réforme électorale, Conseil exécutif, programme no 2.
M. le ministre, la parole est à vous.
Oui, certainement. Nous allons attendre quelques minutes.
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Marc-André
Bédard
M. Bédard: M. le Président, je voudrais souligner
la présence aux travaux de cette commission du directeur
général des élections; également, du
président de la Commission de la représentation électorale
de même que des personnes qui les accompagnent. Au nom des membres de la
commission, je les remercie de leur disponibilité.
Comme vous le savez, M. le Président, lorsque j'ai assumé
la responsabilité de ministre d'État à la Réforme
électorale, quatre projets de loi avaient été
déposés aux fins d'adoption, à savoir la Loi
électorale, la loi concernant le référendum, la Loi sur la
représentation électorale, de même que celle concernant la
mise en place d'un registre des électeurs. Nous avons mené
à terme et fait adopter la loi du référendum, une nouvelle
Loi électorale de même que la Loi sur la représentation
électorale. Concernant le registre des électeurs, avec l'adoption
de la loi 123 en 1978 et le dépôt au printemps 1978 du projet de
loi no 3 sur le registre des électeurs, le gouvernement a
démontré sa volonté de mettre en place un registre des
électeurs à partir duquel serait établie une liste
électorale permanente. Le projet de loi no 3 n'a pu être
adopté à la suite, plus particulièrement, de l'attitude -
et c'était leur droit - des Oppositions d'alors...
M. Rivest: C'est un mauvais projet de loi.
M. Lalonde: C'était une grossière erreur...
M. Bédard: ...qui se sont opposées à
l'établissement d'un registre...
M. Lalonde: ...qui a coûté cher, d'ailleurs.
M. Bédard: ...avec un indicateur informatique, soit le
numéro d'assurance-maladie, sous prétexte que l'existence d'un
tel instrument risquait de porter atteinte à la vie privée et aux
libertés fondamentales des citoyens. (22 h 15)
Avant d'adopter en fonction de l'avenir une position finale dans ce
dossier, il nous faudra tenir compte de plusieurs éléments.
Premièrement, M. le directeur général des élections
m'a informé qu'il avait l'intention de soumettre un rapport faisant
état du travail accompli à ce jour et des études
complémentaires qui ont été effectuées. Il est
essentiel d'en prendre connaissance avant d'adopter une position finale.
Sur un sujet aussi intimement lié au processus
démocratique, il est non seulement souhaitable, mais essentiel d'obtenir
qu'on procède sur une base de consensus du gouvernement et de
l'Opposition. De plus, les suites qui seront données au rapport de la
commission Paré, plus particulièrement les recommandations sur la
protection des renseignements personnels, devront être prises en
considération de telle façon qu'une position qui sera
adoptée tiendra compte, naturellement, de ces différents
éléments. Nous comptons que l'essentiel de l'analyse des
études auxquelles je viens de référer devraient se
terminer au début de l'automne, de manière que le gouvernement
puisse faire connaître une position définitive dans ce domaine au
cours de l'année 1981.
En termes d'orientation, au cours des prochains mois, nous allons
essayer de parachever la réflexion et les études pour essayer
d'aboutir à une position concernant deux dossiers: le registre des
électeurs dont je viens de parler, et également, concernant le
mode de scrutin. Il y aura sûrement d'autres domaines d'intervention qui
seront nécessaires au cours de l'année 1981, qui ne sont
peut-être pas majeurs, mais qui s'imposeront. Je pense entre autres aux
dépenses électorales où une modification peut être
possible quant au plafond des dépenses électorales permises. On
sait que le plafond des dépenses électorales n'a pas
été changé depuis plusieurs années, 18 ans, je
crois. Cela ne fait quand même pas 18 ans que nous avons la nouvelle Loi
sur le financement des partis politiques, mais...
M. Rivest: Cela ne concerne pas les dépenses.
M. Bédard: ... il n'y a pas eu de changement.
M. Rivest: Quand?
M. Bédard: Naturellement, avec l'augmentation des
dépenses, la simple indexation... Pardon?
M. Rivest: La Loi sur les dépenses électorales date
de la réforme apportée par M. Lesage dans les années
soixante?
M. Bédard: Exactement. M. Rivest: Sur les
dépenses.
M. Bédard: C'était en 1962, je crois. Il y aura
probablement aussi des modifications à apporter à la Loi
électorale. M. le directeur général des élections
m'a informé que le groupe de travail qu'il a formé et qui s'est
réuni à plusieurs reprises au cours de la campagne
électorale allait soumettre des amendements à la Loi
électorale à la lumière de l'expérience
vécue lors de la dernière élection. Par exemple, les
mécanismes prévus dans la loi pour le vote des détenus ont
amené des complications et des coûts supplémentaires qu'il
serait possible de minimiser probablement en modifiant certaines
modalités. Considérant que chacun des partis présents a
l'Assemblée nationale était représenté à
l'intérieur de ce groupe de travail, cela facilitera la réflexion
que j'ai l'intention d'entreprendre avec l'Opposition une fois que nous aurons
en main les recommandations de ce groupe de travail.
Concernant la carte électorale, à la suite du travail que
la Commission de la représentation électorale se doit d'effectuer
après chaque scrutin, nous pourrons mesurer l'impact de
l'évolution démographique des circonscriptions actuelles,
c'est-à-dire le nombre de circonscriptions additionnelles requises pour
respecter les critères que fixe la loi que nous avons adoptée
quant au nombre des électeurs, à savoir une moyenne de 34 000
électeurs, qui peut varier entre 24 000 et 40 000 électeurs. Il
sera peut-être nécessaire de réviser à la hausse ces
critères afin de ne pas subir des coûts financiers que l'addition
d'un trop grand nombre de circonscriptions électorales
entraînerait. Cela fera l'objet d'une discussion et d'une
réflexion avec l'Opposition.
Alors, M. le Président, c'est l'essentiel du résumé
du travail qui a été fait depuis que j'assume la
responsabilité de ministre d'État à la Réforme
électorale et ce sont certaines des orientations en fonction des mois
qui viennent et non pas des années qui viennent.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: Oui, M. le Président. Je regrette que l'ancien
député de Laval ne soit pas ici pour entrendre les propos du
nouveau ministre d'État à la Réforme électorale,
parce qu'un des combats que le député de Laval, M. Jean-Noël
Lavoie, a menés, c'est lorsqu'il a tenté de convaincre le
ministre actuel, ministre de l'ancien gouvernement, ainsi que le
prédécesseur du ministre actuel, du principe fondamental en
matière de droit électoral, principe que le gouvernement s'est
obstiné à nier lors de son premier mandat, qui consistait
à ne rien faire dans le domaine du droit électoral sans accepter
de procéder par voie de consensus entre le parti ministériel et
le parti de l'Opposition. J'ai noté, dans les remarques timides, pour ne
pas dire timorées, du ministre que...
M. Bédard: Ce n'est vraiment pas gentil:
M. Rivest: Ce n'est pas péjoratif ça? ...que le
ministre avait à quelques reprises, compte tenu sans doute des
expériences malheureuses qu'il avait vécues, compris finalement,
et je rends hommage au député de Laval parce que c'était
un de ses principes de base, qu'en matière de droit électoral,
tout devait se faire par voie de consensus entre le parti ministériel et
le parti de l'Opposition. Là-dessus, je pense -changez d'air, je vais
vous faire un compliment - que ça augure bien pour les projets du
ministre et vous pouvez être assuré que l'Opposition, sur cette
base, va collaborer à la réalisation des projets du ministre.
Évidemment, dans l'état actuel, M. le Président - j'ai
parlé de projets, c'est un peu un euphémisme, d'une certaine
manière -le ministre, sur chacun des éléments, en est
à l'état de réflexion. Vous noterez bien de quoi il
s'agit. Le ministre n'a aucune espèce d'indication précise
à nous donner, en disant: Le gouvernement a pris ou n'a pas pris telle
ou telle décision. En ce qui concerne le registre des électeurs,
on réfléchit; en ce qui concerne le mode de scrutin, vous nous
avez dit que vous réfléchissiez; en ce qui concerne les
dépenses électorales, peut-être; en ce qui concerne la Loi
électorale, certains amendements - qui sait de quoi il s'agit? - en ce
qui concerne la carte électorale, vous nous avez dit probablement, et
vous n'avez pas parlé de la loi du financement des partis politiques que
je voudrais évoquer avec vous.
Je voudrais reprendre très brièvement, compte tenu de
l'impatience du député de Marguerite-Bourgeoys d'aborder la
question des recherches scientifiques qui le passionnent
particulièrement, le registre des électeurs. Votre aventure
passée, ce n'est pas l'Opposition qui a empêché le ministre
de procéder là-dedans, c'est parce que la loi n'était pas
prête et le ministre est arrivé
avec une loi sans consulter l'Opposition, sans base...
M. Bédard: Non.
M. Rivest: Bien oui, puisque vous avez continué les
études par la suite, vous avez confié des mandats.
M. Bédard: Vous semblez oublier en fait le contexte dans
lequel les débats se sont déroulés à ce
moment-là et le moment où cette loi a été
proposée pour adoption. Tout ça s'est passé à la
fin d'une session et, devant l'argumentation de l'Opposition, et c'était
son droit, dont nous ne partagions pas les motifs, le gouvernement a convenu
d'attendre à plus tard avant d'y revenir.
M. Rivest: Si votre principe du consensus s'applique pour le
droit électoral, il va falloir que vous fassiez en sorte que nous
partagions vos opinions.
M. Bédard: C'est dans ce sens que nous sommes très
heureux que le président des élections ait continué, soit
en mesure, dans un délai assez rapide, de faire connaître...
M. Rivest: Cela a coûté combien d'argent, cette
aventure-là?
M. Rivest: Pouvez-vous me laisser terminer? ...de faire
connaître, non seulement au ministre d'État à la
Réforme électorale, mais à l'ensemble des
députés de l'Assemblée nationale la suite des
études qu'il a entreprises et qui, je l'espère, sans
présumer des conclusions, seront de nature à convaincre
l'Opposition qu'il est nécessaire de faire quelque chose dans ce
domaine.
Registre des électeurs
M. Rivest: Combien a coûté votre mésaventure
au niveau du registre des électeurs?
M. Bédard: En fait, on se répète un peu
parce que j'avais donné les chiffres à l'Assemblée
nationale, il y a de cela plus d'un an. On peut peut-être essayer de les
retracer.
M. Rivest: Oui, s'il vous plaît.
Le Président (M. Jolivet): D'autres questions?
M. Rivest: On va attendre la réponse du ministre,
Le Président (M. Jolivet): Peut-être qu'en...
M. Rivest: II ne faut pas le mêler avec les questions, une
question à la fois, ça suffit.
M. Bédard: Surtout que la manière...
M. Rivest: Les portes, lui, il les prend vite.
M. Lalonde: Même avec une seule question, il réussit
à mêler le monde, imaginez-vous avec deux.
M. Bédard: Je n'aurai jamais l'habileté du
député de Marguerite-Bourgeoys à mêler le monde.
M. Lalonde: Vous tentez très fort.
M. Bédard: Comment est-ce qu'on dit ça? Pour semer
la confusion. Le montant n'a pas changé, il était de 4 419 000
$...
M. Rivest: Cela a coûté 4 000 000 $. M.
Bédard: 4 500 000 $.
M. Rivest: La maladresse du ministre a coûté 4 000
000 $.
M. Bédard: Non, soyez sérieux.
M. Rivest: C'est sérieux, 4 000 000 $.
M. Bédard: Les élections, c'est dans quatre
ans.
M. Lalonde: Quand on voit les coupures...
M. Bédard: 4 500 000 $. Je me rappelle avoir
expliqué qu'on ne devait, en aucune façon, considérer cela
comme étant une dépense inutile, puisque certains de ces
travaux...
M. Rivest: Est-ce qu'on a un registre? On n'a pas de registre
encore.
M. Bédard: Laissez-moi terminer les réponses.
Certains de ces travaux ont effectivement servi et, si l'Opposition semble
ouverte à un consensus ou à une nouvelle réflexion sur un
registre des électeurs, nous serons en mesure de rentabiliser, une fois
pour toutes, le montant de ces études. Cela dépendra de
l'Opposition.
M. Rivest: Soyez sérieux, M. le ministre!
M. Bédard: Vous aussi!
M. Rivest: Concernant le registre des électeurs, il y a
une dimension - je ne fais pas de surprise au ministre, j'en ai causé
avec le président, tantôt, en attendant soit
la dimension municipale et scolaire, que je sais être une
préoccupation du directeur général des élections.
J'aimerais en quelques mots, qu'il nous indique un peu les voies de sa
réflexion à ce sujet.
M. Bédard: Ce qui serait souhaitable, c'est un registre
des électeurs qui soit selon la forme qui a été
étudiée jusqu'à maintenant, l'an dernier, ou sous une
autre forme, comme la remarque que M. le ministre a faite tout à
l'heure. Il faut se pencher sur ce problème et essayer de trouver une
solution satisfaisante pour tous: une liste électorale permanente.
Même dans le système qu'on a présentement, la confection
d'une liste électorale tous les ans, je suis d'avis qu'il faudrait
mettre véritablement en application le but qui avait été
à l'origine d'un recensement annuel des électeurs, en 1973, je
pense, quand on a commencé, qui était d'avoir une liste
électorale qui puisse être utilisée non seulement pour des
élections provinciales, mais pour des élections municipales et
scolaires.
Je peux vous dire qu'à cet égard, on est en conversation
avec les officiers du ministère des Affaires municipales et je pense
qu'on peut envisager pour l'automne des solutions intéressantes.
M. Rocheleau: M. le Président, j'ai une question
concernant la Loi électorale. C'est sur le même sujet, je
pense?
Des voix: Oui.
M. Rocheleau: Cela comporte des problèmes particuliers de
revendications des municipalités qui datent de plusieurs années.
Premièrement, il y a la complexité: on a le recensement pour le
provincial, le municipal doit faire son recensement pour ses propres
élections. J'examine actuellement... II y a encore des critiques chaque
fois qu'il y a des élections, il y a toujours des critiques, des
revendications. Par exemple, depuis l'élection du 13 avril, il y a un
poste vacant à la mairie de Hull qui doit être comblé. On a
dû faire un nouveau recensement alors qu'on aurait pu, normalement, se
servir de la Loi électorale et de la liste des électeurs
déjà conçue pour l'élection provinciale, surtout
à l'intérieur d'un même comté électoral, ce
sont les mêmes limites que la ville. On a dû procéder de
nouveau à l'énumération des électeurs.
Ce qui est encore plus important, M. le Président, c'est que
l'élection qui va se tenir le 28 juin ne comporte pas de poll
avancé, dans la loi électorale municipale. Sachant que
l'été, s'il y a des élections municipales, à cause
des vacances, il y a des gens qui sont à l'extérieur, qui sont
partis en vacances, en voyage. Je sais que dans la Loi électorale
provinciale il y a un bureau de scrutin avancé, deux semaines avant, les
gens qui ont des raisons de s'absenter la journée des élections
peuvent voter deux semaines avant. Dans le cas de la municipalité, ce
n'est pas permis. Est-ce qu'on va penser une fois pour toutes, M. le
Président ou M. le ministre, de rendre similaire le mode électif
des municipalités au mode électoral provincial? (22 h 30)
M. Bédard: M. le Président, on me fait remarquer
que déjà des études ont été faites sur ce
sujet, qu'il y a à l'heure actuelle des échanges avec le
ministère des Affaires municipales. J'imagine que, comme nous l'avons
dit tout à l'heure, nous connaîtrons dès le début de
l'automne l'essentiel des réflexions qui sont poursuivies de
manière que tous les membres de l'Assemblée nationale puissent en
arriver à un consensus qui pourrait peut-être rejoindre des
objectifs que vous évoquez.
M. Rocheleau: Je connais pertinemment le point de vue de l'Union
des municipalités, et de l'Union des conseils de comté. Il y a eu
un comité qui a été formé à un moment
donné, qui est relativement actif, celui de
Québec-municipalités. À plusieurs reprises, l'Union des
municipalités a demandé au ministère des Affaires
municipales, qui est en somme l'interlocuteur des municipalités au
Québec face aux différentes agences ou aux différents
ministères, d'apporter des modifications le plus rapidement possible
pour éviter des problèmes auxquels on doit faire face à
chaque élection. À la suite de chaque élection municipale
au Québec, le gouvernement reçoit énormément de
communications, de correspondance, de résolutions des
municipalités demandant de changer le mode électoral. Par la loi
105, il n'y a pas tellement longtemps - la loi 105 a été
adoptée l'an passé - on a changé la structure
opérationnelle des municipalités, c'est-à-dire les
quartiers électoraux, le nombre de conseillers municipaux, tenant compte
de la population et tout ceci. Il semble qu'on aurait pu, du même coup,
apporter les modifications qui, elles, étaient demandées par les
municipalités. Changer le nombre de conseillers municipaux dans les
municipalités, il n'y a pas une municipalité au Québec qui
a revendiqué cela. Vous l'avez fait. D'autre part, ce que les
municipalités ont revendiqué, vous ne l'avez pas fait.
J'ose souhaiter, M. le ministre, que l'on puisse examiner cela dans les
plus brefs délais. Il y a des élections assez importantes qui
s'en viennent, en 1982, entre autres, dans tout le Québec. On vote des
lois qui précèdent des élections, comme la loi 44 en 1981,
qui était une trappe pour prendre plus particulièrement des
municipalités comme Montréal et créer la formule des
colistiers,
qui n'a jamais fonctionné au Québec. Ce sont des lois
semblables qu'on semble appliquer ou qu'on semble adopter en vitesse. Cela ne
remédie pas aux problèmes que connaissent actuellement les
municipalités.
M. Bédard: Effectivement, nous avons reçu des
représentations de la part des municipalités. Nous avons
acheminé le contenu de ces demandes au président
général des élections. Il y a beaucoup de techniques
à étudier là-dedans. Une demande est faite
régulièrement, que les listes électorales qui servent pour
les élections générales au Québec puissent servir
au niveau des élections municipales, des élections des
commissions scolaires. Maintenant, avec le municipal, nous avons un
problème; le cens électoral n'est pas le même selon qu'il
s'agisse d'élections générales ou municipales.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Sur la réflexion, selon le vocabulaire que le
ministre affectionne...
M. Bédard: Oui, parce qu'il faut toujours bien
réfléchir avant de légiférer.
M. Rivest: Oui, parfois cela coûte 4 000 000 $ pour rien,
mais cela ne fait rien.
M. Bédard: Non, ce n'est pas pour rien, cela coûte 4
000 000 $ quand une Opposition ne veut pas comprendre, mais on espère
qu'avec le temps tout va rentrer dans l'ordre.
M. Lalonde: Vous n'aviez pas la majorité?
M. Bédard: Oui, mais personnellement je crois que, quand
il s'agit de lois qui ont trait au processus électoral, on doit faire
tous les efforts nécessaires pour essayer d'obtenir un consensus de tous
les partis. Quand on parle d'une loi électorale, quand on parle de ce
processus démocratique, il me semble que c'est fondamental. Tout le
monde se doit d'être à l'aise avec l'ensemble de la
législation.
M. Lalonde: À ce moment, est-ce qu'il n'aurait pas
été plus sage d'obtenir le consensus avant de dépenser un
seul cent? Vous avez dépensé 4 500 000 $ avant même d'avoir
obtenu le consensus.
M. Bédard: Je m'excuse, ce dont vous n'avez pas l'air de
vous rappeler - je ne voulais pas faire de la politicaillerie pour le plaisir
de la chose - c'est...
M. Lalonde: Non.
M. Bédard: ... quelque chose de très important.
Rappelez-vous que vous aviez donné un consensus en vertu de la loi 123,
consensus que vous avez retiré pour un motif que nous n'avons pas
accepté...
M. Lalonde: Oh!
M. Bédard: ... et qui a justement occasionné les
dépenses que vous évoquez.
M. Lalonde: Au contraire, c'est parce qu'il y avait des
choses...
M. Rivest: ... dans la loi 123.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, un
à la fois!
M. Bédard: Si vous voulez en faire un débat
politique, on peut en faire un.
M. Rivest: Allons-y.
M. Lalonde: II y avait des choses cachées
là-dedans.
M. Bédard: À ce moment-là, je vais vous dire
carrément mon opinion, c'est qu'au contraire, ce n'est pas le
gouvernement qui est responsable de cette dépense...
M. Lalonde: C'est l'Opposition. M. Bédard: ...
c'est l'Opposition...
M. Rivest: L'Opposition. Vous n'avez pas le droit.
M. Lalonde: C'est vous autres qui avez dépensé.
M. Bédard: ... qui n'a pas été responsable,
puisque, après avoir donné un consentement, elle a retiré
ce consentement pour des motifs purement électoraux.
M. Rivest: Le ministre revit, sauf que la Commission des droits
de la personne devrait également en porter le blâme...
M. Bédard: On n'en était pas sur ce
point-là.
M. Rivest: ... parce qu'elle vous a bloqué.
Deuxièmement, le projet de loi 123 ne parlait pas du tout d'indicateur
informatique.
M. Bédard: Mais à un moment donné, il faut
quand même avoir la logique des consentements qu'on donne. À
partir du moment où l'Opposition en était venue à la
nécessité d'avoir une liste électorale, elle
voulait également accepter les moyens pour avoir cette liste
électorale la plus complète et la plus valable possible.
M. Rivest: Cela a coûté 4 000 000 $. Vous êtes
au gouvernement.
M. Bédard: Non pas le gouvernement, mais M. le
président général des élections, avec
l'expérience qu'il a, avait indiqué la nécessité
d'un indicateur informatique.
M. Rivest: Le président général des
élections fait son travail, mais c'est à vous...
M. Bédard: C'est à ce moment-là il semble
que vous vous êtes réveillés et, pour des motifs
électoraux, vous vous y êtes opposés.
M. Lalonde: Ne vous cachez pas.
M. Rivest: ... comme ministre, de vous assurer qu'en
matière de droit électoral, vous précédez par voie
de consensus, comme vous avez, de façon repentante que j'accepte ce
soir, admis pour la première fois comme principe. Je vous en
félicite.
M. Bédard: Ce n'est pas une action repentante, loin de
là.
M. Lalonde: Cela n'en est pas?
M. Bédard: Du tout, parce que nous avons toujours
essayé d'en arriver à un consensus concernant le registre des
électeurs. Nous avions obtenu un consensus...
M. Rivest: Vous n'avez pas le ferme propos.
M. Bédard: ... mais l'irresponsabilité de
l'Opposition a fait que nous devons retarder...
M. Lalonde: Vous n'avez même pas le ferme propos.
M. Rivest: Non, ah non!
Le Président (M. Jolivet): Un autre sujet.
M. Bédard: Non, je n'ai pas à avoir de ferme
propos, c'est une ligne de conduite chez moi...
M. Rivest: II est fait comme cela.
M. Bédard: ... qu'en ce gui a trait aux lois
électorales, tout ce qui regarde le processus démocratique, on
essaie d'avoir l'assentiment de l'Opposition.
M. Rivest: D'accord. Vos réflexions à 4 000 000 $
de la "shot", comme on dit communément, cette année, votre
registre des électeurs sous une forme de consensus, cette
fois-là, sans doute qu'il va nous revenir, compte tenu de vos nouvelles
bonnes intentions...
M. Bédard: Je m'inscris en faux, mais je vous laisse
répéter.
M. Rivest: Est-ce que, cette année, on va
légiférer là-dessus, non pas cette session-ci, bien
sûr, mais au cours de la session d'automne qui se prolongera probablement
sur l'autre année?
M. Rédard: Je ne suis pas sûr que vous ayez bien
compris les propos que j'ai tenus au début.
M. Rivest: Répondez-moi par oui ou non.
M. Bédard: Peut-être que vous aimez les oui et les
non.
M. Rivest: Cela va plus vite.
M. Bédard: Vous avez le droit à vos questions, on a
le droit à nos réponses, j'espère. Ce que je vous ai dit
tout à l'heure, c'est que nous orienterions nos efforts en vue d'en
arriver à une décision concernant le registre des
électeurs avant la fin de l'année.
M. Lalonde: Comme c'est beau! C'est bien dit, n'est-ce pas?
M. Bédard: J'ai indiqué tout à l'heure
guelles étaient les considérations dont nous devrions tenir
compte.
M. Lalonde: Oui.
M. Bédard: J'ai parlé des études faites par
le président général des élections et d'autres
éléments également. Ce sera soumis à l'ensemble des
membres de l'Assemblée nationale. J'espère qu'à ce
moment-là, on arrivera à une décision, à un
consensus qui nous permettra de déboucher sur une
législation.
Mode de scrutin
M. Rivest: Très bien, M. le ministre. Deuxième
sujet pour accélérer, parce que le ministre est un peu long
à trouver ses réponses. Je voudrais lui parler du mode de
scrutin. Vous nous avez dit que vous réfléchissez
également sur le mode de scrutin.
M. Lalonde: Cela lui fait peur.
M. Bédard: J'ai entendu...
M. Rivest: Je veux simplement rappeler rapidement que vous nous
aviez parlé le 16 juin 1980 - c'est presque un anniversaire, ma foil
c'est aujourd'hui - d'un colloque à l'automne 1980 sur le mode de
scrutin. Il n'y a pas eu de colloque.
M. Bédard: Malheureusement!
M. Rivest: M. le leader parlementaire avec qui je participais
à une émission à Radio-Québec, il y a quelques
semaines, Les lundi de Pierre Nadeau, a déclaré, d'après
la note, mais je me rappelle personnellement l'avoir entendu dire cela: La
réforme du mode de scrutin, un peu tout le monde se mêle du
dossier du ministre, M. Vaugeois a un mandat, le leader parlementaire en a
un...
M. Lalonde: Tout le même s'en mêle sauf le
ministre.
M. Bédard: M. Vaugeois, c'est la réforme
parlementaire.
M. Rivest: ... amorcée cet automne 1981 ou jamais. C'est
ce que disait votre collègue. Alors, le colloque n'a pas eu lieu. C'est
une promesse qui n'a rien coûté au moins, c'est l'avantage.
Deuxièmement, le leader parlementaire a-t-il raison? Est-ce que
cette année vous allez avoir une décision sur le mode de scrutin,
oui ou non?
M. Bédard: Le leader du gouvernement a droit à ses
opinions, à ses impressions.
M. Lalonde: II y a de la zizanie.
M. Rivest: Je ne veux pas dire que c'est mot pour mot. Mais il a
indiqué que ce serait cette année ou jamais. Des
représentants de votre propre formation politique ont adressé une
question au ministre, parce que, à cette émission, il y a des
gens de tous les partis politiques. C'est le sens de sa réponse.
M. Bédard: Étant donné qu'une réforme
du mode de scrutin constitue une réforme fondamentale et de nature
à transformer fondamentalement certaines habitudes des citoyens, ce
n'est évidemment pas le genre de réforme qui doit être
faite à la dernière minute avant une élection. C'est une
des raisons pour lesquelles nous n'avons pas donné suite, après
avoir fait quand même adopter plusieurs lois importantes en ce qui
regarde l'ensemble de la réforme électorale.
C'est pour cela que nous allons essayer d'intensifier la
réflexion pour que le gouvernement puisse se brancher avant la fin de
l'année 1981. Je pense que le député de l'Opposition sera
d'accord avec moi pour constater que ce n'est quand même pas une petite
réforme. Mais j'aimerais que l'Opposition, également, commence
à réfléchir sur l'opportunité de ce changement. Je
ne sais pas s'ils ont besoin de le faire. Je lisais tout dernièrement un
article de journal qui relatait une position prise par le chef du Parti
libéral, M. Claude Ryan, qui disait, à propos de la
réforme du mode de scrutin: "Le peuple du Québec n'est pas
prêt pour une telle réforme."
M. Rivest: Quand est-ce qu'il a dit cela?
M. Bédard: Avant les élections. M. Rivest:
Quelle date?
M. Bédard: C'est-à-dire que c'est après les
élections. C'était d'une façon encore beaucoup plus
dégagée, j'imagine, étant donné le résultat.
C'est dans un article paru dans la Gazette...
M. Rivest: Pour être juste pour le leader parlementaire au
sujet de l'émission à laquelle je me référais
tantôt, il a parlé des difficultés que cela posait au
niveau des habitus ou de la culture électorale québécoise
et qu'il était très prudent. Mais il fallait à tout prix -
et le ministre l'a indiqué et j'en prends note, parce que je suis pas
mal sûr qu'à ce sujet je fais une prédiction, et le
ministre l'aimera ou ne l'aimera pas, peu importe - ne pas franchir la
deuxième année du mandat du gouvernement sans qu'il y ait de
décision. Ce qui est bien important - et le ministre l'a
évoqué, je pense qu'il en est conscient -c'est qu'une
décision soit prise, peut-être la première année ou
dans les 18 mois, certainement dans les deux premières années du
mandat, compte tenu de tout ce que cela demanderait comme mise en place et
comme information...
M. Bédard: Vous m'avez très bien
interprété. Si une décision n'est pas...
M. Rivest: Si on n'en entend plus parler d'ici un an ou deux, par
défaut, on saura qu'il y a une décision qui aura
été prise. Vous continuerez de réfléchir.
M. Bédard: Personnellement, je crois qu'il faut aller plus
loin que cela. Une décision doit être prise, les citoyens doivent
en être informés, même plus rapidement que 18 mois.
M. Rivest: Parlant de réflexion, il y a une
réflexion qui a sans doute coûté aux contribuables son
prix. Le livre vert de votre prédécesseur parlait du mode de
scrutin, la
réflexion avait été amorcée. Je ne sais pas
si vous assumez la continuité de votre prédécesseur en
matière de réforme électorale. Je vous inviterais à
relire les propositions que votre prédécesseur à la
réforme électorale avait faites et à relire
également, si la chose vous intéresse encore, bien qu'on en doute
à certains moments, le programme électoral de votre parti, qui
contient des propositions très intéressantes à ce sujet.
J'imagine que cela a été accepté après mûre
réflexion.
M. Bédard: Étant donné l'importance de la
réforme, est-ce que je pourrais inviter mes collègues de
l'Opposition à le lire également, ce livre vert?
M. Lalonde: Cela fait longtemps qu'on l'a lu. On l'a même
étudié.
M. Bédard: Sauf que le Parti libéral n'a jamais
évoqué une position concernant les... (22 h 45)
M. Rivest: Ah!
M. Bédard: ...hypothèses contenues dans le livre
vert. Si cela n'est pas exact, j'aimerais bien que vous me corrigiez.
M. Rivest: II y a eu tout un colloque à
Montréal...
M. Lalonde: II y a eu tout un colloque...
M. Rivest: ...du Parti libéral, il y a deux ans,
là-dessus...
M. Bédard: Ah oui!
M. Rivest: ...qui portait justement sur le livre vert.
M. Bédard: Ce n'est pas cela que je vous dis. Je vous dis
qu'il n'y a jamais eu de position qui a été prise par le Parti
libéral concernant le livre vert...
M. Rivest: En toutes lettres...
M. Bédard: ... et les hypothèses qui y sont
contenues. La seule prise de position que nous connaissons jusqu'à
maintenant, c'est celle que j'ai évoquée tout à
l'heure...
M. Rivest: C'est faux.
M. Bédard: ...de la part de M. Claude Ryan, tout
dernièrement, qui disait...
M. Rivest: M. le Président, le programme électoral
du Parti libéral du Québec, à la dernière
élection...
M. Bédard: ...que le peuple du Québec
n'était pas prêt pour une telle réforme.
M. Rivest: Excusez! Le programme électoral du Parti
libéral du Québec, c'est faux. Je ne reproche pas au ministre de
ne pas l'avoir lu. Je sais qu'il avait une opinion préjugée
dès le départ, à l'élection.
M. Bédard: Votre programme est comme notre programme. Il y
a beaucoup de choses dedans.
M. Rivest: Mais il contient une disposition expresse au sujet de
la réforme du mode de scrutin. Vous auriez avantage à le
consulter. Donc, cela viendra dans les deux prochaines années. On
réfléchit pendant deux ans et, à un moment donné,
on décide. C'est cela?
M. Bédard: Je trouve que vous nous indiquez un
délai beaucoup trop long. Avant 18 mois...
M. Rivest: 18 mois.
M. Bédard: ...il faut que les qens sachent si...
M. Rivest: L'an prochain, aux crédits, est-ce qu'on va
avoir la même promesse?
M. Bédard: ...le gouvernement veut s'engager dans une
réforme du mode de scrutin...
M. Rivest: Oui.
M. Bédard: ...étant donné
l'importance...
M. Rivest: Question simple au ministre. La carte...
M. Bédard: Je suis habitué à vos questions
simples, allez-y.
M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait avoir une réponse
simple?
M. Rivest: J'essaie d'accélérer. Excusez-moi, si je
vous bouscule un peu, M. le ministre. Cela vous donne un peu de vigueur
d'ailleurs; cela n'est pas mauvais.
M. Bédard: Je vous en prie. La carte
d'électeur
M. Rivest: La carte d'électeur, vos gens ont l'air
d'être pour cela et vous pas trop. Qui a raison?
M. Bédard: J'ai évoqué, devant le Conseil
national, en fin de semaine, certaines considérations dont il faut tenir
compte, je
crois, concernant le coût d'une telle carte et concernant les
implications qui pourraient en découler en ce qui a trait à la
protection des droits et libertés individuels. Je pense que ce sont des
considérations importantes qu'il nous faut essayer de fouiller le plus
possible avant d'aboutir à une décision gouvernementale. Je pense
que, dans une période de restrictions budgétaires, quand on est
à même de constater, à partir d'une étude
très primaire, que les coûts peuvent être quand même
assez élevés, il faut prendre tout cela en
considération.
M. Rivest: Qu'est-ce que cela veut dire? Est-ce qu'il va y en
avoir ou s'il n'y en aura pas? Pas de décision?
M. Bédard: Cela veut dire essentiellement ceci.
M. Rivest: On réfléchit.
M. Bédard: Non, cela veut dire exactement...
Écoutez! Je pense que le député de Jean-Talon peut
s'amuser, mais je crois qu'à partir...
M. Rivest: Je m'amuse, mais j'essaie d'avoir des
réponses.
M. Bédard: Oui, mais... Je vous ai expliqué tout
à l'heure que, depuis que j'ai assumé la responsabilité de
la réforme électorale, nous avons quand même, je crois,
voté trois lois...
M. Rivest: Oui.
M. Bédard: ...de toute première importance: la loi
sur le référendum, une nouvelle Loi électorale et la Loi
sur la représentation électorale. Nous nous étions
engagés dans le domaine de la mise en place d'un registre des
électeurs avec le résultat que vous connaissez. Alors, à
l'heure actuelle, qu'on parle de carte d'électeur, de mode de scrutin ou
de registre des électeurs, nous n'en avons pas trop...
M. Rivest: Boni
M. Bédard: ...de trois ou quatre mois pour terminer la
réflexion dans ce domaine.
M. Rivest: Alors, d'ici trois ou quatre mois, on saura un
peu...
M. Bédard: Vous aurez des réponses sur tous ces
sujets.
M. Rivest: Merci, M. le ministre. La réforme de la Loi
électorale, vous m'en avez parlé avant, vous avez parlé de
la réforme de la Loi électorale, enfin de l'élément
de changement. Cela concernerait surtout les secteurs électoraux. C'est
cela? M. Bédard: Non. M. Rivest: Non.
M. Bédard: Je crois que vous vous mêlez avec...
M. Rivest: Ah! Je m'excuse.
M. Bédard: ...la Loi sur la représentation
électorale, mais...
M. Rivest: C'est cela.
M. Bédard: ...qui concerne également...
M. Rivest: C'est quoi, vos amendements? Vous avez
évoqué, dans vos notes préliminaires... On reviendra, M.
le ministre, si vous voulez, sur la carte électorale. Concernant la Loi
électorale, vous avez dit que vous songiez, enfin, que vous
réfléchissiez à certains amendements.
M. Bédard: Non seulement je réfléchis, mais
également le directeur général des élections nous a
informés qu'il verrait à nous faire connaître les
conclusions de l'étude d'un groupe de travail à la suite de
l'expérience de la dernière élection. Peut-être que
certains amendements, certaines améliorations pourraient être
apportés...
M. Rivest: Oui, certains amendements.
M. Bédard: ...entre autres, concernant le vote des
détenus - si vous aviez écouté ce gue j'ai dit
tantôt - qui s'est avéré une opération
compliquée et coûteuse. On pourrait améliorer la situation
à partir de quelques amendements.
M. Rivest: Est-ce qu'il y a seulement les détenus?
M. Bédard: Très franchement, je ne pourrais pas
vous dire de façon très précise quelles sont les
propositions qui vont être abordées par ce groupe de travail. Ce
qui a été exprimé, c'est que, pendant la campagne
électorale, il y a eu des rencontres avec les représentants des
trois partis politiques et il a été convenu qu'on se
rencontrerait au mois de septembre pour revoir les problèmes. Il y en a
un, en particulier, que je peux vous souligner; il ne se rapporte pas
directement à la Loi électorale, mais à la Loi sur les
listes électorales. C'est un problème qui date de plusieurs
années et auquel il faut trouver une réponse. Ce sont des;
problèmes qui surgissent lors de la révision des listes, le
problème de l'inscription des personnes, de la radiation des personnes,
des problèmes reliés à la liste électorale, en
particulier, qui
devront être revus.
Pour ma part, je pense que toute la question de la révision des
listes électorales devrait être étudiée très
attentivement. Je vous donne un exemple d'une orientation vers laquelle on
pourrait se diriger. Quand une personne a prouvé sa citoyenneté
une fois, il faudrait peut-être trouver le moyen pour qu'elle ne soit pas
obligée de le refaire à toutes les élections ou à
tous les recensements.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gouin. Cela va?
M. Rivest: Bon, c'est à peu près la nature des
préoccupations au titre de la Loi électorale. Il y a une
disposition dans la loi qui indique que - l'article 25 que vous connaissez bien
- dans les douze mois suivant la date de l'élection, la commission remet
au président et au secrétaire général un rapport
dans lequel il propose une délimitation des circonscriptions
électorales. On est dans ce délai qui court et je suppose que
vous vous attendez, M. le ministre, de recevoir de la part de la commission de
délimitation des districts électoraux - c'est ce dont il s'agit
-un tel rapport.
M. Bédard: M. Lemieux nous a déjà
sensibilisés là-dessus, je ne sais pas s'il aimerait ajouter
quelques représentations.
Effectivement, dans les douze mois qui suivent la date de
l'élection, la Commission de la représentation électorale
doit déposer auprès du président de l'Assemblée
nationale un rapport qui pourrait être considéré comme un
rapport préliminaire et qui fera sans doute l'objet d'une commission
parlementaire. Par la suite, dans l'année qui suit, la commission doit
consulter les citoyens dans toute la province et, après consultation,
elle doit faire un rapport final à l'Assemblée nationale. Le
travail est actuellement en cours.
Concernant un autre aspect qui intéresse sûrement le
député de Jean-Talon, en ce qui a trait aux secteurs
électoraux...
Je peux peut-être vous donner une information concernant les
secteurs électoraux. Les membres de la commission -je me permets de
prendre la parole parce que je suis un des membres de la commission vont
déterminer, la commission va terminer, au cours du mois de septembre, la
délimitation des secteurs électoraux. Il y en a environ 2200. Et
nous avons l'intention de soumettre - dans la loi actuelle, il n'y a pas de
mode de consultation de prévu, la commission a le pouvoir,
d'après la loi actuelle, d'adopter des secteurs électoraux et de
les rendre officiels, de les officialiser dès qu'elle les adopte - de
communiquer la délimitation des secteurs électoraux, et les
raisons pour lesquelles nous les avons délimités, aux
différents partis politiques, aux deux partis politiques, pour avoir
leurs réactions à la fin de septembre, dans le courant du mois
d'octobre, et leur permettre, pendant un mois, d'analyser notre façon de
procéder, nos délimitations et de nous soumettre leurs
commentaires.
Subséquemment, nous adopterions de façon définitive
les secteurs électoraux.
M. Rivest: Oui, d'accord.
M. Bédard: Cela permettra à tous les membres de
l'Assemblée nationale de pouvoir s'exprimer.
M. Rivest: Le mandat qui a été confié
à M. Vaugeois, le député de Trois-Rivières, par le
premier ministre touche-t-il au droit électoral ou si ce sont
strictement des fonctions parlementaires?
M. Bédard: Je voulais justement corriger une erreur de
bonne foi commise par le député de Jean-Talon quand il a
mentionné M. Vaugeois tout à l'heure en ce qui a trait à
la réforme électorale. M. Vaugeois est affecté d'une
façon spéciale à la réforme parlementaire qui est
un autre secteur.
M. Rivest: D'accord.
M. Lalonde: II a été très
affecté.
M. Rivest: Ce n'est pas de moi, c'est du député de
Marguerite-Bourgeoys; je n'aurais jamais fait une telle affirmation.
M. Bédard: Je suis convaincu qu'il va s'en tirer mieux que
semble s'en tirer l'Opposition...
M. Rivest: II a été plus affecté par le
remaniement que par...
M. Bédard: ...le Parti libéral après les
dernières élections.
Le financement des partis
M. Rivest: Le financement des partis politiques. Le chef du Parti
libéral a évoqué des éléments de critiques,
finalement assez justifiés, que les administrateurs ou le personnel qui
est sous-jacent à ça au niveau des partis politiques... La
multiplicité des reçus pour des sommes, ensuite le niveau de
divulqation des montants de 100 $ et tout ça, est-ce que cela vous
préoccupe ou avez-vous même reçu des représentations
à ce sujet?
M. Bédard: Non seulement cela me préoccupe, mais le
député de Jean-Talon doit se rappeler que nous avons
déjà déposé un
projet de loi avant la prorogation de cette session concernant les
retouches, les amendements à la Loi sur le financement des partis
politiques. Nous aurons sûrement à reprendre non seulement les
éléments qui étaient contenus dans ce projet de loi qui
pourrait être réintroduit, mais d'autres éléments
également qui ont été portés à notre
attention. Cela permettra une discussion globale là-dessus.
M. Rivest: Normalement, l'intention du ministre est de
réintroduire cela à la session d'automne, dans cette session
1981-1982?
M. Bédard: Je ne crois pas qu'il y ait une urgence en
termes d'élection...
M. Rivest: II n'y a pas d'élection, ce sont les campagnes
de financement, la multiplicité des reçus et après
ça, l'administration. Un des aspects importants, je le signale
brièvement, si vous permettez, M. le Président, c'est que le
fardeau administratif de cette loi qui est saine sur le plan des principes et,
sans doute, sur l'essentiel de ses modalités, est tel qu'il est, je
pense, raisonnablement possible de dire -et l'expérience très
circonstanciée de l'Union Nationale à cet égard est
peut-être révélatrice - qu'il est très difficile
pour un tiers parti de fonctionner dans le cadre d'une telle loi non seulement
sur le plan de l'administration interne que cela représente pour les
permanences des partis, mais également sur le plan du déploiement
qu'exige une campagne de financement au niveau où le Parti
québécois ou le Parti libéral la mène maintenant
sur le terrain.
Là-dessus, pour l'expression des opinions minoritaires, de
l'organisation en parti politique des opinions minoritaires dans la
société, cela a même une importance au niveau des objectifs
qu'on pourrait poursuivre quant au mode de scrutin et j'inviterais le ministre
à examiner cela. Est-ce que c'est lui qui est responsable de ce dossier
également? On n'a pas le président Boucher ici, mais j'aimerais
que le ministre en discute avec lui parce que c'est vraiment un problème
qui touche à l'exercice même de la démocratie. Il ne s'agit
pas de remettre en cause les principes généraux de la loi qui a
été adoptée, avec laquelle on vit, sauf que cela
empêche et cela constitue certainement une entrave non pas
infranchissable, mais une entrave à l'organisation de partis
minoritaires par rapport aux deux grandes formations politiques du
Québec.
M. Bédard: Comme vous le savez, il y a quelques mois, des
recommandations ont été faites par l'organisme en question
à la suite des élections et aux représentations qui
peuvent être faites tant par le chef de l'Opposition que par le chef du
gouvernement ou les députés à l'Assemblée
nationale. Je ne doute pas que, les élections étant
passées et une autre expérience étant faite au niveau de
l'application, d'autres recommandations s'ajouteront et je crois qu'à ce
moment on aura l'occasion d'en discuter amplement.
M. Rivest: J'ai une dernière question, si vous permettez,
au niveau de l'administration de la loi du financement. On sait, au sujet des
coupures budgétaires qu'à l'occasion de la campagne
électorale le directeur général du financement a, proprio
motu, pris l'initiative de prendre une injonction contre l'Alliance des
professeurs de Montréal qui dénonçait les effets des
coupures budgétaires et cela, pendant la campagne électorale. Par
ailleurs, nous sommes étonnés - en tout cas, moi pour ma part -
qu'une semblable injonction n'ait pas été prononcée contre
le gouvernement lui-même qui adressait à la même
époque des communications écrites ou autres aux intervenants ou
aux clientèles qui étaient frappées par les coupures
budgétaires et qui, elles, justifiaient les coupures budgétaires.
(23 heures)
On me l'a indiqué, je ne sais pas ce qui est advenu de
l'injonction devant les tribunaux concernant l'alliance, mais cela nous est
apparu à nous, étant donné que c'était... Le
problème là-dedans, - il faut bien s'en rendre compte - c'est que
l'alliance - c'est mon point de vue, peu importe le point de vue du
président, mais je le dis -des professeurs et les professeurs
étaient parfaitement justifiés au cours de la campagne
électorale de parler de cette question, parce que c'est un sujet qui
devait être placé devant l'opinion publique. Par la bande d'une
loi sur le financement des partis politiques, qu'on en arrive à mettre
des injonctions pour brimer la liberté d'information d'un syndicat et de
travailleurs syndiqués, en l'occurrence, les professeurs, je trouve
qu'au niveau de la loi sur le financement, c'est aller très loin sur le
plan de l'exercice d'un droit démocratique par ailleurs reconnu. C'est
mon opinion.
M. Bédard: Vous avez droit à votre opinion. La
commission à laquelle vous référez est une commission
indépendante qui...
M. Rivest: Oui.
M. Bédard: ...effectivement, s'est adressée aux
tribunaux. Sauf erreur, je crois...
M. Rivest: Vous ne savez pas ce qui est arrivé?
M. Bédard: ...que la commission a eu gain de cause par
rapport à l'injonction
qu'elle avait introduite...
M. Rivest: Oui, je prends cet exemple...
M. Bédard: ...mais je ne veux pas porter de jugement de
valeur. Peut-être que...
M. Rivest: ...pour montrer que la Loi sur le financement des
partis politiques, sur ce plan également - et nous l'avions dit à
l'époque - de l'expression libre des opinions au cours des campagnes
électorales...
M. Bédard: Bah!
M. Rivest: Ce n'est pas "bah!". Il y a des travailleurs
syndiqués qui ont été complètement brimés
dans leur droit légitime de se prononcer sur un élément
qui apparaissait important. Les coupures budgétaires, ce n'était
pas un "bah". C'est une affaire importante dans les campagnes
électorales.
M. Bédard: Je ne porte pas de jugement de valeur, mais il
ne faudrait quand même pas, à partir d'un élément
qui a été porté à l'attention des tribunaux, et sur
lequel les tribunaux se sont prononcés, essayer de prendre cet exemple
pour attaquer l'ensemble de la loi.
M. Rivest: Je n'attaque pas l'ensemble de la loi. J'attaque un
aspect de cette loi et...
M. Bédard: Peut-être y aurait-il lieu...
M. Rivest: ...je n'annonce rien au ministre parce qu'on l'a
critiqué, nous, cet aspect. On pense que dans une campagne
électorale, il doit y avoir une loi sur le financement des partis
politiques, etc., comme on la connaît, mais dans une campagne
électorale, les gens doivent avoir le droit de s'exprimer, que cela
plaise ou non au gouvernement en place, quel que soit le gouvernement. À
la faveur de cette loi, on l'avait dit dans les débats, dans les
discussions sur cette loi et là, on a eu une expérience
concrète et vécue où un groupe de travailleurs
syndiqués ont été empêchés de discuter ce qui
leur apparaissait un élément important au moment où le
gouvernement demandait à la population un mandat et cette question
était en plus une question majeure dans la discussion des thèmes
de la campagne électorale. C'est un élément important.
M. Bédard: Ce sera sûrement un sujet sur lequel nous
pourrons discuter amplement lorsque nous aurons à discuter sur un projet
de loi qui ferait suite aux recommandations qui nous seront faites par la
commission du financement des partis politiques.
Le Président (M. Jolivet): Programme 4. M. Lalonde: M. le
Président... Le Président (M. Jolivet):Oui?
M. Lalonde: ...un dernier mot là-dessus. Il ne faut pas
que le ministre se cache derrière les tribunaux qui ont à
accorder l'injonction. Les tribunaux devraient simplement appliquer la loi
telle quelle, mais...
M. Bédard: Le ministre n'a pas à se cacher.
M. Lalonde: Non. Il disait: Les tribunaux...
M. Bédard: C'est la commission qui a pris...
M. Lalonde: Excusez-moi, j'ai le droit de parole.
M. Bédard: Oui. La commission a pris ses
décisions.
M. Lalonde: À moins que vous preniez une injonction pour
m'empêcher de parler?
M. Rivest: C'est possible. On ne sait jamais.
M. Bédard: Non, ce que vous dites n'est pas dangereux.
M. Lalonde: C'était dangereux, ce que disait l'Alliance
des professeurs?
M. Rivest: Ah, c'est ça, oui!
M. Bédard: Non, non.
M. Lalonde: C'était cela.
M. Bédard: Non plus, j'imagine.
M. Lalonde: Donc, les tribunaux interprétaient la loi,
l'appliquaient telle qu'elle était faite. De nombreuses personnes se
sont étonnées qu'on puisse empêcher des gens de s'exprimer
sur une question d'intérêt public simplement parce qu'on
était en période électorale. C'est une illustration du
résultat ou des conséquences que peuvent créer des lois
qui créent des contrôles. J'espère que le ministre, qui
exprime, par exemple sur la question de la carte de l'électeur, des
réserves que je partage, qui sont reliées à l'exercice des
droits et des libertés de la personne, sera sympathique à ces
réactions qui ont été exprimées lors de cet
incident que j'ai
trouvé très désagréable, en fait, même
un peu détestable dans le contexte de notre démocratie au
Québec.
M. Rivest: Surtout qu'au moment de l'adoption de la loi sur cet
aspect particulier, la commission des droits et libertés...
M. Bédard: Vous me permettrez peut-être une
question?
M. Rivest: Oui, allez-y.
M. Bédard: J'ai l'impression qu'on veut en arriver
à une discussion positive. Je ne crois pas que le gouvernement, de
quelque manière que ce soit, ait fait une publicité
payée...
M. Rivest: Ce n'est pas ce qu'on dit.
M. Bédard: ... durant la période électorale
concernant les restrictions budgétaires.
M. Rivest: La loi est faite de la façon suivante, M. le
ministre...
M. Bédard: Vous me permettrez...
M. Rivest: Question de règlement là-dessus, parce
que c'est important. Tout ce qui, directement ou indirectement, favorise ou
défavorise; je pense que c'est à peu près le
libellé de la loi. Peu importe que ce soit payé, le simple
imprimé qu'émet le gouvernement, qui explique à ses
clientèles...
M. Bédard: Non. Là, si je prends...
M. Rivest: Ah oui, c'est exactement la même chose.
M. Bédard: Une seconde. Je pense qu'il y aura lieu d'avoir
une bonne discussion de fond là-dessus. C'est une chose de dire qu'on
est pour le contrôle des dépenses durant la campagne
électorale, qu'on est pour le financement des partis politiques, que ce
soit fait selon des normes raisonnables, qui donnent la pleine liberté
aux partis politiques et, d'un autre côté, essayer de
véhiculer que n'importe qui peut faire n'importe quoi à
l'intérieur d'une campagne électorale en termes de
dépenses ou de publicité qui peuvent avoir une influence directe
sur une campagne électorale.
M. Rivest: Un syndicat qui s'exprime sur un élément
de politique du gouvernement, ce n'est pas n'importe qui qui fait n'importe
quoi.
M. Bédard: Si je poursuis..
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît:
M. Bédard: Vous vous êtes tout de même assez
exprimé, laissez les autres s'exprimer. Si je poursuis votre
raisonnement, durant une campagne électorale, n'importe quel organisme
ou n'importe quel financier...
M. Rivest: ... leur interdire.
M. Bédard: ... pourrait s'arroger le droit de
dépenser les sommes qu'il voudrait de nature à orienter ou
à influencer les électeurs sur un sujet précis à
l'intérieur d'une campagne électorale. Je pense que ça
peut mener à l'abus. Cela ne veut pas dire que ça ne vaut pas la
peine d'être étudié. Je pense que, lorsque nous aurons
à considérer un projet de loi, des améliorations à
apporter à la Loi régissant le financement des partis politiques,
ça pourra faire l'objet d'une discussion. C'est dans ce sens que je vous
demandais: Est-ce que le gouvernement a payé à même les
fonds publics une publicité dans les journaux pour expliquer ses
coupures budgétaires? Je ne crois pas.
M. Rivest: Un instant. Cet après-midi...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, pas tous
à la fois.
M. Lalonde: Dans mon comté, le Parti
québécois a distribué des brochures publiées par le
gouvernement vantant les réalisations du gouvernement.
M. Rivest: II n'y a pas eu d'injonction.
M. Lalonde: II n'y a pas eu d'injonction. Il faudrait aussi que
le ministre fasse la distinction suivante, parce que je pense qu'il est de
bonne foi et qu'il veut rechercher réellement ce qui ne fonctionne pas
là-dedans. Entre une publicité payée par un groupe
d'intérêt - ce n'est pas illégitime en soi, un groupe
d'intérêt, un syndicat en est un - dénonçant une
décision gouvernementale et une publicité payée par une
personne ou un groupe d'intérêt disant: Votez pour l'un ou pour
l'autre! il y a une grande différence. Il ne faudrait pas que le
gouvernement ait la peau assez tendre pour penser que, lorsque l'Alliance des
professeurs publie des messages à savoir que les coupures sont mal
pensées, c'est une invitation à voter contre le gouvernement.
M. Bédard: Ce que je vous ai dit tout à l'heure,
vous avez été à même de le constater, la commission
concernant le financement des partis politiques - c'est une commission
indépendante - a pris des procédures devant les tribunaux, comme
c'était son droit, avec les résultats que vous
connaissez. Cela ne veut pas dire - je le répète - qu'il
n'y a pas lieu d'avoir là une discussion de fond, mais de là
à accepter toutes les conclusions auxquelles vous en venez, rapidement,
sans plus de réflexion, je crois qu'il y a une limite.
M. Rivest: Comme élément d'information, cet
après-midi, lors de l'étude des crédits du premier
ministre, le chef de l'Opposition a souligné au premier ministre des
annonces radiophoniques du gouvernement valorisant une loi qui était
adoptée. Cela, qu'est-ce que vous voulez, lors d'une campagne
électorale... Je ne veux pas dire au ministre qu'il a tort, qu'il a
raison, ou que le qouvernement est bon ou est méchant, ça ne
m'intéresse pas.
M. Bédard: Je pense que nous faisons cette discussion
au-delà des partis politiques, simplement en termes de processus
démocratique.
M. Rivest: Oui, c'est cela. Ce que je veux souligner au ministre,
c'est que cette dimension existe, et je lui en fais part pour alimenter sa
réflexion. J'ajoute en terminant, M. le Président, qu'au moment
de l'adoption de la loi - je le dis sous réserve, selon mon souvenir -
la Commission des droits et libertés de la personne - ou les centrales
syndicales - avait attiré l'attention du gouvernement sur le danger que
pouvait constituer la Loi sur le financement des partis politiques à ce
titre-là et l'Alliance des professeurs en a été victime en
pleine campagne électorale.
M. Bédard: Là, vous concluez trop vite, sans
réflexion, il me semble. Vous vous déclarez prêt à
réfléchir sur l'ensemble du problème mais je pense que
vous concluez vite, selon vos intérêts personnels. Concernant
l'adoption de cette loi, il y avait eu une opinion fournie par la Commission
des droits de la personne et je crois que nous avions tenu compte de plusieurs
des représentations faites par la commission de manière à
ajuster la loi. On pourra y revenir plus tard.
Le Président (M- Jolivet): II y avait le
député de Hull, mais...
M. Rocheleau: Simplement dans le même ordre d'idées
M. le Président, on nous fait souvent la morale concernant la Loi
électorale, les dépenses électorales et tout ceci mais il
y a quand même des points importants et j'aimerais en rappeler un au
ministre pour qu'il puisse l'examiner sans faire une enquête exhaustive
et retenir les services d'une firme spécialisée. Au cours de la
dernière élection du 13 avril, dans le comté de Hull,
entre autres, l'attaché politique de l'ex-députée du
comté de Hull a été payé par le gouvernement
à l'intérieur des crédits du ministère des Travaux
publics du mois d'octobre au mois d'avril. Cela n'a pas été
comptabilisé, ou je ne crois pas que ç'ait été
comptabilisé dans les dépenses électorales. Le nom de la
personne était Marcel Villeneuve, soi-disant le beau-frère de Mme
Ouellette. Je pense qu'il y a quand même certaines
irrégularités, M. le Président, et, dans ce cas-ci
ça vient du côté ministériel.
M. Bédard: Est-ce que le député veut me dire
qu'il voit une irrégularité dans le fait qu'un attaché
politique du ministre, lors d'une période électorale, puisse
travailler pour le ministre? Vous y voyez une irrégularité?
M. Rocheleau: II était à l'emploi du Parti
québécois comme permanent et il était payé par le
ministère des Travaux publics. Cela fait quand même un petit
changement, M. le ministre. En tout cas, peut-être que le ministre
devrait réfléchir là-dessus. On pourrait ramener le sujet
à une autre occasion et lui demander d'examiner la pureté de ses
collègues en temps d'élection.
M. Bédard: M. le Président, si c'est une personne
qui travaillait comme attaché politique au cabinet du ministre, je ne
vois en aucune façon qu'il y ait irrégularité à ce
que cette personne travaille pour le ministre, politiquement parlant.
M. Rocheleau: C'est un permanent du Parti québécois
et qui devait être payé par l'Association du parti.
M. Bédard: Enfin, qui devait être... Je voudrais que
vous soyez plus précis. Cela me fera plaisir de regarder.
M. Rocheleau: Je pense que c'était très clair,
l'autre jour, l'énoncé qu'on a lu dans les journaux; ça
n'a pas été démenti non plus.
M. Bédard: Si vous prenez comme très clairs tous
les énoncés de journaux!
M. Rocheleau: Non, mais, celui-là, je l'ai pris comme
très clair.
M. Bédard: Vous n'aurez pas une vie politique très
longue.
M. Rivest: Tantôt, vous avez cité le chef de
l'Opposition, c'était très clair et c'était pourtant un
énoncé de journal. Deux poids, deux mesures!
M. Bédard: Je vous ai demandé si vous étiez
d'accord avec cet énoncé de journal.
Le Président (M. Jolivet): Le programme 4 est
adopté?
Une voix: Oui, adopté.
Le Président (M. Jolivet): Nous amenons donc... M. le
leader du gouvernement.
M. Charron: M. le Président, l'heure avance et nous
accumulons du retard. L'entente que nous avions faite avec l'Opposition...
l'Opposition fait preuve d'une vigilance surprenante après avoir
été si négligente sur le dossier olympique.
M. Rivest: N'attaquez pas le maire Drapeau, hein!
M. Charron: Je voudrais indiquer tout de suite que...
M. Lalonde: II va vous prendre dans le corridor! (23 h 15)
M. Charron: ...les crédits de l'aménagement que...
Je voudrais proposer tout de suite une chose, c'est qu'il reste à
l'horaire trois heures de travail et j'insisterais, M. le Président, au
nom de mon collègue de l'Opposition et en mon nom, car nous avons
ratifié cette entente, pour que l'heure prévue ne soit en aucun
temps dépassée. Le ministère de l'Aménagement doit,
d'ici minuit quinze, achever ses crédits et je proposerais que le
ministère d'État au Développement culturel enfourche le
combat par la suite, mais, pour les collègues du développement
économique, puisqu'on sera très avancé, je solliciterais
tout de suite le consentement pour qu'une troisième commission ait lieu
demain matin et pour permettre une heure pour le développement
économique.
Demain matin, il y a des troisièmes lectures, des prises en
considération à l'Assemblée et il y a le projet de loi sur
la retraite.
M. Lalonde: Est-ce qu'on peut donner notre consentement à
ce qu'il y ait une troisième commission...
M. Charron: Qu'il y ait une troisième commission demain
matin, celle du développement économique, à la demande de
M. Johnson, le député de Vaudreuil-Soulanges.
M. Lalonde: Le développement culturel aussi, demain
matin?
M. Charron: Les deux demain matin.
Commençons l'aménagement, si vous voulez, on s'entendra
pour le développement culturel; je vais consulter aussi vos
collègues.
M. Rivest: ... Dans un esprit de collaboration, on va accepter la
proposition du leader.
Aménagement
Le Président (M. Jolivet): Cela va? Donc, consigné
aux livres, l'Aménagement.
Remarques préliminaires M. Denis
Gendron
M. Gendron: M. le Président, membres de la commission, je
voudrais, dans un premier temps, très rapidement, présenter les
gens qui vont m'accompagner. À ma droite, M. Yvon Tremblay,
secrétaire général associé à
l'aménagement; M. François Lamarre, mon chef de cabinet; M.
Huqhes Morrissette, délégué général à
l'OPDQ, président-directeur général de l'OPDQ.
Évidemment, il y a des gens du secrétariat à
l'aménagement et de l'Office de planification et de développement
qui m'accompagnent pour des questions techniques.
Je voudrais, avant de commencer l'étude détaillée
des crédits du Conseil exécutif, en ce qui concerne mes
responsabilités de ministre d'État à l'Aménagement,
et à la demande du premier ministre, pour ce qui est de l'OPDQ,
déqaqer quelques orientations générales. Ce ne sera pas
tellement long et je demanderais tantôt aux membres de cette commission
de m'autoriser à déposer le document de présentation qui
est plus général, afin qu'il soit consigné au journal des
Débats. Je ne sais pas, M. le Président, si on me permettra
ça tantôt.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas de problème
quant au dépôt; tout ce qu'on peut dire, c'est que toute personne
qui voudrait le consulter n'a qu'à le demander au secrétariat des
commissions.
M. Gendron: D'accord. Pour ce qui est de l'aménagement
plus spécifiquement, j'aimerais quand même traiter de certaines
perspectives d'avenir, sous les angles suivants: d'une part, la
nécessité pour le gouvernement d'adopter une attitude plus
transparente et plus souple dans ses interventions sur le territoire et,
d'autre part, l'importance, pour l'aménagement futur de nos villes et de
nos campagnes, de trouver une meilleure articulation entre le
développement régional, la décentralisation des
activités gouvernementales et l'aménagement de notre cadre de
vie.
Une attitude plus transparente et plus souple. Dans une perspective de
décentralisation et de respect des aspirations des élus locaux et
des populations, le gouvernement a accepté, dans le cadre de la loi 125
sur l'aménagement et l'urbanisme,
d'être lié par les schémas d'aménagement. Il
a également fait inscrire des dispositions obligeant les
ministères et les organismes publics à faire connaître leur
orientation en matière d'aménagement et leurs projets ayant une
incidence sur le territoire.
À titre de ministre désigné, en vertu de l'article
267 de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il m'appartiendra de
voir à la préparation de ces orientations gouvernementales et
à la cueillette des projets gouvernementaux d'intervention sur le
territoire. Cela équivaudra à favoriser une plus grande
harmonisation entre les préoccupations gouvernementales et celles qui
seront exprimées par les instances décentralisées et la
population dans l'aménagement de leur cadre de vie.
Pour les gens qui habitent en dehors des grands centres urbains de
Montréal et Québec, il y a belle lurette, je pense, qu'on se
préoccupe et qu'on parle d'aménagement, de développement
régional et de décentralisation. Ces thèmes ont fait les
manchette de la presse locale et régionale et plusieurs de nos
concitoyens ont déjà posé des gestes qui s'étendent
à l'ensemble du Québec. Le dynamisme régional existe de
plus en plus et ce qu'il y a d'encourageant, c'est qu'il n'a pas attendu
l'implication des pouvoirs publics pour se manifester.
Il importe que les organismes locaux et régionaux et les
instances décentralisées apprennent à travailler de
façon concertée pour renforcer et consolider les espoirs de
développement des milieux régionaux. Il faudra également
que le gouvernement puisse soutenir et même encourager ces
dynamismes.
Il me semble d'ailleurs, à cet éqard, que la loi 125 donne
au gouvernement, aux ministères et aux organismes publics, à
travers les intentions sur leur orientation et leurs projets qu'ils
dévoileront lors de l'élaboration du schéma
d'aménagement, l'occasion de faire connaître d'avance aux milieux
régionaux les moyens qu'ils entendent mettre à leur disposition
dans les années à venir pour les soutenir dans
l'aménagement et le développement de leurs régions.
L'application de la loi 125 peut donc être le début d'une nouvelle
façon pour le gouvernement de s'associer aux populations
régionales et aux corps qui les représentent, pour non seulement
améliorer leur cadre de vie, mais contribuer avec eux à leur
développement.
Je voudrais maintenant, dans un deuxième temps, présenter,
à la demande du premier ministre, les crédits de l'Office de
planification et de développement du Québec pour cette
année. Au cours de l'année 1980-1981, l'OPDQ a offert une
performance pour le moins impressionnante quand on considère que pas
moins de 650 projets de moyenne et de grande envergure sont actuellement actifs
aux seuls chapitres du fonds de développement régional, du
programme expérimental de création d'emplois communautaires, des
ententes Canada-Québec et du programme de planification dont mon
collègue aura l'occasion de vous entretenir lorsqu'il parlera de la
planification économique.
L'organisme a aussi connu, durant la même période, des
changements importants au niveau de sa direction, soit la nomination d'un
nouveau président-directeur général que je vous ai
présenté tantôt, M. Morrissette, d'un nouveau directeur
adjoint à la planification, d'un nouveau directeur adjoint des ententes
et d'un nouveau directeur des études et synthèses
socio-économiques. De plus, l'OPDQ a ouvert deux autres bureaux, l'un
à Saint-Jérôme, pour la région de
Laurentides-Lanaudière, et l'autre à Longueuil, pour la
région de Montréal.
D'autre part, en conformité avec l'article 6 de la Loi sur
l'Office de planification et de développement du Québec, le
premier ministre a formé le 13 mai dernier la nouvelle Corporation de
l'OPDQ. Elle est composée du secrétaire général du
Conseil exécutif, du secrétaire général
associé au développement économique, du secrétaire
général associé au développement social,
également du secrétaire général associé
à l'aménagement et du sous-ministre des Affaires
intergouvernementales.
Pour ce qui est maintenant - parce que je pense que c'est important de
parler un peu du fonds de développement régional - du fonds de
développement régional, il sert essentiellement à la
poursuite de quatre objectifs principaux, a savoir le support aux dynamismes
locaux, la concertation des agents de développement, le démarrage
de nouveaux programmes et l'expérimentation de nouvelles techniques. Il
permet, par le biais de la concertation interministérielle en
région, la réalisation de projets de développement gui,
considérés d'un point de vue régional, sont
prioritaires.
Si vous me permettez, M. le Président, à titre de ministre
responsable du fonds de développement régional, j'aimerais aussi
ajouter que j'ai la ferme intention de voir dorénavant le fonds de
développement régional servir principalement à mettre en
marche des projets provenant de l'initiative du milieu. Ainsi, avec l'aide des
équipes présentées dans chacune des régions du
Québec, cette nouvelle approche vise essentiellement à
répondre davantage aux besoins des régions, à optimaliser
l'utilisation de leurs ressources humaines et physiques et enfin à
permettre aux citoyens d'assumer leur propre développement.
Parmi les autres projets de développement régional, je
m'en voudrais également de passer sous silence l'excellent travail
réalisé par l'office, notamment sur la
mission spéciale de la Basse-Côte-Nord formée en
1979, le lancement de l'année du développement économique
en Estrie, ainsi que la mise en place de trois projets pilotes de centres
d'aide aux entreprises dans les régions du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de
l'Estrie et de l'Outaouais, grâce à l'initiative et à la
participation financière du milieu régional des affaires.
Les crédits inscrits au budget de l'OPDQ, pour atteindre les
objectifs visés en 1981-1982, se chiffrent à 48 000 000 $ cette
année, comparativement à 34 300 000 $ en 1980-1981.
L'inscription, aux fins des ententes Canada-Québec, de 213 000 000 $ de
crédits aux programmations des ministères porte donc le budget
global d'intervention de l'OPDQ à 261 500 000 $ pour 1981-1982,
comparativement à 239 800 000 $ en 1980-1981, soit une hausse de 9%. En
ce qui concerne d'abord les ententes Canada-Québec, l'augmentation du
budget pour l'année 1981-1982 est de 8 000 000 $, celui-ci passant de
205 000 000 $ en 1980-1981 à 213 000 000 $ pour l'année qui est
commencée. Il s'agit donc d'une augmentation de près de 4%.
Le budget courant de l'OPDQ quant à lui est inscrit aux
programmes 4 et 5 des crédits du Conseil exécutif. Le programme
4, intitulé Coordination du développement économique et
régional et interventions de développement régional, se
voit consacrer la somme de 37 700 000 $ comparativement à 24 400 000 $
l'an dernier. Les crédits affectés au programme 5,
intitulé Planification économique et régionale,
consultation et administration, augmentent cette année de 400 000 $,
soit 4%. Par ailleurs, les effectifs autorisés de l'OPDQ en 1981-1982
sont sensiblement les mêmes que ceux de l'an dernier, même si on a
absorbé la coupure de 2%.
Enfin, je voudrais remercier tant le personnel du secrétariat
à l'aménagement gue celui de l'OPDQ pour la collaboration
soutenue et précieuse qu'ils ont apportée et qu'ils continueront,
j'en suis sûr, à me donner dans l'avenir.
MM. les députés, MM. le membres de la commission, je
termine ici mon rapide survol des perspectives d'avenir en matière
d'aménagement ainsi que des activités passées ou
projetées de l'OPDQ. Je suis maintenant en mesure de répondre
à vos questions ponctuelles. Je voudrais seulement indiquer aux membres
de la commission, si c'est possible, que je préférerais que nous
commencions par regarder les questions que vous avez à poser sur la
partie aménagement ou le secrétariat de l'aménagement et,
par la suite, on pourrait regarder davantage les crédits de l'OPDQ.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Hull.
M. Gilles Rocheleau
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. Je souhaiterais en
premier lieu que le ministre m'informe sur les ouï-dire ou l'information
qu'on a pu lire dans le journal au cours des dernières semaines,
à savoir que le sous-ministre actuel, M. Yvon Tremblay, serait
muté aux Affaires municipales et que, possiblement, M. Kenniff serait
muté lui aussi à un autre endroit. Peut-on savoir si c'est
véridique ou non.
M. Gendron: Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'actuellement,
M. Yvon Tremblay est le secrétaire général associé
à l'aménagement. Il fait un excellent travail. Comme nouveau
ministre d'État à l'Aménagement, j'ai indiqué au
premier ministre que j'aimerais bien conserver la qualité de travail que
fournit actuellement M. Tremblay au secrétariat à
l'aménagement. En ce qui me concerne, il n'est pas question que M.
Tremblay laisse le secrétariat à l'aménagement pour aller
ailleurs.
M. Rocheleau: Merci. M. le Président, j'aimerais aussi
connaître du ministre les orientations qu'il entend donner à son
ministère et plus particulièrement en tenant compte de ses
responsabilités à l'intérieur de la loi,
c'est-à-dire l'article 267 qui le rend responsable de certains articles
de la Loi sur l'aménagement, plus particulièrement l'orientation
des MRC au cours de prochaines années, du point de vue de la formation,
du nombre de MRC et aussi sur la question de financement et de
responsabilité. Je commence avec cela et je pourrai commenter au fur et
à mesure.
M. Gendron: Oui, il n'y a pas de problème. Il faut faire
attention aux responsabilités du ministre d'État à
l'Aménagement pour ce qui est des MRC dans la loi 125. J'ai un double
rôle en ce qui concerne la loi 125, mais la responsabilité
générale de la loi 125 relève du ministre des Affaires
municipales pour les aspects dont vous parliez tantôt, le financement, la
formation, etc. La responsabilité du ministre d'État à
l'Aménagement est de deux ordres, comme je le mentionnais tantôt,
deux rôles, un premier rôle au niveau de l'appréciation du
retour de la consultation dans les diverses régions. Nous sommes
conjointement, le ministre des Affaires municipales et le ministre
d'État à l'Aménagement dans le comité qui regarde
les rapports de consultation en région. Je suis, au sens de la loi, le
ministre désigné, suivant certains articles, les articles 11, 16
et 267, celui qui a une responsabilité spécifique à
assumer qui, essentiellement, sans verser dans la
littérature ou la plomberie, est la suivante: Je dois m'assurer,
à la suite de l'émission des lettres patentes pour une MRC,
lorsqu'elle à élaborer son schéma d'aménagement,
que le gouvernement ou que le ministre des Affaires municipales puisse
transmettre à la MRC les grandes orientations et les informations
pertinentes quant à nos intentions, comme gouvernement, de
développement ou, comme je viens de le mentionner, de grandes
orientations sur le territoire défini de la MRC, sur les projets de
développement, les projets d'orientation. Cela fait partie de la
responsabilité du ministre d'État à l'Aménagement
de confectionner ce que j'appellerais non pas nécessairement la grille
d'analyse, mais le cadre de référence à l'intérieur
duquel nous allons exiger de l'ensemble des ministères, des organismes
du gouvernement les éléments requis comme grandes orientations
pour que les MRC puissent confectionner leur schéma d'aménagement
en connaissant ces informations. (23 h 30)
Les schémas d'aménagement
M. Rocheleau: M. le Président, à la suite de
l'étude des crédits des Affaires municipales, avec M.
Léonard, celui-ci semblait accorder une autonomie pratiquement sans
bornes aux municipalités et aussi aux MRC, à l'intérieur
de leur planification. J'aimerais savoir si le ministre d'État à
l'Aménagement partage les mêmes buts ou les mêmes opinions
que le ministre des Affaires municipales.
M. Gendron: Je pense, d'une certaine façon, avoir
répondu en partie tantôt à la même question que vous
me posez. À partir du moment où je suis convaincu qu'il est de la
responsabilité gouvernementale de fournir les éléments qui
doivent être imbriqués dans la préparation des
schémas d'aménagement au niveau des MRC, j'estime qu'il s'agit
d'une responsabilité du gouvernement de nourrir des orientations et des
informations nécessaires pour que les schémas
d'aménagement des MRC tiennent compte de nos grandes orientations.
Mises à part cette connaissance et la nécessité
pour nous de leur livrer cette information, je suis également d'avis
qu'il faut laisser les MRC elles-mêmes, avec leur propre orientation de
développement, confectionner leur schéma d'aménagement. En
ce sens, c'est une revalorisation du pouvoir municipal, et c'est l'esprit de la
loi 125 concernant l'aménagement et l'urbanisme.
M. Rocheleau: J'aimerais faire référence, M. le
Président, à l'article 27 de la loi, à la page 13, je
pense, où on mentionne entre autres la question d'autonomie. Depuis
déjà plusieurs mois, surtout depuis l'adoption de la loi 57 sur
la fiscalité, on semble dire et avancer de plus en plus que les
municipalités ont quasiment l'entière responsabilité du
développement et de la planification de leur territoire.
Par contre, je veux souligner au ministre d'État à
l'Aménagement qu'à l'article 27 on mentionne, dans les
responsabilités du ministre, que si le ministre est d'avis que le
schéma d'aménagement ne respecte pas les orientations ou les
projets du gouvernement, de ses ministères et mandataires ainsi que des
organismes publics, il peut demander au conseil de la municipalité
régionale de comté de le modifier.
Pourquoi je pose cette question, M. le ministre? C'est que la
Communauté régionale de l'Outaouais, en 1978, adoptait au
Québec le premier schéma d'aménaqement d'un territoire
donné. Elle avait dépensé quelque 3 000 000 $ pour
confectionner son schéma d'aménagement.
Après 1978, il y a eu la passation de la loi 90 sur le zonage
agricole qui est venue modifier en quasi-totalité le schéma
d'aménagement de la Communauté régionale de l'Outaouais.
Je comprends que la loi 125 ne s'appliquait pas à la Communauté
régionale de l'Outaouais; j'aurais aussi compris que la loi 90 ne
s'applique pas, étant donné que c'était presque un projet
pilote au Québec, le schéma d'aménagement de la
Communauté régionale de l'Outaouais, et qu'on aurait dû lui
laisser l'autonomie nécessaire à l'intérieur de
l'acceptation, de par toutes les modalités de la loi, de son
schéma.
Je me pose la question aujourd'hui: Est-ce que le ministre, à
l'intérieur de l'article 27, s'attend à procéder de la
même façon, c'est-à-dire venir contrer une planification
régionale qui a été coûteuse pour les citoyens de
cette région et qui, aujourd'hui, pose énormément de
points d'interrogation dans ce qu'on appelle l'autonomie qui est
accordée aujourd'hui aux municipalités?
Ne connaissant pas le nouveau ministre de l'Aménagement comme je
connais l'ancien, maintenant ministre des Affaires municipales, j'aimerais
savoir s'il va respecter davantage les orientations qu'il semble
préconiser pour les nouvelles MRC.
M. Gendron: J'aimerais dire deux choses. Justement, ce que j'ai
expliqué tantôt, c'est cette obligation qu'on a inscrite dans la
loi no 125, à savoir que le ministre d'État à
l'Aménagement soit responsable de transmettre aux MRC les grandes
orientations et les projets de développement. C'est pour éviter
ce que vous racontez, ce qui, effectivement, peut se produire,
c'est-à-dire de contrer la planification qui peut être faite en
région par les MRC ou par certaines
expériences pilotes. On se donne l'obligation de fournir les
éléments requis pour qu'en principe, en tout cas, il n'y ait pas
de contradiction évidente entre les intentions régionales ou
locales dans les schémas d'aménagement versus les grandes
orientations du gouvernement.
Quand vous me disiez tantôt que le ministre d'État à
l'Aménagement, suivant l'article 27 que vous avez cité, a la
responsabilité de revoir ces choses-là, ce n'est que dans la
phase finale, après que les MRC ont constitué leur schéma
d'aménagement. Il se pourrait que, pour des raisons d'autonomie mal
comprise ou d'autonomie tout court, les MRC aient décidé de ne
pas tenir compte de la façon dont le gouvernement a fait connaître
ses intentions de développement et qu'en ce sens il y ait certaines
contradictions qui nous amènent à ce que j'appelle, en tout cas,
exercer notre pouvoir qui est prévu dans la loi suivant un
mécanisme de consultation, etc., de revoir avec la MRC concernée
son schéma d'aménagement avant de l'approuver. Je pense que, si
on procède de cette façon, on évite cette situation qui
peut être anachronique.
Effectivement, si on intervient, c'est-à-dire si on demande aux
MRC de confectionner leur schéma d'aménaqement et qu'on ne leur
transmet pas les informations requises, inmanquablement, il se peut qu'il entre
en contradiction avec des objectifs d'aménagement du territoire que le
gouvernement du Québec se doit d'avoir. Dans la fonction
aménagement du territoire, tout en étant conscient que, dans la
préparation même des schémas, il faut rester très
près des préoccupations du milieu, l'État a
également un souci d'aménager le territoire suivant certaines
grandes orientations. C'est pour cela que je ne pourrais pas d'ailleurs
être d'accord avec le principe que vous évoquiez tantôt,
à savoir que, parce que vous avez une Communauté régionale
de l'Outaouais sur le territoire, cela nous soustrait de l'obligation faite,
par la Loi sur la protection du territoire agricole, et qu'on dise: C'est bon
dans toutes les régions du Québec, advenant que cela s'applique
à l'ensemble des régions du Québec, sauf dans l'Outaouais
parce que, là, il y a une communauté régionale. Il me
semble qu'à partir du moment où nous décidions comme
gouvernement de protéger les sols arables, nous nous devions de faire en
sorte que cette protection soit véritablement assumée suivant une
loi sur laquelle nous avions consulté, je pense, tous les intervenants
dans l'ensemble du Québec, et qui nous permettait de réaliser nos
objectifs de contrôle.
De toute façon, je ne sais pas si M. Tremblay, qui est
secrétaire général associé à
l'aménagement, voudrait ajouter quelque chose. Je pense que j'ai dit
tout ce qui concerne votre question.
M. Rocheleau: Je voudrais mentionner au ministre qu'à ce
moment-là, même votre nouveau président de la commission
nationale de l'aménagement, M. Jean-Marc Rivest, était intervenu
auprès du ministère des Affaires municipales et auprès du
ministre d'État à l'Aménagement afin que le schéma
d'aménagement de la communauté régionale soit
respecté. Vous avez sûrement conclu d'une certaine
compétence de M. Rivest, étant donné que vous êtes
venu le chercher pour le nommer président de la commission nationale de
l'aménagement. Je trouve que cela a pu créer, dans plusieurs
municipalités du Québec ou dans plusieurs municipalités ou
MRC à être créées, certains points d'interrogation,
à savoir si on laissait la liberté aux municipalités de
planifier leur territoire en fonction des besoins du milieu, tenant compte des
aspirations du milieu et aussi de la consultation qui est commandée
à l'intérieur de la loi no 125.
Si, d'une part, on oblige, par un mécanisme de consultation,
à demander aux citoyens l'approbation de leur schéma
d'aménagement sur leur territoire, je pense que le ministère doit
tenir compte du respect des citoyens du milieu à l'intérieur
d'une planification qui est faite selon leurs besoins et leurs aspirations,
à moins que le contraire me soit expliqué.
M. Gendron: Non, je ne pourrais pas vous expliquer le contraire
puisque c'est l'esprit même de la loi 125 de faire de
l'aménagement intégré avec des orientations
d'aménagement qui sont transmises par l'État
québécois, par le gouvernement du Québec. Mais à
partir du moment où ces orientations sont transmises aux MRC, quant
à moi -puisque vous me demandez mes intentions -j'ai bel et bien
l'intention d'essayer de respecter le plus possible les orientations de
développement à l'intérieur des schémas
d'aménagement des MRC en tenant compte, bien sûr, des orientations
qu'on leur a transmises et de ce qu'ils vont mettre sur pied. C'est l'esprit
même de la loi 125.
M. Rocheleau: Maintenant, dans un autre ordre d'idées,
j'aimerais m'adresser au ministre d'État à l'Aménagement.
Étant donné que cela comporte des coûts assez importants,
la préparation de schémas d'aménagement et de
planification, est-ce qu'il y a des budgets de prévus pour 1981-1982 et
quel est le montant de ces budgets pour les municipalités? Quel
pourcentage le ministère s'engage-t-il à rembourser pour les
schémas d'aménagement des nouvelles MRC?
M. Gendron: Comme je l'ai mentionné, la partie
financière des MRC ne regarde
d'aucune façon le ministre d'État à
l'Aménagement. C'est dans le budget du ministère des Affaires
municipales qu'il faudrait voir s'il y a des crédits de prévus
pour aider les MRC à confectionner leur schéma
d'aménagement. Je sais que la loi a prévu effectivement un
support financier et c'est la responsabilité du ministre des Affaires
municipales d'aider les MRC à confectionner leur schéma
d'aménagement. Il y a d'ailleurs une formule de prévue. Je ne
sais pas si je l'ai ici.
Oui, il y a des subventions du gouvernement pour ce qui est du
fonctionnement, du personnel technique et des travaux réguliers, il y a
des subventions de prévues pour la préparation des schémas
d'aménagement comme tels et il y a également des honoraires au
niveau des préfets et des membres du conseil qui participent à
ces MRC. Il y a trois niveaux de support financier.
M. Rocheleau: Je ne voudrais pas faire avouer au ministre un
problème aussi particulier que le budqet qui est confié au
ministre des Affaires municipales pour la préparation de schémas
d'aménagement alors que c'est le ministre d'État à
l'Aménagement qui est responsable de la commande de schémas
d'aménagement face aux MRC...
M. Gendron: Ce n'est pas exact. Le ministre d'État
à l'Aménagement n'est pas responsable de la loi 125 dans laquelle
il y a une partie qui prévoit que les MRC ont la responsabilité
de confectionner un schéma d'aménagement; il est responsable,
comme ministre désigné - et je l'ai explicité très
clairement tantôt - d'être celui qui va exiger, au niveau du
gouvernement du Québec, de l'ensemble des ministères sectoriels
et des partenaires, les grandes orientations requises pour que les MRC puissent
confectionner leur schéma d'aménagement.
Ma responsabilité est de construire ou de mettre sur pied le
cadre d'analyse dans leguel va se transmettre aux MRC cette cueillette
d'informations. Il est même prévu dans la loi que ce n'est pas le
ministre d'État à l'Aménagement qui a la
responsabilité de livrer ces informations; je n'ai que la
responsabilité de coordonner les activités et de m'assurer que le
gouvernement du Québec, par le biais du ministre d'État à
l'Aménagement, fera son travail pour nourrir les MRC des informations
requises pour confectionner leur schéma. Le processus de la confection
des schémas, les délais, le suivi administratif, le support
technique, tout cela relève, selon la loi, du ministre responsable de la
loi 125, le ministre des Affaires municipales.
M. Rocheleau: Quand nous avons traité du sujet avec le
ministre des Affaires municipales, il semblait confier beaucoup plus de
responsabilités au ministre d'État à l'Aménagement
que celui-ci semble le croire. Je voudrais éviter le jeu de balle
possible entre le ministre des Affaires municipales, d'une part, et le ministre
d'État à l'Aménagement du territoire, d'autre part,
c'est-à-dire l'ambiguïté face aux responsabilités de
chacun des ministères à l'intérieur; je veux dire, des
budgets ou des responsabilités qui seront confiés aux MRC. (23 h
45)
En plus de la préparation du schéma d'aménagement
on peut sûrement leur accorder, à la demande des MRC, des pouvoirs
additionnels. Je me pose la question de l'aide technique, vu la
possibilité pour le ministre d'État a l'Aménagement de se
faire prendre son sous-ministre, qui a pondu l'ensemble des MRC, au point de
vue de la grande théorie. Si, à un moment donné, le
ministre d'État à l'Aménagement se faisait dire un bon
matin qu'il vient de perdre son sous-ministre, il aurait perdu non seulement la
maison, mais aussi la clé, parce qu'il semble que ce sous-ministre est
le grand responsable de la préparation de cette loi qui a amené
l'adoption de la loi 125.
M. Gendron: Écoutez, quand vous parliez tantôt de
l'éventuelle absence de clarté entre la responsabilité de
l'un par rapport à l'autre, dans notre esprit, c'est très clair,
je ne sais pas si, dans le vôtre, cela l'est, cela ne semble pas, suivant
la question que vous posez. Je m'en réfère au texte, ce que je ne
voulais pas faire, mais regardez la responsabilité précise du
ministre d'État à l'Aménagement, c'est d'assumer la
responsabilité de voir à la préparation et à
l'orientation des documents, des avis, des décrets et de toutes les
interventions du gouvernement visés aux articles 11, 16, 27, 29 ainsi
gu'aux articles 149 à 165. Ma responsabilité est très
claire comme ministre d'État à l'Aménagement, elle est en
fait une responsabilité de coordination des diverses actions du
gouvernement, des ministères et même des organismes
gouvernementaux en matière d'aménagement. Le ministre
désigné, parce que je ne suis pas ministre responsable au sens de
la loi, le ministre désigné, dis-je, aura la
responsabilité de préparer les documents et les avis qui
refléteront la position du gouvernement en matière
d'aménagement tout en s'assurant que le gouvernement respectera les
objectifs des schémas d'aménagement qui seront
élaborés par les MRC.
Quand mon travail est fait, à la suite de l'émission des
lettres patentes, et que le cadre de référence avec lequel va
s'accomplir cette responsabilité est prêt, je transmets le tout au
ministre des Affaires municipales, qui s'assure du suivi de
l'élaboration des schémas, du soutien technique, de l'aide
financière. D'ailleurs, aux crédits des Affaires municipales, si
vous aviez posé la question, vous auriez vu qu'il y a des crédits
de 7 000 000 $ de prévus comme soutien à l'organisation des MRC
pour la confection de leurs schémas d'aménagement.
M. Rocheleau: Disons qu'on avait eu une réponse similaire
de votre collègue des Affaires municipales. On voulait voir si vous
aviez appris la même leçon.
D'autre part, M. le ministre...
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
est-ce sur un autre sujet?
M. Rocheleau: On va finir bientôt ce sujet, mais j'aimerais
connaître du ministre d'Etat à l'Aménagement quel
échéancier son ministère s'est fixé pour l'ensemble
des MRC, sur l'ensemble du territoire du Québec, pour l'adoption de
chacun des schémas.
M. Gendron: Pour la question des schémas et l'adoption des
schémas, je vous réfère encore à la
responsabilité du ministre des Affaires municipales. Pour ce qui est de
ma responsabilité, qui est très claire, c'est que nous,
c'est-à-dire le ministre d'État à l'Aménagement et
l'équipe du secrétariat à l'aménagement, d'ici
l'automne, il nous faut avoir terminé, comme j'appelais cela
tantôt, notre cadre de référence sur lequel on va se baser
pour commencer à exiger de l'ensemble des ministères les grandes
orientations, les avis, tout ce qui est requis par mes responsabilités,
pour que nous ayons cela en banque, en réserve. Dès qu'une MRC a
obtenu ses lettres patentes, s'est mise au travail pour élaborer son
schéma d'aménagement, nous lui transmettrons l'information
requise. Au moment où je vous parle, M. le député de Hull,
il y a douze MRC qui ont obtenu leurs lettres patentes. On n'a pas d'indication
qu'il y aura dans les prochains jours une émission sans
précédent d'autres lettres patentes, le processus va se continuer
normalement, mais, dès que les MRC auront obtenu leurs lettres patentes,
elles se mettront au travail pour élaborer leurs schémas
d'aménagement et nous serons en mesure d'ici l'automne de leur fournir
ce qui est nécessaire. Il ne faut pas que vous oubliiez, M. le
député de Hull, que les municipalités et les MRC ont trois
ans pour commencer à élaborer leur schéma
d'aménagement sur une période allant jusqu'à sept ans pour
le terminer et l'adopter finalement.
M. Rocheleau: D'accord, M. le Président, merci, M. le
ministre. Concernant l'aménagement, cela nous satisfait pour l'ensemble
des questions que nous pourrions poser.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Bourassa.
Le projet Archipel
M. Laplante: Merci, M. le Président. M. le ministre, vous
vous attendez sans doute aux questions que je veux vous poser concernant le
projet Archipel, projet qui me tient à coeur. Vous avez fait une
conférence de presse vendredi dernier. Vous nous avez annoncé
aussi le modèle réduit du projet dans les laboratoires Lasalle.
J'aimerais savoir si l'échéance que l'on s'était
fixée quant à ce projet, et annoncée par un autre ministre
qui vous a précédé, est respectée.
Une manchette de la Presse dit qu'Hydro-Québec est de beaucoup en
avant du comité de travail gouvernemental. Je voudrais savoir ce qu'on a
voulu dire par là. Je voudrais que vous nous parliez de la consultation
avec les 64 municipalités qui font partie du grand projet de
consultation, si le programme tient toujours. J'aimerais aussi que vous me
parliez du barrage d'Hydro-Québec à Montréal-Nord
où les permis ont été demandés à la
municipalité de Montréal-Nord pour refaire le barrage et si,
à votre connaissance, à ce barrage, on fera
l'expérimentation des groupes bulbes.
M. Gendron: II me fait plaisir, M. le député de
Bourassa, de répondre à vos questions. Dans votre première
question, vous me parlez des échéances, si les
échéances prévues et annoncées par mon ancien
collèque, le ministre d'État à l'Aménagement seront
respectées. Très clairement, comme j'ai eu l'occasion de le
mentionner en conférence de presse, on a certains retards par rapport
aux échéanciers prévus. Il y a un rapport d'étapes
qui avait été prévu, assez détaillé, dont
nous pourrions disposer à peu près à ce temps-ci, mais
malheureusement, on ne sera pas en mesure de le livrer avant la période
automnale. Au sujet des échéances, que ce soit au niveau des
études et du travail de certains ministères qu'on exigait, parce
qu'il ne faut pas oublier que le projet Archipel, d'ailleurs comme un des
premiers promoteurs de ce projet - et je vous en félicite - vous
êtes conscient que c'est un projet de très grande envergure...
C'est un projet surtout polyvalent qui fait appel à plusieurs
ressources. Le gouvernement a fait le choix de prendre la position la plus
difficile, c'est-à-dire au lieu de le confier à l'externe, de le
traiter chez nous à l'interne, en intégrant plusieurs partenaires
parce que c'est un projet intégré où il est question
d'écologie, d'environnement, de ressources hydroélectriques et
ainsi de suite... Oui, on a certains retards à déplorer. La
manchette de
la Presse qui disait qu'Hydro-Québec, elle, procède
rapidement, alors que nous, on est en retard, doit quand même être
nuancé. Hydro-Québec a strictement fait le travail exigé
qui était d'avoir pas nécessairement un laboratoire, mais un
modèle réduit qui nous permettrait de faire certaines analyses et
certaines expertises. Mais en ce qui nous concerne, il faut dire que le
comité technique d'harmonisation a rattaché les fils qui
pendaient et selon les informations dont nous disposons à ce moment-ci,
tout va bien pour le moment, ce qui nous permet de croire qu'à
l'automne, on sera en mesure de rattraper certains retards à
l'intérieur de certaines études qui devaient être
effectuées et qui ne l'ont pas été. Il y en a qui ont
été effectuées. Il y en a qui sont en cours et il y en a
quelques-unes qui n'ont pas commencé. En ce sens, on a resserré
les échéanciers. On a éliminé certaines commandes
qui nous apparaissent dans une étude de faisabilité moins utiles
dans un premier temps. Cela va dégager des ressources. Cela va
dégager également du budget pour nous permettre de mieux
respecter les échéanciers.
Vous me mentionnez en troisième lieu la consultation. On a bel et
bien l'intention de s'en tenir à ce qui a été
annoncé en termes de consultation parce qu'il est capital que les
citoyens et les citoyennes de la région de l'île de
Montréal ainsi que tous les gens concernés autour soient
très impliqués dans un projet d'envergure comme celui-là,
dans un projet qui est un peu sans précédent par rapport à
la nouvelle technique. Nous voulons associer la population et nous assurer que
ces gens, tous les intervenants concernés, que ce soient des
intervenants au niveau de l'environnement, au niveau de préoccupations
écologiques, les usaqers de l'eau par rapport aux sports aquatiques et
ainsi de suite, puissent aussi nous signaler leurs besoins, leurs attentes par
rapport à un projet comme celui-là.
En ce sens, il n'est pas question de modifier la consultation,
c'est-à-dire de ne pas la tenir. Sauf que personnellement, comme nouveau
ministre d'État à l'Aménagement, je veux que la
consultation soit une consultation véritable. Pour que ce soit une
consultation véritable, il est important qu'on ait certains
éléments, certaines données à mettre sous la dent
des groupes à consulter. Je pense qu'à ce moment-ci, on n'a
peut-être pas tout ce qu'il nous faut pour être certain que ce ne
sont pas strictement des séances d'information sur un projet, mais que
c'est vraiment une opération de consultation qui nous permet d'avoir la
rétroaction des usagers, des gens, ainsi de suite.
Quatrième élément, c'est l'ouvrage sur la
rivière des Prairies. Le comité technique d'harmonisation,
mandaté par le secrétariat
Archipel, procédera à une consultation des
différents ministères, des différentes
municipalités concernant cet ouvrage. Dans le projet global,
intégré, polyvalent d'Archipel, si jamais nous devions
procéder plus rapidement à l'érection de l'ouvrage sur la
rivière des Mille îles, il faut s'assurer qu'il ne contrevienne
pas...
M. Laplante: M. le ministre, c'est peut-être moi qui vous
ai mal orienté, mais il y a l'ouvrage des Mille Îles qui fait
actuellement l'objet d'une consultation, et il y a aussi la réfection du
barrage existant sur la rivière des Prairies - j'ai oublié
momentanément le nom du barrage - qui fait partie du projet Archipel. On
sait que, là-dessus, il y a des propositions pour creuser la
rivière des Prairies. Il y a des rumeurs actuellement voulant qu'on se
serve de ce projet pour en faire un projet pilote afin d'employer les groupes
bulles, mais je voudrais m'assurer qu'en refaisant ce barrage ça ne
puisse pas nuire à la réalisation du projet Archipel, si ce
dernier était réalisé un jour.
M. Gendron: Si M. le président et les gens n'ont pas
d'objection, puisque j'ai avec moi M. Jean-Paul Gagnon, qui est responsable du
projet Archipel au niveau du secrétariat de l'aménagement, il
pourrait donner des précisions concernant votre question précise
parce que, au moment où je vous parle, je n'ai pas d'indication
précise concernant l'expérimentation du groupe bulle par rapport
à l'éventuel ouvrage sur la rivière des Mille
Îles.
M. Laplante: M. le Président, vous me permettrez de
féliciter le ministre pour avoir su apprendre aussi rapidement les
données du projet Archipel.
M. Gendron: M. Gagnon.
Le barrage qui est en fonctionnement dans la rivière des Prairies
est actuellement en réfection pour une partie, qui est le
déversoir, et tout cela. Là-dessus, on consulte les
municipalités avec Hydro-Québec. D'autre part,
Hydro-Québec est en train de vérifier si la vieille centrale de
la Rivière-des-Prairies pourra supporter un groupe bulle, mais ces
vérifications ne sont pas terminées. Pour ce qui est de
l'ensemble des objectifs du projet Archipel, on vérifie actuellement et,
sous réserve de plus amples informations, il n'y a pas de
contre-indication. Les réfections et, éventuellement,
l'installation du groupe bulle n'iraient en rien contre les objectifs
d'Archipel, au contraire.
M. Laplante: Une dernière question. Plusieurs groupes
m'ont téléphoné pour dire: On aimerait participer à
la consultation, mais on manque d'outils, on manque d'argent. Est-ce que vous
avez l'intention de favoriser
certains groupes sérieux, quant aux consultations, pour leur
donner un certain moyen de financement afin qu'ils puissent vous apporter des
objections négatives ou construe tives?
M. Gendron: Pour le moment, concernant les groupes auxquels vous
faites référence, on a reçu des demandes d'aide
financière a mon bureau. À partir du moment où on a un
secrétariat du projet Archipel à Montréal, pour le moment,
compte tenu qu'on aura le rapport d'étape dont je vous parlais seulement
à l'automne, je n'ai vraiment pas ce qu'il faut comme information
pertinente pour prendre la décision d'élargir la consultation.
(Minuit)
Éventuellement, que ce soient des tenants pour ou contre le
projet, les subventionner, les nourrir d'aide financière pour porter
plus avant la consultation ou apprécier davantage les informations qu'on
va recueillir, plus l'étude avancera, que ce soit au niveau des
études biologiques, que ce soit au niveau des études de
récréologie, que ce soit au niveau des études
environnementales.
Pour le moment, j'aime mieux leur dire que nous sommes tout à
fait ouverts a ce que ces groupes nous fassent part de leurs recommandations.
Le secrétariat d'Archipel à Montréal est ouvert au public,
il est sensible à toute information. J'en profite d'ailleurs pour
annoncer à ses membres et à la population du Québec que,
dans les jours qui suivront, il y aura, en plus du modèle réduit,
la maquette du projet des eaux, qui sera visuellement observable à Terre
des Hommes; en ce sens, pour le moment, je préférerais, comme
ministre d'État à l'Aménagement et responsable de ce
dossier, lui faire faire un bout de chemin et on verra à l'automne ce
qu'on a comme rapport d'étape et si, effectivement, il y a des
éléments qui doivent être critiqués davantage dans
le sens positif du terme, on avisera en conséquence et on prendra la
décision requise.
M. Laplante: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Hull.
Office de planification et de
développement
M. Rocheleau: Merci, M. le Président. J'aimerais
peut-être qu'on demande au ministre d'État à
l'Aménagement de nous indiquer s'il y a des modifications à
l'intérieur des orientations de l'Office de planification et de
développement du Québec, l'OPDQ.
M. Gendron: Cela veut dire que, pour ce qui est du reste, on va
parler plus particulièrement des crédits de l'OPDQ. Votre
question, si vous me permettez de la répéter...
M. Rocheleau: Au point de vue des orientations que le ministre
tend à donner a l'OPDQ en 1981-1982-1983.
M. Gendron: Pour le moment, j'ai eu l'occasion d'en dire quelques
mots dans mon texte de présentation, qui n'a pas tellement
été écouté, mais c'était votre droit le plus
strict...
M. Rocheleau: Je m'excuse, M. le Président, je l'ai
écouté, mais je voudrais faire préciser son rôle par
le ministre, parce que j'ai d'autres questions que je n'ai pas posées
tantôt et que je vais poser par la suite.
M. Gendron: Cela me fait plaisir, M. le député.
Justement, les précisions sont les suivantes. L'OPDQ, comme tel, en
termes d'organisme légalement constitué, au moment où je
vous parle, ne relève pas du ministre d'État à
l'Aménagement mais directement de l'exécutif, c'est-à-dire
de M. Lévesque lui-même, à l'exception du fonds de
développement régional où, c'est très clair, c'est
le ministre d'État à l'Aménagement qui en a la
responsabilité. En ce sens, j'ai annoncé tantôt, dans mon
texte de présentation, que dernièrement, M. Lévesque a
présenté au Conseil des ministres une recommandation à
l'effet de créer une nouvelle corporation qui a comme mandat de regarder
le fonctionnement de l'OPDQ, d'évaluer certaines choses, le travail qui
a été fait, faire le partage entre les fonctions dites
d'aménagement, les fonctions dites de planification du
développement économique et en fait toute la
responsabilité qui, depuis des années, a été
confiée et dévolue à l'OPDQ, pour faire rapport au Conseil
des ministres dans les meilleurs délais. Les meilleurs délais
voudraient dire fin de septembre à peu près, au maximum; on aura
alors plus de précisions quant à une autre définition des
responsabilités de l'OPDQ ou encore pour ce qui est de la question du
rattachement politique de l'OPDQ. Tant que la corporation n'aura pas
terminé ses travaux, je ne peux présumer des conclusions de la
nouvelle corporation quant aux orientations futures à lui donner, autant
au niveau du fonctionnement de l'OPDQ que de ses responsabilités.
M. Rocheleau: Mais la nouvelle corporation qui devra faire une
espèce d'enquête sur l'OPDQ, quand sera-t-elle formée et
quel est son échéancier?
M. Gendron: La nouvelle corporation est formée au moment
où on vous parle. Elle a
siégé à une ou deux reprises: une fois, au moment
où je vous parle. J'ai dit tantôt que son échéancier
est pour septembre. Je ne fais que vous corriger, il n'est pas question de
faire une enquête sur l'OPDQ.
M. Rocheleau: Cela en prendrait pratiquement une.
M. Gendron: II est question d'analyser les responsabilités
qui ont traditionnellement été dévolues à l'OPDQ
par rapport à des précisions quant aux responsabilités de
fond parce qu'il y a des missions à l'OPDQ qui sont quand même un
peu différentes. Il y a une mission de planification, il y a une mission
de statistiques, il y a une mission de responsabilité régionale
et d'association au développement régional par le fonds de
développement régional, le FDR, comme on l'appelle. Il y a
également au niveau des CAR, le délégué
régional de l'OPDQ, tout ça, les CRD, les ententes. Je pense que
toutes ces choses doivent être revues, pour que, comme je l'ai
mentionné plus tôt, fondamentalement, que ce soit plus clair, que
ce soit le rattachement politique de l'OPDQ pour des choses qui seront
très précises. On dira: Telle partie peut relever du ministre
d'État au Développement économique, telle partie peut
relever du ministre d'Etat à l'Aménagement, mais qu'on sache au
moins très bien les fonctions qui continueront, j'espère,
d'être exercées par l'OPDQ, mais à des niveaux beaucoup
plus clairs, en association avec les milieux, en association avec tous les
organismes de consultation qui existent sur l'ensemble du territoire
québécois.
M. Rocheleau: Je veux avoir seulement un oui ou un non, M. le
Président, le fonds de développement régional, c'est la
responsabilité du ministre de l'Aménagement...
M. Gendron: Oui.
M. Rocheleau: J'aimerais savoir du ministre de
l'Aménagement... Quand il a dit tantôt qu'il favorisait et qu'il
souhaitait des initiatives locales, c'est vrai?
M. Gendron: Oui.
M. Rocheleau: II y a à peine un an et demi, la
municipalité de Aylmer, dans le comté de Pontiac, acceptait la
responsabilité de la gestion d'une salle de spectacles au cégep
de l'Outaouais. Des sommes d'argent avaient été
mentionnées, soit 1 000 000 $, en provenance de l'OPDQ, pour la
construction de cette salle de spectacle. Il y a à peine quelques
semaines, on apprenait que ça semblait avoir pris...
M. Gendron: ...direction.
M. Rocheleau: Une direction de côté, en tout cas, et
qu'il y avait une partie des crédits qui était rendue dans le
comté du ministre.
M. Gendron: C'est bien ça.
M. Rocheleau: Alors, je veux savoir si le ministre va
s'approprier le reste du million de dollars ou s'il va reconsidérer
l'initiative locale pour laquelle la municipalité d'Aylmer avait
déjà fait beaucoup de travail et pour laquelle il y avait
déjà un comité formé. Dans l'Outaouais, on avait
besoin, à toutes fins utiles, d'équipement de la sorte et cela
semblait satisfaire le Conseil régional des loisirs et de la culture,
entre autres, et le ministre a reçu, premièrement, une lettre
demandant de reconsidérer cette salle de spectacles qui est un besoin
dans l'Outaouais.
M. Gendron: Cela me fait plaisir de répondre à
votre question. Exposons d'abord rapidement la problématique de la salle
de spectacles à Aylmer dont vous parlez. C'est une salle de spectacles
qui appartient au cégep de Hull...
M. Rocheleau: C'est ça, le cégep de l'Outaouais,
dans le territoire de Pontiac.
M. Gendron: ...construit sur un terrain de la Commission de la
capitale nationale, la CCN...
M. Rocheleau: Avec entente de protocole.
M. Gendron: II s'agit d'une salle qui nécessite
énormément d'améliorations; la preuve, c'est pour
ça que vous faites une demande d'aide, notamment au niveau
d'aménagements, de l'acoustique, pour pouvoir présenter certains
spectacles de qualité et d'envergure, ce qui est normal et souhaitable.
Ce que j'ai à répondre à votre question, c'est qu'il n'y a
aucune relation entre la salle de spectacles d'Amos et le projet dont vous me
parlez. Je peux vous dire que, dans le cas d'Amos, avant même que je sois
nommé ministre d'État à l'Aménagement, c'est un
dossier qui était...
M. Rocheleau: Tombé du ciel.
M. Gendron: ...accepté. J'ai eu l'occasion de le piloter,
de m'en préoccuper constamment depuis un an ou un an et demi, comme
député du comté d'Abitibi-Ouest; je suis fier que ces
démarches aient donné des résultats heureux et que la
ville d'Amos puisse bénéficier d'un tel équipement. Dans
Jean-Talon, vous êtes équipé, suréquipé.
Une voix: Suréquipé.
M. Rivest: Avec le député qu'ils ont, c'est
évident.
M. Gendron: Dans l'Outaouais, la situation est tout à fait
différente. Il n'existe, au moment où on se parle, M. le
député de Hull, aucun maître d'oeuvre pour prendre en main
le dossier; des tentatives ont été faites auprès de la CRO
qui a décliné l'invitation qu'on lui a faite d'être
maître d'oeuvre de cette initiative. Vous n'êtes pas sans savoir
que ce refus a amené des retards importants dans le dénouement de
l'affaire. La salle de spectacles n'a pas encore de preneur, les ententes pour
l'administration de cet équipement ne peuvent donc être
signées, tant qu'on n'aura pas une espèce de groupe,
d'association, d'organisme qui va être promoteur et maître d'oeuvre
du projet, parce que c'est vous-même qui faisiez la relation avec Amos.
Avec Amos, on n'avait aucune difficulté puisque la municipalité,
dès le début des démarches concernant ce projet, nous a
indiqué qu'elle tenait à ce que ce soit un équipement
communautaire ou municipal et, en ce sens, elle acceptait d'être le
maître d'oeuvre du projet, de piloter le projet et d'inscrire le projet
de la salle de spectacles dans ses équipements municipaux. En ce sens,
c'était beaucoup plus facile pour nous d'être ce que nous devrions
être, ce moteur qui supporte une initiative locale du milieu après
que le milieu a pris l'initiative d'être maître d'oeuvre d'une
telle initiative. Ce n'est pas le cas de Hull. C'est pour cela que, pour le
moment, on attend que les différents intervenants dans la région
de l'Outaouais -en passant, il y en a pas mal - fassent le point sur ce
dossier. Si, effectivement, c'est un dossier qui les intéresse, comme je
pense que cela devrait les intéresser, dès que nous serons en
mesure de connaître qui prend l'initiative, cela nous fera plaisir de
voir les possibilités de support et d'aide financière.
M. Rocheleau: Je voudrais mentionner au ministre que ce n'est pas
une demande du comté de Hull, mais c'est beaucoup plus à
l'intérieur du mandat que l'on m'a confié à titre de
responsable auprès des municipalités. Que je sache, M. le
ministre, la municipalité d'Aylmer, dans le comté de Pontiac,
avait accepté la responsabilité et avait accepté aussi la
gestion future de la salle de spectacles à l'intérieur du
cégep de l'Outaouais. Il y a quelques semaines, le conseil d'Aylmer
protestait avec véhémence contre la décision du
gouvernement de retirer, semble-t-il, les fonds pour l'aménagement de
cette salle de spectacles qui avait produit un rapport de rentabilité,
de viabilité et aussi démontrant les besoins. Si la
communauté régionale de l'Outaouais avait refusé, d'une
part, d'être maître d'oeuvre et responsable de la gestion, c'est
que la Communauté régionale de l'Outaouais avait refusé
antérieurement la même responsabilité pour le conservatoire
de musique, d'une part, et, d'autre part, pour le centre des congrès qui
se construisait dans la ville de Hull, mais qui avait un impact
régional.
La communauté régionale qui, pour l'information du
ministre, demande une restructuration en profondeur de son organisme, et ce,
depuis sept ans, attend, avant de prendre de nouvelles responsabilités,
d'avoir des modifications majeures à l'intérieur de sa loi,
c'est-à-dire la loi de la communauté et la Loi créant les
communautés urbaines et régionales.
M. le ministre, j'aimerais connaître et apprécier aussi:
Est-ce que vous considérez reporter les montants nécessaires
à la construction de cette salle à l'intérieur des budgets
de l'OPDQ si la municipalité d'Aylmer vous en fait de nouveau la
demande?
M. Gendron: Je vais sûrement analyser cela au
mérite, sauf que les renseignements qu'on a au moment où on se
parle ne sont pas tout à fait en conformité avec ce que vous avez
mentionné, parce que, au moment même où on se parle, le
cégep est en discussion avec la municipalité d'Aylmer et le
ministère des Affaires culturelles. Ces trois intervenants ne nous ont
pas fait part d'une entente ou d'une problématique qui nous permettrait
de dire qu'on a, au moment où on se parle, un maître d'oeuvre qui
accepte de porter la gestion du projet. Dès qu'on aurait des
réponses par rapport aux discussions qui ont libre cours actuellement
entre le cégep, la municipalité d'Aylmer et le ministère
des Affaires culturelles - on pense qu'on pourrait avoir cela dans les mois
à venir - cela nous ferait plaisir de réévaluer cette
demande qui nous proviendrait de votre région, mais je ne voudrais pas
qu'on se laisse sur des choses qui me paraissent tout à fait exactes,
à savoir un transfert d'argent d'Aylmer pour une salle de spectacles
à Amos. Ce sont deux projets qu'il faut tout à fait dissocier
parce qu'il n'y a aucun lien entre ces deux projets.
M. Rocheleau: On ne conteste pas l'habileté de ministre,
à savoir qu'il aurait pu prendre 300 000 $ pour l'appliquer à
l'intérieur de sa propre région. On ne conteste pas cela, c'est
habile de sa part, mais on ne voudrait pas que cela provienne de la
région de l'Outaouais qui, elle aussi, a des besoins quand même
relativement importants. (0 h 15)
Je tiens à mentionner au président qu'à
moins qu'on ne soit limité dans le temps, les collègues du
côté du pouvoir tantôt ont pris une partie du temps qui nous
était consacré, je pense.
M. Gendron: Ils sont également membres de la commission,
M. le député de Hull.
M. Rocheleau: Oui, mais ils peuvent voir le ministre tous les
jours, avantage qu'on n'a pas.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne voudrais pas engager de conversation ni aucune...
M. Rivest: Leur rôle, c'est d'écouter.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le
député.
M. Gendron: J'ai tout le temps pour vous entendre.
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse. Je pense que
depuis...
M. Rocheleau: Le président est-il fatigué?
Le Président (M. Jolivet): Non, je préside depuis
16 heures, M. le député, mais on a permis cependant une question
de l'autre côté.
M. Rocheleau: J'ai une autre question, M. le Président. Si
le ministre a une réponse courte, cela va se terminer plus
rapidement.
M. Gendron: Mes réponses ont été très
courtes.
M. Rocheleau: M. le Président, on sait que l'Union des
municipalités, l'Union des conseils de comté, les
communautés urbaines et régionales et même la Commission
des transports ont formé un comité à l'intérieur de
rencontres qu'on appelle Québec-municipalités. Le ministre des
Affaires municipales a, depuis l'étude et l'adoption de la loi 57, eu
des rencontres assez fréquentes avec ce comité. Le ministre
responsable de l'aménagement du territoire se propose-t-il de rencontrer
aussi ce comité afin d'étudier les implications des
municipalités régionales de comté et a-t-il l'intention de
les rencontrer au cours de l'été 1981, étant donné
qu'il y a déjà des demandes qui ont été faites dans
ce sens?
M. Gendron: Oui. Vous faites référence à des
groupes de consultation à la suite de la mise en place des MRC. Comme le
ministre des Affaires municipales et moi sommes associés de près,
à la suite de la consultation, pour l'apprécier, j'ai nettement
l'intention d'avoir des rencontres avec ces groupes de consultation pour
prendre connaissance des rapports de la consultation à la suite de
l'implantation des MRC dans à peu près tous les territoires du
Québec. Je vais probablement donner suite aux demandes qu'on va me faire
en ce sens.
M. Rocheleau: Je remercie le président de m'avoir permis
cette dernière question.
Le Président (M. Jolivet): Je permets bien des choses,
vous savez, depuis 16 heures.
M. Rocheleau: On va sûrement lui permettre d'aller se
reposer maintenant.
Le Président (M. Jolivet): Non, nous avons encore du
travail.
M. Rocheleau: Non. Ah! vous avez encore du travaill
Le Président (M. Jolivet): Ah oui!
M. Rocheleau: Comme cela, on peut encore assister et
continuer.
Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez assister. Je
considère le programme 4 ainsi que le programme 6 comme étant
adoptés, le programme 5 faisant l'objet d'autres discussions demain avec
le ministre d'État au Développement économique. Je tiens
aussi à faire remarquer que, par erreur, tout à l'heure, j'ai
adopté le programme 4 alors que je devais adopter le programme 2, ce qui
est donc fait. J'invite maintenant le ministre d'État au
Développement culturel et scientifique pour l'étude du programme
8, si je ne me trompe. C'est bien cela, le programme 8.
Oui, M. le ministre, la parole est à vous.
Développement culturel et scientifique
Remarques préliminaires M. Jacques-Yvan
Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, ayant
passé, par les années dernières, jusqu'à trois
semaines à étudier les crédits du ministère de
l'Éducation, je me ferai une fête de disposer de l'ensemble de mes
crédits en une heure ce soir. Permettez-moi peut-être de commencer
par le développement scientifique et de vous faire part de quelques
observations sur les travaux de ce ministère et du secrétariat
qui lui sert d'officine administrative.
Le mandat du développement
scientifique est tout récent, comme vous le savez. Il s'inscrit
dans le sillage de l'énoncé de politique qui avait
été rendu public par le gouvernement il y a quelques mois et,
plus précisément, en avril 1980. Cet énoncé de
politique était intitulé Un projet collectif. Il y a donc
à peine un an de cela. Le secrétariat qui appuie l'action du
ministre d'État responsable de la mise en oeuvre de cette politique ne
date, quant à lui, que du mois d'octobre dernier.
Néanmoins, je suis heureux de pouvoir dire que l'implantation de
la nouvelle politique de développement scientifique a progressé
à pas vigoureux et que nous devons cela, pour une bonne part, à
l'action du secrétariat. J'en profite pour présenter aux membres
de cette commission, le secrétaire général associé
au développement scientifique, M. Gilles Bergeron, qui est en somme un
de mes deux sous-ministres, celui qui est responsable du développement
scientifique.
Quelques mots d'abord des outils institutionnels dont nous avions besoin
et qui ont été mis en place assez rapidement et
conformément à l'énoncé de politique. Au mois
d'août dernier, le bureau de la science et de la technologie,
jusque-là rattaché au ministère de l'Éducation, a
été transféré au développement scientifique,
c'est-à-dire au ministère du Conseil exécutif. Dès
le mois de décembre, le Conseil de la politique scientifique a vu son
mandat révisé et s'est vu confier des missions nouvelles, tandis
qu'en mars 1981, la nomination par décret de tous ses membres, lui
assurait le second souffle dont nous avions parlé, que nous avions
appelé de nos voeux dans l'énoncé de politique.
En conformité, toujours, avec notre énoncé de
politique, le gouvernement procédait au cours des mêmes mois,
à la transformation de nos deux grands programmes de subvention pour la
recherche universitaire, le programe FCAC du ministère de
l'Éducation et celui du Conseil de recherche en santé du
Québec; deux programmes de subvention bien connus de tous les milieux de
recherche du Québec. Devenus des fonds d'aide à la recherche,
devenus autonomes de surcroît par rapport à leur ministère
de tutelle, le ministère de l'Éducation et le ministère
des Affaires sociales, ces organismes ont amorcé leur transition vers la
création prochaine de véritables fondations pour la recherche
scientifique, comme nous l'avions annoncé dans le livre blanc.
Dotées, comme prévu, d'un fonds spécial destiné
à des actions incitatrices ou à des actions de démarrage
il nous a été possible de soutenir le développement d'un
laboratoire de recherche industriel et à la publication en
français de travaux de recherche scientifique.
Étant donné le moment de la constitution du fonds, qui
remonte à peine à octobre dernier, nous n'avons pu, au cours du
dernier exercice, dépenser plus de 104 000 $ sur les 200 000 $ qui
avaient été attribués. Au cours de cette même
période, d'octobre à mars 1981, si brève soit-elle, outre
ces actions de soutien et de mise en place du dispositif institutionnel,
l'application de notre politique a été poursuivie avec vigueur.
Ainsi, avons-nous lancé avec des ministères sectoriels la
préparation de rapports de conjoncture faisant le point sur
l'état actuel de la recherche et sur les possibilités de
recherche dans les secteurs cruciaux pour le développement du
Québec. Un inventaire et une première analyse des
activités de recherche gouvernementale ont été
complétés. Enfin, l'élaboration d'un plan d'action sur la
recherche en biotechnologie a maintenant été amorcée
à la suite de rencontres avec les milieux de recherche
intéressés.
Dans une perspective d'ouverture et de développement de nos
rapports scientifiques avec l'étranger, nous avons apporté une
attention particulière au dossier de la coopération. Le
Québec a pu être représenté lors de la
dernière conférence au niveau ministériel sur la science
et la technologie à l'OCDE. Du côté canadien, comme nous le
prescrivait notre énoncé de politique, nous avons
multiplié les démarches, les échanges avec les organismes
fédéraux et nous avons voulu poursuivre un dialogue aussi
poussé et soutenu que possible. Je dois avouer que les résultats
demeurent modestes, les fédéraux n'ont pas encore compris tout le
sens de notre démarche, mais on doit noter cependant un certain
progrès dans le dialogue avec plusieurs autres provinces canadiennes.
L'interprovincial fonctionne parfois mieux que le
fédéral-provincial.
Nous entendons au cours de la présente année, qui promet
d'être tout à fait décisive pour l'implantation de notre
nouvelle politique, poursuivre, avec le plus d'énerqie possible,
l'ensemble des actions déjà engagées. Le fonds
d'incitation passe, dans le nouveau budget, de 200 000 $ à 930 000 $, et
j'avoue que par les temps difficiles que nous traversons, cette période
de rigueur financière, je ne suis pas peu fier d'avoir obtenu ces 730
000 $ de plus pour le fonds d'incitation. Cela marque assez, dans cette
période de contraintes et de restrictions, la volonté du
gouvernement de mettre en oeuvre sa politique et de développer la
recherche. Il s'en faut d'ailleurs que l'effort gouvernemental se
reflète là seulement. Les budgets de plusieurs ministères
sectoriels en portent aussi la trace et il convient de noter, par exemple, que
le budget du fonds FCAC connaît cette année une croissance de plus
de 20%.
Au nombre des nouvelles actions que nous aurons pour mission cette
année de
mettre en oeuvre, de piloter, je me permets d'en mentionner deux ou
trois avant de conclure.
Tout d'abord la création d'un programme expérimental de
soutien à l'emploi scientifique dans les universités et dans
l'industrie. Nous avons prévu une vingtaine de postes pour ces fins.
En second lieu, une aide accrue au développement des
activités de nos sociétés savantes.
Enfin, une aide au développement d'activités dans le
domaine de la communication et de la vulgarisation scientifique.
En somme, M. le Président, pour ne pas allonger indûment
cette présentation, je me permettrai de conclure en disant que je suis
tout à fait confiant qu'à la fin de l'exercice budgétaire
1981-1982 l'essentiel des mesures prévues dans notre
énoncé de politique d'avril 1980 aura pris forme et franchi les
premières étapes de la réalisation.
Je suis à la disposition de la commission pour toutes les
questions qu'on pourrait vouloir me poser, bien que je sache qu'il appartient
davantage au premier ministre de défendre les chiffres eux-mêmes.
Je serais tout à fait prêt à répondre aux questions,
si vous aviez à m'en poser là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, nous étudions les
crédits du ministère d'État au Développement
culturel et scientifique. Le ministre exprimait sa satisfaction de n'avoir
qu'une heure à consacrer à l'étude de ses crédits.
Ayant subi la vingtaine d'heures de l'étude des crédits de
l'Éducation l'an dernier avec le ministre, sachez, M. le
Président, que je partage entièrement votre satisfaction.
D'ailleurs, les quelques minutes qu'il a consacrées à sa
déclaration préliminaire tranchent de façon assez brutale
avec l'heure et quelques minutes que nous devions subir l'an dernier. Mais je
regrette que le gouvernement nous force en quelque sorte à
étudier des crédits d'un ministère aussi important
à minuit et demi, en fin de session. L'Opposition officielle accorde une
importance de tout premier ordre aux efforts quand même assez modestes
que le gouvernement tente de consacrer au développement culturel et
scientifique. Jusqu'à maintenant, nous avons eu des livres, nous avons
eu des discours, et depuis quelques mois, quelques...
M. Morin (Sauvé): Modestes réalisations. M.
Lalonde: M. le Président, est-ce que le ministre me permettrait?
J'allais parler de choses modestes, en effet. Réalisations, on verra. (0
h 30)
Les crédits de ce ministère, en effet, sont très
modestes. Les structures que le gouvernement a mises sur pied depuis quelques
mois sont à leurs premiers ébats. Nous aurions quelques questions
à poser, parce qu'il est trop tôt pour demander ou, enfin,
espérer un bilan des réalisations modestes que le ministre
mentionnait tout à l'heure. J'aimerais, au départ, justement ne
pas faire de déclaration liminaire parce qu'on nous a accordé
à peine une heure et les quinze premières minutes ont
été consacrées à la déclaration du ministre.
J'aimerais attaquer non pas le ministre, mais le sujet immédiatement en
posant un certain nombre de questions sur l'échéance pour la mise
en oeuvre des recommandations du livre blanc pour une politique
québécoise de la recherche scientifique. On sait qu'un
sous-ministre aux sciences a été nommé. On connaît
le transfert au ministre responsable du développement scientifique du
Bureau de la science et du Conseil de la politique scientifique. On
connaît aussi la transformation du programme de formation des chercheurs
et action concertée, la FCAC, en un fonds rénové de la
recherche universitaire, quoique, si je comprends bien, ce fonds relève
encore du ministre de l'Éducation.
M. Morin (Sauvé): Entendons-nous bien.
M. Lalonde: Je permets au ministre de m'interrompre parce qu'on
vient de terminer les crédits du ministère de l'Éducation
et on n'est pas sûr de savoir qui est le patron.
M. Morin (Sauvé): Le fonds FCAC, le nouveau fonds FCAC est
devenu autonome et est toujours sous l'égide du ministère de
l'Éducation et il reçoit des orientations générales
de ce ministère. Mais c'est ce fonds autonome qui distribue
désormais les bourses, les subventions, et non plus le ministère.
Je pense que la distinction n'échappera pas au député de
Marguerite-Bourgeoys. Nous pensions cependant qu'il devait y avoir un lien
organique entre le fonds et le ministère de tutelle parce que ce
ministère peut avoir des priorités, des orientations dont le
fonds devra tenir compte. Le fonds a cependant une certaine autonomie
administrative, une autonomie de gestion, et il peut faire des recommandations
lui aussi au ministère de l'Éducation, bien sûr. Est-ce que
la situation paraît suffisamment claire au député de
Marguerite-Bourgeoys ou si c'est trop subtil pour lui comme arrangement?
M. Lalonde: Ce n'est pas tellement la
subtilité, M. le Président, qui crée
problème. Il s'agit de savoir, pour un simple député de
l'Assemblée nationale, quel ministre répond aux questions des
membres de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les responsables
à l'Assemblée de ce fonds. Le ministre de l'Éducation en a
fait état. L'ancien ministre de l'Éducation, qui était
pupille du ministre d'État au Développement culturel et qui en
est maintenant devenu le tuteur, prétend qu'il a aussi quelque chose
à dire là-dedans. J'aimerais savoir qui est responsable à
l'Assemblée nationale.
M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement, le ministre
d'État avait la responsabilité de préparer un
énoncé de politique dans lequel il a estimé opportun,
après une vaste consultation auprès des milieux universitaires et
d'autres milieux aussi, de recommander que ce fonds FCAC de même que le
fonds de recherche dans le domaine de la santé soient rendus
autonomes.
M. Lalonde: On sait cela, tout le monde est d'accord et on est
bien heureux de cela, mais il y a quand même un ministre qui
répond à l'Assemblée nationale.
M. Morin (Sauvé): Une fois que cela a été
fait, la responsabilité du fonds de recherche en santé revient au
ministre des Affaires sociales et la responsabilité du fonds FCAC et les
crédits qui découlent de ce changement relèvent du
ministre de l'Éducation.
M. Lalonde: Voilà, M. le Président. On a
libéré le ministre d'État d'une responsabilité.
M. Morin (Sauvé): II ne l'a jamais eue, à vrai
dire.
Discussion générale
M. Lalonde: Non, mais il en a parlé. Alors, les questions
que nous devions poser et que j'allais poser, on les posera au ministre de
l'Éducation.
On connaît aussi la refonte du Conseil de la politique
scientifique en ce qui a trait à sa composition et à ses
mécanismes d'opération. Il apparaît, toutefois à
plus d'un observateur et à plus d'un député que la
politique scientifique du gouvernement tarde à se concrétiser. Il
faut aller au-delà des discours. Je demande au ministre quel
échéancier il a établi pour l'implantation des
orientations et des mesures annoncées dans l'énoncé de
politique intitulé Un projet collectif. Vous savez, il ne s'aqit pas
d'apposer le mot "collectif" à un projet pour lui donner toutes les
vertus; encore faut-il que le gouvernement décide d'agir
concrètement.
M. Morin (Sauvé): Mais j'ai quelque difficulté
à suivre le cheminement de mon collègue de Marguerite-Bourgeoys.
Je pensais avoir, dans mon exposé, donné le détail des
mesures qui étaient prévues au livre blanc et qui sont
déjà exécutées: création d'un nouveau
conseil de la politique scientifique...
M. Lalonde: Cela est connu... M. Morin (Sauvé):
C'est fait.
M. Lalonde: ... c'était avant même vos
crédits.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais je m'excuse, c'était un
des objectifs principaux du livre blanc sur le développement
culturel.
M. Lalonde: Et après?
M. Morin (Sauvé): Ensuite, il y avait -je l'ai
indiqué - le rattachement du Bureau de la science et de la technologie
qui se trouvait à dépendre du ministère de
l'Éducation et qui, désormais, a été
transféré au développement scientifique. Si vous avez des
questions à poser sur le Bureau de la science et de la technologie, sur
son budqet, sur ses activités, je peux répondre parce que c'est
ma responsabilité désormais. C'est fait, ça.
Ensuite, le programme FCAC était un des objectifs majeurs.
M. Lalonde: On en a parlé.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais c'est fait.
M. Lalonde: Oui, c'est fait.
M. Morin (Sauvé): Vous semblez insinuer que rien n'a
été fait.
M. Lalonde: On parle de structures, est-ce que
l'énoncé de politique se limitait à des structures
seulement? On a cru...
M. Morin (Sauvé): Non.
M. Lalonde: ... les Québécois ont cru qu'il y avait
un contenu là-dedans.
M. Morin (Sauvé): Oui, bien sûr, vous savez qu'il y
avait plusieurs parties dans l'énoncé de politique. Par exemple,
pour favoriser une meilleure concertation de la recherche dans le domaine
universitaire, ensuite, dans le domaine gouvernemental et, enfin, dans le
domaine privé. Il y avait un certain nombre de recommandations et on
peut toutes les voir les unes après les autres, si vous le
désirez, mais les principales tournaient autour de la question des
structures, parce que ces structures ne répondaient pas aux besoins et
les
consultations qui ont été tenues par mon
prédécesseur, le Dr Laurin, l'avaient amené à
recommander, dans le livre blanc, qu'une organisation différente de la
recherche soit établie au Québec. Et sur cela, je puis rassurer
le député, c'est déjà largement
réalisé. Par exemple, il n'y avait pas que le fonds FCAC, il y
avait également le fonds spécial destiné aux actions
incitatrices; eh bien, il est créé, ce fonds.
M. Lalonde: Mais quelles sont les orientations que le ministre,
censément de tutelle de ces fonds, a décidées, a
exprimées?
M. Morin (Sauvé): Ah, très bien.
M. Lalonde: Je veux parler du contenu parce que les structures,
on les connaît.
M. Morin (Sauvé): C'était d'abord le
développement des ressources humaines - je pense y avoir fait allusion
tout à l'heure -c'était le programme expérimental de
soutien à l'emploi scientifique dans les universités, que j'ai
mentionné, et puis l'aide accrue au développement des
activités des sociétés savantes.
Pour ce qui est des sociétés savantes, elles ont
été averties, depuis quelques mois, de l'existence de ces fonds
et elles doivent nous faire parvenir des demandes. Nous attendons ces demandes,
c'est la première année où ce programme est en marche,
c'est la première année où ce programme va être mis
en oeuvre.
Enfin, j'ai mentionné tout à l'heure, dans mon
exposé, l'aide au développement d'activités dans le
domaine de la communication et de la vulgarisation scientifique. Nous aurons
pour cela l'organisation d'un stage dans un organe de publication
scientifique.
Ce ne sont pas de gros montants, encore une fois, puisque au cours du
dernier exercice financier nous n'avons réussi à dépenser
que 104 000 $ sur les 200 000 $ qui avaient été attribués,
mais, au cours de l'année qui vient, nous avons lieu de penser que le
fonds d'incitation pourra dépenser, souhaitons-le, l'ensemble des 930
000 $ qui lui sont attribués pour l'année courante.
M. Lalonde: M. le Président, c'est très bien des
discours, mais lorsque le ministre dit qu'il a exprimé ses désirs
pour le développement des ressources humaines, on voudrait savoir dans
quel sens, premièrement. Deuxièmement, si on revient au projet
collectif, le fameux livre blanc, à la paqe 45, le ministre retrouvera
le résumé-synthèse des politiques et des moyens d'action.
Dans les moyens d'action, on retrouve, par exemple, "soutenir la formation et
l'emploi du personnel scientifique en appuyant des projets de cueillette,
d'analyse et de diffusion des données sectorielles et intersectorielles
pertinentes". Un peu plus loin: "en mettant su pied un programme d'aide
à la création de postes de chercheurs et de techniciens dans
l'industrie". Un peu plus loin: "en soutenant financièrement l'emploi
apr les universités de détenteurs de PhD, âgés de
moins de 35 ans". Est-ce que le ministre peut nous donner un
échéancier?
M. Morin (Sauvé) Oui.
M. Lalonde: Quand va-t-il nous donner ce calendrier d'action?
M. Morin (Sauvé): Je vous l'ai donné tout à
l'heure.
M. Lalonde: Mais non.
M. Morin (Sauvé): Cette année même, nous
allons procéder à la mise en oeuvre du proqramme de soutien
à l'emploi scientifique dans les universités et dans l'industrie.
J'ai même mentionné le nombre de postes que nous comptions
dégager pour cela: une vingtaine de postes. Il s'agit de créer de
l'emploi pour des chercheurs, en particulier les jeunes chercheurs. C'est
ça l'objectif.
M. Lalonde: 20?
M. Morin (Sauvé): Oui, 20 postes, dans un premier temps.
Je ne pense pas qu'on pourrait, d'ailleurs, en absorber plus dans la
première année. J'imagine qu'au cours des années
suivantes, selon les disponibilités financières, il pourrait y en
avoir davantage. Vous savez, dans l'ensemble du pays, pour vous donner une
idée, dans l'ensemble de la fédération, le gouvernement
fédéral en crée 40 chaque année de sorte que cela
ne va pas être si mal d'en créer 20 pour une première
année de mise en marche du programme.
D'ailleurs, cela va prendre beaucoup de travail pour y arriver. Ce n'est
pas simple de créer 20 postes de chercheurs dans l'industrie et dans les
universités. C'est plus compliqué que ça n'en a l'air
à première vue. Deuxièmement, pour compléter ma
réponse au député de Marguerite-Bourgeoys, je voudrais
attirer son attention sur ce que j'ai dit au sujet des rapports de conjoncture.
Il a été convenu que, dans quatre ministères du
gouvernement du Québec, nous ferions un inventaire de la recherche, des
postes consacrés à la recherche, du contenu de ces recherches
parce qu'on s'est aperçu - c'est écrit en toutes lettres dans le
livre blanc -qu'il se fait pas mal de recherche au gouvernement, mais que
souvent le qouvernement ne le sait pas. Les ministères s'en doutent,
mais le gouvernement n'a pas une image d'ensemble de la recherche qui se fait,
par exemple, en agriculture. Il y aura
un rapport de conjoncture sur ce qui se fait en agriculture. Enfin, on
aura une idée précise et le ministre d'État au
Développement scientifique aura un instrument dont il pourra se servir
pour faire progresser cette recherche et pour que le gouvernement sache
où va l'argent, et peut-être, éventuellement, donne de
nouvelles priorités à ces recherches. Les autres
ministères, de mémoire, sont les Communications, les Transports
et Forêts. Ces rapports de conjoncture sont en voie de rédaction
en ce moment même. Je viens, d'ailleurs, ce matin même, de signer
la demande de décret pour ce qui est du rapport de conjoncture dans le
domaine des communications.
M. Lalonde: Le ministre attend-il des rapports définitifs
avant la fin de l'année financière 1981-1982?
M. Morin (Sauvé): Oui, sûrement avant la fin de
l'année financière. Autrement, si cela prenait trop de temps, je
pense que ce serait contraire à l'esprit du livre blanc qui voulait
qu'on fasse le point assez rapidement sur les recherches gouvernementales. (0 h
45)
Conseil de la politique scientifique
M. Lalonde: M. le Président, en ce qui concerne le Conseil
de la politique scientifique, on connaît la mise sur pied de deux
commissions, soit celle consacrée à la promotion de la culture
scientifique au sein du public et l'autre plutôt attachée à
la circulation d'information au sein de la communauté scientifique
elle-même, banques de données informatisées, publications
techniques, etc. Cette mise sur pied appartient aux quatorze nouveaux membres
du Conseil de la politique scientifique. J'aimerais savoir si la mise en place
de ces commissions aura lieu à brève échéance et
que le ministre nous expose de façon plus détaillée le
mandat de chacune de ces commissions ainsi que la nature des ressources
humaines et financières dont elles pourront disposer.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, ces deux
commissions dont il est question dans le livre blanc ont pour but, dans le cas
de la commission sur l'information scientifique, de faire progresser le secteur
de l'information et, notamment, le vaste secteur de l'informatique, de
même d'ailleurs que tout ce qui concerne les instruments avec lesquels
les connaissances scientifiques sont communiquées, aussi bien le livre
que l'audio-visuel, que l'informatique, que toutes les techniques d'information
scientifique. À cet égard d'ailleurs, à propos
d'information scientifique, je pourrais peut-être tout à l'heure,
si vous le désirez, vous donner quelques renseignements sur
Informatech-Québec, mais ce n'est peut-être pas le moment d'en
parler tout de suite.
La commission de la culture scientifique a un mandat très vaste,
du moins dans l'esprit du livre blanc, et elle porte avant tout sur la
formation scientifique et non pas seulement la formation scolaire proprement
dite, la formation à travers le réseau des écoles, des
universités et des collèges, mais tout ce qui peut permettre
à la culture scientifique du Québec de s'épanouir,
c'est-à-dire les revues scientifiques. Je pense, en particulier,
à cet instrument remarquable qu'est devenu Québec Science.
En gros, voilà les objectifs de ces deux commissions. Nous avons
demandé au Conseil de la politique scientifique de nous faire des
recommandations sur ces deux projets de commission. Nous n'avons pas cru bon de
les créer directement, j'entends que le gouvernement les crée
directement, mais qu'il prenne l'avis d'abord du conseil dont ces commissions
dépendront. Lorsque j'ai rencontré les membres du conseil, il y a
deux mois ou deux mois et demi, au moment de la création du conseil, je
leur ai demandé de créer au moins au cours de cet exercice
financier l'une des deux commissions, parce que je sais que ce sera un exercice
assez compliqué. Si cela doit être fait sérieusement, il
faut que ce soit bien fait. Je leur ai suggéré, je leur ai
recommandé de former d'abord la commission de la culture scientifique et
l'année suivante, on pourra songer à s'attaquer à la
commission de l'information scientifique. Voilà le calendrier en gros,
M. le Président.
M. Lalonde: Voilà pour le calendrier, M. le
Président. Donc, nous aurons, au cours de cet exercice financier, une
seule de ces deux commissions, mais le ministre ne nous a pas donné la
nature des ressources humaines et financières qu'il mettra à la
disposition de la seule commission qui sera créée au cours de
l'exercice financier.
M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, l'argent
nécessaire à la création de ces deux commissions qui
dépendent du Conseil de la politique scientifique est prévu au
budget du conseil. C'est l'une des raisons pour lesquelles, le budget
étant somme toute assez modeste, j'ai demandé qu'on se contente
cette année de créer cette première commission. Une fois
que celle-là sera solidement enracinée, on pourra songer à
créer la commission de l'information scientifique. J'attire votre
attention peut-être sur le fait que nous avons augmenté le budget
du Conseil de la politique scientifique pour lequel nous avions demandé
203 000 $ et une somme additionnelle de 120 000 $
permettra d'augmenter l'effectif de deux postes, deux postes bien
sûr pour le fonctionnement de la commission.
M. Lalonde: Étant donné que le temps est
compté, M. le Président, quoique je ne sois pas satisfait des
réponses du ministre... Nous n'avons qu'une commission, alors que deux
étaient proposées, et en ce qui concerne les ressources
financières, c'est assez modeste.
Le français dans les milieux
scientifiques
Je voudrais passer à une autre question très importante,
je voudrais parler de l'étude de M. J.-Arnold Drapeau, ingénieur
et professeur à l'École polytechnique de l'Université de
Montréal. Cette étude intitulée "Compilation des
publications et communications des chercheurs du Québec", novembre 1980,
et publiée pour le compte du Conseil québécois de la
langue française, sonne l'alarme sur l'abandon de la langue
française dans les milieux scientifiques du Québec. Selon le
document, 71% des 4846 publications des chercheurs de l'Université
Laval, de l'Université de Montréal et de cinq institutions de
recherche l'ont été en langue anglaise et 56% des communications,
des conférences, ont été prononcées en langue
anglaise.
En outre, M. Drapeau a découvert que 94% de toutes les
publications scientifiques de l'Institut de recherche d'Hydro-Québec, un
organisme francophone, un organisme qui dépend directement du
gouvernement, sont publiées en anglais. Je répète, 94% de
toutes les publications scientifiques d'Hydro-Québec sont
publiées en anglais.
Je demande au ministre quelle est son attitude face à ce
phénomène de publication en anglais des travaux qui ont
été financés en grande partie par la population
québécoise. Est-ce qu'il ne serait pas souhaitable que le
gouvernement se préoccupe activement de cette situation
déjà alarmante avant qu'elle ne devienne plus grave, par exemple,
en exigeant que les publications scientifiques issues de recherches que le
gouvernement subventionne soient rédigées d'abord en
français et, s'il le faut, en anglais par la suite, ou en même
temps?
Il me semble que pour un gouvernement qui, depuis quatre ans
déjà, proclame qu'il a réglé le problème de
la langue au Québec, par toutes sortes de campagnes, toutes sortes de
parades, un gouvernement et, en particulier, le ministre d'État au
Développement culturel et scientifique, dont c'est la première
responsabilité, a une responsabilité directe, immédiate et
très grave à l'égard de la langue des publications
scientifiques qu'on voudrait d'abord voir disponibles, et immédiatement
disponibles à nos Québécois francophones. Je ne voudrais
pas dire qu'elles ne devraient pas être en anglais, mais, au moins, en
même temps, en français.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je suis tout
à fait ravi de voir que mes collègues du Parti libéral se
soucient enfin de cette question. J'en suis ravi parce que ça va tout
à fait dans le sens de nos efforts entrepris depuis quelques mois pour
soutenir la langue française dans le domaine scientifique. En effet, ce
phénomène que vous venez de décrire, et dont le pire
exemple se trouve à Hydro-Québec, caractérise
également la recherche en France, au point que le premier ministre
Barre, après s'être entretenu de cette question avec le premier
ministre, M. René Lévesque...
M. Lalonde: L'ancien premier ministre Barre.
M. Morin (Sauvé): L'ancien premier ministre, bien
sûr. Vous savez bien ce qu'il en est, ce n'est pas à vous que je
vais apprendre qui est premier ministre du Québec et qui ne l'est
pas...
M. Barre et M. Lévesque avaient fait allusion à ce
problème et ils avaient convenu de faire examiner cela chacun de leur
côté. C'est l'Assemblée nationale qui, en France, a
créé une commission spéciale qui, d'ailleurs, s'est faite
itinérante et qui est venue nous rencontrer, ici au Québec. Le
député de Jean-Talon a eu l'occasion de rencontrer ces gens
également et de constater qu'eux aussi commencent à se soucier,
après de longues années d'apathie, de cet aspect du
développement scientifique en France comme au Québec.
Alors, qu'avons-nous fait? Spontanément est née, depuis un
an ou deux au maximum je pense, la Ligue internationale scientifique pour
l'utilisation de la langue française, la LISULF, à l'instigation
du professeur Arnold Drapeau, que vous avez mentionné, mais
également du professeur Pierre Demers de l'Université de
Montréal. Je pense que tous les scientifiques connaissent ces deux
chercheurs. Le professeur Demers ayant pris sa retraite récemment, il
entend consacrer un peu de son temps à la défense de cette cause.
J'ai fait savoir à la LISULF que j'étais prêt à
encourager ses initiatives financièrement si nécessaire parce que
j'estime que ces actions spontanées venues du milieu scientifique sont
la meilleure garantie que quelque chose va changer.
Ce n'est pas en donnant des ordres aux hommes de science que
l'État peut modifier des comportements aussi aberrants. Il peut, dans un
premier temps, inciter les hommes de science à utiliser de plus en plus
le français. Il peut donner l'exemple d'abord
dans ses publications gouvernementales, publications de recherche
gouvernementale. Il peut également, et ce que nous allons tenter de
faire, demander au milieu lui-même de changer ses habitudes. Il peut
l'inciter financièrement à le faire. L'exemple le plus connu de
cette dernière année a été la subvention
spéciale a la grande Revue médicale pour qu'elle publie un
numéro entier en français sur la recherche. C'était, si ma
mémoire est bonne, sur tous les aspects biologiques de la
fécondation. Un numéro, entre nous...
M. Lalonde: Si la mémoire du sous-ministre est bonne.
M. Morin (Sauvé): Non, non. J'ai eu ce
numéro-là. Je ne dis pas que je l'ai lu de couverture à
couverture, cependant, mais il était très passionnant et je pense
que le député de Jean-Talon aurait beaucoup joui à la
lecture de certains graphiques et certaines pages. Je lui ferai parvenir un
numéro s'il le désire.
M. Rivest: Non, non. Je vais m'occuper de mes propres
jouissances.
M. Morin (Sauvé): De plus, M. le Président, le
Conseil de la langue française organise un colloque sur la question
à l'automne et nous avons l'intention de nous associer à ses
travaux. Nous avons l'intention, en tant que ministère d'État au
développement scientifique, d'être présents et d'apporter
notre contribution à ce colloque qui est d'ailleurs un colloque
international.
M. Rivest: M. le ministre, juste un bref commentaire à
propos de, je crois qu'on l'appelait la haute commission sur la langue
française et la science, enfin une des dimensions était justement
la science, qui avait été formée par le président
Valéry Giscard d'Estaing. Au Québec nous avons reçu le
rapporteur, qui était le député de la Loire, je ne sais
pas ce qui lui arrive ces jours-ci, M. Pascal Clément. Il y avait dans
la délégation, et je le signale aux Affaires
intergouvernementales si vous ne le savez pas, un scientifique -
malheureusement j'ai oublié le nom - qui avait produit en France un
rapport sur la langue française et la science qui était la base
du travail de la commission en question. Sans doute le connaissez-vous. Il
serait très facile de le trouver. Dans les conversations que nous avions
eues, quant au milieu scientifique, sur les progrès du français,
étant donné que comme point de départ une des choses qu'il
fallait reconnaître et admettre c'était que l'anglais était
la langue de la science dans le monde moderne actuel...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, ça c'est
une opinion qui est très répandue mais qui n'est pas
nécessairement tout à fait exacte.
M. Rivest: Non, je sais.. Il faudrait la nuancer. À ce
moment-là dans les conversations, mais vraiment c'était à
bâtons rompus, on nous parlait d'expériences au Japon, en
Allemagne, en Italie, parce qu'il n'y a pas que le français qui est
menacé par cette prépondérance de la langue anglaise.
Compte tenu de ce que mon collègue de Marguerite-Bourgeoys a dit et ce
que le ministre entend faire, parce qu'il faut quand même lutter contre
ça, je l'inviterais à s'associer dans ce domaine et à
développer de plus en plus - je pense que le ministre en est bien
convaincu - les rapports avec la communauté francophone internationale.
Les solutions véritables d'amélioration de la place du
français dans le monde scientifique ne peuvent être qu'une
concertation et une action qui intègrent l'ensemble de la
communauté francophone du monde. (1 heure)
M. Morin (Sauvé): Cela va de soi et c'est d'ailleurs la
raison pour laquelle MM. Barre et Lévesque en avaient fait une
priorité d'action. Je ne veux pas m'étendre sur tout ce que le
ministère de l'Éducation a commencé à faire depuis
quelques années, notamment dans le cadre de la Conférence
internationale des ministres de l'Éducation de langue française,
pour faciliter la rédaction en français de manuels de science qui
soient utilisables par plusieurs pays africains. Le Québec a joué
un rôle de premier plan dans ces efforts et ça vient en quelque
sorte épauler les efforts qui seront déployés au niveau
universitaire.
Si on veut que les universitaires écrivent en français, il
faut d'abord se soucier de ce que la formation des enfants, des jeunes, se
fasse en français aussi. Tous ces efforts sont
complémentaires.
M. Lalonde: M. le Président, je trouve les remarques du
ministre plutôt modestes devant l'énormité du
problème. Il est facile de proclamer que nous sommes tous
hydroquébécois dans la publicité pour rassurer les
Québécois en ce qui concerne leur capacité de
créer, de produire, de travailler dans ce domaine, mais il me semble que
le ministre devrait remplacer des discours par des mesures concrètes,
lorsque 94% de toutes les publications scientifiques de l'Institut de recherche
d'Hydro-Québec sont faites en anglais, quatre ans et demi, presque cinq
ans après l'avènement au pouvoir du Parti
québécois; 94%, ce sont presque toutes les publications
d'Hydro-Québec en ce qui concerne la recherche...
M. Morin (Sauvé): Ah! C'est le lourd héritage que
vous nous avez laissé!
M. Lalonde: Non, mais, écoutez, ça fait quatre ans
que vous êtes au pouvoir, quatre ans et demi, vous deviez avoir
réglé tous ces problèmes; la francisation des entreprises
a commencé avant vous, elle permet de plus en plus à un plus
grand nombre de Québécois de travailler en français, mais
si la technologie, si la recherche et si les manuels scolaires, surtout au
niveau universitaire, continuent de façon prépondérante
à être en langue anglaise, on va simplement former une nouvelle
génération de Québécois capables de travailler en
français, mais à quel niveau? Au niveau manuel.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je ne voudrais
pas défendre les crédits de mon collègue de
l'Éducation, c'est à lui de le faire, mais je pense que si le
député de Marguerite-Bourgeoys a suivi cela, il a pu voir que des
fonds ont été consacrés depuis maintenant deux ans pour
favoriser la rédaction, non pas la traduction, mais la rédaction
par des Québécois de manuels en français, notamment dans
les sciences. Je pense qu'il n'aura pas échappé au
député de Marguerite-Bourgeoys que ce programme a connu un
succès tout à fait extraordinaire, avec l'octroi du prix du
ministre de l'Éducation, que j'ai créé, je pense qu'il y a
maintenant trois ans, pour le meilleur ouvrage en français
édité pendant l'année courante.
Cette année, je ne le sais pas qui l'a mérité mais,
l'an dernier, j'ai eu l'occasion de remettre ce prix à une enseignante
dans le domaine de la chimie, un second prix, je crois, ou était-ce un
accessit, je ne sais plus, dans le domaine de la mécanique automobile,
c'était dans le domaine de l'enseignement professionnel.
Donc, cet effort à la base pour franciser les manuels, il est
encore en cours et le gouvernement y a consacré des fonds, somme toute,
assez importants, mais je dois convenir avec le député de
Marguerite-Bourgeoys que la situation à Hydro-Québec est
proprement scandaleuse.
M. Lalonde: Qu'est-ce que le ministre va faire?
M. Morin (Sauvé): Nous en avons parlé avec
Hydro-Québec...
M. Lalonde: Ah! vous en avez parlé!
M. Morin (Sauvé): ...qui, vous le savez, est un organisme
autonome.
M. Lalonde: Cela nous rassure beaucoup, elle est autonome au
point où le ministre des Finances va chercher 400 000 000 $ par
année dans les profits.
M. Morin (Sauvé): Oui, ma foi, puisque cela appartient aux
Québécois, il était grand temps que cette corporation paie
des dividendes aux Québécois.
M. Lalonde: Puisque cela appartient aux Québécois,
il est grand temps que le ministre d'État cesse de faire des discours et
demande à Hydro-Québec que ces publications scientifiques soient
faites en français.
M. Morin (Sauvé): Oui. Seulement, il faut prendre les
choses les unes après les autres. La première chose à
faire, c'était d'abord d'assurer que le français soit la langue
officielle. Il a fallu lutter contre nos amis pour obtenir ce
résultat.
M. Rivest: C'est la loi 22 qui a fait...
M. Lalonde: C'est faux, c'est la loi 22 qui a fait...
M. Morin (Sauvé): II faut bien se comprendre.
M. Rivest: ... du français la langue officielle.
M. Morin (Sauvé): Je regrette infiniment. Vous vous
souvenez très bien que la langue anglaise était également
langue officielle dans la loi 22.
M. Lalonde: Je regrette. Question de règlement.
M. Morin (Sauvé): Est-ce qu'on va recommencer ce
débat?
Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas, surtout
à cette heure avancée.
M. Lalonde: Question de règlement. L'heure est
avancée, mais la vérité a ses droits. La loi 22, en 1974,
proclamait, à l'article 1, "Le français est la langue officielle
du Québec."
M. Rivest: Vous avez eu cela pendant des mois...
M. Lalonde: Le député de Sauvé a combattu
cet article qu'il n'a jamais voulu adopter.
M. Morin (Sauvé): Parce qu'on voulait ajouter le mot
"seule". Vous l'avez refusé parce que l'article 2 disait que la langue
anglaise était également langue officielle.
M. Lalonde: Dans la loi 101, est-ce que vous trouvez le mot
"seule". Non. C'est de l'hypocrisie.
M. Morin (Sauvé): La langue anglaise,
vous le savez... On n'a pas eu à ajouter le mot "seule", parce
que l'article 2 n'était pas là pour contredire l'article 1.
Le Président (M. Jolivet): Sans vouloir clore ce
débat, revenons...
M. Morin (Sauvé): Effectivement, c'est un vieux
débat.
M. Lalonde: Qu'est-ce que vous allez faire...
M. Morin (Sauvé): Si nous n'avions pas passé deux
et trois ans à lutter avec nos amis d'en face pour implanter la langue
française, pour en faire la langue de travail et la langue de
l'éducation...
M. Rivest: C'est faux, c'était dans la loi 22. La langue
de travail, c'était dans la loi 22.
M. Morin (Sauvé): ... peut-être qu'on aurait pu
accorder plus de temps au progrès de la langue dans le domaine
scientifique, notamment à Hydro-Québec. Je reconnais avec le
député de Marguerite-Bourgeoys qu'il y a un problème.
Hydro-Québec qui est indépendante du gouvernement sur le plan de
son financement peut se permettre évidemment de dire au gouvernement:
Cela ne vous regarde pas. Ce qui ne veut pas dire qu'Hydro-Québec a
raison. Nous allons tenter d'obtenir qu'elle fasse un effort. Nous allons
même essayer d'y mettre à l'occasion l'incitation
financière, parce que je pense, comme le député de
Marguerite-Bourgeoys -cette fois, nous serons d'accord - qu'il y a là
une situation qui n'est pas tolérable.
M. Lalonde: M. le Président, nous avons des
déclarations - je ne voudrais pas dire du verbiage - de la part du
ministre. D'une part, il sait très bien qu'Hydro-Québec
appartient à tous les Québécois et répond au
gouvernement du Québec. Il y a un ministre responsable à
l'Assemblée nationale de l'administration d'Hydro-Québec et de
tous les fonds dont tous les Québécois sont responsables
d'ailleurs, parce que ce qu'Hydro-Québec emprunte pour ses programmes
d'investissements ou autrement, ce sont tous les Québécois qui en
sont responsables. Je demande au ministre ceci: Dans la foulée, comme il
aime bien le dire, des dispositions prises par le ministre des Finances pour
siphonner financièrement Hydro-Québec de ses profits
annuellement, pour tenter de rétablir un semblant d'équilibre aux
finances publiques de la province, est-ce qu'il pourrait avoir d'autre chose
que des mots, verba volant, d'autre chose que des mots concernant ce
problème qui est plus qu'un problème et qui, en fait, est une
insulte à ce que le gouvernement prétend vouloir faire en ce qui
concerne la langue française? Lorsqu'il dit que le gouvernement a pris
trop de temps, à cause du Parti libéral, à proclamer le
français comme langue officielle, le ministre fait erreur. Je suis
gentil, en ce moment, parce qu'il est tard. Il est dans l'erreur parce que
c'est la loi 22 qui a proclamé le français comme langue
officielle du Québec. À l'article 1 de la loi 22, vous retrouvez
l'article 1 de la loi 101.
Deuxièmement, lorsqu'il dit que le gouvernement a perdu beaucoup
de temps à faire du français la langue de travail, c'est faux.
Même le Dr Laurin, comme le ministre l'a mentionné tout à
l'heure, admet que la francisation des entreprises avait été
commencée par la loi 22 par l'ancienne régie de la langue
française, à un point tel que la loi 101 a repris et l'Office de
la langue française a repris les mêmes instruments
créés et mis sur pied par l'ancienne régie
créée par la loi 22. En ce qui concerne la proclamation du
français comme langue officielle et, deuxièmement, comme langue
de travail au Québec, la loi 101 n'a fait que suivre la loi 22. C'est un
faux-fuyant que le ministre invoque lorsqu'il se cache derrière ces faux
débats pour tenter d'excuser la culpabilité du gouvernement
relativement au comportement d'une société d'État qui
appartient à tous les Québécois. Je vais même
sacrifier les quelques minutes qui restent, que je voulais consacrer à
la culture, au programme concernant le développement culturel de son
ministère, pour l'entendre dire ce qu'il a l'intention de faire
concrètement concernant Hydro-Québec.
M. Morin (Sauvé): Mon vieux coeur ministériel se
réjouit profondément, M. le Président...
M. Lalonde: Arrêtez de vous réjouir et commencez
à dire quelque chose.
M. Morin (Sauvé): ... de voir enfin le Parti
libéral s'intéresser aux questions linguistiques. Je souhaiterais
que ce zèle nouveau s'applique également aux questions
intéressant la langue scolaire où vos attitudes paraissent moins
claires et à la langue de l'affichage où vos attitudes sont
proprement impardonnables.
M. le Président, j'ai l'intention effectivement de revenir
à la charge auprès d'Hydro-Québec.
M. Rivest: Comment?
M. Morin (Sauvé): Seulement, comme le député
de Jean-Talon vient de le souligner, le gouvernement n'a pas le pouvoir
d'imposer ce genre de mesure à Hydro-Québec.
M. Lalonde: C'est un aveu
d'impuissance.
M. Morin (Sauvé): Mais il y a moyen cependant, je pense,
M. le Président, de persuader Hydro...
M. Rivest: C'est assez ésotérique, le
développement scientifique.
M. Morin (Sauvé): ... qu'elle devrait - il n'est
peut-être pas nécessaire que tout soit en français du
premier coup - faire un effort pour publier au moins une partie de ses travaux
de recherche en français. Nous serions prêts, d'ailleurs, à
aider financièrement la puissante Hydro-Québec, mais nous sommes
prêts à faire cela pour l'inciter à changer ses
comportements. Si, par la suite, il s'avérait impossible de modifier le
comportement d'Hydro-Québec, M. le Président, je compte sur
l'appui de l'Opposition pour que nous puissions peut-être imposer des
règles à Hydro-Québec. Je garderai en mémoire le
zèle nouveau dont vous venez de nous donner le témoignage ce
soir, parce que, le jour où il faudra imposer des obligations à
Hydro-Québec, je vous entends déjà râler.
M. Lalonde: M. le Président, je comprends les
circonvolutions méandreuses du ministre, parce qu'il ne veut pas
attaquer le problème de front et s'est fait prendre les culottes
baissées. Ministre d'un gouvernement qui se proclame l'inventeur du
français langue officielle face à Hydro-Québec qui a tous
les moyens financiers du monde, une des plus grandes entreprises au
monde...
M. Rivest: Vous allez lui donner de l'argent.
M. Lalonde: ... pensez-vous que c'est le ministre fantôme
d'État au Développement culturel et scientifique qui va pouvoir
lui donner 100 $ ou 100 000 $? Voyons donc, Hydro-Québec a tous les
moyens; il s'agit simplement d'une volonté politique. Je vois que le
ministre se contente de déclarations.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Lalonde: Ce que j'en fais, c'est ceci exactement, M. le
Président. Cela vaut à peu près le papier sur lequel cela
a été écrit.
M. Morin (Sauvé): Vos papiers!
M. Lalonde: Cela vaut à peu près le papier que je
déchire actuellement, M. le Président, parce que le ministre ne
croit réellement pas à ce qu'il dit. C'est malheureux parce
qu'Hydro-Québec, en fait, c'est l'orgueil des Québécois,
c'est la réalisation de tous les Québécois. Ce n'est pas
le Parti québécois qui l'a inventée, on le sait
très bien. Je me souviens encore de ce ministre qui
dénonçait la Baie-James et qui défendait le
nucléaire. Je pourrais vous en donner des copies, M. le
Président, cela a à peu près trois pouces d'épais,
ces déclarations qui défendaient le nucléaire et qui
dénonçaient la Baie-James, alors que justement c'est une
réalisation d'Hydro-Québec. Hydro-Québec a tous les moyens
financiers, a toutes les ressources humaines et financières pour publier
ses recherches en français. Je sais aussi que la langue anglaise, c'est
la langue internationale de la recherche et de la science, mais pourquoi ne pas
d'abord la rendre disponible aux Québécois? (1 h 15)
Ce n'est pas une nouvelle mission qu'on se donne. Vous savez, M. le
Président, que le Parti libéral, là-dessus, n'a aucune
leçon à recevoir du ministre qui a combattu l'article 1 de la loi
22 qui faisait du français la langue officielle.
Quand même, assez, c'est assez! Cela fait quatre ans et demi que
vous êtes au pouvoir, quatre ans et demi, et on en a ras le bol de vos
déclarations sur la langue. Agissez donc là où c'est
important pour l'avenir! La langue de la technologie, la langue de la recherche
et de la science, c'est là qu'est l'avenir pour nos
Québécois, si on veut réellement les aider à
franchir les barrières socio-économiques qui font que, il y a
quelques années encore, généralement, ils se retrouvaient
à un niveau de salaire, de revenu plus bas que l'ensemble des autres
Québécois.
M. Morin (Sauvé): Trêve de paroles verbales, M. le
Président, reconnaissons qu'il y a un problème et qu'il faut le
résoudre. Reconnaissons aussi que vous n'avez rien fait dans le
passé pour le résoudre, mais rien fait, pas même une
observation à Hydro-Québec, tandis que nous avons pris contact
avec Hydro-Québec pour essayer d'améliorer la situation. Nous
allons continuer de le faire et j'ose espérer que, l'an prochain, on
pourra rapporter progrès, mais cela ne se fera pas tout seul, parce que
les chercheurs d'Hydro-Québec ont des idées là-dessus et
ils y sont attachés. Je ne crois pas, je le dis tout de suite, comme le
député de Marguerite-Bourgeoys vient de l'indiquer, que l'anglais
soit la seule langue internationale dans le domaine de la recherche; il y en a
bien d'autres, le russe joue un rôle très important, de plus en
plus le japonais, le chinois. Si on s'y attelle, mais résolument -parce
que les problèmes sont considérables, surtout en Amérique
du Nord, entourés comme nous le sommes - le français peut
reprendre sa place comme langue scientifique. Nous avons commencé
à agir dans ce sens et nous allons continuer. Voilà.
Le Président (M. Jolivet): Le programme 8 est-il
adopté? Adopté.
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Adopté.
M. Morin (Sauvé): Mais, vous n'avez rien à dire sur
le développement culturel?
M. Rivest: Avec la preuve que vous venez de nous donner!
M. Lalonde: Notre heure est écoulée.
M. Morin (Sauvé): Je me permets de le regretter, M. le
Président, parce que nous aurions été prêts, j'en
suis sûr, de ce côté-ci de la commission, à continuer
le travail.
M. Lalonde: Si vous aviez fait quelque chose, on aurait quelque
chose à dire.
M. Morin (Sauvé): Néanmoins, je me permets de
remercier M. le Président et les membres de cette commission de ces
propos éclairants.
Le Président (M. Jolivet): Je dois ajourner sine die, en
précisant cependant qu'il y a eu entente pour que demain nous puissions
étudier le dernier programme, sur le développement
économique, en même temps que deux autres commissions. Donc, il y
aura trois commissions selon l'entente.
(Fin de la séance à 25 h 18)