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Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le mercredi 30 mai 1973 - Vol. 13 N° 70

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales


Journal des débats

 

Commission permanente de la présidence du conseil,

de la constitution et des affaires intergouvernementales

Etude des crédits

du ministère des Affaires

intergouvernementales

Séance du mercredi 30 mai 1973

(Dix heures neuf minutes)

M. HOUDE (Limoilou) (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

Le député de Bellechasse.

Remarques préliminaires (suite)

M. LOUBIER: M. le Président, je tiens d'abord à remercier les membres des autres oppositions de prêter un intérêt aussi marqué à un ministère aussi important que celui des Affaires intergouvernementales. Leur absence explique très bien la préoccupation que ces gens ont pour un ministère qui, malgré certaines imperfections, malgré peut-être certaines erreurs, malgré certaines déficiences, remplit tout de même un rôle souverainement important pour le gouvernement du Québec et pour le Québec dans son ensemble.

J'ai pris connaissance des interventions faites par mes prédécesseurs ou mes préopinants, entre autres des interventions du député de Gouin et du député de Chicoutimi. Les deux interventions ont suscité l'une, mon étonnement et l'autre, mon admiration. Mon étonnement, pour ne pas dire davantage, vient de celle du député de Gouin mais j'y reviendrai tout à l'heure.

Je pense qu'il est inutile de rappeler, surtout au ministre des Affaires intergouvernementales, au sous-ministre et aux hauts fonctionnaires et à vous, M. le Président, l'importance que revêtent les négociations sur le plan constitutionnel. Il y a des gens qui prétendent que, en réglant strictement nos difficultés constitutionnelles, ou pourrait régler tous les autres problèmes, ce qui est absolument faux. Les trois, je pense, l'économique, le constitutionnel et le social, sont indivisibles les uns des autres et j'ajouterais que peut-être le constitutionnel sous-tend les deux autres secteurs.

Je pense que, sur le plan de la constitution interne et externe du Québec, il y a des malaises qui transpirent de plus en plus et je pense que cela a pris une importance pour ne pas dire dans certains milieux, une allure tellement obsédante que l'on est en train de faire de façon parfois démagogique, de la constitution ou de la langue, le problème no 1 mais tellement no 1 que l'on oublie tous les autres problèmes.

Or, M. le Président, je pense qu'on reconnaît tous que la constitution d'un peuple, c'est ce qui lui permet en fait de respirer littéralement, c'est ce qui lui permet de vivre, c'est ce qui l'oriente quotidiennement et ce qui fait en même temps qu'il y a des règles du jeu qu'il a lui-même établies et en vertu desquelles il peut évoluer selon le sens de ses traditions et selon le sens, surtout, de ses besoins et de ses aspirations.

M. le Président, sur ce problème des relations interprovinciales, fédérales-provinciales, il ne faut pas être simpliste au point de penser qu'il n'y a qu'une seule formule. Je dirais plutôt que ces négociations avec les autres provinces et avec le gouvernement central peuvent être faites selon différentes formules de négociation, selon différentes tables de négociation. Le gouvernement actuel a établi quelle était sa table de négociation, quelle était sa formule de négociation, quels étaient les mécanismes qu'il voulait mettre en place pour, tant au niveau interprovincial qu'au niveau fédéral, essayer de déboucher sur des ententes. Mais je reproche au gouvernement actuel d'avoir choisi une table de négociation qui, littéralement, à mon sens, le fait négocier bien assis si ce n'est pas à plat ventre la plupart du temps, parce que la table de négociation choisie par le gouvernement actuel est la suivante: on n'insiste pas et on ne fait pas d'effort particulier pour essayer d'amener les autres Etats et faire en sorte qu'il y ait rédaction d'une nouvelle constitution. Et quand je parle de nouvelle constitution, je pense qu'il ne faut pas qu'on sursaute surtout d'après les dernières expériences fédérales-provinciales et surtout à cause de l'attitude manifestée il y a à peine quelques jours par le premier ministre Davis de l'Ontario qui a établi clairement qu'il fallait à tout prix redéfinir le rôle, le mandat, les objectifs, la vie du gouvernement central et redéfinir les attributions, les juridictions, les sources de revenu des autres ordres de gouvernement.

Alors, je pense que le premier ministre Davis a pris l'initiative qu'aurait dû prendre normalement le Québec pour les raisons historiques ou les raisons culturelles que vous connaissez à cause de nos particularismes.

Mais on se rend nettement compte que ce problème d'une redéfinition nouvelle du mandat à être accordé au gouvernement fédéral, du mantat à être accordé aux Etats constituants, dis-je, le mandat à être défini, même dans l'ordre de gouvernement inférieur comme celui de municipalités, ce besoin, cette nécessité est maintenant exprimée de façon non équivoque par le premier ministre de l'Ontario. On se rend compte que la nouvelle génération de premiers ministres — et là, je le dis avec une pointe d'ironie — quand on était poigné avec des premiers ministres comme M. Bennett et comme M. Smallwood, c'est bien évident que leur longueur d'onde ou leur vision n'était pas la

même que celle des nouveaux premiers ministres et, en toute amitié, je dirais qu'il demeurait des bonzes qui faisaient parfois que la perception des problèmes de 1970 les dépassait royalement.

Partant de ce fait nouveau, de cette réalité nouvelle, la présence de nouveaux premiers ministres qui ont une largeur de vues beaucoup plus appréciable et perceptible que celle des prédécesseurs, on se rend compte que la majorité des provinces ou sinon, des provinces les plus importantes, la province la plus importante demande justement qu'il y ait d'abord redéfinition, partage nouveau des juridictions, des sources de revenu. Je pense que c'est placer véritablement, d'une façon objective et d'une façon efficace, une nouvelle table de négociation à laquelle devrait se prêter de façon spontanée le gouvernement actuel. Mais pour des raisons que j'ignore en partie et le gouvernement actuel — peut-être aussi à cause de ses — entre parenthèses — "liaisons dangereuses" avec le gouvernement central actuel et dans le contexte électoral qui transpire et qu'on sent chaque jour— peut-être que le gouvernement actuel oublie son mandat, ses responsabilités et surtout les objectifs supérieurs qu'il devrait poursuivre par une table de négociation qui serait beaucoup plus efficace, beaucoup plus sérieuse et beaucoup moins humiliante pour le Québec. Parce que, M. le Président, il y a différentes tables de négociation et je dois rétablir les faits, à la suite de l'exposé fait hier par le député de Gouin, et là je salue la présence de mes collègues des deux autres formations politiques.

Tout à l'heure j'avais salué leur absence et, en toute honnêteté, je dois dire que même s'ils sont en retard, ils sont là.

UNE VOIX: Ils sont toujours là.

M. LOUBIER: M. le Président, je pense que l'exposé du député de Gouin donne une image qui est trompeuse, qui est fallacieuse. Cela donne l'impression que, si le gouvernement, si le Québec se séparait politiquement, à ce moment-là, il n'y aurait plus de négociation littéralement ou, s'il y avait des négociations, que nous serions placés dans une position de force pour négocier. C'est une formule de négociation et je ne conteste pas le droit de défendre cette formule ou cette table de négociation mais je dis que ce serait placer le gouvernement du Québec pratiquement à genoux dans une position de faiblesse extrême pour renégocier quoi en fait? Une nouvelle constitution. Séparé politiquement, il est bien établi, si on veut être honnête, que c'est la reprise pratiquement à zéro de nouvelles négociations. Il faut établir que, dans un premier temps, il y aura négociation pour la liquidation des dépouilles de la Confédération. Il faudra établir, dès le départ, que véritablement, en choisissant cette table de négociation, littérale- ment, nous arriverons à Ottawa ou ailleurs avec notre petit pupitre, assis devant dix autres gouvernements.

Une fois la séparation faite, il n'y a plus cette table ronde, parce que nous aurons fait la séparation politique et, partant de là, si nous commençons à discuter des dépouilles de la Confédération — là, je ne voudrais pas en faire l'énumération parce que ce serait pas mal long — de la liquidation, du partage ou de l'équité que nous avons, qu'a le gouvernement fédéral et, par voie de conséquence, les autres Etats, dans les installations portuaires que nous avons au Québec, dans les bureaux de poste, dans les routes transcanadiennes, dans tous ces secteurs, je dis que nous commençons à négocier justement sur ce plan-là.

Dans un deuxième temps, il faudra négocier avec cette formule ou cette table de négociation que le Québec aura choisie, il faudra négocier un marché commun ou un genre de fédéralisme économique, des formes d'entente et chaque fois, nous serions dans une position de faiblesse pour négocier.

Là, véritablement, on serait seul à négocier contre dix. On me dira qu'au moins, on négociera dans la dignité et la fierté. Vous savez, c'est bien beau de dire qu'on négocie dans la fierté et dans la dignité, mais quand on n'a pas ou presque plus de pouvoir de persuasion ou qu'il ne reste plus d'armes ou de cartes qui nous permettraient de forcer les gens à raisonner davantage, je dis que c'est une table de négociation qui m'apparaît illusoire et une position de faiblesse que prendrait le Québec partant de cette table de négociation.

Au cours des années passées, il ne faut pas à mon sens mépriser, condamner et sous-estimer le travail fait par les différents premiers ministres qui se sont succédé au Québec, peu importe la formation politique. Que ce soit au temps de M. Duplessis, de M. Lesage ou de M. Johnson, nous avons gagné des points. Nous avons fait du progrès, nous avons avancé. Il est malhonnête et injuste d'affirmer que toutes ces négociations ont débouché sur des échecs lamentables, ont consolidé le fait que le Québec devenait vulgairement un coin de terre colonisé.

Je pense qu'il faut rendre hommage à ces gens qui, selon leur mentalité, avec leur style, ont fait avancer les choses. Cela me frappe toujours de me rappeler qu'il y a quinze ou dix-huit ans, on s'était entendu sur la nécessité et l'urgence d'un marché commun en Europe. On en discute tout de même depuis quinze ans et on va en discuter encore durant dix ou quinze ans avant qu'on arrive à quelque chose qui approche de la perfection mais qui ne sera jamais parfait.

Je dis que le Québec doit proposer et trouver une table de négociation qui le place dans une position de force. Quand je dis une position de force, je ne veux pas dire une position de supériorité comme je ne veux pas signifier non plus que nous donnerions l'impression à tous

nos partenaires que nous voulons imposer nos vues avec la matraque, parce qu'à ce moment-là, il n'y a pas de climat de négociation propice pour déboucher sur des ententes qui correspondraient à nos attentes, nous, les Québécois. Ce n'est pas nouveau de parler de souveraineté, de juridiction et de sources de revenus pour les états constituants.

C'est le langage tenu en 1864 lors des conférences qui avaient eu lieu, c'est le langage que l'on retrouve presque littéralement exprimé dans le pacte de 1867. Or, il est bien évident, M. le Président, que différents Etats actuellement — et je dirais surtout les Etats comme l'Ontario et le Québec — de plus en plus tendent et visent à atteindre cette souveraineté de juridiction dans des secteurs qui leurs apparaissent essentiels pour tracer leurs priorités, leurs propres priorités et, par voie de conséquence, ces gouvernements tendent également à rapatrier et à obtenir cette souveraineté de sources de revenus qui leur permettrait de faire face à leur compétence et d'établir leurs propres priorités, priorités qui apparaissent essentielles pour ces provinces ou ces Etats. Et malgré tout le respect que je dois à d'autres provinces moins populeuses, M. le Président, quand on me dit que l'Ile-du-Prince-Edouard vante les mérites, les charmes et les aspects séducteurs et enchanteurs du régime actuel avec un gouvernement central extrêmement fort, etc., je m'excuse, mais pour moi, c'est un gros village et, partant de là, M. le Président, ce n'est même pas le quart du Québec métropolitain. Ce qui ne veut pas dire que je méprise les revendications ou l'attitude que pourrait prendre le premier ministre de l'Ile-du-Prince-Edouard, mais je pense que les deux Etats, les deux piliers de ce Canada, les trois, quatre ou cinq piliers, mais disons les deux principaux piliers, demeurent tout le même l'Ontario et le Québec sans négliger l'importance, sans négliger les aspirations des autres Etats constituants.

Or, nous nous rendons compte, M. le Président, et je le répète, qu'actuellement l'Ontario a un premier ministre qui, justement, est prêt à faire ce plaidoyer avec vigueur, afin qu'il y ait, à toutes fins pratiques, une nouvelle constitution écrite, un nouveau partage, un nouveau mandat, etc. Je pense qu'il appartiendrait au Québec, puisque l'Ontario lui en a volé l'initiative, de pousser à fond de train pour que cette table de négociation soit établie, pour que véritablement il puisse y avoir — et je pense que la formule est extrêmement valable — comme table de négociation, qu'il y ait convocation de toutes les provinces ou des Etats constituants, ou l'instauration ou l'établissement d'une conférence permanente, intérétatique ou interprovinciale, si on aime mieux l'expression, sur l'avenir constitutionnel, sur la rédaction d'une nouvelle constitution.

Savez-vous où je vois le gouvernement central à ce moment-là? Je le vois dans les galeries comme observateur. On me dira: Ce n'est pas réaliste. M. le Président, Historiquement, juridiquement, c'est la position la plus logique, la plus défendable qu'on puisse trouver. C'est également la table de négociation la plus propice, la plus favorable, la plus équitable pour cette redéfinition des pouvoirs et des sources de revenus. Il ne faut pas se leurrer, 1864-1867, c'était quoi? C'étaient quatre colonies qui n'avaient même pas un statut juridique d'une liberté ou de l'ombre d'une liberté. On s'est réuni à ce moment-là avec la bénédiction de Londres, on s'est réuni et on a fait quoi? On a déterminé ensemble quels étaient ces domaines, et justement à cause de la présence du Canada français ou du bloc francophone, c'est à cause de nous qu'il y a eu rédaction de cette constitution dans la forme où nous la retrouvons. Autrement, il n'y aurait pas eu ce partage de juridictions, de sources de revenus. Il n'y aurait pas eu cette énumération qu'il fallait conserver aux Etats constituants, des souverainetés de juridiction au niveau de l'éducation, au niveau de la santé, etc. Tout ce qui avait trait à l'épanouissement de la personne humaine, c'est-à-dire la santé, le bien-être, le travail, etc. A ce moment-là, c'était établi qu'il fallait que ça relève, et de façon absolue, de la juridiction des Etats constituants. On a prévu également des formules, des sources de revenus capables d'assurer à ces Etats constituants la possibilité d'établir leur priorité dans tous ces domaines qui leur étaient réservés. Il en va de même pour les questions de droit civil, etc. Partant de là, on voit que, dans ce contexte, pour qu'il y ait véritablement une association valable entre des Etats constituants, il faut qu'il y ait négociation, qu'il y ait ce partage de juridictions et des sources de revenus. Il faut établir, comme on l'a fait, quelles sont les juridictions, quelles sont les sources de revenus qui sont essentielles à ce gouvernement central qui est la créature des Etats constituants.

C'est aussi bête que cela. S'il n'y avait pas d'Etats constituants, c'est aussi simpliste que cela, il n'y aurait pas de gouvernement central, parce que la naissance du gouvernement central est le fruit du mariage des Etats constituants, selon une entente bien conçue. Or, M. le Président, je pense que nous sommes rendus à ce carrefour où il est important de choisir la meilleure table de négociation qui nous placerait dans une situation de force, non pas dans une situation d'infériorité et non pas dans une situation de supériorité. Je reprends ce que je disais tout à l'heure, il faut se placer pour négocier debout le Québec, non pas à quatre pattes, non pas assis mais debout. Je pense que, partant de cette table de négociation, il y en a qui se demandent, et je trouve cela curieux chaque fois, si les Etats constituants ou les provinces refusaient cette table de négociation, ce qui se passerait. Je pense que c'est faire abstraction du désir encore manifesté la semaine dernière par le premier ministre Davis et d'autres premiers ministres, c'est faire abstraction

également d'un précédent qui a été créé et qui n'a pu être continué pour des circonstances que je ne veux pas énumérer et que vous connaissez tous. Ce serait faire abstraction totalement du fait que les provinces ne veulent pas du tout collaborer avec le Québec, ce serait faire abstraction de cette génération de nouveaux premiers ministres qui ont une vision bien différente de celle qu'avaient les messieurs que je vous ai précités et d'autres qui étaient là à l'époque. C'est faire abstraction également de ce désir du Québec, non pas de tout faire sauter, mais de pouvoir vivre et s'épanouir selon des canevas ou selon des juridictions qui lui apparaissent essentiels. Si les Etats constituants ou les provinces ne voulaient pas, ne désiraient pas cette table de négociation, on nous dit: Qu'est-ce que vous feriez? Qu'est-ce que l'on ferait? Moi, je dis que la constitution — et je l'ai répété depuis deux ans — d'un peuple n'appartient pas à un homme politique, cela n'appartient pas à un parti politique. Un parti politique peut préconiser des projets de constitution, un parti politique peut préconiser, comme le fait le Parti libéral, une table de négociation, des mécanismes de négociation que je ne partage pas; comme le Parti québécois le fait, il peut préconiser des formules de négociation, une table de négociation. Moi, je dis que dans les deux cas, c'est une table de négociation qui nous place en état de faiblesse.

M. le Président, je pense que le référendum est justement l'instrument qui, en dehors d'une élection générale, dégagé de toute passion partisane ou aveugle, où l'on remet véritablement et objectivement au peuple l'état du dossier, l'état de la question, à ce moment-là, peut être valable. Ce serait la première fois dans l'histoire du Québec qu'un gouvernement recevrait en dehors d'une élection générale, parce qu'il n'y a pas seulement l'aspect constitutionnel qui intervient dans une élection générale, il y a des éléments humains, il y a des éléments locaux, régionaux.

Il y a une foule de facteurs, il y a l'aspect politique, il y a le contexte général, il y a les rivalités, mais si l'on dégage d'une élection générale une question aussi importante et qu'on demande au peuple de donner un mandat précis à son gouvernement, ce serait la première fois dans l'histoire du Québec qu'un gouvernement recevrait un mandat spécifique, bien précis, bien déterminé, avec toutes les apparences de l'objectivité, et je dis apparences parce que, M. le Président, il est bien évident que si on en prostitue l'appréciation ou si on en prostitue le sens, ça n'aura plus ce climat d'objectivité et de sérénité. Mais encore là, si ça ne fonctionnait pas, le Québec peut exercer des mesures de représailles sur le plan fiscal, ça s'est déjà fait, il y a des précédents qui n'ont pas pris l'ampleur que ça pourrait prendre aujourd'hui. Mais il pourrait exercer également d'autres représailles par l'occupation de juridictions qui avaient été accaparées par le fédéral.

Je dis, M. le Président, que dans tout ce contexte, il s'agit de choisir la meilleure table de négociation pour le Québec, dans le contexte actuel, pour justement cette redéfinition du rôle, du mandat, des pouvoirs de chaque ordre de gouvernement. Et tant et aussi longtemps, à mon sens, que l'on négociera en partant d'une constitution qui n'existe plus, d'une constitution qui n'est plus une constitution écrite, une constitution qui a été prostituée au dernier degré, tant et aussi longtemps qu'on essaiera de prendre comme point d'appui une constitution complètement défigurée, dépassée, je pense que nous allons discuter de façon stérile et que ce seront toujours des querelles de dentelle que nous allons mener.

M. le Président, je dis également que le fait — et c'est ça qui est peut-être le plus dangereux actuellement parce qu'on sait, nous autres, qu'on relève juridiquement du droit parlementaire britannique, que la jurisprudence est établie — depuis plusieurs années, sous tous les gouvernements, que le gouvernement fédéral et central soit intervenu dans différentes juridictions qui avaient été établies comme propres aux provinces, le fait que, très subtilement, très progressivement, le fédéral invoque tantôt l'urgence, comme on l'a fait en 1940, tantôt l'inaction des provinces dans le domaine du travail, tantôt la question de l'unité nationale, revient à ce que, par toute sorte de portes dorées, on a pénétré dans tous ces champs d'action réservés aux provinces. Avec le renversement des revenus au cours des années, surtout à partir de 1953, alors qu'avant les gouvernements provinciaux, les principaux gouvernements, dont le Québec, avaient des surplus budgétaires et que le fédéral avait des déficits budgétaires, à partir des années 1952 et 1953, la vapeur s'est renversée et le gouvernement fédéral a commencé à accumuler des surplus budgétaires et les Etats, des déficits budgétaires. C'est là que véritablement ça s'est gangrené davantage et c'est là que véritablement il y a eu cette invasion qui débouche aujourd'hui, et il faut l'avouer, et que le Québec est devenu une région administrative, une préfecture.

C'est un intendant qu'on a dans le Québec actuellement parce qu'on ne peut même pas, dans les différents secteurs, tracer nos propres priorités. Et je ne fais pas abstraction du besoin ou des avantages d'un gouvernement central dans différents secteurs. Mais quand on est rendu que c'est dans les loisirs, quand on est rendu que c'est dans le domaine des affaires municipales, quand on est rendu que cela s'en vient dans le domaine scolaire, quand on est rendu dans le domaine de la santé, quand on est rendu, M. le Président, que c'est le gouvernement central qui propose les aménagements régionaux, quand c'est rendu que c'est le gouvernement central qui trace les priorités d'une façon uniforme pour toutes les provinces, indépendamment des particularismes ou des caractéristiques ou des conjonctures de cha-

cune, là je dis que cela commence à charrier en maudit et je dis: Qu'on ne vienne pas me dire qu'on vit dans du fédéralisme au Canada et qu'on arrête, s'il vous plaît, qu'on ait au moins le courage et l'honnêteté de dire qu'on accepte d'avoir le statut d'une préfecture, qu'on accepte d'avoir un gouvernement unitaire à Ottawa et qu'on est prêt à être les bedeaux et à administrer selon les priorités qu'ils vont établir. Je pense que véritablement, ce n'est pas ce que recherche sincèrement toute formation politique actuellement au Québec.

Je pense que chacune veut se trouver une table de négociation valable et je dis en terminant — j'ai déjà péroré assez longuement — je dis que ce qui est à mon sens urgent pour le gouvernement du Québec actuel, c'est au moins — et là je le demande au gouvernement beaucoup plus comme Québécois — de ne pas nous traîner dans l'humiliation et de ne pas laisser se reproduire la situation de la semaine dernière, alors que c'est le premier ministre de l'Ontario qui a pris le leadership de la conférence et, au moins, quand on revient des conférences fédérales-provinciales, qu'on ne nous arrive pas avec des sornettes comme celles qu'on nous a servies au retour de cette conférence fédérale-provinciale.

Là je m'éloigne un peu du sujet que je voulais traiter. Mais en terminant, M. le Président, je voudrais dire ceci, c'est que les fonctionnaires que l'on accuse de toutes les plaies d'Egypte, de tous les péchés d'Israël, il ne faut jamais oublier qu'ils sont les commis de l'Etat et qu'à ce moment-là, ils sont très souventefois, ils doivent — et c'est cela, le jeu de la démocratie — respecter les orientations que le gouvernement élu donne et selon le programme de ce gouvernement.

Dans un deuxième temps, je n'irais pas, M. le Président, malgré mon exposé, jusqu'à prétendre que le ministre des Affaires intergouvernementales ne comprend pas l'urgence, la nécessité, l'importance primordiale d'un règlement le plus rapide possible dans les différents secteurs et de préférence une nouvelle constitution. Encore une fois, je pense que les politiciens, de quelque formation politique que ce soit, essaient de servir le plus sincèrement, selon leur mentalité, selon leur approche, selon leur philosophie, le Québec et sur cela, je pense qu'on doit rendre hommage à peu près à tout le monde, même si on peut parfois diverger férocement d'opinion ou d'approche dans ces négociations.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable vice-premier ministre.

M. LEVESQUE: Je voudrais, tout d'abord, remercier le chef de l'Opposition officielle de l'intérêt...

M. LOUBIER: Voyez comment cela a porté. Cela a séduit tout le monde.

M. LEVESQUE: ... particulier qu'il manifeste pour ces questions extrêmement importantes.

Evidemment, c'est la troisième séance que nous passons sur des considérations générales et je comprends que c'est une procédure qui peut être adoptée. Peut-être que c'est de cette façon qu'on aime le mieux aborder ces sujets du ministère des Affaires intergouvernementales. Après cela, comme dit le député de Bourget, nous irons plus vite.

J'aimerais bien passer la supercatégorie 1, un de ces jours, particulièrement, — je ne le dis pas d'une façon qui voudrait avoir l'air de précipiter les choses — mais on sait que tout ce monde-ci aux Affaires intergouvernementales a deux jours très chargés devant lui, demain et vendredi, alors que nous recevons les gens qui nous représentent à l'étranger et que nous avons plusieurs séances de travail de prévues.

Cependant, je voudrais, pour quelques minutes et sans trop me répéter j'espère... Je vois que l'Union Nationale a changé de porte-parole, aujourd'hui, et on a repris certains thèmes...

M. LOUBIER: Je m'excuse. On n'a pas changé de porte-parole. Il était entendu que je devais être là, hier...

M. LEVESQUE: Oui. D'accord.

M. LOUBIER: ... mais à cause du fait que, de façon impromptue, on a annoncé que cela se tenait...

M. LEVESQUE: Oui. D'ailleurs, je n'ai aucune objection. Je suis même très heureux d'avoir eu...

M. LOUBIER: Vous savez, dans l'Opposition, nous sommes retenus à bien des places à la fois.

M. LEVESQUE: Oui. Je suis très heureux de revoir le chef de l'Opposition ici, ce matin. Je vais immédiatement disposer de ce sujet. Je crois que le chef de l'Opposition a très bien disposé de la situation qui serait la nôtre, si on suivant le plan offert par le député de Gouin, dans ses remarques d'hier. Je suis tellement d'accord avec le chef de l'Opposition, même si on tombe dans l'utopie... Il faut toujours bien se rendre compte de la position d'extrême faiblesse, qui serait celle du Québec dans une situation comme celle que nous propose le Parti québécois.

Ceci étant dit, je suis d'accord avec le chef de l'Opposition pour qu'il y ait lieu de prendre avantage de cette nouvelle génération de premiers ministres; j'ai eu l'occasion de me rendre compte, en particulier à Halifax au mois d'août 1972, que ces hommes nouveaux semblent avoir une approche moins traditionnelle, plus nouvelle vis-à-vis de ces problèmes.

Le chef de l'Opposition a parlé de l'interven-

tion du premier ministre de l'Ontario. D s'est réjoui jusqu'à un certain point de cette prise de position de l'Ontario et de certaines autres provinces, tout en se posant des questions sur le rôle traditionnel du Québec dans ces conférences et sur les prises de position du Québec.

Le chef de l'Opposition admettra qu'il y a eu en effet des changements mais le Québec n'est pas étranger à ces changements. On peut parler d'une nouvelle génération de premiers ministres mais on peut parler également d'un nouveau style qui est celui du Québec, de son premier ministre, de son gouvernement. Nous pourrions continuer à nous préoccuper uniquement d'obtenir ou de tenter d'obtenir une nouvelle constitution et nous en tenir à cela. Nous avons voulu, sans renier les principes qui ont guidé les divers premiers ministres et gouvernements depuis longtemps, avoir une approche différente. Justement parce que nous croyons qu'il est important, comme le chef de l'Opposition l'a souligné, si on veut en arriver à des résultats concrets, d'avoir une meilleure compréhension de ces problèmes par les autres Etats membres de la fédération canadienne. Etre ce qu'on peut appeler un "lone wolf", cela peut faire des manchettes mais cela n'apporte pas nécessairement des résultats concrets et désirés par la population du Québec en particulier.

Nous croyons comme le chef de l'Opposition, qu'il est important d'avoir une constitution améliorée. Nous croyons qu'il est important d'avoir un partage des pouvoirs clair, d'éliminer progressivement les zones grises, d'avoir suffisamment d'autonomie fiscale pour pouvoir assumer toutes les responsabilités qui sont les nôtres en vertu de la constitution, en vertu de son esprit autant que de sa lettre. Mais nous avons été témoins, depuis quelques années, sinon d'échecs du moins de situations pas très intéressantes lorsqu'on s'en est tenu uniquement à la question constitutionnelle. Cela, je crois qu'on peut l'attribuer en partie à la mentalité, à l'approche différente des autres Etats membres de la fédération. Pour eux, une approche pragmatique est souvent celle qui est choisie. Si nous parlons un langage qui est complètement différent — je ne parle pas de la langue à ce moment-là mais du langage — si nous avons des approches complètement différentes, nous risquons d'avoir un dialogue de sourd.

Ce que nous avons fait, nous avons changé notre approche, notre style. Nous avons voulu justement, dans cet esprit qui anime sans doute le chef de l'Opposition officielle, nous tourner vers les Etats membres de la fédération canadienne et les convaincre de la justesse de nos positions tant sur le plan constitutionnel que sur les différentes approches qui étaient les nôtres. A ce moment-là, il semblait y avoir une réaction beaucoup plus positive. C'est ainsi que, si nous prenons le domaine de la sécurité du revenu, nous voyons que nous avons eu, à la suite d'un travail extrêmement important qui a été pour- suivi inlassablement par le gouvernement, particulièrement par le premier ministre et le ministre des Affaires sociales, nous avons vu qu'il y a eu un consensus.

Il y en a eu un justement à cette table des premiers ministres et des ministres des Affaires sociales. Il faut dire, M. le Président, que si nous n'avons pas institutionnalisé ce que propose le chef de l'Opposition officielle, c'est-à-dire une conférence permanente interprovinciale sur la constitution exclusivement, avec le fédéral comme observateur, nous avons tout de même modifié considérablement la conférence annuelle des premiers ministres des provinces. La réunion d'Halifax du mois d'août 1972 a été l'occasion pour les premiers ministres de toutes les provinces du Canada de prendre des positions claires dans le domaine constitutionnel mais avec une approche pragmatique, c'est-à-dire non pas une approche globale sur la constitution "at large" mais en prenant des points bien précis où il y a eu entente sur les principes. C'est ainsi, par exemple, que si nous avons présentement réussi à avoir un consensus de la majorité des provinces dans les dernières conférences fédérales-provinciales, c'est qu'il y a eu, au tout début, en août 1972, un consensus des premiers ministres des provinces. Il y a eu là des décisions de prises qui ont eu un lendemain. Ainsi, par exemple, dans la question... Le chef de l'Opposition — il faut le dire pour être bien juste — parlait du gouvernement fédéral qui charriait, par exemple, dans le domaine scolaire et municipal, dans le domaine de la santé et dans le domaine du développement régional. Je dis que si le gouvernement fédéral a voulu charrier, il a vu que cela ne marcherait pas et le retrait définitif du fédéral de certains programmes conjoints, santé et postsecondaire, était peut-être un objectif nouveau pour les autres provinces. Pour le Québec, il s'agissait d'une tâche engagée depuis 1965 et qu'il faut terminer dans les plus brefs délais.

Le Québec, en effet, s'est prévalu de la formule d'option, il y a près de dix ans maintenant. Ce qui est nouveau maintenant, c'est que d'autres provinces veulent se joindre au Québec et le premier ministre du Québec a réclamé avec force, la semaine dernière, qu'on passe des arrangements provisoires aux arrangements définitifs. Jusqu'à maintenant, le Québec était seul, avant Halifax 1972 et avant Victoria 1972. Il n'est plus seul aujourd'hui et c'est précisément l'approche du gouvernement actuel qui a réalisé un gain aussi important. Lorsque le chef de l'Opposition dit que le fédéral charrie, je dis: C'est le chef de l'Opposition, à ce moment-là, qui se laisse charrier. Parce que dans le domaine de l'éducation le gouvernement du Québec a une autorité absolue, une compétence exclusive qui n'a pas été touchée, sauf dans la question du financement et c'est justement ce que nous n'avons pas voulu, que le gouvernement fédéral entre dans le contenu. Nous sommes prêts à parler simplement du contenant

du financement et la meilleure preuve de cela c'est que c'est le ministre des Finances qui a négocié cette question et non pas le ministre de l'Education parce que nous disons; le fédéral n'a pas du tout affaire au domaine de l'éducation. Nous croyons, cependant qu'il y a lieu de reprendre les sommes qui devraient être, qui doivent être les nôtres si nous voulons une autonomie f isacle réelle.

Alors que nous avions, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, une formule particulière, un arrangement particulier dans le cas du Québec, nous voulons que le fédéral maintenant se retire définitivement, non pas seulement du champ où il n'est pas — il n'est pas dans le domaine de l'éducation — mais du champ accessoire, c'est-à-dire un champ important, dans le financement du postsecondaire; et le fédéral accepte cela. Il s'agit maintenant simplement d'en arriver à établir quelle est cette compensation ou quel est ce retrait qui pourrait faire en sorte que la province ait non pas seulement la juridiction exclusive — elle l'a dans le domaine de l'éducation — mais que même ce financement postsecondaire soit tel qu'il revienne entièrement aux Etats membres de la fédération qui ont une juridiction exclusive dans ce domaine.

Dans le domaine municipal, dès qu'il y a eu un département des affaires urbaines qui a été créé, nous avons réitéré les positions traditionnelles du Québec sur la juridiction exclusive du Québec dans le domaine municipal. Nous n'avons pas cédé quoi que ce soit, nous n'avons pas abandonné quoi que ce soit, nous sommes extrêmement vigilants de ce côté et je crois que la position du Québec est celle qui a été maintenue dans le passé et qui continuera à l'être.

Dans le domaine de la santé, c'est encore comme dans le domaine de l'éducation postsecondaire. Nous avons voulu établir clairement que des arrangements provisoires devraient devenir des arrangements définitifs. Ce principe est maintenant accepté. Les autres Etats membres de la fédération sont d'accord avec le Québec. Notre point de vue est devenu celui de l'ensemble ou pratiquement de l'ensemble des provinces. Il ne s'agit maintenant que de trouver les mécanismes ou les technicités afin que ce principe se traduise en acte.

Au cours de la dernière conférence fédérale-provinciale, on a étudié les chiffres. Est-ce que c'est tant de points d'impôt qui devraient être utlisés ou tant de points d'impôt plus certains impôts indirects? Et qu'est-ce que ça va donner? Est-ce que ça va donner plus d'argent que nécessaire pour le financement de ces champs de compétence? On ne s'est pas bloqué sur des principes. On l'a vu au cours de la dernière conférence, les Etats membres s'étaient réunis, il y avait eu un consensus et le gouvernement fédéral était devant une prise de position identique ou à peu près de la part des Etats membres de la fédération. Et le gouvernement fédéral s'est déclaré prêt à retourner aux Etats membres de la fédération le financement adéquat sur lequel il s'agit maintenant de s'entendre quant aux modalités.

M. le Président, le chef de l'Opposition a également parlé de l'invasion du fédéral dans le domaine du développement régional. Or, voici encore un point où, s'il y a eu envahissement, disons un peu timide dans le passé, il y a là un revirement tout récent. Le gouvernement fédéral se dit prêt à respecter les priorités des Etats membres de la fédération, on voudrait maintenant, et cela a été clairement dit, exprimé et établi, que pour les prochains programmes conjoints, les programmes de développement régional, on sache ce que veut le Québec, ce que veulent les Etats membres de la fédération, où sont les priorités. On nous dit: Fixez les priorités afin que nous puissions, nous, nous brancher sur les stratégies de développement économique, les stratégies de développement industriel, les stratégies de développement régional établies par le gouvernement du Québec. Alors, voici une nouvelle approche qui donne suite, évidemment, à des prises de positions fermes du Québec. Mais tout cela, évidemment, c'est un après l'autre, si vous voulez, ce n'est pas l'approche globale constitutionnelle, ce sont des gestes clairement posés dans des domaines précis. Nous sommes convaincus que cette approche a une valeur incontestable parce que, si nous faisons une brèche à tel endroit, des gains à tel autre, dans des cas précis et importants comme le domaine de la sécurité sociale, comme dans le domaine du financement de l'éducation postsecondaire, dans le domaine du développement régional, dans le domaine de la santé et des affaires sociales, nous finirons par les faits, par une approche pragmatique, à influencer la constitution elle-même. La constitution alors ne sera que le reflet des gestes posés, des acceptations, des arrangements qui auront été multipliés comme ils le sont présentement.

Cela, parallèlement avec des récupérations de revenus que nous voyons se traduire de plus en plus dans les faits. On reproche quelquefois, du côté de l'Opposition, au premier ministre de parler de $90 millions, de $315 millions...

M. LOUBIER: Ah non! ...

M. LEVESQUE: ... et des diverses sommes qui sont récupérées par le gouvernement du Québec, mais cela fait partie, justement, de cette stratégie et c'est une stratégie qui, à mon sens, apporte des résultats, non pas à tous les dix ans ni à tous les vingt ans, mais à chaque mois. Nous voyons que, de plus en plus, le gouvernement du Québec est impliqué dans les grandes décisions qui comptent. Hier, je donnais l'exemple de TDM, qui est un concept nouveau pour l'aéroport international de Mirabel. Il y a là, si on voulait s'en tenir strictement à la question constitutionnelle, quelque chose

qui n'apporterait pas ce qu'une action concertée peut apporter. Si l'on veut simplement s'en tenir à la Constitution, que le gouvernement du Québec fasse la route et que le gouvernement fédéral fasse l'aéroport. Maintenant, nous nous asseyons et nous sommes heureux. Nous disons non, là n'est pas l'essentiel. Ce qui est essentiel, c'est que nous ayons toutes les retombées économiques possibles d'un aéroport international, comme celui prévu à Mirabel. Nous croyons à l'action concertée et du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec et cela non pas en tranchant d'une façon absolue la question constitutionnelle, mais en s'imbri-quant et en s'impliquant aux deux niveaux de gouvernement. Nous allons réussir à avoir pour les Québécois beaucoup plus que ce que nous aurions avec une approche purement constitutionnelle.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Gouin.

M. JORON: M. le Président...

M. LOUBIER: Est-ce que le député de Gouin me permettrait trente secondes?

M. JORON: Oui.

M. LOUBIER: C'est justement le danger que je soulignais tantôt, qui semble vouloir donner de la force à l'argumentation du vice-premier ministre. C'est justement ce qu'il faut éviter, que les us, les coutumes et les faits aboutissent à la rédaction d'une constitution, dans les faits, dans les usages et dans les coutumes. A ce moment-là, on tombe dans le panneau, parce que là, c'est véritablement l'esprit et le sens du droit constitutionnel britannique. On va éternellement nager entre deux eaux. On n'aura jamais de constitution préalablement écrite avec des partages bien définis. C'est justement le plus grave danger et l'aspect le plus pernicieux que de se bâtir une constitution à même les usages, les coutumes, les faits et les gestes, sans être appuyé sur un document de base sur lequel on se serait entendu au départ.

Je termine et je remercie le député de Gouin de m'avoir permis...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, il semble que nous soyons à la recherche — c'est l'essence de nos discussions depuis l'ouverture des crédits, hier — d'une position de négociation. Somme toute, c'est à peu près cela qui est l'essence du débat.

On a entendu trois propositions différentes sur la façon de négocier. On a moins parlé par contre à savoir, sur quoi négocier — ce qui est, quand même, un double aspect à la question — comment négocier et sur quoi négocier.

D'autre part, il semble évident qu'il y ait unanimité sur au moins un sujet, c'est que l'on n'est pas content de ce que l'on a et on n'en veut plus. Cela semble être le consensus dans tous les cas. On n'arrive pas à se brancher, à savoir comment on va s'y prendre pour en obtenir davantage. C'est ce qui est tout le drame du Québec, en fait, depuis des années.

On a entendu la position du gouvernement qui accepte le mandat général du gouvernement fédéral actuel. L'Union Nationale, elle, veut ramener les Etats membres à une table de négociation pour redéfinir le mandat du gouvernement fédéral. En d'autres mots, réécrire la Constitution, refaire un nouveau partage du pouvoir.

Le gouvernement, lui, ne veut pas s'attaquer à la Constitution. Le mandat du gouvernement fédéral, il ne l'attaque pas comme tel. Il préfère négocier sectorialement, morceau par morceau, et essayer d'obtenir des arrangements, des accords dans ce domaine-ci, dans ce secteur-là et ainsi de suite. C'est une solution.

Dans les deux cas, pour notre part, ces deux propositions nous apparaissent irréalistes, parce que c'est négocier dans une position de faiblesse dans les deux cas.

Par contre, de la position du PQ, certains ont dit, le chef de l'Opposition officielle le disait ce matin, que c'était négocié dans une position de faiblesse. Cela reprenait en d'autres mots les propos du ministre des Affaires intergouvernementales hier soir, qui illustrait autrement la prétendue faiblesse de la position du Parti québécois, en ce sens qu'il a dit: Vous auriez alors à négocier avec un gouvernement étranger, alors que, dans le moment, on peut négocier avec un gouvernement — il l'appelait ainsi — qui est en partie le nôtre, parce qu'on représente 30 p.c. — ce n'est plus 30 p.c, c'est 26 p.c. et quelques dixièmes en tout cas, on ne se chicanera pas pour un pourcentage — parce que le Québec représente 26 p.c. ou 27 p.c. de la population canadienne. Cela ne m'apparaît pas du tout une position de force. C'est bien théorique de dire que le gouvernement fédéral est le nôtre par le fait qu'on élit 26 p.c. des députés ou 27 p.c. des députés au Parlement fédéral.

Il reste un fait indéniable, c'est que, dans le Parlement fédéral, il y a 264 députés. Il y en a 74 qui viennent du Québec. Il y en aura 73 ou 72 parce qu'on rajuste ça après chaque recensement et, comme la population du Québec croit un peu moins rapidement maintenant que celle de l'ensemble du Canada, on devient de plus en plus minoritaire dans ce Parlement-là. Quand la majorité dans ce Parlement veut prendre une position, il n'y a pas de façon autre que le chantage ou l'intimidation ou enfin la pression que les députés représentant les circonscriptions du Québec peuvent exercer... Ce n'est pas une garantie, ça, ce n'est pas ce que j'appellerais négocier dans une position de force. Au contraire, c'est une position extrêmement faible. Et on

a dit de la position du Parti québécois, parfois, que c'est une question: on se marie, on se démarie, puis on se remarie par la suite. C'est mal comprendre et faire preuve de méconnaissance de ce que propose le Parti québécois. Ce n'est pas un remariage. C'est un accord comme des accords se font normalement entre pays étrangers. Il y en a combien d'accords internationaux parmi les 140 ou 150 Etats souverains du monde? C'est probablement par milliers qu'on peut compter tous les traités d'accord.

Mais la différence essentielle, c'est que, quand deux gouvernements pleinement souverains négocient entre eux, nécessairement la base de leurs négociations doit porter sur des sujets d'intérêt mutuel. Ce n'est pas l'un qui peut faire avaler quelque chose à l'autre. C'est sur des sujets d'intérêt mutuel qu'on est forcé de s'entendre. Il y en a des sujets d'intérêt mutuel justement entre le Québec et le Canada, qui vont devenir rapidement évidents, qui sont déjà évidents, qui sont inscrits dans les faits. C'est pour ça qu'on propose, par exemple, qu'il n'y ait pas de douane, qu'il n'y ait pas de frontières au point de vue économique, que les marchandises continuent de circuler librement comme elles circulent aujourd'hui. Cela, c'est bien normal parce que c'est dans l'intérêt des deux. Nous sommes leur principal client et ils sont notre principal client, vice versa. Alors, si les deux ne veulent pas s'en aller à un suicide évident, il est bien clair qu'il faut que la circulation des marchandises continue comme à l'heure actuelle. Cela, ce n'est pas long de s'entendre là-dessus, c'est inscrit dans les faits, c'est l'avantage mutuel et réciproque des deux, sur des sujets semblables où il est facile de s'entendre. Si les pays du marché commun, par exemple, ont réussi à définir quels étaient leurs champs d'intérêts communs et qu'ils ont pu abolir les frontières, c'est qu'au départ les Etats qui négociaient étaient...

M. LEVESQUE: II faudrait que le député de Gouin soit honnête aussi et cesse de parler de la politique tarifaire qui nous échappe, s'il veut la remettre immédiatement à un autre gouvernement. Alors, qu'il soit prudent s'il dit qu'il veut que les marchandises continuent à circuler à travers le Canada comme présentement dans cette nouvelle approche. Il faudrait qu'il cesse de parler des politiques tarifaires qu'il veut récupérer pour le Québec afin qu'on ne soit pas inondé de telle ou telle marchandise.

On ne peut pas avoir les deux.

M. JORON: Mais, quand on entre dans une union douanière ou dans une association de ce genre, on définit, bien entendu, la politique commune qu'on va exercer vis-à-vis des tiers.

M. LEVESQUE: On ne décide pas ça, par exemple, comme certains de vos orateurs le disent. Il faudrait arrêter ça.

M. JORON: Sur ce sujet, je suis parfaitement de votre avis, mais ce n'est pas ce qu'on appelle négocier dans une position de faiblesse, c'est négocier dans une situation de force. Cela nous apparaît, à nous, la seule façon de négocier parce que les deux autres qui nous sont suggérées mènent à un cul-de-sac. Voici pourquoi. Prenons la position de l'Union Nationale. C'est peut-être la plus irréaliste des deux finalement, je la pense plus irréaliste que celle du gouvernement et voici pourquoi. On nous dit: Nous allons négocier. Je reprends la façon dont l'exprimait hier soir le député de Chicoutimi: Nous allons négocier avec nos partenaires canadiens, c'est-à-dire les autres Etats constituant la population canadienne, c'est-à-dire les Etats membres, un nouveau partage.

Il faut bien se rendre compte qu'il y a des notions de droit constitutionnel de base ou d'histoire constitutionnelle qu'il faut avoir à l'esprit.

Le fédéral aujourd'hui, ce n'est pas une créature des provinces. Les pouvoirs que le gouvernement fédéral a et exerce, il ne les tient pas d'un cadeau qu'un jour les provinces ou les Etats constituants lui ont fait. Il les tient d'une loi qui est une loi du Parlement britannique, c'est l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et dans ces domaines, le gouvernement fédéral est pleinement souverain.

Cela n'appartient pas aux provinces, de dire qu'il n'a aucune affaire à avoir ceci ou qu'il n'a aucune affaire à avoir cela; cela ne les regarde pas. Il les a et sa logique normale, c'est qu'il va vouloir les garder. Cela nous apparaît bien clair.

Imaginons par exemple, ce qui est fort douteux, qu'on assoit toutes les provinces à une table et qu'on engage une telle négociation. Je doute personnellement qu'on puisse arriver à un accord, parce qu'il y a des différences d'intérêts fondamentales entre le Québec et les autres provinces. Il y a des disparités régionales; il y a des intérêts économiques qui ne sont pas les mêmes et finalement, au total aussi et qui coiffe tout cela, il y a une distinction culturelle qui fait que vous avez dans le Québec une société qui a peut-être tels objectifs, telle façon de voir les choses, telle mentalité, telle culture au sens large et l'ensemble des neuf autres provinces qui partagent une autre façon de voir les choses. Déjà cela au départ rend assez illusoire l'espoir que tout ce monde pourrait s'entendre pour redéfinir une constitution commune. J'en doute personnellement; mais même si cela devait arriver que les dix provinces arrivaient à s'entendre parfaitement sur une nouvelle constitution, c'est-à-dire sur un nouveau partage des pouvoirs, on va garder tel, tel ou tel domaine et le gouvernement fédéral qu'on va créer, à qui on va donner un mandat. On va le mandater de s'occuper de cela, cela et cela.

La question qui se pose, c'est: Comment est-ce que vous allez faire avaler cela au gouvernement central? Les provinces n'ont pas de moyens de dire au gouvernement central: Dorénavant parce ce qu'on l'a décidé ainsi, tel domaine, vous ne vous en occuperez plus. Le

gouvernement fédéral continuera à dire: Mais voyons donc, messieurs; selon la Constitution, cette juridiction m'appartient, j'ai le droit de continuer à l'exercer. C'est un "show down" de force, à ce moment-là. Or il pourrait arriver dans l'ensemble du Canada qu'il y ait deux courants parallèles, un courant provincialiste, si vous le voulez, et un courant fédéral. Il y aurait des gens dans les dix provinces, incluant les dix premiers ministres des dix provinces, qui seraient d'accord pour enlever tel ou tel morceau au gouvernement fédéral. Mais qu'est-ce que vous pensez que les partis politiques fédéraux vont penser de cela, eux, ceux qui ne sont pas sur la scène provinciale, qui agissent au niveau fédéral et dont l'intérêt est de défendre la prépondérance du gouvernement fédéral? On est dans un cul-de-sac, on ne peut toujours pas arriver avec une carabine sur la colline parlementaire à Ottawa et dire: Dorénavant, vous allez cesser de vous occuper de l'assurance-chômage, ça revient aux provinces. Il n'y a pas de moyen, il n'y a pas de possibilité de faire réfléchir ces gens, c'est un cul-de-sac, c'est un rêve, cette façon de négocier que propose tout d'un coup l'Union Nationale. Cela nous apparaît ne mener absolument nulle part.

D'autre part, quand on dit qu'on va négocier un nouveau partage, il faudrait bien qu'on se dise une fois quel partage on veut. Qu'est-ce qu'on veut? Là on entend l'Union Nationale qui parle surtout maintenant de la façon de négocier et moins sur le contenu de la négociation, sur ce qu'on devrait récupérer. Pourtant, dans le passé, elle a déjà été beaucoup plus explicite. C'était 100 p.c, 100 p.c, 100 p.c. du temps de M. Johnson. Ce n'est pas compliqué, 100 p.c. des trois impôts majeurs. On se demandait comment il se faisait qu'il n'était pas indépendantiste à ce moment-là parce que quand on a enlevé les trois principaux impôts au gouvernement fédéral, on se demande ce qu'il lui reste. On est en situation de souveraineté ou à peu près. A ce moment-là, l'Union Nationale savait un peu plus où elle s'en allait et ce qu'elle voulait.

On a entendu, depuis longtemps, depuis le début des années soixante, la fameuse question qui était posée par les autres provinces: What does Quebec want?

Il me semblait que nous, au Québec, indépendamment de nos attaches partisanes, globalement, nous le savions à peu près, ce que nous voulions. Nous voulions pas mal plus. Il y en a, comme le Parti québécois, qui voulaient tout. M. Johnson disait: 100 p.c, 100 p.c, 100 p.c; cela n'était pas loin d'être tout. A l'époque, M. Lesage aussi était fort gourmand, il en voulait pas mal; il en voulait peut-être 75 p.c, lui.

A ce moment, les Québécois, tout au moins, savaient. What does Quebec want? Là, on est rendu qu'après l'avoir dit aux autres provinces, à l'extérieur du Québec, on ne nous demande plus cela maintenant: What does Quebec want? Maintenant, ce sont le Parti libéral et l'Union

Nationale qui ne savent plus ce qu'ils veulent. La question qui se pose maintenant est: What does the National Union want and what does the Liberal Party want? On ne le sait plus ce que vous voulez.

C'est la question que je vous avais posée hier. C'est cela que j'aimerais entendre. Quels sont les domaines que le Québec veut rapatrier? Vous nous dites: A la minute qu'il arrive une nouvelle affaire, le cas de l'aéroport Mirabel, on va négocier là-dessus. On est à la merci des événements, des choses qui vont arriver, à la merci aussi des initiatives que va prendre le gouvernement fédéral parce que comme je le disais hier — je ne veux pas revenir là-dessus — par le fait qu'il a une croissance de revenus fiscaux bien supérieure à la nôtre, cela lui donne une marge de manoeuvre qui lui permet, à un certain moment, de s'installer dans toutes sortes de domaines. Une fois qu'il est rendu là, on se dit : Bon, le voilà rendu dans notre jardin encore une fois. On va aller négocier. On va prendre cela secteur par secteur. Cela ne mène nulle part, non plus. J'aimerais cela entendre le ministre répondre aux questions que je lui posais hier.

Quels sont les domaines qu'il veut rapatrier? Je suis d'accord avec lui quand il dit: On ne peut plus faire un partage aujourd'hui. On va dire: La voirie, c'est au Québec; les aéroports, c'est à Ottawa. Si vous poursuiviez plus loin votre logique, vous iriez jusqu'à dire qu'à ce moment, vous êtes en train de faire la preuve que ce qu'il faut, c'est la souveraineté totale, justement parce que les choses ne peuvent plus être compartimentées aujourd'hui. On ne peut plus dire: L'éducation est complètement divorcée de tout ce qui se passe dans les affaires sociales, dans l'économique, etc. Ce n'est pas vrai. Vous êtes en train d'en faire la preuve vous-même. C'est la logique de base du Parti québécois justement, le fait que la souveraineté aujourd'hui doit s'exercer globablement, pleinement, parce que cela n'est plus possible de compartimenter les secteurs les uns avec les autres. Vous n'acceptez pas cette approche.

J'aimerais bien quand même que le gouvernement nous dise ce qu'il veut finalement, ce dont il a besoin. Est-ce qu'il s'estime plus responsable du développement du Québec que le gouvernement fédéral? Qu'il nous dise donc cela une fois pour toutes! On va savoir si on a un Etat à Québec ou si on a une administration municipale. Il faudrait éclaircir ce point parce que là, on ne le sait plus, de la façon que vous reculez sur les positions constitutionnelles que votre parti a prises antérieurement. On ne sait plus où vous vous en allez.

Dites-nous donc ce que vous voulez. Voulez-vous être le maître d'oeuvre principal du développement global du Québec dans tous ces secteurs? Si c'est cela, faites-nous la liste des juridictions dont vous avez besoin pour le faire et des impôts correspondants, bien entendu, du partage fiscal qui doit accompagner ce nouveau

partage de juridictions parce que l'un ne va pas sans l'autre. Si on n'a pas la partie correspondante des impôts pour remplir les responsabilités qu'on sollicite, on parle pour ne rien dire.

Comme sous-question, cela voudrait dire: Quelle sorte de partage fiscal? Quel pourcentage des impôts globaux que les Québécois paient devrait être à Québec pour permettre au gouvernement du Québec d'assumer son rôle de maître d'oeuvre principal du développement du Québec, s'il veut assumer ce rôle?

J'ai plutôt l'impression qu'il a accepté que cela soit un autre niveau de gouvernement qui soit le principal responsable du développement du Québec. Qu'il le dise donc clairement aux Québécois une fois pour toutes. A partir de là, on va arrêter de pérorer sur ce sujet.

Qu'il nous dise aussi si, par hasard, il y aurait encore quelques velléités, quelques intentions ou quelques aspirations québécoises dans ce Parti libéral qui a cessé de l'être, à notre avis, s'il en a encore des aspirations proprement québécoises, être responsable du développement du Québec.

Comment, deuxièmement, vous y prendrez-vous pour avoir ce nouveau partage fiscal, ce nouveau transfert de juridictions? Par quelle méthode vous y prendrez-vous?

Ce qu'on aimerait bien savoir et c'est là où on va justement arriver probablement à faire la preuve suivante. C'est que, dans le contexte actuel, quand vous êtes face à un gouvernement qui a déjà les pouvoirs que vous voudriez peut-être lui enlever, en vertu de quelle logique cet autre gouvernement, celui à qui on veut les enlever, va-t-il se les laisser enlever? Cela ne nous semble avoir aucun sens. Cela semble être complètement contre la logique que le gouvernement fédéral veuille laisser aller quoi que ce soit. C'est à partir de ce moment que de plus en plus de Québécois ainsi que le Parti québécois ont dit que rester dans le cadre de la Confédération empêche le Québec de rapatrier davantage. On voit comme c'est bloqué depuis l'avènement de M. Trudeau, qui a probablement imprégné d'une politique constitutionnelle ferme un gouvernement fédéral qui ne l'avait plus ou qui l'avait perdue peut-être parce que c'étaient des gouvernements minoritaires avant ou je ne sais trop.

Là, il est clair et net que la volonté du fédéral est arrêté maintenant. Comment allez-vous pouvoir infléchir cette volonté? C'est cela que j'aimerais bien entendre. En dernier lieu, si cela ne marche pas, si vous n'êtes pas capables de retirer quoi que ce soit, que faites-vous à ce moment-là? L'Union Nationale nous dit qu'elle va faire des représailles fiscales. J'imagine qu'elle fait allusion à ce que le premier ministre Duplessis avait fait en 1954, la double imposition. C'était un sérieux pari à prendre à ce moment-là parce que, si le fédéral n'avait pas évacué, menacé de faire des représailles fiscales, c'est dire qu'on aurait fait supporter au contribuable québécois le fait d'être "encarcané" dans un régime qui permet à l'autre gouvernement, s'il ne veut pas reculer, de ne pas reculer. On s'est placé dans ce régime, on voudrait le modifier. Il n'y a pas d'autres moyens de le modifier que par des représailles fiscales. Alors que le contribuable québécois paie plus cher que les autres contribuables du Canada par le fait qu'il est dans un régime fédéral, cela m'apparaît drôlement illusoire aussi comme façon de faire. C'est pourquoi il nous semble que la seule façon — parce qu'on ramène tout cela sur le chapitre de négociation — de négocier la place du Québec dans cette partie nord de l'Amérique du Nord, la place du Québec dans le monde, la seule façon de négocier notre place au soleil, c'est en nous rendant, comme tous les peuples du monde, pleinement responsables de tous nos attributs, de nos impôts et de notre pouvoir de faire des lois dans notre pays. On ne veut pas faire la loi pour les autres. On ne veut pas faire un hold-up sur les taxes des Ontariens. Ce sont seulement nos taxes qu'on veut contrôler. Ce sont seulement les lois au Québec qu'on veut avoir le droit exclusif de faire. A partir de ce moment-là, comme tous les pays normaux du monde, on va tailler notre place avec nos voisins canadiens en premier lieu, parce que ce sont les plus près, c'est avec eux qu'on a le plus de choses en commun. Avec nos voisins américains, en deuxième lieu, parce que ce sont eux avec qui, tout de suite après, on a le plus de choses aussi en commun ou à arranger ensemble. En troisième lieu, viendra le reste, l'Europe, etc. Mais c'est comme cela que tous les pays normaux du monde font leur place, font leur nid dans l'ensemble de l'échiquier mondial. On ne voit pas pourquoi, en vertu de quelle logique le Québec ferait exception à ce qui a été finalement la règle, la normale dans toute l'histoire du monde.

M. LEVESQUE: Si je peux juste répondre un mot.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable vice-premier ministre.

M. LEVESQUE: M. le Président, je pense bien que plus le député de Gouin parle, moins il nous convainc de la justesse de sa cause et plus on peut dire que le chat sort du sac. A l'écouter, on se demande si le Parti québécois est tellement radicalement différent parce que tout se résume, d'après ses propos, à une évaluation de la méthode de négociation.

Il a critiqué l'Union Nationale pour avoir une approche comme celle d'une conférence interprovinciale permanente sur la Constitution, qu'il trouve irréaliste; il a parlé de l'approche pragmatique du gouvernement qu'il trouve peut-être, je ne sais pas moi, moins spectaculaire et lui, arrive à identifier le Parti québécois et sa philosophie comme une meilleure méthode de négociation.

M. JORON: J'ai parlé de négocier notre place dans le monde.

M. LEVESQUE: Une place dans un marché commun, dans un pays ou dans un ensemble où les marchandises pourraient passer, où il y aurait toute la mobilité, autrement dit, tous les avantages que le Canada fournit présentement; il voudrait les garder. La mobilité dans les biens, dans les personnes, dans les services, il voudrait tout garder cela, mais, en même temps, il voudrait proposer une séparation qui, elle, favoriserait la négociation qu'il propose. Je dis que c'est absolument aberrant; c'est même enfantin. Il nous dit ensuite: Les gens des autres provinces ne disent plus: What does Quebec want? Voici un beau témoignage, M. le Président. C'est que nous avons réussi par notre approche à expliquer, justement, et à justifier les positions "traditionnelles" du Québec et c'est...

M. JORON: Ce n'est pas cela...

M. LEVESQUE: Un instant. Est-ce que je vous ai interrompu, vous, pendant que vous disiez toutes ces idioties? M. le Président, je dis que le gouvernement actuel a réussi par son travail et par son approche plus pragmatique, plus accessible aux autres Etats membres de la fédération, à convaincre les autres que ces positions du Québec étaient réellement des positions qui s'acceptaient dans un domaine fédéral non seulement qui s'acceptaient, mais qui amélioraient un vrai fédéralisme. Nous avons clairement, par ces positions, obtenu des gains inportants. On a dit qu'il y aurait peut-être un recul constitutionnel avec un, deux ou trois points d'interrogation. M. le Président, qu'on nous apporte un cas où le Québec a reculé d'un iota ou d'un pouce ou d'un millimètre sur la question constitutionnelle. Nous n'avons rien cédé, nous n'avons rien abandonné, nous n'avons pas l'intention, non plus, d'abandonner les principes qui ont été dans la continuité de la tradition du Québec, mais nous ne sommes plus seuls.

Ce que nous faisons maintenant, nous le faisons avec les Etats membres de la fédération. Je n'ai pas de meilleur exemple que le domaine des allocations familiales, par exemple. Prenons les cas concrets — ne parlons pas dans les nuages — prenons les allocations familiales où le gouvernement central était présent depuis plus d'un quart de siècle. Ce n'est pas nouveau cela. Dès l'après-guerre en 1945 ou 1946, le gouvernement fédéral est entré dans le champ des allocations familiales et aujourd'hui, le gouvernement fédéral dit: D'accord avec le Québec qui était d'accord, d'ailleurs, et qui avait fait un consensus des provinces, ce sont les Etats membres de la fédération qui auront la priorité, qui établiront les modalités, mais qui, en tenant compte de normes nationales, établiront la façon dont ces allocations seront distribuées.

Autrement dit, nous avons fait un pas en avant; nous sommes entrés dans un domaine qui était la chasse gardée du gouvernement fédéral, depuis 1945. Nous l'avons fait en consultation avec les Etats membres de la fédération canadienne, après avoir convaincu les autres, nos partenaires, qu'il était plus avantageux d'avoir un programme complet de sécurité du revenu où il y aurait une cohérence, où il y aurait des priorités, où il y aurait des complémentarités, mais où les Etats membres seraient présents dans l'élaboration de ces politiques de la sécurité du revenu.

Dans le domaine du développement régional, dans le domaine du développement industriel, nous avons changé le cours des choses justement, parce que nous avons fait ce travail entre les Etats membres et nous avons convaincu le gouvernement fédéral que certaines actions isolées devenaient souvent contradictoires et ne tenaient pas compte des priorités et des stratégies de développement des Etats membres.

Et là nous avons le gouvernement fédéral qui déclare: Vous avez raison, faites vos priorités, faites vos stratégies, nous allons suivre ce que vous allez nous proposer tout en assurant une certaine cohérence dans les diverses régions du pays.

M. le Président, nous avons, par exemple, dans le domaine industriel, eu des subventions â gauche et à droite avec des critères purement fédéraux. Aujourd'hui, on nous dit: Quelle est votre stratégie de développement industriel et nous allons faire en sorte que les critères de subventions tiennent compte des priorités québécoises. Ce que veut le gouvernement actuel, ce que veut le gouvernement québécois, c'est clair, c'est le développement de la collectivité québécoise, du peuple québécois.

M. JORON: Me permettriez-vous une petite question?

M. LEVESQUE: Et comment, M. le Président? Par une action concertée des deux paliers de gouvernement. Nous sommes Québécois mais nous sommes Canadiens. Nous avons un gouvernement fédéral et nous ne l'ignorons pas. Nous avons à Ottawa des Québécois élus par des Québécois qui sont et qui forment ce gouvernement. Il y a un Québécois à la tête du gouvernement fédéral. Il y a des Québécois dans tous les postes clés du gouvernement fédéral. Nous avons une députation québécoise au gouvernement fédéral, dans le Parlement fédéral. On semble ignorer ça. On parle d'Ottawa comme si c'était un gouvernement étranger. Trop longtemps nous avons laissé dire ces choses sans, pour une fois, au moins de temps à autre dire qu'il existe une réalité, une réalité qui est canadienne, mais qui est également québécoise, la réalité de ce gouvernement fédéral.

M. JORON: C'est 74 sièges sur 264, vous savez ça!

M. LEVESQUE: Je dis que, si on veut réellement servir la communauté et la collectivité québécoise, c'est par une action concertée des deux paliers de gouvernement, et cela, comme jamais auparavant, conformément aux priorités que le peuple québécois lui-même veut se donner. Jamais un gouvernement québécois n'a eu autant accès et nous voulons encore avoir plus accès, justement, à ces grandes décisions nationales qui affectent considérablement notre entité, notre communauté, notre collectivité québécoise. Quel que soit le régime sous lequel nous vivions, si jamais l'utopique solution du Parti québécois était retenue, même pour un instant, en imagination, eh bien, M. le Président, il faudrait encore pour le bien de la collectivité québécoise, se retourner vers cette nouvelle institution, ce nouveau marché commun, ce nouveau gouvernement central, enfin, qui devrait exister sur le plan monétaire, sur différents plans tarifaires etc. Si cette entité politique existait, je ne sais pas si c'est seulement dans l'imagination du député, mais enfin si elle devait exister, si on veut s'en tenir aux propos qu'il a tenus depuis hier, il faudrait qu'il y ait concertation encore. Et nous ne changeons pas le fait qu'il y a 6 millions de Québécois, mais qu'il y a 22 millions de Canadiens, et que, quels que soient les arrangements auxquels on arriverait, nous serions évidemment minoritaires si on prend les deux blocs opposés, et ce n'est pas unilatéralement qu'un Québec séparé pourrait décider et dicter ses lignes de conduite dans l'ensemble du pays.

M. le Président, qu'on veuille faire sur papier des tours de force comme ceux que voudrait faire le député de Gouin, c'est irréaliste, c'est complètement utopique et enfantin.

M. JORON: Vous me l'avez déjà dit. Me permettez-vous que je vous pose rien qu'une petite question, si le député de Rouyn-Noranda me le permet? Je vous ai demandé trois choses. Est-ce que vous pourriez, brièvement, essayer de répondre à ça? D'accord, laissons faire la critique de la thèse du Parti québécois, ce n'est pas le moment. Vous m'en avez fait souvent la réplique aussi. Mais ce que je voudrais savoir, dans votre esprit, est-ce Québec ou Ottawa qui est le principal responsable du développement global du Québec? Lequel des deux...

M. LEVESQUE: M. le Président, je vais répondre simplement au député de Gouin.

M. JORON: Est-ce que vous me permettez...

M. LEVESQUE: Je comprends! Je comprends assez vite vos questions, elles sont toujours les mêmes.

M. JORON: Permettez-vous que je complète ma question? Si vous me permettez, je vais compléter ma question en dix secondes. Est-ce Québec ou Ottawa? Est-ce qu'il y en a un qui doit avoir plus dans ses mains que l'autre ou si c'est quelque chose qui peut être égal, égal? Ou bien... Bon, ça d'abord. Qui est le principal maître d'oeuvre? Si ça doit être Québec, de quoi avez-vous besoin pour arriver à ça de plus que ce que vous avez dans le moment, au point de vue fiscal aussi, la juridiction et la fiscalité qui doit l'accompagner? Troisièmement, comment allez-vous vous y prendre pour obtenir ça?

M. LEVESQUE: M. le Président, cela a l'air d'être un dialogue de sourds, parce que c'est exactement ce que je viens de répondre au député de Gouin.

C'est justement cette approche que nous avons prise...

M. JORON: II n'y en a pas un de principal dans la main-d'oeuvre, il y en a deux, c'est cela?

M. LEVESQUE: Cela dépend évidemment des divers champs de compétence, il me semble que c'est assez clair.

M. JORON: II faut savoir qui mène au Québec. C'est Ottawa ou Québec, dans votre esprit?

M. LEVESQUE: On a demandé, par exemple, qui va décider de l'aménagement du territoire au Québec. C'est une chose assez importante, cela touche quelque chose de bien concret et de bien réel. Le député sait que nous avons présentement, devant la commission parlementaire, un avant-projet sur tout l'aménagement du territoire du Québec où nous prenons une initiative. Nous n'attendons pas d'avoir un code civil là-dessus, parce que, en opposition au "common law", nous prenons...

M. JORON: Vous les prenez un par un, les secteurs...

M. LEVESQUE: ... le domaine de l'aménagement du territoire et nous avons fait nous-mêmes un approche très valable que nous présentons devant la commission parlementaire. Nous avons préparé parallèlement une stratégie de développement économique pour le Québec, parallèlement une stratégie de développement industriel et parallèlement une stratégie de développement régional qui s'apparente justement à l'avant-projet sur le développement du territoire.

Dans les ministères, comme au ministère des Terres et Forêts et au ministère de l'Agriculture, par exemple, on a la même préoccupation de l'utilisation des terres du Québec. Cela est une approche que je dis pragmatique mais très importante et très sérieuse...

M. JORON: Cela vous permet de ne pas répondre à ma question.

M. LEVESQUE: ... et en ceci, il faut tenir compte de la nouvelle approche du gouvernement fédéral qui nous dit justement: Nous allons tenir compte, dans vos champs de compétence, de votre planification, de votre programmation, de votre utilisation de l'espace, de ce que vous préconisez comme utilisation de l'espace sur le territoire québécois. Vous le connaissez mieux que nous, mais nous voulons que notre action soit complémentaire, tienne compte des priorités du Québec. Nous allons faire en sorte que les décisions qui doivent être prises par notre niveau de gouvernement n'arrivent pas en contradiction avec votre propre planification.

Je dis qu'à ce moment-là, évidemment, la priorité est au Québec dans l'aménagement du territoire, dans le développement régional, dans la stratégie de développement économique mais c'est à nous de poser des actions, de poser des gestes et de ne pas attendre que l'on nous les impose.

C'est justement ce qui qualifie le gouvernement actuel, c'est d'être à l'avant-garde de ces politiques, de poser des gestes avant de discuter théoriquement des choses qui n'aboutissent généralement à rien. Nous occupons le champ...

M. JORON: Vous faites le plan, vous demandez à l'autre de l'exécuter. C'est l'autre qui a l'argent et vous vous fiez sur sa bonne volonté?

M. LEVESQUE: Dans la question d'argent, je crois que c'est important d'avoir l'autonomie fiscale. Jamais un gouvernement n'a réussi à récupérer autant des champs, quant à la fiscalité, que le gouvernement actuel.

M. JORON: Ce n'est pas l'opinion du ministre des Finances. Dans son discours du budget, il a dit que nous n'en avions pas assez.

M. LEVESQUE: Que l'on regarde, par exemple, le domaine de la santé. Nous avons eu dans le passé un premier pas qui a été posé, celui d'avoir une compensation fiscale. Nous voulons avoir maintenant l'autonomie fiscale et nous l'avons pratiquement, tout est accepté en principe dans le domaine de la santé, de sorte que nous puissions avoir, non pas seulement le champ mais également la fiscalité correspondante. Nous l'avons en principe également, c'est accepté que, dans le domaine du postsecondaire, nous ayons la récupération fiscale, complète, l'autonomie fiscale. Il s'agit simplement maintenant de déterminer les modalités et c'est ce que nous avons essayé de faire lors de la dernière conférence. Il y a là des pas de géant d'accomplis pour que, non seulement nous ayons l'administration de ce champ de compétence mais que nous ayons en même temps les revenus nécessaires pour avoir cette autonomie fiscale.

M. JORON: Rendu là, en avez-vous assez ou si vous voulez en avoir plus?

M. LEVESQUE: Non, nous continuons, M. le Président. Nous croyons que le gouvernement actuel doit obtenir la pleine autonomie fiscale dans les champs de sa compétence. C'est clair?

M. JORON: Dans les champs de sa compétence, mais vous ne mettez pas en cause les compétences juridictionnelles du fédéral?

M. LEVESQUE: Le gouvernement actuel n'a pas demandé d'avoir la juridiction dans le domaine, par exemple, monétaire. On n'a pas demandé cela. Alors, on ne s'attend pas à l'avoir.

M. JORON: Dans les communications et en agriculture?

M. LEVESQUE : Dans les communications, M. le Président, le député, s'il connaît son histoire, sait que le gouvernement du Québec autrefois avait demandé et avait insité pour obtenir une juridiction dans le domaine de la radio. On se rappelle le jugement du Conseil privé, le Québec n'a pas gagné sa cause. Mais malgré cela, le Québec a posé des gestes depuis un an ou deux dans le domaine des communications, et particulièrement dans le domaine de la câblodiffusion, et nous avons posé des gestes qui indiquent que nous avons l'intention d'exercer notre juridiction dans un domaine que nous croyons propre au Québec, parce qu'il est à l'intérieur et qu'il fonctionne à l'intérieur des frontières québécoises, et il touche à un sujet aussi important que la culture et l'éducation...

M. JORON: Mais jusqu'où...

M. LEVESQUE: ... Et nous continuons à poser ces gestes-là. Nous croyons que nous arrivons à des résultats beaucoup plus concrets que ceux que nous obtiendrions à avoir des discussions interminables et à faire des discours patriotards, M. le Président, ou à proposer des solutions globales et radicales comme celles que pose le député de Gouin lorsqu'il dit: Nous voulons nous séparer et ensuite ce sera la meilleure façon de renégocier avec le reste du Canada. M. le Président, on arrive maintenant à traduire la position philosophique du Parti québécois comme étant simplement une modalité de négociation. On en est arrivé là à écouter le député de Gouin. Si c'est ça que le député de Gouin veut, M. le Président, je répète que c'est irréaliste, enfantin et utopique.

M. JORON: Je le savais, vous m'avez déjà dit ça.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre! Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, bien sûr, nous ne sommes pas toujours d'accord sur l'approche du gouvernement en matière de relations fédérales-provinciales, mais nous le sommes encore

moins avec l'approche du Parti québécois. Quand on les entend nous mentionner qu'il nous faut tout briser, tout casser pour ensuite renégocier un pacte, renégocier une espèce de marché commun, ça me fait penser à quelqu'un qui, traumatisé, serait désireux d'aller aux noces absolument. Puis, comme il n'y a pas de noces en vue, il est prêt à suggérer de provoquer un divorce afin de permettre un remariage pour lui permettre d'aller aux noces. Moi, je n'ai rien contre ça, si le Parti québécois veut aller aux noces absolument, contre toutes considérations raisonnables, c'est son affaire. Mais je peux lui dire que je ne l'accompagnerai pas à ces noces-là.

M. le Président, bien sûr, il y a place à de l'amélioration constante; bien sûr, il y a place à des ajustements; bien sûr, il y a place à une plus grande autonomie du Québec, mais je pense que nous devons regarder vers les autres provinces également. Il y a dix provinces dans le Canada et, lorsqu'on parle de relations fédérales-provinciales, si on veut enlever les oeillères, on verra que, dans les autres provinces, il y a aussi des problèmes qui ressemblent drôlement aux problèmes qu'on connaît au Québec. On verra que les autres provinces ont aussi des revendications qui ressemblent aux nôtres. Ceci veut dire que nous ne pouvons pas facilement compartimenter le Québec dans un seul coin et dire: Le Québec, il n'est pas comme les autres. Au contraire, le Québec c'est une province qui ressemble drôlement aux autres, avec des habitants qui ne parlent peut-être pas majoritairement la même langue que celle utilisée dans d'autres provinces, on est bien d'accord là-dessus.

Mais il n'y a pas seulement le problème linguistique ou culturel, M. le Président, regardez. Il y a tout le problème économique et de matière économique. Evidemment nous voyons que les autres provinces ont généralement les mêmes revendications que les nôtres, d'autant plus que certaines provinces ont des revendications qui vont plus loin que les nôtres. Ce qui veut dire que, si on veut vivre en société bien organisée, dans un vrai Canada, je pense qu'il faut considérer que nous ne sommes pas les seuls. C'est beau de dire: Chez nous on veut cela, mais je pense qu'il faut considérer les besoins et les demandes des autres également. Il faut que tout le monde puisse vivre dans ce Canada de façon raisonnable, parce que même si on voulait se compartimenter chez nous seulement, on trouverait qu'on a drôlement besoin des autres aussi. Et il y a un fait que même le Parti québécois ne pourra jamais changer, c'est qu'on est dans un contexte nord-américain, on est sur un continent. Même si la philosophie d'un parti ou d'un autre parti voulait qu'on se retrouve tout seul, il demeure qu'on est sur un même territoire, sur une même partie de terre et il va falloir qu'on apprenne à vivre dans ce contexte nord-américain.

Bien entendu, il y a eu des efforts de faits.

Dans le passé il y a eu des premiers ministres qui ont fait certains efforts, mais il y en a encore à faire. C'est clair qu'on n'est pas d'accord que tout s'arrête là et qu'on dise: Parce qu'on est dans un Canada, on n'a rien à faire et on va arrêter de revendiquer. Je pense que ce serait irréaliste de penser comme cela. Il faut continuer à revendiquer constamment, mais à revendiquer aussi, M. le Président, en étant nous-mêmes et en prenant nous-mêmes des décisions et en nous faisant respecter davantage. Je pense, à ce moment-ci, à plusieurs façons de procéder. L'an passé j'avais eu l'occasion de suggérer au gouvernement, à cette même commission parlementaire dont le vice-premier ministre d'ailleurs a l'habitude de prendre ou a pris habitude de noter... J'espère qu'il; l'a bien noté et qu'il le renotera encore cette année. Qui sait? Peut-être que dans un avenir rapproché, les notes qu'il aura prises lui reviendront à la surface et il voudra les considérer.

Je pense que nous avons, dans nos négociations fédérales-provinciales, tout avantage à nous associer à des partenaires qui ont les mêmes problèmes que nous, c'est-à-dire les autres provinces et si le fédéral est fort... Nous savons que le fédéral est fort, ce n'est pas le Parti québécois qui vient de nous apprendre cela; on le sait, parce que le fédéral a un pouvoir de taxation et un pouvoir de dépenser que les provinces auraient avantage à partager du moins. Comme ce n'est pas le cas présentement, bien entendu, celui qui paie ou qui a le pouvoir de payer est en meilleure position que les autres, mais cette force de frappe qui pourrait être créée par l'association des différentes provinces pourrait placer les provinces en meilleure position de négocier. Il se trouve — et je pense que ce n'est un secret pour personne — qu'à l'occasion de certaines conférences fédérales-provinciales, le fédéral a aussi une stratégie. J'entends souvent parler mon bon ami, le député de Bonaventure, de stratégie. La stratégie que le gouvernement dit Québec emploie se bute souvent à une stratégie qui a été préparée par le gouvernement fédéral et je pense que c'est de bonne guerre que chacune des parties à ces conférences emploie sa stratégie.

La stratégie du gouvernement fédéral a été, à un certain moment — du moins, selon ce qu'on nous a rapporté puisque nous n'étions pas là; comme on le sait, le gouvernement n'accepte pas encore que les partis d'Opposition soient présents— ... En suivant ce qu'on nous a rapporté, il semblerait que ces stratégies auraient voulu que le gouvernement fédéral fasse un peu de marchandage avec certaines provinces pour faire en sorte qu'à l'occasion des conférences le tout soit un peu préparé à l'avance et que le Québec se trouve, peut-être, dans une mauvaise situation de négociation face à ce marchandage qui a eu lieu auparavant avec d'autres provinces.

Pour contourner cela, pour en arriver à une

négociation où il serait en très bonne posture, je pense que le Québec aurait avantage à s'associer aux autres provinces et peut-être avantage à prendre l'initiative de conférences interprovinciales plus importantes que certaines qui ont déjà eu lieu, dans le sens que les provinces faisant front commun... On a vu cela, les fronts communs; cela n'a pas toujours donné de bons résultats, allez-vous me dire. Dans certains domaines, il a été heureux que cela ne donne pas de bons résultats. Mais dans le domaine des relations fédérales-provinciales, si les provinces en arrivaient à s'entendre sur certains points... Bien entendu, il ne faut pas rêver en couleur. Les provinces ne s'entendront pas sur 100 p.c. des sujets à discuter parce qu'il y a ces particularités d'une province à une autre où parce que certaines provinces ont des choses qui leur semblent nécessaires pendant qu'elles sont prêtes à laisser d'autres points.

Je pense qu'il y a quand même cette possibilité d'en arriver à une force de frappe sur plusieurs points majeurs et avec cette force de frappe, avec ces conférences interprovinciales, je pense que le fédéral serait mis devant une situation où les provinces ne seraient pas en position de faiblesse, mais au contraire, en position de force.

Bien entendu, nous, comme d'autres, déplorons ce genre de déclaration faite par les représentants du gouvernement fédéral, lorsqu'on dit souvent aux provinces: Si vous en voulez davantage, imposez davantage. Je pense que c'est facile pour le gouvernement fédéral de dire cela. C'est facile pour M. Trudeau de dire comme il a dit dernièrement : Le gouvernement fédéral n'aime pas plus imposer que les provinces mais nous prenons nos responsabilités; que les provinces en fassent autant !

Il faut considérer que lorsque le gouvernement fédéral dit aux provinces: Imposez si vous en voulez plus, il occupe quand même le terrain. Si on nous dit: Imposez davantage, vous en aurez plus — et c'est là que je suis complètement en désaccord avec le fédéral — cela veut dire aux provinces: Imposez davantage à la population, alors qu'il y a quand même une limite d'imposition. Il y a une limite à imposer la population et, au sein de cette limite, si le fédéral ne permet pas aux provinces d'en retirer davantage, bien entendu, il n'est pas possible pour les provinces d'aller imposer davantage.

C'est complètement ridicule pour un gouvernement fédéral de déclarer de telles choses. Même si je ne suis pas d'accord avec le Parti québécois dans sa philosophie, sa façon et son approche, il reste qu'il y a des problèmes qui demeurent, qui doivent être résolus et le gouvernement du Québec, je pense, pourrait davantage s'affirmer dans ce domaine.

On pourrait facilement aussi mentionner, parce que les relations fédérales-provinciales, c'est un genre de service... On ne part pas avec l'objectif d'avoir de bonnes relations fédérales-provinciales. Elles sont là pour servir les objec- tifs des citoyens, qu'ils soient des citoyens votant au fédéral ou au provincial. Il se retrouve que c'est la même population. Ce sont les mêmes citoyens qui finalement paient la note. Nous avons tout avantage à ce qu'économiquement le Québec bénéficie de ce qui lui revient, parce que je n'ai pas l'impression qu'on demande des cadeaux au fédéral quand on lui demande d'avoir voix au chapitre en matière de fiscalité ou encore, en matière de commerce, ce qui est très important. Nous voyons trop souvent, hélas, des importations en provenance de l'étranger venir exercer un "dumping" sur le territoire québécois alors que, par des ententes internationales, ce sont les autres provinces qui bénéficient de l'exportation de façon majoritaire, alors que nous, au Québec, il semble que, dans plusieurs domaines du moins, on ait à essuyer ce "dumping" qui est provoqué par l'exportation et qui favorise davantage les autres provinces.

Il y a également le domaine de la fiscalité. Est-ce qu'on peut dire que c'est réellement le fédéral qui est le grand responsable du fait que nous ayons perdu plusieurs de nos droits en fiscalité? Je pense qu'il faut quand même être réaliste aussi dans ce domaine. C'est le député de Beauce qui le mentionnait hier. Si on a plusieurs de nos droits qui sont rendus à Ottawa, c'est probablement et sûrement dû au fait que nos gouvernements québécois, qui ont précédé l'actuel gouvernement, ont permis que cela se fasse de cette façon, ont permis que nos droits s'en aillent à Ottawa, notamment pour la période de guerre. Or, la guerre, si j'ai bien compris, est terminée depuis quelque temps déjà. Si j'ai bien compris également, on est censé avoir remporté une victoire. Il paraît qu'on aurait gagné la guerre.

Malheureusement — je vois que le premier ministre arrive, cela me fait plaisir de lui annoncer cette heureuse nouvelle — même s'il paraît qu'on a gagné la guerre, nous nous retrouvons devant une drôle de situation, devant des Québécois ou des Canadiens qui sont obligés d'aller emprunter sur les marchés étrangers, notamment dans des pays qui sont censés avoir perdu cette guerre-là.

Alors, vous voyez, M. le Président, que c'est une drôle de situation. Nous, les victorieux, nous allons emprunter des gens qui ont perdu la guerre. On se demande, M. le Président, si ce n'est pas un peu cela qui a motivé le Parti québécois à en arriver à sa philosophie de vouloir provoquer une guerre pour la perdre, pour être avantagé par la perte d'une guerre. Guerre, pas au sens de la violence, mon cher collègue de Gouin. Mais quand même, M. le Président, ce sont de drôles de situations et la population du Québec est en droit de se demander: Comment cela se fait-il? Cela se fait. Cela fait, je pense, que nos relations fédérales provinciales y sont pour quelque chose. Nous avons au Québec — et l'actuel ministre des Affaires intergouvernementales,

ancien ministre de l'Industrie et du Commerce le sait — un "dumping" de l'étranger. Nous avons des produits en vente au Québec qui nous proviennent de ces pays-là. Remarquez bien que je ne veux exercer aucune discrimination envers aucun pays, mais le fait est là quand même. On y est obligé, au Québec, et c'est au détriment de nos travailleurs québécois, c'est au détriment de notre industrie québécoise. Quand on va dans les magasins acheter des produits qui entrent directement en concurrence avec les produits québécois, quand on porte une chemise de la Corée du Nord, M. le premier ministre, je pense qu'on pourrait en porter une faite au Canada et au Québec et cela avantagerait les ouvriers québécois, cela avantagerait l'industrie...

M. BOURASSA: Le député de Gouin a une belle chemise en dentelle...

M. SAMSON: Je pense que j'ai frappé juste, M. le Président. Je pense que le premier ministre porte une chemise de la Corée du Nord.

M. JORON: Où est-ce que vous avez acheté la vôtre?

M. BOURASSA: Sur la rue Saint-Laurent, je présume.

M. SAMSON: C'est en plein cela, c'est là que cela se vend. Vous voyez, même le premier ministre n'est pas sûr, il n'est pas certain de son affaire, il n'est pas certain s'il n'encourage pas lui l'importation de l'étranger, le "dumping" sur la province de Québec. Oui, apparemment, vos cartes de Noël étaient aussi des cartes importées, M. le premier ministre, on me rapporte cela. Mais quand même, étant donné que vous m'en avez fait parvenir une et que c'étaient des souhaits de bonheur pour l'année à venir, je vous pardonne facilement pour cette fois-là. Mais, pour en revenir aux choses sérieuses, c'est quand même un problème qui existe et qui pourrait être corrigé avec l'affirmation du gouvernement du Québec. Le gouvernement du Québec doit s'affirmer davantage dans ce domaine. Bien sûr, j'ai entendu tantôt, comme les autres, le vice-premier ministre nous parler de l'affirmation du Québec en matière de communications.

Dans ce domaine, cela ne veut pas dire qu'on a réussi à 100 p.c, mais l'effort qui a été fait est louable et je pense, M. le Président, que vous allez être le premier à nous dire que nous avons toujours été assez objectifs dans ce sens, nous, les créditistes. Quand le gouvernement réussit à faire quelque chose qui a du bon sens, on ne crie pas que ça n'a pas de bon sens, on le dit. Je pense que vous avez fait un effort louable. Tout le problème n'est pas réglé. Mais ça, c'est une partie du problème. Nous demandons non seulement que le gouvernement continue, mais se dépêche à faire des choses semblables dans les autres domaines également, dans tous les autres domaines.

Il y a aussi une question que nous nous posons et que nous sommes en droit de nous poser. Remarquez que nous ne voulons pas faire de personnalité. C'est le principe qui nous intéresse. Nous nous demandons si les conférences fédérales-provinciales ne sont pas un peu conditionnées par la préparation des dossiers et nous nous demandons aussi — c'est une question que je pose, le vice-premier ministre pourra peut-être nous donner son avis là-dessus — dans la préparation de vos dossiers, si le gouvernement peut nous assurer que ceux qui préparent ces dossiers, le font en conformité avec la philosophie gouvernementale ou s'il n'y a pas risque que ces dossiers soient influencés par une autre philosophie, je m'explique, par la philosophie du Parti québécois. Pourquoi est-ce que je pose cette question? Je pense que depuis quelques années, en tout cas, c'est de notoriété publique que certains hauts fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales sont partis de votre ministère et sont allés directement au Parti québécois en ne se gênant pas de dire publiquement qu'ils partageaient depuis longtemps cette philosophie.

Or, je pense que, démocratiquement, le gouvernement actuel du Québec a été élu avec une philosophie en matière constitutionnelle qui doit être celle qui est utilisée à l'occasion de vos conférences fédérales-provinciales. Bien sûr, tous les partis de l'Opposition ne partagent peut-être pas à 100 p.c. cette philosophie. Les partis de l'Opposition ont non seulement le droit, mais le devoir de faire connaître leur philosophie, qui pourrait être susceptible d'améliorer la philosophie gouvernementale, mais il demeure qu'on est en droit de savoir du gouvernement s'il est bien certain que les dossiers du gouvernement sont préparés en fonction de la philosophie gouvernementale ou s'ils ne sont pas plutôt influencés par la philosophie du Parti québécois.

Plus clairement, M. le Président, on va demander au vice-premier-ministre s'il est assuré que, dans son ministère, il n'y a pas ce genre d'influence dont je viens de vous parler qui risquerait peut-être, advenant le cas — remarquez bien, je pose la question, je n'accuse pas, il y a une différence entre une accusation et une question — de saboter les conférences fédérales provinciales? Est-ce que cela ne risquerait pas à l'avance de faire en sorte que ces conférences n'aboutissent pas à des résultats afin de mieux préparer les idéologies favorisant la venue de la philosophie du Parti québécois?

Je ne veux pas faire de personnalité, M. le Président, je n'accuserai pas les personnes qui sont parties du ministère, mais il y a Claude Morin qui est parti du ministère et qui ne s'est jamais gêné pour le dire. Est-ce qu'il en reste encore des Claude Morin dans ce ministère?

M. PAUL: Oui.

M. SAMSON: Cela nous intéresse de le savoir.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît! Est-ce que le député de Rouyn-Noranda s'apprête à terminer?

M.SAMSON: Non, M. le Président, je ne m'apprête pas à terminer.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à la période des questions.

(Suspension de la séance à 12 h 3)

Reprise de la séance 16 h 9

M. HOUDË, Limoilou (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

M. Faucher, du comté de Yamaska, remplace M. Quenneville, du comté de Joliette.

L'honorable député de Maskinongé.

M. LEVESQUE: On peut passer au programme 1 toujours.

Affaires fédérales-provinciales et interprovinciales

M.PAUL: Un instant, M. le Président, je regrette. M. le Président, vous savez toute l'amitié qui me lie au leader du gouvernement et sachant qu'il était à défendre ses crédits, je ne pouvais me soustraire à cette amitié qui me lie à lui pour venir participer quelque peu aux délibérations de cette commission, même si le gouvernement a l'habitude, depuis un certain temps, de nous présenter sans aucune planification les travaux parlementaires.

M. le Président, je m'en voudrais de ne pas répondre très brièvement aux propos qu'a tenus ce matin le député de Gouin. Je n'ai pas eu l'avantage d'entendre les remarques que tenait hier le député de Chicoutimi, de même que celles qui furent faites ce matin par le chef de l'Union Nationale, le député de Bellechasse. Cependant, ça me réjouit, M. le Président, de constater comme notre prise de position, à nous, députés de l'Union Nationale, à la suite du congrès que nous avons tenu, énerve nos amis les séparatistes, qui nous accusent de vivre loin de la réalité. M. le Président, je vais être extrêmement conservateur dans l'emploi de mes termes pour tout simplement répondre bien imparfaitement, bien incomplètement à quelques propos de mon bon ami, le député de Gouin, qui nous a fait un énoncé de droit constitutionnel qui m'a littéralement sidéré. Lorsque j'ai entendu dans la bouche de ce jeune homme sans expérience en matière de droit et non pas en matière d'économie...

M. JORON: J'ai aussi fait mes études de droit.

M.PAUL: M. le Président, heureusement que nous l'apprenons parce que, jusqu'ici, il nous avait été impossible de le déceler.

M. JORON: Très bien, un zéro, c'est très bien!

M. PAUL: Bon, il y a une chose que l'Unité-Québec, comme vous aimiez à le dire, en avait deux zéros, et nous les avons chassés tous les deux.

Je disais donc, M. le Président, que le député de Gouin, ce matin, a dit qu'en droit

constitutionnel il était inconcevable de croire que l'Etat fédéral ne pouvait détenir les pouvoirs que lui déléguaient ou que lui accordaient les provinces.

Je regrette, M. le Président, de ne pas partager cette opinion de droit constitutionnel émise par celui qui se pique d'avoir des connaissances juridiques mais qui n'est sûrement pas ou qui n'a pas été un avocat pratiquant.

Pour ce qui est des pouvoirs actuels que détiendrait le gouvernement fédéral, ils résultent de la cession petit à petit de nos droits, comme le fit un jour feu Adélard Godbout, et comme le fait présentement le gouvernement en place, qui, sous prétexte d'un fédéralisme rentable, plie constamment l'échine, s'incline devant les exigences et les volontés de son grand maître, le gouvernement fédéral.

Si le fédéral aujourd'hui détient de plus en plus de pouvoirs, c'est parce que dans le passé, il s'est constamment appliqué à usurper ces prétendus pouvoirs. Il a occupé, malgré l'objection des provinces, des territoires de juridiction exclusivement provinciale. J'ai été médusé lorsque le député de Gouin disait qu'il nous était impossible aujourd'hui de récupérer ces pouvoirs que s'était arrogé le gouvernement fédéral.

Je me suis rappelé les allées, gestes, venues et déclarations du plus vieux des chefs politiques que nous avons actuellement. L'ex-député de Laurier, M. René Lévesque, qui, avec M. Pierre Laporte, se rendait à l'Université de Montréal vendre la fameuse thèse, la fameuse formule Fulton-Favreau. Ce même chef qui est aujourd'hui à la tête du parti séparatiste du Québec devrait faire un retour sur le passé. Peut-être réaliserait-il qu'il a largement contribué par son attitude et ses déclarations à voir le gouvernement fédéral empiéter de jour en jour sur les pouvoirs que détiennent les provinces théoriquement, en vertu de l'acte constitutif du Canada.

Le parti de l'Union Nationale, d'après le député de Gouin, rêverait en couleur. Il vaut peut-être mieux rêver en couleur que de s'éveiller devant les tristes et tragiques conséquences d'un séparatisme tel que veut nous l'offrir le Parti québécois.

Qu'est-ce que nous aurions de nouveau ou de plus en nous séparant, si ce n'est que nous devrions, d'abord, négocier, comme le disait le député de Gouin, avec nos voisins qui seront les autres provinces, qui seront les Canadiens, dont nous ne serons plus partie intégrante; ensuite, discuter avec des Américains et par la suite, discuter avec les grandes puissances internationales?

Je m'interroge sur le coût d'une telle aventure. Je n'oserai pas avancer de chiffres. J'emprunte un exemple purement hypothétique et qui ne deviendra jamais réalité, mais, pour les fins de la discussion, envisageons la situation telle qu'elle se présenterait demain matin si nous étions séparés du reste de la Confédération. Le député de Gouin se rappellera que, ce matin, il nous disait que cela était impossible de nous entendre avec neuf autres provinces et le gouvernement fédéral dans le statut actuel que nous vivons, dans le domaine constitutionnel.

Mais, pour lui, c'est un tout autre problème, si nous sommes séparés. Il faut croire qu'à ce moment, ceux qu'il appelle, lui, nos voisins immédiats, le reste de la Confédération, composé de Canadiens, les neuf autres provinces, ne nous regarderont plus comme étant une collectivité à part.

Il faut croire que les relations, les discussions, les négociations seront très faciles. Mais supposons que nous discutions des investissements du gouvernement fédéral au Québec. Point n'est besoin de vous dire que nous allons arriver dans des dizaines de milliards de dollars et que nous, pays indépendant, le Québec, nous disons à nos frères séparés: Maintenant, nous exigeons au moins le tiers de cet actif.

Pour les fins de la discussion, disons $10 milliards. Puisque nous avons contribué pour le tiers, nous exigeons $3 milliards. Supposons que nos interlocuteurs se retournent de bord, puisqu'il s'agit d'établir une liquidité, une valeur à cet actif, et nous disent: Nous regrettons, ce n'est pas $3 milliards que nous allons exiger de vous, c'est $5 milliards. Qu'est-ce que nous allons faire?

M. JORON: On acceptera une moins grande partie de la dette nationale.

M.PAUL: Un instant! On va y venir, à votre théorie économique.

M. JORON: II y a un actif...

M.PAUL: Bien oui. Un instant! M. le Président, est-ce que vous pourriez pour le moment permettre à votre humble serviteur d'exposer son point de vue et ensuite, nous entendrons la réponse...

M. JORON: Avec plaisir.

M. PAUL: ... de l'économiste, avec la piastre québécoise. Nous allons, supposons, nous entendre pour $4 milliards que l'Etat du Québec va être appelé à payer.

M. JORON: Non.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. PAUL: M. le Président, avec quel argent? L'argent canadien? Ce n'est plus notre argent. Nous sommes séparés du Canada. Avec notre propre piastre? La piastre québécoise? Qui aura sur le marché comme valeur réelle, une

valeur de $0.65 suivant certaine théorie très répandue chez les bas adeptes de ce parti séparatiste. Et qui va payer la note? $4 milliards avec une piastre qui ne vaut que $0.65? On va aller chercher cet argent où? Dans la poche des contribuables? Pour avoir quoi de plus que ce que nous avons aujourd'hui? Sous prétexte que nous allons être indépendants? Que nous allons être maîtres chez nous? On a déjà eu l'expérience d'une théorie "Maîtres chez nous" en 1962 justement prêchée par celui-là même aujourd'hui qui nous prêche le séparatisme.

M. le Président, il faut toujours vivre dans la réalité. Je soumets que ceux qui rêvent en couleur, ce ne sont pas les partisans de l'Union Nationale mais ce sont ceux qui n'ont aucune connaissance réelle de la vie courante et surtout des situations qui se présentent chez ceux qui ont décidé un jour ou l'autre de faire leur indépendance.

Je n'insiste pas davantage sur ce point parce que nous aurons l'occasion d'en discuter avec force détails et de rappeler aux citoyens du Québec qui possèdent un peu quelque chose quel peut être le risque de l'aventure, quel peut être le sort du petit patrimoine qu'ils possèdent et quel peut être surtout l'avenir économique que leur réserverait le Québec indépendant ou séparé.

M. le Président, je crois que la position du Parti québécois en matière constitutionnelle est très faible, comme celle du Parti libéral, d'ailleurs. Le Parti libéral a pour théorie, comme philosophie, la négociation par pièces, à la petite journée; c'est sa marque de commerce, législation à la petite journée suivant les imprévus du moment, gouvernement de pompiers, même en matière constitutionnelle, on y va par pièces. Je m'interroge, avec raison d'ailleurs, comme beaucoup de citoyens quant à l'époque où nous verrons le Parti libéral respecter cet article de son programme qui parle d'une nouvelle constitution canadienne.

Le leader du gouvernement, ce matin, nous disait: Qu'on nous cite un cas où nous avons capitulé devant Ottawa. Je vais vous en nommer un. En 1971, l'Assemblée nationale a été appelée à voter une loi pour nous soustraire, nous, citoyens du Québec et surtout soustraire les employés d'hôpitaux, les corporations para-gouvernementales et les employés civils, de la juridiction de la loi fédérale sur l'assurance-chômage. Le ministre du Travail de l'époque, dans une grande déclaration qu'il faisait au mois de juillet 1971, nous parlait de l'autonomie que nous avions en matière de politique sociale, puisqu'il s'agissait d'une politique sociale. Et avec cette loi, nous pourrions nous soustraire des exigences fédérales. C'était le député de Verdun à l'époque, l'honorable Bryce Macka-sey, qui était ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre, qui avait émis une directive et on voulait contourner cette directive. Nous avons adopté la loi, nous étions tous fiers d'être

Québécois parce que nous avions l'impression de voter une loi qui confirmerait l'autonomie du Québec en cette matière.

Nous ajournons nos travaux et, à notre grande surprise, nous avons entendu une déclaration du premier ministre qui n'avait pas l'intention de faire sanctionner cette loi et de l'appliquer, mais qui verrait à se plier aux exigences de l'autorité fédérale et qu'il verrait, lui, le gouvernement du Québec, à attaquer la constitutionnalité de la loi fédérale.

Puis-je demander au leader du gouvernement quand de telles procédures ont-elles été instituées? Qui a agi comme avocat du Québec dans cette question de droit qui aurait été soumise à la juridiction des tribunaux, dixit le député de Mercier, premier ministre du Québec? Si le gouvernement fédéral n'a pas retraité une seule fois, qu'est-ce qui est arrivé cette fois-là?

Je n'ai pas l'intention de citer d'autres exemples que je pourrais également rappeler au leader du gouvernement.

M. le Président, avec le Parti québécois, ce sont des négociations qui vont donner quoi? Un programme constitutionnel qui va donner quoi?

Au parti de l'Union Nationale, nous avons un programme, une politique constitutionnelle claire qui consiste en une révision globale de la Constitution. Nous voulons retourner à l'esprit qui a présidé aux négociations des années 1864 et suivantes. Nous voulons avoir des négociations interprovinciales, comme la chose fut entreprise en 1967 en Ontario, conférence à laquelle assistait le gouvernement fédéral, comme invité, dans les galeries. Nous voulons, nous, retrouver cet esprit des conférences constitutionnelles de 1867 tout en tenant compte, aujourd'hui, de l'évolution de notre société et également aux fins d'arrêter les sujets qui demeureront de compétence ou de juridiction fédérale tels que les postes, l'armée etc.

Nous conviendrons, une fois de plus, nous nous arrêterons à une liste de sujets ou de domaines qui demeureront et deviendront la juridiction exclusive des provinces tout en acceptant que les provinces pourraient, en certaines circonstances, céder plus d'autorité au gouvernement central, comme il pourrait arriver que le Québec ait plus de pouvoirs en certains domaines. Les gens diront: Si les provinces n'acceptent pas ou le fédéral ne veut pas se soumettre à ce dialogue, quelle sera la position de l'Union Nationale? C'est clair, nous l'avons déjà exprimée, nous la préciserons davantage.

Je résume quelques représailles que nous pourrions exercer et, advenant l'acceptation par les provinces d'une nouvelle constitution.

Le texte de cette nouvelle constitution sera soumis par référendum au peuple dit québécois pour acceptation ou rejet de cette nouvelle constitution. Si les négociations, que nous allons entreprendre dès notre arrivée au pouvoir, n'aboutissent pas avec les provinces ou que

le fédéral trouve le moyen de bloquer ces négociations, nous irons donc jusqu'à exercer des représailles en matière fiscale par des moyens qui seront préalablement soumis à la population du Québec pour acceptation. Le Québec pourra même aller jusqu'à occuper éventuellement certains champs de juridiction, de compétence fédérale. Le Québec n'hésitera pas à aller de l'avant dans une législation sur la câblodiffusion par exemple, une législation québécoise en matière de sécurité sociale ou complète y compris des allocations familiales, une législation sur diverses mesures économiques régionales. Nous pourrions également, dans le cas de refus du gouvernement fédéral, aller jusqu'à inviter la population à s'abstenir de reconnaître la juridiction fédérale en la matière et inviter la population, dans un geste de protestation, à ne pas se soumettre à cette législation.

M. JORON: Est-ce que le député de Maskinongé me permettrait...

M. PAUL: Si vous me permettez, je vais terminer dans une minute et je serai à vous comme toujours.

M. JORON: Ce n'est pas pour vous faire la réplique, j'ai seulement une question pour préciser davantage ce que vous voulez dire par là, si vous me le permettez.

M. PAUL: Sur quoi?

M. JORON: Sur les représailles en question...

M. PAUL: Par exemple, il serait très facile d'inviter la population du Québec à dire: Sur tel montant d'impôt que vous avez à verser au fédéral, cette année, nous invitons les citoyens du Québec à retenir 4 p.c. ou 5 p.c. additionnels d'impôt sur le revenu parce que nous avons tel programme à réaliser.

M. JORON: C'est-à-dire de ne pas le payer au gouvernement fédéral?

M. PAUL: C'est cela.

M. JORON: Et qu'est-ce qui arrive? Quand le gouvernement fédéral envoie son compte, il ne tient pas compte de cela? Il va poursuivre le gars et...

M. PAUL: Je pense bien que nous avons des précédents dans l'histoire politique du Québec. Je comprends que vous étiez peut-être un peu jeune à ce moment-là.

M. JORON: II y aura double imposition? M. PAUL: En 1954...

M. JORON: Si le gouvernement fédéral ne recule pas, qu'est-ce qui arrive à ce moment-là?

M. PAUL: Et si le gouvernement fédéral ne recule pas?

M. JORON: S'il ne recule pas sur son champ de taxation?

M. PAUL: Nos tribunaux trancheront le litige.

M. JORON: C'est justement, si la Constitution n'est pas changée, ils vont le trancher sur la base de la constitution actuelle? Le gouvernement fédéral a le droit de taxer?

M. PAUL: Je regrette, il y aura plusieurs moyens de pression qui pourront être exercés et le député voudrait bien que j'aille jusqu'à prendre aussi l'idée du séparatisme et dire...

M. JORON: Non.

M. PAUL: ... que c'est la seule porte, c'est la panacée à tous nos problèmes et à tous nos maux. Je soumets respectueusement qu'il y a beaucoup de progrès.

Il y a une ouverture d'esprit que l'on constate avec joie chez le premier ministre de l'Ontario et chez le nouveau premier ministre de la Colombie-Britannique qui ne s'est pas gêné de passer des remarques assez aigres-douces au lendemain de la conférence tenue récemment par les premiers ministres où, encore une fois, on a constaté que le Québec avait refusé de prendre le véritable leadership.

M. le Président, je voulais tout simplement répondre très brièvement et d'une façon bien incomplète aux propos qu'a tenus le député de Gouin, mais nous aurons l'occasion de le faire dans un programme politique que nous allons diffuser. Nous allons informer la population et, au grand désespoir du parti séparatiste, nous verrons les nationalistes adhérer à notre philosophie politique, parce que c'est encore au sein d'une confédération que nous avons l'intention de continuer à vivre, pour autant que l'on reconnaisse et que l'on accepte le fait français, l'entité française et pour autant que certains droits de l'histoire et de la Constitution actuelle, et suivant l'esprit qui a présidé à la rédaction de cette Constitution, puissent être retrouvés par des gens de bonne volonté, soucieux de trouver un mécanisme de bon fonctionnement à l'intérieur de la Confédération canadienne. Je vous remercie, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme 1, adopté.

L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je vous remercie. A l'heure du dîner, j'avais encore quelques remarques à faire...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Mais à quatre heures, vous n'y étiez pas.

M. SAMSON: M. le Président, je prends cette remarque comme un blâme que vous me faites et j'en profite pour faire un blâme à l'administration qui m'oblige à tenir bureau au troisième étage, assez loin, et dont les ascenseurs mentionnés par mon illustre collègue de Lévis, la semaine dernière, ne fonctionnent pas toujours bien et dont les distances, quoique n'étant pas très longues, sont très difficiles à parcourir. Alors, j'espère que l'honorable leader du gouvernement prendra avis de cette question et verra à faire réparer les ascenseurs pour que, la prochaine fois, lorsque j'irai chercher mes dossiers, je puisse revenir dans un temps raisonnable.

M. LEVESQUE: Le ministre des Travaux publics vous a promis de s'en occuper.

M.PAUL: Il nous a annoncé son départ aussi!

M. SAMSON: Voyez-vous, M. le Président, c'est une autre promesse qui a retardé, qui fait que cet après-midi vous avez dû malheureusement vous passer de ma présence pour quelques minutes et je suis sûr que vous le regrettez.

M. le Président, lorsque je terminais mes remarques à midi, j'étais à poser quelques questions au ministre des Affaires intergouvernementales et ces questions sont à savoir si le ministre pouvait nous assurer que, contrairement à ce que nous croyons s'être produit dans le passé, à l'avenir ou actuellement, dans son ministère, les personnes qui ont à préparer les dossiers en vue des conférences fédérales-provinciales sont des personnes en qui le ministre a absolument confiance et qui partagent la philosophie du gouvernement que représente le ministre. Evidemment, je permettrai au ministre de nous donner ces réponses car, si c'était le cas, c'est-à-dire que si, encore dans le ministère ou aux alentours du ministre, des gens qui préparent ces dossiers pour les conférences fédérales-provinciales se retrouvaient à partager la philosophie de leur illustre ex-collègue, M. Claude Morin, évidemment, non seulement nous nous poserions des questions, mais nous serions en droit d'avoir certaines exigences.

On a même porté à mon attention... Le ministre pourra me le confirmer, si c'est vrai. Je pose la question encore une fois: Est-ce qu'il serait possible qu'un document officiel aurait été préparé au ministère pour publication, document devant faire ou faisant la promotion de l'indépendance et que ce document aurait été intercepté à la toute dernière minute avant publication? Si la chose est possible, si c'est arrivé, le ministre pourra peut-être nous dire de quelle façon il a dû procéder, ce qu'il a dû prendre comme mesure, si ces gens sont toujours là pour faire la même chose. M. le Président, ce sont des questions que nous sommes en droit de nous poser parce que, en tant que représentants du Ralliement créditis- te, nous ne partageons pas cette philosophie de la séparation; autrement dit, chez nous il n'y a pas de séparateur.

J'ai l'impression que la philosophie du parti de l'Union Nationale, du moins en ce qui concerne ce sujet, est semblable et celle du Parti libéral également. Donc, le gouvernement ne prône pas cette philosophie de l'indépendance et deux des partis de l'Opposition qui sont quand même les deux premiers partis de l'Opposition ne prônent pas non plus cette philosophie de l'indépendance. Je trouverais malheureux que des fonctionnaires tentent de l'imposer au gouvernement dans ses négociations avec le gouvernement central.

Evidemment, il y a beaucoup d'autres questions qui peuvent être posées. On nous a mentionné aussi que, en ce qui concerne certaines ententes culturelles, Radio-Canada aurait eu à un certain moment priorité dans le choix des membres à être échangés avec l'extérieur. Est-ce que c'est encore le cas? J'imagine que le ministre voudrait profiter de l'occasion pour nous en parler, pour nous dire quel rôle joue la Société Radio-Canada en ce qui concerne ce sujet également. Et aussi dans un autre ordre d'idées, le ministre pourrait probablement nous mentionner quels sont les efforts faits par le gouvernement; cela regarde drôlement les relations fédérales-provinciales. Quels sont les efforts faits par le gouvernement? Quel résultat a obtenu le gouvernement dans ces efforts? Je sais qu'il en a fait pour tenter d'intéresser le Panartic Oils à construire un gazoduc qui passerait par le territoire du Québec plutôt que par le Nord-Est ontarien. Le ministre a sûrement pris connaissance des nombreuses résolutions en provenance d'organismes du Nord-Ouest québécois; notamment on en parlait dernièrement dans le journal La Presse, il s'agit du CRDAT, Conseil régional de développement d'Abitibi-Témiscamingue qui justement s'inquiétait à savoir si le gouvernement du Québec avait pris toutes les dispositions pour que le gouvernement fédéral prenne action en ce sens. Ceci est très important, compte tenu du fait que le développement de la baie James dans la région du Nord-Ouest québécois aurait sûrement trouvé avantage à être complété par la construction du gazoduc du côté du Québec.

Evidemment, il y a toute cette question aussi — et cela peut entrer, je pense, en ligne de compte lorsqu'il est question de relations fédérales-provinciales — de certaines déclarations en provenance de certains ministres ou députés —je pense que ce sont plutôt des députés fédéraux — à l'effet que le gouvernement fédéral, ne voyant pas d'un très bon oeil le développement de la baie James, aurait peut-être tenté, sinon officiellement, peut-être officieusement, de le retarder de quelque façon pour protéger d'autres provinces. Le développement de la baie James, suivant ces déclarations, nécessiterait des investissements, des emprunts à l'étranger et comme le total de ces emprunts,

sur une période de quelques années risquerait de priver d'autres provinces d'emprunts également, parait-il — le ministre pourra sûrement nous éclairer sur ce sujet — que le gouvernement fédéral ne verrait pas cela d'un très bon oeil. La décision du ministère des Affaires indiennes et du Grand Nord de financer les Indiens, quant à leurs revendications devant les tribunaux contre le gouvernement du Québec en ce qui concerne le développement de la baie James, ne serait peut-être pas étrangère à cette philosophie du gouvernement fédéral en ce qui concerne le développement de la baie James.

Il y aurait évidemment une multitude de sujets, mais je pense que le ministre en a sûrement entendu pas mal depuis hier et les autres membres ont sûrement couvert beaucoup le sujet.

Quant à moi, je voudrais bien collaborer afin de permettre au ministre d'adopter ses crédits dans des délais raisonnables. Je n'irai pas plus loin sauf que j'aimerais bien que le ministre nous donne des réponses assez précises, notamment en ce qui concerne la question de la préparation des dossiers pour les conférences fédérales-provinciales, la question de cette publication que j'ai mentionnée tantôt et la question de la baie James, du gazoduc et de Panartic Oils.

M. JORON: M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Oui.

M. JORON: J'aimerais, si vous le permettez... J'avais pensé invoquer le règlement tout à l'heure pour rectifier des propos que le député de Maskinongé m'a attribués et qui étaient incorrects. Enfin, inutile de faire un chichi procédurier. Si vous voulez, en une minute, je voudrais rectifier la chose suivante. En ce qui concerne l'efficacité que je mettais en doute en rapport avec la table de négociations qui serait basée sur une conférence interprovinciale dans le but d'élaborer une nouvelle constitution, un nouveau partage des pouvoirs, je n'ai pas dit que cette solution était irréaliste si on pense à récupérer des pouvoirs qui, par la Constitution actuelle, appartiennent déjà aux gouvernements provinciaux. C'est une autre chose bien que la plupart des zones sensibles à cet égard relèvent de domaines à juridiction partagée et que cela n'est pas facile à récupérer à cause de ce fait.

La méthode que suggère l'Union Nationale peut être possible s'il s'agit de récupérer quelque chose que la Constitution actuelle consacre déjà. Mais il en va tout autrement — et c'est de cela que je parlais — s'il s'agit d'obtenir des pouvoirs nouveaux, des pouvoirs que la Constitution actuelle ne donne pas au gouvernement provincial.

A ce moment-là, ce que je disais, c'est là où je trouve la solution constitutionnelle de l'Union Nationale irréaliste, s'il s'agit d'obtenir des pouvoirs nouveaux — bien que les provinces puissent se mettre d'accord pour définir une nouvelle constitution, pour énumérer des pouvoirs nouveaux qu'elles souhaiteraient avoir et qu'elles n'ont pas dans le moment — en allant plus loin, même si le peuple dans chacune des provinces l'adoptait par référendum aussi bien au Québec qu'ailleurs, rien de tout cela, cet accord, cette unanimité interprovinciale, le fait que cela soit sanctionné par un référendum, rien de tout cela n'oblige le gouvernement fédéral à céder ce que la Constitution actuelle lui accorde déjà. C'est pourquoi il est impossible de modifier le partage qu'a consacré la Constitution de 1867 par la méthode que vous suggérez. C'était l'essentiel de mon point et, si vous me permettez, en quelques secondes additionnelles, j'aimerais aussi répondre à une deuxième question qu'a soulevée le député de Maskinongé, à savoir qui va payer advenant l'indépendance du Québec, qui paierait pour les actifs du gouvernement fédéral qui sont situés sur le territoire du Québec.

La réponse est très simple. Je l'ai donnée en quelques secondes tout à l'heure, je la répète tout simplement. Le paiement se fait de la façon suivante. Non pas en déboursant des sommes additionnelles, des sommes nouvelles. Il s'agit tout simplement d'assumer cette partie de la dette fédérale équivalente aux actifs que l'on veut transférer. Cela n'impose de déboursés en aucune façon et cela n'impose même pas de coût supplémentaire pour l'entretien de cette dette.

M. PAUL: M. le Président...

M. JORON: Laissez-moi terminer. Puisque de toute façon, cette partie de la dette fédérale, la partie québécoise de la dette fédérale on l'entretient par les impôts qu'on paie au gouvernement fédéral et dont une partie sert à l'entretien de la dette. Celà ne change absolument rien au niveau des recettes et des déboursés.

M. PAUL: En assumant...

M. JORON: Vous prenez des actifs et vous acceptez la contrepartie qui est votre part de la dette nationale.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: Une question au député de Gouin. En assumant une partie de la dette fédérale, dois-je conclure que le Québec verra à payer cette dette?

M. JORON: C'est bien entendu que, quand les échéances arriveront, les échéances sont dans dix, quinze, vingt ans, trente ans, il faudra les rembourser, cela va de soi. Là, ce n'est plus le gouvernement fédéral qui emprunte en notre

nom et sur notre crédit, c'est nous qui le faisons nous-mêmes. Vous déplacez tout simplement l'agent payeur. Vous n'additionnez pas deux dettes nouvelles, une par-dessus l'autre.

M. PAUL: M. le Président, vous me permettrez de remercier publiquement l'Esprit-Saint qui déjà a commencé à faire son oeuvre parce que, dans sa première question, j'ai senti que le député de Gouin commençait à être ébranlé et à voir quelque peu la lumière. Je le félicite et l'encourage à continuer à étudier notre programme politique en matière constitutionnelle.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme 1, adopté?

M. PAUL: Un instant, M. le Président.

M. LEVESQUE: Peut-être que je pourrais donner deux ou trois réponses qui sont assez précises. Du moins, les questions étaient précises. Je vais attendre pour qualifier les réponses. D'abord, le député de Maskinongé a souligné un cas.

J'avais demandé en effet ce matin de nous donner un seul cas où il y avait eu, depuis notre arrivée au pouvoir, ce qu'on appelle un recul sur le plan constitutionnel. Et le cas cité par le député de Maskinongé a trait à une loi provinciale. Je voudrais simplement et très brièvement rappeler au député de Maskinongé que, dans ce cas, cas d'assurance-chômage, il s'agit d'un domaine qui est strictement de juridiction fédérale et cela à la suite d'un amendement...

M.PAUL: Pourquoi avez-vous demandé d'adopter la loi, alors?

M. LEVESQUE : ... à la Constitution canadienne. Une réglementation fédérale définissant ce qu'est un employé du secteur public, si vous voulez, réglementation postérieure à notre loi adoptée ici à l'Assemblée nationale, excluait le secteur parapublic, justement, de la définition en question. Il est normal qu'une loi d'un niveau de gouvernement, dans un champ de sa compétence, soit prépondérante. Quant aux procédures dont il a été question par le député de Maskinongé, il s'agit là d'un cas particulier, très particulier. Il s'agit du fait que le nouveau programme d'assurance-chômage comportait des avantages pour des cas, si je me rappelle bien, de congés de maternité. La position du gouvernement du Québec était à l'effet que le gouvernement fédéral semblait dépasser sa compétence parce que ce n'était plus de l'assurance-chômage, à ce moment, mais plutôt de la sécurité sociale. Nous avons donné un mandat à des juristes d'étudier précisément cette question en vue éventuellement de la porter, s'il y a lieu, devant les tribunaux. Il y a là une question qui est présentement à l'étude, concernant l'intérêt... Je ne sais pas si je devrais le souligner, mais enfin il faut un intérêt avant, comme le député...

M. PAUL: Comme pour signifier une procédure.

M. LEVESQUE: II faut avoir un intérêt pécuniaire afin d'entamer une procédure et nous sommes justement à étudier ce point. Nous n'avons pas mis de côté du tout...

M. PAUL: Je ne voudrais pas que vous restiez un gouvernement d'étudiants.

M. LEVESQUE: Non. Deuxièmement, au député de Rouyn-Noranda, je dirai que la préparation des dossiers se fait le plus sérieusement possible et, s'il a pris connaissance de mes remarques préliminaires, je lui dirai que les dossiers qui sont préparés en vue des conférences fédérales-provinciales s'inspirent d'abord du bilan et le bilan a été confectionné, non pas par le ministère des Affaires intergouvernementales... Le ministère des Affaires intergouvernementales a fait la compilation, s'est servi du programme PPBS pour classer ces dossiers, mais les matériaux de base, les données de base sont venus de chacun des ministères du gouvernement, ce qui a fait les matériaux de base du bilan lui-même.

S'inspirant de ce bilan qui n'apportait pas de conclusion ou de jugement de valeur sur chacun des cas, nous avons préparé des dossiers pour les conférences précises auxquelles nous devions participer. Cette préparation de dossiers a été faite avec la collaboration de chacun des ministères concernés.

Le ministère des Affaires intergouvernementales ne veut pas et ne doit pas se substituer à chacun des ministères sectoriels qui, eux, évidemment, ont une connaissance plus large et plus profonde du sujet qui est propre à la responsabilité du ministère en question, du ministère sectoriel. Je dis que la préparation de ces dossiers se fait en collaboration avec chacun des ministères concernés.

De plus, nous avons établi un comité ministériel des affaires intergouvernementales où siègent, évidemment le ministre des Affaires intergouvernementales, mais de plus des ministres représentant les quatre grandes missions de l'Etat. Il y a le ministre qui est responsable des Affaires sociales. Il y a celui qui est président du groupe ministériel des affaires économiques qui groupe les ministères à vocation économique, soit le ministre de l'Industrie et du Commerce. Il y a également à ce comité celui qui représente la mission éducative et culturelle, en l'occurrence le ministre de l'Education et des Affaires culturelles. Finalement, il y a la quatrième grande mission de l'Etat, la mission gouvernementale et administrative, et il est normal de faire appel au ministre des Finances.

Ce groupe ministériel, bien appuyé par un autre groupe de hauts fonctionnaires venant des endroits correspondants, soit du Conseil du trésor, soit du secrétariat du Conseil exécutif, soit du ministère des Affaires intergouvernementales, du ministère des Finances etc., ce

groupe ministériel, dis-je, fortement appuyé de cette façon, a étudié chacun des dossiers dans les séances assez nombreuses que nous avons eues précédant chacune des conférences fédérales-provinciales. Ce n'est pas l'oeuvre d'un homme, on ne peut pas identifier un fonctionnaire en particulier, on ne peut pas identifier un ministère en particulier. Ceci s'est fait d'une façon différente, une approche nouvelle, disons, mais nous l'avons fait volontairement et sciemment afin que ce ne soit pas simplement la politique d'un homme, aussi brillant soit-il, mais que ce soit réellement l'expression de la volonté du gouvernement et que ce soit l'ensemble du gouvernement qui participe à l'élaboration de ces papiers, de ces documents, de ces dossiers. Quant à Panartic Oils, évidemment, c'est une question à laquelle le gouvernement actuel prend un intérêt considérable. Il s'agit là d'un dossier sectoriel qui intéresse d'abord le ministère des Richesses naturelles, mais, je dois le dire, le gouvernement, dans son ensemble, du côté du bureau du premier ministre, du côté du secrétariat du Conseil exécutif, du côté de l'Office de planification et de développement du Québec, du côté des autres ministères à vocation économique, il suit la question avec un intérêt véritable et continu. Le ministère qui en a la maîtrise d'oeuvre si l'on veut, qui s'en occupe primordialement et d'une façon sectorielle, c'est le ministère des Richesses naturelles. Je puis rassurer le député de Rouyn-Noranda. Je sais qu'il a cité le CRDAT tout à l'heure, et il a sans doute eu beaucoup de pressions de son comté et de sa région afin que le gouvernement ne perde pas de vue cet important développement, en particulier pour la région du Nord-Ouest québécois, mais également pour toute la province de Québec. Je puis l'assurer que bien que nous ne puissions pas être trop bavard dans une situation comme celle-là, il le comprendra facilement, nous apportons à ce problème notre meilleure attention.

UNE VOIX: Baie James. Je m'excuse, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: Peut-être que le ministre a oublié de toucher un peu la question des relations avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord que j'ai mentionnées tantôt. Le ministre aurait peut-être quelques commentaires à nous faire à ce sujet.

M. LEVESQUE: Non, je ne crois pas qu'à ce moment-ci il soit d'intérêt public que je le fasse. Si le ministre des Richesses naturelles veut en parler, libre à lui, ses crédits seront à l'étude demain matin.

M. SAMSON: En matière de relations fédérales-provinciales, quand même...

M. LEVESQUE: Nous sommes justement au service du ministère sectoriel dans ces relations ou dans ces démarches, je ne crois pas qu'il soit à ce moment-ci d'intérêt public d'en ajouter davantage. Maintenant, libre...

M. SAMSON: Est-ce que le ministre peut quand même me confirmer son inquiétude, qu'il ne voudrait pas que ni l'un ni l'autre des deux projets... est-ce que le ministre est d'accord que ces deux projets, celui de la baie James et celui de Panartic Oils, sont quand même assez proches l'un de l'autre pour que le projet de Panartic soit considéré en fonction du projet de la baie James.

Est-ce que vous êtes d'accord sur cela?

Est-ce que le fait que ce projet de Panartic Oils se réalise du côté québécois ne pourrait pas faciliter au gouvernement du Québec le développement du côté québécois de la baie James, par exemple?

M. LEVESQUE: En tout cas, tout ce que je peux dire, c'est que nous y attachons beaucoup d'importance; quant aux retombées économiques possibles, j'aime autant attendre un peu avant de donner plus de précisions.

M. SAMSON: Vous le prenez en note?

M. LEVESQUE: Je le prends en note. Non seulement j'en prends note mais je vois souvent le nom revenir.

M. SAMSON: Je vous le rappellerai, si vous l'oubliez.

M. LEVESQUE: Je ne l'oublierai pas.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Autres questions sur le programme 1? Adopté.

M. JORON: M. le Président, je n'ai pas d'autre question. Le programme est adopté. Je vous prierais d'inscrire ma dissidence à l'adoption des crédits du programme 1. Quant à moi, je ne suis pas disposé à ce que des crédits soient votés...

M. LEVESQUE: Vous ne vouliez pas nous donner un dollar tout à l'heure; des gens nous disent que l'on a des péquistes au ministère et vous ne voulez même pas les payer.

M. JORON: Ce n'est pas moi qui ai dit cela.

M. SAMSON: Ils ont assez d'argent, ils vont les payer eux-mêmes.

M. JORON: Pour être clair, hier, au début de mon exposé, j'ai dit que je serais tenté peut-être, à un moment donné, au cours de notre discussion, de proposer de réduire les crédits du ministère jusqu'à un dollar. Vous avez soulevé le fait que le Dr Laurin, l'année dernière,

considérait le ministère important en ce sens que c'était l'embryon d'un futur ministère des Affaires étrangères et ainsi de suite. Cette partie, la partie qui concerne, quand on viendra au programme 2, les affaires internationales, je serai d'accord pour vous la voter. La partie qui concerne les relations avec le gouvernement fédéral, je ne suis pas disposé à vous la voter parce que je pense que vous faites oeuvre inutile et qu'à l'intérieur du régime actuel on est de toute façon placé dans une situation qui mène à un cul-de-sac. Alors, je ne vois pas pourquoi on dépenserait de l'argent pour cela.

M. LEVESQUE: Je ferai simplement remarquer au député de Gouin, seulement pour finir cette discussion, qu'il nous a dit tout à l'heure qu'il avait, je crois, des études en économie, en droit, en toutes sortes de choses. Le droit, le député de Maskinongé a mis cela un peu en doute lorsqu'il a fait une étude...

M. PAUL: Je n'ai pas mis cela en doute, j'ai dit que cela ne se constatait pas.

M. LEVESQUE: Que cela ne se constatait pas? Moi, au point de vue de ses études en économie, je trouve que cela ne se constate pas mieux, parce que lorsque l'on voit que sur un budget brut de $9,026,000 il est prêt à nous en donner au moins $7,582,700, alors, c'est plus qu'un dollar. Il voulait diminuer cela à un dollar.

M. PAUL: Est-ce en argent canadien?

M. JORON: Non, on vote le budget programme par programme maintenant. Selon les fins auxquelles les montants sont alloués, on peut choisir entre les programmes. Il y en a qui ne font pas mon affaire, et il y en a qui font mon affaire là-dedans. Je ne vote donc pas pour le programme 1. Je vous prie d'inscrire ma dissidence.

M. LEVESQUE: M. le Président, si l'on dit que l'étude des crédits est une négociation, je dois dire que cela a été assez bien réussi comme négociation à partir de la position de départ du député de Gouin, qui était prêt à nous donner un dollar et aujourd'hui on est monté à $7,582,700.

M. JORON: Je rectifie. Je vous rappelle ce que j'ai dit hier. J'ai dit que je serais peut-être tenté à un moment donné de réduire cela à un dollar. Je n'ai pas dit que j'allais le faire.

M. LEVESQUE: Ah bon! C'est parce que les journaux ont dit, j'ai lu cela aujourd'hui dans l'article de M. Cleary, je crois, dans Le Soleil, que vous aviez dit cela.

M. JORON: En tout cas, cela va peut-être arriver à moins d'une piastre aussi. Je vais peut-être vous proposer $0.10 tout à l'heure. On va voir au programme 2 ce que vous avez l'intention de faire.

M. LEVESQUE: Est-ce un dollar laurentien que vous vouliez me donner?

M. JORON: On verra au programme 2 ce que vous avez l'intention de faire dans les relations internationales, si cela ne marche pas, vous n'avez pas un cent.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, l'attitude du député de Gouin est logique et illustre par sa prise de position de cet après-midi quel sera le sort réservé au Québec lorsqu'il faudra négocier plus tard un contre huit ou neuf. Il sera seul, le Québec sera seul, mais majoritairement, nous serons obligés d'accepter la décision intelligente de la majorité et c'est ce qui se produit dans les circonstances. Quant à nous, nous regrettons de ne pas aller dans la même voie d'économiste où le député de Gouin veut nous engager.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je voudrais souligner que ce que le député de Maskinongé regrette, nous, nous ne le regrettons pas.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le programme 1. Adopté.

M. SAMSON: Non, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Ah! Je pensais que...

M. SAMSON: Je voulais poser une question, moi, avant l'adoption du programme 1. Il semble que les augmentations, M. le ministre, par rapport à 72/73, de traitements et salaires, est-ce qu'il y a...?

M. LEVESQUE: J'ai donné tous ces détails-là dans mes remarques d'ouverture, j'ai donné les effectifs et dit que l'augmentation était due aux traitements et j'ai donné toutes les explications à ce moment-là. Et je demanderais au député de Rouyn-Noranda de prendre, s'il le veut bien, parce que c'était le député de Beauce qui, à ce moment-là, représentait le parti...

M. SAMSON: Oui, M. le Président, le ministre comprend que j'étais retenu dans le plus beau comté de la province, à Rouyn-Noranda, je suis arrivé un peu en retard, mais je n'ai pas eu le temps de lire votre illustre exposé...

M. LEVESQUE : II y avait plusieurs pages sur les effectifs.

M. SAMSON: ... c'est pourquoi vous me permettrez peut-être de poser une petite question à l'occasion.

M. LEVESQUE: D'accord.

M. SAMSON: Vos réponses sont toujours assez intelligentes, de toute façon ça m'empêchera de lire tout le document. Adopté.

M.PAUL: J'appuie en partie, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme 1, adopté avec la dissidence...

M. JORON: Sur division.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): ... du député de Gouin.

Programme no 2: Affaires internationales. L'honorable député de Maskinongé.

Affaires internationales

M.PAUL: M. le Président, vous me permettez de poser quelques questions au ministre. D'abord, est-ce qu'il pourrait nous dire combien et quelles sont les maisons du Québec à l'étranger? Quelles sont les maisons du Québec dont on prévoit l'ouverture en 73/74?

M. LEVESQUE: Présentement, il y a la maison de Bruxelles que nous venons d'ouvrir, comme vous le savez...

M.PAUL: J'aurai quelques petites questions sur Bruxelles, plus tard.

M. LEVESQUE: ... il y a les maisons de Paris, Londres, Milan, Dusseldorf, New York, Chicago, Dallas, Los Angeles, LaFayette et Boston, et nous entrevoyons cette année d'ouvrir Tokyo.

M. PAUL: Est-ce que vous ne prévoyez pas aussi accentuer les relations avec Moscou?

M. LEVESQUE: Avec Moscou? M.PAUL: Oui.

M. LEVESQUE: Bien non, nous voulons accentuer...

M.PAUL: Est-ce que je pourrais rappeler à mon honorable ami le journal des Débats de mardi, 12 décembre 1972.

M. LEVESQUE: Oui, qu'est-ce qu'il disait?

M.PAUL: Alors, le député de Montmagny posait la question suivante: "M. le Président, j'adresse ma question au premier ministre et au ministre de l'Industrie et du Commerce. Y a-t-il un dossier de négociations ouvert entre Moscou et Québec? Deuxièmement, est-ce que ce dossier porterait sur le financement de biens d'équipement pour la baie James, notamment les turbines hydro-électriques? Troisièmement, est-ce qu'à l'intérieur de ce dossier il y aurait eu aussi des négociations à l'échelon Québec-Ottawa pour des échanges de fournitures, à savoir des contrats d'avions avec les compagnies québécoises? "M. Bourassa: Quelle est la première partie de la question du député? "Y a-t-il un dossier ouvert de négociations entre Moscou et Québec? "M. Bourassa: Non, M. le Président. Il a pu y avoir des discussions entre des représentants du gouvernement québécois et des représentants du gouvernement soviétique sur des échanges commerciaux.' '

M. LEVESQUE: C'est ça.

M. PAUL: "Le ministre des Transports est allé à Moscou il y a quelques jours..."

M. LEVESQUE: C'est ça.

M.PAUL: En 1972, qui était là? Ah, très bien, c'est celui qui était resté à Paris pour coucher là et disait le lendemain matin qu'il partait pour Florence, pour Florence en France. Là, M. le Président, il a pu y avoir des discussions entre deux représentants du gouvernement québécois. "M. Pinard: J'aimerais réserver ma réponse sur la question du député de Montmagny." De toute façon, il n'y a rien qui se fait.

M. LEVESQUE: Lorsque je réponds quant à Moscou, c'est parce que nous n'envisageons pas présentement l'établissement d'une maison ou d'un bureau à Moscou. Cela ne veut pas dire que nous n'essayons pas, avec tous les pays du monde, d'avoir de meilleures relations commerciales. L'un n'exclut pas l'autre.

M. PAUL: Quant à ces relations commerciales — le ministre n'est pas obligé de me répondre, il peut toujours invoquer l'intérêt public — le ministre pourrait-il nous dire si ces relations commerciales ont trait au financement d'équipement pour la baie James?

M. LEVESQUE: Je ne le sais pas personnellement.

M. PAUL: Est-ce qu'il a été ou qu'il serait question d'achat et de vente d'avions avec les compagnies québécoises?

M. LEVESQUE: II est entendu que nous voulons, par tous les moyens à notre disposition, encourager la vente des produits aéronautiques qui sont des produits que nous voulons favoriser et encourager au Québec. Et particu-

lièrement, je me rappelle que du côté de Canadair et du côté de United Aircraft, il y a eu des congrès immenses et nous essayons de favoriser la vente des produits faits au Québec.

M. PAUL: En résumé, M. le Président, le ministre nous assure et il nous informe qu'il n'est pas question d'ouvrir cette année une délégation à Moscou.

M. LEVESQUE: Non.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Autres questions.

UNE VOIX: Oui, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M.SAMSON: Le gouvernement, en 1970, déclarait son désir d'effectuer des coupures dans les budgets en ce qui concerne les maisons du Québec â l'étranger et je pense, â moins que je ne me trompe... Du moins si je me base sur un article paru dans le Soleil du mercredi 8 juillet 1970, on avait confié à M. Yves Michaud la mission de visiter toutes les maisons du Québec aux fins d'amener certaines coupures budgétaires et le premier ministre ainsi que le ministre des Affaires intergouvernementales auraient mentionné qu'ils ne voulaient pas faire trop de déclarations publiques quant aux méthodes d'effectuer ces coupures parce que, suivant leurs déclarations, le gouvernement n'aurait pas aimé que certains de ses fonctionnaires apprennent par la voie des journaux que leur poste serait peut-être aboli.

Nous remarquons que, suivant le budget qui nous est demandé cette année, c'est un peu comparable à 1970.

M. LEVESQUE: Justement, M. le Président, en réponse à la question très pertinente du député de Rouyn-Noranda, je dirai que je suis fort heureux de cette question parce qu'elle me permet de souligner justement que nous avons donné suite à ce que nous nous étions proposé. Et si l'on prend les chiffres du coût des maisons du Québec de 1965 à aujourd'hui, on s'apercevra qu'il y a une augmentation: en 65/66, $547,000 et cela avec trois maisons; quatre maisons en 66/67 pour $816,608; quatre encore en 67/68 pour $1,072,000; cinq maisons en 68/69, $1,226,000; en 69/70, huit maisons, $1,493,000; en 70/71, neuf maisons $1,845,101. On voit une progression des dépenses et lorsque le premier ministre a mentionné cela, il a dit: II faudrait essayer de comprimer ces dépenses, de donner plus d'efficacité aux maisons; cependant ce n'est pas pour réduire l'efficacité, mais essayer de comprimer ces dépenses. Nous voyons que l'année suivante, en 71/72, malgré qu'il y ait eu une dévaluation du dollar, malgré que le coût de la vie ait constam- ment monté particulièrement dans les capitales, dans les grandes capitales où ordinairement nous retrouvons ces maisons... Ici, je ne parle pas des budgets, je parle des dépenses réelles. Alors qu'en 70/71 les dépenses étaient de $1,845,101, en 71/72 c'était presque exactement le même chiffre, c'était $1,850,000. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons réussi à comprimer les dépenses, à arrêter cette progression et en 72/73...

M. SAMSON: Le nombre de maisons en 71/72?

M. LEVESQUE: Le même nombre de maisons, neuf, et si vous avez une augmentation des dépenses en 72/73, c'est que nous avons passé de neuf maisons à quatorze. Et là nous sommes à $2,262,133, soit une augmentation extrêmement conservatrice si l'on tient compte des cinq maisons de plus et des autres facteurs que j'ai mentionnés. Je suis très heureux de le souligner.

M. SAMSON: Est-ce que cela entre au chapitre des relations internationales, ou de la coopération internationale, par exemple, les montants d'argent qui sont versés par le Québec aux associations d'étudiants à Paris?

M. LEVESQUE: C'est passé de $7,000 cette année à $6,000.

M. SAMSON: Une coupure de $1,000. M. LEVESQUE: Pardon?

M. SAMSON: Une coupure de $1,000. Est-ce que vous avez l'intention...

M. LEVESQUE: Nous croyons que cela est suffisant pour maintenir les services.

M. SAMSON: ...de respecter cette progression également?

M. DEMERS: Progression descendante.

M. LEVESQUE: Nous étudions les services donnés aux étudiants et nous croyons que c'est une contribution raisonnable.

M. SAMSON: Quelle est la position du gouvernement face aux informations que nous avons eues, il y a quelques mois, à l'effet que ces étudiants auraient fait un colloque, à Paris, pour condammer la politique du gouvernement du Québec, pour prôner la philosophie socialiste et séparatiste au Québec en utilisant, pour les aider à faire ce genre de travail, ces fonds qui leur sont versés par la province de Québec?

M. LEVESQUE: Ces fonds qui leur sont versés ne sont pas affectés à cela du tout.

M. SAMSON: Non. Je m'excuse, M. le minis-

tre. Je n'ai pas dit que je prétendais qu'ils étaient affectés à cela, mais...

M. LEVES QUE: Au moins, les renseignements que j'ai...

M. SAMSON: ...qu'ils étaient peut-être utilisés pour cela.

M. LEVESQUE: ...sont qu'ils ne sont pas utilisés pour ces fins. D'ailleurs, une étude est faite pour chaque subvention et des rapports doivent être faits sur l'utilisation des fonds. Cela, c'est une pratique au ministère des Affaires intergouvernementales. Un rapport doit être fait dans les douze mois qui suivent l'octroi d'une subvention et on doit avoir un rapport complet sur l'utilisation des fonds. Les renseignements sont à l'effet que ces fonds ne servent pas à ces fins.

M. SAMSON: Bien entendu...

M. LEVESQUE: Maintenant, évidemment, quant aux options politiques de quelques-uns de ces jeunes, mon Dieu, c'est l'âge!

M. SAMSON: Je vous comprends donc. Bien entendu, ces sommes qui sont versées à ces associations... L'association, j'imagine, fait autre chose. Mais il y a un fait qui demeure. C'est qu'il y a une association qui est subventionnée par le gouvernement du Québec qui, à un moment ou à un autre, fait de la politique et, si ces fonds ne vont pas directement pour ces fins politiques, ils vont pour autre chose et cela permet peut-être à ces étudiants de faire de la politique avec les fonds qu'ils devraient normalement utiliser eux-mêmes.

M. LEVESQUE: Oui. Je veux simplement rassurer le député de Rouyn-Noranda en lui signalant qu'il s'agit là d'une subvention de $6,000 sur un total de subventions que nous projetons de $402,000. C'est très marginal. Et d'ailleurs, nous aidons les étudiants, par exemple, la Maison des étudiants canadiens à Paris, par une subvention de $22,000...

M. SAMSON : Qu'est-ce qu'ils font avec cette somme?

M. LEVESQUE: Ceci permet aux étudiants d'avoir un logement à meilleur compte, et la plupart de ces étudiants — je pense de 70 p.c. à 80 p.c. des étudiants — sont du Québec.

M. SAMSON: Ils ne font pas de promotion politique.

M. LEVESQUE: II y en a de l'Ontario aussi. Pardon?

M. SAMSON: Ceux-là ne font pas de promotion politique.

M. LEVESQUE: On n'a pas un gardien par étudiant...

M. SAMSON: Vous n'avez pas reçu de plainte à cet effet?

M. LEVESQUE: Pardon?

M. SAMSON: Vous n'avez pas reçu de plainte à l'effet que ces étudiants feraient de la promotion politique...

M. LEVESQUE: Non. D'ailleurs, il y en a d'autres ici qu'on me signale. Il y a l'Association internationale des étudiants en sciences économiques et commerciales: $20,665; l'Association générale des étudiants québécois en Grande-Bretagne: $1,000; l'Association générale des étudiants québécois en Belgique: $1,000; le Carrefour international d'étudiants: $1,000, et je mentionnais la Maison des étudiants canadiens à Paris: $22,000.

C'est en plus des $6,000 accordés pour l'Association générale des étudiants québécois en France.

M. SAMSON: Est-ce que le ministère a eu des plaintes en provenance d'ailleurs que de Paris, à savoir que les étudiants auraient utilisé ces sommes pour fins de promotion politique séparatiste autres que ce que nous connaissons par la voix des media d'information, autres que ceux provenant de Paris?

M. LEVESQUE: C'est sur la base des services qu'ils dispensent que sont fondées les subventions. Nous n'avons pas à ma connaissance reçu de plaintes.

M. SAMSON: Le ministre ne m'a quand même pas donné une réponse directe...

M. LEVESQUE: Nous n'avons pas reçu de plainte.

M. SAMSON: ...à savoir quelle est la position, quelle a été, quelle est ou quelle sera la position du gouvernement...

M. LEVESQUE: La seule plainte que j'ai reçue directement, c'est le député de Chicoutimi qui l'a faite l'an dernier lors de l'étude des crédits.

M. SAMSON: Ah bon! Vous l'avez prise en note.

M. LEVESQUE: J'avais demandé au député de Chicoutimi à ce moment-là que s'il avait des faits à signaler ou des documents à me montrer, certaines preuves à me fournir, de le faire. Je l'ai invité à le faire et je n'ai pas eu de suite.

M. SAMSON: Le gouvernement est quand même conscient de ces informations qui ont

paru dans tous les journaux du Québec concernant ce que je viens de vous mentionner tantôt. Vous êtes conscient de cela de votre position face à cela dans l'avenir, c'est quoi? Est-ce que vous allez continuer à les subventionner ou si vous allez considérer ce genre d'activité aux fins...

M. LEVESQUE: Dans tout groupe d'étudiants comme dant tout groupe de citoyens, il y a des gens qui ont certaines tendances, philosophies ou options politiques ou religieuses, etc. Ce que nous faisons, nous croyons qu'il s'agit là d'étudiants québécois d'abord et les subventions que nous leur accordons sont basées sur les services qu'ils rendent. Nous ne donnons pas cela à des individus. Nous donnons cela à une association et l'association elle-même doit nous faire la preuve qu'elle rend des services aux étudiants québécois qui sont postés à l'étranger. Si réllement, il y avait, comme on avait laissé entendre, des éléments subversifs qui utilisaient ces fonds, contrairement à la volonté du peuple québécois dans son ensemble, je pense bien qu'il faudrait sévir ou peut-être modifier nos politiques. Mais jusqu'à maintenant, je n'ai rien au dossier qui me permette de modifier cette politique.

M. SAMSON: Est-ce que votre raisonnement irait jusqu'à considérer sérieusement l'excellente suggestion que vous faisait tantôt le député de Gouin, de réduire le budget à $1?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Autres questions? Le député de Gouin.

M. JORON: Je voudrais seulement demander au ministre s'il pouvait nous dire globalement, hors du cas de la France où il y a toutes sortes de programmes de coopération que l'on connaît et qui ne sont pas le cas aux Etats-Unis ou en Angleterre, dans l'ensemble du programme 2, par exemple où on parle d'à peu près $7 millions, comment pourrait-on estimer la part qui va à des objectifs de nature économique, de promotion économique? En gros? Est-ce qu'on peut avoir un ordre de grandeur parce que, en d'autres mots, les maisons du Québec, à part celles de Paris, s'occupent de quoi?

M. LEVESQUE: II faudrait d'abord dire que le gros du budget va à la coopération franco-québécoise.

M. JORON: Dans quelle proportion?

M. LEVESQUE: Un peu plus de 60 p.c. va au budget de la coopération franco-québécoise. Il y a ensuite deux autres articles qui sont relatifs à notre action en Afrique et qui comportent à peu près 25 p.c. du budget. Vous avez là un ordre de grandeur: 60 p.c. pour la coopération franco-québécoise; 25 p.c. pour nos relations avec les pays francophones d'Afri- que et environ 15 p.c. un peu partout, dans d'autres pays et d'autres provinces même.

M. JORON: Prenons la partie la plus importante, la coopération franco-québécoise, quelle est la grosse dépense?

M. LEVESQUE: Je vous ferai remarquer qu'il y a là une évolution parce que c'était à peu près nul comme budget de coopération avec d'autres pays que la France et maintenant, sans réduire notre coopération avec la France, nous avons de nouveaux programmes, ailleurs. En France même, comme je l'ai mentionné, il y a un élargissement de la coopération franco-québécoise, c'est-à-dire que nous ajoutons d'autres secteurs. Au lieu de demeurer dans le secteur purement culturel, éducation et culture, nous touchons maintenant les domaines comme les affaires sociales, les richesses naturelles, l'agriculture, la justice, etc.

M. JORON: Je peux peut-être formuler ma question autrement. On dit: C'est à peu près 60 p.c. pour la coopération franco-québécoise; on parle d'un budget de $7 millions, 60 p.c. de $7 millions. Disons, on parle de $4 millions avec la France, à peu près.

M. LEVESQUE: II faut dire que lorsque vous prenez ces chiffres, vous prenez l'ensemble des traitements des fonctionnaires, etc. Il faut enlever cela de ce qui est purement...

M. JORON: Oui, dans le programme 8 ici, oui.

M. LEVESQUE: Voici, par exemple, dans le secteur de l'éducation, sur tout l'ensemble, c'est $1,753,000, le secteur culturel $349,000, le secteur social $195,000 et les autres secteurs, surtout l'économique, $1,233,000.

M. JORON: Quand on dit éducation, c'est quoi la somme dépensée? Ce sont des paiements de frais de déplacement des jeunes qui vont d'une place et vice versa?

M. LEVESQUE: Oui, des professeurs. L'Office franco-québécois n'est pas inclus là-dedans, dans les échanges de jeunes, mais il y a là des bourses pour des jeunes martres, salaires de professeurs, échanges de professeurs, frais de transport, etc. Il y a 200 professeurs de part et d'autre, 200 professeurs français, 200 professeurs québécois qui changent de milieu dans le cadre de ces accords.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Maskinongé.

M. PAUL: M. le Président, justement dans...

M. LEVESQUE: II faut souligner que lorsque je parle d'autres secteurs pour $1,233,000,

on remarquera que cela rejoint maintenant presque le secteur de l'éducation qui est à $1,753,000. Lorsque nous parlons de l'élargissement de la coopération franco-québécoise, c'est ce que nous voulons dire; c'est que nous ajoutons une dimension économique de plus en plus aux autres préoccupations que nous avions du côté culturel.

M. JORON: Et en Afrique, ce sont essentiellement des questions d'éducation, aussi des professeurs?

M. LEVESQUE: Non. Du côté africain c'est presque exclusivement l'éducation.

M. JORON: C'est ça.

M. PAUL: Le tourisme aussi?

M. LEVESQUE: Nous commençons à y toucher.

M. PAUL: M. Michaud est allé se promener là.

M. LEVESQUE: Nous commençons seulement.

M. PAUL: Ne riez pas. A l'occasion de l'étude des crédits du ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, j'ai soulevé le problème. Le ministre a été surpris d'apprendre que M. Michaud était rendu jusque-là mais il a finalement admis que c'était vrai. Je me demande quelle sorte de touristes il va nous envoyer, mais de toute façon, M. Michaud est allé flirter dans ce coin. C'est en touriste qu'il y est allé, par exemple.

M. DEMERS: Cela fait tout un touriste.

M. LEVESQUE: En Afrique il y a le programme de Derro-Tetouan...

M. DEMERS: Pardon?

M. LEVESQUE: Derro-Tetouan...

M.PAUL: Ah oui! C'est M que Damas a trouvé sa vocation.

M. LEVESQUE: ... qui couvre le secteur agricole et qui comprend une dépense de $300,000. C'est une entente avec l'Agence canadienne de développement international.

M. PAUL: Si le temps le permettait, j'aimerais que le ministre explique davantage.

M. DEMERS : Sur la route.

M. PAUL: Nous sommes un peu captifs du temps.

M. LEVESQUE: Tant mieux.

M. PAUL: M. le Président, vous permettez que je pose quelques questions au ministre?

M. DEMERS: C'est un acte de foi.

M.PAUL: Au cours du mois de décembre 1972, il avait été question que la commission permanente de coopération franco-québécoise mette au point de nouveaux projets. Le ministre vient de nous en signaler quelques-uns. Il a été même question de la création d'un institut québécois du pétrole. Est-ce que le ministre se rappelle de cela?

M. LEVESQUE: C'est au stade des études préliminaires. Il y a eu des échanges de missions à ce sujet.

M. PAUL: Est-ce que la France a payé dans ces missions?

M. LEVESQUE: Oui, deux tiers sont payés par la France et un tiers par le Québec.

M. PAUL: Est-ce que ce sont des échanges au niveau des cadres seulement?

M. LEVESQUE: Fonctionnaires et experts.

M. PAUL: Est-ce que les recherches sont surtout faites par la France?

M. LEVESQUE: Non. Il y a une participation égale, me dit-on.

M. PAUL: Est-ce que quelque chose est prévu au budget du ministère pour l'année 73/74?

M. LEVESQUE: Dans le secteur de l'énergie, il y a des sommes prévues pour des échanges mais tout n'est pas encore définitif parce qu'il y a une évolution dans les diverses... on laisse au ministère sectoriel, soit le ministère des Richesses naturelles qui s'occupe particulièrement des énergies...

M. PAUL: Est-ce qu'une programmation est prévue?

M. LEVESQUE: II y a un comité conjoint de l'énergie qui se charge justement de la programmation. C'est un comité permanent.

M. PAUL: Dans un autre domaine, M. le Président, y aurait-il possibilité de savoir s'il y a des privilèges diplomatiques accordés au personnel des maisons du Québec? Jouissent-ils d'exemption d'impôts, de réductions de taxes et d'immunité diplomatique au sens international du terme?

M. LEVESQUE: Peut-être que monsieur... pour ne pas avoir de répétition...

M. PAUL: D'autant plus que c'est un jeune

dont le père est un de mes amis et je m'aperçois que les générations s'améliorent dans cette famille.

M. JORON: C'est fin pour votre ami, ça!

M. PAUL: II est déménagé, il est resté mon ami quand même.

M. SAMSON: Cela n'existera pas longtemps.

M. LEVESQUE: Le seul exemple que l'on connaisse où un statut vraiment diplomatique ait été accordé à une maison du Québec à l'étranger est celui de Paris. Le cas de Londres est un peu spécial parce que la représentation des provinces à Londres a précédé celle du gouvernement fédéral, comme vous le savez, et le statut de nos représentants à Londres est défini dans une loi britannique et on assimile purement et simplement le statut de nos représentants à tous les représentants consulaires qui bénéficient de la convention de Vienne. Ailleurs, il y a des avantages, des accommodements pratiques qui sont reconnus par des administrations comme les ministères des Finances de certains pays qui ne prélèvent pas certains impôts douaniers, par exemple, certaines taxes attachées à la personne de certains de nos représentants, mais ce ne sont que des accommodements pratiques, mais il n'y a pas de statut afférent ou attaché à la maison ou à la représentation du Québec comme tel. Paris est le seul exemple où un statut ait été conféré à notre représentation.

M. PAUL: Je remercie les fonctionnaires qui viennent de nous transmettre les renseignements demandés et je voudrais savoir du ministre si le ministère des Affaires intergouvernementales a déjà considéré la possibilité d'ouvrir un bureau du Québec au Moyen-Orient?

M. LEVESQUE: C'est à l'étude présentement. Mais nous avons déjà à Beyrouth une présence du ministère de l'Immigration.

M. PAUL: Cette présence a pour fin particulière le pétrole, n'est-ce pas?

M. LEVESQUE: Disons que l'on ne peut pas ignorer le pétrole, quand on est dans une région comme celle-là, mais nous avons d'autres préoccupations.

UNE VOIX: C'est gazant! M. DEMERS: Cela fait...

M. PAUL: Est-ce que la mission dans cette région, au lieu de rechercher l'investissement industriel direct — il ne faut pas rêver en couleur, pour employer un terme cher à mon bon ami, le député de Gouin — est-ce que cette mission aurait surtout comme tâche première de diriger ici du capital de financement qui fournit le pétrole arabe?

M. LEVESQUE: Ce serait une tâche assez intéressante.

M. PAUL: C'est parce que, dans mes moments libres, je lis toujours le bulletin des Affaires intergouvernementales.

M. LEVESQUE: Oui?

M.PAUL: Oui, surtout dans des endroits privilégiés...

M. LEVESQUE: Notre nouveau directeur de l'information sera heureux.

M. PAUL: ... comme, par exemple... Tout de suite, on a mal pensé ou on a pensé mal. ... comme, par exemple, à mon bureau de l'Assemblée nationale, parce qu'il y avait dans une des dernières publications un article de M. Claude Beauchamp, un extrait d'un article qui avait paru dans le journal La Presse. C'est pourquoi j'ai voulu signaler au ministre l'intérêt que je porte à chacune de ses oeuvres, de ses activités surtout.

M. DEMERS: On va parler des moeurs.

M. PAUL: Bruxelles! En 1967, un accord culturel Canado-Belge avait été signé. Le gouvernement du Québec n'avait pas été consulté ni invité à participer aux négociations. L'ouverture de la délégation du Québec a-t-elle été faite en fonction de cet accord?

M. LEVESQUE: Non, pas du tout; mais, évidemment, lorsqu'il a été question avec les Belges de l'installation d'une délégation à Bruxelles, il n'y a aucun doute qu'il a été question de l'accord culturel l'accord canado-belge de 1967.

M. PAUL: Est-ce que le Québec et la Belgique respectent les implications de cet accord canado-belge?

M. LEVESQUE: Disons d'abord que l'accord culturel canado-belge, n'a pas été mis en oeuvre.

M.PAUL: Vu l'arrivée de M. Deschamps maintenant, n'avez-vous pas espoir que cela va s'améliorer?

M. LEVESQUE: Non. Maintenant, cet accord culturel a été suivi d'un nouvel accord scientifique et technique et le Québec a participé à son élaboration. Nous pouvons maintenant songer à une participation du Québec à cet accord. Quant à l'accord culturel lui-même, nous sommes toujours en pourparlers avec le gouvernement fédéral mais disons que c'est présentement au ralenti.

M. PAUL: Est-ce que c'est un objectif visé actuellement de la part du ministère des Affaires intergouvernementales?

M. LEVESQUE: Oui, nous...

M. PAUL: Quelles sont les perspectives du ministère?

M. LEVESQUE: Nous cherchons une solution, mais nous avons nos propres conditions à poser, c'est normal. Les hauts fonctionnaires du ministère, présentement, ont rencontré les hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral à ce sujet. Nous essayons de trouver une façon de participer aux conditions que nous croyons nécessaire de poser.

M. PAUL: Certains malins, M. le Président, ont prétendu qu'il y avait eu exagération des dépenses occasionnées par l'aménagement d'une délégation du Québec à Bruxelles. Quels ont été les ordres de grandeur de ces dépenses?

M. LEVESQUE: M. le Président, je dirai tout d'abord au député de Maskinongé que, quant au ministère des Affaires intergouvernementales, nous n'avons pas de crédits pour l'implantation physique de ces maisons. Je ne veux pas, comme on dit en anglais "pass the buck", mais je vous rappellerai que c'est le ministère des Travaux publics qui a la responsabilité...

M. PAUL: Le ministre des Travaux publics nous dit : Cela ne fait pas assez longtemps que je suis là; je ne connais pas ça.

M. LEVESQUE: Que voulez-vous,... M. DEMERS: Cela informe.

M. LEVESQUE: ...je puis assurer le député de Maskinongé, cependant, qu'il y a eu beaucoup d'exagération là-dedans. Le coût de la vie est assez élevé...

M. PAUL: C'est surtout le coût du loyer qui est élevé.

M. LEVESQUE: Quant au loyer, on a multiplié le loyer, je pense, par dix ans pour faire une somme assez impressionnante.

M. PAUL: C'est $31,715 par année. A Paris, c'est $22,000...

M. LEVESQUE: Mais...

M. PAUL: Un instant, je vais donner quelques statistiques et le ministre pourra me résumer ça brièvement.

A Paris, le coût du loyer annuel est de $22,315. A New York, $21,720 par année, à Bruxelles, $31,715 par année. Le ministre peut-il nous expliquer un tel écart? Quelle a été sa réaction lorsqu'il a constaté que son collègue, le ministre des Travaux publics, avait consenti un bail aussi somptuaire, pour employer un terme cher à l'honorable premier ministre?

M. LEVESQUE: Si on prend le — je ne veux pas entrer dans les détails, parce que ce n'est pas mon domaine, la question des Travaux publics — ... Je puis simplement, peut-être comme un amateur, pas comme un professionnel, rappeler au député de Maskinongé qu'une famille de huit enfants prend plus de place qu'une famille avec un seul enfant.

M. PAUL: C'est évident, surtout l'ameublement coûte plus cher. Les chaises hautes.

M. le Président, je m'en voudrais d'oublier ici mon bon ami, de qui je garde un excellent souvenir à l'occasion de son passage à l'Assemblée nationale, l'ancien député de Gouin, M. Yves Michaud. Quel est le salaire actuel de M. Michaud? Et à quand remonte sa dernière augmentation?

M. LEVESQUE: C'est $27,700. M. PAUL: Cela n'a pas changé.

M. DEMERS: Ses dépenses sont-elles incluses?

M. LEVESQUE: Cela dépend, il a les mêmes droits qu'un autre fonctionnaire au remboursement des dépenses. Je ne sais pas ce que vous voulez dire.

M. DEMERS: Cela fait quoi à peu près? Parce qu'on nous a dit qu'il était...

M. LEVESQUE: En 72/73, les allocations mensuelles comme sous-ministre sont de $3,600; les frais de voyages, $7,752.52.

M. DEMERS: $7,000?

M. LEVESQUE: $7,752.52.

M. PAUL: C'est vrai, il est un peu comme moi, il est gros â déménager. Cela prend des...

M. DEMERS: Ils sont obligés de faire deux voyages.

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous dire quel a été le compte des dépenses payées à M. Michaud, de sa nomination à la suite de sa défaite...

M. DEMERS: Dans le comté de Gouin?

M. PAUL: ... aux élections provinciales par une majorité de douze voix?

M JORON: On va doubler la prochaine fois!

M. PAUL: Si vous perdez les douze que vous avez, cela va être regrettable pour nous. Quel a été le montant des dépenses payées à M. Yves Michaud?

M. LEVESQUE: On ne l'a pas ici.

M. PAUL: On m'a déjà transmis une information; d'ailleurs, le ministre...

M. LEVESQUE: C'est dans les comptes publics pour les années précédentes. On vous les a données et il y a eu une réponse en Chambre également.

M. DEMERS: C'est une question qu'on a posée en Chambre.

M. LEVESQUE: Je pense qu'on a tous les...

M. PAUL: C'est parce que je voulais vérifier si le montant de $24,829.33 était exact.

M. DEMERS: $24,000, pardon? Voulez-vous répéter?

M.PAUL: Je vais simplement répondre à votre question avec empressement mon cher collègue, $24,829.33 pour lui qui, M. Yves Michaud, avait comme mandat de réduire les dépenses somptuaires, déclaration de l'honorable premier ministre lorsqu'il a annoncé sa nomination.

M. DEMERS: Eh bien!

M. PAUL: Est-ce que le ministre des Affaires intergouvernementales peut nous préciser quelles sont les coupures somptuaires qu'a effectuées M. Michaud depuis son rayonnement au ministère des Affaires intergouvernementales?

M. LEVESQUE: Ce n'est pas dans le mandat de M. Michaud. Il est dans le domaine de la coopération et il n'a pas la responsabilité des maisons du Québec.

M. DEMERS: Est-ce qu'il coopère un peu? M. LEVESQUE: II coopère.

M. PAUL: Je suis sûr que M. Michaud va lire avec beaucoup d'intérêt cette partie de nos délibérations. Il pourra dire: Mes amis ne m'oublient pas.

M. le Président, je rappelle qu'il y a eu une entente de signée entre le Québec et le Maine. Je crois que c'est au mois de mai 1972. Est-ce que le ministre peut me dire en quoi consistent les échanges d'information et de documentation sur les systèmes d'éducation respectifs du Québec et de l'Etat du Maine?

M. LEVESQUE: II y a eu des échanges de fonctionnaires. Depuis l'an dernier, nous sommes à mettre au point certains programmes. C'est encore très peu développé comme coopération, mais le gouverneur du Maine vient de nous inviter à aller lui rendre visite à Augusta et j'ai l'intention d'y aller les 10 et 11 juin pour poursuivre ces pourparlers.

M.PAUL: On va souhaiter bon voyage au ministre. Et est-ce qu'en même temps le ministre pourrait s'informer si l'Etat du Maine a l'intention de procéder à l'échange d'étudiants? Est-ce qu'il y a eu échanges d'étudiants?

M. LEVESQUE: II y a des possibilités, me dit-on, d'échanges, de stages d'étudiants du Maine au Québec...

M. PAUL: ... au niveau universitaire.

M. LEVESQUE: ... pour l'étude du français.

M. PAUL: ... au niveau universitaire.

M. LEVESQUE: Au niveau collégial.

M. PAUL: Au niveau collégial également?

M. LEVESQUE: Au niveau collégial...

M. PAUL: Est-ce que l'entente ne prévoit pas seulement pour le niveau universitaire?

M. LEVESQUE: Non.

M.PAUL: II y a un fonctionnaire qui fait signe que oui. Tâchez de vous entendre. Consultez le bon.

M. LEVESQUE: II n'y a pas de signe.

M. PAUL: Parce qu'on aurait pu y voir un signe des temps. Je me suis mis à trembler en voyant un tel geste.

M. DEMERS: C'est comme au baseball, nous sommes en train de voler vos signaux.

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a eu des recherches de réalisées en commun entre le Québec et le Maine? Si oui, sur quel sujet?

M. LEVESQUE: Pas pour l'instant. M. PAUL: Pas pour l'instant encore.

M. DEMERS: Ce sont des échanges de sympathie?

M. LEVESQUE: II faut dire que le gouverneur du Maine n'est venu nous voir qu'il y a à peine un an, l'été dernier. Depuis ce temps, nous avons communiqué, mais nous n'avons pas encore...

M. PAUL: ... agi...

M. LEVESQUE: ... précisé des programmes de coopération.

M.PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire si le bureau du Québec à Boston a réussi son programme de diffusion du film québécois? Et quels auraient été les films ainsi diffusés?

M. LEVESQUE: Non. Franchement là... M. DEMERS: II n'y a pas eu de film?

M. LEVESQUE: ... je devrai me renseigner à ce sujet.

M. PAUL: Préparez-vous pour vos prochains crédits.

M. LEVESQUE: Oui. On m'informe que c'est surtout à New York que l'accent est mis dans ce domaine.

M. DEMERS: C'est meilleur au cinéma à New York.

M. PAUL: Pourriez-vous vérifier s'il n'y aurait pas une politique d'action à Boston pour la diffusion du film québécois?

M. LEVESQUE: Est-ce que ces questions ne sont pas inspirées par le député de Chicoutimi qui a demandé au député...

M. PAUL: M. le Président, je ne m'inscris en faux nulle part. Vous trouverez même l'esprit du député de Chicoutimi.

M. LEVESQUE: Oui?

M. PAUL: On voudrait lire, nous aussi.

M. LEVESQUE: Le sous-ministre pense que la deuxième page que vous avez montrée était blanche.

M. PAUL: Je m'excuse...

M. DEMERS: C'est une version...

M. PAUL: Ce n'est pas surprenant qu'il ne soit plus à l'Education. En quoi consiste la politique du don de livres et de documents audio-visuels qui devait être mise en application avec les maisons franphones du Maine? Est-ce que c'est encore là à l'état de projection?

M. DEMERS: La page est blanche, là aussi.

M. LEVESQUE: Les programmes sont encore à l'état embryonnaire, comme je l'ai indiqué tout à l'heure.

M. PAUL: Je regrette mais j'espère que le ministre et leader du gouvernement réalisent tout l'intérêt que je porte aux activités de son ministère. Quant à moi...

M. LEVESQUE: Aux affaires culturelles dans le Maine.

M. PAUL: Vous savez, je m'intéresse à tout, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme 2, adopté?

M. PAUL: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme 3 : Gestion interne et soutien.

Gestion interne et soutien

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous dire quels sont les effectifs du Service du protocole ou qui en est le chef?

M. LEVESQUE: II y a sept postes.

M. PAUL: Est-ce que les postes sont tous comblés?

M. LEVESQUE: II y en a quatre de comblés. M. Romuald Miville-Deschênes a été muté aux Affaires culturelles et c'est M. Jacques Côté qui assure l'intérim présentement.

M. PAUL: Quels sont les critères pour être au service du protocole?

M. LEVESQUE: Je pense bien qu'il faut... M. DEMERS: Etre protocolaire? M. PAUL: Je n'insisterai pas davantage. M. LEVESQUE: Etre bien...

M. DEMERS: C'est suffisant, M. le Président.

M. LEVESQUE: Non, mais je ne voudrais pas laisser le député de Maskinongé sur cette impression parce qu'il s'agit là d'un poste extrêmement important et vital au gouvernement.

M. PAUL: Quand? Je n'ai pas partagé ce sentiment...

M. LEVESQUE: Non, mais de la façon qu'on a passé immédaitement...

M. DEMERS: C'est parce que...

M. LEVESQUE: ... à d'autres choses.

M. DEMERS: ... on voulait soulager le ministre.

M. PAUL: On ne veut pas embarrasser le ministre. Il est écrasé par plusieurs fonctions. On comprend...

M. LEVESQUE: Pas du tout. Il y a là un côté administratif important du côté du service du protocole qu'il ne faudrait pas négliger ou sous-estimer.

M. PAUL: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il y a des employés occasionnels qui, à son ministère, sont devenus permanents en 72/73?

M. LEVESQUE: II y en a deux.

M. PAUL: Comment le sont-ils devenus?

M. LEVESQUE: Par concours.

M. PAUL: De la Fonction publique?

M. LEVESQUE: De la Fonction publique.

M. PAUL: Est-ce qu'il y a eu, en 1972, des employés rémunérés à titre occasionnel ou des employés occasionnels qui ont été rémunérés? Si oui, combien y en avait-il?

M. LEVESQUE: Trois ou quatre professionnels et autant d'employés de bureau.

M. PAUL: Combien d'employés ont été mutés ou transférés à d'autres ministères, régies ou commissions? C'est parce qu'il y a des sous-ministres qui partent et on voudrait savoir si les fonctionnaires restent.

M. LEVESQUE: Du côté des professionnels, des cadres ou des adjoints aux cadres, une seule personne a été mutée. Chez les employés de bureau...

M. PAUL: A sa demande ou par suite de... M. LEVESQUE: A sa demande.

M. PAUL: Est-ce qu'il y a eu beaucoup de voyages de la part des fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales à l'extérieur?

M. LEVESQUE: Très peu.

M. PAUL: Je parle des pays étrangers. Quant à moi, le Canada n'est pas un pays étranger.

M. LEVESQUE: Non. Alors, très peu du côté du ministère des Affaires intergouvernementales.

M. PAUL: Très peu. Est-ce que le ministre pourrait apporter un peu de précisions, si je lui faisais une motion pour détail sur...

M. LEVESQUE: Je pourrais demander au comptable de sortir les chiffres là-dessus, mais...

M. PAUL: En même temps, j'aimerais savoir si le ministre peut obtenir quel aurait été le montant des dépenses occasionnées à cette fin-là.

M. LEVESQUE: Evidemment, il ne faudrait pas oublier qu'il y a les voyages des gens qui sont en poste à l'étranger. C'est différent.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Programme no 3, adopté?

M. PAUL: M. le Président, la cloche sauve le ministre. J'aurais eu encore beaucoup de questions.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Adopté. Je remercie les membres de la commission.

M. LEVESQUE: Je remercie moi-même tous ceux qui sont intervenus et qui ont participé à ces discussions. Je vous félicite, M. le Président, de la façon dont vous avez présidé nos débats.

M. JORON: M. le Président, vous me permettrez de remercier également...

J'aimerais apporter la précision suivante, même si on a eu des propos cruels quant à l'utilité des efforts du ministère des Affaires intergouvernementales en matière de relations fédérales-provinciales, cela ne voulait surtout pas dire que c'était parce que l'on sous-évaluait la compétence, la bonne foi et la bonne volonté des fonctionnaires concernés.

M. LEVESQUE: II n'y a que le ministre à qui on peut enlever son salaire.

M. PAUL: Si le ministre est quelque peu reluisant, il le doit à ses fonctionnaires que je félicite.

M. LEVESQUE: C'est en toute humilité que j'accepte ces propos, mais je sais qu'ils sont faits avec l'humour qui caractérise une Opposition un peu fatiguée.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 50)

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