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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le vendredi 3 juin 1977 - Vol. 19 N° 109

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits de l'Office de planification et de développement du Québec


Journal des débats

 

Étude des crédits de l'Office

de planification et de développement du Québec

(Onze heures trente-six minutes)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, messieurs!

À la commission parlementaire de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales, chargée d'étudier les crédits de l'OPDQ, les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui seront: M. Bertrand (Vanier), M. Biron (Lotbinière), M. Bisaillon (Sainte-Marie); M. Landry (Fabre), en remplacement de M. Burns (Maisonneuve); M. Cordeau (Saint-Hyacinthe) en remplacement de M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Mailloux (Charlevoix) en remplacement de M. Forget (Saint-Laurent); M. Garneau (Jean-Talon), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Johnson (Anjou), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Levesque (Bonaventure), M. Martel (Richelieu); M. Gagnon (Champlain) en remplacement de M. Morin (Louis-Hébert); M. Desbiens (Dubuc) en remplacement de M. Morin (Sauvé); M. Paquette (Rosemont), M. Raynauld (Outremont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda) et M. Léonard (Laurentides-Labelle) en remplacement de M. Vaugeois (Trois-Rivières).

M. le ministre.

Exposé préliminaire du ministre M. Jacques Léonard

M. Léonard: Les travaux qu'on va faire, espérons qu'ils seront très fructueux. M. le Président, le 5 mai dernier, le premier ministre, M. René Lévesque, faisait connaître officiellement sa décision de me confier la responsabilité ministérielle de l'Office de planification et de développement du Québec et la responsabilité de définir l'orientation de ses programmes et de ses travaux en ce qui a trait à l'aménagement du territoire et au développement régional.

Par la même occasion, il demandait à mon collègue, M. Bernard Landry, ministre d'État au développement économique, de définir les orientations de travail en matière de planification et d'études économiques. Comme cette nomination est encore toute récente, vous comprendrez facilement que je n'ai pu encore prendre la mesure, toute la mesure de cet organisme gouvernemental que je connaissais déjà cependant, par ailleurs. Je ne voudrais donc pas ici m'engager d'une façon rigide sur les orientations futures des travaux de l'office, mais je peux d'ores et déjà vous assurer que j'ai l'intention d'utiliser la compétence des employés de l'office à la réalisation des priorités gouvernementales.

La planification passera toujours par une volonté politique. Cette volonté politique, le gouvernement actuel l'a clairement exprimée par la création de comités ministériels permanents et par la création du comité des priorités. Pour que les décisions soient le plus éclairées possible, deux éléments m'apparaissent essentiels: des données et des expertises le plus exactes possible sur la réalité et aussi une consultation de la population. Ce rôle, l'OPDQ peut le jouer si le gouvernement prend ses responsabilités. Depuis 1970, ce fut toujours une préoccupation constante des députés du Parti québécois de demander pour l'office un rôle dans le développement du Québec.

Il y a un type de développement sauvage au Québec, qui risque de détruire la qualité de la vie. Il faut donc envisager des objectifs en dehors de la petite semaine. Depuis 1970, les députés du Parti québécois ont fait part aussi de leurs critiques, non pas sur les hommes et les femmes qui travaillent à l'office, mais sur le rôle que le gouvernement au pouvoir confiait à l'OPDQ, un gouvernement qui faisait de l'office un bureau, qui administrait les ententes, qui ne l'impliquait pas dans les grands dossiers prioritaires ou qui n'offrait pas d'orientations claires, ce qui est la seule source d'études et de recherches dont l'impact a des conséquences concrètes sur le développement du Québec.

Depuis 1970, nous avons toujours cru à la nécessité à l'Office de planification, mais pas à n'importe quel office, non plus. La continuité n'est donc pas le statu quo. Elle n'est pas, non plus, une brisure totale avec le passé. L'office consacrera donc une partie de ses efforts à la poursuite ou à la conclusion de travaux déjà entrepris en matière de planification socio-économique et de développement régional. L'office se verra aussi, peu à peu, proposer de nouveaux défis afin que nous retrouvions cet arbre complet et non seulement l'écorce.

Avant d'aborder avec vous les crédits proposés pour l'OPDQ en 1977/78, j'aimerais faire le point sur les principales réalisations de l'office au cours de l'année qui vient de s'écouler. Tout d'abord, en matière de planification, les travaux qui avaient été amorcés au cours des exercices précédents ont commencé à donner des résultats. C'est ainsi que l'office vient de publier l'analyse structurelle à moyen terme de l'économie du Québec, une étude déposée en février dernier qui s'inscrit dans le processus d'élaboration d'un modèle économique proprement québécois. La première version de ce modèle doit, d'ailleurs, être produite d'ici à la fin de l'année. De la même façon, l'étude prospective en arrive au point où des résultats fragmentaires peuvent être mis à la disposition du gouvernement.

Des études sont en cours sur l'évolution démographique du Québec, sur la répartition des revenus, sur les filières de production et leur incidence sur le développement régional, sur l'armature urbaine du Québec, etc. Des rapports d'étapes et des rapports définitifs doivent, d'ailleurs, être déposés dans les mois qui viennent. Je déposerai à cette commission une liste des études en cours à la direction générale de la planification.

Mon collègue, le ministre d'État au développement économique, associera étroitement l'OPDQ à la conception de la stratégie du développement économique dont il a fait état à Pointe-au-Pic afin de profiter de toute l'expertise de l'office en orientant les nouveaux travaux à entreprendre dans cette direction. Une stratégie de développement partant du concret, comme la transformation des métaux, la sidérurgie, les pâtes et papiers ou l'agroalimentaire est peut-être moins ambitieuse que la "planification académique", mais a plus de chances de succès.

Vous commencez probablement aussi à être quelque peu familiers avec les schémas régionaux de développement et d'aménagement, puisque l'OPDQ y travaille depuis maintenant environ deux ans. Il s'agit là d'une opération faite en collaboration avec un certain nombre de ministères et avec la population, représentée notamment par les conseils régionaux de développement, et qui a pour but de doter le gouvernement d'un cadre d'intervention en matière de développement régional. En cette matière de développement régional, l'année qui vient de se terminer a vu la publication de certains documents produits au cours de cette opération.

Ce sont les devis relatifs à l'élaboration des schémas régionaux de développement et d'aménagement, les quatre cahiers des caractéristiques sectorielles interrégionales et les six profils régionaux qui ont été remis, m'a-t-on dit, aux députés de chaque région.

Par ailleurs, l'équipe de Montréal a produit des rapports techniques et des documents préliminaires qui permettront de donner bientôt une première version de l'esquisse de la région de Montréal.

La préparation des schémas régionaux devrait se faire de plus en plus dans la région même pour que les spécificités régionales soient respectées et transcrites dans les orientations. Ce n'est pas de Québec qu'il faut faire l'aménagement du territoire. Le gouvernement doit simplement le rendre possible. C'est pourquoi une priorité est accordée à terminer le plus rapidement possible les schémas régionaux de développement et d'aménagement. Nous étudions dans le moment la possibilité de mieux associer les conseils régionaux de développement dans le processus, où la population régionale intervenait souvent trop tard, à notre point de vue, et de rendre en même temps plus opérationnelles les conférences administratives régionales afin de rapprocher davantage le gouvernement et la population.

Il est clair qu'on associerait étroitement l'OPDQ à la préparation de la loi générale de l'aménagement du territoire annoncé dans le message inaugural. Par contre, il est insuffisant de s'en tenir à des schémas régionaux, aussi bien faits et aussi régionalisés soient-ils.

Il faut surtout que des gestes concrets permettent de traduire dans la vie régionale les orientations, somme toute, théoriques qu'offrent les schémas. C'est pourquoi j'étudie avec l'Office la possibilité de présenter quelques projets précis dans des régions à taille humaine, comme

Basque-Neigettes, et offrir ainsi à une population la chance de travailler au développement intégré des ressources de son coin de pays et qui supposera une collaboration efficace entre les agents du milieu et le gouvernement.

Des projets de la sorte soulèvent aussi le problème du fonds de développement régional. En matière de développement et d'aménagement du territoire, ce fonds de développement constitue un instrument très valable, même si la situation financière nous a empêchés d'y consacrer les sommes énormes que les besoins nécessiteraient. Il nous faut préciser quels sont les critères qui nous permettront de faire démarrer et se réaliser les projets jugés prioritaires par la population.

L'administration des ententes fédérales-provinciales s'est poursuivie durant l'année, parallèlement à la négociation des modifications importantes aux ententes déjà existantes et à la négociation d'une nouvelle entente, négociations au cours desquelles le gouvernement du Québec a franchement abordé les problèmes avec le gouvernement canadien non pas dans la soumission, mais comme un gouvernement qui se tient debout et va chercher sa part de la' richesse collective canadienne à laquelle il contribue largement par ses impôts.

Cependant, même si le gouvernement du Québec a voulu négocier avec le gouvernement fédéral, selon l'esprit même de l'entente-cadre de développement, le financement conjoint de certains projets, il n'est pas prêt à accepter n'importe quoi simplement pour avoir de l'argent. Les projets financés doivent avoir une répercussion positive sur le développement régional et accorder la priorité aux régions-ressources.

Passons maintenant aux crédits comme tels. Le budget proposé pour l'OPDQ en 1977/78 est de $33 713 600, qui se répartit comme suit: $25 780 000 pour le programme 4, et $7 404 800 pour le programme 5. C'est un budget qui se compare difficilement avec celui de l'an dernier à cause d'une modification importante apportée par le Conseil du trésor à la présentation des crédits. Le Conseil du trésor a décidé, en effet, cette année, d'inscrire au budget des ministères maîtres d'oeuvre une plus grande partie des crédits afférents aux projets de développement régional et aux ententes fédérales-provinciales actuelles ou en négociation ainsi que les sommes servant à financer les activités commencées avec les ententes ARDA et FODER et poursuivies dans le cadre du fonds de développement régional. Sauf dans le cas de l'entente sur les zones spéciales et celles de FODER, ces sommes ne sont donc plus inscrites au budget de l'OPDQ et ce dernier n'a plus besoin de procéder en cours d'année à des virements de fonds au bénéfice des ministères maîtres d'oeuvre. L'OPDQ conserve toutefois un droit de regard sur l'utilisation de ces sommes.

Cette modification dans la présentation des crédits ne touche que le programme 4, Coordination du développement économique et régional et interventions de développement régional. À l'élément 1, se retrouvent les sommes destinées au parachèvement des travaux entrepris en vertu de

l'entente sur les zones spéciales, le montant prévu est de $5 200 000. À l'élément 2, une somme de $19 700 000 est prévue pour le fonds de développement régional. Contrairement à ce qui se passait les autres années, il s'agit essentiellement, cette année, d'argent neuf.

Enfin, à l'élément 3, la provision est de $880 000, elle devrait servir principalement pour les travaux de l'entente de l'Est. Le programme 5, pour lequel la comparaison est possible avec l'an dernier, connaît une hausse de 7% puisque les crédits demandés sont de $7 933 600 alors qu'ils étaient de $7 404 800 en 1976/77. Le programme 5 regroupe les sommes qui servent à l'administration même de l'OPDQ. Il se décompose en $1 500 000 pour les travaux de planification qui constituent l'élément 1; $1 565 400 pour l'aide à la consultation à l'élément 2, et $4 860 200 pour la direction et le soutien administratif.

Je ne voudrais pas entrer plus avant à ce moment-ci dans les détails des éléments du budget. J'ai été heureux de pouvoir exposer aux membres de la commission certaines de mes idées en matière de développement régional et d'aménagement du territoire.

Ce sont elles qui guideront mon action en tant que ministre responsable de l'Office de planification et de développement du Québec et elles serviront sûrement à orienter le travail de cet organisme au cours des prochains mois. Je vous remercie.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre, avant de passer la parole au député de Bonaventure, est-ce que le député de Sainte-Marie accepterait d'être désigné rapporteur de la commission?

M. Bisaillon: Oui, bien sûr.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est à l'unanimité? M. le député de Sainte-Marie, vous êtes nommé rapporteur de la commission. M. le chef de l'Opposition.

Commentaires de l'Opposition, M. Gérard-D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je serai très bref. Je peux simplement dire au ministre d'État à l'aménagement qu'il peut et que l'Office de planification et de développement du Québec peut compter sur une attitude très positive de la part de l'Opposition officielle, et qu'il peut compter également sur notre coopération la plus active, évidemment, selon nos moyens. Nous voulons que cette contribution soit de nature à améliorer encore la situation de l'office parmi tous les organismes gouvernementaux. On n'a pas à se cacher que l'Office de planification et de développement du Québec a connu des périodes difficiles. Il faut bien l'admettre, cela ne vient tellement des gouvernements que des structures elles-mêmes et des situations conflictuelles qui peuvent naître tout naturellement de l'existence de certaines au- tres institutions ou organismes qui peuvent voir d'un oeil assez critique les activités de l'office.

Je me rappelle, je l'ai dit à quelques reprises, qu'en 1972, lorsqu'on m'a confié les destinées de l'Office de planification et de développement du Québec, alors que j'étais au ministère de l'Industrie et du Commerce, l'image que j'avais de l'office n'était pas tellement positive. Lorsque je suis arrivé à l'office, cependant, j'ai appris — et c'est peut-être la façon de l'apprendre, au contact des hommes et des choses — ce que réellement voulait dire l'office, ce que voulait faire l'office, le rôle qu'il devait de plus en plus jouer dans l'appareil administratif.

Afin de pouvoir sensibiliser le plus de mes collègues, justement, à ce rôle de l'office, j'ai voulu que cette direction soit la plus collégiale possible. À ce propos, on se rappellera que j'avais demandé à quelques-uns de mes collègues, surtout à ceux qui avaient l'administration de ministères à vocation économique, de se joindre à moi afin réellement qu'il y ait un lien plus direct entre le Conseil exécutif et les travaux qui se poursuivaient à l'Office de planification et de développement du Québec.

Par la suite, nous avons même formé un groupe ministériel des affaires économiques où étaient réunis autour de la même table, avec le président-directeur général de l'Office de planification et de développement du Québec, onze ministres, et cela chaque semaine, justement, encore une fois, afin que les dossiers économiques soient les mieux compris et étudiés par l'ensemble des ministres à vocation économique. C'est pour vous dire l'intérêt que nous avons constamment porté à l'office.

Maintenant, il s'est développé, du côté du Conseil exécutif, une autre structure qui est venue, au cours de notre dernière année d'exercice du pouvoir, modifier un peu les choses. C'est là que nous avons vu les comités ministériels qui se sont formés, qui étaient voués à diverses fonctions de l'État et, d'ailleurs, qui ont été probablement la source de cette nouvelle structure du nouveau gouvernement.

M. Léonard: Partiellement.

M. Levesque (Bonaventure): Partiellement, si vous voulez, mais je pense bien que c'était dans l'ordre successif des choses qui en provoquent une autre.

Mais dans tout cela, malgré les intentions et les bons voeux exprimés par le nouveau ministre responsable, que je félicite d'ailleurs de sa nomination, je dois dire qu'il devra continuer à être très vigilant, car l'enfer est pavé de bonnes intentions. Malgré tous les espoirs que peuvent véhiculer présentement le ministre et ses collaborateurs, je suis sûr, pour en nommer un, que le ministère des Finances ne changera pas. Je suis convaincu que le Conseil du trésor ne changera pas. Même si on peut changer les hommes de temps à autre, même si on peut changer les structures à gauche et à droite, il reste un fait, c'est que chacun veut bien contrôler le plus possible.

Lorsqu'on parle des grands dossiers prioritaires, des grandes orientations, lorsqu'on pense à l'impact que peut avoir, sur un Conseil des ministres, tel organisme, chacun veut avoir la priorité ou la place prioritaire. Ceci étant dit, je lui fais confiance; c'est la première fois qu'on se réunit avec le ministre responsable de l'office. Je ne veux pas — il vient de dire lui-même qu'il arrive à peine à son poste — je n'ai pas l'intention d'être négatif, je veux, au contraire, l'encourager, tout en étant vigilant, à poursuivre au moins les bonnes choses qui étaient là avant qu'il n'arrive.

Il ne faudrait pas qu'il pense, comme certains de ses collègues ont pensé lorsqu'ils sont arrivés en poste, qu'il ne s'est rien fait auparavant. Je pense bien qu'en se retournant du côté des hauts fonctionnaires de l'office, il aura immédiatement des témoignages contraires. Il n'a qu'à regarder et à réviser les dossiers, que j'ai à peine effleurés tout à l'heure, pour s'apercevoir qu'il s'est fait énormément de travail à l'office. Tout ce que je souhaite, c'est que cela continue, que cela s'améliore, que cela se bonifie. C'est dans ce sens que je voudrais que mes premières paroles soient interprétées.

Je voudrais cependant indiquer une certaine inquiétude que je ressens à la vue du budget. Je vois d'abord, à la face même du budget, qu'il y a une diminution considérable dans les budgets affectés à l'office; cela n'est pas nouveau, cela a déjà été fait dans le passé, on avait déjà commencé l'érosion. C'est probablement dans un sens de bonne administration, toujours, qu'on nous indique ce qu'il faut faire, c'est-à-dire imputer le plus de sommes possibles à des ministères sectoriels, mais cela ne va pas sans mettre encore en danger... Du moment qu'on enlève des sommes, même si on dit que l'office aura un visa ou que l'office pourra examiner telle chose, on enlève du budget de l'office des sommes considérables. Il ne faut pas oublier que le budget de l'office, il n'y a pas longtemps, dépassait les $200 millions, si je me rappelle bien. On pourra peut-être le faire confirmer.

Là, par toutes sortes de machinations, et par des choses extrêmement rationnelles — il ne faut jamais toucher le rationnel lorsqu'on touche au Conseil du trésor et au ministère des Finances — on est rendu avec un budget qui n'est plus que de $25 millions. On dira: Ne vous inquiétez pas, on va vous laisser un droit de regard.

Ce sont les mots mêmes du ministre. Mais le droit de regard — je vais vous livrer mon expérience — s'amenuise à mesure que disparaissent, dans le budget véritable, les sommes qui sont consacrées à un organisme. Je le dis au ministre: Vous arrivez là, ne vous laissez pas trop influencer ou bien exigez davantage, parce qu'à un moment donné vous allez peut-être disparaître en douceur, alors que personne ne s'apercevra trop trop de ce qui arrive. Lorsqu'on est rendu à $25 millions on est pas mal proche du point zéro. Faites bien attention à cela, malgré tout ce qu'on vous offrira au point de vue intellectuel et rationnel. Je me suis toujours opposé à cette façon de procéder. Évidemment, si j'avais été ministre des Finances, vous savez, je vous le dis bien candidement, j'aurais peut-être pris la même attitude que le ministre des Finances.

Mais on sait l'importance de l'Office de planification et de développement du Québec par rapport à la planification. Le ministre d'État au développement économique est ici, il nous a tellement bien parlé de l'office qui lui avait apporté une collaboration très active dans sa préparation du sommet économique. Il ne faut pas oublier que le ministre qui est avec nous, j'en suis fort heureux, ce matin est bien conscient lui aussi de cette importance qu'a l'office dans ce domaine de la planification, dans la préparation même d'une stratégie de développement industriel, même si d'autres ministères vont vouloir encore une fois avoir la paternité et vous voler vos documents. Il y a une chose, c'est que vous avez un rôle à jouer, il n'y a aucun doute, important. L'importance de l'office peut aussi s'inscrire d'une façon particulière et être soulignée quant à la politique de développement régional.

Et c'est là réellement que la population, le monde ordinaire vous regarde, parce que peut-être qu'à Montréal, et même à Québec, on vous prend en second ou en troisième lieu. Mais, dans les régions, l'Office de planification et de développement du Québec c'est devenu pratiquement le no 1. Lorsque l'on se tourne vers le gouvernement, lorsqu'on veut exprimer certains espoirs, lorsque l'on cherche des solutions à des problèmes extrêmement sérieux et qui touchent les familles, qui touchent les emplois, qui touchent le développement des ressources, dans les régions périphériques on se tourne maintenant, de plus en plus, vers l'OPDQ.

Cela a été un cheminement, cela n'existait pas il y a dix ans cette attitude dans les régions. Mais le travail de l'OPDQ, semaine après semaine, mois après mois, année après année, et les contacts établis avec les institutions comme les CRD, etc., et tous les groupements régionaux, ont fait que de plus en plus la population, dans les régions périphériques, dans les régions excentriques, toutes les régions rurales et semi-urbaines du Québec, a cette impression que l'Office de planification et de développement du Québec peut très bien comprendre les situations régionales.

D'ailleurs, lorsque le ministre parlait tout à l'heure des schémas régionaux et tout cela, c'est un travail qui n'a pas commencé hier, c'est toute une discipline, c'est toute une sorte d'exercice qui a été entamée laborieusement, péniblement, pas toujours avec l'empressement et l'appui que cela aurait mérité au tout début.

Mais aujourd'hui, c'est accepté de plus en plus dans le gouvernement et dans la population. C'est pour cela que je reviens sur le fait qu'il faut faire attention à ces budgets. Malgré tout le rationnel qu'on peut apporter autour de cela, bien, qu'on les protège et qu'on protège les effectifs de l'office afin qu'il puisse continuer à travailler dans le sens où il a commencé à le faire. Cela n'exclut pas qu'il puisse y avoir amélioration. Encore là, il faut être extrêmement vigilant à mon sens.

Je sais que ce matin on ne pourra pas aborder

tellement les programmes eux-mêmes. Peut-être pourrions-nous commencer par le programme 4, si on suit la présentation. C'est à peu près tout ce que nous pourrions toucher ce matin. Nous tombons là dans la coordination du développement économique et régional et les interventions de développement régional, les ententes, etc. Je pense bien que le ministre pourra nous renseigner tout à l'heure là-dessus.

Lorsque le ministre parle d'argent neuf en parlant du fonds de développement régional, il ferait mieux de faire attention encore là. Cela est une autre patente avec laquelle j'ai eu certaines expériences.

Nous avons réussi, et cela n'a pas été facile, à convaincre l'Exécutif, le ministère des Finances, le Conseil du trésor et tous les niveaux, malgré toutes les objections qu'on a pu imaginer à gauche et à droite, nous avons réussi dis-je, et je suis fier d'avoir été celui qui était là pour le réussir, à créer un fonds de développement régional. Nous avons les ententes régionales fédérales-provinciales, d'accord, mais ce que je voulais obtenir, c'était un fonds de développement régional purement provincial et qui n'aurait rien eu à voir avec les ententes avec le gouvernement fédéral, c'est-à-dire une volonté politique du gouvernement de consacrer des sommes précises à l'usage exclusif de l'Office de planification et de développement du Québec qui, d'après sa connaissance des dossiers régionaux, peut réellement non pas seulement apporter un éclairage, mais apporter des actions ponctuelles dans les régions. À mon sens, d'avoir gagné cela, c'est important.

Qu'est-ce qu'on met dedans? Là encore on va essayer de vous faire croire n'importe quoi. Je ne blâme pas les gens. Imaginez-vous la marge de manoeuvre qu'on a au gouvernement ces années-ci. C'est entendu que c'est le devoir du ministère des Finances et que c'est le devoir du Conseil du trésor d'être très vigilants et d'essayer de contrôler, de couper, de faire en sorte qu'on puisse arriver à un total qui soit acceptable et potable dans les dépenses gouvernementales. Mais ce principe de la création d'un fonds de développement régional, c'est au ministre responsable de l'OPDQ d'y voir. Nous avons réussi, en principe, à obtenir $50 millions par année. On s'est rendu à $40 millions, $42 millions, je pense que cela n'a pas dépassé $45 millions, et là-dedans on a essayé de nous vendre quelque chose presque à chaque jour: II faudrait inscrire telle chose dans votre fonds de développement régional, il va falloir que vous y mettiez telle chose, il y a tel ministère qui a besoin de telle chose, mettez donc cela dans votre fonds de développement régional. Quand on parle d'argent neuf, c'était une façon d'entrer une partie ou des parcelles de budget régulier dans notre fonds de développement régional. Cela s'est fait, même quand j'étais là et à mon corps défendant.

Aujourd'hui, vous passez de $42 millions ou $45 millions et vous baissez cela à environ $19 millions.

Voyez-vous le travail d'érosion? Vous êtes rendu à $19,7 millions. Le ministre attendra, parce que je ne pense pas qu'il serait juste de lui de- mander cela aujourd'hui, mais soyez assuré qu'on va lui demander ce qu'il y a de réellement neuf qui n'aurait pas été dans les budgets réguliers, lorsque l'exercice sera terminé.

D'abord, on a pris le ministre et on a dit: II est nouveau, on lui enlève tout de suite $25 millions à $30 millions. On va lui dire: Écoute, c'était de la frime. On l'enlève. Même si c'était de la frime, il aurait fallu le garder, parce que là vous acceptez immédiatement sans discussion même de vous faire baisser à $19 millions. Vous êtes parti d'un principe qui s'était établi à $50 millions et vous acceptez cela. Ce n'est pas de votre faute, mais c'est arrivé. Je ne sais pas si c'est entre les deux gouvernements que cela s'est fait, mais je suis sûr que ce qui est arrivé est mauvais. On accepte. Les $50 millions sont rendus à $19 millions même sur papier. Les $19 millions, vous allez vous battre pour les garder en argent neuf et vous ne réussirez pas. Déjà, vous avez dû vous faire vendre de l'argent dans les $19 millions, qui normalement aurait été dans les budgets réguliers. Je suis convaincu de cela.

Ce qui est important, à mon sens, c'est d'essayer de retourner au moins à ces $50 millions qui avaient été acceptés en principe et que, de plus en plus, dans ces $50 millions, on ne mette pas de l'argent qui normalement aurait été dans les budgets réguliers.

Le danger également, c'est que le ministère sectoriel, sachant qu'il y a un programme qui se retrouve dans le fonds de développement régional pour telle région, dise: Pour telle région, on n'a pas besoin d'en mettre dans le budget régulier, parce qu'elle a déjà sa part dans le fonds de développement régional.

Cela, évidemment, a comme effet d'annuler complètement l'esprit qui nous a animés lorsque nous avons créé le fonds de développement régional. C'est pour cela, encore une fois, que je demande au ministre, en toute bonne volonté, en toute objectivité, ayant connu ces arbitrages, d'être extrêmement vigilant et de s'accrocher sur son fonds de développement régional qui lui permettra d'apporter des actions ponctuelles dans les régions qui en ont le plus besoin.

Je n'ai pas besoin de parler de ma propre région, à ce moment. Tout le monde sait que c'est la région la plus défavorisée au Québec, c'est celle qui en a le plus besoin. Cela a été reconnu de tout temps. C'est reconnu par les chiffres du chômage. On a voulu, par le plan de développement de l'Est du Québec, diminuer les écarts. Nous avons réussi en partie. Il faut continuer. Il y a également d'autres régions périphériques. Il y a le Nord-Ouest québécois, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, Charlevoix, enfin toutes les régions. Il y en a tellement qui réellement, dans le monde rural et semi-urbain, ont besoin d'actions ponctuelles.

Le ministre qui dirige l'OPDQ ou qui est le ministre responsable — il y a une nuance — vis-à-vis de l'Assemblée nationale des activités de l'office, se doit d'être vigilant, lui qui est au courant des besoins régionaux peut-être d'une façon intégrée plus que n'importe quel autre ministre sectoriel parce qu'il a l'ensemble du portrait. S'il voit de

temps en temps que telle action ponctuelle pourrait compléter l'action d'un ministère sectoriel, il lui faut quelques fonds pour le faire. Il doit être vigilant vis-à-vis de ce fonds de développement régional.

D'autres de mes collègues se joindront de temps à autre à l'étude des crédits, mais, quant à moi, je voudrais simplement dire que, pour le moment, ce sont simplement des remarques préliminaires que je voulais formuler d'une façon très positive, sans aucune partisanerie quelconque. J'ai trop de respect pour l'office et pour ceux qui en font partie. J'ai trop de respect, d'ailleurs, pour le ministre qui vient d'assumer ces fonctions pour faire autrement que donner encore une fois la chance au coureur et d'encourager l'office à poursuivre son travail. Le côté de la planification est extrêmement important. Je vois que les budgets dans la planification se sont moins détériorés qu'ailleurs. On n'a pas tenu compte de l'inflation, mais on a généralement maintenu les sommes qui étaient là. Par exemple, dans les travaux de planification, on reste à $1,5 million juste. On ne tient pas compte de l'inflation là-dedans. La détérioration est moins visible.

Dans l'aide à la consultation, il y a un petit indice, très petit, on passe de $1 500 000 à $1 565 000, c'est à peu près la même chose mais disons qu'il y a une petite amélioration. Quant à la direction et au soutien administratif, je pense bien que c'est la même chose parce que, là encore, si on tient compte de l'augmentation des traitements, autrement dit, il n'y a pas de détérioration substantielle dans cette partie au point de vue du budget, il n'y a sûrement pas apparence ou volonté d'augmenter quoi que ce soit de ce côté malgré, évidemment, ce que l'on retrouve dans le programme du Parti québécois. Je ne sais pas si c'est une page qu'on a également déchirée au cours du dernier congrès, mais quand on lit le programme, cela tire les larmes des yeux de voir l'intérêt que portait le Parti québécois, avant l'élection, à la planification. Je ne peux pas le lire parce que vous allez tous pleurer: vous allez reconnaître le rôle moteur et toutes ces histoires, et l'intégration du développement du territoire sur les capitales régionales suffisamment équipées, en y concentrant davantage d'activités relevant de l'administration et les services publics dans le cadre d'une politique de décentralisation de l'appareil gouvernemental, de rapprochement des populations desservies, de participation des citoyens à la gestion des affaires publiques, en y augmentant les investissements publics, en y favorisant l'implantation d'industries et de services, etc.

Réellement, je pourrais adopter assez facilement cette partie du programme qui nous dit de s'occuper des régions, de s'occuper de donner un stimulant et d'augmenter les services dans les régions. Malgré tout cela, il semble qu'il y ait un manque de volonté positive du gouvernement de décentraliser et d'être présent par des services à la population. Cela, encore une fois, c'est une responsabilité du ministre. Ce n'est pas toujours facile, il y a des ministères qui ont encore cette mentalité de vouloir tout diriger le Québec et qui ne veulent pas du tout permettre une décentralisation ou donner la moindre autorité aux coordonnateurs régionaux, etc., aux conférences administratives régionales. Il y en a plusieurs qui n'y croient pas encore.

Mais là, il y a eu une sorte de réaménagement chez les fonctionnaires, récemment. Je ne sais pas si cela va aider ou nuire, mais à la faveur de cela, le ministre pourrait peut-être convaincre plusieurs de ses collègues de voir à apporter leur collaboration dans la mise en place dans les régions ou de compléter. Déjà, la mise en place est faite, mais il faut qu'il y ait une volonté de chacun des ministres et de chacun des sous-ministres pour que cela marche, cette affaire, que les conférences administratives cela veut dire quelque chose, et que, ensuite, on les aide par des budgets adéquats.

Je ne veux pas prendre tout le temps, cet avant-midi, pour faire quelques remarques préliminaires. Je voulais simplement, encore une fois, dans une attitude positive, attirer l'attention des ministres qui sont ici, mes collègues de la commission. M. le Président, je voulais tout simplement apporter une attitude que j'ai décrite comme étant très positive et constructive.

Le Président (M. Vaillancourt, Orford): Merci, M. le député de Bonaventure. Avant de donner la parole au député de Lotbinière, j'aimerais avertir tous les députés que la formule que je propose est la suivante: dans le cadre des remarques générales, après que le chef de l'Union Nationale aura parlé, tous les députés qui voudront intervenir de façon générale pourront le faire. Le ministre aura, évidemment, le droit de réplique, et après, nous entreprendrons l'étude du programme 4. M. le député de Lotbinière.

M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, après les remarques préliminaires brèves du chef de l'Opposition officielle, je serais tenté de faire un peu d'humour et dire que tout à l'heure il nous a parlé de sa région qui était dans le besoin, et que, peut-être, le 15 novembre, c'est pour cela qu'on a laissé un seul député libéral et qu'on a enlevé tous les autres.

M. Levesque (Bonaventure): On en a laissé un de l'Union Nationale aussi.

M. Biron: Oui, on a réussi à remplacer un libéral. M. le ministre d'État à l'aménagement, je serai très bref.

Il y a des remarques, tout à l'heure, du chef de l'Opposition qui m'ont frappé parce que moi aussi je voyais l'OPDQ comme le maître d'oeuvre des grands projets de développement économique conçus et mis de l'avant par les autres ministères à vocation économique. Lorsque j'ai regardé le budget, j'ai vu qu'on l'avait diminué considérablement et j'ai exactement la même préoccupation que le chef de l'Opposition là-dessus. Il faudrait peut-être une meilleure action interministérielle, une meilleure action collégiale des ministères.

J'avais noté aussi qu'on connaît les prérogatives, l'esprit jaloux de chacun des ministres, chacun des ministères dans le fond, pour se protéger contre les autres ministères. Habituellement, on sent tout de suite une réaction à collaborer avec d'autres ministères, surtout que maintenant, l'Office de planification et de développement du Québec doit collaborer et avoir la collaboration des autres ministères.

M. le ministre, il faudrait être excessivement prudent dans vos actions là-dessus et faire en sorte que les sommes d'argent que vous voulez dépenser à l'expansion économique du Québec, au développement et à la planification se rendent véritablement au bout, comme ministre responsable vous voulez qu'elles se rendent. Cela prend véritablement une meilleure planification, une meilleure coordination que celles qu'on a eues dans le passé, même si on a eu quelque chose de bien dans le passé. Je crois qu'il faut regarder l'avenir avec confiance et se dire: Qu'est-ce qu'on peut corriger pour l'avenir? J'aimerais, M. le ministre, tout à l'heure, dans votre réponse, que vous nous racontiez le rôle réel, l'orientation bien précise que vous voulez donner à l'OPDQ, compte tenu aussi de cette interaction des autres ministères où vous avez dû laisser des sommes d'argent. J'aimerais que vous nous racontiez un peu ce que vous vous attendez de faire pour être sûr que ces sommes soient vraiment dépensées aux bons endroits.

Est-ce qu'on pourra avoir une stratégie de développement industriel, économique vraiment à l'intérieur du Québec? Je sais que le premier ministre, ce matin, a fait allusion à l'Assemblée nationale. Cela m'intéresse qu'on ait véritablement quelque chose de planifié, que l'office ne soit pas tout simplement un éléphant blanc; qu'on ne dépense pas de l'argent sans qu'il n'y ait de stratégie à long terme de planifiée. J'aimerais, là-dessus, que vous nous assuriez que l'office va véritablement donner une orientation précise au développement économique du Québec, à la planification économique du Québec.

Il ne faudrait pas, non plus, que cet office soit tout simplement un tiroir-caisse des subventions du fédéral ou un appendice du ministère de l'Expansion économique régionale. Il faut véritablement que le Québec décide de ses grandes priorités économiques. Là aussi je crains qu'on ne fasse que transférer des subventions à partir d'Ottawa, passer par Québec, et transférer des subventions quelque part au Québec. Il faut que les volontés de développement économique viennent véritablement du Québec. Il faut véritablement que cette volonté de planification, ces planifications, ces orientations viennent du Québec. Bien sûr qu'on se serve des subventions qu'on peut aller chercher normalement au gouvernement fédéral; qu'on se serve de ces subventions au maximum, mais que véritablement les décisions primordiales, d'importance, viennent du Québec.

On a signé, dernièrement, des nouvelles ententes auxiliaires. J'aimerais aussi un peu vous entendre là-dessus. Bien sûr, ce que vous faites, vous nous l'avez dit. Qu'est-ce qui pointe à l'horizon? Quelles sortes d'ententes continuez-vous à négocier? Je sais que vous continuez à en négocier plusieurs. Dans quel dossier sectoriel, en particulier, allez-vous mettre plus d'énergie et avoir une réponse définitive de la part du gouvernement fédéral? Dans quelles régions, en particulier, allez-vous essayer de négocier ces ententes auxiliaires? Qu'est-ce que cela va faire au niveau de ces régions? Je sais que vous dépensez énormément d'énergie dans ces négociations d'ententes auxiliaires, mais j'aimerais savoir, au cours de la prochaine année, si possible au cours des prochaines années, où vous entendez aller vis-à-vis de ces dossiers sectoriels et régionaux.

Dans l'optique de la motion que nous avons présentée, mercredi de cette semaine, de négocier avec le gouvernement fédéral dans un esprit autonomiste pour le Québec, il est important de s'asseoir et négocier. Je vous félicite d'avoir négocié déjà de nouvelles ententes. Je vous assure de tout notre appui à nous, en tout cas, de l'Union Nationale, vis-à-vis de ces négociations que vous mènerez avec le gouvernement fédéral. Il y a un besoin de relance économique, il y a un besoin de diminution des disparités régionales partout à travers le Québec. Surtout à la suite du sommet économique, il faut se demander s'il ne serait pas bon d'avoir un véritable sommet économique entre Québec et Ottawa pour définir les priorités d'investissement du gouvernement fédéral.

Moi, cela me scandalise un peu, lorsque je vois que le gouvernement fédéral, avec son ministère de l'Expansion économique et régionale va donner des subventions à certaines entreprises. J'aime avoir des subventions, mais j'aimerais que cette planification de la subvention fédérale soit véritablement décidée par le Québec. Je crois que c'est une responsabilité de votre ministère, M. le ministre, d'orienter véritablement l'action du gouvernement fédéral. À l'heure actuelle, malheureusement, il y a deux paliers de gouvernement qui décident d'octroyer des subventions à gauche et à droite. Je suis d'accord pour continuer à avoir des subventions du gouvernement fédéral, d'avoir des subventions du gouvernement du Québec, mais je voudrais au moins une seule planification pour les deux paliers de gouvernement. Je voudrais que l'office de planification puisse faire la planification — cela est dans le programme de l'Union Nationale et qu'on dise: La planification est véritablement faite d'un bout à l'autre par le gouvernement du Québec. Même que j'aimerais avoir un sommet économique entre tous les ministères fédéraux à vocation économique et les ministères à vocation économique du Québec, afin qu'on décide véritablement de la planification de nos investissements, au cours des prochaines années, et que le Québec donne les directives nécessaires de ce côté.

L'initiative du développement de notre province doit venir du Québec; elle ne doit pas venir du gouvernement fédéral. Mais le gouvernement fédéral doit collaborer dans toute la mesure du possible à développer selon les priorités établies par le Québec. Là-dessus, M. le ministre, je vous encourage à continuer vos négociations. Je vous assure de toute notre collaboration.

D'un autre côté, une fois qu'on a négocié avec le gouvernement fédéral, il faut aussi, au niveau provincial, vous l'avez mentionné tout à l'heure, le chef de l'Opposition l'a mentionné tout à l'heure, beaucoup plus de régionalisation. Si on veut décentraliser d'Ottawa vers Québec, il faut être logique avec soi-même et il faut décentraliser aussi de Québec vers les régions. Là-dessus, je suis d'accord avec vous. Il faut que le milieu local soit consulté — vous avez parlé de consultation locale — il faut véritablement que nos Québécois participent à ce développement. Il faut que les agents de l'économie aux niveaux local et régional participent à ce développement, à cette décentralisation, à cette régionalisation. J'aimerais aussi vous entendre là-dessus, non seulement avoir des voeux pieux, mais que vous nous disiez dans votre réponse ce que vous, votre ministère, l'OPDQ s'attendent de faire pour avoir une réelle participation au niveau régional, une réelle consultation et, après cela, des actions au niveau régional, pour que la décentralisation se fasse véritablement d'un bout à l'autre de l'échelle politique.

J'ai quelques autres préoccupations au point de vue du développement, comme l'aspect social du développement. Je crois que vous l'avez noté, tout à l'heure, en parlant de la protection de l'environnement, des terres arables, spécialement dans la grande région de Montréal, dans la plaine du Saint-Laurent. C'est important que l'Office de planification et de développement du Québec devienne un véritable office du plan au Québec et qu'il protège ses terres arables. On sait qu'au Québec, à cause du climat qui n'est pas aussi bon qu'aux États-Unis pour l'agriculture, on doit protéger les régions qui ont les meilleures terres arables, à l'heure actuelle, même s'il semble que certaines régions devraient normalement, à cause de la situation géographique, devenir des régions urbanisées. Mais à cause du peu de superficie de terres arables que nous avons au Québec, je pense qu'elles doivent être protégées d'une façon complète par l'OPDQ.

Maintenant, j'aurai encore quelques questions, mais j'en note en passant quand même. Le dossier précis de Mirabel, où va-t-on avec cela? Je sais que le ministre de l'Industrie et du Commerce nous en avait parlé un peu, mais cela devient une tour de Babel, Mirabel-Dorval. Je crois que l'OPDQ a quelque chose à faire là-dedans. Les mauvais services qu'on a...

M. Landry: Entre Mirabel et Dorval, Charlebois a une très jolie chanson là-dessus.

M. Biron: À part d'avoir une chanson, qu'on ait autre chose de plus efficace.

Je pense que c'est la responsabilité de l'OPDQ de planifier, finalement, de faire développer par d'autres ministères, mais de planifier de dire quels sont les plans de développement autour de Mirabel, autour de l'aéroport même. Où en est-on rendu dans les discussions avec le gouvernement fédéral là-dessus? Quelle va être la participation du fédéral là-dedans?

Un dernier mot, M. le ministre. Vous nous avez parlé tout à l'heure d'un modèle économique du Québec pour la fin de 1977. J'aimerais que ce modèle économique soit le plus rapidement possible disponible pour les membres de l'Assemblée nationale, pour les agents économiques au Québec, afin qu'on sache véritablement dans quelle direction vous voulez aller au cours des prochaines années. J'ai été personnellement dans le monde des affaires, pendant plusieurs années. Lorsqu'on sait d'avance où l'on va, c'est beaucoup plus facile d'investir. Lorsqu'on ne le sait pas, on ne fait qu'attendre.

On attend de voir plus clair dans l'avenir. Ce modèle économique du Québec que vous nous proposez pour la fin de 1977, je vous encourage à le sortir le plus rapidement possible. Si c'était possible de le sortir au milieu de l'été, ce serait extraordinaire pour les investisseurs.

M. Landry: Ce n'est pas possible!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre d'État au développement économique.

M. Landry: Merci, M. le Président. Je voudrais, brièvement, raccrocher mes remarques à celles du chef de l'Opposition officielle et à celles du chef de l'Union Nationale en essayant d'être le plus bref possible, imitant en cela l'un et non pas l'autre.

M. Levesque (Bonaventure): Bien, je ne sais pas! C'est peut-être parce que mon coeur est avec l'OPDQ depuis plus longtemps.

M. Landry: Oui.

M. Levesque (Bonaventure): J'ai laissé parler mon coeur.

M. Landry: C'est effectivement une question de coeur, mais c'est aussi une question intellectuelle et une question d'esprit.

M. Levesque (Bonaventure): En effet.

Autres commentaires généraux M. Bernard Landry

M. Landry: Je voudrais dire au chef de l'Opposition officielle que, dans son exposé où il a fait grand état de l'importance des budgets, il y a là une vue traditionnelle des choses qui n'est pas sans mérite, mais je pense qu'il minimise deux impacts fondamentaux qui ne sont pas directement reliés aux budgets, c'est l'impact intellectuel d'une boîte comme l'Office de planification et de développement.

Le fait de réfléchir profondément et d'avoir un bon appareil statistique et de constatation factuelle de la réalité avant de poser un geste, c'est peut-être plus précieux pour un État moderne que de consacrer des budgets faramineux à des opérations mal planifiées, mal réfléchies et dont l'impact n'est pas proportionnel aux sommes d'argent dépensées. Je pense que l'office aura, s'il se concen-

tre sur des activités intellectuelles de grand calibre et qu'il est en prise directe avec le pouvoir, plus d'impact qu'en répandant à travers les régions les sommes que d'autres ministères sont souvent mieux qualifiés pour répandre et, ce faisant, l'office pourra se concentrer mieux sur les tâches qui lui sont imparties.

Le premier impact minimisé, à mon avis, c'est l'impact intellectuel. Les grands pays occidentaux qui ont réussi leur développement ont, dans un premier temps, réfléchi leur développement, pris les bonnes options, les bonnes stratégies. Je pense à l'Allemagne de l'Ouest, en particulier, mais je pense aussi à la France qui a développé un appareil de réflexion économique absolument prodigieux pour un pays qui reste décentralisé.

Le deuxième impact qui est minimisé par le chef de l'Opposition, c'est celui des mentalités. Là-dessus, je vais lui rendre hommage, en même temps qu'à l'office, pas à lui personnellement, parce que ces réflexions étaient commencées avant qu'il n'arrive et probablement, sûrement que, quand il était là, il n'a pas nui.

M. Levesque (Bonaventure): Merci!

M. Landry: Je veux parler de l'impact régional...

Une voix: On ne peut pas faire de commentaire!

M. Landry: ...de l'action de l'office. Une région peut prendre son démarrage, son "take off" sur le plan économique par un accident venu de l'extérieur, un investissement de $1 milliard décidé à l'étranger. Cela, c'est le cas exceptionnel qui arrive au quart de siècle et parfois pas du tout. Pour certaines régions, cela n'est jamais arrivé. Par conséquent, il ne faut pas trop compter là-dessus.

L'autre dimension, c'est la conscience de développement qui prend forme dans la région. Les habitants de cette région, après avoir constaté dans quelle situation économique ils se trouvent, se sentent, jusqu'à un certain point, acculés au pied du mur et décident de faire quelque chose. Le développement va passer par là. Il ne viendra pas de façon miraculeuse de Québec avec de l'argent; il va venir fondamentalement des réflexions faites dans les régions où des hommes et des femmes vont dire: Personne ne nous sauvera, si nous ne nous sauvons pas nous-mêmes.

Bien sûr, l'État peut apporter un appoint extraordinaire par la suite, faire de la coordination, faire des actions ponctuelles qui vont avoir des rôles moteurs et des rôles de déclencheurs et de catalyseurs dans certains secteurs. Mais ce qu'a surtout fait l'office, par son action régionale, cela a été de faire naître dans les régions une conscience et de mettre en place, dans les conseils de développement, etc., des individus qui réfléchissent à cela quotidiennement, qui ont même conçu d'excellents projets qui ont vu le jour aujourd'hui et d'autres qui verront le jour dans l'avenir.

Ce qui m'impressionne dans les régions et, partant, ce qui m'impressionne de l'action passée, donc du chef de l'Opposition dans ses anciennes fonctions et des gens de l'office c'est que je retrouve des interlocuteurs valables, qui ont de bons dossiers.

Des fois, dans la région, il ne se fait aucune espèce de maudit développement. Mais le fait qu'il y ait cette soif de développement, qu'il y a des dossiers, qu'il y a une information statistique, je pense — c'est peut-être une hypothèse optimiste — que cela va démarrer. Cela n'aurait jamais démarré si ces gens-là, depuis des années, ne s'étaient pas creusé la tête sur des concepts de développement et des stratégies de développement.

Un des facteurs positifs du développement économique au Québec actuellement, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui sont sensibilisés à cette chose. Je dirais qu'il y en a plus que dans certaines économies qui fonctionnent bien, comme en Ontario, où ils seront peut-être ultimement victimes de leur prospérité un peu facile, dans un premier temps, où ils n'ont pas développé une telle conscience. Nous sommes peut-être dans une certaine pauvreté économique dans les régions, présentement, mais il y a une richesse de mentalité, une richesse intellectuelle qui devrait ultimement déterminer la prospérité, qui est au coin de la rue, comme chacun sait.

Deuxième chose que je voudrais dire, elle touche surtout les remarques du chef de l'Union Nationale, et je pense que c'est fondamental que nous tâchions de nous entendre là-dessus. On ne s'entendra peut-être pas sur la souveraineté-association, encore moins sur l'indépendance du Québec, mais faisons en commun la réflexion suivante:

Quand le chef de l'Union Nationale emploie le mot "planification", sur le plan technique il fait une grave erreur. Sur le plan du vocabulaire économique international, le Québec ne peut pas faire de planification, pour une raison qui tient à la nature même de l'État du Québec: il ne possède pas le quart des instruments nécessaires à réaliser cette chose qui, sur le plan économique, est une chose précise, connue en d'autres pays et qui s'appelle la planification.

Dans un pays unitaire, comme la France par exemple, c'est déjà extrêmement difficile de planifier l'économie. Ils ont une série de plans qui ont donné certains résultats, planification indicative, mais même quand l'État central, le seul en France, en l'occurrence, a tous les pouvoirs, c'est déjà une opération extrêmement périlleuse que de réussir la planification. Alors, imaginez-vous au Québec, où vous ne contrôlez ni l'épargne, ni le crédit, ni l'import-export, ni aucune grande décision bancaire, où la marge de manoeuvre véritable de l'État se trouve à Ottawa.

Vous savez que ce gouvernement a réussi à diminuer les taxes et à augmenter ses dépenses, depuis un certain nombre d'années, alors que le nôtre a des marges de manoeuvre ultimes de quelques centaines de millions de dollars, en fin de compte. Alors je demanderais au chef de l'Union Nationale, pour ce débat et pour tous les débats qu'on aura sur la question du développe-

ment, parce que je sais qu'il est passionné du développement, il vient d'un milieu de décideurs, d'essayer d'arriver au diapason avec nous, au moins sur les concepts, que de planification, il n'en faut pas parler. Nous ne pourrons en parler, éventuellement, au Québec, que le jour où nous aurons tous les pouvoirs, et même à ce moment-là, cela restera une opération périlleuse et difficile.

Parmi les grandes décisions qui ont influencé de façon majeure l'économie du Québec, depuis 50 ans, aucune d'entre elles n'a été prise à Québec. C'est la décision de la canalisation du Saint-Laurent, qui a déterminé une rupture des tendances d'investissement entre Québec et Montréal. Je ne veux pas dire qu'on ne devait pas canaliser le Saint-Laurent, mais quand on l'a canalisé, sans négocier avec le fédéral des contreparties pour profiter de nos avantages de la situation, on s'est mis la corde au cou, on a commis un geste suicidaire. Cela s'est décidé à Ottawa.

Je ne veux pas remonter aux chemins de fer, on va se perdre à des époques reculées. Mais outre la canalisation du Saint-Laurent, pensons au pacte sur l'automobile. Le pacte sur l'automobile a déterminé un développement fabuleux en Ontario et, en même temps, il a déterminé une espèce de surchauffe et des tensions inflationnistes. C'est ce qui a amené le gouvernement du Canada, par son action contracyclique, à nous administrer un remède de cheval.

Nous, on n'a pas eu la prospérité du pacte de l'automobile. On n'avait pas tellement la maladie qui était l'inflation, mais on a eu le remède. Et le remède, cela a paralysé notre économie. Et cela ce sont des décisions fondamentales. C'est peut-être un peu choquant, un peu humiliant, mais ni le chef de l'Union Nationale, ni le chef du gouvernement, présentement, n'ont un impact majeur dans les décisions économiques au Québec. Alors, est-ce que cela veut dire qu'on va être fataliste et, ceci dit, on va fermer les livres? Non.

Et là le chef de l'Union Nationale a raison. Ce qu'il faut faire, c'est ce qui est à notre portée. Et les seules choses qui sont à notre portée, c'est l'établissement d'une série de stratégies. C'est cela le mot, si on veut être technique, si on veut se comprendre, et ne pas se parler chinois. Le mot qu'il faut employer c'est le mot stratégie.

C'est une série de stratégies sectorielles de développement disons: amiante, pâtes et papiers, sidérurgie, agro-alimentaire. Cette série de stratégies doit acquérir le plus rapidement possible un certain degré de cohérence et de cohésion entre elles, et là on pourra parler de notre stratégie de développement économique.

Quand je parle de cohérence, je veux dire que les actions dans un secteur doivent déterminer des effets et des impacts sur l'autre secteur de stratégie choisi, et je donne un exemple: Rééquiper pâtes et papiers. Vous savez que c'est dramatique, vous en parlez en Chambre à tous les jours, vous parlez d'usines, vous parlez de cas particuliers, il faut rééquiper pâtes et papier. Il y a présentement des machines à papier au Québec qui ont été installées durant la guerre de 1914-1918. Il y en a qui ont été installées au siècle dernier et qui au- raient plus leur place dans un musée de pâtes et papiers que dans notre appareil productif de pâtes et papiers.

Si on rééquipe il va falloir mettre peut-être le gouvernement, le secteur privé, le secteur public parce qu'on est déjà lourdement implanté dans les pâtes et papiers, peut-être $1,5 milliard là-dedans. Si on le met il ne faut pas que les machines à papier soient achetées en Suède. Il ne faut pas que les contrôles électroniques soient achetés au Wisconsin. Il faut que ce milliard et chaque cent de ce milliard retombe sur un autre secteur stratégique qu'on a choisi qui est acier, construction mécanique, fonderies spécialisées. C'est l'exemple que je veux donner pour dire que les stratégies doivent être cohérentes entre elles.

Si on réussit cela, et nous avons la ferme intention de le réussir, l'Office de planification et de développement du Québec, et en particulier son secteur d'études et de recherches économiques, est peut-être au jour d'un rendez-vous historique. Ce sera peut-être pour ces gens qui sont assis ici derrière nous la période la plus gratifiante sur le plan intellectuel et sur le plan de l'action de leur vie de fonctionnaire si l'on réussit à créer ce pattern.

Le dernier point dont je veux parler — et le chef de l'Opposition officielle y a fait allusion — c'est une des plaies des grands appareils gouvernementaux modernes, c'est ce que j'appelle l'impérialisme des ministères. Cela est vrai que cela a voué aux filières et à la poussière nombre de grands dossiers fondamentaux parce que le ministre A s'est battu à mort contre le ministre B pour en garder le contrôle. C'est un des problèmes majeurs, comme je dis, de toute administration moderne. Nous avons essayé, si je puis dire, de prendre le taureau par les cornés en créant ces ministres horizontaux, qui sont les ministres d'État au développement, qui ont pour fonction d'assurer ta cohérence, d'aider aux arbitrages, de faire en sorte que l'action soit privilégiée à la structure des ministères, à l'influence du ministre, au nombre de conférences de presse qu'il donne, au mérite qu'il recueille.

Cela suppose évidemment, de la part des ministres au développement, de jouer le jeu et de n'être pas des impérialistes eux-mêmes, première chose, pas essayer d'aller marcher dans les plates-bandes de leur collègue sectoriel; donc, une certaine humilité et ouverture d'esprit. La formule en Ontario s'est cassée la gueule, jusqu'à un certain point, parce que les ministres horizontaux sont un peu restés dans l'ombre; c'est entendu qu'un politicien n'aime pas être dans l'ombre, il veut bien lui aussi avoir sa conférence de presse de temps en temps, avoir sa photo dans le journal. En Ontario ils ne l'ont pas fait et personne ne voulait être ministre d'État. Ils ont dit: J'aime bien jouer un grand rôle dans le gouvernement, être un technocrate, etc., mais si c'était cela je serais sous-ministre.

C'est un écueil à éviter. Vous avez remarqué qu'on l'a évité assez bien jusqu'à ce jour. Ceci dit, je vais vous donner un exemple concret de ce genre d'arbitrage qui s'est fait sur une question

lancinante, celle que j'ai prise en exemple de stratégie, celle des pâtes et papiers. Il y a une vieille lutte à l'intérieur du gouvernement du Québec, le chef de l'Opposition officielle le sait et peut-être que d'autres le savent aussi, entre Terres et Forêts et MIC sur cette question, une lutte qui n'est pas allée jusqu'à la violence physique, mais juste avant ce palier dans le passé.

Nous avons réfléchi, au comité ministériel permanent du développement économique, avec le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre des Terres et Forêts. Nous avons convenu, et le règlement s'est fait justement hier, en parfaite harmonie, que cette stratégie serait à l'avenir au niveau ministériel sous la mouvance d'une équipe de trois ministres.

Les ministres sont celui des Terres et Forêts qui sera le leader de l'opération, celui de l'Industrie et du Commerce qui apportera à ce comité le "know how", la mentalité "industrie et commerce" qui est celle du développement, du financement, du contact avec les entreprises et les maisons à l'étranger, et le ministre d'État au développement économique qui, modestement, essayera de faire de la coordination.

Nous avons décalqué une structure de fonctionnaires sur cette structure ministérielle où le sous-ministre des Terres et Forêts présidera le comité. Le vice-président sera celui du MIC, le secrétaire sera le secrétaire général associé au développement économique. Ils s'adjoindront, dans le personnel du MIC, des Terres et Forêts, du développement économique et de l'OPDQ, les experts dont ils auront besoin pour faire en sorte que cette stratégie dans le domaine du rééquipement des pâtes et papiers puisse, à la fin de l'automne, ce qui nous situe quelque part en décembre, être annoncée et avoir donné lieu à toutes les consultations nécessaires avec les syndicats ouvriers et les patrons du secteur en commission parlementaire. La commission parlementaire, donc, sera utilisée au mois d'août sur la question.

Vous pouvez voir que dans cette optique l'Office de planification et de développement je le réitère — on est allé, mon collègue et moi, parler aux fonctionnaires — est peut-être à un virage. Je pense que le chef de l'Opposition sera content de nous dire si on réussit mieux que lui. J'oserais espérer qu'on va réussir mieux que lui, et si on réussit, je serais content qu'il puisse nous le dire parce que cela sera bon pour le Québec.

La dernière chose que vous avez tous compris, c'est que je suis au moins aussi bavard que le chef de l'Opposition officielle.

Le Président: M. le député de Charlevoix. M. Raymond Mailloux

M. Mailloux: M. le Président, je ne voulais pas intervenir aux préliminaires de l'étude des crédits de l'Office de planification, mais quelques réflexions qui ont été faites m'amènent à faire quelques considérations qui seront sûrement moins longues que celles de mon collègue de droite.

J'écoutais tantôt le ministre d'État au déve- loppement économique parler du schéma qu'il avait à l'esprit pour le développement du Québec. Un facteur en particulier a retenu mon attention quand il a parlé des pâtes et papiers. Je demeure dans un comté où il y a deux compagnies qui oeuvrent dans cette activité. Il est indiscutable que l'état de vieillissement dans lequel sont l'ensemble des usines qu'on retrouve au Québec est un état vraiment déplorable, qui pose des problèmes très particuliers. Il faudrait se rappeler certaines raisons des investissements qui ont été faits il y a 80, 90 et 100 ans. On parle beaucoup de ce temps-ci de la Wayagamack. Je me rappelle qu'étant tout jeune, à 17, 18 et 19 ans, lors de mes vacances d'été, avant de faire un stage dans la navigation, on transportait du bois venant de l'Est du Québec vers Wayagamack. C'est une usine qui sera centenaire prochainement. On peut reprocher au gouvernement antérieur de ne pas avoir invité les compagnies qui ont fait la transformation des matières premières à faire la modernisation qui s'imposait.

Il faudrait quand même se rappeler certains éléments de base qui avaient présidé aux décisions qui ont été rendues d'installer des usines de pâtes et papiers un peu partout sur le territoire du Québec. Il y avait deux facteurs principaux qui faisaient qu'elles étaient installées à tel endroit en particulier. C'était d'abord la forêt qui était abondante à ce moment, et la raison principale, c'étaient les cours d'eau qui amenaient le bois à destination sans que cela coûte tellement cher de transport. On n'a qu'à se rappeler les rivières de Trois-Rivières, la rivière Malbaie, la rivière Sainte-Anne, etc. Aujourd'hui, le ministère de l'Environnement, pour des raisons qu'on connaît, a défendu la drave.

La forêt s'est éloignée également, parce qu'il y a peut-être eu des concessions trop importantes qui ont été accordées à ces industries. Quand on regarde le portrait, que ce soit de la rive, ici à Québec, que ce soit de celle de Beaupré, que ce soit de celle de Clermont ou que ce soit ailleurs, on voit que la forêt est rendue aujourd'hui pour l'approvisionnement à 75, 100, 125 milles. Parfois, on va chercher du bois aussi loin qu'en Abitibi pour approvisionner Charlevoix. C'est donc dire que ces éléments, il ne faudra jamais les oublier en demandant aux industries de se moderniser. Il faudra peut-être faire le geste qu'a posé le gouvernement précédent quand il a oeuvré avec avantage pour installer une usine neuve dans la région de Saint-Félicien où est la forêt pour un certain nombre d'années.

Tous les députés sont perplexes quand on regarde les transformations dans le domaine des pâtes et papiers. En effet, quand je regarde l'immobilisation qu'a faite la compagnie Donohue Brothers à Clermont, il y a environ six ou sept ans, qui a permis la modernisation de la quatrième machine, je m'aperçois que la quatrième machine, avec 100 hommes, produit 100 000 tonnes de papier, alors que les trois vieilles machines, avec 450 hommes, produisent également 100 000 tonnes de papier. S'il y avait une baisse radicale dans les prix du papier, on sait pertinemment le geste qui serait posé

éventuellement par cette compagnie ou par n'importe quelle autre.

Également, une réflexion que je voulais faire étant donné que ma préoccupation première, au cours des dernières années a porté sur le réseau routier du Québec, c'est que les compagnies de pâtes et papiers font face, également, en voyant la forêt s'éloigner, à un coût de transport souventefois inacceptable. On a visité dernièrement, nous de l'Opposition officielle, quelques régions du Québec. Cela m'a un peu estomaqué d'écouter parfois 25 ou 30 maires, ou des personnes du milieu appartenant aux organismes quand on leur demandait: Quelle est la préoccupation première dans votre région? C'est le chômage? On en parle beaucoup de ce temps-là. Est-ce un autre problème, le problème constitutionnel, le problème de la séparation? La réponse automatique qu'on nous donnait, ce n'était pas cela. Aussi on peut en être estomaqués en tant qu'intellectuels. La réponse c'était: Donnez-nous un réseau routier acceptable, et on réglera le problème de chômage par la suite. C'est la première réponse qui nous est venue de presque partout, et cela vient en contradiction — ce n'est pas une approche — avec l'Office de planification.

J'ai été membre du Conseil du trésor et je me rappelle que la préoccupation d'un bon réseau routier pour desservir les quatre coins du Québec, ce n'était pas la préoccupation première de l'Office de planification.

Je me rappelle qu'au Conseil du trésor, j'ai dû me battre pendant des années pour ne pas voir le budget baisser de $100 millions ou de $150 millions, pour tous les autres besoins qu'a le Québec. J'écoutais le ministre de l'Expansion économique régionale, quelques semaines après l'élection, qui disait à propos des routes: Ce ne sera pas un développement sauvage; il faudra y penser très sérieusement avant de poursuivre l'amélioration d'un tel réseau. J'ai compris quand même qu'il ne mésestimerait pas l'importance qu'a le réseau routier pour le développement de quelque type d'industrie que ce soit.

M. Levesque (Bonaventure): Le ministre d'État au développement économique.

M. Mailloux: Le ministre d'État au développement économique, lors d'une conférence; je ne me rappelle pas si c'était devant les constructeurs de routes ou ailleurs.

M. Landry: Le vocabulaire va finir par s'imposer tranquillement.

M. Mailloux: M. le Président, quant au développement routier non pas sauvage, mais correspondant à ce qu'espère chacune des régions du Québec, j'ai écouté, récemment, le député de Labelle dire que l'entente n'était pas encore signée quant au développement sectoriel du côté de la voirie.

Il a dit qu'il s'apprêtait bientôt à mettre une conclusion aux discussions qu'il a avec l'autre ordre de gouvernement et que le Parlement serait heureux d'apprendre que ces retards avaient apporté des montants supplémentaires qui seraient annoncés bientôt. Je suis resté franchement estomaqué pour la raison suivante. Quand on vous a posé la question récemment, en Chambre, je ne sais pas lequel de mes collègues — je ne sais pas où en étaient rendues les discussions avec le gouvernement fédéral quant aux ententes sectorielles pour le développement routier — il me semble que vous avez dit, à ce moment, que vous ne pouviez donner les projets parce que l'entente n'était pas encore complétée, signée, mais que vous annonceriez à la Chambre prochainement des montants suffisamment importants pour prouver le bien-fondé des retards de la discussion.

Je ne nie pas, M. le Président, que c'était le droit du nouveau gouvernement de ne pas donner suite, dans l'immédiat, après la période électorale, à l'accord de principe que mon collègue et les gens du MEER, à Ottawa, nous avions accepté avant la période électorale. C'était le droit du nouveau gouvernement de remettre en question les choix que nous avions faits. Ce qui m'a estomaqué quand on m'a dit qu'on ferait des gains par ces ententes, c'est qu'il n'y a pas un cent, d'abord, au budget, actuellement. Le ministre des Finances a effectivement répondu qu'il y aurait un budget supplémentaire qui viendrait devant la Chambre. Il n'est sûrement pas venu encore. Si vous avez gagné quelques millions supplémentaires, je dois quand même vous dire, à ce stade-ci, que vous perdez plusieurs dizaines de millions de travaux parce que, l'an passé, au moment de la période électorale, nous avions $70 millions de crédits périmés, que nous avons retournés au fonds consolidé, qui nous permettaient d'amorcer des travaux immédiatement et dont les plans et devis étaient prêts. En période de printemps, les travaux auraient également continué. Nous sommes rendus au mois de juin et j'imagine que, s'il y a une entente qui est signée bientôt, je ne pense pas, d'aucune façon, que vous puissiez effectuer un montant tellement important de travaux durant le cours de l'exercice financier actuel.

Il faudrait être assez prudent si l'entente que vous signez est aussi valable que celle que nous nous apprêtions à signer nous-mêmes. Mais il y aura toujours un retard d'un an que vous devrez confesser et accuser et, durant ce temps, les régions du Québec sont certainement à la recherche d'un meilleur réseau de communication. On aura beau parler de développement dans n'importe quel secteur d'activité, il ressort que sur les 44 000 milles de réseau routier du Québec, que ce soit pour l'industrie touristique, que ce soit pour l'industrie agricole, que ce soit pour tout autre type d'industrie, on constate quand même qu'à chaque fois qu'il y a un développement qui s'amorce, dans le secteur industriel, si le réseau de communication routier n'est pas adéquat, immédiatement il y a des contraintes qui s'amorcent.

J'ai effectivement, dans Charlevoix, un développement minier qui semble prometteur pour le Québec. Les découvertes qu'a faites le ministère des Richesses naturelles et certains prospecteurs ont mis à jour le plus important dépôt de silice du

monde entier. On vient d'annoncer que l'ALCAN construira une importante usine qui s'approvisionnera, en partie, de ce minerai. Il ressort que quand on regarde vers Chicoutimi ou vers Charlevoix, quel que soit le point d'expédition, les routes ne seront pas dans un état acceptable pour un transport aussi lourd. Quand on regarde, également, le transport qui se fait vers Bécancour, c'est encore le problème d'un réseau routier où cela coûte très cher la tonne pour transporter des minerais.

Il y a une dernière question que je voulais poser également au ministre, c'est que, lors de la discussion que nous avions eue avant la période électorale, il avait été largement question d'une participation fédérale aux installations portuaires devant permettre la mise en place des quais nécessaires au transport du sel des Îles-de-la-Madeleine. Le ministre voudra probablement nous dire, en cours de route, où en sont rendues ces discussions. Je pense que le gouvernement fédéral s'était déclaré largement ouvert à une contribution importante pour une matière première que nous n'avons pas dans le Québec, que nous importons de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. Je pense que le gouvernement actuel veut, aussitôt que possible, mettre ce gisement en état de production. Je sais que le gouvernement fédéral était prêt à respecter un peu la promesse qu'il nous avait faite, à ce moment. C'étaient les seules remarques préliminaires que je voulais faire, M. le Président.

M. Cordeau: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Hyacinthe, seulement deux minutes, s'il vous plaît!

M. Cordeau: Après avoir écouté les explications, tantôt, de M. le ministre d'État au développement économique, je me demande si on ne devrait pas changer le nom de l'office pour l'Office de stratégie des développements du Québec.

M. Landry: Ce n'est pas bête.

M. Cordeau: Maintenant, je tiens à remercier M. le ministre...

M. Landry: On garde le nom pour après l'indépendance.

M. Cordeau: On s'en reparlera.

M. Landry: Je parle de la planification.

M. Cordeau: Je tiens à remercier M. le ministre responsable de l'OPDQ pour avoir débloqué les crédits nécessaires à la réalisation de l'épuration des eaux de la rivière Yamaska. Je le fais au nom de tous les députés de la région et de l'ensemble de la population. C'est un apport qui va être très bien reçu de toute la population de la région.

M. Levesque (Bonaventure): J'imagine que vos remerciements s'adressent à l'ancien gouvernement qui avait...

M. Bisaillon: Qui l'avait polluée.

M. Levesque (Bonaventure): ... commencé le projet, et l'Office de planification et de développement du Québec avait réellement fait des travaux considérables.

M. Léonard: ... regretter...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À l'ordre, s'il vous plaît! Respectons le droit de parole du député de Saint-Hyacinthe.

M. Léonard: Qui avait l'air de le regretter, ce matin.

M. Cordeau: Cela va être juste 30 secondes.

M. Landry: Sur le plan historique, je dois dire quand même que le projet a été commencé au ministère des Richesses naturelles sous l'administration de M. Lesage.

M. Levesque (Bonaventure): Ah bien mon Dieu!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Étant donné qu'à divers articles il y a des baisses substantielles des crédits, si j'ai bien compris les explications, c'est que ces crédits sont allés à d'autres ministères. Serait-il possible de connaître ces ministères et les montants qui ont été alloués à ces différents ministères, plus tard dans vos remarques — ce n'est pas pour aujourd'hui. Ce sont toutes les questions que j'avais pour aujourd'hui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous avise que la commission ajourne ses travaux à mardi matin dix heures, mais pour étudier les crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. C'est la même commission chargée d'étudier d'autres crédits.

(Fin de la séance à 12 h 55)

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