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Version finale

31e législature, 2e session
(8 mars 1977 au 22 décembre 1977)

Le jeudi 1 décembre 1977 - Vol. 19 N° 268

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du livre blanc sur la consultation populaire au Québec


Journal des débats

 

Etude du livre blanc sur la consultation populaire au Québec

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

Reprise des travaux de la commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales.

Les membres de la commission sont les suivants: M. Bertrand (Vanier), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M. Burns (Maisonneuve), M. Gratton (Gatineau), M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Johnson (Anjou) remplacé par M. Charbonneau (Verchères), M. La-berge (Jeanne-Mance), M. Lamontagne (Roberval), M. Lavoie (Laval), M. Lévesque (Taillon) remplacé par M. Fallu (Terrebonne), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Martel (Richelieu), M. Morin (Louis-Hébert), M. Morin (Sauvé), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

M. Burns: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Je vais donner la parole au ministre.

Déclaration du ministre, M. Robert Burns

M. Burns: M. le Président, la semaine dernière, lors de la fin des auditions des mémoires, j'avais laissé entendre que j'aurais peut-être une déclaration à faire lors de la fin de nos travaux relativement à cette commission; déclaration qui serait, dans le fond, une espèce de prélude et en même temps une espèce de sondage préalable à la rédaction du projet de loi. J'aurais, ce matin, une déclaration à faire pour, en ce qui me concerne, terminer les travaux de la commission en espérant une réaction de la part des membres de l'Opposition là-dessus, qui vont peut-être me donner un certain nombre d'orientations relativement à la rédaction du projet de loi qui devrait, comme je l'ai mentionné, M. le Président, être déposé vers le 15 décembre. Du moins, c'est le souhait que je formule, si tous les aspects techniques sont réglés. Evidemment, comme on le sait, il faut passer d'abord par le Conseil des ministres à qui j'adresserai un mémoire lui demandant de m'autoriser à préparer un projet de loi pour le comité de législation. Ce comité m'autorisera par la suite, si le projet de loi est conforme au mémoire présenté au Conseil des ministres, à déposer un projet de loi vers le 15 décembre. C'est un peu, en tout cas, l'objet de cette rencontre de ce matin.

M. le Président, ainsi que je l'ai déclaré lors de l'ouverture de la présente commission parlementaire, le gouvernement croit que les campagnes référendaires doivent se dérouler suivant des règles semblables à celles qui régissent déjà nos campagnes électorales. En procédant de cette façon, le gouvernement souhaite assurer la plus grande égalité des chances possible entre les options en présence et permettre aux électeurs québécois de s'exprimer librement et en toute connaissance de cause.

Comme* je l'ai déjà mentionné, le seul but d'une campagne référendaire est d'éclairer le mieux possible les électeurs sur le choix qui leur est proposé. Pour cela, il faut non seulement permettre à chaque citoyen de faire valoir son point de vue, mais il faut également l'y aider en évitant que l'opinion des citoyens ne soit noyée sous un déluge de propagande orchestrée par ceux qui détiennent les pouvoirs d'argent. Le référendum doit être l'occasion d'un débat d'idées et non celle d'une genre de publicité.

C'est, d'ailleurs, la philosophie qui s'est progressivement développée dans notre droit électoral à partir de la loi limitant les dépenses électorales jusqu'à celle toute récente réglementant le financement des partis politiques. En empêchant les abus, ces lois favorisent l'expression d'opinion des citoyens et garantissent une certaine égalité des chances entre tous les protagonistes. Il en va exactement de même pour les référendums. C'est pourquoi le gouvernement a proposé que les règles qui assurent la démocratie en temps d'élections puissent également garantir la qualité du débat démocratique au moment des référendums.

Je suis donc très heureux de constater que la majorité des mémoires présentés à la commission, notamment ceux du Barreau et de la Commission des droits de la personne, a donné son accord à ces objectifs généraux.

Je me permettrai de citer ici, en entier, la conclusion du mémoire de la Commission des droits de la personne: "La Commission des droits de la personne souscrit aux objectifs du livre blanc: la démocratisation de nos institutions politiques; l'association directe des électeurs à la gouverne de l'Etat; l'élargissement progressif de la participation populaire. "La commission se réjouit, de continuer cette conclusion, de retrouver dans le livre blanc sur la consultation populaire du Québec, le principe fondamental de l'égalité entre les individus tel que reconnu par la Charte des droits et libertés de la personne, et l'autre principe non moins important affirmé dans la Loi sur le financement des partis politiques: celui d'une meilleure réglementation des revenus et dépenses politiques. "Elle met en garde, cependant, le législateur sur les atteintes possibles aux libertés fondamentales qui pourraient finalement avoir des effets contraires aux objectifs poursuivis, notamment au niveau de la participation des citoyens au débat et au niveau de la démocratisation de nos institutions politiques. "Ces libertés sont, comme on l'a vu, les libertés d'opinion, d'expression et d'association. C'est

maintenant au gouvernement en tant que législateur qu'appartient le fardeau de prouver que la législation sur la consultation populaire au Québec ne portera pas atteinte à ces libertés."

C'est dans cette perspective que s'inscrit ma déclaration d'aujourd'hui. En effet, la formule de regroupement que le gouvernement a proposée dans son livre blanc, celle des comités nationaux, a soulevé des interrogations, des doutes et même des oppositions de la part dé certains groupes qui ont témoigné devant notre commission.

Dans mon discours d'ouverture, j'ai pris soin de bien préciser que cette formule n'était, dans notre esprit, qu'un moyen d'atteindre les objectifs recherchés et que, si de meilleures formules nous étaient proposées, il me ferait plaisir de les soumettre à mes collègues du Conseil des ministres et, éventuellement, à l'Assemblée nationale.

Je crois que tous les membres de cette commission conviendront que, malheureusement, peu de formules de rechange nous ont été suggérées au cours de nos travaux. J'ai quand même demandé à mes collaborateurs de poursuivre leur réflexion tant pour préciser la méthode proposée dans le livre blanc que pour imaginer d'autres hypothèses de travail qui garantissent à la fois les droits fondamentaux des électeurs et l'égalité des chances entre les options.

Je voudrais maintenant faire part à la commission de trois de ces hypothèses. La première est celle évidemment, du livre blanc dont nous avons voulu préciser et — j'insiste sur cet aspect — assouplir les règles. Vous verrez que, dans les hypothèses envisagées, il y a un certain assouplissement qui est suggéré quant à l'hypothèse qui avait déjà été mise de l'avant dans le livre blanc. La deuxième hypothèse met l'accent sur les partis politiques et la troisième propose un système d'enregistrement ouvert à toutes les groupes.

Personnellement, je continue de croire que, tout bien considéré, la formule des comités nationaux demeure, une fois qu'on en a précisé la portée, la meilleure façon d'atteindre les objectifs recherchés. Aussi, j'espère que tous, à la réflexion, voudront s'y rallier de façon à travailler positivement à son amélioration et à sa mise en oeuvre. Cependant, si l'une des deux autres hypothèses que je soumets aujourd'hui, ou même toute autre qui pourrait être formulée par des représentants de l'Opposition, devait engendrer un plus grand consensus, je serais disposé à la soumettre à mes collègues du Conseil des ministres dans le cadre de la préparation du projet de loi que je compte déposer à la fin de la présente session.

Relativement au modèle électoral, pour bien comprendre les modalités des diverses hypothèses que je soumets aujourd'hui, il faut se référer au cadre général qui prévaut en matière électorale, puisque c'est ce cadre qui sert de modèle aux formules que nous pouvons imaginer pour la conduite des campagnes référendaires. En matière électorale, il existe ce qu'on appelle une période électorale qui commence avec l'émission des brefs et se termine avec la proclamation du candidat élu. Cette période, dépendant des cir- constances, peut durer de quatre à neuf semaines. Durant cette période, seul un candidat ou un parti politique peut, par son agent officiel, faire ce qu'on appelle des dépenses électorales, et cela jusqu'à un maximum fixé par la loi. Une partie de ces dépenses est, à certaines conditions, remboursée par l'Etat.

La définition de ce qui constitue une dépense électorale englobe tous les frais encourus pour favoriser ou défavoriser un candidat ou un parti ou encore pour promouvoir ou combattre son programme. On permet cependant la publication, dans un journal ou autres périodiques, d'articles éditoriaux, de nouvelles, de chroniques ou de lettres de lecteurs, pourvu que ce soit suivant la manière ordinaire.

Il en va de même pour la diffusion par un poste de radio ou de télévision d'une émission de nouvelles ou de commentaires. De plus, cette définition n'inclut pas le travail bénévole ou les frais de voyages qui ne sont pas remboursés. Quant aux contributions que les partis politiques sont autorisés à recueillir pour financer leurs dépenses, elles sont régies par la Loi régissant le financement des partis politiques, adoptée en août dernier. Ces contributions doivent provenir d'une personne qui est un électeur et elles ne peuvent dépasser pour un même électeur, la somme de $3000 dans une année. Un crédit d'impôt est accordé à l'électeur pour une partie de ses contributions.

Pour ce qui est de la nomination des officiers d'élection, elle est faite sur la recommandation du premier ministre ou du chef de l'Opposition ou de leurs représentants dans le district électoral. Chaque candidat peut avoir un représentant dans les bureaux de scrutin.

Voyons maintenant suivant quelles modalités il est possible de transposer ce cadre électoral à la poursuite d'une consultation populaire. Quant à la première hypothèse, c'est-à-dire celle qui est présentée dans le livre blanc, c'est celle des comités nationaux. La formule des comités nationaux qui est décrite dans le livre blanc vise tout simplement à remplacer les partis politiques et les candidats, qui sont les acteurs d'une campagne électorale, par des organisations spécialement constituées pour faire valoir chacune des options.

Au cours de la période référendaire, seules ces organisations pourraient faire des dépenses référendaires. Le total de ces dépenses serait limité à un maximum de $0.50 par électeur. La période référendaire commencerait le jour de l'émission du bref référendaire et se terminerait à la fin du jour du scrutin. Elle durerait entre 30 et 60 jours. Ce n'est donc que pour cette période, j'insiste là-dessus, cette période de quelques semaines avant le vote que la loi édicterait certaines règles visant à assurer une certaine égalité entre les options de façon à permettre aux électeurs de mieux comprendre les enjeux en discussion.

Tant que cette période référendaire ne serait pas commencée, toutes les dépenses seraient permises, comme c'est le cas pour les partis politiques en dehors de la période électorale. La défi-

nition de ce qui constitue une dépense référendaire serait inspirée de la définition de ce qui constitue une dépense électorale.

Il n'y aurait donc aucune restriction quant à la publication dans un journal d'articles éditoriaux, de nouvelles, de chroniques ou de lettres du lecteur, ou encore quant à la diffusion par un poste de radio ou de télévision d'une émission de nouvelles ou de commentaires.

De plus, tout individu pourrait librement fournir, sans rémunération, ses services personnels et l'usage de son véhicule pour la défense de l'option de son choix. C'est donc dire, M. le Président, que n'importe qui pourrait se prononcer, faire des discours, envoyer des communiqués à la presse et travailler bénévolement pour l'option de son choix. Je tiens à insister sur ce point parce qu'on a soulevé au cours des travaux de la commission un certain nombre de questions qui laissaient croire que les gens ne pensaient pas que ces choses étaient possibles.

De plus, M. le Président, afin de s'assurer que tous gardent la possibilité d'exprimer pleinement leur opinion, la définition de "dépenses référendaires" n'inclurait pas les dépenses exigées par l'organisation de réunions. Je pense que cela est relativement nouveau dans le débat. Je veux dire, à ce moment-là, la location de salles, la convocation des membres, etc. N'importe qui pourrait donc faire des dépenses à l'intérieur d'une limite raisonnable — pour le moment, pour les fins de la discussion, j'ose lancer le chiffre de $300 par réunion — sans qu'il soit nécessaire de passer par un comité national.

Si de telles règles étaient adoptées, on peut donc constater que ce serait essentiellement les dépenses de publicité payée et d'organisation rémunérée qui, pendant la période référendaire, seraient réservées aux comités nationaux. Or, ce sont précisément les deux domaines où l'unité d'action s'impose de toute façon.

Tous les citoyens et tous les groupes resteraient complètement libres de se réunir pour faire valoir leur point de vue et exprimer leur opinion par les moyens ordinaires. Ce ne serait qu'au niveau de la publicité payée et du travail d'organisation rémunérée qu'il leur faudrait passer par les organisations prévues à cette fin pendant les quelques semaines de la période référendaire.

Quant aux revenus dont ces comités nationaux auraient besoin pour financer leur campagne, ils proviendraient de trois sources. D'abord, d'une subvention de départ que l'Etat accorderait à chaque option, de façon égale; soit dit en passant, le montant de cette subvention serait fixé par l'Assemblée nationale et pourrait varier d'un référendum à l'autre. Evidemment, si un référendum suscite moins d'intérêt qu'un autre je présume que l'Etat, sagement, décidera que le montant mis à la disposition des différentes options sera moindre que lorsqu'un référendum est plus largement sollicité et discuté par la population.

Deuxièmement, les partis politiques autorisés en vertu de la Loi régissant le financement des partis politiques pourraient transférer des fonds aux comités nationaux jusqu'à concurrence d'une limite totale, pour chaque option, de $0.25 par électeur. Enfin, les comités nationaux pourraient recevoir directement des contributions de la part des électeurs jusqu'à un maximum de $3000 pour un même électeur. Cette somme n'affecte en rien — j'insiste sur ce point, car c'est une question qui nous a été posée au cours de nos auditions en commission parlementaire — le droit d'un électeur de contribuer à des partis politiques au cours de cette même année, conformément aux dispositions de la Loi régissant le financement des partis politiques. Cela veut dire, M. le Président, que dans une année référendaire, si je peux m'expri-mer ainsi, un même électeur pourrait donner $3000 au parti politique de son choix, tel que c'est prévu par la Loi régissant le financement des partis politiques et, en même temps, il pourrait donner $3000 à une option qu'il favorise à l'occasion d'un référendum.

Après le référendum, chaque comité national devrait faire un rapport public de ses revenus et de ses dépenses suivant le modèle utilisé en matière d'élections.

L'hypothèse no 2, M. le Président, vise directement les partis politiques. Une deuxième formule consisterait à reconnaître comme auteurs de la campagne référendaire les partis politiques autorisés en vertu de la Loi régissant le financement des partis politiques. Seuls ces partis pourraient faire des dépenses référendaires pendant les quelques semaines de la période référendaire.

La définition de ce qui constitue une dépense référendaire serait la même que dans la première hypothèse. C'est donc dire que les citoyens et les groupes pourraient librement se réunir et exprimer leur opinion sur les moyens ordinaires. Essentiellement, seules les dépenses de publicité et d'organisation devraient obligatoirement être faites pendant la période référendaire par l'agent officiel d'un parti politique autorisé.

Il faudrait, évidemment, s'assurer que, quel que soit le nombre de partis politiques qui favorisent une option, le total de leurs dépenses ne dépasse pas le maximum fixé par la loi, ceci en vertu du principe exprimé au début de mon intervention de l'égalité de chances à toutes les options.

On pourrait y arriver en exigeant que chaque parti autorisé qui désire participer à une campagne référendaire en informe le directeur général des élections en précisant le montant d'argent qu'il désire engager dans la campagne. La loi pourrait prévoir un délai, à partir du moment où la question aura été approuvée par l'Assemblée nationale, pendant lequel cette inscription pourrait être faite.

A la fin de ce délai, le directeur général des élections ferait le total des dépenses envisagées par les partis qui se sont prononcés pour chaque option et, dans le cas où ce total serait inférieur ou égal au maximum permis, il autoriserait les partis à faire ces dépenses. Dans le cas contraire, c'est-à-dire si jamais le total est supérieur au montant autorisé par le directeur général, ce dernier réunirait les partis et leur demanderait de s'entendre entre eux sur une réduction des dépenses prévues de façon à se conformer au maximum fixé

pour chaque option. En cas de désaccord, on pourrait envisager une formule d'arbitrage qui pourrait être prévue dans la loi.

Il serait difficile, évidemment, de prévoir, dans la loi, la solution à toutes les difficultés qui pourraient surgir entre les partis politiques favorisant la même option quant à des questions comme l'utilisation du temps d'antenne mis à la disposition de chaque option ou la répartition de la subvention de départ accordée par l'Etat. On pourrait cependant prévoir régler ces questions au moyen d'un protocole d'entente conclu entre les partis, sous la surveillance du directeur général dos élections.

Quant à la nomination des officiers du référendum et des représentants dans les bureaux de scrutin, elle pourrait être faite, pour chaque option, par le chef du parti favorisant cette option ayant le plus grand nombre de députés à l'Assemblée nationale.

Après le référendum, chaque parti devrait faire un rapport public des revenus perçus et des dépenses faites pendant la période référendaire.

Une troisième hypothèse, M. le Président, serait celle de l'enregistrement des participants. Cette troisième formule, inspirée des deux autres, est cependant, je dois l'avouer, beaucoup plus complexe. Elle permettrait à toute personne ou à tout groupe qui désire faire des dépenses référendaires, au sens où nous l'avons déjà défini, de s'enregistrer et de faire autoriser le montant des dépenses qu'il lui sera permis de faire pendant la période référendaire. Il reviendrait au directeur général des élections de déterminer ce montant suivant une procédure analogue à celle que nous avons décrite dans l'hypothèse précédente pour les partis politiques.

Cette approche a les avantages et les inconvénients de la diversité. Elle permettrait la participation simultanée des partis politiques, des regroupements volontaires, des associations et des individus, mais elle rendrait — je dois le mentionner — plus compliquée la transposition en matière référendaire des mécanismes électoraux, notamment en ce qui concerne le contrôle des revenus et des dépenses ainsi que la nomination des officiers du référendum et des représentants dans les bureaux de scrutin.

Rappelons que, dans cette hypothèse comme dans les deux autres, les citoyens pourraient librement continuer de se réunir et exprimer leur opinion par les moyens ordinaires.

Seules, les dépenses relatives à la publicité payée ou à l'organisation rémunérée devraient être faites par une personne ou un groupe enregistré et cela uniquement durant les quelques semaines de la période référendaire. J'insiste sur ce point. En faisant sa demande d'enregistrement, un groupe, sauf s'il s'agit d'un parti politique déjà autorisé, devrait désigner un agent officiel qui serait le seul à pouvoir autoriser une dépense référendaire au nom de ce groupe. De plus, le groupe, par la voix de son président et de son agent officiel, devrait s'engager à ce que l'argent devant servir à payer pour ces dépenses ait été recueilli conformément aux dispositions de la Loi régissant le financement des partis politiques.

Le président et l'agent officiel du groupe seraient personnellement responsables de cet engagement. Ils seraient passibles d'amende en cas de contravention. Un électeur pourrait s'enregistrer individuellement. Il devrait alors s'engager à ne dépenser que son propre argent et le montant autorisé par le directeur général ne pourrait dépasser, comme c'est le cas pour la loi 2, $3000, de façon à respecter les dispositions de cette Loi régissant le financement des partis politiques. Il reviendrait au directeur général des élections de s'assurer que les participants enregistrés pour chaque option ne puissent, au total, dépenser plus d'argent que le maximum fixé par la loi.

Si les intentions de dépenser d'une option particulière devaient excéder ce maximum, le directeur général aurait l'obligation de réunir les participants enregistrés pour cette option et d'aider à l'établissement, par entente, d'une répartition équitable entre les participants. En cas de désaccord, une procédure d'arbitrage pourrait être prévue. La répartition de la subvention de départ de l'Etat et du temps d'antenne gratuit, de même que la désignation des officiers du référendum et des représentants dans les bureaux de scrutin devraient être traitées suivant un protocole d'entente conclu entre les tenants enregistrés d'une même option sous la surveillance du directeur général des élections. A défaut d'entente sur un protocole de ce genre, la répartition serait faite uniquement entre les partis politiques autorisés, suivant les règles de la deuxième hypothèse.

Après la tenue du référendum, chaque participant aurait l'obligation de faire un rapport public des sommes qu'il a perçues et dépensées pour les fins de la consultation populaire.

Voilà, M. le Président, un effort que nous avons fait, qui n'est peut-être pas parfait, mais jusqu'à maintenant je n'ai pas eu, au cours de l'examen des différents mémoires qui nous ont été présentés à la commission de la présidence du conseil de solutions alternatives qui m'ont été suggérées. Chaque fois qu'on s'opposait à l'organisation, au système des organisations nationales, si vous voulez, des comités nationaux ou appelons-les les organisations parapluie, les comités parapluie, je demandais aux gens qui s'y opposaient: Est-ce que vous avez une solution alternative à nous soumettre? A chaque occasion, on m'a dit: Non, je n'en ai pas. Malgré tout cela, on a fait l'effort chez moi, au sein de mon cabinet, d'essayer de trouver d'autres solutions. On vous propose, non pas comme suggestion, mais pour fins de discussion, deux autres hypothèses, en plus des comités parapluie. Celle des comités formés par les partis politiques uniquement et celle des comités formés par n'importe qui. Tout individu, tout groupement, et qui que ce soit qui voudrait s'inscrire pourrait fonctionner.

Ce sont les trois hypothèses. C'est un effort de réflexion que nous avons fait. Je tenais à soumettre cet effort de réflexion à la commission, avant que nous mettions fin aux travaux de la commis-

sion pour aller individuellement, du côté du gouvernement, préparer un projet de loi qui vous sera soumis, comme je le mentionnais au tout début de mon intervention, vers la mi-décembre.

Ce sont les remarques que j'avais à faire relativement aux travaux de cette commission et relativement aux résultats et aux efforts que nous avons faits au sein de mon ministère pour essayer de trouver d'autres solutions. Si l'une ou l'autre des deux autres hypothèses que nous avons soumises parait rallier un plus grand consensus, je vous avoue que je serai tout à fait ouvert à la possibilité de suggérer au Conseil des ministres d'inclure cette hypothèse dans l'éventuel projet de loi.

C'est avec cette ouverture d'esprit qu'en ce qui me concerne, je termine mes interventions au sein de la commission de la présidence du conseil.

Le Président (M. Laplante): Merci, M. le ministre. M. le député de Laval.

Commentaires de l'Opposition M. Jean Noël Lavoie

M. Lavoie: M. le Président, je dois vous dire on n'est pas impressionnés par ce document, par cet effort. Je ne peux me retenir de vous dire vraiment combien nous sommes peu impressionnés par ce document de travail.

On se demande pourquoi avoir convoqué cette commission ce matin, pourquoi avoir dérangé les membres de la commission, pourquoi avoir dérangé les membres de la tribune de la presse. Non seulement on n'apporte pas de réponses aux questions que les témoins ou les députés se sont posé, mais vous posez d'autres questions sans apporter, encore moins, des réponses.

A notre avis, c'est simplement du tape-à-l'oeil, c'est une perte de temps totale. Le ministre entend peut-être se donner bonne conscience en ce faisant, mais en ce qui nous concerne, on ne peut pas marcher dans cet exercice pseudointellectuel. Encore une fois, le gouvernement ne répond d'aucune façon aux vraies questions, aux questions soulevées par l'Opposition officielle, par les autres Oppositions, ni, en somme, aux questions que se pose toute la population. Entre autres, je pense que le ministre était à Drummondville, hier soir.

M. Burns: Lundi soir. M. Lavoie: Lundi soir. M. Burns: Oui.

M. Lavoie: Les gens vous ont posé des questions.

M. Burns: Oui, oui.

M. Lavoie: Vous n'apportez même pas de réponses d'aucune façon.

M. Burns: Quelles questions.

M. Lavoie: On se demande si vous êtes... Je ne vous ai pas interrompu.

M. Burns: Vous m'avez posé une question, vous.

M. Lavoie: On a l'impression que vous êtes sur le mauvais côté de la barre. Vous feriez un sacré bon témoin. Vous auriez dû comparaître à la commission et vous êtes mal placé de ce côté-ci. Ce sont seulement des postulats et des hypothèses que vous faites.

Nous sommes, après un an de pouvoir...

M. Burns: On est rendu à ce stade. M. Lavoie: A trois mois...

M. Charbonneau: Ce n'est pas un projet de loi.

M. Lavoie: A trois mois du livre blanc, à deux semaines à peine du dépôt du projet de loi, puis on n'est pas plus avancé. Au contraire, non seulement le ministre et son gouvernement ne répondent pas aux questions, mais ils nous proposent trois choix ce matin tout à fait impossibles à mettre en pratique. Il le dit lui-même dans son document.

Ce document, je le considère comme une dissertation de cégépien. C'est tout ce que c'est votre document. Ce gouvernement continue à leurrer la population en la gardant dans l'incertitude et l'ignorance au sujet de cette aventure référendaire. A ce jour, tout ce que nous avons pu savoir du ministre c'est que lui, personnellement, serait favorable à une question appelant un oui ou un non comme réponse.

M. Burns: Le premier ministre aussi.

M. Lavoie: II n'a même pas pu s'engager, pas plus que le premier ministre d'ailleurs, à ce que, entre autres, la question soit bilingue. En somme, aucune assurance sur quoi que ce soit, même pas sur les fameux comités nationaux ad hoc. D'ailleurs, il détruit lui-même son argumentation sur ces comités, sur l'obligation des carcans, dans son document. Je n'ai qu'à citer un paragraphe: "La période référendaire commencerait le jour de l'émission du bref référendaire et se terminerait à la fin du jour du scrutin. Elle durerait entre 30 et 60 jours — et sur cela vous avez bien insisté, tout à l'heure, même en sortant de votre texte — ce n'est donc que pour cette période de quelques semaines avant le vote que la loi édicterait certaines règles visant à assurer une certaine égalité entre les options, de façon à permettre aux électeurs de mieux comprendre les enjeux en discussion. Tant que cette période référendaire ne serait pas commencée, toutes les dépenses seraient permises, comme c'est le cas pour les partis politiques en dehors de la période électorale".

Vous reconnaissez vous-même les carcans que vous voulez imposer sous l'écran des chances égales, tout en flirtant avec des accrocs aux droits

fondamentaux en disant: C'est uniquement pour quelques semaines. Vous voyez que cela n'a aucun effet. Si les gens, les groupes voulaient...

M. Burns: Est-ce que te député me permet une question?

M. Lavoie: Après, d'accord? M. Burns: D'accord.

M. Lavoie: Si les groupes dépensaient $100 000...

M. Burns: II s'est couché de bonne heure hier!

M. Lavoie: ... ou $200 000 pour installer des plaques sur les voitures, pour faire des macarons, pour faire de la publicité, l'impression et tout se feraient avant la campagne référendaire. Quel effet cela aurait-il? Vous n'avez pas confiance en la population du Québec. La population, pendant 30 jours ou 60 jours, se ferait-elle leurrer par ce que vous appelez une avalanche, un battage de publicité?

M. Burns: Est-ce que...

M. Lavoie: Après, d'accord?

M. Burns: Après, la question.

M. Lavoie: Vous démolissez vous-même votre obligation d'encarcanement dans votre document; vous êtes sur la défensive partout. A deux ou trois endroits, vous dites: C'est uniquement pour quelques semaines.

Vous démolissez une autre chose dans cela. On a toujours demandé une loi spécifique. La raison d'être d'une loi spécifique pour chaque référendum est dans votre argumentation, quand vous dites que la contribution de l'Etat devrait varier d'un référendum à l'autre. Des référendums à gogo, il n'y en aura pas. Il va y en avoir très peu de référendums. Il devrait y avoir, comme en Angleterre, une loi spécifique, soit sur le zonage des terres agricoles, soit sur l'euthanasie ou sur l'énergie nucléaire. Ce devraient être des lois spécifiques parce que le modus operandi va changer d'un référendum à l'autre. Vous démolissez vous-même votre affaire d'une loi-cadre dans votre document de ce matin.

La quasi-totalité des organismes entendus en commission — d'ailleurs, vous le savez et même on vous l'a dit à Drummondville lundi soir — vous a parlé d'un seul référendum. Le seul référendum qui intéresse les Québécois aujourd'hui, c'est celui sur l'avenir constitutionnel du Québec. Il n'y a pas autre chose. Il n'y avait que vous qui aviez le pas, parce que les 28 organismes qui sont venus se faire entendre, pour leur quasi-totalité, n'ont parlé que du référendum constitutionnel; ils n'ont pas parlé d'une loi organique des référendums.

M. Burns: Pas 28, 26 organismes.

M. Lavoie: La quasi-totalité des organismes entendus en commission nous a parlé d'un référendum en particulier, je n'ai pas à le nommer. Au moins la moitié des mémoires se disent d'accord avec une loi spécifique sur l'avenir constitutionnel du Québec au sein du Canada. Suite à l'audition des mémoires, l'Opposition officielle se sent davantage justifiée de maintenir sa position du début, à savoir une loi spécifique, une seule question claire, nette et précise demandant aux Québécois s'ils veulent continuer à faire partie du Canada, oui ou non, comme en Angleterre, quand on leur a demandé s'ils désiraient continuer a appartenir au marché commun, oui ou non. C'est ça que les Québécois veulent. Les péquistes veulent dire non à l'appartenance au Canada et 85% des Québécois veulent dire oui à l'appartenance au Canada.

M. Charbonneau: C'est extraordinaire!

M. Lavoie: Une question bilingue et même trilingue, si on veut vraiment respecter les premiers habitants, les premiers occupants du pays; la liberté d'association, d'opinion et d'expression pour les raisons que je vous ai mentionnées tout à l'heure; la tenue d'un référendum le plus tôt possible, ça urge; l'engagement du gouvernement à respecter la décision de la population et à ne pas tenir des référendums à répétition sur l'appartenance du Québec au Canada.

Le refus du gouvernement d'accepter ces conditions normales et raisonnables ne fait qu'ajouter au climat d'incertitude dont l'influence néfaste, voire désastreuse sur l'économie, ne cesse de se manifester de jour en jour. Le ministre se targue de s'être inspiré du "fair play" et de l'expérience britanniques. Il devrait cesser au plus tôt de le dire, car ce n'est pas du tout ce qu'il propose. Laissez-moi vous dire que le ministre a une définition bien à lui de l'inspiration qui, dans ce cas, s'apparente grandement à celle de l'improvisation. On n'y retrouve même pas une apparence d'inspiration ou d'imagination. Sur un des aspects importants, à savoir le regroupement obligatoire, le document que nous présente le ministre ne fait que confirmer l'impraticabilité d'un contrôle aussi strict que celui qu'il nous propose; pourtant, en Grande-Bretagne, on s'en était rendu compte dès le début.

Il faut également relier à ce point toute la question de la liberté d'opinion, d'expression et d'association. Encore une fois, la Commission des droits de la personne est venue confirmer que les appréhensions et les objections de l'Opposition officielle étaient loin d'être sans fondement. Pourquoi ne pas tout simplement suivre l'expérience britannique, non pas en la déformant, comme le fait le ministre, mais en la suivant à la lettre?

Depuis le début, l'Opposition officielle réclame que cette expérience britannique soit calquée par le Québec. Pourquoi le gouvernement s'obstine-t-il à ne pas vouloir le faire, tout en se permettant, par contre, de clamer continuellement qu'il reprend l'expérience de la Grande-Bretagne? J'irai même plus loin, M. le Président: L'Opposi-

tion officielle est d'accord que la contribution de l'Etat soit réduite de façon appréciable. Il ne faut pas oublier qu'en Grande-Bretagne, c'est un montant total de $500 000, 125 000 livres sterling pour chacune des options, 250 000 livres sterling, $500 000, qui furent mis à la disposition des deux groupes et ce, pour 35 millions d'électeurs, grosso modo, 55 millions de population, 35 millions d'électeurs, soit environ 11/2 cent, contribution de l'Etat pour la campagne référendaire. Ici au Québec, c'est $0.50 au lieu de 11/2 cent par électeur, pour un total de 4 millions d'électeurs, $0.25...

M. Burns: C'est faux.

M. Lavoie: ... $0.25 à chaque option...

M. Burns: Vous savez fort bien que c'est absolument faux ce que vous dites. Il n'y a pas de montant maximum...

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît, M. le ministre de la réforme parlementaire, je vous donnerai un droit de réplique tout à l'heure. C'est juste pour le bon fonctionnement de la commission.

M. Burns: Ecoutez, ce n'est pas exact, M. le Président. Non, mais c'est inexact ce que le député est en train de dire.

M. Lavoie: Bon vous pourrez répondre. Vous me corrigerez, M. le Président, ou le ministre me corrigera, ce que j'ai compris, dans le livre blanc, c'est que chaque option aurait le droit de dépenser $0.50.

M. Burns: Oui, mais vous parlez de la contribution de l'Etat.

Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît. S'il vous plaît, M. le ministre.

M. Lavoie: Oui il y aurait possibilité de contribution de l'Etat, on a parlé de $0.25. Très bien, vous me corrigerez tout à l'heure.

M. Burns: Non, on n'a jamais parlé de cela, vous avez mal lu le livre blanc, c'est pour cela que vos commentaires sont complètement... Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise! Ce sont les partis qui sont limités à $0.25 par électeur quant à leur contribution à une option.

M. Lavoie: Vous pourrez me corriger, je le dis encore sous toute réserve, mais c'est mon impression. Quelle serait la contribution de l'Etat?

M. Burns: Elle n'est pas fixée. Elle n'est pas fixée.

M. Mackasey: Ce n'est pas encore...

M. Burns: Cela fera partie de la discussion à l'Assemblée nationale.

M. Mackasey: Chaque fois que le Gallup poll sort il en ajoute plus...

M. Lavoie: De toute façon, nous trouvons que...

M. Burns: Lisez-le, le livre blanc, vous allez être pas mal meilleur critique à ce moment-là.

M. Lavoie: Un instant. Un instant, M. le Président, c'est 35 fois plus ici qu'en Angleterre, la contribution envisagée. Quand on connaît...

M. Charbonneau: Elle n'est pas fixée, elle ne peut être envisagée.

M. Lavoie: ... le coût d'un tel référendum, l'opération référendaire c'est $10 millions, c'est le coût d'une élection normale. Le ministre omet de nous parler d'un référendum test, d'un "dry run", avant la tenue du référendum réclamé par tous. Cela ne peut plus continuer ainsi. Le débat sur la question constitutionnelle dure depuis presque dix ans au Québec. L'Opposition officielle est convaincue qu'il faut faire confiance à la population, que cette population est intelligente et suffisamment informée pour faire la part des choses et décider elle-même de son avenir, sans qu'il soit nécessaire de l'enfermer dans des carcans et de brimer sa liberté d'expression, d'opinions et d'associations.

Que le gouvernement réponde une fois pour toutes aux questions, que le gouvernement dévoile immédiatement la date envisagée du référendum. Que le gouvernement nous présente une loi spécifique que la population demande sur le référendum, sur l'avenir constitutionnel du Québec. Que le gouvernement propose dans cette loi spécifique une question claire, nette, précise, pour savoir si, oui ou non, les Québécois veulent continuer à faire partie du Canada, s'ils veulent continuer à s'appeler Canadiens. C'est ce qu'ils veulent dire les Québécois. Que le gouvernement n'oblige pas les groupes et les individus à se regrouper dans des organisations parapluie, que le gouvernement ne brime pas la liberté d'expression d'opinions et d'associations. Que le gouvernement s'engage à être lié par le verdict de la population. Que le gouvernement s'engage à ne pas tenir de référendums à gogo. Que le gouvernement suive à la lettre l'expérience britannique. Que le gouvernement tienne le référendum au plus tard d'ici six mois.

Si vous voulez faire une copie conforme de la loi anglaise, il y a quatre ou cinq pages sur les référendums. Faites-en une copie conforme et, d'ici Noël, nous adopterons votre loi. Copiez-le l'exemple britannique; vous en avez une copie, c'est cinq pages, puis d'ici Noël on va vous la donner cette loi et on pourra faire le référendum, aller devant la population avant l'été prochain.

M. Mackasey: ... le référendum national au mois de juin.

M. Charbonneau: Ah, parce qu'il a été décidé...

M. Lavoie: Que le gouvernement respecte ces conditions et l'Opposition officielle l'assure de son entière collaboration. L'Opposition officielle s'engage même à étudier et à adopter, d'ici Noël, une loi spécifique qui répondra aux exigences tout à fait légitimes que je viens d'énumérer. Si c'est vrai, comme le ministre le disait le 15 novembre, qu'il n'a jamais fermé la porte — c'est le 15 novembre cette année — qu'il n'a jamais fermé la porte relativement au livre blanc sur quoi que ce soit, il est maintenant temps de le prouver.

Si le gouvernement demeure sur ses positions et décide d'imposer les règles du jeu qu'il a lui-même déterminées et qui ne s'apparentent nullement à celles qui ont présidé à la tenue du référendum en Grande-Bretagne, la population aura été trompée et sera en droit de conclure que la transparence est un mot que le gouvernement devra à tout jamais bannir de son vocabulaire, et que le référendum est une vaste supercherie, une fumisterie dont les conséquences sur l'économie québécoise, et même canadienne, ont déjà coûté beaucoup trop cher.

De plus en plus, il faut se rendre compte que le gouvernement n'est pas prêt à tenir le référendum et qu'il est tiraillé, poigné avec son référendum, M. le Président. Ce que nous voyons, c'est un exercice de jonglerie, de dissertations, comme vous faites actuellement. Un an après la venue au pouvoir, trois mois après le livre blanc, à moins de deux semaines du dépôt de la loi, on n'est pas plus avancé. On en est rendu au point de se demander sérieusement s'il y en aura jamais un référendum sur l'indépendance, tellement vous êtes tiraillés avec le problème. J'ai terminé, M. le Président.

M. Burns: Sérieusement.

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Question de règlement.

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais profiter d'une question de règlement pour déplorer le fait que le leader de l'Opposition officielle n'ait pas cru bon de nous donner une copie du texte.

Le Président (M. Laplante): Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Verchères. Je vous rappelle à l'ordre.

M. Roy: Ce sont des commentaires.

Le Président (M. Laplante): Si vous voulez prendre la parole, je suis prêt à accepter votre nom sur la liste.

M. Charbonneau: M. le Président, j'aurais trouvé d'une décence élémentaire... C'est une question de règlement, voyons donc! Ce n'est pas sur le fond de l'intervention, voyons donc! C'est une question de règlement sur la procédure.

M. Roy: Je regrette, ce n'est pas une question de règlement. M. le Président.

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Burns: Ecoutez-le, il va vous le dire si ce n'est pas une question de règlement. Vous ne savez même pas écouter.

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous voulez exercer un droit de réplique tout de suite, M. le ministre, ou si vous laissez parler le député de Mégantic-Compton auparavant?

M. Charbonneau: M. le Président, est-ce que je peux terminer mon intervention?

Le Président (M. Laplante): Non, monsieur. J'ai jugé que ce n'était pas recevable. Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Verchères. M. le ministre, est-ce que vous exercerez un droit de réplique après chaque intervenant de l'Opposition?

M. Burns: Non, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Mégantic-Compton.

Une Voix: Merci pour la copie de l'Union Nationale.

M. Fernand Grenier

M. Grenier: On vous a remis copie du document, qui n'en est pas un de réplique à la déclaration faite par le ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire puisque nous avions compris qu'il s'agissait d'un résumé d'une perception qui était celle de l'Union Nationale sur les débats de la commission parlementaire. Nous aurons, à une autre occasion, le temps, et nous jugerons de l'à-propos des commentaires sur le dépôt du document du ministre d'Etat à la réforme parlementaire, ce matin.

Au terme des audiences publiques de la commission parlementaire de la présidence du conseil sur le livre blanc sur la consultation populaire proposée, au nom du gouvernement, par le ministre d'Etat à la réforme parlementaire, au nom du parti de l'Union Nationale, j'aimerais formuler certains commentaires.

Au début de nos travaux, mon collègue, le député de Richmond, avait fait un exposé dans lequel il livrait la position de notre parti face au livre blanc, ainsi que l'attitude que nous entendions adopter durant les séances de la commission. Il faisait également état à cette occasion de certaines interrogations que nous avions sur certains

aspects de la proposition gouvernementale, ainsi que de certaines craintes ou appréhensions sur la portée d'autres aspects du livre blanc. Enfin, il manifestait notre intention d'explorer, avec les membres de la commission et nos invités de l'extérieur, certaines avenues ouvertes par le gouvernement.

J'aimerais maintenant, en quelque sorte, faire sommairement le point de nos travaux et de notre réflexion sur la consultation populaire au Québec, avant d'aborder, très bientôt, nous le croyons bien, l'étude du projet de loi que le ministre d'Etat à la réforme parlementaire déposera à l'Assemblée nationale.

Nous avons eu l'occasion, au début et à plusieurs reprises au cours de nos travaux, de manifester notre solidarité au parti ministériel dans sa volonté de procéder à la définition d'une loi organique des référendums, plutôt qu'à chaque fois que le besoin s'en ferait sentir d'adopter une nouvelle loi spécifique pour chaque référendum à tenir. Nous disons, en cela, vouloir doter la Législature québécoise d'un magnifique outil démocratique qui lui permettrait de consulter directement la population et obtenir d'elle son avis sur ce qu'elle souhaite et attend de son gouvernement comme attitude sur un sujet bien précis.

Nous voyons dans la définition et l'application d'une loi organique de la consultation populaire un moyen d'associer plus directement les citoyens à la gouverne de l'Etat et, en cela, une amélioration de la démocratie au Québec.

Tout dernièrement, lors des études de la commission, j'ai eu l'occasion de spécifier, à cause de notre régime bipartite, l'opportunité peut-être plus pour le Québec que tout autre pays, de se doter d'une pareille loi à cause de la majorité de nos députés qui sont élus minoritairement. Il faut changer le système ou bien permettre à la population de s'impliquer dans plus de sujets importants.

Ainsi, dans un contexte donné sur une question d'importance, un citoyen pourra manifester clairement son accord ou son désaccord sur une proposition gouvernementale précise sans pour autant porter un jugement de valeur sur l'administration générale du gouvernement. S'il s'avérait qu'une proposition gouvernementale devait être défaite, cela ne signifierait en rien que la population retire sa confiance au gouvernement, mais bien plutôt que, sur une question précise, elle n'est pas de son avis.

Les scrutins généraux existent. Ils sont régulièrement tenus, justement, afin de juger l'administration d'une équipe et de l'opportunité de lui réitérer ou non la confiance populaire. D'une façon plus spécifique, l'Union Nationale voit, dans la définition et l'adoption d'une loi organique sur le référendum, l'occasion de définir tous les mécanismes et rouages de la consultation populaire sans être embarrassé de l'émotivité et de la passion qui se donneront fatalement libre cours sur chacune des matières sujettes à consultation populaire. Nous ne pouvons, bien sûr, personne oublier qu'une des premières applications spécifiques de la loi de la consultation populaire se fera sur l'avenir constitutionnel du Québec. Nous voyons là une raison plus que valable pour justifier notre appui à une loi organique. Gardons cette éventualité à l'esprit. Elle constitue assurément une des plus sérieuses questions qui devront être posées à la population québécoise. Assurons-nous de définir un mécanisme qui lui garantisse pleine et entière confiance, autant dans le moyen mis à sa disposition pour se prononcer que sur l'authenticité et la représentativité de la volonté populaire exprimée.

Imaginons un instant ce que serait un débat sur une loi spécifique de la consultation populaire sur l'avenir constitutionnel du Québec. Toutes les questions de forme baigneraient dans une mer d'émotivité et de passion complètement déchaînée, tout comme la question de fond. Par une loi organique, nous évitons cela. Il s'agit de définir parfaitement et objectivement les questions de forme pour ne garder ensuite dans le débat que ce qui doit essentiellement y être, soit la question de fond.

Au chapitre de la question, il nous apparaît superflu de dire que nous la souhaitons simple, limpide et intelligible par tous. Elle ne doit pas comporter de multiples options qui empêcheraient une interprétation claire de la réponse de la population. Nous maintenons notre position de créer un conseil du référendum qui aurait pour mandat de suggérer au gouvernement la formulation du texte de la question à être posée aux citoyens lors d'un référendum.

Au cour's de nos travaux, nous avons d'ailleurs sur ce point obtenu l'assentiment de nombreux intervenants, dont celui du Barreau du Québec. Notre position est faite en vue de garantir l'étanchéité de l'outil de consultation et accroître la confiance populaire dans le mécanisme du référendum.

Malgré l'assurance que nous avons eue du ministre d'Etat à la réforme parlementaire que son gouvernement serait moralement lié par le résultat de la consultation, nous souhaitons voir dans la loi un article qui consacrerait cet engagement. Du fait que nous souhaitons voir le gouvernement s'engager moralement à respecter le résultat d'un référendum et malgré le caractère consultatif de celui-ci, nous croyons qu'il y aurait lieu, sinon de définir une majorité requise, du moins de fixer un taux de paticipation pour que la consultation référendaire puisse être tenue pour valable et représentative de la volonté populaire québécoise.

Dans ce sens, également, nous souhaitons voir le gouvernement spécifier, dans la loi, que pas plus d'un seul référendum sur une même question puisse être tenu au cours d'un mandat gouvernemental. Nous sommes toujours d'avis qu'il est heureux que le scrutin référendaire s'effectue selon les procédures prévues pour la tenue d'une élection générale.

Pour ce qui est du droit de vote, au cours de nos travaux, nous avons acquis la conviction qu'il n'y a pas lieu d'abaisser l'âge de la majorité pour un scrutin 'éférendaire et que tout comme pour la tenue d'une élection générale, l'âge de 18 ans de-

vait être l'âge de la majorité politique. Par ailleurs, nous sommes enclins à aller dans le sens de la proposition gouvernementale de lever certaines incapacités de voter frappant les juges, le Protecteur du citoyen, les substituts permanents du procureur général et les prisonniers.

Cependant, à part ceux du dernier groupe, nous nous interrogeons sur l'opportunité de leur permettre d'adhérer au comité commis à la promotion d'une option et à y militer comme de simples citoyens. Leur crédibilité et la qualité de leur travail ne pourraient-elles pas être en cela compromises? La levée des incapacités ne pourrait-elle être faite que pour le droit de vote, tout en exigeant d'eux une discrétion quant à leurs intentions de vote? Nous souhaitons voir la loi expliciter ce point.

A l'instar de la Commission des droits de la personne, ainsi que de la presque totalité des intervenants au cours de nos travaux, nous sommes toujours quelque peu mal à l'aise lorsque nous confrontons l'aspect du livre blanc qui a trait à la formation des organisations à la Charte des droits et libertés de la personne. Ainsi que nous le déclarions à l'ouverture de la commission, nous croyons que ce chapitre du livre blanc tend à vouloir brimer les libertés démocratiques d'expression et d'association. Le ministre n'a pas su nous rassurer à ce sujet et nous attendons de lui qu'il fasse la preuve, dans la loi à venir, que les libertés fondamentales ne subiront aucun préjudice.

D'autre part, nous souscrivons à la volonté gouvernementale d'assurer des chances égales à tous, tout en procédant à un contrôle des revenus et des dépenses. Les délais pour la durée de la discussion en Chambre, tout autant que les délais accordés aux parlementaires pour la constitution d'un comité provisoire nous apparaissent nettement insuffisants. Dans le second cas, un délai beaucoup plus long devrait être prévu, car il ne faut pas s'illusionner; le fait de regrouper sous un même chapeau ou, pour employer l'expression consacrée, au sein d'une organisation-parapluie les tenants d'une option n'implique pas nécessairement que, même s'ils font front commun sur une question, ils sont susceptibles de faire l'unanimité immédiate sur les structures et les compositions du comité national qui dirigera cette organisation pendant la campagne référendaire, tout comme sur la nomination d'un président ou d'un agent officiel.

Ces organisations regrouperont des gens de toutes tendances et de toutes allégeances, des représentants de diverses formations politiques, tout autant que des corps intermédiaires et des groupes de pression. Un consensus devra s'établir entre eux qui, la veille encore peut-être, étaient des adversaires acharnés et qui se verront, du jour au lendemain, obligés de travailler dans la collégialité. Il faudrait sérieusement prévoir un délai qui permettra humainement à tous ces éléments de s'ajuster.

En ce qui a trait au premier cas, soit celui de la durée de la discussion en Chambre sur la question à poser, nous sommes d'avis qu'un débat res- treint de 25 heures est beaucoup trop limité et qu'il doit être sérieusement allongé.

D'autre part, l'Union Nationale a acquis la conviction, au cours des travaux de la commission, que le texte de la question ne doit pas être présenté à l'Assemblée nationale sous forme de motion, mais bien faire l'objet d'une loi spécifique. On demande que les débats entourant son adoption soient ceux de tout projet de loi, à savoir trois lectures, avec le temps dévolu aux parlementaires pour s'exprimer tout au long du processus législatif.

De plus, il devra être spécifié dans la loi organique sur la consultation populaire qu'une commission parlementaire sera convoquée pour entendre ce que la population aura à dire sur le libellé de la question après la première lecture de la loi spécifique dont elle fera l'objet. Enfin, M. le Président, j'aimerais conclure en assurant, une fois de plus, le ministre d'Etat à la réforme parlementaire, ainsi que les membres de la commission que l'Union Nationale, fidèle à la ligne de conduite qu'elle s'était donnée au début de nos travaux, entend maintenir, tout au cours du processus dans lequel nous sommes engagés, son attitude positive, constructive et dégagée, autant que faire se peut, de toute connotation partisane afin de contribuer à doter la Législature québécoise d'un merveilleux outil au service de la démocratie.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Beauce-Sud.

M. Fabien Roy

M. Roy: Merci, M. le Président. Je pense que la déclaration du ministre, ce matin, nous prouve que la formule recherchée n'est pas encore trouvée et que nous nageons dans l'incertitude quant aux modalités qui devront être mises sur pied pour la tenue de ce référendum.

Au tout début, j'étais favorable à une loi organique générale qui pourrait être utilisée dans le cas de la tenue d'un référendum sur la question constitutionnelle. Je pense que, sur le plan théorique, cela va très bien. Mais, sur le plan pratique, nous ne voyons pas comment cela pourrait s'appliquer et je pense que le ministre, dans les trois options qu'il nous a offertes ce matin, nous démontre clairement qu'il est extrêmement difficile de trouver et d'adopter immédiatement l'une ou l'autre des trois formules ou d'en chercher une quatrième.

Je pense, M. le Président, qu'il va falloir au préalable tenir compte du fait que la question constitutionnelle, la question du référendum constitutionnel déborde de beaucoup les cadres du Québec, alors qu'à l'occasion de la tenue d'autres référendums, comme l'a exprimé tout à l'heure le leader parlementaire de l'Opposition officielle, un référendum sur l'euthanasie, un référendum sur l'assurance automobile, un référendum sur les écoles privées ou autres, c'est une question qui ne concerne que les Québécois.

Comment pouvons-nous accepter de nous embrigader, de nous enrégimenter dans des limi-

tes, dans des organismes cadres à l'intérieur desquels il y aurait des limites extrêmement sévères, des limites sérieuses, voire même certains carcans, même si je n'emploie pas le mot avec énormément de vigueur. Il n'y aurait aucune limite pour discuter de la question du référendum, pour toutes les dépenses à l'extérieur du Québec. Je songe à ce moment aux partis politiques fédéraux, qui auront de la difficulté à s'exprimer à l'intérieur du Québec mais qui, à l'extérieur du Québec, pourraient s'exprimer. On peut même aller en Europe s'exprimer sur la question du référendum et avoir une très bonne tribune qui viendrait même inonder le Québec.

On pourrait même aller à New York faire des interventions, exprimer certains points de vue sur la question référendaire qui pourraient avoir, justement, des résonnances jusqu'à l'intérieur du Québec. Que penser des journaux anglophones qui sont publiés à Toronto? Que penser des revues canadiennes? Est-ce que la loi pourrait aller jusqu'à empêcher ces media de voir à limiter à contingenter certaines limites publicitaires? Je sais que ce n'est pas l'intention du gouvernement. C'est absolument impossible.

M. Burns: On ne peut pas.

M. Roy: On le sait, on ne peut pas.' Alors, comment peut-on, à l'intérieur du Québec, nous, Québécois qui sommes les plus directement concernés par cette question référendaire nous poser des obstacles, nous poser des entraves dans l'expression de notre point de vue, dans la diffusion de nos textes publicitaires, alors qu'à l'extérieur du Québec la loi n'a aucune portée? Je ne sache pas que le gouvernement fédéral viendrait imposer une loi sur cette question constitutionnelle et à faire en sorte que, dans l'Ontario et le Nouveau-Brunswick et dans les autres provinces canadiennes, on pourrait être, en quelque sorte, limités et que les gens dans ces provinces, ces régions auraient autant de contingences qu'à l'intérieur du Québec. Ce qui démontre clairement que c'est impossible, à mon avis, sur le plan pratique, je ne dirai pas sur le plan théorique, je souhaiterais réellement que cela puisse s'appliquer sur le plan pratique.

M. Burns: Est-ce que le député me permet une question tout simplement? Est-ce que le député ne reconnaît pas qu'il s'agit du même cas auquel nous avons à faire face, vous comme nous — quand je dis vous comme nous, je veux dire les gens de l'Opposition comme les gens du côté ministériel — lors de n'importe quelle élection? Le premier ministre du Manitoba peut faire n'importe quelle déclaration relativement à une élection québécoise, n'étant pas régi par la Loi électorale au Québec, n'étant même pas contrôlé. Le Vancouver Sun peut sortir n'importe quel éditorial, faire toute la publicité voulue, si vous voulez, en période électorale exactement de la même façon. Sur cela, on n'a pas de contrôle. On ne pourra pas contrôler cela.

Si on veut pousser le parallèle un peu plus loin, est-ce que le député ne reconnaît pas, par exemple, qu'au cours de la campagne référendaire, en Grande-Bretagne, sur le maintien de l'adhésion de la Grande-Bretagne au Marché commun, il était possible qu'en France, à un moment donné, les journaux qui sont lus en Angleterre fassent une certaine publicité sans qu'il y ait quelque contrôle que ce soit à ce sujet. Que voulez-vous, c'est la vie de tous les jours. A partir du moment où vous avez une communication facile entre nations et entre pays et entre territoires différents, c'est un mal nécessaire.

M. Roy: Je comprends très bien les appréhensions du ministre. Je les partage, et je suis conscient des implications qu'il peut y avoir. On ne peut pas comparer la question du référendum constitutionnel à la situation au cours d'une campagne électorale provinciale.

La situation n'est pas la même. Il ne faudrait quand même pas se bercer d'illusions au point de croire qu'il n'y aurait pas de tentatives de faites de la part des autres provinces et surtout de l'Ontario, qui est très près du Québec. Je songe, par exemple, à des limites qu'on pourrait retrouver à l'intérieur d'un poste de télévision situé à Hull qui permet aux gens de s'exprimer. Mais les gens peuvent partir et aller réserver des temps d'antenne à la télévision d'Ottawa, à d'autres postes situés outre-frontières et pouvoir ainsi avoir toute la latitude voulue de s'exprimer comme bon leur semble, sans être aucunement soumis aux contingences qu'on peut retrouver à l'intérieur de la province.

Je n'ai pas de formule à offrir au gouvernement, ce matin, je le dis bien humblement. J'ai passé une partie de la veillée, hier soir, à étudier le document pour essayer de trouver quelque chose, des positions vraiment valables qui permettraient d'améliorer le projet de loi, de faire des suggestions valables au gouvernement. Mais, en premier lieu, pour être en mesure de trouver des formules valables et de guider les travaux de notre commission parlementaire, il faudrait d'abord être certains qu'il n'y aurait qu'une question. Je prends cela à titre d'exemple. S'il n'y a qu'une question posée dans le référendum, il y a deux réponses possibles: un oui ou un non. On peut parler de deux groupes. Il pourrait y avoir deux questions posées dans le référendum. J'ai posé la question au premier ministre à l'Assemblée nationale. Je comprends très bien qu'on n'a pas encore fait un choix définitif là-dessus, mais, s'il devait y avoir deux questions, il y aurait plus de deux réponses possibles. Alors, comment pourrait-on évaluer ou, en quelque sorte, faire une campagne en faveur d'une troisième réponse s'il y a deux groupes autorisés?

Cela me paraît une contingence, à ce moment, qui fait toute la différence quant à une décision gouvernementale qu'il serait définitif qu'il n'y aurait qu'une seule question posée. Si on parle de deux groupes sur le plan national, qu'est-ce qu'il arriverait, par exemple — c'est une question que je

pose — si un parti politique fédéral venait prendre le contrôle d'un des groupes parapluie? Dans quelle situation se trouveraient placés un certain nombre de Québécois?

M. Burns: Je m'excuse. M. le député de Beauce-Sud, mais je pense que le livre blanc empêche toute possibilité d'un contrôle extérieur au Québec. C'est une des assurances qu'on donne, c'est que ce sont les membres de l'Assemblée nationale qui forment la base même du comité.

M. Roy: Je pense que le leader du gouvernement a assez d'expérience politique pour savoir qu'il y a bien des façons de dominer, de contrôler par l'intérieur un mouvement. Il s'agit que des mots d'ordre se donnent, à un moment donné, et on prend le contrôle des structures intermédiaires, des structures régionales et des structures locales, puis le tour est joué, même si cela est sous le chapeau d'un organisme qui nous semble à l'abri de tout soupçon. Ce sont les risques que nous avons devant nous, d'où les difficultés que nous avons encore ce matin de pouvoir déterminer un cadre à l'intérieur duquel nous pourrions évoluer, nous pourrions travailler en toute sérénité et en toute sécurité — non seulement en toute sérénité mais je dis bien en toute sécurité.

Ce sont les observations que je voulais faire au gouvernement, ce matin, de ce côté. Je pense que le leader du gouvernement, dans la page no 5 de son mémoire, dans son intervention de ce matin, dit de façon très objective et très positive qu'il est ouvert à toute suggestion de l'Opposition. Mais comment peut-on réellement faire des suggestions au gouvernement si on ne sait pas d'avance si ce sera une question ou des questions qui seront posées? Je pense qu'il y a un point fondamental dans la détermination et dans la fixation des limites concernant les deux groupes parapluie qu'on appelle les deux grands groupes nationaux. C'est une des limites que nous avons.

J'aimerais également dire qu'il y a une autre difficulté qui survient dans toute cette question, c'est de subventionner les groupes. Il est entendu que, si le gouvernement veut subventionner les groupes, il y a la difficulté d'appliquer la Loi électorale. Selon celle-ci, les subventions sont possibles pour n'importe quelle formation politique, parce que le remboursement de dépenses électorales de l'Etat vient à partir du moment où on a été recueillir un certain pourcentage du scrutin, ce qui permet à des tiers partis et ce qui permettrait à des candidats indépendants qui se présenteraient sous l'étiquette strictement indépendante de pouvoir avoir accès à un remboursement de leurs dépenses électorales.

Si on veut transposer la Loi électorale à l'intérieur de la loi sur les référendums, en vue de compenser pour les dépenses, je ne sais pas quelle est la formule, quelles sont les recherches qui pourraient être faites, qui pourraient permettre de donner justice à tout le monde.

Un dernier point sur lequel j'aimerais attirer l'attention du gouvernement — cela pourrait peut-être clarifier l'orientation de nos travaux pour en venir à trouver une bonne formule — c'est le fait qu'on devrait tenir compte, d'une façon très distincte, de la question du financement de la campagne du référendum via un remboursement des dépenses électorales et la tenue du référendum lui-même. Si on veut subventionner les groupes durant la campagne référendaire, cela ne fait qu'ajouter davantage aux difficultés que nous avons.

Je serais favorable, en ce qui me concerne, à ce qu'on puisse subventionner les groupes s'il y a une question qui laisse le choix de deux réponses, à ce qu'on subventionne deux groupes, Mais à partir du moment où il y aurait deux questions de posées dans le référendum, je verrais très mal que les gens paient des impôts et des taxes pour subventionner un groupe ou l'autre groupe, ou les deux groupes, à l'intérieur desquels une personne ne pourrait pas fonctionner et devrait payer personnellement pour défendre son option s'il devait y avoir deux questions de posées.

Si on s'orientait vers la limite des engagements financiers de l'Etat à la tenue du référendum lui-même, je pense qu'on aurait déjà là énormément de chemin de fait vers la solution des problèmes que le ministre reconnaît lui-même.

Ce sont les observations que j'avais à faire ce matin; je dois dire, en toute sincérité, qu'après ce que le leader du gouvernement nous a dit ce matin — je comprends dans quelle situation il est — nous ne sommes quand même pas plus avancés au niveau de la commission parlementaire parce que nous n'avons pas les prérequis que nous devrions avoir afin de pouvoir nous orienter d'une façon certaine vers des suggestions qui pourraient aider le gouvernement dans la rédaction de son projet de loi.

Le Président (M. Laplante): Je vais vous donner l'ordre des interventions: M. le ministre, M. le député de Gatineau, M. le député de Terrebonne, M. le député de Verchères.

Réponse du ministre

M. Burns: Ce sera très bref, je veux simplement remercier le député de Beauce-Sud, le député de Mégantic-Compton et le député de Laval pour, avec une qualité différente dans chaque cas, nous avoir livré leur réaction au document que je leur ai fait parvenir à l'avance. J'aurais bien aimé que l'Opposition officielle, un peu à l'image du texte qui nous a été livré par le député de Mégantic-Compton, nous fasse des suggestions positives plutôt que de voir dans le texte que je livrais ce matin une attitude qui serait de jeter plus de confusion dans le débat. Bien au contraire, c'est un effort sincère que nous avons fait, comme je l'ai mentionné, de rechercher un certain nombre de solutions.

J'ai bien apprécié, soit dit en passant, la présentation de l'Union Nationale, qui me paraît très positive même si elle n'est pas d'accord en tous points avec le livre blanc. C'est justement ce que je recherchais par cette dernière séance avant que

nous en arrivions à la réflexion finale, si on peut dire, au sein du Conseil des ministres pour présenter un projet de loi au cours du mois de décembre. Le député de Mégantic-Compton a fait un effort sérieux pour nous dire ce que pensait d'avance l'Union Nationale relativement à l'éventuel projet de loi. Je tiens à lui dire, ainsi qu'au député de Beauce-Sud, qu'on va tenir très sérieusement compte des remarques qui nous ont été faites. Les remarques que je fais à l'endroit de l'Union Nationale peuvent s'adresser également au député de Beauce-Sud. On nous a dit: Ecoutez, telle chose, dans votre livre blanc, ne fait pas notre affaire et vous devriez essayer de trouver quelque chose de mieux. C'est un peu le sens du document que j'ai déposé à la commission ce matin; mon exposé d'ouverture, c'était justement un effort de recherche. Ne vous en faites pas, on n'a pas l'impression d'être en pleine possession de la vérité, du côté gouvernemental. On a au moins l'humilité de dire que la suggestion que nous avons faite dans le livre blanc n'est peut-être pas nécessairement la seule et unique, sauf que jusqu'à maintenant je n'ai pas eu, sauf dans le cas de l'Union Nationale, de suggestions très précises eu égard à certaines difficultés que pose l'adoption d'un projet de loi, qu'il soit organique ou qu'il soit spécifique, peu importe.

Mais je n'ai pas eu, à part la suggestion de l'Union Nationale, dis-je, de suggestions très très précises. Alors, je tiens à vous dire, d'abord, mon appréciation pour l'effort que vous avez fait de vous pencher sur le problème. Evidemment, le gouvernement, comme on l'a dit récemment, va faire son lit éventuellement avec un projet de loi qu'il va déposer. C'est là, si, fondamentalement, il y a désaccord entre les diverses approches, qu'on pourra le dire.

De mon côté, la présentation de ma déclaration de ce matin ne visait pas à jeter plus de confusion dans le débat, mais lançait dans le débat une ouverture d'esprit sur un des points qui semblent particulièrement inquiéter beaucoup de gens. C'est dans ce sens que je l'ai fait et c'est pour cela que je voulais entendre un certain nombre de réactions. Là-dessus, M. le Président, je n'ai pas d'autres remarques à faire. Je vais laisser à mes collègues de la commission la possibilité d'intervenir comme ils le voudront d'ici à ce que nous ajournions nos travaux, c'est-à-dire dans à peu près une heure, si on doit se rendre à midi et demi.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Gatineau.

Autres interventions M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, vous comprendrez que, si le ministre n'a pas décelé de suggestions positives dans les propos qu'a tenus le député de Laval, c'est peut-être bien parce que le ministre a déjà fermé la porte à certaines des suggestions que nous faisons depuis le début de la commission et même avant le début de la commission. Nous avons parlé, par exemple, de l'opportunité de procéder par loi-cadre ou par loi organique plutôt que par loi spécifique, et de la nécessité de ne pas brimer les libertés. J'entends, quant à moi, M. le Président, très brièvement, réagir sur deux points principaux, c'est-à-dire justement sur l'aspect de la loi-cadre et, finalement, sur le regroupement des forces et des tenants d'une option autour d'un comité ad hoc dit national.

Sur le premier aspect, le livre blanc indique que le gouvernement se propose de consulter la population chaque fois que cela sera nécessaire pour éclairer le gouvernement et que de telles consultations se feront conformément aux dispositions d'une loi-cadre sur les référendums. Quant à nous, le principe d'une loi-cadre sur les référendums n'est pas acceptable, M. le Président. D'abord, on imagine bien que le recours au référendum sera une procédure exceptionnelle, donc relativement rare. Il n'y a alors pas d'inconvénients majeurs à présenter chaque fois une loi à cet effet à l'Assemblée nationale. Cela permettrait, d'ailleurs, de discuter de la question, de savoir si le référendum proposé est nécessaire — dans le mécanisme que nous livre le livre blanc, il n'y a aucune indication du moment où on pourrait discuter de la nécessité de tenir un référendum sur un sujet donné — ou s'il n'est pas plutôt préférable que le gouvernement, conformément aux principes de notre régime parlementaire, assume lui-même ses responsabilités qui sont celles de décider et d'engager de la sorte sa responsabilité au niveau de l'Assemblée nationale. En second lieu la loi-cadre suggérée par le livre blanc permettrait au gouvernement de faire un référendum à n'importe quel moment, sur n'importe quel sujet, sans exception aucune et selon des règles et une procédure uniformes, sans égard aux matières sur lesquelles il porte.

Or, il y a des inconvénients certains à ce que, par exemple, un référendum ait lieu au même moment qu'une élection générale; je pense que tous en conviendront. Il y a même des sujets qui, de par leur nature, ne peuvent pas ou ne peuvent que bien difficilement se prêter à l'exercice référendaire. Je pense, par exemple, aux droits des minorités qui ne pourraient sûrement pas être soumis à un référendum quelconque et être traités par une majorité. Il pourrait être très difficile également de tenir un référendum sur des questions qui touchent les droits et les libertés fondamentales des individus et des groupes. Il y a enfin, selon la matière faisant l'objet du référendum, des groupes dans la société qui sont plus directement concernés que d'autres par un référendum. Il faut alors, en toute justice et équité, que les règles et les procédures de la campagne référendaire en tiennent compte.

A titre d'exemple, les syndicats auraient sûrement un intérêt particulier dans un référendum qui porterait sur le droit de grève dans les secteurs public et parapublic. En Grande-Bretagne et au Canada, la pratique a toujours été de procéder à chaque référendum par une loi spéciale qui était

complète en elle-même et qui correspondait à la nature du référendum dont il s'agissait. Je répète donc, M. le Président, que nous rejetons l'idée d'une loi-cadre sur les référendums, qui, en raison de son caractère nécessairement général, comporterait des inconvénients pratiques extrêmement graves et se révélerait dans certains cas, profondément injuste et inéquitable sur le plan de la protection des droits et libertés de la personne garantis par la constitution ou la loi.

En cela, M. le Président, nous nous sentons, au terme des travaux de la commission, appuyés par la grande majorité des organismes qui sont venus discuter de leurs mémoires. J'ai fait un bref relevé des organismes qui nous ont fait une présentation. Effectivement, je n'en retrouve que quatre parmi les 25 ou 26 qui sont venus témoigner, qui endossent sans réserves l'idée d'une loi-cadre ou d'une toi organique sur le référendum.

En effet, mis à part le Mouvement national des Québécois et trois sociétés nationales — et j'exclus la Société nationale de l'est du Québec puisque, dans son mémoire, elle fait état de règles spécifiques qui devraient régir les référendums constitutionnels — mis à part ces quatre organismes, l'ensemble des associations ont exprimé de très sérieuses réserves vis-à-vis d'une loi-cadre.

Le Barreau du Québec, par exemple, qui, dans une phrase de son mémoire dit se réjouir de l'intention du gouvernement d'adopter une loi-cadre, qualifie cette réjouissance en disant qu'il relève du législateur d'en décider, et qu'effectivement il proposerait, en plus d'une loi-cadre, qu'il y ait une loi spécifique au moment de la tenue du référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec. Des mouvements comme le Comité d'action positive, le mouvement Québec-Canada, qui nous disaient ne pas avoir d'objections majeures à l'adoption d'une loi-cadre, lorsqu'on les questionnait nous avouaient qu'effectivement il serait, de loin, préférable que le gouvernement procède à l'adoption de sa loi-cadre seulement après avoir tenu le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, à partir d'une loi spécifique.

Est-il nécessaire de rappeler que la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal, le Conseil du patronat du Québec, la Fédération des travailleurs du Québec, la CSN, la Northern Quebec Inuit Association, Participation Québec, les jeunes libéraux de la région de Québec, et combien d'autres se sont catégoriquement opposés à l'adoption d'une loi-cadre sur les référendums?

Donc, M. le Président, il nous semble fondamental que la loi qui régira la tenue du référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec soit d'abord une loi spécifique. A toutes fins pratiques, si le gouvernement entend toujours, au lendemain de ce référendum, se doter d'une loi-cadre ou d'une loi organique pour la tenue de référendums sur d'autres sujets, qu'il le fasse seulement après la tenue du référendum sur l'indépendance.

C'est donc, à mon avis, une suggestion positive de notre part. Le fait que l'Union Nationale soit d'accord avec le gouvernement, j'en suis fort aise, sauf que nous, de l'Opposition officielle, ne partageons pas cet avis. Pour nous c'est fondamental.

Quant à la deuxième question, M. le Président, c'est-à-dire, le regroupement des forces, qui est inspiré, selon le ministre, par le désir du gouvernement d'assurer un contrôle des dépenses et d'assurer une égalité des chances, il me semble, M. le Président, que le texte que nous a livré ce matin le ministre est loin de faire beaucoup de lumière sur le sujet.

A part le fait qu'il nous définit un peu plus précisément ce que seront les dépenses référendaires, et j'admets que cela est positif, cela va dans un sens plus souple, également, à part qu'on précise effectivement que des organismes ou des individus pourront tenir des réunions et engager même des fonds jusqu'à un maximum suggéré de $300, on se retrouve dans la même situation qui a été dénoncée par presque l'ensemble des organismes qui sont venus témoigner, c'est-à-dire qu'il ne faut pas brimer les libertés de quiconque voudrait s'exprimer sur l'avenir constitutionnel du Québec. Bien entendu, cela est relié à notre désir que nous procédions par l'adoption d'une loi spécifique.

Je reprendrai, M. le Président, les propos que nous tenions, au début de cette commission, par rapport à cette question spécifique.

Alors que le ministre nous disait que la décision de procéder par le regroupement, sous des comités dits ad hoc, était fondée sur l'expérience britannique et cela en vertu de deux ordres de considération, c'est-à-dire pour limiter les dépenses encourues lors de la campagne référendaire et permettre aux députés et militants d'un même parti politique d'appuyer différentes options.

Or, en Grande-Bretagne, c'est dans un contexte politique particulier, c'est-à-dire la division interne du Parti travailliste, qui a amené le gouvernement Wilson à suggérer la formation de tels groupes. Ensuite, ces groupes ont été simplement constitués pour permettre au gouvernement de fournir, à chacun des groupes, une aide financière de l'Etat. C'est donner, à notre avis, à l'expérience britannique une interprétation tout à fait fausse que de la traduire ici au Québec dans une forme abusive que celle préparée par le livre blanc sur la consultation populaire.

Si, en proposant la constitution d'organisations ad hoc, le gouvernement voulait ainsi pouvoir aider financièrement les tenants de l'une ou l'autre option, on pourrait alors penser à la formule suggérée. On ne peut très certainement pas, cependant, même pour des raisons de contrôle de dépenses et de revenus des participants à la campagne référendaire, imposer un système qui aboutit à violer carrément la liberté d'expression et d'association des Québécois.

Ce contrôle des dépenses et des revenus pourrait peut-être ne pas se faire d'une façon aussi rigoureuse que souhaitée, sauf au niveau des partis politiques et de la contribution de l'Etat. Mais, entre plus ou moins de libertés, on ne se trompe jamais, M. le Président, en prenant le parti de la protection des libertés individuelles et collec-

tives. C'est d'ailleurs ce qu'ont fait les Britanniques.

Quant à moi, M. le Président, c'est une suggestion positive. Entre brimer les libertés, et assurer un certain contrôle — au dire du ministre ne l'assurer que pendant la période très limitée que durera la campagne référendaire — et laisser chaque Québécois s'exprimer et s'associer de façon tout à fait libre sans avoir ce contrôle, nous de l'Opposition officielle sommes d'accord pour dire: Sacrifions les contrôles et maintenons les libertés. C'est fondamental pour nous. Bien entendu, je n'ai pas de solution autre que celle-là, soit la liberté la plus complète. Je crois que la Chambre de commerce de Québec nous avait fait valoir la difficulté qu'auront ceux qui voudront enregistrer leur abstention en supposant que la question est telle qu'un certain nombre de Québécois veuillent s'abstenir et enregistrer leur abstention. Des trois choix dont le ministre a parlé ce matin, soit dit en passant, les deux choix autres que celui du livre blanc nous ramènent à dire que le moins pire des trois est celui qui est contenu dans le livre blanc, compte tenu des améliorations que le ministre a apportées ce matin. Mais un fait demeure; d'aucune façon, les Québécois qui voudront, pour une raison ou une autre — c'est tout à fait légitime de la part de ces gens — vouloir enregistrer leur abstention ne pourront le faire, ne pourront bénéficier de l'aide financière de l'Etat, ne pourront profiter d'autres avantages que...

M. Burns: Me permettez-vous une question? M. Gratton: Oui.

M. Burns: Je reconnais l'effort positif que démontre actuellement le député de Gatineau dans une certaine recherche quant à améliorer avant le coup, si possible le projet de loi qui sera déposé. Je pose la question en toute candeur, si je peux dire, relativement au point que le député de Gatineau est en train de soulever.

Seriez-vous favorable, dans le cas où vous auriez une question à laquelle on répond par un oui ou par un non, d'avoir une autre option qui soit clairement une démonstration d'abstention, au lieu d'annuler le bulletin purement et simplement comme un abstentionniste peut le faire lors d'une élection en mettant une grande croix sur tous les noms pour signifier qu'il n'y a personne qui l'intéresse là-dedans? Seriez-vous favorable à cela? Je vous pose la question. Je n'ai pas pensé à cela, mais en vous écoutant cette question me vient à l'idée. Seriez-vous favorable, par exemple, qu'il y ait la question: Etes-vous pour ou contre telle option? Oui ou non? Qu'il y ait un troisième carreau qui dit: Abstention?

M. Gratton: Je pourrais répondre très candidement à la question candide que me pose le ministre. Je ne me suis pas penché sur le sujet et je n'ai pas d'études ou d'expériences dont je pourrais lui faire part. Ce que je lui dirai, c'est qu'instinctivement, il me semble qu'il ne devrait pas y avoir de possibilité pour les gens, pour les Québécois de s'abstenir en enregistrant comme telle l'abstention sur le bulletin de vote. Ce que je dis, par contre, c'est que les tenants de l'abstention devraient pouvoir faire de l'information, recevoir l'aide financière de l'Etat, recevoir des contributions des électeurs aussi bien que des partis politiques, devraient pouvoir tenir des réunions, acheter de la publicité dans les media d'information pour faire valoir le point de vue qu'en regard de la question qui est posée au référendum, les Québécois devraient s'abstenir.

M. Lavoie: Et même un autre groupe...

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président.

M. Lavoie: Cela amènerait la création de deux autres organismes.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Laval, vu que j'ai refusé tout à l'heure...

M. Lavoie: C'est pour répondre à la question, il n'y a pas de formalisme en commission parlementaire.

Le Président (M. Laplante): Oui, mais tout de même, je ne voudrais pas causer de précédent. M. le député de Laval, je vous demande...

M. Lavoie: Est-ce que le ministre consent à ce que...

M. Burns: Je consens, M. le Président.

M. Lavoie: On va arrêter de s'enfarger dans la procédure, voyons!

Le Président (M. Laplante): Je l'ai refusé tout à l'heure et je ne voudrais pas recommencer une nouvelle bataille là-dessus.

M. Charbonneau: Non.

M. Lavoie: Je dirais que cela ouvre l'ouverture à deux autres groupes.

M. Charbonneau: On n'aura pas le temps de parler, il y a d'autres députés qui ont participé à cette commission parlementaire.

M. Gratton: D'accord! M. le Président, je terminerai là-dessus. J'espère avoir répondu. J'ai précisé ce que je voulais dire par mes propos sur la question de l'abstention. Il me semble que, comme l'avait souligné la chambre de commerce, c'est un élément sur lequel le ministre avait reconnu devoir se pencher et sur lequel il devrait se pencher. J'espère qu'au moment du dépôt de la loi, on aura... Je n'ai pas de suggestions à faire, sauf que la suggestion très positive que l'Opposition officielle fait, c'est qu'entre plus ou moins de liberté, on choisit plus de liberté et moins de contrôle.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Terrebonne.

M. Elie Fallu

M. Fallu: M. le Président, nous avons été convoqués, ce matin, à une réunion un peu spéciale de la commission puisque cette dernière avait comme mandat d'écouter des témoins alors que nous sommes en train de faire une discussion libre à la suite d'un nouveau mandat donné par l'Assemblée nationale. C'est un exercice un peu rare, inusité à la fin des commissions. C'est même une chance que l'Assemblée nationale se donne ou donne à sa commission, à son émanation, que de pouvoir ensemble, en dehors, allais-je dire, des lignes de parti, puisqu'il s'agit de préparer une législation pour les Québécois, en dehors des tendances personnelles, en dehors des agressivités, une chance, dis-je, de réfléchir sur des problèmes sérieux qui ont été soulevés au moment des auditions et qui, on l'admet au terme de ces auditions, restent, même pour le gouvernement, des questions sur lesquelles, sans doute, il faudra trancher. Mais avant de trancher, on veut se donner la chance d'entendre, d'écouter, de réfléchir en commun, de mettre en commun nos expériences et nos réflexions cumulatives depuis cinq semaines maintenant. Je ne suis pas sûr que tous les partis l'ont compris, mais enfin, ce n'est pas à moi de juger ici.

La commission nous a permis d'entendre un certain nombre de mémoires, quelquefois inégaux, mais pour le moins reflétant assez bien les préoccupations des gens qui venaient formuler leurs réflexions devant l'Assemblée nationale. A la suite de toutes ces auditions, il ressort certaines constantes. Il est vrai que devant le processus même de la législation, il y a une question qui se pose, à savoir qu'on doit faire une loi organique ou une loi spécifique. Il faudra donc que le gouvernement, comme tel, à la suite de ces auditions, prenne une position.

Ce qui est sûr, j'ai eu l'occasion de l'exprimer personnellement au cours de la commission à plusieurs reprises, c'est que je suis favorable, pour ma part, à une loi organique et, en cela, je rejoins l'Union Nationale, si une loi organique nous permet de légiférer en dehors de toute passion.

M. le Président, j'écoutais la réplique, ce matin, du député de Laval et je me disais: Si on était en train de préparer une loi spécifique sur un référendum spécifique, quelles atrocités ne verrait-on pas ici à l'Assemblée nationale! Ce serait une orgie de vocabulaire, de mots, d'intentions, etc. Je n'hésite plus du tout à ce qu'ensemble, sans passion, comme le dirait Tacite, et sans haine, on puisse réfléchir à une forme de loi qui soit la plus parfaite possible. Je crois que la commission, suite aux auditions, est relativement d'accord qu'un référendum, dans la situation constitutionnelle qui est la nôtre, ne peut être que consultatif.

Néanmoins, chacun a demandé que le gouvernement se sente moralement lié par les référendums, par l'expression populaire. Je crois qu'on l'a suffisamment dit et répété de ce côlé-ci de la table pour que ce soit accrédité. Le gouvernement, également, dans son livre blanc, a fait une proposition aux Québécois. C'est celle de garder les mécanismes connus, de déranger, j'allais dire, le moins de choses possible dans notre tradition électorale ou dans notre tradition parlementaire pour que justement, à travers une loi organique, à travers les mécanismes connus, les dés ne semblent pas pipés au départ, pour que l'aspect formel soit tellement respectable, vivant dans la tradition plus que séculaire du Québec, qu'on puisse avoir au départ confiance dans la mécanique référendaire. Je serais porté à croire qu'une loi spécifique n'atteindrait pas ce but, parce qu'elle pourrait être, au départ, discréditée ou discréditable.

On a sans doute abordé beaucoup d'autres points; celui des participants, l'émission du bref, la durée de la campagne référendaire et bien d'autres choses. Il n'en reste pas moins que, ce matin, au terme de nos travaux, il y a une question, à mon avis, et peut-être pas d'autres, qui garde une certaine ambiguïté ou qui reste ouverte. Elle reste ouverte à cause des droits fondamentaux. C'est celle des regroupements. Quant au contrôle financier, je pense que c'est déjà admis par une longue tradition électorale au Québec. Et qui voudrait, je crois, s'y opposer serait vu comme étant quelqu'un qui veut justement piper un référendum.

Ce n'est donc pas le contrôle des revenus et des dépenses qui est en cause. Nos traditions sont là pour en faire preuve. C'est essentiellement un seul point, soit la technique exceptionnelle, inusitée chez nous, à mettre en application au moment d'un référendum, à savoir le regroupement. La tradition veut, puisque jusqu'à maintenant on n'a connu comme expression de la volonté populaire que les élections, que ce regroupement se fasse dans la tradition des partis politiques. Il m'apparaît évident, au départ, qu'on ne peut pas appliquer une telle technique au moment d'un référendum. Je ne suis assuré d'aucune façon, pour quelque référendum que ce soit, que la ligne de parti — puisqu'il s'agit non pas d'un programme de parti qui serait proposé, mais d'une question très spécifique — que la mécanique des partis puisse convenir au moment d'un référendum.

Un parti, c'est déjà un organisme démocratique. C'est déjà un organisme de discussion et de décision. C'est déjà un organisme à travers lequel les consensus s'établissent préalablement. On n'a qu'à le voir en Chambre. On n'a qu'à le voir aux commissions parlementaires. On n'a qu'à le voir au moment des élections. Ce sont déjà des mécanismes de démocratie.

En l'occurrence, utiliser la mécanique des partis au moment des référendums embrigaderait préalablement des gens devant une question. Quant à une absence totale de regroupement, la liberté, pour moi, il ne s'agit nullement de liberté, il s'agit bien plus de libertinage, car il m'a paru constamment, pendant les auditions, que ceux qui voulaient la liberté totale ne voulaient surtout pas la liberté. Ils voulaient surtout une chose, leur li-

berté personnelle d'abuser de tout le monde, y compris et surtout et davantage par le biais de la puissance financière.

J'en reviens donc, pour ma part, comme membre de la commission, à l'hypothèse des comités nationaux, mais avec certains aménagements. Je ne suis pas assuré d'ailleurs que l'hypothèse 1 remplisse bien encore le mandat qu'il doit remplir. Toutefois, il est pour le moins, par rapport au livre blanc, une étape importante de réflexion, d'ouverture sur ce qui était déjà inscrit dans le livre blanc. Il l'est dans trois sens: le premier, c'est qu'il encadre, il encadre des libertés mais il les encadre librement par le regroupement; il l'est également d'une autre façon, c'est qu'il permet également, il autorise des dépenses de type référendaire ou «électoral» à des individus; troisièmement, il ouvre, puisqu'il y avait des zones d'ombre dans le livre blanc, il permet tout à fait librement, selon les habitudes, sans aucun contrôle, à l'information — ce n'est plus la propagande, il s'agit bien d'information — de jouer librement son jeu.

Donc, à mon avis, l'hypothèse 1 serait à retenir avec évidemment les limites qu'elle entraîne. A l'hypothèse 1, il faudrait peut-être ajouter, pour que chacun puisse se sentir assuré, du point de vue de ses droits personnels — ce qui a été dit notamment au moment de l'audition du mémoire de la FTQ — à savoir que les organismes à l'intérieur de leur propre mouvement, de leur propre organisation soient assurés qu'ils puissent librement, selon leurs structures, selon les mécanismes qu'ils se sont eux-mêmes donnés pour faire l'information interne, puissent être assurés de continuer, au moment de la période référendaire, de faire leur travail d'information envers leurs propres membres. Certes, ce travail d'information a une répercussion à l'extérieur. Mais la répercussion, ce n'est pas par la diffusion massive de leur propre information, par le biais même des mécanismes qu'ils se donnent, ce sont des retombées qui sont de nature information générale, à savoir nouvelles.

Enfin, la commission se termine ce matin et il y aura d'autres étapes. Il y aura l'étape, entre autres, d'une première, très certainement d'une deuxième lecture à l'Assemblée nationale, d'une deuxième lecture article par article où on se retrouvera ici ensemble. Je souhaite à tous mes collègues de l'Assemblée nationale, mes collègues, donc, de la commission, c'est un voeu que j'exprime en terminant, qu'à ce moment, lors de nos prochaines rencontres, nous pourrons, en dehors des lignes de partis, nous doter d'un instrument qui soit le plus perfectionné possible pour que la démocratie soit davantage assurée au Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Verchères.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Je ne parlerai pas tellement longtemps, je veux simplement dire que je suis un peu déçu, ce matin, de voir de quelle façon a été accueillie la déclaration du ministre d'Etat à la réforme électorale et parlementaire. Ce qu'il y avait dans ce texte, ce sont trois hypothèses de travail qui auraient mérité d'être discutées par tous les intervenants.

Je ne pense pas qu'on puisse blâmer l'Union Nationale qui, pour toutes sortes de raisons techniques, ne semble pas avoir eu l'occasion de prendre connaissance, avant ce matin, du contenu de cette déclaration et qui n'a donc pu réagir en conséquence aux différentes hypothèses formulées dans le document. J'espère que dans les prochains jours les représentants de l'Union Nationale, le représentant du Parti national populaire et les gens à l'extérieur du Parlement pourront donner au gouvernement et au ministre leurs réactions sur ces diverses hypothèses.

Contrairement à ce que l'Opposition officielle voudrait essayer de nous faire croire, le véritable problème, en particulier pour le Référendum, avec un grand R, auquel tout le monde pense, ce n'est pas la question d'une loi-cadre ou d'une loi spécifique, c'est de la façon dont cela va se faire, c'est-à-dire que le véritable noeud de la question est que tout tourne autour du regroupement et de la façon dont on va organiser ce référendum auquel tout le monde pense. Dans ce sens, il serait avantageux qu'on approfondisse, avant que le gouvernement finalement fasse son lit, ces différentes possibilités qui sont maintenant sur la table; on pourrait également en avancer d'autres. La commission parlementaire aurait pu avoir un rôle intéressant à jouer; malheureusement, je suis assez déçu des résultats car on n'en a pas discuté, finalement, ce matin. Je n'ai pas l'impression, malheureusement, qu'on a souvent discuté des différentes avenues possibles, des solutions de rechange. C'est d'ailleurs parce qu'on n'en avait pas beaucoup discuté auparavant et qu'on ne nous en avait pas proposé que le ministre et le gouvernement ont décidé d'en proposer d'autres pour ouvrir la discussion et voir s'il n'y a pas une meilleure alternative.

Autant je souhaite que cette discussion se poursuive dans les prochains jours, qu'on ait des réactions de l'Union Nationale et de l'extérieur du Parlement, autant je suis convaincu d'une chose, et encore plus à partir de ce matin, quant à l'Opposition officielle, qu'il n'y a rien à attendre d'eux. Ce qui les intéresse, c'est de discréditer le référendum et les résultats à venir avant même que la loi soit présentée. De toute façon, c'est dans une stratégie de discréditation qu'elle s'est engagée et elle n'en sortira pas. Autant je voudrais bien que le souhait de mon collègue de Terrebonne se concrétise, autant je ne me fais plus d'illusion en particulier à la suite des petites mesquineries du député de Laval. Peut-être aurions-nous pu attendre autre chose de mieux du député de Gatineau; nous avons effectivement eu une amorce de discussion intéressante tantôt sur ces hypothèses, mais j'aurais aimé qu'il approfondisse sa démarche, surtout qu'il avait eu, lui, l'occasion de prendre connaissance du texte, contrairement au député de Mégantic-Compton, plusieurs heures auparavant.

Finalement, l'attitude qu'ils ont prise s'inscrit en droite ligne dans leur stratégie de discrédita-tion; je pense qu'il ne faut pas se faire d'illusion, les Québécois et le public québécois doivent s'attendre que cette stratégie de discréditation continue malgré toute la bonne volonté que le gouvernement pourrait vouloir manifester, malgré la bonne foi qu'il voudrait témoigner et malgré même les appuis qu'il pourrait recueillir d'autres partis de l'Opposition.

Ce sont les remarques que je voulais faire ce matin. Je ne voudrais pas revenir sur les propos de mon collègue de Terrebonne qui couvraient d'autres aspects de la question.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre- Dame-de- G râce.

M. Bryce Mackasey

M. Mackasey: M. le Président, je suis étonné de voir que le député de Verchères ait pris la peine d'engueuler si vous voulez le député de Laval, le député à ma droite ici, le député de Gatineau, parce qu'il avait suggéré que le référendum de la loi-cadre n'est pas exactement parfait. Ce ne sont pas seulement les sentiments du député, ce sont les sentiments de la Commission des droits de la personne. Et il n'est pas question de 1, 2, 3, 4 ou 5 référendums, dis-je, M. le Président, au député de Verchères; il n'y aura qu'un référendum, après cela le gouvernement ne sera plus au pouvoir. C'est logique. Il ferait bien d'avoir le référendum aussitôt que possible, mais il manque de courage pour le faire, naturellement, alors il cache derrière une loi-cadre, au lieu d'une loi, un référendum fondamental sur l'avenir du Québec. Est-ce que le Québec resterait dans un pays uni, oui ou non?

M. le Président, pour souligner le fait que le député de Laval est un député sérieux il y a la suggestion que le livre blanc sur la consultation populaire au Québec soit référé à la Commission des droits de la personne. Je pense que le député était présent durant cette période. On voulait tout simplement souligner au ministre que sa formule était contre les meilleurs intérêts des individus de -la province de Québec. Je me rappelle quand le député de Laval et d'autres députés ici ont avancé cet argument, que le gouvernement a dit: Non, on sait ce qui est mieux pour la population du Québec. Il a pris exactement cette attitude sur le bill 1, le bill 2, et tous les bills. Le bill 1, le bill 2 étaient référés encore au gouvernement par la Commission des droits de la personne, parce que c'était contre les meilleurs intérêts des individus. Là vous avez exactement la même chose qui se produit ici aujourd'hui.

Le ministre, au lieu de venir avec une déclaration basée sur les mémoires présentés par 24 ou 25 organisations, essaie, par sa déclaration d'aujourd'hui, de minimiser, si vous voulez, les sentiments exprimés par la Commission des droits de la personne, et c'est regrettable. Même qu'il avait mentionné les conclusions de cet organisme très important, et de plus en plus important quand nous avons au pouvoir un gouvernement qui ne songe presque jamais aux droits de la personne dans cette province. La commission va être obligée probablement de plus en plus de prendre parti dans l'avenir du pays, jusqu'à ce que ce gouvernement soit battu. A la page 4 au sujet des réflexions préliminaires de la Commission des droits de la personne, quand il parle par exemple de l'obligation pour quiconque veut participer à la campagne référendaire d'appartenir à une ou l'autre organisation parapluie, la Commission des droits de la personne pose cette question: Si tel est le cas, ce regroupement obligatoire ne met-il pas en péril la liberté d'association?

C'est la question fondamentale. Le ministre même encore aujourd'hui, dans sa déclaration à la page 4, dit — c'est intéressant — malgré le conseil qui lui a été donné par la Commission des droits de la personne: "Personnellement, je continue de croire que, tout bien considéré, la formule des comités nationaux demeure, une fois qu'on en a précisé la portée, la meilleure façon d'atteindre les objectifs recherchés". C'est malgré les sentiments de la Commission des droits de la personne. C'est évident que le gouvernement, malgré les observations de la Commission des droits de la personne... Remarquez bien, M. le Président, que c'étaient seulement les réflexions préliminaires. Cela veut dire que la commission espère, a des espérances au moins que le gouvernement va prendre en considération les réflexions préliminaires.

C'est évident par la déclaration du ministère aujourd'hui qu'il n'a aucune idée de prendre en considération la question la plus fondamentale posée par la Commission des droits de la personne. Ce n'est pas la question de rendre la loi un peu plus souple, mais la question posée par la Commission des droits de la personne à savoir est-ce que les regroupements obligatoires ne mettent pas en périls la liberté d'association? C'est la question fondamentale.

Il est regrettable que ce soit la troisième occasion depuis un an, le projet de loi 1, le projet de loi 2, et maintenant, même avant d'avoir une loi sur les référendums, que la Commission des droits de la personne soit obligée de dire à ce gouvernement: Ne pensez-vous pas que c'est le temps que vous alliez dans le meilleur intérêt de la population et surtout de l'individu? Pour un parti qui a gagné une élection, surtout sur la question du droit de la personne. Même au temps de Duplessis on n'a jamais eu un gouvernement qui a autant négligé les droits de la personne que ce gouvernement-ci. C'est regrettable. Je suis craintif vis-à-vis de la loi qui sera déposée avant Noël. On va être encore obligé de se soumettre à cette loi.

M. Grenier: Question de privilège, M. le Président.

M. Mackasey: II n'y a pas de question de privilège ici.

M. Grenier: Qu'on laisse les âmes reposer en paix.

M. Mackasey: Je ne savais pas que le député était à côté de moi. L'Union Nationale veut jouer les deux bords de la médaille. Elle ne veut pas une question. Elle ne veut pas le référendum. Elle ne veut pas se prononcer pour dire si le Québec devrait rester dans un Canada uni ou non.

Une Voix: A l'ordre, à l'ordre!

M. Mackasey: M. le Président, la question fondamentale ici est, que la déclaration d'aujourd'hui du ministre ne répond du tout aux questions posées sur le livre blanc par la Commission des droits de la personne. C'était vraiment le but de cette réunion de ce matin. Ce n'était pas pour faire des changements dans le livre blanc, d'après les mémoires présentés devant nous depuis un mois, mais c'était vraiment pour donner une réponse à la Commission des droits de la personne.

Le ministre, par exemple, n'a pas touché du tout au lot de questions posées par la Commission des droits de la personne. Il n'a pas touché du tout le droit d'initiative, la formulation de la question, les préalables au scrutin, la campagne référendaire. Je reviens encore à l'observation de la Commission des droits de la personne à savoir si le gouvernement insiste pour avoir des organisations-parapluie, c'est complètement contre la philosophie de la Commission des droits de la personne parce qu'il met en péril la liberté d'association des individus de cette province.

Par exemple, quand le ministre parle que les individus peuvent verser $3000 à la campagne électorale, est-ce qu'il y a des chômeurs dans le comté de Verchères qui ont $3000 à verser à la campagne électorale, avant le référendum? Je ne pense pas du tout, M. le Président. Même ceux qui, avec raison, avec conviction, représentaient le mouvement séparatiste dans cette province — et ils ont le droit — sont passés devant la commission et ils demandaient le référendum demain, si nécessaire, avec une question précise, claire et nette, comme le député de Laval l'a suggéré.

Je pense que la Commission des droits de la personne prend un engagement moral. L'engagement moral de ce parti c'est que s'ils veulent faire le référendum qu'ils aient le courage de démissionner et de convoquer une élection générale. Nous en aurons terminé avec une loi-cadre sur le référendum parce que le gouvernement veut tout simplement se substituer dans toutes les occasions lorsqu'il sait que ce n'est pas dans le meilleur intérêt de la population. Il manque lui-même de courage de présenter la loi 100, par exemple, à un référendum.

M. le Président, vous savez qu'à l'heure actuelle si vous posez la question au gouvernement à savoir si on veut rester dans un Canada uni? 85% de la population dirait oui. Si vous voulez la séparation, 15% dit non. Si vous voulez l'indépendance, 17% dit non. Si vous voulez la souveraineté-association, sans doute le ministre va expliquer cela en commission demain, c'est en bas de 20%. Le gouvernement est encore mal pris avec le référendum et il ne sait pas comment s'en sortir. Il est mal pris.

This government should resign, because what the minister said today was not in answer to any of the representations made before the Commission, it was an answer to the observations made by the Human Rights Commission. The Human Rights Commission said in effect in its preliminary remarks: Do not go any further because, once again, you are infringing on the individual rights of the people of this province, by forcing them into umbrella organizations which limit their freedom of association, which is what the Trade unions, the Canadian Labor Congress, the Quebec Labor Congress, are saying: We do not want to be forced into des organisations-parapluie.

Tous les syndicats, surtout ceux qui savent ce qu'est la lutte pour obtenir, comment-dirait-on, "freedom of association", comprennent que voilà un gouvernement, par accident ou par philosophie, si vous voulez, qui veut absolument agir encore une fois au nom de la collectivité. Même les syndicats qui dans quelques cas au moins ont appuyé le PQ à la dernière élection disent carrément au gouvernement: Nous ne voulons pas faire partie du concept "parapluie".

M. le Président, dans un esprit de coopération, je suggère au ministre d'avoir le courage de retirer son livre blanc. C'est ce qu'il faut faire actuellement. Appuyez-vous au moins sur les mémoires présentés ici, les 25 mémoires; le ministre pourrait au moins changer son approche. Si c'est vraiment un gouvernement démocratique, les observations du gouvernement... Well, I will speak in my own language, if my accent, in French, makes some of the members laugh.

If this government had any courage, if it was interested in the people of this province, it would have the referendum tomorrow, because, until this referendum is held, on the Constitution... We can have one on apples and oranges and chastity belts and everything else, but until you have it on the Constitution, it will be a subject of discussion and debate, until 1979. Le député de Verchères, le chômage pour lui, ce n'est rien. Il n'est pas pauvre. Il gagne $35 000 ici, un autre $200 comme écrivain, $400 pour son livre. Il n'est pas pauvre, mais les pauvres chômeurs de Verchères devraient lui dire en fin de semaine: On ne veut pas la séparation, on ne veut même pas que le gouvernement discute de séparation ou de référendum tant qu'il y aura autant de chômage dans cette province.

M. Grenier: Un petit coup sur l'agriculture!

M. Mackasey: Mr President, it is a race between whether the government is thrown out of office on its separatist philosophy or on its inability...

M. Burns: Les médicaments pour les personnes âgées!

M. Mackasey:... to run the province and to do anything about unemployment. It is a race between the 20% which the Union Nationale had last year and about 2% which it could have by 1979, because they have not taken a fundamental position on any of these things.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, j'aimerais que vous vous inspiriez de l'exemple des autres intervenants qui ont parlé seulement sur l'objet du livre blanc, du référendum. S'il vous plaît, juste une petite coopération, parce qu'il y en a d'autres qui voudraient aussi parler.

Une Voix: Cela fait vingt minutes!

M. Mackasey: D'accord, M. le Président.

M. Burns: Des médicaments pour les personnes âgées.

M. Gratton: Le ministre n'aide pas beaucoup.

M. Mackasey: J'ai écouté, M. le Président, le ministre qui vient justement de m'interrompre, au moment où je voulais vous dire que je vous donnerais ma pleine coopération, à vous, comme Président, qui remplissez votre rôle franchement, sérieusement et avec expérience.

Le ministre a recommencé et je lui dis qu'avec son record, ce que je dis est sérieux, c'est le ministre, après tout, qui a adopté le projet de loi 1 qui a été obligé de le retirer à cause de la Commission des droits de la personne. C'est encore ce ministre qui est arrivé avec le projet de loi no 2 et qui a encore été obligé de le retirer, à cause des représentations de la Commission des droits de la personne. Aujourd'hui, ce ministre est obligé de venir devant la commission, pas pour faire allusion aux mémoires présentés par les 24 ou 25 associations, mais seulement pour répondre aux observations préliminaires de la Commission des droits de la personne sur le livre blanc.

Il n'était pas ici, auparavant, mais on l'a vu à la télévision, je suppose; il a cité lui-même, dans sa déclaration de ce matin, les conclusions de la Commission des droits de la personne. Il n'a même pas touché aux autres observations de la commission. Comme je l'ai souligné, quand le ministre était absent, c'est parce que lorsque la Commission des droits de la personne, d'une manière très sensible — polite, is suggesting to the Minister, for God's sake, be smart enough and do not force people into umbrella organizations because, even if you do it...

M. Burns: What do you have to offer?

M. Mackasey: I have something to offer, very good suggestions.

M. Burns: Tell me what you have to offer!

M. Mackasey: I will end up to it, but you will not have the courage to follow it, and that isthat I have one question by next April: Do you want to remain in Canada? That would be a suggestion.

M. Burns: There are going to be umbrella organizations!

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mackasey: Le ministre m'a demandé si j'avais une suggestion; elle est simple, il ne sera pas question d'organisations parapluie, il ne sera pas question des finances. Posez cette question à la population du Québec au mois d'avril, l'année prochaine: Désirez-vous rester au Canada? C'est simple. Même les mémoires qui nous ont été présentés par ceux qui veulent absolument l'indépendance ont fait la même suggestion, c'est ce que je pensais que le ministre était pour soulever ici, aujourd'hui, M. le Président, avec un mémoire qui était le reflet...

Le Président (M. Laplante): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Je pense qu'on serait tous prêts à entendre les conclusions du député de Notre-Dame-de-Grâce, étant donné que cela fait déjà 25 minutes. Je n'ai pas d'objection à ce que cela continue encore un peu, mais en conclusion.

M. Mackasey: Je suis content que vous ayez posé cette question, parce que, jusqu'à maintenant, je pensais que vous étiez sourd et muet, depuis que je suis ici, cela fait un an.

M. Bisaillon: Comme je voudrais parler, je voudrais que vous me laissiez du temps, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: M. le Président, en terminant, je voudrais tout simplement dire que le ministre est obligé, avant de déposer son projet de loi devant la Chambre, d'arriver encore avec un mémoire qui va...

M. Burns: Un autre livre blanc.

M. Mackasey: Oui, certainement, encore mieux un autre livre blanc, mais, au moins, les amendements à son livre blanc qui prendront en considération les 24 ou 25 mémoires que l'on a entendus ici. Le ministre n'a pas touché du tout la question du référendum, la date du référendum, et je pense que cela est important. Il essaie de prendre en considération les observations de la Commission des droits de la personne, il ne les a pas prises, il ne répond pas à la question, à la page 4 des réflexions préliminaires. Si tel est le cas, ce regroupement obligatoire ne met-il pas en péril la liberté d'associations? C'est la question posée par la Commission des droits de la personne.

Le ministre, en réponse, dit à la page 4 de son papier, ce matin: Personnellement, je continue de croire que tout bien considéré, la formule de comités nationaux demeure, une fois qu'on en apprécie la portée, la meilleure façon d'atteindre les objectifs recherchés. Justement le contraire que partage la Commission des droits de la personne.

Cela veut dire, M. le Président, en conclusion: Si le ministre dépose la loi, avant Noël à la Chambre — c'est peut-être une réflexion des sentiments qu'il exprime, qu'on trouve à la page 4—il sera exactement en conflit encore avec la Commission des droits de la personne et sera obligé, l'année prochaine — c'est peut-être cela qu'il veut faire aussi — pour ne pas changer cela, et on ne veut pas de référendum parce qu'il va se faire battre. Alors, peut-être le ministre fait cela exprès, pour que la Commission des droits de la personne arrive, l'année prochaine, et dise: Retirez la loi, on va donner les numéros 301 ou 401, si vous voulez. Retirez ce projet de loi parce que c'est contre les meilleurs intérêts de l'individu. Je pense que c'est cela que le ministre veut dire.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: M. le Président, rapidement, sur trois sujets, je vais essayer de laisser un peu de temps aussi à ceux qui voudraient intervenir à la suite de mon intervention. Il reste dix minutes à la commission. Sur trois choses: L'hypothèse 1 présentée par le ministre aujourd'hui corrige, selon moi, un certain nombre de choses qui se trouvaient dans le livre blanc et répond à certaines attentes des groupes qui se sont présentés devant la commission parlementaire. Je réfère en particulier à toutes les précisions qui nous sont apportées quant aux restrictions qu'on apporterait à la définition du terme "dépenses référendaires".

Il me semble que cette façon d'aborder les dépenses référendaires, de mieux définir les dépenses référendaires, non seulement, vont permettre aux groupes de mieux fonctionner pendant la campagne référendaire, mais vont accroître aussi les possibilités pour différents groupes d'intervenir durant une campagne référendaire sans pour autant ici participer aux comités nationaux. En effet, les précisions qu'on apporte quant aux définitions de dépenses référendaires, en ce qui a trait, par exemple, à la possibilité, pour un organisme, de réunir ses membres ou de publiciser auprès de ses membres ses positions sur le référendum ou les référendums, vont permettre à différents organismes, dont les syndicats de pouvoir intervenir dans la campagne référendaire sans pour autant être membres participants d'un comité national.

Je pense que c'est dans ce sens plutôt que l'Opposition devrait travailler et ce pour répondre aussi aux demandes de l'ensemble des groupes qui se sont présentés. C'est-à-dire, on est d'accord avec le fait qu'il faut donner, au moment de la campagne référendaire, égalité des chances, donc, regrouper tous les participants à une campagne référendaire, mais permettre quand même à des organisations de continuer à travailler et à expliquer leur position auprès de leurs membres. C'est uniquement la définition qu'on apportera à ce que sera une dépense référendaire qui va rendre possible cette chose. Je pense que dans l'hy- pothèse 1, à moins qu'on veuille se boucher les yeux et se mettre des oeillères, il y a au moins cette grande amélioration par rapport à la première hypothèse. Je pense que cela a déjà été souligné, d'ailleurs, par le député de Gatineau et il me semble que c'est dans ce sens qu'on devrait travailler afin de restreindre le moins possible la définition de dépenses référendaires, de la décanter par rapport à ce qu'on peut donner comme définition d'une dépense électorale.

Cela, pour moi, c'est une amélioration sensible et majeure dans l'hypothèse 1 qui nous est présentée aujourd'hui.

Par ailleurs, je tiens à souligner au ministre qu'il reste quand même, selon moi, un trou important et ce trou se situe au moment où se tient le débat sur la question au Parlement. Je ne rentre pas dans le temps qu'on utilisera pour débattre la question à l'Assemblée nationale — je sais que l'Union Nationale voudrait avoir un temps augmenté par rapport aux 25 heures qui sont suggérées dans le livre blanc — peu importe le temps qu'on prendra, il me semble qu'il y a un trou important alors que le Parlement va se pencher sur la discussion concernant la question à poser au moment du référendum, qu'on laisse aller sans contrôler — là je ne parle pas de dépenses référendaires, je parle de propagande ou de publicité qui pourrait être organisée ou mise de l'avant par chacun des groupes qui voudra bien le faire.

Il me semble qu'il y a un danger à faire ce type de propagande ou à permettre ce type de propagande ou de publicité sur la question débattue à l'Assemblée nationale. Si on considère que la question appartient au Parlement et que c'est sur proposition du gouvernement que l'Assemblée nationale devra en disposer, en amendant et en essayant d'apporter — là je parle de l'Opposition — tout l'éclairage voulu sur la question qui sera posée aux Québécois par la suite, il me semble que si on laisse intervenir d'autres cadres que celui du Parlement, au moment de la question, on risque de fausser — et de façon importante — le résultat même du référendum.

Ce que je veux dire, supposez, par exemple, que la population se laisse convaincre par une publicité qui surviendrait au dixième jour de la discussion sur la question, que la question va être libellée de telle façon. La population part avec cette idée qu'il faut qu'elle réponde oui ou qu'elle réponde non, selon la perception que la propagande ou la publicité lui aura donnée au dixième jour. On sait que la question peut être amendable par l'Opposition ou par le gouvernement, que les 25 heures de discussion ne seront pas inutiles. Il n'est donc pas illusoire de penser que la question pourrait être modifiée à la fin, et qu'on arrive au bout des 25 heures de débat avec une question différente de celle qui a été proposée par le gouvernement dès le départ.

Si on a laissé faire toute une série de propagande puis de publicité par des corps intermédiaires, on risque fort de tromper la population puisqu'elle se sera fait une opinion à partir d'une question qui aura été modifiée en cours de route.

II me semble qu'il y aurait possibilité sans calculer la période de temps où on discutera de la question à l'Assemblée nationale sans la calculer comme étant une période de dépenses référendaires, on pourrait au moins tenter de contrôler la publicité et la propagande dans les media d'information par des corps intermédiaires durant la période de discussion à l'Assemblée nationale et ce, afin aussi de laisser toute la liberté aux parlementaires, à moins qu'on veuille leur enlever la possibilité de discuter de la question. Mais si on veut leur laisser la liberté de discuter sans être encerclés par de la propagande eux aussi, si on veut les laisser libres au moment de la discussion, il me semble qu'on devrait au moins tenter de veiller à ce que la propagande et la publicité soient limitées durant cette période de débat à l'Assemblée nationale.

Finalement, je voudrais apporter mon opinion sur la loi-cadre par rapport à la loi spécifique. M. le Président, m'écoutez-vous toujours?

Le Président (M. Laplante): Oui, toujours.

M. Bisaillon: Je vous remercie. J'aimerais rappeler au député de Gatineau que son argumentation même, en faveur d'une loi spécifique plutôt que d'une loi-cadre, nous donne justement raison de pencher pour la loi-cadre plutôt que la loi spécifique. Toute son argumentation nous démontre finalement que si on allait de loi spécifique en loi spécifique la population serait, à ce moment-là, manipulée. On pourrait reprendre l'essentiel de son discours sur ce sujet pour se rendre compte qu'à l'encontre de ce qu'il prétend, c'est justement la loi organique qui nous permet de situer la consultation populaire au-delà des intérêts particuliers des partis et d'en faire un outil démocratique pour la population.

Je voudrais aussi rappeler les propres paroles du député de Notre-Dame-de-Grâce qui, lui aussi, voudrait probablement avoir une loi spécifique sur la question constitutionnelle et une loi spécifique sur autre chose par la suite; sa position est claire. Il ne l'a quasiment pas dit, mais c'est ce que cela voulait dire. Il a dit: Après le référendum, ce gouvernement ne sera plus là, alors pourquoi faire une loi générale? Aussi bien faire une loi spécifique sur la question constitutionnelle, le gouvernement va la perdre et après il va perdre les élections. Comme ça, il ne sera plus là. Il vient de nous avouer, en ce faisant, que pour lui, la consultation populaire n'ajoute pas au processus démocratique et que si, par la suite, il reprenait le pouvoir, il n'y aurait pas de consultation populaire sur aucun sujet. C'est ce qu'on veut éviter.

On veut donner aux Québécois un outil de consultation. On veut donner aux Québécois des moments privilégiés où ils pourront parler à leur gouvernement et lui donner son orientation. On veut donner aux Québécois la possibilité de vivre dans un régime qui pourrait être plus démocratique que celui dans lequel on vit actuellement. Pour cela, ça prend une loi organique. Pour cela, ça ne prend pas des lois spécifiques parce qu'on sait que les tenants de la loi spécifique, pour l'instant, c'est parce qu'ils n'en veulent pas, au bout de la ligne, de consultation populaire. Ils ne veulent pas consulter les Québécois de façon régulière.

Je m'étonne fort que le député de Notre-Dame-de-Grâce ait osé parler de l'initiative populaire en nous reprochant de ne pas l'avoir incluse ou de ne pas vouloir l'inclure dans le projet de loi qui sera déposé prochainement. En effet, l'initiative populaire va au-delà encore de ce qu'on propose comme loi organique, va permettre davantage aux citoyens d'apporter leurs commentaires au gouvernement. Je pense, M. le Président, que, pour toutes ces raisons, on doit tenir farouchement à une loi organique sur la consultation populaire qui permettra de façon définitive à l'ensemble des partis politiques, par la suite, de continuer, au-delà de la question constitutionnelle, à intervenir auprès des gouvernements et leur donner leur orientation.

J'ai voulu y aller M. le Président, le plus rapidement possible, afin de permettre au ministre de conclure. Je vais m'arrêter là, j'aurais peut-être deux ou trois petites choses additionnelles, mais je vais m'arrêter pour permettre au ministre de conclure.

Le Président (M. Laplante): II reste une minute, qui la prend? M. le député de Laval.

M. Lavoie: Je pense que je ne prendrai pas plus qu'une minute, je donnerai le temps au ministre de clore. Sur les $0.25 que j'ai mentionnés tout à l'heure, je vais vous dire, si cela n'a pas été mentionné, que je me suis référé aux dépenses actuelles permises lors des campagnes électorales et la contribution de l'Etat est, grosso modo, 50% des dépenses permises aux candidats à une élection.

M. Burns: Grosso modo, oui. Même un peu plus, cela dépend. Dans un comté, par exemple, de...

M. Lavoie: Chez moi, c'est à peu près cela.

M. Burns: ...32 000 électeurs, ce qui est la bonne moyenne, cela donne à peu près $15 000.

M. Lavoie: Grosso modo, 50%, dans une campagne électorale. Je pense bien que, dans l'élaboration de votre loi ou si c'est fait sous forme de résolution, vous allez nécessairement vous accrocher un peu à ce qui existe, à notre tradition de remboursement lors des campagnes électorales. Si vous permettez $0.50 pour chaque option, comme limite de dépenses, je pense bien que cela peut se rapprocher de 50% ou de $0.25. En tout cas, je ne voudrais pas en faire un débat, parce que, dans certains cas et dans certains comtés, il y a une contribution d'à peu près $0.20 par électeur pour chacun des candidats qui sont admissibles à un remboursement. La plupart du temps, c'est au moins deux et parfois trois candidats et cela peut faire une contribution d'environ $0.60 par électeur dans une campagne électorale.

L'autre question est plutôt à l'adresse du député de Terrebonne. Il dit que si on a une loi-cadre, on va éviter une surenchère d'émotivité, de passion, d'intensité de chaleur dans le débat.

Cet argument ne m'impressionne pas parce que je pense que si on adopte dans les mois qui viennent, que ce soit une loi-cadre ou une loi spécifique, et même si c'est une loi cadre, cela n'éliminera pas l'émotivité, la passion du débat, parce que tout le monde a déjà à l'esprit que la question référendaire c'est sur l'avenir constitutionnel du Québec. La grande majorité des témoins nous a entretenus uniquement sur ce référendum.

Je n'ai pas voulu me servir de 96 ou quoi que ce soit.

M. Fallu: Vous prendrez quand même à témoin le climat...

Le Président (M. Laplante): Le dernier mot, s'il vous plaît, M. le ministre de la réforme parlementaire.

Fin des travaux

M. Burns: M. le Président, je n'ai pas d'autres commentaires à ajouter à ce que nos collègues ont dit ce matin. Je remercie tous les membres de la commission pour leur collaboration tout au long de ces séances même si, à l'occasion, il y avait des divergences d'opinions. Il reste qu'on a fait un travail positif qui a pu m'éclairer. C'était d'ailleurs le but de la commission, et sur ce que pense l'Opposition, et sur ce que pense les députés ministériels, et sur ce que pensaient un nombre de représentants qui ont daigné intervenir devant nous. soit sous forme d'un mémoire qui a été déposé, soit encore sous forme d'audition directe.

Je remercie tous les participants de la commission. Je souhaite, et je répète encore une fois, être en mesure, vers le 15 décembre, déposer le projet de loi, et là le débat pourra prendre une ampleur peut-être plus grande. A ce moment-là, on aura peut-être des points spécifiques à critiquer. Il me fera plaisir de le faire.

Je mentionne tout de suite que le projet de loi que j'ai l'intention de déposer au cours du mois de décembre n'est pas pour adoption avant la fin de la présente session; ceci pour donner, une fois de plus, un autre temps de réflexion, parce que, j'insiste, il s'agit là d'un problème qui n'est pas une modification d'une charte d'une municipalité. On est en train d'établir un élément additionnel de consultation démocratique de la population. Je pense qu'on doit prendre tout le temps nécessaire pour soupeser les divers aspects que soulève cette question.

Encore une fois, M. le Président, je vous remercie vous-même pour votre collaboration. Je remercie les membres de la commission et je propose, en conséquence, que la commission mette fin à ses travaux et que le rapporteur soit mandaté pour soumettre son rapport à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Laplante): Motion adoptée. M. Laberge de Jeanne-Mance. Ceci met fin aux travaux de la commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales. Merci de votre coopération.

{Fin de la séance à 12 h 34)

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