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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le mercredi 6 décembre 2017 - Vol. 44 N° 97

Mandat d'initiative - La place des femmes en politique


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Table des matières

Auditions

Directeur général des élections

Comité des femmes de l'Amicale des anciens parlementaires du Québec

Remarques préliminaires

Mme Karine Vallières

Mme Catherine Fournier

Mme Lise Lavallée

Auditions (suite)

Conseil du statut de la femme (CSF)

Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec

Association féminine d'éducation et d'action sociale (AFEAS)

Autres intervenants

M. Marc Picard, président

M. Michel Matte, vice-président

Mme Mireille Jean

M. David Birnbaum

*          M. Pierre Reid, Directeur général des élections

*          Mme Marie Malavoy, Comité des femmes de l'Amicale des
anciens parlementaires du Québec

*          Mme Carole Théberge, idem

*          Mme Hélène Daneault, idem

*          Mme Louise Cordeau, CSF

*          Mme Hélène Charron, idem

*          Mme Marie-Andrée Gauthier, Réseau des tables régionales
de groupes de femmes du Québec

*          Mme Gisèle Dallaire, idem

*          Mme Karine Drolet, idem

*          Mme Hélène Tremblay, AFEAS

*          Mme Céline Duval, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-quatre minutes)

Le Président (M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la bienvenue. Et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques liées au mandat d'initiative portant sur la place des femmes en politique.

Mme la secrétaire, pourriez-vous, s'il vous plaît, nous rappeler les remplacements pour le présent mandat?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Maltais (Taschereau) et Mme Guilbault (Louis-Hébert) est remplacée par Mme Lavallée (Repentigny).

Le Président (M. Picard) : Merci. J'aurais également besoin d'un consentement afin de permettre à Mme la députée de Chicoutimi de remplacer Mme la députée de Joliette pour la séance. Consentement? Consentement. Merci.

Ce matin, nous entendrons le Directeur général des élections et le Comité des femmes de l'Amicale des anciens parlementaires.

Avant de débuter, je comprends que, bien qu'aucunes remarques préliminaires n'étaient prévues à l'ordre du jour, il y aurait un consentement des membres pour qu'une petite période soit allouée pour de telles remarques à 15 heures, lorsque nous allons reprendre nos travaux.

Auditions

Donc, je suis maintenant prêt. J'invite M. le Directeur général des élections à faire sa présentation. Vous disposez de 10 minutes. Vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Allez-y, M. Reid.

Directeur général des élections

M. Reid (Pierre) : M. le Président, mesdames messieurs, membres de la commission, je tiens d'abord à vous remercier de votre invitation à prendre part aux présentes consultations particulières. Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Catherine Lagacé, secrétaire générale au Directeur général des élections du Québec.

Notre participation à cette commission s'inscrit à l'intérieur de notre volonté de faire en sorte que la participation citoyenne augmente au Québec. Cette hausse, nous souhaitons la voir tant sur le plan de la participation électorale, par l'entremise du vote, que sur celui de la participation à la politique active en se portant candidate ou candidat.

Rappelons que nous avons pour mission de garantir le plein exercice des droits électoraux et de faire la promotion des valeurs démocratiques de la société québécoise en matière électorale. C'est donc dans cet esprit que nous nous adressons aujourd'hui à la Commission des relations avec les citoyens, car le plein exercice des droits électoraux suppose aussi de s'intéresser aux barrières qui pourraient compromettre une véritable égalité des chances d'accéder aux postes électifs.

Je tiens à vous rappeler qu'en 2014 nous avons publié une étude sur les facteurs influençant la présence des femmes en politique. Cette étude proposait une analyse des mesures adoptées ailleurs dans le monde et portait un regard sur la situation québécoise. Cette situation comportait des recommandations quant aux conditions à mettre en place pour favoriser une meilleure représentation des femmes en politique au Québec. Elle concluait aussi que la question était complexe.

Le principe, cependant, est assez simple. Au Québec, les femmes constituent plus de 50 % de la population. Il apparaît donc tout à fait normal qu'elles soient représentées en proportion équivalente au sein de nos assemblées législatives. C'est pourquoi nous sommes d'avis qu'atteindre une zone paritaire en matière de représentation hommes-femmes est souhaitable pour la santé de la démocratie québécoise.

La commission a déjà en main les données concernant l'évolution de la représentation des femmes aux divers paliers électifs québécois, donc je ne reviendrai donc pas sur cet aspect. Mais ce qu'il faut sans doute retenir, c'est que le déséquilibre de représentation entre hommes et femmes n'est pas le signe d'un manque d'intérêt des Québécoises envers la politique. Nous savons, par exemple, que les femmes votent autant, sinon plus que les hommes. Par ailleurs, les Québécoises de tous les horizons sont actives, mobilisées et engagées dans la société. Selon toute vraisemblance, il existe donc déjà un large bassin de candidates potentielles. Que la zone paritaire ne soit pas encore atteinte aujourd'hui, en 2017, peut être l'indication que des obstacles persistent.

La politique implique des choix et des décisions qui ont des retombées concrètes sur la vie des gens. Ces choix, ces décisions déterminent parfois des orientations qui auront des effets à long terme sur la société. Dans ce contexte, une représentation plus équitable au sein des assemblées législatives des différents groupes formant notre société prend tout son sens.

Notre institution a pour mission d'administrer les élections, et notre priorité est d'encourager la participation électorale pour que notre démocratie soit préservée. C'est cette motivation qui sert d'appui aux observations dont nous vous faisons part aujourd'hui. Ce qui nous anime, c'est la perspective que peut offrir la diversité des candidatures afin que toutes et tous puissent enrichir les débats politiques ainsi que le bassin d'idées, d'expertise et d'expérience et ultimement, nous l'espérons, inciter davantage de personnes à exercer leur droit de vote.

Il ne s'agit pas ici de favoriser les femmes au détriment des hommes ou des autres groupes composant notre société. Il s'agit plutôt de constater les faits et de mieux comprendre les barrières. Il s'agit aussi de connaître les pistes de solution qui pourraient permettre de tendre davantage vers la parité.

Bien que l'on constate certains progrès, le fait est qu'encore aujourd'hui les femmes représentent trois élus sur 10 à l'Assemblée nationale, moins de quatre sur 10 au sein de nos conseils municipaux, et c'est moins de deux maires sur 10 qui sont des femmes. Pourtant, nous le savons, la compétence n'a pas de genre, et l'électorat semble du même avis. Les résultats électoraux sont, pour nous, révélateurs. Le pourcentage de femmes élues évolue de pair avec le pourcentage de candidates. En d'autres termes, lorsque les femmes se portent candidates, elles ont autant de chances d'être élues que les hommes. Donc, l'équation semble assez simple : pour qu'il y ait plus de femmes élues, il faut donc plus de candidates.

• (11 h 40) •

Le système électoral est ancré dans des valeurs démocratiques dont l'équité est une pierre angulaire, et l'évolution des lois électorales québécoises a été guidée par une recherche d'équité entre partis et entre personnes candidates, que l'on pense aux règles en matière de financement politique, de dépenses électorales ou d'affichage en période électorale; une recherche d'équité entre électrices et électeurs — la représentation électorale, le suffrage universel mais aussi l'accès au vote et à l'information.

L'équité doit aussi être recherchée au fil des étapes qui mènent au choix des candidates et des candidats, ce choix étant un élément essentiel du processus électoral. À cet égard, nous croyons que les partis politiques ont un rôle important à jouer.

Parmi les recommandations de l'étude que nous avons publiée en 2014, soulignons que nous avions encouragé les partis politiques à se doter de plans d'action visant à favoriser, au sein de leurs candidatures et de leur députation, une représentation paritaire des femmes. La littérature sur le sujet indique que des outils sont à la portée des partis politiques. Par exemple, les partis peuvent sensibiliser leurs différentes instances à l'importance de l'équité de représentation. Les partis peuvent prendre les mesures nécessaires afin de faire valoir aux personnes responsables du recrutement... et ce, au sujet des meilleures approches pour recruter plus de femmes dans leurs rangs et inciter plus de femmes à songer à une carrière en politique. Les partis peuvent aussi profiter des départs, du renouvellement de leurs candidats pour favoriser des candidatures issues d'un groupe sous-représenté.

Par ailleurs, en octobre prochain, nous expérimenterons pour la première fois au Québec la tenue d'élections générales à date fixe. Je crois que ce rendez-vous préalablement établi pourrait constituer une occasion à saisir par les partis politiques afin de planifier et de mettre en place des stratégies de recrutement qui favoriseront l'équité de représentation entre les hommes et les femmes.

Les conditions de travail des élus, la situation familiale et économique ainsi que la socialisation politique sont aussi parmi les facteurs d'influence souvent évoqués dans diverses études et au sein de différents forums. Ces facteurs, disent les experts, sont fréquemment évoqués pour expliquer la décision de se porter candidate mais aussi de poursuivre ou non une carrière en politique. À cet effet, tout comme la Commission des relations avec les citoyens, nous avions souligné dans notre rapport le manque d'études empiriques sur la situation québécoise.

Avant de terminer, je voudrais souligner le travail effectué sur le terrain par les différents groupes qui ont pour objectif de promouvoir la participation des femmes à la vie politique. En effet, dans le contexte des dernières élections générales municipales que nous venons de vivre, ces groupes ont offert des séances d'information, des formations et des conférences aux aspirantes candidates dans plusieurs régions du Québec. Sans pouvoir les nommer tous, je souligne l'apport de l'Union des municipalités du Québec, de la fédération des municipalités du Québec, du Conseil du statut de la femme, du Secrétariat à la condition féminine et du ministère des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire. Ces instances ont mis en oeuvre des stratégies basées sur l'information, la sensibilisation et l'accompagnement afin d'encourager plus de femmes à se porter candidates.

À titre d'administrateur électoral, nous offrons notre collaboration en rendant disponible de la formation principalement sur le financement politique, ce qui constitue un volet important des responsabilités d'un candidat politique. Nous profitons aussi de nos plateformes Web et des médias sociaux pour diffuser les activités et projets de nos partenaires qui visent à stimuler les candidatures féminines. Et, bien en amont, par nos programmes d'éducation à la démocratie, nous travaillons à familiariser jeunes filles et garçons à nos institutions démocratiques et à éveiller leur intérêt envers l'engagement politique.

En terminant, je tiens à souligner que l'égalité est plus qu'une loi, c'est notamment son application au quotidien qui en fait une véritable valeur pour la société québécoise. Si notre action se limite dans les limites du mandat qui nous est confié, cependant, nous avons la volonté constante de contribuer à une véritable égalité des chances d'accéder à des postes électifs.

Du chemin reste à faire vers la parité, mais, je l'ai souligné, il existe des leviers d'intervention. Certains sont à la portée des partis politiques, d'autres sont du recours des élus et du gouvernement à travers lois et programmes qui seront mis à l'avant pour atteindre cette parité.

Enfin, dans le contexte de ces auditions, nous tenons à offrir notre collaboration à titre d'experts dans l'application des lois électorales pour participer à d'éventuelles réflexions sur les mesures qui pourraient être envisagées afin d'atteindre de façon durable la parité entre les hommes et les femmes dans l'espace démocratique québécois. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Picard) : Merci, M. Reid. Nous allons débuter nos échanges. Je cède la parole à Mme la députée Richmond.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. M. Reid, Mme Lagacé, merci énormément de votre participation. Merci a priori également pour le rapport dont vous parliez déjà, qui est une brique. J'espère que la plupart des gens qui participent et/ou qui sont intéressés par ce dossier ont pu mettre la main sur, justement, Femmes et politique :Facteurs d'influence et mesures incitatives. Il y a énormément là-dedans. Et, quand on parle de comparaison, c'est fort utile aussi de pouvoir le faire.

Je commencerais déjà par votre conclusion, alors que vous offrez votre collaboration, où, justement, je vous remerciais de votre présence. Le but de cette commission, c'est vraiment d'aller dans des actions très concrètes, terrain, qui répondent réellement aux freins et aux obstacles que peuvent connaître les femmes à faire le saut en politique. Vous en rencontrez certainement de par vos actions également sur le terrain et de par le levier que vous représentez pour les différents groupes, dont vous faites part, justement, dans le mémoire que vous déposez.

Est-ce que vous êtes capable, de par vos actions, justement, d'identifier, selon vous, les principaux freins, justement? Vous l'avez fait de façon plus large dans le rapport dont j'ai parlé tout à l'heure, mais, que ce soit socioculturel, que ce soit socioéconomique, partisan ou encore que ce soit au niveau légal ou institutionnel, il y en a plusieurs, de ces freins. Lesquels sont les plus présents, selon vous? Et est-ce que vous avez des recommandations bien précises, au-delà de rester dans l'aspect plus large de la chose?

Le Président (M. Picard) : M. Reid.

M. Reid (Pierre) : Effectivement, il y a une série de facteurs qui influencent, je dirais, la participation ou l'implication des femmes en politique, mais je n'oserai pas me placer en expert par rapport à ces facteurs-là. Je pense qu'il y aura d'autres groupes ou d'autres personnes qui me suivront, qui seront peut-être plus à même que moi de discuter de ces facteurs-là. Je répète, comme je l'ai dit lors de la commission plus tôt, c'est que, dans le fond, notre étude de 2014 est venue recenser divers moyens, diverses mesures, diverses actions qui varient d'un pays à l'autre. Et on a essayé de jeter un regard sur la situation québécoise, mais on avait déploré, comme la commission l'avait déploré, qu'il n'y ait pas, dans le fond, de données ou de recherches québécoises qui pourraient bien éclairer la situation, et probablement, je pense, que tous attendent de la commission qu'on puisse jeter un regard plus éclairant sur la situation québécoise.

Donc, en ce sens-là, nous, notre collaboration, c'est qu'advenant qu'on en arrive à proposer des mesures — là, j'y vais avec quotas, incitations financières — il va être très important pour nous... Parce que vous savez qu'à la base même de nos lois électorales c'est l'équité. Et donc ce sera de regarder, au regard du processus électoral... Mais il y aura... Principalement et particulièrement au regard du financement politique, nous devrons regarder effectivement si ces mesures-là... quel impact pourraient-elles avoir sur l'ensemble des partis politiques, qui actuellement sont au nombre de 20, au Québec. Parce qu'il faut savoir que... Peut-être me le mentionnerez-vous, le Directeur général des élections, il y a quelques années, avait recommandé des incitatifs financiers, 2002, 2003. Mais là il faut savoir que, depuis cinq ans, depuis 2013, le financement public, le financement à même les fonds publics a changé radicalement. Aujourd'hui, les partis politiques sont financés à la hauteur de 75 %, 76 %, c'est quand même une nouvelle donnée. C'est plus de 11 millions de dollars qui sont versés aux partis politiques. Et, en ce sens, pour préserver l'équité entre les partis politiques, c'est là que nous offrons notre collaboration pour participer à l'analyse de... si jamais vous avez des... la commission retenait certaines recommandations, pour voir quel serait l'impact de ces mesures sur l'équité entre les partis politiques relativement à leur financement.

Mme Vallières : Merci.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée, allez-y.

Mme Vallières : Vous parlez de programmes d'éducation à la démocratie. Est-ce que vous pouvez nous exposer succinctement ce qui est fait par votre institution et à l'égard de quelle clientèle?

• (11 h 50) •

M. Reid (Pierre) : En fait, les programmes d'éducation à la démocratie, un que je pense que vous connaissez, parce qu'on est en partenariat avec l'Assemblée nationale, c'est Vox populi. Donc, on intervient dans les écoles primaires et secondaires pour soutenir, aider la formation de conseils d'élèves.

Il y a également... Et ce que nous avons mis en place plus récemment aussi, c'est une formation, dans le fond, par rapport à des simulations d'élections. Et, lors des dernières élections municipales, il y a quand même plusieurs écoles qui ont tenu ces simulations-là pour permettre aux étudiants et étudiantes, en fait, de voter pour les candidats à la mairie.

On a mis aussi... On a eu une activité en élection partielle, et je pense qu'on a débuté dans la circonscription de... je pense, c'était celle de Chicoutimi. Après ça, dans les autres circonscriptions, il y a eu des élections partielles. On a une journée qui s'appelle Dans les coulisses d'une élection, où on a permis à des jeunes du secondaire de suivre, dans le fond, le directeur de scrutin et même d'être présents lors de la journée des élections. Et je peux vous assurer que, les élèves qui étaient présents, c'était paritaire.

Il y a également une expérience de vote que nous avons introduite dans deux élections partielles, Gouin et Louis-Hébert, et que nous allons renouveler lors des prochaines générales. C'est une première expérience de vote pour les enfants, qui vont accompagner leurs parents et qui seront appelés à voter sur une question qui sera déterminée un peu plus tard.

Mme Vallières : Merci. Est-ce que vous êtes en mesure de nous indiquer... Avec les efforts particuliers qui ont été faits dans les dernières municipales, entre autres avec le financement ajouté pour la FQM, l'UMQ, Groupe Femmes, Politique et Démocratie par le gouvernement du Québec, est-ce qu'il y a déjà des indicateurs de réussite, d'augmentation? Quel a été l'effet de ces leviers? Est-ce que le DGEQ a des résultats concrets là-dessus? Ou peut-être demander aux groupes...

M. Reid (Pierre) : On n'a pas de résultat encore quant aux impacts des nouvelles mesures financières, mises en place, quand même, récemment. Ce qu'on regarde, dans le fond, les chiffres, là, quant à la participation électorale, c'est qu'aux dernières élections de cet automne, les candidates, il y a eu une augmentation, on est à 31,3 %, par rapport à 28,8 % en 2013, et, les élues, 32 %. Donc, presque le tiers des conseillers sont des femmes.

Mme Vallières : Le mode de scrutin, dans votre rapport 2014, le constat est que ce n'est pas nécessairement ce qui va faire une différence au Québec. Est-ce que vous pouvez nous en parler, par rapport aux comparaisons qui ont été faites, justement, et aux constats auxquels vous en arrivez?

M. Reid (Pierre) : En fait, le mode de scrutin actuel est en mesure, là, je pense, de pallier au manque de candidatures féminines, je pense. C'est pour ça que je reviens avec la recommandation qu'on avait faite, c'était que les partis politiques puissent mettre en place, se doter d'un plan d'action en vue de favoriser le recrutement de candidatures féminines. Parce que ce qui est important, dans le fond... Il y a comme trois moments clés. Il y a le moment où une femme décide... c'est vrai pour les hommes, mais, disons, prenons les trois moments clés, où une femme décide de se présenter, après ça il y a la course à l'investiture et, après ça, l'élection. Et, comme je le disais plus tôt, quand les femmes sont en élection, que ce soit au niveau de l'investiture ou au niveau de l'élection comme telle, elles ont autant de chances que les hommes d'être élues. Donc, c'est le premier moment, c'est comment... c'est de franchir la première étape, amener les femmes à être candidates à l'investiture et éventuellement candidates à l'élection. Et c'est là que, d'après nous, les partis politiques ont une grande responsabilité à cet égard-là, et c'est dans ce sens-là qu'on les encourage à se doter de plans d'action, en vue, justement, de sensibiliser leurs instances, leurs équipes de recrutement aux candidatures féminines.

Mme Vallières : Merci. Je ne sais pas si vous avez vu passer, il y a quelques jours, un sondage compilé par Jocelyne Richer, de La Presse canadienne. Il y a une donnée fort surprenante là-dedans. 19 % des femmes disent ne pas vouloir faire le saut en politique parce qu'elles craignent de perdre leur emploi ou encore de ne pas pouvoir réintégrer l'emploi. J'amène cette statistique-là pour dire : Quel rôle peut jouer le Directeur général des élections dans la sensibilisation ou, à tout le moins, l'information des règles, des lois au Québec par rapport à des candidatures politiques, justement? Est-ce que ça s'est déjà fait? Est-ce que ça peut se faire? Comment vous voyez ce manque d'information, par rapport à l'institution que vous représentez, justement, comme étant la main vers la population, par rapport à la démocratie et à la pleine participation, là, de l'ensemble des femmes?

M. Reid (Pierre) : En fait, la Loi électorale, dans le fond, ne prévoit rien. Dans le fond, avec les statistiques ou les données que vous livrez, c'est sûr que... Dans le fond, je pense qu'il y a d'autres instances, effectivement, avec cette donnée... qui devraient s'intéresser à cette donnée. Pour nous, l'information ou l'éducation, c'est, au regard, là, de nos lois électorales, de faciliter la compréhension de nos règles électorales, et particulièrement du financement public. Mais, en même temps, une fois qu'on a fourni ces informations-là... Et ces informations-là, dans le fond, on les livre aussi à des agents officiels, les représentants officiels des partis politiques. Et c'est peut-être une donnée importante parce que, contrairement aux élections municipales, au niveau provincial, il y a très peu de candidats ou de candidates indépendants. Si je me souviens, en 2012, il y a peut-être eu une quarantaine de candidats ou de candidates indépendants sur 892. Et, en 2014, sur 812 candidats, il y avait, je pense, une vingtaine, là, de candidats, candidates indépendants. Donc, au niveau provincial, les candidatures doivent quasiment obligatoirement passer par la filière d'un parti politique.

Le Président (M. Picard) : Il vous reste trois minutes, Mme la députée, question et réponse.

Mme Vallières : Oui. Merci énormément. Est-ce que vous avez... Vous parliez tout à l'heure que les femmes votent plus que les hommes. Avez-vous les derniers résultats? Et est-ce que c'est la même chose au municipal et au provincial, malgré l'écart du taux de participation?

M. Reid (Pierre) : Au municipal, on n'a pas les résultats, mais, au niveau provincial... Et même on peut regarder... on peut reculer jusqu'en 1985, et, les tranches d'âge, je dirais que, quand on les observe, c'est quand on arrive dans le 55 ans, et c'est moins vrai aujourd'hui, mais dans le 65 ans et plus où peut-être les hommes votent légèrement un peu plus que les femmes, mais je vous dirais que, dans les autres catégories d'âge, les femmes votent plus que les hommes.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée.

Mme Vallières : Oui. Et le temps passe rapidement. À la page 4, vous mentionnez l'importance de la recherche d'équité, que c'est une pierre angulaire, justement, dans notre façon de légiférer dans les lois que l'on met en place, que, pour vous, ça fait partie vraiment du coeur, du noyau d'importance. Avec votre vision comme organisation qui chapeaute un peu tout ça, est-ce que vous croyez qu'en ce moment ce qui est fait, c'est justement... qu'il y a cette recherche d'équité? Est-ce qu'il y a encore à faire? Et est-ce que vous avez des propositions concrètes si, selon vous, il y a encore à faire par rapport à ce point précis, qui semble être névralgique dans les propositions que vous faites aussi?

M. Reid (Pierre) : Notre loi, la Loi électorale, je pense, repose sur l'équité. Je pense qu'au moment où elle a pu être discutée, autant des modifications... et, quand on regarde toute l'histoire, là, des modifications qui ont pu être apportées à la Loi électorale, je pense que cet élément-là, cette valeur de l'équité a toujours été présente. Et je pense que l'équité, aussi, repose, là, sur l'exercice aussi des droits électoraux de chaque électeur et de chaque électrice. Et, je dois vous dire, moi, depuis deux ans et demi, qui suis en poste, c'est ma grande préoccupation. C'est sûr que je m'inquiète. Je trouve préoccupants les taux de participation électorale. Vous me dites : À 72 %, on n'est pas pire qu'ailleurs, mais vous comprendrez que moi, je me concentre sur le Québec. Et je trouve que le taux de participation à 72 %, il est inquiétant parce qu'il régresse à chaque élection, est très préoccupant par rapport aux jeunes. Les 18-24, les 18-39, on a des taux de participation qui sont très préoccupants. Et c'est pour ça qu'il faut... Dans le fond, je me dis, c'est qu'il manque encore de l'information au regard des... à l'égard des électeurs et des électrices. Et, je pense, c'est une mission qu'on s'est donnée, au Directeur général des élections, d'accentuer nos efforts, et tous les efforts possibles, pour encore mieux informer. Et, quand on informe, je pense qu'on développe, là, de l'intérêt pour, justement, s'intéresser pas seulement au processus électoral, s'intéresser à la politique et envisager d'être candidate.

• (12 heures) •

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Chicoutimi pour l'opposition officielle. Neuf minutes.

Mme Jean : Merci, M. le Président. Alors, M. Reid, Mme Lagacé, bienvenue à l'Assemblée nationale. Nous sommes très heureux de vous accueillir. Et merci aussi de partager avec nous votre point de vue, vos connaissances et de répondre à nos questions pour faire avancer un dossier ou un enjeu qui est majeur, qui est majeur pour l'Assemblée nationale et qui est majeur pour l'ensemble des niveaux gouvernementaux au Québec, qui est majeur aussi pour la démocratie et pour démontrer la vitalité de la démocratie au Québec. On a une problématique majeure du fait que l'égalité n'est pas atteinte encore, la parité n'est pas atteinte encore, dans un pays aussi développé que le Québec peut être. Donc, merci de travailler avec nous sur cet important dossier.

Je vous ai entendus par rapport à votre exposé. Bravo pour les initiatives que vous avez faites par rapport aux efforts, aux formations pour pouvoir justement favoriser l'entrée des femmes en politique, qui est, selon votre dire, une problématique majeure. C'est-à-dire, ce que je comprends dans votre discours, c'est que les femmes ont tendance... la difficulté des femmes, c'est d'être candidate à un poste électif. Lorsque cette barrière-là est passée, en général, c'est moins compliqué, le coup est donné. Je peux vous témoigner que vous avez raison. Moi, je suis en politique, ça ne fait quand même pas tellement longtemps, bien, j'ai été élue en 2016, donc c'est en 2016, à un âge quand même assez avancé, et effectivement la réflexion que l'on fait, en tant que femme, pour se lancer dans la politique active, elle est longue, et il y a plusieurs aspects à considérer pour les réserves qu'on peut avoir, justement, pour se lancer en politique : des réserves économiques, des réserves personnelles, des réserves familiales. Donc, il y a plusieurs, je pense, barrières vis-à-vis la possibilité d'une femme à entrer comme... de se lancer comme candidate. Il y a le changement de vie, de devenir public, d'avoir à répondre à des questions. C'est toutes sortes d'éléments comme ça qui sont dans notre esprit. Donc, le dossier n'est pas simple, d'où l'importance, encore une fois, de cet exercice qu'on fait aujourd'hui et de votre participation.

Vous mentionnez qu'une des solutions pour animer, ou intéresser, ou activer les femmes à se lancer en politique passe par les partis politiques, donc les partis politiques sont sensibilisés pour favoriser la sollicitation de femmes pour devenir candidates. Ceci dit, ce n'est pas si évident que ça non plus, faisant partie d'un parti politique. On est en élection, vous l'avez mentionné, on a une élection déjà préétablie cet automne, donc le travail est déjà établi, et, au Parti québécois, on fait beaucoup d'efforts pour solliciter des candidatures féminines. Ceci dit, on ne peut pas, comment je vous dirais, forcer les femmes à se présenter.

Mais comment un parti politique pourrait bien agir pour que des femmes soient intéressées à se lancer en politique? Avez-vous des conseils à donner ou des trucs à donner pour qu'un parti puisse pouvoir favoriser l'arrivée des femmes? La sensibilisation, elle est faite, les partis politiques veulent avoir des femmes. Là, actuellement, la problématique, c'est que les candidates sont une denrée rare. Avez-vous des conseils à nous donner pour aider à pallier cette lacune?

Le Président (M. Picard) : M. Reid.

M. Reid (Pierre) : Oui. Bien, je reviens... Dans le fond, je pense que la réponse appartient aux partis politiques. En fait, je pense que tous les partis politiques ont des candidates ou une représentation féminine en leur sein. Donc, je pense qu'ils sont à même également aussi de voir avec différents groupes de la société... Mais, je veux dire, je pense qu'il y a peut-être une stratégie à revoir, mais je ne m'improviserai pas, disons, expert en la matière.

Mais, moi, ce qui me... Écoutez, je me suis promené, moi, depuis deux ans et demi, j'ai rencontré des jeunes, des citoyens et citoyennes de Sherbrooke, Val-d'Or, Rimouski, Joliette, Montréal à deux occasions, et, quand j'ai été invité pour cette commission, je me disais... j'essayais de me remémorer, là, mes présences, et, quand je regardais les auditoires devant qui j'étais, là, je me disais : Mais la parité, elle est là, elle est là. Et, les femmes qui intervenaient, là, je voyais des candidates et des élues de demain, dans, quoi, dans 10 ans, dans 15 ans. Mais en même temps je me disais : Est-ce qu'elles vont rencontrer, à un moment donné, un mur à un endroit qui va faire dévier leur projet? Et c'est là que... Parce qu'en même temps, les barrières qu'on peut voir pour les femmes pour l'implication en politique, je ne sais pas, puis on va y réfléchir, nous allons suivre étroitement la commission, parce qu'il y a encore des barrières pour la participation électorale. Même quand on dit que les femmes votent plus, je remarque, chez les jeunes, la participation électorale, elle est en baisse, et, je le répète et je vais le répéter longtemps et souvent, ça me préoccupe énormément. Est-ce qu'on s'en va vers des taux de 50 % dans 10 ans ou dans 15 ans, de participation électorale? Ce qui est vraiment anormal.

Donc, c'est pour ça que, dans votre travail, je pense, le travail de la commission, les barrières que vous allez identifier et documenter vont peut-être aussi, nous, nous servir à revoir des choses ou à mettre en place des moyens pour peut-être lever des barrières au regard de la participation électorale, parce que je suis d'avis que, si la participation électorale est encore plus importante, qu'on va solliciter tous les groupes de la société... je pense que ce que ça peut amener, c'est les femmes comme d'autres groupes sous-représentés à l'Assemblée nationale de se porter candidats.

Mais à votre question, effectivement, je pense que les partis politiques ont une grande responsabilité, et c'est probablement à eux et, je pense, à l'ensemble des partis politiques autorisés au Québec... Actuellement, ils sont 20. Je pense qu'ils ont probablement des choses à vous dire devant, peut-être, les difficultés...

Mme Jean : J'aurais une autre question, si ça ne vous dérange pas, parce qu'il nous reste trois minutes.

M. Reid (Pierre) : Oui, O.K. Allez-y.

Mme Jean : Désolée. Tant mieux... Et j'espère aussi que la commission va pouvoir inspirer des mesures ou des idées à votre groupe pour pouvoir améliorer la situation.

Je voulais vous poser la question au niveau des mesures que moi, je qualifierais peut-être d'un peu plus musclées pour favoriser les femmes en politique, donc favoriser peut-être ce que je vais appeler, entre guillemets, peut-être des quotas, favoriser peut-être financièrement. Quelle est votre opinion là-dessus, sur des mesures comme ça qui pourraient être adoptées?

Puis en même temps, vu qu'on n'a pas beaucoup de temps, au niveau du mode de scrutin, la révision du mode de scrutin puis mettre un mode de scrutin qui serait proportionnel régionalisé, est-ce que, selon vous, ça pourrait favoriser aussi la parité des femmes au niveau de l'Assemblée nationale?

M. Reid (Pierre) : En fait, je pourrais juste vous référer à des études, puis même je pense qu'on y fait référence dans notre rapport 2014, il semble que les régimes, les scrutins proportionnels peuvent présenter un avantage. Mais je pense que, là encore, dans notre... Parce que, dans le fond, il n'y a pas la garantie non plus que même avec, disons, un scrutin où vous auriez des listes de candidats et de candidates... Est-ce qu'effectivement on aura quand même une présence accrue de... Parce que la barrière, là, c'est parce que...

Mme Jean : Si ça devenait obligatoire d'avoir la parité? Non?

M. Reid (Pierre) : Si ça devenait obligatoire? Bien, encore là, si c'est obligatoire, est-ce que, dans le fond, vous allez avoir franchi la barrière des femmes qui pour quelque raison ne s'investissent pas ou ne s'impliquent pas en politique?

Et moi, je rappelle encore que toute mesure, et c'est pour ça que je tiens à vous le mentionner encore, toute mesure ou toute recommandation, ça va être important, à un moment donné, d'évaluer les mesures qui seraient prises, au regard du financement politique, parce que, nous, je dois dire, c'est dans notre mandat, c'est dans la loi, il faut vraiment assurer l'équité au sein des partis politiques.

Mme Jean : ...secondes?

Le Président (M. Picard) : 40 secondes, question et réponse.

Mme Jean : Juste pour savoir, lorsque vous dites «équité», est-ce que c'est de la parité que vous parlez à ce moment-là? Vous utilisez le terme «équité».

M. Reid (Pierre) : Non. L'équité, par exemple, c'est l'équité de notre système électoral, l'équité entre les partis politiques, puis un parti politique, dans le fond, au niveau du financement, ne soit pas plus avantagé ou, un autre, moins avantagé, d'autant plus que c'est du financement, comme je le répète, tantôt... Le financement public, donc de qui provient des fonds publics, c'est plus de 11 millions de dollars, ça représente plus des trois quarts des revenus des partis politiques. Donc, ça, c'est une donnée que, si on impose, par exemple, des incitatifs ou des pénalités financières, bien, il y a peut-être des partis qui ont des ressources moins importantes qui seraient vraiment, là, pénalisés, et en même temps, bien, là on viendrait un peu débalancer l'équité qu'on veut assurer, là, entre les partis politiques.

Le Président (M. Picard) : Merci. Merci, M. Reid.

Mme Jean : Merci beaucoup. Merci pour vos réponses.

Le Président (M. Picard) : Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny pour six minutes.

• (12 h 10) •

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Merci. Bienvenue, M. Reid et Mme Lagacé.

Tout autant que vous, je suis préoccupée par la présence des femmes en politique. Puis je pense que, si on avait plus de femmes, il y a peut-être une culture qui changerait, assurément.

Comme ma collègue, je suis d'accord avec le fait que tous les partis politiques, actuellement, c'est le défi qu'ils ont à relever, puis je pense que... en tout cas, pour ma formation politique, mais je suis à peu près certaine que toutes les autres formations ont cette même préoccupation-là, on fait un travail de terrain pour aller recruter les femmes. L'avantage d'avoir des élections à date fixe, c'est que ça nous permet de prendre de l'avance, d'avoir du temps pour aller les chercher, alors que, quand une élection se déclenche à un moment où on n'a pas de contrôle, effectivement il faut aller vite, puis on n'a peut-être pas de même temps.

Effectivement, aussi, on doit reconnaître... Parce que je fais ce travail-là au sein de ma formation, puis beaucoup de personnes... c'est vraiment un défi, comme je vous dis, c'est un défi qu'on veut relever, c'est que le temps de décision, pour une femme, à faire le saut en politique n'est pas le même que pour un homme. Si on approche un homme en politique, la réponse vient rapidement. La femme va évaluer tout ce que ça va impliquer dans sa vie, de faire le saut en politique. Et ça, c'est un grand défi.

Tout à l'heure, vous avez parlé du taux de participation aux élections. Le taux est faible. Puis on entend souvent le fait que, lorsqu'on va voter, notre vote ne compte pas. Donc, on a un certain désabusement auprès de la population au fait que... Qu'est-ce que ça va donner, de voter, qu'est-ce que ça va changer?

Dans le livre de M. Stéphane Paquin sur la social-démocratie, où il fait une étude comparée, lui, ce qu'il amène comme idée, c'est que le changement de mode de scrutin serait un incitatif, parce qu'on a des listes, puis je suis à peu près certaine que, sur les listes, là, les partis encourageraient la participation des femmes, mais il y a aussi la mobilisation du mouvement féministe, parce que je pense qu'on doit avoir une vague de fond, on doit avoir des groupes de femmes qui vont... puis même des ex-parlementaires qui servent de modèle et qui vont voir... qui vont à la rencontre des groupes de femmes pour les encourager et les accompagner dans leur processus de réflexion. Est-ce que vous pensez, de votre côté, que ça pourrait être possible ou que ça pourrait avoir un effet sur le taux de participation ou l'incitation des femmes?

M. Reid (Pierre) : Vous parlez du mode de scrutin ou...

Mme Lavallée : Le mode scrutin et l'implication aussi des groupes de femmes.

M. Reid (Pierre) : Bien, moi, je pense que, de toute façon, l'implication... Et c'est, dans le fond, un peu le message, là. Quand je parlais, tantôt de mes rencontres avec des jeunes ou des citoyens, des citoyennes, c'est que, dans le fond, on les incite à s'impliquer.

Vous comprendrez qu'au niveau de la participation électorale, que les gens aillent voter, c'est sûr que j'ai des réactions. Bon, qu'est-ce que ça change... Bon. Mais, au-delà de ça, c'est quand même important, on a un système électoral, c'est important d'aller voter. Pour moi, dans le fond, c'est la signature de chaque citoyenne et de chaque citoyen envers la démocratie. Et je pense qu'à ce moment-là c'est déjà... Moi, je peux vous dire que, comme DGE, compte tenu des limites, dans le fond, le cadre de mon mandat, c'est de travailler beaucoup pour cette participation électorale en essayant d'amener le plus de personnes à s'intéresser à la politique, parce que voter, c'est comme... c'est un moment, alors que ça devrait... c'est un processus. Il faut que les gens s'intéressent, il faut qu'il y ait des réflexions, des échanges pour, à un moment donné, que chaque électeur et chaque électrice soit en mesure de voter.

Donc, en ce sens-là, moi, je mise beaucoup sur nos interventions. Puis, quand vous parlez d'implication de groupes, c'est un peu ça. C'est d'ailleurs ce que des groupes ont fait aux dernières élections municipales, ils sont allés sur le terrain, comme nous aussi sommes allés sur le terrain. J'ai eu l'occasion de rencontrer une quarantaine de femmes candidates et aspirantes candidates dans la région de Trois-Rivières. Et je pense que c'était un peu une forme de mobilisation pour inciter, outre la participation électorale, le fait de s'impliquer en politique. Est-ce que ce sera pour 2018? Est-ce que ce sera pour 2022, 2026? Mais moi, j'ai beaucoup, beaucoup d'espoir à l'égard de notre jeunesse.

Et, par rapport aux stratégies des partis politiques, je pense qu'ils ont sûrement une grande réflexion. Je vais juste vous donner un exemple : en Colombie-Britannique, le NPD a misé sur une stratégie volontaire. Donc, au départ d'un député, c'était de le remplacer par une personne provenant d'un groupe sous-représenté. Et, si ma mémoire est bonne, je pense, aux dernières élections, 46 % des élus du parti, en Colombie-Britannique, du NPD, étaient des femmes. Donc, je pense que cette mesure avait donné un certain effet. Mais, je pense, c'est aux partis, je pense, à développer de nouvelles stratégies et peut-être à se faire aider de groupes qui favorisent l'implication des femmes en politique.

Le Président (M. Matte) : Il vous reste 25 secondes, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Oui, je vais résumer vite, vite. On a fait un minisondage, qui circule au niveau de l'Assemblée nationale, et, lorsqu'on parle de la participation des femmes en politique, au-delà de 90 % disent voter. Lorsqu'on leur demande si elles envisagent de se présenter aussi, c'est non, pour la majorité. Donc, il y a un écart entre le fait qu'on participe, qu'on vote, mais avec notre volonté, notre intention de se présenter. Il y a un frein, il y a un frein à...

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Je vous remercie, Mme la députée de Repentigny. Et, au Directeur général des élections, nous vous remercions de votre participation.

Je vais suspendre les travaux afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 12 h 16)

(Reprise à 12 h 19)

Le Président (M. Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant le Comité des femmes de l'Amicale des anciens parlementaires. Nous avons trois habituées : Mme Marie Malavoy, présidente du comité, et députée de Sherbrooke de 1994 à 1998, et députée de Taillon de 2006 à 2014; Mme Hélène Daneault, députée de Groulx de 2012 à 2014; Mme Carole Théberge, députée de Lévis de 2003 à 2007.

Vous connaissez le processus parlementaire. Vous disposez d'une période de 10, 12 minutes. Donc, on vous laisse aller. Après ça, il va y avoir des interventions avec les députés. Allez-y.

Comité des femmes de l'Amicale des anciens parlementaires du Québec

Mme Malavoy (Marie) : Merci, M. le Président. Et je me permets de saluer nos anciens collègues députés. Enfin, nous avons de bons souvenirs en cette enceinte. Et donc très heureuse d'être avec vous aujourd'hui.

Les femmes sont la moitié du monde. Chez nous, au Québec, elles ont en quelques décennies acquis le droit de vote, accédé à l'instruction, investi le marché du travail et commencé à prendre leur place dans les lieux de pouvoir.

 • (12 h 20) •

À l'Assemblée nationale, toutefois, leur progression s'essouffle. Leur présence a même marqué un recul, entre 2012 — 32,7 % d'élues — et 2014 — 27,2 % d'élues. À ce rythme, la parité apparaît comme un rêve lointain, et la bonne volonté, insuffisante.

C'est ce constat qui a incité d'anciennes députées à souhaiter la formation d'un nouveau comité au sein de l'Amicale des anciens parlementaires. Le Comité des femmes a vu le jour le 18 mai 2016, lors d'une assemblée générale de l'Amicale, avec comme mandat spécifique d'entraîner des actions en vue de la participation des femmes au niveau politique et de viser à obtenir la parité à l'Assemblée nationale du Québec. Le comité est non partisan. Il compte actuellement une trentaine de membres anciennes parlementaires issues de toutes les formations politiques. C'est en leur nom que nous nous exprimons aujourd'hui.

Nous sommes d'avis que, pour atteindre la parité, il faut envisager des moyens de nature législative. Pourquoi? D'abord, parce que nous nous appuyons sur le principe du droit à l'égalité de représentations dans nos institutions publiques découlant du droit à l'égalité des femmes garanti dans la charte québécoise des droits et libertés de la personne. Pour articuler ce principe, on doit passer par une loi comme on l'a fait pour les droits garantis en matière de congé de maternité, d'équité salariale ou d'égalité économique entre époux. Une loi sur la parité créerait une obligation, elle indiquerait la voie à suivre collectivement, au-delà des efforts des personnes et des groupes gagnés à la cause. Elle enverrait un signal clair que la société québécoise veut un Parlement paritaire et que les moyens doivent être pris pour y parvenir. Elle donnerait aux partis politiques l'impulsion nécessaire pour présenter et faire élire autant de femmes que d'hommes à l'Assemblée nationale.

Mais surtout nous pensons qu'un tel signal serait mobilisateur pour les femmes et les conforterait dans l'idée qu'un Parlement, c'est aussi leur place à elles, car, il ne faut pas se le cacher, l'un des obstacles importants à l'entrée des femmes en politique, c'est la piètre qualité de leur perception du pouvoir. Presque exclusivement exercé par les hommes pendant des siècles, le pouvoir a établi ses codes, ses règles, ses armes, son langage, sa culture. Pendant ce temps, les femmes, consacrées à l'univers domestique, ont peu développé le goût d'investir la sphère publique. Lorsqu'elles ont commencé à embrasser toutes les professions, à prouver leurs compétences dans tous les métiers, elles sont demeurées toutefois aux portes du pouvoir. Ce n'est que récemment, il y a à peine quelques décennies, qu'elles ont commencé à franchir ces portes.

Si elles y ont pris leur place, fait leur marque, pourtant, le monde du pouvoir demeure, pour un grand nombre, associé à des valeurs souvent négatives, peu inspirantes. La difficulté dans le recrutement de candidatures féminines par les partis politiques en est un exemple éloquent. Alors que de nombreux hommes sont prêts à s'engager et à se battre pour occuper un siège au Parlement, persuadés que c'est un métier taillé sur mesure pour eux, des femmes compétentes hésitent à se lancer en politique. Le temps que leur réflexion progresse, que leur confiance en elles s'affirme, les places seront prises, et les délais, épuisés.

Mme Théberge (Carole) : Il nous apparaît donc qu'il faut aborder la question de la place des femmes en politiquedans toute son ampleur. Le problème n'est pas d'abord lié aux aménagements de la vie parlementaire. Ceux-ci pourront avoir un effet bénéfique une fois des députées élues, mais ils ne suffiront pas pour vaincre leur résistance face au pouvoir. Ce qui peut contribuer plus profondément à rendre l'univers politique attirant pour les femmes, c'est de prendre les moyens pour qu'elles y soient à part entière, convaincues que c'est normal et que cela ne fait que refléter la composition de la société. Les femmes sont la moitié du monde, elles doivent constituer la moitié des Parlements. Et, une fois élues, elles auront la responsabilité de transformer le pouvoir plutôt que de le craindre. Il leur reviendra d'imprimer leur marque, de changer certains us et coutumes. Elles seront dans l'arène et non spectatrices, actrices et non victimes.

Il existe un courant d'idées voulant qu'on n'ait pas besoin d'une loi pour changer la composition des Parlements. On a cru longtemps, au Québec, que le chemin vers la parité progresserait avec des appels à la raison et à la bonne volonté, mais force est de constater que les résultats ne sont pas là. L'évolution n'est pas constante. Les reculs, on l'a vu, sont possibles, et la marche paraît bien haute entre les avancées actuelles — dans les meilleurs cas, environ le tiers d'élues — et la présence durable de 50 % de femmes députées.

L'histoire des femmes montre que les lois ont permis des progrès qui ne se seraient pas faits tout seuls. C'est le cas, par exemple, de la Loi sur l'équité salariale, qui fête cette année son 20e anniversaire. Au départ, bon nombre de gens en saluaient le principe tout en considérant que la société québécoise n'en avait pas les moyens financiers. La preuve a été faite qu'une fois la loi adoptée les moyens ont suivi, de telle sorte que, même si elle n'est pas parfaite, la législation québécoise sur l'équité salariale fait l'envie de bien des pays dans le monde.

C'est pourquoi, pour atteindre la parité, nous proposons une loi en deux volets. Le premier contiendrait l'obligation pour chaque parti politique de présenter au moins 40 % de femmes lors d'une élection. Nous nous situons dans ce qu'on appelle la zone paritaire, fixée entre 40 % et 60 % de candidatures féminines. Nous sommes aussi conscientes qu'on ne change pas du jour au lendemain un Parlement majoritairement représenté par des hommes pour un Parlement paritaire. C'est pourquoi, tout en visant la parité, nous pensons que l'objectif serait atteint, dans un premier temps, à 40 %. La loi devra prévoir également une période transitoire permettant d'étaler sa mise en application complète.

Le deuxième volet du projet de loi indiquerait une bonification par le Directeur général des élections du financement des partis politiques qui ont atteint l'objectif de 40 % des femmes élues à l'Assemblée nationale. Autrement dit, nous choisissons la voie incitative plutôt que coercitive. Dans certains pays, le défaut d'atteindre l'objectif est sanctionné par une amende octroyée aux partis politiques. Outre l'aspect négatif de cette approche, l'inconvénient, c'est que plusieurs d'entre eux préfèrent l'amende à la transformation de leurs pratiques. Nous préférons récompenser les bons résultats, d'autant plus que le financement des partis politiques est maintenant essentiellement public, au Québec, ce qui donne au Directeur général des élections un véritable levier pour influencer le cours des choses.

Mme Daneault (Hélène) : Une fois précisée notre volonté d'obtenir une loi sur la parité, nous aimerions discuter de certains arguments qui circulent couramment en défaveur de cette idée. Le premier et le plus courant est qu'on risque d'élire une femme poteau ou une femme pour une femme, sans égard à sa compétence. Or, nous pensons qu'il existe bel et bien des femmes compétentes, à travers le Québec, capables de représenter dignement l'électorat d'une circonscription, de contribuer avec talent à des travaux parlementaires et même de gouverner l'État. Leur absence tient beaucoup plus, il faut le répéter, à leur résistance à s'inscrire dans le métier de la politique, avec tout ce que cela suppose de transformation de leur image d'elles-mêmes et d'aménagements dans leur vie personnelle, familiale et sociale. Il y a en ce moment même des femmes capables et désireuses de devenir députées. Nous pensons qu'une loi peut contribuer à enlever les verrous qui freinent leur engagement.

Dans un excellent article paru dans le magazine L'Actualité le 3 mai 2017, la journaliste Noémi Mercier pose la question suivante : «Si on obligeait les partis à faire une plus grande place aux femmes, la qualité des élus s'en trouverait-elle amoindrie?» En faisant le tour de plusieurs recherches portant sur des mesures adoptées dans des pays comme la Suède, l'Italie, la France, la Grande-Bretagne, elle en arrive à la conclusion que le fait d'attirer plus de femmes en politique a eu pour effet d'élever la classe politique tout entière.

Défaisant le mythe que l'obligation de la parité provoquerait une dégradation de la qualité des élus et discréditerait les femmes, Noémi Mercier termine sur ces mots : «Si les hommes sont depuis toujours surreprésentés en politique, ce n'est pas parce qu'ils sont fondamentalement plus méritants. C'est parce que des facteurs historiques, sociaux et culturels qui n'ont rien à voir avec leur mérite leur facilitent l'accès aux lieux de pouvoir comme le vent dans le dos d'un coureur le fait gagner plus aisément la ligne d'arrivée.» Oserons-nous, comme cela s'est fait ailleurs avec succès, changer le cours du vent?

Et puis, en tout respect pour les personnes qui ont, comme nous-mêmes, embrassé le métier de la politique, faut-il rappeler qu'il n'y a aucun test de compétence ni à l'arrivée ni en cours de route. On est élu parce que les citoyennes et citoyens en ont décidé ainsi, pour une foule de raisons qui tiennent aux programmes des partis politiques, à la perception des chefs dans l'électorat, à la conjoncture économique et sociale et aussi, pour une part, à leur opinion sur les candidates et candidats. Permettez-nous de poser avec un sourire la question suivante : Nos Parlements sont-ils actuellement composés à 100 % de personnes compétentes?

Autre argument fréquemment entendu en défaveur de l'obligation de la parité : Les règles du jeu démocratiques empêchent de cibler prioritairement des femmes. Or, même dans les partis dont les règles de recrutement de candidatures sont les plus encadrées, avec un processus d'investiture consacré dans leurs statuts, cela n'est jamais exercé à l'état pur. Les partis interviennent pour équilibrer la provenance des candidates et candidats : jeunes, minorités, professions. Plus encore, les chefs de parti sont en droit de donner un signal clair, étant ceux qui autorisent des candidatures. Nous croyons en ce sens à l'importance du leadership d'un chef qui, convaincu du bien-fondé de la parité, mettrait tout son poids pour guider le choix des militantes et des militants. Dans ce contexte, on peut penser que des femmes seraient sensibles à un tel engagement et répondraient à l'appel en plus grand nombre. Tout cela est déjà possible en vertu des règles actuelles. Une loi sur la parité, comme nous l'avons mentionné plus haut, ajouterait une voix sociétale à celle des chefs de parti, légitimant d'autant leurs démarches. Par ailleurs, ayant une obligation de résultat, les partis trouveraient des moyens pour y parvenir. Ils s'y prendraient beaucoup plus longtemps d'avance, offriraient, par exemple, de l'accompagnement, voire du mentorat.

• (12 h 30) •

Mme Malavoy (Marie) : Mais, au fait, qu'est-ce que ça changerait, plus de femmes au Parlement? Outre l'avantage de mieux refléter la population, peut-on espérer une amélioration de la politique elle-même?

Les études montrent que les femmes ont un impact important sur les sujets débattus. On leur doit plusieurs lois et politiques qui n'auraient probablement jamais vu le jour sans le rapport. Pensons aux services de garde pour les enfants d'âge préscolaire, à la loi sur le patrimoine familial, à la perception automatique des pensions alimentaires, aux congés parentaux, à l'équité salariale, à l'aide médicale à mourir. Pensons également à la politique Pour que l'égalité de droit devienne une égalité de fait, qui outille les organisations depuis 2006 afin de mieux atteindre l'égalité des sexes dans leur milieu. Elle a grandement contribué à la mise en place de mesures qui, notamment, facilitent la conciliation famille-travail.

Les femmes ont introduit dans l'enceinte du Parlement les préoccupations d'une partie de la population jusque-là laissée pour compte. Elles ont également influencé certaines procédures et comportements. Par exemple, leur rôle a été déterminant dans la décision de mettre fin aux sessions de travail de nuit ou de modifier le calendrier parlementaire pour permettre aux parents d'être avec leurs enfants lors de congés scolaires. À plus long terme, on peut viser non seulement à obtenir la parité quantitative, mais aussi à changer le moule. Le monde du pouvoir est perçu négativement par bien des gens qui l'abordent avec méfiance quand ce n'est pas du cynisme. La parité entre les hommes et les femmes forcerait le débat sur la nature même de la politique.

En conclusion, nous tenons à saluer la Commission des relations avec les citoyens pour son mandat d'initiative sur la place des femmes en politique. Nous suivrons avec intérêt et espoir la suite de ces travaux. De notre côté, nous continuerons à plaider la nécessité d'une loi pour la parité, convaincues que nous sommes qu'il en va de la qualité de notre système démocratique. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Merci, mesdames. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Richmond.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Daneault, Mme Malavoy — chère citoyenne du comté du Richmond — Mme Théberge, merci beaucoup de votre présence. Merci. Et félicitations également pour la création de ce comité au sein du cercle que vous représentez aussi! Vous apportez, selon moi, un éclairage qui est vraiment, justement, dans le concret. Vous avez vécu ce que c'est que d'être une femme en politique. Vous l'observez maintenant peut-être d'un peu plus loin mais probablement avec tout autant de passion, et d'ardeur, et de dire : O.K., oui, on veut continuer aussi, comme anciens parlementaires, à faire cette différence, ce pourquoi l'ensemble des parlementaires, souvent, on décide de faire le saut dans cette politique.

Vous parlez évidemment, à la base, beaucoup d'un système de quota plus incitatif que coercitif. Le Directeur général des élections, qui était là avant, c'est plutôt mitigé. On le voit dans le rapport d'ailleurs du Directeur général des élections. D'autres se sont aussi prononcés pour éviter... pour mentionner que ce n'est pas nécessairement... ça peut sembler un moyen facile et efficient, mais que ce n'est peut-être pas nécessairement la mesure qui va concrétiser les résultats qu'on cherche et où que c'est facilement contournable.

Bref, je ne suis pas totalement nécessairement en désaccord avec la proposition que vous faites. Le mandat premier, pour moi, cette idée de mandat d'initiative, c'est aussi d'aller chercher, au-delà de ces grandes théories, qu'est-ce qu'on est capable de faire aussi très concrètement, applicable demain matin, au-delà de la législation, comme parlementaires ou comme anciens parlementaires. Alors, vous me permettez peut-être d'aller un peu plus à l'écart de ça pour parler beaucoup des autres aspects que vous évoquez, soit l'importance de l'éducation des jeunes femmes, de mentorat, de parler également peut-être de votre expérience personnelle, comment vous l'avez vécu, ce saut en politique, ces difficultés, et où, finalement, une fois rendues en politique, vous avez trouvé que c'était quand même conciliable, tout ça.

J'ai une très grande préoccupation aussi, autre que la place des femmes en politique, c'est la valorisation du rôle du député. Vous qui avez exercé ce rôle aussi, est-ce que vous croyez que ça peut avoir un effet également sur la présence des femmes au sein de l'Assemblée nationale?

Donc, je lance beaucoup de choses comme ça, j'en ai plein. Je vous invite à continuer l'échange sur votre perception personnelle du rôle du député, la valorisation, qu'en est-il de son importance dans ce dossier dont on parle aujourd'hui, l'éducation, également, et vraiment votre expérience personnelle aussi à travers ça.

Le Président (M. Picard) : Mme Malavoy.

Mme Malavoy (Marie) : Oui, bien, Mme la députée de Richmond pose effectivement bien des questions tout à fait pertinentes par rapport à ce sujet-là.

Je me permettrais peut-être d'abord de préciser une chose : Nous ne parlons pas de quota mais d'une zone paritaire, ce qui est quand même beaucoup plus souple, une zone paritaire entre 40 % et 60 % de femmes, ça ne cible pas un nombre x, entre autres parce qu'en tout respect pour notre Parlement actuel il ne s'agit pas d'enlever les hommes qui sont là puis de recommencer à neuf. Donc, on pense que, si on vise 40 %, et même avec peut-être un étalement dans le temps, on va avoir une approche qui soit plus réaliste.

Mais notre expérience, et on pourra la partager, mes collègues et moi, c'est que nous avons précisément vécu ce qui actuellement fait problème pour l'accès des femmes en politique, c'est-à-dire d'abord une vision du pouvoir qui n'est pas extrêmement attirante. Et on a effectivement franchi cette difficulté-là, mais on l'a quand même vécue, plus, bien entendu, les difficultés plus classiques de conciliation, par exemple, travail-famille, d'éloignement, etc. Et ce que nous pensons, c'est que, si on continue à espérer que d'élection en élection il y ait un petit peu plus de femmes, puis un petit peu plus de femmes, ça va prendre des siècles.

Il y a actuellement une résistance qui demeure, et les femmes ne se sentent pas, je dirais, globalement appelées dans le monde du pouvoir. Elles se sentent bienvenues. La preuve, c'est que là, actuellement, les chefs veulent avoir des femmes. Donc, les femmes ne vont pas dire : On ne veut pas de nous. Au contraire, on veut de nous, mais elles ne se sentent pas appelées, elles n'ont pas l'impression que c'est leur milieu. Elles n'ont pas l'impression que la société a décidé que le Parlement devait être paritaire. Et nous croyons qu'une loi enverrait ce type de signal.

Je ne veux pas prendre toute la place, donc ma collègue Carole va poursuivre.

Mme Théberge (Carole) : Oui. Ce qu'on décrit beaucoup, en fait, c'est comme un... j'appelle ça un écosystème du milieu politique. Et notre façon de voir, en fait, des solutions... Parce qu'il n'y a pas juste une solution. S'il y avait eu une recette magique pour ça, ça fait longtemps qu'on l'aurait trouvée. Je pense qu'il faut arriver sur plusieurs fronts en simultané pour répondre à différents besoins, pour créer un écosystème qui est favorable. Pour l'améliorer, en plus, en fait, il faut être dans la place.

C'est ce qu'on dit, nous, à des femmes, depuis plusieurs années. Vous le dites, vous aussi. Il faut prendre la place. Il y a une place pour vous, tout le monde le dit, il y a une place pour changer des choses, mais il faut être là, et ça va faire la différence. Et je pense que, là, il y a un grand momentum dans la société, il faut en profiter puis il faut aussi se lancer. Il y a ce volet-là qui est bien important.

Et, lorsqu'on parle des délais, il faut penser que le droit de vote, on l'a eu en 1940. Ça a pris 21 ans avant que la première femme arrive à l'Assemblée nationale, c'en a pris 40 de plus pour arriver à avoir plus de 20 % à l'Assemblée nationale. Maintenant, 67 ans plus tard, on est à peine à 28 %, puis c'est un... Si je faisais la moyenne des cinq dernières années, là, ce ne serait pas tout à fait ça. Alors, il faut faire des gestes concrets et... Vous parliez tout à l'heure de gestes, en fait, un peu plus forts. Ça, c'est important aussi.

Et, l'autre chose, je pense qu'une gouvernance paritaire... Je ne le pense pas... il n'y a pas juste moi qui le pense, en fait, c'est connu qu'une gouvernance qui est paritaire amène des idées novatrices et bénéfiques pour l'organisation, et ça, autant dans des entreprises que dans une organisation ou un organisme. Et c'est là qu'il faut viser. Puis nous, on suggère évidemment de prendre des moyens pour susciter vraiment... l'intérêt est là, mais susciter l'action des femmes qui pensent à venir en politique.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la...

Mme Daneault (Hélène) : Oui, peut-être juste rajouter que ça fait...

Mme Vallières : Très rapidement, il reste très peu temps pour mon bloc de questions.

• (12 h 40) •

Mme Daneault (Hélène) : O.K., rapidement, juste rajouter que ça fait 77 ans que les femmes ont obtenu le droit de vote, mais force est de constater que ça fait 77 ans qu'elles sont aussi sous-représentées. Alors, je pense que, oui, il y a une volonté, mais, la sonnette d'alarme, on l'a eue la dernière élection, où on a reculé par rapport au nombre d'élues féminines, c'est-à-dire qu'on est passés de 32 % à 27 % de femmes élues en 2012.

Alors, je pense que, si on est ici aujourd'hui, c'est pour vous dire que, ce qu'on a obtenu en 1940, on est maintenant prêtes à passer à autre chose, à avancer le dossier. Et malheureusement je pense qu'on doit constater que les efforts qui ont été mis à date ne sont pas suffisants. On peut aller voir dans d'autres législations, entre autres en France, dans les pays scandinaves, où ils ont légiféré et où les résultats sont probants. Au Québec, on se dit des gens qui sont dynamiques. Alors, je pense que maintenant, aujourd'hui, on est prêts à poser ce genre de geste là.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Richmond, il vous reste trois minutes, question, réponse.

Mme Vallières : Merci beaucoup. Vous avez aussi parlé de la culture du travail à l'Assemblée nationale dans sa généralité, là, comment les femmes ne se sentent pas appelées, en fait, par la politique, probablement parce que ça ne nous ressemble peut-être pas assez. Quand on parle de faire de la politique de façon plus respectueuse, moins partisane, faire de la politique aussi plus ouverte aux nouvelles idées, vous venez d'en parler il y a quelques minutes, ce changement de culture à l'Assemblée, concrètement, puisque vous l'avez vécu de l'intérieur aussi, ça touche à quel aspect de la vie parlementaire, selon vous, pour faire que les femmes se sentiraient davantage appelées ou que ça ressemblerait davantage au type de politique que l'on veut vivre?

Mme Malavoy (Marie) : Là encore, une vaste question en peu de temps. En fait, regardez simplement le langage qu'on utilise, c'est un langage qui est guerrier, O.K., très souvent guerrier. Depuis le début d'une campagne électorale jusqu'à une élection, on exerce le pouvoir avec des termes guerriers. Moi, je disais d'ailleurs, quand je venais ici, que je m'en allais au régiment avec les codes de vie d'un Parlement. Je pense que cela se transforme de l'intérieur. Et, par exemple, le fait que des femmes, je l'évoquais tout à l'heure, aient décidé qu'on ne siégerait plus de nuit systématiquement en session intensive, ça a été, à un moment donné, un mouvement des femmes à travers tous les partis politiques.

Donc, une fois dans l'enceinte, on peut modifier des choses, mais la perception qu'on a de l'extérieur, c'est que ce n'est pas vraiment très intéressant. Donc, je crois qu'il faut que les femmes sentent qu'on a besoin d'elles à part entière à l'intérieur des Parlements et que, ce faisant, il y a un certain nombre de manières d'être, de comportements, de langage, d'éléments de culture qui soient teintés de leur présence, et ça ne se fait pas quand on est une minorité. Ça se fait à 40 %, à 50 %, bien entendu, mais, si on n'atteint pas au moins la zone paritaire, ça ne se fera pas suffisamment. Les femmes s'adapteront au langage guerrier, au comportement plus masculin, au lieu de réussir à le transformer de l'intérieur.

Le Président (M. Picard) : 40 secondes.

Mme Vallières : Le rôle des médias à l'intérieur de cette culture, justement, et de la perception que l'on a de ce travail, de ce rôle de député à l'Assemblée nationale, comment vous le voyez?

Mme Théberge (Carole) : Moi, je trouve que... En fait, il y a un constat qu'on doit faire pour le rôle des médias. Malheureusement, la façon de rapporter certaines choses ou la façon de parler tout simplement de ça contribue à renforcer cette notion, de dire que c'est un milieu qui est difficile, c'est un milieu qu'on ne peut pas changer, un milieu qui ne nous appartient pas, aux femmes, et certains hommes aussi doivent avoir de la difficulté à s'y reconnaître quand ils lisent certains éléments. Je trouve ça dommage parce que c'est un effet sur la démocratie, en fait. Quand on dit qu'on veut une démocratie légitime, il faut qu'elle soit représentative de la population. Nous sommes au-delà de 52 % et...

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Théberge (Carole) : Excusez-moi?

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Théberge (Carole) : En terminant, alors, il y a un effet... Ils pourraient, en fait, contribuer à un effet positif à certains égards, certainement.

Le Président (M. Picard) : Merci. Maintenant, du côté de l'opposition officielle, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, bonjour, mesdames, Mme Daneault, Mme Malavoy, Mme Théberge, d'être présentes avec nous aujourd'hui en commission parlementaire pour discuter du sujet infiniment important qui est celui de la place des femmes en politique.

Je n'ai pas eu l'occasion de vous côtoyer comme parlementaire, puisque je suis toute nouvelle, députée depuis un an, mais je vous remercie énormément pour le travail que vous faites pour l'avancement, pour la place des femmes en politique. C'est extrêmement apprécié, puis j'ai beaucoup aimé votre présentation. Je pense qu'en tant, justement, que femme députée je pense qu'on peut reconnaître les réalités que vous soulevez, notamment à travers votre mémoire, quand vous parlez aussi de la question de la fameuse compétence qu'on soulève continuellement quand il est temps de parler, par exemple, de quotas ou du fait d'obliger les partis politiques à avoir un nombre de candidates féminines. Ça me fâche tellement d'entendre ça tout le temps, de dire : Ah! il faut privilégier la compétence, parce que, quand on dit ça, c'est comme si on affirmait que les femmes étaient moins compétentes que les hommes ou, du moins, qu'il y avait moins de femmes compétentes que d'hommes compétents, alors qu'au contraire le problème, c'est que justement les femmes sont moins promptes à se lancer en politique, et donc qu'il y a un plus grand travail à faire de la part des partis pour convaincre les femmes compétentes de se lancer en politique. Alors, ça, c'est la nuance, et je vous remercie énormément de pouvoir l'amener.

Vous parlez aussi... Vous amenez la question de la démarche des partis politiques, notamment ceux qui fonctionnent avec un mode d'investiture pour choisir leurs candidats et leurs candidates, puis ce qu'on constate souvent, c'est justement qu'il y a des hommes qui vont penser très longtemps à l'avance qu'ils veulent se présenter, par exemple, à l'occasion d'une investiture, et ce qui fait en sorte que, quand les partis, bon, essaient de recruter des candidatures, pour aussi arriver à un meilleur équilibre, bien, il y a souvent des hommes qui ont commencé le travail de recrutement, par exemple, de membres, et tout ça, au sein des circonscriptions, et ce qui fait en sorte que ça rajoute encore plus de difficulté quand on veut convaincre des candidatures féminines, parce que, là, elles doivent aller se battre en investiture contre, par exemple, quelqu'un qui est là depuis très longtemps et qui a déjà amorcé le travail. Donc, vous dites dans votre mémoire, avec raison : «Le temps que leur réflexion progresse, que leur confiance en elles s'affirme, les places sont prises, et les délais, épuisés.»

Alors, je sais que vous l'avez abordé aussi, mais comment vous voyez l'obligation que vous proposez, donc, de l'atteinte du 40 % de candidatures... bien, en fait, 40 %, la zone paritaire à l'intérieur, justement, des partis politiques qui choisissent leurs candidats via un processus d'investiture? Est-ce que vous croyez que certaines circonscriptions devraient être d'abord réservées au sein des partis politiques? Comment vous le voyez dans l'application?

Mme Malavoy (Marie) : La question, elle est tout à fait pertinente, et, en même temps, nous sommes bien conscientes que ce dont nous parlons aujourd'hui, ça ne sera pas applicable pour l'élection à l'automne 2018. Donc, il faut penser sur le moyen terme.

Ce que nous pensons, c'est que d'abord, avec une loi, il y a un signal qui est envoyé. Je reviens là-dessus parce que ça donne un message qui dit longtemps d'avance, longtemps d'avance : Nous voulons un Parlement paritaire. Ça veut dire aussi que longtemps d'avance on commence à accompagner des femmes qui manifestent un intérêt pour de la politique. Mais, vous le savez comme moi, elles ne se précipitent pas. Elles ont besoin, puis ça durera encore, à mon avis, un bon moment, besoin d'un accompagnement, d'un mentorat, qu'on réponde à leurs questions, qu'on les rassure sur beaucoup de choses. Elles ont besoin de temps. Si un parti politique savait, par exemple, qu'aux élections de 2022 il devra avoir la parité de candidatures, il se mettrait en marche rapidement et il commencerait un travail d'accompagnement de cette nature.

Aujourd'hui, on le sait bien, pour d'ici l'automne 2018 on est très tard. La volonté d'avoir des femmes est là, mais toute cette démarche de recrutement, elle n'est pas là. De fait, les hommes sont déjà prêts à prendre toutes les places, et on fait du rattrapage. Au lieu d'avoir un signal clair longtemps d'avance, on est en mode plus de rattrapage, avec tout ce que ça peut donner comme inconvénient, de signal d'une obligation un peu forcée, et non pas d'une volonté réelle que des femmes se présentent.

Mme Daneault (Hélène) : En fait, une loi pourrait envoyer un message à l'ensemble des partis, aux chefs, mais aussi à la machine qu'on connaît très bien. La machine est souvent en place, là, depuis même bien avant les chefs et bien avant les députés, et cette machine-là a des réflexes, des vieux réflexes d'aller chercher, dans la communauté, souvent des hommes qui se sont distingués plutôt que d'aller chercher des femmes. Et on le sait, les femmes n'iront pas spontanément. Alors, je pense que d'adopter une loi permettrait d'envoyer le message non seulement aux chefs en place, mais aussi à l'ensemble des machines des partis politiques qui sont souvent celles qui sont beaucoup plus sur le terrain et beaucoup mieux en mesure d'aller recruter des femmes en politique.

Actuellement, quand on regarde au rythme où vont les choses avec ce qu'on a fait à date à travers le monde, juste une petite statistique, j'aime bien en utiliser, le rapport du Forum économique mondial dit qu'au rythme où vont les choses actuellement, la parité hommes-femmes sera atteinte en 2186 à travers le monde. Alors, vous voyez qu'on est loin de la coupe aux lèvres, et je pense que le fait de légiférer permettrait aussi d'envoyer un message non seulement aux partis, non seulement aux leaders, mais aux machines.

• (12 h 50) •

Mme Théberge (Carole) : Il faut dire aussi qu'avec les élections à date fixe, ça facilite ce travail-là. Alors, les personnes peuvent voir venir... C'est un gros avantage, dont il faut profiter. Puis les femmes vont devenir plus sensibles mais, parce qu'il y a tellement de messages, j'espère que les femmes vont devenir plus sensibles à cet appel-là puis y répondre. Et aux partis de mettre en place des mesures. Puis c'est faisable, c'est faisable. C'est juste de vouloir le faire.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée, il reste deux minutes.

Mme Fournier : Bien, exactement, vous avez tout à fait raison. Souvent, ce processus-là, il se fait trop tard, et là, pour pallier à un manque de représentation, on finit par envoyer plusieurs femmes dans des circonscriptions, par exemple, qui sont non prenables. Alors, on ne règle pas, au fond, la question de la représentativité des femmes à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Puis on voit très bien qu'on a atteint un plateau. Et donc moi, je suis très favorable à ce que vous proposez, mais j'entendais tout à l'heure le directeur des élections nous dire que ça pourrait poser un problème dans l'équité pour les partis qui font élire... qui sont des plus petits partis et qui font élire moins de députés. J'aimerais vous entendre là-dessus rapidement, là. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Malavoy (Marie) : Moi, je ne vois pas en quoi ça poserait un problème d'équité. Parce que prenez, par exemple, Québec solidaire, qui est un plus petit parti et qui atteint déjà la parité dans ses candidatures. Alors, je pense qu'au contraire c'est tout à fait possible. Et là encore je dis : Si c'est une zone paritaire, ça nous laisse quand même un petit peu de marge de manoeuvre.

Puis il ne faut pas s'imaginer qu'on parle de quelque chose, là, qui sort de nulle part. Il y a plusieurs pays dans le monde qui ont des lois sur la parité et qui ont fait franchir des pas de géant à la présence des femmes dans les Parlements, et ce sont des pays démocratiques. Donc, on n'est pas dans un univers complètement différent de ce qui se passe ailleurs.

Mme Théberge (Carole) : Si tout le monde a accès à la même opportunité, dans le fond, il s'agit de la prendre, hein, que ce soit un parti ou l'autre.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée, il vous reste une minute.

Mme Fournier : Ah! il me reste du temps? O.K.

Le Président (M. Picard) : Question et réponse.

Mme Malavoy (Marie) : Moi, je peux la prendre, sa minute, si vous voulez.

Mme Fournier : Bien oui, c'est ça. Je pensais que, tantôt, il restait juste deux minutes.

Mme Malavoy (Marie) : Non, non, mais parce que j'avais envie de partager quelque chose, mais on n'avait pas le temps. C'est un concept que j'utilise, mais je trouve qu'il illustre bien les choses. Les hommes ont ce que j'appelle le gène du chef. Ils sont nés, ils ont grandi avec l'idée qu'ils étaient faits pour être des chefs, être dans l'espace public, et c'est ce qui fait que, quand il y a des places qui s'ouvrent en politique, honnêtement, les hommes se précipitent. Ils ont rarement besoin de se demander : Est-ce que je vais être capable de ceci et cela? Je connais des jeunes hommes qui viennent d'avoir un bébé, et qui sont candidats dans des circonscriptions, et qui à aucun moment n'ont pensé que le problème de la conciliation famille-travail pourrait freiner leur élan politique, ce n'est pas comme ça. Les femmes ne sont pas nées...

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Malavoy (Marie) : Nous ne sommes pas nées, pas encore, avec le gène du chef. Donc, il faut travailler un peu plus d'avance.

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède la parole à Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Bienvenue à vous tous et toutes.

Dans votre document, vous parlez... de nombreux hommes sont prêts à s'engager et à se battre. Tout à l'heure, ma collègue a utilisé ce terme-là, «se battre». Donc, ce qu'on comprend, c'est qu'en politique il y a énormément de compétitivité et de combat, hein? C'est un terme qui revient souvent puis ce n'est pas très féminin. Puis vous avez vécu l'expérience de l'interne, vous savez tout comme moi que c'est encore... Tous les débats, c'est encore très masculin, c'est des joutes où on se sert du coude et...

Dans toute l'approche des pays nordiques auxquels on réfère souvent, on dit que ce qui sont des facteurs de succès dans l'approche de la parité homme-femme, ce qui a fait le succès, c'est le changement de mode de scrutin, naturellement, puis je pense que ça, on en parle souvent, puis il faut y arriver, et la mobilisation du mouvement féminisme. Puis moi, je me rappelle, quand j'étais à la fin de la vingtaine, impliquée dans un parti, j'avais été vraiment marquée par une rencontre qu'on nous avait organisée, où on pouvait parler avec des femmes politiciennes qui parlaient de leur expérience, tout ça. Puis ça, je pense que c'est quelque chose qui nous rejoint, d'avoir des modèles, d'avoir des femmes qui nous parlent de leur expérience. C'est concret. Puis je trouve ça intéressant, ce que vous faites comme travail, mais je pense qu'il faut aller au-delà de ça. Puis vous avez un rôle extrêmement, les ex-parlementaires, extrêmement majeur auprès des groupes de femmes, où il y en a certaines qui auraient juste besoin de la petite poussée pour se lancer. Et vous êtes la preuve que c'est faisable, que c'est possible, que, oui, on est capables de le faire. Et je me demande jusqu'à quel point vous voyez votre rôle dans ça, ces changements-là.

Mme Malavoy (Marie) : Bien, d'abord, je peux vous dire qu'effectivement c'est pour ça que notre comité existe. C'est parce qu'on a fait les mêmes constats et puis on s'est dit : Ma foi, en tant qu'anciennes parlementaires, nous avons un avantage que n'ont pas les autres, c'est d'avoir fait de la politique. Donc, ce n'est pas juste donner une tape dans le dos en disant : Vas-y. C'est aussi cumuler des années d'expérience et penser que c'est un métier dans lequel nous pouvons être heureuses, et être compétentes, et avoir de l'avenir.

Mais nous pensons aussi qu'il faut prendre la question de la parité des deux côtés. Il faut le prendre à la base, accompagner des femmes, témoigner. C'est ce que nous faisons. Depuis un an, nous sommes allées à différents forums prendre la parole. Nous avons même une branche de notre action qui est du mentorat vraiment personnalisé, mais nous pensons que ça ne suffit pas. Il faut aussi le prendre par l'autre bout qui est une législation, et c'est avec ces deux moyens combinés que nous croyons être capables de faire progresser la question de la parité, les deux moyens combinés.

Mme Daneault (Hélène) : Dans les pays scandinaves, la réussite, entre autres, s'est faite aussi parce qu'il y a un haut taux de participation des femmes au marché du travail, ce qu'on retrouve chez nous, ici, de toute façon, mais, au-delà de ça, ils ont légiféré et ils ont exigé qu'on fasse de la place aux femmes, et finalement le résultat est probant. Il y a des pays aussi comme le Rwanda où on a légiféré, où maintenant 65 % des élues au Rwanda sont des femmes, et 77 % des femmes aussi travaillent au Rwanda.

Alors, je pense qu'un n'empêche pas l'autre. Je pense qu'on est d'accord à faire du mentorat. On est ici d'ailleurs pour vous sensibiliser, et je pense que notre implication au niveau de la communauté, au niveau des femmes, elle est là. On commence, on n'a pas fini de tenter de sensibiliser des femmes, mais je pense qu'on est ici aussi pour vous dire que le gouvernement a un message à livrer et, au-delà du message, malheureusement, ça va prendre probablement... bien, pas probablement, on vous suggère de légiférer, comme ça s'est fait ailleurs et comme ça a réussi. À un certain moment, on doit aussi regarder les endroits où ça fonctionne bien. Ce n'est pas une question de réinventer la roue, mais je pense que, si aujourd'hui notre message, il est clair, ça s'est fait ailleurs, ça s'est bien fait, et on ne voit pas pourquoi ça ne pourrait pas se faire ici.

Mme Théberge (Carole) : Si je peux ajouter, en 2017, je pense qu'on est rendus à parler d'une seule voix. Alors, nous, ex-parlementaires, vous, comme parlementaires actuels, le gouvernement, les partis, l'Assemblée nationale, tout le monde pour parler dans le même sens, et appuyés par la société civile, qui peut... dont les médias font partie. Alors, il faut vraiment parler dans le même sens. Puis, quand on parle de politique, là, j'aime parfois démystifier aussi : Qu'on soit dans une grande organisation ou en politique, il y a une culture organisationnelle, il y a des consensus à faire, il y a des débats pour faire avancer nos dossiers. C'est à un autre niveau parce qu'on parle au nom de la société, mais ça se fait aussi dans d'autres organisations, puis les femmes passent à travers.

Alors, il faut vraiment, je pense, voir l'effet bénéfique, je parlais tout à l'heure, d'une gouvernance paritaire sur la société et comment nous, les femmes, on peut et on pourrait tellement mieux contribuer en étant encore plus présentes. Moi, je pense, c'est un élément qu'il faut se souvenir. Puis, si une femme a le goût et un doute positif, dire : J'aimerais ça d'y aller, de foncer, sa place va être là. C'est ça que les partis... le signal qu'il faut que les partis envoient.

Le Président (M. Picard) : Il vous reste 30 secondes pour remercier nos invités.

Mme Lavallée : Bien, je vais terminer vite, vite, d'abord en disant que, dans l'étude comparative de M. Paquin avec les pays scandinaves, il dit que, en comparaison, non seulement le Québec n'est pas doté d'un mode de scrutin à même d'encourager l'élection des candidates, mais le mouvement des femmes ne s'est guère mobilisé de façon soutenue pour accentuer la présence des femmes à l'Assemblée nationale. Puis je pense que vous avez un rôle extrêmement important à jouer pour aller chercher ces femmes-là.

Le Président (M. Picard) : Merci. Merci, Mme la députée. Merci, mesdames, pour votre contribution aux travaux de la commission.

Et je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 9)

Le Président (M. Matte) : Alors, bon après-midi à tous. S'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens va reprendre ses travaux cet après-midi. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer la sonnerie de leurs appareils.

Nous poursuivons les consultations particulières et les auditions sur le mandat des femmes en politique. Cet après-midi, nous aurons l'occasion d'entendre le Conseil du statut de la femme — bienvenue — le Réseau des tables régionales des groupes de femmes du Québec et l'Association féminine d'éducation et d'action sociale.

Toutefois, avant de débuter, je vous rappelle que, ce matin, il a été mentionné qu'il y aurait un consentement pour une période réservée pour des remarques préliminaires. Si ça demeure toujours l'intention, de faire des remarques préliminaires, je vous informe qu'il y a un temps de cinq minutes qui a été réservé pour nos remarques. Donc, tout à l'heure, la personne représentant le gouvernement aura 2 min 30 s...

Une voix : ...

• (15 h 10) •

Le Président (M. Matte) : Je vais vous le dire. Si vous m'écoutez, vous allez tout entendre. Donc, il y a un 2 min 30 s qui est réservé pour le gouvernement, 1 min 30 s qui est réservée au premier groupe de l'opposition officielle et une minute pour le deuxième groupe de l'opposition officielle.

Ainsi, dans le but de ne pas prendre trop de retard, je vous invite, Mme Karine... à faire des remarques préliminaires. Et je vous informe que vous avez 10 minutes pour présenter le projet et de vous présenter, s'il vous plaît. Donc, je vous cède la parole, puis après je vais revenir à vous, madame...

Mme Cordeau (Louise) : Bon après-midi. Excusez ma voix un peu rauque. Louise Cordeau, je suis présidente du Conseil du statut de la femme. Je suis accompagnée de Mme Hélène Charron, qui est directrice de l'analyse et de la recherche au Conseil du statut de la femme et qui a directement contribué à l'élaboration du mémoire qu'on va vous présenter cet après-midi.

Remarques préliminaires

Le Président (M. Matte) : C'est bien. On fait remarquer que j'ai fait un impair. Il fallait un consentement pour les remarques préliminaires, puis je devrais céder la parole à la représentante du gouvernement. Est-ce qu'il y a un consentement pour les remarques préliminaires? Alors, j'invite la députée de Richmond à faire ses remarques préliminaires, puis je vais revenir avec vous par la suite.

Mme Karine Vallières

Mme Vallières : Ça aura été un coup de pratique pour votre voix.

Merci énormément. J'aimerais, à ce point-ci, remercier les collègues, les membres de la Commission des relations avec les citoyens, qui ont accepté la tenue de ce mandat qui était vraiment très cher à mon coeur. C'est une de mes motivations principales à avoir fait le saut en politique, mon père l'ayant fait pendant 34 ans, j'avais, je dois vous avouer, davantage de raisons de ne pas y aller plutôt que d'y aller, mais justement cette place que, si nous, les femmes et les jeunes, on ne l'occupe pas, qui les occuperont, ces places, en fait? Alors, c'est vraiment, pour moi, un cheval de bataille.

Tout le monde, comme société, il y a un momentum, on veut atteindre cette zone de parité. Je pense que les gens sont de plus en plus... il y a un consensus, hein, qui se fait autour de ça. Par contre, on en parle depuis déjà longtemps, on écrit là-dessus depuis déjà longtemps aussi, et on avance si peu, et parfois on recule. Alors, comme députée de terrain, comme femme de terrain aussi très préoccupée par la question, je me dis : Comme parlementaire, quelle place je peux jouer, justement, dans le chemin pour se rendre à cette parité?

Et c'est là, justement, en discutant avec des voisines, des amies, des collègues, de la parenté, quand on leur pose la question : Pourquoi tu ne te lances pas, pourquoi la politique ne t'attire pas?, elles ne parleront jamais des grands principes et des grandes théories dont on parle souvent quand on parle de la parité, soit le quota, la réforme du mode de scrutin, elles vont arriver avec des choses bien concrètes et précises, justement, sur la joute politique, ce système plus de débats, le traitement médiatique, la difficulté de traitement avec notre conciliation que ce soit vie personnelle, famille, le transport, le nombre d'heures à effectuer, les nombreux déplacements, etc. Et c'est vraiment là-dessus que j'ai voulu que l'on discute ensemble, et il y a eu une très belle ouverture, et j'en suis vraiment très, très, très contente. Parce que les choses vont vite, je tiendrais à dire que, pour moi, la place des femmes dans l'arène politique, ce n'est pas que l'affaire des femmes, c'est l'affaire de tous, c'est une affaire de société. C'est important que, tous et toutes, on y participe aussi. Et j'espère vraiment qu'à l'intérieur de cette commission parlementaire on pourra sortir des grandes évidences, justement, et surtout ne pas polariser les positions mais, ensemble, chercher une façon d'être très contemporains et modernes, d'apporter du concret pour que les recommandations que l'on fasse soient aussi le reflet de ce qu'on veut, pour montrer, justement, que les femmes, on est, oui, certes, différentes, qu'on a, oui, certes, notre place dans la politique, et puis démontrer ce que je dis souvent aussi, que... Je préfère dire que je ne fais pas de politique mais que je la vis, et que je pense qu'en ayant davantage de femmes autour des tables on la vivra davantage tous ensemble, collectivement, aussi. Alors, merci de votre présence.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite la députée de...

Une voix : Marie-Victorin.

Le Président (M. Matte) : ...Marie-Victorin, merci. Allez-y.

Mme Catherine Fournier

Mme Fournier : Merci beaucoup, M. le Président. Donc, je remercie aussi la Commission des relations avec les citoyens d'avoir choisi de prendre à bras-le-corps ce sujet qui nous préoccupe tous, en tout cas, qui devrait nous préoccuper parce qu'il s'agit quand même de la représentation de la moitié de la population au sein de nos institutions parlementaires, là où se prennent les décisions qui ont un impact sur notre vie de tous les jours. Alors, cette question-là, elle est incontournable. Et je tiens à remercier aussi mes collègues qui m'ont précédée lors des dernières années, lors du mandat d'initiative, lors des travaux, parce que c'est tout nouveau pour moi, donc, d'avoir l'occasion de siéger au sein de la commission. Et ça me ferait vraiment plaisir de participer aux consultations pour qu'on puisse effectivement dégager les meilleures pistes de solution possible. Parce que c'est un sujet qui va bien au-delà des lignes politiques, des lignes partisanes. Ça doit vraiment tous nous préoccuper, comme je l'ai dit, parce que force est de constater que, malgré les avancées, on a atteint une espèce de seuil, un plateau qu'on peine à dépasser. Donc, c'est important qu'on puisse avoir la réflexion en tant que société parce que, les femmes, on a des choses à dire, on a des réalités à exprimer, des points de vue aussi qui ne sont pas meilleurs ou moins pires que ceux des hommes, mais qui sont néanmoins différents parce qu'on vit quand même des réalités différentes, et donc c'est important que ça puisse être pris en considération. On sait que la présence des femmes à l'Assemblée nationale a fait avancer beaucoup la société québécoise, que ce soit en matière de conciliation travail-famille, mais aussi en matière de méthodes de travail, ici même, au sein du Parlement, alors c'est essentiel qu'on puisse arriver à la parité le plus rapidement possible.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Le temps étant écoulé, j'inviterais la députée de Repentigny, s'il vous plaît, à poursuivre pour une minute.

Mme Lise Lavallée

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Ce ne sera pas long, mais je vais essayer d'être assez concise dans mes idées. Donc, je pense qu'actuellement il y a un mouvement pour faire en sorte que plus de femmes s'impliquent en politique. Je suis certaine que tous les partis ont cette même préoccupation-là. Le problème, c'est de déceler les raisons pour lesquelles les femmes n'osent pas faire le saut en politique.

C'est sûr qu'actuellement le ton des débats, la culture politique, la couverture médiatique, l'absence, hein, on n'est pas là pendant trois, quatre jours, les longues heures... Les longues heures, c'est aussi les longues semaines parce que, souvent, la semaine, c'est sept jours parce que le samedi et le dimanche, on a des activités. Il y a un manque d'intérêt aussi de plusieurs femmes pour la politique.

Puis, récemment, il y a quelqu'un qui me disait : Mais il y a une baisse de salaire pour lesquelles les femmes se questionnent, surtout les femmes qui occupent des fonctions où est-ce qu'elles sont bien rémunérées. Puis on a aussi toute la catégorie des femmes qui sont entrepreneures, travailleuses autonomes, qui, elles, au moment où c'est très occupé, ne peuvent pas faire ce choix-là. Donc, il y a beaucoup de choses qui nous interpellent.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie, Mme la députée de Repentigny. Une minute, c'est vite passé.

Alors, je m'excuse, mais j'aurais besoin d'un consentement, là, pour pouvoir terminer nos travaux de cet après-midi de cinq minutes plus tard que prévu. Consentement?

Des voix : Consentement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Matte) : Alors, je suis rendu à vous, Mme Cordeau. Donc, je vous cède la parole. Et, si vous voulez me présenter votre collègue, j'ai oublié son nom.

Conseil du statut de la femme (CSF)

Mme Cordeau (Louise) : Alors, Mme Hélène Charron, qui est directrice de la recherche et de l'analyse au Conseil du statut de la femme et qui a travaillé sur le mémoire dont on va parler aujourd'hui.

Alors, à mon tour, au nom du Conseil du statut de la femme et à titre de présidente, je veux vraiment saluer ce mandat d'initiative là, qui est si important, qui est une réflexion que l'on fait depuis plusieurs années et qui, je pense, en se mettant tous ensemble... et, tous ensemble, on peut peut-être arriver à trouver certaines pistes de solution.

Et, pour ce faire, aujourd'hui, je vais me permettre de vous présenter certaines grandes recommandations d'un avis que le conseil a publié en 2015, qui s'appelle Les femmes en politique : en route vers la parité. Il nous semble toujours pertinent de le reprendre aujourd'hui parce que ce document est toujours d'actualité. Dans cet avis, le conseil a étudié les mesures adoptées au Québec et ailleurs dans le monde pour hausser la présence des femmes en politique. Il a aussi interrogé 18 femmes s'étant présentées ou ayant été élues aux paliers fédéral, provincial ou municipal. Aujourd'hui, on va se concentrer sur le palier provincial.

Malgré les grandes avancées vers l'égalité qu'ont connues les Québécoises dans les dernières années, elles demeurent sous-représentées en politique. Leur présence à l'Assemblée nationale, on le sait, stagne autour de 30 % depuis une quinzaine d'années. Les obstacles rencontrés par les femmes élues sont bien documentés. Selon le conseil, la socialisation différente des filles et des garçons, l'inégal partage des responsabilités familiales, la culture des partis et des institutions politiques sont les principaux freins à une présence plus équitable des femmes à l'Assemblée nationale.

Si je reprends la socialisation, c'est le processus à travers lequel chaque individu intériorise le fonctionnement de la société, ses règles et ses normes. La famille, l'école, les médias, les milieux de travail sont les principales instances de socialisation. Les recherches montrent que certains attributs exigés actuellement à travers l'action politique, comme l'affirmation de soi, la prise de parole en public, l'esprit de combativité, sont encore transmis davantage aux garçons qu'aux filles lors de l'enfance. De plus, de façon ciblée, la socialisation politique est davantage marquée par des différences entre les femmes et les hommes, et, lorsqu'on parle de socialisation politique, on parle d'intérêt pour la politique, d'adhérer à un parti et de s'impliquer en politique active.

• (15 h 20) •

Aussi, à la lumière de certaines entrevues menées par le conseil, ce n'est qu'au terme d'une évaluation assez sévère de leurs capacités et de l'effet qu'aura la vie politique sur leur vie personnelle et professionnelle que la majorité des femmes rencontrées ont choisi de s'engager en politique active.

Il faut le reconnaître, l'organisation parlementaire actuelle a été pensée et mise en place par des hommes à une époque où ils pouvaient se dégager des tâches familiales pour se consacrer pleinement à leurs charges publiques. Or, cette situation n'est plus adaptée, alors que la plupart des pères et des mères remplissent à la fois les rôles parental et professionnel. Toutefois, malgré cette responsabilité commune, on sait que l'articulation travail-famille pèse encore majoritairement sur les femmes.

Les mesures de soutien à la parentalité pouvant faciliter l'articulation du travail parlementaire avec le travail parental sont nombreuses à travers le monde. L'Assemblée nationale devrait s'en inspirer.

Le conseil a aussi souligné, dans son avis de 2015, que la culture masculine du débat politique, fondée sur l'idée de combat, de joute, continue à éloigner les femmes qui se reconnaissent globalement moins dans ce mode d'échange. Certains phénomènes culturels débordant l'enceinte parlementaire affectent également la crédibilité politique des femmes.

L'espace politique n'est toutefois pas immuable, et je pense que c'est pour ça qu'on est réunis ici, aujourd'hui. Pour ce faire, nous devons agir sur plusieurs fronts et prévoir des mesures plus strictes pour atteindre la parité en politique au Québec. Le recrutement des candidates, l'articulation travail-famille ainsi que la socialisation politique et le soutien des filles et des femmes nous apparaissent comme étant des moyens d'action les plus pertinents.

Nous croyons que des mesures contraignantes doivent être adoptées afin que le Québec atteigne la zone paritaire en matière de candidatures, soit entre 40 % et 60 % de chaque sexe.

Considérant ces éléments, le conseil recommande que la Loi électorale soit modifiée pour y inscrire le concept de zone paritaire comme fondement démocratique et électoral. Les partis politiques auraient ainsi l'obligation de recruter un minimum de 40 % et un maximum de 60 % de candidates et de candidats, sans quoi des pénalités financières importantes leur seraient imposées.

L'étude plus spécifique des quotas montre que leur efficacité varie en fonction du contexte culturel et politique. Il nous apparaît clair cependant que des sanctions sévères, comme l'illustrent les cas belge et français, font en sorte de modifier le comportement politique des partis.

Par exemple, en France, une loi sur la parité exigeant que les partis présentent 50 % de candidatures féminines a été adoptée en 1999. Aux élections suivantes, en 2000, les grands partis nationaux ont préféré être privés d'une partie de leurs financements plutôt que de se conformer à la loi. On a alors fait une modification à la loi et on a doublé les pénalités financières. La présence féminine à l'Assemblée nationale française est alors passée de 26,9 %, lors des élections de 2012, à 38,8 % aux élections de 2017.

Le conseil avait noté, dans ses recherches, que peu de travaux se sont intéressés au profil des femmes qui ont été élues suite à l'introduction d'un quota. Le conseil, sans avoir de recommandations précises à formuler, est soucieux que le gouvernement du Québec et les partis politiques tiennent compte de la diversité et facilitent l'accès des femmes et de toutes les catégories sociales à l'espace politique.

Dans le cas de la mesure relative à l'articulation famille-travail-politique, nous recommandons que l'Assemblée nationale se dote d'une politique d'articulation famille-travail-politique et qu'en matière de congé de maternité, de paternité et de congé parental, que le gouvernement respecte minimalement les normes de l'Organisation internationale du travail, soit au moins d'accorder 14 semaines de congé à la suite d'un accouchement.

Pour tenter de contrer les effets de socialisation et d'une éducation différente des filles et des garçons, le conseil recommande que le gouvernement maintienne le financement de projets de soutien à l'action politique des femmes en privilégiant les projets structurants, qu'il réserve une partie de son financement pour des projets visant les jeunes filles et que l'attribution de son financement tienne compte des défis régionaux propres aux femmes.

En ce qui concerne le milieu scolaire, l'étude du conseil a souligné que ce ne sont pas d'abord les contenus actuellement transmis en classe qui font la différence dans le processus de socialisation. La rencontre de personnes inspirantes, la participation à des activités à caractère social et politique sont aussi déterminantes. À ce sujet, il nous est apparu fort intéressant d'analyser la présence des jeunes filles lors des simulations parlementaires instaurées par l'Assemblée nationale du Québec.

En 2016, le Parlement écolier, qui s'adresse aux élèves de sixième année, comptait 65,6 % de participantes. Le Parlement des jeunes, qui visait les troisième et quatrième secondaires, comptait 65,2 % de participantes. Le Parlement étudiant collégial comptait 43,6 % de participantes. Le Parlement étudiant qui vise davantage les universitaires comptait 31,9 % de participantes. Le Parlement jeunesse, lui, a fait beaucoup d'efforts pour maintenir l'équilibre dans la représentation entre les deux sexes, et en 2016, le taux de participation des femmes était de 52,5 %.

À la lecture de ces résultats, nous sommes forcés de constater la nette décroissance, avec l'âge, de l'intérêt et de l'implication des jeunes femmes en politique. D'autres projets visant les adolescentes et les jeunes femmes mériteraient donc d'être développés.

En conclusion, il n'existe pas de solution facile et unique pour résoudre la question complexe de la sous-représentation permanente des femmes en politique. Au-delà des mesures discutées précédemment, il faut agir en amont.

Le conseil a récemment émis un avis sur l'égalité entre les sexes en milieu scolaire, dans lequel il recommande qu'un cours obligatoire en éducation à l'égalité soit implanté dans les écoles québécoises, du début du primaire jusqu'à la fin du secondaire. Un aspect de ce cours pourrait d'ailleurs porter sur la socialisation politique égalitaire des filles et des garçons. Par exemple, différentes activités pourraient être prévues, des rencontres avec des personnes élues, des exercices de prise de parole et de débat public.

Le Québec est l'une des sociétés les plus avancées au monde en matière d'égalité entre les femmes et les hommes. Malheureusement, la longue stagnation de la représentation politique des femmes indique que la bonne volonté des acteurs n'est pas suffisante. Un réel coup de barre et des actions législatives concrètes sont nécessaires pour atteindre la parité politique, un principe cher au coeur de l'égalité entre les femmes et les hommes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Matte) : Alors, je vous remercie pour votre exposé. Maintenant, j'inviterais la députée de Richmond à poursuivre les échanges. Et je vous informe que vous avez 15 minutes, Mme la députée.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, mesdames, de votre présence. Toujours un plaisir de vous entendre et surtout de pouvoir échanger avec vous.

Évidemment qu'on a cette brique qui a été produite et pour laquelle il y a plusieurs informations fort pertinentes, des annexes aussi auxquelles on peut se référer. Je le fais de façon très régulière. Évidemment, il y a là-dedans des recommandations, dans son ensemble, pour des actions dans toutes les sphères politiques et/ou décisionnelles et non seulement sur la place des femmes, précisément, en politique, ce que vous amenez aujourd'hui de façon plus précise.

Quelle est, au-delà de votre position... S'il n'y avait qu'une seule chose à faire, il y en a une à faire, puis on voudrait avoir une incidence rapidement pour la prochaine campagne électorale, sur quoi vous miseriez a priori?

Mme Cordeau (Louise) : La modification à la Loi électorale obligeant les partis politiques à présenter entre 40 % et 60 % de candidates aux prochaines élections.

Mme Vallières : Et, bon, au-delà de ça, puisque le temps est compté, là, vous savez que... j'aurais peut-être dû le dire, au-delà de ça, est-ce que, comme parlementaires ou... Je reprends la question. On va en venir avec des recommandations dans un rapport. J'ai cette préoccupation, comme vous l'entendiez dans les remarques préliminaires tout à l'heure, qu'on ait une réelle incidence sur la présence de femmes comme candidates à la prochaine campagne électorale. Au-delà d'un quota, d'une zone paritaire, qu'est-ce que le Conseil du statut de la femme dit : Tout de suite, demain matin, les parlementaires, allez là-dessus pour qu'on puisse déjà avoir des résultats?

• (15 h 30) •

Mme Cordeau (Louise) : Évidemment, vous l'avez bien dit en introduction, le mémoire est assez complexe dans l'ensemble des dispositions qui sont comprises. Je pense que vouloir avoir, et je fais attention à ce que je dis, mais des solutions qui vont changer complètement ce qui se passe depuis 15 ans, c'est très louable, mais c'est très ambitieux.

Il m'apparaît clair, pour avoir été dans le milieu des affaires, pour être une femme qui a été impliquée dans différents niveaux de la société, qu'une des solutions, je dirais, un petit morceau de la solution, c'est d'aussi regarder des réseaux différents où les femmes sont présentes, où elles sont peut-être moins sollicitées. Mais c'est peut-être à court terme, c'est micro, ce que je dis.

Mais il est évident que, lorsqu'on regarde le résultat, là, 30 % depuis 15 ans, en une année, vouloir interpeler beaucoup plus de femmes... Le Conseil du statut de la femme ne s'est pas penché directement là-dessus. Cependant, dans son mémoire, dans son avis, le conseil parle aussi de l'importance des modèles, parle aussi de l'importance d'avoir, pour ces jeunes femmes et ces filles-là, des modèles auxquels elles peuvent s'identifier. Il y a des actions politiques qui sont accessibles. Et la multiplicité des femmes élues, bien qu'elle soit insuffisante, on a vu aussi ce qui s'est passé au niveau des élections municipales. La possibilité d'être élue, l'accessibilité, je pense que c'est un facteur qui peut être aussi déterminant, pour certaines femmes, de choisir de s'engager en politique.

Mme Vallières : O.K. Donc, vous notez d'ailleurs dans ce que vous avez présenté que vous saluez le fait que, dans la nouvelle politique d'égalité hommes-femmes, justement, il y a une reconduction, une flexibilité dans les sommes également qui sont octroyées pour différentes organisations. Est-ce que, par le biais de projets comme ceux-là, qui peuvent être maintenant pluriannuels, comme vous le mentionnez... est-ce que ça peut être une source de solutions, justement, pour mettre en place — et vous faites bien la différence — non pas seulement de l'information, non pas seulement de l'éducation, mais de la socialisation, donc d'aller plus loin? Est-ce que ça peut passer par ces programmes-là? Est-ce que c'est suffisant déjà, ce qui est fait, selon ce que vous constatez dans les différents groupes, là, qui sont autour de vous?

Mme Cordeau (Louise) : Je pense que ce n'est pas suffisant. C'est déjà extrêmement important d'avoir du financement qu'on appelle pluriannuel, donc qui ne se concentre pas sur une action pendant un temps déterminé, parce que tout ne peut pas se faire en six mois ou en un an. Donc, le financement pluriannuel nous semble essentiel. Mais effectivement, de dire que ce moyen-là est suffisant, non. Et qu'on regarde juste les résultats, et moi, ça m'a frappé, les résultats des Parlements, les Parlements qui sont en décroissance, où on passe de presque 66 % de jeunes femmes à 35 %, alors que c'est bien encadré, c'est bien publicisé, c'est bien organisé, alors ça nous démontre que même ce qui est bien structuré depuis des années n'arrive pas à atteindre certains résultats ou certains objectifs. Alors, les moyens doivent être nombreux. Mais je reviens aux modèles. Je reviens aux témoignages de femmes inspirantes. Je reviens à la façon dont la politique devrait pouvoir être accessible. C'est sûrement un des éléments qui pourraient faciliter la décision de certaines femmes de se lancer en politique.

Mme Vallières : Est-ce que vous voyez le DGEQ avoir un rôle dans cette information, éducation là?

Mme Cordeau (Louise) : Bien, forcément, dans la mesure où le Directeur général des élections... Nous, on parle de modifier la Loi électorale, alors c'est au coeur du mandat du Directeur général des élections. On l'a vu lors des élections municipales récemment, plusieurs organismes, dont le Conseil du statut de la femme, se sont mobilisés pour faire des campagnes pour inciter les femmes à se présenter en politique municipale. Nous, on a présenté une vidéo. Je sais que les Affaires municipales ont fait la même chose. Plusieurs groupes de femmes ont fait la même chose. Alors, cette action de sensibilisation collective et accessible sur plusieurs terrains est aussi importante.

Mme Vallières : O.K. Je reviens aussi... J'entends que, là, le DGEQ... je reviens là-dessus parce qu'il a démontré, autant dans la rédaction du rapport du DGEQ, il y a quelques années, que dans nos discussions tout à l'heure, que le quota, sans un aspect volontaire des partis ou... à tout le moins le quota ne peut pas être nécessairement la solution à tout, n'a pas nécessairement un impact. Vous parliez quand même tout à l'heure de cet aspect-là ou, du moins, de la zone paritaire. Là, je vais faire attention à la façon dont je le mentionne. Est-ce que vous avez évalué aussi la possibilité d'être plus incitatifs, versus le coercitif dont vous parliez et dont vous faisiez référence dans certains endroits, en Europe entre autres?

Mme Cordeau (Louise) : Si vous me permettez, je vais demander à Mme Charron, qui a travaillé à l'élaboration du mémoire puis à l'ensemble des détails, de compléter par rapport à votre question.

Mme Charron (Hélène) : En fait, le conseil a longtemps recommandé des mesures incitatives pour augmenter le nombre, le pourcentage de femmes élues en politique puis il a changé de position. En fait, en 2002, en 2010, il le recommandait. Il a changé de position en 2015 précisément face à la stagnation dont Mme Cordeau parlait à l'instant. Dans le cadre de ce changement-là, on a fait quand même l'étude justement des différents pays qui ont mis en place des mesures incitatives et on a conclu que ce n'était pas convaincant et que ça n'avait pas eu les effets escomptés.

Donc, c'est sûr que ce que le conseil recommande dans son mémoire, c'est vraiment des actions à tous les niveaux. Mais on réalise que les quotas volontaires, s'ils ne sont pas assortis vraiment de mesures contraignantes, ils n'ont pas non plus les effets escomptés. C'est pour ça qu'on a recommandé finalement des pénalités financières significatives, pour qu'au-delà de l'intention égalitaire, qui est assez partagée par tout le monde dans la société québécoise, si on veut aller vers un changement de culture des partis, il faut qu'il y ait quelque chose de plus qui se passe. La culture, ça se change sur le long terme, mais parfois il y a des mesures qui peuvent permettre d'accélérer les choses, puis on pense que ça, ça peut en être une.

Mme Vallières : Évidemment, c'est par l'expérience que vous avez l'ensemble des données auxquelles vous avez accès. Le DGE est aussi venu nous dire tout à l'heure qu'il y avait un manque, selon eux, de données empiriques pour être capable de se positionner de façon aussi précise. Est-ce que vous êtes d'accord aussi avec...

Mme Charron (Hélène) : Non, en fait. Et on a utilisé l'étude du DGEQ dans le cadre de nos travaux, on a actualisé les données parce que c'est un petit peu plus vieux que nous, puis nous, on considère au contraire qu'il y a matière à conclure, actuellement, que c'est la principale voie à suivre, mais que ce n'est pas l'unique voie à suivre, que, comme Mme Cordeau le disait, la socialisation politique des filles et des garçons, qui est très différente encore aujourd'hui, pour ça, on doit agir à la racine et donc travailler vraiment en amont, en éducation, depuis le plus jeune âge. Mais c'est un des aspects. Mais changer la culture des partis implique donc, du point de vue du conseil, un changement à la Loi électorale à ce moment-ci.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. J'invite le député de D'Arcy-McGee à poursuivre les échanges.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Matte) : Il vous reste cinq minutes.

M. Birnbaum : Cinq minutes? Merci. Merci, Mme Cordeau, Mme Charron. Il me semble que chaque fois que le conseil a contribué à nos débats, c'est pour les enrichir de votre approche lucide et rigoureuse, et là ça ne fait aucune exception, alors je vous félicite pour vos interventions, et pour un mandat qui est de mise, là, c'est le temps qu'on en discute et qu'on agisse en conséquence.

Dans un premier temps, je reçois avec intérêt votre observation que la qualité adversairiale constante de notre vie politique, j'ose dire même macho, est à réexaminer dans l'intérêt de nous tous, pas juste les femmes, les femmes qui considéreraient de se joindre à nous ici, mais à l'intérêt des Québécois et Québécoises partout dans notre société.

Écoutez, vous avez parlé longuement là-dessus, mais je veux revenir à votre tableau sur la page 21 parce que je trouve ça fascinant. En quelque part, il y a de la bonne nouvelle là-dedans parce que le potentiel est là. En même temps, ça suggère des obstacles.

Alors, je veux inviter vos observations sur deux phénomènes. J'en vois plusieurs là-dedans. Mais, dans un premier temps, c'est fascinant de voir que les jeunes filles, malgré le fait qu'elles font partie de la même société que nous tous, s'intéressent davantage à cette opportunité de participer dans un Parlement simulé et de voir comment ça change, vous l'avez constaté vous-mêmes, de façon dramatique rendu à l'âge collégial. Alors, je vous invite d'en élaborer mais aussi d'essayer de nous faire comprendre ce qui se passe d'assez positif. Vous avez fait brièvement une allusion, quand on regarde l'évolution des choses, en ce qui a trait au Parlement jeunesse, où ça va dans le bon sens. En tout cas, ça me fascine. Il me semble qu'il y a de quoi à étudier là-dedans pour faire améliorer la situation.

• (15 h 40) •

Mme Cordeau (Louise) : Merci de ces généreux commentaires. Effectivement, lorsqu'on a pensé examiner l'ensemble de ces résultats-là, honnêtement, moi, j'ai simplement demandé... j'ai dit : Est-ce qu'on pourrait regarder les Parlements étudiant et jeunesse, qui constituent quand même des avancées importantes au Québec? On a été des modèles, dans ces Parlements-là, dans l'implication des jeunes, pour faire valoir le parlementarisme, pour mettre en valeur le travail des députés, pour mettre en valeur notre démocratie au Québec. Et honnêtement je ne les avais jamais regardés de cette façon-là, sous cette lorgnette-là. Et j'aurais souhaité que ce ne soient pas ces résultats-là, mais force est de constater qu'il y a une tendance là. J'ai pris la dernière année, mais il y a quand même une tendance. Sans être une spécialiste en pédagogie, on nous indique qu'à partir du secondaire les jeunes filles commencent à avoir moins le goût de poser des questions, à s'investir différemment dans leur milieu. Mme Charron pourra en parler davantage que moi, mais c'est clair qu'on voit que la participation est très importante au niveau primaire.

Donc, il n'y a pas vraiment de distinction. Et donc l'ensemble des valeurs ou des qualités qu'on a fait valoir tantôt, toute la prise de parole en public, la notion de vouloir gagner, la notion de combativité, manifestement, au niveau secondaire puis au niveau universitaire, ces valeurs-là apparaissent moins. Ce n'est pas scientifique, ce que je dis, mais il est clair que ce sont des éléments, je pense, qu'on doive prendre en considération.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Mme la députée de Richmond, pour une minute.

Mme Vallières : Merci. Ça va aller très, très vite. Est-ce que vous avez déjà fait un petit peu de documentation, recherche sur les Parlements sensibles au genre dans l'union interparlementaire? En fait, ça existe. Est-ce que vous avez déjà évalué ce type d'analyse qui est fait par certains Parlements? Quel est votre avis si vous l'avez déjà regardé?

Mme Cordeau (Louise) : Je vais demander à Mme Charron.

Mme Charron (Hélène) : En fait, on a juste regardé ce qui... Dans leur étude, les Parlements sensibles au genre, on s'est surtout attardés aux mesures d'articulation famille-travail qui avaient été prévues un peu partout dans le monde, pour constater que, finalement, à l'Assemblée nationale, il n'y en avait pas tant que ça qui avaient été prévues, surtout en matière de congé de maternité, paternité, parentalité, et qu'il y avait toutes sortes de possibilités d'actions concrètes pour changer les façons de travailler pour ce qui est des horaires, pour ce qui est des manières de voter, un ensemble de façons de travailler qui peuvent évoluer dans le temps et qu'on souhaite voir évoluer pour que ce soit plus inclusif envers tous les élus qui ont une vie familiale prenante, que ce soient des jeunes enfants mais aussi des responsabilités comme proche aidant, par exemple.

Le Président (M. Matte) : ...à conclure. Ça va?

Mme Charron (Hélène) : Voilà.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. J'inviterais la députée de Marie-Victorin à poursuivre les échanges. Et je vous informe que vous disposez de neuf minutes.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Donc, merci, Mme Cordeau, Mme Charron aussi, d'être là aujourd'hui avec nous pour discuter de la place des femmes en politique, qui est incontournable.

C'est extrêmement intéressant, votre mémoire, là. Moi aussi, ça m'a beaucoup interpelée, le tableau sur les Parlements. Je pense que ça reflète une réalité très particulière. Et donc je suis contente que mon collègue de D'Arcy-McGee ait posé la question parce que, visiblement, on constate qu'il y a quelque chose qui se passe autour de l'adolescence qui serait intéressant encore à développer. Si vous n'avez pas terminé votre point, sentez-vous très libre de continuer là-dessus, ça m'intéresse.

Mais je veux aussi revenir sur la recommandation que vous avez faite, qu'on devrait vraiment cibler une modification de la Loi électorale pour atteindre une zone de parité. Je trouve ça intéressant que vous nous amenez là. C'est une recommandation aussi du comité des femmes de l'Amicale des anciens parlementaires. Puis on se demande toujours pourquoi on devrait se rendre jusque-là, jusqu'aux quotas. Est-ce que ça ne va pas trop loin? Bien, ce qu'on constate, c'est que, malgré toute la bonne volonté dont on peut faire preuve, il n'y a jamais rien qui a réussi à fonctionner autant que les quotas. Puis on s'entend que ce n'est pas un objectif qui est à long terme, mais, le temps de casser le moule, ça devient pratiquement incontournable.

Si on prend, par exemple, les sociétés d'État, la loi qui a été passée il y a quelques années, il a fallu cette loi-là pour qu'aujourd'hui, bien, on l'ait, la parité sur les conseils d'administration des sociétés d'État. Et même qu'on se rend compte que leur performance est encore plus grande qu'avant la loi sur la parité. Donc, quand on dit : Ah! ça n'a pas de bon sens de faire des quotas, on va prendre des femmes qui ne sont pas compétentes, mais au contraire c'est parce qu'on force les gens à trouver, à creuser, à convaincre davantage les femmes de se présenter, de sorte qu'on rehausse même la compétence des instances concernées. Alors, moi, là-dessus, bien, je vous appuie.

Sur l'aspect des pénalités que vous suggérez, parce que vous notez dans votre mémoire, par exemple, que les rares cas de pays ayant adopté des mesures incitatives financières ne sont pas concluants, j'aimerais peut-être davantage vous entendre là-dessus parce que moi, j'ai tendance à penser qu'avant de peut-être penser aux pénalités, dans ce cas-ci, on pourrait peut-être davantage essayer les incitatifs financiers. Peut-être que j'ai tort, mais je me dis : Est-ce que les pays qui ont essayé d'adopter des mesures incitatives qui n'ont pas été concluantes, est-ce qu'ils étaient autant financés par le public que sont les partis politiques ici, au Québec? Parce que je pense qu'on a une dynamique un peu particulière, où la grande majorité du financement provient des coffres de l'État. Donc, je me dis : À ce moment-là, puisque la partie est tellement majeure, du financement des partis politiques, qui est publique, peut-être qu'ici, chez nous, les incitatifs pourraient avoir une incidence encore plus grande que ce qui se fait ailleurs, de sorte qu'on pourrait avoir un meilleur résultat. Donc, je ne sais pas si vous vous étiez penchées sur la question ou si vous aviez regardé, dans les cas des pays qui ont adopté ce type de mesures financières, s'ils étaient en majorité financés par les fonds publics.

Mme Charron (Hélène) : En fait, il y a très peu de pays qui ont décidé de procéder à des incitatifs financiers. On en a trouvé quelques-uns. Et ces quelques pays-là, effectivement, je ne serais pas en mesure de vous dire jusqu'à quel point les partis sont financés par le public, mais les incitatifs, peu importe que les partis soient financés par le public ou pas, ça augmente leur financement. Mais en tout cas j'ai de la difficulté à voir en quoi le fait d'être financé initialement par le public changerait quelque chose. Donc, le conseil a longtemps recommandé ça, mais ça n'a jamais été adopté ni ici ni ailleurs. Et donc on a conclu que c'était plus efficace d'aller vers des mesures, disons, d'actions positives, là, parce qu'on peut les appeler comme ça aussi, des mesures correctrices, mais contraignantes, parce que c'est ça qui a démontré de l'efficacité ailleurs.

Donc, on n'est pas en mesure d'évaluer en tant que telle l'efficacité des incitatifs financiers selon la hauteur, par exemple, des incitatifs parce qu'il y a extrêmement peu de pays qui les ont mis en place. Mais, a priori, puisqu'on est dans un changement de culture, on est arrivées à la conclusion qu'il fallait y aller vraiment par des incitations plus fortes en contraignant les parties vraiment à adopter un minimum de candidatures féminines, avec des pénalités ensuite. C'est vraiment la stagnation, en fait, qui nous a fait changer de position, au conseil, parce que, jusque-là, justement, puisqu'il y avait une progression continue, on se disait : On devrait peut-être y aller par incitatifs. Mais, face à l'absence d'augmentation, encore, on a changé de position.

Mme Fournier : O.K.

Mme Cordeau (Louise) : J'allais peut-être juste dire qu'effectivement parfois on associe la notion de quota à la notion de compétence, et, quant à moi, ça doit nécessairement être dissocié. Et même souvent on s'aperçoit, puis on en parle dans le mémoire, que même, pour inciter des femmes à siéger sur des conseils d'administration ou se présenter en politique, au lieu d'agir en amont, bon, on les invite à se former, on les invite à faire du mentorat. On en demande beaucoup plus qu'on demande à des hommes qui spontanément se disent prêts à s'impliquer.

Mme Fournier : Tout à fait. Je pense qu'on se rejoint là-dessus. Moi, ça me fâche à chaque fois que j'entends ça.

Mais, sur la question, donc, des incitatifs, en fait, c'est sûr que, bon, le financement viendrait du public aussi. Le point, c'est plutôt que, par exemple, dans le système actuel au Québec, le financement politique est limité à 100 $ par personne. Ça fait que c'est certain que ça devient plus difficile pour les partis politiques d'amasser beaucoup d'argent de la part du financement populaire. Donc, de là, s'il y avait un incitatif financier encore plus grand de la part du gouvernement, de la part de l'État, bien, je pense que ça pourrait quand même avoir une incidence qui pourrait être grande sur les partis politiques. En tout cas, c'est mon avis. Mais, encore là, ce serait peut-être intéressant d'analyser, là, même s'il y a quelques rares cas... Je vais aller voir ça, c'est bien certain.

En ce moment, on a mené aussi une consultation en ligne. Vous avez peut-être eu les résultats. Il y a quand même plus de 400 personnes qui ont décidé de répondre, et, à la lumière des premiers résultats, il y a quand même beaucoup de gens qui ont répondu qu'ils avaient l'intention un jour de se présenter. Donc, ça amène peut-être un regard plus particulier, surtout que ces gens-là ont identifié en majorité des raisons liées à la conciliation travail-famille comme étant des freins, alors que, là, on voit que c'est en majorité des gens qui ont quand même un intérêt, là, pour se présenter.

Puis vous en parlez aussi dans votre mémoire, des modifications à l'organisation du travail parlementaire, des initiatives qui ont été adoptées aussi en matière de conciliation travail-famille, notamment à la ville de Montréal. Et on sait que c'est tout récent justement, l'instauration d'un congé établi, un congé parental de 18 semaines, tout ça. Et vous le comparez évidemment à l'Assemblée nationale, puis vous l'avez dit tantôt, je pense, Mme Charron, c'est qu'ici il n'y a rien. Tu sais, il n'y a rien qui le dit. Il y a un flou artistique autour de tout ça. Est-ce que les députés ont droit à un congé de maternité ou paternité? Est-ce qu'ils n'ont pas le droit? Est-ce que c'est à la discrétion de chacun? Combien de temps est-ce que c'est acceptable pour un député de s'absenter de l'Assemblée nationale?

Alors, moi, je me demande si vous pensez que l'Assemblée nationale devrait instaurer une espèce de politique, comme ça se fait à la ville de Montréal actuellement, pour que tout soit clair pour tout le monde puis aussi que nos institutions et que même les lieux physiques soient adaptés au fait de la présence de mères ou de pères ici, à l'Assemblée nationale, par exemple, avec les salles d'allaitement, que ce soit parmi les parlementaires, parmi le personnel politique ou même parmi les gens qui visitent l'Assemblée nationale.

• (15 h 50) •

Mme Cordeau (Louise) : Bien, je pense que, lorsqu'on parle d'articulation travail-famille-politique, on parle de l'ensemble de ces éléments-là. Actuellement, je pense, chaque député qui doit vivre ou qui veut vivre un congé parental doit le négocier avec ses instances politiques et parlementaires. C'est vrai, et c'est ce qu'on dit, qu'il devrait y avoir un minimum de 14 semaines de congé d'autorisé, pour ne pas que... Parce qu'au-delà de ce qui nous est autorisé ou pas il y a une question de culture. Est-ce qu'on se sent coupable, dans notre circonscription, de ne pas être là? On est encore rémunéré. Alors, c'est vrai que de se donner des balises et de faire en sorte de dire même aux jeunes femmes qui voudraient se présenter en politique : Bon, si tu souhaites avoir un enfant — ou même aux jeunes pères — il y a des mesures où l'articulation travail-famille-politique va être aussi possible...

Le Président (M. Matte) : Je vous invite à conclure.

Mme Cordeau (Louise) : Bien, je pense que c'est important de se donner des mesures concrètes. Et ça, c'est possible.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'inviterais la députée de Repentigny à poursuivre. Vous disposez de six minutes, madame.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Bienvenue. C'est toujours agréable de lire vos mémoires. Je les attends tout le temps, peu importe dans quelle commission parlementaire on est.

Tout à l'heure, je l'ai dit dans mon allocution puis je le répète, je souhaite ardemment qu'on ait plus de femmes en politique. Mais le défi qu'on a, c'est d'avoir des femmes qu'on présente dans des comtés gagnables. Puis la peur que j'ai, lorsqu'on veut instaurer des mesures incitatives avec la parité, c'est qu'un parti soit... se dise : On va prendre des femmes pour atteindre notre parité, pour ne pas avoir l'incitatif négatif ou pour avoir l'incitatif positif, sans avoir comme souci de présenter les femmes aux bons endroits, puis qu'en fin de compte, lorsqu'on arrive à l'élection, on se ramasse avec pas de parité au niveau des femmes élues. Moi, ce que je voudrais, ce que je souhaite, c'est qu'on ait la parité au niveau des femmes élues.

Donc, c'est pour ça que j'ai un petit bémol avec notre système électoral actuel, accompagné de la volonté que vous avez qu'il y ait une loi sur la parité. C'est le danger. En tout cas, je trouve que c'est dangereux pour les femmes. Puis ça ne veut pas dire qu'on va atteindre le résultat qu'on veut, c'est-à-dire qu'on ait autant de femmes que d'hommes à l'Assemblée nationale, puis, moi, c'est ça que je veux pour changer la culture actuelle. Dans ce qui se passe dans les pays scandinaves, c'est qu'on a un scrutin proportionnel qui permet d'avoir des listes et qui, dans un cadre comme ça, si on change le mode de scrutin, accompagné à peut-être des incitatifs, on va peut-être atteindre le résultat qu'on veut, c'est qu'on ait autant de femmes que d'hommes à l'Assemblée nationale. Qu'est-ce que vous en pensez?

Mme Cordeau (Louise) : Bien, le mode de scrutin proportionnel est rapidement, je pense, évoqué dans l'avis. C'est une des solutions, mais ce n'est pas la solution. On s'entend que de changer le mode de scrutin ne réglerait pas l'ensemble des problématiques. C'est évident que, si on parle d'une zone de parité entre 40 % et 60 %, on prend pour acquis qu'il y a plus de femmes qui se présentent, donc il y a plus de chances qu'elles soient élues, et ça, c'est quand même un facteur important.

Quant à la représentation des femmes, par rapport à l'obligation d'avoir cette parité-là, est-ce que le scrutin proportionnel règle tous les problèmes? On sait que le scrutin proportionnel aussi, il y a parfois des obligations de dire... des candidatures en alternance : un homme, une femme, un homme, une femme, un homme, une femme. Ça aussi, il y a d'autres éléments.

Et, pour répondre peut-être, tantôt, à la question de Mme la députée de Richmond : Qu'est-ce qu'on peut faire assez rapidement?, bien, il nous apparaît plus rapide d'essayer de modifier la Loi électorale qu'à court terme le mode de scrutin. Mais ça, c'est une vision. Ça ne veut pas dire... Un n'exclut pas l'autre. Mais, si on veut agir de façon rapide, je pense que la modification à la Loi électorale nous semble, quant à nous, au conseil, la voie la plus rapide pour atteindre notre objectif.

Mme Lavallée : Pour avoir lu déjà un mémoire que vous aviez fait il y a quelques années sur les irritants... Parce qu'on les connaît tous, les irritants. Je les ai eus, donc je sais très bien, lorsque j'approche une femme, la liste de tous les irritants qu'elle va me sortir. Et, dans votre mémoire d'il y a quelques années, vous les aviez sortis. Donc, peu importe si on met un incitatif pour avoir la parité, mettons, 40 % minimum de femmes, comment on fait pour convaincre ces femmes-là? Puis je sais que vous avez travaillé, à l'interne, près de gens élus. Comment on fait pour convaincre ces femmes-là, leur faire oublier tous les irritants qu'elles vont nous énumérer? Parce qu'elles les énumèrent tous, et ils sont là, puis on ne peut pas le nier, ça, et c'est la difficulté qu'on a, peu importe le parti, là.

Mme Cordeau (Louise) : Écoutez, je n'ai pas de baguette magique, là, pour trouver une solution. Je pense que tous les députés qui essaient de solliciter des candidates essaient de trouver les meilleurs arguments possible. Mais c'est évident que l'ensemble des éléments dont on vient de parler, toute la question de l'articulation travail-famille, toute la question de la nature de la vie parlementaire, de la nature des travaux, de la façon... les exigences de disponibilité... Vous les connaissez mieux que moi, là. La liste des contraintes dont les femmes vont nous parler, ce sont des éléments qui sont naturellement pris en considération par une femme avant de faire de la politique municipale, avant d'accepter une fonction de haute responsabilité, avant d'aller dans un conseil d'administration. Je pense que ce n'est pas exclusif au monde politique. Et, lorsqu'on parle de cours d'éducation à l'égalité, c'est ce qu'on souhaite, de travailler en amont pour que l'ensemble de ces obstacles-là, qui n'existent pas qu'en politique, qui existent, oui, en politique, mais qui existent aussi dans d'autres fonctions stratégiques que des femmes pourraient occuper dans notre société, on puisse les aplanir avec le temps.

Mme Lavallée : Puis, dans le tableau... Parce que ça aussi, ça me préoccupe, et je sais que vous êtes préoccupées sur la baisse, là, lorsqu'on atteint les niveaux collégial et autres, la baisse de l'intérêt des femmes. Est-ce que vous avez l'intention de faire une analyse sur les pourquoi?

Le Président (M. Matte) : Je vous invite à conclure, Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Pourquoi, tout d'un coup, l'intérêt baisse? Moi, je serais...

Mme Cordeau (Louise) : Peut-être que Mme Charron peut compléter.

Mme Charron (Hélène) : C'est vraiment...

Le Président (M. Matte) : Malheureusement, je dois vous couper, le temps étant écoulé. Je vous remercie de votre participation aux travaux.

Et je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 58)

(Reprise à 16 heures)

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Alors, je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour faire votre exposé, et, par la suite, nous allons procéder avec des échanges. Alors, si vous voulez vous présenter afin de permettre à l'enregistrement de pouvoir vous identifier. Allez-y, s'il vous plaît.

Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Marie-Andrée Gauthier, coordonnatrice du Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec. Je suis accompagnée de mes collègues Karine Drolet, du Réseau des groupes de femmes Chaudière-Appalaches, ainsi que Gisèle Dallaire et Martine Boivin, de Récif 02, la table des groupes de femmes du Saguenay—Lac-Saint-Jean.

Le Président (M. Matte) : Alors, allez-y.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Alors, tout d'abord, merci d'avoir accepté de nous entendre et d'accueillir notre mémoire intitulé L'égalité des droits des femmes se doit d'être au coeur de l'Assemblée nationale.

Le Réseau des tables régionales de groupes de femmes du Québec est un regroupement féministe composé des 17 tables régionales de groupes de femmes du Québec. Ensemble, ces tables représentent environ 550 membres, principalement des groupes. Elles défendent les droits des femmes de leurs régions respectives, elles sont bien implantées dans leurs milieux et collaborent avec les différentes actrices et acteurs locaux et régionaux. Le réseau joue un rôle de liaison et de concertation entre les tables elles-mêmes ainsi qu'entre ces dernières et les instances nationales. La spécificité de notre regroupement est représentée par l'expertise régionale développée par les tables dans les dossiers de la condition féminine. Le réseau porte également des positions politiques communes des tables régionales de groupes de femmes auprès des instances nationales

Les tables et les réseaux sont en action depuis plus de 20 ans pour favoriser la participation des femmes à la vie démocratique québécoise. Pour faciliter l'accès des femmes au pouvoir, les tables régionales de groupes de femmes ont mis sur pied sept réseaux de femmes élues, monté quatre programmes de mentorat en politique municipale et réalisé 35 outils en ligne, guides, formations, vidéos. Des événements ont également été organisés par les tables, où des centaines d'hommes et de femmes ont discuté de la faible représentation des femmes dans les milieux politiques. Deux mémoires ont été déposés traitant de la Loi électorale et du mode de scrutin. Enfin, des centaines de communiqués ont décrié la lente progression vers la parité et ont été partagés à la ministre responsable de la Condition féminine dans le cadre de notre campagne Connaissez-vous la politique, Mme la ministre?, en 2016.

En 2017, comme vous le savez probablement, l'Assemblée est composée de 37 femmes sur 125 membres, ce qui situerait le Québec au 48e rang mondial, selon le pourcentage des femmes élues, au classement mondial. Si les statistiques parlent d'elles-mêmes pour l'Assemblée nationale, elles sont encore plus troublantes en ce qui a trait à la présence des femmes députées dans les régions, étant parfois complètement absentes. Nous tenons à souligner que seulement trois régions administratives détiennent une répartition du pouvoir paritaire, soit la Côte-Nord, Montréal et l'Outaouais. On compte cinq régions représentées uniquement par des hommes, à l'Assemblée nationale, soit l'Abitibi-Témiscamingue, le Bas-Saint-Laurent, le Centre-du-Québec, Gaspésie—Les Îles et le Nord-du-Québec. Cinq autres régions comptent moins de 20 % de représentation féminine. Le tiers des élus femmes se retrouvent dans la région montréalaise, pour 12 députées.

Si on aborde les obstacles rencontrés par les femmes. Plusieurs travaux ont été menés par les tables régionales de groupes de femmes et le réseau pour identifier les obstacles qui freinent la pleine participation des femmes à la vie politique. Une étude pilotée par l'Assemblée des groupes de femmes d'interventions régionales, AGIR, démontre les obstacles rencontrés par les femmes de cette région de même que le degré d'importance qu'elles y accordent. Même si cette étude, là, a été produite dans la région de l'Outaouais, elle est quand même représentative de ce qu'on a entendu dans le cadre de groupes de discussion dans les différentes régions du Québec.

Donc, vous avez... Dans le tableau 4, si je ne m'abuse, du mémoire qu'on a déposé, on a listé 12 obstacles, là, que les femmes nous ont dit rencontrer. Je vous nomme les cinq premiers pour le bénéfice de la cause. Donc, le premier obstacle, c'est le manque de temps, que les femmes ont évoqué, pour se lancer en politique, donc c'est quand même important, à un pourcentage de 88, 9 %; deuxièmement, la trop grande part des responsabilités familiales; troisièmement, le financement de l'investiture inaccessible, quand même, pour 88,2 %; quatrièmement, le manque d'attrait pour la politique; et, finalement, avec 77,8 %, un réseau social insuffisant pour les soutenir, là, à faire le saut en politique.

On aimerait jeter un peu de lumière sur un obstacle qu'on a identifié, c'est-à-dire le traitement des candidatures féminines dans les médias. Donc, trois tables régionales, soit celles de la Mauricie, Montérégie et Bas-Saint-Laurent, travaillent en partenariat cet enjeu plus particulièrement, et il en ressort que la place que les politiciennes occupent dans l'espace public et médiatique ainsi que les enjeux qu'elles portent, souvent, ont un traitement médiatique différent que lorsqu'il est question des hommes. Donc, par exemple, on va parler plus... on va parler davantage de leur apparence, des propos qu'elles ont tenus et non... moins sur des enjeux plus spécifiquement. Donc, on est en train de faire une étude de contexte sur les médias traditionnels et communautaires avec un financement obtenu par Condition féminine Canada pour documenter spécifiquement, là, le traitement médiatique des candidatures féminines.

Alors, si on suppose... On vous a donc exposé quelques obstacles. Donc, comment soutenir les femmes à faire le saut en politique provinciale? Donc, nous, on part de l'affirmation que l'égalité est une valeur fondamentale pour la société québécoise, affirmation que partage notre premier ministre et qui est inscrite dans l'introduction de la stratégie gouvernementale qui a été dévoilée en juin 2017. Le réseau, donc, croit que l'implication des femmes dans les différentes instances locales et régionales est un levier pour s'impliquer en politique provinciale. C'est pourquoi on croit qu'il est essentiel d'offrir un soutien aux candidates à l'ensemble des paliers électifs, donc, que ce soit municipal, régional, éventuellement provincial et conseils d'administration ou toute autre instance décisionnelle. Donc, pour ce faire, la reconnaissance de l'expertise des tables régionales de groupes de femmes est un incontournable, puisque nous sommes directement en lien avec les aspirantes candidates et les élues tout au long de leurs parcours politiques, tant avant, pendant qu'après.

Donc, notre première recommandation, dans le cadre de ce mandat d'initiative, est de reconnaître l'expertise des tables régionales des groupes de femmes et du réseau en regard à l'accès des femmes au pouvoir et de maintenir et d'élargir le financement d'un programme spécifique femmes et politique jusqu'au moment où, lors de trois élections consécutives, le pourcentage des élues d'un ou l'autre sexe aura atteint, là, à plus ou moins 1 %, 50 %.

Donc, d'entrée de jeu, mentionnons qu'il existait jadis un programme spécifique aux preuves reconnues. En juin 2014, on dénonçait les coupures dans le programme À égalité pour décider. En juin 2017, via le lancement de la stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes, on apprenait que ce programme spécifique de financement serait inclus à même une enveloppe budgétaire globale destinée à tous les organismes et même à des municipalités qui ne sont pas, eux, spécialisés en matière d'égalité entre les femmes et les hommes. Le programme À égalité pour décider visait à soutenir financièrement les groupes de femmes qui, partout à travers le Québec, font la promotion de la place des femmes en politique et tendent à favoriser leur participation citoyenne.

Donc, depuis la création de ce programme, il y a environ 10 ans, on a contribué à augmenter la présence des femmes en politique, tant au plan municipal que provincial, à inciter plus d'une femme à faire le saut en politique et aussi à surmonter divers obstacles pour y demeurer. C'est notamment grâce à ce financement que les tables ont pu consolider leur expertise en matière d'accompagnement des femmes en politique. Donc, le programme disposait d'un budget annuel de 1 million en 2014. Le gouvernement le réduisait à 500 000 $, soit une coupure de 50 %.

Donc, on tient à rappeler que ce sont les tables qui ont développé l'expertise et le partenariat pour sensibiliser les actrices et acteurs régionaux, des futures candidates et des élues avec qui elles sont en contact régulier et auprès de qui elles font ce travail depuis plusieurs années déjà. Nous sommes les groupes sur le terrain. Diluer le programme À égalité pour décider dans une enveloppe globale nuit au travail essentiel pour encourager et accompagner les femmes intéressées par la politique et met en péril des avancées fragiles. On note qu'il s'agit d'une perte considérable pour les Québécoises, puisque les tables ne peuvent plus répondre aux besoins des femmes.

Le réseau craint également une perte définitive concernant la régionalisation de ce programme, puisque maintenant il ne s'agit que d'une enveloppe nationale. Il faut donc, sans même... Bien que la régionalisation soit un principe, là, un principe directeur inscrit dans la stratégie gouvernementale, on ne voit pas comment, dans le programme, dans le dernier programme, dans le dernier appel, a été régionalisé... donc comment il va bénéficier aux 17 régions. Donc, on croit qu'il faut maintenir un programme spécifique dont l'objectif est de préparer et de former les femmes à occuper les fonctions d'élus et à s'y maintenir.

• (16 h 10) •

Notre deuxième recommandation est de réformer le mode de scrutin pour une représentation égalitaire des femmes et des hommes. Donc, ce qu'on propose, c'est le mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire. En soi, ce mode de scrutin ne permet pas automatiquement l'atteinte de la parité, on en convient, mais c'est un dispositif qui favorise la participation des femmes en politique par l'adoption de mesures incitatives. Par exemple, les listes des sièges de compensation peuvent être montées en y présentant les candidatures en alternant les femmes et les hommes, en commençant, bien sûr, par une femme.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie de votre exposé.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Excellent.

Le Président (M. Matte) : Nous allons poursuivre les échanges avec la députée de Richmond.

Mme Vallières : Est-ce qu'il vous restait beaucoup de...

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : En fait, nos dernières recommandations...

Mme Vallières : Je vous laisse aller. C'est correct, M. le Président? Oui?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : ...dernières recommandations, donc, on a des mesures spécifiquement pour les partis politiques que vous pourrez retrouver dans notre mémoire. On appelle aussi le DGEQ à se pencher sur la proposition de quotas. Et finalement on propose la création d'un observatoire de l'égalité, toujours, là, sous l'égide du Directeur général des élections, qui aurait comme mandat une analyse de la situation et de la proposition de mesures de correction, là, comme par exemple à l'Assemblée nationale. Merci.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Mme la députée de Richmond, pour 14 minutes.

Mme Vallières : Merci, beaucoup. On vous a fait finir ça en sprint. Merci beaucoup de votre présence et du travail effectué pour votre présentation aujourd'hui.

On sait que vous travaillez beaucoup, le réseau, effectivement, dans les régions. Je suis bien au fait également des diminutions de budget dont vous nous parlez aussi. Je ne veux pas faire comme si je ne l'avais pas entendu, puis, je sais, c'est une réalité avec laquelle vous vivez depuis les dernières années. Et, maintenant que vous faites partie de cette... collectivement, là, d'une approche différente avec la dernière politique qui a été présentée, à tout le moins, je me réjouis de votre présence aussi pour continuer ces travaux et de nous accompagner aussi comme acteurs dans le développement de la place des femmes au sein de notre société.

J'aimerais y aller sur des trucs plus précis en particulier parce que le temps va si vite que j'apprends finalement qu'il ne faut pas tout garder pour la fin parce qu'on n'y arrive pas tout le temps. À la page 10, vous parlez d'une étude en cours d'élaboration en ce moment. Est-ce que vous pouvez m'en parler davantage? Je trouve ça fort intéressant. Puis les résultats sont attendus quand? C'est quoi, l'ampleur aussi? Vraiment donner des détails là-dessus, s'il vous plaît.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Tout à fait. Donc, comme je disais, c'est une étude financée par Condition féminine Canada. C'est un projet sur trois ans. Donc, on est dans la première année, donc ça s'échelonnera jusqu'en 2020. Les premiers résultats préliminaires sont attendus au cours du mois de mars. Et on est en train de sensibiliser aussi, là, les médias eux-mêmes de voir quelle place ils occuperont dans cette étude pour être sensibilisés puis amener des changements.

Quand on parle de changement systémique, de changement à la racine, on pense que les médias ont un rôle à jouer spécifiquement en changeant leurs manières de faire, là, au niveau du traitement des candidatures féminines dans leurs journaux ou radios. Donc, c'est une étude qui est menée à travers les trois régions, Mauricie, Montérégie, Bas-Saint-Laurent, et l'étude, plus précisément, là, sur le traitement des candidatures féminines dans les médias, ça se fait avec l'Université du Québec à Montréal.

Donc, aux dernières élections municipales, il y a eu une revue de presse très large qui a été faite dans différentes régions du Québec, là, soit des milieux ruraux ou urbains, pour voir comment, justement, était traité, là... soit quand des femmes se présentaient dans des postes de conseillères, elles étaient seules ou en compétition avec d'autres, postes de mairesse aussi. Donc, c'est un peu, là... Donc, on devrait avoir les premiers résultats au printemps 2018, et il y aura éventuellement d'autres actions pour qu'il y ait des changements, en fait, des changements du système en tant que tel pour que le traitement des candidatures féminines diffère de ce qui a cours actuellement.

Mme Dallaire (Gisèle) : Je veux juste ajouter un point. On sait aussi qu'il y avait l'angle des femmes racisées qui était regardé, évidemment, dans l'étude aussi, donc une candidate noire ou une candidate LBGT. En tout cas, c'était regardé.

Mme Vallières : Et est-ce que les trois régions qui se penchent sur cet aspect en particulier... Puisqu'elles se sont dit : On va se rendre à une étude, c'est certainement qu'elles avaient déjà des constats particuliers. Est-ce qu'il y avait des recommandations, au-delà des constats, déjà, avant même de dire : On va aller plus loin?

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : À ce moment-ci de l'étude, il n'y a pas de recommandation. On part de l'hypothèse qu'il y a un traitement différencié pour les candidatures féminines, mais il n'y a pas de recommandation. Ça va être à la fin du projet que des recommandations pourront ressortir, et ces recommandations aussi vont être basées sur des «focus groups», tu sais, on va croiser ce qu'on retrouve dans les journaux puis avec les «focus groups» des élues ou d'aspirantes candidates, comment elles l'ont vécu aussi. Donc, on va croiser les deux, et les recommandations vont aussi être à l'image de ce que les femmes ont perçu durant cette campagne électorale.

Mme Vallières : Par rapport à l'information que vous nous donnez, page 8, sur la répartition régionale des élues à l'Assemblée nationale, là où il y a le plus d'élues, où il y avait le plus de candidates, est-ce nécessairement intrinsèquement relié à la présence de groupes comme le vôtre ou à... Est-ce que vous êtes capables de dire : Voici l'incidence que ça a ou pas, nécessairement, en lien direct?

Mme Dallaire (Gisèle) : On sait que, par exemple, Montréal et Côte-Nord se démarquent par rapport au nombre de députées. On voit aussi qu'on a également plus de conseillères mairesses dans ces deux régions-là. Ça, ça se... il y a une corrélation là. Mais, pour aller dire... Notre travail se fait sans relâche. On voit qu'on avance. Nous, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, ça fait depuis 10 ans qu'on travaille auprès des femmes pour les sensibiliser, pour travailler avec elles, le réseautage, toutes les activités qu'on vous mentionne dans notre mémoire. Et on a eu une hausse à la fois de députation, puisque maintenant on en a une, alors qu'on en avait zéro pendant plusieurs, plusieurs années. Et à la fois, également, on a eu une hausse au niveau de nos femmes conseillères et mairesses, on a eu un six points d'avance, là, comparé à ce qu'on avait avant. Mais on a... Oui. Marie-Andrée, oui.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, si je prends l'exemple de la Montérégie, par exemple, aux dernières élections, les femmes, toutes les femmes qu'elles ont accompagnées ont été élues. Donc, on peut...

Mme Dallaire (Gisèle) : ...le tiers.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : C'est ça.

Mme Dallaire (Gisèle) : Le tiers des femmes qui ont été accompagnées chez nous ont été élues au municipal.

Mme Drolet (Karine) : Excusez-moi, j'ajouterais un petit élément. En fait, je vous mentionnerais... c'est mentionné dans le mémoire, un rapport final, c'est une étude exploratoire sur les femmes leaders et la politique en Outaouais, c'est un rapport qui est cité dans la bibliographie. Et je mentionnerais qu'on a demandé dans l'étude : Est-ce qu'il y a des activités politiques qui peuvent préparer davantage à faire le saut en politique? Et, entre autres, d'être impliquée au niveau d'un réseau, d'un organisme communautaire, mais aussi de faire de la recherche sur le dossier qui touche les femmes, c'est des éléments qui ressortaient pour l'implication des femmes en politique. Donc, c'est en lien avec ce que vous parliez.

Mme Vallières : O.K. Je sais que mon collègue de D'Arcy-McGee avait demandé pour une question aussi.

Le Président (M. Matte) : M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Mmes Gauthier, Drolet, Dallaire et Boivin, merci beaucoup pour votre exposé. Vos interventions et vos recommandations sont de grande importance compte tenu que vous êtes sur le terrain à travers le Québec. Et, quand j'entends que, lorsque vous aurez fait un suivi, les résultats sont des fois au rendez-vous, alors j'invite peut-être... je vous invite d'en parler davantage.

Quand je regarde sur le tableau n° 4 que vous avez fait allusion, quelques-uns des facteurs qui ont été identifiés comme très importants ou importants par les femmes, je vous invite de nous parler de comment vous avez abordé ces questions de façon très pratique sur le terrain, qu'on parle du fait que, bon, voilà un grand obstacle, trop grand, on parle des responsabilités familiales, qui est identifié comme obstacle, financement de l'investiture inaccessible — ça m'intrigue, il me semble qu'il y a de l'information à apporter à ça — manque d'attrait pour la politique, bon, c'est plus global, réseau social insuffisant. Je me demande si vous pouvez nous parler un petit peu de vos gestes, vos programmes sur le terrain pour attaquer à ces obstacles-là.

• (16 h 20) •

Mme Drolet (Karine) : Oui. Donc, par rapport aux obstacles, c'est sûr qu'on agit toujours de façon systémique. Donc, on n'y va pas seulement avec quelques femmes en particulier, mais on essaie d'y aller vraiment globalement. C'est sûr qu'un élément, on l'a mentionné tout à l'heure, c'est la coupure qu'on a eue au niveau du programme À égalité pour décider. Donc, c'est sûr qu'on faisait énormément d'actions sur le terrain, mais, dans les dernières années, ça a été très difficile parce qu'il faut aller à partir de nos propres... en fait, à partir de notre mission de base pour intervenir. Donc, voilà.

Au niveau vraiment des actions concrètes qu'on peut faire, très, très concrètement, ça peut être des programmes de mentorat qu'on va faire, donc, pour vraiment accompagner les femmes dans leurs démarches. Ça peut être aussi vraiment... ça peut être de la formation, ça peut être des outils qui vont être développés. Donc, c'est vraiment le genre de choses qu'on peut faire sur le terrain, et aller aussi là où les femmes sont. Donc, c'est vraiment quelques... je vous donne quelques exemples, là, qui peuvent être faits. Mais, bien sûr, il faut que les programmes soient là aussi pour soutenir ce genre d'initiative.

Mme Dallaire (Gisèle) : Est-ce que je peux enchaîner à Karine? Nous, c'est ça, on a procédé à une tournée de notre grande région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, aller rencontrer les femmes. Les femmes ont de l'intérêt pour la politique, elles me le disent puis elles me disent : On veut, mais c'est une question de priorités. Tu sais, quand tu as soit ta mère malade, ton père malade, tes enfants, tu sais, ça revient souvent, tu sais, des choix... Elles veulent, puis elles viennent aux rencontres, puis on... Moi, j'ai toujours avec moi une femme élue, donc elles posent leurs questions, puis, tu sais, ça met à jour c'est quoi vraiment, c'est quoi que ça l'implique.

Puis les femmes me le disent, tu sais, après ça, je fais le suivi auprès d'elles : Puis, tu sais, est-ce que tu vas y aller?, puis tout ça, puis elles disent : Bien, coudon! tu sais, mon chum est parti trois semaines sur quatre, tu sais, il y a toutes sortes de réalités qui sont trop dures puis qui... Donc, la fille va mettre de côté... On entendait ces discours-là, on en entendait. Ça s'est parlé tantôt avec le Conseil du statut de la femme, mais c'est... veux veux pas, il y a des choix qui font que la femme va dire : Bon, bien, je mets ça de côté, puis ça va aller à plus tard, tu sais.

Mais l'intérêt, je le sens beaucoup, beaucoup chez les jeunes filles. Les filles sont très impliquées dans les écoles au secondaire. Elles sont toutes leaders, présidentes, conseils, elles s'occupent de leurs bals et d'autre chose, les conseils environnementaux, puis à l'université aussi. Mais, quand il arrive le moment de la famille, bien là, veux veux pas, il y a des choix importants qui se font. Puis, dans notre région, bon, le travail a manqué, souvent les gars sont partis, puis ils reviennent. Donc, ça touche vraiment mes filles, là, mais les femmes dans notre secteur par rapport à ça. Ça fait que, souvent, elles vont reporter leurs décisions à plus tard. Mais l'intérêt, je le sens vraiment beaucoup.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Donc, c'est un accompagnement à long terme. Ce n'est pas un financement qui va nous permettre de préparer les... Il nous faut le financement maintenant pour préparer les prochaines élections, il faut y aller... Il ne faut pas y aller juste un financement, par exemple, au mois de... en janvier pour les élections qui viennent un an plus tard. Ça prend beaucoup de temps. On remarque que ce n'est pas... on ne prépare pas les femmes pour la prochaine élection mais bien pour l'autre d'après, donc c'est vraiment sur le long terme, pour défaire les perceptions, les mythes que les femmes portent puis de défaire tous les préjugés qu'elles ont envers la politique, où elles ne se sentent pas nécessairement toujours incluses, là, par rapport aux obstacles qui sont nommés là.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie...

Mme Dallaire (Gisèle) : ...plus financé en regard des élections municipales, qui touchent évidemment plus de municipalités et de villes. Par rapport aux circonscriptions, tu sais, on se dit : Bon, on a cinq circonscriptions, donc moins de députés, moins de personnes, ça fait que ça, ça revient comme à mi-temps. Là, ça s'en vient, mais on est toujours moins financées pour accompagner aussi ces femmes-là. Puis c'est des vases communicants, là. Les filles qui se lancent au provincial, bien, c'est souvent des filles qui se sont lancées peut-être au municipal. Donc, ça, c'est des choses qu'on... c'est des freins pour nous. On est souvent pas en mesure d'aider les filles qui veulent se lancer au provincial, encore moins au fédéral.

M. Birnbaum : ...ces priorités qui ont été identifiées, avec tout respect, est-ce qu'on s'adresse à ces priorités quand on parle de mettre une emphase sur l'idée de réformer le mode de scrutin pour une représentation égalitaire des femmes et des hommes? Et je me permets de poser la question. Vous parlez d'un travail à long terme. Est-ce qu'on n'a pas à mettre l'emphase sur les genres de gestes concrets qui peuvent répondre à ces questions, ces obstacles qu'on trouve en haut de votre tableau?

Mme Dallaire (Gisèle) : ...le manque de temps?

M. Birnbaum : Une autre fois, sur la page 9, là.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, nous, on le voit en deux parties. La première, quand on demande la reconnaissance de l'expertise des groupes de femmes, des tables régionales et un financement spécifique pour femmes et politiques. Donc là, ça, ça vient vraiment pour aller travailler sur les obstacles. Mais, à long terme, il y a des obstacles systémiques, c'est-à-dire qui se déroulent à l'Assemblée nationale, au palier provincial, et c'est pour ça qu'on propose la réforme du mode de scrutin.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'inviterais la députée de Marie-Victorin à poursuivre nos échanges.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci à vous quatre d'être avec nous aujourd'hui en commission parlementaire. Merci pour le travail que vous faites pour favoriser la place des femmes dans nos instances démocratiques, notamment ici, à l'Assemblée nationale. C'est essentiel.

Puis vous parliez tantôt de l'impact que vous pouvez avoir au niveau municipal, pour lequel vous êtes davantage financées. Bien, je pense, en tout cas, qu'on a vu les fruits de votre travail aussi aux dernières élections municipales. Il y a quand même eu plus de femmes élues, somme toute, là, au Québec, au terme des élections municipales. Puis ça, évidemment, on ne peut que s'en réjouir et on espère que ça puisse se rendre ici jusqu'à l'Assemblée nationale.

Et donc, dans vos recommandations, vous parlez d'un programme possible, femmes et politique, sur lequel vous a questionnées aussi le député de D'Arcy-McGee. Je me demandais : Est-ce que vous avez déjà ce programme-là qui est en place? Vous avez parlé de mentorat; est-ce que vous avez déjà, justement, le programme de mentorat qui se fait actuellement? Vous semblez dire que oui.

Vous étiez aussi une autre intervenante à dire qu'il faut aller où est-ce que les femmes sont. Est-ce que c'est le genre de choses que vous faites? Est-ce que vous repérez les femmes dans les milieux, justement, qui seraient intéressées à se lancer? Est-ce que c'est ces femmes-là que vous ciblez pour ensuite leur offrir du mentorat? J'aimerais un peu comprendre le fonctionnement que vous mettez de l'avant au sein des tables.

Mme Drolet (Karine) : Oui. Donc, pour répondre à votre question, en fait, première question, oui, on avait le programme À égalité pour décider, comme j'ai mentionné tout à l'heure, qui a d'abord été coupé. Et, en lien avec la stratégie qui vient de sortir, il a été dilué dans une enveloppe globale. Donc, en fait, au lieu que ce soit les groupes de femmes qui peuvent, en fait, développer des projets en lien avec, justement, l'implication des femmes, maintenant, c'est vraiment tout organisme, tout groupe ou municipalité qui peut en faire la demande, et ce n'est pas seulement pour le programme À égalité, donc c'est vraiment fait de façon... plus globalement.

La deuxième partie de votre question, c'était, rappelez-moi... c'est de quelle façon on va... quels sont les... Bien, comme je disais tout à l'heure, effectivement, c'est vraiment... on va y aller... on peut y aller de deux façons, soit de façon systémique et aussi on peut y aller, oui, avec du mentorat, on peut y aller avec des répertoires de candidates aussi. Mais c'est sûr qu'on ne peut pas le faire avec notre financement de base. Donc, c'est vraiment... on revient sur la question, mais c'est comme très important.

Une fois que le financement est là, qu'il est là pour plusieurs années, c'est sûr qu'on peut effectivement mettre des programmes en place où on va travailler en partenariat. Donc, vraiment, on va utiliser... Parce que le Réseau des tables et toutes les tables dans les régions, on a développé un grand réseau de partenariat qui est très diversifié, donc c'est sûr qu'on va travailler avec ces partenaires-là pour aller chercher les femmes.

Et aussi, l'autre élément, c'est que toutes les tables et le Réseau des tables, on est déjà implantés dans le milieu, donc c'est sûr qu'avec tous les groupes de femmes qui sont sur le terrain c'est très facilitant pour nous d'aller directement vers les femmes, donc là où elles sont, là où elles sont impliquées, dans les C.A., dans les conseils d'établissement, peu importe, pour effectivement avoir peut-être une banque de candidatures ou faire mixer des femmes qui sont déjà en politique et celles qui pourraient être intéressées, par exemple.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Si on veut des exemples bien concrets aussi, un exemple bien concret qui peut... On a vu par le passé, durant une dizaine d'années, Mauriciennes d'influence ou Lavalloises d'influence, où, là, il y avait des banques de candidatures pour des postes à différentes instances, que ce soit des conseils d'administration, que ce soit aux CSSS, quand on avait des postes plus réservés à la société civile. Puis c'était basé aussi... Pour combler ces postes-là, il y avait du maillage de partenaires entre les tables régionales de groupes de femmes et les partenaires régionaux. Donc, c'étaient des outils reconnus et utilisés.

Faute de financement, c'est sûr qu'il y a moins d'emphase qui est mise sur aller dénicher, là... aller mousser cette banque de candidatures là et la maintenir au fil du temps. Mais c'était reconnu, et les partenaires, même... Tout au long de l'année, on reçoit des appels pour voir : Est-ce que votre banque de candidates est mise à jour? On le fait, mais c'est toujours en dernier de la liste.

• (16 h 30) •

Mme Dallaire (Gisèle) : Pour répondre aussi, bien, le mentorat, c'est fait de façon inégale à travers les régions parce que le financement n'a pas été égal à travers les régions. Ça fait que nous, on a été chanceuses, on a eu notre financement, donc on a été en mesure d'aller rencontrer les femmes. Puis ça se fait beaucoup, beaucoup par téléphone, anciennes élues qu'on appelle, qui donnent... Et également, cette année, on avait une banque d'ambassadeurs, ambassadrices qui, elles, étaient mes yeux sur le terrain, qui pouvaient aussi me faire des référencements de personnes, de candidates potentielles. Donc, c'est beaucoup, beaucoup de téléphones, de réseautage pour aller chercher les... et semer la graine. On sème nos graines, puis après ça, bien, ça pousse, oui.

Mme Fournier : Mais, si vous aviez plus de moyens pour semer vos graines, il y en aurait plus qui pousseraient, par exemple, une fois que la tige est...

Mme Dallaire (Gisèle) : Oui. Oui, oui.

Mme Fournier : Je vous entends bien. Puis justement, tu sais, vous amenez une mesure qui pourrait, j'imagine, contribuer à augmenter votre financement, vous dites : «Un autre type de mesure serait d'obliger les partis politiques à verser dans un fonds dédié à l'atteinte de l'égalité les sommes reçues au chapitre de la bonification de leur allocation annuelle.» Donc, je reconnais ça. Sauf qu'en même temps, je me dis, si on bonifie le financement des partis politiques pour qu'ils fassent élire plus de femmes, donc ça devient un incitatif financier, mais, si on dit que l'argent, on le prend pour le mettre dans un fonds, bien, on enlève en quelque sorte l'incitatif. Donc, je pense que l'incitatif est important, puis peut-être justement que le gouvernement peut reconnaître aussi que c'est important de financer les types d'initiatives comme les vôtres et d'y consacrer les sommes nécessaires, donc, de façon séparée. En tout cas, à mon avis.

Puis justement, sur la question des incitatifs, vous amenez davantage, donc, la bonification du financement plutôt que les pénalités, comme le suggèrent d'autres groupes. Je trouve ça intéressant parce que je me dis que le Québec... étant donné que le financement populaire est quand même limité à seulement 100 $ par personne, ça peut devenir extrêmement intéressant pour les partis politiques, d'avoir une bonification, donc, de leur allocation publique. Donc, est-ce que c'est la raison pour laquelle vous avez davantage choisi d'axer vers l'incitatif plutôt que la pénalité?

Mme Dallaire (Gisèle) : Nous, on préfère les incitatifs aussi parce que, la pénalité, pour un grand parti, ce n'est pas grave de payer une pénalité. Ça fait que, tu sais, tu paies, puis ce n'est pas grave. Donc, en faisant l'incitatif, bien là on sème... on veut justement l'égalité, plus de femmes, puis ça pousse... ça donne une tape dans le dos sur le bon exemple, donc.

Mme Fournier : Merci. Puis vous avez dit que vous souhaitez que le DGEQ se penche aussi sur la question des quotas. Pouvez-vous nous en parler davantage?

Mme Dallaire (Gisèle) : Bien, ils ont déjà fait une très belle amorce avec leur recherche sur les femmes en politique, puis on voulait que ce soit poussé plus loin, parce que nous, on aimerait le faire, mais on n'a pas assez de fonds pour ça, donc... Et c'est vraiment l'instance ici, au Québec, qui est le mieux placée pour faire cette recherche-là, donc voir ce qui est... comparer avec les autres pays, bon, il a déjà fait vraiment une belle revue de littérature là-dessus, puis se pencher, qu'est-ce qui est faisable ici, au Québec, avec...

On a, tu sais, une province qui est très grande. C'est quoi, l'impact qu'il y a sur les différents secteurs, les circonscriptions? Tu sais, oui, les quotas, mais, tu sais, comment arriver à faire quelque chose de viable dans nos grandes régions, là, ça, c'est une problématique spécifique. Tu sais, quand on voit les pays nordiques, ça va bien, mais, tu sais, c'est quand même des petits pays. Nous, tu sais, on a des très, très grands territoires, puis il faut arriver que ce soit viable pour les députés en place. Les gens aiment se reconnaître, quand on vote pour notre député. Si notre député se retrouve en Ungava puis, tu sais, c'est loin... Ça fait que c'est toutes des réalités qu'on doit s'attarder à la spécificité du Québec.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. J'invite la députée de Repentigny à poursuivre, s'il vous plaît.

Mme Lavallée : Je vous remercie, M. le Président. Merci, bienvenue d'être ici. Je ne sais pas si le Réseau des femmes élues de Lanaudière fait partie de votre regroupement.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Bien, en fait, la table des groupes de femmes de Lanaudière a mis sur pied le réseau des femmes élues, donc il ne fait pas partie de notre regroupement, puisque ce n'est pas une table de groupes de femmes, mais disons que, dans la conjoncture actuelle, elles se tournent beaucoup vers nous parce que, les réseaux des femmes élues, il n'en reste que trois ou quatre au Québec, et elles sont seules, elles sont sous-financées. Donc, c'est nous, un peu... On essaie d'être en constante communication.

Mme Lavallée : Je peux vous dire que c'est dans ma région. C'est un groupe qui, pour les élections municipales, a fait un travail extraordinaire de sensibilisation. Elles invitent souvent des élues de tous les partis, tant municipal, provincial que fédéral, et je pense que les femmes ont besoin de ces rencontres-là. Vous avez un rôle à jouer, même les groupes féministes, tous les groupes de femmes, toutes les ex-parlementaires ont une influence significative auprès de ces personnes-là, qui voudraient possiblement accéder à ces postes de pouvoir là, mais qui ont juste besoin de peut-être parler avec des femmes qui vivent cette réalité-là pour leur montrer que c'est possible.

Est-ce que... Ce que je comprends de ce que vous faites, c'est que vous souhaitez de pouvoir continuer à faire ce travail-là de sensibilisation et d'influence, qui est important, parce qu'on a beau avoir n'importe quelle politique de quotas, de zones de parité, si vous n'êtes pas là, ça va être difficile. Pour nous, les partis, aller chercher des femmes, on a besoin de travailler avec vous.

Mme Gauthier (Marie-Andrée) : Définitivement, on veut que le droit des femmes d'avoir accès à cette démocratie-là soit respecté, en fait. C'est ça, notre but ultime, et on pense être des actrices incontournables dans chacune de nos régions, hein, parce que c'est vraiment notre proximité avec les femmes qui veulent se présenter. On a déjà vu... Par exemple, des fois, il y a des mentors qui viennent d'autres régions, qui vont dans une autre région. Donc, il y a peu de similitudes entre Montréal et l'Abitibi, tu sais, donc, des fois, le sentiment d'appartenance est moins là. Donc, on assiste à une conférence, mais, par la suite, il n'y a rien qui est mis en place pour accompagner. Donc, nous, notre but, c'est vraiment la défense de droit des femmes et que ça se rende jusqu'à l'Assemblée nationale vraiment, là, dans le concret, dans notre... dans des principes démocratiques, que ça se retrouve.

Mme Lavallée : Puis c'est une volonté de tous les partis. Moi, je le sens que tous les partis veulent avoir plus de femmes, plus de femmes élues, pas juste de se présenter, mais d'être élues. Mais c'est de les trouver. Puis c'est sûr que vous êtes des réseaux qui peuvent nous aider à atteindre cette fameuse parité là, qu'on veut tous ici, à l'Assemblée nationale.

Mon autre question, ce serait : Est-ce que vous avez l'impression, face à toutes les difficultés que vous dénoncez puis qu'on connaît tous, avez-vous l'impression que c'est plus facile de convaincre des femmes d'aller dans des conseils d'administration ou de se présenter au niveau municipal, qui est plus de proximité, alors que, lorsque... dès qu'on tombe au niveau provincial, là, ça veut dire qu'on s'absente de la maison pendant trois, quatre jours, puis ça... Sentez-vous la réticence de cet éloignement-là qui fait que ça nous tente un peu moins?

Mme Drolet (Karine) : Donc, pour répondre à votre question puis pour m'être déjà présentée aussi en politique municipale, je vous dirais oui et non, parce qu'au niveau municipal il y a quand même... oui, il y a la proximité, mais il y a quand même la gêne du fait que je vais être reconnue. Donc, tout le monde me connaît, dans mon village ou dans ma petite municipalité, et il y a... En tout cas, moi, je l'ai senti, puis même chez d'autres femmes aussi. Il y a quand même... il peut y avoir un malaise. Donc, je vous dirais, le malaise peut être autant pour les deux paliers, donc autant municipal que, comme vous dites, à l'Assemblée nationale.

Et, par rapport au fait de s'absenter, encore une fois, au niveau obligations familiales, même au niveau municipal, ça peut être une très grosse contrainte aussi, parce que ça peut être le soir, ça peut être durant le souper, ça peut être après souper.

Donc, en tout cas, moi, de mon côté, dans ma région, ce n'est pas quelque chose que j'ai senti, de dire : Parce que c'est au provincial que c'est plus difficile ou c'est... C'est les mêmes obstacles. C'est juste qu'ils sont, disons, présentés différemment ou à différents moments qui sont... C'est peut-être ça qui est différent, là. Oui?

Mme Dallaire (Gisèle) : Si je peux ajouter, on voulait féliciter le changement en regard du congé de maternité pour les filles qui se présentent... qui sont au municipal. Cependant, je note que ce congé-là n'est pas accessible aux députés provinciaux. Ça, c'est... En tout cas, on se pose beaucoup de questions là-dessus. On en ferait même une recommandation.

Mme Lavallée : Il me reste du temps? Non?

Le Président (M. Matte) : 30 secondes.

Mme Lavallée : Ah! bien, merci d'être venues. Puis les obstacles que vous énumérez, on les connaît, parce que ça se répète. C'est ça qu'il faut changer pour attirer des femmes en politique.

Le Président (M. Matte) : Bien, je vous remercie d'avoir participé aux travaux de la commission. C'était agréable.

Alors, je vais suspendre les travaux de la commission pour permettre au prochain groupe de prendre place. Je vous remercie.

(Suspension à 16 h 39)

(Reprise à 16 h 42)

Le Président (M. Matte) : Alors, bon après-midi. On vous remercie puis ça nous fait plaisir de vous accueillir. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour faire votre exposé. Si vous voulez vous présenter.

Association féminine d'éducation et d'action sociale (AFEAS)

Mme Tremblay (Hélène) : Oui. Bonjour. Je m'appelle Hélène Tremblay. Je suis présidente de l'AFEAS provinciale. Et ma compagne, c'est Céline Duval.

Maintenant, je vais commencer. M. le Président, Mmes, MM. les députés. Merci de nous recevoir dans le cadre de ces auditions publiques.

L'AFEAS est un organisme sans but lucratif fondé en 1966. L'AFEAS regroupe 7 668 Québécoises travaillant bénévolement au sein de 220 groupes locaux répartis dans 11 régions. Visant à l'autonomie des femmes sur les plans social, politique et économique, l'égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les sphères de la société demeure incontestablement le leitmotiv de l'AFEAS. De là son travail incessant sur divers enjeux concernant les Québécoises, notamment sur l'accès des femmes aux instances démocratiques de tout niveau.

En février 2017, 29 % des députés sont des femmes, une légère hausse par rapport à l'élection de 2014, mais une baisse depuis celle de 2005, où les femmes représentaient 32 % de parlementaires au Québec. Si nous laissons le temps faire les choses, les femmes québécoises auront la parité à l'Assemblée nationale d'ici 100 ans peut-être. Le mandat d'initiative portant sur la place des femmes en politique de la présente commission, bien qu'intéressant à un an des élections au Québec, nous questionne. Pourquoi restreindre le mandat de la commission à la représentation des femmes à l'Assemblée nationale? Pourquoi rechercher uniquement les mesures qui inciteraient les femmes à se présenter aux élections du Québec sans inclure les mesures qui pourraient provenir des partis politiques ou de l'Assemblée nationale? Comment s'assurer que le rapport de la commission n'arrive pas trop tard pour les mises en candidature de 2018?

N'oublions pas que, depuis plus de 30 ans, les Québécoises et les Québécois attendent une révision de la Loi électorale pour que la parité entre les femmes et les hommes dans les instances démocratiques devienne une réalité, et ce, obligatoirement d'une élection à l'autre. On a souvent tendance à dire que ce qui freine les femmes serait dû à leur personnalité. Ne devrait-on pas voir le problème de façon plus large? L'enjeu n'est-il celui de la reconnaissance réelle de la place des femmes en politique?

La politique, un métier traditionnellement masculin, avec ce que cela comporte d'obstacles pour les femmes. Temps révolu? Mais non. Selon Julie Miville‑Dechêne, ex-présidente du Conseil du statut de la femme, les obstacles à l'entrée et au maintien des femmes en politique sont moins visibles que par le passé, mais ils n'ont pas disparu pour autant.

Le recrutement et la sélection par les partis politiques, un autre obstacle vécu par les femmes. Entrer en politique, c'est aussi faire face aux vieux réflexes des partis qui tentent à se renouveler. C'est difficile pour les femmes qui n'y sont pas préparées. Et les partis politiques veulent-ils vraiment changer? Comment apprend-on les règles non dites des partis?

La socialisation et l'éducation des filles et des femmes, un troisième obstacle, qui ne les ont pas préparées à jouer un rôle politique, même aujourd'hui, ou si peu. Historiquement, peu de femmes ont été élues, et donc peu de modèles féminins. Et même les ministères donnés aux femmes sont souvent liés aux rôles et stéréotypes féminins.

L'incontournable conciliation famille-travail. Le système politique actuel défavorise les femmes, car elles assument encore en grande majorité la responsabilité des enfants et des proches en perte d'autonomie.

Pour que la parité soit une réalité au Québec dans un avenir proche, l'AFEAS croit qu'il faut des actions concrètes, rapides et ancrées dans la législation. Nous vous en présentons trois : une loi électorale proactive enchâssant la parité dans une zone de 40 % à 60 %, tant au niveau des candidatures et des parlementaires que des membres du Conseil des ministres et des commissions; un plan d'action et des mesures concrètes mises en place par chaque parti politique tant pour recruter, former et sélectionner des candidatures de femmes que pour aider à maintenir en fonction des femmes élues aux élections; un exemple qui vient d'en haut, la parité au Conseil des ministres obligatoirement, ce qui porte un message clair : L'égalité entre les femmes et les hommes est une valeur fondamentale au Québec.

En attendant que l'Assemblée nationale adopte une loi proactive et des mesures concrètes obligatoires par les partis politiques, l'AFEAS attend de chacun des partis politiques que dès la prochaine élection, en 2018, la parité entre les femmes et les hommes soit un des enjeux de leur organisation électorale, et l'égalité de fait entre les femmes et les hommes, un enjeu de leur plateforme politique. La parité n'est pas un rêve de féministe qui ne comprend pas comment brasser des affaires, au contraire, son absence est un signe de manque avéré de vision et de leadership. Merci.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie de votre exposé. Je vais inviter la députée de Richmond à poursuivre nos échanges. Vous disposez de 14 minutes.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup de votre présence. Merci de votre action à tous les jours aussi partout au Québec. Je disais tout à l'heure que je me considère comme une députée de terrain. Je suis aussi très près de l'organisation des différentes AFEAS dans le comté de Richmond, et c'est toujours un plaisir de participer non seulement aux activités, mais surtout aussi aux démarches que vous faites pour la sensibilisation, pour présenter de plus en plus de résolutions, des documents que vous venez nous porter aussi dans nos bureaux pour dire : Voici la voix des femmes portée plus que jamais par l'AFEAS. Donc, merci énormément.

Ce qui vous amène ici aujourd'hui aussi, parce que vous en avez vu dans l'histoire, vous le relatez dans le document que vous nous déposez également, on dit que la politique, c'est un métier encore masculin, vous écrivez «traditionnellement masculin», je pense qu'on peut dire encore masculin aujourd'hui aussi. Est-ce que vous croyez que la présence de femmes de façon plus grande peut faire en sorte de changer cette culture que l'on connaît dans la façon de travailler, dans la façon d'être, dans la façon de faire ou de vivre la politique au Québec?

Mme Tremblay (Hélène) : Je crois que oui.

Mme Duval (Céline) : Obligatoirement, là où il y aura plus de femmes, on aura une pensée différente, on aura une façon d'agir différente, parce que les hommes et les femmes ont une pensée différente et, plus on aura des pensées féminines qui travailleront avec des pensées masculines, ça permettra, nous, les femmes et nous, les hommes, d'aller ensemble vers une meilleure égalité.

• (16 h 50) •

Mme Vallières : Vous parlez, entre autres, de propositions très concrètes, comme des micros différents pour assurer qu'il y a une alternance hommes-femmes. Est-ce qu'il y a d'autres idées, d'autres initiatives comme ça qui sont ressorties de vos consultations avec les différents... les membres des AFEAS un peu partout au Québec? Avez-vous d'autres suggestions que vous pouvez mettre de l'avant aujourd'hui?

Mme Duval (Céline) : Bien, il y avait celle-là qui nous semblait... j'aimerais y revenir un petit peu plus, parce que souvent, dans les assemblées de parti... Parce que la problématique, c'est qu'avant d'être candidate il faut d'abord être membre, puis, pour être choisie comme candidate, il faut être connue. S'il y a un micro, puis qu'il y a 15 gars qui attendent pour parler, puis que la fille attend son tour, puis que le temps de parole est fini, bien, elle n'a pas eu le temps de s'exprimer. Si on a deux micros, un qui est obligatoirement offert aux filles puis par alternance, bien, la fille qui se présente au micro a son temps assuré pour donner son point de vue, se faire connaître, exprimer son opinion. Parce que, si on veut des candidates, il faut qu'on les connaisse, qu'on connaisse leur façon de parler, leurs idées et leurs opinions. Puis, si elles sont mises de côté ou qu'elles n'ont pas la possibilité de s'exprimer, bien, on ne les connaîtra pas.

Mme Vallières : Je me permettrais de vous dire que je ne suis pas tout à fait d'accord. Et je me base sur mon expérience très personnelle dans des assemblées, parce que j'ai été quand même très impliquée dans différentes associations, au sein d'un parti également. Je n'étais pas celle nécessairement à vouloir aller le plus au micro, poser des questions, avoir des interventions, et ce n'est pas ce qui a fait en sorte que je me retrouve ici aujourd'hui. Mais ça peut effectivement peut-être, pour certaines, faire partie d'une façon d'avoir de l'expérience, d'être vue, reconnue aussi, effectivement, mais, pour ma part, ce n'était pas nécessairement parce que j'ai fait ça que j'ai décidé de me lancer nécessairement.

Veuillez m'excuser, je reviens un petit peu dans le mandat de la commission. Je m'excuse, je m'étais pris une note de pouvoir répondre à vos interrogations dans votre introduction.

Alors, pourquoi parler ici du palier provincial seulement et ne pas inclure le municipal et le fédéral? Bien sûr, autant le municipal et le fédéral sont des paliers bien distincts, on voulait, nous, comme parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec, entre nous, ici — c'est une première fois qu'on le fait — pouvoir discuter, justement, de la préoccupation de notre palier, au provincial.

Ceci dit, dans nos discussions, les membres de la Commission des relations avec les citoyens, on était bien conscients que cette démarche allait être regardée par plusieurs aussi. On sait qu'autant la Fédération québécoise des municipalités que l'UMQ aussi, avant la récente campagne au municipal, ont fait énormément de démarches pour aider à la place des femmes en politique municipale. Ils regardent, évidemment. Ils vont participer aussi, quand même, à nos travaux pour venir nous exposer le résultat des travaux qu'ils ont faits. Je pense que ça peut servir d'exemple pour dire : Nous, comme parlementaires québécois, on s'est posé la question concernant notre palier gouvernemental, ce qui permettra aux autres... ou pourra donner des idées ou encore inciter d'autres paliers à le faire également.

Quant à votre questionnement sur pourquoi parler uniquement des mesures qui inciteraient les femmes à se présenter, et non pas les partis politiques eux-mêmes, bien, je crois que, dans la consultation que l'on fait, on pose aussi des questions ou encore on invite les gens à nous dire qu'est-ce que les partis politiques peuvent mettre en place comme mesures aussi qui vont aider les femmes. Donc, ce n'est pas axé que sur qu'est-ce que la femme peut faire pour avoir de plus grandes compétences, une meilleure confiance en soi, mais on veut que des groupes comme vous puissent aussi venir nous dire : Est-ce que vous pensez que les partis politiques peuvent avoir une incidence? Et quelles mesures ces partis devraient-ils mettre en place pour pouvoir inciter les femmes à se présenter davantage aux élections?

Quant à votre questionnement sur si toute cette démarche sera tablettée, vous savez fort bien que c'est une grande question de société en ce moment, la place que les femmes occupent au sein de notre société. C'est aussi une grande question au sein des parlementaires, cette question de représentation. Parce qu'on parle de la parité, oui, mais il faut toujours rappeler aux gens que c'est une question de saine représentation. Les femmes, au Québec, on représente 50 % de la population, et on n'est pas représentées à cet effet ici, au sein de l'organisation qui nous représente. Alors, c'est sûr que c'est une question qui, étant tellement d'actualité, il y a de plus en plus... il y a une grande synergie qui se crée avec autant les gouvernements que les différents paliers, que la société, les organisations, dont vous êtes, pour faire en sorte qu'on avance, justement. Et cette idée de commission parlementaire, qui vient s'adresser à des questions beaucoup plus concrètes, sur des actions et des mesures qui peuvent être prises plus rapidement, donc il y aura effectivement un rapport.

Les délais en commission parlementaire, dans le système parlementaire étant ce qu'ils sont, évidemment, la campagne électorale, pour nous, dans les différents partis, j'imagine que c'est partout pareil, il y a des annonces déjà de candidats qui se font chez certains. Oui, il est quand même tard dans le processus, mais, pour moi, il n'est jamais trop tard pour bien faire non plus. Et je préfère que la commission que l'on tient en ce moment se tienne, malgré qu'on approche d'une campagne électorale, et non pas, justement, plutôt reporter en se disant qu'on verra ça dans une autre législature. Je crois que c'est important d'en parler maintenant. S'il y a des choses qui peuvent être faites rapidement, tant mieux, on le verra à la lumière des recommandations qui seront faites dans le rapport.

Mais donc on prend déjà en note que, pour vous, il y a un sentiment d'urgence, et il faut aller rapidement. Mais je pense qu'il y a une ferme volonté. Et le fait qu'on soit assis ici, en commission parlementaire, tous les partis, et qu'on traite de ce sujet-là d'une façon très transpartisane, en fait, démontre une grande volonté que les choses évoluent concrètement et qu'on puisse ensemble arriver à des résultats peut-être différents de ce qu'on a réussi à obtenir par le passé.

Mme Duval (Céline) : Je vous le souhaite, hein?

Mme Vallières : Oui. M. le Président, combien de temps?

Le Président (M. Matte) : ...

Mme Vallières : Il reste cinq minutes?

Le Président (M. Matte) : Mais notre collègue de D'Arcy-McGee veut intervenir.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Merci, mesdames, pour votre présentation. Ce n'est pas sans intérêt qu'on va considérer vos interventions, compte tenu que vous avez 61 ans d'expérience sur le...

Mme Duval (Céline) : 51.

M. Birnbaum : 1966? O.K., bon, je ne suis pas expert en maths. Mais impressionnant. Alors, vous êtes présentes à travers le Québec, en région, et j'apprécie vos réponses, où on parle concrètement de ce qui se passe dans la tête, le coeur d'une femme qui veut s'impliquer. Voilà où on essaie d'agir. Et, compte tenu de votre expérience sur le terrain, j'accepte et je comprends qu'on parle beaucoup, et c'est des débats réels, sur l'idée de trancher, de mettre des objectifs très, très clairs. Voilà une voie, mais pas facilement réalisable, et, il faut le dire, je ne veux pas écarter l'importance de discuter comme il faut ces idées-là, mais ce n'est pas, en soi, qu'on décide de trancher sur une obligation que soudainement les obstacles vont disparaître sur le terrain, évidemment. On parle du comportement, des perceptions bien ancrées, et tout ça.

Bon, il ne m'en reste pas beaucoup, de temps. J'aimerais vous inviter de nous parler davantage de ce que vous voyez sur le terrain comme obstacles devant les femmes, même des jeunes filles qui auraient tendance à postuler mais qui s'arrêtent, et qui est de notre responsabilité à adresser comme problèmes.

Mme Duval (Céline) : La première, moi, c'est conciliation travail-famille, c'est toujours ça qui revient, parce qu'elles disent : Bon, bien, pas maintenant, les enfants sont trop jeunes; un petit peu plus tard, possiblement. Et c'est pour ça qu'on vous a mis une petite possibilité, les horaires de toutes sortes, là, que vous avez pour... Et les jeunes parents, hommes ou femmes, qui sont loin de la maison aimeraient ça garder un contact avec les enfants, puis c'est pour ça qu'on vous a mis quelque part, là, Skype, par exemple, on peut garder contact avec les enfants. Mais encore faut-il qu'ils soient réveillés puis qu'ils soient à la maison à cette heure-là. Puis souvent, dans vos horaires en commission, vous avez une pause à l'heure où les enfants ne sont pas disponibles, et ainsi de suite.

Il y a probablement une organisation du travail qui pourrait se faire qui permette davantage aux parents de continuer à être ici, mais que leurs petits de coeur à la maison puissent continuer à communiquer, là. Je ne sais pas si vous comprenez ce que je veux dire, c'est que, quand on est ici, quand on est parent, je dirais peut-être davantage les mamans, qui ont une charge mentale un petit peu plus importante par rapport à toute l'organisation de la famille, là, bien, qu'elles puissent se dire : Bien, je sais que j'ai un temps où je pourrai communiquer avec les enfants.

M. Birnbaum : Oui. Voilà un chemin très concret où il y a des solutions à chercher.

Mme Duval (Céline) : Vous demandiez des choses concrètes, on a essayé de vous en donner.

• (17 heures) •

M. Birnbaum : Oui. Non, voilà, voilà. Là, vous parlez aussi du fait qu'on parle d'un métier traditionnellement masculin qui... Bon, ça nous appartient à changer cette perception aussi. Est-ce que vous avez une suggestion ou deux, juste sur la façon de présenter cette option de carrière, de parler de notre boulot actuel, qui risque de faire en sorte que les femmes puissent comprendre que les hommes ainsi que les femmes souhaitent une participation plus équitable et égalitaire?

Mme Duval (Céline) : Bon, ça, on n'a pas pensé plus clairement, là. Je ne suis pas sûre que des publicités à la télé, ça ferait grand-chose, là. Il faut que ce soit quelqu'un, concrètement, qui parle et qui dise à quel point le métier, si ça s'appelle un métier, là, est profitable à la société. Je pense que les gens ne comprennent pas toujours ce que vous faites concrètement de bien et de bon pour la société. On reconnaît souvent les erreurs, les torts ou les choses mal faites, mais le bien, on n'en fait pas souvent mention. Peut-être une petite cure de bientraitance.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Je céderais la parole à la députée de Richmond pour 50 secondes.

Mme Vallières : Ah! quand même. Alors, merci énormément. Et, quand je parlais des actions que vous faites concrètement aussi sur le territoire, c'est une des choses qui est très bien. Je sais que vous invitez régulièrement... puis pas juste moi, là, dans le comté de Richmond, mais vous invitez beaucoup les élus de tous paliers confondus à aller rencontrer vos membres, aussi expliquer davantage ce qu'on fait. Alors, en ce sens, vous participez beaucoup à l'éducation.

Donc, compte tenu du peu de temps, encore un très grand merci de votre participation.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite la députée de Marie-Victorin à prendre la parole pour les huit prochaines minutes.

Mme Fournier : Merci beaucoup. Merci à vous deux d'être avec nous aujourd'hui en commission parlementaire pour traiter de la place des femmes en politique. C'est tellement important. Donc, on vous remercie de votre contribution.

Moi, justement, je voulais vous poser des questions plus précises sur vos recommandations, parce que, vous l'avez dit, on voulait avoir du concret, vous nous avez amené du concret. Donc, je trouve ça bien intéressant.

D'abord, vous nous parlez des incitatifs, donc les incitatifs financiers pour les partis politiques. On a parlé beaucoup des incitatifs pour le nombre de candidatures, donc l'atteinte de la zone paritaire du 40-60, mais vous, vous allez plus loin. Vous dites que ce serait intéressant qu'on ait des bonifications financières pour le nombre d'élus plutôt que le nombre de candidates. Je dois vous avouer que moi, personnellement, je penche plus vers ce type de système là, parce que j'ai l'impression que, quand on dit qu'on veut donner des incitatifs pour les candidates, le danger là-dedans, c'est qu'on se retrouve avec, oui, beaucoup de candidatures féminines, mais qu'on place un peu pour pallier à certains trous puis dans les comtés qui ne sont pas trop prenables pour les partis politiques.

Alors, si notre but, c'est d'avoir plus d'élues, par exemple, à l'Assemblée nationale, il faut aussi que les partis politiques voient un incitatif à ce qu'elles se fassent élire et pas juste qu'elles se présentent. Donc, la deuxième partie, donc, je trouve ça bien intéressant. Donc, j'imagine que c'est parce que vous partagez mon constat.

Mme Duval (Céline) : Oui, exactement.

Mme Fournier : C'est bon. Merci. Sur l'analyse différenciée selon le sexe, aussi, je trouvais important que vous l'ameniez, que ce soit appliqué à toutes les étapes du processus électoral afin de documenter les effets sur les femmes et les hommes de chaque mesure ou changement. Pouvez-vous me donner des précisions sur ce que vous entendez par là? Parce que c'est assez original. En tout cas, vous êtes le premier groupe jusqu'à maintenant à en parler, puis je pense que ça pourrait être effectivement intéressant.

Mme Duval (Céline) : Bon, comme je l'ai dit tout à l'heure, habituellement, on devient candidate, mais il faut être membre avant. Généralement, il faut être membre d'un parti. Est-ce qu'il y a des incitatifs ou des choses qui font que c'est plus facile pour un homme de devenir membre d'un parti, ou plus facile, ou moins facile pour les femmes?

Quand on parle de l'analyse différenciée, c'est de toujours vérifier si on offre les mêmes conditions. Alors, est-ce qu'on entre dans un parti en gang, une gang de gars ensemble? Est-ce qu'on peut faire la même chose, une gang de filles, on se présente en même temps pour avoir un réseau, pour être avec d'autres? Est-ce qu'on a la même façon de penser? Alors, si déjà, en entrant comme membre, on a le même accueil, les mêmes possibilités et les mêmes choses, quand on devient... devenir de membre à membre impliqué, c'est la deuxième étape, généralement, puis de membre impliqué à possiblement candidate, toujours s'assurer qu'on offre les mêmes occasions ou les mêmes possibilités.

Mme Fournier : Parce que j'ai l'impression que le problème se situe dans l'entonnoir, justement, dans le fait que... En tout cas, si je me base sur les statistiques, notamment au Parti québécois, on a sensiblement des nombres très paritaires en termes de membres femmes et membres hommes. C'est quand on s'en va davantage dans les postes de plus en plus décisionnels puis, je veux dire, par exemple, dans le moment de déposer sa candidature que, là, on a la difficulté de convaincre ces femmes-là, qui sont pourtant membres, de devenir candidates. Puis, en fait, pas qu'on a de la difficulté à les convaincre, je pense qu'on ne met peut-être pas assez de temps pour les convaincre. Puis ça, c'est un problème qui se répercute dans toutes les formations politiques, parce qu'on le voit, on n'atteint pas le nombre de candidates dans une zone paritaire parce que souvent les hommes, justement, sont plus prompts à se lancer, à dire qu'eux, bon, il n'y a pas de problème, ils vont tenter une candidature, et tout ça. Donc, ils rencontrent moins d'obstacles. Alors, effectivement, ce serait intéressant de voir à quel moment est-ce qu'on sent qu'il y a vraiment la déchirure, si on veut. Donc, merci de l'amener.

Vous parlez aussi, évidemment, de la conciliation travail-famille, puis on l'a vu dans la consultation qui a été envoyée depuis quelques semaines sur le site de l'Assemblée nationale, où plus de 400 femmes ont répondu... 400 personnes, il y a des hommes aussi qui ont répondu, mais on voit que c'est souvent des gens qui ont quand même un intérêt pour la politique qui ont répondu au sondage, puis c'était intéressant de voir que les mesures de conciliation travail-famille arrivent largement en tête de liste pour les préoccupations qui freinent les gens à se présenter en politique.

Vous avez parlé du nombre d'heures qu'on pourrait répartir autrement. Est-ce que vous pensez aussi qu'on pourrait se baser sur des exemples qui ont notamment été faits au niveau municipal, par exemple, à la ville de Montréal, sur les congés parentaux? Parce qu'actuellement c'est sûr que, pour les jeunes femmes aussi qui pensent un jour avoir une famille... Puis, tu sais, je connais un peu la situation, je me sens un peu comme ça. Puis je me suis posée la question aussi avant de me présenter en politique, dire : Un jour, je veux avoir des enfants. Mais, tu sais, il n'y a pas de... il n'y a rien qui régit, en ce moment, à l'Assemblée nationale pour dire qu'est-ce qui arrive quand tu attends un enfant. Est-ce que tu as le droit à un congé? Puis, oui, c'est sûr que tu peux te dire, comme élue : Ah! c'est certain que je vais prendre quelques semaines, quelques mois, mais, puisque ce n'est pas inscrit à quelque part, on dirait qu'on a peut-être moins la légitimité de le faire. Alors, est-ce que vous pensez que c'est une bonne avenue?

Mme Duval (Céline) : Ce serait une mesure très importante, effectivement, parce que les salariées ont droit à une année, mais les élues municipales, actuellement, ont droit à trois mois. Mais, comme on l'a mentionné tout à l'heure, les élues au niveau du provincial ou même fédéral, cette politique-là n'est pas incluse, là, n'apparaît pas, puis ce serait important, effectivement, parce que ça peut être, dans certains cas, un frein, tout comme la naissance ou l'adoption, même.

Mme Fournier : Tout à fait. Donc, on partage aussi ça, bien évidemment.

Vous parlez aussi que les partis devraient avoir l'obligation de se doter d'un plan d'action prévoyant l'adoption de mesures concrètes. Donc, est-ce qu'ils devraient rendre compte au DGEQ? Je pense que le groupe avant vous, oui, les tables régionales de femmes, avait amené dans leur mémoire le fait que les partis doivent rendre compte à chaque année au DGEQ de l'avancement de leurs plans d'action. Comment est-ce que vous voyez ça?

Mme Duval (Céline) : Bien, du moment qu'il y en ait un, là, plan d'action et que le plan d'action comprenne soit l'analyse différenciée selon les sexes ou soit comment ils procèdent pour inclure davantage de femmes pour balancer, là, équilibrer cette présence des femmes dans tous les différents postes.

Est-ce qu'ils doivent la présenter à chaque année au Directeur général des élections? Je ne le sais pas, mais du moins que ce soit présenté et que quelqu'un puisse le vérifier. Est-ce qu'à chaque année c'est nécessaire? Peut-être pas, mais au moins d'être vérifié.

Mme Fournier : Une minute? Oui, c'est ça, donc, est-ce que vous pensez aussi que le Directeur général des élections devrait se pencher sur la question des quotas, de l'obligation d'atteindre la zone paritaire 40-60?

Une voix : ...

Mme Fournier : Oui. O.K. C'est bon. Bien, merci beaucoup. Je vous remercie de votre contribution.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. J'invite la députée de Repentigny à poursuivre les échanges.

• (17 h 10) •

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Bienvenue. Votre rôle est important. Tous les groupes de femmes ont un rôle à jouer, à mon avis, pour appuyer ce mouvement afin qu'il y ait plus de femmes qui se présentent en politique.

Tout à l'heure, vous avez parlé de la conciliation familiale qui était difficile, et je vous conterais l'exemple suivant. C'est qu'on a un jeune député qui, effectivement, a des jeunes enfants, puis il trouvait ça dur, les débuts en politique, parce qu'il y a trois jours où il n'était pas présent. Et effectivement il déjeunait avec ses enfants par Skype, et à l'heure du souper il était par Skype pour voir ses enfants souper, et à l'heure du dodo il allait par Skype pour parler à ses enfants parce que... C'est une préoccupation des femmes, mais c'est aussi une préoccupation des jeunes pères, aujourd'hui. Et nous, on respectait ça. Des fois, il venait souper avec nous, puis : Là, je vous quitte parce que je vais aller parler à mes enfants avant l'heure du dodo. Donc, c'est effectivement un problème mais qui n'est pas seulement pour les femmes mais aussi pour les hommes.

Vous parlez de cet obstacle-là, mais on a vu que l'autre groupe avant faisait l'énumération d'autres obstacles, le manque de temps, le manque d'intérêt. Puis les femmes sont compétentes, ça, on le sait, mais ont de la misère à se faire confiance. Ça, c'est peut-être des fois un problème...

Mme Duval (Céline) : C'est qu'on n'a pas appris à faire de la politique.

Mme Lavallée : C'est ça.

Mme Duval (Céline) : On a appris à faire plein d'autres choses, là, mais faire de la politique, ça ne nous a pas été enseigné. On n'a pas eu d'exemple dans l'histoire du Canada, dans l'histoire du Québec, là. À part Jeanne Mance, on n'en a pas eu beaucoup d'autres. Ah! il y a eu Marguerite Bourgeoys, peut-être, mais on n'a pas eu beaucoup d'exemples puis on ne nous a pas appris à faire de la politique. On ne l'a pas appris plus aux garçons, sauf que les garçons sont peut-être plus fonceurs, disons le mot.

Et puis on n'a pas appris à le faire, mais c'est en s'impliquant puis en travaillant dans des comités... Mme Vallières disait qu'elle avait fait plein d'autres choses. C'est ça, c'est en apprenant, en faisant plein d'autres choses qu'on développe des compétences pour ensuite aller en politique, mais, si on ne nous a pas parlé que c'était quelque chose qui était possible pour nous, on peut ne pas le voir.

Mme Lavallée : Puis je pense que le rôle des... vous me direz ce que vous en pensez, mais le rôle des parents, des grands-parents est important. Moi, la journée de la femme... cette année, je rencontrais des gens, je pense que c'était l'AQDR, où je leur disais à quel point c'était important pour eux autres de dire à leurs petites-filles que ce que son petit ami garçon fait, elles étaient capables de le faire, qu'elles étaient aussi bonnes puis d'ancrer ce message-là très jeune. Parce que je pense que ça vient... À partir du moment où très jeune ça s'inscrit dans notre tête, je pense que la confiance va nous alimenter puis va nous donner cette essence-là pour avancer.

Puis le rôle des parents et des grands-parents, à mon avis, il est important, comme le rôle des organisations comme vous et d'autres groupes qui sont venus avant vous. Je pense que les groupes de femmes ont un rôle extraordinaire puis important à jouer auprès des femmes dans votre entourage pour, lorsque vous en voyez une qui aurait des possibilités, de la pousser, de l'encourager, de l'appuyer. Puis je pense que c'est là qu'on va sentir peut-être une vague qui va pousser les femmes vers la politique. Parce que les partis en veulent, des femmes, mais la problématique, c'est on les trouve où? Où est-ce qu'elles se manifestent? Puis on aimerait ça avoir ces noms-là, parce que je pense que, que ce soit le Parti libéral, le Parti québécois, ou nous autres, ou peu importent les partis, on en veut tous et toutes, mais c'est le défi de les trouver puis le défi de leur enlever les peurs, tous les obstacles qu'elles se mettent avant de prendre la décision.

Mme Duval (Céline) : On est un organisme d'éducation, d'action sociale. On en parle dans notre mémoire, on vous dit que, depuis 1974, l'AFEAS demande aux femmes de bouger, de s'impliquer, d'apprendre. Et justement, quand on préparait ceci, on s'est dit : Aïe! ça fait longtemps qu'on n'a pas fait de statistiques sur combien de nos membres maintenant sont dans des postes. On l'avait déjà fait, mais ça fait longtemps qu'on ne l'a pas fait, parce que nos membres apprennent, avec nous, à faire un petit peu plus de politique, parce qu'on en fait, de la politique.

Mme Lavallée : Pour terminer, parce qu'il ne me reste pas grand temps... C'est fini?

Le Président (M. Matte) : 15 secondes.

Mme Lavallée : La consultation pour les femmes en politique, la place des femmes en politique, sur le site de l'Assemblée nationale, ce serait important que vos membres participent puis y répondent, parce que ça va nous donner beaucoup d'informations pour continuer notre travail.

Mme Duval (Céline) : Bien, le réseau provincial a envoyé à tous les membres le courriel leur disant de remplir le questionnaire.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission. Et à mes collègues je vous dis merci pour votre collaboration.

Je suspends les travaux, là, sine die et je vous souhaite une agréable soirée.

(Fin de la séance à 17 h 16)

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