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Version finale

41e législature, 1re session
(20 mai 2014 au 23 août 2018)

Le jeudi 7 décembre 2017 - Vol. 44 N° 98

Mandat d'initiative - La place des femmes en politique


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Table des matières

Auditions (suite)

Mme Pascale Navarro

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD)

Citoyenneté Jeunesse

Chaire Claire-Bonenfant — Femmes, Savoirs et Sociétés

Mémoires déposés

Autres intervenants

M. Marc Picard, président

M. Michel Matte, vice-président

Mme Karine Vallières

M. David Birnbaum

Mme Catherine Fournier

Mme Lise Lavallée

Mme Manon Massé

Mme Caroline Simard

*          Mme Maude Laberge, UMQ

*          Mme Sylvie Pigeon, idem

*          Mme Danielle Duchesneau DuSablon, FQM

*          Mme Renée Rouleau, idem

*          Mme Maryse Drolet, idem

*          Mme Micheline Paradis, GFPD

*          Mme Esther Lapointe, idem

*          Mme Thérèse Mailloux, idem

*          M. Francis Paré, Citoyenneté Jeunesse

*          Mme Laureline Lasserre, idem

*          Mme Guylaine Demers, Chaire Claire-Bonenfant  Femmes, Savoirs et Sociétés

*          Mme Hélène Lee-Gosselin, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Onze heures trente-cinq minutes)

Le Président (M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je vous souhaite la bienvenue à tous et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques liées au mandat d'initiative portant sur la place des femmes en politique.

Mme la secrétaire, pourriez-vous, s'il vous plaît, rappeler les remplacements pour le présent mandat?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Maltais (Taschereau) et Mme Guilbault (Louis-Hébert) est remplacée par Mme Lavallée (Repentigny).

Le Président (M. Picard) : Merci. Ce matin, nous entendrons Mme Pascale Navarro, journaliste et auteure. Mais, comme la séance a débuté avec cinq minutes de retard, j'aimerais avoir le consentement pour pouvoir terminer à 12 h 20. Consentement?

Des voix : Consentement.

Auditions (suite)

Le Président (M. Picard) : Consentement. Mme Navarro, vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé, vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous, allez-y.

Mme Pascale Navarro

Mme Navarro (Pascale) : Merci. Merci à tous et toutes de m'avoir accueillie ici pour venir expliquer, pour moi, ce que ça veut dire, plus de femmes en politique, et comment on peut y arriver.

Au Québec, 27,2 % de femmes ont été élues députées à la dernière élection. Ce taux a aujourd'hui grimpé à 29,6 %. Au moment où je vous parle, nous sommes à égalité avec le Népal, soit au 48e rang du classement mondial du nombre de femmes dans les Parlements, derrière des pays comme le Soudan, comme l'Angola, l'Éthiopie, l'Argentine, le Nicaragua, Cuba, l'Afrique du Sud, les pays de la Scandinavie, la France, le Royaume-Uni. Le pourcentage de femmes députées au Québec est inférieur à bien des pays, dont certains ont réussi à augmenter dans la zone paritaire, voire jusqu'à parts égales, le nombre de femmes et d'hommes députés, cela parfois même sans que les citoyennes de ces pays ne vivent dans une société où l'égalité de droit est acquise.

Étonnamment, pendant que nous faisons envie à beaucoup de femmes pour la liberté que nous, citoyennes, exerçons dans notre pays, celle de rejoindre les cercles de pouvoir nous est encore très difficile.

Pourquoi si peu de femmes en politique? Cette question revient élection après élection. Alors que les femmes s'impliquent dans leurs milieux, dans l'action communautaire, les groupes associatifs, qu'elles réussissent brillamment leurs études et leurs carrières, elles démontrent qu'elles sont intéressées par l'engagement citoyen, ambitieuses et fortement scolarisées. Mais, en politique, on les dit pourtant difficiles à recruter.

Plusieurs raisons sont évoquées pour expliquer ce soi-disant désintérêt. Dans les entrevues que j'ai menées, celle de l'éloignement de la famille revient régulièrement, tout comme le refus de s'exposer aux médias ou encore d'adhérer à une vision agressive du pouvoir. Ce sont quelques-uns des facteurs qui expliqueraient leur peu d'attrait pour la vie politique. Elles disent aussi qu'elles ne sentent pas assez qualifiées ou compétentes pour occuper des postes politiques. Je citerai plus loin les études qui traitent de ces questions.

La famille, la peur d'être incompétentes, l'hésitation à s'exposer. Est-ce que ce sont les seules raisons? Peut-être aurait-on intérêt à regarder les choses autrement.

La responsabilité des femmes ou de la société? Dans tous les secteurs d'emploi, sur les bancs des universités, les femmes ne cessent de faire les preuves de leur désir de s'accomplir et de s'impliquer soit dans leur travail, la vie associative, leurs carrières, leurs créations. Elles démontrent également leurs capacités intellectuelles et sociales, leur excellence et leurs expertises. Que les femmes soient aussi compétentes que les hommes dans tous les domaines ne fait plus l'ombre d'un doute.

Il faut donc reformuler l'équation selon laquelle il revient aux femmes de se préparer, de faire preuve d'audace et de s'outiller pour se présenter en politique. Cette partie-là, celle des obstacles liés à la responsabilité des femmes elles-mêmes, est traitée depuis des années. Les femmes s'instruisent, se forment à la vie politique, soutenues par le travail assidu et rigoureux de plusieurs groupes, dont le Groupe Femmes, Politique et Démocratie, un travail qui doit continuer car il contribue à l'implication politique des femmes.

Mais désormais, il faut ajouter un élément crucial dans l'équation : la responsabilité du gouvernement, de la classe politique, des partis. Car, malgré tous les succès professionnels que vivent les femmes, la politique ne parvient toujours pas à les intégrer dans les sphères où se prennent des décisions capitales, un lieu essentiel qu'elles devraient occuper à parts égales avec les hommes.

Il faut donc changer de point de vue. Le fardeau de la preuve n'est plus sur les femmes, qui travaillent fort à se préparer et à s'équiper. Elles font leur part. À vous maintenant de faire la vôtre.

Ce n'est plus à elles de démontrer leurs capacités et leurs compétences pour être élues et faire de la politique, c'est à vous, partis et classe politiques, parlementaires, à agir pour que les femmes soient dans vos rangs. C'est votre responsabilité, je dirais même que c'est votre obligation. En 2018, ce n'est plus possible de réduire le problème de la sous-représentation des femmes à leur manque d'ambition ou leur incompétence.

• (11 h 40) •

À obstacles systémiques, solution systémique. Voici pourquoi et comment s'explique cette responsabilité. Commençons par décrire le système dans lequel nous vivons.

Les femmes héritent d'une socialisation millénaire qui a laissé des traces. Encore prégnant dans le rôle social des femmes, le réflexe de laisser les autres parler à leur place.

Pendant ce temps, la politique a été modelée par les hommes formés à se projeter dans des rôles de leaders, de décideurs, de législateurs, de bons pères de famille. Ce sont eux qui décident pour toute la société. Très à l'aise dans ces rôles, ils se transmettent ce modèle de génération en génération depuis des siècles. Puisque la politique a été conçue à leur image, ils voient dans ce système de la politique, ses structures, ses traditions, ses mécanismes, une confirmation de leur socialisation de meneurs, de décideurs. Tout cela fonctionne selon une logique ancestrale où les hommes et les femmes ont chacun leurs rôles.

C'est sur ces rôles sociaux de sexe, c'est-à-dire la formation différenciée selon les sexes des individus, relative aux attentes et au conformisme social, que repose la société dans laquelle nous vivons. Et, pour fonctionner, cette société et son système reproduisent et renforcent les biais et stéréotypes qui, à leur tour, encouragent les comportements souhaités dans ces rôles sociaux. Tout cela est nécessaire pour que le système fonctionne.

Évidemment, ça ne veut pas dire que les femmes n'ont pas de personnalité ou d'ambitions. Mais, aussi fortes soient leurs personnalités, elles sont toujours vues en fonction, en relation avec le rôle social de sexe qui leur est attribué. Celui de leader n'est pas inscrit dans cette construction sociale traditionnelle. Et elles négocient, tant bien que mal, avec ce carcan. Le double standard avec lequel nous jugeons les femmes politiques en est la preuve. Une femme qui affiche son leadership avec trop de véhémence ne sera pas vue de la même manière qu'un homme.

Donc, les femmes aussi vivent dans ce système et voient aussi la politique de la façon décrite plus haut. Pour y entrer, elles devront se mouler au rôle masculin, ce qui ne va pas de soi. Peuvent-elles s'identifier au rôle de père de famille?, à la joute oratoire sportive affichée dans les échanges entre parlementaires?, à la culture guerrière qui oppose les partis? La réponse est généralement non.

Viser les postes décisionnels, pour des femmes, c'est aller contre la tradition, contre le rôle social de sexe qui leur est attribué depuis toujours, marqué par l'effacement de soi, le peu d'espace occupé sur la scène politique. En politique, les femmes sont dans un contre-emploi.

Dans la revue scientifique Politique et sociétés, des chercheuses québécoises ont produit une synthèse des travaux portant sur les obstacles qui freinent les femmes vers l'engagement politique. Citant de nombreuses études, les chercheurs rappellent que la socialisation aux rôles féminins et masculins a un impact important sur les intentions des femmes de se lancer ou non en politique.

C'est peut-être ce qui explique une autre des conclusions de l'étude et qui porte sur l'autoévaluation des compétences par les femmes elles-mêmes. Les chercheuses rapportent une étude réalisée auprès de 88 étudiants du primaire, 81 du secondaire, 141 du niveau universitaire, 455 membres de la population générale. Selon les réponses, elles n'ont pas l'impression d'avoir les compétences nécessaires pour mener à bien une campagne électorale. L'équipe de chercheurs rapporte également une étude éclairante. Même des étudiantes en sciences politiques, en droit et en administration, qui doutaient déjà de leurs capacités à faire de la politique active, présentent les mêmes insécurités après leurs études.

L'un des plus grands freins : leur manque de... Le facteur compétence, le plus grand frein des femmes. Donc, entrer en politique ne va pas de soi. Elles doivent d'abord se donner de la crédibilité à elles-mêmes pour s'autorecruter. Puisque le système social dans lequel nous vivons discrimine les femmes par la socialisation, c'est donc à ce système de corriger le tir.

Bien sûr, tout ça prend du temps, mais, si nous pouvons comprendre le retard du secteur privé, il n'est plus possible pour la politique de se soustraire à cette obligation. L'exercice de la démocratie est un droit, et en priver les femmes à cause de traditions anciennes et dépassées est une atteinte à ce droit.

Cette culture doit changer. Et pour cela, c'est à la politique, à vous, de provoquer le changement. Trop peu de femmes se présentent dans les sphères politiques ou décisionnelles, et ça a des conséquences qui vont de l'inadéquation des Parlements et de la politique à la vie des femmes, à la vie familiale, jusqu'à la menace sur leur intégrité que peuvent vivre certaines femmes dans les lieux de pouvoir.

Ne pas prendre de mesure pour s'assurer que les femmes font partie de la vie politique et publique à parts égales avec les hommes reconduit une culture qui les exclut de l'exercice de la vie démocratique.

C'est l'une des raisons qui expliquent pourquoi les femmes elles-mêmes sont si réticentes aux mesures de correction pour faire augmenter leur nombre en politique. Selon elles, le quota — ou autre mesure contraignante — renforce l'idée qu'elles ne sont pas compétentes et qu'il faudrait contourner leurs compétences pour qu'elles entrent en politique.

Pourtant, plusieurs hommes incompétents se sont lancés en politique. Ça ne les a jamais empêchés de se présenter, d'être choisis par un parti et de se faire élire.

Cette conception que les femmes ont d'elles-mêmes est exactement une illustration de la socialisation des femmes dont je parlais, soit l'intériorisation de leur infériorité.

Force est de reconnaître que le système dans lequel nous vivons depuis toujours favorise les hommes en raison de la culture politique modelée par l'histoire et les traditions. On peut dire que, par défaut, les hommes bénéficient depuis toujours de quotas. Ils se choisissent entre eux, sont recrutés par des réseaux traditionnels, sélectionnés en fonction de leurs contacts, de leurs moyens financiers parfois. Ils maintiennent des mécanismes et des traditions qui les soutiennent. Pourtant, personne ne se pose de questions sur les compétences.

Pendant tout ce temps à pratiquer et à concevoir le pouvoir entre hommes, le système a défavorisé, voire laissé tomber les femmes.

Les partis sont les vecteurs de candidatures. Ce sont eux qui recrutent les candidates et candidats, mais ils ne sont toujours pas capables de suffisamment modifier leurs mécanismes pour faire élire plus de femmes. Un constat s'impose, ils ne changeront pas leurs façons de faire s'ils n'y sont pas obligés. Il faut donc que les institutions politiques — Assemblée nationale, partis politiques — s'obligent ouvertement à la parité femmes-hommes, qu'ils publicisent cette volonté, qu'ils la décrètent obligatoire, qu'ils légifèrent en la matière.

En termes de recommandation, cela veut dire : concevoir une loi sur la parité qui contraindrait tous les partis à présenter des listes paritaires de candidates et candidats; selon cette loi, les partis se verront refuser leurs listes si elles n'affichent pas la parité; inscrire dans la loi l'obligation de la parité au Conseil des ministres; dédier un financement au recrutement des femmes ; répertorier les meilleures pratiques en matière d'accès à la politique pour les femmes — binômes, députés substituts, vote à distance, visioconférence et usage des nouvelles technologies.

Élections 2018 : une mesure immédiate. S'il y a une seule mesure à adopter aujourd'hui pour attirer plus de femmes à se porter candidates pour l'élection de 2018, c'est celle-ci : s'engager à légiférer sur la parité pour le prochain mandat. Il y a fort à parier que cet engagement incitera les femmes à faire confiance au gouvernement qui réalisera cette loi. Elles se sentiront appelées à prendre part à la vie parlementaire. Faire une loi sur la parité obligera toute la classe politique, et les partis, ainsi que les institutions politiques à se mobiliser. Le message sera clair et portera ses fruits en 2018 et au fur et à mesure des prochaines élections.

En guise de conclusion, les changements proposés ci-haut visent à atteindre une parité femmes-hommes dans les instances politiques. Il est entendu qu'en 2018 ces changements doivent être faits dans une perspective inclusive et qu'il faut se soucier de donner à la politique les visages de la diversité qui composent la population québécoise. Comment y arriver ? Plusieurs outils ont été développés dans les milieux de travail, comme les programmes d'accès à l'égalité, qui, s'ils étaient dûment appliqués, donneraient des résultats. Peut-être pourrait-on s'en inspirer pour mettre sur pied un plan d'action visant une plus juste représentation politique. On pourrait aussi inscrire la diversité dans les listes de candidatures.

Quelle que soit la démarche qui sera entreprise, elle doit se développer en fonction de ces deux objectifs : plus de femmes, plus de diversité. Faudra-t-il se donner des cibles, des obligations de résultat ? La discrimination est systémique pour les femmes, dont celles que l'on dit issues de minorités et de la diversité. Un projet de parité doit concevoir ces deux réalités dans le même mouvement.

Comme pour les femmes, il faut aller chercher les membres des communautés où ils sont, dans les milieux communautaires ou scolaires. Il va de soi qu'on doit connaître ces milieux, s'intéresser aux différentes cultures pour être en mesure de recruter de futures politiciennes.

La parité ne peut pas être qu'une simple assimilation au modèle dominant. C'est souvent le principal reproche que l'on fait aux féministes paritaires, appuyer un modèle d'assimilation plutôt que de transformation. Cette critique est juste. S'il s'agit d'avoir 125 députés qui se ressemblent tous, qui parleront le même langage, qui proviennent des mêmes milieux, nous ne serons pas plus avancés.

Aujourd'hui, c'est encore sur les femmes elles-mêmes, quelles que soient leurs origines, que repose le fardeau de l'intégration. Or un gouvernement et un Parlement qui constate un déficit de femmes députées doit se mobiliser pour trouver des solutions. À vous de prendre les devants.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme Navarro. Nous allons débuter la période d'échange, et je cède la parole à Mme la députée de Richmond.

• (11 h 50) •

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Navarro, de votre présence, merci de nous exposer votre point de vue personnel comme auteure et journaliste.

Vous terminez, vous concluez en disant : À vous de prendre les devants. C'est ce qui nous réunit d'ailleurs aujourd'hui, donc on est déjà dans l'action. Évidemment, on sait que la politique conjuguée au féminin comporte encore son lot d'obstacles ou encore de défis supplémentaires. Reste qu'on est déjà dans cette conscience sociale et dans cette volonté parlementaire aussi que les choses changent.

Dans ce mandat précis de commission parlementaire, on tente justement de venir briser les barrières des grandes théories qui viennent polariser les débats. Je pense qu'il faut aller davantage dans des mesures plus concrètes, dans des choses pour lesquelles on peut répondre directement à la population, à ces femmes, quand on les rencontre, qui nous disent qu'elles ont des freins, certes, qu'il y a des obstacles à leur venue en politique. Pour eux, ce n'est pas nécessairement les difficultés systémiques qu'ils vont nous nommer pour dire que, non, je ne veux pas me lancer, Karine, pour telle, telle, telle raison. Et c'est sur ce qu'il est intéressant pour nous aujourd'hui de parler.

Une chose qui m'intéresse énormément, c'est tout l'aspect de la socialisation des femmes, dont vous parlez. Certaines d'entre nous, les députées, sommes, je crois, de bons exemples, justement, parce que quelques-unes d'entre nous avons eu des parents aussi qui ont également vécu cette politique, et ça vient en quelque sorte démontrer, lorsque l'éducation fait en sorte qu'on prend davantage notre place ou qu'on nous démontre cette place que l'on peut avoir, justement, n'eut égard à ce sentiment de compétence ou autre, que cette place peut-être se prend de façon plus naturelle.

Mais j'aimerais vous entendre particulièrement, justement, sur la socialisation des femmes. Quand vous nommez la formation différenciée selon les sexes qui mène, certes, à des stéréotypes, comment, cette partie-là, on peut agir là-dessus? Donc là, on s'entend que ce n'est pas nécessairement seulement sur la place des femmes en politique, mais comment vous voyez cette socialisation selon les genres? Comment on peut peut-être aider à faire améliorer les choses?

Mme Navarro (Pascale) : Est-ce que vous voulez dire pour vous... ce que vous, vous pouvez faire, les parlementaires ou socialement?

Mme Vallières : Socialement.

Mme Navarro (Pascale) : Bien, socialement, je pense que les femmes, les groupes de femmes et surtout ces deux, trois dernières années, il y a comme une accélération des discours sur la socialisation différenciée, donc il faut être à l'écoute et puis il faut ne pas se taire aussi, continuer à parler et dire ouvertement les choses comme elles sont.

Puis en plus, pour les femmes politiques, vous parlez de modèles, et je trouve que vous avez raison d'évoquer ça parce que, quand des femmes politiques prennent la parole, et qu'elles disent les choses sans mâcher leurs mots, et qu'elles disent la vérité, qu'elles sont transparentes, c'est un énorme message que vous lancez aux autres femmes. Donc, ça, c'est vraiment un premier pas très important.

Mais pour la socialisation, je vous dirais que... il me semble que je passe tellement de temps là-dedans que je ne sais plus trop comment vous dire des mesures concrètes aujourd'hui, mais certainement d'en parler vous-mêmes. Si des femmes qui ont la parole comme vous ne le font pas, qui va le faire? Donc, les femmes du public, les femmes du Québec s'attendent à ce que vous parliez, à ce que vous disiez les vraies choses. Moi, je pense qu'il faut commencer par là. On vous élit et on s'attend à ce que les femmes parlent pour les autres femmes aussi.

Et une des raisons pour laquelle la parité est importante, c'est parce que toutes les femmes n'ont pas cette capacité ou cette envie de se prononcer sur des sujets féminins, féministes ou égalitaires. Donc, il faut que, dans le spectre de toutes ces femmes qui sont là, il y en ait quelques-unes qui soient plus féministes que d'autres. Parce que les femmes ont aussi le droit de ne pas vouloir le faire, et je considère qu'on n'a pas à exiger sine qua non qu'elles s'expriment au nom des autres femmes. On doit laisser tout le spectre des orientations politiques s'exprimer.

Donc, c'est pour ça qu'il faut une parité, il faut absolument que cette voix-là soit entendue. Ce qui a fait la force des femmes québécoises et la force des politiques publiques du Québec, c'est parce qu'il y avait un lien entre le mouvement des femmes, le féminisme, qui appuyait sur les transmetteuses, si vous voulez, qui elles appuyaient sur les politiciennes. Et c'est comme ça que ça avance. Donc, il ne faut pas se déconnecter de la population et des femmes.

Mme Vallières : Merci. Et il y a une chose par contre, je pense, qui est très importante, je le répète souvent, pour moi, la place des femmes dans la société et en politique aussi, ce n'est pas que l'affaire des femmes non plus. Il faut que les hommes soient inclus dans cette démarche, surtout parce que ce n'est pas de prendre la place de quelqu'un d'autre, hein, c'est important de toujours le mentionner, mais on parle de représentativité, donc c'est une place qui revient tout simplement. C'est sûr que, dans le milieu électif, c'est autre chose parce que le choix revient aux électeurs éventuellement.

Mais vous parliez de modèle, par contre, dans des mesures concrètes. Est-ce que vous pensez... puisque vous mentionnez que vous pensez qu'il y a un effet particulier lorsque les femmes prennent parole, lorsque les femmes se positionnent, est-ce que cette voix-là est suffisamment entendue? Est-ce que vous pensez qu'il y aurait avantage peut-être à ce qu'on soit davantage présentes?

Mme Navarro (Pascale) : Oui. Bien oui. Moi, je pense que, si vous vous réunissez, comme les femmes politiques au Québec l'ont fait pour d'autres enjeux, si vous vous réunissez sur ce thème et que vous en parlez ouvertement et publiquement, les gens vont vous écouter et vont vous appuyer et vos collègues aussi. Parce que vous parlez d'hommes, de femmes, mais, en fait, c'est l'institution qui doit endosser la valeur de parité et d'égalité. Ce n'est pas aux hommes individuellement, aux femmes individuellement, même si ça prend ça aussi, mais c'est l'institution qui doit défendre cette valeur-là. Parce que, demain matin, vous n'êtes plus là, ce sont d'autres personnes. Demain matin, M. Trudeau n'est plus là, c'est un autre premier ministre hyperconservateur, il n'y en aura plus, de parité au cabinet des ministres... au Conseil des ministres.

Il faut que ce soit inscrit dans les règles des institutions que nous croyons, comme province, comme État, que nous croyons à l'égalité, à la parité. La parité, c'est la transposition au Parlement de l'égalité. Nous, on a besoin de savoir qu'on peut compter sur vous, hommes et femmes, sur cette valeur qui est d'ailleurs inscrite dans nos chartes, dans nos lois et dans nos règles.

Mme Vallières : Vous ramenez le tout à un débat de législation. Je ramène le tout à un débat davantage de terrain. Est-ce que la présence des femmes dans chacune des circonscriptions, dans les organisations, soit comme modèle, soit comme mentor, est-ce qu'il peut y avoir un effet... Ou comment on peut aider davantage à se déployer dans chacune des régions, à la limite pour peut-être démystifier le rôle que l'on a, répondre aux questions directement aussi? Quand on le fait de façon individuelle, dans nos circonscriptions, je pense que ça vient aider énormément la perception que les gens ont à notre égard, mais non seulement comme femme, mais comme parlementaire en général. Quel est votre point de vue là-dessus?

Mme Navarro (Pascale) : Bien, je pense que c'est une excellente idée de parler de ce sujet justement aux femmes qui sont dans vos régions. Et pourquoi ne pas organiser soit des 5 à 7 féministes, ou féminins, ou sur l'égalité, enfin, on peut être créatifs, ou un comité qui va pouvoir expliquer, expliciter aussi les enjeux de l'égalité dans la vie politique. Je pense que ça, c'est quelque chose que les femmes peuvent faire et les hommes. Ce serait bien, même, que ce soit des couples qui fassent ça.

Donc, je pense que c'est... En fait, ce qu'il faut, c'est formuler cet enjeu de façon concrète, justement, pour que les gens dans les régions, dans les circonscriptions puissent entendre ces propos. C'est certain que, si on parle toujours... Je comprends qu'il y a tous les enjeux économiques, c'est évident, là, on ne peut passer à côté. Mais tout ça peut se faire dans une vision égalitaire. C'est justement, si on parle d'enjeux économiques, pourquoi ne pas évoquer les conséquences que ça pourrait avoir sur la vie des femmes? Et pourquoi ne pas dire à ces femmes dans ces régions ou ces circonscriptions : Voilà ce que vous pourriez faire, la réflexion que vous pourriez amener, ou : Votre expérience pourrait servir à ça. Mais, il faut les connaître, les circonscriptions, il faut les connaître, les femmes de ce coin de pays.

Le Président (M. Picard) : Merci. M. le député de D'Arcy-McGee, il reste 3 minutes.

M. Birnbaum : 3 minutes. Merci, M. le Président. Mme Navarro, merci pour votre expertise et de nous faire part de votre longue expérience sur un dossier qui nous touche tous.

Écoutez, votre diagnostic et vos propos en ce qui a trait à un objectif parité est assez clair, mais je veux parler aussi des autres facteurs. Dans un premier temps, ça m'étonne un petit peu, avec respect, d'entendre que... je ne crois pas que c'est l'intention, mais de caractériser tous ces autres facteurs comme si on mettait le fardeau sur les femmes là-dessus. Je n'enlève pas notre responsabilité sur tous ces facteurs-là, on a essaimé les conditions pour avoir une espèce d'égalité de chances.

J'aimerais vous entendre sur le rôle spécifique de 50 % de la population, c'est-à-dire les hommes, à faciliter les conditions pour faire en sorte que le Québec peut bénéficier du talent de 100 % de la population. Ça, ce n'est pas une affaire uniquement de femmes. Est-ce que les hommes n'ont pas intérêt à 100 % à ce les obstacles soient démantelés pour qu'on puisse avoir la meilleure qualité de représentation de chacun, de 100 % de la population?

• (12 heures) •

Mme Navarro (Pascale) : Oui, bien sûr, absolument. Moi, je pense que c'est un enjeu pour tout le monde. C'est évident que ça avoir des répercussions sur la vie des hommes comme tous les... beaucoup des conséquences du mouvement des femmes a eu des changements positifs sur la vie des hommes. On n'a qu'à penser à la parentalité.

Mais pour en revenir à votre première remarque, c'est parce que c'est souvent une remarque qu'on entend, une réponse qu'on entend des hommes en politiques : Elles ne veulent pas se présenter, j'ai essayé, ça n'a pas marché. Ou même des femmes politiques, même plusieurs, qui sont... Enfin, même moi, je l'ai vu autour de moi. Et puis, donc, c'est souvent les femmes. Alors, on se dit : Bon, bien, elle n'est pas prête, elle ne veut pas, etc., elle a des hésitations. Mais, à un moment donné, il faut changer. Il faut aussi que l'autre partie du problème, de l'équation soit présente. Si on sent votre volonté de les intégrer, si on sent que... Vous dites que je parle de loi, ce n'est pas de la théorie, les lois, c'est quelque chose qui réglemente notre vie en société, et ça ne changera pas demain matin, mais c'est évident que, si on commence à légiférer, peut-être que, dans deux ou trois élections, on s'y retrouvera avec la parité — espérons moins que trois. Donc, c'est quelque chose de vraiment important, et votre rôle... Je vais vous donner un exemple qu'on m'a raconté il n'y a pas longtemps, une jeune femme d'un parti, qui venait d'avoir un enfant, voulait se présenter à la présidence, et elle s'est présentée, elle a gagné, et tous les mercredis, il y a des réunions, il faut qu'elle vienne à Québec. Donc, évidemment, elle, elle a un petit bébé, elle se dit : Est-ce que je pourrais... Elle essaie de trouver une façon de rester présente, puisqu'elle a été élue, mais elle se dit : Je ne peux pas laisser ma fille, j'ai une vie familiale, j'ai un rôle auprès d'elle. Alors, qu'est-ce qu'elle a fait? Elle a demandé de ne venir qu'une semaine sur deux. Ça a été accepté. Pourquoi est-ce que ce ne sont pas les hommes qui les consultent, les femmes, pour leur demander : Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour vous aider? Vous pouvez faire ça, vous avez des expériences, vous avez des femmes autour de vous, donc c'est possible que, vous aussi, vous ayez des suggestions.

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Navarro (Pascale) : Donc, c'est ça, l'histoire là-dedans, c'est qu'on attend toujours que les femmes — c'est ce que je veux dire par le fardeau de la preuve — elles se prononcent. Mais c'est une histoire d'équipe, ce n'est pas juste une histoire de femmes, la politique.

Le Président (M. Picard) : Merci.

Mme Navarro (Pascale) : Je vous en prie.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci, Mme Navarro, d'être avec nous aujourd'hui en commission parlementaire, merci pour tout le travail que vous faites aussi pour la place des femmes dans les lieux de pouvoir, en politique, particulièrement. J'ai eu l'occasion de lire certains de vos écrits, qui m'ont notamment beaucoup inspirée aussi à faire le saut puis à décider de me lancer en politique, donc je vous en remercie grandement.

J'aimerais vous amener sur les pistes de solution que vous amenez, les solutions très concrètes, d'ailleurs. J'ai certains questionnements, parce qu'on va essayer d'avoir des recommandations à la suite de ce mandat d'initiative, donc je veux un peu comprendre ce que vous entendez plus spécifiquement. Par exemple, vous parlez de dédier un financement au recrutement des femmes. On a certains groupes qui sont venus nous voir qui nous ont dit : Il faudrait qu'il y ait un... puis certains défendent des pénalités pour les partis qui n'arriveraient pas à atteindre la parité, d'autre proposent plutôt justement... en tout cas, je pense que c'est peut-être vers là que vous voyez les choses, mais plutôt des incitatifs financiers, par exemple, une bonification du financement public lorsqu'on atteint la parité. Est-ce que c'est vers là que vous souhaiteriez qu'on aille quand vous dites de dédier un financement au recrutement des femmes?

Mme Navarro (Pascale) : En fait, je pense que c'est aux partis aussi de voir comment ils pourraient... de faire leurs propositions. Mais ce qui est important, c'est que les femmes sachent... parce que c'est un des obstacles aussi, c'est de ne pas avoir les moyens financiers, parce qu'il faut penser à après aussi, donc elles n'ont pas nécessairement — si elles ont élevé une famille, ou quoi — n'ont pas nécessairement passé toutes ces années à ramasser ces sous-là puis ne se sont pas projetées. Mais, si on a une espèce de cagnotte ou une espèce de fonds qui est prévu pour ça, bien, ça peut aider les femmes. Je pense que Valérie Plante en a bénéficié avec Projet Montréal, puis ça a donné les résultats qu'on a vus, mais il y a d'autres femmes aussi qui en ont profité. Donc, ça pourrait être une idée.

Mais il y a plusieurs solutions. Hier, il y avait, dans les présentations, plusieurs options. Je pense que c'est à vous et au Directeur général des élections de prendre le temps de voir qu'est-ce qui pourrait être fait. Ce n'est pas nécessaire d'arriver demain matin avec la solution. Moi, ce que je dis, c'est qu'il y a une partie de l'argent public, puisqu'on sait que c'est ce qui finance majoritairement les partis, qui doit être dédié au recrutement des femmes. Comment vous allez le faire, moi, je pense que vous êtes mieux placés que nous pour le savoir, enfin, que moi, en tout cas, mais je pense qu'il pourrait y avoir... soit que les partis participent à cette élaboration, mais il faudrait que de l'argent soit prévu pour aider les femmes, justement, qui n'ont pas les mêmes moyens que les hommes ou les mêmes réseaux que les hommes.

Mme Fournier : Donc, au fond, ce que vous vouliez plutôt dire, c'est de soutenir financièrement les femmes qui choisiraient de faire une campagne électorale, par exemple.

Mme Navarro (Pascale) : Il y aurait ça.

Mme Fournier : C'est ça que je comprends.

Mme Navarro (Pascale) : Il y aurait ça, oui. Mais il y aurait aussi que les partis pourraient utiliser ces fonds pour eux-mêmes, je ne sais pas, moi, se faire des comités pour passer du temps et se déplacer pour aller chercher des femmes aussi, pour connaître d'autres milieux. Parce que tout ça, c'est du temps, c'est d'aller voir, c'est de prendre connaissance et de découvrir. On ne peut pas tout connaître, on ne peut pas connaître tous les milieux non plus, mais il faut s'y attarder et prendre le temps de le faire.

Mme Fournier : Tout à fait. Puis, quand vous parlez de répertorier les meilleures pratiques en matière d'accès à la politique pour les femmes, vous parlez de binôme. Si vous vouliez m'éclairer... je ne sais pas ce que vous entendez par là.

Mme Navarro (Pascale) : Bien, c'est parce que, dans différents pays, il y a toutes sortes de... vous savez, le rapport du DGE dont on parlait hier, là, le fameux rapport de 2014, il fait vraiment le tour de tout ça, puis il y a toutes les explications, mais c'est, par exemple, de choisir... puis ça dépend des modes de scrutin. C'est évident que dans le mode de scrutin actuel, ce n'est pas nécessairement la meilleure solution, le binôme. Mais c'est juste pour ouvrir la boîte, un peu, pour se dire : Pensons à... soyons créatifs, essayons de voir s'il n'y a pas des façons de faire. Comme par exemple, le député substitut, ou le substitut, ou si vous votez pour quelqu'un, vous votez aussi pour son second ou sa seconde, ce qui fait que quand le ou la députée, là on parle des femmes, devra s'absenter pour des raisons x, comme la jeune femme dont je parlais tout à l'heure dans l'exemple que vous connaissez peut-être, bien, c'est quelqu'un d'autre qui prend sa place.

Donc, pourquoi ne pas faire ça? Est-ce qu'on est vraiment obligés de s'en tenir à des vieilles traditions parlementaires un peu usées? Souvent, quand on regarde comment la politique se déroule dans des pays d'Europe, comme en Allemagne, comme en Suisse, comme en Scandinavie, on est frappés par l'inventivité qu'ils ont déployée pour permettre à plus de monde différent d'exercer la politique. Et tout ce qui a trait au congé parental qui a été développé par les pays scandinaves a eu une énorme influence sur l'égalité, justement, en politique. Et aussi leurs mécanismes, leurs mesures qui sont très différentes des nôtres. Parce que nous, on est figés, on est un peu sclérosés dans notre façon de faire. À ce que je comprends, il y a toujours des : Ah! on ne peut pas faire ça, ça ne marche pas comme ça ici. Bien pourquoi? Est-ce qu'on va rester ici, dans ces mêmes salles, avec la même forme de tables, jusqu'à la fin de l'éternité? On peut changer. On peut décider de voir les choses autrement, mais pour ça, il faut la volonté.

Mme Fournier : Tout à fait. Vous avez 100 % raison, d'autant plus que lorsqu'un député, par exemple, démissionne, pour quelconque raison, le gouvernement a jusqu'à six mois pour appeler une élection partielle. Donc, il y a certains cas où il n'y a pas de député dans la circonscription pendant six mois.

Mme Navarro (Pascale) : Exactement.

Mme Fournier : Moi, ça a été mon cas lorsque l'ancien député de Marie-Victorin a démissionné. Le gouvernement a attendu exactement six mois avant de déclencher l'élection, ce qui a fait en sorte, au fond, que les gens de Marie-Victorin, les citoyens de Marie-Victorin n'avaient pas de député officiel. Par contre, dans ces temps-là, c'est souvent le whip du parti qui devient un peu le député parrain.

Alors, pourquoi ne pas utiliser la même méthode pour les congés, par exemple, parentaux, puis vraiment de venir préciser, au sein même des institutions parlementaires, que les élus ont le droit d'avoir un certain nombre de semaines, par exemple, en congé, et donc de ne pas faire culpabiliser les gens qui choisissent de le faire, parce qu'actuellement il y a vraiment un flou total sur la question. Ça n'existe nulle part. Donc, effectivement, je pense que vous avez 100 % raison là-dessus puis c'était justement... je voulais apporter ce point-là sur les députés substituts.

Vous parlez aussi des listes de candidatures, les listes paritaires. Donc, j'imagine que ça, vous le proposez dans une optique où on aurait un changement de mode de scrutin, parce qu'actuellement il n'y a pas de liste de candidatures...

Mme Navarro (Pascale) : Non. Ce que je propose, et ce à quoi on réfléchit, c'est que les partis proposent eux-mêmes, s'assurent de présenter la parité dans leurs candidatures. Donc, c'est-à-dire, un parti, aux élections, a, je ne sais pas, moi, 30 candidatures à proposer; qu'il s'arrange pour avoir la parité. Et, si la liste n'est pas paritaire, bien, il faut qu'il recommence ses devoirs. Puis on pourrait avoir des dates de dépôt qui pourraient s'échelonner un peu sur le temps, là, pour ne pas traumatiser tout le monde. Mais tu sais, on peut faire ça graduellement. On n'est pas obligés non plus de faire les choses du jour au lendemain, là. Il faut s'adapter à cette nouveauté. Mais ce qui est certain, c'est qu'il faut que l'objectif soit clair, sinon c'est un rejet. Ça se fait ailleurs aussi... oui, c'est ça.

Mme Fournier : Oui. Tout à fait, parce que, tu sais, je réfléchissais à l'applicabilité de la chose, puis souvent il y a des candidatures qui sont même annoncées au début de la campagne électorale, donc, à quel moment un parti pourrait décider, au fond, de déposer, si on veut, la liste des noms ou des profils de ses candidats. C'est un peu de cette façon-là que vous le voyez?

Mme Navarro (Pascale) : Oui.

Mme Fournier : Puis sinon, s'il n'atteint pas, il...

• (12 h 10) •

Mme Navarro (Pascale) : La liste est rejetée. Il faut qu'il recommence. Il faut qu'il trouve, il faut qu'il s'arrange. Mais évidemment, après, ce qui est certain, c'est que ça peut être compliqué, mais il faut travailler en amont. C'est évident. Mais c'est ça que ça force à faire, une loi, c'est à prendre des dispositions pour que les choses se passent, éventuellement.

Mais, pour répondre à Mme Vallières, et ça va un peu dans votre sens aussi, tout à l'heure on parlait du côté théorique d'une loi, ou du côté peut-être un peu trop lointain, mais pas du tout, c'est très concret. Vous savez pourquoi? Parce que, si vous faites une loi et que vous proposez... vous devez l'expliquer. Et, si vous mettez dans la loi que vous prévoyez une politique pour la... une politique pour les absences, enfin, pour le... en matière de famille, si vous présentez une politique en matière de harcèlement ou d'agression, si vous présentez une politique pour ci, pour ça, pour tous les enjeux féminins dans votre loi, c'est concret. Et, si, dans la présentation pendant la campagne électorale, vous parlez de ces enjeux-là, les gens vont écouter, vont entendre. Les femmes vont entendre que, tiens, eux, ils vont faire une loi... ils projettent une loi dans laquelle ils vont parler des politiques familiales pour les parlementaires ou pour le personnel politique.

Donc, il y a tout un attirail d'explications, de contenus pédagogiques dans une loi, on ne fait pas juste décréter une loi. Enfin, nous, quand on la reçoit...

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Navarro (Pascale) : ...ce n'est pas juste ça, il y a un attirail de contenu qui vient avec ça et qui explique pourquoi on la fait.

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Je n'ai pas beaucoup de minutes, mais je vais essayer de faire ça rapidement. Merci, Mme Navarro, pour votre présence ici.

Hier, c'est ressorti puis... Ma réflexion était... Parce que nous, le message est clair, le chef a été très clair, qu'il veut la parité des femmes au sein de ses représentantes... de ses candidates, mais surtout des candidates qui seront élues. Parce qu'il ne faut pas juste avoir des candidates, mais il faut s'assurer qu'elles sont dans les bons comtés pour avoir des candidates élues. Le fait d'avoir des élections à date fixe nous donne... nous permet d'avoir du temps, parce qu'on sait que, lorsqu'on approche une femme... Les femmes ont cette tendance à avoir un plus long délai de réflexion qu'un homme, donc c'est sûr qu'elles vont vouloir regarder comment qu'elles sont organisées dans leurs vies, avant de faire ce choix-là. Puis elles vont vouloir réfléchir avant de faire ce saut-là, qui est important. Et nous autres, on a des équipes qui se promènent partout actuellement dans des régions depuis plusieurs mois pour aller à la rencontre de ces femmes-là. Donc, déjà, sans avoir cette loi-là, il y a cette fameuse loi à date fixe qui nous permet d'avoir ce temps-là.

Puis je pense que tous les partis ont cette préoccupation-là. Sans avoir cette loi-là, je l'entends partout, que ce soit le gouvernement ou la première opposition... l'opposition officielle, excusez, que nous, le message est clair, en tout cas, nous autres, il est très clair. Puis, donc, l'effort se fait. C'est sûr que ça, ça nous aide.

L'autre question, dans votre document, quand je le lisais, j'avais l'impression que... Je ne sais pas si, ça, on peut dire que ça reflète la nouvelle génération. J'ai comme l'impression que les femmes les plus jeunes, qui sont très scolarisées, très impliquées, qui ont leur travail, oui, elles aiment la politique, ça les intéresse, mais, moi, pour avoir parlé avec plusieurs femmes dans la trentaine et début quarantaine, c'est comme si, même si elles ont un attrait, au moment de leur vie, où elles en sont rendues dans leurs carrières, ce n'est pas le moment. Pas rien que question d'enfants, parce qu'elles sont... Il y en a qui sont assez bien organisées, mais, parce qu'elles ont, c'est ça, un bureau ou une carrière, une entreprise qui fait en sorte que, même si elles voudraient, elles ne peuvent pas tout laisser ce sur quoi elles ont travaillé pour aller faire de la politique. Donc, elles reportent cette décision à plus tard, mais elles n'ont pas... Je n'entends pas le même discours que peut-être des femmes peut-être plus de ma génération, le discours de la compétence. Il y en a plusieurs qui savent ce qu'elles valent, elles sont capables de s'affirmer, elles sont capables de défendre leurs idées. Je ne sais pas si votre regard est... Quel est votre regard là-dessus, au niveau des différentes générations?

Mme Navarro (Pascale) : Bien, c'est certain que les... Bien, en fait, ça dépend. C'est certain que les jeunes ont une autre vision, parce qu'elles ont... elles sont d'une autre génération, évidemment, et... Mais moi, je pense que la vie de famille change quand même quelque chose ou... Mais ça ne veut pas dire que, parce qu'elles ne se présentent pas au moment où vous leur demandez, qu'elles ne vont pas se présenter un jour. Il faut quand même l'entretenir cette... Donc, moi... C'est parce qu'on s'attend... Des fois, j'ai l'impression qu'on s'attend à un changement radical, tu sais, on va demander à quelqu'un... Oui, bien sûr, les hommes n'hésitent pas, mais peut-être que certains devraient — ou réfléchir plus longtemps — mais ce que je veux dire par là, c'est que c'est correct de réfléchir, et peut-être que, dans cinq ans, il y en aura plus encore ou... Je veux dire, ce n'est pas... On ne peut pas s'attendre à un changement du tout au tout, mais ce qui est certain, c'est que ça s'inscrit dans un plus large désintérêt citoyen de la politique. C'est plutôt ça que je vois, moi, dans votre interprétation des choses, parce que les jeunes hommes, peut-être qu'ils pensent, eux, à ce qu'ils pourraient gagner, mais les jeunes femmes, elles ne trouvent pas que c'est un gain. Mais c'est aussi ça qu'il faut changer. Il faut que la vie parlementaire ou la vie politique soit plus intéressante, plus créative, plus... Je comprends bien, là, que j'arrive avec des mots qui peuvent un peu surprendre dans cet espace-là, mais, en même temps, c'est ça qui va intéresser le monde à la politique aussi, c'est que ce soit plus humanisé, plus... qui réponde plus à leurs besoins, à leur vie concrète. Des fois, on a l'impression qu'on est dans une bulle, en politique.

Mme Lavallée : Oui. Ça, je vous donne 100 % raison. Mais je pense que la réforme... Nous, ce qu'on propose, c'est la réforme du mode de scrutin, c'est sûr, et la réforme des institutions, parce qu'effectivement, moi, l'image, l'impression que j'ai depuis que je suis ici — c'est mon premier mandat — c'est que c'est vraiment sclérosé, là, c'est une autre époque qui ne reflète pas la réalité.

Mme Navarro (Pascale) : Exact.

Mme Lavallée : Donc, au-delà d'une loi, pour intéresser les femmes, c'est toute cette organisation-là qui fait que les plus jeunes ne se reconnaissent pas. Moi, je ne me reconnais pas là-dedans. Donc, il faut changer ça, là.

Mme Navarro (Pascale) : Bien, moi, je pense qu'une loi... Et, quand on dit «une loi», je ne sais pas ce qu'on a en tête, mais ça participe de ce changement. Écoutez, il y a plus de 100 pays dans le monde qui ont légiféré sur la parité. On est au Québec en 2018, bientôt, puis on n'a toujours pas réfléchi à ça. Ce sont encore des individus qui portent cette cause, ça devrait être le système qui la pose. D'abord, on serait au diapason. Puis, deuxièmement... Parce que beaucoup de gens me disent : Oui, mais tu as vu, ils ont la parité puis ils ne sont même pas égalitaires. Bien, justement, on est égalitaires, on devrait l'avoir. C'est inacceptable, ce retard. Enfin, c'est mon point de vue.

Mme Lavallée : Mais avez-vous l'impression... Parce que j'ai lu une partie du...

Le Président (M. Picard) : 30 secondes, Mme la députée, question, réponse.

Mme Lavallée : ...le livre de Stéphane Paquin — je vais vous le dire vite, mais, de toute façon, je pense que votre groupe va venir après — où lui, ce qu'il dit, c'est que dans les pays scandinaves, c'est le changement du mode de scrutin et le mouvement des femmes qui s'impliquent activement à pousser les femmes à aller vers la politique.

Mme Navarro (Pascale) : Les pays scandinaves ont quelque chose de très précieux que nous n'avons pas, c'est que ça fait 50 ans que les partis pratiquent l'égalité et la parité à l'intérieur des partis. Ça fait partie de leurs statuts, ce qui n'est pas le cas chez vous, à part Québec solidaire. Donc, ils n'ont pas besoin d'une loi sur la parité, les partis se l'imposent d'eux-mêmes.

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Navarro (Pascale) : Donc, évidemment, puisqu'ils ont la parité des candidatures, c'est évident qu'il y a plus de femmes élues.

Le Président (M. Picard) : Merci. Maintenant, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Trois minutes.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Merci, Mme Navarro, toujours aussi inspirante, et elle nous rappelle aussi à l'ordre. Je pense que, quand vous nous dites que maintenant la balle est dans notre camp, j'aime ça parce que je pense qu'ici, autour de la table, c'est pour ça qu'on est là aussi.

Je voulais peut-être, en trois minutes, d'une part, témoigner du défi. C'est vrai que depuis 12 ans, à Québec solidaire, ça fait partie de nos règles. Alors, nous, s'il n'y a pas de parité, bien, il n'y a pas de candidat dans la... On ne mettra pas plus d'hommes parce qu'il n'y a pas de femmes, on ne va pas mettre d'hommes dans ces postes-là de femmes. Alors, c'est une exigence. Et c'est de la job, c'est vrai que c'est de la job, beaucoup de travail.

Vous avez énoncé plusieurs éléments, dont notamment un élément dont vous n'avez pas fait état, c'est-à-dire que la dimension élective même des candidatures, hein... Parce que chez nous à Québec solidaire et ailleurs dans d'autres partis, c'est les associations locales qui déterminent, dans une investiture, quel candidat ou candidate va être choisi pour être leur représentant. Alors donc, quand il faut que tu coordonnes les 125, bien, ça me demande des gestes. Par exemple, nous, un des gestes... Parce que c'est le local qui détermine, mais on demande aux gens, sur une base régionale, de s'entendre puis de dire : O.K., là, nous autres, on a... Donc, le monde, ils sont obligés de se parler, les associations, et, oui, il y a des gars qui sont obligés de laisser leur place. Ça veut dire ça aussi, forcer, entre guillemets, une parité.

Mais, bref, je ne veux pas m'étendre plus longtemps, parce que pour moi vous avez mis... Vous avez dit : Il faut changer de paradigme. Il faut arrêter de mettre le focus sur les épaules des femmes ou sur les épaules individuelles et il faut reconnaître que c'est le système qui a une responsabilité là-dedans. Est-ce que vous ne croyez pas que c'est alors où on entend...

Le Président (M. Picard) : Il reste une minute, Mme la députée.

Mme Massé : ... — ah! simonaque — où on entend comment les programmes d'accès à l'égalité, c'est d'un autre siècle, on n'est plus rendus là, l'égalité, c'est atteint... Qu'est-ce qu'on fait avec ça, puisqu'il faut changer les paradigmes, puisqu'il faut reconnaître que la socialisation est différente pour une femme qu'un homme?

• (12 h 20) •

Mme Navarro (Pascale) : En fait, vous l'avez dit, quand vous avez le thème inscrit dans vos statuts, vous êtes obligés de changer vos façons de faire. Donc, tout le monde va changer ses façons de faire si on légifère. Après... en fait, tout le monde va essayer, tout le monde devrait le faire. Mais, encore une fois, il ne faut pas s'attendre à ce que les choses changent magiquement du jour au lendemain. Mais ce que je pense, c'est certain, c'est qu'il doit y avoir une réelle réflexion sur ce que c'est, un système, parce que j'ai l'impression, souvent, que... et vous êtes, hein, les médias, c'est la même chose, les journalistes ne comprennent pas ce que c'est, quand on leur dit, système, ils pensent systématique, ils ne comprennent pas que la vie dans laquelle ils vivent est faite de mécanismes qui se reproduisent. Que voulez-vous? C'est facile, puis on est dans la survie, on n'a pas le temps de penser toujours à la philosophie quand on vit, quand on est dans notre quotidien. Mais, quand on se donne des lignes de conduite, après, on commence à penser à des mécanismes qui pourraient les appuyer.

Donc, c'est pour ça que ça doit être institutionnel, pour que tout le monde participe à cette réflexion. Les programmes d'accès à l'égalité, on dit que c'est dépassé, mais ont-ils été appliqués comme il faut? Est-ce que quelqu'un a mesuré? Des fois, on lance des choses, mais on n'a pas de plan tout de suite...

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Navarro (Pascale) : ...et c'est ça qu'il faut qu'on fasse.

Le Président (M. Picard) : Merci beaucoup, Mme Navarro...

Mme Navarro (Pascale) : Je vous en prie.

Le Président (M. Picard) : ...pour votre apport aux travaux de la commission.

Et je suspends les travaux jusqu'à 13 h 30, où elle poursuivra son mandat.

(Suspension de la séance à 12 h 21)

(Reprise à 13 h 34)

Le Président (M. Picard) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques liées au mandat d'initiative portant sur la place des femmes en politique.

Cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : l'Union des municipalités du Québec, la Fédération québécoise des municipalités, Groupe Femmes, Politique et Démocratie, Citoyenneté Jeunesse et la chaire de recherche Claire-Bonenfant de l'Université Laval.

Puisque nous avons commencé avec trois minutes de retard, j'ai besoin d'un consentement pour terminer à 17 h 18. Consentement? Qui ne dit mot consent. C'est réglé.

Donc, nous débutons avec les représentants de l'Union des municipalités du Québec. Je vais vous demander dans un premier temps de vous présenter. Et vous disposez de 10 minutes. Vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Mme Laberge (Maude) : Bonjour, M. le Président, Mmes, MM. les députés. Au nom de l'Union des municipalités du Québec, je remercie les membres de la commission de m'entendre aujourd'hui sur la place des femmes en politique.

Je me présente. Je m'appelle Maude Laberge. Je suis mairesse de la municipalité de Sainte-Martine. Je suis aussi préfète de la MRC Beauharnois-Salaberry et je suis membre de la Commission Femmes et Gouvernance de l'UMQ. Je vous présente la personne qui m'accompagne, la précieuse Sylvie Pigeon, conseillère aux politiques à l'UMQ.

Au bénéfice des gens qui nous écoutent, j'aimerais, d'entrée de jeu, souligner que l'Union des municipalités du Québec représente depuis près de 100 ans les municipalités de toutes les tailles dans les régions du Québec. Sa mission est d'exercer à l'échelle nationale un leadership pour des gouvernements de proximité efficaces et autonomes et de valoriser le rôle des élus municipaux. Ses membres représentent plus de 80 % de la population et du territoire. Alors, depuis plusieurs années déjà, l'UMQ a hissé au rang de ses priorités la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, la valorisation du rôle des élus municipaux et l'atteinte de la parité au sein des conseils municipaux.

En 2004, l'UMQ a créé d'abord le Comité Femmes et Gouvernance, qui vient tout juste d'être hissé comme commission permanente à l'UMQ, regroupant, donc, des mairesses et des conseillères municipales. Son mandat est d'accroître le nombre de candidates aux élections municipales et aussi de favoriser une plus grande participation des femmes à la démocratie municipale.   

Plusieurs initiatives ont été mises en place par cette commission, entre autres, à chaque élection municipale, une vaste tournée de conférences organisées à travers le Québec pour démystifier le rôle des élus et encourager les femmes à faire le saut en politique municipale. Des projets ont également été mis de l'avant pour reconnaître la contribution des élues municipales à la démocratie et offrir aux femmes des modèles inspirants.

En 2013, l'UMQ a créé le prix Francine-Ruest-Jutras. Ce prix, nommé en l'honneur de la première femme présidente de l'UMQ, vise à reconnaître l'excellence et le leadership des femmes sur la scène politique municipale et de la gouvernance locale.

Comme je l'ai déjà mentionné, parmi les principaux objets de la Commission Femmes et Gouvernance, l'on retrouve celui d'augmenter le nombre de femmes en politique municipale. Cette année, une nouvelle campagne, intitulée Ça prend des femmes comme vous!, a été mise de l'avant dans le cadre des élections du 5 novembre dernier. Ce projet a reçu le soutien financier du Secrétariat à la condition féminine du gouvernement du Québec. Nous vous en sommes reconnaissants. Et on arrive avec des résultats électoraux encourageants, mais il est certain que nous sommes loin de la coupe aux lèvres.

Donc, voyons un peu le portrait statistique des élues municipales en ce moment. À la suite des dernières élections, la représentation féminine totale au sein des conseils municipaux a augmenté, mais un peu. Les femmes comptent maintenant plus de 32,3 % des élus, une hausse de 2,4 points de pourcentage par rapport à 2013. Aujourd'hui, 34,7 % des conseils municipaux sont composés de façon paritaire, c'est-à-dire dans la zone 40 % à 60 % de femmes. Pour la Commission Femmes et Gouvernance, c'est encore trop peu. Cette sous-représentation n'est toutefois pas l'apanage des municipalités seulement. La sous-représentation des femmes à des postes décisionnels est un enjeu dans tous les paliers, vous le savez.

Au plan municipal, on peut certes se réjouir que Montréal soit représentée par une femme pour la première fois, avec l'élection de Mme Valérie Plante. De plus, Longueuil et Saguenay ont également des femmes à leur tête. Pour la première fois dans l'histoire du Québec, trois des 10 grandes villes ont élu des femmes à la mairie. Ainsi, lors du dernier scrutin, il y a eu 18,8 % de femmes élues à titre de mairesses, comparativement à 17,3 %. C'est à peine 1,5 % et ça équivaut à 15 nouvelles mairesses au total au Québec.

Par ailleurs, il y a toujours trois fois plus de candidats que de candidates aux élections municipales. À ce rythme-là, il faudra assurément des décennies avant d'atteindre la parité en politique municipale québécoise.

Alors, justement, quel est le plan pour le milieu municipal québécois? On s'en doute, la clé de la parité sur la scène politique municipale se trouve en amont et en aval des élections municipales. S'il y a encore trop peu d'élues, c'est qu'il y a trop peu de candidates. Que faut-il faire pour que les femmes soient plus nombreuses à solliciter un poste représentatif? C'est maintenant que j'aimerais vous parler de l'analyse différenciée selon les sexes, communément appelée l'ADS.

• (13 h 40) •

La nouvelle stratégie d'égalité 2017‑2021 du Secrétariat à la condition féminine veut s'assurer que les politiques publiques sont pensées et développées pour diminuer les inégalités des sexes. L'un des outils pour y arriver est l'analyse différenciée des sexes. Cette approche consiste à s'assurer qu'un impact des lois, des politiques, des programmes et des services publics dans leur ensemble favorisent l'égalité entre les sexes ou n'y contrevient pas. La Commission Femmes et Gouvernance de l'UMQ utilisera l'ADS pour élaborer son plan d'action 2017‑2021. C'est une démarche exhaustive pour identifier les mesures les plus structurantes afin d'atteindre l'égalité réelle dans le milieu municipal.

Les enjeux maintenant. Voici les principaux enjeux liés à la problématique de la sous-représentation des femmes en politique et aux inégalités qui persistent.

D'abord, la culture des conseils municipaux. La culture politique actuelle déplaît à plusieurs femmes car le milieu municipal est perçu comme un espace de confrontation personnelle. La politique municipale est mal connue. Elle est aussi peu valorisée. Plusieurs conseils ne sont composés que d'une ou deux femmes, ce qui crée un sentiment d'isolement pour certaines d'entre elles.

Deuxièmement, la responsabilité familiale. Les enjeux de conciliation famille-travail freinent l'accès des femmes aux postes électifs. Bien que cela change tranquillement, les statistiques démontrent encore qu'elles assument davantage les tâches reliées à la sphère privée. Considérant la culture politique municipale, notamment les heures de rencontre, le nombre de représentations, il devient difficile pour elles de tout concilier. Mais cela s'applique toutefois aussi aux pères de la nouvelle génération, qui s'impliquent de plus en plus dans les tâches familiales et qui trouvent important de trouver un juste équilibre entre la famille et le travail, ce qui nous fait penser que, si on ne s'attaque pas aux enjeux de conciliation travail-famille, il y aura aussi un enjeu de relève au niveau des instances démocratiques.

Troisièmement, la situation économique. Les moyens financiers des femmes influent leurs choix professionnels et politiques. Comme les femmes sont moins fortunées que les hommes, et ça, ça se prouve encore statistiquement, cela peut être un obstacle, notamment dans les municipalités de plus petite taille, où les salaires des élus sont beaucoup moins élevés. Il est donc nécessaire de conserver son emploi tout en exerçant la fonction d'élu, ce qui rend la décision encore plus difficile pour une femme de se lancer en politique. On peut penser notamment à juste le fait de faire une campagne électorale avec un mois de sans solde. Pour une femme, ça peut être un obstacle.

Néanmoins, une volonté de changement se perçoit dans les instances de gouvernance locale. Plusieurs municipalités se sont dotées de mécanismes pour favoriser l'égalité entre les femmes et les hommes. Une vingtaine de municipalités ont adopté des politiques d'égalité. Plusieurs ont des politiques familiales. D'autres utilisent déjà l'ADS dans l'élaboration des politiques publiques et pour les budgets. Une dizaine de municipalités se sont dotées aussi de comités consultatifs femmes et villes. À Sainte-Martine, chez nous, par exemple, nous avons aussi adopté une procédure pour le tour de parole femmes-hommes. Toutes ces actions permettent de créer des environnements favorables à l'engagement des femmes.

En intégrant l'ADS à l'élaboration de son plan d'action, la Commission Femmes et Gouvernance de l'UMQ poursuit trois objectifs : d'abord, favoriser la compréhension des élues municipales et des élus municipaux aux impacts des stéréotypes sexuels dans la politique publique, mais aussi à l'égard du fonctionnement du conseil municipal; ensuite, de s'assurer que les investissements et les emplois municipaux soient favorables à l'égalité des femmes et des hommes; puis impulser la volonté de changement pour qu'elle se traduise en actions concrètes.

En conclusion, les femmes prennent de plus en plus leur place sur la scène politique municipale. Bien qu'elles soient encore trop peu nombreuses, elles contribuent néanmoins aux changements durables. Rappelons qu'au début des années 2000 aucune femme n'occupait le poste à la mairie d'une grande ville de 100 000 habitants. Aujourd'hui, trois des grandes villes ont élu une mairesse à leur tête. Elles permettront de rendre la politique municipale au féminin plus visible, et ça, c'est très important. La visibilité, l'effet des modèles et du nombre sont des éléments essentiels à la valorisation du rôle des élues municipales à l'atteinte de la parité.

Par ailleurs, il faut continuer à aplanir les obstacles et mettre en place des actions afin de faciliter la participation politique des femmes. L'adoption d'une modification à la Loi des élections et les référendums dans les municipalités est un bel exemple des gestes que l'on doit poser pour créer des environnements politiques favorables à la conciliation travail-famille. Cette modification permet à tout membre d'un conseil d'une municipalité de s'absenter des séances du conseil pour une période maximale de 18 semaines consécutives, si cette absence est attribuable à sa grossesse ou à la naissance d'un enfant, sans que son mandat prenne fin. C'est pratiquement une révolution.

Le Président (M. Picard) : ...s'il vous plaît.

Mme Laberge (Maude) : Oui. La commission des Femmes et Gouvernance de l'UMQ est animée d'une vision qui se dotera d'un plan d'action sur les quatre prochaines années et elle offre son entière collaboration aux membres de l'Assemblée nationale pour donner plein effet au droit à l'égalité des femmes, comme le prévoient nos constitutions et le droit international, et à répondre aux aspirations des femmes et des hommes pour une société plus égalitaire. Merci.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme Laberge. Nous allons débuter les interventions avec Mme la députée de Richmond.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Mme Laberge, Mme Pigeon, merci beaucoup de votre participation. Je sais à quel point ce sujet vous tient aussi énormément à coeur, alors c'est important que l'on puisse échanger ensemble.

Il y a toutes sortes de statistiques que l'on pourrait sortir. J'ai envie d'en nommer une ici. Suite à un sondage mené par Mme Richer de La Presse canadienne, on dit que 67 % des élues — donc c'est auprès des élues québécoises au provincial — croient qu'en 2017 il est toujours plus difficile pour une femme que pour un homme de faire carrière en politique.

Et, si vous le permettez, compte tenu que vous êtes une élue, j'aimerais... Je veux vraiment que vous vous sentiez à l'aise, là. On ne s'en est pas parlé avant. Donc, vous avez le droit de dire aussi que vous... dans son sens plus large, mais, si vous pouvez nous parler de votre expérience... Qu'est-ce qui a fait en sorte que vous avez décidé, vous, de vous lancer dans ce monde politique? Vous arrivez de quel milieu? Pourquoi cet intérêt pour la politique?

Mme Laberge (Maude) : Bien, je vais faire un lien avec tout ce qu'on fait à Femmes et Gouvernance de l'UMQ. C'est-à-dire que, pour devenir candidate à la mairie, ou comme conseillère municipale, ou, de votre côté, comme députée, il faut d'abord commencer dans son milieu de vie. C'est pour ça qu'on s'intéresse aussi à tout ce qui est donner l'envie aux femmes de prendre leur place dans l'espace public.

Donc, dans mon cas, j'étais impliquée dans plusieurs comités depuis le secondaire, je vous dirais, en étant présidente d'école, et tout ça. Donc, prendre la place à l'école est aussi important. Quand on fait des tournées dans les municipalités, quand on est mairesse, comme nous, puis qu'on fait, par exemple, des journées Élus d'un jour, on voit que les filles, quand on leur passe la parole, bien qu'elles sont au conseil étudiant de leur école, ne prennent pas spontanément encore la parole. C'est les garçons, assurément, qui prennent toujours le front.

Donc, la culture, on le voit bien, est... Tous les gestes, toutes les habitudes sociales, si on ne se met pas ensemble pour les changer, ça va être plus difficile. Ça ne veut pas dire que ce n'est pas possible puisque j'y suis, puisque vous y êtes, mais c'est sûr que c'est plus difficile pour une femme d'être en politique. Il y a beaucoup plus d'obstacles, et on a l'impression — et on nous donne l'impression — qu'il faut être deux fois plus bonnes que les autres, deux fois plus compétentes que les autres. Et ça, ça passe par des petits commentaires des fois en début de réunion, on en parlait tout à l'heure, un petit commentaire qui... Bon, en affichant les autres... Par exemple, moi, c'est la jeunesse. J'ai commencé je n'étais pas si jeune que ça. J'avais 32 ans, là, j'en ai 40. Et, à chaque fois que je rentre dans un nouveau comité, c'est l'image qu'on me projette. Donc, il me faut au moins la fin de la réunion avant que les gens me perçoivent avec ma compétence, et pourtant ça fait huit ans que je suis une élue municipale. Je ne suis pas une nouvelle élue.

Puis, pour revenir à votre question : Qu'est-ce qui nous amène à prendre notre place? En fait, c'est les expériences positives, c'est à force de s'intéresser à la sphère publique, c'est à force de représenter un groupe et de sentir que le groupe nous fait confiance et c'est tout l'aspect consultatif, je pense, qui touche davantage peut-être les femmes, en proportion, que les hommes. Et, à force de créer des expériences positives, bien, on les transmet de fois en fois et on finit par être plusieurs, plusieurs, plusieurs comités. Donc, avant d'être élue municipale à Sainte-Martine, bien, j'étais déjà sur trois comités municipaux.

Donc, c'est une autre façon, je pense, d'approcher les femmes, c'est de les valoriser, de les inviter à prendre la place dans les espaces publics, que ça soit au niveau local, régional ou provincial, pour s'habituer à prendre cette parole-là, pour s'habituer aussi à faire du réseautage, pour s'habituer à représenter un groupe. Et ça, c'est important de se mettre ensemble pour favoriser cette façon de changer la culture dans laquelle on est.

Mme Vallières : En ce sens, est-ce que... Vous parliez de mentorat ou de modèles, en fait, plus, que vous évoquiez. Quelles seraient les meilleures méthodes pour présenter ces modèles dans les différents milieux? Puisque vous êtes dans une région aussi, ce n'est pas la même chose que dans de grands milieux. La réalité est très différente pour nous. Comment vous le voyez, la façon de nous amener comme modèles, nous qui sommes là présentement? Ça serait quoi, la meilleure façon de faire?

• (13 h 50) •

Mme Laberge (Maude) : La meilleure? Je ne le sais pas. Mais je sais que ça fonctionne bien quand on fait des tournées dans les régions, quand on fait... Par exemple, ce qu'on a fait à l'UMQ, je sais que la FQM a fait le même genre d'expérience grâce au financement qu'on a eu du Secrétariat à la condition féminine. C'est-à-dire qu'on a un modèle quand on a déjà une élue qui parle, quand on a déjà une députée qui parle, quand on a déjà une représentante d'une chambre de commerce qui parle et qui vient expliquer quels sont les avantages à y être, les difficultés, puis comment cette personne-là, de façon individuelle, a réussi à trouver des moyens de faire face à ces obstacles-là. Je pense que ça parle beaucoup aux femmes. On a rencontré 800 personnes dans la dernière tournée. Dans ma région, on a eu au moins deux journées où on a parlé de... où, notamment, Mme Simon, qui est avec nous, est venue présenter son expérience. Et, à la suite de ça, il y a plusieurs femmes, c'est au moins une dizaine de femmes, qui ont soit confirmé ou qui ont pensé vraiment, de façon très active, à se présenter comme candidates aux élections actuelles. Donc, ça, on sait que ça fonctionne bien.

Je pense aussi financer les groupes de femmes qui sont sur le terrain, qui connaissent... qui ne sont pas dans le réseau, parce qu'on peut travailler avec les unions, que ce soit l'UMQ ou la FQM, mais on parle déjà des femmes qui sont proches déjà de... qui ont déjà un intérêt au niveau de la politique municipale. Mais, en amont de ça, il y a aussi des groupes de femmes qui sont sur le terrain depuis des décennies, qui sont proches d'un autre type de femmes, que ces femmes-là, elles ont d'autres types d'activité, et c'est aussi important d'aller les financer, je pense, ces groupes de femmes là, pour multiplier les agents de bonnes nouvelles, là, des agents multiplicateurs qui vont parler de cette parité-là et qui vont travailler finalement à l'«empowerment» des femmes dans leurs milieux respectifs.

Mme Vallières : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Picard) : Neuf minutes.

Mme Vallières : O.K., parfait, excellent. On a du temps.

Dans la conciliation travail-famille, vous le mettez comme un des enjeux particuliers qui pourrait enrayer certains obstacles, à tout le moins diminuer les freins un peu. Sur le plan municipal, parce qu'on n'a pas tant d'exemples, y a-tu des choses, soit dans votre municipalité ou encore dans les municipalités en général que vous représentez, qui sont des modèles de réussite, qui pourraient éventuellement être applicables à d'autres niveaux aussi?

Mme Laberge (Maude) : Oui. Changer les heures de réunion, souvent, c'est des... l'heure du souper, quand on concilie le travail-famille, que ça soit pour un homme ou pour une femme... Moi, je tiens à remettre ça toujours en perspective. Les 5 à 7, c'est très difficile. Donc, ne pas faire de réunion, éviter les 5 à 7 sur l'heure du souper, je pense que ça, c'est une mesure qui est importante, changer le calendrier municipal aussi pour tenir compte du calendrier scolaire. Chez nous, ça a été assez rapide quand il y a eu des nouveaux autour de la table, et ça venait de pères de famille qui voulaient vivre la semaine de relâche avec leurs enfants. Donc, on a, de façon systématique, changé le calendrier pour tenir compte de ces semaines de relâche là, les semaines de vacances, aussi les vacances de Noël. Donc, on a tout décalé en se disant que c'était favorable pour les membres du conseil, mais aussi pour les citoyens qui participent ou, en tout cas, qu'on souhaite qu'ils participent davantage aux séances municipales.

Je pense, c'est les trois éléments qui me viennent tout de suite.

Mme Vallières : Et, selon vous, ces changements d'horaire peuvent faire en sorte... Parce que, là, dans le milieu municipal, il y a une grande différence avec le milieu provincial ou fédéral, soit que vous êtes dans votre municipalité aussi. Donc, ce serait déjà un pas de fait dans la bonne direction. Sinon, je voulais aussi parler... Parce que vous évoquez, là, la culture, hein, l'affrontement que les femmes perçoivent, qu'elles ne veulent pas aller dans cette atmosphère de débat, de confrontation. Vous avez pourtant fait le saut, on l'a aussi fait. Comment, à votre niveau, vous pensez pouvoir agir aussi pour les femmes au municipal pour une modification de cette façon dont les gens perçoivent que l'on fait de la politique? Est-ce que vous pensez avoir une possibilité d'action là-dessus? Et/ou sinon — extension de la question — qu'est-ce que nous, on pourrait changer aussi, comme parlementaires au provincial, pour que les femmes aient moins un préjugé défavorable à cet égard?

Mme Laberge (Maude) : Je pense que ça vient en bonne partie avec le nombre de femmes qui va se multiplier, espérons-le, avec le temps. Il suffit d'une femme qui entre dans un conseil municipal pour changer la culture. Et c'était... Souvent... Il n'y a pas si longtemps... En tout cas, je peux parler de mon vécu. Quand je suis arrivée, j'étais la jeune, j'étais aussi la seule universitaire, j'étais aussi la seule femme du conseil. Donc, c'est sûr que ça a été difficile. Mais juste la présence d'une seule femme a fait changer des choses, a fait changer les horaires, a fait changer le besoin de répondre aux citoyens... qui sont plus grands. Donc, une femme, ça fonctionne, sauf que c'est épuisant d'être toute seule. Donc, c'est vraiment avec la force du nombre que ça change.

Est-ce que je réponds à la question? C'est difficile de parler de soi, vous savez. Je n'étais pas censée parler de...

Mme Vallières : Bien, ça rejoint un peu les propos de Mme Navarro, qu'on a vue juste avant, aussi. C'est qu'à un moment donné on place la femme dans un rôle de responsabilisation face à toute cette question, alors que pourtant... Elle mentionne qu'il faudrait que ce soit, à quelque part, le groupe aussi qui voit cette femme parmi eux dire : O.K., y a-tu quelque chose qu'on peut faire? Mais en même temps c'est de mettre aussi l'accent sur le fait qu'on est une femme, ce qu'on cherche à contrecarrer aussi. Ça fait que, tu sais, c'est, bon, par où on commence, là. Donc, je comprends très, très bien votre point de vue.

La valorisation du rôle des élues, j'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que, sur le plan municipal, vous sentez que les citoyens apprécient ce que vous faites ou si vous trouvez que le cynisme vient aussi entacher une partie de votre travail? Et comment vous voyez l'apport des femmes dans ce milieu, dans un changement possible? Et est-ce qu'on devrait davantage, justement, valoriser ce rôle d'élue municipale, que ce soient des conseillères ou des mairesses, évidemment, là?

Mme Laberge (Maude) : C'est sûr que le manque d'éthique et ce qui a été véhiculé massivement dans les médias, dans certains épisodes assez récents de l'histoire, a fait très mal à l'image qu'un politicien, que ce soit à n'importe quel niveau, mais, au niveau municipal, on le sent... La première perception des gens, c'est qu'on n'est pas là nécessairement pour les bonnes raisons. On a envie d'un pouvoir personnel. Il faut travailler fort pour regagner la confiance. Si on regarde au niveau local, chez nous, oui, le fait d'avoir un modèle jeune, féminin, a donné comme un peu plus d'espoir. Et je pense que la population est contente d'avoir... en fait, je suis certaine que la population est contente d'avoir des modèles comme ça pour redonner espoir et envie de participer à la chose municipale.

Donc, avoir plus de femmes en politique, je pense que ça fait partie des éléments pour contrer le cynisme ambiant, qui est très, très dangereux quand... Vous le savez, hein? On veut que les citoyens croient, en politique, parce que nous, on y croit aussi. Et, à partir du moment où il y a trop de cynisme, la place publique n'est pas remplie de gens qui veulent participer au changement. Donc, soit qu'on stagne, soit qu'on recule.

Donc, oui, je pense qu'on peut changer les choses, mais c'est encore avec — deux éléments que je veux dire — plus de femmes. Mais, pour y arriver, il faut arriver avec des mesures concrètes. Est-ce que c'est une loi-cadre pour la parité au niveau provincial, qui se répercute, qui descend après aux différents niveaux? J'ai du mal à m'avancer parce que l'UMQ ne s'est pas positionnée sur différents éléments très précis, là. Et je sais que la question des quotas, nous, on ne peut pas nommer ce genre d'élément là parce qu'on n'a pas le mandat de le faire ou non, là. Mais il faut arriver avec des éléments concrets qui font en sorte qu'on va être capables de changer éventuellement la culture.

Ici, au Parlement, j'ai visité avec mon député... je pense, c'est la chambre rouge. Là, il y a un magnifique tableau où c'est le début de la Nouvelle-France, et on voit bien, hein, c'était quatre ou six hommes, je pense... c'est quatre hommes qui prenaient les décisions avec une poignée de conseillers. Mais c'est de là qu'on part. Et ce tableau-là s'inscrit aussi dans une histoire qui est encore plus grande. Ça fait que c'est plusieurs centaines d'années qu'on essaie de changer. Et, si on n'arrive pas avec des mesures concrètes, donc probablement par des politiques, on ne pourra pas atteindre cette parité-là, ça, c'est certain, dans un horizon intéressant. Et voilà. Puis on risque peut-être même de perdre parce qu'il y a une montée de conservatisme un peu partout en Occident. La place des femmes, on le voit dans des pays démocratiques, est remise parfois en question. Si on n'arrive pas avec des modèles encadrants, on n'y arrivera pas, ça, c'est certain.

• (14 heures) •

Le Président (M. Picard) : Une minute.

Mme Vallières : Oh! en terminant, vous avez effleuré rapidement le sujet des médias. Est-ce que, dans ce que vous avez par rapport aux membres de votre organisation, la... est-ce que vous croyez que les médias ont un traitement différent, envers les femmes élues, qu'elles pourraient l'avoir envers des collègues masculins?

Mme Laberge (Maude) : Je ne peux pas répondre pour le nom de l'UMQ, d'autant plus qu'il y a une étude qui est en train de se faire par le groupe, qu'il y a... Tu connais-tu? Non?

Mme Pigeon (Sylvie) : ...

Mme Laberge (Maude) : Bien, en tout cas...

Mme Pigeon (Sylvie) : Oui, avec une chercheuse de l'UQTR, l'Université québécoise à Trois-Rivières, sur la perception des femmes dans les médias. On devrait avoir des résultats dans les prochains mois là-dessus. Ils vont faire vraiment une étude exhaustive, particulièrement sur les femmes en politique municipale, donc, le traitement médiatique avant la campagne électorale, mais aussi une portion après la campagne électorale, selon les résultats. Donc, on va avoir les résultats dans les prochains mois, on pourra vous en reparler.

Mme Vallières : Merci.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme Pigeon. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci, Mme Pigeon, Mme Laberge, pour votre présentation et votre cri du coeur, même, je dirais. Parce que c'est vraiment inspirant de pouvoir vous entendre. Je pense que le sujet qu'on aborde aujourd'hui est extrêmement important, et donc on vous remercie de contribuer à nos travaux.

Si on fait le bilan des dernières élections municipales, vous en parlez évidemment, là, dans votre mémoire, oui, on constate certains progrès, notamment parce qu'il y a des femmes qui occupent des postes, donc, de mairesses de villes parmi les plus importantes au Québec, là, vous dites : Trois villes sur 10 des plus grandes villes. Moi, je suis députée de Marie-Victorin, à Longueuil, et on avait même la chance d'avoir trois candidates à la mairie, donc c'était 100 % féminin. Donc, on a une mairesse. Puis on avait une mairesse, aussi, sortante. Les quatre circonscriptions de Longueuil sont représentées par des femmes. Donc, bref, chez nous, ça va bien.

Mais, quand on constate à la grandeur du Québec, c'est un peu plus préoccupant, dans le sens qu'on a quand même juste augmenté d'un point de pourcentage pour le nombre total de mairesses, on est passés de 17 % à18 %. C'est franchement bien peu, puis on ne peut pas appeler ça un progrès. Puis c'est vraiment préoccupant de voir que ce n'est même pas un cinquième des mairesses qui sont à la tête des municipalités, donc c'est vraiment préoccupant.

Puis je me demandais : Est-ce qu'il y avait eu une opération qui avait été faite, avant les élections municipales, pour essayer justement de recruter davantage de candidatures féminines? Et, si oui, quelle forme ça a pris?

Mme Laberge (Maude) : À l'UMQ, on a fait les tournées, comme je vous ai dit, La FQM aussi a fait des tournées, et je pense que ça a eu un impact positif sur le nombre de candidates. Mais, comme on disait dans notre mémoire, c'est encore trois fois plus de candidats que de candidates.

Un élément que j'aimerais soulever, peut-être, vous me donnez la chance en ce moment, c'est vrai que, dans les grandes villes, on a la chance maintenant d'avoir au moins trois mairesses sur les 10 plus grandes municipalités. C'est vrai que, dans les villes, il y a des partis politiques, et donc la représentation, pour la plupart du temps, on voit des femmes dans chaque parti politique, sauf exception. Mais ce n'est pas toujours le cas. En tout cas, il y a une grande disparité entre les centres urbains et les municipalités en périphérie ou les petites municipalités, où les partis politiques ne sont pas courants. Donc, ça, c'est un élément à réfléchir.

Je n'ai pas de pistes de solution, mais assurément, le fait d'avoir un parti politique, pour l'enjeu de la parité, c'est favorable aux femmes. Alors que, quand on est dans une municipalité où tous les candidats sont indépendants, soit que la candidate ou la potentielle candidate ne se sent pas soutenue, elle se sent seule pour affronter la campagne électorale et la suite des choses, ça, ça peut être un élément, ou en fait ce n'est pas organisé, donc c'est ceux qui veulent y aller. Donc, si c'est 14 hommes qui veulent y aller, bien, il n'y aura pas de candidate dans cette municipalité-là.

Donc, les partis politiques, je pense que ça peut être favorable pour cet élément-là, et il faudrait faire de la sensibilisation dans les milieux où ça n'existe pas encore ou, en tout cas, je ne veux pas prendre... et dire qu'il faut des partis politiques partout, mais il faut que la place des femmes soit réfléchie dans les municipalités où les partis politiques ne sont pas présents.

Mme Fournier : C'est un aspect extrêmement intéressant que vous nous amenez. C'est vrai qu'on n'y avait peut-être pas pensé, si on ne vit pas cette réalité-là, mais c'est certain que les partis politiques offrent un encadrement aux candidats et aux candidates, qui peuvent justement rassurer certaines personnes à faire le saut. Donc, peut-être, au-delà même de la question des partis politiques, est-ce qu'on ne pourrait pas mieux encadrer, justement, les femmes qui souhaitent faire le saut? Je pense que c'est une bonne réflexion à avoir, puis je suis certaine que vous allez pouvoir en discuter à l'UMQ, et on va certainement suivre ça de près.

Je me demandais, justement, dans les tournées que vous avez faites, quelle forme exactement est-ce que ça prenait. Puis est-ce que vous avez fait un bilan de ces tournées-là? Et quels ont été, par exemple, les meilleurs coups ou les moins bons?

Mme Laberge (Maude) : ...Mme Pigeon va répondre à ça, elle a le bilan de partout au Québec.

Mme Fournier : Super. O.K.

Mme Pigeon (Sylvie) : Donc, notre tournée — ça prend des femmes comme vous! — on avait une équipe de six ambassadrices, donc, des anciennes élues municipales, entre autres Francine Ruest-Jutras, l'ancienne mairesse de Drummondville; Colette Roy Laroche, l'ancienne mairesse de Lac-Mégantic; l'ancienne mairesse de Lévis, Mme Roy Marinelli; une jeune aussi, ex-conseillère municipale de Châteauguay, Esther Salomon; on avait aussi Suzanne Roy, qui est encore, là, mairesse de Sainte-Julie; et Nicole Appleby, l'ex-mairesse de New Richmond, en Gaspésie. Et on a beaucoup collaboré aussi avec les groupes sur le terrain, les groupes de femmes, un petit peu partout, qu'il y a au Québec, donc, pour organiser vraiment des conférences avec ces six ambassadrices-là dans à peu près toutes les régions du Québec.

Donc, les ambassadrices ont sillonné, là... puis on a eu vraiment... On prévoyait un certain nombre de conférences, au début, et, selon la demande, on a dû augmenter le nombre de conférences parce que... Comme la mairesse de Sainte-Martine le disait tout à l'heure, l'importance d'avoir des modèles pour les femmes, donc des élues, des ex-élues qui ont travaillé de nombreuses années sur le terrain, qui ont pu faire part justement de leur expérience, ce qui a bien marché, ce qui était plus difficile, d'expliquer comment ça fonctionne aussi, qu'est-ce qu'on fait, qu'est-ce que ça fait, une mairesse au quotidien, les décisions qu'elle doit prendre, les situations qu'elle vit, je pense que ça, c'est inspirant pour les femmes, de voir vraiment quelqu'un qui a fait ce travail-là et qui peut dire : Bien oui, vous êtes capables, vous aussi, de faire ça, ça ne prend pas 10 000 diplômes, ça ne prend pas des compétences à ne plus finir. Souvent, c'est un manque de confiance qu'il y a chez les femmes, comparativement aux hommes, donc d'avoir vraiment des modèles inspirants, puis... c'est ça, avec des femmes qui sont allées à la rencontre des femmes sur le terrain en collaboration avec des groupes qui oeuvrent, c'est ça, là, sur le terrain, je pense que c'est ça qui a été la clé du succès.

Puis au total, là, on a 800 personnes qui ont participé à notre tournée de conférences, là, dans l'année, là, qui a... c'est ça, là, qui a précédé les élections.

Mme Fournier : Eh, wow! 800 personnes! Puis est-ce qu'on sait... est-ce qu'on a les statistiques de combien de ces 800 personnes ont décidé de se porter candidates?

Mme Pigeon (Sylvie) : Ça, c'est plus difficile à établir. On est en train... mais on a quand même quelques expériences de femmes qui ont participé à... les conférences, et c'est ce qui a fait en sorte que ça leur a donné le petit... ça a fait le déclic et qu'elles ont décidé de se lancer, là, en politique municipale. Mais on essaie de compiler ces chiffres-là, là, oui. Entre autres, la nouvelle mairesse de Contrecoeur, quand elle a vu notre campagne — on avait aussi un volet de capsules vidéo sur les médias sociaux — elle a dit : Quand j'ai vu la campagne de l'UMQ, bien, ça m'a... Elle y pensait déjà, mais ça a été le petit coup de pouce de plus pour prendre sa décision.

Mme Fournier : C'est un beau succès. Puis peut-être que, même si les femmes n'ont pas nécessairement décidé de se présenter à cette élection-ci, parce qu'on sait que des fois on chemine plus longuement...

Mme Pigeon (Sylvie) : Oui, ça peut prendre plusieurs années avant de...

Mme Fournier : Donc, peut-être que vous allez voir les résultats, effectivement, à la prochaine élection. Donc, je pense que c'est des belles initiatives qu'on pourrait aussi faire, notamment ici, au niveau de l'Assemblée nationale.

Il y a bien sûr aussi eu la loi, l'année dernière, qui a été adoptée pour le congé parental pour les élus municipaux. Puis je me demandais : Ça, au niveau du recrutement, par exemple, des jeunes femmes en politique municipale, est-ce que vous avez senti sur le terrain que ça pouvait avoir une incidence, que ça facilitait les choses?

Parce que, si je prends notre exemple ici, à l'Assemblée nationale... puis moi, bon, c'est sûr, j'ai 25 ans, donc, quand j'ai décidé de me porter candidate, c'est sûr que c'est un aspect auquel j'ai réfléchi. Je ne veux pas des enfants maintenant, mais un jour je vais en vouloir puis je ne sais pas si, à ce moment-là, je vais être encore ici, à l'Assemblée nationale. Mais c'est certain que, pour les jeunes femmes, je pense que c'est une considération.

Puis nous, par exemple, ici, il y a un peu un flou artistique sur la question des congés parentaux. Ce n'est pas écrit nulle part, dans les lois parlementaires, là, si on a le droit à un congé parental, puis, si oui, quelle forme il prend. Donc, je trouve ça intéressant qu'on ait pu le faire, que c'est ma collègue Carole Poirier qui a déposé le projet de loi et que maintenant, justement, ce soit inscrit que les élus municipaux peuvent bénéficier d'un congé de 18 semaines. Alors, je me demande si ça a pu avoir un impact positif sur le recrutement des jeunes femmes au niveau municipal.

• (14 h 10) •

Mme Laberge (Maude) : C'est certain que oui. On n'a pas de statistique là-dessus, je pense, mais...

Mme Pigeon (Sylvie) : Mais je sais qu'à Montréal il y a trois conseillères qui ont été élues alors qu'elles ont une grossesse bien entamée. Je ne sais pas si ça a joué, mais on a des exemples concrets.

Mme Laberge (Maude) : Bien, c'est sûr que ça joue parce que, forcément, surtout dans une grande ville où l'horaire du temps est intense, où, comme députée, c'est certain, le fait de s'engager pour les quatre prochaines années, puis tu es rendue en âge où tu as envie de fonder une famille, ça veut dire que tu reportes... Avant le congé de maternité qui est proposé là, maintenant, tu reportais ta décision ou c'était un accident — un accident entre guillemets, là, je veux... — puis il fallait vivre avec le fait que finalement tu continues à travailler tout le temps. Ça fait que c'est certain que c'est un incitatif. Tout à l'heure, j'ai parlé de petite révolution. Moi, je pense que c'est le cas.

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Laberge (Maude) : Parfait. Mais il faut continuer à travailler des initiatives qui vont changer dans ce sens-là la conciliation travail-famille pour tous.

Le Président (M. Picard) : Merci. Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Merci et félicitations pour votre titre de mairesse! C'est toujours agréable d'avoir aussi la nouvelle génération, des jeunes femmes qui font le saut en politique parce que vous êtes inspirantes aussi pour d'autres qui voudraient faire ce saut-là.

Tout à l'heure... je vais relancer un peu ma collègue, parce que dans le comté où je suis, on est dans Repentigny, région métropolitaine de Montréal, c'est la première fois qu'on a des femmes aux trois niveaux politiques, donc tant au municipal, provincial et fédéral. Ça ne s'était pas vu dans mon coin, donc on est assez fiers de ça.

Moi, ce qui m'a frappée, dans votre document, c'est effectivement le rôle du comité des femmes et gouvernance. Et ce que je trouve intéressant du travail qui est fait par ce comité-là, c'est le fait que vous fassiez le tour des régions, de différentes communautés pour aller sensibiliser les femmes à se lancer en politique.

Puis moi, je pense qu'il n'y a rien de tel que d'avoir des modèles, des femmes qui viennent nous parler pour des fois juste nous donner le petit coup de pouce pour faire ce saut en politique là. Puis je pense que le rôle des femmes, des groupes de femmes est majeur dans le changement qui pourrait venir dans les années à venir. Puis ce que je peux constater, c'est que ça marche chez vous, là.

Mme Laberge (Maude) : Tout à fait. Je vais réitérer le fait que... tout ce que j'ai dit tout à l'heure. La tournée, je sais qu'il y a plusieurs candidates qui y pensaient ou ils ont confirmé, juste dans notre MRC, là, ou avoisinant. C'est clair que ça change. Juste le fait de se faire réconforter, des fois, c'est une idée qu'on trotte, mais souvent ce qu'on dit, là, quand... Je pense que Mme Navarro a dû vous en parler, mais les femmes, on a besoin de se le faire demander peut-être une fois, deux fois, trois fois. Il faut que ça soit souvent le milieu qui le demande, contrairement peut-être à un homme qui dit : Bien, moi, j'ai envie de ça, et il y va, ce n'est pas forcément le milieu. Donc, des initiatives comme celles-là vont renforcer ce besoin-là peut-être des femmes d'aller rencontrer en vrai quelqu'un qui a réussi.

Et c'est intéressant, ce qui avait été dit tantôt, ça ne veut pas dire non plus que cette tournée-là... peut-être que ça a touché, dans mon coin, une dizaine de personnes, ça ne veut pas dire que ça n'a pas touché, pour la prochaine élection encore, une autre dizaine de personnes, une autre dizaine de femmes qui ont commencé à mûrir.

Je peux donner un exemple. L'UMQ avait fait, il y a quelques années, ce genre de tournée là pour les jeunes élues. Et moi, avant de... j'avais 32 ans, je vous l'ai dit, là, quand j'ai été conseillère municipale pour la première fois, mais l'année qui a précédé, quand j'ai vu cette tournée-là, je le sais que ça a joué, ça, il y a eu un incitatif, là, qui a dit : Bon, bien, c'est bon, tu sais, ça peut être aussi pour moi. Donc, il faut les encourager. L'UMQ va continuer à le faire. Je présume que... en fait, je suis à peu près certaine que la FQM va continuer à le faire.

Mais il faut aussi élargir, aussi, le cercle, dans les comités femmes un peu partout au Québec, pour aller chercher des gens qui sont peut-être juste un petit peu plus loin de la sphère publique, pour nourrir sur plusieurs années l'«empowerment» des femmes qui ont envie de prendre leurs places en politique active mais aussi sur la place publique. C'est aussi faire de la politique qui va changer la culture et qui va changer les paradigmes dans lesquels nous évoluons.

Mme Lavallée : Oui. Ça aussi, ça m'a accrochée, le fait que vous aviez rencontré... dans le fond, 800 personnes qui ont participé à cette tournée-là. Puis je trouverais ça vraiment intéressant qu'à chaque fois que vous faites les tournées que vous reveniez, vous gardiez les coordonnées de ces femmes-là pour justement évaluer l'impact puis est-ce que... il y en a combien, de ces personnes-là, qui se présentent aux prochaines élections et à l'autre après, pour voir ce résultat-là.

Parce que moi, je pense qu'une des solutions vient vraiment de ce travail-là qui est fait de terrain. Parce qu'il n'y a rien de tel que de parler aux femmes directement pour effectivement les rassurer, puis je pense que vous êtes inspirantes, vous êtes la preuve que ça se fait. Des fois, c'est des petites... des peurs qu'on a, mais, en voyant les femmes comme vous, comme d'autres ici, fait en sorte que ça a un impact positif assurément. Mais je trouverais ça intéressant que vous fassiez le suivi parce que je pense que ça peut nous aider à trouver des réponses au problème de la présence des femmes en politique à un plus grand nombre.

Avez-vous déjà... parce que, là, vous vous êtes lancée an municipal, mais avez-vous pensé aller à un autre niveau politique, comme au provincial ou au fédéral?

Mme Laberge (Maude) : Non.

Mme Lavallée : Jamais?

Mme Laberge (Maude) : Pas pour le moment, en tout cas. Non, je suis heureuse au niveau local et régional en ce moment.

Mme Lavallée : C'est par manque d'intérêt ou parce qu'il y a des obstacles que vous trouvez puis...

Mme Laberge (Maude) : Non. Bien non, en fait, parce qu'on est pris... C'est tellement intense, le travail, de toute façon, de terrain. C'est le contact direct avec les citoyens, c'est changer la qualité de vie directement, c'est le fait de ne pas être dans un parti politique, aussi. C'est sûr que c'est partisan, une fois rendu au provincial, donc ça demande d'autres enjeux. Donc, si vous me questionnez, moi, en tant qu'individu, pour l'instant, non, ce n'est pas...

Mme Lavallée : Ce n'est pas du recrutement, là, hein? C'est juste pour...

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Lavallée : Ça a l'air de ça, mais ce n'est pas ça. Mais c'était pour voir si vous aviez pensé, s'il y avait comme d'autres obstacles que vous voyez...

Mme Laberge (Maude) : Mais je comprends le sens de... Oui.

Mme Lavallée : Dans le fond, est-ce que vous aviez des obstacles que vous voyez que vous ne voyez pas au municipal?

Mme Laberge (Maude) : Bien, je pense que la réponse est oui, en fait, je pense que la réponse est oui. Pas que j'aie envie de me lancer en politique, il ne faut pas partir de rumeur, mais je pense que les obstacles sont plus grands au niveau provincial, ne serait-ce que la distance, tu sais, pour concilier travail-famille. Ça, ça joue. Quand tu es députée à trois heures de route, comme chez nous, de Québec, c'est sûr que ça a un impact direct sur la conciliation travail-famille. Alors que, quand on est élue dans notre municipalité, je suis à 3 min et 15 s de l'école, donc, s'il arrive quelque chose, je peux me libérer pour interagir avec les enfants. Donc, oui, il y a des obstacles supplémentaires, donc je...

Le Président (M. Picard) : En terminant, s'il vous plaît.

Mme Laberge (Maude) : ...à cause de la distance et le rythme de vie, peut-être, qui est moins flexible qu'au niveau local. Donc, peut-être que vous avez à réfléchir davantage à ce niveau-là, là. Il y a une réflexion spécifique au niveau provincial. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Picard) : Merci. Merci, Mme Laberge, Mme Pigeon, pour votre apport aux travaux de la commission.

Et je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 14 h 19)

(Reprise à 14 h 23)

Le Président (M. Picard) : Nous reprenons nos travaux, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux en recevant les représentantes de la Fédération québécoise des municipalités. Dans un premier temps, je vais vous demander de vous identifier, toutes les personnes qui peuvent intervenir. Et vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite vont s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous.

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Alors, bonjour, M. le Président de la commission, membres de la commission, mesdames messieurs. Alors, je me présente, Danielle Duchesneau DuSablon, mairesse suppléante de Saint-Casimir, de la MRC de Portneuf. Alors, j'aimerais remercier la commission sur les relations avec le citoyen de nous avoir invitées pour parler de ce sujet qui nous tient à coeur, la place des femmes en politique.

Avant de débuter, permettez-moi de vous présenter les personnes qui m'accompagnent : Mme Renée Rouleau, mairesse de Saint-Georges-de-Clarenceville, Mme Maryse Drolet, conseillère à la Fédération québécoise des municipalités et Mme Sophie-Émilie Morissette, chargée de projet femmes et jeunes, toujours à la FQM.

La Fédération québécoise des municipalités a été fondée en 1944. Elle compte plus de 1 000 municipalités locales et MRC membres, soit une force de 7 000 élus. Constamment, nous défendons l'autonomie du milieu municipal et nous travaillons à favoriser le développement des régions.

La place des femmes en politique municipale est un sujet de première importante depuis de nombreuses années à la fédération. Déjà, en 2011, elle sondait ses membres afin de recenser des situations problématiques vécues par les femmes en politique municipale, expérience qu'elle répétait en 2012. Plus récemment, à l'automne 2016, elle concluait une entente de partenariat avec le Secrétariat à la condition féminine afin de viser une structure plus égalitaire au sein de son membership. Le comité Femmes et Politique municipale fut mis en place.

Une de ses premières actions fut de créer le prix Elsie-Gibbons, première mairesse élue de l'histoire du Québec, pour souligner l'engagement d'une élue afin de favoriser un maintien ou des avancées en regard de la place des femmes en politique municipale.

Deuxième geste, nous voulons connaître l'évolution de la situation depuis 2011‑2012. Nous avons donc fait un nouveau sondage auprès de nos membres, sous la direction d'une chercheure de l'Université de Sherbrooke, Mme Eugénie Dostie-Goulet. Ce sont les résultats de cette enquête dont nous aimerions vous faire part cet après-midi.

Tout d'abord, il faut le reconnaître, la situation s'améliore tranquillement. Lors des dernières élections, il y a eu une progression du nombre de conseillères de 2,5 % pour s'établir à 34,5 %, et une progression de 1,5 % du nombre de mairesses pour s'établir à 18,8 %. Mais, vous en conviendrez avec moi, il y a encore beaucoup de chemin à faire pour atteindre la zone de parité, en particulier dans le cas des mairesses.

Autre constat des différents scrutins qui ont eu lieu au cours des dernières années, c'est qu'on ne vote pas moins pour les femmes que pour les hommes. En 2013, 62,8 % des candidates furent élues contre 59,5 % des candidats. Il semble donc que ce n'est pas tant le fait d'élire des femmes qui pose problème, mais d'attirer la candidature de celles-ci.

Quels sont les freins qui empêchent les femmes de se présenter aux différentes fonctions électives municipales? L'avantage de cette enquête, qui a recoupé les réponses de 679 élus de la fédération, c'est qu'elle sonde aussi les hommes. Nous pourrons ainsi comparer les situations vécues par les unes et les autres pour cibler les axes d'intervention afin d'atteindre cette zone paritaire beaucoup plus rapidement que ce que laissent présager les augmentations du dernier scrutin.

Alors, je laisse la parole à Mme Renée Rouleau qui va vous parler davantage de notre enquête.

Mme Rouleau (Renée) : Bonjour. M. le Président, chers députés, chers membres de la commission. La revue de la littérature précédant la tenue du sondage a permis de définir les difficultés vécues par les femmes en politique municipal sous quatre situations problématiques : la difficulté de concilier travail-famille, les doutes quant à la capacité à bien faire son travail comme élue, l'aspect conflictuel de la politique municipale, en particulier la discrimination et autres types de violence psychologique ou physique. Le sondage visait à vérifier si ces situations s'appliquaient aux élus membres de la FQM et si le vécu était différent pour les hommes et les femmes. La chercheure a également vérifié si d'autres caractéristiques pouvaient jouer un rôle.

De manière surprenante, sur la difficulté à concilier famille et travail, on ne retrouve pas de différence majeure entre les hommes et les femmes. La différence se trouve au niveau de l'âge : 36 % des élus, tant chez les femmes et les hommes de moins de 45 ans, disent vivre toujours... souvent ou toujours des difficultés de conciliation travail-famille. Quant à la conciliation travail-travail — parce qu'on sait très bien, au niveau municipal, dans les petites municipalités, les élus travaillent — elle est vécue plus souvent par les femmes que par les hommes. Ainsi, les difficultés de conciliation ne sont pas propres aux femmes, mais semblent tout de même un peu plus importantes pour elles.

En ce qui concerne les doutes quant à la capacité à bien faire son travail d'élu, les femmes sont plus nombreuses à considérer qu'elles manquent de ressources pour bien faire leur travail. Le manque d'information, le manque de formation, le sentiment d'impuissance et l'impression de ne pas être à la hauteur ont été mesurés. Dans tous les cas, les femmes sont toujours un peu plus nombreuses à mentionner vivre ces difficultés. Parfois, le fait d'en être à un premier mandat augmente ces difficultés par rapport aux élus possédant plus d'expérience.

Plusieurs formations existent déjà. Il faudra voir pourquoi les femmes qui vivent ces sentiments n'osent pas s'y inscrire. Est-ce en raison des coûts ou des ressources limitées de leurs petites municipalités ou est-ce encore que l'inscription et la formation ne soient pas encouragées, particulièrement lorsque les élus au conseil municipal sont déjà... y sont depuis plusieurs mandats? Il faut investiguer.

• (14 h 30) •

Autre surprise, il n'y a pas de différence notable entre les hommes et les femmes, lorsqu'il s'agit de l'aspect conflictuel de la politique, même s'il ne faut pas le négliger. Comme l'a dit Mme Dostie-Goulet, la gestion d'une municipalité est une affaire d'équipe. Un climat de travail difficile peut être suffisamment démotivant pour amener certaines personnes à quitter son poste ou à ne pas se présenter si elle constate la situation préalablement.

Finalement, sur le quatrième aspect de notre sondage, plusieurs problématiques ont été évaluées sur cette thématique : la discrimination, l'exclusion, le harcèlement, l'intimidation, les menaces et les voies de fait ainsi que le vandalisme. En règle générale, ces difficultés sont vécues par une plus grande proportion de femmes que d'hommes, sauf dans le cas du vandalisme et des menaces et voies de fait, où la différence entre les deux sexes n'a pas été marquée.

Ces situations peuvent prendre plusieurs formes. Par exemple, on peut faire sentir aux femmes qu'elles sont moins compétentes en leur demandant si elles sont assez sévères pour encadrer une équipe de cols bleus ou bien de se faire dire par un collègue ou un citoyen d'aller faire la vaisselle puis de s'occuper des enfants. Il y a beaucoup d'intimidation dans le milieu municipal des petites municipalités.

On peut les exclure de différentes manières en limitant l'information qu'on leur donne sur certains dossiers, en les excluant des rencontres informelles pour en profiter pour prendre des décisions. Ça arrive dans le milieu municipal.

Dans tous les cas, toutes les formes de discrimination ou de violences psychologiques et physiques sont inacceptables et doivent cesser. Si on veut encourager les femmes à aller en politique municipale, il faut que ça cesse, autant pour les hommes que pour les femmes.

Merci, M. le Président, députés, membres de la commission, et je redonne la parole à ma collègue, Mme DuSablon.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Alors, en conclusion, dans notre mémoire, nous suggérons certaines pistes de solution pour enlever ces obstacles-là, ces embûches qui empêchent les femmes de se présenter ou de se représenter en politique municipale. Certaines s'adressent aux municipalités elles-mêmes, d'autres concernent plus l'appareil gouvernemental ou bien elles nécessitent la capacité d'agir du gouvernement comme pour le financement des organismes communautaires tels le groupe Femmes, Politique et Démocratie ainsi que les OBNL dédiés à la promotion des femmes en politique. Sans oublier les premières et sur ces dernières que nous insisterons auprès de vous, vous les retrouverez à la dernière page de notre mémoire.

Sans en faire une lecture de mot à mot, j'insisterai sur les aspects d'information et de formation auprès des élus et de la population en général. Nous devons changer les mentalités de la population et c'est toujours une tâche de longue haleine. Je tiens d'ailleurs à souligner la pertinence de la campagne Prends ta place qui a donné des résultats excessivement positifs. Nous devons... Bien, excessivement, tout est relatif, hein? On sait qu'il n'y a pas eu... Il y a encore du travail à faire, mais c'est... Moi, j'ai eu beaucoup de commentaires de jeunes femmes qui se sont lancées en politique municipale parce que, oui, pourquoi pas moi? Alors donc, ça, ça a été un message excessivement positif.

Nous devons aussi mettre en place des moyens pour soutenir nos élus, tant les hommes que les femmes, que ce soit pour les congés parentaux ou lorsqu'il s'agit d'intervenir auprès de citoyens et collègues au comportement agressant.

Finalement, le gouvernement pourrait mettre en place, et nous lui laissons la souplesse nécessaire pour identifier la meilleure manière de le faire, une personne dont le mandat serait de recueillir les plaintes des élus, tant les hommes que les femmes, en cas de situation problématique, et qui aurait aussi le pouvoir d'intervention afin de régler la situation. Donc, merci beaucoup pour votre écoute et votre accueil.

Le Président (M. Picard) : Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Richmond.

Mme Vallières : Mesdames, bonjour. Merci beaucoup de votre présence et aussi, à vous toutes, de votre implication dans cet important dossier de société. On est ici pour être en action justement. J'aime vraiment beaucoup ce que vous proposez parce que ce sont des mesures concrètes, entre autres, que certaines des municipalités ont pu mettre en place et qui pourraient être dupliquées par d'autres ou encore des mesures gagnantes, dans certains endroits, qui pourraient servir de référence aussi.

Il y a un truc dans votre sondage, je pense que je vais faire une crise d'urticaire, je suis vraiment tannée de le voir, mais tellement, je ne peux pas croire encore aujourd'hui... bien, en fait, force est de constater que c'est ça, mais le sentiment de compétence ou de non-compétence des femmes, c'est absolument terrible. Je ne peux pas croire qu'encore aujourd'hui, en 2017, qu'on se dise aussi souvent, parce que c'est vraiment... ça semble être la problématique majeure de dire : Non, je ne suis pas à la hauteur. Que c'est ça? Non! J'aurais envie de shaker tout le monde.

Je dis souvent, quand je me promène pour aller rencontrer des... je dis, les femmes, là, mais souvent ce sont des jeunes, hein? On t'offre une opportunité extraordinaire, tu te demandes si tu peux ou pas. Ne te pose pas de question. Vas-y, puis tu développeras les compétences après. Je pense qu'il faut oser davantage, il faut amener jeunes hommes et jeunes femmes, de toute façon, à dire : Regarde, oui, je suis capable. Mais particulièrement les femmes. Et vous parlez d'avoir des modèles, à quel point ça peut être utile de faire ça. Avez-vous une idée particulière de comment on pourrait développer cette façon d'avoir du mentorat, des modèles pour repasser ce message en boucle et répéter, répéter, répéter qu'on a ces compétences de façon égale et sinon supérieure à celle des hommes, parce qu'on veut toujours être trois fois meilleures, puis quatre fois meilleures? Comment on est capables d'aller vraiment jouer sur ce point-là, particulier, qui ressort si fort dans votre sondage?

Mme Rouleau (Renée) : C'est le propre des femmes, hein, d'être parfaites. Ça fait que, non, pour être à la hauteur, là, je pense que les femmes, il faut qu'elles comprennent une chose : la compétence, ce n'est pas la compétence technique, c'est la compétence de représentation. Nous, comme élus, là, puis vous, on représente les citoyens, hein? Donc, moi, je suis une femme, je représente les femmes, je représente les familles — bien, je suis grand-maman — je représente aussi des citoyens comme moi, qui ont acheté une maison, là, dans le même quartier que moi, je représente aussi... Donc, je représente les citoyens, c'est ça, la compétence que j'ai, c'est le vécu en tant que citoyen. C'est ça qu'il faut promouvoir. Parce que, dans le fond, là, ce n'est pas parce que tu sais comment ça marche, la machine, là, il y a déjà un directeur général qui va te l'expliquer, puis tu as des formations quand tu arrives. Puis, oui, on en a, des belles formations, la FQM, on en donne, des belles formations, ça va bien de ce côté-là, on devrait peut-être en donner plus sur certains aspects, là, mais disons que ça, c'est un volet. Donc, pour les femmes, les encourager, leur dire qu'elles sont compétentes, puisqu'elles sont citoyennes.

On a besoin des femmes, on ne pourra pas changer la politique s'il n'y a pas de femme en politique, on ne pourra pas changer la façon de faire. On veut améliorer, on veut que ça soit assaini dans les administrations municipales, il faut que ce soit assaini, bien, ça prend des femmes, c'est ça qui va... Chez nous, là, au conseil, c'est mon deuxième mandat, puis je peux vous dire, celles qui travaillent le plus, c'est les femmes, c'est les femmes qui amènent de l'eau au moulin, puis c'est le fun, puis ça fait un bel équilibre, ça prend les deux.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Bien, en fait, pour répondre, peut-être ajouter, c'est que... de quelle façon, bien, les organismes communautaires qui sont sur le terrain ici, dans la capitale nationale... il y a un réseau, et puis ces femmes-là organisent des activités concrètes. Et on cible qui? On cible les jeunes femmes, les femmes de tous âges, dans le fond, et on cible aussi toute catégorie. Parce que souvent, comme femme, on s'imagine que c'est... que la politique est réservée strictement aux élites, et ça, c'est une mauvaise perception. La politique, si on veut qu'elle soit ouverte à tous et à toutes, bien, on se doit de véhiculer ce message-là : c'est pour tous et toutes. Alors, nous autres, bien, c'est plus pour... on travaille plus pour qu'il y ait plus de femmes en politique, mais, en fait, je pense que tous les organismes qui sont partout au Québec, qui sont sur le terrain, ont besoin de votre appui pour continuer à, je dirais, faire la promotion des femmes qui se lancent en politique à tout niveau. Alors, c'est excessivement important, parce que c'est un peu le ciment qui permet aux femmes qui hésitent ou qui pensent qu'elles ne sont pas capables... Bien, en fait, ces groupes-là ont un langage qui s'adresse à toutes les femmes. Donc, pour répondre, bien, je pense que c'est la bonne... en tout cas, c'est un des moyens, et puis continuer à faire la promotion comme ça se fait.

Mme Rouleau (Renée) : Il y a aussi une chose qu'il faut comprendre aussi, que le milieu municipal est perçu comme un lieu de confrontation. Les femmes n'aiment pas ça, la confrontation. Donc, comment on outille les femmes pour dire : Bien, regardez, là, oui, il y a peut-être un milieu de confrontation en milieu municipal, mais comment les outiller dans ce milieu-là pour qu'elles puissent changer ces milieux-là puis que ça ne devienne plus des milieux de confrontation. En fait, moi, là, c'est ça, l'objectif, je pense qu'il faudrait y aller, vers ça, c'est que le milieu municipal, surtout dans les petites municipalités... que les milieux deviennent moins des lieux de confrontation puis de... tu sais, c'est tout petit. Plus je parle avec des élus... vous êtes des élus, vous le savez, en vivez-vous, de la confrontation à tous les jours? Pas vraiment. Ce n'est pas... vous en avez, là, mais je veux dire, sûrement, mais, si vous saviez comment est-ce que notre réputation peut être entachée en milieu municipal, c'est incroyable. Ça fait que c'est sûr que c'est un beau frein, ça, pour les femmes, c'est un frein pour tout le monde, les hommes et les femmes, mais je pense qu'il faut attirer les femmes à venir en politique municipale pour assainir ce milieu-là.

• (14 h 40) •

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Richmond.

Mme Vallières : C'est un peu la poule ou l'oeuf, là, hein, dans ce dossier-là. Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen déjà d'agir, tous paliers électifs confondus, sur cette ambiance, cette culture dans laquelle on travaille, qui va aussi amener en même temps... Tu sais, il ne faut pas juste attendre la présence de femmes. Moi, je pense que s'il y a une volonté citoyenne que les débats se fassent de façon plus respectueuse, est-ce que ça ne concerne pas aussi tout le monde et non seulement l'aspect pour attirer les femmes? Et comment, au niveau municipal, vous voyez une possibilité d'avancer en ce sens-là, sans nécessairement répondre qu'il faut plus de femmes?

Mme Rouleau (Renée) : Bien, le comment, je l'ai regardé un petit peu en détail personnellement. On a un code d'éthique qu'on est obligés d'adopter. Toutes les municipalités, on a un code d'éthique. Puis dans le code d'éthique, le gouvernement a voulu... nous a un peu forcé à adopter ce code-là, mais c'est surtout... c'est beaucoup axé sur les conflits d'intérêts possibles avec les contrats. Rien à voir avec le respect. Mais on peut, dans notre code d'éthique, intégrer tout le volet du respect de la personne. Et ce sont dans... le code d'éthique, il est respecté. Lorsqu'un élu ne respecte pas le code d'éthique, c'est la Commission municipale qui intervient. Donc, dans ce volet-là, je pense que ça serait intéressant que le gouvernement, dans les actions qu'il fait de promotion, c'est de faire la promotion auprès des municipalités pour que, dans le code d'éthique, les éléments de respect soient intégrés de façon à ce qu'il y ait du respect, là, pour l'élu, pour les élus, pour les citoyens, puis de mettre en valeur le travail des élus, mettre en valeur. C'est sûr qu'il y a eu des commissions qui ont fait en sorte... bon, on est tous un peu entachés, quand on est élu, par le travail des commissaires qu'il y a eu sur qui a fait quoi, c'est la faute à qui, mais il faut redonner noblesse au travail de l'élu, il faut redonner... En redonnait un peu de noblesse, je pense que les gens vont naturellement avoir un peu plus de respect. Le salaire des élus des petites municipalités, ce n'est pas élevé, donc pour encourager des gens à venir faire de la politique, ce n'est pas une question d'argent, là, c'est vraiment une question de coeur puis, bien, il y a un minimum de respect, puis il faut redonner un petit peu de lustre à cette fonction-là.

Mme Vallières : Et, avant de passer la parole à un collègue, qui veut aussi pouvoir profiter de votre présence, deux petites choses. Pourquoi vos membres considèrent que, dans les plus petites municipalités, c'est plus difficile? J'aurais pensé peut-être le contraire, compte tenu de ce lien de proximité avec les gens. Et vous parlez de la valorisation du rôle des élus. Comment en ce moment aussi les municipalités peuvent travailler pour valoriser les fonctions d'élu aussi, que vous soyez conseiller, conseillère ou maire et mairesse?

Mme Rouleau (Renée) : Je vais vous dire, moi... Vous savez tous les efforts qui sont faits contre l'intimidation à l'école. À l'école, là, c'est un milieu qui est tout petit, hein, c'est des petits milieux. L'intimidation, ça se fait sur Facebook, et c'est des gens qu'on connaît. Dans les petits villages, les gens se connaissent, le qu'en-dira-t-on est très fort, tout le monde se connaît, puis la rumeur, les affaires sur Facebook, tout ça, il y en a, de ça aussi, là, il y en a. On arrive... Moi, j'arrive au conseil municipal puis je dis : J'ai entendu dire que... Puis là, bien, ta réputation vient de prendre le bord. Alors, tu sais... Donc, à quelque part, là, nos réputations... puis dans un petit village, contrairement à une plus grande ville, ta réputation, c'est pour beaucoup, là, tout le monde te connaît. Ça fait que ça a une incidence, et moi, j'ai demandé à des personnes très compétentes de venir se présenter en politique, puis ils ont dit : Non, non, non, je n'ai pas envie de perdre ma réputation demain matin, là, la chicane, là, je n'aime pas ça — puis des gens très compétents. On veut des gens compétents, on paie des taxes, on ne veut pas payer des taxes pendant quatre ans pour payer les chicanes puis les avocats. Donc, je pense que le milieu municipal a besoin vraiment qu'on relustre, qu'on travaille à faire en sorte que l'élu, c'est quelqu'un qui sacrifie une bonne partie de sa vie pour le collectif. Ce n'est pas tous des gens qui se mettent de l'argent dans les poches, au contraire, je vous dirais, c'est le contraire. Dans les petites municipalités, le salaire, c'est tout petit, là. C'est quoi?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : C'est ridicule.

Mme Rouleau (Renée) : C'est combien, là?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Ah! moi, j'ai 250 $ par mois.

Mme Rouleau (Renée) : 250 $ par mois.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Alors, c'est du bénévolat. C'est du bénévolat.

Mme Rouleau (Renée) : Pour être mairesse.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Non, non, municipale.

Mme Rouleau (Renée) : Hein?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Conseillère.

Mme Rouleau (Renée) : Donc, écoutez, là. Je veux dire... je pense qu'il faut... On aime ce travail-là. C'est superintéressant. Je pense qu'il faut redorer l'image. Puis, oui, la formation, on en a. Puis on peut apprendre. Puis on a droit de faire des erreurs. On n'est pas des criminelles parce qu'on peut faire une erreur ici et là. Ça peut arriver parce qu'on est des personnes bien ordinaires.

Le Président (M. Picard) : Juste pour votre information, dans le code d'éthique des élus de l'Assemblée nationale, la valeur de respect y est.

Mme Rouleau (Renée) : ...copier-coller.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Bien, en fait, c'est que ça dépend peut-être des municipalités parce que nous, dans notre code d'éthique, on a ajouté le mot «respect», on a ajouté la valeur de respect. Ça dépend peut-être des municipalités, puis aussi, bon, en fait, qu'est-ce qui est important. Oui?

Le Président (M. Picard) : Je dois céder la parole à M. le député de Portneuf. Je ne veux pas prendre de son temps.

Mme Rouleau (Renée) : C'est juste pour dire le respect, là... On peut avoir de la valeur, mais, si on n'a pas d'article dans notre... ça n'a pas de valeur. O.K.

Le Président (M. Picard) : M. le député de Portneuf.

M. Matte : Bien, merci de votre participation et bienvenue. Soyez assurées que je n'ai pas douté de votre compétence, là, O.K.? Puis j'ai toujours souhaité qu'il y ait de plus en plus de femmes qui puissent s'impliquer à différents paliers. Sauf que j'aimerais vous entendre... Depuis deux jours, on entend plein de groupes qui nous ont présenté des mémoires. Pour certains, ils fixent des quotas. Pour d'autres, ils ont une cible qui pourrait se situer entre 40 % et 60 % de représentation de la gent féminine. J'aimerais savoir — puis je ne l'ai pas vu dans votre mémoire — est-ce que vous partagez ça. C'est quoi, votre perception par rapport à des cibles, là, qui sont identifiées et des sanctions qui accompagnent ça?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Bien, en fait, c'est qu'on n'a pas eu de discussion au niveau de la FQM sur... bien, oui, la parité, mais, en tout cas... parce que, moi, dans les comités où j'ai la chance de participer, de siéger, ce n'est peut-être pas la bonne... je pense qu'il faut progresser, mais laisser à chaque personne qui a des compétences, que ce soit un homme ou une femme, et... mais parce que ça... Moi, le mot quota, là, c'est assez négatif dans ma tête, hein? Parce que je viens d'un milieu rural, puis...

Des voix : Ha, ha, ha!

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : ...les quotas, là... Non, mais, je ne comprends pas. Parce que, dans le fond, les femmes qui veulent... en fait, il n'y a personne... Si on veut faire de la politique, on veut se lancer en politique municipale, bien, moi, il n'y a jamais personne qui m'a dit : Tu n'iras pas. C'est mon intérêt. Est-ce que je suis là pour représenter les citoyens? Alors donc... Et je n'ai jamais senti que j'avais été mal accueillie ou mise de côté. Alors, je pense que c'est à chaque personne... et puis, si le gouvernement disait du jour au lendemain... Ah! bien, j'aimerais bien qu'ils n'utilisent pas le mot «quota» en tout cas, parce que... mais peut-être faire... on chemine lentement. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure, mais on chemine. Alors, qu'est-ce qui incite les femmes? Bien, c'est de continuer à faire de la promotion, de la formation, et puis de se dire qu'on est capable de réaliser, autant que les hommes... Et puis moi, je trouve que c'est de trouver un juste milieu.

Alors, nos milieux, nos petites municipalités sont... On a des outils aussi, comme la FQM. Lorsqu'on a une demande, bien, on communique à la FQM, puis ils nous chapeautent bien, puis ils nous donnent un bon coup de main. Alors, moi, je pense que c'est le... Oui, qu'on ait davantage de femmes. Le moyen pour y atteindre actuellement... on s'est donné des outils et continuons, avec nos groupes communautaires, continuons à dire que les femmes, on a notre place. On est capables de la prendre. La preuve : la dernière élection municipale. Et on a quatre ans encore, on a les quatre prochaines années, on va continuer à travailler fort. Et puis peut-être se rendre davantage dans les écoles pour sensibiliser les jeunes, les jeunes hommes, les jeunes femmes à la vie politique.

• (14 h 50) •

Et enfin, alors, un mot à nos médias : lorsque... Ça serait bien parce que, parfois, j'ai l'impression que les femmes ont un traitement différent des hommes lorsqu'on parle d'elles dans les médias. Je ne sais pas pourquoi, j'ai toujours l'impression que les femmes, on est des hystériques. Alors donc, j'ai peut-être... peut-être que j'en fais une mauvaise lecture, mais je n'ai pas de lunettes roses, je suis très terre-à-terre. Moi, je suis une fille de terrain, et puis je pense que, ça, ça... Si tous et toutes ensemble on décide qu'on va vers une parité, on va y arriver. Bien, tout le monde, on travaille dans la même direction. On est positifs.

Le Président (M. Picard) : ...s'il vous plaît.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : C'est tout.

Le Président (M. Picard) : C'est tout, merci.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : J'ai conclu.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme Duchesneau DuSablon. Je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci à vous quatre aujourd'hui pour votre participation à nos travaux. C'est extrêmement intéressant de pouvoir vous entendre sur votre réalité directement sur le terrain, dans vos municipalités respectives. Donc, je vous en remercie. Et j'irais tout de suite sur ce que vous venez de dire. Je pense aussi que c'est notre rôle, en tant que femmes, de dénoncer ce double standard-là aussi quand on le constate. Moi, j'essaie de le faire quand je le vois. Récemment, justement il y avait eu un article dans un média, ici, qui couvre l'Assemblée nationale, qui disait qu'il y avait une députée qui s'était emportée à la période de questions. Et moi, je me disais : Mais, voyons! Elle parle comme il y a plusieurs ministres parlent à chaque jour à l'Assemblée nationale, et on ne fait pas de cas pour ça, on ne fait pas des articles dans les journaux. Donc, je pense qu'on a une responsabilité aussi à saisir là en tant que femmes là-dessus.

Puis j'aimerais revenir plus spécifiquement sur ce qui a été fait pour les dernières élections municipales. J'ai posé la question à l'UMQ pour savoir est-ce qu'il y avait eu des initiatives justement pour faciliter le recrutement de candidatures féminines. Tantôt, vous l'avez très brièvement abordé, là, la campagne Prends ta place. J'aimerais que vous puissiez nous en parler davantage et nous parler aussi des effets que vous avez sentis directement sur le terrain avec cette campagne-là. Quels ont été les bons coups, peut-être les moins bons coups, aussi les choses à améliorer? Est-ce que vous avez dressé un bilan?

Le Président (M. Picard) : Mme Rouleau.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Bien, en fait, c'est que le... bien, c'est un peu difficile à évaluer, un peu comme l'UMQ a dit tout à l'heure, évaluer le nombre total de candidates qui ont postulé, mais plusieurs, en tout cas, ont manifesté leur intérêt, mais il y en a qui ont décidé de se lancer en politique. Mais, nos actions, c'est souvent des actions dans l'ombre, hein, parce que ce n'est pas nécessairement des actions qui sont projetées beaucoup, on n'a pas beaucoup d'éclairage sur nous, mais c'est à long terme. Moi, je vois ça comme un travail de terrain à long terme. Donc, je suis persuadée qu'à la prochaine élection, il va y avoir davantage de femmes. Alors, par nos groupes où on fait de la sensibilisation, bien, pour vous donner juste un exemple, on était... notre comité réseau des élues de la Capitale-Nationale, et puis... la jeune femme qui servait aux tables, on était dans un resto, puis elle a dit : Aïe! vous faites quoi, vous autres? Ça a donc bien l'air intéressant. Alors donc, c'est de petites actions, mais, oui, des actions qui portent fruit.

Une voix : On a fait du parrainage. Est-ce qu'on a dit.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Oui?

Le Président (M. Picard) : Allez.

Mme Drolet (Maryse) : En complément, rapidement, là, d'information, effectivement, nous aussi, comme l'UMQ, nous avions fait appel à nos élues pour être ambassadeurs. Nous avions donc 20 ambassadeurs du conseil d'administration de la FQM et les membres du comité Femmes et Politique municipale qui ont participé à différentes activités sur le territoire. On a signé aussi des ententes avec — là, j'y vais de mémoire — cinq, six régions du Québec, avec les tables régionales des groupes de femmes qui «leadaient». En fait, c'est elles qui sont près du milieu, alors elles organisaient des rencontres, et nos ambassadeurs étaient invités à ces rencontres-là. On est à faire le bilan, avec les tables, combien de participantes, et tout ça. On pourra vous le recommuniquer par la suite. Mais j'ai envie d'aussi vous dire : On a peut-être atteint la parité pour les préfets élus parce que, sur les 16 préfets élus du Québec, il y en a sept qui sont des femmes. Alors, quand on dit «parité», bien, là, l'égalité aurait été huit, mais on a sept femmes élues par la population, c'est quand même un élément à noter.

Mme Rouleau (Renée) : Et j'aimerais ajouter...

Mme Fournier : Oui, allez-y.

Mme Rouleau (Renée) : Quand on veut atteindre les... quand on veut améliorer la parité qui devrait être un objectif, il y a plusieurs moyens. On peut aller par le biais d'encourager les femmes, mais aussi d'une façon plus globale, parce qu'on a vu qu'autant les hommes que les femmes présentent certaines difficultés, puis quand on va plus global, bien, on montre un peu une approche qui est égalitaire, qui va peut-être aller chercher à la fois les hommes et les femmes. On va chercher les femmes indirectement, donc. Mais, cibler les femmes, c'est important, les groupes de femmes le font bien. Femmes, Politique et Gouvernance, l'école des femmes, moi, je fais partie de cette... j'ai participé à tous ces cours-là avant de me lancer. Ça m'a donné beaucoup confiance. C'est important.

Mme Fournier : Vraiment intéressant. Donc, de quelle façon justement vous allez chercher les femmes qui participent à vos ateliers avec les ambassadrices?

Mme Rouleau (Renée) : Pour ma part, moi, dans mon milieu, je me suis offerte à faire un petit genre de café-conférence en invitant une autre élue. Malheureusement, ça n'a pas eu lieu parce que la personne qui était en charge, elle a subi une blessure, puis ça n'a pas eu lieu. Mais, moi-même, dans mon propre milieu, j'ai fait appel à plusieurs femmes à venir comme conseillères. Et certaines, comme je disais tantôt, ont décidé de ne pas se présenter, parce qu'elles trouvaient qu'il y avait trop de chicane.

Mme Fournier : O.K., merci. Puis est-ce que vous comptez justement poursuivre cette tournée-là dans les quatre prochaines années pour semer encore des graines pour la prochaine élection?

Mme Rouleau (Renée) : On va continuer. Pensez-vous que... On est ici, ce n'est pas pour rien.

Mme Fournier : C'est ça. Mais je me demandais si c'était juste une campagne qui avait été spécifique, par exemple, dans l'année, avant l'élection municipale, ou c'est vraiment quelque chose que vous faites en continu?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Bien, le comité, en fait, le comité de la FQM , bien, c'est là pour demeurer, hein? On a encore quatre ans, là, pour préparer la prochaine élection, alors je pense qu'on va continuer à travailler très, très fort, et puis partout.

Mme Rouleau (Renée) : Je pense que les résultats du sondage... Le sondage est très, très pertinent, là. Il y a beaucoup d'informations à l'intérieur de cette étude-là, et puis, même, on a des commentaires des femmes... pour plusieurs pages de commentaires très pertinents à regarder, à éplucher puis analyser. Donc, il reste encore beaucoup de choses à faire avec le comité Femmes. Donc, nous, on va continuer pour voir comment est-ce qu'on peut amener plus encore les femmes en politique, puis on pourra continuer à faire des recommandations.

Mme Drolet (Maryse) : En complément d'information, effectivement, le comité s'est doté d'un plan d'action. Et, pour revenir un peu rapidement sur les quotas, la FQM, et avec le comité, on souhaite plutôt travailler sur les freins qui font en sorte que les femmes ne se lancent pas en politique, plutôt que d'arriver avec cette... une forme d'imposition qui pourrait être mal perçue. Et on veut beaucoup travailler sur la sensibilisation, la prise de confiance. Alors, je pense que c'est ces aspects-là qu'on va vouloir regarder et qu'on va travailler. On va continuer de travailler avec le réseau des groupes de femmes également.

Mme Fournier : À votre recommandation n° 2, vous recommandez que des mesures financières puissent être prévues pour les élues lors d'une absence pour un congé parental. Pouvez-vous nous expliquer davantage? On sait qu'il y a quand même eu la loi qui est passée, donc, pour le 18 semaines de congé parental pour les élues. Est-ce que vous considérez quand même que c'est une bonne avancée? Donc, vous, est-ce que vous proposez, au fond, d'aller plus loin?

Mme Drolet (Maryse) : Bien, effectivement, on pense que c'est un... ça peut être un grand chantier à regarder. On abordait cette question-là, mais on voudrait l'aborder sous l'angle aussi des conditions salariales des élus des municipalités de petite taille qui, comme on l'a mentionné tout à l'heure, ne représentent pas vraiment un salaire avec lequel on peut vivre, alors on est toujours obligées de combiner le travail avec notre fonction. Et on a constaté, lors des dernières élections, qu'il y a quelques femmes qui avaient été approchées, quelques jeunes femmes qui étaient enceintes, qui n'ont pas voulu faire le pas parce qu'elles allaient être pénalisées en raison de... bien, en fait, le salaire d'élue, qui aurait été amputé sur leur prestation d'assurance de congé parental.

Mme Rouleau (Renée) : Le salaire d'élu est amputé.

Mme Drolet (Maryse) : Alors, ce n'était pas un incitatif. Disons que c'est toutes ces questions-là qui pourraient être regardées dans un chantier pour aider les femmes à s'impliquer davantage en politique, et les jeunes femmes, particulièrement.

Mme Fournier : Bien, je vous remercie beaucoup. Moi, je dois vous quitter parce que je dois aller intervenir au salon bleu, mais je vous remercie de vos interventions fort pertinentes. Merci.

• (15 heures) •

Une voix : Ne lâchez pas!

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci. Bienvenue. Félicitations pour vos récentes élections municipales! Ce que je remarque, autant de l'UMQ ou la FQM, c'est que c'est l'organisation qui est en dehors de tout parti politique qui fait un travail de sensibilisation auprès des femmes. Donc, je pense que vous avez le mérite de travailler sur le terrain pour aller... Puis je sens, autant de l'autre organisation que vous, que vous faites un travail de terrain pour aller rejoindre les femmes afin de les intéresser à la politique. Puis je pense — je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi — que c'est les mouvements de femmes, les groupes de femmes qu'on a qui devraient peut-être être mieux financés pour aller faire le travail de terrain, de façon apolitique, mais aller chercher ces femmes-là qui attendent juste d'avoir un petit signal, et d'avoir aussi de la formation ou une forme d'appui ou coup de pouce juste pour les aider à faire le saut?

Mme Rouleau (Renée) : Oui, oui, c'est très important. C'est essentiel, essentiel.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Moi, si j'avais juste un voeu, ce serait que justement, ici, notre venue permette à nos groupes de continuer à faire leur excellent travail. Oui, c'est apolitique et puis c'est surtout que c'est près des gens, hein, près des personnes. Alors, c'est ça qui est le plus important, je pense bien.

Mme Lavallée : ...parler aux gens.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Oui, c'est très... vous faites une excellente intervention.

Mme Lavallée : Puis j'aurais envie de vous poser la question piège que j'ai posée à l'autre avant. Encore là, ce n'est pas du recrutement que je fais, mais je vous demanderais, aux deux élues, est-ce que vous avez déjà pensé... Parce qu'ils disent que souvent le municipal est un tremplin pour peut-être aller au provincial. Est-ce que vous y avez déjà pensé? Puis, sinon, pourquoi non? Est-ce qu'il y a des obstacles qui fait que vous dites : Non, ce niveau politique là ne m'intéresse pas ou...

Mme Rouleau (Renée) : En fait, vas-y.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Ça fait un bout qu'on travaille ensemble, hein, ça paraît. En fait, moi, bien, non, je pense qu'à mon âge je vais laisser ça à la relève, je vais laisser ça à des plus jeunes femmes. Mais, si on m'avait... Plus jeune, je pensais... J'ai toujours pensé que ce n'était pas pour moi. Donc, si moi, je pense ça, il y a d'autres femmes... Alors, pourquoi? Bien, peut-être qu'il y avait moins de groupements communautaires ou d'associations qui étaient un incitatif. Donc, maintenant avec tout ce qu'on a la chance, là, de... tous les nouveaux... tous les organismes confondus qui permettent... qui nous outillent et qui nous forment... Alors oui, je l'aurais fait avant, mais pour ma part, non, je vais continuer à faire de la politique municipale, mais c'est mon dernier mandat. Je ne ferai pas comme Dominique Michel.

Mme Lavallée : On va voir. Et vous?

Mme Rouleau (Renée) : Moi, ça m'a toujours intéressé. Ça m'a intéressé, mais j'ai commencé avec le... Bien, j'ai dit : Je vais continuer avec le municipal, je vais voir. Puis je pense que j'aime bien ça, le municipal. S'il y avait juste un peu moins d'intimidation, ça irait bien. Ça a l'air qu'il y en aurait moins au provincial qu'au fédéral. Il faudrait que vous veniez chez nous une couple de semaines.

Mme Lavallée : Il faudrait que vous veniez ici.

Mme Rouleau (Renée) : Oui, c'est ça. Il faudrait qu'on se fasse un échange. Oui, puis la question, c'est le réseautage, hein, ça prend un bon réseau pour se présenter... bien, j'imagine, là, vous êtes tous des députés. Ça fait que ça prend un bon réseautage, être bien connu. Puis c'est sûr qu'il va falloir peut-être que moi, je travaille là-dessus, si jamais je souhaite, un jour... Mais j'aime beaucoup ma job de mairesse. C'est vraiment le fun parce que, quand tu es maire, tu as une équipe, tout ça, mais, tu sais, il n'y a pas de parti. Alors, vous comprenez le message.

Mme Lavallée : Je vous dirais qu'au niveau de... oui, de la confrontation, sachez qu'il y en a ici. C'est juste à un autre niveau. Mais, dans votre cas, c'est sûr que vous restez plus proches de vos citoyens, donc souvent on confronte des fois notre voisin. C'est peut-être plus dérangeant qu'ici où c'est d'un comté à l'autre. Avez-vous l'impression que les plus jeunes sont intéressées par la politique, plus politique municipale, ou... Sentez-vous qu'il y a un mouvement auprès de la nouvelle génération?

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Moi, bien, parce que je travaille sur le campus universitaire — je suis photographe — et puis je discute beaucoup avec les jeunes, et puis là je disais que je m'en venais ici, et là les... Parce qu'on échange, hein, on ne fait pas juste faire les clics. Et puis, les personnes, je sens un intérêt grandissant plus que, exemple, il y a cinq ans. Il y a cinq ans, j'étais aussi conseillère municipale, puis on dirait que le fait... Peut-être que la dernière campagne... peut-être que ça a eu un effet et puis que c'est plus positif. Alors donc, moi, je vous dirais qu'il y a un intérêt plus grandissant pour la politique en général, pas juste pour la politique municipale.

Mme Rouleau (Renée) : Je pense qu'ils ont moins... Je pense que chez les jeunes... je crois, je ne sais pas, je n'ai pas vu d'étude là-dessus, mais je crois qu'ils sont moins... il y a moins de freins, de freins psychologiques, plus de freins physiques, donc la famille, conciliation du temps, là, puis tout ça, parce que, quand tu travailles à plein temps, puis, bon... Mais c'est ça, je pense qu'ils sont enclins, ils ont moins de gêne à se présenter, particulièrement les femmes. Je pense que les jeunes femmes, ils ont moins de freins psychologiques à se présenter, je crois. Mais c'est à confirmer.

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Oui, c'est ça.

Mme Rouleau (Renée) : Parce que je pense...

Mme Duchesneau DuSablon (Danielle) : Oui, il va y avoir une relève.

Mme Rouleau (Renée) : On a-tu des données?

Mme Drolet (Maryse) : ...et effectivement on pourrait même... on va rendre disponible l'enquête complète qui a été réalisée par notre chercheure. Et, dans un des sous-graphiques, elle a mesuré effectivement la différence de l'âge sur le doute de sa compétence, et plus les élus sont jeunes, moins l'écart entre le doute chez l'homme et la femme se mesure. Alors, c'est encourageant, autrement dit.

Mme Rouleau (Renée) : En espérant que ce n'est pas de la naïveté.

Le Président (M. Picard) : Merci, mesdames. Merci, Mme Drolet, Mme Duchesneau DuSablon, Mme Rouleau et Mme Morissette.

Je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 6)

(Reprise à 15 h 10)

Le Président (M. Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant les représentants du Groupe Femmes, Politique et Démocratie. Vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Je vous demanderais, dans un premier temps, de vous présenter, va s'ensuivre des échanges avec les parlementaires. Vous avez assisté aux travaux, donc vous savez comment ça se passe. Allez-y.

Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD)

Mme Paradis (Micheline) : Alors, merci, M. le Président. Je suis Micheline Paradis, je suis présidente du conseil d'administration du Groupe Femmes, Politique et Démocratie depuis déjà six ans, mais je suis là depuis au moins 10 ans, je pense, parce que c'est une question qui me tient à coeur.

Et j'aimerais vous présenter des personnes qui ont aussi beaucoup d'intérêt pour la cause : Thérèse Mailloux, qui est vice-présidente du conseil, et Esther Lapointe, qui est notre directrice générale.

J'attire votre attention sur le fait qu'on a un conseil d'administration qui est très actif. Il est composé de neuf membres, dont cinq femmes et quatre hommes. C'est vous dire que la parité nous tient à coeur et qu'on essaie de la pratiquer, nous aussi.

Alors, plusieurs membres de cette commission nous connaissent déjà, mais, pour les autres, je dirais, je vais essayer de nous présenter succinctement. Le GFPD est un organisme sans but lucratif qui existe depuis presque 20 ans maintenant. Il est non partisan. Notre mission en est une d'éducation à la citoyenneté, mais, plus particulièrement, il est voué à la promotion des femmes en politique et offre aux intéressés par l'engagement politique des sessions de formation pour les habiliter à faire le saut, et ce, à tous les niveaux, aux niveaux municipal, provincial et fédéral.

Et nous avons des résultats intéressants. Et je vous invite à regarder dans notre mémoire, à la première page, parce que, pour des fins de compilation, on vous fait état de résultats que nous avons obtenus lors de la dernière élection municipale. Ça vous dit notre méthode de travail, c'est-à-dire qu'on mesure les résultats de nos activités.

Nous avons déjà, donc, déposé notre mémoire, mais je vais me permettre, en 10 minutes, j'espère, de vous en présenter, en tout cas, les grandes lignes.

Bien que les femmes soient nombreuses à être compétentes pour exercer les fonctions politiques, toute une histoire séculaire liée à la socialisation des filles freine leur accès à ces postes par des barrières invisibles. Et la documentation est abondante à cet effet, vous avez d'ailleurs entendu des personnes avant moi qui vous l'ont exprimé. Il n'est donc pas surprenant que les femmes soient moins susceptibles de s'y penser comme participantes à part entière.

Nous avons un deuxième constat. Depuis longtemps, et encore aujourd'hui, on allègue qu'elles n'ont qu'à se présenter aux élections pour se faire élire et on prétend aussi qu'elles n'avaient pas les compétences suffisantes, etc. Bref, et c'est là-dessus que je veux attirer votre attention, la responsabilité du changement incombait aux femmes seulement. Sauf qu'aujourd'hui on est en 2017, les femmes sont plus scolarisées que les hommes, elles occupent des postes de responsabilité dans tous les secteurs, privé, public, communautaire, et dans des domaines qui les préparent pourtant à des carrières parlementaires.

Troisième constat. En 2017, donc, avec 29 % de représentation féminine à l'Assemblée nationale, on se retrouve aujourd'hui au même point qu'en 2003. C'est donc le statu quo. Et, alors qu'ici on fait du surplace, au plan international, on recule. En 15 ans, le Québec est passé du 15e rang au 48e rang au palmarès mondial, et, pendant ce temps, la France remontait du 64e au 17e rang. Qu'est-ce qui s'est passé?

On pense que plusieurs centaines de pays — et je dis bien centaines — ont compris que leurs gouvernements et leurs partis politiques devaient se mobiliser pour corriger le déficit démocratique. Ils ont compris qu'en voulant le... le vieil adage voulant que le temps ferait son oeuvre et qu'il fallait compter sur une progression naturelle ne tient pas.

Quant à lui, le gouvernement du Québec s'est engagé à transformer l'égalité de droit en égalité de fait dans notre société. Il s'est donné des chartes et il a signé des conventions internationales qui l'obligent à poser des gestes concrets en ce sens. Et d'ailleurs on a connu des conseils de ministres paritaires, mais qu'on souhaiterait en permanence.

Nous pensons que le temps est venu de prendre action, et ce, de façon structurante en faveur de la parité entre les femmes et les hommes et estimons que les partis politiques sont au coeur du changement désiré. Ils détiennent les clés du jeu parce que ce sont eux qui recrutent et sélectionnent les candidatures. Et ce sont des étapes reconnues comme les maillons faibles dans le processus d'accès à l'Assemblée nationale. De plus, on sait qu'ils sont largement financés à même les deniers publics, avec les impôts que paient les femmes et les hommes.

C'est pourquoi nous croyons que les partis politiques devraient avoir une obligation de résultat. Ils devraient être tenus par la loi de présenter une liste constituée à parts égales de femmes et d'hommes. Ainsi, après l'étape du scrutin général, la députation élue aurait mathématiquement plus de chances d'être située dans une zone paritaire entre 40 % et 60 % ou idéalement entre 45 % et 50 % pour chacun des deux sexes. J'aurais aimé que notre trésorier, M. Alban D'Amours, soit là aujourd'hui pour vous en faire la démonstration parce qu'il est très convaincant. Et vous le savez, Alban D'Amours sait compter.

Afin d'opérer ce changement vers des listes de candidatures paritaires, les partis politiques pourraient bénéficier, pendant un certain temps, de ressources financières additionnelles pour mettre en oeuvre des gestes concrets avant et pendant les périodes électorales, d'autant que maintenant les élections ont lieu à date fixe. Le Directeur général des élections assurerait le suivi de cette nouvelle réglementation afin de s'assurer de l'atteinte de l'objectif dans le délai spécifié, soit l'élection 2022.

Nous souhaitons donc le dépôt d'une loi qui pourrait s'inscrire dans le projet de la loi-cadre que la ministre de la Condition féminine d'alors, Mme Lise Thériault, a annoncée, en juin dernier, lors du lancement de la Stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes vers 2021.

Nous invitons également le gouvernement à honorer la motion qui a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale, en avril dernier, affirmant, et je cite, «que l'Assemblée nationale [...] s'engage à ce que la parité dans tous les secteurs de la société soit désormais l'objectif à atteindre». Et j'ajouterais que les élus que vous êtes avez l'occasion de prêcher par l'exemple. Voilà.

Le Président (M. Picard) : Nous allons débuter notre période d'échange. Mme la députée de Richmond.

Une voix : ...

Le Président (M. Picard) : Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Simard : Merci, M. le Président. Je me garde le privilège de pouvoir m'entretenir avec vous, mesdames. Alors, Mmes Lapointe, Paradis et puis Mailloux, un plaisir de vous recevoir en commission parlementaire aujourd'hui, d'autant que je connais votre groupe pour avoir été moi-même une collaboratrice dans les années 2000, en recherche marketing, où vous étiez déjà très interpelées par la question de la place des femmes en politique et donc de l'importance que ce sujet a dans notre société québécoise d'aujourd'hui.

J'ai lu attentivement votre mémoire. Bien sûr, vous l'avez mentionné tout à l'heure, vous mettez en gras l'importance pour vous de la parité femmes-hommes, donc, à l'Assemblée nationale, mais ailleurs dans les sphères politiques. Et je sais également que vous êtes très présentes sur le terrain, donc, pour faire en sorte justement de sensibiliser les femmes, que ce soit en région ou dans la Capitale-Nationale, à l'importance de s'intéresser, donc, à la politique. Et vous avez d'ailleurs reçu une aide qui vous a permis de réaliser des projets, donc, un projet, entre autres, sur le terrain, qui vous a amenés, entre autres, dans ma circonscription.

Alors, j'aimerais savoir, lorsque vous rencontrez les personnes sur le terrain, ces femmes-là, qu'elles soient élues ou encore qu'elles soient intéressées à le devenir, quels sont les freins qu'elles vous expriment le plus souvent et si, à travers le temps, vous voyez que ces freins sont les mêmes.

• (15 h 20) •

Mme Paradis (Micheline) : Je pense qu'il y a une évolution, on en a parlé tout à l'heure, avec la nouvelle génération. Et je pense aussi que... On parle souvent des freins, mais, à entendre les personnes qui m'ont précédée... On parle beaucoup des freins, mais on parle peu du plaisir de la vie politique. Et, vous avez entendu comme moi, elles ont été élues et elles veulent continuer de l'être parce qu'elles aiment le pouvoir politique pour ce qu'il donne, pour ce qu'il produit. Alors, j'imagine que c'est la même chose pour vous. Si vous êtes ici aujourd'hui, c'est que le pouvoir politique vous a attiré. Et je pense que maintenant les... peut-être les plus jeunes, mais on voit qu'à l'Assemblée nationale la moyenne d'âge, c'est autour de 50 ans à la fois pour les hommes et pour les femmes. Donc, il y a un plaisir à faire de la politique, et les personnes qui en témoignent, je dirais, sont les premières à reconnaître qu'il faut dépasser les freins.

Parce que, les freins, c'est vrai, il y en a, comme dans tous les milieux de travail, et spécialement dans des milieux où il y a un exercice de la démocratie. Je pense, entre autres, au milieu syndical puis au milieu coopératif. Si vous voulez vous faire élire, il y a toujours un peu de compétition. Donc, il y a un jeu politique à faire aussi. Et je sais que peut-être que notre directrice générale va pouvoir en parler de façon plus pointue que moi, mais, au-delà de ça, je voudrais qu'on insiste sur le fait qu'il y a du plaisir à faire de la politique. Il faudrait insister plus là-dessus, et peut-être un peu moins sur les contraintes. Parce qu'il y a un avantage. Dans le milieu coopératif, d'où je viens, on disait souvent à une conseillère sur un conseil d'administration : Tu pourrais postuler pour devenir présidente du conseil d'administration. Il y avait l'avantage, premièrement, de décider de l'agenda, des horaires, de sa plage... Il y avait plus de disponibilité parce qu'elle était en situation de décider. Donc, il ne faut pas négliger cet aspect-là.

Moi, je trouve qu'il y a des freins, et la solution, je pense qu'elle n'est pas nécessairement toujours au niveau personnel, mais c'est au niveau collectif. Et je reviens sur la responsabilité des partis politiques. En fait, c'est la loi du nombre. Je pense que, si les partis politiques avaient plus de femmes dans leurs rangs, il y aurait comme un milieu plus naturel, et les femmes auraient plus de prise, mais ce serait avec les hommes et non pas contre les hommes. Il y aurait une propension plus naturelle peut-être à faire évoluer notre projet de société. En tout cas, c'est ma conviction profonde. Peut-être que tu veux ajouter?

Le Président (M. Picard) : Mme Lapointe.

Mme Lapointe (Esther) : En fait, ce que je pourrais dire... Bien, j'aimerais ça parler du palier de l'Assemblée nationale. On a parlé tout à l'heure de l'importance des partis, et, moi-même ayant été militante, je sais que c'est une bonne école pour la politique. Il y a beaucoup de femmes, à l'heure actuelle, à l'intérieur des partis. Je pense, Mme Fournier, que vous disiez que c'est presque à parts égales dans votre parti. Donc, il y a là un bassin de candidates vers lesquelles les partis devraient se tourner. Pourquoi chercher des vedettes à l'extérieur du parti quand vous avez déjà là des centaines de femmes qui s'intéressent à la politique, qui font du bénévolat, qui donnent des heures et qui sont prêtes à prendre leurs places dans les comités puis dans les structures du parti?

Les dames de l'AFEAS, hier, qui étaient ici, disaient : Pour devenir candidate, il faut se faire connaître, puis, pour se faire connaître, il faut pouvoir prendre la parole. Mais, quand il y a 15 gars en avant de toi au micro puis que le temps est écoulé, bien, tu n'as pas eu le temps de faire valoir ton point de vue. Mais c'est aussi ça, voyez-vous, il y a toute la mécanique des partis, la façon dont ça fonctionne. Pourtant, il y a des partis qui ont trouvé des façons, avec des micros pour, contre, femmes, hommes, je ne sais pas trop, en tout cas, pour donner à chacun la chance de s'exprimer.

Vous savez, moi, ça fait des années, là, ça fait plus que 20 ans que je m'intéresse à cette question-là et que j'y travaille, et je me rends compte que c'est une question de volonté. La journée où on va décider collectivement qu'on la veut, la parité, on va l'avoir puis vite à part de ça. Parce que, comme les groupes précédents vous l'ont dit, on va mettre les moyens en place pour y arriver. Puis une loi, ce que ça fait, c'est que ça envoie un signal clair aux partis mais aussi à la population. Les femmes vont l'entendre, ce message-là, puis elles vont comprendre qu'elles ont une place dans la vie parlementaire.

Mme Simard : Je pense aussi, comme vous, que l'on parle souvent des mauvais côtés, que l'on parle des freins, que l'on présente rarement la politique sous un jour positif. Et vous avez raison que, plus on va en parler positivement, plus on va intéresser un grand nombre de personnes.

Sur le terrain, toujours, lorsque vous êtes en communication avec les élus que vous rencontrez et ces femmes intéressées à en savoir davantage via votre groupe, quelles sont les actions à succès que vous voyez, et comment, justement, vous faites pour attirer davantage leur intérêt?

Une voix : Vas-y.

Mme Lapointe (Esther) : Bon, écoutez, je vous dirais premièrement qu'effectivement l'importance des modèles et des témoignages des femmes qui sont en politique mais des hommes aussi. Parce qu'entendre des gens qui sont passionnés par la politique, c'est très inspirant. Et, dans le cas des femmes plus particulièrement, c'est que, dans le genre de session de formation qu'on organise ou, disons, d'événement qu'on organise, on laisse la place aux échanges entre les participantes et les élues invitées.

Puis je peux vous dire que quelque chose qui a eu beaucoup de succès aussi, c'est quand on a choisi d'inviter des élues de partis différents pour montrer qu'en politique ce n'est pas seulement du débat, de la guerre, de la partisanerie, que les femmes sont capables, au-delà des lignes partisanes, de se rencontrer et de venir rencontrer leurs semblables, justement, pour parler, pour témoigner jusqu'à quel point c'est intéressant, la vie politique. Puis à ce moment-là les participantes peuvent aussi leur demander : Comment vous vivez ça, vous, la conciliation travail-famille? Comment vous vous organisez, plus pratico-pratique, justement, quand vous avez à vous absenter pendant trois jours pour siéger à l'Assemblée nationale?

Donc, je vous dirais que ça crée des moments qui sont décisifs pour certaines femmes parce qu'elles voient que ce n'est pas inaccessible finalement.

Mme Simard : Merci. Vous avez, à plusieurs endroits dans votre mémoire, des références, par exemple, au faible nombre de statistiques qu'il peut y avoir ou encore au nombre d'études restreint sur le sujet. Maintenant, vous référez, justement, à des statistiques significatives peut-être manquantes, à des études portant sur les défis que doivent relever aussi celles qui sont déjà en poste, qui sont peu nombreuses, et aussi à une banque, donc, une base de données fiable qui pourrait être centralisée. Donc, est-ce que vous pensez que le milieu, actuellement, tous les regroupements qui s'intéressent à la cause des femmes en politique, pourrait avoir l'intérêt à rassembler toutes ces données dans un seul et même lieu comme vous le proposez dans votre mémoire?

Mme Paradis (Micheline) : Moi, je pense qu'il y a vraiment matière à évoluer de ce côté-là. Parce que, quand on dit qu'il n'y a pas de femmes en politique, il n'y a pas de femmes... on en cherche et on n'en trouve pas, je pense qu'on cherche peut-être à côté de la coche. C'est vrai qu'aller chercher... tu parlais de vedettes, Esther, mais pour aller chercher des personnes, par exemple, qui sont P.D.G. d'une grosse entreprise, qui gagnent quatre fois le salaire d'un député, peut-être que c'est difficile, je dirais, d'aller chercher cette personne-là, avec les risques que ça comporte. Mais, ceci dit, si on regroupe tous les... tout ce qui se fait par les groupes et par nous, il y a beaucoup, beaucoup de femmes qui seraient désireuses de se présenter.

Mais tout est dans la façon. Si les partis politiques... Écoutez, les femmes qui veulent se présenter, elles veulent le faire, mais elles cognent à la porte comment? Comment ça se fait? Tu cognes à la porte d'une personne? Le chef du parti? Comment tu rentres? Est-ce que c'est ton organisation dans ton comté? Il faut démystifier ces choses-là. Et peut-être que les partis politiques, encore une fois, ont une responsabilité de revoir leurs méthodes de recrutement. Moi, je pense qu'ils ont une occasion en or, en or, de se renouveler, quand on parle de repenser leurs méthodes de recrutement. Puis ils peuvent devenir eux-mêmes plus compétents dans leur recrutement, parce qu'ils vont aller chercher un ensemble de personnes avec des profils intéressants. Peut-être que tu veux compléter?

• (15 h 30) •

Mme Mailloux (Thérèse) : Bien, oui. Écoutez, effectivement, au Québec, on le sait, plusieurs vous l'ont dit, les femmes sont compétentes, elles sont plus éduquées, elles occupent des postes dans toutes sortes de domaines qui les préparent à la carrière parlementaire. Et je ne sais pas si les partis font de façon systématique la recherche dans des bassins où elles se trouvent. Il y a des élues, il y a des ex-élues, évidemment, au niveau municipal, mais il y a aussi tout le domaine des commissions scolaires, il y a le domaine des réseaux de la santé et des services sociaux où il y a des gestionnaires qui y travaillent depuis des années, il y a le milieu communautaire, il y a le milieu militant effectivement.

En parlant du milieu militant, d'ailleurs, c'était intéressant, on a trouvé des statistiques dans la fameuse recherche du DGEQ de 2014, où il semble que... alors que souvent les partis nous disent : Ah! on demande aux femmes et puis on reçoit des noms, etc., elles hésitent et tout... Et il y a des données, dans cette étude-là, de deux sources différentes, qui démontrent que malgré tout les militantes — ici, c'était une étude sur le Parti québécois et le Parti libéral — que les militantes se font demander moins souvent d'être candidates que les militants, alors des différences de 11 % à 27 % ou 28 %. Une autre recherche dit : Oui, non seulement elles se font demander moins souvent, mais elles sont exposées à moins d'intervenants des différents partis pour leur demander d'accéder à un poste politique.

Alors, je ne sais pas si c'est encore le cas, peut-être pas du tout, peut-être que ça a changé, mais c'est juste pour dire que, quand on parlait de frein tout à l'heure, il y a des freins qui existent à l'intérieur des partis et ils sont peut-être ceux sur lesquels il faut travailler le plus.

Mme Simard : Mme Paradis, je vais me permettre une question sensible. Vous avez souligné que le salaire des élus peut être un frein pour, par exemple, une personne qui est à la direction d'une entreprise plus importante, donc avec un salaire supérieur à celui que gagnent les élus de l'Assemblée nationale. Pour vous, quelle est votre perception à ce sujet? J'aimerais vous entendre davantage.

Mme Paradis (Micheline) : Écoutez, c'est sûr que, quand vous êtes une femme de carrière, vous avez gagné, dans une grande entreprise, des échelons, et Dieu sait s'il y a des contraintes aussi, alors c'est sûr que vous avez une sécurité d'emploi, en général, vous avez un salaire, vous avez aussi des avantages de toute nature. Est-ce que vous allez risquer de perdre ça pour aller en élection sans connaître le lendemain? On a vu des exemples ici de ministres qui ont fait plusieurs mandats et qui... autant hommes que femmes à part ça, et qui, le lendemain d'une élection, se sont retrouvés à chercher un emploi. Puis souvent ils avaient des diplômes universitaires, là, on ne doutait pas de leurs compétences.

Alors, vous comprenez qu'aller chercher dans des niches comme ça, ce n'est peut-être pas toujours... on n'obtient pas toujours la réponse qu'on souhaite. Moi, je dirais que... vous savez, des Valérie Plante, on a... sortie, je dirais, de nulle part, d'une certaine façon... Valérie, on la connaît parce qu'elle a siégé sur notre conseil d'administration, pas trop longtemps parce qu'elle s'est découvert une vocation de...

Une voix : Pour la politique.

Mme Paradis (Micheline) : ...pour la politique, exactement, mais il y a beaucoup de femmes comme ça qui sont pleines de talents, qui peuvent... qui ne demandent pas mieux que de prendre leur place, mais encore faut-il avoir, je dirais... prendre l'opportunité, etc. Alors, c'est dans ce sens-là qu'on dit qu'on devrait regarder dans des bassins beaucoup, beaucoup plus larges, et ça, je pense que... mais, nous autres, je vous le dis comme je le pense, on peut peut-être aider aussi les partis, mais, si on le fait, vous comprenez qu'on va aider tous les partis parce qu'on est non partisans.

Mais, ceci dit, il n'est pas interdit de donner peut-être des façons peut-être de faire ou de... mais les partis eux-mêmes, je suis certaine, ils peuvent réfléchir davantage pour faire des efforts supplémentaires.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme Paradis. Je cède la parole à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci à vous trois pour votre présence aujourd'hui parmi nous en commission parlementaire, mais pour votre présence aussi hier parce que vous avez... on a vu que vous étiez très assidues aux travaux de la commission, parce qu'évidemment c'est un sujet tellement important, puis on est très heureux qu'on puisse en discuter, là, à la Commission des relations avec les citoyens.

C'est un mandat d'initiative important parce qu'on parle quand même de la représentation de 50 % de la population. Ce n'est pas rien, je pense que ça doit tous et toutes nous interpeller. Et je suis tellement d'accord avec les propos que vous avez émis sur la responsabilité aussi des partis politiques, aussi pour faciliter non seulement le recrutement de candidatures, mais pour faciliter aussi l'accès aux structures militantes, parce que, si on ne vient pas d'un milieu qui est contact avec la politique, ça peut être extrêmement mystérieux comme façon de procéder.

Moi, je ne viens pas d'une famille particulièrement politisée. Quand j'ai voulu m'impliquer en politique, je ne savais même pas que c'était possible d'être membre d'une formation politique, puis je suis sûre que mon cas n'est pas exceptionnel. Donc, j'ai fait des démarches personnellement pour connaître de quelle façon je pouvais m'impliquer puis que je pouvais donner du temps, devenir bénévole, mais ce n'est pas nécessairement un réflexe pour beaucoup de gens. Donc, là-dessus aussi, les partis ont un rôle à jouer pour rendre ça plus accessible, puis ensuite, bien, quand les gens sont au sein des structures militantes, bien, voilà, c'est plus facile par la suite de pouvoir les recruter aussi comme candidates aux élections. Donc, ça, je vous rejoins.

Je trouve ça aussi intéressant que vous ameniez la fameuse question de la loi sur la parité qui a été discutée aussi par plusieurs autres groupes. Je pense qu'on n'aime tous pas ça, on dirait, parler de quotas ou de lois, d'obligations, tout ça, mais on se rend bien compte que, malgré beaucoup de mesures incitatives qui ont été prises, visiblement, on a atteint une espèce de seuil puis on n'est pas capables d'aller plus loin. Et peut-être, le temps justement de changer le moule, de voir qu'il puisse y avoir une représentation égale à l'Assemblée nationale, bien, pour quelques années du moins, ça sera nécessaire.

Donc, j'aimerais vous entendre davantage, justement, sur cette importance-là d'une loi sur la parité.

Mme Paradis (Micheline) : Les femmes, vous avez raison de le dire, c'est 50 % de la population. Alors, ce n'est pas une minorité. C'est une majorité au même titre que le 50 % d'hommes. Alors, il faut en tenir compte, je dirais, et en tirer les conséquences. Si on pense à une loi, c'est qu'on regarde un peu ce qui s'est fait ailleurs et on voit que les mesures incitatives, qu'elles soient de l'ordre de la bonification ou des pénalités, ça ne fait que cultiver le problème, je dirais, et ça n'apporte pas de solution.

J'ai vu, par la documentation, qu'en Argentine, imaginez-vous, en Argentine, en 1991, ils ont fait une loi pour la... puis ce n'était pas pour la parité, c'était au moins pour 30 % de la population. Bien, ils ont de la misère. Ils ont de la misère à tel point qu'ils viennent, en 2017, de voter une autre loi qui là les amène à 50 %, parce qu'il n'y avait pas d'autre solution pour responsabiliser, je dirais, les partis politiques.

Alors, nous, on voudrait qu'on fasse l'économie de deux lois. On voudrait arriver tout de suite à 50 %, parce que ça ne donne rien de tergiverser. Encore une fois, c'est ma thématique : si les listes des partis ne sont pas à hauteur de 50 %, comment vous voulez que le scrutin général soit... Là, on arriverait au moins à 40 %. Parce que, sinon, on va toujours être en deçà et on va rester à 30 %.

Mme Mailloux (Thérèse) : J'aimerais aussi ajouter que, bon, souvent, on présente une loi sur la parité comme étant vraiment quelque chose d'extraordinaire, de révolutionnaire, qu'il faut attendre le grand soir, et tout, mais d'abord, ça s'est fait dans de nombreux pays et c'est la méthode qui a fonctionné. Bon.

Ensuite, au Québec, est-ce qu'on est aussi loin que cela d'une loi sur la parité? Quand je regarde, moi, l'évolution de l'opinion publique, il y a une évolution. Peut-être qu'autrefois, il y a 10 ans, c'était plus bas, mais maintenant on a des taux un peu plus élevés. Vous-mêmes, les élus, vous avez été sondés par un sondage de La Presse canadienne, il n'y a pas longtemps et, si je ne m'abuse, il y avait six ministres interrogés et cinq voulaient un quota ou un objectif de 40 %; une autre, de 50 %. Et la plupart des députés, 93 % si je lis bien le sondage, voulaient aussi que les partis s'engagent à des objectifs numériques.

N'appelons pas ça des quotas, appelons ça des objectifs numériques, comme on le fait pour des programmes d'accès à l'égalité. Le mot «quota», c'est vrai, il a une connotation un peu privilège, donner aux femmes, enlever aux hommes, etc., et ce n'est pas ça. D'ailleurs, au Québec, nous avons deux autres lois qui déterminent l'intégration des femmes dans certains lieux décisionnels. Il y a la loi sur la gouvernance et il y a une loi aussi sur l'organisation du réseau de la santé et des services sociaux. Eh bien, dans ces deux lois, on dit que les listes peuvent être constituées à parts égales de femmes et d'hommes. Donc, on a déjà fait des législations là-dessus.

En plus, on a des mairies, là, qui nous montrent qu'elles sont très capables d'aller chercher des candidatures paritaires pour des villes de 100 000 et plus, Montréal, par exemple. On a aussi, je finis là-dessus, les chefs de parti. Les chefs de parti, on les entend dire souvent... en fait au cours des deux dernières années, on les a entendus dire : Oui, nous voulons une zone de parité, nous voulons que nos candidatures soient de... bon, qu'on augmente le nombre de candidatures et qu'on se situe au moins dans la zone de parité. La plupart ont dit ça; tous, je dirais.

Donc, où est le problème? Si la société veut bien, si la plupart des pays dans le monde, c'est comme ça qu'on progresse, si nos chefs de parti semblent être d'accord, quel est le problème avec une loi?

• (15 h 40) •

Mme Fournier : C'est très intéressant. Puis vous avez amené aussi le point sur le fait que les partis politiques sont financés aujourd'hui au Québec en majorité par des fonds publics. Donc, ils devraient avoir une certaine imputabilité aussi en contrepartie des fonds publics.

Mme Mailloux (Thérèse) : C'est vraiment un autre argument que nous mettons de l'avant tout le temps, c'est 75 % et plus maintenant des partis politiques qui sont financés par l'État, et l'État s'est engagé à des valeurs, à des principes comme celui de l'égalité hommes-femmes. Donc, est-ce que ce n'est pas naturel que, dans le fond, il répercute cette obligation-là sur des partis qu'il finance majoritairement?

Mme Fournier : C'est un fait. Sur un autre point, on a mené une consultation en ligne aussi de plus de 400 personnes qui ont pu répondre et on a eu tantôt, là, les résultats extraits des 76 femmes qui ont répondu au questionnaire, qui ont dit qu'elles envisageaient de se présenter à des élections à moyen, court ou long terme. Puis, quand on regarde les obstacles sur le plan de l'intérêt personnel et de la motivation, c'est comme très, très clair, là, celle qui ressort le plus, c'est la mention «je ne suis pas à l'aise avec certaines dynamiques politiques», à plus de 50 %. Donc, quand vous parlez de la culture à changer, là, dans votre mémoire...

Mme Mailloux (Thérèse) : On est contentes d'entendre ça parce que souvent on dit que c'est la conciliation travail-famille. Or, oui, la conciliation travail-famille est quelque chose qui peut être un obstacle, en particulier pour des jeunes parents, mais l'âge ici des femmes et des hommes, Micheline le disait, c'est 50, 51, 52 pour les femmes. Donc, on n'en est plus à un âge d'accouchement ou de jeunes enfants.

Peut-être que l'argument de la conciliation travail-famille n'est pas si important pour le travail parlementaire, bien qu'évidemment ça restera toujours important pour un parlementaire qui a une famille. Mais nous, sur cette question-là, nous essayons de la penser en termes des deux sexes, c'est-à-dire que ce n'est pas seulement les femmes, mais c'est les hommes aussi qui devraient être préoccupés par leur famille. Et donc c'est pour ça que nous suggérons des congés qui sont accessibles aux deux sexes et que ça inclut, par exemple, des congés pour proches aidants, parce qu'autant les hommes de 50 ans peuvent avoir aussi des aînés dont ils doivent prendre soin.

Mme Fournier : Tout à fait.

Le Président (M. Picard) : Merci, madame... Oh!

Mme Paradis (Micheline) : En complément, si je peux me permettre, quand on parle de climat de travail, c'est le nombre qui va faire la différence. Si vous arrivez en nombre suffisant, il y a bien des chances que vous ayez un mot à dire dans le climat de travail et dans la culture qui va se dégager. Alors, moi, je pense qu'on ne peut pas s'en sortir. Et j'ai vu par expérience aussi des conseils d'administration, dès que vous avez des femmes autour d'une table, le ton change, les arguments changent.

Je vous dis, le changement vient, et je trouve qu'au Québec... On parlait tantôt de cynisme et, entre autres, vis-à-vis la politique. Bien, je trouve qu'on a une occasion en or de rafraîchir le climat, si vous voulez savoir le fond de ma pensée, et je pense que le fait que les femmes puissent entrer, mais de plain-pied puis en quantité suffisante, ça peut faire une différence.

Le Président (M. Picard) : Merci. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Mais moi, j'ai envie de vous parler de mon expérience personnelle parce qu'il y a une image qu'on projette de la politique, pour laquelle... dans mon parti, je ne reconnais pas. C'est sûr que je fais partie d'un parti qui existe depuis six ans. On a eu deux élections générales, 14 ou 16 élections partielles. Donc, c'est sûr qu'on a dû ramer, puis, quand on est une jeune formation politique, mais on a des nouveaux militants. Donc, c'est assez récent, des nouveaux jeunes de la relève aussi.

Et actuellement, je fais partie de... j'étais militante quand j'ai fait le saut en politique. Donc, à deux semaines avant la dernière élection... du déclenchement de l'élection, le comté s'est libéré, le comté que j'avais envie d'avoir aussi parce qu'il faut qu'il soit libre. J'ai levé la main, et, en moins d'une semaine, mon entrevue était passée, l'enquête sur moi était faite et j'avais mon rendez-vous pour prendre mes photos.

Donc, ça, là-dessus, nous, on fait un travail vraiment... Puis on a des jeunes femmes qui sont militantes, qui ont déjà été annoncées, il y a des noms qui s'en viennent, autant dans les militantes, mais que dans les militantes relève aussi. Il y a des noms qui s'en viennent et on essaie de sortir des femmes pour qu'il y ait un effet d'entraînement aussi. On a un processus qui est simplifié, parce qu'on n'a pas d'investiture, parce que l'investiture, les femmes, on n'aime pas ça, parce que c'est de la lutte, on ne sait qui va se présenter contre nous, on n'aime pas ça. Ça, là-dessus, c'est une prérogative du chef, et le chef, le signal, c'est qu'on veut avoir des femmes, parité. Pas juste parité dans les candidats, mais parité dans les femmes qui vont être élues, parce que ce n'est pas tout de mettre des candidates partout, mais il faut qu'on ait la parité au niveau des personnes qui vont être élues. Puis c'est ce que le chef veut. Donc, on pose des gestes.

Et l'autre geste qu'on a posé, on l'a annoncé, puis je vous en parle parce qu'il a été annoncé publiquement, et ça a un effet actuellement, étonnamment, c'est le fait que les gens peuvent envoyer leur C.V. sur notre site Internet. Et étonnamment, on a plus de C.V. de femmes actuellement que de garçons. Donc, on n'a pas besoin d'une loi, on est proactifs. C'est sûr que je pense que, comme je vous dis, on met tout en place, puis je vous l'ai déjà dit, on a des équipes terrain qui se promènent dans toutes les régions du Québec, parce que le fait qu'on ait des élections à date fixe nous donne du temps, ce qui fait que ça fait déjà plusieurs mois qu'on travaille à aller chercher des femmes partout, alors que, quand on a une élection qui se déclenche n'importe quand, bien, il faut réagir à la dernière minute, puis là on n'a pas le temps. Puis c'est sûr que les élections, les multiples élections partielles nous ont enlevé énormément de temps, mais chez nous, peut-être parce qu'on est une nouvelle formation, le travail se fait, puis, même si on n'a pas la parité actuellement au caucus, je peux vous dire que la parole des femmes, elle est entendue au même titre que les hommes, puis ils savent très bien qu'on représente 50 % de la population.

Donc, je n'ai jamais senti de guerre, de lutte de pouvoir ou de différence entre les gars et les filles, même si on n'était pas au même nombre. Mais nous, le signal, il est vraiment lancé. M. Legault avait fait un discours... le chef, excusez, parce que je ne peux pas dire le nom, le chef, mon chef avait fait un discours voilà deux ans.

Une voix : ...

Mme Lavallée : C'est ça. Il avait annoncé 50 %, il l'a dans sa tête, il va tout faire. Est-ce qu'on va réussir? On ne sait pas, mais je peux vous dire que les pressions sont là, les équipes sont sur le terrain, puis l'ouverture qu'on a faite au niveau des C.V. sur le site a un succès. Donc, on a un taux de réponse intéressant. Donc, on les fait les efforts. Moi, je ne suis pas gênée, en tout cas.

Mme Paradis (Micheline) : Est-ce qu'il y a une question?

Mme Lavallée : Bien, je ne sais pas...

Mme Paradis (Micheline) : Écoutez, moi, j'ai le goût de vous dire : Bravo, bravo! Bravo, parce que vous avez pris des initiatives, et il y a une volonté politique. Mais c'est aussi une fragilité. Votre chef, pour le moment, il croit à la parité ou, en tout cas, à une participation plus importante des femmes. Est-ce qu'il sera toujours là? C'est toujours le problème. Le monsieur... le chef du Parti libéral...

Une voix : M. Couillard.

Mme Paradis (Micheline) : Pas M. Couillard, M. Charest, pour ne pas le nommer, il a déjà fait un Conseil des ministres paritaire. Il a passé même une loi pour obliger les conseils d'administration des sociétés... pour avoir la parité, mais ce n'est pas indéfini, ça. Il faut avoir une loi pour avoir une certaine pérennité. Sinon, on est toujours, je dirais, un peu soumis à la bonne volonté d'un chef qui croit qui a ses priorités.

Mais j'ajouterais aussi, c'est votre réalité, puis, encore une fois, je vous dis bravo. Mais je voyais aussi en fin de semaine que le Parti libéral s'est donné aussi... a accepté une proposition pour aller vers la parité aux deux tiers. La liste des candidats aux deux tiers. Moi, je trouve que ça chemine, mais vous comprenez que moi, je crois à la mathématique, et, si on veut arriver à 40 %, il faut chercher 50 %. Mais vous êtes bien partis. Je pense que vous êtes bien partis.

Le Président (M. Picard) : Mme la députée, une minute.

• (15 h 50) •

Mme Lavallée : Moi, je pense que votre travail que vous faites... puis c'est revenu tout à l'heure avec l'UMQ, puis la FQM, ce sont les femmes qui sont sur le terrain. Le travail que vous faites, il est tellement important pour les partis parce que vous êtes là. Puis même les femmes, les ex-femmes parlementaires ont un travail extraordinaire à faire d'aller à la rencontre des femmes puis d'aller leur expliquer leurs expériences, parce que c'est comme ça.

Moi, je me rappellerai toujours, quand j'étais plus jeune, d'avoir assisté à une rencontre de femmes parlementaires, d'ex-femmes parlementaires, et c'est toujours resté en moi. C'est important parce que ça démocratise, ça nous donne du concret, ça nous permet de poser des questions puis de dire : Oui, je pense que je suis capable, je pense que je me sens à l'aise. Donc, le travail que vous faites doit continuer, parce que vous nous aidez, vous et le regroupement des femmes parlementaires. Vous nous aidez énormément parce que vous êtes des modèles, vous êtes inspirantes et vous leur rendez leur part.

Le Président (M. Picard) : Merci, Mme la députée. Merci. Merci, Mmes Lapointe, Paradis et Mailloux.

Je vais suspendre les travaux pour quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 51)

(Reprise à 15 h 56)

Le Président (M. Picard) : Nous reprenons nos travaux en recevant le groupe Citoyenneté Jeunesse, qui est représenté par M. Francis Paré, président, et Mme Laureline Lasserre, chargée de projets. C'est bien ça? Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre exposé. Va s'ensuivre un échange avec les parlementaires. Donc, la parole est à vous.

Citoyenneté Jeunesse

M. Paré (Francis) : Alors, bonjour, M. Picard. Merci beaucoup de nous accueillir, Mme Vallières, tous les députés ici présents. Alors, Francis Paré, Citoyenneté Jeunesse, le rassemblement des...

Le Président (M. Picard) : ...

M. Paré (Francis) : Oui?

Le Président (M. Picard) : ...30 secondes, on ne nomme pas les gens ici par leurs noms de famille, c'est le nom du député.

M. Paré (Francis) : C'est bon.

Le Président (M. Picard) : Mais je ne vous chicanerai pas plus que ça, mais je vous le dis parce qu'habituellement je suis très permissif, mais là vous le dites dans la première phrase. Ça fait que je... Allez-y.

M. Paré (Francis) : C'est bon. Alors, bonjour. Bien, merci beaucoup de nous accueillir ici aujourd'hui. Donc, on vient pour l'organisation Citoyenneté Jeunesse, qui est le rassemblement des forums jeunesse régionaux du Québec.

Alors, juste pour vous dire très rapidement, on rassemble plus de 110 administrateurs et administratrices de plus de 10 forums jeunesse régionaux au Québec, et c'est des jeunes de moins de 35 ans, surtout les 16-35, la tranche d'âge qu'on touche. Nous, ce qu'on fait, c'est qu'on favorise la représentation des jeunes dans les régions. On veut encourager et maintenir la concertation entre les représentants des jeunes et les partenaires locaux et régionaux. On exerce toujours un rôle conseil en matière de jeunesse et on promouvoit bien sûr l'implication sociale à l'échelle locale et régionale chez les jeunes. Donc, c'est vraiment des actions par et pour les jeunes que Citoyenneté Jeunesse promouvoit via les forums jeunesse régionaux, et ici on vient parler en leur nom, bien entendu.

Donc, en fait, notre présentation... On a divisé notre mémoire qu'on vous a déposé en trois points principaux. Tout d'abord, on parle de participation citoyenne. Je pense que c'est notre créneau, donc on est très à l'aise de vous en parler en tant que levier de l'implication politique, l'éducation et la sensibilisation étant la deuxième partie, et on termine en parlant de la réforme des mécanismes politiques.

Donc, je vais y aller grosso modo avec les deux premières recommandations du mémoire. Si vous regardez, tout d'abord, on mentionne, à la page 5, la recommandation n° 1... Juste avant d'y venir, cependant, je tiens à vous dire que ce qu'on... Citoyenneté Jeunesse, on a déjà travaillé à compiler des informations sur la place des jeunes, que ce soit notamment dans les lieux décisionnels et consultatifs. Donc, on avait déjà travaillé avec le Conseil du statut de la femme en 2014 et on avait constaté qu'il y avait 26,6 % de femmes à l'Assemblée nationale et 6,5 % de jeunes de moins de 35 ans. Parmi ces jeunes, d'ailleurs, il n'y avait qu'un seul siège qui était occupé par une femme. Donc, c'était déjà des constats qu'on était bien conscients que ça existait, cette problématique. Et, depuis 15 ans, ce qu'on se rend compte, c'est que la politique québécoise ne parvient pas à présenter plus de 30 % de candidatures féminines. Et, bien entendu, il y a toujours des classements qui sortent avec l'Union interparlementaire, et, si le Québec avait fait partie de ce classement-là en 2015, on aurait occupé le 44e rang sur 193 pays, alors qu'en 1998, par rapport à 2015, on aurait occupé le 15e rang. Alors, on a subi un recul de plus de... d'environ une trentaine de rangs depuis quelques années.

Il faut savoir qu'en 2014 seulement 11 des 23 instances décisionnelles et consultatives analysées par le Conseil du statut de la femme et Citoyenneté Jeunesse se situent dans la zone de parité, c'est-à-dire entre 40 % et 60 %. C'est des chiffres qui sont quasi identiques à 2011. Donc, on est très conscients de ces constats-là et on croit qu'il est temps de questionner, donc, les mécanismes sociaux et institutionnels qui freinent une meilleure représentativité des femmes et des jeunes femmes dans les milieux décisionnels.

• (16 heures) •

Les forums jeunesse régionaux travaillent aussi à l'amélioration de l'égalité hommes-femmes. En effet, dans les conseils d'administration des forums, je ne sais pas si vous le saviez, on compte une très forte présence féminine, en fait «forte» étant une parité, quand même. Elles composaient plus de 56 % des conseils d'administration en 2007 et, en 2014, on parle de 61,3 %. Donc, il y a une belle continuité, une belle tendance qui se renforcit d'ailleurs, même.

Donc, on a plusieurs projets que les forums jeunesse régionaux font d'année en année et qu'ils continuent à faire. Je pense qu'on pourra en reparler un petit peu plus.

À la recommandation n° 1, ce qu'on vous mentionne, c'est qu'on croit que le gouvernement du Québec doit soutenir les projets et les organisations qui outillent les jeunes femmes dans la pratique de la vie associative et démocratique par la création d'opportunités de formation, de partage, de réseautage et d'engagement. Donc, c'est important de bien outiller.

Si on va, par la suite, avec la deuxième recommandation, tout d'abord, ce qui est important avec les forums jeunesse, c'est le travail de proximité qu'on fait. On est ancrés dans nos régions respectives. On parle des régions administratives. Ça rend quand même plus accessible l'expérience d'initiation au monde politique. Ce n'est pas nécessairement politique à 100 %, un forum jeunesse. Il y a plusieurs aspects thématiques qu'on couvre aussi. Mais c'est une belle incursion pour commencer à toucher, à avoir un contact avec le monde politique, entre autres.

La composition des conseils d'administration favorise d'ailleurs une représentativité territoriale, et par secteur d'activité, même. Donc, quand on parle du monde du travail, les sports et loisirs, l'environnement, le domaine de l'éducation, le domaine artistique, etc., il y a une très grande sensibilité, dans tous les règlements généraux de tous les forums jeunesse régionaux, à cet effet.

Et donc, à ce moment-là, ce qu'on croit aussi, c'est qu'afin d'attirer les femmes en politique il faut accorder une importance aux lieux qui préparent à la participation politique. Elles vont y réaliser des décisions qu'elles prennent. Ça peut avoir donc un impact qui est direct sur leur environnement et, en plus, de créer des contacts qui, souvent, perdurent jusqu'à la carrière politique. Donc, c'est bien de commencer à se créer un réseautage.

Si vous voulez une personne emblématique, là, dans l'actualité, Mme Cathy Wong, qui était l'ancienne présidente du Forum jeunesse de l'île de Montréal en 2012 et 2013, alors je me permets de vous dire qu'elle est maintenant au conseil municipal de la ville de Montréal, en plus d'être présidente de quartier. Donc, c'est pour vous dire que c'est des beaux exemples comme ça qui s'incarnent dans la société actuellement, qui sont d'actualité, encore une fois.

On croit donc que le gouvernement du Québec... Recommandation n° 2, page 7 : que le gouvernement considère les organismes jeunes, jeunesse et communautaires comme des lieux potentiels d'initiation à la politique et les finance de manière à ce qu'ils puissent poursuivre leur mission. Donc, on parle, bien entendu, d'initiation à la vie politique avec cette recommandation.

Je vais laisser ma collègue Laureline Lasserre poursuivre, qui est l'employée de Citoyenneté Jeunesse.

Mme Lasserre (Laureline) : Bonjour.

Le Président (M. Matte) : Bonjour.

Mme Lasserre (Laureline) : Alors, ça, ça résume la première partie de notre mémoire, qui est centrée sur la question de la participation citoyenne comme levier de l'implication politique.

Notre deuxième partie se penche beaucoup sur la question de l'éducation et de la sensibilisation dans la société en général. Et, là-dessus, j'aimerais me pencher plus précisément sur la question de l'éducation contre les stéréotypes de genre, parce qu'on a procédé, pour faire ce mémoire-là, à des entrevues. On a parlé beaucoup avec des jeunes femmes qui sont impliquées dans les forums jeunesse, qui sont impliquées dans la politique partisane ou non. Et ce qui ressort beaucoup de leur discours, c'est que ce sont des mécanismes sociaux dont il faut être conscient. Puis je suis sûre que je ne vous apprends rien en vous le disant, les Québécois et Québécoises grandissent avec une éducation qu'ils et elles perpétuent sans s'en rendre compte et qu'il faut absolument briser pour être capables d'atteindre vraiment une parité dans le monde politique, parce qu'on sait que les freins à la participation politique des femmes, ça se fait avant, là, avant qu'elles ne se rendent au Parlement dans la plupart des cas.

Donc, ce qui nous mène à la recommandation qui est à la page 10, la recommandation n° 7, que le gouvernement du Québec mette en place des campagnes de sensibilisation aux stéréotypes de genre, qui demeurent inconscients dans la société québécoise. Donc, c'est très important de comprendre que les femmes sont souvent éduquées de manière complètement inconsciente, avec une notion où elles vont être plus pertinentes dans les domaines où elles vont servir de soutien. Elles vont être là, dans les organismes communautaires, par exemple. Mais, quand c'est des rôles où il faut prendre les décisions, où il faut débattre, quelque chose qui est un peu plus agressif, entre guillemets, c'est la perception que les femmes en ont, eh bien, ça devient beaucoup plus difficile à accéder à ce monde-là.

Et puis c'est d'ailleurs quelque chose qu'on remarque dans les forums jeunesse, qui peut expliquer notre 60 % de présence féminine dans nos conseils d'administration, parce que les forums jeunesse, bien qu'on fasse une vraie différence dans l'environnement et qu'on fasse une certaine partie de travail politique, eh bien, quand on vend les forums jeunesse, bien, les gens perçoivent ça comme une présence régionale où on va aller soutenir ceux qui sont proches de nous. Et donc c'est beaucoup plus près de la socialisation politique des femmes, ce qui nous permet de beaucoup plus facilement les attirer, alors que, bon, le monde politique leur fait encore assez peur.

Et puis on aimerait aussi mettre l'accent sur, à la page 11, la recommandation 9, où là on s'attarde beaucoup à la question de la promotion de la place des femmes en politique. Donc, on parle de la sensibilisation dans la société en général. Et, en parlant avec des jeunes femmes qui sont en politique partisane ou non, on nous a beaucoup dit que, s'il y avait eu des programmes qui les avaient initiées à la vie politique durant leur éducation secondaire, elles auraient eu beaucoup plus de facilité à comprendre le monde de la politique, à se défaire des stéréotypes auxquels c'est attaché, et donc quelque chose dans le style, peut-être, de Chapeau, les filles! ou un programme qui est vraiment fait pour aller montrer aux jeunes femmes : Écoute, c'est possible d'aller passer une journée ou une semaine avec une députée ou un député, puis voir comment ça se fait, puis réaliser que c'est possible et que ça n'a rien de bien effrayant, finalement.

Je vous amène ensuite à la question de la réforme des...

Le Président (M. Matte) : Je vous invite à conclure, madame.

Mme Lasserre (Laureline) : Oui. Donc, à la question de la réforme des mécanismes politiques, la recommandation 10, on parle de la question des instances décisionnelles et consultatives. Donc, encore rappeler, là, que c'est quelque chose qu'on trouve superimportant puis que le gouvernement devrait vraiment prendre en tant que porte-étendard de l'égalité hommes-femmes.

Et puis ça, je suis sûre qu'on vous en a parlé, on va vous en reparler, mais la question du recrutement des partis politiques...

Le Président (M. Matte) : Merci. Maintenant, j'invite la députée de Richmond à poursuivre nos échanges pour 14 minutes. Madame.

Mme Vallières : Merci beaucoup, M. le Président. Merci à Citoyenneté d'être là comme vous l'êtes dans de nombreuses commissions parlementaires aussi. C'est toujours fort important que vous puissiez porter cette voix à des jeunes, et vous le faites de façon très professionnelle aussi, et toujours avec beaucoup de recherche. Alors, c'est ce qui est très intéressant.

Je vais revenir sur ce que vous présentez, mais j'aimerais profiter de votre présence comme groupe jeune dans cette commission pour faire ressortir certaines données préliminaires que l'on a sur la consultation en ligne en ce moment parce qu'il y a un fait très intéressant. Parmi un petit peu plus que 450 personnes qui ont répondu jusqu'à présent, il y a 76 femmes répondantes qui se disent potentiellement intéressées un jour à vivre la politique. Et je vous amène là-dessus, c'est que la plus grande proportion de ces femmes sont âgées entre 18 et 39 ans, le groupe 30-39 étant la plus grande proportion. Alors, je trouve ça fort intéressant justement d'avoir votre point de vue puisque, jusqu'à présent... Évidemment, la période pour remplir le questionnaire n'est pas terminée. On a jusqu'au 31 décembre pour le faire. Mais ça nous amène quand même des indications particulières sur à qui on s'adresse peut-être un peu plus particulièrement, et ça amène toute la pertinence de ce que vous nous présentez.

Il y a quand même... À travers tout ça aussi, on voit que ressort énormément... qu'elles ne sont pas à l'aise avec les dynamiques politiques. C'est — plus de 50 % — trop de contraintes et de désagréments. On y reviendra puisque vous en parlez également. Et ça, on l'a beaucoup, beaucoup, beaucoup entendu aujourd'hui, puis je ne sais pas si les collègues seront d'accord avec moi, les femmes pensent qu'elles n'ont pas un réseau social ou professionnel assez développé. Moi, je pense que c'est un peu un mythe. Il va falloir détruire ça ensemble collectivement parce qu'il n'est pas vrai qu'il faut avoir un si grand réseau quand on décide de se présenter en politique. Il faut, certes, avoir des idées. Il faut avoir cette confiance en soi pour dire : Go! je saute justement parce que j'ai ces valeurs et j'ai cette conviction que je peux faire changer... que je veux participer à la vie publique dans ce cadre politique. Le réseau va être, oui, un aidant, mais en même temps ce n'est pas, pour moi, quelque chose qui devrait faire obstacle à ce point-là, d'être parmi les deux éléments majeurs nommés par les femmes pour se présenter. Alors, on voit qu'il y a effectivement un manque d'information flagrant à ce niveau.

Le point de vue familial, j'en parlais tout à l'heure. Elles n'ont pas assez d'information pour savoir comment se présenter et/ou, encore, elles n'osent pas poser elles-mêmes leur candidature à un parti politique. Je pense qu'on en revient encore, pour ces jeunes femmes, à un manque d'information sur les procédures, comment on en arrive dans ce... On n'est pas juste ici, là, celles qui sommes assises autour de cette table, des bêtes bien particulières, là. On est des petites bibittes bien apprivoisables. Puis il y en a d'autres qui sont capables de le faire aussi. Mais il y a, on comprend, par ces chiffres, un manque d'information. Vous le notez également dans votre mémoire.

Et aussi un autre chiffre fort, fort, fort marquant, c'est qu'elles ne croient pas avoir les appuis financiers suffisants pour mener une campagne électorale. Ça aussi, c'est quand même troublant comme information parce qu'on n'a pas à payer pour faire une campagne électorale. Alors, il y a vraiment quelque chose là de majeur. Et ça rejoint ce que plusieurs groupes ont mentionné, cette perception que c'est seulement l'élite qui peut oser ou dire : Bon, bien, parfait, j'aimerais poser ma candidature. Ce n'est pas le cas. Il n'y a pas de coût. Et les employeurs ont cette obligation de par la loi d'offrir un congé sans solde et de réintégrer la personne si jamais elle n'était pas élue. Mais ça, c'est revenu vraiment, vraiment souvent et c'est une des très grandes préoccupations des jeunes femmes qui ont répondu au sondage jusqu'à présent.

• (16 h 10) •

Donc, vraiment, cette portion d'information est beaucoup plus... Il y a un manque réel, je crois, pour les procédures, la façon de fonctionner, qui peut accéder, comment on peut y accéder. Au-delà de la confiance en soi ou du sentiment de non-compétence dont on a parlé tout à l'heure, avant même tout ça, c'est qu'on pense qu'on ne sera même pas capables d'y aller. Ça fait qu'avant même de réfléchir : Est-ce que je peux... déjà, c'est comme si elles se mettaient un frein tellement énorme qu'elles ne vont même pas réfléchir plus loin nécessairement.

Donc, au-delà du plus profond et du structurel auquel vous parliez à quelques endroits dans votre mémoire, moi, je pense qu'il y a des choses fort intéressantes sur des mesures très pratiques, des mesures concrètes. Je suis vraiment très, très heureuse de pouvoir lire ça. Vous savez, Citoyenneté Jeunesse, que, par le biais de la Politique québécoise de la jeunesse, on travaille déjà étroitement ensemble justement sur cet important axe de la participation citoyenne. Donc, on en fait maintenant une mesure transversale au sein du gouvernement du Québec pour dire : Peu importent les milieux, peu importe qui vous êtes, d'où vous êtes, cette participation est essentielle. Et évidemment que les femmes en font partie. On est d'ailleurs déjà partenaires avec de nombreux groupes jeunes qui font déjà, en quelque sorte, certaines des recommandations que vous proposez. J'entends qu'on pourrait peut-être aller encore plus loin à ce moment-là.

Mais, si on regarde la recommandation 4, qu'on intègre des programmes de crédits de bénévolat, ça a déjà été des propositions. On l'a vu passer dans certaines plateformes électorales lors de campagnes électorales. Mais nous, on l'a insérée dans le Créneau carrefour, pour lequel vous connaissez déjà, là, les missions et les orientations, justement pour dire : C'est cette importance que les jeunes, dès le plus jeune âge, soient en contact avec leur milieu, un, qu'ils connaissent les possibilités d'action citoyenne à leur niveau, dans leur propre région, et comment on est capables de les y pousser... Je dis souvent que c'est non seulement aidant pour les organisations pour lesquelles ils vont aller oeuvrer à faire du bénévolat, c'est très aidant sur la connaissance de soi, sa connaissance de compétence aussi, parce que c'est par ce biais-là qu'ils peuvent aussi vivre des réussites, et c'est par les réussites qu'ils disent : Ah! bien, finalement, tu sais, j'ai été bon, ah! bien, le conseil d'administration de cet organisme peut m'intéresser. Mais c'est aussi un grand élément de persévérance scolaire. Puis on voit dans les différentes études que la scolarité va mener aussi davantage à l'intérêt de l'actualité, de la politique, et donc éventuellement aussi une meilleure connaissance des possibilités d'action. Alors, ça va jouer sur un très large champ.

Alors, là-dessus, je suis vraiment en accord avec vous, sur cette possibilité de peut-être regarder comment on est capables d'aller plus loin encore dans cette participation citoyenne dès le plus jeune âge. Et ce qui est intéressant, c'est que, oui, ça touche les jeunes femmes, mais en même temps il n'y a pas de discrimination. Donc, on agit sur tout le monde aussi en même temps.

Quand vous parlez d'associer les élèves plus étroitement à la gestion des établissements scolaires, oui, il y a plusieurs écoles qui le font. Comment on est capables d'aller plus loin? Il y a, entre autres, le projet... le Directeur général des élections est venu nous en parler, c'est Vox populi. Est-ce qu'il y a une obligation de parité dans l'organisation de Vox populi lorsque c'est mis en place dans les écoles? Ce serait intéressant de regarder si c'est une des possibilités qu'ils ont. Est-ce que c'est suffisamment étendu un peu partout?

J'entends, de par les différentes interventions qu'on a eues dans les deux dernières journées, qu'il y a aussi une grande méconnaissance des projets et programmes disponibles pour les écoles aussi parce que c'est la même chose pour la recommandation 9. Les programmes de stage dans les milieux politiques ou encore... qu'ils soient partisans ou pas partisans, il y en a énormément. J'invite les gens à aller voir même sur le site de l'Assemblée nationale tout ce qui est possible pour les différentes tranches d'âge chez les jeunes. C'est vraiment fort intéressant.

Personnellement, en circonscription ou encore sur la colline parlementaire, à chaque fois que quelqu'un a cogné à ma porte ou une organisation a ciblé un jeune pour dire : Bien, on aimerait ça qu'il puisse passer une journée... ou j'aimerais ça passer une journée avec vous, tout le monde a toujours eu cette journée. Oui, ça fait des petits, effectivement, parce que les gens apprennent davantage c'est quoi, ce rôle de député. Ça vient avec toute la valorisation du rôle du député aussi parce que c'est tellement vu comme étant une fonction qui est dans les plus bas échelons de la perception des gens dans la population. Alors, avant qu'un jeune dise : Oui, oui... ou qu'une femme dise : Aïe! Regarde, ça me tente, moi, d'aller faire ça, c'est sûr que ce n'est pas nécessairement toujours très, très naturel.

Puis, par rapport aux... Partout, vous faites mention d'avoir des exemples, avoir des modèles. Je reviens souvent là-dessus parce que les gens, presque unanimement, nous ont dit : Il faut davantage montrer les actions qui sont faites par les femmes élues en ce moment. Vous le voyez comment? Vous mentionnez : Continuer à financer des groupes qui le font sur le terrain. Mais, au-delà du financement à certains groupes, comment nous, les parlementaires, on peut être inclus à l'intérieur de ces démarches-là? Avez-vous déjà une idée précise ou vous restez plus à un niveau macro?

Mme Lasserre (Laureline) : À ce niveau-là, c'est sûr qu'on a fait beaucoup de... c'est beaucoup par entrevues avec des jeunes femmes qui nous ont dit : Bien, moi, je n'ai pas l'impression d'en voir beaucoup, des jeunes femmes — ou des femmes en général — qui sont dans le monde politique. À ce moment-là, je pense que le programme de stage va avoir une grande pertinence, dans la mesure où on a un programme de stage qui serait davantage publicisé parce que, vous le dites, ça existe, mais on ne le connaît pas, là.

Moi-même, je l'ai fait quand j'étais au secondaire. J'ai écrit : Est-ce que je peux passer une journée... Je l'ai eu, effectivement, mais j'ai eu à faire la démarche. Et c'est très peu de jeunes filles qui vont dire : Ah! mais je vais écrire, trouver une adresse courriel, etc.

Donc, les programmes de stage dont on fait la promotion, puis on pourrait suivre une députée, par exemple, une femme pendant une longue période, pendant une semaine par exemple, ça donnerait beaucoup plus de modèles. Puis de vraiment comprendre ce qu'une députée fait sur le terrain, ce serait superpertinent.

Également, ça peut être par des campagnes de promotion, ça peut être par les réseaux sociaux. On sait que les jeunes fonctionnent beaucoup comme ça. On sait que c'est une bonne façon de rejoindre la société en général, donc, d'aller faire une campagne. On dit : Bien, écoutez, on présente une femme puis ce qu'elle a fait avant, peut-être de manière à ce que les gens comprennent qu'avant d'être députée cette femme-là est une femme comme moi. Et moi aussi, je peux, après ça, me rendre dans le monde politique, et il n'y a pas une grande différence, finalement, entre elle et moi.

Mme Vallières : Merci. Recommandation 13, que je trouve très intéressante aussi, soit de mener une campagne de promotion auprès des jeunes femmes pour présenter la politique sous un jour qui correspond au milieu où elles sont majoritaires. Intéressant, oui. Mais, en même temps, est-ce qu'on ne vient pas cantonner déjà les femmes dans un milieu parce qu'elles sont majoritaires là, que c'est comme si c'était dans ce spectre-là qu'il faut les garder, alors qu'on est plutôt en train de dire que les femmes peuvent agir à différents milieux, différents niveaux? Mais est-ce que vous pouvez m'expliquer — parlez-m'en davantage — comment vous voyez le fonctionnement d'une telle mesure?

Mme Lasserre (Laureline) : En gros, ce que ça veut dire, ça s'inscrit dans notre message sur la socialisation politique, puis comment est-ce qu'on perçoit la place des femmes et comment les femmes se perçoivent. En attendant que le changement soit complètement opéré... C'est sûr qu'on le voit, à Citoyenneté Jeunesse. On le voit dans les organismes communautaires. Les femmes sont beaucoup plus présentes dans les rôles où elles comprennent qu'elles vont avoir un impact sur leur société, dire : Ah! je vais être là pour aider les gens, aider mes proches, aider les autres jeunes, aider les écoles. Donc, la composante «aider» est superimportante et rejoint facilement les femmes parce qu'elles sont socialisées comme ça.

Et la politique, ce n'est pas du tout l'image qu'elles en ont. La politique, c'est des gens qui vont débattre fortement, c'est beaucoup de critiques. C'est : Les gens vont me regarder, vont me pointer du doigt, ils vont regarder comment je suis habillée, ils vont en parler dans les médias. C'est sûr que c'est une grosse image qu'il faut absolument déconstruire parce qu'on sait très bien qu'entre travailler dans un organisme communautaire, et changer sa région, et puis être en politique, l'objectif est le même puis est de faire une différence dans notre société. Donc, c'est vraiment une question de marketing, finalement.

Mme Vallières : Recommandation 17 — parce que M. le Président m'indique qu'il reste vraiment très peu de temps — conciliation travail-famille, je comprends que vous gardez la notion «jeunesse». Parce que, moi, dans la conciliation travail-famille, j'ajoute aussi «vie personnelle». Ce n'est pas nécessairement des députées qui ont des enfants. On peut aussi avoir des députées qui peuvent être proches aidantes, on le voit de plus en plus aussi. Je comprends que vous avez votre chapeau jeunesse et que vous l'avez conservé.

Tout simplement vous dire que, pour moi, le moins de 14 ans, je ne sais pas comment ça a été fixé, cette date-là, pour vous. Personnellement, je suis maman d'adolescentes, donc elles sont plus âgées que 14 ans. Je pense qu'on est mère tout le temps de toute façon. Ça fait que, bref, ce n'est pas juste parce qu'on a des enfants en bas de 14 ans qu'on a besoin de se déplacer davantage. Mais en même temps il y a quelque chose là-dedans qui est un peu irréalisable aussi parce qu'on est souvent trop éloignées, de toute façon, pour se déplacer, dans nos horaires de semaine... et/ou géographiquement impossible.

Donc, ça, je pense que c'est une mesure qui pourrait être un peu plus discutable. Mais je comprends l'aménagement des horaires et l'aménagement de moyens facilitants, aussi, concrets. Merci beaucoup.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, nous allons poursuivre les échanges avec la députée de Marie-Victorin.

• (16 h 20) •

Mme Fournier : Merci, M. le Président. Merci énormément à vous deux d'être présentes aujourd'hui avec nous en commission parlementaire.

Évidemment, je trouve extrêmement pertinent aussi qu'on puisse avoir votre point de vue pour davantage comprendre la réalité des jeunes. Moi, c'est sûr que ça m'interpelle en tant que... Bon, je suis la seule femme en bas de 35 ans aussi à l'Assemblée nationale actuellement, puis la question de l'engagement des jeunes, donc, ça m'intéresse beaucoup. J'ai notamment récemment écrit un livre, d'ailleurs, sur le sujet puis j'ai compilé les statistiques de l'Assemblée nationale. Puis on voit très bien que, depuis quelques années, on assiste, en fait, au déclin de la représentation des jeunes ici parmi les députés de l'Assemblée nationale.

Donc, je pense que ça aussi, ça doit nous préoccuper. Puis je vois que, dans votre mémoire, vous avez quand même mentionné, oui, la place des femmes, mais c'est important aussi de se questionner sur la place aussi des différentes générations au sein de nos institutions parlementaires. Donc, je vous rejoins beaucoup là-dessus.

Je trouve qu'il y a des superbonnes idées que vous avez mises dans votre mémoire pour qu'on puisse travailler en amont aussi pour davantage recruter, pour qu'on puisse avoir un nombre plus grand, donc, de femmes qui se portent candidates, et donc qui sont élues ici, à l'Assemblée nationale. Puis j'aime beaucoup l'idée des stages parce que, vous l'avez bien dit, vous avez presque... J'avais les mots dans la bouche parce que moi aussi, j'accepte... Tu sais, il y a plein de gens qui m'écrivent, notamment sur les réseaux sociaux. J'accepte de passer du temps, tout ça, mais, vu que ce n'est pas quelque chose qui est inscrit, donc ce n'est pas un programme qui est formel. Mais je me dis qu'il y a tellement, peut-être, de jeunes femmes qui n'osent pas m'écrire malgré que j'essaie d'être accessible, tout ça, mais donc qui pourraient le faire via un programme comme celui-là, donc je pense que c'est une excellente idée.

Bien sûr, il y a des programmes aussi qui sont déjà mis de l'avant par l'Assemblée nationale, qui, je pense, sont intéressants. Vox populi en est un notamment. On a aussi tous les Parlements, jeunesse, étudiants, qui existent, qui permettent aussi aux jeunes de se familiariser aussi avec la vie politique, en quelque sorte. Puis c'est très intéressant parce que le Conseil du statut de la femme, hier, nous a donné des statistiques, dans leur mémoire, qui montraient que, par exemple, au Parlement écolier, donc qui se fait à la sixième année du primaire, 65 % des participants sont des femmes, sont des jeunes filles. Et, au Parlement des jeunes aussi, qui est troisième, quatrième secondaire, encore une fois, 65 % des participants sont des jeunes femmes. Là où le bât blesse, c'est à partir du collégial. Donc, avec le Parlement étudiant, ça tombe à 43 %. Et le Parlement étudiant des 18-25 ans, donc plus au niveau universitaire, c'est 31 %. Donc, on voit que ça décroît de façon significative à partir du collégial.

Puis donc je me demandais : Est-ce que vous aviez réfléchi sur la question? Justement, tantôt, vous parliez de la socialisation des genres notamment, donc les stéréotypes de genre. Donc, pourquoi, à ce moment-là, on assiste à un déclin, alors qu'on voit que, dans le fond, chez les plus jeunes filles, il y a un intérêt, là, manifeste pour justement être leader puis prendre sa place, mais que, dès qu'on atteint, par exemple, la majorité, l'âge de 18 ans, visiblement, ça chute dramatiquement?

Mme Lasserre (Laureline) : Bien, écoutez, ça, c'est une excellente question. C'est sûr que les gens qui sont sur nos conseils d'administration, souvent, bon, sont au-delà de 18 ans. Donc, on réussit finalement à recruter dans cette tranche d'âge là. C'est peut-être effectivement dans la manière dont le recrutement est fait, parce que peut-être que c'est plus facile d'aller chercher dans un milieu où on peut aller atteindre les gens directement dans les classes, les jeunes du primaire ou du secondaire. Dès qu'on passe au collégial et université, ça fonctionne plus en réseau déjà. Pour avoir des amis qui ont participé à ces genres de choses là, mais ça se recrute entre eux, forcément, les gens qui ont des intérêts similaires, qui s'intéressent à la politique, etc. Et puis, bon, déjà là, c'est peut-être simplement là-dedans... Mais, tant que la priorité n'est pas affichée d'avoir la parité, bien, forcément, ça s'oublie rapidement. Puis c'est une tendance sociologique normale, finalement, d'aller chercher dans son réseau très proche, et puis, plus il y a d'hommes, plus il y a d'hommes, finalement, dans ces genres de réseaux là, comme ailleurs, finalement.

Mme Fournier : Vous avez tout à fait raison. Aussi, à la recommandation 13, donc vous dites qu'on devrait faire une campagne de promotion auprès des jeunes femmes afin de présenter la politique sous un jour qui correspond mieux aux milieux où elles sont majoritaires. Puis il a beaucoup été question de la notion de la culture politique, la culture parlementaire qui, manifestement, rebute beaucoup de femmes. On l'a constaté dans la consultation dont on a fait mention tout à l'heure, là, plus de 50 % des femmes qui ont l'intention de se présenter en politique ont identifié ce facteur-là comme étant le facteur qui pourrait davantage les repousser. Mais en même temps je pense aussi que, oui, il y a des choses à changer au niveau parlementaire. Ça, c'est bien certain. Mais je pense aussi qu'il y a une perception très négative de la politique ou du milieu parlementaire qui est véhiculée.

Et donc je pense qu'on gagnerait à faire une telle campagne de sensibilisation parce que... On n'est pas parfaits, bien entendu, mais... Moi, si je prends mon exemple, ça fait un an maintenant que je suis députée puis j'ai vraiment été surprise de la façon que se font les débats ici. Je m'attendais vraiment à quelque chose d'ultrapartisan, une atmosphère de grande confrontation. C'est certain qu'il y en a. Puis, comme je le dis, il y a des choses qu'on peut améliorer. Mais c'est nettement moins pire que ce à quoi je m'attendais puis ce qui est, je pense, véhiculé dans l'espace public, notamment par les médias, parce qu'il y a énormément d'emphase, par exemple, sur la période des questions, qui est peut-être quasiment le moment le plus partisan, je pense, de la joute parlementaire. Et donc on ne voit pas tout qu'est-ce qui se fait à l'extérieur de ça. Les commissions parlementaires, les mandats d'initiative comme on a actuellement, qui n'est pas du tout partisan, bien, ce n'est pas connu à l'extérieur des murs ici. Donc, je pense aussi que ça serait une bonne chose à faire. Donc, j'appuie évidemment votre recommandation.

Puis j'ai bien noté également que vous êtes en faveur d'une législation pour l'atteinte de la parité. Donc, j'aimerais que vous puissiez nous parler un petit peu de pourquoi c'est important pour vous.

M. Paré (Francis) : Si je peux me permettre, d'entrée de jeu... Je pense que Laureline va me compléter là-dessus.

Je vous donne juste un exemple, là, de... Selon les données de l'Union interparlementaire, qui confirme que, lorsqu'on implantait des quotas, par exemple, il y avait une augmentation de l'élection des femmes... C'est-à-dire qu'en 2015 des élections parlementaires ont eu lieu dans 58 pays. Dans les 28 pays où il y avait un quota sur le genre, où le genre était utilisé finalement, les femmes occupaient 28,3 % des sièges. Ça ne réglait pas tout, mais c'était un incitatif. Et, dans les autres pays qui n'avaient pas eu recours à cette mesure, on parle de 13,5 % de femmes.

Donc, on croit, par exemple, avec une mesure du genre, qu'on vient compléter de façon systémique cette problématique-là qu'on a au Québec. Ça passe par l'éducation également, là. Ça commence dès le bas âge. C'est dans la culture du Québec. Mais également on se rend compte qu'il y a encore des efforts à faire et que la complémentarité doit se faire avec une législation également.

Donc, c'est un exemple que je voulais montrer avec la recommandation 14, notamment, où on parlait, d'ici 2022, les élections de 2022, d'avoir un quota qui oblige les partis politiques à avoir une zone paritaire d'au moins 40 % de femmes dans les candidatures. Je pense, ça prend un peu plus de temps, parfois, à discuter, à recruter des femmes aussi dans les partis politiques, mais je pense que ça permet d'avoir l'occasion de démystifier davantage aussi aux femmes que c'est un milieu qui leur appartient également et que l'Assemblée nationale doit être représentative de la population également. Donc, c'est pour ça qu'on trouve important d'amener cet aspect législatif là.

Mme Lasserre (Laureline) : Et, rapidement, pour compléter, le fait de mettre une législation en place, c'est le fait d'affirmer haut et fort qu'on est conscients qu'il y a des mécanismes qui conditionnent le recrutement et la mise en candidature des femmes.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Je vais céder la parole à la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Merci, M. le Président. Bienvenue. Vous êtes le premier groupe, je pense, qui représente les jeunes, hein, qui venez ici. Ça fait que félicitations. On apprécie parce que vous contribuez aussi à la réflexion qu'on a à faire sur la place des femmes en politique.

Je ne sais pas si vous l'aviez dit ou... J'ai essayé de le trouver dans vos documents. Il y a combien de jeunes qui sont membres de votre...

M. Paré (Francis) : Dans les forums jeunesse?

Mme Lavallée : Oui?

M. Paré (Francis) : On parle d'environ 110 administrateurs, administratrices, et un ratio d'environ 60 % de femmes, dans les 16-35 ans, là, qui sont impliquées dans les forums jeunesse. Il y en a 10 actuellement au Québec, bientôt plus.

Mme Lavallée : Donc, 110 à la grandeur du Québec. C'est ça, 110 administrateurs à la grandeur du Québec?

M. Paré (Francis) : Exactement, oui.

• (16 h 30) •

Mme Lavallée : Est-ce que vous avez mis en place... parce qu'il y a d'autres groupes qui ont passé avant vous, au niveau municipal, disons, qui disaient qu'il y avait... les groupes de femmes étaient importants pour sensibiliser les femmes à venir en politique, et tout ça, qu'ils avaient un rôle important à jouer. Puis je pense que vous, vous avez un rôle important à jouer justement sur la sensibilisation de la clientèle qui est auprès de vous, donc les jeunes femmes; les jeunes hommes aussi, mais les jeunes femmes. Est-ce que vous avez des mécanismes mis en place pour justement essayer de voir, parmi votre réseau, qui a des intérêts? Puis comment vous pouvez travailler avec ces gens-là pour essayer de les amener vers des réseaux politiques, que ce soit au municipal, provincial, fédéral, là, ce n'est pas... Est-ce que vous avez des choses mises en place ou vous avez l'intention d'en mettre en place?

M. Paré (Francis) : Si je peux me permettre, en fait, pour les forums jeunesse régionaux, du moins, comment on procède en général, c'est vraiment la bonne conscience des administrateurs, mais souvent, dans les règlements généraux, il y avait déjà des choses statuées. Ça fait plus de 15 ans qu'on existe. C'est très clair, dans les règlements généraux, on vise une belle représentativité dans la région, donc en termes territoriaux, en termes de domaine d'activité également, ce qui favorise à aller chercher où est-ce que, certains domaines d'activité, il peut y avoir une plus grande majorité d'hommes ou de femmes un peu plus âgées, vers la trentaine, ou la vingtaine, ou les étudiants notamment. Donc, on a toujours cette conscience-là.

Quand, admettons, il y a des sièges de libres, dans un conseil d'administration, bien, on regarde l'état actuel puis ayant la prémisse initiale qu'autant les hommes que les femmes sont compétents, intéressés, motivés à s'impliquer, que ce soit en politique, que ce soit dans le domaine plus communautaire, comme on touche avec les forums jeunesse. Mais on a un aspect des fois politique, quand on vient participer, notamment ici, ou qu'on touche à certains enjeux. Alors, c'est cette bonne conscience là qu'on a, mais l'incitatif est quand même dans les règlements généraux aussi.

Donc, ça nous rappelle toujours... ça nous ramène dans cet enracinement de toujours avoir cette réflexion-là avant de prendre des décisions et de recruter puis d'aller vraiment solliciter plusieurs partenaires qu'on a dans la communauté. Donc, on a plusieurs partenaires nationaux qui ont des ancrages dans toutes les régions, alors on peut solliciter, viser davantage. Et, si on veut plus de femmes, par exemple, aussi on peut... en ayant la prémisse qu'autant les hommes que les femmes sont compétents et qu'ils peuvent s'impliquer également.

Mme Lavallée : Puis, depuis le temps que vous existez, est-ce que vous avez une façon de mesurer l'impact que votre réseau a eu sur l'implication des femmes? Vous avez parlé des conseils d'administration, mais, au niveau électoral, est-ce que vous avez des statistiques ou des choses comme ça qui peuvent indiquer... ce que vous réussissez à faire? Vous avez parlé tout à l'heure d'une femme qui est maintenant à la ville de Montréal, là, mais est-ce qu'au fil des années vous avez des statistiques qui démontrent que vous avez vraiment eu un impact dans la vie des jeunes, puis, oui, il y a des gens qui sont allés dans des conseils d'administration, oui, il y a des gens qui sont allés au niveau municipal, provincial, fédéral?

Mme Lasserre (Laureline) : En termes des statistiques, pas à ce que je sache. Par contre, dans la mission des forums jeunesse, forcément, c'est sûr qu'on a de l'impact, et on en parle dans le mémoire. Mais il y a une des parties de ce qu'on fait qui est d'aller faire de la sensibilisation dans les conseils étudiants, d'aller... On a travaillé notamment avec le Forum jeunesse de l'île de Montréal, il fait des formations pour les jeunes, dont les jeunes femmes qui pensaient se lancer en politique municipale, pour les outiller, pour leur expliquer, bon, comment est-ce qu'on fait pour monter une campagne, comment est-ce qu'on fait pour avoir du financement, avoir des appuis, etc., de l'appui dont les jeunes ont vraiment besoin, donc cette espèce de formation, la partie formelle, puis la partie échange aussi, qui est très importante, en organisant des 5 à 7, des rencontres et des discussions pour que les jeunes, surtout les femmes qui ont beaucoup d'insécurité, souvent, par rapport à leur implication politique, puissent parler, dans un contexte qui est informel, de ce qui leur fait peur, de leurs questions. Et donc c'est sûr que ça, ça a un impact sur la proportion des jeunes qui vont effectivement se lancer en politique.

Mme Lavallée : Je trouve ça intéressant, ce que vous racontez, parce que vous avez... il y a une grosse partie de votre document qui axe beaucoup sur la formation et l'éducation, puis je pense qu'au niveau de l'éducation... Moi, je ne suis pas de votre génération, mais je me souviens, toute jeune, que, même à l'école, à chaque fois qu'il y avait un changement de gouvernement, on apprenait le nom des ministres puis les ministres de quoi. Ça fait déjà... c'est une autre époque, ce n'est plus ça.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Je vous remercie.

Mme Lavallée : C'est déjà fini?

Le Président (M. Matte) : Le temps passe très vite en bonne compagnie, hein? Alors, j'inviterais la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques à poursuivre les échanges pour les trois prochaines minutes.

Mme Massé : Oui. Alors, bonjour. Merci d'être là. Trois minutes, c'est court, alors je n'aurai pas le temps de m'exprimer longuement, sinon qu'en écoutant votre présentation, regardant le mémoire, ce que je sentais, c'est qu'il y avait quelque chose d'important de faire quelque chose d'ensemble. Ça ne peut pas être une petite mesure ici, une petite mesure là, mais quelque chose d'ensemble, de A jusqu'à Z, de la prévention, de l'éducation jusqu'à... y compris toute la déconstruction de la socialisation, qui est une job à temps plein pour bien des années.

Ceci étant dit, et c'est là-dessus que je veux vous entendre, depuis une quinzaine d'années, le gouvernement du Québec avait un programme À égalité pour décider, qui a, sur une base régionale, permis à plein de femmes de toucher à tout ce que vous dites dans votre mémoire, pas particulièrement les jeunes mais des jeunes aussi. Est-ce que je comprends, donc, que la dimension éducative doit aussi s'appuyer dans un cadre normatif, donc d'avoir une loi qui vienne dire : Voilà, fin de la récréation, c'est 50-50, c'est 40-60? J'aimerais vous entendre.

Mme Lasserre (Laureline) : Là-dessus, bon, effectivement, on voit ça dans un contexte qui est global, et effectivement c'est important. Par contre, ce n'est pas nouveau que ça doit être global. On a effectivement mis des mesures en place, qui ne sont peut-être pas suffisantes, mais ça montre qu'on ne peut pas seulement viser la parité, à l'Assemblée nationale, en mettant des mesures éducatives, et il faut prendre une position claire. On le voit avec les chiffres partout dans le monde.

Nous, ce qu'on demande, c'est d'avoir une proportion des candidatures proposées par les partis, candidatures féminines, qui se situe dans une zone paritaire de 40 % à 60 % de femmes. Parce qu'on le sait, une fois qu'elles sont mises en candidature, le vote des Québécois n'est pas sexiste, ils ne sont pas convaincus que les femmes sont moins pertinentes, et donc c'est vraiment une fois qu'on offre aux femmes la possibilité d'être candidates, où on va les chercher, même si ça prend plus de travail, une fois que, ça, c'est fait, le gros du travail est fait. Donc, oui, il faut mettre une législation en place pour qu'on n'attende pas 50 ans pour que les choses changent vraiment.

Mme Massé : Les gens sont venus nous dire que, puisque 75 % du financement des partis politiques est assumé par des fonds publics, que nous serions légitimes de parler de 50 %, puisque c'est ce que la population féminine représente au Québec. Vous en pensez quoi?

Mme Lasserre (Laureline) : Tout à fait d'accord.

M. Paré (Francis) : Tout à fait d'accord. Puis on veut que ça se répercute même financièrement. Quand on dit, notamment, que, dans le Conseil des ministres, on voudrait bien que, le budget géré par les femmes qui sont ministres également, ce soit un 50-50, pourquoi pas?, au lieu de 9 % ou 20 % à peine, dans certaines provinces, notamment ici.

Le Président (M. Matte) : Alors, je vous remercie.

Mme Massé : Bien, je vous remercie.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie de votre contribution, d'avoir participé. M. le président, M. Paré, je tiens à vous informer que vous êtes le premier homme qu'on a écouté durant ces deux jours de consultation.

Une voix : ...

Le Président (M. Matte) : Non, non, ce n'est pas un imposteur. Je trouve que nous autres aussi, les hommes, on a un rôle à jouer pour faire en sorte d'augmenter la participation, là, des femmes en politique. Et je trouve ça intéressant aussi de voir, la jeunesse, que vous vous impliquez puis que vous voulez favoriser l'augmentation de l'implication des femmes en politique.

Alors, je vous remercie et je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 38)

(Reprise à 16 h 41)

Le Président (M. Matte) : Alors, la commission reprend ses travaux. Je vous rappelle que vous avez 10 minutes pour faire votre présentation...

Des voix : ...

Le Président (M. Matte) : 10 minutes. Et je vous invite à vous présenter et à présenter la personne qui vous accompagne.

Chaire Claire-Bonenfant — Femmes, Savoirs et Sociétés

Mme Demers (Guylaine) : Alors, bonjour. Merci de l'invitation. Mon nom est Guylaine Demers, je suis la nouvelle titulaire de la Chaire Claire-Bonenfant à l'Université Laval, et ma collègue, Hélène Lee-Gosselin, qui est la directrice du nouvel institut, que nous avons aussi à l'Université Laval, Femmes, Savoirs, Équité et Égalité.

D'entrée de jeu, juste vous dire que notre domaine, ce n'est pas du tout la politique — on en fait mais on n'est pas en politique. Moi, je suis du domaine du sport, hein, mon champ d'expertise, c'est les femmes en sport. Et je vous dirais que je peux changer souvent nos sports pour politique, politique, sports, puis il y a beaucoup de similitudes. Et ma collègue est du domaine des affaires. Alors, on va essayer d'apporter, en fait, un éclairage peut-être un peu différent, malgré que ce qu'on entend depuis tout à l'heure, il y a vraiment beaucoup, beaucoup de choses qui y reviennent, et je pense que le message est assez clair.

Ce qu'on a décidé de faire, parce que ça fait une longue journée pour vous, notre présentation est vraiment sous forme abrégée. On a pris une présentation PowerPoint vraiment télégraphique pour faciliter le suivi. Et la première diapo qu'on a, en fait, c'est pour présenter... Quand on aborde la problématique du faible pourcentage des femmes, il faut le voir vraiment, on en parle depuis tout à l'heure, dans sa globalité. Alors, il y a le niveau individuel, interpersonnel, organisationnel et social, et c'est à tous ces niveaux-là qu'il faut travailler si on veut qu'il y ait des changements. Et ça, ce que ça veut dire, ce modèle-là, c'est que le manque de femmes en politique, le manque de femmes dans des postes de leadership, ce n'est pas un problème de femmes, c'est un problème de société. Et ce modèle-là, pour nous, est très parlant.

Et vous aurez aussi l'occasion... Le deuxième, j'ai fait le détail en fait de quels sont les barrières et les aspects qui sont facilitants et, de façon très sommaire, les problèmes. On ne veut pas passer beaucoup de temps parce que vous les connaissez. On en a ciblé trois qui rejoignent aussi nos domaines respectifs en sport et dans le monde des affaires.

Il y a beaucoup de souhaits, beaucoup de désirables, mais le désirable qui n'a pas de moyens, bien, il ne se passe rien. Et, quand un problème interpelle tout le monde, c'est l'affaire de tout le monde, bien, il n'y a personne qui ne fait rien parce que c'est le problème de tout le monde. Ça fait que... Alors, on se ramasse, oui, oui, tout le monde... Il n'y a personne qui est contre la vertu, et ça, ça devient vraiment une problématique d'avoir des politiques qui n'ont pas de dents, alors qu'il n'y a pas d'imputabilité, il n'y a pas de reddition de comptes. Alors, super belle politique, mais, si tu ne t'y conformes pas, ce n'est pas grave, essaie de faire mieux la prochaine fois. Bien, je ne fais pas mieux la prochaine fois, il n'y en a pas, de conséquences. Alors, ça, pour nous, c'est un premier problème important, cette notion d'imputabilité qui doit se retrouver dans les propositions qu'on va mettre sur la table.

Même chose, c'est ressorti, puis même avec le groupe qui nous a précédés, sur l'importance de préparer la relève. Absolument. Donc, au-delà de dire : Ça nous prend un quota ou ça nous prend 50-50, parfait, mais maintenant il faut préparer ce bassin-là pour ne pas non plus mettre les femmes dans des positions précaires.

Et finalement de dire... d'analyser la demande. Et ça, c'est une problématique qui nous interpelle beaucoup, comme chercheures, d'avoir des données probantes mais longitudinales, à long terme, de savoir qu'est-ce qu'on connaît, est-ce que... On met des choses en place, ça porte-tu fruit? Ça a-tu un impact? Alors, ce sont vraiment les trois problèmes sur lesquels on veut présenter les solutions.

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Alors, les solutions qu'on vous propose, il y en a un inventaire assez long, on les a organisés en catégories. Premièrement, pour faire contrepoids au premier problème, celui de sortir de l'énoncé du désirable, bien, comment est-ce qu'on s'y prend? Bien, premièrement, ça va prendre des moyens. Et, pour ça, ça prend non seulement des politiques qui énoncent un désirable, mais il va falloir se donner des cibles, des échéances, des plans d'action qui sont conséquents, des données de qualité pour être capable de suivre la progression. Est-ce qu'on a des impacts dans la direction qu'on veut?

Ça va prendre des outils d'évaluation. Une des choses qu'on sait en comportement, qu'il s'agisse de comportements individuels ou organisationnels, avoir des voeux, on veut faire telle chose, ça ne se passe généralement pas. Avoir des incitatifs, donc, mettre en place des bonnes raisons qui font en sorte qu'il y a des conséquences positives à court terme, quand on fait les bonnes choses, ça aide. Mais, souvent, ça prend aussi le bâton, donc des menaces si on ne fait pas les choses désirables qu'on vient d'évoquer.

Ça prend des responsabilités — qui est responsable en cette matière? — et de l'imputabilité. Pour nous, imputabilité, c'est que les gens qui sont responsables doivent être capables de déclarer publiquement qu'est-ce qu'ils ont fait et qu'est-ce que ça a donné. Quand on devient responsable de quelque chose personnellement, il y a plus de chances qu'on mette les efforts et qu'on s'engage résolument dans cette direction-là.

Et, finalement, ça ne se prend pas tout seul. Ça prend des ressources. On pense à des ressources financières, généralement, mais ça prend aussi des savoirs et des savoir-faire. Et, en matière de changements, qu'il s'agisse de changements organisationnels ou de changements institutionnels, il y a aussi de l'expertise qui a besoin non seulement d'être développée, mais aussi d'être mobilisée pour faire les bonnes choses mais bien les faire.

Le développement de l'offre. Alors, si on veut qu'il y ait des femmes qui se proposent pour des fonctions en politique, encore faut-il, comme le disait le groupe de tout à l'heure, qu'elles aient une image réaliste et positive du rôle qu'elles vont jouer. Alors, il faut se poser la question : Comment est véhiculée l'image du travail politique dans la société? Comment les jeunes ou les personnes de tous les âges y sont exposées? Et comment on les prépare en ce sens? Alors, pour toutes sortes de métiers, on se prépare. Comment sont les filières pour préparer les gens, jeunes femmes comme femmes à d'autres époques de leur vie, vers ces rôles sociaux?

Il faut alimenter le pipeline, de sorte que les filles, elles n'ont pas besoin à être bonnes du premier coup. Les femmes ont appris progressivement, donc elles ont le temps d'apprendre. Mais pour ça, il faut qu'elles soient exposées à des situations qui les mettent en situation d'apprentissage de la diversité des savoirs et des savoir-faire qui sont requis. Il faut qu'on puisse entrer à différents moments dans la carrière aussi. Alors, c'est excellent qu'il y ait des jeunes femmes, c'est excellent qu'il y ait des femmes à d'autres étapes de la vie qui ont d'autres expériences professionnelles et sociales puis qui peuvent, donc, apporter des savoirs, des savoirs d'expertise mais aussi des savoirs d'expériences aux débats publics.

Quand savent-elles qu'il y a des opportunités? Alors, oui, on a des élections à date fixe, ce qui nous aide à savoir à quoi le calendrier peut ressembler, ça aide. Ces places à pourvoir, comment on les apprend? Les partis jouent un rôle, mais est-ce qu'on pourrait s'organiser pour qu'il y ait davantage d'information sur ces occasions d'apprendre les rôles politiques à différents niveaux dans notre société? L'offre de stages, on a entendu d'autres personnes en parler tout à l'heure. Ils existent, oui, mais il y en a combien? Comment est-ce qu'on sait que ça existe? Et ces stages-là, c'est très bien qu'il y en ait pour les jeunes à l'école. Pourrait-il y en avoir pour des gens à d'autres moments dans l'étape de leur vie?

Des cibles ou des quotas. Alors, dans notre cas, nous estimons qu'il n'y a jamais rien eu qui a empêché les organisations à faire des choses pour que les femmes viennent en politique. Mais l'ont-elles fait? En l'absence de quotas, de notre point de vue, la démonstration a été faite que le temps court, et ça prend du temps à corriger le déséquilibre historique. Alors, nous, on dit que... on est bientôt en 2018, c'est plus que temps. D'autres ont démontré, dans d'autres juridictions, l'effet d'accélérateur du changement. Il est plus que temps qu'on le fasse.

• (16 h 50) •

L'autre avantage, c'est que, quand on a des cibles ou des quotas, c'est sur le calendrier, il y a des échéances, ça mobilise les énergies pour que les choses se fassent et ça nous force à changer nos habitudes. Parce que, si on fait les choses d'une certaine façon, c'est que nous avons, individuellement et collectivement, non seulement une socialisation, mais aussi des réflexes et des habitudes qui... On le sait, dans nos vies personnelles, en l'absence de cibles claires et de moyens pour changer, les forces de l'inertie entretiennent ce qui se passe.

Les réseaux. Oui, ça prend des réseaux, des réseaux pour savoir ce qui se passe, des réseaux pour avoir de l'information utile, de l'information concrète, avoir du soutien personnel, donner de la visibilité aux femmes qui sont en poste. On ne les voit pas assez. On ne les voit pas assez dans des rôles positifs aussi, ces femmes qui sont en politique.

Financer les initiatives de sensibilisation, c'est absolument impératif, de sensibilisation, de formation, de simulation auprès des jeunes pour qu'ils soient mis en situation pour qu'ils l'apprennent à tous les âges de la vie.

Alors, voilà quelques pistes qu'on vous invite à explorer. Et, pour nous, il est absolument impératif qu'il y ait des actions à tous les niveaux du modèle que Guylaine a présenté tout à l'heure. Des actions ponctuelles, hétéroclites, ce n'est pas une bonne idée. Ça prend des efforts concertés.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Maintenant, j'invite la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré à poursuivre les échanges.

Mme Simard : Oui. Merci, M. le Président. Mesdames, merci d'être là. On termine avec vous, et c'est un privilège de pouvoir vous entendre, sachant que la chaire elle-même, Claire-Bonenfant, est une chaire reconnue qui a une notoriété importante et que je respecte personnellement énormément. Alors, merci d'être là, de nous partager votre vision.

Vous nous avez fait part de problèmes, vous nous avez identifié des solutions. Effectivement, on pourrait parler longtemps de ces solutions, mais je voudrais vous amener sur celle que vous avez... j'ai numéroté votre document, là, je me suis permis de le faire, mais la solution n° 2, lorsque vous parlez du développement de l'offre. Vous avez mentionné tout à l'heure que l'on doit maximiser, finalement, les efforts positifs et faire en sorte que les femmes voient plus positivement le milieu de la politique et s'y impliquent davantage. Quelle serait la meilleure façon, selon vous, d'y parvenir et de faire en sorte justement que la perception du milieu, de l'environnement politique, soit plus intéressant et plus attractif pour les femmes?

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Je vous dirais, les femmes sont sollicitées de mille et une façons. Elles ont à s'occuper d'elles, à s'occuper de leurs proches, ce sont les rôles auxquels elles ont socialisé. Elles s'impliquent dans leurs communautés, souvent dans des fonctions de services, des fonctions d'exécution, notamment, parce que la socialisation ne leur a pas rendu évident qu'il était important qu'elles jouent des... qu'elles pouvaient elles aussi jouer des rôles clé, de un. Mais, de deux, le travail de soin et le travail de gagner sa vie occupent beaucoup de leur temps.

Donc, c'est clair que pour qu'elles jouent un rôle plus important en politique locale, régionale, nationale, non seulement il faut que les rôles soient intéressants, mais il faut que l'infrastructure sociale leur permette de se dégager d'une partie du travail et du travail de soin pour qu'elles développent progressivement ces savoirs et ces savoir-faire et qu'elles aient le sentiment que, un, elles sont capables, deux, que c'est plaisant.

Donc, à mon avis, il ne faut pas juste viser l'habilitation des femmes à être en politique nationale. Il faut favoriser l'habilitation des femmes d'être dans des postes de leadership à toutes les étapes de la vie sociale. Alors, ça, c'est une façon de nourrir le bassin, puisqu'elles auront fait l'expérimentation des rôles de leadership tant à l'école primaire, secondaire, cégeps, dans les associations caritatives et sociales autant que dans des rôles décisionnels. Ça se construit, cette expertise-là. Donc, à mon avis, il faut absolument viser ce genre de familiarisation.

Mme Simard : Quelle est la meilleure façon de la construire?

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Bien, tout à l'heure, il y a un groupe qui disait : Il va falloir déconstruire la socialisation des filles, qui les exclut de la sphère publique ou qui fait qu'elles s'autoexcluent. La socialisation, si vous regardez comment nos jeunes... Vous avez peut-être pris connaissance de l'avis du Conseil du statut de la femme sur les stéréotypes de sexe qui existent encore à l'école primaire, secondaire. Donc, si on les prend à 25 ans, il y a tout ça à déconstruire. Qu'est-ce qu'on attend pour que le sujet de la déconstruction des rapports sociaux de sexe soit partie intégrante de la formation des enfants et, par conséquent, de la formation des enseignants et des enseignantes à toutes les étapes du régime scolaire? Donc, oui, je propose un grand chantier, mais je pense qu'on n'en sort pas.

Mme Simard : Mme Lee-Gosselin... Oui?

Mme Demers (Guylaine) : Oui. Bien, c'est ça, je pense, vous aviez aussi eu une page, une espèce de tableau, en fait, qui vient de... oui, c'est ça, d'une stratégie qu'on est en train de mettre en place au Canada pour les femmes en sports puis, comme je disais, femmes en politique. Quand on parlait tout à l'heure du modèle... Puis il faut le voir à tous les niveaux d'intervention si on veut qu'il y ait des changements. Et je pense que, si on ne le voit pas dans sa globalité, on va encore avoir des actions très isolées.

Et, si je regarde dans le domaine des recommandations, on parle au niveau des politiques, des programmes, des stratégies de communication. Et, pour moi, ces trois gros morceaux là, le premier, entre autres, de stratégie politique et de stratégie de programme, d'innover, je pense que, le milieu politique comme le milieu sportif, on est ancrés dans nos traditions, puis maudit que c'est dur à nous faire bouger. On est vraiment... tu sais, on a nos façons de faire, on a fait ça de même, puis c'est ça, l'histoire, puis comme ça.

Et, si on regarde juste nos façons de fonctionner, en sport, quand on a des entraînements le soir, la fin de semaine, vous êtes pris ici parfois jusqu'à tard la nuit. Alors, pourquoi est-ce qu'il n'y a pas quelqu'un qui dit : O.K., là, on va revoir nos façons de... juste de s'asseoir en Chambre puis de... Quand moi, je regarde les débats, là, je n'ai pas le goût de m'en aller en politique. J'ai travaillé avec des femmes en politique. Carole Théberge, je l'ai amenée en sport, sur le conseil d'administration de l'INS, et je lui disais : Mais comment tu as fait? À quoi tu as pensé de t'en aller là? L'image que j'avais était ultranégative.

Alors, pour moi, si je regarde les stratégies qui sont là, le rôle des médias, éduquer les journalistes... Quand on parle d'une femme en politique, on peut-u parler d'autre chose que son rouge à lèvres puis la robe qu'elle portait aujourd'hui? On peut-u parler... Puis, en sport, c'est la même chose quand on parle des athlètes féminines : Elle est donc bien belle, elle. Tu sais, c'est de ça dont on parle. En politique, c'est la même chose. Alors, les médias ont un rôle à jouer. Comment ils parlent des femmes en politique? Même chose pour nous, est-ce qu'on peut revoir nos façons de s'asseoir, puis quand tu as des commissions, quand vous siégez, etc.? Puis je ne connais même pas tout ce que vous avez à faire seulement.

Et même chose au niveau des politiques. Et je reviens à cette imputabilité. Si on veut donner le goût aux femmes de savoir qu'il y a du soutien et que je ne serai pas toute seule là-dedans, je vais être secondée, et on va reconnaître que j'ai peut-être des problématiques qui sont particulières au fait que je suis une femme, puis c'est ça, la vie, là. Mais, bon, je vais vous laisser du temps pour parler aussi.

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Je me permettrais d'ajouter. Je pense que le plaisir d'être en politique, le plaisir d'avoir un impact, le plaisir de contribuer à résoudre des problèmes qui sont des problèmes dans la vie du monde, autour de nous, ça, ça fait partie des secrets trop bien gardés. Et voilà une autre façon d'amener les personnes de tout âge, et en particulier les femmes, à découvrir les autres aspects de la politique. Il faut que ce soit incarné dans des personnes qui le font, qui le disent de façon convaincante et qu'on sorte de la joute, qui est l'image trop dominante quant à moi.

Le Président (M. Matte) : Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

Mme Simard : Le mot «plaisir» revient vraiment souvent dans ces consultations. Et c'est vrai, on a toujours matière à présenter les choses plus positivement que négativement. Et il y a de très belles choses. C'est qu'ils se font de belles expériences qui se vivent en politique. Vous avez entièrement raison qu'on devrait promouvoir davantage ce volet de notre fonction.

Vous avez parlé des médias. Vous avez parlé en fait de la façon dont parfois la femme peut être décrite dans les médias. Est-ce qu'au niveau politique vous voyez une différence, vous, personnellement, lorsque vous regardez le traitement fait dans les médias?

• (17 heures) •

Mme Demers (Guylaine) : Ah mon Dieu! c'est clair. Absolument. Tu sais, il y a une... Pour moi, par exemple, on évite de nommer des noms, mais la femme doit faire attention pour ne pas, par exemple... Le choix des bijoux qu'elle va porter, il ne faut pas que ça ait l'air trop riche, tu sais? Il y a des politiciens ici, au Québec, qui sont millionnaires et que juste le suit qu'ils ont sur le dos doit valoir plusieurs milliers de dollars, mais ça, ça passe sous le radar. Mais, la femme, si elle fait un peu trop riche, un peu trop... bien là, on va questionner. Alors, on a toujours... le double standard est frappant. Et même dans la façon de... c'est ça, de s'habiller, de se maquiller, de se coiffer, parce que les journalistes vont noter ces aspects-là. Ils m'ont dit : Elle a donc bien l'air fatiguée aujourd'hui. C'est donc bien rare qu'on entend ça d'un politicien. Alors, il y a toujours ce double standard là.

Puis, moi, comme femme qui écoute la télé, la radio, etc., bien, ces commentaires-là, je les enregistre puis je me dis : Mais mon Dieu! c'est constamment qu'il y a ce double standard, qu'il faut faire attention comme je m'habille, comment je me porte. Alors, pour moi, il y a vraiment un manque d'éducation pour les journalistes dans les médias. Puis on en parle... Je reviens à mon monde du sport, mais les journalistes en sport, ils ont zéro formation sur femmes et sport, zéro plus une barre. Je ne suis pas certaine qu'il y a des cours Femmes et politique pour les journalistes, pour dire, bon, bien, qu'est-ce que ça veut dire, puis d'avoir ce regard critique là, sur vraiment analyser le discours. Nous, en sport, on l'a fait, puis c'est frappant comment ils parlent des athlètes féminines puis masculins. C'est le jour et la nuit. Et je serais curieuse de voir s'il y a des études qui analysent justement le discours, comment on parle des femmes, en politique, puis comment on parle des hommes. Il y aurait peut-être un travail à faire auprès justement des programmes de formation universitaire en journalisme, là, pour traiter de cette question-là des genres.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. J'invite la députée de Richmond à poursuivre les échanges. Il vous reste trois minutes.

Mme Vallières : Merci beaucoup. Et pourtant les journalistes sont aussi, fort probablement, déjà très sensibilisés parce que les journalistes femmes ont déjà une réalité bien particulière dans leur propre monde aussi. Ça devrait ou ça pourrait normalement amener certaines façons de voir ou, du moins, de couvrir l'actualité de façon différente aussi.

Mais, au-delà des médias... On les a pointés un peu du doigt aujourd'hui à quelques reprises, mais je pense que c'est la culture générale de notre société aussi parce que, dans nos activités, même à l'intérieur de nos propres circonscriptions ou que ce soit via les réseaux sociaux aussi... Les médias, c'est aussi le reflet de la société. On le vit également, ce jugement. Les conseillères de la Fédération québécoise des municipalités sont venues nous parler tout à l'heure. Puis une en particulier aussi, avant ça, nous a mentionné : Ça a été très long... moi, souvent, c'est à la fin des rencontres où les gens, je sens qu'ils me donnent un petit peu de crédibilité parce qu'avant je suis vue comme une jeune, je suis vue comme une femme en plus. Aïe! là, je suis obligée de travailler deux puis trois fois plus fort avant qu'ils voient autre chose que ça. J'ai déjà relaté certaines expériences en commission parlementaire aussi, quand j'étais la seule autour d'une table, les commentaires que j'ai eus de certains groupes qui étaient venus nous voir, et là de me dire... Pendant que j'étais en train de parler ou qu'on échangeait sur du contenu, ils analysaient plutôt le côté féminin de la chose. Donc là, je fais comme : O.K., mais, au-delà de ça, dans nos échanges, c'était quoi?

Donc, effectivement, oui, ça fait partie un peu de notre quotidien. Il faut y travailler. Comme, souvent, vous parlez, là, de bijoux, etc. Dans le paraître, ça peut aussi être le contraire. Moi, c'est plutôt le contraire. Souvent, on me dit : Ah mon Dieu! Tu n'as pas l'air d'une députée. C'est supposé avoir l'air de quoi, une députée? Ça fait que... Mais c'est quand même particulier parce qu'un homme ne se fera jamais dire ça, tout simplement. Et je crois que c'est en démystifiant aussi tout ça qu'on fait partie de la solution, là, évidemment, puis en présentant peut-être justement des modèles différents de ce à quoi on est habitués de voir parce qu'il n'y a pas rien qui dit à nulle part qu'un député, ça a un uniforme x, puis que ça ressemble à telle affaire, puis que, bon...

Donc, c'est vraiment très, très intéressant. Et ça m'amène à votre solution 6, de donner de la visibilité aux femmes en poste pour qu'elles offrent justement une diversité de modèles dans des rôles attrayants. Pas mal tout le monde l'a dit, mais comment on peut faire ça, comme parlementaires? Vous le voyez comment, concrètement? Est-ce que c'est par le biais des organismes communautaires qu'on a rencontrés, des groupes qui travaillent pour la... qui militent pour la place des femmes? Est-ce que c'est via l'Assemblée nationale? Est-ce que c'est via les partis politiques? Vous voyez comment ce rôle? Tu sais, concrètement, vous voudriez nous voir faire quoi finalement?

Le Président (M. Matte) : Est-ce que c'est possible de répondre en 12 secondes?

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Essentiellement, pour moi, la réponse est simple : Il faut qu'elles soient partout. Donc, il faut que les femmes soient exposées. Il faut aussi qu'elles aient des portefeuilles quand elles sont au gouvernement, des portefeuilles qui sont conséquents, de sorte qu'on les voit dans des rôles aussi centraux qu'on a pu voir les hommes dans des rôles centraux.

Le Président (M. Matte) : Si vous voulez poursuivre, j'inviterais la députée de Marie-Victorin. C'est sur votre temps encore.

Mme Fournier : Tout à fait. Bien, merci d'être là en commission parlementaire.

Mais justement j'avais la même question que la députée de Richmond. Donc, vous pouvez poursuivre sur le sujet. C'est ma première question que j'avais notée.

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Vous avez mis le doigt sur un élément important tout à l'heure, le déficit de confiance dont les femmes sont l'objet quels que soient les rôles publics et les rôles de leadership qu'elles jouent. Et moi, j'ai beaucoup travaillé chez les femmes professionnelles, les femmes professeures d'université, les femmes cadres supérieures dans les organisations, les femmes membres de conseil d'administration. Le déficit de confiance de l'autre envers elles, c'est un élément largement documenté et dont les femmes d'ici, comme les femmes d'ailleurs, parlent. Donc, ça, c'est un des résultats de cette socialisation qui a besoin d'être transformée et ce sera un travail de longue haleine.

Par conséquent, il faut les rendre visibles, ces femmes qui occupent des postes clés, parce qu'elles deviennent des contremodèles par rapport à ces automatismes qu'on a intégrés. Ce n'est pas parce qu'elles sont des contremodèles que, nécessairement, nos croyances profondes sont fragilisées. Mais, en l'absence de ça, comment est-ce que nos jeunes, comment est-ce que nos femmes de tous les milieux peuvent s'imaginer si elles ne voient pas des modèles à partir desquels elles sont capables de se reconnaître? Quand les modèles sont trop limités dans leur diversité, bien, la gamme du possible qui est offert aux femmes est beaucoup plus étroite que la gamme des possibles qui sont offerts aux hommes. Donc, il me semble qu'on a un effet à contrer ici.

Mme Demers (Guylaine) : Puis j'ajouterais aussi... Dans le... On a parlé beaucoup des quotas qui vont faire que, bon, si... Et moi, je suis pour le 50-50, là, je ne suis pas pour le 40-60, là. On est 50-50 puis, même, on a un peu plus de femmes, même, au Québec, 50,48 %, je pense, mais, bon... Et, pour les quotas, bon, évidemment, ça rend les femmes plus visibles, mais, à chaque fois que vous amenez les quotas, qu'est-ce que les femmes répondent?

Mme Fournier : ...seulement parce que je suis une femme.

Mme Demers (Guylaine) : Bien, oui, parce que je suis compétente. Alors là, donc, tu assumes que tous les hommes qui sont là sont compétents. Bon, je pose la question, mais je pense que, si on y va dans cette voie-là, de dire le quota... effectivement, on va voir plus de femmes. Si c'est 50‑50, normalement, je vais voir autant de femmes que d'hommes dans les médias. On souhaite que les portefeuilles, effectivement, importants soient donnés à des femmes. Mais avec ça vient aussi le message, pour les femmes elles-mêmes et pour la société en général, que les quotas, ce n'est pas pour dire : Bon, bien, O.K., on est obligés de le faire, puis il n'y a pas vraiment de femmes compétentes. Pas du tout. C'est juste que le système... C'est vraiment systémique. Le système fait en sorte qu'on n'a pas accès. Mais le message, quand je parle du rôle des médias et comment on va aussi éduquer les médias... si, demain matin, on arrivait avec une loi, puis il y a des quotas maintenant, qu'il n'y ait pas cette dérape-là, de dire : Bon, bien, là, on met les femmes parce que c'est obligatoire, mais qu'il n'y aura pas de femmes compétentes, nécessairement. Et ça, pour moi, c'est important.

Et finalement le langage. Le langage, c'est extrêmement puissant. On travaille beaucoup, beaucoup là-dessus du côté du sport. Et, pour moi, il y a du langage qui est inacceptable. Et encore une fois, quand j'écoute ce qui se passe des fois à l'Assemblée nationale, je suis un petit peu découragée. Et, pour moi, le langage, c'est aussi quelque chose qui peut faire en sorte qu'il y a des femmes qui vont s'autoexclure d'avoir une carrière en politique quand on voit comment on en parle et comment on se parle un envers l'autre.

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Moi, j'aurais envie de vous proposer que le mot «quota», étant tellement chargé émotionnellement, notamment parce que les gens qui sont contre l'égalité ont vraiment eu beaucoup de succès pour faire croire à tout le monde, et tout le monde l'a cru, que «quota» voulait dire : On met des femmes incompétentes dans les postes... Il faut souligner que le doute sur la compétence survient quand il s'agit d'une femme qui est dans un poste et pas quand il s'agit d'un homme. Ça aussi, c'est le reflet d'une socialisation qui a associé compétence et expertise aux hommes et qui, pour toutes sortes de raisons, ne l'a pas associé aux femmes. Donc, on a ça à déconstruire.

Donc, pour renouveler le langage, moi, je suis prête à accepter le mot «cible» à la condition que la cible, ce soit 50 %. Et pourquoi 50 % plutôt que l'espace de parité? Parce que, dans un contexte où on a cet héritage du passé, je crains fort que la zone de parité 40-60 va vouloir dire que le 40 % va devenir le maximum de représentation des femmes, alors que, pour moi, dans une société démocratique, c'est une obligation que la diversité des savoirs, des talents et des expériences sociales soit autour de la table, donc 50-50 puisqu'elles sont 50 % dans la population.

Le Président (M. Matte) : Merci. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Fournier : Oui. Mais vous avez tellement raison. Moi, ça me fâche énormément quand j'entends ça, dire : Ah! mais on ne va pas mettre des femmes incompétentes seulement pour remplir les quotas. Franchement, au contraire, ça laisse entendre justement que les femmes seraient moins compétentes que les hommes, mais ce n'est pas du tout le cas. C'est qu'il faut faire plus...

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : ...intégrées.

Mme Fournier : Tout à fait. Puis, c'est ça, même, c'est souvent des femmes qui vont avancer ces arguments-là. Mais, au fond, ce qu'on veut, c'est que les partis fassent davantage d'efforts pour aller convaincre ces femmes compétentes de se présenter en politique, parce qu'il y en a, mais ça prend plus de temps. Il faut plus d'efforts. Puis c'est la même chose quand on parle d'un conseil des ministres. Vous parlez des portefeuilles. Puis, même, tu sais, si on fait des efforts pour avoir plus de femmes dans les conseils des ministres, quand on regarde les gros portefeuilles puis par qui est contrôlé l'argent de l'État, c'est encore extrêmement majoritaire masculin. Et donc ça aussi, il faut faire les efforts nécessaires aussi pour se dire : Bien, si on veut avoir un Conseil des ministres qui est paritaire aussi, bien, faisons les efforts pour aller recruter ces femmes qui peuvent occuper les postes, donc, avec les plus importants portefeuilles. Donc, je vous rejoins totalement là-dessus.

Et donc je me demandais aussi... Vous avez communiqué un outil pour élaborer des recommandations. Est-ce que vous pouvez nous en parler un peu plus?

• (17 h 10) •

Mme Demers (Guylaine) : Oui. Bien, c'est ça, c'est qu'en fait la situation des femmes en sport au Canada, c'est la même chose. Si vous regardez le nombre d'entraîneures, le nombre de femmes directrices générales, présidentes de conseil, les chiffres sont pénibles. Vous regarderez aux Olympiques, là, qui s'en viennent il y a combien de femmes qui coachent, et, c'est ça, ça vous prend des longues-vues puis vous les cherchez longtemps.

Et, dans cette optique-là, on a mis en place... En fait, on est en train d'écrire des recommandations pour les gouvernements provinciaux, territoriaux, et on a pris justement le modèle... et de dire qu'il faut s'attaquer... s'attaquer n'est peut-être pas un bon mot, mais, à tous les niveaux, donc autant individuel que social... et d'arrêter de dire : On va donner des formations en leadership aux femmes. Tu sais, c'est super, là, mais, juste ça, elles reviennent dans le système qui n'est pas accueillant puis qui n'est pas inclusif. Donc, ça ne règle pas le problème.

Le Président (M. Matte) : Je vous invite à conclure.

Mme Demers (Guylaine) : Alors, on est parties vraiment de ces catégories-là pour dire : Si on travaille dans chacune de ces boîtes-là, on a plus de chances que la société va finir par changer.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. Mme la députée de Repentigny, pour les cinq prochaines minutes.

Mme Lavallée : Merci beaucoup. Bienvenue. C'est intéressant, tout ce que vous avez dit.

Et on revient sur le fameux quota. Dans le système actuel, c'est difficile. C'est difficile parce que, un, il faudrait penser à une réforme du mode de scrutin où on aurait un vote proportionnel et on pourrait avoir des listes, ce qui n'est pas le cas actuellement.

Le deuxième problème, c'est que certains partis ont une organisation qui fait en sorte qu'il y a le système d'investiture. Les investitures, bien, c'est les gens de comté qui... bon, il y a la vente de cartes de membres, puis c'est qui va en vendre le plus, puis tout ça. Donc, cette machine-là, on ne peut pas dire : Bien là, vous n'avez pas le droit de... C'est difficile à mettre en place. Si tu n'as pas d'investiture, tu viens d'éliminer cette partie-là, et là tu viens de prendre le contrôle, dire : Si je veux avoir un quota puis je n'ai pas d'investiture, là, j'établis ma volonté d'avoir autant de femmes que d'hommes, puis c'est plus facile.

Mais, pour nous, en tout cas, je pense que la solution vient avec une réforme du mode de scrutin déjà en partant, une réforme des institutions ici parce que ça fait longtemps que c'est pareil, puis, quand on veut que ça soit un peu plus... Ce n'est pas sexy. Il faut changer la couleur pour attirer les femmes. C'est mon premier mandat, mais, honnêtement, là, je pense qu'il faut changer tout ça. Puis, je pense, ça va attirer aussi... Oui, on fait un beau travail dans les commissions parlementaires, puis c'est là qu'est le travail intéressant. Mais toute cette structure-là, qui est lourde, qui est vieille, il faut la changer aussi, puis on a un travail à faire.

Puis, quand on lit les analyses sur ce qui s'est fait dans les pays scandinaves, c'est que, bon, on parle de réformes des institutions, donc le mode de scrutin qui est complètement changé, et l'implication des mouvements féministes, des groupes de femmes qui travaillent sur le terrain, qui vont faire le travail pour solliciter ces femmes-là, qui vont aller les chercher, qui se fait de façon non partisane, parce que ce que j'ai aimé de l'UMQ puis de la FQM tout à l'heure, c'est que ces organisations-là, qui sont non partisanes, font le travail terrain. Donc, elles ne sont pas rattachées à un parti politique. Donc, elles ont un travail, elles vont les solliciter puis elles réussissent à aller en chercher.

Ce qu'il faudrait qu'elles fassent... Ces organisations-là qu'on a actuellement, les groupes de femmes qui font du travail terrain, sont apolitiques, mais elles nous aident. Comme les organisations d'ex-politiciennes aussi, ça aide aussi. Mais je pense que de passer... quotas dans le système actuel, de la façon dont les partis sont organisés puis dans le mode de scrutin qu'on a, je ne vois pas comment ça va pouvoir se faire. Il faut vraiment avoir un gros changement.

Mme Lee-Gosselin (Hélène) : Je pense que vous avez nommé un des enjeux. Un parti politique, c'est une organisation qui s'est donné des règles. C'est une création humaine. On l'a créé? On peut le détricoter puis le créer autrement si, par la façon dont il fonctionne, il engendre des effets qu'on estime indésirables en 2018. C'est de ça dont il est question.

Alors, oui, les groupes de femmes se sont occupés de la place des femmes dans la société, mais ce n'est pas une affaire de femmes, corriger ce déséquilibre-là, c'est une affaire de société. Elles sont un catalyste. Elles sont une mauvaise conscience qui rappelle l'enjeu. Nous sommes, dans cette salle, une majorité de femmes. Moi, j'aurais aimé ça être devant une salle à parité parce que ça aurait été un signal important que c'est un enjeu de tout le monde, O.K.? Donc, oui, les groupes de femmes, vous pouvez compter sur elles pour continuer, et les organisations féministes auxquelles j'appartiens aussi, parce que le travail n'est pas terminé, loin de là. Mais encore faut-il que nos organisations, à tous les niveaux, décident que c'est leur problème aussi et qu'elles se privent d'une expertise.

Et j'aimerais revenir sur l'intervention de Mme la députée, précédemment, quand elle parlait de la compétence. C'est aussi une notion qu'il va falloir déconstruire. Il n'y a pas longtemps, pour faire de la politique au Québec, il fallait être un médecin ou il fallait être un juriste. Il me semble qu'il y a pas mal d'autres métiers, d'autres savoirs et savoir-faire requis dans une société pour prendre des décisions qui impactent tout le monde. On fait des changements progressivement.

Mme Lavallée : Vous avez un bon point, qu'effectivement, si on avait eu la présence de plus d'hommes ici, peut-être qu'on aurait eu un échange qui aurait été porteur, là, différent, parce que c'est le fun aussi d'avoir l'image des hommes. Mais je pense que les hommes sont ouverts, dans plusieurs partis, actuellement, là...

Le Président (M. Matte) : Je vous invite à conclure.

Mme Lavallée : C'est ça, je pense qu'il y a des changements qui s'installent. Il y a de plus en plus de personnes plus jeunes, une autre génération où les hommes ont peut-être un peu plus d'ouverture ou cette sensibilité-là.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie.

Mme Lavallée : Je la sens actuellement, mais, en tout cas, oui, ce n'est pas fini.

Le Président (M. Matte) : J'invite la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques à poursuivre.

Mme Massé : Oui. Alors, bonjour. Merci beaucoup de nous rappeler que la place des femmes dans la société... La question qu'on se pose ici, dans le mandat d'initiative, ne s'adresse pas juste au niveau de la politique. C'est ça que vous venez nous rappeler, c'est que c'est un défi de société et, surtout, ce n'est pas un problème de femmes. Moi, je trouve ça extraordinaire qu'on se fasse rappeler ces choses de base là. Mais, ceci étant dit, les femmes, même les femmes en politique, on n'attend pas. On prend les affaires, on relève nos manches puis on dit : On y va. Ça fait que la même affaire se répète ici aussi.

Puisque je n'ai que trois minutes, j'aimerais vous entendre... parce que vous avez soulevé quelque chose d'important. Être une élue du peuple, ça veut dire prendre soin du portefeuille du peuple, ça veut dire prendre soin des cadres législatifs que le peuple a besoin pour le vivre-ensemble, bref, c'est de prendre soin du monde. Pas pire expertise, comme femme, là-dedans, depuis des millénaires, d'ailleurs.

Mais vous avez soulevé un point sur la question de la compétence. Et là, pour moi, vous venez de marquer un grand point, pas par rapport à la question des cibles, ou quotas, ou objectifs, «whatever», parce que, là, c'est vrai qu'on ramène ça souvent, la compétence, mais sur le fond de : Mais qu'est-ce que nous avons besoin comme compétence autour de ces tables pour nous assurer de répondre à notre responsabilité d'élues? Alors donc, merci pour cette poignée que vous nous donnez.

Mais vous avez soulevé un autre élément. Je finis là-dessus. C'est la question de... Depuis que ce système politique a été développé, depuis que la démocratie, d'ailleurs, a été développée, a été définie par les hommes, pour les hommes, y compris dans son application, mais surtout pour l'élite... Alors, j'aimerais, dans le 15 secondes qui vous reste, peut-être... Il va vous le dire. C'est son travail. Quand vous parlez de diversité, il y a la diversité de genre qui est une chose, mais qu'en est-il de la diversité des femmes entre elles? En tout cas, tu sais, je veux dire...

Mme Demers (Guylaine) : Mais en tout cas, d'ailleurs, sur le petit tableau, là, il y a une boîte qui s'appelle «voix absentes», et je trouve que la diversité, qu'on parle des femmes autochtones, les minorités visibles, les femmes avec un handicap, bien, on peut... parce que, pour moi, les femmes, il y a une diversité de femmes qui n'est pas présente. Déjà, on n'a pas beaucoup de femmes à l'Assemblée nationale, et la diversité n'est pas là, mais ça s'applique aussi aux hommes. Mais effectivement je ne trouve pas que l'Assemblée nationale est représentative de notre population.

Le Président (M. Matte) : Je vous remercie. C'était un exercice qui était difficile. Alors, je tiens à vous remercier de votre participation aux travaux de la commission.

Mémoires déposés

Avant de conclure, je voudrais tout simplement déposer les mémoires pour les organismes ou les personnes qui n'ont pas pu se faire entendre.

Et je conclus ces deux jours de consultations, là, et les travaux de la commission sine die.

Donc, je vous souhaite une bonne fin de soirée et à la prochaine.

(Fin de la séance à 17 h 20)

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