Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
42e législature, 1re session
(27 novembre 2018 au 13 octobre 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions
Le
mercredi 4 novembre 2020
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Vol. 45 N° 65
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 70, Loi visant à protéger les personnes contre les thérapies de conversion dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre
Aller directement au contenu du Journal des débats
Intervenants par tranches d'heure
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Lecours, Lucie
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Jolin-Barrette, Simon
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Maccarone, Jennifer
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Massé, Manon
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Maccarone, Jennifer
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Lecours, Lucie
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Massé, Manon
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Hivon, Véronique
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Lachance, Stéphanie
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Maccarone, Jennifer
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Lecours, Lucie
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Massé, Manon
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Hivon, Véronique
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Lecours, Lucie
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Jolin-Barrette, Simon
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Lévesque, Mathieu
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Maccarone, Jennifer
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Maccarone, Jennifer
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Lecours, Lucie
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Massé, Manon
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Hivon, Véronique
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Massé, Manon
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Lecours, Lucie
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Hivon, Véronique
11 h (version révisée)
(Onze heures dix-neuf minutes)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le
quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens
ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes
dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils
électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi
n° 70, Loi visant à protéger les
personnes contre les thérapies de conversion dispensées pour changer leur
orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre.
Alors, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente : Mme Dansereau (Verchères) est remplacée par M. Lévesque
(Chapleau); M. Barrette (La Pinière), par M. Tanguay (LaFontaine).
• (11 h 20) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Est-ce qu'il y a des droits de vote par
procuration?
La Secrétaire
: Oui, Mme
la Présidente : Mme Lachance (Bellechasse) dispose d'un droit de vote par
procuration au nom de Mme Blais (Abitibi-Ouest); Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis) dispose d'un droit de vote par procuration au nom de M.
Kelley (Jacques-Cartier).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Donc, ce matin, nous débuterons par les
remarques préliminaires puis nous entendrons, par visioconférence, le Conseil
québécois LGBT, qui est représenté par M. Daniel Gosselin, administrateur et
directeur général de l'organisme Diversité 02.
J'invite maintenant le ministre de la
Justice à faire ses remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de
6 minutes.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. Mes salutations à vous, salutations également au député de
Chapleau et à la députée de Bellechasse, qui m'accompagnent, Mme la députée de
Westmount, Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques ainsi que Mme la
députée de Joliette. Je tiens à vous présenter également les personnes qui
m'accompagneront : Me Patrick-Thierry Grenier, sous-ministre associé au
sous-ministériat des orientations de l'accès à la justice et de la performance,
ainsi que Me Christine Claraz, légiste à la direction au soutien <des
orientations...
M. Jolin-Barrette :
...
qui m'accompagnent, Mme la députée de Westmount, Mme la députée de
Sainte-Marie—Saint-Jacques ainsi que Mme la députée de Joliette. Je tiens à
vous présenter également les personnes qui m'accompagneront : Me
Patrick-Thierry Grenier, sous-ministre associé au sous-ministériat des orientations
de l'accès à la justice et de la performance, ainsi que Me Christine Claraz,
légiste à la direction au soutien >des orientations des affaires législatives
et de la refonte.
Alors, Mme la Présidente, je vous souhaite
la bienvenue à cette consultation particulière concernant le projet de loi
n° 70. Le projet de loi n° 70 a été déposé le 22 octobre dernier à
l'Assemblée nationale et vise à protéger les personnes contre les thérapies de
conversion visant à modifier leur orientation sexuelle, leur identité de genre
ou leur expression de genre.
Je tiens, d'entrée de jeu, à remercier la
présence de tous les intervenants qu'on entendra en commission parlementaire.
Votre collaboration à cette consultation particulière est très appréciée, voire
essentielle, en tant qu'experts vraiment sur le terrain. Vous êtes à même de
nous éclairer sur la réalité des thérapies de conversion. Vous pouvez également
nous donner l'heure juste quant aux conséquences néfastes de ces thérapies sur
les personnes qui les subissent. Grâce à votre apport, nous pourrons poser des
gestes concrets pour mettre fin à ces pratiques inacceptables et pour soutenir
efficacement les personnes qui en ont été victimes.
On entend par «thérapie de conversion»,
les thérapies qui visent à modifier l'orientation sexuelle d'une personne vers
une orientation hétérosexuelle, ou encore à convertir une personne à l'identité
de genre qui correspond au sexe de sa naissance et à ce qui est perçu comme
étant la norme, alors qu'elle ne s'identifie pas à ce genre. Vous le savez trop
bien, ces thérapies de conversion sont nocives et dangereuses pour les
personnes qui les subissent. Elles sont une atteinte à l'intégrité et à la
dignité d'une personne et peuvent avoir de graves répercussions pour ceux et
celles qui les suivent. Vous serez d'accord avec moi, il est inacceptable qu'en
2020 de telles pratiques aient encore cours au Québec. L'orientation sexuelle
n'est pas un choix et personne ne devrait être pénalisé, dénigré, intimidé ou
discriminé en fonction de son orientation sexuelle, de son identité ou de son
expression de genre.
En déposant ce projet de loi, nous posons
un geste fort qui envoie un message très clair : les thérapies de
conversion n'ont pas leur place au Québec. Désormais, elles ne seront plus
tolérées et les personnes qui les dispensent seront passibles de sanctions
importantes. Concrètement, le projet de loi n° 70 présente des mesures
permettant d'agir sur plusieurs niveaux pour interdire les thérapies de
conversion. Tout d'abord, le projet de loi reconnait explicitement que toutes
les thérapies de conversion, peu importe le contexte, portent atteinte aux
droits fondamentaux, à l'intégrité et à la dignité de la personne qui la suit.
Ces droits sont protégés par la Charte des droits et libertés de la personne. Par
cette affirmation claire, nous allégeons le fardeau de la preuve de la personne
qui en est victime. Le projet de loi permettra ainsi qu'une personne victime de
cette pratique puisse exercer un recours pour obtenir la réparation du
préjudice qui a pu en résulter, que le préjudice soit moral ou corporel.
Ensuite, notre projet de loi propose de
modifier le Code des professions, pour y prévoir que tout professionnel, peu
importe l'ordre professionnel dont il est membre, ne peut dispenser une telle
thérapie de conversion. Une telle pratique sera considérée comme un acte
dérogatoire à la dignité des professions. Enfin, il est également prévu que nul
ne peut conclure un contrat, que ce soit à titre onéreux ou à titre gratuit,
afin d'offrir une thérapie de conversion à toute autre... à une autre personne
sous peine d'une amende importante. En effet, toute personne qui
contreviendrait à la loi serait passible, pour une personne physique, d'une
amende <entre 5 000 $ et 50 000 $...
M. Jolin-Barrette :
...des professions. Enfin, il est également prévu que nul ne peut conclure un
contrat, que ce soit à titre onéreux ou à titre gratuit, afin d'offrir une
thérapie de conversion à toute autre... à une autre personne sous peine d'une amende
importante. En effet, toute personne qui contreviendrait à la loi serait
passible, pour une personne physique, d'une amende >entre
5 000 $ et 50 000 $, ainsi que de 15 000 $ à
150 000 $ dans les autres cas, pour une personne morale.
Les changements législatifs contenus dans
le projet de loi n° 70 s'inscrivent dans notre volonté de défendre le
droit à l'intégrité et à la dignité des personnes, et cela, peu importe leur
orientation sexuelle, leur identité de genre ou leur expression de genre. Nous
franchissons ainsi une étape supplémentaire afin d'ajuster la loi aux réalités
de la société qui l'encadre, une société juste, ouverte et qui assure la
protection et l'épanouissement de toute la population. Le Québec se
positionnerait ainsi en leader en allant encore plus loin que la plupart des
autres juridictions canadiennes, en instaurant une présomption d'atteinte à la
dignité de la personne.
Le Québec est un pionnier en la matière,
en matière de droits des personnes LGBTQ ,et nous pouvons en être très fiers.
En effet, depuis des décennies, nous sommes au coeur du progrès pour un plus
grand respect de la diversité, notamment sexuelle. Cela, nous le devons en
grande partie au rôle actif des organismes dans notre société, un rôle qui vous
tient à coeur, car, vous le savez, le rôle pour lequel vous agissez est crucial
pour le bien-être et le respect des droits de la communauté LGBTQ. En veillant
si bien aux intérêts des personnes des minorités sexuelles et de genre, les
organismes que nous entendrons cette semaine vont nous aider à mieux faire
notre travail de législateur qui est d'accorder le même respect et les mêmes
droits à tous les membres de la société québécoise.
En terminant, je tiens à remercier la
collaboration que nous avons reçue des oppositions depuis le début du dépôt du projet
de loi. J'ai noté que la députée de Westmount—Saint-Louis a déposé un projet de
loi au début du mois de septembre sur lequel, je pense, on peut travailler
ensemble pour faire en sorte de bonifier le projet de loi du gouvernement.
Alors, je serai très ouvert, Mme la Présidente, tout au long des travaux de la commission,
à retenir les suggestions des oppositions en lien avec le projet de loi que
nous déposerons. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Avant de passer la parole à
la députée de Westmount—Saint-Louis, Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements additionnels?
La Secrétaire
: Oui, je
m'excuse. Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par Mme Massé
(Sainte-Marie—Saint-Jacques); Mme Perry Mélançon (Gaspé), par Mme Hivon
(Joliette).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Alors, Mme la porte-parole
de l'opposition, la parole est à vous pour une période de quatre minutes.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. C'est un grand plaisir pour moi, dans le fond, une grande fierté
d'être parmi vous, chers collègues, pour commencer le débat par rapport au
projet de loi n° 70, loi qui vise à interdire les thérapies
de conversion. D'emblée, j'aimerais remercier toute l'équipe qui m'accompagne
aujourd'hui et qui m'aide... qui m'ont aidée dès le début du processus. Tel que
le ministre avait déjà mentionné, j'étais très fière de déposer mon premier
projet de loi, le 599, loi visant à protéger les personnes contre les
thérapies de conversion, et aussi de protéger leur identité de genre, et de
respecter leur orientation sexuelle. Alors, moi, la façon <que je vois...
Mme Maccarone : ...
déjà mentionné, j'étais très fière de déposer mon premier projet de
loi, le 599, l
oi visant à protéger les personnes contre les
thérapies de conversion, et aussi de protéger leur identité de genre, et de
respecter leur orientation sexuelle. Alors, moi, la façon >que je vois les
échanges que nous allons avoir entre collègues aujourd'hui, c'est vraiment... Je
vais faire une démonstration, Mme la Présidente : Voici mon projet de loi.
Voici le projet de loi du ministre. Honnêtement, ce que je vois, c'est ça. C'est
ça que j'aimerais accomplir lors des débats, les échanges. J'aimerais vraiment
travailler en collaboration.
Nous savons que, selon les sondages, un
homme issu des minorités sexuelles sur cinq affirme avoir déjà été visé par les
efforts de coercition visant à changer l'orientation sexuelle, l'identité de
genre ou l'expression de genre, et de... Selon près de 40 % ou jusqu'à
47 000 hommes, qui sont issus de la communauté LGBTQ2 au Canada, ont
subi une thérapie de conversion, puis illustré par les résultats provisoires de
l'enquête de sexe jusqu'au présent. Nous savons que les telles thérapies de
conversion causent la détresse, l'anxiété, la dépression, une image négative de
soi, un sentiment d'échec personnel et de la difficulté à maintenir des liens
et le dysfonctionnement sexuel.
Alors, c'est le temps que la thérapie de
conversion est terminée, est bannie. On se comprend, être membre de la
communauté LGBTQ2, ce n'est pas une maladie à être guérie. Alors, le but, c'est
vraiment d'interdire toutes les thérapies de conversion au Québec. C'est tant
que nous allons poursuivre de cette façon-là. Eh oui, comme le ministre avait
mentionné, on a fait quand même des recommandations visant que le projet de loi
s'applique à la Régie de l'assurance maladie du Québec, ainsi que d'empêcher
des organismes ou entreprises de bénéficier des avantages fiscaux ou d'autres
aides financières. Nous savons, actuellement, près de 25 millions de
dollars sont offerts en crédit d'impôt aux organismes qui offrent des thérapies
de conversion. Alors, le but, ce serait d'empêcher ceci.
Et, car nous avons
beaucoup de gens qui nous écoutent à travers le Canada, Mme la Présidente,
j'aimerais aussi mentionner en anglais : Thank you to everybody who has
been watching and who has been carefully providing us with much dialogue, much
debate and much information to help us to pursue this very important bill,
which we know you are expecting to be leaders in legislation, to go beyond
simply the youth, but also imperate the adult sector. And so, well, we know
that you're watching, we know that you're counting on us, and you can certainly
count on me to be a good representative of you as we pursue the consultations
and debate.
Alors, j'ai hâte à
avoir des échanges avec tous les gens qui sont venus pour témoigner lors de ce
projet de loi qui est très, très, très important pour tous les Québécois et
Québécoises. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, mon regard se tourne
vers la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous disposez d'une minute pour
vos remarques préliminaires.
• (11 h 30) •
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente...
11 h 30 (version révisée)
Mme Maccarone : ...avec tous
les gens qui sont venus pour témoigner lors de ce projet de loi qui est très,
très, très important pour tous les Québécois et Québécoises. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, mon regard se tourne
vers la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, vous disposez de deux minutes
pour vos remarques préliminaires.
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, tout le monde. Très heureuse d'être parmi vous pour
aborder l'étude du projet de loi. Je remercie d'ailleurs M. le ministre d'avoir
rapidement déposé ce projet de loi lorsqu'il a repris entre ses mains le
dossier des personnes LGBTQI+. Très heureuse de voir qu'on aborde ça dans un
esprit d'ouverture, je pense, ça a toujours été le cas ici, à l'Assemblée
nationale, lorsqu'il a été question des droits de nos communautés. Alors, je
vais bien sûr m'inscrire dans cette tradition. On va regarder le projet de loi,
on va surtout entendre... parce que c'est une réalité documentée, mais, encore
là, je pense qu'ici, au Québec, on a avantage à mieux connaître, comprendre
pour être capable d'agir adéquatement. Donc, dans ce sens-là, bien, on va faire
ce qu'on a à faire pour le rendre superbon.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, pour terminer, Mme
la députée de Joliette, vous avez une minute pour vos remarques
préliminaires.
Mme
Hivon
:
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, à mon tour de me réjouir de vous
retrouver ici pour aborder un projet de loi très important sur la voie, je
dirais, du respect des différences, de l'intégrité et de la dignité des gens au
Québec. Et donc je suis heureuse de voir que le ministre a rapidement saisi la
balle au bond à la suite de l'initiative de la députée de Westmount—Saint-Louis
et qu'il a déposé, au nom du gouvernement, un projet de loi pour vraiment
mettre fin à une pratique qui est effectivement inacceptable, qui est
représentée, donc, par les thérapies de conversion. Et, oui, j'abonde dans le
même sens que ma collègue de Westmount—Saint-Louis et j'espère qu'on va pouvoir
tirer le maximum de ce qui est bon dans l'un ou l'autre des projets de loi pour
sortir d'ici avec le meilleur projet de loi possible. Et, surtout, on est
vraiment en mode écoute de tous les groupes pour qu'il y ait la meilleure
adéquation possible entre le contenu du projet de loi et la réalité à laquelle
on veut mettre fin et qui est encore trop présente sur le terrain. Alors, merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, cette première étape
étant terminée, nous allons commencer maintenant la période des auditions.
Bienvenue, M. Gosselin. Alors, pour
cette partie, vous avez le micro pour une période de 10 minutes.
M. Gosselin (Daniel) :
Bonjour, tout le monde. Je suis très, très heureux d'être avec vous
aujourd'hui. Mme la Présidente, M. le ministre de la Justice, mon nom est
Daniel Gosselin, je suis le directeur général de Diversité 02 et je suis
également administrateur sur le Conseil québécois LGBT. J'utilise les pronoms
«il».
Donc, les thérapies de conversion
continuent actuellement <d'avoir des...
M. Gosselin (Daniel) : …Mme
la Présidente, M. le
ministre de la Justice, mon nom est Daniel
Gosselin, je suis directeur général de Diversité 02 et je suis également
administrateur sur le Conseil québécois LGBT. J'utilise les pronoms «il».
Donc, les thérapies de conversion
continuent actuellement >d'avoir des effets néfastes pour les personnes
trans, non binaires, deux esprits, queers, bisexuelles, lesbiennes, gaies
et aussi pour d'autres Québécoises et Québécois qui se reconnaissent dans la
diversité sexuelle et de genre. Nous sommes très encouragés de constater que le
gouvernement provincial est résolu à lutter contre ces pratiques qui sont
traumatisantes.
Le Conseil québécois LGBT et
Diversité 02 accueillent donc avec grand plaisir le projet de loi n° 70
qui vise à protéger les personnes contre les thérapies de conversion qui sont
dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou
leur expression de genre. Cependant, nous sommes obligés de nous exprimer par
rapport à nos préoccupations. Le projet de loi n° 70 ne parvient pas à
définir et à empêcher adéquatement toutes les formes de thérapies de
conversion.
Donc, tout d'abord, nous aimerions porter
à votre attention que des études démontrent que la plupart des personnes qui
participent à des épisodes de conversion sont des personnes qui sont mineures.
Certains témoignages qui ont été recueillis par l'Alliance Arc-en-ciel et qui
sont disponibles dans leur mémoire sur les thérapies de conversion démontrent
qu'il y aurait encore des situations de séquestration, de voies de fait, d'abus
physiques et émotionnels. Or, comment le projet de loi sera-t-il appliqué dans
le système de la protection de la jeunesse? Les parents qui assistent l'enfant
dans une thérapie de conversion peuvent-ils faire l'objet d'un signalement?
Pour répondre à la question, nous croyons que des parents dont l'enfant
participe à des pratiques de réorientation sexuelle manquent à leur obligation
d'assurer la sécurité et le développement de leurs enfants.
Dans un autre ordre idée, on… que c'est
essentiel que le gouvernement finance des soins en santé mentale accessibles
aux personnes ayant vécu des thérapies de conversion, puisque les thérapies de
conversion<… >, et ça a été mentionné tout à l'heure< que >,
ça a des conséquences néfastes sur les plans cognitifs, sociaux. Nous
croyons que les instances gouvernementales doivent sérieusement prendre en
considération cet aspect et aussi appuyer financièrement les demandes d'aide
psychologique venant des victimes. Nous soutenons également le fait que
l'éducation sur les réalités LGBTQI2SA+, notamment sur les thérapies de
conversion, devrait faire partie des exigences afin d'obtenir un permis
d'exercer.
<Rappelons…
M. Gosselin (Daniel) :
...nous soutenons
également le fait que l'
éducation sur les
réalités
LGBTQI2SA+, notamment sur les thérapies de conversion, devrait
faire partie des exigences afin d'obtenir un permis d'exercer.
>Rappelons que le projet de loi
établit explicitement que le fait qu'un professionnel dispense une thérapie de
conversion constitue un acte dérogatoire à la dignité de sa profession. Nous
croyons fermement que le code professionnel du Collège des médecins devrait également
constituer un acte dérogatoire à la dignité de sa profession.
Ensuite, malgré la décriminalisation et la
dépathologisation de l'homosexualité, il y a encore des organismes qui offrent
des traitements pour guérir l'homosexualité. Ces organismes-là font la
promotion de la guérison de l'homosexualité. Bien, je parle notamment de l'organisme
Ta vie Ton choix. Donc, le nom même de l'organisme, Ta vie Ton choix, laisse
prétendre que l'orientation sexuelle est le fruit d'un choix, alors que c'est complètement
faux. Il est même mentionné sur leur site Internet qu'une personne devient
homosexuelle ou lesbienne à la suite d'un traumatisme vécu dans son enfance.
Selon Diversité 02, selon le Conseil québécois LGBT, également, ces informations-là
ne sont pas fondées scientifiquement et véhiculent de l'homophobie et de la
transphobie. Leur discours, qu'on pourrait affirmer de pseudo-scientifique,
détient un pouvoir qui est à ne pas négliger. Nous pensons qu'il est tout
indiqué que le projet de loi n° 70 examine davantage
ce sujet et impose des mesures disciplinaires aux contrevenants. Il en va de la
protection de la population, notamment des personnes LGBTQI2S.
Je vais terminer en mentionnant qu'il faut
reconnaître que plusieurs personnes aînées ont vécu des thérapies de conversion
par le passé et qu'elles en vivent encore de lourdes conséquences. Nous avons
de la difficulté à s'imaginer que des personnes aînées, qui, je le répète,
vivent encore des conséquences psychologiques et sociales, aient la force de se
trouver un avocat et d'entamer seules ces lourdes démarches. Nous suggérons donc
au ministre de financer un organisme communautaire pour une ligne téléphonique
gratuite et confidentielle afin que les survivantes et survivants des thérapies
de conversion puissent avoir une facilité pour le témoignage en cour et pour un
accompagnement tout au long du processus judiciaire. Je vous remercie <beaucoup...
M. Gosselin (Daniel) :
...téléphonique gratuite et confidentielle afin que les survivantes et
survivants des thérapies de conversion puissent avoir une facilité pour le
témoignage en cour et pour un accompagnement tout au long du processus
judiciaire. Je vous remercie >beaucoup de votre écoute.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Gosselin. Je veux juste en profiter
pour rappeler que vous êtes représentant du Conseil québécois LGBT et également
administrateur et D.G. de l'organisme Diversité 02. Alors, maintenant,
nous en sommes à la période d'échanges. Je me tourne du côté de M. le ministre,
et vous disposez de 16 min 30 s.
• (11 h 40) •
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme
la Présidente. M. Gosselin, bonjour. Merci d'être présent avec nous aujourd'hui
puis merci de nous avoir indiqué des suggestions en lien avec le projet de loi.
Tout d'abord, je souhaiterais peut-être vous rassurer, là, au niveau de la
portée du projet de loi. Nous, on agit dans le champ de compétence québécois,
dans le champ de compétence de l'État québécois, à l'intérieur de notre droit
civil. Pour tout ce qui est de l'aspect criminel, le législateur fédéral peut
agir sur son volet. D'ailleurs, il y a déjà un projet de loi qui a été redéposé
à Ottawa sur les aspects criminels.
Au niveau des ordres professionnels, vous
disiez tout à l'heure : Il faudrait que ce soit prévu expressément pour
les médecins, l'interdiction, dans leur code. Bien, en fait, le Code des
professions, ce qu'il fait, c'est qu'il chapeaute l'ensemble des 46 ordres
professionnels. Donc, en faisant ce que nous faisons dans le projet de loi, en
venant indiquer qu'il s'agit… le fait que, pour un professionnel, peu importe
de l'ordre professionnel duquel il relèverait, on en fait un acte dérogatoire à
la dignité de la profession, ce qui signifie que le syndic de l'ordre… incluant
le syndic du Collège des médecins, parce que l'ordre professionnel des
médecins, on l'appelle le Collège des médecins, le syndic pourrait poursuivre
un médecin au niveau de son droit de pratique. Donc, c'est le syndic qui
prendrait la poursuite, et, à ce moment-là, en matière de droit professionnel,
droit disciplinaire, ça serait déjà couvert. Donc, le fait de le mettre dans le
Code des professions, ça vient encadrer tout ça.
Même chose au niveau aussi... vous disiez,
au niveau des mineurs, les parents qui feraient suivre une thérapie. Le projet
de loi, de la façon dont il est construit, fait en sorte que toute personne qui
offrirait une thérapie de conversion, bien, <ça serait... >en
fait, ça serait visé par le projet de loi parce que l'amende pour une personne
physique, entre 5 000 $ et 50 000 $, s'appliquerait
également. Donc, peu importe l'âge de la victime, qu'elle soit mineure ou
majeure, le projet de loi trouve application également en ce qui concerne les
mineurs.
J'avais envie de vous demandez, avez-vous...
vous, vous êtes au Saguenay—Lac-Saint-Jean, je crois, votre organisme, celui
dont vous êtes D.G., avez-vous des témoignages de gens qui vous disent :
Moi, j'ai subi une pression relativement à mon orientation sexuelle, à mon
identité de genre, à mon expression de genre? Avez-vous des gens qui cognent à
votre porte puis qui vous disent : Écoutez, moi, je vis ça concrètement?
Parce que c'est difficile à trouver, ces <témoignages-là, là...
M. Jolin-Barrette :
...
Saguenay—Lac-Saint-Jean, je crois, votre organisme, celui dont vous
êtes D.G., avez-vous des témoignages de gens qui vous disent : Moi, j'ai
subi une pression
relativement à mon
orientation sexuelle, à mon
identité de genre, à mon expression de genre. Avez-vous des gens qui cognent à
votre porte puis qui vous disent : Écoutez, moi, je vis ça concrètement?
Parce
que c'est difficile à trouver, ces >témoignages-là, là, nous, quand on a
rédigé le projet de loi.
M. Gosselin (Daniel) : Absolument.
Je peux vous confirmer que c'est difficile d'avoir accès à des personnes qui
ont vécu ce genre de thérapie là. Moi, je vous dirais d'emblée que, oui,
j'entends des personnes qui ont déjà entendu... qui ont déjà participé à des
groupes de discussion pour corriger l'homosexualité. Ce que je peux vous dire,
c'est que ça se fait de manière très informelle. C'est très, très tabou, on
n'en entend pas parler, donc il faut déjà faire partie d'une communauté. Ici, à
Saguenay, bien, je peux vous donner l'exemple d'une librairie chrétienne qui a
déjà affiché dans ses vitrines des affiches qui affirmaient que Dieu pouvait
corriger l'homosexualité. Donc, effectivement, on peut parler de thérapies de
conversion. Ça me fait penser un peu à ce que Ta vie Ton choix... fait la
promotion, là, des thérapies de conversion sur leur site Internet. Donc, je
pense que, oui, c'est important de s'attarder aux thérapies en tant que telles,
mais par rapport à tout ce qui est promotion de l'hétérosexualité, qui peut en
venir à des thérapies de conversion.
M. Jolin-Barrette : Et puis,
moi, ce qui m'inquiète particulièrement en région, c'est l'isolement auquel les
jeunes peuvent faire face lorsqu'ils sont en questionnement, surtout à
l'adolescence. Pouvez-vous nous dire si le fait de présenter le projet de loi,
vous pensez que ça va être utile en tant que… comment je pourrais dire, qu'oeuvre
pédagogique aussi pour dire... pour dénoncer ce genre de comportements là, le
recours aux thérapies de conversion, puis de dire : Bien, on va en parler,
on va amener ça sur la place publique, puis ça va permettre de sensibiliser de
plus en plus les gens, mais aussi, pour les gens qui en seraient victimes, de
dire : N'hésitez pas à dénoncer, puis : On est là pour vous
supporter?
M. Gosselin (Daniel) :
Effectivement, à chaque fois qu'il y a une annonce dans les médias, peu
importe, la communauté trans, communauté non binaire, il y a une augmentation
chez Diversité 02 des appels. Par contre, ma préoccupation, c'est que
Diversité 02 couvre l'ensemble du territoire du Saguenay—Lac-Saint-Jean et
est le seul organisme LGBTQ+ à oeuvrer sur le territoire, donc ce qui ne nous
permet pas de rejoindre l'ensemble de la population et d'offrir des services
d'aide directe à l'ensemble des personnes qui en auraient besoin. Donc, c'est
certain que, oui, le projet de loi pourrait aider des personnes qui sont en
questionnement. Par contre, est-ce que les ressources sont adéquates et…
surtout dans les régions? Ça, je me pose plus la question.
M. Jolin-Barrette : Sur la
question de la proposition de la ligne téléphonique que vous nous <faites,
là...
M. Gosselin (Daniel) :
...oui, le
projet de loi pourrait aider des
personnes qui sont en
questionnement.
Par contre,
est-ce que les
ressources
sont adéquates et… surtout dans les régions? Ça, je me pose plus la
question.
M. Jolin-Barrette :
Sur la
question de la proposition de la ligne téléphonique que vous nous
>faites, là, c'est sûr que ça, ce n'est pas un élément qui peut se
retrouver au projet de loi. Ça peut être par le biais d'une politique ou de ressources
qu'on consacre. Mais vous, vous verriez une ligne centralisée pour l'ensemble
du territoire québécois à laquelle les gens pourraient appeler, là. C'est ça
que j'ai compris?
M. Gosselin (Daniel) : Oui, exactement.
Nous, on voit mal des personnes aînées notamment, des personnes vulnérables se
trouver seuls de l'aide juridique. Donc, on aimerait beaucoup que ces personnes-là
soient encadrées et que les personnes reçoivent du soutien des organismes LGBTQ+,
parce qu'on a une expertise envers ces communautés-là puis on... aussi qu'ils
et qu'elles se sentent écoutés et en sécurité dans ces milieux-là.
M. Jolin-Barrette : Je vous
remercie grandement, M. Gosselin. Mme la Présidente, je sais que le député
de Chapleau souhaite poser des questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, M. le député de
Chapleau, il reste encore 9 min 55 s.
M. Lévesque (Chapleau) :
Excellent. Merci beaucoup, Mme la Présidente. D'entrée de jeu, j'aimerais
saluer l'ensemble des collègues, M. le ministre, les collègues de l'opposition
également, Mme la députée de Bellechasse, Mme la Présidente. Et merci,
M. Gosselin, pour cette présentation, là.
J'aimerais revenir sur un point que vous
avez dit d'entrée de jeu en lien avec la définition des formes de thérapie, et
le projet de loi ne semblait pas ratisser assez large en termes de définition.
J'aimerais peut-être que vous nous éclairiez sur ça et qu'est-ce qui pourrait
être ajouté, ou modifié, ou bonifié.
M. Gosselin (Daniel) : Alors,
nous, quand on parle de toutes les formes, on est principalement préoccupés par
les formes de thérapies religieuses. Donc, on parle beaucoup de cas de professionnels,
par rapport aux professionnels de la santé, mais ce qu'on remarque dans les
thérapies de conversion, c'est qu'il y a beaucoup de groupes religieux qui
offrent des services pour guérir l'homosexualité, devenir hétérosexuel, devenir
cisgenre. Donc, quand on parle de toutes les formes, bien, on voudrait inclure
les formes, là, de thérapies qu'on considère de type religieux.
M. Lévesque (Chapleau) : O.K.
Et donc le volet religieux, vous avez parlé, donc, de cela, également de
certains organismes qui font la promotion du choix, de la notion de choix dans
l'homosexualité, toute la notion de guérison de l'homosexualité. Donc,
j'imagine que vous incluriez également ces éléments-là. Est-ce qu'il y aurait
d'autres choses que vous ajouteriez pour aller encadrer également, donc, soit
ces groupes religieux là ou certains organismes dont vous avez fait mention qui
font la promotion, là, de la notion de choix et de guérison?
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
écoutez, selon mes connaissances, là, je pense que c'est les deux principaux
éléments, là, qu'il faudrait ajouter dans le projet de loi.
M. Lévesque (Chapleau) :
...c'est certainement des problématiques importantes, là, à aborder.
Vous avez également abordé la question des
mineurs, donc <toute la...
M. Lévesque (Chapleau) :
...font la promotion, là, de la notion de choix et de guérison.
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, écoutez, selon mes connaissances, là, je pense que c'est les deux principaux
éléments, là, qu'il faudrait ajouter dans le
projet de loi.
M. Lévesque (Chapleau) : …c'est
certainement des problématiques importantes, là, à aborder.
Vous avez
également abordé la
question des mineurs, donc >toute la question de séquestration, de voies
de fait, d'abus physiques, d'abus émotionnels, vous avez ciblé également les
parents ou, du moins, qu'il y aurait une défaillance dans les obligations parentales
envers les enfants. Comment proposeriez-vous d'encadrer ça ou, du moins, de
venir en aide à cet enfant-là, là? J'essaie de voir comment on pourrait faire
pour aider ces enfants-là, justement, à pouvoir s'épanouir de façon, là,
complète et sécuritaire.
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
tout d'abord, ça passe par la promotion, par la sensibilisation des réalités
des personnes de la communauté LGBTQ+. Ce que je remarque dans ma pratique,
c'est que les intervenants en matière de santé, en matière de services sociaux
ont encore une grande méconnaissance. Donc, je pense que ça, c'est la base,
d'éduquer les intervenants, intervenantes, qui vont passer éventuellement, là,
par la protection de la jeunesse.
Puis, dans un deuxième temps, bien, c'est
que ces intervenants-là puissent informer à leur tour et faire de la
sensibilisation sur les communautés LGBTQ+, ce qui pourrait éventuellement
éviter, là, que des parents, au lieu d'avoir accès à des services de thérapie
de conversion, qu'ils consultent plutôt les organismes LGBTQ+ qui peuvent aider
une personne à accepter son homosexualité ou sa transidentité.
M. Lévesque (Chapleau) : O.K.
Est-ce que vous considérez également peut-être des campagnes de sensibilisation
ou d'information pour les parents, pour les enfants peut-être dans les écoles?
Est-ce qu'il y a quelque chose qui... certains points que vous pourriez aborder
à ce niveau-là?
M. Gosselin (Daniel) : Oui.
Bien, en fait, on travaille en collaboration avec l'ensemble des GRIS du
Québec, donc GRIS-Montréal, GRIS-Québec. Je crois que ça pourrait être des bons
organismes qui interviennent déjà dans les écoles, qui pourraient parler des
thérapies de conversion et les effets néfastes, là, de ces thérapies-là.
• (11 h 50) •
M. Lévesque (Chapleau) : Et,
en parallèle avec ça, vous aviez également parlé, là, de soins de santé mentale
qui pourraient être offerts, justement, aux personnes qui ont subi ça, là, ou
qui le subissent. Comment ça se matérialiserait pour vous? Comment, dans le
meilleur des mondes, ça serait disponible, là, pour ces gens-là?
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
écoutez, c'est sûr qu'en tant que directeur général, là, je reviens toujours
aux organismes LGBTQ+, je pense que… financer davantage les organismes qui
offrent déjà des services aux communautés LGBT, de renforcer leurs capacités et
d'engager des intervenants, intervenantes qui pourraient travailler au niveau
de la santé mentale.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le député. Je pense que le ministre a
encore quelques petites questions.
M. Jolin-Barrette : Bien, en
fait, c'est juste une précision avant de recéder la parole au député de
Chapleau. Vous disiez, M. Gosselin, tout à l'heure, là, pour les parents
qui enverraient leurs enfants suivre des <thérapies...
M. Gosselin (Daniel) :
...des
intervenants,
intervenantes qui pourraient travailler
au
niveau de la
santé mentale.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup,
M. le député. Je pense que le
ministre a
encore
quelques petites
questions.
M. Jolin-Barrette :
Bien, en fait, c'est juste une précision avant de recéder la parole au député
de Chapleau. Vous disiez, M. Gosselin,
tout à l'heure, là, pour les
parents qui enverraient leurs enfants suivre des >thérapies de
conversion, ça constitue un motif de compromission en vertu de la Loi sur la
protection de la jeunesse, donc c'est déjà couvert. C'est sûr que le fait de
venir rajouter le projet de loi n° 70, ça vient
ajouter également à la crédibilité de la dénonciation, parce que, lorsqu'un
parent fait subir de mauvais traitements psychologiques à son enfant, ça
constitue, en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, un motif de compromission,
et donc il pourrait y avoir un signalement, à ce moment-là, à la DPJ. Donc,
c'est déjà prévu dans la loi.
Ce qu'on vient faire, avec le projet de
loi, c'est qu'on vient rajouter un élément supplémentaire qui permettrait de
dire : Bien, voyez-vous, dans notre société, c'est totalement
inacceptable, ce genre de thérapie là, et, en plus, particulièrement pour un
mineur. Donc, c'est déjà prévu que ça va pouvoir faire l'objet d'un signalement
au niveau psychologique, donc je tenais à vous rassurer là-dessus, M. Gosselin.
C'était l'intervention que je voulais faire.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. M. le député de Chapleau, vous avez
d'autres questions?
M. Lévesque (Chapleau) :
Merci, Mme la Présidente. Effectivement, là, une bonne précision du ministre.
Vous nous avez parlé également des mesures disciplinaires contenues, là, au projet
de loi, vous avez dit qu'elles ne semblaient pas assez fortes ou assez, là...
avec assez de mordant. Qu'est-ce qu'on pourrait ajouter? Qu'est-ce qui pourrait
bonifier, à votre opinion, là, le projet de loi, pour les mesures
disciplinaires?
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
écoutez, pour être honnête avec vous, on ne s'est pas penché sur la question,
quelles seraient les mesures qui pourraient avoir plus de mordant, mais on
pense que c'est vraiment important de mettre en lumière tout l'aspect de
sensibilisation aux futurs intervenants. Et on pense aussi que ce serait
peut-être pertinent et essentiel que les intervenants en matière de santé et de
services sociaux aient les formations continues et que ça ne soit pas
optionnel, des formations, bien sûr, concernant les personnes LGBTQ+, parce que
les réalités changent et les réalités changent rapidement.
M. Lévesque (Chapleau) : Merci
de votre éclairage, de vos lumières sur ça. Nos aînés. Vous avez abordé la
question de nos aînés LGBTQ+. Effectivement, c'est un enjeu qui est très
important. Et ils ont, bon, ceux qui ont subi ces thérapies-là, de lourdes
conséquences. Vous avez dit qu'un organisme, bon, avec une ligne téléphonique
pourrait venir en aide, pourrait être bénéfique. Est-ce qu'il y a d'autres
éléments qu'on pourrait faire, selon votre expérience, et avec, dans le fond,
les gens que vous avez parlé... qu'on pourrait aider nos aînés LGBTQ+ dans ces
situations-là, pour appuyer et aider le processus de guérison?
M. Gosselin (Daniel) : En
fait, j'aimerais souligner d'abord le travail de la Fondation Émergence, qui
travaille étroitement sur le dossier des personnes aînées <LGBTQ+...
M. Lévesque (Chapleau) :
…nos aînés LGBTQ+ dans ces situations-là pour appuyer des processus de
guérison.
M. Gosselin (Daniel) : En
fait, j'aimerais souligner d'abord le travail de la Fondation Émergence, qui
travaille étroitement sur le dossier des personnes aînées >LGBTQ+. Par
contre, qu'est-ce qui pourrait aider? Et là je reviens un peu sur les réalités
que les groupes LGBT communautaires en région vivent, c'est de financer de
manière adéquate selon les territoires qui sont couverts. Donc, moi, ce serait
ma principale demande, là.
M. Lévesque (Chapleau) : …merci,
Mme la Présidente. Je crois que la députée de Bellechasse aurait des questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Mme la députée de Bellechasse, il reste
1 min 30 s.
Mme Lachance : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bonjour à tous. Merci, M. Gosselin, d'être là. La
dernière fois que nous nous étions rencontrés, c'était dans le cadre de la
tournée pour la rencontre des organismes pour le plan de lutte à
l'intimidation, et vous aviez, à ce moment-là, abordé justement le sujet des
aînés LGBTQ+ et évidemment sous le volet de l'intimidation.
Mais je réalise, en vous entendant
aujourd'hui, qu'on parle aussi de plusieurs aînés qui auraient pu subir, par le
passé, des thérapies. Comme mon collègue le mentionnait, vous avez aussi fait
état d'une ligne téléphonique et du soutien aux organismes pour venir en aide.
Dans une région comme la vôtre ou encore
dans une ville comme Montréal, la réalité peut être bien différente. Est-ce que
vous pouvez un peu nous expliquer comment vous voyez l'organisation un peu sur le
territoire? Parce que la ligne, <elle serait… >ce serait une ligne
qui serait, dans le fond, accessible à tous, volontaire, mais il faut
rejoindre… Encore faut-il rejoindre ces aînés-là. J'aimerais ça vous entendre.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : …
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
écoutez, c'est sûr que la manière dont on peut rejoindre les personnes aînées,
c'est en faisant des campagnes de sensibilisation, c'est en allant aussi dans
les foyers de personnes aînées, ce que Diversité fait déjà en collaboration
avec la Fondation Émergence. Donc, je pense que c'est encore une fois de mieux…
les organismes afin qu'ils puissent faire des campagnes de sensibilisation et
d'information sur les services qui sont offerts.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci, Mme la députée. Je me
tourne maintenant du côté de la députée de Westmount—Saint-Louis, et vous
disposez de 11 minutes.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Gosselin, un plaisir d'échanger avec vous. Je vais
prendre la balle au bond, pas pour vous faire répéter, mais vous avez mentionné
qu'à l'intérieur de la définition de c'est quoi, une thérapie de conversion…
puis vous avez évoqué des problématiques vis-à-vis la religion, l'église.
Comment voyez-vous les modifications que vous aimeriez aborder à l'intérieur de
cette définition à l'intérieur du projet de loi?
M. Gosselin (Daniel) : Cest
une très bonne question. Selon nous, ce qui est important, c'est de l'écrire
clairement que, dans le projet de loi n° 70, les thérapies de
réorientation sexuelle de type religieux sont interdites au même <titre
que les…
M. Gosselin (Daniel) : …c'est
une très bonne question. Selon nous, ce qui est
important, c'est de
l'écrire
clairement que, dans le
projet de loi n° 70, les
thérapies de réorientation sexuelle de type religieux sont interdites au même >titre
que les thérapies qui peuvent être offertes par des personnes dans les ordres
professionnels.
Mme Maccarone : O.K. C'est
sûr, ça fait le sujet de beaucoup de discussions. Nous avons reçu, puis, j'ose
croire, c'est la même chose pour le ministre, beaucoup de définitions, beaucoup
de propos. Alors, j'ose croire qu'il y aura des amendements relatifs à ceci.
Vous avez évoqué beaucoup le besoin
d'avoir du soutien des victimes. J'aimerais savoir si, à l'intérieur de cette
réflexion-là, vous avez, et votre groupe, si vous avez évoqué l'idée d'un
recours légal, l'idée de donner du pouvoir aux victimes d'aller au niveau…
d'avoir de l'aide juridique, par exemple, pour avoir un recours légal pour être
compensé, par exemple, pour avoir subi une telle atroce, dans le fond, c'est
une thérapie, on devrait appeler ça, une atroce.
M. Gosselin (Daniel) : Bien, effectivement,
nous, on aimerait beaucoup que ce soit possible. On a aussi pensé que les
amendes qui sont faites pourraient servir à un fonds juridique pour soutenir
les personnes qui veulent faire un recours.
Mme Maccarone : O.K. Alors,
vous prévoyez d'abord une aide juridique pour accompagner aussi les victimes à
l'intérieur peut-être des modifications ou de l'aide qui sert à aborder,
offrir, tel qu'une ligne d'appel, mais aussi de l'aide juridique.
M. Gosselin (Daniel) :
Exactement.
Mme Maccarone : Parfait. Vous
n'avez pas abordé, mettons, des modifications qui sont nécessaires dans la
prise en charge dans le réseau de santé. J'aimerais vous entendre là-dessus,
qu'est-ce que nous avons besoin pour accompagner soit les victimes, surtout les
personnes trans, on se comprend, qu'à l'intérieur de notre réseau de santé,
c'est une problématique. Alors, peut-être, vous pouvez aborder un peu ce que nous
pouvons faire là-dessus pour améliorer la réalité de ces personnes.
M. Gosselin (Daniel) : Bien,
je pense qu'on a besoin, premièrement, d'une meilleure collaboration, d'une
meilleure concertation entre les groupes LGBTQ+ et les professionnels de la
santé. Je peux peut-être vous donner un exemple mais qui sort peut-être un peu
des thérapies de conversion. À un moment donné, j'ai l'Hôpital de Chicoutimi
qui m'appelle, c'est l'urgence, et puis l'urgence vient de me dire qu'il y a
quelqu'un qui s'est mutilé les parties génitales, étant donné que c'était une
personne trans puis elle a eu une crise de dysphorie.
• (12 heures) •
Donc, moi, j'ai bien beau faire de
l'intervention dans l'ici et maintenant, mais ça ne permet pas de la prévention
pour que ces choses-là ne se passent plus. Donc, je pense que c'est important
de mieux collaborer avec les groupes LGBT et surtout de reconnaître leur…
12 h (version révisée)
M. Gosselin (Daniel) :
...crise de... (panne de son). Donc, moi, j'ai bien beau faire de
l'intervention dans l'ici et maintenant, mais ça ne permet pas de la prévention
pour que ces choses-là ne se passent plus. Donc, je pense que c'est important
de mieux collaborer avec les groupes LGBT et surtout de reconnaître leur
expertise en la matière.
Mme Maccarone : Est-ce
que vous prévoyez aussi ou vous souhaitez avoir une formation pour les professionnels
aussi qui doivent accompagner de telles personnes, que ce soit dans le réseau
de santé, incluant un accompagnement psychologique, ou autres?
M. Gosselin (Daniel) :
Exactement, c'est ce que plusieurs groupes LGBT... je parle de Diversité 02,
mais je parle également de tous les autres organismes LGBT du Québec, c'est
l'une de nos préoccupations majeures.
Mme Maccarone : Et, je
sais, souvent, on demande beaucoup de nos organismes communautaires, surtout de
nous accompagner dans de telles démarches, j'ose croire que vous serez ouverts,
ainsi que GRIS... vous avez évoqué GRIS, puis avec raison, ils sont dans nos
écoles, ils offrent un soutien vraiment précieux d'accompagnement de toute
notre jeunesse, mais pensez-vous que ce serait aussi possible, mettons, pour
votre organisme, Émergence, GRIS, ou autre, qu'on sait... la Coalition des
familles LGBT, par exemple, d'accompagner les professionnels, d'avoir une telle
formation, ou est-ce que c'est trop lourd pour nos groupes déjà sur le terrain
et qui offrent un soutien aux victimes puis aux membres de la communauté
LGBTQ2?
M. Gosselin (Daniel) : Eh
bien, écoutez, ça dépend de chaque organisme, et je ne peux pas parler pour
tous les organismes communautaires LGBT. Le Conseil québécois LGBT, c'est
certain qu'il est prêt à mettre les efforts nécessaires pour intervenir sur le
sujet.
Mme Maccarone :
Excellent. Changement de propos, un peu. C'est sûr, on parle de faire de la
promotion, ce qui est vraiment positif, mais dans une manière d'essayer de
fermer le plus de trous possible à l'intérieur d'un projet de loi, pensez-vous
que ce serait important et nécessaire d'avoir quelque chose à l'intérieur du
projet de loi qui va empêcher ou interdire de la publicité relative aux
thérapies de conversion?
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, écoutez, moi, je pense vraiment que oui, si on consulte le site Internet
de Ta vie Ton choix, qui est très facile à trouver sur Internet, bien, c'est
très préoccupant parce que le site Internet est fait <d'une manière... >d'une
très bonne manière, les mots utilisés sont très bons. Quelqu'un qui est
vulnérable, qui se pose des questions sur son identité de genre, son
orientation sexuelle peut très, très facilement entrer dans ce vice-là, si je
peux dire ça, donc, je pense que oui, la promotion devrait être dans le projet
de loi n° 70.
Mme Maccarone : Et aussi,
on a eu quand même quelques <commentaires...
M. Gosselin (Daniel) : ...dans
ce vice-là, si je peux dire ça. Donc, je pense que oui, la promotion devrait
être dans le
projet de loi n° 70.
Mme Maccarone : Et
aussi, on a eu quand même quelques >commentaires depuis le... Bien, je
sais que dans mon cas, quand j'ai déposé mon projet de loi, puis j'ose croire
que c'est la même chose pour le ministre lors du dépôt du projet de loi
n° 70, on a quand même eu quelques commentaires, des personnes qui disent
que ceci ne devrait pas s'appliquer aux adultes, tu sais, il faut respecter les
droits et libertés de ces personnes-là, de consulter. Ce serait quoi votre
réponse à ces personnes qui disent qu'on devrait avoir des craintes que ça soit
appliqué aux mineurs et majeurs?
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, écoutez, c'est une très bonne question. Dans la mesure où on essaie de
créer un environnement inclusif à la diversité sexuelle et de genre, je crois
que ça doit être interdit autant pour les mineurs que pour les majeurs. On doit
créer un environnement exempt d'homophobie, de transphobie où chacun peut
exprimer son genre, peut exprimer son orientation sexuelle de manière
sécuritaire.
Mme Maccarone :
Pensez-vous que ceci peut aussi être adressé peut-être à l'intérieur de la
définition pour s'assurer que les gens, ils comprennent? Je sais qu'on ne peut
pas nécessairement mettre des exemples à l'intérieur d'un projet de loi, mais, par
exemple, moi, ma réponse à ces personnes, c'est qu'on a quand même des lois
pour se protéger... pour protéger la population des choses qui peuvent nous
faire mal, malgré qu'on veut faire notre propre choix, exemple, je ne peux pas
aller à la pharmacie puis demander au pharmacien de me donner une prescription,
de même, d'oxycodone, on sait que ça peut me faire très mal, ou sur
l'autoroute, c'est obligatoire de porter une ceinture. Pensez-vous qu'à
l'intérieur de la définition, ou ailleurs, il y aurait peut-être une manière de
définir ceci pour que ça soit plus clair puis que les gens ils comprennent que
ce n'est pas une question de ne pas accompagner les gens à affirmation de leur
identité de genre, mais une manière de l'écrire à l'intérieur du projet de loi?
M. Gosselin (Daniel) :
Oui, absolument, puis je pense que c'est important que les personnes qui
interviennent dans ce dossier-là affirment qu'on ne peut pas guérir
l'homosexualité ou guérir la transidentité, mais qu'on peut accompagner quelqu'un
et l'écouter et la soutenir dans ce processus-là.
Mme Maccarone : Et je
pense qu'il me reste peut-être une minute.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 1 min 30 s à peu près.
Mme Maccarone : Bon,
dernière question pour vous, M. Gosselin, ce serait vis-à-vis une
interdiction pour les entreprises ainsi que les églises, comme j'ai mentionné
dans mes remarques préliminaires, nous savions qu'il y a au-dessus de
25 millions de dollars qui sont offerts en crédits d'impôt, pensez-vous
que ce serait aussi important que ceci figure à l'intérieur du projet de loi
pour s'assurer que ce 25 millions de dollars peut aller pour financer les
objectifs, les besoins que vous avez évoqués lors de vos remarques dans votre <présentation...
Mme Maccarone : ...donc
il y a au-dessus de 25 millions de dollars qui sont offerts en
crédits d'impôt. Pensez-vous que ce serait aussi
important que ceci
figure à l'intérieur du
projet de loi pour s'assurer que ce
25 millions de dollars peut aller pour financer les objectifs, les besoins
que vous avez évoqués lors de vos remarques dans votre >présentation
ainsi que les besoins sur le terrain soit que... dans la région ou plus dans
les milieux urbains?
M. Gosselin (Daniel) : Absolument.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Il vous reste encore une minute. Oui.
Mme Maccarone : Il me
reste encore une minute? Mon Dieu! c'est parce que vos réponses sont tellement
claires. Bon, bien, d'abord, car il nous reste un petit peu moins d'une minute,
est-ce qu'il y a autres points que vous aimeriez souhaiter partager avec les
membres de la commission avant qu'on termine nos échanges?
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, écoutez, non, merci, ça va.
Mme Maccarone :
Excellent. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Je me tourne maintenant du côté de
la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Et vous disposez de
2 min 45 s
Mme Massé : Bonjour,
M. Gosselin. Nous avons 2 min 45 s pour parler d'un angle
mort, à mon sens, du projet de loi qui est toutes les personnes intersexes.
Lorsque j'ai lu le projet de loi, je me suis posé la question sur comment ces
personnes-là, et je sais qu'elles sont représentées aussi à travers la
coalition LGBTQI+, alors j'aimerais savoir si vous avez des préoccupations et
je vous laisse le deux minutes qui reste pour nous en faire part.
M. Gosselin (Daniel) :
Oui, absolument, on est très préoccupés par l'absence des personnes intersexes
dans le projet de loi n° 70. Les personnes intersexes, là, juste pour
faire une petite minute de sensibilisation, la meilleure manière de définir ces
personnes-là, c'est une personne qui est née avec une anomalie... une anatomie,
pardon, sexuelle qu'on dit atypique, là, donc qui ne correspond pas aux
attentes médicales féminines ou masculines. Je tiens à dire que ces personnes-là
sont souvent méconnues, invisibles et que le sujet est tabou.
Donc, moi, je pense qu'il y aurait quelque
chose à modifier dans le projet de loi de façon à ce que ce soit plus clair en
termes de respect de la démarche autonome et consentie. Donc, ce qu'on propose
de corriger, c'est... donc, actuellement, dans le projet de loi, c'est
écrit : «Est cependant exclu tout traitement médical ou intervention
chirurgicale destiné à changer le sexe d'une personne ainsi que
l'accompagnement requis à cette fin.» Donc, on propose de le changer par :
Est cependant exclu tout traitement médical ou intervention chirurgicale
découlant d'une démarche autonome d'affirmation de genre d'une personne et que
l'accompagnement requis à cette fin.
Mme Massé : Et, quand
vous dites «autonome», qu'est-ce que vous voulez dire exactement?
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, enfin, quand on parle d'autonome, on parle vraiment de <consentement...
M. Gosselin (Daniel) :
...de genre d'une
personne et que l'
accompagnement requis à cette
fin.
Mme Massé : Et quand
vous dites «autonome»,
qu'est-ce que vous voulez dire,
exactement?
M. Gosselin (Daniel) :
Bien, en fait, quand on parle d'autonome, on parle
vraiment de >consentement
libre et éclairé.
Mme Massé : De la personne
intersexe.
M. Gosselin (Daniel) : Exactement.
• (12 h 10) •
Mme Massé : Merci. En
restant... Je continuerais, parce qu'il y a aussi...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En 20 secondes, s'il vous plaît.
Mme Massé : Merci. L'accompagnement
dont... l'exclusion qui concerne l'accompagnement. Un des enjeux, avec les personnes
intersexes, si j'ai bien compris, c'est que c'est des interventions médicales
qui sont faites quasiment à la naissance, donc il va falloir qu'on prenne acte
de ça puis voir comment on peut prendre soin de ces gens-là aussi.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, le tour de parole
est rendu à la députée de Joliette, 2 min 45 s
Mme
Hivon
:
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Et merci beaucoup à vous, M. Gosselin,
c'est très éclairant, et très heureux de vous avoir comme premier témoin aujourd'hui.
Moi, je veux venir un peu sur les définitions parce que vous ne semblez pas
convaincu de la définition de thérapie de conversion, dans le projet de loi,
parce que vous nous indiquez vos craintes, là, par rapport notamment aux
pratiques dans certains organismes plus religieux. Donc, je comprends que la
manière dont c'est écrit qui, moi, m'apparaissait assez large, «toute pratique
ayant pour but d'amener une personne à changer son orientation sexuelle, son
identité de genre ou son expression de genre», vous aimeriez que ce soit
spécifié à l'intérieur de ça, que ça inclue aussi les pratiques qui peuvent
émaner de communautés religieuses.
M. Gosselin (Daniel) :
Oui, effectivement, quand je dis que la définition est peut-être incomplète,
c'est justement par rapport à tout ce qui est promotion également, comme je
parlais tantôt. Est-ce que le fait de dire qu'on peut corriger l'homosexualité
par de la promotion peut affecter justement les personnes qui sont plus
vulnérables? Donc... (panne de son) …là, oui, on parle de l'aspect religieux,
mais également tout l'aspect qui est de promotion.
Mme
Hivon
:
Parfait. Par ailleurs, j'ai une autre question, dans le projet de loi du ministre,
on parle que ce qui est exclu des thérapies de conversion, c'est vraiment les
thérapies qui consistent à accepter, donc, qui visent l'acceptation. Dans le projet
de loi de ma collègue de Westmount—Saint-Louis, elle était un peu plus large,
elle parlait d'acceptation, soutien ou compréhension, ou faciliter
l'adaptation. Est-ce que, pour vous, vaut mieux être un peu plus large dans
cette définition-là ou restreindre ça à la question de l'acceptation?
M. Gosselin (Daniel) :
Non, moi, je pense vraiment que c'est une définition plus large qui est
nécessaire au niveau de l'affirmation de soi, de l'écoute, du soutien. Il y a plusieurs...
bien, nous, dans les groupes LGBT, on utilise <beaucoup...
Mme
Hivon
:
...dans cette définition-là ou restreindre ça à la
question de
l'acceptation?
M. Gosselin (Daniel) :
Non, moi, je pense
vraiment que c'est une définition plus large qui est
nécessaire
au niveau de l'affirmation de soi, de l'écoute, du soutien.
Il y
a... bien, nous, dans les groupes LGBT, on utilise >beaucoup La licorne
du genre, je ne sais pas si vous connaissez cet outil-là, mais je pense que
c'est important d'utiliser des outils beaucoup plus larges, qui peuvent
permettre l'affirmation de soi.
Mme
Hivon
:
Est-ce qu'il me reste du temps?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 10 secondes.
Mme
Hivon
:
C'est ça, en fait, mon questionnement, c'était parce que depuis tantôt, avec le
ministre et vous, vous parlez beaucoup aussi des jeunes qui vont se
questionner. Donc, avant d'être dans l'acceptation, il y a beaucoup de questionnements,
d'où le questionnement que j'avais à votre égard, mais vous avez bien éclairé
ma lanterne. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée de Joliette. M. Gosselin,
les membres de la commission et moi vous remercions beaucoup pour votre apport
aux travaux. Alors, nous allons suspendre... la commission va suspendre jusqu'à
15 heures. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 13)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 heures)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations
avec les citoyens reprend donc ses travaux. Je vais demander à nouveau à toutes
les personnes qui sont dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques. La commission est réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 70, Loi visant à protéger les personnes contre les thérapies de conversion
dispensées pour changer leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou
leur expression de genre.
Donc, cet après-midi, nous allons entendre
par visioconférence les organismes suivants : la Fondation Émergence, qui
est ici présente en les personnes de M. Laurent Breault, directeur général, et
M. Gabriel Nadeau, qui est témoin et gouverneur de la fondation, ainsi qu'un
peu plus tard l'organisme AlterHéros.
Alors, à nouveau, bonjour, messieurs.
Bienvenue à la commission. Vous allez disposer d'une période de 10 minutes pour
votre exposé, après quoi, nous allons passer à la période d'échange avec les
membres de la commission. Alors, le temps vous est alloué. Vous commencez
maintenant pour une période de 10 minutes.
M. Breault (Laurent) : Oui,
bonjour, Mme la Présidente, M. le ministre de la Justice, Mmes et MM. les
députés. Bonjour et merci de l'invitation. Aujourd'hui, je suis accompagné de
M. Gabriel Nadeau, gouverneur de la Fondation Émergence et témoignant. M.
Nadeau a eu l'occasion de s'exprimer publiquement dans les médias sur les
thérapies de conversion qu'il a vécues, ainsi que sur les préjudices
occasionnés au niveau de la santé psychologique et physique. Il pourra donc
vous en faire part lors de son intervention.
La Fondation Émergence salue et appuie le projet
de loi. Nous saluons également l'unanimité et les initiatives des différents
partis politiques qui s'engagent à interdire les pratiques qu'on nomme les
thérapies de conversion. En effet, nous ne pouvons guérir de ce qui n'est pas
une maladie. Les personnes LGBTQ+ ne sont plus considérées, notamment par l'Organisation
mondiale de la santé, comme des malades mentaux. D'ailleurs, la Fondation
Émergence souligne annuellement le retrait de l'homosexualité par l'OMS en
1990, par la mise sur pied de la Journée internationale contre l'homophobie et
la transphobie, qu'elle a initiée, pour la première fois, au monde.
Mes commentaires aujourd'hui visent à
lister quelques recommandations dans le but de bonifier le projet de loi le
plus possible, toujours évidemment en collaboration avec les parlementaires. Je
formulerai donc quatre recommandations. La première, consulter les personnes
intersexes sur la définition. Les personnes intersexes revendiquent l'arrêt des
mutilations génitales opérées <sur les nouveau-nés…
M. Breault (Laurent) : ...
dans
le but de bonifier le projet de loi le plus possible, toujours évidemment en collaboration
avec les parlementaires. Je formulerai donc quatre recommandations. La
première, consulter les personnes intersexes sur la définition. Les personnes
intersexes revendiquent l'arrêt des mutilations génitales opérées >sur
les nouveau-nés En excluant dans la définition : «Tout traitement médical
ou intervention chirurgicale destinée à changer le sexe d'une personne», nous
craignons que cela protège contre tout recours contre les opérations réalisées
sur les nouveau-nés intersexes. La définition doit donc être claire, en termes
de respect de la démarche autonome et consentie de la personne, pour le
traitement médical ou pour une intervention chirurgicale, de manière à ne pas
protéger les mutilations génitales.
Deuxième recommandation : S'assurer dans
la définition que l'interdiction des pratiques englobe les activités de
promotion de thérapies de conversion. À l'ère des réseaux sociaux, des outils
Web et des vidéos sont créés, sont facilement accessibles et font la promotion
des thérapies de conversion. Des influenceurs, qui agissent comme des ex-gais,
tentent de démontrer qu'il est possible de changer son orientation sexuelle,
son identité ou son expression de genre. Des sites Web pseudoscientifiques ici
même, au Québec, offrent des solutions de conversion. Ici, il n'y a pas de
prise en charge directe d'une personne pour lui faire suivre une thérapie de
conversion, mais on cherche à influencer indirectement, ce qui est autant
dommageable pour les personnes LGBTQ+, surtout celles en phase normale d'acception
et de questionnement. Donc, est-ce que le projet de loi interdira ces activités
de promotion? Si oui, de quelle manière? Nous pensons que le projet de loi
atteint l'objectif de l'interdiction, mais ne met pas assez l'accent sur la
prévention.
Troisième recommandation : La
création d'un fonds d'indemnisation pour les réparations, le soutien des
victimes, la formation et la sensibilisation des intervenants et du grand
public. Les thérapies portent atteinte à la santé psychologique et physique, ce
qui laisse des traces qui sont parfois permanentes. Nous devons soutenir les
personnes qui ont subi ces thérapies et les accompagner dans le processus de
guérison. Également, bien qu'on interdise les thérapies, il reste que les
professionnels de la santé n'ont pas les outils théoriques et pratiques afin
d'aider les personnes LGBTQ+. Trop peu, aujourd'hui, sont aptes à le faire.
J'ajoute à cela qu'il est important de
porter une attention particulière aux personnes aînées LGBTQ+ qui constituent
une population très importante démographiquement, mais souvent oubliée ou mise
de côté, alors qu'elle a vécu, de plein fouet, une société qui normalisait les
thérapies de conversion. Les aînés LGBTQ+ ont donc un rapport traumatique avec
le système de santé. La confiance doit être rétablie et les intervenants
doivent faire preuve d'ouverture manifeste à l'égard de la diversité sexuelle
et de genre. Il faut donc outiller, former et sensibiliser l'ensemble des
intervenants qui sont déjà sur le marché du travail, mais également en amont,
durant leur parcours universitaire. Pour ce qui est du grand public, il est
important d'envoyer un message clair à la population que <les thérapies
de conversion...
M. Breault (Laurent) : ...
la
diversité sexuelle et de genre. Il faut donc outiller, former et sensibiliser
l'ensemble des intervenants qui sont déjà sur le marché du travail, mais
également en amont, durant leur parcours universitaire. Pour ce qui est du
grand public, il est important d'envoyer un message clair à la population que
>les thérapies de conversion ne sont pas une solution, qu'il existe des ressources
et des groupes d'aide et d'accompagnement pour les personnes LGBTQ+ ainsi que
pour leurs proches qui en ont besoin.
Enfin, quatrième recommandation, intégrer
dans la politique et le plan de lutte contre l'homophobie et la transphobie,
actuels et prochains, l'interdiction des thérapies de conversion et des mesures
qui s'assureront de sa mise en place. Voici quelques premières idées : Une
mesure qui mettrait sur pied une campagne de sensibilisation et de formation
auprès des différents ministères et intervenants; création d'outils pour un accompagnement
des familles et des proches qui ont de la difficulté à accepter la réalité
LGBTQ+ de leurs proches; bâtir des ponts avec les communautés religieuses pour
prévenir les thérapies qui se réalisent sous prétexte d'une idéologie
religieuse; déterminer un mécanisme clair de gestion de plainte et d'accompagnement
des victimes.
Merci pour votre écoute, et je cède la
parole à Gabriel.
M. Nadeau (Gabriel) : Merci à
tous pour votre écoute aujourd'hui... la place que vous laissez à mon
témoignage, parce qu'effectivement j'ai vécu trois thérapies de conversion.
Merci à Laurent pour cette introduction très appréciée. Pour moi, l'importance
de mon témoignage, c'est amener un petit peu un vécu, une expérience concrète par
rapport à quelque chose qui est méconnu au Québec, qui sont les thérapies de
conversion. Les thérapies de conversion, évidemment, sont plus présentes aux États-Unis.
Pourquoi? En grosse partie, à cause de la présence du groupe religieux auquel
mes parents ont été donc recueillis, là, dans les années 80. J'ai grandi dans
ce groupe religieux là, qui est protestant pentecôtiste. Donc, les protestants
pentecôtistes et les baptistes, là, un groupe qui est très présent aux États-Unis,
performent des... administrent, de manière très régulière, encore aujourd'hui,
des thérapies de conversion. <Ce n'est pas l'exception... >Ce
n'est pas une exception pour le Québec, pour ces groupes-là.
En fait, c'est ça, mes parents se sont
rencontrés dans l'église, donc ils ont eu moi et mes deux frères. J'ai grandi
dans un milieu qui était très religieux. Dès mon plus jeune âge, j'ai été, en
fait... je ne dirais pas «brainwashé», là, mais j'ai été conditionné un petit
peu à l'homophobie pour que ce soit très fortement implanté en moi. Donc, dès
que j'étais jeune, j'avais déjà l'impression que l'homosexualité, c'était quelque
chose qui était inacceptable, qui était bizarre, qui était contre nature,
puisque mes parents étaient assez vocaux sur leurs positions par rapport à
l'homosexualité ou... en fait, je ne pense pas que le reste, ils étaient au
courant, donc c'était pas mal juste l'homosexualité.
Quand, moi, j'ai pris conscience de mon
orientation sexuelle, peut-être autour de 10, 11 ans, évidemment, ma réaction
initiale, <c'était de la honte...
M. Nadeau (Gabriel) : ...positions
par rapport à l'homosexualité ou... en fait, je ne pense pas que le
reste, ils étaient au courant, donc c'était pas mal juste l'
homosexualité.
Quand, moi, j'ai pris conscience de mon
orientation sexuelle, peut-être autour de 10, 11 ans, évidemment, ma réaction
initiale, >c'était de la honte, c'était surtout de la détresse ou un
petit peu de la panique, puisque je ne savais pas du tout c'était quoi, la
solution. Et je savais qu'il y avait un avenir plutôt sombre qui allait
m'attendre si je continuais dans cette voie-là, ayant vu, là... ou, selon mes
parents, ayant entendu qu'est-ce qui était en réserve pour les homosexuels,
soit une vie, là, pas selon qu'est-ce que je souhaitais en tant qu'enfant.
• (15 h 10) •
Donc, je me rappelle bien qu'on
fréquentait une église à Montréal, où l'homosexualité était <souvent, >souvent
bannie. On parlait très librement, là, contre l'homosexualité, on disait que
c'était une perversion, on disait que c'était en fait un démon. Donc, plusieurs
chrétiens croient que l'homosexualité n'est pas nécessairement un démon, parfois,
ils vont croire que c'est un problème qui est relié à l'enfance, qui est relié
à la présence ou à l'absence du parent ou, souvent, du parent de même sexe.
Dans mon cas, dans le cas de cette église-là, qui était une église protestante,
il y avait la croyance que c'était un démon. Donc, j'ai eu cette croyance-là
très profondément en moi, j'étais sûr que c'était un démon, mais aussi que
j'avais un démon en moi, donc un genre d'esprit maléfique qui créait une
déviance sexuelle qui était l'homosexualité.
Donc, à 12 ans, je me rappelle, j'ai
demandé en fait de suivre un exorcisme où le prophète, là, un genre de ministre
religieux qui voulait qu'on l'appelle «prophète», on pourrait dire que c'est un
pasteur d'une certaine manière aussi, j'ai demandé, là, de suivre une séance
d'exorcisme au prophète. J'en ai parlé la première fois à ma mère, d'une
certaine manière, c'était mon premier «coming out». Je lui ai dit que j'avais
des intérêts pour le même sexe au niveau de mon orientation sexuelle. Ma mère,
donc, a cédulé une rencontre avec le prophète pour faire un exorcisme et
administrer un exorcisme. J'avais 12 ans, et c'est... donc, je vous rappelle,
c'est moi qui ai demandé, à 12 ans, de vivre un exorcisme.
Comment ça se passait? C'est que, donc, ma
mère est allée me reconduire — évidemment, je ne pouvais pas prendre
le métro ou aller par moi-même en voiture — <ma mère est allée
me reconduire >dans cette séance-là. Je suis rentré dans la salle. Il y
avait quatre diacres, là, qui sont des gens de l'église pour assister le
prophète, et évidemment le prophète lui-même. Il m'a fait boire de l'huile
d'olive, qui est une sorte d'eau bénite pour les chrétiens protestants. Après
avoir bu de l'huile d'olive, il a commencé à prier et ensuite il a commencé à
essayer de chasser l'esprit maléfique ou le démon à l'intérieur de moi. Donc,
ça, c'était l'exorcisme en tant que tel. Il me criait littéralement <dans
les oreilles, là...
M. Nadeau (Gabriel) : ...une
sorte d'eau bénite pour les chrétiens protestants. Après avoir bu de l'huile
d'olive, il a commencé à prier et ensuite il a commencé à essayer de chasser
l'esprit maléfique ou le démon
à l'intérieur de moi. Donc, ça, c'était
l'exorcisme en tant que tel. Il me criait
littéralement >dans les
oreilles, là, ça l'a duré une bonne trentaine de... Moi, je pleurais, évidemment,
j'étais complètement sous le choc de ce processus-là, mais je pleurais, je me
rappelle, à ce moment-là, <je me rappelle >que je pleurais aussi
parce que j'étais tellement désespéré de vouloir changer. À 12 ans,
j'étais déjà tellement triste d'être homosexuel, je voulais absolument changer.
Ce désir-là <n'a pas... >ne
m'a pas quitté, puisqu'à 16 ans et à 18 ans, je suis retourné à
d'autres séances d'exorcisme. Je suis retourné, à 16 ans, voir la même
personne et, à 18 ans, voir un autre groupe en Ontario pour vivre mon
troisième exorcisme. Et évidemment, ça, c'est des thérapies de conversion
directes, mais j'en ai vécu des indirectes, là, par toute l'homophobie ou les recommandations
des groupes religieux par rapport à l'homosexualité que je pouvais soit avoir
en parlant à des gens, des gens de mon église ou... quand je me confiais ou
même sur Internet. Puis c'est le rejet, à chaque jour, de moi-même qui est un
petit peu ma thérapie de conversion que j'appliquais à moi-même puisque je
voulais absolument changer. J'avais vraiment l'espoir que l'homosexualité,
c'était quelque chose de modifiable.
Donc, maintenant, j'en suis sorti, maintenant,
je suis bien. Maintenant, je suis tellement heureux dans mon orientation
sexuelle. Ça l'a pris du temps. Il y a des gens qui ne s'en sortent pas, il y a
des gens qui se suicident. J'ai pensé au suicide moi-même. Il y a des gens qui
ont des fortes dépressions. J'ai passé aussi par des états dépressifs. Donc, je
sais c'est quoi, les sévices des thérapies de conversion. Puis c'est pour ça
qu'aujourd'hui j'en parle avec grande fierté, je veux que ça arrête.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Nadeau, pour ce témoignage, merci,
c'est très apprécié. Merci beaucoup, M. Breault. Nous en sommes maintenant
rendus à la période d'échange avec les membres de la commission. M. le ministre,
vous avez gentiment accordé un petit peu plus de temps à votre... au témoignage
de M. Nadeau, il vous reste donc, pour votre tour parlementaire,
14 min 12 s.
M. Jolin-Barrette : Merci, Mme
la Présidente. M. Breault, M. Nadeau, merci de votre présentation.
M. Nadeau, c'est un témoignage courageux que vous faites à la commission.
Et c'est justement pour des témoignages comme le vôtre, pour une réalité vécue
comme la vôtre, que nous souhaitons agir sur les thérapies de conversion. Et je
dois vous dire que c'est difficile de retrouver des gens qui sont prêts à
livrer des témoignages comme ça. Alors, le fait que vous nous partagez aujourd'hui
votre témoignage, c'est tout à votre honneur. Et on vous remercie grandement
parce que je pense que ça va renseigner les membres de la commission.
Et vous identifiez nommément des éléments
pour lesquels on peut agir : des épisodes dépressifs, il y a des gens qui
ont pensé au suicide, des idées noires. Vous relatez que, dès votre jeune âge,
à 12 ans, 16 ans, 18 ans, <vous êtes confronté à...
M. Jolin-Barrette :
…les membres de la commission.
Et vous identifiez nommément des
éléments pour lesquels on peut agir : des épisodes dépressifs, il y a des
gens qui ont pensé au suicide, des idées noires. Vous relatez que, dès votre
jeune âge, à 12 ans, 16 ans, 18 ans, >vous êtes confronté
à ce genre de thérapie là. On ne devrait pas, au Québec, permettre que des
enfants soient soumis à ce genre de thérapies qui sont complètement barbares,
et surtout on doit s'assurer de s'occuper des enfants et d'offrir un cadre ou
expliquer à quel point l'orientation sexuelle n'est pas un choix, et que chaque
individu a le droit de vivre sa sexualité, vivre son orientation sexuelle, et
c'est ce qu'on recherche à faire avec le projet de loi n° 70.
J'aimerais vous demander à vous et à M.
Breault… et j'ai retenu, là, les quatre suggestions qui ont été formulées par
M. Breault tout à l'heure, notamment sur la question des personnes
intersexes, mais est-ce qu'il y a des éléments dans le projet de loi… Il y a
plusieurs éléments, là, qui ont été soulignés, exemple, un fonds pour les victimes
ou du soutien, tout ça, mais vraiment est-ce que vous trouvez qu'il manque
certains éléments dans le projet de loi en lien avec les thérapies de
conversion, là, quand vous en avez pris connaissance?
M. Breault (Laurent) : Veux-tu
y aller, Gabriel?
M. Nadeau (Gabriel) : Tu peux
y aller, Laurent.
M. Breault (Laurent) : O.K.
Merci, donc, pour la question. Tel que formulé, mis à part les questions que
j'ai amenées autour de la table par rapport à la définition, le projet de loi
nous semble plutôt complet. Je n'ai pas, en termes de… pour chacun des
articles, des ajouts spécifiques à faire. <Ce que… >Comme je le
mentionnais, on pense que le projet de loi est très axé sur l'interdiction, ce
qui est une bonne chose, je pense, c'est l'objectif numéro un, et, en ce
sens-là, il nous semble atteindre l'objectif, remplir l'objectif.
Je me demande s'il y a matière à bonifier
d'une manière à agir aussi sur la prévention et sur bonifier d'une manière
aussi à s'assurer de l'application de la loi. En fait, en principe, tout nous
semble tenir, mais les thérapies de conversion se réalisent d'une manière
tellement insidieuse, tellement cachée que… Puis je suis très conscient, M. le
ministre, que c'est difficile de faire un projet de loi qui va prévenir tous
les cas de thérapie de conversion, alors qu'on sait que ce n'est pas quelque
chose qui est annoncé, inscrit sur les billets de médecin ou de manière claire,
mais on se demande si l'application va vraiment fonctionner, et c'est pour ça
qu'on cherche à le bonifier d'une manière à prévenir mais aussi à soutenir les
personnes qui en sont victimes.
M. Jolin-Barrette : O.K.
J'aurais peut-être une question, là, pour M. Nadeau, en lien avec votre
témoignage. Pour les membres de la commission, là, par souci d'information,
est-ce que vous savez si, dans la communauté religieuse de vos parents, il y
avait beaucoup de jeunes qui ont été soumis à ce genre de thérapie là? Est-ce
que c'était <monnaie courante dans…
M. Jolin-Barrette :
...M. Nadeau, en lien avec votre témoignage. Pour les membres de la
commission, là, par souci d'information, est-ce que vous savez si, dans la
communauté religieuse de vos parents, il y avait beaucoup de jeunes qui ont été
soumis à ce genre de thérapie là? Est-ce que c'était >monnaie courante
dans cette congrégation-là, dans cette communauté-là?
M. Nadeau (Gabriel) : C'est
une bonne question. Je pourrais vous dire qu'en fait toutes les personnes que
je sais être homosexuelles, transsexuelles, lesbiennes ou de la communauté
LGBTQ+ de mon ancien groupe religieux, là, dans lequel j'ai grandi, toutes les personnes
qui étaient connues comme étant dans le groupe LGBTQ+ ont passé par des
thérapies de conversion. <C'est... >Souvent, les gens qui ne
passaient pas par des thérapies de conversion, c'est des gens qui le gardaient
en secret ou faisaient semblant d'être hétérosexuels, donc ça, ils s'en
passaient. Mais, dès que la personne lesbienne, gaie, ou etc., voulait assumer
son orientation sexuelle en étant toujours dans la religion, il allait y avoir
des tentatives claires, là, pour essayer de changer l'orientation sexuelle de
la personne.
Donc, je connais plein de gens que, oui, effectivement,
peut-être pas dans leur enfance, mais de ce que j'ai compris, plus
l'adolescence à partir de 14 ans jusqu'en montant, là, je connais... j'ai
entendu, au moins, une dizaine de personnes qui sont venues me voir puis qui
m'ont dit qu'ils ont vécu des choses similaires, oui.
M. Jolin-Barrette : Et
pour... Tout à l'heure, là, on parlait avec M. Breault, là, au niveau de
la prévention. En termes de diffusion, là, parce que c'est un des objectifs
aussi de pourquoi j'ai décidé de présenter le projet de loi, c'est de dire que
ce genre de thérapie là, ce n'est pas tolérable au Québec. Mais comment est-ce
que vous pensez qu'à partir du moment où on va avoir adopté le projet de loi,
puis qu'il va y avoir des recours pour les personnes victimes, puis aussi on va
avoir des dispositions pénales afin de poursuivre ceux qui offrent ce genre de
thérapie là... Comment est-ce qu'on peut sensibiliser la population québécoise
pour que ça percole partout au Québec, pour dire que ce genre de thérapie là
n'est pas acceptable?
• (15 h 20) •
Parce que vous nous livrez un témoignage,
vous, vous l'avez vécu, vous dites : Certains jeunes, à l'intérieur de la
congrégation religieuse avec laquelle j'appartenais par le biais de mes
parents, l'ont subi aussi. Mais pour dire à ces jeunes-là : Vous n'êtes
pas seuls, l'État québécois est là pour vous aider, pour vous accompagner,
comment est-ce qu'on devrait faire ça?
M. Nadeau (Gabriel) : Je
dirais qu'au niveau des communautés, là, qui sont susceptibles d'administrer
des thérapies de conversion, je pense que l'intervention du gouvernement, au
niveau des campagnes de prévention, doit être ciblée vers les communautés qui
sont susceptibles d'administrer des thérapies de conversion. Pourquoi? Parce
qu'au Québec ce n'est pas l'apanage général ou... d'administrer
des thérapies de conversion juste comme ça. C'est souvent dans des groupes
spécifiques, soi-disant, donc des groupes religieux, en majeure partie, c'est
ça, ou des groupes qui sont issus de l'immigration, qui vont apporter leur
propre groupe religieux dans lequel il y a des thérapies de conversion.
Moi, ça a été le cas. <Ça a été un...
M. Nadeau (Gabriel) : ...
d'administrer des thérapies de conversion juste comme ça. C'est souvent dans
des groupes spécifiques, soi-disant, donc des groupes religieux en majeure
partie, c'est ça, ou des groupes qui sont issus de l'immigration, qui vont
apporter leur propre groupe religieux dans lequel il y a des thérapies de
conversion.
Moi, ça a été le cas. >Ça a été
un petit peu le biais des deux. Le groupe que je faisais partie, c'était un
groupe religieux et un groupe qui venait de venir, là, de l'immigration et que
c'était une pratique très, très courante, faire des exercices de cette
manière-là. Donc, je pense qu'il faudrait juste, selon moi, là, pour, le plus
possible, éviter que des gens, ou même les enfants surtout, vivent des
thérapies de conversion, ça serait de cibler l'intervention et la prévention
aux groupes, soit issus de l'immigration ou aux groupes religieux, pas juste,
par exemple, faire des campagnes à la télévision; ça, tous les Québécois vont
sûrement l'écouter. Mais, je veux dire, les groupes religieux n'écoutent pas
les postes normaux, là, ils ne vont pas les écouter, là.
Donc, les gens qui sont susceptibles de
faire... d'administrer des thérapies de conversion sont souvent un peu exclus,
ils sont souvent un petit peu dans leur taverne, si... ou dans leur caverne
plutôt, je dirais, puis c'est eux qu'il faut cibler, c'est eux qu'il faut...
C'est ça, je pense que je vous dirais ça, oui.
M. Jolin-Barrette : O.K. Peut-être
avant de céder la parole au député de Chapleau, j'aurais peut-être une question
pour M. Breault, en lien avec les personnes intersexes. Dans le projet de loi,
ce qu'on a fait à l'article 1, c'est qu'on vient à définir ce que constitue la
thérapie de conversion. Mais on vise, par contre, à exclure un traitement
médical qui ferait en sorte qu'une personne qui souhaiterait changer de sexe
physiquement puisse le faire et puisse être accompagnée par un professionnel de
la santé, une personne transsexuelle, pour subir l'opération.
Est-ce que vous considérez que la
définition qu'on a indiquée entraîne des difficultés pour les personnes
intersexes?
M. Breault (Laurent) : Bon, première
des choses, dans ma recommandation, j'invitais, donc, le gouvernement à
consulter les personnes intersexes et les groupes qui les représentent pour
avoir une réflexion plus poussée et plus précise que la mienne. Moi, ce que je
peux vous dire, et après consultation dans mon entourage et dans mon réseau, la
définition a ceci de bien, qu'elle ne considère pas une personne qui, autonome,
et de par sa propre volonté, souhaite faire une transition. Ça, c'est bien.
Dans le cas des intersexes, ce qui se
passe, c'est qu'on opère des bébés afin de leur assigner un sexe et, en
grandissant, bien, le sexe qu'on a assigné n'est pas nécessairement celui qui
est l'identité de genre ressenti. Donc, en ce sens-là, si je peux me permettre
l'expression, c'est comme une thérapie de conversion à retardement, là. Donc,
c'est en ce sens-là <que je pense...
M. Breault (Laurent) : …afin
de leur assigner un sexe et, en grandissant, bien, le sexe qu'on a assigné
n'est pas nécessairement celui qui est l'identité de genre ressenti. Donc, en
ce sens-là, si je peux me permettre l'expression, c'est comme une thérapie de
conversion à retardement, là. Donc, c'est en ce sens-là >que je pense
qu'il faut faire attention de ne pas… de prendre en considération la
revendication première des personnes intersexes qui est d'arrêter les
mutilations génitales, et que la formulation comme telle de la définition ne
soit pas un laissez-passer pour permettre les mutilations génitales. Donc,
c'est le sens de mon message, mais je ne veux pas trop m'avancer. Je vous invite
simplement à consulter les groupes intersexes.
M. Jolin-Barrette : Parfait. Je
vous remercie, M. Breault, et je vais céder la parole au député de Chapleau.
Mais merci également beaucoup, M. Nadeau, votre témoignage est très percutant,
et je vous félicite d'avoir le courage de partager votre histoire.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. le ministre. Je vais maintenant céder la
parole au député de Chapleau. Il reste 3 min 37 s.
M. Lévesque (Chapleau) :
Merci. Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Breault, M. Nadeau. Merci de ce
témoignage poignant, j'abonde dans le même sens que le ministre, personne ne
devrait avoir à vivre ce que vous avez vécu. Merci d'avoir le courage et la
force de nous le témoigner aujourd'hui. Vous avez parlé des difficultés à
rejoindre les jeunes, mais aussi les communautés, là, soit les minorités
religieuses, ethniques ou même culturelles. Vous avez dit qu'il faudrait peut-être
cibler ces communautés-là de façon à faire de la prévention ou même à s'assurer
que ce type de thérapie là n'ait pas lieu.
Auriez-vous une marche à suivre ou
certains éléments qui pourraient nous guider afin de bien pouvoir les rejoindre
et s'assurer qu'on essaie de mettre un frein à ces thérapies?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Est-ce que vous m'entendez encore? M'entendez-vous?
M. Nadeau (Gabriel) : Pardon,
j'étais sur «mute».
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
O.K. D'accord. Allez-y, la parole est à vous.
M. Nadeau (Gabriel) : Merci
beaucoup. Merci de vos commentaires, premièrement, c'est bien apprécié. Ce que
je dirais à ce niveau-là, c'est que je suis certain qu'il y a des méthodes, là,
qu'on peut amener, le développement de ces projets de loi là dans les
communautés, parce que de ce que j'ai compris, en ce moment, la stratégie
surtout des communautés religieuses, c'est faire le bouche-à-oreille puis faire
semblant qu'il n'y a rien qui se passe, même au niveau légal, faire semblant qu'il
n'y a <rien, >rien qui se passe, donc on continue dans le secret.
Je sais qu'en fait les communautés
religieuses ont souvent des, comme je disais, des ordres, entre guillemets, ce
n'est pas des vrais ordres, là, mais des ordres qui les chapeautent. Donc,
toutes les églises sont sous l'ordre, par exemple, des évangéliques protestants
du Plein Évangile<, exemple>. Sous cet ordre-là, si on envoie des
campagnes de sensibilisation ou... peut-être plus un petit peu fort que ça,
parce que des campagnes, ça se met <facilement…
M. Nadeau (Gabriel) : ...mais
des ordres qui les chapeautent. Donc, toutes les églises sont sous l'ordre,
par
exemple, des évangéliques protestants du Plein Évangile, exemple. Sous cet
ordre-là, si on envoie des campagnes de
sensibilisation ou...
peut-être
plus un petit peu fort que ça, parce que des campagnes, ça se met >facilement
dans la poubelle, des pamphlets, là, mais être un petit peu plus agressif par
rapport aux législations. Comme là, un courriel à partir de maintenant, c'est
interdit. Donc, si on voit ça dans les églises que vous chapeautez, il va y
avoir des conséquences, tu sais. Plus cibler, être stratégique à ce niveau-là.
M. Lévesque (Chapleau) : Oui. O.K.
Intéressant, intéressant. Il y a également, là, une table interreligieuse qui a
été établie par le gouvernement, tout récemment, pour justement être en
relation avec les différentes religions et, bon, leurs représentants. Peut-être
que ça pourrait être également un très bon canal à ce niveau-là, je retiens la suggestion.
Peut-être, selon votre expérience, M.
Nadeau, à quoi ressemble, dans le fond, l'accompagnement — donc vous
êtes une victime, là, mais — pour... de ces thérapies, là? Donc, qu'est-ce
qui vous a permis de sortir de ça? Qu'est-ce qui vous a... Dans le fond, votre
accompagnement que vous avez eu pour mieux, disons, sortir, puis si vous avez
peut-être des pistes de solution pour améliorer le tout.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : En très peu de temps, M. Nadeau.
M. Nadeau (Gabriel) : O.K.
Parfait. C'est une très bonne question. Je vous dirais, moi, mon accompagnement
a plus été par mon réseau de ma famille qui n'est pas religieuse, puisque
seulement mes deux parents sont religieux. Par contre, j'ai été aidé quand j'ai
été au secondaire, par une thérapeute, donc, du secondaire, jusqu'à secondaire
III, puisqu'en secondaire IV, V, c'était une école confessionnelle protestante
que j'ai fréquentée. Donc évidemment, ce n'était pas question d'être dans ce
niveau-là. Peut-être de la sensibilisation dans les écoles, mais surtout
sensibiliser les thérapeutes que la thérapie de conversion, premièrement, ça
existe. Et deuxièmement il y a des programmes, là, pour permettre que les gens
qui vivent,. comme évidemment la Fondation Émergence, aient des ressources pour
s'accepter, pour évoluer là-dedans puis surtout pour sortir de leur trauma.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M. Nadeau, M. Breault. Je cède
maintenant la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis, et vous avez
11 minutes pour votre intervention.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Breault, bonjour, M. Nadeau. Merci d'être parmi nous,
et merci surtout, M. Nadeau, pour votre témoignage qui était touchant. Et, en
effet, je me joins à mes collègues en disant que ça a pris du courage de venir
témoigner et de partager votre histoire avec nous. C'est sûr, je pense qu'on a
besoin de dénoncer, mais on a aussi besoin d'avoir... C'est une éducation que
vous apportez aussi, puis c'est très nécessaire que nous entendions. Et
j'espère que les gens qui nous écoutent ont pris en bonne note ce que vous avez
amené comme clarté et information.
• (15 h 30) •
Sous l'angle où vous avez déjà abordé,
j'aimerais parler un peu de la prescriptibilité ou imprescriptibilité. Nous
avons pensé à qu'est-ce que nous allons faire pour appuyer, et le soutien pour
les...
15 h 30 (version révisée)
Mme Maccarone : ...amené comme
clarté et information.
Sous l'angle que vous avez déjà abordé, j'aimerais
parler un peu de la prescriptibilité... ou imprescriptibilité. Nous avons pensé
à qu'est-ce que nous allons faire pour appuyer... et le soutien pour les
victimes, mais j'aimerais vous entendre par rapport à des... le recours au Code
civil, puis si nous devions penser à une imprescriptibilité, encore... Par
exemple, ce que vous avez vécu, c'était plutôt dans votre jeunesse. Vous êtes
maintenant adulte. Comment vous voyez cette procédure-là comme appui pour les
victimes?
M. Nadeau (Gabriel) : C'est
une bonne question, et ça, je pense que ça chapeaute votre question un peu, mes
questionnements par rapport à l'application de ce projet de loi là, s'il vient
à être adopté, parce qu'évidemment c'est absolument mon souhait, et ça me
rendrait extrêmement heureux. À quel point, donc, les victimes, et je m'inclus
là-dedans, vont pouvoir, dans le concret, là, premièrement, dénoncer les
groupes qui leur ont fait vivre des thérapies de conversion, les individus qui
ont administré les thérapies de conversion? Moi, il n'y en a pas juste un, il y
a plusieurs.
Moi, je veux dire, je n'ai pas vraiment
intérêt de poursuivre des gens <pour... > au niveau des sous, là.
Ce n'est pas mon intérêt. Moi, mon intérêt, c'est que les gens qui m'ont
administré des thérapies de conversion arrêtent de le faire, puis qu'ils
n'aient pas vraiment le choix d'arrêter.
Mais au niveau de l'application, de
l'importance d'arrêter ou de la contingence d'arrêter, je ne sais pas trop
comment la loi va être exécutée, si elle vient à être adoptée. Donc, est-ce que
je vais appeler un genre de CNESST pour le civil, là, pour les droits civils
pour dénoncer? Après ça, ça va être comment que ça va découler? Est-ce que ça
va être une enquête? Est-ce qu'il va y avoir des enquêteurs là-dedans? Est-ce que
ça va être une procédure? Est-ce que moi, je vais devoir débourser des frais,
en tant que victime? Puisque c'est sûr que, s'il y a des frais légaux, il y a
plein de victimes, là, qui ne vont pas pouvoir rentrer là-dedans. Donc, les
gens qui vont avoir administré les thérapies de conversion vont sûrement
continuer parce que les victimes ne pourraient pas s'impliquer dans un
processus légal.
Mme Maccarone : Bien, je pense
qu'on peut faire un parallèle avec les victimes d'agressions sexuelles, par exemple.
Je suis tout à fait d'accord que c'est complexe, mais je viserais plutôt... je
pense, une imprescriptibilité serait importante. Parce que, souvent, vous avez
évoqué, avec M. Breault, que, surtout, les aînés, c'est quand même une
population qui est particulièrement visée, et on devrait avoir quand même un
recours pour ces personnes. Alors, peut-être, si, mettons, on disait qu'il y
aurait de l'aide juridique pour accompagner les victimes, est-ce que ça rejoint
un peu les préoccupations que vous avez évoquées?
M. Nadeau (Gabriel) :
Absolument. Avec l'aide juridique, je pense que le vent serait beaucoup plus
dans les voiles, là, pour les victimes. Ça les encouragerait à aller de l'avant
pour que les gens qui administrent les thérapies de conversion ne le fassent
plus. Oui, absolument.
Mme Maccarone : Vous n'avez
pas parlé... Je sais que j'ai entendu... au début, on trouvait que le projet de
loi était bien, puis, oui, je <pense...
M. Nadeau (Gabriel) :
...avec l'aide juridique, je pense que le vent serait
beaucoup plus dans
les voiles, là, pour les victimes. Ça les encouragerait à aller de l'avant pour
que les gens qui administrent les thérapies de conversion ne le fassent plus,
oui, absolument.
Mme Maccarone : Vous n'avez
pas parlé... Je sais que j'ai entendu, au début, on trouvait que le
projet
de loi était bien. Puis, oui, je> pense qu'évidemment, on peut le
bonifier, c'est perfectible. Vous n'avez pas évoqué protection à la jeunesse et
ça m'a surpris étant donné votre expérience personnelle. Avez-vous des recommandations,
des mesures que nous pouvons faire pour bonifier ce que nous faisions à
l'intérieur de la protection de jeunesse? Par exemple, comment on va identifier
l'orientation sexuelle, l'identité de genre pour nos jeunes enfants qui vont malheureusement
avoir besoin de cette ressource?
M. Nadeau (Gabriel) : C'est un
très bon point. Je vous dirais que j'ai été surpris du projet de loi puisque je
pensais qu'il allait être ciblé sur les gens de moins de 18 ans. J'ai été
agréablement surpris que c'est vers tout le monde, ça vient me chercher
vraiment positivement. C'est sûr que pour les enfants, les sévices <sont...
> peuvent être beaucoup plus importants puisqu'il y a un... évidemment,
il y a une vulnérabilité qui est bien plus importante, il y a une fragilité
psychologique, il y a une absence de sens critique pour prendre des choix, puis
surtout, s'en sortir, sortir d'un contexte qui oblige une thérapie de
conversion. Moi, ce n'était pas obligé, la thérapie de conversion, je l'ai
demandée, mais si j'avais refusé d'en suivre, sûrement qu'elle aurait été
implicitement obligatoire.
Au niveau de la protection de la jeunesse,
qu'est-ce que je vous dirais, selon moi, là, selon mon avis, ça serait de
sensibiliser les gens qui sont, donc, qui sont responsables ou qui sont dans
une protection de la jeunesse, exemple, la DPJ, pour qu'est-ce qui est de la
thérapie de conversion. Donc, si l'intervenant de quelqu'un en DPJ reçoit un
appel pour une plainte autour d'une thérapie de conversion, premièrement,
d'intervenir... l'intervenant sait c'est quoi, il a été éduqué sur les
thérapies de conversion, il sait comment réagir par rapport à ça. Aussi,
l'intervenant, si, donc, il sait que c'est un milieu qui est religieux, par
exemple, puis que ce milieu religieux là est susceptible d'administrer des
thérapies de conversion, bien, peut-être qu'il va aller de l'avant pour poser
les bonnes questions, pour un petit peu creuser, voir si les enfants, est-ce
qu'il y a eu des... au niveau de l'orientation sexuelle, est-ce qu'il y a des
thérapies de conversion, peut-être, qui ont été avancées ou même vécues. Donc,
c'est qu'est-ce que je dirais à ce niveau-là.
Mme Maccarone : Parfait.
M. Breault, j'aimerais vous entendre. Vous avez évoqué parmi vos
recommandations qu'il faut vraiment aller vers l'avant, avoir un appui pour nos
aînés qui sont particulièrement visés. Avez-vous des recommandations que vous
aimeriez voir, à l'intérieur du projet de loi n° 70, qui pourraient amener
ce qu'on a besoin de <faire...
Mme Maccarone : …vous
entendre. Vous avez évoqué parmi vos recommandations qu'il faut vraiment aller
vers l'avant, avoir un appui pour nos aînés qui sont particulièrement visés.
Avez-vous des recommandations que vous aimeriez voir à l'intérieur du
projet
de loi n° 70 qui pourraient amener ce qu'on a besoin de> faire pour
protéger nos aînés et pour leur amener des services et des soins qui sont
nécessaires, pour offrir un soutien à ces victimes de la thérapie de
conversion?
M. Breault (Laurent) : Oui, donc,
pour ce qui est des aînés, ce qu'il est important de savoir, c'est que les
aînés ont un rapport trouble et stressé avec le système de la santé. C'est une
génération qui a connu, donc, la pathologisation médicale de l'homosexualité,
des réalités trans. Ils ont connu, même, la criminalisation. Donc, pour eux, le
système de la santé a opéré les thérapies de conversion qui ont été de
différentes natures, <jusqu'à des… > jusqu'à l'extrême, là, jusqu'à
des marques corporelles.
Donc, c'est sûr que le lien de confiance
est brisé entre les aînés LGBT et le système de la santé, mais aussi par
rapport à tout… il y a une énorme crainte et d'appréhension par rapport au
milieu aîné, par rapport aux résidences, par rapport au lieu de socialisation
pour les aînés, pour les soins de santé, etc. Donc, ma première recommandation
par rapport à ça, c'est d'informer les professionnels de la santé et des
différents milieux aînés par rapport à cette histoire de la thérapie de
conversion qui a frappé les gens, les aînés qu'ils sont normalement en train d'aider
et de soutenir. Donc, ça, ça serait ma toute, toute première recommandation.
Par la suite, c'est de manifester une
ouverture. Je pense qu'en ce moment, <il y a… > dans le milieu de
la santé, il y a un… on adopte un ton neutre qui se veut inclusif, mais, en
réalité, ça ne corrige pas le problème de la crainte. Donc, quand c'est trop
neutre, quand c'est trop monotone, et on ne fait aucun signe ni d'exclusion ni
d'ouverture, bien, en fait, la crainte des aînés persiste. Donc, ça, c'est une
deuxième recommandation. Donc, j'en resterais là pour l'instant, là, je... Dans
le futur mémoire, je pourrai préciser davantage, mais c'est principalement ça,
l'effort à faire.
Ensuite, bien, il y avait évidemment la
question des indemnisations. Moi, je dis que… la question que je me demandais,
c'est jusqu'à quand est-ce que la thérapie doit avoir eu lieu? Dans les années…
dans le peu d'années, deux, trois années, ou ça peut être voilà 50 ans, voilà
30 ans? Je pense qu'il y a peut-être quelque chose à préciser à ce
niveau-là, là.
Mme Maccarone : Ça m'amène à
savoir, comme j'ai... Pour que vous sachiez, vous pouvez déposer n'importe
quand, pendant que nous sommes en commission, vos recommandations. Je sais que
vous avez eu très peu de temps à vous préparer, mais ce serait vraiment
bienvenu. Si vous nous envoyez plusieurs recommandations, c'est <bienvenu,
mais…
Mme Maccarone : ...ça
m'amène à savoir, comme j'ai... Pour que vous sachiez, vous pouvez déposer
n'importe quand, pendant que nous sommes en
commission, vos
recommandations.
Je sais que vous avez eu très peu de temps à vous préparer, mais ce serait
vraiment
bienvenu si vous nous envoyez plusieurs
recommandations, c'est>
bienvenu, mais ce que vous évoquez, ça me faisait penser... J'ose croire, d'abord,
que vous êtes d'accord que nous devrons aller au-delà de sanctions, mais aussi
de s'assurer qu'on doit empêcher les organismes de bénéficier des avantages
fiscaux. Pour moi, c'est une lacune dans le projet de loi, et j'aimerais le
rajouter. Pensez-vous que ce serait un ajout qui serait nécessaire? Et est-ce
que vous appuyez ceci?
• (15 h 40) •
M. Breault (Laurent) :
Si les avantages fiscaux peuvent <... s'ils peuvent > devenir un
levier pour mieux intervenir, pour apporter du soutien ou pour interdire les
thérapies de conversion, moi, je pense que ce serait une bonne idée de
l'ajouter. Je ne sais pas si Gabriel a une meilleure position que moi sur ce
point-là.
M. Nadeau (Gabriel) : Je suis d'accord.
Oui, je suis absolument d'accord, oui.
Mme Maccarone : ...pour moi,
une autre manière que j'aimerais bonifier...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Très rapide, il ne reste plus de temps.
Mme Maccarone : Oui, bien, c'est
parce qu'évidemment pour la Régie de l'assurance de maladie du Québec, ça aussi,
c'est quelque chose, pour moi, j'aimerais ajouter. Je voulais juste savoir si
vous seriez en accord avec un tel ajout pour bonifier le projet de loi.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, c'est tout le temps qu'on
avait pour cette aile parlementaire. Nous en sommes maintenant rendus à la
députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, et vous disposez de
2 min 45 s.
Mme Massé : Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Nadeau. Merci, M. Breault. Effectivement, c'est
courageux, mais je sais que vous vous en faites en même temps une fierté d'être
à la défense de ce dossier-là depuis quelques années, avec raison, parce que je
pense qu'il y a de bien du monde qui ont besoin du courage que vous avez,
Gabriel. Merci. Mais j'ai juste deux minutes, alors on va aller au coeur.
M. Breault, vous avez parlé
d'interdire la promotion dans votre deuxième axe. J'aimerais vous entendre un
peu plus là-dessus. Et vous avez aussi parlé d'une espèce de fonds d'aide pour
les victimes. J'essayais de voir si vous voyez, dans ce que vous imaginiez à
cette étape-ci, si c'était quelque chose un peu comme l'IVAC, hein, où l'État
soutient les victimes d'acte criminel? Là, je le sais que ce n'est pas de ça qu'on
parle ici, là, mais est-ce que c'est un peu dans cette perspective-là où vous
envisagez ce que vous avez appelé tantôt le fonds d'aide pour les victimes?
M. Breault (Laurent) : Oui, donc,
merci, Manon. Donc, pour ce qui est de la promotion, en fait, le point, c'est
surtout qu'on va interdire les thérapies, mais en ligne on peut suivre des sites
Web, des informations qui ont indirectement le même effet que les thérapies,
mais ce ne sont pas des outils qui prennent en charge la <personne...
M. Breault (Laurent) : …on
va interdire les thérapies, mais en ligne, on peut suivre des
sites Web,
des informations qui ont indirectement le même effet que les thérapies, mais ce
ne sont pas des outils qui prennent en charge la> personne comme un
patient, comme un psychothérapeute qui voudrait opérer une thérapie.
Donc, dans le... ma question était :
Est-ce que, dans la définition de la pratique — hein, une thérapie de
conversion, c'est une pratique, ainsi de suite — est-ce que la
pratique inclut la pratique de promotion? Et que fait-on par rapport au site
Web Ta vie Ton choix, là, qui est peut-être le plus populaire, là? Est-ce qu'on
peut l'interdire à la suite de l'adoption du projet de loi? Comment on s'y
prend? Donc, c'est surtout en ce sens-là, là, je n'ai pas de réponse moi-même, là,
mais j'invite les députés à réfléchir sur cette question.
Pour ce qui est du fonds d'aide, je le
voyais davantage, pas comme un fonds de réparation comme le Fonds Purge LGBT au
fédéral, là, je le voyais plutôt comme un fonds qui viendrait apporter un
soutien psychologique, financer des thérapies, par exemple, de soutien
psychologique pour les gens qui ont vécu des thérapies de conversion, mais
aussi de l'argent qui serait dédié à des campagnes de sensibilisation et à la
mise sur pied de formations et de création d'outils pour les intervenants de la
santé. Donc, j'ai dit fonds d'indemnisation, mais on peut changer de nom pour
inclure ces trois volets-là, un fonds d'aide.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, Mme la députée. Merci, M. Breault.
Nous en sommes maintenant rendus au troisième groupe, pour une période, Mme la
députée de Joliette, pour une période de 2 min 45 s.
Mme
Hivon
: Merci,
Mme la Présidente. Alors, à mon tour de vous remercier chaleureusement pour vos
témoignages à tous les deux, très éloquents et très pertinents, ça nous aide beaucoup
à cheminer ici. Et j'allais aller dans le même sens, là, sur la question, je
voulais comprendre davantage ce que vous aviez en tête avec votre fonds. C'est beaucoup
plus clair avec ce que vous avez dit, dans le fond, c'est pour soutenir un peu
les répercussions et aussi avoir un objectif de prévention, si j'ai bien
compris. Donc, vous pourrez clarifier ça.
Mais je voulais avoir… j'avais une
question pour M. Nadeau, plus spécifiquement, de son expérience, mais aussi de
l'expérience de gens qu'il a pu côtoyer, qui ont vécu ce type de thérapie là,
de cheminement là. Le plus grand besoin, après, je dirais, de réparation,
est-ce que c'est de pouvoir être soutenu dans le choc ou dans les séquelles que
ces thérapies-là ont pu laisser ou c'est davantage une demande en indemnisation?
Donc, je voulais juste comprendre un petit
peu où étaient les besoins les plus importants pour que quand nous, on va
cheminer, pour déterminer, justement, c'est quoi, les gestes les plus précis
qui peuvent être faits pour soutenir… je comprends votre message sur la
prévention, mais a posteriori aussi, pour ceux qui ont vécu ces thérapies-là,
qu'est-ce qui peut être le plus aidant?
M. Nadeau (Gabriel) : Je
serais d'accord absolument avec Laurent, là, pour qu'est-ce qui est, au niveau,
là, <psychologique…
Mme
Hivon
:
...ici qui peuvent être faits pour soutenir... je comprends votre message sur
la prévention, mais a posteriori aussi pour ceux qui ont vécu ces thérapies-là,
qu'est-ce qui peut être le plus aidant?
M. Nadeau (Gabriel) : Je
serais d'accord,
absolument, avec Laurent, là, pour qu'est-ce qui est...
au niveau> psychologique, l'intérêt du fonds, puis ça va répondre à
votre question. Je pense que, selon mon expérience, les sévices psychologiques
qui sont les plus dommageables, mais qui vont aussi rester dans le temps, c'est
sûr qu'ils doivent être adressés, notamment, je pense, par de la thérapie avec
des thérapeutes qualifiés qui vont ne pas, premièrement, administrer de la
thérapie de conversion. Parce qu'on en a eu, des exemples, qu'il y a des gens
qui sont des thérapeutes dans les ordres professionnels qui défient leur code
de déontologie pour administrer des thérapies de conversion. Donc, aller dans
le sens inverse avec des thérapeutes qualifiés qui pourraient, donc, réparer
les dommages au niveau psychologique.
Pour qu'est-ce qui est de l'indemnisation,
je ne sais pas... Moi, personnellement, je ne verrais pas d'intérêt pour
moi-même d'être indemnisé, je ne verrais pas où je devrais être indemnisé. Les
gens qui ont vécu des sévices physiques ou... Tu sais, voilà des décennies,
c'était une question de lobotomie, là, tu sais, d'interventions dans le
cerveau. J'imagine que leur discours va être différent, peut-être, mais je
pense que, dans le concret, là, puis des gens que j'ai côtoyés qui ont vécu
aussi des thérapies de conversion dans mon cercle, mais aussi qui m'ont
rejoint, je pense que l'intérêt d'un fonds pour rendre accessible la thérapie
réparatrice, pour vraiment venir guérir les traumas puis les sévices créés par
les thérapies de conversion, c'est le plus important. Je pense que les gens qui
ont vécu des thérapies de conversion devraient avoir des thérapies qui leur
sont accessibles facilement puis que ce n'est pas à cause d'une situation
économique, là, difficile qu'ils ne vont pas pouvoir réparer les dommages à
l'intérieur d'eux.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M. Nadeau. Merci, Mme la
députée. Alors, ceci met fin à votre témoignage. Encore merci de votre rapport
aux travaux de la commission. Votre témoignage, M. Nadeau, était touchant.
Merci également, M. Breault. Alors, nous allons suspendre quelques
instants le temps de recevoir le prochain groupe. Encore merci.
(Suspension de la séance à 15 h 47)
(Reprise à 15 h 49)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Alors, la commission reprend ses travaux. Nous en sommes maintenant
rendus à l'organisme AlterHéros, que je remercie d'être présent aujourd'hui
avec nous, avec la présence de M. Henri-June Pilote, qui est directeur
général. M. Pilote, vous allez commencer avec votre témoignage et vous
avez une période de 10 minutes. Ça commence maintenant.
M. Pilote (Henri-June) : Parfait.
Bonjour, moi, c'est Henri-June Pilote, je suis une personne... Je suis directeur
général de AlterHéros. Donc, une petite...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y, allez-y.
M. Pilote (Henri-June) :
Parfait. Alors, une petite table des matières : je vais commencer par
faire une courte présentation de l'organisme... notre définition de la thérapie
de conversion, parler des identités LGBTQ+ et la spiritualité, et trois petits
témoignages. Donc, en espérant que je puisse parler assez vite, mais être
compris.
• (15 h 50) •
Donc, présentation d'AlterHéros.
AlterHéros est un organisme communautaire à but non lucratif dont la mission
est de favoriser l'épanouissement des individus par rapport à l'orientation
sexuelle, leur identité de genre, leur expression de genre et leur sexualité.
Engagé dans la lutte aux préjugés depuis 2002, AlterHéros coordonne une grande
équipe de 80 personnes intervenantes issues des minorités sexuelles ou de
genre dont les actions sont principalement orientées vers les jeunes Québécois
et Québécoises de 14 à 30 ans. L'organisme organise également des groupes
de soutien pour et par les jeunes LGBTQ+ neurodivers, sur le spectre de
l'autisme ou autrement neurodivergents. AlterHéros a soutenu plusieurs milliers
de jeunes Québécois et Québécoises aux quatre coins du Québec en leur offrant
un espace sécuritaire d'épanouissement via nos services interactifs de soutien
et d'éducation à la sexualité disponibles sur notre site Internet.
Donc, notre plateforme Pose ta question!
constitue un univers d'éducation à la sexualité positif, inclusif. Par le biais
d'une banque de plus de 5 000 articles et d'un système de
questions-réponses entièrement anonyme, ces personnes ont ainsi accès à une
réponse nuancée, personnalisée et crédible à leurs questions, sans devoir
craindre d'être jugées, stigmatisées ou incomprises. Un tel environnement
virtuel sain permet d'aborder <notamment...
M. Pilote (Henri-June) :
...un univers
d'éducation à la sexualité positif, inclusif, par le biais
d'une banque de plus de 5 000 articles et d'un
système de
questions-réponses
entièrement anonyme. Ces
personnes ont ainsi accès à une réponse
nuancée, personnalisée et crédible à leurs
questions sans devoir
craindre d'être jugées, stigmatisées ou incomprises. Un tel environnement
virtuel sain permet d'aborder> notamment l'exploration de son orientation
sexuelle, son identité de genre, de son coming out, de l'intimidation, de la
prévention du suicide, de la santé mentale, la contraception et les ITSS. Cet
outil représente un outil d'émancipation de choix entièrement adapté à la
réalité numérique d'aujourd'hui.
Donc, maintenant, notre petite définition
de la thérapie de conversion, pour qu'on puisse tous se comprendre : Les
thérapies de conversion, aussi nommées thérapies réparatrices dans certains
milieux, sont une forme de traitement violent, malsain, illégitime et
scientifiquement erroné. Ces thérapies sont incluses dans la grande famille des
pratiques coercitives visant à changer l'orientation sexuelle, l'identité de
genre et l'expression de genre. En effet, le terme «thérapie de conversion»
réfère à des efforts structurés et organisés par un groupe, une personne morale
ou un professionnel de la santé visant à modifier l'orientation sexuelle,
l'identité de genre ou l'expression de genre d'un individu. Toutefois, ce terme
ne permet pas de prendre en compte l'ensemble des pratiques coercitives de
conversion vécues par les personnes LGBTQ+, parfois faites et coordonnées par
la famille eux-mêmes, visant à empêcher ou à retarder l'acceptation de son
identité de genre ou de son orientation sexuelle. Dans le cadre de ce mémoire,
nous préconisons le terme «pratique coercitive visant à changer l'orientation
sexuelle, l'identité de genre ou l'expression de genre» afin d'inclure tout
l'éventail de ces pratiques ou de recommander des modifications au présent projet
de loi afin de tenir compte des spécificités s'inscrivant à l'extérieur d'un
cadre professionnel ou de personnes morales. Donc, voilà.
Maintenant, je vais parler des entités
LGBTQ+ et du rapport à la spiritualité. Donc, la religion fait partie prenante
de l'identité d'une personne, de plusieurs jeunes... la diversité sexuelle et
de genre. Bien que plusieurs pratiques coercitives visant à modifier l'orientation
sexuelle et l'identité de genre prennent racine dans des discours de leaders
religieux et sont publicisées par des personnes morales ou des institutions
religieuses, il demeure primordial de ne pas généraliser ces pratiques
coercitives à l'ensemble des personnes ou groupes religieux. Ces discours,
autant présents chez les personnes athées que chez les personnes croyantes
placent souvent en dichotomie l'appartenance aux communautés LGBTQ+ et à
l'appartenance religieuse. Or, il s'agit d'un faux dilemme. Il est impossible
de demander à un individu de choisir entre sa religion et son identité de
genre. Il est impossible de demander à un individu de choisir entre sa
spiritualité et son orientation sexuelle. De plus en plus de groupes religieux
commencent à prendre parole, à s'organiser et à offrir écoute, compréhension et
soutien aux personnes LGBTQ+ de leurs propres communautés religieuses. Ce type
d'initiative pour et par mérite d'être soutenu et valorisée afin d'éviter
d'inciter les personnes à choisir entre leur orientation sexuelle et leur foi.
En aucun cas AlterHéros ne souhaite que ce
projet de loi puisse traiter les groupes religieux en tant que bloc
monolithique. Nous tenons donc à inviter les parlementaires à éviter un
discours en portant une opposition entre le «nous» laïques et le «eux»
religieux où les groupes religieux sont étiquetés à tort comme seuls et uniques
responsables de ces thérapies de conversion et... la responsabilité de l'État
envers <l'ensemble...
M. Pilote (Henri-June) : ...
projet
de loi puisse traiter les groupes religieux en tant que bloc monolithique. Nous
tenons donc à inviter les parlementaires à éviter un discours en portant une
opposition
entre le nous laïques et le eux religieux où les groupes religieux sont
étiquetés à tort comme seuls et uniques responsables de ces thérapies de
conversion et invisiblement esquive la
responsabilité de l'État envers>
l'ensemble des pratiques discriminatoires de ses différentes institutions
étatiques et services publics, de ses professionnels de la santé et des
services sociaux. ... que l'islamophobie, l'antisémitisme, le racisme et le
colonialisme envers les Premières Nations inhérents aux discours entourant ces
nombreux dilemmes entre religion, identité et orientation sexuelle sont des
freins importants à l'émancipation des personnes LGBTQ+2S.
Maintenant, je vais commencer les
témoignages. Je commence par le témoignage d'une personne blanche
transmasculine bisexuelle de Repentigny. Cette personne-là, c'est moi, bonjour.
Donc, je vais vous lire un petit témoignage que j'ai fait :
Donc, en grandissant, les adultes en qui
j'avais confiance faisaient partie de l'Église catholique. Je me sentais
confortable avec les animateurs de l'école du dimanche, avec mes animatrices
scoutes. L'Église était pour moi un lieu de confiance, de joie et de calme.
Quand j'ai commencé à questionner mon orientation sexuelle et mon identité de
genre, mes désirs sont devenus une source de honte. Face au discours homophobe
et transphobe véhiculé par l'Église catholique, j'ai décidé de cacher mes
désirs pour continuer à ressentir un lien d'appartenance avec mes mentors
chrétiens. Je me souviens des longues nuits de honte et d'humiliation où je
priais à Dieu de me libérer de ces interrogations. J'ai vécu cette constante
humiliation intériorisée de mes 12 à 22 ans, où j'ai décidé de rompre complètement
mon rapport avec l'Église et avec ma famille du même coup.
En 2012, j'apprends que Christian Lépine,
le prêtre de l'église de ma jeunesse, avait tenu des thérapies de conversion
dans le sous-sol, le même sous-sol où je me sentais en confiance, heureux et
calme. Cette nouvelle, clairement, fut la dernière étape ... à apprendre, a vraiment
mis fin à ma relation entre l'Église et moi. Aujourd'hui, six ans après mon
coming out, je me questionne sur cette division que j'ai dû faire avec ma
spiritualité. Je me questionne sur le sentiment d'appartenance que j'ai
développé à l'Église et comment l'Église aurait pu aussi être un acteur positif
dans la découverte de mon orientation sexuelle. Je pense à tous les jeunes
LGBTQ+ chrétiens qui posent ces questions puis comment... leur sexualité et
leur identité de genre n'aillent pas à l'encontre de leur spiritualité. Je
réfléchis aussi à comment il aurait été possible pour mes mentors d'être
outillés pour m'accompagner ou me référer face à mes nombreux questionnements.
Donc, j'espère que ce projet de loi
viendra, de un, mettre fin aux thérapies de conversion, mais viendra aussi
soutenir les jeunes chrétiens LGBTQ+ pour statuer un rapport harmonieux entre
leur spiritualité et leur identité LGBTQ+.
Donc, le second témoignage est un peu plus
long. C'est aussi un témoignage qui est très prenant, qu'on a reçu sur notre site
Internet. Dites-moi, quand j'ai fini ce témoignage-là, combien de temps il me
reste parce que...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : 2 min 40 s. Il vous reste
2 min 40 s.
M. Pilote (Henri-June) :
Parfait. Je vais essayer de faire ça vite. Donc, le dernier témoignage vient
d'une femme racisée cisgenre et bisexuelle de Sainte-Anne-des-Lacs, en
Laurentides. Donc :
«Voici mon témoignage et j'espère qu'il va
mettre des mots sur un grand tabou sur lequel on se <préoccupe si peu...
M. Pilote (Henri-June) :
...je vais avoir un...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
2 min 40 s. Il vous reste
2 min 40 s.
M. Pilote (Henri-June) :
Parfait. Je vais essayer de faire ça vite. Donc,
il y a... le dernier
témoignage
vient d'une femme... bisexuelle de Sainte-Anne-des-Lacs, dans les Laurentides.
Donc :
«Voici mon
témoignage, et
j'espère qu'il va mettre des mots sur un grand tabou, sur lequel on se>
préoccupe si peu. Je m'appelle Sarah, je suis une personne queer, j'ai bientôt
30 ans et, il y a 15 ans, j'ai passé proche de fréquenter une clinique de
conversion. C'était en 2004, la première fois que j'ai entendu parler
d'endroits pour les personnes non conformes. On ne disait pas "clinique de
reconversion", plutôt un endroit meilleur pour aider les gens qui ont
besoin d'aide. J'avais 13 ans, je me posais beaucoup de questions sur mon
orientation sexuelle et mon identité. Je me suis rendu compte très tôt que
j'avais une forte attirance pour les filles. Je les trouvais magnifiques et
j'avais une grande attirance.
«Internet n'était... dans mon village au
fond des Laurentides, donc c'était difficile d'avoir des informations ou
pouvoir discuter de ça avec d'autres gens. Autour de moi, j'étais entourée de
personnes hétérosexuelles, catholiques, et le manque de représentation des
différences me manquait cruellement. Un an plus tard, j'ai fait mon coming out
à ma famille. La nouvelle a été bien reçue, mais j'ai senti une petite
déception de la part de mon père. Je me suis très vite fait une amoureuse et je
vivais une vie plus ou moins normale.
«Être aimée, pas rejetée par mes amis et
ma famille, c'était ce que je pouvais demander... La nouvelle de mon coming out
s'est propagée très vite dans mon village, jusqu'à mon école secondaire. C'est
devenu un sujet qui amusait tout le monde, mais j'ai gardé la tête haute avec
le courage. Le sujet des cliniques de conversion est arrivé un dimanche matin.
Ma mère et moi allons à l'église, par tradition et habitude. Je me souviens
qu'une femme s'est approchée de ma mère et lui a dit que c'était scandaleux de
tolérer le fait que sa fille soit lesbienne. Mes souvenirs sont flous, comme
j'avais été mise à l'écart, mais l'acharnement a commencé là.
«Il m'était habituel pour moi de visiter
le prêtre pour lui livrer des repas que ma mère préparait. Elle offrait à cet
homme religieux les restes des repas. En venant lui apporter, il m'a dit :
Sarah, tu devras être prudente à l'avenir. Il y a des gens qui te veulent du
mal parce qu'ils disent que tu n'es pas une adolescente normale. Vu mon âge, je
ne comprenais pas le danger ni l'affirmation de celui-ci. Je suis rentrée chez
moi sans me poser de questions.
«Au printemps, mes parents ont retrouvé un
couple d'amis. Après m'avoir dévisagée pendant longtemps, ils ont dit à mes
parents : Tu n'as jamais pensé à envoyer Sarah en clinique de conversion?
Ma mère m'a demandé de quitter la table, et je savais que cela n'était pas un
bon présage. Mes parents ont annulé l'activité quand je suis revenue. Une fois
à la maison, mes parents m'ont dit qu'ils m'aimaient beaucoup, et malgré que je
suis lesbienne... et que je ne me sentais pas bien. Ils m'ont expliqué, à
l'avenir, que je dois être discrète, et que je ne pouvais plus venir à l'église
le dimanche.
«Malheureusement, les choses se sont
gâtées. Les gens me disaient que j'étais malade, pas normale, que je devais me
faire soigner, que je n'avais pas ma place. Des parents d'enfants aimaient dire
haut et fort que je devrais être en clinique. Ça a détruit ma confiance en moi.
Ma maison a été vandalisée pendant des années. Je retrouvais des mots comme "sale
lesbienne", "crevarde" et d'autres mots douloureux à l'entrée.
Tout le monde m'évitait parce que ce n'était pas normal d'être lesbienne à 14
ans.
• (16 heures) •
«Au début de mon message, j'ai dit que
j'ai passé proche, mais c'est parce que je ne suis pas dans la tête de mes
parents. Je ne compte pas le nombre de fois où mes parents m'ont laissée seule
à la maison, par peur de jugement des autres. Je me suis sentie abandonnée. Je
n'avais plus d'amis ou de famille. Mes parents recevaient de nombreux messages
d'autres adultes, en leur disant que je devais me faire...
16 h (version non révisée)
M. Pilote (Henri-June) : …au
début de mon message, j'ai dit que j'ai passé proche, mais c'est parce que je
ne suis pas dans la tête de mes parents. Je ne compte pas le nombre de fois où
mes parents m'ont laissée seule à la maison par peur de jugement des autres. Je
me suis sentie abandonnée. Je n'avais plus d'amis ou de famille. Mes parents
recevaient de nombreux messages d'autres adultes en leur disant que je devais
me faire soigner. Mes parents n'ont jamais voulu m'envoyer à une thérapie de
conversion, mais je me suis sentie responsable de ce rejet et cette exclusion
de la vie sociale durant des années. Les conséquences de tout ça, c'est que
j'ai décroché l'école. À 15 ans, mes parents se sont divorcé puis ma mère
m'a abandonnée. Aujourd'hui, en 2020, 15 ans plus tard, je me souviens de
ce rejet, de cette exclusion sociale, de comment on m'a privé d'une partie de
mon adolescence et de ma jeune vie d'adulte. Dans mon village, on ne me
tolérait pas et on ne tolérait pas que je sois différente, que ce soit les
traits de mon visage, mes yeux bridés ou mon orientation sexuelle, c'était un
cauchemar et un manque d'information… et un cauchemar atroce.» Voilà… je
m'excuse.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Allez-y.
M. Pilote (Henri-June) : Je
vais dire la fin. Donc, la personne, elle finit en disant qu'il serait
temps d'écouter les besoins criants et de cesser les pratiques de conversion,
que nous ne sommes plus en 1950, et que nous sommes en 2020, et qu'il est grand
temps de cesser la violence envers ceux qui n'ont rien demandé, mais qui
souhaitent seulement être heureux comme tous les autres humains, et qu'elle
tient aussi à dire à ses frères et ses soeurs LGBTQ+, qu'elle les voit, les
soutient, les aime, et de continuer fort pour être plus forts. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci…
M. Pilote (Henri-June) : On a
reçu des très longs témoignages.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Bien, merci beaucoup pour ces témoignages, merci pour votre
exposé, mais vous allez pouvoir répondre à plusieurs questions. Alors, le
ministre a accepté de prendre un peu de son temps, merci beaucoup. La parole
est à vous, donc, M. le ministre, pour une période de 14 min 25 s.
M. Jolin-Barrette : Merci,
Mme la Présidente. M. Pilote, merci de votre présence ici pour représenter
votre organisme AlterHéros, merci également de nous avoir partagé les
témoignages des deux personnes qui vous ont fait parvenir ceux-ci en lien avec
les thérapies de conversion. Je pense que ça illustre bien pourquoi est-ce
qu'on a déposé le projet de loi puis pourquoi est-ce qu'on veut faire en sorte
que les personnes soient protégées contre ce genre de thérapies là de
conversion parce que c'est totalement intolérable.
Et dans le dernier témoignage que vous
souleviez, bien qu'il n'y avait pas de thérapie de conversion, selon le
témoignage, on voit toute l'importance de parler du dossier, <de parler… >en
fait, de faire de la pédagogie, d'expliquer aussi que l'orientation sexuelle
n'est pas un choix. Et je pense qu'on ne retourne pas, comme le disait le
témoignage, dans les années 50, là, le témoignage que vous relatez date de
2004‑2005, donc il y a à peine 15 ans, et la personne qui témoigne a
30 ans, alors c'est tout juste hier, et je pense qu'il y a encore des
efforts à faire, et le projet de loi vise notamment à <aider…
M. Jolin-Barrette :
...comme le disait le témoignage dans les années 50, là. Le témoignage que
vous relatez date de 2004, 2005, donc
il y a à peine 15 ans et la
personne qui témoigne a 30 ans. Alors, c'est tout juste hier, et je pense
qu'
il y a encore des efforts à faire, et le
projet de loi vise
notamment
à >aider tout ça et à sensibiliser la population.
Au début de votre allocution, de votre intervention,
vous disiez : Il faut que la définition, relativement aux thérapies de
conversion, soit le plus large possible. Et, dans le libellé <qu'on a... >que
j'ai mis dans le projet de loi, on a essayé de faire ça le plus large possible,
justement pour rejoindre l'intervention, alors on dit : «On entend par
«thérapie de conversion» toute pratique ayant pour but d'amener une personne à
changer son orientation sexuelle, son identité de genre ou son expression de
genre.»
Vous donniez l'exemple, au départ, que ce
n'est pas nécessairement des... dans une organisation qu'on suit cette
thérapie-là, mais que ça peut être nos proches ou nos parents qui nous
disent : Bien, change… tout ça. Donc, la définition, elle est large. Ça ne
vise pas nécessairement à ce que ça soit une thérapie organisée par le biais
d'une personne morale, là, ça peut être une personne physique également qui
offre cette thérapie de conversion là. Donc, je tiens juste à vous rassurer
qu'on a essayé de viser le plus large possible pour protéger le plus possible
les personnes, à la fois pour les personnes physiques qui l'offriraient, mais à
la fois également pour les personnes morales qui offriraient un tel type de
thérapie.
L'autre point sur lequel j'aimerais qu'on
échange c'est celui... Vous avez fait le parallèle, là, pour dire : Il ne
faut pas opposer la religiosité, la spiritualité, et l'orientation sexuelle ou
les thérapies de conversion. J'aimerais ça qu'on développe un petit peu plus parce
que vous dites : Écoutez, il ne faut pas cibler les groupes religieux
précisément, parce qu'il faut permettre aux gens qui ont une spiritualité à
travers certaines croyances, de pouvoir les poursuivre. Comment est-ce que vous
réconciliez ça avec le fait qu'il y a eu des témoignages préalablement à vous,
que parfois, il y a certains groupes religieux... Bien, en fait... comment je
pourrais dire ça? Il y a une prévalence supplémentaire ou plus importante chez
certains groupes religieux relativement aux thérapies de conversion? Comment
est-ce qu'on réconcilie tout ça, là?
M. Pilote (Henri-June) : Bien
sûr. Mais je pense à mon expérience personnelle en tant que jeune Québécois qui
a grandi dans une famille catholique puis qui a vécu... qui a grandi, dans son
adolescence, dans une famille catholique, c'est certain que c'est difficile parce
que la religion catholique est expressément transphobe et homophobe, mais je
pense que de venir, justement, être clair avec comment les thérapies de
conversions doivent être légales et de comment être, à l'intérieur de l'Église
catholique, précisément, et à travers toute église organisée d'offrir, en fait,
aux groupes religieux qui existent déjà, qui soutiennent, en fait, les
personnes LGBTQ+, ces groupes religieux là existent autant à travers l'islam, à
travers le judaïsme, à travers le <christianisme...
M. Pilote (Henri-June) :
...de l'église catholique précisément et à travers toute église organisée
d'offrir, en fait, aux groupes religieux qui existent déjà qui soutiennent, en
fait, les personnes LGBTQ+, ces groupes religieux là existent autant à travers
l'islam, à travers le judaïsme, à travers le >christianisme, les aider à
supporter et à avoir des conversations internes sur comment c'est possible de
réconcilier la foi et l'identité sexuelle et de genre.
Donc, je pense que c'est important de ne
pas créer une dichotomie où est-ce qu'on présente la religion comme la
méchanceté, et la laïcité comme la bonne chose, mais d'être clairs qu'il y a
des personnes LGBTQ+ qui sont religieuses, et que la seule solution pour faire
son coming out, ce n'est pas d'arrêter d'être croyant, en fait, et que c'est
possible de réconcilier les deux, puis qu'il y a des groupes qui font ça
activement et que... Exactement, de ne pas dire... Parce qu'en renforçant
l'idée que les groupes religieux sont homophobes et transphobes, et qu'ils le
sont tous, on rentre, en fait, ces jeunes-là de plus en plus dans le placard,
un peu comme j'ai expliqué dans mon témoignage, où est-ce que je disais que je
savais que j'avais des questionnements par rapport à ma sexualité et mon genre,
mais que, dans le but de me sentir bien à l'église, j'ai décidé de mettre ça
plus loin en moi, parce que je savais que l'Église catholique n'allait pas
accepter, mais s'il y avait eu l'obligation, justement, que, je ne sais pas, il
y ait des pamphlets d'organismes chrétiens LGBTQ+ à l'intérieur de ces églises,
ou des choses comme ça, ou qu'il y ait une voix forte, ou plus de financement
pour les groupes chrétiens LGBTQ+, ça m'aurait sûrement aidé, dans le fond, à
réussir, au lieu de faire un schisme entre la religion et ma sexualité, de
réussir à grandir avec ma foi et ma religion, puis grandir ensemble.
M. Jolin-Barrette : Donc, ce
que je comprends, là, c'est que, si on l'identifie, c'est un peu de ne pas
mettre les gens face à un conflit de loyauté entre le fait de vivre leur foi à
travers leur religion et le fait, également, par rapport à leurs identités
sexuelles, à leur orientation sexuelle. Vous nous dites : Faites attention
de ne pas opposer les deux, parce que ça se peut très bien que je pratique une
confession x et que, dans cette confession x là, ils font des thérapies de
conversion, alors je ne veux pas avoir à choisir entre ce en quoi je crois au
sens plus large et le fait que mon identité sexuelle… donc je ne voudrais pas
avoir nécessairement à rejeter.
Moi, je vous dirais là-dessus, dans le
projet de loi, on n'a pas visé particulièrement des groupes spécifiques parce
qu'on veut que ça vise tout le monde sur le fait de protéger les personnes
victimes de thérapies de conversion. Alors, le projet de loi, de la façon dont
il est construit, ça vise notamment les personnes morales, et donc une
congrégation religieuse, nécessairement, pour voir le jour au Québec, <nécessairement,
>elle est incorporée, là, elle a pignon sur rue pour bénéficier, entre
autres, de certaines exemptions fiscales, sauf que, ce que ça fait, c'est
qu'elle ne pourrait pas offrir ce <genre…
M. Jolin-Barrette :
...et donc une congrégation religieuse,
nécessairement, pour voir le
jour au
Québec,
nécessairement elle est incorporée, là, c'est le
pignon sur rue pour bénéficier de... entre autres de certaines exemptions
fiscales. Sauf que, ce que ça fait, c'est qu'elle ne pourrait pas offrir ce >genre
de thérapie là, donc elle serait passible de poursuite pénale — et
l'on construit comme ça, le projet de loi, pour s'assurer. Donc là, vous, vous
allez un petit peu plus loin et vous dites : Bien, écoutez, il faudrait favoriser
le fait qu'il y a de la diversité à l'intérieur de ces congrégations
religieuses là, justement pour qu'il y ait de l'ouverture. Je ne peux que
saluer ça.
Honnêtement, je pense qu'au Québec, on le
dit très clairement que ce n'est pas acceptable, les thérapies de conversion, mais
voici un peu, là, comment je peux répondre à votre interrogation en lien avec
le projet de loi, avec le libellé, on atteint un petit peu l'objectif que vous
souhaitez qu'on atteigne sans nécessairement viser des groupes religieux
particuliers, mais ces groupes religieux particuliers là, avec le libellé qu'on
a, ne pourraient pas offrir de thérapie de conversion.
Est-ce que vous recevez beaucoup de
témoignages de gens qui ont subi ce genre de thérapie là? Juste, là, nous dire,
là, dans votre organisation, là, c'est fréquent? Parce que, tu sais, ce n'est
pas très connu, les thérapies de conversion, là, on n'en entend pas tant parler
que ça. Vous, là, dans l'organisation, là, à quelle fréquence vous recevez des
messages ou des gens qui ont besoin d'aide ou de soutien?
• (16 h 10) •
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je dirais que... Je m'excuse, quand je me connecte, ça fait plein de bruits, mais
peu importe. En fait, je dirais que qu'est-ce qui est le plus souvent... qu'on
reçoit le plus souvent, ce n'est pas nécessairement des jeunes ou des moins
jeunes qui ont passé à travers une thérapie de conversion, mais c'est plus des
jeunes qui ont peur de... on voit un peu comment la thérapie de conversion...
puis participe, en fait, à l'homophobie internalisée. Donc, l'homophobie
internalisée, qu'est-ce que c'est? C'est souvent qu'est-ce qui fait que les
personnes ne vont pas venir à faire leur coming out, c'est la honte
internalisée, c'est le sentiment de... qu'est-ce qu'ils ont fait en coming out
LGBTQ+, on risque d'avoir une moins bonne vie, et tout ça, etc. Donc, je dirais
que qu'est-ce qu'on voit plus dans nos messages, ce n'est pas nécessairement
des jeunes qui nous demandent de l'aide face à la thérapie de conversion, mais
c'est des gens qui nomment, des jeunes, des moins jeunes qui nomment la
thérapie de conversion comme une preuve que l'homophobie existe en fait et...
Puis, genre, cette thérapie de conversion là, elle s'applique autant chez les
psychologues qui sont homophobes, que chez les groupes religieux, que chez les
travailleurs sociaux qui vont porter un discours homophobe ou transphobe. Donc,
je dirais que moi, qu'est-ce qui m'inquiète le plus, vraiment, c'est comment la
thérapie de conversion et aussi le manque d'interdiction, en fait, des
thérapies de conversion font que les jeunes <ont l'idée >et les
moins jeunes ont aussi l'idée que, dans le discours social québécois,
l'homophobie est bien présente, la transphobie est bien présente, et ça
participe beaucoup à leur honte personnelle et au retardement, en fait, de leur
coming out et de leur acceptation de soi.
M. Jolin-Barrette : En fait,
c'est ce qu'on essaie notamment de dénoncer, et de donner des outils à la
population pour que ce genre de comportements là, ça ne se produise pas, au
niveau de l'homophobie, de la transphobie.
Vous <abordez...
M. Pilote (Henri-June) :
...en fait de leur coming out et de leur acceptation de soi.
M. Jolin-Barrette :
En fait, c'est ce qu'on essaie
notamment de dénoncer, et de donner des
outils à la
population pour que ce genre de comportements là, ça ne se
produise pas,
au niveau de l'
homophobie et de la transphobie.
Vous >abordez le fait que
certains membres d'ordres professionnels pourraient inciter à suivre une...
bien, à suivre une pratique qui vise à changer l'orientation sexuelle, notamment.
Là, là-dessus, je tiens à vous rassurer que, dans le projet de loi, on prévoit
nommément le fait que tout professionnel, peu importe l'ordre professionnel
auquel il participe… ça va constituer un acte dérogatoire à la profession, donc
le syndic va pouvoir le poursuivre... et éventuellement perdre le droit de
pratique. Donc, ça, c'est spécifique, parce que les professionnels doivent
protéger le public, et tout comportement qui irait à l'encontre de ce genre-là,
de ce comportement-là, serait inadmissible.
Est-ce que vous avez des exemples fréquents de
professionnels qui adopteraient une telle approche?
M. Pilote (Henri-June) : Je
dirais que «fréquent» n'est pas le mot, mais c'est certain qu'on a reçu des exemples
précis. Souvent, qu'est-ce qu'on reçoit, c'est des enseignants ou des
travailleurs sociaux, des professionnels de la santé qui nous envoient des
messages pour qu'on les appuie, dans le fond, pour aller contre l'homophobie et
la transphobie de leurs supérieurs ou de leurs collègues. Bien, c'est arrivé
quelques fois qu'il y a des jeunes qui nous envoient des messages pour nous
dire qu'ils ne se sentaient pas acceptés par leur psychologue et par leur
travailleur social, mais ce qu'on remarque le plus souvent, vraiment, c'est des
messages qu'on reçoit où est-ce que la direction s'oppose entièrement à ce que,
par exemple, un jeune fasse son coming out trans et utilise la toilette des
garçons ou que... recommande fortement à un ou une jeune de ne pas faire son coming
out lesbien, par exemple, parce que ça pourrait nuire à sa réputation puis...
ou juste... Je pense que ce qui se passe le plus souvent, c'est vraiment des
demandes d'aide directes des professionnels dans le milieu scolaire ou dans le
milieu de la santé. Donc...
M. Jolin-Barrette : À ce
moment-là, je vous dirais, la disposition est très pertinente au niveau des
professionnels parce que c'est un message, notamment, qu'on veut envoyer, que
ce genre de comportement là est totalement inacceptable.
Je vais céder la parole, Mme la
Présidente, au député de Chapleau, mais je tiens à vous remercier d'avoir été
présent, c'est fort instructif, et surtout les témoignages que vous nous avez
partagés.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, M. le ministre. Je passe maintenant la parole au
député de Chapleau. Il vous reste 1 min 53 s.
M. Lévesque (Chapleau) : Oh!
Rapidement. Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup de votre témoignage et
d'être ici avec nous, là.
Peut-être une petite question, là, pour
commencer, comment que vous pensez que le gouvernement pourrait mieux
accompagner les victimes, là, qui auraient subi des thérapies de conversion?
Est-ce que vous avez peut-être des témoignages ou des membres qui vous ont
dit : Bien, j'aurais besoin de tel service, tel élément pour vraiment leur
venir en aide puis les aider à sortir de cette situation-là malheureuse?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je dirais que la plus grosse demande des gens qui sont survivants, survivantes
des thérapies de conversion, c'est vraiment avoir un support psychosocial, un
support en psychothérapie pour les aider à <passer...
M. Lévesque (Chapleau) :
...tel service, tel élément pour
vraiment leur venir en aide puis les
aider à sortir de cette
situation-là malheureuse?
M. Pilote (Henri-June) :
Bien, je dirais que la plus grosse demande des gens qui sont survivants,
survivantes des thérapies de conversion, c'est
vraiment avoir un support
psychosocial, un support en psychothérapie pour les >aider à passer
par-dessus le trauma qui a été engendré. Donc, je dirais que ça aussi, en tant
que personne qui travaille dans un organisme communautaire LGBT, je dirais qu'on
est tous survivants, survivantes d'avoir vécu l'homophobie internalisée, la
transphobie internalisée. Moi, je pense que c'est un besoin large où est-ce que
les jeunes LGBTQ+ et moins jeunes ont besoin, en fait, d'un support
psychosocial accessible et... oui, c'est ça, parce que souvent les personnes <ne
vont pas avoir accès... >vont seulement avoir accès à la psychothérapie lorsqu'ils
vont avoir de l'argent, donc ça peut prendre des années et des années. Comme le
deuxième témoignage que j'ai donné, la personne nomme qu'elle a pu seulement
penser et passer à travers son trauma 14 ans plus tard, quand elle a eu
accès à un psychothérapeute. Donc, je pense que c'est important de pouvoir
soutenir ces gens-là plus rapidement, en fait.
M. Lévesque (Chapleau) : O.K.
Très rapidement, en terminant, là, puis du côté du volet des églises ou du
phénomène religieux, comment faire pour mieux les rejoindre puis pour
qu'elles... pour que ces personnes-là comprennent... les communautés
religieuses comprennent que ce n'est pas nécessairement des pratiques à
adopter? Donc, juste peut-être votre opinion par rapport à ça.
M. Pilote (Henri-June) : Je
pense que c'est important de travailler avec les églises, comme j'ai dit, il
existe plusieurs églises, par exemple l'église chrétienne unie du Canada, qui a
des positions... plusieurs groupes, aussi, juifs qui ont des positions avec...
en accord des personnes LGBTQ. Donc, je pense que c'est important de travailler
avec ces gens, qui sont à l'intérieur des religions organisées, pour pouvoir
parler avec celles qui ne sont pas ouvertes à la question LGBTQ.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M. le député. Merci beaucoup. On est
rendus maintenant à la partie d'échange avec les groupes d'opposition. Nous
allons commencer avec Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, et vous disposez
de 11 minutes au total. Merci.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Henri-June, c'est vraiment un plaisir d'échanger avec vous
en commission. Premièrement, merci beaucoup de partager votre histoire
personnelle ainsi que les témoignages. Je vous demanderais si vous seriez à
l'aise de déposer des témoignages, entre autres le vôtre ainsi que les autres
personnes qui ont été en communication avec vous, pour les membres de la
commission, je pense que ce serait fort instructif pour nous, ça fait que… est-ce
que ce serait acceptable?
M. Pilote (Henri-June) : Oui, bien
sûr. Nous avons déjà beaucoup plus de témoignages qui ont été inclus dans le
mémoire, je dirais environ cinq. Donc, j'espère que vous allez les lire avec
minutie et empathie parce qu'il y a plusieurs témoignages qui sont prenants.
Mme Maccarone : Oui, en effet.
Bon, bien, merci pour ça. Je vais quand même continuer sur l'angle de la religion
et ce que nous voulions accomplir à l'intérieur d'un projet de loi qui va,
entre autres, interdire, bannir la thérapie de conversion, parce que, c'est
sûr, on parle de vraiment une zone grise, un peu. Alors, j'étais contente
d'entendre les questions qui ont été posées par le ministre, parce que <j'aimerais...
Mme Maccarone : ...et ce que
nous voulions accomplir
à l'intérieur de notre
projet de loi, qui
va,
entre autres, interdire, bannir la thérapie de conversion,
parce
que,
c'est sûr, on parle
vraiment d'une zone grise un peu. Alors,
j'étais contente d'entendre les questions qui ont été posées par le
ministre,
parce que >j'aimerais vous entendre par rapport à qu'est-ce qui
serait acceptable et pas acceptable dans une manière où on peut peut-être
bonifier le projet de loi, parce que c'est sûr, à l'intérieur d'une église,
s'ils vont pratiquer de la torture, la thérapie de conversion, il n'y aura pas
comme une pancarte qui va être devant l'église, qui va dire «groupe de
discussion»… mais ça va être ça, dans le fond, ça ne serait pas : Viens,
on fait de la thérapie de conversion, vous êtes tous les bienvenus. Alors, ça
va être discret, ça va être bien caché, dans le fond, puis on veut vraiment
fermer le plus de trous possible à l'intérieur de ce projet de loi. Alors,
selon vous, ce serait quoi, un conseil acceptable et une thérapie de conversion
qui serait offerte à l'intérieur du milieu religieux?
• (16 h 20) •
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je pense que ça revient un peu à mon témoignage où est-ce que quand j'étais
jeune, justement, je participais à une église, et de me rendre compte, des
années plus tard, qu'au même endroit où est-ce que je pratiquais, bien il y avait
des thérapies de conversion, et je n'en avais aucune idée parce que ce n'était
pas ce nom-là qui était utilisé, que c'était plus vers des conversations vers
une libération.
Je pense que qu'est-ce qui est important,
c'est de supporter... Encore une fois, il y existe des cours, à Montréal, LGBTQ+
à l'intérieur des églises, autant… les églises catholiques, je pense à l'église
catholique qui est dans le Village de Montréal, elle a une approche inclusive
des personnes LGBTQ+. Donc, je pense qu'il y a déjà une expertise qui existe à
l'intérieur même des religions et je pense que d'ouvrir cette porte-là puis de
donner plus de place à cette porte-là… et ça pourrait être une manière de… faire
une consultation avec ces gens-là pourrait être une manière de trouver toutes
les petites crevasses que vous avez dites parce que c'est certain que des
personnes qui font les thérapies de conversion ne vont pas le crier sur tous
les toits, que ça va être fait dans le secret, que ça va être fait dans… et que
ça va venir chercher la honte des enfants, des adultes, la honte qui nous
gruge, en fait, d'être… de faire partie de la communauté LGBT. Donc, je pense
que c'est important, à la fois, de, comme, être clair sur comment ces
thérapies-là ne devraient pas avoir lieu sous toutes leurs formes et, en plus,
que le gouvernement soit clair qu'il ne supporte pas ces thérapies-là puis
qu'il supporte, en fait, des religions organisées qui viennent supporter les
membres croyants LGBTQ+.
Mme Maccarone : Parce que,
c'est sûr, on ne veut pas reproduire… on a entendu le témoignage de
M. Nadeau, juste avant vous, qui fait partie de la Fondation Émergence, et
il y a évidemment les expériences que lui a eues dans son église protestante
sont quand même des images qui frappent, qui sont très fortes, alors on veut
éviter que ceci se reproduise. Alors, on cherche un angle pour rentrer à
l'intérieur du projet de loi de s'assurer qu'on va interdire ceci, mais aussi
de <rejoindre…
Mme Maccarone : …les expériences
que lui a eues dans son église protestante sont
quand même des images
qui frappent, qui sont très fortes. Alors, on veut éviter que ceci se
reproduise. Alors, on cherche un angle pour rentrer
à l'intérieur du
projet
de loi, de s'assurer qu'on va interdire ceci, mais aussi de >rejoindre
ce que vous proposez. Alors, je suis en train de penser que peut-être vous avez
une idée d'une église qui serait un projet pilote, qui serait intéressée comme
un modèle que nous pouvons s'inspirer pour reproduire ailleurs, sauf que je
sais que, souvent, à l'intérieur des groupes religieux, c'est fermé, ce n'est
pas facile de reproduire ceci, alors j'ai des préoccupations que nous ne
pouvons pas nécessairement rejoindre ce que vous demandez en assurant qu'on
protège la majorité de la population contre ce type de thérapie qui n'est pas
une thérapie — je hais ce mot-là.
Changement de propos un peu, <nous
avons, >plusieurs d'entre nous, nous avons reçu des messages des parents.
Vous êtes une jeune personne, vous avez fait, comme vous avez dit, votre coming
out dans votre jeunesse, mais plusieurs parents apportent des inquiétudes par
rapport à : Est-ce que mes droits comme parents seront brimés si, mettons,
je décide que je ne veux pas que mes enfants ont accès à des soins, des
services, des hormones, par exemple, puis ils visent plutôt une attente
vigilante? Dans votre expérience, qu'est-ce que vous voulez partager avec nous,
comme membres de la commission, à l'intérieur de ce projet de loi, une attente
vigilante ou une approche plus affirmative de l'identité de genre? Comment nous
devrions procéder et traiter ceci?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je pense, premièrement, que c'est certain qu'il faut avoir une approche
affirmative. Ici, on parle précisément des jeunes trans et non binaires. Donc,
je crois que c'est certain que si un jeune, une jeune trans, à l'intérieur d'une
famille qui, elle, est croyante et foncièrement homophobe et transphobe va
aller contre, en fait, l'idée que ce jeune puisse avoir accès à des services.
Nous, à AlterHéros, on reçoit beaucoup de messages, en fait, de jeunes trans et
non binaires qui cherchent, en fait, à quitter leur famille pour pouvoir avoir
accès à des services de santé transaffirmatifs. On reçoit aussi beaucoup de
messages de jeunes qui veulent que, par exemple, leurs grands frères, leurs
grandes soeurs, leurs tantes deviennent leur tuteur légal pour pouvoir avoir
accès à ces soins, en fait, qui vont sauver leur vie.
Donc, je dirais que qu'est-ce qui pourrait
être utile par rapport à ça, c'est de revoir, en fait… de revoir toutes les
législations qui ont un lien avec le droit légal des parents sur leurs enfants
pendant leur accès, dans le fond, aux soins de santé trans. Moi, j'ai fait mon coming
out à… mon coming out trans à 24 ans, donc je n'ai pas fait face à ça,
mais je sais que j'ai décidé de faire mon coming out après avoir eu 18 ans
parce que c'était plus facile pour moi puis que c'était possible pour moi, en
fait. Donc, je dirais qu'il serait important pour le gouvernement de se
rappeler à quel point ces <jeunes-là…
M. Pilote (Henri-June) :
...moi, j'ai fait mon coming out à... mon coming out trans à 24 ans, donc
je n'ai pas fait face à ça, mais je sais que j'ai que j'ai décidé de faire mon
coming out après avoir 18 ans parce que c'était plus facile pour moi, puis
que c'était possible pour moi, en fait. Donc, je dirais que c'est important
pour le
gouvernement de se rappeler à quel point ces >jeunes-là
sont pris, ces jeunes-là se sentent brimés, j'irais même jusqu'à dire
emprisonnés dans leur famille où est-ce qu'ils ne peuvent pas vivre qu'est-ce
qu'ils sont. Et ça revient un peu aussi à comment je disais plus tôt que ces
jeunes LGBTQ+ là ont besoin de support psychosocial parce que peu importe qu'on
ait fait une thérapie de conversion ou non, quand on a passé des années, des
années dans le placard à l'intérieur de cellules familiales sans support, quand
on en sort enfin, on en sort abîmés, et ça, je pense que toutes les personnes
LGBTQ+ qui n'ont pas été supportées le savent, puis je pense que c'est quelque
chose qui est présent dans la communauté, à quel point on sort tout le temps
abîmés de la transphobie, l'homophobie internalisée, et que même si on voit de moins
en moins d'attaques homophobes et transphobes, c'est toujours présent dans la
société, dans l'imaginaire collectif, et qu'il ne faut pas penser que ça
n'existe plus. Donc, je pense, de soutenir avant tout les personnes qui font
leur coming out, et avec des services psychosociaux, c'est ce qu'il y a de plus
important.
Mme Maccarone : Mais en
parlant de soutien, oui, c'est vrai, il faut absolument soutenir les personnes
qui font leur coming out, mais il y a d'autres groupes qui ont aussi suggéré
que nous devrions penser à avoir un fonds pour soutenir aussi les victimes qui
ont subi la thérapie de conversion. Votre idée là-dessus? C'est une bonne idée?
Ça pourrait fonctionner de quelle manière? Que pensez-vous de ceci?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
c'est certain que ça pourrait être... que c'est une bonne idée, mais je pense
que c'est clairement qu'il y a des questions à se poser par rapport à ça parce
que ces personnes-là ne vont pas nécessairement vouloir faire leur coming out
de personnes qui ont vécu des thérapies de conversion, que ça pose des
difficultés, en fait, justement, comme on parlait plus tôt, où est-ce que la
personne ne va pas être nécessairement confortable de parler de son vécu suite
à, tu sais, comment cette personne-là est un survivant, une survivante. Donc,
je pense que cette chose doit être faite autant au niveau légal avec plus
d'argent, mais doit être faite à travers des professionnels de la santé et puis
des professionnels psychosociaux parce que ça va être quelque chose qui va être
sensible et qui ne peut pas être fait de façon seulement protocolaire. Donc,
c'est mon opinion sur ça.
Mme Maccarone : Et tant que
vous représentez quand même un secteur de la population qui est plutôt notre
jeunesse, pensez-vous aussi que nous devrions faire des modifications auprès
des lois qui représentent nos jeunes, comme vous avez dit, peut-être la DPJ,
par exemple? Est-ce qu'il y a des modifications à faire à l'intérieur de ceci
pour protéger les jeunes qui sont potentielles victimes de la thérapie de
conversion ou d'avoir un meilleur une meilleure compréhension de la communauté,
comme la terminologie ou de l'éducation, par exemple, pour accompagner nos
jeunes qui sont toujours mineurs?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je <pense...
Mme Maccarone :
...potentielles victimes de la thérapie de conversion ou d'avoir un meilleur
une meilleure compréhension de la
communauté, comme la terminologie ou
l'éducation,
par exemple, pour accompagner nos jeunes qui sont
toujours
mineurs.
M. Pilote (Henri-June) :
Bien, je >pense que c'est important, puis je souligne que souvent la
religion va être un endroit acceptant, ouvert, un endroit où est-ce qu'on se
sent en confiance, en fait, d'aller chercher de l'aide. Et quand on se pose des
questions sur notre orientation sexuelle, souvent, on est dans un moment de
honte, et je pense que la religion organisée a souvent les moyens pour pouvoir
soutenir les jeunes, et que, même si on en parle, de la thérapie de conversion,
d'une manière totalement horrible, quand on la vit, au début, c'est sûrement un
truc rassurant. Donc, je pense que c'est important que ces moyens que la
religion organisée offre soient aussi dans les groupes LGBTQ+, puis ça aussi,
comme vous avez dit, qu'à la DPJ, que dans les CLSC, que dans les cliniques
jeunesse, ça soit clair, en fait, que les personnes qui soutiennent les jeunes
aient la connaissance du vocabulaire LGBT, qu'ils puissent soutenir les gens
puis qu'ils n'aient pas à retourner vers, justement, la religion, qui est une
voie plus... Justement, qu'ils puissent vivre leur foi à travers l'église sans nécessairement
avoir à porter leur honte de leur homosexualité à travers leur foi et
d'utiliser l'église, en fait, comme soin psychothérapeutique. Ils devraient... Oui.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Merci beaucoup.
Mme Maccarone : Votre sourire
est vraiment contagieux. J'adore.
M. Pilote (Henri-June) :
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. On est maintenant rendus du côté de la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques,
et vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Massé : «Let's go»,
Henri-June, il va falloir y arriver. Bonjour. En fait, moi, j'ai une question,
vous êtes à peu près, AlterHéros, le seul groupe qui travaille de façon très
spécifique avec les personnes qui vivent dans la neurodiversité, et je me
demandais si, à ta compréhension, à votre expérience, tu as remarqué que ces personnes-là
sont plus à risque d'être prises dans des thérapies de conversion? Et quels
sont les moyens qu'il faudrait prendre pour les protéger de façon particulière?
• (16 h 30) •
M. Pilote (Henri-June) : …je
dirais que, vite comme ça, je ne peux pas nommer exactement, mais je sais que
ces personnes-là... je n'aime pas le terme «vulnérables», mais vont avoir
tendance à ne pas avoir des supports adéquats à leur neurodiversité, à avoir
des supports psychosociaux qui vont être adéquats à une neurodiversité, et que
les groupes religieux sont souvent plus flexibles, en fait… conversion, plus
flexibles à venir supporter, en fait, les jeunes qui vont être neurodivers
parce qu'il y a plus de temps et plus d'organisations. Donc, je dirais que
puisque toute l'aide psychosociale gouvernementale... fonctionnaire, c'est dans
la rapidité, dans l'intensité, dans le manque de fonds, donc je dirais que
cette rapidité-là fait que, souvent, les jeunes neurodivers ne vont pas se
sentir acceptés, en fait, ils ne vont pas nécessairement aller chercher de
l'aide, parce que cette anxiété-là est... que le manque de fonds nous met
dessus, en fait, fait que ces jeunes-là neurodivers vont avoir de la difficulté
à accéder...
16 h 30 (version révisée)
M. Pilote (Henri-June) :
...dans le manque de fonds. Donc, je dirais que cette rapidité-là fait que
souvent les jeunes neurodivers ne vont pas se sentir acceptés, en fait, ils ne
vont pas nécessairement aller chercher de l'aide, parce que cette anxiété-là et
cette intensité-là, que le manque de fonds nous met dessus, en fait, fait que
ces jeunes-là neurodivers vont avoir de la difficulté à accéder à ces soins-là.
Mme Massé : Et est-ce que... Parce
qu'il me semble, en tout cas, qu'il y a une certaine quadrature du cercle quand
tu parles de religion, à tout le moins de spiritualité, mais tu parles
spécifiquement des églises, on a eu d'autres témoignages, et l'acceptation de
l'homosexualité. Il m'apparaît à moi, peut-être c'est une question d'âge, un
certain défi. Est-ce que tu suggères même< que>, puisque c'est
principalement du côté des églises structurées où on veut ramener les gens dans
le droit chemin, qu'on devrait particulièrement mettre de l'énergie là pour
faire de la promotion de l'interdiction de ces thérapies de conversion là?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement, s'il vous plaît.
M. Pilote (Henri-June) : Oui.
Je dirais que, oui, parce que moi principalement, j'ai habité quand même
longtemps en Colombie-Britannique, et je dirais que, dans une province où
est-ce que c'est plus l'Église protestante, Protestant United Church qui est
présente, il y a un meilleur rapport entre la religion et l'orientation
sexuelle. Puis je dirais que ça m'a aidé d'être dans ce milieu-là, en fait,
d'accepter que c'était possible que ces deux entités-là à l'intérieur de
moi vivent, que je pouvais avoir été élevé dans une foi chrétienne tout en
étant une personne LGBT.
Donc, je dirais que c'est important de
penser à ça, mais que c'est certain que c'est un grand défi pour le
gouvernement, puis j'espère que ça va être quelque chose qui va être fait, en
fait, mais qu'il y a de l'espoir là, puis que ça existe à Montréal, il y en a
plusieurs, et que je pense que c'est important de pencher vers ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Merci, Mme la députée. Je me tourne
maintenant vers la députée de Joliette pour une période de
2 min 45 s.
Mme
Hivon
: Oui.
Merci beaucoup pour votre présence parmi nous. Je veux poursuivre un peu sur la
même voie. Je pense, en fait, que c'est très éclairant, ce que vous nous amenez
comme lien, à ne pas toujours diaboliser non plus entre l'aspect spirituel de
quelqu'un et son orientation sexuelle ou son identité de genre, son expression
de genre. Mais, dans ce contexte-là, donc, ça peut présenter des défis
particuliers. Puis, en lien avec ce que vous avez amené, parce qu'il y a un
autre groupe tantôt qui nous a amené la même préoccupation sur la définition de
thérapie de conversion dans le projet de loi en voulant être sûr que ça
incluait bien la réalité des Églises ou des communautés religieuses, qu'est-ce
qui vous embête? Parce que, comme le ministre l'a dit, dans sa perspective à
lui, c'est très large. Qu'est-ce qui vous embête avec le libellé actuel?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je dirais que qu'est-ce qui m'embête, <c'est... >comme on en a
parlé plus tôt avec Mme Maccarone, c'est vraiment de comment c'est
possible pour les groupes religieux de créer un nouveau narratif, de créer des
nouveaux vocabulaires qui font qu'ils continuent, en fait, à apporter ces
thérapies-là avec d'autres termes. Puis je pense que ça peut être... que c'est
vraiment un défi additionnel pour, en fait, le <projet de loi puis que...
M. Pilote (Henri-June) :
...plus tôt avec Mme Maccarone, c'est vraiment de comment c'est possible
pour les groupes religieux de créer un nouveau narratif, de créer des nouveaux
vocabulaires qui font qu'ils continuent, en fait, à apporter ces thérapies-là
avec d'autres termes. Puis je pense que ça peut être... tu sais, c'est vraiment
un défi additionnel pour, en fait, le >projet de loi, puis que j'espère
que ça va être fait avec des consultations où est-ce qu'il va être possible, en
fait, d'acclimater ça autant aux réalités religieuses qu'aux réalités LGBTQ+.
Mme
Hivon
: O.K.
Puis j'imagine que vous avez lu… Dans cet article-là, justement, de la loi, ça
dit que ce n'est pas une thérapie de conversion quand c'est une thérapie, par
exemple, qui vise l'acceptation, donc, de sa réalité. Est-ce que vous trouvez
que c'est la bonne définition ou est-ce qu'on devrait être plus large que la
seule idée de l'acceptation?
M. Pilote (Henri-June) : Bien,
je pense que ça peut être compliqué, puis je pense, encore une fois, que je ne
suis pas nécessairement un professionnel par rapport à ça, mais je dirais que
c'est certain que d'avoir l'acceptation de son orientation sexuelle, ça peut
être aussi l'acceptation qu'elle existe, mais qu'elle va à l'encontre de sa
religion. Donc, je crois qu'on voit aussi beaucoup aux États-Unis ce
parcours-là où est-ce que les gens vont dire : Je suis homosexuel, mais je
suis chrétien, donc je ne peux pas être homosexuel. Donc, ils acceptent, ils
comprennent leur orientation sexuelle, mais elle va à l'encontre de leur
chrétienté. Donc, je pense que c'est important de penser à eux aussi et de
vraiment déconstruire comment c'est possible, en fait, de manipuler les mots
puis d'utiliser les mots.
Mme
Hivon
:
Merci, c'est très intéressant et éclairant. Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Henri-June Pilote, merci beaucoup
pour votre témoignage, celui que vous nous avez apporté, ainsi que les éléments
additionnels en éclairage aux travaux de la commission.
Alors, ceci met fin à notre séance d'aujourd'hui.
Nous allons ajourner jusqu'au jeudi 5 novembre, après les affaires courantes.
Merci.
(Fin de la séance à 16 h 35)