Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
42e législature, 2e session
(19 octobre 2021 au 28 août 2022)
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Le
mardi 10 mai 2022
-
Vol. 46 N° 36
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 32, Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures quarante-cinq minutes)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance à la
Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie afin de procéder
à des auditions publiques dans le cadre des consultations particulières sur le projet
de loi n° 32, Loi sur la liberté académique dans les milieux
universitaires.
M. le secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
Le Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Lachance (Bellechasse) remplace Mme Foster
(Charlevoix—Côte-de-Beaupré); M. Lévesque (Chapleau) par M. Chassin
(Saint-Jérôme); Mme Picard (Soulanges) par M. Émond (Richelieu); Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis) par Mme David (Marguerite-Bourgeoys); Mme Labrie
(Sherbrooke) par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve); et M. Bérubé (Matane-Matapédia)
par Mme Perry Mélançon (Gaspé).
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Ce matin, nous allons débuter par les remarques préliminaires, puis
nous entendrons les groupes suivants : l'Union étudiante du Québec et la
Fédération nationale des enseignants et enseignantes du Québec. Je cède
maintenant la parole à la ministre de l'Enseignement supérieur pour ses
remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez de six minutes.
Mme McCann : Merci, Mme la
Présidente. Alors, très contente d'être ici aujourd'hui. Et je veux saluer,
évidemment, d'entrée de jeu, mes collègues parlementaires, là, de l'opposition.
Alors, je les salue. On vient de se voir à l'étude des crédits, alors c'est un
plaisir de vous retrouver aujourd'hui dans un autre contexte. Et évidemment je
veux saluer les collègues, là, du gouvernement, Mame Émilie Foster, députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré, M. Youri Chassin, député de Saint-Jérôme, M.
Jean-Bernard Émond également, et Mme Suzanne Dansereau. Donc, très contente de
vous revoir, et merci d'être présents. Et aussi, j'ai des représentants de mon
cabinet et du ministère de l'Enseignement supérieur.
Donc, on est réunis aujourd'hui pour
débuter les consultations particulières sur le projet de loi n° 32, la Loi
sur la liberté académique d'un milieu universitaire. Alors, avant de débuter, j'aimerais
faire un bref retour en arrière pour mettre en contexte l'importance de ce qu'on
fait aujourd'hui. La question de la liberté académique est fondamentale, et les
dernières années nous ont démontré qu'elle n'est pas aussi acquise qu'on serait
tentés de le croire. Il y a plusieurs événements troublants en lien avec la
liberté académique qui ont attiré notre attention récemment. À ce sujet, les
recommandations du rapport de l'université du futur étaient claires et c'est
pourquoi nous nous étions engagés à agir pour protéger la liberté académique
dans les universités québécoises.
Pour y arriver, nous avons voulu faire les
choses correctement, dans l'ordre, sans sauter d'étapes. Alors, on a créé la
Commission scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la
liberté académique dans le milieu universitaire, qui a été présidée par M.
Alexandre Cloutier. M. Cloutier et son équipe avaient pour mandat de rédiger
une proposition d'orientation gouvernementale sur la liberté académique en
milieu universitaire et de déterminer le meilleur véhicule pour reconnaître la
liberté académique. Pour ce faire, la commission a notamment dressé un portrait
de la situation, tenue des consultations publiques sur la question, soumis au
gouvernement des propositions pour déterminer de meilleurs véhicules afin d'assurer
la reconnaissance de la liberté académique.
Le gouvernement a décidé de donner suite à
l'ensemble des recommandations de la commission et aussi à certains de ses
avis. En premier lieu, elle a recommandé au gouvernement d'adopter une loi
portant sur la liberté universitaire, la raison de notre présence ici. Alors,
ce projet de loi permet notamment de réaffirmer que la liberté académique
universitaire et l'autonomie des établissements sont des conditions
essentielles à l'accomplissement de la mission des universités, de définir la
liberté académique universitaire et d'en identifier ses bénéficiaires, de nous
assurer que les universités se dotent d'une politique portant exclusivement sur
la liberté académique universitaire, et de faire en sorte que les
établissements visés rendent compte de la mise en œuvre de leur politique.
Alors, le projet de loi permettrait la
mise en place d'un cadre uniforme en matière de liberté académique et
universitaire dans le milieu universitaire. Par exemple, elle exclurait toute
possibilité pour les établissements visés d'inclure des mesures qui
empêcheraient d'aborder, à l'occasion d'une activité qui contribue à la mission
universitaire, des idées et des sujets qui sont susceptibles de choquer.
Autrement dit, à des fins académiques, toutes les idées, tous les sujets, sans
exception, peuvent être débattus de manière rationnelle et argumentés au sein
des universités.
• (9 h 50) •
Toujours selon le projet de loi déposé,
les bénéficiaires de la liberté académique universitaire ne pourraient être
contraints d'émettre un avertissement avant d'aborder un contenu susceptible de
choquer. D'autres dispositions prévoient de permettre au ministre ou à la
ministre de demander des éléments additionnels à la politique des
établissements. Si besoin était, le ou la ministre pourrait également faire
apporter des correctifs...
Mme McCann : ...à ses frais,
un établissement qui ferait défaut d'adopter une politique de conforme. Les
établissements visés bénéficieraient de la souplesse nécessaire afin de
déterminer eux-mêmes les moyens les plus appropriés à mettre en place pour
atteindre les objectifs du projet de loi. L'autonomie de chaque établissement
universitaire est très importante et nous comptons la respecter, elle même
réaffirmée dans le projet de loi.
Au cours des prochaines heures, je serai
donc à l'écoute des différents points de vue qui seront partagés. Je vous le
dis d'emblée, moi, je suis dans un mode d'ouverture et de collaboration. S'il
est nécessaire de bonifier ce projet de loi, nous allons le faire assurément.
Mais sur le principe, sur la protection de la liberté académique et la fin de
l'autocensure, nous sommes catégoriques, il n'y aura pas de compromis. Le
développement d'un esprit critique et d'un jugement éclairé ne peut se faire
que si le milieu universitaire défend les principes de la liberté académique.
Et par ailleurs on pense que les étudiants ont droit à une formation de qualité
dans un environnement propice à l'apprentissage, à la discussion et au débat.
Et je suis confiante que cet exercice de
consultations mènera à l'adoption d'une loi qui fera du Québec une société
avant-gardiste quant à la protection de la liberté académique dans ses
universités et qui va inspirer d'autres États à travers le monde. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
Mme la ministre. Je vais juste vous faire un petit rappel qu'on ne doit pas
nommer nos collègues par leurs noms, mais bien par leurs titres.
Mme McCann : Oh mon Dieu!
vous avez tellement raison. Après tant d'années, je devrais savoir ça. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Donc, Mme la députée, j'invite maintenant... pardon, la députée du groupe de
l'opposition officielle, de Marguerite-Bourgeoys à faire ses remarques
préliminaires pour une durée de quatre minutes.
Mme David : Merci beaucoup.
Bonjour, tout le monde. Comme je n'ai que quatre minutes, je vais aller au plus
important, étant celui de discuter de ce projet de loi là. Alors, je remercie
la ministre, dans ses propos introductifs, de dire qu'elle sera très ouverte et
en mode collaboration parce que c'est ça qui va être très, très important,
quand on lit tous les mémoires, qu'on entend tous les commentaires. Encore ce
matin, à la radio, le recteur de l'Université de Montréal qui disait,
carrément, de retirer ce projet de loi. Donc, vous allez voir qu'on va passer
par beaucoup de choses, beaucoup de points de vue, mais il y a unanimité
contre, beaucoup de parties, de ce projet de loi, même si tout le monde défend,
comme vient de terminer la ministre, en disant : Le milieu universitaire
défend le principe de la liberté académique. Oui, oui, oui, mais c'est pour ça
qu'il protège... qu'il propose tant de changements au projet de loi.
Alors, ce projet de loi là est de la plus
grande importance. C'est comme, Mme la ministre, rouvrir la Constitution
canadienne, rien de moins. C'est comme les articles 90Q.1, 90Q.2 dans le projet
de loi n° 96. C'est la liberté académique, c'est le fondement même du
fonctionnement d'une université et de la mission des universités. Donc, chaque
mot compte, chaque absence de mot est lourde de conséquences, chaque mesure a
son lot d'enjeux. Par exemple, l'article 6 est unanimement décrié par tous les
partenaires. Et, en 40 ans de pratique en enseignement supérieur, je peux
vous dire que j'ai rarement vu une telle unanimité. Quand on a les trois
piliers qui sont contre, c'est qu'il y a quelque chose qui ne va pas,
c'est-à-dire les étudiants, les syndicats, les professeurs et les hauts
dirigeants qui disent : Ça n'a pas de bon sens, c'est une ingérence sans
précédent, ça donne un fondement juridique sans précédent, des intrusions
massives dans la sphère décisionnelle des universités. Il y a donc unanimité
contre cette mesure et tous les protagonistes sont contre ce projet de loi, en
tout ou en partie. Donc, ça va être un exercice d'équilibriste, comme j'ai dit,
jeudi dernier, à la ministre, de pouvoir trouver le meilleur de tout ça. Il va
falloir écouter, réfléchir, dialoguer, trouver les meilleurs compromis, sinon
c'est vers un échec total qu'on se dirige, à moins de faire mourir le projet de
loi au feuilleton.
Donc, si on met ensemble toutes les
recommandations, pas mal tout, et on va le voir avec les mémoires, avec les
présentations, pas mal tout est à repenser, refaire, réécrire. Je ne dis pas
que tout est mauvais, je ne dis pas que ça n'a pas été réfléchi, mais il y a
tellement d'obstacles et tellement d'enjeux qu'on va entendre toute la
journée : Vous devriez faire ci, vous devriez faire ça. Si on met, ça,
bout à bout, hi! c'est un... Nous sommes conviés tous ensemble à une grande, grande
réflexion et amendements autour de ce projet de loi. Je ne dis pas qu'on n'y
arrivera pas, je l'ai dit à la ministre, mais il va falloir s'asseoir et être
extrêmement ouverts à tous les commentaires qui vont être apportés. Et je ne
sais pas s'il me reste du temps. Ah! il me reste une minute.
Alors, nous allons écouter tous les...
nous allons commencer avec l'Union étudiante du Québec qui, par exemple, dans
sa recommandation 1, c'est simple : «Que le gouvernement du Québec ne
légifère pas au sujet de la liberté académique...
15
379
Mme David : ...on
commence raide, je dirais, Mme la Présidente, mais il y a d'autres qui vont
venir dire la même chose, l'Université de Montréal l'a encore dit ce matin, le
BCI va venir demain. Alors, on est entre ce genre de position. La FQPPU va
venir, des syndicats, la CSN, la FNEQ. Il y a... Il y a beaucoup, beaucoup de
monde, là. Monsieur Cloutier va venir lui-même pour son rapport. Et eux-mêmes
proposent dans leur... des amendements importants parce que, quand on dit que
le gouvernement a donné suite à l'ensemble des recommandations du rapport
Cloutier, bien, le rapport... M. Cloutier et ses collaborateurs vont venir
dire que non, le gouvernement n'a pas donné suite à l'ensemble de leurs
recommandations. Alors, ça va être passionnant. Ça va être passionnant, Mme la
Présidente, et nous allons travailler très fort, et j'offre toute ma
collaboration à trouver des voies de solution.
15
399
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci, Mme la députée. J'invite maintenant le porte-parole
du deuxième groupe d'opposition et député d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses
remarques préliminaires. Vous disposez d'une minute.
17
935
M. Leduc : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, tout le monde. Bienvenue. C'est une journée
importante aujourd'hui. Une loi sur la liberté universitaire et la liberté
académique est réclamée quand même depuis longtemps par différents acteurs.
Nous, on souscrit à Québec solidaire à cet objectif, mais visiblement la pièce
qu'on nous a servie est mal bricolée, mal ficelée. On a peut-être travaillé
trop vite. Pour reprendre l'allégorie professorale, je ne suis pas sûr qu'elle
obtiendrait une note de passage, cette première copie. Mais bon, on est là.
J'entends l'ouverture de la ministre, autant aujourd'hui que la semaine
dernière, à l'étude des crédits. Je suis content d'entendre cette ouverture-là,
maintenant. Ça tombe bien, la semaine prochaine, c'est une semaine de
circonscription. Il y aura le temps, peut-être à son cabinet, de retravailler
les amendements, de mettre une deuxième copie au jeu au retour. Nous sommes...
Nous serons disponibles, les différents députés d'opposition, pour travailler
peut-être avec elle dans cette semaine de circonscription là et arriver à une
pièce législative qui sera... qui fera peut-être l'unanimité, cette fois-ci en
faveur et non l'unanimité en défaveur, comme c'est le cas actuellement. Merci.
15
399
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci beaucoup, M. le député. J'invite maintenant la
porte-parole du troisième groupe d'opposition et députée de Gaspé à faire ses
remarques préliminaires pour un maximum d'une minute.
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217
Mme Perry Mélançon : D'une
minute. Merci, Mme la Présidente. Je salue les collègues et Mme la ministre
pour cet important projet de loi qu'on va... qu'on va analyser dans son détail
avec nos invités justement. Et je salue également les collègues de
l'opposition. Bien, ce sera un peu des commentaires qui... qui rejoignent ceux
de mes collègues. Il faut s'assurer que cet important pas qu'on fait pour
assurer une protection aux établissements, et à leur personnel, et à leurs
enseignants, que ce soit un pas vers la bonne direction et non pas un pas de
recul. Alors, c'est vraiment dans le libellé, dans les articles tels qu'ils
sont rédigés, qu'il faudra aller en profondeur voir quels impacts que ça a. Je
pense qu'on entendra beaucoup de commentaires qui vont nous éclairer. Et
j'entendais l'ouverture de la ministre pour apporter des amendements. Et
évidemment, moi, je suis vraiment favorable à ce qu'on... à ce qu'on légifère,
qu'il y ait une... qu'il y ait vraiment un projet de loi pour assurer la
liberté académique. Alors, ça, évidemment qu'on sera toujours dans cette
optique-là au Parti québécois. Merci.
15
399
La Présidente (Mme
D'Amours) : Merci beaucoup. Je souhaite maintenant la bienvenue à
l'Union étudiante du Québec et aux représentants M. Jonathan Desroches,
président, et Mme Alice Lemieux-Bourque, coordonnatrice à l'enseignement
supérieur. Nous procédons à la période d'échanges entre les membres d'une
durée... Vous avez... Pardon, vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé. Et ensuite nous procéderons à la période d'échanges avec les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre
exposé. La parole est à vous.
M. Desroches (Jonathan) : Merci,
Mme la Présidente. Je tiens à vous saluer, saluer les députés, saluer la
ministre de l'Enseignement supérieur. Mon nom est Jonathan Desroches. Je suis
président de l'Union étudiante du Québec pour encore quelques heures. Je laisse
ma collègue se présenter.
Mme Lemieux-Bourque
(Alice) : Alice Lemieux-Bourque, coordonnatrice en enseignement
supérieur.
• (10 heures) •
M. Desroches (Jonathan) : L'Union
étudiante du Québec représente directement 91 000 étudiants/étudiantes universitaires
au Québec par l'entremise de 10 associations étudiantes membres et
regroupe, là, dans ses travaux, sur une base régulière, plus de 200 000 étudiants/étudiantes
représentées par l'entremise d'associations non-membres également. L'UEQ a pour
mission de défendre les droits et les intérêts de la communauté étudiante
universitaire, de ses associations étudiantes membres et de leurs membres
individuels. Par sa représentation politique, ses recherches et sa
mobilisation, l'UEQ est, depuis six ans maintenant, l'interlocutrice principale
des dossiers d'accessibilité aux études universitaires et conditions de vie des
étudiants et des étudiantes auprès du gouvernement provincial, fédéral, des
partis d'opposition et des groupes sociaux. Vraiment, je remercie la commission
de l'invitation à témoigner et à présenter le point de vue étudiant sur le
projet de loi no 32, Loi sur la liberté académique dans le milieu
universitaire. En septembre passé, l'UEQ a participé à la Commission
scientifique et technique indépendante sur la reconnaissance de la liberté
académique dans le milieu universitaire, la commission Cloutier...
10 h (version non révisée)
M. Desroches (Jonathan) : ...s'opposant
à l'idée d'une loi ayant pour but de définir et de baliser la liberté
académique au sein des universités. On souhaitait donc qu'il n'y ait pas de
projet de loi. Et on est ici aujourd'hui pour réitérer cette position, en plus
de suggérer des pistes d'amendements pour améliorer le projet de loi, bien que
nous y demeurons opposés.
Donc, allons-y tout de suite avec le coeur
de notre position. Pour qu'elle puisse accomplir pleinement sa mission, soit d'alimenter
les connaissances, les débats et le développement de la société, l'Université
doit être un lieu où toutes les idées peuvent être exprimées, discutées et
remises en question. La communauté étudiante est une partie centrale de cette
discussion et la seule manière dont ces débats peuvent avoir lieu, c'est dans
un milieu respectueux, inclusif, inclusif des idées et des individus. Il est
normal, il est sain que ces discussions se déroulent dans les universités et,
en fait, c'est même dans les universités et non à l'Assemblée nationale que
cette discussion-là doit avoir lieu. Parce que la liberté universitaire permet
aussi la critique indépendante de l'État, et c'est impossible d'atteindre cet
objectif si c'est l'État qui définit les contours de la liberté universitaire.
En imposant un cadre législatif, en imposant une démarche, l'Assemblée
nationale ouvre une brèche pour affecter le rôle de l'université et son
évolution dans le temps. L'article 6 du projet de loi est le meilleur
exemple pour illustrer le danger que ce projet de loi représente pour la
liberté académique en elle-même. Je vais d'ailleurs revenir à l'article 6
un peu plus tard. En plus d'être une menace à l'autonomie des universités et à
la liberté académique, le projet de loi ne va régler aucun problème, selon
nous, parce que la commission Cloutier a existé en réponse à des événements
médiatisés. Or, avec ou sans une loi, avec ou sans une politique, s'il y a des
propos dans les universités qui sont inacceptables ou qui ne sont pas
respectueux, qui sont tenus par des personnes qui bénéficient de la liberté
académique, évidemment, les personnes qui sont concernées par ces propos-là
seront toujours dans leur droit de s'exprimer sur la place publique, dans les
médias, si elles le souhaitent. Donc, les situations médiatiques qu'on cherche
à éviter, ce n'est pas avec une loi, ce n'est pas avec une politique qu'on va
les corriger, c'est plutôt en travaillant en amont dans un processus de
formation continue de la communauté universitaire. Ça aussi, on va y revenir
peu plus tard.
Donc, ce que je disais, c'est que le
projet de loi non seulement ne va rien changer à la situation initiale, soit la
possibilité qu'il y ait des événements médiatiques, mais, en plus, représente
une menace à la liberté universitaire et à l'autonomie des universités. C'est
pour ça que la première recommandation de l'Union étudiante du Québec demeure
de ne pas légiférer sur la liberté académique dans les universités et de
laisser cette notion évoluer selon la communauté universitaire. Bien que ce
soit là notre principale recommandation, nous souhaitons tout de même suggérer
des amendements dans le cas où le projet de loi serait adopté.
Notre première suggestion d'amendement
concerne l'article 6. L'Union étudiante du Québec suggère de retirer le
premier alinéa de l'article 6 qui stipule que le ministre peut, lorsqu'il
l'estime nécessaire pour protéger la liberté académique universitaire donc,
ordonner à un établissement d'enseignement de prévoir dans sa politique tout
élément qui l'indique. C'est un élément du projet de loi qui suscite de vives
réactions dans la communauté universitaire, chez la communauté étudiante
également. Et pour l'UEQ, si on souhaite vraiment protéger la liberté
académique, il faut empêcher une ‘intervention de l'État qui aurait pour
conséquence d'influencer sa mission même. Car ça demeure ce niveau de danger
auquel nous confronte le projet de loi avec un exemple comme l'article 6.
Ainsi, notre première suggestion d'amendement est de retirer le premier alinéa
de l'article 6. Et Alice va poursuivre avec la suite de nos suggestions d'amendement.
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Merci.
Ensuite, là, on pense qu'il faudrait mieux définir ce qu'on entend par liberté
d'enseigner à l'article 3 du projet de loi. La communauté étudiante s'inquiète
que la reconnaissance de cette nouvelle liberté là mène à des interprétations
légales qui risquent de restreindre les droits et libertés acquis par les
étudiants et les étudiants dans leurs institutions. Et ce qu'on veut dire par
là, en gros, là, c'est qu'on ne veut pas que le concept de liberté d'enseigner
soit utilisé pour justifier, par exemple, qu'une personne enseignante ne suive
pas son plan de cours selon les règlements de l'université, sous prétexte que
ça ferait partie de sa liberté académique. À cet effet, d'ailleurs, là, on
propose dans le mémoire un amendement qui permettrait, là, de spécifier la
liberté d'enseigner.
Ensuite, Jonathan l'a déjà dit, mais je
vais à mon tour rappeler pourquoi on est ici aujourd'hui. La problématique à l'origine
du projet de loi, c'était à propos de conflits liés à des événements à
caractère discriminatoire qui se sont retrouvés dans l'espace public. En ce
moment, dans le projet de loi, il n'y a absolument rien qui va permettre d'éviter
des situations conflictuelles puis rien non plus qui va permettre de désamorcer
ces conflits afin d'éviter que des membres de la communauté étudiante ne ressentent
que leur seule option, face à un désaccord, soit de sortir dans les médias. Au
contraire, là, le projet de loi ne contient que des éléments répressifs qui ne
viennent pas encourager la médiation, mais donnent plutôt l'impression que l'endroit
pour exprimer son désaccord, c'est à l'extérieur des murs de l'université. Un
comité de règlement de plaintes portant sur une atteinte au droit à la liberté
académique, comme c'est en ce moment, là, prévu au projet de loi, ça n'offre
pas de solution à une personne qui se sent brimée dans son milieu d'apprentissage.
Ce que l'UEQ propose...
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : ...lorsqu'elle
a témoigné devant la commission Cloutier, en septembre dernier, c'était la mise
en place de mécanismes de médiation ou une gestion de plaintes envers le
contenu d'un cours ou les propos tenus dans le cadre d'un milieu d'apprentissage.
La présence de lieux de médiation, de consensus, des lieux d'arbitrage, ça
permettrait de proposer une procédure encadrée de gestion de conflits plus
inclusive et respectueuse pour les personnes touchées. Pour nous, afin que le
projet de loi ne rate pas complètement sa cible, c'est essentiel qu'il demande
la mise en place d'espaces de dialogue et de processus de gestion de plaintes
envers le contenu d'un cours. On croit que ça pourrait être fait, là, entre
autres, en intégrant ces fonctions-là au conseil qui est proposé au
paragraphe 1 de l'article 4.
Pour continuer encore sur ce conseil-là,
on croit qu'il serait important que le projet de loi spécifie que des membres
de la communauté étudiante doivent être inclus dans la constitution du conseil.
On doit vraiment s'assurer de la participation et de la consultation de la
population étudiante sur cet enjeu dans toutes les universités.
Encore une fois dans l'article 4,
mais cette fois-ci au paragraphe 3, qui demande de préciser dans les
politiques les mesures et sanctions applicables en cas d'atteinte au droit à la
liberté académique universitaire. Puisque l'université possède déjà les outils
nécessaires pour sanctionner les personnes en cas de harcèlement ou de
diffamation, l'UEQ craint que les politiques mises en place mènent à des abus
de sanctions sur les membres de la communauté étudiante qui exprimeraient leur
désaccord. Les politiques ne doivent pas servir à porter atteinte à la liberté
d'expression de la population étudiante et à remettre en question son droit
fondamental de s'exprimer de manière non diffamatoire, bien sûr, sur
l'enseignement qu'elle reçoit. On veut être bien clair ici, là, c'est
impensable qu'on permette la création de systèmes dans les universités qui
sanctionneraient les étudiants et les étudiantes exerçant leur droit
constitutionnel de s'exprimer, de protester ou de manifester. Ainsi, L'UEQ
demande que, dans les politiques mises en place par les universités, on
réaffirme le droit fondamental de la communauté étudiante à s'exprimer sur le
contenu académique et les propos tenus par une personne enseignante.
Finalement, l'UEQ croit que les politiques
pourraient être utilisées afin de mettre en place des ressources et formations
sur l'équité, la diversité et l'inclusion, ou l'EDI, dans le milieu
universitaire. Plus précisément, là, l'UEQ propose de demander la mise en place
de ressources pour accompagner le corps enseignant des universités lorsque
vient le temps d'aborder des sujets potentiellement litigieux, une proposition
d'ailleurs, là, qu'on peut retrouver dans le rapport de la commission Cloutier.
Cette initiative permettrait de rendre le milieu universitaire plus inclusif et
d'éviter des situations conflictuelles.
Dans le même ordre d'idée, afin d'assurer
que l'ensemble de la communauté étudiante soit sensibilisé aux enjeux liés à la
discrimination, on demande que les universités mettent en place des formations
sur les enjeux liés à l'EDI, notamment l'utilisation d'un langage et d'une
expression inclusifs. Il me reste combien de temps?
Une voix : ...
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Je
vais y aller rapidement. En résumé, l'UEQ s'oppose à la légifération de la
liberté académique dans les universités. Le premier alinéa de l'article 6,
qui fait la démonstration même que ce projet de loi est une porte d'entrée pour
les ingérences de la part du gouvernement, doit être retiré afin de s'assurer
que le projet de loi ne rate pas sa cible et qu'il puisse réellement désamorcer
les conflits présents dans les universités lors d'événements à caractère
discriminatoire. Il doit prévoir la mise en place de milieux de médiation et de
gestion de plaintes. Des étudiants et des étudiants doivent se retrouver sur le
conseil mis en place dans chaque université. Les universités doivent reconnaître
le droit fondamental de la communauté étudiante à s'exprimer sur le contenu
académique et les propos d'une personne enseignante. Et finalement, des
ressources doivent être développées afin de soutenir le corps enseignant
lorsque vient le temps d'aborder des sujets potentiellement litigieux. Et toute
la communauté universitaire devrait être formée aux enjeux d'équité, de
diversité et d'inclusion. Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Bravo!
Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer la période d'échange.
Mme la ministre, la parole est à vous pour une durée de
16 min 30 s
Mme McCann : Merci, Mme la
Présidente. Bien, écoutez, je vous salue, et je vous remercie vraiment d'avoir
pris le temps, là, d'évidemment rédiger le mémoire, les consultations,
sûrement, que vous avez faites et d'être présents aujourd'hui avec nous. Vous
le savez probablement, mais je vous le réitère, que je valorise énormément vos
opinions, vos positions. C'est sûr que je peux être en désaccord, là, avec certaines
de vos positions, vous le savez, mais tout au long du mandat, je vous ai
rencontrés, et vos prédécesseurs, et ça a été, pour moi, toujours très
enrichissant, et ça va être la même chose aujourd'hui.
Alors, suite à votre exposé, j'aurais
quelques questions. Sur... Parce que, vous le savez, le rapport Cloutier, il y
a eu un sondage qui a été fait auprès des étudiants, auprès des professeurs, et
il y avait une proportion, une certaine proportion des professeurs, des
étudiants qui disaient qu'ils ne pouvaient pas utiliser... s'autocensurer sur
certains mots, certains sujets dans les classes. Quelle est votre position
là-dessus, là, actuellement? La situation, elle a été amenée, là, par ces
sondages qu'a faits la commission Cloutier. Quelle est votre position pour
régler cette autocensure, là, des étudiants et des professeurs?
• (10 h 10) •
M. Desroches (Jonathan) : Merci.
Merci de la question...
M. Desroches (Jonathan) : ...on
a vu récemment, dans des articles, je crois, de La Presse, des groupes de
professeurs remettre en question la méthode scientifique de ce sondage-là, là.
Également, il me semble, c'est le recteur Jutras qui a soulevé ces points-là.
Mais, bon, je vais laisser la remise en question de la méthodologie
scientifique. Puis, on peut parler directement au niveau de la censure.
Évidemment, on ne peut pas être contre la vertu. Pareillement, on ne peut pas
être pour la censure. Et ce n'est pas ça qui est soulevé dans ce qu'on dit,
mais plutôt une optique de... En fait, c'est normal que ça soit dans les
universités, à l'Assemblée nationale, sur la rue, de réfléchir avant de parler.
Et c'est souhaitable, évidemment. Mais c'est pour ça que, quand on
demande : est-ce que vous avez l'impression de vous autocensurer? Ça peut
avoir plusieurs connotations. Ça peut dire quelque chose et son contraire en
fait. Et clairement, ce n'est pas de ça qu'on parle. Mais dans l'évolution
peut-être de l'université, les termes, évidemment, évoluent. Les personnes qui
fréquentent les universités évoluent au Québec, particulièrement dans les 20,
30, 40 dernières années et, évidemment, avec une évolution des personnes
qui fréquentent l'université, ça apporte aussi une évolution des concepts, des
discussions qui ont lieu dans les universités. C'est donc normal... il serait
souhaitable que des termes qui étaient peut-être utilisables il y a 50 ans
ou dans des générations précédentes ne le soient plus aujourd'hui. Mais dans
tous les cas, ce qu'on dit, c'est que ces discussions-là appartiennent ou
doivent avoir lieu dans le milieu universitaire et c'est une bonne chose
qu'elles aient lieu dans le milieu universitaire.
Mme McCann : D'accord. Je
vais vous poser une autre question, mais je vais faire un petit préambule, là,
parce que je vais être sûre qu'on comprenne le projet de loi. Peut être je vais
vous poser la question suivante et est-ce que votre compréhension du projet de
loi, dans votre compréhension, il est entendu que les étudiants peuvent aussi
porter plainte au conseil qui est mentionné dans le projet de loi. Est-ce que
votre compréhension, c'est celle-là? Est-ce que vous pensez que ce sont
seulement les professeurs, les chargés de cours, etc. qui peuvent porter
plainte, là, au conseil qui est mentionné dans le projet de loi, ou est ce que
vous pensez que... est-ce que votre compréhension, c'est que les étudiants
aussi peuvent porter plainte à ce conseil?
Mme Lemieux-Bourque (Alice) :
Bien, de notre compréhension, bien, de ce que vous avez dit, es étudiants
peuvent aller porter plainte, mais de ce qu'on lit, nous, c'est qu'en ce
moment, dans le projet de loi, le conseil, sa fonction, là, c'est écrit
d'examiner les plaintes portant sur une atteinte au droit à la liberté
académique, universitaire. Or, comme une personne étudiante ne bénéficie pas de
la liberté académique universitaire, comme dans le projet de loi, bien, tu
sais, si le comité est pour atteinte au droit à la liberté académique, bien, si
un éditeur se retrouve sur ce comité-là, on s'entend que ce n'est pas parce que
c'est son droit qui a été atteint, et donc c'est qu'il l'atteint. Il porte
atteinte au droit à la liberté académique. Donc, nous, pour nous, la façon dont
le projet de loi conçoit la problématique, ça semble être à sens unique. Ça
fait que c'est pour ça que pour nous, là, on ne voyait vraiment pas comment un
étudiant ou une étudiante, là, pourrait aller voir ce comité-là pour parler.
Mme McCann : Et si c'était
possible, si c'était possible qu'un étudiant puisse porter plainte au conseil,
est ce que ça modifierait votre position?
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Bien,
ça ne modifierait pas notre position sur le projet de loi en soi, parce qu'on
considère que les universités pourraient déjà mettre des mécanismes en place
par eux-mêmes, là, pour, par exemple, la médiation. Mais c'est sûr que ce
serait mieux pour nous puis ce serait même très important de préciser dans le
projet de loi que ça peut être une place pour que les étudiants puissent aller
exprimer leur désaccord.
Mme McCann : O.K. Et il y a
un lien avec ma prochaine question. Vous êtes probablement au courant d'une
étude qui est faite actuellement par des étudiants en psychologie à McGill. Et
cette étude porte sur la liberté universitaire. Ils ont recueilli des
commentaires de plusieurs... quelques centaines d'étudiants d'ailleurs qui
indiquent que le débat et la diversité des points de vue sont difficiles, voire
impossibles dans certains départements, que les étudiants craignent de partager
leurs points de vue, qu'il est difficile d'avoir des conversations posées et
raisonnées, que ceux qui présentent des points de vue, qui critiquent ou
questionnent les dérives du mouvement de justice sociale, même à des fins
constructives, se font humilier publiquement par certains professeurs et
étudiants, que les étudiants ont peur de s'exprimer, craignant d'être traités
de suprémacistes blancs ou transphobes, alors que ça n'est pas du tout leur
point de vue ou encore de se faire annuler ou de se voir refuser l'accès à des
bourses ou à des études graduées...
Mme McCann : ...les chercheurs
disent : Nous avons nous-mêmes observé ces phénomènes dans nos programmes.
Est-ce que ça suscite chez vous une inquiétude? Parce que vous, là, comme union
étudiante du Québec, vous représentez tous les étudiants. Et là, on a une étude
qui est faite par des chercheurs étudiants, et vous avez un rôle de défense,
hein, des droits, des intérêts, que vous jouez pleinement pour toute la
communauté étudiante. Quelle est votre réaction à cette étude, là, qui démontre
qu'il y a un certain nombre d'étudiants qui ont vraiment peur de s'exprimer?
M. Desroches (Jonathan) : Je
peux y aller. Merci de la question. Donc, je vais vous mentionner que,
clairement, ce n'est pas une question, par exemple, là, puis ce n'est pas ce
que la ministre a soulevé, mais ce n'est pas une question de débat woke ou anti
woke. Puis de toute façon, si j'ai suivi l'actualité récemment, tout le monde
ici serait rendu des wokes ou à peu près.
Mais sur la notion de liberté académique,
ce qu'on soutient, essentiellement, c'est que ça fait des décennies que les
universités gèrent la liberté académique, c'est au coeur, en fait, de la
liberté... La liberté académique est un outil pour accomplir la mission même
des universités. Donc ça fait des décennies que ces considérations-là ont lieu,
qu'il y a des situations académiques qui sont gérées dans les comités de
discipline, par exemple, qui existent déjà dans les universités. Évidemment, on
n'en entend pas toujours parler, mais c'est une situation qui se passe de
manière régulière dans les universités et, au niveau de l'accessibilité, quand
je parlais dans mon préambule d'accessibilité, qui est une mission de
l'Union... du Québec, on ne parle pas uniquement d'accessibilité financière.
Oui, évidemment, mais dans le cas qui nous concerne aussi, on parle
d'accessibilité des différentes personnes porteurs, porteuses de marqueurs de
diversité, ce qu'on ne voyait pas dans les universités au Québec il y a 30,
40 ans. Et comme je le mentionnais tantôt, ça fait en sorte que les discussions
évoluent et c'est une bonne chose. Et le point qui a été soulevé à McGill,
spécifiquement, c'est une étude universitaire, là, du côté de l'UEQ qu'on n'a
pas vue récemment, mais clairement, ça démontre qu'il y a des discussions dans
le milieu universitaire et que c'est une bonne chose que ces discussions là,
que ces analyses-là aient lieu dans le milieu universitaire et que la
communauté universitaire peut arriver à un consensus sans avoir un projet de
loi qui impose ce cadre-là, législatif, là.
Mme McCann : Bien, je vous
remercie et je suis d'accord qu'il y a des actions qui sont prises dans
plusieurs universités. Mais je pense que, évidemment, là, vous avez lu le
rapport Cloutier puis c'est bien clair que c'est à géométrie variable. Il y a
eu beaucoup de commentaires, là, par rapport à la disponibilité de
l'information. Enfin, c'est à géométrie variable. Mais effectivement, il existe
quand même beaucoup d'actions qui se font dans les universités. Et le projet de
loi va dans le sens d'une cohérence, hein, d'une uniformité. Donc là-dessus, je
vous demanderais, et ce sera ma dernière question avant que je passe la parole
à mes collègues, comment vous voyez que la politique, là, qu'on va instaurer
dans chaque université, il y aurait une consultation auprès des membres de la
communauté universitaire. Alors, comment vous voyez cette consultation-là pour
qu'elle soit la plus rassembleuse possible?
M. Desroches (Jonathan) : Pour
ce qui est de la disparité des informations entre les universités, on tient
aussi à souligner qu'on parle peut-être, là... La liberté universitaire
s'applique, là, pareillement dans l'ensemble des universités, évidemment. Ce
qui est question, des fois, quand on parle de différence, c'est dans les
traitements, surtout dans les traitements, par exemple dans les différents
comités, les traitements de plaintes. Chaque université a déjà des processus
pour traiter ces demandes-là.
• (10 h 20) •
Maintenant, ce qui a trait de
politiques... puis c'est pour ça aussi qu'on pense que ce n'est pas nécessaire
de légiférer ou en tout cas d'imposer une politique aux universités, c'est
parce que les universités vont peut-être aller vers d'autres options,
pourraient aller vers d'autres options, comme ce qu'on a fait à l'Université de
Montréal avec un énoncé de principes qui a suivi la mission du recteur sur la
liberté académique. Et cet énoncé de principes là a été travaillé par
l'ensemble de la communauté. Je pense, quand on cherche à avoir un processus de
consultation, celui-ci en est un bon exemple. Et évidemment, comme on l'a
mentionné, on doit impliquer la communauté étudiante dans ces consultations-là.
Chaque université a ses structures dans lesquelles les étudiants et étudiantes
doivent avoir une voix. Donc, c'est pour ça que c'est difficile... et ça
illustre un peu à quel point c'est difficile d'appliquer le même modèle à
l'ensemble des...
M. Desroches (Jonathan) : ...Université
parce que les structures sont légèrement différentes bien qu'évidemment la
liberté académique, là, s'applique de manière similaire dans tous les cas.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à la députée de
Charlevoix-Côte-de-Beaupré. Il reste 4 min 50 s.
Mme Foster : Merci beaucoup.
Bienvenue à vous, merci beaucoup pour votre mémoire très enrichissant. Vous
apportez certaines idées d'amendement, et comme la ministre l'a mentionné, elle
montre quand même une certaine ouverture. Moi, de mon côté, j'aurais une
question. Vous avez dit tout à l'heure, lors de votre présentation, que
certains mots ne se disent plus et que ce n'est peut-être pas une mauvaise
chose. Bon, moi, j'ai ma perspective d'ancienne chargée de cours, peut-être
future, également, je viens de ce monde-là, j'ai un doctorat. Bon, à mon avis,
le prodébat, c'est une notion qui doit être fondamentale au niveau académique,
O.K., je pense que, là-dessus, on s'entend sur le fond. Par contre, on
détermine où la limite? Qui détermine ce qui va se dire et ce qui ne se dira
pas, quel mot se dit, quel mot ne doit pas se dire? Par exemple, si on fait un
cours sur la deuxième guerre mondiale en histoire puis on ne parle pas
d'Hitler, est-ce qu'à la base on doit nommer les choses pour pouvoir les
décrier et dire qu'elles étaient inacceptables historiquement ou il ne faut pas
la nommer? Vous me suivez? Ça fait que voilà, c'est ma question.
M. Desroches (Jonathan) : Merci
de la question. Mme la Présidente, je dirais qu'un peu comme on l'a mentionné
en introduction la commission Cloutier a existé en réponse à des événements qui
ont été médiatisés. Ce qu'on veut dire par là, c'est qu'on n'est pas devant des
problèmes théoriques de gens, par exemple, qui cherchent à remettre en question
le big bang, puis qui ne sont pas capables, puis qui se font censurer, ce n'est
pas ça. C'est qu'il y a des personnes, dans le contexte universitaire, sur la
liberté académique, on a vu ce qui a été médiatisé, qui veulent dire le «n»
word, puis qui ne devraient peut-être pas. C'est ça qui a été question, c'est
ça qui a été médiatisé. Ensuite, est-ce qu'il y a des contextes pour... qui est
acceptable d'avoir certains propos? Ces contextes, ce qu'on dit, c'est au
milieu universitaire de le définir, que ça soit dans chaque domaine, dans
chaque secteur, ce n'est clairement pas à l'Assemblée nationale, ici, d'imposer
un cadre aux universités et au milieu universitaire pour établir qu'est-ce qui
est possible de dire ou qu'est-ce qui est possible de ne pas dire.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais céder maintenant la parole au député de Saint-Jérôme.
M. Chassin :Merci, Mme la Présidente. Peut-être une question sur le
volet de votre présentation qui concerne la pertinence ou la nécessité d'un
projet de loi par rapport à, dans le fond, l'organisation autonome dans chacune
des universités. Est-ce que... Vous parlez des cas médiatisés, est-ce que,
selon vous, donc, la réaction des universités a été correcte?
M. Desroches (Jonathan) : Correct
par rapport?
M. Chassin :Est-ce que vous jugez que les universités ont bien géré les
différentes crises médiatiques dont on a entendu parler? Est-ce que vous jugez
que les universités ont bien géré ça de façon autonome?
M. Desroches (Jonathan) : Merci
de la question, merci de la précision. Bien, on sait qu'il y a eu un cas à
l'Université d'Ottawa, il y a un an et demi, deux ans maintenant, donc qui ne
nous concerne pas, évidemment. Et, à l'Université McGill, là, on avait entendu
aussi un événement médiatisé il y a un an, un an et demi. Et, à notre
connaissance, cette situation-là a été réglée comme, je mentionnais, des
situations qui se produisent et qui sont réglées par des comités de discipline.
Donc, à notre connaissance, il n'y a pas eu d'enjeu problématique, là, qui a
suivi cette situation-là à McGill, par exemple.
M. Chassin :Et donc, même si ce n'est pas au Québec, je trouve que
c'est quand même intéressant de retenir les leçons de nos voisins. Mais
renvoyer, par exemple, une chargée de cours ou la suspension en solde, est-ce
que ça peut être, à votre point de vue, une réaction tout à fait pertinente
d'une université dans un cas?
M. Desroches (Jonathan) : Et
c'est pour ça qu'on ramène la discussion vers l'équité, la diversité et
l'inclusion vers la formation en continu du milieu universitaire, parce que,
non, la censure, ce n'est pas une option, et de sanctionner des gens, comme on
mentionnait... Et c'est ça que la politique apporte, là. Quand qu'on parle
d'imposer une politique, on parle de sanction. La différence entre un énoncé de
principe et une politique, c'est que la politique doit avoir des sanctions pour
pouvoir l'appliquer. Donc, nous, on pense que c'est favorable, dans cette
discussion-là du milieu universitaire, de travailler en amont et de laisser
peut-être les sanctions de côté, de favoriser la discussion et de laisser le
milieu universitaire, si c'est des énoncés ce principe qui émanent, bien, de
laisser ses conclusions.
M. Chassin :Puis là j'imagine qu'il me reste très peu de temps, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes.
M. Chassin :20 secondes. Est-ce que... Juste sur la méthodologie
du sondage. Est-ce que je comprends que, quand vous dites «autocensurer», ça
peut vouloir dire une chose et son contraire? C'est que vous comprenez
«autocensurer» comme peut-être que des répondants se sont dit : Ah! bien,
il faut que je pense avant de parler, et donc c'est positif de s'autocensurer
dans ce sens-là là?
M. Desroches (Jonathan) : On
dit ça, mais ce n'est pas que nous qui dit ça, là. Comme je mentionnais, le
recteur Jutras a soulevé un problème avec ce sondage-là...
M. Desroches (Jonathan) : ...et
je crois, c'est il y a deux semaines, il y a trois semaines, dans La Presse, un
groupe de professeurs, là, de plus 200 professeurs, là, qui soumet ça.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Donc, maintenant, je cède la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys
pour une durée de 11 minutes.
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Des questions que j'entends, j'espère qu'on ne
passera pas toute la journée à faire le procès de l'Université d'Ottawa parce
que la question de la liberté académique est tellement plus large que ça. Même
la ministre réfère à la recherche, tout à l'heure, la liberté de pouvoir
chercher sur n'importe quoi. Or, on sait que souvent les fonds de recherche
orientent et mettent de l'argent comme on fait pour les bourses Perspective
Québec, d'ailleurs, dans des sujets particuliers, parce que c'est prioritaire
pour la société. Alors, ça, ça pourrait être une forme de censure. Les
étudiants le savent très bien quand ils font des demandes de bourse de
maîtrise, de doctorat. Il y a des mots à écrire dans la demande de subvention
si tu veux avoir ta subvention, puis il y a des mots à proscrire ou il y a des
sujets.
Alors, j'espère qu'on ne se sera pas
là-dessus tout le long. Mais vous êtes le seul regroupement étudiant qui va
venir aujourd'hui, si je ne m'abuse, et c'est extrêmement important ce que vous
avez à dire. Vous ne voulez pas de loi. Vous dites : Les universités sont
capables de le faire. Vous référez souvent à l'Université de Montréal. C'est
assez intéressant. D'ailleurs, je vous en parlerai tout à l'heure, mais vous
dites : La communauté étudiante doit pouvoir s'exprimer sur le contenu
académique d'un cours et les propos d'une personne enseignante. Alors, vous
dites : On ne veut pas de loi, mais c'est... Il faut que l'université
trouve une façon. Et vous référez à la médiation, alors que la ministre vous
envoie directement au conseil qui est une instance suprême, selon le rapport
Cloutier. Ce n'est pas une instance première, c'est quand toutes les procédures
universitaires habituelles n'ont pas fonctionné.
On sait comment ça fonctionne, vous le
savez, il y a un directeur des départements, il y a un directeur de programme
de baccalauréat ou de maîtrise ou de doctorat. Après ça, il peut y avoir un
vice-doyen aux études dans le décanat de la faculté. Après ça, il peut y avoir
le doyen qui intervient, après ça le vice-recteur. Puis le conseil, c'est la
dernière, dernière, dernière instance. Alors, l'étudiant qui dit : Moi, je
n'aime pas le prof, puis il a dit tel mot, il ne s'en va pas au conseil
directement. En tout cas, si c'est ça, on va en parler tout à l'heure avec
M. Cloutier qui va venir parler de son rapport, mais ça va être impossible
de s'immiscer dans le contenu de tous les cours. Alors, comment vous vous conciliez
votre sentiment que vous pouvez pouvoir exprimer ce que vous voulez? De la même
façon que vous dites : Les professeurs ont le droit d'enseigner de la
façon dont ils veulent. Ils ne doivent pas se censurer. Et cette question du
processus puis de... jumelé au fait que vous ne voulez pas de projet de loi
finalement.
Mme Lemieux-Bourque
(Alice) : Bien, je peux y aller, là. Vous venez, en fait, d'expliquer,
là, notre position qu'il existe déjà des processus dans les universités pour
entendre, pour régler ce genre de problématique là. Donc, pour nous, le projet
de loi n'est pas nécessaire. Puis la mise en place de ce conseil-là,
précisément, dans chacune des universités, n'est pas nécessairement parce qu'il
existe déjà des processus pour faire exactement ça. Ça fait que je pense que,
tu sais, ce qu'on veut dire, c'est que c'est réconciliable. La seule chose
qu'on n'avait peur avec le conseil, c'est que ça devienne un conseil seulement,
là, à sens unique de sanctions, par exemple, pour un étudiant ou une étudiante
qui exprimerait son désaccord, puis que la personne enseignante en réponse
dise : C'est ma liberté académique. Puis en voulant m'empêcher... tu sais,
en te plaignant de la façon dont j'aborde un sujet, tu nuis à ma liberté
académique. On va au conseil, puis tu vas être sanctionné. L'idée, c'était
qu'on ne voulait absolument pas que ce conseil-là soit mis en place dans les
universités pour mener à des sanctions contre la communauté étudiante. Mais on
s'entend, là, c'est pour ça aussi qu'on ne voulait pas nécessairement de projet
de loi, c'est parce qu'en soi, il existe des processus déjà dans les
universités, on s'entend.
Mme David : Ce qui est
intéressant dans ce que vous dites, c'est qu'on ne veut pas qu'il soit
sanctionné. Et la dernière question du député de Saint-Jérôme dit :
Qu'est-ce que vous pensez de la sanction de la prof qui aurait été suspendue?
Et donc, des sanctions que le conseil pourrait appliquer, c'est exactement ça,
là. C'est exactement ça. Et ce contre quoi, évidemment, le gouvernement est, il
ne faut pas sanctionner une prof, mais le conseil aurait pour objectif de
sanctionner, entre autres, de réfléchir aux sanctions en étape directe. Tu vas
à la Cour suprême sans passer par les premières instances, si on veut, si on considère
que le Conseil serait la Cour suprême. Alors, comment vous réconciliez cette
histoire, justement, de sanctions? Comment on sanctionne un professeur qui
aurait dit un mot qui aurait rendu inconfortables certains étudiants, par
exemple?
• (10 h 30) •
Mme Lemieux-Bourque
(Alice) : Bien, nous, on ne voyait pas ça en termes de sanction, là,
d'un professeur qui aurait rendu des étudiants inconfortables, mais plutôt,
quand on parle de processus de médiation, c'est de s'asseoir entre le prof, tu
sais, de s'asseoir professeur, étudiant, étudiante, d'essayer d'arriver à un
consensus, puis d'un peu... c'est quelque chose que j'avais beaucoup parlé, là,
à la commission Cloutier, mais un peu que le corps enseignant se place un peu
en position d'apprentissage, tu sais, puis qu'il prenne les commentaires puis
qu'il essaie de s'améliorer pour la suite. Puis peut-être de ne pas...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : ...de
réaborder le même sujet de la même manière, parce qu'on réalise que ça peut
venir toucher certaines personnes de manières différentes. Puis on est
conscients aussi qu'en arrivant dans une classe une personne enseignante ne
peut pas automatiquement savoir tous les impacts de tout ce qu'elle peut dire.
Ce qu'on veut, en fait, c'est que le corps enseignant soit ouvert, en fait, à
recevoir de la rétroaction puis à s'améliorer pour la suite, parce que le
milieu universitaire, parce que la société évoluent et que les opinions
évoluent aussi avec ça.
Mme David : Justement, je
vais vous amener à ce fameux rapport de mission de l'Université de Montréal qui
recommande, et je recommande à tout le monde de le lire parce que ça donne des
belles pistes, ils ont fait un travail colossal, que l'Université de Montréal
protège en tout temps son autonomie. Et c'est les seuls qui parlent de ça, le
projet de loi n'en parle pas, mais je suis très contente qu'ils disent ça par
rapport aux ordres professionnels. On en a parlé avec la ministre la semaine
dernière, les rehaussements, les ci, les ça, les ordres professionnels ont le
goût, des fois, de dire, et le font allègrement, comment... quelles sortes de
programmes faire pour donner accès à l'ordre, bon. Alors, ils le disent :
«protège en tout temps l'autonomie par rapport aux ordres professionnels, aux
instances gouvernementales, aux entités politiques comme aux agents économiques
ou philanthropiques». Parce que la philanthropie, on peut en parler longtemps,
comment ça paye bien, des fois, des professeurs pour faire de la recherche.
«Que l'Université de Montréal, bon,
continue d'assurer la défense, la protection de la libre expression agissant
dans le cadre de leurs fonctions ou d'activités universitaires.» Je comprends
que ça inclut les cours. Après ça, ils parlent d'aborder... «soutiennent la
mise en place de dispositifs de partage de ressources pédagogiques, bon,
pour... tels que des communautés de pratique qui reflètent la diversité des
approches déjà éprouvées par le personnel enseignant pour aborder des thèmes et
des œuvres sensibles», on y est, là, dans la question d'aborder des œuvres
sensibles, mais avec discussion, réflexion. Et ils veulent que l'Université de
Montréal produise un règlement visant à interdire la cyberintimidation, je
pense, c'est important.
Et finalement qu'ils disent, et c'est là
où vous dites la même chose, que «les facultés se dotent d'une ressource dont
elles peuvent déterminer la nature et la composition pour recueillir les
témoignages des personnes ou des groupes qui souhaitent relayer une situation
problématique en lien avec l'exercice des libertés d'expression en contexte
universitaire. Cette ressource se veut un espace de médiation entre les parties.»
J'ai l'impression que c'est votre inspiration, ça.
M. Desroches (Jonathan) : Je
pourrais dire clairement que... peut-être pas une inspiration, mais qu'il y a
des éléments intéressants ici. Puis, quand on regarde ces conclusions-là à l'Université
de Montréal, on se demande aussi, avec le projet de loi actuel, ça va être
quoi, l'interaction entre une future politique et ces conclusions-là qui ont
déjà lieu à l'Université de Montréal. Donc, on se retrouve, là, quand on
parlait d'autonomie institutionnelle puis du milieu universitaire, on se
retrouve un peu à devoir refaire le travail, si on comprend, si l'Université de
Montréal a une politique comme dans toutes les autres universités.
Puis aussi, bon, là, ça, c'est le cas de l'Université
de Montréal, mais ce qu'on voit aussi souvent dans la communauté universitaire,
comme vous le savez, c'est les différentes universités qui s'inspirent l'une de
l'autre. On le voit dans le cadre de d'autres sujets, d'autres politiques.
Donc, est-ce qu'on pourrait voir éventuellement, sans le projet de loi, est-ce
qu'on pourrait voir différentes universités se prononcer dans ce sens-là puis
créer un milieu de discussion comme l'a fait l'Université de Montréal? C'est
certain qu'on le souhaite, mais, pour nous, il n'y a pas lieu d'imposer une
politique par-dessus, par exemple, les travaux, là, qui sont mentionnés par la
députée.
Mme David : Avez-vous l'impression
que chaque université pourrait trouver à l'intérieur d'une... admettons qu'il y
a une exigence législative, qu'il y a une loi, trouver chacune les moyens pour
s'assurer qu'il y a un dispositif aussi, je pourrais dire, intéressant, parce
que je pense que c'est intéressant, ce que l'Université de Montréal a fait, et
que ça pourrait être ça, l'exigence du projet de loi?
M. Desroches (Jonathan) : Je
crois que... puis, bon, je ne vais pas parler pour le BCI, je sais aussi que
vous recevez le BCI plus tard dans la commission, mais c'est certain qu'il y a,
comme je mentionnais plus tôt, des éléments, là, qui sont propres à chaque
université dans les structures.
Puis, en parlant peut-être du BCI, je
tiens aussi à mentionner que c'est assez rare, là, qu'on voit le milieu
universitaire autant unanime sur un élément, sur un projet de loi, ou contre
quelque chose pour des raisons différentes, d'avoir les profs, les étudiants,
les étudiantes et les administrations universitaires qui, somme toute, sont
insatisfaits d'un élément, là. Ça arrive environ tous les samedis de pleine
lune d'année bissextile, là. Donc, je pense que c'est important de le noter
aussi, là.
Mme David : Oui,
effectivement, je ne sais pas comment on va s'en sortir parce que vous êtes
seulement les premiers, mais ça va s'accumuler, là, toutes les objections, les
propositions. Alors, c'est assez vertigineux, et je prends la mesure, moi, en
tout cas, et je pense, mes collègues...
Mme David : ...de
l'importance de ce projet de loi là, qui, malgré le faible nombre d'articles,
peut changer vraiment, comme je dis, la Constitution et l'essence même de la
mission universitaire.
Alors, je ne sais pas combien de temps il
me reste, alors j'aimerais vous entendre sur la crainte qu'un étudiant, avec ce
processus-là, puisse lui-même faire l'objet de plainte par un professeur à ce
conseil.
M. Desroches (Jonathan) : Sur
la crainte qu'une personne étudiante puisse avoir accès ou ne pas avoir accès,
c'est ça?
Mme David : ...être l'objet
d'une plainte par un prof qui dit : Il m'a traumatisé. Je n'ose plus
parler.
M. Desroches (Jonathan) : Sur
la liberté universitaire en tant que tel, pour nous, ça nous ramène au fait que
ce n'est pas à l'Assemblée nationale de définir s'il doit y avoir des
politiques ou non. Le milieu universitaire, comme je le mentionnais, ça fait...
comme plusieurs ici le savent très bien, ça fait des décennies que ces
éléments-là sont discutés, évoluent dans le milieu universitaire, et on pense
qu'on peut laisser au milieu universitaire le soin de continuer cette
discussion-là.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Merci beaucoup. Maintenant, je cède la parole au député
d'Hochelaga-Maisonneuve.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux. D'abord, bravo pour le mandat qui se termine.
Beaucoup de beau travail cette année. Je vous souhaite du succès dans les
parcours qui vous attendent respectivement.
Première question : Vous avez été
déposer un mémoire à la commission Cloutier. Avez-vous été consultés en amont
de la rédaction de ce projet de loi?
M. Desroches (Jonathan) : De
la rédaction du projet de loi... On a eu l'information qu'il y avait un projet
de loi, là, dans les dernières semaines, là, je ne sais plus exactement, là,
mais...
M. Leduc : Il n'y a pas eu de
point de rencontre entre vous et le cabinet?
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Oui,
oui. On a rencontré le cabinet avant.
M. Leduc : Parfait. Parfait.
Bonne nouvelle. Tout ce qu'on entend sur les enjeux qui créent du remous
alentour de la liberté académique, on dirait que c'est toujours une question de
sciences humaines. Est-ce qu'à votre connaissance il y a des enjeux aussi
brûlants en génie, en arts, en gestion? Est-ce que c'est une erreur de penser
que c'est juste un problème de sciences humaines?
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Bien,
le problème de la liberté académique, en fait, si on parle en termes de mots
utilisés dans les cours, c'est sûr qu'on retrouve plus ça en sciences humaines.
Mais madame David en a parlé tantôt, là, que, tu sais, la liberté académique,
ça peut aussi être les ordres professionnels ou les philanthropes. Ça, c'est
quelque chose qu'on peut retrouver beaucoup en génie, par exemple, ou en
pharmacie, c'est sûr. Ça fait que c'est des enjeux... Je dirais que les enjeux
peuvent être différents, oui, en fonction des programmes.
C'est sûr que, sur l'utilisation, par
exemple, de certains termes plus litigieux, je dirais, que c'est assez rare
que... Tu sais, si on utilise ça dans un cours de génie, c'est assez clair que
ça n'a pas sa place, alors que je peux comprendre qu'il y a plus de débats, en
fait, sur l'utilisation de certains mots en sciences humaines.
M. Leduc : Et les éléments
que vous faisiez référence, donc, en pharmacie, est-ce que, d'après vous, ce
projet de loi là pourrait contribuer à les aider?
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Je
n'ai pas l'impression... En fait, je n'ai pas l'impression que ça ne touche à
rien de ce qui est extérieur à, en fait, l'utilisation de certains mots ou de
certains termes dans la communauté, par exemple.
M. Leduc : Est-ce que, dans
un même état d'esprit, tout ce qui se passe à McGill, en ce moment, avec
l'association étudiante puis la question palestinienne, ce qu'on a connu avec
le projet Laurentia, à l'Université Laval, ou la Chaire de recherche sur la laïcité
que la CAQ avait un peu orientée... Ça aussi, donc, si je comprends bien, ça ne
sera pas... le projet de loi, ça ne traite pas de ces enjeux-là non plus.
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Bien,
en tout cas, certainement pas sur le cas à McGill, là, que vous parlez, avec
l'association étudiante, parce qu'en fait les associations étudiantes ne sont
pas bénéficiaires de la liberté académique, là, selon la définition qu'il y a
dans le projet de loi.
La Présidente (Mme D'Amours) : Dix
secondes.
M. Leduc : Oui, 10 secondes.
On va vous souhaiter une bonne journée.
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé pour une période de 2
minutes 45 secondes.
Mme Perry Mélançon : Merci,
Mme la Présidente. Donc, c'était, je pense, très éclairant de connaître votre
position sur le projet de loi. C'est sûr qu'on est effectivement contre
l'intervention puis l'ingérence, là, de l'État dans les affaires internes des
universités. Mais je pense que d'avoir une loi qui sécurise vraiment la liberté
académique, moi, c'est là ou je me rejoins dans le discours, d'une certaine
façon, là, du gouvernement. J'ai quand même émis aussi certains bémols à la
lecture du projet de loi.
Mais, si une université ne se conforme
pas, justement, à la loi, selon vous, de quelle manière est-ce qu'on peut
amener l'université à se conformer sans que le gouvernement s'ingère dans ses
affaires?
• (10 h 40) •
M. Desroches (Jonathan) : On
revient à la situation actuelle au Québec. Puis il n'y a pas une avalanche
d'éléments, là, qui ont eu lieu, comme je le mentionnais dans mon...
M. Desroches (Jonathan) : ...d'un
ou deux peut-être éléments qui ont été fortement médiatisés. Pour nous, ces
éléments-là ne justifient pas un projet de loi. Puis ça fait des années, là, ça
fait des années que les universités existent au Québec sans projet de loi pour
encadrer ou définir la liberté académique, et on pense qu'on peut très bien
continuer dans ce chemin-là.
Mme Perry Mélançon : Bien,
c'est sûr qu'on a vu des avancées. J'aimerais peut-être vous entendre sur les
impacts que ça a eu de se doter de mécanismes pour sanctionner, par exemple,
quand on est dans le harcèlement sexuel, dans les universités ou, tu sais,
toute la question des violences à caractère sexuel. Pourquoi vous ne voyez pas
ça, justement, du même oeil, finalement? Peut-être...
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Ah!
pour nous, c'est assez clair que ce n'est pas la même chose. Parce que, tu
sais, la loi pour prévenir et combattre les violences à caractère sexuel, on
parle de protéger l'intégrité physique de la communauté universitaire, dans
l'autre, on parle de façons d'aborder un sujet dans un cours. Pour nous, c'est
assez clair qu'il y en a un que c'est important qu'on légifère, qu'on encadre
puis qu'on s'assure que les gens soient protégés. De l'autre côté, bien là, on
pense que les universités sont capables d'avoir cette discussion-là puis de
développer, en fait, des mécanismes vraiment appropriés pour traiter de ça.
Parce que, comme Jonathan, il dit depuis tantôt : La liberté académique,
c'est traité depuis toujours dans les universités, quand même.
Mme Perry Mélançon : Mais
est-ce que c'est valorisé? Est-ce qu'au sein des universités on le valorise ou
est-ce qu'on aurait besoin, peut-être, d'être plus dans la prévention,
l'intervention en cas de graves problèmes, tu sais, qu'on soit dans le punitif,
mais qu'il y ait aussi des mécanismes constructifs, là, de prévention? Vous ne
voyez pas là une opportunité que la liberté académique soit vraiment valorisée
au sein des institutions?
La Présidente (Mme D'Amours) : En
cinq secondes.
Mme Lemieux-Bourque (Alice) : Bien,
on est très ouverts à la promotion de la liberté académique, mais ça pourrait
être fait, entre autres, par un énoncé de principes qu'on encourage toute la
communauté à lire, là.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants afin d'accueillir nos prochains
témoins. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 42)
(Reprise à 10 h 50)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux, et je souhaite la bienvenue...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...aux
représentants de la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du
Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre
exposé. La parole est à vous.
Mme Quesnel (Caroline) : Bonjour.
Alors, je vais commencer par me présenter, puis je présenterai un peu plus tard
mes deux collègues. Alors, je m'appelle Caroline Quesnel, je suis présidente de
la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec. C'est
une des huit fédérations affiliées à la CSN. Une des particularités de la
FNEEQ, c'est qu'elle est l'organisation syndicale la plus représentative en
enseignement supérieur, puisque nous représentons 45 syndicats des cégeps,
à savoir 85 % des profs de cégep, ainsi que 80 % des personnes
chargées de cours, tuteurs, tutrices au Québec dans dix universités différentes.
Je dirais d'emblée la question de la
liberté académique revêt une importance particulière pour les personnes
chargées de cours que nous représentons, notamment en raison de leur statut, de
la précarité qui caractérise ce statut-là et qui rend les personnes chargées de
cours vulnérables aux attaques de leur propre liberté académique. Je
rappellerai que les cas médiatisés depuis un an touchaient en grande majorité
des personnes chargées de cours ou des enseignantes ou des enseignants
contractuels. La FNEEQ est favorable à l'introduction d'une loi. Mais, si nous
le sommes, c'est en bonne partie en raison de l'incurie, de la négligence des
directions universitaires d'avoir mis... en fait, de ne pas avoir mis en place
des mécanismes pour protéger la liberté académique. Et, lorsqu'il y en a,
d'avoir fait preuve de laxisme dans l'application.
Je le dirais, cela dit, qu'à nos yeux
l'État et les entreprises privées constituent des menaces bien plus sérieuses
et réelles à la liberté académique. Et, en conséquence, nous estimons que
l'intervention législative, le projet de loi devrait être limité et
circonscrire de manière très précise des interventions et des balises.
Enfin, le projet de loi n° 32, tel
que déposé par la ministre McCann, est insatisfaisant à nos yeux, et nous
demandons aux membres de la commission d'y apporter des amendements. Et c'est
ce que présenteront mes deux collègues. Alors, d'abord, Christine Gauthier, qui
est vice-présidente responsable du regroupement universitaire à la FNEEQ. Elle
est aussi chargée de cours au département des fondements et pratiques en
éducation à l'Université Laval et chercheuse, ainsi que Benoît Lacoursière, qui
est secrétaire général et trésorier de la FNEEQ. Il est aussi enseignant de
sciences politiques au cégep de Maisonneuve. Je leur cède la parole.
M. Lacoursière (Benoît) : Merci.
Donc, à titre de première recommandation que nous faisons à l'Assemblée, nous
recommandons d'élargir la portée du projet de loi aux établissements collégiaux
publics et privés. Il s'agit d'établissements d'enseignement supérieur et les
réalités d'enseignement et même de recherche, elles sont très similaires à
celles des universités. À l'article 3 du projet de loi, nous recommandons
également d'utiliser la définition complète et internationalement reconnue de
la liberté académique, c'est-à-dire celle qui est prévue à l'article 27 de
la recommandation de l'UNESCO. En ce sens, il s'agit ici de donner suite à une
recommandation formulée par la commission Cloutier, d'autant plus que, nous
l'avons dit, l'État et parfois même les directions locales peuvent constituer
des menaces à la liberté académique.
En lien avec cette recommandation, nous
recommandons aussi d'ajouter au projet de loi la précision que les obligations
auxquelles un bénéficiaire de la liberté académique est tenu en vertu de tout
instrument régissant ses conditions de travail, par exemple le devoir de
loyauté, ne devraient pas être interprétées ou appliquées de façon à
compromettre ou à restreindre l'exercice de la liberté académique, et que les
tribunaux doivent, dans l'interprétation et l'application de ces obligations,
donner plein effet à la liberté académique. Nous avons assisté, au cours des
dernières années, à des invocations abusives du devoir de loyauté. De plus, et
il nous semble important...
M. Lacoursière (Benoît) : ...à
souligner que dans le cas des services publics, comme les universités et les
cégeps, le devoir de loyauté prévu au Code civil doit s'appliquer avec une
grande souplesse. À qui s'adresse cette soi-disant loyauté? À l'établissement,
à sa direction ou à la nature même du service public qui est représenté? On ne
doit pas voir le devoir de loyauté à travers le même prisme que celui d'une
entreprise privée, par exemple.
Comme quatrième recommandation, nous recommandons
de renforcer l'obligation imposée aux établissements d'enseignement supérieur
de prendre fait et cause pour les membres de la communauté qui sont pris à
partie par des tiers pour avoir exercé leur liberté académique, que ce soit en
raison de leur recherche ou de leur enseignement. Les établissements doivent
avoir l'obligation de soutenir les membres de leur communauté dès qu'ils sont
l'objet de recours judiciaires afin d'éviter, par exemple, une autre affaire
Mayer. L'état actuel du droit n'est pas stable à cet égard, d'autant plus que
les directions d'établissement hésitent à soutenir leurs chercheurs et leurs
chercheuses face à des poursuites.
Mme Gauthier (Christine) : Alors,
bonjour aux membres de la commission. Alors, pour l'article 4, la FNEEQ
salue l'obligation faite aux établissements de se doter d'une politique
particulière sur la liberté académique, tel que recommandé par la commission
Cloutier. Pour nous, c'est une exigence qui va permettre de mieux protéger les
personnes chargées de cours face à des plaintes qui concernent la liberté
académique. Puis également ça permet d'uniformiser les protections relatives à
la liberté académique pour l'ensemble des universités puis éviter les
disparités de traitement. Tout de même, pour l'article 4, certaines
précisions nous apparaissent importantes sur le libellé des articles, et il est
important aussi que ce soit clair que le mécanisme de traitement des plaintes
compris dans les politiques élaborées par les établissements se distingue des
processus qui peuvent mener à des mesures disciplinaires parce que ce sont des
processus qui ne sont pas toujours impartiaux puis qui accordent une très large
autonomie aux directions d'établissement plutôt qu'à la collégialité entre les
pairs. Et la collégialité est un corollaire important à la liberté académique.
Alors, notre recommandation 5. À
l'article 4, paragraphe introductif, la FNEEQ recommande de préciser que
la politique sur la liberté académique dans chaque établissement soit non
seulement consultée par l'ensemble des membres de la communauté universitaire,
mais soit aussi adoptée de façon collégiale dans les instances universitaires
ou de cégeps. Notre recommandation 6, à l'article 4, alinéa un,
pardon, recommande d'indiquer clairement quels sont les groupes et les
associations devant faire partie du conseil visé au paragraphe 1° pour affirmer
notamment la place des personnes chargées de cours au sein de ce conseil de
manière représentative à leur contribution à l'enseignement universitaire. Et
nous tenons à préciser que c'était d'ailleurs le cas dans la loi sur les
violences à caractère sexuel pour pouvoir assurer, là, une représentation de
plusieurs.
Alors, notre recommandation 7 concerne
l'article 4, l'alinéa quatre. Alors, nous recommandons d'ajouter la
responsabilité de l'établissement de porter à la connaissance de chaque nouveau
membre de la communauté universitaire la politique adoptée sur la liberté
académique.
À l'alinéa cinq du même article, nous
recommandons de préciser ou d'ajouter que ces ressources et outils pédagogiques
soient disponibles au sein des universités et des collèges pour soutenir les
bénéficiaires de la liberté académique qui sont tenus d'aborder des sujets
potentiellement sensibles.
La recommandation 9. On propose d'ajouter
un nouvel article qui préciserait que les membres de la communauté étudiante
bénéficient de la liberté d'apprendre, ce qui comprend notamment le droit de
choisir ses cours en fonction des programmes et de son domaine d'études, de
recevoir une formation de qualité et de participer aux échanges en classe.
La recommandation 10 concerne
l'article 4, l'alinéa cinq sur la question des traumas-avertissements.
Nous sommes d'avis qu'on ne doit pas obliger les enseignantes et enseignants de
voir inscrire des traumas-avertissements dans un plan de cours puis qu'une
telle obligation serait difficilement applicable. Hein, c'est difficile de
prévoir comment un contenu académique peut créer, par exemple, des sentiments
douloureux. Cela dit, nous sommes aussi d'avis que ces éléments doivent
appartenir aux enseignantes et enseignants et ne doit pas amener à légiférer,
là, sur cette question. Donc, on recommande de retirer du projet de loi cette
disposition relative aux traumas-avertissements.
La recommandation 11, donc, l'ajout
d'un nouvel article pour ajouter aux éléments de contenu des dispositions
relatives à la protection de la liberté académique en lien avec le financement
de la recherche. Les enjeux relatifs à la recherche sont aussi importants à
bien aborder dans le cadre de ce projet de loi là.
• (11 heures) •
Et enfin, notre dernière recommandation,
12. Elle porte sur l'article 6, que nous invitons à abroger ou à
modifier...
11 h (version non révisée)
Mme Gauthier (Christine) : ...considérablement,
nous jugeons que ça ouvre une porte inquiétante à l'ingérence de l'État dans
les politiques des universités. Nous estimons que le gouvernement doit s'en
tenir à émettre des conditions générales qui encadrent les devoirs et
obligations des établissements, et non pas en fixer le contenu normatif. Donc,
pour conclure, en quelques secondes, la FNEEQ est en accord avec le principe d'une
loi comme recommandé par la commission Cloutier. Mais le projet de loi doit
être amendé.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant commencer notre
période d'échanges, et je cède la parole à Mme la ministre pour une durée de 16
min 30 s.
Mme McCann : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je veux vous saluer vraiment. Vraiment très contente que
vous participiez aux consultations. Vous êtes au cœur évidemment des
bénéficiaires de la liberté universitaire telle qu'on en parle, là, dans le
projet de loi. Donc, votre participation est absolument essentielle.
J'aurais beaucoup de questions, mais je
vais m'en tenir à quelques-unes, étant donné le temps que nous avons... D'ailleurs...
Évidemment, je reconnais, là, que vous êtes... vous l'avez dit deux ou trois
fois, que vous êtes en accord avec le projet de loi, mais vous avez évidemment
des demandes au niveau d'amendements potentiels, des changements que vous
aimeriez au projet de loi. Et j'accueille ça évidemment avec ouverture.
Évidemment, on va en discuter, puis on va réfléchir là-dessus dans les
prochains jours. Mais, effectivement, c'est un exercice important. Donc ma
première question, et ce n'est peut-être pas dans l'ordre chronologique, là,
des demandes au niveau des articles que vous nous faites, c'est vraiment au
niveau du fonctionnement, au niveau du fonctionnement parce que vous connaissez
très bien le terrain, comment ça se passe. Je veux simplement dire que, tout à
l'heure, quand on a rencontré l'Union étudiante, je mentionnais le conseil,
hein, qu'on peut faire une plainte au conseil. Mais je clarifie tout de suite
que les situations qui peuvent se passer dans les établissements, ils vont être
réglés aussi par les départements. Alors, ce fonctionnement-là peut continuer.
Si l'université juge que c'est le fonctionnement qu'elle veut se donner, hein,
il y a une autonomie de ce côté-là, mais il y a un conseil qui est responsable
aussi de traiter les plaintes. On peut dire que si le département n'a pas
réussi à résoudre la situation, on va le dire comme ça, dans le fonctionnement,
donc le conseil est très important dans ce sens-là. Donc, au niveau du
fonctionnement, comment vous voyez l'apport du projet de loi? Comment ça va
bonifier le fonctionnement dans les universités, dans les établissements?
Mme Gauthier (Christine) : Donc,
je peux peut-être commencer une réponse, mes collègues pourront compléter.
Bien, c'est clair qu'effectivement il y a déjà des mécanismes qui existent
présentement pour protéger la liberté universitaire ou pourra traiter les
plaintes, qu'elle soit étudiante pour travailler de concert entre les
enseignants et les étudiants si on parle du volet enseignement. Mais c'est
clair qu'un des problèmes pour lesquels il est urgent d'agir, c'est que, s'il y
a une plainte, comment on s'assure qu'il n'y a pas un traitement disciplinaire
de ce dossier-là et que ce soit justement traité de façon académique, c'est-à-dire
qu'on puisse, tu sais, discuter de la situation et évaluer s'il y a vraiment eu
effectivement un manquement au niveau des contenus enseignés, donc qui n'est
pas un problème de comportement, mais qui est vraiment un problème de...
comment dire, d'interprétation différente par rapport à un contenu qui est
amené par un enseignant versus les étudiants. Donc, le conseil à ce niveau-là,
peut effectivement écouter les... advenant qu'il n'y ait pas de règlement au
niveau du département, peut entendre les parties pour évaluer si effectivement
c'est un enjeu de liberté académique et, à ce compte-là, le protéger des
bénéficiaires de cette liberté académique là plutôt que de prendre le chemin
des voies disciplinaires ou administratif qui ne nous semble pas approprié dans
ces circonstances-là. On a vu dans dans l'affaire Lieutenant Duval une
suspension qui n'aurait pas dû avoir lieu, qui aurait dû être... peut avoir une
défense, finalement, de sa situation face à des pairs en toute collégialité
pour justifier, finalement, les éléments d'enseignement amenés dans le cadre du
cours pour lequel elle avait à intervenir. Donc, je m'arrêterais là-dessus.
Mme McCann : Merci, madame
Gauthier. Je veux vous amener également sur ce que vous proposez en regard du
devoir de loyauté à l'établissement. Alors, j'aimerais que vous élaboriez s'il
vous plaît, parce que c'est une question quand même complexe et importante...
Mme McCann : ...toute cette
question de devoir de loyauté versus la liberté universitaire. Pourriez-vous
élaborer davantage sur la proposition que vous nous faites, et peut-être, nous
illustrer concrètement, là, le vécu, là, dans les établissements?
M. Lacoursière (Benoît) : Oui,
bien sûr. Écoutez, si je peux peut-être donner quelques exemples, là, il y a...
il doit y avoir une protection, là, contre la censure institutionnelle, puis
souvent, ce qu'on a pu constater, les directions d'établissement vont se servir
de l'obligation générale du devoir de loyauté pour avoir un effet dissuasif
pour s'exprimer sur, par exemple, des enjeux de politique locale. Je vais
donner un exemple. Une enseignante est convoquée en réunion disciplinaire parce
qu'elle a critiqué l'établissement d'un comptoir de malbouffe à la cafétéria.
Un enseignant qui critique une intention de la direction de modifier le
fonctionnement ou la composition de la commission des études est suspendu de
ses fonctions. Ce sont des... Et en ayant recours aux mécanismes
disciplinaires, en disant : Tu dois avoir une loyauté à la direction. Les
enseignants, les enseignantes qui, par exemple, dans un contexte de grève
étudiante, se prononcent publiquement sont rabroués par certaines directions.
Puis là-dessus, bien, ce qu'on voit, c'est
que les décideurs, les juges ont tendance à ne pas donner plein exercice ou
plein pouvoir à la liberté académique ou, même, à la liberté d'expression, qui
est pourtant prévue aux chartes des droits et libertés, dans leurs décisions.
On cite une décision qui concerne le Syndicat des professeurs de l'Université
du Québec en Outaouais, où l'arbitre a même dit que, même si c'est dans la Loi
sur l'UQ, la liberté académique, bien, le devoir de loyauté est aussi dans le
Code civil, donc c'est égal, donc je donne préséance au devoir de loyauté. Il
faut qu'il y ait une intervention législative. Même, à l'origine, nous, on
aurait souhaité un amendement à la Charte québécoise des droits et libertés
pour affirmer plus fortement le droit à la liberté académique. Donc, c'est pour
ça qu'il y a une nécessité que l'Assemblée nationale légifère pour vraiment
accorder une supériorité à la liberté académique sur d'autres obligations, là,
du droit du travail.
Mme McCann : Bien, merci, M.
Lacoursière. Puis la question, là... vous y fait allusion... la liberté
universitaire versus la liberté d'expression, ça, c'est une grande, grande
question. Peut-être, je vous demanderais de commenter là-dessus, rapidement,
parce que je voudrais donner du temps aussi à mes collègues pour vous poser des
questions. Pouvez-vous commenter rapidement sur liberté d'expression versus
liberté universitaire, avec ce que vous venez de dire, là, nous illustrer
davantage?
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
la liberté d'expression est l'une des composantes de la liberté académique ou
de la liberté universitaire, sauf que la liberté d'expression comme telle, elle
est reconnue à la charte québécoise puis à la charte canadienne des droits.
Mais il semblerait que les décideurs n'y accordent pas le poids qu'elle devrait
avoir.
Mme McCann : Mais le projet
de loi dont on parle, évidemment, on le sait, là, c'est sur la liberté
universitaire, académique et universitaire. Et comment délimiter cette liberté
académique universitaire? Vous avez donné quelques exemples. Dans le projet de
loi, on parle dans son champ d'activité. Est-ce que vous avez des commentaires
là-dessus?
Mme Gauthier (Christine) : Bien,
en fait, si vous me permettez, il faut être capable d'élargir, justement, cette
notion de champ d'activité. Les enjeux universitaires sont souvent
transdisciplinaires. Elle doit permettre de pouvoir juger, par exemple, de
l'intervention d'une entreprise versus la qualité de l'air, en tout respect,
dans le cadre de son travail universitaire, d'être capable de critiquer les
institutions, de critiquer son établissement, de le faire sans avoir peur de se
retrouver censuré par l'institution. Donc, la définition de l'UNESCO, elle
prévoit ces possibilités-là de critiquer, même, les connaissances que nous
avons de tous les enjeux scientifiques, phénomènes sociaux, etc. Donc, de nous
en priver ou en priver... liberté académique, ce serait vraiment un recul
majeur, et c'est pourquoi, nous, on invoque, là, un amendement sur la
définition qui est actuellement prévue dans le projet de loi, pour l'élargir à
ce qui est normalement, là, prévu partout au niveau international.
Mme McCann : Vous avez fait
beaucoup de propositions. Si je vous demandais quelles sont les priorités dans
vos propositions? Parce que vous en avez fait 12, là. Quelles sont les
priorités?
• (11 h 10) •
Mme Gauthier (Christine) : Alors,
si vous permettez de refaire notre conclusion, les amendements les plus
majeurs... C'est clair que la liberté académique doit inclure tous les aspects
reconnus par l'UNESCO, pour la définir et la protéger. Alors, pour nous, il
manque des pas importants. Il faut absolument rendre le droit à la liberté
académique supérieur aux autres obligations juridiques...
Mme Gauthier (Christine) : ...des
enseignantes et des enseignants, comme l'a rappelé mon collègue, la politique
doit prévoir quels sont les groupes d'acteurs qui doivent composer le conseil
au comité pour assurer une représentation juste des groupes visés puis une
collégialité. Et enfin l'article 6, là, doit absolument être abrogé ou modifié
considérablement pour éviter l'intervention de l'État dans les politiques
institutionnelles.
Mme McCann : Bien, écoutez,
je vous remercie beaucoup. Et, Mme la Présidente, je vais passer la parole, je
pense, là, je regarde l'heure, là, à mes collègues et je la reprendrai si
jamais il y a encore du temps.
La Présidente (Mme D'Amours) : Parfait.
Mme la députée de Charlevoix-Côte-de-Beaupré, à vous la parole.
Mme Foster : Merci. Il reste
combien de temps?
La Présidente (Mme D'Amours) : 6
min 30 s.
Mme Foster : Parfait. J'aurai
une ou deux questions. Juste avant vous... Bien, d'abord, bonjour. Merci pour
votre mémoire et votre apport à la commission. Juste avant vous, l'Union
étudiante du Québec, dans son mémoire, a proposé que l'article 4 du projet de
loi puisse mentionner que... comment je pourrais l'exprimer, qu'on puisse
recevoir les plaintes envers le contenu d'un cours. Donc, je voulais savoir
qu'est-ce que vous pensiez de cette proposition-là. Je serais curieuse
d'entendre votre point de vue, là, comme chargé de cours ou comme professeur,
là.
Mme Gauthier (Christine) : Bien,
nous, on a défendu, dans le cadre d'un mémoire précédent, l'importance de la
discussion collégiale en classe avec les étudiants, de pouvoir, en tout
respect, là, échanger. Puis c'est certains que ce sont des éléments qui peuvent
faire progresser les débats sociaux qui peuvent être amenés, des divergences
d'opinions aussi, mais c'est le propre d'un milieu universitaire, que
d'échanger autour d'enjeux complexes qui ne font pas l'unanimité, mais qui
méritent le débat, évidemment, en tout respect des droits prévus à la charte et
qui ne doit pas contenir d'insulte, ou d'injure, ou de discrimination dans les
propos. Mais il y a beaucoup de contenus de cours qui peuvent, comment dire,
créer des situations difficiles pour certains étudiants, il y a des contenus de
cours qui peuvent parler, par exemple, du harcèlement sexuel en milieu de
travail, sur des enjeux psychologiques, sur des enjeux de vaccination,
d'obésité. Donc, ce sont un ensemble de contenus de cours qui peuvent faire
l'objet de difficultés d'interprétation ou de ressenti, alors c'est clair que
ce qu'on évite... Nous, la FNEEQ, c'est le débat en classe, de soutenir des
interventions qui permettent de faire réfléchir dans un esprit scientifique et
académique, le débat. Bien, ce que je vous répondrais d'emblée.
Des voix : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais céder maintenant la parole au député de Saint-Jérôme.
M. Chassin :Bonjour. Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous. Je vais
essayer de poser deux questions assez courtes. D'abord, pour rebondir sur la
question de ma collègue, il y avait aussi une crainte, dans le fond, exprimée
par l'UEQ de dire : La liberté académique et la liberté d'expression,
est-ce que ça va vouloir dire... dans le fond, que, si on garantit la liberté
d'enseigner, par exemple, un enseignant puisse... puis là, que ce soit un
professeur ou un chargé de cours, puisse ne pas respecter la plan de cours.
Est-ce que pour vous, ça, c'est une crainte, que la liberté d'enseigner
permette, finalement, de sortir du plan de cours complètement?
Mme Gauthier (Christine) : Bien,
vas-y, Benoît.
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
ce n'est pas à coup de licences ou d'interdits qu'on gère la liberté
académique, hein? Moi, je n'ai pas de... on parle de professionnalisme aussi,
on agit en tant que professionnel, puis c'est... je pense qu'il faut faire
confiance aux gens, tant aux enseignants, puis aux enseignantes, puis aux
étudiants, puis étudiantes, qui peuvent échanger sur le contenu des cours.
M. Chassin :...je pense comme vous, on a des libertés, on a des
devoirs, une responsabilité aussi. Puis, par curiosité, vous parliez du droit
d'apprendre. Le deuxième considérant, dans le projet de loi, parle
spécifiquement d'un environnement propice à l'apprentissage. Vous, vous le
mettriez comme le droit d'apprendre de plus. Ce n'est pas suffisant le
considérant pour vous?
Mme Gauthier (Christine) : Pour
nous, c'est important que les étudiants... on identifie clairement les
étudiants comme étant aussi des bénéficiaires de la liberté académique, que ce
soit dans le cadre de leur projet de recherche, que ce soit dans le cadre des
échanges que nous avons dans les salles de cours, donc... Et c'est clair que,
dans cette optique-là, c'est important de l'ajouter, c'est important de
considérer, tu sais, l'ampleur de la liberté académique et de ne pas la
restreindre à certains bénéficiaires.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Nous revenons maintenant à la ministre. Mme la ministre, il vous reste 2 min 20
s.
Mme McCann : Oui. Bien, je suis
très contente de pouvoir revenir puis vous poser une question sur l'équité, la
diversité et l'inclusion...
Mme McCann : ...parce que dans
notre échange, là, avec les étudiants, c'est une préoccupation pour eux. Et je
veux vous entendre, vous, là, de votre expérience, là, vous êtes sur le
terrain, comment concilier, de votre point de vue, tout ce qui tourne autour de
l'équité, la diversité, l'inclusion et la liberté... versus la liberté
académique universitaire? Comment vous le voyez, là, concilié? Bon, moi, dans
mon point de vue, il y a des politiques, hein, dans toutes les universités, sur
le... mais là on parle d'un projet de loi sur la liberté académique
universitaire. Vous, de votre point de vue, comment concilier les deux?
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
écoutez, on a fait plusieurs suggestions. On a tenu plusieurs propos sur
l'équité, la diversité, l'inclusion, là, dans notre mémoire à la commission,
puis aussi à la commission Cloutier. Je pense que ce n'est absolument pas
impossible de concilier les deux. Il faut le reconnaître, il y a encore des
efforts substantiels à faire en matière d'équité, diversité et d'inclusion dans
les universités, dans les collèges. Ne serait-ce que, par exemple, pour ce qui
est de la représentation, là, en emploi. On pense, on sait qu'il y a un plafond
de verre, là, dans les universités, certains diraient même un plancher collant.
Donc, il y a des efforts substantiels pour
que les étudiants et les étudiantes aussi se sentent peut-être plus accueillis,
je dirais, dans l'université. On a parlé qu'il doit y avoir des mesures de
soutien, des ressources disponibles pour les enseignantes, pour les enseignants
pour aborder des sujets sensibles qui sont assez souvent liés à l'équité, la
diversité, l'inclusion auxquels, donc, les enseignants, les enseignantes
pourraient avoir affaire.
Peut-être dernière chose, puis on revient
à ce qu'on a dit il faut nourrir les espaces de dialogue et de débats et de
discussions dans les universités entre les différents groupes, quels que soient
ces groupes, pour permettre, là, une meilleure harmonie dans les
établissements. Mais, disons-le, ça se passe quand même généralement bien dans
nos établissements. Il y a des dérives, il y a des éléments qui attirent
l'attention mais, dans l'ensemble, ça va bien.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de
Marguerite-Bourgeoys pour une période de quinze minutes.
Mme David : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à vous tous, que j'ai eu l'occasion de
rencontrer en différentes circonstances. Juste pour continuer un peu sur la
diversité, l'inclusion, l'équité, ça peut être autant un étudiant qui se sent
heurté par des propos qui toucheraient à quelque chose de sa propre diversité
ou d'inclusion. Mais ça peut aussi donner lieu à ce qui est arrivé à
l'Université Laval, une chaire de recherche où il ne faut pas être blanc de
souche, de sexe masculin. Alors vous voyez comme c'est complexe, parce que ce
qui est bon pour pitou est bon pour minou. Alors là, on est dans deux
situations où on s'insurge énormément sur la question de l'affichage de postes
en chaires de recherche, de candidatures. Puis en même temps, on veut protéger
des étudiants qui seraient eux-mêmes... qui se diraient victimes de ça.
Donc, comme je le répète depuis ce matin,
nous ne sommes pas dans un projet de loi simple. Ce sont des contextes et des
enjeux extrêmement complexes. Et vous le dites d'ailleurs. Je répète la phrase
que vous dites dès la page trois : Nous sommes d'avis que l'état, donc on
y est, là, ici, c'est l'État, et les entreprises privées, et puis Dieu sait
qu'on en parle beaucoup dans les universités, surtout en recherche,
représentent des menaces bien plus sérieuses et réelles la liberté académique,
dans le fond, que l'écurie, comme vous dites, des directions d'établissement.
En conséquence, nous estimons que l'intervention législative doit être minimale
et circonscrite. Alors, est-ce que vous trouvez qu'elle est minimale et circonscrite,
cette intervention du projet de loi n° 32?
• (11 h 20) •
Mme Gauthier (Christine) :
Alors, je peux peut-être commencer. L'intervention, elle mérite, on l'a
mentionné, là, elle mérite des amendements pour être certain qu'on, justement,
n'empiète pas sur les politiques institutionnelles. Donc, on a parlé de
l'article six, mais dans l'ensemble, il y a des précisions importantes et il
faut absolument s'assurer de bien baliser la définition de la liberté
académique. Mais dans l'ensemble, effectivement, la majorité des articles, là,
sont plus dans l'encadrement des devoirs et des obligations des établissements
et doivent s'en tenir à ces éléments-là, c'est-à-dire soutenir l'importance
d'une politique claire, soutenir des ressources pour les bénéficiaires de la
liberté académique...
Mme Gauthier (Christine) : ...bien
encadrer de quoi on parle quand on parle de liberté académique. Et, pour nous,
ça répond, justement, à ce qui est bien circonscrit. Là ou on voit des...
J'avais entendu un arrêt. Je m'excuse. Alors là où on voit.... là où ça empiète
puis c'est plus problématique, c'est : Est-ce qu'on peut s'ingérer dans le
contenu des politiques en indiquant les traumavertissements ou encore en
obligeant, là, la ministre à avoir un certain pouvoir sur le contenu de ces
politiques- là? Nous, on appelle à retirer ces éléments-là.
Mme David : Vous ajoutez, à
la page 4, vers la fin de votre introduction : «La posture
gouvernementale insiste abusivement sur certaines dérives en particulier plutôt
que sur l'ensemble des menaces, instrumentalisant de façon excessive des
revendications étudiantes dites wokes.» Alors, vous concluez : «Le projet
de loi, tel que déposé, risque fort de rater la cible et nous apparaît ainsi
inacceptable en l'état.» Alors, en quoi vous trouvez que c'est trop restrictif
et ciblé sur certains événements médiatisés plutôt que sur l'ensemble des
dimensions qui existent depuis des siècles sur la question de la liberté
académique?
M. Lacoursière (Benoît) : Si
je peux me permettre, c'est ce qu'on a dit puis c'est l'essentiel des premiers
amendements qu'on propose, on veut retenir... on appelle à retenir la
définition complète de l'UNESCO. Puis ce que, nous, on dénonce depuis de
nombreuses années, c'est les invocations abusives du devoir de loyauté, c'est
du financement étatique ou privé dirigé vers des fins particulières, avec des
contraintes, par exemple, sur la possibilité de publier des recherches. Ça,
c'est des problèmes concrets, réels, qui datent d'il y a longtemps et qui doivent
qui doivent faire l'objet d'une intervention publique. Il y a effectivement des
rebondissements dans l'actualité sur des événements qui se passent en classe,
mais comme j'ai dit... comme on a dit un peu plus tôt, bien, ce sont des
événements qui sont, je dirais, marginaux, qui sont... qu'on doit intervenir,
mais qui sont peut-être moins importants par rapport aux menaces que peut poser
l'État ou financement privé.
Mme David : Et
effectivement... Pardon?
Mme Gauthier (Christine) : J'ajouterai
juste comme exemple, l'obligation de prendre fait et cause, pourquoi, pour
nous, c'est important? C'est qu'on a eu... on a vu des cas au cours des années,
dont l'affaire Maillé, où l'établissement n'avait pas d'emblée pris fait et
cause pour défendre la doctorante face à des menaces extérieures qui voulaient
l'empêcher ou avoir recours à ces données. Et ça, c'est problématique, et c'est
pour ça que le projet de loi est important, mais doit permettre, donc, de
s'assurer que les établissements vont défendre la liberté académique en
protégeant les membres de leur communauté face à des recours abusifs par des
tiers.
Mme David : Je rajouterais
que le rapport Cloutier traite en long et en large de tout ça, plusieurs pages
où ils nous rapportent quelles universités ont ou pas cette question du devoir
de loyauté expressément nommé. Évidemment, le SPUL est directement visé.
Louis-Philippe Lampron a écrit un mémoire qui ne sera pas... il ne sera pas
entendu, mais il a écrit un mémoire très, très précis. On sait bien que
l'Université Laval a cette question du devoir de loyauté, mais certaines
universités l'ont, d'autres ne l'ont pas. Vous pensez que ça devrait se
retrouver, que la liberté académique doit primer dans le... plutôt que le
devoir de loyauté.
On voit qu'on est bien loin de ce qui se
passe en classe, là, à ce moment-là, et c'est ce que je prétends et que je vais
répéter souvent : Ce projet de loi là va beaucoup plus loin que juste une
situation pédagogique entre un étudiant ou des étudiants et un enseignant.
Donc, vous incluriez, si je comprends bien, cette question-là, comme le rapport
Cloutier le suggère d'ailleurs, la question de la liberté académique qui
supplante le devoir de loyauté.
Vous mettriez, évidemment, la définition
complète de l'UNESCO. Ça, ce n'est pas compliqué, tout le monde le dit, tout le
monde le dit, alors, y compris les syndicats, les étudiants, les
administrations universitaires, le 1b du rapport Cloutier, là, dans la page V
en chiffre latin le dit clairement. Eux réclament absolument l'autonomie
universitaire, et ils sont... quand ils vont venir demain, ils vont le dire
haut et fort. Donc, tout le monde dit : On a pris juste la partie qui
faisait notre affaire du rapport de l'UNESCO. Alors, il va falloir la remettre au
complet, l'article 27, donc, de la définition.
Prendre fait et cause, ça aussi ce n'est
pas nécessairement dit dans le projet de loi, et plusieurs en parlent,
plusieurs en parlent. Et l'affaire Maillé, je pense, devrait être assez
instructive pour comprendre que ça peut être très pertinent. Alors, j'insiste
parce que vous parlez de choses qui sont souvent nommées par d'autres aussi,
mais qui sont...
Mme David : ...très nommé dans
le rapport Cloutier. Alors, encore une fois, si on veut s'inspirer du rapport
Cloutier et dire qu'il est formidable, ce rapport-là, bien, je pense que ce que
vous faites, et je voudrais vous entendre là-dessus, vous allez chercher des
choses qui ne sont pas là du rapport Cloutier. Est-ce que je me trompe?
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
effectivement, on ramène plusieurs conclusions, là, la commission Cloutier, qui
nous semblent pertinentes. Puis c'est des choses que les larges consultations
de la commission Cloutier ont aussi permis de mettre en évidence, donc... Puis
c'est des éléments où il faut que... l'état du droit étant instable, bien, il
faut qu'il y ait une intervention législative pour venir, je dirais, rassurer,
là, le socle juridique de ces questions.
Mme David : Est-ce que...
Vous qui avez, Mme Quesnel en particulier mais les autres aussi, une longue
expérience syndicale, et on a des gens aussi de d'autres syndicats qui écoutent
et qui assistent ou ils écoutent en virtuel, j'ai rarement vu une telle
unanimité que ça soit les trois piliers qui composent ce qu'on appelle la
communauté universitaire, étudiants, enseignants, syndicats et dirigeants,
réclamer à peu près les mêmes choses, finalement. C'est pour ça que j'ose
croire, à ce stade-ci, je suis encore optimiste, que la ministre et ses équipes
entendent, ont lu tout ça et vont arriver avec des... Les propositions sont
extrêmement concrètes, les gens rédigent les amendements. Est-ce que vous
pensez que, si ces amendements-là sont tous acceptés et qu'on se colle vraiment
beaucoup plus au rapport Cloutier, on va arriver avec une loi intéressante pour
tout le monde et aussi unanime, dans le positivisme qu'elle ne l'est, en ce
moment, dans le négativisme, par rapport au projet de loi?
Mme Quesnel (Caroline) : Je
vais peut-être répondre, vous m'interpellez, Mme David, à ce sujet-là.
Effectivement, il y a autour du milieu universitaire puis des différents corps
qui la composent... Ce sujet-là est discuté depuis fort longtemps, vous le
savez, vous le devinez. Et, à travers beaucoup de discussions, bien, c'est
clair qu'en ce moment se concrétise une volonté forte qui est d'avoir une prise
dans le monde universitaire et, je pense, on n'en a pas parlé de manière aussi
claire, mais une uniformité à l'intérieur des universités. Elles sont toutes
autonomes, il est évident. Mais sur des sujets aussi importants que sont la
liberté académique, la liberté d'expression qui touchent tout le milieu, et de
manière très complexe, là, de la classe à la recherche, à l'expression des
individus sur le plan social, ces éléments-là sont très importants. Pour nous,
si les amendements que nous proposons, puis que sont semblables à ce que j'aie
lu jusqu'à présent dans plusieurs mémoires, sont adoptés, c'est sûr que ce
projet de loi là va être non seulement bien accueilli, mais va être utile.
Mme David : Merci. Écoutez,
vous n'êtes pas les seuls. Encore ce matin, le recteur Jutras, à Radio-Canada,
disait : Il faudrait que ça passe par la Charte des droits et libertés.
Vous l'avez dit tout à l'heure. Ça, c'est comme un concept nouveau, différent,
là, on sort du rapport Cloutier. Alors, j'aurais aimé vous entendre là-dessus.
Peut-être que mes collègues prendront la relève. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Nous avons terminé ce bloc d'échanges avec la députée de l'opposition
officielle. Maintenant, je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve
pour une durée de 2 min 45 s.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous trois. Toujours un plaisir de vous voir. Je suis content
de lire... Beau mémoire, d'ailleurs. Je suis content de lire votre
recommandation numéro 10 sur la question des traumavertissements. C'est
vraiment quelque chose que j'ai trouvé étonnant, pour ne pas dire étrange, dans
la proposition du gouvernement d'interdire l'obligation des
traumavertissements. Parce que je me suis demandé, là : J'ai-tu manqué un
épisode ou je n'ai pas vu une file d'attente de gens qui réclamaient, tu sais,
l'obligation des traumavertissements un peu partout, tu sais? Est-ce que je me
trompe? J'ai manqué un épisode? Est-ce qu'il y a des gens et des groupes
organisés qui réclament ça, l'obligation d'être de traumavertissement partout?
• (11 h 30) •
Mme Gauthier (Christine) : Bien,
c'est clair que ce n'est pas... on l'a entendu, mais ce n'est pas des
associations étudiantes nationales. Mais c'est clair que la question du
traumavertissement, c'est très difficile à baliser. C'est-à-dire, comment
prévoir le fait qu'un contenu de cours peut individuellement déranger ou créer
un impact négatif sur la personne? Puis je vous mentionnais des exemples qui,
nous, on est beaucoup au-delà aussi des sciences humaines et sociales, on en a,
des exemples, en biologie, en géographie où la présentation de cartes avec des
mots qui sont utilisés dans...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Gauthier (Christine) : ...certains
pays peuvent soulever aussi des aspects négatifs. Ça fait que ce qu'on dit, c'est
que ça appartient à la liberté académique des enseignants, des enseignantes. Si
certains souhaitent le faire en considérant les contenus de cours qui sont
abordés, ils et elles peuvent le faire.
Cela dit, si on en force l'obligation,
bien, on va avoir la difficulté de comment on aborde, là... bien là, la
personne, le chargé de cours n'a pas, par exemple, cette obligation-là dans son
plan de cours. Or, on a parlé d'obésité, or, je me reconnais dans ce groupe-là,
et ça me dérange. Bref, vous voyez un peu la difficulté, là, autour de cette
obligation-là, donc. Mais je suis d'accord avec...
M. Leduc : Ce n'est pas juste
la question du fameux mot en n, là, vous parlez des questions d'obésité, par
exemple, des violences à caractère sexuel. J'avais l'impression qu'on faisait
un peu de mauvaise presse au concept de traumavertissement, qui, en effet, peut
être fort adéquat dans toutes sortes de situations et qui, si je comprends
bien, est déjà une pratique plutôt bien utilisée, autant, j'imagine, au cégep
qu'à l'université.
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
à vrai dire, c'est ça, c'est que c'est une pratique pédagogique puis ça doit
relever de l'aspect pédagogique. On ne voit pas non plus la place que ça
devrait avoir de l'obliger ou d'interdire l'obligation dans le cadre d'un texte
législatif.
M. Leduc : Vous avez évoqué,
dans votre présentation, là, le fait qu'il y a plusieurs directions qui
hésitent à soutenir leurs chercheurs, leurs professeurs lorsqu'ils sont
poursuivis. Pourquoi ils hésitent? Est-ce que c'est la question de la mauvaise
presse? C'est déjà fini?
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui,
c'est déjà terminé.
M. Leduc : À une prochaine
fois, alors. Bonne journée.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé pour une période de 2
minutes 45 secondes.
Mme Perry Mélançon : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour. Ça me fait plaisir de vous voir, ce matin, parce que je
vous ai lus avec beaucoup d'intérêt. J'aimerais commencer justement... Dans le
tout début de votre mémoire, vous nous amenez sur un terrain sur lequel on s'est
penchés, nous aussi, dans ma formation politique. Et j'aimerais vous entendre
sur la question d'étendre le projet de loi au réseau collégial. J'aimerais
savoir, selon votre expérience, qu'est-ce que vous vivez sur le terrain. Est-ce
qu'on est plus dans la prévention de ce genre de cas là ou est-ce qu'on le vit
actuellement, ce type d'autocensure ou d'enseignants qui sont critiqués pour
leur façon d'aborder leurs cours?
M. Lacoursière (Benoît) : Bien,
écoutez, effectivement, oui, il y peut avoir ce genre de phénomène, mais les
questions relatives, par exemple, au financement de la recherche, il y a des
centres collégiaux de transfert de technologies, dans les cégeps, où il y a des
partenaires privés dans les projets, il y a des enjeux de recherche. Des
exemples que j'ai j'évoqués, quant à l'utilisation du devoir de loyauté, sont
aussi présents dans le réseau collégial depuis bon nombre d'années.
Au Québec, on juge que les cégeps
appartiennent à l'enseignement supérieur, et, écourtez, on est dans l'ordre de
l'enseignement supérieur, ici, donc il ne devrait pas y avoir de différence.
Comme la loi visant à prévenir les violences à caractère sexuel s'appliquait à
l'ordre collégial, bien, de la même façon, on estime que ça devrait s'appliquer
à l'ordre collégial, la liberté académique.
Mme Perry Mélançon : Donc,
autant l'enseignement que la recherche, de ce que je comprends, devraient être
assujettis, là. Et selon vous, est-ce que... si on y apporte les amendements
proposés dans votre mémoire, est-ce que ce projet de loi là pourrait s'appliquer
de cette façon-là ou est-ce qu'on devrait faire les travaux en amont, un peu
comme la commission Cloutier? Est-ce qu'on doit revoir, dans un environnement
plus collégial, comment l'appliquer ou ça pourrait être fait directement dans
ce projet de loi là?
M. Lacoursière (Benoît) : Je
pense, comme l'ancien projet de loi n° 151, sur les violences à caractère
sexuel, on a une mécanique qui se ressemble. Nous, on l'a défendu devant la
commission Cloutier aussi, que ça devait s'appliquer à l'ordre collégial. Je
pense qu'il y a un consensus là-dessus aussi.
Mme Perry Mélançon : Très
bien, merci. Combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme D'Amours) : 30
secondes.
Mme Perry Mélançon : 30
secondes. On a entendu l'Union étudiante du Québec qui demandait à ce que la
communauté étudiante soit présente sur le conseil qui sera formé. À votre avis,
est-ce que c'est une bonne recommandation?
Mme Gauthier (Christine) : Oui.
Nous sommes d'accord avec cette recommandation-là. C'est un conseil qui doit
être représentatif des groupes de la communauté universitaire, mais aussi en
fonction de leur importance. Donc, pour les personnes chargées de cours, nous
pensons que c'est important qu'ils soient largement présents sur ce conseil-là,
les étudiants, les professeurs bien sûr, et d'autres membres du personnel, là,
impliqués.
Mme Perry Mélançon : Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
pour votre contribution à nos travaux, chers invités. La commission suspend ses
travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 35)
15 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 15 h 34)
La Présidente (Mme D'Amours) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend
ses travaux. Nous poursuivons les auditions publiques dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi n° 32, Loi sur la liberté
académique dans le milieu universitaire. Avant de débuter, est-ce qu'il y a
consentement afin que la députée de Huntingdon remplace la députée
d'Abitibi-Ouest cet après-midi? Est-ce que j'ai le consentement?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme D'Amours) : Consentement.
Merci. Cet après-midi, nous entendrons la Centrale des syndicats du Québec, la
Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université et M.
Alexandre Cloutier, président de la Commission scientifique et technique
indépendante sur la reconnaissance de la liberté académique dans le milieu
universitaire. Je souhaite maintenant la bienvenue à l'enseignement
universitaire du Québec et... Je n'ai pas dit le titre au complet, parce que mon
écran ne me le donne pas. Je vais reprendre ma feuille: Centrale des syndicats
du Québec. Et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la Commission. Je vous invite donc à vous présenter et à procéder à votre
exposé. La parole est à vous.
M. Beaucher (Vincent) : Oui.
Donc, bon après-midi. Je m'appelle Vincent Beaucher, je suis président de la
Fédération de la recherche et de l'enseignement universitaire du Québec. Je
suis accompagné de Catherine Huart, qui est conseillère politique à la CSQ.
Donc, dans le cadre des travaux du projet
de loi n° 32, la Fédération de la recherche et de l'enseignement universitaire
du Québec, qui est une fédération de la CSQ, a...
M. Beaucher (Vincent) : ...mémoire.
Le mémoire contient 13 recommandations, et on les reprend ici avec de
brèves explications.
La recommandation numéro 1 :
Ajouter après l'article un, en fait, à l'article un, après les termes «liberté
académique, universitaire», les mots «tels que reconnus à la définition de
l'UNESCO.» À l'égard de plusieurs acteurs du milieu universitaire, dont
certains sont présents lors de ces audiences, il nous apparaît opportun de
miser sur une définition qui fait consensus depuis plusieurs années et dont
l'intégration dans la loi serait un ajout significatif qui permettrait, en
outre, de dissiper les questionnements et également aussi de légitimer la loi.
Recommandation numéro 2 :
Ajouter à l'article trois du projet de loi une mention voulant que la liberté
académique puisse inclure la critique des modes de gestion des décisions
administratives et des orientations de l'institution d'attache des membres de
la communauté universitaire. Cette recommandation découle de la première
recommandation, en fait, donc avec la définition de l'UNESCO, à l'intérieur
d'un cadre légal qui est déjà en place et qui ne permettrait pas, par exemple,
la diffamation, il nous apparaît très sain, sinon attendu que les
universitaires puissent critiquer leur institution sans peur de représailles.
En d'autres mots, la liberté académique doit prévaloir sur le devoir de
loyauté. Selon nous, il s'agit d'un des piliers de l'université avec un grand
U.
Recommandation numéro 3 :
Inscrire en préambule du projet de loi que le principe de collégialité se
trouve au cœur de l'université québécoise. Ici aussi, il nous apparaît
essentiel que le gouvernement reconnaisse une des particularités de
l'université, à savoir qu'il s'agit d'une institution dont la pérennité et
l'évolution sont le fruit d'une réflexion de discussion et de débats en
communauté. Si historiquement, cette communauté se voulait davantage savante,
elle regroupe aujourd'hui l'ensemble des acteurs d'une université qui
travaillent en collégialité pour le bénéfice de celle-ci. L'inscrire dans la
loi serait avisé.
Modification... bien, en fait,
recommandation numéro 4 et 5, soit de modifier l'article 4 du projet
de loi afin que celui-ci prévoie que le comité, ce qu'on appelle dans le projet
de loi «le conseil», soit le maître d'oeuvre de l'élaboration de la politique
institutionnelle sur la liberté académique et que ce comité soit celui qui
détermine les mécanismes de consultation de la communauté universitaire à cet
égard. Donc, en fait, par rapport à l'élaboration de la politique
institutionnelle. Nous croyons, dans un objectif de sensibilisation,
d'éducation et surtout de recherche de cohésion, que la constitution des
comités sur la liberté académique devrait être préalable à la rédaction,
l'adoption et la mise en œuvre d'une politique sur la liberté académique dans
chaque institution. Ainsi, au lieu que ce soit la direction de l'université qui
rédige et fasse cheminer une telle politique, nous sommes d'avis que le comité
pourrait être d'abord créé, puis que celui-ci aurait le mandat de consulter la
communauté universitaire et d'en arriver avec une politique qui répond à la
fois à la loi et aussi aux attentes des acteurs locaux.
Notre sixième recommandation va à l'effet qu'à
l'alinéa 1 de l'article 4, après les termes «la composition d'un
conseil», il faudrait détailler la composition de ce conseil ou du comité que
l'on voudrait comme multicatégoriel. Notre recommandation parle d'elle-même,
nous la proposons dans le but d'assurer une réelle représentativité de tous les
acteurs dans chacune des universités du Québec. Elle est cohérente avec notre
précédente recommandation et aussi avec notre vision selon laquelle la liberté
académique est l'affaire de tous, tant du point de vue de son application que
de sa promotion.
La recommandation numéro 7 :
Intégrer au projet de loi l'obligation des établissements de voir à la mise sur
pied d'une formation obligatoire pour les gestionnaires de tous les paliers, ce
qui inclut les directions départementales et facultaires ainsi que les conseils
d'administration. Les dirigeants universitaires, à tous les niveaux, sont
nombreux et changent régulièrement. Or, ce sont eux qui ont la lourde tâche de
s'assurer que les règlements, les politiques et aussi les conventions collectives
soient bien appliqués. La liberté académique étant fondamentale à l'admission
universitaire, il nous apparaît primordial que les dirigeants en aient une
bonne compréhension et en reconnaissent les implications. Une formation
disponible à tous et en permanence assurerait donc un cadre commun de langage
au bénéfice d'une meilleure promotion et d'une meilleure reconnaissance de la
liberté académique.
• (15 h 40) •
Recommandation numéro 8 : Que
l'alinéa 5 de l'article 4 soit modifié afin que soient ajoutés, après
les mots «la mise en place», les mots «et le financement adéquat.» Si le
gouvernement juge assez important de...
M. Beaucher (Vincent) : ...sur
la liberté académique. Nous croyons qu'il doit offrir un financement conséquent
afin de s'assurer que toutes les institutions universitaires fassent leurs
devoirs et que l'argent ne soit pas une raison ou une excuse pour tourner les
coins ronds. Ce financement supplémentaire et pérenne serait considéré comme
une preuve d'engagement du gouvernement dans ce dossier qualifié de capital par
le premier ministre lui-même, avec raison.
Recommandation numéro neuf. Retirer tout
simplement l'article 6 du projet de loi en raison de son incohérence avec
l'ensemble des dispositions et des principes qui y sont amenés. À l'instar de
plusieurs autres acteurs du milieu universitaire, nous jugeons que cet article
va à l'encontre de l'esprit même du projet de loi et qu'il soulève réellement
un enjeu de cohérence interne. D'autre part, il est contradictoire avec les principes
mêmes qui donnent corps à la liberté académique, soit les notions d'autonomie,
de collégialité et plus largement de communauté. De fait, il est contradictoire
aux principes que le gouvernement cherche à protéger dans le contexte actuel.
Recommandation numéro dix. Inscrire la
reconnaissance de l'expertise disciplinaire du personnel enseignant non
professoral et des professionnels et professionnelles de recherche dans le
projet de loi. Il s'agit pour nous d'un principe fondamental au fonctionnement
et au rayonnement de toute institution universitaire. L'expertise disciplinaire
de nos membres, à savoir des chargés de cours et des professionnels de
recherche, est au cœur de leurs fonctions d'enseignement et de recherche au
sein des universités. Malgré cela, nos membres doivent bien souvent faire face
à un certain manque de considération de leur statut, que ce soit par les
étudiants, mais aussi de la part d'autres personnels de la communauté
universitaire. Une reconnaissance de leur expertise viendrait nécessairement
influer de manière positive la place occupée par la liberté universitaire dans
une classe ou un département et dans l'institution elle-même.
Recommandation numéro onze. De manière
complémentaire à l'adoption du projet de loi, prévoir une commission
parlementaire portant sur l'enjeu précis de la précarité à l'emploi au sein des
universités du Québec, en accordant une attention particulière aux effets des
différents statuts d'emploi sur la liberté académique, notamment. Il apparaît
fondamental de reconnaître que le modèle universitaire actuel produit des
statuts de seconde classe où l'autonomie professionnelle et la liberté
académique sont régulièrement menacées, voire sacrifiées. Le coût de ces
sacrifices ne peut être que néfaste pour le développement et le rayonnement des
universités québécoises. Concrètement, et pour les personnes concernées, les
impacts d'une non-reconnaissance de leur autonomie professionnelle et d'une
non-valorisation de leur liberté académique peuvent prendre différentes formes.
Autocensure, décision de ne plus enseigner certains cours ou sujets sensibles,
refus de postuler pour de nouvelles charges de cours, acceptation de
comportements déplacés pour ne pas déranger à cause du statut précaire, etc.
Nous sommes d'avis qu'en continuité du chantier de l'Université du futur, le
Québec est mûr pour une réflexion élargie sur le milieu universitaire du
XXIe siècle et, entre autres, sur la place qu'y occupent les différents
acteurs de ce moteur social et économique que sont les universités.
Cette proposition de réflexion élargie
nous amène à nos deux dernières recommandations, à savoir que le gouvernement
adopte une loi-cadre sur les universités dont l'objectif serait de définir les
assises du contrat social entre les universités et la société québécoise, et le
cadre de référence entre les universités et l'État, et que cette loi-cadre soit
rassembleuse et qu'elle inclue, entre autres, la mission de l'université
québécoise ainsi que les principes fondamentaux et les moyens pour les mettre
en œuvre. Son élaboration devra résulter d'un véritable exercice démocratique
axé sur la collaboration et la concertation entre les membres de la communauté
universitaire, les citoyennes et les citoyens et le gouvernement.
En conclusion, il nous apparaît important
de mentionner que l'intention du gouvernement de légiférer sur la liberté
universitaire s'avère une avancée significative pour la Centrale des syndicats
du Québec et la Fédération de la recherche et de l'enseignement universitaire
du Québec. Bien qu'il reste quelques éléments à bonifier pour en faire une
référence en la matière et un texte législatif concrètement viable, les
événements qui ont conduit à ce projet de loi et les données recueillies de
part et d'autre depuis quelques mois démontrent la pertinence de réitérer
l'importance suprême de la liberté académique en contexte universitaire. Nous
vous remercions de votre écoute.
La Présidente (Mme D'Amours) : Maintenant,
nous allons commencer la période d'échange. Mme la ministre, la parole est à
vous pour 16 minutes 30 secondes.
Mme McCann : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je veux vous remercier, M. Beaucher, Mme Huart, aussi,
d'être présents aujourd'hui puis d'avoir élaboré le mémoire que vous nous avez
transmis. C'est important. Vous représentez beaucoup de monde et...
Mme McCann : ...vous avez fait
13 recommandations. Je vous pose la première question. Vous l'avez dit, mais je
veux vous l'entendre confirmer. Ce que je comprends de votre position, c'est que
vous êtes certainement en faveur d'un projet de loi, mais vous demandez des
modifications au projet de loi. C'est bien ce que j'ai compris de votre
position.
M. Beaucher (Vincent) : Effectivement.
Depuis qu'il en est question, même avant la proposition, là, du projet de loi
que vous avez fait, nous, on était d'avis que c'était positif d'aller dans
cette direction-là. Vous avez déposé un projet de loi que nous jugeons, dans
son ensemble, intéressant. Mais maintenant, il y a effectivement certaines
modifications qui, comme d'autres vous l'ont mentionné également, bonifieraient
assurément le projet de loi.
Mme McCann : Oui, vous
suggérez évidemment de reprendre la définition de l'UNESCO. Ça nous a été dit
par les précédents interlocuteurs. Et effectivement, on voit que votre position
est la même. Est-ce que vous pouvez nous identifier les éléments qui sont
particulièrement importants pour vous dans la définition de l'UNESCO et qui ne
sont pas dans le projet de loi?
M. Beaucher (Vincent) : L'aspect
le plus important, là, sans aller sur les mots, là, dans la définition, je
pense, c'est vraiment l'idée qu'un universitaire a la possibilité, sans peur de
représailles, de pouvoir critiquer des positions de son institution et
également aussi des positions peut-être scientifiques, mais également au niveau
de la gestion de l'université en tant que telle. Donc, cet aspect-là de la
loi... pas de la loi mais de la définition de l'UNESCO nous apparaît très
important. Et, comme on l'a mentionné, pour nous, cette idée, de pouvoir
participer activement, donc, à la gestion, entre autres, des universités fait
partie de ce qu'est une université.
Mme McCann : Merci. La
question aussi que j'ai pour vous, parce que vous êtes évidemment branchés sur
le terrain, là, de par vos membres : Pourquoi vous jugez qu'un projet de
loi, c'est nécessaire? Quelle est votre lecture de l'état de situation actuel
en général dans les universités concernant la protection de la liberté
académique universitaire?
M. Beaucher (Vincent) : Quand
les événements sont arrivés au printemps 2021, qui ont précipité finalement,
là, votre désir de mettre sur pied, par exemple, la commission, outre ce qu'on
avait vu dans les médias, ce n'est pas quelque chose qu'en tant que président
de fédération ou en tant que président de syndicat, parce que c'est un chapeau
que je porte également aussi, ce n'est pas quelque chose qu'on avait vraiment
beaucoup entendu parler.
Pour me nourrir un peu, j'ai sondé les
membres de mon syndicat de chargés de cours à l'Université de Sherbrooke et
j'ai été vraiment surpris d'apprendre que sur, par exemple, les 400 répondants
au petit sondage que je leur avais fait parvenir, donc, déjà là, il y avait un
taux de réponse assez élevé, j'en avais une centaine qui m'affirmaient
s'autocensurer à divers degrés ou s'être déjà autocensurés à divers degrés dans
leur enseignement. Je n'avais jamais entendu parler de ça, et là, tout d'un
coup, cette réalité-là, qui était... je ne dirais pas cachée, mais qui n'était
pas nécessairement au grand jour, existait. Moi, c'est quelque chose qui me
préoccupe beaucoup.
Donc, le projet de loi, je ne le vois pas
tant comme un élément où est-ce qu'on veut s'assurer de pouvoir punir des
comportements qui ne seraient peut-être pas l'idéal à une université, mais
vraiment comme un pas pour la réaffirmation de l'importance de la liberté
universitaire dans les universités... bien, de la liberté académique dans les
universités, excusez-moi, et qui doit s'accompagner d'une promotion de cette
liberté académique là, d'une éducation sur son importance pour les universités
et plus largement pour notre société démocratique. Donc, c'est pour ça que je
pense qu'un projet de loi est important parce que ça a une valeur qui est
définitivement plus que, par exemple, un énoncé pourrait avoir.
• (15 h 50) •
Mme McCann : Oui. D'ailleurs,
M. Beaucher, vos recommandations tournent beaucoup autour du rôle et du
mandat... une partie de vos recommandations tournent beaucoup autour du rôle et
du mandat du conseil, hein, qui est prévu à...
Mme McCann : ...article 4,
alors, moi, j'aimerais vous demander un peu plus votre opinion sur le rôle et
les fonctions de ce conseil. Comment vous voyez ça concrètement, là? Parce
qu'on nous dit, dans les universités, c'est déjà traité. Les universités nous
disent : C'est déjà traité. Pour certaines d'entre elles, là, c'est déjà
traité dans des départements. Nous, évidemment, dans le projet de loi, on amène
un conseil, on pense que c'est une instance qui est en recours, là, après les
départements. Mais vous, là, votre vision du fonctionnement, là, du conseil,
son rôle aussi.
M. Beaucher (Vincent) :
Donc, je pense qu'à cet égard-là il est très pertinent de retourner au rapport
de la commission Cloutier. Il y a beaucoup d'éléments là-dedans qui expliquent
ce que pourrait faire... en fait, ce que devrait faire un conseil ou un comité
dans les universités. Et vous mentionnez, également, aussi, bon, son rôle par
rapport aux départements, etc. Je pense qu'effectivement il y a beaucoup...
S'il y a des situations dites mineures quelque chose qui se passe dans notre
département, ça peut se régler à cet endroit-là. Après ça, peut-être que le
comité sur un aspect plus, comment je pourrais dire... pour régler des situations
problématiques, pourrait jouer un rôle là. Mais sinon toute la question de la
promotion de la liberté académique sur un campus devrait revenir à ce
comité-là. Les formations dont il est question dans notre mémoire devraient
relever de ce comité-là. Ça devrait être une instance de médiation lorsqu'il y
a des situations particulières qui sont relevées. Donc, j'ai... Et on le voit,
également, aussi comme un outil qui va faire en sorte que les différents
acteurs, au sein même d'une communauté universitaire, vont se rallier à la
liberté académique et à son importance, donc vraiment sur le terrain. Et, au
lieu que ça soit une responsabilité d'une direction d'université, bien, on...
finalement, on remet ça un peu dans les mains de la communauté. Et ça, on pense
qu'il y a une valeur ajoutée à prendre ce chemin-là.
Mme McCann : Et je
note... oui, madame, vous vouliez intervenir?
Mme Huart (Catherine) : Bien,
simplement ajouter d'ailleurs que ce qu'on recommande aussi, c'est que ça soit
le comité qui voie à l'élaboration de la loi, c'est de la politique interne,
pardon, puis, ça, c'est assez important pour nous pour encore une fois se
distancier de cette approche-là où tout vient du haut, finalement, en bon
français, «top down». Donc, pour nous, c'est assez fondamental, puis aussi pour
s'éloigner des logiques punitives qu'on a vues quand même se mettre en place à
différentes occasions.
Mme McCann : Merci.
D'ailleurs, vous vous l'avez répété deux fois, là, vous parlez de mesures de
sensibilisation et d'information, vous semblez insister beaucoup là-dessus,
puis c'est dans le projet de loi d'ailleurs. Et la mise en place aussi d'outils
pédagogiques et de ressources pour assurer la promotion et le respect, la
liberté académique. Puis il y a même un service-conseil, là, qu'on a inscrit
dans la loi. J'imagine que ça va dans le sens de votre vision, là. Est- ce que
vous voudriez élaborer davantage sur ces objets?
M. Beaucher (Vincent) :
Bien, comme vous l'avez dit, ça va dans le sens qu'on cherche, qu'on vise.
Nous, on pense qu'il y a une... Des fois on prend pour acquis. Par exemple, si
on prend les étudiants ou même des systèmes impersonnels, que, la liberté
académique, c'est connu, c'est compris, c'est partagé, etc. C'est peut être des
éléments en fait sur lesquels il faudrait mettre un peu plus d'efforts et qui
pourraient donner des fruits assez rapidement et justement qui nous
permettraient de ne pas aller dans une direction où est ce qu'il y aurait des
chocs finalement entre diverses positions. Si, par exemple, les étudiants
comprennent bien qu'est-ce que c'est aller à l'université et pourquoi que, la
liberté académique, c'est important, donc, nous, oui, effectivement, si c'est
ces aspects-là qu'on retrouve notre projet de loi, on est d'accord avec ça.
Mme McCann : Bien, vous,
vous faites allusion à quelque chose qui est quand même très important. On a
rencontré l'Union étudiante du Québec ce matin-là et effectivement, vous, vous
vous dites qu'il faut bien comprendre qu'est ce que c'est la liberté académique
universitaire, où est ce que ça se situe. Et je disais d'ailleurs, ce matin,
que même un étudiant peut faire une plainte dans le cadre, là, du conseil en
regard de la liberté académique universitaire, puis je pense que ça, ça n'avait
peut être pas été complètement compris, là, et je peux comprendre pourquoi là,
ce n'est peut être pas complètement explicite dans le projet de loi.
Et il y a toute la question aussi de
l'équité, la diversité, l'inclusion, c'est quand même un domaine différent,
mais il y a quand même des liens dans le vécu. Hein, on se comprend? Et il y a
peut être une inquiétude du côté des étudiants que l'équité, la diversité,
l'inclusion...
Mme McCann : ...inclusion,
il y a un impact par rapport à toutes ces questions. Vous, vous voyez ça
comment? La liberté académique... ces préoccupations au niveau de l'équité, de
la diversité, l'inclusion, parce que dans les universités, chacune a une
politique, là, sur ces questions là.
M. Beaucher (Vincent) :
Bien, nous, on pense que c'est dit que c'est des thématiques qui peuvent être
abordées en classe. Et moi, je serais beaucoup plus enclin à ce que, lorsque
des étudiants ont des malaises, des appréhensions ou des questionnements sur ce
genre de sujets là. Bien, en fait, nous, ce qu'on ne veut pas, c'est que, par
exemple, le conseil soit le premier réflexe : Je vais aller voir cette
instance-là et porter plainte. Dans un premier temps, nous, on pense qu'il faut
que ça passe par la classe ou encore peut-être en privé avec l'enseignant pour
en parler, de ces sensibilités-là. Mais je réitère, c'est important de
comprendre que quand on vient à l'université, ce n'est pas forcément pour se
faire confirmer dans ses croyances, dans ses visions, mais c'est pour venir en parler,
voire en débattre, les mettre au jeu et, après ça, en sortir grandi,
collégialement.
Mme McCann : Excellent.
Merci. Puis je termine par une question, puis je vais passer la parole à mes
collègues. Si je vous demandais, vous avez treize recommandations, quelles sont
les prioritaires pour vous?
M. Beaucher (Vincent) : Nous,
on pense que d'y aller avec la définition complète de l'UNESCO, c'est quelque
chose qui n'est pas compliqué, qui devrait se faire. Y aller avec ça ferait en
sorte que la question du devoir de loyauté versus la liberté académique serait,
si ce n'est pas réglé, du moins on s'y attaquerait adéquatement. Et, bien, là,
ça en regroupe plusieurs, là, mais nous, l'aspect collégial, si on veut, c'est
quelque chose sur lequel on mise beaucoup.
Puis finalement, je mentionnerais
peut-être que la question de l'article six et... ce n'est pas nécessaire dans
sa forme actuelle. Et le gouvernement et la ministre ont d'autres chemins, là,
si on veut, là, pour faire voir... faire valoir un point de vue aux
institutions s'il y a un manquement quelconque.
Mme McCann : Bien, je
vous remercie beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais céder la parole à Mme la députée de Charlevoix-Côte-de-Beaupré pour 3
min 40 s.
Mme Foster : Mais merci
beaucoup, merci à vous. C'était très intéressant comme présentation. Je sais
qu'il y a toujours beaucoup de travail derrière ces mémoires présentés en
commission parlementaire. Donc, merci.
J'aurais une petite question,
premièrement, sur les recommandations que vous nous faites à l'article 4.
Là, dans le fond, je veux juste être certaine de bien comprendre, concrètement,
ce que ça donnerait. Vous recommandez que ce soit le conseil qui détermine les
mécanismes de consultation et l'élaboration de la politique. Parmi la
composition du conseil, vous voudriez qu'on ajoute, bon, une longue liste de
personnes membres de la communauté universitaire. Vous citez en dernier les
directions de départements et de facultés et autres gestionnaires.
Bon, si on lègue à un conseil les
mécanismes de consultation, l'élaboration de la politique, comment se fait
l'arbitrage à travers tout ça? Et mon autre question : L'article 5,
est-ce que vous remettez en question le fait qu'il y ait un responsable de la
liberté académique ou ça, vous êtes corrects avec ça?
M. Beaucher (Vincent) : Si
je prends d'emblée la question de l'article 5, nous, on serait à l'aise
avec ça. Il y a déjà, dans les universités, quelques personnes qui ont des
rôles particuliers qui ressemblent, là, à celui-là, qu'on parle de l'ombudsman,
ou etc. Donc, ça, on serait d'accord avec l'idée.
• (16 heures) •
Et concernant la composition, donc, vous
parlez de l'arbitrage, c'est ça? Donc, l'arbitrage à l'intérieur, je vous
dirais qu'ultimement il y aurait toujours la question de pouvoir passer au
vote, là. Donc, il y aurait ça à l'intérieur des comités. Mais, de façon
générale, pour être sur plusieurs comités universitaires, je vous dirais qu'on
finit toujours par trouver, là, un terrain d'entente qui va faire en sorte que
ce qui doit aller de l'avant va de l'avant. Après ça, est-ce qu'on pourrait,
par exemple, voir la personne responsable de cette politique-là comme étant une
espèce de... comment je pourrais dire... je ne veux pas aller vers le droit de
veto, là, mais vers l'espèce de sage, là, si on veut, du comité...
16 h (version non révisée)
M. Beaucher (Vincent) : ...donc,
ce serait à vois, je dirais, là.
Mme Foster : Dans le fond,
votre peur, c'est peut-être les... Oui. Ah! Je pensais que tu avais parlé.
Désolée. Donc, dans le fond, votre peur, c'est un peu que, si on laisse au...
Bon, à la direction, là, de l'université, que ce soit un peu l'approche,
excusez-moi l'anglicisme, «top down». Donc, vous voudriez vraiment que ce soit
le conseil qui puisse avoir davantage de pouvoirs pour l'élaboration. Bon. O.K.
Bien, je suis les raisonnements, là, mais je me demande juste comment vous
voyiez l'arbitrage dans tout ça parce que, si ça ne s'entend pas sur la
composition, sur l'élaboration de la politique, sur la version finale de la
politique, qu'est-ce qu'on en fait et qui tranche? C'est un peu ça, là, ma
question, au final, là. Donc, vous dites que ça pourrait être au final le
responsable de l'établissement, le responsable de la liberté académique.
M. Beaucher (Vincent) : On
pourrait le voir de même.
La Présidente (Mme D'Amours) : En
25 secondes, M. Beaucher.
M. Beaucher (Vincent) : En
25 secondes... ça pourrait être une voie à utiliser. Honnêtement, je pense qu'il
y aurait une réflexion à y avoir, il y a peut-être également aussi des us ou
des moeurs dans différentes institutions qui pourraient répondre à cette
question-là, mais ce serait une réflexion à mener plus loin.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Maintenant, je cède la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys pour une
période de 11 minutes.
Mme David : Merci beaucoup,
madame la Présidente. Bonjour. Bonjour à vous. Merci de votre mémoire. Écoutez,
il y a, j'ai calculé ça, et ça ne me rajeunit pas, mais il y a 41 ans, je
donnais ma première charge de cours au baccalauréat en psychologie. J'avais 26
ans, 25, 26 ans. J'étais terrorisée littéralement, parce qu'il y avait 200
étudiants dans un cours de bac, vous savez ce que c'est, et j'enseignais les
troubles de santé mentale, la psychopathologie. Alors, c'était très couru,
évidemment, comme cours. Et je pense que, bien avant que ce soit nommé, cette
question de sensibilité de ne pas blesser des étudiants, mais j'avais des
étudiants paniqués constamment devant moi. Pourquoi vous pensez? C'est comme
des étudiants en médecine, ils se retrouvaient dans toutes les pathologies que
j'enseignais. Alors, c'était trouble anxieux, trouble dépressif, trouble
périnatal, trouble sur le spectre de l'autisme, schizophrénie, nommez-les,
Asperger, enfin, borderline, tout le monde se voyait là-dedans, donc... trouble
de l'attachement, etc. Alors, dans le fond, je réfléchis à ça puis je vais
aller à ma question sur votre minisondage interne, là, je me suis... est-ce que
je me suis autocensurée ou j'ai été dans la délicatesse de dire : Je vous
avertis un... avertissement, comme on dit, vous allez vous retrouver dans tout,
c'est normal, mais s'il y a des choses qui vous angoissent vraiment plus, venez
me voir. Parce que, quand tu étudies en psycho, souvent, tu peux avoir toi-même
des inquiétudes par rapport à ta santé mentale ou être passé à travers des
choses très difficiles ou vivre encore des choses très difficiles. Donc, j'y
étais, je m'aperçois que j'y étais en plein dans cette question de sensibilité.
Alors, diversité, inclusion, bien, la santé mentale en est une forme de
diversité.
Donc, vous, vous avez dit pourquoi...
alors que beaucoup de monde, 40 %, vous avez dit, ou 60 % ont affirmé
s'autocensurer. J'aurais probablement été dans vos répondants qui dit :
Oui, je m'autocensure. Ça dépend comment vous avez posé la question, mais je
fais très, très, très attention à ce que je dis. Alors, je vous pose la
question : Est -e que vous vous êtes demandé pourquoi ils se censuraient?
Est-ce qu'il y avait des modalités de réponse? Première question, et deuxième :
En quoi, le projet de loi va changer quelque chose à ça?
M. Beaucher (Vincent) : Concernant...
bien, juste peut-être pour préciser, en fonction des chiffres que je vous ai
présentés, dans mon cas, c'était à peu près le quart, là, je vous dirais, ce
qui est quand même assez assez élevé, là, et donc ça peut différer d'un milieu
à l'autre. Mais sur les raisons, donc c'était qui était demandé, je pense, en
fait, il y a.... des fois, ça va être une dynamique de groupe qui va s'installer
et donc... ou qu'on a peur qui s'installe, donc c'est pour ça, par exemple, qu'on
va s'autocensurer. On va s'autocensurer, parce que, par exemple,
particulièrement dans mon université à Sherbrooke, on a beaucoup, beaucoup,
beaucoup de nos membres qui sont précaires, donc en période de probation. Et ce
que ça implique, c'est qu'ils pourraient, tout simplement, ne pas être appelés
pour donner un cours l'année suivante parce qu'ils n'ont pas de priorité sur
les cours qu'ils donnent. Donc, est-ce que, moi, en tant que chargé de cours,
qui n'a aucune priorité, n'a aucune protection presque sur mes charges de
cours, je veux que mon nom atterrisse sur le bureau de la direction de mon
département, de mon programme? Probablement pas. Donc, est-ce que je vais faire
en sorte que...
M. Beaucher (Vincent) : ...dans
ma classe, tout se passe le mieux possible, peut-être pour amener des questions
qui seraient plus sensibles, de faire place à des débats qui pourraient être
moins intéressants.
Mme David : Peut-être
que je vais vous interrompre pour poser la question suivante : tout dépend
de la méthodologie que vous avez employée. Si c'est que le chargé de cours,
puis vous avez raison, là, à statut précaire, ne fait par des examens aussi
difficiles pour ne pas que les étudiants se plaignent qu'ils ont eu des
mauvaises notes. Ça peut atterrir sur le bureau d'un directeur des études, ça.
Est-ce que c'est de l'autocensure? Est-ce que c'est de l'autocensure dans le
sens que l'examen va être plus facile? Est-ce que... autrement dit, dans votre
questionnaire, avez-vous des détails? Leur avez-vous demandé qu'est-ce qu'eux
entendent par l'autocensure, ou si c'était oui ou non?
M. Beaucher (Vincent) : Non,
c'était... puis on avait effectivement une question qui demandait des détails.
Évidemment, on en a plusieurs dans des cours en sciences... en univers social,
en sciences sociales, mais ça peut être, par exemple, de... je vais donner un
exemple qui arrive, de mon point de vue, du champ gauche, en sciences, mais un
cours d'histoire de la science, à certaines époques, ça va côtoyer la question
de la magie, la question de la religion. Bien, au fil des ans, on se rend
compte qu'il y a des étudiants qui viennent de certains milieux culturels, avec
des croyances religieuses, entre autres, qu'ils vont être moins réceptifs à ce
que le chargé de cours va leur annoncer comme étant l'évolution de la science
et les liens avec la religion et d'autres croyances comme ça. Donc, il y en a
dans différents milieux, plusieurs cours sur la sexualité, sur les identités de
genre, sur... donc, les exemples qu'on a vus dans les médias, on en a retrouvé,
là, dans nos réponses. Et, quand on parle d'autocensure, c'était vraiment en
fonction de sujets à l'intérieur de cours que ces personnes-là enseignent.
Mme David : O.K., mais,
à ce moment-là, en quoi... Quels éléments, dans le projet de loi... Ont
l'impression que ça va donner l'entière liberté au chargé de cours de parler de
sexualité, parler de religion, parler de race et d'intelligence? Il y avait ça
dans mon temps, là, c'était beaucoup, beaucoup... Est-ce que...
M. Beaucher (Vincent) : Oui,
oui.
Mme David : Bon, en quoi
le projet de loi va changer quelque chose devant le chargé de cours précaire?
M. Beaucher (Vincent) : Au-delà
d'éléments particuliers dans le projet de loi, nous, on pense que le projet de
loi en lui-même et le message qu'il va envoyer va faire en sorte qu'il va y
avoir une place plus importante et plus explicite donnée à la liberté
académique dans les institutions universitaires, et ce, autant pour les
personnels, par exemple les chargés de cours, que pour les directions, que pour
les étudiants. Si tout le monde comprend qu'est-ce que la liberté académique et
l'impact que ça a et l'importance que ça dans une institution universitaire, on
va avoir fait un très bon pas dans la bonne direction, non pas qu'on s'en va
dans le sens contraire, actuellement, mais on a des exemples ici et là qui nous
posent des questions.
Une voix : ...
M. Beaucher (Vincent) : Puis,
également, aussi dans le projet de loi, si je termine, la question de demander,
par exemple, au comité de s'assurer qu'il y a des outils qui sont fournis tant
au personnel enseignant que voire même de la promotion faite au niveau des
étudiants, ça, c'est vraiment un bon pas dans la bonne direction.
Mme David : Oui,
effectivement, vous parlez de ça, de promouvoir, le comité pourrait faire ça,
former, former, ça, c'est tout le monde, là, et médiation, donc, médiation...
La ministre l'a encore redit tout à l'heure, on arrive à ce conseil, selon la
logique interne d'un fonctionnement d'université, après moult étapes
antérieures, de plaintes au premier niveau, deuxième niveau, troisième niveau.
Puis là, si vraiment rien ne se règle, on pourrait dire, à l'amiable et de
façon collégiale, on arrive au conseil, et là, il y aurait une ultime médiation
avec, probablement, des... là, vous dites : on veut s'éloigner des
logiques punitives, alors est-ce qu'on punit l'étudiant de s'être plaint?
Est-ce qu'on punit le chargé de cours d'avoir dit des mots pas corrects?
Comment on fait ça, là? Parce qu'on parle de sanctions aussi dans le projet de
loi.
• (16 h 10) •
M. Beaucher (Vincent) : Oui,
mais je vous dirais que... Je pense que si on prend du côté des chargés de
cours, je pense qu'il faut quand même aussi de l'avant, bon, la liberté
académique, mais aussi l'autonomie professionnelle, et ça, de mon point de vue,
là, c'est majeur. Et, après ça, si on arrivait, ultimement, avec une situation
où est-ce qu'un étudiant ou un groupe d'étudiants est complètement non
réceptif, là, aux diverses médiations antérieures, qui ont eu lieu avant
d'arriver au conseil, en termes de... peut-être qu'effectivement, bien, il faut
prévoir, là, une éventualité où est-ce qu'il pourrait y avoir une sanction,
mais...
M. Beaucher (Vincent) : ...ce
serait peut-être l'expulsion d'un cours ou peut-être même, ultimement,
dépendamment des gestes qui ont été posés, là, peut-être même de l'institution,
là, jusqu'à un certain point. Mais clairement il ne faut pas que ça soit le
message qui soit envoyé d'emblée qu'il existe maintenant une instance dans une
université qui va punir des étudiants ou des chargés de cours qui auraient des
paroles ou des comportements qui vont à l'encontre de la liberté académique. Ce
n'est pas ça...
Mme David : Vous
élaborez quand même pas mal, sur la page 4 et 5, le principe de
collégialité. Ça, habituellement, c'est très mal compris quand on n'est pas de
l'interne dans milieu, probablement, et collégial et universitaire. D'autant
que le mot «collégialité», ça ressemble au mot «collégial», mais ce n'est pas
l'ordre collégial d'enseignement, ça réfère vraiment à un principe de gestion.
Et vous parlez même des membres externes dits indépendants, ça fait longtemps
que je n'avais pas réfléchi à cette question-là de la composition des conseils
d'administration. Mais j'aimerais que vous élaboriez là-dessus pour bien faire
comprendre en quoi ce principe de collégialité peut changer quelque chose dans
l'atterrissage de ce projet de loi là.
M. Beaucher (Vincent) : On
est d'avis que, si, par exemple, l'élaboration de la politique de liberté
académique est faite de façon réellement collégiale, il va y avoir une
meilleure cohésion de l'ensemble des acteurs dans une institution autour de la
politique interne qui aura été élaborée, mais surtout, entre autres, sur la
question de la liberté académique. Il faut quand même comprendre que, dans une
université, de façon générale, lorsque, par exemple, une politique ou un
règlement est proposé pour modification, il y a un chemin qui se fait à travers
différentes instances où est-ce qu'il y a une certaine représentation de
différents acteurs. Mais ça reste... Comment je pourrais dire? Il y a quand
même un sentiment de pouvoir changer les choses qui est là mais à des degrés
extrêmement variables et souvent pas très élevés. Donc, on pense que, si,
d'emblée, on se dit : C'est un comité qui a été créé de façon collégiale,
qui a la responsabilité de...
La Présidente (Mme D'Amours) : En
terminant, M. Beaucher. Je suis désolée, je vais être obligée de vous
couper, la période d'échanges avec la députée est terminée. Je vais maintenant
céder la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour une durée de 2 min 45 s.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour à vous deux, content de voir. Je suis un ancien
syndicaliste moi-même, alors, quand vous parlez de la question du devoir de
loyauté, ça résonne chez moi. Vos collègues de la FNEEQ, qui vous ont précédés,
l'ont soulevé également. Pourriez-vous nous entretenir un peu davantage, dans
le fond, sur ce concept-là? Et si vous avez peut-être des cas plus concrets à
nous soumettre ou, dans votre expérience de syndicaliste, vous avez vu que ça
pouvait causer problème, et que ça mériterait donc qu'on précise davantage cet
enjeu-là dans le projet de loi.
M. Beaucher (Vincent) : Moi,
personnellement, en tant que président d'un syndicat de fédération, j'ai...
vite de même, là, je n'ai pas d'exemple particulier, et, en fait, je suis
content de ne pas en avoir, là, O.K.? Donc, ce n'est quand même pas quelque
chose qu'on voudrait qui arrive à toutes les semaines, là, une problématique
liée au devoir de loyauté, appliqué dans une université. C'est antinomique par
rapport à la philosophie de ce qu'est une université. Il n'y a personne, là,
qui est d'accord à ce que, au nom de la liberté académique, ou, peu importe,
quelqu'un se mette à lancer des propos racistes ou à faire des propos
diffamatoires, ou, etc. On n'est vraiment pas là. On en est dans une logique de
l'avancement des connaissances et également aussi dans une logique d'évolution
de l'institution avec un grand ou un petit «u», comme vous le voulez, là. Et
les acteurs universitaires s'inscrivent, pour la très grande majorité, ceux qui
y participent, dans cette logique-là, et il faut que ça continue comme ça.
Et donc d'arriver avec un concept comme le
devoir de loyauté qui pourrait, parce qu'inscrit, entre autres, dans le Code
civil du Québec et parce qu'il n'est pas contrecarré ailleurs par un
contrepoids vraiment important, commencer à être appliqué davantage dans les
universités, c'est juste, bien honnêtement, inconcevable.
M. Leduc : Vos
collègues, plus tôt, parlaient aussi, là, que des directions d'universités
hésitent à soutenir leurs chercheurs quand ils sont poursuivis ou ébranlés par
des acteurs externes. Est-ce que c'est quelque chose aussi que vous avez
observé, et...
M. Leduc : ...pensez-vous
que le projet de loi peut venir corriger cette situation?
La Présidente (Mme D'Amours) : En
20 secondes, M. Beaucher.
M. Beaucher (Vincent) : Ce
n'est pas une situation, là, que j'ai vécue. Je ne pourrais pas m'avancer sur
l'impact du projet de loi actuel ou de la loi, éventuellement.
La Présidente (Mme D'Amours) : 10 secondes...
M. Leduc : 10 secondes.
Est-ce qu'il faut appliquer ça aux cégeps aussi?
M. Beaucher (Vincent) : C'est
un autre contexte. On va peut-être pouvoir élaborer dans quelques secondes
là-dessus, mais...
Une voix : C'est prématuré.
M. Leduc : Oui, c'est
ça.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup.
M. Leduc : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
cède maintenant la parole à la députée de Gaspé pour une période de 2 min 45 s.
À vous la parole.
Mme Perry Mélançon : Merci,
M. Beaucher, madame... Bien, on va poursuivre dans cette même question que
mon collègue avait sur la question de l'étendre au réseau collégial. On l'a
entendu de vos collègues, la FNEEQ, qui était en faveur de ça. Et vous comme
centrale plus large, disons, est-ce que vous êtes du même avis?
Mme Huart (Catherine) : Bien,
en fait, on pense que... On n'est pas du tout fermés à l'idée qu'il y ait une
réflexion pour le réseau collégial, qu'il y ait peut-être même éventuellement
une loi, mais présentement c'est prématuré, à notre avis, d'étendre le projet
de loi no 32 comme ça, là, sans consultation des acteurs concernés du
réseau collégial, de l'étendre au réseau collégial. Il y a quand même
différentes... Il y a des distinctions, les réalités ne sont pas les mêmes
entre le réseau universitaire puis le réseau collégial, entre le milieu
universitaire et le réseau collégial, malgré qu'on se trouve quand même en
enseignement supérieur, là, je suis tout à fait d'accord avec ce que... on est
tout à fait d'accord avec le propos, une partie du propos que soutenait la
FNEEQ plus tôt, mais, quand même, c'est des réalités qui sont différentes,
puis... Mais, au-delà de ça, il faut qu'il y ait une réelle consultation, là,
de l'ensemble des réseaux du milieu collégial, qui n'a pas eu lieu du tout, là,
pour le projet de loi no 32. Donc, à notre avis, partir un processus de
consultation serait de loin la meilleure avenue.
Mme Perry Mélançon : O.K.
Parce que, justement, la FNEEQ disait qu'ils avaient déjà présenté à la
commission Cloutier, finalement, leurs recommandations, autant au niveau du
milieu universitaire que dans le réseau collégial, que, finalement, le travail
pouvait être comparable sur certains points. Je ne veux pas parler pour eux,
mais il me semble qu'ils ont dit qu'on serait en mesure d'appliquer en fonction
du projet de loi dans sa... s'il y a des amendements de proposés, en fait,
qu'on soit capables de l'ajouter dans ces travaux-ci. Donc, vous n'êtes pas à
la même place.
Mme Huart (Catherine) : Bien,
en fait, c'est qu'il y a la FNEEQ comme fédération. Il y a aussi la FEC, donc
la Fédération des enseignantes et enseignants de cégep, qui est affiliée à la
CSQ, qui n'a pas participé aux travaux de la commission Cloutier. Il y a aussi
la FECQ, donc la fédération étudiante, qui n'a pas participé aux travaux,
donc... puis ni non plus la Fédération des cégeps, bref, un paquet d'acteurs du
réseau collégial qui n'ont pas participé à cette réflexion-là. Donc, voilà.
L'étendre, à ce stade-ci, à notre avis, est prématuré.
La Présidente (Mme D'Amours) : 20 secondes,
Mme la députée.
Mme Perry Mélançon : Oui,
bien, malheureusement, on m'indique que... je pense qu'il y avait une volonté
de la fédération étudiante d'être là, mais ça n'a pas pu se faire. Donc, on
n'entendra pas, malheureusement, qu'est-ce qu'ils en pensent. Donc, je vous
remercie pour ces éclairages-là.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Je vous remercie, chers invités, pour votre contribution aux travaux
de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin d'accueillir les prochains témoins. Merci infiniment.
M. Beaucher (Vincent) : Bonne
fin de journée.
La Présidente (Mme D'Amours) : Bonne
fin de journée.
(Suspension de la séance à 16 h 19)
(Reprise à 16 h 21)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux. Et je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise
des professeures et professeurs d'université. Je vous rappelle, chers invités,
que vous disposez de dix minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons
à la période d'échange avec les membres de la Commission. Je vous invite donc à
vous présenter et à procéder à votre exposé. La parole est à vous.
M. Portugais (Jean) : Bonjour,
je m'appelle Jean Portugais, je suis le président de la Fédération québécoise
des professeures et professeurs d'université, j'y reviens dans un instant. Je
suis accompagné de Pre Lucie Lamarche, de l'Université du Québec à Montréal, et
du professeur Pierre Trudel, de l'Université de Montréal, pour le compte de
notre fédération. La Fédération québécoise des professeurs d'université représente
8200 professeurs permanents dans les 18 universités québécoises et
donc l'ensemble des syndicats et associations qui en sont membres. Elle a été
fondée en 1991.
Pour nous, le fait que le gouvernement
s'engage dans un processus législatif sur la liberté académique est une très
bonne nouvelle, c'est un moment important de notre vie collective et de notre
réseau universitaire au Québec. Il faut trouver la bonne façon d'accompagner et
de donner le plein effet à la liberté académique de manière à en promouvoir le
rôle et les effets. La liberté académique joue un rôle fondamental dans nos
universités. Elle doit, bien sûr, comme ça a été discuté, prendre plein effet
sur l'enseignement, bien sûr - il y a eu beaucoup de débats publics là-dessus
depuis deux ans - mais aussi, il ne faut pas l'oublier, sur la science, sur la
recherche, sur les services à la collectivité et sur la création et toutes les
activités qui réalisent la mission universitaire.
La liberté académique, ce n'est pas un
problème à résoudre, ce n'est pas une question que l'on doit traiter dans un
comité de discipline, essentiellement, ça doit être une affirmation d'un droit
ouvert. En réalité, c'est un outil de travail qui constitue le fondement des
tâches pour nous, les professeurs, et pour d'autres membres de la communauté
comme sont les chargés de cours et tout le personnel qui, un an avant les
événements de l'affaire Lieutenant Duval de la liberté académique dans les
différentes instances... et on avait même sensibilisé le gouvernement, monsieur
Roberge, à l'époque, de la nécessité de cette chose-là.
Pourquoi c'est un moment important? On
pourrait faire l'image miroir de la liberté de la presse qui... Le gouvernement
l'avait décidé ainsi en 1929, c'était le premier ministre Louis-Alexandre Taschereau
qui avait décidé de faire une loi pour protéger les journalistes et l'exercice
de leurs fonctions. C'est un petit peu la même chose dont on a besoin pour
protéger les fonctions universitaires, une loi affirmative, ouverte, qui
permette de donner plein effet à la mission de l'université de façon à en
garantir l'exercice du travail qui est fait par les collègues et pour le
meilleur bénéfice... Pour l'intérêt public, pour les citoyens. On a besoin des
universitaires, on les a vus pendant la pandémie, durant deux ans, dans les
médias, presque tous les jours, leurs avis éclairés servent les citoyens bien
au-delà de la sphère des étudiants qui sont dans la classe.
Il y a deux éléments qui attirent notre
attention sur ce projet de loi là. On pense qu'il doit être amendé, parce que
dans l'état où il se trouve, là, ce projet-là ne nous plaît pas, mais il
pourrait être amendé. Et on fait toute une série de propositions, mais je veux
aller à l'essentiel de ce qui est demandé par la FQPPU comme amendements sous
deux rubriques : d'abord, des amendements au texte, et ma collègue Lucie
Lamarche va développer là-dessus dans un instant, puis ensuite, des éléments
qui devraient être repris et qui sont absents du texte.
Pour ce qui est des amendements au texte,
la liberté académique devrait prévoir, notamment, dans le préambule de
l'article trois, que le domaine d'activité devrait être mis de côté, parce que
les activités professorales nécessitent, notamment, qu'on puisse permettre la
critique de sa propre institution, de son propre établissement. On peut penser
aussi à d'autres exemples, on y reviendra.
La question de la définition de l'UNESCO,
qui a été reprise par plusieurs, on est d'accord, on pense qu'elle doit être
complétée d'un élément qui est manquant aussi à cet égard-là, et, bien sûr,
aussi les pouvoirs qui sont accordés au ou à la ministre...
M. Portugais (Jean) : ...ils
nous paraissent inusités. Et, pour préserver l'autonomie des universités, il
nous apparaît important bien sûr que la ministre pourrait s'assurer d'un
respect de la liberté académique dans les universités, mais elle n'a pas à
aller, comment dire, jusqu'à infléchir ou modifier le contenu des politiques.
Il faudrait donc trouver une solution appropriée pour ce qui est de l'article 6.
Autrement dit, la liberté académique doit s'appliquer lorsque ça correspond à
la mission de l'université et pas au-delà, donc dans les tâches qui sont
exécutées par les différents membres de la communauté. Donc, ceci complète les
trois principaux amendements au texte, qu'on va demander, et Lucie va
développer.
Et puis je termine en disant rapidement
que les deux éléments qui sont manquants au texte et qu'on voudrait retrouver,
ils sont déjà recommandés par la commission Cloutier - on a participé à cette
commission, on salue son rapport - deux éléments qui nous apparaissent
absolument fondamentaux : l'absence d'une règle d'interprétation
concernant le devoir de loyauté, qui fait en sorte que la liberté académique
n'aurait pas son plein effet si la loi ne prévoit pas une disposition, une
clause interprétative - on y reviendra - et aussi toute la question de
l'obligation de prendre fait et cause pour les institutions, dès lors que les
collègues sont intimés, dans des situations qui sont litigieuses, il faut, pour
pouvoir garantir l'exercice de la liberté académique, que les institutions
puissent le faire. Sinon, on fait place à une espèce d'effet de
refroidissement, ou encore, si vous préférez, une sorte d'autocensure. On ne
veut pas que les membres de la communauté universitaire scientifique
s'autocensurent dans leur prise de parole publique pour les services qu'ils
rendent à la communauté.
Alors, voilà, tracés à grands traits, les
principaux éléments qu'on demande au gouvernement d'intégrer dans le projet
pour le rendre acceptable pour nous, mais bien sûr aussi pour améliorer la
portée de ce projet-là dans le rôle de la défense de la mission de
l'université. Je vais céder la parole à ma collègue, Mme Lucie Lamarche.
Mme Lamarche (Lucie) : Mme
la ministre, monsieur, mesdames les députés, comme le disait
M. Portugais : Célébrons l'enchâssement dans une loi de la liberté
académique. La liberté académique, c'est une bonne nouvelle, et donc, à titre
de bonne nouvelle, ça doit être distingué d'autres comportements qui seraient
plus répréhensibles dans le contexte universitaire.
Toutefois, si la liberté académique est
reconnue dans cette éventuelle loi, ce qui est tout à fait souhaitable pour
plusieurs interlocuteurs, ça signifie que corollairement il faut aussi envisager
les devoirs de l'établissement universitaire. Et je vous amène à la
page 18 du sommaire des recommandations du mémoire de la fédération pour
expliquer, en quelques secondes, comment, selon la fédé, ces devoirs pourraient
être exprimés dans un remodèlement de l'article 4 de l'actuel projet de
loi. Parce que la fédération propose que ce qui soit affirmé à cet
article 4, c'est d'abord l'obligation de l'établissement de s'assurer de
la conformité de l'ensemble de ses règles et politiques ou, dit autrement, de
tout le spectre de la liberté académique, à la reconnaissance de cette liberté.
Alors, on vous en a déjà parlé
aujourd'hui, je répète rapidement : Un membre de la communauté académique,
c'est déjà redevable à l'égard de plusieurs politiques en milieu universitaire.
Pensons au comité éthique, les politiques sur le harcèlement, celles sur les
violences sexuelles, la disponibilité d'un recours auprès du protecteur
universitaire, les comités de programmes, qui sont au cœur de la collégialité.
Et donc ce faisceau de protections n'a pas à être enrichi d'un nouveau comité
qui, finalement, pourrait peut-être jeter un brin de confusion dans le respect
de la liberté académique. Et c'est pourquoi la fédé propose une approche sobre
qui est celle d'utiliser l'article 4 du projet de loi pour affirmer la
barre et décliner les obligations de l'établissement au sein duquel est
exercée, par une large communauté de professeurs et chercheurs, cette liberté
académique. Et c'est pourquoi la proposition de la fédé sacrifie, si j'ose
dire, l'idée de la création d'un conseil et certainement l'éventualité pour ce
conseil de pouvoir imposer des sanctions, mais ne sacrifie pas les obligations
positives qui sont celles de promouvoir la liberté académique.
• (16 h 30) •
À cause de cette approche, il va de soi
que, selon la fédé, l'article 6...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Lamarche (Lucie) : ...du
projet de loi, on l'a déjà entendu aujourd'hui, mérite d'être sacrifié parce qu'il
heurte de plein fouet le principe de l'autonomie universitaire. Et je passe la
parole à mon collègue Trudel, qui va parler des grands absents du projet de loi
no 32.
La Présidente (Mme D'Amours) : Il
reste 45 secondes.
M. Trudel (Pierre) : ...deux
absences, Mme la Présidente, une... Pour s'assurer que la liberté académique
soit efficace, la reconnaissance soit efficace, nous proposons de l'accompagner
d'une obligation de prendre fait et cause, c'est-à-dire que les universités ont
le devoir de protéger, de défendre la capacité effective des universitaires de
prendre la parole. Et nous considérons également qu'il faut comprendre le devoir
de loyauté de la façon de... Il faut comprendre le devoir de loyauté imposé aux
universitaires dans le contexte de la mission de l'université. Et donc, par
conséquent, il faut une clause interprétative qui permettrait, en quelque
sorte, de mettre fin à cette confusion que l'on rencontre très souvent lorsque
vient le temps d'interpréter les différentes normes qui régissent les
universités et qui, souvent, ont tendance à subordonner la liberté
universitaire à une compréhension, à notre avis, erronée d'un devoir de
loyauté. Les universitaires ont une loyauté, ils doivent de la loyauté à l'institution,
ce qui est différent, évidemment, des gestionnaires de l'institution. Et c'est
ce principe-là que nous demandons d'enchâsser.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Maintenant, nous allons commencer la période d'échange. Mme la
ministre, la parole est à vous. Il vous reste un temps de 15 min 44 s.
Mme McCann : Merci, Mme
la Présidente. Je vous salue tous les trois, mais je ne vois pas M. Portugais,
je ne sais pas s'il a des problèmes techniques.
M. Portugais (Jean) : Je
suis là.
Mme McCann : Ah! Vous
êtes là? Bon. Ah mon Dieu! Je ne vous avais pas vu, en haut. Excusez-moi. Oui.
Alors, écoutez, j'apprécie énormément votre
présentation et je dois vous dire que, comme tous les gens qu'on va entendre,
elle est très importante, mais on se comprend, là, vous représentez quand même
un nombre très important de professeurs à l'université, donc très important de
vous entendre. Et je suis... On va manquer de temps, probablement, pour
clarifier tous les éléments que vous nous apportez aujourd'hui. Parce que c'est
majeur quand même, là, vous... Par exemple, au niveau du conseil, quand vous
dites : Nous, on propose de ne pas avoir de conseil ou de comité, bon,
comment on s'assure, à ce moment-là, de l'application du principe de la liberté
académique et universitaire? Concrètement, là, comment on s'assure que ça se
passe bien sur le terrain?
M. Portugais (Jean) : C'est
important que le conseil, s'il y en avait un, ne contienne pas d'éléments
disciplinaires ou de contrôle, de mesures de contrôle. C'est-à-dire qu'à notre
avis le plein exercice de la liberté académique ne devrait pas entrer en
conflit avec les autres éléments de la tâche ou des fonctions qui existent dans
l'université.
Donc, dans la loi, l'article 4, c'est
un conseil. On a compris des débats ce matin qu'il y avait une gradation et que
ça se trouvait à être une espèce de structure d'appel, ce qui est une précision
que, personnellement je n'avais pas auparavant. Sachant cela, il est
probablement possible de modifier l'article 4. Mais, en l'état, tel que...
la lecture qu'on avait de ça, on se disait : Ce n'est peut-être pas
possible de le conserver tel qu'il est. C'est pour ça qu'on a fait une série de
propositions pour modifier le texte, que vous allez retrouver dans notre
mémoire. Peut-être plus techniquement, Lucie, sur ce point?
Mme Lamarche (Lucie) : Mes
excuses, Mme la ministre, un petit débat de micros. Contrairement à d'autres
comportements, hein, dans la cité universitaire, pour lesquels, à juste titre,
on est intervenus à l'aide d'une loi pour les prohiber, les sanctionner et,
bien sûr, promouvoir leur caractère inadmissible, on répète que la liberté
académique, c'est une liberté, elle est fluide, elle est transversale, elle s'exprime
tous les jours dans tous...
Mme Lamarche (Lucie) : ...les
racoins de la collégialité universitaire, c'est difficile d'imaginer une un
établissement rendant compte... voire faisant la police d'une bonne nouvelle
comme la liberté académique. Par contre, ce n'est pas du tout difficile
d'évoquer les responsabilités qui sont à la clé de la reconnaissance par
l'établissement de cette liberté. Donc, c'est peut-être de nature différente de
d'autres comportements ou enjeux que la loi a exploré précédemment dans
d'autres législations et, bien sûr, on pense aussi aux violences sexuelles sur
campus. Ce n'est pas un comportement à prohiber, c'est une liberté à célébrer,
la liberté académique.
Mme McCann : Mais, je
vous remercie. Donc, je comprends que, et vous l'avez dit d'entrée de jeu, vous
êtes tout à fait en accord avec un projet de loi. Vous êtes en accord avec une
loi, avec le principe d'une loi, mais vous suggérez énormément de
modifications. Puis je vous demanderais quels sont en fait les éléments
principaux de ce qui est devenu votre propre mouture du projet de loi. Quels
sont les éléments principaux? Vous avez mentionné, je pense, là, la définition
de l'UnNESCO. Mais quels sont les autres éléments principaux? Parce qu'il y a
quand même des éléments du projet de loi que vous retirez.
M. Portugais (Jean) : Alors,
domaines d'activité, je l'ai mentionné dans mon introduction tout à l'heure. Je
ne sais pas si vous m'entendez bien. À ce moment-là, on a eu quelques problèmes
techniques, mais il y a eu la question...
Mme McCann : Oui, on
vous entend bien, M. Portugais. La question que j'avais pour vous...
M. Portugais (Jean) : ...bien
sûr, de l'article 6. Ça, c'est pour les modifications...
Mme McCann : Oui.
M. Portugais (Jean) : ...les
amendements principaux aux textes existants. Et on demande d'ajouter les
éléments concernant le devoir de loyauté et poursuites-bâillons sur lesquels
mon collègue Pierre pourrait compléter.
M. Trudel (Pierre) : Oui.
En fait, comme le signalent mes collègues, c'est d'une liberté qu'il s'agit, et
ce qu'une... à notre sens, ce qu'une loi comme celle que vous proposez devrait
faire, c'est de l'affirmer, cette liberté et d'expliquer les obligations des
institutions universitaires, des établissements universitaires dès lors que
l'on reconnaît et que l'on veut enchâsser cette liberté. Alors, une des
approches qui nous semble beaucoup plus fructueuse, c'est celle de mettre en
place des mécanismes par lesquels les institutions universitaires seraient
tenues de démontrer que leurs règles internes, leurs modes de fonctionnement
sont compatibles avec la liberté académique. Et les deux autres approches, les
deux autres éléments qui nous semblent important pour s'assurer que cette
liberté académique est effectivement protégée, bien, c'est précisément cette
obligation de prendre fait et cause et cette balise... et ce balisage du devoir
de loyauté pour tenir compte du fait que les universitaires, ici, ils
participent à l'institution universitaire, à son fonctionnement et ils doivent
par conséquent avoir la liberté de critiquer cette institution universitaire,
mais de critiquer également tous les pouvoirs qui sont susceptibles d'exister
dans la société et qui pourraient avoir différents intérêts à tenter de
domestiquer ou d'encadrer, ou de baliser la capacité des universitaires de
prendre la parole pour expliquer, prendre la parole dans un contexte de service
public.
Les universitaires sont au service du
public et donc au service des gens qui financent les universités. Mais, pour
rendre ce service, bien, il leur faut des coudées franches. Il leur faut une
capacité, il leur faut... il faut leur garantir que s'ils sont poursuivis, ils
ne seront pas seuls à se défendre, l'institution sera là pour prendre fait et
cause en leur nom et pour les défendre. Et il faut également baliser et
redécouper le devoir de loyauté qui est prévu dans le Code civil et qui
justement impose aux universitaires d'être loyaux. Mais c'est loyaux à quoi?
Loyaux à l'institution, à l'établissement universitaire comme institution et
non pas loyal au gestionnaire ou aux personnes qui, à un moment ou à un autre,
sont appelées à diriger l'établissement.
Et donc, voilà deux façons de faire en
sorte que la liberté universitaire est plus qu'un mot, plus qu'un principe de
liberté qui irrigue toutes les activités universitaires et elle en porte des
conséquences et des obligations pour les établissements.
• (16 h 40) •
Mme McCann : Merci
beaucoup. Alors, j'en comprends de la réaction aussi de monsieur Portugais
qu'étant donné la...
Mme McCann : ...L'éclairage
que je vous ai apporté... Ou qu'on a apporté, là, au cours de nos consultations
aujourd'hui sur le conseil... La fonction du conseil, qui est un dernier
recours, on va le dire comme ça, rapidement, peut-être ça a modifié un petit
peu votre réflexion, mais je n'irai pas jusqu'à dire que ça modifie votre
position complètement, mais ça vous porte à réflexion. C'est ce que j'ai
entendu, là, de vos propos, monsieur portugais.
Parce que la question que je veux vous
poser, par exemple, je reviens à la base, de votre expérience à vous et de vos
membres, est-ce que vous avez une... vous avez sûrement une lecture de ce qui
se passe sur le terrain, le rapport Cloutier nous en a donné un éclairage avec
le sondage que la commission a fait auprès des professeurs et des étudiants.
Est-ce qu'on peut avoir votre point de vue là-dessus, au niveau de
l'autocensure dans les universités? Est-ce que vous avez des échos du terrain
là-dessus? Je présume que oui mais je veux vous entendre.
M. Portugais (Jean) : Je
peux vous dire, Mme la ministre, qu'on peut... Qu'on est en état de confirmer
ce que vous avez avancé et ce que la Commission Cloutier avance concernant
l'autocensure à l'égard de l'enseignement. Mais notre préoccupation pour la
liberté académique, elle est plus profonde et plus large parce qu'elle touche
aussi les autres aspects. Et comme les collègues la FNEEQ l'ont souligné ce
matin, peut-être les dangers les plus grands proviennent, en fait, de
l'entreprise privée, des pressions externes à l'université sur la question, par
exemple, du financement de la recherche, sur les questions de probité, sur les
questions de fonctionnement, sur les questions d'autonomie.
La liberté académique est une notion large
qui structure l'ensemble de l'université. Protéger l'exercice de l'enseignant
dans la classe est une bonne chose, c'est le geste législatif que vous avez
voulu poser, on vous invite à l'élargir pour que la liberté académique prenne
son plein effet dans l'ensemble des sphères d'activité de l'université, ce qui
inclut recherche et service, etc. Ce qui veut dire que, pour nous, oui, on a
des cas pour l'enseignement, mais on est encore plus de cas... Puis vous pouvez
consulter la littérature, il y a un excellent rapport de l'Association
canadienne des professeurs d'université qui a été publié il y a quelques mois,
qui fait état de l'ensemble des violations qui ont eu lieu, et on peut voir que
dans le financement de la recherche en particulier, là, les pressions, soit de
l'entreprise, soit de toute autre forme de pression externe à l'université,
c'est... Celles-ci sont prises dans une espèce de tirs croisés ou de feu
extérieur puis j'en veux pour preuve le... Et peut-être vous donner un peu de
contexte de cette réflexion-là.
Je pense qu'il y a dix ou 20 ans on n'avait
pas ces préoccupations-là, on discutait, les professeurs d'université, entre
nous, de cette question de liberté académique. Qu'est-ce qui a changé, qui rend
l'intervention législative nécessaire et importante aujourd'hui? Bien, c'est
l'évolution de la société et des pressions externes, notamment, le fait qu'on
vit dans une société post-factuelle où chacun peut, notamment, via les réseaux
sociaux, faire circuler toutes sortes de contrevérités et les professeurs
d'université se retrouvent au centre de ça et ont besoin d'une protection
importante de leur outil principal de fonctionnement qui est la liberté
académique. Donc, ça veut dire pas seulement les discours d'opinion, mais ça
veut dire aussi les pressions externes.
Sans faire de la politique fiction, on
voit que l'acquisition du réseau Twitter par un grand argentier, un puissant
milliardaire américain, en ce moment, va en conditionner le fonctionnement.
Est-ce que la prise de parole publique va être préservée? Est-ce qu'il ne faut
pas se doter d'outils pour protéger le rôle que l'on joue dans la société et ne
pas prendre les collègues universitaires dans un tir croisé d'opinions sur la
place publique? Ça va bien au-delà de la salle de classe, comprenez-moi bien.
Alors, on a une préoccupation là-dessus
pour le financement, pour le fonctionnement de l'université, pour en assurer...
Finalement, assurer l'autonomie de l'université. Et le meilleur geste qu'on
peut poser, c'est de renforcer la liberté académique et je pense que c'est ça,
l'intention première. C'est comme ça qu'on comprend l'intention du législateur,
de vouloir faire en sorte que la liberté académique soit pleinement reconnue
puis trouve toute sa portée, on vous invite simplement à le faire pour
l'ensemble des sphères, pas seulement pour la question de l'enseignement et de
la classe. Je ne sais pas si ça vous aide à saisir un petit peu notre
réflexion.
Mme McCann : Ah! bien,
tous vos commentaires nous aident, Monsieur Portuguais, mais je dois vous dire
que je suis toujours un petit peu étonnée, parce que vous n'êtes pas le seul
qui avez soulevé ça. Mais dans le projet de loi, on ne parle pas seulement
d'enseignement, on parle de recherche, de création dans toutes les missions de
l'université. Je pense que vous apportez aussi d'autres dimensions dans votre
discours, là, je le comprends très bien, mais on fait quand même référence à
l'ensemble des activités faites par des universitaires, là, je vais le dire
comme ça. Mais on n'aura pas le temps, peut-être, de vider la question parce que
j'aimerais donner la parole à mes collègues, là, qui aimeraient vous poser des
questions. Mme la Présidente.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais céder la parole à la députée d'Huntingdon pour un temps de 2 min 50 s.
• (16 h 50) •
Mme IsaBelle : O.K.,
alors je vais essayer d'aller rapidement. Écoutez, j'ai bien lu votre...
Mme IsaBelle : ...je
comprends que vous demandez l'autonomie, hein, des institutions, vous dites,
mais qu'il y a un devoir des institutions. Vous précisez qu'il faut faire
confiance aussi à l'institution, mais on sait qu'il y a déjà eu un dérapage,
hein? Puis vous dites, en plus, que les universitaires sont loyaux envers leur
université et la mission, et vous rappelez que cette liberté comprend le droit
de critiquer la gestion même des universités.
Et là je vais vous emmener à un point de
la Fédération de la recherche et de l'enseignement du Québec. Parce que, là, c'est
comme si vous nous dites : Supprimez l'article 6, pas de comité, on doit
faire confiance à l'institution, je suis d'accord, on peut faire confiance à l'institution,
mais, dans ce cas-là, qu'est-ce que vous dites de ce que propose la Fédération
de la recherche et de l'enseignement du Québec quant à une formation de vos
gestionnaires? Moi, je vais vous lire ce qu'a proposé tantôt... c'est une
recommandation qu'ils font, la fédération. Et vous avez dit tantôt, aussi...
vous avez dit de dissocier l'institution des gestionnaires, mais là j'ai un peu
de difficultés à comprendre ça, là. L'institution, elle est quand même gérée
par les gestionnaires. Puis là, eux, ce qu'ils suggèrent, ou elle, la
fédération, c'est de voir à la mise sur pied d'une formation obligatoire pour
les gestionnaires de tous les paliers, les directions départementales,
facultaires ainsi que les conseils d'administration. Qu'est-ce que vous pensez
de ça? Si, moi, vous me dites... Moi, je suis un prof d'université, vous me
dites : Pas de comité, mais faites confiance à votre institution. Wo!
Rassurez-moi.
M. Trudel (Pierre) : En fait,
dans notre mémoire, on reconnaît la nécessité de mettre en place des mesures de
sensibilisation, d'information, la mise en place d'outils pédagogiques. Par
contre, dans les universités, il y a déjà une pluralité d'instances et de
comités qui sont chargés de résoudre les multiples conflits, les multiples
situations dans lesquelles peut être impliqué, en totalité ou en partie, la
liberté académique. Or, ce que l'on met de l'avant, c'est de s'en remettre
autant que faire se peut au fonctionnement de ces comités, qui, pour la plupart
des situations, fonctionnent déjà, mais en ajoutant des mécanismes qui vont
forcer les institutions à s'assurer que l'ensemble des comités, des mécanismes
qui existent déjà fonctionnent de manière à respecter la liberté académique, c'est
ça, la différence d'angle, puisqu'il nous semble assez peu réaliste de s'imaginer
qu'on pourrait instituer une sorte de comité unique qui aurait pour vocation de
régler les questions...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
infiniment. C'est tout le temps que nous avions pour le premier échange, bloc d'échange.
Maintenant, je vais céder la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys pour
une période de 11 minutes.
Mme David : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Alors, bonjour, tout le monde. Écoutez, je vais continuer un peu
sur ma recherche, parce qu'une note en bas de page, à la page 48 du rapport
Cloutier, le rapport... enfin, qui a un nom plus long que ça, en note en bas de
page, 179, la note infrapaginale : «Il faut également s'interroger sur des
tendances récentes à ajouter aux demandes d'octroi de subvention des conditions
non académiques n'ayant aucun lien avec l'expertise scientifique. Certaines de
ces conditions peuvent constituer en fait des intrusions dans les choix et
opinions personnelles sur des sujets socialement débattus. Le gouvernement du
Québec aurait avantage à porter une attention particulière à ces nouvelles
tendances.» Alors... Et dans le texte c'est dit : «Cette liberté de choix
est un fait inhérente à la liberté universitaire qui découle directement de la
mission des universités.» On est au cœur des enjeux de la recherche et des
bailleurs de fonds.
En quoi trouvez-vous que le projet de loi...
Parce que la ministre a répondu : On en parle, de la recherche, mais en
quoi vous trouvez que ce projet de loi là protège les enjeux abordés par le
rapport Cloutier?
Mme Lamarche (Lucie) : Eh
bien, il n'est pas impossible que, dans le contexte actuel, où se complexifient
et s'échafaudent des structures et des infrastructures de recherche inter, multidisciplinaires,
privé, public, interétablissements... bien, il n'est pas impossible que le ou
la chercheure se retrouve bien seul au monde à revendiquer sa liberté
académique, voire un peu contrainte peut-être de faire certains compromis,
s'agisse-t-il de propriété intellectuelle, s'agisse-t-il de distribution, diffusion
des données, voire, dans des cas les plus malheureux, d'une certaine influence
exercée sur les membres de la communauté universitaire en matière de recherche.
Cette solitude, si j'ose dire, ou cette inquiétude, je pense que les sondages
ont révélé...
Mme Lamarche (Lucie) : ...beaucoup
d'inquiétudes, bien, il faut un levier pour l'atténuer, l'organiser et faire en
sorte que l'établissement soit présent pour y répondre.
Et donc il nous apparaît que ces
articles 3 et 4 du projet de loi n° 32, ça pourrait un peu devenir le
Yin et le Yang de l'affaire, c'est-à-dire la dimension recherche, oui, non
seulement c'est un aspect de la liberté académique, mais c'est un aspect
parfois périlleux pour le chercheur de la liberté académique. Et, de manière
corollaire, à l'article 4, il y aurait donc, dans les obligations qui sont
faites aux établissements, le devoir de se soucier et de reconnaître les
enjeux, hein, les optimistes parleront d'enjeux, les pessimistes parleront de
dangers, mais c'est un peu l'un et l'autre. Dans le contexte québécois, on a
beaucoup plus parlé de la salle de classe, dans les dernières années, les
derniers mois, peut-être parce que les chercheurs sont trop occupés ou trop
préoccupés. Mais, comme le dit si bien l'article 3 du projet de loi, c'est
trois piliers importants la liberté académique, c'est l'enseignement, la
recherche et les services aux collectivités.
Mme David : Merci
beaucoup. M. Portugais, pour une rare fois peut-être, la FQPPU est pas mal
d'accord avec le BCI sur une approche sobre, sobre de la liberté académique et
surtout de son encadrement. Alors, vous êtes d'accord avec le BCI qui va venir
nous dire : Le conseil, pas sûr que c'est nécessaire; et les sanctions,
pas sûr non plus. On a déjà tout ça dans le fonctionnement interne et dans tous
les multiples règlements qui régissent déjà les universités.
Alors, là-dessus, qu'est ce qu'on fait?
Parce que vous êtes clairs, là, à la page 6, d'ailleurs je salue votre
document d'appoint, je dirais, qui résume bien les amendements. C'est clair,
l'article 4, il saute pas mal puis l'article 6 aussi.
L'article 4 ne garde qu'une fonction «conseil et formation», ce avec quoi,
je pense, on peut tous être d'accord, mais l'alinéa un, deux, trois est enlevé.
Puis après ça, oui, mesures de sensibilisation et d'information et après ça,
bon, responsabilité de l'établissement, les outils pédagogiques, donc des
choses qui ne font pas trop mal : Conseil, formation, sensibilisation,
etc. Là-dessus, les recteurs vont venir nous dire la même chose et la même
chose pour l'article 6, ça, c'est l'unanimité totale de tout le monde.
Alors, qu'est-ce que vous dites... qu'est
ce que vous avez à dire de plus sur l'article 4, par exemple? ...de ce que
la ministre a apporté, peut-être que ça peut être en dernier recours que le
conseil est saisi d'une plainte.
M. Portugais (Jean) : Bien,
effectivement, on n'avait pas cette lecture-là avant les travaux de ce matin.
Et donc la fédération se rend disponible auprès du gouvernement pour examiner
des espèces de formes de solutions alternatives, à savoir les formations - vous
en avez parlé - l'accompagnement que la ministre pourrait jouer auprès des
universités via l'article 6 plutôt que de lui donner un pouvoir de
quasi-tutelle qui est actuellement celui qu'on trouve dans la formulation de
l'article 6. Il y a sans doute façon de modifier le texte pour faire en
sorte que le gouvernement accompagne les universités dans un rôle d'étude,
d'examen de la bonne marche de la liberté académique au sein des universités.
Alors, ça, ça pourrait faire l'objet de discussions tout prochainement.
Quant à l'article 4, évidemment dans
son état actuel, avec l'article 6 tel que rédigé, on a pris ça comme un
tout. Si on les divise puis on modifie les équilibres changeants, il est
possible probablement d'examiner les choses dans une autre perspective. C'est
ce que je comprends de ce que vous dites et de ce que la ministre a indiqué
plus tôt aujourd'hui. On pourrait, par exemple, si on fait un peu de millage
dans cette direction, on pourrait examiner qu'est-ce que ça pourrait donner si
les universités avaient un accompagnement qui leur permette de documenter
l'exercice de la liberté académique, un peu comme il y avait dans la loi, que
vous avez vous-même proposée, Mme David, sur les violences à caractère
sexuel. C'est à dire que cette loi-là... Mes collègues juristes pourront
peut-être compléter, cette loi-là, avec d'autres types de fonctionnements, et,
par exemple, obligeait les universités à faire une sorte de reddition de
comptes, une fois par année, sous forme de rapport et, etc. sur les actions qui
sont prises pour s'assurer du bon suivi. Évidemment, ici, il ne s'agit pas de
formes répréhensibles - on l'a dit tantôt - des actions...
M. Portugais (Jean) : ...devraient
être prises parce que la liberté académique, c'est un droit positif. Mais, tout
de même, on peut comprendre que le législateur peut avoir une volonté
d'examiner pour regarder ce que ça donne, si j'ose m'exprimer dans ce langage
familier, au bout d'un an, au bout de deux ans, au bout de trois ans. Puisque
c'est une loi qui est innovante, ce n'est pas une mauvaise idée de regarder ce
que ça donne. Et ça, ça pourrait être sous forme de rapports, de reddition de
comptes additionnels sur les effets de la loi. Ce qu'on veut absolument éviter,
nous, de notre côté, pour être très clair, c'est les effets punitifs, c'est les
corrections, c'est l'aspect disciplinaire qui se trouve implicitement dans la
question des sanctions ici qu'on retrouve dans la loi. Si on enlevait ces
aspects-là, sans doute qu'on peut examiner autrement les choses. Mais, pour
l'heure, on s'est prononcés sur le projet qui a été soumis. Donc, je me suis
permis d'ouvrir un peu le dialogue avec la suite de votre question. Peut-être
que Pierre peut compléter si nécessaire. Pierre.
M. Trudel (Pierre) : Oui.
Bien, j'ajouterais simplement qu'il y a quand même... dans notre mémoire, on
recommande, quand même, de maintenir un devoir de tous les établissements, de
s'assurer de la conformité de l'ensemble de...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...M.
Trudel.
M. Trudel (Pierre) : Oui?
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
suis désolée. On vous entend. Probablement qu'un de vos collègues n'a pas fermé
le micro ou...
Une voix : ...
M. Trudel (Pierre) : Est-ce
que les micros sont fermés? Ton micro. Ah! O.K. Ça va mieux maintenant?
La Présidente (Mme D'Amours) : ...Oui,
merci.
M. Trudel (Pierre) : En fait,
tout simplement pour ajouter que la recommandation que le mémoire de la FQPPU
fait, c'est que, quand même, c'est de maintenir la phrase introductive de
l'article 4, c'est-à-dire une obligation de l'établissement de démontrer, de
faire en sorte, de s'assurer que l'ensemble de ces pratiques, règlements et
procédures internes sont compatibles avec la liberté universitaire. Ce qui
n'est pas rien comme obligation dans la mesure où ça implique, finalement, de
passer en revue, là, tout un ensemble de pratiques et de procédures pour
chacune des institutions, mais selon leur logique propre, selon leurs
traditions, selon leur configuration, qui ne sont pas toujours les mêmes, les universités
au Québec sont très différentes les unes des autres.
Mme David : Merci beaucoup.
Et je pense, Monsieur Portuguais, vous ouvrez la porte à continuer la
collaboration avec le ministère. Il va y avoir une dizaine de jours, là, où on
ne siégera pas. Et je pense qu'à la lumière de certaines précisions qui sont
apportées, effectivement, vous pourriez continuer cette collaboration. Parce
que, dans les principaux éléments à modifier, quand vous avez posé... quand la
ministre va poser la question... vous et d'autres, là, on est à peu près à six
points d'achoppement, là : le domaine d'activité à enlever; l'article 6,
unanimement, à enlever; «poursuite bâillon», «prend fait et cause», pour
l'université, prendre fait et cause pour le personnel... la personne qui est
poursuivie; quatrièmement, baliser le devoir de loyauté et pouvoir critiquer
l'administration; cinquièmement, changer quelque «fine-tuning», là, excusez
l'anglicisme, dans les considérants; et, sixièmement, l'autonomie
universitaire, l'article 1 b, page V, en chiffre romain, du rapport Cloutier,
que les recteurs vont venir demander et supplier d'ajouter l'autonomie
institutionnelle. Quand on met tout ça ensemble, là, on commence à avoir
quelque chose, je pense, qui est beaucoup plus... qui rallie beaucoup plus. Et
je voulais vous entendre là-dessus.
La Présidente (Mme D'Amours) : M.
Portugais
M. Portugais (Jean) : Oui, je
trouve très important, personnellement, que madame David... d'autant plus que,
si on retourne au document de l'UNESCO de 1997, il y a d'autres articles qui ne
sont pas devant nous aujourd'hui, mais qui spécifient que l'autonomie
universitaire doit être garantie et que la liberté académique en est, en
quelque sorte, la condition d'exercice. Donc, il y a une... C'est bien
expliqué, dans la recommandation de 97, qu'il y a une forme de synergie très
importante entre ces deux notions-là. Donc, évidemment, on est d'accord avec
cette idée d'un renforcement mutuel, mais jamais au détriment l'un de l'autre.
Et d'ailleurs l'UNESCO va jusqu'à préciser...
La Présidente (Mme D'Amours) : M.
Portugais. Je suis désolée, je dois vous couper, on a terminé le bloc
d'échanges. Merci beaucoup de votre compréhension. Et je cède maintenant la
parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve pour une durée de 2 min 45 s.
M. Leduc : Bonjour. Terminez
donc votre lancée, Monsieur Portugais.
M. Portugais (Jean) : Simplement
pour dire que la liberté académique, telle que définie dans UNESCO... on dit
que l'autonomie universitaire ne saurait avoir pour effet de limiter la portée
de la liberté universitaire. C'est un des articles... je ne sais pas par coeur
le numéro, là, mais ça se trouve dans UNESCO 97. C'est ce que je voulais dire.
• (17 heures) •
M. Leduc : Merci. Bonjour à
vous trois. Toujours un plaisir de vous voir. Passer en troisième, c'est faire
le deuil de plusieurs très bonnes questions qui ont été posées précédemment. Je
me posais la question, plus tôt aujourd'hui, avec un autre groupe : Est-ce
qu'on a affaire, essentiellement, à un problème de sciences humaines? Est-ce
que l'enjeu de la liberté académique se reflète aussi dans...
17 h (version non révisée)
M. Leduc : ...le génie, les
sciences, les arts, la gestion. Est-ce qu'on parle de tout ça aujourd'hui parce
qu'on a un problème assez spécifique en sciences humaines?
M. Portugais (Jean) : Pas du
tout. C'est transversal à l'ensemble des secteurs d'activité. On a des
dizaines, voire plusieurs dizaines de départements ou de facultés, dans mon
université, l'Université de Montréal, il y en avait 60, et dans les autres
universités également. Donc, ça touche tous les domaines. La liberté académique
n'est pas spécifique à un secteur d'activité. Elle existe partout. Elle ne
prend pas toujours les mêmes formes, les mêmes déploiements. C'est pourquoi,
dans la loi, on doit trouver une définition suffisamment large pour qu'elle
puisse s'appliquer à toutes et tous de manière uniforme. Et le bénéfice, c'est
aussi qu'à l'intérieur de notre réseau, on a 18 universités au Québec, le fait
de légiférer là-dessus va permettre d'avoir, comme l'ont précisé les chargés de
cours ce matin, une définition universelle au Québec. Et ça, c'est un ajout
important à notre fonctionnement collectif au Québec.
M. Leduc : Merci. J'aime
beaucoup votre dernière suggestion, là, le nouvel article : «Si un membre
du personnel enseignant ou de recherche est poursuivi en justice par un tiers
pour un acte qu'il a posé ou omis de poser dans l'exercice de ses fonctions, l'université
prend fait et cause pour lui, sauf si cette personne a commis une faute
lourde.» On disait plus tôt que, parfois, les directions d'université hésitent
à soutenir leurs membres professoraux, entre autres. Pourquoi c'est comme ça?
Pourquoi les directions d'université hésitent?
M. Portugais (Jean) : Il y en
a beaucoup. Moi, j'ai été président de syndicat longtemps. J'accompagne des
présidents de syndicats partout au Québec. Les institutions sont frileuses
parfois, et ça prend des formes dramatiques. On a connu au Québec, au Canada et
à l'étranger de nombreux cas depuis 30 ans où la recherche ou l'enseignement ou
les activités universitaires, lorsqu'elles font l'objet d'un litige, l'université
peut hésiter à prendre fait et cause, alors que dans certaines conventions
collectives, c'est garanti et pas dans d'autres. Un des effets de la loi serait
d'uniformiser les protections pour l'ensemble des 8 200 profs au Québec et des
chargés de cours également. Ça me paraît tout à fait majeur qu'on puisse le
faire et qu'on pose un geste...
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci,
Monsieur.
M. Portugais (Jean) : ...pour
leur permettre de faire leur travail. Merci.
M. Leduc : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup. Donc, je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé, toujours
pour une période de deux minutes 45 secondes.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Bonjour. Merci d'être présents et de nous éclairer sur ces enjeux-là, notamment
tout le volet de la recherche, pour vous, c'est très important. Et je voulais
peut-être vous entendre, comme première question, sur la pression qui est
exercée dans ce volet-là, sur les professeurs notamment. Est-ce que vous avez
des exemples connus, par exemple, du secteur privé ou du gouvernement qui
pourraient permettre d'alimenter les discussions, réflexions?
M. Portugais (Jean) : Il y en
a beaucoup. Il y a des ouvrages qui ont été publiés là-dessus. Là, au Québec,
il y a l'affaire... assez récemment, à Québec, qui est bien connue, et il y en
a eu d'autres. Elles ne sont pas toutes publiques, ces situations, mais elles
sont importantes. Et, lorsqu'un professeur rencontre ça... Moi, j'ai accompagné
un professeur en pharmacologie qui faisait l'objet d'une poursuite bâillon d'une
entreprise pharmaceutique qui voulait le faire taire parce que ses résultats
déplaisaient à l'industrie pharmaceutique, la personne s'est trouvée dans des
beaux draps, puis l'université a hésité pendant de longues années avant de
finalement prendre la défense. Mais il était trop tard. Les effets délétères de
la poursuite bâillon avaient fait leur œuvre un peu funeste. Alors, c'est très
important, si on veut conserver un corps professoral actif, il faut en garantir
des protections.
Donc, c'est le privé parfois, c'est plus
rarement le gouvernement lui-même, mais c'est souvent des forces extérieures à
l'université. Il ne s'agit pas de dire que le travail qu'on fait n'est pas
redevable. On passe notre temps et notre vie à faire de la reddition de
comptes, les profs, et à rédiger des rapports. Mais toujours est-il qu'il faut
que l'exercice de la recherche, de la science se fasse à l'abri des influences
indues. Et l'idée d'avoir une clause dans la loi qui le protège nous apparaît
absolument nécessaire à cet égard.
Mme Perry Mélançon : Merci.
Justement, garantir la protection sans toutefois donner trop de pouvoir
directement dans les mains de le ou la ministre, comment est-ce qu'on peut
arriver à faire appliquer la loi dans cette condition-là?
M. Portugais (Jean) : Bien,
je pense que les universités devraient avoir, comme l'a suggéré Pierre tantôt,
l'obligation de faire en sorte que la liberté académique prenne plein effet
dans toutes les sphères d'activité, dans tous les comités et dans toutes les
situations qui sont rencontrées. Autrement dit, la liberté académique, ce n'est
pas quelque chose qui se traite dans une case spécifique, avec un comité qui
lui est uniquement dédié. Mais la loi pourrait trouver dans une affirmation un
peu ouverte, comme le recommandait d'ailleurs madame Bissonnette dans le
rapport Bissonnette-Porter, il y a presque 10 ans déjà, une expression
généreuse qui fasse en sorte que la liberté...
M. Portugais (Jean) : ...soit
un principe directeur, en quelque sorte, de l'ensemble de l'activité. Si ça,
c'est énoncé dans la loi, ça nous suffit, comme facteur de protection, nous,
les acteurs de l'université que nous représentons.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vous remercie pour votre contribution à la commission et j'ajourne les
travaux... pas j'ajournée les travaux, je suspends les travaux pour recevoir
nos prochains invités. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 6)
(Reprise à 17 h 12)
La Présidente (Mme D'Amours) : Nous
reprenons nos travaux et je souhaite la bienvenue à M. Alexandre Cloutier,
président Commission scientifique et technique indépendante sur la
reconnaissance de la liberté académique dans le milieu universitaire. Il est
accompagné de Mme Chantal Pouliot et, en visioconférence, de M. Yves Gingras.
Alors, vous disposez de dix minutes pour votre exposé, après quoi nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Donc, la parole
est à vous.
M. Cloutier (Alexandre) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Mme la ministre, Messieurs, Mesdames les députés,
membres du personnel, bonjour à chacun d'entre vous. Alors, c'est un immense
honneur pour nous, les membres de la commission, d'être devant vous
aujourd'hui. Je vous dis d'emblée que les propositions qui vous seront faites
sont signées par les cinq membres de la commission. Et on va donc vous
présenter, là, quelques éléments qui méritent, à notre point de vue, une
bonification au projet de loi actuel.
D'abord, vous rappeler brièvement le
mandat qui avait été confié à la commission. Le principal mandat, c'était de
déterminer le meilleur véhicule pour protéger et promouvoir la liberté
universitaire. Et vous rappeler que la commission s'est quand même réunie
46 fois entre le 25 mars et le 2 décembre 2021. On a procédé à
une vaste consultation à la fois auprès des professeurs d'université, mais
aussi auprès des étudiants. Et nous avons aussi tenu des audiences publiques et
reçu de nombreux mémoires. Je tiens aussi à préciser que l'échantillon utilisé
pour la cueillette de données est représentatif du corps professoral.
Quelques faits saillants du sondage du
corps professoral et des étudiants, question de se rafraîchir la mémoire. Ce
sont 60 % des membres du corps professoral sondé qui affirment s'être
censurés en évitant d'utiliser certains mots. 28 % des étudiants affirment
s'être censurés dans le cadre de leurs études. 82 % des membres du corps
professoral considèrent qu'ils devraient pouvoir utiliser tous les mots utiles
à des fins universitaires. Et il n'y a seulement que 14 % des membres du
corps professoral qui considèrent que les mesures sur la liberté universitaire
devraient relever uniquement de leur institution. Quelques constats dans le
cadre de nos travaux. D'abord, oui, il existe une protection de la liberté
universitaire dans les conventions collectives. Mais ce qu'on constate, c'est
qu'il y a des divergences quant à la signification et quant à la portée. On
retrouve des éléments divergents, par exemple sur le droit de critiques des
institutions, sur qui sont les bénéficiaires de la liberté universitaire, sur
l'obligation de prendre fait et cause. On retrouve aussi des mécanismes de
règlement de litiges qui sont carrément déficients. Procédure de grief, par
exemple, qui est évidemment inapplicable aux étudiants, qui nécessite aussi une
intervention de l'employeur pour qu'un grief puisse être déposé. Il y a aussi
une gestion, en quelque sorte, qui dépend un peu au bon vouloir, là, des
administrations en place. Puis on réalise aussi la portée très limitée des
déclarations ou des déclarations de principe. Alors, il y a aussi des
conventions collectives qui sont carrément muettes sur l'enjeu de la liberté
universitaire.
Le projet de loi n° 32 reprend
plusieurs de nos recommandations. D'abord, la loi, hein, pour nous, les membres
de la commission, c'est un véhicule qui est nécessaire, qui permet d'avoir une
protection qui est uniforme pour l'ensemble des établissements au Québec. Donc,
une seule définition de la liberté universitaire qui s'applique à l'ensemble
des institutions. Le projet de loi reconnaît la mission de l'université ainsi
que les conditions d'exercice, dont l'autonomie des universités,
l'article 1 et le préambule, on y reviendra avec quelques précisions à
apporter. Le projet de loi identifie aussi les bénéficiaires de la liberté
universitaire à l'article 3. Là aussi, on aura quelques précisions à
apporter. Et elle définit aussi les mécanismes des litiges par la création d'un
conseil. On va proposer, dans quelques minutes, un comité. Elle prévoit,
enfin...
M. Cloutier (Alexandre) : ...l'adoption
d'une politique spécifique afin de promouvoir la liberté universitaire. La
première recommandation qu'on veut vous faire, c'est de reprendre la définition
de la liberté universitaire telle qu'on vous le propose dans le rapport.
Honnêtement, je pense qu'à la lumière de ce qu'on a entendu aujourd'hui ça
réglerait beaucoup d'enjeux si on reprenait intégralement la définition qui
vous a été présentée dans le rapport. Donc, essentiellement, on reprend, là,
les propos qui viennent de vous être présentés par la FQPPU en ce qui a trait,
par exemple, au domaine d'activité, on pense que c'est une limitation inutile
et on devrait davantage axer la réflexion sur la démarche universitaire pour
l'atteinte de la mission de l'université, qui est la bonne approche, à notre
point de vue, parce que c'est beaucoup trop complexe, je pense, d'entamer un
débat sur le domaine d'expertise. Si vous le souhaitez, on pourra vous donner
quelques exemples de complexité que ça pourrait apporter. Ensuite, on souhaite
réintégrer le concept de création dans la définition de la liberté
universitaire. Probablement juste une omission. Puis enfin, préciser le droit
du bénéficiaire, là, d'exprimer son opinion, hein, sur l'établissement. Le
monde universitaire, dans la définition de la liberté universitaire, ça
comprend ce droit de critique de l'institution et ça nécessite, on pense,
également une précision.
Maintenant, on vous propose aussi de
modifier l'article 4, là, la création d'un conseil. On préfère, nous,
l'expression «comité», là, qui nous apparaît plus conforme dans l'environnement
universitaire. Je tiens aussi quand même à préciser, hein, dans notre rapport,
ce qu'on souhaitait, c'était la création d'un comité pour régler les enjeux en
lien avec la liberté universitaire mais uniquement en cas de litige, donc une
fois que les parties sont insatisfaites du résultat. Et, pour préciser, dans le
fond, cette mécanique, on a soumis, dans le cadre de nos travaux, un tableau en
annexe qui est la dernière page, en fait, de notre rapport qui montrait un peu
la procédure à suivre avant d'en arriver à un comité, avant que le comité,
finalement, entre en action au sein des institutions. Donc, ça permet, grosso
modo, à chaque institution, il arrive un événement, bien, de trouver une
solution à l'interne. Mais, en cas d'insatisfaction d'une des parties, là,
c'est le dépôt formel de la plainte et là une mécanique, là, qui s'en suit.
Évidemment, on pense qu'avec l'adoption de la loi et la définition de la
liberté universitaire on va régler essentiellement une grosse partie du
problème avant d'en arriver à la mise en oeuvre comme telle du comité.
Quant à l'article 6, nous aussi, on
vous invite peut-être à revoir la formulation quant à cette nécessité.
Essentiellement, nous, ce qu'on pense, c'est que vous devriez vous inspirer de
la loi sur les violences à caractère sexuel dans laquelle, grosso modo, on
permettait au gouvernement d'intervenir en cas de violation de la loi.
Essentiellement, c'est un peu normal qu'un gouvernement souhaite s'assurer que
la loi soit respectée, mais, en même temps, il faut s'assurer de ne pas être
trop intrusif dans le concept d'autonomie des universités.
Enfin, j'aimerais vous mentionner
également qu'en ce qui a trait aux considérants il y a peut-être une
reformulation, là, qu'on pourrait apporter aux considérants 3 et 4,
simplement réaffirmer qu'il existe des conditions essentielles que sont l'autonomie
et la liberté universitaire. Mais, en fait, la façon dont c'est formulé, on
dit, essentiellement, que ça découle de la recommandation de l'UNESCO. Mais, en
fait, les conditions essentielles ne découlent pas de l'UNESCO mais découlent
plutôt de la mission de l'université. Donc, ce qu'on vous propose au quatrième
considérant, en fait, c'est de... pardon, de remplacer le considérant 3 et
4 par celui-ci, essentiellement : «Considérant que l'autonomie
universitaire et la liberté universitaire sont des conditions essentielles à
l'accomplissement de cette mission;», et de placer cette recommandation-là en
numéro 2.
Alors, voilà essentiellement ce que les
membres de la commission souhaitaient soumettre à votre attention aujourd'hui.
Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci
beaucoup pour votre exposé. Nous allons commencer nos échanges avec la ministre
pour une période de 16 min 30 s.
Mme McCann : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je veux saluer vraiment monsieur Cloutier, madame Pouliot et
monsieur Gingras, là, qui est sur écran, et vous remercier d'entrée de jeu de
tout le travail que vous avez fait au niveau de la commission, alors remercier
aussi les autres membres de la commission. Ça a été pour nous essentiel, hein,
ce que vous avez fait. C'est la base, vraiment, de ce que nous avons décidé.
Puis effectivement, là, aujourd'hui, vous nous apportez des recommandations
sur, peut-être, réajuster le texte du projet de loi en fonction de ce que vous
aviez recommandé. On comprend ça très bien, et je reçois ça très positivement.
• (17 h 20) •
Alors, j'aurais quelques questions. Puis,
écoutez, ce n'est pas étranger que vous arrivez à ce moment-ci de la commission
où on a entendu différents groupes...
Mme McCann : ...le dernier
groupe sur lequel je vais avoir quelques questions, la position de la
Fédération des professeurs d'universités, là, du Québec. Donc, juste, d'entrée
de jeu, pour être sûre que je vous comprends bien, parce qu'on nous a beaucoup
recommandé de prendre la définition de l'UNESCO, et là je vais vous poser une
petite question pointue au départ, là. La recommandation, votre définition, de
la commission Cloutier, elle est assez similaire à celle de l'UNESCO. Il y a
quand même quelques petites divergences. Vous êtes très à l'aise avec ça?
Est-ce qu'il y a... Parce qu'on nous demande de prendre la définition de
l'UNESCO. Vous nous suggérez votre définition.
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
en fait, on n'a vu aucun intervenant suite au dépôt de notre rapport qui a
remis en question la définition qui avait été suggérée au gouvernement pour la
définition de la liberté universitaire. Nous, on considère que cette
définition-là semble faire consensus. Donc, effectivement, on pourrait s'y
référer. Sinon, si vous voulez utiliser le texte actuel, bien, il y a moyen d'y
arriver aussi en biffant, par exemple, «dans le domaine», en y ajoutant «la
créativité» et en y ajoutant «le droit de critiquer les institutions». Je pense
qu'on pourrait arriver, à partir du texte actuel, mais vous pouvez aussi le
réécrire si vous le souhaitez. Mais nous, on a travaillé à partir du texte du
projet de loi, et c'est dans cet esprit-là qu'on vous a soumis quelques
amendements. C'est ce que vous retrouvez dans la page, là, page et demie qui vous
a été soumise.
Mme McCann : Oui, puis on
vous en remercie, c'est très clair d'ailleurs. Je voulais aussi vous demander,
parce que vous avez entendu la Fédération québécoise des professeurs
d'université, la FQPPU, parce qu'un des éléments, une de vos recommandations,
c'est celle de mettre sur pied un comité. On va appeler ça un comité pour le
moment. On parle d'un conseil dans le projet de loi, mais on va parler du
comité, c'est votre recommandation. Et on a clarifié, hein, sur place, qu'évidemment,
c'est un dernier recours, parce que je pense que le projet de loi n'était
peut-être pas assez explicite là-dessus, là, que ce n'est pas en première
instance, là. Mais la suggestion qui est faite par la fédération, celle qu'on
vient d'entendre, des professeurs d'université, c'est que le conseil ou le
comité, évidemment, n'aurait pas... peut-être suggérait qu'il n'existe pas, à
la limite, mais vous, vous suggérez que, même, le comité puisse sanctionner,
hein, apporter des sanctions, et la position des intervenants précédents
suggère qu'il n'y ait pas de sanction. Qu'est-ce que vous répondez?
M. Cloutier (Alexandre) : Une
nuance, intéressante, Mme la ministre, on n'a pas suggéré dans notre rapport
que le comité sanctionne, on a suggéré que le comité fasse une recommandation
au responsable de la politique, parce que, d'un point de vue purement relation
de travail, on ne peut pas demander à un comité de prendre une décision au nom
de l'employeur. Par définition, ce sera celui qui recevra les recommandations,
donc probablement le vice-recteur à l'enseignement qui aura à mettre en œuvre
ou non a les recommandations. C'est un peu comme ça que ça fonctionne pour les
comités, par exemple, sur le harcèlement, par exemple. Il y a une enquête, on
étudie, puis ensuite, bien, au terme de cette cueillette d'information, il y a
une recommandation qui est faite. Puis la recommandation, bien, elle est entre
les mains de l'administration, puis c'est elle qui décide de la façon de la
mettre en œuvre. Donc, c'est vraiment un comité qui qui propose à l'institut,
puis qui, ensuite, c'est la haute administration qui doit décider des suites à
donner.
Mme McCann : Bien, c'est une
nuance extrêmement importante. Puis on voit qu'au fil des discussions qu'on a
eues aujourd'hui, il y a beaucoup de nuances qui doivent être apportées. Et on
s'aperçoit qu'évidemment, on n'a pas tous la même compréhension, hein, de
certains éléments, et c'est probablement normal parce que c'est un dossier
extrêmement complexe. Vous dites, vous avez dit dans votre présentation et dans
votre rapport que 14 %, si je vous ai bien compris, des professeurs ou du
personnel enseignant souhaitent que ce soit vraiment la responsabilité de leur
institution, la protection de la liberté universitaire, académique,
universitaire. Les derniers intervenants nous disaient, en quelque part, que
l'université devrait, si je les ai bien compris, et peut-être qu'il y aurait
des nuances à apporter là-dessus aussi, l'université devrait être responsable.
La ministre accompagnerait, mais l'université serait responsable. Qu'est-ce que
vous pensez de ça?
M. Cloutier (Alexandre) : Peut-être
un élément de précision, effectivement, sur les 14 %. Le 14 % fait
référence à qui devrait protéger la liberté universitaire ou qui devrait être
responsable de sa définition en quelque sorte. 14 %, c'était que ça
devrait être juste l'institution. Alors, ce qui est intéressant, c'est de voir
une proportion très élevée qui pensait qu'un point de vue national était
nécessaire. Donc, ça, justifiait, en quelque sorte...
M. Cloutier (Alexandre) : ...qu'il
y a une vision et une compréhension communes pour l'ensemble des Québécois.
Enfin, après, effectivement, l'université a une immense responsabilité dans la
mise en œuvre de la liberté universitaire au sein de son institution. Ce qui
est tout à fait à propos. Mais maintenant, ce qu'on essaie d'éviter maintenant,
c'est qu'il y a une divergence dans la définition entre la faculté, je ne sais
pas moi, de sociologie de telle université versus telle autre université et que
chacun y va un peu de son interprétation. Parce que je pense que vous avez été
à même de le constater durant votre journée à quel point il y a des
compréhensions assez diverses...
Mme McCann : Oui.
M. Cloutier (Alexandre) : ...de
la liberté universitaire. Et si on ne réussit pas à avoir une compréhension
commune, bien, on passe à côté de l'objectif. Et mettez-vous en place ensuite
de ceux qui ont à mettre en oeuvre. Il faut que ça soit clair pour eux
qu'est-ce qu'ils doivent mettre en oeuvre et quelle est la compréhension? C'est
pour ça qu'on revient nous au texte de l'UNESCO qui est beaucoup plus large et
qui fait consensus et qui nous permet justement d'avoir un environnement commun
de compréhension.
Mme McCann :
Oui. Et on voit qu'il y a un assentiment
du côté, là, des fédérations, des associations que nous avons rencontrées, du
personnel enseignant, d'avoir un projet de loi. Ça, c'est vraiment unanime,
même si on demande plusieurs modifications. Évidemment, il y a toute la
question des étudiants et on a... j'ai souhaité clarifier ce matin qu'un
étudiant peut faire une plainte dans le cadre de la liberté académique
universitaire. Et ça, je pense que, et c'est normal, là, que l'UEQ ne l'avait
pas saisie de cette façon-là, alors j'étais contente de le clarifier. C'est
votre position aussi.
M. Cloutier (Alexandre) : Bien
sûr. Tout à fait.
Mme McCann : Bon. La
FQPPU, à nouveau, leurs commentaires, et je pense que vous en avez parlé dans
votre rapport, l'obligation de prendre fait et cause pour le professeur. Et
pouvez-vous nous dire quelle importance, là, vous attachez à cet élément-là?
M. Cloutier (Alexandre) : C'était
effectivement une de nos recommandations. On suggérait que la haute administration
prenne fait et cause en cas de litige. C'est donc dire qu'en cas de procédure
judiciaire, que l'administration devrait prendre fait et cause, mais on fait le
pari, Mme la ministre, que pour qu'il y ait une procédure judiciaire, ça voudra
dire qu'il y aura eu des échecs précédents. Parce que normalement, il y a la
loi, il y a la définition de la liberté universitaire. Ensuite, il y aura une
première application avec les personnes concernées. En cas de réel litige, il y
aura un comité. Ensuite, il y en a une recommandation. Puis lorsqu'on va tomber
dans la mise en oeuvre de la recommandation, j'imagine que c'est là que
pourrait intervenir davantage un litige potentiel. Et c'est là que l'obligation
de prendre fait et cause devrait intervenir auprès de la haute administration.
Mais vous voyez qu'on est quand même à un niveau de dernière étape. Je vois que
mon collègue Yves lève la main, Mme la ministre. Je pense qu'il...
Mme McCann : Oui,
M. Gingras.
M. Gingras (Yves) : Oui.
Pour montrer cette importance, je pourrais donner un exemple très bref. À
l'Université de Toronto, il y a une bonne quinzaine d'années, il y a une
chercheuse, Nancy Olivieri, qui avait fait une recherche en biomédical qui
mettait en évidence les dangers d'un médicament qui était fait par une
compagnie pharmaceutique. La compagnie a poursuivi le professeur. Au début,
l'université a dit : Ah, bien là, nous, elle avait signé un contrat. On ne
la défend pas. Ce qui est assez inacceptable parce que c'était une chercheuse,
et l'université était contente. Les contrats de la chercheuse rentrent à
l'université. Mais la minute où elle a eu une poursuite, l'université a refusé.
Et on peut aussi prendre le cas au Québec de l'affaire Mainguy qui a fait un
grand scandale. Il a fallu que le scientifique en chef lui prenne fait et cause
pour que là soudainement les universités changent d'avis. Donc, c'est concret,
cette affaire-là et c'est très important. D'où le fait qu'on l'a mis dans notre
rapport comme un des éléments qui touchent souvent plus la recherche et
l'opinion sur la société. Vous savez qu'en France, actuellement, il y a des
économistes qui ont été poursuivis parce qu'ils avaient dénoncé des
traitements, eux avaient fait des preuves que des compagnies avaient des
comportements, sur le plan économique, qui étaient inacceptables. C'est des
professeurs d'université et ils ont été poursuivis. Or, c'est dans leur mission
d'enseignement et surtout de recherche et de service à la collectivité que de
défendre le bien commun. Les universités sont contentes lorsque les
scientifiques sont à la télé, mais il faut qu'en compensation elles
disent : On va aussi vous défendre si quelqu'un vous attaque.
• (17 h 30) •
Mme McCann : Bien, je
vous remercie. Je regarde l'heure et je voudrais vous entendre, parce que je
veux donner la parole aussi à mes collègues, tout de suite après. Dernière
question...
17 h 30 (version non révisée)
Mme McCann : ...sur le
devoir de loyauté. On en a parlé, les différents groupes en ont parlé. Le
dernier a affirmé que ça devrait être dans le projet de loi. Et c'est quand
même une question, là aussi, complexe parce que ça touche aux conventions collectives.
Et je pense, si j'ai bien compris la FQPPU, c'est comme si on nous disait :
Le devoir de loyauté, c'est presque antinomique par rapport à une université.
Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez?
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
en nommant clairement, dans la définition de la liberté universitaire, le droit
de critiquer l'institution, on vient de régler, à mon avis, une grosse partie
du problème. Il faut reconnaître que, dans le monde universitaire... puis je
vois Mme David, qui connaît très bien le milieu, qu'il y a une culture qui fait
partie du monde universitaire, mais qui est... cette culture, elle est
internationale. Dans la déclaration de l'UNESCO, on le reconnaît aussi, et ça
fait partie de... certains pourraient rattacher, par exemple, à la
collégialité, en quelque sorte. Cette collaboration, c'est le droit de
participer aux discussions, aux orientations qui sont prises par l'institution,
quand on est pour et quand on est contre. Alors, ce que ça veut dire, c'est
qu'il faut que... En ajoutant le droit de critique, inévitablement, on envoie
aussi un message aux arbitres de griefs puis aux juges que, quand vous abordez
ces enjeux-là dans une université, bien, c'est un contexte particulier du
milieu universitaire, avec ses propres règles et ses propres codes.
Mme McCann : Bien, je
vous remercie. Et, avant de passer la parole, je vais encore une fois vous
remercier pour l'énorme travail que vous avez fait dans le dossier. Ça a été
extrêmement aidant pour nos réflexions. Merci.
M. Cloutier (Alexandre) : Merci.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je vais céder la parole à la députée de Charlevoix-Côte-de-Beaupré. Il vous
reste 3 min 50 s.
Mme Foster : Merci
beaucoup, merci beaucoup. D'entrée de jeu, je me joins à la ministre, je vous
remercie pour tout le bon travail effectué, parce que c'était tout un boulot,
ce rapport, il était très complet.
Première question. On a discuté beaucoup
avec les intervenants précédents, bon, de liberté académique, le point de vue des
professeurs, bon, etc. Par contre, je voudrais vous entendre sur une notion.
Dans votre rapport, vous parlez de la liberté d'apprendre, donc cette liberté
fondamentale, hein, pour les étudiants pour avoir un enseignement de qualité.
J'aimerais que vous parliez et le lien potentiel avec notre projet de loi.
Donc, c'est une question à développement.
M. Cloutier (Alexandre) : J'ai
presque envie de céder la parole à mon collègue Yves parce que je sais
qu'Yves... Non, je peux donner un bout, je peux donner un bout de réponse puis
tu pourras... O.K., c'est beau, je vais compléter.
Pour nous, c'est important de reconnaître
aux étudiants ce droit d'apprendre là parce que les étudiants ont le droit de
poser des questions, ils ont le droit de choisir leurs cours. Ils font partie
intégrante du processus universitaire. Et ça, c'est important de leur dire.
Mais évidemment ça vient avec des responsabilités aussi. Et, lorsqu'on met
cartes sur table et en reconnaissant ce droit d'apprendre, ce droit de
participer, ce droit être présent, ce droit de remettre des choses en question,
le droit de poser des questions, de participer en classe, bien, ça nous permet,
dans le contexte de la promotion de la liberté universitaire, de dire qu'il
existe aussi pour les étudiants, ce droit d'apprendre.
Yves pourrait faire l'historique d'où ça
origine. Yves, j'aimerais ça que tu expliques aux membres de la commission, à
l'époque... dès le départ.
M. Gingras (Yves) : Non,
mais je pense que la raison pour laquelle, dans notre rapport, on a insisté sur
le droit d'apprendre, c'est aussi le complément. L'université, c'est d'abord,
bien sûr, le professeur qui enseigne, parce que les gens viennent à
l'université pour apprendre, mais pour qu'il y ait un équilibre, il faut que
l'étudiant... Et on vient de voir, dans l'enquête qui a été faite par les
étudiants de McGill, qui viennent confirmer l'enquête qu'on a faite auprès des
étudiants, et moi, comme professeur, je peux vous dire que je l'ai vu aussi
quand les étudiants viennent me parler, il y a des étudiants qui se sentent
aussi censurés, soit parce qu'un professeur leur dit qu'ils n'ont pas droit de
croire à telle idée ou que des étudiants les empêchent d'exprimer librement leurs
opinions.
Donc, ce droit d'apprendre, c'est
fondamental. C'est que ça veut dire qu'il y a un milieu académique qui est
propice, il y a un véritable échange sur toutes les opinions, pas uniquement de
la part des professeurs, mais de la part des étudiants. Donc, on a insisté sur
cette notion, qui n'a pas été reprise dans le projet de loi, mais on pense que
ça équilibre, que les étudiants... L'université, là, c'est les étudiants et les
professeurs. C'est ça, les universités. Les administrateurs sont au service de
l'université, dont la définition, depuis le Moyen Âge, c'est les professeurs et
les étudiants. Et les directions passent, mais les profs restent plus
longtemps, puis les étudiants passent. Donc, le droit d'apprendre est
fondamental dans notre rapport.
M. Cloutier (Alexandre) : Et
nous, on l'avait inclus dans la politique. Ce qu'on avait suggéré au
gouvernement, c'était de l'inclure comme élément... partie intégrante de la
politique sur la liberté universitaire, dans laquelle on devait reconnaître ce
corollaire pour les étudiants.
Mme Pouliot (Chantal) : J'ajouterai
une chose. C'est dans ce sens-là qu'à l'annexe 10, lorsqu'on présente la
façon de fonctionner du comité, qu'on souligne que tout membre de la communauté
universitaire pourrait déposer une plainte. Dans le fond, c'est la réponse à la
question qui était posée ce matin.
Une voix : Oui, parfait...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...il
reste 30 secondes.
Une voix : Bien, je peux y
aller.
Une voix : Je passerais la parole...
Mme IsaBelle : J'aurais aimé
ça savoir...
La Présidente (Mme D'Amours) : Oui.
Députée de Huntingdon.
Mme IsaBelle : Oui. Excusez,
hein. Je suis allée trop vite. J'aurais aimé ça savoir ce que vous pensez de la
recommandation sept, que j'ai posée tantôt comme question, de la Fédération de
la recherche et de l'enseignement du Québec, qui propose que tout gestionnaire
suive une formation.
M. Cloutier (Alexandre) : ...de
la promotion de la liberté universitaire, puis en soi, on pense que c'est
assurément une bonne idée qu'il y ait le plus de gens possibles qui comprennent
qu'est ce que ça veut dire, la liberté universitaire, d'autant que les
gestionnaires, par définition, auront davantage, éventuellement j'imagine, à
s'interroger sur la mise en œuvre, donc d'avoir une compréhension commune, ça
m'apparaît approprié.
Mme IsaBelle : Est-ce qu'on
devrait l'ajouter dans le projet de loi?
La Présidente (Mme D'Amours) : ...désolée,
le temps étant écoulé, je me tourne maintenant vers l'opposition officielle
avec la députée de... non, pardon, de Marguerite-Bourgeoys, pour une période de
onze minutes.
Mme David : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Alors, bonjour, bonjour tout le monde, même de France.
Alors, je vais commencer par une drôle de CQFD à l'envers, ce qu'il fallait
démontrer. Alors, les éloges pleuvent sur votre rapport, unanime, j'ai rarement
vu ça. Le projet de loi dit s'inspirer fortement de votre rapport et vous
félicite à profusion. Les mémoires et sorties publiques critiquent à profusion
le projet de loi. Donc, unanimité pour votre rapport et unanimité contre la
mouture actuelle du projet de loi. On en est là. Je ne suis pas découragée,
j'ai encore de l'espoir, mais c'est fascinant. Je veux dire, tout le monde vous
admire, rapport formidable, mais que des critiques sur ce qui manque ou sur ce
qui n'a pas été bien compris de votre rapport, peut être.
Premier exemple, vous l'avez bien précisé.
Article quatre, troisième alinéa. L'article quatre que décrit très, très fort,
entre autres, la FQPPU, parce qu'ils avaient mal compris la question du
conseil, qui arrive en toute fin, là, je pense, c'est plus clair, alors là il
faut tout repenser les choses. Mais troisième alinéa : alors cette politique
doit notamment prévoir les mesures et sanctions applicables. Alors, vous, vous
dites : Bien non, on n'a jamais parlé de mesures de sanctions.
M. Cloutier (Alexandre) : C'est-à-dire,
je vais apporter une nuance ici, Mme la députée. En fait, nous, ce qu'on a dit,
c'est que la politique, effectivement, devrait réfléchir à la panoplie de
mesures ou de sanctions ou de... les suites finalement, données au rapport. En
fait, ce qu'on souhaitait, c'est que chaque secrétaires généraux des
institutions décident eux-mêmes de la politique et de la façon dont ils
donnaient suite au rapport du comité qui était soumis, au vice-recteur,
probablement responsable. Mais nous, on n'a pas voulu aller jusque là parce que
nous aussi on était préoccupés par ce juste équilibre de l'autonomie des
universités, puis on jugeait, chaque université établira bien la procédure...
puis incluant les sanctions. C'était pour ça qu'on disait aux
universités : Décidez de ce que vous voulez.
Mme David : Décidez
vous-mêmes.
M. Cloutier (Alexandre) : C'est
ça.
Mme David : Mais vous dites
bien, au premier alinéa, parce c'est là qu'il y a un grand malentendu, il y a
plein de malentendus dans le projet de loi par rapport au rapport. Je pense
qu'on nage dans des malentendus sur la liberté académique. Mais on dit bien,
dans le premier alinéa, que le cas échéant, pour un cas particulier, là, ce ne
sont que des recommandations. Ce ne sont pas des sanctions. Mais ce comité que
vous, vous appelez "comité" dans votre rapport, qui s'appelle
Conseil, je ne sais pas d'où vient cette inspiration, je pense que vous étiez
mieux inspiré pour les fins de du milieu universitaire de parler d'un comité,
ce n'est pas clair du tout. Ce comité fait de la sensibilisation, de la
formation, explique comment ça devrait fonctionner mais reçoit des cas
litigieux. Donc il a un bras dans les opérations et dans les recommandations
concrètes, puis il a un bras dans la formation, sensibilisation, etc. Est-ce
que c'est... je comprends bien les choses?
M. Cloutier (Alexandre) : Je
crois que oui, je crois que oui. Mais évidemment, les suites à donner, ça peut
n'être rien du tout également, là, juste pour être clair, là. Le comité
pourrait décider... absolument aucune sanction sous forme de recommandations.
Mais je rappelle qu'ultimement, c'est le vice-recteur qui va décider de la
sanction à appliquer et c'est lui qui va devoir prendre la responsabilité comme
emploi avec ce qui vient avec, c'est-à-dire...
Mme David : Oui. Donc c'est
très différent d'un comité de discipline.
M. Cloutier (Alexandre) : Oui.
Mme David : Parce qu'un
comité de discipline, là, nous, on a... j'en faisais partie longtemps, on peut
mettre des professeurs à la porte, complètement.
M. Cloutier (Alexandre) : Ça
n'était pas dans cet esprit-là, effectivement, du tout, que ça a été... la
recommandation, effectivement, ne va pas jusque là.
Mme David : O.K.
• (17 h 40) •
M. Gingras (Yves) : Je peux
faire un complément, là. Il faut rappeler aussi que le but de tout ça, c'est de
faire la promotion de la liberté universitaire, ce que les directions
d'université n'ont jusqu'à maintenant jamais fait. Donc, soyons clairs, le
comité a une fonction. C'est que s'il y a une plainte, c'est qu'il n'y a pas eu
promotion ni défense de la liberté universitaire. Donc le but du comité, c'est
de s'assurer qu'on défend la liberté universitaire, hein, il ne faut pas
oublier ça, là. Ce n'est pas si confus, ce n'est pas si compliqué. Donc quand
on complique les choses, souvent, ça peut être pour...
M. Gingras (Yves) : ...ne
perdons pas de vue que le but, c'est de promouvoir et de défendre la liberté
universitaire. Il y a plein de corps qui ont été assurés qu'elle n'a pas été
défendue. Donc, ce comité distinct des autres, il ne faut pas qu'il soit noyé
dans d'autres types de comités qui vont faire sur le coin de la table. Il faut
qu'il y ait un seul comité qui dit : Si la liberté universitaire n'a pas
été mise en application, il doit y avoir des mesures. Appelez ça des mesures,
ne jouons pas sur les mots... Est-ce qu'il y a des mesures qui vont s'assurer
que le professeur ou l'étudiant a bien eu son droit d'apprendre et le
professeur sa liberté universitaire?
Mme David : C'est clair. Les
recteurs sont très, très inquiets et réfèrent beaucoup à la page cinq, en
chiffres romains, l'article 1 b pour parler de l'autonomie universitaire.
Alors, ça, ils vont venir le dire, le BCI va venir nous le dire, le recteur de
l'Université de Montréal s'est prononcé, il y a un mémoire de l'Université de
Montréal. Où c'est qu'on pourrait mettre ça pour rassurer, d'après vous, les
directions d'universités?
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
nous, la commission on proposait qu'il soit dans la loi.
Mme David : C'est ça. Pas
dans les considérants, là.
M. Cloutier (Alexandre) : Non.
Nous, les recommandations qu'on faisait au gouvernement, effectivement, c'était
de l'inclure dans la loi. Puis c'est une occasion, je pense, vraiment
extraordinaire de le faire, parce qu'on est en train de poser les bases, dans
le fond, des conditions d'exercice d'une université. Alors, c'est dans cet
esprit là que nous, on a proposé qu'effectivement les deux conditions...
Maintenant, si on ne veut pas modifier, on peut aussi modifier le considérant,
mais je suis bien conscient qu'un article de loi, versus un considérant, a un
impact plus fort.
Mme David : Donc, parce que
j'ai noté votre considérant, qui deviendrait le numéro deux, plutôt que trois
et quatre, vous allez envoyer ça à la ministre, j'imagine. «Considérant que
l'autonomie universitaire et la liberté universitaire sont des conditions
essentielles à l'accomplissement», ça ne satisfera pas entièrement les
recteurs. Il faut trouver... et est-ce que vous trouvez que vos modifications à
l'article trois comblent ou rassurent les directions d'université?
M. Cloutier (Alexandre) : À
la base, les cinq membres de la commission recommandent les recommandations du
rapport. Donc, si on a à choisir entre des considérants versus un article de
loi, nous on a privilégié un article de loi sur ces deux conditions.
Mme David : Mais vous le
mettez où, actuellement? Dans votre mémoire, à l'article 3?
M. Cloutier (Alexandre) : En
fait, on le retrouve dans la première recommandation : «Que le
gouvernement fasse adopter une loi sur la liberté... consacrer l'autonomie
universitaire.» On peut en faire un article de la loi. On pourrait ajouter un
article de loi, par exemple, si vous vouliez modifier. Il y a deux choix, soit
qu'on ajoute un considérant, comme on vous l'a proposé tout à l'heure, ou qu'on
l'inclut carrément dans un article de loi.
Mme David : Mais, pour
l'instant, ça n'existe pas.
M. Cloutier (Alexandre) : Non,
absolument...
Mme David : Puis vous ne le
proposez pas dans votre mémoire.
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
c'est-à-dire qu'on le propose dans nos recommandations. Parce qu'il faut
comprendre aussi que, dans le fond, ce qu'on propose au gouvernement, ce sont
toutes les recommandations. Maintenant, il y a un choix qui est fait par le
gouvernement, qu'on accepte par la démocratie, qu'ils ont le droit de choisir
qu'est-ce qu'ils veulent ou pas.
Mme David : Oui, oui, mais
disons que, dans le «pick and choose», il y a des choses qui sont...
M. Cloutier (Alexandre) : Oui.
Mais si vous nous demandez, aux membres de la commission, nous, on a recommandé
que ça soit dans la loi.
Mme David : O.K.. Et vous
continuez à le recommander, et vous serez d'accord quand les recteurs vont
venir dire qu'eux autres sont très inquiets que ça se...
M. Cloutier (Alexandre) : L'ensemble
des recommandations sont toujours portées par les cinq commissaires.
Mme David : O.K.. Bonne
réponse de politicien.
Des voix : Ha! Ha! Ha!
Mme David : Il n'a pas perdu
ses réflexes.
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
j'ai un peu de pratique, quand même.
Mme David : La question va
peut-être s'adresser à monsieur Gingras, parce qu'au début j'ai bien entendu,
l'échantillon de votre sondage, qui a été fort critiqué par plusieurs, est
représentatif du corps professoral. Alors, comme ça a été beaucoup critiqué,
peut-être que M. Gingras pourrait dire pourquoi vous prenez la peine
d'expliquer ça.
M. Gingras (Yves) : O.K..
Tout d'abord, je veux rappeler que le rapport a très bien expliqué, dans une
note de bas de page, en référant à un manuel standard de méthodologie des
sondages, comment ça fonctionne les sondages. Alors là, il est assez
surréaliste que certains recteurs qui n'ont soit jamais fait de statistiques ou
qui ont oublié leurs sondages... Ils devraient savoir ce que tous les élus
autour de la table savent : au Québec, vous avez, à chaque semaine, des
sondages sur l'ensemble des 7 millions de Québécois fondés soit par Léger et
Léger ou d'autres sur 1000 ou 1200 de Québécois sur 7 millions. Est-ce qu'on
dit que le taux de réponse de 1200 sur 7 millions, c'est 00.4? Donc, ils n'ont
pas compris que ce qui compte dans la validité d'un sondage, ce n'est pas que
3% des 33 000 ont répondu, ça n'a rien à voir. C'est que sur l'échantillon de
1000 sur 30 000, et non pas 1000 sur 7 millions, il soit représentatif des
variables.
Alors, si vous regardez le tableau, c'est
écrit que, sur la distribution de l'âge des professeurs, sur le domaine
disciplinaire, ça représente la distribution des professeurs, sur la séparation
Montréal-régions...
M. Gingras (Yves) : ...aussi
et sur le texte aussi. Vous avez le tableau dans le rapport. Donc, tous ceux
qui font des échantillons au Québec prennent 1 000 sur 7 millions, et
au Canada, sur 30 millions, on prend à peu près 2 000. Donc, aller
dire que 3 % de répondants, ce n'est pas suffisant, c'est montrer qu'on ne
sait pas les règles des sondages. Et tous les politiciens, ils lisent les
sondages, et il n'y a jamais plus que 1 000 ou 1 200.
Dernier point, aucun des recteurs qui se
sont plaints de la soi-disant invalidité de l'échantillon, ce qui est
scandaleux, n'a remis en cause la même... le même sondage sur les étudiants. Il
y a 1 000 étudiants qui ont été interviewés par un panel tiré de
Léger & Léger, et c'est 1 000 sur combien? Mais sur
200 000 étudiants. Mais ce n'est pas le taux de réponse qui compte,
c'est la représentativité de l'échantillon qui, avec 1 000 ou 1 200,
est à 3 % de précision. Donc, comme je le dis, quand on veut tuer son
chien, on dit qu'il a la rage. Donc, les recteurs n'aimaient pas les résultats,
ils ont inventé des arguments pseudoscientifiques, alors que notre sondage est
représentatif et valide.
Mme David : Merci. Merci
pour le cours... le cours de statistiques. Merci beaucoup, Yves. Et donc
l'article 6, là... et là je me sens un peu juge et partie là, mais... mais
ça, ça prend la prémisse de tout le reste qui précède parce qu'à défaut de se
conformer aux obligations prévues par la présente loi, encore faut-il que la
présente loi soit satisfaisante pour l'ensemble des parties. On se comprend?
M. Gingras (Yves) : Oui.
Mme David : Si la
prémisse est bonne, l'article 3, l'article 4, les considérants, on
est en business pour l'article 6?
M. Gingras (Yves) : Oui.
Mais c'est inévitable. Il ne faut pas... il ne faut surtout pas oublier, parce
que j'ai entendu des discours qui prennent une phrase de l'article 3, un
projet de loi, chaque paragraphe est relié à l'autre paragraphe. Donc, quand on
définit la mission au premier, la conséquence de la mission, c'est la liberté
universitaire.
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
M. Gingras, je suis désolée de vous interrompre. Le bloc étant terminé, je
dois procéder au prochain qui est le député d'Hochelaga-Maisonneuve pour une
durée de 2 min 45 s.
M. Leduc : Merci, Mme la
Présidente. Vous me permettrez de commencer par un truc un peu plus léger en
cette journée très chargée. Je voudrais souhaiter joyeux anniversaire à notre
collègue, la députée de Gaspé. C'est aujourd'hui, n'est-ce pas?
Mme Perry Mélançon : Mais,
oui.
M. Leduc : Bon. Ensuite,
je veux saluer monsieur Gingras. Je suis un diplômé d'histoire de l'UQAM.
Alors, c'est une sommité internationale, c'est mon alma mater, et puis
salutations faites à M. Gingras. Merci, pour votre présence. Merci pour
votre contribution.
Je veux reprendre l'échange que vous aviez
avec Mme la ministre sur la question, là, de prendre fait et cause pour les
professeurs. Moi, c'est quelque chose qui me touche beaucoup, est un ancien
syndicaliste. Je n'ai pas compris si la fin de l'échange atterrissait sur
l'idée qu'il fallait en effet préciser dans la loi, rajouter un article, tel
que le propose la FQPPU, pour obliger en quelque sorte les universités à
prendre fait et cause.
M. Cloutier (Alexandre) : Oui,
en fait, c'est ce qu'on a suggéré. Là, c'est la quatrième recommandation.
M. Leduc : Oui.
M. Cloutier (Alexandre) : En
fait, là, ce qu'on vous propose, c'est que la loi indique que chaque
établissement rende compte de la mise en œuvre — oui, c'est bien ça — de
la mise en œuvre de la politique dans un rapport annuel qui pourrait cheminer
et ce rapport doit faire l'objet d'un nombre traitement. Non, ce n'est pas ça
du tout. Il faut juste que je trouve la bonne...
M. Leduc : C'est le
quatrième avis, je pense.
M. Cloutier (Alexandre) : Oui,
c'est pourtant ce qui... Ah! c'est l'avis. Pardon. Oui, je vous remercie. Non,
ce n'est pas l'avis non plus. J'étais persuadé que je lisais le texte.
M. Leduc : Donc, au-delà
de ça, vous êtes d'accord à ce qu'on rajoute le texte.
Mme Pouliot (Chantal) : C'est
le 4, là.
M. Cloutier (Alexandre) : Bien,
vas-y donc.
M. Leduc : Allez-y, oui.
Mme Pouliot (Chantal) : Donc
pour répondre à cette question-là, c'est en effet le cas. On proposait que ce
soit... que ça fasse partie de la loi.
M. Leduc : Dans la loi,
un texte là-dessus?
Mme Pouliot (Chantal) : Oui.
M. Leduc : Parfait.
Intéressant. J'aimais vos échanges aussi sur la question du devoir de loyauté.
Si on rajoute quelque chose dans la définition de l'UNESCO, on règle une bonne
partie. Que penseront vos collègues du Bureau de coopération
interuniversitaire, demain, sur cette question de la loyauté? Est-ce que vous
pensez qu'il y a de l'ouverture de leur côté pour qu'on aille jouer là-dedans?
M. Cloutier (Alexandre) : Je
suis persuadé que, oui, pour la simple raison que je ne crois pas que les
recteurs remettent en question la définition de l'UNESCO qui reconnaît, dans le
fond, ce droit de critique des institutions, et pour eux-mêmes être recteurs,
ils visitent assez régulièrement ce droit de critique des professeurs au sein
des institutions. Alors, je pense qu'ils comprennent bien que ça fait partie de
l'environnement universitaire.
M. Leduc : Peut-être une
dernière question si le temps le permet?
La Présidente (Mme D'Amours) : 30 secondes.
M. Leduc : 30 secondes.
Plusieurs personnes ont proposé d'élargir le débat aux cégeps. Est-ce que c'est
trop tôt ou est ce que c'est trop vite?
M. Cloutier (Alexandre) : On
n'ose pas trop se prononcer là-dessus parce que, d'emblée, on nous a clairement
indiqué que, nous, notre mandat, c'était sur la liberté universitaire puis,
honnêtement, on n'en serait pas autorisés. Je pense que, comme commission,
comme on l'a complètement exclu et qu'on n'a entendu aucun témoin provenant du
milieu du cégep, là, ça ne serait probablement pas adéquat de le faire.
M. Leduc : Merci
beaucoup.
• (17 h 50) •
La Présidente (Mme D'Amours) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé qui fête son anniversaire
aujourd'hui...
La Présidente (Mme D'Amours) : ...pour
une période de 2 min 45 s.
Mme Perry Mélançon : Bien,
merci à tout le monde pour vos bons mots. Le député de Hochelaga-Maisonneuve a
toujours cette attention pour ses collègues. Bien, à mon tour de vous saluer,
c'est vraiment intéressant de vous entendre, après toutes les heures que vous
avez travaillé ce rapport-là, bien complet. Pour nous aussi, on en retrouve
plusieurs recommandations, qui sont le sens où il faut aller avec la liberté
académique. Mais là je comprends que, dans le réseau collégial, on n'a pas fait
ce travail-là, mais est-ce que ce serait pertinent qu'on le fasse, une
commission Cloutier volet cégeps?
M. Cloutier (Alexandre) : On
peut y aller à titre personnel, là. Moi, je pense qu'on pourrait facilement
s'inspirer de plusieurs éléments du rapport pour en arriver à une application
éventuelle dans les cégeps. C'est mon opinion personnelle. Maintenant, comme je
vous dis, il faudrait quand même entendre les membres du cégep pour aller plus
loin. Mais je pense sincèrement qu'il y a beaucoup d'enjeux qui sont
similaires. Moi, je n'aurais aucun problème, demain matin, à aller donner une
conférence dans un cégep puis expliquer les principes de la liberté
universitaire dans le milieu de l'enseignement, par exemple.
Mme Perry Mélançon : O.K.
Justement, parlons de la communauté étudiante, qui... On a entendu aujourd'hui,
ce matin... il y en a... bon, l'Union étudiante allait jusqu'à ne pas
recommander d'adopter le projet de loi, mais de ne même pas légiférer, en fait,
là. Puis ça m'amène un peu dans l'esprit de vos travaux. C'est quoi la place,
justement, si ce n'est pas... Si je comprends bien, le comité, c'était vraiment
pour être plus dans les cas de litige, et donc ce n'est pas vraiment la place
pour les ajouter, sur ce comité-là, ou finalement, tu sais, dans la façon qu'on
compose le conseil, du projet de loi versus le comité, que vous aviez à
recommander?
M. Cloutier (Alexandre) : Il
y a peut-être un élément direct, là, qui concerne les étudiants, d'abord, dans
la définition de la liberté universitaire, hein? Tous ceux qui contribuent à la
mission de l'université bénéficient la liberté universitaire. Ça inclut les
étudiants de, particulièrement, deuxième cycle, qui sont dans un exercice
pédagogique, les étudiants en doctorat, à plusieurs égards, etc. Donc, ça
concerne aussi les étudiants. Puis maintenant, nous, on a essayé d'être le...
de trouver une façon de bien reconnaître ce droit de participer, par la liberté
d'apprendre, qu'on a souhaité voir intégrée dans la politique, là, ce qu'on a
discuté un peu précédemment, pour, justement, là, équilibrer, se rappeler
qu'une classe là, ce n'est pas un monologue, c'est une discussion, c'est un
moment d'apprentissage collectif, et que les étudiants aussi doivent être
reconnus dans cette démarche-là.
La Présidente (Mme D'Amours) : 13
secondes, Mme la députée.
Mme Perry Mélançon : Bien, ça
répond à ma question, parce que, c'est ça, je pense que ça doit aussi être une
affaire de la communauté étudiante de s'approprier ce principe-là, puis de le
défendre aussi. Donc, de les ajouter, c'est sûr, dans le processus, je pense
que c'était une espèce de voie de passage possible pour s'assurer que ce
soit... que tout le monde y adhère, finalement, et qu'on puisse aller de
l'avant avec l'adoption du projet de loi.
La Présidente (Mme D'Amours) : Je
vous remercie pour votre contribution à nos travaux.
La commission ajourne, et là c'est vrai,
ses travaux au mercredi 11 mai 2022, après les affaires courantes, où elle
poursuivra son mandat. Merci infiniment.
(Fin de la séance à 17 h 54)