Journal des débats de la Commission des relations avec les citoyens
Version préliminaire
43e législature, 1re session
(29 novembre 2022 au 10 septembre 2025)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Le
mardi 21 mars 2023
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Vol. 47 N° 5
Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi concernant les soins de fin de vie et d’autres dispositions législatives
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Intervenants par tranches d'heure
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Blais, Suzanne
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Schmaltz, Valérie
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Poulet, Isabelle
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Picard, Marilyne
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Maccarone, Jennifer
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Maccarone, Jennifer
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Lecours, Lucie
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Prass, Elisabeth
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Tardif, Marie-Louise
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Bélanger, Sonia
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Bélanger, Sonia
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Lecours, Lucie
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Schmaltz, Valérie
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Gendron, Marie-Belle
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Guillemette, Nancy
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Blais, Suzanne
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Maccarone, Jennifer
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Tardif, Marie-Louise
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Lecours, Lucie
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Bélanger, Sonia
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Poulet, Isabelle
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Schmaltz, Valérie
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Schmaltz, Valérie
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Lecours, Lucie
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Maccarone, Jennifer
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Tardif, Marie-Louise
9 h 30 (version révisée)
(Dix heures)
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je vais me
permettre de souhaiter un bon mardi matin à l'ensemble d'entre vous.
Alors, la commission est réunie aujourd'hui
afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques
sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi
concernant les soins de fin de vie et d'autres dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Garceau (Robert-Baldwin) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, <aujourd'hui...
>
10 h (version révisée)
< La Secrétaire :
...
Mme Garceau (Robert-Baldwin) est remplacée par
Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis).
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
Merci beaucoup. Alors, >aujourd'hui, nous
entendrons, donc, ce matin, les personnes et les organismes suivants : le
Dr David Lussier, le Réseau de la FADOQ et l'Ordre des travailleurs
sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.
Nous allons donc débuter cette séance avec
le Dr Lussier. Bienvenue, Dr Lussier. Merci de prendre part à ces
travaux. Alors, vous allez avoir une dizaine de minutes, d'abord, pour vous
présenter, ensuite pour faire votre exposé. Par la suite, évidemment, nous
aurons des périodes d'échange avec les membres de la commission. Alors, le
temps qui vous est alloué commence dès maintenant.
M. David Lussier
M. Lussier (David) : Merci,
Mme la Présidente. Mme la ministre, Mmes les députées, merci pour l'invitation
et l'honneur de m'adresser à vous ce matin. Quelques mots de présentation.
Donc, je suis gériatre à l'Institut universitaire de gériatrie de Montréal. En
plus de ma formation en gériatrie, j'ai fait une formation complémentaire en
douleur et soins palliatifs. Ma pratique actuelle est, en grande majorité, au
sein d'une clinique de gestion de la douleur chronique, où je traite des aînés
atteints de douleurs chroniques qui présentent des souffrances, souvent, à la
fois psychiques et physiques, et qui ont un déclin avancé de leurs capacités.
Je suis prestataire de l'AMM depuis le
tout début. Je siège sur le groupe interdisciplinaire de soutien de mon CIUSSS
et je suis membre de la Commission sur les soins de fin de vie. Même si,
aujourd'hui, je ne m'exprime pas au nom de la commission, il m'est impossible
de faire abstraction de cette expérience.
Donc, mes observations et recommandations
sont le fruit de mon expertise clinique en gériatrie, en gestion de la douleur
chronique et en aide médicale à mourir ainsi que de la revue de plus de 12 000 aides
médicales à mourir qui ont été déclarées à la Commission sur les soins de fin
de vie depuis 2016.
Tout d'abord, l'article le plus important
de la loi est, selon moi, l'article 4, selon lequel «toute personne, dont
l'état le requiert, a le droit de recevoir des soins de fin de vie». Cet
article est primordial, car il assure que l'aide médicale à mourir ne soit pas
un soin administré par défaut d'avoir accès à des soins appropriés, mais bien
une décision libre et éclairée, après que toutes les options thérapeutiques
aient été présentées et rendues accessibles.
Maintenant que des personnes qui ne sont
pas en fin de vie peuvent recevoir l'AMM, il est important de s'assurer que,
pour elles aussi, l'aide médicale à mourir ne soit jamais un soin choisi par
défaut, faute d'avoir reçu ou d'avoir eu accès à des soins ou services rendus
nécessaires par sa condition, que celle-ci soit une maladie, un trouble
neurocognitif ou, si le projet de loi est adopté, un handicap. Par exemple,
personne ne devrait recevoir l'AMM faute d'avoir les services lui permettant de
rester à domicile, s'il le souhaite, ou par crainte de ne pas recevoir les
soins et services de qualité s'il doit aller en CHSLD.
Je propose donc de modifier l'article 4
pour qu'il affirme le droit, pour toute personne avec une maladie ou un
handicap grave et incurable ou une maladie menant à l'inaptitude, de recevoir
les soins et services requis par son état. Ce n'est qu'à cette condition que l'aide
médicale à mourir peut être rendue disponible à ces personnes.
La différence entre le Code criminel et la
loi québécoise crée une iniquité entre les Québécois et les autres Canadiens
atteints d'un handicap grave et incurable, mais également entre des Québécois
présentant des déficiences semblables. En effet, une paralysie résultant d'un
AVC ou d'un syndrome de Guillain-Barré, par exemple, rend la personne
admissible puisque son handicap est causé par une maladie, alors que la même
paralysie résultant d'un traumatisme ne rend pas la personne admissible. La
souffrance et le déclin de l'un et de l'autre sont pourtant équivalents. Pour d'autres,
il n'y a pas de consensus à l'effet que ce soit une maladie ou un handicap, ce
qui complique beaucoup l'évaluation de l'admissibilité. Il est donc justifié,
comme le propose le projet de loi, de permettre l'AMM pour les personnes avec
un handicap grave et incurable.
Cependant, l'introduction de la notion de
handicap peut poser problème s'il n'est pas défini. Lorsque la population pense
à un handicap, elle pense surtout à une personne quadriplégique ou paraplégique
prisonnière de son corps. Cependant, ce n'est pas ainsi que le handicap est
défini. Selon la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées
du Québec, une personne handicapée est «toute personne ayant une déficience
entraînant une incapacité significative et persistante et qui est sujette à
rencontrer des obstacles dans l'accomplissement d'activités courantes». L'Organisation
mondiale de la santé, référence internationale pour la définition du handicap,
a une définition semblable et ajoute que cette perte d'autonomie peut être,
entre autres, l'effet de l'âge.
Selon ces définitions, le handicap inclut
donc beaucoup plus de personnes que ce à quoi la population s'attend. Ainsi,
une personne âgée présentant diverses incapacités liées à l'âge, comme la
difficulté importante à marcher ou un besoin d'aide pour se laver, s'habiller
ou aller à la toilette, sans que ce soit causé par une maladie spécifique,
pourrait être considérée comme présentant un handicap grave et incurable qui la
rendrait admissible à l'aide médicale à mourir.
Avant d'inclure le handicap grave et
incurable comme <critère...
M. Lussier (David) :
...
admissible à l'aide médicale à mourir.
Avant d'inclure le handicap grave et
incurable comme >critère, les parlementaires doivent donc se demander
s'ils souhaitent que cette personne âgée soit admissible. Est-ce que c'est ce
que la société québécoise souhaite? Si les parlementaires sont d'avis que ce
n'est pas le cas, ils devraient ajouter dans le projet de loi une définition de
«handicap» qui s'assure d'être représentative de ce que la société souhaite.
Depuis la semaine dernière, une grande
partie des discussions ont porté sur la justification de se restreindre au
handicap neuromoteur. Il y a un consensus assez large pour exclure les
handicaps intellectuels. Donc, les handicaps qu'on pourrait souhaiter inclure
et qui ne le sont pas sont les handicaps sensoriels, comme la cécité et la
surdité. Plusieurs personnes présentant une cécité sont déjà admissibles à l'AMM
car leur cécité est causée par une maladie grave et incurable, comme une
dégénérescence maculaire. Il ne reste donc que les cécités et surdités
congénitales ou traumatiques et les surdités liées à l'âge. Dans notre
réflexion sur le maintien ou le retrait du terme «neuromoteur», nous devons
simplement nous demander si nous souhaitons qu'une personne présentant une
cécité ou surdité congénitale, ou traumatique, ou reliée à l'âge soit
admissible à l'AMM. Puisque le nombre supplémentaire de personnes qui seraient
rendues admissibles par le retrait du terme «neuromoteur» est relativement
faible et que celui-ci risque de complexifier les évaluations, je propose de le
retirer.
On entend parfois, depuis le début du débat
sur les demandes anticipées, des gens demander s'il faut élargir l'accès à
l'AMM aux maladies cognitives dégénératives comme l'alzheimer. Il faut
clarifier que ces personnes y ont déjà accès à l'intérieur d'un intervalle
restreint dans la progression de la maladie, quand elles sont en déclin avancé
mais sont encore aptes. Selon les statistiques de la Commission sur les soins
de fin de vie, 70 personnes l'ont reçue dans ces circonstances depuis
2016. La question est donc plutôt s'il faut permettre de demander l'aide
médicale à mourir de façon anticipée. Les consultations antérieures, les
groupes d'experts et les études dans la population ont fait dégager un
consensus social assez large pour les permettre. Il persiste toutefois
plusieurs écueils, le principal étant la distinction entre les souffrances
anticipées et les souffrances contemporaines.
Le projet de loi a repris la
recommandation de la commission parlementaire spéciale en exigeant la présence
à la fois des souffrances décrites dans la demande et de souffrances
persistantes au moment de l'évaluation. Il est relativement facile d'évaluer la
présence de souffrances physiques à l'aide d'échelles d'évaluation de la
douleur, même si la personne ne peut pas la communiquer. Cependant, puisque la
souffrance psychique est une expérience subjective, il est très difficile,
voire impossible, dans la plupart des cas, d'en évaluer la présence chez
autrui. La presque totalité des personnes ayant reçu une aide, même
contemporaine, en raison de troubles cognitifs alors qu'elles étaient aptes ont
décrit une souffrance reliée à un état, comme la difficulté à effectuer les
activités de la vie quotidienne ou les activités qui donnent un sens à la vie,
ou un sentiment de perte de dignité. La grande majorité des gens qui disent
vouloir faire une demande anticipée d'AMM mentionnent également un état ou un
stade de la maladie, par exemple, quand ils ne reconnaîtront plus leurs
proches, quand ils seront incapables de marcher, de manger seuls ou qu'ils
seront incontinents.
La présence de ces états est facile à
constater chez une personne inapte, mais il est impossible d'évaluer s'ils lui
causent de façon contemporaine une souffrance psychique insupportable. Il
faudrait alors se fier sur la description de la souffrance anticipée que la
personne aurait faite dans son formulaire de demande. Est-ce qu'une personne
ayant statué, lorsqu'elle était apte et lucide, qu'il serait insupportable pour
elle de se retrouver dans tel état mais qui, au moment où elle se retrouve dans
cet état, ne semble pas malheureuse dans le moment présent devrait recevoir
l'AMM? En d'autres mots, est-ce que la constatation que la personne est dans un
état qu'elle a mentionné dans sa demande anticipée, sans signe objectivable de
souffrance contemporaine, est suffisante? C'est le dilemme de ce qu'on appelle
la démence heureuse, même si on peut très bien comprendre aussi que cette
personne ne soit plus elle-même et qu'elle ne souhaiterait pas vivre dans ces
conditions.
Après plusieurs heures de réflexion, je
dois constater mon échec à résoudre ce dilemme éthique et clinique. Cependant,
selon des discussions avec des collègues cliniciens qui oeuvrent auprès des
personnes avec des troubles cognitifs majeurs sévères, très peu, voire aucun
d'entre eux n'entrevoit pouvoir administrer l'AMM à une personne qui ne se
souvient pas l'avoir demandée, est incapable de rapporter une souffrance et
semble par ailleurs heureuse dans son quotidien. Je vois donc très mal comment
les demandes anticipées pourraient être appliquées en l'absence de souffrance
contemporaine objectivable. Pour ces personnes, il faudrait plutôt s'assurer
qu'elles ont fait les directives médicales anticipées et que le concept de
niveau de soins est bien compris et appliqué.
Merci pour votre écoute, votre disponibilité
et votre engagement envers cette loi très importante qui demande un travail
rempli de nuances.
• (10 h 10) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Dr Lussier, pour cet exposé et vos
recommandations, qui sont, ma foi, très, très claires.
Alors, on va débuter la période d'échange,
d'abord, avec la ministre, qui va disposer d'un temps de 16 min 30 s
avec vous, ainsi <qu'avec les députés...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
... disposer d'un temps de 16 min 30 s avec vous,
ainsi >qu'avec les députés de la banquette pour discuter de cet
important projet de loi. Mme la ministre, le temps commence. La parole est
vous.
Mme Bélanger : Oui, Mme la
Présidente. Bonjour, Dr Lussier. Un plaisir de vous revoir. Merci pour,
vraiment, l'excellence de votre mémoire et votre présentation que vous venez de
nous faire. Beaucoup d'éléments, de propositions, là, pour amener toutes les
nuances nécessaires.
Dans le fond, ce que je comprends, c'est
que vous trouvez que conserver uniquement le terme «neuromoteur» pourrait être
discriminatoire. Est-ce que j'entends ça ou... Voulez-vous revenir sur ces
éléments-là?
M. Lussier (David) : Bien, en
fait, c'est que le terme «neuromoteur» inclut la très, très grande majorité des
handicaps. Selon moi, les seuls qui ne sont pas inscrits, c'est les handicaps
intellectuels, qu'on ne souhaite pas inclure de toute façon, je crois qu'il y a
un large consensus pour ça, et les handicaps sensoriels, donc la cécité, la
surdité. Donc, la différence entre un handicap neuromoteur, si on le précise et
si on ne précise pas le handicap neuromoteur, c'est la cécité et la surdité qui
ne sont pas causées par des maladies, donc, qui sont congénitales, ou, par
exemple, la surdité qu'on voit souvent, là, les personnes âgées sans maladie
sous-jacente. Donc, c'est vraiment une différence assez minime entre «neuromoteur»
ou «handicap», sans la précision. Donc, pour cette raison-là, j'ai l'impression
que ça complexifierait l'évaluation. Et il n'y a pas beaucoup de différences
entre les deux. Donc, on pourrait le retirer, là, sans grand problème.
Mme Bélanger : Dr Lussier, on
a, depuis la semaine dernière, rencontré plusieurs groupes d'experts puis des
personnes, des usagers aussi, des patients. La définition d'un handicap
neuromoteur demeure quelque chose qui n'est pas très, très bien défini. Est-ce
que vous avez une définition de ce que c'est, un handicap neuromoteur?
M. Lussier (David) : Je ne
crois pas qu'il existe... Je n'ai pas pu trouver de définition claire,
acceptée. Mais, selon moi, c'est comme... Là, je le disais, le handicap, c'est
une personne qui est limitée dans ses activités. Donc, c'est beaucoup... Le
handicap, habituellement, on ne le conçoit pas comme une déficience, mais comme
une différence entre ce que la personne peut faire et les ressources que
l'environnement lui donne. Par exemple, quelqu'un pourrait avoir un handicap
s'il est dans son appartement, et qu'il n'y a pas d'ascenseur, et il n'est pas
capable de descendre les escaliers. Mais on lui met un ascenseur, et il y a...
son handicap est disparu, parce qu'il peut maintenant sortir. Donc, quelqu'un
peut avoir un handicap s'il est chez lui et n'a pas les services, par exemple,
pour se laver, pour s'habiller. On lui donne ces services-là, il perd son
handicap parce qu'on vient compenser sa déficience.
Donc, c'est pour ça que c'est difficile,
dans une loi comme ça, de mettre «handicap» sans le définir, parce qu'on risque
d'élargir de façon très, très large. Et, comme je le disais, une personne âgée
qui a de la difficulté à se laver, à s'habiller et à marcher, elle a un
handicap neuromoteur, parce que le «neuromoteur», selon moi, veut tout
simplement dire un trouble neurologique ou un trouble moteur. Donc, ça inclut
la très, très grande majorité des handicaps. Donc, «handicap neuromoteur»,
c'est un terme qui est très, très, très large.
Mme Bélanger : Et vous
avez... Donc, vous nous avez parlé de handicap neuromoteur, mais, dans votre
mémoire, vous parlez aussi de l'importance de définir «handicap».
M. Lussier (David) : Effectivement,
parce que, comme je le dis, «handicap», la définition qu'on utilise, entre
autres celle de la loi, là, sur les droits des personnes handicapées, c'est une
définition qui est beaucoup trop large, je crois, pour ceux qu'on veut inclure
dans la loi, comme critère d'admissibilité. Alors, je crois qu'il faudrait le
définir pour être certains que ça s'applique aux personnes. Par exemple, on
pourrait dire... Comme c'est écrit dans le projet de loi, «un trouble mental
autre qu'un trouble neurocognitif n'est pas considéré comme une maladie», on
pourrait dire : Un handicap intellectuel ou un handicap résultant des
effets de l'âge n'est pas considéré comme un handicap au sens de la loi, quelque
chose comme ça. Je crois que ça pourrait être une façon simple de s'assurer
qu'on le restreint vraiment aux personnes qu'on veut inclure.
Mme Bélanger : OK. Peut-être
une autre question. Vous avez soulevé dans votre mémoire que... Et c'est la
première fois que je l'entendais comme ça, puis je trouve ça intéressant, là. Vous
dites que c'est... en fait, il y a deux lois, il y a le Code criminel, bien
sûr, mais la loi... et la loi québécoise, et que la loi québécoise, elle est
très différente, parce que c'est une loi qui est davantage une règle de droit
en lien avec des soins, tandis que le Code criminel, bien, c'est le Code
criminel. Pouvez-vous peut-être, <juste pour notre...
Mme Bélanger :
...
le Code criminel, bien, c'est le Code criminel. Pouvez-vous peut-être, >juste
pour notre bénéfice, nous parler un petit peu de ça, s'il vous plaît?
M. Lussier (David) : Bien oui,
effectivement, c'est la philosophie. J'ai parfois des collègues juristes qui
n'apprécient pas que je donne des avis juridiques, donc je vais faire
attention. Bien, je crois que la philosophie derrière les deux lois est
différente. Le Code criminel a été amendé suite à des décisions de cour, donc,
la Cour suprême, la Cour supérieure du Québec, alors que le Québec agit dans sa
compétence en soins de santé. Donc, c'est pour ça que la loi québécoise est une
loi de soins. Donc, selon moi, le Québec pourrait être justifié de dire que,
même si les cours ont donné le droit à une personne de recevoir l'AMM dans ces
conditions, le Québec ne considère pas que c'est un soin approprié pour cette
personne dans cette condition, donc, pourrait restreindre plus la loi. Je crois
que ça irait dans la... dans toute la philosophie de la loi, comme on dit que
la...
Un élément que je n'ai pas abordé dans le
mémoire, que j'aurais dû, c'est toute la discordance, aussi, si les
directives... les demandes anticipées sont acceptées au Québec mais pas au
Canada. Ça, je crois que c'est un élément qui pourrait vraiment décourager les
médecins ou les IPS de l'administrer. Donc, on a ici deux compétences
différentes, et, le Québec, c'est vraiment celle des soins de santé.
Mme Bélanger : Je vous
remercie, Dr Lussier.
M. Lussier (David) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, Dr Lussier, on va poursuivre
la discussion avec la députée d'Abitibi-Ouest. Il reste un total de
10 minutes pour la banquette ministérielle. La parole est à vous.
Mme Blais : Merci, Dr Lussier,
pour la présentation de votre mémoire. Lorsque vous rencontrez la clientèle
gériatrique et que vous parlez d'aide médicale à mourir, j'aimerais vous
entendre sur les inquiétudes qu'ils vous verbalisent. Est-ce possible?
M. Lussier (David) : Oui,
bien sûr. En fait, ce que je vois dans ma pratique, comme je le disais, tous
les jours, je vois des personnes âgées qui ont de la douleur chronique. Ils ont
souvent une souffrance psychique qui est associée à ça. Donc, des personnes qui
veulent mourir, j'en vois presque tous les jours. Évidemment, et c'est toujours
ce que j'enseigne quand on parle d'aide médicale à mourir, si quelqu'un
dit : Je veux mourir, on ne dit pas : J'ai un papier, signez ici,
puis vous allez avoir l'aide médicale à mourir. Parce que la très grande
majorité de ces gens-là ne veulent pas l'aide médicale à mourir. Ils ont ce
qu'on appelle un souhait de mort passif. Ils espèrent se coucher et ne pas se
réveiller le lendemain parce qu'ils trouvent que leur vie... la qualité de vie
n'est plus là, ils ont vécu ce qu'ils avaient à vivre, donc, ils ont moins de
plaisir à vivre. Donc, ça, c'est quelque chose qu'on entend vraiment souvent.
Par contre, ils ne vont pas tous demander l'aide médicale à mourir.
Et ce qui m'inquiète, c'est que ça
devienne un peu trop facile, pour une personne âgée qui trouve qu'elle est
rendue au bout de sa vie, de recevoir l'aide médicale à mourir. Je crois qu'il
faut toujours s'assurer qu'il y a une maladie grave et incurable. Je dis
souvent aux gens : Vieillir, c'est grave et c'est incurable, mais ce n'est
pas une maladie. Et moi, je ne crois pas que le seul fait d'être vieux, si on
peut s'exprimer ainsi, devrait rendre admissible à avoir l'aide médicale à
mourir. Et ça, je crois que, dans ce que.... j'en parle autour de moi, c'est un
sentiment qui est assez partagé.
Mme Blais : J'aimerais...
M. Lussier (David) : Et sinon,
peut-être pour mieux répondre à votre question, je m'excuse, ce que les gens ne
souhaitent pas non plus, c'est de vivre trop longtemps dans des conditions
qu'ils ne jugent pas acceptables, avec une perte d'autonomie. On entend
beaucoup la crainte d'aller en CHSLD, mais, derrière la crainte d'aller en
CHSLD, c'est beaucoup la crainte d'être dans un état de perte d'autonomie qui
nécessite d'aller en CHSLD. Donc, ça, c'est quelque chose qu'on entend
beaucoup, beaucoup aussi chez les personnes âgées.
Mme Blais : Et, lorsque vous
avez des... une clientèle qui est très souffrante, même, je dirais, douleur
intolérable, est-ce que vous avez un protocole, comme soins de confort, ces
choses-là, automatiquement ou... Chaque cas est unique, naturellement.
M. Lussier (David) : Oui,
chaque cas est unique. Ça dépend si la personne est vraiment dans une douleur
terminale, là, évidemment. Il y a des protocoles, par exemple, dans les CHSLD,
dans tous les hôpitaux, des protocoles de soins palliatifs. Et, si on a une
personne qui est plutôt... qui habite chez elle, là, qui est en ambulatoire,
donc, on va y aller selon toutes les bonnes pratiques de prise en charge de la
douleur.
Mme Blais : Je vous remercie
beaucoup, Dr Lussier.
M. Lussier (David) : Merci à
vous.
• (10 h 20) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, on va poursuivre
avec la députée de Vimont. Et il reste encore 7 min 15 s.
Mme Schmaltz : Bonjour, Dr Lussier.
On parle beaucoup de démence heureuse, et il semble y avoir un débat autour de
la question. J'aimerais un petit peu vous entendre sur votre définition de «démence
heureuse», parce que, pour moi, c'est... une démence heureuse, c'est l'absence,
peut-être, de symptômes visibles. Est-ce qu'on... Est-ce que... Le fait de ne
pas avoir de symptôme, est-ce que notre <qualité de vie...
Mme Schmaltz :
...
qu'on... Est-ce que... Le fait de ne pas avoir de symptôme, est-ce que notre
>qualité de vie, quand même, peut être altérée? Alors, il y a comme tout
un... Il n'y a pas de consensus, hein, je pense, sur la question.
M. Lussier (David) : C'est
une excellente question. Et, quand je parle de démence heureuse, je le mets
toujours entre guillemets, justement, parce qu'il n'y a pas de consensus. Donc,
ce qu'on appelle la démence heureuse, c'est une personne qui est plus ou moins
consciente de ses déficits et qui est heureuse dans son quotidien. Donc, elle
est heureuse de manger, elle est heureuse de participer à des activités, elle
peut être heureuse de voir sa famille, même si elle ne reconnaît pas sa famille,
elle peut être heureuse d'écouter la télévision, de chanter. Donc, dans le
quotidien, elle est heureuse. Donc, ça, c'est ce qu'on appelle la démence
heureuse. Donc, elle n'a pas de signe de souffrance.
Il y a des gens pour qui c'est très
souffrant, la détérioration et les problèmes cognitifs, où on peut voir qu'il y
a une souffrance physique ou une souffrance psychique, parce qu'ils sont
agités, parce qu'ils crient, parce qu'ils se débattent, parce qu'on ne peut pas
les approcher. Donc, ceux-là, on ne les sent pas heureux. Mais les gens qui
sont heureux, parce qu'ils ne présentent pas de signe, c'est ça qu'on appelle
la démence heureuse.
Maintenant, quelqu'un va dire : Oui,
elle est heureuse, mais elle n'est pas elle-même, elle n'aurait pas voulu se
voir être dans cet état-là. Donc, ça, c'est de l'autre côté, de dire que, oui,
elle semble heureuse, mais elle ne serait pas heureuse de se voir comme ça.
Donc, c'est vraiment le dilemme que je disais que j'ai été... impossible à
résoudre, de dire : Est-ce que cette personne-là qui n'est plus elle-même,
qui ne reconnaît pas ses enfants ou qui n'a pas de... qui ne peut pas avoir une
grande conversation significative... Est-ce que cette personne-là, elle devrait
recevoir l'AMM, même si... Cet état-là, elle n'aurait pas voulu le vivre. Et ce
serait très difficile.
Quand on en parle aux gens qui travaillent
avec des personnes, là, qui ont des problèmes cognitifs, il y a très peu de
gens qui s'imaginent prendre quelqu'un et dire : Madame, quand vous étiez
apte, vous aviez demandé à recevoir l'aide médicale à mourir, donc, par
exemple, quand vous ne reconnaîtriez pas vos enfants; maintenant, aujourd'hui,
vous ne les reconnaissez pas depuis un an, donc, aujourd'hui, on va vous
administrer l'aide médicale à mourir. Donc, très peu de gens s'imaginent faire
ça.
Mme Schmaltz : Mais moi, je
suppose que les médecins ne vont pas l'administrer, là, l'aide médicale à
mourir, dans un cas comme ça.
M. Lussier (David) : Bien,
c'est le dilemme de ce qu'on appelle la souffrance contemporaine. Donc, cette
personne-là, elle ne semble pas avoir de souffrance contemporaine, maintenant,
mais peut-être que, quand elle était apte, elle a dit : Quand je ne
reconnaîtrai pas mes enfants, pour moi, ce serait une souffrance psychique,
donc, à ce moment-là, donnez-moi l'AMM. Donc, c'est vraiment de dire : Est-ce
que, quand je me projette dans le futur, ça a plus de valeur que comment je
suis maintenant?
Et ce qui est difficile, c'est que
plusieurs personnes... Par exemple, quelqu'un pourrait dire : Si je ne
suis pas capable de courir cinq kilomètres par jour — j'exagère là,
mais... — la vie ne vaut pas la peine d'être vécue. Bien, ils vont
vieillir, ils ne vont pas être capables de courir cinq kilomètres, ils vont
être capables de se déplacer seulement dans leur maison et ils vont quand même
être heureux. Donc, on évolue dans la vie. Est-ce que, parce qu'on a des
problèmes cognitifs, il faut refuser à ces gens-là le droit d'évoluer? C'est
vraiment une question difficile.
Mme Schmaltz : ...oui, oui.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Merci, Dr Lussier. On
va poursuivre pour une période de 3 min 30 s avec la députée de
Laporte.
Mme Poulet : Oui. Bonjour.
Merci de votre présence. J'avais une question concernant votre pratique, votre
expérience. Vous avez mentionné tantôt que des personnes veulent mourir. Vous
en voyez à tous les jours. Quel est le rôle, pour vous, du tiers de confiance
auprès d'une personne, justement, qui veut demander l'aide médicale à mourir?
Pouvez-vous nous parler du tiers de confiance?
M. Lussier (David) : Bien, le
tiers de confiance qu'on voit dans les demandes anticipées parce que la
personne sera devenue inapte, le tiers de confiance, pour moi, a un rôle
important parce que, dans la demande anticipée, on peut supposer que l'équipe
traitante ou celui qu'on appelle le professionnel compétent, qui va remplir la
demande avec la personne au temps zéro, ne sera pas la même équipe et ne sera
pas la même personne que celle qui va avoir soin de la personne quand on va
être rendu au moment d'administrer l'aide médicale à mourir. Donc, c'est pour
ça que le tiers de confiance, c'est celui qui connaît la personne.
Et nous, on le voit beaucoup aussi avec
des... On le fait déjà, là. Habituellement, c'est plus pour les niveaux de
soins que pour l'aide médicale à mourir, mais on dit : Vous qui connaissez
votre mère, est-ce que vous pensez qu'elle aurait voulu vivre dans ces
circonstances-là? Est-ce que vous pensez que la souffrance qu'elle a décrite
dans sa demande, ça correspond à la souffrance qu'elle ressent maintenant?
Donc, c'est pour ça que le tiers de confiance est vraiment important pour ça.
Il y a des gens qui ont parlé des proches
aussi, quelle est l'implication des proches. Bien, je crois que les proches, <même
s'ils ne sont pas...
M. Lussier (David) :
...
Quelle est l'implication des proches? Bien, je crois que les proches, >même
s'ils ne sont pas mentionnés dans la loi... C'est clair qu'on tient toujours
compte de l'opinion des proches, là, pour... dans les évaluations ou les
discussions sur les soins.
Mme Poulet : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Donc, une toute petite
question pour la députée de Soulanges. Il reste 1 min 50.
Mme Picard : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Dr Lussier. J'avais une question par rapport à la
demande anticipée et la réticence que les gens pourraient y avoir au moment de
l'injection de l'aide médicale à mourir. Est-ce que vous pensez qu'on ne
devrait pas... En fait, s'il y a un refus, qu'est-ce qu'on doit faire, selon
vous? Qu'est-ce qui pourrait être un refus, une réticence? J'aimerais vous
entendre sur ce moment-là précis, si possible.
M. Lussier (David) : C'est
vraiment une excellente question. Je crois que le projet de loi, celui-ci, par
rapport au projet de loi n° 38, a fait une bonne avancée en disant que les
manifestations cliniques qui découlent de la maladie ne sont pas un refus.
Parce que le problème, c'est que les gens qui ont des problèmes cognitifs
sévères, souvent, résistent aux soins, résistent à tout. On ne peut pas leur
donner un bain, on ne peut pas les changer parce qu'ils vont se débattre. Ils
n'aiment pas être touchés parce qu'ils ne savent pas ce qui arrive. Donc, ces
gens-là, c'est évident qu'on ne peut pas leur installer une intraveineuse pour
donner l'aide médicale à mourir. Donc, on se trouverait à exclure presque tout
le monde qui a demandé l'AMM de façon anticipée. Donc, ces gens-là, il ne faut
pas considérer ça comme un refus.
Par contre, ça va être difficile quand
même de l'administrer, parce que la personne va se débattre. Donc, est-ce qu'il
faut la sédationner pour lui administrer l'aide médicale à mourir? Ça va être
très difficile pour les professionnels et pour la famille. Donc, moi, je crois
que, dans la demande, la personne devrait dire : Si, au moment de
l'administration, j'ai une résistance à cause de ma maladie, je veux avoir un
sédatif pour recevoir l'aide médicale à mourir à ce moment-là. Je pense que ça
conforterait beaucoup les gens, là, qui vont être impliqués dans le soin, rendus
à ce moment-là.
Mme Picard : Parfait. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, Dr Lussier, je me
tourne maintenant du côté de la banquette de l'opposition officielle, qui va
bénéficier d'une période de 12 min 29 s. Et le temps commence.
Je reçois la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, Dr Lussier. C'est un plaisir de vous avoir avec nous ce
matin. Merci pour votre mémoire puis toutes les recommandations. C'est toujours
bien reçu quand nous recevons des mémoires qui sont complets. Ça fait que merci
pour votre travail pour nous aider dans notre réflexion en ce qui concerne ce
projet de loi.
Moi, je veux revenir sur la notion de
handicap. Je sais que la ministre vous a posé quand même de très bonnes
questions. Je sais que c'est difficile d'avoir une définition en ce qui
concerne ceci. Puis évidemment je pense qu'on souhaite avoir plus
d'accompagnement puis de l'information, nous aussi, ici, en commission, pour
mieux comprendre comment l'encadrer dans la loi. Vous avez dit, dans votre
recommandation 4, qu'un handicap intellectuel n'est pas considéré comme un
handicap. Pouvez-vous élaborer un peu en ce qui concerne cette notion, s'il
vous plaît?
M. Lussier (David) : Oui. En
fait, c'est... Je crois avoir décelé un consensus assez large, là, dans la
population, et même les gens qui sont venus en commission, parce que j'ai
écouté toutes les audiences jusqu'à maintenant, les gens qui sont venus et qui
veulent inclure le handicap, même en supprimant le «neuromoteur», je n'ai
entendu personne qui disait qu'il voulait qu'un handicap intellectuel rende
quelqu'un admissible à l'aide médicale à mourir. Donc, c'est dans ce sens-là où
je crois qu'il y a un consensus pour les exclure, ce qui ne veut pas dire
qu'une personne, par exemple... Une personne qui aurait un handicap
intellectuel mais qui est apte pourrait, évidemment, avoir l'aide médicale à
mourir si elle a un cancer ou une autre maladie, mais je crois que de donner
l'AMM pour quelqu'un qui n'a pas d'autre maladie qu'un handicap intellectuel...
Je crois qu'il y a un consensus pour dire que ça ne devrait pas être. Donc,
c'est pour ça que je recommandais d'écrire que... évidemment, pas de façon
générale, mais comme c'est fait pour le trouble mental, de dire qu'au sens de
la loi le handicap intellectuel n'est pas considéré comme un handicap qui rend
admissible à l'AMM.
• (10 h 30) •
Mme Maccarone : Ça fait que
les mots sont très importants. Évidemment, je pense qu'on est... Nous autres
aussi, nous avons entendu le consensus que, parce qu'on souffre de déficience
intellectuelle, ça ne peut pas être cause pour avoir fait une demande à l'aide
médicale à mourir. Mais on ne veut pas aussi exclure, comme vous avez dit avec
justesse, s'il y a quelqu'un qui souffre d'une déficience intellectuelle ou qui
vit avec le spectre de l'autisme, par exemple, qui serait en mesure de faire un
choix, parce qu'on parle beaucoup de l'autonomie. Alors, ça va être important
d'avoir cette notion très bien définie dans la loi, si on y arrive là, pour
s'assurer que le droit de ces personnes aussi sont respectés. Mais je veux que
ce soit <clair aussi...
>
10 h 30 (version révisée)
<17911
Mme
Maccarone :
...définie dans la loi, si on y arrive là, pour s'assurer
que les droits de ces personnes aussi sont respectés, mais je veux que ce soit >clair
aussi parce que, quand on parle des définitions, si on n'a pas de définition, évidemment,
là, on peut avoir des dérives.
Vous avez mentionné, mettons, quelqu'un
qui est quadriplégique ou tétraplégique, si... mettons, quelqu'un qui perd l'usage
de ses bras. Est-ce que ça, ça pourrait être considéré comme une souffrance?
Puis là je comprends que vous avez aussi parlé de... exemple, des personnes qui
sont atteintes des difficultés sensorielles. Mais, si c'est suite à un
accident, par exemple, quelqu'un qui a un accident d'automobile, qui subit
quand même, maintenant, des difficultés qui sont considérées graves, qui
souffre, après combien de temps que nous devons prévoir une période de...
Une voix : ...
Mme Maccarone : ... — merci — réadaptation
avant de dire que, d'abord, on peut même considérer que cette personne pourrait
avoir un accès à l'aide médicale à mourir?
M. Lussier (David) : C'est un
point vraiment important, parce qu'on sait tous qu'après un accident qui cause
un handicap grave la plupart des gens vont traverser une période de dépression.
Ça s'apparente beaucoup au seuil... aux stades de deuil, donc, la colère, le
déni. Après ça, on va avoir la dépression. Et, à un certain moment, avec la
réadaptation, on développe une résilience. Donc, il y a une acceptation et une
adaptation. Donc, je crois que c'est clair pour tous que la personne ne peut
pas recevoir l'AMM avant d'être arrivée au stade final de l'acceptation et de l'adaptation.
Il ne faut pas que, le mois suivant ou deux mois après l'accident, elle puisse
avoir l'AMM, parce qu'elle est encore dans le stade de dépression et de choc.
Je crois que c'est impossible de dire un an,
deux ans, trois ans, parce que chacun évolue différemment. Par
contre, je crois qu'il y a un jugement médical qui est assez bon pour ça, où on
pourrait dire, comme on le fait avec les autres, là : Si on a quelqu'un
qui a une maladie et qui a des symptômes dépressifs importants, on ne va pas
lui donner l'AMM. Donc, je crois que c'est important. La loi pourrait préciser
seulement qu'il faut attendre que la personne ait terminé sa réadaptation ou
ait atteint un stade d'acceptation et qu'elle n'ait pas de symptôme dépressif
significatif. Je crois que ce serait suffisant, parce que, de mettre un an,
deux ans, cinq ans, je crois que c'est impossible.
Mme Maccarone : Ça fait que,
selon vous... On a entendu la recommandation la semaine passée, un guide de
pratique. Selon vous, est-ce que ça, c'est un moyen que nous devrons utiliser
pour s'assurer une compréhension commune? Mais je comprends ce que vous dites.
C'est cas par cas. Mais est-ce que ça, c'est un moyen pour nous de l'encadrer?
M. Lussier (David) : Bien, le
guide de pratique est toujours là. Il y a un guide de pratique qui est fait par
les ordres professionnels, qui existe déjà, qui devrait être mis à jour, là, si
le projet de loi est adopté. Donc, c'est une bonne façon de le faire.
Moi, je crois seulement qu'il faut s'assurer
de ce qui est dans le guide de pratique, parce que ce n'est pas l'Assemblée
nationale qui fait le guide de pratique, il faut s'assurer que ce qui est dans
le guide de pratique, ça correspond bien à l'esprit que l'Assemblée nationale
avait quand ils ont adopté la loi.
Mme Maccarone : Vous, comme
gériatre, vous devez voir beaucoup de proches de vos patients. Comment
voyez-vous leur rôle de le tiers de confiance en ce qui concerne, par exemple,
une demande anticipée? Comment voyez-vous le rôle de cette personne? Est-ce qu'il
devrait être avec vous pendant que la personne concernée va remplir le
formulaire en question? Comment voyez-vous le rôle de cette personne? Est-ce
que c'est cette personne qui devrait lever la main pour dire : Bien là, je
pense que ma mère ou ma proche est rendue à un moment où, peut-être, elle
rejoint les critères qu'elle avait elle-même identifiés dans le formulaire de
demande anticipée?
M. Lussier (David) : Oui. Je
crois que le lien de confiance est vraiment important, parce que c'est lui qui
connaît le mieux la personne, parce que l'équipe qui va soigner la personne à
la fin ne sera pas la même qu'au début. Donc, on n'aura pas la connaissance
longitudinale de la personne, de sa personnalité. Et le tiers de confiance est
celui qui le connaît le mieux. Et, en plus, c'est la personne elle-même qui l'a
désigné. Donc, ça veut dire que la personne a le sentiment qu'elle va bien
décrire comment elle ressentait les souffrances. Donc, je crois que le tiers de
confiance est vraiment important. Le projet de loi lui donne un rôle qui est
assez mineur, mais je crois que, dans les faits, c'est certain que le tiers de
confiance va être très, très, très impliqué dans tout le processus, et les
proches aussi, même s'ils ne sont pas tiers de confiance, évidemment.
Mme Maccarone : Un tiers de
confiance? Deux tiers de confiance? Et on a aussi <entendu...
Mme Maccarone :
...et
on a aussi >entendu quelques groupes qui nous ont dit que, peut-être,
c'est trop pour un membre de la famille, peut-être, ça devrait être quelqu'un
qui n'a pas cette influence puis qui ne sera pas influencé aussi. Comment
voyez-vous ça?
M. Lussier (David) : Bien, je
trouve que c'est... C'est pour ça que la personne choisit elle-même son tiers
de confiance. Donc, la personne va choisir un tiers de confiance qu'elle pense
qu'il ne sera pas trop influencé et qu'il va être capable de remplir ce
rôle-là. D'en avoir deux ensemble, ça risquerait de compliquer les choses.
Donc, un et un autre, si le premier n'est pas capable de remplir le rôle, je
crois que c'est bien de le faire, mais le tiers de confiance est vraiment
important, parce que c'est lui qui connaît bien la personne.
Mme Maccarone : Et le
professionnel de la santé peut occuper ce rôle.
M. Lussier (David) : Moi, je
ne crois pas que le professionnel de la santé peut occuper ce rôle, parce que
le tiers de confiance est celui qui connaît la personne depuis longtemps, et le
professionnel de la santé ne connaît pas la personne, à moins que ce soit la
même personne. Mais, entre le moment de la demande et le moment de
l'administration, il va y avoir entre deux et 10 ans, probablement,
donc... et la personne va, dans plusieurs cas, avoir peut-être changé de milieu
de soins. Donc, probablement que ce ne sera pas le même professionnel au début
et à la fin, si ça va être... Et c'est rare, malheureusement, maintenant, dans
notre système, que le même professionnel suit une personne pendant 10 ans.
Donc, je vois difficilement comment le tiers de confiance pourrait être un
professionnel de la santé. Je crois que, si la personne n'a pas de tiers de
confiance, ce rôle-là pourrait être rempli par des proches ou pourrait être
délégué à des professionnels de la santé, parce que le rôle est quand même
assez mineur légalement, mais je crois que d'avoir quelqu'un qui connaît bien
la personne, c'est vraiment essentiel.
Mme Maccarone : Merci. Ma
collègue, elle aura des questions. Merci.
M. Lussier (David) : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Dr Lussier. On va poursuivre, donc, les
discussions avec la députée de D'Arcy-McGee. Il vous reste... (panne de son)
...secondes.
Mme Prass : Quatre minutes.
Parfait.
La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) :
...je m'excuse.
Mme Prass : 2 min 50 s.
OK. Parfait. Dans ce cas-là, je vais y aller avec ma première question. Donc,
pour les demandes anticipées, vous faites mention que, si, entre-temps, la
personne devient inapte, et ils sont atteints d'une autre maladie... qu'ils
devraient être en mesure de recevoir l'AMM à ce moment-là. Là, vous dites que
vous devrez décrire les souffrances, etc. Mais, si une personne n'est pas
encore atteinte de cette maladie-là, mais on comprend que c'est une maladie
terminale, par exemple, un cancer, comment est-ce qu'on pourrait bien indiquer
ça, comme j'ai dit, sans que la personne puisse décrire les souffrances qu'ils
vont avoir parce qu'ils ne sont pas encore atteints de la maladie? Est-ce qu'on
peut dire, par exemple... Si une autre maladie de... mortelle, disons, ils sont
en stage 4, cancer, etc., qu'il soit prévu pour qu'ils reçoivent plus tôt,
comment est-ce qu'on pourrait bien indiquer ça?
M. Lussier (David) : Bien, je
crois que vous l'avez... C'est vraiment une bonne question, et vous l'avez
très, très bien dit. Je crois que, dans sa demande, la personne devrait dire :
Est-ce que, si j'ai une autre maladie, je veux avoir l'AMM pour la souffrance
qui est causée par cette maladie-là? Donc, dans ma demande, je vais écrire :
Si j'ai une souffrance physique à cause d'un cancer, je veux recevoir l'AMM.
Donc, je crois qu'il faudrait l'écrire. Parce qu'on pense à un cancer, mais ça
pourrait être quelqu'un qui commence à avoir une douleur chronique sévère.
Donc, est-ce que je veux juste pour le cancer ou je veux juste pour la douleur?
Parce que c'est important que ce soit un consentement. Et, pour consentir, il
faut que je sache de quoi il est question.
Donc là, on est vraiment dans le
consentement anticipé. Donc, je crois qu'il faut... il faudrait vraiment dire :
Si j'ai telle maladie, je veux le recevoir, si j'ai telle maladie, je veux le
recevoir, pour que ce soit bien consenti à l'avance et pour ne pas non plus que
la personne se... qu'on se retrouve à dire : Bon, est-ce que sa
souffrance, c'est son cancer ou c'est son problème cognitif?, et que, là, la
personne ne reçoive pas l'AMM parce qu'on n'est pas certains, qu'est-ce qui
cause sa souffrance.
Mme Prass : Mais, comme vous
l'avez dit, il est difficile de prévoir ce qu'on pourrait avoir comme maladie.
Donc, dire que ce soit un cancer... Est-ce qu'on pourrait plutôt dire : Si
on est... on a une maladie en phase terminale, plutôt, parce que... ou le... la
façon de le vulgariser? Parce que, justement, on ne peut pas prévoir ce qui va
nous arriver. Donc, pour bien cibler les cas où on serait admis à l'AMM plus tôt,
je pense qu'il faudrait trouver une formulation de mots plutôt que de maladie
en tant que telle pour bien décrire la situation.
M. Lussier (David) : Effectivement,
parce que, sinon, on... si on oublie une maladie, la personne va se retrouver à
ne pas pouvoir le recevoir. Donc, d'écrire, ça pourrait être une bonne façon de
le faire.
• (10 h 40) •
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Donc, Dr Lussier, on
va terminer nos blocs d'échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice. Et
vous détenez, Mme la députée, 4 min 7 s pour ces discussions. La
parole est à vous.
Mme Tardif : Merci. Merci,
merci, <Dr Lussier...
Mme Tardif :
Merci.
Merci, merci, >Dr Lussier.
M. Lussier (David) : Merci.
Mme Tardif : J'oserais
dire : C'est beau, c'est beau de vous voir, c'est beau de vous entendre.
J'ai bien aimé quand vous avez dit : Vieillir n'est pas une maladie. Je
pense que c'est très important, là, dans la société dans laquelle on vit, de se
rappeler ça et de le rappeler à nos personnes aînées aussi, âgées, et que la
loi ne devrait pas se rendre... ou rendre possible une demande d'aide médicale
à mourir pour ces personnes-là. Parce qu'on en rencontre plusieurs, on remet
des certificats de centenaire de plus en plus, et il y en a souvent qui nous disent :
Je pense que le bon Dieu m'a oublié. Mais ils ne sont pas malades. Ils sont en
bonne santé. Ils sont pimpants. Ils souffrent souvent de solitude, par contre.
Et, quand vous dites, là, que certaines personnes âgées deviennent handicapées
à cause de leur âge ou à cause du manque de soins, à cause du manque de
services, à cause du manque de visiteurs, je pense que c'est une... c'est une
grande question de société aussi qu'on a à se poser.
Vous nous dites que vous voyez mal comment
un médecin pourrait administrer l'aide médicale à mourir à une personne qui ne
semble pas souffrir puis qui a écrit que, rendue à ce stade-là, elle devrait
mourir. Et là vous nous référez au formulaire. J'aimerais avoir davantage
d'informations. Vous avez... vous avez noté, vous avez dit qu'on ajoute, entre
autres, si elle veut recevoir de la sédation ou de la contention physique,
qu'il y ait plus de détails pour décrire, qu'il n'y ait pas juste des cases à
cocher, qu'il y ait... de laisser de la place pour que la personne puisse... et
que ce soit revu aussi, éventuellement, j'imagine, par la personne. Donc,
qu'est-ce que vous verriez comme le formulaire parfait, autant que faire se
peut?
M. Lussier (David) : Oui.
Là, c'est une question difficile, parce que le formulaire parfait devrait
laisser le plus de place possible pour qu'on comprenne bien ce que la personne
veut exprimer, mais sans que ce soit dans un cadre trop rigide comme des cases
à cocher, parce que moi, je crains que la personne coche toutes les cases,
finalement. Donc, on ne comprendra pas bien comment elle se sent. Mais il ne
faut pas non plus que ce soit trop libre parce qu'il faut avoir une information
de qualité, là, qui va être applicable concrètement. Donc, la personne ne peut
pas dire, disons : Quand je ne serai plus moi-même. Donc, on peut
comprendre que quelqu'un voudrait l'aide médicale à mourir quand elle n'est
plus elle-même, mais c'est quelque chose qui n'est pas applicable dans la
réalité. Donc, on ne peut pas écrire ça dans le formulaire.
Maintenant, la question qu'il faut se
poser, c'est : Est-ce que je peux écrire dans mon formulaire : Quand
je ne reconnaîtrai pas ma famille? Parce que ça, ce n'est pas une souffrance. C'est
un état, c'est un stade de la maladie. Et, si, quand je ne reconnais pas ma
famille, j'ai par ailleurs l'air heureux, est-ce que je devrais avoir l'aide
médicale à mourir dans ces circonstances-là? C'est ça vraiment, le gros
dilemme, là, de la démence heureuse que je n'ai pas réussi à résoudre. Et on peut
avoir des bons arguments des deux côtés, mais où je crois, comme je le disais,
que je vois difficilement quelqu'un administrer l'AMM dans ces
circonstances-là. Probablement qu'il y en aurait qui le feraient, mais la
grande, très grande majorité ne le ferait pas.
Mme Tardif : Et, quand
vous dites que les modifications apportées à la loi par le PL n° 11 ou
l'arrêté ministériel qui va l'accompagner soient assez claires pour s'assurer
que les volontés de l'Assemblée nationale soient bien représentées, ça aussi,
c'est vague, là. Aidez-moi un peu, là. Assez claires, donc...
M. Lussier (David) : Pour...
Vous voulez dire pour le formulaire ou pour la définition du handicap,
peut-être?
Mme Tardif : Oui.
M. Lussier (David) : Pour
le formulaire?
Mme Tardif : Pour la
définition du handicap.
M. Lussier (David) : Pour
la définition du handicap. Oui, c'est ça. C'est que le... C'est que je crois
qu'il revient à la société québécoise de décider dans quelles circonstances un
handicap devrait être admissible à l'aide médicale à mourir. La société
québécoise est représentée par l'Assemblée nationale. Donc, c'est pour ça que
je crois qu'il faut que ce soit bien défini, pour ne pas que ce soit laissé à
l'interprétation de tous ceux qui vont être impliqués dans ça.
Mme Tardif : Est-ce
qu'on devrait enlever le mot «handicap» ou on le laisse?
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci. Très rapidement.
M. Lussier (David) : Je
crois qu'on devrait garder le mot «handicap», oui, et qu'on devrait enlever le «neuromoteur»,
là, qui introduit de la confusion dans ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Dr Lussier, écoutez,
le temps est terminé. Je vous remercie pour l'apport à nos travaux. C'est
important. Au nom de mes collègues, membres de la <commission...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) :
...membres de la >commission, à nouveau
merci. Je vous souhaite une bonne fin de journée.
Et, pour nous, je vais suspendre quelques
instants, le temps que le prochain groupe s'installe. Merci, Dr Lussier.
Au revoir.
M. Lussier (David) : Merci à
vous.
(Suspension de la séance à 10 h 46)
(Reprise à 10 h 48)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, les travaux de... La Commission
des relations avec les citoyens reprend.
Nous recevons pour l'heure le Réseau de la
FADOQ, représenté par Mme Gisèle Tassé-Goodman, présidente de l'organisme,
ainsi que par M. Danis Prud'homme, directeur général. Bienvenue à vous
deux. Alors, je vous rappelle que vous allez disposer d'une période de
10 minutes pour votre exposé. Vous vous présentez au début de votre exposé.
Ensuite, la période d'échange va commencer avec les différents groupes
parlementaires et évidemment avec la ministre. Alors, le temps commence pour
vous maintenant. À vous la parole.
Réseau FADOQ
Mme Tassé-Goodman (Gisèle) : Mme
la Présidente, je vous remercie. Mme la ministre et Mmes et MM. les
parlementaires, je me nomme Gisèle Tassé-Goodman, présidente du Réseau FADOQ.
Je suis accompagnée de M. Danis Prud'homme, directeur général de notre
organisation.
Le Réseau FADOQ est un regroupement de
personnes de 50 ans et plus qui compte près de 525 000 membres,
et, dans chacune de nos représentations politiques, nous souhaitons contribuer
à l'amélioration de la qualité de vie des aînés d'aujourd'hui et de demain.
D'abord, j'aimerais remercier les membres
de la commission pour cette invitation à exprimer le point de vue du Réseau
FADOQ sur le projet de loi n° 11 qui propose de modifier la Loi concernant
les soins de fin de vie.
D'office, le Réseau FADOQ ne souhaite pas
statuer sur les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir. De
nombreux experts contribuent à ces analyses, et il y a fort à parier que les
tribunaux continueront de faire évoluer la législation entourant l'aide
médicale à mourir. Pour le Réseau FADOQ, il importe essentiellement que
l'autodétermination, l'autonomie, le libre choix et la dignité du patient
soient mis de l'avant. Dans le cadre du projet de loi n° 11, il nous apparaît
que le gouvernement du Québec a respecté ces aspects.
L'impossibilité de formuler une demande
anticipée d'aide médicale à mourir a fréquemment été décriée au cours des
dernières années. L'introduction d'une telle possibilité est donc bien
accueillie par notre organisation. Le caractère libre et éclairé est respecté
dans le cadre de ce nouveau type de demande. Un professionnel compétent
accompagnera le demandeur dans la formulation de sa demande et s'assurera que
ce dernier ait bien compris la nature de son diagnostic et soit informé de
l'évolution prévisible de la maladie et du diagnostic relatif à celle-ci.
L'ensemble des possibilités thérapeutiques envisageables et leurs conséquences
devront être présentées, y compris les alternatives à l'aide médicale à mourir.
• (10 h 50) •
La personne qui formule une demande
anticipée pourra désigner deux tiers de confiance afin d'assurer le
respect de sa demande. Notons qu'une personne apte à consentir aux soins pourra
en tout temps retirer sa demande anticipée au moyen d'un <formulaire...
Mme Tassé-Goodman (Gisèle) :
...au
moyen d'un >formulaire. Il s'agit d'aspects primordiaux, et le Réseau
FADOQ se permet de souligner leur importance.
Par ailleurs, notre organisation souhaite
souligner l'apport du projet de loi n° 11 en matière de décloisonnement
des actes professionnels. En effet, cette pièce législative favorise le
décloisonnement des professions du domaine de la santé, notamment en permettant
aux IPS d'administrer la sédation palliative et aux infirmières de dresser un
constat de décès. Il s'agit d'avancées que notre organisation salue, et nous encourageons
le gouvernement du Québec à intensifier et accélérer ce décloisonnement,
hautement nécessaire dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre. Cette pénurie
est d'ailleurs inquiétante pour la population du Québec.
Les soins de longue durée au Québec ont
mauvaise presse et les soins à domicile ne suffisent pas à la demande.
Plusieurs éléments plombent actuellement la confiance des Québécois envers son
système de santé. Il importe que les individus réfléchissent à l'aide médicale
à mourir en fonction de leur volonté, de leur dignité et de ce qu'ils
souhaitent comme fin de vie. Il ne faut pas que l'état du système de santé du
Québec entre dans cette réflexion, qui doit être personnelle. La population
québécoise doit avoir confiance en son système de santé, et il en va de la
responsabilité du gouvernement du Québec de maintenir ce lien de confiance. Le
plan de santé du gouvernement du Québec intensifie plusieurs propositions afin
d'améliorer le système de santé. Pour notre organisation, il est clair que la
pénurie de main-d'oeuvre doit constituer un chantier prioritaire.
Le virage vers les soins à domicile doit
également être accéléré. Entre-temps, il ne faut pas oublier que plus de
4 000 personnes attendent actuellement une place dans un centre
d'hébergement et de soins de longue durée.
L'état des soins palliatifs au Québec doit
également être amélioré. En 2020, le rapport d'un groupe de travail national
sur les soins palliatifs et de fin de vie soulignait quelques constats à ce
sujet. Il était question de l'inégalité quant à l'accès aux soins palliatifs.
Le manque de professionnels de la santé formés spécifiquement sur cette gamme
de soins était décrié. L'offre insuffisante au niveau des soins palliatifs et
de fin de vie à domicile était soulignée. Au Québec, seulement 11 % de la
population décède à domicile. À titre comparatif, dans la population canadienne
hors Québec, ce pourcentage se situe à 30 %, et, plus loin de chez nous,
en Europe, les pourcentages varient entre 28 % et 45 %, selon la
disponibilité des unités de soins palliatifs.
Toutefois, il existe des initiatives, au
Québec, qui mériteraient d'être déployées sur l'ensemble du territoire. C'est
notamment le cas des équipes de soins intensifs à domicile, les SIAD. Les SIAD
sont des équipes médicales intensives palliatives à domicile intégrées aux
équipes de soins à domicile des CLSC. Ces équipes ont des soins actifs avec des
soins de confort. Les SIAD sont une solution prouvée efficace pour réduire en
amont le nombre de patients aux urgences. Ces équipes réduisent de 65 %
les hospitalisations. 60 % à 65 % des patients SIAD décèdent à
domicile, comparativement à 11 % à l'échelle du Québec. Par ailleurs, les
coûts de la trajectoire de fin de vie des patients dans leur dernière année de
vie sont réduits de 50 %. Il importe que le gouvernement du Québec
s'assure de déployer des équipes SIAD partout sur le territoire.
Plus généralement, l'intégration des soins
palliatifs doit être effectuée plus tôt dans la trajectoire de la maladie, dans
divers contextes de soins. L'intégration précoce des soins palliatifs peut se
révéler bénéfique pour les patients et les systèmes de santé puisque les
patients ayant reçu des soins palliatifs plus tôt sont moins susceptibles de se
rendre aux services d'urgence ou encore de recevoir des traitements énergiques
en fin de vie, ces derniers étant épuisants et coûteux. Actuellement, parmi les
personnes susceptibles de bénéficier de soins palliatifs, environ le quart
passent au moins 14 jours hospitalisées dans leurs derniers mois de vie.
Près de la moitié visitent l'urgence au cours des deux dernières semaines
de vie. Même si tous les groupes de patients ont des problèmes d'accès aux
soins palliatifs, les personnes atteintes d'un cancer étaient trois fois
plus susceptibles que les autres de recevoir des soins palliatifs. Ainsi, il
importe d'implanter un repérage précoce en matière de palliatif et de fin de
vie pour l'ensemble des clientèles.
Le Réseau FADOQ souhaite maintenant
aborder la question des maisons de soins palliatifs, qui ne pourront pas
exclure l'aide médicale à mourir des soins qu'elles offrent. Notre organisation
est favorable à cette disposition, laquelle évitera que des personnes en
situation de fin de vie soient contraintes d'être transférées dans une maison
de soins palliatifs vers un autre établissement afin de recevoir l'aide
médicale à mourir. Néanmoins, il <importe...
Mme Tassé-Goodman (Gisèle) :
...néanmoins,
il >importe que le gouvernement du Québec s'assure que l'accès aux
maisons de soins palliatifs continue d'être réservé aux personnes en fin de
vie. Il est nécessaire d'éviter que les patients qui sont admissibles à l'aide
médicale à mourir mais qui ne sont pas en situation de fin de vie soient
transférés dans une maison de soins palliatifs afin de recevoir ce soin. Au
Québec, en matière de soins palliatifs, nous peinons à suffire à la demande.
Toutes ressources confondues, nous disposons seulement de 23 lits pour 500 000 habitants,
comparativement à 33 en Australie ou encore 54 pour le Royaume-Uni. Ces
statistiques sont décevantes et se situent en deçà des besoins. Le Réseau FADOQ
recommande au gouvernement du Québec de rehausser le nombre de maisons de soins
palliatifs ainsi que le nombre de lits réservés aux soins palliatifs sur
l'ensemble de son territoire en fonction des besoins.
Par ailleurs, le gouvernement du Québec
doit améliorer son soutien financier aux maisons de soins palliatifs
actuellement en fonction, particulièrement dans un contexte où elles devront
obligatoirement offrir un service supplémentaire. En 2020, la Commission des
soins de fin de vie soulignait que la très grande majorité des maisons de soins
palliatifs faisait face à une situation difficile... situation financière
difficile et que des enjeux de précarité de la main-d'œuvre étaient
sous-jacents.
Finalement, notre organisation souhaite
aborder les aspects relativement aux données de recherche et l'information à la
population. D'abord, nous estimons qu'il est nécessaire de mieux sensibiliser
la population relativement aux directives médicales anticipées ainsi que sur la
panoplie d'offres de services en matière de soins palliatifs et de fin de vie.
En 2022, le gouvernement du Québec soulignait que les directives médicales
anticipées demeuraient peu connues auprès de la population québécoise et que
peu de formulaires en ce sens étaient remplis par les usagers. Comme dernier
aspect, nous recommandons au gouvernement du Québec de créer un observatoire de
soins palliatifs et de fin de vie. L'objectif est d'avoir accès à des données
standardisées en fonction des différents types de soins dans le cadre de la fin
de vie. Il importe de disposer d'indicateurs portant sur l'accessibilité et la
qualité de ces soins ainsi que des statistiques sur l'utilisation des
ressources. Une telle entité pourra effectuer des études comparatives avec
d'autres juridictions et s'inspirer des meilleures pratiques afin de soumettre
des propositions au gouvernement du Québec. Il s'agira d'une instance
complémentaire à la commission sur les soins de vie, laquelle continuera de
surveiller l'application des exigences particulières relatives à l'aide
médicale à mourir tout en profitant du contenu élaboré par l'observatoire.
J'aimerais remercier les membres de la
commission de nous avoir écoutés. M. Prud'homme répondra à vos questions.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup pour cet exposé. Alors, nous allons
commencer la période d'échange avec Mme la ministre pour une période de 16 min 30 s.
La parole est à vous, madame.
Mme Bélanger : Oui, Mme la
Présidente. Mme Tassé-Goodman, M. Prud'homme, bonjour. Alors, merci
pour le dépôt de votre mémoire et pour la présentation que vous venez de faire.
J'aimerais vous entendre sur, spécifiquement, l'aide médicale à mourir.
M. Prud'homme (Danis) : C'est-à-dire...
Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu plus la question? Qu'est-ce que...
à ce sujet-là?
Mme Bélanger : Bien, en fait,
nous avons déposé le projet de loi n° 11 sur les soins de fin de vie et
l'aide médicale à mourir, donc... et j'aurais aimé vous entendre sur les
différents éléments du projet de loi que nous avons déposé il y a quelques
jours. Est-ce que... En fait, est-ce que vous et vos membres se sont
positionnés par rapport au processus d'aide médicale à mourir?
• (11 heures) •
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, comme mentionné, de notre côté, il y a plusieurs choses qu'on voit d'un
bon oeil dans le projet actuellement. Donc, comme on le disait, de notre côté,
ce qui est très important, c'est que le libre choix et choix éclairé soit une
chose qui est respectée. Dans le projet de loi actuellement, c'est ce qu'on
voit et c'est ce qu'on dit qui est une bonne chose, parce que ce libre choix
éclairé doit effectivement être respecté en tout temps. Ça, c'est une première
chose.
Autre chose qu'on souligne, c'est le
décloisonnement des professions. Donc, avec les infirmières spécialisées et les
autres infirmières, donc, de pouvoir aller de l'avant et de faire des actes en
plus grand nombre, donc, c'est bon aussi, parce que... concernant non seulement
la pénurie, mais en fait ça devient plus une interdisciplinarité où plusieurs
métiers, au niveau de la santé, contribuent, justement, à cet effet-là.
Et, autre chose, évidemment, quand on dit <d'élargir...
>
11 h (version révisée)
< M. Prud'homme (Danis) :
...évidemment,
quand on dit >d'élargir, donc, c'est sûr que la part, en fait, de
décloisonnement, c'est une chose, mais aussi au niveau des autres éléments en
ce qui a trait aux différents soins. Donc, évidemment, c'est pour ça que nous,
on va de l'avant en suggérant différentes choses par rapport aux soins
palliatifs, aux soins à domicile. Je pense que... nous pensons, pardon, que le
projet doit pousser beaucoup plus loin si on veut en faire une globalité et ne
pas forcer les gens à choisir l'aide médicale à mourir parce qu'il n'y a pas
autre alternative.
Mme Bélanger : Ok. D'accord.
Donc, je comprends que ce que vous énoncez, là, puis on le voit, là, c'est
assez majoritaire, là, dans votre mémoire, c'est vraiment concernant les soins
à domicile et les soins palliatifs, là, c'est les deux éléments que vous
ressortez, le décloisonnement des professions, là, bien sûr. OK. Est-ce que,
dans votre mémoire, le travail que vous avez fait, vous avez consulté des
groupes autres que la FADOQ pour faire les recommandations que vous faites?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, on se base sur, comme on le marque dans la bibliographie de notre
mémoire, les différents rapports qui ont été faits par différentes instances
sur les soins palliatifs et les soins de fin de vie. On se base aussi sur... au
niveau du commissaire au bien-être, au niveau du Vérificateur général... Vérificatrice
générale, pardon. Mais on va aussi chercher des comparatifs dans d'autres pays,
notamment, dans le mémoire, quand on mentionne, à titre d'exemple, que, le
Québec, le niveau de demandes, actuellement, pour les soins de fin de vie a
atteint un niveau que, la Belgique, ça lui a pris 20 ans avant d'atteindre,
et du fait de la commission, actuellement, qui dit que, bien, ils ne peuvent
pas mettre le doigt, donc, comme on dit en bon français, «pinpointer», donc,
vraiment mettre le doigt sur pourquoi on est aussi haut que ça en si peu de
temps. Donc, ça, c'est des choses, pour nous, qu'on va valider, différentes
expériences dans différents pays, pour essayer de se comparer, de voir les
bonnes pratiques mais aussi d'essayer de comprendre certains facteurs, dont
celui que je viens de mentionner.
Mme Bélanger : D'accord.
Bien, peut-être juste en complétant, vous l'avez certainement vu, là, dans
votre préparation, là, pour le mémoire, mais il y a quand même, au Québec, tout
un plan d'action 2020‑2025 concernant l'accès et l'amélioration des services en
soins palliatifs. Et il y a l'Association québécoise des soins palliatifs,
aussi, qui sont extrêmement actifs et la Société québécoise des médecins en
soins palliatifs, là, en particulier. Mais, je voulais quand même le mentionner,
il y a un plan d'action. Et puis effectivement il faut continuer d'améliorer
les soins palliatifs au Québec. Alors, je vous remercie.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, on va poursuivre la
discussion du côté de la banquette ministérielle. Il y a trois interventions.
On va commencer par les questions de la députée de Vimont. La parole est à
vous. Il reste, au total, 11 min 30 s.
Mme Schmaltz : Parfait. Merci,
Mme la Présidente. En fait, ma question vient rejoindre la question de la
ministre, parce que, bon, la FADOQ, c'est quand même 500 000 membres.
Alors, je me posais la question, à savoir si vous les aviez... pas
nécessairement consultés, mais est-ce qu'il y a eu des tables de discussion
autour de l'AMM? Est-ce que les gens se prononcent? Que ce soit de façon formelle
ou informelle, j'imagine, vous avez le pouls, quand même, de vos membres.
Est-ce que... Comment ça fonctionne? Sur la question, est-ce qu'ils ont été un
peu sondés? C'est ce que la ministre a demandé tantôt. Alors, c'est un petit
peu mon... mon questionnement, pardon.
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, on a effectué des sondages auprès de notre clientèle et auprès du
grand public à quelques années d'intervalle. Donc, on en a eu un en 2022, à
titre d'exemple. Et le but de ces sondages, c'est plusieurs choses, mais,
notamment, à l'intérieur des préoccupations des gens, et ce qui est ressorti
beaucoup par rapport... Si on parle 2022 par rapport à 2019, juste avant la
pandémie, la santé est toujours sortie numéro un. Mais, avec la pandémie, on a
mis deux volets. Les gens, c'est la santé physique et la santé mentale. Donc, c'est
deux choses qui est sorti. Et, quand on regarde au niveau... Évidemment, la
majorité des gens disent qu'ils ne veulent pas finir dans un CHSLD, parce que
tout ce qu'on entend... Donc, ça, c'est des choses que les gens mentionnent. Et
évidemment qu'ils aimeraient pouvoir recevoir des soins à domicile, ce qui est
aussi une lacune, là, en ce moment chez nous.
Mme Schmaltz : Parfait.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Donc, la parole est à la
députée de Châteauguay.
Mme Gendron : Bonjour, M.
Prud'homme ainsi que Mme Tassé-Goodman. Merci d'être avec nous ce matin.
En fait, j'avais une petite question. Vous
avez rapidement abordé le sujet du tiers de confiance. Est-ce que... J'aimerais
vous entendre davantage sur le tiers de confiance. Avez-vous parlé de deux
tiers de confiance? J'aimerais vous entendre.
M. Prud'homme (Danis) : Le
micro a... Désolé. Oui, il a... Je ne sais pas pourquoi. Désolé <pour
ça...
M. Prud'homme (Danis) :
...le
micro a... Désolé. Oui, il a... Je ne sais pas pourquoi. Désolé >pour
ça.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Ah oui! Parfait. C'est beau. Allez-y.
M. Prud'homme (Danis) : Oui.
On mentionne deux tiers de confiance, effectivement, pour s'assurer... parce
que, bon... pour pallier à tout éventuel cas, on va le dire comme ça. Souvent,
nos proches, c'est des gens qui ont soit des âges rapprochés des nôtres ou des
enfants, et, sachant que, bien, les gens se promènent un peu partout, surtout avec
la mondialisation, c'est aussi bien d'avoir deux proches pour considérer cet
effet-là.
Mme Gendron : Parfait. Merci.
C'était ma question.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Je me tourne du côté de la
députée de Roberval.
Mme Guillemette : Merci, Mme
la Présidente. Merci d'être avec nous aujourd'hui pour nous partager la...
bien, en fait, ce que vos membres en pensent. Vous êtes ici en tant que
représentants de la FADOQ.
Donc, moi, je vous amènerais sur la
demande en tant que telle. Vous dites, dans votre mémoire, que cette demande
anticipée devra être faite par acte notarié en minute ou devant deux témoins
puis versée au Registre des directives médicales anticipées. Donc, vous, vous
verseriez dans le même registre les directives et les demandes. Vous ne feriez
pas un registre différent. Ma première question.
Et ma deuxième question, c'est en lien
avec un registre notarié. Est-ce que ça pourrait limiter... On sait que des
personnes aînées, peut-être, qui sont... à laquelle ça pourrait, je dirais,
limiter l'accessibilité. Est-ce que vous voyez un frein, là, à exiger que le document
soit notarié?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, on mentionne, effectivement, notarié, pour aller à l'envers de vos
questions, pour répondre, mais on mentionne aussi que ça peut être fait devant
deux témoins. Donc, c'est... Oui, notarié avec minute, c'est ce qui serait
privilégié parce qu'on parle quand même d'un acte qui est quand même très
sérieux, là, ici, ou devant deux témoins, et puis effectivement versé au
Registre des directives médicales anticipées parce qu'on pense qu'il y a déjà
un registre qui existe, qui parle de directives, et ça, en fait, c'en est une,
directive médicale. On demande d'avoir l'aide médicale à mourir à tel et tel
moment de notre vie. Donc, pour nous, je pense que c'est d'allier les deux pour
ne pas avoir deux endroits à regarder, en oublier un, aller pas... ne pas aller
voir l'autre. Je pense que de regrouper ensemble les différentes directives
médicales. C'est une solution qui est quand même plausible et qui va maximiser
l'efficacité, je pense.
Mme Guillemette : Parfait. Et
vous n'exigeriez pas que ce soit exclusivement un document notarié. Vous êtes
ouverts aussi à la possibilité qu'il y ait deux témoins. Mais, s'il n'y
avait... Comment verriez-vous la possibilité que, dans le projet de loi, ce
soit exclusivement un document notarié?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
écoutez, si on va dans le processus d'aller notarier uniquement, vous l'avez
mentionné en début... c'est-à-dire que ça peut, effectivement, limiter les gens
à cet effet-là au niveau... s'il y a des coûts. Donc, ça veut dire qu'il y a
des gens qui n'auraient pas la possibilité de le faire. Je pense que c'est pour
ça que, devant deux témoins, c'est quelque chose qui est important.
Puis on peut même faire un certain lien
avec les changements de la loi au niveau de la curatelle, donc, du Curateur
public. Il y a eu différentes avancées en considérant les différents stades de
perte d'autonomie des individus. Donc, il y a des choses aussi de ce côté-là
qui pourraient, effectivement, être utilisées pour créer une synergie, parce
qu'on parle, effectivement, d'avoir des témoins, différentes choses, des
aidants pour différents processus. Donc, c'est pour ça que nous, on peut aller
devant deux témoins et non pas seulement acte notarié.
Mme Guillemette : Parfait.
Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Il reste encore du temps. Est-ce
qu'il y a d'autres questions? La députée d'Abitibi-Ouest, la parole est à vous.
Il reste encore 5 min 48 s.
Mme Blais : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous pour la présentation de votre mémoire. Lorsque vous
avez fait l'évaluation, le sondage chez vos membres concernant l'aide médicale
à mourir, quelle serait votre recommandation numéro un, qui revient très
souvent?
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, le sondage ne portait pas directement et uniquement sur l'aide médicale à
mourir. C'était beaucoup plus global. C'était sur la santé en général et les
différentes alternatives que les gens y voyaient.
Au niveau de l'aide médicale à mourir
spécifiquement, bien, on réitère, c'est ce qu'on dit à plusieurs reprises dans
notre mémoire, le choix libre, éclairé, informé, et que les gens soient
informés sur la différence entre les soins palliatifs et l'aide médicale à
mourir, qui est totalement différent dans ce cas-là. Donc, ça, c'est des choses
qui ressortent à cet effet-là.
• (11 h 10) •
Mme Blais : Merci. Et quel
serait le rôle de la FADOQ dans un document comme ça, de <l'aide médicale
à mourir...
Mme Blais :
...merci.
Et quel serait le rôle de la FADOQ dans un document comme ça, de >l'aide
médicale à mourir?
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, on n'est pas les experts. Comme on le mentionne, il y a beaucoup de gens
qui peuvent se prononcer beaucoup mieux que nous sur cette question-là. Nous,
c'est beaucoup plus la question sociétale, l'acceptabilité face à comment les
gens voient ça, et quelles seraient les alternatives, parce que, comme on le mentionne
tout au long, on sait que le système de santé est surchargé. Ça coûte cher. On
essaie de trouver des efficacités au niveau d'économies et de soins, et il ne
faut pas que ça rentre dans la décision. Donc, c'est très important que les
gens soient bien éclairés puis qu'on ait le choix, justement, à cet effet-là.
Mme Blais : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, si c'est terminé, je vais me côté...
me tourner du côté de l'opposition officielle. Donc, vous aurez un temps d'un
peu plus de 12 minutes pour poser vos questions. La parole est à vous, Mme
la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, Mme Tassé-Goodman et
M. Prud'homme. Merci beaucoup de votre présence dans notre commission.
D'emblée, je veux le dire, je sais que le
sujet qu'on discute est très sérieux, mais je veux dire que la première fois
que j'ai vraiment entendu parler de vous, j'étais... c'était dans la dernière
législature et c'était ma journée de fête. Et j'avais Mme Marguerite
Blais, qui était la ministre, à cette époque-là, responsable des Aînés et Proches
aidants, et elle m'a annoncé que, rendue à ma 40-10 ans, parce qu'à cette
époque-là je n'étais pas capable de dire 50... que je pouvais maintenant être
membre de la FADOQ. Alors, je ne suis toujours pas membre, mais j'ai trouvé
intéressant que c'est à partir de 50 ans que les gens peuvent en
bénéficier. Et je réfléchis à la question parce que je comprends que, d'être
membre de votre organisme, ça vient avec des bénéfices. Alors, merci pour ce
que vous faites pour accompagner nos personnes matures.
Ça fait que, dans le sérieux, je veux
revenir un peu sur la demande anticipée puis cette question, parce que je
trouve les questions de la collègue de Roberval très pertinentes. Ce que
j'entends, c'est qu'on souhaite rendre simple et peu coûteuse la formulation
d'une demande anticipée, mais je veux vous entendre sur le retrait de la
demande et combien de fois, selon vous... et si nous devons aussi revoir la
demande anticipée, puis, si oui, combien de fois devons-nous le faire — à
chaque année, à chaque deux ans? — comment devons-nous revoir le
formulaire après que ce soit rempli, comment devons-nous retirer la demande, qui
va m'amener à une deuxième question en ce qui concerne le refus.
M. Prud'homme (Danis) : Oui.
Merci pour la question. En fait, intéressant, je faisais tout à l'heure un
parallèle avec la loi qui a changé du côté du Curateur public, et il y a aussi
là-dedans certains délais de prescrits pour réviser des dossiers. Et je pense
qu'on pourrait faire un parallèle, et regarder les délais prescrits dans
certains cas, et pouvoir regarder si c'est des choses, du côté de l'aide
médicale à mourir, qui pourraient s'apparenter. Donc, on pourrait dire, de
s'assurer que c'est toujours la volonté de la personne ou, dans le cas de... ses
deux mandatés, si on peut dire, là, à ce niveau-là, par rapport aux volontés de
la personne.
Mme Maccarone : Et, si, rendu
au moment qu'on dit que nous avons déclenché un processus, si ce qui était
écrit dans la demande anticipée n'est pas nécessairement une réflexion de la
souffrance que la personne qui a rempli la demande est en train de vivre, mais
le tiers de confiance ou le professionnel de la santé dit que nous sommes
rendus à un moment où, peut-être, nous devons avoir une discussion en ce qui
concerne la prochaine étape d'un soin de fin de vie, comment voyez-vous ça?
Est-ce que nous devons avoir des balises, un encadrement? Comment voyez-vous
cette réalité, qui va sûrement avoir lieu? Je pense qu'on peut prévoir que ça
va arriver. Comment devons-nous traiter cette préoccupation?
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, c'est quelque chose de très important. Dans tout le processus de l'aide
médicale à mourir, on a toujours dit : Il faut que la personne ait un
choix libre, et éclairé, et consentant. Donc, ça, ça demeure tant et aussi
longtemps que la personne peut, d'elle-même, être libre, éclairée et
consentante.
Une fois que la personne n'est plus là,
bien là, là, on rentre dans des légalités que nous, on n'est pas des experts.
Donc là, il faudrait vraiment voir, côté l'équivalent du curateur, il se passe
quoi à ce moment-là, car il y a des changements quand la personne n'est plus
apte et qu'elle a deux personnes qui ont été identifiées <comme des
personnes...
M. Prud'homme (Danis) :
...plus
apte et qu'elle a deux personnes qui ont été identifiées >comme des
personnes qui peuvent prendre des décisions à sa place. Donc là, je n'irais pas
plus loin, parce que c'est vraiment un côté légal, et je me référerais à ce
qu'on vit du côté Curateur public pour pouvoir transposer, le cas échéant, ce
qui peut se transposer à cet effet-là.
Mme Maccarone : Et, pour
revenir aux tiers de confiance, vous avez dit deux, j'ai entendu ceci, puis
leur rôle, évidemment, est très important en ce qui concerne les paramètres. Selon
vous et la FADOQ, est-ce que le tiers de confiance peut être un membre de la
famille, un proche aidant? Est-ce que ça devrait être quelqu'un qui est plus
retiré, qui n'a pas un lien personnel avec la personne concernée? Et est-ce que
ça devrait être une obligation ou est-ce que ça peut être un choix de la
personne concernée de nommer un tiers de confiance ou deux, dans votre cas?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, la personne qui formule la demande, bien, en tant que telle, c'est
elle qui peut désigner deux tiers de confiance. Je reviens à la décision libre,
éclairée et consentante. Ça, c'est une première chose.
La deuxième, c'est... pour aborder l'autre
partie de votre question, bien, je pense que c'est important à savoir,
qu'est-ce que le curateur autorise. Parce qu'encore là je peux faire un
parallèle. Quand on prend en charge toute l'autonomie de la personne, il y a
certains principes qui sont déjà désignés dans cette loi-là, et je pense qu'il
faudrait regarder si ça s'applique et ça demeure toujours valable du même côté
pour ce qui est de l'aide médicale à mourir. Donc, quand on désigne de façon
libre et éclairée, ça veut dire qu'on peut désigner qui on veut. Il n'y a pas
de balise. Et donc je pense que, du côté du curateur, il y a aussi des choses,
à cet effet-là, qui pourraient être regardées.
Mme Maccarone : Puis là
est-ce que ça devrait être une obligation ou un choix d'avoir un tiers de
confiance?
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, nous, on dit bien...
Mme Maccarone : Vous avez dit
«peut». Dans la loi, c'est marqué «peut». Alors, est-ce qu'on garde ça comme
«peut» ou est-ce qu'on devrait...
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
nous, on a marqué «pourra», «peut». Donc, on en reste où la loi mentionne
actuellement.
Mme Maccarone : Ça fait que
ça reste un choix. Pas nécessaire de nommer quelqu'un. OK.
Et, pour revenir à une maison des soins
palliatifs, je comprends que ça a pris beaucoup de place dans votre mémoire et
votre présentation. Comment voyez-vous... Puis vous avez aussi mentionné, la
directive médicale anticipée, qu'il y a beaucoup de gens qui ne sont pas au
courant. Comment voyez-vous le processus de présenter tous les soins? Comment
voyez-vous l'accompagnement de la personne concernée, étant donné qu'on va
maintenant élargir, si la loi est adoptée dans sa mouture actuelle, que ce
serait maintenant une obligation d'élargir l'accès à l'aide médicale à mourir à
nos maisons de soins palliatifs? Comment voyez-vous ça?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, je pense que, quand on modifie certaines choses par rapport à des
lois, bien, c'est la responsabilité du législateur de s'assurer qu'en ce qui a
trait à la formation, l'information, la diffusion, ce soit fait de la bonne
façon et ce soit fait auprès, un, des professionnels concernés et, deux, auprès
des gens qui seraient touchés.
Donc, quand quelqu'un vient de l'avant
pour demander l'aide médicale à mourir, il doit y avoir quelqu'un qui doit bien
lui expliquer tout ce qu'il en est et aussi c'est quoi, les soins palliatifs,
par rapport à l'aide médicale à mourir, parce que, comme on le disait, il y a
beaucoup de gens qui ne font pas la différence et qui ne savent pas la
différence.
Et, autre chose, bien, c'est... Effectivement,
dans une maison de soins palliatifs, lorsque la personne est là, est toujours
lucide et est capable de prendre toutes ses décisions, il faut aussi lui
expliquer que c'est maintenant une possibilité, quand on est dans une maison de
soins palliatifs, de se rendre là, et à la famille, le cas échéant, quand on
est dans une maison de soins palliatifs, à tous ceux qui entourent, là, les
proches de cette personne-là.
Je pense que ça, c'est le minimum qu'on
doit faire, et un peu... Je vous dirais, il y a des... Il faut faire des
sensibilisations dans les différents outils, dans les différentes clientèles. Lorsqu'on
identifie les cibles qui pourraient demander un tel acte, bien, je pense que ce
serait... c'est comme ça qu'il faut aller répondre aux demandes d'information.
Mme Maccarone : On l'a déjà
souligné en commission, c'est une question très sensible, parce qu'on ne
souhaite pas nécessairement faire la promotion non plus. Ce qu'on prône, c'est
aide médicale à vivre et... en premier lieu, qui m'amène à une autre question.
Dr Lussier, qui vient de passer juste avant vous, nous recommande de modifier
l'article 4 de la loi afin de garantir un accès aux soins avant tout. Est-ce
que vous êtes d'avis que ça, ce serait une modification à propos dans le projet
de loi n° 11?
• (11 h 20) •
M. Prud'homme (Danis) : En
fait, pour nous, tout au long, depuis qu'on a commencé à parler, au Québec, de
ce processus d'aide médicale à mourir, on a été présents avec des mémoires et
en commission, et ça a toujours été la même chose. Pour nous, ça ne doit pas
être un <substitut à la vie...
M. Prud'homme (Danis) :
...toujours
été la même chose, pour nous, ça ne doit pas être un >substitut à la vie,
c'est-à-dire qu'on ne doit pas demander ça parce qu'on n'est pas capable d'avoir
les soins, parce qu'on n'est pas capable d'alléger nos souffrances ou parce qu'on
se sent isolé. Parce que, dans nos premiers mémoires, on donnait les
statistiques par rapport à l'effet que, dans bien des cas, malheureusement, ce
n'est pas pour la bonne raison qu'on va le demander. Alors, définitivement,
pour nous, c'est... On doit vivre et mettre la vie de l'avant avant de mettre l'aide
médicale à mourir, et ça, ça devient, en bout de ligne, si on n'est plus
capables de faire autre chose pour que la personne ait une vie agréable à cet
effet-là.
Mme Maccarone : Et, quand on
parle... Vous avez aussi parlé beaucoup de l'accompagnement, de soins à
domicile, le SIAD. Puis, en effet, les statistiques, ils parlent. Il y a
beaucoup de gens qui font des demandes de l'aide médicale à mourir, puis, dans
le fond, ils vont vivre ce soin de fin de vie chez eux. Avez-vous des
recommandations ou des modifications en ce qui.... Maintenant qu'on parle des
demandes anticipées, est-ce qu'il y a quelque chose que nous devons prendre en
considération en ce qui concerne le SIAD, puis les soins à domicile, et l'application
de l'aide médicale à mourir?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, je dirais, dans un premier temps, de... Effectivement, comme on le
dit, il y a un plan 2020‑2025 qui a été mis de l'avant, qui parlait de l'accès
équitable à des soins palliatifs et de fin de vie. Donc, je pense que ça, c'est
important. Ce qu'il y a là-dedans, on le mentionne, c'est d'une importance
capitale, d'élargir les soins palliatifs. Au Québec, comme dans d'autres
endroits au Canada, on est à la remorque. On n'en a pas assez. Les gens n'ont
pas le choix. Et c'est là qu'on disait tout à l'heure : Il ne faut pas que
ce soit une alternative à un manque de choix, l'aide médicale à mourir.
Présentement, il n'y a pas assez de soins palliatifs. Il n'y a pas assez de
services de soins à domicile pour tout faire ça. Donc, évidemment, ça devient d'une
importance capitale, là, là-dedans.
Mme Maccarone : Merci. Et,
pour le refus, comment voyez-vous le refus, rendu à l'application de l'aide
médicale à mourir, suite à une demande anticipée, si, la personne, c'est rendu
au moment? Comment... Devons-nous poursuivre? Comment devons-nous protéger
aussi les personnes qui ont fait leur demande anticipée en respectant les
critères qu'eux, ils ont identifiés dans le formulaire? Comment voyez-vous ce
processus? Avez-vous quand même de l'information de vos membres, la façon qu'ils
souhaitent que ce soit traité?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
en fait, si on est cohérents avec nous-mêmes, on dit que... la vie en premier.
Donc, la personne qui va de l'avant avec une demande d'aide médicale à mourir,
évidemment, je pense qu'il faut respecter son choix tant qu'elle est libre et
éclairée et qu'elle peut prendre une décision pour elle. Si elle ne veut pas,
je pense, c'est important.
Mme Maccarone : Je vais
reformuler, parce que... Si, mettons, on parle de quelqu'un qui souffre,
malheureusement, d'un alzheimer avancé, quelqu'un qui a rempli une demande
anticipée, puis, dans les critères, cette personne a dit : Bien, si,
mettons, je refuse, rendu au moment d'accéder à l'aide médicale à mourir, je
souhaite que vous poursuiviez quand même, comment voyez-vous ça? Parce qu'on
peut imaginer que, pour les professionnels de la santé, que ce soit une
infirmière praticienne spécialisée, un médecin, peu importe... comment ça doit
être difficile pour nos professionnels aussi de poursuivre, mais aussi on a,
comme vous le dites, une responsabilité de respecter aussi les demandes de la
personne concernée. Comment voyez-vous ceci? Puis comment le baliser?
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
écoutez, je...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Rapidement, s'il vous plaît.
M. Prud'homme (Danis) : Oui.
Rapidement, en fait, je dirais simplement que c'est quelque chose qui est... Il
faut voir si la personne, un, a toute sa tête, donc si elle est encore capable
de prendre la décision pour elle-même, parce que, ça, je pense, c'est important.
Puis après ça, bien là, on rentre dans le processus légal. Donc là, nous, on ne
peut pas se prononcer là-dessus. On n'est pas des experts en ce qui a trait à
ça.
Mme Maccarone : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Prud'homme. Alors, on va terminer
notre ronde d'échange avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice pour une
période de 4 min 7 s. La parole est à vous, madame.
Mme Tardif : Merci, Mme la
Présidente. Mme Tassé-Goodman, M. Prud'homme, merci de votre présence,
mais merci aussi d'avoir préparé ce rapport.
Grosso modo, je comprends, donc, puis
corrigez-moi, là, que vous êtes en accord avec le projet de loi. Vous êtes en
accord plus particulièrement avec le fait que le libre choix, l'autonomie...
avec le fait qu'une personne puisse retirer, à partir du moment où elle est
encore apte... de retirer sa demande à tout moment. Avec le décloisonnement de
la médecine, bon, vous nous suggérez fortement que le virage de soins à
domicile soit augmenté. On y travaille. On le souhaite aussi.
J'ai deux petites questions. Dans votre
rapport, vous avez abordé le volet de <formation additionnelle. On n'a
pas eu...
Mme Tardif :
...j'ai
deux petites questions. Dans votre rapport, vous avez abordé le volet de >formation
additionnelle. On n'a pas eu la chance de vous entendre par rapport à ça. Et
une question qui me vient en tête, parce que vous avez quand même un type de
clientèle... je ne dirais pas aisée, mais vous avez beaucoup de professionnels,
vous desservez beaucoup de professionnels... Bien, je me demandais, par rapport
aux gens que vous servez, que vous desservez : Combien évaluez-vous le
nombre ou le pourcentage de gens qui seraient seuls et qui auraient de la
difficulté à se trouver un tiers? Ce sont mes deux questions.
M. Prud'homme (Danis) : Bien,
merci pour les questions. En ce qui a trait à votre première question, je pense
qu'il est... Effectivement, je dirais, au niveau de la formation, c'est quelque
chose de très important, surtout si on dit que, maintenant, dans les maisons de
soins palliatifs, on peut, effectivement, aller jusqu'à l'aide médicale à
mourir. Bien, je pense qu'il faut former les gens en conséquence à cet effet-là
et tous nos professionnels. Et je pense que, quand on parle, même, de soins
palliatifs, on met les deux, là. Il y a un manque de professionnels ou un
manque de formation à ce niveau-là pour pouvoir, justement, rendre tous les
soins palliatifs qu'on a besoin et, en même temps, transitionner vers les soins
de fin de vie, donc, l'aide médicale à mourir. Donc, ça, pour nous, c'est très
important qu'il y ait la formation, de même, en parallèle, à l'information au
public pour savoir, un, c'est quoi, la différence entre les soins palliatifs
puis les soins de fin de vie et, deux, c'est quoi, les différentes choses que
je dois faire pour m'y rendre dans un et dans l'autre, et comprendre le
continuum, si on veut, de soins que ça va amener lorsqu'on peut l'autoriser
maintenant dans les maisons de soins palliatifs. Ça, c'est en ce qui a trait à
la première question, pour nous.
La deuxième, évidemment, au niveau des
gens seuls, je référerais encore à comment le curateur fonctionne, parce que,
de la même façon... Et il y a, effectivement, des dispositions, quand la
nouvelle loi a été mise de l'avant par le Curateur public, où on sait fort bien
que, s'il y a des gens qui sont isolés, qui sont seuls... Donc, comment on fait,
justement... Et, à cet effet, je ne me rappelle pas de façon pointillée, là,
mais la loi a été élargie de leur côté à cet effet-là, justement, pour ne pas
bloquer, à un moment donné, par rapport à quelque chose qui doit être fait. Donc,
je leur dirais d'aller voir ce qui s'est fait actuellement puis voir si ça se
transpose ou si ça peut se moduler, la même chose pour l'aide médicale à mourir.
Mme Tardif : Merci. Vous
allez me permettre de saluer l'ensemble des employés, les médecins, les
infirmières, tous les employés bénévoles aussi de la Maison Gilles-Carle...
pardon, de la Maison Aline-Chrétien, on en a deux, de la maison de fin de vie
Aline-Chrétien à Shawinigan. Ils font un travail merveilleux auprès des malades
et auprès des familles. Donc, merci beaucoup.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la députée. Alors, Mme la Présidente,
M. le directeur général de la FADOQ, merci beaucoup pour les réponses aux
nombreuses questions qui... ainsi qu'à votre exposé. C'est ce qui termine notre
séance avec vous. Alors, au nom de l'ensemble de mes collègues, je vous
remercie à nouveau. Je vais même les laisser, évidemment, vous remercier. Je le
fais souvent pour elles. Alors, j'ai décidé de changer ma tournure de phrase.
Merci beaucoup.
Alors, nous allons suspendre quelques
instants, le temps de recevoir le dernier groupe. Bonne fin de journée.
(Suspension de la séance à 11 h 30)
11 h 30 (version révisée)
(Reprise à 11 h 39)
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des
relations avec les citoyens reprend ses travaux.
Pour cette dernière audition de cet avant-midi,
nous recevons l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et
familiaux du Québec, représenté par trois personnes que je vais inviter dans
quelques secondes à se présenter. Alors, madame, messieurs, vous allez avoir
une période de 10 minutes non seulement pour vous présenter, mais, bien
évidemment, pour exposer votre point de vue sur le projet de loi. Par la suite,
évidemment, nous aurons une période d'échange avec les membres de la
commission. Alors, je vous tends le micro.
Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec (OTSTCFQ)
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Merci,
Mme la Présidente. Alors, écoutez, mon nom est Pierre-Paul Malenfant. Je suis
travailleur social et président de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec. M'accompagnent aujourd'hui Mme Marie-Lyne
Roc, qui est travailleuse sociale et directrice des affaires professionnelles à
l'ordre, et M. Alain Hébert, qui est le conseiller principal aux affaires
professionnelles à l'ordre.
• (11 h 40) •
Donc, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes
et MM. les députés, permettez-moi tout d'abord de vous remercier de nous avoir
invités à prendre part aux consultations particulières sur le projet de loi n° 11.
Nous recevons cette invitation comme une reconnaissance de notre expertise mais
aussi une volonté du législateur de tenir compte des aspects sociaux de l'aide
médicale à mourir.
Les observations présentées aujourd'hui
sont le reflet à la fois des principes qui guident notre profession, tels que l'autodétermination
des personnes, le respect de leurs droits ou encore la protection des personnes
vulnérables, de l'expérience terrain qui nous est rapportée par les
travailleurs sociaux ainsi que de récentes données issues de la recherche.
En effet, depuis l'entrée en vigueur de la
Loi concernant les soins de fin de vie en 2015, les travailleurs sociaux sont
appelés, plus ou moins fréquemment selon les établissements, à intervenir
auprès des personnes souhaitant obtenir ou ayant été autorisées à recevoir l'aide
médicale à mourir ainsi qu'auprès de leurs proches. Une des contributions
majeures des travailleurs sociaux membres de l'équipe interdisciplinaire prend
la forme de l'évaluation du fonctionnement social de la personne qui demande l'aide
médicale à mourir ou qui songe à le faire. Cette évaluation apporte un regard
global sur la situation de la personne et témoigne de sa réalité, de ses
besoins, de ses forces, de sa souffrance et de ses volontés. Elle permet un
éclairage unique sur les aspects <sociaux...
M. Malenfant (Pierre-Paul) :
...ses besoins, de ses forces, de sa souffrance et de ses volontés.
Elle permet un éclairage unique sur les aspects >sociaux qui sont
présents dans la situation de la personne. Elle contextualise son état actuel
et sa demande.
Comme cette contribution nous apparaît
d'autant plus pertinente au regard des nouvelles possibilités amenées par le
projet de loi, l'ordre propose de modifier l'alinéa 1°c de
l'article 29.4 de la loi. Nous... nous suggérons ainsi de remplacer le
«des» par un «les». Ce changement aurait, à nos yeux, pour effet de renforcer
cette disposition en insistant sur la nécessité de faire appel à la
contribution des autres professionnels de l'équipe de soins, dont le travailleur
social, sans toutefois la rendre obligatoire afin de ne pas alourdir le
processus ni faire entrave à l'exercice du jugement clinique du professionnel
compétent. Effectivement, la contribution du travailleur social peut s'avérer
particulièrement pertinente dans le processus allant de la formulation de la
demande anticipée à l'administration de l'aide médicale à mourir à la personne
devenue inapte. En effet, on sait que le Code des professions reconnaît que...
le TS comme seul professionnel pouvant procéder à l'évaluation psychosociale
d'une personne majeure en situation d'inaptitude. L'évaluation du
fonctionnement social prend également tout son sens auprès des personnes en
situation de handicap qui envisagent l'aide médicale à mourir.
Comme plusieurs groupes l'ont fait avant
nous, je me dois de souligner le travail significatif qui a été effectué depuis
l'étude du PL n° 38 au printemps 2022. Nous avons devant nous un
projet de loi beaucoup plus complet, beaucoup plus abouti, avec lequel notre
ordre est en accord de façon générale. Nous saluons, entre autres, l'ajout de
l'obligation pour les établissements de créer un groupe interdisciplinaire de
soutien, le GIS. D'ailleurs, l'ordre estime que le rôle des GIS devrait être
bonifié et leur soutien augmenté.
Évidemment, je... je ne pourrais passer
sous silence l'inclusion des personnes vivant avec un handicap neuromoteur
grave et incurable comme étant admissibles à l'aide médicale à mourir, une
demande formulée par l'ordre lors de l'étude du projet de loi n° 38.
Toutefois, l'ordre souhaite attirer l'attention des parlementaires sur certains
enjeux en lien avec le projet de loi.
Tout d'abord, une personne vivant avec un
handicap autre qu'un neuromoteur mais qui est grave et incurable et qui
correspond aux autres critères de la loi devrait pouvoir demander l'aide
médicale à mourir. Selon nous, il est du devoir du législateur d'éviter de
restreindre les droits des personnes en situation de handicap en se basant sur
la nature de leur handicap, le tout dans un souci d'équité et de lutte à la
stigmatisation. Dans cette perspective, nous émettons des doutes sur
l'utilisation du terme «handicap». Effectivement, les interprétations contemporaines
du handicap mettent l'accent sur l'importance des facteurs environnementaux
pour compenser des incapacités plutôt qu'uniquement sur les facteurs personnels
ou biologiques de la personne. Il nous apparaît fondamental de ne pas envoyer
le message que la société se désinvestit de sa responsabilité de procurer à
toutes les personnes vivant avec un handicap les ressources nécessaires pour
répondre à leurs besoins.
Par ailleurs, l'ordre recommande également
d'inclure dans la loi deux conditions préalables à l'administration de l'aide
médicale à mourir pour les personnes se retrouvant en situation de handicap à
la suite d'un accident et qui ne soient pas en fin de vie. Selon nous, ces
conditions devraient être, premièrement, de laisser un délai d'au moins 90 jours
entre la demande d'aide médicale à mourir et son administration, sous réserve d'une
évaluation faite par le professionnel compétent susceptible de conclure à
l'inutilité de cette mesure. Deuxièmement, il s'agit de s'assurer que toutes
les alternatives aient été sérieusement envisagées avec la personne au
préalable pour qu'elle puisse faire un choix éclairé.
Enfin, nous souhaitons attirer votre
attention sur l'article 14, qui semble préciser que... selon notre
interprétation, qu'un trouble mental autre qu'un trouble neurocognitif n'est
pas considéré comme une maladie. Nous tenons ici à rappeler qu'il... que les
personnes vivant avec un trouble mental réfractaire devraient pouvoir demander
l'aide médicale à mourir. De plus, dans la mesure où le fédéral se penche
actuellement sur la question, il serait dommage que la loi québécoise récemment
modifiée ne puisse pas prendre en compte rapidement ces situations.
Si on... si on s'attarde, maintenant, à la
formulation de la demande anticipée, le principal défi sera, selon nous, d'arriver
à une description des souffrances physiques et psychiques qui facilitera tant
la correspondance aux critères qu'une certaine précision afin d'aider à
déterminer le moment opportun pour administrer le soin. La contribution du
travailleur social pour évaluer et accompagner la personne peut ainsi être fort
utile.
Enfin, lors de la signature de la demande,
l'ordre est d'avis de retirer l'obligation de présence simultanée de toutes les
personnes concernées puisqu'elle constitue un frein qui nous apparaît inutile.
Dans la période qui suivra, c'est-à-dire
celle entre la signature de la demande anticipée et l'administration de l'aide
médicale à <mourir...
M. Malenfant (Pierre-Paul) :
...inutile.
Dans la période qui suivra,
c'est-à-dire celle entre la signature de la demande anticipée et
l'administration de l'aide médicale à >mourir, nous croyons essentiel
qu'il y ait une démarche clinique avec la personne, incluant des évaluations et/ou
des mises à jour périodiques. À la fin du processus, lorsque le professionnel compétent
sera à évaluer si les souffrances décrites dans la demande anticipée sont bien
présentes, l'ordre estime qu'il devrait en faire une interprétation assez large
pour considérer les souffrances corrélées ou concomitantes avec la maladie
ainsi que la dimension subjective des souffrances physiques et psychiques. Là
encore, l'évaluation complémentaire des professionnels, dont celle du
travailleur social, sera particulièrement importante, tout comme le point de
vue du tiers de confiance et des proches. Par ailleurs, l'ordre souhaite
exprimer son désaccord avec la radiation immédiate de la demande anticipée
advenant la manifestation d'un refus de la personne au moment de
l'administration de l'aide à... médicale à mourir.
Enfin, nous jugeons important de profiter
de cette tribune pour élargir la réflexion aux soins de fin de vie. Bien que
cela ne remette pas en cause notre appui au projet de loi, nous estimons
important de préciser qu'à nos yeux le projet de loi s'appuie sur une vision
idéalisée des conditions de pratique et de l'offre de soins de fin de vie qui
ne correspond pas à la réalité actuelle. La réalité, c'est que les équipes sont
instables, que les professionnels manquent de temps et que l'on offre de
services... et que l'offre des services varie souvent en fonction de la région
dans laquelle on se trouve.
Il y a urgence de se pencher sur les
conditions de vie difficiles des aînés et des personnes vivant avec un
handicap. Nous devons nous concerter et nous mobiliser collectivement pour
mieux répondre à leurs besoins. Nous devons rebâtir le filet social autour de
ces personnes vulnérables et s'assurer de rehausser l'offre de soins
palliatifs, incluant à domicile, sans quoi nous pourrions nous retrouver face à
des situations où le choix de l'aide médicale à mourir serait fait par dépit. En
ce sens, nous recommandons que les comptes rendus des demandes d'aide médicale
à mourir ayant été refusées parce qu'elles ne satisfont pas aux critères soient
mieux documentés. Les constats découlant de ces demandes refusées permettraient
au gouvernement de mieux mesurer les besoins de soutien social de ces personnes
et d'apporter les réponses appropriées, le cas échéant.
Finalement, il ne faut surtout pas
négliger d'informer la population sur la variété des soins de fin de vie.
L'ordre estime que les établissements devraient déployer des efforts
supplémentaires pour faire connaître à la population ses droits ainsi que les
soins de fin de vie offerts et les moyens d'y avoir accès. Ils devraient être
soumis à une reddition de comptes à cet effet. Je vous remercie de votre
attention.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, M. Malenfant, pour cet exposé. Vous
avez des suggestions intéressantes et des commentaires. Alors, on va commencer
la période d'échange avec les parlementaires, avec les membres de la Commission
des relations avec les citoyens, et, à tout seigneur tout honneur, avec
l'auteure du projet de loi. Mme la ministre, la parole est à vous pour une
période de 16 min 30 s.
• (11 h 50) •
Mme Bélanger : Mme la
Présidente... M. Malenfant, Mme Roc, M. Hébert, merci pour le
mémoire et votre présentation.
Je vais reprendre les éléments que vous
avez mentionnés. Vous dites que vous accueillez positivement l'inclusion des
personnes vivant avec un handicap neuromoteur grave et incurable comme étant
admissibles à l'aide médicale à mourir, mais, tout de suite après, vous
mentionnez que, même si vous êtes en accord avec l'élargissement, donc, pour
les personnes ayant un handicap neuromoteur, l'ordre estime que cette
disposition demeure trop restrictive malgré tout. Donc, vous êtes en faveur,
mais, en même temps, vous nous dites que c'est restrictif.
De plus, l'ordre demeure réservé sur la
qualification du handicap qui est faite dans le projet de loi, donc, à savoir,
un handicap neuromoteur. J'aimerais vous entendre un petit peu plus là-dessus,
là. C'est vraiment intéressant puis c'est un élément fondamental du projet de
loi. Alors donc, peut-être parler un peu davantage, là, parce que j'ai senti
que vous aviez un inconfort avec la définition de «handicap». Faites juste
revenir sur ces propos-là, s'il vous plaît.
M. Malenfant (Pierre-Paul) : C'est
surtout sous le qualificatif de neuromoteur qu'on a certaines... certains questionnements.
J'inviterais peut-être Alain Hébert à pouvoir documenter davantage cet
élément-là.
M. Hébert (Alain) : Bien, en
fait... (panne de son) ...un effort par le législateur de préciser, là, le type
de handicap qui serait visé, là, pour les personnes devenant éligibles, à ce
moment-là, à l'aide médicale à mourir. En même temps, pour nous, ce qu'on
soulève un petit <peu...
M. Hébert (Alain) :
...devenant
éligibles, à ce moment-là, à l'aide médicale à mourir. En même temps, pour
nous, ce qu'on soulève un petit >peu, c'est une alerte sur le fait que
ça pourrait relever, par rapport à d'autres, là, à des personnes qui ont
d'autres types de handicaps, un aspect discriminatoire. Et on sait que ça
pourrait même causer difficulté, là, avec la législation canadienne. Donc, on
se questionne là-dessus.
Maintenant, vous avez peut-être vu aussi
dans notre mémoire, là, que nos réflexions autour de la notion de handicap sont
aussi, en fait, avec les approches contemporaines, là, du handicap, qui prévoient
qu'on parle de handicap aussi quand l'entourage, l'environnement, la société
est incapable de procurer les ressources nécessaires à la... à la personne qui
vit la... la situation. Et on attire l'attention sur le fait qu'il y a une
responsabilité sociétale de fournir toutes les ressources aux personnes ayant
un handicap. Et on souligne aussi, là... Cette question-là a beaucoup été
discutée, là, je termine là-dessus, a beaucoup été discutée précédemment dans
la commission. C'est une invitation, à tout le moins, là, sur un sujet sensible
comme celui-là, à consulter puis entendre la voix des groupes et organismes qui
représentent les personnes handicapées, et les personnes handicapées
elles-mêmes.
Mme Bélanger : OK. Merci. Je
vais revenir. C'est intéressant, là. Dans le fond, vous demeurez, je dirais,
réservés, sur l'aspect discriminatoire, là, d'inclure la notion de handicap
neuromoteur par rapport à handicap. Est-ce que c'est bien ça? Je le dis
autrement, là, mais c'est parce que je veux juste être sûre de bien, bien
comprendre.
Une voix : Exactement.
Mme Bélanger : OK. Et par
ailleurs vous nous dites... Là, j'ai... je n'ai pas le... le mémoire sous les
yeux, là, mais par ailleurs vous nous dites que, si on va avec le handicap, il
faudrait bien le définir et ne pas prendre seulement la définition qui est
davantage sociologique, là, mais prendre une définition de l'handicap... Vous
avez parlé tantôt de termes biologiques ou... J'ai bien aimé ce que vous avez
mentionné, là, M. Malenfant, là, mais j'aimerais ça que... juste que vous
reveniez sur cette phrase-là. Vous avez dit quelque chose d'important, là. En
fait, j'ai compris que vous trouviez que la... la définition de «handicap»,
selon la définition usuelle, là, qu'on voit un peu partout, est davantage
sociale, dans l'adaptation des personnes à leur handicap, l'intégration dans la
société, alors que vous dites : On devrait regarder plus les notions
biologiques.
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Bien,
dans le sens que ce qu'on dit, c'est... Vous savez, il y a... La science, concernant
toutes les études, là, parce que ça fait quand même un bon bout de temps,
considère que la situation des personnes avec un handicap, c'est... c'est
occasionné par la... j'appellerais, le processus de production de handicap.
Vous savez, une personne, par exemple, qui est en fauteuil roulant, qui a une
certaine limitation à... à se déplacer, bien, à partir du moment qu'elle arrive
devant un obstacle, où elle ne peut pas rentrer dans un édifice, bien, on
comprend que ce n'est pas sa situation qui crée le handicap, c'est le fait
qu'elle ne peut pas rentrer dans l'édifice. Donc, si on met une rampe, on met
des facilités, bien, à ce moment-là, le handicap n'est plus présent pour
pouvoir avoir accès. Donc...
Et, sur la question de neuromoteur, c'est...
on considère qu'on doit le regarder vraiment, le handicap, au sens large pour
éviter à toutes sortes d'interprétation qui peut arriver selon des courants,
des tendances, des opinions, là, qui pourraient apparaître en cours de route.
Mme Bélanger : OK. Merci.
Peut-être une dernière question de mon côté. Concernant la santé mentale... en
fait, le trouble mental, je me corrige, là, concernant le trouble mental, vous
dites que les personnes présentant un problème médical ou un trouble... avec un
trouble mental devraient être éligibles à recevoir l'aide médicale à mourir.
Est-ce que... Bien, vous voyez... Vous savez très bien que nous l'avons exclu
du projet de loi. Est-ce que vous croyez qu'il y a une acceptabilité sociale
actuellement pour élargir l'aide médicale à mourir aux personnes ayant un
trouble mental? Et est-ce que, de votre côté, comme ordre professionnel, vous
avez déjà examiné cette question avec vos patients, avec des usagers? Alors,
j'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Avant
de céder la parole à ma collègue Marie-Lyne Roc, vous savez, on est dans la semaine
des travailleurs sociaux, des travailleuses sociales. Et nous, dernièrement, au
début du mois, on a fait un sondage auprès de la population pour aller vérifier
certains enjeux que les... les gens peuvent rencontrer en regard de l'accès aux
services sociaux, le... la qualité des services sociaux, le rôle du travail
social, et tout ça. Il y avait une question, dans le sondage, qui disait :
Est-ce que vous considérez... est-ce que vous seriez d'accord à ce qu'on
élargisse l'accès à l'aide médicale à mourir aux personnes qui présentent un
trouble de santé mentale? Il y a 70 % des répondants qui étaient tout à
fait en désaccord... ou en accord avec le fait d'inclure ces personnes-là. On a
quand même eu 1 000 <répondants...
M. Malenfant (Pierre-Paul) :
...Il y a 70 % des répondants qui étaient tout à fait en
désaccord... ou en accord avec le fait d'inclure ces personnes-là. On a quand
même eu 1 000 >répondants répartis, avec une marge là-dessus.
J'inviterais Marie-Lyne, ma collègue, là, peut-être, à compléter.
Mme Roc (Marie-Lyne) : Oui.
Alors, pour répondre à votre question, oui, effectivement, le sondage que nous
avons effectué témoigne d'une acceptabilité sociale, mais aussi de la part de
nos membres qui exercent auprès de... auprès de personnes aux prises avec des
problèmes de santé mentale réfractaires. Il ne faut pas oublier qu'on doit
toujours inscrire cela avec les autres critères prévus, hein, par la loi. Et on
parle toujours, là, encore là, de personnes qui sont réfractaires au traitement...
au traitement prévu habituellement... (panne de son) ...aussi la question du
consentement libre et éclairé. Alors, on voit bien que l'idée, c'est de pouvoir
permettre ce soin dans ces circonstances-là.
Mme Bélanger : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Alors, on va poursuivre
nos échanges avec la députée de Laporte. J'ai aussi la députée de Vimont. Il
reste un total de 8 min 18 s. La parole est à vous, Mme la
députée.
Mme Poulet : Oui. Bonjour.
Merci à vous trois de votre présence. Merci, Mme la Présidente.
Je veux venir sur la... votre
recommandation n° 10. Lorsque vous parlez de la présence simultanée de
toutes les personnes, là, que cette disposition, dans le fond... qu'il y ait
des gens... qu'il y ait une présence simultanée lors de la signature, pour
vous, vous souhaitez le retrait de cette disposition-là. J'aimerais vous
entendre à cet effet-là. Est-ce que ce ne serait pas mieux pour la personne
concernée qu'elle soit accompagnée par un tiers, par le membre de sa famille?
Et, en même temps, que pensez-vous de l'acte notarié? Est-ce que vous pensez
que ça pourrait être un frein à la demande, à l'AMM?
M. Malenfant (Pierre-Paul) :
Sur la question de la présence de... je dirais, de toutes les personnes
significatives au moment de la signature de la demande, vous savez, lorsqu'on
est dans des régions éloignées, des fois, la famille est loin. Des fois, les
gens ne sont pas autour nécessairement. Et, oui, il peut y avoir certaines
personnes significatives, mais il peut y avoir une personne très significative
qui est éloignée. Et, à ce moment-là, c'est peut-être une certaine contrainte
de... de déplacement.
Pour ce qui est de l'acte notarié,
écoutez, on ne s'est pas penchés là-dessus. Je ne vois pas, là, nécessairement,
là, d'objection. Mais on n'a pas porté d'attention particulière, là, sur cet...
cet aspect-là. N'étant pas juristes, là, de par notre profession, là, on ne
s'est pas arrêtés, là, à cette question-là.
Mme Poulet : OK. Merci.
Mme Roc (Marie-Lyne) : Je
pourrais... (panne de son) ...ajouter un petit complément à notre président. En
fait, c'est que le projet de loi prévoit quand même les deux possibilités, soit
de pouvoir formuler la demande avec témoins ou encore par acte notarié. Donc,
ça, pour nous, c'était intéressant, parce qu'on... on prévoit deux... deux
modalités différentes.
Par contre, ce qu'on disait qui était plus
difficile, c'est d'insister sur le fait que les témoins doivent être présents
simultanément, effectivement, pour les raisons que notre président a avancées
en termes de... Alors, ce n'est pas qu'on discarte l'idée d'avoir des témoins. C'est
le fait, au contraire, bien, de... d'obliger la présence des deux en même temps
lors de la signature, lors de la demande anticipée.
Mme Poulet : Si ma
mémoire est bonne, je pense qu'on apportait la disposition d'être en virtuel
aussi. Est-ce c'est un élément, pour vous, qui peut être intéressant?
M. Hébert (Alain) : Oui, tout
à fait.
Mme Roc (Marie-Lyne) : Tout
à fait.
• (12 heures) •
M. Hébert (Alain) : Ça peut
être intéressant, mais ça demande quand même une présence en même temps, là, du
professionnel compétent, du tiers de confiance, les deux témoins. Ce n'est pas
toujours évident. Alors, on se... La réflexion, pour nous, c'est : Quelle
en est l'utilité? Est-ce que ce n'est pas plutôt une entrave, là? Déjà, pour trouver
deux témoins, pour un certain nombre de personnes, ce sera déjà un certain défi.
Alors, de les... de les avoir en même temps pour la signature du document, on
se disait : Bien, il y a peut-être possibilité de faire les signatures en
différé mais faire ça bien, dans les formes. C'est ça qu'on... C'est une
question d'accessibilité, là, pour nous, puis de faciliter les processus.
Mme Poulet : Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci, Mme la députée. Alors, le tour de parole vient à la
députée de Vimont.
Mme Schmaltz : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, messieurs, madame. En fait, j'aimerais aborder... Vous
parlez, dans votre mémoire, des soins palliatifs rehaussés dans un contexte d'isolement
social des personnes aînées ou qui vivent avec un handicap. Vous recommandez
que ce soit <mieux...
>
12 h (version révisée)
<19259
Mme
Schmaltz :
...d'isolement social des personnes aînées ou qui
vivent avec un handicap. Vous recommandez que ce soit >mieux documenté
et envoyé à la commission des soins de vie... de gens qui ont été refusés à l'aide
médicale à mourir dans un contexte de désespoir social. Pourquoi? Je me
demande. C'est parce que vous aimeriez ouvrir aussi cette option-là? Non?
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Non.
C'est plus... Écoutez, j'ai eu une rencontre l'an passé. À sa demande, j'ai
rencontré le commissaire aux soins de fin de vie, le Dr Michel Bureau, donc,
une rencontre à sa demande, et ce que le Dr Bureau nous présentait, c'est qu'il
constatait une augmentation des demandes d'aide médicale à mourir qui étaient
refusées et que le profil de ces personnes-là laissait entrevoir de la misère
sociale, du désoeuvrement social. C'est peut-être des termes qui ne sont pas
très, là, contemporains, mais je pense qu'on s'entend là-dessus. Donc, des gens,
souvent, qui se retrouvent isolés, qui n'ont pas de soutien autour d'eux, qui n'ont
pas accès à des services, qui voient leur autonomie diminuer et qui font une
demande d'aide à mourir un peu par dépit de leur condition sociale.
Alors, nous, ce qu'on pense qui serait
intéressant pour aider le gouvernement à mieux comprendre, c'est que ces
refus-là devraient être mieux documentés pour permettre à la commission d'avoir
vraiment un portrait de cette dynamique-là de désoeuvrement social, pour faire
en sorte que les politiques sociales, là, du ministère, là, puissent s'ajuster
et pouvoir y répondre.
Mme Schmaltz : OK. Parfait. Merci.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Si je n'ai pas d'autre intervention, je
vais me tourner du côté de l'opposition officielle. Donc, les discussions se
poursuivent avec la députée de Westmount—Saint-Louis pour une période de 12 min 29 s.
La parole est à vous, madame.
Mme Maccarone : Parfait. Merci,
Mme la Présidente. Merci de votre présence en commission, puis pour votre
présentation, ainsi que votre mémoire. Je vais renchérir sur les questions que Mme
la ministre vous a posées. Puis je pense que ce qu'on peut dire en ce qui
concerne la notion de handicap, ce qui fait consensus, c'est qu'il n'y a pas de
consensus. Alors, merci de partager votre réflexion. Même, ce matin, nous avons
entendu que la société québécoise doit juger pour le handicap. Alors, j'espère
que, s'il y a un éventuel forum ou une discussion qui aura lieu à l'extérieur
de cette commission... que vous en faites partie pour élaborer et partager
votre opinion, parce que vous, vous faites un accompagnement qui est vraiment
important en ce qui concerne des citoyens en situation de vulnérabilité, que ce
soient des personnes en situation de handicap, ou autres. Alors, je veux mieux
comprendre vos recommandations.
Puis je comprends que vous dites que nous
pouvons élargir puis qu'on fait face, quand même, à peut-être une
stigmatisation. Et évidemment on ne veut pas créer de la discrimination envers
des citoyens qui souhaitent et qui devraient peut-être être éligibles pour
faire une demande en ce qui concerne l'aide médicale à mourir, surtout quand on
parle de la notion de souffrance, qui est très subjective.
Et vous recommandez, dans votre recommandation
n° 5, si, par contre, on parle de quelqu'un qui a
subi un accident, qui se retrouve, malheureusement, en situation de handicap,
qu'on aurait un délai d'au moins 90 jours. Évidemment, ça sonne dans ma tête,
90 jours, parce qu'on a entendu aussi le Collège des médecins et autres
regroupements médicaux qui ont dit : C'est clair, il y a une période d'adaptation
qui est importante pour cette... pour cette personne concernée. Il n'y a
personne qui a souhaité mettre un chiffre à côté de ceci. Vous, vous mettez 90
jours. Autres groupes ont dit : Bien, ça peut être un an, ça peut être
deux ans, parce que, pour chaque personne, encore une fois, on peut imaginer...
J'ai donné déjà l'exemple de quelqu'un, un athlète, un olympien qui a eu un
accident d'automobile, qui devient quadriplégique. Est-ce que c'est 90 jours de
période de réadaptation qui va lui donner vraiment une perspective en ce qui
concerne le reste de sa vie ou est-ce que c'est une limitation qui n'est
peut-être pas assez large?
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Bien,
je laisserais mon collègue Alain...
M. Hébert (Alain) : C'est
vraiment une bonne... une bonne question. Puis, tout de suite, là, d'entrée de <jeu...
M. Malenfant (Pierre-Paul) :
...Bien,
je laisserais mon collègue Alain...
M. Hébert (Alain) :
C'est
vraiment une bonne... une bonne question. Puis, tout de suite, là, d'entrée de >jeu,
Mme la députée, on reconnaît bien, là, comme ordre, qu'il y a quelque chose, en
partie, d'aléatoire et qui ne peut pas s'ajuster à toutes les situations
singulières des personnes quand on met un délai chiffré comme celui-là.
Juste peut-être expliquer un petit peu
notre recommandation à ce sujet-là. On parle, donc, d'un délai d'au moins
90 jours, donc d'au moins trois mois, pour permettre minimalement à la
personne de faire des avancées dans sa réadaptation. Vous savez, les
travailleurs sociaux, ils sont aussi beaucoup impliqués auprès des personnes en
réadaptation, et on reconnaît bien qu'il y a un temps qui est nécessaire pour
s'adapter, jusqu'à un certain point, à sa nouvelle situation. Parce que, pour
nous, ce qui est derrière ça, c'est de permettre à la personne de faire un
choix, par exemple, pour l'aide médicale à mourir, à partir d'un consentement
qui est libre et éclairé, donc, d'une situation qui pourrait être relativement
stabilisée, là, nonobstant le fait qu'il y aurait les autres critères auxquels
elle devrait correspondre, déclin avancé et irréversible, souffrances
intolérables, persistantes, que... Alors, tu sais, c'est l'ensemble des
critères, comme ma collègue Mme Roc, tantôt, énonçait, qui sont importants.
Mais, pour nous, ce délai-là aussi, on
s'est inspirés du délai des mesures de sauvegarde du fédéral, de la loi
fédérale, la loi canadienne, pour le stipuler. Donc, c'est un délai qu'on
recommande comme étant minimal, puis pour ne pas non plus enfermer ou même
discriminer des personnes qui, avant un délai de 90 jours, par exemple, de
l'avis du professionnel compétent, médecin ou infirmière praticienne
spécialisée, seraient en mesure de prendre une décision éclairée. On a fait
cette recommandation, sous réserve du jugement du professionnel compétent. Mais
ce que ça voudrait dire, c'est que, dans la norme, dans l'ordinaire, ce fameux
délai de 90 jours, on le prendrait comme une cible minimale pour permettre
l'adaptation. Si la personne a besoin de plus de temps d'adaptation puis qu'on
juge qu'elle n'est pas en mesure d'offrir un consentement libre et éclairé pour
prendre une telle décision, même six ou sept mois plus tard, là, le
professionnel compétent va tout de même exercer son jugement, on s'entend.
Alors, voilà un petit peu la notion.
Puis la deuxième recommandation, au-delà
du délai, c'est vraiment de s'assurer... C'est sûr que, de façon usuelle, le
professionnel compétent, c'est dans son travail. Il le fait. Et les
professionnels de la santé ou des services sociaux, dont les travailleurs
sociaux, en accompagnant la personne, fournissent aussi de l'information à la
personne sur les services disponibles, sur les ressources, sur le processus
d'adaptation, aident la personne dans un processus de prise de décision,
l'encouragent, la soutiennent émotivement. Ils font tout ça. Mais il reste que
ça nous apparaissait une mesure de sauvegarde importante, compte tenu de
l'aspect subit du handicap qui survient, là, lorsque c'est suite à un accident.
On comprend que ce n'est pas un processus, là, de maladie grave et avancée sur
une longue période de temps. C'est quelque chose qui arrive relativement à
court terme. Donc, c'est pour se donner une chance.
Bien, écoutez, si vous me disiez... si
vous nous disiez : Pourquoi pas 120, pourquoi pas 60?, bien, ce qu'on sait,
en tout cas, c'est que c'est quelques mois que ça prend généralement, selon
l'expérience professionnelle de nos membres. C'est pour ça qu'on l'a pris, puis
pour s'arrimer un petit peu sur la législation canadienne.
• (12 h 10) •
Mme Maccarone : Bien là, vous
parlez de la législation canadienne puis vous parlez de... Tu sais, évidemment,
les balises sont importantes, puis, quand vous mettez des recommandations en ce
qui concerne l'application pour les personnes en situation de handicap, j'étais
surprise de voir qu'il n'y avait pas des balises ou des recommandations en ce
qui concerne l'application pour les troubles mentaux, parce que vous dites que
nous devons parler de, peut-être, une harmonisation avec la loi fédérale.
Comme membre de la commission spéciale, ce
que je peux vous dire, encore une fois, malgré ce que vous avez reçu dans votre
sondage, c'est qu'il n'y a pas de consensus, encore une fois, en ce qui
concerne l'application. Mais vous n'avez pas de balise en ce qui concerne
l'application pour les personnes qui souffrent de troubles mentaux. Parce que,
ce que nous avons entendu, ce n'est pas nécessaire. Je ne veux pas utiliser le
mot «guérir», mais, souvent, il y a de l'espoir. Souvent, il y a beaucoup de
choses qu'on ne connaît pas en ce qui concerne les troubles mentaux.
Aujourd'hui, on n'a peut-être pas ce qu'il nous faut pour accompagner la
personne concernée, mais ça se peut que, dans un an ou deux ans, ce sera le cas.
Alors, évidemment, il faut agir avec de la prudence.
Vous, dans ce que vous faites, évidemment,
comme travailleurs et travailleuses sociales, c'est fondamental. L'accompagnement
est tellement important, des personnes que vous aidez et que vous accompagnez.
Comment voyez-vous ce type de balise si on doit prévoir 90 jours pour une
personne qui a eu un accident d'automobile, mais quelqu'un qui souffre d'un
trouble mental... Comment devons-nous poursuivre pour aussi protéger cette
personne de ne pas prendre une décision qui est finale, surtout quand eux aussi
peuvent être dans une situation de vulnérabilité? Puis, quand on parle
d'aptitude, ça peut <être...
Mme Maccarone :
...quand
eux aussi peuvent être dans une situation de vulnérabilité? Puis, quand on
parle d'aptitude, ça peut >être... ça peut évoluer aussi.
M. Hébert (Alain) : Peut-être
simplement signifier qu'effectivement pour ce... dans le cadre de l'étude du
projet de loi n° 11, on n'a pas fait de telle recommandation de balise, ni
non plus dans notre mémoire déposé à la commission sur l'évolution de la loi
sur les soins de fin de vie, où on s'était prononcés de façon favorable pour
l'éligibilité des personnes ayant pour seul problème médical un trouble mental,
avec les autres conditions, donc, dans une trajectoire avancée, irréversible de
trouble, souffrances intolérables ou tout... Donc, on a parlé tantôt, ma
collègue et M. le président, de cas réfractaires. Donc, on comprend que c'est
sur une longue, longue période de temps. Donc, la question du délai nous
apparaissait moins pertinente à ce moment-là. On n'a pas proposé pour ça.
Au niveau des balises, par contre, on ne
l'avait pas fait la dernière fois. Peut-être, la mise en garde qu'on fait, pour
nous, actuellement, pour le projet de loi à l'étude, c'est de dire : Si la
précision à l'effet que le... on ne considère pas d'autres troubles mentaux que
le trouble neuromoteur, bien, cette petite... On comprend que la précision dans
la loi, dans le projet de loi, elle est contextualisée, mais les craintes qu'on
a, c'est que ça puisse exclure cette possibilité-là si les travaux du
gouvernement fédéral arrivent, et que, là... qu'on a besoin, au Québec, de
revoir la législation québécoise, et là qui demanderait un certain délai,
encore du temps. On se met en porte-à-faux, encore une fois, avec la
législation. Or, nous, c'est sûr, étant favorables pour l'éligibilité des
personnes ayant des troubles mentaux graves, bien, c'est sûr que ça... c'est
quelque chose qu'on trouve important de porter à votre attention. Mais c'est
pour ça qu'on n'est pas allés plus loin non plus, parce que le projet de loi ne
porte pas là-dessus, là, actuellement.
Mme Maccarone : Vous faites
bien. Je pense que nous sommes tous conscients de la réalité. Combien de
membres avez-vous dans votre ordre?
M. Malenfant (Pierre-Paul) : ...membres.
Mme Maccarone : 13 000
membres. Puis, pour chaque membre...
M. Malenfant (Pierre-Paul) : 16 000,
16 000.
Mme Maccarone : 16 000. OK.
Puis on peut imaginer combien de dossiers par travailleur ou travailleuse
social?
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Bien,
écoutez, c'est très variable dépendamment du secteur, du milieu de pratique. On
sait que, dans le réseau de la santé et des services sociaux, la situation, au
cours des dernières années, s'est vraiment détériorée au niveau des conditions
de pratique, dans le sens que les TS se retrouvent avec une augmentation
importante du nombre de personnes à aider et aussi des contraintes quant au
temps consacré auprès de chaque personne.
Vous savez, le système de données du
ministère concernant le travail social, ça calcule des nombres, le nombre de
personnes que vous avez rencontrées. Si je rencontre une personne, ça nous
donne une statistique, mais ça ne donne pas de statistique s'il faut que je
rencontre le conjoint, que je rencontre, peut-être, le professeur d'école,
peut-être quelqu'un dans un organisme communautaire, qui est peut-être un
professeur. Alors, ça, il n'y a aucune donnée là-dessus. Donc, on se retrouve
dans des conditions de pratique où il y a une pression parce qu'il y a des
listes d'attente partout, il manque de ressources humaines, et on se retrouve
avec une pression très importante, où on arrive difficilement, comme TS, à
faire notre travail dans le respect des règles de déontologie mais aussi des
normes que... qui régissent la pratique du travail social.
Mme Maccarone : Bien, entre
autres, merci beaucoup pour ce que vous faites. Je pense que je l'ai déjà dit,
mais je vais le répéter, c'est essentiel. Alors, la raison de la question,
c'est, dans le cadre du projet de loi, on a entendu autres groupes, la semaine
passée, qui ont dit que ça se peut que le tiers de confiance peut être un TS. Mais,
étant donné que vous avez une charge de travail très importante, comment
voyez-vous votre rôle en ce qui concerne l'accompagnement de la personne qui
fera peut-être une demande anticipée? Puis, rendu au moment du déclenchement,
le tiers de conférence... de confiance, est-ce que ça peut être un TS? Est-ce
que ça doit être un membre de la famille, un proche? Comment voyez-vous votre
implication? Puis, si ce n'est pas vous qui pourraient ou qui souhaiteraient
être nommés comme le tiers de confiance, que sera votre rôle dans...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Très rapidement, s'il vous plaît, pour la réponse.
Mme Maccarone : C'est
tellement une bonne question, Mme la Présidente.
M. Malenfant (Pierre-Paul) : Oui.
Mme Roc, s'il vous plaît.
Mme Roc (Marie-Lyne) : C'est
une excellente question. Puis effectivement, de par le fait que les
travailleurs sociaux, on a vraiment une pratique de proximité auprès des
personnes, souvent, on va être ciblés pour avoir un tel rôle. Nous, en fait, on
ne se voit pas du tout agir à titre de tiers de confiance. Effectivement, dans
la loi, on se... on se voit agir comme professionnels de la santé et des
services sociaux, donc, plus dans l'équipe <interdisciplinaire...
Mme Roc (Marie-Lyne) :
...on se voit agir comme professionnels de la santé et des
services sociaux, donc, plus dans l'équipe >interdisciplinaire.
Maintenant, le tiers de confiance, on peut
très bien accompagner la personne pour cibler un tiers de confiance, pour
discuter avec la personne de qui pourrait l'assister à faire une demande
anticipée, de lui expliquer les... Et puis aussi, le tiers de confiance, on
comprend qu'il est... bien, on souhaite qu'il soit bien présent, mais en fait
la personne pourrait ne pas faire une demande anticipée et prévoir un tiers de
confiance. Alors, ce qu'on trouve intéressant, c'est qu'on...
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup, Mme Roc. Merci pour la réponse. Je
suis désolée, je suis la gardienne du temps. Alors, pour le dernier... le
dernier bloc d'échange, nous allons le faire avec la députée de Laviolette—Saint-Maurice
pour une période de 4 min 7 s. La parole est à vous, Mme la
députée.
Mme Tardif : Merci. En fait,
je crois que je vais vous laisser poursuivre cette réponse, parce que c'était
ma question aussi, quel était le... quel est le rôle, là, que vous entendez
jouer, et qu'est-ce que vous pourriez faire, comme première question.
Et, comme deuxième question, puisqu'on parlait
du tiers de confiance et que, là, vous avez confirmé que vous ne seriez pas
nécessairement un tiers de confiance, dans votre rapport, vous estimez quand
même que c'est essentiel de prévoir des interventions de soutien et
d'accompagnement pour le tiers de confiance. Donc, si vous pouvez développer
ces deux volets-là, s'il vous plaît. Merci.
Mme Roc (Marie-Lyne) : Oui.
Je vous remercie. Effectivement, c'était... ça allait être le complément de ma
réponse, qu'on se voyait aussi à soutenir le tiers de confiance, qui a quand
même un rôle extrêmement important dans ce contexte, c'est-à-dire de faire
valoir les volontés de la personne alors qu'elle était apte, et aussi faire
connaître à l'équipe de soins et aux professionnels compétents les volontés de la
personne. Alors, nous, on se voit beaucoup plus dans ce rôle-là d'accompagner,
soutenir le tiers de confiance, et non pas de se substituer à cette personne.
La Présidente (Mme Lecours, Les
Plaines) : Merci beaucoup. Alors, M. Malenfant, Mme Roc, M. Hébert,
ce fut fort intéressant de vous avoir avec nous pour conclure cet avant-midi
d'échanges. Alors, il me reste à vous souhaiter une bonne journée ainsi qu'être
le porte-parole de mes collègues pour tout ce que vous nous avez apporté à la commission.
Alors, mesdames, nous allons suspendre les
travaux de la commission... nous allons, en fait, ajourner les travaux jusqu'au
jeudi 23 mars 2023, à 14 heures, où nous allons poursuivre
notre mission.
(Fin de la séance à 12 h 19)