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Version finale

28e législature, 3e session
(20 février 1968 au 18 décembre 1968)

Le mercredi 12 juin 1968 - Vol. 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Sidbec


Journal des débats

 

Sidbec (2)

(Dix heures trente-neuf minutes)

M. GRENIER (président): Alors, pour faire suite à la dernière séance que nous avons tenue, voici ce comité des régies gouvernementales, à caractère industriel et commercial.

M. le Premier Ministre.

M. JOHNSON: M. Gignac, d'abord nous vous remercions d'être revenu. Nous remercions M. Caron pour son premier cours sur le cours des valeurs. Nous avons, la semaine dernière, déclaré que les représentants des métallos auraient la permission, avec le consentement du comité, de poser quelques questions. Est-ce qu'il y a des représentants ce matin?

Hier, nous avons reçu une délégation fort imposante de Bécancour et de la région qui nous a évidemment exposé premièrement sa déception, deuxièmement son espoir que l'entente avec Dosco n'ait pas lieu, troisièmement, son espoir que Dosco n'étant pas réalisée on pourrait éventuellement recevoir un début de sidérurgie à Bécancour même, selon l'espoir et la certitude qui avait été donnée à toute la population de Bécancour.

Alors, nous avons suggéré à ces messieurs, de former un comité qui, lui aussi, aurait le même droit que les métallos, c'est-à-dire celui de poser quelques questions.

Il n'est évidemment pas question ce matin de faire un débat sur les emplacements ni sur les rapports et je crois qu'en toute équité, il faut fournir à chacun l'occasion de poser des questions qui éclaireront l'opinion publique et les députés de cette Chambre sur le pourquoi de Sidbec.

M. le Président, il se passe des événements qui troublent tous ceux qui ont à coeur la paix dans le monde et qui veulent dénoncer la violence surtout quand il s'agit de violence contre les hommes politiques. Tout le monde se sent un peu touché à des degrés plus ou moins divers et je voudrais bien ici, même si ce n'est pas dans l'ordre, offrir officiellement des sympathies à Mme Kennedy et à toute sa famille pour le tragique attentat dont le sénateur Kennedy a été victime hier. On rapporte, ce n'est pas confirmé, que l'opération n'aurait pas réussi et que le sénateur Kennedy serait décédé.

M. LESAGE: Mais ce n'est pas confirmé.

M. JOHNSON: Ce n'est pas confirmé. C'est une nouvelle entendue à la radio pour le moment. Je pense que chacun dans son coeur aura une pensée pieuse et espère que les immolations finiront par servir la paix et l'ordre dans le monde et dans l'Amérique du Nord.

Pour revenir à Sidbec, ce matin nous serions très heureux d'entendre de nouveau M. Gignac répondre à nos questions et aux questions des membres de ce comité et aux questions que pourront poser les représentants des Métallos et de la région de Bécancour.

Est-ce que le comité a été formé? M. le maire de Bécancour est-il ici?

M. GAUDET: Oui, M. le Président.

M. JOHNSON: De qui êtes-vous assisté? Il y a un peu moins de monde qu'hier.

M. GAUDET: Un peu moins mais par contre on a choisi des gens qui, je le pense bien, nous rendront service. Notre urbaniste, notre ingénieur, trois échevins, les deux maires des villes qui nous environnent, Trois-Rivières-Ouest et Trois-Rivières.

M. JOHNSONS Pourriez-vous nous les présenter s'il vous plaît?

M. GAUDET: M. Philippe Bourque, échevin; M. Jean-Baptiste Leblanc, échevin; M. André Labrecque, notre ingénieur; M. Roch Duval, échevin; M. Roger Leblanc, notre urbaniste; M. Montour, le maire de Trois-Rivières-Ouest; M. Deschênes de Trois-Rivières. Les gens de Victoriaville sont censés arriver d'une minute à l'autre. Je vous remercie.

M. JOHNSON: Merci M. le Maire. Ce n'est pas une nouvelle officielle que je donnais tantôt, mais de toute façon je pense qu'il y a lieu d'offrir nos sympathies. Le pire n'est pas arrivé.

Tous les députés et, je pense, tous les membres de l'auditoire sont un peu affectés par ces nouvelles, mais il faut quand même que la vie continue. Et pour nous ramener des choses extrêmement prosaïques, nous pourrions peut-être demander à M. Caron de continuer sa démonstration. Il n'y a rien comme une douche de chiffres pour nous ramener les deux pieds I terre.

M. Caron devait nous préparer, à la demande du chef de l'Opposition, un document qui a été distribué à tous les députés et au sujet duquel nous pourrions poser des questions. Préférez-vous être au tableau, M. Caron?

M. CARON: Oui, si vous le désirez, pourvu que vous me permettiez d'avoir I mes côtés M. Graveline qui est mon bras droit.

M. JOHNSON: Vous avez besoin d'un souffleur?

M. CARON: J'ai aussi besoin d'experts. M. le Premier Ministre.

M. LESAGE: Voudriez-vous attendre un instant? Je vais essayer de trouver des copies.

M. JOHNSON: Pendant que le chef de l'Opposition cherche des documents pour nous rendre service, est-ce que je pourrais faire le point, du moins tel que je le vois quant à nous? La question principale est la suivante, pourquoi avez-vous fixé à onze dollars le prix de l'action que Sidbec offrirait, après les autorisations nécessaires y compris celle du gouvernement, et l'assurance d'avoir de l'argent, aux actionnaires de Hawker Siddeley qui détiennent environ 77% ou exactement 77% des actions émises, et aux actionnaires qui ont acheté en bourse leurs actions?

Nous avons compris que le président de Sidbec et son conseil d'administration avaient arrêté le chiffre de $45,000,000 environ comme valeur des actifs que garderait en définitive la Sidbec, soit trois installations dans le Québec et une en Ontario, à Etobicoke, et que ces actifs valaient ou vaudraient aux livres environ $72,000,000. Cela c'est une autre dimension du problème. Donc, $45,000,000, c'est le prix que vous aviez arrêté, que vous trouviez raisonnable et qui, par toute une opération complexe que M. Garon nous expliquera, se ramène sur la base d'action à $11 l'action.

Nous avons aussi compris, tout le monde, je crois bien, que les $60,000,000 que le gouvernement s'engagerait à mettre à la disposition de Sidbec, c'est un montant qui n'est pas entièrement nécessaire pour l'achat des actions mais qu'il servirait aussi à d'autres opérations de Sidbec, entre autres pour l'installation d'une usine de transformation du minerai, ou du minerai préréduit à de l'acier primaire, pour compléter le processus d'un complexe intégré.

M. GIGNAC: Si vous permettez, M.Johnson. M. JOHNSON: Oui

M. GIGNAC: Un peu plus tard, si le comité le désire, nous vous donnerons en gros le détail de ces $60,000,000, c'est-à-dire ce que Sidbec entend en faire dans les années qui viennent.

M. JOHNSON: Merci, M. Gignac, donc comment les $45,000,000, pour les actifs que garderait Sidbec, ou une compagnie que Sidbec contrôlerait, peuvent arriver à faire $11 l'action? C'est cette opération que nous aimerions comprendre dans les menus détails.

M. LESAGE: On soustrait 45 de 64.

M. CARON: Alors pour faire le lien avec notre discussion de la semaine dernière, peut-être qu'on pourrait prendre connaissance du tableau.

On vous a exposé, alors, que nous avons extrait du rapport annuel de Dosco, le rapport au 31 décembre 1967, qui est le rapport officiel de la compagnie, des chiffres que nous avons re-classifiés pour nous permettre d'enchaîner et d'expliquer les régularisations qui devaient être apportées.

Alors, pour résumer, le bilan montrait, en disponibilité, $68 millions, c'est-à-dire l'encaisse, les comptes à recevoir, et l'inventaire. Il y avait certains actifs en charbonnages, d'autres actifs, des immobilisations dont une partie à laquelle Sidbec est particulièrement intéressée, dont la valeur aux livres dépréciée est de $72 millions. La semaine dernière nous avons fait état de $6,700,000 pour la Montreal Works, $58,500,000 pour Contrecoeur, pour Etobicoke $4 millions et $2,600,000 pour Truscon Steel.

D'autres actifs, d'une valeur aux livres dépréciée de $10 millions, seront revendus à Hawker Siddeley Canada Limited. Un actif total de $157,500,000 qui correspond à l'actif total apparaissant dans le rapport officiel de la compagnie.

M. LESAGE: M. le Président, est-ce que vous me permettez juste une question à ce moment-ci? L'actif de $157,881,541 ou environ $157,500,000 ou $158,000,000, c'est l'actif au 31 décembre 1967. Il y avait eu diminution des actifs, par rapport au 31 décembre 1966. de $11 millions, n'est-ce pas?

M. CARON: M. le Premier Ministre et M. Lesage, d'après l'état financier que j'ai devant moi, en 1966...

M. JOHNSON: M. Caron, vous n'êtes pas recyclé encore?

M. CARON: Je pensais que je devais toujours m'adresser à lui d'abord. Alors, M. Lesage, l'actif total, à la fin de 1966, apparaissant aux livres est de $189 millions et l'actif apparaissant à la fin de 1967 est de $157 millions.

M. LESAGE: Ce qui fait $31 millions.

M. CARON: C'est $31 millions. Une raison de la forte diminution de l'actif c'est la radiation, au cours de l'année, d'une somme de $26 millions résultant de la disposition des actifs de Sydney Works, c'est-à-dire ceux que je présume avoir été vendus à la province de la Nouvelle-Ecosse à une valeur inférieure à la valeur qui apparaissait aux livres de Dosco.

Alors, pour la transition entre les deux bilans, il y a beaucoup d'autres facteurs d'ajustement, mais c'est un facteur majeur et c'est écrit comme ceci: Provisions for estimated costs and losses araising from sale of almost all of the assets in the business of the Sydney Works. C'est $26 millions.

M. LESAGE: C'est $26,000,000!

M. CARON: Alors, c'est une radiation de $26 millions dans le bilan de Dosco qui est comparable ou qui est du moins de la même espèce que la radiation de $27 millions que nous appliquons sur l'article immobilier.

Pour continuer le bilan, nous avons une exigibilité de $38,500,000, les comptes à payer, des frais courus à payer, diverses provisions dont une pour pension, les pensions aux employés, $9,500,000, une réserve qui est utilisée pour une régularisation sur les achats de minerai, $6 millions, et des impôts différés de $1 million.

Et nous avons ensuite la dette à long terme, celle que l'on a décrite, qui porte intérêt à 5 3/4% ou 6% et qui échoit en 84/85, un passif total de $93 millions. Or l'avoir des actionnaires qui est la différence entre les biens de la compagnie et ses dettes, est de l'ordre de $64 millions. Cet avoir des actionnaires est celui qui apparaît au rapport financier de Dosco, à la fin de 1967.

Pour les fins du calcul de $11 l'action, nous avons appliqué des régularisations aux chiffres du bilan et c'est ainsi qu'une réduction des immobilisations achetées par Sidbec, dont le coût déprécié de $72 millions, est réduit à un prix de $45 millions. Ce prix de $45 millions résulte des négociations de M. Gignac avec le groupe de Hawker Siddeley, mais est aussi appuyé par des études qui avaient été faites quant aux opérations projetées de la compagnie, de 1968 à 1980, études qui tiennent compte des capacités de production des usines et des possibilités du marché, en d'autres mots, conciliation entre ce qu'il est possible de vendre et ce qu'il est possible de produire.

Voici le résultat net de cette étude compte tenu des corrections à apporter aux immobilisations, lesquelles sont déterminées par des études d'ingénieurs, et après analyse de l'effet de ces corrections sur les prix de revient, a permis des calculs de rentabilité qui ont établi pour les administrateurs de Sidbec, qu'en payant tel prix, on devait s'attendre à obtenir tel niveau de rendement sur l'investissement. Et cette base est de 12 ans, c'est-à-dire de 1968 à 1980. Or le prix négocié pour les actifs de Sidbec a été établi à $45 millions. Une réduction est accordée dans la négociation, sur les stocks. C'est-à-dire qu'on accorde une diminution de l'inventaire, d'un montant de $1,500,000, qui pourrait tenir compte de surévaluation, de stocks désuets, ou de stocks en trop grande quantité. En fait un coussin, si on peut dire, de $1,500,000 contre les inventaires du 31 décembre 1967.

Nous avons ensuite une réduction de l'actif net, parce que les actifs nets, c'est-à-dire des actifs moins des passifs, qui seraient assumés par Hawker Siddeley, ont une valeur nette dépréciée de $17,600,000 et la valeur de rachat, le montant que Hawker Siddeley devra repayer à Dosco pour prendre possession des actifs est de $13,600,000. Donc, une perte à la liquidation, à la vente, de $4 millions, laquelle permettra en même temps, cependant, de récupérer $1 million d'impôts différés. Donc une perte nette au point de vue comptable, une perte nette dans nos livres de $3 millions. Le total des régularisations, des corrections à apporter, l'équité pour les fins de calcul, seulement, de la valeur des actions, est de $31,500,000. L'avoir des actionnaires, celui qui est considéré pour les fins de l'offre qui n'est pas celui qui apparaît à l'état financier et qui n'apparaîtra probablement jamais, mais qui est utilisé pour les fins de calcul, est de $32,500,000.

C'est ce que Sidbec a considéré être l'évaluation de la valeur de la compagnie une fois que l'on a éliminé les actifs extérieurs du Québec, mais en. gardant ici les installations, le fonds de roulement et en assumant la dette obligataire, donc la division de $32,500,000, par le nombre d'actions donne $11.00 l'action.

M. LESAGE: M. Caron, de tousles chiffres que nous voyons au tableau, deux seulement, me semble-t-il, ne sont pas tirés soit du bilan, soit des livres de Dosco. Ce sont les chiffres de $45 millions et de $13,600,000. Est-ce que c'est exact?

M. CARON: Oui, c'est exact.

M. LESAGE: Ces deux chiffres sont le résultat de négociations, n'est-ce pas?

M. CARON: Oui, des négociations qui ont suivi les études faites par les experts.

M. LESAGE: M. Caron, est-ce que vous avez fait partie de l'équipe qui a fait une estimation de la rentabilité sur une période de douze ans des quatre établissements de Dosco qui deviendraient la propriété de Sidbec?

M. CARON: Nous faisions partie de l'équipe, c'est-à-dire moi et quelque dix membres de mon bureau, tous comptables agréés, travaillant en coordination avec les ingénieurs-conseils, travaillant en coordination avec les ingénieurs et les comptables à l'emploi de Sidbec et que l'on a nommé l'équipe Sidbec, qui ont coordonné leurs efforts dans les domaines de leur compétence respective pour établir les études de rentabilité. Et nous étions de l'équipe, par le truchement d'un de mes associés M. Ferguson, dans l'établissement du marché éventuel de Dosco. Et M. Ferguson est ici ce matin avec moi.

M. LESAGE: Oui, M. Dozois voudrait vous...

M. DOZOIS: M. Lesage soulève cette question de rentabilité des actifs que Sidbec peut acheter. Vous établissez la valeur dépréciée ou les $72 millions sont basés sur la valeur dépréciée de quatre installations. Est-ce qu'il vous est possible de nous donner — entre autres dans le cas de Contrecoeur on nous a dit que cela avait coûté $70 millions et on ne connaît que la date de construction de ces installations qui remonte à trois ou quatre ans et que c'est maintenant déprécié à $58 millions — est-ce que vous pourriez nous dire, dans le cas de Montreal Works, quand cela a été installé et quelle a été la valeur originale, pour arriver aujourd'hui à une valeur dépréciée de $6,700,000 et dans le cas des deux autres également ou si c'est impossible?

M. CARON: Si vous le permettez, M. Dozois, je vais demander à M. Graveline qui est lui-même allé sur place à Contrecoeur, à Montreal Works et dans chacune des usines, de répondre à votre question.

M. GRAVELINE: M. Dozois, nous pouvons vous donner rapidement le coût original des actifs aux différents emplacements. Nous pouvons également faire un peu de recherche pendant cinq à dix minutes pour vous donner la date d'acquisition de ces différents actifs.

M. DOZOIS: Non, approximativement, à quand cela remonte-t-il Montreal Works? Est-ce une installation qui remonte à dix ans, quinze ans, trente ans ou cinquante ans, environ?

M. GRAVELINE: Le Montreal Works remonte à au moins une vingtaine d'années.

M. DOZOIS: Une vingtaine d'années. Et la valeur originale?

M. GRAVELINE: II faut que j'aille chercher les papiers.

M. LESAGE: Nous pouvons discuter avec M. Caron pendant que M. Graveline fait ses recherches.

M. DOZOIS: Parce que j'estimais que c'était peut-être nécessaire de partir de cette base pour estimer la rentabilité.

M. LESAGE: Oui.

M. CARON: Je voudrais soulever un point, M. Dozois, c'est qu'entre les usines, il y a transfert de matériel et le problème se pose toujours lorsque vous avez un enchafnement de postes de fabrication, à quel point on doit reconnaître le profit. Et nécessairement suivant l'endroit où vous l'octroyez, vous pouvez changer la rentabilité d'un établissement pour en faire bénéficier un autre. Notre étude est certainement plus exacte sur une base globale. Parce qu'à ce moment-là, nous partons du prix de vente au consommateur et nous avons le taux global encouru par toute l'organisation de Dos- co.

Mais c'est un problème qui se pose parce que, prenez Etobicoke, elle est alimentée largement par Contrecoeur et, d'ailleurs, c'est la raison pour laquelle Etobicoke est suggérée dans l'acquisition de groupe, parce que, par le truchement d'Etobicoke, on écoule une forte proportions des produits qui sont fabriqués à

Contrecoeur.

C'est la même chose entre Contrecoeur et Montreal Works. C'est la même chose en fait à Truscon où vous manipulez du fer d'armature que vous obtenez de vos usines. L'enchaînement des opérations permet une meilleure utilisation globale.

M. LESAGE: D'accord. Entre compagnies parentes, le prix de vente des produits de l'une à l'autre peut servir aux propriétaires d'instrument pour faire profiter telle compagnie plutôt que telle autre, suivant le prix de vente de l'acier dans l'état où il est lorsqu'il est vendu.

M. JOHNSON: C'est très souvent en fonction d'une entente.

M. LESAGE: C'est ça que je dis, c'est une entente entre les propriétaires qui en décident. M. Gignac l'a dit la semaine dernière d'ailleurs.

M. CARON: La semaine dernière, dans l'exemple de Sydney Steel, le transfert de la matière première de Sydney à Contrecoeur...

M. LESAGE: Etait de $10 à $15 trop élevé, avez-vous dit...

M. CARON: D'accord.

M. LESAGE: ... et c'était une question d'impôt, parce que Sydney Steel opérant à perte, les opérations de la Nouvelle-Ecosse opérant à perte, il n'y avait pas intérêt à faire payer des impôts trop élevés ni à Contrecoeur, ni à Etobicoke, ni à Montreal Works, ni à Truscon.

M. DOZOIS: Cela servait à sauver des impôts à l'autre.

M. LESAGE: Je pense que les comptables sont bien familiers avec ce procédé qui est habile, mais n'est pas illégal.

M. DOZOIS: Le ministère du Revenu s'en plaint.

M. LESAGE: Ce n'est pas contre la loi. Non. Maintenant, M. Caron, j'en suis toujours aux $45 millions. Je voudrais revenir aux deux chiffres qui sont les seuls, n'est-ce pas, qui rie proviennent pas des livres, soit $45 millions qui est un prix négocié, une valeur ou un prix négocié, de même que $17.6 millions qui également est une valeur négociée ramenée à $13.6 millions. Dans ces deux cas, prenons plutôt l'exemple des $45 millions. Si je comprends bien il s'agit d'un prix négocié. Ce n'était par conséquent pas le prix ou la valeur à laquelle l'équipe de Sidbec en était venue tenant compte de la rentabilité sur douze ans, puisque cela a été négocié. Quelle était la valeur à laquelle l'équipe de Sidbec en était venue avant les négociations qui ont amené la précision du chiffre de $45 millions?

M. CARON: Si j'ai bien compris notre mandat de l'équipe de Sidbec, c'était de préparer tous les renseignements pertinents et utiles, de manière que les administrateurs de Sidbec puissent prendre une décision informée devant une série de faits. Alors nous n'avons pas établi un chiffre, nous en avons établi plusieurs. Par exemple, je pense que je puis dire qu'à certains moments, nous avons considéré que l'actif immobilisé de Dosco dans le Québec pouvait valoir $70 millions. Et nous avons établi quelle serait la rentabilité advenant le cas où l'on paierait $70 millions. Nous l'avons fait à $65 millions. Nous l'avons fait à $60,000,000. Nous avons fait toute la gamme, de manière à informer le conseil d'administration de Sidbec: Si vous achetez à telle condition, vous devriez avoir tel résultat d'après la projection de douze ans. Somme toute, vos opérations et vos ventes restent les mêmes, votre coût de main-d'oeuvre ne fluctue pas, vos frais fixes ne fluctuent pas. Un facteur fluctue, c'est la dépréciation sur les immobilisations et l'intérêt sur l'argent requis si vous payez plus cher.

M. LESAGE: C'est ça!

M. CARON: Alors vous avez toujours des correctifs. Nous avons fait des courbes et illustré qu'à tel niveau, on obtient tel résultat et à tel autre tel résultat, de manière que, M. Gignac avait en main toute la gamme et l'effet immédiat d'une décision ou du moins l'effet immédiat de la négociation, il savait que s'il achetait à tel prix il obtenait tel rendement.

Il l'a dit lui-même, et je pense que nous pouvons le répéter, que la base établie a été pour que sur des opérations de 12 ans, de 1968 à 1980, on trouverait un facteur de rentabilité comparable aux autres sidérurgies canadiennes. Cela ne serait pas vrai si on regarde l'année 1968 comme telle, parce qu'on sait que 1968 va être une année difficile. Il y a des correctifs à apporter, il y a des changements à apporter. On ne peut pas changer une situation de perte en une de profit immédiatement.

M. LESAGE: Non, c'est une perte qui est inévitable, en 1968.

M. CARON: Mais, des études indiquent que nous atteingnons le point mort ou le point où nous faisons nos frais totalement après quelques années d'opération et qu'ensuite une rentabilité intéressante se développe.

M. LESAGE: A $45 millions.

M. CARON: Sur la base de $45 millions.

M. LESAGE: Evidemment, vous aviez préparé, pour divers paliers...

M. CARON: Divers paliers.

M. LESAGE: ... à partir de $25 millions jusqu'à $70 millions, je suppose.

M. CARON: Nous ne nous sommes pas rendus à $25 millions, parce qu'il y avait un problème pratique qui intervenait. Quand vous avez une dette obligataire de $38 millions, vous avez peut-être un montant minimum à considérer. Là, je suis obligé de vous parler de mémoire, parce que je ne me rappelle pas exactement, mais nous sommes certainement descendus très bas pour montrer exactement l'effet que ça produisait sur la rentabilité à tous les niveaux.

M. LESAGE: Mais les $17,600,000?

M. CARON: On m'a laissé entendre, et c'est M. Bourassa qui m'a dirigé vers ça, il aurait fait des mathématiques pour expliquer que c'était la même radiation...

M. LESAGE: Mais vous aviez dit que c'était, comme on dit communément, un « adon ».

M. CARON: Pour moi, j'y vois là une coïncidence.

M. LESAGE: Une coïncidence.

M. CARON: Je ne suis pas allé à la négociation, je n'ai pas fait les calculs mathématiques à ce moment-là. On peut présumer que Hawker Siddeley aurait pu dire: Bien nous, si nous acceptons les radiations de tant sur certains actifs, nous voudrions que vous acceptiez la même radiation sur ce que nous reprenons.

M. LESAGE: La même radiation...

M. CARON: Encore une fois, je ne veux pas faire de chantage. C'est à peu près...

M. LESAGE: C'est à peu près ce que je vous ai dit l'autre jour.

M. CARON: ... ce qu'on a dit l'autre fois. Comme je n'étais pas à la négociation, je ne peux pas dire...

M. LESAGE: Mais est-ce que vous aviez préparé des chiffres...

M. CARON: Oui, nous avions préparé des tableaux...

M. LESAGE: ... qui concernent l'évaluation?

M. CARON: ... qui indiquaient le coût de chacune des unités hors du Québec et préparé des tableaux...

M. LESAGE: Est-ce que c'était...

M. CARON: ... qui montraient le résultat d'opération de ces unités, parce que certaines sont déficitaires et d'autres opèrent à profit. Alors, nous avions donné au conseil d'administration de Sidbec des tableaux qui analysent — ici il y en a cinq ou six concernés — chacune des opérations. Cinq ou six opérations y sont analysées en fonction des actifs requis, des résultats qu'elles ont apportés depuis cinq ans ou six ans, de manière que M. Gignac puisse établir quelle était, dans son opinion, la valeur réelle de ces actifs.

M. LESAGE: Au cours des dernières années, M. Caron, est-ce que, toute proportion gardée, les actifs qui seront rachetés par Hawker Siddeley étaient une source de pertes relativement plus considérable que les actifs en ce qui concerne les quatre établissements que Sidbec retiendrait?

M. CARON: Disons que certaines unités ont opéré à perte continuellement.

M. LESAGE: Cela, c'est dans le rachat.

M. CARON: Oui, dans le rachat. Je ne veux pas les identifier pour porter préjudice, mais disons dans certaines activités très particulières, qui sont en dehors des opérations normales de l'acier. D'autres, par ailleurs, avaient une production qui a changé avec le temps. Par exemple, il y en a une en Ontario, entre autres, qui a modifié son approche en affaires. Elle fabriquait, je crois, des wagons, à certains moments, et à certains moments, les commandes étaient généreuses, ce qui était très intéressant. Elle s'est lancée dans d'autres activités et, depuis ce temps-là, il y a des pertes. On peut dire que dans l'ensemble la rentabilité que nous avons voulue, ne justifierait pas un prix supérieur à celui qui a paru ici.

M. DOZOIS: Je crois comprendre, n'est-ce pas, que le prix offert de $45 millions pour ce qui intéresse Sidbec, c'est le coût net par Sidbec indépendamment de la transaction des $17 millions ou des $13 millions. Quand toute l'opération sera terminée et que Hawker Siddeley aura

racheté certains actifs au coût de $13 millions, et ce qui restera coûtera $45 millions àsidbec?

M. CARON: C'est ça. Avec une valeur aux livres de $72,000,000, mais on n'aurait pas payé un montant équivalent de plus de $45,000,000 pour les installations.

M. DOZOIS: Oui, mais les $45,000,000 qui est le prix offert, comportent en somme un paiement de $18.9 millions qui est $11 l'action, moins les $13.6 millions.

M. CARON: Oui, nous allons payer $11 l'action et Hawker Siddeley va remettre l'équivalent d'environ $4 l'action à Dosco.

M. LESAGE: Oui, mais il y a une chose, M. Dozois, les $45 millions, le prix négocié de $45 millions, comprend les actifs qui seront rachetés par Hawker Siddeley.

M. CARON: Non.

M. LESAGE: Bien oui, vous les soustrayez.

M. CARON: Non, c'est exclus, icinous avions divisé les immobilisations en deux secteurs. Alors les $10 millions d'immobilisations, valeur originale dépréciée, plus certains actifs que nous avons en disponibilité, moins certains passifs que nous avons en exigibilité, se retrouvent dans les $17 millions.

M. LESAGE: Les $17.6 millions.

M. CARON: Alors que les $72 millions se ramènent directement aux $45,000,000. Somme toute, nous pourrions oublier tout ça et mettre $45 millions ici et puis dire: On a nettoyé notre situation, puisque nous avons payé effectivement $45 millions, nous ne le référions pas, parce que ça pourrait être désavantageux puisque nous avons des dépréciations additionnelles qui peut-être pourront être utilisées éventuellement. Alors, nous allons continuer à porter une valeur aux livres de $72 millions, mais nous aurions effectivement payé $45 millions.

M. DOZOIS: Alors, M. Caron, j'imagine que quand Sidbec offre $45 millions pour des actifs, et que Sidbec ne débourse seulement que $18.9 millions, c'est-à-dire $32 millions moins la récupération de $13.6 millions, que la différence entre le $18 millions est constituée par les obligations assumées de $38 millions, moins d'autres disponibilités qui appartiendront à Sid- bec. Autres actifs qui appartiendront à Sidbec et feront la différence.

M. LESAGE: La partie des $68 millions.

M. CARON: Nous héritons, comme vous le dites, d'un fonds de roulement, qui lui, va être augmenté de $13,6 millions. Ce qui équivaut, si l'on peut dire, à $4 l'action, et qui sont compris dans notre prix de $11. Nous allons hériter des immobilisations dont la valeur a été négociée et établie à $45 millions. Nous allons continuer ou plutôt Dosco va continuer d'assumer sa dette obligataire de $38 millions et aura certaines exigibilités; par ailleurs Dosco dispose de la provision pour le minerai et un impôt récupérable aura disparu dans la transaction.

M. LESAGE: Est-ce que je fais erreur?

M. DOZOIS: Actif ou passif.

M. CARON: Moi, je fais la différence.

M. LESAGE: Est-ce que je fais erreur en disant que la semaine dernière, je crois, vous avez parlé d'un fonds de roulement de $30 millions.

M. CARON: J'ai fait un calcul mathématique, M. Lesage, en disant, qu'au 31 décembre 1967, celui qui apparaît est de $29,500,000 soit la différence entre le $68 millions et le $38.5 millions.

M. LESAGE: C'est ça.

M. CARON: Nécessairement, comme nous venons d'en discuter, plusieurs modifications vont s'effectuer, nous avons des demandes d'argent que nous recevons qui vont changer le fonds de roulement. Mais, nous avons donné effet à ces changements et nous sommes en mesure d'affirmer qu'avec la souscription gouvernementale de $60 millions et ce dont Dosco disposerait après la transaction, que le fonds de roulement serait confortable, serait ce qui est anticipé d'une compagnie de l'ampleur de Dosco.

M. LESAGE: Mais, vous parlez de la souscription gouvernementale de $60 millions. La souscription gouvernementale de $60 millions n'est pas nécessaire pour cette transaction?

M. CARON: Non, je pense que M. Gignac en a indiqué le désir tout à l'heure.

M. LESAGE: C'est vous qui venez de le mentionner.

M. CARON: Je m'excuse.

M. LESAGE: J'ai compris que la souscription gouvernementale de $60 millions, faite sur une période de cinq ans à $12 millions par année, pourrait éventuellement servir à une opération additionnelle, c'est-à-dire la réduction du minerai.

M. GIGNAC: Oui, d'accord.

M. CARON: En partie, pas en totalité...

M. LESAGE: Non, c'est parce que vous venez d'ajouter les $60 millions pour calculer le fonds de roulement...

M. CARON: Avec ces $60 millions nous allons acquitter le coût.

M. DOZOIS: II y a plusieurs facteurs qui interviennent.

M. CARON: Il va rester un montant pour des nouveaux investissements.

M. LESAGE: Evidemment. Je faisais simplement remarquer à M. Caron qu'en mentionnant $60 millions comme ajoutant de la valeur à ces actifs-là, il allait trop loin. Ce n'est pas $60 millions, il y en a une partie qui va servir à autre chose.

M. DOZOIS: D'accord.

M. CARON: D'accord, partiellement.

M. LESAGE: Oui.

M. DOZOIS: Est-ce que vous seriez en mesure de répondre à ma question de tout à l'heure, M. Graveline?

M. GRAVELINE: Pour répondre à votre de-mande, M. Dozois, les usines de Montréal ont un coût initial approximatif de $26 millions. Certaines installations datent de 25 ans mais la majeure partie de 15 ans.

Contrecoeur a un coût de $62 millions...

M. DOZOIS: Est-ce $62 millions?

M. GRAVELINE: C'est $62 millions. La mise en opération s'est faite à partir de 1964 jusqu'à aujourd'hui.

UNE VOIX: Depuis quatre ans.

M. JOHNSON: La mise en opération, est-ce le début de la construction de Dosco à Contrecoeur?

M. GRAVELINE: Je crois que le début de la construction remonte à 1962.

M. BERTRAND: A 1963. UNE VOIX: A 1963.

M. GRAVELINE: A 1963. Etobicoke a un coût de $8 millions et date approximativement de 1955. Truscon a un coût de $5 millions...

M. DOZOIS: Est-ce $5 millions?

M. GRAVELINE: ... et un âge d'à peu près quinze ans, également, 1955 disons.

M. DOZOIS: Avez-vous estimé le coût de remplacement de ces installations?

M. JOHNSON: Est-ce que le coût de remplacement a été évalué ou établi pour ces installations?

M. GIGNAC: Nous avons tenu pour acquis, je crois, que le coût de remplacement serait le coût initial des équipements qui ont été mis en place. Si nous recommencions aujourd'hui Montreal Works, il est quand même fort probable que le coût de remplacement serait beaucoup plus élevé que le coût initial d'il y a vingt ans.

M. DOZOIS: Oui.

M. GIGNAC: II s'élevait à peu près à $26 millions à ce moment-là. Mais nous n'avons pas fait d'étude approfondie là-dessus. Nous les avons pris tels qu'ils étaient dans les livres.

M. DOZOIS: Mais si vous deviez construire les quatre usines dont il est question, la valeur originale serait de $101 millions.

M. GIGNAC: Oui.

M. DOZOIS: Alors, je m'imagine que ça coûterait beaucoup plus au prix d'aujourd'hui.

M. GIGNAC: Ah, oui! beaucoup plus.

M. DOZOIS: Vous auriez quelque chose de neuf, évidemment.

M. GIGNAC: Oui. Il faudrait rajouter à la

valeur aux livres, coût initial, un montant de l'ordre de 20% à 30% de plus au moins...

M. DOZOIS: De 20% à 30% de plus? M. GIGNAC: Ah, oui!

M. DOZOIS: Alors, construire en neuf les installations qu'il y a là, pourrait coûter actuellement de $120 millions à $130 millions?

M. GIGNAC: Au moins.

M. DOZOIS: Au moins, sauf que vous auriez quelque chose de neuf.

M. GIGNAC: Oui.

M. DOZOIS: C est là la différence. Très bien.

M. JOHNSON: M. Gérin-Lajoie et M.Gaudet, je pense bien, auraient des questions à poser.

M. GERIN-LAJOIE: J'aurais une première question à poser à M. Gignac. Est-ce que j'ai bien compris que l'effet de la transaction initiale est de laisser intacte l'entité juridique de Dosco qui continue à fonctionner comme auparavant? Je parle de la transaction initiale et non pas de leurs projets éventuels. Si je pose cette question-là, ce n'est pas évidemment parce que nous nous intéressons à l'aspect légal de la question, mais parce que la continuité de l'entreprise comme entité juridique a immédiatement des effets sur la continuité des régimes d'assurance et des régimes de pension en dehors même des conventions collectives ou en dehors des articles de loi qui régissent les plans de pension ou les fonds d'assurance. Alors, est-ce qu'on a bien compris que, en achetant les actions, plutôt que les actifs pour les quatre usines concernées, l'employeur sur le plan juridique reste Dosco, du moins après la transaction initiale, l'achat des actions par Sidbec?

M. GIGNAC: Vous aviez bien compris, M. Gérin-Lajoie.

M. GERIN-LAJOIE: Maintenant, il y a une autre question, M. le Président. Je n'ai pas l'intention de demander à M. Gignac quelle sera la politique de salaires, la politique de Sidbec dans ses négociations collectives éventuellement. Il nous a expliqué assez clairement, quelle était sa politique de rentabilité par rapport aux autres aciéries canadiennes et je pense bien qu'il estimerait que ce n'est pas, ici, l'endroit pour exposer son attitude vis-à-vis des négociations.

Cependant, si on me le permet, j'aimerais faire un bref commentaire. Et si cela dépasse les cadres de l'invitation qui nous a été faite par le comité, je serais reconnaissant au président du comité de me rappeler à l'ordre. J'aimerais seulement faire un très bref commentaire sur la position du syndicat des métallos sur le plan des négociations vis-à-vis d'une entreprise qui va être maintenant, sinon la propriété complète, du moins sous le contrôle du gouvernement.

Alors que Dosco était encore du secteur privé, nous avons dans deux usines, celle de Montreal Works d'abord, qui aurait fait le travail de pionnier dans ce secteur-là et celle d'Etobicoke tout récemment, nous avons établi une politique de parité avec les autres aciéries canadiennes, au premier chef Stelco. Malheureusement, dans les deux cas, il a fallu des grèves pour obtenir ces résultats. Evidemment, ce sont les travailleurs de chaque usine qui prennent leurs décisions et établissent leurs politiques de négociations, mais nous avons l'intention dans les conseils que nous sommes appelés à donner à ces syndicats locaux, de recommander de conserver cette politique de parité obtenue dans les deux dernières années et, dans le cas de l'usine de Contrecoeur, de l'établir et de suivre le modèle de parité établi par Etobicoke et Montreal Works récemment. Dans le cas de Contrecoeur, cela peut avoir un intérêt un peu plus immédiat, étant donné que les négociations sont présentement en cours. Mais je crois que c'est notre responsabilité syndicale de traiter Dosco, une fois qu'elle appartiendra à Sidbec, sur le plan des salaires, exactement de la même façon que le reste de toute l'industrie canadienne de l'acier.

Je me permettrai aussi, un autre commentaire très bref. En gros, le syndicat des métallos accueille avec énormément de joie et de satisfaction la transaction envisagée sans pouvoir offrir un jugement d'experts sur tous ces détails. Nous avons abordé le sujet avec une confiance initiale envers l'équipe de Sidbec et je dois dire, après avoir entendu les explications, la réaction de mes confrères et moi-même est que notre confiance est sortie grandie et non pas diminuée envers l'équipe que dirige M. Gignac.

Si nous accueillons avec joie cette transaction, c'est d'abord pour ses effets immédiats. Après le coup moral donné par la fermeture de l'usine de Sydney, l'intérêt, qui nous apparaît clair depuis plusieurs mois déjà, de Hawker Siddeley est de se débarrasser de sa présence dans l'acier, dont le premier symptôme a été l'abandon des opérations à Sydney. Il a évidemment surgi une crainte parmi les quelque 2,000 employés de Dosco au Québec et à Etobicoke de voir des transactions hâtives s'effectuer

à droite ou à" gauche ou ne pas se réaliser du tout, d'où la fermeture possible d'usines. L'effet immédiat de la transaction est d'assurer l'emploi de ces quelque 2,000 travailleurs et nous tenons à féliciter Sidbec et, également, le gouvernement du Québec pour cette initiative.

A long terme, nous nous réjouissons aussi des intentions qu'a manifestées M. Gignac, sinon le premier ministre lui-même, selon lesquelles ce n'est peut-être, qu'après une période de consolidation et d'expérimentation, qu'un premier pas sera franchi vers la transformation de l'acier ici au Québec. Et la transformation de l'acier au Québec offre l'intérêt à la province d'une diminution du coût de transformation de l'acier et d'une baisse du coût des produits de l'acier, un métal extrêmement important pour l'industrie secondaire. Si Sidbec peut servir d'intermédiaire pour offrir l'acier à meilleur prix pour le développement de l'industrie secondaire, toute la métallurgie, plusieurs des régions du Québec et, éventuellement, toute l'industrie québécoise auront à s'en féliciter.

En terminant, nous souhaiterions vivement que le gouvernement autorise, le plus rapidement possible, Sidbec à conclure cette transaction, le facteur délai nous apparaissant actuellement important. Il naît parmi nous une certaine inquiétude, centrée plus particulièrement sur l'usine de Contrecoeur, où à l'heure actuelle les opérations d'entretien dans cette usine — sans parler de celles d'améliorations qui sont mêlées quotidiennement à l'entretien ont atteint un point qui nous semble dangereusement bas, particulièrement à l'usine de Contrecoeur; ce qui est peut-être inévitable — que ce soit louable ou non — pour une compagnie qui songe à se débarasser bientôt de ces actifs. Il nous semble, qu'à long terme, les intérêts de l'opération elle-même, celle des travailleurs qui, tout de même, aiment travailler, pour une entreprise qui tourne rond, et non avec des machines qu'on rafistole avec des « bouts de broche à foin », que cet intérêt dis-je serait avantagé si la transaction pouvait se compléter le plus tôt possible et si le nom du propriétaire et la prise de pouvoir du propriétaire pouvaient être connus rapidement.

Je remercie le comité de nous avoir donné la permission, en dehors des règlements, d'avoir pu faire ces quelques remarques au nom des 2,000 membres des métallos qui travaillent pour Dosco et qui, nous le souhaitons, travailleront bientôt pour Sidbec.

M. BERTRAND: M. Lajoie, si vous me le permettez, vous avez eu dans vos derniers propos une remarque qui m'a frappé — je pense qu'elle a frappé tous mes collègues aussi — lorsque vous avez dit que c'était une « cour de broche à foin ». Ces propos-là s'appliquent-ils à un ensemble ou à certaines parties de cet ensemble? Ne serait-il pas préférable que vous précisiez?

M. JOHNSON: Parliez-vous de la maintenance seulement?

M. GERIN-LAJOIE: Je parle surtout de la maintenance et je parle de l'usine de Contrecoeur. L'usage des mots « broche à foin » ils ne font pas de broche à foin à Dosco.

M. BERTRAND: On sait quel sens cela peut avoir devant l'opinion publique.

M. GERIN-LAJOIE: En fait, cela s'applique si peu que Dosco, il y a un an, a vendu son département de broche à foin. Disons qu'il s'agit pour nous d'une préoccupation.

M. BERTRAND: C'est plus sérieux que cela.

M. LESAGE: Nous avons compris que vous avez employé l'expression « broche à foin », nous voulons savoir à quoi ça s'applique. Est-ce à ce que vous appelez la maintenance, la production?

M. GERIN-LAJOIE: A la qualité et au budget de la maintenance.

M. DOZOIS: Est-ce qu'on pourrait appliquer ça à une chose qu'on veut acheter à $58 millions? Si c'est de la broche à foin, cela n'en vaut peut-être pas un million.

M. GERIN-LAJOIE: Ecoutez, nous n'en sommes pas à dire que le fonctionnement des opérations a atteint un point désastreux, que ça ne fonctionne plus. Mais il y a ce qu'on appelle la maintenance immédiate et une maintenance complète. Ce n'est pas la même chose de tenir des machines en marche et de tenir une usine en parfait état. Et nous avons, quant à nous, le sentiment que nous observons un certain relâchement dans la politique de maintenance à Contrecoeur.

M. DOZOIS: C'est plutôt l'administration que vous qualifieriez de broche à foin.

M. GERIN-LAJOIE : Je dirais plutôt un relâchement dans la qualité et les budgets affectés à la maintenance.

M. BERTRAND: Appliquez-vous vos propos, pour être encore plus précis, à ce qu'il y a là comme usine, équipement, immeubles?

M. GERIN-LAJOIE: II s'agit évidemment uniquement de l'équipement puisque les bâtisses elles-mêmes sont presque toutes quasiment neuves.

M. LESAGE: Est-ce que dans la machinerie, les laminoirs et autres, une bonne partie n'est pas neuve également?

M. GERIN-LAJOIE: Oui, exactement.

M. LESAGE: Oui, mais alors, qu'est-ce qui ne va pas dans ce que vous appelez la maintenance et l'entretien?

M. GERIN-LAJOIE: Disons que dans un atelier, quand il se brise un morceau ou qu'on a besoin d'en faire un, on peut profiter de cette occasion pour en faire deux ou trois de rechange. A ce moment-là, c'est plus facile de le faire et on a donc tout de suite des pièces de rechange s'il survient un autre bris. Si on ne fait qu'une pièce de rechange pour un morceau qui se brise, la machine continue à marcher mais comme politique de maintenance à long terme, on s'aperçoit d'un changement. Si on commande une pièce d'équipement additionnelle qui modifie et améliore un procédé de fabrication mais qu'on ne l'installe pas en disant que le présent budget ne permet pas l'installation immédiate de la machine, on sauve de l'argent durant ce mois mais, une fois l'acquisition faite, il faudra évidemment installer une machine qui a été commandée pour améliorer le processus de production.

M. JOHNSON: M. Lajoie, serait-il exact de décrire la situation de Dosco comme suit: Dosco serait, quant à l'entretien de son usine, dans la même position que quelqu'un qui a décidé de vendre sa voiture à un prix déterminé et qui n'a pas le goût de faire de grosses réparations entre le moment où c'est décidé et la livraison.

M. GERIN-LAJOIE: C'est exactement ma pensée.

M. JOHNSON: Cela ne s'applique pas quant à la qualité du nouveau laminoir.

M. GERIN-LAJOIE: D'aucune façon.

M. JOHNSON: II y a un vieux laminoir aussi.

Celui-là doit se briser plus souvent. Mais, M. Lajoie, je puis d'abord vous proposer d'éliminer le mot peut-être quant à la fin du processus et dire: « ... les $60 millions seraient versés ou imputés avec la condition expresse qu'on va se rendre jusqu'au bout du procédé pour établir un complexe intégré ».

M. LESAGE: Jusqu'au début, vous voulez dire.

M. JOHNSON: Oui. On sera jusqu'au bout. On commence par la fin. Le projet, si vous l'avez bien compris, c'est l'achat d'installations qui fonctionnent déjà, qui ont déjà des marchés de l'ordre de 350,000 tonnes, pour ensuite en arriver à établir la source d'approvisionnement d'acier.

Cela, c'est de $60 millions et c'est fait en fonction de ça. M. Gignac, tantôt, avait évoqué le désir d'expliciter sur ce point, ce qu'il fera tout à l'heure après que nous lui aurons posé des questions.

J'aimerais vous poser quelques questions. Est-ce que la parité de salaires est établie pour représenter les métallos de Stelco à Contrecoeur?

M. GERIN-LAJOIE: Oui, à Contrecoeur, à Montréal et dans le reste du pays.

M. JOHNSON: Est-ce que la parité est établie entre Stelco-Contrecoeur et Stelco-Ontario?

M. GERIN-LAJOIE: Oui, sur le plan géographique pour la même sorte d'opération, Stelco à Contrecoeur est payé au même salaire, ou les travailleurs sont payés au même salaire que les employés de Stelco à Hamilton. Il y a dans ça une légère différence de quelques cents l'heure, selon que le travailleur travaille du lundi au vendredi ou sur des équipes continues.

M. JOHNSON: Est-ce que, par ailleurs, il vous semble y avoir une parité entre les employés de Dosco et Stelco, entre eux, à Contrecoeur?

M. GERIN-LAJOIE: Non, jusqu'à maintenant, non.

M. JOHNSON: C'est ce qui est en train d'être négocié.

M. GERIN-LAJOIE: C'est ce qui est en train d'être négocié. Nous devons demander la conciliation d'ici une quinzaine de jours.

M. JOHNSON: Alors, il faudrait demander à M. Gignac si les projections ont été basées en tenant compte de l'éventuelle parité entre Dosco-Contrecoeur et Stelco-Contrecoeur et ensuite entre Dosco-Contrecoeur et Stelco-Ontario ou la parité, en somme, géographique québécoise et la parité canadienne.

M. GIGNAC: Dans les études que nous avons faites, nous avons tenu compte du fait qu'éventuellement, évidemment si nous parlons de parité de rentabilité nous pensons aussi à la parité de salaire.

M. JOHNSON: Vous ne pensez pas pouvoir échapper à ça?

M. GIGNAC: Bien nous verrons à la table des négociations, si jamais nous nous y retrouvons. Mais je crois que c'est une chose qu'il faut envisager, mais il me semble assez évident que c'est à la table des négociations que tout cela va se décider. Disons que nous n'avons pas tenu pour acquis que la rentabilité se faisait aux dépens de la main-d'oeuvre.

M. BERTRAND: Bon, très bien! M. JOHNSON: Merci.

M. LESAGE: En d'autres mots, M. Gignac, vous avez assumé, dans vos études de rentabilité, en faisant vos comparaisons avec la rentabilité actuelle de la sidérurgie en général au Canada, vous avez assumé, dis-je, la parité de salaire...

M. JOHNSON: ... Eventuelle.

M. LESAGE: Eventuelle dans les établissements, Dosco avec le reste de la sidérurgie au Canada?

M. GIGNAC: C'est exactement ça. M. LESAGE: Bon, c'est très bien.

M. JOHNSON: M. Gignac, êtes-vous du même avis que M. Gérin-Lajoie quant à l'urgence d'en arriver à une décision, pour que ne se détériorent pas le climat et les budgets d'entretien?

M. GIGNAC: Oui, je suis absolument de cet avis-là. Je crois que nous devrions faire le plus rapidement possible pour régler le problème si nous devons le régler, de telle façon que nous prenions en main la responsabilité non seu- lement de la maintenance mais aussi et surtout de certaines dépenses capitales qui devront contribuer éventuellement à améliorer les installations dont nous allons devenir propriétaires.

M. VINCENT: M. Gignac, avant de demander au maire de Bécancour...

M. LESAGE: Un instant, j'aurais une question à poser à M. Gérin-Lajoie.

M.VINCENT: D'accord!

M. LESAGE: M. Gérin-Lajoie, vous avez parlé de laisser-aller dans l'entretien, je traduis comme ça votre expression « broche à foin », le laisser-aller dans l'entretien à Contrecoeur. La production est très minime par rapport à la capacité de production de l'usine, n'est-ce pas? Est-ce qu'il y a ralentissement actuellement dans la production?

M. GERIN-LAJOIE: Il y a un ralentissement. Une bonne partie des activités d'un laminoir à Contrecoeur c'est de rouler de l'acier inoxydable qu'Atlas Steel envoyait auparavant aux Etats-Unis et qu'elle fait rouler maintenant à Contrecoeur.

Il y a aussi le roulage de ce qu'on appelle du skelp, c'est-à-dire des rubans de métal qui servent à la fabrication de tuyaux et qui sont vendus soit à Dosco, soit à Stelco, et si l'on enlevait ces activités-là, il y a un laminoir qui n'aurait plus besoin d'entretien.

M. LESAGE: La production est très très ralentie alors. Est-ce qu'il y a eu ralentissement au cours des derniers mois, des dernières semaines? A quel moment s'est fait sentir ce ralentissement dont vous parlez?

M. GERIN-LAJOIE: II est plus accentué depuis trois semaines ou un mois.

M. LESAGE: Le ralentissement est plus accentué depuis trois semaines ou un mois dans la production.

M. GERIN-LAJOIE: Dans la production. Je n'ai pas mentionné ce facteur-là au début, parce qu'il est difficile de dire si le carnet de commandes a diminué uniquement à cause de l'annonce de la transaction et puis là nous entrons dans un domaine hypothétique qu'il me semble difficile d'explorer à fond...

M. LESAGE: C'est pour ça que je l'ai mentionné.

M. GERIN-LAJOIE: ... et c'est pour ça que je n'ai mentionné que le facteur d'entretien.

M. LESAGE: Disons que ce facteur est plus économique que politique et c'est peut-être M. Gignac qui pourrait nous faire des commentaires sur les causes de ce ralentissement que vous mentionnez et dont vos membres sont témoins dans la production à Contrecoeur.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'on aurait d'autres questions à poser?

M. LESAGE: Il y a les commentaires de M. Gignac sur le ralentissement dans laproduction. Alors, si M. Gignac, comme il l'a fait tout à l'heure lorsque le premier ministre posait des questions à M. Gérin-Lajoie, voulait faire son commentaire sur le ralentissement de la production.

M. GIGNAC: D'une façon générale, M. Le-sage, les ventes, sans aller dans les détails, les ventes des produits qui sont fabriqués à Contrecoeur, correspondent à peu près aux projections qui ont été faites pour l'année en cours. Maintenant, il arrive, pour des raisons qui sont assez souvent difficiles à analyser, qu'il peut y avoir dans certains secteurs un ralentissement temporaire. Alors, il semble que dans deux ou trois produits, cette situation-là soit arrivée et qu'effectivement depuis les deux ou trois dernières semaines, particulièrement dans les tôles fines, il y a eu un certain ralentissement.

M. LESAGE: Dans quoi?

M. GIGNAC: Dans les tôles fines il y a eu un certain ralentissement, mais nous n'avons pas de chiffres. Ce serait assez difficile de vous donner les raisons de ce fait, de ces choses, mais je crois qu'il faut surtout regarder, ce qu'il est important d'établir, c'est si les ventes ou si la production correspond à ce qui a été projeté pour une année, compte tenu du fait que dans l'avenir on doive avoir un certain ralentissement, à certaines périodes, sans trop prévoir toujours à quelle période ces ralentissements-là arriveront. Dans le cas des tôles fines, ça correspondait à l'annonce, en effet, de l'offre que Sidbec faisait pour les parts de Dosco, les actions ordinaires de Dosco. Maintenant, ça peut être une coincidence mais nous n'avons pas...

M. LESAGE: Quelle est l'utilisation principale de ces tôles fines?

M. GIGNAC: Pardon?

M. LESAGE: Quelle est l'utilisation principale des tôles fines produites?

M. GIGNAC: II y en a une partie qui va au Québec et l'autre partie qui va en Ontario.

M. LESAGE: Je comprends, mais l'utilisation...

M. GIGNAC: Il y a une partie de ces tôles qui sont galvanisées, qui sont utilisées pour faire de l'acier corrugué et puis il y en a d'autres qui sont utilisées, enfin, à toutes sortes d'industries secondaires où on utilise les tôles fines.

M. LESAGE: Est-ce que c'est vendu pour l'industrie automobile?

M. GIGNAC: Pour les réfrigérateurs, les chauffe-eau, les choses comme ça.

M. LESAGE: Alors, c'est utilisé principalement dans la fabrication des, comment appelle-t-on ça, des appareils...

M. GIGNAC: Des appareils ménagers. M. LESAGE: ... ménagers.

M. GIGNAC: II y a une quantité assez grande qui va dans ce domaine-là et puis pour la construction, enfin, ça couvre à peu près presque tous les domaines. La tôle fine est un produit qui est utilisé dans à peu près tous les domaines de la construction et de la fabrication et c'est d'ailleurs pourquoi, éventuellement, on compte que ces laminoires-là sauront attirer au Québec des industries secondaires, parce que c'est la tôle fine qui peut contribuer le plus largement I développer l'industrie secondaire au Québec.

M. LESAGE: Pour mon renseignement, — j'ignore si ça intéresse les autres membres du comité — quelle est l'épaisseur maximale d'une tôle fine, ce que vous appelez la tôle fine?

M. GIGNAC: Je crois que c'est 3/16.

M. LESAGE: C'est 3/16 de pouce. Au-delà de 3/16 de pouce...

M. DOZOIS: M. Gignac...

M. LESAGE: ... on n'appelle plus cela des tôles fines.

M. GIGNAC: Non.

M. DOZOIS: ... vous avez dit qu'une partie de cette production de la tôle fine s'en allait en Ontario. Quel est le pourcentage?

M. GIGNAC: Actuellement, je crois que c'est à peu près 50-50. C'est 50% au Québec, 50% en Ontario.

M. LE PRESIDENT: M. Dozois.

M. DOZOIS: M. Gérin-Lajoie, si vous permettez, étant donné que depuis l'annonce de la proposition de M. Gignac au sujet des installations de Dosco, il y a eu diverses réactions et que certaines personnes ont utilisé l'expression que vous avez employée tout à l'heure, que Sidbec s'apprêtait I acheter une affaire de broche à foin, je voudrais bien que vous précisiez davantage l'emploi que vous avez fait de ce mot. Est-ce que l'on doit conclure que votre remarque ne s'applique pas à la valeur intrinsèque des actifs que nous achetons mais tout simplement à la façon...

UNE VOIX: D'opérer.

M. DOZOIS: ... qu'on utilise ces actifs-là?

M. GERIN-LAJOIE: Je n'allais même pas aussi loin que ça, M. le Ministre, c'était uniquement I un certain relâchement récent de l'entretien. C'est là-dessus que portait mon expression. Quand à la valeur des établissements eux-mêmes, évidemment nous ne sommes pas des experts en la matière mais, connaissant les opérations de Stelco, celles de Dosco, il nous semble qu'avec une saine administration, il n'y ait aucune raison pour que les entreprises de Dosco ne puissent pas réaliser l'objectif que vise M. Gignac, c'est-à-dire de pouvoir concurrencer avec efficacité les autres sidérurgies canadiennes dans le domaine des produits qu'elles fabriquent.

M. DOZOIS: Très bien, je vous remercie. M. LE PRESIDENT: M. Vincent.

M. VINCENT: M. Gignac, la semaine dernière, vers la fin du comité, j'ai mentionné les extraits d'une lettre du président de Sidbec, lettre qui a été lue en Chambre le 31 mars 1965, par le premier ministre du temps, M. Lesage, informant de la décision prise le 30 mars par les administrateurs de Sidbec. La décision la plus importante a été le choix d'un emplacement, c'est-à-dire Bécancour, et l'annonce du début des travaux au printemps de 1966. Et aujourd'hui, avant que nous puissions entendre les représentants de la ville de Bécancour, vous avez mentionné qu'il serait possible, pour vous, d'apporter, aujourd'hui, les décisions qui ont été prises par Sidbec le 30 mars 1965. Est-ce que vous pourriez nous donner ces décisions?

M. GIGNAC: M. Vincent, je crois que je n'ai pas d'objection dans les circonstances à vous lire un extrait du procès-verbal qui fait mention du choix de l'emplacement de Bécancour. Mais disons que je considère ça comme une façon non orthodoxe de procéder, parce que normalement ce sont des choses qui doivent rester pour le conseil d'administration.

Mais, étant donné la chaleur du sujet...

M. BERTRAND: Non, mais ça avait été rendu public par M. Filion.

M. GIGNAC: Oui, mais l'extrait, ici, officiel, si vous voulez, du livre des minutes, si vous voulez que je vous lise cet extrait-là, moi, je n'ai aucune objection. Cela pourrait peut-être éclairer un peu le sujet.

Alors, cela se lit comme suit: « Les administrateurs ont reçu une copie du rapport de la firme d'ingénieurs-conseils, Asselin, Benoît, Boucher, Ducharme et Lapointe. L'étude conduite au cours des dernières semaines, a mené à la conclusion que Bécancour est l'emplacement le plus avantageux pour l'implantation d'un complexe sidérurgique. Pour le type d'usine retenu par le rapport de rentabilité, le coût de production par tonne de produit fini, reviendrait meilleur marché à Bécancour qu'à Contrecoeur. L'étude des ingénieurs tient un compte rigoureux de tous les facteurs ayant une incidence sur le coût de revient, soit le transport des matières premières, le coût des immobilisations et le transport des produits finis. Alors que Contrecoeur présente des avantages au poste du transport des matières premières et du transport des produits finis, Bécancour s'avère nettement plus avantageux au poste des immobilisations, notamment à cause de la présence d'un roc solide en surface et de meilleures facilités portuaires. Sur proposition dûment appuyée, il est unanimement résolu de fixer le site de l'emplacement sidérurgique à Bécancour. »

Alors, c'est l'extrait de...

M. VINCENT: M. Gignac, est-ce qu'à ce moment-là, quand le conseil d'aministration a fixé définitivement le site de l'usine sidérurgique, la décision était prise de construire une usine sidérurgique?

M. GIGNAC: Non.

M. VINCENT: Donc, on fixait l'emplacement sans avoir pris de décision pour cette construction.

M. GIGNAC: II faut quand même trouver un emplacement pour pouvoir étudier le sol, pour pouvoir faire les coûts de construction, etc, calculer le coût du transport des matériaux, le coût de livraison au marché, alors c'est à partir du moment où on étudie cet emplacement-là, je pense bien, qu'il faut annoncer qu'on l'étudie. Sans cela, ça fait de la spéculation, j'imagine. J'ai l'impression que c'est pour cela, que cela a été annoncé. C'est tout simplement pour éviter les rumeurs.

M. VINCENT: Mais est-ce qu'on a quand même informé les administrateurs des villes qui se sont fusionnées, à qui on demandait tout de suite, de donner des services, que ce serait l'emplacement seulement au cas où une décision serait prise pour la construction?

M. GIGNAC: Pour autant que je sache, M. Vincent, jamais Sidbec a été mise au courant de l'agglomération qu'on a faite des villes aux alentours du village de Bécancour. On n'a absolument rien eu à faire avec cela.

M. VINCENT: II faut quand même être juste et équitable envers la population de Bécancour. C'est que le président de Sidbec a eu l'occasion de la rencontrer, de lui demander d'organiser ses services, de se préparer même en vue d'une population de 50,000 en l'an 2000 et ces gens sont partis sous la foi d'un discours d'affirmation du président de Sidbec du temps.

M. GIGNAC: Moi, M. Vincent, je ne peux pas prendre sous ma responsabilité les déclarations du président du temps.

M. BERTRAND: Dites-vous, M. Gignac, qu'il n'y avait à ce moment-là, d'après ce que vous pouvez retracer dans les livres, aucun lien, aucune coordination entre les activités que poursuivaient la Société générale de financement, quant à l'acquisition des terrains, Sidbec et le ministère des Affaires municipales?

M. GIGNAC: Pas à ma connaissance. Je n'ai jamais vu de rapport à cet effet-là. C'est-à-dire qu'il y avait une certaine coordination entre la SGF et Sidbec parce qu'à ce moment-là, c'est la SGF qui devait être le véhicule du gouvernement pour investir de l'argent dans Sidbec.

M. LESAGE: M. Filion était à la fois président de Sidbec et directeur général de la SGF?

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: Au moment où il m'a écrit la lettre du 31 mars 1965, il disait ceci: « Je crois devoir aussi vous informer que f ai accepté la présidence de Sidbec. Je continuerai à assumer temporairement la direction générale de la SGF, en attendant que les administrateurs m'ait désigné un successeur. »

II m'envoyait cette lettre comme directeur général de la SGF. L'original de cette lettre est au dossier que j'ai remis au premier ministre. Elle est écrite, d'après la copie dactylographiée que j'ai ici sur du papier de la Société générale de financement du Québec et M. Filion signait comme directeur général de la SGF.

Mais dans la plus grande partie de sa lettre, il parlait franchement comme président de Sidbec, puisqu'il faisait rapport dans des termes presque identiques au procès-verbal que vous avez lu, des raisons du choix de Bécancour.

M. JOHNSON: Par ailleurs, M. le Président, dans cette lettre que le chef de l'Opposition connaît certainement, ou dans des notes qu'il m'a transmises dans le dossier, il y aura deux ans bientôt, — c'est le 5 juin aujourd'hui —...

M. BERTRAND: C'est un événement heureux et on félicite celui qui fut vainqueur lors de la grande constestation du 5 juin 1966. C'est le premier ministre qui a été vainqueur.

M. LESAGE: Je crois que c'était le 14 ou le 16 que j'ai remis les documents. C'est donc dire qu'après l'événement heureux du 5 juin pour mes amis d'en face, moins heureux pour nous, celui qui assumait encore la fonction de premier ministre dans l'intérim, a travallé jour et nuit pour préparer et classer, avec ses principaux assistants, toute la documentation qu'il fallait remettre au premier ministre désigné, contrairement à l'habitude qui avait malheureusement été contractée depuis des décennies dans le Québec, de ne transmettre aucun document.

M. JOHNSON: Mais les gouvernements changeaient si peu souvent.

M. BERTRAND: Il y avait une raison majeure.

M. LESAGE: Ce n'était pas une raison.

M. JOHNSON: Je dois dire que nous sommes déjà recyclés tous les deux, je l'espère. Quant à moi, je le suis, j'avais même oublié que c'était aujourd'hui l'anniversaire.

M. LESAGE: J'ai déjà commencé à me re-recycler. J'aime autant en aviser le premier ministre.

M. JOHNSON: Il reste que dans ses notes, dès le mois de janvier 1966, M. Filion protestait contre le fait que le gouvernement n'avait pas tenu ses engagements, c'est-à-dire, si je comprends bien le contexte, un engagement d'investir $25 millions pour faire démarrer l'affaire. Engagement pris depuis un an, d'après M. Filion.

M. LESAGE: Voudriez-vous me montrer la lettre? Je n'ai pas gardé cela.

M. JOHNSON: Je n'ai qu'une copie, c'est ce qui m'a été remis.

M. LESAGE: Je vais vous la remettre. UNE VOIX: Va-t-il falloir payer?

M. LESAGE: Je vais vous la remettre tout de suite.

M. JOHNSON: Ce n'est pas dans celle-là.

M. VINCENT: Pendant que le chef de l'Opposition prendra connaissance de la lettre, je voudrais poser une question supplémentaire à M. Gignac. Le site a été choisi, la décision finale n'avait pas été prise pour la construction d'une aciérie ou d'une sidérurgie. Mais dans la même lettre de M. Filion, président de Sidbec, lue par le premier ministre du temps, M. Lesage, en Chambre, celui-ci dit: « Les cadres de Sidbec seront complétés incessamment. Le groupe d'ingineering sera formé d'ici quelques mois et les travaux, sur le terrain, débuteront au printemps 1966. » Donc, c'est simplement pour confirmer la bonne foi de la population, des édiles municipaux qui, voyant cette déclaration-là...

M. COURCY: Si le 5 juin n'était pas arrivé.

M. VINCENT: Le député d'Abitibi-Ouest dit: « Si le 5 juin n'était pas arrivé. » Bon, remarquez cela, si le 5 juin n'était pas arrivé. M. Gignac est-ce qu'il y a eu quelque chose de changé dans les décisions, dans le travail de Sidbec à cause du 5 juin 1966?

M. GIGNAC: Si vous parlez pour autant que je suis concerné, il n'y a eu aucun changement.

M. JOHNSON: Si le ministre de l'Agriculture me le permet, je référais — pour éclairer les recherches de l'Opposition — à une note du 12 janvier de M. Filion, adressée au premier ministre et dont j'ai eu copie du chef de l'Opposition — 12 janvier 1966 — dans laquelle M. Filion reprochait au gouvernement de n'avoir pas donné suite à un engagement. Cet engagement a été pris dans une déclaration conjointe du premier ministre M. Lesage et du président de la Société générale de financement, M. Filion, en date du 19 octobre 1964. Le gouvernement prenant un engagement de souscrire $25 millions à la nouvelle société par le truchement de la Société générale de financement, dont $20 millions sous forme d'actions ordinaires à dividendes différés, et $5 millions sous forme d'actions ordinaires. C'était un engagement pris en octobre 1964. Et au mois de janvier 1966, M. Filion disait: Je n'ai pas votre appui, vous ne remplissez pas vos promesses, je commence à en avoir plein le dos.

On sait ce qui est arrivé par la suite. Choisir entre le beurre et le canon et tout ce que vous voulez. Mais pour le moment, je ne voudrais pas...

M. LESAGE: M. le Président, je voudrais bien préciser que c'est une note qui m'avait été envoyée par M. Filion, le 12 janvier 1966, alors qu'il était encore en pourparlers avec des intérêts internationaux et que la partie de cette note à laquelle réfère le premier ministre est le chapitre 8, intitulé: Un cas personnel. Il faut lire ce qu'a lu le premier ministre en regard du premier paragraphe de la page 18 qui précède et qui se lit comme suit: — nous pensons bien qu'à ce moment-là, les décisions d'ingénieurs, quant à la consistance technique de l'usine, n'étaient pas prises — « Après une année d'études, de travail, de visites, de consultations, j'ai la conviction profonde que Sidbec ne peut réussir sans l'appui entier de l'Etat et sans l'apport financier, technique et commercial du secteur privé. Même en réunissant

les deux, il faudra mettre double proportion de travail et d'énergie. » Et voici la phrase-clé: « Une sidérurgie entièrement publique n'a pas de sens dans le contexte nord-américain, à moins que le Québec ne s'achemine vers un état séparé ayant des frontières et un régime douanier propres. Une sidérurgie entièrement privée, les efforts de Dosco sont là pour en témoigner, ne se fera pas avant une génération ou davantage. Seul un effort concerté du gouvernement et du capital privé peut mener le projet à bonne fin. » Et le premier ministre a dans ses dossiers les réponses que j'ai adressées à M. Filion au cours de cette période. M. Filion m'a écrit une lettre le 13 janvier, si on veut dévoiler tout le dossier, on peut le faire. On pourra en même temps citer une note que M. Cyrille Dufresne avait envoyée à M. Filion le même jour et étudier les différences entre les deux. On verra alors dans quelle situation se trouvait le gouvernement. Maintenant, il appartient au premier ministre de décider s'il y a lieu de rendre publics ces documents. Mais, en toute justice, il doit savoir dans quel contexte le gouvernement était placé le 12 et le 13 janvier et ce qui se passait à Sidbec même, et bien se rappeler qu'en ce qui concerne la consistance de l'usine, la décision n'avait pas été prise ni par les ingénieurs ni par Sidbec.

M. VINCENT: La décision n'avait pas été prise mais on annonçait néanmoins le début des travaux pour 1966.

M. LESAGE: Pardon, c'est en 1965 que le début des travaux a été annoncé par M. Filion pour le printemps 1966.

M. VINCENT: Et non par le gouvernement.

M. LESAGE: Non par le gouvernement. Par M. Filion, dans sa lettre du 31 mars 1965. M. Filion calculait alors qu'au printemps 1966, Sidbec aurait pu, à ce moment-là, prendre les décisions quant à la consistance de l'usine en regard des marchés qu'il aurait obtenus: marchés internationaux dans son esprit, puisque ses conversations, tout au cours de 1965, ont été tenues avec des Français, des Allemands, des Italiens et des Belges pour l'écoulement des produits d'une sidérurgie considérable, axée vers le marché d'exportation, et construite à Bécancour.

M. VINCENT: Mais à ce moment-là, dans l'esprit des administrateurs de Sidbec, quelle était la capacité de l'usine qu'on devait construire à Bécancour?

M. LESAGE: On devait commencer avec une capacité d'au moins un million de tonnes. Parce que la coulée continue et les fours électriques ne s'étaient pas avérés possibles, on avait choisi les hauts fourneaux conventionnels et on disait que le seuil, le palier de la rentabilité, était, si mon souvenir est bon, de 1 million de tonnes. C'est ce que M. Filion me disait. Alors il fallait trouver les marchés pour 1 million de tonnes.

M. VINCENT: Il fallait trouver les marchés extérieurs pour 1 million de tonnes.

M. LESAGE: Il fallait trouver les marchés pour 1 million de tonnes y compris l'exportation, et cela pour le début en vue d'une production éventuelle, je ne le sais pas. M. Dufresne pourrait me dire, de combien...? Trois millions, quatre millions?

M. JOHNSON: Deux millions.

M. LESAGE: Pardon, M. Dufresne? vous avez vécu presque exclusivement ce problème depuis quelques années, pouvez-vous nous dire ce qui s'est passé à ce moment-là?

M. DUFRESNE: Le projet initial que vous venez de décrire au seuil de rentabilité de 1 million de tonnes pouvait se développer assez rapidement à 2 millions de tonne.

M. LESAGE: Deux millions de tonnes.

M. DUFRESNE: On avait également indiqué que si, 20 ans ou 25 ans plus tard, l'industrie s'était développée, elle aurait facilement pu augmenter sa production à 4 millions de tonnes. C'est-à-dire que tout était prévu en fonction d'un développement continu dans le temps et elle aurait éventuellement atteint cette production, avec les années, avec de très longues années.

M. LESAGE: C'est dans ce contexte-là, n'est-ce pas, que Sidbec, son président, ses administrateurs, ses directeurs, comme vous, M. Dufresne, avez travaillé au cours de l'année 1965?

M. DUFRESNE: En 1965 et 1966.

M. LESAGE: Et 1966, dans le contexte d'une très grande usine axée sur l'exportation, n'est-ce pas?

M. DUFRESNE: Pour une bonne partie axée sur l'exportation.

M. LESAGE: Une grande partie axée sur l'exportation.

M. VINCENT:. Etait-ce ce que recommandait le comité de la sidérurgie en 1964, une très grande usine?

M. GIGNAC: Je vais demander à M. Bélanger de répondre à cette question.

M. BELANGER: Je pense que M. Dufresne pourrait répondre également à cette question. Le projet du comité de sidérurgie envisageait une usine qui pourrait se rendre le plus rapidement possible à 1 million de tonnes mais qui ne commençait pas avec une telle production.

M. LESAGE: C'est ça!

M. VINCENT: Y a-t-il eu des relations constantes entre le comité de la sidérurgie et Sid-bec de 1964 à 1966?

M. BELANGER: Non. Le comité de sidérurgie a été dissout après avoir remis son rapport. Le directeur technique du comité de sidérurgie, M. Dufresne, est devenu employé de Sidbec, les dossiers du comité de sidérurgie ont été transférés à Sidbec. Il n'y a pas eu de liaison organique entre l'un et l'autre, puisque l'un est disparu lorsque l'autre a été créé.

M. VINCENT: Lorsque le comité de sidérurgie a recommandé Bécancour, était-ce dans le contexte d'une usine commençant avec 400,000 ou 500,000 tonnes et allant jusqu'à 1 million de tonnes?

M. BELANGER: Dans l'ordre de 600 millions à 1 million de tonnes.

M. LESAGE: Vous voulez dire 600,000 tonnes.

M. BELANGER: Oui, de 600,000 tonnes. Si on veut plutôt avoir un point de repère, les chiffres d'investissements envisagés par le comité de sidérurgie étaient de l'ordre de $200 millions à $250 millions...

M. LESAGE: $228 millions.

M. BELANGER: Ce qui évidemment se traduisaient par une certaine capacité qui était détaillée dans le rapport. C'est à partir de ce projet que Bécancour était considéré comme un endroit désirable pour un nouveau projet.

M. JOHNSON: M. le Président, j'ai référé à ce document tout simplement pour rappeler qu'il y a eu un engagement par une déclaration publique en 1964, ce qui donnait lieu aux gens de Bécancour d'espérer qu'il y aurait une sidérurgie, puisqu'on parlait, en octobre 1964, dans une déclaration conjointe, publique, d'engagement, d'investissement de $25 millions. Ce qui, dans le temps, a renforcé évidemment l'espoir des gens de Bécancour. Je n'aurais pas lu d'autres extraits, mais le chef de l'Opposition s'était permis d'en lire, voici juste une phrase qui explique peut-être le climat dans lequel ce problème s'est joué. M. Filion disait: « Ajoutons la dernière sortie de M. Kierans qui menace les Américains de société d'Etat s'ils refusent de nous prêter les fonds dont nous avons besoin. Dans un tel climat psychologique et politique, bâtir Sidbec contre l'hostilité d'une partie du gouvernement et l'indifférence de l'autre et contre la suspicion du capital privé devient une impossibilité ». C'était en quelque sorte la conclusion de M. Filion au mois de janvier.

M. LESAGE: Oui, mais j'avais reçu M. Filion à la suite de ce rapport et il a continué son travail, comme pourra vous le dire M. Dufresne, et comme pourra le confirmer M. Bélanger, qui était administrateur de Sidbec à ce moment-là.

M. BERTRAND: Des canons ce matin là...

M. JOHNSON: Ce matin-là ils ont utilisé des canons plutôt que du beurre! A tout événement, M. le maire aurait peut-être des questions à poser.

M. LESAGE: M. le Président, le premier ministre vient de faire allusion à ma déclaration du 19 octobre 1964, est-ce qu'il me serait permis d'en lire un extrait puisque c'était une déclaration publique? Voici, des extraits de la déclaration quant à l'engagement financier du gouvernement: « Le gouvernement entend donner à la nouvelle entreprise son appui entier. Il a confiance que le public en fera autant lorsqu'il sera appelé à souscrire. » C'était une entreprise mixte, le 19 octobre 1964. — « Comme première étape du financement, la Société générale de financement souscrira $25 millions — pas le gouvernement — au fonds social de la nouvelle compagnie. De ce montant, $20 millions seront fournis par le gouvernement sous forme de souscription, d'actions à dividendes différés de la SGF.

M. JOHNSON: C'est ça.

M. LESAGE: Celle-ci fournira le reste en utilisant à cette fin les $5 millions déjà investis par le gouvernement en actions à dividendes différés » et par conséquent nous nous engagions à fournir $20 millions additionnels au moment, évidemment, où Sidbec en aurait besoin. Or, au mois de janvier 1966 — je pense que M. Dufresne peut confirmer ce que je dis là — le démarrage de Sidbec était impossible, parce qu'au point de vue technique et au point de vue du marché, l'affaire n'était pas définitive. C'est bien ça, M. Dufresne?

M. DUFRESNE: Les études techniques n'étaient pas complétées à ce moment-là.

M. LESAGE: Ce n'était pas complété. M. DUFRESNE: Non, non.

M. LESAGE: Au moment où M. Filion m'écrivait cette lettre, me parlant de la souscription gouvernementale, les études techniques, permettant le début des travaux, n'étaient même pas complétées.

M. VINCENT: Comme l'affirmait le député d'Abitibi-Ouest, ce n'est pas à cause du 5 juin.

M. LESAGE: Bien voyons donc.

M. VINCENT: Ce n'est pas comme l'affirmait le député d'Abitibi-Ouest

M. LESAGE: Je ne comprends pas très bien, mais M. Gignac, la semaine dernière, a déclaré: Dès les mois de mai, juin, juillet et août 1966 et M. Gignac avait assumé ses fonctions de président de Sidbec au mois de juin 1966...

M. JOHNSON: Non, au mois de mai.

M. LESAGE: ... au mois de mai 1966, je l'ai annoncé le 25 mai, M. Gignac disait la semaine dernière, et je cite la page 38 des Débats rapportant les discussions ici au comité des régies gouvernementales: « Dès les mois de mai, juin, juillet et août 1966, nous avons essayé de raffiner le rapport qui avait été préparé par les ingénieurs-conseils et de déterminer quel était réellement le strict minimum qu'il fallait dépenser pour établir un complexe sidérurgique intégré à Bécancour. » — C'était encore à Bécancour à ce moment-là.

M. GIGNAC: Oui, d'accord.

M. LESAGE: « Dans des notions de financement plus acceptables. » Alors, je voulais citer ça au ministre de l'Agriculture, pour qu'il prenne bien connaissance du fait que, dans l'esprit des administrateurs de Sidbec, même en août 1966, la décision à Sidbec était encore l'établissement de la sidérurgie intégrée à Bécancour. Nous avions perdu le pouvoir en juin 1966. Je continue de lire ce que M. Gignac a dit: « c'est à peu près vers ce temps-là. Malgré le fait que nous ayons pu abaisser le coût du projet, il n'en reste pas moins, à notre avis, que les sommes à être engagées sont encore très énormes. » Je continue à citer M. Gignac qui déclarait la semaine dernière: « II nous est apparu à ce moment-là qu'il fallait penser à voir le problème sous un autre aspect. C'est à peu près vers ce temps-là, vers septembre ou octobre 1966, que f ai eu l'occasion d'entrer en communication avec Dosco et du même coup demander à l'équipe de Sidbec de préparer un autre projet d'allure beaucoup plus modeste. Les deux ont été menés de front pendant un an. Le projet d'allure beaucoup plus modeste est prêt. En fait, nous l'avons en filière. Il n'a jamais été présenté, parce que nous avons réalisé, à un moment donné, qu'il fallait donner une priorité à la possibilité de prendre certains actifs de Dosco à cause des avantages énormes que nous pouvions y voir à ce moment-là, de là les transactions qui ont eu lieu. »

Maintenant, M. le Président, c'était justement la principale question que je voulais poser à M. Gignac, aujourd'hui. Ce projet plus modeste pour Bécancour qui est en filière, ne croit-il pas qu'il serait d'intérêt que les membres du comité en prennent connaissance, pour pouvoir comparer la rentabilité de ce projet avec la rentabilité de l'achat des actifs de Dosco, rentabilité qu'on nous a expliquée en détail.

M. JOHNSON: Voici, M. le Président. Deux points d'abord. M. Gaudet s'est déplacé aujourd'hui. Nous aimerions bien lui donner une chance de poser des questions.

M. LESAGE: J'arrive justement au point qui l'intéresse.

M. JOHNSON: Oui, la transition est bien faite.

M. LESAGE: Je pense que je suis arrivé à ce qui l'intéresse.

M. JOHNSON: Nous, députés, serons ici dans d'autres circonstances, Quant à discuter

de l'autre projet plus modeste qui serait situé à Bécancour, projet que le président et le conseil d'administration de Sidbec ont mis de côté pour le moment, en tentant de réaliser la transaction Dosco, je pense que nous n'avons aucune objection à en parler. Nous ne le connaissons pas en détail, le gouvernement ne le connaît pas dans le détail. Le gouvernement n'a pas pris de décision là-dessus et il faut bien situer le problème, c'est que nous avons fait confiance à l'équipe de Sidbec, qui est formée sous un nom ou sous un autre, avec quelques additions ou soustractions depuis 1961. Nous lui faisons confiance et elle nous a dit: Nous, nous préférons tenter le marché ou l'entente avec Dosco, ce qui n'exclut pas, je le répète, la possibilité de discuter ici l'autre projet.

M. LESAGE: Ah! je le sais ça, oui.

M. JOHNSON: Je pense que toute la population serait intéressée, et particulièrement le maire de Bécancour et tout son comité.

M. LE PRESIDENT: M. le Maire, avez-vous des questions?

M. GAUDET: M. le Premier Ministre, je vous remercie de l'invitation que vous nous avez faite de pouvoir assister à ce comité qui est pour nous certainement fructueux, et nous donner l'occasion, également, de dire quelques mots.

Nous avons formé notre comité à la hâte, hier, parce que le temps manquait et, en retournant chez nous, en dehors des activités de la municipalité, nous devons aussi travailler pour subvenir aux besoins de notre famille. C'est la raison pour laquelle nous avons pris des échevins et invité les maires qui ont bien voulu venir. Après moi, si vous nous donnez la permission d'entendre notre urbaniste, et comme notre comptable n'a pas pu ce matin venir au rendez-vous, je vous demanderais — nous en avons pris un ici à Québec, il s'agit de M. Ro-chette — de bien vouloir nous laisser dire quelques mots.

J'ai bien compris votre rapport, plutôt je l'ai bien entendu sur les chiffres donnés sur votre tableau et sur la rentabilité de Dosco. A notre point de vue, nous nous demandons s'il ne serait pas mieux de payer un peu plus pour une construction neuve, car on semble douter du bon état des industries dont on a parlé ce matin.

Chez nous, pour se replacer un peu dans le contexte, la plupart de nos gens vivent de l'agriculture et comme un agriculteur se base tou- jours avec le gros bon sens lorsque vient le temps d'acheter une machine, un tracteur ou quelque chose de semblable, plus souvent il aime mieux payer un peu plus pour avoir une machine neuve que pour acheter une machine d'occasion.

Je remarque aussi — on fait tout simplement commencer à en parler — que nous ignorions pour le début de l'assemblée, les possibilités complètes d'établir le complexe sidérurgique à Bécancour. On a parlé de la rentabilité de l'autre, mais on n'a pas parlé de la rentabilité de la nôtre. Comme je ne voudrais pas parler inutilement et trop longtemps, comme vous nous avez dit hier qu'il n'y avait encore rien de décidé en ce qui a trait à l'établissement du complexe sidérurgique à Bécancour, je vous demanderais une faveur. Si vous voulez nous donner votre gâteau de deuxième anniversaire de la ville de Bécancour et en incluant la sidérurgie, complexe intégré, nous en serions bien reconnaissants. Je vous remercie.

M. JOHNSON: Mais vous pourriez poser des questions à M. Gignac, si vous voulez.

M. BERTRAND: Si vous avez des questions.

M. JOHNSON: Il est préparé à vous répondre sur les raisons pour lesquelles il recommande, lui et son conseil d'administration et tout son groupe, Dosco plutôt que l'implantation à Bécancour, d'un complexe en commençant soit par un laminoir pour ensuite en arriver à une fonderie ou à une usine de transformation ou soit en débutant par une usine de transformation.

M. Gignac est parfaitement préparé à répondre à toutes vos questions dans ce domaine.

M. GAUDET: C'est un peu ces questions-là que nous nous sommes posées chez nous aussi. D'après les lettres que nous avons pu entendre lire ce matin, en autant que nous ne prenons que les consonances qui font notre affaire, nous avions toujours l'impression, comme au début ici, lorsqu'on a rencontré M. Dufresne à quelques reprises, et M. Filion également, que l'on construisait quelque chose à Bécancour.

Au début, c'était une grosse affaire et après les chances ont un peu diminué, mais nous n'avions jamais entendu dire qu'il n'y aurait rien d'installé à Bécancour. C'est cette raison surtout que nous aimerions connaître. Pourquoi se dirige-t-on plutôt vers l'achat de Dosco que vers la construction dans notre région?

M. JOHNSON: Alors, M. Gaudet, même si nous n'avions pas le temps ce matin, d'épuiser le sujet, ou bien le comité siégera en d'autres circonstances, ou bien, si M. Gignac est d'accord, vous pourriez, vous et votre comité avoir une entrevue avec les gens de Sidbec, pour poser amplement toutes les questions que vous voudrez. Ce qui n'exclut pas, pour nous, la possibilité de poser nos questions. Je veux que cela soit bien entendu, nous ne voulons pas bâillonner le comité, au contraire. Mais il y a peut-être une foule de détails que les gens concernés plus directement aimeraient obtenir. Quant à moi, je n'ai pas d'objection, si les gens de Sidbec qui ont quand même une certaine autonomie, veulent bien le faire.

M. LESAGE: Est-ce que M. le maire Gaudet ne pourrait pas donner une liste des principales questions qu'il voudrait poser à M. Gignac, afin que ce dernier se prépare, s'il a besoin de préparation, ce que j'ignore...

M. GAUDET: S'il n'en a pas besoin, moi, j'en aurais besoin. Parce que à brûle-pourpoint, nous avons toutes les idées dans la tête, mais, au fur et à mesure, j'aurais peur de vouloir poser des questions et de les omettre. Si vous nous le permettez, lors d'une prochaine rencontre — si vous avez l'obligeance de nous inviter comme vous venez de le faire d'ailleurs — il sera davantage possible pour nous de poser des questions plus spécifiques et de tourner moins autour du sujet. Je pense bien que, pour gagner du temps, à tout le monde, le comité pourra venir avec des questions tout à fait spécifiques, pour avoir des réponses.

M. VINCENT: D'accord. C'est parfait, ça.

M. GAUDET: Si vous le permettez, M. Leblanc, notre urbaniste aimerait bien vous poser quelques questions avant de terminer.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. JOHNSON: M. Leblanc.

M. LEBLANC: Messieurs du comité, avant de poser ma question, j'aimerais faire un parallèle avec ce que M. Lesage a dit tout à l'heure, dans le sens que le gouvernement, avant l'élection de juin, avait toujours coopéré, avait toujours travaillé de pair, de façon très intime avec Sidbec, à ce comité interministériel, que le ministère des Affaires municipales avait établi.

M. JOHNSON: Pardon!

M. LEBLANC: C'est donc une action continue entre les autorités de Sidbec et les organismes intéressés et la ville de Bécancour également, pour la planification en vue de l'implantation d'une sidérurgie à Bécancour.

Alors, maintenant, j'aborde ma question. Elle se présente sous forme de trois questions qui peuvent paraître dès l'abord, futiles mais qui, à mon avis, sont très importantes. Ces trois questions sont celles-ci. Pourquoi une sidérurgie? Quel type de sidérurgie devons-nous avoir ici? Et où l'implanter?

Alors, à la première question, évidemment une sidérurgie s'Impose dans une économie telle que la nôtre, au même titre que les réseaux routiers, que les axes de communications, les développements des ressources naturelles.

A la deuxième question, quel type de sidérurgie devons-nous avoir? J'ai été bien heureux de l'entendre hier, parce que c'est toujours cela que j'ai pensé. Il doit s'agir d'une industrie absolument intégrée, c'est-à-dire une industrie qui parte de la transformation du minerai et qui aille jusqu'à la transformation des produits finis, par des usines connexes. C'est bien entendu.

A la troisième question, à savoir où implanter la sidérurgie c'est en fait la question épineuse à l'ordre du jour.

A mon avis, dans une économie concertée comme celle qui nous occupe actuellement, dans une économie nationale, en l'occurence provinciale, l'implantation d'une sidérurgie doit tenir compte de tous les autres facteurs, c'est-à-dire des axes de circulation, de la main-d'oeuvre et de la production secondaire. Enfin, je sais que vous êtes très pressés, et sans insister davantage sur ces points-là, il demeure un fait quand même qui a été mentionné hier à savoir que l'Industrie sidérurgique devait être absolument intégrée. D'autre part, l'industrie sidérurgique doit faire partie intégrante d'une planification économique concertée.

Ceci étant admis au départ, je pose une question à qui de droit, à celui qui peut répondre. C'est qu'on a parlé tout à l'heure de rentabilité. Cette rentabilité à mon avis part d'une mauvaise donnée. Dans le sens, dans l'optique des deux considérations dont nous venons de parler, est-il possible de considérer une rentabilité qui ne soit qu'une rentabilité financière de la firme elle-même, alors que la rentabilité doit s'établir nécessairement sur la raison d'être de toutes les implications de cette industrie sidérurgique?

Je sais pertinemment que jamais une étude de rentabilité n'a été faite concernant tous les effets de la sidérurgie. Et à mon sens, ceci constitue une erreur. La rentabilité a toujours été étudiée dès le départ. Et j'ai été, dès le départ, informé du problème. Depuis 1964, je travaille à la planification concernant la sidérurgie à Bécancour. Le comité n'a jamais étudié la rentabilité du point de vue global à l'échelle provinciale.

Hier, M. le Premier Ministre, vous disiez que Bécancour ne devait pas agir égoïstement et penser que la sidérurgie devait venir chez elle, mais qu'au contraire on devait tenir compte du point de vue de toute la province. Justement, à cet effet, il me semble qu'une étude de rentabilité ne peut pas exister concernant la sidérurgie sans qu'une étude de rentabilité soit nécessairement une étude de rentabilité globale.

Alors, je m'adresse à M. Gignac, ou à celui qui pourra répondre à cette question. Une étude de rentabilité concernant tous les aspects de la sidérurgie et de ses répercussions sur la main-d'oeuvre, etc., a-t-elle été faite? Sinon, est-il possible de juger de l'emplacement d'une sidérurgie en parlant seulement de la rentabilité des opérations de la firme elle-même?

M. LE PRESIDENT: M. Gignac.

M. JOHNSON: M. Gignac, s'il y a des aspects de politique générale, je n'ai pas d'objection à répondre moi-même.

M. GIGNAC: Est-ce que vous préférez répondre d'abord?

M. JOHNSON: M. Leblanc a fait des affirmations que je ne suis pas en mesure de confirmer ni d'infirmer. Entre autres, celle de la collaboration continue entre Sidbec et Bécancour jusqu'à votre arrivée. Si j'ai bien compris, c'est ce que cela voulait dire. Avant que vous n'arriviez, on collaborait beaucoup avec Bécancour, Et deuxièmement, M. Leblanc pose le problème, en termes très généraux et en termes bien placés à part cela, d'une étude de rentabilité qui ne serait pas seulement économique pour une industrie donnée, mais également de rentabilité sociale, de rentabilité d'aménagement régional et tout ce que vous voulez.

Si vous me permettez M. Gignac, je vais répondre toute de suite à cette question. Evidemment, c'est la responsabilité du gouvernement qui doit, dans ce domaine, prendre les mesures nécessaires. Deuxièmement, je dirai tout de suite le fond de ma pensée, la création d'emplois, de « jobs » à Bécancour n'est pas restreinte uniquement à l'implantation d'une aciérie. Il peut y avoir beaucoup plus de postes, en moins de temps à Bécancour, autrement que par l'implantation d'une sidérurgie. Alors, il n'y a donc pas de dogme là-dedans à l'effet que ce soit une sidérurgie plutôt qu'une autre source d'emplois à Bécancour.

Je ne blâme pas les gens de Bécancour. Ils ont toutes les raisons au monde d'espérer l'avoir chez eux, ça fait des années. Alors, le gouvernement devra prendre ses responsabilités dans ce domaine et expliquer à la Chambre et au public pourquoi il ne le fera pas à Bécancour, si cela ne se fait pas à Bécancour. Mais laissez-moi vous dire très simplement que n'importe quel gouvernement peut décider de l'implantation d'une sidérurgie d'un ou de deux millions de tonnes basées sur l'exportation et peut la maintenir ouverte à une seule et unique condition, c'est qu'il prenne $10, $15, $20, $30, $50 millions par année pour en payer le déficit. Alors, est-ce que cet argent ne serait pas mieux placé, distribué dans la province, pour d'autres industries, plutôt que concentré sur un seul projet qui pourrait devenir évidemment un tonneau de Danaïdes. C'est là le problème du gouvernement. Les priorités sociales ne s'établissent pas seulement en fonction d'une ville, fut-elle la plus sympathique, celle qui avait le plus grand espoir d'avoir la sidérurgie, mais en fonction des besoins de toute la province.

Alors, sur la rentabilité, M. Gignac?

M. GIGNAC: Si vous me le permettez, M. le Premier Ministre, je vais d'abord parler des échanges qu'il y a eus, semble-t-il, entre la ville de Bécancour et Sidbec, par le truchement du ministère des Affaires municipales, je crois. Il y aurait eu trois réunions qui ont sûrement dû se tenir avant mon entrée en fonction, c'est-à-dire avant le 25 mai 1966, et à la suite desquelles, en autant que nous le savons, il n'y eut aucune décision de principe de prise, pour autant que Sidbec est concernée. J'ai lu, dès mon arrivée en fonction, toutes les minutes, les procès-verbaux des assemblées depuis le début jusqu'à ma venue à Sidbec et dans aucun de ces procès-verbaux, je n'ai pu déceler la moindre allusion aux discussions ou aux prises de position du conseil d'administration concernant le projet de la ville de Bécancour ou les projets de la future ville de Bécancour.

Pour ce qui est de la rentabilité, comme industriel et comme président de Sidbec secondé par un conseil d'administration composé non d'hommes d'affaires avec des oeillères

mais qui volent les problèmes dans le sens le plus large du mot, je crois que ce serait assez difficile, même pour des raisons sociales, de faire accepter par un conseil d'administration un projet de sidérurgie qui, à priori, au départ, n'est pas rentable. A mon opinion personnelle, je serai absolument contre. Mais le problème comme tel ne s'est jamais posé au conseil d'administration, puisque celui-ci a toujours essayé d'établir la rentabilité financière de la sidérurgie. A partir du moment où l'on produit une tonne d'acier, il faut la vendre. On ne peut la stocker et je pense que ce serait plutôt déprimant pour un conseil d'administration et aussi pour les a-gents de la compagnie, d'avoir une société productrice qui ferait d'une année à l'autre des déficits à cause des contraintes sociales.

D'autre part, une société comme Sidbec, si elle pouvait établir d'une façon ou d'une autre un projet rentable au point de vue financier, devient à ce moment-là, je crois, une espèce de bougie d'allumage pour la création d'autres industries qui, elles, en se créant, contribuent à développer l'entourage ou la société du Québec d'une façon générale.

Un des avantages du projet Dosco sur tout autre projet jusqu'à aujourd'hui, c'est que justement nous ne partons pas de rien. Nous partons avec un marché établi et, en travaillant dur et en développant l'usine, en intégrant les usines de Dosco, nous risquons éventuellement de créer un « cash flow » intéressant qui nous permettra à ce moment-là d'être beaucoup plus à l'aise pour contribuer, peut-être, au développement de l'industrie secondaire qui est un des buts de l'implantation d'un complexe sidérurgique au Québec.

Il y a un mot que j'ai retenu, un mot que M. le premier ministre m'a mentionné un jour où nous discutions de ces problèmes-là. J'espère qu'il n'aura pas d'objection à ce que Je le mentionne aujourd'hui mais ça m'a frappé. Nous parlions de sidérurgie et, alors que je lui demandais certaines opinions, il m'a dit à peu près textuellement: Moi, dans cette chose-là, je crois à la vérité économique. Et j'ai trouvé que cela avait beaucoup de sens. Alors moi aussi, je crois à la vérité économique et ce n'est pas en faisant des déficits ou en étant extrêmement original, que nous allons contribuer au développement de l'industrie au Québec. C'est en faisant des profits et en en ayant assez pour justement être capable de mettre à la disposition ou du moins aider le développement de l'industrie secondaire éventuellement.

Avec Dosco, nous y parviendrons probablement d'ici sept ou huit ans. Avec un départ modeste nous en avons au moins pour vingt ans. Je ne dis pas que ce n'est pas rentable, mais au point de vue d'entraînement économique, cela va prendre du temps avant de récolter des dividendes.

M. DOZOIS: Ces dividendes sont certainement des dividendes dans le sens large du mot.

M. LESAGE: M. Gignac, la rentabilité sociale, économique et financière, l'ensemble. M. Gignac, lorsque vous avez été nommé, à la fin de mai 1966, président de Sidbec, j'avais fait une déclaration et j'avais été informé à ce moment-là que le rapport des ingénieurs-conseils sur la formule d'une grande sidérurgie avait été remis à Sidbec le 15 avril 1966, et que le conseil d'administration de Sidbec ne l'avait pas encore étudié à fond. Cela, c'est le 25 mal. Et si vous vous souvenez bien, c'était une des choses que nous vous avons demandées d'étudier, le rapport de ces ingénieurs-conseils, que je n'ai jamais vu, que je n'ai jamais eu, et qui a été remis à Sidbec le 15 avril 1966 et auquel je faisais allusion dans ma déclaration du 25 mai, à l'occasion de l'annonce de votre nomination.

Il est clair que vous l'avez mis de côté, pour des raisons que je pourrai vous demander de me donner à une autre séance. En même temps j'aimerais bien que vous explicitiez, en donnant des chiffres, ce que vous venez de déclarer à l'effet que si un autre projet que celui de l'achat des parts, par conséquent des actifs de Dosco, était entretenu, projet par exemple d'une construction neuve à Bécancour. C'est sans doute à cet autre projet que vous faisiez allusion dans votre déclaration de mardi de la semaine dernière devant le comité. Est-ce que ce ne serait pas rentable à tout point de vue avant 20 ans? Evidemment vous n'auriez pas le temps, il est une heure moins le quart, de nous répondre en détail à toutes ces questions, de répondre aux questions que nous pourrions vous poser. Il n'y a pas de doute de plus, que M. le maire de Bé-cancour et ses compagnons auraient sur ce point en particulier des questions à vous poser. Pourrions-nous vous demander, pour une prochaine séance, de vous préparer à nous en dire le plus possible sur ce projet que vous avez en filière et également sur les raisons du rejet de ce programme qui était sur une plus haute échelle et au sujet duquel Sidbec aurait reçu un rapport le 15 avril 1966. Evidemment, pour les raisons que vous connaissez, je n'ai pas...

M. GIGNAC: II est assez difficile pour moi de vous parler de projets qui, disons, n'ont pas

été nécessairement mis de côté par le conseil d'administration mais qu'il n'a pas approuvés non plus.

M. LESAGE: Qui n'ont pas été retenus, si vous voulez.

M. GIGNAC: Je peux dire, ici, que nous avons étudié à peu près six ou sept projets de front, en plus de ceux qu'éventuellement, nous avons retenus, et nous avons été extrêmement conscients, tout au cours de ces études, des contraintes financières. Enfin, personne ne l'ignore, il y a des limites, non seulement à ce qu'un gouvernement, mais à ce que des intérêts privés peuvent investir actuellement dans des complexes de l'envergure d'une sidérurgie intégrée, ou d'une sidérurgie quelle qu'elle soit Je pense que la contrainte financière a sûrement été le facteur le plus important lors de l'étude de tous ces projets. Sans doute, me suis-je mal exprimé quand j'ai dit que les alternatives n'étaient pas rentables. Je pense plutôt qu'à plus ou moins longue échéance, elles sont toutes rentables. Mais ce sont des échéances qui s'échelonnent sur des périodes de 15, 20 ou 25 ans, et, à ce moment-là, un projet devient strictement gouvernemental, mené par l'Etat et risque de devenir lourd à un moment donné, s'il y a des fluctuations importantes dans le marché de l'acier, comme ça s'est produit l'an dernier. Les marchés de 1967 n'ont sûrement pas contribué à faire de Dosco une entreprise rentable.

Maintenant, je suis bien prêt, personnellement, à revenir devant le comité, évidemment, je suis à la disposition du gouvernement. J'apprécierais, cependant, pour sauver du temps et pour éviter des paroles peut-être inutiles aussi, qu'on m'envoie une liste de questions précises. Je ne vous dis pas d'avance que je répondrai à toutes ces questions, parce qu'il reste tout de même que nous ne voulons pas dévoiler nos projets futurs à nos concurrents ni leur indiquer la façon dont nous entendons développer notre projet de sidérurgie. Mais je ferai tous les efforts possibles pour essayer d'y répondre avec un maximum de précisions, en m'efforçant de satisfaire tout le monde.

M. LESAGE: Ma demande serait la suivante, M. Gignac. Voulez-vous nous exposer, dans le plus de détails possibles, le projet d'allure beaucoup plus modeste qui est prêt et que vous avez en filière, projet pour Bécancour, d'après ce que vous avez dit la semaine dernière. Exposez-le-nous en détail. Quelle production prévoyez-vous dans ce projet? Quelle installation prévoyez-vous? Le coût? La rentabilité? etc. Evidemment, les questions de détails seront formulées selon l'exposé que vous ferez de ce projet.

M. JOHNSON: M. Gignac, comme nous devons ajourner, disons que, par le président, nous vous ferons parvenir les questions que les membres du comité auront bien voulu vous poser. Le chef de l'Opposition a déjà formulé une question générale. Moi, j'en ai une à laquelle vous avez déjà esquissé une réponse: l'utilisation des $60 millions dans l'hypothèse Dosco et dans l'autre hypothèse...

M. LESAGE: Dans l'autre hypothèse, excellent.

M. JOHNSON: ... de sorte que, à une séance ultérieure, en tenant compte de l'urgence de prendre une décision, et de passer les législations nécessaires, vous puissiez répondre à ces questions. Vendredi vous conviendrait-il?

M. GIGNAC: Cette semaine? M. JOHNSON: Cette semaine.

M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: Pour que nous soyons situés.

M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: Quel jour seriez-vous...

M. GIGNAC: Vendredi, conviendrait, M. le Premier Ministre.

M. JOHNSON: Vendredi matin? M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: Cela va? Vendredi matin, Alors, vendredi matin, à dix heures et demie.

M. GIGNAC: Vendredi matin, à dix heures trente. Maintenant, il faudrait quand même que d'ici à ce temps-là, ceux qui ont des questions précises à poser me les formulent par écrit le plus rapidement possible.

M. JOHNSON: M. Gignac, avez-vous compris la question de M. Lesage?

M. GIGNAC: J'ai compris la question la question de M. Lesage.

M. LESAGE: Pardon?

M. GIGNAC: Enfin, j'ai votre question en note.

M. LESAGE: Oui, et celle dupremier ministre aussi. La réponse à la question du premier ministre m'intéresserait énormément aussi.

M. CLICHE: M. Gignac, en vertu de la formule que vous préconisez, l'Etat deviendrait acquéreur des actions.

M. JOHNSON: Non, Sidbec deviendrait acquéreur.

M. CLICHE: Sidbec plutôt deviendrait acquéreur de la totalité des actions. Avez-vous étudié la possibilité d'une participation des intérêts de l'entreprise privée? Je pense qu'il y aurait lieu, pour vous, de nous exposer à la prochaine séance, quels seraient les avantages possibles d'une participation et même aussi les désavantages possibles d'une participation, s'il y en a. Je pense, vu la dure concurrence que Dosco a ou aura de la part de Stelco...

M. BERTRAND: Et des autres.

M. CLICHE: ... et peut-être aussi pour protéger les marchés, qu'une participation possible aiderait. J'aimerais que vous élaboriez sur ce sujet-là à la prochaine séance.

M. GIGNAC: Est-ce que l'on pourrait dire immédiatement qu'on a effectivement pris en considération la participation possible de l'entreprise privée. D'ailleurs, M. Johnson a répondu je crois, à la dernière réunion, qu'éventuellement nous envisagions la participation de l'entreprise privée, des capitaux privés, dans le capital-actions de Sidbec.

M. LESAGE: Dans quelle proportion? M. JOHNSON: Et même public.

M. LESAGE: Qui serait majoritaire? Le gouvernement ou les capitaux privés?

M. GIGNAC: Evidemment, le gouvernement serait majoritaire.

M. JOHNSON: De la part du gouvernement, j'ai déclaré que nous n'avions pas d'objection à ce qu'il y ait une participation des autres aciéries et qu'on devrait donner la préférence aux aciéries canadiennes existantes. Deuxièmement, pas d'objection à ce qu'il y ait participation du public mais qu'au départ, au moins, le gouvernement voulait avoir le contrôle de la politique, c'est-à-dire avec un grand P: la Politique de prix, la Politique dans toute la mesure où ça peut influencer le développement régional. Or, la Politique des prix peut-être, etc., ça nécessiterait probablement que le contrôle soit, pour un certain temps, du moins, entre les mains du gouvernement ou de ses représentants.

M. LESAGE: Alors, la question qui se pose est la suivante: Comment pensez-vous pouvoir intéresser les investisseurs privés à investir dans une société contrôlée par l'Etat?

M. JOHNSON: C'est arrivé dans d'autres pays.

M. LESAGE: Je vous demanderais d'y réfléchir. C'est une question qui a été discutée à fond.

M. JOHNSON: Cela existe dans d'autres pays, nous avons plusieurs suggestions qui nous ont été faites par des experts, mais tout cela devra être discuté en fonction d'une loi ou d'une charte nouvelle pour Sidbec. Mais au moment où nous vous parlons, je pense que M. Gignac peut confirmer cela, toutes les options sont ouvertes, nous n'avons fermé aucune porte; ce qui importe, c'est que cela démarre soit à

Contrecoeur, soit éventuellement à Bécancour, et que l'on cesse d'en parler et qu'on passe à l'action.

M. LE PRESIDENT: M. Dozois.

M. DOZOIS: M. le Président, je voudrais dans la même ligne de pensée des questions posées par le premier ministre et par le chef de l'Opposition, sur l'autre projet de Bécancour, poser la question suivante et vous y répondrez dans la mesure du possible. Seriez-vous en mesure de nous dire quelles seraient les conséquences de l'établissement d'un complexe sidérurgique à Bécancour, résultant du fait que Dosco resterait à Contrecoeur? Les effets sur le complexe à Bécancour ou les effets sur le complexe de Dosco? Si vous êtes en mesure d'y répondre, vendredi, vous pourrez y répondre.

M. GIGNAC: Si l'on mettait en marche un projet très modeste, les effets évidemment...

M. DOZOIS: J'aimerais mieux avoir une réponse complète, si c'est possible pour vous de le faire vendredi.

M. GIGNAC: Vendredi? D'accord.

M. BOURASSA: Pourriez-vous me dire brièvement l'étendue du marché captif du gouvernement et des institutions affiliées si vous pouviez le donner?

M. GIGNAC: 100,000 tonnes. M. BOURASSA: Cent mille.

M. LE PRESIDENT: Alors, si M. le maire de Bécancour veut préparer ses questions et les faire parvenir. La séance est ajournée au vendredi, 7 juin, à 10 h 30.

Séance du 7 juin 1968

(Dix heures cinquante-quatre minutes)

M. GRENIER (président): A l'ordre!

Alors, c'est la troisième séance pour le comité des régies gouvernementales. M. le maire de la ville de Bécancour s'excuse, il n'a pas eu de copies de ses questions pour donner à tous les membres du comité. Mais il en arrivera quelques copies supplémentaires. On pourra en distribuer aux députés qui siègent ici autour de la table.

Si quelqu'un dans l'assistance veut poser des questions ou prendre la parole, on leur demande de se servir du microphone qui est installé là-bas. Et les députés qui sont dans la deuxième rangée voudront bien s'approcher de la table, s'ils ont des questions à poser.

M. Gignac aimerait dire quelques mots au tout début.

M. GIGNAC: Pardon!

M. LE PRESIDENT: Vous avez la parole.

M. GIGNAC: Non, non.

M. JOHNSON: Vous n'avez rien à dire?

M. GIGNAC: J'ai beaucoup à dire, mais pas dans le moment.

M. JOHNSON: Je sais que vous avez beaucoup à faire. Est-ce que je pourrais vous poser une question tout de suite, M. Gignac? Une question que vous auriez aimé traiter, c'était l'utilisation des $60 millions, qui ne se borneraient pas exclusivement à l'achat des actifs en question, mais qui serviraient également au prolongement, pour en arriver à un complexe intégré.

M. GIGNAC: M. le Premier Ministre, nous avons préparé quelques notes pour expliquer de quelle façon nous entendons utiliser les $60 millions qui seront investis par le gouvernement, sous une forme ou une autre, dans la Sidbec.

Je vais demander à M. Graveline de vous expliquer au tableau de quelle façon, nous comptons au départ utiliser ces sommes d'argent, quitte éventuellement, un peu plus tard, à faire les remarques en fonction de l'exposé qui aura été fait par M. Graveline.

M. GAGNON: Seulement une question à M. Graveline. Dans les disponibilités, $68 millions,

cela comprend quoi? Est-ce que ce sont des disponibilités d'argent physique ou si ce sont d'autres disponibilités qui comprendraient l'inventaire?

M. GRAVELINE: Les disponibilités comprennent l'argent en banque, les comptes I recevoir des clients de Dosco, les inventaires de matières premières ainsi que des produits finis.

M. GAGNON: Parce que si je me rappelle, sur la formule que vous nous avez remise il est dit que dans l'actif de la compagnie, vous arriviez avec un prix de $21 et quelque chose par action. Par la suite, vous mettez les actifs de Sidbec moins toutes les diminutions qui apparaissaient à l'actif du bilan et qui totalisent les actions à $11 et quelque chose.

M. GRAVELINE: C'est exact.

M. GAGNON: Comment se fait-il que toutes les diminutions viennent contre les actifs de Sidbec et qu'elles ne se partagent pas avec celles de Dosco?

M. GRAVELINE: La diminution s'appliquait contre les actifs de Dosco qui étaient achetés par Sidbec.

M. GAGNON: Si je pose ces questions, c'est que je n'étais pas à la première réunion, en raison de circonstances de force majeure.

M. LESAGE: Je viens de lui donner le bilan de Dosco. Je pense que M. Graveline peut vous donner le détail des $67.7 millions de disponibilités.

M. GRAVELINE: C'est exact, selon le bilan de Dosco, ces $68 millions se composent de dépôts à court terme de $550,000; de comptes I recevoir des clients de Dosco de $22 millions; de dûs, par certaines compagnies affiliées, de $677,000; la valeur des actifs vendus à la province de la Nouvelle-Ecosse, $14 millions; les inventaires de $29.7 millions et des frais payés d'avance de $440,000.

M. GAGNON: Merci.

M. GRAVELINE: M. le Président, si vous le permettez, j'aimerais disposer de trois minutes pour mettre au tableau les chiffres sur lesquels nous allons apporter des commentaires.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. GRAVELINE: M. le Président, je vais me permettre de passer brièvement à ces chiffres en revue et ensuite je pourrai vous expliquer le détail.

Premièrement, les investissements du gouvernement sont prévus comme suit: $12 millions annuellement en 1968, 1969, 1970, 1971, 1972 pour un total de $60 millions. L'emploi de ces fonds s'établit comme suit. Premièrement, l'achat des actions de Dosco, ainsi qu'expliqué, se chiffre par $32.5 millions; d'autre part, nous savons que certains actifs dans lesquels Sidbec n'est pas intéressée seront revendus à Hawker Siddeley pour un prix qui semble devoir être $13.6 millions, soit un montant net de $18.9 millions.

Il est projeté que l'agrandissement et l'amélioration des installations existantes de Dosco à Contrecoeur, l'usine de Montréal, Truscon et Etobicoke requerront un montant de $17 millions.

L'augmentation du fonds de roulement durant cette période de cinq ans, $13.9 millions.

Le remboursement de la dette à long terme, $7.2 millions.

Enfin des recherches visant à la fabrication de l'acier primaire, $3 millions, en tout un montant de $60 millions.

Si vous me permettez, je vais élaborer un peu plus longuement sur le détail de ces chiffres.

Ce chiffre-ci ($18.9 millions) ne requiert pas plus d'élaboration.

Les $17 millions ici visent a agrandir les installations existantes, comme je l'ai expliqué, les usines de Montréal, Contrecoeur, Truscon, Etobicoke, pour leur donner la capacité demandée par les études faites sur le marché et également assurer une qualité de produits que les études du marché semblent exiger. Quant à l'augmentation du fonds de roulement, durant la période de cinq ans, nos projections sont que les ventes augmenteront et automatiquement, les comptes à recevoir augmenteront. Les stocks devront être également accrus pour pouvoir répondre aux exigences des clients et assurer une meilleure qualité de service. Nous avons considéré qu'un montant de $13.9 millions sera requis à ces fins. Le remboursement de la dette à long terme est fixé par les actes de fiducie de la présente dette obligataire de Dosco. Ces actes de fiducie exigent que des versements de $7.2 millions soient faits durant cette période de cinq ans. Finalement, Sidbec envisage que durant cette période, elle devra dépenser $3 millions dans certaines études visant à la fabrication de l'acier primaire.

Vous remarquerez que les souscriptions

gouvernementales ici ont été consacrées à établir une entreprise saine et une structure financière propice à son développement. Vous pourrez remarquer qu'aucune indication n'a été donnée ici de l'emploi des fonds qui seront rendus disponibles par les opérations et en fait, à la conclusion de cette période, ces fonds seraient suffisants pour entrevoir la création d'une usine de fabrication d'acier. Egalement, à ce moment-là, à la conclusion d'une période de cinq ans, les projections indiquent que la compagnie Dosco-Sidbec aurait accumulé un avoir des actionnaires, aurait prouvé un pouvoir de gain qui lui permettrait des financements additionnels pour la création de l'usine d'acier primaire, des financements de quelque forme que ce soit dans le secteur privé.

M. LESAGE: M. Graveline, vous dites que Dosco aurait besoin, au cours de la période 1968 à 1972, d'une augmentation du fonds de roulement de $14 millions.

M. GRAVE UNE: C'est exact.

M. LESAGE: Et cela, en dépit du fait qu'il y a actuellement un fonds de roulement assez considérable et en dépit du fait qu'une somme de $14 millions est due par le gouvernement de la Nouvelle-Ecosse et qu'elle doit être payée et fera partie du fonds de roulement. Alors, même en tenant compte du montant de $14 millions à recevoir du gouvernement de la Nouvelle-Ecosse, vous croyez qu'il y aurait une telle augmentation des comptes à recevoir et des réserves de stocks, qu'il faudrait en plus de ces premiers $14 millions encore $14 millions, c'est-à-dire $28 millions additionnels de fonds de roulement.

M. GRAVELINE: C'est exact. Nous avons basé nos exigences de fonds de roulement sur les statistiques qui sont courantes dans l'industrie sidérurgique canadienne.

Et en prévision d'augmentation de ventes, nous considérons qu'il serait sage, qu'en plus des $14 millions qui apparaissent déjà au fonds de roulement...

M. LESAGE: Oui, oui.

M. GRAVELINE: ... .entre parenthèses, qui apparaissent déjà au fonds de roulement de Dosco...

M. LESAGE: Mais ils sont dus, eux?

M. GRAVELINE: C'est ça. Mais ils appa- raissent déjà au fonds de roulement, Nous avons besoin d'un moyen additionnel.

M. LESAGE: Je ne me trompe pas lorsque je dis que c'est comme créance qu'ils apparaissent ici?

M. GRAVELINE: Ils apparaissent comme comptes à recevoir.

M. LESAGE: Comme comptes à recevoir!

M. GRAVELINE: Dans les disponibilités de Dosco.

M. LESAGE: Très bien. Comme disent les Anglais: « I stand corrected ».

M. GRAVELINE: C'est ça.

M. LESAGE: Comptes à recevoir, $14 millions...

M. GRAVELINE: Et dans les disponibilités de Dosco.

M. LESAGE: Oui.

M. GRAVELINE: Qui constituent le fonds de roulement de Dosco.

M. LESAGE: Bon. Maintenant, j'avais cru comprendre, au cours des séances précédentes — il est évident que j'avais mal compris — qu'une partie des $60 millions qui seraient souscrits par le gouvernement au rythme de $12 millions par année, servirait éventuellement à payer le coût des installations nécessaires pour la production de l'industrie primaire.

Je constate, d'après les chiffres que vous avez au tableau, que les $3 millions qui seraient consacrés à cette phase, le seraient pour recherche...

M. GRAVELINE: C'est ça.

M. LESAGE: ... des recherches et d'après ce que vous avez dit, il faudrait compter sur les gains, sur le « cash flow » au cours des cinq prochaines années, sur les profits quoi, les profits de la compagnie, pour accumuler les montants nécessaires à la création d'une industrie de transformation primaire, c'est-à-dire...

M. GRAVELINE: C'est ça.

M. LESAGE: ... à partir du minerai à aller à l'acier en gueuse. C'est ça?

M. GRAVELINE: Le souci que nous avons eu, M. Lesage, était de montrer que les $60 millions étaient requis pour établir une entreprise saine, d'une façon administrative et financière. En d'autres mots, non seulement nous pouvions acheter les actions de Dosco, mais nous pouvions avoir un fonds de roulement adéquat, rencontrer les exigences de la dette à long terme et à ce moment-là, étant bien assis, dire: Après avoir dépensé $3 millions dans des recherches pures, nous pensons que nous avons une entreprise viable qui, durant cette période de cinq ans, a surmonté ses pertes, a commencé à démontrer un pouvoir de gains, a commencé à accumuler un avoir des actionnaires — elle a déjà des fonds disponibles — c'est-à-dire le profit des opérations, plus, les fonds correspondants à l'amortissement, qui nous permettent d'investir dans des usines d'acier primaire. De plus ce pouvoir de gains et ces avoirs des actionnaires peuvent être utilisés comme un levier de financement.

M. LESAGE: Oui, je comprends que ça peut servir de levier de financement et que tout ça est difficile à évaluer. Mais vous dites, n'est-ce pas, qu'à ce moment-là, vous croyez que Dosco, étant établie, sur des bases financières solides, aura accumulé des gains, que l'avoir des actionnaires aura été augmenté par les profits et évidemment par l'amortissement. A combien évaluez-vous les profits que pourra faire Dosco sur la base que vous dites solide — vous venez de l'établir — et quel sera l'amortissement?

Vous comprendrez que je voudrais savoir quel sera le montant disponible en 1972. C'est dans quatre ans, quatre ans et demi. Quelle sera la somme disponible pour entreprendre la construction des installations nécessaires pour la transformation du minerai de fer en acier primaire?

M. GRAVELINE: Je crois qu'avant de m'aventurer trop loin dans ce domaine, je préférerais que la question soit adressée à M. Gignac. Si je peux me permettre une liberté, néanmoins, je remarquais, en préparant ce tableau et en regardant les projections, qu'advenant certains développements dans la fabrication de l'acier primaire, il pourrait déjà, dès la fin de 1972, ou au début de 1973, y avoir des capitaux suffisants pour créer des usines de fabrication requérant des investissements modestes comparés aux hauts fourneaux.

M. LESAGE: Est-ce que M. Gignac peut donner des chiffres?

M. GIGNAC: Je crois que M. Graveline a très bien répondu.

M. LESAGE: Oui, très bien, mais est-ce que M. Gignac peut mettre des chiffres au bout des explications?

M. GIGNAC: Non, je ne crois pas que ça soit opportun à ce moment-ci de mettre des chiffres. Il faudrait quand même que vous nous fassiez un peu confiance. Je ne crois pas que ce serait utile de publier des chiffres pour les cinq prochaines années, pas plus que pour les dix prochaines années. Le mandat ou disons l'entente verbale ou autre sur laquelle nous nous sommes entendus avec le gouvernement est la suivante: Si nous avons à notre disposition $60 millions par tranches de $12 millions pendant cinq ans, est-ce que nous pouvons acheter Dosco et faire démarrer une usine d'acier primaire? La réponse c'est oui.

Maintenant, la façon d'étaler les chiffres sur le tableau en est une. On aurait pu dire: L'augmentation du fonds de roulement plus la recherche, plus le remboursement de la dette à long terme s'appliquent à la fabrication de l'acier primaire et puis, à même notre « cash flow », rembourser la dette à long terme, enfin il y a bien des façons de plumer un chat.

Etant donné que le gouvernement a l'intention de nous donner $12 millions par année pendant cinq ans, je pense que ce que M. Graveline a voulu démontrer, c'est qu'avec cet argent-là on pouvait mettre la compagnie Dosco en excellente posture et qu'il ne semble pas, d'après les états financiers que nous avons projetés, que nous aurions quelque problème que ce soit pour trouver l'argent requis pour faire l'acier primaire. Il y en aurait une partie dans la compagnie; il pourrait y en avoir une partie à court terme des banques et il pourrait y en avoir une partie aussi soit d'investisseurs privés ou dans la dette à long terme.

M. LESAGE: Mais tout cela est basé sur une question de confiance. Si pour une ou des raisons quelconques il arrivait que Dosco, les quatre établissements, avec la base financière exposée par M. Graveline, ne fassent pas les profits anticipés et n'opèrent pas à profit régulièrement d'ici une couple d'années, jusqu'en 1972, bien il sera peut-être difficile de trouver l'argent et le crédit à même Dosco pour établir l'industrie primaire. Alors, il faudra de nouveau avoir recours au gouvernement pour l'Industrie primaire. C'est une possibilité. Vous ne pouvez l'exclure, n'est-ce pas?

M. GIGNAC: Non, j'exclus cette possibilité-là, M. Lesage.

M. LESAGE: Vous l'excluez!

M. GIGNAC: Je l'exclus complètement. Ce qui peut arriver c'est que nos projections s'avèrent conservatrices et que nous puissions faire démarrer la fabrication d'acier primaire avant le temps prévu ou que nos projections ayant été trop optimistes, on doive retarder d'un an ou deux la fabrication d'acier primaire. Maintenant, des projections, ça reste des projections.

M. LESAGE: D'accord.

M. GIGNAC: Nous avons essayé d'être ni optimistes ni pessimistes. Nous avons essayé d'être réalistes, nous tenir au milieu du chemin et ce sont les conclusions auxquelles nous arrivons. Je crois réellement, et mon conseil d'administration de même, que la façon dont nous avons envisagé le problème Dosco, est une façon réaliste et que nous ne pouvons pas nous attendre d'une façon raisonnable à ce que l'investissement de l'acier primaire soit fait à même le pouvoir d'achat de Dosco, uniquement vers 1972.

M. LESAGE: Alors, comment se fait-il... .

M. GIGNAC: II y a une chose que je voudrais ajouter, peut-être pour renforcir ma thèse, si l'on peut appeler cela une thèse. C'est que, lorsque l'on parle de Dosco, on parle de chiffres qui existent aujourd'hui. Que ce soient des déficits ou des gains, on parle de chiffres qui sont connus. Evidemment la projection est plus réaliste que si l'on partait de chiffres qui sont projetés ou qui sont inconnus, dans le fond.

M. JOHNSON: Installés à Bécancour, vous auriez à vous baser sur des projections aussi.

M. GIGNAC: Exactement.

M. LESAGE: Oui, mais nous n'avons pas commencé à parler de Bécancour...

M. JOHNSON: Mais vous auriez de l'argent à trouver également.

M. LESAGE: ... le projet que nous avons devant nous, c'est le projet Dosco.

M. BOURASSA: Quand vous parlez des projections, est-ce indiscret de vous demander si vous avez pris des projections basées sur un taux de croissance Inférieur, équivalent, ou supérieur à celui du produit national brut?

M. GIGNAC: Equivalent à celui du produit national brut du Canada.

M. BOURASSA: D'accord.

M. LESAGE: Maintenant, c'est dire que si — comme vous l'avez mentionné tout I l'heure — vous avez été trop optimiste dans vos estimations, quant au profit, que cela pourrait retarder l'établissement de l'industrie de l'acier primaire. C'est ce que vous avez dit, n'est-ce pas?

M. GIGNAC: Oui, ça pourrait... M. LESAGE: Au-delà de 1972.

M. GIGNAC: Oui, ça pourrait arriver. Ce n'est pas ce que l'on prévoit, mais c'est une chose qui pourrait arriver, de la même façon que dans l'autre projet dont je vous parlerai tout à l'heure, d'autres choses aussi pourraient arriver.

M. LESAGE: Ah! clairement. Il n'y a pas d'entreprise sans risque. C'est entendu.

M. GIGNAC: Non.

M. LESAGE: Mais la somme de $60 millions n'est pas suffisante pour accélérer la construction de l'industrie de transformation du minerai de fer en acier primaire.

M. GIGNAC: Ah, bien, là, je ne suis pas tout à fait d'accord!

M. LESAGE: Sauf, indirectement. Bien, d'après le tableau que nous avons devant nous.

M. GIGNAC: Cela me semble assez direct comme approche. Le gouvernement nous donne $60 millions pour nous permettre, éventuellement à très court terme, d'en arriver à faire de l'acier primaire. Si nous pouvons faire démarrer une fabrique d'acier primaire en 1972, ce serait à mon sens, assez extraordinaire.

M. LESAGE: C'est parce que vous auriez fait des profits suffisants, du fait qu'une injection de $60 millions a permis de rendre le tout rentable. C'est pour cela que Je dis que c'est une conséquence indirecte.

M. GIGNAC: Oui, mais disons que nous ne

mettons pas la charrue devant les boeufs. Nous développons notre marché, nous développons notre production et quand nous arrivons avec une fabrique d'acier primaire, nous avons un volume suffisant pour justifier la dépense. Alors, ç'a été un peu le problème du premier projet.

M. LESAGE: Bien, évidemment le conseil d'administration de Sidbec a déjà pensé autrement. Quand vous parlez de mettre la charrue devant les boeufs, le conseil d'administration de Sidbec, dans les rapports qui ont été faits au gouvernement, voyait la charrue et les boeufs autrement, dans un autre ordre. On commençait par l'acier primaire.

M. GIGNAC: Le conseil de Sidbec n'a jamais approuvé, M. Lesage, ces rapports-là, pour autant que je sache.

M. LESAGE: C'est justement une question que je voudrais poser.

M. GIGNAC: J'ai justement des réponses à ces questions-là.

M. LESAGE: Je pense que c'est assez important de savoir, lorsque M. Filion m'a écrit le 31 mars et qu'il m'a dit que le conseil d'administration de Sidbec, la veille, avait approuvé le choix de Bécancour, avait approuvé la nomination de M. Bonnaure.

M. GIGNAC: Oui, le choix de Bécancour, ce n'est pas la consistance de l'usine.

M. LESAGE: Pardon!

M. GIGNAC: Le choix de Bécancour et la consistance de l'usine, à mon sens, sont deux choses assez différentes. Le 15 avril, Je crois que vous avez reçu une lettre de M. Filion.

M. LESAGE: J'ai reçu une lettre de M. Filion le 15 avril 1966, me disant que le conseil d'administration de Sidbec étudiait le dernier rapport.

M. GIGNAC: Vers le milieu d'avril 1966, le conseil d'administration de Sidbec a été saisi du rapport final des ingénieurs-conseils.

M. LESAGE: C'est cela.

M. GIGNAC: Ce rapport a été déposé et les administrateurs ont commencé à l'étudier. Comme vous le savez, c'était un rapport assez vo- lumineux, très bien fait et qui arrivait aux conclusions que j'ai mentionnées à la dernière ou à la première séance je crois. Il y a un concours de circonstances dont je ne suis pas responsable mais qui a fait qu'un mois après, ou un peu plus, j'ai été nommé président de Sidbec. Je me suis penché assez rapidement sur le problème de la sidérurgie, il le fallait bien.

M. LEVESQUE (Laurier): En termes galants, ces choses-là sont dites.

M. GIGNAC: Indépendamment de la valeur du rapport, de sa qualité, nous avons été forcés de réaliser très rapidement que l'investissement du départ était très élevé. Et même si les marchés avaient été disponibles, nous doutions fort que les montants pour développer le complexe auraient pu être disponibles, soit du gouvernement ou soit du secteur privé.

Mais non seulement les investissements globaux étaient trop élevés, mais il faut ajouter qu'on était un peu optimiste sur le marché prévu. Donc s'il y avait le moindre ralentissement dans la production et dans l'allure du marché — je n'ai pas besoin de vous dire qu'en 1967 il y a eu un moyen ralentissement — on en arrivait à conclure que la rentabilité, à ce moment-là, pouvait être grandement affectée et que ce ne pourrait être que dix, quinze ou vingt ans après qu'on pourrait réaliser une rentabilité acceptable.

M. LESAGE: M. Gignac, vous avez été nommé président de Sidbec le 25 mai 1966, ces études, vous les avez poursuivies au cours de l'été et de l'automne 1966?

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: Vous dites que vous avez réalisé très rapidement, c'est au cours de l'été cela?

M. GIGNAC: Cela s'est fait disons au cours de l'été. Ce qui est arrivé, c'est qu'après avoir mis de côté le rapport KSAL, nous nous sommes appliqués à déterminer quel serait le coût minimum pour une sidérurgie intégrée qui produirait à peu près 700,000 ou 800,000 tonnes. Nous avons considérablement réduit, par toutes sortes de moyens, les coûts d'investissement. Cela s'est fait au cours de l'été 1966. Je crois que ce projet-là était attrayant. Mais ce qui n'était pas encore attrayant, c'était le marché de l'argent, si vous vous souvenez bien. Même si les investissements étalent réduits, nous considérions qu'il serait difficile de lancer ce pro-

jet et de trouver l'argent requis pour le financer. Que ce soit du gouvernement ou du secteur privé.

M. LESAGE: De quel projet parlez-vous? M. GIGNAC: Du projet réduit.

M. LESAGE: Celui dont vous avez parlé en disant qu'il était en filière.

M. GIGNAC: Non, c'est un autre projet.

M. LESAGE: Un autre encore.

M. GIGNAC: Nous en avons fait sept.

M. LESAGE: Oui, je comprends, il y en a eu tellement que c'est pour cela que je vous demande de préciser.

M. GIGNAC: On aime mieux vous parler des projets qu'on a l'intention de vous vendre.

M. LESAGE: Oui, d'accord. Mais celui dont vous parlez, de l'été ou de l'automne 1966, a été mis de côté?

M. GIGNAC: D'accord.

M. LESAGE: C'était une réduction...

M. GIGNAC: Considérable.

M. LESAGE: ... du projet qui avait été soumis à Sidbec le 15 avril 1966.

M. GIGNAC: C'est cela.

M. LESAGE: Celui-là, c'était $328 millions?

M. GIGNAC: $400 millions.

M. LESAGE: $400 millions.

M. GIGNAC: C'était$350 millions d'investissement technique plus le fonds de roulement et divers frais d'ingénérie, etc. Cela se chiffrait par $406 millions, je crois.

M. LESAGE: C'était ce projet qui permettait éventuellement, sur une période d'années, d'aller à une production de 4 millions de tonnes.

M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: C'est le projet KSAL, cela?

M. GIGNAC: Oui, le projet KSAL.

M. JOHNSON: En résumé, le projet KSAL, c'était, comme l'a dit le chef de l'Opposition, conçu comme un ensemble de 4 millions de tonnes, étalé éventuellement sur une période de 40 années...

M. LESAGE: Eventuellement.

M. JOHNSON: ... dont la capitalisation totale requise aurait été de $653 millions.

M. GIGNAC: C'était lepremierprojetKSAL, M. le Premier Ministre.

M. JOHNSON: Le premier projet KSAL. M. GIGNAC: C'est ça. Il y en a déjà d'autres.

M. JOHNSON: Le déficit cumulatif de ce projet KSAL serait de $111 millions pour les cinq premières années et $220 millions pour les quatorze années suivantes.

M. LESAGE: Qui a donné ces chiffres? M. JOHNSON: C'est tiré du rapport KSAL.

M. PINARD: Est-ce que le premier ministre a dit qu'il a préparé...

M. JOHNSON: Le premier profit de $174,000 apparaît en 1984. Toujours dans le projet KSAL. Et un taux très faible d'utilisation des installations dans un prix de revient très élevé. Je pense que tout le monde l'a mis de côté, celui-là.

M. LESAGE: C'était ça qui était le grand défaut de ce premier projet. C'est qu'on construisait à Bécancour des installations formidables, qui n'auraient été utilisées que beaucoup plus tard.

M. JOHNSON: A 15% de l'utilisation, au départ.

M. LESAGE: Plusieurs décennies plus tard. Ce qui rendait le projet pratiquement non rentable. Cela, d'accord, c'était le premier, ça.

M. JOHNSON: Mais c'était $111 millions de déficit pour les cinq premières années et $220 millions pour les quatorze années suivantes.

M. LESAGE: Oui, il a été mis de côté. M. JOHNSON: Un rêve en couleurs.

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que l'on

peut poser une question sur un autre sujet ou si vous avez...

M. LESAGE: Non, mais cela a été soumis quand même. Il a été mis de côté.

M. LEVESQUE (Laurier): M. Gignac, si vous me permettez, tantôt vous avez parlé du taux de croissance... Le député de Mercier vous demandait, à propos de la façon que vous aviez calculé, par rapport à la progression, la croissance économique générale. Vous avez dit c'était plus ou moins équivalent, que les projections qui ont été faites sont plus ou moins équivalentes à celles du produit national brut canadien. Par rapport au marché, vous avez dit que la façon dont ça avait été conçu là, au moment où vous êtes arrivé pour prendre la charge du projet, qu'on avait conçu ça en fonction d'une projection trop optimiste des marchés. Alors, dans ce domaine plus spécifique des marchés de l'acier, parce que c'est de ça qu'il s'agit, vous, comment avez-vous calculé? C'est-à-dire en fonction strictement du marché de l'acier, qui n'est pas nécessairement toujours relié à l'ensemble économique.

M. GIGNAC: Je crois, M. Levesque, que l'on peut en effet faire une analogie assez rapprochée...

M. LEVESQUE (Laurier): Même sur quatre ans?

M. GIGNAC: Nous avons fait nos projections pour une période de treize ans, en nous servant comme base d'accroissement du produit national brut. Mais je dois vous dire que cet accroissement-là est de beaucoup inférieur à toute autre projection de marché que nous avons faite. C'est ce qui nous donne un avantage considérable dans l'étude des marchés, lorsqu'on considère le projet Dosco, parce que nous partons d'une base établie et nous avons été, je crois, conservateurs en ne considérant que l'accroissement normal du volume d'acier qui est vendu d'une année à l'autre. C'est-à-dire que l'accroissement des ventes est proportionnel à l'accroissement du produit national brut, prenant pour base de départ ce que Dosco vend aujourd'hui.

M. LEVESQUE (Laurier): Ce que Dosco vend aujourd'hui dans les installations que vous achetez, c'est quoi? C'est de la tôle?

M. GIGNAC: De la tôle, des fers marchands et des cornières, du fil-machine. Il y a plusieurs produits.

M. LEVESQUE (Laurier): Et c'est sur le type de produits que vous achetez à la fabrication et sur le marché, d'abord celui qu'ils ont, celui dont vous héritez et aussi sur ce que vous voyez comme projection, que vos chiffres sont basés?

M. GIGNAC: Exactement.

M. LEVESQUE (Laurier): Combien d'hommes sont employés? Parce qu'il y a toujours cette idée de l'emploi.

M. GIGNAC; Au-delà de 2,000. M. LEVESQUE (Laurier): C'est cela actuellement?

M. GIGNAC: Oui.

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que vous avez fait une projection? Disons, au moment où vous passeriez au primaire, est-ce que ce serait stable? C'est parce que d'un côté, si vous faites de l'expansion, parfois il y a plus de monde et, d'un autre côté, si vous modernisez, parfois il y en a moins. Est-ce que vous avez une idée...?

M. GIGNAC: Nous prévoyons que si nous ajoutons une fabrique d'acier primaire, disons à Contrecoeur ou ailleurs, que la main-d'oeuvre, le personnel à ce moment-là augmenterait de 300 à 350 personnes d'un seul coup.

M. LEVESQUE (Laurier): Ce qui voudrait dire que...

M. GIGNAC: Il y a l'augmentation normale suivant les lignes de production qui pourraient être ajoutées par après. Quand on parle du montant de $19 millions ou de $18,6 millions qu'on dépense pour améliorer la production de Dosco, cela comprend entre autres un dédoublement du laminoir à barre qui existe présentement à Contrecoeur et pour lequel les fondations sont en place. Le laminoir n'est pas là mais les fondations sont en place. Alors, évidemment, si on installe un autre laminoir à barre, cela requiert une main-d'oeuvre additionnelle.

M. LEVESQUE (Laurier): En gros, alors, ce pourrait être entre 2,500 et 3,000 employés dans quatre ans.

M. GIGNAC : A peu près. Disons dans six ans. M. LEVESQUE (Laurier): Avec le primaire?

M. GIGNAC: Avec le primaire.

M. LE PRESIDENT: A-t-on encore des questions à poser à M. Graveline?

M. LESAGE: Je voulais simplement demander à M. Graveline s'il voulait être assez aimable de nous rendre le même service qu'il nous a rendu il y a deux semaines lorsqu'il nous a préparé un tableau sur papier au clavigraphe?

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on passe aux question de M. le maire Gaudet à l'adresse de M. Gignac?

M. LESAGE: M. le Président, M. le Premier Ministre, je pense bien qu'en répondant à la première question de monsieur le maire, M. Gignac, inévitablement, devra répondre à la mienne. Je demande à M. Gignac si c'est exact. Je lui demandais de faire l'exposé du projet qui est en filière. Je lis la première question de monsieur le maire et il est clair qu'il ne peut y répondre sans faire cet exposé. Alors, nous pouvons fort bien procéder en suivant les questions de monsieur le maire, ce qui implique une réponse à ma question. Alors, à vous laparole, M. le Maire.

M. GAUDET: M. le Premier Ministre, MM. les Ministres et Députés, messieurs de Sidbec, comme vous le voyez, nous avons préparé un questionnaire assez rapidement; on ne pense pas qu'il soit parfait. Mais si on donne réponse à toutes les questions qui y sont inscrites, nous serons satisfaits. Il n'y a aucun doute que M. Gignac et son équipe travaillent de pair pour la réalisation de quelque chose. Je pense bien que ce qui nous intéresse encore le plus après cette foule de questions, c'est de savoir exactement, et dans le plus bref délai possible, si la sidérurgie doit s'établir chez nous ou ailleurs. Nous ne sommes pas indifférents à la question. Si nous posons toutes ces questions, c'est parce que nous aimerions aussi avoir quelque chose chez nous, comme le démontrent des copies de journaux que nous vous avons transmises ce matin. Nous avons toujours eu l'espérance que la sidérurgie du Qué -bec viendrait bel et bien chez nous. Je passe à la première question; Quels sont les avantages comparatifs sur le plan financier de l'achat de Dosco ou du complexe d'allure beaucoup plus modeste pour Sidbec, si le complexe s'établit à Bécancour?

On a vu, par l'exposé de l'expert comptable, que d'un côté ou de l'autre, le gouvernement doit accorder son aide presque en égalité.

M. GIGNAC: Si vous pouvez me le permettre, M. le Maire, j'aimerais vous exposer, dans ses grandes lignes, le projet d'allure plus modeste qu'on pourrait éventuellement, ou le cas échéant, établir à Bécancour. Les préalables qu'on doit poser au départ sont les mêmes ou à peu près les mêmes que pour le projet de Sidbec-Dosco. D'abord, contribution du gouvernement de $60 millions à raison de $12 millions par année pendant cinq ans dans Sidbec. Et cela requiert la possibilité de pouvoir financer soit à moyen terme ou soit à long terme et presque au départ, une somme d'environ $20 millions. Ce sont deux préalables très importants.

M. DOZOIS: Cela s'applique aux $60 millions.

M. GIGNAC: Oui. Dans ces conditions, nous pourrions installer à Bécancour un laminoir à barres et fer marchand d'une capacité nominale annuelle de 250,000 tonnes avec une fournaise électrique utilisant des ferrailles ou de la fonte achetée en grande partie sur le marché québécois.

L'aciérie électrique comprendrait un four à arc de 85 tonnes capable de produire environ 215,000 tonnes par année. Il y aurait une installation de coulée continue à six lignes pour produire des billettes de six par six. Et enfin le laminoir à barre dont j'ai fait mention un peu plus haut, qui produirait des ronds à béton lisses ou crénelés d'un demi-pouce à deux pouces et demi de diamètre, des carrés, des plats et cornières, enfin tous les fers marchands, jusqu'à quatre pouces.

M. JOHNSON: Combien d'employés?

M. GIGNAC: Au départ, environ 350 à 400 employés. Le coût, $80 millions, inclut les frais d'inge'nérie, enfin inclut tout: l'intérêt durant la construction, le fonds de roulement et, je crois, une partie des frais de démarrage du moins ceux que l'on peut prévoir.

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que c'est plus ou moins parallèle auprojet Sidbec-Dosco? Autrement dit, ça donnerait à peu près les mêmes produits?

M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: Mais, on n'aurait que des profilés, on n'aurait pas de tôle à ce moment-là.

M. GIGNAC: Il n'y aurait pas de tôle, c'est-à-dire que le projet Sidbec-Bécancour, couvre des produits qui sont produits par Dosco.

M. JOHNSON: Ah, bon!

M. GIGNAC: Mais, pas tous les produits.

M. LESAGE: Maintenant, il n'y a pas de transformation primaire du minerai? Vous vous alimentez...?

M. GIGNAC: De la ferraille et de la tonte.

M. LESAGE: II en existe un à Montréal, un four électrique. Cela c'était à Stelco ou à Dosco?

M. GIGNAC: A Dosco.

M. LESAGE: A Dosco.

M. GIGNAC: A Montreal Works.

M. LESAGE: A Montreal Works, il y en a un.

M. GIGNAC: Deux.

M. LESAGE: II y en a deux où l'on utilise la fonte et la ferraille.

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: Et là, la coulée continue est possible.

M. GIGNAC: Nous avons la coulée continue à Montréal.

M. LESAGE: Au Montreal Works? M. GIGNAC: Actuellement, oui.

M. LESAGE: Ce qui n'a a pas été ou ce qui ne s'est pas révélé possible techniquement, c'est la coulée continue à partir du minerai de fer, si je comprends?

M. GIGNAC: C'est-à-dire que c'est la coulée continue pour la tôle fine.

M. LESAGE: Pour la tôle fine?

M. GIGNAC: Pour la tôle forte, on peut avoir la coulée continue.

M. LESAGE: La tôle forte et pour les fers marchands.

M. GIGNAC: Pour les fers marchands. Mais, pour la tôle fine, le procédé n'est pas au point encore.

M. LESAGE: Le projet antérieur, qui était beaucoup plus considérable, prévoyait au départ, c'est-à-dire le projet KSAL, ou son amendement prévoyait la production de fer marchand et de tôles fortes au départ, et nonpas les tôles fines, n'est-ce pas?

M. GIGNAC: C'est ça. Maintenant, si vous me permettez de continuer...

M. LESAGE: A partir du minerai.

M. GIGNAC: Oui, oui, avec des hauts fourneaux conventionnels et des convertisseurs à l'oxygène.

M. LESAGE: C'est ça.

M. GIGNAC: La rentabilité du projet que je viens de vous décrire, sur une période de treize ans, nous allons vous la donner d'une façon comparative. Le profit, sur une période de treize ans, d'une entreprise comme celle qu'il serait possible d'installer à Contrecoeur, est du tiers du profit de Dosco.

UNE VOIX: Bécancour.

M. JOHNSON: C'est Bécancour.

M. GIGNAC: Bécancour, excusez-moi.

M. JOHNSON: D'accord.

M. GIGNAC: Et le « cash flow », ce qui est assez important aussi, serait lui aussi le tiers du projet Sidbec-Dosco à Contrecoeur.

M. DE MERS: Est-ce que ce serait parce que vous ne fabriqueriez pas de tôle?

M. GIGNAC: C'est parce que l'ensemble... Evidemment, on compare une chose qui est déjà en marche avec une installation qui est quand même limitée dans les produits qu'elle peut mettre sur le marché et qui est limitée aussi par la quantité qu'elle peut produire et par la pénétration des marchés.

Si nous démarrons à Bécancour, il faut penser I un pourcentage de pénétration de marché. C'est assez difficile d'apprécier les projections. Tous ont quand même un peu la tendance de vouloir faire coller le marché à la capacité de production de l'usine. Nous essayons de nous en défendre mais c'est assez difficile.

L'étape suivante, parce qu'il y aura une étape suivante, c'est-à-dire aussitôt que l'usi-

ne de Bécancour fait des profits et fournit suffisamment de fonds pour le permettre, nous pourrions, à ce moment-là, passer à l'installation d'un laminoir à tôle forte d'une capacité de 480,000 tonnes, avec les fournaises électriques appropriées et de toute évidence l'utilisation de matériaux préréduits, ou de fer métallisé, si vous voulez, convertis sur place. Le coût total additionnel de ces installations comprenant frais « d'ingénérie » et tout le reste, s'élèverait entre $110 millions et $120 millions. Sa rentabilité, si on le prend sur une période donnée comparable au projet Sidbec-Dosco, serait, au point de vue des profits, de 40% de celui de Dosco et le « cash flow » serait aussi à peu près de 40% de celui de Dosco.

Cependant, Je dois aussi souligner que, dans les deux cas, les premiers profits ne seraient réalisés qu'après cinq ans, compte tenu des projections de marché que nous avons faites.

M. LESAGE: Les $80 millions que vous avez mentionnés au départ pour la première phase, c'est le coût global, ça?

M. GIGNAC: Oui, M. Lesage.

M. LESAGE: Parce que quand nous pensons à l'achat de Dosco, c'est $60 millions moins la partie de capital des $7.2 millions. Votre projet Sidbec-Dosco...

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: ... c'est $60 millions moins les $7.2 millions.

M. GIGNAC: Bien là, ça dépend comment on le considère.

M. LESAGE: Non, mais je parle du coût, n'est-ce pas?

M. GIGNAC: Oui, d'accord.

M. LESAGE: Du coût au gouvernement, $60 millions moins la partie de capital des $7.2 millions plus la dette à long terme, la dette à long terme dont on soustrait la partie de $7.2 millions qui est un montant de capital. Mettons cinq si vous voulez, 38, 33 et 5, il y a certainement $2 millions ou $3 millions d'intérêt.

M. GIGNAC: Je pourrais peut-être ajouter... M. LESAGE: Près de $100 millions.

M. JOHNSON: M. Caron, ce sont des obligations sériées, ça? Un fonds d'amortissement dans la dette budgétaire.

M. CARON: Oui, oui.

M. JOHNSON: Et les $7.2 millions, c'est du capital remboursé, ça.

M. LESAGE: Est-ce qu'il y a de l'intérêt?

M. CARON: Les versements, d'après les échéanciers, comprennent le fonds d'amortissement.

M. LESAGE: Alors, ça comprend l'intérêt.

M. DOZOIS: Intérêt et capital ou seulement le capital?

M. CARON: Non, le capital seulement.

M. LESAGE: Le capital seulement. $31 millions plus $60 millions, ça fait $91 millions. Le gouvernement injecte $60 millions; Sidbec assume une dette à long terme en dehors des $60 millions, qui est de $31 millions, ça fait $91 millions. Je vous dis que c'est suivant le plan Sidbec-Dosco, je n'ai pas dit pour acquérir, comprenons-nous bien, c'est pour établir, tandis que, dans l'autre cas, pour l'établissement de départ à Bécancour, c'est $80,000,000.

C'est 20 plus 60, ce qui donne 80. Non, d'accord, je pense bien que nous ne sommes pas pour recommencer à faire toutes les différences à chaque fois que nous parlons des coûts. Il est clair que ce n'est pas la même chose.

M. GIGNAC: Je pourrais peut-être vous faire remarquer ou vous informer aussi que si nous appliquons au projet Sidbec-Bécancour les mêmes critères que nous avons pris pour Sidbec-Dosco, le décalage, dans le temps de la deuxième étape, peut être assez long. Je ne crois pas que la compagnie pourrait être en mesure de songer sérieusement à la deuxième étape, avant d'avoir établi, je dirais d'une façon définitive, qu'elle peut faire des profits. Et même à cela, je crois qu'il va falloir aussi ramasser un peu de profit, faire une petite réserve, un peu comme nous faisons dans le projet Dosco, sur laquelle nous pourrions nous appuyer pour aller éventuellement sur le marché de l'argent, d'une façon ou de l'autre, pour être en mesure de financer la deuxième étape qui s'élève à un montant d'environ $120 millions.

Si nous considérons les conditions actuel-

les du marché, vous conviendrez que c'est une chose qui ne sera pas facile. Je crois avoir répondu, en gros du moins, à la première question qui nous a été posée. Maintenant pour éviter à M. le maire de venir...

M. LESAGE: Sur la première question, sur le détail de la première question, vous dites que vous avez étudié cinq, six ou même sept projets, à partir de la date de votre nomination.

M. GIGNAC: Huit.

M. LESAGE: Huit à partir de la date de votre nomination.

M. GIGNAC: Non, non. A partir de ma nomination, six.

M. LESAGE: Six. Est-ce que parmi ces projets, vous en avez élaboré un qui aurait été rentable et qui aurait été moins dispendieux que celui dont vous avez hérité, le 25 mal? Je pense que nous nous comprenons bien quand je vous parle de cela.

M. GIGNAC: Les investissements des projets que nous avons étudiés sont tous beaucoup moins considérables que ceux dont j'ai hérité comme vous dites, ils sont tous plus rentables.

M. LESAGE: Est-ce qu'il y en a parmi ces projets qui comportaient — peut-être pas au moment du départ, mais à une date assez rapprochée du départ — en nombre d'années, la transformation du minerai?

M. GIGNAC: Il y a trois de ces projets-là, M. Lesage, qui comportent la transformation du minerai.

M. LESAGE: Et le meilleur marché des trois était pour une production de combien?

M. GIGNAC: 800,000 tonnes environ, 850,000 éventuellement.

M. LESAGE: De tôles fines, de tôles fortes et de...

M. GIGNAC: De divers produits, c'est plutôt de la tôle forte et des fers marchands.

M. LESAGE: Tôles fortes et fers marchands. Alors 800,000 tonnes et quel était l'investissement requis?

M. GIGNAC: Il y en a un, c'était $226 millions, l'autre...

M. LESAGE: Cela, c'est revenir à peu près au projet du comité de sidérurgie.

M. GIGNAC: Oui, mais pas avec les mêmes produits.

M. LESAGE: Non, parce qu'on parlait de tôles fines et on assumait que la coulée continue serait possible pour les tôles fines, à ce moment-là, au moment où le comité de sidérurgie a fait son rapport, en 1964. Ce n'étaient pas les mêmes produits, je suis d'accord.

M. GIGNAC: II y a deux projets qui se ressemblent, mais pour lesquels nous avons pris des voles différentes, justement pour la transformation du minerai. Il y en a un pour lequel on doit investir environ $226 millions, cela comprend tout, même la dette que Sidbec doit au gouvernement. Il y a un autre projet qui est à peu près semblable, sinon que la façon de traiter le minerai est différente et qui requiert des investissements d'à peu près $210 millions.

M. LESAGE: Lorsqu'à la fin de février 1967, vous avez déclaré que le « complexe sidérurgique à l'état de projet, qui doit être construit à Bécancour, à mi-chemin entre Québec et Montréal, sur la rive sud du Saint-Laurent, est tout ce qu'il y a de plus viable, a déclaré hier dans un interview M. Jean-Paul Gignac, président de Sidbec », et c'est Le Nouvelliste, je pense que vous en avez une copie devant vous, Le Nouvelliste du 1er mars 1967. A ce moment-là quel projet était sur votre table de travail?

M. GIGNAC: Ce qui est indiqué ici et ce que j'ai déclaré, cela peut être différent, cela arrive.

M. LESAGE: C'est pour cela que je vous ai envoyé une copie du journal.

M. GIGNAC: Oui, je vous remercie, j'en ai eu trois.

M. LESAGE: II n'aurait pas été juste que je le fasse, sans que vous ayez l'occasion de faire des précisions, s'il y a lieu.

M. GIGNAC: Je pense bien que ce qui est passé est passé. Mais je n'ai jamais fait de déclaration, à ma connaissance, sur la Sidbec sinon au moment où officiellement nous avons fait part de notre intention d'examiner les installations de Dosco. J'ai dit officiellement une fois, à la Chambre de commerce de Montréal — je ne me souviens pas exactement de la

date — que je croyais qu'une sidérurgie pouvait être rentable au Québec. Je n'ai sûrement pas spécifié l'endroit. On m'avait demandé à ce moment-là si j'avais demandé la permission à Stelco. J'ai dit non, que je croyais que je n'avais pas de permission à demander à Stelco. Je n'ai jamais déclaré qu'une sidérurgie à Bécancour pouvait être rentable. Mais j'ai pu dire qu'un complexe sidérurgique au Québec était rentable. Mais je n'ai sûrement pas mentionné l'endroit.

M. LESAGE: Mais vous croyez aujourd'hui qu'une sidérurgie à Bécancour peut être rentable?

M. GIGNAC: Sûrement que je le crois. Nous procédons actuellement d'une façon comparative.

M. LESAGE: Oui, oui. D'accord.

M. LEVESQUE (Laurier): Ce que vous établissez, si j'ai bien compris, c'est que ce serait plus coûteux, plus lent et, si la rentabilité se rejoignait, ce serait à beaucoup plus longue échéance, dans le cas de Bécancour, ce que vous appelez votre tableau comparatif là...

M. GIGNAC: C'est exact.

M. LEVESQUE (Laurier): Dans le cas de Bécancour que dans le cas d'un départ avec Sidbec-Dosco tel que vous...

M. GIGNAC: C'est exact et je crois que c'est très normal. C'est facile de faire une sidérurgie sur le papier, mais quand...

M. LEVESQUE (Laurier): Ah, cela, nous en avons eu!

M. LESAGE: ... M. Filion a déjà dit, dans une conférence, que cela prenait une demi-heure.

M. GIGNAC: Mais il faut bien penser que construire un complexe industriel, même de très petite envergure, cela représente des problèmes considérables et des dépenses d'énergie inappréciables. Avant de s'aventurer dans des choses de cette nature, il faut y penser comme il faut. Cela requiert beaucoup d'argent et beaucoup de patience aussi de la part de ceux qui attendent et de la part de ceux qui le font. Et de compréhension, devrais-je ajouter.

M. JOHNSON: La deuxième question, monsieur...

M. GAUDET: Est-ce que Dosco tomberait en failllite, si le gouvernement érige un complexe intégré à Bécancour?

M. GIGNAC: La réponse est non. M. LE PRESIDENT: La troisième?

M. GAUDET: Est-ce que la province a des obligations envers cette compagnie?

M. JOHNSON: M. Gignac, vous me permettez une question. La question est: Est-ce que Dosco tomberait en faillite si le gouvernement érige un complexe intégré à Bécancour? Votre réponse est: Non. Est-ce que cela veut dire qu'il y a de la place pour les deux?

M. GIGNAC: Cela veut dire, M. Johnson, qu'éventuellement, théoriquement du moins, il y a de la place pour les deux. Mais cela ferait deux sidérurgies séparées et les forces ou les pouvoirs d'achat seraient nécessairement divisés.

M. DEMERS: Comme ça, ça voudrait dire que vous... compagnie si vous bâtissez.

M. GIGNAC: Non, je n'ai jamais dit ça. M. DE MERS: Non, je vous pose la question. M. GIGNAC: Non, la réponse est non là aussi.

M. DEMERS: C'est parce que la question n'a pas été clarifiée.

M. DOZOIS: La question de concurrence, M. Gignac. Est-ce que, quand vous projetez l'étatablissement d'une sidérurgie au Québec, vous y voyez non des obstacles insurmontables, mais tout au moins des obstacles sérieux du fait que la concurrence de Dosco continuerait?

M. GIGNAC: Oui, il y aurait des obstacles sérieux, je crois, et de plus il y aura non seulement des obstacles mais des désavantages sérieux pour les deux parties. J'ai en note la question que vous avez posée à la dernière assemblée, M. Dozois, et je peux peut-être y répondre tout de suite ou plus tard.

M. DOZOIS: Peut-être... c'est dans le contexte actuel, puisqu'on étudie le projet de Bécancour.

M. JOHNSON: C'est dans le contexte actuel.

M. GIGNAC: Il y a plusieurs façons d'aborder le problème. Si nous prenons, si je m'en tiens aux choses les plus faciles et les plus évidentes, je préférerais tout d'abord parler des produits mis en marché par Dosco et ceux qui seraient éventuellement mis en marché par Bécancour si Bécancour existait.

Dans le domaine des tôles fortes, présentement Contrecoeur ne produit pas de tôles fortes. Donc il n'y a pas d'effet immédiat si à Bécancour on produit éventuellement de tôles fortes.

Par contre...

M. JOHNSON: Eventuellement c'est quelle année, ça? Le plus proche.

M. GIGNAC: Oh! cela peut être à peu près 1977, 1978 peut-être 1979. Dans le domaine des fers marchands, c'est-à-dire les cornières, les ronds à béton, le fil-machine, etc., à ce moment-là Bécancour et Contrecoeur seraient en compétition directe sur les marchés québécois, enfin sur tous les marchés.

M. BOURASSA: Mais le marché est déprimé ces années-ci, peut-on dire, pour les aciers marchands. Avec le fait que le métro soit complété et puis que les travaux publics soient au ralenti.

M. GIGNAC: D'accord, mais c'est un marché qui fluctue énormément comme vous le savez peut-être.

M. BOURASSA: Oui, oui.

M. GIGNAC: Il peut peut-être se remplumer s'il y a les tours de transmission de l'Hydro-Québec.

M. BOURASSA: Ou un changement de gouvernement.

UNE VOIX: Ne vous fiez pas là-dessus pour faire...

M. JOHNSON: Ou les prochains gouvernements, c'est le crédit social qui va imprimer l'argent.

M. LESAGE: Mais, quand même, vous avez mentionné l'Hydro-Québec. Il est clair que le gouvernement, étant intéressé, il y a un marché captif à Québec pour les aciers marchands d'environ 100,000 tonnes, avez-vous dit, par année?

M. GIGNAC: Oui, c'est une moyenne, M.Le-sage.

M. LESAGE: Oui, une moyenne, c'est entendu, parce que cela fluctue. Vous l'avez dit.

M. GIGNAC: Oui, oui.

M. BOURASSA: Est-ce que ça comprend 100,000 tonnes, par exemple, une société comme Marine Industries qui est reliée à la SGF et...

M. GIGNAC: Une société comme Marine Industries? Non, cela ne comprendpas... L'acier requis par Marine Industries n'est pas inclus dans les 100,000 tonnes. Lorsque nous avons fait les études, cela n'a pas été pris en considération.

M. BOURASSA: Seulement les wagons de chemin de fer, je pense, comme on en parlait, c'est 25,000 tonnes.

M. BOURASSA: Sans compter les turbines et les bateaux et...

M. GIGNAC: Bien les turbines, c'est plus spécial.

M. BOURASSA: Oui, là c'est plus... la construction des bateaux?

M. GIGNAC: La construction des bateaux, cela demande de la tôle forte.

M. JOHNSON: M. Gignac, vous me permettrez une très brève question. En posant l'hypothèse que pour Churchill Falls l'entente se fait, est-ce que c'est Truscon, une des installations de Dosco, si c'était acheté par vous, qui pourrait faire les tours, l'acier pour les tours?

M. GIGNAC: Truscon pourrait être en mesure de faire l'acier pour les tours. Maintenant je dois dire, pour être honnête, qu'il y a au moins deux autres organisations au Québec qui peuvent faire la même chose.

M. JOHNSON: Lesquelles?

M» GIGNAC: Il y a une compagnie ici à Québec qui s'appelle Dynamic Industries et il y a Lockwell Forges à Montréal, M. Fast. Mais disons que ce n'est pas impossible qu'à travers Truscon on centralise certaines productions avec des compagnies déjà existantes, surtout

dans le domaine des tours de transmission ou de la fabrication d'acier.

M. JOHNSON: Un marché de combien, en tonnes et en dollars? Environ?

M. GIGNAC: 250,000 à 300,000 tonnes. Pas par année. Pour l'ensemble.

M. JOHNSON: Pour l'ensemble de ce projet.

M. GIGNAC: Sur une période d'à peu près quatre ou cinq ans.

M. DOZOIS: Si on décidait de prendre des procédures pour un projet à Bécancour, est-ce qu'on pourrait fournir...?

M. GIGNAC: On pourrait peut-être fournir pour une année au maximum. Ce serait la fin. Si nous prenions aujourd'hui la décision d'aller de l'avant avec Bécancour, il faut au moins compter trois ans avant d'avoir une usine qui fonctionne et qui soit un peu rodée. Cela nous mène tout de suite en 1971 et, à ce moment-là, une bonne partie des commandes de l'Hydro-Québec auront été données et seront même fabriquées. C'est un des avantages indéniables de pouvoir avoir Dosco parce que eux peuvent produire immédiatement, s'ils ont une partie de ces commandes. Maintenant, si vous me permettez de continuer un peu mon exposé.

M. DOZOIS: Est-ce sur la question que je vous ai posée?

M. GIGNAC: C'est ça. Je crois que la main-d'oeuvre est un aspect qu'il faut considérer. Evidemment, je le considère dans un contexte provincial, même si je suis natif de la Mauri-cie. Je crois que pour les cinq premières années, s'il y avait un laminoir ou une petite installation mise en marche à Bécancour, il n'y aurait ni perte ni gain au point de vue de la main-d'œuvre comparativement à ce que nous avons aujourd'hui. Ce qui veut dire, en d'autres mots, qu'il y aurait saturation ou sursaturation des marchés et, évidemment, il faudrait que Dosco en perde si Bécancour en gagne. Alors, ce ne serait que beaucoup plus tard, dans six ou sept ans, que l'équilibre se rétablirait à cause de l'accroissement normal de la demande ou de la consommation dans le domaine des fers marchands. Evidemment, il y aurait accroissement de la main-d'oeuvre dès qu'un laminoir à tôle forte serait installé à Bécancour,, Mais je dois vous dire du même coup que ce laminoir peut aussi être installé à Contrecoeur.

M. LEVESQUE (Laurier): Autrement dit, au départ, cela s'équivaut?

M. GIGNAC: Oui, absolument.

M. LEVESQUE (Laurier): Si vous tenez compte des deux marchands...

M. GIGNAC: Si Bécancour produit et vend et qu'il y en a deux plutôt qu'un pour fournir un marché donné, il va y avoir une surproduction et un des deux en souffrira. Alors, il faudra qu'il y ait une diminution de main-d'oeuvre quelque part. Mais il n'y a pas de gain net ni de perte nette. Je vous ai fait un peu mention du marché et je pense bien que je n'ai pas besoin de vous exposer longuement qu'un marché divisé entre deux sociétés de production est moins intéressant qu'un marché unifié dans une unité de production.

Au point de vue financier — je pense en fonction du contexte où on vit présentement — si Dosco continue ses opérations malgré une présence de Sidbec à Bécancour, et comme je l'ai dit tout à l'heure, nous avons raison de croire que Dosco continuera, je crois qu'il sera plus difficile à ce moment-là de justifier notre position vis-à-vis des financiers et de les convaincre d'investir dans de la dette à long terme pour Bécancour.

Alors, à ce moment-là, la conséquence immédiate sera qu'il faudra retarder l'installation de nouveaux équipements à Bécancour jusqu'au moment où la petite compagnie modeste aura fait assez de profits pour pouvoir financer ses investissements, ou disons une grande partie de ses investissements.

C'est une situation, je crois, qui peut durer entre cinq et dix ans. Pour ce qui est de la rentabilité, j'en ai dit quelques mots aussi tout à l'heure, il nous semble assez clair qu'avec un départ rapide dans l'investissement à Contrecoeur, nous pouvons assez rapidement, sur une période de temps très peu étendue, d'abord créer un petit « cash flow » et ensuite faire des profits. Je dois vous dire que je voudrais insister sur le fait qu'après cinq ans, le « cash flow » produit par Dosco à Contrecoeur serait extrêmement attrayant et permettrait à la compagnie de faire tous les financements nécessaires pour installer quelque installation que ce soit dans l'acier primaire, même la plus dispendieuse, c'est-à-dire les hauts fourneaux ou la moins dispendieuse, utilisant les minerais préréduits.

Chaque fois qu'on parle d'un facteur dont il faut tenir compte pour établir les marchés, établir la rentabilité, établir la finance, il faut tou-

jours diviser par deux lorsque nous avons deux installations. Et enfin, ce que je peux vous dire, et c'est, je crois, plus qu'une opinion personnelle, j'ai un membre du conseil d'administration à côté de moi et, s'il n'estpas d'accord, il pourra me le dire. Je crois qu'avec Dosco, on pourra arriver en 1980 avec une sidérurgie complètement intégrée, qui aura une gamme de produits qui ressemblera étrangement à celle mise de l'avant par le comité de sidérurgie, qui sera éminemment rentable, qui n'aura à peu près pas de dettes à long terme en cours et qui aura tout l'argent voulu pour voir à son expansion ou au développement de l'industrie secondaire du Québec. Je pense, comme président de Sidbec et comme représentant des membres de mon conseil d'administration, que ce sont des avantages que nous ne pouvons sûrement pas ignorer.

Je ne sais pas si ça répond un peu à votre question, M. Dozois?

M. DOZOIS: Je voudrais vous poser une question, si vous me le permettez. Je pense que l'installation d'une aciérie dans le Québec, en soi est une chose intéressante pour la main-d'oeuvre qui sera employée etc. Mais je pense qu'également il faut tenir compte du fait que l'établissement d'une aciérie pourra créer des industries primaires ayant une production en mesure de fournir la matière première des industries secondaires. Je pense que c'est un des aspects intéressants de l'investissement dans une aciérie.

D'après vous, M. Gignac, est-ce qu'il y aurait plus de chance de créer des industries secondaires au Québec avec deux installations, Bécancour et Dosco, ou bien avec une seule installation, soit à Bécancour ou avec Dosco?

M. GIGNAC: Je vais vous donner une opinion personnelle. Je crois sincèrement qu'un complexe est suffisant actuellement au Québec. Avec un complexe on a beaucoup plus de chances éventuellement d'être en moyen de mousser l'éclosion d'industries secondaires que s'il y avait deux complexes qui seraient peut-être rentables mais qui seraient un peu plus marginaux.

M. DOZOIS: Deux complexes n'empêcheraient pas la création d'industries secondaires.

M. GIGNAC: Non, mais ça serait un peu plus difficile et peut-être un peu plus long aussi. Voyez-vous, des compagnies comme Stelco, Algoma et Dofasco ont créé ou à peu près toutes, des marchés captifs et ces marchés captifs dont je vous fais mention sont nécessairement des industries secondaires. Elles alimentent des industries dont elles sont les propriétaires. Il faut être en moyen pour faire des choses comme ça.

M. BOURASSA: Le taux de rendement de Stelco et Dofasco, est-ce que vous l'avez étudié? Est-ce qu'il a tendance à baisser?

M. GIGNAC: Nous l'avons bien étudié.

M. BOURASSA: Est-ce qu'il a tendance à baisser?

M. GIGNAC: Bien en 1967, comme vous le savez sûrement, le taux de rendement de toutes les sidérurgies au monde, je crois, a considérablement diminué. Mais si j'ai bien lu dans les journaux les rapports qui ont été faits jusqu'à présent sur les sidérurgies canadiennes en particulier, l'allure des profits pour l'année en cours sera beaucoup meilleure que celle de l'an dernier.

M. LESAGE: Stelco est établie dans le Québec?

M. GIGNAC: Stelco a trois usines de fabrication au Québec dont deux à Contrecoeur à côté de celle de Dosco.

M. LESAGE: II y a déjà au moins Dosco et Stelco; il y a déjà deux compagnies qui produisent l'acier.

M. GIGNAC: Oui, oui, qui font du laminage d'acier.

M. LESAGE: Ils font du laminage.

M. JOHNSON: Elles emploient à peu près 4,000 employés? M. Gérin-Lajoie, vous avez à peu près 4,000 membres?

M. GERIN-LAJOIE: Non, Stelco a moins d'employés que Dosco. C'est entre 1,000 et 1,500.

M. JOHNSON: Y inclus ceux de Montréal?

M. GERIN-LAJOIE: Y inclus ceux de Montréal.

M. LESAGE: M. Gignac, est-ce que c'est Stelco ou Dosco qui, à Montréal, fait le tuyau continu?

M. GIGNAC: C'est Dosco. M. LESAGE: C'est Dosco.

M. GIGNAC: C'est Dosco qui fait du tuyau à Montréal. Stelco est à Contrecoeur pour son tuyau.

M. LESAGE: Mais à Montréal? C'est parce que j'ai déjà visité l'usine de fabrication de tuyau continu. C'est Dosco, je crois.

M. GIGNAC: Je sais que Dosco a d'excellentes organisations de fabrication de tuyau à Montréal.

M. LESAGE: Oui, c'est Dosco.

M. JOHNSON: Et Atlas Steel, M. Gignac?

M. LESAGE: Non, ce n'est pas Atlas, ça.

M. JOHNSON: Qu'est-ce que fait Atlas?

M. GIGNAC: Les aciers spéciaux.

M. LESAGE: Les aciers inoxydables.

M. GIGNAC: Atlas ne fait pas de tuyau.

M. LEVESQUE (Laurier): ... On se demande ce qu'elle fait.

M. LESAGE: De l'acier inoxydable à partir du minerai de fer de Havre-Saint-Pierre.

M. GIGNAC: Ce n'est pas à partir...

M. LESAGE: Ce n'est pas à partir du minerai de Havre-Saint-Pierre, Atlas?

M. DUFRESNE: Excusez-moi, M. Lesage, Atlas, à Tracy, fait de l'acier inoxydable surtout à partir de ferraille d'acier inoxydable et se sert d'un certain apport, je crois, de fonte de Quebec Iron and Titanium mais c'est un apport qui est faible.

M. LESAGE: De Quebec Iron and Titanium.

M. DUFRESNE: L'apport de fonte de Quebec Iron and Titanium est faible.

M. LESAGE: Par rapport à l'utilisation de la ferraille.

M. DUFRESNE: ... à l'utilisation de la ferraille.

M. LESAGE: Pour la fabrication de l'acier inoxydable d'Atlas Steel.

M. DUFRESNE: Exactement.

M. VINCENT: M. Gignac, vous avez mentionné tout à l'heure que si le marché Sidbec-Dosco était conclu, vous en arriveriez à avoir un complexe intégré, une sidérurgie intégrée au Québec vers 1980.

M. GIGNAC: Je m'excuse, ce n'est pas tout à fait ça que j'ai dit. Cela va être intégré avant ça mais je dis que les prévisions s'échelonnent sur 13 ans. Alors, je dis qu'en 1980 nous aurons au Québec, avec Dosco-Contrecoeur, une sidérurgie intégrée. J'ai dit éminemment, enlevons le mot éminemment et puis disons très rentable. Maintenant, si l'autre projet...

M. LEVESQUE (Laurier): Quelle différence y a-t-il entre éminemment et puis très?

M. GIGNAC: Question d'appréciation.

M. VINCENT: Mais si l'autre projet dont vous parliez tout à l'heure était mis sur pied à Bécancour, vers quelle date arriveriez-vous au même résultat?

M. GIGNAC: Passé dix ans ou douze ans. Il faut réellement naviguer dans les chiffres, mais je dirais que le minimum, ce serait 15 ans, peut-être 20 ans, enfin de 15 à 20 ans.

M. DOZOIS: Avec un investissement supérieur?

M. GIGNAC: Avec un investissement supérieur. J'insiste pour vous dire que la sidérurgie à Contrecoeur sera intégrée, nous le prévoyons entre 1972 et 1974. Mais nous ferons des profits à ce moment-là, mais disons que nous tirerons le maximum des profits vers 1978, 1980. Et à ce moment-là, je crois que nous serons en position de prendre la direction qui sera la plus avantageuse pour nous et pour la province aussi.

Je voudrais peut-être juste faire un petit détour, M. le Président, si vous me le permettez, pas pour vous prouver des choses, mais pour vous dire que nous avons toujours eu à l'esprit les politiques qui ont été données au gouvernement par le Conseil d'orientation économique et qulpeuvent se résumer en trois points très précis: Mettre sur pied une entreprise sidérurgique qui soit en elle-même rentable; établir une entreprise dont les centres de décision

sont localisés dans le Québec, en vue d'atteindre les objectifs économiques de la province: tenir compte des éléments de sidérurgie existant au Québec, en tentant de relier certaines de leur fabrication à celle que nous projetons.

Je dois vous dire que c'est de ces objectifs dont nous nous sommes inspirés pour arriver au résultat que nous avons aujourd'hui et je ne crois pas que ce que nous avons à offrir soit du tout incompatible avec ces objectifs.

M. BOURASSA: Il y a un journal de Toronto, je crois, qui disait que vous auriez obtenu un prêt de Hawker Siddeley à des taux d'intérêt favorables, pour aider votre « cash flow », parce que vous disiez que votre « cash flow » serait excellent après cinq ans. Mais d'ici cinq ans, du moins durant les premières années, étant donné le paiement aux actionnaires et comme vous avez droit seulement à $12 millions par année ce serait plutôt serré. Vous pouvez confirmez ou vous ne pouvez pas...

M. GIGNAC: Disons que c'est un as dans nos mains» En effet, lorsque nous avons signé l'entente avec Hawker Siddeley, ils ont accepté de prendre une note à court terme, de cinq ans, à un taux d'intérêt assez intéressant pour un montant de $5 millions.

M. BOURASSA: Le taux d'intérêt, vous ne pouvez pas le mentionner?

M. GIGNAC: Sept pour cent.

M. BOURASSA: D'accord, merci.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que nous pouvons passer à l'article 3?

M. GAUDET: Si vous ne faites pas de différence, nous allons passer à l'article 5, pour rester dans le même ordre d'Idée et nous reviendrons à l'article 3 après. L'article 4, nous y avons répondu en répondant à l'article 2. Est-ce que l'établissement du complexe construit de toutes pièces ne permettrait pas d'avoir un équipement plus moderne et plus compétitif s'il est construit à Bécancour?

M. GIGNAC: Ce que je peux vous dire là-dessus, c'est que nous avons pris en considération, les installations, les équipements actuels de Dosco, à Contrecoeur, à Montréal et à Toronto. Nous les avons appréciés et les résultats qui en sont sortis ceux dont je vous parle depuis trois séances. A moins de vous faire un résumé complet de tout notre projet, il serait assez difficile de vous prouver, laminoir par laminoir, ce que nous allons faire d'ici 10 ans. Vous voyez au tableau un montant de $18 millions qui devront être réinvestis dans les installations existantes. Ces montants d'argent serviront d'une part à améliorer ces installations et, d'autre part, à augmenter dans certains cas, la production.

Il serait assez difficile pour moi d'aller plus loin que cela dans le moment, de vous donner plus d'explications sans tomber dans les détails techniques qui endormiraient le comité.

M. GAUDET: Il n'y a pas de possibilité d'établir si cela serait réellement compétitif avec un équipement plus moderne?

M. GIGNAC: J'ai dit tout à l'heure qu'en partant à Bécancour, nous obtenions 1/3 du profit que nous espérions avoir à Dosco compte tenu des équipements modernes à Bécancour et que si nous allions à l'étape suivante, à ce moment-là nous produirions à peu près 850,000 tonnes, et le profit comparatif serait de l'ordre de 40% des profits faits à Contrecoeur. Les mêmes pourcentages s'appliquent au « cash flow ». Cela tient compte de l'état actuel des équipements dont nous prendrons possession, évidemment s'il y a entente, à Contrecoeur, à Montréal et à Etobicoke.

M. GAUDET: Je vous remercie. Pour revenir à la question numéro 3, est-ce que la province a des obligations envers cette compagnie, c'est-à-dire la Dosco?

M. GIGNAC: Moi, je ne suis pas la province, j'Ignore si M. Johnson peut répondre à la question.

M. LEVESQUE (Laurier): Vous, vous n'en avez pas, sauf l'entente en marche?

M. JOHNSON: Sidbec n'a aucune obligation envers Dosco?

M. GIGNAC : Non, sinon que nous avons signé une entente avec toutes les restrictions que vous savez. L'entente est conditionnelle à l'acceptation par le gouvernement des recommandations que nous allons lui faire et conditionnelle au transfert de la dette obligataire sans changement, enfin sujette à cinq ou six conditions... Je peux vous en donner d'autres.

M. JOHNSON: D'accord. Mais vous n'avez aucune autre obligation que celle que comporte cette entente de principe, qui ne pourrait être

conclue qu'avec le consentement du gouvernement, entre autres.

M. GIGNAC: C'est cela.

M. JOHNSON: Et quant au gouvernement, il n'a aucune obligation envers cette compagnie.

M. GAUDET: Du même coup, que pensez-vous de la décentralisation de l'industrie?

M. LEVESQUE (Laurier): En tant que fils de la Mauricie.

M. GIGNAC: Tout ce que je pourrais vous donner, ce sont des idées personnelles et je ne crois pas que je doive répondre à cette question. Nous sommes partis d'un mandat qui avait été donné par le gouvernement au COE et qui est revenu au gouvernement avec des recommandations très précises. Mais nous nous en tenons à cela. Je crois que c'est beaucoup plus au gouvernement à établir ses positions au point de vue de la décentralisation de l'industrie, qu'à Sidbec qui, à toutes fins pratiques, est contrôlée par le gouvernement.

M. JOHNSON: M. Gaudet, évidemment M. Gignac nous renvoie le ballon et avec raison. C'est une responsabilité du gouvernement. Le gouvernement du temps, celui qui nous a précédés, a certainement eu des pressions de la part des gens de Sept-Iles, des gens de Rimouski. Je pense que des études sérieuses ont été faites sur la possibilité de créer un autre pôle d'attraction qui serait aussi éloigné que Montmagny ou Rimouski ou Sept-Iles. Mais les économistes, les experts en sont venus à la conclusion que si l'on voulait payer des déficits tous les ans et des déficits considérables, on pourrait peut-être le faire, mais que pour la rentabilité, il fallait s'approcher, soit à Bécancour, soit à Contrecoeur.

L'expérience de la Suède, encore une fois, est assez intéressante. Toutes les aciéries, généralement, font des profits, sauf celle qui est installée à 400 ou 500 milles de Stockholm, qui est subventionnée à un rythme assez intéressant par le gouvernement. Peut-être que dans leur économie, cela se place assez bien, c'est peut-être avantageux.

Mais l'opinion que j'avais recueillie en Suède de la part des autorités gouvernementales et des hommes d'affaires est que si c'était à refaire on ne la placerait pas là.

M. LESAGE: M. Gignac, dans les études qui ont été faites par le comité de sidérurgie, quand le comité de sidérurgie en est arrivé à la recommandation de Bécancour, les prix du coût de production par tonne d'acier avaient été établis pour divers endroits dans la province n'est-ce pas?

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: Et là où les coûts étaient les plus bas, c'était justement à Bécancour et Contrecoeur.

M. GIGNAC: C'est ça!

M. LESAGE: Contrecoeur, Varennes, si ma mémoire me sert. Varennes, Contrecoeur et Bécancour. C'est exact. Le coût de la production à Sept-Iles ou à Rimouski aurait été beaucoup plus élevé.

M. GIGNACï Peut-être que le coût n'aurait pas été tellement différent, mais le coût de transport...

M. LESAGE: Non, quand je parle... M. GIGNAC: Le prix de revient...

M. LESAGE: Le prix de revient sur le marché, je me suis mal exprimé. Je voulais dire les coûts qui nous étaient donnés ou les prix qui nous étaient donnés par le comité de sidérurgie, tenaient compte évidemment du coût des transports. On parlait de la tonne d'acier rendue à Montréal.

M. GIGNAC: Exactement.

M. LESAGE: Et c'est à ce moment-là que nous avons étudié, que nous avons rétréci le champ des études du comité de sidérurgie, quant à l'emplacement entre Montmagny et Varennes.

M. GIGNAC: C'est ça. Bécancour.

M. GAUDET: On a répondu à la question 7 et à la question 8 lorsqu'on nous a fourni les chiffres.

Question 9: Est-ce que Sidbec a considéré de s'associer à une autre aciérie canadienne, telle que Stelco, Dofasco, au lieu de s'installer seule à Bécancour?

M. GIGNAC: Oui, c'est-à-dire que, pour les deux projets, Sidbec-Bécancour et Sidbec-Con-trecoeur, nous avons pensé d'avoir certains accords avec d'autres sidérurgies canadiennes. Mais il n'y a pas eu de discussions officielles,

à une exception près, avec les sidérurgies canadiennes. Cependant nous savons qu'au moins une et peut-être deux d'entre elles seraient peut-être intéressées à participer à nos aventures. Mais je crois qu'il est bien prématuré actuellement de dire ce que nous pourrons faire ou non. C'est seulement avec le temps que nous pourrons y voir notre profit et eux le leur.

M. LESAGE: Les membres du comité de sidérurgie avaient eu dans le temps, si mon souvenir est bon, des discussions préliminaires. Vous avez raison de dire que cela n'était pas officiel. Mais entre autres, avec les gens de Stelco et également, je crois, avec M. Sherman, de Dofasco.

M. GIGNAC: De Dofasco. Et Algoma. En fait nous avons vu les trois.

M. LESAGE: Les entrevues avec M. Sherman, je me souviens qu'elles avaient été fixées à la suite de suggestions que j'avais faites.

M. BOURASSA: Est-ce qu'elles exigeaient d'être majoritaires?

M. GIGNAC: Non, les discussions ne se sont pas rendues jusque la.

M. LESAGE: Cela ne s'est pas rendu là, non.

M. GIGNAC: Enfin, ce furent des discussions amicales.

M. LE PRESIDENT: Question numéro 10.

M. GAUDET: A-t-on sérieusement considéré et cherché une participation américaine partielle à une sidérurgie québécoise, qui pourrait être une participation pratiquement égalitaire?

M. GIGNAC: A ma connaissance, non.

M. LESAGE: Bien, est-ce que Davum, le fameux Davum, n'opérait pas de New York?

M. LEVESQUE (Laurier): Ce n'est pas une sidérurgie.

M. LESAGE: Non, je sais.

M. GIGNAC: Ils avaient deux bureaux. Ils en avaient un à New York et un à Montréal, Franco Steel Corporation et Franco Steel, tout court je crois.

M. LESAGE: Oui.

M. LEVESQUE (Laurier): C'était pour mise en marché, essentiellement.

M. GIGNAC: Oui, essentiellement pour la mise en marché.

M. JOHNSON: A l'extérieur du Canada.

M. LESAGE: Oui, à l'extérieur. Bien, il y avait importation et il y avait exportation.

M. GIGNAC: Oui, mais l'entente n'aurait pas été une entente américaine. Elle aurait été une entente française.

M. LESAGE: M. Lévesque, si j'ai mentionné Davum, c'est parce que la question telle que posée ne porte pas sur des sidérurgies américaines, mais sur des intérêts américains.

M. GAUDET: La province de Québec n'est-elle pas en posture, comme l'Alberta avec ses puits d'huile, de marchander pour l'exploitation de ses richesses naturelles?

M. GIGNAC: Je ne suis pas la province.

M. JOHNSON: Je ne suis pas la province moi non plus, mais je dois vous dire que d'abord, nous parlons surtout de minerai de fer, exclusivement de minerai de fer. Le minerai de fer, il y en a beaucoup dans la province et M. Dufresne me corrigera, c'est quatre milliards de tonnes à l'ouest de là supposée ou de la frontière discutée ou discutable entre Labrador et Québec. Seulement dans la partie clairement québécoise, qui n'est pas discutée, il y aurait quatre à cinq milliards de tonnes de minerai de fer. Alors, avant que l'on transforme ça, quelle est la clé, une demi-tonne de minerai ou deux tonnes de minerai de fer pour une tonne d'acier?

M. DUFRESNE: Tout dépend de quelle teneur de fer nous avons dans le minerai.

M. JOHNSON: Mais oui, vous connaissez la teneur, vous y avez travaillé.

M. DUFRESNE: Alors, si nous parlons d'un minerai comme celui de Schefferville qui titre environ dans les 55% de fer naturel, en moyenne, cela va prendre deux tonnes de minerai de Schefferville. Si vous parlez d'un minerai comme celui de Québec Cartier Mining qui titre de l'ordre de 28% à 30% de fer, cela vous prend pratiquement trois tonnes et demie.

M. JOHNSON: Alors, nous en aurions pour une couple de milliers d'années.

M. LESAGE: Une question que je voudrais vous poser, M. Dufresne.

M. JOHNSON: Si l'on me permet de compléter ma réponse, deuxièmement il y a aussi d'autres pays qui ont du minerai de fer et il y en a un très grand nombre facilement transportable de teneur assez intéressante, de sorte que nous sommes déjà dans le marché compétitif. Je pense que nous pouvons dire ça. M. Dufresne m'approuvera ou me corrigera.

M. GIGNAC: Nous pouvons avoir des minerais qui viennent de l'étranger à meilleur coût que le nôtre au Québec.

M. LEVESQUE (Laurier): Si le premier ministre avait su tout ça dans le temps, lui et d'autres, il y avait un débat sur Atlantic Iron Ores, qui est quelque part dans la baie d'Ungava. Quand il voulait nous prouver et à toute la province qu'on avait le « bargaining power » et tout ce qu'il fallait pour placer même la sidérurgie en plein la baie d'Ungava. J'ai vécu cela pendant une semaine. C'était un vrai pique-nique!

M. JOHNSON: Je m'en souviens très bien. J'en ai beaucoup appris depuis ce temps-là...

M. LEVESQUE (Laurier)r Moi aussi.

M. JOHNSON: ... et le député de Laurier aussi, avec le résultat que je suis encore dans l'Union Nationale et lui n'est plus dans le parti libéral.

M. LESAGE: M. Dufresne, une question qui m'intéresse, justement quant au minerai de fer de l'Ungava.

M. LEVESQUE (Laurier): Nous étions champions dans ce temps-la!

M. LESAGE: Pour ce minerai de fer de Iron Ore Company, de Scheffervllle, qui est I 55%, est-ce qu'on a trouvé maintenant les techniques de réduction possibles, de concentration si vous voulez?

M. DUFRESNE: M. Lesage, vous savez que j'ai laissé Iron Ore depuis déjà quatre ou cinq ans.

M. LESAGE: Mais vous êtes un ingénieur minier.

M. DUFRESNE: Je comprends. Je sais que depuis ce temps-là, Iron Ore a poursuivi des recherches dans cette optique et que ces recherches sont réellement intensives. Ils espèrent d'ici quelques années, mais je n'ai aucune idée de leurs échéances, avoir au moins les éléments d'une solution à ce problème-là.

M. LESAGE: D'un procédé de concentration.

M. DUFRESNE: Oui, de concentration de ces minerais.

M. LESAGE: Parce que ce n'est pas le même genre de minerai, évidemment. Qu'est-ce qu'il y a dedans, c'est de la pyrite?

M. DUFRESNE: Non, le minerai de fer de Shefferville est un minerai qu'on peut décrire comme llmonitlque, qui est un minerai à grain très très fin — un peu comme de la rouille si on peut dire — vous le connaissez M. Lesage — qui fait une masse informe qui n'est pas cristallisée et son amélioration ou sa bonification en est rendue de ce fait très difficile, justement à cause de l'état très fin des grains individuels d'oxyde. Par ailleurs, les minerais qui existent à Cartier Mining ou à Wabush ont un grain beaucoup plus grossier ce qui permet après broyage d'avoir un sable dont par lavage on peut séparer les stériles du minerai de fer.

M. LESAGE: C'est le genre d'opération qui se fait à Gagnon?

M. DUFRESNE: Oui, justement.

M. LE PRESIDENT: Question suivante.

M. GAUDET: Si on nous a dit que l'exploitation devait rester au pays, c'est tout simplement qu'à notre avant-dernière réunion, si ma mémoire est bonne, on nous a dit que le Parlement n'aimait pas beaucoup voir passer les morceaux de province à pleins bateaux, et qu'il y aurait peut-être possibilité de l'exploiter chez nous. La onzième, la question de financement du projet mise à part pour un instant, votre option aurait-elle été la même? La construction à Bécancour, ou à Contrecoeur?

M. GIGNAC: Bien, c'est une question hypothétique et je crois que ça demande une réponse hypothétique. Il y a d'autres facteurs que le financement — dans le moment c'est probablement le plus important — mais il y a aussi le facteur du marché que nous ne pouvons ignorer et si nous mettons le facteur du marché à part, bien, il va falloir mettre d'autres facteurs à

part. Théoriquement, je pense bien que s'il nous tombait du ciel $250 millions I un intérêt pas trop élevé et que nous pourrions théoriquement nous permettre le luxe de n'être pas rentable pendant dix ou quinze ans, à ce moment-là, je n'aurais pas d'objection à aller à Bécancour ou à d'autres endroits; mais je pense qu'il faudrait alors considérer ça comme un subside pur et simple; tandis que les $60 millions que nous attendons du gouvernement, nous ne les considérons pas comme un subside. On a parlé d'actions ordinaires à dividendes différés, ça veut dire qu'un de ces jours on paiera les dividendes ou on remboursera le capital et les actions seront vendues à d'autres. Ce sera vendable.

Or, votre question est un peu hypothétique, et je pense que c'est assez difficile d'y répondre, parce que l'on ne peut pas exclure des facteurs aussi importans que le financement et le marché.

M. LE PRESIDENT: Douze.

M. GAUDET: Comment se fait-il que l'annonce de l'intention de Sidbec d'acheter Dosco à $11 l'action, n'ait pas obtenu l'approbation préalable du gouvernement?

M. GIGNAC: J'ai donné cette réponse tout I l'heure, quand j'ai dit que dans l'entente que nous avons signée avec Hawker Siddely ou qui a été signée disons par M. Hall, le président du groupe Hawker Siddely et moi-même, il y a des restrictions et il y est fait mention bien clairement dans cette entente que nous devrons, lorsque l'offre formelle sera faite, avoir chacun de notre côté les approbations de tous les corps administratifs ou politiques qui doivent intervenir.

M. JOHNSON: M. Gaudet, vous n'avez peut-être pas vu cette nouvelle dans les journaux sous la forme, je vous la donne, de capsule. J'ai déclaré en Chambre que le président de Sidbec nous a demandé si, il y a déjà plusieurs mois, nous croyions pouvoir mettre à la disposition de Sidbec $60 millions sur une période de cinq ans, au rythme de $12 millions par année. Nous lui avons évidemment demandé pourquoi. Il a dit: « Je ferai de deux choses l'une: ou une offre pour Dosco si le prix nous semble raisonnable ou un début modeste mais pour en arriver finalement à un complexe intégré à Bécancour. » Dans le cas de Dosco, je lui ai dit: II faudrait aussi que vous en arriviez à un complexe intégré, même avec Dosco. Il a dit: « D'accord. » Et muni de cette assurance morale, si vous voulez, il a, avec son conseil d'administration, fait des études et en est arrivé à la conclusion que, dans les circonstances, c'était Dosco qui était le plus favorable et le prix de $11 a été fixé par eux. Aucun membre du conseil des ministres ne le connaissait, sauf moi, parce qu'il me l'avait donné et parce que nous avons dit ceci, c'est clair, c'est simple: Allons-nous, nous du Cabinet des ministres et des députés, prendre tous les rapports, et c'est littéralement à peu près aussi haut que ça, et commencer à les étudier pour dire: Non, c'est $10.60 que vous devriez payer ou $10.33. J'ai dit: Après six ans d'études avec les meilleurs experts, des hommes honnêtes, des hommes en qui nous avons confiance, nous allons nous en remettre à eux pour fixer le prix. Sauf qu'avant que le gouvernement ne s'engage, j'ai dit à la Chambre que nous aurions des séances devant ce comité, séances publiques, afin que les députés se renseignent, que les intéressés posent des questions avec la permission du comité et que le grand public puisse connaître tous les aspects du problème.

M. GAUDET: Je vous remercie.

M. LESAGE: M. Gignac, je vais vous poser une question. Vous allez peut-être être surpris que je vous la pose, parce que vous allez dire que je pourrais donner les réponses, mais comme plusieurs personnes m'ont posé la question, j'ai pensé vous la poser pour que les réponses les plus précises apparaissent au compte rendu.

La question qui m'a été posée, est la suivante — et plusieurs personnes me l'ont posée, je le répète. Comment se fait-il que, lorsque le gouvernement a acquis les compagnies d'électricité, l'Hydro-Québec a procédé par une offre ferme, un « take-over bid »? Et dans ce cas, il me semble que Sidbec, au lieu de faire comme l'Hydro, a procédé par négociations. Evidemment, vous étiez directeur de l'Hydro, vous savez parfaitement la différence qu'il y a entre les deux transactions, mais pour informer les gens qui veulent être renseignés — il y ades journalistes qui m'ont posé la question — j'ai pensé qu'il serait bon que...

M. GIGNAC: Je crois qu'au départ il y a une différence fondamentale entre les problèmes de l'Hydro-Québec, faisant une offre pour les compagnies d'électricité, et Sidbec, faisant une offre pour Dosco. Du fait que le stock de Dosco est contrôlé à 77% par la compagnie Hawker Siddeley of Canada, qui elle-même est contrôlée

à 59% par Hawker Siddeley Group Limited, d'Angleterre, alors, à ce moment-là, de toute évidence il faut négocier avec l'actionnaire majoritaire.

M. LESAGE: II y avait des actionnaires majoritaires dans certaines des compagnies.

M. GIGNAC: Mais ne dépassant pas 77%.

M. LESAGE: Non, non. Mais, il y avait des majoritaires dans certaines compagnies. Oui, il y avait des « holding companies » qui possédaient...

M. GIGNAC: Une offre ne pouvait pas se faire sans, auparavant, obtenir un accord de principe ou l'appui moral de Hawker Siddeley of Canada.

M. LESAGE: Une des raisons de procéder par négociations ne provient-elle pas encore fondamentalement du fait que, dans le cas de l'Hydro-Québec, il s'agissait d'utilités publiques, où il n'y a pas de concurrence, alors que, dans le cas de l'acier, il s'agit d'un marché compétitif? Je pense que cela fait une différence...

M. GIGNAC: Ah! ça fait une différence assez particulière.

M. LESAGE: ... Sur la façon de procéder. C'est une des réponses que j'ai données. Mais j'aimerais bien que vous me confirmiez si j'avais raison et si c'est un des facteurs.

M. JOHNSON: M. Gaudet, votre question B, « Est-ce que le gouvernement se trouve devant le fait accompli? » La réponse est non.

M. LESAGE: Pardon!

M. JOHNSON: Question B.

M. LESAGE: Ah, oui! Un instant. Dans le cas des compagnies d'électricité, il y avait le fait que l'Hydro-Québec existait. C'était une corporation gouvernementale ou paragouvernementale, qui opérait déjà dans le domaine de l'électricité.

M. GIGNAC: Oui et je pense que l'un des facteurs qui a joué dans le cas de l'Hydro-Québec et qui joue dans notre cas, est le fait qu'on prenait une dette obligataire — là je ne veux pas entrer dans des discussions qui peuvent devenir politiques — mais le fait est là: on prenait une dette obligataire assez intéres- sante au point de vue des taux d'intérêt. Maintenant, il y a eu...

M. LESAGE: Les questions que je pose n'ont aucun but politique et ne peuvent pas en avoir parce que j'ai davantage l'air en posant ces questions, de défendre votre position et celle du gouvernement que de l'attaquer.

M. GIGNAC: La grosse différence, je pense, entre les deux offres, est que nous étions forcés de passer par une négociation avec Hawker Siddely, parce que si leurs dirigeants s'étaient objectés, quel que soit le prix, il n'y aurait pas de « take-over ». Ils contrôlent 77% du « stock ».

M. JOHNSON: Deuxièmement, il y avait l'aspect de tous les actifs répartis dans les autres provinces qui ne nous intéressaient pas.

M. GIGNAC: Bien oui.

M. LESAGE: II y a toujours moyen de nationaliser n'importe quel actif. C'est clair. Mais les actifs, pas les actions.

M. LE PRESIDENT: On passe à B.

M. LESAGE: Surtout quand les actions représentent, en partie, des propriétés situées hors du Québec.

M. LE PRESIDENT: La question numéro 13, M. Gaudet.

M. LESAGE: On peut exproprier les actions d'une compagnie établie dans le Québec, incorporée au Québec, qui n'a de l'actif que dans le Québec.

M. GAUDET: Sur quel marché sujet au contrôle direct ou indirect de la province pourrait compter une sidérurgie québécoise intégrée dans le domaine des tôles minces fabriquées à Contrecoeur par Dosco, mais aussi dans le domaine des profilés de toute nature, des tôles épaisses, de l'acier d'armature, des âmes de précontraint.

M. GIGNAC: J'ai répondu à cela avant-hier, je crois. C'est environ 100,000 tonnes. En moyenne.

M. LE PRESIDENT: B.

M. LESAGE: Ne comprenant pas, je le répète, Marine Industries, contrôlée par la SGF où le gouvernement est intéressé.

M. GIGNAC: Ne comprenant pas Marine Industries.

M. LESAGE: Ni Volcano, ni Forano... M. LE PRESIDENT: B.

M. GIGNAC: L'étude qui a été faite a porté strictement sur ce que le gouvernement, en fait, contrôlait directement plutôt qu'indirectement. L' « indirectement » peut s'évaluer peut-être à 20,000, 30,000 ou 40,000 tonnes.

C'est assez difficile de le dire. Nous n'avons pas fait d'étude là-dessus.

M.BOURASSA: D'ailleurs vous êtes au courant, M. Gignac, que dans le cas de Marine Industries l'acier étant acheté en Ontario, les compagnies ontariennes sont obligées de payer les frais de transport jusqu'à Marine Industries, à cause de la concurrence japonaise ou même européenne, suédoise, entre autres.

M. GIGNAC: Nous sommes au courant. M. BOURASSA: Cela limite les possibilités.

M. GAUDET: Quelle est la consommation totale de l'acier dans la province de Québec et au Canada?

M. BOURASSA: Un million de tonnes à peu près.

M. GIGNAC: Au Québec, la consommation totale, se situe entre 1,600,000 et 1,800,000 tonnes, et au Canada elle atteint entre 8 millions et 9 millions de tonnes par année.

M. BOURASSA: Mais une aciérie est-elle capable, M. Gignac, de produire tous les types d'acier? Un million de tonnes... cela comprend-il tous les aciers spécialisés?

M. GIGNAC: C'est ça!

M. BOURASSA: Une aciérie, en pratique, n'est pas capable de produire tous ces aciers-là.

M. GIGNAC: Non. Dosco pourrait être intéressée à peu près à 1 million de tonnes de ces produits.

M. BOURASSA: D'accord!

M. LE PRESIDENT: Quatorze.

M. GAUDET: Quels sont, dans l'optique de l'achat de Dosco par Sidbec, les intentions de l'Hydro-Québec et du centre de l'Energie atomique du Canada au sujet de la centrale atomique de Gentilly?

M. GIGNAC: Je crois que, si je me mets un chapeau de l'Hydro-Québec sur la tête, le développement de la centrale de Gentilly et le développement — là, je change mon chapeau — de Dosco par Sidbec à Bécancour n'a absolument aucun rapport. Que ce soit à Contrecoeur ou à Bécancour, cela n'a aucun rapport. De fait, je crois que si la sidérurgie est installée à Bécancour, l'alimentation si je me souviens bien sera faite par la ligne à 230 KV qui traverse le fleuve, un peu en amont de Trois-Rivières.

M. GAUDET: Le projet serait-il complété dans son entier ou abandonné en cours de route?

M. GIGNAC: Vous parlez du projet de... M. GAUDET: De l'énergie atomique.

M. GIGNAC: Cela n'a aucun rapport. Là, il s'agit de l'Hydro-Québec...

M. JOHNSON: Vous changez de chapeau!

M. GIGNAC: Je change encore de chapeau. D'accord on a projeté des développements pour Gentilly. En fait, je vais répondre à vos questions B et C en même temps. Si on construisait cinq réacteurs atomiques à Gentilly, il n'y aurait pas assez de place pour y mettre une sidérurgie.

M. LEVESQUE (Laurier): Mais d'où cela vient-il que tous et chacun...

M. GIGNAC: Je ne sais pas...

M. LEVESQUE (Laurier): Vous, vous ne le saviez pas.

M. GIGNAC: Je savais qu'on projetait quelque chose à Gentilly, mais il n'y a rien de fixé encore. On parle de certaines projections.

M. LEVESQUE (Laurier): Mais les cinq réacteurs, ce sont simplement une rumeur ou quoi?

M. LESAGE: Les réacteurs, c'est la première fois que...

M. GIGNAC: Le réacteur qu'on installe à

Gentilly présentement est un réacteur à 250,000 kilowatts.

M. LEVESQUE (Laurier): Enfin, votre centrale, c'est un réacteur.

M. LESAGE: Oui.

M. GIGNAC: II y a un réacteur par centrale.

M. JOHNSON: Oui, mais M. Gaudet qui pose les questions, doit savoir où il a pris ça que tous et chacun savent qu'on avait l'intention d'installer cinq réacteurs.

M. GAUDET: Cela s'est toujours dit dans la région. Nous l'avons appris des gens de l'Hydro-Québec. C'est parce que nous avons eu l'avantage d'aller visiter à plusieurs reprises les chantiers sur invitation. Et on nous a toujours démontré, sur certains plans qui sont affichés dans les bureaux, l'endroit où seraient construits les réacteurs, qu'il y avait de la place pour en construire cinq.

M. LESAGE: Cinq réacteurs. Est-ce qu'il avait été question, M. Gignac, de construire plus qu'un réacteur?

M. GIGNAC: Là, on est pris avec un. C'est-à-dire qu'on en construit un. Mais ce n'est pas impossible qu'éventuellement, si on doit faire dans cinq ou dix ou je ne sais combien d'années, de l'énergie atomique, qu'on en construise d'autres. Alors, comme vous le savez, le problème d'alimentation en eau est extrêmement important et c'est sûrement une région que nous allons étudier éventuellement comme futur emplacement de réacteurs atomiques.

M. LESAGE: De centrales nucléaires additionnelles.

M. GIGNAC: Mais je peux vous dire qu'il n'y a pas de décision de prise. Nous sommes loin d'une décision.

M. LESAGE: Non, mais c'est envisagé comme une possibilité.

M. GIGNAC: Oui, oui.

M. LE PRESIDENT: On passe à la question quinze.

M. GAUDET: Advenant tout de même l'achat éventuel des quatre installations existantes de Dosco, et admettant l'intervention gouvernementale pour subventionner l'écoulement de la production par l'exportation ces subventions ne peuvent-elles pas être investies dans un com- plexe qui assurerait la décentralisation industrielle souhaitée et prônée par le Conseil d'orientation économique, et une politique régionale rationnelle?

M. GIGNAC: Pour autant que je sache, la Sidbec n'a jamais compté sur quelque subvention que ce soit pour faire de l'exportation, peu importe d'où viennent ces subventions. Enfin, il n'a jamais été question ni de près ni de loin que nous soyons subventionnés pour faire de l'exportation en dehors du pays.

M. GAUDET: Le seizième. Suivant les déclarations que vous avez faites à l'émission « Deux plus un », il y a plus d'une semaine, on compte conserver les marchés que possédait Dosco, en l'occurence ceux de la province de Québec, dont le gouvernement provincial est le principal client, et celui de l'Ontario. On peut fort probablement conserver le marché du Québec, mais qu'est-ce qui assure Sidbec de ne pas perdre une partie des marchés de l'Ontario, au détriment d'aciéries plus près de ces mêmes marchés?

Quant aux marchés extérieurs d'exportation, il en a été un peu question. Pourrons-nous le concurrencer, si présentement il y a déjà une réserve abondante d'acier, c'est-à-dire une surproduction? Et quelles seront également nos chances d'y concurrencer, maintenant que prévalent les accords du Kennedy Round?

M. GIGNAC: Pour la première partie de votre question, nous pouvons fort probablement conserver le marché du Québec; mais qu'est-ce qui assure Sidbec de ne pas perdre une partie des marchés de l'Ontario, au détriment d'aciéries plus près de ces mêmes marchés? Il faut quand même reconnaître que Dosco, dans le moment, a établi des têtes de pont assez valables en Ontario et vend en Ontario. Ce ne sont pas des projections, ce sont des réalités. Il faut aussi réaliser qu'en prenant Dosco, on prend une compagnie ou une subsidiaire qui s'appelle Etobi-coke, une division, qui produit en Ontario. Alors, ça met un peu d'huile sur les roulements à billes, d'une part, et d'autre part, je dirais que, pour les mêmes raisons, nous devons essayer de maintenir des marchés d'Ontario — et nous avons des marchés d'Ontario et je ne vois pas pourquoi nous les perdrions — pour les mêmes raisons que Stelco a des marchés au Québec, ou Dofasco a des marchés au Québec, et il n'y a pas de discrimination qui se fait contre eux. Je ne vois pas pourquoi il s'en ferait contre nous en Ontario.

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que, si mo-

deste soit-il, vous pouvez compter couvrir ce qu'il y a de marchés dans les Maritimes, quand même?

M. GIGNAC: Oui. Nous sommes mieux placés pour certains produits que Hamilton, pour alimenter les Maritimes. Nous sommes plus près, alors, ça coupe énormément le coût du transport.

M. LEVESQUE (Laurier): Dans les régions proches des Etats-Unis, je veux dire les régions proches aux Etats-Unis, proches de Contrecoeur, que ce soit dans les états limitrophes, est-ce qu'il y a quelque chose dans la frontière qui empêcherait que vous y soyez présents?

M. GIGNAC: Non, mais disons, que nous n'avons pas compté là-dessus. Nous n'avons pas tablé là-dessus, parce que ce n'étaient pas des quantités tellement énormes. Ce sont de petites quantités. Comme je vous l'ai dit, nous avons voulu être conservateurs, nous avons fait comme si nous n'avions pas ces marchés, ou si ces marchés n'existaient pas.

Maintenant, pour la deuxième partie de votre question, disons que nous n'avons jamais compté sur l'exportation pour établir les projections que nous avons faites pour les six projets nouveaux et pour le projet Dosco. Si on peut exporter, bien ça sera du surplus. Mais nous n'avons jamais tablé sur l'exportation pour vendre nos produits.

M. LE PRESIDENT: Numéro 17. M. GIGNAC: Numéro 17...

M. LESAGE: Numéro 17, c'est une question assez complexe. Je ne sais pas, il est déjà 1 h 5 et il y a des membres du comité qui se sont engagés à rencontrer des cultivateurs au Patro Roc-Amadour et qui sont déjà en retard de trois quarts d'heure. Je me demande s'il n'y aurait pas lieu d'avoir une séance la semaine prochaine.

M. GIGNAC: Si vous me permettez, M. Lesage, je pourrais répondre à la question 17 très rapidement

M. LESAGE: Oui, très bien.

M. LEVESQUE (Laurier): Auriez-vous une objection, pour ne pas revenir?

M. GIGNAC: C'est exact.

M. JOHNSON: Mais c'est assez urgent qu'on procède dans cette histoire, qu'on marche, qu'on démarre.

M. GIGNAC: II faut faire autre chose.

M. JOHNSON: C'est déjà un procédé exceptionnel que celui où l'on permet — remarquez bien que je ne regrette rien — à des gens d'interroger publiquement les responsables dans un domaine semblable. Je remercie M. Gignac d'avoir accepté. Je pense que si on nous accordait juste une quinzaine de minutes, on pourrait peut-être terminer.

M. LESAGE: Les députés voudront quand même réexaminer le texte, les questions et réponses et puis vouloir revoir M. Gignac pour qu'il réponde à des questions additionnelles qu'ils auront certainement à poser après lecture du compte rendu.

M. JOHNSON: II est évident qu'il nous faudra une législation quelconque et là l'Opposition pourra poser toutes les questions.

M. LESAGE: Mais M. Gignac ne répond pas en Chambre.

M. JOHNSON: Le gouvernement, à ce moment-là, aura pris ses responsabilités, sa décision, si une législation est apportée. On pourra, à ce moment-là, répondre à toutes les questions de l'Opposition. Quant à M. Gaudet je pense qu'en peu de temps il pourra voir des réponses à ses questions quitte, nous, à décider si nous devons faire une autre réunion après avoir pris connaissance des transcriptions de ce matin.

M. LESAGE: C'est ça.

M. GAUDET: Nous n'avons pas l'intention non plus, de vous retenir ici indéfiniment, d'abuser de votre bonté de nous avoir reçus.

Mais si cela rencontre l'assentiment de mon comité, si vous préférez que M. Gignac donne suite aux questions, parce que nous en avons posé plusieurs, parce que, comme vous voyez, nous sommes toujours inquiets de notre sort, nous pourrions accepter des réponses par écrit et elles pourraient être communiquées à nos gens, aussi également.

M. LESAGE: Là, je suis moins sûr...

M. GAUDET: Pour les questions qu'on a

posées mais pour les questions supplémentaires posées par le comité soit par vos ministres, par les députés et par l'Opposition, bien...

M. JOHNSON: M. le Maire, c'est un arrangement extrêmement généreux que vous faites là. Quant à moi, il me semble que c'est normal, que ce serait satisfaisant pour le public que vous répondiez par écrit au président qui fera connaître les réponses publiquement, par la Chambre, et ensuite si la Chambre, cependant, décide qu'elle a besoin de renseignements additionnels et veut faire revenir M. Gignac, là nous prendrons notre décision.

M. GAUDET: Notre intention est de ne faire perdre le temps à personne. C'est tout simplement pour nous renseigner, si nous pouvons faire quelque chose pour vous aider, nous avons peut-être posé un trop grand nombre de questions que nous aurions peut-être pu résumer, mais avec le peu de temps que nous avions à notre disposition, nous avons essayé, le comité et moi-même, de faire pour le mieux tout en voulant le faire intelligemment aussi.

M. LESAGE: Vos questions 17 et 18 sont extrêmement pertinentes, M. le Maire. Nous allons retarder, je pense bien, nous sommes très intéressés à savoir quelles seront les réponses de M. Gignac à 17 et 18.

M. GAUDET: Nous sommes toujours désireux à tout événement de laisser cela à votre discrétion et arrangez les choses de la manière qu'il vous plaira.

M. LESAGE: Alors 17.

M. GAUDET: En définitive, nous avons le respect de l'autorité.

M. JOHNSON: M. Gignac, 17, vous l'avez la question?

M. GIGNAC: Ce que je dois affirmer, c'est que lorsque nous avons établi la rentabilité de Dosco ou des actifs de Dosco, nous avons projeté, depuis le début de l'année 1968, pour treize ans. Donc, nous avons tenu compte des résultats de Dosco cette année, pour les actifs qui nous concernent.

M. JOHNSON: Alors, cette année, c'est 1968?

M. GIGNAC: Oui, et je dois vous dire que nous avons fait des vérifications dernièrement, dans les livres de Dosco, pour comparer les résultats qu'ils ont aujourd'hui avec nos projections et il s'est avéré que, pour cette fois-là, en tout cas, nos projections étaient très bonnes. En fait cela se tient.

M. BOURASSA: Vous aurez à nous faire un rapport à la fin de juin, au 30 juin pour Dosco? Est-ce qu'ils ont un rapport semi-annuel?

M. GIGNAC: Oui, mais il sort assez tard, je crois. Le rapport semi-annuel sort, je crois, vers le mois d'août.

M. BOURASSA: D'après vos informations, vos calculs se sont-ils avérés relativement exacts?

M. GIGNAC: Si nous avions prévu une perte pour les actifs dont nous prendrons charge éventuellement, peut-être. Je dois vous dire que le résultat correspondrait à ce qui avait été prévu, le résultat actuel.

M. BOURASSA: Perte dont vous pourrez profiter dans deux ou trois ans, si la compagnie cesse, sur le plan fiscal, d'être considérée comme une entreprise publique.

M. GIGNAC: On peut quand même profiter de la réserve qui a été faite à cause de la perte.

M. LEDUC (Laviolette): Est-ce qu'il y a de l'amélioration?

M. GIGNAC: Oui.

M. BOURASSA: Si on prévoit que c'est rentable dans trois ans, il va y avoir de l'amélioration.

M. LE PRESIDENT: M. Johnson.

M. JOHNSON: M. Gignac, quand il y a moyen d'accommoder tout le monde, vous savez que cela nous fait bien plaisir. Serait-il possible que vous reveniez mercredi? Est-ce que cela vous crée des problèmes?

M. GIGNAC: Un instant, M. le Premier Ministre.

M. LEVESQUE (Laurier): On n'entend pas les soupirs d'ici.

M. BOURASSA: Un voyage par semaine à

Québec, ce n'est pas trop pénible.

UNE VOIX: Les soupirs que vous n'entendez pas, ce sont les nôtres.

M. GIGNAC: On appelle cela de l'hyper-ventilation.

Oui, mercredi matin, je pourrais être libre, J'imagine, si on pouvait être libéré pour une heure, parce que j'ai un rendez-vous assez important à Montréal, à trois heures.

M. JOHNSON: II se pose un autre problème, la FTQ, c'est à dix heures et demie, nous pourrions l'avancer à dix heures. Est-ce qu'une heure et demie serait raisonnable? De onze heures et demie à une heure mercredi?

M. GIGNAC: Si je peux avoir un réacté, oui.

M. LEVESQUE (Laurier): Une chance qu'ils ne l'ont pas vendu.

M. JOHNSON: Je dois vous avertir qu'à partir de lundi, il est en inspection.

M. LESAGE: C'est parce qu'il a trop servi, je suppose.

M. JOHNSON: Non, c'est peut-être pour plus de sécurité; parfois, toute la majorité du gouvernement voyage dedans. Je voudrais bien faire plaisir à l'Opposition, mais pas de cette façon-là.

M. GIGNAC: Alors voici, je m'organiserai avec mes problèmes. Vous suggérez de onze heures à une heure?

M. JOHNSON: Onze heures et demie.

M. GIGNAC: Onze heures et demie à une heure.

M. JOHNSON: Nous recevons la FTQ, une délégation assez importante. Cela représente plusieurs travailleurs, alors, de onze heures trente à une heure.

M. LE PRESIDENT: Pour les questions 18, 19, 20 et 21.

M. JOHNSON: La FTQ, ce sera à dix heures.

M. LE PRESIDENT: Alors, on ajourne la séance à mercredi prochain, onze heures trente.

(13 h 10)

Séance du 12 juin 1968

(Onze heures cinquante-quatre minutes)

M. GRENIER (président): A l'ordre!

Nous reprenons la séance du comité des régies gouvernementales avec M. Gignac et ses représentants de Sidbec. C'est la quatrième séance. Je déclare la séance ouverte.

Alors, nous en étions à la question dix-sept. M. le maire de Bécancour.

M. GAUDET: Si vous me permettez, en premier lieu, je remercierai M. le Premier ministre, tous les membres du comité et aussi les délégués de Sidbec de s'être réunis ce matin.

En plus du comité provisoire que nous avons formé pour étudier la possibilité d'implanter Sidbec à Bécancour, il me fait plaisir de souligner la présence parmi nous du préfet du comté, assisté de tous les maires du comté qui ont ajourné la séance ce matin pour prendre part aux délibérations. Je les remercie bien sincèrement ainsi que les nombreux délégués de toute la région. Je pense bien que dans l'auditoire aussi, vous avez beaucoup de gens de Bécancour. Je vous remercie.

A la dix-septième question: L'offre deSidbec à Dosco est fixée à $11 l'action et tient compte de divers facteurs dont principalement, le faible intérêt de la dette obligataire de quelque $38 millions. De plus il semble que ce prix soit fixé suivant l'évaluation des actifs de la compagnie au 31 décembre 1967. Or, si nous tenons compte du fait que la perte pour l'exercice de 1967 a été de l'ordre de $9 millions, soit $750,000 par mois, quelle sera la perte encourue par la même compagnie pour l'exercice en cours, d'autant plus que plusieurs mois peuvent encore se passer avant que l'entente — si elle survient — soit définitivement signée? Tout en admettant que le bilan soit assez récent, et que normalement pour faire une offre il faut se baser sur des chiffres, n'y aurait-il pas lieu de voir, par un bilan intérimaire, quelle sera la perte pour les six premiers mois en cours, avant de signer cette entente au prix fixé?

Il va sans dire que si la perte est maintenue, le prix de $11 l'action nous parait peu justifiable.

M. GIGNAC: M. le Président, M. le Maire. Tout d'abord dans la première partie de votre question, je voudrais souligner que le prix qui a été fixé à $11 l'action n'est pas établi suivant l'évaluation des actifs de la compagnie au

31 décembre 1967, mais beaucoup plus bas. C'est à peu près à 50% de l'évaluation des actifs de la compagnie au 31 décembre 1967, tel qu'il a été démontré à l'avant-dernière séance par MM. Caron et Graveline. Pour ce qui est de l'autre partie de la question, je tiens à répéter que nous avons tenu compte de l'allure actuelle de la compagnie pour 1968.

Tel que je l'ai déjà dit, il semble que les projections que nous avons faites nous-mêmes pour les prévisions financières, devrais-je dire, telles que nous les avons établies pour l'année 1968, rencontrent d'assez près l'état actuel des opérations.

Maintenant, je ne crois pas que je puisse vous dire dans quelle situation, à quel point se trouve actuellement la compagnie au point de vue des résultats d'opération pour l'année 1968. Etant donné que nous ne sommes pas encore propriétaires de Dosco, ce serait plutôt indiscret, je crois, de donner pour le compte de Dosco des chiffres qui dans le fond lui appartiennent encore.

Je tiens à souligner, encore une fois, que nous avons tenu compte des opérations de 1968 et que s'il y a pertes, tel qu'il est mentionné dans la question de M. Gaudet, nous en avons tenu compte.

En fait, l'offre que nous avons faite à $11 l'action avec un rachat d'actifs de $13.6 millions tient compte de l'opération de la compagnie entre le 1er janvier 1968 et la fin de l'exercice financier de 1980.

Je crois que c'est pour ça que nous sommes en mesure de justifier le prix de $11 l'action. Si nous avions payé la valeur actuelle des actifs, le prix aurait été d'à peu près $21 ou $22 l'action.

M. JOHNSON: M. Gignac, êtes-vous en mesure d'affirmer que la perte de $9 millions en 1967 n'est pas nécessairement, dans sa totalité, attribuable aux quatre installations que vous voulez acheter?

M. GIGNAC: Oui, M. le Premier Ministre, nous sommes en mesure d'affirmer que les $9 millions de pertes ne s'appliquent pas nécessairement, ni actuellement aux quatre installations que nous avons l'intention d'acheter.

En fin de compte, dans les rachats d'actifs qui seront faits par Hawker Siddeley, il y a des compagnies dans ça qui montraient un déficit à la fin de 1967.

M. JOHNSON: Mais le montant de $9 millions n'est pas attribuable uniquement aux opérations des quatre installations telles que vous les projetez?

M. GIGNAC: Non, M. le Premier Ministre.

M. JOHNSON: Vous avez déjà dit, je crois, publiquement — il faut que je sois prudent — il semble que vous avez dit publiquement qu'il y avait une partie de ces pertes qui pouvaient s'expliquer par les ventes entre succursales ou entre installations particulièrement quant au prix de base de l'acier qui venait de Sydney.

M. GIGNAC: C'est exact, M. le Premier Ministre, nous avons mentionné qu'à toutes fins pratiques, Contrecoeur payait l'acier de $10 à $15 de plus qu'elle ne l'aurait payé à l'extérieur de Sydney.

M. BOURASSA: M. Gignac, pour faire le montant, est-ce que vous pouvez nous dire sur combien de tonnes portent ces $10 à $15?

M. GIGNAC: Je dirais entre 200,000 et 300,000 tonnes.

M. BOURASSA: Vous avez $3 millions de frais de démarrage qui ne se renouvelleront pas forcément au cours de ces années.

M. GIGNAC: Pour les frais de démarrage, le montant s'élève à plus que $3 millions si on considère les deux laminoirs, c'est-à-dire le laminoir à barre et le laminoir à tôle fine. Je dirais que les frais de démarrage s'élèvent à environ $8 à $10 millions.

M. BOURASSA: Je veux dire, l'an dernier, sur les $9 millions?

M. GIGNAC: Il y avait $3.5 millions pour les frais de démarrage.

M. LESAGE: Le chiffre exact que vous aviez mentionné, je crois, c'est $3,600,000.

M. GIGNAC: C'est ça.

M. LEVESQUE (Laurier): Si la transaction se fait telle que prévue, vous achetez à Contrecoeur un laminoir ou deux?

M. GIGNAC: Deux laminoirs.

M. LEVESQUE (Laurier): Deux laminoirs à Contrecoeur.

M. GIGNAC: C'est-à-dire trois laminoirs. Un laminoir à barre et deux laminoirs à tôle fine.

M. LEVESQUE (Laurier): Et à Montréal, au point de vue des produits finis...?

M. GIGNAC: A Montreal Works, il y a à peu près quatre ou cinq produits différents. D'abord, il y a la fabrication des tuyaux, deux laminoirs à cornières et à barre, ensuite, il y a la fabrique de clous et la boulonnerie.

M. LEVESQUE (Laurier): Et pour les deux autres, Truscon et Etobicoke, ce sont des produits finis?

M. GIGNAC: Oui. Truscon, c'est unique ment une usine de fabrication.

M. LEVESQUE (Laurier): Tuyaux, entre autres?

M. GIGNAC: Non, ce sont des poutrelles, des petites et des longues. Ilya aussi la fabrication ou la manufacturation d'acier plat en toutes sortes de produits.

M. LEVESQUE (Laurier): Alors, l'ensemble des installations que vous acquerriez aurait quelle capacité?

M. GIGNAC: Actuellement, si tout marchait à pleine capacité, ce serait de l'ordre de 700,000 tonnes.

M. LEVESQUE (Laurier): Et actuellement, pour autant que vous le sachiez, l'emploi de la capacité est à peu près?

M. GIGNAC: A peu près, entre 350,000 et 400,000 tonnes.

M. LEVESQUE (Laurier): Ce qui implique que le jour où vous passerez à l'autre étape, à celle que vous prévoyez dans trois ou quatre ans, si j'ai bonne mémoire, l'étape de production à partir de la fonte, il faudra probablement entrevoir quelque chose autour d'un million de tonnes ou de 500,000 tonnes ou quoi?

M. GIGNAC: Tout dépendra de la voie dans laquelle nous nous engagerons à ce moment-là. S'il s'agit de la voie conventionnelle, soit celle des hauts fourneaux et des convertisseurs à l'oxygène, j'imagine qu'il faudra penser à une production d'à peu près un million de tonnes. Si nous nous engageons dans l'acier primaire, par la voie des matériaux préréduits ou du fer métallisé, à ce moment-là, on peut envisager des productions d'acier primaire qui seraient compatibles avec le marché que nous aurions à ce moment-là.

M. LEVESQUE (Laurier): Quand vous dites du fer métallisé, est-ce la nouvelle formule?

M. GIGNAC: C'est le fer-éponge.

M. LEVESQUE (Laurier): Sponge iron?

M. GIGNAC: C'est ça. L'appellation française, semble-t-il, est fer métallisé.

M,, LEVESQUE (Laurier): Est-ce qu'on peut l'acheter sur le marché?

M. GIGNAC: Non. On ne peut pas l'acheter actuellement, sur le marché.

M. LEVESQUE (Laurier): Alors, vous seriez obligé de le fabriquer?

M. GIGNAC: De le fabriquer nous-mêmes.

M. LE PRESIDENT: Si vous voulez passer à la question 18, M. Gaudet?

M. GAUDET: a) Le prix de $11 l'action représente, sur la base des projections du marché pour la période de 1968 à 1980 utilisée dans votre étude de rentabilité, un rendement de combien sur l'investissement, lequel rendement vous affirmez être sensiblement le même que celui des établissements canadiens de même nature? b) Quel a été effectivement le revenu net utilisé pour chaque année à partir de 1968 jusqu'à 1980, qui a permis de fixer votre offre?

M. GIGNAC: Pour la première partie de votre question, je pourrais vous dire que le retour ou le rendement sur l'investissement se situe entre 8% et 15%. Je ne crois pas qu'il soit d'intérêt pour Sidbec d'informer le public du rendement précis que nous avons utilisé pour faire nos études.

Mais disons que le rendement de la sidérurgie canadienne, sur une période d'années, se situe entre 8% et 15% et nous sommes dans cet écart.

M. LESAGE: M. Gignac, vous dites de 8% à 15% de l'investissement. Lorsque vous prononcez le mot investissement, à quel investissement référez-vous?

M. GIGNAC: Aux $45 millions. M. LESAGE: Les $45 millions.

M. GIGNAC: Bien oui, évidemment, plus les investissements que nous allons faire d'ici cinq ans, qui sont de $18 millions.

M. LESAGE: C'est ça.

M. GIGNAC: C'est ce que nous avons indiqué au tableau, l'autre jour.

M. LESAGE: Est-ce que vous tenez compte, également, du fe.lt que vous assumez une dette à long terme?

M. GIGNAC: Oui, nous tenons compte de cela aussi.

M. LESAGE: Evidemment, ça fait $45 millions, plus les investissements qui vont à l'amélioration, si vous voulez, des établissements...

M. GIGNAC: C'est exact.

M. LESAGE: ... et qui nous ont été détaillés la semaine dernière par M. Graveline, plus les $38 millions.

M. GIGNAC: Non, non, les $38 millions, eux, sont dans le bilan de Dosco, enfin.

M. LESAGE: Je sais.

M. GIGNAC: Ils financent... On en profite, quoi!

M. LESAGE: Oui, oui.

M. GIGNAC: Mais ça ne s'ajoute pas aux actifs.

M. LESAGE: Aux $45 millions, non. Alors, c'est $45 millions, plus cette partie des $60 millions qui doit servir à l'amélioration des installations, les dépenses capitales, tel que mentionné par M. Graveline, qui vont à l'amélioration de la production.

M. GIGNAC: Exact. Disons que d'une façon générale, nous avons établi notre rentabilité de la même façon ou à peu près de la même façon que les sidérurgies canadiennes ou américaines établissent la leur. C'est assez difficile d'être exactement semblable, mais nous avons essayé de nous rapprocher, autant que possible, des méthodes employées couramment pour faire établir le taux de rentabilité.

M. LESAGE: Maintenant, M. Gignac, le montant mentionné par M. Graveline pour l'agrandissement et les améliorations à apporter aux installations existantes à Montréal, Contrecoeur et Etobicoke était de $17 millions. J'ai une copie du document qu'il m'a remis.

Est-ce que vous comptez, dans votre investissement, l'augmentation du fonds de roulement de $14 millions?

M. GIGNAC: Non, le fonds de roulement est inclus dans le retour sur l'investissement. En fait tout ce qui sert à faire fonctionner la compagnie est inclus dans le montant dont nous tenons compte pour établir le retour sur l'investissement.

M. LESAGE : Vous comprenez que cette question a son importance, parce qu'étant donné que ces $14 millions que vous mentionnés comme injection capitale pour le fonds de roulement, $14 millions par rapport à $45 millions plus $17 millions, c'est tout de même une proportion assez considérable.

M. GIGNAC: Oui, mais nous parlons sur une période de cinq ans, je crois.

M. LESAGE: Oui, c'est entendu. Alors, en réalité, l'investissement dont vous parlez c'est à peu près $31 millions plus $45 millions?

M. GIGNAC: Bien, c'est-à-dire, voici. Les $45 millions, c'est le chiffre de base...

M. LESAGE: Oui.

M. GIGNAC: ... d'où nous sommes partis...

M. LESAGE: Je suis bien prêt à dire $45 millions plus $31 millions, si vous voulez.

M. GIGNAC: Non, non, mais ce que je veux dire c'est que, par le truchement de l'achat d'actions, nous prenons le contrôle d'une dette obligataire qui nous permet d'acheter pour $45 millions des investissements qui valent $75 millions.

M. LESAGE: Mais votre investissement, vous l'avez dit tantôt, vous le calculez à $45 millions, plus $17 millions, plus $14 millions, ce qui fait donc $76 millions.

M. GIGNAC: Je pense qu'il faudrait peut-être revenir au tableau que nous avons fait l'autre jour. Je demanderais à M. Graveline de démêler les chiffres un petit peu, parce qu'il ne faudrait pas mêler les actifs que nous achetons avec les dettes obligataires ou...

M. LESAGE: Non, je ne fais pas ça. Les $45 millions, vous avez dit vous-même que l'investissement était de $45 millions, je n'ai pas discuté votre chiffre. Vous avez dit qu'il fallait y ajouter les $17 millions prévus à même les $60 millions qui viennent du gouvernement, pour l'agrandissement et l'amélioration des installations et qu'il fallait y

ajouter également les $13.9 millions d'injection au fonds de roulement. Cela fait $45 millions plus $31 millions, c'est-à-dire $76 millions d'investissements.

M. GIGNAC: Très bien, sur ça, je suis d'accord sur la façon dont vous l'exposez.

M. LESAGE: Bon. Alors, c'est un rendement de 8% à 15% sur un investissement d'à peu près $70 millions ou $71 millions. Est-ce que c'est bien ça, 8% à 15% sur un investissement de $70 millions?

M. GIGNAC: C'est ça. M. LESAGE: C'est bien.

M. BOURASSA: II ne reste pas tellement d'inconnues avec tout ça.

M. GIGNAC: II reste l'opération pour les cinq prochaines années.

M. LESAGE: Clairement.

M. GIGNAC: Je dis qu'il reste l'opération pour les cinq prochaines années.

M. LESAGE: Oui, mais il est clair que vos 8% à 15%, c'est sur une période de 12 ans, parce que vous n'envisagez pas faire des profits d'ici deux ou trois ans, avez-vous dit.

M. GIGNAC: C'est ça.

M. LESAGE: Une période de 12 ans à partir de trois ans d'ici.

M. GIGNAC: Non, non. Les prévisions ont été faites à partir de 1968 à aller jusqu'à 1980.

M. LESAGE: Bien. Mais là-dessus il y a trois ans où vous essayez de rattraper pour ne plus faire de pertes.

M. GIGNAC: Bien, écoutez, c'est variable, ça. Nous espérons que d'ici...

M. LESAGE: Pour l'ensemble de la période, le rendement sera de 8% à 15% sur l'investissement...

M. GIGNAC: C'est ça.

M. LESAGE: ... de $71 millions.

M. GIGNAC: L'investissement que vous avez mentionné tout à l'heure.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que l'on considère qu'on a répondu à B)?

M. GIGNAC: B, non je ne crois pas que je puisse répondre à B. Ce sont des projections que je ne suis pas en mesure de dévoiler.

M. BOURASSA: Alors, question 19.

M. LE PRESIDENT: Alors, question 19. M. Gaudet.

M. GAUDET: D'après les chiffres fournis, le coût de la construction initiale des actifs immobilisés de Dosco serait de $100 millions. En tenant compte des augmentations des coûts de construction en 1968, la valeur de remplacement de ces actifs serait de l'ordre de $130 millions au minimum. Or, ces mêmes actifs sont évalués par le prix d'achat des actions de Dosco à $45 millions, soit à 30% de leur valeur de remplacement. Il me vient à l'esprit la question suivante: Comment peut-on espérer opérer économiquement avec de telles immobilisations et un tel équipement qui comptent en moyenne une telle dépréciation?

M. GIGNAC: Justement, c'est sur quoi a porté l'étude intensive que nous avons faite des installations que Sidbec espère acquérir de Dosco? Nous avons apprécié les installations de Dosco et nous avons décidé, nous avons établi que ces installations, pour nous, valaient $45 millions, compte tenu des taux de rendement que nous avions établis au départ. Maintenant, je crois que si nous avons pu avoir, pour $45 millions, des actifs dont la valeur de remplacement est de $130 millions au minimum, on peut peut-être, entre autres choses, dire que Sidbec a bien négocié et, deuxièmement, on peut aussi établir que les dépréciations qui seront prises par Sidbec ne seront pas limitées aux $45 millions, mais bien à la valeur actuelle aux livres des actifs dont nous prenons la possession, ce qui est, dans le cas d'une situation de profit, un avantage indéniable.

Mais il faut en fait, que vous nous fassiez un peu confiance. Nous avons apprécié, de la façon la plus sérieuse et la plus compétente qui soit — du moins dans notre opinion — les actifs en question et la rentabilité a été établie en fonction de critères qui sont courants dans l'industrie sidérurgique et je crois que si cela n'est pas admis, eh bien, c'est assez difficile de prouver quoi que ce soit.

M. DOZOIS: Je pense bien que la dernière partie de la question laisse croire que ceux qui l'ont posé cette question, sont d'avis que, en

somme, vous achetez de l'équipement tellement vieux, que cela va vous coûter très cher d'opération.

M. GIGNAC: Je voudrais revenir à des réalités, plutôt que de rester dans les rêves, et vous dire qu'il y a certaines parties de l'équipement que nous achetons qui a un certain âge, dont Montreal Works, mais je voudrais vous faire remarquer du même coup que Montréal Works a été, pendant longtemps, la partie la plus rentable de Dosco.

Deuxièmement, à Contrecoeur, il y a au moins les 2/3 de l'équipement qui sont de l'équipement absolument neuf.

Troisièmement, la compagnie Truscon, qui est une compagnie de fabrication, dont nous ferons l'acquisition éventuellement, je l'espère, est une compagnie qui a été formée il y a à peu près 10 ans, dont une partie de l'équipement est absolument moderne.

Pour ce qui est de Etobicoke, c'est aussi une compagnie qui est relativement jeune et qui a de l'équipement de dernier cri, qui ne demande pas tellement de remodelage.

La chose qu'on veut peut-être mettre en évidence, c'est qu'à Contrecoeur, — et cela, tout le monde l'admet sans discussion — il y a une partie du laminoir à plat qui a des difficultés techniques dans le moment. Nous avons prévu cette chose et dans le montant d'investissements que nous prévoyons pour les cinq prochaines années, il y a un montant assez considérable qui sera affecté à la modernisation ou à la réfection des laminoirs à plat, dont une partie fonctionne actuellement avec beaucoup de difficultés. Je réfère ici le laminoir à chaud.

Je dois vous dire que le démarrage — et ça c'est, disons, comme corrollaire — d'un nouveau laminoir à plat ou à tôle forte ou quel qu'il soit, que les frais de démarrage d'un laminoir de quelque nature que se soit, coûteront probablement plus cher que la réfection du laminoir à chaud qu'il faudra faire éventuellement à Contrecoeur.

M. DOZOIS: Est-ce que M. Glgnac, d'après les renseignements que vous nous donnez, en vous basant sur la science, les études que vous avez faites, devons-nous conclure que vous êtes d'avis que, en achetant à ce prix-là les actifs de Dosco, vous faites un bon achat, et que ce sera économique de les utiliser, au prix où vous les payez?

M. GIGNAC: Nous sommes formels, pour autant que ce point-là est concerné.

M. LESAGE: M. Gignac, ici je vous demande une appréciation sur la même base que celle que vient de mentionner le ministre des Finances, M. Dozois, c'est-à-dire, votre expérience, le fait que vous soyez ingénieur, votre sens des affaires, croyez-vous que le prix de $45 millions qui a été négocié, de même que celui de $13.6 millions qui a également été négocié, sont dans cette catégorie de prix, qu'en droit, l'on définit comme un prix raisonnable au marché?

C'est-à-dire, le prix que paie un acheteur qui n'est pas obligé d'acheter et le prix que reçoit un vendeur qui n'est pas obligé de vendre. C'est la définition du prix raisonnable ou du prix du marché en droit.

M. GIGNAC: Je crois que je pourrais raisonnablement répondre oui à votre question. J'y ajouterais ceci: S'il n'y avait pas eu un acheteur qui voulait acheter et un vendeur qui voulait vendre, je ne crois pas qu'il y aurait eu une entente.

M. LESAGE: C'est clair. Je comprends que vous ne soyez peut-être pas aussi habitué que certains d'entre nous pouvons l'être aux critères qui sont utilisés par les cours dans l'évaluation d'actifs ou d'une marchandise qui se vendent, ou quoi que ce soit qui fait l'objet d'un contrat de vente. Mais le critère, c'est celui que je vous ai mentionné. Le prix juste et raisonnable. Le prix du marché doit être considéré comme celui qu'exige un propriétaire qui n'est pas obligé de vendre d'un acheteur qui n'est pas obligé d'acheter. C'est ça qui est le test, le critère.

M. GIGNAC: Je ne veux pas prendre la responsabilité de ce qui a pu motiver Dosco ou Hawker Siddeley Group de vouloir vendre ses actifs dans Dosco, mais pour autant que Sidbec est concernée, cette partie-là de votre affirmation, je l'accepte.

M. LESAGE: C'est-à-dire du critère. M. GIGNAC: Du critère, oui.

M. LESAGE: Ce n'est pas une affirmation, c'est un critère reconnu.

M.JOHNSON: C'est un critère reconnu lorsqu'il y a beaucoup de transactions pour une marchandise donnée. Mais des actifs d'aciéries, il ne s'en vend pas tous les jours.

M. LESAGE: Non, mais c'est justement pour

cela que j'essaie de vous apporter un critère.

M. JOHNSON: Il ne s'en vend pas un tous les mois non plus. Je pense bien qu'il ne s'en vend pas un par mois au Canada, il ne s'en achète pas un par mois au Canada non plus. Je pense que c'est assez difficile de comparer le prix que vous paieriez pour Dosco à un prix que d'autres ont payé ailleurs ou sont sur le point de payer. Ce ne sont pas des transactions habituelles. Cela ne se fait pas bien souvent, je crois.

M. GIGNAC: Non.

M. LESAGE: C'est justement, M. le Premier Ministre, la raison pour laquelle je n'ai pas voulu prendre le critère qui est souvent utilisé dans l'achat des propriétés. Un autre critère, c'est celui des ventes au cours d'une période récente, je ne l'ai pas pris. Parce que le seul critère applicable dans le cas qui nous occupe, c'est celui que je viens de mentionner.

M. JOHNSON: Le désir d'acheter peut être plus ou moins intense et le désir de vendre peut être plus ou moins urgent aussi. Ce sont des facteurs assez difficiles à apprécier quant au vendeur. C'est-à-dire que M. Gignac est placé dans une situation où, je pense bien, il ne peut pas être trop prolifique dans ses renseignements. C'est un fait public que Dosco a décidé de fermer, d'abandonner son usine à Sydney. Il est aussi de notoriété publique que Dosco a perdu de l'argent sur l'ensemble de ses opérations sidérurgiques au Canada et pour un montant considérable: $9 millions en 1967.

Il est aussi un fait de notoriété publique que la situation en Angleterre n'est pas ce qu'elle a déjà été et que les investissements à l'étranger sont moins faciles qu'ils ne l'ont déjà été. C'est toute une série de facteurs...

M. LESAGE: Ils sont plus restreints.

M. JOHNSON: Ils sont moins faciles, plus sévères. Par ailleurs, de la part de l'acheteur, il y a un élément qu'il ne faut pas oublier, c'est que M. Gignac et les gens de Sidbec ont été placés dans une position telle qu'ils ne sont pas obligés d'acheter Dosco, qu'ils ont l'assurance d'avoir à leur disposition $60 millions sur une période de cinq ans pour être utilisés selon l'une ou l'autre des méthodes qu'ils croiront la meilleure, la plus rentable et disons — c'est le gouvernement qui aura à juger cela — celle qui est plus conforme à l'intérêt public.

C'est-à-dire ou acheter des actifs de Dosco pour les compléter éventuellement par une acié- rie, une usine de transformation du minerai, ou commencer tout de suite par un laminoir et ensuite prévoir une usine de transformation.

Alors il y a de la liberté du côté de l'acheteur et c'est dans ce contexte, après bien des études de rentabilité, de mise au point de la machinerie, d'évaluation des actifs en détail, que Sidbec nous dit: C'est ça notre conclusion.

M. LEVESQUE (Laurier): Pour ajouter à ce que disait le premier ministre, on peut se poser la question suivante: Je ne me souviens pas si c'est en 1966 ou en 1967, mais le groupe Hawker Siddeley Canada, si j'ai bonne mémoire, était parmi les plus grosses entreprises au point de vue de l'actif au Canada, mais par contre, peut-être une de celles qui avaient le rendement le plus bas de tous les groupes. Je pense que c'était autour de 1%, ce qui veut dire que c'est quelque chose, à toutes fins pratiques, qui s'en va chez le diable.

Si on ajoute cette remarque à ce que le premier ministre disait sur l'Angleterre, ce groupe n'était-il pas de toute façon en position de liquider cette affaire-là? La liquidation a sérieusement commencé en Nouvelle-Ecosse, ce qui implique que le marché québécois sur lequel il se soutenait en grande partie au point de vue sidérurgique, devenait orphelin, à moins qu'il se reconstruise au complet ici, ce que, semble-t-il, ils ne peuvent pas faire.

Alors voici ma question. N'est-ce pas d'un groupe qui n'est plus rentable, qui est dépendant d'un pays dont la rentabilité est assez basse actuellement, qu'on extrait la partie la plus rentable, qui est le marché québécois et dont nous pouvons continuer le développement? Cela ne revient-il pas à peu près à ça?

M. GIGNAC: Oui, cela revient à peu près à ça, M. Levesque.

M. LE PRESIDENT: Nous passons à la question suivante. Question 20.

M. GAUDET: L'option Dosco a été d'après vos propres paroles, basée sur la seule question qui demeure essentiellement valable, remarquez bien, sur le strict plan des affaires, soit la rentabilité de l'entreprise dans le contexte économique actuel nord-américain. Etes-vous prêt à admettre, cependant, que le problème d'une sidérurgie intégrée au Québec doit tenir compte d'une rentabilité plus élargie que la stricte rentabilité de l'affaire d'un secteur bien restreint, qui est l'ensemble de la compagnie Dosco? En admettant, à priori, que cette entreprise est bien rentable, êtes-vous sûr,

d'autre part, qu'en ne considérant que cette stricte rentabilité comptable, vous ne laissez pas tomber des facteurs importants, difficiles à évaluer, mais qui changeraient tout l'aspect de la question? Nous pensons en particulier qu'un complexe sidérurgique québécois, établi dans le coeur du Québec à Bécancour, est l'élément de relève unique pouvant servir de substitut I l'industrie marginale sur laquelle fonctionne, au ralenti, et la région de la Mauricie et la région du centre du Québec au sud du Saint-Laurent?

M. LE PRESIDENT: M. Gignac.

M. GIGNAC: Pour réponse à cette question qui englobe assez largement le point de vue aspect économique, je présume qu'avant de penser à toute autre rentabilité, il faut d'abord avoir une compagnie qui, au point de vue économique, est saine et peut se tenir debout sur ses deux pieds, sans l'aide de personne, si l'on excepte l'injection de capitaux par le gouvernement au tout début.

Pour ce qui est de l'aspect qui déborde ce que vous appelez ici la rentabilité comptable, je ne crois pas que nous soyons actuellement en mesure de répondre à votre question. Il faudrait sûrement que vous expliquiez d'abord votre thèse. Lorsque vous parlez des facteurs importants, il y en a plusieurs. Il faudrait les connaître et leur appréciation ne pourrait sûrement pas se faire sans la participation active de ceux qui en tant qu'actionnaires contrôlent la compagnie.

A toutes fins pratiques, du moins au départ, l'actionnaire principal de la compagnie sera le gouvernement. Il me semble assez normal donc, si le gouvernement a des remarques à faire à un moment donné au conseil d'administration de Sidbec, qu'il soit en mesure non seulement dele faire, mais aussi d'imposer ses vues. Je crois que c'est une façon normale de procéder. Celui qui contrôle ou ceux qui contrôlent une entreprise sont en droit d'en établir les politiques. Le premier ministre aurait peut-être quelque chose à ajouter à ce propos.

M. JOHNSON: Oui, je pense que c'est une question qui s'adresse surtout au gouvernement et elle demande une réponse publique que le gouvernement donnera.

M. LEVESQUE (Laurier): Que le gouvernement donnera? C'est au futur.

M. JOHNSON: Oui. Disons que nous pouvons la donner tout de suite, du moins très succinc- tement. La déconcentration industrielle ou l'industrialisation décentralisée de la province, est une préoccupation du gouvernement actuel au même titre qu'elle a préoccupé le gouvernement antérieur qui, du moins, en a beaucoup parlé. Nous avons, nous, songé à cet aspect du problème et lorsque nous devrons donner l'approbation finale au projet soumis par Sidbec, c'est un des éléments dont il faudra tenir compte. Maintenant, il n'est pas dit que la seule vocation industrielle de Bécancour, en soit une d'industrie sidérurgique, si tant il est vrai que Bécancour a une vocation industrielle. Ce qui a dû être établi par les travaux du Conseil d'orientation économique, entre autres, dont les études démontrent qu'il y a là plusieurs avantages au point de vue portuaire pour les industries d'exportation. L'aciérie n'est pas la seule source d'exportation. D'autres industries pourront s'établir.

Deuxièmement, il n'est pas établi, du moins à ma satisfaction, que les industries ancillaires, qui gravitent autour d'une aciérie, d'une manufacture de tôles fortes, de tôles produites à bon marché, par exemple, vont nécessairement toutes s'installer à Bécancour. C'est là, je pense, qu'on se fait des illusions. C'est en tout cas mon opinion. Les industriels ont d'autres considérations qu'un emplacement proche de leurs sources d'approvisionnement. Pour plusieurs entreprises qui utiliseront les produits de l'aciérie, que ce soit à Contrecoeur ou à Bécancour, certaines d'entre elles ont des facteurs déterminants d'implantation indépendants de la sidérurgie elle-même. Evidemment, il y a toute une catégorie de compagnies qui aiment à se coller sur la sidérurgie elle-même. Mais cela ne veut pas dire dans un rayon de cinq milles ou de dix milles. Peut-être est-ce dans un rayon de trente, quarante, cinquante, soixante milles, selon les facilités de transport.

Je ne voudrais pas, M. le Maire, vous donner une opinion définitive, mais j'ai un doute quant à votre affirmation relative à la région de la Mauricie. Vous dites qu'elle repose sur une industrie marginale. Je ne sais pas si vous songez aux papeteries de Trois-Rivières, du Cap, de Shawinigan, de Grand'Mère. Je ne sais pas. Lorsque vous employez ce terme, si vous songez aussi aux produits pétrochimiques, à l'industrie chimique? Qu'entendez-vous par « l'industrie marginale de la Mauricie »?

Quelles sont ces industries marginales que vous avez en Mauricie?

M. GAUDET: C'est parce que dans la région la population est assez dense et pour l'industrie du papier ainsi que d'autres l'approvisionnement

en matière première est aujourd'hui plus difficile. Plus ça va, par exemple, plus il faut prendre notre bois au loin.

M. LESAGE: Le mot marginal est employé dans un sens large. Vous voulez sans doute dire déclinant plutôt que marginal?

M. JOHNSON: Bien, plusieurs des industries de la Mauricie sont basées entre autres sur la proximité des ressources hydrauliques. L'électricité produite à Shawinigan est, comme on le sait, un des facteurs déterminants pour certaines industries. Si vous parlez de l'industrie du bois, des industries de Grand'Mère qui s'occupent de transformation des produits forestiers, je ne sais pas si c'est marginal ou non. Vous pourriez demander cela à M. Gignacl

M. LEVESQUE (Laurier): Le tableau s'améliore quand on est au pouvoir!

M. LESAGE: Je crois qu'on devrait plutôt dire que l'industrie, relativement parlant, est déclinante par rapport à la montée de la population.

M. GAUDET: C'est un peu ça aussi. Donc, en ayant l'industrie chez nous, ça donnerait une chance, en même temps, à toute la région pour garder au moins la population, principalement celle des villes qui ont tendance à s'accroître à un rythme un peu plus accéléré.

M. LESAGE: Alors, c'est donc dans ce sens-là que vous avez employé le mot marginal?

M. GAUDET: C'est dans ce sens-là, parce que nous ne sommes pas les seuls à vouloir avoir quelque chose chez nous. Nous avons l'aide des gens du côté nord ainsi que celle des gens du côté sud. Et s'il vient quelque chose dans la région, il y a une certaine quantité de main-d'oeuvre qui, tout en nous aidant, aidera les autres aussi également à maintenir ce qui est en opération et puis, en même temps, employer tout le capital humain de disponible, du moins dans nos régions.

M. JOHNSON: N'allez pas vous imaginer que c'est avec gaieté de coeur que le gouvernement viendrait à approuver les suggestions, les recommandations faites par Sidbec.

Ce n'est jamais plaisant de décevoir des gens qui avaient de bonnes raisons de croire que l'industrie allait s'implanter chez eux. Il y a aussi d'autres centres dans la province qui auraient voulu l'avoir. Je pense bien que le gouvernement qui a précédé le nôtre a éliminé les demandes de Sept-Iles, de Rimouski, de Montmagny pour des raisons économiques.

Je pense qu'un pôle d'attraction à Rimouski ou à Montmagny aurait drôlement favorisé le développement de l'est de la province. Mais, le gouvernement, quel qu'il soit, ne peut pas se lancer dans une série de remèdes artificiels si nos implantations industrielles ne sont pas économiquement saines, ne sont pas en mesure et de payer des salaires comparables à ceux qui sont payés ailleurs et de vivre de leurs propres moyens et même d'être assez efficaces pour supporter la concurrence dans l'exportation.

Nous voulons éviter l'industrie artificielle. Comme je vous l'ai déjà dit, M. le Maire, publiquement, n'importe qui, n'importe quel gouvernement surtout, peut autoriser l'implantation d'une industrie d'un million de tonnes, qui s'en va vers quatre millions éventuellement, à condition d'être prêt à y mettre l'argent pour l'implantation et, deuxièmement, à fournir l'argent pour les déficits pendant une période de cinq, six, huit, dix, douze, quinze ans.

Mais, quand on examine ce problème en fonction de tous les autres problèmes de la province et de tous les besoins du territoire, on ne peut pas artificiellement faire vivre une aciérie même si on a eu lieu de croire qu'elle s'établirait à tel endroit.

Ce n'est pas de gaieté de coeur que le gouvernement autorisera la transaction de Dosco; ce sera un autre cas où nous devrons choisir entre l'économique et la politique, entre ce que nous croyons être, à tort ou à raison, l'intérêt économique à la base du progrès social et une raison très claire, très facile, celle de la politique: Combien de comtés ça va nous donner ou nous faire perdre? Cela, il faut qu'un gouvernement ait le courage de le faire, il faut qu'il prenne ces risques à un moment donné même s'il doit être battu.

M. LEVESQUE (Laurier): Le ministre de l'Agriculture écoute ça d'un air mortuaire...

M. VINCENT: Je pensais aux déclarations de l'ancien ministre des Richesses naturelles.

M. LEVESQUE (Laurier): C'est vrai.

M. JOHNSON: Le ministre de l'Agriculture a eu une naïveté, c'est de croire toutes les déclarations qu'il lisait des gens en place avant 1966.

M. LEVESQUE (Laurier): Si j'ai bonne mémoire, en m'affiliant à la campagne de 1966, il disait dans son coin: Avec nous autres, ça va venir encore plus vite.

M. VINCENT: A ce moment-là, je me basais sur les déclarations du président de Sidbec.

M. LEVESQUE (Laurier): D'accord.

M. LESAGE : M. le Président, si vous me permettez, à la suite des exposés de principe du premier ministre et avant qu'on ne tombe dans la politique, d'en revenir à la rentabilité économique, je voudrais demander à M. Gignac ceci: Au lieu d'une somme de $60 millions à être versée pendant cinq ans à $12 millions par année, si le gouvernement mettait à la disposition de Sidbec une somme de $150 millions ou de $200 millions qu'il lui verserait au rythme de $25 millions par année sur une période soit de six ans dans le cas de $150 millions, soit de 8 ans dans le cas de $200 millions, quelle serait la période de temps requise pour construire à Bécancour une sidérurgie intégrée rentable? Sur quelle période de temps pourrait s'échelonner l'établissement, alors, premièrement, d'une usine de transformation du minerai I l'acier primaire et, deuxièmement, des laminoirs pour les tôles fortes et des installations pour la production des fers marchands?

M. GIGNAC: Enfin, pour autant que je suis concerné du moins, c'est un peu une question hypothétique.

M. LESAGE: Ce n'est pas une question plus hypothétique que celle que le premier ministre vous a posée lorsqu'il vous a parlé de $60 millions. Je vous parle de $150 millions ou de $200 millions. Supposons, par exemple, que ce n'est pas hypothétique, qu'il y a des élections la semaine prochaine, que le gouvernement est renversé et que nous vous disons: Qu'est-ce que vous allez faire avec $150 millions ou $200 millions? C'est une question que je vous poserais, une question très précise.

M. GIGNAC: Il y a une chose sûre, c'est que Dosco serait encore là, c'est-à-dire à Contrecoeur. Nous avons toujours tenu pour acquis que quoi qu'il arrive à Bécancour, Dosco continuerait à exploiter la plupart de ses Installations au Québec et à Toronto...

M. LESAGE: Mais vous avez dit qu'une industrie à Bécancour pouvait être viable en dépit de Dosco.

M. GIGNAC: Je reviens à dire que les critères de rentabilité que nous prendrions pour étudier cette nouvelle proposition qui serait faite par le gouvernement seraient les mêmes que nous avons pris jusqu'à maintenant pour étudier les divers projets que nous mettons de l'avant. Je ne crois pas que nous pourrions aller beaucoup plus vite que nous irions si nous démarrions à Bécancour pour la bonne raison que le marché, au départ, serait divisé entre deux complexes: celui de Dosco et celui de Bécancour.

M. LESAGE: Il n'y a pas de tôle forte à Dosco.

M. GIGNAC: Oui, mais concernant la tôle forte, il y a une pénétration considérable du marché à faire.

M. LESAGE: Il faut pénétrer le marché, d'accord.

M. GIGNAC: On ne peut pas mettre de côté les fers marchands. En fait nous croyons que c'est par là qu'il faudrait commencer plutôt que par la tôle forte.

M. LESAGE: Mais il y a un marché captif pour les fers marchands.

M. GIGNAC: Oui, mais c'est quand même 100,000 tonnes.

M. LESAGE: On arrivait avec Marine Industries à plus que cela.

M. GIGNAC: Cela présuppose des pénétrations de marché beaucoup plus considérables que celles que nous avons envisagées actuellement.

Peut-être que, à cause du fait que $150 millions — vous avez mentionné $150 millions — cet argent-là serait donné à Sidbec sans intérêt. C'est ce que vous dites?

M. LESAGE: Oui, dans les mêmes conditions, au rythme des $25 millions par année.

M. GIGNAC: Evidemment, nous gagnerions dans la rentabilité le taux d'intérêt que nous avons toujours pris en considération lors des études que nous avons faites depuis 1966. Cela serait sûrement plus avantageux au point de vue de la rentabilité que ce que nous avons considéré nous-mêmes, étant donné que si nous construisions un complexe à Bécancour, nous disions au gouvernement ceci: Assurez-nous de

$60 millions et, avec le temps, nous allons pouvoir établir un complexe à Bécancour. Et le reste de l'argent qui sera requis sera fourni à même les fonds produits par Sidbec à Bécancour, ou fournis par une dette à long terme, pourvu que la compagnie soit en bonne posture financière à ce moment-là, ce qui lui permettrait d'aller sur le marché de l'argent.

M. LE PRESIDENT: M. Levesque.

M. LEVESQUE (Laurier): Il ya deux choses qui sont contradictoires dans ce qui s'est passé et nous ne sommes responsables, c'était inévitable, et probablement que les élections ont rempiré les choses. C'est que nous avons tous donné une sorte d'assurance morale et c'est bien sûr que c'était vrai des deux côtés en 1966, que Bécancour, pour des raisons qui étaient très logiques à ce moment-là, serait choisie, et les gens de Bécancour ont droit d'être ici pour nous rappeler ce qui a été dit. Plus importante encore que cela, il y a la question de décentralisation c'est-à-dire d'arriver à réduire un peu — non pas à réduire Montréal — ou si vous voulez à réorienter ce qui peut devenir monstrueux dans la région de Montréal et équilibrer le développement du Québec, là-dessus, nous sommes tous d'accord.

Et d'un autre côté, si nous n'avons pas le minimum de confiance envers ceux qui travaillent là-dedans, avec tous les experts qu'ils ont consultés, il paraît évident que dans l'immédiat, l'achat Dosco est d'une rentabilité que nous ne pouvons pas discuter. De toute façon, si nous ne le faisions pas, il y aurait cet ébrèchement mutuel de Dosco continuant autant qu'on puisse savoir, et de Bécancour commençant, qui, à toutes fins pratiques, serait uniquement une sorte de stérilisation mutuelle, au moins pendant un bon nombre d'années. Alors, nous sommes devant ce problème-là. Au point de vue technique, est-ce que je pourrais poser deux ou trois questions à M. Gignac? Parce qu'il y a quelque chose qui me frappe à propos de l'expansion prévue.

Est-ce qu'il n'y a pas une possibilité de sortir de ce cul-de-sac, surtout en fonction de la décentralisation éventuelle, en se posant les questions suivantes? Je vais être profane. M. Gignac et M. Dufresne pourront me corriger s'ils le désirent.

Si les souvenirs que j'en ai sont bons, d'abord vous dites que, d'ici quatre ans, en prenant les fonds qui vous seraient fournis et en faisant fonctionner l'entreprise telle qu'elle est — vous avez une capacité de 700,000 tonnes. Elle fonctionne actuellement, d'après ce que vous disiez, à peu près à 350,000 ou 400,000 tonnes. Elle lamine, elle fait des produits, elle a un marché. Et dans quatre ans à peu près, vous prévoyez passer à la production, enfin j'appelle cela primaire, en profane, à la production de fonte et d'acier. C'est ça?

M. GIGNAC: Oui.

M. LEVESQUE (Laurier): Alors, si j'ai bonne mémoire du cheminement, vous installez des hauts fourneaux ou des fours électriques, peu importe, l'un ou l'autre éventuellement. Si vous commencez par le deuxième, pour produire x centaines de milliers de tonnes de fonte, quelque part, cela peut être Contrecoeur ou ailleurs, à partir de minerai et de votre fer métallisé, je suppose, dont vous parlez. Mais cela aussi, il faudrait le fabriquer quelque part. Cela va en fonte, si j'ai bonne mémoire, et le cheminement, c'est qu'il va à l'aciérie qui, dans la technique de la sidérurgie, est l'endroit où la fonte devient acier. Et puis là, vous le barattez suffisamment et, àun moment donné, avec ou sans coulée continue, vous en faites des lingots ou des brames — je ne sais pas trop quoi — et à ce moment-là, vous emmagasinez — à moins qu'on puisse prévoir qu'on va les employer tout de suite pour faire des produits — vous emmagasinez cela et il faut que ce soit acheminé vers les laminoirs selon les besoins, c'est ça?

M. GIGNAC: Oui.

M. LEVESQUE (Laurier): Alors, toute la partie que vous allez ajouter, d'après vos calculs, dans trois ou quatre ans, peu importe, ce sera à toutes fins pratiques la partie de fourniture d'acier primaire, c'est-à-dire de fabrication d'acier à partir de fonte par hauts fourneaux ou par fours électriques ou les deux, selon les besoins du marché; de cet acier auront été coulés des lingots qui seront devenus brames, il me semble que c'est le mot.

Tout cela, c'est ce que vous ajouterez pour intégrer l'opération sidérurgique, dont la partie que vous achetez actuellement,ce sont les laminoirs et les produits finis. C'est cela?

M. GIGNAC: Oui.

M. LESAGE: Excusez-moi M. Lévesque, M. Gignac, l'autre jour nous a parlé de la construction de fours électriques pour alimenter Dosco, mais pas à partir du minerai, à partir de la fonte de ferraille.

M. LEVESQUE (Laurier): Si l'ancien premier ministre me permet, mon ancien chef...

M. LESAGE: C'est parce que M. Gignac vous répond oui, mais ce n'est pas ce qu'il nous a répondu l'autre jour.

M. LEVESQUE (Laurier): Ecoutez, est-ce que nous pourrions finir cela?

M. GIGNAC: Est-ce que nous parlons de Bécancour?

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LEVESQUE (Laurier): J'ai presque fini.

M. LE PRESIDENT: Je pense bien que M. Gignac a peut-être affirmé certaines choses actuellement, mais nous ne sommes pas encore rendus là. M. Lévesque va terminer sa question et M. Gignac...

M. LEVESQUE (Laurier): Je vais laisser répondre M. Gignac. Je voudrais bien que le chef de l'Opposition me laisse finir mon modeste cheminement.

M. LESAGE: C'était seulement parce que la réponse affirmative de M. Gignac à votre question ne ressemble pas à la réponse qu'il a donnée l'autre jour quant à la transformation du minerai.

M. GIGNAC: Cela dépend de ce dont nous parlons. Si nous parlons de Bécancour, ce que nous proposions au départ, si nous nous installions à Bécancour, c'était l'installation d'un laminoir et peut-être d'une fournaise électrique qui utiliserait des déchets, des ferrailles.

M. LEVESQUE (Laurier): C'est ça. M. LESAGE: Et à Dosco?

M. GIGNAC: A Dosco, cela pourrait être éventuellement, soit une installation de hauts fourneaux ou de fournaises électriques qui utiliseraient du fer métallisé. Maintenant, je crois que je vois venir un peu la question de M. Levesque: Est-ce que cette opération d'acier primaire ne pourrait pas être faite à Bécancour? A ce moment-là, je n'ai pas encore répondu d'une façon formelle là-dessus. Mais ce que j'ai dit, c'est qu'il me semblait logique que, si le plus clair de nos opérations devant se concentrer à Contrecoeur, il nous semblait logique que la fabrication d'acier primaire se ferait aussi à Contrecoeur, pour des raisons administratives et aussi pour des raisons d'opération. Parce que, dans l'opération d'un four électrique ou même d'un haut fourneau, il y a une propor- tion assez considérable de déchets d'acier qui sont produits par l'opération des laminoirs les quels déchets retournent éventuellement à la fabrication d'acier primaire, soit via les hauts fourneaux ou soit via les fours électriques. Disons que nous n'avons pas étudié à fond la possibilité d'installer la fabrication d'acier primaire à Bécancour ou à Contrecoeur, mais il nous semble que ce serait peut-être éparpiller nos efforts et nos énergies, que d'aller installer cela à Bécancour plutôt qu'à Contrecoeur le cas échéant.

M. LEVESQUE (Laurier): Pour terminer, je vois bien qu'il y a des problèmes. Je pense bien que dans n'importe quelle conception d'ingénieur, d'administrateur — et cela doit être vrai ailleurs aussi — on essaie d'intégrer au maximum les opérations, comme on les conçoit au début. Mais il demeure que Contrecoeur est seulement à 48 milles de Bécancour — d'après ce qu'on me disait, on a vérifié avec les gens du canton.

M. GIGNAC: C'est 80 milles.

M. LEVESQUE (Laurier): Ah, bon! Vous ne connaissez même pas votre région. L'autre jour, on nous a dit 48 milles. En tout cas, écoutez, nous ne nous chicanerons pas. Ce que je veux dire, c'est que dans l'immédiat — une cinquantaine de milles — et comme vous dites il y a des questions de déchets, etc., il doit y avoir des facteurs qui, au point de vue de l'efficacité immédiate ou de l'efficacité à court terme, sont importants. Mais comme il reste trois ou quatre ans, est-ce que l'on ne peut pas tenir compte du fait que le centre du Québec — c'est quand même le centre du Québec — qu'il y a trois régions qui sont évidemment extraordinairement inégales.

Mais, en gros, on peut dire que l'industrie québécoise est quelque part dans la région, qui confine à Bécancour, éventuellement, et quelque part dans la région qui confine à la capitale, si les projets du gouvernement et n'importe quelle politique régionale un peu cohérente se développe. Essentiellement, enfin, il y a l'agglomération monstrueuse de Montréal.

Alors, on sait que la qualité du terrain à Bécancour, qui existe, qui est là, a été évaluée aussi systématiquement que possible, avec les moyens de cette époque. C'est un terrain qui, paraît-il, est idéal pour l'implantation d'industries lourdes, qui ont besoin d'être bien soutenues. En profane, je rappelle simplement que le transport du minerai de la Côte-Nord, source d'approvisionnement normal, ne pose pas de

problème, d'alimentation des marchés extérieurs non plus. C'est, enfin, l'endroit où la navigation ne présente aucun problème, sauf des détails mineurs, douze mois par année. Si donc on regarde le développement du Québec, qui sera peut-être plus clair dans trois ou quatre ans, si on veut l'harmoniser, qu'on implante cette aciérie! On n'en implantera pas tous les jours des fabriques d'acier primaire! Nous serons peut-être 8 millions d'habitants dans douze ans, 10 millions dans 20 ans. Par conséquent Québec ne pourra pas soutenir, dans une industrie primaire aussi stratégique que celle-là, trois ou quatre usines.

N'est-il pas possible, en fonction d'un développement — c'est un facteur très important — d'un développement déconcentré et d'un équilibre régional, en tenant compte aussi du fait que les produits de cette sidérurgie peuvent aller dans les deux directions et que ces approvisionnements viennent tout de même normalement de la Côte-Nord, si vous employez du minerai; n'est-il pas possible, de concevoir, ou enfin de ne pas fermer la porte I ce bloc de fabrication, que j'appelle primaire, en profane, mais qui parviendrait Si un produit qui pourrait être fini sûrement en grande partie à Contrecoeur et Montréal — mais peut-être aussi éventuellement ailleurs — et à du minerai qui doit venir de moins loin s'il s'agit de Contrecoeur; n'est-il pas possible que tout cela soit un argument suffisant, si votre actionnaire principal, qui est le gouvernement, décidait dans sa politique de quantifier ça, de calculer et de vous dire: C'est là qu'il faut aller?

M. GIGNAC: M. Lévesque, en ce qui concerne l'implantation d'une fabrique d'acier primaire, je crois que nous pouvons dire que la porte n'est pas fermée. Cependant, je ne voudrais leurrer ni le public ni le gouvernement quant à la possibilité ou à l'impossibilité d'implanter des installations pour produire de l'acier primaire à Bécancour.

Je me sentirais, personnellement du moins comme citoyen du Québec, très mal à l'aise de tenir en haleine pendant quatre ou cinq ans les gens de Bécancour, de leur donner l'espoir qu'un de ces jours, il y aura une fabrique d'acier primaire alors que peut-être les chances sont assez minces, qu'il n'y a qu'une chance.

Disons que je parle de logique industrielle ou de logique d'hommes d'affaires. Disons qu'il me semble plus logique d'installer l'acier primaire à Contrecoeur qu'à Bécancour si nous devenons propriétaires des installations de Con» trecoeur. Mais cela ne veut pas dire que ce soit impossible de les installer ailleurs. Il y a un facteur qui joue énormément en faveur de Bé- cancour au point de vue de l'installation d'un gros équipement, c'est celui des fondations. Il y a un facteur qui joue contre des installations d'acier primaire ou de tout autre complexe à Bécancour, c'est l'éloignement du marché. Et cela coûte de l'argent. Le facteur de l'apport de matériaux ou de minerai n'est pas un facteur qui compte parce que transporter du minerai à Bécancour ou le transporter à Contrecoeur, c'est le même prix.

M. LEVESQUE (Laurier): Même pendant les mois d'hiver?

M. GIGNAC: Pendant les mois d'hiver, on ne transporte pas tellement de minerai, de toute façon.

M. LEVESQUE (Laurier): Ce serait « stocké » ou quoi?

M. GIGNAC: Oui, il faudrait stocker parce que, comme vous le savez, dans le fleuve, les assurances maritimes sont très élevées l'hiver et, à moins que cette situation change, ce ne serait pas attrayant d'autant plus que transporter du minerai qui gèle, l'hiver, c'est assez embarrassant. Or, stocker à Bécancour ou stocker à Contrecoeur, c'est le même prix. Je ne crois pas que nous puissions trancher cette question aujourd'hui. Je ne veux pas fermer la porte définitivement mais je ne voudrais pas non plus donner de fausses espérances à quiconque.

M. LEVESQUE (Laurier): Une simple question additionnelle. Je ne voulais pas vous interrompre mais c'est pour terminer...

M. LE PRESIDENT: M. Levesque, un instant. M. Johnson a la parole.

M. JOHNSON: Très courte, ma question. On a pu avoir l'impression, M. Gignac, que c'est le gouvernement qui vous a dit qu'il n'avait que $60 millions à mettre alors que, je pense bien, vous allez le confirmer, c'est vous qui nous avez demandé si on avait $60 millions à vous promettre pour faire de deux choses l'une, le choix « A »: Dosco ou le choix « B »: Bécancour, selon un plan que vous nous avez exposé en détail la semaine dernière.

M. GIGNAC: C'est exact, M. Johnson.

M. JOHNSON: Vous êtes notre BAEQ en somme.

M. LESAGE: Je voudrais continuer mes questions. J'en ai pour quelques minutes encore.

M. LE PRESIDENT: Une seconde, là.

M. LESAGE: J'en ai pour quelque temps. Il est déjà une heure...

M. LEVESQUE: Est-ce que je pourrais terminer?

M. LE PRESIDENT: Nous sommes à la question B, il nous reste la question 21 et le maire de Bécancour nous a distribué une autre série de questions. Alors, nous nous étions engagés, unanimement, vis-à-vis de M. Gignac, à le dégager à une heure précise.

Or, je me demande s'il n'y a pas lieu de suspendre la séance.

M. GIGNAC: Ecoutez, j'ai réglé mes problèmes personnels alors, moi, je peux continuer jusqu'à cinq heures, si vous voulez.

M. LESAGE: Cinq ou six heures! M. JOHNSON: Voici, évidemment,...

M. LESAGE: Après les ordres du jour en Chambre.

M. JOHNSON: ... Les questions...

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que le premier ministre permettrait, c'est une simple question complémentaire? Est-ce que Sidbec est en mesure ou sera en mesure, avant longtemps — parce que je suis d'accord que quatre ou cinq ans, faire mijoter des espoirs, etc., comme forcément c'est une décision en grande partie politique que le gouvernement devrait prendre pour Sidbec — d'établir la différence au point de vue de la rentabilité, de l'implantation de l'acier primaire au Coeur du Québec, à une cinquantaine de milles des laminoirs actuels de Contrecoeur et un peu plus de Montréal? Est-ce qu'on peut l'établir ou si ça n'a pas été établi?

M. GIGNAC: Cela n'a pas été établi, mais nous pouvons l'établir et nous...

M. LEVESQUE (Laurier): Est-ce que nous pourrions demander au gouvernement de le demander?

M. JOHNSON: Oui.

M. GIGNAC: Nous avons l'intention de l'établir aussi. Maintenant, je crois que le choix que nous devons faire aujourd'hui, quoi qu'il arrive plus tard, c'est de quelle façon Sidbec ou le Québec peut arriver à avoir une industrie intégrée — là je parle d'une façon générale — au Québec et, la réponse, c'est en achetant les installations de Dosco.

Maintenant, ça ne donne pas de réponse quant à l'implantation de ce qui se passera plus tard pour les installations d'acier primaire.

M. LE PRESIDENT: M. le député de Mercier.

M. BOURASSA: Oui, juste une question. Je pense que le point que MM. Levesque et Lesage ont abordé, c'est fondamental. Vous supposez forcément que Dosco continuerait à opérer? C'est une hypothèse que vous tenez pour acquis, même si, évidemment...

M. GIGNAC: Oui.

M. BOURASSA: L'on peut se demander si les propriétaires anglo-saxons continueraient à investir, puisqu'il semble qu'il faut réinvestir pour faire opérer la chose de façon rentable? Ou vous supposez que Dofasco ou Stelco achèterait Dosco ? C est-à-dire que vous supposez de façon certaine ces deux hypothèses?

M. GIGNAC: Enfin, ça peut être Dofasco, Stelco, ça peut être d'autres aussi. Ce n'est pas limité à ces deux-là.

M. BOURASSA: Mais, vous éliminez la disparition du compétiteur?

M. GIGNAC: Ah! c'est impensable de croire que Dosco, les installations à Contrecoeur particulièrement, vont fermer du jour au lendemain.

Même si elles ont perdu beaucoup d'argent l'an dernier, les mêmes conditions d'exploitation qui s'appliquaient pour nous cette année, s'appliquent à elle aussi. Je pense bien que, avec Sydney Steel sortie du portrait, la situation va s'améliorer grandement cette année. Alors, il est plausible de croire que, même par ses propres moyens, Dosco deviendrait éventuellement une compagnie rentable. Maintenant je ne voudrais pas entrer dans les détails, je ne pourrais pas entrer dans les détails quant aux raisons qui ont motivé Dosco ou les propriétaires de Dosco, soit Hawker Siddeley au Canada ou Hawker Siddeley à Londres, de vouloir vendre leurs installations. Mais je suis pas mal convaincu qu'avant de fermer ces

installations-là, si d'un autre côté nous partons à Béeancour, je pense bien que ça me surprendrait énormément qu'ils ferment ça du jour au lendemain.

M. LE PRESIDENT: Question 21.

M. GAUDET: S'il est admis d'une part que la sidérurgie doit avant tout...

M. LESAGE: Un instant, s'il vous plaît. Il est une heure cinq; il n'y a certainement pas d'espoir de terminer ce matin. Il y a encore toute une série de questions; j'ai à peine amorcée la question que j'ai posée sur l'investissement possible de $150 millions à $200 millions et j'ai toute une série de questions à poser. J'ai été interrompu par M. Le-vesque et j'ai bien l'intention de continuer dans cette ligne de questions.

M. JOHNSON: M. Gignac, pourriez-vous revenir au comité cet après-midi?

M. GIGNAC: Oui.

M. JOHNSON: Après la période des questions que nous espérons toujours courte, mais dont la longueur n'est jamais garantie.

M. LESAGE: Cela dépend de la longueur des déclarations ministérielles.

M. GIGNAC: Nous sommes disponibles, M. Johnson, toute la journée, à l'heure que vous voudrez. Nous sommes disposés à prendre le temps qu'il faut pour répondre à toutes les questions.

M. LESAGE: Vers trois heures et demie ou quatre heures.

M. JOHNSON: Et nous sommes disposés à fournir aux députés et aux intéressés tout le temps nécessaire pour poser leurs questions et même au chef de l'Opposition pour faire des promesses électorales.

M. LE PRESIDENT: Alors, la séance est levée. Nous reprendrons l'étude cet après-midi vers trois heures trente au même local.

Reprise de la séance à 16 h 24

M. GRENIER (Président): A l'ordre, messieurs!

M. JOHNSON: J'aurais une question avant que M. le Maire ne reprenne la parole. Il s'agirait d'éclaircir une des dimensions du problème, soit l'achat des actifs à $45 millions, le juger dans le contexte du principe émis par le chef de l'Opposition. Si M. Gignac croit qu il n'est pas opportun de répondre, il n'a qu'à le dire.' Ma question est la suivante: Si Hawker Siddeley qui détient 77% du capital-actions de Dosco ne se trouvait pas dans la conjoncture que vous connaissez, M. Gignac, est-ce que vous auriez pu vous porter acquéreur pour $45 millions des mêmes actifs dont il est question depuis le début?

M. GIGNAC: La réponse est définitivement non. Je crois que je pourrais dévoiler qu'il y a environ un an, la base des discussions que j'avais avec les gens de Hawker Siddeley Group, était établie sur la valeur aux livres des actifs. Je parle des actifs que nous avions l'intention d'acquérir.

Evidemment, à ce moment-là, c'est-à-dire vers le mois de mai ou de juin de l'an dernier et le mois de février ou de mars de cette année, le fait que Dosco ait dépéri, n'a sûrement pas aidé les gens de Hawker Siddeley dans leurs négociations avec nous. Si, au lieu d'avoir une position déficitaire à la fin de 1967, ils avaient eu une position non déficitaire, même pas une position de profit mais une position non déficitaire, je ne crois pas personnellement que nous aurions réussi à pouvoir acheter les actifs en question à un prix de $45 millions.

M. JOHNSON: Merci, monsieur Gignac.

M. LE PRESIDENT: Nous nous en tenons à la question 21.

M. LESAGE: M. le Président, comme le disait le premier ministre, ça revient un peu à la définition de ce qui est un prix juste et raisonnable.

M. JOHNSON: Quand un gars est mal pris, il vend meilleur marché,

M. LESAGE: Oui, peut-être.

M. LE PRESIDENT: A la question no 21, M. le Maire.

M. GAUDET: S'il est admis, d'une part que la sidérurgie doit avant tout être une entreprise intégrée, c'est-à-dire qu'elle soit suffisamment considérable pour être compétitive sur le marché canadien, sinon international, pour écouler la production et d'autre part, que cette compétition soit en faveur du complexe sidérurgique intégré, possédant la prépondérance technique et réduisant les coûts d'exploitation et améliorant la qualité de la production, comment Sidbec espère-t-elle avoir le mécanisme suffisant pour se prévaloir de ce marché, alors que les quatre usines Dosco semblent déjà dépassées ou auront besoin d'améliorations considérables pour atteindre les objectifs plus haut précités?

M. GIGNAC: Je crois, M. le Président, que j'ai déjà répondu directement ou indirectement à cette question. Mais permettez-moi de dire que quand Sidbec déclare qu'elle peut payer $45 millions pour certaines installations de Dosco, c'est parce qu'elle a établi, de la façon la plus sûre possible, que le pouvoir de gains de ces installations est compatible avec le taux de rendement prévu, dont je vous ai parlé ce matin et à d'autres séances. Tout cela, compte tenu de la concurrence sur le marché domestique. Nous n'avons pas tenu compte de l'exportation, comme je vous l'ai déjà dit, sur des marchés à l'extérieur du Canada, c'est-à-dire que nos prévisions de marché ou nos projections de marché sont basées sur le marché canadien, québécois et ontarien, etc.

M. JOHNSON: M. Gignac, considérez-vous que le mécanisme des quatre usines est dépassé? C'est ce qu'on prétend dans la question.

M. GIGNAC: Je ne suis pas prêt à dire que les installations que nous prenons sont dépassées. Prenons l'installation de Dosco à Contrecoeur. C'est à cet endroit que les installations les plus coûteuses ont été faites. IL y a, à Contrecoeur, à toutes fins pratiques, trois laminoirs, un laminoir à barres, un laminoir à plat à froid, et un laminoir à plat à chaud.

Le laminoir à barres est un laminoir moderne qui a actuellement une bonne production et qui a dépassé le stade de démarrage. Il est en production et en bonne production. Le laminoir à froid est aussi un laminoir moderne qui a une bonne production. Le seul laminoir ou la seule pièce d'équipement qui laisse à désirer présentement est le laminoir à chaud. Dans nos projections nous avons prévu des sommes pour pallier la mauvaise tenue ou au mauvais rendement de cette pièce particulière d'équipement.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on passe aux questions supplémentaires qui nous ont été posées cet avant-midi?

M. GAUDET: On présume que le facteur important du choix de Dosco, ce sont les exigences du marché. L'achat de Dosco permettrait une pénétration plus rapide du marché du fait que l'on s'approprie déjà une clientèle. Mais cependant les installations ne seront pas complétées puisque Dosco ne fabrique pas de tôles fortes et de plus on projette une usine intégrée.

Je passe à la deuxième partie de la question, parce qu'à la première nous avons déjà obtenu une réponse.

Toujours en tenant compte de la décentralisation industrielle, et une fois le marché bien acquis, ne serait-il pas aussi possible et souhaitable de prévoir le déménagement des installations actuelles de Dosco à Bécancour avant d'investir un montant de $17 millions pour l'agrandissement et l'amélioration des installations existantes de Dosco?

Combien en coûterait-il alors pour déménager les installations de Dosco à Bécancour?

M. GIGNAC: Nous n'avons pas fait d'études spéciales sur un projet de la sorte mais disons qu'avec l'expérience déjà acquise il faudrait y mettre plusieurs millions pour transporter de Contrecoeur à Bécancour les installations déjà existantes.

Si nous parlons des bâtisses, à toutes fins pratiques, cela ne se déménage pas. Cela peut se déménager, mais c'est très coûteux. On en profiterait sûrement pour améliorer certains laminoirs, ce qui coûterait des sommes d'argent additionnelles. Enfin, tout le monde sait que faire un déménagement, c'est quelque chose d'assez dispendieux et je ne serais pas prêt à dire combien cela coûterait, mais je peux vous assurer que cela coûterait assez cher et que l'on se retrouverait avec des installations qui seraient peut-être bonnes, mais qui coûteraient beaucoup plus que $45 millions, plus les $17 millions que nous avons l'intention d'investir à Contrecoeur ou ailleurs.

M. LESAGE: Combien beaucoup plus?Avez-vous une idée de l'ordre de grandeur même si vous n'avez pas d'étude, M. Gignac?

M. GIGNAC: Dans les études que nous avons faites jusqu'à présent, M. Lesage, le coût en soi des équipements représente, grosso modo, à peu près le tiers du coût total. Ce qui veut dire que les autres coûts sont répartis sur les services, les aqueducs, égouts, bâtiments,

électricité... Ce sont des équipements de service, extrêmement dispendieux. Cela a été fait il y a déjà quelques années. Certains de ces services, à Contrecoeur, sont très à point. Nous n'avons jamais mis en doute les services d'é-gouts de Contrecoeur, que je sache, ni les services d'électricité. Ce qui est à améliorer, ce sont des équipements de production. Et comme je vous le disais, au total, ces équipements représentent à peu près le tiers du coût total d'une installation sidérurgique.

M. LESAGE: Comprenant bâtiments, services...?

M. GIGNAC: C'est cela.

M. JOHNSON: M. Gignac, est-ce sous votre présidence ou sous celle de votre prédécesseur, que l'on aurait étudié la possibilité de transporter l'acier liquide, en ébullition, en fusion, de Bécancour à Contrecoeur?

M. LESAGE: De Tracy à Bécancour. M. JOHNSON: Ou à l'inverse.

M. LESAGE: C'était de Tracy, de QIT, à Bécancour, pour le début des opérations.

M. GIGNAC: On me dit, M. le Premier Ministre, que cette proposition a été d'abord étudiée au comité de sidérurgie. Elle a été reprise — au début de la fondation de Sidbec — par Sidbec, mais elle a été abandonnée en faveur du projet que vous connaissez.

M. JOHNSON: Qu'est-ce qu'il s'agissait de transporter exactement?

M. GIGNAC: De la fonte liquide, de Bécancour à Contrecoeur, dans des...

M. LESAGE: Non, de Tracy à Bécancour.

M. GIGNAC: De Tracy à Bécancour, oui. C'est une distance beaucoup plus courte.

M. LESAGE: De QIT. c'est beaucoup plus court. C'est à 18 milles je crois, en ligne directe.

Peut-être un peu plus que ça, mais de toute façon on nous disait que ce pouvait être sur des voies extrêmement rapides, et il y aurait eu perte très légère de chaleur.

M. JOHNSON: Est-ce que l'on a songé à un pipe-line?

M. LESAGE: Non, non. Pas possible, le pipeline pour de l'acier en fusion. C'est un peu chaud.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que nous pouvons passer à la question suivante?

Question posée au gouvernement par M. le maire.

M. GAUDET: Sans déménager les usines existant à Contrecoeur, si une partie du primaire était installée à Bécancour, est-ce que ça pourrait aussi aider à venir qu'à intégrer le complexe, à la longue?

M. GIGNAC: Je m'excuse, je n'ai pas très bien saisi.

M. GAUDET: En installant le primaire à Bécancour, sans enlever en premier le complexe qui est établi à Contrecoeur, est-ce qu'à la longue les travaux pourraient s'exécuter sur une certaine période de temps, pour intégrer le complexe à Bécancour tel que l'on pensait qu'il était prévu?

M. GIGNAC: La réponse à cette question est que, si nous procédons dans l'ordre, c'est-à-dire que si Sidbec acquiert les installations de Dosco à Contrecoeur, elle devra par la suite faire une étude pour ce qui est de l'installation de la fabrique de l'acier primaire. Et je crois — ça, je l'ai déjà dit à M. Johnson — qu'il serait juste, à ce moment-là, d'étudier les deux possibilités d'installer l'acier primaire, soit à Bécancour, soit à Contrecoeur. Et je suppose qu'en étant plongé dans ces études, on étudiera sûrement ou l'on mettra au point sûrement toutes les possibilités qui pourraient à ce moment-là rendre attrayant soit l'un ou soit l'autre des projets et ça incluerait, j'imagine, ce que vous venez de dire.

M. GAUDET: Question B: On connaît la force du pôle d'attraction que constitue une sidérurgie au point de vue industriel. On sait que nombre d'industries graviteront un jour autour de cette sidérurgie projetée, pour former un complexe ou centre industriel des plus importants du Québec. Le gouvernement du Québec ne croit-il pas alors que, s'il autorise Sidbec à s'installer à Contrecoeur, il ne pourra plus être question de décentralisation industrielle au Québec? Considérant toute la force d'attraction que constituera la sidérurgie au point de vue industriel, ne réalise-t-il pas que la centralisation industrielle sera devenue irréversible au Québec? Cette question 2, je la sauterai. Si vous voulez que je la remplace par une autre qui res-

semble moins à une qui a été posée. Si l'on considère le coût modique du terrain acquis à Bé-cancour pour fins industrielles, comparativement à ce qui en coûterait pour une étendue identique à Contrecoeur, ne croyez-vous pas alors que ce facteur amènerait plutôt qu'à Contrecoeur l'installation d'industries satellites à Bécancour et compenserait alors, en partie ou totalement, le retard de la rentabilité subi par Sidbec à Bécancour?

M. JOHNSON: J'ai l'impression, M. le maire, que la question est dirigée plutôt au gouvernement. Elle ressemble étrangement à une question qui nous a été posée souvent au cabinet par un député, celui de Nicolet, et qui, lui aussi, avait l'appui du député de Champlain, du député de Trois-Rivières, entre autres.

M. LESAGE: Saint-Maurice.

M. JOHNSON: Saint-Maurice, oui monsieur, c'est un autre qui pousse.

Alors, nous, M. Gaudet, avons examiné cet aspect. Vous savez que les terrains ont été acquis par la SGF, qui n'a pas nécessairement investi d'argent, mais qui est quand même collée avec cette obligation de les payer, si mes renseignements sont exacts.

Nous avions, en vue de dégager la SGF de cette obligation, dès l'année dernière, étudié le problème et préparé même un projet de loi, qui en était rendu à sa troisième rédaction. C'est en vue de créer une compagnie, une corporation ou agence gouvernementale, qui se porterait acquéreur de ces terrains. Alors, évidemment, si le projet Sidbec-Dosco reçoit toutes les approbations tant du côté des proposants vendeurs que de proposants acheteurs, nous allons faire revivre ce projet de loi et je puis, ici, vous donner l'assurance publique que le gouvernement — quel que soit celui qui le dirige et de quelque parti qu'il soit — c'est une personne morale qui doit respecter les obligations qui ont été prises dans le passé et réparer au moins les dommages qu'il peut causer à des gens, lorsque ces obligations ne sont pas respectées, pour des considérations de bien commun.

En conséquence, ça veut dire ceci. Nous mettons au point une étude, qui nous permettra, non seulement de former cette corporation — elle peut se former sans étude — mais de faire une promotion industrielle pour cette région, à même ces terrains qui n'ont pas coûté cher et qui seraient très propices à certains genres d'industries.

Nous allons, de plus, analyser avec vous, les municipalités qui se sont groupées, toujours dans l'hypothèse où Sidbec-Dosco se réalise, les conséquences pour les propriétaires-contribuables de chez vous, les conséquences monétaires, et le gouvernement réparera dans toute la mesure où commandent la justice et l'équité, les dommages que vous avez subis. Vous aviez raison de fonctionner. On vous a incité à vous grouper, à vous organiser, à vous équiper en services, en ressources humaines.

Vous vous êtes engagé un gérant, un gérant adjoint. Vous avez, paraît-il, même mécanisé votre comptabilité en vue de cette ville de 50,000 de population qu'on vous annonçait et vous aviez raison d'y croire. Vous n'êtes pas les seuls à y avoir cru. Le député de Nicolet y a cru; moi, étant un peu plus sceptique, évidemment, j'ai été beaucoup plus prudent dans mes déclarations...

M. LESAGE: Pas tellement.

M. JOHNSON: Ah oui!

M. LESAGE: Pas tellement!

M. JOHNSON: On ne pourra pas m'en mettre sur le nez...

M. LESAGE: J'en ai. On fera ça en Chambre.

M. JOHNSON: M. le Président, en Chambre nous aurons certainement un débat à l'occasion d'une législation. Je vous dis tout de suite que le gouvernement a l'intention de se faire autoriser à garantir, à Sidbec, une somme de $60 millions, sur une période de cinq ans, pour faire l'un ou l'autre des projets.

Maintenant, M. Gignac je pense que vous avez besoin de cette autorisation pour faire votre offre définitive. Je voudrais vous poser une question dont je connais la réponse mais que je pose en tant que porte-parole de bien des gens dans la population qui se disent ceci: Pourquoi n'avoir pas procédé par un achat graduel des actions sur le marché alors qu'elles étaient à $8? D'après certaines gens, cela aurait été facile. Vous auriez pu les prendre par surprise, cela n'aurait coûté rien que $8.25 et vous auriez eu le contrôle. Mais ce sont des gens qui, pour ne pas allonger la réponse, ne savent peut-être pas qu'un bloc d'actions de 77% est détenu par Hawker Siddeley et que ce bloc unique aurait bien pu s'effriter, évidemment. Mais seulement si Hawker Siddeley avait bien voulu les vendre vous n'auriez jamais pu attraper le contrôle sans négociation avec Hawker Siddeley.

Il y a des gens encore qui se disent: Comment se fait-il qu'on suggère au gouvernement de payer $11 l'action alors que sur le marché c'était $8, $8.5O, $9? Pourquoi ne pas ramasser ça sur le marché? Je connais la réponse mais j'aimerais vous entendre l'expliquer à votre façon.

M. GIGNAC: Je crois que la valeur du marché n'est pas nécessairement la valeur aux livres pas plus que c'est nécessairement la valeur qu'il faut accepter au point de vue de la rentabilité. La valeur actuelle aux livres des actions de la Dosco se situe à $21.65 alors que la valeur au marché, même présentement, est d'environ $8 ou $9. Deuxièmement, étant donné, comme vous disiez, M. le Premier Ministre, que 77% des actions sont contrôlées par Hawker Siddeley et étant donné aussi que Hawker Siddeley, depuis 1957 alors qu'elle a pris le contrôle de Dosco, n'a pas vendu ou acheté d'actions sur le marché, il demeure que la spéculation ne se fait que sur les 23% qui restent disponibles. Si nous examinons pour une période de quelques années passées, quatre, cinq ou six ans, lafluc-tuation des actions de Dosco sur le marché, nous réalisons que les moindres ventes, c'est-à-dire les ventes de 1,000 actions ou plus, ont fait varier le stock considérablement pour des raisons qui sont inexplicables. Alors, je pense bien que si, d'une part, Sidbec s'était mise entête d'acheter des actions sur le marché, le stock en question aurait grimpé rapidement peut-être à au-delà des $11 que nous offrons présentement. D'ailleurs, je crois qu'à l'automne, lorsque nous avons fait l'annonce que Sidbec examinait certaines installations de Dosco, les actions sont montées immédiatement à $10.50 ou $10.75 chacune.

C'est juste pour vous donner une idée de la sensibilité de ce stock sur le marché présentement.

M. LESAGE: M. Gignac, parmi les facteurs d'évaluation des actions, est-ce que vous considérez comme des facteurs importants, premièrement, la valeur aux livres des actifs représentés par les actions, la valeur nette aux livres? Deuxièmement, la cote du marché sur une période raisonnable qui peut être à peu près pour les cinq dernières années, conjuguée au rendement en dividendes sur les actions? Et troisièmement, le facteur important de la rentabilité prévue sur une période à venir d'une dizaine d'années? Est-ce que ce sont, d'après vous, les trois facteurs principaux qui vous ont guidés dans les attitudes que vous avez prises au cours des négociations?

M. GIGNAC: Je dirais, pour les deux premières parties de votre question, que ma réponse est oui. Pour la troisième partie, nous ne nous sommes pas occupés de la valeur au marché, c'est-à-dire que nous l'avons...

M. LESAGE: Vous l'aviez devant les yeux.

M. GIGNAC: ... nous l'avions dans les yeux. Mais ça n'a pas été la valeur au marché qui nous a guidés. Mais c'est la valeur aux livres, comme vous dites et puis éventuellement la valeur de rentabilité, telle que nous l'avons établie.

M. LESAGE: Quand je parle de la cote sur le marché, je ne veux pas dire au moment de la transaction, mais au cours des cinq années qui auront précédé.

M. GIGNAC: Oui, les actions ont varié, comme vous le savez, de $21...

M. LESAGE: Oui, c'est ça.

M. GIGNAC: Elles ont baissé graduellement de $21 au prix qui est actuellement coté sur le marché...

M. LESAGE: Elles ont baissé à $7 et elles ont remonté à $8.50.

M. GIGNAC: A $6 ou $6.50, quelque chose comme cela. Et elles se sont maintenues entre, disons, $7 et $8, à quelques exceptions près, depuis les deux dernières années. J'ai un tableau de ces cotes-là.

M. LESAGE: M. Gignac, si je comprends bien, vous étiez l'un des administrateurs de l'Hydro-Québec au moment de la nationalisation de l'électricité et vous vous souvenez parfaitement des facteurs qui, à ce moment-là, avaient été tenus en ligne de compte, particulièrement sur la recommandation de M. Fuller-ton, pour l'établissement des prix à offrir à chacune des compagnies d'électricité, sous forme de « take-over bid ». Je suppose que mutatis mutandis, étant donné que dans ce cas-là, il s'agissait de services publics, sans concurrence, que vous avez tenu compte d'à peu près les mêmes facteurs que dans ce cas-ci, mais avec cette différence qu'il s'agit dans ce cas-ci d'une industrie qui doit faire face à la concurrence, tandis que dans le cas des compagnies d'électricité, il s'agissait de monopoles.

M. GIGNAC: Je pense bien que, à quelques

exceptions près, dans les facteurs dont l'on a tenu compte dans le « take-over bid » qui a été fait pour les compagnies d'électricité, exceptions assez importantes quand même, nous avons suivi à peu près les mêmes...

M. LESAGE: Mais exceptions à cause du fait qu'il s'agissait de monopoles dans le cas des compagnies d'électricité.

M. GIGNAC: Exactement.

M. LESAGE: Tandis qu'ici, il s'agit d'une société qui a à faire face à la concurrence.

M. GIGNAC: Oui, et qui est contrôlée aussi à 77%.

M. JOHNSON: M. Gignac, pourriez-vous me rafraîchir la mémoire? L'engagement de la province, pris en 1965, pour un montant de $20 millions ou de $25 millions, à être investi via la Société générale de financement. C'était en vue d'un projet de quelle envergure? Vous en souvenez-vous?

M. GIGNAC: Je crois que c'est le projet de $250 millions. Cela a été pris, si ma mémoire est fidèle, à la suite de la déposition du rapport qui a été fait par le comité de sidérurgie. C'est à la suite du rapport du comité de la sidérurgie que le gouvernement a décidé, par le truchement de la SGF, d'investir $25 millions. Maintenant, je n'ai pas les détails de cette transaction.

M. LESAGE: Si vous vous souvenez, M. Gignac, cette entente avait été annoncée au mois d'octobre 1964, à la suite du rapport du comité de sidérurgie, avant la formation de Sidbec?

M. GIGNAC: Je crois que oui.

M. LESAGE: Par conséquent, c'était clairement sur la recommandation du comité de sidérurgie qui prévoyait un projet de $250 millions y compris le « Working capital ». D'après mon souvenir c'était $228 millions plus le « working capital ».

M. GIGNAC: Je ne me souviens pas des détails.

M. LESAGE: Bien je crois que c'est cela. Je suis sujet à correction par M. Bélanger. Est-ce que c'est pas mal exact ce que je viens de dire? Oui.

M. BELANGER: Oui.

M. LE PRESIDENT: M. le Maire, est-ce que vous auriez des questions supplémentaires?

M. GAUDET: Oui, j'en ai une petite ici, si vous me permettez. J'ai cru comprendre, selon l'opinion du premier ministre ce matin, que la sidérurgie à Bécancour n'amènerait pas nécessairement une industrie secondaire. Devons-nous déduire que nos chances du côté de l'industrie secondaire seraient plutôt nulles avec le complexe entier à Contrecoeur?

M. JOHNSON: Je n'ai pas saisi la fin de votre question.

M. GAUDET: Est-ce que nos chances seraient plutôt minces du côté de l'industrie secondaire si le complexe était établi en entier à Contrecoeur?

M. JOHNSON: Non, je ne suis pas en mesure quant à moi d'évaluer l'intense développement de Bécancour par suite de l'implantation dans cette ville de la sidérurgie. Mais je sais que les industries existantes à Montréal et ailleurs dans la province ont intérêt à ce que nous ayons éventuellement une aciérie intégrée et même que nous ayons une aciérie ou des installations qui fonctionnent très bien afin de pouvoir leur offrir des prix compétitifs, des prix aussi bas que les manufacturiers qui sont dans le triangle Sault-Sainte-Marie-Hamilton-Windsor peuvent obtenir de leurs aciéries.

Disons bien franchement, que ce n'est pas pour le plaisir d'être propriétaire d'une aciérie que la province se lancerait dans cette initiative. Je pense que l'idée de tous ceux qui ont travaillé sur ce projet depuis des années, soit d'avoir une aciérie dans Québec, une aciérie éventuellement intégrée, un complexe intégré, c'est d'être en mesure de fournir aux industries de transformation les matériaux nécessaires à un prix aussi bas que les obtiennent les industries de transformation qui sont dans le triangle que j'ai délimité tantôt d'une façon bien imparfaite par ces trois villes où sont situées les aciéries d'Algoma, Dofasco, Stelco et peut-être d'autres que j'oublie.

Alors, ce qui nous intéresse, nous, c'est que les industries secondaires existantes et celles qui ont l'intention de s'établir puissent obtenir leur matériel à un prix qui ne comprend pas le prix du transport de Hamilton à Montréal. Ce qui a pour effet, me dit-on, d'augmenter le coût de 8% à 12%. La seule présence de Dosco dans l'état actuel a eu pour effet de faire bais-

ser les prix pour ce matériel utilisé par les industries de transformation.

Mais nous sommes encore plus certains que cette situation se maintiendra si nous avons une aciérie intégrée éventuellement. C'est dans cette perspective que le gouvernement, du moins au départ, est prêt à fonctionner. La chose aurait été plus facile d'autres années. Je n'ai pas de reproches à distribuer à qui que ce soit, mais il y a longtemps qu'on parle d'aciérie, vous savez, dans la province de Québec et je pense qu'on sera intéressé de savoir qu'en 1948 il y avait le projet Dudley fait par MM. Préfontaine et A. Grégoire qui a été rejeté.

En 1949, le projet Cholette-Potvin, une sidérurgie sur la Côte-Nord, qui n'a pas été retenu. C'est à ce moment-là que l'on écrivait dans les journaux que c'était une affaire très simple. On n'avait qu'à installer deux fourneaux électriques, c'était réglé. On avait une sidérurgie.

En 1951, le gouvernement du temps avait chargé un expert, M. Gérard Letendre, de préparer une étude sur la réduction au Québec d'une partie du minerai de fer de l'Unga-va. En 1952, le gouvernement a reçu ce rapport qui favorisait l'établissement d'une usine de réduction de faible capacité, dans la région de Montréal. En 1955, il y a eu un nouveau projet. Le projet s'appelait New Quebec and Ungava Mining Corporation. Il n'a pas été accepté celui-là non plus. En 1955, projet des Aciéries nord-atlantiques incorporée. C'était un projet piloté par MM. Louis Périni et Gérald Martineau. L'étude avait été faite sous la direction de Kayser Engineers.

En 1955, projet Iron Ore Company of Canada, pour la production du fer-éponge au Nouveau-Québec. Le coût était trop élevé, on l'a abandonné. En 1957, le projet Picard. Une société franco-suisse qui a offert de nous ouvrir une sidérurgie, mais cela n'a pas eu de suite. En 1957, les Krupp se sont intéressés, ont voulu intéresser le gouvernement du temps et je n'ai pas pu retracer les quelques documents...

M. LESAGE: Cela avait été publié dans les journaux à ce moment-là.

M. JOHNSON: En 1957, la société Belge Sogemines a préparé un projet d'une sidérurgie intégrée qui aurait été établie à Beauharnois. Le travail avait été dirigé par M. Du-priez et l'étude concluait à la rentabilité. Il y eut à ce moment-là une alliance ou un début de tentative d'alliance avec Dosco. Mais cela n'a pas eu de suite.

En 1958 encore, projet Quesco celui-là, proposait une usine de réduction à Varennes par le procédé Strategic-Udy et Quesco a cédé ses actions à Corgemines. Les résultats décevants du procédé, utilisé dans un autre pays, ont découragé les promoteurs.

Donc, en 1958, Dosco avait un projet à long terme pour la création d'une aciérie intégrée à Contrecoeur. C'est en 1963 que Dosco s'est implantée à Contrecoeur, avec un Investissement de $60 millions, alors que l'on était en train de faire des études par le comité de sidérurgie.

M. LESAGE: Us ne se sont pas implantés, d'un coup sec. La preuve c'est qu'on en est encore à la période de démarrage.

M. JOHNSON: En 1958 aussi, construction à Contrecoeur d'une usine de tuyaux par Stelco. Travaux terminés en 1960. Construction en 1964-1965 d'une autre partie de cette aciérie, soit d'un laminoir de douze à dix-huit pouces, par un investissement de $25 millions. L'agrandissement a été terminé en 1964-1965.

M. LESAGE: C'était compris dans les $60 millions mentionnés tantôt.

M. JOHNSON: Peut-être. M. Dupriez, en 1960, a eu des rencontres avec les autorités du gouvernement, c'était après le 22 juin, au sujet du projet Sogemines. Et à partir de là, je pourrais céder la parole au chef de l'Opposition qui vous dirait que la Chambre de commerce de la province nous a présenté, le 23 mai, un mémoire suggérant la création d'un complexe sidérurgique. Le Conseil d'orientation économique a été chargé de faire un premier examen, etc., etc.

C'est ainsi qu'on est parti d'un projet modeste pour se retrouver avec un projet de $653 millions, des promesses formelles, une lettre du président de Sidbec du temps et une loi pour l'intégration des municipalités.

M. LESAGE: Est-ce que le premier ministre me permet? Est-ce que je pourrais rétablir certains faits? C'est que la décision, quant à Bé-cancour, est survenue avant que ne soit préparé le projet gigantesque dont il parle. La recommandation quant à Bécancour nous est venue du comité de sidérurgie qui recommandait le projet plus modeste de $250 millions. C'est à partir de là et avant même que le rapport final du comité de sidérurgie nous soit soumis que des options ont été prises sur des terrains à Bécancour.

Si on lit le rapport du comité de sidérurgie dont j'ai d'ailleurs cité des extraits au cours d'une des séances, on constatera que les options à Bécancour ont été prises au cours de 1963 avant que soit remis au gouvernement le rapport final du comité de sidérurgie en février ou mars 1964, je crois.

A ce moment-là, il y avait même des options qui avaient été exercées en décembre 1963. Cinq des options sur cinq terrains l'avaient été... parce qu'il y a eu cinq propriétaires qui avaient refusé de prolonger les options de douze mois. Il y a donc cinq terrains qui ont été achetés en décembre 1963 au moment de l'expiration des options, les autres propriétaires ayant consenti à prolonger les options d'un an et le reste des terrains ayant été acheté au mois de décembre 1964 avant la création de Sidbec. Par conséquent, avant qu'il ne soit question d'un projet qui soit d'un ordre plus grand que celui qui avait été suggéré par le comité de sidérurgie au coût de $250 millions.

Donc, ce n'est pas parce qu'il y avait eu un projet que le premier ministre a qualifié de gigantesque qu'il a été question de Bécancour. Pas du tout. Il a été question de Bécancour dès qu'il y a eu des achats de terrain, dès avant le premier rapport du comité de sidérurgie qui nous avait proposé en février 1964 un projet de $250 millions, mais je ne suis pas pour revenir sur tout ce que nous avons discuté je crois au cours de la première séance.

M. JOHNSON: Je voudrais situer le problème et demander à M. Gignac s'il peut confirmer ces faits par les dossiers ou par des conseils de ses acolytes, qu'il y a ici, qui sont des éléments de continuité depuis le début. C'est le 22 septembre que le comité Deschamps recommandait la création d'une nouvelle société, d'un capital, etc. Mais c'est le 19 octobre de la même année 1964 qu'une annonce publique avait été faite nous informant qu'une entente était intervenue entre le gouvernement et la SGF pour le financement de l'entreprise, et que la SGF re -cevait un mandat de constituer la société Sidbec. C'est là qu'il y a eu l'engagement d'une souscription de $25 millions par la province.

M. LESAGE: $20 millions additionnels aux cinq millions déjà souscrits par le Québec à la SGF. C'est-à-dire que la souscription totale du Québec à la SGF était déjà de $5 millions et qu'on y ajoutait $20 millions.

M. JOHNSON: C'était pour le projet auquel on ajoutait $20 millions.

M. LESAGE: C'était pour le projet de $250 millions.

M. JOHNSON: $223 millions.

M. LESAGE: C'est ça, $223 plus le capital de roulement.

M. JOHNSON: ... disait le rapport Deschamps. Qu'est-ce qui a fait qu'on a déraillé à ce moment-là? Cela avait l'air tout bâclé, tout réglé, on embarquait, c'était $223 millions plus le capital de roulement, $250 millions,, le gouvernement y allait pour $20 millions, le public y allait pour $35 millions et les emprunts à long terme pour $165 millions. Qu'est-ce qui est arrivé que ça a cassé?

M. LESAGE: J'ai donné les raisons au cours de la première séance et cela a été confirmé par les officiers. C'est la coulée continue. On ne pouvait pas faire la coulée continue pour les tôles fines et, à part ça, c'est que les fours Elkem n'étaient pas éprouvés.

Or, le rapport du comité de sidérurgie était basé en particulier sur ces deux aspects techniques. Et c'est là qu'on s'est aperçu que ce n'était pas prouvé. L'on pourra trouver ces raisons exactes dans la déclaration que je faisais le 25 mai...

M. JOHNSON: 1966.

M. LESAGE: ... 1966 et que j'ai répétée au mois d'août de la même année, je crois, pas tout à fait dans les mêmes termes, mais à peu près. Mais le 25 mai 1966, dans la déclaration que j'ai faite, je l'ai lue, ici, au comité à la première séance, ou peut-être à la deuxième, et la raison invoquée, c'était l'impossibilité technique de donner suite à ces deux recommandations, premièrement, quant à la coulée continue pour les tôles fines, et deuxièmement, quant à l'utilisation des fours Elkem.

M. JOHNSON: En résumé, M. Gignac, çafait 22 ans que j'entends parler d'une aciérie, d'un complexe intégré, depuis que je suis député. Moi, je suis prêt à ce que ça démarre et je suis prêt à étudier, avec beaucoup de sympathie, dans le sens de la compréhension, les suggestions faites par une compagnie que vous dirigez et qui a eu $5 millions ou $6 millions à sa disposition pour des études, qui a pu recourir aux meilleurs experts et qui semble, à l'unanimité — j'ai lieu de le croire — nous proposer une solution et nous demander une autorisation.

II restera, évidemment, à tenir compte des facteurs qu'on a fait ressortir par ces trois réunions du comité. Je voudrais, quant à moi, remercier tous ceux qui ont participé...

M. LE PRESIDENT: M. le Maire.

M. GAUDET: Je voudrais remercier bien sincèrement M. le premier ministre de son invitation. Je remercie également M. le ministre de l'Agriculture, M. le chef de l'Opposition, M. le président...

M. LESAGE: Si la période des remerciements est arrivée...

M. GAUDET: En ce qui me concerne, c'est fini, mais....

M. LESAGE: Je ne sais pas, vous aurez peut-être d'autres questions à poser à la suite des miennes.

M. GAUDET: Non, c'est parce que j'avais le micro, je voulais profiter de l'occasion.

M. LESAGE: On va vous le laisser, M. le Maire.

M. LE PRESIDENT: M. le Maire, on va laisser M. Lesage poser ses questions et vous reviendrez après.

M. LESAGE: On va vous le laisser, M. le Maire.

M. GAUDET: Je ne suis pas seul sur le comité. Tous ceux qui sont ici et qui nous accompagnent sont des collaborateurs précieux à la ville de Bécancour. J'aimerais, si ce n'est pas trop vous demander, que vous nous donniez encore quelques minutes. Je suis certain qu'il y en a quelques-uns qui aimeraient se faire entendre pour plus de satisfaction. Tous les exposés que nous avons eus ici à chaque séance que nous avons tenue avec vous en comité, nous sommes bien heureux de les avoir eus et ça nous aidera nous aussi, en retournant à la maison, à renseigner d'une manière plus exacte les gens de notre région, qui sont un peu indécis sur notre sort.

Si vous avez, d'un autre côté, quelque chose à faire, sans vouloir dicter une ligne de conduite à personne, je demanderais et on aimerait, nous aussi, que ç'a se fasse assez rapidement pour qu'on s'oriente d'une manière ou d'une autre. Je vous remercie.

M. LESAGE: M. Gignac, ce matin, je vous ai posé une question et je vous ai demandé, si Sid-bec avait à sa disposition une somme de $150 millions ou de $200 millions qui serait versée par le gouvernement au rythme de $25 millions par année, soit pendant six ans, soit pendant huit ans, s'il serait possible d'établir à Bécancour une industrie sidérurgique intégrée et rentable. Ma question venait surtout du premier rapport du comité de sidérurgie. En remplaçant, si vous voulez, les tôles fines par les tôles fortes dans le premier projet, et en tenant compte qu'il est impossible d'utiliser les fours Elkem, est-ce qu'il y aurait eu moyen de modifier le projet initial du comité de sidérurgie, d'établir à Bécancour une industrie sidérurgique intégrée de l'ordre de grandeur suggérée par le comité de sidérurgie, en tenant compte du fait que ces souscriptions gouvernementales seraient pour du capital ne portant pas intérêt?

Vous avez posé la question ce matin, serait-ce pour ce qu'on appelle du « equity capital », ce qui permettrait à Sidbec, obtenant de son actionnaire le gouvernement, une équité de $150 millions ou de $200 millions, d'avoir assez facilement accès au marché à long terme pour un montant qui ne serait pas trop considérable pour la différence du coût de l'établissement de cette industrie sidérurgique intégrée, à Bécancour. Souvenons-nous que le rapport du Conseil d'orientation économique insistait sur le facteur mentionné tout à l'heure par le premier ministre, la nécessité de produire de l'acier en tôle, de l'acier marchand, en vue de l'établissement d'industries secondaires, mais il y avait un autre facteur qui préoccupait aussi le Conseil d'orientation économique et c'était la transformation de notre minerai de fer du Québec, en acier primaire, ici, au Québec, en vue de son utilisation et dans l'industrie sidérurgique, dans les laminoirs, et plus tard dans l'industrie secondaire. La question a été longue, un peu complexe, mais je sais que vous avez très bien compris ce que je voulais dire.

M. GIGNAC: Je crois que oui.

M. LESAGE: Je pense que oui. Vous connaissez assez le dossier pour comprendre ça.

M. GIGNAC: Tout d'abord disons que si le gouvernement nous donnait une contribution de $150 millions à $200 millions dans Sidbec et que ces sommes-là devraient être investies à Bécancour, bien le projet que nous lancerions au départ serait le projet dont je vous ai fait part lors de la deuxième ou de la troisième séance,

c'est-à-dire le projet modeste mais qui deviendrait, disons, un peu moins modeste en ce sens qu'il serait un peu plus accéléré.

Evidemment, si l'on tient compte du fait qu'il n'y aurait pas d'Intérêt sur une dette à long terme...

M. LESAGE: Ce serait de l'équité.

M. GIGNAC: ... on gagnerait l'Intérêt sur la différence entre $60 millions et $150 millions, c'est-à-dire environ $90 millions ou $100 millions, 3 $10 millions près.

M. JOHNSON: Ce serait un bon subside!

M. GIGNAC: Oui, cela serait un subside énorme.

M. LESAGE: Fort intéressant!

M. GIGNAC: J'ai dit ce matin que c'était une question hypothétique; j'en reste encore là.

M. LESAGE: Un subside fort intéressant quand même! $25 millions par année, c'est seulement une fraction de 1% du budget annuel du gouvernement.

M. GIGNAC: Cependant, si je peux me permettre de continuer mon exposé...

M. LESAGE: Une fraction de 1%.

M. JOHNSON: Les fractions font rapidement les unités dans le gouvernement.

M. LESAGE: Ne dites pas ça à un ancien ministre des Finances, il le sait. Mais n'empêche que voici qu'on peut investir dans une industrie aussi importante, au rythme d'une fraction de 1% par année du budget.

M. GIGNAC: Alors, si l'on tient pour acquis qu'il n'y a pas d'intérêt sur une dette à long terme, les autres problèmes demeurent ou disons que le reste ne change à peu près pas, en ce sens qu'il faut avoir des installations techniques, compatibles avec la prévision des marchés. Il faudrait aussi prendre le temps d'en-trafner la main-d'oeuvre et le personnel de cadre et y consacrer les sommes d'argent appropriées. Il faudrait aussi prévoir, dans le cas d'un démarrage rapide de plusieurs grosses installations, des frais de démarrage plus élevés. Il faut s'attendre à des coûts plus élevés — cela a déjà été établi — pour le transport des produits finis vers les marchés de con- sommation. De toute façon, à ce moment-là, on se retrouve avec un pourcentage important du marché qui sera forcément divisé entre Contrecoeur et Bécancour, parce que je tiens pour acquis que Contrecoeur continuera, et de ce fait des installations d'acier primaire qui, à cause du volume réduit qui sera requis par les installations, ne seront pas rentables avant plusieurs années, en fait ne le seront pas avant au moins une dizaine d'années.

Finalement, si je peux me permettre de terminer, j'avais un peu prévu votre question, M. Lesage, dans le cas d'une contribution du gouvernement, de l'ordre de $150 à $200 millions, nous pouvons facilement imaginer, si nous procédons sur une base comparative, que cet argent rendrait une sidérurgie intégrée possible et rentable au départ, beaucoup plus facilement à Contrecoeur qu'à Bécancour. Et je crois qu'il est assez difficile, lorsque nous parlons de sommes d'argent de cette envergure, de ne pas procéder sur une base comparative. J'ai dit, l'autre jour, qu'une sidérurgie à Bécancour serait au tiers rentable de celle de Dosco à Contrecoeur et cela serait encore vrai. Compte tenu que Contrecoeur, éventuellement, pourrait avoir les mêmes avantages.

M. LESAGE: Oui, mais est-ce que cela ne changerait pas tout de même la proportion jusqu'à un certain point?

M. GIGNAC: C'est assez difficile à établir exactement. Disons, si nous ne considérons que Bécancour comparativement à Contrecoeur, la rentabilité, au lieu d'être du tiers, sera à peu près de la moitié de celle de Contrecoeur.

M. LESAGE: La seule raison ce sont les établissements de Dosco.

M. GIGNAC: Oui, c'est surtout la fabrique d'acier primaire, qui ne serait pas rentable à cause du faible volume.

M. LESAGE: Du faible volume, plus faible dû à la concurrence de Dosco?

M. GIGNAC: Oui, et même du fait qu'il n'y aurait pas d'intérêt à cause du faible volume de la fabrique d'acier primaire, il n'y aurait pas de profit à cet endroit ou du moins il serait difficile d'établir une rentabilité acceptable avant un nombre assez considérable d'années. Cela pourrait être huit ou dix ans.

M. LESAGE: Huit ou dix ans. On n'a jamais prévu, n'est-ce pas, dans aucun des plans qu'u-

ne industrie sidérurgique intégrée au Québec, à Bécancour, pourrait être rentable pour les huit ou dix premières années? Dans les rapports que nous avons eus?

M. GIGNAC: Dans les rapports qui ont été faits, je crois que la rentabilité devait être établie sur une période d'environ vingt ans et encore, à mon sens...

M. LESAGE: C'était le grand projet, ça.

M. GIGNAC: ... du moins, dans l'opinion du conseil d'administration de Sidbec, ce n'était pas une rentabilité acceptable.

M. LESAGE: Mais c'était plus que les dix ans que vous mentionnez pour un projet du genre de celui que vous pourriez établir à Contrecoeur.

M. GIGNAC: Voyez-vous, il faut s'entendre sur la rentabilité. C'est peut-être rentable au bout de sept ans. On fait des profits au bout de sept ans. Pour avoir un retour sur investissement acceptable, il faut prendre une période donnée. Dans le cas que vous me soumettez, avant d'avoir une rentabilité comparable à celle des autres sidérurgies canadiennes sur cette période de temps-là, cela pourrait être assez long, peut-être 15 ans. Mais il faudra l'établir. Nous n'avons jamais osé espérer que le gouvernement donnerait des subsides de cet ordre-là.

M. LESAGE: Et si cela arrivait, ce serait possible, sur une période de 10 ans?

M. GIGNAC: Je ne crois pas que ce serait logique, mais ce serait possible.

M. LESAGE: C'est ça. Bien, cela dépend, à ce moment-là, il s'agit de savoir quelle est la valeur pour le gouvernement du Québec de la rentabilité socio-économique de la décentralisation de l'industrie. Et je pense que c'est une discussion qui est possible. Les opinions peuvent être partagées. Tout dépend de la valeur que l'on donne à la rentabilité socio-économique qui découle de la décentralisation de l'industrie.

M. GIGNAC: M. Lesage, si vous donniez les mêmes avantages à Sidbec-Contrecoeur, d'abord la première chose que nous vous dirions, c'est que nous n'avons pas besoin de $150 millions, et, deuxièmement, ça deviendrait rentable d'une façon extrêmement rapide.

M. LESAGE: Je le crois.

M. GIGNAC: Moi j'en suis convaincu.

M. LESAGE: Mais, si vous aviez cet argent à Contrecoeur, vous pourriez procéder également à la transformation à partir du minerai beaucoup plus rapidement.

M. GIGNAC: A peu près immédiatement.

M. LESAGE: A peu près immédiatement, ça, c'est sur.

M. JOHNSON: Le temps de compter trois à quatre ans?

M. LESAGE: A peu près immédiatement.

M. GIGNAC: C'est-à-dire qu'on prendrait la décision et, trois ans ou trois ans et demi après, tout serait en marche.

M. LESAGE: Mais encore là, on aboutit toujours au même point, l'industrie demeure concentrée principalement dans la grande région de Montréal et on n'utilise pas toutes les possibilités qu'offre le centre du Québec.

M. GIGNAC: Je crois qu'il y a une chose qu'il ne faudrait pas sous-estimer. Je veux parler de l'apport de la main-d'oeuvre spécialisée et des cadres qu'il faudrait mettre en place à Bécancour. C'est un problème extrêmement ardu et qui ne peut pas se régler sur une période de deux ou trois ans. Il faut y mettre la patience, du temps et beaucoup d'argent.

M. LESAGE: La General Motors, à Sainte-Thérèse, a dû faire ça.

M. GIGNAC: Oui, mais elle avait de l'argent pour entraîner le monde.

M. LESAGE: Oui.

M. GIGNAC: Mais ce n'est pas facile.

M. LESAGE: On a commencé par donner aux contremaîtres d'Oshawa des cours intensifs à l'école Berlitz, en français, et les contremaîtres ont appris aux employés Canadiens-français qui étaient engagés à Sainte-Thérèse, à désigner en langue française les diverses pièces d'automobiles...

M. PLAMONDON: On a dû apprendre certaines traductions de pièces d'automobiles, on

a dû apprendre le mot français à nos Canadiens-français.

M. LESAGE: C'est exactement ce que je viens de dire. D'ailleurs, quand j'ai visité la General Motors, c'est une des choses que les employés m'ont dite: ils avaient appris de gens de langue anglaise d'Oshawa les termes français pour désigner les pièces d'automobiles.

M. JOHNSON: Ils doivent avoir de la difficulté quand il vont dans des garages, ces gens-là?

M. LESAGE: Oui, en effet. D'ailleurs, pour la plupart, c'était d'anciens employés de garage.

M. JOHNSON: Moi, je ne me targue pas d'être fort en calcul et le chef de l'Opposition pourrait me calculer ça, $20 millions sur un budget, rien qu'une fois, $20 millions qu'on donnerait, ce serait une petite proportion du budget, ça aussi, c'est une fraction plus petite encore que $12 millions par année...

M. LESAGE: Bien dans le temps, c'était plus que 1%.

M. JOHNSON: Non, dans le temps, c'était moins que 1%.

M. LESAGE: C'était plus que 1% dans le temps. C'était $25 millions et c'était plus que 1% parce que c'est l'année dernière seulement que vous avez atteint $2,600,000,000. Cette année, vous êtes rendus à $2,900,000,000, au budget total. Avant cela, en 65/66, c'était inférieur à $2 milliards. Voyez-vous, cela a monté de $1,800,000,000 à$2,300,000,000à$2,600,000,000 et à $2,900,000,000 pour l'année courante. $300 millions par année.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions? Oui, M. Pinard.

M. PINARD: M. Gignac, je suis représentant d'un comté qui se trouve dans le contexte géographique où aurait pu naître cette fameuse sidérurgie dont il a été longuement question. Je ne mets pas de côté vos expertises, ni les déclarations que vous avez faites depuis que vous avez été interrogé aux diverses séances du comité des Régies gouvernementales, mais vous me permettrez d'être un peu pessimiste sur la naissance possible, un jour, d'une véritable politique de décentralisation industrielle. Je me demande, en effet, probablement avec plusieurs des personnes qui ont assisté aux séances, ce qu'il faudra donc au Québec pour — comme fer de lance, par exemple — lancer cette fameuse politique de décentralisation industrielle. On avait espéré que cela se ferait à l'occasion de la création de Sldbec, mais ça n'existera pas à Bécancour, ça restera à Contrecoeur. Qu'est-ce qu'il faudra qu'il arrive au Québec pour que ça parte une fois pour toutes, la réalisation de cette politique-là?

M. GIGNAC: Bien, si vous me permettez de donner à ce moment-ci une opinion personnelle, je vous dirai que Contrecoeur, ce n'est quand même pas à Montréal, c'est même plus loin de Montréal que Sainte-Thérèse, où on vient d'ouvrir une usine de General Motors..

Deuxièmement, je crois que dans tout pays — du moins c'est ce que j'ai eu l'avantage d'observer lorsque j'ai fait certains voyages — qu'on le veuille ou non, il y a des concentrations industrielles. Et à partir du moment où ces concentrations industrielles-là existent, c'est presque naturel que l'industrie vienne s'y greffer. Pour caricaturer un peu ce que je pense, pour les besoins de décentralisation industrielle, je ne crois pas que ce serait bon, d'aller s'installer à Gaspé avec une sidérurgie.

Je crois que lorsque le choix de l'emplacement a été fait, on avait établi que l'espace, la distance entre le marché et l'usine devait être à ce moment-là de 100 ou 110 milles. C'est pour cela qu'on a limité à Bécancour la possibilité de décentraliser en y installant une sidérurgie intégrée.

Que des accidents — j'appellerai cela des accidents — tels celui que la Dosco soient venus s'installer entre-temps à Contrecoeur, personnellement, je n'y peux rien. Mais je ne vois pas très bien les circonstances dans lesquelles nous sommes présentement, comment on peut passer par-dessus ce qui existe pour retourner dans des choses qui, au départ, étaient quand même un peu éphémères. Si vous prenez une carte géographique et que vous y mettez les densités de population qu'il y a au Québec, vous verrez, je crois, un centre comme Montréal qui est très dense au point de vue de la population, vous en verrez un autre aux alentours de Sorel, vous verrez un autre centre près de Trois-Rivières et un autre aux alentours de Québec.

Je pense bien que, sur une période de temps, à force de créer certaines industries lourdes, ces centres-là vont finir par se rejoindre et que, via les installations d'autres industries lourdes ou le développement d'industries secondaires, on créera une zone industrielle, je

l'espère, qui se situera entre Montréal et Québec. Mais ce sont des opinions personnelles. Je pense bien que le gouvernement a aussi un petit mot à dire là-dessus et a aussi des responsabilités dans ce domaine-là qui dépassent les miennes ou celles de mon conseil d'administration.

M. LE PRESIDENT: M. Baillargeon.

M. BAILLARGEON: Au point de vue du marché américain, quelle est la concentration de l'industrie de l'acier aux Etats-Unis? Il y a plusieurs états qui ont des aciéries, mais beaucoup d'autres n'en ont pas. Est-ce que ce n'est pas concentré dans certains grands états?

M. GIGNAC: Oui, la fabrication d'acier primaire aux Etats-Unis est concentrée à trois ou quatre endroits, mais il ne faudrait quand même pas oublier qu'aux Etats-Unis, il y a 200 millions de personnes. C'est un peu plus qu'au Québec et qu'au Canada.

M. LE PRESIDENT: M. Plamondon.

M. PLAMONDON: M. Gignac, croyez-vous que Sidbec, étant devenue une entreprise rentable dans quelques années — parce qu'en s'ins-tallant à Contrecoeur, on a toutes les raisons de croire qu'elle sera beaucoup plus forte, beaucoup plus viable — croyez-vous qu'éventuellement Sidbec pourrait participer à cette opération de décentralisation industrielle? C'est-à-dire en accordant peut-être certains escomptes sur la fourniture à des industries s'installant dans un rayon éloigné?

Je m'explique. Je comprends que vous êtes tout de même une entreprise privée, mais il reste qu'à ce stade-ci il semble que, si on veut décentraliser, il faudra que quelqu'un paie. Est-ce qu'éventuellement Sidbec pourrait participer à cela?

M. GIGNAC: A partir du moment où Sidbec devient une entreprise prospère, elle peut se permettre bien des choses qu'elle ne peut se permettre en ce moment. J'ai mentionné l'autre jour qu'une industrie sidérurgique intégrée et prospère, qui fait des profits, pourrait se permettre de participer, soit dans l'équité ou d'une autre façon, à l'implantation de certaines industries secondaires qui utilisent l'acier.

A ce moment-là, il n'est pas dit qu'obligatoirement il faudrait que cette ou ces industries soient implantées près de Contrecoeur.

Comme question de fait, nous avons été approchés tout dernièrement par au moins deux manufactures qui transforment de l'acier, qui ne sont pas situées à Contrecoeur et qui sont intéressées à acheter de nous et, de plus, qui sont même intéressées à ce que nous participions éventuellement à leur équité. Alors, disons que c'est une espèce d'engrenage dans lequel on devra un de ces jours entrer, lorsque nous aurons fait des profits et que nous aurons les moyens de le faire.

C'est pour ça qu'il est important de mettre la sidérurgie au monde le plus rapidement possible et qu'on essaie de prendre les moyens de l'implanter le plus rapidement possible afin de produire des profits et d'être en mesure de participer à la formation de ces nouvelles industries qui pourraient, selon toute possibilité, être décentralisées. Mais, de toute façon, il faut penser aussi qu'une industrie secondaire, à quelques exceptions près, a tendance à se rapprocher de ses marchés. Alors, ce seront des choses à étudier en temps et lieu et dont il faudra tenir compte lorsque nous en serons rendus là.

M. LE PRESIDENT: Messieurs de Bécan-cour, avez-vous des questions? M. Bourassa en a une apparemment qui est très courte. On revient à vous immédiatement après celle de M. Bourassa.

M. BOURASSA: Lorsque vous parlez d'association avec des compagnies privées, ça veut dire qu'éventuellement votre entreprise deviendrait privée, c'est-à-dire serait sujette à payer des impôts? Parce qu'actuellement, tant que 90% des actions sont détenues par le gouvernement québécois, vous ne payez pas d'impôt. Alors, étant donné que vous avez beaucoup d'amortissement à prendre et qu'il est possible que vous subissiez des pertes pour trois ans, qui vont pouvoir aussi vous servir comme récupération pour les impôts, quand prévoyez-vous commencer à payer des impôts?

M. GIGNAC: Si les prévisions que nous avons faites s'avèrent vraies, nous ne paierons pas d'impôt avant 1980 ou 1982.

M. BOURASSA: Parce que vous avez des amortissements?

M. GIGNAC: A cause des amortissements qui sont en réserve dans la compagnie Dosco et les « tax losses » qu'on peut récupérer.

M. LE PRESIDENT: Monsieur le représentant de la ville, est-ce que vous voulez vous identifier pour les fins d'enregistrement?

M. LEBLANC: Mon nom est Roger Leblanc, du service d'urbanisme de la ville de Bécancour. Les connaissances de M. Gignac, au point de vue de la rentabilité financière de la sidérurgie ne font pas de doutes mais, lorsque M. Gignac parle de Contrecoeur comme ne faisant pas partie de la région de Montréal, je crois que ses connaissances, au point de vue phénomène de la régionalisation dans le monde, me semblent pour le moins limitées. De toute façon, ceci m'amène à poser ma question, qui est un peu longue.

M. JOHNSON: M. Leblanc, est-ce une offre de services comme urbaniste à Sidbec que vous venez de faire?

M. LEBLANC: M. Le Premier Ministre, ceci a été fait dès le 2 novembre 1965, effectivement. Voici. Monsieur Sidbec... effectivement... M. Gignac a semblé mésestimer, de même que vous, M. le Premier Ministre, le fait que ce soit le gouvernement lui-même qui ait entrepris la planification de la région de Bécancour et qui l'ait suscitée effectivement. Il y a eu formation d'un comité, comité d'aménagement au sein du ministère des Affaires municipales, le 2 novembre 1965. Ce comité d'aménagement a formé un comité consultatif interministériel qui faisait aussi participer tous les organismes intéressés à ce comité consultatif. En fait, on peut dire que, dans la province de Québec, une véritable planification a été amorcée à ce moment-là. L'Office du plan préconisé actuellement découle directement de l'expérience que nous avons eue à ce moment-là. M. Gignac a tout d'abord sousestimé la participation de Sidbec à ce comité, en disant qu'il n'y avait eu que trois rencontres et qu'a partir de ces rencontres, peu de décisions importantes avaient été prises. Or, en réalité, sept réunions ont été tenues et de grandes décisions ont y été prises quant à l'aménagement de ce territoire.

En fait, ce préambule m'amène à poser ma question. Sidbec, à ce moment-là, était tellement sérieuse dans la réalité de son projet qu'elle nous a fourni un plan montrant ses installations complètes sur le terrain à Bécancour. Nous avons ces plans en main.

Ces plans comprennent toutes les parties du processus de transformation du minerai jusqu'à la production finie. Alors, j'aimerais poser une première question à M. Gignac, parce que, pendant la durée du mandat du comité d'aménagement et du comité consultatif, soit seize mois, du 2 novembre 1965 au 2 mars 1967, plus d'une centaine de réunions ont eu lieu entre les différents ministères et les organismes intéressés. Ce projet qui, effectivement, a été tenu comme valable pendant cinq mois, je ne sais pas lequel Xème des projets de Sidbec c'était à ce moment-là.

Mais une chose est sûre, c'est que pendant une période pouvant aller de cinq mois, à seize mois, un projet a été présenté, d'une façon catégorique, au comité d'aménagement et au comité consultatif. A ce moment-là, Sidbec faisait partie du comité en tant que membre. Comment ce projet ne pouvait-il pas être valable et être présenté d'autre part et pendant si longtemps, de façon à baser nos éudes là-dessus?

Ceci est une question à laquelle j'aimerais que M. Gignac réponde tout à l'heure.

Deuxième partie de ma question. M. Gignac, à un moment donné — je ne sais pas si c'est par boutade ou parce qu'il était conscient de la chose, j'espère que non — a dit qu'il n'était pas facile de construire cinq réacteurs nucléaires et la sidérurgie à Bécancour.

Or, à mon avis, cette affirmation peut se baser sur deux faits, soit sur le manque de terrain ou sur la prise d'eau, qui serait, à ce moment-là, insuffisante dans le fleuve. Peut-être y a-t-il d'autres raisons, c'est pour cela que j'aimerais lui poser la question par la suite. Mais, dans le cas du terrain, les plans donnés par Sidbec exposant tout le processus et les plans des cinq réacteurs que nous possédons — nous possédons incidemment les deux exemplaires — montrent bien que ces effectifs entrent très facilement sur le terrain préconisé et acheté par le Trust Général. D'autre part, s'il est question de prise d'eau, j'ai fait les calculs hier, en admettant une production de 5,000 tonnes par jour et en admettant les 5 centrales nucléaires. Selon les chiffres courants, on aurait une prise d'eau de 49,500 mètres cubes heure. En prenant une vitesse moyenne raisonnable de cinq milles à l'heure — ça, c'est conservateur — le débit de ces six industries prélèverait un millième du fleuve.

Je me demande donc dans quel sens M. Gignac disait qu'il n'y avait pas de place pour cinq réacteurs nucléaires et une industrie sidérurgique à Bécancour.

J'aimerais que M. Gignac réponde à ces deux questions, s'il vous plaît.

M. LE PRESIDENT: M. Gignac.

M. GIGNAC: Je n'ai pas tout à fait saisi les questions, mais je vais vous en poser une, moi. Qui vous a présenté le projet final de Sidbec?

M. LEBLANC: Les plans que nous avons en main et montrant les différents stades du processus sur le terrain nous ont été fournis par M. Dufresne les 2 et 3 février...

M. GIGNAC: Qui vous les a présentés?

M. LEBLANC: Les plans nous ont été présentés au cours d'une réunion...

M. GIGNAC: Oui, mais qui vous a donné les explications?

M. LEBLANC: Qu'est-ce que vous entendez par explications?

M. GIGNAC: Enfin, vous avez pris les plans comme ça et vous les avez étalés sur le terrain, tout simplement.

M. LEBLANC: Non, non, ces plans servaient à coordonner le travail au point de vue des grands réseaux de circulation et de communication. C'est la raison première, j'imagine, pour laquelle ces plans nous ont été communiqués. C'est pour ça que je vous dis que nous en sommes en possession.

M. GIGNAC: C'est parce que vous parliez d'un projet définitif. De toute façon, pour répondre à votre première question, ce que j'ai dit l'autre jour était conscient, c'est qu'il y a eu une participation des gens de Sidbec à trois des réunions du comité dont vous parlez et je ne sais pas à laquelle de ces réunions nos gens ont participé. Mais, pour autant que je sache, étant président de Sidbec depuis le 25 mai 1966, je n'ai jamais entendu parler que, d'une façon officielle, le conseil d'administration se soit commis, de près ou de loin, concernant l'élaboration que vous faisiez à ce moment-là sur la ville de Bécancour.

Maintenant, pour ce qui touche la question des réacteurs nucléaires et de la sidérurgie, je n'ai pas grand-chose à dire là-dessus. J'ai toujours vu le projet d'une façon positive et vous avez, pour une fois, bien jugé quand vous disiez que j'étais inconscient ou que je faisais une boutade lorsque j'ai dit qu'il n'y avait pas de place pour une sidérurgie si on y mettait cinq réacteurs nucléaires. J'imagine que si c'était le cas, il y aurait amplement de place pour les réacteurs nucléaires et puis je pense bien qu'il y a assez d'eau dans le fleuve pour les fournir.

Je pense qu'il faut voir les problèmes d'une façon plus positive et d'une façon plus réaliste aussi. C'est comme dire que monter une sidérurgie à Contrecoeur ce n'est pas de la décen- tralisation, bien je pense bien que c'est relatif. C'est plus décentralisé que si c'était installé dans le coeur de Montréal. Alors, à partir de quand ça devient de la décentralisation, bien c'est bien relatif. C'est plus décentralisé à Bécancour, ça le serait plus à Montmagny, et ça le serait encore plus à Gaspé. Alors, je pense que dans ça il faut être assez pondéré et puis il faut savoir voir les problèmes là où ils sont et non pas les supposer.

Je n'ai pas d'autres commentaires à faire pour le moment.

M. LE PRESIDENT: Quelqu'un d'autre de votre délégation aurait-il des questions?

M. JOHNSON: Le chef de l'Opposition me corrigera si je fais erreur. Si une sidérurgie était la seule façon de créer un autre pôle, si c'était l'unique moyen, le conseil d'orientation économique ne l'aurait pas fixé à Bécancour, il l'aurait fixé beaucoup plus à l'est Parce que lorsqu'on a qu'un moyen et qu'on a une province aussi vaste, qu'on a Québec et tout le Bas-du-Fleuve, on ne le situe pas à Bécancour. Mais, le Conseil d'orientation économique sait bien et vous aussi que la façon de créer des pôles d'attraction qui vont amener une déconcentration industrielle ou l'industrialisation déconcentrée, c'est aussi une foule d'autres facteurs et une foule d'autres industries. Celle-là est bien importante, mais vous ne voulez pas affirmer que c'est la seule façon de créer une déconcentration industrielle.

M. LEBLANC: Est-ce que vous me demandez de répondre à cette question?

M. JOHNSON: Oui, je vous demande votre opinion.

M. LEBLANC: II faut, premièrement, un peu comme M. Gignac le disait tout à l'heure, établir une fameuse région dans ce programme de régionalisation. Evidemment, cet après-midi nous ne sommes pas en position de le faire. Mais compte tenu de tous les facteurs qu'on a mentionnés et qu'il faudra analyser pour préparer cette régionalisation, il est bien sûr que le choix de Bécancour, à mon avis, s'imposerait et non pas à l'est, comme vous dites. Mais évidemment, nous ne sommes pas pour discuter ici, cet après-midi, de ce phénomène.

J'aimerais, si vous me le permettez, revenir sur la déclaration de M. Gignac tout à l'heure, c'est un point de vue un peu personnel que je défends là. C'est que M. Gignac tient à ses trois réunions, alors qu'il est question de sept réu-

nions que nous avons eues avec eux ici. Je comprends que M. Gignac n'était pas là à ce moment-là, mais j'aimerais quand même que la vérité se fasse là-dessus. Je ne comprends pas que M. Dufresne n'intervienne pas ici pour le faire.

Mais la grande collaboration qu'il y a eue à ce moment-là, entre le comité consultatif interministériel et Sidbec, je pense qu'il y a là des facteurs qu'on ne comprend pas. On semble mésestimer ou tout simplement faire oublier une planification d'ensemble qui s'est effectivement passée pendant 16 mois.

M. JOHNSON: Mais vous parlez d'une planification locale de Bécancour.

M. LEBLANC: Oui, mais quand on dit locale, c'est quand même un territoire énorme.

M. JOHNSON: Enorme,immense.

M. LEBLANC: La SGF, on parlait de la SGF tout à l'heure, faisait partie du comité. Nous avons rencontré M. Parenteau, à ce moment-là. Nous avons discuté avec lui des options de Bé-cancour et celui-ci ne remettait pas en question ce choix comme pôle de décentralisation.

M. JOHNSON: Cen est un, il n'y a pas d'erreur.

M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, est-ce que vous avez terminé là-dessus? M. Pinard.

M. PINARD: Je pense bien que le premier ministre me permettra, au nom du chef de l'Opposition, de remercier, encore une fois M. Gignac et tous les membres de son conseil d'administration d'avoir eu la patience de se soumettre aux questions qui leur ont été posées pendant les quatre séances, de remercier également le maire de Bécancour, les membres de son conseil et les experts qui les ont entourés. Ceci a permis, je pense, à tous les membres du comité de bien saisir la profondeur du problème et aussi la complexité de cette création de Sidbec à Bécancour ou à Contrecoeur.

Evidemment, comme représentant du comté, comme je l'ai fait tantôt, j'exprime des regrets que cette naissance de Sidbec ne pourra probablement pas avoir lieu à Bécancour. J'espère que, quand même, les fruits que donneront Sidbec ailleurs seront profitables à l'ensemble de la province de Québec, que le gouvernement prendra ses responsabilités, et que le Conseil d'orientation économique, la Société générale de financement et tous les autres instruments de l'émancipation économique du Québec qui ont été mis sur pied pourront reprendre l'étude d'une véritable politique de déconcentration industrielle, et pourront aussi élaborer des plans pour doter Bécancour et la région du Coeur du Québec des industries secondaires dont elle a besoin pour se développer harmonieusement mais aussi pour être dans le courant du progrès économique que d'autres parties de la province connaissent en ce moment. C'est le voeu que j'exprime tout en faisant mes remerciements les plus sincères à tous ceux qui ont participé de près et de loin aux séances du comité de Sidbec.

M. LE PRESIDENT: M. le Premier Ministre.

M. JOHNSON: J'ai déjà remercié M. Gignac, je remercie M. Bélanger, M. Graveline, M. Dufresne, M. Howison et les autres. Je remercie le maire Gaudet, sa délégation et M. Leblanc.

Je puis dire, en terminant, ce n'est pas un prix de consolation, c'est tout simplement une vérité, ce n'est pas une promesse, ce n'est pas un rêve en couleurs, que le travail qui a été fait à Bécancour ne sera pas stérile. Il y a d'autres façons de déconcentrer l'industrie et nous avons maintenant des instruments, entre autres les bills numéros 23 et 24, qui vont nous permettre de fonctionner. Cette corporation sera créée pour devenir propriétaire du terrain. Des commissaires industriels seront engagés, des ententes seront prises avec la municipalité et les chances sont très bonnes pour qu'on ait besoin d'urbanistes pour nous dire encore où faire passer les routes dans ce coin-là.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. Gignac.

M. GIGNAC: Est-ce que je peux me permettre, moi aussi, de remercier les membres du comité d'avoir eu la patience de nous écouter pendant quatre séances, malgré quelques sautes d'humeur, et aussi les membres de la presse, qui ont été bien gentils avec nous et également mes collaborateurs. Je voudrais les remercier au nom de mon conseil d'administration pour le bon travail qu'ils ont fait, je crois, étant donné le mandat que nous avions. Merci.

M. JOHNSON: M. Gignac, quand on parie $60 millions sur un homme et une équipe, on aime bien les voir.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Gignac et M. Gaudet.

La séance est terminée.

(17 h 55)

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