L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux des commissions > Journal des débats du Comité des relations industrielles

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats du Comité des relations industrielles

Version finale

27e législature, 1re session
(15 janvier 1963 au 11 juillet 1963)

Le jeudi 20 juin 1963 - N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition de témoins et étude du bill no 54 - Code du travail


Journal des débats

 

Audition de témoins et étude du bill no 54 - Code du travail (3)

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Demain, nous ajournerons à mardi ou à mercredi, qu'est-ce que vous aimez mieux? Si le comprends bien, vous voulez avoir quelques jours, des deux côtés?

M. Massicotte: En ce qui nous concerne, M. le Président nous préférerions mercredi, de façon que nous puissions retourner a nos bureaux, pour nos affaires personnelles.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Marchand, M. Prévost, qu'est-ce que cela vous dit, mercredi?

M. Marchand: Comme d'habitude, on va se soumettre.

Des voix: Oh! oh:

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, c'est compris, demain après-midi, à 5 heures, nous ajournerons à mercredi matin, 11 heures moins le quart.

Nous en étions hier à la définition, des salariés. Je crois que nous avions fini les salariés. M. Morin, qui? M. Morin vous avez le microphone.

Étude article par article (suite)

M. Morin (Fernand): Fernand Morin, Conseil du bâtiment.

Oui. M. le Président. Nous proposons d'ajouter comme sixièmement de l'article 1-0 le mot "l'entrepreneur".

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est dans votre proposition.

M. Morin: Oui. oui.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bill 54.

M. Morin: Le mot "entrepreneur". Ceci pour éviter des discussions inutiles sur l'application de l'article éventuel, l'article 36, l'ancien article de la Loi des relations ouvrières. C'est, disons, une reconnaissance textuelle de l'explication que nous donnait M. Marchand hier, à savoir que le Code du travail s'applique aux salariés et non pas à ceux qui sont liés à d'autres personnes, non pas par un contrat de travail mais par un contrat d'entreprise.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La partie syndicale, qu'est-ce qu'elle a à dire?

M. Morin: Je n'ai pas très bien saisi la portée de l'amendement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous n'avez pas le texte qui a été produit... Salariés ne comprend pas, sixièmement, "quiconque a le statut d'un sous-traitant indépendant ou d'un artisan". M. Desaulniers.

M. Desaulniers: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Identifiez-vous.

M. Desaulniers: Guy Desaulniers, procureur.

Si vous vous souvenez, M. le Président il y a quelques années, un problème a été créé par l'acte d'une ccmpagnie. Je n'ai pas l'intention ici de faire de procès; je ne la nommerai pas. Une compagnie avait siqné une convention collective de travail avec une association reconnue par la Commission des relations ouvrières. Lorsque la convention collective s'est terminée - et même les préparatifs avaient été faits précédemment -l'employeur a avisé qu'il n'était plus employeur parce qu'il avait par incorporation, formé trois compagnies, et les trois compagnies qu'il avait formées étaient la propriété des contremaîtres de trois départements.

Prenant la position qu'il n'était plus un employeur, parce que, par le moyen de la loi, il avait cessé d'être un employeur, si vous voulez - et je prends ici 'e mot "entrepreneur" comme employeur - il a refusé de négocier une convention collective de travail.

Nous savions très bien que les trois compagnies n'étaient que des compagnies fictives, mais en raison de l'existence d'une loi de la province qui permet de former des compagnies qui ont une entité, une existence, ce que nous ne pouvons pas nier, nous avions à faire face au problème que, dans le fond, ces trois compagnies ne constituaient, en fait et en réalité, que des sous-traitants. Et chaque sous-traitant devenant l'employeur, le certificat qui avait été accordé n'avait plus

aucune valeur et l'association, en somme, n'avait plus une unité d'existence.

Je soumets respectueusement que le sixième paragraphe va permettre à un employeur d'agir contrairement, et ici je fais un lien, et de se soustraire aux implications de l'ancien article 10a de la Loi des relations ouvrières qui apparaît dans le nouveau code, l'article 36.

M. Massicotte: M. le Président, le but de l'amendement proposé par les patrons est simplement de définir de facon précise. sous l'item "salarié", la différence entre une personne qui travaille, si vous voulez, pour un salaire sous la forme que nous connaissons et une oersonne qui travaille sous un contrat d'entreprise pour un profit et c'est une question de fait. On a cru bon, dans certaines lois qui couvrent un nombre immense de conventions collectives, de bien définir cette précision. Cela n'a aucune relation, pour le moment, avec l'article 36 ou l'ancien article 10a. En fait, nous n'avons, comme semble nous prêter M. Desaulniers, aucune intention de mauvaise foi en proposant cet amendement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je ne vous prête pas ça.

M. Massicotte: Non, non, je dis: Nous n'avons aucune arrière-pensée. C'est simplement une clarification. Et l'on verra que nous reconnaissons les principes que M. Desaulniers vient d'émettre, quand on verra notre proposition sur l'article 36. C'est simplement me question de clarification.

M. Desaulniers: M. le Président, avec votre permission, j'aurais une chose à ajouter. C'est qu'on veut, dans la loi, déterminer la participation au droit d'association d'un groupe d'individus. Je considère que les principes qui ont été établis, et aussi 'es discussions qui se sont faites hier devant le comité, ont eu comme conclusion, du moins c'est ce que j'ai cru comprendre, que lorsqu'il s'agit de la détermination du caractère d'un salarié ou de la détermination de ce que peut être un salarié, le comité semblait, sans avoir oris de décision finale, considérer que, avec les dispositions générales, c'était la commission qui devait prendre cette décision.

Je dis que le 6 n'est pas un article qui peut être considéré comme une loi générale parce que l'article 6 implique nécessairement une situation de fait et je crois que seule la commission pourra déterminer, suivant les principes généraux de la loi et suivant la preuve et les faits qui lui sont apportés, si vraiment un sous-traitant indépendant ou un artisan n'est pas un salarié au sens de la loi.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En fait, si on disait: "ou bien l'enlever complètement ou ne pas s'occuper de l'article 6" ou bien dire "sous réserve de l'article 36", qu'est-ce que vous diriez de cela?

M. Desaulniers: Si vous mettez sous réserve de l'article 36... Un instant, M. le Président.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 36 c'est 10a autrefois, l'aliénation partielle ou totale.

M. Desaulniers: Cela réglerait le cas de l'article 36 mais le sixièmement a l'autres indications. Et le dis qu'en incluant l'article 36 dans la loi, vous enlevez à la Commission des relations ouvrières le droit de déterminer, suivant la preuve qui sera faite devant elle, si une personne qu'on, appelle un artisan ou un sous-traitant indépendant est vraiment une personne salariée ou non. Ce qu'on demande au comité, c'est de décider dans la loi ce que la Commission des relations ouvrières doit décider.

Les services publics

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Les services publics. On va entendre, si vous le voulez, les camionneurs, de l'Association des camionneurs, qui n'ont pu se faire entendre.

M. Barry: M. le Président, Je suis Henry Barry, de l'Association des manufacturiers du bois de sciage.

Avant de passer, si vous le permettez, aux services publics, au mot "artisan" dans l'article proposé, je dois mentionner qu'il s'agissait de doser certaines discussions oiseuses, particulièrement dans l'opération forestière. Si l'on se fie à la définition d'un artisan, il s'agit d'un ouvrier qui, de lui-même et quelquefois avec une assistance, généralement, d'un membre de sa famille, exécute un travail. Alors, il n'est pas au sens de la loi si ni au sens d'aucune définition, un salarié à proprement parler. Il serait plutôt considéré, dans certains cas même, comme étant un employeur de cette assistance qu'il peut obtenir. Nous avons été saisis. récemment. de l'émission d'un certificat le reconnaissance syndicale par la Commission des relations ouvrières pour le compte d'un groupe de camionneurs artisans dans la région du Saguenay. Le cas n'est pas réglé et ne peut pas être réglé parce qu'il ne s'agit pas d'un groupe de salariés, alors qu'on les a considérés comme tels.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, les services publics, l'Association des camionneurs, M. Fournier, je pense.

Association du camiormaqe du Québec

M. Joron (Pierre): Pierre Joron, président de l'Association du camionnage du Québec.

M. le Président, M!. le premier ministre, messieurs, l'Association du camionnage du Québec allait accueillir avec satisfaction ce projet du Code du travail lorsqu'elle a constaté avec étonnement que les entreprises de transport public car camion, sous permis de la Régie des transports, ne seraient plus comprises dans les catégories d'employeurs désignées comme services publics.

Pourtant, c'est grâce à la loi de 1944, reconnaissant le transport routier professionnel comme service public et, en conséquence, le mettant à l'abri des grèves, que cette industrie a réussi à prendre l'essor qu'on lui connaît.

Cette loi s'est avérée satisfaisante, a permis de régler les disputes et a facilité le renouvellement de contrats de travail avantageux pour les ouvriers, sans que ceux-ci aient recours a la grève, l'intimidation et la force, dans la plupart des cas.

Les transporteurs routiers sont conscients du rôle essentiel qui est leur dans le développement économique et industriel de l'État du Québec. Par ailleurs, ils connaissent la vulnérabilité de leur industrie en cas de grève, parce qu'elle se compose de centaines de petites entreprises ayant des véhicules dispersés sur les diverses routes. Les employeurs du camionnage n'ont pas la facilité et les moyens financiers de lutter contre les puissants organismes ouvriers dont les ressources financières sont considérables.

Transportant presque toute la marchandise périssable: les viandes, les produits laitiers, le pain, les fruits, les légumes, ils savent qu'une grève, chez eux, pourrait être gravement dommageable et néfaste à la santé publique.

Il nous paraît qu'il serait donc illusoire de penser qu'une grève généralisée, c'est-à-dire de plusieurs entreprises dans une même région, serait impossible. On ne saura penser qu'en pareil cas, dans les régions éloignées, les chemins de fer pourraient se substituer aux camions parce que le réseau ferroviaire dans la province de Québec, on le sait, est très limité. Québec est la province qui possède le moins de milles ferroviaires per capita de toutes les provinces canadiennes, et la majorité de nos villes et villages compte essentiellement sur le transport motorisé.

C'est pourquoi les entrepreneurs en transport public s'efforcent de donner aux ouvriers du camionnage les meilleures conditions de travail et les meilleurs salaires qu'il leur est possible d'offrir, prenant en considération la capacité de payer et le bien-être des travailleurs.

N'est-il pas vrai que dans la région de Montréal, par exemple, depuis une douzaine d'années, l'échelle des salaires a plus que doublé? Suivant le décret 407 du Comité paritaire, le salaire d'un chauffeur de camion, en 1947, était fixé à $0.70 l'heure.

En 1962, le même employé recevait $1.58 l'heure pour le même travail pour les neuf premières heures, par jour, et le 1er octobre 1963, il recevra $0.08 l'heure supplémentaire. Et cette évolution s'est faite sans grève organisée.

A Montréal, les employés sous la juridiction de la loi provinciale des services publics gagnent $0.04 l'heure de plus que ceux qui tombent sur la juridiction fédéraie et où il y a une grève, arrêt de travail et la violence que l'on sait.

Quant aux avantages sociaux, plan collectif d'assurance-vie, hospitalisation, etc., jusqu'à maintenant, il a été payé aux employés du camionnage une somme de. $1,750,000; aucune contribution n'est requise de la part de l'ouvrier pour l'assurance. L'employeur seul paie les frais de ce programme de protection sociale. Ce plan a donné le ton à l'industrie du transport routier dans toute la province. Les membres de l'Association du camionnage du Québec paient volontairement des cours aux employés qui sont assujettis au comité paritaire de la ville de Montréal, pour améliorer leurs connaissances techniques et automatiquement améliorer leur salaire et conditions de travail. Ils paient également des cours de premiers soins à la Société d'ambulance Saint-Jean. En matière de sécurité routière, une somme de $10,000 sera distribuée aux chauffeurs de camions qui n'auront pas eu d'accident pendant les douze derniers mois.

Tout ceci s'est accompli en transiqeant suivant la Loi des services publics.

Notre association participe aussi à la vie universitaire et a remis des bourses d'études qui se totalisent à $35,000.

L'Association du camionnage du Québec compte aujourd'hui quelque 1400 membres. Des membres représentent la majorité de 26,153 véhicules de services publics portant la licence L. sous contrôle de la Régie des transports, oui transportent 52% de toutes marchandises dans la province.

Le camionnaqe public professionnel du Québec est une entreprise privés essentiellement de chez nous. Comme nous l'avons dit, elle se compose de centaines de petits entrepreneurs qui, dans leur milieu respectif, constituent un facteur d'enrichissement. Elle donne de l'ouvrage directement à 45,000 ouvriers. Prise dans son ensemble, elle représente peut-être la plus importante industrie comme telle dans l'Etat du Québec. Si elle a pris autant d'envergure, c'est précisément, sauf dans Quelques cas isolés, parce qu'elle n'a jamais été paralysée par les grèves et qu'elle a su prendre ses responsabilités.

Grâce à sa souplesse, le transport par camion amène la marchandise dans les régions les plus éloignées de la province et nous crovons pouvoir affirmer, en toute quiétude, que le programme du gouvernement de décentraliser l'industrie repose largement, pour ne pas dire essentiellement, sur le transport par camion.

Nous soulignons que les régions de Chibougamau et de Matagami, entre autres, se sont développées essentiellement en comptant sur le transport routier. Toute la région du nord de la Gaspésie, par exemple, compte entièrement et uniquement sur trois entreprises de camionnage organisées, possédant une flotte de 200 unités environ, pour alimenter sa population et satisfaire aux bespins du Transport, du Commerce et de l'Industrie. Ce serait une catastrophe publique s'il y avait une grève des transports routiers a cet endroit.

Il y a déjà de nombreux obstacles à la décentralisation industrielle, surtout lorsqu'on parie de l'industrie moyenne et de la arande industrie. Les principaux obstacles sont ceux de la main-d'oeuvre, de I'éloignement des grands marchés, d'où le besoin de la facilité et du coût contrôlé du transport. Tout homme d'affaires ou groupe d'hommes d'affaires que le gouvernement pourrait inviter à ouvrir une industrie dans une région éloignée s'intéressera immédiatement au facteur "transport" et à la certitude qu'il aura, en tout temps, de faire transporter ses produits et approvisionner son usine. Dans l'état actuel de la loi, il est assuré qu'il ne pourra devenir victime d'une grève. Votre projet de loi lui enlève cette sécurité essentielle: de là, la nécessité de le modifier pour maintenir le statu quo, pour autant que le transport routier professionnel est concerné.

Le transport pour autrui, moyennant rémunération sous toutes ses formes, est en soi un service public puisqu'il est licencié par la Régie des transports, paie un permis particulier à cet effet et constitue un monopole contrôlé. Nous constatons, par ailleurs, que le projet de loi protège largement l'ouvrier et l'entrepreneur du transport, et nous en sommes reconnaissants au gouvernement. Nous avons pleine et entière confiance qu'en cas de différends, les décisions du tribunal d'arbitrage formé de juges de district rendront pleine justice aux parties.

Nous soulignons d'une façon particulière qu'une union internationale dont la réputation douteuse est de notoriété publique, qui a été expulsée du Congrès canadien du travail et de la fédération américaine du travail, détient la majorité des certificats de reconnaissance syndicale émis par la Commission des relations ouvrières du Québec. Nous avons d'excellentes relations avec les officiers québécois d'un local "le cette union internationale. Cependant, un autre local de cet organisme syndical dirigé par des étrangers harasse les employeurs en agissant illégalement et ils ont causé des préjudices Graves et irresponsables à certains d'entre eux. Quelques-uns ont même dû vendre leur commerce à la suite de ces difficultés.

Nous croyons qu'il ne serait pas sage, dans l'intérêt public, de donner plus de pouvoirs à ces dirigeants qui viennent chez nous pour dicter la politique dans la province ou dans notre pays.

Suivant la politique d'autonomie du gouvernement, les camionneurs routiers veulent, eux aussi, être maîtres chez eux sans toutefois avoir objection à transiaer avec des représentants de notre province.

Encore avant-hier, le 17 juin, cette union internationale a organisé une grève illégale dans trois entreprises de cammionnage public de l'Abitibi et a orivé cette région de marchandises essentielles en plus des dommages graves causés aux compagnies concernées.

Nous souhaitons respectueusement que le gouvernement ne devrait pas permettre à aucun diriqeant étranger d'imposer sa domination dans un secteur si imposant de notre économie. Pour toutes ces raisons, nous demandons, durant l'étude des articles, de modifier le sous-paragraphe 5 du paragraphe n) de l'article 1 afin d'y inclure le transport routier pour autrui moyennant considération.

Je désirerais ajouter ici que notre demande est appuvée par le public expéditeur représenté par l'Association canadienne des manufacturiers, la Chambre de commerce, le Board of Trade. l'A.P.I. et plusieurs autres organismes.

M. le Président, M. le premier ministre, messieurs, je vous remercie de votre bonne attention.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Merci, M. Joron. Est-ce qu'il y a quelque chose à dire, du côté syndical, sur ce mémoire-là?

M. Marchand: Voici, M. le Président. Je pense que le principe qui est à la base du mémoire présenté par "Association des camionneurs est un principe extrêmement important et je crois que la philosophie générale de la loi doit tenir compte de la réalité et de certaines libertés fondamentales dans notre société, c'est-à-dire que suivant la conception qu'on se fait d'une société libre, on arrive aux conclusions auxquelles arrive l'Association des camionneurs ou à une autre qui est. disons, la nôtre.

Ce qu'il y a d'assez curieux, c'est que si nous demandions ici, ce matin, aux gens qui représentent la grande entreprise - il y en a - "Est-ce que vous seriez d'accord pour que dans votre entreprise il y ait l'arbitrage

obligatoire des conflits, même des différends à l'occasion des renouvellements de la convention collective?", la réponse, j'en suis convaincu, serait un "non" catégorique. Pourquoi? Parce que des conflits de travail, ce ne sont pas essentiellement des conflits de droits. Ce sont des conflits d'intérêts et c'est la conception que chacun se fait de son entreprise, des risques qu'il est prêt à courir. C'est dans cette atmosphère-là qu'il négocie une convention qui s'applique non pas pour le passé, mais pour l'avenir. Et là, il est extrêmement important que l'on tienne compte de la conception et aussi de la mentalité et des risques que l'entreprise ou les individus sont prêts à courir, c'est-à-dire que ça repose et ça remet en question fondamentalement tout le principe, toute la notion de la liberté d'entreprise et même de la liberté d'association.

Je pense que nous ne pouvons pas toucher à ça à la légère. Nous sommes d'accord à la CSN - et la FTQ prendront ses propres positions - nous sommes d'accord pour que, dans certains secteurs, le droit de grève soit restreint pour des raisons d'ordre public. C'est limité, en fait, au secteur non dynamique, si vous le voulez, de la vie économique: les fonctionnaires, les employés municipaux, les corporations municipales et scolaires et je ne veux pas dire que ces gens-là ne travaillent pas.

M. Bellemare: Vous avez perdu la clé...

M. Marchand: Non, je vais vous l'expliquer. Mon affaire a du bon sens. Il n'y a que ce que je dis qui n'en a pas.

J'entends par facteur dynamique de la vie économique les éléments de la vie économique qui peuvent, par leur action, transformer les structures ou avoir une influence, disons, sur les tendances économiques de notre société.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice:Ça devient clair.

M. Johnson: Là, c'est clair.

M. Marchand: C'est clair? Il n'y a que moi qui n'ai pas compris.

Alors, je crois que c'est un principe fondamental. En somme, le droit de coalition se rattache au droit d'association qui, lui-même, est l'expression d'une liberté fondamentale du citoyen.

D'ailleurs, évidemment, il y a dans le mot "grève", si vous voulez, toute une émotivité qu'on ne peut pas éviter, seulement c'est simplement le phénomène qui se produit quand, disons... On a parlé des avocats: un avocat refuse ses services à certaines conditions qui lui sont posées, il ne donne pas son travail. Et c'est vrai pour l'ensemble des citoyens. Ça n'a pas l'implication d'une grève. Ça n'a pas les conséquences sociales d'une grève, mais c'est la même liberté qui est en jeu. C'est la liberté d'offrir, de donner son travail à des conditions qu'on accepte ou qu'on n'accepte pas. Alors, c'est quelque chose de fondamental dans notre société et c'est tellement fondamental, comme je vous le dis, que si vous demandez à la grande entreprise de restreindre ces droits-là, c'est elle qui va se battre contre vous.

Maintenant, les seules restrictions que l'on peut apporter à ça sont pour des raisons d'ordre public, non pas parce que ça peut créer des ennuis localement à une industrie ou à une autre, toutes les grèves créent des ennuis. À cette condition-là, faites une loi générale et enlevez le droit de grève.

Par exemple, sous prétexte que les camionneurs rendent des services absolument essentiels - je suis bien d'accord - je pense que ce n'est pas une raison suffisante. Pourquoi, par exemple, les laitiers ici à Québec qui distribuent le lait, ou à Montréal, ont-ils le droit de grève eux? Ils peuvent priver toute la population de lait. C'est sérieux ça. On pourrait dire: Bien, mon Dieu, ça n'a aucun sens, on va les mettre sous la Loi du service public. Les épiceries peuvent toutes fermer à Québec ou à Montréal. Enfin, c'est-à-dire que si vous partez du principe que dès que ça crée un ennui à la population il faut enlever ce droit, je pense que vous rendez un mauvais service parce que vous enlevez une responsabilité que des citovens libres doivent avoir, et même la liberté de faire des bêtises. Mais donnez la chance à l'opinion publique de se faire une opinion sur les conflits, même quand ça l'ennuie. Ils n'auront pas le téléphone dans tel secteur, ils se demanderont pourquoi et ils feront pression sur les parties. Si on veut avoir la liberté sans en avoir les inconvénients, on va perdre la liberté et on aura des inconvénients également.

Alors, le comprends que s'il y a une entreprise de camionnage qui est paralysée à un moment donné, ça peut nuire, ça peut être embêtant. Mais est-ce qu'on peut dire que ça va être un conflit d'ordre public tellement important qu'il faille les mettre sous la Loi du service public?

Si l'Assemblée législative croit ça, je pense que vous vous en allez vers l'arbitrage obligatoire dans tout le domaine industriel, parce que partout ça crée des ennuis.

M. Johnson: Excusez, M. Marchand, vous plaidez contre tout le paragraphe 5.

M. Marchand: Oui, c'est ce que ça veut dire, au fond. D'ailleurs, j'aime autant le faire tout de suite, le n'aurai pas besoin de recommencer tout à l'heure. C'est-à-dire que je crois que nous devons essayer de limiter. C'est par voie d'exception qu'on enlève le

droit de coalition dsns une société libre, pour des raisons de bien commun. Il y a des groupes, à un moment donné, qui peuvent égorger l'ensemble de la société et, a ce moment-là, je pense que le bien commun justifie une restriction. Mais même dans ce temps-là, vous savez - il ne faut pas se faire peur - je pense que l'opinion publique et le Parlement existent et ils peuvent intervenir. Vous prenez le cas des chemins de fer au fédéral. C'est sûr que les syndicats de cheminots ont en main un pouvoir extraordinaire, une puissance extraordinaire puisqu'ils peuvent paralyser l'économie de l'ensemble de la nation. Ils ont quand même le droit de grève. Vous savez ce qui s'est passé lorsqu'ils ont voulu l'exercer. La société s'est dit, par le truchement de son Parlement: Tout de même, on n'est pas pour paralyser l'ensemble de l'économie. Mais je pense que dans une société démocratique libre, il ne faut pas enlever aux agents privés la responsabilité de l'exercice de leur liberté. On rend un mauvais service à tout le monde. Alors, j'ai beaucoup d'estime pour l'industrie du camionnage. Je pense que c'est une industrie qui rend de grands services. mais je suis convaincu que même si Guilbault Transport arrête, M. Langis Galipeault, la société québécoise n'est pas en danger. Il y a des ennuis autant pour M. Galipeault que pour nous et pour un certain nombre de citoyens.

M. Johnson: Pas pour M. Galipeault.

M. Bertrand (Missisquoi): Il n'a pas d'ennuis, lui.

M. Marchand: Alors, c'est le principe général parce qu'autrement, vous essayez de faire déterminer dans un domaine économique dynamique - je reviens avec le mot parce que c'est important en dehors du jeu de mots qu'on peut faire - par un juge, des problèmes d'intérêts et il ne peut pas se substituer à la liberté des parties là-dessus dans un domaine économique qui n'est pas d'intérêt réellement public. Comment voulez-vous qu'un juge puisse dire: Votre conception, monsieur l'entrepreneur, de ce que sera votre marché dans six mois ou dans un an, moi je décide qu'elle n'est pas bonne; c'est une autre que vous devez avoir. Dire aux syndicats: Vous croyez-vous, que l'entreprise va fonctionner, disons, à profit et qu'il y aura un accroissement de productivité, et vous voulez, dans la convention qui va couvrir une période d'avenir, fixer les conditions de rémunération? Moi, je considère que vous avez tort. Votre conception le l'avenir est fausse. Vous savez que ce n'est pas un problème de droit; il ne s'agit pas de savoir, dans un texte, si le texte veut dire ceci ou cela. C'est toute la conception qu'on peut se faire de l'économie et du dynamisme de l'économie, à moins que vous vous en alliez strictement vers un dirigisme d'État. Si c'est l'idée des employeurs représentés par l'Association des camionneurs, on aimerait mieux le savoir. Si c'est ça leur conception fondamentale, ce serait peut-être intéressant à discuter.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ce serait peut-être intéressant à discuter.

M. Johnson: À appliquer. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si les employeurs sont d'accord.

M. Marchand: Le dirigisme d'État, vous savez, je n'y crois pas, comme principe.

M. Johnson: C'est la première fois qu'on s'entend, nous autres.

M. Marchand: Seulement, cela ne veut pas dire que je suis contre l'intervention de l'État; au contraire, dans certains domaines. Mais essayez de penser une minute. Comment se fait-il que la grande entreprise se bat contre ça à mort et que des petits employeurs, eux, veulent l'avoir?

Ils se battent à mort et je comprends pourquoi. C'est tout leur système, dans le fond, que vous mettez en danger. Ensuite, je pense qu'il ne faut pas empêcher la population de se faire un jugement et une opinion sur les conflits qui éclatent dans son sein; c'est la démocratie, c'est la liberté, prenons-en tous les aspects et tous les risques. Je peux vous dire personnellement, comme représentant de centrale syndicale, que dans plusieurs cas, ça fait notre affaire d'avoir la Loi des services publics et d'être sous la Loi des services publics parce qu'on n'a pas le fardeau de la grève, les obligations que cela comporte, les risques que cela comporte. C'est l'État qui vient mettre à notre service une puissance que peut-être nous n'aurions pas, comme c'est le cas.

Cela fait notre affaire, mais nous sommes prêts à courir le risque de la liberté que nous réclamons et je pense que l'Association des camionneurs, comme les gens du téléphone et ceux qui spnt rémunérés, à l'article 5, ont tort de poser ces principes-là parce qu'ils songent qu'un jour peut-être ils peuvent envisager que les autorités publiques marcheront plutôt dans le sens conservateur et là, j'entends au point de vue du conservatisme social et économique et non pas au point de vue politique. Cela peut faire leur affaire, mais qu'ils se mettent bien dans l'idée que la forme de gouvernement qu'on a n'est pas celle qu'ils désirent et l'instrument que nous avons entre les mains va être utilisé contre eux. À ce

moment-là, ils vont réclamer leur liberté.

Je pense que la liberté, il faut la prendre des deux côtés et nous, nous sommes prêts à en courir le risque. De toute façon, je trouve que vous avez tort de demander cette chose-là. Nous allons insister, même si, dans les petites entreprises de camionnaqe, on aime mieux avoir la loi. Je vous le dis, on aime mieux l'avoir, on n'a pas besoin de faire de grève, ca vient automatiquement. On aime bien mieux ca. Ils nous enlèvent un tas de responsabilités, mais je pense qu'on ne rend pas service à la société et, de plus, on peut laisser les citoyens responsables de leurs problèmes. C'est mieux, comme philosophie générale, en tenant compte de la présence des corps intermédiaires. C'est ce que j'avais a dire sur la philosophie.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Puisqu'on est dans les généralités, on pourrait préciser non moins philosophiquement, parce que ca va s'appliquer tout le long, quels seraient les critères - ordre public, monopole, etc., danger à la santé - essentiels que les syndicats, les centrales admettraient pour désigner un service public.

M. Marchand: Là, je ne peux pas parler au sujet des centrales. Je peux vous dire simplement que nous - d'ailleurs, vous allez le voir par l'énumération - lorsque nous acceptons, disons, d'une façon générale, dans les services publics...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Qu'est-ce que c'est, un service public acceptable, dans cette loi-là?

M. Marchand: Enfin, je pense que je ne peux pas donner de définition d'un service public; la seule chose que je peux faire là, spontanément, c'est de vous donner une espèce d'énumération. Nous sommes d'accord que les policiers ne peuvent pas faire de grève, nous sommes d'accord, à l'heure actuelle - et là, ce n'est pas un principe -que dans les corporations municipales et scolaires le droit de grève n'existe pas, que dans les hôpitaux, le droit de grève n'existe pas parce que, justement, vous mêlez à un conflit des gens qui ont un problème fondamental à régler, le problème de leur santé. Je pense qu'il faut restreindre le droit de grève pour ces raisons-là. Je ne dis pas d'une façon absolue, je dis tant et aussi longtemps que nous aurons des mécanismes qui nous permettront d'obtenir justice. N'oubliez pas une chose, je pense qu'il ne faut pas faire de théorie non plus là-dessus, si un groupe d'hommes, que ce soit dans les hôpitaux et même dans la police, éventuellement, est placé dans une situation telle que ce groupe-là sent qu'il n'a pas tous les recours pour avoir justice, ayez n'importe quelle loi, ils passeront à côté et l'État ne pourra rien faire. Il s'agit de créer une loi qui tienne compte des intérêts de tout le monde et qui donne des recours aussi. C'est pour ça que, dans les hôpitaux, nous acceptons la restriction au droit de grève, comme dans les corporations municipales et scolaires, mais à une condition: que les autres recours existent et à titre exceptionnel.

Si vous remarquez, dans les énumérations qu'il y a là, je pense que nous ne demandons pas l'abolition du droit de grève dans aucun des secteurs dynamigues de la société économique, aucun, parce que dans ce domaine-là, nous croyons que les parties doivent jouer leur rôle. Alors, il y a les fonctionnaires provinciaux. Nous sommes d'accord parce que c'est sûr que si les fonctionnaires vident la bâtisse ici et les quelques autres qu'il y a autour ou à Montréal, là, c'est l'ensemble de la société qui se trouve égorgée. Je pense qu'il est bon qu'il existe un recours: par exemple, on est favorable à la présence d'un tribunal d'arbitrage où ces gens-là, qui sont des citoyens comme les autres, qui ont des droits comme les autres, peuvent aller exposer leurs griefs et essayer d'avoir justice.

Quand on est employeur, vous savez, ça ne veut pas dire qu'on est de mauvaise foi, mais on regarde plutôt nos intérêts. Cela va vous surprendre, mais moi, comme président de centrale syndicale, je me comporte comme un employeur. Puisqu'il y a un syndicat de permanents chez nous, c'est moi qui deviens le "torrieu" de gars à l'autre bout, qu'est-ce que vous voulez? Mais c'est normal parce que les intérêts peuvent être divergents, de même que les conceptions. Ils ont un recours même contre leurs officiers. Cela devrait exister pour le Parlement, évidemment, je ne trouve, pas ça drôle parce que j'ai déjà eu des sentences arbitrales contre mes décisions et je vous assure que je trouvais que le juge n'avait pas beaucoup de jugement mais, de toute façon, je les ai acceptées et je pense que le aouvernement devrait faire la même chose. De toute façon, comme vous le remarquez, c'est surtout dans le secteur des services que nous apoelons les services publics...

M. Bellemare: L'eau, le aaz, l'électricité, pas Se téléphone.

M. Marchand: Oui, ça, on est d'accord; pas le téléphone. Même si le téléphone du Bas-Saint-Laurent arrêtait un bout de temps, évidemment, ra irait, les gens utiliseraient le télégraphe: ils ont déjà vécu ça, il y a des moyens de s'en sortir. Là où il n'y a pas moyen de s'en sortir... évidemment, si vous bloquez les lignes d'un hôpital et qu'il y a 50 personnes qui meurent, c'est sûr que là, il y a un problème extrêmement grave. Mais

bloquer le téléphone, entre nous, d'abord, moi, ça ferait mon affaire pendant un bon bout de temps, si je pouvais ne pas en avoir pendant quinze jours! Bloquer les lignes de la Commission des liqueurs, ça peut s'endurer...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Pas trop longtemps.

M. Marchand: Pas trop longtemps, non. J'ai une provision d'à peine une semaine. De toute façon, je pense que l'argumentation qui veut qu'on enlève le droit de grève parce que ça crée des ennuis n'est pas valable parce que vous devrez l'enlever partout. Il s'agit de savoir si la nature des ennuis que ça crée touche l'ensemble de la société; c'est réellement un pouvoir exorbitant entre les mains d'une institution privée. Il n'y a qu'une raison d'imposer l'arbitrage obligatoire, c'est dans un contexte strictement socialiste et de dirigisme économique, c'est-à-dire où la communauté, dans l'ensemble, prend des risques économiques, et si vous voulez ça, il va falloir que vous fassiez également l'autre partie. On ne vous dit pas qu'on sera contre si vous décidez d'embarquer dans ça, mais il ne faudrait pas être sur la clôture et prendre les bonnes affaires des deux régimes. Je pense qu'il faut faire l'évolution en temps normal.

De toute façon, ce sont les réflexions que j'avais à vous soumettre. Nous y sommes opposés non pas parce que, si vous nous l'imposez, on ne criera pas, on ne dira pas que vous voulez tuer le mouvement syndical, pas du tout. Dans bien des cas, vous allez nous rendre service, mais je pense que vous nous rendez un mauvais service et vous en rendez un mauvais aussi aux entrepreneurs, aux entreprises de camionnage.

M. Provost (Roger): Je veux simplement ajouter ceci, M. le Président: On accepte la liberté d'entreprise avec les risques inhérents. On ne peut pas se fendre de longs discours sur la liberté d'entreprise pour, ensuite, chaque fois que, dans un contexte de société libre qu'on prône, ça nous cause des embêtements, venir demander l'interférence ou l'ingérence de l'État par un tribunal. On dit que c'est bon, l'État, dans ce temps-là, mais si l'État arrive pour nous déranger, même en vue du bien public, ça, ce n'est plus bon. Il va falloir que l'entreprise libre fasse son option et accepte tous les risques inhérents à la libre entreprise;

On parle de monopole, dans le mémoire de l'Association des camionneurs. C'est un petit monopole de 1400. Il y a 1400 camionneurs dans la province de Québec, il y a 1400 membres, c'est encore mieux; il y a 4000 détenteurs de permis et je ne crois pas, d'ailleurs, qu'ils parlent au nom de la majorité s'ils ne sont que 1400 sur 4000.

Deuxièmement, je ne crois pas que le fait qu'un camionneur arrête quelque part cela constitue un danqer public. Je pense que M. Spector, hier, a établi certaines normes qui vaudraient la peine d'être considérées quant aux services publics. Il a dit, si je lis bien ses notes - j'espère ne pas déformer sa pensée - ceci: Lorsqu'il y a une espèce de monopole qui doit servir toute la population - c'est le cas des camionneurs - lorsque ce sont des institutions publiques, là, nous l'acceptons avec restrictions mais, dans le moment, nous concédons que le gouvernement veuille imposer dans le contexte actuel certaines restrictions qu'on est prêt à discuter.

Lorsqu'il s'agit d'une institution publique, surtout lorsqu'elle est financée par des taxes - c'est le fait des écoles, des couvents, des hôpitaux - on comprend que le gouvernement veuille savoir où il s'en va dans ce domaine-là avec l'argent du public, là où la cessation des opérations pourrait créer un danger pour la santé ou la sécurité publique. Je ne pense pas qu'un livreur de lait, même s'il en passe douze dans la même rue, ou un camionneur qui apporte du lait d'une ville à l'autre, lorsqu'il y en a dix qui font la même chose, puisse créer un danqer pour la sécurité ou la santé publique. C'est la raison pour laquelle nous sommes favorables à ce que ceci disparaisse, et c'est dans le présent texte.

Maintenant, pour la distribution du gaz, la vente du gaz, de l'eau et de l'électricité, nous imposons une restriction, lorsqu'une partie de cette production est pour des fins publiques, est destinée a l'utilité publique. Nous ne croyons pas, par exemple, que si une comoaqnie a son propre aqueduc, pour elle-même, les ouvriers oui travaillent à l'aqueduc, qui ne sont pas d'utilité publique, n'ont pas le droit d'exercer leur droit de grève.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Pour une compagnie... Prenons un cas qu'on connaît dans la province, la oortion de son pouvoir, sa oroduction électrique irait dans la production industrielle. Pour vous autres, évidemment, ça devrait être exclu.

M. Provost: Exclu des services publics parce qu'on ne pense pas que si le pouvoir arrête ce soit une calamité qui mette en danger la santé ou la sécurité de la province. En somme, nous nous résumons à ce qui peut mettre en danger la sécurité ou la santé de la province.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): J'aimerais bien savoir - je pense que c'est M. Renault qui représente la CMA, hein? -M. Renault, ce que vous avez à dire sur la théorie de M. Marchand à l'effet que si on établit l'arbitrage obligatoire, dans le cas du

camionnage, comme ça, là, ça crée un principe qui, à un moment donné, peut conduire à l'arbitrage obligatoire, à des conflits partout.

M. Renault: Eh bien, je crois, M. le Président...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je vous demande votre opinion parce que M. Joron dit que la CMA, l'API et d'autres organisations soutiennent le mémoire de l'Association des camionneurs.

M. Renault: Oui. Je fais tout de suite remarquer qu'en ce qui me concerne, comme représentant de l'Association des manufacturiers canadiens, si on discute au point de vue théorique de l'affaire, je vous soumets, M. le Président qu'il ne faut pas oublier que dans toutes nos lois ouvrières, qu'on le veuille ou non, l'employeur ne retire rien des lois ouvrières, sauf la paix industrielle. Il faut partir du principe que toutes les lois ouvrières sont pour la protection de l'employé. Il n'y a absolument rien, je le soumets respectueusement, qui, dans les lois ouvrières, est en faveur de l'employeur; tout ce qu'on enlève, ce sont des droits à l'employeur. Alors, en partant de la base, c'est la raison pour laquelle, en ce qui concerne mes clients nous appuyons le mémoire de l'Association des camionneurs.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ce n'est pas très clair comme raisonnement.

M. Renault: M. Lévesque, il y a des cas, au point de vue des services publics, en autant que nous sommes informés...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Oui, mais enfin, on n'a pas encore décidé que les camions étaient redevenus services publics; alors, on parle sur le camionnage.

M. Renault: Oui, mais, comme principe, l'industrie du camionnage... Enfin, ce que j'en comprends, je ne suis pas avocat et je n'ai même pas de clients dans le camionnage alors, je ne voudrais pas compromettre la cause des autres.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Hamel vous demandait simplement si la CMA, d'après vous, l'appuyait et jusqu'à quel point.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ils l'ont appuyé, le mémoire.

M. Renault: Nous l'avons appuyé et nous l'avons appuyé sur la base suivante. Dans certaines régions, par le fait que la province a décidé d'imposer aux camionneurs d'obtenir une licence, qu'arrive-t-il? Vous avez, dans certains cas, un seul camionneur qui a un droit exclusif dans un district ou peut-être pas dans un district, mais sur certaines lignes...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que vous connaissez des régions de ce genre-là''

M. Renault: J'ai changé de mot, M. Lévesque, "région" pour "certaines lignes". J'en connais en tout cas, dans la Beauce, M. Lévesque. J'en connais dans la Beauce où certains villages sont desservis simplement par une seule ligne de camionnage ou enfin un propriétaire de camions.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ça, c'est un cas, excusez-moi, puisqu'on parle de cas de fait, c'est des cas de fait qui changent continuellement à tous les mois, ou à tous les six mois, il peut y avoir de nouveaux permis d'émis...

M. Renault: Peut-être.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ça arrive depuis des années.

M. Renault: Comme je vous ai dit, M. Lévesque, vous m'entraînez dans un domaine que je connais très peu, parce que je n'ai pas de clients dans cette ligne-là. Mais pour répondre à votre question, c'est le principe sur lequel nous nous sommes basés pour appuyer le mémoire de l'association des camionneurs. Nous n'avons pas approfondi le problème plus que ça. Mais vu que la province décide, par le ministère du Transport, d'imposer aux camionneurs l'obligation d'avoir une licence et que, dans certains secteurs, peut-être qu'ils ne sont pas nombreux, M. Lévesque, mais ils existent dans certains secteurs, il n'y a que ce camionneur qui peut...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): En partant de ce principe-là, est-ce que les taxis ne sont pas dans le même cas''

M. Renault: Bien oui, mais seulement écoutez, je ne connais pas de région de taxis, M. Lévesque, où il n'y a qu'un seul taxi. Le taxi, tout ce que vous avez...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ah! il y a quelques endroits que je connais où vous avez une seule compagnie ou une seule association, parce qu'il n'y a pas de place pour deux.

M. Renault: Et vous n'avez pas une ligne exclusive, vous n'avez pas la rue Willowdale, ou Quelques rues dans Montréal, comme la rue Vendôme, qui ont été servies seulement par un... Et vous n'avez pas de

taxi qui est le seul à avoir le droit de servir cette rue-là...

M. Johnson: D'ailleurs, M. Renault, vous n'éliminez pas la possibilité d'une grève générale du camionnage qui paralyserait les deux lignes qui desservent la même région ou les trois lignes?

M. Lévesque (Montréal-Laurier): À ce moment-là, j'ai la valise de ma voiture pour aller m'approvisionner.

M. Johnson: Si vous êtes dans la Gaspésie, c'est moins drôle.

M. Bertrand (Missisquoi): M. le Président, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen d'avoir une charte qui nous donnerait un peu les lignes de distribution du camionnage dans la province, avec le nombre à peu près de compagnies qui desservent telle ou telle région? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui pourrait nous la donner?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je vais inviter M. Fournier tantôt, si vous voulez attendre une minute, M. Fournier, je vais vous inviter tantôt.

M. Renault: Je m'accorde avec M. Marchand pour dire que, en ce qui nous concerne, l'entreprise certainement s'objecterait à ce qu'on nous enlève le droit de négociation. Très bien. Je m'accorde.

Seulement, M. le Président, je soumets que c'est le devoir de la Législature, dans tout ce domaine-là, de poser une certaine limite. Où allez-vous la poser? Vos responsabilités, j'aime bien mieux que ce soit vous autres, vous avez choisi de les prendre, que moi-même. Moi, je représente un certain groupe et je crois que je peux me limiter.

M. Johnson: M. Renault, et vous en avez élu une partie de nous autres...

M. Bertrand (Missisquoi): Aidez-nous à établir la limite.

M. Renault: Dans ce domaine-là, je crois que je dois me limiter et laisser à mes confrères, qui ont étudié le problème plus que moi, le soin de défendre les intérêts des camionneurs. Je crois que je ne peux rien ajouter pour contribuer à la discussion que vous allez avoir à faire.

M. Girouard (Jean): M. le Président...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Un instant, une minute, c'est M. Fournier là, un instant là.

M. Girouard: Je veux juste terminer ce que monsieur mon confrère vient de dire. Il ne devrait pas y avoir d'arrêt de travail dans tout service essentiel à la vie sociale. Peu importe, maintenant, la situation juridique de l'entreprise qui donne ce service-là. Je crois qu'elle est là, la notion.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): La vie sociale, vous admettrez que c'est une notion un peu floue.

M. Girouard: Je la définirai.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que ça comprend les bingos? Non, enfin la vie sociale...

Une voix: Les clubs de nuit?

M. Girouard: Écoutez, moi je sais une chose, sur un fait précis. Si, disons, j'ai un cas d'urgence, chez moi, je dois communiquer chez le médecin, il n'y a pas de service téléphonique, imaginez les conséquences. Je donne l'énumération de faits comme ça.

M. Bellemare: Mais dans ce cas-là, les ambulanciers ne sont pas compris. C'est bien important les ambulanciers.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

M. Girouard, qu'est-ce que vous pensez du principe énoncé par M. Marchand, disant que le droit de grève ne doit pas être restreint parce qu'il cause des ennuis aux personnes qui en sont victimes?

M. Girouard: Bah! encore là, faisons la distinction entre les différents ennuis. Si c'est un ennui extrêmement onéreux mais qui, à la rigueur, je dirais, se supporte, je n'aurai pas tort. Mais si c'est un ennui dont l'effet tombe dans la nature des choses essentielles et irréparables, je crois qu'il faut distinguer.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Fournier.

M. Provost: Je voulais simplement demander à M. Renault s'il est prêt à laisser tomber les relations ouvrières, puisqu'il n'y a rien dedans pour les patrons? Nous, il nous resterait notre droit de grève, suivant le Code criminel, puis on s'est déjà débrouillé sans loi, ça ce serait plus difficile, ça serait moins dans l'ordre, mais on pourrait peut-être. Seule une affirmation qu'il n'y a rien dans la loi des relations ouvrières pour les patrons, moi je trouve ça un peu vaque et un peu étendu comme affirmation.

M. Marchand: Si vous me permettez, juste là-dessus, pour compléter ce qu'a dit mon ami Provost. C'est que les organisations syndicales sont antérieures à la législation du

travail. Et les législations ouvrières sont venues, non pas pour augmenter les droits des travailleurs parce qu'on les avait, on avait nos syndicats et puis on pouvait se battre. Elles sont venues pour les limiter: Vous serez reconnus, mais à telles conditions. Vous ne pourrez pas faire la grève dans telles conditions. Et quand M. Renault trouve que la loi nous donne des droits, ces droits-là, nous croyons que nous les avions avant la loi. C'est basé sur la nature même et la libellé. Alors, c'est le contraire. Et en est prêt...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si je comprends votre histoire, est-ce que les syndicats ne sont pas venus comme une espèce de réaction violente pour des abus de la civilisation industrielle?

M. Marchand: C'est sûr.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Il a fallu, à un moment donné, codifier, autrement ça aurait été la jungle. Ça aurait été la pagaille.

M. Marchand: Et là, on a voulu canaliser ça et puis on a voulu enlever des droits et limiter l'exercice des droits des syndicats. Et ça c'est la Loi des relations ouvrières, la Loi des services publics et toutes les autres lois qui se greffent autour.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Marchand, la Loi des relations ouvrières, par exemple, dit, suivant le Code civil, si vous voulez, c'est la liberté individuelle; ne peut mettre un gars dehors suivant certains avis d'une semaine ou un mois. Alors dans la Loi des relations ouvrières, quand on dit que le patron, par exemple, ne peut pas mettre un gars dehors pour activité syndicale et qu'en plus il y a une présomption contre lui, on ne peut pas dire que c'est une restriction aux lois des ouvriers ou aux lois d'un syndicat.

M. Provost: Voici, c'est une concession qu'on nous fait parce qu'on nous enlève notre droit de grève à n'importe quel temps. On ne dit pas que c'est mauvais ou pas. on ne discute pas sur le mérite, mais on nous enlève le droit de grève, à n'importe quel temps, qui existait avant qu'il y ait des lois du travail. Et puis on a dit: Pour mettre de l'ordre, on vous enlève votre droit de grève. Nous, on a dit: En retour, orotéqez-nous parce qu'on n'a plus l'arme nécessaire pour exercer ce recours qu'on avait en tout temps autrefois. Ce n'est pas un privilège qu'on nous a...

M. Fortin: M. Provost, vous allez admettre que si on entre dans ce domaine-là, on entre dans toute la philosophie de la législation du travail. On n'en sortira pas.

M. Provost: Non, non. c'est juste cour répondre à l'affirmation générale rie M. Renault qui dit: "Nous autres, dans...

M. Fortin: La réglementation nous permet de légaliser de plus grandes jouissances de sa liberté et de ses droits.

M. Provost: Exactement, mais ce n'est pas nous qui avons ouvert le débat, M. Fortin.

M. Renault: Bien voici, écoutez. J'ai ouvert le débat, peut-être, mais je crois qu'à la façon dont j'ai ouvert le débat, le n'ai certainement pas voulu commencer un argument avec les amis, parce qu'en fait nous nous connaissons tous assez bien. Mais voici un point, je n'ai rien à retirer, vous savez que ce que j'ai dit, plutôt à ajouter ceci: que les abus dont on vient de parler ont existé des deux côtés, de telle sorte que la Législature a cru bon de faire des lois ouvrières. Mais si on avait le temps, si on prenait article par article de la Loi des relations ouvrières on ne trouverait aucun article en faveur des patrons, sauf qu'il doit avoir la paix dans le temps de la convention collective. C'est ce que je ne retire pas.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Fournier.

M. Fournier: M. le Président, je crois que l'exercice de la liberté doit être limité, du moment qu'il peut affecter le bien commun. Et un groupe d'ouvriers d'une entreprise de camionnage, s'il leur est possible, au moyen de la grève, par exemple, de bloquer, disons, une route, comme on l'a déjà vu, c'est nuire au bien commun d'une région. Je crois que ce droit de grève doit être limité.

En somme, le droit de grève, c'est quoi? C'est le refus de se soumettre à d'autres qu'à son propre jugement afin d'obliger le partie opposée, l'employeur dans le cas, à se rendre à certaines conditions. Nous n'avons aucune objection et nous ne nous opposons pas a l'association, à la syndicalisation, chez nous. Mais quant aux services publics. l'ouvrier est entièrement protéqé lorsqu'il comparaît devant le tribunal d'arbitrage qui décidera des droits de l'une et l'autre des parties. Sa liberté n'est pas abolie par le seul fait qu'il n'a pas le droit suprème d'imposer sa volonté au moyen d'une grève. Ce droit-là, on le lui donne lorsqu'i! peut être localisé. Mais dans le cas du camionnage, la grève peut être généralisée. Et à titre d'exemple, dans la Gaspésie, vous avez trois grands camionneurs, on le dit dans le mémoire, qui contrôlent 200 camions. En vertu de la Loi de la Régie des services

publics, on ne peut pas accorder d'autres permis de camion, et ceci pour répondre à l'honorable M. Lévesque, on ne peut pas accorder d'autres permis de camion dans cette région-là parce qu'alors toute l'industrie du transport dans cette région-là ne pourrait pas exercer avec un profit raisonnable et elle cesserait d'être rentable.

Par conséquent, la Régie des services publics a limité un certain nombre de camionneurs, comme d'ailleurs elle le fait sur toutes les routes, au droit de transporter.

J'en reviens à la Gaspésie. Vous avez trois camionneurs et vous avez une route pour sortir de la Gaspésie. Il faut être réaliste, il faut regarder l'histoire. Il faut savoir ce qui se passe en temps de grève.

On a déjà vu des routes bloquées. La route entre Toronto et Montréal a été bloquée par des camionneurs qui commençaient la grève. Si on bloque la route de la Gaspésie, c'est la santé publique qui est affectée, et c'est tout le développement de cette région qui est affecté. Pendant 9 jours, 15 jours...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Comme je suis gaspésien moi aussi, puisque vous parlez d'une situation de fait...

M. Fournier: Je sais, je cite la Gaspésie.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): À l'ordre!

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si vous me le permettez, M. Fournier, je veux juste vous faire un tableau puis je vais vous demander si vous êtes d'accord. Prenez la Gasoésie, vous dites que vous avez trois compagnies de transport par camions qui ont des permis. Soyons d'accord pour dire qu'il ne faut pas en avoir six, si ce n'est pas rentable. Alors, il y en a trois. Il y a deux choses: ou toutes les trois sont en grève ou bien il y en a moins que trois. Si c'est moins que trois, il en reste une. Les deux peuvent être en grève et la santé publique n'est pas affectée ni quoi que ce soit parcs qu'entre la santé et le camionnage, je ne vois pas de relation directe. Si les trois sont affectées, il reste quand même que dans le sud, vous avez le chemin de fer qui couvre tout le monde. Il resterait le nord; si cela dure quelques jours, il y a quand même la route qui permet aux automobiles puis aux autobus de compenser, et il y a l'opinion publique, comme disait M. Marchand. Qu'est-ce qu'il y a là qui affecte de façon vitale le droit de grève et la population? A moins que cela s'éternise: à ce moment-là, il y aurait des réactions dans la oopulation et dans les parties.

M. Fournier: Bien voici, M. Lévesque, celui qui est possesseur d'une automobile pourra toujours aller chercher sa marchandise là où il sera nécessaire, en autant...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): La santé publique, cela peut vouloir dire quoi'' Cela peut vouloir dire, dans le camionnage, les choses à manger qui manquent, s'il s'agit d'une pièce pour une usine ou s'il s'agit de choses comme cela, ce n'est quand même pas vital. Cela affecte évidemment la région comme n'importe quelle grève, mais ce n'est pas vital.

M. Fournier: Et cela conduit évidemment au chômage.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): D'accord.

M. Fournier: Les camions transportent les aliments, comme je l'ai dit d'ailleurs et c'était très clair. On a vu, par exemple, si mon souvenir est bon, une grève à New York où les grévistes ont empêché d'entrer le lait sur le marché, il y a deux ans, je pense. Et il y avait là de nombreux camionneurs, cela a été une grève généralisée.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que vous ne vous dirigez pas justement vers ce que M. Marchand disait? Si vous continuez de parler des ennuis, M. Fournier, et toute grève cause des ennuis; on va finir par dire qu'il faudrait arbitrer obligatoirement tous les conflits.

M. Fournier: Toute grève cause des ennuis, mais la grève ne doit pas être permise lorsqu'elle affecte le bien commun d'une région, par exemple. C'est dans ce sens que je dis que la grève ne doit pas être permise.

Maintenant, lorsqu'on parle des chemins de fer comme un substitut, les chemins de fer dans la province de Québec ne peuvent pas être un substitut aux camionneurs.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Je parlais de la Gaspésie, du sud de la Gaspésie.

M. Fournier: Dans la Gaspésie ou dans toute autre région. Parce que, à partir de ce moment, il faut commencer, lorsque la marchandise arrive, par la distribuer, et c'est encore le camion qui la distribuera. Et est-ce que les chemins de fer seront en mesure de mettre fin à une grève qui durerait 10 ou 15 jours? Le manque d'équipement, le manque de matériel roulant, je ne crois pas que le chemin de fer puisse servir de substitut. Les camionneurs, par exemple, en l951, ont servi de substitut, à l'occasion de la grève des chemins de fer.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela serait peut-être l'occasion de donner aux chemins de fer la chance de prouver qu'ils peuvent en faire autant. Il y a même eu une grève générale à cause de la loi.

M. Fournier: À cause de la loi, évidemment, c'est, jusqu'à présent, M. Lévesque et je vous remercie de le souligner, empêcher la grève.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela, c'est enlevé dans le texte proposé.

M. Fournier: Maintenant, nous sommes exactement dans la même situation, c'est-à-dire que nous sommes essentiellement un service public. La Régie des services publics nous oblige à accepter les transports. On nous confie des marchandises, on n'a pas le droit de la refuser, il faut la transporter. Cela, c'est l'article 32 de la loi de la Régie. Les sections 30, 31, 32, 33...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que vous n'admettez pas que la définition des services publics peut évoluer? Si on dit service public essentiel, ce n'est pas tout à fait la même chose. Autrement dit, un service public n'est pas nécessairement, est-ce que vous êtes d'accord, par définition, essentiel à la santé, à la sécurité, à l'ordre public, etc... Il peut quand même s'appeler service public dans le sens général de ces divisions-là.

M. Fournier: Je crois que l'industrie du camionnage, le transport par camion, particulièrement dans la province de Québec, est un service essentiel. À l'heure actuelle, la politique du gouvernement, par exemple, est la décentralisation de l'industrie. Le mémoire le souligne ouvrir la décentralisation de l'industrie veut dire aller ouvrir des industries, disons, dans la région de la Gaspésie. Est-il un industriel sérieux qui ne prendra pas en considération comme un des facteurs essentiels pour aller ouvrir une industrie dans cet endroit-là, de s'assurer le transport de ses marchandises pour qu'elles arrivent sur le marché? Or, s'il y a une grève, s'il y a la possibilité d'une grève dans le transport par camions, dans les régions éloignées où seuls les camions circulent, je crois qu'on paralyse, de cette manière, l'essor industriel de la province.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Paralyse, si on veut, à l'occasion, cela peut s'appeler une paralysie qui serait extrêmement provisoire et je ne crois pas que cela dérangerait. Enfin, prenez une région qui se développe, où il y a des mines, par exemple, cela ne dérangera pas. Si quelqu'un veut développer cette mine-!à, il va passer à travers la grève puis il la développera quand même. C'est évident que c'est un ennui, cela. Vous parlez de paralysie comme si cela empêchait le développement. Vous ne croyez pas que c'est un peu excessif?

M. Fournier: Je ne crois pas que ce soit exagéré parce qu'avant d'aller installer une industrie, ici on parle des mines, évidemment, les mines, il faut aller les exploiter où elles sont, mais je parle d'une industrie de production, avant d'aller installer une industrie dans une région éloignée, l'homme d'affaires est invité à s'y rendre, considère le transport et les facilités de transport. C'est la première chose qu'il fait.

M. Bellemare: M. Fournier, vous avez un exemple qui est donné dans le Canada tout entier, le transport des marchandises par chemin de fer qui est un service absolument nécessaire et inévitable pour toute la population. Il ne faut pas oublier que dans les lois du Canada, quand on parle de chemin de fer, justement, les employés de chemin de fer ont le droit de grève. Comme c'est déjà arrivé, les grèves du CNR et du CPR.

M. Fournier: Cela a été extrêmement dommageable...

M. Bellemare: Le droit de l'individu à la liberté.

M. Fournier: A ce moment-là, on a été obligé de convoquer le Parlement. Alors, pourquoi changerions-nous la situation dans la province de Québec alors que nous avons cette loi de 1944, le chapitre 31, 169 qui, jusqu'à présent, a permis essentiellement, grâce au camionnage le développement de la province de Québec? À ce titre-là, nous le sommes pas non plus une province comme les autres, à cause du Saint-Laurent qui divise la province de Québec en deux. Nous n'avons pas les mêmes avantages que "Ontario, par exemple, où le chemin de fer se répand partout comme une toile d'araignée. Nous n'avons que deux routes. Une du côté sud et une du côté nord. La grève peut être extrêmement dommageable, et alors, à ce moment-là, la grève dans les transports par camionnage est à l'encontre du bien commun, et du moment que c'est à l'encontre du bien commun, je soumets respectueusement qu'elle ne peut pas être donnée.

M. Fortin: M. Fournier, est-ce que vous seriez capable de répondre à cette question? Savez-vous combien il y a de régions dans la province de Québec où il n'y a qu'un permis unique pour desservir une région, par exemple? où il n'y a qu'une compagnie, qu'un camionneur qui dessert tel comté ou tel... Est-ce qu'il y en a plusieurs?

M. Founier: M. le ministre, je ne suis pas en mesure de répondre à cette question. M. Archambault serait peut-être en mesure de répondre à la question. Je ne suis pas versé en...

M. Fortin: Parce qu'en fin de compte, c'est, une question de fait...

M. Archambault (David): David Archambauit, directeur des relations extérieures de l'Association du camionnage qui dessert le publie. Vous avez Sherbrooke-Québec, par exemple, vous avez Montréal-Cornwall. Il y a trois compagnies, ce sont les mêmes intérêts.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Excusez-moi, M. Archambault, juste pour préciser. Quand vous dites une seule, Sherbrooke-Québec, vous voulez dire que sur tel circuit de transport, Sherbrooke-Québec, il y a un seul permis mais qu'il y a d'autres camions, cela c'est évident, sur la route, qui circulent continuellement? Autrement dit, d'autres circuits et d'autres...

M. Archambault: Il y en a un seul qui est licencié par la Réqie des transports avec obligation de donner un service régulier quotidien entre Sherbrooke et Montréal.

M. Johnson: Entre Sherbrooke-Québec.

M. Archambault: Entre Sherbrooke-Québec, pardon. Maintenant, si vous me permettez quelques observations, M. le Président, au sujet des remarques de M. Marchand. M. Marchand est un grand penseur et un grand théoricien pour qui j'ai beaucoup d'admiration. Mais je soumets que nous devrions étudier et savoir si la Loi des services publics dans le passé a été une bonne ou une mauvaise chose oour les ouvriers du transport. Si vous vous reportez à la page 3 de notre mémoire, nous vous avons signalé des faits qui démontrent que dans la région de Montréal, les salaires ont été augmentés de plus de 100%, que dans les réqions de Montréal où il y a eu contrat de travail négocié en vertu de la Loi des services publics, les ouvriers gagnent $0.04 l'heure de plus que dans les cas de Smith Transport, puis Osborne et d'autres où il v a eu grève, au niveau fédéral. Nous avons été les premiers à établir des plans d'assurance sociale pour les ouvriers, entièrement défrayée par les patrons. Nous établissons des concours de sécurité routière et nous mentionnons que cette année, nous donnons $10 000 à nos employés à Montréal seulement pour leur bonne conduite au volant. Alors, qu'est-ce qu'on reproche aux employeurs de l'Institut de camionnage, pourquoi veut-on enlever le statu quo? On se le demande.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous êtes de bons papas.

M. Lesage: Bien non, s'il a toutes ces bonnes ambitions-là, il n'y aura pas de grève jamais.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'a pas besoin de s'inquiéter de la grève jamais, si c'est bon comme cela.

M. Lesage: M. Archambault, avec tout le respect que j'ai pour vous, j'aimerais mieux vous voir attaquer la question de principe que de vous entendre réciter combien vous avez été bon pour vos employés.

M. Archambault: Bien oui, mais un principe je crois...

M. Lesage: Jusqu'à quel point, dans un domaine comme le camionnage, qui est un domaine concurrentiel, qui n'est pas un monopole, jusqu'à quel point...

M. Archambault: C'est un monopole contrôlé par la Régie des transports.

M. Lesage: C'est-à-dire qu'il y a un monopole... oui, évidemment, il faut une franchise, mais simplement, c'est juste qu'il n'y ait qu'une seule franchise pour un territoire donné.

M. Archambault: J'admets que c'est rare qu'il n'y ait qu'une seule franchise. Habituellement, il y en a deux, trois, peut-être quatre.

M. Lesage: Deux. trois, il y a concurrence.

M. Archambault: Mais l'expérience démontre que...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela change souvent, selon le volume.

M. Lesage: C'est là que je vois la différence avec le téléphone...

M. Archambault: L'expérience démontre...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Selon le premier volume...

M. Archambault: L'expérience démontre que les "teamsters", lorsqu'ils organisent des grèves ailleurs au Canada et aux États-Unis, ils bloquent une route entièrement. Ils n'arrêteront pas deux ou trois compagnies de camionnage. Vous avez l'exemple de l'an dernier, Montréal-Toronto, ils ont tout bloqué.

Une voix: Cela, c'est du piquetage... Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

Que voulez-vous faire contre une organisation syndicale particulière dans la loi générale?

M. Archambault: Nous ne disons pas ça. Nous demandons le statu quo actuel de la loi...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est ça qui est le problème.

M. Archambault: ...pour la bonne raison que le principe de cette Loi des services publics, dans notre cas, a apporté de bons résultats. Il semble être facile... Certaines personnes mentionnaient tout a l'heure: S'il y a des entreprises de camionnage qui sont bloquées, il y aura d'autres camions qui circuleront.

Mais ce n'est pas facile, du jour au lendemain et en criant ciseaux, de se procurer des camions-isothermes, des camions réfrigérés, des camions-citernes. Par exemple, vous avez des spécialités dans le transport. Ce sont des spécialités essentielles: les camions-citernes qui transportent l'huile, les réfrigérés qui transportent les aliments, les médicaments. Alors, pour toutes ces raisons, nous demandons le statu quo, M. le premier ministre et M. le Président, étant donné que les résultats que nous crovons ont été dans le passé à l'avantage des ouvriers.

M. Maheux: J'aimerais bien vous poser une question avant que vous partiez.

M. Archambault: Avec plaisir.

M. Maheux: Vous avez mentionné tout ce que vos employés ont. J'aimerais bien savoir si ce sont les employeurs qui ont offert ça ou si ce sont les employés qui l'ont demandé.

M. Archambault: Si vous voulez parler de certains cas particuliers, le montant de $10,000 oui est mis à la disposition de nos ouvriers, cette année, pour bonne conduite au volant a été offert par les employeurs. Le plan d'assurance sociale est offert par les employeurs.

M. Maheux: Ça peut vous payer s'il n'y a pas d'accidents, je le comprends, si vous mettez un montant de $10,000. Mais les autres?

M. Archambault: Mais comme quoi? L'échelle des salaires, c'était négocié, évidemment.

M. Maheux: Alors?

M. Archambault: Mais par contre, je souligne de nouveau que nous donnons $0.04 l'heure de plus que le Service public.

M. Maheux: Le fils l'a demandé à papa, papa le lui a accordé.

M. Archambault: Nous donnons $0.04 l'heure de plus qu'à Montréal, en vertu des contrats négociés comme service public, que les employés du transport reçoivent en vertu de la Loi fédérale de négociation.

M. Fortin: Supposons qu'il y a un changement à la direction de l'Association du camionnage et que la direction cesse de donner de bons effets à la partie ouvrière. C'est le seul moyen pour les ouvriers de faire valoir leurs droits.

M. Archambault: Moi, je prévois, M. Fortin, que s'il y a pouvoir de grève dans l'industrie du camionnage, l'entreprise privée, telle qu'elle existe aujourd'hui, l'industrie du camionnage disparaîtra et ce seront de grosses entreprises qui contrôleront le camionnage dans la province de Québec.

M. Desaulniers: M. le Président, je n'ai pas l'intention de discuter le mérite du problème, mais simplement je soumets une information que je crois pouvoir être utile à votre comité dans la décision ou du moins dans la recommandation qu'il pourra faire. C'est qu'un grand nombre de salariés, employés par un nombre de compagnies qui sont actuellement représentées par les porte-parole, sont soumis à la loi fédérale, et la loi fédérale permet le droit de grève à tous ses employés.

M. Lesage: Y compris ceux des chemins de fer?

M. Desaulniers: Y compris ceux des chemins de fer. Toute entreprise de camionnage qui tombe sous la juridiction fédérale - je ne parle pas de permis parce que le permis, c'est un autre problème -c'est-à-dire qui fait du transport entre une province et une autre ou plusieurs provinces est soumise à la Loi des relations ouvrières fédérales et, par conséquent, les salariés de ces entreprises ont le droit de faire la grève. Je crois que c'est bien important que certains membres de votre comité qui n'étaient pas au courant de ce fait le reconnaissent.

M. Plourde (Jean): Jean Plourde, procureur de la Maison de transport Ltée et Chibougamau Express Ltée.

M. le Président, M. le premier ministre, mes clientes m'ont prié de soumettre le point suivant au comité. Ce qu'elles veulent, c'est l'égalité de traitement avec d'autres

services publics. Tout à l'heure, M. Marchand se disait favorable à ce que soient déclarés services publics les domaines de l'éducation, de l'hospitalisation, les policiers, les corporations municipales et scolaires, les fonctionnaires provinciaux, la distribution d'eau, le gaz et l'électricité. Ce qui impliquait qu'il ne considérait pas comme services publics le transport par tramway, le transport par autobus...

M. Lesage: Est-ce que je puis vous demander s'il a mentionné les poubelles en juillet?

M. Plourde: Il n'en a pas parlé. M. Marchand: On est d'accord.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On ne peut pas dire qu'il s'est déclaré favorable; il acceptait.

M. Marchand: Ce n'est pas parce que ça crée des ennuis. C'est parce que c'est un danger pour la santé publique.

M. Plourde: Alors, il ne considérait pas comme services publics le service de téléphone, le transport par autobus, par bateau, aar tramway et le transport routier. Alors, M. le Président nous considérons que ça nous place dans une meilleure position. Nous disons: Nous sommes un service public aussi essentiel que Bell Téléphone et le transport par bateau. Si vous en arrivez à la conclusion que les compagnies de téléphone, de transport par tramway, par autobus, par bateau sont des services publics, nous considérons que nous sommes sur le même pied que ces services-là. Nous ne voulons pas qu'il y ait de discrimination dans ce qui sera un service public. Maintenant, on dit: Le camionnage, ce n'est pas un monopole en raison du nombre de ceux qui en font. Je dis que ce n'est pas le nombre de ceux qui exercent un commerce qui fait que ce commerce-là est de la nature d'un monopole. Ce qui fait qu'un commerce est de la nature d'un monopole, c'est le fait qua pour exercer ce commence, il faut obtenir un permis, que ce permis est donné après que la preuve d'intérêt public est faite. C'est ce qui arrive quand quelqu'un se présente devant la Régie des transports et demande un permis de camionnage. On obtient ce permis après que la preuve d'intérêt public est faite et ensuite on fait disparaître la concurrence. Il n'y a pas de concurrence dans le domaine du camionnage soumis à la Régie des transports parce que les taux sont déposés. La seule concurrence qu'il y a pourrait être dans la Qualité des services qui seraient donnés, mais quant au prix, c'est un prix qui, théoriquement - je ne vous dis pas qu'il n'y a pas des trucs qui se prennent pour contourner la difficulté - quand ça se fait, se fait en marge de la loi. Alors, on n'a pas, je crois, ici à tenir compte de ce qui se fait en marge de la loi. Normalement, la loi devrait prévoir elle-même à réparer le dommage...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Plourde, si vous me permettez. Vous êtes en train de prouver que c'est d'intérêt public...

M. Plourde: Je suis content de savoir que je suis en train de le prouver.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Je suis d'accord et je crois bien que personne ne discute là-dessus. C'est d'intérêt public. Mais entre l'intérêt public et la nécessité publique, quotidienne, vitale, il y a autre chose.

M. Plourde: Voici, M. le ministre, évidemment, si on s'en tient à la définition du dictionnaire pour savoir ce qu'est un service public, on n'ira pas très loin, Mais je crois que c'est le législateur lui-même qui nous indique ce qu'est un service public lorsqu'il déclare qu'un service public ne sera pas soumis à la grève. Le législateur veut donc que l'on pèse la somme des inconvénients qu'il y a si on suspend un service, et c'est ça qui est la nature d'un service public, lorsque la suspension d'un service est d'une nature telle que sa susoension ou sa disparition, pour un temps plus du moins prolongé, pèse trop lourd sur l'intérêt de la communauté ou d'une section importante de la communauté, évidemment, nous disons que la plus grande partie du transport de la nourriture se fait par camion dans les régions extra-métropolitaines de Montréal et de Québec. Naturellement s'il n'y a qu'une seule compagnie de transport dans la région du Saguenay, où, le crois, il y a six permis, qui nous relie à Québec et à Montréal, s'il n'y en a qu'une seule en grève, il n'y a pas danger pour la santé publique. Mais quand même, les gens oui dirigent les syndicats ne sont pas des imbéciles, tout le monde le sait. Si, à un moment donné, il y a une grève des chemins de fer, n'est-ce pas que le moment serait tout choisi pour les employés du transport routier de faire une grève qui nous placerait dans une situation d'urgence nationale? Ce n'est pas notre devoir d'attendre que le problème se pose comme celui-là. Il est suffisant que le problème se oose, existe, pour qu'on agisse en conséquence...

M. Bellemare: Si le gouvernement disait: "Ceux qui sont des permissionnaires sont suspendus", qu'est-ce qui arriverait?

M. Plourde: Eh bien, ce serait sûrement une situation draconienne et, M. Bellemare,

plutôt que d'en arriver à cette situation-là, que l'on suspende la grève. Comme le disait M. Marchand, ce n'est pas si agréable que ça que de ne pas avoir le droit de grève dans une entreprise parce que si, à un moment donné, un patron a les moyens financiers, il peut peut-être trouver avantage à vouloir briser le syndicat.

M. Fortin: Vous présumez l'hypothèse qu'il y a une grève dans les chemins de fer.

M. Plourde: Oui.

M. Fortin: Et qu'à un moment donné, toute l'Association des camionneurs, pas nécessairement des camionneurs...

M. Plourde: Ce serait le moment choisi.

M. Fortin: Et s'ils sont liés par une convention collective, ils n'auront pas le droit de faire la grève pendant la durée de la convention collective.

M. Plourde: M. Fortin, M. le ministre, lorsqu'on prévoit qu'il va y avoir une grève des chemins de fer, on la prévoit un an d'avance au moins. Que le risque de grève dans les chemins de fer arrive, il n'est pas impossible, il ne répugne pas au raisonnement que les diverses conventions collectives, on les laisse épuiser...

M. Fortin: Vous présumez, vous apportez l'élément, je peux dire, de mauvaise foi de la part de la partie ouvrière.

M. Plourde: Ce n'est pas de la mauvaise foi, M. le ministre.

M. Fortin: On va profiter d'une circonstance pour faire une grève syndicale.

M. Plourde: Si, dans le camionnage, ils veulent faire une grève, pourquoi attendre celle des chemins de fer?

M. Fortin: Ce n'est pas de la mauvaise foi que de se placer dans une position où on va essayer de gagner son point. C'est de la bonne stratégie, Napoléon a fait ça toute sa vie.

Des voix: Il est mort.

M. Fortin: Vous ne prétendez pas que M. Marchand n'en est pas là.

M. Johnson: Un petit peu.

M. Plourde: Alors, M. le Président c'est ce que nous voulons. Nous voulons être traités avec égalité. Et si l'article devait rester ce qu'il est, c'est-à-dire que le transport routier ne soit pas inséré dans la liste des services publics, nous demandons, suivant la demande que M. Marchand a faite, que les compagnies de téléphone soient soustraites, que les chemins de fer soient soustraits, que les tramways soient soustraits, que le service par autobus soit soustrait et que le transport par bateau le soit parce que c'est exactement la même situation que la nôtre. Nous considérons que du fait de ne pas placer le transport routier dans cette liste-là, telle qu'elle est faite actuellement, il y a une discrimination dans des services publics de même égalité, de même importance.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si on prenait le cinquièmement, je poserai la question à M. Marchand, si M. Plourde le permet. Est-ce que vous avez fini l'essentiel de votre exposé?

M. Plourde: Eh bien! l'essentiel, on n'a jamais fini.

M. Lesage: J'aimerais savoir quelle réponse les gens du camionnage et les unions auraient à donner à une suggestion qui couvrirait non seulement le camionnage, mais les autres.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Sous forme de question, ce serait ceci...

M. Lesage: Écoutez! Je veux sauver du temps, M. Plourde.

M. Plourde: Oui, oui, c'est raisonnable. Une voix: C'est juste aussi.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si, dans le cinquièmement tel qu'il sera défini...

M. Lesage: Même si on inclut le camionnage.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): En supposant que ce qui est mentionné là doit rester, malgré qu'il y ait bien des choses qui doivent sauter, y compris le camionnage, ce serait uniquement par définition, qui pourrait être celle du lieutenant-gouverneur en conseil, uniquement soustrait au droit de grève dans les cas, disons, de fléaux, des cas d'urqence véritable, d'urgence collective, etc.

M. Lesage: Et qu'un arrêté ministériel empêcherait la grève et uniquement dans ces cas-là. Prenez par exemple un cas d'inondation dans une région. Évidemment, on a besoin, à ce moment-là, de tous les services publics, on a besoin des camions, on a besoin de tout, on a besoin du téléphone surtout, on a besoin du télégraphe. Est-ce qu'on ne pourrait pas exclure le cinquièmement, en faire un article spécial et

dire que le lieutenant-gouverneur en conseil, en cas d'urgence extrême, a le droit de réquisitionner et d'empêcher la grève et d'obliger...

M. Marchand: On est d'accord là-dessus, M. le premier ministre. Évidemment, au fédéral, c'est le Parlement qui a ce pouvoir. Il faut dire que, dans le cas des chemins de fer, on convoque le Parlement.

M. Lesage: Je sais.

M. Marchand: Je comprends que c'est une procédure très lourde et surtout, comme M. Desaulniers me l'indiquait il y a quelques minutes, évidemment, disons que c'est un principe qui est dangereux. Voici le raisonnement que M. Desaulniers me faisait il y a un instant. Si vous regardez quelle est la base, l'unité de négociation qu'il y a dans notre loi, c'est l'unité d'entreprise. Ce n'est pas l'unité d'industrie, alors, c'est chacune des entreprises qui négécie et qui obtient son droit de grève. On me dit qu'il y a 4000 camionneurs dans la province de Québec. Pour créer un état d'urgence, il faudrait qu'il y ait une coalition et, coïncidence, expiration de la convention collective et coalition de tous les syndicats pour bloquer tout le transport. Or, la situation fédérale n'est pas la même parce que l'unité de négociation est canadienne. Quand on négocie pour les chemins de fer, on négocie pour le Canada et là, c'est plus dangereux. Même si c'est plus dangereux, le gouvernement fédéral n'a pas jugé opportun de leur enlever le droit de grève. Entre nous, on a déjà eu la situation dans un cas particulier, je l'ai vécu. S'il fallait qu'à un moment donné vous ayez une grève du transport des gens qui tombent sous la loi fédérale, eux ont le droit, et si ce sont les gars qui la font, par exemple, dans le comté de Charlevoix, ça va être une grève illégale, ils n'auront pas le droit de faire la grève.

Je me souviens très bien de la situation où, ici à Québec, la compagnie Quebec Power - celle qui opérait le secteur d'autobus, en vertu de sa charte fédérale, avait évidemment le droit de grève - était exclue de la loi provinciale. Ceux qui étaient à Montréal, la plus grosse unité de chauffeurs d'autobus, étaient sous juridiction provinciale et ils n'avaient pas le droit de grève. Alors...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Alors, si ça prenait une forme de quelque chose comme ça...

M. Marchand: On serait d'accord.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): ... une réunion du gouvernement dans les sept jours...

M. Bertrand (Missisquoi): Il croit réunir dans un tel délai...

M. Lesage: Ils n'ont pas la convocation dans les sept jours, si le Parlement voulait se réunir... c'est une situation, il me semble, qui ne pourrait pas être justifiée.

M. Provost: On l'a fait avant la guerre quand on a renoncé à notre droit de grève pour les questions de fléaux et de calamités.

M. Lesage: Il est évident que le patron est obligé de convoquer, s'il faut que la Législature se réunisse dans les sept jours, il va y penser deux fois.

M. Marchand: Ça, je suis d'accord...

M. Plourde: Je voudrais quand même, M. le Président, que l'on sache que si j'ai suggéré les compagnies de téléphone, de tramway et d'autobus, de transport par bateau, et que le transport routier n'a pas être nommé, c'est parce que j'avais l'impression que jamais le comité ne rayerait cet élément. Et nous insistons fortement...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): À l'ordre, à l'ordre.

M. Gobeil (Antoine): Antoine Gobeil, procureur de D'Anjou Transport. Je voudrais ajouter certaines remarques à celles de mon confrère Me Plourde.

M. Johnson: Quelle compagnie, monsieur?

M. Gobeil: D'Anjou Transport. Me Plourde a souligné l'article de la régie qui veut que les entreprises de transport soient opérées seulement après l'obtention d'un permis et après preuve d'intérêt public. La même loi de la Régie des transports prévoit qu'un opérateur ne peut pas cesser ses opérations avant d'être autorisé à le faire par la réqie. Il ne peut pas non plus les modifier. La régie, toutefois, peut, dant l'intérêt public, canceller son permis il n'importe quel moment. Elle peut aussi, dans l'intérêt public, n'importe quand, le forcer à étendre ses opérations.

Alors, si on veut rester avec le même principe que la Régie des transports, dans l'intérêt public - c'est elle qui connaît l'intérêt public, qui a des enquêteurs à sa disposition - elle pourrait permettre, dans certains cas, l'exercice du droit de grève. Cet exercice pourrait être limité aussi longtemps que la Régie des transports ne l'a pas permis. C'est un organisme du gouvernement oui a les connaissances, qui a les enquêteurs, qui a l'expérience, qui connaît l'industrie du transport d'une façon générale.

M. Marchand: Inutile de vous dire que l'on s'objecte à cela, la Régie des transports n'est pas un organisme - et je ne veux pas utiliser le même type d'arguments que j'ai utilisés hier afin de ne pas affaiblir ma cause - ce n'est pas un type d'organisme qui a pour fonction et qui a été conçu pour régler des problèmes de cette nature.

M. Galipeault (Langis): M. le Président quelqu'un m'a signalé qu'il était une heure moins vingt. Je suis prêt à commencer, si vous le voulez, ou je suis prêt à suspendre le débat.

M. Lesage: Vous en avez pour combien de temps, M. Galipeault?

M. Galipeault: Certainement pour dix minutes ou un quart d'heure, peut-être.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La séance est suspendue jusqu'à trois heures moins quart.

(Reprise de la séance du comité sur les relations industrielles à 2 h 45 P.M.)

M. Galipeault: M. le premier ministre, messieurs les membres du comité, madame, mes premières paroles, M. le Président, seraient pour féliciter le gouvernement d'avoir décidé de faire un Code du travail, une loi qui était bien importante, à mon sens, et qui arrive en son temps.

En deuxième partie, je vais vous féliciter de nouveau. Mais, en premier lieu, je suis d'accord avec tous nos amis de nos unions ouvrières. En deuxième lieu - nous serons le seul groupe à vous féliciter - c'est que le gouvernement mérite également des félicitations pour la loi qui a été incorporée dans le code au sujet d'un vote de grève. Il me semble qu'il est temps qu'une loi sérieuse établisse des règlements avant qu'il n'arrive des grèves au caprice de qui que ce soit.

En troisième lieu, je tiens également à souligner le mérite du gouvernement d'établir des tribunaux avec des juges de district pour les auestions de services publics, et ceci, comme on peut dire, nonobstant la décision qui sera prise par le comité de nous accepter ou non comme service public. Je crois que c'est une décision qui est très importante et qui va rendre service, malgré qu'on puisse dire que les juges ne sont pas suffisamment préparés dans les questions ouvrières. S'ils ne le sont pas suffisamment, ils vont se préparer, ils sont aussi intelligents que les autres et sont capables de faire le travail aussi bien que n'importe qui.

En dernier lieu, je tiens à féliciter le gouvernement pour les deux juges d'appel au sujet des grèves de prérogative. Je considère que c'est un mouvement constructif.

Maintenant, M. le Président, je ne sais pas si je déplace le débat ou le problème, mais on nous a demandé, ce matin, de vous convaincre que le camionnage devait être considéré comme un service public. Est-ce que ce ne serait pas plutôt au gouvernement de nous expliquer pourquoi on ne le serait plus? À l'heure actuelle, nous sommes considérés comme tels dans la Loi des services publics. Dans la loi des différends, les services publics et leurs salariés, le transport est compris parmi les services publics. C'est pourquoi je dis que si le législateur, qui est supposé avoir toujours raison, nous a considérés jusqu'à maintenant comme un service public, c'est déjà un argument considérable qui dit que nous devrions rester un service public, à moins de raisons particulières. À tout événement, ce n'est pas à moi de demander les raisons au gouvernement, et je crois que c'est un des arguments que la Législature ou les autorités provinciales devraient considérer avant de décider, comme cela, que le camionnage ne doit plus faire partie des services publics.

Si on considère l'industrie du camionnage, il s'agit d'une industrie canadienne-française. On a dit à plusieurs reprises qu'il était temps d'être maîtres chez nous. Eh bien, voici une industrie où nous pouvons avoir des patrons, nous pouvons avoir des officiers qui n'ont pas besoin d'avoir la compétence qu'on considère être tellement importante dans certaines compagnies. Là, nous avons l'occasion de pouvoir former des hommes pour devenir chefs de l'industrie. Ce qui plus est, c'est par ce moyen qu'on pourrait arriver, dans l'industrie canadienne-française, à un des moyens qui nous sont propres.

M. Bellemare: Que! est le pourcentage approximatif des biens possédés par les entreprises canadiennes-françaises?

M. Galipeault: Je n'ai pas de chiffres exacts, je ne voudrais pas vous induire en erreur, mais je peux vous dire, d'après les informations que j'ai obtenues de la Régie des transports, qu'il y a 4000 détenteurs de permis. Sur ces 4000 détenteurs de permis, ce sont, dans bien des cas, des ouvriers, des employés ou des personnes qui font le travail elles-mêmes. Alors, dans les circonstances actuelles, ces 4000 détenteurs, on ne peut pas dire, en réalité, qu'ils sont de vrais employeurs. Ce sont des artisans et ce sont seulement quelques organisations plus considérables qui deviennent de plus en plus considérables. Pour votre information, dans le même domaine, il y a 70% des permis de la Régie des transports qui sont donnés à des maisons canadiennes-françaises et 30% sont donnés à des maisons anglaises.

Par contre, si on considère le transport,

il y a 70% du transport qui est fait par des maisons anglaises; 30% est fait par des maisons canadiennes-françaises. Si vous prenez les relations ou le transport entre la province de Québec et l'Ontario, il y a un nombre considérable de détenteurs de permis de l'Ontario ou d'autres provinces qui viennent dans la province de Québec mais nos détenteurs de permis de la province de Québec ne vont pas en Ontario. De sorte qu'on peut dire ceci: Depuis 1958, il y a une tendance en faveur des liaisons canadiennes-françaises qui augmente de plus en plus en importance et qui devient plus utile dans la province de Québec.

Maintenant, pour vous donner un exemple, la majorité, je pourrais dire - c'est encore trop facile - plus des trois quarts des détenteurs de permis sont des Canadiens français qui étaient des employés ou des ouvriers et qui ont créé des emplois. Pour votre information, je représente la compagnie Paul Guilbeaut et on est porté à penser que c'est une qrosse compagnie. Eh bien, la compagnie Paul Guilbeault, ce sont des frères et des soeurs qui étaient des ouvriers et qui ont travaillé depuis trente ans comme ouvriers, qui travaillent encore comme ouvriers, qui fournissent du travail à des ouvriers et ils ont laissé leurs économies dans cette organisation qui a pris de l'expansion graduellement. Si on prend le problème tel qu'il est, il y a une institution canadienne-française dans la province de Québec qui mérite d'être protégée. C'est ce que je soumets respectueusement.

Maintenant, d'après ce que j'ai compris, il y a eu une recommandation du Conseil supérieur du travail pour exclure le transport par camion des services publics. Si je ne me trompe pas, cette recommandation, quand on connaît les relations entre patrons et employés, se considère toujours un peu dans les intérêts particuliers de chacun. Si je ne me trompe pas, il n'y avait personne du camionnage présent au Conseil supérieur du travail ou faisant partie du Conseil du travail, et c'est le seul service que l'on enlève dans le projet de loi, dans le bill 54. C'est le seul service que l'on enlève du projet et je soutiens respectueusement que l'une des raisons qui peut inciter le Conseil supérieur du travail à le faire, c'est qu'il n'y avait pas un seul employeur qui pouvait faire valoir les droits du camionnage.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'y avait pas de représentants des universités, des collèges, des distributeurs, des hôpitaux...

M. Galipeault: Ce n'est pas ça que j'ai dit.

M. Bellemare: Il n'y en avait pas non plus pour les poubelles...

M. Galipeault: Je n'ai pas dis qu'il n'y . en avait pas dans d'autres catégories...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

Ce que je veux dire, M. Galipeault, c'est qu'il n'y avait pas de représentants spécifiques du camionnage. Il y avait des représentants patronaux, des représentants d'ouvriers, mais il n'y avait pas de représentants des corporations municipales et scolaires. Le Conseil supérieur du travail...

M. Galipeault: Je ne dis pas que le Conseil supérieur du travail est mal organisé. Je dis purement et simplement ceci: Qu'il n'y avait pas de représentants du camionnage, que l'Association du camionnage n'a pas eu la chance d'être représentée et de faire valoir devant le Conseil supérieur du travail les arguments qu'elle aurait pu faire valoir, de sorte que ça aurait été beaucoup plus facile. Si les représentations avaient été faites, tout probablement que le transport par camions serait resté dans le bill 54. Maintenant, en vertu de la loi de la Régie des transports, la Régie des transports n'accorde pas de permis sans qu'il y ait une preuve de nécessité, et ceci apparaît à la loi.

Si vous prenez l'article 30 de la Loi de la Régie des transports, il est dit ceci: "Aucun propriétaire ne peut commencer l'exploitation d'un service de transport dans cette province à moins d'avoir obtenu de la Régie une autorisation à cette fin. L'autorisation doit indiguer les conditions que la Régie juge utiles ou nécessaires à la protection des droits des usagers du service et des intérêts du public" On a encore la preuve, par la loi de la Régie des transports, qui est une loi provinciale, que c'est un service public par la Loi du Service public.

Maintenant, si la Réoie des services publics a accordé des permis, ce matin qu'il y avait trois camionneurs qui avaient une route particulière, si on veut. Si la Régie des services publics a accordé trois permis, c'est en raison des dispositions de la loi parce qu'il y avait une nécessité pour les usagers, dans l'intérêt du public.

Or s'il arrive la grève d'un seul camionneur, ça veut dire que les usagers puis le public sont appelés à en souffrir. C'est ce que je voudrais dire. Maintenant si on veut prendre un exemple de ce que ça veut dire, une grève, au point de vue des intérêts du public, dans la grève entre Toronto et Montréal, qu'est-ce qui est arrivé dans notre temps? Les routes ont été fermées et les aliments ne sont pas entrés à Montréal. Il est arrivé une rareté de fruits, il est arrivé une rareté d'aliments importés. Qu'est-ce oui est arrivé? C'est tout le public de la province de Québec qui a été appelé à en souffrir, par une augmentation de prix. Si nos savants amis avaient voulu régler plus

tard, on s'en serait aperçu encore plus, par exemple.

M. Johnson: Les prix ont montés, par exemple, un peu.

M. Galipeault: Oui, oui, c'est ce que je dis. C'est le public qui a payé.

M. Dozois: Ma femme ne m'en a pas parlé.

M. Galipeault: Je pense bien, M. Dozois, que l'allocation que vous donnez à votre femme peut lui permettre de rencontrer les petites augmentations qui en résultent. Il y en a qui en souffrent, de ces augmentations-là. Alors, ce que je veux dire c'est ceci, c'est que le public est assez petit, et si le public est assez petit, ça démontre encore plus que c'est un service public. Si vous prenez maintenant l'article 21 de l'ordonnance de la Régie des transports, l'article 21 oblige les camionneurs de donner le service comme en vertu des articles 46 et 48. Le transport doit être fait, qu'on ait des camions vides, des camions pleins, il faut faire le transport tous les jours, comme les autobus sont obligés de donner un service à l'heure, de la même manière, qu'il y ait des passager ou qu'il n'y en ait pas. Le bill 54, si on le considère tel quel et si je comprends qu'il y a eu des additions, on peut, à l'heure actuelle, considérer qu'au point de vue de l'élimination du service public, on considère la santé et l'intérêt public. Je dis ceci en ajoutant, dans le bill 54, les crèches ou les orphelinats. Qu'est-ce qui peut arriver s'il arrive une grève dans un orphelinat par exemple? Est-ce que la santé du public va en souffrir? Est-ce que la Loi du service public... Si vous prenez les universités, les collèges et les couvents, est-ce que la santé publique va en souffrir? Si vous prenez maintenant un autre item, on accepte, en vertu du bill, le transport par bateau. Or, le transport par bateau, à l'heure actuelle, suivant mes prétentions, je soumets respectueusement que c'est de la juridiction de la province de Québec. C'est tellement vrai que la Loi de la Régie des transports ne s'occupe pas du transport par bateau. Alors la province de Québec est prête à considérer un service par bateau comme un service public.

M. Johnson: Les traversiers, monsieur Galipeault?

M. Galipeault: Pardon.

M. Johnson: Les traversiers?

M. Galipeault: C'est la même chose.

M. Johnson: Ce n'est pas sous la juridiction provinciale?

M. Galipeault: Les autobus, mais les traversiers ne sont pas sujets à la Régie des transport de Québec. La traverse de Lévis n'est pas sujette à la juridiction de la province de Québec. Monsieur Marchand pense sûrement que c'est une rivière interprovinciale. Supposons même que la province de Québec ait juridiction sur certains bateaux, il y aurait même de la discrimination, parce que les bateaux ont le droit de transporter de la marchandise et ça pourrait devenir un service public dans les cas de nécessité et les camions n'auraient pas le droit de transporter de la marchandise. Plus loin, si vous prenez l'article 6, à la définition de services publics, vous acceptez ceci: "Les entreprises de production, transport, distribution ou vente de qaz, d'eau ou d'électricité". On peut permettre, par camions, le transport de qaz, on peut appeler ça du gaz propane, on peut appeler ça n'importe comment, puis on n'aurait pas le droit de transporter des marchandises.

M. Johnson: Pas de qaz naturel.

M. Galipeault: Si mon bon ami, monsieur Johnson, veut me le permettre, je n'ai pas assez l'expérience dans le gaz naturel pour le savoir.

M. Johnson: Seul mon courtier le sait.

M. Galipeault: Dieu et moi le savons. Il y a une discrimination de cette manière-là. On parle en même temps d'ordures ménagères dans les...

M. Johnson: Vous allez m'excuser, monsieur, mais je crois que les traversiers sont de juridiction provinciale, entre Québec et Lévis, Rivière-du-Loup, Sorel, tant pour l'octroi du permis que pour les tarifs.

M. Gobeil: La juridiction est jn peu concurrente, le ministère des Transports fédéral a juridiction - Gobeil, mon nom - a juridiction sur, par exemple, l'opération, le trafic, l'inspection, le maintien des bateaux: mais pour ce qui regarde l'octroi des permis et les taux, les horaires, c'est la Régie des transports qui détermine.

M. Galipeault: M. le Président, même si la province a juridiction, cela ne change pas mon argument parce que j'ai dit que même pour les bateaux pour lesquels la province pourrait avoir juridiction, c'est une discrimination de permettre aux bateaux d'être considérés comme un service public. Ils transportent de la marchandise, ils transport en même temps des passagers, si vous voulez, mais on permet le transport

de la marchandise par bateaux et on ne le permet pas par camions. Ça, c'est ma prétention à ce sujet-là.

Maintenant, j'ai parlé des ordures ménagères, c'est la même chose. Supposons, par exemple, qu'à Trois-Rivières, parce qu'il y a des représentants, hier, qui ont parlé souvent de Trois-Rivières et monsieur le représentant de Trois-Rivières en a été heureux, apparemment, alors supposons qu'à Trois-Rivières, pour prendre un...

M. Gabias: Jusqu'à un certain point.

M. Galipeault: Je vais accepter votre réticence. Maintenant, supposons qu'au point de vue de Trois-Rivières, si vous voulez, puis qu'on parle des ordures ménagères, ça ne devient pas un problème plus qrave que les ordures ménagères ne soient pas enlevées dans la ville de Trois-Rivières, pour prendre un exemple, que si, demain matin, il arrive une grève de camions. Je ne parle pas d'une grève générale, parce que ça, ce n'est pas la même chose. Mais une grève importante, partielle, si vous voulez, d'une certaine région, peut paralyser tout un territoire. Les services de chemins de fer provinciaux, parce que la loi provinciale s'applique simplement aux chemins de fer provinciaux qui représentent quelques petites compagnies, si l'on peut dire, les services provinciaux, si une grève de camions importante survenait, les chemins de fer ne seraient pas capables de les remplacer, mais il pourrait y avoir une grève des services provinciaux de chemins de fer qui ne paraîtrait même pas parce que les camions peuvent donner le même service.

Maintenant, supposons un autre problème: les relations patronales-ouvrières sont une question, comme on peut dire ou en anglais, de "give and take". La province de Québec a imposé aux camionneurs, en 1944, de considérer le service de camionnage comme un service public. À ce moment-là, je n'ai pas eu à me prononcer, tous les patrons n'ont pas eu à se prononcer. La loi l'a imposé, et tout le monde s'est habitué à ce climat-là, et aujourd'hui, tout le monde est organisé pour opérer de cette manière-là. Et aujourd'hui, on dit: vous n'en êtes plus, un service de camionnage. Or, si on procède, comme on dirait, indirectement par des négociations dans le domaine des relations ouvrières, les patrons renoncent à l'heure actuelle à une prérogative importante, prérogative que, probablement, au début, ils n'ont peut-être pas aimée, mais ils se sont habitués à ça, et toute leur législation et toutes leurs relations, toutes leurs conventions collectives de travail sont établies sur cette base-là. Si les unions disaient: On veut avoir cet avantage-là, c'est correct, mais quelles sont les raisons que les unions ont à donner pour avoir ce service- là? Est-ce qu'elles ont mérité d'avoir un avantage supplémentaire tout en avant les services publics? Qu'est-ce qu'elles ont fait pour avoir ça? Ce sont les mêmes unions qui sont ici qui n'ont pas respecté la loi en faisant des grèves. Alors, le gouvernement dirait: Mes bons petits enfants, vous avez été bons, on va enlever aux patrons le service de camionnage et puis on va vous le laisser à vous autres. C'est ça que je considère. Maintenant, et ceci sera mon dernier argument, si on veut enlever aux patrons le service public, il faut toujours leur donner un droit égal, ce qu'on a appelé "parité" à date, à plusieurs reprises. Cet argument-là, je dois vous le déclarer bien franchement, il ne vient pas de moi, et je suis bien heureux de le dire que c'est d'autres qui me l'ont suggéré, mais j'ai trouvé qu'il était très important. Si vous donnez le droit de grève, les patrons dans le camionnage n'ont pas le droit de "lock out", en vertu de l'article 32 de la . Loi des Relations ouvrières, de la Loi de la Régie des transports. Un propriétaire de service de transport, visé par le sous-paragraphe du paragraphe 3 de l'article 2, doit obtenir l'autorisation au préalable de la Régie pour cesser ou interrompre ses opérations ou pour étendre ou modifier son entreprise. Alors, vous ne mettez pas les patrons, dans le service de camionnage, sur un pied d'égalité. C'est une injustice qui va être créée si ça arrive, cette chose-là.

Alors, messieurs, pour toutes ces raisons, vous allez m'excuser, mais je soumets respectueusement que le service de camionnage devrait être maintenu comme un service public.

M. Alma: Dans le cas où il y aurait une grève des transports publics dans une région et que ces camions précisément transporteraient des aliments...

M. Galipeault: Qu'est-ce que vous dites?

M. Dozois: Transporteraient des aliments.

M. Galipeault: Oui transporteraient? Les camions?

M. Dozois: Oui. Est-ce que ça pourrait empêcher une maison de gros d'aller faire les livraisons d'aliments dans ses propres camions?

M. Galipeault: Au point de vue légal, non. mais ce que je peux vous dire...

M. Alma: Ça veut dire que ça ne couperait pas complètement les approvisionnements d'une région parce qu'il y aurait une grève de camionnage dans une

région.

M. Galipeault: Je vais vous dire ceci: quand on parle ici au comité, puis quand on est dans notre bureau avec une grève, on voit la différence. J'en ai eu une grève, je peux vous montrer des bombes qui ont été photographiées par la police, si vous voulez en entendre parler, le F.L.Q. a commencé à certains endroits à apprendre comment faire des bombes, ils ont fait ça quelque part.

M. Johnson: C'est quelle union qui organisait chez vous?

M. Galipeault: C'est le Syndicat catholique, Monsieur.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

Je crois qu'il n'y a pas tellement avantaqe à remémorer...

M. Marchand: Toutefois on en est venu à bout...

M. Galipeault: Ah! j'en suis venu a bout. Si vous voulez savoir comment j'en suis venu à bout, c'est vous qui avez insulté le ministre du Travail à plusieurs reorises et je l'ai défendu publiquement dans les journaux, et je dois le louanger, si vous voulez le savoir, dans les circonstances actuelles.

Une voix: Il est capable de se défendre tout seul.

M. Galipeault: Je ne dis pas qu'il n'est pas capable de se défendre tout seul, mais il est bon de souligner des faits. Je pourrais vous dire autre chose...

M. Johnson: Il est meilleur pour attaquer que pour se défendre.

M. Galipeault: Je peux vous dire autre chose par exemple qui est encore mieux, monsieur le président, je crois que c'est bon de le souligner ça ici.

M. Bertrand (Missisquoi): Mon, non, c'est en dehors du problème, M. Galipeault.

M. Galipeault: M. le Président, me permettez-vous de dire un mot seulement? C'est dans l'intérêt de la province que je vais le dire, ça va être tout court. C'est la première fois qu'un syndicat se reconnaît tellement dans la vallée de l'humiliation, comme l'a dit déjà M. McKenzie King. Les syndiqués sont venus porter, comme des enfants, à la Commission des relations ouvrières, leur certificat de reconnaissance syndicale. Ils ont dit: "On abandonne tous les droits sur ça et puis on n'en demandera pas un autre".

M. Bertrand (Missisquoi): Ça va engager un débat, M. Galipeault, sur un problème qui ne relève pas du comité.

M. Marchand: Je peux vous conter l'histoire de M. Galipeault, mais je ne pense pas que ce soit intéressant, je pense que M. Galipeault sera gêné de rester ici si je raconte toute l'histoire, alors on va laisser faire.

M. Fournier: M. le Président, me permettriez-vous d'ajouter quelques mots a ce que M. Galipeault vient de vous dire, pour vous donner des informations précises'' J'ai ici le rappprt annuel de statistiques pour l'année de calendrier 1962 sur de nombreux membres, des détenteurs de permis de la Régie, des véhicules employés pour tous les gens de service ou de transport sous son contrôle. L'information suivante est en rapport avec l'argument de M. Galipeault, que l'Association du camionnage, dans la province de Québec, c'est une entreprise strictement canadienne-française ou presque exclusivement canadienne-française et que c'est de la petite entreprise. La statistique aussi vous établira l'argument que l'on a donné dans le mémoire à l'effet que cette petite entreprise est très vulnérable en temps de grève, est aussi vulnérable au point de vue financier.

Sur 410, il y a 400 détenteurs de permis qui n'ont pas plus que six à quinze camions. Je tiens cette information du rapport dont je viens de vous parler. Il y a 2845 détenteurs de permis qui n'ont pas plus que un à cinq camions. C'est vous dire que l'industrie du camionnage dans la province de Québec est strictement une petite industrie.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Fournier, me permettez-vous une question? Justement, c'était un argument qui me paraissait a double tranchant, peu importe que ça ait un rapport ou non avec la question du droit de grève. On a le cas sur la Côte-Nord, par exemple, et dans beaucoup d'autres régions de la province, mais la Côte-Nord, je la connais mieux. d'un investissement non rentable au point de vue économique. Cela devient une plaie sociale, ce petit camionnage oui s'est développé outrancièrement, probablement parce qu'il y avait des facilités peut-être trop grandes. le ne sais pas. Mais cela devient à un point qu'on est obligé quasiment de porter ça comme la sécurité sociale, c'est-à-dire que vous en avez, dans vos 2845 dans beaucoup de régions, peut-être deux fois ou trois fois plus que l'économie de la région en demanderait.

M. Fournier: Les détenteurs, les personnes les petites entreprises dpnt je viens de parler, je croyais avoir dit qu'i!

s'agit de détenteurs de permis de ta réqie avec licence "L" qui, avant d'obtenir ce permis-là, ont été obligés de prouver à la régie qu'il y avait nécessité pour leur service. Ce ne sont pas des artisans du camionnage. Je ne sais, pas si je vois dans la pensée du ministre...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous voulez dire détenteur de permis de service.

M. Fournier: De permis de service. Nous sommes ici, M. le Président, pour les détenteurs de permis dûment enregistrés à la régie et qui ont fait preuve de nécessité.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): D'accord.

M. Fournier: Je crois que l'argument du ministre et de l'affaire de la Manicouagan...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Entre autres.

M. Fournier: C'est pourquoi nous avons pensé à l'affaire de Manicouagan, M. le ministre. Nous n'avons pas été égoîstes dans notre suggestion. Et lorsque viendra la rédaction de l'article, nous vous suggérerons une rédaction telle qu'elle permettra d'empêcher la grève lorsque les services donnés seront contre rémunération. Les artisans, par exemple, qui vont prendre un contrat pour transporter du gravier, dans un sous-contrat de voirie, afin d'empêcher la grève, les artisans, par exemple, qui étaient à Manicouagan et qui sont quelques centaines, pourraient, au moyen d'une grève, causer des dommaqes considérables à ce grand développement industriel. Je voudrais rappeler ici... Qu'est-ce qui vous fait rire, M. le ministre...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous donnez l'impression que, puisque vous me répondez, vous vouliez prendre l'intérêt de l'Hydro.

M. Fournier: Pas nécessairement, je le prends à titre d'exemple parce que, évidemment, comme tous les autres qui ont lu les journaux, j'ai vu que vous aviez eu peut-être un petit peu de misère à régler cet aspect-là du problème.

M. Johnson: Oui, mais il se débrouille bien.

M. Fournier: J'en viens à un autre argument. Il y a un an ou deux, nous avons été obligés de défendre l'Association du camionnage devant la Régie des transport parce que Osborne Transport, une immense compagnie de transport, Midland Superior, une immense compagnie de transport, voulaient devenir propriété du CNR. En fin de compte, le CNTL, Canadian National Transportation, achetait ces deux compagnies-là. Nous avons comparu devant la Régie et nous avons défendu, nous avons plaidé, évidemment, que le transfert des permis ne devait pas être consenti, du moins quant à ce qui concernait la province de Québec. La Régie des services publics a émis une ordonnance, disant que les chemins de fer dans la province de Québec ne pourraient pas acquérir de services routiers, le tout était afin de protéger le petit camionneur et d'empêcher le monopole. S'il y a des grèves possibles dans des petites entreprises, on doit considérer l'aspect financier et ce sont des petits entrepreneurs, ce sont, comme disait justement M. Galipeault, des ouvriers devenus petits patrons qui travaillent et gagnent pour eux-mêmes, avec deux ou trois aides, souvent des membres de leur famille. Mais s'il est possible de faire la grève...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): S'il y avait une grève dans la famille, là, c'est moins grave.

M. Fournier: Ça devient du droit civil. Mais s'il est possible de faire la grève dans ces petites entreprises, évidemment, elles n'ont pas, financièrement, les reins assez forts pour résister. Il en résulte la faillite ou il en résulte, à la prochaine occasion, la vente à une organisation plus puissante, et dans un an, deux ans, trois ans ou dans un délai cessez court, vous verrez dans la province de Québec, et c'est ce qu'attendent les unions, c'est ce qu'elles désireraient, deux, trois grandes organisations de transport et alors là, vous aurez le monopole et vous aurez la grève généralisée qui, actuellement peut-être, est difficile à cause du nombre des transporteurs, mais à ce moment-là, vous aurez une grève généralisée. C'est ce vers quoi on se dirige si le camionnage n'entre pas dans le sous-paragraphe 5 au paragraphe n).

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Voulez-vous vous identifier''

M. Gobeil: Antoine Gobeil. Ce matin, lorsqu'on a suggéré que le droit de grève soit limité à certains contrôles du gouvernement en conseil, j'ai mentionné les pouvoirs qu'avait la Régie des transports et j'ai suggéré que la Régie des transports était compétente pour décider de toutes les questions. Je crois qu'il est nécessaire d'insister sur certains arguments qui ont été soulevés ce matin et cet après-midi par Me Galipeault.

Si le bill 54 n'est pas changé, les salariés obtiendront le droit de grève. On a parlé de parité, d'égalité; la parité, quand il y a droit de grève, doit accorder le "lock-

out" et c'est justement ce que la loi des transports défend par son article 32, qui dit: "un propriétaire doit obtenir l'autorisation au préalable de la Régie pour cesser ou interrompre ses opérations, pour les étendre ou pour les modifier". Alors, si on accorde le droit de grève, et si on laisse la loi des transports telle qu'elle est, la parité est détruite.

M. Marchand: M. le Président, là-dessus, nous sommes pour la justice pour tout le monde. S'il y a un doute, quant aux droits des employeurs dans le transport, de faire un "lock-out", nous croyons qu'ils devraient être sur un pied d'égalité avec nous. Si nous avons le droit de faire la grève, je ne vois pas pourquoi ils n'auraient pas le droit d'utiliser l'arme économique semblable. Alors, nous sommes absolument d'accord, il n'y a pas d'objection.

M. Gobeil: Il n'existait aucun doute avec l'article 32 tel que rédigé.

M. Fournier: M. le Président, est-ce que je pourrais m'acquitter d'une mission qu'on vient de me confier, avant que je ne l'oublie? Me Wilbrod Bhérer, qui représente l'Association des propriétaires d'autobus, ne pouvait pas rester et il m'a demandé de vous transmettre le message suivant, au nom des propriétaires d'autobus. C'est qu'il s'oppose à cet argument qui a été émis ce matin, que les autobus pourraient ne pas être considérés comme un service essentiel. Ils se considèrent, au même titre que les autres services, comme un service essentiel. Ils demandent au comité, puisqu'ils ne sont pas représentés, qu'ils soient toujours considérés comme un service public.

M. Fortin: M. Fournier, est-ce que les camionneurs qui n'ont pas de permis de la Régie font partie de votre association?

M. Fournier: Non, seuls les camionneurs qui font partie de la Régie font partie de l'Association.

M. Johnson: M. le Président, m'accorderiez-vous juste un moment...

M. Fortin: Je vous demande pardon, est-ce qu'ils ont une association, ces camionneurs-là?

M. Fournier: On me dit qu'ils ont des assocations régionales.

Une voix: Ils essaient de s'en former à l'heure actuelle avec le ministre.

M. Johnson: Ils sont plusieurs fédérations libérales comme ça.

M. Fournier: Le résultat des dernières élections, M. Johnson, semble nous faire croire qu'ils sont tous dans le Parti libéral.

M. Bertrand (Missisquoi): ...de patronage.

M. Johnson: M. le Président, on n'avs:: pas de fédération, nous, on était...

M. Bertrand (Missisquoi): La liberté illimitée.

M. Johnson: ...je ne voudrais cas que ça rentre dans les transcriptions alors je vais me retenir. Disons que notre patronage n'était pas systématisé.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Le patronage, ça, c'est disparu. Je demande...

M. Johnson: M. le Président, vous me permettrez, très brièvement, d'apporter ce que je voudrais taire, mais que j'ai l'intention de dire. En somme, je ne parle qu'en mon nom personnel. Tout le monde l'a compris, le gouvernement qui, pourtant, a ses experts, ses conseils et puis des nouveaux experts et tout l'argent voulu, votre argent et le mien, nous arrive quand même avec ce qu'il considère être un instrument de travail et ne se lie pas à aucune des clauses. Alors. évidemment, nous jouons le jeu te! que! et nous parlons ici non pas comme chef de parti, mais tout simplement comme député et essayons d'apporter une contribution que nous voulons constructive.

Je voudrais d'abord, M. le Président, dire que je m'entends avec M. Galipeault. mais pas loin, loin, évidemment, il est vrai que l'économie de la Loi du transport, telle qu'elle est actuellement, serait complètement bouleversée, et M. Galipeault a bien raison, en bon avocat, d'essayer de concilier les deux textes. Mais le législateur, qui peut modifier le texte de la Loi de la Commission des relations ouvrières, pourrait aussi modifier l'autre en temps et lieu pour les faire concorder, s'il en vient à cette décision.

J'ai été bien impressionné par le plaidoyer de l'avocat de Roberval, de Saint-Félicien qui, à mon sens, est allé au fond du problème quand il a dit, sur le terrain des principes: "Si on admet la thèse de M. Marchand, eh bien, enlevons tout ce qu'ii . a là, dans l'article 5, ou bien ajoutons-y le camionnage." Moi, je suis de l'avis de " '. Plourde là-dessus. C'est la première fois que j'ai l'occasion de l'être d'ailleurs et ça me fait bien plaisir.

M. Plourde: Ce n'est pas arrivé souvent.

M. Johnson: Ca peut revenir. On va vous ballotter.

M. le Président, sur le terrain des principes, l'exposé de M. Marchand est bien intéressant. Les précédents dans les autres provinces sont aussi des facteurs dont il faut tenir compte et qui nous impressionnent jusqu'à un certain point. Cependant, je crois qu'il ne faudrait pas se hâter dans le domaine du Code du travail, et agir avec une précipitation que nous pourrions regretter. On m'informait, par exemple, qu'en Ontario, quand on a eu à faire un Code du travail, le Comité des relations industrielles a siégé pendant un an complet. Il a pris la peine de faire venir les membres de la Commission des relations ouvrières, des experts, des économistes et tous les groupes intéressés pour réellement pouvoir digérer tout ce qui lui était soumis.

Alors, M. le Président, nous, il n'y a pas tellement longtemps que nous siégeons et je n'aimerais pas être un "bulldozer", dans ce domaine comme dans bien d'autres. M. Marchand nous pose le problème assez bien quand il dit: "Il faut se décider, à un moment donné, entre deux régimes". Celui qui voudrait que toutes les décisions soient rendues par des tribunaux de travail, M. Marchand connaît certains pays où ça se fait et où il semble y avoir non seulement la paix industrielle, mais aussi certains proqrès. Mais, quant à moi, j'aimerais qu'on qarde le plus longtemps possible le système qui prévaut en Amérique du Nord et qu'on ne détonne pas trop vite dans le portrait général de l'Amérique du Nord. C'est d'autant plus important qu'on a des unions, paraît-il, qui ont des relations avec d'autres parties de l'Amérique du Nord et si on changeait toute l'économie des relations patronales-ouvrières, eh bien, ça créerait un paguet de problèmes.

M. le Président ce qui me frappe, dans l'affaire du transport routier - c'est un domaine que je connais particulièrement pour y avoir exercé comme avocat pendant plusieurs années - c'est que, comme l'a dit tantôt M. Fournier, c'est un monopole à certains points de vue, mais un monopole constitué par un groupe, c'est-à-dire un groupe de très nombreux entrepreneurs. C'est une industrie oui est fragile, extrêmement fragile de ce temps-ci. J'aime bien ça, les principes, mais il faut faire attention quand on veut appliquer des principes à la réalité. Les syndicats sont les oremiers à s'en rendre compte, d'ailleurs. Ils règlent des problèmes réels quand ils règlent certains conflits ouvriers, comme nous, nous aimerions adopter des lois qui collent à la réalité. Or, ce qui me fraope, dans l'industrie du camionnage, c'est qu'à l'heure actuelle elle est dans un état fragile, extrêmement fragile. Elle a reçu de bons coups sur la tête par des augmentations de taxe, mais je ne veux pas m'étendre sur le sujet un peu litigieux et soulever un débat. Mais elle a été durement frappée par trois augmentations dont deux sur l'huile diezel et une autre sur les enregistrements.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ça n'a aucun rapport avec le bill, ça.

M. Johnson: Alors, elle est fragile. M. le ministre, vous allez comprendre devant le tableau. Ca compte quand il faut apprécier la valeur, la disposition dans laquelle se trouve actuellement le camionnage.

Mais ce qui est plus grave encore, c'est que le camionnage est un des modes de transport, et on sait qu'il y a une lutte à mort entre le camionnage, d'une part, et les chemins de fer de l'autre. Les camionneurs ont essayé d'empêcher des compagnies de chemin de fer d'entrer dans le camionnage, ils ont perdu la cause de Smith Transport, ils ont perdu la cause de Osborne et de Middland, avec le résultat qu'aujourd'hui, les deux grandes compagnies de chemin de fer qui sont subventionnées par l'État fédéral -l'un, le CN, d'une façon tellement évidente et l'autre, d'une façon indirecte, peut-être moins connue - sont en concurrence ouverte avec le camionnage et seraient maintenant en position. Je ne veux pas leur prêter des intentions, je veux tout simplement poser l'hypothèse: seraient en position. Tous ceux qui s'y connaissent en relations ouvrières savent ce que je veux dire par une grève bien faite. Seulement dans le camionnage ou par une convention bien faite dans leur cas, ils pourraient tuer l'industrie du camionnage en peu de temps. C'est à ce point-là, dans la réalité des faits.

Alors, je pense qu'il faudrait songer a ça. On parle d'émancipation économique, évidemment, il ne faudrait pas la faire au détriment des ouvriers. Il ne faudrait pas la faire en perpétuant des conditions de travail qui ne sont pas raisonnables en 1963, si tel est le cas dans l'industrie du camionnage. Mais l'émancipation économique, voici un domaine où les Canadiens français ont prouvé, à l'heure qu'il est, qu'ils Douvaient prendre leur place. 90% du camionnage dans la province de Québec est entre les mains des Canadiens français. Ils sont dans un état fragile, je parle du transport à l'intérieur de la province seulement, je ne parle pas du transport interprovincial inclus. C'est à peu près cette proportion. Alors, actuellement, si on plaçait le camionnage dans une position d'infériorité vis-à-vis des grands chemins de fer, je crois que ce serait mauvais pour le moment. Peut-ètre qu'on sauverait le principe pour lequel on semble se battre, mais je pense, en réalité, qu'on rendrait un mauvais service à toute notre économie et je me demande pour quelle raison spécifique le gouvernement - quand M. Godbout avait

inclus le camionnage dans (l'énumération des services publics - change d'idée et n'enlève que ce moyen de transport.

Encore une fois, je suis de l'avis de M. Plourde. Si on doit restreindre le droit de grève pour les opérations des bateaux et des chemins de fer, qu'on le fasse aussi pour le camionnage ou bien qu'on le permette pour tout le monde. Je crois, M. le Président, que c'est un principe sain. Mais je voudrais tâcher de faire comprendre aux députés du gouvernement et à ceux qui, en somme, auront la responsabilité de la rédaction définitive de ce projet, qu'il y a une question de fait, une situation économique, il y a une position de concurrence désavantageuse à cause du manque de capitaux. Quand on compare ces deux concurrents, je vous assure qu'on conclut vite que le camionnage est faible. Je voudrais donc que le gouvernement y songe deux fois avant d'asséner ce qui serait à toutes fins utiles un coup sur la tête du camionneur, un autre coup après en avoir déjà donné quelques-uns qui n'étaient pas tellement agréables pour l'industrie du camionnage.

Quant à légiférer contre une union en particulier, je pense qu'aucun de nous, ici, ne voudrait faire ça. Même si on a peur, si on tremble devant certaines méthodes qui seraient appliquées par des unions en contrôle américain, je pense qu'on ne peut pas légiférer contre une union en particulier. On ne devrait pas la faire, ce serait trop dangereux, ça nous permettrait de le faire en d'autres occasions, ce serait un précédent dangereux même entre les mains du ministre du Travail actuel parce qu'il est comme tous les autres ministres, il est un humain.

Mais je pense que, dans l'opinion publique de la province de Québec - ce n'est pas une loi que je propose, c'est un voeu que j'exprime - on a hâte que les unions et les patrons trouvent des façons de changer qui ne vont pas en conflit direct avec notre notion d'émancipation économique et le contrôle des agents dynamiques de l'économie entre des mains étrangères. Je connais les efforts qui sont faits pour "canadianiser" certaines unions, je connais le travail de certains chefs ouvriers, entre autres M. Prévost et M. Jodoin, mais si les employés du camionnage tombaient éventuellement sous le contrôle américain direct sans même passer par la FTQ ou le CTC, ce serait beaucoup moins intéressant encore au point de vue de l'émancipation économique.

Mon ami, le député de Champlain, n'est pas de mon avis, peut-être, lui qui est de la Brotherhood et qui paie $12 par mois aux États-Unis. Je lui disais, avant le dîner: Si vous payez tout ça et tous vos collèques ici, dans la province ou au Canada, ce serait un agent dynamique du mouvement de l'économie. Ce serait un moyen d'avancer notre émancipation économique. Ce n'est pas une suggestion de loi, c'est un voeu et ce sont en même temps, pour ceux oui doivent l'étudier, des informations qui me viennent, comme chef d'un parti, de gens oui ont hâte qu'on accentue ce mouvement de rapatriement non pas de la constitution, mais de rapatriement du contrôle de certaines unions, entre autres celles qui s'occupent du transport.

M. le Président, c'est vous qui allez décider, je suis certain que le premier ministre va vous écouter, mais je pense que, lorsque vous aurez à prendre la décision, vous devriez de nouveau consulter tous les membres du comité des relations industrielles qui aimerait débattre ce point-là au stage final.

M. Marchand: M. le Président si vous me le permettez, juste un mot. Le type d'argument utilisé par M. Johnson est encore un type d'argument qui nous conduit pas mal plus loin que là où, sans doute, nous serions prêts à aller, tout le monde. Si la situation économique des entreprises peut être une justification à un moment donné de les placer sous la Loi des services publics, je peux vous en nommer un certain nombre d'autres qui sont dans une situation économique extrêmement précaire. L'industrie de la chaussure, l'industrie du meuble, par exemple, vous avez toute la petite industrie des scieries dans la province de Québec, et du bois, vous avez toutes ces industries qui sont dans une situation économique, disons, difficile. Qu'est-ce qui arrive? C'est que les syndicats, évidemment, s'entendent avec les employeurs. On tient compte de la situation. Que voulez-vous? Chacun prend sa responsabilité. Ce n'est pas, je pense bien, que la solution à ce problème n'est pas une solution, ne peut être une solution strictement légale. Alors, c'est pour ça, évidemment...

M. Johnson: M. Marchand, je ne l'érige pas en principe.

M. Marchand: Non? Bon, c'est correct.

M. Johnson: C'est pour une situation de fait entre deux concurrents dont l'un disparaît ou on a tout lieu de croire qu'il va disparaître à cause du climat des luttes qui se font et de l'infériorité où se trouve...

M. Marchand: Mais, entre nous, la menace qui peut exister à l'encontre de ces petites compagnies de transport, ce n'est pas le syndicalisme et ce n'est pas la Loi des services publics, ce sont les grands monopoles, les grandes compagnies qui, à cause de leur puissance financière ou l'efficacité de leur service, peuvent les mettre en péril. Qu'on soit sous la Loi des services publics ou non, ce qu'on craint -

disons que c'est une hypothèse qui n'est pas impossible, impensable - c'est que, à un moment donné, directement ou indirectement, on se serve du syndicalisme pour paralyser les petites entreprises et, éventuellement, les tuer. Mais ça, ça suppose une organisation extrêmement bien faite et je me demande si même les "teamsters", à cause de notre régime de négociation qui établit par établissements... vous savez que provoquer la solidarité de tout un secteur comme celui du transport de Gaspé à Hull... Moi, ça fait 21 ans que je fais du syndicalisme, si vous me demandez de le réaliser, je vous avoue que je ne vois pas comment je pourrais le faire.

Alors, cette chose est une hypothèse, évidemment, qui est envisageable, mais il ne faudrait tout de même pas considérer que les syndicats sont là, obsédés par l'idée, un jour, de faire une grève générale. Que voulez-vous? Chez nous, on a 600 ou 700 conventions collectives de travail. Il y en a une ou deux par année qui donne lieu à des grèves et même, dans l'ensemble du Canada, les jours perdus en grève, c'est un dixième de un pour cent de l'ensemble des jours travaillés, alors que le chômage représente à peu près entre 9% et 10%. Vous savez, c'est pas mal plus sérieux. On exagère un peu cet aspect. Puis, nous autres, on n'y a pas plus intérêt qu'eux. Seulement, si la petite compagnie, les petites compagnies de transport se comportent comme certaines compagnies se sont comportées dans le passé et font tout pour tuer les syndicats libres qui seraient prêts à coopérer, bien, mon Dieu, qu'un jour ils aient de la misère, ils en auront. Si jamais le local dont on parlait, le local 106, leur tombe dans les jambes, je vous assure que ce n'est pas nous qui allons les retirer parce que, que voulez-vous, ils n'y croient pas à cette coopération fondamentale.

Mais, dans l'ensemble, je ne pense pas que le problème qui est réel, celui soulevé par M. Johnson, peut être réglé par cet instrument. Je ne le crois pas.

M. Johnson: La valeur de l'argument s'appliguerait d'ailleurs contre toutes les entreprises mentionnées au sous-paragraphe 5.

M. Marchand: Ah oui. D'ailleurs, nous, on demande que le paragraphe soit exclu...

M. Johnson: Et mon argumentation, évidemment, était plutôt dans la ligne de celle adoptée par M. Plourde où c'étaient des relations entre divers modes de transport qui se font concurrence actuellement. C'est surtout à ce point-là que... Si on enlève le sous-paragraphe 5, c'est un autre problème.

M. Marchand: Bien, nous, on demande les deux. On trouve que ce n'est pas plus valable pour ce qu'il y a au sous-paragraphe 5 qu'au camionnage.

M. Johnson: Mais si le sous-paragraphe 5 devait rester, n'êtes-vous pas d'avis que ça devrait rester pour le camionnage également?

M. Marchand: Bien, vous savez, disons qu'au point de vue intellectuel, ça se justifie très difficilement. Seulement, en fait, ce ne sont pas des industries qui sont sur le même pied, le téléphone et le transport. Vous avez le bateau, le transport par bateau. Vous savez que dans toute grève, il y a un danqer pour l'entreprise qui est en grève, c'est que des substituts entrent sur son marché et le remplacent. C'est le risque normal de la grève. Mais, de toute façon, nous, comme position, nous demandons que tout ça soit enlevé et nous croyons qu'avec des syndicats responsables comme nous en avons a la FTQ et chez nous, il y a moyen d'organiser un régime où il y aura la paix.

D'ailleurs, M. Archamhault est venu nous dire ce matin que non seulement il payait des salaires courants, mais il donnait $0.04 de l'heure de plus. Alors, avec de telles conditions de travail, vous savez, je ne les ai pas vérifiées, mais si elles sont vraiment aussi bonnes que ça, je ne vois pas pourguoi on craindrait des difficultés ouvrières. C'est nous qui aurions des difficultés à sortir ces gars-là en grève s'ils sont aussi bien traités que ça. Si, par hasard, il y en a qui étaient maltraités, bien, il faudrait penser qu'ils ont des droits eux aussi.

M. Johnson: En théorie, vous avez parfaitement raison.

M. Marchand: Mais en pratique aussi.

M. Johnson: Mais quand vous organisez-vous...

M. Marchand: Vous savez, je ne suis pas un professeur d'université, moi, je suis un gars d'action qui négocie des conventions collectives.

M. Johnson: Vous avez un petit peu des deux.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Il rouqit.

M. Marchand: Je ne suis pas certain si c'est une insulte ou un compliment, c'est ça qui m'inquiète.

M. Maheux: Si vous décidiez de nous embarquer dans les services publics, nous. les députés, nous accorderiez-vous le droit de grève?

M. Marchand: Ah oui. Le grand danqer,

c'est qu'il s'agirait de savoir si le gouvernement peut marcher quand même.

M. Johnson: Ça dépendrait de la personne.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): De toute façon, je suis très heureux d'entendre le chef de l'Opposition et, pour faire suivre sa première phrase qui concernait le fait qu'on était arrivé avec juste un instrument de travail, que le gouvernement laissait un peu l'impression que ce n'était pas prêt et que, par conséquent, c'était hors d'ordre de faire suivre cette phrase, quelques phrases après j'étais rassuré quand le chef de l'Opposition a dit, comme nous le disons, que cet instrument de travail, il ne faudrait pas l'adopter avec une précipitation regrettable.

Je voudrais simplement répéter, M. le premier ministre n'est pas là, qu'il s'agissait de le prendre en délibéré aussi _ et que, pour l'instant, on n'adoptait rien. Je me substitue au ministre du Travail qui est président, il peut difficilement reprendre de notre côté tous les arguments, mais je voudrais bien que ça reste clair.

Maintenant, il y a une chose que M. Marchand a soulignée et qui, peut-être, colore un peu ce que vient de dire le chef de l'Opposition, ce qu'on est tous exposés à dire, c'est qu'on parle de grève, de droit de grève, d'exclusion du droit de grève depuis le début de la journée et on finit par avoir une certaine obsession. On finit par voir la grève comme une espèce de monstre, dans la discussion, qui est présent autour de la table, tandis qu'en fait - et je voulais le souligner, mais M. Marchand l'a fait mieux que moi, parce qu'il est plus dans ce milieu quotidiennement - la grève est quand même une chose exceDtionnelle - et il s'agit ici d'un droit qui peut être un droit pour la majorité des travailleurs auquel il faut apporter des restrictions selon certains critères - dont les voies économiques peuvent être l'un de ces critères. Mais il s'agit quand même de ne pas en abuser, parce que, quand on parle de lois économiques, on rejoint directement ce qui fait l'objet de la plupart des conflits. Justement, si on commence à travailler avec des lois économiques ou vouloir faire d'une loi un parapluie artificiel pour une industrie, il faut y penser à plusieurs reprises et délibérer assez longuement, parce que ça pourrait s'appliquer à toute une gamme d'industries. C'est là le principe du parapluie économique.

Le chef de l'Opposition a fait une analyse rapide mais sérieuse: on voyait que ça venait de sa pratique et de son expérience des difficultés auxquelles peut se heurter le transport routier. Par exemple, la multiplicité qu'il y a d'entrepreneurs dans ce monopole, à cause des permis de la régie, etc., si on peut appeler ça un monopole, mais enfin un monopole très multiple avec beaucoup de petits entrepreneurs et parmi lesquels il y a beaucoup de fragilité. Je crois bien que tout le monde peut être d'accord. ils sont également grevés d'une foule de servitudes, peut-être de taxes aussi. Tout le monde peut être d'accord aussi là-dessus. Mais tout ça, c'est un tableau économique qui n'est pas complet, parce qu'il faudrait savoir exactement ce qu'il en est, quel est le prix de la main-d'oeuvre, quelle est la possibilité d'ajustement des tarifs, parce que, là encore, la réqie a son mot à dire quand les prix de revient augmentent.

De toute façon, il reste que la question de principe existe aussi et l'emporte probablement, si on ne veut pas se servir de l'argument de parapluie économique qui est un argument fragile qui ne doit pas aller dans une loi, il me semble, une loi générale. On ne doit pas légiférer pour protéger telle ou telle industrie, exactement comme en peut être d'accord avec le chef de l'Opposition au départ pour dire qu'on ne doit pas légiférer contre tel ou tel syndicat, parce qu'à ce moment-là, on n'aurait plus une loi, on aurait une espèce de série de décrets camouflés en loi. De même, j'essaie de peser mes mots, mais l'argument d'une industrie canadienne-française, en soi - et Dieu sait que j'espère être nationaliste dans un sens positif et faire des efforts auotidiens pour que ça rapporte positivement - ne me paraît pas non plus s'appliquer à une loi comme celle-là, du tout, d'autant plus que, quand on parle du Québec, on ne parle quand même pas uniquement de Canadiens français. De toute façon, qu'ils soient Canadiens français, Anglais, Juifs ou Américains, la loi que nous allons éventuellement adopter est une loi générale qui doit s'appliquer à tout un secteur, quelle que soit l'origine raciale ou religieuse ou sociale de ceux qui y participent.

Dans le domaine des principes, je voudrais simplement rappeler qu'il y a une proposition, qui est également en délibéré, qui est encore de faire sauter l'article 5, tel quel, au complet, mais d'v substituer la possibilité pour le gouvernement, avec convocation du Parlement, dans un délai très bref - on a parlé de seot jours, enfin il s'agissait d'une proposition encore informe, sauf pour l'essentiel - la possibilité pour le Gouvernement, pour ce secteur des transport et communications, dans les cas d'urgence, de faire quelque chose oui soit comme une mobilisation, une réquisition, qui soit en tout cas l'arrêt de tout arrêt de travail à cause de situations qui soient véritablement classifiées comme étant d'urgence, quittes à être ratifiées ou non ratifiées par le Parlement dans les sept, les dix ou les quatorze jours.

M. Johnson: Je vous remercie, j'ai juste

un mot à dire. Cela va illustrer peut-être mieux que tout ce que j'ai dit, le fond de ma pensée. Si on avait cru - et ce n'est pas fait d'une manière désagréable - qu'une grève arrivée au Canada aurait eu pour effet de tuer Radio-Canada, j'en connais plusieurs qui ne l'auraient pas fait, la grève, à Radio-Canada. C'est dans ce sens-là. L'industrie du camionnage, elle est fragile en soi, globalement fragile à cause de sa multiplicité. Et je ne parle pas nécessairement pour protéger les petits parce qu'il va falloir que les petits obéissent comme n'imoorte qui à certaines lois économiques. S'ils ne sont pas capables de survivre, de faire la concurrence à d'autres grosses industries du camionnage, je crains bien qu'ils disparaissent. Ce sera comme dans d'autres industries. Mais celle-là est fragile globalement. Ce ne sont pas que des unités qui sont fragiles, elle l'est à cause des magnats des transports qui voudraient tuer l'industrie privée du transport, industrie dont on a besoin dans certains coins. C'est juste l'inverse de l'autre situation que je vous mentionne pour illustrer ma pensée seulement. Alors, on délibère, moi j'ai dit ce que j'avais à dire à titre personnel.

M. Plourde: Je ne voudrais pas, M. le Président, passer pour celui qui a proposé d'abroger l'article 5; il faut bien se placer dans le contexte.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Il serait peut-être mieux que vous le souligniez.

M. Plourde: Voici, je regardais comme un mal que l'on n'insère pas le transport routier dans les services publics et t'apportais l'hypothèse: pourquoi alors ne pas agrandir le mal et abolir l'article 5, pour que le mal soit tellement qrave due le gouvernement sente le besoin de suturer la plaie?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, c'est tout pour les services publics?

M. Brunelle (Jean): Jean Brunelle, de l'API. M. le Président, je me demande si la solution qui est proposée de laisser au gouvernement le choix de déterminer quand il doit y avoir grève ou non n'est pas compliquée, si elle ne forcera pas le gouvernement a une foule d'interventions qui vont l'engager dans la détermination des points particuliers de la convention collective. Je voudrais souligner également que l'atmosphère dans laquelle les délibérations se passent, M. le Président, est extrêmement importante: nous travaillons sur un code sérieux qui doit déterminer les bases des relations du travail et du capital pour quelques années. Je pense qu'il est difficile d'interpréter d'une façon unique la position de l'entreprise à cause de la variété des organismes qui sont concernés et je pense que nos amis les syndicats utilisent une tactique assez facile qui consiste à prendre un moment la sensibilité, un moment des questions de liberté pour étendre leur aire d'influence. Par exemple, hier, au chapitre des corporations, on demandait, pour les gens qui sont membres de ces organismes, le droit de se syndiquer. C'est peut-être aux membres mêmes qu'il faudrait le demander. Il n'en reste pas moins qu'à plus ou moins brève échéance le syndicalisme se réserve des aires de travail et de prospection qui limitent considérablement le champ d'action de l'entreorise comme telle, à tel point que je me demande si on ne la trouvera pas, à un moment donné, dans la situation d'un bonhomme qui a le collet trop serré et qui, le sang lui sortant par le nez, trouvera que ça travaille très inconfortablement. Je pense que, si on réserve l'aire d'activité du syndicalisme dans un rayon trop étendu, on arrivera à un moment où l'entreprise ne pourra plus fonctionner. Il faudra bien se déterminer que nous avons créé chez nous un socialisme d'état contre lequel il sera extrêmement difficile de faire machine arrière.

M. Marchand: M. le Président, je pense que c'est une attitude d'esprit à l'endroit du syndicalisme qui est inadmissible. À tout bout de champ, il y a des gens qui vont en Europe, oui vont en Suède et disent: Il n'y a plus de grève, il y a de la coooération. En Belgique, c'est la même chose. En Hollande, c'est beau de voir le syndicalisme coopérer avec le patronat. Mais vous savez que, dans tous ces pays-là, le syndicalisme n'est plus contesté du tout. En Suède, vous n'avez même pas la Commission des relations ouvrières, le patronat reconnaît le syndicalisme partout dès qu'il est constitué. Et ici, regardez ce qui se passe depuis le début, il n'y a pas un article où on n'a pas tenté de restreindre le droit d'association des employés et, d'un autre côté, sur le plan théorique, on parle de coopération. Si on ne veut pas développer l'agressivité sur le plan syndical, il ne faut surtout pas s'attaquer à une chose qui se réfère à l'instinct de conservation, c'est-à-dire le droit de s'associer. On est prêt à coopérer avec la patronat, on sait qu'on est solidaire de la vie économique, mais qu'il cesse donc de s'imaginer que le syndicalisme est un instrument de destruction de l'économie et d'embêtement pour le patronat. On est aussi intéressé a la vie économique que les patrons peuvent l'être, seulement qu'ils cessent de nous piquer et de trouver ou d'essayer de faire des lois où on va être continuellement harassés.

Tout à l'heure, on a parlé des ingénieurs, non pas des ingénieurs, msis des

corporations. Je n'avais pas l'intention d'en parler à nouveau, mais je vais simplement donner lecture d'un télégramme pour vous indiquer l'espèce de mandat tacite que je pouvais avoir: "Félicitation pour l'appui à la cause des ingénieurs salariés. Une pétition à cet effet est en route, signée par un groupe d'ingénieurs salariés de la ville de Montréal." Alors, vous allez recevoir une pétition et vous allez voir qu'on n'est pas seuls à penser ça.

M. Johnson: Si vous permettez, M. Provost, juste un moment. À ce propos, M. Marchand, vous voyez, vous venez de me fournir un argument et je pense que vous allez être de mon avis d'entendre les ingénieurs de ces pétitions-là.

M. Marchand: On est bien d'accord.

M. Johnson: J'aimerais entendre les économistes sur certains problèmes. On va décider implicitement de la rédaction de certains articles et on n'aura pas le temps de faire ça. Le Conseil supérieur du travail est censé avoir fait ça. Il nous a soumis un rapport. Le gouvernement est parti de là pour bâtir un projet qui, dit-il, est un instrument de travail, mais il n'inclut pas certaines recommandations unanimes du Conseil du travail et il inclut, dans le projet qu'on a devant nous, des articles qui n'ont pas été soumis au Conseil supérieur du travail. Alors, vous voyez la situation dans laquelle on se trouve pour rendre un jugement d'hommes intelligents. Je trouve qu'on n'est pas tout à fait assez informés et ce sont vos pétitionnaires que j'aimerais bien entendre ou un de leurs porte-parole.

M. Marchand: Je ne les connais pas mieux que vous, M. Johnson, j'ai seulement reçu le télégramme, je suppose qu'ils existent.

M. Johnson: Ah! j'en connais qui m'ont appelé et qui m'ont dit que vous aviez raison.

M. Marchand: Oui, ils ne sont pas bêtes.

M. Johnson: C'est ce que je leur ai dit.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Brunelle.

M. Brunelle: M. le Président, les bases de collaboration de l'API ou d'autres membres patronaux...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Identifiez-vous.

M. Brunelle: Jean Brunelle, de l'API.

Les bases de la collaboration ne devraient pas aller jusqu'à exiger que les patrons refusent de considérer leurs intérêts. Quand on parle de syndiquer, par exemple, les ingénieurs, les avocats qui sont normalement à l'emploi de l'entreprise, ça peut aller loin, cette histoire-là. Est-ce qu'on va aussi syndiquer les négociateurs patronaux?

M. Marchand: Pourquoi pas?

M. Brunelle: Et pourquoi oui? Il y a tout de même des limites. Si l'entreprise comme telle n'a plus le droit de se protéger et si sa reconnaissance est impossible, il faudrait savoir qu'on s'en va vers le socialisme, M. le Président. Il y a des mesures à prendre et la collaboration, je pense, n'exige pas du patronat qu'il renonce complètement à ses droits. Qu'il fasse son unité, c'est d'accord, les traditions patronales sont courtes chez nous et il n'en reste pas moins que nous avons un droit, comme entreprise, à défendre - et je pense que c'est notre rôle de le faire - parce que, si on abandonne toute responsabilité aux efforts collectifs, encore une fois, M. le Président, nous serons socialisés dans très peu de temps.

M. Marchand: Il existe en France - la France, Dieu sait si c'est une société qui aime sa liberté individuelle - ce qu'on appelle la Confédération générale des cadres où vous avez des éléments du patronat qui ne sont pas affiliés aux centrales syndicales, mais qui se regroupent et qui se syndiquent. En quoi est-ce que cela tue l'entreprise privée ça?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Provost a demandé la parole et, après ça, nous allons prendre les articles.

M. Provost: Deux mots seulement, M. le Président. J'ai écouté M. Galipeault et les autres, cet après-midi, attentivement. J'en suis sorti avec l'impression très marquée qu'on tentait de faire régler par législation les problèmes de négociation de l'industrie du camionnage en invoquant que c'est une industrie fragile. Je vous soumets que, si on veut les faire régler, on prépare un paragraphe. Nous sommes à un paragraphe définissant un service public et non pas à prouver l'essentiel de leur service. Tout ce qu'ils disent sur l'organisation économique, ce n'est pas l'endroit où en discuter, il y aura d'autres lois peut-être que la règleront pour eux.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je comprends qu'on a discuté surtout l'article 1, même si la discussion a porté sur 5. Pour ce qui est des corporations municipales et scolaires, y en a-i-il qui ont

quelque chose de particulier à dire?

Des voix: Non.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Les hôpitaux, les sanatoriums, les orphelinats, les universités, les collèges, les couvents?

M. Renault: M. le Président, avec votre permission, j'aurais une suggestion à faire.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Sur quel paragraphe?

M. Renault: Sur le deuxième, M. le Président.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Sur les hôpitaux?

M. Renault: Oui, on pourrait ajouter, M. le président, si on tient compte du cas des hôpitaux, la question de la Croix rouge. Je doute qu'on puisse l'inclure actuellement, mais je crois que si on parle de santé publique et le reste, le service de la Croix rouge, comme organisation charitable, si vous voulez, devrait être inclus dans le paragraphe 2. Mais je ne crois pas que les mots employés actuellement puissent inclure l'organisation de la Croix rouge et je vous soumettrais, si vous voulez considérer les mots, je n'ai pas pensé aux mots si vous voulez, organisation charitable.

Une voix: Oh non!

M. Renault: En tout cas, organisation de bien-être.

Une voix: Pas plus.

M. Renault: En tout cas, tout ce que je demande au comité...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Qu'on pense à la Croix rouge.

M. Renault: ...c'est de considérer la classe, si vous voulez, et l'organisation de la Croix rouge.

M. Johnson: L'Ambulance Saint-Jean aussi?

M. Renault: Surtout à cause du service de transfusion de sanq.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Provost.

M. Provost: C'est le quatrièmement.

M. Bellemare: Dans le deuxièmement, M. Provost, il est quelque chose de bien important dans la province, qui touche les hôpitaux, c'est le service ambulancier, les ambulances.

M. Provost: Quand il est raccordé aux hôpitaux et qu'il appartient aux hôpitaux, d'accord. Mais vous seriez surpris des organisations privées qui ont développé des services d'ambulances là où l'intervention syndicale s'impose. Je ne veux pas porter de jugement, mais je vous dis qu'il est bon d'y regarder et d'y regarder de près.

M. Bellemare: C'est pour ça que je voulais avoir votre réaction parce que dans le rapports qui est fait par les sociologues, ils prétendent que les ambulanciers devraient être ajoutés aux services des hôpitaux.

M. Provost: Absolument pas quand ils sont pour des entreprises orivées.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous êtes sur 4, M. Provost, là.

M. Provost: Sur i, M. le Président, nous demanderions que l'article se lise comme suit: "les universités, les collèges et les couvents, en autant qu'ils demeurent dans les limites de leurs activités dans l'enseiqnement." Je m'explique: Il peut arriver et il arrive que certaines institutions qui dirigent en même temps des collèges ou des couvents ont des activités qui entrent en concurrence avec des organisations d'entreprises privées.

M. Johnson: Elles peuvent avoir des imprimeries?

M. Provost: Elles peuvent avoir des imprimeries ou d'autres entreprises.

M. Johnson: Actuellement, elles ne sont pas syndiquées?

M. Provost: Oui, elles sont syndiquées, pour les laïcs, mais là, elles ne le seront plus après ça.

M. Johnson: Alors actuellement, les imprimeries...

M. Provost: Elles vont tomber sous la Loi des services publics.

M. Johnson: Ah! bon.

M. Provost: Avec le résultat qu'elles s'en tirent beaucoup mieux que l'entreprise privée à laquelle elles font concurrence. Alors, si elles entrent dans le domaine de l'entreprise privée...

M. Johnson: Syndiquer les Frères. M. Provost: C'est ça.

M. Johnson: Il est rendu à vouloir syndiquer les Frères. Quand est-ce qu'il va attaquer les vicaires?

M. Provost: Quelles sont les religieuses à la CSN? Sérieusement, à cause de ce fait, nous voudrions qu'elles restent dans les limites de leurs activités dans l'enseignement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est correct.

Article 5, on en a discuté suffisamment.

M. Fournier: M. le Président, à l'articie 5, nous suggérerions qu'après les mots "de transport par bateaux" soient inclus "le transport routier pour autrui moyennant considération".

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 6.

M. Provost: Après s'être opposés a l'article 5 tel qu'on vient de nous le présenter, M. le Président, nous suggérons que l'article 6 se lise comme suit: "Les entreprises privées de production, de transmission, de . distribution ou de vente de gaz. d'eau ou d'électricité ne tombent pas sous le coup des présentes dispositions, à moins qu'une partie de leur production ne soit régulièrement destinée à l'utilité publique." C'est ce que nous avons discuté ce matin.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Sous-paragraphe 7, pas de problème; 8 pas de problème: paragraphe o), exploitations forestières, pas de problème. À o) il n'y a pas de problème?

Une voix: Il y a un problème, on demande un amendement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous en avez des copies, M. Levesque?

M. Levesque (Léopold): Services forestiers de l'UCC et je parle ici en même temps pour la CSN et la FTQ.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous parlez en même temps pour les deux?

M. Levesque (Léopold): Oui, pour les trois. Nous n'avons pas assez de papillons pour distribuer à tout le monde, probablement qu'on pourra se les séparer pour suivre. Or, l'amendement que nous proposons à l'article 1, paragraphe o), "exploitations forestières", devrait se lire: "la coupe, le tronçonnement, l'écorcage en forêt, le charroyage, l'empilement, le flottage, le chargement et déchargement du bois en forêt et à bord des bateaux et wagons de chemins de fer, l'usine de sciage et façonnage du bois pour fins d'opérations forestières, le déboisement de la forêt en vue de la construction de chemins, d'autoroutes, de barrages, de lignes de transmission, de piliers, de champs, d'écluses ainsi que tous autres travaux du qenre tels que les travaux de reboisement, d'amélioration, d'entretien de la forêt et le transport routier du bois, à l'exclusion de la transformation en dehors de la forêt". C'est à peu près...

M. Levesque (Montréal-Laurier): ...J'ordonnance.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Monsieur, qui est-ce qui représente l'entreprise forestière? L'entreprise, c'est M. Gagnon?

M.. Levesque, est-ce que c'est textuel avec l'ordonnance 39 ou si ça va un peu plus loin?

M. Levesque (Léopold): Cela ne va pas plus loin, ça va moins loin.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Cela va moins loin? Ce n'est pas textuel?

M. Levesque (Léopold): On n'a pas placé les gens oui sont pour la protection contre le feu, par exemple, parce qu'il y a un danger.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, M. Gaané.

M. Gagné: m. le Président, lors de l'ouverture des séances de votre comité, nous avons exposé immédiatement le point de vue de l'industrie forestière, à la demande du premier ministre, et à cette occasion, nous avons soumis un texte, il y a eu discussion au comité et le ministre des Ressources naturelles a fait quelques remarques. J'en ai tenu compte, j'ai soumis le point de vue aux membres de l'association que je représente et aujourd'hui, je me vois placé subito presto devant un nouveau texte avec force détails. Je vous demanderais la permission de déooser demain matin, par écrit, un texte corresDondant ou enfin différent...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord, très bien.

M. Gagné: Merci.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): L'autre article o). "concessionnaires forestiers".

M. Levesque (Léopold): Alors, au paragraphe p), "concessionnaire forestier", nous proposons: "concessionnaire forestier" -

le détenteur du droit de coupe de bois où le propriétaire du fonds, ou le détenteur du permis de coupe, conjointement avec le détenteur du droit de coupe de bois ou le propriétaire du fonds, lorsqu'il n'a pas cédé le droit de coupe à un tiers.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Là, vous ajoutez "conjointement".

M. Lévesque (Léopold): Conjointement avec le droit de coupe du bois. Nous n'avons pas d'objection au contracteur, particulièrement au grand contracteur, mais à condition qu'il soit certifié lors des reconnaissances syndicales, en même temps que le concessionnaire réei, le concessionnaire forestier réel, c'est-à-dire la compagnie forestière, que soient certifiés les deux conjointement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, M. Gagné, ce sera la même chose sur ça?

M. Gagné (Jean H.): La même réserve.

M. Bellemare: M.. Gagné, pourriez-vous répéter votre réserve?

M. Bertrand (Missisquoi): Non, il va nous la faire parvenir demain par écrit.

M. Gagné: M. Bellemare, lors du premier jour des auditions, j'ai été appelé, un peu avant mon tour, je pense, à soumettre mes amendements à la loi qui avait été suggérée et je soumets que M. Lévesque a eu tout le temps voulu pour analyser le texte soumis et je veux le considérer avec mes clients.

M. Bellemare: Vous avez gagné votre temps.

M. Gagné: Merci.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors article 2. M. Gagné, vous prenez ça en note?

M. Gagné: M.

Le Présirlent (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous suggérez qu'on enlève le deuxième paragraphe.

M. Gagné: À l'article 1, oui.

M. Crête (Marcel): Procureur de cette industrie précaire qu'est celle de la chaussure.

M. le Président, suggestion que nous espérons objective: l'association sggère d'ajouter dans les définitions, à la fin, la suivante, en ce qui concerne le lieu du travail, ce serait l'ensemble des terrains et bâtisses où un employeur exerce ses activités professionnelles. Ceci dans le but de faire disparaître les oossibilités de confusion et de conflit qui existent actuellement, puisque la loi, par ailleurs, aux articles 6, 7 et 8, prévoit ou défend certaines activités syndicales au lieu du travail. Sans une définition de ce genre-là, il y aurait peut-être lieu de se demander si c'est à l'intérieur de la tannière ou à l'intérieur de l'usine...

M. Bellemare: La deuxième partie de l'article 7, M. Crête.

M. Bertrand (Missisquoi): Avez-vous un texte?

M. Bellemare: La deuxième partie de l'article 7...

M. Crête: La distribution de circulaires, ce n'est pas nécessairement à l'intérieur de l'usine, c'est bien plus souvent à l'intérieur de la barrière.

M. Bellemare: Non, mais quand ça arrivera pour les employés forestiers, l'article 7, deuxième paragraphe, vous avez oarfaitement raison.

M. Gérin-Lajoie: Préparez donc votre texte, vous le remettrez demain matin.

M. Crête: Je suggère cette définition-là...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Pour l'article 1. ce serait la définition q).

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): À l'article 9, il est question de l'endroit où logent les salariés, mais vous suggérez que ce soit après les définitions, qu'on définisse le lieu du travail.

M. Crête: C'est bien exact. évidemment, le vais peut-être annoncer qu'à l'article 7 nous demanderons de radier le second paragraphe, mais ra viendra là-dedans.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors article 3 droit d'association. Pas de problème.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): l'article 2 n'est pas fini.

M. Lévesque (Léopold): Nous demanderons d'enlever le deuxième parapraphe de l'article 7.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah! oui. "La commission peut cependant

reconnaître une association", n'est ça que vous voulez enlever? Vous suggérez d'enlever ça?

M. Lévesque (Léopold): Justement parce que l'on croit que, avec la nouvelle définition considérant les forestiers...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, M. Gagné, vous avez décidé ça de même?

M. Gagné: Oui?

Le droit d'association

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 3. Il n'y a pas de problème à 3, je pense bien.

Article 4 ...

M. Desaulniers: Dans 4...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Avez-vous quelque chose à lire sur l'article 3, M. Desaulniers?

M. Desaulniers: Je crois que M. Lapointe n'est pas ici, mais je crois pouvoir parler en son nom. M. Lapointe, hier, dans son exposé, vous a suggéré, n'est-ce pas, certaines recommandations concernant un amendement au premier paragraphe de l'article, en ce sens que...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est à l'article 4, ça. On est à 3, là M. Desaulniers. Il n'y a rien de particulier à 3?

M. Desaulniers: Non, c'est correct. Alors M. Lapointe est ici.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 4.

M. Lapointe (Jean-Paul): M. le Président sur l'article 4, j'ai pas mal mentionné notre position. Je crois que mercredi prochain, je . déposerai le texte, mais en fait, après les explications que le premier ministre nous a données tantôt, notre amendement est bien simple. Tout ce qu'on demande, c'est: "Nonobstant toute loi à ce contraire, "c'est pour prévoir certaines chartes particulières à la municipalité et afin qu'il n'y ait pas d'exception, que le droit soit bien accordé à tous les policiers municipaux. Nous le déposerons mercredi prochain.

M. Bellemare: Maintenant, M. Lapointe, vous en faites un amendement spécialement attenant pour les policiers municipaux. Et les pompiers?

M. Lapointe: Je dis que je parlais uniquement pour les policiers municipaux. Je ne parle pas de la deuxième partie du deuxième paragraphe.

M. Bellemare: Et les pompiers municipaux?

M. Lapointe: Les pompiers municipaux, en vertu de leur certificat, pour nous, ce sont des policiers. Et le certificat de reconnaissance syndicale les considère comme policiers. Alors, ils tomberaient sous le coup de la loi. Ils n'ont pas droit à l'affiliation extérieure.

M. Dozois: Quand c'est conjoint.

M. Lapointe: Pardon? Quand c'est conjoint uniquement. Là, c'est un corps de pompiers séparé et ça tombe en vertu d'une autre association que vous connaissez dont le président, M. André Plante, est ici. Je parle uniquement pour les policiers-pompiers.

M. Bellemare: Là où il y a des pompiers permanents, ils font partie de votre association, de vctre fédération. Ils ne s'affilient pas à d'autres. Quand ils ont le double mandat d'être policiers et pompiers, vous avez déjà une association.

M. Lapointe: Cette priorité-là est établie par jurisprudence de la Commission des relations ouvrières qui satisfait les deux parties.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Merci M. Lapointe. M. Desaulniers, vous avez quelque chose?

M. Desaulniers: Non, c'est très bien. C'était simplement pour vous dire que les certificats accordés par la commission, dans le cas des pompiers, à l'Association internationale des pompiers, ce sont des certificats donnés dans les villes où il y a un département de pompiers séparé du département des policiers.

M. Bellemare: Ils sont reliés à leur fédération.

M. Desaulniers: C'est ça.

M. Lesage: C'est seulement pour inscrire dans la loi ce qui a déjà été déterminé par la Commission des relations ouvrières.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Maintenant, le deuxième paragraphe, les membres de la Sûreté. Il n'y a pas de problème?

M. Marchand: Comme ils ne sont pas affiliés, on ne peut pas en parler.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 5, les fonctionnaires. Sur l'article 5, M. Girouard?

M. Girouard: Article 4. Étant donné que l'article 4 parle des policiers municipaux, des membres de la Sûreté, nous nous demandons si, en toute logique, on ne devrait pas aussi considérer le cas des agents de sécurité, au sens de la loi, des détectives particuliers, 1962, chapitre 49, qui se touvent un peu dans la même situation que les policiers qui sont salariés, relèvent de leur patron, mais qui, en même temps, sont des agents de la paix ou des agents de la reine.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous voudriez que les agents de sécurité soient considérés comme des policiers municipaux.

M. Girouard: Mais non, pas assimilés aux policiers municipaux. Ce que je veux dire, si je comprends bien le sens, M. le Président, ils ne nient pas le droit d'association. Ils ne nient pas le droit de négocier. Je dis tout simplement qu'ils doivent faire partie d'une unité qui est propre, qui n'est pas affiliée à d'autres groupements. Nous, nous demandons si, en toute logique, les agents de sécurité au sens très précis de cette loi-là, pas n'importe qui...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais quand on dit, à la définition de salarié cela ne comprend pas les employés à titre confidentiel. Les agents de sécurité ne sont pas assez confidentiels.

M. Girouard: Je ne crois pas que ce soit suffisant, parce que dans l'exercice même de ses fonctions, l'aqent de sécurité se trouve à être un agent de la paix et en ce sens-là, il peut être, il devient assimilable à un policier.

M. Johnson: Parlez-vous des genres de Pinkertons qu'on voit à la porte des hôpitaux?

M. Girouard: Pas nécessairement eux autres,...

M. Johnson: Non mais ce genre d'agents de sécurité.

M. Girouard: Ça pourrait être ça. Je pense surtout à ces endroits où il y a des employés qui ont pratiquement, sans l'aide de statut de policier mais pour les fins particulières sur les lieux...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Délibéré.

M. Massicotte (Jean): M. le Président, si vous me le permettez. Je pense que nous devons donner toutes les informations nécessaires à votre comité. Il ne s'agit pas de ne pas avoir, dans la même unité de négociation, les gens qui sont chargés de voir à la protection de notre propriété, qui sont chargés, par exemple, de fouiller nos employés pour savoir s'il y a des vols de commis. Pour l'information du comité, il y a, dans un certain pays, une loi, particulièrement aux Etats-Unis qui a reconnu ce principe-là, en Ontario aussi, je pense. Ces gens-là ne doivent pas faire partie de la même unité de négociation, ce qui, à un moment donné, peut leur créer un conflit sérieux. Ça n'empêche pas qu'ils soient membres d'un syndicat. Nous n'avons aucune objection, mais qu'ils ne soient pas membres du même syndicat qui représente les employés qu'ils sont obligés de fouiller. Ils peuvent être membres du syndicat, je n'ai aucune objection à ça.

M. Desaulniers: M. le Président, je dois soumettre aux membres de votre comité que le problème qui a été soulevé concernant une unité appropriée composée, disons, d'aqents de sécurité a été réglé par la Commission des relations ouvrières et c'est la commission qui a établi, par des décisions, que les qardiens ou si vous voulez, les agents de sécurité travaillant dans une usine doivent constituer un corps à part comme unité appropriée de négociations.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Notre commission a de bons jugements, ordinairement.

M. Gaqné: Le problème n'a pas été réglé par la commission. Ce que la commission a décidé, à mon sens, c'est tout simplement qu'à cause des termes de la loi actuelle, la commission ne peut pas faire la distinction. Entre autres, M. Desaulniers connaît très bien le cas de la Canadian Celanese Limited où le commissaire Baker a fait une très forte dissidence.

M. Massicotte: M. le Président, sur cette question-là, nous déposerons un texte demain matin.

M. Bertrand (Missisquoi): Ils vont déposer un texte demain matin.

M. Lapointe: M. le Président, je voudrais affirmer que dans l'amendement qui nous concerne, nous ne croyons pas que les policiers des agences doivent être ajoutés. En ce qui a trait aux agences qui auraient pu agir comme policiers municipaux, ça a été entièrement réglé par la Loi des agences privées puis adopté par le gouvernement, à la satisfaction générale.

Quant au problème interne d'affiliation de ces salariés au sens de la loi, eh bien, là, je pense que la position des centrales syndicales revient parce que je ne crois pas qu'ils devraient revenir à notre unité de négociation ou dans notre groupe.

M. Massicotte: M. le Président, ce n'est pas ce qu'on veut du tout. Nous demandons simplement que nos agents de sécurité ne fassent pas partie de l'unité de négociation qui a été définie, disons, pour les employés manuels. La balance, les syndiqués, ça n'a aucune importance pour nous.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Est-ce qu'il y a des mandats particuliers?

M. Bertrand (Missisquoi): Qui les représente?

M. Marchand: Voici, si l'amendement, à la définition du terme salarié, est accepté, tel que nous l'avons proposé en conjonction avec l'article 5, il n'y a aucun doute que ça voudra dire que le gouvernement accorde le droit d'association à ses fonctionnaires. Et, évidemment, si tel est bien le cas, je crois que nous allons être unanimes à féliciter le gouvernement pour ce geste démocratique et cette reconnaissance du droit des fonctionnaires. Les fonctionnaires sont des citoyens comme les autres, à part entière. Ils paient les taxes, ils ont le droit d'être membres du Club Richelieu, du Kiwanis, ou de la Chambre de commerce et ils pourront aussi avoir leur syndicat et défendre collectivement leurs intérêts. Autrement dit, le gouvernement qui dit aux entreprises privées, par le truchement d'une loi comme la Loi des relations ouvrières: Reconnaissez les syndicats librement organisés, se soumet lui-même à la même obligation. Et je pense que si mon interprétation du texte est bonne, surtout si on tient compte de l'amendement au terme ''salarié", le gouvernement méritera d'avoir donné à 20,000 ou 30,000 personnes dans la province de Québec le droit d'association qu'on considère comme un droit fondamental.

M. Lesage: Il n'y a aucun doute qu'en vertu de l'article 5, les fonctionaires ont le droit de s'associer et de se syndiquer.

M. Marchand: Alors, dans cette mesure-là, c'est une grande satisfaction et nous croyons...

M. Lesage: La condition, c'est qu'il n'y ait pas d'affiliation, la même chose que pour les policiers...

M. Marchand: Alors évidemment, vous vous attendez un petit peu à ce que je parle de cette restriction. Je crois que c'est une restriction au droit d'association si nous l'avons compris et si nous le comprenons dans le cas des policiers, nous le comprenons beaucoup moins bien dans le cas des foncctionnaires.

M. Lesage: C'est à cause du secret d'État...

M. Marchand: Voici, pour ce qui est de la partie de la fonction ou plutôt du secret d'État, c'est valable dans certaines fonctions. Dans d'autres...

M. Lesage: C'est grave, même pour une sténographe ou un messager confidentiel...

M. Marchand: Oui, enfin, disons que pour une série de fonctions, je pense bien que ça n'a aucune gravité et que les employés qui sont sous la Loi du service civil et qui sont, par exemple, au département de la Voirie, une foule de personnes qui occupent des fonctions au Parlement, je ne vois par comment la raison d'État...

M. Lesage: Oui, je comprends. Il est très difficile souvent de faire une distinction entre ceux qui ont entre les mains - entre les mains, c'est une façon de parler - dans les mains desquels passent les documents confidentiels. Il est extrêmement difficile de déterminer quelle est la catégorie de ces gens-là à comparer à l'autre catégorie. Nous avons nous-mêmes de la difficulté quand il s'agit de faire prêter les serments.

M. Marchand: M. le premier ministre, moi, j'ai de la difficulté à comprendre en quoi l'absence d'affiliation peut constituer une garantie du maintien du secret d'État.

M. Lesage: C'est-à-dire que ça constitue une garantie qu'il n'y aura pas de pression extérieure.

M. Marchand: Bien ça, vous savez, ça pourrait être valable aussi. Plusieurs employeurs pourraient invoquer la même chose. Nous avons des syndicats qui nous sont affiliés, des syndicats qui viennent de compagnies qui sont souvent en concurrence les unes les autres. Il y en a quelques-uns là-dedans, surtout les employés de bureau, qui manoeuvrent des renseignements confidentiels et jamais la centrale syndicale n'a été l'instrument...

M. Lesage: Je n'accuserai pas la centrale syndicale, M. Marchand, mais n'oubliez pas qu'il y a des centrales qui ont une affiliation politique. Il ne faut pas oublier ça.

M. Marchand: Sur ce plan-là, M. le

premier ministre, je ne suis pas le mieux désigné pour discuter du problème...

M. Lesage: J'étais d'autant plus à l'aise de vous le mentionner.

M. Marchand: Je le laisserai discuter par ceux qui peuvent avoir des difficultés sur ce plan-là, bien des difficultés avec l'argumentation, je veux dire. Mais, par exemple, prenez les employés de la Commission des liqueurs. Évidemment, c'est peut-être confidentiel de nous livrer des bouteilles de scotch ou de gin, mais je ne pense pas que l'affiliation...

M. Lesage: Ce qu'il peut y avoir de confidentiel, c'est d'en prendre en arrière du comptoir.

M. Marchand: Mais voyez-vous, on pourrait détailler des catégories comme ça, et la raison d'État, pour un très grand nombre ne pourrait même pas être invoquée.

M. Dozois M. Marchand, est-ce qu'il existe de telles restrictions dans les autres provinces où on reconnaît l'organisation..

M. Marchand: Non. Au fédéral, quelques syndicats sont affiliés, d'autres sont indépendants. En Saskatchewan, ils ont été affiliés longtemps après ça, les fonctionnaires eux-mêmes ont décidé de se désaffilier. Ils ont le droit.

M. Lesage: Oui, oui.

M. Marchand: Je fais le même raisonnement dans le cas de l'affiliation que dans le cas du droit d'asociation. Si les fonctionnaires ne veulent pas s'affilier, ils doivent être libres et ils ne doivent pas le faire.

Dans l'ensemble des pays du monde occidental, les fonctionnaires sont organisés, ils sont affiliés aux centrales. Pourquoi? parce qu'ils reçoivent des centrales syndicales des services que ces syndicats-là ne peuvent pas se donner seuls. Le mouvement syndical a une tradition, s'est enrichi d'une expérience que je considère considérable, au cours des années. C'est normal qu'un syndicat veuille profiter de cette expérience et veuille profiter des services que donne une centrale syndicale. Pourquoi les fonctionnaires ne pourraient-ils pas orofiter de cette expérience et de ces services? Au nom de quel principe? Je ne vous dis pas que les fonctionnaires provinciaux décideront de s'affilier. S'ils décident de ne pas s'affilier pour la raison qu'ils trouveront bonne, c'est leur affaire. Mais pourquoi le gouvernement leur enlèverait-il ce droit? Ce sont des citoyens comme les autres qui ont le droit de participer à la vie démocratique de la nation et c'est par le truchement des centrales syndicales qu'ils peuvent mieux le faire. Ou bien s'ils jugent qu'ils ne peuvent pas mieux le faire par le truchement des centrales syndicales, bien mon Dieu, ils ne s'affilieront pas. Alors, ce qui arrive au Canada, c'est qu'il y en a qui sont affiliés et d'autres qui ne le sont pas. Ils sont libres de le faire.

Aux Etats-Unis, le président Kennedy vient de donner instructions de négocier avec les syndicats, et les syndicats de fonctionnaires sont affiliés à l'AFL-CIO. Partout en Europe, les syndicats de fonctionnaires sont affiliés à des centrales syndicales. En Angleterre également.

M. Johnson: En Saskatchewan...

M. Marchand: En Saskatchewan, ils ne le sont pas présentement. Ils ont le droit, mais ils n'ont pas voulu. Je ne sais pas pour quelle raison. Ils ont été affiliés un bout de temps et puis aujourd'hui, ils ne le sont plus.

M. Johnson: En Colombie?

M. Marchand: En Colombie, ils se sont affiliés. Je ne sais pas s'ils le sont encore aujourd'hui.

M. Provost: Quelques-unes, c'est ce qui s'est dit.

M. Marchand: Il ne faut pas se faire de leurre. Il est sûr que des syndicats de fonctionnaires seront toujours très sensibles aux attitudes politiques que peuvent prendre les centrales, à cause de leurs fonctions même. Mais ils décident eux-mêmes de leur propre attitude.

M. Lesage: Voulez-vous, vous allez me laisser ça en main. Je vais y penser, à la lumière de toute cette réforme du service civil dont je vous ai parlé hier.

Pour les raisons que je vous ai données, mon esprit n'est pas convaincu, même par votre éloquence et vos compliments.

M. Marchand: Ce qui me frappe, M. le premier ministre, ce n'est pas que votre esprit ne soit pas convaincu, mais qu'il ne semble pas ouvert à la conclusion.

M. Lesage: Il est certainement ouvert puisque je veux étudier ça à la lumière de tout le problème du service civil.

M. Marchand: Alors, nous vous remercions de cette attitude, mais nous considérons qu'au point de vue de droit - et nous savons toutes les difficultés concrètes que ça peut comporter - nous sommes intéressés au gouvernement comme citoyens

et aussi comme institution importante, et nous n'avons pas intérêt à vous créer des ennuis simplement pour le plaisir d'en créer. Seulement sur certains principes, nous aimerions que, disons, notre démocratie soit la plus parfaite possible et je comprends que vous étudiiez sérieusement...

M. Lesage: Vous savez, j'ai beaucoup d'ennuis personnellement, comme chef du gouvernement avec la réorganisation et la revalorisation de la fonction publique. C'est une chose à laquelle je tiens.

M. Marchand: Et nous aimerions vous aider.

M. Lesage: Ça crée beaucoup de problèmes, mais j'aimerais bien voir clair...

M. Bellemare: Ce n'est pas la première fois.

M. Lesage: ...avant d'accepter votre aide. Mais soyez sûrs que je vais examiner l'affaire sans préjugés.

M. Gabias: Après la déclaration de l'honorable premier ministre, est-ce que vous avez un porte-parole au cabinet?

M. Marchand: Nous autres, non. Nous n'avons pas de porte-parole, ni même dans l'Opposition, d'ailleurs.

M. Gabias: On ne fait pas partie du cabinet.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Qu'est-ce que vous diriez si nous prenions un petit repas?

Une voix: Oui, oui, c'est admis.

M. Lesage: On commencera à six, après.

M. Bellemare: M. Garant va avoir quelque chose à dire sur 5.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mesdames, messieurs, M. Garant avait demandé la parole sur l'article 5.

M. Garant (Léopold): M. le Président, M. le premier ministre, j'ai entendu tantôt, évidemment la discussion au sujet de l'article 5 et puis, le premier ministre a demandé à y songer. Mais je voudrais juste apporter un exemple qui peut aider à trouver la solution. À la Corporation des instituteurs, nous avons eu, de 1946 à 1950, ou 1951, je pense, affiliée à notre corporation, l'Association des professeurs d'Écoles normales. Cela a enrichi tout le monde parce que les discussions étaient nécessaires autour des orogrammes d'écoles normales, de la préparation des professeurs et puis des méthodes nouvelles, etc. Si le gouvernement accorde la demande faite par M. Marchand, à savoir le droit d'affiliation, c'est très bien. S'il ne l'accorde pas, il est peut-être possible de considérer la possiblité de mettre certaines exceptions pour certaines catégories comme celle que j'ai donnée comme exemple.

M. Lesage: C'est surtout à ça que je pense, M. Garant. Je pense aussi aux employés de la voirie.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Merci M. Garant. Article 6. Sur 5, je comprends que c'est fini.

M. Marchand: En suspens.

M. Jean Massicotte: On peut peut-être esaver de changer la tendance. Nous suggérons de prendre l'ancien article ou. plutôt, l'article 23 de la Loi des relations ouvrières, de l'amender pour remplacer l'article 6 du projet du Code du travail de la façon suivante: enlever dans l'article 23 les mots "sauf avec le consentement de l'employeur". On m'avait signalé que parfois, il pouvait arriver qu'il y ait des unions de boutiques et que les patrons permettent la sollicitation durant les heures de travail. Alors, avec la suggestion que nous faisons, personne ne pourra le faire et ça se lirait comme suit: "Personne ne peut, au nom ou pour le compte d'une association, solliciter pendant les heures de travail l'adhésion d'un salarié à une association." Je crois que ceci rencontre le point de vue des syndicats.

M. Marcel Pepin: Cet article 6 est, de près, relié à l'article 7 qui suit immédiatement. Notre proposition à 6 aurait été de biffer les mots "et sur le lieu du" pour les remplacer par "durant les heures de travail". uniquement. Maintenant, nous en avons causé, avant la reprise de la séance, et ce que nous demandons au comité, c'est de suspendre l'étude des articles 6 et 7 pour nous permettre, pendant l'heure du dîner, de les réexaminer et de dire ce que nous en ferons après l'ajournement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors 6 est suspendu et 7 est suspendu.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Nous arrivons à 8.

M. Massicotte: M. le Président, Jean Massicotte. En ce qui concerne l'article 8, nous suggérons qu'il soit rayé. Nous y voyons des difficultés d'application, probablement tant du côté du syndicat que du côté de I'employeur. Si je parle du côté de

l'employeur, évidemment, l'article nous vise autant que le syndicat et nous voyons, par exemple, qu'il pourrait peut-être être difficile, des fois, si nous voulons faire circuler un article de journal, de retracer l'auteur; souvent ils ne sont pas signés. De plus, M. le Président, quand nous avons une convention collective de travail, nous y prévoyons habituellement que nous donnons, à l'usage des syndicats et des unions, certains tableaux d'affichage et nous déterminons par convention collective le type d'avis et d'affiche qui peuvent être affichés sur ces tableaux. Alors, nous suggérons de laisser ceci à la négociation en matière de convention collective.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, les deux sont d'accord là-dessus. 9...

M. Lesage: Cela venait du Conseil supérieur du travail. Les patrons et les sociologues étaient d'accord, mais les ouvriers n'étaient pas d'accord. Donc, vous êtes d'accord pour qu'il n'y ait pas d'article 8; il y en a un, mais autrement.

M. Bellemare: M. Lévesque, dans 9 au paragraphe 2, vous ne trouveriez pas que l'article 7 irait mieux là?

M. Lévesque: L'article 7 s'applique généralement à l'industrie, l'article 9 s'applique à la forêt.

M. Bellemare: Oui, mais pour les lieux affectés aux repas des salariés..

M. Lévesque: On va revenir demain matin là-dessus.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est suspendu pour le moment 7 et 8; 6 et 7 sont suspendus. Nous sommes à 9.

M. Lévesque (Léopold): À 9, M. le Président. Léopold Lévesque, services forestiers...

M. Lesage: M. Lévesque, si vous êtes pour proposer cet amendement qui est ici, alors, mademoiselle, voudriez-vous l'inscrire?

Amendement proposé par M. Léopold Lévesque, des services forestiers de l'U.C.C.

L'article 9 devrait se lire comme suit: "Sous réserve de la Loi des terres et forêts, le propriétaire d'une terre ou concession où se fait une exploitation forestière est tenu de permettre le passage et de donner accès aux camps où logent les salariés à tout représentant d'une association de salariés muni d'un permis délivré par la commission. "L'exploitant est tenu de fournir à ce représentant le gîte et le couvert au prix fixé pour les salariés par ordonnance, suivant la Loi du salaire minimum." 2e paragraphe, amendement: "L'association, sur demande écrite d'un salarié, peut réclamer de l'employeur la somme requise pour droit d'entrée dans une association et la première cotisation. Cette demande écrite du salarié remise à l'association constitue, pour fins de la présente loi, le paiement du droit d'entrée et de la première cotisation, pourvu que ce salarié ait cette somme à son crédit. "Le présent article ne s'applique pas à l'exploitation forestière effectuée sur sa oropriété par un cultivateur ou un colon."

M. Lévesque (Léopold): Est-ce que vous voulez que je lise l'amendement?

M. Lesage: Bien, vous n'avez pas besoin de le lire parce que mademoiselle va l'inscrire dans le transcript.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, M. Lévesque, on vous écoute.

M. Lévesque (Léopold): Alors, l'article 9, 3e paragraphe, nous disons: "L'association, sur demande écrite d'un salarié, peut réclamer de l'employeur la somme requise pour droit d'entrée dans une association et la crémière cotisation. Cette demande écrite du salarié remise à l'association constitue, pour fins de la présente loi, le paiement du droit d'entrée et de la première cotisation, pourvu que ce salarié ait cette somme à son crédit. "Nous demandons cet amendement afin de conserver le secrret du droit d'association et d'éviter particulièrement des représailles de la part des employeurs, en certaines circonstances.

M. Lesage: C'est le "check off", mais simplement que le salarié demande à l'association qui, elle, transmet la demande du salarié à l'employeur.

M. Lévesque (Léopold): A l'employeur, justement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Si vous dites au patron: J'ai une autorisation de M. Untel, M. Untel, M. Untel; comme vous avez mentionné que c'était pour garder le secret de l'adhésion...

M. Provost: M. le Président, si vous permettez M. Lévesque, rien n'empêcherait, lorsque nous envoyons notre requête à la commission, d'y attacher les créances. L'inspecteur de la commission à vérifier avec les transferts de créances si, à la date où il a signé, il y avait le $2, le $3 ou le $5. Nous pensons que l'article actuel peut nous causer des . difficultés ou le secret ne sera pas maintenu. Nous disons: Il le transmet à l'association, puis on l'attachera, nous autres, avec notre requête; et puis votre inspecteur, qui est un homme

impartial, va y aller, et discret, il va dire à l'employeur: Donnez-moi la liste des créances, et puis il va vérifier M. Untel.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Cela voudrait dire que le paiement serait fait seulement après que cela sera déposé à la commission.

M. Desaulniers: Si vous me permettez, M. le Président, votre remarque est absolument juste. Je ne crois pas que la créance puisse constituer un paiement simplement au moment où l'enquêteur de la commission examine les livres parce qu'en vertu de la loi, si le paiement est une condition dans la considération de ce qui est un membre de l'association, il faut que toutes les conditions soient remplies avant le dépôt de la requête. Mais avec cette différence, je crois que vous êtes certainement au courant qu'une organisation ouvrière dans la forêt, ce n'est pas une chose qui se fait dans les 24 heures; cela peut prendre assez de temps. Dans le cas ordinaire, en dehors de la forêt, l'individu qui signe une carte d'adhésion et qui paie à l'association de son choix, normalement il n'est pas obligé d'aller dire ou de faire connaître à l'employeur son adhésion. Dans la forêt, en raison de problèmes particuliers qui ont été bien compris par le gouvernement, puisqu'il l'a compris dans sa législation, vous avez trouvé une formule pour dire que si le type n'a pas d'argent dans la forêt, et ça se comprend, ce sera une promesse de créance qu'il remet à l'association. Simplement la différence, c'est ceci: L'Association devra remettre cette créance ou cette demande de créance à l'employeur, mais pourra le faire quelques jours avant l'assemblée au cours de laquelle on votera la résolution pour demander un certificat de reconnaissance syndicale. Alors ça empêchera une étendue de délai telle que cela ouvrira les portes à toute intimidation ou à toute coercition. Si vous examinez la loi actuelle, du moment que vous avez passé à une assemblée une résolution disant que les gens ont signé les cartes d'adhésion, ont payé leur contribution et leur initiation et qu'une requête a été envoyée, la commission doit considérer, au moment du dépôt de la requête, quel en était le caractère représentatif. Or, ça, ça peut se faire deux ou trois jours avant l'assemblée. Rien dans la loi n'exige que cette assemblée se fasse un mois d'avance. Alors, pour couvrir la demande ici, c'est que l'espace entre la remise de la créance à l'employeur et le dépôt de la requête à la commission soit assez court pour empêcher toute campagne d'intimidation. C'est la raison.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je comprends, vous allez faire votre recrutement, comme vous le faites d'habitude, et quand vous aurez votre majorité, quand vous prétendrez avoir la majorité, vous délivrerez des cartes ou vous aviserez l'employeur de vous payer.

M. Desaulniers: À ce moment-là, l'association qui est dépositaire de ces créances les enverra à l'employeur et tel que la loi le dit, automatiquement sur réception par l'employeur de ces créances, s'il y a un crédit, eh bien, ça constitue paiement.

M. Fortin: La seule autorisation pourrait équivaloir pour les fins de la Commission des relations ouvrières.

M. Desaulniers: En autant que l'employeur les recevra, si j'ai bien compris la loi, à ce moment-là, il y aura un montant d'argent...

Une voix: C'est simplement un crédit.

M. Desaulniers: Si vous me permettez, M. le Président, j'ai dit que la créance, lorsqu'elle sera remise à l'association, et je lis le texte, si vous me le permettez: "cette demande écrite du salarié remise à l'association constitue, pour les fins de la présente loi le paiement du droit d'entrée et de la première cotisation, pourvu que le salarié ait cette somme à son crédit."

M. Fortin: Ce serait conditionnel.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si je comprends bien, la loi telle qu'écrite disait ceci...

M. Desaulniers: Si vous me permettez, dans les explications qu'on vous a données, on vous a dit tout à l'heure qu'on donnait ça à l'inspecteur. Alors, il y a deux solutions. Je comprends que votre comité veut savoir quelle est la solution qu'on propose. Il y a deux solutions, soit que la créance soit remise à l'employeur pour constituer un paiement ou soit que la simple remise de la créance à l'association constitue un paiement. Simplement, dans leur enquête, il est évident que les inspecteurs de la commission devront constater que lorsque la créance a été remise, et je prends le texte qui est ici, l'employé avait un crédit.

M. Fortin: M. Desaulniers, après l'enquête, l'enquêteur fait rapport à la commission et là, le certificat de reconnaissance syndicale est émis.

M. Desaulniers: C'est ça.

M. Fortin: Maintenant si, après ça, vous envoyez vos créances à l'employeur...

M. Desaulniers: Si M. le ministre me permet, il n'est pas obligé de l'encaisser à ce moment-là.

M. Fortin: Mais il faut croire que la procédure se fait assez rapidement pour que, si l'employé s'en va de la forêt...

M. Bellemare: Cela se fait dans une soirée.

Une voix: Une journée.

M. Bellemare: Mais je veux dire, quand l'inspecteur part, il l'a...

M. Fortin: Quand l'employé va remettre sa créance au syndicat, après ça, je crois que l'inspecteur a le devoir, dans la forêt, de vérifier s'il a de l'argent à son crédit, et il faudra qu'il fasse un rapport à la commission. La commission rend la décision et donne le certificat de reconnaissance syndicale et après ça, vous aller percevoir le dû, assez rapidement avant que le type ne s'en aille de la forêt.

M. Desaulniers: Et c'est pour cela qu'on a demandé cette formule-là.

M. Turpin: Le syndicat, pour être en mesure d'entrer et d'organiser un groupe d'ouvriers, est censé avoir la majorité. Sa majorité doit se composer de membres qui auront signé une carte, en vous donnant l'autorisation d'aller percevoir la somme. Vous allez garder ça en main, juste quelques jours avant d'être en mesure de tenir votre assemblée après que vous aurez obtenu la permission de la commission. Vous allez arriver avec ça et je sais très bien que dans les opérations forestières, il peut s'écouler une semaine, même davantage, avant que l'employeur soit en mesure de dire si M. Unte! a l'argent à son crédit. L'ouvrage dans I» bois ne se fait pas à l'heure et à la journée. 30% de l'ouvrage du bois se fait à forfait et souvent ça va prendre une équipe de mesureurs pour aller mesurer le bois de tel ou tel individu pour savoir si le type en question a l'argent à son crédit. Je ne dis pas que ça arrivera, mais ça peut vraiment arriver, dans un camp de 100 personnes, que 55 auront signé leur adhésion et que, sur ces 55, après vérifictaion, il y en aura au moins 25 à 30 qui n'auront pas l'argent pour payer leur cotisation. Vous aurez obtenu un droit, non pas sous de fausses représentations, parce que vous êtes de bonne foi. Vous fournissez à la commission le nombre de signatures établissant que les employés sont prêts à faire partie du syndicat mais quand vous allez découvir que ces derniers n'avaient pas la solvabilité nécessaire pour signer cet acte-là, quand dans un camp de 100 personnes, vous découvrez qu'il y en a seulement 55 qui ont signé - vous avez le droit d'entrer à cette condition-là - et quand vous réaliserez que vous en aviez seulement 25, qu'est-ce qui va arriver? Ça tombera à l'eau.

M. Johnson: Il y en aura une vingtaine qui seront tombés, à part ça.

M. Turpin: Ah! peut-être.

M. Lévesque (Léopold): M. le Président, aussitôt que l'assemblée est terminée dans le camp, on peut passer chez le commis, c'est le commis qui tient le temps de tous les hommes, qui peut dire si le gars a l'argent nécessaire immédiatement.

M. Turpin: J'ai passé 25 ans dans le bois, et on serait venu me demander un soir, combien d'ouvriers avaient $25 à leur crédit, j'aurais été en peine de le dire, avec la meilleure volonté.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Voici, quand un type quitte le camp, puis demande une avance, il va voir le commis à brûle-pourpoint, une heure avant. Le commis sait s'il a une avance ou non, puis il lui donne son $25. C'est de même que ça se passe partout.

M. Turpin: Des employés qui ne retirent jamais le dernier cent, même sans prendre le livre, on peut dire: "Je sais très bien que celui-là a $50 à son crédit, il en a peut-être $200, je suis certain de ça". Mais dans le bois, ça ne se passe pas comme ça.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Je pense que le commis peut dire, "celui-là ici, n'a pas l'argent nécessaire, que ce soit $2, etc."

M. Bellemare: C'est la commission M. Lévesque, quant aux autres, priorité d'association, quant...

M. Provost: M. Turpin, nous prenons un risque, mais c'est le même risque que nous prenons dans l'industrie quand nous signons 90% de cartes et que seulement 45% nous sont réellement payées. Si nous allons devant la commission, l'enquêteur va dire: Ils n'ont pas la majorité signée et payée, vous n'avez pas votre certificat... S'il y en a qui nous trompent en forêt en nous disant: J'ai $2, $3 ou $4, ou je ne les ai pas. C'est le risque que nous devons courir. Cela veut dire qu'on n'a pas une majorité d'ouvriers qui ont rempli les conditions du règlement et puis là, on en subira les conséquences.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Alors, comme c'est assez impondérable, que veut dire, l'amendement? Je voudrais comprendre,

mais je ne suis pas très familier avec la forêt. Que veut dire l'amendement? Est-ce que c'est par rapport à ce qui était dans le texte? Dans le texte, cela voulait dire que le gars, individuellement, se révélait un peu rapidement, tandis que selon la formule que vous employez, c'est l'association qui se chargera, elle, de faire savoir, quand elle le saura, qu'elle a le plan qu'il faut pour négocier.

M. Provost: C'est cela, pour conserver le secret d'organisation, afin d'empêcher la discrimination possible.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Le reste étant une question de risque à savoir s'il l'a ou ne l'a pas à son crédit.

M. Provost: Cela prend plus de temps, le risque.

M. Lesage: J'aurais seulement une remarque à faire, moi, qui ne va pas au fond de la question; il ne faudrait tout de même pas nous accuser d'être trop juridiques ou procéduriers, parce qu'à ce moment, ce n'est pas nous qui le sommes.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il y a-t-il des objections, du côté patronal sur cet article?

M. Gagné: Encore là, nous avons un texte qui vient de nous être remis et que nous aimerions bien examiner pour en voir toutes les indications, sauf que j'aimerais peut-être immédiatement faire des remarques sur le texte que nous avons soumis, lors de la première audition de votre comité: "Sous réserve de la Loi des terres et forêts, le propriétaire du fonds." Dans le texte soumis par le syndicat, on dit: "Le propriétaire d'une terre..." Or, dans les articles o), p)l et 2, on se réfère toujours au "propriétaire du fonds." Alors, pour faire une concordance dans les termes, pour ne pas qu'il y ait d'erreurs, nous suggérons ''propriétaire du fonds ou concession où se fait une exploitation forestière." Or, nous savons - et j'ai tenté de me faire comprendre sur ce point, lorsque je me suis déjà exprimé ici devant vous - que toutes les terres sont concédées, concédées comme "free holder", comme on dit, ou concédées comme terres publiques. C'est la première fois que nous voyons apparaître le terme "concessionnaire" et, au moins quant aux terres qui sont détenues en propre, qui sont concédées en vertu de lettres patentes par le gouvernement, il n'y a aucun doute que ses deux mots veulent dire la même chose.

Alors, nous avons suggéré "le détenteur d'un permis de coups sur une terre", parce que sur les terres publiques, l'État, le gouvernement émet un permis, le permis de droit de coupe. Le droit de coupe peut être concédé, mais le gouvernement n'intervient pas. C'est une transaction à l'ordre. Si on distingue les deux classes de personnes visées, nous suggérons: "le propriétaire du fonds, détenteur d'un permis de coupe sur une terre où se fait l'exploitation forestière, est tenu de permettre le passage et de donner accès au campement." Nous disons "au campement", au lieu de "camp où logent les salariés".

La raison est très simple, c'est que le campement, nous le prétendons, c'est l'endroit où sont situés tous les édifices ou toutes les bâtisses nécessaires aux opérations forestières. Ici, il est question de donner accès; or, supposons le cas, par exemple, où le prooriétaire du permis de coupe n'est pas l'exploitant, il a cédé son droit de coupe, alors il ne peut pas donner accès au camp; il va donner accès au campement. Il laisse passer, en d'autres termes.

D'autant plus que, dans le paragraphe qui suit, on dit que c'est "celui qui fait". Cela veut dire que c'est l'exploitant qui doit donner le gîte et le couvert, alors, il y aura une certaine contradiction entre les termes. C'est pourquoi nous suggérons que le "propriétaire du fond ou le détenteur du permis de coupe sur une terre donne accès au campement", ce qui est beaucoup plus précis, et que "celui qui fait l'exploitation forestière ou l'exploitant" donne le gîte et le couvert aux représentants du syndicat.

Au lieu de "délivré par la commission" - c'est tout simplement une correction de style - nous suggérons "émis par la commission".

M. Lesage: Non, pardon, M. Gagné. Ce n'est pas français. C'est "délivré" qui est français.

M. Gagné: "Délivré"

M. Lesage: Oui.

M. Gagné: Dans ce cas. je retire ma remarque.

M. Lesage: Oui, c'est mieux. C'est un anglicisme. Ce n'est pas l'émission des permis, c'est la délivrance des permis.

M. Gagné: La délivrance des permis, très bien.

M. Fortin: M. Gagné, la personne qui va être employeur peut être différente de relie qui lui a accordé le droit de passage?

M. Gagné: Exactement. Au point de vue pratique, c'est ce qui va arriver dans bien des cas.

M. Turpin: M. le Président, sur cette question, je crois que si ce projet de loi passe, les compagnies vont être au courant et, comme dans les autres domaines, vont obliger leurs sous-entrepreneurs ou leurs entrepreneurs à respecter les lois comme on 1e fait pour la Commission des accidents du travail, comme on le fait pour une question de feu. Cela va être inclus dans les contrats que les compagnies vont signer avec les entrepreneurs. Je suis certain que ces clauses vont être incluses dans le contrat,

M. Gagné: Je suis bien d'accord avec M. Turpin. Seulement, pour la bonne compréhension des textes, j'ai consulté l'association que je représente. Nous ne nous opposons pas aux principes, nous acceptons de leur donner accès, nous acceptons de leur donner le gîte et le couvert à de très bonnes conditions par jour, etc. mais nous voulons que les termes décrivent exactement la situation qui va se produire en forêt.

Quant au deuxième paragraphe, nous suggérons, au lieu de "l'exploitant", "celui qui fait l'exploitation forestière" déjà décrite antérieurement. On pourrait encore faire une concordance dans les termes pour permettre une même interprétation des termes utilisés dans tous les articles qui concernent la forêt. "Est tenu de fournir à ce représentant le gîte et le couvert au prix fixé pour les salariés par ordonnance suivant la Loi du salaire minimum".

Maintenant, les centrales syndicales suggèrent un amendement au troisième oaragraphe: "L'association, sur demande écrite d'un salarié, peut réclamer de l'employeur la somme requise" au lieu de: "l'employeur doit, sur demande écrite d'un salarié, lui avancer la somme requise pour droit d'entrée dans une association et la première cotisation pourvu que ce salarié ait cette somme à son crédit." Encore là, il s'agit d'une formule extrêmement particulière. Évidemment, du côté patronal, tout ce que nous pouvons dire, c'est que c'est certainement une très grande victoire syndicale. Mais encore là, c'est le pré-check-off". En d'autres termes, c'est la seule fois dans sa vie où un bûcheron, pour parler de lui ici, où ce salarié aurait le privilège de prendre l'argent dans sa poche volontairement ou, en tout cas. aller demander une somme d'argent à son patron pour n'importe quoi. Il peut dire que c'est pour du tabac. Il peut dire que c'est pour 3utre chose. Il peut obtenir l'argent, l'avoir dans sa poche et puis dire au représentant de l'union: Voici, je te paie ma cotisation", les frais d'initiation et la première cotisation. C'est la seule fois dans sa vie, avec les lois actuelles, que ce salarié, après avoir été convaincu, aura le privilège de faire ce geste lui-même, comme dans l'industrie d'ailleurs.

Si le comité veut aller jusque-là - et remarquez bien que ce salarié en particulier n'aura jamais fait même ce geste fondamental, initial et originaire de payer -eh bien! pour te moins, ce qu'on peut dire, c'est que cette demande continue à être faite par lui. Je le répète, on parle de discrétion, évidemment, c'est usuel, dans le langaqe, lorsqu'on parle d'employeur, à l'époque d'organisation syndicale, quoique ce soit bien dépassé aujourd'hui, d'intimidation ou enfin de pratique interdite. Mais je dis ici que le système de payer d'avance ou de remettre des sommes d'avance aux employés de le forêt est déjà reconnu dans l'ordonnance no 39 du salaire minimum. Nous avons déjà le système reconnu. Si l'employé a de l'argent à son compte, à son crédit, si on veut garder la discrétion, rien de plus simple que de le lui dire tout simplement plutôt que de le demander pour une autre raison et de le remettre à l'agent syndical. Si on veut garder la formule plus directe de forcer l'employeur à remettre cet argent si une demande d'avance est faite pour des fins de première cotisation et de frais d'initiation, encore là, nous n'aurions pas d'objection formelle, sauf que nous tenons à ce que la demande soit faite par l'employé lui-même et non pas par le truchement de l'association et par une cession de créance.

Il est reconnu - et je pense que je ne dis rien de nouveau ici - que lorsqu'un syndicat organise une usine, il fait signer des cartes et quand il en a suffisamment, je pense qu'on peut présumer que dans bien des cas, les cartes sont datées à une date la plus rapprochée possible de la demande de certification, parce qu'en fait, il n'y a que l'effet d'initiation. La première cotisation est payée et on date les cartes quand on est suffisamment assuré qu'il y a majorité.

Alors, je dis que dans la forêt on pourra procéder de la même façon. L'agent syndical, chez nous plus que partout ailleurs, étant déjà sur les lieux - il demeure chez nous, nous le logeons et nous le nourrissons, évidemment à un certain taux, un taux, comme vous le savez, que nous concédons à nos employés - il peut arriver avec son groupe de cartes, ses demandes d'avance de la part de chacun des salariés, et dire: Voilà les gens qui demandent de faire des retenues sur leur salaire pour payer telle chose et telle chose, voulez-vous faire ces retenues sur leur salaire pour payer telle chose et telle chose; voulez-vous faire ces retenues. Immédiatement, l'agent syndical, connaissant le camp très bien puisqu'il y demeure - dans l'industrie, ils n'ont pas ce privilège - nous n'avons pas de doute du moins qu'il fasse une campagne syndicale. Nous n'avons pas de doute qu'il ait rencontré les employés à maintes occasions. Il les rencontrera dans nos bâtisses, dans nos bâtiments, il sera chez nous au su et au vu des contremaîtres,

même du propriétaire ou de l'exploitant, alors il n'y a aucune cachette possible et je dirais même - et c'est évidemment le but de l'article, sans doute - qu'il n'y a aucune possibilité d'intimidation d'aucune sorte. Alors, nous nous objectons à la cession de créance en faveur de l'association pour cette première cotisation et les frais d'initiation et nous acceptons le texte soumis par le comité, disons, du moins le texte de la loi avec l'amendement, toutefois du syndicat, s'il le croit utile. Cette demande écrite du salarié constitue, pour fins de la présente loi, le paiement du droit d'entrée de la première cotisation, pourvu que ce salarié ait cette somme à son crédit.

Évidemment, on pourrait peut-être améliorer le texte pour dire que ça constitue une quittance mais je ne vois pas l'utilité du tout de procéder par cession de créance.

Le droit du salarié, on le dit toujours, c'est un droit qui est personnel, alors, au moins pour la première fois où, dans sa vie, il devient membre et paie sa cotisation, nous tenons, comme employeurs, à garder cette relation personnelle qui existe entre l'employeur et le salarié, lorsqu'il y a une demande de paiement de cotisation syndicale que nous acceptons de faire.

M. Barry: René Barry, M. le Président. L'industrie du bois de sciage voit une certaine objection dans l'application de cet amendement proposé par les syndicats sur ce qui se rapporte à ces exploitations forestières, étant donné, comme M. Turpin l'a si bien mentionné, les difficultés de contrôle des cotisations envers ces ouvriers. Il s'agit tout simplement d'une traite qui est tirée par deux personnes à l'endroit d'une troisième personne à son insu, sans qu'il y ait possibilité de vérification. Selon l'article 37, on procède également par autorisation à prélever sur les salaires dus les retenues syndicales. L'autorisation est alors remise dans les mains de l'employeur et ce transfert de droit est fait en connaissance de cause par les trois personnes. Avec l'amendement qu'on propose à l'article 9, il faudrait de toute façon que l'employeur soit informé de ce transfert ou de cette traite qui est tirée à son endroit.

M. Provost: Il y a une chose, M. le Président, qui me frappe. On parle de créance envers une troisième personne. Il y a un régime spécial, en forêt, qui est différent de celui de l'industrie parce que le gars n'a pas d'argent à dépenser, puis l'ordonnance veut, pour le bon ordre, que l'argent reste au patron. Mais il lui appartient techniquement, du moment qu'il l'a gagné. Le patron agit comme une banque envers lui, ni plus ni moins. Il garde son argent en dépôt pour le moment où il en aura besoin ou lorsqu'il sortira de la forêt.

Deuxièmement, aujourd'hui, on vous dit: Il mentira, il dira que c'est pour du tabac, il mentira pour payer le $2, il mentira quand le patron demandera s'il a rejoint le syndicat ou non, mentez, mentez, il reste toujours quelque chose, peut-être pas du syndicat. Mais, on a beaucoup exploité ceci dans le passé. Je dois attirer votre attention sur le fait qu'on a demandé des requêtes devant la commission, des paquets de tabac ou de paquets de cigarettes, pour prouver que les gars avaient payé. Je pense qu'il est temps qu'on sorte de ce régime-là qui est tout à fait anormal, à mon avis. Pour que ce ne soit pas révélé, le gars allait au magasin -parce qu'ils ont des magasins, apparemment, dans certains camps - suis il disait: Je veux avoir pour $3 de cigarettes. Puis le syndicat allait revendre les cigarettes après pour avoir $3. Je pense que tous les gens sérieux vont admettre qu'il y a quelque chose d'anormal et d'irrégulier dans ce système-là et qu'il faudrait trouver une formule pour le régulariser, le normaliser.

M. Lesage: On a parlé de traite, M.. Provost. Si je vous signe une traite sur une banque, la banque n'est pas représentée lors de la signature. Je vous signe une traite et vous l'utilisez en temps utile, dans la mesure où il y a des fonds, c'est comme un chèque.

M. Gagné: Je ne sugqère pas qu'on paie avec des paquets de cigarettes ou des boîtes de tabac. Je dis tout simplement que si c'est aussi vrai que ça que l'argent le ce salarié-là lui appartient, il n'a même pas de justification à donner: il a le droit d'avoir des "paid out", comme le prévoit l'ordonnance no 39. Il a le droit d'avoir $5, s'il l'a à son crédit, il a le droit d'avoir $10.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Gagné, si vous me permettez une question, qu'est-ce ça peut faire, sauf si on a l'intention - je ne veux pas vous en prêter -sauf si on a l'intention de se servir de l'individu en sachant ce qu'il fait. Qu'est-ce que ça peut faire qu'il fasse cette traite dont parlait le premier ministre? Qu'est-ce que ça peut faire? C'est son argent. S'il l'a, il l'a, s'il ne l'a pas, vous ne le paierez pas.

M. Gagné: Quand il y a transport de créance, M. le ministre, l'individu le sait certainement. Il faut qu'il le sache.

Je soumets tout simplement...

M. Lesage: Non, non. on signifie le transport de créance.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si je vous fais un chèque, moi, M. Gagné, je n'ai pas besoin de répondre, vous non plus, vous le verrez quand vous verrez qu'il n'y a pas de fonds, puis vous courrez après.

M. Gagné: Ce que je dis, c'est que ce n'est pas là la question, en fait. La question, à mon humble avis, c'est qu'il s'agit du paiement d'une cotisation syndicale. Nous avons l'agent sur les lieux. Je sais fort bien que le ministre ne peut pas m'imputer des actions de mauvaise foi. Mais avec l'article que nous avons ici, principe auquel nous ne nous objectons pas, nous pouvons garder des agents syndicaux dans la forêt durant quinze jours, trois semaines, et je dirais que toute activité contraire à l'activité syndicale qui se produit, ce serait beaucoup trop visible, ce serait trop facile de combattre toute action de l'employeur. Nous l'avons chez nous.

M. Dozois: Vous ne savez pas quand même qui a signé ou qui n'a pas signé, tandis que vous savez qu'il y a de l'activité syndicale. Mais de la minute où il va y avoir une procession d'employés qui va réclamer $3.00, vous allez les identifier au fur et à mesure...

M. Marchand; C'est ça.

M. Gagné: Dans ses précisions, je ne sais pas si j'ai bien compris, Me Desaulniers a dit: deux jours avant, ou quelque chose comme ça. Qu'est-ce que c'est, ça? Vous avez mentionné tout à l'heure: deux jours avant la demande d'accréditation, parce qu'il faut que la cotisation soit payée au moins avant que la requête soit présentée. Est-ce que j'ai bien compris quand vous avez dit qu'on se fera payer la cotisation le même jour, toutes en même temps, quelques jours avant l'accréditation?

M. Desaulniers: M. le Président, avec votre permission et en réponse à mon confrère, M. Gagné, je vais suivre la recommandation ou du moins prendre en considération l'observation qui nous a été faite. Je ne veux pas pour le moment discuter de questions légales, je dirai simplement que, si je comprends la loi, la loi a raison, pour des raisons particulières de décider d'aider l'employé, de faciliter son paiement. C'est ce que la loi veut faire. Or, actuellement, on discute dans quelle condition le paiement doit être fait. Je soumets que le problème qui est en jeu et qui est le problème principal, c'est que le législateur, ayant trouvé une facilité à l'employé de faire son paiement, ce n'est pas à l'employeur de dire comment ça va se faire et comment il va se servir du droit que le législateur lui donne.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais il a tout de même le droit de suggérer, quitte au comité à prendre ses responsabilités. Je pense bien que...

M. Desaulniers: Oui, ce n'est pas au point de vue suggestion, que j'ai dit. J'ai dit: on demande un texte précis.

Une voix: On suggère...

M. Desaulniers: On suggère un texte précis. Le texte précis a pour effet de faire exactement le contraire de ce qu'on suggère.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien oui, mais ça ne veut pas dire que le comité va l'accepter.

M. Desaulniers: Je n'ai pas pris ça pour acquis, M. le Président.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Non, ce que vous voulez dire, si vous me permettez, c'est que le problème est d'éviter l'identification des gars à mesure qu'ils viendraient, un par un, dire: "J'ai demandé de faire partie du syndicat, donc, j'ai besoin de $5.00 ou de $2.00". On suppose qu'il n'y en aura pas, mais à supposer qu'il y ait de la mauvaise volonté de la part de l'employeur vis-à-vis d'un syndicat en voie de formation, ça lui permettrait de "sacrer" dehors tous les gars qui veulent en faire partie. C'est ça.

M. Lesage: Il y a d'ailleurs des employeurs, des "jobbers", par exemple, qui, à certains de leurs employés, ne donnent pas d'argent, sur la recommandation de la mère de famille.

M. Provost: M. le Président, s'ils n'avaient pas peur d'aller à l'employeur, M. Turpin justement nous a dit que, dans certaines circonstances, ça peut prendre une semaine, quinze jours avant qu'il leur donne $5. Alors, l'organisateur syndical en forêt, lui, il va être obligé de demeurer dans le camp une semaine, quinze jours ou trois semaines de plus, jusqu'à ce que le patron ait pu faire sa comptabilité. Alors, on dit: Il est là, il a une preuve de paiement, une preuve de créance. Comme disait le premier ministre, il a signé ses cartes. Il sort de la forêt; il dit à la commission: "Voici." L'inspecteur va voir dans les livres du patron, il l'avise puis il dit au patron: "Bien, ce gars-la, il avait $2, $3 ou $5. On a la majorité, voici le certificat." Ce n'est pas plus compliqué que ça.

M. Gagné: M. le Président, pour terminer sur la même réserve que pour les autres articles, vu que je viens d'avoir le texte, je vais soumettre un texte pour convenir aux remarques que j'ai faites. En second lieu, je souligne à mon confrère tout simplement une chose: c'est tout de même un service que nous rendons quand nous percevons les cotisations.

Une voix: Ah! quand vous payez les ouvriers, vous leur rendez service.

M. Gagné: Pas plus.

M. Barry: M. le Président, René Barry. Si j'ai mentionné tout à l'heure les difficultés que ça comporte, c'est en tenant compte du complexe d'opérations forestières où l'on a, dans des article précédents, transmis les responsabilités de traitants à sous-traitants, et de sous-traitants à sous sous-traitants, etc. Alors, étant donné la difficulté de vérification, étant donné le grand pourcentage de population flottante dans la main-d'oeuvre forestière, il n'est pas question du tout de refuser les paiements à une personne qui a des droits. Je ne connais pas un entrepreneur forestier qui conteste le salaire quand il est gagné. C'est simplement une question de contrôle que tout homme en affaires doit tenir. Maintenant...

M. Lesage: Vous savez comme moi qu'un "sous-jobber" qui part, avec son groupe de bûcherons, de sa petite paroisse, puis qui a la recommandation des femmes, avant de partir, de ne pas donner un sou à leur mari pour certaines raisons, il se sent obligé de ne pas leur donner un sou. Je sais ça. Il y a des "jobbers" qui...

M. Bellemare: Ils envoient leurs chèques d'en bas...

M. Lesage: Bien ça, je l'ai vécu. J'étais député à Montmagny et j'ai eu conaissance de ça. Dans certaines paroisses, il partaient en groupes; il y en avait un qui était le petit "jobber". Il ramassait les bûcherons de la paroisse pour ses employés. C'était entendu. La condition, c'était ça.

M. Barry: Il ne faudrait pas ériger la question en principe puis insinuer que toute la main-d'oeuvre forestière est en tutelle...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

À l'ordre, s'il vous plaît, on ne comprend rien.

M. Barry: ... sous la tutelle de la maman ou de l'épouse, pour des raisons qu'on ne mentionnera pas.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): On est tous en tutelle.

M. Barry: Pas pour un montant de $5, M. le ministre. Maintenant, c'est tout à fait inique d'insinuer que les intentions pieuses sont d'un seul côté puis que les intentions mauvaises sont de l'autre côté, du côté patronal. Et il ne faut pas insinuer que l'article 12 qui dit que nul ne doit utiliser l'intimidation, ça s'applique aux patrons.

Alors, il ne faut pas présumer que chaque fois qu'un ouvrier...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On n'est pas rendu à 12...

M. Barry: Non, mais tout de même, on anticipe peut-être un petit peu, on a anticipé par les insinuations.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 12 s'applique au deux.

M. Barry: Oui, évidemment, alors le texte de l'article 12 s'applique à la mauvaise intention des deux parties. Quand on dit que toute personne qui va aller chercher de l'argent, que ce soit pour emprunter, pour acheter des bas de laine, du tabac ou pour payer une cotisation syndicale, il ne faut pas croire que le patron va immédiatement user d'intimidation.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 10.

M. Marchand: Seulement une remarque générale, M. le Président. Ici, il s'agit de la reconnaissance de l'association des employeurs. Il n'y a aucune restriction. Il n'est pas indiqué qu'ils doivent être membres en règle, qu'ils doivent payer leur cotisation, ni dans quelles conditions ça doit se faire. Cela ne nous fait exactement rien, nous sommes heureux. Ils ont le droit d'association...

M. Bellemare: Même, M. Marchand, si, à l'article 3, ils ont fait ajouter: Tout salarié...

M. Massicotte: M. le Président, nous remercions M. Marchand de nous permettre de nous associer. Nous faisons remarquer aussi qu'il était difficile, je pense, à M. Marchand de s'objecter au texte, vu que c'est sensiblement le même texte que celui qui donne le droit d'association aux salariés. C'est la parité, nous sommes contents que vous la reconnaissiez.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord.

M. Massicotte: L'article 11, premier paragraphe, prévoit qu'aucun employeur ni aucune personne, agissant pour un employeur ou une association d'employeurs, ne cherchera par intimidation d'aucune manière à dominer, entraver ou financer, etc. Cette première partie de l'article 11, M. le Président, et je parle à ce moment-ci au nom d'employeurs, a été bien mal comprise de la part de beaucoup d'employeurs et même, dans certains cas, de la part d'avocats qui ont conseillé les employeurs.

Voici un article où nous demandons la parité. Les employeurs ont cru généralement que dès qu'une union ou un syndicat commençait des activités d'organisation, leur liberté de parole leur était enlevée par ce premier paragraphe de l'article 11. Pendant le même temps, les organisateurs d'unions exerçaient, eux, leur droit de parole sous toutes sortes de formes, sous forme de circulaires, sous forme de pamphlets, etc. Nous suggérons, du côté employeur, d'ajouter un texte qui se lirait comme suit:

M. Lesage: Voulez-vous attendre un instant, M. Massicotte? Je voudrais bien que la jeune fille soit ici pour insérer le texte.

Bill no 54

Amendement suggéré Article 11

M. Massicotte:. "Aucun employeur ni aucune personne agissant pour un employeur ou une association d'employeurs ne cherchera d'aucune manière à dominer, entraver ou financer la formation ou les activités d'une association de salariés ni à y participer. "Aucune association de salariés ni aucune personne agissant pour le compte d'une telle organisation n'adhérera à une association d'employeurs ni ne cherchera à dominer, entraver ou financer la formation ou les activités d'une telle association ni à y participer. "Le fait d'exprimer ou de distribuer des opinions, des arguments, des points de vue, que ce soit sous forme écrite, imprimée, graphique ou visuelle, ne constitue pas ou ne peut faire preuve d'une pratique interdite au sens des dispositions du présent code, pourvu que cette expression ou cette distribution ne contienne aucune menace, intimidation ou promesse."

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'y a pas de changements dans les deux premiers paragraphes?

M. Massicotte: Non, mais nous suggérons d'ajouter au texte de l'article 11 un troisième paragraphe qui reconnaîtrait, que ce soit du côté employeur ou que ce soit du côté employé, le droit de parole, soit en transmettant ses vues par écrit ou autrement, à condition que l'exercice de ce droit de parole ne constitue pas ou ne fasse pas preuve d'intimidation, de menaces ou de promesses.

Je pense que, là au moins, il y aura un énoncé de principes que les gens de la Législature connaissent bien: la liberté de parole. Pour une fois, tout le monde saurait que, d'abord, il ne viole pas les clauses du Code du travail en ce qui concerne l'intimidation, la coercition. Nous avons le droit de parler, nous avons le droit d'émettre nos opinions personnelles à l'endroit des problèmes auxquels nos employés font face, de façon qu'ils puissent exercer leur droit d'association, comme on l'appelle, dans un champs plus libre.

M. Desaulniers: M. le Président, je crois qu'il n'est pas nécessaire de mettre dans une loi que l'on peut exprimer des opinions. L'ensemble de notre législation est fait de telle sorte que toute personne a le droit d'exprimer les opinions qu'elle veut exprimer. Et la restriction quant à l'expression de parole est régie par des législations de portée générale et ce ne sont que les tribunaux qui peuvent décider, et non pas la loi, si, lorsque je me suis exprimé, je l'ai fait contrairement à la façon dont la loi me permet de le faire.

Maintenant, si vous me permettez, peut-être que vous comprendrez un peu plus la portée du dernier paragraphe et les exemples peuvent souvent servir. Je vais vous donner un cas que je connais personnellement. Une organisation a présenté dix requêtes à la Commission des relations ouvrières pendant huit ans; sur les dix requêtes, nous avons dû faire face à deux ou trois brefs de prohibition. À un certain moment, nous avons obtenu qu'il n'y ait pas de bref de prohibition à la condition, malgré que nous avions la majorité, qu'il y ait un vote a la demande de l'employeur; nous avons accepté. Deux jours avant le vote ou même une journée avant le vote, et peut-être la journée du vote, il y a des wagons qui sont entrés dans la cour de la compagnie et l'employeur a expliqué, c'était son opinion sur un problème purement d'administration, que pour des raisons économiques, il était obligé de faire transporter sa machinerie à New York parce que la production se ferait à New York. Inutile de vous dire que cette expression d'opinion a eu pour résultat que nous avons perdu le vote. Vouloir déterminer par la loi...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce qu'il est parti pour New York après?

M. Desaulniers: Non, il est encore là. Simplement, on doit vous dire que nous rencontrons, avec une nouvelle requête encore, les mêmes procédures; alors, je suggère que quant au dernier paragraphe, cela sera à la Commission des relations ouvrières d'interpréter, suivant les faits qui lui sont apportés, si oui ou non l'expression d'opinion a été faite conformément aux dispositions de la loi.

M. Massicotte: M. le Président, Jean Massicotte. Évidemment, avec le texte que nous soumettons et avec l'exemple que M.

Desaulniers vient de donner, je pense il aurait appartenu à l'union qu'il représentait d'aller prouver à la commission que la compagnie s'était servie de son droit de parole contrairement aux dispositions de la loi. Maintenant, ce qui m'inquiète le plus, c'est que justement nous soumettons devant vous un texte où cela donne la parité. On ne vous a pas demandé un texte pour permettre à l'employeur d'exprimer ses opinions, on demande un texte, le même pour les deux. Maintenant...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Massicotte, est-ce que vous avez vu souvent des employés empêcher la formation d'association d'employeurs?

M. Massicotte: Cette partie du texte, je ne l'ai jamais comprise incidemment.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): C'est pour cela qu'en fait, cela s'applique uniquement dans un sens.

M. Massicotte: Non, voici, un instant, M. le ministre, si vous me permettez. Je suis prêt à suggérer ceci; c'est que ce texte, si vous voulez, qui apparaît comme troisième paragraphe devienne, comme dans une autre loi que je connais, un article particulier. Il n'est peut-être pas dans le contexte et comme question de fait, il est traduit, si vous voulez, de l'article 8-C de la législation américaine. Je pense qu'aux États-Unis, on semble reconnaître les principes de liberté. C'est l'article 8-C, tout probablement mal traduit, mais enfin, nous avons cru que le principe était bon pour tout le monde, que les employeurs et que les gens sachent qu'ils ont le droit de parole, même en période d'organisation syndicale.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous me permettez une question? Tout simplement, sur le fond de l'affaire, l'information, en fait. Quand vous dites opinions, arguments, points de vue, c'est de l'information, finalement peut-être de la propagande avec le but très net de rejoindre le premier paragraphe qui est: "Ne cherchera d'aucune manière à dominer, à entraver", mais finalement, cela va être une question d'interprétation. Alors, pourquoi ajouter une chose qui, finalement avec les trois derniers mots "menace, intimidation ou promesse", va revenir au premier paragraphe où quelqu'un va être obligé d'interpréter de toute façon, si la compagnie essaie de se servir du mot "opinion" pour faire, en fait, la menace, l'intimidation ou la promesse?

M. Massicotte: Mais, M. le ministre, évidemment, ce texte que nous suggérons touche aussi à l'article 12 et à l'article 13.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Enfin, je trouve que cela ne donne rien.

M. Massicotte: Bien voici. Nous sommes, si vous me permettez, M. le ministre - je parle pour moi, si vous voulez, sans parler pour une association - j'ai eu l'occasion de représenter les employeurs devant la Commission des relations ouvrières; il y a les mots, dans le premier paragraphe: "en aucune façon, vous n'essaierez d'entraver". J'exerce mon droit de parole, je ne fais pas d'intimidation, je ne fais pas de menace de renvoi, je ne fais aucune coercition; j'explique à mes employés que, par exemple, il serait peut-être bon qu'avant de signer une carte d'union, ils se posent certaines questions; ils sont libres de joindre l'union, mais enfin, je leur fais penser à certains points auxquels ils doivent penser, peut-être comme tout le monde intelligent. Si on me demande d'entrer dans une Chambre de commerce, je vais me poser certaines questions, j'ai droit à certains renseignements. Alors, il n'y a pas de menaces, d'intimidation, mais on dit: Vous entravez la formation ou les activités, et nous le savons; du côté de l'employeur, quand nous allons devant la Commission des relations ouvrières, pour employer une expression dans ces matières, une expression anglaise, "we have got two strikes against us". Du moment qu'on parle comme employeur, on nous présume encore, comme sous d'autres articles, comme ayant voulu empêcher la formation ou les activités d'une union, alors qu'en fait, nous faisons ce que nous croyons être simplement exprimer une opinion librement, comme on doit le faire dans une société comme la nôtre.

M. Lesage: On dit qu'au Conseil supérieur du travail, il y avait unanimité sur cet article.

M. Marchand: M. le premier ministre, ça...

M. Massicotte: Si vous me permettez, en lisant les recommandations faites par le groupe d'employeurs, faites par le Conseil supérieur du travail, il y avait une recommandation - l'article 13, je crois - des employeurs un peu dans le sens que j'indique, mais qui était unilatérale, c'est-à-dire qui le s'appliquait qu'aux employeurs. Après en avoir discuté avec mes collègues, nous en sommes venus à la conclusion que nous ne devrions peut-être pas vous demander des privilèges spéciaux, mais que les unions aussi bien que nous devraient avoir le même privilège. Il n'y a pas eu unanimité en ce qui concerne le droit de parole au Conseil supérieur du travail.

M. Lesage: Sur le principe...

M. Marchand: Je pense qu'on n'a pas besoin de la Loi des relations ouvrières pour donner le droit de parole aux employeurs. Ils l'ont, le droit de parole. La seule chose, s'ils l'utilisent à l'encontre des dispositions de la loi, eh bien, on en discutera à la Commission des relations ouvrières. L'histoire est qu'il y a une vieille présomption ou une vieille philosophie qui existe encore. Je dois dire ici, pour le bénéfice de tous les gens de bonne foi, que dans la grande entreprise, ces problèmes ne se posent pas aujourd'hui; enfin, on n'a pas de difficultés. Le syndicalisme est accepté, ils se battent au moment de la convention collective, mais en dehors de ça, il n'y a pas de difficultés.

Le droit d'association est un droit qui appartient aux employés puis les employés n'appartiennent pas aux employeurs. Ce n'est pas leur propriété, c'est un droit qui appartient aux employés et ce que la loi tente de faire, c'est de faire en sorte que ce droit soit exercé normalement, qu'il n'y ait pas d'entrave. Qu'est-ce que c'est, les employeurs? Enfin, qu'est-ce que M. Massicotte allait dire en donnant des informations sur les unions aux employés? Si vous rentrez dans tel syndicat, votre argent va aller aux États-Unis; si vous gardez votre argent ici, dans une association indépendante, évidemment, ça va vous en faire plus. Qu'est-ce que vous voulez? C'est ça. L'employeur n'est pas le gars qualifié pour donner des informations sur les unions. On va les donner, nous autres.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Est-ce que c'est ça que vous considérez comme une menace?

M. Marchand: Oui, c'est de l'intimidation parce que moi, si je ne veux pas de syndicat, si je suis employeur, je donne des informations ou des renseignements qui vont inciter le gars à ne pas y entrer, etc. L'histoire, c'est qu'il faut considérer -la loi le reflète, d'ailleurs - le projet qui est devant nous. Les travailleurs sont des citoyens adultes, qui s'appartiennent à eux-mêmes; ils ont un droit qui s'apoelle le droit d'association et leurs seules restrictions sont des restrictions qui visent justement à empêcher qu'on abuse de ce droit et que justement ils ne puissent pas le faire en pleine liberté; ça, d'accord. Mais qu'est-ce que l'employeur vient faire là-dedans? Est-ce qu'on va se mêler de leur association, nous? C'est normal, ça ne nous regarde pas.

M. Johnson: Ils ont même le droit de se faire informer.

M. Bertrand (Missisquoi): Oui. M. Marchand: Les employés?

M. Johnson: Oui.

M. Marchand: Ils peuvent se faire informer. Si les informations sont tendancieuses, on ira devant la Commission des relations ouvrières et la commission plaidera.

M. Provost: C'est ça.

M. Johnson: Vous ferez comme les politiciens, vous avez les journaux, vous endurerez.

M. Marchand: Oh oui! On est une organisation démocratique comme toutes les autres; on a eu nos bombes, on a eu, à un moment donné, des hommes forts, c'est possible, mais on n'a pas été tout seul à en avoir; il y a même des institutions très respectables qui en ont eu dans la province.

M. Lesage:. Délibéré, délibéré.

M. Brown: Sir, looking over the section 11, it worries me quite a little because 1 find that section 11 is diametric to section 9. On section 9, we just finished up with the employer who practically invites the organizer into his camp, feeds him, gives him his money; he is something like a fellow going out duck hunting and he has somebody even put the ducks in his bag and then, we find that in his particular paragraph here "any man who seeks to dominate or finance the formation of the activities". Now, what is more "financing activities" than to pay the dues or to advance the dues of the worker from the point of view of the manager than we come along with section 11 and say: Well, you are not supposed to even see, talk, touch, nothing to do with the employee whatsoever? I am really worried about this type of thing if it goes before the Supreme Court...

M. Lesage: In the case of the forestry workers, the situation is different. And when you say that the employer feeds the representative of the union, he feeds him, but he has to pay.

M. Bertrand (Missisquoi): He pays.

M. Lesage: He pays for his meals and lodging.

M. Bertrand (Missisquoi): You read the article again.

M. Brown: I understand that quite well, but at the same time, we have financed the formation of... Well, here is the employer who is advancing the money...

M. Bertrand (Missisquoi): No, no, the

money belongs to the employee.

M. Brown: But advances money from the salary of the man.

M. Johnson: On condition that the guy has the...

M. Brown: But the money belongs to the employee. Well, something like my boy who has his advance coming along. He comes to me and says: Hay! Dad, I would like to go to the show tonight.

M. Bertrand (Missisquoi): The employee is not the child of the employer.

M. Lesage: Mr. Brown, it is the same as if you transport me under your signature, part of your indemnity.

M. Bertrand (Missisquoi): Regardez...

M. Renault: Je voudrais attirer l'attention du comité sur le fait que ce paragraphe n'est pas seulement à l'avantage, s'il y a avantage, de l'employeur. Il s'applique aux deux parties. L'exemple que M. Desaulniers a donné, je pourrais le soumettre à votre comité textuellement, au point de vue pratique, automatiquement ou pratiquement automatiquement, lorsque l'employeur veut donner certaines informations à ses employés. Je vous fais remarquer que dans certains cas, c'est assez nécessaire, ça dépend avec qui on peut ou avec qui l'employeur peut faire affaires. Il n'y a pas de problème quand on fait affaires avec la CSN ou la FTQ ou, enfin, la Fédération du travail.

Mais il y a d'autres unions qui sont peut-être actuellement enquêtées ou toutes sortes de choses du genre, où l'employeur aime à donner des informations et je soumets, si j'en juge par le nombre de contestations ou de requêtes en révision qui ont été faites - et j'en ai encore pendantes - qu'actuellement, devant la Commission des relations ouvrières, certaines requêtes ont été faites seulement parce que l'employeur a donné des lettres ou a fait circuler des lettres à ses employés ne donnant que les faits qui s'étaient passés ou ce qu'il croyait. Peut-être qu'il peut avoir fait erreur, mais je ferais remarquer que d'après le débat, si on s'oppose à ce qu'on intercale un article qui...

M. Bertrand (Missisquoi): M. Renault, si vous me le permettez, vous êtes un excellent avocat, M. Massicotte aussi, ne croyez-vous pas que même avec votre dernier paragraphe, ça va être laissé à l'interprétation du juge de dire si l'écrit, l'argument, le point de vue a été une menace, une intimidation ou une promesse? Alors, c'est un cercle vicieux.

M. Renault: Je voudrais justement vous faire remarquer, M. Bertrand, que le problème actuel... J'ai des requêtes, je n'ai pas besoin de demander quoi que ce soit, le seul fait d'avoir fait circuler une lettre et on allègue qu'il s'agit d'une entrave.

M. Bertrand (Missisquoi): ... survenir au même.

M. Renault: Bien oui, mais enfin, si on a le droit, si c'est mentionné que...

M. Lesage: Vous ne pourrez pas empêcher, M. Renault, un plaideur de se présenter en prétendant que la lettre constituait une entrave.

M. Renault: Non, c'est très bien, mais le fait... Pardon?

M. Lesage: Avec le texte tel que vous l'avez maintenant...

M. Bertrand (Missisquoi): Il a tout ce qu'il faut pour juger.

M. Lesage: ... il faut que vous invoquiez, que vous prouviez que la lettre constituait une menace, une entrave. Votre dernier paragraphe en droit, comme un bon avocat... Et comme vient de dire M. Bertrand, c'est définitivement un cercle vicieux qui vous ramène aux deux premiers et particulièrement au premier.

M. Renault: Je l'admets jusqu'à un certain point, mais je crois et je soumets encore à votre comité qu'actuellement ce qu'on allègue, dans la majorité des cas, c'est que le fait de faire circuler, c'est une entrave en soi, sans même mentionner la lettre.

Des voix: Ah!

M. Renault: Ce sont les faits tels que je vous les soumets.

M. Lesage: Mais est-ce qu'il arrive que le seul fait de faire circuler une lettre ait été reconnu comme une entrave par la Commission des relations ouvrières sans que celle-ci ait pris connaissance du texte de la circulaire ou de la lettre et ait jugé au mérite?

M. Renault: Je dois admettre que ce rapport a été fait.

M. Marchand: Quand on a une commission comme ça, ça ne sert à rien d'avoir une loi, il peut arriver n'importe quoi.

M. Renault: Ce sont les délégations

qu'on fait...

M. Bertrand (Missisquoi): Il va revenir ce soir.

M. Bélanger (René): René Bélanger, Fédération des employés des corporations municipales et scolaires. Dans le texte de l'ancienne...

M. Lesage: Parlez plus fort parce que...

M. Bélanger: ... loi, on n'avait pas ce dernier membre de phrase où on dit "ni à y participer". Évidemment, je pense que ça restreint un peu la liberté des employeurs qui ont compris quelques chose dans les encycliques sociales et les lettres collectives des évêques.

M. Provost: Comment va-t-on les distinguer, ceux-là?

M. Bélanger: Je comprends qu'il peut y avoir des abus, mais lorsqu'on ajoute ce texte, à mon avis, ça ne change pas grand chose, parce que lorsqu'on a dans le texte "dominer, entraver ou financer", je crois qu'on a suffisamment de choses pour prendre le patron qui voudrait organiser un syndicat de boutique. Je peux vous citer des exemples. Ça remonte à vingt-six ans. Le syndicat des fonctionnaires...

M. Gabias: Pas Trois-Rivières.

M. Bélanger: ... le syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec a été organisé et fondé dans une salle de l'hôtel de ville qui était la Cour municipale dans le temps, sous la présidence du maire du temps, la présidence d'honneur, si vous voulez, avec la présence de l'ancien président de la Confédération des travailleurs catholiques du Canada. Est-ce qu'avec un texte comme ça on ne pourrait pas dire que l'employeur a participé à l'organisation d'un syndicat?

Vous avez le cas d'une ville qui est voisine d'ici, à Sainte-Foy, par exemple, où la ville parle de participer à la formation. A Sainte-Foy, lorsque le gérant de la ville où les employeurs se sont rendu compte que les employés manuels s'étaient organisés, ils ont dit: "Les fonctionnaires, c'est une chose à venir. On aime autant prendre le problème de face." Ils ont invité les employés à se réunir dans la salle du conseil et puis ils m'ont fait demander et puis j'y suis allé. Les employés ont signé, certainement.

M. Provost: Svndicat de boutique.

M. Bélanger: Non, non, ce n'est pas un syndicat de boutique. Je vais vous le prouver. Je me suis rendu là. Les employés ont payé leur droit d'entrée. J'étais un petit peu surpris, mais on ne peut tout de même pas empêcher un employeur qui est favorable à l'organisation ouvrière, il y a une question de principe. Mais j'ai ici, M. le Président, justement une lettre collective qui a peut-être été oubliée, mais que je n'oublie pas, qui a été éditée en 1950, qui est la lettre collective des évêques de la province de Québec où on dit clairement que les patrons doivent favoriser l'organisation ouvrière. On dit, on spécifie que les patrons ce n'est pas leur devoir d'organiser des syndicats ni de s'immiscer dans leur vie, mais comment pourraient être interprétés les exemples que je vous ai donnés? Cela s'est présenté à la ville de Lachine aussi.

Et quand on parle de syndicat de boutique, c'est absolument faux. Le syndicat de Sainte-Foy n'est pas un syndicat de boutique. Il a toute sa liberté, mais il faudrait comprendre qu'un employeur pourrait être favorable à la formation d'un syndicat et ensuite lui laisser la paix. C'est ce qu'on a fait à Saihte-Foy, d'ailleurs; on ne s'est pas entendu lors de la première négociation. Nous sommes allés à l'arbitrage et nous avons eu, comme président du tribunal d'arbitrage, l'honorable juge Paul Lesage qui nous a rendu une sentence favorable. Et depuis ce temps-là, nous avons eu des griefs qui ont été réglés par le juge Paul Roy. Ce n'est absolument pas un syndicat de boutique.

À présent, il y a le point de vue, M. le Président, dans le cas particulier des villes... Alors je termine...

C'est parce que le cas particulier des villes est un peu différent des autres. Les salles de l'hôtel de ville sont à la disposition de tout le monde. Alors, ça arrive assez souvent, dans nos syndicats, qu'on a nos réunions dans les salles des conseils de ville et puis ça n'engage à rien les syndicats.

M. Lesage: M. Marchand, je voudrais vous poser rien qu'une question. Vous penserez à ça entre six et huit et vous me répondrez. Aucun employeur ni aucune personne agissant comme un employeur ou une association d'employeurs ne cherchera d'aucune manière à dominer, entraver ou financer la formation des activités d'une association de salariés ni à y participer. Supposons, par exemple, qu'un syndicat, un bon soir, donne une soirée de danse. Est-ce que ça veut dire que l'employeur n'a pas le droit de danser avec la présidente du syndicat?

M. Bertrand (Missisquoi): Pensez-y.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Silence, s'il 'vous plaît. La séance est suspendue jusqu'à huit heures.

(Suspension de la séance^

(Reprise de la séance à 20 heures)

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, nous sommes rendus à 12. Nous prenons en considération la suggestion de M. Massicotte, qui est dans le dossier, concernant le troisième paragraphe de l'article 11.

M. Pepin: M. le Président, est-ce qu'on peut revenir immédiatement aux articles suspendus, 6 et 7?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, je ne le sais pas.

M. Pepin: On avait dit qu'on donnerait une réponse ce soir; on est prêt à la donner.

M. Lesage: Un instant, c'est où ça?

M. Bertrand (Missisquoi): Les articles 6 et 7, page 4.

Recrutement syndical interdit pendant les heures de travail

M. Pepin: Alors, à l'article 6, M. le Président, M. Massicotte, au nom des employeurs, a proposé de modifier l'article 23 de la Loi des relations ouvrières, qui maintenant se lirait ainsi: "Personne ne peut, au nom ou pour le compte d'une association, solliciter pendant les heures de travail l'adhésion d'un salarié à une association." Alors, nous serions d'accord là-dessus.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Voulez-vous le relire, M. Pepin, qu'on voie? Actuellement, dans l'ancienne loi, si vous voulez, la loi actuelle qui est en marche, celle qui est en vigueur, l'article 23 dit: "Sauf avec le consentement de l'employeur..."

M. Pepin: Biffez ça.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors: "Personne ne peut, au nom ou pour le compte d'une association, solliciter pendant les heures de travail l'adhésion d'un salarié à une association".

M. Pepin: C'est ça. C'est la proposition de M. Massicotte sur laquelle nous sommes d'accord.

M. Crête: Marcel Crête, de la chaussure. M. le Président nous regrettons de ne pas être d'accord parce que, si cet amendement-là était accepté, ça veut dire qu'on pourrait même solliciter en dehors des heures de travail, c'est-à-dire à l'heure des repas. Alors, nous croyons qu'à ce moment-là ça peut engendrer des sources de conflits. Nous désirons enregistrer notre dissidence.

M. Marchand: Cela veut dire que, pendant l'heure des repas, on pourrait parler de politique, de religion, d'armes atomiques, mais pas de syndicalisme.

M. Crête: Faire du recrutement.

M. Marchand: C'est ça que ça veut dire.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 7?

M. Lesage: L'article 7, ce n'est pas ça qu'on vient de voir, là.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Non, c'est l'article 6.

M. Pepin: À l'article 7, notre suggestion serait la suivante: le premier paragraphe de l'article 7 tel que proposé dans le bill 54, pas de modification; le deuxième paragraphe de l'article 7 serait retiré de cet endroit-là et reporté à l'article 9 qui parle de la concession des forêts.

M. Bellemare: Deuxième paragraphe après le salaire minimum; ça peut s'ajouter là.

M. Pepin: Oui, oui, ça peut s'ajouter à cet endroit-là ou on peut en faire un 9a)si on le désire. Oui, avec une modification.

M. Lesage: Cela ne marchera pas, parce que ce n'est pas le sujet. Le troisième paragraphe commence par "il" qui se rapporte à l'exploitant qui ast le sujet du deuxième paragraphe.

M. Pepin nous proposons pour ce paragraphe serait d'ajouter après le mot "repas", le mot "logement". Alors, je le lirai au complet pour qu'on ait une meilleure idée du texte: "Les lieux affectés aux repas et logement des salariés ne sont pas considérés comme lieux de travail".

M. Lesage: Bien, M. Pepin, moi, je vais vous parler au nom des bûcherons. Je pense que M. Lévesque va être d'accord, Moi, j'ai été dans les camps de bûcherons. S'il y a un endroit où les bûcherons ne veulent pas se faire "achaler", c'est quand ils sont dans leur cantine pour se coucher. Dans les lieux de repas, très bien, dans un chantier - puis, je connais bien ça - d'accord, il peut y avoir des réunions, ça va bien là. Ils se réunissent là le soir. Mais qu'ils laissent dormir ceux qui veulent dormir parce qu'ils se lèvent à cinq heures et demie le lendemain matin.

M. Bellemare: Parce que, pendant les repas actuellement, c'est silence.

M. Lesage: Je trouve que ça n'a pas de bon sens et que ce n'est pas humain pour le bûcheron qui veut dormir, ce que vous proposez là.

M. Provost: M. le Président, la raison pour laquelle nous avons demandé d'ajouter le mot "logement" est la suivante. Vous allez peut-être pouvoir nous aider, messieurs les membres du comité. C'est parce qu'il arrive souvent que le lieu du repas n'appartient pas à la compagnie, appartient à un concessionnaire. Ils pourraient s'opposer, eux, parce que ça leur appartient, ils sont locataires, à ce qu'il y ait des réunions sur le lieu du repas. Si vous me trouvez une autre solution, on n'a aucune objection. Mais dans les cas de concessionnaires pour la nourriture, ça crée des embêtements.

M. Lesage: Peut-être, oui. Mais simplement, monsieur, une chose certaine, c'est qu'on trouve que ce n'est pas juste pour le bûcheron qui a travaillé dur toute la journée, qui veut se coucher et dormir, d'être pris avec un tas de gars qui font ce que vous savez autour de lui.

M. Provost: M. le Président, on n'y tient pas tant que ça, si vous mettez quelque chose dans la clause qui dit qu'au lieu du repas, même s'il est détenu par un concessionnaire, ils ont le droit.

M. Lesage: Mais, laissez dormir les bûcherons fatigués.

M. Bellemare: Même s'il est détenu par un concessionnaire.

M. Pepin: Alors, M. le premier ministre, je pense bien que, si on ajoutait cette disposition que vient de soumettre M. Provost, ce serait conforme.

M. Lesage: Oui. Autrement, ça n'a pas de bon sens.

M. Pepin: Alors, avec ça. ça rencontrerait les vues de tout le monde.

Une voix: Même s'il est détenu par un concessionnaire.

M. Massicotte: M. le Président, Jean Massicotte. En ce qui concerne notre groupe d'employeurs, à l'exception du groupe, disons, qui concerne la forêt et qui est représenté par Me Gagné et qui n'est pas encore ici, nous acceptons, évidemment, que soit ravée cette dernière partie de l'article 7 et qu'elle soit reportée à l'article 9, sujet aux commentaires de Me Gagné, s'il en a. Cela va être difficile d'en faire après les remarques du premier ministre.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 12.

M. Crête: M. le Président, Marcel Crête, de la chaussure, toujours. Nous suggérons respectueusement à l'article 12 d'ajouter les "fausses représentations" à part les "intimidations" et les "menaces", parce que, dans notre industrie particulière, nous soumettons qu'il y a des fausses représentations qui équivalent réellement à dol. Parce que, dans notre industrie, notre main-d'oeuvre principalement est féminine et d'âge, je dirais, en bas de vingt et un ans, il y a des fausses représentations très sérieuses qui réellement influent sur l'adhésion au syndicat. Nous croyons qu'au même titre que les menaces ou l'intimidation, les fausses représentations devraient être incluses dans l'article 12 comme pouvant influer défavorablement ou enfin préjuger à la liberté de l'employé d'adhérer au syndicat.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais il n'y aurait pas d'objection à une louange exagérée.

Une voix: Ce serait encore des fausses représentations.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je crois que les tribunaux civils ont parlé de louanges exagérées à un moment donné.

M. Crête: Cela s'applique aux associations d'employés.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, M. Desaulniers.

M. Desaulniers: Guy Desaulniers, procureur. M. le Président, avant de pouvoir faire une représentation concernant la suggestion, j'aimerais tout de même savoir, au point de vue de l'interprétation légale, ce que ça veut dire exactement "fausse représentation" qui équivaut à dol. Qu'on m'explique ce que ça veut dire.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est la représentation fausse d'un fait passé ou présent.

M. Desaulniers: Oui, je comprends, mais étant donné qu'actuellement nous discutons, n'est-ce pas, de situations particulières, comment cette formule peut-elle s'appliquer dans le cas présent?

Si on fait une demande d'amendement, je soumets qu'on peut savoir pourquoi on voit la nécessité d'ajouter ces mots à la loi. Alors, j'aimerais savoir pourquoi on veut ajouter ces mots, pour comprendre le sens qu'on veut donner à cette phrase.

M. Johnson: Si vous voulez un exemple

de louanges exagérées, écoutez le ministre du Travail parfois.

M. Desaulniers: Est-ce que c'est ça que ça voudrait dire dans le texte?

M. Johnson: Louanges exagérées, ah oui.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Si c'est rien que ça, ce n'est pas grave.

M. Crête: Je suis prêt à donner des exemples que nous avons vécus, M. le Président. On a dit par exemple, ici dans la région de Québec. On vous demande d'adhérer au syndicat parce que le ministre du Travail favorise la signature des conventions collectives particulières de façon à pouvoir amender le décret. À ce moment-là, je pense bien qu'on va peut-être un peu loin. On a dit un tas de choses. On a dit: Votre patron vous vole $0.25 parce qu'il est amateur de pêche au saumon, puis c'est vous autres, les employés, qui payez ça. Toujours pour faire du recrutement syndical. Alors, on n'est pas au niveau de la négociation de la convention collective, du moins à ce stade-là. Enfin, nous pourrions citer des tas d'exemples comme ceux-là et je répète que ça a de l'importance parce qu'on a affaire à des employés de 17, 18, 19, 20 ans qui sont excessivement impressionnables et toujours j'exclus les menaces et l'intimidation. Puisque dans l'économie générale de la loi, M. le Président, le mineur est restituable pour cause de lésion, bien, elles sont des mineures, ces jeunes filles-là. Je parle principalement de la main-d'oeuvre féminine, impressionnable et influençable et je soumets que ceci fausse réellement la liberté d'association du salarié.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Crête, quant à votre premier exemple, si on ramasse là toutes les déclarations que j'ai faites et que je ferai encore à l'occasion, je me demande si on va trouver que c'est une fausse représentation.

M. Crête: Non, non, ce n'est pas de vous montrer... Mais c'est sérieux, M. le ministre, parce que nous sommes régis par un décret et on sait que la prédominance actuellement, c'est le décret. Et les unions ouvrières, particulièrement dans la chaussure, veulent bien par le jeu de conventions particulières, forcer, si on veut, des majorations au décret. Et c'est de ça, de ces choses-là qu'on se sert.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il a des preuves qu'il donne une interprétation trop...

M. Crête: Je dirais que c'est plus que le "wishful thinking".

M. Gabias: M. Crête, quand le ministre du Travail a dîné avec les créditistes, est-ce que c'était une fausse représentation?

M. Crête: C'était au moins une fausse présentation.

M. Bertrand (Missisquoi): Il avait un vrai béret.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est un vrai beau portrait.

M. Bertrand (Missisquoi): Il avait un vrai béret.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, madame.

Mme Parent: M. le Président, je veux seulement m'opposer à ce qu'un représentant patronal se serve de l'excuse que la main-d'oeuvre féminine, jeune, peut être plus impressionnable que les autres. Je pense que les femmes qui travaillent ont autant de jugement, sont aussi responsables que n'importe quel autre individu.

M. Johnson: Très bien.

M. Marchand: Si réellement c'est tellement important de réglementer les discours de tous les représentants syndicaux -et là, je ne parle pas seulement des officiers, des organisateurs, mais de tous les travailleurs qui, à un moment donné, deviennent des propagandistes parce que ça peut conduire à la reconnaissance syndicale -je pense qu'à un échelon plus élevé, lorsqu'il s'agit d'élire un gouvernement, ce qui est encore plus sérieux que de choisir un syndicat, on devrait avoir la même disposition dans la Loi électorale.

M. Johnson: Voulez-vous en rédiger une, M. Marchand?

M. Bertrand (Missisquoi): On va amender la Loi électorale.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, à l'article 12, la suggestion de l'association de la chaussure est notée. Article 13?

M. Massicotte: Jean Massicotte. M. le Président, même si notre suggestion sur l'article 11, cet après-midi, pour la parité au point de vue de la liberté de parole n'a pas reçu de sympathie de la part des unions, n'a pas reçu, non plus, de sympathie de la part du gouvernement, ni de la part de l'Opposition...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Elle est notée.

Congédiement pour activités syndicales

M. Massicotte: ... nous demandons encore la parité. Le ministre des Ressources hydrauliques a dit cet après-midi, je crois, dans une remarque, que l'article 12 s'appliquait à tout le monde, ce qui est le cas. Cela s'applique aux employeurs, ça s'applique aux employés, ça s'applique aux unions. L'article 13 s'applique exclusivement aux employeurs. Maintenant, dans l'article 13, on ne se limite pas, par exemple, comme dans l'article 12 aux mots "intimidation ou menace", on ajoute: "menace de renvoi ou autre menace, ou par l'imposition d'une peine ou par quelque autre moyen". Nous suggérons, premièrement, à l'article 13, pour établir la parité entre l'article 12 et l'article 13, que l'on enlève les mots "par quelque autre moyen". Il y a déjà une énumération assez fantastique de toutes les choses qu'on peut faire contre les employés sans en laisser trop à l'imagination. Nous suqgérons aussi, à l'article 13, que le dernier paragraphe de l'article 13 soit enlevé. Nous croyons, évidemment, que cet article 13 était dans l'ancienne loi depuis peut-être 1944. La dernière partie de l'article 13 n'a plus de raison d'être à cause, évidemment, de la présomption qui a été imposée sur les employeurs par l'article 14.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Y a-t-il objection à barrer le deuxième paragraphe?

M. Marchand: Oui, sûrement objection, une objection, à part ça, fondamentale. Je pense bien qu'il n'est pas nécessaire d'élaborer longtemps. Voici, on présente faussement, à mon avis, la situation des rapports entre employeurs et employés. On parle de parité entre les deux. Il y a des choses qu'on a vues souvent dans notre vie, qui ont été constatées, d'ailleurs, par les tribunaux, c'est qu'il y a eu des employés de congédiés pour activités syndicales. Nous n'avons jamais vu un employeur congédié pour activités syndicales. Alors, si on veut la parité, il va falloir qu'on donne au syndicat le droit de "sacrer le boss dehors". Là, on va avoir la parité, mais ça n'existe pas comme ça, bon. Alors, qu'il y ait une différence dans les textes... Je reviens encore là-dessus, M. le Président: C'est une loi qui consacre le droit d'association des travailleurs. C'est ça qu'il faut protéger et je pense qu'il ne peut pas y avoir de parité entre les deux articles soulignés par M. Massicotte. Alors, quant au fardeau de la preuve, il y a une raison, c'est que les travailleurs sont réellement dans un état d'infériorité à ce sujet-là. Ce sont eux qui sont sujets à congédiement. Je pense que, dans une campagne d'organisation syndicale, s'il y a des motifs sérieux de croire qu'un employé a été privé de son gagne-pain parce qu'il exerçait un droit qui lui est consacré dans la loi, c'est à l'employeur de démontrer qu'il ne l'a pas fait pour ça. Alors, évidemment, c'est un article qui est fondamental au point de vue de la protection du droit d'association et nous demandons qu'il soit maintenu intégralement.

M. Massicotte: M. le Président, Jean Massicotte. Premièrement, je pense que M. Marchand a peut-être, avec son talent habituel, déplacé un peu la question. Je n'ai pas suggéré qu'on enlève dans le premier paragraphe les mots "menace de renvoi ou autre menace"; j'ai suggéré simplement qu'on enlève les mots "quelque autre peine". En ce qui concerne le deuxième paragraphe, nous soulignons qu'il nous semble que c'est une redondance parce qu'à l'article 16, c'est marqué encore: "Il incombe à l'employeur de prouver que le salarié a été congédié, suspendu ou déplacé pour une autre cause, juste et suffisante". Nous voulons simplement indiquer qu'il y a une redondance et qu'il n'est pas nécessaire qu'on le répète à deux places, à moins qu'on ne veuille absolument nous convaincre que c'est à nous autres le fardeau de la preuve.

M. Marchand: C'est ça qu'on veut faire. M. Massicotte: Mais on le sait.

M. Crête: À tout événement, si la suggestion de Me Massicotte n'est pas acceptée en ce qui concerne le deuxième paragraphe qu'il voudrait faire radier, nous demandons qu'on enlève les mots "dont la preuve lui incombe" parce que, dans notre conception, dans toute l'économie de nos lois, je dirais, civiles et pénales, c'est au plaignant de faire sa preuve, c'est lui qui a le fardeau de la preuve. Si on nous accuse de quelque chose, eh bien, au moins qu'on le prouve. Si, à tout événement, la suggestion de M. Massicotte n'est pas acceptée d'emblée, comme alternative nous suggérons respectueusement d'enlever les mots "dont la preuve lui incombe" à la fin de l'article.

M. Desaulniers: Si vous le permettez, je ferai remarquer que, lorsqu'il s'agit de l'article 13, il ne s'agit à ce moment-là que de pratiques interdites. Donc, l'article 13 ne doit pas s'interpréter en raison de 14, 15 et 16.

M. Lesage: Je crois qu'on peut établir une présomption sur 13, c'est seulement à 13 qu'on peut l'établir.

M. Desaulniers: C'est ça. Ce n'est pas une redondance; elle est obligatoire, la répétition.

M. Lesage: Certainement.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 14?

M. Pepin: Alors, voici, M. le Président, sur l'article 14, ça ici c'est le bill no 3 adopté en ce sens; les articles 14 et suivants correspondent à 21 a) et suivants.

Une voix: C'est ça.

M. Pepin: Je pense que, dans l'ensemble, on peut dire que ces articles ont été bien reçus et ont donné des résultats convenables pour tout le monde. Maintenant, à l'examen et aussi à la pratique, on peut se rendre compte que certains employeurs ont tenté de contourner quand même l'article 14 et ont essayé de démontrer qu'ils n'avaient ni congédié, ni suspendu, ni déplacé un employé, mais qu'il avait été uniquement mis à pied et qu'il ne tombait pas sous les dispositions de l'article 14 et des suivants. Il avait été mis à pied en raison d'activités syndicales, quant à nous, mais ils disaient! Il n'a pas été congédié, il n'est pas suspendu, il n'est pas déplacé...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'était un jugement, ça?

M. Pepin: Non, cela à été prétendu et défendu devant la CRO. Alors, la seule chose, je pense, M. le Président, que nous pourrions ajouter, c'est, en plus de congédié, suspendu ou déplacé, les mots "mis à pied".

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Congédié puis mis à pied, il y a une différence entre les deux?

M. Pepin: Oui, parce que, voyez-vous, un congédiement en général, on l'interprète dans le domaine du travail comme étant un renvoi pour cause de cessation d'emploi. Dans une mise a pied, la relation entre employeur et employé n'est pas éteinte, elle existe encore. Alors, on dit: Non, il n'est pas congédié, ça existe encore, mes relations avec lui. Voilà pourquoi nous demandons de clarifier cela.

M. Lesage: Si c'est ça que ça veut dire "mise à pied", il a été suspendu.

M. Pepin: Bien, voyez-vous, il y a aussi la suspension pour raisons disciplinaires, M. le premier ministre.

M. Lesage: Mais oui, mais ça ne dit pas pourquoi ici.

M. Marchand: Une suspension, M. le Président, c'est une action dont le terme est prédéterminé, on vous suspend pour un mois, deux mois. Une mise à pied, c'est simplement parce qu'à un moment donné il y a une diminution dans les opérations de la compagnie. En anglais, ils disent: On a été "slackés". Ils ne sont pas congédiés. Ils ne perdent pas habituellement leurs droits acquis, mais seulement on attend que cela reprenne et, à ce moment, on les redemande. Alors, une suspension, c'est habituellement pour un terme prédéterminé; dans une mise à pied, il n'y à pas de terme prédéterminé. Alors, il y a une distinction, on voudrait la mettre, parce que, justement, on l'a invoqué.

M. Lesage: Avez-vous eu une mauvaise expérience, M. Marchand?

M. Massicotte: M. le Président...

M. Lesage: Je viens de poser une question à M. Marchand, excusez.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Marchand, répondez donc à M., le premier ministre.

M. Marchand: Oui, excusez, c'est parce que je suis à chercher les mauvaises expériences.

M. Johnson: C'est une preuve qu'on a tenté de faire, hein?

M. Marchand: C'est une preuve qu'on a tenté de faire devant la commission, on l'a invoquée. On veut se couvrir parce qu'il y à une distinction entre ces motions.

M. Lesage: Vous êtes plus procédurier que moi, monsieur.

M. Massicotte: M. le Président sur cette question de mise à pied, je référerais votre comité à une décision très élaborée et très détaillée de la Commission des relations ouvrières. Cela devient une question d'appréciation de faits. En d'autres termes, un employeur peut très bien arriver devant la Commission des relations ouvrières et dire: Je n'ai pas congédié cet employé, je l'ai mis à pied dans le cours des opérations normales de mon entreprise, parce que je n'avais plus d'ouvrage pour lui, parce que je n'avais plus de commandes. Or, je l'ai invoqué personnellement dans une couple de cas où je pensais avoir, si vous voulez, une preuve assez solide pour convaincre la commission. La commission ne m'a pas donné raison, la commission n'a pas accepté ma simple déclaration comme quoi j'avais mis des employés à pied parce que je manquais d'ouvrage pour eux. Elle a dit: En fonction de telle et telle raison, vous avez commis une pratique qui n'est pas permise par la commission; on fait une ordonnance de réinstâllation.

Maintenant, sur cet article 14, nous soumettons un amendement, une addition d'un paragraphe pour des raisons bien particulières...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En avez-vous des copies?

M. Massicotte: Je pense qu'elles ont été distribuées, M. le Président.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Cela va.

M. Massicotte: Nous demandons que la décision de la commission...

M. Lesage: Un instant, M. Massicotte. Voulez-vous, mademoiselle, intégrer le texte?

M. Massicotte: Bill no 54 Amendement suggéré Article 14 - "Lorsqu'un salarié est congédié, suspendu ou déplacé par l'employeur ou son agent à cause de l'exercice par ce salarié d'un droit qui lui résulte du présent code, la commission peut ordonner à l'employeur de réintégrer, dans les huit jours de la signification de la décision, ce salarié dans son emploi avec tous ses droits et privilèges, et de lui payer, à titre d'indemnité, l'équivalent du salaire et des autres avantages dont l'a privé le congédiement, la suspension ou le déplacement. "Toutefois, la décision de la commission ne peut rétroagir au-delà de six mois et elle doit tenir compte de faits subséquents à la soumission de la plainte qui feraient que l'employé n'aurait pu être effectivement réengagé ou réintégré au poste d'où il a été déplacé."

M. Lesage: Très bien.

M. Massicotte: Nous demandons, premièrement, que la décision de la commission ne rétroagisse pas au-delà de six mois. En voici la raison: nous espérons, évidemment, que, dans l'avenir, les décisions de la commission soient rendues avec plus de diligence. Mais, par ailleurs, nous avons eu des cas où, dans ces matières, les décisions de la commission nous sont parvenues un an, un an et demi après que la plainte eut été déposée devant la commission. Or, dans certains cas, nous sommes en face de petits employeurs. Il y en a beaucoup dans cette province qui, par exemple, ont un chiffre d'affaires assez bas, qui vont montrer un profit à la fin de l'année de $5000 ou $6000. Quand ils reçoivent une ordonnance de la commission qui va dix-huit mois en arrière, s'il y a deux ou trois congédiements et que la partie est perdue, cela peut équivaloir, si vous voulez, à des sommes de $12,000, $13,000 ou $14,000. Nous trouvons qu'à cause, si vous voulez, de la lenteur qu'il y a devant la Commission des relations ouvrières un employeur ne devrait pas être pénalisé outre mesure. Pardon?

M. Gabias: Dans ces cas, lorsque l'employé a travaillé ailleurs, il y a ajustement.

M. Massicotte: Il y a réajustement, excepté - et nous allons y venir, à cet article - que la partie syndicale et peut-être Me Desaulniers a prétendu, à un moment donné, qu'avec la législation actuelle la question des gains que l'employé a pu faire ailleurs ne s'appliquait, pour les fins, disons, de cette loi, qu'au paragraphe 17, dans le cas où un employé refusait de se rapporter au travail, et que cela ne s'appliquait pas à l'article 14 ou 15. Là-dessus, nous avons une suggestion à faire aussi.

La deuxième suggestion que nous faisons pour l'article 14, c'est que nous ayons la possibilité d'aller devant la commission, à un moment donné, pour indiquer à la commission des situations de fait qui feraient que nous ne serions pas obligés de payer l'indemnité à laquelle on a été condamnés. Voici de quelle façon cela peut arriver. Si cela prend, par exemple, douze mois ou dix-huit mois à la commission avant de rendre une décision sur un cas de congédiement, il se peut très bien que, pour des raisons parfaitement de bonne foi, l'entreprise cesse d'exister. Alors, c'est un cas subséquent à la plainte. Il y a d'autres cas, par exemple, où vous avez deux employés qui ont été congédiés dans la période intercallaire entre la plainte et la décision de la commission. Il y a eu un ralentissement de travail général. Il y a eu baisse de commandes dans l'industrie. Et, au point de vue des faits, ces deux employés n'auraient jamais été réengagés d'une façon ou d'une autre.

Alors, nous voudrions avoir la possibilité d'aller devant la commission et d'établir ces faits devant la commission de façon à éviter, dans ce domaine évidemment, un cas comme celui que j'ai, par exemple, à l'heure actuelle, où je suis obligé de conseiller à mon client de se laisser poursuivre parce qu'au point de vue physique son entreprise a tellement décliné que les personnes que la commission nous a ordonné de réinstaller, on ne les aurait pas reprises d'une façon ou d'une autre. Généralement, c'est le but de nos deux propositions d'amendements.

M. Johnson: C'est joliment compliqué.

M. Marchand: Nous comprenons très bien que cela peut être triste pour un petit employeur qui n'a que $5000 ou $6000 de profit par année. C'est sûrement triste de recevoir une ordonnance de la commission

qui peut lui coûter $7000, $8000 ou $10,000. Mais, quant à être dans la tristesse, pensez à la tristesse aussi du travailleur qui a cru que c'était vrai, la loi, et qu'il avait le droit de s'organiser. Non seulement la loi le lui disait, mais à peu près tout le monde, les gouvernements, les représentants syndicaux, l'Église catholique, lui a dit: Monsieur, vous avez ,1e droit de vous organiser. Il y a cru; il est rentré dedans et puis l'employeur l'a congédié. Et lui, avec sa famille, il n'a pas $5000 ou $6000 de profit. Il n'a que son salaire et puis il en est privé. Cela aussi est très triste.

Alors, si l'employeur prend l'initiative de commettre une illégalité comme celle-là, je pense qu'il doit en assumer le fardeau. C'est comme si, devant les tribunaux, là où il y a une amende disons, de $500 ou $1000 de prévue, on disait: Bien, celui que vous condamnez, il n'a pas beaucoup d'argent et puis il a beaucoup d'enfants. Alors, je pense que, si on accepte le principe de tristesse, cela va modifier substantiellement non seulement cette loi, mais plusieurs autres lois.

M. Johnson: M. Marchand, y a-t-il eu beaucoup de procédures basées sur cet article?

M. Marchand: Devant la commission?

M. Johnson: Y a-t-il eu beaucoup de jugements?

M. Desaulniers: Beaucoup de jugements sur les congédiements?

M. Lesage: À peu près 700 cas.

M. Dozois: Est-ce que cela arrivait souvent que cela dépassait six mois?

M. Desaulniers: Je n'ai pas de statistiques pour établir si cela dépassait six mois ou non. Mais je peux dire qu'il y a eu énormément de jugements rendus sans pouvoir être en mesure de dire si la rétroactivité est de six mois.

M. Dozois: Généralement, de combien de mois?

M. Desaulniers: Cela peut être trois, quatre ou cinq mois. Maintenant, un instant, si vous le permettez, M. le Président, puisqu'on veut entrer dans les détails sur ce problème, on va entrer dans les détails.

Lorsqu'une cause de congédiement est envoyée à la Commission des relations ouvrières, une plainte doit être faite dans les quinze jours. L'employé doit attendre que la décision soit rendue avant de pouvoir toucher ce à quoi il a droit s'il a été congédié contrairement à la loi. Des employés, particulièrement dans des régions où il y a du chômage, peuvent crever de faim pendant trois, quatre, cinq, six mois tant et aussi longtemps que la décision, se fait attendre.

Or, au point de vue de la procédure, il y a eu des contestations qui ont été faites et ces contestations, dans bien des cas, de part et d'autre, ont amené des délais. Or, parce que le droit est donné aux individus de contester des réclamations qui sont faites contre eux, peut amener des délais et peut amener aussi de la part d'un juge ou d'un tribunal un certain temps pour décider, est-ce qu'on va punir celui qui se sert de la loi pour réclamer parce que le système judiciaire est tel et ne peut pas être autrement?

Je dis que le principe s'applique autant devant nos cours de justice qu'il s'applique devant la Commission des relations ouvrières. Nous acceptons un système. Nous acceptons que, dans un système judiciaire bien organisé, chaque partie ait toutes les possibilités de se défendre, de présenter sa cause. Je ne vois pas en quoi on peut exiger d'un juge qu'il rende son jugement, immédiatement, indépendamment du fait qu'il ait le temps de rendre un jugement sérieux ou non, simplement parce qu'une partie va en subir les conséquences. Je me permettrais, à ce moment, de dire que je suis très surpris que l'on s'oppose et qu'on demande, si vous voulez, une limitation au droit de réclamation quand on agit contre les employeurs, alors qu'il a été prouvé depuis plusieurs années que les employeurs ont été ceux qui ont créé le plus de délais quand il s'agissait d'une demande en certification.

M. Fortin: M. Desaulniers, au sujet de l'article 14 et de la remarque qui a été faite par M. Gabias, député de Trois-Rivières, est-ce que vous acceptez que le salaire que l'ouvrier peut avoir gagné pendant le délibéré de sa cause soit déduit?

M. Desaulniers: Il est toujours déduit.

M. Fortin: Il y a déjà eu des difficultés d'interprétation au sujet de l'article 17.

M. Desaulniers: Un instant! Je ne prends pas mon opinion comme étant une jurisprudence, ce que semble vouloir dire mon confrère, M. Massicotte.

M. Gabias: Cela viendra.

M. Desaulniers: Merci, M. Gabias. Prenons la politique suivie ou la jurisprudence de la Commission des relations ouvrières. La Commission des relations ouvrières, après avoir décidé, n'est-ce pas, si oui ou non il y avait eu un congédiement pour activités syndicales, prenait des dispositions et demandait aux parties, je vous

le dis, sous la forme pratique: Est-ce que vous voulez vous entendre sur la question du montant qui serait dû si, oui ou non, nous en venons à la conclusion que l'employé a été congédié à cause d'activités syndicales? En plusieurs occasions, les parties ont, par entente, déterminé le montant. Lorsque les parties ne se sont pas mises d'accord sur le montant à être payé, si la décision de la commission ordonnait à l'employeur de payer, c'était la commission qui entendait les deux parties et nous devions faire la preuve et cette preuve se faisait suivant le mode normal d'une preuve pour établir la perte d'un individu.

M. Fortin: Que fait-on du salaire qu'il avait gagné?

M. Desaulniers: La commission suivait dans ces cas-là les normes régulières de la loi de la preuve au point de vue de l'établissement du montant à être payé.

M. Fortin: Vous êtes probablement au courant de la cause ideal Concrete, parce qu'il y a eu une difficulté sur l'interprétation de l'article 21c. Il serait peut-être bon de faire un paragraphe distinct du dernier paragraphe.

M. Desaulniers: Si vous me le permettez, je ne suis pas au courant. On a mentionné tout à l'heure que j'avais plaidé quelque chose; je vous avoue en toute franchise que je ne m'en souviens pas du tout.

M. Fortin: Parce qu'on serait porté à croire...

M. Desaulniers: Qu'est-ce que c'est la cause? Je ne le sais pas.

M. Fortin: Parce qu'on a prétendu qu'un des paragraphes de l'article 21c s'appliquait seulement à l'article 21c. Alors, c'est pour ça que je vous ai posé la question. Si on prenait l'article 17 tel que rédigé, on serait porté à croire que le dernier paragraphe de l'article 17 ne s'applique qu'à l'article 17, c'est-à-dire si l'ouvrier refuse de revenir travailler, et seulement dans ce cas-là, on détruirait le salaire qu'il a gagné. Alors, comme avocat, vous allez comprendre mon objection; ce serait peut-être préférable d'avoir un article différent pour le dernier paragraphe de l'article 17.

M. Desaulniers: Est-ce que vous me permettez de reqarder l'ancien texte? Dans l'ancien texte, c'est pareil. Or, l'interprétation donnée par la commission, c'est qu'indépendamment que le texte soit identique ou non, dans chaque cas, la procédure a été suivie pour tous les autres articles.

M. Gabias: Ils l'ont appliqué, autant que mon souvenir est exact, que l'employé reprenne ou non son travail.

M. Desaulniers: Qu'il le reprenne ou non, ils ont toujours employé ça.

M. Gabias: La commission.

M. Desaulniers: La commission l'a fait.

M. Fortin: M. Desaulniers, c'est sur le dernier paragraphe de l'article 21c qu'il y avait eu la cause d'idéal Concrete.

M. Desaulniers: Juste un instant... M. le ministre, si vous examinez 21c, troisième paragraphe, on dit ceci: "Au cas de contestation entre l'employeur et le salarié quant au montant de l'indemnité, le quantum en est fixé par la commission." Or, si le quantum en est fixé par la commission, est-ce qu'à ce moment-là la loi ne donne pas la juridiction à la commission de prendre en considération les qains que l'employé a obtenus pendant son absence de chez l'employeur?

M. Bellemare: Même la commission a le droit en sa faveur sans recours.

M. Fortin: C'est parce que, M. Desaulniers, ce paragraphe-là est dans l'article où l'employé refuse de revenir au travail. Alors, on orétendait que ça s'applique juste dans ce cas-là.

M. Desaulniers: Ici, c'est tout simplement dans le but, n'est-ce pas, de clarifier la loi. Nous ne pouvons pas avoir une objection à ce que ce chapitre s'applique ailleurs, parce que, du moins, quant à moi, c'est toujours comme ça que j'ai compris la loi et c'est toujours comme ça que je l'ai vu administrer par la commission.

M. Fortin: Seriez-vous d'accord que ce serait plus clair at que ça éviterait toute discussion si on faisait un article spécial du dernier paragraphe?

M. Desaulniers: Il faut faire un article spécial, si vous voulez tout couvrir.

M. Fortin: C'est ça que je voulais savoir.

M. Massicotte: Nous sommes évidemment d'accord.

M. Desaulniers: Excusez-moi, M. Massicotte. Maintenant, à l'article 17, il y a une chose qu'il faut considérer. Vous avez le salaire. Alors, votre article que vous voulez

ajouter ailleurs, si vous voulez qu'il s'applique aux deux sections, comme vous l'avez dit, il faut que ce soit un article à part. Autrement, ça serait une répétition. Moi, je ne vois pas d'objection à ça.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, que vouliez-vous dire, en attendant là?

M. Massicotte: M. le Président, évidemment, la suggestion de M. Fortin nous va, parce que c'est comme ça que nous l'avions compris. C'est pour ça que nous avions l'intention de suggérer qu'il y ait un article à part pour ce dernier paragraphe de l'article 17. En effet, contrairement à ce qu'a dit M. Desaulniers, qui a bien pris la peine de dire qu'à sa connaissance personnelle la commission avait toujours interprété que le salaire gagné ailleurs devrait être déduit, que l'employé ait repris son travail ou non, je dois vous dire que la commission ne l'a pas toujours interprété ainsi; ça dépendait des juges. Il y a eu des interprétations différentes.

M. Marchand: Là-dessus, juste un mot. On n'a pas d'objection à faire un paragraphe. La seule chose, on vérifie pour voir si tous les droits qui sont consacrés dans les deux articles sont bien couverts. On n'en veut pas de nouveau. Seulement, on veut être sûr...

M. Bellemare: Est-ce qu'il a eu des difficultés, M. Marchand, quant à l'application de cette clause à l'article 21c?

M. Marchand: Je me souviens qu'il y a eu des interprétations différentes, je crois que M. Massicotte a raison là-dessus. On n'a pas d'objection, la seule chose qu'on veut vérifier, c'est qu'en isolant ce paragraphe-là ça couvre bien des droits qui sont présentement consacrés dans les deux articles.

M. Bellemare: Parce qu'il y avait un recours qui pouvait été exercé par la commission même s'il dépassait 24 jours. Si l'employé ne le faisait pas, la commission pouvait exercer ce recours-là, même après 24 jours, cela existait, ça.

M. Marchand: Est-ce que vous êtes d'accord sur le principe que je mentionne, parce qu'on n'a pas le temps?

M. Massicotte: Ah oui! Je suis parfaitement d'accord, on n'a aucune arrière-pensée en le suggérant, nous, non plus, excepté de mettre cet article de façon qu'il s'applique à tous les cas.

M. Marchand: Très bien, très bien.

M. Massicotte: M. Desaulniers a parlé tout à l'heure des statistiques de la commission qu'il ne connaissait pas à fond, particulièrement en ce qui concerne les jugements de la commission sur, disons, l'article 21a. Si le ministre réfère aux statistiques qu'il a, il constatera qu'évidemment il y a eu un tas de jugements, comme le dit M. Desaulniers, et que, dans ces tas de jugements, il y a eu aussi un tas de jugements oui ont renvoyé les plaintes. Il constatera aussi que, sur le nombre de plaintes qu'il y a eu devant la commission, nous nous sommes trouvés souvent le matin à l'audition, comme partie patronale, en face de désistements, parce que l'organisation syndicale avait été faite et qu'on s'était servi, si vous voulez, parce qu'un employeur normalement avait mis des gens a pied, de ce moyen-là pour continuer l'organisation syndicale et prétendre que l'employeur commettait des pratiques interdites. Dès qu'on avait reçu la certification et qu'on arrivait devant la commission pour plaider les plaintes, soit que les plaignants ne se présentaient pas ou soit qu'un procureur de l'union venait dire devant la commission: Nous nous désistons de toutes les plaintes. Cela, vos statistiques, M. le ministre, vous le montreront.

On a parlé du principe des cours de justice. Je voudrais bien qu'on établisse une différence dans les délais vis-à-vis d'une cour de justice ordinaire par rapport aux dommages. Dans le cas d'un action en dommages devant une cour de justice ordinaire, vous êtes poursuivi pour un montant que vous connaissez, vous êtes poursuivi pour $10,000 en dommages. Par ailleurs, vous savez que ça peut prendre du temps, mais que votre "liability", comme on dit en anglais, vos obligations ne montent pas de jour en jour. C'est là la différence essentielle avec les plaintes de congédiement.

M. Bertrand (Missisquoi): L'intérêt est rétroactif au moment...

M. Massicotte: C'est l'intérêt qui est rétroactif; le capital ne monte pas. Or, dans le cas des plaintes de congédiement. le capital monte et, s'il s'agit d'un nombre important d'employés, le montant peut devenir fantastique.

M. Bellemare: M. Massicotte, est-ce que vous craigniez ça avec la nouvelle composition du tribunal?

M. Massicotte: Un juge seul. Bien, nous sommes opposés à un juge seul.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Massicotte, une autre question. Est-ce que...

M. Bellemare: Pour les congédiements

seulement.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Il faut prendre les deux côtés de la médaille. Pendant que les jours s'accumulent et, comme vous dites, que la somme ne peut pas être fixée quand on ne sait pas évidemment la longueur des délais., est-ce que ça ne court car également pour le gars qui s'est fait mettre à la porte pour activités syndicales? Il ne sait pas, lui non plus, combien de jours il va perdre de son salaire. Or, si le patron est condamné, c'est quand même lui qui s'est mis dans l'illégalité. S'il n'est pas condamné, ça ne lui coûte rien.

M. Massicotte: M. le ministre, je pense que, sur ce point-là, nous allons tomber sur le côté pratique. Le côté pratique est le suivant: un gars est mis à la porte, on fait une plainte de congédiement à la commission et l'union dit: On te paye tout le temps que tu es dehors. Si on qaqne, tu nous rembourseras. Et c'est exact. Alors, il n'y a pas de préjudice. Il y a tellement peu de préjudice que les employés qui sont congédiés dans ces circonstances-là ne se cherchent même pas d'emploi.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Massicotte, si vous me le permettez, là-dessus, puisque c'est juste un cas de fait, j'aimerais savoir ce que disent les syndicats, parce que je ne sais pas s'ils ont les moyens je payer pour tous les gens qui peuvent être congédiés. Cela, je ne le sais pas.

Une voix: C'est une assurance.

Une voix: S'ils ont les moyens de payer pour tout le monde qui est congédié? Il n'y en a pas tellement.

M. Provost: Il parle du coût de congédiements massifs. C'est là que ça coûte cher. S'il y en a cinquante dehors, pensez-vous qu'un syndicat pourrait payer, disons, $80 par semaine à cinquante personnes ou $4000 par semaine pendant un an et demi?

M. Massicotte: M. le Président je regrette, un nombre plus considérable...

M. Marchand: M. le Président, s'il y a un employé qui est réellement congédié pour activités syndicales, si ses confrères ont assez de solidarité pour l'aider pendant qu'il est la victime du groupe. Bien oui, mais ça, c'est le groupe. Autrement, qu'est-ce que vous voulez? Vous voudriez qu'il y ait dans la loi que personne n'a le droit de leur donner quoi que ce soit dans ce temps-là pour qu'ils crèvent? Bien voyons, c'est normal, c'est la solidarité syndicale.

M. Johnson: M. Marchand, vous plaidiez la misère de l'individu tantôt; là, vous plaidez la misère du syndicat.

M. Marchand: Oui, mais dans bien des cas, quand ce sont de petits syndicats qui n'ont pas d'argent, les gars le perdent, leur salaire.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que je pourrais juste ajouter cette question? Que ce soit le syndicat lui-même ou l'employé, de toute façon, si le patron s'est mis dans l'illégalité, il est condamné. Le tribunal juge qu'il a été dans l'illégalité. Est-ce que c'est plus juste que l'argent que ses confrères du syndicat lui auraient avancé pour l'empêcher de crever de faim soit, à toutes fins pratiques, confisqué, parce qu'on dit: C'est le syndicat, il a les moyens?

M. Massicotte: Oui, mais, M. le ministre, évidemment, on semble encore partir de la présomption que, chaque fois qu'il y a une plainte de congédiement devant la commission, l'employeur a agi illégalement. Or, les statistiques du ministère du Travail vous montreront...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Justement, je voulais dire ça tantôt. Voici les statistiques. Le rapport de 1962 finit au mois de mars 1962. Depuis le mois de septembre, nous avons fait des modifications qui peuvent changer ces chiffres. En 1961-1962, la commission a reçu 558 plaintes de congédiements, 87 plaintes de suspensions et 12 plaintes de déplacements. Ces plaintes furent réglées comme suit: ordonnances de réintéqration, 36, comme on le voit, sur 657; ordonnances de payer salaires perdus, 10; plaintes rejetées, 157; plaintes retirées, 428.

M. Massicotte: Vous l'avez, l'histoire. Elle est claire, d'après les chiffres.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais, M. Massicotte, nous avons quelque chose pour essayer de corriger cela.

M. Massicotte: Maintenant, si vous me permettez de finir, M. Desaulniers, je vous ai laissé toute la liberté de parler. Je veux relever une autre chose. M. Desaulniers a parlé des délais de quatre ou cinq mois. J'ai un cas avec M. Desaulniers de congédiement d'au-delà de deux ans devant la commission. On n'a pas de décision. C'est le cas de Sterling Furniture.

M. Desaulniers: Avec moi?

M. Massicotte: Avec vous, monsieur.

M. Johnson: Si vous me le permettez, je pense qu'on a déplacé la question. Pour mesurer l'amende, M. Desaulniers, il ne faut

pas se baser sur la misère du syndicat ou de l'individu.

M. Marchand: Je n'ai jamais mis ça dans...

M. Johnson: La question, pour nous, c'est de savoir si l'amende basée sur l'équivalent des jours perdus est établie d'une bonne manière. Et, en principe, je pense que ça l'est. Je ne vois pas encore comment ça peut nuire à l'employeur si les plaintes sont retirées, sauf que ça peut se refléter sur son bilan éventuellement...

M. Massicotte: Bien, si les plaintes sont retirées.

M. Johnson: Non, mais avant qu'elles soient retirées, s'il a une centaine de plaintes contre lui, évidemment quand il fait son bilan, quand il essaie d'évaluer ses obligations continqentes, comme il disait, "liabilities", ça peut avoir un certain reflet, mais je ne vois pas ailleurs où ça peut nuire à ce point-là.

M. Massicotte: M. le Président, Jean Massicotte. Nous ne sommes pas contre le principe, si vous voulez, que, si nous avons agi illégalement, l'employé soit remboursé du montant qu'il a perdu. Nous acceptons cette procédure dans nos conventions collectives pourvu que, dans les conventions collectives, à part de cas d'espèce, nous ayons une procédure rapide et sachions exactement que, dans un délai relativement court, nous allons savoir de la part du tribunal d'arbitrage si le congédiement que nous avons fait est juste ou injuste, si notre geste est confirmé.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, après qu'on va avoir passé à travers cette loi-là, on prévoit des procédures beaucoup plus rapides.

M. Massicotte: Nous n'acceptons pas le seul arbitre, si vous voulez, ou le seul juge et nous donnerons nos raisons, évidemment, quand nous arriverons à cet article-là.

M. Johnson: M. Massicotte, qu'est-ce que vous oenseriez de laisser au juge la discrétion d'établir qu'une partie des délais est due a l'avocat oui poursuit? Alors, il pourrait réduire ça. Cela, c'est pour envisager les cas où la ooursuite retarderait de mauvaise foi. Dans ce cas-là, il y a des avocats qui seraient embêtés, à commencer par moi quand je pratiquais. Je pense que ce serait une manière équitable de ne pas faire porter par l'employeur les délais qui sont dus à la partie poursuivante.

Par ailleurs, les délais qui sont dus à l'encombrement des tribunaux, ça, c'est la faute du gouvernement. Je pense que le gouvernement doit en prendre la responsabilité et il faut admettre qu'il a, d'année en année, essayé d'améliorer l'expédition ries affaires. Si on nommait plus de juges, ça passerait peut-être plus vite, les causes. La meilleure preuve, c'est qu'on en a nommé depuis deux ans, on à augmenté leur nombre et on a essayé d'expédier les affaires devant la Commission des relations ouvrières. Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion-là?

M. Massicotte: Nous avons une autre suggestion à faire aussi sur la question des plaintes. Nous aimerions que les plaintes soient libellées de façon qu'on nous dise exactement de quoi on est accusé. Les unions, si vous me permettez le mot, M. Lévesque, ont "patenté" une formule. Je suis membre de l'union, j'ai été congédié et je considère mon congédiement illégal. Cela s'en va. On ne sait aucune des circonstances dans lesquelles ça s'est produit. Pourtant, on fait face, si vous voulez, à une condamnation en dommages et on n'a aucune connaissance des faits. On ne sait même pas de quoi il s'agit souvent. On fait nos enquêtes, on demande à nos clients de faire leurs enquêtes, puis ils ne peuvent pas voir de quoi il s'agit. Si au moins les plaintes nous indiquaient des faits précis, nous oourrions reqarder la situation. De fait, dans bien des cas, M. le Président, si nous connaissions les faits, nous pourrions rétablir la situation immédiatement. Nous avons des clients qui viennent à nos bureaux, qui nous disent: J'ai fait telle chose, j'ai fait telle chose. On fait enquête, on leur demande de faire enquête. On questionne, on transquestionne et, après ça, on leur dit: Eh bien, reprends-le, tu n'as pas de chance.

M. Bertrand (Missisquoi): Comment est rédigée la plainte, M. Massicotte?

M. Massicotte: Toujours la même chose avec des variantes très petites. Par exemple, c'est la CSN: "J'ai été congédié à celle date pour activités syndicales". On dit: "Quel est le motif du congédiement'"' "Congédié pour activités syndicales à telle date".

M. Johnson: Est-ce Qu'ils étaient assermentés?

M. Massicotte: Assermentés.

Évidemment, avec les désistements que vous voyez là, je regrette, mais on fait se parjurer un tas d'employés dans la province de Québec.

Des voix: Ah, ah, ah;

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

Oui, M. Desaulniers.

M. Desaulniers: M. le Président j'aimerais informer, tout de même, le comité sur certaines affirmations nui ont été faites et surtout sur certaines ailusions qui ont été faites concernant le nombre de plaintes retirées. Je signalerais à votre comité qu'en vertu de la loi des relations ouvrières une plainte doit être déposée à la Commission des relations ouvrières dans les quinze jours qui suivent le congédiement, la suspension ou le déplacement. Et ce délai n'est pas un délai de procédure; c'est un délai de droit strict. Or, M. Massicotte, qui est un avocat comme moi, sait très bien qu'un client qui vient nous voir... Je vais donner l'exemple des accidents dans le cas des corporations municipales. Prenons la ville de Montréal où, lorsqu'il y a un accident sur le trottoir, l'on doit, en vertu de la loi - et c'est un délai de droit strict - déposer notre avis, si je me souviens bien, dans les quinze jours de la date de l'accident.

Une voix: Dix jours.

M. Desaulniers: C'est encore pire, 10 jours. Il est du devoir d'un avocat de dire qu'il n'est pas en position, en dix jours, de faire une enquête complète sur tous les faits, d'aviser son client, de déposer l'avis prescrit par la loi et dans les délais de la loi. Et c'est son devoir de le faire. Deuxièmement, encore sur ce point-là, la Commission des relations ouvrières, dans le but de décharger ses rôles et dans le but de régler le problème de l'amoncellement des causes de conqédiements qui traînaient en lonqueur, a institué un système en vertu duquel ses employés agissent comme enquêteurs et conciliateurs. À la suite d'un congédiement et d'une plainte, la commission envoie d'abord ses représentants - nommez-les enquêteurs ou conciliateurs - et ces derniers voient l'employé, obtiennent des renseiqnernents de cet employé-tà, voient l'employeur et essaient de régler le cas.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ils en règlent 60%.

M. Desaulniers: J'étais pour le dire. Ils règlent actuellement 62% des plaintes. Or, quand on parle d'une accumulation, je soumets resoectueusement qu'un nouveau système a été établi par la commission, non seulement par des règlements, mais aussi par des pressions oui ont été exercées dans certains cas par le conciliateur pour faire comprendre a l'employé qu'il n'avait pas vraiment de cause et à ce moment-là, l'employé a retiré sa olainte. Alors, je crois que ces renseignements...

M. Johnson: M. Desaulniers, quand les 426 plaintes ont été retirées, le ministre me dit qu'il n'y avait pas de conciliateur.

M. Desaulniers: Il n'y avait pas de conciliateur.

M. Johnson: Alors, elles sont retirées à quel stade? Tout de suite après, dès que l'avocat a eu le temps de se rendre compte qu'il n'y avait pas de cause, ou bien juste à l'audition?

M. Desaulniers: Je regrette, mais je n'ai aucune statistique sur cela.

M. Marchand: Si vous me le permettez, là-dessus, pour vous répondre, M. Johnson, à ma connaissance personnelle, j'ai vu beaucoup de cas se régler à l'occasion de la négociation de la convention collective. Là, on s'entend et puis on dit: Retire tes plaintes devant la commission. On en a réglé pour le Lac Saint-Jean toute une série dernièrement. Cela ne veut pas dire que les plaintes n'étaient pas fondées, mais, au moment où les deux parties s'entendent, on dit: Lavons donc ça, cette histoire-là, et on n'en entendra plus parler. Alors, quel est le pourcentage là-dedans? Je ne le sais pas, mais je sais qu'il y en a un nombre considérable.

M. Johnson: Il serait bon que la commission, quand même, ait des statistiques plus précises là-dessus, pour l'avenir afin qu'on sache comment cette clause-là fonctionne.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On va donner la parole à M. Renault; après ça, on passera à un autre article.

M. Renault: M. le Président Paul Renault. Sur l'article 14, je voudrais revenir à une suggestion qu'on a faite à votre comité. Après "lorsqu'un salarié est congédié, suspendu ou déplacé", on a demandé d'ajouter "mis à pied". Je demande à votre comité de ne jamais mettre "mis à pied" parce qu'enfin il s'agit d'une loi restrictive, il s'agit d'un cas où, enfin, on présuppose, tout de même, que l'employeur a agi illégalement. Pour le cas de "mis à pied", dans nombre d'industries, aujourd'hui, à certaines périodes de l'année, on doit mettre à pied un certain nombre d'employés. Je demande à votre comité de considérer qu'en ajoutant "mis à pied" dans ce paragraphe-là vous allez augmenter le nombre des plantes. Comparé aux 400 quelques plaintes que vous avez actuellement, je vous assure que vous pouvez doubler et tripler ce nombre.

M. Marchand: On abandonne notre demande là-dessus. M. le Président, on abandonne notre demande sur "mis à pied".

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Bélanger, vous vouliez dire quelque

chose?

M. Marchand: J'ai juste un petit mot à vous dire avant M. Bélanger. Par exemple, dans le domaine des relations ouvrières, il se passe des choses, des fois, qui ne se passent pas dans d'autres milieux. Moi, depuis que je fais du syndicalisme - ça fait déjà quelques années - je ne sais pas combien de dizaines et peut-être de centaines d'actions en dommages nous avons reçues, actions en dommages qui ont à peu près toutes été réglées à l'occasion des conventions collectives de travail. Est-ce que ça serait raisonnable de notre part de demander, en vous établissant la statistique de toutes les actions en dommages qui ont été reçues: Messieurs, modifiez donc la loi de façon qu'ils ne puissent plus prendre d'actions en dommages, car, voyez-vous, c'est toujours retiré? Cela ne serait pas raisonnable. Alors, c'est la même chose dans le domaine des relations ouvrières pour les congédiements. Nous croyons que ça consacre un droit et même si on...

M. Lesage: M. Marchand, je pense que vos connaissances du droit sont telles que vous pouvez vous donner votre réponse à vous-même.

M. Marchand: Non, non, c'est simplement une réponse. Je ne sais pas. si vous étiez revenu, M. le premier ministre, mais en donnant des statistiques sur les retraits des congédiements...

M. Johnson: Des actions en dommages où on ne fait pas d'affidavit.

M. Marchand: ... on le prouve.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Bélanger.

M. Bélanger: René Bélanger, Fédération des employés des corporations municipales et scolaires. En ce qui nous concerne, nos employés ont porté des plaintes devant la Commission des relations ouvrières. Dans le cas d'une ville, la décision a été :endue au bout de sept ou huit mois. Une deuxième décision a été rendue au bout de six mois, un premier conaédiement. À la suite de l'ordonnance de la commission, les deux employés ont été réenqaqés et, quelque temps après, ils ont été mis à pied, c'est-à-dire que tous les employés ont été mis en vacances et qu'au bout d'une semaine on a engagé d'autres employés qui venaient de l'extérieur. On est devant la Commission des relations ouvrières avec cette deuxième plainte qui est là depuis le mois de septembre 1962. Il y a une audition qui va avoir lieu mardi.

A présent, voici ce qu'il y a d'un peu particulier: c'est qu'on parle des délais. Moi, évidemment, je suis contre le deuxième paragraphe de l'amendement qui est suggéré par la partie patronale parce que ce n'est pas aux travailleurs de payer pour tous ces délais inévitables. Dans le cas du dernier employeur que je viens de vous signaler, les deux principaux témoins, du moins dans les dossiers de la commission, étaient en dehors de la ville lors de la dernière convocation. Il y en a un qui avait une déclaration assermentée à l'effet qu'il était en Europe; le deuxième, il avait une lettre de son avocat à l'effet qu'il était aussi en Europe. À la grande surprise de notre procureur qui est allé au palais de justice le même jour pour une cause de faillite, il a vu ce même individu, qui était censé être en Europe, sur le banc en avant de lui. Alors cela a retardé l'affaire d'un mois.

M. Johnson: Il était revenu.

M. Bélanger: Non, je comprends que ça revient vite. Il n'avait pas eu le temps de partir. C'est pour vous dire que ces délais existent. Dans le cas d'une autre ville, évidemment, les congédiements ont lieu en février 1962 et il y a toutes sortes de retards, tantôt dus à la partie patronale, tantôt peut-être à la partie syndicale et aussi à cause du rôle chargé de la commission. Bien, je crois que les employés ne sont pas obligés de payer pour ces retards-là.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Nous cherchons un moyen pour que la Commission des relations ouvrières puisse expédier ses affaires dans le plus bref délai possible.

M. Bélanger: Ce n'est pas une plainte que je ferai contre la commission parce que je sais qu'il y a eu des problèmes au point de vue des congédiements et puis je sais qu'il y a eu des remises qui ont été dues, dans certains cas, à la partie patronale. Enfin, on avait des séances de conseil, on avait des bills, puis on avait toutes sortes de choses. Alors, dans ce temps-là, la commission, évidemment, se rend à leur demande.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Des questions de la part de la partie syndicale?

M. Bélanger: Alors, nous autres, en ce qui nous concerne, on n'a pas retiré de plaintes; on en a perdu une.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 15?

M. Desaulniers: Les deux centrales

syndicales me disent que l'article est accepté. Simplement, nous vous demanderions d'ajouter, soit un paragraphe ou un article 15a). Je vais vous lire le texte et je vous donnerai l'explication après: "La date de la mises à Ia poste de la piainte constitue la date de réception de ladite plainte par la commission."

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais ce n'est pas prévu quelque part, un peu plus loin?

M. Desaulniers: Non, non, je ne crois pas que ce soit prévu par la loi. Maintenant, si vous me le permettez, je vais vous dire pourquoi nous faisons cette demande. La Commission des relations ouvrières a rendu une décision sur ce problème. Si vous examinez le texte, on dit ceci: "L'employé doit soumettre sa plainte par écrit à la commission dans les quinze jours du conqédiement, de la suspension ou du déplacement." Le mot "soumettre" sa plainte a été considéré par la Commission des relations ouvrières comme voulant dire "déposer" à la Commission des relations ouvrières. Or, ceci veut dire - je donne ça comme exemple - que, si je malle ma plainte, disons, le treizième jour, ou le deuxième jour avant le quinzième jour, et que la commission est fermée pour trois jours, comme la commission ne peut pas recevoir la malle, il n'y a donc pas en ce moment de dépôt. Ce qui est arrivé en fait, c'est que cette interprétation permet de renvoyer une plainte.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Desaulniers, j'ai eu l'occasion d'en discuter avec la commission et votre théorie est admise, ça devrait être a partir de la mise à la poste.

M. Desaulniers: Mais ça n'est pas dans la loi.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Seulement, on en avait discuté et on s'est demandé si ça ne devait pas se faire par règlement de la commission.

M. Bertrand (Missisquoi): Dès la mise à la poste, la lettre...

M. Desaulniers: M. le Président, si je me souviens bien et ne fais pas erreur, je crois que la loi de l'Ontario le prévoit.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):

Le prévoit? M. Lesage: Du moment qu'une lettre est mise à la poste, elle est la propriété du destinataire.

M. Desaulniers: M. le premier ministre, c'est ce que j'ai plaidé. Malheureusement, on n'a pas admis que j'avais raison et, comme la décision de la commission est finale, qu'on est en avant des opinions même du premier ministre, je suis obligé de demander cela.

M. Lesage: Mais il faudrait, tout de même, prendre des précautions et voir à ce que vous puissiez faire la preuve de la mise à la poste.

M. Desaulniers: Nous l'avons faite. M. Lesage: Non, non mais...

M. Desaulniers: La preuve est nécessaire, si vous avez une disposition disant que la date de la mise à la poste, vous devez nécessairement en faire la preuve.

M. Lesage: C'est ça.

M. Desaulniers: Maintenant, si vous le permettez, M. le premier ministre, je vous dirais ceci: Cela peut créer une injustice sérieuse. Prenons, par exemple, un employé ou un salarié de la Côte-Nord qui se fait congédier à un moment donné. Avant d'obtenir tous les renseignements qui lui sont nécessaires...

M. Lesage: M. Desaulniers, je ne discute pas le mérite de votre argumentation.

M. Desaulniers: Je vous remercie, M. le premier ministre.

M. Lesage: Je ne faisais que dire que, dans mon opinion - mais, évidemment, il y en a d'autres qui ne l'ont pas partagée - et la vôtre, la mise à la poste n'a pas été considérée suffisante.

M. Massicotte: Jean Massicotte. Nous n'avons certainement aucune objection à la position de M. Desaulniers. même si cela augmente encore un peu les délais.

M. Bellemare: M. Massicotte, vous avez un amendement à l'article 15.

M. Massicotte: M. Bélanger va parler.

M. Lesage: Voulez-vous m'excuser? Ce ne serait pas 15a) M. Desaulniers: ce serait un deuxième paragraphe à 15 un deuxième alinéa à 15. Il ne faut pas que ce soit 15a).

Deuxième alinéa de l'article 15: "Le salarié qui a été congédié, suspendu ou déplacé illégalement pour que des causes mentionnées à l'article 14 doit, lorsque dûment rappelé au travail par l'employeur, reprendre son emploi dans les trois jours

d'avis à cet effet. En réintégrant ainsi son emploi, le salarié aura droit à tous ses droits et privilèges, et l'employeur devra lui payer le salaire dont l'a privé le congédiement, la suspension ou le déplacement en question. La reprise de son emploi par le salarié dans ces circonstances ou son défaut de répondre à cet avis a pour effet d'annuler toute plainte déjà déposée ou qui pourrait l'être en vertu de l'article 14."

M. Desaulniers: Je n'ai pas d'objection. D'ailleurs, je profite de l'occasion pour vous dire que le même problème va se soulever lorsque nous arriverons à la présentation de la requête. Le même problème se soulève, le même principe.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Bélanqer.

M. Massicotte, est-ce que vous avez quelque chose à dire?

M. Massicotte: Non, non. M. Girouard parlera.

M. Bélanger: M. le Président, hier, dans les remarques générales, je vous ai soumis un cas concret qui est actuellement devant la commission. Il s'agit de l'interprétation du mot "congédiement". J'ai dit que, dans une ville que tout le monde connaît, il y a eu des congédiements par avis légal, après une décision du conseil. Plaçons-nous au 23 juillet 1961. Les employés reçoivent un avis de congédiement. Il y a un bref d'injonction qui est accordé par la Cour supérieure et qui défend à la ville de congédier les employés. Ce bref-là est renversé par la Cour d'appel. Alors, il y en a qui soutiennent que cela place les parties dans la situation ou elles étaient le 23 juillet et ils soutiennent que l'avis de congédiement ou la plainte de congédiement...

M. Gabias: Un instant, M. Bélanger, s'il vous plaît. C'est parce que j'ai reçu un télégramme du maire Mongrain et je pense que le président également en a reçu un. C'est un télégramme assez violent; je ne prends pas la liberté de le lire. Si le président veut le lire, cela lui appartient. Je crois qu'il m'appartenait comme citoyen et comme maire de Trois-Rivières, de souliqner le fait.

M. Bélanger: La violence ne me surprend pas. Est-ce que je peux continuer?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, oui, allez-y.

M. Bélanger: Alors, voici ce qui arrive. Les employés ont porté plainte au mois de février 1962 et on soutient que les plaintes sont tardives parce que le congédiement réel était au mois de juillet 1961, alors que ces employés-là ont continué à travailler jusqu'en février 1962. Est-ce que le mot "congédiement" ne pourrait pas être changé pour, par exemple, "dans les 15 jours de son départ" afin qu'on clarifie cette histoire-là? Il y a des bons avocats dans le comité: si vous soutenez que le mot congédiement est suffisamment clair.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Pourquoi a-t-on interprété ça ainsi?

M. Bélanger: C'est-à-dire que la décision de la commission n'est pas rendue.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah non, non.

M. Bélanger: Mais, enfin, c'est l'objection que la ville a apportée devant la Commission des relations ouvrières.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Et le congédiement a eu lieu, disons, au mois de...

M. Bélanger: Au mois de juillet, même si les employés sont demeurés au travail pendant...

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Les employés ont continué de travailler jusqu'au mois de janvier.

M. Bélanger: Jusqu'au mois de janvier.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La Commission des relations ouvrières, pour moi, a assez de jugement pour trouver une solution à ça.

M. Bélanger: Je pensais peut-être que vous pourriez vous prononcer, ça nous aiderait.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Non, non, j'ai confiance au jugement de la commission.

M. Bélanger: Ça fait que là, M. le Président, si le code ne passe pas avant la décision de la commission, si la décision était défavorable, on pourrait peut-être suggérer de remplacer le mot "congédiement" par un autre.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 15, alors?

M. Girouard (Jean): Au sujet de l'article 15, nous demandons d'ajouter, selon le texte distribué, "et comparaître en personne à l'audition". Je dois ajouter tout de suite que ceci est une suggestion première et, si la commission avait des

pouvoirs, disons, de faire des remises en conséquence, je n'ai aucune objection.

Voici le point de départ de notre demande. C'est qu'il y a des plaintes de déposées et, selon les statistiques que vous avez entendues tantôt, en très grand nombre. Sitôt déposées, la commission en avise l'employeur. À cause de son secrétariat souvent, nous constatons que ça prend un temps assez long. Nous n'avons aucun détail, la plainte n'est pas libellée, il faut se préparer pour aller devant la commission. Ici, je fais une autre distinction qui est très importante. Lorsque l'employeur visé est un employeur organisé au point de vue de ses relations du personnel, le problème n'est pas tellement grave parce que, avant de prendre sa décision, lui-même l'employeur, ou forcément son directeur du personnel ou ses contremaîtres ont, je dirais, justifiés vis-à-vis d'eux-mêmes leur geste. Ils ont des dossiers, tout est fait et s'il s'agit d'aller devant la commission, même s'il y a une présomption contre eux, ils sont en mesure, tout de même, d'apporter ça. Mais le petit ou le moyen patron, lui, n'a pas de directeur de personnel, n'a pas 40 contremaîtres chez lui. Il prend ses décisions, le plus sauvent de mémoire. On me répondra qu'à ce moment-là il agit peut-être trop sentimentalement, peut-être. À ce sujet-là, j'ai un article 15a) que je vous suggérerai ensuite.

M. Bellemare: Sur votre article 15a), c'est simplement pour aviser qu'après trois jours ça ne tient pas.

M. Girouard: Oui, tantôt, on reviendra à ça. Le problème pour l'avocat qui reçoit l'employeur tout excité avec ça, bien, écoutez, c'est terrible. Il faut se dire: Bien, comment pouvez-vous justifier devant la commission le geste que vous avez posé?

M. Gabias: Vous étiez là pour le tranquilliser.

M. Girouard: Oui. Vu que mon député me parle, j'ajouterai que je fais partie du Barreau rural et...

M. Gabias: Moi aussi, d'ailleurs.

M. Girouard: Dans ces régions, le plus souvent, il y a beaucoup de moyens et de petits patrons. Tout ceci pour dire que, même si nous croyons avoir une bonne preuve à faire devant la commission, nous comparaissons devant la commission et le plaignant n'y est même pas. Le libellé de la plainte n'existe pas ou pratiquement pas. Nous sommes privés automatiquement du droit de contre-interroger le plaignant. Il faut tout de même savoir de quoi il se plaint, pourquoi il se plaint. Or, en vertu de l'article 32 de la Loi des poursuites sommaires, on nous dit que le plaignant n'est pas obligé de comparaître en personne s'i! est représenté par avocat. Et, chose remarquable dans mon expérience à moi, il y a toujours un avocat. Je le connais comme étant toujours l'avocat de l'union ou du syndicat concerné. Je pose la question si le plaignant est représenté. Forcément, le confrère se lève et dit: "Je représente le plaignant". Alors, quoi faire? On ne peut même pas contreinterroger le plaignant. Je crois qu'il...

M. Fortin: Comment peut-il faire sa demande?

M. Girouard: Le document est là, la plainte est là. La présomption est contre l'employeur et la commission dit: Faites votre preuve. Or, nous sommes obligés, par précaution depuis cette décision-là, d'assigner à nos frais - et j'insiste pour dire que ma clientèle, ce sont surtout des petits et moyens patrons - les plaignants qui viennent dans l'automobile de l'organisateur. Je crois qu'il y a quelque chose qui manque. Il devrait y avoir comparution personnelle du plaignant ou, s'il y a un avocat qui justifie son absence, que la commission, à ce moment-là, remette la cause. Autrement, nous somme absolument sans moyens.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Desaulniers.

M. Desaulniers: M. le Président, je dois dire que j'ai toujours eu le plus grand respect pour les avocats des districts ruraux. J'en ai rencontré plusieurs et je les ai toujours reconnus comme étant de bons juristes.

Pour moi, il est absolument inconcevable qu'un avocat vienne plaider devant ce comité que dans une cause, même si c'est devant la Commission des relations ouvrières, qui est une cause de matière civile il y ait dans la loi une obligation à la personne qui poursuit d'être devant le tribunal. Un instant, vous êtes en présence de matière civile lorsque vous plaidez sur une question de congédiement et non pas sur une question pénale. Et, d'ailleurs, la loi l'établit clairement parce que vous avez deux articles distincts concernant les recours; un article, c'est le recours pénal, l'autre article, c'est le recours civil.

Deuxièmement, si l'employeur considère qu'i! lui est nécessaire d'avoir, pour établir sa preuve, le plaignant, les dispositions de la Loi des relations ouvrières sont faites de telle sorte qu'il peut assigner le plaignant et le plaignant est obligé de se présenter devant la Commission des relations ouvrières.

M. Lesage: Monsieur, je pense que vous n'avez pas besoin de continuer parce que,

dans ma pratique d'avocat, ça m'est arrivé comme avocat de la défense d'assigner le demandeur pour être sûr de sa présence.

M. Girouard: C'est parce que, M. le premier ministre, tantôt, on a cité certaines statistiques. J'aurais voulu éviter d'être obligé de le dire, mais depuis que les articles 21a) et suivants existent, on en a fait une utilisation maximum, et c'est devenu un moyen d'organisation et de chantage.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Les statistiques que j'ai données tantôt ne sont plus valables aujourd'hui parce que la procédure a été changée depuis ce temps-là.

M. Marchand: Nous l'avons expliqué.

M. Gabias: M. le Président, si vous me le permettez. M. Girouard, est-ce qu'il y a quelque chose qui vous empêche de demander à la commission d'assigner le plaignant?

M. Girouard: Le cas où le juge Lespérance a exigé de l'avocat Filion à Montréal - je ne me souviens pas du nom, par exemple - qu'il procède. Il a été pris de court. Pour ma part, je n'ai jamais pris cette chance-là. Mais c'est toujours aux frais de l'employeur en question.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Dans les causes civiles, si vous assignez le demandeur, vous lui envoyez tous les frais de déplacement.

M. Desaulniers: M. le Président, c'est inconcevable. Voyons, c'est à croire, moi, que je vais aller en cours civile.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Choquez-vous pas, M. Desaulniers.

M. Gabias: Votre affaire allait bien, choquez-vous pas.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous paraissez si bien quand vous ne vous choquez pas.

M. Bellemare: Vous pourriez retourner le compliment au président.

M. Desaulniers: M. le Président, je suis déchoqué. Ce que je veux dire, c'est ceci: Est-ce que vous croyez convenable que j'arrive en Cour supérieure et que je dise au juge: Le demandeur n'est pas venu et j'ai oublié de l'assigner. Voulez-vous, s'il vous plaît, remettre la cause? C'est à peu près ça que mon confrère dit.

M. Lesage: Délibéré.

M. Girouard: Nous avions maintenant l'article 15a). Peut-être qu'on pourrait le disposer à un autre endroit. Il se réfère mot à mot à l'article 17.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): À l'ordre.

M. Bellemare: Est-ce que c'est trois jours du rappel?

M. Girouard: Oui, oui, à 15a) que nous suggérons.

M. Bellemare: Oui.

M. Girouard: L'histoire de ceci se réfère à l'article 17c).

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): À l'ordre.

M. Bellemare: Quand l'employeur, après trois jours d'avis formel, adressé, s'il ne se présente pas... Vous voulez actuellement que cet amendement-là, qui a pour effet d'annuler toute plainte déjà déposée, soit inséré dans notre article 14.

M. Girouard: Oui, ceci se réfère à l'article 17c) du mémoire des patrons au Conseil supérieur du travail. Et l'histoire encore est celle-ci...

M. Bellemare: Oui, mais dans la Loi des relations ouvrières, à l'article 21c) il y avait une disposition.

M. Girouard: Non, il y a une disposition une fois que la décision par la commission est rendue.

M. Bellemare: Oui.

M. Girouard: L'objet de l'article 15a) que nous suggérons - vous pourrez le disposer à un autre endroit - c'est celui-ci. C'est qu'un employeur, même de bonne foi et surtout de bonne foi, pose un geste aujourd'hui. À ce moment précis, il ne sait pas qu'une organisation syndicale est en cours chez lui, pas du tout. Il apprend, trois, quatre ou cinq jours après, qu'on lui reproche telle chose pour un déplacement, une mise à pied ou même un congédiement. D'où immédiatement la réalisation qu'il y a une organisation syndicale. Là encore, la distinction vaut entre ceux qui sont organisés au point de vue service de personnel et ceux qui ne le sont pas. Immédiatement consultation chez un procureur qui dit: Étant donné la présomption, on ne pourra pas faire une preuve suffisante. Alors, immédiatement, on devrait pouvoir rappeler l'employé et le réintégrer dans ses fonctions en payant ce qu'il aurait peut-être perdu. Mais, à ce moment-là, on ne voudrait pas que ça reste

un moyen de pression vis-à-vis de l'employeur en vue des négociations qui doivent suivre.

M. Bellemare: Oui, mais ça, ce sont des craintes qui ne peuvent pas se justifier, parce que ce n'est rien que des présomptions que vous avez la, avec un article comme celui-là.

M. Girouard: Mais non. Au moment où l'employeur réalise qu'il y a eu une plainte déposée contre lui, là, il dit: Il s'est passé quelque chose. Maintenant, évidemment, il cherche à savoir qu'est-ce qu'il doit faire avec ça. Et, à ce moment-là, nous nous rendons compte qu'il ne peut pas lutter contre la présomption.

M. Bertrand (Missisquoi): Pourquoi, M. Girouard, dans un cas comme celui-là, l'employeur ne peut-il pas immédiatement le réengager?

M. Girouard: Précisément, M. Bertrand...

M. Bertrand (Missisquoi): A ce moment-là, je pense bien que l'employé ne persistera pas avec sa plainte.

M. Girouard: Ah, c'est là qu'est le problème.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Girouard, l'article 17 ne vous plaît pas?

M. Girouard: Pardon?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): L'article 17 ne vous satisfait pas?

M. Lesage: "... jusqu'au jour où il a été rappelé au travail. Si le salarié a travaillé ailleurs su cours de la période précitée, le salaire qu'il a ainsi gagné doit être déduit de cette indemnité". Il n'est même pas question de trois jours: à partir du jour où il est rappelé au travail.

M. Girouard: Voici ce que nous demandons: si ce geste est posé, il s'agit de l'effacer, autrement dit. Oui, évidemment, si ce geste est posé avant le jugement rendu, c'est-à-dire immédiatement après que la commission a avisé l'employeur de ce qui vient de se passer, nous voudrions qu'à ce moment-!à on règle l'affaire moyennant le paiement de tout. C'est toujours une leçon, je dois le dire, pour le patron de bien organiser son département du personnel ou, du moins, d'avoir une certaine fiche du personnel. Alors il paie, mais on se dit que la plainte demeure.

M. Lesage: Oui, mais c'est la garantie de l'employé qui a été congédié, ça, M. Girouard. Moi, je ne vois pas comment 15a) peut vous aider quand vous avez 17. Je vous le dis bien franchement. Il me semble que l'employeur a toutes les garanties que, s'il rappelle l'employé, l'union confesse jugement à ce moment-là. Quand il le rappelle, il confesse jugement et admet qu'il l'a renvoyé sans faute. Il le réengage, il le reprend, la plainte reste là et c'est la garantie de l'employé.

M. Massicotte: M. le premier ministre, je pense que vous avez raison. C'est parce que nous avions l'impression, jusqu'à un certain point, que le troisième paragraphe de l'article 21c) n'avait pas été amendé. Mais là il est amendé.

M. Lesage: Il a été amendé par l'article 17.

M. Girouard: Si on me disait que l'article 17 répond exactement et efface la plainte, pas d'objection.

M. Lesage: Lisez l'article 17 dans le bill.

M. Bertrand (Missisquoi): Cela donne la qarantie.

M. Lesage: Pourquoi alors?

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, vous retirez votre amendement, monsieur?

M. Girouard: En autant que... D'accord. M. Bertrand (Missisquoi): Alors, retiré.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 16?

M. Crête: Si vous me le permettez, M. le Président l'article 16 prévoit que lorsqu'il a été établi à la satisfaction de la commission qu'un salarié exerce un droit qui lui résulte de la loi, à ce moment et à cette condition, il y a présomption en sa faveur d'un congédiement illégal et il y a le fardeau de la preuve contre l'employeur.

M. Lesage: C'est votre remarque, ça.

M. Crête: Pardon? À 16, oui. Si la commission...

M. Lesage: Bien oui, il y a une présomption en sa faveur.

M. Crête: Il y a présomption et le fardeau de la preuve est contre l'employeur. Nous suggérerions, M. le Président que, pour établir que l'employé exerce un droit qui lui

résulte de la loi, il y ait une préenquête déterminée et connue des parties.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Avec notre système de médiateur, ça va simplifier le problème, parce qu'immédiatement quand la plainte est portée on a un médiateur qui se trouve à peu près à faire ce qu'on peut appeler la préenquête. Je ne peux pas voir...

M. Crête: Même dans le système de la conciliation, il arrive que nous ne sommes pas exactement au courant de la position de la partie adverse, ni de ses prétentions. Enfin, c'est une suggestion que nous faisons avec autant d'objectivité que possible pour les raisons suivantes. Nous espérerions que ça éliminerait certaines plaintes, disons, futiles, que ça pourrait raccourcir les délais et rendre le travail de la commission plus effectif, également, ça réduirait le préjudice possible tant pour l'employeur que pour le salarié qui est en dehors pendant toute cette période. Je ne voudrais pas tromper le comité, mais un avocat d'expérience dans le domaine m'a dit que cette préenquête existait dans les lois ontariennes.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Crête, je pense qu'elle existe à peu près comme elle existe aujourd'hui chez nous. C'est que nous avons des médiateurs qui, dès qu'une plainte est portée, vont voir les parties, se renseiqnent et font rapport à la commission immédiatement.

M. Crête: Évidemment, je peux parler d'expérience personnelle peut-être, mais...

M. Bellemare: Si vous lisez, M. Crête, l'article 21d de la Loi des relations ouvrières, vous allez voir, à mon sens, qu'il y a une amélioration sensible.

M. Fortin: M. Crête, au point de vue pratique, vous avez, devant un tribunal, un ouvrier qui a été congédié. Le patron dit: Dehors. Il arrive devant le tribunal, puis le juge dit: Monsieur, prouvez que vous avez été congédié pour activités syndicales. Comment voulez-vous qu'il fasse cette preuve?

M. Crète: Bien, voici, M. le ministre, comment ça se présente. Un employé peut avoir été congédié pour activités syndicales légales ou illégales. S'il s'agit d'activités syndicales illégales, le patron peut être parfaitement en droit de le congédier. Mais on ne le sait pas, ça - et c'est arrivé devant la commission - sans préenquête, évidemment. On ne sait pas à quel moment et à quelles conditions. Nous avons le fardeau de la preuve et l'employé a la présomotion en sa faveur.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je crois qu'on a prévu votre suggestion en établissant un médiateur, M. Crête.

M. Crête: Bien, évidemment, je ne veux pas contredire.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Évidemment, ça ne fait pas tellement longtemps.

M. Crête: Parce que notre expérience a été contraire, c'est seulement à l'audition que la commission a déterminé et nous a indiqué si l'employé avait exercé un droit résultant de la loi.

M. Gabias: Vous avez raison.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 16 en délibéré. Article 1.7, cela va; on l'a étudié avec 14. Article 19?

Prescription quant au recouvrement de l'indemnité

M. Desaulniers: Le texte de l'article 19 est accepté, sauf que nous suqqérons au comité d'inclure la prescription d'un an. M. le Président, si je considère la décision de la commission, elle équivaut à un jugement. Une décision de la commission équivaut à un jugement. Nous ne sommes pas ici pour réclamer la prescription trentenaire, mais nous considérons que la décision de la commission est un jugement; elle reconnaît l'existence d'un droit au moment où le jugement est rendu. Je crois que c'est l'interprétation que l'on doit donner au jugement de la commission. Or, si nous référons...

M. Lesage: M. Desaulniers, je ne comprends pas très bien.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Six mois à partir du huitième jour qui suit la décision de la commission.

M. Lesage: La Prescription, c'est pour faire la déclaration.

M. Desaulniers: Oui, oui.

M. Lesage: Bon, alors, ce n'est pas un jugement de la commission qui donne ouverture au droit: l'ouverture au droit existe au moment...

M. Desaulniers: C'est-à-dire que le recours existe, mais c'est le jugement qui décide de l'existence du droit, oui le constate; il ne le crée pas.

M. Lesage: Très bien, mais ne parlez pas d'ouverture du droit, parlez de

l'existence.

M. Desaulniers: De l'existence, il le constate.

M. Bellemare: M. Desaulniers, est-ce que l'article 59 du nouveau code ne s'applique pas dans ce cas?

M. Provost Non, parce que c'est une convention collective.

M. Desaulniers: Si vous me le permettez, sans vouloir sauter d'article, je veux simplement souligner que...

M. Lesage: Je voudrais que vous justifiiez pourquoi on donnerait un délai d'un an à un salarié congédié pour avoir recours a cette procédure.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est une question de jugement.

M. Desaulniers: Parce que le jugement de la commission, comme vous l'avez dit, M. le premier ministre, à ce moment, constate le droit de l'individu. Or, le droit à son salaire, c'est à partir de la décision. Me reportant aux prescriptions du Code civil, je vois que la prescription est d'un an.

M. Lesage: Est-ce que vous avez eu connaissance que des ouvriers aient été lésés?

M. Desaulniers: C'est-à-dire que cette prescription de six mois n'existait pas avant. Maintenant, si vous me le permettez, je veux faire ici un parallèle. Sur la question de la sentence arbitrale, nous allons aussi suggérer une prescription d'un an.

Maintenait, je dois dire que le problème est actuellement devant la Cour d'appel, parce que la Cour d'appel, suivant les dispositions de la Loi des relations ouvrières telle qu'elle est et de la loi des services publics, doit décider actuellement si, lorsqu'une sentence est rendue, nous sommes en face d'une prescription trentenaire, d'une prescription d'un an ou d'une prescripton de six mois en vertu de l'article 24 de la Loi des cités et villes. Alors, quelle va être la décision de la Cour d'appel? Je ne le sais pas. Mais la prétention que nous avons soutenue devait la Cour d'appel, c'est que la prescriotion de six mois mentionnée dans la Loi des cités et villes ne s'appliquait pas et qu'on devait appliquer la prescription, soit d'un an ou trentenaire.

M. Fortin: Est-ce que ça n'a pas été soulevé dans une cause de la cité de Sherbrooke?

M. Desaulniers: C'est soulevé dans une cause de la ville de Malartic.

M. Lesage: M. Desaulniers, on a une prescription de cinq ans dans nos lois pour les dettes; évidemment, on donne une prescription parce qu'on veut donner une chance au débiteur. On lui demande de nous payer.

M. Bertrand (Missisquoi): C'est un an, deux ans, suivant le cas.

M. Lesage: Bon, ensuite, dans le cas des blessures corporelles, c'est deux ans.

Mme Kirkland-Casgrain: Blessures corporelles, c'est un an.

M. Lesage: Un an pour les blessures corporelles. C'est vrai qu'au bout d'un an il faut faire une demande incidente parce qu'on ne sait pas où l'on va. Mais voici qu'ici on a un jugement de la commission qui est la base de l'action et à six mois, M. Desaulniers, voyons!

M. Desaulniers: Je n'ai plus besoin de parler, M. le premier ministre.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 19?

M. Gabias: M. le Président, seulement une question. La commission et la partie peuvent toutes deux poursuivre en recouvrement. Vous ne pensez pas qu'à un moment donné les deux parties pourront poursuivre pour recouvrement. Qu'est-ce qui va se produire à ce moment?

M. Renault: Je ne sais pas. M. Gabias. est-ce que vous crovez que la commission comme telle peut poursuivre'' Je ne le crois pas.

M. Gabias: Je le comprends comme ça, dans le troisième paragraphe.

M. Renault: Oui, "l'action en recouvrement de l'indemnité par le salarié ou la commission est intentée devant le tribunal compétent en raison du montant réclamé". Je ne connais pas encore de moyen pour la commission de prendre des poursuites. Enfin, si comme telle la commission le couvait, ce dont je doute, bien, j'admets avec vous qu'on aurait une cause de répétition de l'indu. peut-être, si on était pris de cette façon ou encore en Cour supérieure, avec une exception à la forme...

A tout événement, pour le moment, M. Gabias, je dois dire que je n'avais pas prévu ce problème.

M. Girouard: Après l'article 18, M. le Président, ou à l'endroit que vous voudrez,

pour les raisons déjà énoncées et étant donné que nous avons pu personnellement constater que même, parfois, le banc à la Commission des relations ouvrières eût été heureux de pouvoir le faire, dans les cas de plaintes frivoles, de contestations frivoles, nous demanderions que la commission puisse statuer sur les frais, qu'elle établisse ce qu'elle voudra ou que les parties établissent les dépenses encourues inutilement dans des circonstances comme ça. La commission aurait le pouvoir de statuer. Certaines gens prétendent qu'elle a le pouvoir, d'autres disent que non.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, l'article 19, adopté: Article 20?

L'accréditation

M. Provost: M. le Président, à l'article 20, se présentait un problème, dans la loi actuelle, qui est rendu en Cour suprême. Le règlement no 1 excluait du droit d'organisation les ouvriers de moins de seize ans. Les tribunaux ont prétendu jusqu'à maintenant - je ne sais pas ce que décidera la Cour suprême - que, par le fait même, il restreignait la définition de "salarié" qui est dans la loi. Nous sommes organisés de telle façon que, si la Cour suprême maintient la décision de la Cour d'appel, dans le nombre total des salariés, on comptera ceux qui ont moins de seize ans, mais, d'un autre côté, nous n'avons pas le droit de les organiser à cause du règlement no 1. Alors, nous vous demandons ici, au comité, de décider. Nous préférerions que les moins de seize ans...

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Qu'ils restent à l'école?

M. Provost: Qu'ils restent à l'école, mais s'ils travaillent, si on leur donne des permis pour travailler - il y en a toujours trop - ils doivent avoir les mêmes droits que les autres travailleurs. Alors, il faudra prévoir que le règlement no 1 ne contienne pas d'exclusion pour les moins de seize ans ou, si le gouvernement décide de les exclure, il faudra que ce soit prévu dans la loi.

M. Bellemare: Il y a un autre point de vue dans cet article de l'accréditation qui me frappe d'une manière particulière. Le règlement no 1 de la Commission des relations ouvrières impose deux conditions vitales pour l'accréditation. La Commission des relations ouvrières dit dans son règlement que le caractère de bonne foi, premièrement, et, deuxièmement, le caractère représentatif sont des conditions essentielles. Ici, dans l'article, vous avez "la majorité absolue" qui représente bien le caractère représentatif, mais je serais très heureux si on ajoutait, par exemple: A droit à l'accréditation l'association de salariés "de bonne foi", parce qu'en vertu du règlement no 1 de la Commission des relations ouvrières on l'exige. On dit que le caractère de bonne foi et le caractère représentatif sont des conditions très essentielles qui sont requises pour avoir droit à un certificat de reconnaissance. Alors, je pense que ça serait à l'avantage de tout le monde, et de la sécurité syndicale, puisqu'on l'a ajouté au début, dans la définition, qu'on dise ici: l'association de salarié "de bonne foi".

M. Lévesque (Montréal-Laurier): On pourrait le prendre en délibéré.

M. Bellemare: C'est sûr, en délibéré, mais je ferais une suggestion qu'on puisse le prendre en délibéré si...

M. Desaulniers: M. le Président concernant la remarque faite par l'honorable député de Champlain, je dirais ceci. Si l'honorable député veut inclure dans la loi union, "de bonne foi", il faudra nécessairement que les législateurs, s'ils désiqnent une union comme étant de bonne foi, sachent au moins ce qu'est une union "de bonne foi". Or, vous n'avez pas dans la loi de désignation de l'union de bonne foi.

M. Bellemare: Il est question d'associations de salariés.

M. Desaulniers: Si je comprends l'esprit de la loi, l'accréditation est basée sur le fait que l'association a un caractère représentatif. C'est l'esprit de toute la loi. Sur le caractère "de bonne foi", vous ne pouvez pas déterminer, n'est-ce pas, ce qu'est la bonne foi ou mettre ces mots dans l'article 20 si on ne sait pas ce qu'est la bonne foi.

M. Bellemare: M. Desaulniers, vous avez saisi mon point de vue. Vous savez où je veux aller. Vous me comprenez comme deux et deux font quatre. Je pense que ce que je suggère est à l'avantage de tout le monde. Dans le règlement premier, en partant, de la Commission des relations ouvrières, ces deux conditions sont formelles: d'abord, le caractère de bonne foi et, ensuite, le caractère représentatif.

M. Desaulniers: Mais est-ce nécessaire de le mettre dans la loi?

M. Bellemare: Bien, nécessaire. Vous allez dire: En 1953, c'était peut-être nécessaire; en 1963, ça ne l'est pas. Comme le disait le ministre du Travail, on a affaire à un peuple d'adultes. Dans ce cas-là, il y a bien des articles qu'on a adoptés depuis ce matin dont on n'aura pas besoin.

M. Marchand: M. Bellemare, c'est parce que, dans le règlement no 1, si vous le lisez comme il le faut - vous n'avez lu que le premier article - à l'article 2, on définit ce qu'on entend car la bonne foi. Alors, qu'est-ce qu'une union de bonne foi? C'est une union qui a déposé en double sa requête en reconnaissance, qui doit produire le texte d'une résolution, etc. C'est ça. Si vous employez simplement le terme, là il est défini, on sait exactement ce que c'est.

M. Bellemare: M. Marchand, c'est qu'à mon sens la Commission des relations ouvrières qui doit être formée va répéter ces règlements. Bon! Si elle l'inclut?

M. Marchand: C'est parce que, si vous mettez simplement dans la loi "caractère de bonne foi", vous faites entrer un élément discrétionnaire, tandis que, dans le règlement, ce n'est pas un élément discrétionnaire. C'est défini. Alors, ce n'est pas du tout la même chose de le mettre dans la loi et de le laisser dans le règlement.

M. Bellemare: M. Marchand, vous savez pourquoi j'insiste. Je ne veux pas aller contre le comité, ni contre la délibération qui sera faite à ce sujet. Mais, pour tout le monde, je pense que ça serait avantageux. Vous allez me dire...

M. Marchand: Je pense, M. Bellemare, qu'il ne faut pas ramener les bills 19 et 20.

M. Bellemare: Ah non! Je vous ai vu venir sur ça. Je suis au XXe siècle, moi aussi. Je suis bien conscient des responsabilités qui nous incombent. Ce n'est cas pour rappeler le bill 19 qui disparaît par cet article. C'est sûr, je le comprends. Pardon?

M. Marchand: On comprend la même chose.

M. Bellemare: Ah oui! Vous savez aussi où je vais: vous me voyez aller. Mais je pense que ça serait, pour tout le monde, juste et raisonnable que, dans les règlements qui vont être faits, oui vont être répétés par 'a Commission des relations ouvrières, ces deux principes fondamentaux, l'expression "de bonne foi" et l'expression de la garantie au point de vue majoritaire, soient inclus.

M. Provost: Pas dans la loi.

M. Marchand: Si c'est dans la loi et que vous ne le définissez pas, c'est là que vous avez un élément discrétionnaire. Si vous répétez les mêmes conditions dans la loi, évidemment, je n'ai peut-être pas d'objection, mais si vous employez simplement le terme "de bonne foi", vous entrez...

M. Bellemare: En délibéré.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 20? L'amendement vient de qui à l'article 20?

M. Bertrand (Missisquoi): Des employeurs.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Des employeurs.

Amendement suggéré par M. Girouard (API) à l'article 20. "A droit à l'accréditation l'association de salariés groupant la majorité absolue des salariés d'un employeur ou l'association d'employeurs pour ses membres qui l'ont mandatée. "Selon les décisions de la commission, ce droit existe envers la totalité des salariés de l'employeur ou envers chaque groupe desdits salariés que la commission, après avoir entendu les représentants de l'employeur, déclare devoir former un groupe approprié pour les fins du présent code. "Dans la détermination du groupe approprié, la commission doit tenir compte des caractéristiques particulières à l'entreprise de l'employeur visé."

M. Girouard: Jean Girouard, avocat. M. le Président, il existe actuellement des associations d'employeurs qui, se prévalant de la Loi des relations ouvrières, ont été accréditées. Si un certificat de reconnaissance peut être obtenu pour une association de salariés, l'ancienne loi d'ailleurs prévoyait le même droit pour une association d'employeurs. Dans les définitions que nous avions suggérées au début, nous avions prévu le cas de l'association d'employeurs accréditée. Le but du certificat, c'est d'obliger le patron à changer avec le détenteur du certificat pour les ouvriers. Vous avez exactement la réciproque dans le cas de l'association d'employeurs qui est reconnue, c'est-a-dire certifiée. Alors, c'est nourauoi nous demandons, au premier paragraphe, d'ajouter "ou l'association d'employeurs pour ses membres qui l'ont mandatée."

Voici maintenant pourquoi. Lorsqu'une association d'employeurs demande un certificat de reconnaissance, elle prouve à la commission qu'elle existe, qu'elle a suivi ses règlements, qu'un tel et un tel sont bien parmi ses membres. Cependant, la commission exiqe toujours qu'il y ait un mandat spécifique de donné par cet employeur, membre de son association. La raison est très simple. Nous ne voulons pas que l'association d'employeurs, à ce moment-là, devienne accréditée pour représenter tous ses membres parce que, dans les associations

d'employeurs qui existent actuellement, vous constaterez qu'il y a beaucoup d'autres buts que celui unique et exclusif de la représentation an négociation et le certificat est donné "pour ses membres qui l'ont mandatée". D'ailleurs, c'est exactement ce qui se fait actuellement. Nous demandons que ça continue d'exister. Cela, c'est pour le premier paragraphe.

Au second paragraphe, l'idée, c'est que nous disons qu'une accréditation n'est pas la chose unique d'un groupe de salariés. Ils ont leurs buts, ils ont leur point de vue. Ils demandent d'être reconnus pour tel groupe de salariés, pas la totalité: le plus souvent, c'est pour un groupe Qu'ils essaient de définir. Nous disons ceci: Lorsque la commission émet un certificat de reconnaissance et donne, si je puis dire, un acte de baptême à une asscciation d'employés avec qui l'employeur va transiger et va vivre, le but de la loi, c'est précisément qu'ils s'entendent bien, qu'ils aient la paix. Or, si, au départ, la commission a émis le certificat sans tenir compte de l'entreprise de l'employeur, de sa nature propre, de ses activités propres, elle risque - c'est arrivé - d'émettre un certificat qui a pour effet de chambarder toutes les structures de l'entreprise. À ce moment-là, au point de départ, vous ne réalisez pas la première condition qui pourrait aider à avoir précisément la paix dans l'entreprise.

M. Lévesque (Montréal-Laurier): Je ne comprends pas. Voulez-vous donner un exemple?

M. Marchand: Je vais vous en donner un, si vous voulez, et, en même temps, je vais vous dire pourquoi ça ne tient pas. Les syndicats sont certifiés par unités d'entreprises, c'est-à-dire que, si le syndicat qui a un certificat décide de signer une convention collective avec un employeur, nous autres, on peut tenter d'exercer des pressions surtout si c'est dans un large secteur et si ça peut avoir une incidence sur d'autres syndicats, on peut essayer de le convaincre de ne pas siqner. Mais légalement on ne peut rien faire; si le syndicat décide de signer, il signe. Si l'employeur est membre d'une association patronale certifiée, il arrive, à un moment donné, dans un groupe d'employeurs, que nous autres, lors des négociations, on réussit à en convaincre un qu'il devrait signer cette convention collective. Qu'est-ce qui est arrivé dans le passé? C'est que l'association patronale s'est opppsée à ce que la convention soit signée. Or, si vous accordez à l'association patronale ce droit, nous allons demander le droit de certifier nos fédérations professionnelles et même la confédération. Puis, à un moment donné, on pourra empêcher les syndicats de siqner. Alors, je pense que ce droit est abusif et, dans le passé, ça a donné lieu à des abus considérables.

Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, si vous voulez, on va dormir là-dessus et, demain matin, on ppurra continuer. On pourra reprendre cela demain matin, entre 10 h 45 et 11 heures, parce qu'on a quelque chose à faire avant. Maintenant, au lieu de mardi, nous ajournerons, demain à 17 heures, jusqu'à mercredi après-midi, 15 heures.

Une voix: Cela, c'est bien. (Fin de la séance)

Document(s) associé(s) à la séance