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Audition de témoins et étude du bill no
54 - Code du travail (5)
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Quand nous avons
laissé, nous étions à l'article 40, mais nous avions
laissé en suspens le problème forestier. M. Gagné devait
proposer quelque chose au nom des patrons concernant les entreprises
forestières. Maintenant, M. Lajoie a demandé à dire un mot
là-dessus. On va demander M. Gagné avant, si vous voulez, M.
Lajoie.
M. Gagné (Jean-H.): Lors de l'une des dernières
séances, nous avons déposé des amendements devant votre
comité et la séance s'est terminée immédiatement
par ta suite. En ce qui nous concerne, après avoir étudié
les remarques faites par M. Lévesque de l'UCC et les syndicats nationaux
et la Fédération du travail du Québec, après avoir
entendu les remarques de votre comité, nous avons fait ces suggestions
que nous vous présentons sans autres commentaires. Article 1, paragraphe
o -
Exploitation forestière
"Exploitation forestière":
(i) La coupe, le tronçonnement, l'écorcage en forêt,
l'empilement, le chargement et le transport du bois, à l'exclusion du
transport par bateau au chemin de fer et de sa transformation en dehors de la
forêt.
(ii) Le sciage et le faconnage du bois ou autre travail
exécuté dans des usines ou des établissements dans la
forêt aux fins exclusives d'exploitation forestière.
(iii) Le déboisement de la forêt pratiqué par un
concessionnaire forestier en vue de la construction, par qui que ce soit, de
chemins, d'autoroutes, de barrages, de lignes de transmission, ou de tout autre
travail du même genre en forêt.
Article 1, paragraphe o, concessionnaire forestier: aucun
commentaire.
Article 2. premier paragraphe: aucun commentaire.
Article ?, deuxième paragraphe: substituer au texte
proposé le texte qui suit, afin de couvrir le cas d'employeur unique:
"La Commission peut cependant reconnaître comme employeur celui qui fait
l'exploitation des terres d'un concessionnaire forestier ou d'une partie
déterminée de ces terres ou reconnaître une association
d'employeurs comme représentant de tous les employeurs faisant
l'exploitation des terres d'un concessionnaire forestier ou d'une partie
déterminée de ces terres; cet employeur on cette association est
alors députée employeur de la faron ci-dessus
indiquée".
Article 9, premier paragraphe. "Sous réserve de la Loi des Terres
et Forêts, le propriétaire du fonds ou le détenteur d'un
permis de coupe sur une terre où se fait une exploitation
forestière est tenu de permettre le passage et de donner accès au
campement à tout représentant d'une association de
salariés munie d'un permis délivré par la Commission".
Article 9, deuxième paragraphe. "Celui qui fait l'exploitation
forestière est tenu de fournir à ce représentant le
gîte et le couvert au prix fixé pour les salariés par
ordonnance suivant la Loi du salaire minimum."
Article 9, troisième paragraohe. "Les lieux affectés aux
repas des salariés ne sont pas considérés comme lieux de
travail dans l'exolpitation forestière".
Article 9, quatrième paraaraphe. "L'asspciation pouvant justifier
d'une cession de créance d'un salarié peut réclamer de
l'employeur la somme requise pour droit d'entrée dans une association et
la première cotisation, pourvu que ce salarié ait cette somme
à son crédit."
Article 27: "Prévoir qu'un avis de trente jours
précède la mise en vigueur ou l'entrée en vigueur de tout
règlement édicté en vertu de cet article."
Le texte suivant est suggéré pour être ajouté
à l'article 27: "Un tel règlement est oublié dans la
Gazette officielle de Québec avec un avis comportant que toute
représentation doit être formulée à la Commission
des relations ouvrières de la province de Québec dans les trente
(30) jours. Après son approbation par le lieutenant-gouverneur en
conseil, le règlement est publié en sa forme définitive et
il entre en vigueur a compter du jour de sa dernière publication dans la
Gazette officielle de Québec ou de la date ultérieure qui y est
fixée."
Article 115: Pour qu'il y ait concordance à la règle
édictée à l'article 27 et relative à la publication
de rèalement de la Commission, le texte suivant est
suggéré pour remplacer entièrement le troisième
paragraphe dudit article 115: "Ces règlements sont oubliés dans
la Gazette officielle de Québec avec un avis comportant que toute
représentation doit
être formulée à la Commission des relations
ouvrières de la province de Québec dans les trente (30) jours.
Ces règlements, sur approbation du lieutenant-gouverneur en conseil,
sont ensuite publiés en leur forme définitive dans la Gazette
officielle de Québec et ils entrent et demeurent en vigueur à
compter du jour de leur dernière publication ou de la date
ultérieure qui y est fixée."
Québec, le 21 iuin 1963.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Les centrales syndicales
proposent des amendements concernant les entreprises forestières.
Représentations des centrales syndicales et CSN, FTQ et UCC. Article 1,
paragraphe m, salariés exemptés.
Enlever le 5e: "Les personnes employées à l'exploitation
d'une ferme".
Paragraphe o, exploitation forestière:
(i) "La coupe, le tronçonnement, l'écorcage, l'empilement,
le flottage, le chargement et déchargement du bois en forêt,
à bord des bateaux et wagons de chemins de fer, ainsi que le transport
routier du bois, à l'exclusion de sa transformation en dehors de la
forêt."
(ii) "Le sciage, faconnage et empilement du bois ou autre travail
exécuté dans des usines ou des établissements dans la
forêt aux fins exclusives d'exploitation forestière."
(iii) "Les travaux de reboisement, d'amélioration et d'entretien
de la forêt ainsi que le déboisement pratiqué en vue de la
construction par qui que ce soit de chemins publics, d'autoroutes, de barrages,
de lianes de transmission ou de tout autre travail du genre en
forêt."
(iv) "La construction et l'entretien de chemins forestiers, camps,
écluses, piliers et tout autre travail du genre en forêt."
Article 2, deuxième paragraphe. "La Commission peut cependant
reconnaître conjointement le détenteur du droit de coupe de bois
et une association d'employeurs comme représentants de tous les
employeurs faisant l'exploitation forestière des terres d'un
concessionnaire forestier ou d'une partie déterminée de ces
terres: ce détenteur de droit de couoe de bois et cette association sont
alors réputés conjointement employeurs de la façon
ci-dessus indiquée."
Est-ce que la partie ouvrière a pris connaissance de ces
propositions? M. Lévesque?
M. Lévesque (Léopold): Oui, M. le ministre, nous en avons
Dris connaissance, seulement nous ne sommes pas tout à fait d'accord sur
tous les points.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Qu'est-ce qui ne va
pas?
M. Lévesque (Léopold): Dans la définition, d'abord,
le paragraphe o, exploitations forestières, on a oublié le
flottage, les travaux de reboisement, d'amélioration, d'entretien de la
forêt, oui sont les travaux...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Un instant: flottage,
reboisement, les travaux de campement...?
M. Lévesque (Léopold): Les travaux de campement, oui, mais
on dit par exemple à iii): "Le déboisement de la forêt
pratiqué par un concessionnaire forestier en vue de la construction, par
qui que ce soit, de chemins, d'autoroutes, de barrages, de lignes de
transmission, ou de tout autre travail du même qenre en forêt." Il
y a le déboisement, la construction de chemins forestiers, la
construction de camps, la construction de piliers, tous ces travaux-là.
On exclut la construction de chemins...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Cela, c'est ce qui
s'appelle les "improvements".
M. Lévesque (Léopold): C'est ça, les chemins
forestiers et...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Comment est-ce que
ça se dit en français, les "improvements"?
Des voix: Les améliorations.
M. Lévesque (Léopold): Les améliorations, le
reboisement, l'entretien de la forêt, tous ces travaux. Il y a un
très grand nombre d'ouvriers oui travaillent là-dessus et il
faudrait qu'ils soient couverts. En somme, nous autres, on avait, dans
l'ordonnance 39, pratiquement la même chose.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, votre proposition,
c'était l'ordonnance 39?
M. Lévesque (Léopold): C'est ça.
Qn n'a pas inclus le flottage dans les représentations de
l'Association des industries forestières non plus. Le flottage est une
opération essentielle.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ils l'ont peut-être
oublié. M. Gagné, ce n'est pas un oubli que vous avez fait,
là, 'e flottage? Cela me semble...
M. Gagné: M. le Président, nous soumettons que le texte
proposé dans le bill
no 54 est raisonnable en soi. Nous avons tenté d'y introduire des
mots, on peut peut-être en introduire d'autres, mais nous pensons que ce
texte décrit les activités forestières en
général. Il y a une seule chose que je voudrais vous faire
remarquer dans l'ordonnance 39, lorsqu'il s'agit, par exemple, d'ouvrir des
chemins en forêt pour des fins d'organisation de services publics ou
autres, que ce soit pour le CNR pour les chemins de fer, ou pour
l'Hydro-Québec. En autant que l'ordonnance 39 est concernée, cela
va bien; le gouvernement ou le CNR devra payer au moins les taux minimaux, mais
en autant qu'un employeur particulier est concerné, nous serions
appelés à contrôler les conditions de travail des
employés du gouvernement ou des grandes compagnies ferroviaires. Alors,
nous n'avons pas l'intention d'aller trop loin dans ces amendements qu'on
suqgère et qui feraient en sorte que le bill no 54 reproduise en entier
l'ordonnance 39 et ses dispositions.
M. Lévesque (Léopold): M. le Président, j'ai un
texte ici. Puis-je le déposer?
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord. Vous en avez
des copies?
M. Lévesque (Léopold): Qui concernent les principaux
articles, oui.
M. Bellemare: Dans l'ordonnance 39, est-ce que le flottage du bois
était compris''
M. Lévesque (Léopold): Ah oui...
M. Bellemare: Je ne le trouve pas dans la définition
d'exploitation forestière.
M. Lévesque (Léopold): "Les entreprises de flottage de
bois", à la page 10. Vous comprenez, il faut que ça couvre les
gens qui travaillent sur la drave.
M. Bellemare: Dans l'ordonnance 62, exploitation forestière.
M. Lévesque (Léopold): Je ne sais pas si c'est dans
l'ordonnance 62, mais c'est dans S'ordonnance 39, à exploitation
forestière. Il y a les entreprises de flottage du bois, les entreprises
de reboisement de la forêt qui sont là, l'amélioration de
la forêt.
M. Gagné: M!. le Président, nous nous sommes
limités à l'étude de l'article 4 de l'ordonnance 39 qui
décrit l'exploitation forestière.
M. Bellemare: Mais plus haut, à l'article 3, dans le centre de la
citation: "La présente ordonnance régit les salariés des
entreprises ci-après mentionnées et leurs employeurs, à
savoir 1-2" et vous allez trouver ça aux entreprises de flottage du
bois, à c.
M. Lévesque (Léopold): D'ailleurs, c'est là que
sont inscrits les mots "construction d'autoroutes, de chemins, de lignes de
transmission, de barrages".
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord, M.
Lévesque, on va regarder ça. Avez-vous fini M.
Lévesque?
M. Lévesque (Léopold): Non. À l'article 1 toujours,
paragraphe p, M. le Président, nous avions soumis l'autre jour un texte.
Nous le retirons, nous n'avons aucun commentaire. Nous acceptons ce qu'il y a
actuellement, tel qu'il est.
À l'article 2, nous avions demandé d'enlever le
deuxième paragraphe, mais il semble qu'on ne peut enlever ces pouvoirs
à la commission de déterminer, à un moment donné,
qui est l'employeur. Au moment où elle devra tenter de certifier une
association d'employeurs, nous demandons, dans le texte que nous vous avons
remis: "La Commission peut cependant reconnaître conjointement le
détenteur du droit de coupe de bois, qui est la compagnie, et une
association d'employeurs."
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous ajoutez
"conjointement"?
M. Lévesque (Léopold): C'est ça. Et à la fin
du paragraphe: "Ce détenteur de droit de coupe de bois et cette
association sont alors réputés conjointement employeurs..." Il
existe déjà des certifications dans ce sens-là et,
à ce moment-là, l'employeur véritable assiste aux
négociations et nous pouvons "bargainer" plus facilement.
Avant de m'assoir, si vous permettez, au nom du Conseil
général de l'UCC qui a étudié la question, à
l'article 1, paragraphe m, on a demandé d'enlever le
cinquièmement: "Les personnes employées à l'exploitation
d'une ferme."
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Cela n'y est pas dans
votre texte.
M. Lévesque (Léopold): Oui, oui, en haut.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah oui, vous l'avez mis
le Premier. C'est bien.
M. Lévesque (Léopold): Alors là. je parle au nom du
Conseil général de l'UCC. Je suis autorisé. Ils ont pris
une décision. Vous avez des centaines et des centaines d'employés
qui travaillent, par exemple, dans le tabac, là où il y a de
l'intégration, pour les maraîchers et les grands
propriétaires de
fermes qui sont caDables d'engager des employés. Nous ne voulons
pas enlever le droit d'association à ces gens-là qui,
normalement, devraient être payés de façon raisonnable,
avoir droit aux négociations et conventions collectives.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien. M. Lajoie. Qui
représentez-vous? Voulez-vous vous nommer pour qu'on vous
enregistre?
M. Lajoie (Francois): Je représente des employeurs forestiers de
la Mauricie, de la Baie-des-Chaleurs, de la Haute-Outaouais et de la Gatineau.
Ce sont quatre associations incorporées en vertu de la troisième
partie de la Loi des compagnies de Québec dont le but, d'après la
charte, est de promouvoir et défendre les intérêts des
entrepreneurs forestiers membres des associations en matière de
relations ouvrières.
Ces associations groupent un nombre important d'entrepreneurs forestiers
des différentes régions. Par exemple, dans la Mauricie, il y a,
je crois, quarante-cinq ou quarante-six entrepreneurs forestiers membres de
l'association.
Il faut, le pense, prendre en considération les
intérêts de ces entrepreneurs que le représente. Ils
forment, dans nos régions d'exploitation forestière, une classe
un peu particulière de gens. Ce sont des petits capitalistes ou des
moyens capitalistes oui viennent tous de petites municipalités: il n'y
en a pas qui viennent de grandes villes, de grands centres, et ils ont investi
dans l'entreprise forestière qu'ils opèrent des sommes assez
considérables. Ils sont propriétaires de machinerie,
d'équipement: il y en a quelques-uns qui ont pour plusieurs centaines de
milliers de dollars et d'équipement. D'autres ont des équipements
plus modestes. Ils ont des chevaux. Ces gens-!à, dans chacune de leurs
municipalités, ont des fonctions sociales assez particulières. Il
y a une foule de gens, dans chaque municipalité, qui comptent sur
l'entrepreneur pour avoir un emploi stable et qui, d'année en
année, s'en vont avec ces entrepreneurs-là, quand vient la saison
de l'exploitation forestière, montent aux chantiers avec eux et le
recrutement se fait de cette façon.
Ce sont des gens qui ont une certaine indépendance
financière et qui ont une certaine indépendance aussi, parce que
leurs intérêts sont différents de ceux des travailleurs de
la forêt, mais ils sont différents aussi de ceux des
concessionnaires forestiers. Et la négociation des contrats
d'entreprises forestières, d'année en année, donne lieu
à des discussions. Ces gens-là ne sont, ni en fait ni en droit,
des contremaîtres, des surveillants pour les concessionnaires. Miais ce
sont de fait et de droit les véritables employeurs et ils sont jaloux de
leurs prérogatives, ils veulent rester maîtres chez eux, en somme.
Ils peuvent exploiter des cpntrats avec différents
concessionnaires...
M. Johnson: Est-ce qu'ils le sont devenus, eux-autres, maîtres
chez eux?
M. Lajoie: Bien, ils sont jaloux et ils veulent qu'on leur conserve
leurs droits dans le moment.
M. Johnson: Ce n'est pas encore réglé, nous autres.
M. Lajoie: Alors, ils ne sont pas obligés de se tenir sur le
chantier. Tous ces faits que je vous rapporte ont déjà fait
l'objet d'une preuve considérable devant la Commission des relations
ouvrières elle-même au mois de mars dernier. Des associations ont
été sommées de comparaître devant la commission.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Une décision
a-t-elle été rendue?
M. Lajoie: La décision n'est pas encore rendue, mais tous ces
faits ont été soumis parce que la commission demandait un*
enquête afin de déterminer qui était le véritable
employeur. Je pense bien que la preuve qui a été faite et tous
les faits que nous vous exposons a convaincu tous ceux qui étaient
là que le véritable employeur. c'était l'entrepreneur
forestier, oui n'était pas qu'un surveillant, qui n'était pas
qu'un contremaître, et que les intérêts qu'il avait
étaient différents de ceux de la compagnie.
Nous étions contre le projet d'amendement apporté par
l'Association des industries forestières nous n'en voulions pas, parce
que nous trouvions qu'il violait les prérogatives des entrepreneurs. Je
comprends que nous n'avons plus à faire face à ce problème
dans le moment, que nous retombons sur le texte de l'article 2 avec la
suggestion apportée par Me Lévesque.
Ce que nous craignons et ce que nous voulons éviter par
l'amendement tel que proposé par la partie syndicale, c'est la
disparitipn, justement, de cette classe de la scciété, scit les
entrepreneurs, dans les régions forestières. Si le
concessionnaire forestier a toutes les responsabilités en vertu du Code
du travail au point de vue de son application, s'il a, de fait, toutes les
responsabilités, à ce moment-là, ce qui arrivera, c'est
que le concessionnaire n'aura plus besoin des entrepreneurs et devra
lui-même contrôler jusque dans le détail les
opérations forestières que font actuellement les
entrepreneurs.
Or, si ce contrôle est pris par le concessionnaire forestier, la
raison d'être des
entrepreneurs n'existera plus. Il y a des entrepreneurs qui
opèrent à la frontière de l'Ontario qui m'ont
rapporté des cas où, à la suite d'une décision de
la Commission des relations ouvrières de l'Ontario, les concessionnaires
forestiers s'étaient mis à faire eux-mêmes les
opérations forestières; les entrepreneurs sont disparus et sont
venus travailler dans la province de Québec.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il y a une disposition
qui prévoit que la Commission des relations ouvrières peut
déterminer qui est le véritable employeur.
M. Lajoie: Si le texte de l'article 2 demeurait tel qu'il a
été soumis, nous n'aurions rien à craindre de ce
côté parce que le pouvoir de la commission de déterminer
qui est le véritable employeur demeurerait. Et s'il se présentait
un cas où le véritable employeur n'est pas l'entrepreneur, la
commission pourrait le décider. Mais ce que nous ne voudrions pas, c'est
que les entrepreneurs forestiers soient liés absolument, de toute
faron.
Il y aurait une autre solution, peut-être, au problème.
J'ai compris au texte tel qu'il était que la partie syndicale avait deux
objections: une, d'abord, qui a trait a la responsabilité
financière de l'association et une autre parce que lé
concessionnaire forestier n'est pas membre de l'association. Alors, je me
demande si la solution ne serait pas de trouver la formule par laquelle ces
deux objections disparaîtraient. Je comprends que l'objection n'est pas
de principe, mais pratique.
Si, par exemple, l'association était tenue de fournir un
cautionnement pour la satisfaction de ses obligations, à la satisfaction
de la Commission des relations ouvrières, et que le concessionnaire
forestier était tenu d'être membre de l'association d'employeurs,
il me semble que ce serait la solution intermédiaire et juste qui
satisferait tout le monde. Alors, c'est dans cet esprit que j'avais
préparé un texte...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous avez un texte?
M. Lajoie: ... que j'ai ici et que je peux soumettre pour
distribution.
M. Gabias: M. Lajoie, mes collègues me disent que cela
paraît que vous venez de Trois-Rivières. Ceux de la
côte...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Lajoie, d'accord.
Une voix: Un instant, on n'a pas de copie.
M. Lajoie: Voici les amendements suggérés: 2. "La
commission peut cependant reconnaître une association d'employeurs comme
représentant de tous les employeurs faisant l'exploitation
forestière des terres d'un concessionnaire forestier ou d'une partie
déterminée de ces terres, à condition que le
concessionnaire soit membre de ladite association et que l'association donne un
cautionnement, à la satisfaction de la Commission, garantissant sa
responsabilité financière aux fins du présent code;" 2.
"Nevertheless, the Board msv acknowledge an employer's association as 'he
representative of all the employers carryina on logging operations on the lands
of a limit holder or on a specific portion of such lands, provided that the
limit holder be a member of such association and that the association furnish
security, satisfactory to the Board, to guarantee its financial responsibility
for the purpose of this code:"
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Messieurs du
syndicat?
Une voix: Pensez-y comme il faut.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Gagné, vous
avez quelque chose à dire?
M. Gagné: M. le Président, en autant que nous sommes
concernés, nous n'avons pas d'objections au texte présenté
par M. Lajoie ou au texte original présenté dans le bill no
54.
M. Lévesque (Léopold): M. le Président, nous avons
objection, évidemment, au texte rédigé actuellement dans
le Code du travail, nous avons objection aussi à ce texte, au moment de
la certification. Dans la certification, il ne sera pas mentionné que
telle compagnie, par exemple, Canadian International Paper, est
certifiée conjointement avec l'association d'employeurs, disons, de
Petite-Rivière ou quelque chose du qenre, oui concerne plusieurs
employeurs. Ce que nous demandons, c'est que le nom de la compagnie soit sur le
certificat de reconnaissance.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais si l'on...
M. Lévesque (Léopold): Là, on va mettre sur le
certificat seulement l'association d'employeurs, cela finit là. Je
comprends qu'il peut être membre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais s'il
dépose un cautionnement pour garantir les obligations de la convention
collective ou de l'ordonnance?
M. Lévesque (Léopold): Jusqu'où cela peut-il aller?
Vous avez une association d'employeurs sur une rivière, car exemple,
comprenant cinquante entrepreneurs et, au moment des exploitations
forestières, la compagnie en prend trente-sept, disons, et à la
fin de l'hiver vous en avez huit, neuf ou dix qui font ce qu'on appelle en bon
Canadien un trou dans le bois, un trou solide comme cela arrive.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais s'il y a un
cautionnement oui prévoit cela?
M. Lévesque (Léopold): Je comprends qu'il y a un
cautionnement, mais jusqu'où cela va-t-il aller? Il va falloir
prévoir cela dans les négociations, ces choses.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La commission va...
M. Lévesque (Léopold): Mais si vous avez, par exemple, sur
le certificat de reconnaissance la compagnie X reconnue comme employeur au
même titre que l'association d'employeurs de Petite-Rivière du
district reconnu là...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, mais la plainte
exposée par M. Lajoie, c'est que s'ils sont obligés de faire cela
ils ont peur de disparaître, c'est là le problème.
M. Lévesque (Léopold): Ils ne disparaissent pas. À
ce moment, ils vont venir changer à la table de négociation. Ils
sont reconnus...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ceux qui sont disparus en
Ontario à cause de cela?
M. Lévesque (Léopold): Ah! je ne pense pas.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien là, je ne
sais pas.
M. Bellemare: La compagnie va prendre ses responsabilités.
M. Lévesque (Léopold): Actuellement, dans la province de
Québec, toutes les grandes industries forestières ont des
certifications, et ce sont toutes les compagnies. Je ne vois pas pourquoi
demain, pour une exception bien particulière, parce qu'il reste
seulement cette compagnie oui n'a pas de certification en forêt, celle
que j'ai mentionnée tout à l'heure...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Quelle compagnie''
M. Lévesque (Léopold): Canadian International Paper. C'est
la seule. Pourquoi faire une exception? Vous avez Consolidated Paper qui est
reconnue dans le Saguenay, qui est reconnue sur la Côte-Nord, vous avez
Quebec North Shore sur la Côte-Nord, vous avez Gaspesia Pulp dans la
Gaspésie.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'y en a pas une de
ces compagnies qui est à la Cour d'appel?
M. Lévesque (Léopold): C'est la Canadian International
Paper.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah! c'est la Canadian
International Paper.
M. Lévesque (Léopold): C'est la seule qui reste. On avait
l'impression en premier -je vais vous le dire - que le deuxième
paragraphe avait été fait exclusivement pour la compagnie
International Paper, la seule des grandes industries qui reste. Bien oui, il y
a des certificats partout, dans toutes les autres compagnies: St.Raymond Paper,
Brice Brothers, Domtar Newsprint, St.Lawrence Corporation, St.Anne Power.
Donohue Brothers, Eddy. C'est la seule qui reste.
M. Gabias: Est-ce que les petits entrepreneurs ont disparus?
M. Lévesque (Léopold): Ils ne sont pas disparus ils sont
encore tous les mêmes et, à certains endroits, il y a des
compagnies qui les amènent à changer. Ils ne sont pas
obligés.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On va pouvoir
délibérer là-dessus.
M. Lajoie: M. le Président, pour répondre à ce que
M. Lévesque vient de dire, il me semble que dès que le
concessionnaire est obligé d'être membre de l'association le
problème n'existe plus. Les opérations forestières ne se
font pas toutes de la même façon, ce sont tous des
concessionnaires forestiers.
Il y a une compagnie forestière qui, par exemple, va employer
quelques très gros entrepreneurs: il y en a une autre qui va morceler
ses opérations et ce qui peut arri- ver, à un moment
donné, c'est que le concessionnaire, s'il est conjoint, se trouve en
présence de plusieurs certificats de reconnaissance syndicale. Cela peut
créer des embêtements et c'est le le problème des
entrepreneurs forestiers. Il faut vous dire que, dans le moment, les
associations que le représente, à la suite de certains
événements malheureux qui s'étaient produits, de la
pression qui s'est faite dans les forêts où l'union est
entrée, ont négocié des conventions collectives et le
système
fonctionne.
Nous nous étions inspirés, pour établir ces
associations, de l'article 6 de la Loi des relations ouvrières telle
qu'elle existait. Ce qui paraît heureux, c'est que cet esprit qui a
présidé à la formation des associations qui ont
négocié des conventions collectives qui fonctionnent très
bien, à la satisfaction des employeurs forestiers et à la
satisfaction de la partie syndicale, c'est précisément le
système qu'on a actuellement; c'est précisément celui qui
était prévu par le texte de l'article 2 du bill no 54, tel qu'on
le présente, et cela fonctionne bien.
Alors, vu que l'expérience a été faite, pourquoi ne
pas au moins, suivant ce texte, avec les garanties que l'amendement que je
propose donnerait à la partie syndicale, un essai? Cela me paraît
être aussi l'idée du gouvernement dans le texte et, en pratique,
nous savons que cela fonctionne bien, puisque c'est sous ce système que
nous fonctionnons actuellement.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En
délibéré. C'est tout sur les forêts? 40.
M. Marchand (Jean): Seulement sur le premier paragraphe de 40, M. le
Président. Dans l'article 11 de l'ancienne loi, il était
prévu que l'avis était donné par le syndicat et non par
l'employeur. Ici, ce n'est pas une question de principe, parce que je crois que
les employeurs peuvent aussi bien que nous donner un avis. Seulement, quand
vous mettez les deux comme cela, dans le même article, si par
coïncidence ils se convoquent mutuellement à des endroits
différents, à la même heure et la même
journée, on se demande quel avis sera prioritaire. C'est la seule
difficulté qu'on voulait vous soumettre.
M. Bellemare: Vous avez huit jours pour vous retrouver.
M. Marchand: Il ne s'agit pas de nier le droit de l'employeur, c'est
cette difficulté pratique que nous...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je comprends que, sur les
autres paragraphes, il semblerait que tout le monde soit d'accord, sauf
à corriger la formule.
M. Massicotte (Jean): Au paragraphe 2, on ne connaît pas tout
à fait l'intention du législateur même si le texte est
substantiellement le même que celui de l'article 11 de l'ancienne loi. On
se demande si le législateur se réfère à
l'expiration de "la partie" ou à l'expiration de "la convention
collective". Il y a peut-être lieu de corriqer le français.
M. Lesage: Ah non! là, c'est tiré par les cheveux! C'est
bien français. Autant j'ai admis l'autre jour que vous aviez raison. M.
Massicotte, autant je ne suis pas prêt à l'admettre cette
fois.
M. Massicotte: Très bien.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, le
troisième paragraphe et le quatrième paragraphe, c'est
d'accord?
M. Desaulniers (Guy-Merrill): M. le Président, nous aimerions
suggérer au comité d'ajouter, à la fin du troisième
paragraphe, les mêmes mots que vous trouvez à la fin du
deuxième paragraphe, c'est-à-dire "à moins qu'un autre
délai y soit fixé".
Si vous me permettez, dans le troisième paragraphe, il s'agit,
n'est-ce pas, d'une sentence qui remplace une convention collective de travail.
Or, il arrive, en fait, que dans des sentences les parties puissent faire
comprendre au tribunal que pour certaines raisons pratiques, un avis de plus de
60 jours peut être inclus: souvent, les tribunaux d'arbitrage l'ont
accepté, particulièrement dans le cas des corporations
municipales.
Dans le cas des corporations municipales - et je prends comme exemple
les corporations municipales dont l'exercice financier commence le 1er janvier
pour se terminer le 31 décembre - habituellement, les prévisions
budgétaires sont préparées vers le mois d'octobre. Alors,
par entente - et cela se pratique depuis quelques années -nous avons, de
consentement, ouvert les négociations trois mois avant l'étude
des prévisions budgétaires: si nous nous entendions à ce
moment, le conseil municipal prévoyait dans son budget les
éléments sur lesquels nous étions d'accord.
M. Lesage: Je comprends très bien. Nous allons noter cela, M.
Desaulniers.
M. Bellemare: Est-ce que c'est à cet article aussi que, si le
comité acceptait le troisième paragraphe de l'article 32c.
non-utilisation pendant douze mois, on change le délai de six à
douze mois?
M. Desaulniers: C'est l'article 32 auquel vous vous
référez? L'article 32, c'est pour l'accréditation. Le
problème que je soulève actuellement n'a aucune relation avec
cela.
M. Bellemare: Non, c'est un autre problème, M. Desaulniers, quant
au délai à être changé pour l'article 4.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 40, en
délibéré. 41.
Les négociations
M. Massicotte: M. le Président, sur 40.
en relisant rapidement le projet, je me demande s'il n'v a pas une
espèce de contradiction entre le paraqraphe 3 de l'article 40 et
l'article 54. Enfin, je ne l'ai pas étudié à fond, mais il
me semble y avoir une certaine incompatibilité.
Je souligne simplement cela au comité des relations industielles
de façon que, si nécessaire, on puisse aller plus loin dans le
problème. Je crois à 40, le troisième paragraphe, et
à 54; dans un cas, on parle d'un avis dans les 60 jours; dans un autre,
on parle d'un avis de non-renouvellement entre le 60e et le 30e jour. Je me
demande s'il n'v aurait pas une espèce de concordance à
faire.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, on dit ici
que 40, troisièmement, ca se rapporte a une sentence arbitrale.
M. Massicotte: Deuxièmement, M. le Président, le
deuxième paragraphe de 40, excusez-moi.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En tout cas, 54, ca me
semble être la tacite reconduction.
M. Dugré: sur quel article? 40?
M. Dugré (Alexandre): 40, quatrièmement. Il faudrait
mentionner que ces six mois n'ont aucune relation avec l'article 21-D.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 21-D.
M. Dugré: L'accréditation Deut être demandée
du 60e au 30e jour précédant !a date d'expiration d'une
convention collective: mais là, par le quatrièmement de l'article
40, la convention peut être considérée comme en
négociation; alors, il y aura a vérifier pour qu'il n'v ait pas
de relation avec ca.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 41: Il n'v a pas
d'objection? 41, en délibéré..
M. Massicotte: Un instant, M. le Président, à 41, pour
fins peut-être de clarification, et pour bien montrer que l'article
s'applique tant aux associations de salariés qu'aux emploveurs, nous
aimerions suggérer un texte qui dit qu'après un avis prévu
à l'article précédent, les parties doivent commencer et
poursuivre avec diligence les négociations, avec diligence et bonne foi.
Changer un peu le texte et nous avons préparé, pour distribution,
un texte.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, on dit: Les
négociations doivent commencer, c'est malaisé de faire ca tout
seul, des négociations.
M. Lesage: Cela obliqe les parties, ça.
M. Massicotte: Nous le présumons, évidemment,
excepté que nous aimerions que ce soit plus clair.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord. 42.
M. Massicotte: 42, différence de textes, M. le Président
entre le texte anglais et français; d'un côté, on dit le
"ministre", de l'autre côté, on dit le "board".
M. Lesage: Merci, monsieur.
M. Gabias: Leauel des deux préférez-vous, M.
Massicotte?
M. Massicotte: En Ontario, c'est évidemment la commission qui
fait ça. Cela dépendra du client, si le client est Anglais, on
prendra le "board"; et si le client est Francais, on prendra le "ministre".
M. Bellemare: M. Massicotte, vous n'êtes pas contre le
deuxième paragraphe de 42, vous?
M. Massicotte: Je me suis posé une question: si le mot "notifier"
était français?
M. Bellemare: Ah oui, oui, vous allez être "notifié", les
parties vont l'être.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, 42, en
délibéré.
M. Matteau (Arthur): 42, M. le Président. Arthur Matteau, Union
des municipalités.
M. Marchand: Est-ce que c'est la commission ou le ministre, M. le
ministre?
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est le ministre.
M. Matteau: 42, M. le Président, nous demanderions d'ajouter dans
la quatrième ligne, à la fin de la ligne, après le mot
"délai", le mot "additionnel", de manière que, dès la
réception du certificat de reconnaissance, nous puissions au moins avoir
un mois ppur prévoir les négociations. Le texte, tel que
rédigé, permettrait à une partie d'amener l'autre a
l'arbitrage dès le lendemain de la réception du certificat de
reconnaissance. Alors nous croyons qu'un délai "additionnel",
après le mois expiré, un "délai raisonnable
additionnel"...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, 42, en
délibéré. 43.
M. Provost (Roger): 43, M. le Président,
43 exclut de la conciliation les corporations municipales et scolaires,
les hôpitaux, les sanatoriums, les institutions pour malades mentaux.
L'expérience passée a prouvé qu'en bien des circonstances,
les parties, avec l'intervention d'un conciliateur, finissaient par s'entendre
et nous pensons qu'enlever ceci causerait encore un raidissement dans les
négociations et pourrait conduire, à la fin, à l'absence
de toute négociation. Les parties, ne faisant pas l'effort
nécessaire pour négocier, s'en reporteraient trop directement
à un tribunal d'arbitrage. Alors, nous pensons qu'il est
préférable de laisser le régime du conciliateur et pour
les hôpitaux et pour les corporations municipales.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Provost, actuellement,
il n'y a plus de conciliation dans le cas des corporations municipales et
scolaires.
M. Desaulniers: M. le ministre, si vous me le permettez, il n'y en a
plus, mais, pour votre information, il y en a eu et cela a donné de bons
résultats.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On dit qu'il n'y en a
plus depuis quinze ans.
M. Desaulniers: Je comprends. Je ne sais pas si c'est depuis quinze ans,
je ne suis pas à même de dire si c'est depuis quinze ans, mais je
sais qu'il y en a eu; j'y ai assisté moi-même et cela a
donné de bons résultats.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je sais qu'il y en a eu,
j'en ai fait moi-même.
M. Desaulniers: Et avec de bons résultats, n'est-ce pas, M. le
ministre?
M. Bellemare: M. Desaulniers, on fait disparaître de cet
article-là un mot très important de l'ancienne loi: le ministre
charge un conciliateur "sans délai", le ministre charge "sans
délai": ce n'est pas dans le nouvel article.
M. Desaulniers: Ce sera toujours sans délai qu'il le fera?
M. Bellemare: Ah, ça dépendra du ministre.
Dans l'ancienne loi, on disait: Le ministre charqe le conciliateur "sans
délai".
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Quelle différence
y a-t-il entre "sans délai" et "immédiatement"''
M. Bellemare: Ah, c'est dangereux avec le ministre.
M. Desaulniers: Mais, si vous me permettez, M. le Président,
concernant cet avis "sans délai", il n'y a pas de doute que l'ancien
texte créait une obligation au ministre, disons, au point de vue de la
loi. Simplement, je ferai remarquer qu'aujourd'hui - et je ne parle pas ici des
services publics pour le moment, je ne parle que de ceux qui ne sont pas des
services publics - les calculs du délai pour la grève sont
basés non pas sur l'intervention du conciliateur, mais les délais
sont calculés sur la réception par le ministre de la demande de
conciliation. Alors, je crois qu'avec cette nouvelle formule-là - je
comprends qu'il est toujours loisible pour un ministre de nommer un
conciliateur sans délai pour éviter des litiqes - je crois
qu'elle n'a pas la conséquence qu'elle avait autrefois.
M. Garant (Léopold): Corporation des instituteurs. M. le
Président, sur cet article-là, je suis chargé de dire, au
nom de la Corporation des instituteurs, que les instituteurs, de leur
côté, sont satisfaits du système actuel et ne
réclament pas de conciliateur; ils sont satisfaits du système
actuel.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 44.
M. Massicotte: M. le Président, sur 44, à cause du
caractère obligatoire de la clause, nous préférerions que
cette clause soit rayée, surtout, évidemment, à cause des
pénalités prévues par l'article 126. Par ailleurs, nous
accéderions certainement un amendement qui dirait que les parties ont
l'obligation, "à moins de raisons valables", d'assister aux
séances de conciliation.
Nous trouvons cela un peu abusif, parce que nous avons eu des
expériences: encore là, nous parlons du côté
pratique. Il est arrivé, par exemple, disons du côté
syndical, que, dans certains cas, nous nous sommes présentés,
certains confrères et moi, à trois séances successsives de
conciliation et la partie syndicale n'y était pas.
Une voix: Est-ce que le contraire peut arriver?
M. Massicotte: Le contraire peut arriver pour une raison ou pour une
autre. Il y a des oublis qui se font d'un côté et de l'autre; il y
a des gens qui arrivent en retard aux séances de conciliation.
Maintenant, le point important de cet article, c'est qu'on tombe à ce
moment-là sous l'article 126, on fait défaut de remplir une
obligation: même si on est de bonne foi, on devient passible d'amende.
L'article n'existait pas avant ça, M. Marchand. L'article n'existait pas
avant aujourd'hui et on se présentait à la conciliation.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, vous
suggérez que l'on ajoute "à moins de raisons valables..."?
M. Massicotte: Ou l'enlever ou ajouter "à moins de raisons
valables..."
M. Marchand: M. le Président, cette clause nous plaît. Nous
croyons que les conflits ouvriers sont assez importants pour que, si le
conciliateur délégué par le gouvernement convoque les
parties, les parties devraient être là. Je pense que c'est le
minimum qu'on peut exiger et je pense bien qu'il n'y a aucun conciliateur,
devant une raison valable, qui n'acceptera pas. La seule chose que nous
aimerions ajouter à cet article, serait ceci: nous aimerions qu'en
principe, les parties soient convoquées au lieu du litige, ou à
un autre endroit convenu entre les parties. Parce qu'il arrive très
souvent que, si le conflit a lieu, par exemple, à Baie-Comeau, on nous
convoque a Québec; ça ne fait pas toujours notre affaire. Disons
qu'en principe, ça pourrait être un autre lieu. Le danger, c'est
qu'on soit convoqué n'importe où. Il y a une tendance à
convoquer les parties toujours à Québec ou à
Montréal. Pour les gens de Québec et pour les gens de
Montréal, ça va très bien. Pour nous, ça fait notre
affaire, mais, pour les gens qui sont impliqués dans le litige, je pense
que ce n'est pas toujours pratique.
M. Massicotte: M. le Président, nous sommes parfaitement d'accord
avec les dernières remarques de M. Marchand. Pour en revenir à
mes remarques antérieures, j'aimerais au moins, par exemple, que la loi
prévoie, si oossible, que les parties reçoivent un avis
raisonnable de la date à laquelle les séances de conciliation
seront tenues, de façon que quelqu'un ne puisse nous accuser selon 126
et nous fasse condamner à l'amende.
M. Bellemare: Qu'est-ce que vous appelez un délai raisonnable?
Trois jours?
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est huit jours pour les
parties en grève: le délai de convocation des parties pour
négocier, c'est huit jours.
M. Marchand: Il peut arriver des circonstances où il est urgent
que le conciliateur fasse, dans une période très courte, son
intervention conciliatrice: si, par exemple, on est à la veille d'un
conflit très important, où ça menace de
dégénérer en conflit, je pense que si, à ce
moment-là, la loi prévoit un délai de huit jours, c'est
nettement abusif; je pense que le conciliateur peut arriver dans la nuit et
convoquer les parties. Des conflits de travailleurs, ce sont des conflits qui
intéressent souvent des milliers de personnes...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): ...on s'en tient au bon
jugement des conciliateurs, qu'est-ce que vous voulez?
M. Marchand: Si le jugement du conciliateur fait défaut, on peut
toujours avoir recours à celui du ministre.
Une voix: Ce n'est pas difficile.
M. Johnson: Non, non, vous nous en reparlerez à ce
moment-là, et on y verra.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): L'expérience que
vous avez eue pendant seize ans, on l'a goûtée.
M. Provost: M. le Président, il me semble y avoir une
espèce de décalage entre 45 et 46. À 46, le droit de
grève est acquis après 60 jours ou après 90 jours lorsque
c'est une première convention. D'un autre côté, le rapport
du conciliateur doit être fait dans les trente jours. Cela laisse un
vacuum de trente à soixante jours où il ne se casse rien. Alors,
on pense que ce vacuum courrait rendre difficile une entente ultérieure
dans les parties, s'il ne se fait rien pendant trente jours. Or, c'est
simplement une question de changer les délais du conciliateur pour les
faire conincider avec la date où le droit de grève prend
effet.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais on dit ici: "dans
les trente jours de sa nomination ou dans le délai ultérieur dont
les parties conviennent par écrit."
M. Provost: Bien oui. mais il faut que les deux parties en conviennent.
S'il y en a une qui ne convient pas, au bout de trente jours, elle est
obligée d'envoyer son rapport. et là, il se passe trente jours
là où il ne se passe rien: un entracte de trente jours où
il ne se passe rien. Alors, dans l'usine, il va se passer toutes sortes de
choses qu'on ne voudrait pas qu'il se passe. parce que les ouvriers sont assis
entre deux chaises. Ils n'ont pas le droit de faire la grève, mais il
n'y a aucune procédure en cours. Alors, ça peut créer des
problèmes assez difficiles.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Et si les parties ne
veulent pas, après trente jours, que le conciliateur continue, pour une
raison ou pour une autre?
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous permettez? À
l'article 42, on dit que si une des parties ne croit pas que les
négociations puissent être complétées dans un
délai raisonnable, le ministre, apparemment, peut
prolonger le délai de conciliation; est-ce que c'est exact,
ça?
M. Desaulniers: Il s'agit de négociation, monsieur.
M. Bellemare: M. Desaulniers, l'ancienne loi prévoyait 14
jours.
M. Desaulniers: Oui, autrefois, 14 jours. Maintenant, si vous le
permettez, M. le Président, je vais essayer de répondre au point
soulevé par l'honorable ministre du Travail.
J'ai toujours compris que lorsque le législateur avait
créé une intervention conciliatrice, c'est qu'il l'avait fait,
n'est-ce-pas, dans le but d'essayer d'obtenir des ententes entre les parties
pour établir la stabilité dans l'industrie et les bonnes
relations. Pour moi, la conciliation, particulièrement dans l'esprit de
nos lois, c'est l'intervention du législateur par le ministère du
Travail dans le but de forcer les parties à s'entendre.
Or, je soumets que, avec le délai actuel, le législateur
ne prend pas du tout le temps qu'il aurait à sa disposition pour mettre
fin à un différend qui peut dégénérer en
grève. Je prends l'expérience d'ailleurs et je crois que c'est
peut-être souvent dans les derniers moments, dans les derniers jours
avant une grève, que l'intervention conciliatrice peut être plus
efficace. Et ce n'est pas, à mon point de vue, simplement aux parties de
décider de ça. Je crois qu'il est de l'intérêt
public que le législateur autorise les officiers de ses
départements à intervenir jusqu'à la fin pour amener un
règlement au différend et pour empêcher des
grèves.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, vous
suggérez que le délai de trente jours disparaisse?
M. Desaulniers: C'est-à-dire que, tant et aussi longtemps, en
fait, que la grève ne commence pas, je soumets que le conciliateur a le
devoir d'approcher de plus en plus les parties et d'essayer de plus en plus de
les empêcher soit de faire une grève, soit de faire une
contre-grève.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): C'est-à-dire qu'en
fait, en respectant les délais prévus pour la grève, le
conciliateur ait le droit de "se grouiller" jusqu'à la fin.
M. Desaulniers: C'est ça. Tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas
un règlement de signé, s'il peut faire le règlement;
autrement, lorsqu'il ne peut faire le règlement, à ce
moment-là, naturellement, il y a une grève ou une
contre-grève.
M. Bellemare: Oui, mais, M. Desaulniers, cet amendement-là de
quatorze jours, c'est nouveau dans le cas des relations ouvrières.
Aujourd'hui, on marque trente jours. C'est un amendement qui a
été adopté et contre lequel j'ai voté.
M. Desaulniers: M. le Président, pour répondre à
l'honorable député de Champlain, les quatorze jours, dans
l'ancienne loi, correspondaient aussi à un système de
référence à l'arbitrage qui n'existe plus maintenant.
Maintenant il faut dire - et je crois que M. le Président en a
l'expérience -que même après les délais du
conciliateur, même après que le conciliateur fait son rapport, il
est arrivé à maintes reprises que des demandes ont
été faites auprès du ministère du Travail
d'intervenir dans des conflits, même après que le conciliateur
avait fait son rapport.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'y a rien oui
empêche ça.
M. Desaulniers: Je comprends, mais si vous avez un conciliateur,
pourquoi ne pas lui donner toute la latitude puisque vous croyez à la
nécessité d'en avoir un pour amener les parties à un
règlement'' Pourquoi ne lui...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il n'y a pas d'objection
à ça. On l'a fait, à un moment donné, pour que
l'intervention du conciliateur cesse, si personne n'en veut.
M. Desaulniers: Puant à la question de dire que personne n'en
veut, il y a un autre principe qui se dégage de la loi. La conciliation,
ce n'est pas les parties qui en ont mis le texte dans la loi, c'est le
législateur qui a mis ce texte dans la loi.
M. Johnson: M. Desaulniers, si on ajoutait ceci: "Le conciliateur fait
rapport au ministre dans les 30 jours de la nomination ou dans le délai
ultérieur dont les parties conviennent par écrit ou oui lui est
accordé par le ministre." En somme, le ministre, c'est ce qu'il fait en
pratique, même après les 30 jours, il donne un mandat au
conciliateur.
M. Desaulniers: D'ailleurs, le principe a été reconnu
dès la première législation que vous avez eue dans
Québec. Prenez la Loi, des différends ouvriers, le bill Lemieux,
qui a été adopté, je crois, en 1909. Dès ce
moment-là, on a compris que, en toutes circonstances, lorsqu'un
différend s'élevait, le ministre, par l'intermédiaire d'un
greffier -parce qu'à ce moment-là on l'appelait greffier -
devrait intervenir auprès des parties pour faire tous les efforts
possibles pour les amener à un accord.
M. Dozois: M. Desaulniers, dans l'article "le conciliateur fait au
ministre un premier rapport dans les 30 jours de sa nomination", est-ce que
ça voudrait dire qu'il peut continuer quand le ministre sera
informé de la situation?
M. Marchand: L'État intervient pour empêcher les parties de
recourir, à un moment donné, à la force
économique.
L'État prévoit que, dans le cas d'une première
convention collective, vous avez 90 jours avant que le droit de grève
soit acquis. Dans le cas de renouvellement d'une convention, vous avez 60
jours. Il n'est pas Densable que le mandat du conciliateur soit plus court que
cette période-là. C'est l'État qui impose ce délai
pour pouvoir intervenir. Il ne faut pas que, par une clause, vous
l'empêchiez, à un moment donné, d'intervenir. C'est
justement parce que le bien commun est en jeu et l'État dit: "Je me
réserve le droit d'intervenir auprès des parties pour assurer un
règlement pendant ces deux périodes-là."
M. Bellemare: Le droit de grève commence 60 jours après
ça.
M. Marchand: Non, non, c'est 60 jours après l'avis envoyé
au ministre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Marchand, le rapport
du Conseil supérieur du travail dit ceci en parlant de l'article 63:
"Troisièmement - et ça, c'est le groupe syndical et le groupe
économique de la même opinion - il n'y aurait pas de conseil de
conciliation, mais seulement des conciliateurs de carrière qui
interviendraient avant l'expiration du délai de 60 jours prévu au
paragraphe précédent. Le conciliateur devrait avoir un
délai d'au moins 30 jours pour faire son travail. Une fois
expirés les délais de 90 jours ou de 60 jours avant que le droit
de grève ne puisse s'exercer, les parties auraient le droit de faire la
demande de la formation d'un conseil d'arbitrage." Et ils disent: "Ce premier
délai pourrait être étendu de 30 jours à la demande
des parties." Le "30 jours" vient de là. Seulement, si vous
croyez...
M. Marchand: Il n'y a pas de contradiction entre ce que vous venez de
lire et ce qu'on demande ici.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Non, la raison pour
laquelle on a mis 30 jours, c'est là qu'on l'a prise. Maintenant, je ne
vois pas d'objection de principe, parce que les conciliateurs continuent
jusqu'au dernier moment.
M. Marchand: Il faut que le mandat du conciliateur coïncide avec la
période que l'État considère essentielle pour lui
permettre d'intervenir.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord, je comprends
ça.
M. Bellemare: Mais, M. Marchand, vous dites: "Le rapport que le
conciliateur fait" et ça, ça prend 60 jours.
M. Marchand: Non, non. Avant que le droit de grève soit acquis
dans le cas d'un renouvellement de convention collective c'est 60 jours; dans
le cas d'une première convention, c'est 90 jours. Dans le cas d'une
deuxième convention ou des conventions subséquentes, c'est
soixante jours à partir de la demande d'intervention.
M. Bellemare: De la demande d'intervention?
M. Marchand: Oui. Alors, si le 60e jour arrive, même si vous avez
un conciliateur, le droit de grève est acquis.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Selon les détails,
il peut rester d'un à trente jours à peu près, dans le cas
d'un renouvellement, avant que la grève arrive.
M. Marchand: C'est ça.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Alors, où vous avez
objection, vous autres, c'est concernant le rapport dans les trente jours.
C'est là une question de procédure. Mais l'affaire du
délai ultérieur convenu par les parties, que ce soit simplement
laissé jusqu'à la fin que le négociateur puisse...
M. Marchand: Que le conciliateur puisse intervenir de droit.
M. Fortin: Il faut simplement que le conciliateur fasse rapports avant
l'expiration du délai prévu pour faire la grève.
M. Marchand: Le plus tôt possible, mais avant le délai.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Avez-vous autre chose, M.
Massicotte, sur 45? 46. Alors 46, cela va. 47"' Un
délibéré 48?
Conditions de travail
M. Desaulniers: M. le Président, si vous examinez 48, vous allez
vous apercevoir qu'il y a une relation avec 46. Dans 48, on établit,
n'est-ce pas, la protection des conditions de travail des employés en ce
sens qu'il est prohibé à l'employeur de faire des changements
dans les conditions de travail de ces employés à certaines
périodes? Et là,
c'est pour ça que vous avez à 48, une
référence à l'article 46.
Or, si nous nous référons à l'article 46, on
s'aperçoit que cet article ne concerne que les industries ou, si vous
voulez, les employés ou les salariés qui ne font pas partie de
services publics. Et je ne peux pas voir, dans le moment, comment les
employés de services publics peuvent profiter de la protection que donne
48 aux employés dans l'industrie. Il n'y a absolument rien qui garantit,
lorsqu'une convention collective de travail cesse dans un service public, que
l'employeur n'est pas obligé de ne pas changer les conditions de
travail. Et je soumets ici le problème suivant: je crois qu'il n'y a pas
simplement dans le cas de services publics le problème de faire
protéger les conditions de travail existantes chez un employeur lorsque
cet employeur est un service public. Cela va beaucoup plus loin que ça.
Dans un service public, suivant toutes les dispositions de la loi, vous n'avez
pas de grève. Non seulement vous n'avez pas de grève, mais la loi
est très claire et, à l'article 47, qui est une
répétition de l'ancien article de la Loi des services publics, il
est dit que tput différend doit être réglé par
l'arbitrage.
Or, du moment qu'une association a été
accréditée, et du moment qu'une convention collective de travail
est intervenue entre elle et son employeur, ou encore qu'une sentence arbitrale
a été rendue à la suite d'un différend entre les
salariés et le service public, eh bien, à ce moment-là,
toutes les parties sont assujetties à une procédure riqide, c'est
qu'elles doivent accepter les sentences arbitrales. Or, il est évident
que si vous enlevez le droit de grève dans les services publics, la
situation qu'on a voulu couvrir par 48 dans l'industrie ne peut pas être
couverte. On comprend que, dans l'industrie, lorsque les délais ont
été passés, lorsque les parties ne peuvent pas en venir
à un accord, à ce moment-là, il y a comme un vide qui se
fait, chaque partie est libre de faire ce qu'elle veut et à ce
moment-là, c'est la force économique qui entre en jeu.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Desaulniers, est-ce que
vous voulez dire qu'en se référant à l'article 46, on se
trouve avec 48 à éliminer une espèce de protection.
M. Desaulniers: C'est-à-dire qu'on ne la donne pas au service
public...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): C'est que la protection ne
se trouve pas à être donnée en même temps à
ceux qui sont exclus de 46.
M. Desaulniers: C'est ça. Par conséquent, je reporte le
texte pour le moment, mais, comme conséquence, c'est que, dans un
service public, lorsqu'une convention a été signée entre
les parties. disons que l'accréditation reste la même, il y a
à ce moment-là d'autres négociations oui vont amener une
autre convention ou une autre sentence. Or, il faudrait que dans la
période de négociation après que la convention s'est
terminée, les emoloyés soient protégés dans les
conditions de travail. Pourquoi le donnerait-on aux employés,
c'est-à-dire à des salariés d'un secteur de la province,
alors qu'on ne le donnerait pas aux autres?
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Desaulniers, ce que
vous voulez, c'est qu'on trouve le moyen de protéger les employés
de services publics qui ne sont pas couverts par l'article 46?
M. Desaulniers: Dans le sens de l'article 48.
M. Fortin: M. Desaulniers, si, après le chiffre 46, on ajoutait:
"jusqu'à ce qu'une sentence arbitrale soit rendue suivant l'article
47'"'
M. Desaulniers: Si vous me le permettez, j'aimerais bien répondre
oui, mais, avant, j'aimerais y penser.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Enfin. l'idée c'est
de trouver le moyen pour d'étendre la protection de 48 à ceux qui
n'ont pas le droit de grève.
M. Desaulniers: C'est ça.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord? M. Massicotte,
sur 48?
M. Massicotte: M. le Président 48 semble couvrir deux situations.
La situation, disons où vous avez une requête en
accréditation et la situation où vous avez une convention
collective et on dit dans Se cas d'une requête en accréditation:
L'employeur ne changera pas ses conditions de travail, tant et aussi longtemps
qu'il n'a pas eu le consentement écrit de l'association
requérante ou retenue en fonction des délais prévus
à l'article 46.
Par ailleurs, quand vous avez une convention collective et si l'article
48 dit que les dispositions de la convention collective continuent de
s'appliquer. habituellement, dans les conventions collectives, vous pouvez,
sous réserve ''es conditions qui y sont exprimées, changer les
conditions de travail de vos employés. Or, l'entreprise, comme on la
connaît, c'est une chose vivante ou, comme dirait M. Marchand, une chose
dynamique. S'il y a une requête en accréditation, nous soumettons
qu'on ne devrait pas paralyser un employeur de bonne
foi dans les opérations de son entreprise.
Nous sommes en période d'automation; nous pouvons acheter de la
machinerie; nous pouvons changer des conditions physiques de travail et nous
aimerions que, dans le texte de l'article 48, nous avons une protection pour
continuer quand même à administrer notre entreprise et suivre le
progrès, même si pendant, disons, la période
d'accréditation à la période de reconnaissance (des fois,
ça prend quelques mois, comme les unions et nous, nous le savons) nous
pouvons quand même continuer à opérer, à avancer, si
c'est nécessaire.
Alors, nous aimerions suggérer un texte qui n'est pas, si vous
voulez, comme tous les textes que nous avons soumis, nécessairement un
texte définitif, mais enfin qui exprime bien l'idée que nous
avons et nous demanderions de faire circuler ce texte qui dit ceci au premier
paragraphe de l'article 48: "Ceci ne doit pas être
interprété comme empêchant un employeur de faire un
changement compatible avec ses opérations à condition que tel
geste soit posé de bonne foi."
C'est une question de bonne foi. On passe son temps à nous
reprocher souvent, peut-être d'être de mauvaise foi. Alors, nous
disons que s'il y a des employeur de bonne foi qui doivent faire marcher leur
entreprise, bien, mon Dieu, qu'ils soient protégés.
évidemment, il y a une erreur typographique à la deuxième
ligne, qui est soulignée, au lieu "d'obligations", ça devrait
être "opérations" pour rendre bien l'idée que nous
avons.
Au nom des employeurs, je propose un amendement à l'article 48.
"Article 48 "À compter du dépôt d'une requête en
accréditation ou à compter de la reconnaissance d'une association
et jusqu'à l'expiration de l'un des délais prévus à
l'article 46, un employeur ne doit pas, sans le consentement écrit de
l'association requérante ou reconnue, modifier les conditions de travail
de ses salariés et il est tenu, s'il est alors lié par une
convention collective, de continuer à s'y conformer. Ceci ne doit pas
être interprété comme empêchant un employeur de faire
des changements comptabiles avec ses opérations, à condition que
tel geste soit posé de bonne foi. ''Sous réserve des dispositions
du paragraphe précédent, il est interdit, pendant la
période visée au orésent article, à une association
de salariés ou à ses représentants ou à quiconque
de conseiller ou d'enjoindre à des salariés à de pas
continuer a fournir leurs services aux mêmes conditions de travail. Les
salariés doivent continuer à fournir leurs services à
leurs employeurs."
M. Marchand: Nous comprenons les bonnes intentions de M. Massicotte et
des personnes qu'il représente. Seulement, si cet amendement est
accepté, ça veut dire à toutes fins pratiques que nous
détruisons l'article que nous sommes à étudier, parce que
nous allons demander aussi le droit de faire la grève de bonne foi
pendant cette période. Qu'est-ce que vous voulez, parce que s'il y a une
modification qui est faite et qui met en danqer les conditions de travail des
ouvriers, des droits acquis, je ne vois pas pourquoi nous serions les seuls
à être paralysés et que l'autre ait une porte de sortie et
qu'il puisse plaider qu'il pouvait la faire, la modification.
Cet article est là pour des raisons de bien commun,
c'est-à-dire que, pendant que le gouvernement intervient, on veut geler
les conditions pour ne pas donner prise au conflit, que le conflit
éclate immédiatement. Cela nous ennuie, les syndicats de
travailleurs, ça nous fige dans nos conditions actuelles. Cela ennuie
l'employeur aussi, temporairement. Si vous voulez les relever de leur ennui,
nous vous prions de nous relever du nôtre. C'est un équilibre.
Alors, nous tenons à l'équilibre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous plaidez la
parité, M. Marchand?
M. Massicotte: M. le Président je plaide aussi la parité.
Mais la seule chose que j'essaie de souliqner à l'attention du
comité, c'est que, dans le cas où il existe une convention
collective, l'employeur assujetti aux dispositions de sa convention collective
peut, à ce moment-là, changer les conditions de travail pendant
cette période. Si, par exemple, votre article 48 dit que les termes de
la convention collective se continuent pendant cette période, si, par
exemple, dans la convention collective, comme on en a souvent, j'ai une clause
de productivité qui me permet de faire des changements dans la
machinerie, des changements dans mes taux, sous réserve
évidemment des conditions de la clause, à ce moment-là, je
peux les faire selon le texte même de votre article 48. Mais, dans le cas
d'un employeur qui fait face à une demande d'accréditation, il ne
peut pas le faire.
Alors, c'est pour ça que je demande la parité, si vpus
voulez bien, pour le bon fonctionnement des entreprises, toujours sous la
condition de bonne foi.
M. Marchand: Dans ce cas-là, il y a une convention collective: la
façon dont le changement peut se faire a été
réglementée et prévue par les parties et des recours
existent à l'intérieur de la convention en cas de ariefs. Alors,
il n'y a pas de problème quand il existe une convention collective,
c'est quand il n'en existe pas, alors, là, vous avez une disposition
d'ordre public oui paralyse également les deux parties.
Je soumets simplement que s'il y en a une qui est
"déparalysée", on veut l'être également.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, 48 en
délibéré.
M. Massicotte: Sur la feuille qu'on vient de vous faire circuler, nous
demandons d'ajouter les mots "à quiconque", qu'il est interdit, pendant
la période visée au présent article, à une
association ou à ses représentais ou à quinconque de
conseiller aux salariés ou d'enjoindre à ces salariés de
ne pas fournir leurs services aux mêmes conditions de travail."
M. Desaulniers: C'est couvert, ça.
M. Massicotte: Non, non, ce n'est pas couvert, ra. Pas par l'article
48.
Une voix: Il y a une disposition d'ordre public.
M. Desaulniers: On dit au deuxième paragraphe de l'article 48:
"Pendant la période visée au présent article, il est
interdit à une association de salariés de conseiller ou
d'enjoindre à ses membres de ne pas continuer à fournir leurs
services à leurs employeurs aux mêmes conditions de travail."
M. Massicotte: Bien oui, c'est ce qu'on dit, mais nous demandons
d'ajouter les mots "à quinconque"; pas simplement à l'association
de salariés, mais "à quiconaue" aussi. A l'association de
salariés ou à ses représentants, parce que c'est assez
difficile pour nous ou pour n'importe qui d'identifier, si vous le voulez,
l'association de salariés ou ses représentants. Nous disons,
"à quinconque" pour...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Desaulniers, est-ce
que c'est rien que le mot "quinconque" qui vous "chicotte"?
M. Desaulniers: M. le Président je dirais que, lorsque l'on se
réfère à une association, moi, j'ai toujours compris que,
d'après la jurisprudence, on parlait quant à la
responsabilité de ceux qui en étaient membres ou de ses
représentants. Ce n'est pas l'association elle-même qui pose des
actes.
M. Johnson: Il y a des juges qui diraient que la prohibition s'applique
juste à l'association agissant comme association par une
résolution; je vois mal une résolution qui conseillerait à
ses membres de ne pas se conformer à la loi.
M. Massicotte: D'ailleurs, M. le Président, du côté
patronal, nous ne croyons pas à la génération
spontanée dans ces matières-là.
Une voix: Il faudrait peut-être mettre les incroyants.
M. Marchand: Exactement, ce qui est très difficile, je sais ce
qu'on veut viser par ça; devant une association qui agirait
indirectement, la clause ne se trouve pas à couvrir le cas.
Mais, si on accepte la proposition de M. Massicotte, ça va
beaucoup plus loin que ça, cela atteint même certaines
libertés civiles parce que, pendant cette période, l'employeur
même s'il ne peut pas changer le conditions de travail, peut à un
moment donné, mettre des gens à pied. Il est libre de le
faire.
Un travailleur pourrait très bien, sur une base individuelle,
être sollicité par un voisin qui dirait: "Bien, à ces
conditions-là, ne travaillez donc plus là. "Il va tomber sous le
coup de la loi. Vous savez, je trouve que ça va beaucoup trop loin, trop
loin.
Ce qu'on vise à l'heure actuelle, c'est une loi qui
réglemente les relations collectives. Qu'on vise l'association, le
syndicat, nous sommes d'accord, nous l'acceptons. Mais si ça va plus
loin que ça, vous savez qu'à un moment donné n'importe qui
pourrait conseiller à quelqu'un qui travaille à l'Anglo Pulp:
"Sors donc de là, tu as de mauvaises conditions de travail." Si c'est
dans cette période-là, il peut être emprisonné ou il
peut être condamné à l'amende. Alors, je ne pense pas que
ce soit le but de la loi. Cela va beaucoup trop loin.
M. Johnson: Alors, vous n'avez pas d'objection à inscrire "ou ses
représentants."
M. Marchand: Non, "ses représentants", je n'ai pas d'objection
à cela.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En
délibéré.
M. Fortin: On pourrait prendre la même suggestion pour l'article
96.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): L'article 49.
M. Provost: M. le Président, l'article 49 détermine les
droits d'une association qui se substitue à une autre association. La
loi prévoit que ceci ne peut se faire qu'entre le soixantième et
le trentième jour. Et ordinairement, normalement, les ouvriers changent
d'association parce qu'ils ne sont pas satisfaits ou de la compétence,
ou des services, ou de l'intérêt que l'association en place leur
porte. Naturellement, s'ils changent, c'est parce qu'ils ne sont pas
satisfaits. Il ne faudrait pas qu'ils soient liés par les actes
de l'association qu'ils sont en train de déplacer. Et, dans l'article
49, on dit que: lorsqu'une association est reconnue, si elle est
déplacée par une autre, la convention qu'elle a signée est
non avenue. Mais lorsqu'une association est accréditée,
même si elle a signé une convention qui est loin d'être
satisfaisante pour les syndiqués, l'association qui vient à
remplacer, dans la limite de temps imposée par la loi du
soixantième au trentième jour, devient responsable de cette
convention. Elle est soumise à cette convention; et c'est bien souvent
parce que l'association en place allait négocier une convention qui
n'était pas satisfaisante que les ouvriers ont changé. Alors,
nous suggérons qu'après le mot "reconnue", nous enlevions les
mots "non accréditée" et que nous ajoutions le mot "reconnue" ou
"accréditée".
M. Lévesque (Montréal-Laurier): En fait, vous voulez dire
que...
M. Provost: Pardon?
M. Lévesque (Montréal-Laurier): ...cela reviendrait au
même?
M. Provost: Ce qu'on veut dire, c'est ceci: elle peut conserver la
convention, si elle le veut: si elle ne veut pas, elle peut la dénoncer
et en changer une autre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Avez-vous des objections
à ça, vous autres?
M. Massicotte: Aucun commentaire, M. le Président. Aucun
commentaire, excepté qu'au lieu d'employer le mot "et", employons le mot
"ou" pour "reconnue et accréditée".
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):
Délibéré. Article 49. Article 50.
M. Massicotte: M. le Président en fonction de la nouvelle
définition donnée à la convention collective ou
suggérée par M. Pépin aux mots "convention collective"
nous croyons que la première partie de l'article 50 devrait être
éliminée, vu que celle-ci ne mentionne plus les mots "conditions
de travail", tout simplement les rapports individuels et collectifs. Nous
suggéréons l'élimination du premier paragraphe de
l'article 50.
M. Marchand: On n'y aurait peut-être pas d'objection, mais on n'a
aucune assurance que le comité va accepter nos suggestions. On n'a pas
d'objection, mais, comme on ne sait pas si le comité va accepter notre
définition... à moins que le comité ne veuille nous donner
un "advance report"...
M. Lesage: Je ne pense pas.
M. Massicotte: M. le Président au cas où le comité
n'accepterait pas la définition proposée par les syndicats et que
nous avons semblé accepter, nous demanderions que les mots "qui n'est
pas contraire à l'ordre public ni prohibée par la loi" soient
éliminés, et si nous gardons la définition de convention
collective de travail au paragraphe 1 et toujours en supposant que le
comité garderait la définition qui est proposée là,
nous soumettons qu'on doit s'en tenir, si vous voulez, à "la convention
collective peut contenir toute disposition relative aux conditions de travail."
Il est souvent arrivé des arguments, si vous voulez, de la part
d'avocats syndicaux nous disant que tout ce qui n'est pas défendu est
permis.
M. Lesage: C'est normal.
M. Massicotte: Excepté que, je crois dans le Code civil, au lieu
des mots "prohibée par la loi", on emploie le mots "on ne peut pas
mettre dans un contrat quelque chose qui est contraire à la loi".
Voilà une nuance, si vous voulez, dans le chanaement de texte entre le
Code civil et le projet de code du travail, un élément dangereux.
D'ailleurs, cela a été plaidé par des avocats très
éminents du côté syndical.
M. Marchand: M. le Président, nous allons faire des
représentations comme si nous ignorions, enfin, c'est comme ça,
ce qui adviendra de notre définition que nous avons
suggérée au début.
Alors, a l'article 50, nous suggérons que le premier paragraphe
se lise comme suit: "La convention collective peut contenir toute disposition
oui n'est pas contraire à l'ordre public ni prohibée par la loi."
Si les parties s'entendent là-dessus, qu'est-ce que vous voulez, si on
décide avec un employeur de réqlementer, disons, le
défilé de la Saint-Jean-Baptiste, pour autant qu'on peut
être concernés, qui cela peut-il intéresser? Et pourquoi la
loi viendrait-elle délimiter le champ de la convention collective,
pourvu que les parties s'entendent? Alors, tout ce qui n'est pas contraire
à la loi...
M. Lesage: M. Marchand, l'affaire des congés, comme a la
Saint-Jean-Baptiste, tout ça fait partie des conditions de travail.
M. Marchand: M. le premier ministre, si on décidait, par exemple,
de mettre dans la convention collective une disposition concernant le
défilé de la Saint-Jean-Baptiste et voulant que le patron serait
en avant, qu'est-ce que vous voulez? On pourrait faire un tas de choses. C'est
parce qu'il ne m'en vient pas à l'esprit immédiatement, mais on
peut, dans une convention collective, qu'est-
ce que vous voulez, mettre toutes sortes de dispositions. C'était
un exemple.
M. Fortin: D'un autre côté, la loi oblige le patron, quand
il y a une solution contestée, à négocier une convention.
Faudrait pas toujours le forcer a négocier sur n'importe quoi. Il est
obligé de vous recevoir et de vous écouter.
M. Marchand: À l'heure actuelle, comme il a été
établi dans le jugement de la compagnie Paquet en Cour suprême,
les conditions de travail contenaient également des conditions d'emploi.
Comment voulez-vous les délimiter? Cela ne se délimite pas, je
crois que ce sont simplement des prétextes pour éviter le
débat. Je crois que ça ne donne rien d'essayer de définir
ici tout ce sur quoi les parties s'entendent.
Si on demande quelque chose à l'employeur, si on dit à
l'employeur: "Vous n'irez pas en Floride au mois de février, mais vous
irez au mois de mai", il va nous dire: "Ce n'est pas de vos affaires";
qu'est-ce que vous voulez? Je pense bien que, même si on allait en
arbitrage, on perdrait son temps.
Alors, l'histoire, c'est que, dans la convention collective, pour que
jamais la légalité ne puisse en être contestée sur
ce plan-là, si ce n'est pas contraire à l'ordre public et
à la loi, si les parties se sont entendues là-dessus, même
s'il y a un autre employeur qui croit que son voisin n'aurait pas dû
faire ça, ce n'est pas de ses affaires, c'est une entente privée
entre les parties et, du moment qu'elle n'affecte pas l'ordre public, c'est
l'affaire des parties.
Il y a toutes sortes de choses, vous savez. Nous autres, je ne sais pas,
on a au-dessus de 600 conventions collectives de travail... il y a toutes
sortes de choses qui entrent là-dedans. Il y en a qui ont des programmes
d'habitation, par exemple. L'employeur fournit... quand est-ce que c'est que
ça va s'arrêter? Je ne le sais pas, mais du moment que ce n'est
pas contraire à l'ordre public et à la loi.
Pourquoi, par la loi, donner une définition qui en fait ne
restreint pas, parce que l'integrétation qu'on en donne, c'est
très large, c'est tout ce qui concerne les conditions d'emplois.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Ce que vous voulez dire,
c'est que, finalement, les mots "conditions de travail", en pratique,
n'impliquent rien.
M. Marchand: Ils n'impliquent rien, mais cela donne lieu à les
arguments, c'est une occasion de débats et de conflits inutiles.
M. Johnson: M. Marchand, éclairez-moi donc: quant à ces
conventions, personne ne voit d'inconvénients à ce que vous
conveniez de ce que vous voulez, pourvu que ça ne soit pas contre
l'ordre public et la loi...
M. Marchand: Et les bonnes moeurs.
M. Johnson: Mais, à un moment donné, la convention
collective qui est signée comporte un caractère obligatoire,
impératif envers l'employeur; et si le conflit naît sur une
condition autre qu'une condition strictement de travail ou d'emploi, c'est
là qu'on est embêté un peu.
M. Marchand: Bien, je vais vous dire, si l'employeur accepte de le
discuter, de le changer, de mettre une disposition en vertu de laquelle il ira
en Floride rien qu'au mois de juin, vous allez me dire: Bien, c'est
idiot...
M. Lesage: Mais, M. Marchand, il peut accepter de discuter, avec le
texte actuel.
M. Marchand: Pardon?
M. Lesage: Il peut accepter de discuter, avec le texte tel qu'il
est.
M. Marchand: C'est ce Que nous prétendons; seulement, quand vous
le définissez, comme ça, il y en a quelques-uns qui voient une
restriction à ça; on est obligé de faire un débat
sur des mots et on public le fond du problème. Je pense que le
présent code a essayé d'éviter - j'ai remarqué
ça à plusieurs endroits - ces textes trop restrictifs.
Je pense que l'employeur peut même refuser de mettre une clause
concernant les heures de travail dans sa convention: il n'a qu'à ne pas
s'entendre, il n'a Qu'à refuser. Qu'est-ce que vous voulez? C'est la
liberté de négociation; il est obligé de changer.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Qu'est-ce que ça
implique, en réalité, comme restrictions, cette
histoire-là, tant que c'est là, dans le monde d'aujourd'hui''
M. Marchand: Simplement, c'est qu'il y en a qui disent, par exemple: Si
on veut discuter la prolonqation des prestations d'assurance-chômage: ce
n'est pas une condition de travail, c'est une mesure de sécurité
sociale et puis on ne veut pas entrer dedans. Le fonds de pension: il y a de
grandes compagnies ici qui disent que ça, ce n'est pas une condition de
travail; elles se basent sur la loi et on est obligé de faire des
débats. Le cas de Paquet a établi une jurisprudence pour un cas
particulier, mais on ne peut pas dire que le problème est
clarifié définitivement.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Pardon,
d'après, le texte, prenez le cas des fonds de pension: "la
convention collective peut contenir toute disposition relative aux conditions
de travail qui ne sont pas contraires à l'ordre public ni à la
loi." Le fonds de pension n'est contraire ni à l'ordre public, ni
à la loi: qu'on appelle ça conditions de travail ou n'importe
quoi...
M. Marchand: Seulement, elles vont prétendre que ce n'est pas une
condition de travail. Voici comment elles le prétendent: Il y a de
grandes entreprises, par exemple, qui ont des systèmes non
contributoires au niveau du siège social. Elles disent: C'est nous, la
compagnie, qui donnons cà et vous n'avez pas affaire là-dedans,
ce n'est pas une condition d'emploi, on vous le donne. "Alors, nous sommes
obligés de faire un débat pour démontrer que c'est une
condition de travail, que cela intéresse les travailleurs, que c'est
leur avenir qui est en jeu. Et elles se servent de la loi pour dire: Non, la
loi ne vous autorise pas à négocier pour ça.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): C'est-à-dire que
c'est la définition de conditions de travail...
M. Marchand: C'est ça. Alors, avant que ce soit
complètement clarifié, on a encore cing ou six causes devant la
Cour suprême. Je trouve que la Législature ne devrait pas nous
créer de restrictipns inutiles à ce moment-ci; elle devrait nous
laisser faire le débat avec l'employeur...
M. Johnson: Est-ce que, dans un code bien fait, M. Marchand, on ne
devrait pas inclure une définition de ce que comprend l'expression
"conditions de travail"?
M. Lesage: Oui, mais essayez, c'est indéfinissable.
M. Marchand: Vous en parlez très fort, M. Johnson, parce
qu'à ce moment-là ce serait encore limitatif...
M. Lesage: Nécessairement, toutes les fois que vous essayez de
définir, vous limitez.
M. Lévesque (Montréal-Laurier):
D'autant plus que d'après ce que vous dites, il s'agit d'un
domaine qui est en train de changer tput le temps, tout le temps.
M. Marchand: C'est ça. Qu'est-ce que vous voulez? Il arrive
toutes sortes de choses. D'ici quelques années, même dans la
province, il peut y avpir des plans, conjointement avec le gouvernement, pour
la réhabilitation des travailleurs, leurs réadaptation
professionnelle: il peut y avoir des ententes au niveau de l'industrie: alors,
il va y avoir des débats pour savoir si c'est une condition de travail
ou si ce n'en est pas une. Ce sont des cas comme celui-là...
M. Lesage: Mais, à mon sens, M. Marchand, c'est
nécessairement une condition de travail; les pensions, les
bénéfices de sécurité sociale, tout ça, ce
sont des conditions d'emploi et de travail.
M. Marchand: M. le premier ministre, supposons que, dans une entreprise,
il y ait dix travailleurs de mis à pied par suite de l'introduction de
nouvelles techniques industrielles; ces gars-là ne sont plus à
l'emploi de la compagnie. Puis, à un moment donné, on va vouloir
changer pour les réadapter professionnellement, étant
donné qu'ils ont été déplacés pour des
causes d'automation. L'employeur va dire: "Ils ne sont plus à mon
emploi, ce ne sont pas des conditions de travail ici, ça, c'est une
affaire qui ne nous reqarde pas." Et pourtant, on sait qu'il y a une
responsabilité collective là-dedans, et on va essayer de trouver
des formules.
On ne voudrait pas que la loi serve de prétexte simplement pour
éloigner le problème parce que le problème est
réel.
Pour donner un exemple de dix employés qui seraient mis à
pied parce qu'on a trouvé une nouvelle machine plus productive, une
nouvelle technique, ces gars-là ne sont plus à l'emploi de
l'employeur: seulement, on sent qu'on a une responsabilité collective,
tout le monde, là-dessus.
L'employeur dit: "Cela ne me regarde plus, ce n'est pas une condition
d'emploi ici, ils ne sont plus mes employés, ma convention colllective,
c'est pour mes conditions de travail et à mes conditions d'emploi, ici,
dans mon entreprise".
Je pense qu'on ne devrait pas empêcher la discussion du
problème pour une Question technique comme celle-là: alors, parce
que la réalité industrielle est quelque chose d'extrêmement
mouvant, qu'on ne peut pas prévoir, quel est l'avantage? Si on demande
des choses pas raisonnables, l'employeur n'a qu'à dire non, ça
finit là; d'ailleurs, ils sont habitués à ça, ce ne
sera pas nouveau: qu'est-ce que vous voulez? Ils ont un certain
entraînement...
M. Fortin: M. Marchand, si vous enlevez ça, auelle
différence va-t-il y avoir entre le Code civil et le Code du travail,
vous qui n'aimez pas troo le Code civil?
M. Marchand: Alors, voulez-vous qu'on dresse la liste des
différences?
M. Fortin: Non. Tout de même, même si on laissait les mots
"conditions d'emploi" ou "conditions de travail", il y aura toujours une
certaine limitation, quitte évidemment à
la jurisprudence à la fixer. D'ailleurs, c'est te jeu des
tribunaux, ça, de prendre un texte de loi qui est le principe
déjà énoncé, d'étudier les faits et de
juger. Il faut, il me semble, une certaine limitation, La jurisprudence viendra
la fixer tranquillement.
M. Marchand: Oui, je pense que vous accepterez comme moi que ce n'est
pas le rôle des tribunaux de déterminer les conditions de travail
dans les entreprises. Cela, c'est nécessairement, essentiellement le
rôle des parties.
M. Fortin: Oui, mais d'interpréter la loi, c'est le rôle
des tribunaux.
M. Marchand: Ah, oui, interpréter la loi, et c'est pour ça
que, quand vous mettez quelque chose qui peut être jugé
restrictif, vous créez des problèmes inutilement; si on demande
des choses pas raisonnables, des choses qui sont ou en dehors des habitudes
industrielles, n'avez pas peur, l'employeur a sen recours, il va dire non.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Oui, mais il pense que
vous ne voulez pas...
M. Marchand: Mais non, qu'est-ce que vous voulez?
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On va
délibérer?
M. Marchand: Alors, ça c'est sur le premier paragraphe;
maintenant est-ce que vous aimez mieux...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Finissez donc sur le
deuxième paragraphe, M. Massicotte reprendra après.
M. Marchand: Alors, sur le deuxième paragaphe, M. le
Président, ça c'est une des dispositions auxquelles on s'objecte
fortement. Elle ne doit contenir aucune clause aux conditions venant en conflit
avec les droits et devoirs attribués par la loi aux autorités
municipales. Cela, à notre avis, c'est une atteinte directe à des
droits qui sont fondamentaux. Vous savez, les droits que les travailleurs
veulent défendre, en entrant dans un syndicat, évidemment, il y a
le salaire, il y a les conditions de travail, mais ce qu'il y a de plus
fondamental pour lui, c'est la sécurité d'emploi et ce que
ça peut impliquer, c'est-à-dire ne pas être
ccngédié injustement, ne pas être victime d'injustice
à l'occasion de transferts ou de mises à pied.
Or, quand vous prenez un large secteur comme les employés
municipaux et vous dites, le syndicalisme dans ce secteur-là, voici ces
sujets importants qui concernent ce qui est de plus sérieux si vous
voulez, pour les syndiqués, et ça, vous n'aurez pas le droit de
réglementer l'activité de l'employeur dans ce domaine-là,
alors, ça nous trouvons que c'est une atteinte sérieuse aux
droits de l'association et nous trouvons que le présent gouvernement
devrait enlever ça; c'est absolument indéfendable et nous ne
voyons pas, parce que c'est un conseil municipal, qu'il puisse congédier
n'importe qui pour n'impprte quelle raison et que l'employé n'ait pas de
recours. C'est sûr que sans lui, et le présent gouvernement a
commencé une campagne contre le patronage, voilà un instrument
entre les mains du syndicat qui peut, justement, empêcher en grande
partie le patronage. C'est sûr que s'il arrive un nouveau conseil
municipal et s'il y a des employés qui, politiquement, ne sont pas du
bon bord, le syndicat sera là pour les protéger à ce
moment-là, évidemment, s'ils sont incompétents, ils
suivront des règles normales, mais je ne vois pas pourquoi les
municipalités ont une situation de privilège et, surtout, qu'on
empêche des syndiqués de défendre ce qu'ils ont de plus
important. Alors, ce deuxième paragraphe, M. le Président, npus
croyons que, sans hésitation, votre comité devrait le rayer comme
étant un vestige, disons, d'une période qui a été
un petit peu rétrograde sur le plan des relations de travail.
M. Provost: Je voudrais simplement ajouter ceci, M. le Président,
que tout d'abord votre gouvernement a décidé de soustraire a
cette loi les chefs de police justement pour ne pas les rendre à la
merci des municipalités.
La plus grande ville dans la province de Québec, la ville de
Montréal, ne l'invoque plus cette clause-là depuis plusieurs
années et accepte l'arbitrage dans les cas de congédiement,
tellement ils se sont rendu compte qu'il y avait quelque chose d'un petit peu
odieux dans cette affaire-là, qui pouvait laisser la porte ouverte
à toute forme de patronage, par des échevins sans
expérience. Alors, ils disent: Si on veut avoir de bons employés,
il faut leur donner la protection qu'ils auraient s'ils allaient dans
l'industrie: autrement, si on ne les protège pas, s'ils sont soumis
à toutes sortes d'aléas politiques, sur le plan municipal
surtout, on sait que c'est là que c'est dangereux surtout, eh bien, les
municipalités vont se priver de très bons employés, de
très bons administrateurs, parce qu'ils sont à la merci de ceux
qui sont élus pour une très courte période de temps.
M. O'Reilly: M. le Président, sur une question de patronage, je
crois que ce sont les derniers mots vous mentionnez la ville de
Montréal. Je suis maire de la ville de Verdun et il n'y a pas ce que
vous mentionnez ici, monsieur. À Verdun, on ne procède pas de
cette manière-là. Je crois que M. Saulnier
défend mon point de vue parce que je sais, bien sûr, qu'il
y a une entente entre les groupes qui représentent les ouvriers. M.
Desaulniers me l'a dit, je le sais, et on n'a pas cette
manière-là de procéder; j'aimerais crier le
problème ici, je corrigerai les erreurs, s'il y en a.
Mr. President, in case I have made a mistake in the French language,
will vou allow me to say it in my mother tongue?
George O'Reilly, Member for Verdun. What the last speaker has said is
not totally true. If his experience has been in certain municipalities that he
should not be restricted to certain areas; we do not operate in that manner in
a city where I am also mayor, the third largest city in the Province of
Québec.
Mr. Guy Desaulniers should know, he negotiates, what has' been going on
in the past number of years and we do not have that difficulty with the
negotiators in our city. You may have some, I do not know, but I want to make
it very clear, M.. Premier and Mr. Chairman and Members of the Private Bills
Committee, to the extent -and the Labour Code has been formed now -that I bend
backwards to see that the working man has his every right. The legal adviser to
the corporation who negotiates with us is sitting right in the front, he is one
of the experts in the front line here today. And I do not go on the basis of
the last speaker by saying we form a type of patronage, that is out. And we do
not hire policemen, we have a director there; that is negotiated through him,
they pass a medical examination and we have a very strong union representative.
He is here today and he can bear out what I am saving now.
M. Johnson: Do you think that the municipalities should keep the powers
that they already have respecting the appointment, suspension and dismissal of
their employees or should we just have that paragraph stricken out?
M. O'Reilly: I will keep an open mind on that last remark because I feel
that this is not a very public by-law, and the only thing that is wrong with
it, I will go by the decision of the Board and I know that we can always come
back. We do not have agreement or disagreement with the Labour Code which lavs
before you tonight, we come down and we neqotiate as pepole should, and we come
to a "bonne entente" between both parties. It is not every time that we come
toa collective aqreement between the labour party, whether it be the union, or
police or fire department, or what have you, that we are both contented and
satisfied to serve the public as we are elected to do.
M. Johnson: You do not use that clause? Do vou relinquish that clause in
vour contract with the union? Est-ce qu'à Verdun, on fait comme à
Montréal, on soumet des griefs?
M. Desaulniers: Non, M. le chef de l'Opposition, non seulement à
Verdun, mais dans bien d'autres corporations municipales. Vous avez des
dispositions à même la convention collective de travail, qui
permet le règlement des griefs dans le cas de congédiements, de
suspensions pour des raisons injustes. Maintenant, M. le Président, si
vous me permettriez juste un instant d'indiquer la source de ce paragraphe dans
la Loi des corporations municipales et scolaires.
Lors de l'étude du bill 60, et cette disposition-là a
été incluse dans le bill 60.
M. Johnson: En quelle année ça, 1949?
M. Desaulniers: C'est que je ne oeux pas, c'est 1949 ou 1950, je crois
que c'est après la Loi de l'ordre public, il y avait eu, à un
moment donné, des discussions qui ressemblaient un peu aux discussions
devant le comité des relations industrielles de l'Assemblée
législative, et ce cas-là c'était devant le comité
du Conseil législatif. Et à ce moment-là, tout le
problème avait été soulevé. Une des raisons
principales, et si ce n'est pas la seule raison pour laquelle cette dissolution
était incluse dans la loi, c'est qu'il existait à cette
époque des conventions collectives de travail, en vertu desquelles la
cité ne pouvait pas augmenter son personnel ou diminuer son personnel,
et c'était à l'encontre de cette disposition particulière
que l'on a voulu inclure ces clauses, cette clause que vous avez
aujourd'hui.
Et je me souviens très bien lors de la discussion, que le point
s'est soulevé si un employé est congédié
injustement, est-ce que le législateur veut que cet employé n'ait
aucun recours, même si la convention collective de travail indique qu'il
peut y avoir un recours par entente avec les parties, est-ce que la loi veut
dire, que même si les parties consentent à créer une
formule de règlement des griefs justifiés, est-ce que ces
formules-là doivent disparaître? Et je soumets que la
réponse que nous avons eue à ce moment-là, c'est qu'il
n'était nullement de l'intention du législateur de oasser une loi
empêchant qu'un employé congédié injustement et sans
raison valable, ne puisse pas se défendre par l'intermédiaire
d'une convention collective de travail.
Et ce que nous demandons par le renvoi de ce paragraphe, ce n'est pas du
tout le contrôle de la main-d'oeuvre d'une ville, ce que nous demandons
simplement c'est que tout employé comme d'ailleurs c'est le principe de
tpute la société qui nous régit,
que tout employé qui se fait congédier ou suspendre sans
raison, puisse avoir le droit d'aller devant le tribunal pour faire
régler son problème et présenter sa cause.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Desaulniers, une
minute, là. Si on ajoutait à la suite de l'article une
disposition dans le genre de celle-ci: "à moins qu'une telle disposition
concernant les congédiements, les suspensions, ne soit incluse dans la
convention collective..."
M. Desaulniers: Alors si vous me le permettez, il est évident que
dans bien des cas, parce que je peux le dire, parce que j'en connais plusieurs,
il est évident à ce moment-là, que même dans
certains cas où nous avons peut-être cette disposition-là,
on nous la refusera.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): De quoi?
M. Desaulniers: On pourra nous la refuser..
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien voici, je comprends
parce qu'aujourd'hui, on dit: "Je l'ai eu, j'ai eu le cas, moi", une
municipalité avait fait une convention collective et dans sa convention
collective, il était indiqué qu'il y aurait une procédure
de griefs concernant les congédiements, les suspensions, les promotions,
les démotions. Et à un moment donné, le problème
s'est posé, l'union a demandé au tribunal d'arbitrage, pour
discuter de ça, la ville a répondu: Même si c'est dans la
convention collective, c'est ilégal. Mais si nous mettons ici, si nous
mettons dans la Loi des relations ouvrières, à moins qu'une telle
disposition ne soit incluse dans la convention collective, il est
évident qu'à ce moment-là, on ne pourra plaider, c'est
illégal.
M. Desaulniers: Mais M. le ministre, si vous me le permettez, je ne veux
pas retarder le débat, mais je ferais la remarque suivante. Je crois que
le problème qui se pose, c'est un problème n'est-ce pas, que nous
reconnaissons tous, particulièrement les avocats. Nous savons que dans
notre société, tes gens n'est-ce pas, ont droit à une
certaine justice, à une certaine protection. Nous reconnaissons que
toute personne accusée injustement, a un recours devant les tribunaux.
Or, en matière de relations ouvrières, puisque dans le cas des
corporations muinicipales, particulièrement comme dans les services
publics, on doit tout réglementer, parce que c'est ça l'esprit de
la loi dans les services publics. Alors pourquoi priver par une
réglementation établie par un législateur, parce que tout
différend a droit à l'arbitrage, pourquoi veut-on priver un
individu du droit d'aller devant un tribunal et de prouver à ce tribunal
qu'il a été congédié et suspendu injustement.
Comment peut-on supporter que cet individu n'aura pas ce recours-là,
alors qu'on institue tout un système d'arbitrage pour régler et
non seulement les relations entre employeurs et employés, mais
même les relations concernant les conventions collectives de travail?
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Mais justement à
cause du raisonnement que vous faites, M. Desaulniers, moi, j'aurais deux
questions, la deuxième surtout ce sont des questions de faits, dont la
deuxième m'intéresse beaucoup. D'abord, si vous demandez
ça, ce qui tient compte que le maire de Verdun, la cité de Verdun
disait: C'est qu'à côté d'une ville comme la sienne.
où on peut dire à toutes fins pratiques, caduque, parce que par
le mécanisme des obligations, il accepte de ne pas s'en servir, vous
voulez dire qu'en pratique, il y ait des villes ou même en ajoutant
l'idée d'une convention collective...
M. Desaulniers: Même dans la convention...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): ... ça ne
marcherait pas parce que l'expérience vous prouve, je suppose qu'il y a
des villes...
M. Desaulniers: M. le ministre, est-ce que je Deux répondre
directement à votre question?
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Oui ou non?
M. Desaulniers: Je vais répondre à votre question. C'est
tellement vrai ce que vous dites que vous avez eu des sentences arbitrales et
particulièrement une cause, la cause de la Cité de Québec,
était une cause où il y avait eu une question de promotion, mais
admettons le principe est le même, ça aurait été le
renvoi ou non. C'est allé en Cour supérieure, malgré que
la sentence qui avait été rendue, il y avait un différend,
la sentence était rendue, la loi était observée. Bon, je
crois que c'est la cause de Duchesneau vs Cité de Québec. Eh bien
la Cour d'appel, je ne discute pas ici du mérite, je pourrais ne pas
être d'opinion à Se Cour d'appel, la Cour d'appel, c'était
un banc composé de trois juges, a décidé unanimement
qu'indépendamment de la convention collective de travail et des termes
de la convention collective de travail. le texte tel qu'il était ne
permettait pas d'avoir une telle clause et deuxièmement la sentence
était absolument illégale, Bon, ça je vous donne un
cas.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui. mais si vous aviez
la suggestion faite ici: "... à moins que ce ne soit inclus dans la
convention collective". Là, je comprends, vous l'aviez rien, vous aviez
le texte de la loi et le texte de la convention collective.
M. Desaulniers: Très bien, lorsqu'il y aura un texte dans la
convention collective. Mais. M. le ministre, j'aimerais bien savoir si
lorsqu'un employé est injustement renvoyé par une corporation
municipale, cet employé aura un recours à l'arbitrage s'il n'y a
pas de texte dans la convention.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que vous me
permettez une deuxième question qui s'enchaîne justement avec ce
que vous dites?
M. Desaulniers: Oui.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Supposons que, s'il y a
une convention collective, l'amendement suggéré par le ministre
du Travail couvre le cas, mais il y a aussi le cas où il n'y en a pas,
ou alors lorsque ce n'est pas accepté dans la convention. Alors, dans ce
cas-là, les pouvoirs d'engagement, de suspension et de renvoi sont
conférés par l'autre loi aux municipalités scolaires et
municipales; normalement, ce sont des renvois pour cause et ça. c'est de
l'administration pure et simple: les employés qui ne font pas leur
travail, des suspensions, des renvois, des engacements, c'est la
responsabilité de l'employeur. Alors, où en quoi les pouvoirs
précis ces municioalités ou des commissions scolaires en rapport
à ces trois mots-là: engacement, suspension et renvoi" vous
paraisse-it-ils abusifs? Ou est-ce que c'est précisément le
cas?
M. Desaulniers: Personnellement, j'ai toujours interprété
l'article contrairement au jugement de Duchesneau versus Cité de
Québec. Simplement, lorsque je vais devant un arbitrage, j'ai
l'impression que le juge-ment de la Cour d'appel a certainement une importance
beaucoup plus grande que les opinion personnelles que je peux apporter devant
un tribunal d'arbitrage. Et je peux vous dire que, dans bien des cas, des
employés ont été congédiés injustement. Nous
en avons fait la preuve, mais, justement, en raison de cette clause-là,
le tribunal en venait à la conclusion que même si l'employé
avait été congédié injustement, il ne pouvait pas
en vertu de cette clause-là, ordonner à la ville de le
réengager.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): C'est-à-dire que la
jurisprudence donne l'impression que les pouvoirs qui sont là sont des
pouvoirs absolus d'après les jugements.
M. Desaulniers: Vous avez une jurisprudence dans ce sens-là et
vous avez d'autres jurisprudences de tribunaux d'arbitrage dans le sens
contraire. Je crois que le problème devrait être
réglé par la législation.
M. Marchand: Cela fait drôle. La clause dit: "Il y aura aucune
clause". Je ne sais pas comment M. le ministre veut arranger ça.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Un instant. M.
Matteau.
M. Matteau: Union des municipalités.
M. Johnson: Excusez-moi un moment, je voudrais finir avec M.
Desaulniers. Je ne voudrais pas être mal interprété. Moi,
je suis d'accord avec vous du moment qu'un employé est renvoyé
par un service public et je suis même allé jusqu'à
prôner ça pour le gouvernement, il devrait y avoir un moyen pour
lui d'obtenir justice, que ce soit un comité de griefs, dans une
convention collective ou autrement. Alors, je voudrais vous dire qu'en principe
j'en suis. On cherche une modalité et je crois que celle que le ministre
a suggérée est tout de même une grosse amélioration
sur le texte actuel. Est-ce qu'il est suffisant? Certains représentants
d'unions ouvrières me disent que les corporations municipales ne
l'accorderont pas dans la convention collective.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je l'ai dit à
plusieurs reprises.
M. Johnson: D'ailleurs, ça commence à se
généraliser. Moi, j'ai tellement hâte que ça se
généralise, que ça s'en vienne jusqu'au gouvernement afin
d'éviter des injustices lors des changements de gouvernement. Ce sera
moins dangereux lors du prochain, mais ce sera...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Il s'agit de ne pas
changer du tout.
M. Desaulniers: M. le Président pour répondre à ce
que vient de dire l'honorable chef de l'Opposition, le lui demanderais
d'entendre les remarques qui vont être faites après que je me
serai assis et là, peut-être, à ce moment-là, il
pourra se faire une idée.
M. Matteau: M. le Président, j'ai deux remarques à faire
à cet égard. Il ne faudrait pas perdre de vue non plus, je pense,
que les municipalités, comme 'es corporations scolaires, sont des
employeurs différents des autres. La loi a déjà
prévu les devoirs et les obligations des membres des conseils de ville.
La protection que les employés recherchent présentement, ils
l'ont déjà, pour une bonne part, dans la loi elle-même. La
Loi des cités
et villes définit bien clairement les pouvoirs des maires et
échevins en matière d'administration des deniers publics. Alors,
il faut faire attention ici, tout de même, de ne pas accorder, par la
clause telle que demandée, des pouvoirs plus grands ou, si vous voulez,
une protection plus grande que celle que le législateur a
accordée aux chefs de police, aux officiers supérieurs des villes
par son...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Matteau, excusez-moi.
Je reviens à la question que je posais à M. Desaulniers; vous
êtes du côté municipal. Quels sont ces pouvoirs
définis clairement par la loi?
M. Matteau: En matière de suspension et renvoi, c'est le conseil
qui a droit de surveillance sur les deniers publics et l'administration, le
maire, par exemple, peut congédier un employé pourvu que ce soit
ratifié par le conseil.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela, c'est sans
appel?
M. Matteau: Oui, c'est sans appel. Et même dans le cas d'un chef
de police, le tribunal qui vient faire une enquête ne peut pas demander
au conseil de reprendre le chef de police, pas plus que l'officier
supérieur, le trésorier va devant la Commission municipale. La
Commission municipale n'impose pas pour autant l'obligation au conseil de ville
de le reprendre.
M. Dozois: Est-ce que ça s'applique aux chefs de police et aux
secrétaires-trésoriers?
M. Matteau: Aux officiers supérieurs. Messieurs, je pense bien
qu'il ne faudrait tout de même pas aller plus loin que la protection que
le législateur a déjà accordée aux officiers
supérieurs des villes.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela, ça se discute
en principe parce que le pauvre diable, lui aussi, si c'est un employé
de carrière, il a le droit à certains recours.
M. Matteau: Dans la Loi des cités et villes, je pense que les
pouvoirs ont déjà été donnés aux
administrateurs des deniers pubics.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Oui, mais il s'agit de
savoir si c'est convenable...
M. Matteau: Et ces gens-là, en plus d'avoir le droit de regard de
la Législature, ils ont aussi le droit de regard des contribuables. Si
les deniers publics sont mal administrés, les contribuables ont tout de
même leur mot à dire quand viennent les élections. Alors,
il y a deux protections que les autres employés n'ont pas.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Bien, on dit que
l'employé injustement renvoyé peut être candidat quand il a
été mis à la porte.
M. Fortin: Il a un droit d'appel.
M. Matteau: Il a un droit d'appel, mais la Commission municipale n'a pas
les pouvoirs du tribunal d'arbitrage. Alors, ce serait, à mon sens, des
pouvoirs plus grands que ceux que vous avez donnés aux officiers
supérieurs des villes. Nous soumettons qu'actuellement ce ne serait pas
nécessaire d'aller aussi Ioin, étant donné que la loi
garantit déjà...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): En peu de mots, quelle est
l'objection pour une municipalité de bonne foi, sauf dans les cas de
chicane personnelle, etc... À ce moment-là, il me semble qu'un
maire ou un conseil outrepasserait son mandat, on ne les a pas élus dans
aucun cas, ppur régler leurs chicanes personnelles. Quelle serait
l'objection d'un conseil ou d'un maire de bonne foi à accepter
l'idée que, puisqu'il négocie de tpute façon avec des
unions et étant un service public, ils ont un droit à l'arbitrage
- en fait, l'arbitrage est obligatoire dans leur cas - quelle serait
l'objecticn à ce que ça aille en arbitrage comme tout le reste,
s'il est de bonne foi?
M. Matteau: ...La distinction, c'est que ces gens sont là pour
administrer les deniers publics et n'ont aucun intérêt personnel
et leur devoir...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Mais ça, est-ce que
ça ne peut pas arriver?
M. Matteau: Cela peut arriver, mais le veto est quand même
là.
M. Fortin: M. Matteau, au début, quand on a commencé
à siéger, vous avez admis que le gouvernement avait des
problèmes assez sérieux, au point de vue financier, avec les
commissions scolaires. Si on enlève ça complètement, si
les commissipns scolaires négocient n'importe quelles conditions de
travail avec leurs employés, décrétant par exemple qu'ils
auront droit à pas plus de quinze élèves dans une classe:
une autre, pas plus de vingt élèves dans une classe, ça
voudrait dire qu'il faudrait construire deux ou trois écoles de plus.
Alors, savez-vous ce que ça va amener au point de vue de la situation
financière?
M. Matteau: Vous auriez raison, M. le ministre, si c'était
ça, mais la restriction qu'il y a ici, c'est simplement concernant
l'embauchage, le congédiement et l'engagement.
M. Fortin: Mais en matière d'engagement?
M. Matteau: Comment en matière d'engagement?
M. Fortin: Qu'est-ce que c'est qu'une condition de travail? Qu'est-ce
que ça comprend, l'engagement?
M. Matteau: Ah non, ça, la municipalité, M. le ministre,
garde son pouvoir d'engager, de congédier et de suspendre. Le seul droit
que nous demandons, c'est le droit d'en appeler si une décision nous
paraît injuste. On ne lui enlève aucun de ses droits et j'essaye
de me comprendre dans l'immensité des relations
ouvrières-patronales dans la province de Québec, qui couvre des
commissions scolaires, des municipalités, mais aussi des hôpitaux,
des institutions de toutes sortes, même des syndicats, etc.. Pourquoi les
municipalités ont-elles ce privilège tout à fait abusif,
à mon avis, de pouvoir, elles, congédier sans qu'il y ait de
recours de la part de ceux qui peuvent être victimes, disons,
d'injustice?
M. Fortin: Ce serait simplement comme dans un cas que c'est le bien
commun qui est en jeu et il y aurait, par exemple, un employé qui aurait
fait quelque chose de...
M. Marchand: Écoutez, M. le ministre, enfin, je ne présume
de rien, mais ce que nous avons étudié à date dans le
code, ça donne les droits d'association aux fonctionnaires. Il n'y a
personne qui a limité à ce moment-là les recours des
fonctionaires. Et tout le monde est d'accord. Il faut tout de même se
mettre dans l'esprit que pour un employé, c'est ce qu'il y a de plus
important, c'est sa source de revenus et pourquoi? Parce que c'est une
commission scolaire, on lui enlèverait le droit, lui, s'il pense qu'il
est injustement traité, d'aller se défendre comme tous les autres
citovens. J'essaye de comprendre pour quelles raisons on dit que c'est parce
que c'est un conseil municipal puis il y a le bien commun. Les soeurs nous
disent qu'elles ont une institution de charité, c'est pour servir
l'humanité qu'elles font ça. Mais, seulement, en dehors de ces
belles oeuvres et du bien commun, il existe des droits fondamentaux des
individus et c'est justement d'avoir un droit de recours quand ils sont
congédiés injustement. Parce qu'enlevez ça d'une
convention collective et vous l'avez vidée de 80% de son sens.
M. Gabias: D'ailleurs, sur ce point-là, M. le Président,
il est reconnu que les municipalités concernant, par exemple, le chef de
police, concernant d'autres employés supérieurs, les
municipalités ont consenti à ce que ces employés-là
aient un recours spécial quant à leur congédiement et
à leur suspension. Et je comprends mal que les municipalités
tiennent tellement aujourd'hui, à ce que le simule employé n'ait
pas un recours dans le cas d'un congédiement ou dans le cas de
suspension. D'ailleurs, je sais que plusieurs municipalités ont
accordé à date ce recours et je crois que ça pourrait
entraîner des abus considérables que de maintenir dans le Code du
travail, une telle disposition. Je suggère ceci, c'est qu'au moins si
les municipalités, les corporations scolaires ou municipales ne veulent
pas qu'il y ait toute cette procédure, longue parfois, de griefs, etc..
Au moins que l'employé congédié ait un recours direct avec
la Commission des relations industrielles, à savoir si son
congédiement ou sa suspension ont été accueillis...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Messieurs, je m'excuse,
nous sommes obligés d'aller en Chambre parce qu'il y a sanction de bills
et la séance est suspendue jusqu'à huit heures ce soir.
(Suspension de la séance)
(Reprise de la séance à huit heures)
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):À l'ordre
messieurs, 50.
M. Garant: Sur 50, M. Garant, Corporation des instituteurs, c'est sur
50, deuxième alinéa.
M. Bellemare: Vous êtes pour ça. vous?
M. Garant: Je suis pour son aooosition parce que, voyez-vous, 50,
deuxième alinéa, c'est 13, Georges VI qui est tout simplement
ramené dans le Code du travail centre lequel nous avons
déjà fait des représentations. Cet article-là
crée des injustices, du moins, dans notre domaine, nous autres, en
nombre considérable. Chaque année, il y a eu depuis toujours des
renvois dans les commissions scolaires pur toutes sortes de causes.
Le Président CM. Hamel, Saint-Maurice): Puis, vous autres, M.
Garant, vous avez la permanence après deux ans, ça a
été modifié là de façon qu'après deux
ans. vous pouviez...
M. Garant: L'article 232, modifié l'an dernier, s'applique cette
année pour la première fois. Là-dessus, vous avez
déjà accepté, si vous voulez, . un départ de
corrections, mais c'est partiel seulement.
M. Bellemare: Mais vous allez perdre vinqt-cinq cas.
M. Garant: Vingt-cinq cas, c'est très bien. On ne s'objecte pas,
c'est très bien. Mais sur cinquante, sur le deuxième paragraphe,
il nous a causé énormément d'injustices.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La commission
scolaire.
M. Garant: Et puis, le syndicat ne peut rien faire dans ce
domaine-là. Le syndicat ne peut pas intervenir pour protéqer les
membres en aucune façon. Maintenant, la correction que M. le
Président a suggéré tantôt, ça me semble,
après un peu de réflexion, ça me semble que ça aura
peut-être un bon côté, mais, par contre, ça peut nous
entraîner aussi dans des compromis qui peuvent nous créer des
embêtements considérables. Alors, nous, nous demandons que le
deuxième paragraphe soit biffé.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord, on va prendre
note de cela. Est-ce qu'il y en a d'autres qui ont quelque chose à dire
la-dessus? M. Dugré?
M. Duqré: Sur la deuxième partie du paragraphe no 50, les
commissaires d'écoles ont suffisamment de difficultés à
faire un choix judicieux du personnel enseignant et la clause existe
actuellement. On se demande comment les commissaires d'écoles pourront
faire un choix judicieux de leur personnel si cet article disparaît? Les
commissions scolaires rurales, entre autres, n'ayant pas à leur
disponibilité les directeurs d'écoles ou des directeurs
d'études en nombre suffisant pour établir le rendement à
l'élève, il nous faudra nécessairement considérer
que nous avons quand même chez les commissaires d'écoles des gens
qui prennent sur eux de juger de la valeur du personnel enseignant avec les
notes et ça cause un préjudice assez difficile actuellement de
procéder au choix du personnel enseignant que nous invoquons le maintien
de ce paragraphe.
M. Marchand: M. le Président, simplement là-dessus, nous
n'avons absolument pas l'intention de demander ou d'insister auprès de
ce comité pour que l'engagement du personnel par les
municipalités puissent faire l'objet d'une réglementation
conventionnelle. On est d'accord et même, enfin, je ne sais pas au point
de vue de la rédaction si ça peut se faire facilement, mais je le
crois, s'ils veulent absolument avoir ce droit-là d'une façon
formelle, on n'a pas d'objections, mais là où on a une objection,
c'est que c'est de priver de recours les gens qui sont suspendus ou
congédiés. Sur l'engagement, nous sommes d'accord.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Nous avons entendu
ça cet après-midi, M. Marchand. Vous l'avez dit cet
après-midi.
M. Marchand: Mais sur l'engagement, peut-être que je n'ai pas dit
ça cet après-midi, M. le Président. Moi, je n'ai pas eu
l'impression de le dire. Peut-être que vous l'avez entendu.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous l'avez dit.
M. Marchand: Alors, de toute façon, je vous dis que sur
l'engagement, nous n'avons pas d'objections à leur donner leurs
droits.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Bélanger,
avez-vous demandé la parole, vous?
M. Bélanger (René): Oui, oui.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Lapointe?
M. Bélanger: Voici, M. le Président, en ce qui concerne la
fédération que je représente, nous demandons le retrait de
ces dispositions du deuxième paragraphe...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Pour les mêmes
raisons que les autres?
M. Bélanger: Voici, c'est un peu différent, pour la bonne
raison que cet article-là a cause' plus de tort aux corporations
municipales qu'aux syndicats. Je vais vous expliquer pourquoi.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est dommage qu'elles le
maintiennent.
M. Bélanger: Elles le maintiennent parce qu'elles ne savent pas
ce qu'elles font.
M. le Président, je vais vous le prouver. Vous mettez une clause
comme ça dans la loi et voici ce qui arrive. A première vue. les
corporations municipales et les conseillers municipaux croient qu'ils ont tous
les pouvoirs en fait d'engagement, de suspension et de renvoi. En pratique,
qu'est-ce qui est arrivé? Nous ne craignons pas la clause parce que,
dans 85% des cas, nous avons gagné nos arbitrages. Mais, cette
clause-là, précisément parce qu'elle est
interprétée comme voulant dire que les villes ont le droit de
faire ce qu'elles veulent en cas d'engagement, de suspension et de renvoi, cela
a coûté $26,0.00 à la ville de Dorval pour avoir
congédié onze employés à l'encontre de la
convention collective. Ces employés n'ont pas fourni de travail et elle
a été obligée de payer $26,000. Pendant ce
temps-là, les employés ont eu de la misère, ils ont
vécu dans l'inquiétude. Cela a donné quoi? Cela n'a rien
donné aux employés, ça leur a donné,
évidemment, le remboursement du salaire qu'ils ont perdu et cela a
coûté $26,000 à la ville.
La même chose à Charlesbourg récemment, $4,000. Les
villes croient qu'elles ont tous les pouvoirs, elles se font prendre. Elles
congédient. On s'en va à l'arbitrage, on gagne notre point. Je
pourrais vous nommer des dizaines de sentences que j'ai ici où j'ai agi
comme arbitre. Je vous nomme Charlesbourg, je vous nomme Matane. La ville de
Matane n'a pas le droit de donner $1800 à un gars qui n'a pas
travaillé. La ville de Dorval n'avait pas les moyens de faire ça.
La ville de Charlesbourg n'avait pas les moyens de faire ça, et maintes
autres villes que je pourrais vous citer.
Alors, cette clause-là, je crois que nous devrions tout
simplement la biffer et les villes verront à la mettre dans les
conventions collectives; on n'aura que deux choses à voir: la convention
collective et la Loi des cités et villes.
M. Bellemare: M. Bélanger, êtes-vous en faveur de la
suggestion faite par le président de ce comité d'ajouter
"à moins que..."?
M. Bélanger: Cela ne donnera pas grand-chose. Je vous le dis
franchement, M. le Président, nous avons demandé le retrait de
cette clause-là dès 1950, on n'a pas voulu nous écouter,
alors vous avez les résultats. Je peux vous donner des chèques,
j'ai des photostats de chèques ici de $26,000.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On croit ça, on
croit ça.
M. Bellemare: Et si l'article était repris tel quel, est-ce que
vous seriez en faveur de la suggestion du président? Non?
M. Bélanger: Moi, je trouve qu'en laissant l'article, c'est
laisser croire aux villes qu'elles ont tous les pouvoirs. Elles s'illusionnent,
elles congédient, on va à l'arbitrage, on gagne; elles payent
pour des gens qui n'ont pas travaillé.
M. Johnson: M. Bélanger, il y a tout de même, dans les
conventions collectives, dans d'autres domaines que le domaine municipal,
certaines clauses quant à l'engagement d'employés
supplémentaires, etc. Cela, c'est un des pouvoirs que les conseils de
ville n'aiment pas déléguer d'une façon directe ou
indirecte. Est-ce que vous auriez objection à mettre la suggestion du
président ou peut-être à ajouter ce qui suit: "Sauf que la
convention collective pourra prévoir un appel en cas de
congédiement" Il semble que c'est là le plaidoyer de M. Marchand,
cet après-midi, et de M. Desaulniers et de M. Provost, et il semble que
c'est là l'injustice: l'employé d'un service public qui est
démis ou renvoyé n'a aucun recours et nous sommes en faveur d'un
recours.
M. Bélanger: Actuellement, il y en a.
M. Johnson: Si on le mettait dans la loi?
M. Gabias: En vertu de la convention?
M. Bellemare: En vertu de la convention.
M. Bélanger: En vertu de la loi 13, George VI qui
réfère la définition du mot "différend" à la
Loi des différends ouvriers et qui dit que le renvoi d'un employé
est un différend au sens de la loi.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais vous, vous avez
été chanceux parce que, dans bien des cas, M. Bélanger,
même si ça existe dans la convention collective, cela a
été contesté parce que c'était contre la Loi des
cités et villes.
M. Bélanger: La Loi des cités et villes ne dit absolument
rien au point de vue de l'engagement. Il y a une chose dans la Loi des
cités et villes que je tiens à rectifier.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La Loi des cités
et villes 13 George VI, c'est indiqué.
M. Bélanger: Parce que la Loi des cités et villes parle de
suspension par le maire; ça, on ne le conteste pas, ce n'est pas un
congédiement. Le maire a le droit de suspendre, c'est temporaire; il est
obligé de faire rapport à la prochaine séance du conseil.
Le conseil décide en dernier ressort. On a parlé, cet
après-midi, ou cas de Duchesneau. On s'est référé
spécifiquement à un article de la charte de la cité de
Québec et cela a été une cause pour établir une
certaine jurisprudence, parce que l'enjeu, dans cette cause-là,
était une affaire d'une cinquantaine de dollars. Ce qui est
arrivé, c'est que, depuis ce temps, Duchesneau a eu quatre promotions
et, aujourd'hui, il est chef adjoint du coût de revient. Il ne peut pas
monter plus haut à moins de prendre la place de son chef. C'était
le type qui réclamait la position parce qu'il prétendait...
M. Bellemare: Il est resté dans votre union?
M. Bélanger: Oui, M. le Président. À part cela,
ça crée des problèmes aussi aux employés, parce
que, pendant tout le temps
qu'ils sont congédiés, évidemment, ils ont des
soucis, ces gens-là. Je vous le dis, je peux vous citer des dizaines de
juges qui ont dit que la loi 13 George VI ne voulait pas dire que le cas de
renvoi n'avait pas le droit d'aller à l'arbitrage. Je vous dis
qu'à première vue, c'est ma conviction profonde, des conseils de
ville prennent ça comme une affaire qui leur est acquise; ils font
n'importe quelle bêtise: ils en font à part ça, je peux
vous prouver qu'ils en font. Le gérant de la ville de Dorval, s'il
n'avait pas eu cette clause-là, n'aurait pas congédié onze
employés: cela a coûté $26,000. C'est la ville qui paie;
nous autres, ça ne nous fait rien, mais c'est regrettable, tout de
même. Tandis que, s'il n'y avait pas...
M. Bellemare: Dorval?
M. Bélanger: Oui, c'est Dorval. Tandis que, s'il n'y avait pas
cette clause-là dans la loi, la ville regarderait sa charte ou la Loi
des cités et villes et la convention collective. On regarderait deux
choses, parce que là, on regarde ça, à première
vue, on congédie, et, quand on arrive devant le tribunal d'arbitrage, le
juge prend ça autrement. Il y a le juge Montpetit qui a pense autrement;
il y a le juge Trudel, il y a le juge Paul Roy, le juge Lagacé, enfin
une guinzaine qui ont pensé autrement, qui ont ordonné le
réengagement et le remboursement du salaire perdu.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord. M. Lapointe,
avez-vous quelque chose à dire?
M. Lapointe (Jean-Paul): Jean-Paul Lapointe, pour le Syndicat des
policiers municipaux. M. le Président, en autant que les policiers sont
concernés, le gouvernement a tellement comoris le problème que,
dans le cas des chefs de police, il a adopté une loi spéciale
pour leur donner un recours d'appel à la Commission municipale. Nous
croyons, et nous sommes d'accord avec ce qui a été dit cet
après-midi, que le problème n'existe pas à Montréal
et, comme l'a dit le député et maire de Verdun, il n'existe pas
à Verdun. Il existe dans certaines municipalités du Québec
où les policiers n'ont pas la protection voulue et le problème
existe particulièrement chez les policiers municipaux. Nous demandons
que, dans le cas, au moins, de la suspension ou du renvoi, lorsqu'il serait
apparemment injustifiée, il soit sujet à une décision,
à un appel devant le tribunal arbitral. Je vous remercie.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): D'accord. Alors, article
50, le comité est-il suffisamment informé? Avez-vous quelque
chose à dire, M. Massicotte, sur l'article 50?
M. Massicotte: Cet après-midi, quand nous discutions de la
première partie de l'article 50, vous avez permis que l'on bifurque sur
la deuxième partie et vous m'avez réservé, je pense, le
droit de parole sur la première partie de l'article 50. Nous avons
écouté les discussions qui ont eu lieu cet après-midi sur
ce que sont les conditions de travail, ce qu'est une convention collective;
nous avons écouté les remarques du premier ministre, de
l'honorable ministre des Ressources naturelles et tous sommes devenus inquiets
au point que nous voulons retirer notre consentement à la
définition de la convention collective qui avait été
présentée par les représentants de la CSN. Nous voulons,
deuxièmement, Qu'en ce qui concerne encore le premier paragraphe de
l'article 50, il y ait des changements, et voici pourquoi. En ce qui concerne
la partie de l'article 50...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, l'article
25, il est en suspens.
M. Massicotte: Je ne parle pas de l'article 25, je parle de l'article
50.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, oui. Actuellement,
on est à l'article 50, mais vous vous êtes
référé tantôt à un consentement que vous
aviez donné à l'article 25.
M. Massicotte: Je me suis référé tout à
l'heure a un consentement que nous avions donné sans avoir de texte, sur
l'impulsion du moment, à la définition de la convention
collective. Or...
M. Bellemare: Ouant aux conditions de travail.
M. Massicotte: C'est ça. Or, cet après-midi, on a
ramené tout le emblème du côté syndical et nous
avons réexaminé notre position; nous ne sommes plus prêts
à donner notre consentement à la définition
suggérée par la partie syndicale. Voici pourquoi. Nous avons eu,
entre l'ajournement de la séance de cet après-midi et le
commencement de celle de ce soir, l'occasion... Je m'excuse, mais quand vous
apportez des éléments nouveaux, M. Provost, nous sommes
obligés de reconsidérer nos positions...
M. Johnson: D'ailleurs, l'exemple vient de haut, M. Massicotte, M.
Gordon à fait ça.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):À l'ordre, à
l'ordre, l'autonomie!
M. Massicotte: M. le Président, entre l'ajournement de la
séance et le commencement de celle-ci, nous avons ou, par exemple, faire
un examen bref de la
législation canadienne; nous avons pu faire un examen, bref
encore, si vous voulez, des auteurs français; nous avons même pu
consulter les dictionnaires pour savoir ce qu'est une convention collective de
travail. Nous trouvons, par exemple, dans Brun et Gallant que ce sont "des
accords conclus entre des syndicats de salariés, d'une part, des
employeurs ou des groupements d'employeurs, d'autre part, pour
déterminer les conditions de travail s'appliquant à tous les
salariés et à tous les employeurs tributaires de ces
conventions". Cela ne mentionne pas les conditions d'emploi dans Brun et
Gallant, M. Marchand.
Nous avons du examiner aussi la définition du dictionnaire
Quillet, oui dit qu'il s'agit d'une réglementation contractuelle
écrite des conditions de travail. Nous avons examiné la
législation des autres provinces qui parle des conditions soit de
travail, soit d'emploi, applicables aux employés. Je pense que, cet
après-midi, de la façon que la discussion s'est orientée,
on a semblé perdre de vue un fait principal; c'est qu'une convention
collective, ce n'est pas fait pour les unions, c'est fait d'abord et avant tout
pour les employés.
Dans nos conventions collectives, nous avons quelques clauses qui ont
trait aux rapports que M. Pepin appelait collectifs, les rapports entre l'union
et la compagnie. Nous avons, par exemple, des clauses de sécurité
syndicale qui ont trait aux rapports entre la compagnie et le syndicat, parce
qu'on doit leur remettre l'argent. Nous avons des procédures de griefs
qui prévoient la représentation syndicale à certaines
étapes de la procédure des griefs; mais la majeure partie des
clauses d'une convention collective a trait aux conditions de travail des
employés, et ce sont ces gens-là pour qui on réclame le
droit d'association. Je pense, M. le Président, qu'on ne doit pas le
perdre de vue quand on parle de conditions de travail et quand on parle de
conventions collectives. C'est pourquoi nous retirons, en fonction de ce qui a
été dit cet après-midi, en fonction de ce que l'honorable
premier ministre a dit: "Qui définit limite", nous retirons notre
consentement.
En ce qui concerne la deuxième partie de l'article 50, où
nous nous sommes opposés aux mots "qui n'est pas contraire à
l'ordre public ni prohibé par la loi", encore là,
premièrement, nous trouvons des qualifications qui semblent
définir ce qu'est une condition de travail. Nous suggérons
respectueusement à votre comité que l'article 13 de notre Code
civil prévoie qu'on ne peut déroger, par des conventions
particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public ou les
bonnes moeurs et nous suggérons, M. le Président, qu'on emploie
ces mots dans le texte de l'article 50 en disant: "La convention collective
peut contenir toutes dispositions relatives aux conditions de travail qui ne
déroqent pas aux lois qui intéressent l'ordre public ou les
bonnes moeurs."
Les raisons principales pour s'opposer aux mots "prohibé par la
loi", c'est que nous trouvons, M. le Président, que le texte du Code
civil, quand il dit qu'on ne peut pas faire de conventions particulières
qui dérogent aux lois qui intéressent l'ordre public ou les
bonnes moeurs, laisse entendre qu'il y a des dispositions qui
intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. Mais, si on emploie les
mots "prohibé par la loi", nous en venons au raisonnement qui nous est
donné souvent, du côté de l'employeur, par les unions,
leurs représentants et leurs avocats, que tout ce qui n'est pas
défendu ou tout ce sur quoi la loi est silence, c'est permis dans une
convention collective.
On a raooorté cet après-midi des exemples ridicules ou
qui, à première vue, semblent ridicules. On a dit: "On ne
négociera pas avec vous, si un patron peut aller en Floride l'hiver".
Par ailleurs, il est fort possible, en théorie, à un moment
donné, que le syndicat nous demande: "À cause de l'importance de
telle et telle chose, on voudrait que Se président n'aille pas en
Floride cet hiver". Le président dit: "J'y vais quand même". On
sort les gens en grève et on leur dit: "Vous voyez comme c'est un
écoeurant".
M. Lesage: Oh, oh!
M. Massicotte: Je vous donne ça comme exemple. Avec la
définition du syndicat, avec la définition ou les mots "non
prohibé par les lois", on s'expose à n'importe quoi. Or, nous
sommes d'abord et principalement intéressés aux salariés;
c'est le but de la convention collective et pas autre chose.
M. Bellemare: M. Massicotte, dans l'ancienne loi de la Commission des
relations ouvrières, la définition de la convention collective
visait bien les conditions de travail?
M. Massicotte: Oui, et nous en sommes satisfaits.
M. Bellemare: Est-ce que M. Marchand...
M. Massicotte: Et nous sommes satisfaits de la définition qui est
suggérée dans le présent cas.
M. Bellemare: M. Marchand est-ce que ça vous a apporté
beaucoup de souci, cette convention, c'est-à-dire cette
rédaction, à cause des ajustements à ce que les compagnies
peuvent fournir au point de vue
de la sécurité sociale? C'est simplement ça? Non
pas pour les conditions de travail?
M. Marchand: C'est ça.
M. Provost: Les pensions, les...
M. Bellemare: Alors seulement pour les choses de la
sécurité sociale...
M. Desaulniers: Pas nécessairement.
M. Bellemare: ... et les conditions de travail, non?
M. Desaulniers: Pas nécessairement...
Une voix: C'est ça, en somme, que vous négociez.
M. Massicotte: Cela va plus loin que ça.
M. Desaulniers: Pas nécessairement. Maintenant, j'aimerais,
à ce stade, replacer le problème dans le cadre où il doit
être. Le législateur intervient, par sa loi, pour assurer une
meilleure stabilité dans l'industrie et aider, par une
législation, les relations entre employeurs et employés. Je ne
crois pas qu'il soit du rôle du législateur d'intervenir d'une
façon directe ou indirecte pour limiter le champ d'action qui est la
base des négociations entre les parties. Le texte que vous avez soumis,
c'est-à-dire le texte que nous examinons dans l'article dit: "qui n'est
pas contraire à l'ordre public ni prohibé par la loi"; eh bien,
ce texte n'a pas été mis dans cet article sans raison. Il est le
résultat d'une conception, depuis plusieurs années, qu'il y a
nécessairement une limitation dans les...
M. Bellemare: M. Desaulniers, votre théorie, je la comprends
bien, je la saisis, je comprends la portée de la discussion, mais, au
Conseil supérieur du travail, quand cet article est venu dans la
convention collective, il y a eu unanimité de la part des parties pour
laisser dans le texte ce qui existait dans la Loi des relations
ouvrières, à l'article 2e.
M. Desaulniers: Conditions de travail et d'emploi...
M. Bellemare: Qui. tel que c'est spécifié là.
M. Desaulniers: Non, non, ce n'est pas spécifié
là.
M. Bellemare: Ici, par exemple, vous aviez, à la
convention...
M. Desaulniers: Non, mais je me réfère, pour le
moment...
M. Bellemare: ... "une entente relative aux conditions de travail
conclue entre des personnes agissant pour une ou plusieurs associations de
salariés, et un ou plusieurs employeurs agissant pour..." Il
n'était pas question d'emploi dans le temps.
M. Desaulniers: Non, mais, dans la loi actuelle, il n'y avait aucune
défnition: la définition était laissée à
l'interprétaticn et les tribunaux...
M. Bellemare: M. Desaulniers. Est-ce qu'au Conseil supérieur du
travail, il y a eu entente?
M. Desaulniers: Non, et la suggestion faite par les centrales,
c'est-à-dire par les représentants des centrales ont
été qu'on devait inclure le mot "emploi". Maintenant, ce que je
veux dire, c'est qu'à ce moment, il faut tout de même
considérer que les termes que l'on semble vouloir faire enlever de
l'article 50 et qui sont qui n'est contraire ni à l'ordre public ni
prohibé par la loi", ces termes ne font que reconnaître de la part
des législateurs, que les parties ont un champ d'action vaste pour
essayer de s'entendre sur leurs problèmes et justement, pour les aider,
par négociations, à régler leurs problèmes en
dehors d'autres moyens. C'est cela, le sens de la loi. c'est comme cela qu'on
doit comprendre l'intervention du législateur.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): M. Desaulniers?
M. Desaulniers: Oui.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que cela voudrait
dire ceci que dans les mots "conditions de travail", vous incluez en fait que
les syndicats seraient portés de plus en plus à inclure tout
ça qui peut raisonnablement faire partie - de qui c'est pas raisonnable,
évidemment. Ce sera une question à éliminer en partant -
mais tout ce qui, raisonnablement, peut faire partie de la vie de
l'employé dans l'entreprise? Tandis que ce texte, à votre avis,
donnerait à l'employeur la chance de se servir d'un texte
législatif pour éliminer les matières de
négociations...
M. Desaulniers: C'est exactement cela.
M. Désilets (Ubald): Dans le secteur qui nous occupe, nous tenons
énormément aux mots "prohibé par la loi". Parce que, sans
ces mots, nous perdons, dans nos conventions collectives, un champ important,
et je m'explique. Cela résulte d'une jurisprudence récente. Le
Code scolaire est considéré, à
bon droit, comme la source des droits de la commission scolaire. Il y a,
dans ce code, des dispositions qui sont impératives, d'autres qui sont
prohibitives, d'autres qui sont facultatives. La jurisprudence nous
défend, dans les conventions collectives, d'inclure des clauses qui
viennent à l'encontre des dispositions impératives -
là-dessus, on s'accorde - des dispositions prohibitives -
là-dessus, on s'accorde - mais aussi à l'encontre des
dispositions facultatives, de sorte qu'il ne nous reste plus rien. Et quand le
Code scolaire est silencieux sur le sujet, on dit: "Ces gens n'ont pas plus de
pouvoirs que le code leur en donne". Je vous donne des exemples,
récemment...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Désilets, si on
indiquait "à moins qu'une telle disposition ne soit incluse dans la
convention collective"?
M. Désilets: Oui, mais je reviens sur le premier alinéa,
M. le Président. Il est important que les limites soient celles
prohibées par la loi. Je vous donne un exemple. Récemment, dans
vingt-cinq commissions scolaires de Chicoutimi, on avait convenu par convention
collective d'un plan d'assurance-groupe; le contrat a été
référé aux tribunaux et les cours ont cassé le
contrat en disant: "L'article 256b donne la faculté à la
commission scolaire d'adopter un plan semblable par résolution; par
conséquent, on ne peut pas le lui imposer par convention
collective".
Par conséquent, il est excessivement important que les limites
d'une convention collective soient, pour le moins, des conditions de travail;
au moins que les limites s'arrêtent à ce qui est prohibé
par la ici. D'ailleurs, la Cour suprême, dans la cause de Dominion Blank
Book, a posé les mêmes limites. Mais si vous enlevez ça, je
vous dis que nous sommes en face d'une jurisprudence qui se
répète et en vertu de laquelle on ne peut pas inclure dans une
convention collective des choses sur lesquelles les commissions scolaires ont
une faculté seulement.
M. Gabias: Qu'est-ce que vous voulez? La cour, proprio motu, a
déclaré que c'était illégal.
M. Désilets: Elle a déclaré que c'était
illégal parce que l'article 256 en faisait une matière de
discrétion pour les commissions scolaires.
M. Gabias: Oui, mais la convention collective donnait suite à une
résolution.
M. Désilets: La convention collective était adopté
en vertu d'une résolution, mais pas en vertu d'une résolution qui
prévoyait l'adoption spécifique d'un plan d'assurance-groupe. Ce
sont des difficultés auxquelles on a à faire face. Bien plus que
ça, M. le Président, nous avons 10,000 professeurs qui suivent
des cours de perfectionnement de fin de semaine et d'été. Nous
avons des conventions collectives oui prévoient des bourses de $35. On
vient de leur dire que c'est illégal. C'est illégal, pourquoi?
Parce que c'est facultatif et les commissions scolaires ne peuvent pas
s'engager dans ce domaine-là.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous voudriez que
ça reste prohibé par la loi?
M. Désilets: Prohibé par la loi. Je voudrais que ça
le reste parce que ça nous confirme dans un secteur important de nos
conventions collectives.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Du côté
syndical, je ne suis pas certain si j'ai bien saisi M. Desaulniers
tantôt, mais M. Desaulniers voudrait, d'après ce que j'ai saisi,
le texte tel quel, "qui n'est pas contraire à l'ordre public ni
prohibé par la loi". Cela vous satisferait, vous autres?
M. Desaulniers: Oui, ça nous satisfait, M. le
Président.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, oui, si je
comprends, ça satisfait M. Massicotte aussi.
M. Massicotte: M. le Président...
M. Marchand: Non, M. Massicotte est préoccupé par les
bonnes moeurs.
M. Massicotte: Je pense que M. Marchand ne devrait pas réoondre
pour moi. Evidemment, je ne voudrais pas passer pour un vertueux non plus,
comme M. Marchand.
M. le Président, le texte ne nous convient pas parce que nous
vovons une différence essentielle entre les mots "contraire à une
loi" et les mots "prohibé par une loi". Si on dit contraire à une
loi, ça présuppose qu'il y a une loi qui traite d'un certain
sujet. Si on dit: Vous pouvez faire n'importe quoi qui n'est pas Drohibé
par la loi, on rejoint... Vous avez le raisonnement de M. Provost qui dit, en
arrière: C'est normal. Alors, on rejoint le raisonnement des unions oui
disent: Vous allez changer sur n'importe quoi parce que, ce sur quoi on veut
que vous négociiez, il n'y a pas une loi qui en parle. Alors, s'il n'y a
pas une loi qui en parle, on a le droit rie changer ça et on a le droit
d'entrer ça dans une convention collective. C'est là la
différence essentielle que nous faisons entre les mots "prohibé
par la loi" et "contraire à
une loi".
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Écoutez. Si c'est
contraire à une loi, il faut toujours bien qu'il y ait une loi qui dise:
Ce n'est pas permis; et, si c'est prohibé par une loi, il faut que la
loi le prohibe.
M. Massicotte: Non, non, écoutez. Le raisonnement, par exemple,
de certains avocats du côté syndical est ceci: S'il n'y a rien
dans une loi qui parle...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Là, je voudrais
qu'on parle des avocats du côté patronal.
M. Massicotte: M. Lévesque, j'aimerais ça vous faire
comprendre le côté patronal.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): La bonne volonté ne
manque pas.
M. Massicotte: Si on dit: Vous pouvez mettre n'importe quoi dans une
convention collective à la condition que ce ne soit prohibé par
aucune loi.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Cela veut dire qu'une loi
dit: Ce que vous voulez mettre là, c'est défendu dans tel
texte.
M. Massicotte: Oui.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Bon, c'est
prohibé.
M. Massicotte: C'est prohibé explicitement par la lot.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Contraire.
M. Massicotte: Par ailleurs, si on dit: Vous ne rentrerez rien dans une
convention particulière, comme le dit le Code civil, "qui est contraire
à une loi d'ordre public", il faut, à ce moment-là, qu'il
y ait une disposition particulière dans la loi qui traite du sujet que
vous voulez entrer dans une convention collective.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Alors, c'est
prohibé?
M. Massicotte: Non. Ce n'est pas nécessairement prohibé.
Dans un cas, vous n'en parlez pas du tout: dans un autre cas, vous en parlez et
vous dites: C'est prohibé.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous ne m'avez pas
gagné.
M. Massicotte: J'ai beaucoup d'humilité sur mes talents pour vous
gagner, M. Lévesque.
M. Fortin: Pourriez-vous donner un exemple pratique?
M. Desaulniers: M. le Président, je pourrais vous donner un
exemple pratique d'un cas qui se soulève depuis longtemps. Dans bien des
compagnies...
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous allez aider M.
Massicotte?
M. Desaulniers: Bien ça, on verra après! Dans bien des
cas, les compagnies ont institué des fonds de pension.
C'est une condition d'emploi de faire partie du fonds de pension.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Et, suivant la Cour
suprême, une condition de travail.
M. Desaulniers: Un instant! Si vous me le permettez, la Cour
suprême ne participe pas à toutes les négociations. Or, un
des grands problèmes en négociation, c'était de faire
admettre par les employeurs que le fonds de pension était une condition
de travail. Cela a été refusé. Je peux vous donner un
grand nombre d'exemples où les employeurs ont refusé d'entrer
dans la convention collective de travail les dispositions concernant le fonds
de pension. Au point où vous avez, dans plusieurs cas, des ententes qui
ne font pas partie de la convention collective de travail, qui sont
complètement en dehors de la convention collective de travail.
Or, si on considère que le fait d'être obligé
d'être membre d'un fonds de pension et si c'est l'employeur qui l'exige
pour avoir un emploi, à ce moment-là, on considère que ce
n'est pas une condition de travail. Cela en est devenu une essentiellement. Or,
l'interprétation qu'on a toujours donnée, c'est qu'il faut faire
des distinctions entre condition d'emploi et condition de travail. Et si je me
permets de vous donner cet exemple-la, c'est pour faire comprendre
l'importance, au point de vue de notre interprétation, de tous ces
problèmes, qui sont multiples, de la nécessité des mots
"condition d'emploi". Je comprends, comme M. le premier ministre a dit: La Cour
suprême a décidé que les mots "condition de travail"
incluaient aussi la condition d'emploi, mais, M. le premier ministre, je peux
vous dire, moi, qu'en général, dans les négociations de
conventions collectives de travail, cette interprétation de la Cour
suprême n'a pas été acceptée.
M. Gabias: L'application de la formule Rand, est-ce que c'est une
condition d'emploi ou de travail?
M. Desaulniers: L'application de la
formule Rand, à mon point de vue, peut être
considérée - et je n'emploierai ni les mots "condition de
travail", ni les mots "condition d'emploi"; j'emploierai l'expression qui est
admise - c'est une clause normative dans une convention collective de travail.
Parce que, dans une convention collective de travail, vous avez des clauses
normatives, en ce sens que ce sont des clauses de portée
générale qui peuvent exister indépendamment de la
condition de chaque salarié. Les clauses normatives, ce sont les clauses
de relations entre l'association, partie contractante, et l'employeur. Et vous
avez les autres clauses qui touchent directement aux employés.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, je pense bien que
nous sommes suffisamment informés sur l'article 50. On va
délibérer là-dessus.
M. Marchand: Ah non! Pas tout 50, M. le Président.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 50, premièrement;
50 deuxièmement.
M. Marchand: Ah oui, mais j'aurais deux choses à suggérer.
Excusez, si vous le permettez, ça peut retarder de quelques
secondes.
Nous suggérons qu'il y ait, soit comme paragraphe de cet article,
soit comme nouvel article, une disposition semblable à celle qui existe
dans le Code fédéral du travail concernant les clauses de
sécurité syndicale. Dans le Code fédéral du
travail, ça se lit comme suit: "Rien dans la présente loi
n'interdit aux parties à une convention collective d'insérer dans
ladite convention une disposition stipulant, comme condition d'emploi, la
qualité de membre d'un syndicat ouvrier spécifié ou
accordant une préférence d'emploi aux membres d'un syndicat
ouvrier spécifié." C'est-à-dire que nous voudrions
justement que les clauses de sécurité syndicale cessent
d'être l'objet d'interventions, de procédures dilatoires de toutes
sortes, comme cela a été dans le passé. Nous croyons que
c'est un fait acquis. Comme dans le cas du prélèvement des
cotisations syndicales, c'est une chose qui est reconnue, en fait, par la
très grande majorité des employeurs. Et je ne vois pas pourquoi
on permet encore de contester la légalité de ces
clauses-là. Cela, c'est le premièrement.
Une voix: Quel article, ça?
M. Marchand: L'article 6 du code fédéral. Enfin, il y a
une deuxième clause que, spontanément, je suggère au
comité. Je crois que, dans notre Loi des relations ouvrières, il
devrait être formellement stipulé qu'une des parties à une
convention collective de travail peut exiger que le texte officiel soit en
français ou en anglais. Et ça, ce n'est pas un problème
artificiel. Nous avons eu des conflits à ce sujet-là. Je crois
qu'un syndicat devrait pouvoir exiger, comme un employeur d'ailleurs - le droit
doit exister des deux côtés - que le texte soit en français
ou en anglais, ou les deux langues à la fois.
Je pense que ce serait peut-être une des premières
réalisations sur le plan du biculturalisme et je crois que ça
devrait faire l'objet d'une disposition spéciale de notre Loi des
relations du travail.
M. Lesage: Je vous félicite, M. Marchand. Je suis d'accord.
M. Marchand: Oui? Est-ce que je dois comorendre que vous êtes
d'accord aussi avec le premièrement que j'ai suggéré?
M. Lesage: Ah non, non.
M. Marchand: Non? Non, mais dans un bon mouvement...
M. Lesage: La première partie est en
délibéré. La deuxième partie est d'accord.
M. Bellemare: M. Massicotte, vous êtes d'accord, vous aussi?
M. Marchand: Ce n'est pas un problème purement artificiel que je
pose.
M. Lesage: Non, je le sais.
M. Marchand: Nous avons failli avoir une grève à
Montréal parce que l'employeur refusait de signer un texte officiel en
français de la convention collective. Je n'ai pas d'objection à
ce que l'employeur exige également qu'à un moment donné,
le texte soit en anglais, si c'est sa langue. Seulement, si le syndicat opte
pour avoir une convention en français, je pense qu'il devrait être
d'ordre public que ça ne peut pas lui être refusé.
M. Lesage: D'accord.
M. Johnson: On est rendu à l'unilinguisme. Qu'est-ce que vous en
pensez, vous?
M. Marchand: Pardon?
M. Johnson: On est rendu au stade de l'unilinguisme. C'est
dépassé, le biculturalisme.
M. Lesage: Pas vous, la Saint-Jean-Baptiste.
M. Bellemare: Puis le Procureur
général.
M. Marchand: Disons que je suis surtout préoccupé par la
sauvegarde de nos droits; maintenant, si les autres ont des droits, ils les
feront valoir. Mais, quant à nous, on veut que les nôtres soient
respectés.
M. Johnson: Ce n'est pas clair, mais c'est habile.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, vous avez
quelque chose à dire encore là-dessus?
M. Massicotte: M. le Président, je n'aime pas le mot "encore".
C'est parce que M. Marchand a soulevé deux points nouveaux. Sur son
deuxième point, nous aimerions peut-être aller un peu plus loin
que lui et suggérer que le nouveau Code du travail, à cause des
incompatibilités de textes, prévoie qu'en cas de doute, le texte
français est le texte qui compte.
Une voix: Si ça ne pose pas de problèmes
constitutionnels.
M. Lesage: Oui, oui, ça en pose un.
M. Marchand: Il me semblait qu'il nous ennuierait encore de nouveau.
M. Massicotte: Mais enfin, au risque de vous ennuyer encore de nouveau,
M. le Président, comme dirait M. Marchand, J'aimerais reprendre son
premier point.
M. Marchand, particulièrement depuis le début de nos
délibérations, parle du droit d'association des employés,
du droit des individus d'appartenir librement à une association de leur
choix. Par ailleurs, avec ce que M. Marchand vient de suggérer, le droit
d'association des individus se termine dès le moment qu'une union est
certifiée; du moment que l'union a 50% plus un des employés, les
49% n'ont plus le choix. C'est ce que suggère M. Marchand.
M. Marchand: Je reqrette, mais ce n'est pas ça.
M. Massicotte: Certainement que c'est ça que vous
suggérez, M. Marchand.
M. Marchand: Jamais de la vie.
M. Massicotte: C'est ça qui est demandé, c'est ça
qui existe dans la loi fédérale. Et je trouve que, si on doit
parler du droit d'association des individus, ça, doit aller pour les 49%
aussi bien que pour les 51% et que ces formules de sécurité
syndicale qui souvent, avec les employeurs... Parce que l'employeur est
menacé d'une grève, parce qu'on le menace de fermer son usine, il
est obligé d'accepter l'atelier syndical parfait ou l'atelier syndical
imparfait, le maintien rie l'affiliation. Je dis que là, vous n'avez
plus pour les individus concernés le droit d'association.
M. le Président, évidemment, à ce moment-ci, je
parle plus en mon nom personnel, je n'ai pas consulté mes
collègues. Je parle plus en mon nom personnel qu'au nom de l'association
ou des associations que je représente.
Je m'oppose personnellement à la suggestion de M. Marchand
d'introduire la législation fédérale dans le cas de la
province de Québec où nous sommes supposés être plus
individualistes que les autres. Je m'oppose à ce que cette suggestion
soit acceptée par votre comité.
M. Bellemare: M. Massicotte, je ne voudrais pas vous déplaire;
mais seulement, si vous avez lu un peu le Code du travail, vous allez voir que
vous faites une sortie... Je comprends que ça peut être une
réaction bien normale pour le mandat que vous représentez, mais
je pense que, si nous restons calmes dans cette discussion qui est assez
intéressante, vous allez voir qu'à l'article 56 et à
l'article 57, d'une part pour les salariés et d'autre part pour les
employeurs, ils sont liés ultérieurement.
M. Lesage: Ultérieurement. M. Bellemare: Oui.
M. Massicotte: Mais ça, ça n'a rien à voir. Cela
relève de 56, de l'obligation que le législateur impose à
l'union de représenter tous les employés, mais ce n'est pas du
tout le point que je discute.
Nous avons dit dans le mémoire patronal, dans les
représentations de Me Gagné qu'en ce qui nous concernait, les
matières de sécurité syndicale devraient être
laissées à l'entière discrétion des parties,
n'est-ce pas?
Alors ça, c'est le problème. Mais en ce qui concerne les
formules qui sont, si vous voulez, plus avancées dans le domaine de la
sécurité syndicale, je n'ai rien personnellement à retirer
des remarques que je viens de faire.
M. Bellemare: M. Massicotte, si "conditions de travail et d'emploi"
étaient ajoutées, ça vous satisferait?
M. Massicotte: Conditions d'emploi, M. le député de
Champlain, je ne peux pas accepter ça. Parce que conditions d'emploi. M.
Desaulniers a parlé de plans de pension. Ce n'est pas exact de dire que,
où il y a des plans de pension, c'est toujours une condition d'emploi.
Il y a beaucoup de plans de pension dans nos industries qui sont sur
une base volontaire, mais il y a plus que ça. Si on parle de
conditions d'emploi dans le sens de "hiring conditions", ça voudrait
dire, par exemple, que les syndicats pourraient avoir un droit de vue sur les
épreuves que nous faisons passer à nos employés pour
savoir s'ils pourront remplir telle ou telle fonction. Ce sont des conditions
d'emploi. Nous avons, par exemple, dans certaines industries, une
épreuve d'habileté physique qu'on fait passer à un moment
donné, et c'est une condition d'emploi. Avant d'employer quelqu'un, on
lui dit: Il faut qu'i! soit physiquement en mesure de remplir la tâche,
et on fait subir telle ou telle épreuve. Cela deviendra une
matière négociable. Nous ne voulons pas que ça devienne
une matière négociable.
Vous constaterez, M. le Président - une remarque en passant - que
notre expérience en matière de conventions collectives, du
côté patronal, peut se résumer par la définition que
l'économiste américain Slickter donnait: "La convention
collective, c'est qu'on enlève aux patrons des fonctions qu'ils avaient
avant." Nous, nous savons assez bien, du côté patronal, de quelle
façon on essaie de gruger des fonctions que nous croyons, jusqu'au
moment de la négociation, être particulières à la
direction des entreprises. Je présume que le gouvernement de la
province, quand il négociera avec ses fonctionnaires civils, fera face
au même problème. Je présume que, par exemple, avec
l'opposition, encore sur l'article 50, on me permettra, sans représenter
les corporations scolaires ou municipales, de faire une remarque en passant. En
ce qui concerne les corporations municipales qui ont leur autorité du
peuple, comme le gouvernement a son autorité du peuple, je soumets que
ni un gouvernement municipal ni un gouvernement provincial n'a le pouvoir de
déléguer son autorité. Or, par exemple, en demandant
l'abolition du deuxième alinéa de l'article 50, on demande ni
plus ni moins à un gouvernement, municipal dans ce cas-là, de
déléguer son autorité, au-dessus de ses employés,
une troisième personne, à un tribunal d'arbitrage.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Est-ce que vous n'admettez
pas que, par le fait qu'il y a un tribunal d'arbitrage, dans une foule de cas,
il la délègue de toute façon par la loi?
M. Massicotte: Je parle de gouvernements, M. le ministre.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Non, les corporations
scolaires et municipales.
M. Massicotte: Ah, oui, elles y sont soumises, mais pas en
matière de congédiement, pas en matière de suspension.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si vous voulez qu'elles
gardent l'arbitraire ou, en fait, si vous voulez le pouvoir absolu dans ce
domaine précis; mais, pour le reste, vous admettez le tribunal
d'arbitrage.
M. Massicotte: M. le ministre des Ressources naturelles, je ne
représente pas beaucoup de corporations municipales ni scolaires, mais
j'en ai représenté quelques-unes et, avec les unions
représentées par le bureau, je ne dirai pas par Me Desaulniers,
par le bureau de Me Desaulniers, nous avons trouvé des
procédés d'accommodation qui ont satisfait les deux parties.
Une voix: Bien ça, c'est question d'opinion.
M. Marchand: En réponse à M. Massicotte, si vous
permettez, il y aurait deux points. M. Massicotte a parlé des
salariés éventuels d'un employeur et des épreuves qu'on
pourrait faire passer à un employé ou à un candidat
à un emploi. Je vais lui faire remarquer qu'à ce
moment-là, le candidat n'est pas un salarié au sens de la loi.
Donc, il ne peut pas être couvert, il ne peut pas faire partie de la
convention. Cela règle ce cas-là.
M. Lesage: S'il l'est?
M. Marchand: S'il l'est, à ce moment-là, et s'ils font
passer des examens, nous voulons avoir un droit de reqard et nous voulons
pouvoir discuter.
M. Lesage: Si le médecin dit qu'il n'est pas apte?
M. Marchand: Alors, la seule chose que nous allons demander, c'est
d'avoir le droit de pouvoir assigner un autre médecin qui pourra le
contester.
Une voix: C'est comme à la Commission des accidents du
travail.
M. Marchand: Bien oui, c'est tout ça. Moi, je ne peux pas
contester le verdict d'un médecin; seulement, je peux demander à
un médecin qui ne partagera pas cette opinion-Ià, de
défendre le gars, s'il veut le défendre. C'est le cas de la
Commission des accidents du travail, où on veut justement avoir le
même recours, et d'ailleurs je vous cite simplement, M. le premier
ministre, le cas de la Loi des accidents du travail où, justement, on
demande un recours; et, si mon souvenir est bon, c'est dans le programme du
Parti libéral.
M. Lesage: Ah oui.
M. Johnson: Quel programme?
M. Bellemare: Vous vous souvez de ça, vous?
M. Marchand: D'ailleurs, j'aurais lu le vôtre si vous en aviez eu
un, vous savez!
M. Johnson: Je suis tellement heureux d'avoir trouvé enfin une
explication raisonnable au manque de support que j'ai eu de la part de M.
Marchand. Il ne savait pas que nous avions un programme. Il est bien
occupé. Je lui en enverrai une copie.
M. Bellemare: Il y a, dans l'Évangile, une parole qui vous
frappe. "Il n'y a pas de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir."
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Messieurs, à
l'ordre, M. Dupré veut parler là-dessus.
M. Marchand: J'ai un point à soulever là-dessus, M. le
Président, si vous me le permettez. M. Massicotte, sur la
première proposition que j'ai faite au sujet des clauses de
sécurité syndicale, a fait une intervention tout comme si nous
demandions à votre comité d'imposer par la loi des clauses
d'atelier syndical. Ce n'est pas ça du tout.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): J'en ai manqué,
j'aimerais voir le texte parce que...
M. Marchand: Le texte, il est très clair. C'est qu'on dit - et
c'est la loi fédérale - et quand il dit qu'on impose, dans la loi
fédérale, l'atelier syndical, ou qu'on néglige les gens
qui ne sont pas membres du syndicat, qu'est-ce que vous voulez? C'est
peut-être pathétique, mais ce n'est simplement pas vrai.
On dit simplement: "Rien dans la présente loi n'interdit aux
parties à une convention collective d'insérer une clause de
sécurité syndicale." C'est tout ce qu'on dit.
M. Lesage: C'est permissible.
M. Marchand: C'est permissible, c'est tout. Alors, quand M. Massicotte
argumente en disant qu'on veut forcer les employés à devenir
membres et qu'on néglige ceux qui ne sont pas membres, ce n'est pas du
tout le cas. C'est peut-être beau, et moi aussi, je pourrais faire une
description aussi pathétique, mais seulement ce ne serait pas vrai.
M. Lesage: Cela permet qu'une convention collective agrée
à l'atelier fermé.
M. Marchand: Excusez, M. le premier ministre.
M. Lesage: Cela permet que, dans une convention collective, les deux
parties aaréent à l'atelier fermé. C'est ça que
vous voulez dire?
M. Marchand: Oui, à toute clause de sécurité
syndicale. Et on prévoit qu'on ne peut pas indiquer, dans une
disposition de convention collective, qu'un employé n'aura pas le droit
d'être membre d'une association donnée, et là on est
d'accord. D'ailleurs, c'est déjà dans notre loi.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Si la loi n'en parle pas,
est-ce que ça ne revient pas au même que si les deux parties
s'entendent?
M. Marchand: M. Lévesque, c'est exactement le même
problème au sujet du prélèvement des cotisations
syndicales. A l'heure actuelle...
M. Lesage: Non, non, non. M. Bellemare: Non, non, non.
M. Johnson: Ce n'est pas prohibé par la loi.
M. Marchand: Ce que je veux dire, si vous me laissez finir... Je vous
dis que, dans une proportion considérable de nos conventions
collectives, nous avons déjà des clauses d'atelier syndical ou de
sécurité syndicale. Il existe une minorité qui essaie de
s'appuyer sur des textes juridiques pour dire que ce n'est pas légal,
que, si c'est un atelier syndical, ce n'est pas légal, ça viole
la Loi des relations ouvrières.
M. Lesage: Quelle prohibition invoquent-ils?
M. Marchand: Les articles 20, 2] et 22 de la loi actuelle des relations
ouvrières. On réfère également à la
convention collective de travail en disant que ce n'est pas une condition de
travail. Non, tout ce que nous disons, c'est que nous voulons que ce ne soit
pas pour des raisons d'ordre juridique qu'ils refusent ça. Ils peuvent
le refuser s'ils croient que ça violente la liberté des
individus, etc. Ils ont droit comme nous d'avoir leur opinion là-dessus,
mais je ne voudrais pas que ce soit en vertu d'un texte de loi qu'ils le
refusent. À l'heure actuelle, les argumentations devant les tribunaux
d'arbitrage sont de cette nature. Ils nous font perdre un temps infini avec ce
genre d'opposition; c'est pour ça que c'est dans la loi
fédérale et la loi fédérale ne va pas plus loin que
de dire: C'est permis, entendez-vous là-dessus et on ne s'opposera pas.
Seulement, ce n'est pas nous qui allons vous l'imposer.
M. Fortin: M. Marchand, si je comprends bien votre pensée, quand
il y a
une convention qui est signée entre les parties, dont la partie
syndicale, avec ou sans reconnaissance syndicale, cela lie même les
personnes qui ne font pas partie du syndicat. C'est une espèce
d'extension juridique. Alors, si, à un moment donné, vous votez
une clause comme ça, une clause d'atelier fermé, même les
personnes qui n'ont pas siqné la convention, qui ne sont pas membres du
syndicat, automatiquement, se trouvent à être...
M. Marchand: Si vous référez à un type particulier
de clause, c'est-à-dire à l'atelier fermé seulement, si je
veux, par exemple, mettre dans une convention collective de travail une clause
d'atelier syndicat, la clause d'atelier syndical veut dire ceci: ceux qui sont
membres doivent rester membres et les nouveaux employés doivent devenir
membres; mais ceux qui sont là et qui ne sont pas membres, qui refusent
de devenir membres, ne sont pas touchés, ils qardent leur
liberté. Cela dépend du type de clause.
M. Fortin: Alors, si la clause que vous voulez insérer n'y
était pas, eh bien, on vous reprocherait de stipuler pour des tiers
tandis qu'avec ça on ne pourra plus vous le reprocher.
M. Marchand: Je ne comprends pas très bien, excusez-moi.
M. Fortin: Si on ne mettait pas la clause que vous voulez...
M. Marchand: Oui, oui, exactement.
M. Fortin: Alors, en mettant cette clause d'atelier syndical, on vous
reproche probablement de faire quelque chose d'illégal, de stipuler pour
des tiers.
M. Marchand: On crée artificiellement des conflits. Je
n'insisterai pas plus que ça, mais je vous dis que, si c'était
dans la loi, ça éviterait un tas de débats inutiles.
D'ailleurs, ils sont Darfaitement inutiles parce que la tendance est dans ce
sens-là et c'est irréversible, ne nous en faisons pas.
Maintenant, ce qui me surorend - et là, c'est dans l'esprit ou les
conceptions auxquelles on réfère - c'est qu'on est là, en
principe, à dire: Le syndicalisme, c'est une bonne affaire, ça
fait partie de notre société moderne et puis, à tout bout
de champ, on essaie de revirer les individus contre l'association syndicale
quand, en principe, tout le monde est d'accord. La loi est là pour
confirmer le principe, c'est bon ou ce n'est pas bon.
Je pense que c'est bon. Cela ne veut pas dire que tout ce que les
syndicats font doit recevoir la bénédiction de tout le monde, je
serais probablement le premier à ne pas la donner; mais je pense qu'on
ne doit pas soupçonner, par le truchement de la convention collective,
que ce n'est pas le régime convenable ou que c'est un régime
temporaire. C'est tout! Je pense que c'est permanent et tout ce que nous
demandons, c'est un texte de loi qui évitera un tas de débats
inutiles qui créeront artificiellement des conflits comme cela en a
créé chez nous parce que des griefs peuvent être objectifs,
ils peuvent être psychologiques, mais ce sont des griefs quand même
et il faut essayer de trouver un noyen de les canaliser. C'est ça qu'on
n'accepte pas; on essaie, par le truchement de la loi ou artificiellement, de
dire qu'il n'y a pas de griefs. Bien non, ça ne se fait pas comme
ça! S'il y a un grief, il faut essayer de le canaliser normalement.
Alors, l'argumentation de M. Massicotte... Et c'est ce que je voulais
dire au comité. Enfin, c'est pathétique et je oeux parler de la
liberté des individus, etc. Je pourrais inclure la mère, l'enfant
dans le berceau, un enfant rose, la mère infirme, etc., mais ça
ne règle pas le problème, ce n'est pas ça le
problème. Le problème est qu'il s'agit de savoir si on peut le
discuter. Au Canada, en 1963l, tout de même, on ne discutera pas de
l'opportunité d'insérer des clauses de sécurité
syndicale dans les conventions collectives. Tout le monde l'accepte, la grande
entreprise l'accepte, à 90%, c'est accepté. Quelle clause va
être acceptée? Libre aux parties de le décider, mais elles
ne doivent pas tenter de trouver dans la loi une espèce de
prétexte pour ne pas la discuter ou créer artificiellement un
conflit.
M. Lesage: En d'autres mots, M. Marchand, vous dites ceci: Si la loi ne
dit pas expressément que la chose soit permise, ça vous
crée des embêtements qui vous empêchent de négocier
sur ce point-là.
M. Marchand: On va vivre sans ça.
M. Lesage: Non, je dis à toutes fins pratiques.
M. Marchand: C'est ça. On va vivre sans ça, ce n'est pas
une question de vie ou de mort pour nous.
M. Lesage: Oui, je comorends.
M. Marchand: Mais je vous dis que, si le gouvernement l'incluait, il
éviterait un tas de conflits et il favoriserait la paix
industrielle.
M. Lesage: M. Massicotte, j'aimerais vous entendre sur ce
point-là.
M. Massicotte: M. le Président M. le premier ministre, je n'ai
pas grand chose à
ajouter sinon qu'évidemment nous vivons dans ce contexte que M.
Marchand décrit. Nous vivons dans ce qu'il dit être la
négociation libre mais, par ailleurs, nous disons, mes collègues
et moi, que nous vivons aussi le côté pratique de cette
affaire-là. Nous avons toujours soutenu que le droit de faire partie
d'une association quelle qu'elle soit, que ce soit une association
ouvrière, que ce soit une association patronale, comporte aussi le droit
de ne pas en faire partie.
Or, par le truchement de ces formes de sécurité syndicale
qui nous sont imposées par la négociation... Vous avez ce petit
employeur particulièrement, M. le premier ministre, auquel je pense, qui
a six employés et à qui on dit: Monsieur, nous autres, dans votre
qenre d'industrie, tout ce qu'on a ce sont des ateliers syndicaux parfaits;
c'est à prendre ou à laisser ou on vous met en grève. Il
ne peut pas refuser, ça ne lui coûte rien, excepté
probablement un peu de honte de lui-même d'abandonner certains principes.
Cela ne lui coûte absolument rien; alors, il donne.
On part, on s'en va chez l'autre employeur qui a quatre employés
et on dit: Bien, le voisin vient de le donner; si tu ne le donnes pas, il y a
des chances que ton usine ou ton entreprise ferme d'ici trois ou quatre jours.
À ce moment-là, lui aussi le donne et on procède comme
ça, si vous voulez, à saper un droit que je pense aussi
fondamental que le droit d'association, c'est-à-dire le droit de ne pas
s'associer avec quelqu'un.
M. Lesage: Oui, mais, M. Massicotte, vous êtes un avocat et la
condition essentielle pour que vous puissiez être ici représentant
des employeurs est que vous fassiez partie du Barreau.
M. Massicotte: Exact, M. le premier ministre.
M. Lesage: Vous êtes obligé d'être associé,
vous avez le droit d'en sortir, mais vous ne pourrez plus pratiquer.
M. Massicotte: Exact, excepté que j'aimerais
référer le premier ministre à une cause où
c'était le juge Kellock de la Cour suprême qui reprenait cet
argument que vous venez de mentionner, M. le premier ministre, et je
réfère au juge Kellock et à vous-même, avec mes
respects, alors que l'union, à ce moment-là, disait:
Écoutez, ça, ce sont des "free riders", ceux qui ne veulent pas
se joindre à l'union; vous autres, les avocats, vous êtes
obligés de faire partie de votre union. Jusque-là, il a dit: Oui,
très bien. Mais c'est parce que le législateur l'a voulu comme
ça, pour la protection du public. C'est ce que le juge Kellock a dit;
nous avons formé une corporation d'avocats pour la protection du
public.
Or, ce n'est pas le cas ici, surtout que vous avez des associations
volontaires, non incorporées, qui n'ont pas les mêmes obligations
que nos clients généralement de faire des rapports, etc. On n'a
pas du tout la même sorte de constitution, quoi: Je voudrais faire... Je
pense que c'est dans un ancien jugement du CPR que le juge Kellock avait dit
cela.
M. Marchand: J'ai une chose bien importante, M. le Président, et
je vous dis que c'est important au point de vue de la conception de tout
ça. On essaie toujours d'opposer des clauses de sécurité
syndicale au droit au travail de chaque employé. Voici ce que j'ai
à dire là-dessus. En dehors de la convention collective de
travail, quels sont les droits des ouvriers? Ils n'en ont à peu
près pas. C'est le droit du Code civil, la Loi du salaire minimum, et le
décret en vertu de la Loi des débats de convention collective
là où il en existe. Il n'existe absolument aucun droit en dehors
de ça. L'employeur peut arriver demain matin et dire: Toi, je ne t'aime
pas, je n'aime pas la couleur de tes cheveux, dehors! C'est ça, le droit
de l'ouvrier. Quand ils disent qu'on se trouve à limiter le droit des
travailleurs, quel droit? Est-ce qu'ils ont un droit, les travailleurs? Quel
droit? Est-ce qu'il a le droit, le travailleur qui a été 40 ans
à l'Anglo Pulp, de rester là s'il n'a pas de convention
collective? Il n'a pas de droit. Le gérant peut arriver le lendemain
matin et lui dire: Toi, on n'a plus besoin de toi.
Quel sont les droits du travailleur? Ce sont les droits qui sont
consacrés dans la convention collective de travail: ils sont là,
ses droits. Et quand on lui dit que c'est par le truchement de son syndicat et
de sa convention qu'il va sauvegarder ses droits, qu'ils ne viennent pas
opposer le pseudo-droit au travail, ça n'existe pas. Ce n'est pas vrai,
ça n'existe pas. Il n'y a aucun travailleur, s'il n'est pas couvert par
une convention collective de travail, qui a un droit autre que celui de
recevoir un avis d'une semaine ou de quinze jours suivant son mode de
rémunération. Alors, ça...
M. Lesage: Sauf, évidemment, le droit naturel au travail.
M. Marchand: Le droit naturel? Mais comment peut-il l'exercer? Devant
quel tribunal?
M. Lesage: D'accord.
M. Marchand: Je suis tanné, de me faire servir ça par tout
le monde. Ils n'ont pas de droits, ce sont les employeurs qui les ont tous; les
seuls droits que les travailleurs ont sont ceux qu'ils réussissent
à gagner par
le truchement de leur convention collective et leur syndicat...
M. Lesage: Il y a tout de même certains droits, il y a la
Commission des accidents du travail.
M. Marchand: Ah, oui, mais à ce moment-là...
M. Lesage: Il y a les bénéfices sociaux.
M. Marchand: ... les droits sociaux, le droit aux allocations familiales
ou aux pensions de vieillesse, ça ne se rattache pas à leur
statut d'employé.
M. Lesage: Les accidents du travail, oui.
M. Marchand: Oui, il y a certains droits, mais les droits de protection
de leur situation, de leur promotion, etc.? Ce qui m'étonne, c'est que
M. Massicotte discute comme s'il y avait devant votre comité une
disposition en vertu de laquelle on forcerait les travailleurs; ce n'est pas
ça du tout qu'on demande à votre comité, c'est de dire que
ce n'est pas illégal.
Maintenant, quand M. Massicotte sera en face d'une clause de convention
collective, une clause de sécurité syndicale qui va brimer la
liberté des travailleurs, enfin, à son point de vue, il les
défendra, c'est tout, mais pas devant le comité, ici. Tout ce
qu'on vous demande, c'est de dire: Négociez-les, si vous croyez que
c'est opportun, on vous dit que ce n'est pas illégal. C'est tout ce
qu'on vous demande, on ne vous demande pas d'autres choses.
M. Massicotte: M. le Président, juste une minute. Je pense que M.
Marchand, avec son habileté coutumière, a déplacé
le problème.
M. Marchand: Ah, mais non, je l'ai placé, je l'ai
replacé.
M. Massicotte: Non, M. Marchand a essayé de confondre les droits
des travailleurs avec ce qu'il considère une obligation des travailleurs
ou un droit, si vous voulez, des unions qui sont mandatées pour
reorésenter ces travailleurs. Deux choses complètement
différentes dans mon optique.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Duqré.
M. Dugré: Ce n'est pas que j'approuve la clause: d'ailleurs,
j'aurai un commentaire à cet effet tout à l'heure. Si par hasard
cette clause-là venait à oasser, il faudrait
nécessairement exclure dans le domaine scolaire la possibilité
d'accepter les ateliers fermés, parce que, dans le domaine scolaire, on
n'a pas le droit de congédier une personne compétente parce
qu'elle ne fait pas partie de son syndicat. Dans le domaine scolaire c'est trop
précieux et nous avons assez de misère à avoir du
personnel qualifié. Je pense bien qu'on ne devrait pas, a ce
moment-là, limiter les pouvoirs des commissions scolaires parce que le
syndicat aura négocié, si vous voulez, l'atelier fermé, et
aura réussi. Et concernant cette clause d'atelier...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien.
Délibérez.
M. Dugré: ...fermé, si on continue le raisonnement de M.
Marchand, en plus des pouvoirs que l'employeur a de congédier un
employé - ça peut être aussi pour le commissions scolaires
- parce qu'il n'aime pas la couleur de ses cheveux, s'il faut que le syndicat
en plus en fasse aussi une condition d'emploi parce que l'atelier fermé
aura été passé, il ne restera pas grand-chose à
l'employé comme droit; les deux auront pigé, chacun de leur
côté, sur les droits présumés de
l'employé.
M. Garant: Ce n'est pas cela qu'il demande du tout. Il demande tout
simplement de déclarer que les clauses d'atelier ne sont pas
illégales. Pourquoi le personnel enseignant ou le personnel à
l'emploi des commissions scolaires ou les corporations municipales seraient-ils
traités autrement que les autres? Je ne vois pas pourquoi on ferait des
distinctions pour traiter les instituteurs ou les employés des
corporations municipales ou scolaires autrement que les autres.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): 50, en
délibéré. 51. Je comprends qu'il n'y a pas de
problème. 52. Pas de problème?
Une voix: Un instant.
M. Matteau: 52, M. le Président. Nous demanderions que la
deuxième partie de l'article, c'est-à-dire tous les mots
après les "vingt quatre mois", à la quatrième ligne,
soient radiés du texte. Nous soumettons que c'est une matière, le
bon! de vie chère, qui relève de la convention collective, comme
l'a si bien dit M. Marchand.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Elle peut contenir.
M. Matteau: Elle peut contenir. M. Lesage: C'est permissible.
M. Matteau: Cela devient une invitation pour les parties.
Deuxièmement, nous sommes en présence d'une situation où
les salaires sont fixés automatiquement par la clause de bon! de vie
chère. Je comprends que la loi permet de le faire, mais je ne crois pas
que ce soit nécessaire ici de mettre une invitation aux parties pour
aller au-delà de la reconnaissance pour s'ingérer dans le domaine
de la négociation privée. Cette clause-là était
valable lorsque les salaires étaient gelés, en temps de querre ou
pendant l'après-guerre, alors qu'il y avait une fluctuation très
prononcée du bon! de vie chère. Aujourd'hui, cette clause n'a
aucune utilité dans le code. C'est une invitation qui s'inspire des gens
de l'autre côté pour nous dire qu'on doit l'incorporer; alors, je
crois qu'elle est inutile, et c'est pour cela que j'en demande la
radiation.
M. Provost: M. le Président, on propose une restriction aux gens
des corporations municipales, on les empêche de négocier pour
moins que deux ans. Dans une période inflationnaire, si on leur impose
une restriction et si le coût de la vie augmente, je pense que le
législateur est sage de leur permettre de ne pas être à
l'arrière des autres à la suite de l'augmentation du coût
de la vie. Je pense que c'est sage.
M. Lesage: M. Provost, au fond, toute la question est la suivante.
Est-ce que l'on doit avoir des clauses permises qui constituent, d'après
M. Matteau, une invitation ou si on ne doit pas en avoir? C'est une question de
philosophie de la loi ça.
M. Provost: Moi, je pense qu'on doit en avoir des clauses permissives.
Chaque fois que l'on impose une restriction, on doit donner une
permission...
M. Lesage: Mais oui, mais vous admettez que j'ai raison.
M. Provost: Ah absolument...
M. Lesage: Sur 50 c'est la même chose.
M. Provost: Absolument, M. le premier ministre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, M. Massicotte.
M. Massicotte: M. le premier ministre, vous avez posé la question
à M. Provost, est-ce qu'on doit avoir des clauses permissives? Je pense
qu'il y a un danger aux clauses permissives, surtout si on se reporte
particulièrement à une décision, que j'ai lue
récemment, de la Cour suprême dans le cas de Saskatchewan Labor
Relations Board avec Woolworth, où il y avait une clause similaire
à celle que l'on retrouve dans notre Code du travail qui dit que la
commission peut, pour cause, réviser les décisions, etc. Or, la
Cour suprême a dit que le mot "peut", du moment que quelqu'un montre un
intérêt, ne signifie plus une option; cela devient "doit"...
M. Lesage: M. Massicotte, je suis d'accord avec vous, s'il s'agit d'un
corps public, et spécialement du gouvernement. S'il s'agit de dire
purement et simplement qu'on "peut", dans une convention collective, c'est
définitivement permissif et non mandataire, tandis que, pour le
gouvernement, cela l'est: "peut" veut dire "doit". C'est là la
distinction.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Girouard?
M. Girouard: À l'article 52, le premier paragraphe: "La
durée d'une convention collective est d'au moins un an et d'au plus
trois ans".
M. Bellemare: Plus fort, plus fort.
M. Girouard: Nous n'avons pas d'objection au texte, mais cependant nous
croyons que le législateur a oublié le dernier paragraphe de
l'article 15 de la Loi des relations ouvrières qui disait: Nonobstant
cet énoncé d'un an à trois ans, dans les cas où on
veut remplir l'intervalle entre la fin d'une convention
précédente et le début d'une convention qu'on projette, on
peut - je comprends que ce sont des cas exceptionnels, par définition -
soit prolonqer l'ancienne convention, ou soit en conclure une qui va remplir
l'intervalle. Nous ne retrouvons pas cela dans le code ici.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On dit que cela n'a
jamais servi, cet article-là. Sa disposition particulière...
M. Girouard: Je reqrette, M. le Président, c'est le
problème que je viens de régler hier à mon bureau.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah bien, c'était
la première fois.
M. Girouard: C'est assez cocasse, j'avais un cas exactement concret
comme cela...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): C'est la proposition que
vous faites?
M. Girouard: Oui, nous y avions pensé déjà d'une
façon théorique, mais j'ai un cas concret que je peux vous
donner, qui est vécu.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous allez nous donner
une copie de votre amendement?
Article 52: "La durée d'une convention collective est d'au moins
un an et d'au plus trois ans. "Nonobstant les dispositions du premier
alinéa du présent article, lorsque les parties à une
convention collective projettent de passer une nouvelle convention avec un
terme commençant à une date postérieure a celle de
l'expiration de la convention précédente, elles peuvent,
temporairement, pour une période de moins d'un an, prolonger la
convention existante ou en passer une nouvelle pour remplir l'intervalle entre
la fin de la convention précédente et le début de la
convention projetée. (14-15 Geo. VI, c. 34, a 1). "Toute convention
collective, dans le cas d'une corporation municipale ou scolaire, doit
être pour un terme de vingt-quatre mois et peut contenir une clause de
rajustement automatique des salaires pendant sa durée, selon les
fluctuations de l'indice officiel du coût de la vie au Canada."
M. Bélanger: Juste un mot sur le deuxième paragraphe de
l'article 52, au sujet des clauses de bon! de vie chère. Notre
fédération est favorable à ce que cette clause soit
maintenue. Je crois qu'en maintenant cette clause vous vous trouvez en
même temps à autoriser les villes à dépasser, si
vous voulez, leur budget, parce que le coût de la vie, les villes ne
peuvent pas le prévoir. C'est pour cette raison que cette clause a
été mise dans la loi en 1949, donc cinq ans après la
guerre, contrairement à ce que M. Matteau affirme. M. Matteau
prétend que c'est une clause qui a été mise lorsque les
salaires étaient gelés en temps de guerre, alors que cette
clause-là a été mise dans la loi en 1949,
c'est-à-dire quatre ans après la fin de la guerre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, alors 52, en
délibéré; 53, tout le monde semble d'accord? 54.
M. Massicotte: M. le Président, à 54, je fais encore la
relation avec l'article de cet après-midi, 40.2. Je vois encore la
contradiction. Si dans un cas vous avez une convention collective, l'article
40.2. dit que vous pouvez donner un avis de renouvellement, si vous vouiez,
dans les 60 jours. Par ailleurs, votre article 54 dit que, si vous n'avez pas
donné votre avis de renouvellement entre le 60e et le 30e, votre
convention continue. Alors, là, je signale encore ce que je crois
être une contradiction.
M. Provost: M. le Président, à 54, nous
préférerions ne pas avoir de renouvellement automatique. Et voici
pourquoi. Je pense que les travailleurs qui approuvent une convention pour un
an, deux ans, trois ans doivent être pleinement informés
même si les conditions se détériorent, et qu'il faut
renouveler une convention suivant les mêmes conditions, qu'on doive aller
vers eux et leur dire exactement "Elle se termine, nous allons la renouveler
avec les mêmes conditions". Et que ça ne se fasse pas
automatiquement, parce que parfois, malheureusement, dans certains syndicats
indépendants, ça pourrait se faire sans la connaissance des
travailleurs. Or, on dit c'est un an, deux ans, trois ans, et, si on veut la
renouveler, on en siqnera une nouvelle pour des conditions identiques, au lieu
d'un renouvellement automatique. Je pense que c'est une protection pour tout le
monde.
M. Bellemare: M. Provost, vous avez le privilège de donner un
avis.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais, M. Provost, vous
étiez d'accord sur cette clause-là au Conseil supérieur du
travail.
M. Provost: Écoutez, M. le Président, ce n'est pas un
drame qu'on l'ait ou qu'on ne l'ait pas. On fait simplement une observation...
Pardon?
Une voix: Est-ce que ça arrive souvent, le renouvellement
automatique?
M. Provost: Cela arrive très peu souvent, surtout quand il s'agit
d'un syndicat au niveau central. Nous avons connaissance que, dans certains
syndicats indépendants, on s'aperçoit que ça se renouvelle
et ça se renouvelle d'année en année parce que la loi
actuelle dit qu'une convention de trois ans, vous n'avez pas le droit de la
renouveler. Mais une convention d'un an se renouvelle automatiquement. Bien
souvent, les travailleurs ne le savent pas, il suffit simplement de ne pas
envoyer d'avis au patron et ils sont pris avec la même convention pour
l'année suivante sans qu'ils aient pu se prononcer.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Désilets,
avez-vous quelque chose là-dessus?
M. Lesage: M. Provost, si les travailleurs ne sont pas satisfaits des
conditions de travail, c'est comme dans le cas d'un bail. Ils ne laisseront pas
aller la tacite reconduction, parce que c'est ça.
M. Provost: Mon, non. Mais, parfois, une année leur
échappe avant qu'ils ne s'en rendent compte. C'est entre le
soixantième et le trentième jour et ils s'apercoivent, la
dernière journée, que leurs représentants n'ont pas
demandé de rouvrir la convention à la dernière
journée, au trentième jour, au trente et unième jour.
Alors, ils sont pris pour une autre année.
M. Johnson: Le remède à ça, c'est l'affiliation
à la FTQ.
M. Provost: C'est ça, ou à la CSN. Nous autres, on n'est
pas difficiles.
M. Lesage: Ah! Mon Dieu!
M. Désilets: M. le Président, mes clients font la
même demande que M. Provost, mais ils ajoutent que subsidiairement, si
vous acceptez l'article, on demandera de changer "le septième mois" par
les mots "au moins six mois auparavant". Et voici pourquoi. Nous avons des
conventions collectives de 24 mois. C'est pendant un mois seulement qu'on peut
les dénoncer et empêcher le renouvellement automatique. Je pense
que c'est de nature à prendre par surprise plusieurs syndicats dont les
officiers ou le président - ça tombe généralement
dans le mois de décembre - peut être absent ou malade ou enfin, il
en oerd la notion et tout le syndicat sera pris avec un renouvellement
automatique. Pourquoi...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Au moins six mois. On le
dénoncera sept mois, huit mois, neuf mois avant; enfin, on pourra
entraîner nos gens à cette discipline-là. Parce que vous
n'avez qu'un mois pour le faire?
M. Désilets: C'est ça.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Longtemps avant la fin de
la convention collective, ça peut être...
M. Désilets: C'est le mois de décembre de la
deuxième année, alors, c'est...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, cela va, l'article
54? Oui, M. Dugré.
M. Dugré: Je suis de la Fédération des commissions
scolaires.
Si je comprends bien, M. Désilets, la Corporation des
instituteurs ne s'opposerait pas au renouvellement automatique d'un an,
d'année en année. C'est parce que nous calculons que c'est
important pour nous d'avoir cette clause du renouvellement d'année en
année. Le syndicat prendra les mesures nécessaires pour donner
les avis, mais enfin, si, par entente entre l'employeur et le syndicat, il y a
possibilité d'organiser un groupe de sept, huit ou quinze commisions
scolaires qui sont assujetties par le même syndicat à engager une
négociation seulement, ensemble, à ce moment-là, on n'a
tout simplement qu'à s'entendre et ne pas faire le rappel de la
convention; elle se renouvellera automatiquement et là, les quinze
commissions scolaires du même groupe négocieront ensemble.
M. Lesage: Mais, M. Dugré, qu'est-ce que vous dites de la
suggestion de M. Désilets qu'au lieu de dire "le septième mois",
l'on dise "au moins six mois auparavant?
M. Dugré: À ce moment-là, ça retarderait les
conventions ou, si vous voulez, ça redonnera six mois à la
commission scolaire.
M. Lesage: Non, non, M. Dugré.
M. Dugré: Pardon!
M. Lesage: On dit "au moins six mois", pour la dénonciation.
M. Gabias: Les enquêtes de la signature ont été
lonques.
M. Dugré: Il n'y a pas d'objection à six mois dans la
dénonciation.
M. Lesage: Comme dit monsieur, on siqne et puis on dénonce.
M. Gabias: Il n'y a personne qui se fait prendre les culottes à
terre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, article 54, en
délibéré. À l'article 55, il n'y a pas de
problème.
M. Desaulniers: Excusez-moi, M. le président, est-ce que c'est
l'article 55''
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): L'article 56.
M. Girouard: À l'article 56, à moins que le
législateur ait eu un but que nous ne connaissons pas, en lisant cet
article, nous voyons que la convention collective conclue par une association
d'employeurs lie tous les membres de cette association auxquels elle est
susceptible de s'appliquer, y compris ceux qui y adhèrent
ultérieurement. À notre point de vue, nous voyons en ceci deux
dangers. Il existe des associations d'employeurs dont les buts ne sont pas
uniquement de négocier des conventions. Entre autres, parmi leurs
activités, à un moment donné, il y a celle-là.
C'est pourquoi, dans les amenements que nous vous avons suggérés
pour d'autres articles, nous avions précisé "les membres qui ont
mandaté leur association à cette fin".
Le deuxième danger que nous voyons à
cet article est celui-ci. L'employeur, membre d'une association...
M. Lesage: Oui, mais quelle est la garantie des employés à
ce moment-là? Il y a une négociation avec une association
d'employeurs. Il est évident que l'employeur qui devient
ultérieurement membre de l'association, il le sait, il le fait en
connaissance de cause.
M. Girouard: Disons pour celui qui entre et qui la connaîtrait.
Mais, jusqu'ici, la Commission des relations ouvrières, pour un
certificat ou une accréditation, a toujours exigé le mandat
précis. Il arrive que si un employeur est membre d'une association et
que, pour une raison ou pour une autre, il n'est pas satisfait des attitudes de
son association sur ce sujet précis des négociations et que, par
ailleurs, il en est satisfait pour diverses autres raisons du genre marketing,
étude de marché, etc., ça l'oblige à se dissocier
du groupement. Je crois qu'à ce moment-là, vous, du moins du
côté des employeurs, avez vu cette espèce d'existence de
plusieurs associations.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais en fait, M.
Girouard, le même problème peut se trouver du côté
syndical. C'est possible qu'à un moment donné un des
syndiqués ne soit pas satisfait de la clause qui le concerne
particulièrement dans la convention. Il n'est pas lié de la
même façon que vous autres.
M. Girouard: Non, il n'est pas lié de la même facon que
nous autres.
M. Marchand: Je suis d'accord avec le représentant patronal et je
crois que cette clause va absolument à l'encontre de toute la
philosophie de la Loi des relations ouvrières. Nous, nous sommes
certifiés, non pas à l'échelle des
fédérations professionnelles, mais localement,
c'est-à-dire que chaque syndicat doit négocier avec son
employeur. Une des applications de l'article 56 est le faire qu'un employeur
soit lié par une convention collective signée au niveau de son
association: d'autre part, vous avez un syndicat oui conserve son droit de
négocier avec cet employeur en vertu de la Loi des relations
ouvrières. Je pense que les deux philosophies ne vont pas de pair et je
crois que si vous introduisez un article comme l'articie 57...
M. Lesage: En d'autres mots, pour avoir la parité, ii ne faut pas
l'avoir.
M. Marchand: C'est-à-dire qu'il va falloir certifier les unions
professionnelles -les "brotherhood" et nous autres, les
fédérations professionnelles - pour que les négociations
se fassent à l'échelle de l'industrie. Vous ne pouvez pas les
faire à l'échelle de l'industrie pour une et ne pas les faire
pour l'autre. Là, je pense qu'il y a une contradiction dans la
philosophie même de la loi.
M. Lesage: M. Quimper me dit que cet article-là existait.
M. Marchand: Il existait mais, justement, il a donné lieu
à un tas de difficultés, D'ailleurs, à un moment
donné, et nous avons demandé, nous avons obtenu, si mon souvenir
est bon, que les associations d'employeur ne soient plus
accréditées, justement parce qu'on arrivait à ces
situations absolument impossibles où vous aviez une association qui
pouvait forcer son membre à ne pas négocier et, d'un autre
côté, vous aviez un syndicat qui était certifié, qui
avait le droit de négocier. Je ne pense pas qu'on puisse mener les deux
régimes parallèlement. On n'a pas d'objection, si vous voulez
nous certifier, nous autres, je pense qu'on va peut-être être
d'accord; si vous voulez certifier la CSN, par exemple, on va négocier
pour tout le monde. On va essayer de bien faire ça, mais seulement ce
n'est pas tout à fait dans l'esprit de la loi. Bill no 54, article 56:
amendement suggéré. La convention collective conclue par une
association d'employeurs lie tous les employeurs membres de cette association,
lesquels ont mandaté cette dernière à cette fin.
M. Morin (Fernand): M. le Président, je profite de l'occasion de
la remarque de M. Marchand sur cette question de l'accréditation au
niveau professionnel dans un cadre territorial ou dans un cadre plus
élevé que celui de l'unité de négociation
confinée à l'entreprise... Dans l'industrie de la construction,
c'est exactement le problème que nous avons d'ailleurs expliqué
la semaine passée. Les associations patronales représentent la
presque totalité des employeurs de la construction dans une
région donnée et on négocie des conventions collectives
sur cette base. Cet article dit bien que la convention collective lie chacun
des membres - j'entends ici les employeurs -des associations patronales. En
conséquence, si chacun des natrons, des entrepreneuers est lié
par cette convention collective, on ne voudrait pas que ces employeurs soient
à nouveau obligés de changer une autre convention collective en
vertu de la Loi des relations ouvrières avec une association
accréditée. C'est justement le problème de la
construction; j'en profite pour le souligner encore une fois.
M. Marchand: M. Morin, il a été prévu dans une
clause que la commission devait
faire des règlements spéciaux dans le cas de la
construction, je suis d'accord avec vous.
M. Morin: Oui, M. Marchand...
M. Marchand: Seulement, on étudie toute la loi, pas seulement la
construction...
M. Morin: Oui, mais ce que nous faisons ce soir, c'est simplement donner
certaines notes au comité pour avoir une certaine réglementation
qui corresponde bien à nos besoins.
M. Marchand: Le projet de loi a prévu que, dans le cas de
l'industrie de la construction, il devrait y avoir une réglementation
spéciale au point de vue de l'accréditation. Mais il ne faut pas
régler ce cas-là, sur lequel nous sommes d'accord, en faisant une
disposition générale qui change toute la philosophie de la Loi
des relations ouvrières et la change simplement partiellement,
c'est-à-dire uniquement au niveau des employeurs.
M. Morin: Ce qui pourrait être fait, M. le Président, c'est
un genre de reconnaissance - s'il ne faut pas prendre le mot
"accréditation" - du syndicat le plus représentatif dans un
territoire donné pour un métier ou des métiers
donnés de la construction.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Barry, vous avez
quelque chose?
M. Barry (René): Est-ce que l'article 56 ne se rattache pas
plutôt à l'esprit de l'extension juridique d'une convention
collective pour en former un décret? Parce que pour les associations
patronales qui sont concernées par une négociation,
principalement en vue d'un décret, cet article tel que
rédigé serait une entrave majeure au recrutement dans les
associations patronales. Si nous tentons de recruter un membre, et qu'il y ait
à envisager une convention...
M. Lesage: Cet article existe à l'heure actuelle, pas dans la Loi
des conventions collectives, mais dans la Loi des syndicats professionnels.
M. Barry: Mais, actuellement, on veut l'appliquer là.
M. Lesage: Ah oui, je comprends.
M. Barry: Ce sera une nuisance épouvantable pour les associations
professionnelles patronales. Nous ne pourrons plus faire de recrutement de
nouveaux membres, surtput si npus avons à leur offrir une convention qui
ne leur convient pas.
Cela devient une objection majeure.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En
délibéré. Article 57?
M. Renault (Paul): Paul Renault. M. le Président nous craignons
beaucoup l'article 57 qui pourrait créer des situations assez
difficiles. Au cours de la convention collective, il peut arriver certaines
ententes et je crois qu'en vertu de la loi et du principe de la loi l'union
représente tous les employés. Avec cet article, ii pourrait
arriver des cas où après qu'il y serait eu une entente de bonne
foi entre l'employeur et les unions, un ou des employés pourraient, en
vertu de la deuxième partie ou de la deuxième phrase, causer des
ennuis assez sérieux non seulement aux employeurs, mais aux unions. Nous
soumettons que la crémière partie de cet article," les
dispositions de la convention collective applicables à un salarié
font de plein droit partie de son contrat individuel de travail, "ça
existe et que, même en vertu de la loi actuelle, on n'a pas besoin - je
le soumets respectueusement à votre comité - de cette
déclaration-là. La suite, par exemple," il peut, nonobstant toute
renonciation, en réclamer les avantages," je soumets que ça peut
créer à l'employeur et aux unions des ennuis très
sérieux. Pour cette raison, nous soumettons que l'article devrait
être rayé.
Une voix: Pas tout.
M. Desaulniers: M. le Président, nous supportons les
prétentions qui ont été faites par M. Renault. Nous savons
par expérience que l'article, tel que rédigé, pourrait
créer des difficultés assez sérieuses dans les relations
entre les associations et les employeurs. Particulièrement, si nous
examinons les mécanismes de la convention collective de travail, nous
voyons - et cela d'une façon générale - que les ententes
sur les interprétations sont souvent faites au cours de discussions lors
du règlement d'un grief. Il est dit dans les conventions que, lorsque le
comité de griefs, qui parle au nom de l'association, s'entend avec
l'employeur, à ce moment-là, il y a entente et. par
conséquent, le grief se termine. Or, si on accepte l'idée que
toute personne qui ne serait pas satisfaite de ce que la partie
contractuelle... N'oublions pas, comme M. Renault l'a dit, que la partie
contractuelle, ce n'est pas le salarié, c'est l'association oui siqne la
convention collective de travail et qui voit à son
interprétation... Nous considérons que ce recours qui est
donné pourrait créer des difficultés insurmontables aux
rapports entre les parties.
M. Lesage: Ce que je trouve un peu extraordinaire, M. Desaulniers, c'est
qu'au
Conseil supérieur du travail les employeurs et les
employés étaient d'accord pour inclure l'article et là, ce
soir, vous êtes d'accord pour qu'il ne fasse pas partie de la loi. Ne
trouvez-vous pas notre position difficile?
M. Desaulniers: M. le premier ministre, pour ma part, je comprends que
je représente ici les centrales syndicales.
M. Lesage: Non, non, je comprends, mais vous voyez comment notre
situation n'est pas facile.
M. Desaulniers: Non, mais je crois que le code a peut-être permis,
n'est-ce pas, aux parties d'aller plus profondément dans la question et
de pouvoir l'examiner sous un autre angle...
M. Lesage: Cela veut dire qu'on a perdu beaucoup de temps au Conseil
supérieur du travail.
M. Desaulniers: M. le Président, ce n'est pas a moi de
répondre.
M. Marchand: M. le Président, je pense que cela mérite une
explication. Au Conseil supérieur du travail, ça se fait un peu
comme dans une négociation de convention collective.
M. Lesage: Oui, c'est ça.
M. Marchand: Les employeurs insistaient pour avoir cette disposition,
évidemment, je ne sais pas, ce qui a été abandonné,
d'autre part, du côté syndical, pour permettre l'inclusion de
cette disposition. Cela vous explique un peu l'attitude que nous pouvons avoir
au Conseil supérieur, qui est différente de celle que nous
prenons comme centrale syndicale.
M. Lesage: M. Marchand, en définitive, au Conseil
supérieur du travail, c'est donnant donnant, tandis qu'ici, c'est la
vérité qui sort.
Une voix: Pas mal ça, pas mal.
M. Marchand: Voici, c'est partiellement vrai. C'est parce que nous avons
établi, à toutes les réunions annuelles du Conseil
supérieur du travail, nos positions. Nous avons dit que les positions
que nous prendrions, comme centrale syndicale ne seraient pas
nécessairement celles que nous prenions comme membres du conseil, parce
qu'à ce moment-là on essayait de trouver des modus vivendi, quoi,
avec les employeurs.
Alors, cette clause-là, en particulier... Bien, enfin, j'essaie
de donner une explication, j'avoue que je ne suis pas très
élégant, M. le Président, mais de toute
façon...
M. Bellemare: Vous avez déjà été
meilleur.
M. Marchand: ...j'essaie de recréer l'atmosphère du
Conseil supérieur du travail.
M. Lesage: M. Marchand, je vais vous dire pourquoi je vous fais cette
réflexion-là, c'est parce que le premier jour...
M. Marchand: Oui, oui, je me souviens.
M. Lesage: ...vous avez suggéré de retrouver la chose au
Conseil supérieur du travail et je commence à avoir des doutes
très sérieux...
M. Marchand: Oui, c'est-à-dire non. Je m'excuse, M. le
Président. C'est encore partiellement vrai, c'est-à-dire que j'ai
simplement déclaré qu'on avait fait peut-être une mauvaise
utilisation du Conseil supérieur du travail, mais je ne crois pas avoir
suggéré - maintenant comme tout est enregistré, j'y vais
avec précaution - de le retourner au Conseil supérieur du
travail.
M. Lesage: Oui, j'ai eu l'impression que vous l'aviez fait.
M. Marchand: Bien, cela vaudrait la peine de vérifier les
notes.
M. Lesage: Vous aviez suggéré... Bien, j'ai eu
l'impression, je ne veux pas me...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Désilets, les
deux veulent le biffer, vous, vous voulez le qarder.
M. Désilets: Si on le biffe, je n'ai pas d'objection, mais c'est
parce qu'il nous posait des craintes d'un autre ordre: c'était de voir
diminuer les avantages supérieurs contenus dans un contrat individuel
d'enqagement. Quand une convention collective intervient, elle prévoit
une échelle de salaires qui, automatiquement, remonte ceux qui ont un
salaire inférieur. Mais est-ce que cela va abaisser ceux qui, par
contrat individuel, ont un salaire supérieur?
On voulait demander qu'il y ait une disoosition comme dans la Loi des
conventions collectives à l'effet que les conditions supérieures
obtenues par contrat individuel ne seront pas abaissées.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 57 en
délibéré. Article 58.
M. Desgagné (André): M. le Président, André
Desgagné, avocat.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice):
Sur l'article 57?
Représenter en justice
M. Desgagné: Nous avons deux oppositions à faire
connaître à votre comité, M. le Président,
relativement à l'article 58. L'article 58, dans sa rédaction
à la fin, comporte un élément nouveau, car on
prévoit que l'association de salariés peut représenter les
salariés en justice "sans avoir à justifier d'une cession de
créance de l'intéressé. Nous soumettons, M. le
Président, que le projet de loi à cet endroit introduit un
principe tout à fait nouveau dans notre régime juridique. Mais ce
n'est pas parce qu'il est nouveau que nous nous y opposons, c'est parce que le
principe qui est reconnu par notre système juridique est un principe
valable en soi.
Dans notre système juridique, on ne peut déduire en
justice que les droits dont on peut justifier un intérêt actuel et
présent. L'association ici est habilitée à
représenter en justice sans même avoir à justifier d'une
cession de créance de l'intéressé lui-même. Pour
reprendre les expressions qu'on a utilisées cet après-midi
même du côté de la gauche, je dirais que ça va trop
loin, car on empiète sur les relations individuelles, alors que
l'économie du Code du travail est construite sur la
nécessité de régir les rapports collectifs. Nous estimons
que l'intéressé doit au moins céder son droit à
l'union ou au syndicat.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je présume qu'il y
a des raisons sérieuses à ça.
M. Desgagné: Oui, nous voudrions bien les connaître.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous allez les
connaître tout de suite, là.
M. Fortin: L'article 25 de la Loi des syndicats professionnels ne permet
pas a un syndicat de demander une action?
M. Desgagné: Voici, il y a deux sortes d'actions sous la Loi des
syndicats professionnels que le syndicat peut exercer. Il y a l'action par
représentation et, à ce moment-là, il exerce les droits de
l'individu, du salarié, mais il est obligé de justifier d'une
cession de créance.
Des voix: Non, non.
M. Desgagné: Sous la Loi des syndicats orofessionnels,
d'accord.
M. Fortin: Bien, alors, on l'enlève dans le Code du travail.
M. Desgagné: Bien voici, le syndicat doit justifier qu'il
défend l'intérêt collectif des salariés.
Une voix: Non, non, pas besoin de ça.
M. Fortin: Ils peuvent exercer leur protection au sein du syndicat en
faveur de chacun de leurs membres.
M. Desgagné: Le syndicat a deux moyens d'agir en justice. Il peut
défendre, évidemment, son patrimoine comme toute personne; il
peut défendre aussi les droits des salariés, mais à la
condition qu'il justifie que ces droits heurtent l'intérêt
collectif qu'il représente.
M. Fortin: Prenez l'article 25, de la Loi des syndicats
professionnels.
M. Gabias: Vous avez raison, il y a deux conditions. Il faut que
l'employé ait été averti puis il faut qu'il n'ait pas
déclaré s'y opposer, ce qui est bien différent de
l'article 58.
M. Fortin: Le principe de base est le même.
M. Gabias: C'est bien différent.
M. Fortin: Cela pourra justifier d'une cession de créance.
M. Desgagné: Voici l'article 25, vous me permettrez de le lire.
Alors, le début permet d'exercer les actions en justice qui maissent de
cette convention en faveur de chacun de leurs membres, sans avoir à
justifier d'une cession de créance de l'intéressé." Si
ça l'intéresse, ça irait. C'est parfaitement conforme au
texte proposé. Mais on ajoute: "pourvu que celui-ci ait
été averti et n'ait pas déclaré s'y opposer". Et
bien plus: "l'intéressé peut toujours intervenir dans l'instance
enqagée par le groupement."
Or, le texte actuel, le texte proposé substitue de plein droit et
pour tout l'union ou le syndicat au salarié lui-même qui n'a plus
même le droit d'intervenir, qui n'a même plus le droit de
manifester son opposition. Nous estimons, M. le Président, qu'il y a
là un principe dangereux qui se trouve à annihiler les droits de
l'individu qui sont quand même les premiers, le droit d'association
étant non pas une fin en soi, mais un moyen pour l'individu de
sauvegarder ses droits individuels. M. le Président, deuxième
objection que nous formulons contre l'article 58, c'est sur l'expression
employée "peut exercer en justice". Nous exprimons ici un dcute. Ce
n'est pas formellement une objection. Nous pensons qu'il est dangereux de
maintenir cette expression "peut exercer en justice", car il peut arriver que
la convention collective
prévoie, évidemment comme elle le prévoit souvent,
le recours à tout un processus de règlement de griefs. Nous
estimons qu'on ne doit pas cumuler; on doit exercer le recours en justice
subsidiairement, après l'épuisement des procédures
prévues dans la convention collective. C'est pourquoi nous pensons que
l'expression "peut...
M. Desaulniers: M. le Président, je dois dire que le principe que
l'on reconnaît par le nouveau texte soit que l'association peut
poursuivre sans qu'il y ait cession de créance, est un principe qui a
été reconnu depuis bien longtemps par la Loi des décrets
de convention collective de travail, en somme, où on parle du
comité paritaire. Or, dans le présent cas, si nous examinons
toute la législation, il est évident que c'est l'association qui
a représenté le salarié et on dit même dans la loi
qu'elle doit représenter tous les associés. Or, son obligation de
représenter les associés lui donne certainement un droit. Si,
à un moment donné, un des membres ou un salarié refuse de
porter devant un tribunal d'arbitrage ou devant la cour un grief qui a des
conséquences nécessaires non pas simplement dans son cas, mais
sur tout l'établissement de la convention collective de travail,
l'association peut, à ce moment-là, voir elle-même à
ce que la convention soit observée. C'est ça qu'on atteint par
cet article-là.
M. Lévesque (Montréal-Laurier): Vous voulez dire qu'en
plus de protéger les gens individuellement c'est la convention
elle-même qu'elle protège.
M. Desaulniers: Certainement et puis, à part ça, il faut
nécessairement, en certaines occasions, si un ou des employés
refusent de faire les réclamations nécessaires pour que la
convention soit observée, permettre à l'association qui, elle, a
signé, qui elle est partie, de voir à l'observance de la
convention.
M. Fortin: Lorsque la Loi des syndicats professionnels a
été adoptée, cet article 25 de la Loi des relations
ouvrières n'existait pas. Exemple du principe d'une extension juridique
mitigée par la Loi des relations ouvrières; si l'ouvrier avait le
droit de s'opposer à des poursuites, eh bien, c'est aussi bien qu'il n'y
ait pas de convention collective. Chaque individu dirait a son patron: Vous
avez spécifié $2 l'heure à la convention collective,
maintenant, j'accepte $1 l'heure. Alors, tout le monde ferait ça et la
convention tomberait.
M. Desaulniers: M. le Président, je n'ai plus rien à
dire.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, M. Crête.
M. Crête (Marcel: M. le Président, au nom des
manufacturiers de chaussures, sur l'article 58, si le comité croit
devoir retenir le texte tel qu'il est comme corollaire à cet article, il
faudrait aussi prévoir qu'une association accréditée ou
reconnue pourrait être poursuivie en justice pour chacun des
salariés qu'elle représente sans que l'employeur ait à
justifier une relation de commettant et de préposé entre
l'association et ses membres. Nous soumettons comme corollaire et toujours au
nom de la parité que cet article devrait également prévoir
que l'association accréditée ou reconnue pourrait être
poursuivie en justice pour tous ses salariés pour les recours
résultant de la convention collective sans que le poursuivant ait
à justifier une relation de commettant et de préposé.
Je m'explique. Il arrive, disons, une violation de la convention
collective - nous sommes dans ce domaine-là - par un certain groupe
très restreint d'employés. L'employeur voudrait les poursuivre
pour des raisons peut-être d'insolvabilité; son recours serait
illusoire. S'il veut poursuivre l'association, il lui faudra prouver le mandat
ou la relation de commettant et de préposé; son recours à
ce moment-là serait extrêmement difficile. Alors, si on veut
parler de parité ou d'équilibre, comme le disait M. Marchand cet
après-midi, je soumets que cet article-là devrait
également comprendre une disposition semblable.
M. Marchand: Moi, je n'ai pas compris l'affaire de M. Crête.
M. Bellemare: Ah oui, vous l'avez comprise.
M. Marchand: J'ai eu peur de la comprendre.
M. Bellemare: Vous n'êtes pas sourd.
M. Marchand: Vous ne voulez pas m'entendre.
M. Massicotte: M. le Président, nous craignons
particulièrement, évidemment, si on regarde le texte anglais et
le texte français. Dans le texte français, on parle de recours en
justice et, dans le texte anglais, on parle de recours qui découlerait
de la convention collective de travail. Nous croyons que cet article est
très dangereux, en ce sens qu'il pourrait, si vous voulez, annihiler
l'effet de nos procédures de ariefs. Et cet article, évidemment,
est relié au suivant. Nous croyons qu'avant qu'il y ait des recours en
justice, quand il y a une convention collective existante, les parties
devraient avoir recours à la procédure des griefs. Et je
soumettrais qu'on devrait enlever le nnot "en justice" et tenir compte,
évidemment, des représentations que M. Desgaqné a faites
sur la question de cession de créance.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors, 58, en
délibéré. Article 59?
M. Marchand: Il y a un point sur lequel nous sommes d'accord, M. le
Président, mais je ne voudrais pas que ça passe trop vite. Qu'il
y ait non seulement une présomption, mais que la procédure de
griefs ait priorité sur des recours judiciaires, s'il y a moyen de
l'exprimer, sur ça nous sommes d'accord, mais après que les
recours de la convention collective ont été
épuisés. Nous sommes tout à fait à l'aise de
constater que les employeurs sont d'accord avec nous pour limiter certains
droits individuels au nom du bien commun et du groupe, ce qu'ils
n'étaient pas prêts à faire tout à l'heure au nom de
la sécurité syndicale.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): La suqgestion, ce serait
que les procédures de griefs aient priorité sur les
procédures en cour?
M. Massicotte: Par exemple, dans le cas de la Compagnie Paquet auquel on
a fait allusion souvent, il y a un tas d'autorités qui ont
été citées par la Compaqnie Paquet particulièrement
en Cour d'appel, où on parlait de la procédure des griefs par
rapport aux recours judiciaires. Il y a une nombreuse jurisprudence qui dit,
par exemple: Avant d'exercer des recours judiciaires, passez par la
procédure des griefs. C'est ce que nous voulons et c'est ce sur quoi le
syndicat semble être d'accord.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): En
délibéré. Article 59...
M. Matteau: Article 59, M. le Président. Arthur Matteau, Union
des municipalités. Nous demanderions de remplacer, dans la
dernière phrase de l'article 59, les mots "procédure de griefs"
par "arbitrage". Nous avons une foule de conventions où il y a des
procédures imprécises où les délais ne sont pas
prévus. Il y a même des conventions où il n'y a pas de
procédures du tout. Alors, je pense que prévoir la prescription
à ce stade serait dangereux et source de nombreux problèmes.
M. Desaulniers: M. le Président, sur ce
problème-là, je vais rapporter un peu ce que dit M. Matteau.
C'est que la procédure de griefs dans les corporations municipales peut
amener des délais considérables et c'est justement parce qu'elle
peut amener des délais considérables que nous voyons la
nécessité de considérer que c'est le recours à la
procédure de griefs qui arrête la prescription; parce qu'autrement
ce qui va arriver, c'est qu'il n'y aura plus aucun effort.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Vous êtes d'accord
là-dessus avec M. Matteau?
M. Desaulniers: Non, non, je dis le contraire. Je m'excuse, M. le
Président, de ne pas m'expliquer clairement. Ce que je veux dire, M. le
Président, c'est que non seulement je ne suis pas d'accord, mais voici
le point qui va se soulever si vous ne maintenez pas votre texte: il n'y aura
plus de procédure de règlement de griefs qui va exister parce que
les gens vont aller tout de suite à l'arbitrage pour ne pas perdre leur
droit. Et de ne pas être prescrits dans leur droit; et moi, je
considère que le règlement du grief par la procédure de
griefs est la meilleure façon pour que deux parties s'entendent.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, article 60 en
délibéré.
M. Désilets: M. le Président, si vous me le permettez.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Oui, M.
Désilets.
M. Désilets: Dans le domaine scolaire, parmi les droits et
recours qui naissent de la convention, il peut y avoir des réclamations
de salaires. Actuellement, nos réclamations de salaires se prescrivent
par cinq ans. L'effet de l'article 59 serait d'abréger ce délai
de prescription à six mois. évidemment, c'est un article qui va
nous causer un qrave préjudice parce que l'institutrice n'est pas
souvent en mesure, et n'est pas toujours disposée, puis souvent
encourerait de graves risques, si elle prenait une action pour réclamer
son salaire troo tôt. C'est un fait devant lequel on va se trouver
passablement endommagé.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Bélanger.
M. Bélanger: M. le Président pour la première fois,
je vois dans le texte le -not "sentence". On dit: "Les droits et recours qui
naissent d'une convention collective ou d'une sentence" et, à l'article
81, on dit que la sentence tient lieu de convention collective. Est-ce que
ça ne pourrait pas prêter à confusion? Puis, je vois
qu'à l'article 52, on dit: "Toute convention collective dans le cas des
corporations municipales et scolaires doit être pour un terme de 24 mois.
Dans l'ancienne loi, on disait: "Toute convention collective ou toute
sentence". Là, on fait
disparaître, dans pratiquement tous les articles, le mot
"sentence" parce qu'à l'article 81 on dit: "La sentence a l'effet d'une
convention siqnée par les parties." Là, je vois que l'on ajoute
le mot "sentence". Est-ce que ça ne serait pas mieux de l'enlever? Si on
l'ajoute là, il faudra le mettre partout.
Oui, on en parle à l'article 81: "La sentence a l'effet d'une
convention collective siqnée par les parties. "C'est parce que, si on
met "sentence" là, il faut le mettre dans l'article 52. Autrement, les
villes vont être obligées de signer des conventions collectives
pour un terme de 24 mois et les sentences vont être pour une durée
d'un an ou deux ans ou trois ans; il n'y aura pas de terme; dans l'ancienne
loi, on disait que la sentence et la convention devaient être pour un
terme de 24 mois. Alors, c'est la première fois que je vois le mot
"sentence" là; si l'article 81 dit que la sentence à l'effet
d'une convention collective et si ce n'est pas nécessaire de
répéter tout le temps le mot "sentence", enlevons-le partout
parce que, s'il est là et puis qu'il n'est pas ailleurs, ça va
sûrement prêter à confusion.
M. Johnson: Je pense qu'à 81 on le dit une fois pour toutes.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte.
M. Massicotte: M. le Président, sur 59 aussi bien que sur 58,
nous voyons un danqer fantastique de détruire toutes les
procédures de griefs qu'on a dans nos conventions collectives de
travail. Nous sommes parfaitement d'accord avec la déclaration de M.
Desaulniers; nous croyons que la procédure qui doit régir nos
différends pendant l'existence d'une convention collective, c'est la
procédure de griefs. Or, dans la plupart de nos conventions collectives,
nous n'avons pas des délais de six mois pour de bonnes relations
industrielles, nous n'avons pas des délais de six mois pour permettre
à un employé de faire un grief, nous avons des limites de temps
que nous négocions, en tenant compte, évidemment, des situations
particulières.
Nous voulons, par exemple, du côté patronal, être mis
à la connaissance le plus tôt possible des griefs qui surgissent
de façon à pouvoir les régler le plus tôt passible;
mais nous serions dans une position intenable si, par exemple, on allait
interpréter l'article 59 pour dire à un employé ou
à l'Union: Vous pourrez attendre six mois ou cinq mois et demi avant de
faire votre grief.
Maintenant, il y a une autre question que nous voyons dans l'article 59,
c'est qu'il semble y avoir une superposition de recours. En d'autres termes,
nous ne savons pas trop exactement ce que l'article 59 signifie, nous ne
pouvons que nous imaginer ce qu'il peut signifier. On dit dans un cas, il y
aura une prescription de six mois, mais "le recours à la
procédure de griefs interrompt la prescription." Vous superposez, vous
additionnez les délais. Nous croyons que c'est un abus si la
procédure des griefs interrompt la prescription. Mais nous croyons
surtout que la Législature devra voir à ce que, du
côté pratique, on n'aille pas détruire, par certaines
clauses dans le code, des systèmes de procédure de griefs dont
nous nous sommes accommodés et qui nous sont satisfaisants, tant du
côté patronal que du côté syndical. Nous voyons de
grands dangers tant dans l'article 59 que dans l'article 58.
M. Gabias: C'est en vertu de la convention collective, M. Massicotte, la
convention collective va faire la loi des parties. Si la convention collective
prévoit que le grief peut être fait dans les huit jours, il faudra
qu'il se fasse dans les huit jours; si ça ne se fait pas
automatiquement, il est prescrit...
M. Massicotte: Oui, mais on pourrait toujours se référer
à la loi et dire: J'avais le droit d'attendre six mois.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Je comprends votre point
de vue, M. Massicotte, je l'ai noté.
M. Marchand: M. le Président, ce que M. Massicotte a
mentionné, 58 et 59 couvrent deux sujets différents. 58, ce sont
les recours qui se rattachent à la convention collective de travail; il
n'y a pas de délai de six mois, dans 58, si vous remarquez. Dans 59, ce
. sont des droits beaucoup plus généraux, des droits et recours
qui naissent d'une convention collective ou d'une sentence qui en tient lieu;
ils se prescrivent par six mois. Voici ce qui arrive - peut-être que M.
Renault pourra comprendre - c'est qu'à un moment donné même
une sentence peut être contestée; on peut négocier
très longtemps après pour tenter de s'entendre. J'ai l'impression
qu'on se comprend très bien. Alors, là, à ce
moment-là, le délai de six mois peut très bien se
justifier et être nécessaire.
M. Gabias: Je me sens visé.
M. Marchand: Non, non, je ne vous vise pas, peut-être que je vous
attrape.
M. Gabias: Est-ce que c'est le but des réunions du Conseil
supérieur du travail?
M. Marchand: Non, non. À un moment donné, une sentence
arbitrale ou même une sentence qui, d'après la convention, lie
les
parties peut être contestée par une partie ou une autre
devant les tribunaux; cela donne lieu à des négociations
postarbitrales et ça peut être très long avant qu'une
action soit prise; alors, à ce moment-là, il nous faut un
délai raisonnable et c'est ce que 59 veut couvrir. Je pense que le
délai de six mois, qui est un délai qu'on retrouve dans la loi de
la convention collective, enfin, je crois que c'est le délai de six
mois, et qu'on retrouve ailleurs, je ne me souviens pas où...
Une voix: Dans la Loi du salaire minimum.
M. Marchand: Dans la Loi du salaire minimum, alors là, il faut
tout de même donner le temps aux parties de se retourner de bord; je ne
vois pas en quoi c'est abuser.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): M. Massicotte, j'ai
noté ceci, moi; il ne faudrait pas que le délai de six mois soit
interprété comme permettant d'attendre six mois pour
dénoncer un grief.
M. Marchand: On est plus raisonnable que ça.
M. Massicotte: M. Marchand mentionne la Loi du salaire minimum, mais ce
sont des réclamations sur salaire. Dans les conventions collectives,
nous avons des griefs qui portent sur autre chose que sur les salaires. Nous
avons des questions d'ancienneté, nous avons des questions de promotion,
toutes sortes de griefs qui n'ont pas trait, si vous voulez, directement au
paiement du salaire; indirectement, oui, mais pas directement, ce n'est pas la
même chose.
M. Marchand: Non, non, mais dans le cas que je vous mentionne, moi, je
me souviens d'avoir négocié pendant pas loin de trois mois et j'y
ai été mêlé avec l'employeur pour essayer de
s'ajuster, ce qui est normal. Mais pensez-vous qu'à ce moment-là,
si j'avais su qu'au bout d'une semaine mon délai était prescrit,
je l'aurais tentée, cette négociation-là? Il faut tout de
même donner une chance aux parties de s'entendre, c'est le but de toute
cette loi-là, favoriser l'entente entre les parties et essayer
d'éliminer, d'émonder, si vous voulez, tout l'asoect
orocédure pour que les problèmes ne se règlent pas tout
simplement par des délais.
M. Renault: M. le Président, pour être très bref, de
la façon que l'article ou même les deux articles se lisent, 58 et
59, à 58, on dit: "L'association accréditée ou reconnue
peut exercer en justice tous les recours que la convention collective accorde
à chacun des salariés." Vous avez nombre de conventions
collectives où seul l'emoloyé, et c'est fait par
négociation, peut faire un grief. Je soumets qu'il faudrait savoir si
maintenant, en vertu de cet article, la loi ayant priorité, on ne
détruira pas alors tout le système actuel de nos conventions
collectives.
M. Desaulniers: M. le Président, je crois qu'il serait bien
important - je m'excuse je vais être bref - de bien faire attention
à l'article 59, parce que l'article 59 couvre aussi les services
publics. N'oubliez pas que dans le cas des services publics, la sentence est
finale et exécutoire. Alors, je crois qu'il est bien important ici qu'on
détermine - que ce soit six mois ou un an, pour le moment, je ne discute
pas de ça - si le recours, à la suite d'une sentence, est
prescrit, et quand il doit être prescrit. C'est nécessaire. Et
même, en interprétant, l'article 59, je dirai que, par les
conventions collectives de travail, l'on peut s'entendre pour que, si un grief
n'est pas réglé par la procédure des griefs, il soit
soumis à l'arbitrage. Et s'il est soumis à l'arbitrage,
habituellement, dans les conventions collectives de travail, les parties
conviennent que la sentence est finale et sans appel.
Or, nécessairement, si, à un moment donné, la
sentence est rendue et que l'une des parties ne l'exécute pas, il y a
nécessairement un recours en quelque part pour faire exécuter
cette sentence. Là encore, on voit la nécessité du
délai de six mois qui doit s'appliquer et dans la convention collective
et dans la sentence, dans le cas des services publics.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Bien, en
délibéré.
M. Massicotte: M. le Président...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 58 ou 59?
M. Massicotte: À l'article 59, telle une suggestion: que les mots
"en justice" qui apparaissent à l'article 58 soient donc
transférés à l'article 59, sous réserve des
remarques que nous avons faites antérieurement que nous ne voulons pas
la destruction des procédures de griefs.
M. Desaulniers: M. le Président, si je comprends bien la
sugqestion, c'est qu'on ne veut pas que la loi donne à l'association
accréditée le droit de poursuite.
M. Massicotte: Mon, non, non.
M. Desaulniers: Certainement, ça va avoir cet
effet-là.
M. Renault: ...faut pas que ça remplace les procédures
pour négocier.
M. Desaulniers: Ça va avoir cet effet-là.
M. Massicotte: Enfin, c'est parce qu'en lisant le texte de l'article 59,
on voit: "Les droits et recours qui naissent d'une convention collective..."
Or, il y a des droits qui naissent de la convention collective; le droit, par
exemple, pour un employé de recourir à la procédure des
griefs. Ce n'est pas nécessairement un droit judiciaire. Si on veut
viser, par l'article 59, les recours judiciaires, qu'on le dise.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Mais oui, mais si on
laissait à l'article 58 et si on mettait à l'article 59 "les
droits et recours en justice?" Parce que je comprends que les six mois
prévues ici, c'est pour les recours en justice, devant les cours en
fait, ce n'est pas pour les recours, c'est de la convention collective.
M. Desaulniers: C'est simplement pour les recours en justice.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): On pourrait
peut-être le dire à l'article 59, si on le répétait
à l'article 59, ce serait clair.
Une voix: Pas d'objection.
M. Marchand: On peut le répéter.
M. Massicotte: Nous ne suggérons pas de le répéter,
M. le Président, nous disons simplement de le transférer
d'article.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Alors...
M. Désilets: Alors, si vous le décidez comme ça, M.
le Président, je répète mon 'intervention de tout à
l'heure. Je vous demanderais de faire à ce moment-là, un
paragraphe pour maintenir la prescription de cinq ans. Si vous précisez
à l'article 59...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Ah, j'ai noté
ça.
M. Fortin: Il faudrait enlever, par exemple "les droits", il faudrait
mettre simplement "les recours".
M. Renault: Il faudrait mettre "les recours en justice". Ce sont les
recours...
M. Desaulniers: Si vous permettez, M. le ministre, les droits, c'est une
chose; les recours, c'est autre chose.
M. Fortin: Oui, mais là, on tombe.
M. Desaulniers: Non, vous devez faire votre distinction au point de vue
du texte législatif.
M. Fortin: La prescription, c'est une question de procédure.
M. Desaulniers: La prescription peut-être en raison du jour
où le droit a été créé, et elle peut
être aussi en raison d'un recours qui ne peut être permis dans la
loi que dans telles circonstances. Vous avez ces deux prescriptions, vous avez
les prescriptipns de procédure et vous avez les prescriptions de
droit.
M. Fortin: Quand on lit en matière de cas de prescription, ce
sont des prescriptions de droit.
M. Desaulniers: Pardon?
M. Fortin: En matière de cas de prescription, le droit est
éteint complètement.
M. Desaulniers: Oui, je comprends, mais celui qui a
préparé le texte était imbu des principes de nptre droit
civil quand il a fait la distinction.
M. Gabias: Est-ce que ce serait vous, par exemple?
M. Desaulniers: Non, M. Gabias.
M. Marchand: Il y aurait des choses qu'on n'expliquerait pas.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Article 60?
M. Marchand: L'article 60, j'ai un discours d'une heure à faire
là-dessus.
Des voix: Il est dix heures.
M. Marchand: M. le Président, sans forcer la main du
comité, voici un des articles fondamentaux du code, au moins au ppint de
vue de l'intérêt que cela comporte pour les centrales syndicales:
les services publics. Alors, je n'aimerais pas beaucoup l'entamer partiellement
pour cinq ou dix minutes. J'aimerais bien, à moins que le
président insiste...
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Pardon?
M. Marchand: Je vous dis simplement, M. le Président, que c'est
un des articles fondamentaux quant à nous. Vous savez, c'est toute
l'affaire des services publics, du recours au ministre, et je pense qu'on ne
peut pas régler le problème en quelques minutes, à moins
que le président nous dise
que nous avons amplement...
M. Johnson: Ah non, c'est ce que je disais à M. le
Président, on ne devrait pas attaquer cela en l'absence du premier
ministre.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Sur 60?
M. Johnson: Oui.
M. Marchand: L'article 60, c'est la référence au ministre
des conventions collectives qu'il peut, lui, référer aux
tribunaux d'arbitrage. Alors, si nous sommes pour aborder le problème
seulement pendant quelques minutes - je ne sais pas quelles sont les intentions
du président - nous aimerions avoir un peu plus de temps.
Le Président (M. Hamel, Saint-Maurice): Il est dix heures. Demain
matin, à onze heures moins le quart?
M. Marchand: Vous êtes bien aimable, M. le Président.