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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le jeudi 16 mars 1978 - Vol. 20 N° 11

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 70 - Loi constituant la Société nationale de l'amiante


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 70

Loi constituant la Société nationale de l'amiante

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Bonjour tout le monde. Il s'agit de la commission des richesses naturelles chargée d'étudier le projet de loi no 70, article par article. Les membres de la commission pour la présente séance seront: MM. Bérubé (Matane), Bordeleau (Abitibi-Est), Brochu (Richmond), Forget (Saint-Laurent), Grégoire (Frontenac), Laplante (Bourassa), Ouellette (Beauce-Nord), Rancourt (Saint-François) et Raynauld (Outremont) est remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

Les intervenants sont: MM. Fontaine (Nicolet-Yamaska), Godin (Mercier), Garneau (Jean-Talon), remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal); MM. Landry (Fabre), Larivière (Pontiac-Témiscamingue), Léger (Lafontaine) remplacé par M. Brassard (Lac-Saint-Jean); MM. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Paquette (Rosemont), Roy (Beauce-Sud) et Samson (Rouyn-Noranda).

J'aimerais vous dire immédiatement que les intervenants, en vertu de nos règlements, ont, comme les membres, un droit de parole, le droit de présenter des motions, mais ils n'ont pas le droit de vote.

Il y aurait lieu maintenant de désigner un rapporteur pour la commission. Est-ce que vous auriez quelqu'un à suggérer? M. le député de Bourassa, accepteriez-vous?... Consentement unanime?... Le député de Bourassa est nommé rapporteur de la commission.

M. le ministre, auriez-vous une déclaration d'ouverture à faire?

Déclaration préliminaire du ministre M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Nous avons devant nous un projet de loi de 25 articles. Comme nous le disions tantôt, avec l'Opposition, nous n'aurons sans doute pas suffisamment d'articles pour tenir jusqu'à ce soir. Néanmoins, cela vaudrait peut-être la peine de passer en revue, très brièvement, les raisons pour lesquelles nous discutons de ce projet de loi et peut-être identifier les caractéristiques qui, à mon point de vue, méritent certainement discussion, puisqu'elles peuvent représenter des concepts nouveaux dans ces projets de loi constituant des sociétés d'Etat.

Tout d'abord, pourquoi le gouvernement choisit, dans ce secteur économique particulier, la voie de l'intervention directe? Je pense que cette voie nous est dictée par un certain nombre de considérations constitutionnelles ou politiques considérations économiques. En effet, je pense que lorsque l'on sonde l'opinion des Québécois quant aux problèmes qui les préoccupent et quant aux ac- tions qu'ils voudraient voir prises par le gouvernement, on constate que l'ensemble des Québécois place les préoccupations économiques, les préoccupations de chômage au premier rang. En d'autres termes, les Québécois veulent voir leur gouvernement intervenir dans le secteur économique et s'attaquer aux problèmes de chômage. On a parfois l'impression que l'Opposition aussi voudrait que le gouvernement s'engage dans la même voie.

Un des obstacles que l'on affronte très rapidement lorsque le gouvernement du Québec cherche à s'impliquer au niveau économique, c'est le problème des moyens d'action économique d'un gouvernement. En fait, un gouvernement a à sa disposition cinq grands moyens: une politique monétaire, une politique commerciale, une politique fiscale, la subvention à l'entreprise privée et l'intervention directe.

Si on considère la politique monétaire qui, finalement, est l'accessibilité des fonds, la mise en circulation de l'épargne, ces moyens sont essentiellement sous la juridiction du gouvernement fédéral. Par conséquent, un Etat du Québec n'a aucune juridiction concernant les politiques monétaires — que ce soit la masse monétaire en circulation, que ce soit le taux de réserve bancaire, que ce soit le "prime rate" des banques — c'est un outil qui n'est pas à notre disposition.

Lorsque l'on regarde les politiques fiscales, on se rend compte que les sociétés paient 75% de leurs impôts à Ottawa et en paient 25% à Québec. Par conséquent, la marge de manoeuvre du gouvernement du Québec est autour de 25%. Dans sa loi 48, le ministre de l'Industrie et du Commerce devait, par exemple, permettre à une entreprise d'utiliser la moitié de ses paiements d'impôts à des fins de développement industriel. En d'autres termes, cela revient à dire réduire l'impôt perçu du Québec de 25% de l'impôt total à 12,5%. Par conséquent, on se rend compte que la marge de manoeuvre du gouvernement du Québec dans ce domaine de réduction de la charge fiscale est relativement restreinte.

Finalement, on pourrait parler de politique commerciale. Je crois que, dans mon discours de réplique en deuxième lecture, j'ai assez clairement fait voir qu'il n'était pas possible à un gouvernement du Québec de forcer la transformation de l'amiante au Québec, par exemple, donc de protéger notre industrie par des tarifs. On a très bien vu cela tout récemment, lorsque le gouvernement fédéral, en 1976, a choisi de réduire les tarifs sur l'importation de textiles. On a vu un écrasement général de notre industrie du textile au Québec. Soulignons d'ailleurs que le Québec n'est pas la seule province à avoir subi un tel assaut, dans la mesure où l'Ontario, qui avait une industrie de l'électronique relativement évoluée, a vu cette industrie disparaître en moins d'un an et demi par suite de la réduction des tarifs.

Par conséquent, cette intervention gouvernementale au niveau des politiques commerciales est de juridiction fédérale et, a nouveau, le gou-

vernement du Québec n'a pas juridiction. Que reste-t-il au gouvernement du Québec? Il reste la subvention et il reste l'intervention directe.

Au niveau de la subvention, j'ai eu l'occasion d'expliquer à l'Assemblée nationale que, finalement, des subventions, il en existe déjà. Malheureusement, mon discours de réplique a peut-être été écourté et je n'ai pas eu le temps de faire ressortir cet aspect avec peut-être toute l'ampleur que j'aurais voulu.

De fait, lorsqu'on regarde la quantité de subventions qui seraient disponibles à un industriel de la petite et moyenne entreprise au Québec, par exemple, qui voudrait aller vers l'amiante, on constate que, d'une part, le MEER lui fournirait des subventions qui peuvent aller jusqu'à 25%. La SDI du Québec peut lui fournir également des subventions qui vont jusqu'à 12 1/2%. Finalement, la loi 48 lui permet d'aller chercher encore 25% sous forme de réduction sur les impôts qu'il paie. Par conséquent, il est subventionné dans son investissement à 62%, au maximum.

On se rend bien compte que, lorsque les subventions atteignent 62%, l'augmentation des subventions pourrait tout simplement signifier 100% et, à ce moment-là, cela voudrait dire que le gouvernement investirait totalement dans l'industrie et que seul l'entrepreneur en bénéficierait. Cela m'apparaît un peu aberrant. Je pense que les programmes de subventions ne sont pas de nature à régler le problème.

Il reste l'intervention directe, cette intervention directe qui, je pense, est une conclusion que tous les gouvernements ont dû tirer puisque, si on examine les investissements au Québec par rapport à la population, j'ai devant moi une courbe intéressante — ce sont des chiffres de Statistique Canada — qui montre que, depuis 1965, il y a une baisse très nette des investissements totaux par rapport à la population au Québec; il y a un ralentissement des investissements qui date de 1965. Qu'est-ce que l'on constate? On constate que les gouvernements du Québec, successivement, ont augmenté leurs investissements qui étaient de 38% en 1963 et qui montent graduellement jusqu'à un total de 52% en 1977.

Par conséquent, on se rend compte que, par la force des choses, tous les gouvernements, quels qu'ils soient, qu'ils aient été de l'Union Nationale, qu'ils aient été du Parti libéral ou qu'ils soient du gouvernement actuel, ont dû avoir recours à l'intervention directe, parce que, finalement, il faut reconnaître que le seul outil que le gouvernement du Québec a, à part les subventions, c'est l'intervention directe. C'est la connaissance de ce fait constitutionnel qui doit induire normalement un homme politique à faire des choix politiques. Ce sont ces choix politiques que nous demandons aux Québécois de faire au moment du référendum.

Si on passe maintenant en revue le projet de loi que nous avons devant nous, nous constatons que nous créons ainsi une société d'Etat qui se voit dotée d'un mandat, un mandat assez large, en deux points essentiellement. Premier point, il s'agit de confier à cette société le soin de rechercher, de développer et d'exploiter des gisements d'amiante. Donc tout l'aspect minier de l'amiante tomberait sous la juridiction de cette société d'Etat.

Pourquoi vouloir une société d'Etat spécialisée dans l'exploration, l'exploitation, alors que nous avons déjà une société québécoise d'exploitation minière? La raison en est relativement simple. Dans ce domaine minier de l'amiante, les techniques sont passablement différentes, en ce sens que l'amiante est un produit physique qui ne subit pas de transformation chimiques. C'est un produit dont les propriétés sont reliées directement à la méthode de minage; par conséquent, il lui faut une technologie particulière. Il apparaît donc assez juste de confier à une société, ayant l'expertise, le soin de développer cette industrie de l'amiante.

D'autre part — c'est la deuxième partie du mandat — cette société se voit confier le mandat de conduire des activités de nature industrielle, manufacturière et commerciale reliées à la transformation de l'amiante. C'est donc une société intégrée au sens classique du terme dans ce domaine de l'amiante, puisque les sociétés que nous connaissons au Québec sont toutes intégrées.

L'article 6 est un peu spécial, dans la mesure où le gouvernement va choisir un conseil d'administration. L'actionnaire, le ministre des Finances, élira donc son conseil d'administration. Cependant, la direction de l'entreprise oeuvre au sein de la compagnie en vertu d'un contrat avec la compagnie, et non en vertu d'un décret gouvernemental qui fixerait à la fois le salaire et le choix des directeurs.

Pourquoi cette modification? Elle est relativement simple. C'est pour éviter les circonstances qu'on a connues dans le passé où, par un article de loi, évidemment applicable généralement par décret, on choisissait des directeurs pour des périodes qui pouvaient atteindre parfois une dizaine d'années, d'une part; d'autre part, on fixait également la rémunération, ce qui causait souvent des problèmes vis-à-vis du Vérificateur général, parce que si un directeur de société était appelé à siéger à une autre société et qu'il recevait des émoluments sous forme de jetons de présence, le vérificateur estimait que c'était alors en contradiction avec le décret qui, lui, était censé prévoir l'ensemble de la rémunération des directeurs.

Compte tenu qu'uniquement certaines de nos sociétés d'Etat font face à ce problème, alors que d'autres n'y font pas face, il nous apparaît plus logique de décider directement par contrat l'engagement des directeurs, et surtout de donner une très grande autonomie au conseil d'administration, donc dans la sélection des directeurs.

En d'autres termes, le bureau de direction devra répondre au conseil d'administration de sa performance. Présentement, il se produit souvent dans nos sociétés d'Etat que, d'une part, le président relève directement du Conseil des ministres ou de son actionnaire parce qu'il a été nommé par arrêté en conseil, et d'autre part, il relève égale-

ment de son conseil d'administration. Très souvent, les conseils d'administration de nos sociétés d'Etat estiment ne pas avoir le pouvoir qu'ils devraient avoir pour réorienter l'action des sociétés. Par conséquent, il est important de noter que dans cet article nous cherchons à redonner aux conseils d'administration un véritable pouvoir de nomination — engager par contrat. Evidemment, il reste qu'il faut que cet engagement soit rectifié par le gouvernement. Nous nous rapprochons donc des techniques commerciales privées que l'on connaît dans l'industrie au Québec, au Canada et en Amérique du Nord.

Un autre aspect, c'est le pouvoir de directives qui est donné au gouvernement. En effet, il nous apparaît qu'une société d'Etat n'est pas complètement une entreprise privée, au sens classique du terme. Elle est essentiellement le mandataire du gouvernement dans un secteur de développement économique, les ministères se voyant confier une tâche d'administration des lois ou d'incitation, alors que cette société devient, à ce moment-là, l'instrument privilégié du gouvernement. Or, il apparaît important, dans la mesure où on donne plus d'autonomie au conseil d'administration, dans la mesure où la direction de l'entreprise a à répondre de sa performance au conseil d'administration, que le gouvernement puisse donner, le cas échéant, des directives au conseil d'administration.

Un dernier aspect qui m'apparaît aussi important à souligner, c'est le plan de développement. En effet, plusieurs de nos sociétés d'Etat se sont développées un peu à la bonne franquette, en ce sens qu'elles n'ont pas de véritable plan de développement. On ne sait pas, au niveau du gouvernement, où va la société et on se retrouve très fréquemment — en l'espace d'une année, nous avons été à même de le constater au gouvernement — devant des faits accomplis, devant des décisions prises sans qu'on ait vraiment de justification. On a parfois l'impression que plusieurs de nos sociétés se développent d'une façon un peu aléatoire. Par conséquent, ce que nous demandons, c'est que ces sociétés préparent des plans de développement. Cela n'est pas une pratique inhabituelle. En effet, dans l'entreprise privée, les sociétés ont toujours des plans de développement — "corporate plan" —. Il nous apparaît que ce plan de développement est absolument fondamental. Cela n'est évidemment pas un plan de développement rigide car la société peut le modifier, mais il reste que cela détermine au gouvernement des façons d'évaluer cette société puisque dans son plan de développement, elle va établir des critères. Cela permet au gouvernement, avec c.es critères de performance, d'évaluer la performance de l'entreprise.

Je pense que ce sont les articles saillants de ce projet de loi qui modifie un peu le style traditionnel de nos sociétés d'Etat. L'objectif de ces changements à ce projet de loi type est essentiellement de rendre cette société beaucoup plus compétitive, beaucoup plus dynamique, d'utiliser des critères davantage économiques dans sa ges- tion quotidienne et, par conséquent, d'avoir une société prospère qui permettra aux Québécois de bénéficier de l'amiante au Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

Remarques de l'Opposition M. Claude Forget

M. Forget: M. le Président, l'Opposition aborde l'étude de ce projet de loi avec beaucoup de curiosité, curiosité qui semble devoir demeurer insatisfaite, cependant, à entendre les propos d'introduction du ministre. Déjà, au moment de la deuxième lecture, nous avions pris connaissance, sans être grandement impressionnés, de la rhétorique partisane et de l'arithmétique sommaire du ministre des Richesses naturelles. Il a répété, ce matin, les mêmes banalités sans même nous laisser soupçonner qu'il était en mesure, au moment d'aborder une étude détaillée du projet de loi, de nous faire part des études, des arguments plus détaillés, plus fouillés, qui nous permettraient de comprendre enfin le raisonnement du ministre et le raisonnement sur lequel s'est présumément — du moins, on l'espère — basé !e gouvernement au moment de prendre une décision aussi importante; importante financièrement, mais importante aussi pour l'avenir d'une industrie qui, au moins dans une région du Québec, est l'industrie qui supporte économiquement toute une région du Québec. (10 h 25)

Malheureusement, je crois comprendre, d'après les propos d'introduction du ministre, que nous allons demeurer sur notre appétit, qu'il n'a à nous offrir que les arguments déjà offerts au moment de la deuxième lecture et qui consistent — c'est absolument incroyable, M. le Président — essentiellement dans des parcelles du dossier préparé pour le gouvernement précédent, dossier dont nous pourrons faire l'analyse plus tard, mais qui, très certainement aux yeux de ceux à l'intention de qui ce dossier avait été préparé, est manifestement incapable de justifier la décision qu'a prise le gouvernement.

Nous avons assisté, au moment de la deuxième lecture, à une espèce de strip-tease bureaucratique où, élément par élément, le ministre nous amène tel ou tel document des fonctionnaires, ordinairement mal identifié, parfois représenté de façon non seulement erronée, mais susceptible de prêter à confusion, confusion que le ministre a d'ailleurs cherché à entretenir de façon soigneuse. Il s'agit, je le rappelle, pour que tout le monde sache bien de quoi on parle, d'une part, à l'arrière-scène, du rapport Alexandre — du nom de son auteur — un rapport qui est le seul document, à notre connaissance, qui ait jamais conclu avec une prétention quelconque à l'objectivité ou à l'impartialité d'une analyse non partisane et non déjà compromise politiquement, à la prise en charge de

la société Asbestos. C'est sur ce seul argument, sur ce seul document, cette seule étude que le gouvernement actuel prétend faire avaler au Québec un investissement de $250 millions. Cette étude, est-il besoin de le dire, n'avait jamais mérité encore une fois aux yeux de ceux qui avaient à prendre des décisions à l'époque le titre d'une étude suffisamment mûre, suffisamment complète, suffisamment convaincante pour qu'on puisse passer aux actes; elle n'avait donné lieu qu'à des discussions préliminaires et à la suggestion de travaux ultérieurs.

Le ministre des Transports a également fait état d'un soi-disant mémoire au Conseil des ministres. Ce mémoire — et je le dis pour l'avoir vérifié auprès de tous ceux qui sont en mesure de nous donner des assurances là-dessus, j'ai vérifié mes propres notes personnelles relatives aux séances du Conseil des ministres — n'a jamais été présenté au Conseil des ministres, jamais été distribué à ses membres. Bien sûr, il était connu d'un petit nombre de ses membres, qui ont porté un jugement très sévère sur le rapport Alexandre et qui ont porté un jugement non moins sévère sur ce projet de mémoire. D'ailleurs, le ministre des Transports, au moment de son dépôt, aurait mieux fait de vérifier, puisqu'il a déposé non pas la dernière version de ce projet de mémoire, mais une version encore plus préliminaire, ce qu'il aurait facilement pu corriger, s'il avait pris le moindre soin de s'informer quant aux sources et quant aux documents qu'il utilise et quant à l'interprétation qu'il place sur ces documents.

La position du gouvernement antérieur vis-à-vis de ce dossier était donc que ces études qui avaient été entreprises par la direction de l'économie minérale et du développement, direction — faut-il le mentionner, M. le ministre — qui avait été créée par l'ancien gouvernement, avec, entre autres, comme objectif, l'exploration de questions comme celle-là et, en particulier, celle de l'amiante, étude et mémoire qui avaient été jugés non susceptibles d'une action immédiate. C'est d'ailleurs à la même époque qu'avaient eu lieu des discussions avec l'Association des mines d'amiante pour la bonne fin d'une étude sur les perspectives de production de produits finis à base d'amiante. L'association, à l'origine, cherchait la collaboration financière du gouvernement, mais cette association a finalement réalisé à ses frais et cela a été publié, comme on le sait, au cours de l'automne 1977 et de l'hiver 1978...

Il y avait donc une action, des études entreprises, mais à aucun moment, ce dossier n'était-il susceptible d'une action, d'une décision dans le sens de celle qu'a adoptée le gouvernement actuel. Ce jugement porté par le gouvernement précédent sur les travaux qui lui étaient soumis n'était pas seulement dicté, comme a voulu laisser soupçonner le ministre, par des problèmes financiers ou par une hésitation politique à agir dans ce domaine, mais par une analyse, par d'autres analyses des mêmes documents émanant également de l'administration publique et laissant clairement voir la faiblesse des documents qui constituaient le dossier de l'amiante à l'époque.

J'ai pour indication un mémoire préparé par l'OPDQ, l'Office de planification et de développement du Québec, qui porte précisément sur le contenu à la fois du rapport Alexandre et sur le contenu du projet de mémoire au Conseil des ministres, dont j'ai fait mention tout à l'heure.

Je ne lirai pas en entier ce document qui est de 5 pages à peu près et qui, comme je l'ai dit tout à l'heure, émane de l'Office de planification et de développement du Québec. Il a pour titre, Vers une politique québécoise de l'amiante et il est daté du 7 avril 1975. J'en citerai cependant les extraits non descriptifs, les extraits où il est permis de voir le jugement que portait l'OPDQ sur cette politique et sur les décisions qu'a prises le gouvernement actuel, puisqu'il s'agit des mêmes conclusions, des mêmes recommandations.

Je cite en particulier, à la page 2, la troisième constatation, les constatations préliminaires qui portent sur la facture, en quelque sorte, physique et sur les éléments descriptifs de l'étude qui sont jugés satisfaisants. Effectivement, je crois bien qu'ils le sont, du moins à l'époque à laquelle ils se rapportent.

La troisième constatation touche cependant l'aspect de l'analyse et des recommandations. Je cite: "Le document qui nous a été remis présente, d'autre part, une très grande faiblesse, sur le plan de l'analyse, de l'ensemble de la situation de l'amiante, laquelle analyse devrait normalement nous conduire aux solutions souhaitables et possibles. En effet, vous constaterez que ce document comprend environ 175 pages et que de ces 175 pages, 160 pages sont consacrées à la description de la situation et tout au plus quinze pages sont consacrées à l'analyse de la situation ". Il m'apparaît y avoir là une distorsion très grave et si vous prenez la peine de lire ces quinze dernières pages, vous constaterez beaucoup de faiblesse dans cette courte analyse.

Quatrième constatation, je dirais que ce document renferme beaucoup trop d'affirmations gratuites qui nous sont présentées comme des certitudes. On donne des exemples. Un peu plus loin, "Finalement, on retient la troisième solution... C'est une référence à ce projet de mémoire au Conseil des ministres, où précisément, on recommande l'acquisition de la société Asbestos parce que cette solution est immédiate. Comme si le fait de réaliser un acte immédiatement était une solution de court terme, par opposition à d'autres solutions de moyen et long termes.

Il est un peu primaire de considérer qu'un acte immédiat est automatiquement un geste de court terme quand on sait que l'objectif recherché est la transformation plus poussée de l'amiante au Québec et que l'on propose d'acheter une compagnie qui n'a aucune usine de transformation au Québec. Il faut donc admettre que cette compagnie devra développer une expertise dans le domaine de la transformation, se trouver des marchés, construire et exporter. Cela ne m'apparaît pas une solution à court terme, loin de là.

Un peu plus loin, on parle de la question de la rentabilité diminuée ou réduite d'une entreprise de transformation au Québec, étant donné les contraintes de marché. On dit que ce jugement peut sembler très favorable — on parle évidemment de la conclusion de l'étude — et je cite le document de l'OPDQ: "Mais en clair, ceci signifie que si l'on considère d'autres contraintes que les contraintes de marché, il n'est plus possible de parler de rentabilité plus faible, mais probablement aucune rentabilité possible. "

De toute façon, nulle part dans ce document on n'a abordé cet aspect de la rentabilité et je crois qu'une étude de rentabilité pour implanter une usine considère d'autres points que les contraintes de marché.

En conclusion, le document dit: "Je crois que nous avons là un excellent document pour commencer une analyse en profondeur du secteur de l'amiante, mais clairement pas — puisque l'on fait différentes recommandations à la fin — pour terminer cette analyse et certainement pas pour conclure immédiatement à l'acquisition d'une compagnie."

On nous dira, à ce moment-là: Comment se fait-il...

M. Brochu: M. le Président, juste une petite question, si mon collègue me le permet. Le document dont vient de faire mention le député de Saint-Laurent revêt un caractère assez intéressant. Comme il n'est pas encore document public, est-ce qu'il serait possible, pour les bonnes fins de nos travaux en commission parlementaire, s'il l'accepte, de faire circuler ce document à l'intention des membres de la commission?

M. Forget: M. le Président, comme il n'y a pas de dépôt formel, il me fera plaisir de le faire. Je n'ai pas d'autres copies avec moi que celle que j'utilisais, mais il me fera plaisir d'en faire tenir des copies à nos collègues de la commission parlementaire ou à toute autre personne qui désirera en prendre connaissance.

On nous dira, à ce moment-là: Pourquoi, dans un tel contexte de doute aussi sérieux sur la qualité de l'analyse présentée au gouvernement précédent et sur la validité des conclusions, cette étude a-t-elle été publiée? Il faudrait, pour expliquer la publication de cette étude, se reporter au contexte social et économique dans lequel ces études se déroulaient.

On se souvient qu'en décembre 1974, il y a eu l'incendie d'un moulin dans la région de Thetford Mines. Il y a eu, durant l'année 1975, une grève prolongée et, en parallèle, il y avait, bien sûr, des discussions qu'avaient alimenté, au début de 1974, des propositions émanant de centrales syndicales visant à pousser le gouvernement du Québec à agir dans le domaine de l'amiante, recommandations émanant de centrales syndicales qui avaient reçu, à ce moment-là, d'ailleurs, l'appui d'un très grand nombre de personnes dans l'économie et qui avaient reçu également des appuis à titre de manifestations d'intérêt de la part du gouvernement et des partis d'Opposition.

Dans le contexte de 1975, étant donné l'intérêt très élevé que tous portaient à cette question, étant donné que l'on savait que le gouvernement avait fait une étude et qu'elle était terminée, il est apparu normal au ministre du temps de publier cette étude de manière que les discussions soient alimentées par une étude plutôt que par des rumeurs ou des fuites, mais c'est en spécifiant à l'Assemblée nationale, à la date du dépôt ou de la publication de cette étude, que sa publication n'impliquait en aucune manière une approbation de ses conclusions. Cette affirmation avait été faite, à l'époque, à plus d'une reprise.

Il reste donc, M. le Président, que nous avons là un dossier qui, sans aucun doute, traite du problème en cause et qui en traite même de façon fort élaborée, mais pas suffisamment élaborée toutefois, pas suffisamment convaincante pour permettre à qui que ce soit de conclure. C'est donc avec un sentiment d'extrême surprise que nous voyons le gouvernement actuel, sans faire état d'aucune étude subséquente au 15 novembre 1976, se précipiter vers une solution que, clairement, il ne peut pas défendre à l'aide de ses études, malgré les prétentions qu'il a. C'est un procédé que je qualifierais de proprement malhonnête de la part du gouvernement actuel qui devrait, pour justifier sa position, faire état de quelque chose de plus substantiel et de plus sérieux plutôt que de se réfugier derrière des documents qui ne sont pas les siens et que ceux pour qui ils avaient été préparés avaient jugé non recevables et qu'ils avaient désavoués, en quelque sorte, dont ils avaient du moins désavoué les conclusions.

En attendant cependant que le ministre nous fasse part de ses raisons, si jamais il en est capable, il ne nous reste qu'à soulever, par nos interventions devant cette commission, toutes les interrogations qui se posent encore dans notre esprit relativement à une initiative comme celle-là, qui présente un si grand nombre d'aspects discutables.

Le premier ministre, dans son intervention en deuxième lecture, a fait état non pas d'arguments lui non plus, mais d'un certain appel aux émotions en nous invitant à manifester vis-à-vis de l'amiante un sentiment de confiance en l'avenir qui fait honneur, bien sûr, à l'optimisme qui caractérise actuellement le gouvernement, mais qui n'est pas bien convaincant en lui-même, ni rassurant pour ceux qui vivent de cette industrie. (10 h 40)

Plutôt que d'affirmer à qui veut l'entendre que l'avenir de l'amiante est assuré quoi qu'il arrive, nous aimerions davantage entendre le gouvernement nous dire ce qu'il entend faire pour redoubler les assurances qui devraient exister de ce côté-là. Effectivement, des projections — on sait ce que valent souvent les projections — indiquent que si tout demeure tel que c'était dans le passé, si n'intervient aucun changement technologique, si les marchés conservent à peu près la consistance qu'ils ont eue dans le passé, on peut prévoir effectivement un avenir brillant pour les mines d'amiante et une industrie basée sur les produits de l'amiante.

Cependant, ce sont des hypothèses que rien ne permet de soutenir pour un avenir indéfini et nous aimerions voir le gouvernement se préoccuper davantage de la dimension recherche, recherche dans deux dimensions, dimensions qui touchent aux risques certains et indéniables que posent l'exploitation de mines d'amiante, la transformation de la fibre et l'utilisation de produits d'amiante pour la santé des travailleurs et des utilisateurs, et même du public en général. Il s'agit là, bien sûr, de choses dont on a pu dire, peut-être avec raison, qu'on a grossies à l'excès dans le passé, mais il reste que personne ne peut être absolument sûr de ce que l'avenir nous réserve de ce côté. Il serait souhaitable que le gouvernement du Québec, qui se targue, sans aucun doute avec raison, de parler au nom d'une population sur le territoire de laquelle se trouvent les plus fortes ressources d'amiante au monde, que ce même gouvernement se soucie, par des recherches dans le domaine de l'impact sur la santé et sur l'environnement de l'exploitation et de l'utilisation de l'amiante, de prendre toutes les précautions requises pour que l'on trouve des solutions à ce problème. Il ne faut pas traiter le problème des risques à la santé dans l'amiante comme un problème nécessairement insoluble. Par la recherche de nouveaux procédés d'extraction, de fabrication de nouveaux produits, il sera possible d'enrayer les risques que peuvent laisser entrevoir certaines études sur l'effet de l'amiante sur la santé. Si l'on ne fait pas ces recherches, cependant, on risque de voir se refermer un étau, éventuellement, sur l'industrie et sur les régions qui en vivent.

Nous aimerions également voir le gouvernement se préoccuper, en priorité, de la recherche de nouveaux produits, en collaboration, bien sûr, avec l'industrie, mais je ne vois pas pourquoi cette collaboration, cette offre de collaboration, si elle venait, si elle était faite de la part du gouvernement, ne pourrait pas trouver, du côté de l'industrie, une réponse sympathique et même enthousiaste.

Ce sont là des priorités pour préserver ce que nous avons déjà. En mettant même de côté ce qu'il serait possible de développer dans l'avenir, il demeure que nous ne sommes pas satisfaits de voir le premier ministre et le ministre faire état d'une confiance absolue et aveugle dans l'avenir, sur la base de projections qui supposent que rien ne changera dans le monde. Au contraire, on sait très bien que, dans tous les secteurs industriels, dans tous les secteurs sociaux, il y a des changements et qu'il ne faut pas se fier aveuglément aux prédictions. C'est là un sujet incident par rapport à l'objet de litige principal qui fait l'objet des travaux de cette commission. Incident pour une très bonne raison, puisque la loi est muette sur l'engagement du gouvernement quant à l'initiative dans le domaine de la recherche. Nous l'inciterons à être autrement que muet. Si l'on se concentre sur les questions relatives à l'exploitation des mines, à l'achat de la société Asbestos, à la question de la transformation, nous aurons également beaucoup de questions à poser.

Relativement à l'achat de la mine de la société Asbestos, nous voudrons savoir sur quoi se base cette magnifique confiance dont le ministre a fait état relativement au prix qu'il entend payer pour cette mine. Il devient assez évident qu'en refusant de donner un prix précis, le gouvernement actuel donne un témoignage éclatant de sa faiblesse vis-à-vis de General Dynamics. Il se donne ainsi toute la marge de manoeuvre nécessaire pour pouvoir a posteriori, une fois que l'achat sera effectué, justifier à peu près n'importe quel prix; par un jeu d'addition et de soustraction, il sera possible de justifier absolument n'importe quel prix. C'est la position très inconfortable dans laquelle s'est placé le gouvernement par son offre d'achat indéfini, mais irrévocable puisque, en refusant de dire un prix, mais en laissant entrevoir la possibilité qu'une évaluation nous révèle autre chose que ce que les livres de la compagnie recèlent déjà et pourraient permettre d'établir comme valeur nette d'acquisition, on pourra, après la conclusion d'une entente avec la société General Dynamics, nous dire: Effectivement, nous avons payé un montant X; ce montant est supérieur à la valeur aux livres parce que des évaluations ont démontré que la valeur aux livres ne reflétait pas de façon adéquate la valeur présente des réserves de minerai — valeur, évidemment, sur laquelle, étant donné qu'il s'agit de probabilité, il sera possible de construire n'importe quelle hypothèse.

A partir d'un chiffre construit de façon arbitraire et artificielle, il sera possible au gouvernement de justifier ses affirmations téméraires selon lesquelles il déduira du prix d'achat le prix des investissements nouveaux qui seront requis, qu'il déduira également la valeur du passif contingent que représentent les réclamations non liquidées des travailleurs souffrant d'amiantose, puisque, à partir d'un total indéfini, il est permis de faire n'importe quelle déduction pour arriver au prix qu'on veut ou au prix qu'on doit payer, étant donné qu'entre la société General Dynamics et le gouvernement, et la conjoncture financière, la force n'est pas du côté que le gouvernement voudrait faire croire.

Ce sont donc des explications que nous attendrons du parti gouvernemental sans avoir l'espoir d'obtenir autre chose qu'une arithmétique sommaire du genre de celle à laquelle vient de se livrer le ministre dans ses remarques préliminaires.

Nous voudrons également connaître de quelle façon le gouvernement entend articuler la phase 2 de sa politique de l'amiante à partir de l'acquisition de la société Asbestos. Tout ce que le ministre a dit ce matin — il répétait d'ailleurs ce qu'il a affirmé à d'autres occasions — c'est que les gouvernements, traditionnellement au Québec, ont un peu obéi à ce dicton qu'on attribue à Leibniz, je crois, que la nature a horreur du vide et qu'ils se sont intéressés à l'investissement puisque l'entreprise privée ne le faisait pas.

M. Godin: Est-ce qu'elle vous aime beaucoup, la nature?

M. Forget: Cela n'est pas un roseau très puissant pour y accrocher un achat de $250 millions. Même en admettant que le ministre ait raison, il faudrait encore qu'il nous explique pourquoi cette façon particulière d'intervenir est meilleure qu'une autre, parce que c'est de cela qu'il s'agit. Il ne s'agit pas de se livrer à un débat idéologique sur la justification théorique d'un interventionnisme d'Etat dans l'économie. En admettant même que le ministre ait raison, il faudrait qu'il nous dise pourquoi il intervient de cette façon plutôt que d'une autre.

Or, cette démonstration-là, je suis persuadé que le ministre, non seulement ne l'a pas faite, mais qu'il n'a pas l'intention de la faire puisqu'il en est incapable. Il est incapable de venir démontrer qu'il y a un lien fonctionnel, un lien de cause à effet, entre l'acquisition d'une propriété, comme la société Asbestos, et la mise en place de la phase 2 de sa politique de l'amiante. Il n'y a aucune relation, et c'est bien ce que les travaux de cette commission vont démontrer.

Je termine là-dessus. Ce sont des interrogations, comme vous l'avez remarqué. C'est cela seulement que nous pouvons faire de ce côté-ci de la Chambre puisque les réponses devraient venir du parti gouvernemental. Une occasion magnifique a été ratée par le gouvernement dans un débat de quinze jours pour nous donner ces raisons. Nous avons l'intention de donner une autre occasion au gouvernement — toutes les occasions voulues — pour expliquer, pour convaincre, sinon l'Opposition — s'il pense que l'Opposition n'est pas susceptible d'être convaincue — au moins — c'est un devoir très strict du gouvernement d'essayer honnêtement et complètement de convaincre l'opinion publique et ceux qui vont payer la note de cette aventure, de cette fuite en avant du gouvernement qui tenait, pour des raisons politiques, à prendre des décisions rapides même s'il ne savait pas pourquoi ni comment.

Le ministre, M. le Président — et je terminerai là-dessus — a déjà changé deux fois d'avis sur le sujet, peut-être réalisant lui-même qu'il n'est pas capable de faire la démonstration à laquelle on l'invite, et il va en changer une troisième fois puisque, sur la question de l'amiante bien sûr...

M. Grégoire: ...

M. Forget: ... M. le député de Frontenac, le ministre a déjà — j'imagine — adhéré à la proposition qui était dans le programme du Parti québécois, visant la création d'une société de mise en marché. Il a carrément abandonné, avec tous ses collègues, cette vision des choses; il déclarait, il y a un an environ, que la nationalisation d'une société...

M. Grégoire: ... qu'il avait voté contre...

M. Forget: J'ai le droit de parole; M. le Président, rappelez le député de Frontenac à l'ordre; il va nous exposer ses vues, j'en suis sûr, en temps utile. Mais le député...

M. Grégoire: Question de privilège, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, s'il vous plaît!

M. Grégoire: C'est une erreur, en tout cas, ce que vous dites là.

M. Forget: Bien, vous me corrigerez quand vous en aurez l'occasion. Il demeure...

M. Grégoire: Parce que le ministre a voté contre...

M. Forget: M. le Président, faites respecter l'ordre, s'il vous plaît!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît, un instant! M. le député de Frontenac et M. le ministre, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire. Je demanderais à chacun de respecter le droit de parole de ses collègues. M. le député de Saint-Laurent.

M. Godin: ...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, M. le député de Mercier!

M. Forget: Alors, M. le Président, le ministre a changé deux fois d'avis. Il a abandonné la position de son parti au moment des dernières élections et il déclarait, dans une entrevue reproduite dans La Presse, il y a environ un an, que la nationalisation d'une entreprise dans le secteur de l'amiante ne résoudrait rien. C'est une citation que l'on pourra lui mettre sous les yeux s'il la nie maintenant, mais elle est très explicite. Il s'est rallié, quelques mois plus tard, à une décision qu'on lui a peut-être imposée. Ce qui n'exclut pas, donc, un autre revers, une autre évolution dans sa pensée.

Il y a cependant un motif qui pourrait l'inciter à adhérer à ce point de vue, par analogie à la situation qu'on a connue dans le passé. Il y avait des ministres de la santé qui étaient des médecins et la tradition voulait qu'ils se construisent un hôpital pour leur retraite. On a maintenant un ministre des Richesses naturelles qui est un ingénieur minier; il ne faudrait peut-être pas se surprendre qu'il veuille s'acheter une mine.

Alors, j'ai terminé, M. le Président. On attendra avec intérêt les commentaires du député de Frontenac.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Saint-Laurent. M. le député de Richmond.

M. Yvon Brochu

M. Brochu: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais, à mon tour, au nom de l'Union Nationale, émettre certains commentaires au début des

travaux de cette importante commission parlementaire. Le débat, au Québec, sur cette question de l'amiante, est amorcé et il prend de plus en plus d'ampleur. Je pense qu'à ce stade-ci de nos travaux, nous sommes rendus à une étape qui nous apparaît de première importance puisque, et nous l'espérons, les démarches que nous allons entreprendre ici trouveront preneur et les questions qui sont demeurées en suspens tout au cours de l'étude, de l'évolution de ce projet de loi, pourront connaître ainsi des réponses satisfaisantes. Nous espérons aussi que nous serons en mesure d'obtenir les lumières que je pense, la commission attend sur cette question et, deuxièmement, que les citoyens québécois sont en droit d'attendre sur cette question.

M. le Président, au début tout à l'heure, le ministre a établi sa position, il a fait quelques remarques d'ordre général, quelques unes d'ordre pratique, et il a mentionné quelques articles du projet de loi en question. Au point de départ, je pense que le ministre nous a donné un excellent exposé théorique sur quelques moyens possibles d'intervention de l'Etat dans un domaine comme celui de l'amiante. Je suis convaincu cependant, et le ministre en conviendra avec moi, que ce n'est pas là un exposé complet et qu'il y a peut-être d'autres moyens par lesquels l'Etat peut intervenir dans un tel domaine. Nous allons d'ailleurs en discuter au cours des quelques heures de débats parlementaires que nous aurons sur cette question à partir d'aujourd'hui.

Je tiens à rappeler, dans un premier temps, M. le Président, et je tiens à le souligner de façon particulière, qu'en ce qui concerne l'objectif de transformation en sol québécois d'un pourcentage plus élevé de notre fibre d'amiante, l'Union Nationale a toujours été en faveur de cette position. Aujourd'hui, encore, nous voulons donner notre appui et souligner notre volonté politique de voir transformer cette richesse naturelle, en sol québécois, visant d'abord et avant tout — et, en cela, je pense qu'on rejoint l'objectif qui a été à quelques occasions exprimé par le ministre et d'autres de ses collègues — à créer par là une source d'emplois immédiate, dans les plus brefs délais, puisqu'on répondrait ainsi à un besoin de plus en plus accentué de notre société québécoise. (10 h 55)

Donc, dans nos discussions, M. le Président, je pense qu'il ne faudrait pas perdre de vue cet objectif que s'est fixé le gouvernement, cet objectif auquel souscrivent également les différents partis d'Opposition, en particulier l'Union Nationale.

Cependant, l'autre volet de cette question est situé en ce qu'il est maintenant convenu d'appeler l'achat ou l'acquisition d'une mine par le gouvernement pour atteindre cet objectif. A ce niveau, nos discussions ont été beaucoup plus ardues aux différentes étapes qu'a connues le projet de loi jusqu'à maintenant. Je pense qu'en commission parlementaire également, nous devrons, ici plus qu'en tout autre endroit peut-être, obtenir des éclaircissements sur ce choix politique du gouvernement, sur les implications de cette volonté politique d'un parti politique d'utiliser ce moyen pour atteindre l'objectif d'une plus grande transformation. Nous comptons bien obtenir davantage de données en ce qui concerne les coûts réels de cette approche qu'a choisie politiquement le gouvernement, soit celle de nationaliser et d'étatiser une entreprise pour devenir un des producteurs d'amiante au Québec.

C'est donc dans ce sens que nous abordons cette commission parlementaire, avec une volonté bien arrêtée, bien claire, de pouvoir obtenir davantage de données, parce qu'il nous apparaît, au point de départ, que le gouvernement s'aventure dans cette nationalisation de l'amiante, dans son projet de loi créant la Société nationale de l'amiante, d'abord avec cette vision de créer au Québec un emblème, de vouloir rallier de plus en plus de Québécois derrière une image, celle d'être maîtres chez nous. Mais nous tenons quand même à souligner que, derrière cette volonté politique, derrière la création de cet emblème qui semble tenir chaud au coeur des membres du Parti québécois, se cachent aussi des réalités profondes. Il y a celle d'un engagement d'un peuple sur le plan économique, celle aussi de certains risques qui peuvent exister dans cette volonté du gouvernement d'acquérir une entreprise de la sorte et de vouloir la faire fonctionner de la façon dont le gouvernement veut le faire fonctionner actuellement. Je pense qu'il convient de distinguer ces deux choses, soit cette volonté politique du gouvernement de créer un emblème de maître chez nous et, à côté, la réalité dans laquelle auront à vivre et les gouvernements qui vont se succéder dans l'avenir et surtout nos citoyens du Québec qui eux, auront à payer cette note et à vivre avec cette entreprise que le gouvernement veut mettre sur pied.

C'est pour cela que — et je l'ai souligné hier, à l'Assemblée nationale, lors de l'intervention que j'ai faite au niveau de la motion qu'avait présentée le député de Beauce-Sud pour scinder en deux ce projet de loi, afin d'amorcer la discussion à deux paliers — je regrette de façon particulière que cette question n'ait pas été divisée, que le gouvernement n'ait pas accepté de diviser cette question. A ce moment-là, nous aurions pu traiter cette question de façon beaucoup plus logique. Dans un premier temps, nous aurions pu arriver assez facilement à un consensus au niveau de l'objectif de transformation de plus d'amiante en sol québécois. Dans un deuxième temps, nous aurions pu vider cette question du moyen que choisit actuellement le gouvernement pour arriver à ses fins. Ce moyen, en effet, nous apparaît fort discutable et apparaît de plus en plus, à un plus grand nombre de citoyens du Québec et également à des groupements, comme un moyen douteux et qui mérite d'être discuté à son juste mérite et à la place qui lui revient.

Nous devrons cependant nous contenter de discuter, puisque le gouvernement a rejeté cette motion, de ces deux questions en même temps. Nous sommes cependant conscients, M. le Président — et je tiens à le souligner — que, dans sa

stratégie, le gouvernement est sage d'utiliser ce moyen de vouloir vendre cette idée de la création d'une Société nationale de l'amiante en y joignant indirectement cette volonté d'interventionnisme direct de l'Etat, au niveau de l'achat d'une entreprise au niveau de cette aventure économique dans laquelle le gouvernement veut nous entraîner actuellement.

M. le Président, le ministre devra nous prouver, au point de départ, que ces deux questions vont bien de pair, que le fait de vouloir davantage de transformation de l'amiante en sol québécois, que le fait de vouloir confier à une société d'Etat le rôle de recherche, le rôle d'exploration et en même temps une dimension de transformation, soit au niveau d'un dépôt incitatif ou autre, est relié directement au besoin d'acquisition d'une des entreprises oeuvrant dans le domaine.

Je pense que, maintenant que nous sommes rendus à l'étape de cette commission parlementaire, le ministre devra être beaucoup plus explicite sur cette question et établir clairement tous les paramètres qui se posent à ces deux niveaux de question, puisque le gouvernement, dans un seul projet de loi, met en branle tout l'appareil gouvernemental législatif pour arriver à nationaliser une entreprise et éventuellement — on pourra revenir sur cette question — peut-être vouloir aller plus loin dans le domaine, puisqu'un bon matin, il va se retrouver un des producteurs où les preneurs d'amiante ne seront pas obligés d'acheter davantage de l'entreprise gouvernementale du Québec que des autres, ce qui pourrait inciter le gouvernement à vouloir étendre son aventure à un domaine beaucoup plus vaste et à vouloir, ouvertement et directement, loucher du côté des autres entreprises en vue d'acquérir un monopole dans le domaine de l'amiante pour être sûr de ses marchés, pour être sûr d'avoir en main tous les outils pour atteindre l'objectif qu'il s'est fixé au point de départ.

Je pense que le ministre devra établir clairement la position qu'il entend prendre et la position que son gouvernement entend prendre sur cette question, dire quelle vision le gouvernement a actuellement en ce qui concerne l'ensemble des mines d'amiante au Québec et quels est l'appétit immédiat et l'appétit éventuel de son administration en ce qui concerne toutes les mines d'amiante au Québec.

Certaines personnes commencent à croire que ce n'est qu'une question de temps, peut-être, avant que le gouvernement étende son action aux autres entreprises pour acquérir justement tous les moyens qu'il désire avoir dans ce domaine, afin d'être les seuls producteurs au Québec et les seuls vendeurs d'amiante au Québec. Cela ouvre évidemment la porte à une tout autre dimension de cette question qui est devant nous actuellement.

M. le Président, j'ai simplement une remarque à ce stade-ci. Mes collègues ont sûrement écouté les nouvelles hier soir, entendu ce que le gouvernement fédéral a l'intention de faire en matière d'amiante au Québec, très bientôt, puisque le MEER a indiqué son intention d'annoncer des in- vestissements dits majeurs en ce qui concerne la transformation éventuelle de l'amiante en sol québécois et plus précisément sur la rive sud de Montréal.

Je pense bien que le ministre doit être au courant de cette annonce et j'aimerais que le ministre nous fasse part de ses commentaires à ce sujet tout à l'heure, dans un premier temps. Sur ce point, je me réfère aux propos que le ministre a tenus à l'Assemblée nationale; il avait indiqué qu'il avait déjà été possible que le gouvernement du Québec participe financièrement à un projet du gouvernement fédéral, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral serait prêt à participer à des projets du gouvernement du Québec ou à des entreprises dans ce domaine.

La question qui se pose maintenant, peut-être de façon humoristique, mais qui a quand même des incidences assez profondes dans le débat actuel, est celle-ci: Etant donné que le gouvernement fédéral va procéder immédiatement à la transformation de l'amiante en sol québécois, est-ce que le ministre et son gouvernement proposent d'offrir une collaboration financière au gouvernement fédéral, au MEER, dans cette entreprise, afin d'être présents dans cette volonté de transformer l'amiante au Québec? On sait, et ce sera annoncé dans les prochains jours, que cette transformation de l'amiante au Québec se fera chez nous sur une grande échelle.

Donc, la chose étant possible et considérant la volonté politique du gouvernement du Québec de s'impliquer, dans quelle mesure et dans quelle proportion financière, de quelle façon, quel mode d'approche le gouvernement du Québec va-t-il employer ou choisir pour s'impliquer dans ce projet important du gouvernement fédéral en sol québécois?

J'aimerais que le ministre, dans ses réponses à nos questions et dans sa réplique, puisse faire le point sur cette question et indiquer clairement quelles sont les intentions de son gouvernement et quelles sont ses propres intentions en ce qui concerne ce projet qui va se réaliser bientôt.

M. le Président, il y a également plusieurs autres questions qui sont en suspens concernant ce projet de loi que nous avons à étudier, article par article, maintenant, questions qu'il conviendrait de clarifier avant d'entreprendre l'étude, article par article, de ce projet de loi, puisqu'elles auront des incidences tout au long des discussions que nous aurons sur le sujet.

Quelles données plus précises le ministre peut-il nous fournir en ce qui concerne les coûts, directs et indirects, qui sont reliés à l'achat même d'une entreprise et, deuxièmement, à la question de l'exploitation comme telle? On donne certains ordres de grandeur cependant. Je pense qu'à l'étape où nous sommes rendus, le ministre devrait être en mesure de nous donner, d'une façon beaucoup plus précise, beaucoup plus complète, beaucoup plus satisfaisante, certaines estimations qu'il a sûrement faites, qu'il a sûrement demandé à ces fonctionnaires de lui fournir, avant de prendre la décision qu'il nous a annoncée et qui est

présentement devant nous sous la forme du projet de loi no 70.

Je suis convaincu que le ministre se fera un plaisir d'étayer les propos qu'il a tenus en deuxième lecture avec toutes les informations récentes, je l'espère, qui lui ont été fournies depuis dix ou quinze mois par ses fonctionnaires et par le personnel politique de son bureau.

Est-ce vrai, par exemple — et, à ce moment-là, le ministre pourra nous donner un ordre de grandeur — que l'aventure dans laquelle le projet de loi 70 nous entraîne pourra aller au-delà de $350 millions, au-delà de $400 millions même? A ce sujet-là, il conviendrait maintenant de donner des réponses beaucoup plus précises. Quels sont les documents que j'ai mentionnés tout à l'heure...

M. le Président, cela fait un an et demi environ que le gouvernement du Parti québécois est au pouvoir. Il croit maintenant bon de s'embarquer directement par un projet de loi, tel le projet de loi 70, qui nous lie maintenant dans une action immédiate et, possiblement, comme je l'ai expliqué tout à l'heure, dans une série d'actions à répétition, suivant les appétits éventuels du gouvernement en matière de nationalisation et de volonté politique d'intervention au niveau du dossier d'amiante...

Après un an et demi, le gouvernement se dit prêt à procéder immédiatement, mais est-ce qu'il a toutes les données pertinentes? Je ne parle pas des études qui ont été faites, qui ont été soulignées à l'Assemblée nationale avec beaucoup d'éloquence par plusieurs de nos collègues, mais je parle des études ou des données que le ministre, récemment, a pu demander et obtenir pour poser le geste politique qu'il s'apprête à poser, avec le projet de loi no 70.

M. le Président, pour bien clarifier cette situation, je me reporterai tout simplement à la dernière campagne électorale où on parlait avec force, avec beaucoup d'éloquence également, du besoin de régler une fois pour toutes la question des maladies industrielles, la question de nos travailleurs atteints d'amiantose, tant ceux qui étaient sous le coup de la loi 52 que ceux qui demeurent encore au travail, mais à qui on a enlevé les permis de travail et qui se trouvent maintenant dans une situation d'insécurité vraiment intenable et qui se demandent du jour au lendemain ce qui va leur arriver.

Certains de nos travailleurs québécois, qui travaillent encore sans permis de travail, sont atteints, dans une proportion de 10%, 15% et même 20%, d'amiantose. Ils sont maintenus sur le marché du travail parce qu'on n'a pas corrigé les lois existantes et qu'on n'a pas amélioré la situation.

Lors de la dernière campagne électorale, j'ai fait état de cette situation, M. le Président, et le Parti québécois, avec raison, a fait état de cette situation alarmante qui demandait une intervention urgente au niveau de la législation pour corriger, remplacer la loi 52 et modifier tout ce qui existe en matière d'approche gouvernementale pour ces travailleurs atteints d'amiantose, puisqu'on est face à une situation vraiment intolérable.

M. le Président, c'est après le même nombre de mois de pouvoir de ce gouvernement qu'on se retrouve devant la situation absolument non réglée face à ce simple point des maladies industrielles concernant quelques centaines de travailleurs au Québec. On disait pourtant — et je vous le rappelle — qu'il s'agissait simplement d'une volonté politique de corriger le projet de loi 52. On a même, au début de la session l'année dernière, indiqué au feuilleton de l'Assemblée nationale l'intention du gouvernement de déposer un autre projet de loi pour corriger la loi 52. M. le Président, je vous rappelle que ce projet de loi n'a jamais vu le jour, que les travailleurs sont encore dans les mines, travaillant encore sans permis de travail et que rien n'a été corrigé là-dedans. (11 h 10)

Pourtant, c'était simplement un des petits secteurs sur lequel le Parti québécois avait clairement indiqué qu'il s'agissait d'une simple action législative dont il connaissait exactement la nature avant de prendre le pouvoir. Pourtant, après quinze mois, cela n'a pas été fait non plus.

Après quinze mois, alors qu'on n'a pas pu corriger une situation aussi claire que celle des amiantosés au Québec, avec un programme d'action qui était clair dans le programme du Parti québécois, comment, après le même laps de temps, le même Parti québécois est-il en mesure de se lancer dans une aventure qui a une envergure aussi grande que celle du projet de loi no 70, qui ouvre la porte à toutes les autres aventures subséquentes dont j'ai fait état tout à l'heure? Comment le gouvernement peut-il nous assurer qu'il est en mesure de nous donner les garanties que nous, de l'Opposition, exigeons maintenant et que les citoyens également du Québec exigent, puisqu'ils commencent à réaliser de plus en plus quel genre d'équipée peut nous attendre à partir du projet de loi 70?

Je pense que si le ministre veut obtenir l'appui de la population à son projet de loi et que le population soit vraiment derrière les objectifs et les moyens du gouvernement, le ministre devra, à ce stade-ci, nous donner toutes ces informations d'une façon claire, nette et précise. Je pense que c'est un droit non pas seulement de l'Opposition, mais un droit également des citoyens du Québec.

Le ministre pourra peut-être faire état en même temps de la situation de ces amiantosés à laquelle on n'a pas donné suite depuis quinze mois, sinon d'essayer de régler par la bande, cas par cas, de façon isolée, pour certains d'entre eux...

J'aimerais également que le ministre, peut-être avant même d'aborder l'étude article par article du projet de loi, nous dise sur quelle garantie de marché il base son action, sur quelle garantie de marché le gouvernement base toute cette volonté politique qui est exprimée dans le projet de loi 70 et, éventuellement, les autres étapes qui suivront ce projet de loi 70. Qu'est-ce que le ministre a de précis à nous donner à ce sujet? Autre question également que nous pouvons poser à ce stade-ci. Qu'est-ce qu'il en est maintenant aussi

des négociations qui sont en cours avec l'entreprise pour ce qui concerne cette volonté d'acquisition de l'entreprise par le gouvernement? Qu'est-ce qui se passe dans ce dossier? Où en est-on rendu? Que nous réserve l'avenir à ce sujet, puisque c'est directement quand même relié à l'étude du projet de loi no 70? Quels seront aussi éventuellement, dans le cadre de l'acquisition de cette entreprise, les coûts réels d'exploitation? Qu'est-ce que le ministre et le gouvernement du Parti québécois vont demander demain aux citoyens québécois en termes d'argent pour procéder à ce coût d'exploitation de l'amiante au Québec? Quel va être le coût également de la reconstruction de l'usine comme telle? J'aimerais qu'on nous donne des chiffres beaucoup plus précis sur cette question. Ils font partie de l'enveloppe des discussions dans lesquelles nous nous engageons actuellement et pour lesquelles nous sommes en droit, je pense, d'obtenir des réponses beaucoup plus précises que celles des déclarations générales qui ont été faites jusqu'à maintenant.

Pourquoi également le gouvernement a-t-il arrêté son choix sur Asbestos Corporation plutôt que sur toute autre entreprise exploitant au Québec? Pourquoi Asbestos Corporation plutôt qu'une autre des entreprises exploitant chez nous? Pourquoi avoir choisi ce qui nous apparaît être peut-être l'entreprise qui est actuellement en plus mauvaise posture? Pourquoi avoir choisi l'entreprise dont l'usine — on en a discuté déjà — est dans le plus mauvais état de sorte qu'on doive la reconstruire? Pourquoi avoir choisi l'entreprise, par exemple, où les normes de salubrité sont peut-être les moins bonnes et où le gouvernement devra faire face à ses propres exigences en cette matière, en investissant des sommes énormes pour se mettre au diapason de ses propres lois et de ses propres règlements? Autant de questions qui, à mon sens, doivent trouver réponse avant que nous abordions l'étude article par article de ce projet de loi.

Le projet de loi 70, en regardant ce qui s'est fait dans le passé, c'est la copie conforme, ou à peu près, de la loi créant SOQUIP en 1969. C'est à peu près ce qu'on peut dire comme définition générale.

J'aimerais aussi aborder la question des produits de remplacement possible à l'amiante. J'aimerais là-dessus encore, puisque ce sont des données inhérentes à toute cette question, que le ministre nous donne, nous indique la marge de sécurité qui va rester au gouvernement — du moins le plus précisément possible — après avoir fait l'acquisition d'Asbestos Corporation, en ce qui concerne justement la possibilité de voir apparaître sur le marché des produits de remplacement. Parce qu'il est clair que si les produits de remplacement devaient apparaître à un degré assez élevé, cela compromettrait dans un certain sens l'intervention du gouvernement, puisqu'il serait, à ce moment, directement impliqué en tant que propriétaire d'une mine d'amiante et en tant que transformateur d'aminate.

Sur quelles preuves, sur quelles données pré- cises le ministre s'appuie-t-il pour nous présenter cette loi, pour nous exprimer cette volonté politique du gouvernement en ce qui concerne justement l'éventualité de l'apparition de produits de remplacement en ce qui concerne l'amiante? Je pense que le ministre doit, à ce stade, établir clairement tous les paramètres de cette partie du problème, de cette dimension de la discussion sur l'amiante, qui est la nôtre maintenant.

J'aimerais également que le ministre nous indique avec beaucoup plus de clarté et de précision ce qui a trait aux réserves de la mine gérée par Asbestos Corporation, de l'éventuelle mine gouvernementale. On a entendu différents sons de cloche à ce sujet, mais je pense que ce serait bon que le ministre fournisse également, de façon officielle, claire et précise, toutes les données qu'il a en sa possession en ce qui concerne les réserves d'amiante de qualité dans la mine que le gouvernement veut acheter. C'est important. Au nombre de millions que le gouvernement veut demander aux citoyens du Québec d'investir dans cette entreprise, je pense qu'il convient de savoir pour combien d'années encore on peut espérer exploiter ces gisements. Parce que, et rappelons-le, si General Dynamics n'a pas cru bon de développer davantage, de reconstruire le moulin qui avait déjà brûlé, posons-nous des questions sur les réserves minières également, sur la qualité de la fibre qui reste et sur les années en matière des différentes qualités de fibres. Je pense que le ministre devra nous donner ces réponses avant même que nous procédions à cette étude, article par article.

Si le ministre accepte de fournir ces données ou de rendre publiques les études récentes ou ce que lui ont produit ses conseillers en cette matière, je pense que ce sera de nature simplement à accélérer les travaux de notre commission parlementaire, lorsque nous serons rendus à l'étape de l'étude article par article.

J'aimerais également que le ministre nous indique clairement quelle est la proportion de la production faite par Asbestos Corporation qui va vers le marché européen. J'aimerais que le ministre établisse clairement dans quelle proportion Asbestos Corporation exporte sa fibre d'amiante vers le marché européen, pour la raison suivante, puisqu'on sait... Et j'aimerais que le ministre nous fasse le point aussi sur l'ensemble de cette question, puisqu'on sait que, d'une part, General Dynamics, propriétaire d'Asbestos Corporation, n'a pas jugé bon, dans un premier temps, de reconstruire son usine après l'incendie qu'il y avait eu. Elle a préféré d'abord prendre les $20 millions d'assurance que cet incendie lui a procurés et ouvrir, à ce moment, un moulin en Allemagne. Or, General Dynamics, par son moulin en Allemagne, sera donc en mesure de procéder à la transformation de l'amiante et à la production de produits finis. Or, on sait que la communauté européenne, l'Europe des neuf, a cette entente que lorsqu'un produit est manufacturé sur le sol d'un des partenaires de l'Europe des neuf, les autres partenaires s'engagent à ne pas acheter ce produit de pays extérieurs. Ce qui veut donc dire que si

General Dynamics, qui n'a pas reconstruit son moulin, Asbestos Corporation, produit du produit fini d'amiante en sol européen, les autres pays — les pays de la communauté européenne — devront donc, de par l'entente qui existe entre eux, diminuer et même couper complètement l'achat de produit fini — du même produit fini, j'entends bien — d'autres pays, donc du Canada, du Québec, des Etats-Unis ou d'ailleurs.

C'est donc un élément très important dans les discussions actuellement. C'est pour cela que je demande au ministre de nous donner exactement et le plus précisément possible la proportion de la production de fibre d'amiante d'Asbestos Corporation qui va au marché européen parce que cela a une incidence directe et très importante. Il y a des questions qui se posent à ce niveau-là parce que, si le gouvernement du Québec, demain, devient propriétaire d'Asbestos Corporation et devient par la suite compétiteur avec General Dynamics, il ne fera pas le poids puisque ce moment-là, les ententes de la communauté européenne vont empêcher l'Europe des Neuf d'acheter des produits finis du Québec puisque ces mêmes produits risquent de se retrouver au niveau d'usines de transformation en sol européen.

J'aimerais donc que le ministre soit assez explicite sur cette question pour nous fournir toutes ces données qui sont de première importance dans cette aventure du projet de loi 70.

M. le Président, il y a également toute la question à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure, la question de rentabilité de l'entreprise à laquelle est liée cette première question que je pose au ministre, mais la question de rentabilité de façon générale: les coûts de fonctionnement, d'exploitation, de reconstruction de l'usine, l'incidence de la production de produits finis par General Dynamics en sol européen. Le gouvernement du Parti québécois prétend — c'est son droit — que la nationalisation de l'amiante, pour un premier pas — je dis même éventuellement, la nationalisation d'autres entreprises — rendra les Québécois gagnants, mais il nous est permis de croire, avec le peu d'information que nous avons eu sur la question et avec les données qu'il nous est possible d'obtenir, qu'il y a des risques que les Québécois, dans cette aventure de nationalisation, soient plutôt perdants. Ici, je ramène cette distinction qu'il est important de faire. Le gouvernement du Parti québécois — c'est son choix — veut, d'abord et avant tout — il me semble, d'après les discussions que nous avons eues jusqu'ici — créer avec l'amiante un emblème québécois de maîtres chez nous. Mais notre rôle en tant qu'Opposition, défenseur des droits des citoyens du Québec, c'est celui de dire au gouvernement que, derrière cette volonté de créer un emblème, l'aspect émotif de la question, il y a toute la réalité des faits, des coûts et des risques. C'est sur ce terrain que nous voulons avoir les réponses aux questions que j'ai posées au ministre pour clarifier vraiment la situation.

M. le Président, il y a aussi la question du rapport Alexandre que mon collègue de Saint-Laurent a citée tout à l'heure et sur laquelle, très briève- ment, j'aimerais revenir, en indiquant simplement au ministre d'être extrêmement prudent dans sa démarche au niveau de l'interprétation du rapport Alexandre, puisque, si le gouvernement base sa volonté politique — partisane, disons-le — uniquement et majoritairement sur les données du rapport Alexandre, il risque, à ce moment-là, de se retrouver peut-être ailleurs qu'à l'endroit où il veut arriver, parce que le rapport Alexandre contient énormément de zones grises, même s'il traite de l'amiante, et, à ce moment-là, le gouvernement devrait agir avec beaucoup plus de prudence.

Ce qui me fait dire que, pendant un certain nombre d'années, il y a eu des recherches, des études de faites, c'est vrai. Mais, maintenant, vous arrivez, en tant que nouveau gouvernement et, après un an et demi, vous vous dites en mesure de régler le sort de l'humanité en ce qui concerne l'amiante. C'est cela qui est dangereux. Alors que vous n'avez même pas réglé, comme je l'ai dit tout à l'heure, le cas des quelques mineurs atteints d'amiantose au sujet desquels vous aviez dans votre programme des articles bien précis pour régler la question à court terme. C'est ce qui me fait craindre de façon beaucoup plus précise l'aventure dans laquelle nous nous embarquons actuellement. (11 h 25)

M. le Président, le ministre a fait rapidement état tout à l'heure, dans ses remarques préliminaires, de l'article 18 du projet de loi comme étant bien fondé, où — je cite rapidement — "Le ministre des richesses naturelles pourra, dans le cadre des responsabilités et des pouvoirs qui lui sont confiés, émettre des directives portant sur les objectifs et l'orientation de la société dans l'exécution des fonctions qui lui sont confiées par la loi. Ces directives doivent être soumises au gouvernement pour approbation. Si elles sont ainsi approuvées, elles lient la société qui est tenue de s'y conformer."

Je dis immédiatement au ministre que c'est risqué, énormément risqué, et on le sait. J'aimerais que le ministre repense son approche de ce côté parce qu'à toutes fins pratiques, ce que le ministre nous dit en proposant cet article — il y est revenu tantôt dans ses propos du début — c'est qu'il veut se garder à lui-même le pouvoir en ce qui concerne cette matière.

On pourrait ainsi, à la rigueur, modifier l'orientation même de la société sans avoir à revenir devant l'Assemblée nationale. Cela c'est dangereux, M. le Président. Lorsque je parlais, tout à l'heure, de l'appétit possible du gouvernement en matière d'amiante, qui peut être à un moment donné pris à son propre jeu, ne devenant qu'un des seuls producteurs et désirant peut-être le monopole en matière d'amiante, son appétit pourrait s'ouvrir davantage et il pourrait regarder vers les autres entreprises pour acquérir ce monopole.

Si on donne au ministre cette possibilité de modifier l'orientation de la Société nationale de l'amiante, voyez dans quel risque on s'embarque. On risque, à ce moment-là, de soumettre à la sim-

pe volonté politique d'un parti ou d'un ministre le changement complet d'orientation d'une société d'Etat pour laquelle on nous demande, aujourd'hui, un mandat.

A ce sujet, M. le Président, je dis: Attention, on ne laissera pas passer comme cela cette possibilité que le ministre se donne. On devra — et c'est la volonté de l'Union Nationale — peut-être permettre au ministre d'avoir une volonté dans ce sens, mais également on devra lui donner, en plus de ce pouvoir, la responsabilité de venir devant l'Assemblée nationale pour demander l'élargissement d'un mandat ou une orientation nouvelle à donner à la Société nationale de l'amiante.

M. le Président, ce sont autant de questions que l'on peut lancer de façon générale, à cette étape-ci des travaux de la commission parlementaire, pour bien se situer avant de passer à l'étude, article par article, du projet de loi. Je pense, par ces quelques questions lancées ainsi à bride abattue, qu'on peut voir l'ampleur de la question qui nous est soumise et les implications graves, sérieuses, étendues, qu'implique le projet de loi no 70. C'est beaucoup plus, M. le Président, que l'étude rapide et technique de quelque 25 articles d'un projet de loi. C'est toute la dimension d'une volonté politique d'un parti qui n'est pas prêt, après quinze mois de pouvoir, à se lancer dans une telle aventure et à engager l'avenir des Québécois. L'avenir d'un gouvernement, ce n'est pas grave, c'est pasager; mais l'avenir des Québécois, c'est beaucoup plus grave parce que c'est constant. C'est là-dessus, M. le Président, que l'Union Nationale s'élève pour demander des comptes immédiatement et demander au gouvernement d'établir clairement ses positions pour que, demain, la population du Québec sache à quoi s'en tenir.

M. le Président, je reviens sur une question que...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond, s'il vous plaît!

M. Brochu: En terminant, d'ailleurs, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, parce que j'ai été très souple dans l'application du règlement. Cela fait 40 minutes que vous avez la parole, exactement, comme le député de Saint-Laurent d'ailleurs. Je demande votre collaboration. D'accord?

M. Brochu: M. le Président, vous avez toute ma collaboration, soyez-en certain. Je continue en concluant...

M. Bérubé: Continuez à conclure.

M. Brochu: C'est cela, je continue à conclure.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): N'abusez pas de ma bonté.

M. Brochu: M. le Président, lors des discussions du projet de loi en deuxième lecture, j'avais demandé — cette proposition a également été faite par mon collègue de Huntingdon, M. Dubois — au leader parlementaire comme au ministre la possibilité que cette commission parlementaire puisse tenir certaines auditions pour obtenir certaines expertises en ce qui concerne le sujet traité et, deuxièmement, pour connaître — cela, au niveau du choix politique du gouvernement — la volonté politique des citoyens impliqués, des groupes de pression qu'on aurait avantage à entendre à ce sujet, justement pour que Je gouvernement ne continue pas à se retrouver dans cette forme d'isolationnisme dans lequel il se trouve actuellement et où il perd de vue la population. Il aurait tout intérêt à savoir exactement ce que les gens de la région concernée par l'amiante ont à dire en ce qui concerne, d'une part la transformation — et là je pense que tout le monde est d'accord — mais, deuxièmement et surtout, sur le moyen d'étatiser et de nationaliser qu'a choisi le gouvernement pour arriver à ses fins.

Je pense qu'à ce moment-là, le gouvernement pourrait davantage être en mesure de prendre le pouls et la volonté de la population en ce qui concerne cette question. Je vous rappellerai, M. le Président, que le leader du gouvernement, M. Burns, m'avait indiqué que peut-être en cours de route la commission pourrait décider, si elle le juge à propos et si le ministre le juge à propos, de recevoir ces témoignages et de recevoir également certaines expertises, répondant ainsi au voeu de députés des deux côtés de cette table, afin d'avoir toutes les données sur la question.

En terminant mon intervention, M. le Président, je pose au ministre une dernière question. Qu'est-ce que le ministre entend faire maintenant en ce qui concerne cette question? Quelle est l'opinion du ministre en ce qui concerne la convocation éventuelle des groupes de pression et également de certains experts qui pourraient éclairer nos travaux et nos propos afin de bonifier ce projet de loi et afin d'avoir toutes les données possibles avant que la décision finale du gouvernement soit prise en cette matière?

M. le Président, je conclus...

M. Bérubé: Vous allez conclure?

M. Brochu: Je conclus toujours en disant que c'étaient là les quelques remarques, le propos que je voulais tenir, au nom de l'Union Nationale, en ce qui concerne ce projet de loi et les quelques questions que je voulais poser au ministre.

Je conclus donc en disant, M. le Président, que j'espère que le ministre, avant d'aborder l'étude de la loi article par article, pourra répondre aux différentes questions que je lui ai posées.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, vous avez raison, puisque la présidence a été d'une souplesse...

Une Voix: Remarquable!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... remarquable, effectivement.

M. le ministre, s'il vous plaît, si vous avez une courte réplique à faire.

Réponse de M. le ministre

M. Bérubé: Très brièvement, M. le Président, compte tenu du grand nombre de questions qui ont été soulevées, je pense qu'il serait beaucoup trop long de vouloir y répondre immédiatement. Par conséquent, nous aurons sans doute les prochains jours pour le faire et nous pourrons en profiter pour y revenir.

D'une part, la question des renseignements. J'ai l'intention de déposer à la prochaine séance de cette commission le plan de travail du gouvernement concernant la politique de l'amiante ainsi que certains chapitres qui portent plus spécifiquement sur la transformation, sur les problèmes de salubrité, sur la substitution. Je dois cependant dire que je devrai m'abstenir de déposer un chapitre extrêmement important et volumineux qui porte comme tel sur Asbestos Corporation, et je m'explique — de même qu'un autre chapitre qui porte sur des aspects de fiscalité. Je pense que l'Opposition, sans peut-être apprécier le fait, comprendra néanmoins qu'il serait dangereux, à titre d'exemple, de déposer un document sur la fiscalité, qui pourrait contribuer à semer le doute dans les esprits, alors que le gouvernement a choisi de ne pas retenir cette voie pour diverses raisons; par conséquent, ce chapitre ne sera pas distribué et continuera à dormir sur les tablettes du gouvernement.

Quant au document de base sur Asbestos Corporation, sur les avantages pour le gouvernement de l'achat d'Asbestos Corporation, sur l'évaluation d'Asbestos Corporation, c'est un document volumineux, qui a pris le temps de plusieurs spécialistes en la matière, je ne pourrai non plus le déposer pour une raison très simple: on s'est interrogé, ce matin, sur le fait que le gouvernement n'avait pas annoncé, claironné un prix d'achat et ait annoncé une loi nationalisant la société d'Asbestos Corporation. Cartes, nous aurions pu le faire. La province de la Saskatchewan, il y a quelques années déjà, a introduit à son Parlement, un projet de loi portant sur l'achat ou la nationalisation de son industrie de la potasse. Ce qu'il est intéressant de constater c'est que cette province n'a également pas jugé bon de nationaliser ces industries, mais, au contraire, elle les achète de gré à gré, l'objectif de la Saskatchewan étant de prendre le contrôle entier de son industrie de la potasse. Néanmoins, elle ne le fait pas par voie de nationalisation. Pourquoi? Pour plusieurs raisons. Une raison qui, je pense, vous paraîtra... Il ne change absolument rien pour le gouvernement de présenter une loi nationalisant une entreprise, alors que celle-ci pourra de tout évidence, puisqu'il s'agit d'une loi d'expropriation, s'adresser à la cour pour contester le montant qui lui a été promis. Par conséquent, nous nous retrouverions à nouveau devant une incertitude qui durerait tout le temps du débat en cours sur le coût final que nous devrions payer.

Ce que nous avons préféré faire, c'est notre propre évaluation, de manière à avoir une idée précise de ce que ça valait réellement et, à ce moment-là, laisser des experts négocier la valeur de l'entreprise. L'Assemblée nationale pourra, en tout temps, lorsque ce montant sera connu et que le gouvernement aura pris une décision à la suite de cette négociation, l'Opposition aura tout le temps, à la lumière des chiffres qui seront disponibles, de pouvoir critiquer. Mais il serait extrêmement dangereux, ici, de venir avancer un chiffre. L'Opposition libérale en particulier s'est élevée contre un chiffre que le ministre de l'Energie a, non pas avancé pour le prix de la compagnie, mais avancé simplement pour souligner qu'il pouvait y avoir énormément de discussion autour de la valeur d'une action.

Il s'était, à titre d'exemple, basé sur une règle que les courtiers utilisent fréquemment lors de l'achat de stocks, qui consiste à prendre ce qu'on appelle le "price earning ratio " et à évaluer quelle pourrait être, hypothétiquement, la valeur de l'entreprise. Mais il va de soi que lorsqu'on prend le contrôle d'une entreprise, il y a d'autres paramètres qui entrent en ligne de compte. Il y a les paramètres fondés sur l'espérance à long terme de gains, sur la valeur des réserves. Il y a donc un grand nombre de paramètres qui entrent en ligne de compte et qui dépassent de loin le simple examen des profits des dernières années de l'entreprise.

Par conséquent, il serait extrêmement dangereux... L'Opposition aurait tout à fait raison de condamner un gouvernement qui annoncerait publiquement le chiffre qu'il a l'intention de payer, ce qui ferait démarrer la négociation immédiatement sur cette base. De la même façon, lorsque l'entreprise a annoncé officiellement, par la voie de son vice-président, M. Fiske, qu'elle demandait $60 l'action, elle a fixé un sommet au montant que le gouvernement devrait payer. Vous noterez tous que ce n'est pas $250 millions, mais $170 millions le maximum que la compagnie envisage de demander au gouvernement.

C'est donc la position de la société. Il m'apparaîtrait anormal que le gouvernement avance un chiffre, alors que, justement, c'est le résultat d'une négociation. L'Opposition pourrait être justifiée de condamner le gouvernement d'annoncer un montant, alors que ceci a surtout un impact direct sur la valeur des actions.

Donc, nous préférons que cette négociation se fasse sur une base confidentielle et advenant le cas où nous pourrons l'annoncer, on aura tous les éléments en main pour juger si l'investissement du gouvernement est rentable ou non. Par conséquent, le chapitre sur l'évaluation d'Asbestos ne sera pas déposé.

Parlons également des aspects pertinents à l'amiante qui n'apparaissent pas dans ce projet de loi. Il m'apparaît évident que ce projet de loi n'est

pas une refonte de tout l'appareil législatif concernant la santé et la sécurité des travailleurs. Notre ministre d'Etat au développement social a reçu ce mandat; on me dit que son projet est en bonne voie de réalisation et que cette assemblée sera sans doute très rapidement saisie d'un projet de loi qui devra traiter de cette question.

On me dit aussi que nous ne parlons pas de recherche sur la santé, de recherche sur le développement de nouveaux produits. Il va de soi que ce n'est pas l'objectif du présent projet de loi. L'assemblée sera saisie très prochainement — nous avions l'intention de la saisir à cette session, mais nous croyons devoir attendre l'automne — d'un projet de loi portant sur la création d'un laboratoire, d'un centre de recherche sur l'amiante qui se verra confier deux mandats, un mandat spécifique à la santé, la sécurité et la salubrité, et un deuxième mandat spécifique au développement de nouveaux produits, de nouvelles technologies.

Par conséquent, il est prématuré de vouloir inclure dans ce projet de loi tout l'aspect recherche sur la question. En effet, ma propre expérience en recherche m'a enseigné qu'il était très important, en recherche technologique plus particulièrement, que la recherche soit généralement financée par les utilisateurs, dans la mesure où cela permet le transfert de technologie. Trop souvent, la recherche, dans les universités, au gouvernement, souffre de cette difficulté à assurer un transfert de technologie et très fréquemment les recherches effectuées dans les laboratoires gouvernementaux n'ont pas de suite au niveau industriel, en dépit de la valeur de ces recherches. (11 h 40)

Donc, il nous est apparu important de nous assurer la collaboration, la participation des industries existantes au Québec dans le secteur de l'amiante, de manière à constituer un centre de recherche qui soit viable, un centre de recherche qui ait un impact réel sur le développement de notre industrie de l'amiante.

Le projet que nous discutons ici est celui de la création d'une société nationale de l'amiante, laquelle société participera, comme partie, à la création de ce centre de recherche et par conséquent, aura donc son mot à dire. Donc, il existe une certaine antériorité des actions et il faut créer la société nationale de l'amiante si on veut que cette société nationale de l'amiante puisse participer à la création de ce centre de recherche.

Ce sont peut-être les trois points que j'aurais voulu soulever. On m'a demandé également si j'étais au courant, conscient, approbateur, des mesures que pourrait prendre le ministère de l'Expansion économique régionale vis-à-vis d'une certaine société qui oeuvre déjà dans le domaine de l'amiante du côté de Longueuil. Il va de soi que chaque fois que les taxes des Québécois reviennent au Québec, je n'ai certainement pas d'objection. Vous n'êtes pas sans savoir que le MEER a financé, en subventions au Québec, l'équivalent de $700 millions, contre $1,4 milliard dans les Maritimes et cela pour la période de 1969 à 1976, c'est-à-dire pour une moyenne de $17 par habitant au Québec, contre des moyennes qui atteignent $176 par habitant à l'Ile-du-Prince-Edouard. Vous n'êtes pas sans savoir que ceci s'est produit en même temps — et c'est important de le souligner — que l'on observait des investissements per capita au Québec, dans le secteur manufacturier, qui étaient, en 1968, de 738 au Québec, contre 827 dans les Maritimes. Par conséquent, alors même que les investissements étaient plus élevés dans les Maritimes, on constate que le MEER a mis beaucoup plus d'argent en subventions dans les provinces maritimes qu'au Québec. Donc, ce n'est certainement pas moi, après avoir dénoncé l'incurie du gouvernement fédéral, qui m'opposerai à ce que le gouvernement fédéral tente de corriger, de quelque façon que ce soit, ce déséquilibre qui est tout à fait anormal, puisque le député de Rosemont, dans son intervention en discours de deuxième lecture portant sur la loi 70, a très clairement fait ressortir l'impact des politiques nationales monétaires, commerciales et fiscales sur le développement de l'économie québécoise, sur l'évolution des taux de chômage au Québec contre les taux de chômage canadiens. Il a pu montrer que cela n'avait eu que très peu d'impact, finalement, sur la correction des inégalités régionales en ce qui concerne le Québec par rapport au reste du Canada et qu'une politique de subvention du MEER a également conduit à l'amplification de ces mêmes déséquilibres. Par conséquent, je n'ai aucune objection à ce que le MEER subventionne les industries de l'amiante au Québec. Merci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Traditionnellement, on donne la parole au ministre et aux représentants de chacun des partis. En ce qui me concerne, j'ai toujours, au cours des commissions parlementaires, après avoir laissé parler les porte-parole officiels des partis, permis à chaque député, conformément à l'article 160, d'émettre des opinions générales avant d'entreprendre l'étude article par article. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vous cède la parole.

M. Lalonde: M. le Président, mes considérations générales, vous les avez bien décrites. Elles concernent justement le travail et ont un caractère préliminaire au travail que l'Assemblée nationale a confié à notre commission parlementaire.

M. Brochu: Me permettriez-vous de revenir à une petite question à laquelle le ministre a oublié de répondre?

Tout à l'heure, je vous ai demandé quelles étaient vos intentions en ce qui concerne l'audition de certains groupes d'experts ou autres à cette commission parlementaire, si le député me permet, pour que le ministre clarifie sa position immédiatement.

M. Lalonde: Si c'est une dernière fois, oui.

M. Brochu: C'est toujours la dernière fois, M. le député.

M. Lalonde: On y verra.

M. Bérubé: Si c'est effectivement la dernière fois que nous l'entendons, je suis absolument d'accord pour répondre.

M. Brochu: La dernière fois à ce stade-ci...

M. Bérubé: J'aimerais d'abord que le député de Richmond s'engage à ne plus parler.

M. Brochu: ... M. le ministre.

M. Bérubé: J'ai effectivement discuté avec le leader parlementaire de la possibilité d'inviter des gens de l'extérieur. Après discussion, il nous est apparu, en fait, que ce débat porterait finalement sur un débat politique sur l'achat d'Asbestos Corporation, et il ne nous est pas apparu, en tous les cas, justifié d'entreprendre la discussion ici avec une série d'experts ou de soi-disant experts pour une démonstration politique. Nous n'élaborons pas une politique, nous avons à créer ici une Société nationale de l'amiante. On peut diverger d'opinion sur le plan politique, mais il ne nous est pas apparu justifié de tenir des audiences publiques pour recevoir les gens, à moins d'avoir besoin d'informations spécifiques. S'il y a une question qui est soulevée et qui exige des informations, sur laquelle il existerait effectivement des compétences qui pourraient nous fournir cette information, je suis d'accord. Quant à convoquer des intervenants avec des mémoires, nous avons estimé que ce n'était pas la place.

M. Brochu: Mais pour la question de la transformation comme telle, des données sur la transformation possible?

M. Bérubé: Je pense qu'il faudrait qu'il y ait une question précise et une demande formelle. A ce moment, la commission pourra toujours convoquer quelqu'un pour répondre à ces questions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si on en décide ainsi.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Motion demandant l'évaluation du coût

et le plan de financement de l'achat

d'Asbestos Ltée

M. Lalonde: M. le Président, c'est donc dans la perspective de l'étude d'un projet de loi, non pas en vase clos, non pas de façon fermée, mais dans le contexte de l'acquisition par le gouvernement d'Asbestos Corporation de la General Dynamics, que nous abordons l'étude de ce projet de loi.

Je suis fort surpris d'entendre ce propos du ministre. Il vient seulement, il y a quelques instants, de dire qu'on ne voudrait pas porter ici, devant cette commission parlementaire, le débat politique de l'acquisition d'Asbestos Corporation. Or, on sait très bien que c'est le gouvernement lui-même qui en a fait une question politique, qui l'a annoncée de la manière la plus politique qui soit, qui en a fait aussi l'objet de l'examen en deuxième lecture, devant l'Assemblée nationale. Je me demande donc pourquoi cette commission parlementaire se verrait ni plus ni moins bâillonnée pour ce qui concerne l'acquisition d'Asbestos Corporation, lors de l'étude article par article du projet de loi. D'autant plus que le ministre vient de nous dire qu'il ne déposerait pas, qu'il ne distribuerait pas aux membres de cette commission, comme c'est permis, le chapitre sur Asbestos Corporation.

Il a parlé de déposer un chapitre sur le plan de travail du gouvernement, certains autres chapitres peut-être, mais le chapitre sur Asbestos Corporation ne sera pas déposé, ne sera pas divulgué aux membres de cette commission parlementaire. Il existe donc un chapitre sur Asbestos Corporation.

Je suis fort surpris. En fait, je trouve incroyable que le gouvernement refuse aux élus, aux membres de cette commission, de leur communiquer des données qui réapparaissent absolument indispensables pour pouvoir discuter de façon intelligente de ce projet de loi. Mais, à la toute fin de son intervention, le ministre a fait une petite ouverture, en réponse à une question du député de Richmond: s'il y avait une demande formelle, pour un point précis, on pourrait peut-être entendre des experts étrangers à cette commission. M'accro-chant à cette ouverture, je me demande si justement, en faisant une demande formelle au sujet du chapitre de l'Asbestos Corporation, on ne pourrait pas justement élargir un peu l'ouverture que j'ai perçue dans l'esprit du ministre et obtenir que les membres de cette commission reçoivent la communication du chapitre — je l'appelle maintenant le chapitre, puisque c'est de cette façon que le ministre l'a décrit — sur Asbestos Corporation. Quant à moi, j'appelle cela une évaluation du coût, un plan de financement de l'achat de la société Asbestos Ltée. Dans le but de permettre au ministre de s'asseoir très confortablement sur une demande formelle, je vais faire une motion qui va se lire comme suit — je vous en communiquerai une copie — "Que cette commission est d'avis que le ministre des Richesses naturelles remette, avant le début de l'étude article par article du projet de loi no 70, aux membres et intervenants de cette commission, l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat de la société Asbestos Ltée, tel que décidé par le gouvernement."

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voici, M. le député de Marguerite-Bourgeoys...

M. Lalonde: Est-ce que vous me permettez de poser une question avant?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Lalonde: Est-ce que vous allez suivre une certaine tradition dans cette commission et per-

mettre aux membres des formations politiques de se faire entendre sur la recevabilité d'une motion lorsque, dans votre esprit, il y aurait une question qui se poserait?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, j'ai l'intention de suivre cette politique.

M. Lalonde: Merci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que vous voulez parler sur la recevabilité?

M. Lalonde: S'il y a le moindre doute dans l'esprit du... Si vous le demandez, je vais parler.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, j'ai un doute. J'aimerais que...

M. Lalonde: M. le Président, voilà une motion...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pas tellement sur le fond, mais surtout sur le moment.

M. Lalonde: Voilà une motion qui est presque classique, surtout depuis que ce gouvernement a introduit un élément nouveau dans le processus législatif et qu'on appelle l'improvisation. Depuis un an, les oppositions ont été obligées, chaque fois qu'on abordait l'étude article par article d'un projet de loi sérieux, important — je pense, par exemple, au projet de loi 67, au projet de loi 101 — malheureusement, d'arracher au gouvernement au compte-gouttes des renseignements qui nous apparaissaient nécessaires. Ce n'est donc pas la première fois, malheureusement, que nous devons le faire. Nous n'avons pas le choix. C'est pourquoi nous le faisons encore une fois. Dans les autres cas, je m'en souviens, il y a beaucoup de précédents; de telles motions ont été discutées, en particulier en ce qui concerne le projet de loi 67, au cours des séances de la commission parlementaire des consommateurs et sur l'évaluation, par exemple, du plan d'assurance automobile. Il y a amplement de précédents qui soutiennent la recevabilité de cette motion. Elle ne va à l'encontre d'aucun principe. Elle fait partie de cet éventail de motions préliminaires qu'une commission parlementaire peut adopter pour donner à ses travaux un caractère de sérieux. Elle concerne les travaux de cette commission parlementaire. Elle est parfaitement recevable. Savoir si le gouvernement va l'accepter, c'est une autre chose, ce qui, naturellement, ne doit pas du tout vous influencer quant à la recevabilité. Je ne pense pas qu'il y ait beaucoup d'autres choses à ajouter; cela me paraît tellement évident qu'elle ne contredit aucun principe et qu'elle doit être faite à ce stade des travaux. Naturellement, vous me direz peut-être que l'article 1, c'est seulement le nom de la société, mais il reste...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On n'est pas encore rendu à l'article 1.

M. Lalonde: C'est cela. On n'est pas encore rendu à l'article 1, mais c'est le premier article qu'on aborderait normalement. On n'est pas encore rendu à l'évaluation. L'évaluation, cela vient peut-être à l'article 10 ou à l'article 20. En tout cas, il y a un article là-dessus, sur les acquisitions. A ce moment, je pense qu'on ferait fausse route parce que c'est toute la loi qui repose sur l'acquisition de la société Asbestos, si on en croit ce que le gouvernement nous a annoncé avec grande pompe en octobre dernier. S'il n'avait pas l'intention d'acheter la société Asbestos Ltée, je -ne pense pas que le gouvernement se serait imposé l'adoption de ce projet de loi et que cette commission parlementaire aurait quoi que ce soit à faire avec un tel projet de loi. Donc, c'est au tout début de l'étude de ce projet de loi que nous devons nous informer, comme membres de cette commission, sur l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat de la société Asbestos. (11 h 55;

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond, est-ce que vous voulez intervenir sur la recevabilité?

M. Brochu: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Très très brièvement...

M. Brochu: Très très brièvement comme toujours.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...puisque la présidence est prête.

M. Brochu: Oui, comme dirait le ministre, je conclus donc mes propos en commençant comme ceci. Je vais également appuyer cette motion qui vient d'être présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys demandant que le ministre remette, avant que l'on procède à l'étude article par article du projet de loi 70, aux membres intervenants de la commission l'évaluation du coût, du plan de financement de l'achat de la société Asbestos Ltée tel que décidé par le gouvernement.

En ce qui concerne cette question du moment, il m'apparaît également que c'est maintenant qu'on doit obtenir ces renseignements qui sont directement liés au projet de loi 70 et à l'achat éventuel de la société Asbestos Corporation. Je pense qu'avant d'aborder l'étude article par article, s'il nous était donné de cette façon d'avoir plus d'information pertinente, nos discussions s'en trouveraient simplement améliorées et je pense que cela serait même de nature à accélérer nos travaux que d'avoir en main tous les outils de discussion nécessaires et disponibles. Je pense que le ministre aurait intérêt à le faire et c'est d'ailleurs le sens des remarques que j'avais faites tout à l'heure en disant que, avant que nous procédions justement à cette étude article par article, nous devrions avoir la possibilité d'avoir accès à toutes ces informations afin que nos discussions soient plus éclairées, plus rapides et plus efficaces.

Dans ce sens-là, j'ai l'impression que cela sera l'attitude du ministre, c'est-à-dire que la commission elle-même dans son ensemble a intérêt à adopter la motion immédiatement pour qu'on puisse avoir, pour fins de discussion, sur la table, toutes les données dont nous avons besoin. Pour indiquer que j'appuie cette motion, j'avais moi-même l'intention de demander que soit acceptée à cette commission...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ne parlez pas du fond pour le moment.

M. Brochu: ... une motion semblable, tout en indiquant le moment où cette présentation de documents pertinents à la discussion devrait avoir lieu. Je demandais que cette commission prenne connaissance des études faites à la demande du gouvernement sur les coûts directs et indirects reliés à l'acquisition et à l'exploitation de l'Asbestos Corporation par le gouvernement du Québec. Mon intention était de demander, par cette motion, que ces documents soient déposés le plus tôt possible, c'est-à-dire avant l'étude article par article.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la recevabilité, très brièvement.

M. Laplante: Sur la recevabilité, M. le Président, je doute qu'elle soit recevable. D'ailleurs, on n'a pas encore commencé l'étude de l'article 1 du projet de loi et le mandat de l'Assemblée nationale est de venir l'étudier article par article. La deuxième conséquence, c'est qu'il n'y a rien dans la loi qui dit que c'est Asbestos qu'on achète. Cela pourrait être aussi bien une compagnie du Nord-Ouest.

M. Lalonde: Vous avez d'autres plans?

M. Laplante: II n'y a rien dans le projet de loi...

M. Lalonde: Ah! bon. On en prend note, on en prend note. Est-ce que le ministre le sait?

M. Laplante: Pour moi, M. le Président, cela n'est pas recevable au stade actuel des débats.

Décision du président

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Messieurs les députés, je pense que la présidence ne peut ignorer, même si le mot "Asbestos" n'est pas écrit dans la loi, l'ensemble des déclarations qui ont été faites à l'Assemblée nationale ou ailleurs. Je pense que cela fait partie d'un tout et que la décision doit être prise en tenant compte non seulement du texte de la loi, mais de ce qui l'entoure également. D'autre part, je voudrais quand même suivre une certaine jurisprudence qui a été établie relativement au genre de motions préliminaires que l'on peut présenter avant d'adopter l'article 1. A ce sujet, les conseillers parlementaires vous ont fait parvenir des directives générales sur le genre de motions préliminaires que I'on peut déclarer recevables avant l'adoption de l'article 1 ou avant d'en arriver à l'article 1. Je dois dire immédiatement au député de Marguerite-Bourgeoys que sa motion ne va absolument pas contre un principe du projet de loi, qu'elle est parfaitement fondée et recevable normalement, si elle est présentée à l'article 4.

Je note à l'article 4: "La Société a pour objets: a) la recherche, le développement et l'exploitation de gisements d'amiante..." Il ne fait aucun doute, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, dans mon esprit que si vous présentez cette motion à l'article 4, paragraphe a), qui traite justement de la possibilité pour la société d'acquérir une compagnie minière, quelle qu'elle soit, cette motion sera déclarée recevable.

D'autre part, je pense qu'à ce stade-ci elle est prématurée; je pense que les motions qui peuvent être actuellement acceptées, déclarées recevables, sont des motions sur l'organisation fonctionnelle de nos travaux de la commission parlementaire. Mais, une fois que l'article 1 sera appelé, toutes les motions ressemblant ou analogues à celle du député de Marguerite-Bourgeoys seraient normalement recevables.

Donc, je dis immédiatement au député de Marguerite-Bourgeoys que sa motion ne va pas contre un principe, qu'elle est parfaitement fondée en vertu de notre tradition parlementaire. Je me réfère ici surtout à une décision qui a été rendue, le 18 juillet 1974, lors de l'étude du bill 22, qui fait jurisprudence et qui dit: "Une fois qu'on a disposé des motions préliminaires, très peu nombreuses, le président doit appeler l'article 1." Qu'entend-on par motions préliminaires? Ici, on donne des exemples: accorder à une personne qui n'est pas membre d'une commission la permission de se faire entendre; décider de siéger à huis clos; nommer des sous-commissions; différer l'étude de tel article d'un projet de loi; proposer un ordre du jour; proposer la tenue d'une audition publique; requérir une personne de se présenter devant elle. Toutes sont des genres de motions préliminaires qui pourraient être déclarées recevables parce qu'ayant pour but d'organiser nos travaux pour le futur, alors que celle-ci a trait spécifiquement à quelque chose que nous allons retrouver à l'article 4, paragraphe a).

Je vous dis immédiatement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, qu'elle sera, à ce moment-là, déclarée reçue.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce que je pourrais vous demander une directive?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Lalonde: Vous vous êtes référé à un document que vous avez, des directives de conseillers.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est-à-dire qu'il y a des gens ici, à l'Assemblée nationale, qui ont comme fonction principale de conseiller les présidents des commissions parle-

mentaires ou le président de l'Assemblée nationale. Nous avons non pas des directives mais des interprétations qu'ils donnent à certains règlements; c'est une sorte de doctrine parlementaire, disons, en plus de la jurisprudence. Evidemment, nous ne sommes pas liés par ces recommandations...

M. Lalonde: Non, M. le Président, mais ne serait-il pas sage que ce soit distribué aux députés aussi? Au fond, les présidents auraient beaucoup plus de collaboration des députés si on était au courant de toute cette jurisprudence.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II y aurait peut-être lieu de... Je vous dis immédiatement que la personne responsable au niveau des présidents des commissions parlementaires, c'est Me Dominique Lapointe, qui voit, dans toutes sortes de sujets où les articles prêtent à confusion, à nous émettre ses opinions personnelles à titre d'expert dans ce domaine, sur l'interprétation des différents articles, compte tenu également de la jurisprudence, de l'ancien règlement et ainsi de suite. J'essaie de me guider autant que possible sur ces recommandations.

M. Lalonde: Si je comprends bien, ces conseils sont distribués à tous les présidents...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les présidents de commissions parlementaires.

M. Lalonde: ... de commissions, ceux qui font partie de la banque de présidents.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est cela.

M. Lalonde: Je vous remercie. M. Forget: Alors, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... m'inspirant de vos commentaires ou de la décision que vous venez de rendre, j'aimerais faire des représentations et rappeler que, précisément dans le cadre de l'organisation des travaux de la commission, il y a un certain nombre d'étapes préliminaires qu'il me semblerait opportun de franchir. Sans vouloir, en aucune manière, remettre en cause la décision que vous venez de rendre, sachant d'abord la nature rationnelle de votre décision, on aurait peut-être pu argumenter que nous visions à obtenir le dépôt d'un certain nombre de documents avant d'entreprendre l'étude article par article, arguant donc que c'était pertinent à l'organisation des travaux. Mais on n'a pas eu l'occasion de faire cette représentation et, comme je vous l'indiquais tout à l'heure, je n'ai pas l'intention de remettre en question votre décision. Il demeure que vous nous avez clairement indiqué qu'il était nécessaire de centrer nos re- marques et nos propositions de motions sur l'organisation des travaux.

Or, précisément, outre le dépôt de documents, d'études qui nous permettraient d'évaluer la prise en charge de la société Asbestos, il nous apparaît qu'il y a d'autres questions qui devraient être clarifiées avant d'entreprendre une étude détaillée article par article. Par exemple, l'un des volets importants de la politique de l'amiante annoncée en octobre consiste dans l'élaboration de plans de développement qui, comme tels, ne sont pas mentionnés dans le projet de loi et qu'il n'est donc pas possible de raccrocher de façon précise à aucun article du projet de loi, mais qui sont nécessaires, dont la compréhension est nécessaire pour placer dans son contexte la contribution de la société de l'amiante envisagée, à la réalisation d'un plan de développement. Jusqu'à maintenant, c'est plutôt une rubrique, un titre, cela n'a pas un contenu très précis. C'est pour cette raison qu'il nous apparaît utile, avant d'entreprendre l'étude article par article, d'avoir un aperçu du travail qui a été fait jusqu'à maintenant dans l'élaboration de ces plans de développement et, en particulier, dans la discussion — puisqu'il s'agit d'une entreprise conjointe gouvernement-industrie — et l'élaboration de ces plans de développement ou dans l'invitation adressée à l'industrie d'élaborer de tels plans de développement.

Motion pour production de documents

Tout ceci peut se formuler de façon assez simple par la voie d'une motion qui se lirait ainsi: "Cette commission est d'avis que le ministre des Richesses naturelles remette, avant le début de l'étude article par article du projet de loi no 70 — c'est donc clairement une question préalable et qui vise à l'organisation de nos travaux pour un déroulement logique et rationel, je crois — aux membres et intervenants de cette commission, concernant un plan de développement relatif à la transformation au Québec de la fibre d'amiante en produits finis et ce, depuis le 26 novembre 1976: a) le compte rendu des rencontres entre des représentants du gouvernement — soit des fonctionnaires et des ministres — et les représentants des producteurs d'amiante ou de leur association; b)une copie de la correspondance échangée traitant de cette question".

A l'aide de ces documents, il sera possible d'analyser le cheminement qu'a fait le ministère des Richesses naturelles dans tout ce volet et cela nous permettra de voir très clairement jusqu'à quel point précisément une intervention directe de l'Etat, premièrement, par la création de la Société nationale de l'amiante, mais par des gestes plus particuliers tels que la prise de propriété d'une société minière comment la société Asbestos se justifie, entre en conflit ou complète les actions envisagées ou amorcées dans ces discussions préliminaires d'un plan de développement.

Je ne crois pas que ce soit une demande déraisonnable à faire au gouvernement pour la raison additionnelle suivante: c'est que, en dépit du

fait que le gouvernement, en annonçant en octobre une politique de l'amiante qui comportait comme un de ses volets importants l'élaboration de plans de développement — une espèce de contrat de développement, tel que cela a été décrit entre le gouvernement et l'industrie — ce n'est pas une idée qui a pris naissance — je pense bien que le ministre le reconnaîtra — le 21 octobre 1977. C'est en effet une idée qui avait été avancée par le prédécesseur du ministre actuel dans une allocution qu'il avait faite devant l'Association des mines du Québec en 1976. Il y avait justement proposé, non seulement pour l'amiante, mais pour l'ensemble des industries minières du Québec, il avait mis de l'avant ce concept d'un plan de développement, une espèce de plan conjoint. Ceci laisse à supposer que, entre le moment de ce discours du ministre des Richesses naturelles de l'époque, M. Cournoyer, et la date du 21 octobre où le premier ministre actuel a fait l'annonce de la politique de l'amiante, il a dû se faire — en particulier dans le secteur de l'amiante, parce que c'était bien sûr l'un des secteurs importants que visait ce discours de M. Cournoyer — des démarches, il y a dû y avoir des rencontres, il y a dû y avoir des échanges de correspondance qui ont — du moins est-il permis de le supposer — justifié la décision annoncée par le gouvernement de procéder et d'aller de l'avant avec la création de la Société nationale de l'amiante, étant donné — c'est peut-être ce que les comptes rendus et la correspondance en question nous révéleraient — les déceptions, les refus de collaboration, l'avortement, peut-être, de certains efforts, de certaines démarches, du côté gouvernemental, ce qui, encore une fois, justifierait pleinement, rendrait évidentes la nécessité d'une intervention directe et l'acquisition d'une société minière. (12 h 10)

II me semble que cela préparerait le terrain à énormément de travail constructif et ça préparerait le terrain à l'étude du projet de loi. On verrait dans quel contexte de dialogue fructueux ou infructueux avec l'industrie le gouvenrement a pris sa décision au mois d'octobre dernier. Il me semble que ça nous éviterait un grand nombre de débats peut-être inutiles si on pouvait constater, en même temps que le ministre et en même temps que les autres membres de la commission, qu'effectivement ces efforts ne se dirigeaient pas vers une issue favorable, peut-être à cause de l'opposition de la seule société Asbestos; sait-on jamais, c'est peut-être là un des motifs qui a poussé le gouvernement à dire: comme on ne peut pas s'entendre avec ces gens, on va prendre possession de la compagnie et on va créer un bon exemple pour les autres.

Toutes les conjectures sont permises dans le moment, mais ça aiderait énormément à expliquer la décision gouvernementale et ça pourrait certainement faciliter l'étude du projet de loi. Cela ne peut pas être raccroché à aucun autre article, M. le Président, mais ça fait intimement partie du contexte qui a entouré la décision du Conseil des ministres en octobre. C'est, il me semble, un élément essentiel du dossier.

D'ailleurs, il est assez remarquable de constater le silence — peut-être le ministre dira-t-il un silence prudent — mais comme il s'agit d'événements passés et qu'il y a malgré tout des décisions importantes qui ont été prises dans ce contexte, le silence systématique observé par les membres du gouvernement vis-à-vis de la qualité ou du contenu de leurs relations avec l'industrie depuis qu'ils sont au pouvoir. Qu'est-ce qui a bien pu se passer au cours de ces rencontres? Qu'est-ce qui a amené le gouvernement à prendre telle ou telle mesure?

Jamais n'a-t-on entendu de commentaires de ce côté, peut-être que c'est parce qu'on n'a pas jugé bon, on n'a pas eu l'occasion de poser la question au ministre. Cela, ce serait très utile de le savoir et il me semble que pour cette raison, il s'agit là d'une motion qui est éminemment appropriée, qui me semble acceptable en vertu des critères que vous nous avez décrits tout à l'heure, de veiller au meilleur aménagement de nos travaux, en déposant des documents qui sont de nature à les faciliter, qui ne sont pas des documents pertinents à un article particulier du projet de loi, dont l'étude viendra ultérieurement, mais qui sont contraires à un élément de contexte déterminant.

Pour toutes ces raisons, j'aimerais que nous puissions adopter une telle motion — peut-être que le ministre voudra la prendre à son compte — . Je suis étonné. Parce que je suis persuadé, pour en avoir même causé avec le représentant de certains membres de l'industrie, qu'il n'y a, de leur part, aucune réticence à ce que la nature et le contenu de leurs discussions avec le ministre soient publiés, soient rendus le plus transparents possible. Ils n'ont certainement, du côté de l'industrie, aucune hésitation pour cela. Nous aurons l'occasion d'y revenir d'ailleurs, mais j'inviterais le gouvernement à ne pas faire preuve de plus de dissimulation que les circonstances ne le commandent.

Vraiment, comme il s'agit d'événements passés, pourquoi ne pas faire une récitation des faits qui motivent la décision qu'il défend maintenant?

M. Brochu: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Uniquement sur la recevabilité.

M. Brochu: Toujours sur la recevabilité, M. le Président. Je pense qu'il convient, à ce stade-ci, de voir la recevabilité de cette motion, M. le Président, justement pour la bonne organisation de nos travaux, tel que vous l'avez mentionné tout à l'heure. Lorsque je me réfère au journal des Débats qui a donné lieu à la décision que vous avez rendue, décision qui avait été rendue par un précédent président de commission en 1974, je me rends compte que la motion que vient de présenter le député de Saint-Laurent s'inscrit exactement dans le cadre des motions qui restaient recevables avant d'aborder l'étude, article par article, d'un projet de loi tel que celui que nous avons devant nous.

M. le Président, je pense qu'au niveau de l'organisation de nos travaux, il conviendrait qu'on ait

ces données qui sont non seulement pertinentes, de façon générale, à nos débats, mais qui y sont directement reliées. Il importe, avant de voir le contenu en détail du projet de loi tel qu'il nous est présenté actuellement par le gouvernement, de voir quel cheminement, depuis le 15 novembre 1976, le Parti québécois, en tant que nouveau gouvernement du Québec, a suivi face aux entreprises exploitant le domaine de l'amiante; quel genre de relations le gouvernement du Parti québécois a entretenues et élaborées avec les entreprises exploitant le domaine de l'amiante; de voir, par la production du compte rendu des rencontres entre les représentants du gouvernement, les fonctionnaires et les représentants des producteurs d'amiante, quels ont été, dans toutes ces démarches, les points positifs de ce processus; quels ont été les écueils, les pierres d'achoppement de ces discussions.

De cette façon, il me semble qu'on pourrait situer exactement dans le débat du moins, avec plus de précision, l'attitude présente des entreprises exploitant le domaine de l'amiante.

Il y a eu une certaine évolution; il y a certaines données qui nous permettent de croire qu'il y a eu une certaine évolution de la part des entreprises en ce qui concerne la transformation de l'amiante, les problèmes généraux qui y sont inhérents et la question de la recherche dans le domaine de l'amiante.

Le compte rendu de ces rencontres nous permettrait de voir ou d'évaluer avec plus de précision l'attitude des entreprises au jour où cette commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi 70 va procéder à l'étude, article par article, du projet de loi.

On pourrait ainsi, en obtenant immédiatement ces comptes rendus, ces rapports d'entretien entre le gouvernement, les fonctionnaires et les entreprises, juger davantage de l'attitude que le gouvernement adopte face aux entreprises privées exploitant le domaine de l'amiante. Là-dessus, je me réfère à certaines remarques que j'avais faites à l'Assemblée nationale. J'avais indiqué que le gouvernement ne devait pas maintenir ce que j'appellerais sa hantise de l'entreprise privée, qu'il ne devait pas craindre de s'approcher de l'entreprise privée et de discuter avec elle, puisqu'il a également les moyens législatifs d'intervenir dans le domaine de l'amiante. Il ne devait pas craindre de s'approcher de l'entreprise privée et d'ouvrir les portes à une discussion en profondeur sur la question et à d'éventuelles participations.

Il faudrait que le gouvernement, en déposant ces comptes rendus, en faisant état de tous ces documents qui sont demandés actuellement par la motion du député de Saint-Laurent, nous prouve ou nous fasse la démonstration qu'il n'est pas exact qu'on puisse lui reprocher cette hantise ou cette psychose de l'entreprise privée. Je pense que cela serait de nature à bonifier nos travaux et l'approche que nous aurons à faire dans l'étude, article par article, de ce projet de loi.

Je vous rappelle que, tenant compte des directives que vous avez données tout à l'heure, cette motion ne va pas du tout à l'encontre du principe d'organisation des travaux de la commission; au contraire, elle s'inscrit directement dans une bonne, saine et logique organisation de nos travaux, afin d'obtenir, au point de départ, toutes les données dont nous avons besoin pour entreprendre cette étude avec le plus de logique et le plus d'intelligence possible.

Ainsi, on situerait exactement l'entreprise, on situerait plus exactement également à quelle enseigne se loge le gouvernement pour ce qui concerne son approche avec l'entreprise privée.

En terminant, M. le Président, je vous dis simplement que cela ne touche pas non plus aucun des articles du projet de loi qui est devant nous. Je considère, pour ma part, que cet amendement est non seulement recevable, sur le plan de la technique législative, au niveau de la commission, mais qu'il doit être recevable également dans l'esprit du législateur, afin de nous assurer, à cette commission, d'une approche logique, normale et qui donne lieu à des discussions profitables. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Qui parle au nom du gouvernement là-dessus? M. le ministre? Sur la recevabilité, M. le ministre, et très brièvement.

M. Bérubé: M. le Président, je devrai plaider l'irrecevabilité de cette motion et, en même temps, souligner le très grave danger qu'une telle motion fait courir à toutes les autres commissions qui pourraient avoir à discuter des problèmes semblables.

En effet, il faut distinguer très clairement entre la construction d'une société à but commercial, une société d'Etat qui devra investir sur une base de qualité, de compétition avec le reste de l'industrie des relations que l'Etat va avoir avec l'ensemble de cette industrie.

Lorsque l'on parle d'entente de développement et non de plan de développement, comme l'a indiqué le député de Saint-Laurent, il faut souligner que ce n'est pas un nouveau concept; c'est un concept qui a cours au ministère des Richesses naturelles, à ma connaissance, depuis au moins douze ans, d'une part.

D'autre part, certes, dans le cadre d'une politique de l'amiante, nous avons décidé de tester ce concept...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre, sur la recevabilité uniquement.

M. Bérubé: La recevabilité, j'y arrive. Nous avons décidé de tester ce concept. Je poursuis dans la ligne de l'intervention du député de Saint-Laurent qui ne s'est pas vu interrompre; je poursuis entièrement dans la continuité...

M. Forget: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, à écouter le ministre.

M. Bérubé: Le concept même de l'entente de développement, c'est donc un concept qui porte sur des relations particulières qui pourraient exis-

ter entre le gouvernement et une industrie particulière. Cela pourrait être avec l'industrie du cuivre, du zinc. C'est donc que cela décrit le type de communications qui devraient exister entre l'Etat gestionnaire de la ressource et l'industrie qui l'exploite commercialement.

Ce que nous devons discuter ici, c'est la possibilité pour le gouvernement d'intervenir comme investisseur dans ce secteur. Je pense que nous ne sommes donc pas là en train d'examiner l'ensemble des politiques du ministère, ayant trait à la fiscalité, ayant trait aux politiques d'exploration, ayant trait à toutes les activités du ministère des Richesses naturelles.

Ce que vous discutez présentement, essentiellement, c'est totalement en dehors du projet de loi qui nous est soumis, c'est-à-dire ce que nous voulons discuter ici, par le biais de cette motion, c'est essentiellement les relations qui existent entre l'Etat gestionnaire de la ressource et l'industrie qui éventuellement inclura évidemment la Société nationale de l'amiante.

Par conséquent, je pense qu'elle est totalement irrecevable, parce qu'elle ne va pas dans le sens du projet de loi que nous discutons.

M. Forget: M. le Président, si vous me permettez, avec l'indulgence du ministre et de nos collègues de la commission... Il me semble que le ministre, dans le fond, par son argument, démontre encore plus d'intérêt de cette motion, parce qu'il est bien clair que, si les ententes de développement pouvaient déboucher sur la réalisation des objectifs que le gouvernement a à coeur, il ne serait pas nécessaire, par hypothèse, de faire une intervention directe. C'est donc qu'il y a un jugement qui est porté sur les ententes de développement ou leurs possibilités d'avenir qui amène le gouvernement à dire: Ce ne sera pas suffisant. Il nous faut un autre outil qui est la Société nationale de l'amiante. Donc, il y a une corrélation entre les deux démarches. Je comprends, effectivement, que ce n'est pertinent au contenu détaillé d'aucun des articles du projet de loi et, en particulier, ce n'est pas pertinent à l'article 4 qui dit que la Société nationale de l'amiante peut se livrer à des activités manufacturières. C'est bien vrai. A ce titre, elle pourrait devenir contractante avec le gouvernement dans une entente de développement, mais elle n'aurait pas de compétence pour les ententes de développement entre le gouvernement et les autres sociétés actives dans le domaine de l'amiante. Donc, c'est la seule occasion, au début de nos travaux, de parler de cette avenue, une avenue contractuelle plutôt qu'une avenue d'intervention directe. Il me semble que le jugement qu'on porte sur l'un est nécessairement conditionné par le jugement qu'on porte sur l'autre. C'est pour cela que, du côté de l'Opposition, on aimerait bien savoir où cela en est rendu pour pouvoir juger de cette autre option.

M. Paquette: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Très brès brièvement, la présidence est suffisamment informée et renseignée.

M. Paquette: Je pense qu'à la suite de l'intervention du député de Saint-Laurent, de deux choses l'une: Ou la demande de dépôt de document qui est faite n'est pas reliée au projet de loi, en ce cas, je pense qu'il faudrait la déclarer irrecevable, ou elle a une corrélation, comme dit le député de Saint-Laurent, avec des activités possibles de la société. Ces activités sont celles qu'on retrouve bel et bien à l'article 4, au paragraphe a), où on dit: La société a pour objets: la recherche, le développement et l'exploitation de gisements d'amiante, y compris la mise en marché de la production. Si tel est le cas, je pense que, par analogie avec votre précédente décision, cette motion devrait être considérée comme prématurée et serait possiblement recevable à l'article 4, puisque, de la même façon que la motion précédente visait à fournir à la commission des renseignements susceptibles de l'éclairer sur un des objets de la société, celle-ci, par corrélation peut-être, aurait pour objet d'en fournir sur l'article 4.

D'autre part, je m'interroge également sur un autre aspect de la question qui concerne la partie de la motion au sujet de la correspondance échangée entre le ministre et les compagnies. J'aimerais que vous m'éclairiez là-dessus. Il me semble qu'à l'Assemblée nationale un ministre n'est pas tenu de citer tout élément de correspondance privée, échangée avec des tiers.

M. Forget: ...

M. Paquette: A ce moment-là, je pense que cette règle doit s'appliquer également à la commission et je me demande, même si nous votions cette motion, si nous pourrions obliger le ministre à déposer cette correspondance.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Très, très brièvement, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, l'article premier nous demande de constituer une compagnie sous le nom de "Société nationale de l'amiante ". Je crois que, préliminairement, avant de nous demander et de discuter si, oui ou non, nous allons voter en faveur de ce premier article, on a le droit de demander s'il y a un plan de développement. Ce sera le ministre qui décidera si, pour certaines raisons qu'il pourra nous expliquer, il peut ou non nous fournir l'information.

Avant même de discuter, de constituer une telle société, c'est important pour moi de le savoir. S'il n'y a aucun plan de développement, s'il n'y a rien de fait, cela va influencer ma décision. Si le ministre nous dit: Oui, il y en a, mais si pour une raison ou pour une autre, il ne veut pas donner l'information, s'il ne le peut pas pour des raisons de négociation, etc., au moins, cela va nous éclairer et cela va certainement affecter la position que nous allons prendre.

Je soutiens que c'est recevable. C'est même essentiel, pour les buts mêmes de la société de savoir au début quelle attitude nous allons prendre vis-à-vis de la création d'une telle société.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. Les travaux de la commission sont ajournés sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 27)

Reprise de la séance à 15 h 36

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, messieurs!

Alors, les membres de la commission pour la présente séance sont: M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est)...

M. Grégoire: Remplacé, aujourd'hui, par M. Paquette.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Paquette est déjà inscrit comme intervenant.

M. Grégoire: Oui, alors comme membre à part entière, pour aujourd'hui, M. Bordeleau étant absent.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, M. Bordeleau (Abitibi-Est) sera remplacé par M. Paquette (Rosemont); M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt (Saint-François) et M. Raynauld (Outremont); les intervenants étant M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin (Mercier), M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Landry (Fabre), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Léger (Lafontaine) remplacé par M. Brassard (Lac-Saint-Jean); M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata)...

M. Grégoire: Remplacé par M. Clair.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... est remplacé par M. Clair (Drummond), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Décision du président

Avant de continuer les travaux de la commission... Le député de Saint-Laurent avait présenté, avant la suspension de midi trente, une deuxième motion demandant que cette commission exprime l'avis que le ministre des Richesses naturelles remette, avant le début de l'étude article par article du projet de loi no 70, aux membres et intervenants de cette commission, concernant un plan de développement relatif à la transformation au Québec de la fibre d'amiante en produits finis et ce, depuis le 26 novembre 1976, premièrement: le compte rendu des rencontres entre des représentants du gouvernement et les représentants des producteurs d'amiante ou de leur association; deuxièmement, une copie de la correspondance échangée en traitant de cette question.

Malgré que le député de Saint-Laurent ait employé, avec subtilité — je le confesse — le mot "remette" dans sa motion, la présidence ne peut faire autrement que de constater que cette motion s'apparente essentiellement et fondamentalement à une motion visant à une demande de dépôt de documents. Le sens et l'esprit de cette motion en font une demande de dépôt de documents. Or, il n'y a pas de dépôt de documents en commission

parlementaire. Bien sûr, le ministre peut, s'il le veut, distribuer aux membres de la commission parlementaire les documents demandés par le député de Saint-Laurent dans sa motion, mais au strict niveau de la procédure parlementaire, le seul moyen qu'a l'Opposition de forcer le gouvernement ou un ministre à déposer des documents, c'est de se prévaloir entre autres de l'article 175 de notre règlement qui permet à un député, par une motion annoncée à notre feuilleton, de demander, par exemple, au gouvernement des copies de correspondance ou toutes sortes de contrats que veulent avoir les députés de l'Assemblée nationale.

En résumé, cette demande s'apparente à une demande de dépôt de documents. Il n'y a pas de dépôt de documents en commission parlementaire. Le ministre peut, s'il le veut, distribuer lesdits documents demandés par le député de Saint-Laurent.

D'autre part, j'estime que le moyen mis à la disposition du député de Saint-Laurent et de ses collègues pour forcer le gouvernement à remettre ces documents, ce n'est pas une motion adoptée en commission parlementaire, mais les articles 175 et autres du règlement qui prévoient une façon privilégiée, solennelle et formaliste d'obtenir ces informations.

M. Lalonde: Une directive, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Le règlement m'empêche de discuter de votre décision, mais je ne peux oublier la décision que vous avez justement rendue ce matin à propos de ma motion qui se lisait à peu près comme suit: Donc, cette commission est d'avis que le ministre des Richesses naturelles remette avant le début de l'étude, article par article, du projet de loi no 70 aux membres et intervenants dans cette commission, etc., motion que vous avez déclarée parfaitement recevable sauf qu'à votre avis elle était prématurée, motion que j'ai donc déplacée dans mon cartable à l'article 4, suivant votre invitation.

Vous venez de me dire que la motion du député de Saint-Laurent était irrecevable parce qu'il emploie les mots "remette aux membres et intervenants d'autres documents ". C'est la même formulation que la mienne.

Une Voix: Même d'incertitude.

M. Lalonde: Je préférerais naturellement, M. le Président, un peu plus de cohérence de la part de la présidence dans ses décisions. Vous me remplissez d'appréhension quant à la façon dont je dois agir maintenant comme membre de la commission...

Une Voix: Même d'incertitude.

M. Lalonde: ... et même d'incertitude.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous admettrez avec moi qu'il y a une différence absolument fondamentale entre les deux motions. Dans celle que vous avez présentée, l'article 4 va effectivement donner ouverture à cette motion puisqu'il est précisément question de l'objet de la discussion, alors que, dans le cas de la motion présentée par le député de Saint-Laurent, en aucun moment, dans la loi, il ne pourrait présenter cette motion puisqu'il n'y a aucun article dans ce projet de loi qui pourrait donner ouverture à cette motion.

Alors, la vôtre avait trait au financement ou à l'évaluation du coût d'Asbestos Corporation, s'il y avait achat. Or, l'article 4 donne le pouvoir à la société d'acquérir une mine d'amiante. J'ai cru bon de référer votre motion à l'article 4 parce qu'il y avait ouverture, à l'article 4, pour ce genre de motion. Mais, en ce qui concerne celle du député de Saint-Laurent, je ne vois réellement pas où je pourrais renvoyer la présentation de cette motion.

D'autre part, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je dois vous dire ici que, dans la motion présentée par le député de Saint-Laurent, on demande une copie de la correspondance échangée. Avec le peu d'expérience parlementaire que j'ai, il m'est arrivé de lire le feuilleton à plusieurs reprises. J'ai souvent vu, par des questions écrites ou des motions, des députés de l'Opposition et même des députés du gouvernement demander à un ministre: Auriez-vous l'obligeance de me faire parvenir copie de toute correspondance échangée entre telle date et telle date, entre tel ministre et telle association?

Je pense que la nature des documents demandés, c'est-à-dire la correspondance, est passablement différente de votre demande qui n'est pas un échange de correspondance entre un ministre et des compagnies minières. En tout cas, c'est...

M. Lalonde: Si je comprends bien, M. le Président, le fait que j'emploie la même formulation pour que le ministre remette les documents n'entraînera pas le même sort à la mienne.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Absolument pas et, malgré le fait que vous voyiez une certaine incohérence...

M. Lalonde: Cela peut être dans la façon que vous l'avez formulée.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Peut-être, mais, en ce qui me concerne, je ne la vois pas. Ce qui m'a surtout laissé perplexe dans la motion du député de Saint-Laurent, ce sont les mots: "copie de toute correspondance échangée et traitant de cette question". Je sais qu'habituellement, la correspondance des ministres avec les compagnies ou autres organismes est demandée par des motions ou des questions au feuilleton.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Puisque vous jugez que ceci est analogue à un dépôt de documents, encore que rien dans notre règlement n'interdise de demander une distribution de documents et que le dépôt de documents se réfère au maintien d'un greffe de documents déposés, il y a une pratique générale qui admet qu'un ministre peut distribuer des renseignements aux membres d'une commission. Cela se fait souvent.

Quoi qu'il en soit, je pense qu'il est clair, d'après votre décision, qu'il nous serait possible de demander au ministre et à ses fonctionnaires de nous faire un exposé du déroulement de cette négociation qu'on peut présumer être en cours, entre l'industrie, d'une part, et le gouvernement, d'autre part. Ceci serait, j'imagine, tout à fait recevable. Je suis forcément tenté de formuler ma demande de cette façon.

Mais, avant de le faire formellement, j'aimerais, malgré tout, inviter le ministre à un peu moins de secret quant à un aspect important de la politique de l'amiante et l'inviter à ne pas se réfugier derrière le règlement pour refuser d'informer les membres de l'Assemblée nationale. C'est quelque chose qui est quand même d'ordre public. Il faut quand même réaliser que nous pourrions fort bien avoir — et je souhaite que nous en ayons une le plus rapidement possible — une loi qui fasse véritablement que des documents publics soient des documents publics et non pas des documents privés à l'usage exclusif du ministre. Il serait tout à fait normal que ces négociations, qui ont un impact direct sur la conclusion à laquelle en est arrivé le gouvernement d'intervenir par ses propres instruments qu'il veut se donner, par cette loi, dans l'industrie de l'amiante, que ce cheminement soit l'objet d'un exposé quelconque.

Autrement, j'en viendrai à la conclusion — et j'imagine que ce n'est pas la conclusion à laquelle le ministre voudrait nous voir arriver — qu'il n'y a absolument rien de fait du côté de la négociation et de l'élaboration d'ententes de développement, qu'on en est à un stade très préliminaire, qu'on en est encore à se pencher sur le dossier et à élaborer des hypothèses, mais qu'il n'y a rien de fait, qu'il n'y a aucun contact qui a été pris avec l'industrie et que, dans le fond, le gouvernement, sur ce plan comme sur d'autres, a imaginé quelle pourrait être l'issue de ses démarches auprès de l'industrie, et, par sur la base de ces imaginations, en vient à la conclusion qu'elles n'ont pas d'autres fondements que des créations de son imagination.

S'il y avait quelque progrès que ce soit, je ne vois pas ce qui empêcherait le ministre d'en faire part. S'il y avait des échecs ou des résistances bien caractérisés, cela aiderait évidemment les membres de la commission à se faire une opinion sur I'à-propos de la création de la Société nationale de l'amiante et, encore davantage, sur le geste le plus spectaculaire que posera cette société une fois formée qui sera vraisemblablement de prendre le contrôle et d'agir comme le propriétaire de la société Asbestos Ltée.

Encore une fois, avant d'en faire une motion formelle, j'inviterais le ministre à sortir de son mutisme pour une matière d'intérêt public, une matière qui a un impact direct sur la question en litige, si je puis m'exprimer ainsi, et de nous dire au moins quelque chose sur cette question.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un instant, s'il vous plaît! J'aimerais quand même — je vois tout le monde lever la main — rappeler les règles qui doivent nous guider; ce matin, le ministre a fait un exposé général; le député de Saint-Laurent, comme représentant de l'Opposition officielle, en a fait un également, et le député de l'Union Nationale, M. Brochu, a également fait son exposé.

Plus tard, je reconnaîtrai à tour de rôle les députés qui voudront bien parler, de façon générale, avant d'appeler l'article 1, tout en tenant compte de l'article 160 du règlement, c'est-à-dire des vingt minutes.

Ce matin, j'ai permis aux représentants des différents partis d'élargir, de dépasser les vingt minutes, amplement, à tout le monde d'ailleurs; tous les autres députés qui voudront prendre la parole pourront le faire avant que j'appelle l'article 1, non pas en entrant dans les détails, mais en parlant des principes du projet de loi. Par la suite, j'appellerai l'article 1.

M. Lalonde: Question de directive, M. le Président, suite à vos propos. Cela n'exclut pas la période de motions préliminaires, parce que ce n'est pas terminé?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, absolument pas. A l'occasion de votre droit de parole, vous pourrez toujours présenter des motions. M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Question de directive, M. le Président. Lorsque vous avez répondu au député de Marguerite-Bourgeoys sur la motion que vous avez conseillé de retarder à l'article 4, est-ce que cela veut dire que vous considérez cette motion comme reportée à l'article 4, mais non pas acceptée d'avance?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je tiens pour acquis que M. le député de Marguerite-Bourgeoys va la présenter à nouveau à l'article 4.

M. Laplante: Vous ne l'avez pas jugée recevable?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je l'ai déclarée prématurée et irrecevable; parce que prématurée...

M. Lalonde: Prématurée, mais recevable. M. Laplante: Elle sera jugée...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... sauf que je lui ai très clairement laissé entendre, je

pense, qu'elle serait déclarée recevable à l'article 4, puisque l'article 4 parle d'exploitation d'un gisement d'amiante et que la motion vise précisément à avoir les détails là-dessus.

Je répète — je pense que le député de Bourassa est en train de voir, comme le député de Marguerite-Bourgeoys, une certaine incohérence dans les deux décisions — je maintiens que le député de Saint-Laurent demandait un échange de correspondance entre le ministre et d'autres personnes et que le moyen pour obtenir cet échange de correspondance n'est pas une motion adoptée en commission parlementaire. D'ailleurs, cela demeurerait un voeu pieux tout simplement.

M. Laplante: Pour être plus clair, à l'article 4, si cette motion est représentée, est-ce que nous pourrons discuter à nouveau sur la recevabilité de la première motion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion du député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Laplante: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous dirai bien sincèrement que je pense que je suis suffisamment informé puisque tous les partis politiques ont parlé ce matin sur la recevabilité de cette première motion.

M. Laplante: Parce qu'il y a un élément nouveau qui est ressorti à travers tout cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous avez, à ce moment, des éléments nouveaux à faire valoir, vous pourrez les faire valoir.

M. Laplante: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'ailleurs, j'aimerais rappeler ici, et je pense qu'il faut bien s'entendre, que, lorsque je parle de motion préliminaire ayant pour but ou ayant trait à l'organisation de nos travaux, il faut comprendre que c'est l'organisation fonctionnelle et technique de nos travaux. Il ne faudrait pas élargir le sens de l'organisation de nos travaux pour présenter toutes sortes de motions préliminaires, parce qu'on pourrait toujours dire: C'est pour mieux organiser nos travaux. C'est, évidemment, l'organisation fonctionnelle, technique et pratique des travaux de la commission parlementaire. Je pense qu'on a intérêt, tous ceux qui ont des motions préliminaires à présenter, dans ce sens, à les liquider d'avance et, par la suite, à passer à l'article 1. M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, c'est justement concernant la directive que vous venez de donner. M. le député de Saint-Laurent veut avoir un supplément d'information et je pense que c'est le cas de la plupart des membres de cette commission. Une bonne façon d'en avoir, c'est de commencer l'étude du projet de loi, en particulier à l'article 1.

Or, dans votre directive, vous avez mentionné que, bien sûr, des motions sur l'organisation de nos travaux étaient encore possibles, mais je me demande justement si le fait que nous ayons commencé à recevoir de telles motions n'a pas mis automatiquement fin aux exposés généraux. Je me base sur le fait suivant: On a déjà eu 25 heures de débat, il y a eu 48 interventions sur la politique de l'amiante en général et le principe du projet de loi en particulier. Chacun des représentants des partis s'est déjà exprimé sur la question et, par la suite, on a commencé à recevoir des motions concernant la soi-disant organisation de nos travaux. Est-ce qu'on n'est pas rendu au point où, justement, seules sont recevables des motions sur l'organisation de nos travaux, à la suite de quoi nous devrons passer à l'article 1? A ce moment, nous pourrons accéder aux désirs du député de Saint-Laurent et recevoir une foule de renseignements liés au projet de loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je dois vous dire qu'en ce qui me concerne, je suis une politique différente de celles de tous les autres présidents. Je sais pertinemment que tous les autres présidents accordent au début le droit de parole seulement aux représentants des partis politiques, alors que, depuis un an, j'ai toujours donné le droit de parole, avant l'article 1, à chaque député qui manifeste l'intention, pour des raisons personnelles, d'émettre ses opinions sur le principe du projet de loi. Je ne pense pas que le fait que le député de Saint-Laurent ait parlé au nom du parti de l'Opposition officielle empêche quelque membre que ce soit de l'Opposition officielle d'émettre ses opinions personnelles sur ce projet de loi. La même chose s'applique évidemment au parti ministériel et je pense que cela va dans l'esprit de la revalorisation du rôle du député. En tout cas, c'est une chose qui...

M. Paquette: M. le Président, je n'en avais pas contre cette façon que vous avez d'interpréter votre mandat, mais sur le fait qu'on fait un peu du coq-à-l'âne. On a commencé par les exposés généraux, et, après cela, les motions de fonctionnement. Est-ce qu'on ne devrait pas terminer les exposés généraux et ensuite vider la question des motions de fonctionnement, pour ensuite attaquer l'article 1? Si tout le monde est d'accord...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je reconnaîtrai le prochain député qui demandera la parole. Exposés généraux.

M. Lalonde: Exposez-vous généralement.

M. Paquette: J'ai fait mon discours de deuxième lecture.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Drummond.

M. Clair: Dans le but d'être certain de bien comprendre l'entente qui intervient, j'en fais une

proposition formelle, en bonne et due forme, que, avant de passer aux motions préliminaires, on s'entende pour dire qu'on passe aux exposés généraux de tous et chacun des députés afin d'être certains de ne pas revenir en arrière et que cette entente ne soit remise en cause en aucun temps. (15 h 55)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On tombe réellement dans la procédurite. Je pense qu'il n'y a pas besoin de motion pour cela. Le président a pris note du fait que lorsque les exposés généraux seront terminés, nous en arriverons aux motions préliminaires. Est-ce qu'un député voudrait intervenir?

M. Lalonde: II n'y a plus d'exposés généraux?

M. Paquette: On a déjà fait notre discours de deuxième lecture!

M. Lalonde: Tout le monde levait la main tantôt!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: J'avais donné mon consentement pour rien, M. le Président, je suis trompé. On a quêté mon consentement pour qu'on procède aux exposés généraux...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, à vous la parole.

M. Paquette: C'était au cas où vous voudriez refaire votre discours de deuxième lecture.

M. Lalonde: M. le Président, si les exposés généraux sont terminés, et compte tenu des décisions que vous avez rendues jusqu'à maintenant, et... Avant de procéder, le député de Saint-Laurent me rappelle qu'il a posé une question au ministre, je pourrais laisser au ministre le loisir de répondre, s'il le désire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Grégoire: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: La question du député de Saint-Laurent était pour demander au ministre de faire un compte rendu à jour, pour dire où en sont rendues les négociations avec General Dynamics à propos de l'achat de l'Asbestos Corporation.

M. Forget: II faut préciser, si j'ai été mal compris.

M. Grégoire: C'est ce qu'il avait dit?

M. Forget: Non, c'est...

M. Raynauld: Vous avez mal entendu.

M. Forget: Le député de Frontenac se souviendra que, quand le premier ministre, le 21 octobre, a annoncé la décision de faire l'acquisition de la société, il a annoncé d'autres éléments de ce qu'il a appelé la politique de l'amiante du gouvernement. Parmi ces autres éléments, il y avait une motion qui circule au ministère des Richesses naturelles depuis de nombreuses années — douze ans, a dit le ministre actuel, c'est fort possible — selon laquelle, de façon générale, dans l'industrie minière, il y a des contrats de développement ou des ententes de développement qui lient, d'une part, le gouvernement et, d'autre part, une industrie. Cela peut être l'industrie de l'amiante, cela peut être l'industrie du cuivre, éventuellement, peu importe. On parle de l'amiante dans le moment.

Ma question visait tout simplement à faire le point, à inviter le ministre à faire le point sur ce volet de la politique de l'amiante puisque l'acquisition de la société Asbestos se situe dans un contexte. Le contexte est défini, entre autres choses, mais de façon très importante, par l'état du dossier dans les ententes de développement. Il me semblait, comme on ne peut pas demander la copie de la corresponsance, etc., ce qui nous aurait permis de nous en informer par nous-mêmes, qu'il nous serait possible, à la limite, M. le Président, de présenter une motion pour demander aux fonctionnaires du ministère et au ministre lui-même, mais surtout aux fonctionnaires, de comparaître devant la commission pour nous exposer où ils en sont dans leurs travaux.

M. Grégoire: M. le Président, je soulève la même question de règlement. Les renseignements que demande présentement le député de Saint-Laurent sont les mêmes que ceux demandés dans la motion et...

M. Forget: Oui.

M. Grégoire: ... la motion elle-même a été déclarée antiréglementaire parce que...

M. Forget: Cela n'a aucun rapport.

M. Grégoire: ... en relevant d'aucun des points ou des articles du projet de loi no 70.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, la raison fondamentale...

M. Grégoire: Si vous me permettez...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, je pense que vous avez mal interprété. J'ai dit que la motion du député de Saint-Laurent s'apparentait à une demande de dépôt de documents; or, les dépôts de documents n'ont pas lieu en commission parlementaire, sauf que le député de Saint-Laurent, si je comprends

bien, demande verbalement au ministre la question qui était dans la motion écrite.

M. Grégoire: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le ministre peut répondre ou ne pas répondre.

M. Grégoire: ... justement, la question traite de points et de sujets qui ne sont aucunement dans le projet de loi no 70. Il s'agit là d'un rapport verbal que demande le député de Saint-Laurent sur les ententes qui pourraient intervenir entre le ministère des Richesses naturelles ou, plutôt, le bureau de l'amiante, qui est déjà constitué, et des compagnies privées. Or, le projet de loi ne traite que de la constitution d'une société d'Etat qui pourrait acquérir des propriétés ou qui pourraient avoir un centre de recherche et de développement, qui pourrait faire de la transformation.

Mais cela sera fait par la Société nationale de l'amiante ou les compagnies filiales. Ce que le député demande à l'heure actuelle, ce sont des ententes entre le ministère des Richesses naturelles et des compagnies privées et non pas...

M. Forget: J'admets cela, M. le Président...

M. Grégoire: Ce n'est pas du tout dans le projet de loi.

M. Forget: ... c'est bien sûr. Non, ce n'est pas dans le projet de loi, mais le règlement ne nous force pas à l'imbécillité. On n'est pas obligé d'avoir des oeillères en regardant un projet de loi. On demande au ministre de nous éclairer sur le contexte dans lequel il nous amène à faire l'étude d'un projet de loi. Il me semble que c'est une demande des plus normales. Indépendamment de toute stratégie ou de tactique de l'Opposition, qu'on fonctionne à huis clos ou n'importe comment, il reste que c'est tout à fait normal de la part des membres d'une commission de demander au ministre responsable de leur donner un éclairage particulier sur le contexte dans lequel cette décision va se prendre. Mon Dieu! ce n'est rien que de très normal. Ce n'est pas de la procédure qu'on fait. On demande d'être éclairés, comme membres de la commission parlementaire des richesses naturelles, sur un élément important d'une politique gouvernementale qui a un impact sur la décision sur laquelle on doit se pencher.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ecoutez, je pense, M. le député de Frontenac, que la question du député de Saint-Laurent est parfaitement admissible, compte tenu du mandat de la commission et du sujet en cause. Je maintiens, d'autre part, qu'elle aurait pu être posée à un autre moment. Elle a été posée. Le ministre peut décider de lui répondre immédiatement. Par contre, comme il aura certainement beaucoup d'autres occasions de lui répondre à d'autres articles... C'est au ministre, évidemment, à décider.

M. Bérubé: Si j'hésite à m'engager dans cette voie, perche que je dirais tendue par l'Opposition, c'est pour la raison très simple que l'Opposition pourrait chercher à mener le débat sur toutes sortes de questions extérieures au projet de loi que nous avons à discuter, de manière à faire faire le maximum de temps à cette commission. Ce n'est donc pas une objection fondamentale. A titre d'exemple, on pourrait parler également de la loi sur la santé-sécurité, par exemple, qui est en voie de rédaction. En effet, cette loi aura un impact sur la rentabilité de l'industrie de l'amiante et, par conséquent, il faut s'attendre que, compte tenu de l'impact d'une telle loi pour la rentabilité d'Asbes-tos Corporation, on veuille, par exemple, convoquer ici le ministre d'Etat au développement social, de manière à connaître exactement le détail de son projet de loi, de manière à savoir si véritablement on doit appuyer la création de la Société nationale de l'amiante.

Donc, on pourrait convoquer ici un ministre qui pourtant n'a rien à voir avec le présent projet de loi, mais, toutefois, en arguant que, de fait, et cela demeure tout à fait plausible, il est nécessaire que les députés connaissent toutes les implications de tous les projets de loi, de toutes les mesures fiscales qu'envisage le gouvernement dans tous les champs possibles, de manière à pouvoir savoir à l'avance si l'engagement dans la Société nationale de l'amiante est un bon engagement. Donc, vous voyez le genre de traquenards, de pièges, que nous tend l'Opposition et auxquels il faut évidemment penser à deux fois avant de succomber, parce qu'il ne fait aucun doute que, si j'apporte un élément de réponse, la deuxième question sera: Pouvez-vous préciser ce point. Et il y aura ensuite débat autour de cette question et, finalement, on constatera que le débat n'a pas du tout porté sur le projet de loi, mais, au contraire, a porté sur le concept même des ententes de développement.

Voilà donc pourquoi j'y pense à deux fois avant de m'engager. Néanmoins, pour faire preuve de bonne foi vis-à-vis de l'Opposition, je suis d'accord pour non pas entrer dans le détail des négociations qui ont cours présentement avec diverses compagnies, pour des raisons, je pense, que l'ensemble des députés comprendra, même si l'Opposition ne comprendra pas... C'est qu'il faut réaliser que ces entreprises sont en compétition. Nous avons accès, présentement, à de l'information confidentielle sur des projets de développement de diverses entreprises, sur la situation de rentabilité de différents projets, et que, par conséquent, il n'est certainement pas sage de la part d'un ministre des Richesses naturelles, qui est en négociation avec une industrie, de venir révéler au grand public l'état des négociations en cours.

Donc, je parlerai plutôt de l'esprit général de ces ententes de développement pour vous montrer un peu dans quel sens elles vont et, à cet égard, je traiterai, peut-être, de trois points: taxation, recherche, transformation.

En effet, l'industrie minière a souffert assez sérieusement, en 1975, d'une augmentation subs-

tantielle du fardeau fiscal qui lui était imposé à la fois par l'augmentation par la province des taux d'imposition au niveau de la rente minière, par l'augmentation des impôts fédéraux et par la disposition d'un certain nombre d'abattements fiscaux.

Il en est résulté une certaine instabilité, une certaine insatisfaction au sein de l'industrie minière concernant les politiques d'à peu près tous les gouvernements canadiens. Il apparaît donc assez évident que l'industrie verrait d'un bon oeil une certaine stabilisation de son niveau de taxation et que ceci pourrait être négocié dans le cadre d'une entente.

Donc, on voit bien que le gouvernement pourrait s'engager à maintenir à un certain niveau ou même à signer des ententes spéciales pour le développement de nouveaux gisements. L'Ontario vient d'introduire ce type d'entente dans la mesure où un nouveau gisement se verra libéré des taxes minières traditionnelles jusqu'à ce que la capitalisation soit remboursée. On voit donc le genre d'entente qui peut prévaloir lors de la mise en place d'un nouveau gisement.

On peut imaginer, dans nos ententes, ce même genre de points. C'est donc un élément, je dirais une arme du gouvernement, face à l'industrie, donc un bonbon, une façon d'amener l'industrie à s'asseoir autour de la même table.

De l'autre côté, qu'est-ce que nous pourrions attendre de cette industrie? Nous pourrions attendre, par exemple, la participation de cette industrie à un effort de recherche. Vous savez sans doute que l'industrie des pâtes et papiers se cotise et finance un centre de recherche à Montréal. Ce n'est pas unique. Vous savez que l'Institut national de la recherche sidérurgique en France est également parrainé par un grand nombre d'industries sidérurgiques.

Il existe donc des laboratoires dans le monde qui sont financés, souvent à parts, partiellement par l'Etat, partiellement par les compagnies. On peut donc imaginer une négociation avec ces compagnies pour les amener à participer à un effort de recherche dans le secteur de l'amiante. Cela pourrait faire l'objet d'une entente de développement.

On peut également parler de la transformation. Vous n'êtes pas sans savoir que ces industries sont intégrées. Vous n'êtes pas sans savoir que ces industries ont des usines de transformation aux Etats-Unis et dans la plupart des pays du monde, le député de Frontenac en a énuméré un grand nombre dans le cas de la Johns-Manville. Il aurait pu s'amuser de la même façon avec la Canadian Carey; ASARCO, Turner & Ne-wall. Donc, le nombre d'entreprises de transformation dans le monde est élevé.

Par conséquent, il n'est pas du tout illogique de penser que l'on puisse amener ces compagnies, dans différents domaines, puisque toutes ces entreprises n'ont pas l'expertise dans les mêmes domaines, ces différentes sociétés à se mêler de transformation au Québec en participant à des projets conjoints avec d'autres transformateurs québécois.

C'est ce genre de discussions que nous avons présentement avec l'industrie. Nous cherchons à évaluer sa volonté de venir transformer au Québec. Je dois dire que dès le début, dès les premières rencontres que j'ai eues avec l'industrie de l'amiante, ces industriels m'ont fait part d'une attitude changeante de leur part, dans la mesure où, n'ayant peut-être pas envisagé de transformer au Québec, ils se montraient davantage prêts à l'examiner. On m'avait même fait des propositions assez concrètes à ce moment.

Cette attitude de l'industrie s'est traduite par la décision qu'elle a prise de financer une étude auprès de SORES pour examiner assez rapidement des secteurs dans lesquels elle pourrait investir. Par conséquent, si vous voulez, nous pouvons penser donner suite au rapport SORES, de concert avec l'industrie, dans le cadre de ces ententes de transformation.

Pour l'instant, vous devrez le reconnaître, ces ententes ne sont qu'en voie d'élaboration, elles sont à l'état embryonnaire. Dans la mesure où le bureau de l'amiante n'est en fonction que depuis quelques mois, dans la mesure où nous avons à peine terminé le recrutement du personnel, je dirais que le gros du travail a surtout porté sur des rencontres personnelles et des prises de contact entre ce bureau et les différentes sociétés de manière à établir un dialogue, je dirais assez franc, assez amical, à ce jour. Il faut se donner deux ans avant d'être capable d'évaluer à nouveau quel a été le résultat de cet effort. En effet, la notion d'entente de développement est une vieille notion, mais elle n'a pas été utilisée à ce jour. Par conséquent, il est encore beaucoup trop tôt pour être capable d'en évaluer l'efficacité. Je pense donc que nous devons nous donner le temps nécessaire pour jauger cette méthode de l'approche. (16 h 10)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le ministre. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, en tenant compte des décisions que vous avez rendues au sujet de nos deux motions et aussi en invoquant certaines considérations que vous avez mentionnées lors de la première décision, à savoir que dans les motions préliminaires, on pouvait, par exemple, proposer des séances publiques, proposer toutes sortes de modalités qui ont un impact direct sur le déroulement des travaux, j'ai l'intention de proposer à cette commission d'inviter des membres du milieu impliqué directement par le projet du gouvernement, de légiférer dans ce secteur, par la loi 70 d'abord, et aussi d'intervenir par l'acquisition de l'Asbestos Corporation.

Ainsi, plusieurs représentants de divers secteurs d'activités ont sûrement des renseignements qui pourraient nous intéresser grandement, nous aider à mieux délibérer, à savoir si nous devons légiférer, tout d'abord, et deuxièmement, de quelle façon nous devons légiférer. Ainsi, je voudrais, par exemple, que les représentants autorisés du Syndicat des travailleurs de l'amiante, les représentants des autorités municipales de Thetford Mines,

les représentants autorisés de General Dynamics, ainsi que les représentants de l'Association des mines d'amiante se fassent entendre ici, devant cette commission, afin de renseigner les membres et intervenants.

Je commencerai donc par une motion invitant les représentants de l'Association des mines d'amiante à se faire entendre. Je pense qu'on peut présumer de l'avis du leader du gouvernement, à savoir que cette commission ne siégera pas mardi prochain durant la matinée, qu'elle ne siégera pas non plus au cours de l'après-midi, mais qu'elle siégera le soir. Donc, on peut présumer que des gens soient invités formellement à venir se faire entendre à une heure précise, le 21 mars...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): 153...

M. Lalonde: Vous me lancez un numéro d'article, 153.

Motion pour convoquer

les représentants de l'Association

des mines d'amiante du Québec

Donc, je fais la motion suivante: Que cette commission invite les représentants de l'Association des mines d'amiante du Québec à se faire entendre le 21 mars 1978, à 20 heures, devant cette commission, afin de renseigner les membres et intervenants de cette commission.

Je fais cette motion formelle quant aux membres de l'Association des mines d'amiante, tout en vous ayant déjà indiqué, M. le Président, et aux membres de cette commission, que nous n'avons aucune préférence quant à l'ordre dans lequel nous voulons entendre les représentants des divers milieux représentant les différents syndicats des travailleurs de l'amiante. Mais ne sachant pas longtemps d'avance quels jours et à quelles heures cette commission siégera la semaine prochaine, je pense que je dois commencer quelque part. C'est la raison pour laquelle ma motion ne contient que l'invitation aux représentants de l'Association des mines d'amiante.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je déclare la motion recevable.

M. Grégoire: M. le Président, avant cela, je pourrais peut-être faire une demande au député de Marguerite-Bourgeoys. Il y a probablement intérêt à rencontrer non seulement l'Association des mines d'amiante, mais peut-être que le député de Marguerite-Bourgeoys a d'autres motions pour en rencontrer d'autres.

M. Lalonde: Oui, j'ai indiqué que...

M. Grégoire: Pourrais-je faire la suggestion au député de Marguerite-Bourgeoys de remettre cette motion et qu'il y ait une rencontre entre les deux partis pour établir la liste de ceux qu'on voudrait inviter et s'entendre sur une journée. Vous arrivez et vous demandez... On ne met pas de date. On pourrait s'entendre sur la date et sur l'endroit. Par exemple, si c'est l'Asbestos Corporation, il y aurait peut-être intérêt à le faire à Thetford pour visiter en même temps la mine. On pourrait remettre cette motion et toutes les autres semblables et en venir à une entente pour établir la liste de ceux qu'il serait intéressant d'inviter ainsi que préparer une espèce de questionnaire sur ce qu'on veut avoir d'eux, sur ce qu'on attend d'eux comme discussion et le leur faire parvenir avant. Je me demande si vous accepteriez de remettre cela à la prochaine séance. D'ici ce temps-là, on pourrait se rencontrer pour établir...

M. Lalonde: Je remercie le député de Frontenac de sa grande ouverture d'esprit à l'égard de ma demande. Il n'y a aucun doute que nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement et ses représentants pour établir la liste des personnes que nous voulons rencontrer ainsi que les questions, sans nous lier, sans nous restreindre à ces questions, générales que nous voulons leur poser. Je m'attends immédiatement que, du même souffle, le député de Frontenac propose la suspension des séances de cette commission jusqu'à ce que ces rencontres aient lieu.

M. Grégoire: Non, on peut continuer là-dessus. Le fait de les entendre ne viendra certainement pas à l'article 1, ni à l'article 2, ni à l'article 3, peut-être à l'article 4 ou à l'article 16. Nous pouvons continuer aujourd'hui nos délibérations. On a le temps de se rencontrer. Dès la prochaine séance, d'ici mardi prochain, on pourrait arriver après rencontre avec une liste conjointement établie. Vous pourrez en suggérer sur cette liste et nous aussi.

M. Lalonde: M. le Président, cela me surprend un peu.

M. Grégoire: Je crois que simplement suspendre les travaux en attendant de préparer la liste, ce n'est pas tellement de la collaboration. On est prêt à collaborer pour établir une liste de concert avec vous.

M. Forget: Parlez-vous au nom de la majorité, à ce moment-ci, ou en votre nom personnel?

M. Grégoire: Quelques-uns d'entre nous en ont parlé. Nous croyons la chose parfaitement acceptable, soit délimiter un temps, une journée ou deux...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys était prêt à proposer que la rencontre se fasse la semaine prochaine. De toute façon, il faut nous donner le temps de contacter les gens, etc. Il me semble qu'on a d'autres questions à régler sur le plan du

fonctionnement de la commission. C'est sûrement une raison pour poursuivre les travaux.

D'autre part, il me semble qu'aux articles 1, 2 et 3, il est peut-être moins utile d'avoir l'avis de ces différentes personnes. On pourrait commencer à étudier le projet de loi.

D'autre part, on a un mandat, évidemment de l'Assemblée nationale, pour siéger cet après-midi et ce soir. On devrait essayer, dans cet esprit de collaboration qu'on essaie d'établir, de faire tout ce qu'il est possible de faire, pour autant qu'on s'assure que les avis de ces personnes arrivent à temps pour qu'on puisse discuter intelligemment des articles clefs du projet de loi. Il me semble que c'est l'essentiel.

M. Forget: II n'est certainement pas question de poser des objections à l'offre de collaboration du parti ministériel pour ce qui est d'entendre les parties intéressées. On ne voudrait pas, d'un autre côté, en passant tout de suite à l'étude, article par article, se retrouver un peu assis entre deux chaises et constater la semaine prochaine que la liste que le député de Frontenac a à l'esprit est singulièrement plus courte ou différente de celle que nous avons nous-mêmes à l'esprit et qu'après la présidence nous dise — je ne peux pas présumer de ses décisions — qu'une motion analogue n'est plus recevable parce qu'on a quitté la période préalable où ces motions devaient être faites et qu'en vertu de l'article 4, on ne peut plus convoquer qui que ce soit. Il est difficile pour moi d'anticiper ces décisions, mais on voudrait être bien sûr qu'il y a un certain nombre de corps intermédiaires, comme on dit, ou de parties intéressées...

M. Grégoire: Est-ce que vous pourriez nous lire la liste que vous aviez en vue, sans présenter des motions différentes, seulement nous énumérer les noms au complet?

M. Forget: Oui, c'est très facile.

M. Lalonde: Je l'ai déjà donnée. Ce sont des représentants de l'Association des mines d'amiante, des représentants autorisés de General Dynamics, les représentants...

M. Forget: On dit bien de General Dynamics, on ne dit pas de la société Asbestos, mais des propriétaires, effectivement.

M. Lalonde: Troisièmement, les représentants du Syndicat des travailleurs de l'amiante. Enfin, les membres du conseil municipal de Thetford Mines. Ce sont ceux et celles, actuellement, qui sont l'objet de notre demande. Maintenant, cela n'exclut pas d'autres personnes que d'autres députés pourraient avoir à...

M. Grégoire: L'Association des mines, General Dynamics...

M. Lalonde: Oui, le Syndicat des travailleurs de l'amiante.

M. Grégoire: Lequel? Il y en a trois. M. Lalonde: Les syndicats...

M. Forget: Celui qui est impliqué principalement... Mais en général, les autres aussi, puisque plusieurs... Et je pense, tous les syndicats, à un moment ou l'autre...

Une Voix: CSN?

M. Forget: ... ont fait des mémoires. Ils y sont tous allés de leur contribution. Je pense que pour ne pas aviver des rivalités intersyndicales, par inadvertance, on est aussi bien d'être le plus large possible de ce côté.

M. Grégoire: Et l'Asbestos Corporation elle-même, vous l'avez mentionnée?

M. Forget: Oui, cela pourrait être utile, mais c'est General Dynamics qui, je pense, est peut-être... Sans aucun doute, l'Asbestos Corporation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Sur la même question, merci. En ce qui nous concerne, l'Union Nationale, cela rejoint une de nos préoccupations. D'ailleurs, j'en ai fait mention dans mes remarques préliminaires. J'aimerais bien qu'on puisse donner suite à cette ouverture qui semble se faire maintenant, c'est-à-dire de pouvoir obtenir les renseignements des différents groupes auxquels on vient de faire mention. J'avais même certaines propositions sous forme de motions à présenter à ce sujet. Si on peut aborder cette discussion dans un tout, comme cela, je pense qu'on va gagner du temps. Si le gouvernement maintient cette ouverture d'esprit et accepte d'entendre les opinions de ces personnes, je pense que cela va tout simplement accélérer les travaux de la commission.

Maintenant, j'aimerais qu'il y ait d'autres groupes qui soient ajoutés à ceux qu'on vient de nommer au cours des discussions. J'aimerais qu'on puisse entendre, en particulier, les dirigeants de SORES sur les possibilités de fabrication des produits d'amiante au Québec. On sait l'importance que revêt cet aspect dans tout le dossier qu'on s'apprête à étudier actuellement, à cause de différents éléments, à cause de différents sujets particuliers. Je pense que ceux qui ont été à la base de l'étude SORES pourraient, à ce moment, nous apporter un éclairage dont nous avons absolument besoin pour l'étude intelligente et complète du présent dossier. On peut simplement mentionner quelques éléments. On sait, par exemple, qu'il y a certains obstacles à la création d'une nouvelle firme dans le domaine de l'amiante, lesquels ont été mentionnés dans l'étude SORES. A ce moment, on pourrait avoir davantage d'éclairage là-dessus: La question des frais d'investissement et de commercialisation, les capacités de production excédentaire, par exem-

ple, qui représentent actuellement dans le paysage au niveau des Etats-Unis et du Canada...

Une Voix: Les représentants du parlement européen...

M. Laplante: La communauté économique européenne aussi, il ne faut pas l'oublier.

M. Brochu: M. le Président, si vous permettez, je vais continuer quand même...

M. Ciaccia: Ils ne prennent pas cela au sérieux, les députés ministériels.

M. Brochu: J'ai l'impression que quelques uns des députés d'en face ne prennent pas cela au sérieux, mais c'est un fait... c'est évident.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Laplante: ... communauté économique européenne.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond, à l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, M. le député de Frontenac!

M. Brochu: J'aimerais continuer, M. le Président, si vous me le permettez.

M. Grégoire: A part ça, est-ce qu'il y en a d'autres...

M. Bérubé: Est-ce qu'on invite le parlement européen?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! Vous ne proposez pas une commission...

M. Brochu: La communauté européenne a été proposée par un député du Parti québécois. La communauté des soeurs Grises, je pense, qui est mentionnée...

M. Grégoire: Est-ce qu'il faut aller en Europe pour les interroger?

M. Lalonde: ... commission "interrogatoire".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Richmond. (16 h 25)

M. Brochu: Pour revenir sur une note plus sérieuse, nous aimerions que soient inclus à cette liste les dirigeants de SORES, pour obtenir davantage de renseignements à ce niveau. Egalement, nous aimerions, en ce qui nous concerne, pouvoir avoir les remarques du comité des mines du CRDCE, c'est-à-dire du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, qui a fait un travail considérable sur toute cette question de la transformation de l'amiante, qui a des données fort pertinentes à nous présenter, qui a d'ailleurs des documents fort étoffés également. Il serait d'un grand intérêt pour nous de l'entendre puisque j'ai même cru m'apercevoir qu'après l'annonce de la politique de l'amiante que le gouvernement entend prendre, déjà, certains commentaires pourraient être émis, de la part de ces gens-là, qui pourraient même être de nature à aider le gouvernement. Je rappellerai au gouvernement que, justement, les documents qui ont émané de ce comité l'ont peut-être aidé à fabriquer sa politique en matière d'amiante. Je pense qu'après cette cristallisation de volonté politique au niveau du projet de loi 70, le gouvernement aurait intérêt à revoir le point de vue de ces personnes impliquées qui, par leur travail, ont donné lieu, pour ainsi dire, à cette politique de l'amiante. Alors, j'insiste sur ce point. Les dirigeants de la firme SORES, le comité des mines du Conseil de développement des Cantons de l'Est auraient grand intérêt à être entendus.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Le député de Frontenac posait des questions et je considère que ces questions sont sérieuses; même s'il semblait vouloir les faire dans un esprit de plaisanterie plus ou moins approprié, je crois que c'est tout à fait normal que les gens soient entendus...

M. Grégoire: Je pense que le plus plaisantin là-dedans n'est peut-être pas celui à qui vous pensez, mais celui qui parle.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Mais, comme ils peuvent poser des questions, à savoir s'il y a d'autres personnes qui devraient être entendues, je pense qu'effectivement, il y a des gens qui ont fait des contributions dans ce secteur. Je pense en particulier au Conseil régional de développement des Cantons de l'Est qui a fait une étude — cela a été mentionné, je m'excuse, je n'avais pas saisi — et il y a non seulement les auteurs de l'étude SORES, M. Legault et les autres qui ont été mentionnés par le député de Richmond, mais il y a également les études auxquelles a travaillé le professeur Roma Dauphin du département d'économique de l'Université de Sherbrooke, dont l'une d'elles n'est d'ailleurs pas publiée, n'est donc pas nécessairement facilement accessible à tous les membres de la commission, qui pourraient fort bien s'ajouter à la liste avec beaucoup d'à-propos.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A ce stade-ci, devant ce consensus qui semble se dégager de la commission, j'aimerais quand même vous informer des dispositions de notre règlement relativement à ces comparutions, et relativement surtout au mandat de notre commission parlemen-

taire. Il est bien entendu qu'un genre de motion comme celle présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys est pleinement recevable puisque j'en ai déjà reçu de semblables. Le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas spécifiquement utilisé l'article 153, puisque ce n'est qu'une invitation, il n'a pas "requis de", mais il invite quelqu'un et il est bien sûr que nous pouvons inviter un, deux et on peut inviter vingt-cinq organismes à venir devant nous, mais je voudrais quand même mettre en garde les membres de la commission parlementaire. S'il fallait que ces invitations se fassent à un nombre trop grand d'associations, on en viendrait peut-être à éliminer le but premier de notre commission qui est d'étudier le projet de loi article par article. On peut étudier un projet de loi article par article tout en convoquant certaines personnes à venir nous voir; c'est bien sûr, je le répète.

D'autre part, si on se sert de cette disposition du règlement pour inviter 15, 18 et 20 organismes, à ce moment-là, notre commission parlementaire se transforme presque en une commission parlementaire de première lecture et on ne remplit pas notre mandat d'étudier le projet article par article. Je vous rappelle l'article 152 qui dit qu'à la suite d'une motion annoncée, l'Assemblée nationale peut, par des instructions spéciales, étendre les pouvoirs d'une commission élue. Je voudrais tout simplement rappeler le corridor qui doit nous guider: étudier article par article le projet de loi. On peut inviter des personnes à venir nous rencontrer, mais il ne faudrait pas que, par le nombre de personnes que l'on invite, même par consentement unanime de tous les membres de la commission parlementaire, on en vienne à oublier notre mandat premier — non pas unique, mais premier — d'étudier article par article le projet de loi. Je soumets le tout à votre considération. Ce sont tout simplement des mises en garde, mais je voudrais respecter le mandat que nous avons, tout en invitant certaines associations.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys et, après, le député de Richmond.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai donc fait une motion formelle que vous avez acceptée, comme président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Lalonde: A la suite de cette motion, il y a eu des interventions qui m'ont indiqué que le gouvernement était prêt à considérer la possibilité d'inviter plusieurs personnes. Nous en avons donné une liste, nous sommes rendus peut-être à six ou sept. Ce n'est sûrement pas le but de ma motion de transformer, de changer la nature de cette commission, mais je pense que la motion est tellement importante... Elle l'est pour tous les membres de cette commission, elle l'est pour l'Assemblée nationale et elle l'est pour tous les Québécois, non seulement au point de vue symbolique, non seulement à cause de l'importance de l'industrie chez nous, mais aussi à cause des montants en jeu. Je ne pense pas, quant à moi, que d'entendre une dizaine, peut-être un peu moins, d'intervenants soit de nature à changer la commission, à la transformer en une autre sorte de commission. Là-dessus, je compte sur votre bon jugement, comme président, pour mesurer le moment où ce sera dangereux et nous rappeler, à ce moment-là, à l'ordre, quitte à recourir éventuellement à l'article 152.

I! me semble qu'il y a une espèce de consentement, enfin un commencement de consensus, sinon de consentement, à considérer positivement cette possibilité. Il n'y a aucun doute que nous allons nous fonder sur un accord formel ici, non seulement du député de Frontenac, mais aussi du ministre, pour considérer que notre demande est acceptée. Je ne peux pas aller beaucoup plus loin que cela, étant donné qu'il semble qu'on veuille l'accepter. Je fais appel au ministre pour nous indiquer s'il accepte formellement que cette commission convoque ou, enfin, invite les représentants de ces organismes ou les personnes que nous avons mentionnées, que le député de Saint-Laurent a mentionnées, de même que le député de Richmond. Lorsque cet accord sera formel, à ce moment-là, M. le Président, il s'agira de considérer comment nous organiserons le déroulement de la commission.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Délimiter le nombre de jours, et ainsi de suite.

M. Lalonde: Oui.

M. Brochu: M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui. Est-ce que vous n'auriez pas, dans ce sens-là... Moi, comme président, je semble constater un commencement de consensus, du moins tacitement, mais je ne voudrais quand même pas que le consentement, même unanime, de tous les membres de la commission vienne faire disparaître les dispositions de notre règlement relativement au mandat que j'ai. A titre de président, s'il y a une entente entre tous les partis ici représentés sur un nombre précis d'intervenants et si le nombre me paraît très élevé, à ce moment-là, je n'hésiterai pas à demander à un membre de la députation, quel qu'il soit, de présenter une motion, en vertu de l'article 152, pour que l'Assemblée nous donne un mandat plus large et que je me sente beaucoup plus en sécurité.

D'autre part, si je juge que le nombre est raisonnable et qu'il y a une entente entre les partis quant au nombre de jours ou au nombre d'heures à être allouées à chaque intervenant, à ce moment-là, on pourra se passer de l'article 152. Mais vous comprendrez que c'est par mesure de prudence que je fais cette mise en garde. Ce n'est pas une décision, en fait, c'est une constatation.

M. Brochu: M. le Président, sur la même question justement. Comme vous le dites si bien, je

pense qu'il semble se dégager un certain consensus, du moins autour de l'audition d'un certain nombre, restreint, de groupements se rattachant directement à l'étude du projet de loi en cours. Je comprends, par ailleurs, M. le Président, votre hésitation lorsque vous dites que vous voulez avoir la certitude d'avoir un mandat de l'Assemblée nationale pour mener les travaux de cette commission parlementaire dans son travail même, dans le choix de ses moyens.

Par contre, je vous rappellerai, M. le Président, que j'ai posé la question au leader du gouvernement à l'Assemblée nationale, demandant justement s'il serait possible d'entendre certains groupes, des experts ou des groupes intéressés directement par le projet de loi no 70, ce qui comprenait essentiellement les groupes visés par la proposition du député de Saint-Laurent et par les propositions que je viens de faire au nom de l'Union Nationale, à savoir des représentants de la municipalité, des syndicats, quelques syndicats, à savoir le groupe SORES et les trois principaux qui nous occupent: l'Association des mines, le CRDCE (Conseil régional de développement des Cantons de l'Est et l'association des mines comme telle. Donc, M. le Président, je pense que ce qui se dégage, c'est d'abord un certain consensus au niveau des gens, à s'entendre. Deuxièmement, je vous rappelle, M. le Président, qu'il semble qu'on ne veuille pas dépasser, à ce stade-ci, un nombre restreint de groupes, ce qui permettrait un travail assez court de ce côté, et permettrait à la commission, par la suite, de débloquer dans ses discussions de façon générale. Alors, M. le Président, je tiens à souligner aussi qu'il serait important, si ce consensus s'établit de façon générale et qu'on s'entend sur sept ou huit organismes, comme cela semble être le cas, qu'on puisse entendre ces organismes, avant de procéder à l'étude article par article, à cause des incidences, avec un calendrier...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Bien, là-dessus, j'ai une autre directive, pour les membres de la commission parlementaire.

M. Brochu: Je m'excuse, M. le Président...

M. Raynauld: ...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Bien, écoutez, c'est justement ce que je voulais dire; cela a rapport à cela. Encore là, je pense que les membres de la commission doivent savoir cela. Sans préjuger du sort de la motion du député de Marguerite-Bourgeoys, que j'ai déclarée recevable d'ailleurs, si elle est adoptée par cette commission parlementaire, il faut que les membres de la commission sachent que le corridor de discussion sera restreint quant aux questions à être posées en dehors du principe du projet de loi qui a été adopté en deuxième lecture.

Donc, ce qu'il faut bien comprendre, c'est que nous ne sommes pas une commission parlementaire ayant pour but d'entendre des organismes qui viennent nous soumettre des mémoires, et que les questions que je permettrai d'un côté ou de l'autre ne pourront jamais et jamais remettre en cause le principe du projet de loi, mais devront s'attaquer et se borner à des modalités du projet de loi. Il ne faut jamais oublier que le principe a été adopté en deuxième lecture et que je ne peux permettre à des associations invitées ce que je refuse aux membres même de cette commission parlementaire, c'est-à-dire d'attaquer le principe d'un projet de loi en commission. Alors je pense qu'on ne peut céder plus de droits qu'on en a. Même si la comparaison semble boiteuse, je l'utilise pour dire qu'autant le député de Marguerite-Bourgeoys ne peut présenter une motion pour battre en brèche le principe du projet de loi, autant je défendrai au ministre et à toute autre personne de poser des questions sur les principes du projet de loi à nos invités. Cela je pense, c'est important que ce soit dit.

M. Lalonde: Alors, M. le Président, il n'y a aucun problème là-dessus, d'ailleurs, même si on n'acceptait que ma motion, on serait lié par le mandat de l'Assemblée nationale; le principe est accepté, alors il n'y a aucun problème là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense qu'il fallait le dire.

M. Lalonde: Oui, je vous remercie de me l'avoir rappelé. J'invite le ministre à indiquer où il se situe là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion du député de Marguerite-Bourgeoys est déclarée recevable et reçue. Alors, discussion sur la motion qui se lit ainsi: "Que cette commission invite les représentants de l'Association des mines d'amiante du Québec à se faire entendre le mardi 21 mars 1978, à 20 heures, devant cette commission afin de renseigner les membres et intervenants de cette commission". M. le ministre.

M. Bérubé: Alors M. le Président, votre intervention ou votre directive a touché le point sensible et je pense que nous devons en être conscients tous ensemble. En effet, il ne s'agit pas ici d'une commission parlementaire de deuxième lecture, où, comme membres de la commission, nous viendrions entendre tous les intervenants susceptibles de donner leur idée de ce que devrait être la politique de l'amiante du gouvernement. Nous sommes ici mandatés par l'assemblée pour discuter, article par article, d'un projet de loi. Il va de soi qu'inviter, à titre d'exemple, le Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, qui a pris position politique sur une approche à une politique de l'amiante, c'est évidemment le faire pour des raisons politiques et non pour des raisons techniques. On n'essaiera pas de discuter de la structure du conseil d'administration, de la façon d'élire les administrateurs, on ne discutera pas du budget de la Société nationale de l'amiante, mais en fait nous discuterons, à savoir

si la politique gouvernementale de l'amiante est valable, compte tenu de ce qu'eux préféreraient, c'est-à-dire au contraire, l'achat total de toutes les mines de la région de Thetford, la fusion pour la création d'un moulin central avec également la création d'une régie de mise en marché. Voilà donc un débat politique qui a eu lieu en deuxième lecture et ce n'est certainement pas la place et ce ne doit pas être la place et ce ne devra pas être la place ici. En ce sens, je ne serais pas d'accord pour inviter des organismes dont les connaissances techniques n'aideront pas cette commission à pouvoir porter des jugements qui sont propres au projet de loi, mais qui, en fait, ne nous apporteront que des points de vue politique à une politique globale. (16 h 40)

Qu'est-ce que je constate? Dans le cas de SORES, il m'apparaît effectivement que, parlant de transformation, cette entreprise est certainement apte à éclairer cette commission concernant le développement d'une industrie de transformation au Québec. Lorsque je regarde le Syndicat des travailleurs de l'amiante, sa position antérieure a évidemment été plutôt politique puisque ces gens ont prôné la nationalisation intégrale de l'industrie. Par conséquent, l'intérêt qu'il pourrait y avoir porterait surtout sur l'état de l'usine en question, sur les problèmes de salubrité dans cette industrie, sur les problèmes de l'amiantose, sur l'impact que ça peut avoir sur la rentabilité de l'industrie.

On peut donc voir certaines raisons. Quant au conseil municipal de Thetford, je m'interroge, à moins qu'on parle de la localisation du siège social à Thetford, par exemple, M. le député, auquel cas je vois tout de suite le député de Richmond protester. Il trouverait beaucoup plus normal que le siège social et le laboratoire de recherche soient situés à Asbestos, il va de soi. Evidemment, il y aurait là un beau débat, mais, malheureusement, je pense que le siège social de la Société nationale de l'amiante n'est pas défini dans le projet de loi et j'y verrais là une déformation très nette des objectifs de l'Assemblée lorsqu'elle nous envoie siéger à cette commission.

Personnellement, je préférerais quelques heures de réflexion qui me permettraient de pouvoir prendre position et je préférerais attendre à ce soir pour donner un avis définitif.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense qu'à ce stade-ci, je me dois de redonner la parole au député de Marguerite-Bourgeoys puisqu'il a présenté une motion reçue et que le ministre nous dit qu'il demande un délai de réflexion. Qu'est-ce qu'on fait de la motion M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: M. le Président, je vais naturellement profiter de l'ouverture que le ministre a faite pour tenter de le convaincre. Je serais fort malvenu de suspendre le débat, sachant qu'il réfléchit actuellement, qu'il a demandé quelques heures de réflexion. Je pense que c'est dans un terrain très fertile que mes propos vont être semés et je man- querais à mon devoir si je ne profitais pas des largesses du règlement pour tenter de convaincre le ministre, non seulement d'apporter une réponse affirmative quant aux organismes qu'il a laissés en plan dans son exposé, mais aussi quant à ceux qu'il semble vouloir éliminer, à ma grande surprise, comme le Syndicat des travailleurs de l'amiante, comme le Conseil régional de développement de l'Estrie. Je pense que c'est faire fort peu de cas de la représentativité de ces organismes que de les éliminer au départ, quand on parle d'une politique de l'amiante, parce qu'il ne faut quand même pas "chausser " ses oeillères, comme dirait un de mes collègues, pour ensuite penser qu'on ne va discuter que du nom de la société, à l'article 1, de la constitution de la société, à l'article 2, un sujet encore très restreint.

C'est toute la politique de l'amiante du gouvernement qui est mise en question ici, qui doit être discutée, comme on l'a fait, d'ailleurs, au niveau de la deuxième lecture.

M. Bérubé: Nous devrons voter contre votre motion si c'est bien ce que vous entendez.

M. Lalonde: Comprenez-moi bien, je n'ai pas dit...

M. Bérubé: Je crois vous avoir bien compris.

M. Lalonde: Je n'ai pas dit qu'il fallait remettre en question le principe du projet de loi, mais dans ses modalités, dans les pouvoirs de la société, il y a toutes sortes de considérations pratiques qui ne sont pas que des considérations techniques. Le Conseil régional de développement de l'Estrie, par exemple, pourrait apporter un éclairage sur la façon de s'y prendre. Ce n'est pas le principe de la loi. Le principe de la loi, c'est la création d'une société avec un certain nombre de pouvoirs. Il ne faut pas non plus s'enserrer dans une attitude tout à fait fermée, à savoir que, si on suggère d'étendre les pouvoirs de la société, à ce moment-là, on viole le principe qui a été adopté.

Je pense que là-dessus, il va falloir que le président soit quand même juste. A l'égard d'un certain nombre d'articles, il n'y a aucun doute que le Syndicat des travailleurs de l'amiante et le Conseil régional du développement auront des propositions, des suggestions à faire, qui n'iront pas à l'encontre du principe. Il faut bien que le ministre me comprenne là-dessus. Lorsque, à l'article 4, on parle de la recherche, du développement et de l'exploitation de gisements d'amiante, y compris la mise en marché de la production, il faut faire confiance à ceux qui sont dans le milieu depuis si longtemps, comme le Conseil régional de développement de l'Estrie et le Syndicat des travailleurs de l'amiante, pour nous apporter des données qui vont nous éclairer sur la façon d'aménager les pouvoirs de cette société. Cela ne va pas à l'encontre des principes, au contraire. Cela va dans le sens d'habiller ces principes avec des modalités bien réalistes qui vont permettre au gouvernement d'avoir une politique de l'amiante plus articulée et plus efficace.

Quant à l'Association des mines d'amiante plus particulièrement, naturellement, le ministre semble tenté... enfin, il ne l'a pas éliminée, au départ, comme il a semblé le faire pour le syndicat et pour le conseil régional.

Par exemple, en ce qui concerne le conseil municipal de Thetford Mines, voilà des gens qui sont intéressés au plus haut point à ce que la société obtienne dans la loi des pouvoirs suffisants, bien déterminés, bien décrits, pour que l'aménagement de toutes les activités de transformation que la société pourrait faire soit fait en conformité avec un plan de développement, un plan d'urbanisme de la ville de Thetford Mines, et cela, en laissant de côté la question du siège social. Je sais que le député de Frontenac fera son devoir pour obtenir que le siège social de la société soit situé chez lui. Si le député de Richmond et le député de Frontenac ne s'entendent pas, on pourra toujours l'installer dans le beau comté de Marguerite-Bourgeoys. Il n'y a aucun doute, c'est comme Merlin, que mes électeurs se réjouiraient d'avoir le siège social de la Société nationale de l'amiante chez eux.

M. Laplante: Vous passeriez avec 500 000 de majorité.

M. Lalonde: M. le Président, que le député de Bourassa ne s'inquiète pas de ma majorité, dans quelques mois, il verra qu'elle aura grandi des erreurs multipliées du gouvernement.

M. Laplante: ... elle a grandi à 6000. Je suis content, dans quelques mois...

M. Lalonde: M. le Président, je vais suspendre mon propos au sujet de la motion, espérant que d'autres interventions pourront élargir encore davantage la bonne volonté du ministre, la bonne foi des députés ministériels quant à notre motion. Vous savez, peu de députés autour de cette table peuvent dire qu'ils sont experts dans l'établissement de sociétés nationales, encore moins de sociétés nationales de l'amiante, encore moins dans les activités plus précises que le gouvernement destine à cette société, à savoir la recherche, le développement et l'exploitation de gisements d'amiante, la mise en marché de la production, toute activité industrielle, manufacturière ou commerciale reliée directement ou indirectement à la transformation de la fibre d'amiante. C'est très large. Je pense que ce n'est pas être trop modeste que de dire que nous avons besoin d'éclairage.

Le ministre, naturellement, est entouré d'experts qui peuvent lui donner des paramètres, des informations, des renseignements, qui peuvent le diriger, le conseiller, mais il faut quand même tenir compte du fait que c'est la commission parlementaire et non pas le ministre qui va décider. La commission parlementaire est l'émanation de l'Assemblée nationale et c'est le pouvoir législatif. Le ministre fait partie du pouvoir exécutif. Si c'était seulement le ministre qui décidait, on n'aurait pas besoin d'être ici, on s'en irait chacun chez soi. Mais, pour faire notre travail comme il faut, il faut que nous soyons éclairés davantage.

Nous n'avons, actuellement, qu'une décision gouvernementale. Nous avons un mémoire, une étude que l'OPDQ a déclaré être tout à fait insatisfaisante. Nous avons un commencement de projet de mémoire d'un ministre...

M. Grégoire: Pourrais-je vous poser une question?

M. Lalonde: ... le troisième avant-projet, je pense, et une lettre du fédéral. Voilà ce que nous avons pour nous décider. C'est à savoir si nous faisons une bonne loi actuellement. Je pense que, quant à moi, je n'ai pas suffisamment de renseignements.

M. Grégoire: Pourrais-je vous poser une question?

M. Lalonde: Oui, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Etant donné que cette motion porte sur une invitation aux représentants de l'Association des mines d'amiante du Québec, pourriez-vous nous éclairer en nous disant quelles sont les questions que vous avez l'intention de leur poser en fonction de la loi 70?

M. Lalonde: Oui...

M. Grégoire: Pourriez-vous nous éclairer pour voir si cela vaut la peine de les déranger et de les faire venir, parce qu'on sait qu'ils ont déjà présenté un rapport étalant complètement leur position sur la politique de l'amiante du gouvernement du Québec? Vous avez dû le lire, je suppose, du moins je le crois. Pourriez-vous nous indiquer quelles sont les questions que vous avez l'intention de leur poser?

M. Lalonde: Le député de Frontenac ne peut pas s'imaginer une seule question à poser à l'Association des mines d'amiante?

M. Grégoire: Oui, mais je voudrais savoir quelles sont celles que vous avez l'intention de poser.

M. Lalonde: S'il en a déjà à l'esprit, pourquoi ne fait-il pas confiance aux membres de cette commission pour poser les questions pertinentes?

M. Grégoire: Celles que j'aurais à leur poser, ils leur ont répondu dans leur mémoire étalant leur position. Ce sont eux autres qui ont étalé leur position.

M. Lalonde: Naturellement, si le député de Frontenac a une connaissance totale et entière de la question...

M. Grégoire: Non, je ne dis pas cela, mais, est-ce que vous avez des questions? En avez-vous une comme exemple?

M. Lalonde: ... je ne pourrai pas l'accuser de modestie.

M. Grégoire: En avez-vous une? Donnez-nous une question.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Grégoire: Si vous nous en donnez une, on va voir.

M. Lalonde: M. le Président, je ne pense pas que le député de Frontenac contribue, de façon intelligente...

M. Grégoire: Non, mais seulement une question. C'est quand on n'a pas de réponse. Une question.

M. Lalonde: ... aux délibérations en tentant de réduire le débat justement à une question qu'on aurait à poser. Ce n'est pas très sérieux. Nous allons... Nous le sommes d'ailleurs. Normalement, je ne dirais pas au député de Frontenac quelle question j'ai à poser, parce que, si c'était au député de Frontenac que j'avais à poser la question, je la lui poserais maintenant, mais, c'est à des intervenants qui seront invités ici. Je pourrai changer d'idée d'ailleurs sur les questions, d'ici au moment où ils viendront devant nous. Je ne pense pas que ce soit là une contribution sérieuse du député de Frontenac aux délibérations.

Si je lui disais, par exemple, les deux ou trois principales questions qui me viennent à l'esprit, il m'accuserait, lorsque les représentants seraient devant nous, d'avoir changé d'idée, de l'avoir trompé, d'avoir retenu des questions et d'avoir manqué de transparence.

Je pense que nous devons laisser à chaque membre de cette commission la liberté complète de poser les questions à l'intérieur du corridor que le président nous a bien défini...

M. Paquette: Défini par le président!

M. Lalonde: ... des questions que nous pensons pertinentes au moment où nous aurons à converser avec ces gens.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je pense que, justement, la question du député de Frontenac a pour effet de savoir quels organismes peuvent contribuer, dans le cadre du corridor défini par le président de la commission... (16 h 55)

Evidemment, je pense qu'on est d'accord sur le principe de recevoir un certain nombre d'organismes dans un temps limité qu'il s'agit de définir, pour nous éclairer, j'irais même jusqu'à dire sur le contexte dans lequel la loi se situe. Toute question qui est reliée à un article, au sujet d'un article du projet de loi, puisque c'est la tâche qui nous est confiée par l'Assemblée nationale, est tout à fait pertinente, mais encore faut-il s'assurer que les organismes qu'on va convoquer pourront nous donner des renseignements sur ces articles. Si tous les partis sont d'accord, je suggérerais qu'on mette cette proposition du député de Marguerite-Bourgeoys et toute la question des organismes à inviter sur la glace jusqu'à 20 heures ce soir. Il nous reste une heure de travaux. On pourrait passer, d'ici là, aux autres motions ou questions que les députés veulent soulever sur le fonctionnement de la commission. Nous pourrions réfléchir à cette question et déterminer une période fixe pendant laquelle nous pourrions recevoir les organismes, pour autant que ces organismes puissent nous éclairer sur le projet de loi dans le cadre du corridor défini par la présidence.

J'aimerais savoir si les autres partis sont d'accord sur cette suggestion. Si oui, j'aimerais qu'on passe aux autres modalités de fonctionnement, qu'on vide cette question et qu'on revienne ce soir, à 20 heures, à la question des organismes à convoquer, parce qu'on n'y arrivera pas, de la façon qu'on est parti.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant de céder la parole au député de Saint-Laurent et tout en parlant encore du corridor, puis-je me permettre de vous dire qu'il y aurait peut-être deux façons possibles de procéder? C'est-à-dire que les organismes invités — vous pourrez réfléchir là-dessus, c'est une suggestion de la présidence; tenez pour acquis que la présidence est là pour protéger le respect de notre règlement et du principe du projet de loi — pourraient être invités aux séances de la commission parlementaire. On pourrait alors adopter l'un des deux modes suivants: Premièrement, chaque association présente un exposé formulant les observations qu'elle désire, mais portant uniquement sur tel ou tel article spécifique de la loi. En résumé, telle association vient dire: Je demanderais l'article 1 de telle façon, l'article 8 de telle façon. Deuxième façon de procéder: A l'appel de chacun des articles de la loi, on demande aux organismes présents s'ils ont des observations. Exemple: article 1. Est-ce qu'il y a des organismes qui veulent se faire entendre sur l'article 1? Ainsi, on sera assuré qu'il ne sera pas question du principe et que la commission se conformera strictement à son mandat, c'est-à-dire celui d'étudier le projet de loi article par article. Je pense que cela limite encore plus le corridor.

M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je ne cède pas mon droit de parole, mais, si c'est une question très brève qui appelle une réponse brève, je suis bien prêt à laisser parler le député de Bourassa.

M. Laplante: En somme, on parle d'inviter des gens. Le député de Saint-Laurent nous a remis un mémoire au début de la séance. Aucune signature dans le mémoire, on ne sait pas si c'est véridique.

On ne sait pas où cela a été pris. Est-ce que vous auriez objection...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Bourassa, vous êtes complètement à l'encontre du règlement.

M. Forget: Je n'ai pas d'objection à répondre à la question du député de Bourassa.

M. Laplante: Pour finir ma question: Est-ce que vous auriez objection qu'on invite au moins celui qui a fait ce mémoire pour qu'on puisse le connaître, pour avoir des références?

M. Forget: Je vais vous référer à ce qu'a dit votre ministre hier en déposant un document du même acabit. Il nous a, fort savamment d'ailleurs, développé une théorie constitutionnelle qui m'était inconnue et qui, j'en suis sûr, est du droit nouveau, mais qu'on doit accepter, je pense bien, comme étant la nouvelle situation de droit quant aux documents pubiics, c'est-à-dire qu'un document non signé, mais ayant toutes les apparences d'avoir été fabriqué sur la papeterie officielle du gouvernement, était un document officiel, et que, quand il était signé, par contre, il n'engageait que son auteur; mais un document non signé était un document gouvernemental.

M. Bérubé: Je m'oppose, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La question à l'encontre du règlement du député de Bourassa a amené une réponse à l'encontre du règlement.

M. Forget: Je vous réfère...

M. Bérubé: Pourrais-je faire un commentaire à l'encontre du règlement?

M. Forget: Je vous réfère au journal des Débats d'hier.

M. Laplante: C'était intéressant...

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Laplante: Qui a signé ce document?

M. Forget: Je reprends mon droit de parole, mais sur le sujet original que j'avais à l'esprit. Je le ferai sur la motion du député de Marguerite-Bourgeoys. Je le fais pour réagir à la fois à ce qu'a dit le ministre, dans un premier temps, et à la question-commentaire qu'a formulée le député de Frontenac.

Premièrement, j'ai été saisi d'étonnement en entendant la distinction assez curieuse qu'a faite le ministre entre des interventions de caractère politique émanant de groupes, qui pourraient être invités devant nous, et des interventions de caractère technique. Il est clair que les illustrations qu'a choisies le ministre, à savoir, d'une part, le CRDE, les syndicats, ou, d'autre part, le conseil municipal, illustrent sa pensée et, d'ailleurs, il l'a fait de façon assez explicite. Il a dit: Ces organismes-là se sont exprimés dans le dossier, ils se sont, en quelque sorte — ce n'est pas lui qui l'a dit, mais il l'a laissé entendre — disqualifiés de se prononcer sur les aspects du projet de loi, et on doit présumer d'avance que, s'ils viennent devant nous, ils ne respecteront pas...

M. Bérubé: ... M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Vous me corrigerez après, si je vous ai mal interprété. C'est clair que vous avez indiqué qu'on n'avait pas d'intérêt à entendre ces groupes puisqu'ils s'étaient déjà commis vis-à-vis de la politique gouvernementale et qu'ils ne pourraient pas respecter l'esprit de nos travaux, ni même vos directives, M. le Président, et se confiner à des commentaires sur des articles du projet de loi. Je pense que c'est présumer beaucoup. Je pense que l'opinion du ministre n'était pas définitive. Il a exprimé un doute — je le veux bien — mais c'est un doute assez curieux, surtout au sein d'une commission parlementaire, que de dire qu'on n'invitera pas ou que ce n'est peut-être pas opportun d'inviter tel ou tel groupe, parce qu'il pourrait exprimer des opinions politiques. Si c'était cela, je pense bien qu'on n'inviterait plus grand monde, parce que cela arrive assez fréquemment, malgré tout, j'ai cru remarquer cela...

M. Bérubé: ... déjà assez.

M. Forget: Oui. J'ai cru remarquer que cela arrivait de temps à autre que des organismes expriment des opinions politiques. Après tout, on est ici pour les entendre et être en désaccord ou en accord avec les opinions qu'ils expriment, ce qui ne veut pas dire qu'à l'occasion de l'expression d'opinions, auxquelles ils ont droit comme n'importe quel autre citoyen du Québec, ils n'ont pas des points de vue à faire valoir quant à la façon dont leurs intérêts particuliers ou leurs connaissances particulières du milieu peut aider à éclairer. Je pense que cela, c'est assez normal de voir que, par exemple, le conseil municipal... Et cela m'amène à toucher un peu le deuxième aspect, auquel je pensais tout à l'heure, la question du député de Frontenac.

Le conseil municipal, bien sûr, a pu se prononcer dans une telle ou telle direction sur un plan politique, mais il a aussi des choses à nous dire pour nous faire saisir les problèmes, par exemple, d'aménagement urbain et les coûts d'aménagement urbain ou du réaménagement urbain qu'implique une industrie comme celle-là et les implications qu'il pourrait vouloir voir dans la loi ou ne pas vouloir y voir, quant aux obligations de la Société nationale de l'amiante, vis-à-vis de ce genre de problème. Même si ces conseils se sont exprimés sur un point de vue politique, je pense que j'aimerais bien savoir quel genre de préoccupations, ils ont à l'esprit et si, oui ou non, la loi, dans sa facture actuelle, à tel ou tel article, les satisfait à cet égard-là. La même chose pour le CRDE.

Je pense bien que ces gens sont assez honnêtes pour accepter les balises des lois, du fait que la deuxième lecture est passée, et pour nous donner, sur la base des principes déjà acceptés, au moins des réactions, en disant comment limiter les dégâts en faisant telle ou telle chose, en faisant ce que vous voulez faire, qui n'est pas de notre goût, mais en le faisant au moins de telle et telle façon, avec telle et telle modalité, et cela pourrait être utile. C'est le genre de question que l'on a à l'esprit, bien sûr. Vous ramènerez à l'ordre nos invités, M. le Président, s'ils s'égarent dans des propos politiques comme le dirait le ministre, mais, je pense bien qu'ils ont des choses à nous dire.

L'Association des mines d'amiante a certainement des choses à dire en particulier et ceci est, quant à moi, un peu un fait nouveau, quant à sa divulgation publique, étant donné ce que vient de nous dire, il y a une heure à peine, le ministre des Richesses naturelles, relativement au cheminement de ces discussions, sur les contrats ou les ententes — je ne me rappelle plus quel est le terme exact disons les ententes de développement.

Le ministre nous a quand même dit une chose qui, à mon avis, est intéressante. C'est que, sans pouvoir être absolument sûres actuellement les conclusions du rapport SORES pourraient s'actualiser par une collaboration volontaire de la part de l'industrie, ce qui laisse soupçonner que, dans le fond, la société de l'amiante, tout en étant créée et tout en se réalisant conformément au principe adopté en deuxième lecture, pourrait ne pas nécessairement déboucher sur une prise de possession d'une industrie ou d'une entreprise particulière au sein de l'industrie, puisque, déjà, on voit que la politique en question pourrait s'actualiser autrement. J'aimerais bien avoir des commentaires. N'oublions pas une chose, c'est que l'Association des mines d'amiante, comme l'a indiqué le ministre, a eu une attitude qui a varié dans le temps et de façon assez remarquable. Je crois que le point tournant est intervenu au début de 1975. Avant 1975 et avant l'incendie, avant les travaux du CRDE, avant les mémoires de la CSN et de la CSD, ils n'avaient peut-être pas pris conscience de leurs obligations sociales et ces événements ont rendu palpable, pour eux, le fait qu'ils étaient devant une situation qu'ils ne pouvaient plus ignorer.

Au début de 1975, l'association a commencé à reconnaître l'existence de ces obligations sociales et c'est d'ailleurs ce qui l'a amenée à financer l'étude SORES — donc, il y a déjà eu une évolution à ce moment-là — étude que l'association a financée seule puisque le gouvernement, à l'époque, n'avait pas voulu s'y associer, étant encore méfiant de ses intentions. On se demandait, du côté du gouvernement de l'époque — et je pense que c'est facile à saisir — si son désir de nous impliquer dans le financement de l'étude était de nous' impliquer, au fond, dans sa conclusion qu'on pouvait soupçonner à l'époque d'être plutôt négative vis-à-vis de la possibilité d'une transformation. On a été heureusement surpris par les résultats de l'étude. Encore que ce ne soit pas tout en rose, le tableau que trace l'étude SORES! Il reste que cela n'a pas évolué de façon aussi pessimiste qu'on avait pu le croire. C'est d'ailleurs pourquoi la décision aurait pu être moins méfiante, de la part du gouvernement de l'époque, et il aurait pu accepter de se joindre au financement pour, peut-être, en accélérer la réalisation. Mais, peu importe.

Il reste qu'il y a eu cette évolution, une évolution qui se continue. Donc, c'est le genre de questions que l'on aimerait poser. Etant donné cette évolution, étant donné les constatations que vous avez faites durant les derniers mois, jusqu'à quel point, dans l'actualisation de l'article 4, par exemple, voyez-vous le gouvernement s'engager? C'est une question qui respecte le principe de deuxième lecture et ce n'est qu'une indication générale du genre de questions qu'on peut poser, mais qui seraient extrêmement éclairantes pour les membres de la commission.

En terminant sur ce sujet, un dernier point, M. le Président. Je remarque — et cela arrive souvent au début de l'étude d'un projet de loi majeur — que le côté ministériel se sent, au fond, à l'orée de la forêt. Les ministériels sentent qu'ils ne sont pas sortis du bois et puis ils se disent: Cela va être long, etc. Je comprends que cela va être long. D'accord, tout le monde le sait, on ne fait pas de secret. Cela va être long parce que c'est un projet important...

M. Grégoire: ... dans le tunnel, vous voulez dire.

M. Forget: ... et on va effectivement vouloir en débattre longuement. C'est correct, je pense que c'est accepté de part et d'autre. Mais pourquoi ne pas le faire dans un esprit un peu plus positif? On ne vous tend pas de traquenard, on voudrait tout simplement que la population soit sensibilisée à ce qui nous apparaît, nous, être des raisons qui ne favoriseront pas votre opinion. Si votre opinion est valable, si vous êtes sûrs des conclusions auxquelles vous êtes arrivés, vous ne pouvez pas perdre sur le grand éclairage.

Donc, ce n'est vraiment pas un piège qu'on vous tend. Ce ne peut être un piège; cela ne pourrait justifier votre espèce d'allure défensive relativement à ces invitations que si vous pensez qu'on va avoir des révélations d'une contradiction flagrante avec la politique que vous avez suivie. Il n'y a vraiment pas de raison de douter; moi, il me semble que si j'étais à votre place, je ne douterais pas de l'occasion de faire un éclairage plus grand sur une chose qui, quand même, est drôlement importante. De toute manière, on va y passer du temps, à cette étude; autant passer le temps de façon utile, de façon éclairante pour l'opinion publique, que de le faire dans des débats stériles où on ne va faire que s'engueuler de part et d'autre de la table sur la base de positions qui sont déjà connues d'avance. Pourquoi ne pas faire intervenir des éléments nouveaux dans le dossier?

Encore une fois, si votre décision est bonne, décision de prendre le contrôle de la société Asbestos et de faire un certain nombre d'autres choses, cela va apparaître encore plus clairement

avec la participation de groupes qui sont parfois neutres, parfois pas neutres, mais qui ont une connaissance du milieu qui n'est certainement pas représentée là, malheureusement, à cette table. Donc, allons-y, ne craignons ridn. Ce n'est pas un traquenard qu'on vous tend, la procédure nous permet de passer autant de temps que celui qu'on passerait de toute manière en entendant des gens de l'extérieur. Pourquoi ne pas le faire utilement?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais brièvement parler sur cette motion. Je voudrais surtout insister sur le fait que...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voulez-vous rapprocher votre micro, s'il vous plaît?

M. Raynauld: ... si on interprète très étroitement, et trop étroitement, les articles du règlement qui nous limitent à un débat sur des modalités, à la limite, on pourrait ne plus discuter du tout. Je lis l'article 4 qui détermine les objets de la société; il me semble que si on a le droit de se poser des questions sur les objets de cette société qu'on veut créer, je pense aussi qu'on a le droit d'avoir des informations sur les implications pour une société comme celle-là de s'engager dans des activités qui sont prévues à l'article 4. Et on admettra que cet article 4 est tellement général que cette société peut, en réalité, en vertu de cet article, s'engager dans à peu près n'importe quelle activité qui est de près ou de très loin reliée à l'amiante. Cela implique que l'on doit se poser des questions sur les implications d'une décision comme celle-là. (17 h 10)

En effet, l'article 4 ne restreint pas la Société à l'achat d'Asbestos, on ne le mentionne même pas là-dedans. Cette société a pour objets, comme on dit ici, de s'engager dans la recherche, l'exploitation, le développement de tout gisement d'amiante; c'est donc une activité minière. Elle a le droit. A ce moment là, j'aurais moi aussi le droit de me demander quelle va être la relation qui va exister entre cette société et SOQUEM, par exemple. Je pense que c'est une question légitime et cela s'applique à l'article 4, sur des modalités d'application. Je crois aussi que, lorsqu'on passe au paragraphe suivant et que l'on dit que la Société peut aussi entreprendre toute activité de nature industrielle reliée directement ou indirectement à la transformation de la fibre de l'amiante, cela peut nous mener très loin parce qu'indirectement reliée à la transformation de la fibre de l'amiante, cela veut dire toute utilisation. On pourrait se lancer dans la fabrication, je ne sais quoi, d'automobiles, de cendriers, si l'on décidait que l'extérieur pourrait avoir un certain contenu d'amiante. Je pense que, même si l'on ne discute pas du principe de la loi, l'article 4, tel qu'il est rédigé, nous autorise certainement à poser des questions et à rencontrer des gens qui sont dans ce métier depuis et qui pourraient nous éclairer.

Je regarde ensuite l'article 16; l'article 16 donne des pouvoirs d'exception, si je puis dire; ces pouvoirs d'exception sont également extrêmement larges, mais, ici, on veut les restreindre parce que l'on exige l'autorisation du gouvernement. Quoi qu'il en soit, on a le droit de s'interroger également sur la portée d'articles comme ceux-là, d'acquérir les entreprises, par exemple, poursuivant les mêmes fins ou des fins similaires, disposer d'une partie ou de la totalité de son domaine minier. Cela veut dire quoi? Cela veut dire que la société n'aurait pas le droit de se départir, par exemple, d'un domaine minier, de réserves ou de mines proprement dites, sans l'autorisation du gouvernement. Je pense que cela nous amène certainement à examiner les implications de l'ensemble de ce projet de loi et de l'ensemble des modalités, par conséquent, des politiques de l'amiante que ce projet de loi nous amène à considérer.

Ceci dit, j'ai l'impression que l'on pourrait effectivement avoir une très longue liste de gens que l'on pourrait inviter. Je serais favorable, en ce qui me concerne, à avoir une liste qui ne serait pas trop longue; je ne pense pas qu'il faudrait être tellement excessif et demander des avis à l'ensemble de la population, mais je crois qu'il y a un certain nombre d'organismes qui ont été mentionnés tout à l'heure et qui sont reliés de très près à l'amiante, qui sont reliés de très près à des études qu'ils ont pu faire, qu'ils ont pu entreprendre. Ils ont des données techniques dont nous ne connaissons pas toujours l'existence, il ont certainement des opinions que nous aurions, je pense, intérêt à entendre, en ce qui nous concerne, pour être capables de porter un jugement plus éclairé sur ce projet de loi. Donc, je serais favorable à ce qu'on en arrive assez rapidement à une liste de 6 ou 7 organismes et qu'on y consacre quelques jours. Je demanderais que le président, tout en acceptant l'orientation générale qu'il nous a donnée tout à l'heure, j'aimerais bien qu'il ne se propose pas d'être trop tatillon sur ce genre de choses puisque nous voulons nous informer.

Ce n'est pas pour remettre en question le principe de la loi, mais je pense que, si l'on veut avoir une discussion intelligente sur les modalités d'application, je crois qu'il est tout à fait pertinent d'inviter des gens qui se sont penchés sur ces problèmes et qui ont certainement des vues à exprimer sur l'une ou l'autre des modalités d'application de la loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. J'ai quelques remarques, à mon tour, sur cette proposition, sur cette motion. J'espère que, pendant qu'on en discute et qu'on amène les différents arguments qui militent en faveur de la comparution de ces organismes, le ministre continue cette réflexion tranquille qui le conduira peut-être à souscrire à ce consensus général qui semble se dégager pour l'audition de ces groupements.

Dans un premier temps, M. le Président, j'aimerais souligner que je suis satisfait que le ministre souscrive à la demande que j'ai faite, soit de recevoir le groupe SORES, étant donné l'importance de ses travaux par rapport au projet de loi 70 et à ses implications. Point n'est besoin de disserter longuement sur cette question, lorsqu'on parle da transformation, de faisabilité, de rentabilité en termes de plus de transformation de la fibre d'amiante au Québec, de produits nouveaux faisables en sol québécois, je pense que SORES a donné certaines indications tout à fait pertinentes. A ce chapitre, je pense que les auditions de SORES nous permettraient de clarifier certaines zones qui demeurent encore confuses, du moins dans la présentation de la loi telle quelle par le gouvernement. Nous aurions alors intérêt à entamer avec eux des discussions en rapport direct, comme l'a indiqué le président, avec l'étude du projet de loi 70.

Deuxièmement, je reviens à la question du comité du CRDCE, soit le Comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, puisque, pour ma part, je considère que son travail, quoique régional, est quand même de première importance dans le dossier qui nous intéresse, soit celui de l'amiante.

D'un côté, ce comité, sans mentionner tous les organismes qui en font partie, regroupe une quarantaine d'organismes de la région. Il nous a fourni énormément de données sur le plan technique. Son approche est globale, tout en s'intéres-sant à différents aspects particuliers de cette question. Les données qui nous ont été fournies jusqu'à maintenant sont fort pertinentes et méritent d'être analysées de près.

De plus, ce groupement, le Comité des mines du CRDCE, a cette qualité, devrait avoir cette qualité aux yeux de la présente commission, d'être issu du milieu, c'est-à-dire d'être en même temps un groupe représentatif de la population, ce qui nous permettrait d'avoir cet éclairage sur l'orientation du projet de loi en question.

Pour montrer l'importance des travaux de ce comité et pour rappeler au ministre qu'il aurait peut-être intérêt, contrairement à ce qu'il nous a indiqué, à entendre une fois de plus le Comité des mines, puisque le comité a déjà rencontré le ministre, sur différents sujets bien précis qui sont en rapport direct avec plusieurs articles du projet de loi actuellement en discussion...

Je pense que ce serait une erreur que de rejeter la participation éventuelle du Comité des mines du CRDCE aux audiences de notre commission parlementaire, comme l'a indiqué le ministre tout à l'heure, puisque ce sont des personnes qui, depuis déjà plusieurs années, avec des connaissances précises et techniques du milieu, avec des données pertinentes, ont présenté au gouvernement des documents qui sont vraiment de nature à être considérés de très près.

Pour souligner de façon plus précise au ministre l'importance et la portée des travaux de ce comité, je lui rappellerai simplement quelques éléments sur lesquels ce comité s'est penché et j'attirerai l'attention des autres membres de cette commission qui ne sont peut-être pas au courant de l'ampleur des travaux du comité du CRDCE.

Son travail a porté en particulier sur la situation de l'amiante dans la région de Thetford, de Black Lake, ce qui intéresse d'ailleurs le député qui est en face de moi, sur la question de la production comme telle de l'amiante, sur la teneur et la qualité de l'amiante. J'ai moi-même posé ces questions au ministre ce matin lorsque j'ai parlé des réserves, des quantités d'amiante qui nous restent au Québec, de la nature de la fibre et des quantités qui restent dans les gisements dont le gouvernement veut se porter acquéreur, de la teneur des gisements, du travail apporté aux différents types de fibres, de l'usinage de l'amiante dans la région, des moulins, des fameux moulins auxquels j'ai fait allusion, ce matin, dans mon intervention, du coût, également, des capacités de production qui sont directement reliées au projet de loi en question. Je pense qu'à ce moment-là, le comité des mines du CRDCE pourrait nous donner maintenant, à la lumière du projet de loi qui a été déposé, sa perception du projet ou de la façon de procéder que le gouvernement a choisie, compte tenu de toutes les informations que ce comité possède en la matière. Ces gens ont également à travailler au niveau de toute la question de la commercialisation, de la mise en marché— le ministre est au courant — la question même de la transformation. Ils ont abordé également, avec beaucoup de sérieux, toute la question de la recherche qu'implique directement le projet de loi no 70.

Je pense que ceia serait une erreur que de ne pas inviter ce groupement à venir ici nous rencontrer afin que nous puissions lui poser les questions qui nous apparaissent maintenant pertinentes, à la suite du débat de deuxième lecture et à ce stade-ci de l'évolution de nos travaux.

Il est important que le tout — je le rappelle au ministre — que ces auditions puissent se faire avant même que nous abordions l'étude article par article du projet de loi à cause de toutes les incidences que les questions laissées en plan actuellement ont sur l'étude éventuelle de ce projet de loi article par article. Nous avons besoin, avant de partir, pour fonctionner d'une façon logique, d'une façon rationnelle, d'une façon qui puisse nous permettre d'atteindre des résultats dans un laps de temps raisonnable, d'avoir certains éclaircissements qui pourraient nous venir de SORES, d'un côté, du comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est, qui pourraient nous venir également des autres groupements et associations de l'Association des mines. Je pense que, sans que ces auditions soient d'une longueur exagérée, nous pourrions, à ce moment-là, aller chercher la matière dont nous avons besoin pour amorcer l'étude article par article du projet de loi. Je rappelle au ministre que nous devrions, à mon sens, tenir ces auditions avant même d'entreprendre l'étude article par article du projet de loi. J'espère que le ministre, dans sa réflexion, ira jusque-là et présentera lui-même

sa décision de cette façon, de sorte qu'on puisse entrevoir les travaux de notre commission parlementaire d'une façon logique et rationnelle.

M. le Président, c'étaient les quelques remarques que je voulais faire à ce stade-ci, en ce qui concerne l'audition éventuelle de ces groupes impliqués au niveau de la transformation de l'amiante. Je tiens à souligner qu'en ce qui nous concerne, l'Union Nationale, nous verrions d'un très bon oeil — ce sont d'ailleurs les propositions que nous avons faites dans ce sens-là — le fait d'entendre ces gens, ce qui nous permettrait d'arriver à de meilleurs résultats. Ce n'est aucunement dans une volonté d'allonger indûment les travaux de cette commission parlementaire, mais plutôt dans le but de fonctionner d'une façon beaucoup plus logique.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, je vous ai reconnu, mais après le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'avoue que je suis un peu perplexe quant à la position que le gouvernement vient de nous présenter. D'un côté, il nous a laissé entendre qu'il était favorable à ce qu'on entende différents groupes devant cette commission, mais, d'un autre côté, la première fois que l'Opposition fait une suggestion, il ne semble pas être tout à fait d'accord à entendre le groupe qui fait l'objet de cette motion. Il me semble élémentaire que, si le gouvernement veut instituer une Société nationale de l'amiante, on entende l'Association des mines d'amiante. On aurait beaucoup de questions. Quand le député de Frontenac nous a demandé quelles sortes de questions on pouvait lui poser... Il me semble que c'est élémentaire d'entendre l'association, de la questionner sur divers aspects de ce projet de loi, sans aller à l'encontre du principe, mais sur certains sujets, certains problèmes qui sont soulevés par le projet de loi.

Je crois que le gouvernement ferait preuve de sa bonne foi en nous disant: certainement. Au lieu de passer tout ce temps à justifier pourquoi l'Association des mines d'amiante devrait être convoquée, cela aurait été bien plus facile que le gouvernement dise, si on avait suggéré mercredi, 20 heures, que cela ne faisait pas son affaire. Il n'aurait eu qu'à dire: une autre journée serait mieux, sans aller au fond de la question en mettant en doute la bonne foi et les intentions de l'Opposition. (17 h 25)

Une commission parlementaire, ce n'est pas une course à obstacles où le gouvernement nous suggère l'étude, article par article d'un projet de loi. On cherche à avoir des renseignements, peut-être pour bonifier le projet de loi, pour éviter certaines difficultés, certaines ambiguïtés. Au fur et à mesure que nous faisons ces suggestions, le gouvernement nous oppose des obstacles systématiques. J'espère que ce n'est pas l'intention du gouvernement d'agir de cette façon dans ce projet de loi, surtout avec les sommes d'argent du public qui sont en jeu et les implications.

Il y aurait plusieurs questions qu'on pourrait poser, plusieurs sujets qu'on pourrait explorer avec l'association. C'est elle qui a commandé l'étude SORES. On pourrait avoir des questions sur ce rapport. On pourrait lui demander quels sont les problèmes de l'industrie, les craintes qu'elle peut avoir sur ce projet de loi, non pas dans le but d'écarter le projet de loi, mais dans le but d'insérer certaines protections qui seraient nécessaires pour le bon fonctionnement de l'industrie.

Je crois bien que ce n'est pas l'intention du gouvernement de mettre à terre toutes les autres compagnies. Il vise spécifiquement une compagnie. Il veut améliorer l'industrie. Il a l'intention d'augmenter la transformation des produits de l'amiante au Québec.

Quels sont certains problèmes que l'association verrait dans le projet de loi, tel qu'il est rédigé? Verrait-elle certaines clauses additionnelles? Certaines restrictions? Voit-elle certaines prévisions du projet de loi qui ne sont pas incluses et qui devraient l'être?

Je me réfère spécifiquement, quand on parle de craintes, à l'article 16 où on dit que "La Société ne peut, sans l'autorisation du gouvernement..."— on continue— "acquérir des entreprises poursuivant les mêmes fins ou des fins similaires, ou des actions formant le fonds social de pareilles entreprises; " L'association verrait-elle cet article comme une épée de Damoclès, parce qu'on dit: "La Société ne peut, sans l'autorisation du gouvernement... par règlement..."?

Cela ne veut pas dire que le gouvernement doit retourner à l'Assemblée nationale, mais qu'il pourrait faire des pressions si d'autres compagnies qui font partie de cette association agissent d'une façon qui ne plaise pas au gouvernement. Il aurait toujours ce mode de pression prévu à l'article 16. Est-ce l'intention du gouvernement d'utiliser cette pression? Quelle est la réaction de l'association face à cet article? Y aurait-il lieu de l'enlever, d'obliger, si la société voulait acquérir d'autres entreprises, le gouvernement à retourner à l'Assemblée nationale justifier ses actions et que la députation, l'ensemble de l'Assemblée nationale, soit appelée à donner son consentement pour assurer une protection à ceux qui sont déjà dans l'industrie.

Même si ce sont des compagnies qui pourraient être multinationales, il y a toujours des restrictions. Elles ne peuvent pas avoir tous les pouvoirs qu'un gouvernement peut avoir. Elles font face à cette compétition; elles font face à ces pouvoirs additionnels que, peut-être, un autre membre de l'Association— Est-ce que la Société nationale va devenir membre de l'association — ait des pouvoirs quasiment omnipotents, parce que c'est autorisé par le gouvernement et qu'il n'y a pas de restrictions. Quelle est l'attitude de cette association face aux pouvoirs donnés à la société par le projet de loi?

Ce sont des questions légitimes, je crois, qu'on pourrait poser et ce sont les questions qu'on doit poser avant de commencer l'étude du projet de loi, article par article. Une fois que nous

aurons entamé l'étude du projet de loi, cela va nous aider dans notre attitude envers le projet de loi, dans les amendements que nous pourrons suggérer au projet de loi. Cela pourrait seulement aider le gouvernement. Si le gouvernement n'a rien à cacher, l'association, en venant ici, se ferait poser des questions qui seraient naturellement limitées à l'objectif du projet de loi et qui n'iraient pas à rencontre des principes du projet de loi.

Si le gouvernement a fait ces études et s'il est justifié de présenter ce projet de loi et de procéder à son étude, les réponses de l'association ne pourraient qu'aider le gouvernement et elles pourraient justifier aussi l'Opposition de dire: Nous avons accompli notre devoir. Nous avons fait ressortir toutes les implications, tous les problèmes de la loi. Ce serait un éclaircissement, non seulement pour l'Opposition, mais aussi pour la population qui aura à en juger et qui surtout sera affectée par les dépenses du gouvernement et par les implications du projet de loi.

Le député de Marguerite-Bourgeoys a dit tantôt que nous n'étions pas dans la position du ministre, qui a des experts pour le conseiller sur tous les différents aspects du projet de loi. Je dirais, spécialement parce que le ministre a ses experts, que nous avons besoin de convoquer d'autres associations, d'autres personnes, d'autres groupes. Parfois, il se peut — et c'est déjà arrivé dans le passé — que les experts utilisent une approche pas mal limitée, très limitative. Peut-être qu'ils n'ont pas eu l'occasion de regarder ou n'ont pas regardé d'autres aspects du problème qui auraient dû être portés à l'attention du ministre.

Pour ces raisons, il serait absolument, je dirais indispensable, de convoquer une des associations, une ou plusieurs des parties qu'assurément l'action du gouvernement affectera le plus. Elles ont elles-mêmes commandé une étude à laquelle le gouvernement s'est référé maintes fois. Elles pourraient nous éclairer, elles pourraient nous donner des renseignements sur les différents aspects de ce projet de loi, suggérer des changements, des additions et nous donner tous les renseignements qui seraient possibles et dont nous avons besoin. Je ne pense pas qu'on puisse faire la distinction entre des raisons politiques ou des raisons économiques. Cela soulève certaines questions, certaines intentions du gouvernement. J'espère que le gouvernement ne convoquera pas seulement les organismes qui ont le même point de vue politique que lui-même. Je ne pense pas que cela va ajouter aux débats, je ne pense pas que cela va nous donner tous les points de vue, tous les renseignements dont nous avons besoin. Je dirais même que tout spécialement s'il y a un ou des organismes qui ne partagent pas le point de vue politique — et je ne dis pas politique dans son grand sens — de ce projet de loi, ils devraient être convoqués pour vraiment examiner les aspects sur lesquels ils ne sont peut-être pas d'accord avec le gouvernement et ils pourraient aussi soulever d'autres questions. J'espère que cela ne sera pas le barème que le ministre va utiliser en disant: Oui, je vais consentir à ce que tel ou tel organisme vienne devant la commission parlementaire, mais je m'opposerai à ce qu'un autre organisme vienne parce qu'il ne partage pas notre point de vue. Je pense que ce n'est pas le but de cette commission. Ce ne serait pas l'objectif à viser et la philosophie que je vois dans l'examen d'un projet de loi qui va affecter les gens qui ne partagent pas votre opinion politique sur ce projet de loi. Ce serait donc à votre avantage de faire venir ici ces organismes, pour les questionner et peut-être même les convaincre aussi.

M. le Président, pour le moment, ce sont les brèves remarques que j'avais à faire sur la motion du député de Marguerite-Bourgeoys. J'espère que le gouvernement va consentir à ce qu'on convoque cette association, avant de commencer l'examen du projet de loi article par article, parce que ce sera quasiment inutile de convoquer l'Association des mines d'amiante après que les troisième, quatrième ou quinzième articles auront déjà été étudiés.

A ce moment-là, le point de vue qu'elle pourrait nous donner serait une perte de temps puisqu'on aurait déjà étudié des articles du projet de loi. C'est avant qu'il faut le faire et non seulement pour l'association, mais aussi, je crois, pour les autres organismes que le gouvernement pourrait consentir à convoquer et à interroger.

C'est important je crois, M. le Président, et je m'adresse aussi au ministre, que ces organismes soient convoqués avant qu'on commence l'étude du projet de loi article par article. Si vous ne le faites pas avant, ou si vous les convoquez après, nous allons perdre le bénéfice de leurs opinions, des informations qu'ils pourraient nous apporter. Cela ne sert à rien, par exemple, si, après l'article 16 ou l'article 17, on convoque un ou des organismes. On ne pourra pas les questionner sur les implications de certains articles; on irait à l'en-contre des règlements, on ne pourrait pas apporter des amendements qui pourraient bonifier le projet de loi, sous différents aspects des articles qui auraient déjà été discutés.

Je crois que c'est vraiment élémentaire de les convoquer. Ou vous dites que personne ne sera convoqué, que vous ne voulez pas être éclairés, que votre opinion est faite et que, malgré ce que l'Opposition officielle va dire et malgré ce que les différents organismes convoqués diront, vous autres, c'est comme cela que vous procédez.

Si c'est cela votre attitude, dites non à chacune de nos motions, que ce soit l'Association des mines d'amiante, que ce soit un conseil municipal. Mais, si vous dites oui, si vous voulez être de bonne foi, si vraiment on veut agir dans un but constructif, si on veut avoir des discussions fructueuses, je pense que c'est élémentaire pour vous de consentir à ce que ces organismes soient convoqués avant qu'on commence l'étude de la loi article par article. Autrement, je ne voudrais pas le dire, mais cela serait quasiment une perte de temps.

M. le Président, j'espère pour ces raisons que le ministre va prendre bonne note de nos représentations et va accepter de convoquer les orga-

nismes que nous voulons voir convoqués, que nous voulons questionner. Nous le faisons de bonne foi, nous avons des questions très spécifiques sur des articles qui ont des conséquences assez importantes non seulement sur le fonctionnement de la société qui doit être constituée par ce projet de loi, mais aussi sur son fonctionnement et sur tous les autres corps politiques, la population, les régions, toutes les associations qui vont être touchés au moment où ce projet de loi va être mis en vigueur par le gouvernement.

C'est important qu'on les questionne, qu'on obtienne leur point de vue et qu'on puisse le faire d'une façon constructive. Je puis assurer le ministre que nous voulons agir d'une façon constructive et je suis assuré que le ministre veut que nous soyons constructifs dans nos propos, dans nos commentaires et dans l'étude de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Mont-Royal. M. le ministre. M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, je voudrais vous dire qu'en principe je n'ai aucune objection, je parle pour moi, personnellement du moins, à ce qu'on entende des organismes qui peuvent éclairer la commission...

Une Voix: Le Parti québécois de Richmond.

M. Grégoire: Je n'ai aucune objection de principe, loin de là. Je crois qu'il est bon d'entendre la population, les gens du milieu, ceux qui seront touchés par la politique de l'amiante. Toutefois, je crois qu'il faut choisir les organismes. Il faut savoir un peu pourquoi on les fait venir. Quand j'ai essayé de savoir tout à l'heure, du député de Marguerite-Bourgeoys, ce qu'il entendait retirer comme éclaircissement de la part de l'Association des mines d'amiante, je me suis aperçu que le député de Marguerite-Bourgeoys n'avait même pas la moindre idée derrière la tête de ce qu'il aurait à leur poser comme questions. En fait... (17 h 40)

M. Ciaccia: Je vous ai donné des exemples.

M. Grégoire: ... j'ai été surpris de voir...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: Je vais y revenir. J'ai été surpris de voir qu'un si brillant avocat était estomaqué. J'ai vu sa réaction: estomaqué net. Mais quand même...

M. Forget: Je vais vous dire pourquoi il était estomaqué.

M. Grégoire: ... par chance, fort heureusement, il était estomaqué.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: Cela a l'air d'une tentative de censure.

M. Bérubé: Vous n'avez jamais rien compris.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Paquette: Cela donne le temps... M. Grégoire: Tout de même...

M. Paquette: Cela donne le temps à ses collègues d'y penser.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: Oui, ses collègues y ont pensé pendant ce temps-là et le député de Saint-Laurent est venu à sa rescousse en nous donnant un exemple. En demandant la comparution de l'Association des mines d'amiante, il a dit: Depuis quelque temps, avec tout le brassage qui se fait au Québec, les mines ont davantage reconnu leurs obligations sociales — c'est à peu près le terme qu'il a employé — vis-à-vis de la population, vis-à-vis du Québec et, déjà, elles sont prêtes à s'amender; elles ont changé depuis quelque temps — textuellement — et peut-être sont-elles prêtes maintenant à transformer sans qu'il soit nécessaire d'acheter l'Asbestos Corporation. C'est ce que le député de Saint-Laurent nous a fait remarquer, je l'ai noté ici. Il a insisté en disant: Probablement que maintenant, avec l'enquête SORES, elles sont commanditées, que l'Association des mines d'amiante est commanditée; avec l'enquête SORES, ils ont des projets; il serait bon de savoir quels projets ils ont en main, quels projets ils ont en tête, tout cela. Avec tous ces projets, on atteindrait notre objectif sans qu'il soit nécessaire d'acheter l'Asbestos Corporation.

Or, justement, si on veut savoir quels sont les projets qui peuvent exister pour la transformation, ce n'est pas l'Association des mines d'amiante qui va venir nous le dire. L'Association des mines d'amiante, c'est un groupement des différentes mines. Les représentants de l'association vont venir...

M. Raynauld: ...

M. Grégoire: ... nous dire que c'est chaque compagnie minière qui peut s'engager ou qui peut le dire. Ce n'est pas l'Association des mines d'amiante qui va prendre... Ce n'est pas le vice-président, M. Filteau, qui va venir nous dire que la Lake Asbestos ou ASARCO va instaurer telle industrie, ou Jim Walter, ou Celotex au nom de Jim Walter, ou Panacon au nom de Jim Walter, basé à East Broughton avec la Canadian Carey; ce sont

eux qui peuvent venir nous dire quels sont leurs projets mais pas l'Association des mines d'amiante.

Alors, si on nous demande de faire venir les porte-parole de l'Association des mines d'amiante, pour leur poser des questions auxquelles ils ne pourront pas répondre parce que ce ne sont pas leurs responsabilités... Ce n'est pas l'Association des mines qui prend la décision de dire quelles sont les usines ou les projets qu'elle a en vue; cela va appartenir à chaque compagnie minière. Ce sont elles qui ont les fonds, ce sont elles qui ont leur conseil d'administration.

Déjà, vous me mettez devant un doute alors que j'étais d'accord, que je n'avais pas d'objection de principe. Vous me mettez devant un doute et ce doute provient justement du fait de la non-préparation que vous avez dans ce dossier.

M. Raynauld: ... qu'on vous écoute.

M. Grégoire: Je suis surpris même de voir la non-préparation; vous voulez poser des questions à l'Association des mines d'amiante qui ne s'adresseront pas à elle. Mais si vous faites venir les représentants des mines, je serais intéressé à leur poser des questions à ce moment-là. Je serais intéressé à leur demander si les anciens gouvernements ont déjà fait des pressions pour qu'ils transforment... Depuis cent ans que vous avez des mines ici, que vous avez de la fibre...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cette question serait déclarée irrecevable.

M. Grégoire: Alors, ce sont des choses qui seraient intéressantes à savoir mais ce serait déclaré irrecevable.

Une Voix: On ne peut pas les inviter elles non plus.

M. Grégoire: J'aimerais savoir, en ce qui concerne les mines de Jim Walker, de ASARCO, de Turner & Newall, de General Dynamics, quels sont leurs projets. Or, elles l'ont déclaré dernièrement, elles n'en ont pas de projets, ces compagnies. Elles n'en ont pas et elles l'ont déclaré...

Une Voix: Vous allez en avoir une demain.

M. Raynauld: Elles ne peuvent pas le déclarer avant.

M. Grégoire: Elles l'ont déclaré. J'aimerais savoir combien...

M. Bérubé: ... les compagnies minières.

M. Grégoire: Si on veut parler des mines, parlons des mines. Après cela, on parlera pour les autres transformateurs, c'est une autre paire de manches. J'aimerais savoir combien d'emplois, avec les projets qu'elles ont en dossier, mais elles l'ont dit, elles n'en ont pas. On réaliserait peut-être, à ce moment-là, à les voir venir ici, elles nous diraient: Bien, on n'a pas de projets. On n'a rien. Vous n'avez rien fait, vous n'avez rien vu. Alors, je suis assuré que vous deviendriez convaincus.

M. Raynauld: On a des questions. Ne vous inquiétez pas.

M. Bérubé: C'est parce qu'il vient de dire qu'il a eu des discussions qui montrent que ces compagnies sont prêtes à considérer les projets.

M. Grégoire: Oui, mais attendons les affaires de SORES. C'est le gouvernement qui, ayant la Société nationale de l'amiante et ces mines, voyant ce qui s'en vient...

M. Raynauld: Ne vous inquiétez pas.

M. Grégoire: ... avec la politique de l'amiante, elles ne sont plus intéressées à entrer dans le jeu parce que, justement, le gouvernement va y pénétrer. Je serais également intéressé à poser des questions, par exemple, au MEER, au ministère de l'Expansion économique. C'est pour cela que je vous proposais qu'on fasse une liste conjointe. Si on faisait venir le ministre de l'Expansion économique régionale d'Ottawa, lui qui proposait d'aider le Québec à acheter l'Asbestos Corporation. Il serait bon de savoir du ministre, M. Marcel Lessard...

M. Forget: J'aimerais... Vous n'engagez pas le MEER.

M. Grégoire: Marcel Lessard était... Ah! Il faudrait le savoir.

M. Forget: C'est marqué dessus.

M. Grégoire: Je serais bien heureux de le savoir.

M. Forget: C'est écrit dessus.

M. Grégoire: Oui, je l'ai. Mais je serais bien heureux de savoir si le MEER est toujours prêt à venir nous aider à acheter l'Asbestos Corporation. Vous seriez peut-être intéressés vous autres aussi.

M. Laplante: Ce n'est pas l'enquête Keable ici.

M. Grégoire: Non, ce n'est pas l'enquête Keable. Ce n'est pas l'enquête Keable, cette commission parlementaire. Je dirais aux gens du MEER: Etes-vous toujours prêts à collaborer?

M. Laplante: Si c'est une...

M. Forget: Ce serait intéressant, cela. Je suis bien d'accord.

M. Grégoire: C'est vrai qu'en 1975, ils étaient prêts à collaborer parce qu'ils savaient que l'ancien gouvernement était tellement engagé dans les dépenses des Olympiques qu'il n'était pas capable de le faire. Mais, le gouvernement actuel a réglé cela.

M. Forget: C'est l'opinion de monsieur... Attendez un peu, je vais vous donner son nom. C'est probablement l'opinion de M. Fournier.

M. Grégoire: Oui.

M. Forget: Oui. Vous voyez!

M. Grégoire: Que l'ancien gouvernement était trop engagé avec ses...

M. Forget: C'est un fonctionnaire fédéral.

M. Grégoire: Un fonctionnaire fédéral. Mais il faudrait tout de même savoir de ce...

M. Bérubé: Ce n'est pas l'opinion de M. Fournier que je demande, c'est l'opinion d'à peu près tout le Québec.

M. Forget: Selon vous, M. le ministre?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! La parole est au député de Frontenac.

M. Grégoire: Je serais intéressé à questionner le ministre de l'Expansion économique régionale ou le haut fonctionnaire qu'il nous déléguera; ce ministère est là, en fait, pour aider les régions qui en ont besoin. La région de l'amiante en a besoin. Il y a des taux élevés de chômage là-bas. J'aimerais le questionner afin de savoir ce qu'il va faire, de quelle manière il va aider. Vous autres aussi, vous seriez peut-être intéressés à le savoir.

M. Forget: On a les faits que c'est le ministre... Le député a raison.

M. Grégoire: Ceux qu'on vous suggère, nous, d'inviter sont ceux qui pourraient réellement aider et collaborer. Il faudrait choisir ceux qu'on vous a proposés, choisir réellement ceux qui pourraient collaborer. Par exemple, M. Gilles Massé, l'ancien ministre des Richesses naturelles, a eu lui aussi un document; vous dites qu'il n'est pas signé, d'accord, mais c'est un document du ministère. S'il y a pensé en 1975, c'est que ce n'était pas si pire que cela. Il faudrait le savoir. Je serais intéressé qu'on le questionne pour savoir ce qu'il aurait à dire là-dessus. Il y a tout de même un document de son ministère qui a été préparé. En principe, je ne suis pas contre. Mais si c'est comme vous le dites, pour demander à l'Association des mines d'amiante: Avez-vous des projets? C'est la seule question que j'avais à lui poser.

M. Ciaccia: Vous avez la chance...

M. Grégoire: Comme je sais d'avance... Oui, justement, c'est un exemple; si vous n'en avez pas d'autres à l'idée et comme je sais...

M. Ciaccia: Vous devriez...

M. Grégoire: ... que cette question ne peut lui être posée, parce qu'il ne pourra pas répondre...

M. Forget: Le député de Frontenac insiste pour censurer les questions de l'Opposition aux gens qui seraient invités ici.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre!

M. Forget: C'est une attitude irrecevable, M. le Président.

M. Ciaccia: ... la question que j'ai soulevée, moi.

M. Forget: On n'a pas à soumettre nos questions à l'approbation ou à l'imprimatur du député de Frontenac, pas du tout.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

Une Voix: A l'ordre, à l'ordre, M. le Président!

M. Grégoire: Bien non, je ne veux pas avoir d'imprimatur. J'aurais voulu au moins que, dans votre motion pour inviter les représentants de l'Association des mines d'amiante, vous ayez un commencement de justification quant à l'opportunité de les inviter, or, vous ne l'avez pas fait du tout, vous n'avez pas présenté votre cause à l'Association des mines d'amiante, pas du tout. Vous n'avez étalé aucune preuve, ne fût-ce qu'un commencement de preuve pouvant justifier la possibilité de les inviter, aucune.

M. Raynauld: La seule chose, c'est qu'ils connaissent ça.

M. Grégoire: Oui, mais ce que vous voulez leur demander ne relève pas de leur compétence, alors que vous pourriez inviter les personnes qui pourraient réellement nous aider.

M. Bérubé: ... votre ignorance.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Raynauld: ... le député de Frontenac, je ne connais rien là-dedans.

M. Grégoire: C'est pour ça qu'en fait, je ne sais pas, mais il me semble que vous allez avoir besoin de plus de preuves que ça pour justifier... Pendant ce temps, on pourra inviter d'autres groupes que l'Association des mines d'amiante qui pourront davantage nous éclairer, vous aider à comprendre le problème, vous aider à comprendre que le Québec... En fait, quand vous prenez les chiffres de SORES—le ministre en parlait—il ressort clairement que le Québec produit 82% de l'amiante qui change de frontière dans le monde libre; cela nous donne une puissance formidable dans le secteur de l'amiante.

M. Raynauld: Ils ne le disent pas que c'est la puissance, ils ne le disent pas.

M. Grégoire: Cela se déduit tout seul. Vous êtes économiste, vous devriez savoir ça.

M. Raynauld: L'avez-vous lu? Si vous l'avez lu, ce n'est pas...

M. Grégoire: Si vous êtes économiste, vous devez savoir que, quand vous êtes le seul producteur d'un matériau aussi précieux que l'amiante, ça vous donne...

M. Raynauld: On n'est pas le seul producteur.

M. Grégoire: Non, mais pas 92% de l'amiante qui change de pays vient du Québec. Quand les Etats-Unis produisent à peine 100 000 tonnes, qu'ils ont besoin de 850 000 tonnes, il faut qu'ils prennent les 750 000 autres tonnes ailleurs. Un économiste comme vous devrait savoir ça, il en manque 750 000. Moi, je soustrais...

M. Raynauld: Je ne vous ai pas dit tout ce que je savais. Je ne vous ai pas dit tout ce que je savais.

M. Grégoire: Ce n'est pas encore le temps de dormir.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre!

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement. Je ne voudrais pas arrêter le "filibuster" du gouvernement qui semble tellement indécis qu'il veut sûrement atteindre l'heure de l'ajournement avant de prendre une décision. Mais il reste que le député de Frontenac est rendu au fond...

M. Grégoire: Vous avez parlé tous les cinq...

M. Lalonde: ... non seulement de la motion, mais de toute la loi.

M. Grégoire: M. le Président, j'espère qu'on ne veut pas m'empêcher de parler. Vous avez parlé vingt minutes, le député de Saint-Laurent...

M. Lalonde: Je n'ai pas parlé vingt minutes, dix minutes.

M. Grégoire: ... les cinq, de suite, vous avez parlé; tout d'un coup, vous ne voudriez plus qu'on parle.

M. Lalonde: Parlez sur la motion.

M. Grégoire: C'est là-dessus que je parle, je n'en sors pas plus que vous en êtes sortis. Ne commencez pas à nous imposer le bâillon au début. Je m'oppose à la méthode. Je suis le premier qui parle de ce côté-ci après que vous ayez parlé tous les cinq et vous voulez nous empêcher de parler. Vous allez protéger mes droits, M. le Président?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne pense pas que ce soit leur intention. Parlez, M. le député de Frontenac.

M. Forget: On aime vous écouter, d'ailleurs.

M. Grégoire: Je vous le dis, M. le Président, je suis d'accord pour qu'on invite certaines personnes qui peuvent nous éclairer, qu'on fixe les jours, les durées, les périodes où ça pourra durer, qu'on sache au moins un peu ce sur quoi on veut les interroger. Il me semble que si on veut les interroger... Je m'opposerais aux questions que voulait poser tout à l'heure le député de Saint-Laurent à l'Association des mines, mais qu'on sache au moins les grandes lignes, sans vous limiter, sans vous bâillonner, loin de là.

M. Forget: Alors je sais d'avance ce qu'on va dire.

M. Grégoire: Etant donné qu'il n'y a pas eu de preuve de faite de la nécessité, je réserve mon jugement pour le moment. Vous n'avez établi aucune preuve jusqu'à maintenant.

M. Forget: M. le Président, on va peut-être démontrer la nécessité de...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vois que le député de Frontenac...

M. Grégoire: II y en a qui avaient levé la main et qui n'ont pas encore parlé.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ecoutez, M. le député de Frontenac, je pense être en mesure de reconnaître ceux qui demandent la parole.

M. Brochu: C'est lui qui est le président. En plus de contrôler ceux qui vont venir ici, il va contrôler les questions qu'on va poser. Le député de Frontenac veut contrôler le président. C'est là qu'on voit que le gouvernement a des objectifs beaucoup plus vastes qu'on pense.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vois que le député de Frontenac est tombé dans le panneau. Il aurait dû faire confiance à l'expérience d'un plaideur pour conclure qu'on ne dit jamais d'avance les questions qu'on a à poser à un témoin. Il devrait se rendre compte que la démarche que le gouvernement fait actuellement dans le domaine de l'amiante a un caractère particulier, à savoir que son implication, soit au niveau d'une mine, par l'acquisition de Asbestos Corporation, soit au niveau de la transformation, si on considère les

plans à plus long terme, va créer une situation de concurrence, c'est-à-dire impliquer le gouvernement dans une situation de concurrence avec d'autres entreprises qui vont demeurer dans le secteur. Il doit faire la différence entre cette démarche et celle que l'ancien gouvernement avait faite dans le domaine du pouvoir hydroélectrique, alors que tout un secteur de l'industrie avait été nationalisé ni plus ni moins.

Je pense que les questions, lorsqu'on considère les articles 4 et 16, qui sont les articles substantifs, peuvent être très larges sur ce qui arrive, après, pour le secteur de l'amiante, en ce qui les concerne, l'Association des mines et les syndicats Par exemple, pour le syndicat qui va représenter les salariés de l'entreprise qui va être nationalisée, ou acquise, qui va devenir une société de la couronne, par rapport aux syndicats qui représentent les employés des autres entreprises, quelle situation est-ce que cela va créer entre ces syndicats, les syndicats des entreprises privées et ceux de l'entreprise nationalisée? Qu'est-ce qu'ils en pensent? Et quelles seraient les recommandations à faire au gouvernement et à la commission parlementaire? Ce sont tous des cas. Je ne vous donne pas les questions. Jamais vous ne me convaincrez de devoir vous donner les questions. La seule chose à laquelle je m'engage, c'est que les questions que j'aurai à poser seront dans le cadre du règlement que vous êtes appelé à appliquer. (17 h 55j

Une Voix: Vous aurez jusqu'à 18 heures.

M. Lalonde: Je pense que le député est fort injuste à l'égard de celui qui vous parle, lorsqu'il conclut, du refus que j'ai fait de donner des questions spécifiques, même une seule, comme il dit, que nous n'avons aucun intérêt à entendre les organismes que nous avons indiqués. Je pense que c'est faire preuve d'une ignorance crasse de la situation qui va exister.

M. Grégoire: Je n'ai parlé que de l'Association des mines, je n'ai pas parlé du tout des autres groupes.

M. Lalonde: L'Association des mines représente des entreprises dans la famille desquelles va s'introduire un gouvernement qui a un pouvoir de légiférer, qui a naturellement un pouvoir beaucoup plus grand que ces entreprises. Quelle est l'opinion, quelles sont les recommandations, quelles sont les réactions de cette association? Après tout, on ne veut pas que ce soit une situation de conflit. Je présume que le gouvernement désire que son implication dans ce secteur de l'activité ne crée pas de chaos. C'est, je pense, une préoccupation de la commission parlementaire de voir à ce que nous ayons tous les renseignements nécessaires pour injecter dans le projet de loi les dispositions qui vont permettre que l'implication du gouvernement dans ce genre de secteur d'activité se fasse de façon harmonieuse, en mettant les paramètres, les balises nécessaires pour que tout se fasse à l'avantage du gouvernement et aussi, naturellement, de tous les Québécois.

Il ne serait pas du tout indiqué, comme les propos du député de Frontenac semblent le suggérer, d'imposer à cette question un cadre étouffant. Nous avons intérêt, comme membres de cette commission parlementaire, à avoir la plus large approche possible dans le cadre du règlement, en ne mettant pas en question le principe du projet de loi. J'invite le ministre et les députés ministériels à réfléchir de façon positive, dans les deux heures qui vont séparer la suspension de la reprise de nos débats pour nous donner une réponse affirmative à 20 heures. C'est la seule chose que je peux faire actuellement. Nous considérerons, à la lumière de la réaction du gouvernement, quelle position nous devrons prendre; mais, quant à nous, je pense que ce serait très positif, de la part du gouvernement, d'impliquer tous les membres de la commission parlementaire dans cette recherche de la meilleure solution, toujours dans le cadre du principe déjà accepté par l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Trente secondes, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, je voudrais simplement mentionner qu'on a laissé sous-entendre que nous craignions certains points de vue, que nous voulions éviter les organismes qui ne partageaient pas notre opinion. Ceci est contredit par les faits, puisque le ministre a mentionné qu'il serait intéressant, parce que relié au projet de loi, d'entendre certains organismes qui ne partagent pas totalement la politique du gouvernement. Je pense, entre autres, à la firme SORES qui a préparé un rapport dont certains aspects vont dans le sens de la politique du gouvernement, et d'autres, non. Vous comprendrez que, par contre, plutôt que de discuter, pièce par pièce, des propositions qui pourraient se succéder à répétition et nous mener fort loin, et excéder largement le mandat de cette commission, le côté ministériel veuille réfléchir aux gens qui sont le plus susceptibles de nous éclairer.

Je vous donne un exemple. On a mentionné General Dynamics — je termine là-dessus — on peut se poser la question: Est-ce que ce n'est pas embêtant de faire ici des questions-réponses avec une firme avec laquelle le gouvernement est déjà en contact et qui a déjà...

M. Lalonde: On légifère.

M. Paquette: Oui, mais on n'est pas pour faire des négociations autour de cette table. Il faut se poser des questions comme cela.

M. le Président, conformément à votre directive, je pense qu'on va suspendre les travaux et qu'on reviendra à 20 heures.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant de suspendre les travaux, puis-je suggérer, à titre de gardien de la procédure, aux partis présents, s'ils le veulent bien, d'essayer au moins de s'entendre et de se rencontrer? Parce qu'imaginez-vous bien que ce genre de motions,

on peut en avoir cinq, six, sept, huit et neuf, et les mêmes arguments reviendront toujours de part et d'autre. Je pense qu'il y aurait intérêt pour tout le monde, au moins à essayer de vous entendre. Sinon, on prendra les motions l'une après l'autre.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Paquette: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense qu'il serait bon que vous essayiez de vous rencontrer.

M. Brochu: Si le ministre nous indique qu'il a l'intention de recevoir ces auditions, je pense que...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les travaux de la commission sont suspendus, c'est automatique, jusqu'à 20 heures.

M. Paquette: J'aurai le droit de parole au retour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

Reprise de la séance à 20 h 25

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! La parole était au député de Rosemont, mais compte tenu qu'il y a eu, je le présume, une rencontre en haut lieu, est-ce qu'il y aurait un porte-parole qui pourrait nous faire le rapport de ce qui s'est passé? Est-ce qu'il y a une entente qui est intervenue? M. le ministre.

M. Bérubé: Je vais laisser mon...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac.

Entente sur la convocation de témoins

M. Grégoire: Voici ce sur quoi on semble s'être entendu. Il y a eu quatre propositions de la part du député de Marguerite-Bourgeoys au nom du Parti libéral. Quatre compagnies sont invitées à comparaître devant la commission: l'Association des mines d'amiante, General Dynamics, le conseil municipal de Thetford Mines et le Syndicat des mines de l'Asbestos Corporation, c'est-à-dire la CSN.

De son côté, M. le député de Richmond, au nom de l'Union Nationale, a fait deux propositions: SORES et le Comité des mines du conseil régional de développement des Cantons de l'Est.

Des six propositions, nous en adopterions cinq, sauf General Dynamics. Nous reviendrions avec une motion séparée pour le cas de General Dynamics. Tout cela se ferait ce soir; nous terminerions les préliminaires pour pouvoir les entendre le plus vite possible, c'est-à-dire mardi soir, mercredi matin et mercredi après-midi, quitte à ajouter une autre période, si le besoin s'en fait sentir. Après quoi, nous commencerions l'étude de l'article 1 du projet de loi.

M. Forget: II y a peut-être un élément qui n'a pas été discuté aussi longuement que nécessaire; c'est l'ordre et surtout le calendrier. J'imagine qu'il serait poli de ne pas convoquer tout le monde mardi soir parce qu'il sera impossible de les entendre tous. Il y aurait peut-être lieu, avec le secrétaire des commissions, après la fin de la séance, qu'on s'entende brièvement là-dessus. Quant au reste, je concours aux propos du député de Frontenac.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, ce serait mardi et mercredi?

M. Grégoire: Mardi soir, mercredi matin et mercredi après-midi, quitte à se réserver jeudi matin si on n'a pas eu le temps de terminer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord. Est-ce que, à ce moment-là...

M. Paquette: Pour information sur l'entente.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Est-ce que cela veut dire que tous les partis conviennent de limiter à ce soir le débat sur les motions préliminaires?

M. Grégoire: Oui, oui.

M. Paquette: Cela fait partie de l'entente.

M. Lalonde: Pas que je sache, mais il me semble que, normalement, les préliminaires devraient être terminés ce soir. Je ne prévois pas, à moins qu'il y ait un développement inattendu, que les préliminaires devraient se terminer ce soir, de sorte que, M. le Président, si vous le permettez, on attaquerait... on aborderait, sans attaquer nécessairement, l'étude de l'article 1, après avpor entendu... A un point tel que, si les préliminaires se terminaient avant l'ajournement de 22 heures, je serais tenté de faire une motion de suspension jusqu'à ce que...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Et la présidence serait d'accord.

M. Lalonde: Oui.

M. Laplante: Est-ce qu'il serait conforme au règlement, dans ce cas, M. le Président, avec le consentement de l'Opposition, sur la motion qu'on a débattue jusqu'à maintenant, de faire un amendement et, au lieu d'Association des mines, de prendre...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! Au lieu de faire un amendement, je pense qu'il y aurait lieu, de consentement, de permettre au député de Marguerite-Bourgeoys de retirer sa motion et d'en présenter une autre, compte tenu de l'entente qui est intervenue et, par la suite, évidemment, celle-là sera adoptée assez rapidement, je présume. Il y aura une autre motion à présenter pour General Dynamics qui sera évidemment jugée recevable. Là, il y aura un débat sur cette motion.

M. Laionde: M. le Président, à votre invitation et avec la permission de la commission, en retirant ma motion ou en l'amendant ainsi: Que les représentants de l'Association des mines d'amiante, les représentants du conseil municipal de Thetford Mines, les représentants du Syndicat des travailleurs à l'amiante (CSN), des représentants de SORES et des représentants du comité des mines du Conseil régional de développement des Cantons de l'Est soient invités par la commission, à se faire entendre à compter de 20 heures le 21 mars 1978, afin de renseigner les membres et intervenants de cette commission. Cela termine...

M. Forget: II y a aussi un autre organisme, c'est le comité des mines...

M. Lalonde: Je l'ai nommé.

M. Grégoire: Non, c'est parce qu'il y a un autre comité de citoyens qui s'occupe des mines d'amiante; il y a le CRD à Sherbrooke et il y a le comité des mines du curé Tanguay, à Thetford, qui comprend également des groupes sociaux.

M. Lalonde: Je croyais qu'on parlait... Alors, ajoutons-le, M. le Président, et que tous ces représentants soient invités à se faire entendre devant cette commission à compter de 20 heures le 21 mars 1978. Je n'ai pas écrit la motion.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...

Donc, du consentement de la commission la première motion présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys est retirée. Celle-ci est déclarée recevable sous réserve de sa production écrite et je vois quelqu'un qui est en train de la préparer. Est-ce que cette motion du député de Marguerite-Bourgeoys sera adoptée?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Motion adoptée. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas demandé la parole après cela. Je dois quand même remercier, je pense, le gouvernement et les membres du parti ministériel d'avoir accepté notre suggestion. Quant à nous, nous allons nous en tenir aux corridors que vous nous avez indiqués.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député de Richmond.

M. Brochu: Brièvement, j'aimerais également, au nom de l'Union Nationale, remercier les membres de la commission et le ministre d'avoir accepté ces suggestions, d'avoir accepté aussi d'inclure le groupe SORES et le Comité des mines du CRDCE. Je pense que maintenant on peut dire que la commission a mis toutes les chances de son côté pour aborder le travail de façon positive. Je pense aussi qu'il va s'avérer vraiment productif parce qu'on va aller chercher là les éléments qui vont aider à ce que le reste de la discussion se déroule d'une façon normale. Je vous remercie beaucoup et je pense que c'est un bon signe de la bonne marche de nos travaux.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci beaucoup. M. le député de Saint-Laurent.

Motion pour convoquer des représentants de General Dynamics

M. Forget: Merci, M. le président. Je ne veux pas répéter ce qui a été dit par nos collègues. Je me réjouis évidemment de l'occasion qui nous sera offerte de questionner les différentes personnes qui viennent d'être mentionnées. Je crois qu'il s'agit là d'un élément positif dans l'étude de ce projet de loi et je suis sûr que tous les membres de la commission parlementaire sauront en profiter pleinement. C'est ce genre d'éclairage sur le

contexte général et les implications du projet de loi qui est nécessaire à ce moment-ci et qui pourrait heureusement être complété, je pense, dès que le ministre jugera à propos de déposer certains des documents qu'il a mentionnés dans ses remarques préliminaires, ce matin.

Cependant, il y a une seule ombre au tableau, M. le Président, que je veux mentionner comme vous le savez, en faisant une motion relative à la visite que nous désirons toujours voir s'effectuer, soit des représentants de General Dynamics. Cette société est propriétaire de la société Asbestos depuis environ huit ans. Elle a donc une connaissance intime, non seulement de la société Asbestos elle-même, mais des caractéristiques générales de l'industrie de l'amiante au Québec pour y avoir investi des sommes importantes au cours des dernières années, entre autres dans le développement d'une mine dans le grand Nord du Québec, Asbestos Hill. Je crois que son absence devant cette commission est fort difficile à justifier.

En effet, un pan complet de la politique de l'amiante du gouvernement a pour objet l'acquisition de la société filiale de General Dynamics. Une telle décision de la part du gouvernement suppose que le gouvernement a porté un jugement à la fois sur le potentiel que représente la société Asbestos pour la réalisation de ces projets de transformation de l'amiante au Québec; donc généralement, on peut présumer un jugement positif de ce côté, mais d'autre part, le gouvernement a aussi porté vis-à-vis de la société General Dynamics un jugement négatif.

En effet, s'il avait paru possible pour le gouvernement — du moins par hypothèse, c'est ce qu'il faut supposer — de réaliser ces objectifs, en collaboration — et pour employer les termes que le ministre utilisait cet après-midi, lorsqu'il a décrit le cheminement des contrats de développement dans une participation, un projet conjoint pour développer la transformation des fibres d'amiante au Québec — s'il avait paru possible de le faire, en collaboration avec la société General Dynamics, j'imagine qu'il aurait pris une décision différente de celle qu'il a prise.

Alors, il y a ces deux éléments dans la décision du gouvernement qui doivent être éclaircis: d'une part, l'aspect positif, le potentiel que ça représente et nul n'est mieux placé pour l'évaluer que la société qui détient actuellement le contrôle de cette société. Nul n'est mieux placé pour nous aider à comprendre la situation qu'occupe la société Asbestos dans l'industrie de l'amiante, sur les marchés internationaux pour la fibre, les ressources qu'elle représente sur le plan technique et autres, les liens qu'elle entretient avec la société General Dynamics elle-même, les services qu'elle en tire, etc., tout un élément qui est essentiel pour comprendre si le gouvernement est bien fondé de faire l'acquisition de cette entreprise minière parmi d'autres au Québec et d'autre part, encore une fois, cette impression qu'on a que le gouvernement a procédé un peu à un procès de la société General Dynamics, qu'il en est arrivé à des conclusions négatives dans ce procès ex parte.

Jusqu'à quel point le ministre base-t-il son raisonnement sur la prétention que les politiques de prix ou d'investissements de la société General Dynamics, dans le passé, étaient inappropriées? Jusqu'à quel point la société General Dynamics elle-même pourra-t-elle nous aider à comprendre si, oui ou non, ses politiques d'investissement, ses politiques de prix, dans le passé, ses politiques de mise en marché de la fibre étaient dans l'intérêt du Québec? Jusqu'à quel point la disponibilité de General Dynamics, comme propriétaire de la société Asbestos, existait-elle ou non vis-à-vis des programmes de développement du gouvernement? (20 h 40)

C'est un ensemble de questions qui sont vitales pour comprendre l'orientation. L'objection qui semble exister du côté gouvernemental est basée sur le souci plus ou moins explicable... mais explicable d'autant plus facilement qu'on connaît la méthode assez particulière avec laquelle le gouvernement a abordé cette question de prise en charge sans déclarer fermement ses intentions quant au prix. C'est facile de comprendre son malaise vis-à-vis de la visite parmi nous de General Dynamics. On comprend, malgré tout, dans ce contexte, qu'il ne souhaite pas s'engager en public, en commission parlementaire, dans une négociation sur le prix. C'est une attitude qui se comprend. Encore que, idéalement, le gouvernement aurait dû procéder dans cette volonté d'acquisition de la même façon que le gouvernement dont le premier ministre actuel était membre, en 1962, avait procédé lors de l'acquisition de l'Hydro-Québec, non pas de l'Hydro-Québec, puisque cela a été postérieur à l'acquisition des sociétés privées, mais de la Shawinigan, de la Gatineau, des autres compagnies privées de l'époque où, à partir d'une analyse des états financiers de ces entreprises privées de l'époque, il avait annoncé un prix, au moment même d'annoncer fermement son intention d'acheter. Il a effectivement acheté à ce prix.

Dans un tel contexte, évidemment, le problème de l'embarras actuel du gouvernement n'existerait pas, mais on peut comprendre que, dans le contexte où il s'y est pris, il puisse trouver délicat d'être en face de son partenaire dans cette négociation, étant donné que la négociation va prendre une allure assez curieuse, une négociation un peu indéfinie dans ses contours.

Malgré tout, nous avions indiqué, dans les discussions qui ont précédé, dans la résolution que nous venons d'adopter, qu'il serait concevable que les membres de cette commission adoptent comme règle de conduite de faire porter leurs interrogations sur des aspects autres que l'évaluation des actifs et des réserves de la société Asbestos, de l'attitude face à la vente ou à l'expropriation entretenue par la General Dynamics, etc., autrement dit, de mettre entre parenthèses tout ce qui sera l'objet de la négociation et de faire porter, au contraire, ceux des éléments d'information factuelle sur les perspectives, la performance passée, les intentions de General Dynamics ou, encore, les options que pourrait ou aurait pu suggérer Gene-

ral Dynamics dans l'hypothèse — je dis bien l'hypothèse — où le gouvernement eût été ouvert à une telle discussion.

Il semble, d'après des échos qui sont apparus dans les media, que le gouvernement n'a jamais — d'ailleurs, c'est plus que cela, puisque le ministre des Finances l'a admis lui-même à l'Assemblée nationale il y a quelques semaines — approché la société General Dynamics avec une proposition de développement conjoint, n'a jamais tenté de découvrir un moyen moins coûteux pour la collectivité de réaliser les mêmes objectifs qu'il prétend poursuivre. Je me demande si c'est là la raison de sa réticence à voir paraître General Dynamics devant nous. Si c'était le cas, je crois que le gouvernement se condamnerait lui-même, parce que rien n'est plus obtus que celui qui décide sans considérer les alternatives. Je pense que c'est vraiment là la situation dans laquelle on se trouve. On a un gouvernement qui a décidé, qui est parti de ses conclusions, et saisissant le plus fortement possible ses conclusions à deux mains, il s'est dit: Quel genre de raisonnement pourrais-je bien faire? Quel genre de comportement pourrais-je bien adopter pour éviter d'être confronté avec des alternatives qui seraient peut-être plus attrayantes?

Si c'est cela que le gouvernement a fait, je comprends parfaitement pourquoi il ne veut pas avoir le démenti en chair et en os au bout de la table; Je comprends qu'effectivement, il n'a rien voulu connaître. Il savait déjà quelles seraient ses conclusions, indépendamment de toute étude, indépendamment de toute réflexion, indépendamment des coûts impliqués, indépendamment de la balance des avantages et des inconvénients. Au fond, dans cette motion d'entendre General Dynamics, il y a la conviction chez celui qui vous parle, et une conviction qui n'est pas entièrement le fruit du hasard, que c'est exactement le scénario devant lequel le gouvernement se trouve, une décision politique comme certains ministres actuels aiment à les qualifier. A une autre époque, on croyait que les décisions politiques n'étaient pas nécessairement les décisions les plus justifiables, mais c'est devenu un type de gloire pour le gouvernement actuel de dire que ce sont des décisions politiques. Ce n'est pas une décision raisonnable, ce n'est pas une décision fondée, c'est une décision politique. On a tout dit quand on a dit cela.

M. Bérubé: Ce n'est pas le même genre de politique que vous faites, c'est pour cela.

M. Forget: Non, fort heureusement que tout le monde ne fait pas votre genre de politique, parce qu'on serait encore plus pauvre qu'on ne l'est.

Une Voix: On serait en faillite.

M. Forget: Ce genre de façon de procéder... Evidemment, c'est devant cela qu'on est encore une fois, une décision politique et une conclusion politique, mais un raisonnement qui lui, n'est pas politique, il est tout simplement absent. C'est de- vant cette absence que le gouvernement serait placé s'il avait la présence de General Dynamics. Il aime mieux l'absence de General Dynamics et l'illusion de la présence d'un raisonnement que la présence de General Dynamics et la démonstration de l'absence du raisonnement.

M. Bérubé: Monsieur a fait ses études chez les Jésuites.

M. Forget: Même pas, M. le ministre. Je ne peux même pas leur rendre cet hommage.

M. Grégoire: Cela ne serait pas un blâme, au contraire; cela serait...

M. Forget: Sérieusement, M. le Président. C'est pour poser ce problème aux membres de la commission que nous faisons cette motion. Nous avons la conviction profonde que c'est la réalité de la situation qui vient d'être décrite et c'est pour la confirmer et non pas pour l'explorer, explorer une possibilité, c'est pour la confirmer que nous aurions voulu voir General Dynamics nous dire précisément ce qui s'est passé. Parce que du côté gouvernemental, quand on a posé la question, on a eu des He... et des Ah..., mais on n'a pas eu un exposé clair. Lorsque nous avons demandé, dans une demande qui, par malheur, n'était pas complètement conforme à toutes les règles de la procédure, mais qui, malgré tout, correspondait à un besoin réel, d'avoir la transcription des rencontres et l'exposé des correspondances, c'est qu'on sait très bien que si le ministre n'avait pas eu l'excuse des règlements, il n'aurait pu rien déposer. Rien, il n'y en a pas; c'est le vide. Mais le vide, on ne l'a pas exposé; on l'a caché de façon très pudique derrière les règlements.

M. Bérubé: C'est très difficile de cacher le vide.

M. Forget: Oui, on peut le cacher, M. le Président.

M. Lalonde: ... une bonne "job".

M. Forget: II y a une pièce de théâtre dans laquelle on dit que le roi est nu, mais personne ne veut le dire parce que, évidemment, c'est le roi et cela ne se dit pas. Mais on est un peu dans cette situation. Le roi est tout nu et il faut finalement que quelqu'un le dise, que quelqu'un le montre du doigt...

M. Lalonde: Que quelqu'un le voie.

M. Forget: Cela va finir par se savoir, M. le Président. Je pense que je n'ai pas besoin d'ajouter autre chose. Je pense que mon propos est très bien compris. La motion que je veux présenter se lit comme suit: Que cette commission invite les représentants autorisés de General Dynamics à se faire entendre, le 22 mars, à dix heures a.m., devant cette commission afin de renseigner les membres et intervenants de cette commission.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. Alors la motion est déclarée recevable; M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, nous devrons de toute évidence voter contre cette proposition qui nous est faite. Non seulement voter contre, mais regretter qu'elle ait été faite. En effet...

M. Lalonde: Je comprends que vous regrettiez.

M. Bérubé: En effet, nous le verrons assez rapidement, l'Opposition est totalement — oui, la franchise est certainement une de mes qualités — inconsciente de l'implication de sa proposition ou si elle est consciente, elle préfère, en fait, sacrifier les intérêts supérieurs du Québec à une petite cause politique mesquine qui est celle de se faire un certain crédit politique en voulant convoquer General Dynamics devant cette commission.

Je m'explique. Pourquoi choisir, premièrement, l'approche que le gouvernement a adoptée pour la négociation de l'achat d'Asbestos Corporation? Tout d'abord, ce n'est pas une compagnie, un investisseur, qui doit dicter à l'Etat ses politiques. C'est donc au gouvernement à évaluer une politique, à en évaluer les avantages et les inconvénients et, après avoir soupesé l'ensemble des facteurs, à prendre une décision. C'est ce que nous avons fait, M. le Président.

Nous aurions pu, évidemment, choisir de nationaliser, donc de fixer un prix à la lumière des études que nous avions menées et, dans un projet de loi qui aurait certainement fait l'objet d'encore plus de fracas que ce que nous observons aujourd'hui, le gouvernement aurait pu, effectivement, imposer son prix à la société. Mais ne nous faisons pas d'illusions, imposer un prix ne veut pas dire pour autant que c'est le prix que le gouvernement paie. En effet, la société, comme dans tout cas d'expropriation, peut évidemment en appeler en justice et, par conséquent, nous nous serions retrouvés devant une négociation en public, à nouveau, de la valeur de l'entreprise. Par conséquent, évaluant les questions de stabilité politique, évaluant l'avantage qu'il pouvait y avoir à négocier avec une entreprise, General Dynamics, qui avait déjà manifesté son intention de se départir de cet intérêt, nous avons cru possible d'atteindre plus rapidement à une solution négociée. Par conséquent, nous avons choisi la négociation. Nous avons donc choisi de soumettre à un expert indépendant le soin de vérifier ou d'infirmer nos propres calculs, de manière à pouvoir adopter une position, une offre préliminaire auprès de la compagnie, et la compagnie, de son côté, fait faire exactement la même étude, de manière à avoir une base de négociation.

Nous sommes donc en face de deux parties qui se préparent à négocier. Il va de soi que, si nous invitons ici General Dynamics, celle-ci devra répondre à toutes nos questions de manière à ne pas nuire à sa position concurrentielle, à sa position de marchandage et toutes ses réponses de- vront viser à asseoir plus solidement sa position face au gouvernement; en d'autres termes, amener le gouvernement à payer le plus cher possible par une manipulation adroite de l'opinion publique et cela, avec l'appui du Parti libéral, qui sera tout à fait ravi de faire en sorte que le Québec paie plus cher parce qu'il est réputé pour nous entraîner dans des aventures qui coûtent toujours beaucoup plus cher que ce que cela aurait dû coûter. On pourrait vous en citer un certain nombre, mais je pense que vous les connaissez trop bien. En d'autres termes, le Parti libéral nous a habitués aux aventures; or, ce que nous avons choisi d'éviter, c'est justement l'aventure. Nous avons donc choisi l'évaluation la plus objective, la plus scientifique possible et une négociation en dehors du grand fracas de la publicité, comme ce à quoi le gouvernement libéral nous avait habitués, lors de ses Jeux olympiques ou lors de sa lancée du projet de la baie James où sa précipitation a conduit on sait où.

Par conséquent, il faut donc manifester énormément de prudence dans cette négociation; il faut savoir que nous sommes face à deux adversaires qui vont jauger chacun des coups qu'ils auront à porter à l'autre. Tout est négociation dans le cas d'Asbestos Corporation, non pas seulement la valeur des actifs ou des réserves, M. le député de Saint-Laurent, mais également les problèmes d'insalubrité, qui sont sujets à négociation. La société prétendra que, au contraire, ses installations sont tout à fait ou sont relativement salubres et qu'il en coûterait relativement peu pour régler les problèmes; le gouvernement, évidemment, devra invoquer l'opposé. On parlera de la situation du marché, on parlera — et c'est naturel — la société dira que, s'il n'y a pas de transformation, si elle n'a pas fait de transformation au Québec, c'est qu'il n'y a pas de transformation à faire. La société fera ressortir tous les arguments en faveur de sa position de façon insidieuse, toujours de façon tout à fait délicate; on ne posera pas de questions spécifiquement sur la valeur de l'entreprise Asbestos Corporation, mais on réussira néanmoins à manipuler l'opinion, surtout devant la collaboration absolument tacite, évidente, veule du Parti libéral, du parti de l'Opposition. (20 h 55j

II m'apparaît donc extrêmement dangereux, pour l'intérêt supérieur du Québec — ce que le parti de l'Opposition ne semble pas comprendre — d'inviter la société General Dynamics. D'autant plus qu'il faut reconnaître que la société General Dynamics ne connaît rien à l'amiante. La société General Dynamics n'a qu'un gisement, n'a qu'une mine, n'a aucun service de marketing; par exemple, dans le cas de la société Johns-Manville, c'est strictement l'entreprise Johns-Manville des Etats-Unis qui fait la mise en marché; dans le cas d'Asbestos Corporation, c'est la seule société qui fait sa mise en marché du Québec. En d'autres termes, General Dynamics ne connaît pas ce milieu de l'amiante. General Dynamics n'est pas impliquée dans l'industrie minière. Par conséquent, elle est d'abord une industrie spécialisée dans

l'aéronautique et on peut essentiellement dire que la compagnie General Dynamics est placée, face à la vente de ses actifs, dans la même position que le gouvernement; en d'autres termes, elle a fait appel à la société qu'elle estimait la plus valable pour évaluer la valeur de son entreprise, elle a fait appel à la Société Surveyer, Nenniger et Chêne-vert de Montréal.

Par conséquent, nous nous retrouvons devant une négociation entre experts SNC-KIDDER Pea-body de New York, et on voit déjà le jeu politique qui peut se produire, et il faudra évidemment en arriver à une entente. Donc, nous n'avons rien à apprendre de General Dynamics; au contraire, nous pouvons certainement entrer dans son jeu, lui permettre de faire en public des contrats, lui permettre, donc, d'amener le gouvernement sur son propre terrain à elle et nous pouvons, à ce moment-là, faire en sorte que le gouvernement du Québec, qui n'a pas l'intention de se faire dicter par General Dynamics — contrairement à l'ancien gouvernement qui avait l'habitude de se faire dicter ses politiques par les multinationales — comme nous n'avons nullement l'intention de faire dicter nos politiques par General Dynamics...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...

M. Bérubé: ... évidemment, il s'ensuivra nécessairement que la position du Québec pourrait se voir mise en danger ou compromise par suite de cette attitude infantile, de cette attitude de basse politique de l'Opposition libérale.

Prenant tous ces facteurs en considération, il m'apparaît qu'il faut résister au chantage de l'Opposition et qu'il nous faut rejeter avec l'unanimité, j'espère, de tous les gens autour de cette table...

M. Ciaccia: II n'est pas certain!

M. Lalonde: Vous avez entendu l'ordre!

M. Ciaccia: Tous ensemble, unanimité!

M. Grégoire: C'est parce que l'on n'est pas des suiveux! Vous avez été habitués à cela, vous autres. Vous votez tous pareil.

M. Lalonde: On verra cela au moment du vote.

M. Bérubé: J'espère que vous allez me laisser terminer, messieurs.

M. Grégoire: Nous, on n'est pas des suiveux.

M. Bérubé: II faut donc la rejeter avec toute l'unanimité et j'oserais même espérer que certains des membres de l'Opposition libérale qui ont l'air plus intelligents que les autres voudront se joindre à nous. Merci.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, s'il vous plaît, s'il vous plaît! Il n'y a aucune manifestation en commission parlementaire. S'il vous plaît!

M. Lalonde: Surtout après ce discours-là, il n'y a aucune raison, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, j'allais donner la parole au député de Richmond, je constate qu'il est absent.

Une Voix: On va l'attendre.

M. Bérubé: II est suffoqué par l'imprudence de cette proposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'en ai d'autres avant le député d'Outremont. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, est-ce que vous avez demandé la parole?

M. Lalonde: J'avais demandé la parole, mais peut-être après le député d'Outremont.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant le député d'Outremont, il y a le député de Mont-Royal, le député de Rosemont; alors, vous cédez votre droit de parole?

M. Lalonde: Non, non. M. le Président, on vient d'entendre un discours que je n'étais pas habitué d'entendre dans la bouche du ministre des Richesses naturelles...

M. Bérubé: On s'habitue à tout, vous savez.

M. Lalonde: Je l'avais perçu comme un homme articulé, qui savait peser les arguments de valeur, mais il faut qu'il soit réellement à court de bons arguments pour devoir recourir à la démagogie comme il le fait maintenant. Attaquer de façon malhonnête le Parti libéral, accuser l'Opposition libérale d'être de mèche, de partie, disons, avec les multinationales comme la General Dynamics, alors que tout... Non, M. le Président, ce n'est pas vrai. Le député de Frontenac semble surpris et moi, cela ne me surprend pas qu'il soit surpris parce qu'avec toute la propagande pé-quiste qui...

M. Bérubé: Ça fait penser au "chocialisme".

M. Ciaccia: Qui a donné le contrat à General Motors à London? Quel gouvernement a donné le contrat, plutôt qu'à...

M. Bérubé: Parlez donc du "chocialisme".

M. Lalonde: ... c'est de la propagande contre les multinationales, tout ce qui a été charrié depuis quelques années par le Parti québécois là-dessus. Je comprends le député de Frontenac d'être surpris que ce ne soit pas vrai, mais je suis prêt à le lui répéter plusieurs fois. Je sais que ça va prendre du temps, parce que c'est maintenant ancré dans sa mentalité, il ne pense que de cette façon, comme la propagande péquiste le lui a appris. Maintenant, il va falloir, petit à petit, que cela s'en aille, il va falloir que la vérité ait ses droits,

trouve sa place. Il va y avoir une petite lumière, à un moment donné, qui va scintiller, faiblement, dans son esprit et qui va éventuellement défaire certains schèmes, certaines chimères surtout...

M. Bérubé: ... watts qu'on a en avant de nous autres.

M. Lalonde: ... qui ont été installés systématiquement par la propagande bien organisée, bien orchestrée du Parti québécois, mais ce n'est pas vrai, au contraire.

M. Laplante: Ce n'est pas nous qui étions à Ottawa et regardez la propagande qui se fait là, $25 000 pour une caisse électorale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Le ministre nous a dit tantôt: Une compagnie ne peut pas dicter au gouvernement ses politiques. Donc, on ne peut pas inviter une compagnie ici au bout de la table. On ne peut pas inviter une compagnie, M. le Président, mais on va inviter toute l'association des compagnies. Elle, par exemple, on peut l'inviter à nous dire ce qu'elle pense, mais une compagnie, non! L'Association des compagnies d'amiante, ça va.

M. le Président, c'est pauvre comme argument, c'est épouvantable, cela me déçoit beaucoup. Je ne laisserai pas ma déception prendre le dessus, je vais quand même tenter d'amener le ministre et les autres députés, parce que le ministre n'a pas l'air sûr que les députés vont suivre là-dessus, à appuyer notre motion.

Nous aurions pu nationaliser, a dit le ministre, mais, épouvantable hypothèse, la compagnie peut en appeler en justice. Mais c'est effrayant, M. le Président. Vous, un avocat, vous savez comme c'est effrayant de penser que des gens peuvent aller devant les cours de justice. Jamais ce gouvernement ne voudra s'imposer, se soumettre au système, à l'appareil normal. J'emploie le mot "normal ", parce que je sais que ça allume des petites lumières et ça fait sonner des petites musiques dans les oreilles péquistes! Le système normal de la justice, personne ne veut se soumettre à ça. Et pourtant!

Alors, il dit: Nous avons donc choisi de négocier. Ah bien là, on est libre quand on négocie, on est totalement libre. Le gouvernement, M. le Président, je dis qu'il a ainsi choisi de se soumettre à la volonté de la société General Dynamics. C'est lui le gouvernement qui vient de se livrer, pieds et poings liés, à la volonté de General Dynamics. Pourquoi? Parce que, quand on négocie une entente bilatérale, on se soumet à l'accord d'une autre partie et la seule porte de sortie du gouvernement, c'est de perdre la face et ne pas perdre n'importe quelle face, la face politique. C'est important pour le gouvernement péquiste.

Lorsqu'on connaît la vanité politique du Parti québécois, on ne peut pas s'imaginer qu'il va perdre la face politique. Savez-vous dans quelle posi- tion le gouvernement s'est mis? Parce que, de la façon qu'il a commencé ce dossier...

M. Bérubé: ... perdre la face, ils en ont toujours une autre de rechange.

M. Lalonde: De la façon qu'il s'est mis, pieds et poings liés...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: ... à la merci de cette compagnie, cela me fait penser à quelqu'un ou à une société qui a choisi un drapeau. On choisit collectivement un drapeau comme étant le symbole de sa fierté nationale. Mais le drapeau...

M. Laplante: Cela va être l'Union Jack. M. Lalonde: ... se trouve chez le voisin. M. Laplante: C'est cela.

M. Lalonde: Alors, on dit: On va aller le chercher. On n'ira pas le chercher, on va aller le négocier. Imaginez-vous le prix qu'il va payer pour le drapeau.

M. le Président, le premier ministre a dit, et je cite ce qu'un journal rapporte de ses propos: "Toutefois, si le procédé échoue, le procédé de l'acquisition de la négociation, le gouvernement pourrait alors envisager la voie de l'expropriation offerte à tous les Parlements démocratiques." Mais est-ce que le gouvernement a mis cette solution de côté ou s'il veut y recourir éventuellement?

M. Paquette: II me semble que c'est assez clair.

M. Lalonde: Et à quel prix?

M. Bérubé: Le pire des règlements vaut mieux que le meilleur des procès.

M. Lalonde: Mais à quel prix allons-nous recourir à l'expropriation? Mais à quel prix? On ne le sait pas. Cela va être notre argent. Ce n'est pas l'argent du Parti québécois, c'est l'argent de la population.

M. Bérubé: Vous qui êtes avocat, vous savez que le pire des règlements vaut toujours mieux que le meilleur des procès.

M. Forget: C'est une promesse que vous nous faites, de faire le pire des règlements.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Le ministre est déjà prêt à faire le pire des règlements, avec l'argent des autres naturellement. C'est facile de faire le pire des règlements avec l'argent des autres. Si c'était l'argent

du ministre, l'argent du Parti québécois, ce serait leur affaire, mais il s'agit de nos valeurs à nous, à toute la société.

M. Bérubé: Cela va coûter moins cher que $1 milliard.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Est-ce que M. le ministre a une intervention à faire? Il me semble que je ne l'ai pas interrompu lorsqu'il a parlé.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: M. le Président, le député de Saint-Laurent a démontré d'une façon très claire jusqu'à quel point le gouvernement s'est mis dans une situation telle que des hommes raisonnables, des personnes raisonnables, en examinant le comportement du gouvernement actuel, concluent que le gouvernement ne veut pas acheter. Il est impossible de conclure que le gouvernement veut réellement acquérir cette compagnie. Comment voulez-vous? On s'est mis dans la situation d'un acheteur qui veut acheter, qui négocie avec un vendeur qui n'est pas obligé de vendre, et l'acheteur ayant déjà décidé de ne recourir à aucune autre manière d'acheter que la négociation. Tous les prix sont possibles, le plus haut prix, le prix que l'imagination ne peut pas atteindre, et le bon pour le gouvernement, parce que cela lui permet, à ce moment-là, de sauver la face politique.

Nous, ce qu'on voudrait, M. le Président, c'est aider le gouvernement en invitant General Dynamics ici, à nous indiquer, non pas le prix, non pas l'évaluation...

M. Laplante: Marchander.

M. Paquette: ... L'imagination ne peut pas atteindre.

M. Lalonde: Non, on ne peut pas être partie à cette comédie de négociation que le gouvernement a entreprise avec General Dynamics. On ne veut pas être partie à cela, mais pas du tout. Nous voulons nous laver les mains de la stupidité du gouvernement. Jamais nous n'allons participer à cette parodie d'administration des affaires publiques. Mais General Dynamics aurait d'autres informations à nous donner concernant justement le cadre de l'incorporation de la société nationale ou la société québécoise de l'amiante. Pourquoi pas SOQUAM, en effet?

On a énoncé les articles 4 et 16 du projet de loi qui comportent des pouvoirs. General Dynamics a sûrement accumulé une expérience considérable dans le domaine de l'amiante et elle pourrait nous informer sur un certain nombre de données qui sont absolument nécessaires pour les membres de cette commission en vue de se faire une idée sur la portée du projet de loi.

M. le Président, je ne comprends pas le gouvernement. J'ai été étonné, et je le répète, de l'attitude du ministre, en réaction à cette motion. Je m'attendais à des arguments beaucoup plus pesés, beaucoup plus fouillés. Tout ce qu'il nous a dit, c'est qu'il a accusé simplement l'Opposition de vouloir faire du chantage. Je comprends que le gouvernement se sente dans une situation de minorité; quand on regarde les sondages actuellement... Il sait qu'il ne représente qu'une minorité de Québécois. De plus en plus. Je l'ai averti, à plusieurs reprises, lors des dernières interventions, depuis un an, à l'occasion des débats, soit en vertu de la loi 101, à propos de la loi 101, de la loi 67 en ce sens que ces décisions l'isolaient dans l'opinion publique. (21 h 10)

M. Laplante: Parlez-vous du sondage de 1976?

M. Lalonde: Quand on a baissé de 20%, en moins d'un an, dans l'opinion publique, on voit le résultat de décisions qui ne sont pas raisonnables.

M. Laplante: En 1976, le même sondage disait cela.

M. Lalonde: ... qui ne sont faites que pour imposer à la réalité les chimères d'un programme politique, pensé simplement en vase clos. On le voit actuellement. C'est écrit dans le programme du Parti québécois: II faut le faire, à n'importe quel prix. Ce n'est pas important. Il a maintenant accès au trésor public. Il pense qu'il peut en faire n'importe quoi, pourvu que ce soit pour mettre en vigueur le programme sacré — je n'ai pas dit le sacré programme — du Parti québécois.

Un drapeau n'a pas de prix, M. le Président, et c'est un drapeau qu'on fait actuellement. C'est un symbole et les symboles n'ont pas de prix, on le sait, on a vu cela avec la loi 101. On a fait un drapeau au lieu d'une loi. On est en train de faire un autre drapeau, à n'importe quel prix. J'espère que les députés ministériels vont s'en rendre compte et faire appel à cette indépendance intellectuelle à laquelle on se réfère souvent, quoique, de plus en plus, on s'aperçoit qu'il s'agit plutôt d'une ligne de parti sans aucun accroc. C'est "le crois ou meurs" dans ce parti. On va le voir tantôt. Je vais surveiller le vote. Je vais surveiller le vote, M. le Président, je vous le dis d'avance et j'avertis les ministériels.

M. Laplante: S'il fallait que cette affaire soit télévisée!

M. Lalonde: On va voir jusqu'à quel point ces députés qui disent posséder assez de maturité pour prendre leur propre décision, en fonction de la valeur des arguments, on va voir de quelle façon ils vont voter.

M. Laplante: C'est beau les valeurs d'arguments.

M. Lalonde: Ont-ils peur?

M. Laplante: On n'en a pas trouvé encore.

M. Lalonde: Auront-ils peur d'entendre General Dynamics?

M. Ciaccia: Où est leur indépendance d'esprit?

Une Voix: Oui.

M. Lalonde: Je vous le demande.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Auront-ils peur d'aller à l'encon-tre des desiderata et des diktats du ministre?

M. Laplante: Oui.

M. Lalonde: On va le voir. Je vois un député qui fait signe que "non", je ne sais pas s'il veut dire qu'il n'aura pas peur.

Une Voix: II est assis à table, lui. M. Laplante: II n'a pas droit de vote.

M. Lalonde: Pendant quelques secondes, j'ai eu de l'espoir. On vient de me dire que ce député n'a pas droit de vote. C'est facile d'avoir une autonomie de pensée quand on n'a pas le droit de décider. Mais ceux qui sont assis ici à cette table et qui ont le droit de vote, nous allons les surveiller.

M. Laplante: On va regarder le ministre avant.

M. Lalonde: J'ai vu un regard inquiet de la part du ministre, je peux le rassurer. Tantôt, lorsqu'il a regardé ses troupes, bien alignées, lorsqu'il a dit peut-être que les députés ministériels voteront contre, dit-il...

Une Voix: N'est-ce pas?

M. Lalonde: ... n'est-ce pas? Oui, le mot d'ordre est lancé.

M. Ouellette: Vous regardez l'émission Duplessis, certainement.

M. Lalonde: L'inquiétude du ministre, je pense, n'est pas fondée. Voyant jusqu'à quel point les députés actuellement se préparent à prendre leur rang derrière le ministre, sans tenir compte de la valeur de nos arguments, je peux rassurer le ministre, mais il me reste quand même...

M. Grégoire: On attend l'argument. Cela ne fait rien, il y en aura encore deux autres pour apporter l'argument. Sur quatre, jamais je ne croirai qu'il n'y aura pas un argument.

M. Lalonde: ... à faire appel aux députés ministériels, de considérer... Jusqu'à quel point, ces députés... Lequel, parmi les députés ministériels, autres que le ministre... On ne sait pas si le ministre a rencontré les représentants de General Dynamics. On ne sait rien de cela. On n'a droit à aucun renseignement.

M. Bérubé: Pour ne pas surcharger votre cervelle.

M. Lalonde: Pourquoi? Lequel de ces députés ministériels qui sont au pouvoir, lequel de vous a rencontré les gens de General Dynamics? Qui de vous a eu accès à ces renseignements?

NI. Paquette: Est-ce qu'il y en a chez vous... Le député de Saint-Laurent a dû rencontrer les gens de General Dynamics, d'après son intervention.

M. Lalonde: Est-ce que le député de Bourassa a rencontré les représentants? Est-ce qu'il a les réponses aux questions qu'on se pose concernant General Dynamics?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Est-ce que le député de Bourassa a des réponses?

M. Laplante: Oui, j'ai des réponses.

M. Lalonde: Le député de Bourassa a rencontré...

M. Laplante: Lorsque j'irai les rencontrer, j'irai vous rencontrer, parce que vous savez le chemin, vous du Parti libéral, pour aller vers ces multinationales.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Ce n'est pas General Motors que j'ai dit. J'ai dit General Dynamics.

M. Laplante: Non, General Dynamics. On vous découvre un nouveau talent de comédien, ce soir, M. le député.

M. Lalonde: M. le Président, s'il y avait une question de privilège, je la soulèverais, parce que ce n'est pas de la comédie, c'est triste, au contraire, de voir jusqu'à quel point les députés ministériels n'ont rien comme renseignement, aucun.

M. Grégoire: Les renseignements de qui? Je les ai.

M. Lalonde: Ah! Le député de Frontenac a rencontré les gens de General Dynamics.

M. Grégoire: Non, vous m'avez demandé si j'avais les renseignements. Je les ai.

M. Lalonde: II a rencontré les gens de General Dynamics?

M. Grégoire: Le représentant au Québec, c'est Asbestos Corporation.

M. Ciaccia: Ils n'ont pas le droit, le ministre ne veut pas.

M. Lalonde: Vous avez le président de General Dynamics qui a parlé au député de Frontenac.

M. Grégoire: Non.

M. Lalonde: Le député de Frontenac n'est pas intéressé à l'entendre...

M. Grégoire: II ne viendra pas ici.

Une Voix: ... pour venir subir vos questions!

M. Lalonde: ... alors que c'est justement cette compagnie, avec la société qu'on est appelé à créer, qui va faire une entente.

M. Grégoire: Vous ne croyez pas que le président de General Dynamics va venir écouter vos questions et vos discours? Arrêtez-moi cela, vous autres!

M. Ciaccia: Faites-en la preuve, invitez-le!

M. Laplante: II va partir de Saint-Louis et il va s'en venir ici.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: S'ils savent quel genre de questions vous allez leur poser! Jamais ils ne viendront vous écouter.

M. Ouellette: Est-ce que je pourrais poser une question?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: M. le Président, devant le "filibuster" du parti ministériel, laissez-moi quand même la parole. Je pense que je l'avais.

M. Ouellette: Vous ne me permettez pas une question? Juste une.

M. Lalonde: Non. Si j'en juge par les questions de vos deux voisins, je ne suis pas optimiste.

M. Ouellette: Prenez une chance! M. Grégoire: II est drôle, celui-là. M. Ouellette: Je recommence... M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Ouellette (Beauce-Nord): Pour une fois, ma question serait vraiment sérieuse.

M. Grégoire: Je vous le recommande celui-là, il a de bonnes questions.

M. Ouellette: Mais il n'aura pas de réponse, c'est cela le problème.

M. Lalonde: J'ai tenté de faire appel au sens pratique, quoique c'est assez difficile...

Une Voix: Une tentation comme tentative.

M. Lalonde: ... dans ce parti, on n'en trouve pas, même à l'honnêteté intellectuelle des membres de l'équipe ministérielle pour simplement ne pas avoir peur. Si on pose des questions telles que: Quel prix voulez-vous avoir? M. le Président, vous serez le premier à nous rappeler à l'ordre, lorsque les gens de General Dynamics vont être ici. Si on pose la question à M. Untel, je je ne sais pas son nom: Quelle est l'évaluation de la compagnie Asbestos? M. le Président, vous allez tout de suite faire tomber la guillotine sur mon droit de parole, à ce moment.

M. Grégoire: Pourquoi poseriez-vous la question?

M. Lalonde: Raison de plus de ne pas craindre qu'on se lance dans une telle aventure, mais combien de questions pertinentes pourraient être posées à General Dynamics, justement sur son expérience concernant ce que... Est-ce que le député de...

M. Ouellette: Beauce-Nord.

M. Lalonde: ... Beauce-Nord a lu...

M. Ciaccia: Oui, j'en ai entendu parler.

M. Lalonde: Est-ce que le député de Beauce-Nord sait ce que l'article 4 du projet de loi contient?

M. Ouellette: Est-ce que je suis tenu de répondre à votre question, puisque vous n'avez pas accepté la mienne?

M. Lalonde: Bon. Voilà, il ne sait pas ce que l'article 4... Je comprends qu'il ne sache même pas pourquoi General Dynamics viendrait ici!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

Une Voix: Ce n'est pas cela que j'ai dit. Allons donc!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît!

M. Grégoire: II a une mine d'amiante dans son comté, lui aussi.

M. Lalonde: Est-ce que le député de...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De Lac-Saint-Jean.

Une Voix: Le "show" continue.

M. Lalonde: ... Lac-Saint-Jean veut intervenir? A votre place, je l'inviterais à la table.

Une Voix: Le "show must go on". M. Grégoire: On peut l'inviter.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je suis sûr que s'il demande le consentement, il l'aura!

M. Lalonde: De toute façon, je pense que chacun des députés ici serait intéressé de voir les gens de General Dynamics, les méchants qui ne veulent pas vendre. Voyons! Ce serait intéressant!

M. Laplante: Cela fait longtemps qu'on cherche un remplaçant à Olivier Guimond.

M. Lalonde: Pensez-y une minute! Essayez de vous transporter dans le temps et dans l'espace. Ils sont là. Vous avez des questions à leur poser.

Une Voix: II commence à me convaincre!

M. Laplante: Savez-vous ce que je pense? Je pense que vous auriez fait un diable de bon remplaçant à Olivier Guimond!

M. Lalonde: Le député de Bourassa pense déjà aux questions à lui poser.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Laplante: On en cherche un.

M. Grégoire: J'aimerais savoir quelles sortes de questions vous leur poseriez!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...

M. le député de Marguerite-Bourgeoys. S'il vous plaît! Résistez à la provocation, messieurs. Je demanderais également à M. le député de Marguerite-Bourgeoys de bien vouloir conclure.

M. Lalonde: Le député de Bourassa a déjà des questions.

M. Laplante: Non, il est gentil ce soir.

M. Lalonde: M. le Président, je conclurai en disant que d'ici le vote, je suis sûr que chacun des députés, en oubliant les souhaits — parce qu'il s'agissait d'un souhait — du ministre, devrait se poser la question, à savoir pourquoi avoir peur de General Dynamics? Simplement avoir ses représentants ici au bout de la table et leur poser des questions pertinentes... Cela serait, au contraire, une façon de démontrer que le gouvernement n'a pas peur. Mais je pense que celui-ci fait une espèce de cauchemar parce qu'il sait que l'affaire est mal engagée; il ne sait pas comment s'en sortir. Mais quand même, j'espère que d'ici au vote il changera d'idée et appuiera la motion du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président.

M. Laplante: Prends ton temps, je reviens.

M. Brochu: Oui, certainement, je vais attendre le retour du député de Bourassa pour conclure.

M. Bérubé: Vous devriez commencer à conclure tout de suite.

M. Brochu: Merci de l'invitation du ministre.

M. le Président, je commencerai donc mon intervention en concluant que j'appuierai cette motion présentée par le député de Saint-Laurent simplement parce que, au début des discussions que nous avons eues sur la question, nous avions quand même abordé cette proposition de faire venir ici, à la table de nos discussions, différentes parties concernées par le projet de loi, différents groupes qui peuvent nous apporter des lumières. Parmi ces groupes, évidemment figurait — c'était là l'expression même des premières motions qui ont été présentées aujourd'hui — la compagnie General Dynamics.

A notre avis, il semble que les réserves qui ont été exprimées par le ministre et par quelques-uns de ses collègues, en ce qui concerne les négociations actuellement en cours, ne sont pas de nature à nous faire rejeter la proposition qui est devant nous, c'est-à-dire de faire comparaître General Dynamics. Au contraire, M. le Président, et vous-même en tant que gardien des règlements de cette commission et des règlements dont cette commission peut décider en cours de route, pourriez-vous vous porter garant, à ce moment-là — nous-mêmes aussi — en acceptant un certain corridor de discussion, comme vous le mentionnez si bien. Nous pourrions définir exactement le cadre des discussions à l'intérieur desquelles des questions pourraient être posées à General Dynamics, toujours dans le but d'obtenir de cette entreprise les expertises qui peuvent être pertinentes à nos débats, les renseignements que nous pourrions juger utile d'obtenir de l'entreprise, étant donné que c'est elle qui est, en grande partie, propriétaire d'Asbestos Corporation, entreprise dont le gouvernement se portera acquéreur.

Nous espérons par cette motion, obtenir, en quelque sorte, la radiographie de l'entreprise

comme telle, les données techniques de cette entreprise. Quelques questions que nous aurions eu à lui poser sur ses installations, par exemple, sur l'état de ses installations...

M. Grégoire: ... General Dynamics ne ferait pas cela. Quand les syndicats viendront, tu vas le savoir.

M. Brochu: ... sur les coûts. Oui, on pourrait le savoir des syndicats, avoir certaines données. Par contre, je pense que nous aurions pu avoir certaines données de la part de General Dynamics. Même si General Dynamics est la maison mère d'Asbestos Corporation, je pense que les gens qui se seraient présentés devant nous auraient eu certaines données pertinentes en ce qui concerne ce sujet.

M. Bérubé: ... qui fait l'évaluation pour General Dynamics sur l'état des installations.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Brochu: Non, il ne s'agissait pas, à ce moment-là, de faire un tour d'horizon aussi complet que le souhaiterait le ministre, malgré que, s'il veut lui-même amender la proposition faite par le député de Saint-Laurent, libre à lui de le faire et d'inviter tous les gens, groupements, associations qui peuvent être reliés directement ou indirectement à cette question et la commission pourrait éiargir son mandat. On pourrait élargir le corridor qui a été si habilement tracé par notre président. Cela serait la volonté du ministre de la faire; je lui laisse cette possibilité.

Au point de départ, pour revenir à la question plus sérieusement, il s'agissait d'aller chercher toutes les données de l'entreprise exploitante. Il s'agissait d'obtenir le plus de renseignements sur le plan économique, d'une part, et sur le plan technique, d'autre part; parce que l'entreprise en question, comme on le sait, possède environ 54% des actions d'Asbestos. Son emprise sur le domaine, tant sur le plan national que sur le plan international, revêt une grande importance. Je pense qu'à cause de cette situation, à cause de la nature de l'étendue de ses possessions et de son expérience, on aurait pu obtenir des données pertinentes. (21 h 25)

M. le Président, je limiterai mes remarques à cela. Je devrai conclure avant le retour du député de Bourassa! Je conclus en vous remerciant de votre patience, en vous disant que j'appuie cette motion du député de Saint-Laurent et en espérant que le gouvernement pourra l'appuyer également.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, quand on dit que le Parti québécois et les députés ministériels ont peur, je crois que la plus grande peur qu'ils semblent avoir, c'est la peur de la vérité. C'est cela, la vraie peur, c'est l'impression que vous nous donnez. Cela me rappelle un mémoire que la chambre de commerce vient de présenter, il y a une semaine, à la commission parlementaire de la justice, sur la question des recours collectifs. La chambre de commerce, en adressant son mémoire au ministre, au gouvernement, a rappelé au ministre que, dans la Loi de la protection des consommateurs, il y a une provision qui oblige les compagnies, ceux qui vont offrir des produits aux consommateurs, à faire des représentations, à dire la vérité et le souhait de la chambre de commerce était: Si cette loi pouvait seulement s'appliquer aux hommes politiques! C'est le même souhait que je fais ici, quant à l'information qu'on veut obtenir pour voir si le projet de loi doit être bonifié, pour obtenir toutes les informations.

M. Bérubé: Est-ce que vous vendez de la salade?

M. Ciaccia: Non, parce que cela s'appliquait au gouvernement. C'est vous qui nous donnez l'impression d'une obstruction, que vous voulez systématiquement tout bloquer.

D'un côté, le ministre dit qu'il ne peut pas inviter General Dynamics parce que General Dynamics fera en sorte de faire augmenter la valeur de ses actions. C'est un peu illogique parce que ce n'est pas dans l'intérêt de l'Opposition de montrer que les actions de General Dynamics valent tellement; c'est dans notre intérêt de montrer qu'on est contre votre acquisition et, si vous avez tellement confiance à votre compétence et à la compétence des experts de votre ministère, il me semble que ce serait la chose la plus facile que de poser des questions à General Dynamics et d'avoir la vérité, de voir vraiment ce qu'a la compagnie.

D'un côté, le ministre dit que General Dynamics viendrait ici et ferait des représentations qui forceraient le gouvernement à payer plus cher. De l'autre côté, M. le Président, le député de Frontenac dit que General Dynamics ne viendrait même pas.

M. Grégoire: Le président.

M. Ciaccia: Le président ou qui que ce soit, les représentants de General Dynamics. Alors, il me semble que cela trahit un peu l'esprit des députés ministériels qui voient qu'une commission parlementaire donnerait la vérité ou ne la donnerait pas. Si elle donne la vérité pourquoi avez-vous peur qu'on ait toutes les données? Est-ce que c'est parce que vous n'avez pas fait votre devoir, que vous ne savez pas dans quelle aventure vous vous embarquez?

M. Grégoire: Oh oui, on le sait!

M. Ciaccia: Si vous le savez, vous ne devriez pas avoir de craintes à inviter General Dynamics. Mais j'ai l'impression — et ce n'est pas seulement moi qui ai cette impression, mais tout un secteur de la population — que vous ne voulez pas que le public sache que General Dynamics veut se faire

acheter par le gouvernement. C'est l'impression que vous nous donnez et c'est ce qui se dit dans le public. J'ai l'impression que la meilleure chose qui soit arrivée à General Dynamics depuis qu'elle a acheté 54% des actions d'Asbestos, c'est l'intention du gouvernement du Québec d'acheter ses 54%. C'est absolument l'impression que vous nous donnez et la seule manière d'enlever cette impression, c'est de donner les faits, de l'inviter ici, de la faire parler, de la questionner et de faire ressortir tout ce qui, dans cette compagnie, n'augmenterait pas les coûts: les améliorations, les coûts à long terme, les planifications de la compagnie; il y a une série de questions, une série d'informations qu'on peut obtenir seulement si cette compagnie vient ici et si on voit vraiment son comportement. On verra si elles sont vraies, les rumeurs qui courent dans le public que General Dynamics veut se faire acheter. C'est pour cela aussi que vous n'allez pas procéder par voie d'expropriation, parce qu'à part du fait que vous ne semblez pas avoir trop de confiance dans les tribunaux, quand vous négociez de gré à gré, de la manière que vous le faites, vous le faites en cachette. Vous ne le faites pas en toute ouverture, vous ne voulez pas donner les faits, vous ne voulez pas donner les faits à l'Opposition, vous ne voulez pas donner les faits au public.

Je vois que le député de Frontenac dit non, mais qu'il le prouve. Ce n'est pas seulement par vos déclarations que vous allez nous prouver cela, c'est par vos actions, ce n'est pas par un illogisme que vous allez nous convaincre. M. le Président, je crois qu'une des manières de démontrer vraiment que ce projet de loi est dans l'intérêt du public, du Québec, c'est d'inviter la General Dynamics. Si vous n'aviez pas peur, si vous aviez confiance, c'est cela qui vous manque vous autres, la confiance, vous le voyez avec vos projets de loi, comme le projet de loi 101, c'est le manque de confiance. Vous le voyez par un projet de loi où vous ne donnez pas les faits au public, c'est le manque de confiance. Vous avez peur que le public vous questionne, qu'il vous dise: Ecoutez, ces données que vous avez sur la table, ce n'est pas ainsi que cela se fait. En cachant les faits, en essayant de nous jeter de la poudre aux yeux, c'est seulement de cette façon que vous pensez que vous allez réussir.

M. le Président, l'Opposition officielle ne permettra pas qu'on vote en cachette un projet de loi aussi important sans questionner tout le monde impliqué. Pourquoi avez-vous accepté les autres? Vous pensez que vous avez fait un compromis: on va en faire venir quelques-uns, mais on va en exclure d'autres. Votre position n'est pas logique. Si vous n'aviez pas peur de l'orientation de votre projet de loi, vous n'auriez pas peur d'inviter General Dynamics d'ajouter une compagnie sur les cinq compagnies ou groupes proposés. Ce n'est pas cela qui va changer la nature de la commission parlementaire, ce n'est pas cela qui va ajouter tellement à nos travaux.

M. le Président, j'appuie donc la motion du député de Saint-Laurent et je lance un défi aux ministériels. Montrez que vous n'avez pas peur, montrez que vous êtes honnêtes, montrez que vous voulez que le public sache ce qui se passe. Prouvez-nous que General Dynamics ne peut pas se faire acheter, que ce n'est pas dans l'intérêt de General Dynamics ce que vous faites. Les actions montent de $23 à $49. Le ministre de l'énergie a dit que cela devrait être $60.

M. Grégoire: Cela va baisser.

Une Voix: Elles sont rendues à $37.

M. Ciaccia: Voyons! Voyons! Cela commence à être un peu louche.

M. Paquette: Cela redescend.

M. Grégoire: Cela va encore baisser.

M. Ciaccia: Je ne veux pas prêter d'intention au gouvernement.

M. Grégoire: Elles sont à $37 aujourd'hui. M. Paquette: Cela n'a aucune importance. M. Grégoire: Cela va tomber à $35.

M. Ciaccia: Je ne veux pas prêter d'intention au gouvernement, mais c'est d'un amateurisme, c'est d'une incompétence inexcusable.

M. Bérubé: Qu'ils prennent leurs risques.

M. Ciaccia: Prouvez un peu de votre bonne foi, prouvez un peu votre compétence. Faites venir General Dynamics. On a les mêmes intérêts que vous. On n'a pas intérêt à faire monter les actions. On veut démontrer que l'usine est désuète. On va le faire prouver par la bouche de General Dynamics. On va faire prouver...

M. Grégoire: Cela a brûlé.

M. Ciaccia: II y en a une autre, voyons! Pas celle qui a brûlé, naturellement, voyons! Est-ce assez illogique, cela? Vous venez de prouver ce que je viens de dire de votre illogisme par vos déclarations. Voyons!

M. Grégoire: Oui, mais le montant de l'assurance est dans les coffres par exemple. Les $21 millions...

M. Ciaccia: Faites-la venir ici pour démontrer les cas d'insalubrité de sa présente usine...

M. Grégoire: Ne vous inquiétez pas, les syndicats vont le dire.

M. Ciaccia: ... pour démontrer les démarches faites par le ministère de l'environnement. Quelles sont les exigences imposées par le gouvernement? General Dynamics a-t-elle respecté les normes du ministère de l'environnement? Ce ne sont là que quelques exemples. Je vais vous dire

que vous verrez, par les réponses apportées aux questions posées, que la valeur de la compagnie n'augmentera pas, elle va baisser. Dans l'opinion publique, les gens diront: Pourquoi le gouvernement achèterait-il cette compagnie après que les organismes convoqués auront répondu aux questions de l'Opposition officielle? C'est ce qu'on veut, en toute franchise. Nous avons les mêmes intérêts. Ne vous inquiétez pas. Nous représentons la majorité des Québécois. Nous avons leurs intérêts à coeur. Ne vous inquiétez pas de cela. Si vous votez contre cette motion, c'est parce que vous démontrez une incompétence. Vous n'êtes pas prêts. C'est une aventure, c'est un symbole. Vous n'avez pas la compétence pour poser des questions à General Dynamics. Le ministre dit: Ils vont venir dire que ça vaut beaucoup. Bien oui, mais vous n'allez pas prendre pour du "cash" les déclarations de General Dynamics. J'espère que vous aurez des questions pertinentes pour démontrer vraiment que cette compagnie ne vaut pas ce qu'elle prétend que ça pourrait valoir, et pour faire sortir toutes les failles, toutes les difficultés.

M. le Président, j'avoue que la position du ministre m'étonne, elle étonne même les ministériels, c'est pour ça qu'il a été obligé de dire: Vous allez voter contre. C'est étonnant, franchement, c'est étonnant, c'est incompréhensible, en plus.

Je vais terminer ma brève intervention ici, M. le Président. Pensez aux arguments qu'on vous a fait valoir et aux questions qu'on vous a posées, demandez-vous, individuellement, peut-être que votre ministre ne vous l'a pas dit, peut-être que le député de Frontenac ne vous l'a pas dit, mais General Dynamics veut se faire acheter par le gouvernement. D'accord?

Une Voix: On ne veut pas l'acheter.

M. Ciaccia: Vous ne voulez pas l'acheter, mais vous le faites avec votre projet de loi. Scindez-le, et dites-le, que vous ne le voulez pas. Il y a d'autres moyens d'arriver à votre objectif. D'accord? Pensez-y et acceptez cette motion et enlevez les doutes que la population a à ce sujet.

Le Président (M. Laplante): Le député d'Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je serai très bref. En ce qui me concerne. Ce sera beaucoup moins de vingt minutes. J'ai été profondément blessé par les déclarations du ministre, tout à l'heure, et je pense que j'admire mes collègues qui sont ici, qui sont capables de passer outre à des insultes aussi basses qu'on a reçues ce soir. On s'est fait accuser de ne pas servir les intérêts supérieurs du Québec, d'avoir partie liée avec des intérêts étrangers, d'avoir des attitudes infantilles, de faire du chantage, de la collaboration, de la basse politique.

Si on est ici pour se faire insulter comme ça, je pense que ça ne vaut pas la peine de discuter sur le fond des problèmes. Il y a d'autres ministres de ce gouvernement qui accusent les gens d'être des voleurs, des bâtards, des inféodés. Ce soir, on s'est fait insulter de nouveau. Si je suis ici, ce n'est pas pour sacrifier les intérêts du Québec, M. le ministre. Avec des attitudes aussi offensantes et aussi méprisantes, il n'y a qu'un sentiment que j'ai envers vous, c'est le mépris. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, l'Opposition nous fait son traditionnel appel à voter en faveur de sa résolution. Je dois révéler un secret d'alcôve. Nous avons eu un caucus, à l'heure du souper, et je dois dire que la suggestion de rejeter cette proposition est apparue, spontanément, à l'ensemble du caucus des députés. C'est donc une idée qui nous est bien personnelle et elle saute d'évidence aux yeux; il est tout à fait à l'encontre de l'intérêt du Québec d'entendre à cette commission la General Dynamics.

L'Opposition a accusé le gouvernement, les députés ministériels, d'avoir peur de perdre la face. Elle a manqué une bonne blague tantôt autour de la table. On disait que c'est très différent du gouvernement libéral, qui ne pouvait pas avoir peur de perdre la face...

M. Lalonde: C'est la seule affaire que vous êtes capables de faire, à part de lancer des insultes, voyons!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Soyez donc un peu sérieux!

M. Paquette: M. le Président, je pense que c'est vrai que l'Opposition a conservé cette caractéristique d'être incapable de perdre la face, parce qu'elle en a une autre... (21 h 40)

M. Lalonde: On l'a entendue, celle-là. Cela fait deux fois...

M. Paquette: On nous fait une proposition que l'on sait, de toute évidence, que le gouvernement du Parti québécois ne peut absolument pas accepter. C'est évidemment inacceptable pour un gouvernement...

M. Ciaccia: ... ils l'ont dit.

M. Paquette: ... d'amener à une commission parlementaire, sous les feux de l'opinion publique, une compagnie avec laquelle elle est en train de négocier. On aura beau dire qu'on pourrait simplement se contenter d'orienter les questions autrement...

M. Lalonde: Avec l'argent des autres.

M. Paquette: Je pense qu'on ne pourrait pas éviter, dans cette situation, de traiter du fond de la question et de faire révéler par la compagnie General Dynamics certains des arguments qu'elle

compte employer dans la négociation et également de placer le ministre dans une position où il serait obligé de sortir un certain nombre d'informations à un moment où ce n'est peut-être pas approprié, puisqu'on est en négociation.

Quand on dit que c'est parce qu'on a peur, que c'est parce qu'on se cache, je pense que les gens de l'Opposition ignorent peut-être que, quand le gouvernement fédéral a acheté la compagnie Canadair, en 1976, de la même compagnie General Dynamics, il l'a fait exactement de la même façon. C'est une transaction d'à peu près la même envergure. General Dynamics n'a pas été convoquée devant le Parlement pour discuter pendant que le gouvernement négociait avec elle.

Je pense que tout gouvernement responsable aurait exactement la même attitude devant des situations semblables.

M. Lalonde: Ils veulent le faire à n'importe quel prix.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Ils sont aussi enfantins que vous autres.

M. Grégoire: Ils ne sont pas allés devant la commission parlementaire pour...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Paquette: M. le Président, c'est une situation tout à fait analogue. Le gouvernement fédéral avait annoncé son intention d'acheter la compagnie Canadair et était en train de négocier avec cette compagnie, General Dynamics, l'achat de Canadair.

J'ai entendu le député de Mont-Royal essayer d'insinuer que c'est peut-être parce qu'on avait peur que soit démontrée devant la commission la hâte de General Dynamics de vendre sa filiale d'Asbestos. Je ne sais pas s'il est au courant que la General Dynamics, avec Asbestos, a fait un rendement sur le capital autour de 22% à 25% l'année dernière.

M. Ciaccia: Je suis au courant.

M. Paquette: Je ne connais pas une compagnie qui, avec un tel rendement sur son capital, serait très désireuse de vendre au plus vite une entreprise aussi rentable.

M. Forget: Puisqu'il leur donne le même rendement.

M. Paquette: D'autre part, M. le Président, quand j'ai entendu le député de Saint-Laurent parler du soi-disant vide que le gouvernement voudrait cacher, je le trouve très perspicace de voir un vide qu'il dit aussi apparent là où il n'est pas. Le seul vide que j'ai trouvé, c'est dans les ar- guments de l'Opposition et également aussi dans son incapacité à fournir des solutions alternatives. Je ne pense pas que des questions à General Dynamics pourraient jeter quelque lumière sur ce débat.

Finalement, M. le Président, je me demande si ce n'est pas simplement parce que l'Opposition manque carrément de ressources, qu'elle manque d'armes, qu'elle a décidé de convoquer une compagnie qui se spécialise dans l'armement. Nous aurons toutes les occasions nécessaires, toutes les occasions de discuter de la situation générale de l'amiante, de la position respective des différentes compagnies d'amiante au Québec, lorsque l'Association des mines comparaîtra devant la commission.

Pour ce qui concerne la salubrité de la mine, je pense que le syndicat pourra nous en parler abondamment et que les différents organismes que le gouvernement accepte de rencontrer nous permettront d'avoir toutes les lumières nécessaires pour juger de la politique de l'amiante du gouvernement.

M. le Président, par conséquent, je devrai voter contre cette motion de l'Opposition.

Vote sur la motion

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion du député de Saint-Laurent sera-t-elle adoptée?

M. Lalonde: Vote enregistré, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bérubé (Matane)?

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bordeleau (Abitibi-Est)?

M. Bordeleau: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu (Richmond)?

M. Brochu: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire (Frontenac)?

M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Raynauld (Outremont)?

Une Voix: Absent.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion est rejetée, six voix contre deux.

Y aurait-il d'autres députés qui voudraient présenter des motions préliminaires ou est-ce que je peux appeler l'article 1? M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je pense que nous avions, sinon convenu, du moins... Est-ce que le député de Richmond a une motion?

M. Brochu: J'aurais une motion, mais je pourrai la faire au début, lorsqu'on reprendra; il n'y a pas de problème.

M. Grégoire: Oui, mais on finirait les préliminaires. On commencerait l'article 1 immédiatement après avoir entendu... C'était ce qui avait été entendu.

M. Lalonde: C'est-à-dire qu'on entendait les intervenants avant d'arriver à l'article 1.

M. Grégoire: Oui, et on prenait l'article 1 immédiatement après.

M. Lalonde: Après.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est ce que j'ai demandé. Y a-t-il d'autres motions préliminaires?

M. Brochu: Est-ce que cela veut dire qu'on doit disposer de toutes les motions qui restent, ce soir?

M. Lalonde: Pas nécessairement, si cela va plus loin.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pas nécessairement, mais je veux dire qu'il nous reste quinze minutes. S'il n'y a pas d'autres motions préliminaires, on pourra envisager d'autres hypothèses pour terminer nos travaux. On pourrait même terminer un peu avant.

M. Brochu: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'autre part, s'il y a encore des motions préliminaires, on va épuiser le temps jusqu'à 22 heures en en discutant tout simplement.

M. Brochu: Ce que je veux dire, c'est que s'il y a des motions préliminaires plus tard que 22 heures, est-ce qu'avant de reprendre l'article 1...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On va les étudier mardi soir.

M. Brochu: Non pas mardi soir, parce que mardi soir...

M. Lalonde: Après les intervenants. M. Brochu: Après les intervenants.

M. Grégoire: Ce n'est pas cela qui a été convenu; c'est qu'on finissait la période préliminaire ce soir. C'est cela qui a été convenu.

M. Lalonde: Non.

M. Grégoire: C'est cela qui a été dit tout à l'heure et qu'immédiatement après les intervenants, on passait à l'article 1. Vous pourrez faire vos motions à l'article 1.

M. Brochu: Non, je ne peux pas les faire, en vertu du règlement, parce que ce ne sont pas des motions qui s'appliquent à l'article 1.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un instant, s'il vous plaît! Un instant, M. le député de Frontenac!

M. Grégoire: C'est cela qui a été convenu tout à l'heure. Relisez les galées, vous allez voir que c'est cela qui a été convenu. Le député de Rosemont a même demandé une précision là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je comprends... S'il vous plaît!

M. Forget: II a été convenu qu'il n'y aurait plus d'autres motions sur les invitations à des groupes ou à des individus.

M. Grégoire: Non, ce n'est pas cela qui avait été convenu.

M. Forget: Vous avez notre parole là-dessus. On est d'accord également pour procéder à l'audition des témoins à partir de mardi.

M. Grégoire: J'ai bien employé l'expression "immédiatement après ceux qui viendront comparaître, nous commencerons avec l'article 1.

M. Lalonde: Non, on n'avait pas accepté.

M. Grégoire: Ah! Cela a été accepté, vous relirez les galées.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Si vous le permettez, M. le Président, on avait convenu de ne pas faire de motion autre que celle de General Dynamics pour les invitations, c'est réglé.

M. Grégoire: Oh non! cela n'a pas été...

M. Lalonde: On avait convenu de procéder ce soir à des motions préliminaires. Maintenant, si les motions préliminaires débordent la séance de ce soir, il n'y a pas de doute qu'elles devront être vidées avant d'aborder l'article 1. Il était convenu qu'on entendait les intervenants avant d'aborder l'article 1 aussi. Le seul autre endroit que je verrais, s'il reste des motions préliminaires — quant à moi, je n'en ai pas actuellement — c'est après avoir entendu les intervenants, avant d'aborder l'article 1. Je ne pense pas que cela crée des problèmes. Je ne sais pas si vous en avez beaucoup.

M. Grégoire: En avez-vous une...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Elles doivent nécessairement être présentées avant l'article 1.

M. Grégoire: Avez-vous d'autres motions préliminaires?

M. Brochu: Oui, en fait, en ce qui me concerne, j'aurais une courte motion que je pourrais peut-être présenter immédiatement. Je voulais m'assurer en même temps, pour que ce soit bien clair, s'il y avait d'autres motions en cours de route avant l'article 1, après avoir entendu les mémoires, que cela restera quand même possible si jamais il y en avait.

M. Lalonde: On peut la remettre à ce moment. Qu'est-ce que c'est?

Motion pour accorder le droit de parole à tous les députés

M. Brochu: Très rapidement. C'est simplement que tous les députés qui en manifestent le désir puissent s'exprimer à la table de cette commission, comme cela a déjà été le cas à d'autres commissions, qu'ils puissent être entendus, et non pas se limiter...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est une motion qui est présentée à presque toutes les commissions parlementaires.

M. Brochu: Surtout peut-être à cette commission où on a vu, d'ailleurs, l'intérêt d'un grand nombre de députés à l'Assemblée nationale. On a déjà eu 45 ou 48 interventions sur le sujet. Il y a peut-être des députés aussi qui sont impliqués et qui ne sont pas membres de la commission qui aimeraient à ce moment soit venir poser des questions aux groupes qui vont venir, ou venir s'exprimer à un moment ou à l'autre. Je fais donc la motion suivante: Que les députés qui ne sont ni intervenants, ni membres de la commission permanente...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! Allez, M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le député de Frontenac, est-ce que je peux?

M. Grégoire: Oui.

M. Brochu: Merci. Je relis. Je vous remercie beaucoup, M. le député, de me permettre de lire ma motion: "Que les députés qui ne sont ni intervenants, ni membres de la commission permanente des richesses naturelles puissent s'y faire entendre, sans devoir obtenir la permission, et ce, pour toutes les séances que tiendra ladite commission, relativement à l'étude, article par article, du projet de loi no 70".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond, puis-je dire que c'est là l'exemple classique de la motion préliminaire par excellence?

M. Brochu: Qui se situe donc dans le cadre de la discussion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour l'organisation de nos travaux, elle est rece-vable et reçue. Alors, discussion sur la motion.

M. Lalonde: Je serais en faveur.

M. Brochu: On pourrait peut-être entendre le ministre. Cela réglerait peut-être la question.

M. Lalonde: Quel ministre?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Disons que les règlements...

M. Bérubé: Je passe mon droit de parole.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! M. le député de Frontenac!

M. Grégoire: Je ne suis qu'adjoint ministériel. M. Lalonde: Ah! Adjoint, pardon!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, voulez-vous cesser de jouer au président et écouter, s'il vous plaît?

M. Grégoire: On me pose une question.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les députés n'ont aucune question à vous poser. Ce que j'ai à dire, c'est que les règles générales de procédure veulent qu'un député qui n'est pas membre ni intervenant ait le consentement de la commission pour intervenir. La motion du député de Richmond, si elle était adoptée, empêcherait les députés de présenter ou de demander ce consentement. C'est le but de cette motion. Alors, discussion sur la motion.

M. Lalonde: Adopté.

M. Brochu: Si le gouvernement n'a pas d'op-

position, on pourrait passer à l'adoption immédiate.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que cette motion...

M. Brochu: Attendez, je veux savoir avant la position du gouvernement.

M. Lalonde: Est-ce que vous l'acceptez ou non?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Rosemont, s'il vous plaît!

M. Grégoire: Le vote! On y va après le vote?

M. Brochu: Si vous n'êtes pas sûrs de l'adopter, je vais faire valoir certains arguments.

Une Voix: Je pense qu'on pourrait peut-être préciser quelque peu la motion.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grégoire: On va laisser un vote libre.

M. Brochu: A ce moment, on va s'assurer de la liberté des gens.

M. Paquette: M. le Président, je me demandais... Une discussion est peut-être nécessaire là-dessus. J'aurais quelques arguments à apporter.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, prenez la parole.

M. Paquette: Je ne sais pas si on pourrait convenir de dépasser un peu l'heure pour essayer de régler cette question de façon qu'on puisse...

M. Brochu: Je m'étais fait comme programme de partir à dix heures.

M. Paquette: ... passer à l'audition des organismes et ensuite à l'étude de l'article.

M. Lalonde: M. le Président, quant à moi, je ne peux pas dépasser dix heures. Nous avons une réunion à dix heures. Maintenant, on peut peut-être convenir...

M. Ciaccia: II faut déjà s'en aller...

M. Lalonde: Mais on peut convenir, par exemple, de reporter la discussion au début des travaux, après l'audition des témoins. Quant à moi, je serais d'accord de reporter la discussion après l'audition des témoins.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La présidence est d'accord pour ajourner à dix heures.

M. Brochu: D'accord, compte tenu des cir- constances, étant donné que c'est ma motion, si les membres de la commission sont d'accord et avec votre autorisation, on pourrait reporter l'étude de la motion avant l'étude de l'article premier.

M. Paquette: On va voter.

M. Brochu: Avant l'article 1 lorsqu'on aura entendu...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant l'étude de l'article 1? Après les intervenants? D'accord?

M. Grégoire: Si vous voulez voter. M. Paquette: On va voter.

M. Lalonde: On n'a pas le temps de continuer nos arguments ce soir.

M. le Président, si les députés ministériels sont d'accord, ils seraient aussi bien de voter tout de suite. Sinon, il va falloir faire valoir nos arguments et on n'a pas le temps de toute façon d'ici dix heures. Il ne reste que sept minutes avant l'ajournement.

M. Brochu: Ce qu'on ne sait pas, M. le Président, c'est combien de temps il nous faudra pour les convaincre.

M. Bérubé: Comme députés, nous respecterons énormément notre députation. Ils sont toujours libres de voter...

M. Brochu: C'est un vote libre. Cela veut dire que tout le monde va voter pareil de votre côté.

Une Voix: Je ne sais pas.

M. Grégoire: On peut vous en garantir un.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît. Pour suivre les règlements, je vous demande: Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Brochu: Non, M. le Président. J'aimerais faire valoir certains arguments en ce qui concerne cette motion.

Une Voix: En concluant?

M. Brochu: Oui, toujours en concluant. J'aimerais vous rappeler que lors de l'étude en deuxième lecture du projet de loi, on a vu, dans un premier temps, l'intérêt que la plupart des députés portent à cette question du projet de loi 70. Je pense que cet intérêt va se manifester non pas de façon générale au cours de la commission, mais je pense pour certains députés qui sont peut-être plus touchés par cette question que d'autres et qui ne sont pas automatiquement membres de cette commission nommés, d'office, tel que le veut notre règlement... A ce moment-là, cela permettrait

d'éviter des discussions qui doivent avoir lieu chaque fois qu'un député intéressé par la question ou impliqué... Par exemple, le député de l'Abitibi, région touchée par cette question de l'amiante, qui n'aura pas la possibilité — étant donné le corridor restreint...

M. Bordeleau: Je suis membre de la commission. (21 h 55;

M. Brochu: Vous êtes membre, mais vos voisins ne sont pas nécessairement tous membres. Ce n'est pas toute la famille de votre région qui est ici représentée.

M. le Président, cela permettrait que ces gens puissent être entendus sans avoir à reprendre chaque fois le débat, sans demander une permission qui est souventefois refusée. Tout dépend, à ce moment, de l'humeur des gens qui sont à cette table. On sait combien l'atmosphère peut changer rapidement d'une minute à l'autre, selon ce qui peut être lancé d'un côté à l'autre de la table, selon aussi les événements qu'ont eu à vivre les dignes membres de cette assemblée à leur bureau ou ailleurs. M. le Président, cela nous oblige à suivre toute une procédure qui devient parfois lourde.

Alors, cette motion, tout anodine soit-elle, permettrait, si elle était adoptée par le gouvernement, d'éviter tous ces dédales du règlement et donnerait la possibilité à ceux qui le désirent de pouvoir se faire entendre. Je ne pense pas que ce soit là non plus un risque pour le gouvernement de voir étendre indéfiniment les discussions. Au contraire. Je pense que les députés intéressés pourront simplement faire valoir leurs points et poser leurs questions aux groupements qui viendront. Si on l'adoptait tout de suite, cela aurait cet effet également, M. le Président.

Lorsque les groupements qui ont été acceptés comme intervenants à ces audiences de la commission viendront, ces députés pourront poser directement les questions qu'ils jugent pertinentes en fonction de leur responsabilité de député, des circonscriptions respectives qu'ils ont à représenter, des intérêts non seulement de leur comté, mais également de leur région, ce qui revêt un caractère particulier et tout à fait spécial dans certains cas.

M. le Président, je pense que si on acceptait — et j'ai cru sentir une certaine volonté de la part de certains membres du gouvernement, de ce côté; par contre, d'un autre côté, certaines réticences, ce qui me fait dire qu'on doit éviter de procéder avec trop de rapidité pour laisser mûrir les choses...

L'expérience de ce côté, M. le Président, nous prouve — expérience récente — que la possibilité de mûrir donne parfois des résultats fort intéressants et je vous rappellerai simplement une petite expérience que nous avons vécue tous ensemble, assez récemment, à ce chapitre. Pour n'impliquer personne, je ne nommerai pas le ministre en question, mais cela touchait la question de l'amiante. Je vous rappellerai que, dans une discussion qu'une commission comme la nôtre a tenue il n'y a pas tellement longtemps, on avait proposé que certaines audiences soient tenues en ce qui concerne des groupements et des sociétés. Au début, le ministre semblait assez réticent. Cependant, à force d'arguments et en demandant lui-même une réflexion, il en est arrivé à la conclusion fort logique et fort louable, que nous devons souligner, celle qu'il nous a donnée tout à l'heure avec l'approbation de toute l'équipe qui est avec lui présentement, de recevoir la semaine prochaine les groupements, soit l'Association des mines d'amiante, la ville de Thetford...

Non, pas General Dynamics, je ne pense pas, à moins que le ministre revienne sur sa décision. Le ministre a profité de cette réflexion...

M. Grégoire: Puis-je vous poser une question?

M. Brochu: ... pour arriver à une conclusion fort logique et qui va permettre à notre commission d'évoluer d'une façon formidable et d'arriver, probablement, à des résultats intéressants et positifs.

M. Grégoire: Seulement pour vous aider, puis-je vous poser une question?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Brochu: Le député de Frontenac aimerait peut-être me poser une question.

M. Grégoire: Je m'aperçois que vous avez de la misère à étirer un peu; je vais être charitable et je vais vous poser une question. Je comprends le point de vue et tous les députés peuvent avoir l'occasion de le dire. Le fait d'avoir cette année des intervenants qui ne seront pas des membres actifs, mais qui peuvent être remplacés à chaque séance, sans autorisation, à l'appel des noms par le président, ne permettrait-il pas d'atteindre cet objectif, justement? C'est nouveau.

M. Lalonde: Avant, c'étaient les membres qui étaient remplacés.

M. Brochu: C'est le même nombre quand même.

M. Grégoire: Ou les membres, est-ce que cela ne permet pas, à ce moment-là, à tout le monde de...

M. Brochu: C'est une certaine ouverture, mais il reste que c'est quand même le même nombre de membres par parti à qui on accorde la possibilité d'intervenir. Cela ne règle pas le problème. Cela oblige à une suite de techniques.

M. Ouellette: Etes-vous en faveur de votre motion?

M. Brochu: Exactement.

M. Bérubé: Je suis sûr qu'en y réfléchissant comme il faut...

M. Brochu: Je vais l'appuyer avec beaucoup plus d'insistance.

M. Bérubé: II vous reste encore dix minutes.

M. Brochu: M. le Président, étant donné qu'il est dix heures...

M. Grégoire: II vous reste huit secondes.

M. Brochu: ... puis-je vous demander l'ajournement de nos débats?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant, j'aimerais inviter le ministre et les représentants des deux autres partis politiques à essayer d'en venir à une entente sur l'ordre d'invitation des organismes que nous convoquerons pour mardi et mercredi.

Les travaux de la commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 22 heures)

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