Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Etude du projet de loi no 70
Loi constituant la Société
nationale de l'amiante
(Vingt heures quatorze minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
Les membres de la commission parlementaire des richesses naturelles pour
la présente séance sont: M. Bérubé (Matane), M.
Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M.
Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette
(Beauce-Nord).
M. Laplante: Est-ce que la séance de demain matin sera une
nouvelle séance?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, M.
le député.
M. Laplante: Merci. D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François), M. Raynauld (Outremont).
Les intervenants: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin (Mercier), M.
Ciaccia (Mont-Royal) en remplacement de M. Garneau (Jean-Talon); M. Landry
(Fabre), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) en remplacement de M.
Larivière (Pontiac-Témiscamingue); M. Léger (Lafontaine),
M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M.
Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda).
Report du débat sur la motion du
député de Richmond
Lors de notre dernière séance, jeudi dernier, nous en
étions à discuter une motion présentée par le
député de Richmond. Je pense qu'il y a un consensus autour de
cette table pour que la discussion sur cette motion ayant trait au droit de
parole des députés non membres et non intervenants soit suspendue
jusqu'à ce que nos invités se soient fait entendre. D'accord?
M. Brochu: D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'autre
part, j'aimerais rappeler, pour le bénéfice des membres et de nos
invités, que cette commission parlementaire, a convenu, à sa
dernière séance jeudi dernier, d'inviter quelques organismes
à se faire entendre, même après l'adoption du projet de loi
en deuxième lecture, à se faire entendre, dis-je, devant cette
commission parlementaire. Pour la séance de ce soir, nous entendrons
dans l'ordre: premièrement, les membres du conseil municipal de Thetford
Mines, avec son représentant, M. Maurice Côté, qui nous
présentera ses collègues tout à l'heure;
deuxièmement, le
Comité des mines d'amiante du conseil régional de
développement des Cantons de l'Est.
J'aimerais rappeler ici et je pense que c'est mon devoir de
président non seulement aux membres, mais aux invités,
qu'il y a une différence fondamentale entre une commission parlementaire
ayant pour but d'entendre des mémoires après la première
lecture d'un projet de loi et la démarche que nous entreprenons ce soir,
c'est-à-dire d'entendre des invités suite à un voeu
exprimé unanimement par les membres de cette commission parlementaire,
parce que le principe du projet de loi 70 a été adopté par
l'Assemblée nationale.
Or, il est bien entendu que je n'accorderai pas aux invités plus
de pouvoirs et de droits que j'en accorde aux membres mêmes de cette
commission parlementaire. Tous savent qu'une fois qu'un principe est
adopté en deuxième lecture par une commission parlementaire,
même les membres députés de cette commission parlementaire
ne peuvent remettre en cause le principe de ce projet de loi et
évidemment, il appartient à la présidence de
décider ce qui est un principe ou ce qui est une modalité ou un
détail d'un projet de loi.
Pour le bénéfice de nos invités, j'aimerais donc
leur dire que je me permettrai, s'il y a lieu, d'interrompre tout intervenant,
membre de cette commission qui poserait des questions sur le principe du projet
de loi, de même que je me permettrai d'interrompre les intervenants
invités de cette commission qui remettraient en cause le principe de ce
projet de loi.
D'autre part, toute autre discussion, questions et réponses entre
les membres et les intervenants est possible, relativement au projet de loi no
70. A cet égard, je demanderai également à tous les
intervenants, s'ils ont l'intention de présenter un court exposé
d'ouverture, si oui, je leur demanderais de le faire dans une brève
période de temps, peut-être de dix à quinze minutes et, par
la suite, les membres de la commission parlementaire, représentant
chacun des partis politiques, auront un temps égal pour vous poser des
questions.
D'autre part, si vous n'avez pas l'intention de présenter un
exposé d'ouverture, je demanderai, s'il vous plaît,
immédiatement aux membres de la commission de procéder à
la période de questions et réponses.
Je présume que j'ai devant moi tous les membres ou certains
membres du conseil municipal de Thetford Mines. Je demanderais à M. le
maire Maurice Côté, s'il vous plaît, de bien vouloir
présenter ceux qui l'accompagnent et de nous présenter leur
mémoire.
Audition des témoins convoqués
Conseil municipal de Thetford Mines
M. Côté (Maurice): M. le Président, MM. les
membres de la commission, je voudrais vous pré-
senter les membres qui m'accompagnent. A mon extrême-gauche, M.
Croteau, conseiller municipal; M. Denis Rousseau, conseiller municipal; M.
Samson, conseiller municipal; M. Meilleur, conseiller municipal; M.
André Laramée, directeur général; à mon
extrême droite, M. Perreault, conseiller municipal; M. Lafrance,
conseiller municipal; M. Pierre Champagne, commissaire industriel pour la
région de l'amiante.
M. le Président, nous avons un bref mémoire à vous
soumettre si vous me le permettez. Suite à la lecture de ce document, on
pourra vous en remettre des copies ou peut-être au préalable, si
vous préférez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
copie au préalable.
M. Côté: Oui. J'ai la copie que je peux vous
remettre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On me
dit que c'est déjà fait.
M. Côté: C'est déjà fait?
Monsieur le Président, messieurs les membres de la commission, il
y a environ deux semaines, la région de Thetford Mines, par la voie de
sa chambre de commerce et de représentants de l'hôtel de ville,
remettait à l'honorable ministre Yves Bérubé un
mémoire visant à obtenir pour notre région l'implantation
de la Société nationale de l'amiante de même que du Centre
de recherche et de développement de l'amiante.
Les demandes contenues dans ledit mémoire se justifiaient par les
prémisses suivantes, à savoir: qu'une région fournissant
à la province d'immenses revenus provenant de richesses primaires non
renouvelables devait, par un juste retour, se voir octroyer une part
raisonnable de ces revenus pour assurer non seulement sa survie, mais sa
prospérité future.
Ceci présume assez bien les attentes que nous formulons à
l'endroit du projet de loi 70 de même que l'importance qu'il revêt
pour notre région. Nous nous contenterons de vous énumérer
quelques-unes des principales raisons qui nous amènent à accorder
notre appui à ce projet de loi.
La création d'emplois vient certainement en tête de liste.
Notre région qui connaît actuellement un taux de chômage
d'environ 20% n'est certes pas insensible au nombre d'emplois qui pourraient
être créés à la suite de la mise sur pied de la
Société nationale de l'amiante et du Centre de Recherches.
De même, le rapatriement à Thetford Mines du siège
social de la compagnie Asbestos Limitée est une autre
éventualité qui contribuerait à donner à notre
région la relance économique qui lui fait défaut depuis
l'incendie de la King-Beaver et la fermeture de Sno-Jet il y a
déjà plus de trois ans.
Un deuxième point, tout aussi important que le premier et qui
vient compléter, est la diversification de notre économie. En
effet, avec la loi 70, nous espérons que notre région sera
témoin de l'établissement d'usines de transformation qui
viendront à la fois stabiliser et diversifier notre économie
régionale. Nous croyons que beaucoup d'efforts seront
déployés au niveau de la transformation parce qu'elle nous
apparaît comme le principal facteur de création d'emplois.
En troisième lieu, nous espérons que l'implication du
gouvernement dans l'industrie de l'amiante incitera tous les producteurs
à respecter de façon encore plus stricte les normes de
santé qui ont été établies dans le but de
protéger nos travailleurs et que, de plus, les mêmes
préoccupations s'étendront à la protection et à
l'amélioration de notre environnement.
Finalement, nous espérons qu'à la suite de l'application
de la loi 70, le gouvernement sensibilisera davantage les producteurs d'amiante
dans leur rôle et leur devoir de citoyens à part entière de
notre communauté.
En conclusion, compte tenu des raisons énumérées
plus haut de même que des retombées économiques ou autres,
telles que routes et communications que pourrait entraîner pour notre
région l'adoption du projet de loi 70, nous nous déclarons
favorables à l'adoption du projet de loi, même si pour ce faire,
nos préoccupations sont plutôt d'ordre régional.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Bérubé: Peut-être que l'Opposition
pourrait adresser les premières questions?
M. Forget: Vous pouvez y aller d'abord.
M. Bérubé: Ce sont d'abord vos invités.
Enfin, je n'ai pas d'objection à poser la première question.
Merci, M. le maire de la présentation de votre mémoire.
J'aimerais, comme question, tenter de rattacher votre intervention au projet de
loi, à l'article 4. On y mentionne que cette société aura
pour objet la recherche, le développement et l'exploitation de gisements
d'amiante. Par conséquent, ceci est notoire, cette Société
nationale de l'amiante pourrait décider d'acheter la
société Asbestos Corporation. Est-ce que vous seriez en mesure de
décrire un peu les problèmes physiques que la ville a
affrontés avec la société Asbestos, le genre de
négociations que vous avez eues concernant les problèmes de
pollution, de relocalisation de quartiers? Est-ce que vous pourriez comparer,
par exemple, les contacts que vous avez eus avec certaines entreprises et les
contacts semblables que vous auriez pu avoir avec d'autres entreprises du
même genre dans la région?
M. Côté: Depuis 1969, à Thetford Mines, il y
a la rénovation d'une partie de quartier, qui regrouperait à peu
près 400 propriétés qui ont été
déménagées complètement dans une autre partie de la
ville, après certaines négociations avec la compagnie Asbestos
Corporation. Le projet, qui avait débuté en 1970, s'est
terminé en 1975; il a coûté au-delà de $14 millions
tant aux gouvernements provincial, fédéral que municipal; la
contribution de la
compagnie minière a été de $1,2 million et la
contribution de la cité de Thetford Mines a été
d'au-delà de $4 millions pour la réalisation de ce projet.
Le reste du projet a été payé par le gouvernement
provincial, à raison de 25%, de même que le gouvernement
fédéral, à raison de 50%. Il va sans dire que des projets
semblables avaient été réalisés auparavant dans la
région de Thetford, où on avait dû déplacer aussi
certains quartiers. Si on fait référence aux années 1954
et 1956, alors que le projet portant le nom de "Relocation " et qu'il avait
été fait par Asbestos, au coût de $6 millions ou $7
millions, il avait été payé à 100% par la compagnie
Bell Asbestos. C'est donc dire qu'aucun contribuable n'avait eu à
financer quelque somme que ce soit pour le déplacement de ces
propriétés.
Suite à ce projet, je dois vous dire que, pour revenir au premier
projet de 1970-1975, il n'y a qu'une partie du projet qui a été
terminée, soit la phase I. Il reste encore en plan deux projets qui sont
la phase II et la phase III, des quartiers complets à
déménager, dont les propriétés sont tout de
même situées à peine à quelques cents pieds des
cratères, des puits ouverts existants. Je n'ai pas à vous
décrire la situation qui existe pour ces gens qui doivent demeurer sur
place, soit le bruit, la poussière et tous les inconvénients du
milieu comme tels. Je pense que les faits parlent d'eux-mêmes.
On voudrait réaliser ce projet qui date de 1969. On a
tenté certaines approches avec les gouvernements supérieurs pour
tâcher de réaliser ce projet. Malheureusement, au niveau du
gouvernement fédéral, le projet de loi est encore existant, mais
aucune somme d'argent n'est disponible pour compléter le projet. Donc,
pour nous, la ville, ce n'est strictement pas possible de réaliser cela.
Ce sont des projets trop onéreux pour que la ville puisse les
réaliser. On parle tout de même d'un projet qui pourrait
coûter encore $7 millions ou $8 millions.
M. Bérubé: Si je comprends bien, la
société Asbestos avait couvert à peu près 8,5% des
frais de déplacement du quartier, le reste étant à la
charge des gouvernements municipal, provincial et fédéral.
M. Côté: Ce n'est qu'une partie, M. le ministre.
C'est $120 000 qu'on a payé à l'intérieur de cela,
comparativement au projet qui coûtait $14 millions.
M. Bérubé: On a déboursé $120 000 sur
un projet de $14 millions?
M. Côté: $1,2 million sur $14 millions, de la part
de la compagnie.
M. Bérubé: Ah bon! C'est donc à peu
près 8,5%, si je comprends bien?
M. Côté: Oui.
M. Bérubé: Est-ce que vous avez examiné des
possibilités pour amener l'entreprise à payer ces
déménagements, en d'autres termes, des moyens légaux?
Est-ce que vos conseillers juridiques vous ont indiqué que vous aviez
des droits pour obliger la société Asbestos à couvrir les
frais des déménagements des quartiers dont vous parlez?
M. Côté: Dans le quartier qui reste à
déménager, les compagnies ont commencé, graduellement,
à acheter certaines propriétés pour répondre
à une certaine demande de gens qui voulaient quitter la place ou qui
n'avaient pas apporté certaines rénovations à leur
propriété et voulaient s'en départir.
La compagnie a acheté quelques propriétés, aux prix
offerts, qui sont relativement bas j'imagine qui ne satisfont
tout de même pas les propriétaires qui sont là. Suite
à certains achats qui ont été faits par la compagnie, nous
avons eu des plaintes de la part de la ligue des citoyens, savoir que les
achats faits par la compagnie pouvaient causer certains préjudices aux
personnes qui demeuraient sur place, parce que cela occasionnait des trous qui
étaient faits, de place en place, par la démolition de ces
maisons. Naturellement, les propriétés qui devaient demeurer sur
place subissaient une certaine dévaluation, par la suite. On a
demandé à la compagnie de cesser ce genre de chose. C'est ce
qu'elle a fait.
Je sais, pour l'avoir rencontrée personnellement, qu'il est
impossible pour nous de pouvoir réaliser ce projet qu'il nous reste
à faire avec la compagnie, strictement avec la compagnie, sans l'appui
des gouvernements supérieurs. (20 h 30)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Bérubé: Merci, M. le maire.
M. Forget: M. le Président, je vais poser quelques
questions également, peut-être avec la réserve dont s'est
prévalu le gouvernement quant à la possibilité d'y
revenir, si notre temps n'est pas épuisé. Relativement à
cette question des travaux de relocalisation de quartiers, M. le maire, selon
l'expérience différente que vous avez eue, si je comprends bien
au cours des années cinquante avec Bell Asbestos, expérience plus
avantageuse, à ce moment-là, puisque la compagnie prenait 100%
des coûts, moins avantageuse, récemment, avec la
société Asbestos, vous vous attendez, j'imagine, si le
gouvernement devient propriétaire de la société Asbestos,
qu'il assume en totalité ces coûts de relocalisation qui, vous
l'avez dit, sont estimés à $7 millions ou $8 millions. Est-ce la
totalité des coûts que vous envisageriez de faire assumer par la
société?
M. Côté: Je crois qu'il appartiendrait à la
compagnie de défrayer ces coûts présentement, parce que les
terrains dont on parle présentement sont situés en bordure des
puits ouverts où on fait présentement des travaux, où on
travaille conti-
nuellement, à quelques 100 pieds près, même à
100 ou 150 pieds près de ces puits qui sont ouverts continuellement.
M. Forget: Ce sont les travaux prévus dans
l'immédiat?
M. Côté: Ces travaux étaient prévus
durant les phases II et III. Suite à la première
réalisation des travaux, de 1970 à 1974, on devait poursuivre ces
travaux. On ne les a pas poursuivis, parce que le gouvernement
fédéral s'est retiré du projet comme tel.
M. Forget: Encore une fois, je répète ma question.
Si le gouvernement devient propriétaire de la société
Asbestos, vous vous attendriez, j'imagine, comme conseil municipal, que cette
nouvelle société se comporte comme un citoyen corporatif
exemplaire et assume 100% des coûts de relocalisation?
M. Côté: Je pense que cela devrait faire partie des
coûts comme c'est le cas présentement. Si cela fait partie des
coûts présentement, l'Asbestos Corporation devra
déménager un quartier. Je pense que ces chiffres devraient
être inclus dans le projet pour l'avenir.
M. Forget: Actuellement, ils ne sont pas assumés?
M. Côté: Non, ils ne sont pas assumés.
M. Forget: Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent, selon vous,
d'inclure dans la loi des dispositions qui obligeraient une filiale de la
Société de l'amiante, dans le cas où il s'agit d'une mine,
à indemniser à 100% les municipalités pour des travaux
d'urbanisme et de réaménagement de quartiers qui pourraient
être rendus nécessaires pour le développement des mines qui
seraient ainsi la propriété de la Société de
l'amiante?
M. Côté: Je pense que si le gouvernement intervenait
pour l'achat de l'Asbestos Corporation, il pourrait se prévaloir de ce
privilège d'incorporer ce prix à l'achat, de le déduire
peut-être de ce prix d'achat, ou demander simplement par une loi au
gouvernement que toute compagnie assume 100% des frais du déplacement
des propriétés à l'avenir afin que des villes comme la
nôtre n'aient pas à payer des montants tels que nous en avons
payé dernièrement, soit $4 millions pour les
déménagements.
M. Forget: Que le gouvernement réussisse ou non dans la
négociation de son prix à déduire ce montant, il reste
que, pour ce qui est de la ville, la garantie essentielle que vous auriez ou
que vous n'auriez pas consiste dans l'inscription dans la loi d'une obligation
pour la société Asbestos, à l'avenir, après
l'acquisition par le gouvernement, de défrayer à 100% ces
coûts. Ne vous semble-t-il pas que c'est une chose qui devrait
paraître dans le projet de loi?
M. Côté: Je ne suis pas qualifié pour vous
dire si cela devrait faire partie du projet de loi ou non, mais je puis
répondre que cela devrait faire partie des négociations en ce qui
a trait au prix de l'Asbestos Corporation, étant donné que cela
dépend directement des installations d'Asbestos Corporation et que c'est
une question qui doit être considérée pour les
développements futurs de la compagnie.
M. Forget: Avez-vous eu des engagements de la part du
gouvernement actuel ou du ministre lors des rencontres que vous avez eues avec
lui et recherchez-vous de tels engagements pour que, à l'avenir, si le
gouvernement devient propriétaire de la société Asbestos,
il défraie effectivement 100% du coût de
réaménagement?
M. Côté: Non, nous n'avons eu aucune approche de
faite avec le ministre à ce sujet. La seule approche que la ville de
Thetford Mines a tentée dernièrement, c'est que, au mois de
novembre 1977, nous avons préparé un nouveau dossier, un nouveau
mémoire complet, que nous avons présenté à la
Société centrale d'hypothèques et de logement du
fédéral de façon à aller chercher d'autres sommes
pour tâcher de réaliser ces phases qui ne sont pas
terminées. Malheureusement, ces fonds nous ont été
refusés encore une fois.
M. Forget: Pour terminer sur ce sujet, il me semble que, si vous
n'avez pas d'engagements du gouvernement et que vos négociations
auprès de la compagnie ou du gouvernement fédéral n'ont
pas porté fruit, il n'y a que dans la loi que vous pourriez trouver une
protection vis-à-vis de ces dépenses.
M. Côté: Le seul engagement que nous avons
présentement du gouvernement provincial n'est pas un engagement sur
papier mais nous avons toujours eu l'assurance du gouvernement provincial qu'il
continuerait à payer les 25% qu'il avait payés pour le
déménagement des propriétés durant la
dernière phase. Dans les deuxième et troisième phases, si
cela devait se réaliser, le gouvernement provincial était
prêt à payer ses 25%, comme il l'avait fait dans la
première phase.
M. Forget: Est-ce que cet engagement vous semble suffisant?
M. Côté: Pour nous, 25%, ce n'est pas suffisant.
C'est là qu'on veut avoir le reste de la compagnie, probablement, pour
compléter le projet.
M. Forget: Sur une autre question, M. le maire, vous avez fait
mention, dans votre mémoire, de l'éventualité que le
siège social de la compagnie Asbestos soit situé dans votre
ville. Avez-vous, à cet égard, des indications qui vous
permettraient d'être rassuré quant à cette
éventualité ou est-ce justement cela, une
éventualité, une probabilité, dont vous n'êtes pas
certain? Si votre réponse à cette deuxième partie de la
question est
affirmative, c'est que c'est une probabilité seulement, si vous
n'avez pas d'engagement, ne serait-il pas prudent que la loi créant la
Société de l'amiante fasse une obligation du maintien du
siège social à Thetford Mines?
M. Côté: Le siège social de la compagnie
Asbestos Corporation était complètement à Thetford il y a
quelques années. Tous les bureaux de l'As-bestos Corporation, y compris
le bureau des ventes, étaient à Thetford. Ce n'est que depuis
quelques années que c'est rendu à Montréal. Je dois vous
dire que nous espérons fortement, si le gouvernement se portait
acquéreur de la compagnie, retrouver à Thetford les structures de
I'Asbestos Corporation que nous avions chez nous auparavant. Pour nous, c'est
une industrie très importante. Cela représente pratiquement
au-delà de 100 employés et des salaires assez
élevés. C'est déjà une très bonne industrie
pour nous et je pense qu'il serait tout à fait logique que cela revienne
à Thetford.
M. Forget: Ce serait peut-être important et logique, mais,
encore une fois, est-ce que vous avez des engagements de la part du
gouvernement de ce côté-là ou vous considérez-vous
suffisamment rassuré pour ne pas insister pour voir apparaître
cette prescription dans la loi?
M. Côté: Je crois que ce sont des formalités
tout à fait normales. Nous avons fait des pressions auprès de la
compagnie actuelle, je vous dis qu'il y a certaines choses qui sont
déjà revenues à Thetford depuis un an ou deux, une grande
partie du personnel est déjà revenue, certaines choses sont
déjà revenues, et il nous est permis d'espérer
peut-être pas avec la compagnie que si cela devenait la
propriété du gouvernement, on pourrait retrouver à
Thetford l'administration de l'Asbestos Corporation.
M. Forget: Je comprends qu'il vous est permis d'espérer,
mais là, vous avez une occasion, vous êtes devant le ministre,
vous êtes en commission parlementaire, n'êtes-vous pas tenté
d'aller un peu plus loin et de demander au ministre de s'engager un peu plus
vis-à-vis de votre ville, relativement à cette question?
M. Côté: S'il n'y a que cela, on va lui en faire la
demande immédiatement.
M. Bérubé: C'est ce que les députés
de l'Opposition attendaient depuis le début.
M. Forget: M. le Président, une autre question portant sur
l'importance des taxes que paie la société Asbestos à la
ville de Thetford Mines. Je pense que ces taxes sont malgré tout assez
importantes, peut-être de l'ordre de quelque 10%, peut-être un peu
moins de 10%, de l'ensemble des taxes directes perçues par la
municipalité de Thetford Mines. Comme vous savez, si cette
société devient une propriété publique,
gouvernementale, elle n'est plus tenue, à strictement parler, de payer
des impôts fonciers sur ses biens. Est-ce que, sur ce point, vous avez
des engagements précis du gouvernement, et, à défaut d'en
avoir, est-ce que vous seriez intéressé à demander au
gouvernement d'inscrire dans la loi une obligation précise qu'une
société comme celle-là soit astreinte à payer des
impôts sur tous ses biens, de la même façon que si elle
continuait d'être une société privée?
M. Côté: Cette revendication a déjà
été faite au premier ministre et au gouvernement et nous avons eu
l'engagement, la promesse du gouvernement qu'on continuerait à payer,
comme toute entreprise privée, les taxes dues à la ville de
Thetford si le gouvernement devenait propriétaire de l'Asbestos
Corporation. C'est l'engagement que nous avons eu du présent
gouvernement.
M. Raynauld: Combien cela représente-t-il?
M. Côté: Cela représente à peu
près $20 millions en 1978.
M. Raynauld: $20 millions?
M. Côté: Oui.
M. Raynauld: ...
M. Côté: Vous voulez dire l'évaluation?
M. Raynauld: Non. L'impôt.
M. Côté: Seulement ce qui est payé en
impôt?
M. Laplante: L'impôt foncier.
M. Côté: Les taxes directes.
M. Raynauld: Les taxes payées à la ville.
M. Côté: $300 000.
M. Raynauld: $300 000.
M. Forget: Cet engagement verbal et peut-être un peu
politique sur les bords vous apparaît-il une sécurité
financière suffisante pour la ville de Thetford Mines et n'y aurait-il
pas intérêt à ce que cela soit inscrit dans la loi?
M. Côté: Voulez-vous reprendre votre question, s'il
vous plaît?
M. Forget: Vous venez de nous faire part d'un engagement verbal
ou d'une réponse verbale qu'on a donnée à votre question
en dehors de l'Assemblée nationale. Je vous dis que c'est un engagement
qui n'est pas très formel, qui n'est pas très officiel. C'est un
peu, au moins, coloré par le contexte politique. Ne vous
apparaîtrait-il pas plus rassurant, comme maire et pour les membres du
conseil municipal de la ville de Thetford Mines, de chercher un engagement plus
formel qui soit peut-être consacré dans une loi, de manière
que
vous soyez protégés contre toutes les
éventualités possibles, y compris les changements de
gouvernement, des changements d'intention du même gouvernement ou Dieu
sait quoi?
M. Côté: Certainement. Nous pouvons même le
faire par écrit, de façon à avoir des réponses
écrites du gouvernement, un engagement formel du gouvernement.
M. Forget: Je vois. Et, pour terminer, très
brièvement, si le conseil municipal de Thetford Mines avait $150
millions qu'il aurait la discrétion d'utiliser à son gré,
l'utiliseriez-vous pour acheter une des mines qui est déjà active
dans votre région ou pour faire autre chose?
M. Côté: Je dois vous dire une chose. Vous savez
que, dans la région, chez nous, nous dépendons strictement, en
grande partie, des compagnies minières pour notre économie et,
s'il devait se révéler que cela serait la seule chose qui nous
manque pour l'établissement chez nous d'industries secondaires ou de
transformation de l'amiante, on n'hésiterait pas à le faire.
M. Forget: Vous avez dit: si; effectivement, est-ce la
situation?
M. Côté: Si c'était la seule chose qui
manquait, on n'hésiterait pas à le faire. On devrait le
faire.
M. Forget: Selon vous, est-ce la seule chose qui manque?
M. Côté: Pour réaliser cela?-Je vous dis
qu'on est strictement dépendant des compagnies minières, 50% de
la main-d'oeuvre, chez nous, dépend de cela et le seul
fléchissement que nous avons des compagnies minières chez nous...
Vous avez la répercussion partout aussitôt qu'il y a un
fléchissement quelconque.
M. Forget: Ce qui permet donc de conclure, à partir de vos
remarques, que vous souhaiteriez diversifier d'ailleurs, vous le dites
dans votre mémoire...
M. Côté: Sûrement.
M. Forget: ... votre économie et utiliser des sommes
disponibles pour diversifier vos sources de revenu, dans le fond.
M. Côté: On souhaiterait l'établissement
d'industries secondaires et de transformation chez nous de façon
à consolider notre économie.
M. Forget: Je vous remercie. Cela répond à mes
questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie.
M. le député de Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Avec la même
réserve que mes collègues ont émise tout à l'heure,
au début de leurs interventions, j'aurais également quelques
questions à poser aux représentants de la région de
l'amiante.
Relié peut-être à la dernière question qui
vient d'être posée par le député de Saint-Laurent,
j'aimerais peut-être... M. le maire, vous avez indiqué
qu'essentiellement, évidemment, l'économie de votre
région, en termes de création d'emplois, dépend
exclusivement, en réalité, du secteur de l'amiante. Mais, pour
bien situer Thetford et sa région immédiate, pourriez-vous nous
décrire un peu l'état de l'économie de la région
actuellement? Je pose cette question en rapport évidemment avec tout le
contexte que sous-tend le projet de loi 70 avec l'acquisition éventuelle
d'Asbestos Corporation comme seconde étape: quel est l'état
économique actuel de la région de Thetford et de ses environs en
termes de chômage, de création possible d'emplois, et ainsi de
suite? Est-ce que vous pourriez nous brosser rapidement un tableau de votre
situation économique?
M. Côté: Je dois vous dire que, présentement,
pour l'ensemble des compagnies minières, chez nous, cela va très
bien depuis quelques années, depuis les dernières années.
Malgré tout cela, nous avons un taux de chômage qui se tient entre
18% et 26% et ce, depuis les trois dernières années. C'est tout
de même assez considérable, si vous regardez la situation comme
telle.
Pour ce qui est des industries, l'industrie de l'amiante comme telle
emploie à peu près 46% de la main-d'oeuvre locale. Le reste se
trouve dans l'industrie secondaire, les commerces, et ainsi de suite. Les
très bonnes industries secondaires chez nous, il y en a quelques-unes
à très faible niveau d'emploi, dont la plus grosse est Lynn
Macleod Metallurgy qui emploie à peu près 175 personnes; Gosselin
en emploie à peu près 150 ou 175. Certaines compagnies comme
Bellevue, qui est tout près de chez nous, pas dans la région de
Thetford, mais qui est très près de Thetford, emploient
présentement quelque 300 personnes.
Ce sont les principales industries, avec Méti-vier et certaines
autres industries secondaires, mais je dois vous dire que le climat chez nous,
présentement, est très bon depuis les trois dernières
années. L'économie semble assez stable et si le travail continue
dans les compagnies minières, il y a lieu d'envisager l'avenir avec
beaucoup d'optimisme. La construction des dernières années,
d'ailleurs, reflète cette note d'optimisme puisque, l'an passé,
nous avons eu au-delà de $10 millions de construction domiciliaire et
pratiquement autant en 1976. C'est donc un point en notre faveur pour ce qui a
trait à l'économie.
M. Brochu: Et dans ce... (20 h 45)
M. Meilleur (Yvon): Est-ce que je peux me permettre de
compléter? Dans l'industrie minière, depuis les dix
dernières années la création d'emplois est stagnante. Il
n'y a pas eu d'évolution, si-
non le statu quo chez les compagnies minières dans le domaine de
l'extraction. Les opérations minières de notre région
n'ont pas fait évoluer la situation de l'emploi. Au contraire, c'est
stable ou cela a tendance à diminuer.
M. Brochu: C'était mon autre question. Il y a une
stabilité de l'emploi, strictement dans le domaine de l'amiante, et
même une légère tendance à la diminution.
M. Meilleur: Selon l'évolution de la technologie, les
emplois n'ont pas tendance à augmenter.
M. Brochu: Est-ce que, d'après vous, l'acquisition par le
gouvernement du Québec d'une des entreprises situées sur vos
territoires va être un créateur immédiat d'emplois? D'autre
part ma question est nettement tendancieuse est-ce que la venue de
la transformation immédiate ne serait pas plus propice à
créer de l'emploi immédiatement, dans un deuxième
temps?
M. Côté: C'est bien évident que si le
gouvernement se porte acquéreur de la compagnie Asbestos Corporation, ce
ne sera certainement pas pour faire simplement ce qui est fait
présentement. Je pense qu'on voudra aller dans la transformation et
c'est ce qu'on anticipe d'ailleurs pour l'avenir, de même que la
transformation des résidus pour lesquels certaines études ont
été faites dernièrement. Il est permis d'anticiper un
avenir meilleur de ce côté.
M. Brochu: Vous parlez de résidus. Cela m'amène
à vous poser quelques questions concernant la recherche et la
localisation éventuelle du Centre de recherche, domaine sur lequel vous
vous êtes penchés... D'ailleurs, vous avez participé
à plusieurs rencontres à ce sujet. Je sais que les
représentants de la ville de Thetford ont rencontré
dernièrement le ministre des Richesses naturelles pour discuter de cette
question et faire valoir les points de vue de Thetford en ce qui concerne la
localisation éventuelle d'un centre de recherche, lié à la
Société nationale de l'amiante.
Est-ce que vous pourriez m'indiquer, M. le maire ou M. Laramée,
dans les discussions que vous avez eues avec le ministre, quelles assurances et
quels engagements dans un premier temps, vous avez eus à ce niveau?
Deuxièmement, quelle définition a donnée le ministre en ce
qui concerne le centre de recherche appliquée?
Je sais qu'on doit faire deux distinctions bien nettes en ce qui
concerne la recherche: la recherche pure, qui doit être localisée
dans un centre où on peut avoir accès à beaucoup
d'information et aussi un centre universitaire hospitalier, c'est normal.
Par contre, j'aimerais savoir, cela va peut-être faire
évoluer le dossier dans son ensemble, si le ministre a clairement
défini avec vous ce que pouvait être la section d'un centre de
recherche appliquée, qu'est-ce que cela pouvait comprendre et de quelle
façon cela pouvait se présenter?
M. Côté: Je dois vous dire que nous avons
présenté le mémoire au ministre, M. Bérubé,
il y a une dizaine de jours, réclamant, pour la Société de
l'amiante, un centre de recherche. Malheureusement, nous n'avons eu aucune
indication et aucune promesse formelle de la part du ministre, à savoir
si, demain matin, ce centre de recherche pour la Société de
l'amiante serait installé à Thetford. Il me ferait
réellement plaisir de vous dire que le ministre s'est engagé
à le mettre chez nous, mais malheureusement, il ne l'a pas fait.
C'est pour cette raison que nous avons fait des pressions et que nous
continuerons à en faire pour inciter le ministre à nous donner le
plus possible, chez nous, chose que nous revendiquons à juste titre,
étant donné que nous sommes une des villes les plus importantes
dans l'exploitation de l'amiante. Je pense que nous sommes en droit de
s'attendre à avoir certaines retombées de cette loi 70 et de ces
usines de transformation qui devront être établies à
certains endroits en province.
J'ose espérer que la ville de Thetford aura sa large part et
verra s'implanter les premières usines de transformation dans la
région même de Thetford.
M. Laramée (André): J'aimerais, si vous permettez,
compléter la réponse de M. le maire en ajoutant ceci. Lorsque
nous avons présenté le mémoire à M.
Bérubé, une des raisons que M. Bérubé nous a
mentionnées pour ne pas dévoiler maintenant où serait
implanté le centre de recherche, c'était que le gouvernement
envisagerait de faire participer les compagnies d'amiante actuelles à ce
centre de recherche et que la décision devrait être prise par
l'ensemble des participants.
Pour l'instant, les participants n'étant pas connus, on aurait
présumé que le gouvernement aurait été le seul
actionnaire de ce centre de recherche.
M. Brochu: Je vous remercie de cette précision
supplémentaire.
Un autre aspect sur lequel j'aimerais poser quelques questions, c'est au
sujet de l'état des lieux d'Asbestos Corporation. Vous avez
indiqué: "En troisième lieu, nous espérons que
l'implication du gouvernement dans l'industrie de l'amiante incitera tous les
producteurs à respecter de façon encore plus stricte les normes
de santé qui ont été établies dans le but de
protéger nos travailleurs et que, de plus, les mêmes
préoccupations s'étendront a la protection et à
l'amélioration de notre environnement".
Cette préoccupation est importante, elle n'est pas nouvelle et
j'en suis conscient, comme d'autres aussi, étant d'une région
touchée par ce problème. Vous êtes directement en rapport
avec Asbestos Corporation, c'est dans votre localité. On a entendu
plusieurs rapports, on a eu plusieurs indications sur l'état des
installations d'Asbestos Corporation en ce qui concerne les normes de
santé, certains les décrivant même comme étant les
pires installations existant actuellement. Je voudrais entendre l'opinion des
représentants de
Thetford Mines à ce sujet. Vous avez vécu ces
problèmes, vous connaissez les gens qui travaillent dans le domaine de
l'amiante, qui y ont laissé leur santé. Vous avez donc certaines
indications qui peuvent nous êtres utiles à ce sujet. On ne vous
cachera pas que c'est peut-être celle-là que le gouvernement veut
acheter, du moins, pour le moment.
M. Côté: Je vous dirai que la situation existante
s'est beaucoup améliorée, si on regarde les années
passées, parce que les compagnies ont tout de même
dépensé certaines sommes forcément à cause de la
situation ou des lois mises en vigueur, de même que les règlements
auxquels on leur a demandé de se soumettre. Peut-être, si on avait
procédé comme il y a dix ou quinze ans, serions-nous beaucoup
plus avancés et aurions-nous moins de personnes dont la santé est
affectée par cela. Mais je crois que c'est venu à point, depuis
les quelque dernières années et que les compagnies ont
forcément beaucoup fait dans ce domaine.
Je vous dis qu'il reste encore beaucoup à faire, parce que tout
de même, des installations que nous avons chez nous datent de plusieurs
années. Personnellement, je n'ai jamais travaillé dans une
compagnie minière et je ne suis pas en mesure de vous dire ce qui
existait il y a dix ou quinze ans. Ce que nous voyons, c'est l'aspect
extérieur des compagnies, les dépôts de rebuts et ces
choses-là. Mais, comme tel, je n'ai jamais travaillé à
l'intérieur d'une compagnie minière et je ne pense pas qu'il y
ait beaucoup de membres du conseil qui aient travaillé dans une
compagnie minière. Je sais qu'il s'est fait beaucoup de choses, mais il
reste beaucoup à faire, selon ce qu'on nous dit. Mais il y a beaucoup
d'améliorations qui ont été apportées.
M. Meilleur: Sans y avoir travaillé, il est admis que la
société Asbestos est peut-être la société qui
a fait le moins d'efforts de ce côté, comparativement à
d'autres compagnies dans notre région. Il reste que, à la limite,
la réglementation est dans une situation moins bonne que chez les autres
compagnies. Elle a toujours eu cette réputation et a toujours suivi une
réglementation minimale.
M. Brochu: Avez-vous l'impression que si l'entreprise ne s'est
pas mise au diapason des autres entreprises qui, dans ce domaine, sont
peut-être allées beaucoup plus loin et ont respecté ou
exprimé leur volonté de respecter les normes gouvernementales,
cette attitude puisse être reliée au fait que l'entreprise ne
veuille pas, au niveau de son exploitation, prendre de l'expansion?
M. Côté: II y a des compagnies existantes qui font
des changements présentement. Vous avez la compagnie Bell Asbestos qui
est à construire une usine où on dépensera plusieurs
millions de dollars. Il est sûr qu'il est prévu de mettre à
l'intérieur de ces moulins tout ce qu'il est possible d'y installer
suivant la technologie connue. Je pense qu'on y porte une certaine
attention.
Si on retourne dans certaines vieilles installations d'Asbestos
Corporation qui datent de plusieurs années, à la BC ou d'autres,
on ne retrouvera certainement pas le même genre de
dépoussiérage. Je ne le sais pas, je ne pourrais pas vous le
dire, je ne suis jamais allé les visiter.
Mais il est évident que, dans une usine qui remonte à 40
ou 50 ans, on ne retrouvera pas les mêmes installations que dans une
usine qui date de deux ans. Je pense qu'il s'est tout de même fait des
choses pour améliorer la situation à l'intérieur de ces
usines. On devait se conformer à certaines normes et je pense qu'on a
tenté, par tous les moyens possibles, de se rapprocher de ces normes
d'une façon satisfaisante pour répondre tout de même aux
besoins des unions ouvrières et des employés qui sont à
l'intérieur.
M. Brochu: M. le maire, pour le moment, je vous remercie. Cela
répond aux principales questions que j'avais. Je pourrai y revenir tout
à l'heure. Je veux aussi vous indiquer que je souscris à
l'objectif que vous avez aussi de voir une plus grande transformation chez nous
de nos matières premières et aussi quant à la question de
la santé des travailleurs. Je pense qu'il faut s'y atteler et
sérieusement. Je vous remercie beaucoup.
M. Côté: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Richmond. M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: L'Asbestos Corporation a quatre mines dans la
région de Thetford, je crois. Elle fait des trous d'où elle
extrait la fibre. Les résidus sont lancés sur des tas de
poussière qui polluent l'environnement. Il y a des citoyens de la
région de Thetford qui contractent une maladie nommée
l'amiantose. Elle s'enrichit dans la région de Thetford.
En retour, je voudrais vous demander, M. le maire, ou les conseillers
municipaux, si vous avez besoin de leur aide, de me nommer une seule je
ne vous en demanderai pas plus industrie de transformation de la fibre
de l'Asbestos Corporation dans la région de Thetford. Y en a-t-il
une?
M. Côté: II n'y en a pas du tout.
M. Grégoire: Pas une. Elle pollue, mais...
M. Côté: II n'y a pas de transformation du tout,
à l'intérieur de la ville.
M. Grégoire: Aucune?
M. Côté: Aucune transformation.
M. Grégoire: Elle se contente de sortir la fibre et de
l'envoyer en dehors de la région?
M. Côté: Certainement.
M. Ciaccia: Vous venez de l'apprendre? Le maire vient de vous
apprendre cela?
M. Grégoire: Je voulais vous faire constater qu'il n'y
avait aucune transformation. Est-ce que vous trouvez cela...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Je pensais que vous veniez de l'apprendre.
M. Grégoire: Je pense qu'on ne vous a pas interrompu.
M. Ciaccia: Non.
M. Grégoire: Si cela vous choque trop, dites-le, on va
arrêter.
M. Ciaccia: Non, cela ne me choque pas du tout.
M. Grégoire: Je sais que cela fait mal. Que voulez-vous,
il y a des vérités, des fois qu'il faut dire.
M. Ciaccia: Non, sous forme de question.
M. Raynauld: Mais avant, demandez-lui si elle fabrique des
automobiles. Est-ce qu'on fabrique des automobiles à Thetford?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Ménagez votre temps, il est précieux.
M. Ciaccia: J'ai eu l'impression que vous ne le saviez pas.
M. Grégoire: II n'y en a pas une, M. le maire? Pour ce qui
est de la relocalisation du quartier Mitchell, les terrains sur lesquels sont
ces maisons présentement sont des terrains qui appartiennent à
l'Asbestos Corporation?
M. Côté: En partie, je crois, oui. M.
Grégoire: Surtout?
M. Côté: Je pense que oui, en partie; le quartier
Mitchell appartient à l'Asbestos Corporation. Je pense que ce sont tous
des terrains miniers.
M. Grégoire: Le développement de la mine va vers ce
coin, je crois?
M. Côté: A peu près; c'est à 100 pieds
des propriétés existantes. C'est très près, c'est
à 100 pieds.
M. Meilleur: II a toujours été difficile de savoir
de quel côté va le développement de la part des compagnies
minières. On a des problèmes de centre-ville; on a des
problèmes de quartiers. Depuis trois ans que le conseil existant a
demandé, dès les premières réunions, de rencontrer
les autorités pour connaître un peu les projets d'expansion, ne
serait-ce que pour nous permettre une meilleure planification de nos services
municipaux. On n'a jamais été capable de les rencontrer, ne
serait-ce que pour nous dire que, au cours des prochains cinq ans, on va se
tasser du côté est, du côté ouest, du
côté sud, pour nous permettre d'investir de nouveaux services pour
les résidants, dans d'autres quartiers de la ville. Elles n'ont
même pas daigné nous rencontrer pour nous dire ce qu'elles vont
faire comme exploitation au cours des prochains cinq ans.
On le sait, je pense, après que les maisons sont tombées
dans le puits ou que l'on effectue des travaux dans la cour du voisin. On a
alors un doute qu'elles s'en vont de ce côté. On réagit au
développement. C'est à peu près cela. Le conseil de ville
n'est pas partie intégrante du tout de cela. On réagit. On a
toutes les difficultés du monde à avoir une collaboration
minimale, décente pour au moins faire fonctionner les affaires
municipales de notre ville.
M. Grégoire: Est-ce que ce que vous pourriez
considérer comme un mauvais concitoyen, à ce point de
vue-là?
M. Meilleur: Si je regarde l'importance de ce citoyen, je le
qualifierais certainement de mauvais citoyen, personnellement. Ce n'est pas
l'opinion du conseil, c'est mon opinion. Si je regarde tous les dossiers que
nous avons avec cette compagnie, où on voudrait collaborer, à mon
point de vue, je n'ai vu de collaboration dans aucun dossier. Cela n'a pas
existé, à mon point de vue.
M. Grégoire: Quant aux $8 millions que coûtera la
relocalisation du quartier Mitchell, vous dites que le gouvernement du
Québec s'est engagé à 25% pourvu que le gouvernement
fédéral continue l'entente qui a été
adoptée, en 1970, en ce sens que le gouvernement fédéral
paiera 50% de la relocalisation.
M. Côté: Je n'ai pas d'engagement formel de la part
du gouvernement. On nous a toujours dit, à la société, que
l'on serait toujours prêt à contribuer aux 25% qu'on s'est
engagé à contribuer pour compléter le programme de
relocalisation chez nous. C'est la réponse que nous avons eue de la
société. Nous l'avons eue encore dernièrement. Le
personnel de la société nous a toujours dit qu'on était
prêt à payer les 25% de contribution sur lesquels on
s'était engagé à le faire, fort heureusement, si on avait,
naturellement, les 50% ou les 75% fournis par les compagnies minières ou
une autre source de revenus, quelque part.
M. Grégoire: Est-ce que le gouvernement
fédéral a refusé ces 50%, parce que le budget de
l'année en cours était épuisé et que cela pourrait
revenir sur le budget de l'année suivante? (21 heures)
M. Côté: La loi est encore existante. Quant au
gouvernement fédéral, il n'a pas de fonds; les fonds ont
été retirés de la loi depuis 1972 et il n'y a pas d'autres
fonds là-bas.
M. Grégoire: Dans ce fonds. M. Côté:
Non, absolument pas. M. Grégoire: Alors, si...
M. Côté: Elle a été remplacée,
je pense, par la Loi de l'amélioration des quartiers, programme
d'amélioration des quartiers.
M. Grégoire: Alors, si le gouvernement du Québec
achète l'Asbestos Corporation, par le fait même qu'on ne paiera
plus de taxe au gouvernement fédéral... je crois que c'est
l'équivalent de plusieurs millions de dollars. En tout cas, cela
pourrait servir à aider à...
M. Côté: Vous pourriez prendre ces millions de
dollars pour déménager les quartiers chez nous.
M. Grégoire: C'est une bonne suggestion; je crois qu'il
faudrait la faire au ministre.
M. Côté: On en prend bonne note, monsieur.
M. Grégoire: On ne l'inclura pas dans la loi, mais...
C'est tout pour le moment. M. le Président. Je sais qu'il y en a
d'autres qui ont des...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, je
vais passer la parole au député de Mont-Royal; il reste trois
minutes à son parti. Par la suite, ce sera le tour du
député de Richmond; il reste trois minutes à l'Union
Nationale. Par la suite, ce seront les députés
ministériels, à qui il reste cinq minutes.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'aurais deux
questions; j'espère que vous allez m'accorder le temps de les poser.
M. le maire, est-ce que vous voyez une différence, une
distinction entre l'achat d'une compagnie qui exploite la mine, comme le
député de Frontenac le décrivait si graphiquement, qui
fait des trous dans la terre et qui envoie la poussière dans les airs,
l'achat de cette compagnie, avec tout son passif, c'est-à-dire les
coûts de relocalisation que vous avez mentionnés, les coûts
assumés pour les cas d'amiantose, les coûts renouvelés pour
se conformer aux normes de l'environnement, est-ce que vous voyez une
distinction entre cette opération, qui est l'achat de la compagnie
actuelle, et celle de la transformation des produits de l'amiante?
M. Côté: Entre les deux?
M. Ciaccia: Est-ce que vous voyez une distinction, une
différence entre les...
M. Côté: II est évident que la transformation
dépend directement du produit que l'on va extraire. En relation avec
l'opération de la compagnie minièrel'argent qu'on y fait
selon les derniers chiffres qui nous ont été
donnés, soit $20 millions de profits, je pense qu'on aurait pu prendre
quelques millions de dollars à l'intérieur de ces $20 millions et
finir le déménagement du quartier chez nous. Cela n'aurait pas
affecté tellement les profits et cela aurait peut-être rendu
certaines gens très heureux de la situation.
M. Ciaccia: Non, mais, dans le moment, la transformation se fait
par d'autres compagnies, même en dehors du Québec. Alors, c'est
possible de séparer ces deux opérations. Vous pouvez avoir une
compagnie qui va seulement exploiter le produit de l'amiante et une autre
compagnie qui va faire la transformation. Dans votre mémoire, vous dites
que vous voulez voir octroyer une part raisonnable des revenus pour assurer non
seulement la survie de votre ville, mais sa prospérité future.
Alors, je me demande comment l'achat seul de la compagnie...
M. Laramée: Remarquez bien que...
M. Ciaccia:... va pouvoir contribuer... Mon collègue, le
député de Saint-Laurent, a même démontré
qu'à moins que vous n'ayiez des garanties, vous allez même perdre
des revenus.
M. Laramée: C'est un fait que la compagnie existe et
opère actuellement depuis plusieurs années déjà.
C'est aussi un fait qu'on considère la transformation comme étant
la clé de notre économie régionale. Mais, actuellement, il
ne s'en fait pas de transformation chez nous. La municipalité de
Thetford Mines n'a pas à déterminer s'il est nécessaire ou
non d'acheter l'Asbestos Corporation pour transformer l'amiante, mais au moins,
avec ce projet de loi, on a une chance qu'il y ait de la transformation chez
nous.
M. Meilleur: II y a, si vous me le permettez... M. Ciaccia:
Oui, qu'est-ce que...
M. Meilleur: ... une différence majeure: ce sont les
profits. On a été locataire depuis X temps; on n'a jamais
touché aux profits. $20 millions ont été
déclarés l'an dernier au dernier exercice financier
qui était une très mauvaise année. On n'a rien vu de cela.
Je n'ai pas les chiffres en mémoire, mais les derniers profits des
dernières années se chiffraient dans les je ne sais pas
$10 millions, $15 millions, $20 millions par année. Il y a une
différence majeure entre être propriétaire et
bénéficier de ces profits et être locataire et ne jamais
les voir passer. Lorsque le nom sera parti, cela va être
réglé.
M. Ciaccia: Une question finale. Ma dernière question.
Qu'est-ce qui vous porte à croire... Excusez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Dernière question. Oui, allez-y.
M. Croteau (Robert): Moi, je dis que si l'Asbestos Corporation,
ou le gouvernement, ou une
autre usine..., fait de la transformation, cela ne réglera rien.
...
M. Ciaccia: Qu'est-ce qui vous porte à croire que la
transformation, à part votre propre désir qui est assez normal,
va se faire à Thetford Mines?
M. Rousseau (Denis): On n'a aucune garantie.
M. Samson (Ronald): On n'a pas encore de garantie, mais on sait
depuis toujours qu'il n'y en a pas eu de faite. Il y a eu toutes sortes de
gouvernements, mais il n'y en a pas eu de faite.
M. Ciaccia: Avez-vous un engagement de la part du gouvernement
que la transformation va se faire à Thetford Mines?
M. Samson: On ne le sait pas encore, mais avant, il n'y a rien eu
de fait, maintenant, on a au moins une espérance. M. Forget proposait de
le faire ajouter au règlement, je suis bien d'accord. C'est une bonne
suggestion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-François.
M. Rancourt: Vous disiez tantôt, M. le maire, que
l'Asbestos Corporation vous payait environ $300 000 de taxes municipales.
Est-il exact de dire que vous avez perdu des taxes, justement, par une loi qui
a été adoptée par un ancien gouvernement sur la taxation
des machineries à l'intérieur? Si c'est vrai, quel montant cela
veut-il dire?
M. Côté: C'est exact, quoique nous avions
prévu chez nous un peu cette chose qui devait venir. Nous avions conclu
une entente avec les compagnies et cette entente que nous avions avec la
compagnie baissait, je crois que c'est de 6% par année, sur un
dégrèvement de X années, pour s'éteindre
complètement, l'évaluation sur la machinerie que nous avions avec
les compagnies minières. C'est donc dire que nous avons
été un peu privilégiés à l'intérieur
de cela, comparativement à d'autres municipalités que je connais
qui ne s'étaient pas prévalues de cela et ont perdu au complet ce
montant des taxes sur la machinerie. Je n'ai malheureusement pas ici le montant
que cela représente exactement parce que cela fait de nombreuses
années que nous avons mis cela de côté, cela n'existe
plus...
M. Rancourt: Je sais.
M. Côté: ... sauf les 6% de rabais que nous, avons
chaque année et qui s'appliquent là-dessus.
M. Rancourt: Est-ce que c'est terminé? M.
Côté: Non, c'est prochainement.
M. Rancourt: Cela veut dire dans l'année qui vient?
M. Côté: II reste quelques années
seulement.
M. Rancourt: D'accord. C'est tout ce que je voulais vous
demander. Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Bourassa avec trois minutes.
M. Laplante: M. le maire, vous misez beaucoup sur l'emploi.
Combien y a-t-il de travailleurs dans votre ville?
M. Côté: Seulement la compagnie minière?
M. Laplante: Oui. Combien de milliers de travailleurs
avez-vous?
M. Côté: Nous en avons entre 3200 et 3600, pour la
compagnie minière seulement.
M. Laplante: Avec les compagnies minières et les autres
entreprises, le total des ouvriers?
M. Champagne (Pierre): Pas loin de 7000 travailleurs.
M. Laplante: 7000 travailleurs?
M. Champagne: Environ, oui, si on parle de la région.
M. Laplante: Là-dessus vous avez environ 1400
chômeurs?
M. Champagne: A peu près.
M. Laplante: D'accord. La compagnie d'amiante Asbestos se trouve
chez vous. Lui avez-vous déjà, même après l'incendie
de son usine, demandé de le reconstruire?
M. Côté: II s'est évidemment fait beaucoup de
pressions pour la reconstruction de cette usine, et tout de suite après
l'incendie de l'usine. Il s'est fait des pressions de part et d'autre pour que
cela se construise à Thetford et cela ne s'est pas fait. Je pense que ce
qu'on a fait aujourd'hui, c'est qu'on conserve le primaire pour aider à
d'autres usines simplement.
M. Laplante: Combien d'emplois avez-vous perdus avec cela?
M. Côté: Passablement. Je peux vous dire qu'au
niveau de la ville nous avons perdu immédiatement $3 millions
d'évaluation. Au niveau de l'emploi comme tel, qu'on pourrait raccorder
strictement à l'usine comme telle, je ne pourrais pas vous dire, mais
c'est certainement...
M. Champagne: C'est à peu près 800 emplois. M.
Côté: C'est quelques centaines d'emplois.
M. Laplante: Entre 600 et 800 emplois. Mais, dans d'autres
transformations, les compagnies d'amiante se trouvent chez vous sur votre
territoire, avez-vous déjà fait des démarches pour es-
sayer de les intéresser à la transformation? Si oui,
quelle réponse vous donnait-on?
M. Côté: Vous demandez s'il y a eu des
démarches auprès des compagnies minières ou de
transformation?
M. Laplante: Oui, pour essayer de faire faire de la
transformation à Thetford Mines?
M. Côté: Nous avons eu certains dossiers sur
lesquels nous avons travaillé passablement au sujet de la
transformation. Il y en a un en particulier que je peux vous mentionner, qui a
été fait il y a deux ans encore, c'est sur les feuilles de
gaskets, qui sont faites en Angleterre et qui reviennent au Canada, et dont on
se sert pour faire des gaskets d'automobiles et ainsi de suite, des feuilles de
4 x 8, "pour faire des joints d'étanchéité. ' Cela nous
intéressait beaucoup parce qu'il entre 80% d'amiante dans ce produit. On
entrevoyait la possibilité d'avoir cela chez nous à
proximité des compagnies, sans compter qu'une compagnie de chez nous
faisait partie de cette compagnie et nous espérions beaucoup, mais cela
n'a pas été possible.
M. Laplante: Quelle réponse vous donnait-on à ce
moment-là? Pourquoi n'était-ce pas possible à
côté de la mine comme cela?
M. Côté: Des réponses aussi concrètes
que cela, on n'en a pas eu, mais disons que cela n'a pas été
possible pour nous de réaliser ce projet.
M. Laplante: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
maire, messieurs les échevins, je vous remercie beaucoup pour votre
collaboration aux travaux de cette commission parlementaire. Je vous remercie
également d'avoir respecté les directives que j'avais
données, de même que tous les membres de la commission
parlementaire, et je souhaite, parce qu'un président est toujours
neutre, que vos voeux soient exaucés.
M. Côté: Merci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Là-dessus, j'inviterais le Comité des mines d'amiante du CRD des
Cantons de l'Est et ses représentants à venir nous rencontrer
s'il vous plaît.
S'il vous plaît, à l'ordre!
Je demanderais, s'il vous plaît, à M. Laliberté qui
est le représentant du CRD de bien vouloir nous présenter ses
collègues qui l'accompagnent.
Comité des mines d'amiante du CRD des Cantons
de l'Est
M. Routhier (Robert): A titre de président du Conseil
régional de développement des Cantons de l'Est, je veux d'abord
vous dire que cela nous fait plaisir de répondre à votre
invitation afin, peut-être, de vous aider à clarifier les
questions que vous voudrez bien nous poser et, tout de suite, nous pouvons vous
dire qu'en ce qui regarde le projet de loi 70, nous n'avons pas l'intention de
remettre en question le principe sous-jacent.
A titre de président, il me fait plaisir de présenter les
membres du Comité des mines du CRD qui est composé de personnes
d'Asbestos, de la ville d'Asbestos, ville de notre territoire qui est vraiment
concernée par l'amiante.
Ce comité est structuré comme un organisme. Il y a une
assemblée générale très représentative de ce
secteur du territoire, de même qu'un conseil d'administration et d'un
exécutif dont à peu près tous les membres sont ici
présents.
D'ailleurs, le président du comité, M. Laliberté,
va vous les présenter personnellement tout à l'heure.
Permettez-moi une brève intervention pour vous présenter
le comité qui existe déjà depuis 1972 et qui a
complété de nombreuses études et travaux, qui a
multiplié les démarches et qui a, à vrai dire, fait une
certaine expertise sur la question de l'amiante.
D'ailleurs, au CRD, on aime croire que ce comité a pu contribuer
à l'engagement du gouvernement actuel à l'égard de sa
politique de l'amiante.
En février 1977, le comité a produit un rapport, un
mémoire sur une politique québécoise de l'amiante.
D'ailleurs, peut-être quelques-uns parmi vous ont-ils eu l'occasion de
l'examiner. Ce rapport portait, essentiellement, sur quatre volets d'une
politique, à savoir l'extraction, la transformation, la
commercialisation et la recherche et ce rapport avait l'avantage de situer
l'intervention souhaitable du gouvernement québécois dans
l'amiante et ce, tant à Thetford qu'à Asbestos. Il a atteint
l'ensemble du dossier québécois en matière d'amiante.
Pour ce soir, notre comité, même s'il n'a appris que
tardivement qu'il aurait à se présenter ici, a fait un effort en
fin de semaine pour synthétiser à votre intention ce rapport et
vous présenter la perspective privilégiée par le
Comité des mines du CRD.
Alors, avec votre permission, je vais laisser M. Laliberté
présenter les membres du comité. Par la suite, il
présentera rapidement le mémoire qui a été
préparé pour cette commission parlementaire et ce, avant que les
membres de cette commission aient l'occasion de poser des questions.
Alors, cela nous fait plaisir de contribuer et nous espérons que
cela vous sera utile. M. Laliberté.
M. Laliberté (Roger): M. le Président, il me fait
plaisir de vous présenter M. Aimé-Jean Côté,
représentant la Société Saint-Jean Baptiste; M. Anselme
Beaudoin, maire de la municipalité de Wot-ton; M. Raynald Losier,
représentant du CLSC d'Asbestos; M. Francisco Spertini et M. Alain
Drouin, représentants de la chambre de commerce; M. Gaudiose Leclerc,
représentant de la ville d'Asbestos; M. Jean-Claude Simoneau,
représentant du Syndicat national de l'amiante; M.
France Zuckoski, représentant des enseignants; Mme Cora
Levasseur, représentante de la Société Saint-Jean
Baptiste; Mme Elisabeth Parenteau, représentante du Cercle culturel
d'Asbestos et Mme Normande Lamontagne, représentante de l'AFEAS d'une
paroisse d'Asbestos. (21 h 15)
M. le Président, avec votre permission, nous avons
préparé un petit mémoire, comme on vous le disait, et j'en
fais une lecture rapide.
Depuis longtemps, l'amiante a valeur de symbole au Québec,
symbole de la lutte des travailleurs pour de meilleures conditions de travail,
symbole de la mainmise étrangère sur notre économie,
symbole d'abondance en ressources naturelles. L'annonce d'une intervention de
l'Etat québécois dans le secteur de l'amiante aurait donc
dû susciter le plus grand intérêt, voire l'enthousiasme,
chez la plupart des Québécois. Enfin, comme
l'électricité, une intervention dans l'amiante était
destinée à devenir un projet québécois dans toute
la force de cette expression. Or, le Comité des mines du Conseil
régional de développement des Cantons de l'Est constate avec
déception que ce n'est pas le cas. Tel que présenté,
l'initiative gouvernementale engendre le doute, la discussion, la partisanerie,
quand ce n'est pas tout simplement l'indifférence. Pourtant, le projet
du gouvernement présente, aux yeux du comité, un
intérêt certain, parce que ce projet va, en bonne partie, dans le
sens des propositions qu'il a émises dans son mémoire en
février 1977. Ce mémoire recommandait, comme nous le disions tout
à l'heure, des interventions à tous les niveaux: extraction,
commercialisation, transformation et recherche. En plus de la concordance au
moins partielle avec les buts du comité, le projet présente un
autre intérêt. Il indique à tout le moins une
volonté politique d'agir, une volonté de faire quelque chose dans
ce secteur important de l'économie québécoise, secteur qui
a été trop longtemps oublié et négligé.
Au niveau de l'extraction de cette matière première qu'est
l'amiante, l'achat proposé de l'Asbestos Corporation est en quelque
sorte un premier geste significatif, même s'il peut paraître
peut-être plus spectaculaire que riche en retombées
immédiates, mais il indique tout de même aux compagnies d'amiante
qu'elles devront désormais accepter dans leur club sélect un
nouveau partenaire décidé à gérer au moins une
partie de sa propre richesse. Au surplus, malgré d'importants
investissements à y faire, les quatre mines de l'Asbestos Corporation
présentent un achat rentable, au moins si on se fie aux derniers
états financiers de la compagnie. Ajoutons à cela un
élément très important. L'achat d'Asbestos Corporation
permet de contrôler une assez bonne part de l'amiante
québécois. Il s'agit en fait de 70% de l'amiante produit à
Thetford et Black Lake, soit environ 30% de l'amiante québécois.
Si l'on considère aussi que cette production est d'excellente
qualité et que la compagnie possède d'importantes
réserves, on peut dire alors que le Québec prend, dans le monde
de l'amiante, une part qui est loin d'être négligeable. Cette part
lui donnera certainement un pouvoir de négociation important
auprès d'industriels intéressés ou déjà
engagés dans la transformation, compte tenu qu'à plus ou moins
brève échéance on prévoit que l'offre ne pourra
satisfaire la demande et qu'à long terme on prévoit même
une disette dans l'amiante.
Etant dans une position de force, la Société nationale de
l'amiante, par l'intermédiaire du Bureau de l'amiante, pourra
négocier assurément avec les acheteurs de fibres, des ententes de
développement axées sur l'implantation d'industries de
transformation au Québec. L'achat des trois mines de ce secteur
appartenant à Asbestos Corporation présente un avantage
supplémentaire aux yeux des membres du Comité des mines. Il
constitue un prérequis à un regroupement de toutes les mines de
cette ville, regroupement que proposait le comité en février
1977pour des raisons de rationalité et de rentabilité
économiques.
Au niveau de la recherche, l'initiative du gouvernement est de nature
à garantir au Québec des débouchés accrus si la
recherche appliquée est bien menée. Parallèlement à
la recherche appliquée, la recherche santé tendra à
préserver la santé des travailleurs et permettra de redorer le
blason de l'amiante brut et des produits qui en contiennent. Pour peu que les
efforts en ce sens soient sérieux, le Québec prendra enfin le
leadership qui lui revient et le label "Approuvé Québec"
deviendra synonyme de salubrité et de qualité des produits de
l'amiante. Déjà, la création du Centre de recherche sur
l'amiante avec comme philosophie la revalorisation ou la valorisation de
l'amiante va tout à fait dans le sens des propositions
déjà énoncées par le Comité des mines.
D'ailleurs, le comité présentera dans les prochaines semaines, au
ministre des Richesses naturelles et au directeur du Bureau de l'amiante un
nouveau mémoire spécialement consacré à la
recherche sur l'amiante.
Au niveau de la commercialisation, le gouvernement
québécois a renoncé à une action d'envergure en ne
retenant pas l'idée d'un office de mise en marché. Le
comité, pour sa part, avait mis cette idée de l'avant dès
1972, en considérant qu'il s'agissait là d'un excellent moyen,
pour le Québec, de se donner subtilement et à peu de frais une
influence déterminante sur une part très importante de toute
l'amiante en circulation dans le monde capitaliste.
Toutefois, grâce à son contrôle de 30% de la
production québécoise, la Société nationale de
l'amiante devra nécessairement s'intéresser à la vente de
sa matière brute et, en conséquence, acquerra une connaissance
certaine des marchés de l'amiante. Si on joint à cette
connaissance et à cette présence sur les marchés la force
de la Société nationale de l'amiante comme producteur de
matière brute, on ne peut pas douter que l'achat d'Asbestos Corporation
accorde au Québec un "bargaining" économique assez
considérable.
Quant à la transformation, c'est le véritable enjeu d'une
politique de l'amiante, parce que c'est à ce niveau qu'on situe les
emplois et la véritable
force économique. Si la présente initiative du
gouvernement, par son ampleur, peut paraître radicale aux yeux de
certains, c'est qu'elle lui a été imposée en bonne partie
par l'insouciance des gouvernements québécois antérieurs
et par le contexte historique qui a amené des compagnies à
négliger de transformer un pourcentage décent des fibres qu'elles
extrayaient du Québec, privant ainsi les Québécois de
retombées auxquelles ils auraient dû s'attendre.
Le geste du gouvernement a au moins le mérite, comme nous l'avons
déjà dit, d'indiquer clairement que les règles du jeu sont
maintenant changées au Québec. Bien sûr, le programme
annoncé en novembre dernier n'apporte pas instantanément des
emplois au Québec. Personne d'ailleurs ne s'y attendait. Mais
l'idée des ententes de développement avec les compagnies est une
mesure qui, aux yeux du comité, peut s'avérer prometteuse. Les
compagnies engagées dans l'extraction devront conclure, d'ici la fin de
1979, des ententes visant à transformer l'amiante en sol
québécois.
Finalement, le projet du gouvernement a le grand avantage de constituer
une formule ouverte, c'est-à-dire qu'elle ne bloque aucune autre avenue
que pourrait emprunter le Québec au cas où il verrait la
nécessité de s'engager plus à fond dans le monde de
l'amiante.
Le comité des mines aurait souhaité une intervention plus
en profondeur à certains niveaux du secteur de l'amiante, notamment dans
la commercialisation. Mais, compte tenu que la formule adoptée par le
gouvernement est ouverte et compte tenu des résistances traditionnelles
à l'intervention de l'Etat dans l'économie, le comité
aurait mauvaise grâce de ne pas se montrer satisfait du geste posé
par le gouvernement.
A vrai dire, on aurait pu facilement s'attendre à beaucoup
moins.
Malgré l'intérêt certain de plusieurs aspects du
projet présent, il se trouve pourtant qu'il est loin de susciter
l'enthousiasme. Il y a d'abord eu l'apparente improvisation de l'annonce du
projet. Un tel programme aurait mérité plus de
déploiement. Surtout, on a omis de mettre la population vraiment dans le
coup. On a négligé de donner suffisamment d'information sur le
sujet, sur le projet, sur ses mérites et pourquoi pas? sur
ses limites. Peu de gens se sentent concernés et impliqués. Cela
permet aux adversaires du projet de le décrier facilement, sans avoir
à proposer d'alternatives vraiment valables aux yeux du
comité.
Les membres du comité déclarent que le débat actuel
reste accroché sur le mot "nationalisation". Il conviendrait bien plus
d'élargir le débat et d'envisager la question dans son ensemble,
en incluant notamment les aspects intéressants comme la politique de
recherche et les éventuelles ententes de développement.
Le projet du Québec semble avoir été
élaboré avec soin dans les bureaux du ministère des
Richesses naturelles. Mais, semble-t-il, on a oublié un aspect important
qui aurait pu conférer à ce projet une valeur bien plus grande.
C'est la parti- cipation des citoyens du Québec à une initiative
à la mesure du symbole qu'est l'amiante.
Comme le proposait le comité dans son rapport
précédent, une politique vraiment québécoise de
l'amiante devrait permettre aux citoyens, individuels ou corporatifs, de
participer à cette initiative qui pourrait alors devenir
véritablement collective. C'est pourquoi, sous l'initiative de l'Etat,
les acheteurs d'amiante, les syndicats et les travailleurs de l'amiante, les
organismes publics et privés, de même que les citoyens, devraient
pouvoir acquérir des actions dans l'entreprise nationale de
l'amiante.
Le comité ne veut pas s'engager dans ce débat en indiquant
quel pourcentage de la propriété devraient détenir l'un et
l'autre des partenaires possibles, mais l'Etat pourrait ne détenir que
la partie lui permettant d'assurer le leadership de l'affaire.
En plus d'intéresser la population entière au projet, la
formule que suggère le comité aurait l'avantage indiscutable de
coûter moins cher au ministre des Finances. Et en cette période de
rareté de l'amiante, on pourrait dire aussi rareté de l'argent,
le comité ne croit pas aux prophètes de malheur, étant
convaincu que la participation de plusieurs partenaires serait facilement
acquise.
Les compagnies acheteuses d'amiante trouveraient leur avantage à
investir dans ce projet. Elles auraient ainsi leur mot à dire sur leur
approvisionnement et n'auraient pas ainsi l'idée de se lancer un jour
dans un quelconque boycottage. Pour le Québec, leur participation
faciliterait la concertation sur la valorisation de l'amiante. Et,
politiquement, cela indiquerait que le gouvernement du Québec
considère l'entreprise privée comme un partenaire.
En associant les syndicats et les travailleurs de l'amiante, le
gouvernement obtiendrait d'eux un appui qui a été très
mesuré jusqu'à maintenant. Ceux-ci auraient directement droit de
parole sur la gestion de leur patrimoine, ainsi que sur les initiatives qui
touchent leur santé. Ils auraient, en fait, deux droits de vote: l'un au
conseil d'administration de l'entreprise et l'autre aux élections
générales.
Le comité constate que la tendance est de plus en plus forte en
Amérique du Nord à associer les travailleurs à leurs
entreprises. Non seulement cela serait possible, mais encore cela serait-il
hautement souhaitable dans le cas de l'amiante. Il s'agirait aussi d'une forme
privilégiée d'éducation à la vie
économique.
Quant aux citoyens québécois, à titre individuel ou
corporatif, ils auraient l'occasion, en investissant dans l'amiante, de poser
un geste très significatif pour leur propre promotion économique,
sans compter qu'ils auraient la possibilité de retirer les fruits d'une
entreprise rentable.
En conclusion, MM. les membres de la commission, le Comité des
mines voit d'intéressantes avenues dans le programme d'intervention
gouvernementale, mais il a voulu apporter ici quelques suggestions de nature
à susciter au projet une plus grande adhésion.
Le projet tel que présenté ne ferme pas la porte à
cette large participation que suggère le comité. Comme on l'a dit
maintes fois, l'amiante est un symbole. N'est-il pas alors permis de penser que
le gouvernement voudrait alors faire preuve d'originalité dans la
conception définitive et la réalisation de son projet
d'intervention?
Le comité croit fermement que le gouvernement du Québec
doit tenter d'associer à sa politique le monde de l'amiante et la
population en général pour transformer en véritable projet
collectif ce qui peut n'être finalement qu'une simple initiative
économique.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
monsieur. M. le ministre.
M. Bérubé: Merci, M. le Président. M.
Laliberté, MM. les membres du CRD des Cantons de l'Est, je tiens, d'une
part, à vous témoigner mon appréciation pour les
suggestions éminement constructives de votre mémoire. Je pense
que vous avez cherché à regarder quelles étaient les
failles du projet qui vous était proposé et je pense que vous
avez certainement mis le doigt sur plusieurs éléments qui vont
nous inciter à réfléchir.
Ce que j'aimerais savoir de votre Comité des mines, en
première question, c'est depuis combien de temps vous vous
préoccupez de cette question de la transformation de l'amiante, d'une
politique de l'amiante, pour le Québec.
M. Laliberté: M. le ministre, on a commencé
à se préoccuper de cette question en 1970 et notre premier
mémoire date de 1972.
M. Bérubé: Donc huit ans? M. Laliberté:
Huit ans.
M. Bérubé: Je comprends donc un peu mieux pourquoi
le mémoire que vous m'avez soumis était d'une telle
densité, au moment où nous travaillions à une politique de
l'amiante; vous nous avez soumis un mémoire qui était très
considérable, très bien étoffé, avec
énormément d'informations. Je conclus que cela fait des
années que vous réfléchissez.
J'aurais des questions reliées à votre mémoire,
reliées aussi à l'approche que vous avez proposée, pour
tenter de voir dans quelle mesure vous voyez dans la Société
nationale de l'amiante quelque chose qui répond à vos objectifs,
du moins dans les objectifs de la société.
Si je comprends bien ce que vous avez recommandé au gouvernement
dans votre mémoire, mémoire qui, je dois le dire, a
été largement utilisé chez nous, vous avez
recommandé la création d'un genre de société
nationale qui se serait occupée de transformation essentiellement, en
première approximation. (21 h 30)
Vous avez également recommandé que l'Etat devienne un
actionnaire important dans l'exploitation minière à Thetford, qui
était un autre aspect.
Vous avez recommandé d'investir dans la reconstruction des
installations viellottes de la région de Thetford, essentiellement, donc
de ne pas hésiter à investir dans la reconstruction des usines
existantes, votre opinion étant que les usines existantes sont
passablement démodées et devraient être modernisées,
tant pour des questions de productivité que pour des questions de
salubrité.
Vous avez également proposé une association avec les deux
autres sociétés minières pour regrouper les
opérations minières de la région de Thetford. Si je
comprends bien, vos recommandations concernent la région de Thetford.
Vous avez d'autres recommandations concernant un office de
commercialisation.
Le maire de Thetford soulignait tantôt que la
société Bell Asbestos dépense présentement
plusieurs millions de dollars pour moderniser ses usines, travaux qui sont en
cours déjà depuis un certain temps. En général, on
s'entend pour dire que la société Lake Asbestos a une usine
passablement moderne et bien étoffée. Puisque la
Société nationale de l'amiante se voit confier comme mandat
l'exploitation, la transformation, pourriez-vous me dire dans quelle mesure les
travaux de modernisation à Bell et Lake Asbestos pourraient affecter
votre plan de transformation? Voudriez-vous que cette Société
nationale de l'amiante aille plus loin que l'achat d'Absbestos Corporation et
qu'elle aille rechercher, par exemple, un genre d'association, une
société mixte, avec les autres partenaires de la région
pour viser toujours l'objectif que vous vous êtes donné? Avec le
temps, constatant l'évolution, êtes-vous toujours d'accord pour
que ce soit un objectif d'exploitation de la société?
M. Laliberté: M. le ministre, le regroupement que nous
proposions effectivement n'avait d'autre but que d'assurer une plus grande
rentabilité à tout le secteur de Thetford-Black Lake.
C'était pour diverses raisons aussi simples que celle-là, que
l'on trouvait qu'il y aurait eu avantage, par exemple, à mélanger
certains types de fibres de différentes mines, pour rationaliser toute
la production d'un large secteur qui avait d'abord besoin d'argent qu'on y
investirait. Les compagnies minières ont manifesté une certaine
retenue dans leurs investissements. Compte tenu aussi que l'amiante
était en très grande demande il y a deux ans et qu'il l'est
encore, nous pensions qu'il fallait rationaliser tout le secteur. Ce
n'était pas strictement sur le plan de la santé que nous voyions
cela, c'était pour assurer, par ce regroupement, la construction de la
meilleure usine d'amiante au monde qui devrait être construite là,
avec une conception nouvelle, etc. On pensait que c'était
approprié dans les circonstances. On le croit encore, M. le ministre,
bien que les établissements miniers de la Lake et de la Bell pourraient
très bien servir, ce n'est pas perdu.
Autrement dit, les usines actuelles pourraient servir de concentration.
Les "concentrateurs", comme c'est une nouvelle conception qui date de dix ans
dans l'amiante, on concentre l'amiante
avant de l'usiner dans l'usine principale. Les usines qui existent
déjà pourraient être transformées, modifiées
légèrement et peut-être même employées telles
quelles, dans certains cas.
L'idée du regroupement, on y croit toujours. On pense que, de
toute façon, en prenant les trois compagnies minières, en prenant
la compagnie Asbestos, vous avez déjà trois opérations. Il
va falloir rationaliser tout cela. C'est peut-être déjà
rationalisé un peu, mais on présume que cela pourrait être
amélioré. Ajoutez à cela une petite compagnie comme la
Bell qui n'est pas grand-chose à Thetford, ajoutez la Lake à
Thetford et ajoutez la Lake à Black Lake et vous aurez finalement le
regroupement que l'on propose.
M. Bérubé: Est-ce que je comprends bien? La
Société nationale de l'amiante s'étant portée
acquéreur de l'Asbestos Corporation, vous proposeriez, comme
modèle de développement, de rechercher un genre d'entente, de
contrat avec les autres compagnies environnantes pour tenter de viser à
la création de cette usine. Vous estimez que c'est encore un objectif de
la Société nationale de l'amiante.
M. Laliberté: Je pense que l'idée du comité
est assez claire sur cela. On pense que... De toute façon, c'est un peu
écrit dans l'histoire de la région. Ce sera une
nécessité qui va être demandée par la force des
choses, savoir le développement de toute la région et de tout le
secteur Thetford-Black Lake, la planification du territoire,
l'aménagement même du territoire. Vous savez ce que la Bell fait.
La Bell, je pense, loue une partie d'une propriété minière
qui appartient déjà à Asbestos Corporation pour exploiter.
Je pense que c'est écrit dans l'histoire future du secteur Thetford
Mines-Black Lake, ce regroupement.
M. Bérubé: Mais croyez-vous que l'achat de
l'Asbestos Corporation par la Société nationale de l'amiante pour
moderniser les installations qui y sont, pourrait représenter un pas
dans le sens de la politique que vous recommandez?
M. Laliberté: Je n'ai pas compris le sens...
M. Bérubé: Croyez-vous que l'achat de l'Asbestos
Corporation, avec les trois mines sur cinq de la région, pour la
modernisation des installations, peut servir d'étape à votre
politique? En d'autres termes, est-ce que vous pensez que cela
répondrait, si la Société nationale de l'amiante
choisissait cette voie, aux objectifs de votre politique?
M. Laliberté: C'est un petit peu cela qu'on dit: c'est un
début de regroupement. On peut le considérer comme un
début de regroupement avec les trois mines qui composent la compagnie
Asbestos Corporation.
M. Bérubé: Maintenant, il y a une question que
j'aimerais poser, sur le rôle que pourrait jouer une
société productrice de fibre dans le dévelop- pement.
Avez-vous l'impression que le fait de contrôler la fibre, avec toutes les
discussions que vous avez eues, de contrôler, donc, une partie du
marché mondial, pourrait servir de levier pour amener, par exemple, des
industries étrangères de transformation à investir au
Québec pour faire de la transformation, en d'autres termes, accepter de
venir investir au Québec en échange d'une garantie
d'approvisionnement? Avez-vous l'impression que cette formule est une
façon d'arriver à l'objectif que vous vous êtes fixé
avec l'Office de mise en marché?
M. Laliberté: Nous n'avons pas seulement cette conviction,
nous avons la conviction que c'est un moyen, M. le ministre, parce que la
compagnie Asbestos Corporation va contrôler 30% de l'amiante produit au
Québec. L'amiante est présentement en très grande demande.
Les acheteurs qui existent présentement vont vouloir avoir de la fibre
qui est produite encore aujourd'hui par la compagnie Asbestos Corporation. Le
Bureau de l'amiante et la société Asbestos Corporation vont
très bien tenir le langage suivant: Ecoutez, les gars, vous voulez de
l'amiante, mais il commence à être rare au Québec; il
faudrait peut-être penser que, si vous en voulez, il faudrait venir en
transformer un petit peu plus chez nous. Naturellement, on veut être
civilisé, mais je commencerais donc peut-être par 2% ou 3%. On
pense que c'est une façon et c'est pour cela d'ailleurs qu'on pensait
que l'Office de commercialisation, M. le ministre, était la façon
la plus fine, la plus subtile, la plus économique pour s'impliquer
à ce niveau afin d'avoir non seulement des ententes de
développement avec les producteurs actuels, mais avec tous les
transformateurs de l'amiante.
M. Bérubé: Les fonctionnaires du ministère
de l'Expansion économique régionale, quand ils discutent de la
possibilité d'un office de commercialisation, apportent comme argument
que cela pourrait déstructurer le marché, c'est-à-dire
qu'établir un intermédiaire entre le producteur de fibre et le
consommateur pourrait déstructurer le marché et occasionner
certains problèmes de mise en marché. Evidemment, d'autres ont
également invoqué le problème de la
constitutionnalité, vu la tenure particulière des terres dans les
Cantons de l'Est. Quelle est votre opinion concernant cette recommandation dans
votre mémoire?
Une Voix: France, c'est toi.
M. Zuckoski (France): Bon. A ce sujet, il n'est pas certain qu'il
soit souhaitable, d'une certaine façon, de déstructurer le
marché. Actuellement, ce qui se passe, c'est que toute industrie de
l'amiante, d'une façon ou de l'autre, officiellement ou plus ou moins
officiellement, est verticalement intégrée, ce qui fait qu'on a
des possibilités de fraude fiscale, par exemple,
Johns-Manville-Asbestos, Johns-Manville-Etats-Unis, ce qui fait aussi qu'on
peut cacher des choses à un endroit et à un autre, et c'est ce
qui fait aussi la force de
ces compagnies. Il est certain et même probable que l'acheteur
Johns-Manville, qui en est également le producteur, est habitué
à se vendre de l'amiante à lui-même, est habitué
à un certain type en particulier. Il reste que la seule
déstructuration qui va exister au début, c'est quel type
d'amiante exactement chacun voudrait à un moment donné.
A part cela, il reste aussi que cela permet, comme l'office, à ce
niveau, de contrôler l'offre, ce qui permettait aussi, à ce
moment-là, de forcer la main un peu plus, d'influencer un peu plus
fortement les compagnies à transformer ici. Il est sûr que si on
ne structure rien, si on laisse les choses comme elles sont, les incitations
possibles sont assez faibles. Il reste que, déjà, en prenant 30%
de l'amiante au Québec, cela peut avoir deux effets. Aux acheteurs
actuels de l'amiante, on peut dire qu'on souhaiterait qu'ils transforment ici
et cela permet aussi au gouvernement de dire: Ceux qui sont déjà
dans l'amiante, au Québec, qui ont des mines d'amiante, on vous incite
fortement aussi à le transformer. Vous voyez que nous sommes
sérieux. Nous prenons déjà en main une partie de
l'industrie et, possiblement, si vous n'êtes pas sérieux
là-dedans, si vous n'êtes pas intéressés à
transformer, on le fera nous-mêmes et nous prendrons peut-être
aussi votre mine en plus.
C'est toute la question du "bargaining" possible qui joue à ce
niveau-là. Le fait de prendre une mine comme telle, premièrement,
permet de connaître ces marchés, de prendre des contacts avec ceux
qui transforment, de commencer à négocier avec eux, tout en
permettant aussi de jeter un certain poids encore du "bargaining"
par rapport à celles qui le font déjà.
Si vous avez déjà des gens qui sont dans la transformation
comme à la Johns-Manville; s'ils veulent le faire, parfait. Si cela
devient un bon succès corporatif, pas de problème. Le jour
où ils deviennent un moins bon succès corporatif, on a des moyens
de pression pour les faire jouer à ce moment-là. C'est cela en
fin de compte, le truc.
M. Bérubé: Je vous remercie messieurs. J'aurais
encore beaucoup de questions à poser, mais malheureusement le
président me fait signe, alors je devrai céder la parole au
député de Saint-Laurent, j'imagine.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
cela. Le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. Laliberté, d'abord une question au sujet des
interventions gouvernementales au niveau de l'extraction. Vous dites, à
la page 2 de votre mémoire, qu'il s'agit d'un premier geste, vous l'avez
d'ailleurs confirmé. Selon vous, il est inévitable, c'est dans la
nature des choses, que, éventuellement, toutes les mines de la
région de Thetford Mines soient sous une gestion unique. C'est
d'ailleurs la recommandation que vous avez formulée au nom de votre
groupe dans le mémoire de février 1977, il y a tout juste un peu
plus d'un an. Est-ce que cela veut dire que, quant à vous, une action
qui se limiterait à la prise en charge de l'Asbestos n'aurait pas de
sens, il faut nécessairement qu'elle se poursuive?
M. Laliberté: Je pense que c'est un début à
une opération plus vaste. On semble d'ailleurs avoir bien indiqué
cette opération dans notre petit mémoire; cette opération
a non seulement un sens, mais elle a déjà des
intérêts certains.
M. Forget: Quand vous me dites que c'est un début, vous me
faites soit une prédiction ou vous invitez le gouvernement à
aller plus loin. Est-ce une recommandation de votre part d'aller plus loin, ou
est-ce simplement une prédiction que vous faites des probabilités
inconnues quant aux interventions futures du gouvernement?
M. Laliberté: C'est peut-être une prédiction,
c'est peut-être aussi une conviction que le gouvernement va être
amené, par la force des choses, à en arriver là
éventuellement.
M. Forget: M. Laliberté, vous ne reniez donc en rien ce
qui était contenu à la page 36 du mémoire du CRDE de l'an
dernier, alors qu'ayant sûrement à l'esprit la question de
l'acquisition de la Société Asbestos, vous déclariez que
cette question de créer un secteur témoin, qui consiste à
acquérir les actifs miniers de l'une des firmes engagées dans
l'extraction de l'amiante, est à peu près inutile. Vous
développiez cette idée dans ce mémoire, disant qu'on
pourrait procéder de la sorte dans le but d'assurer un approvisionnement
et vous persistez à dire que ce n'est pas nécessaire, parce que
les sociétés minières déjà établies
se feraient un plaisir de vendre à de nouvelles usines
québécoises de transformation. Vous continuez en disant: "Les
résultats à obtenir dans le secteur témoin ne seraient
certes pas à la mesure de l'effort financier consenti pour le
créer, en tout cas, pas à court ni à moyen terme".
Cela demeure toujours l'opinion du CRDE, si je comprends bien?
M. Laliberté: Cela fait partie d'une section du rapport
où on traite des genres d'intervention de l'Etat dans l'amiante. On dit
que, strictement limité à la nationalisation d'une entreprise, ce
n'est pas cela qui va donner des "jobs". On dit que cela ne sera pas un moyen
de...
M. Forget: ... un générateur d'emplois. M.
Laliberté: II y a les autres...
M. Forget: On y reviendra tout à l'heure, mais je voulais
soulever ce point pour être bien sûr que le CRDE n'avait pas
révisé son attitude ou s'il l'avait révisée, dans
quel sens. Je pense bien que c'est clair que vous êtes encore du
même avis que celui que vous avez exprimé en février 1977
quant à l'inutilité en soi, si elle se limite à cela,
d'une intervention qui se bornerait à l'acquisition d'une des
sociétés minières. (21 h 45)
Dans le même souffle, M. Laliberté, s'il est vrai qu'il
faut aller plus loin et que vous prétendez qu'il est inévitable
que le gouvernement sera amené à aller plus loin, le CRDE a-t-il
fait une évaluation des engagements financiers, des investissements
additionnels qui seront requis, justement pour aller jusqu'au bout de sa
politique?
M. Laliberté: Le CRD a des moyens limités. On a
réfléchi au sujet et nous sommes arrivés à la
conclusion que le regroupement que nous proposons était avant tout pour
assurer une plus grande rentabilité à tout le secteur.
Si le secteur est déjà rentable actuellement, on se dit
qu'en assurant une plus grande rentabilité, ce regroupement sera
sûrement économiquement faisable.
M. Forget: Vous n'avez pas d'estimation, de prix
précis?
M. Laliberté: Quant au coût, on ne l'a pas
précisé. Permettez-moi de revenir sur un aspect. Nous disions que
dans ce regroupement, on souhaitait que l'Etat ne soit qu'un important
actionnaire. Cela peut vouloir dire quoi? Peut-être 20%. Finalement, tout
le regroupement coûtera peut-être moins cher...
M. Forget: ... cette question, si vous voulez bien, tout à
l'heure, parce qu'on est un peu pressé par le temps.
Dans un autre domaine, celui de la commercialisation, vous avez
exprimé un point de vue dans votre rapport de 1974, peut-être dans
celui de 1972 je n'en ai pas pris connaissance mais dans celui
qui a été publié... Il y en a eu un nouveau, je pense, au
début de 1974 qui recommandait un office de mise en marché et
vous êtes revenus à la charge en février 1977 avec,
substantiellement, la même recommandation.
Entre 1974 et 1977, vous aviez eu des alliés de circonstance dans
la présence de nos amis d'en face du Parti québécois, qui
ont inscrit cela dans leur programme après votre premier rapport.
Après votre deuxième rapport, vous avez eu moins de
chance. Ils ne sont plus de cet avis. Le ministre a exposé publiquement
que toutes sortes de raisons militaient contre un office de mise en
marché.
Il semble, d'après les réponses que vous lui avez
données tout à l'heure, que vous persistiez à
prétendre que c'est là un moyen d'intervention auquel vous tenez,
mais je suis un peu étonné de voir la façon dont vous en
traitez cette fois-ci dans votre mémoire. Il semble, sans vouloir vous
critiquer, que vous manquiez un petit peu de courage vis-à-vis de cette
recommandation que vous avez formulée à deux reprises, parce que
vous dites que le gouvernement a renoncé à une action d'envergure
de ce genre-là et pourtant vous vous consolez en disant que la
société Asbestos, dont il envisage l'acquisition, contrôle
c'est votre mot 30% de la production. Alors, il semble que
maintenant vous soyez satisfaits, à titre d'organisme de mise en
marché, du contrôle d'une seule société qui
représente 30%, mais vos arguments de l'an dernier vous incitaient
à aller beaucoup plus loin que cela. Comment se fait-il que tout
à coup 30% soient suffisants pour contrôler le marché
mondial de l'amiante, alors qu'il fallait un office de mise en marché?
Il me semble que vous abandonnez cet objectif de façon assez
inexplicable.
M. Laliberté: M. le député, le comité
n'a jamais abandonné l'idée d'un office de commercialisation. Ce
que nous disons dans notre mémoire, c'est qu'au lieu de contrôler
100% de l'amiante produit sur le sol québécois, du fait de
l'acquisition de la compagnie Asbestos, la société d'Etat va
avoir au moins à commercialiser 30% de la fibre d'amiante.
M. Forget: Je veux bien croire qu'elle va commercialiser 30%,
mais si vous prétendez qu'avec 30%, la Société nationale
de l'amiante va contrôler le marché, c'est donc que vous dites
qu'à l'heure actuelle une société qui a 30%, comme part du
marché, contrôle déjà le marché. Est-ce que
c'est une proposition qu'on peut faire dans le moment?
M. Laliberté: Non. Nous ne disons pas, M. le
député, que 30% vont contrôler le marché. Nous
disons seulement que contrôler 30% de la production
québécoise, c'est déjà pas mal. C'est un
début.
M. Forget: C'est plus de 25%, mais cela n'explique pas pourquoi
30% entre les mains de General Dynamics ne la rendent pas capable, selon toutes
les apparences, de contrôler le marché, et qu'une fois que cela
changerait de propriétaire, cela serait suffisant. Par quelle alchimie,
tout à coup, 30% deviennent le contrôle du marché, je ne le
sais pas. J'aimerais bien que vous me l'expliquiez, si vous êtes en
mesure de le faire.
M. Zuckoski: A ma connaissance, on n'a pas affirmé dans le
mémoire que 30% permettaient de contrôler le marché entier.
Ce qu'on a dit, c'est que pour réellement intervenir dans le domaine de
l'amiante, nous étions prêts à aller jusqu'à
contrôler l'ensemble de l'Office de l'amiante par un office de mise en
marché. D'accord. Actuellement, ce n'est pas ce qu'il y a sur la table,
comme projet. Il y a un projet sur la table qui est de contrôler 30% de
cette fibre. On dit: C'est mieux que rien. On dit: Cela permet,
premièrement, d'entrer sur ce marché, d'en contrôler une
partie...
M. Forget: Ecoutez, c'est un peu comme la vertu. Vous
contrôlez ou vous ne contrôlez pas. Que vous vendiez 30% de la
fibre, cela va, mais entre vendre 30% et contrôler le marché, il y
a une différence de qualité. Ce n'est pas seulement la
différence entre contrôler et ne pas contrôler.
M. Zuckoski: C'est-à-dire que si on veut entrer dans la
question du contrôle, à ce niveau-là, il est sûr que
30% c'est seulement 30%, ce n'est pas le
contrôle du marché. Il reste qu'on peut avoir une influence
relativement considérable du fait qu'une entreprise gouvernementale ait
un contrôle sur 30% de la fibre. Cette influence peut être
significative sur les ententes de développement avec des transformateurs
actuels, soit de l'extérieur, soit d'ici, avec des producteurs d'amiante
actuels d'ici et avec des transformateurs d'ici. Si on disait: Ce qu'on cherche
au départ, c'est la transformation, c'est un outil qui peut permettre
d'avoir une influence significative sur ce
phénomène-là...
M. Forget: Me permettez-vous une question? Si vous dites cela,
c'est que vous supposez que le gouvernement utilise la possibilité de
refuser de vendre la fibre de manière à obtenir l'implantation
d'usines de transformation au Québec. Pour que cette menace soit
efficace, il faudrait qu'effectivement, les autres producteurs d'amiante, non
seulement au Québec, mais ailleurs dans le monde, ne puissent pas
prendre la place de la société Asbestos, quand on l'utilise de
cette façon pour l'empêcher de vendre. Est-ce que vous avez des
raisons de croire que les autres producteurs seraient incapables de combler la
place laissée vide par un retrait de fibres par la société
Asbestos?
M. Laliberté: Nous avons toutes les raisons de croire que
la production actuelle est suffisante pour satisfaire la demande. Nous disons,
dans le mémoire, qu'à brève échéance, la
demande ne pourra pas être satisfaite et des experts de l'amiante disent
que, dans quinze ans, il faudrait déjà commencer à
rationner l'amiante.
M. Forget: On peut faire d'autres mines, mais est-ce qu'il n'est
pas vrai qu'à la Johns-Manville, on fonctionne cinq jours par semaine
plutôt que six jours, depuis quelque temps?
M. Laliberté: II est vrai que la compagnie fonctionne cinq
jours par semaine, en effet, oui.
M. Forget: Mais ça permet de majorer à peu
près de 20% la production, du jour au lendemain. Du moins, pour un
non-instruit, il semble que ça pourrait être une des
conséquences possibles. Est-ce que vous êtes d'accord avec
ça?
M. Laliberté: Bien sûr que, si la compagnie...
Pardon?
M. Forget: Est-ce que vous êtes d'accord que, si on passe
de cinq jours à six jours, on va augmenter de 20% la production, si la
production s'accroît au même rythme que le nombre d'heures
travaillées?
M. Laliberté: II y a environ deux mois seulement que la
production est tombée de six jours à cinq jours.
Déjà, le petit inventaire de la compagnie s'épuise. Il y a
déjà un mois, il y avait des groupes de fibres qu'il aurait fallu
fabriquer et qu'on ne peut pas fabriquer parce que nous travaillons cinq jours.
Alors, très bientôt, on envisage de revenir à l'état
normal. C'est seulement une petite passée très courte. Dans
l'histoire minérale, rares sont les substances minérales aussi
stables que l'amiante; si vous considérez le cuivre et n'importe quoi,
le nickel, vous verrez qu'il y a des perturbations beaucoup plus
considérables qu'un soubresaut.
M. Forget: Permettez-moi de poser une question sur un autre
sujet, M. le Président, très brièvement. Au tout
début du mémoire qu'on entend ce soir, on a l'affirmation qu'il
s'agit là d'un symbole de la mainmise étrangère sur notre
économie, toute la question de l'amiante. Dans une certaine mesure, vous
avez probablement raison. Il reste qu'un des aspects importants de ça,
c'est la capacité des entreprises actuellement en activité au
Québec d'intégrer de la main-d'oeuvre québécoise et
francophone en particulier. Or, je trouve dans votre mémoire de
février dernier, à la page 21, un petit paragraphe sur la
question du personnel. On dit qu'il y a actuellement une technologie qui est
présente au Québec, que le Québec est même un leader
de ce côté-là. Vous enchaînez en disant: "Ceci est
dû à une longue tradition de compétence du personnel
à tous les niveaux de l'entreprise. Ce personnel est majoritairement
québécois: ingénieurs, cadres, techniciens ou ouvriers
spécialisés".
Si cette phrase est exacte et si vous êtes toujours d'accord avec
cette phrase, est-ce que, dans la question du contrôle étranger
dans l'amiante, quoiqu'il existe bien sûr sur le plan des actions, de la
propriété du capital-actions, au moins pour ce qui est de
l'intégration des Québécois dans l'entreprise à
tous les niveaux, il n'y a pas là un problème
particulièrement aigu et cela ne peut-il pas être, à ce
moment-ci, un objectif majeur pour une intervention gouvernementale dans
l'amiante?
M. Laliberté: Je ne connais pas la situation dans la
région de Thetford-Black Lake. Je connais la situation dans la ville
d'Asbestos et je peux vous dire, M. le député, qu'il y a
sûrement matière à amélioration. On a
commencé à améliorer, on a commencé à
promouvoir des francophones à des postes supérieurs. Tout le
monde s'en réjouit. Il y a bien des gens, par contre, qui
considèrent que ce processus est plutôt lent et qu'il y aurait
peut-être lieu de l'accélérer.
M. Forget: Vous avez quand même fait fi de cette
affirmation dans votre rapport de l'an dernier, qui n'était pas
nuancé du tout. Est-ce que vous le qualifiez maintenant?
M. Laliberté: Nous considérons les anglophones
comme des Québécois.
M. Forget: Une dernière question, très
brièvement. Vous parlez de participation des citoyens de la
région en particulier, des organismes de la région, au
capital-actions de la Société nationale de l'amiante. Comme vous
êtes un groupe qui, d'après sa vocation, peut s'exprimer au nom
d'un certain nombre de corps intermédiaires et d'orga-
nismes dans la région, avez-vous une estimation du montant que
les citoyens de la région des Cantons de l'Est, des organismes
privés et semi-publics de la région, y compris les caisses, les
caisses de développement, etc., pourraient investir dans ce projet,
puisque vous en faites la suggestion au gouvernement?
M. Simoneau (Jean-Claude): C'est un point sur lequel le
comité ne s'est pas penché et on ne peut se prononcer
actuellement sur l'intention des gens du milieu, à savoir quelle serait
leur capacité d'investir dans ce secteur. Il reste que, comme on le dit
dans l'ensemble du rapport qu'on présente ce soir, ce serait d'initier
les gens à l'économie. Je pense que, par cette méthode, on
pourrait démontrer très facilement à la population de la
région qu'il est souhaitable et peut-être même rentable pour
elle d'investir dans le secteur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Saint-Laurent. Je demanderais, au nom du
député de Richmond, un consentement unanime pour que nous
puissions dépasser notre horaire jusqu'à 22 h 10, ce qui
accorderait au député de Richmond un temps égal aux autres
intervenants.
M. Bérubé: M. le Président, devrions-nous
être aussi généreux que le député de Johnson,
chaque fois que nous demandons un consentement unanime pour terminer nos
interventions?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'ai
présumé de ce consentement, sinon, je vous aurais
arrêté avant, de même que le député de
Saint-Laurent.
M. Bérubé: Dans ce cas, ce serait, non, M. le
député de Richmond.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Quelques questions. Je
vous remercie beaucoup du document que vous nous avez présenté.
Je sais très bien, pour ma part, toutes les recherches et les travaux
que vous avez effectués dans le domaine.
Aux pages 44 et 45 de votre document de février 1977, vous parlez
de la création d'une société mixte, en fait, avec les cinq
entreprises de la région de Thetford, projet qui vous tient encore
à coeur, je pense, parce que vous le voyez à long terme comme une
suite que le gouvernement pourrait donner quand même à son projet
de loi. Vous parlez, lorsque vous mentionnez la question des réserves,
des cinq mines ensemble, d'un total possible d'environ 250 millions de tonnes
de minerai, toujours avec les cinq mines en question, pour une réserve
approximative de 25 ans. Il semble que le projet de loi 70 va donner lieu
à l'acquisition d'une des entreprises, soit Asbestos Corporation.
Avez-vous certaines évaluations pour ce qui concerne plus strictement
les réserves des puits miniers d'Asbestos Corporation? Est-ce accessible
dans vos données? (22 heures)
M. Laliberté: Dès maintenant, on peut vous dire que
les réserves du secteur de Thetford-Black Lake sont plus fortes que 250
millions, puisque, lors de la dernière réunion des actionnaires
de la société Asbestos Corporation, on a dévoilé
que les réserves avaient augmenté, je pense je peux me
tromper d'environ 75 millions. La compagnie a fait beaucoup de forage
ces dernières années et les réserves ont augmenté
en conséquence. Le montant exact de chacune des mines, on pourrait le
savoir. Il y a différentes publications au ministère des
Richesses naturelles. C'est publié aussi habituellement dans les
rapports financiers annuels des compagnies.
M. Brochu: Savez-vous, de mémoire, si l'augmentation de
ces réserves publiée récemment par l'entreprise, l'a
été à la suite de l'annonce du gouvernement, de son
intention d'acheter la mine?
M. Laliberté: Vous me demandez de présumer, mais je
vous dis que les derniers chiffres que nous avions étaient d'environ 250
millions. Je ne sais pas si je pourrais faire le calcul. On aurait
peut-être 325 millions.
M. Brochu: Maintenant, j'aimerais toucher la question des
produits transformés en sol québécois. D'après
certaines informations qu'il nous a été possible d'avoir, il y a
eu dans le passé un certain nombre de produits qui ont été
manufacturés au Québec, plus précisément dans la
région d'Asbestos. Est-ce que vous avez déjà fait une
certaine étude sur ce secteur en particulier, sur un nombre possible de
produits qui ont déjà été manufacturés dans
la région d'Asbestos? Deuxièmement, si tel était le cas,
quelle est votre opinion sur les raisons qui ont pu inciter, par exemple,
l'entreprise à cesser de manufacturer ces produits en sol
québécois?
M. Simoneau: Depuis quelques semaines, étant donné
les difficultés qu'on rencontre au niveau local d'Asbestos,
c'est-à-dire le syndicat que je représente ici ce soir, on est en
train de monter un dossier à ce sujet. En 1960, il existait à la
manufacture d'Asbestos 350 emplois; en date d'aujourd'hui au moment
où je vous parle il y a 134 emplois. Notre étude est
commencée depuis deux semaines et demie environ et sera probablement
terminée à la fin du mois d'avril. Donc, nous sommes en train de
faire des recherches, à savoir, en 1960, quels étaient les
produits fabriqués a Asbestos et ce qu'il nous reste actuellement. Il ne
nous reste plus grand-chose actuellement. Au début de l'année, en
janvier, la Canadian Johns-Manville nous a fait connaître sa politique,
c'est-à-dire que, dans l'avenir, au niveau du département du
textile, on se spécialiserait seulement dans le fil d'amiante et tout le
reste les métiers à bande, les métiers à
toile on s'en débarrassait et
on envoyait cela à l'extérieur du Québec. On sait
que les nouveaux métiers à toile ont été
envoyés en Nouvelle-Ecosse et que les métiers à bande...
Vendredi dernier, Garlock était à Asbestos pour se procurer les
métiers à bande qu'on a à Asbestos. Notre étude est
en marche, mais, à la fin d'avril, on pourra vous soumettre un dossier
complet qui vous dira exactement ce qu'on fabriquait en 1960, ce qu'on fabrique
aujourd'hui et les difficultés qu'on rencontre au niveau de la
manufacture à Asbestos.
M. Brochu: Ce qui voudrait donc dire que, jusqu'ici, dans vos
études, dans vos recherches, il y a une nette diminution d'emplois,
d'une part. Deuxièmement, si j'ai bien compris c'est un
élément qui est quand même assez important c'est
qu'au moment où on se parle, il y a certains emplois qui risquent de
glisser vers d'autres provinces canadiennes.
M. Simoneau: Actuellement, oui. Parce que les métiers
neufs qui avaient été achetés en 1976 ont
été vendus à une manufacture de la Nouvelle-Ecosse pour
fabriquer la toile. Et certaines de nos recherches démontrent que le
plus grand acheteur de toile pour la compagnie c'est le gouvernement. On se
pose donc plusieurs questions, à savoir pourquoi, actuellement, tous nos
emplois s'en vont à l'extérieur du Québec.
M. Brochu: Avez-vous, de mémoire, un chiffre ou un ordre
de grandeur en ce qui concerne le nombre maximum d'emplois qu'il a pu y avoir
dans le passé de consacrés à la transformation de
l'amiante à Asbestos? Avez-vous une indication là-dessus?
M. Simoneau: Actuellement on en a de 1960 jusqu'à
aujourd'hui. En 1960, il y avait tout près de 400 emplois à la
manufacture.
M. Brochu: Limitez-vous votre étude à 1960 ou si
vous avez l'intention de...
M. Simoneau: Nous voulions aller plus loin, mais nous avons
beaucoup de difficultés à nous procurer les chiffres
actuellement.
M. Brochu: A obtenir les chiffres disponibles.
M. Simoneau: C'est sur ce point que nous tentons de faire des
recherches plus approfondies.
M. Brochu: Maintenant, je reviens ici à votre document
présenté en février 1977. Lorsque vous parlez, dans les
différentes formes d'interventions possibles, de l'établissement
d'un secteur témoin, vous indiquez que créer un secteur
témoin consiste à acquérir des actifs miniers de l'une des
firmes engagées, mais on pourrait procéder de la sorte dans le
but d'assurer un approvisionnement en fibre d'amiante à des usines de
transformation québécoises. Là encore, comme vous le
disiez, c'est à peu près inutile, puisqu'on pourrait se procurer
directement la fibre d'entreprises qui se- raient prêtes à la
vendre. Vous continuez en disant: "Enfin, le fait que cette firme
nationalisée ne soit pas intégrée verticalement
elle serait la seule dans le cas la pénaliserait lourdement et
elle ferait sans doute piètre figure devant ses concurrents qui
pourraient se concerter pour discréditer ainsi l'intervention de l'Etat.
Préconiser la création d'un secteur témoin d'envergure
aussi limitée, c'est se placer au départ dans une position de
faiblesse."
Et si je vais plus loin dans votre document maintenant, à la page
55, là où vous parlez de la création d'une agence de mise
en marché d'une envergure assez grande pour avoir un contrôle sur
le domaine de l'amiante, vous dites: "La suggestion émise au chapitre
précédent en parlant du rapport Alexandre à
savoir de prendre le contrôle d'une ou de quelques mines, est
limitée. Il ne s'agirait là que de constituer un producteur parmi
d'autres. Qui plus est, ce producteur non intégré serait en
concurrence avec les producteurs intégrés, beaucoup mieux
informé de l'état du marché."
Et plus loin vous dites, au même chapitre: "Pour se
prémunir contre pareille éventualité, il importe
d'intervenir sur l'ensemble de la production d'amiante brut du Québec,
car c'est là, et là seulement, que réside encore la force
du Québec. Or le comité des mines a rejeté l'idée
de nationalisation." Cela pour dire que, puisqu'il semble qu'avec le projet de
loi 70, le gouvernement se portera acquéreur d'une des entreprises
productrices d'amiante, qui font l'extraction en sol québécois,
compte tenu de ce que vous dites au niveau de cette agence de mise en
marché et au niveau de l'autre hypothèse de travail de tout
à l'heure, n'y a-t-il pas le risque, justement, pour le gouvernement du
Québec, dans l'approche qu'il fait actuellement, de se retrouver dans
l'état de faiblesse avec une non-garantie de marché que vous
indiquez actuellement, telle que vous l'avez décrite dans votre travail?
Parce que vous avez, si je comprends bien, évalué toutes les
avenues possibles et, parmi celles-ci, on retrouve cette préoccupation
de dire au gouvernement du Québec... Et je comprends votre
volonté de vouloir que le gouvernement étende ses possessions
à de plus nombreuses mines pour avoir davantage de poids, mais
l'argument vaut dans l'autre sens aussi. Si le gouvernement se porte
acquéreur, comme c'est son intention actuellement, d'une seule des mines
qui devient un des producteurs, n'y a-t-il pas là un risque qu'il se
trouve dans cette situation de faiblesse, de sorte qu'il ne pourra pas faire le
poids?
Je vous demande votre opinion là-dessus maintenant, compte tenu
de ce que vous avez déclaré.
M. Zuckoski: Là-dessus, il s'agit de bien comprendre qu'au
niveau du mémoire, lorsqu'on analysait les différentes
interventions possibles, chaque intervention était pesée par
rapport à d'autres interventions, c'est-à-dire qu'on disait:
Comparativement à l'autre, celle-là nous semble plus ou moins
intéressante. L'analyse était faite sur chaque intervention prise
isolément: dans le
cas où c'était une intervention unique, ponctuelle,
c'était la seule qui était prise. Il est clair et encore clair
pour nous que, s'il s'agissait seulement de faire ce geste, c'est-à-dire
d'avoir une participation importante dans Asbestos Corporation, si ce
n'était que cela, avec aucune autre volonté politique, avec
aucune espèce d'incitation au développement, par ce qui se
prépare au niveau de la recherche aussi, s'il n'y avait pas autre chose
d'annoncé avec cela, pas de volonté politique derrière
tout cela, cela serait un geste qui serait un coup de couteau dans l'eau.
Il reste que ce geste combiné avec d'autres devient
intéressant. Si, justement, on avait analysé ce geste tout seul,
on se disait: Si on ne faisait qu'acheter une mine et tout ce qu'on peut faire,
c'est produire de l'amiante, cela ne donne absolument rien. Cela vous
permettrait de connaître un peu les marchés. On disait cela aussi.
Cela avait l'avantage de pouvoir connaître les marchés, pour
pouvoir intervenir plus tard, si on pensait pouvoir intervenir. C'était
dit là-dedans. On ne disait pas que ce changement négatif ne
servait à rien. On disait que c'était moins prometteur qu'une
autre solution ou un autre choix.
A ce moment, on croit encore que ce geste qui était posé
dans un contexte où c'était le seul geste qu'on posait, ne serait
pas le meilleur geste à poser. Cela ne serait pas un geste très
intéressant.
Mais, dans le cadre où cela se fait avec certains
développements possibles, avec le pouvoir de négociation que cela
donne, cela devient un geste intéressant. C'est pour cela que ça
peut sembler un peu bizarre qu'on ait dit des choses là et qu'on les
interprète différemment par la suite.
M. Brochu: Je comprends...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Très brièvement, M. le député de Richmond. Une
minute.
M. Brochu: D'accord. Je conclus donc, M. le Président.
Est-ce que ce n'est pas une volonté de votre part d'indiquer au
gouvernement, en fonction de ce que vous avez déjà
signifié dans votre mémoire, que celui-ci devrait se porter
acquéreur d'un ensemble du secteur de l'amiante au Québec? C'est
aussi la porte que j'ai ouverte en disant au ministre: Votre appétit ne
s'arrêtera peut-être pas à une mine, parce qu'au niveau des
producteurs vous allez être un des joueurs à la table.
M. Laliberté: C'est la recommandation que nous faisons
dans le mémoire, le regroupement, qui était une idée
maîtresse de notre mémoire. On considère quand même
que l'implication de l'Etat sur le plan de l'extraction est un début
dans cette direction.
M. Brochu: Sachant toujours, au point de départ, que
l'extraction ne crée pas d'emploi, que la transformation va en
créer. Ce que vous dites, c'est que le gouvernement devrait à ce
moment-là élargir son appétit et prendre le contrôle
du domaine de l'amiante au Québec.
M. Zuckoski: Non, ce n'est pas cela. On s'est mal compris. On
disait que l'on suggérait à l'Etat de prendre le contrôle
de la région de Thetford, premièrement, pour des raisons de
vétusté des installations à certains endroits, pour rendre
les moyens plus efficaces et tout cela, et après cela, si l'autre
géant, Johns-Manville, veut transformer ici, on n'ira pas plus loin. On
ne suggérait pas d'aller plus loin.
Mais si l'autre géant n'est pas intéressé à
transformer ici, y met des réticences sérieuses, on pourrait
aller jusque là, pas nécessairement jusque là, mais
possiblement, si le besoin s'en faisait sentir, s'il n'y avait pas de
collaboration de l'autre côté, on pourrait suggérer qu'on
aille jusque là. Mais si Johns-Manville, par exemple, se mettait
à transformer, comme on souhaite qu'elle le fasse on ne voit pas du tout
d'intérêt d'aller dans ses plates-bandes. Elle sait comment le
faire, elle peut le faire, qu'elle y aille, on va être très
satisfaits qu'elle le fasse. On veut la transformation et on voudrait prendre
les moyens qu'il faut pour y arriver. Quand l'industrie privée le fait,
bravo à 100%, mais si elle ne veut pas le faire, là on
souhaiterait qu'on aille plus loin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Très brièvement, monsieur.
M. Laliberté: M. le Président, je crois qu'il faut
percevoir notre mémoire comme une invitation à voir plus grand,
comme les gouvernements antérieurs ont su voir grand quand il
était question de l'électricité, de la baie James, etc.
J'espère, en particulier, après avoir entendu les interventions,
qu'il faut aller au-delà des contradictions apparentes et voir
l'essentiel du message qu'on vient porter ici ce soir. Même si ce n'est
pas parfait, avec les quelques moyens dont on dispose, je crois que les divers
partis ont ici tout l'équipement et le personnel requis pour aller
nettement plus loin qu'où nous pouvons aller. Il faut voir cela comme
des indications, comme des avenues à explorer. Je crois que cela devrait
être vrai pour tous les partis. En tout cas, du terrain, c'est comme cela
qu'on voit cela.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous
remercie beaucoup, messieurs et mesdames, membres du comité des mines du
CRD et là-dessus nous ajournons nos travaux à demain matin 10
heures.
(Fin de la séance à 22 h 13)