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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mercredi 5 avril 1978 - Vol. 20 N° 20

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 70 - Loi constituant la Société nationale de l'amiante


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 70

Loi constituant la Société

nationale de l'amiante

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Les membres de la commission pour la présente séance sont: M. Bérubé (Matane), M. Godin (Mercier), M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt (Saint-François) et M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplace M. Raynauld (Outremont). Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Paquette (Rosemont), M. Raynauld (Outremont) remplace M. Garneau (Jean-Talon), M. Landry (Fabre), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Léger (Lafontaine), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

La parole était au député de Marguerite-Bourgeoys.

Constitution de la société Motion de sous-amendement (suite)

M. Lalonde: M. le Président, nous étions en train de discuter, à l'ajournement, hier soir, la motion de sous-amendement du député de Richmond, afin d'ajouter au nom proposé par le député de Saint-Laurent, le mot "nationale", pour qu'on puisse appeler cette société d'amiante: Société nationale pour la transformation et la commercialisation des produits de l'amiante.

Au fond, on discute de l'opportunité d'utiliser le mot "nationale " dans le nom. Cela peut paraître un débat plutôt mince. Il reste qu'il a son utilité, puisqu'on peut quand même avoir l'occasion, comme députés, de faire notre devoir de législateurs. C'est aussi dans ces détails apparents que l'on retrouve certaines vérités importantes et que l'on doit, comme législateurs, faire preuve de toutes les qualités qui sont attendues de nous, y compris la précision.

On a employé le mot "nationale" dans plusieurs noms de sociétés dans tout le pays. On peut invoquer, je pense, un précédent d'un côté comme de l'autre. Qu'on pense au Canadien national, par exemple, on pourra dire: Voilà un précédent qui permet au gouvernement d'employer le mot "nationale" dans le nom de la société de l'amiante. On doit donc laisser les précédents un peu de côté, parce que je pense que, des erreurs passées, on ne peut pas quand même tirer la sagesse présente par la simple imitation. Je pense toutefois quand même qu'on doive conserver un qualificatif aussi précieux que "national" pour des occasions, pour des institutions ou pour des souvenirs précieux et qui sont chers à notre coeur. Au niveau des institutions, se trouve l'Assemblée nationale. Au niveau des souvenirs, ou des antiquités, on peut parler de l'Union Nationale. Conservons ces qualificatifs importants, qui décrivent réellement une possession de la nation pour des choses importantes et non pas simplement pour une entreprise qui va faire l'extraction et peut-être la transformation de l'amiante.

Je comprends que les symboles ont tous les droits, en politique. C'est un symbole, l'amiante, dans l'esprit de ce parti. C'est strictement un acte de spoliation que le gouvernement fait, actuellement, en proposant la société nationale. Le Parti québécois s'empare de l'idée "amiante" pour en faire un drapeau politique.

Je pense qu'un bon gouvernement doit s'imposer une rigueur beaucoup plus exigeante au niveau de la législation. Dans l'hypothèse où l'intention du gouvernement serait de prendre en charge toute l'industrie, tout le secteur de l'amiante, à ce moment, peut-être que la société nationale serait plus pertinente. Mais on se souviendra que, par l'application de la politique annoncée du gouvernement qui est actuellement l'acquisition de la société Asbestos, cette société du gouvernement ne deviendra, en fait, propriétaire que de moins de la moitié; on dit près du tiers en importance du secteur actuel de l'amiante. De sorte que l'appeler "nationale" serait trompeur; cela serait trompeur et il me semble que le gouvernement devrait s'abstenir de faire de tels gestes. Autrement, on pourra avoir des doutes quant à sa sincérité, quant à l'authenticité de son geste.

Il faudrait que les Québécois soient convaincus que cette société nationale soit réellement une société nationale. Autrement, ce geste aurait pour effet, comme plusieurs gestes du gouvernement jusqu'à maintenant, de l'isoler de plus en plus dans un coin où il se regarde le nombril en disant: Ce qu'on est gentil, ce qu'on est beau, un peu. On peut même faire des poèmes à ce sujet. Mais les Québécois, eux, pensent à autre chose. Ils pensent à autre chose; ils ont d'autres préoccupations beaucoup plus importantes.

C'est pourquoi, M. le Président, je pense que l'inclusion du mot "nationale", tout en étant fort, c'est-à-dire tout en se rapportant à des valeurs qui sont extrêmement importantes pour nous, serait trop prétentieux. En fait, ce serait une prétention, ce serait une superbe, ce serait un panache que le gouvernement mettrait dans le nom d'une société qui aurait moins de la moitié de l'importance des activités de l'amiante, qui serait limitée à des activités strictement reliées à l'amiante. Si c'étaient des activités pour tout le secteur minier, par exemple: on a SOQUEM. Si on l'avait nommée société nationale, qu'est-ce que cela aurait donné de plus à SOQUEM?

M. Bérubé: C'est une société québécoise.

M. Lalonde: Une société québécoise, cela donne le lieu, cela situe la société. Oui, cela n'est pas société ontarienne.

Une Voix: Ce qui contrôle.

M. Lalonde: Mais société nationale, on peut avoir une société nationale pour n'importe quel territoire. Cela fait appel non pas à un lieu; cela fait référence à une valeur nationale. Peut-être que le Parti québécois, qui n'a pas pu s'appeler l'Union Nationale ou le Parti national parce que l'Union Nationale existait, a une certaine nostalgie et à chaque occasion, il va aller piger le mot "nationale" et l'accoler à toutes ces créations. C'est peut-être pour cela.

M. Ouellette: Me permettriez-vous une question très sérieuse?

M. Lalonde: Oui, oui.

M. Ouellette: Vous connaissez la différence entre la définition du mot "nationale " en français et "national" en anglais? Pouvez-vous nous donner la différence, dans votre esprit, entre le sens de ces deux mots?

M. Lalonde: M. le Président, la question n'est pas de savoir ce que le mot "nationale" veut dire en anglais. Est-ce que le député veut légiférer en anglais?

M. Ouellette: Ce n'est pas cela. Mais on voudrait savoir si vous légiférez...

M. Lalonde: Cela me surprend, mais il me semble que le ministre au développement culturel devrait être ici pour rappeler le député à l'ordre.

M. Ouellette: ... en français sur des critères anglais.

M. Laionde: II s'agit simplement de savoir comment cela va s'appeler en français "société nationale ". Je ne veux pas faire de sémantique ici. Pour les gens, "société nationale" est une société nationale qui va avoir...

M. Ouellette: Vous parlez en français, mais vous pensez en anglais.

M. Lalonde: ... non seulement dans sa possession, mais aussi dans l'ampleur, dans son action, une importance telle que c'est nécessaire de dire que c'est "nationale".

M. Ouellette: Vous ne reconnaissez pas l'existence d'un peuple québécois, alors?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Mais c'est cela l'Assemblée nationale.

M. Ouellette: C'est quoi?

M. Lalonde: C'est l'Union Nationale qui l'a nommée, mais là, au moins, c'est limité à une institution tout à fait importante. Conservons cela pour des choses extrêmement importantes.

M. Grégoire: L'amiante, il n'y a rien de plus important que cela.

M. Lalonde: Le député de Frontenac qui vient... Le chat sort du sac, M. le Président.

M. Grégoire: II n'y a rien de plus important que cela.

M. Lalonde: II n'y a rien de plus important que l'amiante pour le député de Frontenac. Réellement, le député de Frontenac ne pense qu'à l'amiante. Je vous avoue que...

M. Grégoire: Vous savez pourquoi?

M. Lalonde: ... je ne peux pas le blâmer, mais...

M. Bérubé: Y a-t-il une seule substance pour laquelle nous contrôlions 65% du commerce mondial?

M. Lalonde: II faut dire que les électeurs du comté de Marguerite-Bourgeoys ne partagent pas les préoccupations du député de Frontenac. Je dois dire cela au départ.

M. Grégoire: Ni le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Nous croyons que l'amiante c'est important, comme toutes les richesses, comme toutes les valeurs qui nous appartiennent, mais de là à perdre la tête complètement et à en faire un symbole et un drapeau, il y a une limite. C'est là que vous avez commencé à faire des erreurs. Vous avez tenté d'aller chercher cette question, ce problème et d'en faire de la politique. Vous en avez fait de la politique depuis le début du Parti québécois. Vous en avez fait de la politique lorsque vous avez annoncé votre décision. Vous avez fait de la politique même en prenant votre décision, parce que cela a été une décision politique.

Pas besoin de l'expliquer, pas besoin de la justifier, c'est une décision politique. Donc, c'est sacré, les dieux ont parlé. C'est probablement par l'effet d'une prescience quelconque, M. le Président, que les dieux ont parlé. Ils ont dit que c'était bon, qu'il fallait faire cela. Il ne faut pas se poser de questions.

M. Godin: A chacun son projet du siècle, M. le Président.

M. Lalonde: Voilà, encore un autre chat qui sort du sac. On veut faire le projet... On est jaloux du projet du siècle.

M. Grégoire: ... le député de Richmond, en parlant des chats.

M. Lalonde: On est jaloux de la baie James. C'est vrai qu'il a fallu la réhabiliter. Cela a dû être un peu douleureux de réhabiliter la baie James. M. le Président, j'ai été interrompu...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'accord, mais ne cédez point à la provocation.

M. Lalonde: C'est cela le projet du siècle, M. le Président. Le projet du siècle du Parti québécois, c'est l'amiante. J'aurais aimé que le Parti québécois, le gouvernement se prépare davantage, ait appuyé son projet du siècle sur des documents beaucoup plus solides. Le député de Mercier n'était pas ici hier, mais on a vu que cela faisait pitié, les documents qu'on nous a présentés. J'espère qu'il va lire le document du groupe de travail. Est-ce que c'est fait? Je l'invite à le lire. S'il y trouve des choses nouvelles, M. le Président, j'espère qu'il va nous les décrire et nous en faire part ici, à la commission parlementaire, parce que j'aurais aimé que ce projet du siècle du Parti québécois soit mieux étayé.

Il reste, M. le Président, que, quant à l'appellation nationale, c'est l'aboutissement de tout ce processus politique du Parti québécois. On a pris l'amiante, on l'a mis dans le programme du Parti québécois. Ce n'était pas suffisant un organisme de mise en marché. Voyons donc! Il n'y a personne qui va accrocher avec cela. On ne peut pas faire élire beaucoup de monde là-dessus. Alors, on va faire une société nationale pour la décision politique. Alors, M. le Président, dans ces circonstances, il n'y a plus grand-chose à dire, il n'y a qu'à les regarder aller et souhaiter qu'ils se réveillent avant de s'isoler complètement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Mercier, sur la motion de sous-amendement.

M. Godin: II n'est pas étonnant, M. le Président, de voir nos amis d'en face mettre en doute le fait que ce que le gouvernement du Québec fait, quand ce n'est pas le leur, n'est pas national et n'a pas de portée nationale. Il n'est pas étonnant non plus de voir que l'Opposition officielle s'oppose à la présence du mot national dans le titre de cette entreprise qui est, on l'a dit, on le répète, un rapatriement des richesses naturelles du Québec entre les mains de la nation québécoise.

La quantité, M. le Président, ne fait rien à l'affaire, c'est l'intention qui compte et la SOQUEM, qui a été ainsi baptisée par nos amis d'en face à l'époque où ils étaient au pouvoir, s'appelle la Société québécoise minière. Pour reprendre l'analogie de mon savant ami, le député de Marguerite-Bourgeoys, est-ce que le fait que cette société ne contrôle pas toutes les mines du Québec a empêché ce gouvernement de l'appeler la Société québécoise? Pas du tout! Ils se sont dit: Peut-être qu'on met un pied dans la porte et ce pied-là portera le nom du gouvernement ou de la nation qui prend cette décision, cela s'appelle Société québécoise d'exploration minière.

Qu'ils s'opposent aujourd'hui à cela, cela prouve tout simplement leur mauvaise foi, ça prouve tout simplement qu'ils veulent, pour des raisons obscures et bizarres, retarder l'adoption de cette loi. Je pense que l'Opposition a le droit et même le devoir de s'opposer à ce que le gouver- nement fait à l'occasion, mais nous sommes en face d'une opposition systématique, d'une opposition qui, à mon avis, a le défaut d'être antihistorique, a le défaut de se situer en dehors de ce que — c'est fort, hein?...

M. Lalonde: Si vous faites votre historique, il faudrait s'aplatir.

M. Godin: ... en dehors de ce que le peuple du Québec veut faire depuis un méchant bout de temps, un sacré bout de temps. Ce n'est pas nous qui avons inventé cela, qu'il fallait exercer un contrôle sur les richesses naturelles du Québec, ce n'est pas nous qui avons inventé ça, on n'existait pas comme parti il y a dix ans. C'est une motion qui est récurrente dans la pensée de tout gouvernement du Québec depuis qu'il y a un gouvernement à Québec, depuis 1791.

Quand nous réalisons enfin ce que les deux partis d'en face ont mis dans leurs déclarations, dans leurs discours depuis un demi-siècle et même plus, quand nous le faisons enfin, on tente d'amener le gouvernement dans le marais des pertes de temps, du "filibuster" déguisé, appelons ça comme on veut, sauf que je me demande qui ils représentent ici, ces deux partis d'en face, qui font perdre le temps de la commission parlementaire. Qui représentent-ils ici? Ils représentent effectivement 60% de l'électorat. Or, on sait que cet élec-torat, d'après les renseignements déposés ici même par certains maires, membres d'un des deux partis, est venu nous le dire, on le sait, parce qu'il nous l'a dit, affirmant que, dans la région en question, les gens étaient plutôt d'accord avec ça.

Les sondages préparés par l'Association des mines d'amiante ont été démentis par les dépositions faites ici même à la commission par des représentants élus de ces populations...

M. Grégoire: Et même des libéraux.

M. Godin: ... et même des libéraux. Ces sondages sont faits par les sociétés minières de l'amiante, il n'est pas étonnant qu'ils arrivent aux résultats qui nous ont été dévoilés ici, et dans les journaux plus précisément.

Ce qui me frappe de la part de ce gouvernement, dans le temps où il était gouvernement, c'est l'importance qu'il attache aux sondages. Comme si un gouvernement devait gouverner par sondages, comme si un gouvernement... M. le député d'en face, en faire, c'est une chose, mais gouverner par sondages, c'est autre chose.

M. Lalonde: Vous en faites paraître tous les mois.

M. Godin: En faire, c'est une chose, mais baser ses décisions sur des sondages, c'est autre chose.

M. Lalonde: Bien, voyons donc!

M. Forget: Nous n'en avons jamais fait sur les mots.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: Jamais.

M. Lalonde: Non, mais depuis que vous l'avez emporté, vous vous êtes mis à plat ventre, par exemple.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Paquette: Jamais de la vie...

M. Lalonde: Vous vous êtes dégonflés depuis deux mois, à cause des sondages.

M. Paquette: Attendez à la fin de l'année, vous allez voir.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît!

M. Grégoire: On voit que l'opinion publique est devenue bonne sur l'assurance automobile.

Une Voix: De mieux en mieux.

M. Grégoire: De mieux en mieux, oui.

M. Godin: M. le Président, malgré, encore une fois, l'opposition systématique de nos amis d'en face à l'assurance automobile et à la Société nationale de l'amiante, malgré cela, nous allons le faire quand même. Même si les sondages, temporairement, étaient unanimement contre la Société nationale de l'amiante, on le ferait quand même, parce qu'on est convaincu que c'est une bonne décision, M. le Président. C'est une bonne décision, simplement parce qu'on ne peut plus laisser les multinationales...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la motion, M. le député de Mercier.

M. Godin: Non, mais j'y reviens.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Revenez.

M. Godin: On a le choix entre les sociétés multinationales de l'amiante ou la Société nationale de l'amiante. Est-ce qu'on revient là-dessus? Est-ce que je reviens sur le sujet? A choisir entre les sociétés multinationales de l'amiante et la Société nationale de l'amiante, notre choix est clair, c'est la Société nationale de l'amiante. On n'a pas honte du mot "national" on n'a pas honte de ce mot. C'est un mot qui a un sens pour nous, le mot "national". Le mot "national" a un sens pour nous, parce que la nation québécoise a un sens pour nous, M. le Président. (10 h 30)

La nation québécoise a un sens pour nous. On peut se poser la question: Est-ce qu'elle a un sens pour nos amis d'en face, la nation québécoise?

Est-ce qu'elle a un sens? Si elle avait eu un sens à l'époque où ils étaient au pouvoir, ils auraient adopté de telles législations. Tout ce qu'ils ont fait, ce sont des études, des travaux; d'ailleurs, ils appelaient cela la nationalisation de l'amiante, comme par hasard.

Mais pour des raisons secrètes, bizarres, curieuses, on ne saura jamais pourquoi précisément, à moins qu'un jour ou l'autre, ces deux messieurs d'en face écrivent leurs mémoires, puisque c'est le mode des politiciens à la veille de leur retraite, peut-être qu'à ce moment-là, nous saurons la raison pour laquelle ils n'ont pas mis la machine en marche, la raison pour laquelle ils ont fait faire des études et qu'ils n'ont pas franchi le pas vers la nationalisation d'une partie des richesses naturelles du Québec.

Je suis sûr que ce serait extrêmement intéressant de savoir cela. Peut-être qu'il y aura une série de sept émissions sur Lalonde-Forget, comme il y en a eu sur Duplessis, et peut-être qu'on verra les raisons pour lesquelles ils n'ont pas osé faire le pas...

M. Forget: Le poète politicien.

M. Godin: ... qui consiste à nationaliser une partie des ressources naturelles du Québec, en vue de rapatrier au Québec les emplois qui vont avec la transformation et la commercialisation de nos richesses naturelles.

Pour ces raisons, je dis que l'Opposition fait un "filibuster" antihistorique — et je pèse mes mots — et antinational — et je pèse mes mots — elle fait, au fond, un "filibuster" multinational. C'est la direction qu'elle a prise. On l'a vu dans le cas de ITT, on l'a vu dans d'autres cas dans le passé. C'est la direction qu'elle a prise.

M. Lalonde: General Motors.

M. Godin: Laissons-la aller dans cette direction.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: Est-ce que je peux rappeler au député de Marguerite-Bourgeoys que le principal développement de General Motors au Québec a été fait sous M. Lesage, un des plus grands premiers ministres du Québec, un membre de votre parti...

M. Lalonde: On n'a pas honte, mais on ne parle pas d'un coin de la bouche contre les multinationales pour ensuite se faire élire avec elles.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: C'est de l'hypocrisie pure et simple.

M. Godin: Par conséquent, la raison pour laquelle on le fait, c'est que cela crée de l'emploi, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. La seule raison, c'est que cela crée de l'emploi.

M. Lalonde: Vous allez en créer en achetant cela.

M. Godin: Ce qui nous importe, avec le projet de nationalisation, c'est la création d'emplois.

M. Lalonde: Oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Si cela continue, je vais faire un sondage sur la nécessité de la présidence.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

M. Godin: M. le Président, si les multinationales...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys sur une question de règlement.

M. Lalonde: Je pense que le règlement me permet de poser une question au député de Mercier. Est-ce que le député de Mercier me permet une question?

M. Godin: Posez-la et je verrai.

M. Lalonde: Le député de Mercier parle d'emplois qui seraient créés par la nationalisation. Combien d'emplois vont être créés par...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je refuse votre question et je refuse la réponse également. C'est en dehors du sous-amendement.

M. Lalonde: Mais c'est lui qui était rendu là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II était justement en dehors du sous-amendement lui aussi.

M. Lalonde: J'avais donc une bonne question de règlement à soulever.

M. Godin: M. le Président, la raison pour laquelle on nationalise une partie de cette richesse naturelle, c'est uniquement parce que les multinationales n'ont pas fait ce que la nationale va faire, créer de l'emploi dans le secondaire, ici.

Si cela avait été fait depuis cinquante ans, sous les pressions successives de Taschereau, Duplessis et autres, si cela avait été fait, la création d'emplois par les multinationales, le gouvernement du Québec, aujourd'hui, ne serait pas obligé d'en arriver à une société nationale.

C'est la raison pour laquelle, dans le domaine des autobus, puisque cela crée des emplois, on n'y touche pas. Dans le domaine des bagnoles, cela crée de l'emploi, sous M. Lesage, on n'y touche pas. On n'a pas créé de société nationale de l'auto puisqu'il y avait de l'emploi en partie dans ce secteur. On crée du national parce que les multinationales ne donnent pas au Québec leurs jus- tes retombées d'emplois dans le secondaire. C'est la raison pour laquelle on fait cela. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que la motion de sous-amendement sera adoptée? M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Je peux céder la parole au ministre. A tout seigneur tout honneur, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous avais reconnu en premier, je vous cède donc la parole.

M. Lalonde: Tirez les premiers, MM. les Anglais.

M. Forget: Sur le sous-amendement, je ne fais pas de procès, bien sûr, à notre collègue de Richmond de vouloir retrouver un peu partout le mot que l'on retrouve dans le nom de son parti. C'est une ambition normale et fort légitime. Donc, je peux comprendre ce qui le motive et je veux l'assurer que, si nous nous opposons à son amendement, ce n'est certainement pas par mauvais esprit ou par mauvaise humeur à l'endroit de la formation politique qu'il représente. On s'étonne cependant davantage — mais l'étonnement ne dure pas longtemps — de voir le gouvernement emprunter les mêmes artifices de langage pour se fabriquer une image que l'Union Nationale a utilisés à une autre époque. C'est un nouveau style probablement du gouvernement qui le dispense de faire les choses qu'il veut faire en donnant le change quant à la rhétorique, aux mots, au vocabulaire.

Si on essaie de se poser la question, à la suite...

M. Godin: Ce sont eux qui font de la rhétorique en changeant les pinottes sur les mots. On parle de $250 millions, ce n'est pas de la rhétorique, ce sont des piastres qu'on veut débloquer. Ils ne veulent pas.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Lalonde: On va parler de vos $250 millions tout à l'heure.

M. Godin: Parlons-en donc tout de suite. C'est cela qui est important. Vous dites vous-même que ce ne sont pas les mots qui sont importants.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Godin: Ce sont eux qui nous font perdre notre temps avec les mots.

M. Lalonde: Que fait-il ici, lui?

Une Voix: Ils vous "achale", n'est-ce pas?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: II n'aime pas la poésie.

M. Lalonde: Oui, je vais vous en lire, si vous voulez.

Une Voix: Déposez donc...

M. Lalonde: Je vais vous en lire de la poésie, si vous voulez.

M. Godin: J'exige le dépôt ici même de ce texte publié sans copyright par le Parti libéral pendant une campagne électorale, à 36 000 exemplaires, de porte en porte dans un comté anciennement détenu par le premier ministre Bourassa.

Une Voix: C'est pour cela que vous avez été élu.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous ne sommes pas à la commission des affaires culturelles, nous sommes aux richesses naturelles.

M. Godin: Sans copyright, 36 000 exemplaires. Je suis devenu le poète le plus lu au Québec.

M. Lalonde: Ce qui est étonnant, c'est qu'il a été lu quand même!

M. Godin: Justement, vous aviez mal compris ce qui se passait dans Mercier.

M. Lalonde: II fallait être bien mauvais.

M. Laplante: Imaginez-vous si c'était tombé dans Marguerite-Bourgeoys.

M. Godin: Je suis devenu un best-seller grâce à eux, M. le Président.

M. Forget: Je crois qu'il s'en réjouit depuis ce temps, M. le Président. On est bien content d'avoir contribué à sa fortune, au moins, littéraire.

M. le Président, pour faire suite...

Des Voix: ...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: ... aux propos du député de Mercier, où il invoque des raisons, peut-être les seules qui ont été invoquées de l'autre côté pour justifier cette appellation de "nationale", on doit se poser la question: Qu'est-ce exactement qui sera national et qui ne l'est pas actuellement dans l'exploitation de cette société? Evidemment, le plus grand projet de la société de l'amiante sera d'acheter une mine existante; c'est certainement dans cette direction que le plus clair de ses ressources va passer.

Si on regarde la société Asbestos, à l'heure actuelle, de par les témoignages qui nous ont été faits en commission parlementaire, on se rend compte d'une chose, c'est que les travailleurs de cette société, y compris les cadres et l'expertise, si on se fie au jugement qui a été porté par les porte-parole du CRDE, lorsqu'ils sont venus ici, ils ont affirmé, sans ambiguïté, que c'était dans une immense majorité des cadres et une expertise québécoise. Ce sont d'ailleurs ces cadres et cette expertise que le gouvernement prétend vouloir acquérir justement pour s'en servir de façon plus large. Donc, le gouvernement lui-même admet que, au niveau des travailleurs, il s'agit déjà d'une société québécoise. Au niveau de son incorporation et de son siège social, c'est également le cas. Au niveau de son implantation, c'est assez évident qu'il s'agit d'une société québécoise puisque le minerai se trouve ici. Le seul aspect sur lequel on pourrait discuter, c'est de savoir s'il s'agit, dans son capital, d'une société québécoise. Il est évident que l'actionnaire majoritaire étant à l'étranger, que sa capitalisation est en partie étrangère. Est-ce que le projet gouvernemental va changer quoi que ce soit là-dessus? Absolument pas, puisque le gouvernement, pour financer l'acquisition de cette société, va emprunter l'argent et tout probablement, comme il le fait de façon assez courante pour tous les appels de capitaux importants, il va aller trouver ce capital à l'étranger; donc ça continuera à être du capital étranger qui financera cette société. Bien sûr, ce sera du capital obligataire, ce seront des obligations plutôt que du capital action, mais pratiquement...

M. Paquette: Des mots qui se ressemblent, ça n'a pas de maudit bon sens!

M. Forget: Oui, il y a une nuance, mais la nuance... Non, pas du tout parce que derrière les mots il y a cette réalité que, de toute manière, le capital, vous allez le trouver à l'étranger...

Des Voix: ...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: M. le Président, est-ce qu'ils pourraient retenir leurs ailes? Ça les fatigue énormément de voir que, derrière 'le mot national, ils vont tout simplement changer le capital par actions en capital obligataire, de provenance étrangère dans les deux cas. La conséquence pratique de cela c'est que, sur le capital obligataire, vous devez faire des paiements d'intérêt, que vous soyez en position financière de le faire ou pas. Par exemple, durant les dix dernières années, il s'est trouvé à peu près la moitié des années pendant lesquelles, à cause des investissements importants qui étaient requis au Québec dans la région traditionnelle de l'amiante, soit Asbestos Hill qui fait, aux dernières nouvelles, encore partie du territoire du Québec, il a fallu cesser le paiement de tout dividende. Dans la future Société nationale de l'amiante, l'avantage concret qu'on retirera de cette appellation nouvelle et du fait qu'on n'aura plus un capital-actions, mais un capital obligataire détenu par les étrangers, c'est qu'en tout état de cause et quels que soient nos besoins locaux de financement, il

faudra trouver l'argent pour payer les intérêts sur l'emprunt. Il faudra aussi assumer les risques de changes étrangers, ce qui n'est pas le cas lorsque vous avez du capital-actions par rapport à du capital obligataire. Donc, pour changer des mots, pour appeler "nationale", on ne changera pas, effectivement... Ce n'est pas en changeant des mots qu'on peut changer la réalité que le capital va continuer de venir de l'étranger...

M. Laplante: Avec la piastre à Trudeau.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: Justement, s'il y a une diminution de valeur, en ayant du capital obligatoire, vous accroissez vos dettes, alors que si vous avez du capital-actions, vous ne les accroissez pas. Tout ceci pour démontrer qu'en voulant changer des mots, on ne change pas les réalités de fonds et on ne les change pas non plus sur le plan des marchés. Les marchés, on va continuer, et cela, tout le monde l'admet, à devoir les trouver à l'étranger. Alors, ni sur le plan du personnel, ni sur le plan de l'incorporation, ni sur le plan de son implantation, ni sur le plan des sources de financement, ni sur le plan des marchés, la nationalisation ne va changer quoi que ce soit. Dans la mesure où elle change quelque chose...

M. Godin: La transformation.

M. Forget: C'est une autre entreprise, la transformation, parce que j'imagine qu'on va créer plusieurs filiales: une pour l'exploitation des mines, qui va continuer d'être une société minière...

M. Godin: Cela fait partie du projet, M. l'économiste.

M. Forget: ... et une autre... Pourquoi ne fait-on pas seulement cela? On ne nous l'a jamais expliqué. Toujours est-il que sur tous les plans, on va se retrouver devant exactement la même situation, mais l'essentiel de l'opération — et c'est cette supercherie que l'amendement que nous avons présenté veut dénoncer — ce n'est pas de changer la réalité, c'est de changer les mots qu'on met sur les choses. C'est d'appeler "nationale " une entreprise qui existe déjà ici, qui a déjà du personnel, y compris le personnel de cadre, y compris l'expertise qui est québécoise, qui a son siège social sur place, qui rayonne à partir du Québec et qui continuera de trouver à l'étranger les marchés dont elle a besoin pour fonctionner à son niveau actuel, et à plus forte raison, pour fonctionner à un niveau encore plus considérable. Donc, c'est un changement dans les mots. C'est cette espèce de désir, à défaut de changer les réalités, d'essayer désespérément de donner le change sur le plan des mots, de l'image, que nous voulons dénoncer par cet amendement.

D'ailleurs, le gouvernement en faisait lui-même l'aveu lorsqu'il y a quelques mois, il a créé la Régie de l'Assurance automobile. Qu'on nous explique donc pourquoi il n'a pas appelé cela la Régie nationale de l'assurance automobile? C'est parce que cette fois, il savait qu'il y avait quelque chose de nouveau, qu'il y avait quelque chose de substantiel dans ce projet de loi, avec lequel on peut être d'accord ou ne pas être d'accord, mais il y avait quelque chose là-dedans. Il y avait un organisme nouveau qui faisait les choses de façon très différente du passé.

Dans ce cas-ci, tout ce qu'on a, c'est un nom à suggérer. Alors, il faut bien mettre le mot "nationale", autrement, les gens ne se rendraient pas compte que cela a changé. On met "nationale", et avec cela, on va placarder. On a créé une Société nationale...

M. Godin: ... pavoiser...

M. Forget: ... qui n'est qu'un organisme de papier.

M. Godin: On va pavoiser.

M. Forget: Les gens qui sont les cadres et les employés de la Société nationale de l'amiante se retrouvent déjà au ministère des Richesses naturelles. On va leur mettre un titre de papier. Ils vont peut-être occuper les mêmes bureaux. Finalement...

M. Godin: Raison d'économie.

M. Forget: ... on va aussi avoir un certain nombre de morceaux de papier qui représentent le capital-actions de cette société qu'on va acheter. On va déposer cela dans une banque. En échange de cela, on va donner à d'autres des obligations du Québec, sur lesquelles on va devoir payer des taux d'intérêt à 10% par année. Seulement le changement de papier, le changement des titres, on va faire imprimer de la papeterie avec ce titre et rien d'autre ne va avoir changé, seulement les mots; les morceaux de papier ne seront plus dans les mêmes banques. C'est tout ce qui va se passer, parce que tout ce qu'il y a de substantiel là-dedans suppose des investissements nouveaux dans des industries de transformation. Pour cela, on est vraiment très loin. On n'est même pas à pied d'oeuvre. On n'est même pas à une étape d'avant-réalisation. On est à l'étape de la spéculation. Il s'agit de voir les documents qui nous ont été distribués le 23 mars pour se rendre compte de cela. On est à l'étape de la spéculation la plus libre, la plus imagée...

M. Godin: ... vous autres, les libéraux, c'est nouveau, vous êtes contre cela. (10 h 45)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Forget: La spéculation, la spéculation. On est toujours très très soupçonneux.

M. Godin: Les libéraux contre la spéculation, M. le Président, c'est nouveau.

M. Lalonde: Cela n'est pas conforme à votre image.

M. Forget: On est toujours très soupçonneux face à la spéculation, M. le Président.

M. Godin: C'est nouveau.

Une Voix: ... conforme à la réalité.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Lalonde: Vous manipulez trop les images.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys et M. le député de Mercier, respectez le droit de parole du député de Saint-Laurent.

M. Forget: A plus forte raison, sommes-nous opposés à la notion de "nationale" puisque le gouvernement, non seulement ne change-t-il rien à la réalité, sauf les mots, sauf les titres, sauf les papiers, mais n'a même pas le courage d'aller jusqu'au bout de cette tentative de nationalisation de la société de l'amiante? Le fameux rapport du CRDE que le ministre-substitut ou l'adjoint parlementaire du ministre a si abondamment cité — il ne l'a pas cité, il a cité seulement la liste des auteurs...

M. Bérubé: ... d'être ministre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Forget: ... a évoqué auprès du gouvernement l'argument suivant: si le gouvernement voulait faire quelque chose du côté des mines, il devait non pas en nationaliser une, mais en nationaliser un nombre beaucoup plus grand, de façon à avoir une majorité, un contrôle majoritaire, non pas sur les actions d'une compagnie, mais sur la production de la fibre au total.

M. Godin: Pour ce qui est de nous autres, c'est le bout.

M. Forget: C'est un nationalisme, M. le Président, à 32% que le Parti québécois nous offre.

M. Godin: On ne va pas assez loin?

M. Forget: C'est un nationalisme à rabais, dans la mesure où il fait quelque chose.

M. Godin: M. le Président, est-ce que je peux poser une question au député?

M. Forget: Non, vous ne pouvez pas poser de questions.

M. Godin: Quel malheur!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Grégoire: ... L'Opposition ne permet jamais les questions.

M. Forget: Dans la mesure où il fait quelque chose...

M. Lalonde: C'est nous qui menons. M. Grégoire: ...

M. Forget: ... il fait quelque chose pour à peine le tiers de l'activité.

M. Godin: C'est la seule place d'où vous venez.

M. Grégoire: Vous ne mènerez pas ici; ce n'est pas vrai. Il n'y a personne qui va mener.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Forget: Alors, M. le Président, même en adoptant le point de vue qui est de donner un titre nouveau, de donner des mots nouveaux, des joujoux nouveaux à la fraction de la clientèle péquiste que les slogans nationalistes font vibrer au-dessus de toute autre chose, même en adoptant cette façon de voir, il reste que le gouvernement a été très timide dans son action, qu'il a été...

M. Godin: Vous trouvez qu'on ne va pas assez loin; dites-le donc, si vous trouvez cela.

M. Forget: Non, je trouve que vous allez dans la mauvaise direction.

M. Godin: Dites-le donc. Voulez-vous qu'on nationalise tout? Dites-le publiquement.

M. Forget: Vous allez dans la mauvaise direction.

M. Lalonde: Comme d'habitude.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Forget: Mais quant à y aller, vous auriez pu y aller jusqu'au bout.

Une Voix: Oui, comme l'assurance automobile.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Forget: Mais vous n'êtes pas capable.

M. Godin: Mais vous avez été là pendant six ans.

M. Forget: Non, on ne serait pas allé dans cette direction...

M. Godin: Vous avez été là pendant six ans.

M. Forget: ... pour les raisons qu'on a exposées abondamment. Mais puisque le gouvernement a fait son lit, s'est dirigé de ce côté, s'est dirigé du côté du symbolisme nationaliste, pourquoi ne pas avoir acheté un plein symbole, un symbole à 100% plutôt qu'un symbole à 32%? Parce que c'est cela qu'il achète essentiellement et quant à vouloir seulement changer les papiers de place comme il se destine à le faire, modifier le capital-actions américain par du capital obligataire, américain lui aussi, modifier l'obligation de payer des dividendes quand on a l'argent pour les payer par une obligation constante de toujours payer des intérêts et d'assumer le taux de change — dans les circonstances actuelles, on sait que cela peut coûter... C'est tout ce qu'on a à offrir à la population: des symboles et des changements de papier. On pourrait au moins donner à la population des symboles à 100% et non pas des symboles à 32%.

C'est la raison pour laquelle nous avons présenté cet amendement et pour laquelle nous ne pouvons pas souscrire à la motion de sous-amendement de l'Union Nationale dont on comprend, par ailleurs, les motifs qui sont fort normaux dans les circonstances.

M. Godin: M. le Président, j'aimerais souligner le plaisir que j'ai à voir des "assis " nous reprocher de ne pas courir assez fort. Cela fait 50 ans qu'ils sont assis...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: ... et ils nous reprochent de ne pas courir assez fort. C'est fort.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier, il vous reste quatre minutes pour intervenir plus tard.

M. Forget: ... par le gouvernement précédent, vous n'auriez rien à dire aujourd'hui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, M. le...

M. Godin: ... là-dessus.

M. Forget: ... à moitié préparé, à moitié préparé.

M. Grégoire: Vous admettrez que...

M. Godin: Qu'avez-vous poursuivi... le chat sort du sac.

M. Grégoire: Le chat sort du sac.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre.

M. Lalonde: Vous avez quand même pris la même décision.

M. Grégoire: Le chat sort du sac.

M. Lalonde: Ce n'est pas important, les dossiers, pour vous autres.

M. Forget: Ils étaient seulement à moitié préparés. Vous êtes limités à cette moitié, d'ailleurs.

M. Grégoire: Vous aviez déjà commencé à le préparer?

M. Lalonde: Oui, certain.

M. Forget: On n'a jamais nié cela.

M. Grégoire: On va vous donner le crédit sur cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, hier, le député de Marguerite-Bourgeoys nous a dit qu'il se sentait un peu mal à l'aise parce qu'il se sentait en pleine hérésie péquiste. On a plutôt l'impression que l'Opposition officielle est un peu exorcisée, qu'elle se débat un peu comme un diable dans l'eau bénite. Chaque fois qu'on emploie le mot "nationale", ces gens deviennent mal. On a vu le député de Saint-Laurent hésiter même à dire le mot "nationale ".

M. Forget: J'attendais la fin des interruptions. C'est autre chose.

M. Paquette: C'est un mot qu'on craint beaucoup, d'employer.

Une Voix: Cela ne passe pas.

M. Paquette: Je trouve cela étonnant parce que...

M. Lalonde: ... cela vous appartient.

NI. Paquette: ... il y a eu. Non, justement cela ne nous appartient aucunement.

M. Lalonde: Excusez, on n'en parlera plus, si vous voulez.

M. Paquette: Aucunement, aucunement; cela ne nous appartient pas.

M. Lalonde: Excusez-nous, excusez-nous.

M. Paquette: La meilleure preuve, M. le Président...

M. Lalonde: On n'en parlera plus. Voyons, écoutez! Toutes nos excuses.

M. Paquette: La meilleure preuve, M. le Président, c'est que le mot "national"... C'est pour cette raison que le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas dans une hérésie péquiste, le mot "national" est beaucoup plus large que le Parti québécois. Il y a eu énormément de partis dans le

passé qui l'ont utilisé. Il y en a un à cette table, il y en a un autre qui pourrait être là, le Parti national populaire et il y a même eu, à un moment donné, l'Action libérale nationale, ce qui prouve que libéral et national n'ont pas toujours été incompatibles.

M. Lalonde: ...

M. Forget: II était très clairvoyant.

M. Paquette: Ils étaient un peu avant leur temps. Quant à vous, vous êtes un peu en arrière, vous êtes un peu en retard. Cela n'a pas toujours été incompatibles. Il est surprenant de voir deux députés de l'Opposition qui appuient un candidat à la chefferie qui dit: On est une nation, il faudrait que cette nation ait un statut d'égalité au Canada, de les voir se débattre ainsi, comme des diables dans l'eau bénite, dès qu'on mentionne le mot "national". C'est vrai qu'ils ont deux...

M. Godin: ils ont deux... Il y en a un qui dit le contraire. Il y a deux "goalers" dans les buts.

M. Paquette: C'est cela.

M. Forget: Vous connaissez cela.

M. Paquette: Par contre, M. le Président, c'est drôle comme ces gens-là sont prêts à faire le tour de tous les rallyes nationaux, à participer aux mouvements pour l'unité nationale. Là, il faut se demander à quelle nation ils appartiennent et ce qu'on entend par nation exactement.

M. Lalonde: C'est la ligne nationale.

M. Paquette: Je vais leur lire la définition du petit Larousse au mot "national". Il y a une double définition et c'est pourquoi nos amis libéraux sont peut-être dans l'ambiguïté. Ils sont mêlés; ils vont d'une définition à l'autre et ils ne savent pas trop. Ils disent: Votre mot "national" n'est pas seulement à vous, c'est à nous aussi. Par contre, on est pour l'unité nationale. Je ne voudrais pas attaquer le député de Richmond, mais c'est quasiment comme son chef qui dit qu'il est nationaliste québécois canadien.

M. Lalonde: ...

Une Voix: Montréalais.

M. Godin: Vous pouvez parler, vous autres en face avec vos deux candidats. Contradiction mur à mur. L'un est pour le bill 63, l'autre pour le bill 101. Vous avez choisi le bilI 101.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Paquette: II y a une double définition que donne le petit Larousse au mot "nation ". La première acceptation du mot: "Communauté humaine...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Ouellette: Cela exclut les libéraux. M. Paquette: Non, cela les inclut. M. Lalonde: C'est cela, on est des...

M. Forget: On est au courant de votre philosophie.

M. Lalonde: On est déjà des vendus, des bâtards. On est tout cela.

M. Paquette: On dit simplement que vous êtes mêlés.

M. Lalonde: Sans pays.

M. Paquette: Alors, le premier sens du terme... C'est peut-être celui-là qui vous fatigue. Cela vous énerve. "Une communauté humaine, le plus souvent installée sur un même territoire, et qui du fait d'une certaine unité historique, linguistique, religieuse ou même économique, est animée d'un vouloir-vivre commun".

Alors, vous allez reconnaître, avec M. Ryan — j'espère que vous n'êtes pas en désaccord avec votre candidat à la "chefferie" — que les Québécois forment une nation dans ce sens-là, au sens...

M. Lalonde: C'est pourquoi on veut que vous respectiez cette nation pour ne pas la mettre sous n'importe quelle société qui va faire simplement extraire de l'amiante.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Arrêtez de rire de la nation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Je serais porté à vous dire, ce matin, de... Je remarque le député de Richmond qui depuis 40 minutes est calme, n'a pas encore interrompu un collègue. C'est peut-être parce qu'on parle du mot national, je ne sais pas, mais... Non, la présidence est neutre De toute façon, je remarque qu'il est très calme, très patient, qu'il attend son tour. J'aimerais que certains députés...

Une Voix: C'est un nouveau style.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: M. le Président, c'est en pensant à ce premier sens du mot "nation " que donne le petit Larousse qu'il y a eu, à un moment donné, un parti qui s'appelait l'Action libérale nationale et que maintenant le candidat à la "chefferie " qu'appuient nos deux collègues de l'Opposition, parle de la nation québécoise. Nous sommes une nation et c'est évident. Il n'y a personne qui va contester

cela. Il y a un autre sens que donne le petit Larousse. A d'autres moments, quand ils prennent un autre chapeau... Oui, c'est encore dans le premier sens du terme.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Bérubé: Je m'étonne que... provincial de l'amiante.

M. Paquette: Lorsque nos amis d'en face prennent leur autre chapeau et qu'ils se mettent à se promener pour parler de l'unité nationale, from coast to coast, ils pensent au deuxième sens. Alors, ils jouent sur les deux sens du mot, puis ils sont surpris qu'on les accuse d'être ambigus et de ne pas savoir de quoi ils parlent.

Le deuxième sens du mot est: "Personne juridique formée par l'ensemble des individus régis par une même Constitution, distincte de ceux-ci et titulaire de la souveraineté".

Alors, ce n'est manifestement pas dans ce sens-là. Là, je vous comprendrais de dire qu'on veut faire l'indépendance avant la lettre, parce que c'est dans ce deuxième sens qu'on peut parler d'unité nationale au sens "canadien" du terme, celle qui vous tient le plus à coeur, messieurs.

Or, devant ces deux sens, les politicologues ont regardé et se sont entendus sur l'un des deux sens. Je vous donne une citation de ce bouquin: "L'accession à la souveraineté et le cas du Québec". On y dit ceci: "Bien qu'on soit aujourd'hui d'accord en doctrine pour employer exclusivement le terme nation dans son sens originaire, c'est-à-dire le premier sens, le sens sociologique du terme — et dans ce sens vous allez admettre avec M. Ryan qu'on est une nation — "on relève encore quelques applications insolites...

M. Godin: M. le député, est-ce que, quand M. Ryan a dit cela, c'était ou non final et irrévocable?

M. Paquette: II y a peut-être cela aussi. C'est peut-être une explication. Je me demandais depuis tantôt comment il se faisait que nous étions les seuls à avoir l'acceptation du mot nation, que c'était une hérésie péquiste que d'attaquer le sens national et qu'en même temps on appuie un candidat qui se déclare pour la nation. Peut-être que l'explication est là, M. le Président.

Une Voix: II ne peut pas parler ex cathedra, à ce moment là.

M. Godin: II va y avoir de la chicane là, ça va être effrayant.

M. Grégoire: Ils vont se battre.

M. Lalonde: M. le Président, voulez-vous demander aux députés ministériels de ne pas interrompre le député de Rosemont, s'il vous plaît? Pour une fois que quelqu'un dit quelque chose qui a du bon sens de ce côté.

M. Paquette: Alors, l'auteur parle de quelques applications insolites. "Donc, il faut comprendre que l'utilisation d'unité nationale: "Canada from coast to coast", est une application insolite du sens dérivé dans le droit positif, vraisemblablement sous l'influence de la pensée anglo-saxonne."

Je pense que nos amis d'en face sont trop influencés par la pensée anglo-saxonne, c'est cela qui les fait contester le sens du mot national. Or, M. le Président, je pense que, s'il y a quatre ou cinq partis qui, jusqu'à maintenant, ont utilisé le mot national dans leur appellation, si l'un des candidats à la chefferie du Parti libéral parle de la nation québécoise, on va s'entendre pour dire que, contrairement au député de Saint-Laurent, ce n'est peut-être pas le moment de rebaptiser l'Assemblée nationale, qui est l'Assemblée de la nation québécoise, pour l'appeler l'Assemblée législative comme dans toutes les autres provinces. Ce serait dire, contrairement à M. Ryan, que le Québec est une province comme les autres, qu'elle n'est pas le siège d'une nation et que cet Etat québécois n'est pas l'Etat qui gère le territoire national, qui est le territoire de l'Etat du Québec. Sur ce territoire national, M. le Président, — et là j'arrive à l'essentiel pour dire pourquoi je suis en faveur du sous-amendement du député de Richmond — ce territoire national contient une richesse nationale qui est l'amiante. M. le Président, 81% de la production canadienne d'amiante se fait au Québec. S'il y a une richesse naturelle qu'on peut qualifier de nationale parce qu'elle est sur le territoire national, qui peut contribuer au développement de la nation, c'est bien l'amiante. En ce sens, je trouve tout à fait normal qu'on introduise le terme national dans le sens communément admis et non pas dans son application insolite que l'Opposition voudrait nous attribuer parce qu'elle l'utilise elle-même de préférence. On a tout à fait raison d'introduire le terme national pour désigner cette société qui gère l'une des principales richesses nationales des Québécois.

Quand j'entends le député de Saint-Laurent nous dire: Ecoutez, cette société va emprunter, sous forme d'obligations, et il y a une partie de ses capitaux qui va être étrangère. M. le Président, ce serait la même chose que de dire que l'Hydro-Québec, par exemple, n'est pas une société nationale, au sens véritable du mot, tout simplement parce que, lorsqu'on a fait la nationalisation de l'électricité, on a dû, temporairement, emprunter des fonds à l'extérieur du Québec.

Le député de Saint-Laurent a l'air de dire que la majorité des capitaux viennent de l'étranger. Je lui rappellerai que le Québec est un exportateur net d'épargnes et qu'on produit essentiellement tous les capitaux nécessaires à notre développement ici. D'ailleurs, il y a quelques années — ce n'est pas un phénomène seulement québécois, c'est un phénomène pancanadien — il y a eu le rapport Gray, qui a démontré que certaines années, cela oscillait entre 95% et 105%, c'est-à-dire que les capitaux utilisés pour développer les industries canadiennes provenaient du Canada à 95%, et même certaines années à 105% parce qu'il y avait une exportation de capital. (11 heures)

Le Québec est encore plus fortement exportateur d'épargne et cela veut dire qu'il y a des capitaux Québécois; c'est cela M. le Président. Si on contrôlait nos compagnies d'assurances, nos institutions financières, si on pouvait orienter nos épargnes en majeure partie au Québec, on n'aurait pas besoin d'aller emprunter à l'étranger. Mais l'important n'est pas là, qu'on fasse des emprunts à l'extérieur, peu importe d'où viennent les capitaux, l'important c'est qui les contrôle. On le sait très bien nous qui ne contrôlons aucune ou presque aucune... qui laissons 50% de nos institutions financières sous contrôle étranger. Nous savons tout ce que cela nous coûte. Pourtant, c'est notre argent qui est dans ces banques, ces compagnies d'assurances, dans ces mutuelles, dans ces sociétés de fiducie; c'est notre argent qui est là et qui s'en va développer l'extérieur et temporairement, avant que nous arrivions à contrôler tous les leviers essentiels de notre économie, c'est vrai, nous sommes condamnés parfois et même souvent à emprunter sur les marchés étrangers alors que nous avons toutes les ressources financières ici pour nous développer.

Encore une fois, ce n'est pas cela qui empêche une société d'être nationale. Elle est nationale parce qu'elle va être sous contrôle Québécois, peu importe d'où viennent les fonds; elle va être orientée par un gouvernement qui défend les intérêts des Québécois et qui est en fonction des intérêts des Québécois. Je pense que dans ce sens, le sous-amendement du député de Richmond est absolument dans l'ordre et nous allons l'appuyer sans réserve.

M. Forget: M. le député de Rosemont me permet-il de lui poser une question? Pourquoi pas à ce moment, une régie nationale de l'assurance automobile? Pourquoi pas une Société nationale de l'électricité? Est-ce qu'il a l'intention de recommander les changements de noms pour ses abonnés?

M. Paquette: Ce n'est peut-être pas une mauvaise idée. Quand même, il y a une différence, c'est que, comme je le disais tantôt, l'amiante est une richesse nationale des Québécois.

M. Forget:... n'en est pas une...

M. Paquette: Pas à ce point-là. On produit 81% de la production canadienne, 50% de celle du monde libre.

M. Forget: Ah bon! Il faut exporter pour que ce soit national.

M. Paquette: Je pense que c'est bon de mettre en évidence que l'amiante est vraiment une richesse nationale, c'est-à-dire qui est contrôlée essentiellement par le Québec, en tout cas, dans le monde libre. Au sein de la Confédération canadienne actuellement, 81% de la production canadienne est québécoise. Ce n'est pas le cas de l'électricité.

M. Forget: Quand on consomme nous-mêmes, c'est moins national.

M. Paquette: L'assurance automobile, on n'est pas sur le plan des richesses naturelles, il y en a partout des régies d'assurance automobile.

M. Forget: C'est limpide, quand on consomme nous-mêmes, ce n'est plus national. Quand c'est la nation qui consomme, ce n'est plus national.

M. Paquette: Je pense que j'ai été suffisamment clair. M. le député de Saint-Laurent ne me comprend pas, je n'y peux rien.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, j'appuierai l'amendement du député de Richmond, auquel je souscris pour plusieurs raisons. D'une part, l'Opposition libérale a tenté un peu de dégrader, de rabaisser les motifs qui nous ont amenés à créer cette Société nationale de l'amiante. Je soutiendrai qu'il est vrai qu'en choisissant le terme national dans le titre, nous y avons voulu l'affirmation d'une volonté collective. Donc, il existe effectivement dans le titre Société nationale de l'amiante une affirmation de la collectivité québécoise, une affirmation de la nation québécoise, une affirmation du peuple Québécois. Une affirmation d'un peuple qui s'est vu privé de ses outils de développement économique dès finalement la conquête anglaise, qui s'est vu privé d'un certain nombre de ses grandes sociétés — la Hudson Bay Company avait remplacé la compagnie des Cent Associés — et c'est un peuple qui, avec les années, a péniblement, d'une part, après s'être accroché à son clocher, s'est également accroché à son gouvernement, s'est redonné des outils de développement, des outils politiques. Il s'est également donné, je pense, une culture. Nous avons parmi nous un poète et je pense que la culture québécoise d'aujourd'hui n'est plus à défendre.

M. Forget: Plus qu'un d'ailleurs.

M. Bérubé: La personnalité québécoise s'est affirmée dans le domaine des arts, dans le domaine intellectuel, dans le domaine scientifique. Il reste que dans le secteur économique, comme d'ailleurs beaucoup de provinces, d'autres provinces canadiennes, nous sommes presque entièrement un peuple, un pays de succursales. C'est un peuple privé d'outils de développement de compagnies. Je pense que l'amiante présente à cet égard un exemple assez intéressant. Lorsqu'on examine l'importance de cette industrie, on constate que le Québec contrôle 65% de la production du monde libre dans le secteur de l'amiante. Néanmoins, lorsqu'on examine qui contrôle cette production, on constate que c'est ASARCO, c'est-à-dire les Etats-Unis, on constate que c'est la Canadian Johns-Manville mais la" Canadian Johns-Manville est contrôlée à 100% par la

US Johns-Manville, c'est la Jim Walter Corporation, à nouveau, très grosse société de matériaux de construction américaine et c'est également la Turner and Newall qui est une société britannique, et faut-il parler de la General Dynamics.

Par conséquent, à nouveau, nous avons devant nous un exemple frappant de cette main-mise par l'étranger des outils de développement collectif, de développement économique. Par conséquent, si le mot national est inclus dans le titre, c'est qu'il y a affirmation d'une volonté des Québécois de compléter leur maturation politique et de prendre en main les leviers de développement économique. La présentation de l'Opposition libérale est intéressante parce que, à nouveau, elle cherche à rabaisser le plus possible cette aspiration québécoise, comme si le Québec ne pouvait contrôler ses outils de développement, comme si le Québec ne pouvait être un pays normal, un pays susceptible, lui aussi, d'avoir en main les principaux outils pour se développer en tant que nation, en tant que peuple, comme si l'épargne québécoise était insuffisante.

Là, je n'irai pas beaucoup plus loin que le député de Rosemont, puisque ceci est un fait, nous sommes un net exportateur d'épargne. L'épargne collective québécoise dépasse les $50 milliards. Le Québec est capable de générer les fonds pour posséder son industrie au Québec. Cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas y exister d'entreprises étrangères mais il apparaît anormal que le contrôle majoritaire de l'économie québécoise soit entre les mains d'étrangers. Seule l'Opposition libérale trouve cette situation normale. Tout effort pour redonner...

M. Forget: Est-ce qu'on me permet une question?

M. Bérubé: Non, je regrette, vous aurez toute l'occasion. Je sais que dans votre "filibuster" vous aurez encore pour trois mois à adresser la parole, ce qui fait que...

M. Lalonde: C'est vous qui faites le "filibuster", vous avez parlé plus longtemps que nous autres.

M. Forget: ... que vous preniez un engagement.

M. Bérubé: Par conséquent...

M. Grégoire: Vous n'en permettez pas de questions, on va prendre la même attitude.

M. Forget: Est-ce que vous prenez un engagement que le capital ne sera pas emprunté à l'étranger pour l'achat de la Société Asbestos?

M. Bérubé: Par conséquent, il existe au Québec une capitalisation suffisante, il existe une épargne suffisante. Cette épargne pourrait prendre en main...

M. Forget: Vous n'êtes pas capable de répondre.

M. Lalonde: On a vu que vous n'êtes pas capable de répondre.

M. Bérubé: M. le Président, ai-je la parole? M. Grégoire: M. le Président...

M. Lalonde: M. le Président, le député de Rosemont continue d'interrompre le ministre. Je suis très intéressé à entendre...

M. Grégoire: M. le Président, je crois que le ministre est en train de donner la plus belle leçon que l'Opposition n'ait jamais eue.

M. Forget: Non, il ne donne pas de leçon parce que...

M. Lalonde: Bien non!

M. Forget: ... il s'arrange pour être très vague dans ses engagements.

M. Grégoire: II faut que vous soyez enveloppé dans du roc pour ne pas comprendre.

M. Forget: II dit que l'épargne au Québec est suffisante pour financer la Société Asbestos. C'est faux, il va aller emprunter à l'étranger pour cela et il ne peut pas s'engager à ne pas le faire.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent, il vous reste encore des minutes à votre temps; si vous voulez les employer, vous les emploierez tout à l'heure. M. le ministre.

M. Bérubé: Donc, M. le Président, l'épargne québécoise est importante. Que l'insuffisance d'outils entre les mains de l'Etat conduise à une situation de pays sous-développé qui puisse nous amener même à aller chercher à l'extérieur du Québec...

Des Voix: Ah! Ah!

M. Bérubé: ... des fonds supplémentaires pendant que nos Québécois exportent l'épargne québécoise, ce qui amène finalement à un équilibre puisque dans la mesure où nous sommes un net exportateur, si nous voulons rétablir l'équilibre, il faut donc compenser par une importation de capital de manière à en venir à une certaine neutralité.

M. Lalonde: II n'y a rien de neuf. M. Forget: Non, mon cher. Non, mon cher. M. Lalonde: Ce n'est pas comme cela. M. Bérubé: Par conséquent...

Le Président (M. Laplante): A l'ordre, à l'ordre! S'il vous plaît!

M. Bérubé: ... il existe, au Québec, une épargne qui nous permettrait de prendre en main tous les leviers de notre développement économique. Cela ne veut pas dire, M. le Président, que nous devons racheter toutes les entreprises au Québec; cela ne veut pas dire non plus que nous devons refuser tout investissement étranger au Québec. Non, au contraire. Dans beaucoup de cas, les investissements étrangers nous permettent d'avoir accès à des marchés, nous permettent d'intégrer notre économie à l'économie nord-américaine, à l'économie mondiale et, de ce fait, nous ne pouvons ignorer l'existence des grandes sociétés multinationales qui structurent l'économie mondiale aujourd'hui.

Cependant, si nous devons reconnaître un certain nombre de forces, cela ne veut pas dire que nous devons nous laisser écraser par ces forces. La reconquête de notre économie, c'est un objectif que tout véritable gouvernement du Québec devrait avoir. C'est un objectif qui est sain, c'est un objectif normal. Cette reconquête de notre économie doit bâtir sur l'existant. Elle ne doit pas chercher à inventer des choses complètement nouvelles. Le risque serait beaucoup trop grand. Elle doit donc commencer par s'accrocher à des entreprises existantes au Québec, de la même façon que la technique la plus fréquente pour une multinationale de s'implanter dans un nouveau pays, dans un nouveau marché consiste généralement à acheter une entreprise dans ce pays de manière à se servir de cette entreprise comme pivot de développement économique.

S'il en va ainsi pour ces grandes sociétés internationales qui ont une grande expérience de l'économie, pourquoi en serait-il autrement du Québec qui doit s'occuper de développement économique?

Dois-je signaler, M. le Président, que l'Opposition libérale lit, ce qu'elle me reproche régulièrement?

Je continue, M. le Président. En fait, nous sommes en face d'un peuple qui s'éveille, un peuple qui s'assume, un peuple qui se définit par un vouloir-vivre collectif. Le député de Saint-Laurent a eu un mot malheureux hier, je pense qu'il lui a échappé, mais il traduit peut-être une arrière-pensée, un subsconcient. Il a parlé de la nation et il l'a qualifiée d'oripeaux. Qualifier la nation d'oripeaux, que l'on manipule à la face des gens, c'est donner...

M. Forget: Le ministre est malhonnête dans ses remarques.

M. Bérubé: ... une très, très bonne idée de ce qu'il pense de la nation.

M. Forget: Le ministre fait des remarques malhonnêtes dans le moment, il le sait très bien.

M. Bérubé: J'aimerais simplement citer...

M. Lalonde: Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose.

M. Bérubé: ... le passage d'un homme qui a marqué l'histoire du Québec, le chanoine Lionel Groulx, qui parle de cette démarche d'un peuple vers un certain réveil collectif. Que dit le chanoine Groulx? Je pense que je terminerai par la citation du chanoine Groulx...

M. Forget: C'est un mauvais réveil.

M. Bérubé: ... parce que, je pense, il est difficile de dépasser sa pensée. "Le réveil d'un peuple est une longue et immense entreprise. Depuis qu'il faut compter avec la souveraineté de l'opinion, c'est constamment une gigantesque bataille entre les forces du bien et du mal. Il nous faut appeler un chat un chat", M. le député de Marguerite-Bourgeoys, "comme on nous l'avait dit. Entre les puissances de la vérité et de l'erreur", M. le député de Marguerite-Bourgeoys, "ceux qui se rendent maîtres des esprits, ce sont les groupes les plus forts, parce que les mieux organisés, ceux qui jettent dans la circulation les mots d'ordre les plus entraînants et les plus persévérants. Il ne peut suffire de tuer l'apathie et le sommeil. Pour odieux et extraordinaire que cela doive paraître, il faut savoir entendre qu'au milieu de nous vivent et s'agitent des hommes qui redoutent, à l'égal d'une calamité, la reviviscence du sentiment national. "Oui, messieurs, il y a des gens qui redoutent comme une calamité cette résurrection du Québec. Le patriotisme crée un ordre et nous subordonnant à quelque chose de plus grand que nous-mêmes. Il atteint toutes les anarchies, toutes les formes de l'égoïsme ", M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Je vous avais bien dit qu'il y avait plus qu'un poètn parmi nous.

M. Bérubé: "Aux yeux des déracinés et des apathiques, les patriotes feront toujours figure de sonneurs de trompette et de Catons grincheux. Notre devoir est d'accepter...

M. Forget: ... qui citent leur propres écrits; d'autres, les écrits des autres. Ne les utilisez pa. • pour des fins partisanes.

M. Bérubé: ... cette longue bataille " — respectez au moins le chanoine Groulx, si vous ne savez pas respecter autre chose —"et de vouloir que l'esprit de nation finisse par l'emporter sur l'esprit de parti. La cause du patriotisme et du réveil national devra disposer d'assez de constance et d'assez de force pour écraser toutes les résistances de l'apathie et de l'intérêt ".

Merci, M. le Président.

M. Grégoire: C'est très bon, ça.

M. Lalonde: C'est le genre de discours que vous aimez.

Le Président (M. Laplante): Vote sur la motion d'amendement, le sous-amendement.

M. Lalonde: C'est le genre de discours que vous aimez.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond.

M. Grégoire: Ils ont des oreilles et ils n'entendent pas, ils ont des yeux et ils ne voient pas.

M. Lalonde: Des violons.

M. Paquette: Ils ont une grande bouche et ils parlent trop.

M. Lalonde: Le vocabulaire, le vocabulaire.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. Comme je n'ai pas utilisé mon droit de parole hier, sur la motion de sous-amendement que j'ai présentée, j'aimerais revenir ce matin pour émettre certains commentaires à la suite des propos qui ont été tenus. Pour bien situer mon intervention, M. le Président, j'aimerais, avec votre permission, relire la motion telle que sous-amendée. L'article sous-amendé se lirait donc comme suit: "Une compagnie à fonds social, ci-après appelée la Société, est constituée sous le nom de Société nationale pour la transformation et la commercialisation des produits de l'amiante'.

M. le Président, je tiens à revenir sur cette question. Cela n'était pas mon intention au départ. (11 h 15)

Cependant je pense qu'elle s'inscrit dans un débat de fond qui est le nôtre, dès maintenant, et qui le sera pour un certain temps puisqu'il touche à des sujets qui affectent tout le monde, qui ont trait à toute la collectivité à laquelle nous faisons partie.

Pour bien situer les raisons fondamentales qui m'ont incité à vouloir que le mot "nationale" demeure, soit inscrit dans l'appellation de cette société de transformation et de commercialisation que le gouvernement du Québec est en train de mettre sur pied, M. le Président, vous me permettrez d'établir une certaine analogie entre ce qui m'apparaît être des éléments importants de notre société.

D'abord, sur le plan individuel, il est clair que, pour chaque individu, il est important et primordial, logique et nécessaire — d'ailleurs, même la société tente de plus en plus à fournir aux individus les outils pour y arriver — il est donc important et souhaitable que chacun des individus puisse s'épanouir et mettre à profit les talents, les qualités qui sont siennes, puisse se développer normalement et s'affirmer en tant qu'individu. C'est un constat de base et tout le monde reconnaîtra cette réalité.

La société moderne veut donc que l'individu s'affirme en tant qu'entité personnelle, à travers les 4 milliards d'êtres humains qu'il y a sur la planète. C'est le lot de chacun, la volonté de chacun que de vouloir arriver à cette forme d'affirmation qui est un individualisme sain, pour autant qu'il ne verse pas dans ce qu'on peut appeler l'égoïsme ou l'égocentrisme. On peut donc bien situer l'individu à ce niveau-là.

Cet individu fait partie d'une famille, sa famille humaine propre, ses frères et de ses soeurs. Cet individu, au sein de sa famille, s'identifie comme une entité particulière qui a ses talents, ses qualités propres, qui n'est semblable à aucun des autres membres de la famille, mais qui est lui-même. Cela n'empêche pas les autres membres de la famille, frères et soeurs ou parents, de vivre heureux, épanouis avec lui, même s'il est différent. Je pense qu'on peut le prendre comme constat.

La famille devient donc une entité en soi avec les qualités, la nature de chacune de ses composantes, entité propre, particulière, qui ne nie pas les autres entités familiales qui existent autour d'elle. Au contraire. Par contre, elle recherche — et c'est normal — à s'affirmer en tant que famille, parents et enfants ensemble.

Je souligne ce fait parce qu'il est important, il est même possible qu'à ce noyau familial vienne se greffer, à l'occasion, selon les circonstances, d'autres membres qui ne sont pas issus de la famille, mais qui deviennent partie intégrante de cette famille qui recherche maintenant son entité en soi, son entité personnelle, son entité propre. On reconnaît à la famille un esprit ou un dynamisme qui lui est particulier, qu'on peut appeler, d'une certaine façon, l'esprit de famille.

Si on se reporte à un tableau un peu plus large, vous conviendrez avec moi que l'ensemble de ces cellules familiales, sur un territoire donné, constitue une collectivité qui, elle, devient, par définition, une grande famille.

Dans le cas qui est le nôtre, nous sommes, avec toutes nos composantes, la grande famille canadienne-française, la grande famille québécoise avec un esprit propre, un esprit de famille particulier. Nous ne sommes ni comme les Belges ni comme les Français — pas tout à fait — ni comme les Américains, ni comme les Canadiens anglais de l'Ouest non plus. Je pense que c'est reconnaître simplement la réalité.

Cette grande collectivité, cette agglomération de toutes les familles, en territoire québécois, forme donc cette grande famille canadienne-française québécoise qui a son nationalisme propre, qui est l'expression de sa propre entité, ce qui est tout à fait normal. Ce serait tout à fait illogique de vouloir nier le droit de cité à un nationalisme sain, non pas à un nationalisme à outrance, que ce soit d'un côté ou de l'autre, mais de la même façon que l'individu est fier d'être lui-même, que la famille est fière d'être un noyau familial et de s'affirmer avec ce qu'elle est, de la même façon la famille collective canadienne-française québécoise est fière d'être ce qu'elle est. Ce serait vouloir nier la réalité que de vouloir effacer, dans les textes de loi ou ailleurs, toute trace de cette identification

de cette grande famille collective que nous formons en territoire québécois. D'ailleurs, cela a toujours été fondamentalement le noeud et la pierre d'achoppement de tous les problèmes qu'on a connus depuis longtemps, justement de ne pas vouloir reconnaître cette réalité au point de départ.

Je pense qu'il est important d'établir ce parallèle pour indiquer qu'il existe donc un nationalisme sain qui a non seulement droit de cité, mais qui doit s'affirmer si l'on veut que, comme individuellement on souhaite que l'individu se développe normalement, atteigne sa maturité en respectant les autres, une nation, une grande famille le fasse aussi, on doit lui reconnaître non seulement son droit au nationalisme sain, juste et normal, mais également le devoir pour elle d'affirmer cet esprit de famille qu'est le nationalisme.

Les participants au débat, du côté libéral, m'ont prêté certains épithètes, lorsque j'ai présenté cette motion voulant conserver le mot "nationale" dans la Société nationale de commercialisation et de transformation des produits d'amiante; ils ont le droit de prendre les positions qu'ils veulent, je ne leur nie pas ce droit. Cependant, il faut bien se rappeler une chose, c'est que le Parti libéral n'a quand même jamais eu cet esprit de famille qui doit caractériser la nation canadienne-française du Québec. Or, ce n'est donc pas étonnant qu'ils soient surpris par une volonté de vouloir identifier, à la nation canadienne française du Québec, ce projet de loi qui est un projet de loi à portée collective. Donc, ce n'est pas surprenant du tout parce que, en réalité, le Parti libéral — même si on remonte loin dans l'histoire— n'a jamais mis l'accent sur le nationalisme, même pas sur le nationalisme que j'ai appelé, tout à l'heure, sain, un nationalisme juste qui se veut l'expression réelle d'une communauté, comme sur le plan individuel d'ailleurs. C'est pourquoi, même, ils n'étaient pas d'accord avec l'appellation, qui a été donnée par l'Union Nationale, d'Assemblée nationale, à notre Assemblée ici. Alors, pourquoi ne l'ont-ils pas changée entre les années 1970 et 1976, puisqu'ils pouvaient corriger à loisir ce qui leur apparaissait être une erreur.

Pour le Parti libéral, il m'apparaît que le besoin de nier le nationalisme est lié à sa volonté ou à son pouvoir de défendre le fédéralisme, comme si, pour défendre le fédéralisme, les libéraux doivent absolument nier toute forme de nationalisme existante, comme si cela ne pouvait pas aller de pair, absolument pas. A ce moment, ça devient ce que je pourrais appeler du Trudeau pur, ce qui n'est peut-être pas nuancé non plus, comme position, à certains égards.

La position de l'Union Nationale, là-dessus, est claire; nous sommes nationalistes, mais nous ne sommes pas séparatistes, c'est là la différence. Je pense que c'est là que le Parti libéral n'a jamais donné suite à la réalité québécoise, dans le fond, et ne peut pas s'approcher de la réalité non plus, d'abord préoccupé par le fait de vouloir nier ce nationalisme pour brandir le seul étendard fédéraliste, comme si on devait absolument passer par cette négation pour défendre un fédéralisme quelconque, alors que c'est bien le contraire; de la même façon que dans une société, un individu peut s'affirmer sans pour autant nier son voisin ou vouloir s'en séparer, de la même façon qu'une famille, dans une collectivité, soi au niveau d'une ville ou d'une province, peut s'affirmer en tant que famille sans, nécessairement, s'isoler des autres. Le même phénomène s'applique dans ce que nous connaissons au niveau de la fédération. On veut un fédéralisme renouvelé; par contre, nous sommes des nationalistes. C'est clair, net et précis. Comme un individu, à bon droit, peut être fier d'être lui-même, une entité propre, et de s'exprimer comme il est. Comme une famille peut être fière, et à bon droit, d'être elle-même, ce qu'elle est, une entité propre, et de s'affirmer comme telle. Comme une nation et comme une collectivité également peut et doit être fière, à bon droit, d'être ce qu'elle est, sans pour autant nier l'existence des autres, mais, au contraire, dans le respect de l'existence des autres. Parce que, justement, à mon sens, le vrai nationalisme implique le respect des autres.

C'est vrai que, comme individus, de l'un à l'autre, il y a d'énormes différences; c'est vrai que, comme d'une famille à l'autre, il y a d'énormes différences. Mais ce qui est important au point de départ dans notre attitude, c'est de voir les différences comme étant normales, de la même façon qu'à l'intérieur d'une famille, entre les individus, de la même façon qu'entre les familles, sur le plan d'une nation. Ce serait un danger — et il faudra appuyer là-dessus dans les discussions que nous aurons — que de percevoir les différences qui existent entre les nations comme étant des choses anormales. A ce moment-là, c'est le premier pas pour une non-acceptation, non seulement de la différence, mais de cette nation également.

Je pense que notre réflexion doit porter dans ce sens. On doit partir avec une intention de respect mutuel tout en voulant une affirmation de soi dans un sain nationalisme, ce que j'appelle aussi un sain individualisme, si vous voulez, ou un sain esprit de famille, en ayant le respect des autres qui nous entourent. Comme il y a plusieurs formes de fédéralisme, on en parle, il y a peut-être également différents niveaux de nationalisme. Cependant, j'ai tenu à bien préciser notre position ici, à indiquer que la position de l'Union Nationale là-dessus est claire, que nous sommes — c'est vrai — fédéralistes, mais que nous sommes nationalistes. Là-dessus, je pense que c'est important qu'on établisse clairement la nuance. C'est pourquoi j'ai proposé cette motion de sous-amendement.

En terminant, M. le Président, j'aimerais souligner qu'on aura à revenir à différents débats où on touchera des questions aussi importantes que celles-là, avant même d'atteindre le référendum, si vous voulez, où l'ensemble de la population aura à se prononcer sur le statut du Québec, mais je pense qu'on n'arrivera pas à des bons résultats, on n'arrivera pas à un débat normal et sain si on discute d'une manière émotive, de part et d'autre, des situations. On n'arrivera pas non plus à une

solution équitable, juste et réaliste, tenant compte des volontés réelles populaires, si on devient radical de part et d'autre. On n'arrivera pas non plus à quelque chose de valable si on affiche une intolérance envers ceux qui ne pensent pas comme nous, c'est-à-dire qui sont différents de nous. Il faut se dire que ceux qui ne pensent pas comme nous, qu'on soit d'un côté ou de l'autre — pour les fédéralistes, ceux qui sont séparatistes et, pour les séparatistes, ceux qui sont fédéralistes — sont donc des gens différents. A ce moment-là, le même constat et le même principe que j'ai établis tout à l'heure s'appliquent. On doit, au point de départ, respecter ces différences et ne pas embarquer sur le terrain glissant de l'intolérance qui risquerait tout simplement de faire dévier toutes les questions et d'aboutir à un tout autre résultat.

Nous devons aborder ce débat avec le moins d'émotivité possible, le plus d'objectivité possible, en tenant compte des réalités. Parmi ces réalités, il existe la nation canadienne-québécoise, il existe le nationalisme normal, naturel, que nous devons reconnaître et que je demande au législateur de reconnaître dans les textes de loi comme celui que nous avons. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Motion de sous-amendement du député de Richmond. Vous êtes prêts à voter?

M. Grégoire: Oui.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Simplement une directive à vous demander. Cela aurait peut-être dû être fait au moment de la présentation du sous-amendement qui m'apparaît un peu irrégulier dans la mesure suivante; c'est que le sous-amendement vise à remettre...

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous pourriez attendre? On va changer de président. Vu qu'il a rendu les deux autres décisions, j'aimerais que ce soit fait par le même président. (11 h 30)

M. Lalonde: Voici, il s'agit de la motion de sous-amendement qui vise à remettre le mot "nationale" dans l'amendement du député de Saint-Laurent, de sorte que la motion de sous-amendement est la négation de l'amendement parce que l'amendement, c'était de remplacer le mot "nationale" par les mots "pour la transformation et la commercialisation des produits". Donc, si on vote cette motion maintenant les députés ministériels ont indiqué qu'ils voteraient en faveur — ils vont donc ajouter le mot "nationale" à notre amendement et s'ils votent Contre, après l'amendement, ils vont se trouver à voter contre ce en faveur de quoi ils viennent de voter. Alors, on est dans un imbroglio un peu procédurier.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quoique le dernier point que vous soulevez, c'est uniquement une question de procédure, mais je dois vous dire que ce matin, alors que j'étais complètement seul en me faisant la barbe à l'appartement, j'ai pensé à la décision que j'avais prise de déclarer recevable le sous-amendement du député de Richmond. C'est pour cela que je trouve très pertinent le fait que vous souleviez cela ce matin puisque je me suis posé la question vers 8 heures moins le quart ce matin. J'ai essayé de vérifier si la décision que j'avais prise de le déclarer recevable, ce sous-amendement, était bonne et je me suis convaincu que oui...

M. Lalonde: Unanimement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... En me donnant les raisons suivantes. C'est que l'amendement du député de Saint-Laurent a pour effet non seulement d'enlever le mot "nationale", mais de le remplacer par les mots "la transformation et la commercialisation des produits", donc on ne peut pas dire que son amendement a uniquement pour but d'enlever le mot "nationale"; il aurait pu proposer, par exemple, dans son amendement, "La Société de l'amiante". Il aurait manifestement démontré que son intention était uniquement de le remplacer par "québécoise", alors qu'il a ajouté les termes "pour la transformation et la commercialisation des produits"... Donc, j'ai vu dans son amendement non seulement le désir d'enlever le mot "nationale ", mais de voir également apparaître d'autres termes comme "transformation" et "commercialisation". De sorte que lorsque le député de Richmond présente un sous-amendement en ramenant le mot "nationale", je pense qu'il n'écarte pas totalement l'amendement du député de Saint-Laurent qui prévoyait, dans son amendement, aussi les termes "transformation et commercialisation des produits".

Or, c'est peut-être compliqué tout cela mais cela veut dire en gros que si le député de Saint-Laurent avait présenté une motion pour que l'amendement se lise "Société de l'amiante" ou "Société québécoise de l'amiante" et que le député de Richmond était arrivé avec un sous-amendement ramenant le mot "nationale", je l'aurais déclaré irrecevable. Ce sont les motifs que je me suis donnés ce matin en révisant intérieurement cette décision, mais votre question, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, était pertinente puisque d'autres ont dû se la poser également.

M. Lalonde: Je ne veux pas faire une question de procédure, je veux tout simplement soulever peut-être la contradiction apparente de certains votes qui pourraient être pris.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais en ce qui concerne votre deuxième point, j'admets que c'est cela qui peut arriver, mais je pense que c'est uniquement une question de procédure que nous avons pu vérifier d'ailleurs, vous le savez, à l'occasion de d'autres commissions parlementaires. Or, est-ce que le sous-

amendement du député de Richmond sera adopté?

Vote sur la motion de sous-amendement

M. Grégoire: Oui, M. le Président. M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Or, le sous-amendement du député de Richmond est...

M. Laplante: Vote enregistré.

Une Voix: On demanderait un vote enregistré.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le vote sur la motion de sous-amendement du député de Richmond. M. Bérubé, Matane.

M. Bérubé: Certainement favorable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Godin, Mercier.

M. Godin: Favorable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu, Richmond.

M. Brochu: Favorable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Forget, Saint-Laurent.

M. Forget: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire, Frontenac.

M. Grégoire: Favorable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. Laplante, Bourassa.

M. Laplante: Favorable.

Une Voix: II est contre lui-même.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! Je pense que les votes en commission parlementaire devraient au moins avoir le même décorum qu'à l'Assemblée nationale. A l'ordre, s'il vous plaît! M. Ouellette, Beauce-Nord.

M. Ouellette: Très favorable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt, Saint-François.

M. Rancourt: D'accord.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Lalonde, Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Donc, le sous-amendement du député de Richmond est adopté de telle sorte que j'appelle maintenant le vote sur l'amendement du député de...

M. Lalonde: II n'y a pas eu de délibération sur l'amendement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, mais si quelqu'un manifeste l'intention d'en parler il pourra en parler. Je me dois, à ce stade-ci, de demander si l'amendement du député de Saint-Laurent, tel qu'amendé lui-même par le député de Richmond, sera adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, le sous-amendement du député de Richmond a distrait un peu la commission parlementaire du but et des objectifs contenus dans la proposition du député de Saint-Laurent à savoir d'ajouter les mots "pour la transformation et la commercialisation des produits" au nom de la société qui est créée par l'article 1. M. le Président, je me demande pourquoi on serait contre un tel amendement... Est-ce que cela va?

M. Grégoire: Attention à ce que vous allez dire.

M. Godin: Excusez-nous de vous interrompre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre, s'il vous plaît! Parfois je me demande si cela n'irait pas mieux s'il n'y avait pas de président. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Non, s'il vous plaît, restez M. le Président. Vous êtes notre protecteur, le protecteur du règlement.

M. Godin: ...

M. Lalonde: M. le Président, la politique de ce gouvernement en matière d'amiante trouve son premier jalon dans ce projet de loi. De toute évidence, c'est avoué, c'est annoncé, il n'y a aucun débat là-dessus. La politique de ce gouvernement repose toutefois sur des objectifs très clairs, très évidents à savoir de créer des emplois au Québec dans le secteur de la transformation, c'est-à-dire, d'augmenter le niveau de transformation qui est très bas, actuellement, compte tenu de la production et de l'extraction, ce que, je pense, tous les Québécois partagent comme objectif. Le fait qu'on procède, quoique ce n'est pas inclus dans ce projet de loi, mais c'est présent dans tout le débat... Vous avez sûrement été témoin, M. le Président, de certains discours en deuxième lecture et on a sinon toléré, du moins accepté, de part et d'autre,

que le débat porte sur le projet d'acquisition d'une mine d'amiante par le gouvernement et je crois que ce projet, qui est omniprésent, n'est pas convenu dans ce projet de loi. Il reste que — et j'entendais tantôt l'intervention du député de Mercier qui, à plusieurs reprises, a parlé de création d'emplois dans le secteur de la transformation — il s'est limité justement à cet objectif, qui est partagé par tous les Québécois, d'augmenter le secteur secondaire dans toutes les activités idéalement, mais surtout...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, s'il vous plaît!

M. Godin: Je suis d'accord avec cela.

M. Lalonde: La foule est en délire, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, s'il vous plaît.

M. Lalonde: J'accepte les applaudissements, M. le Président, je ne ferai pas d'objection.

M. Grégoire: C'est parce que vous avez parlé d'emplois qu'on a applaudi.

M. Lalonde: Donc, de...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Même si c'est contre le règlement... vous qui êtes respectueux du règlement!

M. Godin: ... M. le Président, quand ils sont d'accord avec nous ou qu'on a des objectifs communs, moi, je me sens libéral quand ils parlent comme cela.

M. Lalonde: Donc, M. le Président...

M. Godin: C'est très temporaire, M. le Président.

M. Lalonde: Je fais justement du recrutement. Alors, c'est l'objectif le plus partagé. Je pense qu'au-delà de toutes les lignes de parti, il faut faire en sorte que le secteur de transformation de l'amiante — en particulier de l'amiante, parce que l'on parle aussi des autres activités industrielles — soit augmenté au Québec. On sait que c'est dans le secteur de la transformation que sont les emplois les plus rémunérateurs, les plus stables aussi, et qu'une économie, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus, fondée surtout sur le secteur primaire et tertiaire — naturellement, au niveau des services, il en faut — une économie fondée surtout sur ces deux secteurs est une économie beaucoup plus vulnérable. On le voit et c'est le cas dans trop de catégories d'activités au Québec.

Donc, sur cet objectif de transformation de l'amiante, commercialisation nécessairement, puisque, lorsqu'on parle d'un secteur secondaire, il faut éventuellement vendre ses produits. Tout le monde est d'accord. J'ai été intéressé d'entendre le député de Mercier insister là-dessus tantôt, mais peut-être un peu rapidement sauter par-dessus le problème, c'est-à-dire la véritable question: Pourquoi acheter à coup de centaines de millions une société d'extraction, une société de production de la fibre, alors que le but est d'augmenter les emplois dans le secteur secondaire, c'est-à-dire dans la transformation.

C'est la véritable raison de l'opposition du Parti libéral, de l'Opposition officielle, à ce projet actuellement. Nous avons tenté, par tous les moyens, d'obtenir, de la part de ce gouvernement, une justification de sa décision. Nous avons failli jusqu'à maintenant, parce que les documents qu'on nous a donnés ne sont pas pertinents, ne répondent pas aux véritables questions que nous avons posées. ' On ne doit pas se surprendre: Notre opposition sera aussi vigoureuse, aussi longtemps qu'on n'aura pas expliqué aux Québécois pourquoi, mais véritablement pourquoi, on doit prendre quelques centaines de millions de leurs poches pour acheter une mine, alors que ce qu'on veut faire, c'est créer des emplois dans le secteur secondaire.

On a fait des schèmes un peu intellectuels là-dessus. On a vu, dans le document du groupe de travail, qu'il y avait quatre lignes là-dessus, davantage inspirées, il me semble, par le symbole de la volonté politique que cela constitue que d'acheter une société avec un sol et un sous-sol.

Il reste que le but premier des Québécois, représenté par ce gouvernement et aussi par les autres partis, c'est de créer un secteur secondaire, un secteur de transformation de l'amiante au Québec. C'est la raison pour laquelle, je pense, on doit insister sur le nom, parce que c'est la raison sociale qui va se retrouver partout et qui doit quand même exprimer la volonté de tous les Québécois. C'est pourquoi, je pense, ce nom doit contenir le but de sa propre création, c'est-à-dire la transformation et la commercialisation des produits. Je me demande pourquoi on serait contre.

M. Forget: Le ministre a dit qu'il ne s'occuperait pas de recherche.

M. Lalonde: On me pose la question, M. le Président, à savoir ce qu'il arrive de la recherche. Le ministre nous a dit qu'éventuellement, peut-être plus tard, à quelque part, on s'en occuperait. Il ne semble pas que ce soit là le but premier de la politique du gouvernement, le but premier étant — je le répète — partagé par tous les Québécois, à savoir d'augmenter le secteur de la transformation de l'amiante au Québec.

Pourquoi, à ce moment-là, ne pas le mettre dans le nom de la société? Est-ce que c'est une société pour acheter une mine? Non, M. le Président. C'est une société pour faire la transformation. Alors, pourquoi ne pas le dire? Etant donné que je ne peux pas prévoir d'autres objections, aucune objection, je ne peux aller plus loin, M. le Président. Je vais attendre les discours favorables, sûrement, que les députés ministériels vont faire à l'endroit de la proposition d'amendement du député de Saint-Laurent.

M. Godin: Cela vient de tomber...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier.

M. Godin: C'est à moi à parler?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous aviez demandé la parole au début de l'intervention du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Godin: D'accord. Je suis content de l'avoir parce que dans la perspective, M. le Président, de l'amendement proposé par notre honorable ami de Saint-Laurent, je pense...

M. Forget: C'est bien cela, c'est bien cela.

M. Godin: ... je me demande pourquoi il ne donnerait pas, comme nom officiel à cette société et en restant dans l'optique libérale, la Société multinationale...

M. Lalonde: C'est fini cela, c'est marqué "nationale".

M. Godin: Non, non mais je vous donne le titre qu'on pourrait mettre.

M. Lalonde: M. le Président, la pertinence.

M. Godin: La Société multinationale de recherche, de développement et d'exploitation des gisements d'amiante, y compris la mise en marché de la production, de même que toute activité industrielle manufacturière ou commerciale reliée à la transformation de la fibre d'amiante. Cela devrait être le titre dans la perspective de nos amis d'en face, puisqu'ils veulent qu'on mette dans le nom... (11 h 45)

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'espère que vous n'en faites pas un sous-amendement.

M. Godin:... pas du tout. Je commente la perspective dans laquelle cette modification, ce jeu sur les mots se situe. Dans un discours, dans ses remarques, l'Opposition dit qu'elle veut que le nom reflète exactement l'activité de la Société nationale de l'amiante. Si telle est l'intention de l'Opposition, elle devrait aller plus loin et mettre au complet le paragraphe qui décrit dans sa totalité les projets actuels, présents et futurs de cette Société nationale de l'amiante. Je pense que, faute de les mettre au complet, à mon avis, elle manque son objectif, si tel est le cas. Au fond, je me demande si cet amendement proposé par l'Opposition officielle, je ne me le demande pas, je suis convaincu que cette motion d'amendement ne vise qu'à retarder l'objectif que le gouvernement s'est donné.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys disait tout à l'heure qu'il était temps que l'on crée des emplois dans le secteur secondaire. Tout le monde s'entend là-dessus. Il y a des emplois non seulement dans la transformation et la commercialisation, mais il y a également des emplois dans d'autres secteurs. Il y a la recherche qui s'en vient éventuellement, il y a l'acquisition d'une expertise globale dans ce secteur et qui va toucher beaucoup d'autres sujets que ceux-là. L'objectif du projet de loi, c'est précisément que des Québécois, enfin, acquièrent de l'expertise dans toutes les activités reliées...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la motion. J'aimerais...

M. Godin: D'accord, M. le Président, mais si on veut mentionner toutes les facettes...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... j'aimerais quand même avertir le député de Mercier et tous les députés qui vont prendre la parole sur l'article premier, peu importe que ce soit sur un amendement, sur un sous-amendement, sur la motion principale que l'article premier a pour but de désigner le nom d'une société et j'entends être assez sévère là-dessus.

M. Godin: Ce que je lis dans les lignes et entre les lignes de la motion d'amendement, c'est qu'on veut que le nom de l'entreprise étale, si vous voulez, les objectifs du gouvernement dans leur ensemble. Je trouve que ces gens ne vont pas assez loin non plus. Je trouve que, dans cette perspective-là, ils devraient reproduire intégralement, ou à peu près, le deuxième paragraphe des notes explicatives de la loi. Car là, vous avez le portrait complet du projet du gouvernement et on confinerait alors à l'absurde, parce qu'à ce moment, il faudrait que le nom de chaque régie, ou société d'Etat au Québec... Cela veut dire que la Société des alcools devrait s'appeler Société pour l'achat, dans les pays producteurs de vins et autres boissons, de produits qui sont destinés à être mis en marché au Québec et avec une part de profits qui constitue des revenus pour l'Etat.

M. Lalonde: C'est ridicule.

M. Godin: Enfin, si l'intention de l'Opposition est de mettre dans le nom de toute entreprise d'Etat au Québec l'ensemble des objectifs poursuivis, à ce moment-là, revisons tous les titres, tous les noms des sociétés, même celles créées par nos amis, même celles créées...

M. Lalonde: C'est de la poésie...

M. Bérubé: Le Parti libéral, il faudrait le changer de nom...

M. Godin: II faudrait l'appeler le parti multinational...

M. Bérubé: ... le parti pour l'extinction des droits des Québécois, quelque chose comme cela.

M. Godin: C'est pour cela, M. le Président, que c'est de la foutaise, ces amendements-là; ils veulent nous faire perdre notre temps. Ils sont, en d'autres termes, ce qui apparaît...

M. Lalonde: ... Vous nous aidez.

M. Godin: ... et j'espère que le député de Marguerite-Bourgeoys va me laisser parler comme je l'ai laissé parler moi-même dans 90% de son temps — c'est l'Assurancetourix, le barde, l'assu-rancetourix, la poésie a battu l'économie dans Mercier, et les libéraux ne s'en sont pas encore remis. Chaque fois que je parle ici, ils évoquent cette époque peu glorieuse de leur parti, où le parti a été décapité et ils sont rendus avec deux têtes qui se contredisent, temporairement; heureusement, cela achève. En tout cas, si on tient pour acquis...

M. Lalonde: Les Québécois commencent à s'en ressentir dans leur économie. On ne parlera pas d'être patient, on va parler, d'âge canonique.

M. Godin: ... la perspective dans laquelle ils se situent, il faudrait en mettre beaucoup plus; je trouve qu'ils ne vont pas loin moi non plus. Mais, en fait, je termine là-dessus, pour passer la parole à d'autres de mes collègues, de quelque côté qu'ils se trouvent dans cette chambre. Ils veulent ralentir, ils veulent mettre le "brake", comme on dit dans mon comté, M. le Président, la reprise en main par les Québécois de leurs ressources naturelles. C'est ce qu'ils font et ils ne se rendent pas compte que le peuple ne leur pardonnera pas de faire cela. Ils ne se rendent pas compte que les "filibusters" qu'ils nous font successivement de commission parlementaire en commission parlementaire, dans certains cas visent à améliorer les projets de loi et d'ailleurs les amendements le prouvent dans de nombreux cas — mais dans plusieurs cas ne visent qu'à ralentir la reprise en main des Québécois d'une partie de leur économie ou de leur avenir.

J'espère qu'après s'être fait remettre sur le nez par leurs propres partisans, dans la région de l'amiante, à quel point leur "filibuster" était antihistorique, allait contre les intérêts des Québécois, ils vont nous arriver avec des amendements qui ont plus de consistance et de fond que ces amendements-là. Quand j'étais journaliste, j'avais fait une entrevue avec mon honorable collègue, le député de Saint-Laurent, qui passait, à ce moment-là, pour un économiste sérieux et compétent. Le magazine MacLean m'avait demandé de l'interroger et j'avais été frappé par son esprit brillant et les propos qu'il avait tenus dans cette entrevue. Je découvre aujourd'hui...

M. Lalonde: II est plus partisan depuis ce temps-là.

M. Godin: ... qu'il y a une espèce de ramollissement du cerveau, des deux côtés, dans les deux cas. Je ne le reconnais plus. Le député de

Marguerite-Bourgeoys — les deux côtés du micro, je veux dire — je ne reconnais plus...

M. Laionde: Je vous ai déjà vu plus brillant que cela, je l'avoue. Je vous ai vu avant et vous étiez plus brillant que cela.

M. Godin: M. le Président...

M. Lalonde: Depuis que vous êtes devenu partisan...

M. Godin: ... je ne reconnais plus les brillantes idées de mon collègue de Saint-Laurent qui, à l'époque, était un des forts que nous, de la jeune génération, avions au Québec. On avait confiance en ces gens-là. On pensait qu'on pouvait leur confier une partie de l'avenir du Québec. On pensait qu'ils feraient un bon job au lieu de quoi ils n'ont fait que des études dans ce secteur en particulier. Aujourd'hui, ils arrivent avec des amendements qui retardent, des amendements qui veulent que le gouvernement soit en panne dans un projet très important, qui est à terme: — ils le savent et ils l'ont dit — la création d'emplois. A chaque fois qu'ils en ont l'occasion, ils nous posent des questions en Chambre — et c'est leur droit le plus strict: — Que faites-vous pour créer des emplois? Voici une loi dont l'objectif ultime est celui-là et qu'est-ce qu'ils font? Ils tirent sur les guides pour que le cheval cesse d'avancer, M. le Président. C'est cela que la population comprend tandis qu'eux, sur la foi d'un sondage fait par des multinationales dans la région, pensent qu'en freinant, ils ont l'appui populaire.

M. Grégoire: On va aller les...

M. Godin: L'avenir dira... d'ailleurs, de toute façon, mon collègue a raison, nous faisons le tour...

M. Lalonde: Ne faites pas cela, s'il vous plaît, j'ai peur. J'ai peur.

M. Godin: ... et nous allons expliquer aux citoyens, de la bouche du cheval, from the horse's mouth, M. le Président, ce qui se passe ici au Parlement et le rôle que l'Opposition joue dans ce Parlement, à l'égard de cette loi. L'Opposition joue un rôle de frein, elle bloque la marche du Québec vers la reconquête de ses richesses naturelles.

M. Grégoire: Ce n'est pas un frein en amiante. M. Godin: Ce n'est pas un frein en carbone? M. Grégoire: Même pas.

M. Godin: M. le Président, je vais leur donner un conseil amical à mes amis de l'Opposition. Vous allez vous faire haïr par la population parce qu'elle va voir clair dans votre jeu qui consiste à empêcher le gouvernement de créer des emplois. C'est ce qui apparaît aux yeux de tous. Je vous

donne un conseil amical parce que cela fait longtemps que l'on se connaît, surtout M. le député de Saint-Laurent et moi, je vous le dis en toute amitié, M. le député de Saint-Laurent: Vous vous nuisez, cela ne me fait rien mais vous vous nuisez. L'avenir le dira. Est-ce qu'il y a un Québécois, en 1978, qui va accepter que le gouvernement n'intervienne pas dans le secteur des ressources naturelles pour assurer la transformation d'une richesse en produits secondaires? Il n'y en a pas un seul Québécois, sauf peut-être...

M. Forget: Je peux vous en nommer deux ou trois.

M. Godin: ... les gens des multinationales, sûrement, vos grands amis.

M. Lalonde: On n'est pas actionnaires des multinationales, nous autres.

M. Godin: Mes actions ont été vendues, M. le député.

M. Forget: Avec profits d'ailleurs.

M. Lalonde: Avec grands profits, j'espère.

M. Godin: Mes cinq actions ont été vendues. Non, les profits ont été versés au Devoir.

M. Lalonde: Au Devoir?

M. Godin: Au Devoir, dans une campagne de financement.

M. Forget: C'est bien.

M. Godin: Mais surtout dans un fonds spécial pour améliorer l'objectivité de certains journalistes de ce journal, qui gagneraient peut-être à relire le code d'éthique des journalistes. En tout cas, je reviens au sujet, M. le Président, si vous me le permettez et avant que vous m'incitiez à le faire, je reviens au sujet et je dis que... Avez-vous une question à me poser?

M. Bérubé: J'aimerais tout simplement savoir, relativement à ce financement, à ce fonds spécial... Devoir qu'il me surprend un peu...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Question irrecevable, sur la motion s'il vous plaît!

M. Godin: Je l'ai créé moi-même. Cela s'appelle la Société nationale d'aide au Devoir... M. le Président, je termine et je dis que ces gens-là, pour des raisons inconnues... Est-ce qu'ils sont payés par la Société multinationale pour faire cela ici? Est-ce qu'ils couchent encore avec eux? Oui, mais qu'est-ce qu'ils font? Je me pose la question. Qu'est-ce qu'ils font ici? Pourquoi nous mettent-ils les bâtons dans les roues?

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Pré- sident, on entend le député de Mercier badiner depuis tout à l'heure. On peut l'endurer, on peut même rire de certains écarts de conduite, mais je ne peux pas laisser passer l'accusation, la question qu'il vient de poser. Le règlement, je pense, à l'article 99, paragraphe, sous-paragraphe quelconque, interdit à un député de prêter des motifs indignes et je suis convaincu que vous serez d'accord avec moi que si un député était payé par des multinationales pour faire quelque action que ce soit au Parlement, ce serait indigne. Je pense que le député de Mercier s'abaisse à un niveau que je ne l'ai pas vu souvent rejoindre en recourant à de tels procédés. Je le fais de façon très calme; ce n'est pas de cette façon-là, je pense, que le député va obtenir de l'Opposition une certaine collaboration et surtout qu'il va justifier à la population le bien-fondé de sa politique.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier.

M. Godin: Je suis d'accord pour retirer le mot payé actuellement, mais j'aimerais savoir la contribution de ces multinationales au parti libéral des dix dernières années, s'il y a moyen. S'il peut nous déposer cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous êtes complètement hors d'ordre.

M. Godin: D'accord, ok, je retire cela aussi. Mais il reste que je me pose des questions, M. le Président; je ne vois pas la raison pour laquelle ils nous font perdre notre temps ici; je ne vois pas la raison pour laquelle ils n'en viennent pas à l'essentiel de cette loi et qu'ils nous font perdre notre temps sur des détails.

M. Forget: Justement, si vous étiez ici pour autre chose que pour faire votre spectacle, vous connaîtriez la réponse à votre question.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Godin: Ils nous font perdre notre temps sur des détails alors que l'essentiel n'est pas là, ils le savent et ils l'ont dit eux-mêmes. Ils en sont là à jouer sur les mots, à faire des mots croisés avec une chose qui est urgente et importante. Alors, j'ai terminé M. le Président, mais je me pose des questions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: II fait bien de se poser des questions, M. le Président; cela va peut-être lui faire acquérir la sagesse avec les années. Mais il demeure que les insinuations grossièrement malveillantes du député de Mercier ne changent en rien la situation dans laquelle le gouvernement encore une fois ne s'apprête pas du tout. Il serait d'ailleurs fort embêté qu'on ait adopté une telle loi dès

le mois de décembre dernier, parce qu'il ne semble pas du tout en mesure de donner suite, de quelque façon que ce soit, aux projets qui ont été annoncés au mois d'octobre. Il y a dans les délais actuels, et l'acceptation, au fond, fort placide de la part du gouvernement de ces délais, une indéniable impression de soulagement. Tant qu'on est arrêté dans les travaux à l'Assemblée nationale par un débat qui est long, sans aucun doute, on a une excellente excuse pour ne rien faire.

On a, par exemple, et le ministre ne s'est pas privé pour l'utiliser, une excellente excuse pour ne rien faire dans la région du Nord-Ouest québécois, où il n'est absolument pas nécessaire de créer une structure de papier qu'on appelle la Société de l'amiante, la Société nationale de l'amiante, ou quel que soit son nom, pour prendre un intérêt actif au développement d'une nouvelle mine et créer 650 emplois. Cela pourrait se faire par une décision gouvernementale et par une attribution de crédit. (12 heures)

II y a sûrement parmi les futurs hauts fonctionnaires de la Société nationale de l'amiante qui sont déjà à l'emploi du gouvernement, des gens qui sont capables d'évaluer ce dossier et prendre des décisions requises, sans délai, qui n'ont pas besoin du tout d'une créature de papier telle que la Société nationale de l'amiante pour prendre une décision comme celle-là. Ils n'ont pas non plus besoin d'une Société nationale de l'amiante si la compétence du ministère des Richesses naturelles vaut pour quoi que ce soit. Ils n'ont absolument pas besoin d'une nouvel le création, d'une nouvelle structure pour entreprendre la mise en place de certains investissements dont la rentabilité probable a été démontrée dans une certaine mesure par l'étude SORES. Bien sûr que cela ne constitue pas là un "blue print", un plan qui peut être immédiatement transformé en réalisation concrète, mais il y a au moins une amorce très sérieuse de ce côté qui permettrait, pour trois ou quatre produits, dès le mois de janvier, dès le mois de février de cette année, dès le mois de mars cette année, sans attendre des structures nouvelles, de faire démarrer des projets, de compléter les études, de faire amorcer des installations, d'amorcer des discussions avec des distributeurs de produits de construction dans les marchés que l'on veut atteindre etc..

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la motion.

M. Forget: M. le Président, avec la même générosité avec laquelle vous avez permis au député de Mercier de déborder sur à peu près tous les sujets, y compris le financement des partis politiques, je pense qu'il ne peut être difficilement...

M. Godin: II y a peut-être un lien, M. le Président.

M. Forget: II n'y en a pas de lien, M. le Président, il n'y en a absolument pas et je défie le député de Mercier...

M. Godin: Dans le passé... Bien non, à cause de la loi 2.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Forget: ... Et je défie le député de Mercier, comme on s'amuse souvent, de l'autre côté, lorsqu'on a la moindre critique à dire... Et j'invite les auteurs des critiques à mettre leur siège en jeu. Je l'invite à le faire lui aussi, s'il croit avoir la moindre indication sérieuse. Justement, il fait des insinuations gratuites, sans aucune base, sans aucune justification.

M. Godin: Avant la loi 2.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Avant ou après la loi 2, vous ne pourrez jamais établir une pareille affirmation, puisqu'elle est fausse; c'est complètement imaginé.

M. Grégoire: Votre caisse a toujours été cachée. Vous n'avez jamais divulgué votre caisse.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre!

M. Godin: Etiez-vous dans les secrets de Paul Desrochers, vous?

M. Grégoire: Vous ne l'avez jamais divulguée?

M. Forget: Si elle est si bien cachée, M. le Président, elle ne peut certainement pas agir au niveau de la motivation de mon collègue et de moi-même.

M. Grégoire: II y en a qui sont dans le secret des dieux.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! à l'ordre et changez de sujet s'il vous plaît!

M. Godin: II y a une porte ouverte, il y a une porte ouverte...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Godin: Votre cas personnel n'est pas en doute, M. le député.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier...

M. Godin: II faut faire des nuances, vous n'êtes pas concerné par cela.

M. Lalonde: Ecoutez, M. le Président, c'est une question de règlement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! C'est un sujet qui ne concerne absolument pas cette commission parlementaire.

M. Godin: Je parle du passé.

M. Lalonde: Oui, mais écoutez, M. le Président, c'est une question de règlement. J'invoque encore l'article que j'ai invoqué tantôt, l'article 99. Là, le député de Mercier vient de dire que les deux députés de l'Opposition officielle ne sont pas mis en cause. Leur cas n'est pas en doute. Pourtant il l'a fait par ses interruptions depuis tantôt.

M. Godin: J'ai retiré mes paroles.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! J'invite...

M. Godin: M. le Président, une question de règlement, est-ce que j'ai retiré mes paroles, oui ou non là-dessus?

M. Lalonde: ... ou bien on est en cause ou on ne l'est pas. Si on ne l'est pas, le parti ne l'est pas non plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Godin: Quel parti, c'est secret?

M. Grégoire: II a posé la question sur le parti.

M. Lalonde: Non, mais à ce moment-là vous insinuez que l'on serait...

M. Grégoire: On a posé la question sur le parti.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre!

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président. A ce moment-là, les insinuations qui nous prêtent des motifs indignes... Et ce serait indigne pour nous comme membres de ce parlement, de cette commission parlementaire d'être payés par qui que ce soit pour agir ici. Cela a été retiré.

M. Godin: N'en parlons plus.

M. Lalonde: II refait ses accusations en disant, c'est le parti.

M. Grégoire: C'est la question, c'est le parti.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Laplante: La question est de savoir combien le parti a reçu d'argent pour sa caisse électorale.

M. Forget: Ce sont des accusations sous une forme interrogative. Cela n'en change pas la nature. C'est un procédé malhonnête.

M. Grégoire: Mais vous le faites souvent. Vous l'avez fait combien de fois à l'Assemblée, M. le député de Saint-Laurent?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre!

M. Forget: C'est un procédé malhonnête. On s'en reparlera, M. le député de Mercier.

M. Bérubé: Ravi de savoir cela.

M. Grégoire: L'affaire de Bernard Landry.

M. Godin: L'affaire de l'épouse de M. Bernard Landry.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Godin: On n'a pas de leçons à recevoir d'eux là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Je ne sais pas si les propos qui sont tenus sont indignes, je n'ai pas à porter de jugement là-dessus, actuellement, mais votre conduite est certainement à tous, ou du moins pour la plupart, indigne. Cela est une chose qui est sûre et d'autre part, je vous inviterais à revenir au sujet qui nous occupe, c'est-à-dire l'article 1 qui parle d'un nom à donner à une société. La loi numéro 2 a été adoptée. C est moi qui présidais cette commission parlementaire. Elle a été adoptée en commission parlementaire et à l'Assemblée nationale et je ne pense pas qu'elle soit remise en question ici.

M. Forget: M. le Président, relativement à cette question d'un titre plus précis, je ne souscris certainement pas à la longue énumération descriptive qui se retrouve dans les notes accompagnant le projet de loi comme étant un substitut valable pour le titre de cette société. Il reste que, même le député de Mercier dans ses pires moments ne pourra pas nier que l'objectif essentiel de l'opération c'est d'encourager la transformation de produits d'amiante au Québec et pour que cela ait un sens, il faut bien commercialiser ces produits.

C'est essentiellement cela. Ce sont ces deux mots de transformation et de commercialisation qui résument les objectifs de la Société de l'amiante. C'est afin de fixer les esprits et particulièrement l'esprit du ministre sur cet objectif de transformation que nous souhaiterions voir apparaître ces mots dans le titre même de la société, de manière, justement, qu'on ne se disperse pas à droite et à gauche dans des initiatives qui ne sont pas reliées aux objectifs principaux.

Par les documents qui nous ont été distribués, on se rend compte combien, justement, cet objectif risque de n'être pas poursuivi avec beaucoup

de vigueur ou beaucoup d'assurance. On va se fixer un objectif qui est présenté comme un moyen d'action: l'acquisition d'une société minière. Mais la seule justification de l'acquisition d'une société minière existante, c'est de faciliter et de rendre possible ce qui ne serait pas possible autrement, et qui, essentiellement, réside dans le domaine de la transformation et de la commercialisation. Si je comprends l'intention du gouvernement, ce n'est pas d'acheter une mine pour acheter une mine, c'est d'acheter une mine à cause du moyen que cela constituera pour faire autre chose. J'ai compris l'argumentation du ministre.

M. Bérubé: Cela a été long. Mes félicitations, M. le député de Saint-Laurent!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre!

M. Forget: Ne nous félicitez pas trop vite. M. Godin: Cela confirme...

M. Forget: Oui, justement, cela le confirmerait si on tenait pour acquis une telle explication, parce que ce lien entre un moyen prétendu et le but qu'on veut poursuivre n'a pas été démontré. Il n'a été qu'affirmé.

M. Bérubé: Même SORES l'affirme.

M. Forget: Non, elle ne l'affirme pas. Citez-nous une référence précise.

Une Voix: ... on va vous la citer.

M. Grégoire: Ils l'ont dit ici: Ce sera un atout.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Pendant qu'il la trouve, M. le Président, je vais poursuivre mon exposé. Il reste que, dans cette démarche, on a un moyen qui dépasse de loin, en termes de coûts et en termes d'importance et de préoccupations, pour le gouvernement, l'objectif qu'on veut poursuivre. Ce que je veux dire par cela c'est tout simplement qu'on va consacrer le plus clair des ressources financières, le plus clair du temps et des énergies du ministre et du gouvernement à acquérir la mine, c'est-à-dire acquérir le moyen, et on n'aura presque plus d'argent, ni d'énergie, ni de temps, ni de crédits politiques pour réaliser l'objectif qu'on prétend vouloir poursuivre. C'est pourquoi il me semble qu'il serait opportun de souligner, par tous les moyens possibles — sans aucun doute le nom de la société est un moyen, en soi, secondaire, mais c'est un moyen qui, puisqu'on est à cet article 1, doit être pris — c'est un moyen pour concentrer l'esprit du ministre et du gouvernement sur son objectif plutôt que sur les moyens prétendus qu'il entend choisir pour y arriver: l'acquisition d'une mine.

Quand on arrive à la description des objectifs et à la mise en place de projets précis, on se rend compte jusqu'à quel point les idées gouvernementales là-dessus sont floues. Je vous avais dit que je vous citerais justement cette incohérence ou cette absence d'explication relativement à une application précise à un produit de transformation précis, il s'agit des panneaux d'amiante-ciment. Il s'agit là d'un projet de transformation et ce projet de transformation est décrit dans deux documents qui nous sont accessibles. D'une part, le document de SORES et, d'autre part, il y a dans le document du groupe de travail sur l'amiante un paragraphe ou une partie de chapitre qui est consacrée à cette utilisation de l'amiante. Or, on trouve, entre les deux rapports, des divergences qui sont frappantes, M. le Président. On retrouve, en particulier, à l'annexe 2-1 de la phase 2 du rapport SORES, une évaluation du nombre d'emplois et de l'investissement initial qui sont impliqués par un projet de fabrication de plaques finies d'amiante-ciment. Pour ce qui est du nombre d'emplois, on trouve 100 emplois et un investissement initial de $5 millions à $10 millions...

M. Laplante: Est-ce qu'il y aurait possibilité de revenir à la pertinence de l'article?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense que votre remarque est pertinente, à un point tel que j'avais même l'intention de refuser au ministre le droit de répondre au cas demandé par le député de Saint-Laurent puisqu'il est complètement en dehors de l'article 1 qui doit inviter les députés à dire pourquoi ils préfèrent telle appellation de la société plutôt que telle autre appellation. C'est l'objet de nos discussions ce matin.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: La proposition d'amendement du député de Saint-Laurent, c'est d'inclure, d'injecter dans la raison sociale les mots: "pour la transformation et la commercialisation des produits de l'amiante". Je pense que le député de Saint-Laurent est tout à fait justifié de donner des exemples particuliers dans le sens de son amendement, de sa proposition, à savoir que cette société sera appelée à faire de la transformation. S'il passait ses vingt minutes à donner des exemples, on pourrait dire que ce n'est peut-être pas tout à fait pertinent, mais je pense qu'il a l'intention d'en donner un exemple, celui de la transformation et des problèmes que les documents contradictoires constituent pour nous autres, de l'Opposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je comprends ce que vous voulez dire, mais il faudrait que l'exemple donné soit pour démontrer la nécessité d'appeler la société Société pour la commercialisation et la transformation et non pas

pour entrer dans le fonds du débat et la transformation de cet article donné.

M. Lalonde: Oui.

M. Forget: Elle le démontre, je pense M. le Président, sur ce point du règlement, dans la mesure où justement, l'état de non-préparation du gouvernement, des dossiers du gouvernement relativement à la question de transformation, est un signe — il faut bien se fier aux signes qu'on a — que la question de transformation, même si, au niveau des grands principes et des grandes déclarations officielles, cela a l'air d'être l'objectif du gouvernement dans le fond, ce dossier, cette partie du dossier gouvernemental, la partie qu'on connaît au moins du dossier gouvernemental, relativement à la transformation, est dans un état de sous-développement tel que l'on risque très bien de voir une société de l'amiante qui va voir ses activités se résumer à l'achat de mines, ou à la prise de participation des mines éventuelles, telles que celles de l'Abitibi. Sur le plan de la transformation, le dossier dont on dispose est dans un état de sous-développement qui est une indication que l'on est probablement très loin d'initiatives concrètes dans le domaine. Le député de Mercier disait que, si on pouvait adopter cette loi, on pourrait finalement créer des emplois très rapidement, mais c'est aussi notre préoccupation de créer des emplois dans le domaine de la transformation. Mon propos, c'est de démontrer d'une part — ce que j'ai fait tout à l'heure — qu'il n'est absolument pas nécessaire de créer la Société de l'amiante, pour s'impliquer, pour que le gouvernement s'implique dans le domaine de la transformation, il peut le faire d'une infinité d'autres façons, et que, même s'il veut le faire vis-à-vis de ou via la Société de l'amiante, il n'a pas actuellement de dossiers, ce n'est pas l'étude prolongée du projet de loi qui le retarde, c'est l'état d'insuffisance et de non-préparation de ces dossiers relativement à cela.

J'allais citer un exemple qui est justement ce paragraphe du rapport du groupe de travail où contrairement...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est une très large interprétation du mot "transformation ".

M. Forget: Pourtant, la fabrication de panneaux est une des trois productions qui ont été soulignées par SORES comme étant le domaine, et il n'y a pas de produits, il n'y a pas de projet qui soient impliqués.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui je comprends, mais ce que je voulais dire en fait, attendez un peu, M. le député de Frontenac, j'aurai la même attitude envers tous les membres — et je pense quand même avoir raison — c'est que l'essence même de l'article 1 est de donner un nom à une société, puisque tout l'amendement et toute discussion devraient porter sur les raisons qui militent en faveur d'une autre appellation. Le député de Saint-Laurent veut donner des exemples, je le lui permets, mais je donnerai la même permission aux autres.

M. Lalonde: Est-ce que je pourrais tout simplement vous poser une question, M. le Président? Je voudrais quand même que vous soyez fort conscient que l'article 1, ce n'est pas seulement pour désigner la société, mais pour la constituer. Donc, toute question pertinente comme si on doit constituer une société et quel nom on doit lui donner est pertinente.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous me posez la deuxième question, d'accord: Est-ce que l'on doit constituer une société? Là, je le dis, je ne vous suis plus, je ne suis plus d'accord avec vous, parce que cette création a été adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale. Toute argumentation ayant pour objet de dire qu'il ne faudrait pas constituer une société de l'amiante, est hors sujet et hors d'ordre, puisqu'on irait contre un des principes adoptés par l'Assemblée nationale. Je suis sûr que vous êtes conscient.

M. Lalonde: Oui, sûrement, M. le Président, ce n'est pas cela que je voulais dire; ce que ie voulais dire, c'est que l'on ne peut pas maintenant se poser la question si on doit la constituer, mais si cette société ne doit être orientée vers telle ou telle chose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Grégoire: Vous pouvez poser ces questions à l'article 4.

M. Lalonde: Bien oui, mais, dans la mesure où je veux dire que, dans la raison sociale, c'est pertinent.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est très difficile de soupeser tout cela.

(12 h 15)

M. Forget: Je crois bien que, si vous me permettez de continuer, je vais terminer sur cet unique exemple. Contrairement à ce qu'on trouve dans le rapport SORES pour le même produit, qui est le panneau fini d'amiante-ciment, on retrouve un mince paragraphe à la page 16 du rapport où il n'est plus question, contrairement au rapport SORES, de 100 emplois, mais de 200 à 250 emplois, et où il n'est plus question d'un investissement de $5 millions à $10 millions mais d'un investissement de $10 millions à $15 millions. Et ceci, on en dispose, encore une fois, je n'ai pas pu retrouver de choses plus spécifiques relativement aux panneaux d'amiante-ciment... On parle en général de l'industrie d'amiante-ciment et des produits d'amiante-ciment mais on s'attarde beaucoup aux statistiques sur les tuyaux, ce qui n'a rien à voir là-dedans. C'est à peu près tout ce qu'on retrouve dans ce rapport, un paragraphe ou

deux qui traitent de la question des panneaux d'amiante-ciment et là, on gonfle dans un facteur de 2 à 2,5 les estimations qu'on retrouve dans le rapport SORES. Evidemment, le chiffre d'investissement est également plus élevé dans un facteur de 2.

Le ministre pourra dire qu'il s'agit là d'une perspective à plus long terme, encore qu'il n'y a pas de budget pro forma d'investissement et de fonctionnement qui nous permettrait de l'évaluer. C'est un chiffre en l'air comme cela, on dit: Si cela dure plus longtemps, cela coûtera présentement plus cher. Mais cela démontre assez clairement, M. le Président, que jusqu'à maintenant l'attention du gouvernement, les documents qui sont en sa possession ne lui permettent pas de considérer, de façon prioritaire et urgente, l'établissement de l'industrie de transformation. Il a là un dossier, si c'est tout ce dont il dispose — il ne nous a pas annoncé qu'il disposait de quoi que ce soit d'autre dans ce domaine... C'est un des produits les plus prometteurs; le rapport SORES contient à peu près cinq ou six pages de description d'un projet possible avec ses ramifications sur le plan de la commercialisation; l'analyse gouvernementale se limite à un paragraphe. Si c'est tout ce qu'il a là, on pourrait bien en parler pendant un an du projet de loi no 70 et je n'ai pas l'impression qu'on retarderait quoi que ce soit de concret. Tout cela est à l'état d'ébauche très, très, très préliminaire et, d'ailleurs, je mets au défi le ministre, même si on adoptait sa loi d'ici la fin du mois, de voir quoi que ce soit de concret se faire dans le domaine des panneaux d'amiante-ciment avant trois ans. Ce sera, pour la prochaine élection, une promesse fort intéressante pour le Parti québécois à faire dans la région. D'ailleurs, je pense que, là-dessus, il a d'habiles politiciens qui savent très bien qu'ils ont plus à gagner de promettre quelque chose dans le domaine de la transformation que de le réaliser. Parce que quand ce sera réalisé, ce n'est pas 100 emplois additionnels avec les quelques milliers de chômeurs, les 23% de chômeurs de la région de l'amiante, qui vont occasionner vraiment des ovations populaires auxquelles le ministre s'attend lors de ses visites éventuelles.

M. Bérubé: C'est mieux que de ne rien faire.

M. Forget: C'est mieux que de ne rien faire mais c'est mieux de le promettre politiquement dans les tournées électorales du ministre et de ne pas le réaliser parce que la réalisation risque d'être décevante, d'autant plus que si c'est 100 emplois...

M. Bérubé: On ne promet rien. On ne promet pas 100 000 emplois, nous.

M. Forget: ... plutôt que 250 emplois. Non, vous seriez bien malvenus de les promettre, d'ailleurs, parce que c'est plutôt 100 000 emplois de moins que vous avez.

M. Lalonde: C'est 100 000 chômeurs de plus qu'on a depuis un an, 100 000 chômeurs de plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: C'est pour cela que vous empêchez la loi d'être adoptée.

M. Forget: M. le Président, pour me résumer là-dessus, et c'était le but de cet exemple... C'est un exemple que tous peuvent consulter, il y a la page 82 du rapport SORES, l'annexe 2-1, la page 16 du document sur le groupe de travail. On verra là à la fois des contradictions et une analyse tellement sous-développée, une esquisse tellement préliminaire que cela convainc le lecteur, à première vue, qu'il n'y a rien là, comme on dit. Il n'y a rien là dans les cahiers gouvernementaux, il n'y a rien là au point de vue des plans et si on veut que cela se réalise un jour, je pense qu'un des efforts qu'on peut faire au moins dans le titre, c'est d'attirer l'attention du gouvernement sur des objectifs qu'il s'est donnés à lui-même dans ce domaine, pas d'acquérir des choses qui existent déjà, qui ont été créées par d'autres mais d'en créer lui-même dans le domaine de la transformation et de la commercialisation. C'est un défi exaltant à relever, c'est un véritable défi à relever. Cela n'a pas été créé par le gouvernement, je pense, non.

M. Godin: Les mines n'ont pas été créées par le gouvernement.

M. Forget: Bien non.

M. Godin: C'est créé par le bon Dieu, cela.

M. Forget: Les mines ont été créées par le bon Dieu! Les gisements sont créés par le bon Dieu mais les mines, ordinairement, c'est fait par les hommes.

M. Godin: Une mine, ce serait un gisement.

M. Lalonde: Bien oui, mais la mine est une entreprise.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: C'est le trou, la mine.

M. Lalonde: C'est une entreprise, la mine.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: Alors, le trou a été creusé par des hommes, au cas où notre barde national serait mélangé dans son vocabulaire. Les mines ont été créées par des hommes, avec des pics, des pelles et des pelles mécaniques éventuellement.

M. Godin: Est-ce que le minerai était dans le trou?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est complètement hors sujet.

M. Forget: Ce n'est pas le gouvernement qui a créé cela, M. le Président.

M. Godin: Mais est-ce que le minerai était là ou s'il n'était pas là?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît!

M. Forget: M. le Président, je pense que ce sont des enfantillages, on sait très bien que le défi que le ministre...

M. Godin: La conclusion...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier, vous pourrez discuter la conclusion. Il vous reste huit minutes.

M. Forget: ... a à relever, ce n'est pas d'acheter les mines existantes, c'est de créer la transformation et de commercialiser les produits qui vont en sortir. C'est un défi qu'il serait capable de relever sans créer la société de l'amiante, il n'a pas besoin de faire cela pour y arriver. La raison pour laquelle il ne l'a pas fait jusqu'à maintenant, ce n'est pas ce débat qui s'éternise, c'est qu'il n'est pas prêt à le faire, il ne sait pas comment s'y prendre encore et il va encore, pendant un an, un an et demi ou deux ans, patauger dans des études préliminaires; on le verra, on aura ce débat aux crédits des Richesses naturelles dans un an et vous verrez dans quel état d'improvisation le ministre devait se trouver au printemps 1978; parce que, au printemps 1979, il va encore parler d'études préliminaires, d'esquisses et de plans en préparation. On a déjà vu...

M. Godin: De votre bord, oui!

M. Forget: ... de la part du gouvernement actuel, des promesses qui devaient se réaliser en un mois et, un an plus tard, ne s'étaient pas encore accomplies.

M. Lalonde: Le centre des congrès à Montréal devait être commencé en septembre 1977.

M. Forget: C'est cela, le centre des congrès va être réalisé probablement plus rapidement que les projets de transformation. C'est la raison pour laquelle on voudrait...

M. Godin: M. le Président, question de privilège; je n'accepterai pas...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Question de privilège à...

M. Godin: ... oui certainement, on parle du centre des congrès, le stade Taillibert a été fait sans concours; ça a été plus vite, mais il a coûté plus cher.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier, il n'y a pas de question de privilège.

M. Godin: Non, mais ils ne nous lanceront pas la boue ainsi sans qu'on réagisse.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, mais vous avez encore huit minutes...

M. Lalonde: Oh, lancer la boue, vous êtes bon là-dedans, vous!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent, il vous reste une minute pour conclure.

M. Forget: II me reste une minute, alors je conclus, M. le Président, en disant que si on ne veut pas que le gouvernement prenne une voie d'évitement, la voie de la facilité, une modeste contribution de l'article 1 serait de l'inviter, chaque fois qu'il utilisera la papeterie de la Société nationale de l'amiante, à se rappeler que c'est là pour la transformation et la commercialisation des produits, pas pour l'acquisition des mines.

Vote sur la motion d'amendement

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que l'amendement du député de Saint-Laurent, tel que modifié par l'amendement du député de Richmond, sera adopté?

M. Grégoire: L'appel des votes!

M. Godin: Est-ce que je peux dire la raison pour laquelle je vais voter contre, M. le Président?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II vous reste huit minutes pour le dire.

M. Godin: C'est que, au point de vue du sigle, le nôtre se lit SNAQ, le leur se lirait SPLTELCDPEDA, il n'y a pas moyen de le mettre nulle part, c'est la raison pour laquelle je serai contre, M. le Président.

M. Lalonde: C'est mieux que le "PQuiou."

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bérubé, Matane.

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Godin, Mercier.

M. Godin: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu, Richmond.

M. Brochu: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Forget, Saint-Laurent.

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire, Frontenac.

M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Laplante, Bourassa.

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Ouellette, Beauce-Nord.

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt, Saint-François.

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Lalonde, Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: En faveur.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'amendement du député de Saint-Laurent, tel qu'amendé par la motion du député de Richmond, est rejeté six voix contre trois.

Nous revenons maintenant à la motion principale.

Est-ce que cette motion sera adoptée?

M. Forget: M. le Président, on a un autre amendement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent il vous reste...

M. Grégoire: Voyons donc!

M. Godin: S'agit-il d'affaires définitives ou bâclées comme les autres?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bérubé: M. le Président, est-ce que nous pourrions demander... Je sais que le règlement ne nous le permet pas, mais est-ce que le député de Saint-Laurent voudrait, peut-être, distribuer la collection d'amendements, de manière que nous puissions évaluer ces amendements, pouvoir juger...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Saint-Laurent.

M. Grégoire: M. le Président, ce serait peut-être bon pour ne pas être pris au dépourvu.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si M. le député de Saint-Laurent veut le faire, c'est bien son droit, mais il n'y a aucun article du règlement qui peut forcer...

M. Bérubé: Non, mais on pourrait tout simplement l'inviter...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président, là-dessus, puisque la question est posée, je pense qu'elle mérite qu'on s'y attarde. On a pensé les distribuer, mais certains amendements seraient désuets au cas ou d'autres auraient été acceptés. Alors je pense que les députés et le ministre en particulier qui semble commencer à porter un peu d'intérêt aux travaux — je l'en félicite — serait tout mêlé là-dedans. Alors, M. le Président...

M. Grégoire: ...

M. Godin: Ils viennent de faire une bonne évaluation de leur travail...

M. Lalonde: M. le Président, il ne comprendrait rien, son niveau de compréhension ne dépassant pas le genre de travail comme...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Là c'est vrai qu'on est en dehors de l'article 1.

M. Lalonde: ... le rapport du groupe de travail; il serait inutile d'essayer.

M. Grégoire: Démêlez-vous d'abord.

M. Godin: Ils énoncent leur propre confusion, c'est extraordinaire!

M. Forget: M. le Président, il y a déjà un certain nombre de précédents qui ont déjà été créés dans la désignation des sociétés d'Etat qui sont actives dans plusieurs domaines. Parmi les plus récentes, la Société québécoise d'initiatives agroalimentaires, la Société québécoise d'exploration minière, la Société québécoise d'initiatives pétrolières, etc..

Une Voix: Vous avez lu le bottin du gouvernement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! A l'ordre!

M. Forget: Ce sont des exemples que je rappelle, je n'ai pas besoin du bottin pour les citer, je les connais bien et tout le monde connait bien, je pense, ces entreprises pour la contribution qu'elles font ou qu'elles feront un jour à l'économie du Québec. Il me semble qu'en s'inspirant de ces précédents et pour éviter la confusion dans l'esprit de ceux avec lesquels cette société va transiger, particulièrement à l'extérieur du pays, il serait approprié d'avoir le même genre de désignation. C'est une proposition que nous aimerions faire, parce qu'il nous semble que c'est plus normal d'avoir une désignation standard pour les sociétés d'Etat, plutôt que de faire varier cette désignation selon le contexte politique ou électoral du moment.

II y a donc d'excellentes raisons, il me semble, pour adopter une chose comme celle-là. A la limite, c'est presque une proposition qui aurait dû émaner du gouvernement et qu'on pourra nous reprocher d'avoir faite à cause de l'épithète que l'on veut utiliser dans le titre de cette société. On pourra y voir une intention de flatter le parti au pouvoir, mais loin de nous cette intention. Encore une fois, c'est tout simplement pour procéder relativement à cette question sur l'amiante, à cette initiative gouvernementale dans le domaine de l'amiante, de la même façon que les gouvernements précédents ont procédé lorsqu'il s'est agi d'intervenir dans certains secteurs de l'économie.

Cette désignation n'a jamais causé de controverse, à ma connaissance, et il y a pour cela de bonnes raisons, puisqu'il s'agit d'une désignation tout à fait descriptive. Essentiellement, il s'agirait de désigner la société de l'amiante comme étant la société québécoise de l'amiante. J'imagine que le parti québécois, qui se flatte d'une telle désignation, ne serait pas, c'est très prétentieux dans le cas d'un parti politique...

M. Grégoire: C'est un beau nom.

M. Forget: Oui, c'est sûrement un beau nom, il n'y a pas d'erreur.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: C'est très impérialiste.

M. Grégoire: C'est moi qui l'avais proposé.

M. Bérubé: C'est une idée originale du député de Frontenac.

M. Grégoire: J'avais été le parrain du nom. M. Forget: C'est très impérialiste.

M. Godin: Cela répond davantage à la réalité que le Parti libéral, en tout cas.

M. Forget: C'est très impérialiste comme désignation évidemment puisqu'on se prétend à ce moment les seuls à mériter l'épithète avec beaucoup de...

M. Godin: ... Des libéralistes.

M. Forget: C'est un très beau nom aussi.

M. Godin: L'êtes-vous toujours?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: La liberté d'un libéral...

M. Forget: La liberté est une valeur universelle.

M. Godin: Prouvez-le. Montrez-vous-en dignes!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: Est-ce que le député de Saint-Laurent pourrait nous dire la liste de tous les noms qu'il a l'intention de proposer à l'article 1, peut-être que dans le lot on en trouvera un qui conviendra à ce moment... vous m'avez permis une question.

M. Forget: Peut-être en trouverez-vous un... On vous les donne par ordre de préférence.

M. Grégoire: Donnez-les nous quand même par ordre de préférence, avec différentes motions, peut-être qu'à ce moment, on pourra en trouver un qui ferait l'affaire de tous, et on collaborera, le député de Marguerite-Bourgeoys sait qu'on peut collaborer.

M. Lalonde: M. le député ne s'est pas rendu compte que c'est l'Opposition qui mène. Il va falloir qu'il s'en rende compte tranquillement; cela entre.

M. Grégoire: On veut bien, sur certains points. Mais, on ne vous laissera pas mener. C'est le règlement qui mène. Le règlement vous permet de proposer 200 noms.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Le règlement ne mène pas maintenant.

M. Grégoire: C'est de plus en plus prévisible. Si le député veut nous faire la liste, on pourrait peut-être choisir. On vous offre notre collaboration afin peut-être de choisir un de vos noms...

M. Bérubé: La collaboration du gouvernement.

M. Grégoire: ... s'il est meilleur.

M. Forget: Vous voterez pour nos motions, on les présente par ordre de préférence et si vous adoptez celle-là on va s'interrompre immédiatement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: II y en a peut-être des meilleurs dans votre liste.

M. Lalonde: Nous pensons que c'est le deuxième meilleur.

M. Grégoire: Oui mais on peut tout de même s'entendre, à un moment donné.

M. Bérubé: Je vois le député de Richmond qui est également dubitatif.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Laisseriez-vous présenter la motion au député de Saint-Laurent, s'il le veut, avant 12 h 30, s'il ne le veut pas...

M. Bérubé: Cela n'est pas vraiment la peine.

M. Forget: Je dispose de quelques minutes encore.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquire): On pourrait la déclarer recevable immédiatement, je l'ai vue.

Motion pour remplacer le mot "nationale" par le mot "québécoise"

M. Forget: Vous l'avez vue, M. le Président. Alors, écoutez, il s'agit de la motion suivante dont je vais faire la lecture effectivement: Que l'article 1 soit modifié en remplaçant, dans la deuxième ligne, le mot "nationale" par le mot "québécoise" et en ajoutant l'alinéa suivant: La société peut également être désignée sous le nom de SOQUAM.

L'article amendé se lirait comme suit: Une compagnie à fonds social, ci-après appelée la société, est constituée sous le nom de Société — il y a une faute de frappe-là québécoise de l'amiante...

M. Godin: L'amiante, c'est quoi?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: II y a une improvisation, M. le Pré- sident, on parle de l'"amiante, il n'y a pas d'amiante au Québec.

M. Grégoire: Je me demandais...

M. Godin: On est riche en richesses naturelles mais on n'a pas d"'amiante".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Bérubé: II y a peut-être une faute de frappe.

M. Godin: ... qui ont préparé ces amendements, M. le Président, et c'est totalement inacceptable.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: II faut...

M. Grégoire: L'Opposition est minable, M. le Président, mais ce n'est pas de l''amiante". C'est minable, je l'admets.

M. Godin: M. le député, est-ce que...

M. Lalonde: M. le Président, je suggère...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Les travaux de la commission sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 12 h 31)

Reprise de la séance à 16 h 40

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, messieurs!

Les membres de la commission pour la présente séance sont: M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt (Saint-François), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin (Mercier), M. Gratton (Gatineau), M. Landry (Fabre), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Léger (Lafontaine), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda).

M. Forget: Je ferai lecture d'une motion pour rafraîchir la mémoire des membres de la commission deux minutes quant au contenu de cette motion. Il s'agissait de voir un article amendé qui se lirait comme suit: Une compagnie à fonds social, ci-après appelée "la société", constituée sous le nom de Société québécoise de l'amiante. La société peut également être désignée sous le nom de SOQUAM.

Je ne reprendrai pas les propos que j'ai tenus avant la fin de nos travaux de ce matin. Il s'agit de suivre le patron déjà largement représenté dans les sociétés d'Etat au Québec et d'adopter, pour cette société de l'amiante, la même désignation, désignation d'un même genre que celle qui existe pour d'autres sociétés actives dans le monde économique.

C'est un qualificatif qui permet d'identifier clairement l'entreprise au Québec, sans ambiguïté, sans que des acheteurs étrangers ou des entreprises avec qui la société contracterait à l'étranger ne se méprennent sur le sens de ce mot, de l'appartenance ou du rattachement de cette société, puisque toute confusion avec une société nationale des pétroles ou autre entreprise de caractère fédéral serait ainsi éliminée.

Il serait possible de la distinguer très clairement. Le but d'un nom, c'est de permettre une désignation qui ne donne pas ouverture à la confusion.

Voilà, M. le Président, c'est une proposition que nous faisons. J'espère que le gouvernement pourra y réagir de façon constructive, pour une fois. Je n'ai pas d'autres remarques à ajouter.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président, simplement quelques mots sur cette nouvelle motion qui nous est présentée maintenant par le député de Saint-Laurent pour que, selon le texte qu'il nous a présenté, la Société nationale de l'amiante soit désormais désignée comme étant la Société québécoise de l'amiante.

En ce qui me concerne, pour les raisons que j'ai évoquées ce matin à l'appui de ma motion de sous-amendement, soit d'inclure et de conserver dans l'appellation de cette société de l'amiante le mot "nationale", je vous dirai que je ne pourrai souscrire à cette motion du député de Saint-Laurent.

J'ai été quand même un peu surpris qu'on revienne avec cette motion, avec le mot "québécoise " au lieu du mot "nationale", puisqu'il m'ap-paraît que la nuance entre les deux n'est pas tellement grande sur le plan pratique, sauf, peut-être — et cela devient plus important — sur l'aspect nationaliste qui s'en dégage. Encore là, on retourne à la même argumentation que ce matin. En ce qui concerne l'Union Nationale, nous ne craignons pas du tout cet aspect de nationalisme qui doit se dégager de la province de Québec, nationalisme sain, normal, logique, respectueux des autres, mais en même temps voulant s'affirmer.

Dans ce sens-là, je ne peux donc souscrire à cette motion puisque, dans la logique de ce que j'ai présenté ce matin et pour les mêmes arguments, je tiens à ce que soit inclus dans l'appellation de cette société de l'amiante l'élément nationaliste, l'élément de Société nationale de l'amiante.

M. le Président, je limiterai mes commentaires pour le moment puisque je ne pourrai pas poursuivre, pour les mêmes raisons que je n'ai pas l'intention de reprendre, puisque je pense que j'ai fait un tour d'horizon plus large, suffisant, ce matin.

A ce moment-ci, je vous dirai simplement que je n'appuierai pas... Je voterai contre cette motion d'amendement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le ministre.

M. Bérubé: Je n'ai rien à dire, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous n'avez rien à dire. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, seulement quelques mots. On a passablement indiqué la raison pour laquelle l'Opposition officielle désire conserver le caractère exclusif, l'aspect plus précieux de l'emploi du mot "nationale" à des institutions plus importantes, surtout que cette société va simplement être une société commerciale, industrielle, ayant des activités minoritaires dans le secteur de l'amiante. Mais il y a aussi l'aspect ambiguïté qui est un aspect pratique.

Le député de Richmond vient de dire que la nuance entre "nationale" et "québécoise" n'est pas grande. Au contraire, en pratique, cela fait la différence suivante: C'est que les gens avec qui cette société va faire affaire vont pouvoir l'identifier plus facilement. La Société nationale de l'amiante, cela peut être aussi bien une société nationale fédérale. Cela peut être une société nationale française. Cela peut être une société nationale de partout, tandis que si l'on dit: Société québécoise de l'amiante, il n'y a pas d'ambiguïté

possible, il n'y a pas de doute, c'est la société du Québec. Je pense que c'est le principal avantage de l'amendement qui est proposé par le député de Saint-Laurent.

J'aimerais profiter de cette occasion — je pense que je ne vais pas à rencontre du règlement — pour relever une accusation du député de Mercier, faite ce matin à l'endroit de l'Opposition officielle à l'égard des motions d'amendement de l'Opposition officielle. Le député de Mercier a accusé l'Opposition officielle de vouloir retarder l'implantation de la politique de l'amiante au Québec par les discussions que l'Opposition entend faire ici, à la commission parlementaire, sur le projet de loi no 70. Je pense que ces accusations sont complètement non fondées, manquent complètement de fondement.

La politique de l'amiante du gouvernement, à très court terme, c'est l'acquisition d'une société d'extraction. A moyen terme, semble-t-il, ce sera l'implantation d'entreprises de transformation tout en, espérons-le, n'oubliant pas l'aspect salubrité pour non seulement l'entreprise que le gouvernement ou les entreprises que le gouvernement veut implanter, mais aussi pour tout le secteur de l'extraction et de la transformation de l'amiante qui n'appartiendrait pas au gouvernement. Tout cela peut se faire à l'extérieur de la Société nationale de l'amiante.

On a assisté, il y a une dizaine d'années, à la nationalisation de l'électricité qu'un gouvernement libéral a faite dans un secteur tout à fait névralgique, tout à fait stratégique au niveau de l'énergie qui appartenait à différentes personnes et qui a été considérée comme devant être un bien public. Cela a été fait, sans même qu'une société soit créée. Il y avait déjà des sociétés qui pouvaient la prendre. Cela a été fait de cette façon. De la même façon, l'implantation, par exemple, c'est absolument urgent. Si le gouvernement était prêt, ce qu'il n'est pas, à procéder à l'implantation d'entreprises de transformation actuellement, à ce moment-là... Le député de Frontenac me demande s'il peut quitter.

M. Grégoire: ...

M. Lalonde: II a ma permission, M. le Président.

M. Grégoire: D'accord, merci. J'ai un appel téléphonique à faire.

Une Voix: Le temps d'un appel téléphonique.

M. Lalonde: On peut peut-être prendre le vote en attendant.

M. Grégoire: Vous m'avertirez.

M. Lalonde: Le gouvernement n'est pas prêt pour une implantation. Il peut le faire, d'ailleurs, sans cette Société nationale de l'amiante. Cette société nationale de l'amiante n'est qu'un instrument. Il y en a beaucoup d'autres. Rien n'empê- che, par exemple, la Société générale de financement d'investir dans le secteur de l'amiante, de même que d'autres sociétés qui appartiennent à l'Etat actuellement. Rien n'empêche SOQUEM, compte tenu des détails de ces pouvoirs — je ne veux pas donner une opinion juridique, à savoir si elle a le pouvoir de le faire ou non... Je suis parfaitement d'avis que la SGF, par exemple, pourrait fort bien, simplement par une décision, suivant une directive, une politique générale du gouvernement, s'impliquer dans des entreprises de transformation de l'amiante. On n'a pas besoin de la Société nationale de l'amiante. De la même façon, une société d'Etat existante pourrait fort bien servir d'instrument d'acquisition de la société Asbestos.

On n'a pas besoin de la Société nationale de l'amiante, ce qui nous remplit d'aise, nous de l'Opposition, parce que nous sommes convaincus que l'avenir immédiat de la politique de l'amiante du gouvernement ne dépend pas de l'adoption de la loi no 70, ne dépend pas de la constitution immédiate de la société, de sorte que nous avons amplement le temps de regarder sur toutes les coutures le projet de loi qui nous est soumis. Nous avons la conviction que nous ne retardons pas d'une seule seconde l'implantation de la politique de l'amiante du gouvernement, ce qui démontre, toutefois, que les accusations du député de Mercier n'ont absolument aucun fondement et sont reçues comme telles par l'Opposition. Nous n'avons pas l'intention de changer, de modifier en aucune façon notre attitude.

Au départ, nous avons dit en deuxième lecture: Nous sommes complètement défavorables à l'acquisition, à la politique de l'amiante du gouvernement qui veut procéder à l'acquisition, au coût de dizaines de millions et peut-être de centaines de millions, d'une société d'extraction, d'une société qui ne fait pas la transformation de l'amiante pour arriver, éventuellement, à implanter des entreprises de transformation.

Nous n'avons pas eu la démonstration par le gouvernement qu'il fallait procéder de cette façon. Je pense que c'est notre responsabilité vis-à-vis de la population que d'exiger de ce gouvernement qu'il en fasse la démonstration. Nous avons demandé des documents, nous en avons eu quelques-uns. Nous avons décortiqué celui qui émanait du gouvernement, du ministère, d'un groupe de travail qu'on n'a pas voulu identifier, un groupe de fantômes. Là-dessus, il y a quatre lignes, sans aucune démonstration. Il y a une affirmation, à savoir qu'il faut acheter une compagnie de l'amiante pour faire de la transformation.

M. le Président, c'est notre responsabilité comme Opposition d'exiger que ce gouvernement fasse la démonstration du bien-fondé de sa politique, surtout de l'acquisition d'Asbestos Corporation. C'est un des moyens qui est donné à l'Opposition. Nous allons prendre tous les moyens nécessaires, conformément aux règlements, pour amener le gouvernement à se plier à ces exigences qui sont tout à fait justifiables. Nous allons parler le même langage tout au long de ce débat. Les accusations du député de Mercier sont sans fondement et ne nous concernent pas.

Toutefois, et je vais terminer là-dessus, concernant les accusations du député de Mercier, il a cru devoir recourir à l'injure à l'égard de l'Opposition pour étayer son argumentation. Nous avons eu quelques échanges. Il a dû retirer ses paroles. Je ne reviendrai pas sur le contenu. Je voudrais simplement dire que, lorsqu'on en est rendu à devoir recourir à l'injure vis-à-vis de l'Opposition, c'est une indication, à mon sens, que le gouvernement ne se sent pas très à l'aise dans sa politique.

Il a eu aussi un autre argument, l'argument ad hominem. Les gens de ma génération ont été assujettis dans leur jeunesse à un système d'argumentation. On leur a enseigné deux sortes d'arguments: l'argument d'autorité — Mgr Lartigue l'a dit, donc cela doit être vrai — et l'argument ad hominem. Je ne parlerai pas ici, ce serait probablement antiparlementaire, des arguments que le député de Mercier a employés à l'endroit du député de Saint-Laurent relativement au ramollissement de son cerveau ou des farces de cette nature. Je pensais que le député de Mercier était un peu plus jeune. Je m'excuse de devoir dire ces propos en son absence, mais il fait quelques incursions ici, et ensuite il s'enfuit. Mais, que voulez-vous, je ne suis pas pour attendre qu'il revienne. Alors, c'est le genre d'argument que... J'aurais cru que la participation d'un poète à la chose gouvernementale, à la "res publica" aurait donné une dimension nouvelle, une dimension pleine d'espoir à nos débats, mais je m'aperçois qu'au contraire il a contribué, par ses interventions, à réduire le débat à un simple échange de rue.

Alors, M. le Président, c'est un avertissement qu'on doit faire au député de Mercier. Nous n'allons pas nous laisser entraîner dans ce genre d'échanges.

Pour revenir au remplacement du mot "nationale" par le mot "québécoise", c'est une attitude réaliste qu'on doit avoir là-dessus. On ne doit pas faire de la petite politique, de la politicaillerie, de la partisanerie là-dessus. Il s'agit simplement d'être pratique. La Société québécoise de l'amiante va faire autant de belles choses pour les travailleurs que la Société nationale de l'amiante, sauf que, pour la Société québécoise de l'amiante, les gens vont savoir de quoi il s'agit. Il s'agira du Québec. Une société nationale de l'amiante, il y en a peut-être une en France. Je l'ignore. Il peut y en avoir une demain matin en France. Il peut y en avoir une dans d'autres provinces, avec un nom français, dans certaines provinces. Alors, pourquoi s'assujettir à la confusion et à l'ambiguïté? Ce serait si simple de dire la Société québécoise de l'amiante. C'est une des raisons pour lesquelles les dernières sociétés d'Etat ont été ainsi nommées. Dieu sait si les anciens gouvernements libéraux ont présidé à la constitution de certaines sociétés d'Etat. On sait de quoi on parle. Nous identifions généralement nos sociétés par le qualificatif de québécois ou québécoise ou du Québec. C'est simplement une attitude pratique, une attitude réaliste, qui ne fait pas appel à toutes sortes de chimères politiques, de partisanerie. C'est pourquoi nous invitons le gouvernement à revenir sur terre, à cesser de pelleter des nuages sur le dos des Québécois. En appuyant notre motion d'amendement, M. le Président, je pense que le gouvernement démontrerait qu'il a une attitude, qu'il a décidé, à compter d'aujourd'hui, après un mois d'arrogance, de s'asseoir et de discuter réellement et avec réalisme de ce projet de loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, je voudrais dire deux mots en deux minutes, parce que le député de Marguerite-Bourgeoys a déclaré que l'Opposition était nettement contre la politique québécoise de l'amiante. Je suis heureux qu'il l'ait dit cet après-midi, M. le Président, et je vais vous dire pourquoi. Il y a ici aujourd'hui un mineur de l'amiante qui est maintenant à sa retraite et qui a travaillé pendant des années et des dizaines d'années dans les mines d'amiante. Il sait ce que c'est. Il n'est pas complètement atteint par l'amiantose. Il en a un peu, pas pour nuire encore à sa santé, mais il en a un peu après toutes ces années passées dans les mines. Je suis content qu'il ait entendu le Parti libéral déclarer qu'il était contre la politique québécoise de l'amiante. Cette population attend depuis si longtemps...

M. Lalonde: J'invoque le règlement, M. le Président.

M. Grégoire: Cela fait mal!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, puis-je vous dire que vous êtes complètement hors du sujet?

M. Lalonde: M. le Président, le règlement, je pense, me donne le droit de demander la parole pour rectifier les propos du député à l'endroit de mes dernières paroles, je pense.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voilà ce qui arrive lorsque les députés ne se conforment pas à l'objet de la discussion. Le député de Marguerite-Bourgeoys — j'ai été souple — est sorti quelque peu de la motion, le député de Frontenac enchaîne en sortant également de la motion, ce qui amène l'article 96. Vous voyez les résultats.

M. Grégoire: Alors, je conclus en disant, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Concluez... Vous ne pouvez pas conclure, parce que vous n'êtes pas dans le sujet, M. le député de Frontenac.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense que vous avez passé... Très brièvement, parce que...

M. Lalonde: Sur la question de règlement, M. le Président, est-ce que l'article 96 m'oblige d'attendre la fin des propos du député?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La fin des propos du député sera possible pour autant qu'il revienne au sujet de la motion, mais s'il doit parler sur le même sujet, il n'y aura pas de continuation de l'intervention. D'autre part, habituellement, lorsque l'intervention est illégale, je pense que la réplique l'est également.

M. Lalonde: M. le Président, si vous lui avez permis de dire des choses illégales, vous allez quand même me permettre légalement de les...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, mais je vous avais permis également à vous aussi de sortir du sujet.

M. Lalonde: Comme au député de Mercier.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Comme au député de Mercier, oui. C'est comme cela, quand on fait preuve de trop de souplesse. Ce n'est pas seulement vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ce sont tous les députés ici présents que je vise. M. le député de Frontenac, vous avez le droit de parler 20 minutes sur la motion en discussion et uniquement sur la motion. Je vous accorderai le droit, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, en vertu de l'article 96, de rectifier brièvement, puisqu'il n'y a pas de débat là-dessus. (17 heures)

M. Grégoire: M. le Président, je vais seulement terminer en disant que nous allons voter contre cet amendement, parce que nous sommes fiers du titre, la Société nationale de l'amiante. Cette société permettra l'application de la politique de l'amiante du gouvernement québécois qui sera favorable aux travailleurs de l'amiante et à la région de l'amiante. C'est tout ce que j'ai à dire. Si le parti de l'Opposition n'est pas en faveur nous le sommes.

M. Lalonde: M. le Président, je viens d'être témoin — jusqu'à maintenant, nous sommes habitués aux blagues du député de Frontenac — de la plus sale démagogie que j'aie entendue depuis longtemps en présence d'un travailleur frappé par l'amiantose...

M. Grégoire: Je n'ai pas dit frappé, je l'ai bien dit.

M. Lalonde: ... mais quand même, c'est un travailleur de l'amiante et qui est ici présent, devant lequel le député de Frontenac vient de déformer complètement mes paroles. J'ai dit que j'étais contre la politique adoptée par le gouver- nement pour l'implantation d'entreprises de transformation au Québec. La sale démagogie...

M. Grégoire: C'est ça que j'ai bien compris.

M. Lalonde: ... du député de Frontenac a été faite...

M. Laplante: C'est ce que j'ai dit.

M. Lalonde: ... lorsqu'il a sorti de mes propos simplement une intention de me désintéresser complètement de l'aspect de salubrité et de la santé des travailleurs. Maintenant, si c'est la façon dont le député de Frontenac veut encore continuer de conduire nos débats, je l'avertis lui aussi que je ne le laisserai pas faire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! Il n'y a pas de débat là-dessus. C'est très clair...

M. Grégoire: C'est très clair.

Vote sur la motion

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! C'est tellement clair qu'à l'avenir, pour ne pas que ces choses se reproduisent, je vais être encore plus strict sur l'objet de vos propos, messieurs. Est-ce que l'amendement du député de Saint-Laurent sera adopté?

M. Grégoire: L'appel des noms, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bérubé (Matane)?

M. Bérubé: Je dois bien être contre, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bordeleau (Abitibi-Est)?

M. Bordeleau: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu (Richmond)? M. Brochu, excusez-moi, je n'ai pas entendu.

M. Brochu: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire (Frontenac)?

M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion est rejetée à 7 voix contre 2.

S'il vous plaît! Nous revenons à la motion principale. L'article 1 est-il adopté?

M. Bérubé: ... appeler.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent, il vous reste cinq minutes sur la motion principale.

M. Forget: M. le Président, dans un motif de compromis, pour démontrer que nous ne sommes pas doctrinaires...

Une Voix: ... démontrer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Voulez-vous faire ça tout seul? Essayez de le faire sans l'Opposition, vous verrez!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Pour démontrer précisément le caractère non doctrinaire de notre position, contrairement à celle du gouvernement, nous suggérions, pour fins de meilleure identification de l'entreprise en question, que nous retenions, comme il le faut bien, puisque les autres motions précédentes ont été défaites, grâce à la force du nombre, que l'appellation "nationale" demeure, mais qu'elle soit complétée par une référence à l'implantation de cette entreprise qui pourrait être une entreprise belge, française ou autre. Il s'agit de la société nationale de l'amiante qui n'est pas située n'importe où.

M. le Président, encore une fois, pour éviter la confusion dans l'esprit des groupes commerciaux et industriels avec lesquels cette société fera affaire, présumément, si un jour elle fait affaire avec qui que ce soit, ce qui est peut-être beaucoup présumer, mais en supposant qu'on dépassera le niveau des voeux pieux, des plans, des études, des documents semi-publics et semi-personnels de fonctionnaires ou de ministres, parce que tout ça, c'est complètement mélangé dans les documents qui nous ont été remis, on peut envisager qu'un jour, peut-être sous un autre gouvernement que le gouvernement actuel, on cessera de s'amuser avec le symbolisme verbal et on passera à des réalisations concrètes. Ce qui, encore une fois, pourrait être fait, sans créer cette coquille vide de sens et vide de contenu, du moins dans l'état actuel du dossier qu'est la Société nationale de l'amiante, tel que le conçoit le gouvernement.

Il n'en a pas besoin, de cette société, M. le Président. Il insiste malgré tout pour créer des structures. Au moins, faudrait-il que ces structures soient identifiées, de manière que leur appartenance soit reconnaissable, de même que les objectifs. C'était le but des amendements précédents.

Malgré tout, encore une fois, ils vont tenir pour acquis qu'on aura une société nationale de l'amiante, mais on pourrait peut-être ajouter "du Québec", de manière à ne pas entretenir de confusion et à bien mettre le nom du Québec aussi. La société nationale de l'amiante, non seulement cela pourrait exister ailleurs comme société d'importation et de transformation; il n'y a rien qui empêcherait que cela existe. Cela pourrait exister comme société fédérale aussi, parce qu'on sait que, n'en déplaise au Parti québécois, le gouvernement fédéral persiste à utiliser cette épithète, sans aucun doute à mauvais escient. Mais comme on ne peut pas passer de loi pour en interdire l'usage, il faut bien se rendre compte qu'il y a un certain nombre de sociétés fédérales qui pourraient avoir exactement la même désignation.

Je suis sûr que le ministre ne voudra pas se voir enlever le crédit, et son gouvernement encore moins, s'il y a du crédit qui doit s'attacher à la création d'une telle structure gouvernementale et qu'il accepterait d'ajouter le nom du Québec à la société.

Il me semble aussi que du point de vue de, l'Union Nationale dont le porte-parole a exprimé son désir de voir le mot "nationale", se retrouver le plus souvent possible dans les titres de toutes sortes de choses, cela permettrait de concilier cette préoccupation avec une désignation correcte de l'organisme en question.

Motion pour ajouter les mots "du Québec" au nom de la société

Au fond, c'est une porte ouverte à la collaboration des oppositions et aussi à la collaboration du gouvernement, M. le Président. Je vais donc faire la lecture de ce projet d'amendement qui se lit comme suit: Que l'article premier soit modifié, en ajoutant, dans la deuxième ligne, après le mot "amiante", les mots "du Québec".

L'article amendé se lirait comme suit: Une compagnie à fonds social, ci-après appelée "la société" est constituée sous le nom de Société nationale de l'amiante du Québec.

C'est simple, cela répond à toutes les préoccupations exprimées à cette table et cela nous

permettrait d'avoir au moins une motion qui touche au projet de loi, qui pourrait faire, il me semble, sans grande difficulté, l'objet d'un consensus. Je le dis très sérieusement, je ne vois pas en quoi on pourrait différer d'opinion là-dessus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je déclare la motion recevable. M. le député de Richmond.

M. Brochu: En ce qui me concerne, M. le Président, pour les préoccupations que j'ai mentionnées au début, j'étais content de voir dans la présentation de la loi qu'il y avait les termes "société nationale de l'amiante", pour les motifs que j'ai indiqués tout à l'heure également. Je peux aussi être d'accord qu'en ce qui concerne le contenu comme tel du projet de loi, il y a beaucoup de zones grises encore, il y a beaucoup de choses qui ne sont pas claires.

Par contre, on est à discuter, à ce moment-ci, de la structure que le gouvernement a l'intention de créer pour mettre de l'avant son moyen d'atteindre l'objectif d'une plus grande transformation en sol québécois.

Je pense que ce que le député de Saint-Laurent présente actuellement, en ajoutant le mot "Québec", à toutes fins pratiques, ne change pas grand-chose; cela identifie davantage. Cela s'inscrit simplement dans la ligne de préoccupation du début, comme lorsqu'il voulait indiquer que cela touchait la commercialisation et la transformation. Il est également évident que pour les motifs que j'ai donnés ce matin, lorsqu'on parle d'une nation, on parle évidemment de la nation québécoise, dans le contexte de ce qu'on discute actuellement. On constitue une grande famille, l'entité québécoise actuelle, avec ses diversités, avec ses lignes de force, avec ses qualités, avec la nature qu'on lui connaît, avec le dynamisme qu'on lui connaît.

Pour ces raisons, je n'ai pas d'objection à ajouter le mot "Québec", quoique je ne le voie pas, au point de départ, comme absolument nécessaire. Je ne vois pas non plus de contradiction essentielle qui me fasse rejeter l'amendement comme tel.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour le gouvernement... Vous n'avez rien à dire?

M. Lalonde: Je voudrais savoir si le gouvernement est prêt à l'appuyer. S'il est prêt à l'appuyer, cela sauverait un peu de temps.

Quitte à décevoir le parti ministériel, je n'ai rien à ajouter à ce que nous avons indiqué, aux raisons qui nous amènent à proposer cet amendement, que ce soit la Société québécoise de l'amiante ou la Société nationale, puisque c'est la décision de la commission parlementaire du Québec, ce sont les mêmes préoccupations qui inspirent cet amendement. Je ne vois pas pourquoi le gouvernement voterait contre cet amendement. Voter contre cet amendement, je pense, serait l'indication la plus claire d'une fermeture d'esprit la plus totale, d'un hermétisme, comme on a vu dans d'autres commissions parlementaires depuis le début des activités de ce gouvernement. Je pense que ce serait une indication que le gouvernement croit avoir la vérité la plus absolue, la science infuse, et qu'il n'est pas prêt du tout à accepter des suggestions constructives de la part de l'Opposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Y a-t-il d'autres intervenants?

M. Laplante: M. Forget.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion du député de Saint-Laurent sera-t-elle adoptée?

M. Grégoire: L'appel des membres, M. le Président.

Vote sur la motion

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bérubé (Matane)?

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bordeleau (Abitibi-Est)?

M. Bordeleau: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu (Richmond)?

M. Brochu: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire (Frontenac)?

M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Lalonde: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion est rejetée, 6 voix contre 3.

Une Voix: Comment l'appelez-vous?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous revenons à la motion principale.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Nous restons donc avec la Société nationale de l'amiante. L'article 1 se lit comme suit: "Une compagnie à fonds social, ci-après appelée "la Société", est constituée sous le nom de "Société nationale de l'amiante "." C'est donc...

Une Voix: Le drapeau est hissé.

M. Lalonde: ... la constitution de cette société que l'article premier fait.

Lors de la discussion sur certaines propositions d'amendement, on a eu l'occasion d'indiquer pourquoi nous étions défavorables à la constitution, c'est-à-dire à certains aspects importants de la politique de l'amiante du gouvernement actuel. La constitution de la compagnie, de la société, s'inscrit justement dans cette parade que, je pense, le gouvernement fait, à tort, avec une question aussi importante que l'avenir de l'amiante comme activité économique, la solution des problèmes non seulement économiques, mais aussi les problèmes humains, qui est commandée et qui est la responsabilité du gouvernement.

Le gouvernement, pour implanter une politique de l'amiante, que ce soit au niveau de la salubrité, que ce soit au niveau de la transformation de la matière première au Québec, ce à quoi nous sommes complètement favorables, n'a pas besoin du tout de la constitution d'une telle société. Au contraire, les instruments qui existent actuellement sont nombreux, multiples, comportent tous les pouvoirs et les moyens qui sont nécessaires; ils peuvent fort bien servir au gouvernement pour implanter sa politique, politique qu'il ne nous a pas encore expliquée, qu'il n'a pas encore expliquée à la population et que, malheureusement, nous sommes en train d'implanter à la pièce par ce premier article du projet de loi no 70. (17 h 15)

Je pense qu'à cet article on doit dénoncer le gouvernement pour le peu de sérieux qu'il apporte à la définition de sa politique, et ce, aux dépens des Québécois, à deux titres: tout d'abord, dans le coût que cette politique va entraîner pour tous les Québécois et dans ses chances de succès. On sait qu'une politique qui est bousculée, improvisée, de la façon que le gouvernement l'a faite depuis un an, surtout depuis le mois d'octobre l'an dernier, a moins de chance de succès. On ne peut pas escamoter des démarches absolument essentielles dans le développement d'une décision, dans le développement d'une implantation qui est aussi complexe que celle de la création au Québec de tout un secteur de transformation de l'amiante.

Je pense que c'est à ce stade, au moment où on aborde l'étude de l'article 1 du projet de loi créant la Société nationale de l'amiante, que nous devons dénoncer le gouvernement et tenter, encore une fois, de l'amener à définir, de façon concrète, de façon articulée, sa politique en disant à tous les Québécois, non pas en leur contant des histoires, non pas en leur chantant des chansons, mais en disant à tous les Québécois comment on va y arriver et pourquoi on doit procéder de la façon proposée pour arriver aux résultats que l'on recherche.

Les résultats que l'on recherche sont extrêmement clairs. Ils sont partagés par la très grande majorité des Québécois, à savoir que le gouvernement doit, d'une façon ou d'une autre — nous ne sommes pas d'accord sur la façon dont il le fait — voir à l'implantation le plus possible d'un secteur de transformation au Québec pour créer des emplois plus rémunérateurs et plus stables, et Dieu sait si notre économie a besoin de ce genre d'emplois.

M. le Président, vu l'attitude de ce gouvernement, nous ne pourrons pas l'appuyer dans la loi qu'il propose, y compris l'article 1 du projet de loi 70.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Richmond. M. le ministre?

M. Bérubé: Je suis incapable de comprendre ce qui...

Le Président (M. Laplante): Article 1, adopté? M. Grégoire: Adopté. M. Lalonde: Sur division.

Le Président (M. Laplante): Sur division. Article 1, adopté sur division. Article 2? M. le ministre.

Site du siège social

M. Bérubé: M. le Président, cet article 2 spécifie simplement que le gouvernement déterminera éventuellement le site du siège social de cette entreprise. Je pense qu'il est important de souligner la politique qui a été adoptée par le Conseil des ministres, à savoir que tout nouvel organisme gouvernemental devra, sauf sur dérogation spéciale, normalement être situé en dehors des grands centres que sont Montréal et Québec, de manière à faciliter une certaine décentralisation administrative au Québec.

Par conséquent, cette Société nationale de l'amiante ne pourra échapper à cette règle et, de ce fait, son siège social pourrait se voir situé ailleurs que dans les deux centres en question. Néanmoins, il apparaît que la localisation exacte du centre peut faire l'objet de discussions et d'une évaluation, compte tenu des membres du conseil d'administration éventuel et des emplacements où seront situées certaines industries.

On ne peut pas, dans cet article 2, supposer que la société Asbestos Corporation sera achetée par la Société nationale de l'amiante. Par consé-

quent, il n'y a pas d'endroit précis de mentionné pour les principales activités de cette entreprise. Il semble, néanmoins, que l'ensemble, la majeure partie des activités de cette industrie devrait se voir située, localisée dans les régions de l'amiante. On peut très bien imaginer que le siège social de l'entreprise sera situé dans la région de l'amiante. Néanmoins, le gouvernement n'a pas fait son nid quant à la localisation et je pense que les administrateurs de la future entreprise auront certainement à examiner différents sites possibles, compte tenu de l'intention arrêtée du gouvernement de favoriser la décentralisation. Par conséquent, cet article permet une certaine latitude aux futurs administrateurs de la société.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, on a, n'est-ce pas, ici une merveilleuse démonstration du sérieux et de la profondeur du débat de fond qui devait se dérouler sur les articles du projet de loi, puisque, à l'article 1, on a décoré, affublé la société d'un nom largement symbolique. A l'article 2, on donne au gouvernement carte blanche pour décider ce qu'il voudra bien décider au moment de l'implantation d'un siège social.

C'est très rassurant pour ce qui est des débats de fond que nous promet ce projet de loi. On va dépenser un quart de milliard, soi-disant pour relever l'économie des Cantons de l'Est et, en particulier, de la région de l'amiante. Quand vient le temps de poser un geste qui aurait une signification réelle pour les gens de la région de Thetford Mines, les gens de la région de l'amiante, on s'abstient, on ne veut pas faire de présomption, on ne veut pas décider à la place des fonctionnaires; on veut leur donner toute la possibilité de faire ces tractations en fonction, peut-être, d'assurances électorales. On pourra, à ce moment-là, émettre un arrêté en conseil pour déterminer l'emplacement du siège social à un moment choisi avec soin, stratégiquement déterminé pour aider peut-être les fortunes du député de Frontenac, mais aussi de quelque autre député qui en aurait plus besoin. Le gouvernement aura l'embarras du choix, dans un moment aussi sérieux pour lui, d'utiliser cette promesse ou justement, de ne pas l'exercer, ce choix, avant la prochaine échéance électorale et de faire les promesses à deux ou trois comtés à la fois.

Mais il me semblerait plus normal, si on veut poser un geste précis, qu'on aille un peu plus loin que cela.

Je vais vous faire la lecture, M. le Président, d'un échange qui a eu lieu ici en commission parlementaire, il y a eu quinze jours hier soir, où on posait au maire de Thetford Mines, M. Côté, la question suivante, à savoir si, selon lui, la question du siège social devrait être réglée dans la loi. Vous me permettrez de citer la transcription; c'est à la page R/99, à huit heures trente-cinq minutes, le 21 mars.

La question que je lui pose est la suivante: "M. le maire, vous avez fait mention, dans votre mémoire, de l'éventualité que le siège social de la compagnie Asbestos soit situé dans votre ville. Avez-vous, à cet égard, des indications qui vous permettraient d'être rassuré quant à cette éventualité ou est-ce justement cela, une éventualité, une probabilité dont vous n'êtes pas certain? Si votre réponse à cette deuxième partie de la question est affirmative, à savoir que c'est une probabilité seulement, si vous n'avez pas d'engagement, ne serait-il pas prudent que la loi créant la société de l'amiante fasse une obligation du maintien du siège social à Thetford Mines".

M. Côté, maire de la ville: "Le siège social de la compagnie Asbestos Corporation était complètement à Thetford il y a quelques années. Tous les bureaux de l'Asbestos Corporation, y compris le bureau des ventes, étaient à Thetford. Ce n'est que depuis quelques années que c'est rendu à Montréal. Je dois vous dire que nous espérons fortement, si le gouvernement se portait acquéreur de la compagnie, retrouver à Thetford les structures de l'Asbestos Corporation que nous avions chez nous auparavant. Pour nous, c'est une industrie très importante. Cela représente pratiquement au-delà de 100 employés et des salaires assez élevés. C'est déjà une très bonne industrie pour nous et je pense qu'il serait tout à fait logique que cela revienne à Thetford".

La deuxième question que je pose au maire est la suivante: "Ce serait peut-être important et logique, mais, encore une fois, est-ce que vous avez des engagements de la part du gouvernement de ce côté-là ou vous considérez-vous suffisamment rassurés pour ne pas insister pour voir apparaître cette prescription dans la loi".

Réponse de M. Côté: " Je crois que ce sont des formalités tout à fait normales — c'est un mot que vous connaissez bien de l'autre côté — nous avons fait des pressions auprès de la compagnie actuelle, je vous dis qu'il y a certaines choses qui sont déjà revenues à Thetford depuis un an ou deux; une grande partie du personnel est déjà revenue, certaines choses sont déjà revenues et il nous est permis d'espérer — peut-être pas avec la compagnie — que si cela devenait la propriété du gouvernement, on pourrait retrouver à Thetford l'administration de l'Asbestos Corporation". "M. Forget: Je comprends qu'il est permis d'espérer, mais là vous avez une convocation. Vous êtes devant le ministre, vous êtes en commission parlementaire. N'êtes-vous pas tenté d'aller un peu plus loin et de demander au ministre de s'engager un peu plus vis-à-vis de votre ville relativement à cette question.

M. Côté: "S'il n'y a que cela, on va lui faire la demande immédiatement."

Alors, M. le Président, le ministre a reçu la demande de M. Côté, le maire de Thetford Mines. Il a pris des précautions oratoires tout à l'heure pour nous dire qu'il ne savait pas, qu'il ne pouvait pas présumer que le gouvernement deviendrait propriétaire de la Société Asbestos. C'est une perle, M. le Président. C'est la première admission que le ministre a faite qu'il se pouvait que cet achat ne se fasse pas. Jusqu'à maintenant, il a dit: De deux choses l'une: ou on va l'acquérir de gré à

gré ou on l'expropriera. Maintenant, il arrive devant le projet de loi et il dit: Je ne sais pas. Peut-être qu'on l'aura, peut-être qu'on ne l'aura pas et si on ne l'a pas, on ne peut pas mettre dans la loi que le siège social va être à Thetford Mines. Belle affaire! Il me semble que ce n'est pas tout à fait cohérent. Ou il y a une intention gouvernementale, une volonté politique, selon l'expression consacrée dans le vocabulaire péquiste, de l'acheter d'une façon ou d'une autre cette fameuse Société Asbestos, ou la volonté n'est pas là. Si la volonté n'est pas là, je comprends qu'on prenne toutes sortes de précautions pour ne pas s'enfermer dans un dilemme.

Si vous avez la volonté de l'acheter d'une façon ou d'une autre, vous pouvez très bien inscrire, à l'article 2, une affirmation solennelle à l'effet que le siège social de la Société Asbestos va se trouver à Thetford Mines. Cela ferait plaisir aux gens de Thetford Mines. Ils seraient rassurés qu'il y a peut-être quelque chose qu'ils vont retirer de toute cette affaire. Le ministre citait tout à l'heure la présence d'un travailleur de l'amiante, mais il aurait dû être là, ce même travailleur de l'amiante, lorsque le vice-président du syndicat est venu faire la confession qu'il ne savait pas, dans le fond, ce qu'il en retirerait, ce que ses membres retireraient de cette initiative gouvernementale. La seule chose qu'il a pu mentionner après un bon 90 secondes de silence embarrassant, c'est que le gouvernement serait probablement un meilleur employeur. Mais le pauvre vice-président du syndicat ne savait pas, à cette époque-là, que les fonctionnaires avaient déjà réglé son cas. Les fonctionnaires, à la page 7 du mémoire de leur groupe de travail, ont déjà dit que les mineurs de la région de Thetford Mines avaient des salaires tellement élevés qu'on ne pouvait pas songer à implanter une usine de transformation dans la même ville à cause de ces salaires élevés de la mine car cela créerait une concurrence déraisonnable et impliquerait que le produit de transformation serait non concurrentiel. C'est à la page 7.

Alors, s'ils avaient su qu'ils n'allaient pas avoir les usines de transformation, si le ministre avait été assez franc à ce moment-là pour leur dire: Ne pensez pas à cela, dans nos études on a déjà des conclusions qui nous démontrent qu'il ne faut pas les installer à Thetford Mines... Au moins donnez-leur le siège social. Ayez au moins cette décence. Vous faites toute une campagne politique sur le dos de la région de Thetford Mines et en particulier de la ville de Thetford Mines. Vous allez dire: Au moins on va vous garantir le siège social. Si vous ne voulez pas y mettre le siège social de la Société Asbestos, au moins mettez-y le siège social de la société d'amiante. Vous avez des choix, mettez en un au moins à cet endroit. N'allez pas nous dire: On verra, peut-être qu'on va avoir la Société Asbestos, peut-être qu'on ne l'aura pas, mais de toute façon pour les gens de Thetford Mines, on peut leur dire une chose, peut-être bien qu'ils vont avoir un siège social, mais peut-être bien qu'ils n'en auront pas. Ça a bien l'air qu'ils n'en auront pas, parce que si le ministre avait l'oc- casion de le dire, il n'y en a pas de meilleure qu'aujourd'hui, il n'y en a pas de meilleure qu'au moment où on arrive à l'article 2 où on dit: Le bon gouvernement dans sa sagesse, en fonction des échéances électorales et autres, en fonction des préférences quant au milieu de vie dans lequel ses hauts fonctionnaires qui vont devenir les directeurs et les cadres de cette société vont vouloir vivre... Peut-être qu'ils n'aiment pas, de leur fenêtre, regarder les montagnes de débris.

M. Godin: Des crassiers qu'on appelle cela.

M. Forget: Les crassiers. Merci. Je remercie notre barde national de nous suggérer, de nous souffler des mots.

M. Grégoire: Des tas de résidus.

M. Forget: Alors, si les cadres et les fonctionnaires ne veulent pas regarder les crassiers, peut-être qu'ils vont préparer un arrêté en conseil et persuader le ministre que décidément on pourrait mettre cela, je ne sais pas, à Sainte-Marie de Beauce ou un peu au sud, au nord, à l'est ou à l'ouest, mais assez loin des crassiers pour que le plus qu'on puisse voir c'est un profilé à l'horizon pour dire aux visiteurs quand ils viennent: Vous voyez les mines. Quand on invitera les visiteurs français ou européens, parce qu'on aime beaucoup recevoir des échanges de la France, particulièrement dans le moment, on dira, des fenêtres panoramiques du bureau du directeur général: Les crassiers, vous les voyez se profiler à l'horizon. C'est cela notre industrie de l'amiante. Elle est assez loin, bien sûr, parce que c'est mauvais pour la santé et on ne voulait pas se mettre juste à côté. Mais pourquoi ne pas y aller franchement et dire carrément: On va mettre cela dans la loi que la Société nationale de l'amiante va avoir son siège social à Thetford Mines. (17 h 30)

M. Grégoire: D'accord.

M. Forget: Je vois avec plaisir, pour la première fois, un accord, une sympathie naturelle, se dégager entre le député de Frontenac et l'Opposition.

M. Grégoire: Je peux même dire au député de Saint-Laurent que s'il présente cet amendement, comme il a l'intention de le faire, je vais m'asseoir de ce côté-là aussi longtemps que durera l'amendement.

M. Lalonde: Le député peut rester de ce côté-là et voter en faveur.

M. Grégoire: Les deux, s'ils le veulent, tant que durera l'amendement.

M. Forget: J'ai une motion et avec une telle invitation, M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous la présentez tout de suite.

M. Forget: Je vais la présenter tout de suite. Je ne peux plus résister a la tentation de voir le député de Frontenac se joindre à nous pour un moment seulement, bien sûr, pour un seul instant; malgré tout, ce sera une occasion à ne pas manquer.

La motion d'amendement à l'article 2 se lit donc comme suit: Que l'article 2 soit modifié en remplaçant dans les première et deuxième lignes, les mots "à l'endroit déterminé par le", par les mots "dans la ville de Thetford Mines. Elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit avec l'approbation du", en remplaçant dans la deuxième ligne, les mots "un avis de la situation ou de", par les mots "un tel" et en remplaçant, dans les deuxième et troisième lignes, les mots "du siège social est publié ", par les mots "entre en vigueur sur publication d'un avis à cet effet".

L'article amendé se lirait comme suit: "La société a son siège social dans la ville de Thetford Mines. Elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit avec l'approbation du gouvernement. Un tel changement entre en vigueur sur publication d'un avis à cet effet dans la Gazette officielle du Québec".

Le Président (M. Laplante): Si le député de Saint-Laurent n'a pas d'objection, je vais redonner la place au président qui a toujours pris les décisions jusqu'à maintenant.

M. Forget: En remerciant le président de sa collaboration temporaire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je déclare recevable la motion d'amendement.

M. Lalonde: ... sur la recevabilité, je vous aurais demandé de parler.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le député de Saint-Laurent.

Je pense qu'il faut accorder la parole au... Est-ce que vous avez fini de parler sur l'amendement?

M. Forget: Pour l'instant, oui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président.

M. Lalonde: II se déclare en conflit d'intérêts.

M. Brochu: J'avoue que l'astuce est très bien.

M. le Président, la motion présentée actuellement par le député de Saint-Laurent va sûrement le rendre plus amical à l'endroit du maire de Black Lake. Je pense que les anciennes amitiés pourraient même se renouer lorsqu'il nous présente une motion comme il le fait en incitant le gouvernement à statuer immédiatement sur l'emplacement éventuel du siège social de l'entreprise, puisque le maire de Black Lake nous avait indiqué son ancienne admiration et ses anciennes allégeances politiques, je pense qu'il se réjouira...

M. Forget: ... à Black Lake, pas à Thetford Mines.

M. Brochu: C'est tout près. Les retombées économiques sont dans la même région. Le maire de Black Lake se réjouira sûrement de voir cette proposition de la part du député de Saint-Laurent.

Blague à part, M. le Président, je dois convenir, dans un premier temps, qu'en ce qui concerne la ville de Thetford, d'ailleurs, nous avons accueilli à cette commission parlementaire les représentants de la municipalité qui sont venus nous exposer leur point de vue sur la politique de l'amiante, d'un côté et de l'autre côté, nous avons pu leur poser des questions sur la situation économique qui prévaut dans cette région, et les réponses que nous avons obtenues à ce moment-là ont été très claires.

La région de Thetford, actuellement, souffre d'un pourcentage très élevé de chômage. Compte tenu du fait que l'établissement d'autres industries secondaires est, en apparence, dans les périodes que nous traversons actuellement, fort peu prévisible, cela rend donc la situation, je le conçois et je le constate, encore plus difficile de ce côté.

Il semble qu'il y ait peu de possibilités de raviver cette région à court terme. C'est donc tout à fait compréhensible que les édiles municipaux recherchent tout ce qui peut — c'est leur devoir, leur responsabilité — aider leur municipalité et leur région à se développer économiquement et à se renforcer, par le fait même, sur le plan économique, et sur le plan social, il va sans dire.

Donc, on doit considérer ce point de vue, ce qui est tout à fait normal. Ces gens défendent leur région, à ce moment, et c'est leur devoir et leur responsabilité de le faire. Par contre, lorsque je me place d'un autre point de vue et que je regarde l'ensemble de la région des Cantons de l'Est, je vois que d'autres régions sont aussi affectées. Et si je parle pour mon clocher — parce que je suis député de Richmond, que je suis natif de la ville d'Asbestos et que j'y demeure toujours — Asbestos est impliquée directement dans le dossier de l'amiante. Si je regarde un point très subjectif, la municipalité chez nous, je dois vous dire ceci: La ville d'Asbestos est également aux prises avec certains problèmes, parce qu'elle ne compte, et cela depuis en fait le tout début de son histoire, qu'une seule industrie majeure, soit celle de l'amiante. Il y a eu des tentatives modestes d'implanter d'autres industries à côté, mais, pour diverses raisons, ces industries n'ont pas pu persister longtemps. Donc, on se retrouve avec une situation où il y a une seule source majeure de revenu pour les citoyens, ce qui apporte, dans certains cas, certains problèmes, et qui limite, entre autres, pour le moment, en ce qui concerne tout le secteur de notre jeunesse, la disponibilité d'emploi. Donc, on doit, malheureusement, dans la région d'Asbestos, assister à une saignée de nos concitoyens en bas âge, de 20 ans à 30 ans, qui doivent aller vers l'ex-

térieur pour trouver des emplois et pour gagner leur vie. C'est la réalité avec laquelle...

M. Lalonde: Pour la saignée des concitoyens, vous n'avez pas invité la Croix-Rouge?

M. Brochu: Non, je ne veux pas me mêler du congrès libéral du tout. Ce n'est pas mon intention.

Il existe donc un problème réel de ce côté, dans cette région. Lorsque je regarde autour encore, que je vais dans la ville même de Richmond, par exemple, je me rends compte que le problème se pose encore avec beaucoup plus d'acuité, beaucoup plus de force et que ces conséquences sont beaucoup plus graves, parce que le taux de chômage augmente continuellement, parce que ce sont des petites usines, majoritairement des usines de fabrication de chaussures, et on sait avec quels problèmes elles sont aux prises actuellement. L'été dernier encore, une usine au complet a fermé, la Duchesse, qui était en affaires depuis nombre d'années.

Les autres usines qui continuent leur exploitation le font avec un niveau assez limité de production. Lundi dernier encore, je recevais à mon bureau les gens qui sont maintenant impliqués dans des mises à pied à une usine qui allait bien, La-salle Plastique, à Richmond, où on a encore 60 mises à pied qui ont eu lieu la semaine dernière, parce que ces gens sont reliés avec les usines Bombardier de Valcourt, et aussi parce qu'à ce moment les demandes sont moins nombreuses. On sait que les usines Bombardier de Valcourt ne fonctionnent pas à la capacité qu'on pourrait espérer qu'elles fonctionnent, pour différentes raisons.

Quoi qu'il en soit, dans la région de Richmond, il y a ce problème énorme de chômage qui s'accentue actuellement et qu'on doit constater et déplorer. Je vous décris la situation pour vous dire que, pour ces régions, on pourrait fortement souhaiter la venue d'un siège social sur le territoire de Richmond, ou d'Asbestos, ou de la municipalité de Valcourt, qui a été fortement affectée par la décision du gouvernement de donner le contrat de fabrication d'autobus à General Motors plutôt qu'à Bombardier.

M. Godin: American Motors.

M. Brochu: Tous ces arguments militent en faveur du fait que nous pourrions dès maintenant dire: Le siège social de cette entreprise devrait être à Asbestos ou à Richmond ou à Valcourt. Je pense que ces arguments pourraient avoir du poids et mériteraient d'être retenus, parce que la situation de chômage qui prévaut dans les Cantons de l'Est est réelle.

Si le député de Drummond était ici, il pourrait dire la même chose, parce que chez lui, c'est le textile. A ce moment, il connaît les mêmes problèmes que chez nous.

Donc, au point de départ, je pourrais immédiatement, en ce qui me concerne, amener une proposition d'amendement pour suggérer la ville d'Asbestos. Je pourrais amener une motion pour dire: Le siège social de l'entreprise doit être à Asbestos; mais reprenons au tout début. J'aurais aimé, dans un premier temps, que le gouvernement soit plus explicite en ce qui concerne la localisation. On aurait pu souhaiter, au point de départ, que le gouvernement ait des choses plus précises à nous annoncer de ce côté, de sorte qu'on puisse prendre des décisions avec davantage de renseignements. Cela n'a pas été le cas, puisque maintenant il nous présente un article 2 où l'allocation du siège social, de façon générale, sera indiquée tout simplement par un avis dans la Gazette officielle.

Alors, là-dessus, on peut reprocher au gouvernement, d'une certaine façon, de ne pas nous avoir donné plus de précision, de ne pas avoir préparé davantage son projet de loi pour en arriver à des amorces de décisions beaucoup plus avancées que celles qu'on a actuellement.

C'est un peu le même reproche qu'on a pu faire à d'autres égards, lorsqu'on disait qu'il restait encore beaucoup trop de zones grises — qui nous apparaissent, du moins, dans le dossier de l'amiante — pour se lancer immédiatement avec un projet de loi, comme le gouvernement l'a fait. De la même façon, je disais qu'il y avait beaucoup de contradictions: le ministre un tel nous dit qu'il y a 20% de transformation possible de produits au Québec; un autre nous dit 11%; SORES nous dit 7%. Là aussi, ce sont encore des choses imprécises et un peu incohérentes.

Un peu de la même façon, on peut reprocher au gouvernement de ne pas avoir rendu son projet de loi plus cohérent et plus définitif, appelons-le comme cela, en le présentant. C'est donc presque un pré-projet de loi que le gouvernement nous présente actuellement. C'est pourquoi on se retrouve face à des situations comme celle qu'on connaît actuellement.

Ceci pour vous dire, M. le Président, que, dans la position que j'occupe, par souci d'une certaine cohérence et d'une certaine honnêteté, je m'abstiendrai tout simplement de voter sur la motion qui vient d'être présentée, pour les motifs que j'ai indiqués. Je pourrais tout aussi bien après arriver avec une motion pour défendre la ville d'Asbestos, ce qui est tout à fait normal.

Etant donné que le gouvernement n'a pas pris soin de digérer davantage son projet de loi et de préciser toutes ces choses, je souhaite que, lorsque viendra le temps de situer le siège social de l'entreprise, il y aura un mécanisme de consultation auquel nous pourrons être partie pour faire valoir, compte tenu de tout ce que nous aurons appris dans le restant de la loi et de tout ce que nous savons de nos régions, pour faire valoir les différents points de vue et en arriver honnêtement à choisir le meilleur emplacement possible dans l'intérêt des citoyens des Cantons de l'Est.

C'est la position que j'ai l'intention de défendre par souci d'honnêteté. Si j'agissais subjectivement, je m'opposerais sincèrement à la motion qui est présentée actuellement. A ce moment-là, je

présenterais une autre motion: après 10 ans, il faut que ce soit la ville d'Asbestos ou telle et telle ville. Alors, dans ce sens, M. le Président, je m'abstiendrai donc, mais je demande au ministre d'établir un mécanisme auquel on pourrait avoir partie, si c'est son intention de continuer avec son projet de loi, pour décider avec le plus de logique possible de l'emplacement éventuel.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Richmond. M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, je dois dire à mes deux collègues d'en face de l'Opposition libérale que, sur cet amendement, je suis de tout coeur avec eux. Je vais l'appuyer, et je suis prêt, avec eux, à faire une argumentation, une forte discussion, une forte présentation d'arguments pour convaincre mes collègues que le siège social de la Société nationale de l'amiante doit être situé à Thetford.

D'abord, je dois dire au député de Richmond que cela ne peut pas être Asbestos, le siège social de la Société nationale de l'amiante. Je pense que mes nouveaux collègues de l'Opposition...

M. Lalonde: M. le Président, est-ce qu'il faut réellement payer ce prix?

M. Grégoire: ... avec qui je me retrouve dans l'Opposition pour cet amendement, admettront avec lui que cela ne peut pas être Asbestos, parce que, depuis à peu près le début de mars que nous sommes sur l'étude de cette loi, le député de Richmond nous dit qu'il n'a pas confiance dans l'avenir de l'amiante, dans le développement de la transformation de l'amiante...

Une Voix: II est contre, mais...

M. Grégoire: ... dans la commercialisation de l'amiante.

C'est l'argument prouvant que cela ne peut pas aller dans la ville du député qui n'a pas confiance dans l'avenir de l'amiante, ce qu'il nous répète. En fait, mes nouveaux collègues le savent très bien et vont m'appuyer comme je les appuie sur cet amendement. (17 h 45)

Cela ne peut pas aller dans la ville de Richmond, c'est à éliminer. Je dois dire que l'amendement est bon. Le ministre nous a dit, et je le prends au mot, il nous a dit que la région de l'amiante fournit $30 millions en droits miniers à la province. C'est une richesse qu'on retire de cette région. Cela ne vient pas du comté de Matane, cela ne vient pas du comté de Saint-Laurent ni du comté de Marguerite-Bourgeoys, cela vient de la région de l'amiante dont je suis le député.

Alors, si la région de l'amiante fournit cette richesse au gouvernement, il est bien normal que les retombées en reviennent au centre de la région de l'amiante, à Thetford Mines. Je commencerai par expliquer pourquoi cela doit revenir à la ré- gion de l'amiante. Si c'est dans la région de l'amiante qu'on est affecté par l'empoussiérage, par la pollution de l'air, par la pollution de l'eau, par les tas de résidus ou les crassiers, comme les appelle notre poète de Mercier, ainsi que les trous creusés et qui sont laissés là béants, il est bien évident également qu'on doit en avoir les avantages, c'est-à-dire le siège social. Il ne faut pas oublier que Thetford est au centre et je félicite mes nouveaux collègues d'avoir compris que Thetford est au centre de la région de l'amiante...

M. Forget: On connaît bien le dossier, comme vous voyez.

M. Grégoire: On va y revenir! Mais, sur ce point, je dois féliciter mon nouveau collègue. Thetford est au centre de la région de l'amiante; à l'ouest, il y a une mine à Asbestos, une seule; à l'est, à East Broughton, à 15 milles de Thetford, qui est dans le comté de Frontenac également, il y a une mine; au centre, à Thetford, il y a sept mines: la Normandie, la Lake, la British Canadian no1, la British Canadian no 2, la King Beaver, la Bell Asbestos, la National Mine et une qui est fermée depuis deux ans, mais qu'il y a toujours moyen de rouvrir, la Flintkote. Alors, c'est là le centre de la région de l'amiante. Dans ce cas, je suis complètement d'accord et je félicite mes nouveaux collègues d'avoir compris.

Pendant que je suis d'accord avec eux et que je suis avec eux, je formule le souhait qu'ils commencent au moins à étudier tous les angles de cette loi parce que, autant je peux dire au ministre que, sur ce point — comme je l'ai dit depuis trois semaines ou un mois à mes deux nouveaux collègues — ils ne connaissaient pas le projet de loi, qu'ils ne l'avaient pas étudié, qu'ils ne connaissaient pas les implications — et ceci, ce n'est pas parce qu'on est devenu collègues, c'est simplement comme préparatif — autant j'ai pu vous dire dans le passé — et c'était vrai, vous le remarquerez — que vous ne connaissiez pas le dossier... Non, mais je voudrais, M. le Président, étant donné que nous commençons une lutte ensemble, je voudrais tout de suite les mettre sur la bonne voie parce que le député de Saint-Laurent a mal commencé ce débat que nous entreprenons ensemble quand il a parlé, par exemple... Il a complètement mêlé le siège social de l'Asbestos Corporation avec le siège social de la Société nationale de l'amiante. Quand il nous lisait le texte, tantôt — ce n'est pas un reproche, mais je voudrais le remettre sur la bonne voie — il a mêlé le siège social d'Asbestos Corporation et le siège social de la Société nationale de l'amiante. Ce sont deux choses distinctes parce que la Société nationale de l'amiante pourrait être un holding qui est propriétaire d'Asbestos Corporation qui, elle, continuerait à avoir son siège social. Qu'il soit redéménagé à Thetford, où il avait toujours été dans le passé, je suis d'accord, le ministre est d'accord; il me l'a dit à plusieurs reprises et je crois qu'il est prêt à confirmer qu'on transportera le siège social. Il faut quand même mettre le ministre au pied du mur parfois.

M. Bérubé: Je ne réponds pas aux questions de l'Opposition!

M. Grégoire: Vous ne répondez pas aux questions de l'Opposition!

NI. Ouellette: Ce serait peut-être un moyen de développer la maison mobile.

M. Grégoire: On reprend. Je pense bien que le siège social d'Asbestos Corporation ne présente pas de problème, mais je voudrais dire au député de Saint-Laurent, tout de suite, pendant que nous sommes ensemble dans l'Opposition, qu'il ne mêle pas les deux. Ce sont deux choses nettement distinctes. Pour le siège social d'Asbestos Corporation, il n'y a pas de problème, mais pour le siège social de la Société nationale de l'amiante, c'est une autre paire de manches.

En fait, il faudrait au moins comprendre ce point du dossier pour être ensemble, comme il faut. Il ne faudrait pas non plus partir avec des arguments. Je ne pense pas que ce soient les bons arguments que nous ayons, ensemble, au départ, quand vous commencez à dire: On établira cela juste à la veille d'une élection, parce que cela pourrait devenir une aventure électorale, et présumer des choses comme cela. Nous ne partirons pas avec des arguments comme cela, ce n'est pas solide. Enlignons-nous.

M. Lalonde: Excusez-nous.

M. Grégoire: On réfléchit. On tient un caucus. On va se trouver des meilleurs arguments que cela, entre nous trois.

M. Lalonde: M. le Président, pouvons-nous suspendre les travaux pour un caucus?

M. Grégoire: Réellement, il faudrait peut-être faire un caucus et s'enligner sur des bons arguments, parce que la chose était mal partie, et je vais essayer de la remettre sur la bonne voie. Non, ce n'est pas une aventure électorale. Ce n'est pas parce que c'est peut-être à la veille d'une élection, c'est trop présumer. Non, là-dessus, au moins sur cet amendement, prenons les bons arguments. Sur les autres, je vous laisse seuls, c'est votre affaire. Non, ce n'est pas par aventure électorale qu'il faut demander le siège social à Thetford, c'est parce que, réellement, c'est sa place. C'est parce que, réellement, c'est l'endroit, au centre de la région de l'amiante, où cela doit être situé.

On mentionnait tout à l'heure le chômage. C'est vrai qu'il y a beaucoup de chômage. Il y en avait plus avant que le nouveau député de Frontenac soit là, avant le 15 novembre 1976. Il y avait 29% de chômeurs et c'est baissé à 22%, ce dont je suis fier. Ce que je dis là, ce n'est pas pour rompre nos nouveaux liens d'amitié, mais je dois dire que si le chômage... c'est simplement pour répondre au député de Richmond et non pas à mes nouveaux collègues.

Non, je ne veux pas rompre nos nouveaux liens d'amitié, mais je dois vous dire que si le chômage a baissé de 29% à 22% dans le comté de Frontenac, c'est parce que le nouveau député du comté de Frontenac et le gouvernement actuel ont réussi à rouvrir une industrie que l'ancien gouvernement avait réussi à fermer, qui compte maintenant 400 employés, qui est bien connue par les citoyens de la région, parce qu'ils ont tous du monde qu'ils connaissent qui travaille là. C'est ce qui a réussi à diminuer le chômage de 29% à 22%, c'est-à-dire que le nouveau gouvernement a réussi à rouvrir une industrie que l'ancien gouvernement de peine et de misère, avait réussi à fermer, mais ceci sans...

M. Lalonde: M. le Président, une directive s'il vous plaît! Est-il exact que l'on ne peut pas retirer la motion sans son consentement?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cela prend le consentement, effectivement.

M. Grégoire: Ceci dit, je suis d'accord avec mes nouveaux collègues pour seconder la motion. Je demanderais au ministre, et je fais un appel tout spécial à mes collègues du Parti québécois... Je sais qu'il y en a un de l'Abitibi, c'est une région marginale comme celle des Cantons de l'Est. Il y a mon voisin de la Beauce, qui sait dans quel problème nous sommes, nous les... — Je lui demande son consentement et il me le refuse trop vite —J e demanderais à mon collègue de Sherbrooke, qui n'est pas loin non plus. Je demande à mon collègue du comté de Mercier, poète, à qui on pourrait demander un poème sur l'amiante, ce qui serait... Je demande à mon collègue de Montréal-Nord. Je demande même à mon ministre de faire réellement un effort. Je leur demande à tous de nous appuyer, mes nouveaux collègues et moi, pour voter oui à cet amendement. Je les appuie et je vais faire toute la lutte qu'il faut, mais faisons-là comme il faut. On va peut-être gagner si l'on fait cela, pas de la façon que vous aviez commencé à le faire, non, non, mais avec les nouvelles méthodes qu'ensemble on va utiliser pour discuter. J'approuve l'amendement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Sur la motion que nous avons à débattre, qui est devant nous malheureusement, je ne pourrai pas être d'accord avec mon collègue, mon ancien collègue...

M. Grégoire: Ancien collègue.

M. Bordeleau: ... mon nouvel adversaire de Thetford. La région de l'Abitibi, comme il l'a mentionné, n'est peut-être pas pour le moment une région de l'amiante, mais c'est sûrement la région de l'avenir de l'amiante. D'ailleurs, là-dessus, le député de Saint-Laurent semble connaître passablement le dossier des gisements qui existent en

Abitibi, même s'il ne s'en est préoccupé que tout dernièrement. On sait, par exemple, au niveau du gisement d'Amiante Abitibi, découvert en 1969, que, de 1970 à 1976, il ne s'est pas fait grand-chose. Il n'a pas été démontré un grand intérêt de la part du gouvernement de ce temps-là.

M. Forget: II y a eu de l'exploration.

M. Bordeleau: Oui, mais faite par l'entreprise privée, quand même.

M. Forget: II a fallu trouver le gisement avant de l'exploiter.

M. Bordeleau: M semble qu'aujourd'hui on devrait investir, toujours selon le député de Saint-Laurent. Alors, si l'on décidait d'investir dans un des deux gisements connus du Nord-Ouest québécois ou de l'Abitibi, qui sont effectivement ceux d'Amiante Abitibi et du projet Me Adam dans le coin de Chibougamau... Il y a également d'autres gisements de moins grande importante qui sont actuellement découverts. Pour ceux que cela peut intéresser au niveau des deux grands gisements, quand on parle de réserve de 110 millions de tonnes, par exemple, dans le cas d'Abitibi Asbestos, ce sont quand même des gisements importants et dans le cas de Me Adam, on parle de 90 millions de tonnes. Alors...

M. Grégoire: II y a un milliard de tonnes à Thetford.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, s'il vous plaît, respecter le droit de parole des députés ministériels.

Une Voix: De vos anciens collègues.

M. Bordeleau: Je ne veux pas minimiser les réserves de la région de l'amiante non plus.

M. Brochu: Le député fait des réserves en commission.

M. Bordeleau: Oui, mais si on parle de nouveaux investissements, dans le cas d'Amiante Abitibi, on parle d'investissements d'au-delà de $300 millions. Alors, si je me base sur les chiffres, dans notre projet de loi 70, on parle de $250 millions au maximum. Prenons le cas suivant: Si la société décidait d'investir un certain montant, jusqu'à un maximum de $300 millions, disons, je pense qu'à ce moment-là je serais justifié comme député de la région de l'Abitibi-Témiscamingue de demander que le siège social vienne dans cette région, qui deviendrait une région où les investissements seraient les plus forts de la société. Alors, je pense bien que le siège social pourrait très bien être à Matagami, dans le comté d'Abitibi-Est.

M. Lalonde: Un sous-amendement...

M. Bordeleau: Non, tout simplement pour mentionner à la commission que je pourrais être d'accord avec la motion qui demande que le siège social soit situé à Thetford Mines.

M. Forget: Est-ce que vous me permettez une interruption très brève?

M. Bordeleau: Oui.

M. Forget: Je suis d'accord avec vous que s'il y avait un développement auquel le gouvernement participait dans l'Abitibi, il y aurait des raisons pour qu'il y ait une implantation ou même un siège social. Mais peut-être que l'attitude la plus pertinente est de se poser la question afin de savoir de la part du ministre, si jamais il envisageait des entreprises multiples pour la Société nationale de l'amiante, si ces entreprises ne seraient pas incorporées chacune séparément. Par exemple, dans le contexte actuel, la société Brinco offre une participation à Abitibi Asbestos, une participation sur la base de 50% je pense, ou quelque chose approchant cela, ce qui supposerait que Abitibi Asbestos a un siège social présumément dans le Nord-Ouest du Québec, ce qui n'empêche pas que la capitale de l'amiante ou l'implantation de la Société nationale de l'amiante, qui est le "holding", pourrait très bien se trouver à Thetford Mines, de la même façon, pour répondre à la question du député de Frontenac, que la société Asbestos pourrait avoir son siège social à Thetford Mines aussi, en même temps que la Société nationale de l'amiante.

Mais ce sont des clarifications qu'il serait fort intéressant de connaître de la part du ministre. Parce que, qu'est-ce qu'on approuve dans le moment, est-ce que c'est la création d'une société qui va directement fonctionner...

M. Godin: Ce n'est pas tout cela, une autre intervention.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un instant, je pense...

M. Forget: Non, c'est une précision qui pourrait peut-être permettre au député d'Abitibi d'appuyer son collègue ou son ex-collègue, le député de Frontenac, si on avait une précision du ministre; mais je pense qu'on voit très bien le sens de ma remarque, qui est de demander au ministre si c'est une société "holding" que l'on crée ou une société qui va "opérer" directement tout ce qu'elle veut "opérer" dans la transformation et l'exploitation.

M. Bordeleau: De toute façon, pour le moment, on discutait sur l'article 2, alors que l'Opposition présente une motion pour situer le siège social. Or, à partir des éléments que je viens de démontrer, c'est normal que le gouvernement se réserve le privilège d'installer le siège social selon les investissements qui se feront exactement à partir de la Société nationale de l'amiante. Le gouvernement est tout à fait logique en ne donnant pas d'endroit précis, pour le moment, mais en at-

tendant de voir où se feront les investissements par la Société nationale de l'amiante.

Alors M. le Président, simplement pour vous dire que je voterai contre la motion pour fixer le siège social à Thetford Mines en particulier.

M. Godin: D'abord, je veux m'inscrire en faux contre l'union sacrée, semble-t-il, ou l'alliance tactique qui semble se manifester de la part du député de Frontenac, avec nos amis d'en face. Entre parenthèses, comme ils m'ont donné un surnom M. le Président, "Assurancetourix", qui vient des bandes dessinées, je me permettrais de leur rappeler qu'ils me font penser à Toto et Titi, les jumeaux du capitaine Ryan. Depuis deux ou trois jours, je les observe; or, on pourrait leur donner un surnom du même genre.

M. Grégoire: Je demanderais au député de Mercier de bien vouloir sortir un amendement. Il faut avoir du respect pour mes nouveaux collègues.

M. Godin: Je redeviens sérieux. Ce que je veux dire, c'est que l'implantation de tout siège social ou de toute entreprise reliée à l'amiante doit tenir compte non pas de facteurs de clochers. J'ai l'impression de me retrouver ici au conseil de ville de Trois-Rivières, où j'ai travaillé il y a quelques années, où chaque quartier voulait avoir l'aréna.

Cela me semble de la petite politique. On a dépassé ce stade-là. Il y a des facteurs économiques qui vont entrer en ligne de compte; on tiendra compte effectivement des facteurs sociaux. Le chômage, dans une région, est un facteur très important; mais, je pense que le but de l'article 2, tel que rédigé dans la loi — c'est dans le projet de loi — est de laisser le gouvernement prendre une décision basée sur des faits, basée sur des données objectives, comme la proximité des voies d'accès au marché, etc. Je pense que tant que les études ne seront pas complétées sur ces questions, il est prématuré... Je suis absolument convaincu que le député de Saint-Laurent, sérieux comme je le connais, sera d'accord avec moi que la décision devra se prendre sur des données précises, en tenant compte de tous les facteurs, et non pas sur des questions purement politiques, soit qu'il faut plaire à tel groupe d'électeurs ou non, et ce serait retourner au temps de Séraphin Poudrier, que de baser cela sur des facteurs purement de ce type.

C'est la raison pour laquelle je voterai contre l'amendement. Je récuse l'alliance sacrée de mon collègue de Frontenac, avec...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les travaux de la commission sont ajournés à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 1)

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