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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le jeudi 6 avril 1978 - Vol. 20 N° 23

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 70 - Loi constituant la Société nationale de l'amiante


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 70

Loi constituant la Société

nationale de l'amiante

(Dix heures dix minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

La commission des richesses naturelles est réunie pour continuer l'étude, article par article, du projet de loi no 70 intitulé Loi constituant la Société nationale de l'amiante. Les membres de la commission sont M. Bérubé (Matane), M. Paquette (Rosemont) en remplacement de M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt (Saint-François), M. Raynauld (Outremont).

Les intervenants sont M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin (Mercier), M. Gameau (Jean-Talon), remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Landry (Fabre), M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue), M. Léger (Lafontaine), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Constitution de la société Site du siège-social (suite)

Au moment où cette commission a ajourné ses travaux hier, selon les informations que m'a laissées le député de Jonquière concernant l'état de vos travaux, vous en étiez à l'étude de l'article 2. Une motion d'amendement à l'article 2 avait été présentée par le député de Saint-Laurent. Quant à savoir qui avait la parole, je n'ai pas ce détail.

M. Forget: Ce n'est pas moi.

M. Godin: C'est moi qui parlais, mais j'avais terminé.

Le Président (M. Clair): Je n'ai pas d'autres intervenants en lice. M. le député de Saint-François.

M. Rancourt: Quoique nous puissions en penser ce matin de la motion faite hier par l'Opposition libérale concernant le siège social de la Société nationale de l'amiante qui, dans une espèce de grand jeu qui tient lieu d'exercice d'une démocratie en marche... J'en suis de cette démocratie. Je veux la vivre, mais depuis un mois maintenant je fulmine intérieurement et je retiens une indignation devant cette mascarade qui se présente sous des déguisements de toutes sortes, pour le bien, soi-disant, de la nation québécoise. On s'oppose au projet de loi et maintenant, à l'article 2, qui dit que le siège...

Une Voix: Le lieutenant-gouverneur.

M. Bérubé: II vient sanctionner la loi. Une Voix: Nous sommes d'accord.

M. Grégoire: Je dois souligner, M. le Président, que le chef du Parti libéral vient peut-être parce que j'ai adhéré à l'Opposition libérale depuis hier sur ce projet de loi.

M. Brochu: Oui, il y a de l'opposition cir-constantielle.

M. Grégoire: Oui, sur l'amendement présenté.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

M. Laplante: ... l'inviter à venir s'asseoir avec nous autres, par exemple.

M. Lévesque (Bonaventure): Merci.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!

M. Rancourt: M. le Président, est-ce que je peux continuer?

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-François, vous avez la parole.

M. Rancourt: On s'oppose à ce que le lieu du siège social ne soit pas inclus dans le projet de loi. Maintenant, devant cette opposition circonstan-tielle, j'inviterais le ministre à penser que pour le grand bien de la nouvelle Société nationale de l'amiante, elle devrait s'installer dans le meilleur milieu que les circonstances le permettent. Ce qui importe pour moi, c'est que notre Société nationale de l'amiante atteigne ses objectifs qui, en plus de viser au contrôle d'une société multinationale seront, dans les meilleurs délais, par des ententes sur la transformation, de s'implanter dans la commercialisation des produits utilisateurs de notre fibre, et, de là, augmenter le potentiel humain qui, en conjonction avec nos ressources naturelles disponibles... N'oublions pas que, dans le monde de l'amiante, c'est, presque en totalité, nous, dans le monde occidental.

Puisque je suis sur la motion de l'Opposition demandant d'indiquer le nom d'une ville où installer ce siège social, je suis d'accord, au départ pour que la région amiantifère en soit le site. Et pourquoi pas? quoique, en juxtaposition avec un volet que l'on semble oublier jusqu'à présent, depuis le début de l'étude de ce projet de loi, le volet qui en est l'avenir et sûrement le besoin le plus urgent, la recherche qui, j'en suis sûr, avec l'appui de tous, s'installerait à Sherbrooke — c'est le temps de le dire — sûrement près de l'Université de Sherbrooke, dans le comté de Saint-François. Et puis, dans le comté de Saint-François, il y a aussi l'Université Bishop. Trouvez-en un milieu où, dans un comté, il y a deux universités, deux CEGEP!

Donc, c'est tout à fait le milieu propice à des chercheurs, à leurs familles et aussi aux membres de la direction de la nouvelle Société de I amiante. Puis, il y a une chose, c'est que le CRDCE, dans son rapport, a déterminé que, chez nous, dans la région, il y a 1,5 milliard de tonnes de réserve d'amiante. Je crois que c'est une raison de plus, et, là-dessus, j'appuie le choix du site dans cette région. Je devrais dire maintenant à M. le ministre, si vous me le permettez, M. le Président, que ce siège social devrait être dans la région, et je laisse cette décision au ministre. Donc, je voterai contre la motion telle que présentée à l'heure actuelle. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, I'amendement proposé par le député de Saint-Laurent a donné lieu depuis hier à une triste comédie que les pauvres acteurs du gouvernement nous ont fait voir, une des plus tristes que nous ayons vue depuis longtemps. Après la pirouette abstentionniste du député de Richmond qui, comme son chef et son parti, croit que, devant un dilemme, le courage commande la fuite, quand le double jeu n'est pas possible, les députés ministériels nous ont donné le spectacle dont ils sont capables quand ils sont laissés à eux-mêmes, c'est-à-dire l'opportunisme dégradant et l'à-plat-ventrisme partisan.

M. le Président, le siège social d'une entreprise quelle qu'elle soit revêt une double importance. En plus de la contribution considérable qui constitue pour le milieu dans lequel il s'installe tant au point de vue économique qu'au point de vue social, le siège social est le lieu où les décisions importantes et la direction constante se situent. C'est pourquoi le lieu de l'établissement d'un siège social est une décision importante qui doit être prise en fonction des critères les plus rigoureux d'efficacité. C'est donc dans cette perspective que l'amendement a été proposé par le député de Saint-Laurent. Nous croyons que la proximité des activités minières et de la main-d'oeuvre est un facteur déterminant dans le choix du lieu du siège social de la Société nationale de l'amiante. Voilà pourquoi nous avons suggéré Thetford Mines au lieu d'Asbestos ou d'autres villes de la région.

Mais, pour les péquistes, cette question est perçue d'une tout autre façon. Tout d'abord, le député de Frontenac a commencé le bal en nous donnant le spectacle d'un opportunisme politique maladif et essoufflé qui faisait pitié à voir. S'ac-crochant à l'Opposition officielle pour tenter de donner un semblant d'authenticité à ses brailla-ges, le valeureux député de l'amiante a cru trouver un voile opaque à ses pitoyables manoeuvres partisanes, mais il n'a trompé personne. D'abord, il n'a pas trompé les députés de l'Opposition officielle qui voyaient leur amendement littéralement happé par le gargantuesque appétit politique et partisan du député de Frontenac.

L'Opposition officielle n'a pas besoin de la minable alliance d un député dont les virages de capot ont anéanti à jamais toute crédibilité et cela depuis longtemps. A côté là, de la pleurnicharde et rampante alliance offerte par le député de Frontenac...

M. Grégoire: Je me range de son côté puis regardez comment il me traite. Moi je le traite de collègue depuis hier...

M. Lalonde: ... la pirouette à reculons du député de Richmond prend l'allure d'un courageux bond en avant.

M. le Président, ensuite on a vu le député d'Abitibi-Est qui ne peut accepter d éliminer à tout jamais — je regrette qu'il ne soit pas ici ce matin — sa région comme le siège éventuel d'un centre de décision en matière de l'amiante. Je crois que son témoignage est valable. Les interventions du député de Saint-Laurent, au moment des propos du député d'Abitibi-Est, sont de nature à rassurer le député d'Abitibi-Est. Quant à moi, je crois que le Nord-Ouest devrait loger le siège social de toute entreprise gouvernementale d'amiante qui aurait des activités dans cette région.

Ensuite est venue l'intervention banale du député de Mercier qui, pourtant, n'avait pas jusque-là brillé par là-propos et la tenue de ses discours hier.

M. Godin: ... un concours de beauté ce matin?

M. Lalonde: Tout comme le député de Rosemont, depuis quelques semaines...

M. Grégoire: C'est bien la première fois que je vois le député de Marguerite-Bourgeoys lire un discours.

M. Lalonde: ... — et je salue le député de Rosemont ici — le député de Mercier se dinstingue maintenant par le caractère orthodoxe de ces diktats. On dirait que depuis qu'ils ont franchi, ces derniers temps, le seuil de l'antichambre du cénacle ministériel, ces deux députés ont perdu cette étincelle d'originalité et d'honnêteté intellectuelle qu'on leur avait connue I'an dernier.

M. Godin: Quelle antichambre. Puis-je poser une question au député?

M. Lalonde: Ils sont maintenant les champions de la ligne du parti, ce qui est, il faut en convenir, la voie la plus sûre vers le sommet du pouvoir.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je m'excuse de vous interrompre, le député de Mercier vous demande, par mon entremise, si vous acceptez qu'il vous adresse une question?

M. Grégoire: Comment se fait-il que vous lisiez un discours ce matin?

M. Godin: Est-ce que vous m'autorisez à poser une question?

M. Lalonde: Après, s'il vous plaît. M. Godin: D'accord.

M. Grégoire: Comment se fait-il que vous lisiez votre discours, ce matin?

M. Godin: C'est une question banale.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Lalonde: Les mathématiques et la poésie ont ceci de commun que ni les unes ni l'autre ne résistent à l'intérêt.

Avec un ministre désintéressé aux travaux de la commission et son adjoint qui est sujet aux vertiges, on l'a vu hier, on comprend que les hautes autorités du parti aient délégué un envoyé spécial de la trempe de ces deux députés, de Rosemont et de Mercier, pour protéger l'orthodoxie de la pensée péquiste.

Le député de Frontenac s'est mis à plat ventre devant ses intérêts électoraux, pendant que ses collègues, sauf le député d'Abitibi-Est, se sont mis à plat ventre devant la ligne de parti. Il ne reste qu'à espérer qu'ils se relèveront assez tôt pour voter sur la motion.

Pendant ce temps, le ministre, lui, plane au-dessus de la mêlée, apparemment inconscient de la fête foraine qui se passe à ses côtés et dont il est le premier responsable par l'improvisation et le manque de préparation de son projet de loi. Au moins, des députés comme celui de Frontenac — on a vu hier la façon dont il l'a fait — se sont exprimés. Le député d'Abitibi-Est l'a fait avec responsabilité et le député de Saint-François, ce matin, semble préparer un appui à une proposition qui pourrait venir plus tard, si l'amendement du député de Saint-Laurent est battu, de situer le siège social dans Saint-François. On verra, à ce moment-là, quelle sera sa verve. Je ne veux pas lire entre les lignes de ses propos, mais je m'attends à un appui que j'espère beaucoup plus digne, toutefois, que celui du député de Frontenac, qui est d'ailleurs resté de l'autre côté de la table. De toute évidence, c'est là qu'il doit demeurer.

C'est très malheureux qu'une motion aussi sérieuse que celle du député de Saint-Laurent ait donné lieu à un si pauvre spectacle. Le député de Saint-Laurent a proposé de situer le siège social à un endroit précis, et ce n'est pas par hasard, ce n'est pas le fruit de l'improvisation, au contraire. Si nous proposons de situer le siège social d'une façon précise, c'est dans la ligne d'une tradition qui a prévalu jusqu'à maintenant et dont les gouvernements précédents n'ont eu qu'à se féliciter.

Si on prend, par exemple, la loi qu'on appelait à ce moment-là la loi 22, la loi de SOQUIA, sanctionnée le 27 juin 1975, on voit qu'à l'article 2 le siège social de la société est dans le territoire de la Communauté urbaine de Québec. Il en est de même pour REXFOR, créée par le projet de loi no 5, sanctionnée le 15 juin 1973. Il en est de même pour la Société québécoise d'exploration minière où, à l'article 2, on dit: La société a son siège social à Québec ou dans le voisinage immédiat.

Si c'est le problème de l'amendement, à savoir qu'on est trop précis en disant qu'on veut que le siège social soit situé dans la ville — c'est ce qu'on dit, je crois — de Thetford Mines, nous sommes prêts à accueillir un sous-amendement afin que le siège social puisse être aussi établi dans le voisinage immédiat de la ville de Thetford Mines. Ainsi, SOQUIP, créée par une loi sanctionnée le 28 novembre 1969... C'était le parti de l'Union Nationale qui était au pouvoir et à ce moment-là on avait dit: La société a son siège social dans la ville du Québec ou dans le voisinage immédiat. Espérons que le rappel de ces décisions, surtout de cette loi de la Société québécoise d'initiatives pétrolières adoptée par le gouvernement de l'Union Nationale pourra inspirer au député de Richmond de changer sa'décision de ne pas se décider.

Le siège social de la Société nationale de l'amiante peut avoir plus ou moins d'importance en fonction du rôle que le gouvernement fera jouer à cette société, à savoir...

M. Godin: La Palice est passé par là, M. le Président.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: 2 sur 10.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Lalonde: ... dans quelle mesure et quel rôle on fera jouer à cette société. Est-ce qu'elle demeurera une société de portefeuille seulement, qu'on appelle "holding ", ou une société qui aura des activités elle-même, des activités minières, des activités d'exploitation, d'exploration et de transformation? Je dis ceci pour répondre aux objections ou aux questions qui ont été posées par le député de Frontenac qui a été surpris quand le député de Saint-Laurent a parlé du siège social de la Société de l'amiante et du siège social de l'Asbestos Corporation, tout en demeurant dans l'interrogation, étant donné que le ministre venait à peine de nous dire qu'il est possible — ce n'est pas exactement ce qu'il nous a dit, mais c'est ce que ces propos laissaient transparaître — qu'il n'y ait pas d'acquisition de l'Asbestos Corporation. Il n'y a aucun doute que si l'Asbestos Corporation est acquise par la Société nationale de l'amiante, la question du siège social de cette filiale sera aussi à déterminer. J'espère que l'on ramènera, dans la mesure du possible, le plus grand nombre de services possible de ce siège social à Thetford Mines. Je pense qu'il y a plusieurs excellentes raisons — et ce n'est pas seulement une question de clocher, comme disait le député de Mercier — pour lesquelles un siège social doit se rapprocher du lieu des activités, doit se rapprocher de l'ensemble de la main-d'oeuvre.

On sait que des grandes métropoles comme Montréal rassemblent un grand nombre de sièges sociaux dont les activités sont dispersées dans le monde. A ce moment, on ne peut pas avoir le siège social tout près des activités principales de la société. Mais, lorsqu'il s'agit d'une société comme l'Asbestos Corporation, je ne veux pas mettre en doute le bien-fondé des motifs qui ont présidé au transport de ce siège social à Montréal. Je ne connais pas les raisons, il y en a peut-être d'autres. Mais je pense qu'il est désirable, lorsqu'une société a l'ensemble de ses activités à un endroit, que son siège social et la majorité des services de son siège social soient situés le plus près possible des travailleurs, le plus près possible de ses activités.

Dans cette mesure, je pense qu'au cas où l'Asbestos Corporation serait acquise par le gouvernement il y aurait lieu aussi de se poser la question. Une des raisons pour lesquelles le député de Saint-Laurent n'a pas pu se prononcer là-dessus et moi non plus, c'est que le ministre a laissé paraître qu'il est possible qu'il n'y ait pas d'acquisition d'Asbestos Corporation. Donc, on ne peut parler actuellement — d'ailleurs, le règlement nous empêcherait de le faire— que du siège social de la Société nationale de l'amiante. (10 h 30)

Pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense que les députés devraient appuyer cette motion. C'est seulement exceptionnellement qu'un gouvernement laisse en suspens la décision concernant le siège social de ses sociétés. Je n'en connais pas d'autre exemple que celui du projet de loi no 70. Les seuls précédents qu'on peut invoquer touchent des organismes de l'Etat, par exemple l'Office de la langue française et l'ancienne Régie de la langue française. On laissait au gouvernement le soin de déterminer si ce serait à Montréal ou à Québec. On donnait au moins deux endroits, un choix. Il en est de même pour certains autres organismes, mais là il s'agit réellement d'organismes du gouvernement. Pour la Société nationale de l'amiante, puisque c'est le choix du gouvernement d'en faire une société de la couronne, une société de l'Etat, c'est-à-dire un organisme non pas gouvernemental, mais une société à caractère séparé, une personnalité juridique autonome, il serait désirable et tout à fait indiqué, premièrement, qu'on détermine dans la loi où le siège social se situera et, deuxièmement, qu'on le situe au coeur même de la région de l'Amiante, à Thetford Mines.

Le Président (M. Clair): M. le député d Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, je pense que cet amendement qui est proposé s'inscrit dans une volonté de décentralisation qui est partagé par tout le monde. Cet amendement n'est pas farfelu du tout. Dans cette perspective de décentralisation, je crois que, déterminer le siège social de la Société nationale de l'amiante soit à Thetford, cela permettrait de préciser tôt où la société va situer ses principales activités. Cela permettrait d'éviter des conflits qui sont, évidemment, toujours à craindre dans ce genre de décision. C'est souvent les décisions les moins importantes qui donnent lieu à des conflits les plus sérieux. Ce qui peut ne pas être d'une grande importance pour I ensemble du Québec peut être très important pour une région particulière comme Thetford.

Dans cette volonté de décentralisation, il m'apparaîtrait utile d'envisager — c'est peut-être envisagé déjà — qu'un centre de recherche sur l'amiante, par exemple, puisse être situé à Sherbrooke. Il sera évidemment possible d'envisager que, si on crée une société de transformation, cette société puisse avoir son siège social ailleurs et peut-être qu'au total il y en aurait un peu pour tout le monde dans cette répartition de sièges sociaux...

M. Godin: ... Outremont...

M. Raynauld: Outremont? Je n'ose même pas placer de très fortes probabilités sur la possibilité que le gouvernement soit aussi aimable à mon endroit.

M. Bérubé: On vous réservera un siège au conseil d'administration, M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Oui, après. Surtout lorsque je ne serai plus ici. Il y a quand même une certaine cohérence, une certaine logique à cet amendement. Etant donné que la société nationale de l'amiante va avoir surtout à s'occuper d'Asbestos Corporation — cette dernière a déjà eu son siège social à Thetford — que la société nationale ait son siège social à Thetford Mines n'est sûrement pas une chose idiote, au contraire.

Je pense qu'il y aurait intérêt, dans ce projet de loi, qu'on élimine justement les possibilités de conflits, les ambiguïtés qui peuvent donner lieu à toutes sortes de pressions de la part des députés et même aussi de la part d'autres groupes d'intérêts qui sont impliqués dans ce genre de décision. Je voudrais appuyer cet amendement, encore une fois, pour marquer d'abord cette volonté de décentralisation et, ensuite, pour éviter que des conflits se multiplient pendant tout le temps où le gouvernement pourra examiner la question et se laisser pousser d'un côté ou de l'autre par tous les groupes d'intérêts impliqués dans ce genre de décision. J'appuie donc cet amendement du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, vous demandez la parole?.

M. Forget: Oui, M. le Président. J'aimerais parler sur la motion d'amendement cette fois-ci.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, je vous indique immédiatement, étant donné que vous dites cette fois-ci, que, malheureusement ou heureusement, ce n'est pas

moi qui présidais la commission auparavant, mais, d'après les notes que m'a laissées le député de Jonquière, vous auriez déjà parlé durant dix minutes sur la motion.

M. Laplante: Est-ce que je pourrais corriger, M. le Président? Au moment où le député de Saint-Laurent a présenté son amendement, c'est moi qui présidais la commission et M. le député de Saint-Laurent n'a aucune minute d'entamée sur sa...

M. Forget: ... sa motion d'amendement. M. Laplante: ... sa motion d'amendement.

M. Lalonde: ... sur sa motion d'amendement. Il avait parlé sur la motion principale.

M. Laplante: II a parlé dix minutes, par exemple, sur la motion principale.

M. Forget: Ma compréhension aussi.

Le Président (M. Clair): Cela va. M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: De toute façon, M. le Président, je vais sûrement me maintenir à l'intérieur même de la plus basse limite. J'aimerais reprendre les arguments qui ont été offerts par deux députés, et en particulier celui d'Abitibi-Est, hier soir, lorsqu'il a émis des doutes sur l'opportunité d'une implantation dans la région de l'amiante étant donné les perspectives de développement de mines d'amiante dans d'autres régions du Québec.

Il est évident que l'amendement qu'on a proposé soulève, du côté ministériel, des agitations et des doutes parce que plusieurs députés pourraient se trouver dans la situation où des ressources amiantifères se trouvent soit à l'état de développement ou à l'état d'exploration dans leur comté respectif et qu'ils pourraient envisager une implantation de la Société de l'amiante chez eux. Cependant, je les inviterais à réfléchir peut-être un peu plus longuement sur les véritables possibilités qui peuvent exister, par exemple, pour la région de l'Abitibi, pour la ville d'Amos en particulier, de recevoir le siège social de la Société de l'amiante.

Etant donné le rôle historique de la région de l'amiante, de la région de Thetford Mines et des environs, l'importance des réserves qui s'y trouvent, et l'importance de la masse des travailleurs qui se consacrent à l'exploitation de ce minerai depuis au-delà de 100 ans, est-il vraiment réaliste d'envisager que des régions nouvelles où se situeraient au plus une ou deux exploitations minières pourraient être vraiment des concurrentes sérieuses à l'implantation du siège social d'une entreprise de l'amiante? Il ne semble pas. Le danger que cette augmentation fait courir, c'est que, comme souvent il arrive au Québec, si on se rangeait à cet avis, si on écoutait les propos tant du député d'Abitibi-Est que ceux du député de Saint-François, on conclurait, comme d'habitude, que, dans le fond, sur le plan des communications, sur le plan économique, le centre de gravité du Québec se trouve à Montréal et on trouverait, dans toutes ces argumentations, une raison de plus pour laisser le siège social à Montréal.

Il est à peu près assuré que le gouvernement ne choisira pas de mettre le siège social de la Société de l'amiante à Amos, à Chibougamau ou dans des régions comme celles-là. Je crois que le député d'Abitibi-Est, entre autres, devrait concentrer ses énergies et son pouvoir de persuasion auprès du ministre pour obtenir un engagement du gouvernement à une prise de participation à la mine qui pourrait s'établir dans cette région, et ne pas viser plus haut que cela. Je pense que ce serait déjà, pour lui, comme député de la région, une réalisation très solide à son crédit, s'il réussissait à convaincre le gouvernement d'intervenir dans ce secteur.

Pour ce qui est du député de Saint-François, je suis sensible aussi à toutes les pressions auxquelles il peut être l'objet parce qu'on en a vu les signes, les manifestations dans les journaux locaux, dans laTribune en particulier. Il est clair que c'est la ville la plus importante, pas vraiment dans la région de l'amiante, mais qui est peut-être la plus rapprochée et qui est reliée historiquement le plus étroitement à la région de l'amiante et qu'elle ambitionne, à cause de son université, d'avoir un certain nombre de retombées. On a parlé du centre de recherche, en particulier. Il me semble que, du côté du député de Saint-François, c'est là un objectif réaliste, et, s'il se limitait à cela, il aurait peut-être des chances de marquer des points. Mais s'il veut tout avoir, dans un certain sens, il risque d'échopper... d'achopper, je m'excuse, c'est un lapsus.

Donc, il me semble que du côté ministériel, si on me permet de concilier les points de vue divergents de la majorité sur cet aspect, le meilleur intérêt de ceux qui sont intervenus pour offrir des points de vue particuliers, tant au nom de la région du Nord-Ouest qu'au nom de la ville de Sherbrooke et de ses environs, est qu'ils feraient aussi bien d'accorder leur appui au député de Frontenac et à l'Opposition officielle dans cette démarche et d'obtenir du ministre qu'il se prononce rapidement sur cette implantation à Thetford Mines.

Un autre aspect qui a été évoqué — j'ai tenté de le faire dans une question, mais en me rendant compte moi aussi que c'était finalement plus un commentaire qu'une question — est que la question de la structure corporative de l'intervention gouvernementale dans le domaine de l'amiante est encore extrêmement floue. S'agira-t-il d'une société de l'amiante qui serait un holding financier seulement, qui détiendrait des actions dans son portefeuille de la Société Asbestos, de la Société Abitibi Asbestos, une participation dans des sociétés à établir veillant à la transformation et ne modifiant en rien en quelque sorte la vocation actuelle de la Société Asbestos qui demeurerait une société minière sans aucune autre préoccupation? Ou s'agirait-il, au contraire, d'une société complètement intégrée qui serait à la fois active dans le

domaine minier, dans le domaine de la transformation, dans le domaine de l'exploration?

Ce sont évidemment des précisions que le gouvernement n'a pas fournies à l'heure actuelle. On ne peut faire que des conjectures. Mais, de toute manière, est-ce que cette distinction est importante pour déterminer le siège social de la Société nationale de l'amiante? Il me semble que non, parce que dans l'hypothèse où la Société nationale de l'amiante serait une société intégrée, il demeure que pendant longtemps c'est à Thetford Mines que se trouverait la plus grande partie de ses activités, de ses travailleurs, de ses opérations. Ce n'est qu'après un assez grand nombre d années, dans le fond, que le poids relatif des autres activités pourrait se déplacer à l'extérieur de Thetford Mines. Et encore, même cela n est pas certain.

Il y a donc d'excellentes raisons pour que, s'il s'agit d'une société intégrée, son siège social, dès le départ, se retrouve à Thetford Mines. Si, d'un autre côté, il s'agit d'un holding, mon Dieu, la question du siège social prend peut-être moins d'importance dans la mesure où un holding n a pas vraiment besoin d'un personnel important. Il s'agit d'être détenteur de portefeuille et de surveiller de façon générale les activités des filiales, de coordonner leur action. Il s'agit d'un personnel extrêmement restreint. Encore une fois, comme il s'agit de coordonner les filiales et que la plupart des filiales, la plus importante, du moins, serait encore une fois la Société Asbestos, il y aurait d'immenses avantages à ce que à la fois la Société Asbestos et la Société nationale de l'amiante se retrouvent dans la même ville puisqu'elles auront des relations très étroites.

Que l'on choisisse une solution ou l'autre, il reste que la conclusion à laquelle on en vient, qui prend forme par cet amendement qui vise à faire de la ville de Thetford Mines le siège social, semble appropriée. Il ne semble pas y avoir d'objection, quelles que soient les distinctions qu on puisse faire, ou quelles que soient les possibilités de structurer les différentes corporations qui seraient les filiales de la Société nationale de l'amiante. Dans le fond, je ne vois vraiment pas quel pourrait être le raisonnement que pourrait tenir le ministre à partir de cela. Il a dit: On ne peut pas présumer qu'on va acheter la Société Asbestos. C'est peut-être une révélation intéressante, mais je ne peux pas vraiment croire, étant donné ce qu'il a dit, ce que des porte-parole du gouvernement récemment ont dit quant à leur désir même d'exproprier si les négociations de gré à gré ne débouchent pas rapidement, je ne peux pas croire, dis-je, qu'on doive prendre comme hypothèse de travail que la Société Asbestos ne sera pas achetée.

Si on écarte donc cette possibilité que la société Asbestos ne soit pas achetée, si on tient compte de l'affirmation du ministre à l'effet qu'il faudra désormais implanter en dehors de Québec et de Montréal les sièges sociaux des sociétés d'Etat ou des entreprises gouvernementales nouvelles et peut-être même déplacer vers des endroits, des centres régionaux et des pôles d'attrac- tion régionaux certains sièges sociaux qui, actuellement, sont situés à Québec ou à Montréal, dans cet esprit, il me semble que ce serait une occasion intéressante et tout à fait appropriée pour le gouvernement de dire: Etant donné les positions que nous avons prises, étant donné nos politiques, étant donné l'éventualité plus que probable et même la certitude ou notre volonté arrêtée de façon définitive de se porter acquéreur de la société Asbestos, voilà une occasion que nous saisissons de démontrer que cette volonté de déconcentration des entreprises gouvernementales est plus que des paroles en l'air, mais peut se traduire effectivement dès aujourd'hui par un texte de loi.

D'ailleurs, comme mon collègue de Marguerite-Bourgeoys le signalait, à ma connaissance, le siège social de toutes les sociétés d Etat est déterminé par la loi, avec une porte de sortie, une échappatoire stipulant que la société peut, avec I autorisation du gouvernement, déplacer son siège. Mais, plus qu'une nuance, il est très différent de trouver une affirmation dans une loi disant que le siège social est à un endroit X, mais que, dans des circonstances qu'il faudra, à ce moment, justifier, qu'il faudra expliquer, le fardeau de la preuve en quelque sorte appartiendra au gouvernement qui devra dire: Voici, les raisons qui font qu'il fallait absolument le déplacer et, d'autre part, une affirmation selon laquelle, dans le fond, sans avoir la nécessité de démontrer quoi que ce soit, le gouvernement a la plus large discrétion quant à l'implantation du siège social. Et cela, on ne le retrouve pas dans d'autres projets de loi, à ma connaissance. Sauf erreur, dans tous ceux que j'ai vus du moins, dans tous ceux qui ont été adoptés au cours des dernières années, et cela devait être encore plus vrai dans le passé, je pense qu il n'y avait même pas l'échappatoire de pouvoir le déplacer. Je crois que dans les anciennes lois c était même la ville de Québec, ce n'était même pas la région de Québec, sans possibilité de changement. Depuis quelques années, on disait la région de Québec, mais on peut le déplacer si on a des raisons de le faire. Alors, il faudra le justifier, il faudra le publier dans la Gazette officielle.

Là, on franchirait une étape nouvelle où la loi est complètement silencieuse sur I'implantation du siège social. Il ne me semble pas que ce soit un progrès, encore une fois, parce que, dans la mesure où il y a une intention de décentraliser, on peut le faire dès le départ, on sait de quoi on parle. De toute façon, ce n'est pas comme si on parlait d'une société dont les activités seraient réparties à peu près également à travers tout le territoire. Là, il y aurait beaucoup plus de possibilités de choix. Je crois qu'il n'y en a vraiment pas dans ce cas-ci. Cela se limite à un très petit nombre de villes. Essentiellement, cela se limite à la région, à la très petite région de Thetford Mines et Black Lake puisque, dans le cas de l'autre ville, l'autre centre important qui est Asbestos, la ville d'Asbestos, on est malgré tout en présence d'une seule mine, d'une seule entreprise, alors que dans l'autre cas, on en a sept et puis on est aussi au coeur géographique de région. Donc, il y a vraiment quelque chose qui...

M. Grégoire: II y a 2000 mineurs à Asbestos, 4000 à Thetford. (10 h 45)

M. Forget: C'est cela. Alors, les nombres sont beaucoup plus importants, le nombre d'entreprises est plus important, le nombre de travailleurs est plus important et il y a une certaine répartition géographique à l'est et à l'ouest de cette ville, ce qui n'est pas le cas pour Asbestos qui est à une des extrémités de la région.

M. Grégoire: A l'ouest, et East Broughton à l'est.

M. Forget: Alors, il me semble que cela devrait être peut-être la motion par excellence où on va avoir l'appui de tout le monde. Il ne me semble pas avoir laissé de côté aucun argument. Il me semble que cela permettrait même dans un vote absolument libre au député d Abitibi-Est et au député de Saint-François de donner leur appui.

Encore une fois, ils peuvent le faire sûrement privément dans des entretiens avec le ministre. Ils pourraient certainement l'assurer de leur appui si le ministre décidait d'appuyer cette motion d'amendement en obtenant de lui privément, sans aucun doute — ce sont des choses qui se font — des assurances morales au moins que le centre de recherche et que la mine d'Abitibi Asbestos vont recevoir l'attention prioritaire du ministre pour une implantation dans leur région.

Devant une telle démonstration de bonne volonté, je suis sûr qu'ils accorderaient leur appui à cet amendement qu'on a eu l'honneur de présenter sur l'invitation d'ailleurs — on s'en souviendra, je l'ai cité au début— du maire de Thetford Mines qui disait: "Si c'est tout ce qu'il faut, le demander au gouvernement, on va le demander immédiatement." Le maire et son groupe nous ont dit cela il y a deux semaines, avant les vacances pascales; ils ont dit cela ici même, tous les membres de la commission en ont été témoins. Cela permettrait de donner une réponse, la première, mais une réponse sans aucun doute très significative, et qui serait très bien accueillie par les citoyens de la ville de Thetford Mines, une indication précise ou au moins un avantage, le premier, peut-être le seul, mais au moins le premier et quelque chose de concret devant découler de la politique de l'amiante du gouvernement actuel.

Ils nous ont dit qu'ils n'avaient aucune assurance qu'ils auraient d'autres retombées positives, mais celle-là, au moins, on peut la leur assurer, alors, pourquoi ne pas le faire?

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: Oui, M. le Président. Nous sommes en présence d'une motion qui ne ralliera jamais tous les gens intervenant à cette commission. On a vu, par exemple, nos collègues de l'Opposition officielle proposer que le siège social de cette compagnie s'établisse à Thetford Mines. Je pense, honnêtement, qu'un certain nombre d'ar- guments militent en faveur de leur motion. Par exemple, on sait que Thetford Mines est reconnue mondialement comme étant la capitale de l'amiante. Sur ce point, je leur donne absolument raison. Il y a une autre raison qu'ils n'ont pas tellement détaillée, mais qu'on retrouve quand même dans leur motion en ces mots: "Elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit."

On sait qu'à Thetford Mines, notre ancien collègue, le transfuge député de Frontenac, a travaillé fort pour réhabiliter et remettre en marche une entreprise importante.

M. Lalonde: II est très sévère, il est aussi sévère que moi.

M. Grégoire: Oui, oui.

M. Ouellette: Ce n'est pas de la sévérité, je me rends tout simplement compte de certains faits que j'ai vécus hier.

M. Grégoire: M. le Président, je demanderais au député de Beauce-Sud, qui est mon voisin comme député, de ménager ses paroles à mon égard.

M. Ouellette: Oui, nous sommes voisins de comté, mais nous ne sommes plus collègues depuis hier. C'est la politique, ça!

On a vu qu'à Thetford Mines, il y a une firme qui se spécialise justement dans la fabrication de maisons mobiles et qui serait en mesure de fournir les locaux à être transportés éventuellement dans un autre site. Je pense que c'est le meilleur argument, après celui de la capitale de l'amiante, qui milite en faveur de votre amendement, messieurs de l'Opposition officielle. Comme chacun, étant élu dans une circonscription électorale, a tendance, tout naturellement, à défendre les intérêts de ses électeurs, on a également vu le député de Saint-François favoriser l'implantation de ce siège social à Sherbrooke. L'argument no 1 qu'il pouvait mettre de l'avant était évidemment l'activité importante de l'université de Sherbrooke dans le secteur de l'amiante au niveau de la recherche; on ne peut certainement pas en vouloir au député de Saint-François de soutenir cette thèse.

On a également vu le député d'Abitibi-Est, qui prévoit un développement assez spectaculaire dans sa région dans les années qui viennent, souhaiter que le siège social s'établisse à Matagami. Etant député de Beauce-Nord, comté dans lequel on retrouve d'ailleurs une mine d'amiante, Carey Canadian Mines, je m'en voudrais de ne pas souhaiter que le siège social s'en vienne chez moi. J'ai également un certain nombre de raisons tout à fait défendables qui justifient ma prise de position. Par exemple, la mine de Carey Canadian Mines ne se trouve pas dans Beauce-Nord, elle se trouve à East Broughton.

M. Grégoire: Si vous permettez, j'ai une question de règlement.

M. Lalonde: Ecoutez ce qu'il veut dire, écoutez-le.

M. Grégoire: Oui, mais c'est une erreur qu il commet.

M. Ouellette: Je précise mon point de vue, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: C'est une erreur monumentale.

M. Lalonde: Ecoutez-le, il dit de bonnes vérités.

M. Grégoire: La mine n'est pas dans la Beauce.

M. Ouellette: J'allais le dire.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s il vous plaît!

M. Grégoire: La mine est dans le comté de Frontenac.

M. Lalonde: C'est ce qu'il était en train de dire.

M. Ouellette: J'allais dire que la mine se trouve sur le territoire d'East Broughton, qui est dans le comté de Frontenac, mais le moulin est dans Beauce-Nord.

M. Grégoire: C'est un vieux moulin! Un vieux moulin plein de poussière! C'est pour cela qu'ils y sont en grève, parce que c'est un moulin empous-siéré!

M. Ouellette: Je remercie le député de Frontenac qui me met les arguments dans la bouche. J'allais justement dire que le moulin se trouve dans notre comté, les travailleurs sont du comté de Frontenac et les retombées positives sont donc dans Frontenac alors que les retombées négatives sont dans Beauce-Nord. La poussière, elle est chez nous! Les tas d'ordures sont dans Frontenac, mais le vent venant généralement de l'ouest, on avale la poussière. Le député de Frontenac est tout à fait d'accord, n'est-ce pas? Même s'il a changé de côté, je vois qu'on se rejoint de temps en temps. C'est donc là, je pense, un argument tout à fait favorable à l'implantation du siège social dans Beauce-Nord, et je ferais preuve de condescendance jusqu'à offrir au député de Frontenac qu'on installe, sur la frontière des deux comtés, ce siège social, mais que la porte d'entrée soit dans Beauce-Nord.

Il y a un seul intervenant qui m'a surpris, c'est le député de Richmond. Il faut lui rendre cet hommage ce matin, il a été fidèle à lui-même. Etant donné qu'il s'oppose à la création de la Société nationale de l'amiante, même s'il tient beaucoup au mot "nationale", il a préféré s'abstenir plutôt que d'oser réclamer que ce siège social s'installe dans Richmond. Quand on ne veut pas d'une chose, je ne vois pas pourquoi on voudrait que le siège social de cette chose serait chez nous. Alors, il a été tout à fait fidèle à lui-même. Mais je pense que, si j'étais Salomon, je suggérerais une chose un peu bizarre, mais de toute façon, même si cela paraîtra tout à fait farfelu, cela n aura rien de plus farfelu que les douze, treize ou quatorze motions présentées par l'Opposition jusqu'à présent. Il faudrait peut-être, pour satisfaire tout le monde, qu'on place la réception à Matagami, puisqu'un jour il y aura là un développement de l'amiante. On pourrait peut-être installer les téléphonistes à Montréal. Les lignes téléphoniques sont plus nombreuses, plus accessibles.

M. Paquette: Dans l'édifice de la Sun Life.

M. Ouellette: Mon voisin suggère l'édifice de la Sun Life. Non, ce n'est pas assez mobile. Le secrétariat pourrait très bien aller à Asbestos, la recherche à Sherbrooke — elle y est déjà — les fichiers à Thetford et le président pourrait siéger à Tring Jonction. Je pense que là on réussirait à rallier toutes les opinions.

M. Lalonde: Vous n'avez rien pour Marguerite-Bourgeoys?

M. Ouellette: Maintenant, comme c'est fort farfelu, je ne me ferai pas le défenseur de cela! Je ne sais pas... On parle de Montréal en général, cela peut toujours vous toucher.

M. Lalonde: Vous enverrez les profits chez nous.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ouellette: Evidemment, je ne ferai pas une motion ou un sous-amendement à la motion pour suggérer que le siège social s'en vienne dans Beauce-Nord.

M. Lalonde: C'est un manque de courage!

M. Ouellette: Ce n'est pas un manque de courage, c'est plutôt une preuve de réalisme de ma part. Je crois que nous aurions tort de lier les deux mains d'une compagnie à fonder, ou d'un siège social à créer, en lui imposant un site précis. D'ailleurs, la motion présentée par l'Opposition officielle manque de précision. Vous auriez pu déterminer la rue à Thetford. A ce moment-là, on aurait peut-être pu suggérer qu'il s'agisse du boulevard René-Lévesque, de l'avenue de l'Indépendance ou je ne sais trop, peut-être la rue Yves-Bérubé par exemple. Vous auriez été un peu mal pris. (11 heures)

M. Forget: II y a justement un terrain à Thetford Mines où il y a une affiche où on dit: Site du futur siège de l'amiante.

M. Ouellette: Et comment s'appellera la rue? M. Grégoire: Place de l'Amiante.

M. Forget: La place de l'Amiante. C'est déjà identifié.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ouellette: Alors, en terminant — parce qu'il est important qu'il y ait une fin à ces choses-là — je vous dis tout de suite que je vais voter contre la motion, préférant laisser à l'éventuel bureau de direction le soin d'établir le site lui-même. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le ministre des Richesses naturelles.

M. Bérubé: M. le Président, je dois un peu, dans la ligne de toutes ces interventions, m'inscrire en faux contre une manoeuvre comme on en a vu plusieurs depuis que nous sommes à cette commission, une manoeuvre que je dirais déloyale. Déloyale de la part de l'Opposition, qui cherche à saper le moral du parti au pouvoir en offrant ici un siège social...

M. Lalonde: Une petite pichenette et, déjà, vous êtes divisés.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Bérubé: ... au député de Frontenac, là sans doute quelque autre avantage et on parle même d'un poste de lieutenant-gouverneur. Enfin! On voit un peu la tactique du Parti libéral. C'est que, face à un gouvernement solide, ils n'ont d'autres solutions que de tenter d'y faire quelques fissures. Et c'est avec regret que j'ai vu mon collègue se joindre au Parti libéral, je dirais même avec terreur, car...

M. Lalonde: Ne pleurez pas, il va revenir vite.

M. Brochu: II est comme un bolo! C'est le même principe qu'un bolo.

M. Bérubé: Je dis bien avec terreur, parce que j'ai eu souvent l'occasion d'apprécier la fougue, la verve qui a le don de mettre en rage les députés de l'Opposition. Je dois dire qu'il sait, avec beaucoup d'humour, avec beaucoup de finesse, aller chercher toutes les petites défaillances des partis d'Opposition. Et je craindrais d'avoir le député de Frontenac face à moi, qui pourrait sans doute manifester le même enthousiasme, la même habileté à démolir les thèses du gouvernement comme il le fait pour les thèses de l'Opposition. Je pense que c'est un gain très net pour le Parti libéral.

M. Forget: ... trop de compliments...

M. Lalonde: II est en train de se faire noyer comme un poisson.

M. Bérubé: En fait, j'ai cru discerner d'ailleurs dans l'attitude du parti de l'Opposition officielle une certaine crainte face à la venue du député de Frontenac. En effet, en temps normal le député de Marguerite-Bourgeoys y va d'interventions "ad lib" à cette commission qui sont parfois intéressantes, généralement assez longues, vingt minutes, et parfois manquant d'idées. Elles sont même parfois ennuyeuses. Or, aujourd'hui, craignant sans doute l'éclat de son nouveau confrère, il a cru bon cette fois-ci de faire préparer son texte par ses services de recherche.

M. Lalonde: Oui, c'est en plein ça...

M. Bérubé: Et, effectivement, je pense que c'est peut-être une saine crainte de la part du Parti libéral face à l'arrivée dans ses rangs du député de Frontenac.

M. Grégoire: Pas tant que cela...

M. Bérubé: Soyons néanmoins plus sérieux et examinons la proposition qui nous est faite ici par l'Opposition libérale. D'une part, l'Opposition libérale a très bien souligné que la société a son siège social dans la ville de Thetford Mines. Elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit avec l'approbation du gouvernement. Donc, l'Opposition libérale a très bien perçu une tendance qui a cours présentement au gouvernement, depuis déjà un certain nombre d'années, qui consiste à laisser une plus grande autonomie aux sociétés d'Etat, à permettre aux sociétés d'Etat d'évaluer un certain nombre de décisions importantes à prendre. Or, je pense que la localisation d'un siège social est de toute évidence une décision importante qu'une société, qu'un conseil d'administration peut avoir à prendre.

D'ailleurs, pour parler de ces déménagements de sièges sociaux, on pourrait sans doute très bientôt annoncer un nouveau déménagement de siège social de la Sun Life puisque, en effet, la société Asbestos Corporation étant située dans l'édifice de la Sun Life, je doute qu'elle veuille, pendant encore de nombreuses années, encourager une entreprise qui a montré déjà par ses attitudes absolument politiques, et je dirais même un peu démagogiques, que très souvent des arguments politiques prenaient le pas sur de véritables arguments économiques lorsqu'on prend une décision comme celle de déménager un siège social.

Nous l'avons vu dans le cas de la Sun Life. Je pense que pour la même raison il faut éviter ici de n'introduire que des arguments politiques dans le choix d'un siège social. En effet, le gouvernement a adopté une politique de décentralisation. C'est donc dire que dans tous les cas une étude doit être faite de tout nouvel organisme gouvernemental en mettant l'accent cette fois-ci sur les arguments favorables à la décentralisation, et que toute décision de ne pas décentraliser en dehors des grands centres doit être justifiée par une analyse excessivement serrée. On l'a vu d'ailleurs dans le cas de la Régie de l'assurance-maladie où la décision gouvernementale a été, temporairement, pour l'implantation du régime, étant donné

la rapidité — de l'assurance automobile, je m'excuse — que nous devions manifester dans I'implantation du système, à ce moment difficile peut-être, d'immédiatement démarrer la régie à partir d'une ville de province, par exemple, avec des problèmes, possiblement, de recrutement. Il est donc apparu qu'on pouvait pendant une période temporaire d'un ou deux ans établir, constituer la Régie de l'assurance automobile à l'intérieur de la ville de Québec pour après la déménager dans un centre plus propice, un centre qui nous permettrait de pratiquer cette tendance à la décentralisation.

L'intention du gouvernement est très ferme. Elle s'est manifestée dans ce mémoire au Conseil des ministres, qui a été approuvé par lui et qui va donc inciter tout nouvel organisme gouvernemental à sortir des grands centres traditionnels. Cependant, je pense qu'il faut, d'une part, manifester une intention très nette de décentraliser, mais, en même temps, respecter l'autonomie de la société. En effet, à ce conseil d'administration il va de soi qu'il n'y aura pas que des représentants, par exemple, de la société Asbestos Corporation, mais qu'il y aura également des représentants d'autres sociétés qui se seront jointes à la Société nationale de l'amiante dans des "joint ventures", dans des associations pour développer soit le gisement d'Abitibi Amiante, si celui-ci devait s'avérer économiquement intéressant, soit d'autres entreprises de transformation dont nous sommes à discuter des projets extrêmement précis.

Par conséquent, il faut s'attendre à voir apparaître au Québec, aussi bien dans le comté de Richmond que dans le comté de Frontenac et, j'espère, dans le comté de Drummond et dans tous les comtés environnants de la région des Cantons de l'Est, des entreprises très souvent avec leur propre conseil d'administration. Le siège social des papiers Cascades est situé à Kingsey Falls. On pourrait très bien imaginer une expansion de cette entreprise qui amènerait une plus solide implantation de son siège social dans le comté de Richmond.

Par conséquent, il faut s'attendre que ces diverses filiales de la Société nationale de l'amiante implantent leur siège social là où elles ont leurs activités principales. Comme le député de Saint-Laurent l'a souligné, on peut et on doit s'attendre que la Société nationale de l'amiante voie ses fil ia-les ou les sociétés avec lesquelles elle sera associée implanter des sièges sociaux un peu partout. Donc, on peut très bien imaginer cette implantation aussi bien dans la région de Sherbrooke que dans la région de Thetford et à Black Lake.

Le seul problème et l'objection que j'aurais, c'est de prendre une décision qui n'est pas fondée sur un examen objectif de différents sites pour conclure à l'endroit idéal pour une telle implantation. Il va de soi que cette loi constituant la Société nationale de l'amiante, vise à permettre l'engagement d'administrateurs de cette future société — puisque c'est l'objectif de la loi — qui, eux, pourront se doter des services nécessaires à une telle analyse. Il va de soi que le ministère des Ri- chesses naturelles, qui est un ministère voué au développement minier, n'a pas les services pour étudier l'implantation optimale d'un siège social. De la même façon, je ne crois pas qu'il y ait, à l'intérieur du gouvernement, un organisme qui soit spécialisé dans l'étude et la recherche de la localisation des sièges sociaux.

D'ailleurs, nous avons, au moment du dossier de la Régie de l'assurance automobile, dû constater qu'il nous était impossible, en fait, d'obtenir véritablement une étude objective nous permettant de situer ce siège social. C'est le mandat que la Régie d'assurance automobile se voit confier de le définir à l'intention du gouvernement. Cela ne veut pas dire qu'il n'existera pas de pressions politiques. Les députés de Richmond, de Frontenac, de Saint-François pourront, certes, introduire le facteur politique, puisque c'est certainement un facteur important. On l'a vu dans le cas de la Sun Life où la décision n'a nullement été économique. Elle a été purement politique dans un but de déstabiliser l'économie du Québec. On voit bien ce qu'il arrive lorsqu une décision comme celle-là est une décision purement politique.

Il m apparaîtrait donc mauvais de décider de la localisation d'un siège social autour d'une table sans aucune étude préliminaire, sans aucune évaluation véritablement objective. Il faut donc laisser au conseil d'administration de la future Société nationale de l'amiante le soin de faire ce travail. Cela ne veut pas dire que le gouvernement n'aura pas "d'input" à cette décision, puisque, de toute façon, le gouvernement devra approuver la localisation du siège social. De la même façon, la société Asbestos, qui a toujours eu son siège social dans la région de Thetford et qui ne l'a déménagé que très récemment, pourrait certainement avoir à réenvisager la relocalisation de son siège social. Il pourrait évidemment exister encore un certain nombre de bureaux commerciaux, par exemple, dans la région de Montréal, puisque, peut-être pour des raisons de mise en marché, la région de Montréal pourrait s'avérer plus intéressante. Je ne me porte absolument pas garant de la décision, puisque je pense qu'une telle décision doit faire l'objet d'une analyse sérieuse avant d'être prise.

Par conséquent, je pense que ce qui apparaît important ici, c'est tout simplement de confier au gouvernement le soin de prendre des décisions administratives. La localisation d'un siège social, c est une décision administrative. Il faudra donner à nos conseils d'administration une certaine autonomie.

Egalement, dans la localisation d'un siège social, si on tient compte de l'opinion du conseil d'administration de cette société, il faut tenir compte du fait aussi qu'au conseil d'administration de la société siégeront des représentants des populations locales. C'est notre intention. Par conséquent, ces représentants auront certainement un mot à dire à nouveau. Puisque le député reconnaît dans son amendement qu'elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit avec I'approbation du gouvernement, c est qu'il reconnaît que la décision prise par cette commission

pourrait, en fait, être néfaste pour cette société et que, par conséquent, le gouvernement pourrait être amené à la renverser. Puisqu'on admet implicitement que cette commission n'a tout simplement pas les compétences, n'a tout simplement par les études — puisque le député de Saint-Laurent serait bien en peine de déposer ici une étude montrant qu'après une analyse sérieuse de toutes les localisations possibles, il en est arrivé à la conclusion que Thetford était le site idéal — ...

M. Forget: C'est notre travail.

M. Raynauld: C'est à nous de le faire, de fournir le travail au gouvernement.

M. Bérubé: ... cette étude n'existant pas, je pense qu'il nous apparaît logique, à ce moment-là, de laisser à l'organisme qui sera mandaté par le gouvernement pour réglementer les opérations de cette future Société nationale de l'amiante, de laisser à ces organismes le soin de faire des recommandations au gouvernement. Par conséquent, il m'apparaît, en fait, que cette proposition du député de Saint-Laurent est assez mai venue. D'ailleurs, les interventions que nous avons pu observer autour de cette table ont rapidement montré que la proposition du député de Saint-Laurent ne pouvait obtenir l'assentiment de personne autour de cette table.

En effet, je suis convaincu que le député de Richmond s'est tout de suite interrogé sur la solidité des arguments qu'invoquait le député de Saint-Laurent. Il a donc écouté soigneusement — et c'est difficile parce qu'il est assez soporifique, ce député de Saint-Laurent — mais il a quand même fait un effort. Je remarquais qu'il avait les yeux ouverts et il faisait vraiment un effort constant pour suivre le discours du député de Saint-Laurent. J'ai dû constater son profond désarroi...

M. Forget: C'est mieux que celui du ministre. M. Lalonde: C'est mieux que le ministre.

M. Bérubé: ... puisqu'à la fin du discours, évidemment, il recherchait encore un motif valable, présenté dans l'argumentation du député de Saint-Laurent, pour justifier l'emplacement à Thetford. Le député de Frontenac a certainement invoqué des arguments beaucoup plus solides, beaucoup plus étayés. Le député de Frontenac, je pense, en cette matière, a représenté un atout très appréciable pour l'amendement de l'Opposition libérale sans quoi, effectivement, je pense qu'il serait tombé dans le ridicule.

Oui, j'ai un remarquable adjoint parlementaire.

M. Forget: Faites-vous payer par des mots.

M. Lalonde: Pour combien de temps? On verra après le vote.

M. Bérubé: Oui, en fait.

M. Lalonde: On verra s'il a le courage de ses opinions.

Une Voix: II y aura au moins du ballottage. M. Lalonde: Vous allez le regretter.

M. Bérubé: Je tire donc la conclusion, après avoir observé attentivement le député de Richmond, que l'argumentation du député de Saint-Laurent était remarquablement faible, extrêmement ténue, je dirais même extrêmement fallacieuse les trois quarts du temps.

Egalement, dans la présentation du député d'Abitibi, j'ai trouvé plusieurs arguments valables, effectivement, dans la mesure où, peut-être, le gisement d'Abitibi Amiante pourrait représenter des investissements de $300 millions, donc supérieurs même aux investissements que l'on pourrait consentir dans la région de Thetford. Evidemment, il pourrait certainement être justifié de souligner que, effectivement, le Nord-Ouest a peu participé au développement minier, lui aussi, et qu'il pourrait être valable d'y avoir là certains sièges sociaux.

Je pense également, comme le député de Saint-Laurent a dû le reconnaître, que le député de Saint-François a des arguments valables concernant la ville de Sherbrooke qui est quand même un centre universitaire, un centre universel remarquablement dynamique et une des universités les plus dynamiques au Québec, en dépit de sa taille, et qui est d'ailleurs largement impliquée dans la recherche sur l'amiante. C'est donc un secteur qui mériterait certainement attention, il ne fait aucun doute, et il est situé également dans la région que je pourrais appeler de l'amiante, au sens large. Le député de Frontenac me dirait évidemment que c'est un peu tiré par les cheveux, mais je comprends.

M. Grégoire: En banlieue.

M. Bérubé: Oui, en banlieue. Quant à la localisation à Tring-Jonction, j'ai remarqué que même le député de Marguerite-Bourgeoys a dû, en y réfléchissant, finalement admettre que c'était peut-être une bonne localisation et il a proposé une porte avant, du côté du comté de Beauce-Nord, et une porte arrière, du côté de Frontenac, pour tenter un compromis.

M. Lalonde: Ce n'est pas moi qui ai fait cela, ce n'est pas moi qui ai dit cela.

M. Bérubé: En d'autres termes, le débat politique que nous avons eu autour de cette table a montré, hors de tout doute, que cette motion, comme toutes les autres que nous avons reçues de l'Opposition libérale jusqu'à maintenant, avait été très mal préparée et, en fait, je pense que nous devrons voter contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Frontenac. (11 h 15)

M. Grégoire: M. le Président, malgré toutes les fleurs et tous les compliments, j'en remercie le ministre mais je dois lui dire quand même qu'il ne m'a pas convaincu. Non, le ministre ne m'a pas convaincu réellement. C'est drôle, j'ai l'impression qu'il a pris à peu près les mêmes arguments que l'Opposition prend ordinairement. C'est vrai, j'ai remarqué que le ministre a pris à peu près le même style d'argumentation que l'Opposition prend ordinairement. Ordinairement, l'Opposition nous dit: II faut étudier, il faut des études; il n'y a pas eu assez d'études, on n'a pas complété nos études. Et l'argument de fond du ministre pour garder l'article tel qu'il est, c'est: II faut faire une étude objective de l'endroit.

M. Lalonde: Est-ce que vous I'amenez avec vous de notre côté?

M. Grégoire: Je ne sais pas, mais... M. Lalonde: On n'en veut pas.

M. Grégoire: II me semble que le temps des études est terminé dans la politique de l'amiante. Quand il a été question d'annoncer la politique de l'amiante, il n'y a pas eu d'hésitation. Il n'y a pas eu d'hésitation, les études étaient faites. Le premier ministre et le ministre sont venus où pour annoncer la politique de l'amiante? A l'endroit naturel où cela devait se faire, à Thetford Mines, annoncer la politique de l'amiante.

M. Lalonde: Je pensais que c'était l'Assemblée nationale l'endroit naturel.

M. Grégoire: C est pourquoi je me demande pourquoi cela prend encore des études pour délimiter l'endroit du siège social. En fait, la décision à prendre, M. le Président, c'est bien simple, le député de Marguerite-Bourgeoys a apporté des arguments solides tantôt quand il a sorti les précédents. Pour SOQUIP, le siège social était mentionné dans la loi. Pour quelle autre... Pour quantité de sociétés qui ont été formées, le siège social était mentionné, oui. Cela a été mentionné. En fait, la décision à prendre est la suivante, et d autant plus que le ministre, parfois, nous a donné de l'argumentation, à nous de l'Opposition, sur cet amendement quand il a parlé de la volonté de décentralisation du gouvernement actuel.

Alors, la première décision à prendre, à mon avis, c'est: Est-ce que le siège social sera situé dans la région de l'amiante, oui ou non? Que ce soit le député de Richmond qui plaide, que ce soit le député de Beauce-Nord, que ce soit le député de Frontenac, que ce soit le député de Saint-François, est-ce que le siège social de la Société nationale de l'amiante sera situé dans la région de l'amiante, oui ou non? Si on se sert de l'argument de la volonté de décentralisation, si on se sert de l'argument invoqué à juste titre par le député de Saint-Laurent que le siège social soit situé le plus possible vers les lieux des opérations, à ce moment, on doit en conclure, inévitablement, que le siège social de la Société nationale de l'amiante doit se trouver dans la région de l'amiante.

Une fois cette décision prise, la région de l'amiante, son centre, à tous points de vue, se trouve à Thetford Mines, comme le député de Saint-Laurent l'invoquait à juste titre. Je crois que cela a été son meilleur discours, ce matin, M. le Président. Je dois dire au député de Saint-Laurent que cela a été son meilleur ce matin. Cela a été celui qui l'a emporté avec les arguments les plus justes. Quand il a dit, par exemple...

M. Paquette: C'est rare, mais... M. Grégoire: Pardon?

M. Paquette: C est rare.

M. Grégoire: Non, mais je ne voudrais pas mettre d épines à travers les fleurs et je dois dire que cela a été son meilleur ce matin parce que là il y avait des arguments qui portaient. Au point de vue géographique, le centre géographique de la région de lamiante, c'est Thetford Mines avec, à l'est, East Broughton et un peu Tring Jonction; à l'ouest, Asbestos; le centre géographique est là. Le nombre de mines, également, vaut pour quelque chose. Sur neuf mines, il y en a sept à Thetford Mines. Cela vaut quelque chose. Une fois la décision prise d installer le siège social dans la région de l'amiante, Thetford Mines, c'est le centre, géographiquement, au point de vue des mines, au point de vue des travailleurs. Sur 6800 mineurs, il y en a 4000 à Thetford Mines, à peu près 500, 600 à East Broughton, à l'est, et 2100, 2200 à Asbestos à l'ouest.

C'est bien évident, c'est bien normal. Je pense bien que c est quasiment vouloir enfoncer une porte ouverte que de répéter les arguments justifiés du député de Saint-Laurent pour amener le siège social de la Société nationale de I'amiante à Thetford Mines. Donc, en définitive, il s agit de décider. Est-ce que c est dans la région de I'amiante ou non? Si c'est dans la région de l'amiante, c'est à Thetford Mines, il n'y a aucune hésitation.

M. Laplante: Amenez cela à Montréal nord.

M. Ouellette: Est-ce qu'il reste de la place pour construire?

M. Grégoire: Oui, il y a de la place. Si on en vient donc à se dire, cela doit être dans la région de l'amiante ou non, je crois que ce doit être dans la région de l'amiante. Ecoutez, il ne faut pas oublier, le ministre l'a déjà souligné, que la région de l'amiante fournit quand même $30 millions de droits miniers au Québec. Est-ce qu'on est là simplement pour rapporter au Québec? Cela inclut Asbestos.

M. Brochu: Ne l'oubliez pas.

M. Grégoire: N'oubliez pas que le député d Outremont est un économiste tout comme le ministre. Il va comprendre un...

M. Lalonde: C'est un ingénieur. M. Grégoire: Economiste également. M. Raynauld: C'est un ingénieur. M. Grégoire: Economiste également.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Grégoire: Le député d'Outremont... M. Bérubé: Pas vraiment économiste.

M. Raynauld: Je ne m'en suis jamais rendu compte. J'espère que cela va paraître un jour.

M. Grégoire: Le député d'Outremont va certainement m'apppuyer quand je vais invoquer l'argument que l'amiante étant un produit d'exportation...

M. Bérubé: C'est un économiste à ras le sol, tous les autres sont dans les nuages.

M. Grégoire: ... c'est de l'argent qu'on fait pénétrer au Québec. Le développement du secteur de l'amiante, étant donné que c'est un produit d'exportation, c'est de l'argent qu'on fait entrer au Québec. Il n'y a aucun produit d'exportation qui est aussi fort que l'amiante, c'est peut-être la plus grosse richesse d'exportation du Québec. Qu'on pense aux avantages innombrables que la région de l'amiante apporte au Québec. C'est la plus grosse richesse minière au Québec, qui a dépassé tous les autres secteurs miniers, et de beaucoup, à l'heure actuelle. Si la région de l'amiante fournit tant d'avantages au Québec, au point de vue de l'argent qui pénètre au Québec venant de l'extérieur, au point de vue des droits miniers qui s'en vont dans les coffres du gouvernement du Québec, à ce moment, est-ce qu'il ne serait pas normal que la région de l'amiante ait des retombées de tout cela? Comme je dis tout le temps, nous autres on a les trous de mine, on a les tas de résidus, on a les mineurs dans le fond de la mine, et cela depuis 100 ans, parce que évidemment, vous allez admettre avec moi aussi que cela existe depuis 100 ans, qu'on s'est consolé de cela et qu'on s'est contenté de cela.

M. Raynauld: 1877, dix ans après la Confédération.

M. Grégoire: J'ai dit 100 ans, parce que cela fait un chiffre rond. 100 ans et quelques mois. Cela fait 100 ans qu'on s'est contenté de cela et personne n'a jamais réagi pour nous donner plus que cela. Vous allez l'admettre aussi, c'est de l'histoire, quoi! On s est contenté de cela. Est-ce que ce ne serait pas un juste retour des choses qu'en 1878, et je fais un appel à mes collègues...

M. Raynauld: 1978.

M. Grégoire: ... qu'en 1978, je fais un appel à mes collègues, après tout ce temps où la région a été abandonnée par nos gouvernements précédents, où la région a été obligée de se contenter des trous, des tas de poussière, des mineurs dans le fond de la mine et d'envoyer son argent au gouvernement du Québec, d'enrichir le Québec à même notre région, ne trouvez-vous pas que par un juste retour des choses aujourd'hui, après 100 ans, il serait normal que la région de l'amiante bénéficie enfin...

M. Lalonde: Vous êtes en train d'en convertir un, là.

M. Grégoire: Je pense que je vais en avoir un, là.

M. Forget: Ils ont peut-être du coeur. Une Voix: Ils ont peut-être du coeur.

M. Grégoire: J'ose espérer que la ligne de parti va tomber pour qu'ils comprennent que réellement la région de l'amiante a droit à un juste retour des choses et qu'on profite de cela.

J'admets que le ministre ne dit pas non. Il dit que cela va rester la décision du gouvernement plus tard. J'admets que le ministre ne dit pas non.

M. Forget: C'est la compagnie.

M. Lalonde: C'est la compagnie, même pas le gouvernement. Ce n'est même pas le gouvernement, c'est la compagnie qui va décider.

M. Grégoire: Oui, avec son approbation, parce que le projet de loi dit nettement "le gouvernement". Cela va tout de même être une décision qui sera prise en définitive au Conseil des ministres puisqu'il est dit "à l'endroit déterminé par le gouvernement ". On sait, dans ce temps, que la compagnie va faire une suggestion, mais c'est le gouvernement...

J'admets que le ministre ne dit pas que ce ne sera pas à Thetford. Je sais que le ministre, même s'il veut garder cela, en définitive, trouvera au moins que les arguments invoqués... Je suis content que l'Opposition m'ait donné l'occasion de faire ce débat-là. Au moins, les arguments que nous aurons invoqués à trois, mes nouveaux collègues de Saint-Laurent, de Marguerite-Bourgeoys et moi, ainsi que mon nouveau collègue d'Outremont, à nous quatre, je suis sûr que les arguments que nous aurons invoqués à nous quatre, ce matin et hier, vont encourager le ministre, lorsque viendra le temps de prendre la décision d'établir le siège social à Thetford. Cela aura son bon côté.

M. Laplante: Je n'en peux plus.

M. Grégoire: Si le moindre effort supplémentaire peut vous amener...

M. Laplante: ... la semaine sainte.

NI. Grégoire: Sur ce point, M. le Président, au moins nous aurons fait valoir nos arguments pour que, lorsque la décision se prendra, le siège social de la Société nationale de l'amiante soit à Thet-ford.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: M. le Président, je reprends la parole quelques secondes pour faire remarquer une chose importante à mon ancien collègue de Frontenac. C'est que dans la motion qu'il défend actuellement, même si elle vient de l'Opposition, il est dit: "Elle peut toutefois le transporter en un autre endroit. '

Avez-vous réfléchi à ce qui pourrait se produire dans une éventuelle campagne électorale où, par exemple, des candidats du Parti libéral iraient à East Broughton et promettraient le déplacement de ce siège social pour obtenir des voix? Cela aurait pour effet de vous nuire considérablement. Ils pourraient faire la même chose à Black Lake, à Asbestos, à Sherbrooke et peut-être même dans mon comté. A ce moment-là, vous seriez tout à fait perdants de vouloir lier les deux mains de l'éventuel bureau de direction. Vous devriez réfléchir à cela avant de défendre avec autant d'ardeur une motion aussi ambiguë.

Le Président (M. Dussault): Comme il n'y a plus d intervenants, j'en conclus que vous êtes prêts à voter.

M. Brochu: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond.

M. Brochu: ... j'ai écouté avec énormément d'attention tous ceux qui m'ont précédé. Je n'ai pas l'intention de parler longuement sur cette question, mais je me dois quand même d'intervenir. Je dois d'abord dire que la motion qui a été présentée par le député de Saint-Laurent est une motion fort habile. Je lui reconnais cette habileté. Elle a cette qualité, recherchée dans son contenu, de vouloir embarquer, en quelque sorte, les députés autour de cette question de la localisation du siège social. D'ailleurs, M. le Président, vous pouvez transmettre mes félicitations à l'honorable député de Saint-Laurent, puisqu'il a très bien réussi jusqu'à présent en ce qui concerne les députés du gouvernement.

En ce qui me concerne, ma position a été claire là-dessus. Hier, je vous l'ai exprimée en termes nets, clairs et précis. Ce matin, je me rends compte que le député de Saint-Laurent, aidé par le député de Marguerite-Bourgeoys dont la soirée de repos d'hier lui a permis de revenir avec de nouvelles forces, de plus grandes forces, même avec un texte, en est arrivé à susciter des réactions du côté gouvernemental. La motion a donc atteint son but, c'est-à-dire diviser le gouvernement sur cette question, mettre en opposition certains dé- putés, tout en étirant quelque peu aussi nos travaux parlementaires. Le député de Frontenac est donc devenu un ardent défenseur de cette motion pour les motifs qu'on connaît, c'est sa place, sa ville.

M. Godin: C'est bassement égoïste.

M. Grégoire: C'est légitime. Je m'en prends à mon ancien collègue de Mercier qui me prête des intentions que je n'avais pas.

M. Brochu: M. le Président, je m excuse de relancer le débat entre nos collègues du gouvernement, mais le député a le droit d'avoir ses motifs. Cependant, tout en se faisant un ardent défenseur de la région de l'Amiante, je constate que, pour lui, cette région de l'amiante se limite, à toutes fins pratiques, à la ville de Thetford Mines. En abordant un projet de loi comme celui qui est devant nous actuellement, dans les étapes que nous poursuivons, il nous faut avoir, au point de départ, une plus grande largeur de vue à ce sujet. C est pour cela que j'ai prisé les propos du ministre dans ce sens lorsqu'il disait qu'il n'avait pas — on peut être d'accord ou non; on peut reprocher ou non au gouvernement de ne pas avoir les données — toutes les données suffisantes pour pouvoir prendre cette décision. J'espère que le député de Frontenac prendra la peine d'écouter son collègue, tout près de lui, afin de voir dans quelle optique on doit aborder l'étude d'un projet de loi, aborder une question aussi importante que celle-là qui a des incidences non seulement localement, mais régionalement aussi.

On a également constaté les altercations qui ont eu lieu, à la suite de la motion habile du député de Saint-Laurent, entre le député de Frontenac et son voisin de comté, le député de Beauce-Nord. Je ne reviendrai pas sur les propos du député de Beauce-Nord; je pense qu'ils parlent par eux-mêmes.

Dans cette question, comme dans toute la question du projet de loi no 70, ce qui est important, à ce stade-ci, tant pour le député de Beauce-Nord, pour le député de Sherbrooke, pour le député de Frontenac que pour moi-même, en tant que député de Richmond, ou pour le député de Saint-François, c'est penser région. Lorsque j'ai établi clairement mes positions hier, sur la localisation de ce centre, j'avais cette préoccupation de vouloir penser région, de vouloir penser région de I Amiante. A l'intérieur de cela, évidemment, il y aura des décisions à prendre en ce qui concerne finalement la localisation précise du siège social et on devra, à ce moment-là, s'appuyer sur des données sérieuses et non pas sur les intérêts de I un ou de l'autre. (11 h 30)

Lorsqu il s agira d'établir le centre de recherche, à ses différents paliers, puisqu'on sait que le centre de recherche comportera différents paliers, il faudra, là aussi encore, s'appuyer sur la réalité, sur des données sérieuses et non pas sur les intérêts locaux. Il est normal de vouloir défendre, au

point de départ, nos intérêts, mais il faut d'abord penser en sens de région. Je rappelle ici au ministre le fait qu'il serait souhaitable, étant donné que, malheureusement, le choix n'a pas été fait avant le dépôt du projet de loi, qu'il y ait une consultation sérieuse, et que les députés de la région aussi puissent être impliqués, à ce niveau de la décision qui devra être prise de la situation du siège social. Le ministre me fait un signe d'acquiescement et je pense que ce serait une saine approche de cette décision que de procéder de cette façon. C'est donc dans cette optique d'une préoccupation régionale, pour s'assurer qu'il y ait des retombées réelles, sur la plus grande échelle possible, dans la région de l'amiante, que j'ai pris la position que je vous ai annoncée hier. Je demande également à mes collègues de continuer les discussions. Peut-être en changeant l'atmosphère qu'on a eue ce matin, qui ne mène nulle part puisqu'on n'a pas avancé d'un pouce. On a simplement assisté à des échanges humoristiques fort intéressants, par contre lorsqu'on se situe au niveau de la pratique et de la logique, on n'a pas avancé énormément.

Je profite également de l'occasion pour vous indiquer que, dans cette préoccupation de voir ré-gionalement, en termes de retombées du projet de loi 70 — si retombées il y a — je reviendrai tout à l'heure, à la suite du député de Saint-Laurent, avec une autre motion justement, étant donné que cela fait le consensus autour de la table, d'après tous les propos que j'ai entendus, de tous les députés, pour que, justement, on précise dans le projet de loi que le siège social de la société soit dans la région de l'amiante. Je voudrais avoir cette précision dans la loi. Je pense que, à ce moment-ci, cela rejoint tout ce qui a été mentionné précédemment par nos collègues, même si, à ce stade-ci, on ne s'entend pas sur un site précis pour le siège social.

C'était donc les quelques remarques que je voulais faire. Je voudrais aussi simplement rappeler au député de Frontenac, qui a glissé sur une pente dangereuse, sur la pelure de banane, en quelque sorte, qui lui a été présentée par l'Opposition libérale, je voudrais lui rappeler, dis-je, qu'il a mentionné son intérêt pour l'amiante, je l'ai fait également; il représente une région de l'amiante, j'en représente une également; et je pense qu'au niveau de la transformation, on doit établir clairement, comme paramètre, que nous voulons davantage d'emplois dans nos régions, nous voulons une plus grande transformation. Là où nous ne sommes pas d'accord, c'est sur les moyens. C'est une autre question. Cependant le député de Frontenac a mentionné hier que, à cause de l'attitude du député de Richmond, il avait l'intention de laisser tomber un peu la ville d'Asbestos et cette région-là en ce qui concerne les retombées. Simplement pour rafraîchir la mémoire, je vous rappellerai, et je rappellerai par votre intermédiaire au député de Frontenac que, lorsqu'il a eu l'amabilité de venir dans la région d'Asbestos, flanqué du ministre des Richesses naturelles et de quelques autres personnages aussi importants, le député de Frontenac a bien pris le soin, à ce moment-là, de prendre un engagement public — et je le montre à la commission puisqu'il est en gros titre; "Grégoire s'engage à défendre les intérêts d'Asbestos".

M. Grégoire: Et je le maintiens.

M. Brochu: Vous voyez ici, je pense que vous pouvez vous référer aux propos.

M. Grégoire: II y a d'autres retombées pour Asbestos.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond, s il vous plaît, votre temps de parole est maintenant écoulé et si vous n'avez pas conclu, je vous invite à le faire très brièvement.

M. Brochu: J'avais presque terminé, M. le Président, je vous remercie de cela. Je voulais ajouter cette précision pour rafraîchir la mémoire du député de Frontenac...

M. Grégoire: Je le maintiens d ailleurs.

M. Brochu: ... et lui rappeler que nous devons penser région.

Le Président (M. Dussault): II n'y a plus d intervenant, alors j'appelle cet amendement aux voix. Si l'amendement était adopté, il se lirait comme suit: "La société a son siège social dans la ville de Thetford Mines. Elle peut toutefois le transporter dans un autre endroit, avec l'approbation du gouvernement. Un tel changement entre en vigueur sur publication d'un avis à cet effet dans la Gazette officielle du Québec. "

M. Laionde: M. le Président, je demande un appel nominal.

M. Grégoire: Oui, moi aussi je le demande.

M. Lalonde: Le député de Frontenac se joint à moi.

Le Président (M. Dussault): Nous agirons donc par appel nominal. M. le député de Matane.

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Abstention.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Pour.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Bien tiraillé! Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-François.

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député d'Outremont.

M. Raynauld: Pour.

Le Président (M. Dussault): Nous avons donc trois votes pour, quatre contre et une abstention.

M. Godin: Excusez-moi, mais le député de Rosemont remplace M. Bordeleau.

M. Laplante: C'est au journal des Débats de ce matin.

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, vous avez parfaitement raison. J'ai sauté pardessus le nom du député, qui était rayé. Je pense pouvoir prendre le vote de M. le député de Rosemont.

M. Godin: Je voudrais souligner, M. le Président, qu'il y a des pressions indues qui s'exercent sur un...

Le Président (M. Dussault): Ceci ne concerne pas le président de la commission. M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Contre.

Le Président (M. Dussault): Ce qui fait un cinquième vote contre. J'en conclus donc que l'amendement est rejeté. Nous revenons donc à l'article 2, tel que stipulé dans le projet de loi.

M. Brochu: M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond, selon le président qui me précédait, il restait — je ne sais pas si je dois tirer cette conclusion — à M. le député de Saint-Laurent dix minutes. Je ne sais pas si cela veut dire que les autres avaient épuisé leur temps de parole.

M. Laplante: ... à l'exception du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci. M. le Président, tel que je l'avais annoncé tantôt j'ai l'intention de proposer immédiatement, à l'article 2, une motion d amendement qui fait suite à plusieurs déclarations qui ont été rendues publiques du premier ministre, même du député de Frontenac, et même du ministre, d'ailleurs, qui ont resouligné tout à l'heure aussi...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond, je m excuse, avant de faire des commentaires sur votre amendement, je voudrais d'abord que vous définissiez cet amendement, s il vous plaît.

M. Brochu: Oui, cela peut être fait ainsi. Par contre, depuis le début des travaux de cette commission parlementaire, il a été accepté qu on puisse faire un bref préambule pour présenter la motion tel que cela a été le cas pour les motions précédentes. C'est dans cet esprit...

Le Président (M. Dussault): D'accord, je soustrairai ce temps sur votre temps de parole sur l'article 2.

M. Brochu: M. le Président, je continue pour vous dire simplement que la motion que j'ai l'intention de présenter rejoint les préoccupations de tous les membres de cette commission parlementaire. Elle ne devrait pas appeler un long débat non plus puisque, d'un côté, en voulant que le siège social soit à Thetford et dans la région de I amiante, le député de Saint-Laurent et I'Opposition libérale indiquaient leur intention de voir des retombées au niveau de la localisation du siège social dans la région de l'amiante. D autre part, compte tenu de toutes les déclarations du premier ministre, du ministre des Richesses naturelles ainsi que de ses collègues, je pense qu'il est de notoriété que c'est l'intention du gouvernement d avoir des retombées, s'il y en a, dans la région de l'amiante. Donc, fort de ces arguments, et aussi fort du fait qu'il est essentiel à mon sens que les premiers à bénéficier de l'apport financier d'un siège social soient ceux de la région de l'amiante, je fais motion, M. le Président, pour que l'article 2 soit modifié en ajoutant après le mot "social", à la première ligne, les mots suivants: "dans la région des Cantons de l'Est".

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond, est-ce que vous pourriez me faire parvenir le texte écrit de cette motion?

M. Brochu: Oui, on est en train de vous le faire parvenir, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Je juge immédiatement cette motion recevable.

M. Grégoire: Les Cantons de I'Est vont jusqu à l'autre bout, alors...

M. Bérubé: ... est-ce qu'on vote pour?

Le Président (M. Dussault): A Tordre, s'il vous plaît! M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président, je...

M. Grégoire: C'est dans la région 03.

M. Brochu: Non, vous parlez en termes de division administrative du gouvernement. Ce qu'on entend par Cantons de l'Est...

M. Grégoire: La Beauce n'est pas dans les Cantons de l'Est.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, question de règlement.

M. Lalonde: Actuellement, les interventions se font de fort bonne part. Etant donné que vous avez déjà reçu la motion, j'aimerais que l'on en débatte le bien-fondé suivant les règlements, chacun à son tour.

Le Président (M. Dussault): Vous avez raison, M. le député. J'avais donné la parole à M. le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. Très brièvement, pour ces mêmes motifs qui poussent le gouvernement à vouloir favoriser cette région où se trouvent toutes les mines d'amiante du Québec, pour les mêmes motifs que là où les travailleurs ont à souffrir, à certains égards, de la retombée négative de ces industries, qu'en même temps on puisse, de façon générale, statuer que les retombées économiques positives, s'il y en a, doivent avoir lieu dans la région en question. C'est pourquoi j'ai proposé cette motion, pour que là où se trouvent les mines d'amiante dans les Cantons de l'Est, l'on puisse s'assurer que dans le texte de loi on mette une forme de garantie du gouvernement.

M. Godin: II ne connaît pas le Québec.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Frontenac.

M. Godin: Est-ce que c'est télévisé cela, M. le Président? Le débat ne sera pas télévisé? J'aurais aimé que le citoyen voie cela.

Le Président (M. Dussault): II semble que non, M. le député de Mercier. M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, je vais m'oppo-ser à cette motion. Il faudrait savoir ce que sont les Cantons de l'Est, d'après la définition du député, parce que Thetford se trouve dans la région économique 03, la région de Québec.

M. Brochu: Ce ne sont pas les Cantons de l'Est, 03.

M. Grégoire: Thetford se trouve dans 03.

M. Brochu: Thetford est dans les Cantons de l'Est.

M. Grégoire: A quel point de vue doit-on le prendre?

M. Brochu: Ce n'est pas dans la Gaspésie ni dans le Bas-du-Fleuve.

M. Grégoire: Au point de vue de la division territoriale en régions économiques telles que décrites par le gouvernement du Québec? Est-ce qu'on se trouve à prendre les régions territoriales?

M. Brochu: Dans l'Estrie, là où sont situés les mines d'amiante actuellement, ce qui comprend votre région, la mienne, East-Broughton.

M. Grégoire: Thetford est dans la région économique... Est-ce que c'est la division selon la voirie, le gouvernement, la tradition ou selon quoi?

M. Brochu: Pour répondre au député de Frontenac, disons que c'est une question en vue d'établir un principe général. A ce stade-ci, il ne s'agit pas de rebâtir une carte géographique pour délimiter exactement ce qu'il en est. Il s'agit d'établir le principe que les retombées auront lieu dans la région des Cantons de l'Est, laquelle est directement concernée, là où sont situées les mines d'amiante.

Le Président (M. Dussault): Je considère les réponses données aux questions du député de Frontenac comme étant du temps pris sur son temps. Est-ce que M. le député de Frontenac a terminé?

M. Grégoire: Oui.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: M. le Président, personnellement, je m'opposerai à cette motion parce que les mots "dans la région des Cantons de l'Est " sont beaucoup trop restrictifs et ont pour effet direct d'exclure la région de la Beauce. Etant donné que cette dernière n'est pas dans les Cantons de l'Est et que, pourtant, dans le comté de Beauce-Nord, on retrouve des mines d'amiante, si le député avait plutôt proposé le terme "région de l'amiante", qui est un terme beaucoup plus générique, j'aurais possiblement pu considérer sa motion. Dans le cas présent, je m'y opposerai parce qu'elle a pour effet d'exclure ma région, qui est pourtant une partie de la région de l'amiante, mais qui ne se trouve pas pour autant dans les Cantons de l'Est.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je me demande sur quel critère le député de Richmond se fonde

pour proposer la région des Cantons de l'Est. Il y a plusieurs ambiguïtés qui peuvent s'installer dans le processus de détermination de la région elle-même. Je vais en mentionner quelques-unes. Si on s'en rapporte aux régions administratives, la région des Cantons de l'Est est la région 05. Vous auriez la situation absolument abracadabrante et même aberrante que le comté de Beauce-Nord, qui est dans la région 03, se trouverait exclu de la région où le siège social de la Société nationale de I'amiante devrait être installé.

Je comprends que le comté de Richmond est en plein centre. Là, le député est fort confortable. On pourrait probablement installer aussi le siège social dans le comté d'Orford si c'est cela...

M. Godin: M. le Président, question...

Le Président (M. Dussault): Question de règlement?

M. Godin: Oui, question de règlement. Je vois que le député de Marguerite-Bourgeoys consulte un document qu'on n'a pas. Est-ce qu'on peut demander le dépôt de ce document? Il se réfère à des choses dont on n'a aucune connaissance. C'est peut-être confidentiel. On ne le sait pas. Est-ce qu'on pourrait avoir accès à ce document? (11 h 45)

Le Président (M. Dussault): Je vous arrête immédiatement, M. le député de Mercier. Il n'est pas prévu dans les règlements que l'on puisse faire des dépôts de documents dans les commissions parlementaires.

M. Godin: Ah bon!

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, si vous voulez quand même que je satisfasse la curiosité du député de Mercier, cette carte géographique représente le beau pays du Québec.

M. Godin: C'est de quelle année?

M. Lalonde: Ah! C'est assez récent, M. le Président, que je vois encore le comté de Lotbinière.

M. Godin: C'est un lapsus?

M. Bérubé: On peut l'accepter, d'ailleurs, en parlant du pays du Québec.

M. Lalonde: C'est un beau pays, comme on parle du royaume du Saguenay.

M. Godin: On vient de gagner un allié important.

Une Voix: Les écailles lui tombent des yeux, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, est-ce l'intention du député de Richmond de rendre possible l'installation du siège social dans le comté d'Orford ou dans le comté de Johnson, peut-être?

M. Grégoire: Missisquoi.

M. Lalonde: Celapeut même aller jusque dans le comté de Brome-Missisquoi.

M. Godin: Stanstead peut-être!

M. Lalonde: Stanstead, oui.

M. Godin: M. Vaillancourt serait content.

M. Lalonde: Mégantic-Compton. A moins qu'avec son collègue de Mégantic-Compton il n ait peut-être un arrangement, une autre alliance; une mésalliance plutôt, à ce moment-là.

M. Grégoire: Mais pas Frontenac!

M. Lalonde: Frontenac! Le coeur de l'amiante n'est pas là.

M. Grégoire: II y a une seule ville de l'amiante dans les Cantons de l'Est...

M. Lalonde: C'est une insulte à l'intelligence, M. le Président, d'avoir même suggéré cela.

M. Grégoire: ... c'est Asbestos.

M. Ouellette: Et le député a perdu la carte.

M. Lalonde: M. le Président, le député de Beauce-Nord, et à bon droit parce que lui aussi a le droit de se sentir injurié par cette motion, prétend que le député de Richmond a perdu la carte. Alors, je la lui donne.

M. Godin: Je la prends avec plaisir.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez terminé votre intervention?

M. Lalonde: Pour l'instant.

Le Président (M. Dussault): Pour linstant.

M. Godin: M. le Président, est-ce que je peux poser une question à notre géographe d'en face?

Le Président (M. Dussault): Cela serait votre intervention, M. le député de Mercier.

M. Godin: Ce sera le début de mon intervention, je peux toujours revenir.

Le Président (M. Dussault): Vous avez raison.

M. Godin: Est-ce que le comté du député de Richmond est bien dans la région qu il favorise, au moins?

M. Lalonde: II est au centre de la région qu'il favorise.

M. Godin: Ah!

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond.

M. Brochu: M. le Président, juste un mot pour vous dire que la préoccupation de cette motion quand même n'était pas restrictive. C'était simplement pour établir un principe d'ordre général pour qu'à l'opposition, par exemple, de la région de Montréal ou de la région de Québec, on identifie un secteur, là où se trouve l'amiante, de façon générale, en principe pour que les retombées aient lieu là. Alors, c'est simplement dans ce sens; ce n'était pas limitatif, pas du tout. Depuis le début qu'on parle de East Broughton, qu'on parle du député de Frontenac et qu'on parle de Thetford Mines, évidemment, ce serait complètement illogique de présenter une motion restreignant cela strictement au comté de Richmond. Ce serait, d'ailleurs, contraire aux propos que j'ai tenus peut-être tout à l'heure lorsqu'on disait qu'on devait penser région.

Je voulais simplement clarifier ceci. C'est une déclaration de principe que j'aimerais voir dans la loi pour s'assurer que ce ne soit pas dans des régions comme Montréal, Québec ou ailleurs, mais que ce soit dans la région qui est touchée par l'amiante, dans les Cantons de l'Est.

Le Président (M. Dussault): Avez-vous terminé, M. le député de Richmond?

M. Brochu: J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Vouliez-vous la parole, M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: Non, pas maintenant, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier.

M. Godin: Non, je passe, je me ravise.

Le Président (M. Dussault): II n'y a plus d'intervenants. Alors, nous allons mettre aux voix la motion du député de Richmond. Rejeté? La motion est rejetée...

M. Brochu: Sur division.

Le Président (M. Dussault): ... sur division et nous revenons à l'article 2. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, le spectacle auquel on a assisté depuis hier relativement à l'étude de l'article 2 m'impose de faire une suggestion à cette commission par voie de motion, et je vous expliquerai pourquoi je fais cette motion. Je vais commencer par la lire. Il est possible que vous trouviez un élément qui n'est pas acceptable dans cette motion; à ce moment-là, je vous demande d'avance de l'enlever.

Le Président (M. Dussault): Je vous remercie d'avance de m'avertir.

M. Lalonde: "Que la commission des richesses naturelles suspende l'étude de l'article 2 du projet de loi no 70 — et je continue — jusqu'à ce que le gouvernement ait fait connaître officiellement l'endroit déterminé pour l'établissement du siège social de la Société nationale de l'amiante. " II est possible que cet élément soit de trop parce qu'il n'est pas nécessaire. On peut simplement dire qu'on suspende l'étude de l'article 2, sans dire jusqu'à quelle échéance? Je vous suggère cette motion, et si vous la déclarez recevable, à ce moment...

M. Laplante: Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Nos règlements permettent que le président de la commission consulte les membres de la commission. Pendant cinq minutes tout au plus, je vais recevoir vos avis sur la recevabilité de cette motion.

M. Laplante: Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: La motion de l'Opposition dit: "Que la commission des richesses naturelles suspende l'article 2 du projet de loi 70, jusqu'à ce que le gouvernement ait fait connaître officiellement l'endroit déterminé pour l'établissement du siège social de la Société nationale de l'amiante. " Elle n'est pas recevable parce que la société elle-même n'est pas créée encore parce que la loi n'est pas adoptée en troisième lecture. D'autant plus que son conseil d'administration doit faire rapport, d'après la loi, au gouvernement, pour accepter le siège social de l'endroit. C'est une proposition qui fait, en somme, qu'après la deuxième lecture, on vient en commission parlementaire pour étudier article par article. Il y a un article aussi dans le règlement qui dit qu'on ne peut pas, en commission parlementaire, changer un article qui va à l'encontre de la loi telle qu'acceptée en deuxième lecture.

J'aimerais avoir le numéro de l'article, mais je n'ai pas mon livre. Vous pourriez retrouver là-dedans le pourquoi exact. C'est très clair dans le règlement qui dit que cet amendement ne pourrait être accepté.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): M. le député, vous faites allusion à l'article 154 de nos règlements.

M. Laplante: Je le crois.

Le Président (M. Dussault): Qui prévoit qu'une motion ne peut pas défaire le principe déjà adopté par l'Assemblée nationale.

M. Laplante: Exactement.

Le Président (M. Dussault): J'écoute maintenant M. le député de Marguerite-Bourgeoys sur la recevabilité.

M. Lalonde: Au cas où la limpidité de l'intervention du député de Bourassa ne vous aurait pas convaincu, M. le Président, je voudrais simplement vous dire que la motion n'a pas pour but— même en présumant que vous retranchiez l'élément qui est inutile — d'aller à l'encontre du principe lui-même, de la façon dont l'article est décrit, à savoir, est-ce que c'est le conseil d'administration qui doit, au départ, conseiller le gouvernement, etc.? C'est un processus que le ministre a décrit, mais qui n'est même pas contenu à l'article lui-même.

Ce que je propose, c'est une motion tout à fait classique qui a souvent été proposée dans des commissions parlementaires où on étudie article par article un projet de loi, à savoir, que l'on suspende l'étude de tel article pour aller à un autre. Je me souviens, peut-être que vous étiez là, M. le Président, de la loi 101. Je ne sais pas si c'était l'Union Nationale ou le parti ministériel qui avait proposé la suspension de plusieurs chapitres de la loi pour qu'on retombe immédiatement au chapitre qui concernait la langue de l'enseignement. Il y avait eu un débat, si je me souviens bien, là-dessus. L'Opposition officielle s'était opposée, mais la motion avait été parfaitement reçue, rece-vable et reçue.

La motion que je fais est de même nature: de suspendre l'étude d'un article. C'est parfaitement recevable. Cela ne va pas à rencontre du principe. Ce n'est pas une motion qui dit que la société n'aura pas de siège social, que le siège social ne sera à aucun endroit. A ce moment, ce serait aller à rencontre de l'article lui-même du principe accepté en deuxième lecture. Mais on dit simplement: Que l'on suspende. Je dirai pourquoi, je pense que c'est assez évident après ce qu'on a vu depuis trois heures de débats.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Mercier, brièvement.

M. Godin: Je pense que l'amendement n'est pas recevable, M. le Président, parce que l'article 2, tout ce qu'il dit, c'est que c'est le gouvernement qui va déterminer où le siège social sera situé. L'article 2 a pour effet de préciser qui va annoncer cela. Est-ce que ce seront les employés? Est-ce que ce sera la CSN? Est-ce que ce sera la FTQ qui vont avoir des employés là-dedans? Est-ce que ce sera n'importe qui? Non, l'article 2 dit qui va déterminer cela. C'est le gouvernement. L'article 2 dit encore que quand ce sera décidé, ce sera an- noncé dans la Gazette officielle. C est ce que l'article 2 dit. Ce n est pas autre chose que cela. L'article 2, en fait, n'aborde même pas de façon directe, la question de l'implantation. L'article 2 aborde qui va devoir décider cela, qui va déterminer cela et, dans cette perspective, la motion est absolument irrecevable, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Messieurs, j'ai écouté vos propos sur la recevabilité de cette motion. Je vais suspendre les travaux de cette commission pour quelques minutes, et je vais prendre cette question en délibéré.

(Suspension à 11 h 56)

Reprise de la séance à 12 h 1

Le Président (M. Dussault): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

Nous revenons à nos travaux, nous en étions à une motion du député de Marguerite-Bourgeoys sur la recevabilité de laquelle je devais statuer. Je tiens à faire remarquer que, dès le départ, avant même la formulation de sa motion, M. le député de Marguerite-Bourgeoys nous avait fait part d'un petit doute qu'il avait quant à la recevabilité de cette motion. Son intuition ne le trompait pas, d'ailleurs. Si nous adoptions cette motion telle que formulée, nous ferions en sorte que le gouvernement et l'Assemblée nationale tournent en rond, l'un attendant la décision de l'autre, ce qui fait qu'à toutes fins pratiques je ne peux pas recevoir la motion telle que formulée par le député de Marguerite-Bourgeoys. Je la juge donc irrecevable.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Laplante: II n'avait pas compris tout à l'heure.

M. Lalonde: ... je ne discute pas votre décision, mais je vous avais suggéré que le règlement vous permettait de modifier une motion. Vous ne l'avez pas fait et je vais le faire. Je vais reprendre la motion et la présenter comme suit: "Que la commission des richesses naturelles suspende l'étude de l'article 2 du projet de loi no 70 et procède immédiatement à l'étude de l'article 3 ".

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'attends le texte écrit. Le voici.

M. Lalonde: Je m'excuse de l'aspect physique du texte, car il a fallu le corriger sur place.

Le Président (M. Dussault): Je vous comprends très bien, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je déclare immédiatement

que la motion de M. le député de Marguerite-Bourgeoys, telle que formulée, est recevable.

M. Laplante: Ordinairement, dans une commission parlementaire, un député de l'Opposition ou un député ministériel demande de suspendre temporairement un article sans en faire une motion. Je pense que cela a toujours été la pratique jusqu'à présent. La commission parlementaire a ce pouvoir de report d'un article.

Le Président (M. Dussault): Effectivement, M. le député de Bourassa. J'allais demander s'il était dans l'intention de M. le député de Marguerite-Bourgeoys de faire fonctionner la commission, avec tout ce que cela comporte, sur cette motion ou s'il n'y a pas lieu d'en venir à une entente rapide de la part des membres de la commission sur cette question, comme cela se fait très souvent en commission.

NI. Lalonde: Chaque fois qu'une motion est faite, il est loisible au gouvernement d'exprimer immédiatement son accord. Avant même de commencer mon intervention pour tenter de le convaincre, si le gouvernement me dit qu'il est d'accord, à ce moment-là, je ne ferai pas perdre le temps de la commission pour rien.

Le Président (M. Dussault): Si je ne reçois pas d'avis du parti ministériel sur la motion, je vais en conclure que nous devrons la débattre tel qu'on doit le faire habituellement sur une motion.

M. Lalonde: M. le Président, il ne semble pas y avoir un accord. Est-ce que nous allons suspendre? Je devrai donc tenter de les convaincre.

Tout d'abord, pour quelle raison suspendre l'étude de l'article 2 du projet de loi no 70? Toute personne qui aurait été témoin du débat des deux motions d'amendement, celle du député de Saint-Laurent et celle, si on peut la nommer ainsi, du député de Richmond, n'aurait pas besoin d'être sujet à un effort de persuasion terrible pour se laisser convaincre du bien-fondé de la motion. Je ne vous prendrai pas à témoin, de votre siège de président vous n'avez pas d'opinion à donner là-dessus, mais je suis surpris que le gouvernement m'oblige à lui faire la description de ce qui s'est passé pour tenter de le convaincre d'appuyer ma motion.

La motion du député de Saint-Laurent qui a été défaite par le gouvernement, par la majorité des députés ministériels, je dois dire, a donné lieu à un débat où on a vu, par exemple, le député d'Abitibi-Est souhaiter que des activités de siège social, des activités de direction relativement à des entreprises amiantifères soient installées dans la région du Nord-Ouest. Il l'a fait d'une façon tout à fait responsable et j'ai dit un peu plus tôt, ce matin, jusqu'à quel point je trouvais convenable son attitude. Mais il n'a pas pu aller plus loin. Le député de Saint-François, ce matin, a vanté les mérites de sa région, à bon droit. Il est sûrement valable de penser qu'un siège social, avec tout ce que cela comporte de centres de décision soit installé près d'institutions aussi valables que l'Université de Sherbrooke, dans sa région. Mais il n'est pas allé plus loin, lui non plus. Il a même voté contre la motion du député de Saint-Laurent. Quant au député d'Abitibi-Est, il n'était pas ici ce matin pour voter.

Le député de Beauce-Nord, lui, est un homme pratique. Il a fait preuve de beaucoup de réalisme et, pour régler le problème, il a fait des suggestions tout à fait concrètes et précises, soit d'installer le siège social de la Société de l'amiante sur la frontière séparant le comté de Beauce-Nord et le comté de Frontenac. Mais, il n'a pas fait de motion d'amendement. Il n'a pas osé aller plus loin, lui non plus.

Quant au député de Richmond, il a cru devoir s'abstenir: C'est son droit de décider de s'abstenir. Il l'a fait, mais son abstention indique quand même jusqu'à quel point, il n'est pas convaincu ni du bien-fondé de la motion du député de Saint-Laurent, ni du bien-fondé de l'article 2 tel qu'il est inscrit. Au contraire, il a même fait une tentative, avortée, mais quand même une tentative pour déterminer une région précise, dans son esprit, pour établir le siège social de la Société de l'amiante. Mais voilà, encore un des députés ici, qui n'est pas décidé. Quant au député de Frontenac, M. le Président, je ne l'ai pas vu remettre sa démission de son poste d'adjoint parlementaire au ministre. Il a sûrement besoin de temps pour réfléchir à la rebuffade publique et honteuse qui lui a été faite par ses collègues, et en particulier, par son ministre.

Le ministre, lui, dit qu'il ne peut pas prendre de décision maintenant quant à la localisation du siège social, autre indication très précise à l'effet que ce gouvernement a besoin de temps pour réfléchir, à tel point que le député de Frontenac s'est dit surpris que le ministre suggère d'autres études là-dessus. C'est à se demander si le député de Frontenac, adjoint parlementaire du ministre des Richesses naturelles, est au courant de ce qui se passe dans ce ministère. Est-ce que le député de Frontenac n'a pas besoin de temps pour aller vérifier au ministère, si on lui ouvre les portes maintenant, à savoir s'il y a eu des études de faites, et à quel stade ces études sont rendues, et revienne informer la commission parlementaire, le cas échéant, sur le processus décisionnel et où en est rendu le cheminement de la pensée du ministère en ce qui concerne l'instauration du siège social de la société de l'amiante.

M. le Président, nos deux surveillants de discipline, le député de Rosemont et le député de Mercier, eux, ont regardé cela d'un oeil sévère, et, j'en suis sûr, d'un oeil aussi découragé. C'était le spectacle d'un parti divisé sur une question qui peut paraître, pour certains, secondaire, mais qui ne l'est pas. Je suis sûr qu'il ne l'est pas dans l'esprit du député de Frontenac, à savoir où sera installé le siège social de la Société nationale de l'amiante. C'est une question beaucoup plus importante que cela peut paraître à l'esprit de quelqu'un qui n'est pas au courant, premièrement, de l'importance d'un siège social, et deuxième-

ment, de I'importance du siège social de la Société de l'amiante pour la région de l'amiante.

C'est pourquoi les surveillants de discipline étaient si découragés ce matin au point qu'ils ont quitté — je ne sais pas si c'est une coïncidence, mais ils sont tous deux partis. Ils ne sont plus là pour surveiller...

M. Grégoire: Ils sont partis avec le député de Saint-Laurent et le député d'Outremont, avec deux autres députés libéraux qui sont partis.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre!

M. Lalonde: Ils sont probablement partis faire un caucus avec les hautes autorités du parti pour savoir comment rapiécer ce parti qui a été complètement déchiré ce matin et qui tente de remettre les pièces ensemble. C'est dans ce but, M. le Président, que je présente ma motion. Je pense que le gouvernement mérite qu'on lui donne du temps pour prendre une décision en toute connaissance de cause. Le ministre a dit: on ne peut pas prendre la décision maintenant. Il a dit "verbatim" dans sa dernière intervention: on pourra le vérifier dans les galées. Il a avoué ne pas être prêt. Il a avoué le caractère d'improvisation et de manque de préparation sinon de toute la loi, du moins de l'article 2. Après cela, M. le Président, on va allègrement accuser l'Opposition officielle de retarder l'implantation de la politique de l'amiante au Québec en faisant une opposition vigoureuse à ce projet de loi. M. le Président, le gouvernement est si peu avancé que même s'il avait ce projet de loi adopté aujourd'hui, il ne saurait pas quoi faire. Il ne sait même pas où installer le siège social de cette Société nationale de l'amiante. On savait que le gouvernement était à l'état le plus préliminaire de ces études en ce qui concerne les produits à choisir, la mise en marché, la commercialisation. On le savait. L'étude du groupe de travail fantôme qu'on nous a remise en tomes en est la preuve la plus flagrante. Ce qu'on ne savait pas, c est jusqu'à quel point ce gouvernement était dans limprovisa-tion la plus complète en ce qui concerne même l'instrument qu'il a choisi pour implanter sa politique. Il ne sait même pas où le siège social de la Société nationale de l'amiante va être installé.

Vous allez me rappeler à l'ordre, M. le Président, si je tente de refaire un plaidoyer en faveur de Thetford Mines. Je sais que ce n'est pas le député de Frontenac qui va vous demander de me rappeler à l'ordre. Je suis fort tenté de... et c'est dans l'ordre que je dise que l'état d'improvisation et de manque de préparation du gouvernement en ce qui concerne le siège social est incompréhensible. C'est tellement évident que cela va dans le coeur de la région de l'amiante que je me demande jusqu'à quel point on peut ne pas être préparé. C'est épouvantable de refuser d'avance, au départ, que ce soit en plein coeur de la région de l'amiante.

M. Bérubé: Ce n'est pas refusé.

M. Lalonde: C'est refusé. Vous avez voté contre!

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je constate que vous avez succombé à la tentation au sujet de laquelle vous nous aviez prévenu qu'il y avait un danger. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de revenir à la pertinence, a savoir aux raisons pour lesquelles vous avez demandé la suspension de l'article 2. (12 h 15)

M. Lalonde: M. le Président, c est pour permettre à ce gouvernement de préparer ses dossiers.

M. Grégoire: C est pour perdre du temps en fait.

M. Laplante: Vous n'êtes pas plus clair que moi dans vos énoncés.

Le Président (M. Dussault): A Tordre, messieurs!

M. Lalonde: M. le Président, c'est la pire insulte que j'aie reçue depuis longtemps.

M. Grégoire: II faudrait avertir tout le monde que...

M. Laplante: C'est drôle, je fus le premier à gagner mon point. Il a été compris par le président, mais vous, il n'y a encore personne qui vous a compris.

M. Grégoire: ... tout le monde sait...

Le Président (M. Dussault): M. le député de Bourassa, n impliquez pas le président, s il vous plaît!

M. Grégoire: Tout le monde sait que si c est vide, c'est parce que c'est rien que pour prendre du...

M. Lalonde: Le député de Bourassa soulève un point intéressant, M. le Président. J ai parlé des députés d Abitibi-Est, de Beauce-Nord, de Saint-François, Frontenac, Rosemont, Mercier, Richmond...

M. Grégoire: De Saint-Laurent.

M. Lalonde: ... Matane, et j'ai oublié le député de Bourassa, M. le Président.

M. Grégoire: C'est un nom que vous connaissez bien. Vous I'aviez oublié, hein?

M. Lalonde: Vous savez pourquoi je l'ai oublié? C est que je ne savais pas qu'il était là, malgré ses brillantes interventions, M. le Président: je I'ai oublié.

M. Grégoire: Bourassa?

M. Lalonde: Le député du comté de Bourassa.

M. Laplante: Si cela peut finir par changer pour Henri Bourassa, on va peut-être être mieux compris après cela.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s il vous plaît, messieurs les députés! M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président, je suis content quand même d'être interrompu parce que cela me permet de chercher ce que je pourrais bien dire sur le député de Bourassa. Je ne trouve absolument rien.

M. Laplante: Vous essayez de retrouver vos gens enfin! C'est un pur.

M. Lalonde: Je cherche dans mes souvenirs ces brillantes interventions sur l'amendement du député de Saint-Laurent et je ne trouve rien.

M. Laplante: Vous n'êtes pas souvent en Chambre.

M. Lalonde: C'est une absence métaphysique, M. le Président, que le député de Bourassa a offerte à cette commission depuis le début, mais il me fait plaisir quand même de vous annoncer la présence du député de Bourassa ici, à notre commission. Ceci dit, le député de Bourassa pourra se joindre au député d'Abitibi-Est dans ses réflexions, il pourra consulter le député de Saint-François, son voisin de siège, il pourra même poser des questions au député de Beauce-Nord à savoir où est la frontière entre le comté de Frontenac et le comté de Beauce-Nord, où le député de Beauce-Nord veut installer le siège social. Il pourra même être témoin des conversations qui vont être très orageuses entre le ministre et son adjoint parlementaire. Cela n'est pas fini.

M. Grégoire: Cela, c'est étirer le temps, ne pas savoir choisir.

M. Lalonde: Quand le député de Frontenac va-t-il remettre sa démission? De quelle façon? Va-t-il la remettre à l'Assemblée nationale ou va-t-il la remettre à Thetford-Mines?

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît, je vous demande de revenir à la pertinence.

M. Lalonde: Oui, mais c'est pour cela qu'il faut suspendre l'étude de l'article 2. Il faut laisser le temps au député de Frontenac de réfléchir sur la façon dont il va démissionner, parce que personne ne peut s'imaginer qu'il va demeurer à son poste, député peut-être, mais de quel parti? On verra. Mais adjoint parlementaire du ministre des Richesses naturelles qui vient de le bafouer publiquement...

M. Grégoire: Ah! tu n'as pas faitcela!

M. Lalonde: Serait-il assez inconscient pour ne pas s'en être rendu compte? Je n'ose pas l'imaginer, M. le Président, c est pour cela que je veux lui laisser le temps de réfléchir. Il va relire les galées et il va s'apercevoir, à ce moment-là, de l'énormité de la situation dans laquelle son ministre l'a mis. Il faut suspendre l'étude de l'article pour laisser le temps, à ce parti, de se remettre ensemble, sans cela, il va manquer de leadership complètement dans cette commission parlementaire si, à tous les articles, on est là avec la division. Si, par exemple, le député de Richmond, ayant vu la lumière, ayant été persuadé que les Cantons de l'Est sont une région un peu difficile, fait une motion pour installer le siège social dans le comté de Saint-François, quel dilemme! Avec le bel exemple qu'on a eu tantôt du député de Frontenac.

M. Ouellette: ...

M. Lalonde: Est-ce que le député de Saint-François va avoir le courage, à ce moment, de ses opinions?

M. Rancourt: Moi je ne suis pas l'adjoint parlementaire, je suis adjoint parlementaire à l'Agriculture.

M. Lalonde: Oui, mais peut-être qu après la démission du député de Frontenac, le poste sera libre. Là, cela va nous prendre justement un député de la région de l'amiante, comme adjoint parlementaire.

M. Grégoire: On prépare le territoire.

M. Brochu: Cela ne sera pas la première fois qu'il aura changé d'idée, de toute façon.

M. Lalonde: II y a seulement les fous qui ne change pas d'idée.

De toute façon, M. le Président... Question de règlement, M. le Président, quand j'ai parlé des fous, je n'ai pas voulu dire le député de Bourassa. Si c'est cela qu'il a compris, M. le Président, je le retire.

M. Bérubé: M. le Président...

M. Grégoire: II faut avoir des idées pour changer.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, messieurs. Un instant, s'il vous plaît. D'abord, je voudrais demander à M. le député de Marguerite-Bourgeoys de bien aider le président à rester sérieux. Il est difficile de garder tout son sérieux dans des circonstances comme celles que l'on connaît présentement. Je vous demanderais, s'il vous plaît, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, de conclure votre intervention. Est-ce que c'était une question de règlement, M. le ministre?

M. Bérubé: Je voulais souligner son manque de sérieux, mais sa très grande constance, cependant.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, de l'autre côté de la table, on se réjouit, on prend cela à la blague, mais c'est assez difficile de s'imaginer jusque quel point ce parti a été tiraillé. On pensait que c'était seulement le chef qui était tiraillé, M. le Président, mais ce sont tous les membres de cette commission, les membres ministériels de cette commission qui sont tiraillés depuis à peu près 24 heures qu'on discute sur le siège social. Qu'ils aillent donc en caucus en discuter tranquillement. Ici, ils font perdre le temps de la commission. Si on avait accepté...

M. Grégoire: Qui fait perdre le temps de la commission? C'est la meilleure!

M. Lalonde: ... hier l'amendement du député de Saint-Laurent rapidement, on serait peut-être rendu à l'article 3 ou 4. Il y a des articles importants qui s'en viennent: l'article 3 qu'il va falloir sûrement enlever, et l'article 4 qui est un article de substance. M. le Président, j'ai hâte d'arriver à ces articles. Le gouvernement fait état...

M. Bérubé: Etalons sur des articles peu importants.

M. Lalonde: ... de sa division et impose à la commission parlementaire un rythme de travail qui est absolument insupportable, M. le Président. C'est pourquoi je demande que... Je pense que les députés qui se posaient des questions, comme le député de Saint-François et le député de Beauce-Nord, pourraient très facilement... D'ailleurs, j'ai vu le petit caucus tantôt quand j'ai fait ma motion, à savoir, s'il l'avait acceptée ou non. Il y avait un certain doute. Il pourrait facilement supporter, appuyer ma motion de suspendre sans encourir les foudres des surveillants de discipline qui vont revenir tantôt. On y reviendra tantôt à l'article 2, un peu plus tard, lorsque l'unité du parti sera faite, lorsque l'adjoint parlementaire aura été remplacé par quelqu'un de plus docile. A ce moment, on pourra facilement passer à l'article 2 et l'étudier en toute sérénité, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Richmond.

M. Brochu: Très brièvement, M. le Président, pour vous dire simplement que pour les raisons que j'ai mentionnées tout à l'heure, aussi parce que j'aurais souhaité que la ville soit identifiée et que les préparatifs aient été davantage faits au niveau du projet de loi avant de nous le présenter, j'appuierai la motion.

Le Président (M. Dussault): Alors il n'y a plus d'intervenant, je mets aux voix la motion de M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Laplante: Est-ce que le député de Marguerite-Bourgeoys peut voter sur sa motion?

M. Lalonde: Si j'avais le droit de vote, M. le Président, je voterais pour.

M. Bérubé: Vous voulez dire qu'il n'y a aucun membre du Parti libéral qui va voter sur une motion du Parti libéral?

M. Grégoire: Prenez le vote et on va le voir. M. Bérubé: Ce n est pas vrai!

M. Laplante: Un vote enregistré, M. le Président.

M. Grégoire: Vote enregistré.

Le Président (M. Dussault): On me demande le vote enregistré, alors je vais faire...

M. Laplante: C'est le sérieux de leurs motions.

Le Président (M. Dussault): Je vais faire l'appel nominal. M. le député de Matane.

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Rosemont. M. le député de Richmond.

M. Brochu: Pour.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-Laurent.

M. Grégoire: Absent.

M. Bérubé: Absent.

M. Lalonde: II voterait contre.

Le Président (M. Dussault): Je m'excuse, mais je dois nommer les membres de la commission. M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: Contre. M. Lalonde: Pour. M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Saint-François.

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Dussault): M. le député d'Outremont.

M. Grégoire: Absent.

M. Bérubé: Absent.

M. Lalonde: Ce n'est pas vrai, M. le Président.

M. Bérubé: M. le Président, quand il ne lit pas son journal, il est absent.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît!

Je fais le décompte, cinq contre et un pour. La motion est donc rejetée.

M. Grégoire: Est-ce que je dois comprendre qu'il n'y a pas un libéral, sur la commission, à l'heure actuelle qui a le droit de vote? Ils ne prennent pas cela au sérieux.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Frontenac, le président n'a pas à faire d'interprétation sur les présences et les absences des membres à cette commission...

M. Grégoire: Vous pouvez constater.

Le Président (M. Dussault): Est-ce une question de règlement, M. le député?

M. Lalonde: Oui, évidemment, M. le Président, parce que les remarques du député de Frontenac rejoignent une observation que j'avais faite au début des travaux de cette commission, à savoir que la composition des commissions parlementaires en vertu du règlement sessionnel actuel, présente souvent au niveau du vote des situations aberrantes, à savoir qu'il y a des membres d'un parti qui sont présents, qui délibèrent, qui font des motions et quand on arrive au vote, il arrive qu'il n'y a pas de vote enregistré au nom de ce parti. Je pense que les remarques du député de Frontenac sont complètement hors d'ordre et qu'elles ne doivent pas être reçues, M. le Président.

M. Grégoire: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: C'est vrai que mes remarques étaient hors d'ordre, mais elles étaient justes. Il n'y avait pas un libéral.

M. Lalonde: Oui, je suis là.

M. Grégoire: II faut que ce soit inscrit dans le livre des minutes, qu'il n'y avait pas un seul libéral, lors du vote. C'est la deuxième fois que cela se produit.

Le Président (M. Dussault): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Frontenac! Nous revenons donc...

M. Grégoire: Par chance et je félicite le député de Richmond d'être présent.

Le Président (M. Dussault): Nous revenons donc à l'article 2 du projet de loi. L'article 2 est-il adopté?

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Dussault): Oui, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: L'article 2 apporte du nouveau dans la législation des sociétés d'Etat. J'ai donné des exemples un peu plus tôt ce matin d'autres sociétés d'Etat incorporées en vertu de lois, naturellement, soit sous un gouvernement unioniste, soit sous un gouvernement libéral, et j'ai fait état de la continuité de la tradition qui veut que la région où le siège social sera situé soit déterminée dans la loi. Le débat sur les motions d'amendement a donné lieu à un certain nombre de précisions; c'est-à-dire qu'on a précisé les imprécisions de la politique du gouvernement. Il reste que c'est tout à fait inusité qu'une société soit incorporée par le gouvernement. Je pense qu'on doit dénoncer actuellement, au moment de la motion principale de cet article, le caractère d'improvisation, le manque de préparation, l'amateurisme du gouvernement dans la loi qu'il nous propose. Quand on arrivera à l'article 3 — j'ai hâte d'arriver à l'article 3 parce qu'il y a là quelque chose d'encore pire — on verra jusqu'à quel point ce projet de loi a été garroché comme si ce qu'il contenait n'était pas important, mais que ce qui comptait, c'était le contenant.

M. le Président, je constate qu'il est 12 h 30.

Le Président (M. Dussault): A ma connaissance, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, nos travaux se terminent à 13 heures. Ce n'est que le mercredi que nos travaux se terminent à 12 h 30.

M. Lalonde: Je regrette, M. le Président, mais depuis qu'on siège à 14 heures, à l'Assemblée nationale...

Le Président (M. Dussault): A moins que vous me fassiez...

M. Laplante: Depuis que l'Assemblée nationale siège à 14 heures, on termine ici à 12 h 30.

M. Lalonde: ... le mardi et le jeudi, on termine à 12 h 30.

Le Président (M. Dussault): II n'est jamais trop tard pour...

M. Lalonde: Pour apprendre.

Le Président (M. Dussault): ... apprendre certaines choses, vous avez raison. Etant donné que l'Assemblée nationale siège cet après-midi à 14 heures, les travaux seront ajournés sine die.

M. Lalonde: C'est cela.

Le Président (M. Dussault): Les travaux de la commission parlementaire sont ajournés sine die. Merci!

(Suspension de la séance à 12 h 30)

Reprise de la séance à 15 h 45

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Les membres de la commission pour la présente séance sont: M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu (Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M. Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt (Saint-François) et M. Raynauld (Outremont). A l'ordre, s'il vous plaît!

Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Garneau (Jean-Talon) est remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).

M. Lalonde: Remplacez-le par M. Raynauld et je vais remplacer M. Raynauld comme membre.

Une Voix: Vous voulez voter cet après-midi.

M. Bérubé: J'espère que le journal des Débats aura enregistré que le député de Marguerite-Bourgeoys a souligné les départs fréquents et répétés du député d'Outremont.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) remplace M. Raynauld (Outremont) comme membre et M. Raynauld (Outremont) remplace M. Garneau (Jean-Talon) comme intervenant; M. Landry (Fabre), M. Gratton (Gatineau) remplace M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue); M. Léger (Lafontaine), M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

Je pense que ce matin vous étiez revenus à la motion principale.

M. Grégoire: M. le Président, sur une question de règlement. Il s'est produit ce matin quelque chose qu'on ne voit pas souvent, soit l'absence totale des membres permanents représentant le Parti libéral à la commission, de sorte que, lorsqu'il y a eu un vote à prendre sur une motion même d'un membre intervenant, il n'y a même pas eu un député libéral ici pour voter.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Est-ce une directive ou une question de règlement?

M. Grégoire: Oui, je demande une directive, M. le Président. Ne pourriez-vous pas demander a nos collègues d'en face d être au moins presents à la période des votes pour qu on puisse savoir quelle est leur opinion, surtout quand c est une motion. C'est la deuxième fois que cela se produit depuis le début de la commission.

M. Lalonde: Vous l'avez laissé parler, nous allons en parler, c'est sûr.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n est pas une question de règlement.

M. Lalonde: Vous l'avez laissé parler, nous allons répondre.

M. Laplante: On en fait une question de directive.

M. Grégoire: C'est une question de directive. M. Lalonde: Quelle est la directive?

M. Grégoire: De vous prévenir que vous devriez être ici au moins lorsque viennent les votes sur vos propres motions.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: Ce n'est pas cela des directives. Si on veut être absent, on sera absent.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question des directives...

M. Grégoire: Surtout, M. le Président, que ce sont eux qui, l'autre jour, blâmaient le ministre d'être absent, alors qu'ils sont tous absents. C'est épouvantable!

M. Lalonde: M. le Président, quand même, la vérité a ses droits. Les bouffonneries du député de...

Une Voix: C est la seule réponse.

M. Lalonde: ... Frontenac — c'est vrai — ont des limites. Il est exact qu'avec le nouveau règlement sessionnel, il arrive que des intervenants étant presents à la commission parlementaire et des membres devant s'absenter au moment du vote, c est comme si tout un parti était absent de la commission parlementaire. A cet égard, j'ai d'ailleurs parlé avec le leader de l'Opposition officielle à midi, et nous aurons sûrement des suggestions à faire pour amender ce règlement, éventuellement, pour que cette apparence qui est, de fait, une aberration...

M. Bérubé: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II n'y a pas de question de règlement ni de la part du député de Frontenac, ni de la part du député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Qu'un amendement soit fait pour empêcher cette espèce de situation un peu irrégulière, je l'avoue, mais que le règlement nous impose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): L'article 2, sera-t-il adopté?

Une Voix: Oui.

Une Voix: Non.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, il y a effectivement eu un certain nombre de votes pris de façon précipitée dans le grand espoir qu'avait le député de Frontenac qu'on puisse finalement sortir de ce sujet fort embarrassant pour lui, et d'autant plus embarrassant que ses efforts désespérés pour convaincre son ministre et ses collègues se sont soldés par un échec assez misérable.

M. Grégoire: Vous ne m'avez pas aidé assez fort.

M. Forget: C est un échec qui l'embarrasse, parce que, étant député de la région de Thetford Mines, le député de Frontenac devra rentrer bredouille chez lui avec une loi qui risque d'être adoptée dans un contexte complètement inusité. Ce sera la première loi que l'Assemblée nationale aura adopté une loi créant une société d'Etat, où le siège social n'est pas fixé par la loi. C'est un précédent qu'on crée en l'honneur du député de Frontenac, parce que le gouvernement veut bien se donner des airs d'écouter ceux qui plaident en faveur de la ville de Thetford Mines, mais prend bien soin de ne pas s'engager dans ce sens-là, de quelque façon que ce soit, et laisse toutes les portes ouvertes, créant en cela une nouvelle tradition, qui n a jamais existé dans le passé, de ne pas mentionner le lieu du siège social.

M. Bérubé: C est une ouverture d'esprit.

M. Forget: C'est une ouverture d esprit qui frôle la dérobade et le manque de courage de la part du ministre. On a eu le spectacle assez révélateur des ambitions de chacun des ministres de la majorité ministérielle pour avoir dans son comté le siège social de la Société de l'amiante.

Il s'agit là d une tentative ouverte de faire jouer le bon patronage péquiste, j'imagine, mais c est assez désolant de voir, sur un aspect malgré tout secondaire, sur le plan de la politique gouvernementale, un gouvernement incapable d'imposer une orientation commune à ses députés, incapable de leur faire abandonner l'esprit de clocher, incapable de dire le choix du siège social, le lieu d'implantation du siège social: Ce sera à Thetford Mines, mais devant reculer devant une échéance, sous prétexte qu'on n'a pas assez longuement étudié le sujet, ce qui est une excuse qui, d'ailleurs, convient fort bien au sujet et au ministre — on se doutait un peu que toutes ces études n étaient pas complétées — mais, sur ce point, il n'y a vraiment pas de raison de différer la décision, parce que les études pour l'implantation du siège social, ne sont pas longues à mener, elles sont évidentes, leurs conclusions sont évidentes, et on ne peut certainement pas expliquer par l'absence d'études, une décision, ou une absence de décision qui découle normalement des conditions concrètes dans lesquelles l'industrie de l'amiante se trouve. Elle se trouve concentrée géographi-quement dans une région, il ne s'agit pas d'étudier

longtemps la géographie économique du Québec pour se rendre compte de cette vérité élémentaire. Cependant, encore une fois, devant les pressions multiples auxquelles les députés, privément, je n'en doute pas, et même publiquement, ce matin, hier soir, se sont livrés vis-à-vis du ministre, vis-à-vis le "lobbying" intense auquel les hauts fonctionnaires du ministre, hauts fonctionnaires qu il écoute...

M. Bérubé: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre, sur une question de règlement.

M. Bérubé: M. le Président, j en ferais peut-être une question de directive. Est-ce qu'il est possible pour un député de revenir sur une question qui a fait l'objet d'un vote et qui a permis, finalement, de prendre une décision?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense que le député de Saint-Laurent, actuellement, est dans la pertinence du débat, puisque l'article 2 parle du siège social, à l'endroit déterminé par le gouvernement; les motions ont été défaites, mais, à ce que je constate, le député de Saint-Laurent parle de la localisation du siège social. Je pense qu'il est dans son droit actuellement.

M. Bérubé: Merci, M. le Président.

M. Forget: Le supplice du ministre et le supplice du député de Frontenac vont persister encore pendant quelques minutes.

M. Bérubé: Encore quatre minutes qu'on vient de me dire, ce qui fait que cela me soulage et ça va me permettre de vous entendre.

M. Forget: Je vois que vous comptez les minutes avec impatience, ce qui démontre que les arguments qu'on avance sont effectivement des arguments pour lesquels vous n'avez pas de réponse. Vous avez avancé, je devrais dire, M. le Président, le ministre a avancé une justification qui est le clou ou la cerise sur le "sundae" de son argumentation là-dessus. Il a dit: II faudra que les membres du conseil d'administration nous donnent des avis là-dessus. Or, on sait comment sont désignés les membres du conseil d'administration. Pour rappeler cette magnifique procédure de la loi, M. le Président, ils sont élus, les membres du conseil d'administration.

M. Bérubé: On parle d'un article que nous aurons à discuter dans quelques jours.

M. Forget: Ils sont élus par les actionnaires, les actionnaires se résumant à un individu qui est le ministre des Finances. C est donc le ministre des Finances qui va choisir les membres du conseil d'administration et ce sont les membres du conseil d administration qui vont donner un avis au ministre des Richesses naturelles.

Et c'est sur cet avis indépendant et autonome du conseil d'administration de la Société de l'amiante que le ministre va se reposer pour prétendre, à l'Assemblée nationale, dans quelques mois, qu ayant reçu cet avis autonome et indépendant qui démontrait au-delà de tout doute, dans une étude non publiée, que le siège social de la société devrait se trouver à Québec ou à Montréal, étant donné qu ils ont des projets dans la région du Nord-Ouest du Québec, que, tout en tenant dûment compte des représentations de toutes les régions impliquées, de la région de I'amiante en particulier, il doit à regret se ranger de I avis de ses experts et de ce conseil d'administration.

C est probablement le scénario qu'il nous prépare, puisqu'il n'y a pas de doute que les experts du ministre, ses fonctionnaires, sont moins sensibles que le député de Frontenac aux préoccupations de la population locale de Thetford Mines et qu ils préfèrent très certainement les aménités sociales qui accompagnent la résidence dans la ville de Québec ou la ville de Montréal aux déplacements que leur imposerait I établissement du siège social dans la ville de Thetford Mines. Comme dans le passé on a vu souvent le gouvernement changer d'avis sous I impulsion de ses fonctionnaires, particulièrement dans ce dossier. On nous prépare donc ce genre de réponse. On se prépare...

M. Bérubé: Sous votre régime.

M. Forget: Sous le vôtre, M. le ministre. Vous avez changé d'opinion deux fois en un an au sujet de I'amiante pour tomber pile sur l'opinion conforme à celle exprimée par les fonctionnaires avant même que vous ne soyez nommé ministre. C est une curieuse coïncidence qui va se répéter et ce que je peux vous affirmer, c est que vos fonctionnaires vont préférer vivre à Québec que d'aller s expatrier à Thetford Mines.

C est la conclusion sur laquelle vous allez déboucher parce que vous n avez pas voulu prendre vos responsabilités dans cette affaire, vous n avez pas voulu indiquer une orientation claire qui aurait été suivie par votre caucus. On a eu le spectacle de la désunion et de I esprit de clocher. Ce n est pas en vous cachant derrière les fonctionnaires, derrière un conseil d administration que vous allez nommer et non pas un conseil d'administration élu, contrairement à ce que prétend la loi de façon fallacieuse... ce sont vos propres créatures qui vont vous donner ce conseil, conseil que vous allez écouter, comme vous avez écouté les autres.

C est donc avec beaucoup de regret quon doit fermer ce chapitre, en quelque sorte, de la loi, cet article 2, refermer le couvercle sur le cercueil des espoirs du député de Frontenac. Il va devoir emporter chez lui ses espoirs, et essayer de convaincre ses commettants que les efforts qu il a déployés, malgré son titre d adjoint parlementaire au ministre des Richesses naturelles, tout cela ne lui a servi à rien, ses paroles n'ont servi à rien.

Je suppose qu'il était sincère, M. le Président, je suppose et j'espère pour lui qu'il n'a pas simplement voulu donner le change à la population de Thetford Mines en prenant la parole et en essayant, par beaucoup de mots qui se voulaient des mots d'esprit, de faire croire à une association avec l'amendement présenté par le Parti libéral. J'espère qu'il était sincère. Mais, à tout événement, sincère ou pas, cela n'a aucune espèce d'importance, le ministre n'a pas été impressionné et ses collègues ministériels non plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Richmond. M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, le député de Saint-Laurent, il y a deux jours, a invoqué les mêmes arguments de méfiance à l'égard de la fonction publique. Ce sont des arguments qui m étonnent beaucoup dans la bouche d'une personne qui a été ministre et qui, sûrement, ne peuvent que témoigner de la confiance que lui ont manifestée ses fonctionnaires à l'époque où il était là.

M. Bérubé: Ses ex-fonctionnaires.

M. Godin: Et lui-même l'a été. Mais cela fait deux fois qu'il revient à ces arguments, M. le Président, et je trouve cela...

M. Forget: Je sais ce dont je parle, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à l'ordre! (76 heures)

M. Godin: ... je trouve cela... Si vous avez des cas, M. le député, faites-les-nous connaître publiquement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Forget: La nature humaine ne se dément pas.

M. Lalonde: Un seul.

M. Godin: Cessez de laisser planer un doute sur...

M. Forget: Ce n'est pas un doute, c'est une affirmation.

M. Godin: Cessez de faire des affirmations gratuites, alors. Ou donnez des cas et des noms précis de manipulation de ministres par les fonctionnaires.

M. Forget: Nous n'avons pas les noms. On vous les a demandés, on ne les a pas encore.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Donnez des cas précis de manipulation. Personnellement, M. le Président, je m'inscris en faux contre ce genre de remarques. Si on a des cas précis à donner de manipulation des ministres par les fonctionnaires, qu'on les donne, sinon qu'on ne laisse pas planer le discrédit sur l'ensemble de la fonction publique.

M. Forget: Qu'on nous laisse entendre ces fonctionnaires et on saura quel est leur avis.

M. Godin: Laissez-moi parler. M. le Président, est-ce que c'est moi qui ai la parole?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est vous, M. le député de Mercier.

M. Godin: Merci, M. le Président. Ces procès d'intention sont, pour reprendre les mots de mon collègue de Marguerite-Bourgeoys ce matin, dégradants. C'est de la mesquinerie et, si le député de Saint-Laurent a des suggestions précises à faire pour arriver au résultat visé, qu'il les fasse ici, M. le Président, mais qu'il cesse de faire planer un doute sur l'ensemble de la fonction publique dont, comme gouvernement nouvellement élu, nous sommes satisfaits jusqu'à maintenant et...

M. Forget: Ce n'est pas sur la fonction publique que les doutes planent, c'est sur le ministre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Laplante: ... les fonctionnaires.

M. Forget: II a une attitude servile vis-à-vis de ses conseillers. Il est tout à fait légitime pour ses conseillers de préférer vivre à Québec.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît.

M. Laplante: Vous avez bien dit les fonctionnaires.

M. Godin: S'il a des cas, qu'il les donne; sinon, qu'il se taise, M. le Président. Je n'accepterai pas qu'on attaque ici impunément la réputation, le sérieux des gens qui conseillent le gouvernement.

M. Lalonde: C est touchant. Vous m'avez fait pleurer.

M. Raynauld: M. le Président...

M. Bérubé: M. le député d Outremont est parmi nous.

M. Raynauld: ... comme je ne parle pas souvent, je demanderais peut-être au ministre de cesser de faire...

M. Bérubé: C'est juste, il ne parle pas souvent.

M. Raynauld: ... des attaques continuelles. La décision de placer un siège social devrait, je pense, être annoncée au moment même où on annonce le projet de loi, parce que, lorsqu une décision comme celle-là n est pas prise au moment où elle devrait être prise, cela crée des conflits inutiles. Lorsque le ministre nous dit qu on ne peut quand même pas décider d'une question comme celle-là sans avoir fait des études, comme il l'a fait ce matin, j aurais espéré, franchement, que les études aient été faites. Je pense qu il n y a pas de caractéristique plus claire que, là encore, on a improvisé des choses puisque, même sur une question aussi simple au fond, que la décision de placer un siège social à un endroit plutôt qu à un autre, la décision n est pas prise.

Si le ministre avoue aujourd hui qu il faut faire des études pour prendre une décision comme celle-là, je me demande dans quel état seront les études pour justifier l'ensemble du projet de loi. Il est évident également, mon collègue de Saint-Laurent l'a souligné tout à l'heure, qu'une décision comme celle-là entraîne des conséquences pour les fonctionnaires, entraîne des conséquences pour l'ensemble de la politique que le gouvernement veut poursuivre en matière de décentralisation ou de centralisation des services.

Il me semble que c était quand même, dans cette perspective de décentralisation, une occasion, une bonne occasion d'indiquer dès maintenant quelle était la volonté du gouvernement en cette matière. Qu'on n aille pas invoquer le fait, comme le ministre l'a fait ce matin, qu il y a un conseil d administration qui va décider de ça, puisque non seulement est-ce inexact sur le plan de I économie de la loi, puisque I'article 2 dit qu'il y a un endroit déterminé par le gouvernement... Il n'a jamais été dit que cet endroit serait déterminé par le conseil d'administration, il est déterminé par le gouvernement.

S il avait été convenu que ce serait le conseil d administration qui déciderait de cela, on I'aurait marqué dans la loi, à I'article 2. Ce n'est pas ça qu'on a fait. On dit que c est déterminé par le gouvernement. Alors, nous demandons que le gouvernement le décide. Encore une fois, je pense que c'est une position tout à fait acceptable que de demander que, dans des lois de ce genre, on indique dès maintenant où se trouve la direction des sociétés que Ion crée.

On a fait état de nombreux précédents à cet égard. Dans presque toutes les lois établissant des sociétés de ce genre, on indique où se trouve, au moins dans les grandes lignes, le siège de la société. Dans ce cas-ci, il est évident qu'on n'a pas voulu prendre la décision. Ce n'est pas parce qu'on manquait d études, ce n est pas parce qu'on attendait le conseil d administration, c'est parce qu on a trouvé opportun de ne pas prendre la décision. J'aurais aimé entendre les raisons pour lesquelles le gouvernement décide de reporter à plus tard, de ne pas suivre les précédents créés lorsquon a créé des sociétés semblables, pour justifier de ne pas prendre la décision de le faire.

Sur le fond, je crois qu'il y a quand même là des considérations qui ont une très grande importance. Je pense que ce n est pas du tout indifférent que de penser que le siège social d une société puisse être à Thetford Mines, à Sherbrooke, à Québec ou à Montréal.

Je pense que des décisions comme celles-là doivent être des solutions cohérentes avec I'ensemble des politiques du gouvernement. Je ne pense pas que cela doive être une décision ad hoc, une décision qui soit prise, soit en fonction des intérêts des députés des régions concernées, soit en fonction des intérêts des fonctionnaires, soit en fonction de toute autre considération.

Il me semble que de déterminer où se trouvent les sièges sociaux, c est aussi important que de déterminer ou pourraient être les services gouvernementaux, si on décide et qu'on pense que c'est très important, dans une politique de décentralisation, de placer des services de planification, de la justice, ou que sais-je encore, en Gaspésie, au Saguenay-Lac-Saint-Jean ou dans le Nord-Ouest québécois, parce que I'on veut stimuler ces régions.

Je pense que la décision de placer un siège social comme celui-ci, qui aura une très grande importance, a un endroit ou à un autre, n est pas du tout une décision marginale et secondaire. Au contraire, c est une décision, a mon sens, d une très grande importance. Il me semble que cela aurait dû faire partie des politiques d ensemble du ministère, relativement a I amiante.

C est une décision qui affecte certainement des régions bien identifiées, mais en plus, elle pourrait donner une stimulation a certaines de ces régions, sous des formes fort intéressantes parce qu'elles vont représenter une diversification très grande de cette activité. Les activités d un siège social ne sont pas les mêmes que les activités minières, ne sont pas les mêmes que les activités de transformation. Ce n est pas le même genre de personnel, ce n est pas non plus le même genre de ressources humaines, de ressources de spécialisation, par exemple, ressources techniques, que dans le cas d autres activités. il me semble que la décision de placer le siège social de la Société de I'amiante à Thetford, à Quebec, à Montréal ou à Sherbrooke, est une décision d'une très grande importance, qui aurait du être prise, encore une fois, certainement après des études, mais dans un cadre général, dans un cadre d'une politique gouvernementale et visiblement, cette politique n'a pas été déterminée, n'a pas été définie. Visiblement, on n a pas examine cette question a temps pour qu'on puisse, à I'occasion du depot du projet de loi et a I'occasion de cette décision de créer la société, au même moment, simultanément, placer a I'article 2. I'endroit ou se trouverait le siège de cette société.

Il me semble qu'on a là un exemple, je dirais, d une improvisation, si on entend le mot au sens littéral du terme, c est-à-dire qu'on a précipité une décision sans en connaître et sans en tirer toutes les conséquences. La décision concernant la localisation du siège social de la société est une décision importante qui aurait dû faire partie de cette

réflexion antérieure au dépôt du projet de loi et faire partie encore une fois des éléments centraux de la politique de I amiante du gouvernement du Québec.

C'est pour cette raison que je regrette, pour ma part, qu'on ait rejeté la suggestion faite ce matin, parce qu'il me semble qu'au moins, à première vue, de placer le siège social de la Société nationale de l'amiante à Thetford Mines était, il me semble en tout cas, une décision qui aurait été, au moins à première vue, cohérente avec une politique de décentralisation que prétend défendre le gouvernement du Québec en tout état de cause. Faute de mieux; faute de cette réflexion qui aurait dû avoir lieu et qui n'a pas été faite, je pense que le ministre devrait cesser d'accuser I'Opposition, puisque ce n est pas à nous de préparer ces études, ce n'est pas à nous de faire la réflexion non plus; il appartenait au gouvernement de réfléchira ces questions, de faire les études dont il pensait avoir besoin et d'en arriver à fixer, dans le projet, la localisation du siège de la société.

Je regrette que cette proposition, cette motion n ait pas été acceptée. Je regrette également que le gouvernement ne soit pas revenu avec d'autres propositions, s'il croyait que celles qui étaient suggérées par l'Opposition n étaient pas acceptables. Pour cette raison, je voterai certainement contre l'adoption de l'article 2 sous sa forme actuelle.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, je voudrais uniquement ajouter quelques mots à la présentation du député d'Outremont, d'une part, parce que j'ai I'impression qu il ne comprend pas vraiment le sens du travail parlementaire auquel nous sommes appelés à contribuer.

En effet, lorsque nous discutons d'une loi, d'un cadre de fonctionnement, nous ne prétendons pas, comme parlementaires, nous substituer à lexécutif. Il faut bien comprendre le système britannique qui fait une distribution très nette entre I exécutif et le parlementaire.

Au niveau du parlementaire; nous définissons des cadres généraux. Nous évitons de nous mêler des décisions quotidiennes d'administration, lesquelles décisions quotidiennes d'administration sont normalement prises par l'exécutif.

Une décision du type de celle qui est la localisation d'un siège social, évidemment, c'est une décision administrative. La plus belle preuve c'est que, même dans I'amendement proposé par le Parti libéral, on y constate qu'on ajoute à cet amendement la possibilité quon puisse modifier le siège social à la lumière des recommandations éventuelles du conseil d administration, le tout étant soumis au gouvernement et non à I Assemblée nationale.

En d autres termes l'Opposition reconnaît que la décision finale, quant à la localisation d'un siège social, relève de l'exécutif, et non du législatif. C'est donc à I'exécutif de prendre ses déci- sions quotidiennes, concrètes, concernant la gestion quotidienne de l'Etat, alors qu'il appartient au législatif, ce que le député d'Outremont ne comprend pas... Je pense que lorsqu'il s'est lancé en politique, il espérait, évidemment, aller au pouvoir et être ministre. Il n'a pas encore compris qu'étant député, il doit accepter le processus législatif traditionnel.

Il doit donc s'efforcer de définir les cadres généraux des décisions gouvernementales, et non de prendre les décisions à la place du gouvernement.

On a pu constater autour de cette table que le député de Richmond trouvait que local iser le siège social à Thetford présentait des inconvénients, compte tenu qu'il avait des raisons à invoquer en faveur de la localisation à Asbestos. On a vu le député de Saint-François souligner la possibilité d'implanter le siège social à Sherbrooke. On a vu également d autres députés intervenir, notamment le député d'Abitibi, concernant la possibilité d'implanter le siège social dans sa région.

On a donc constaté qu'il n'appartient pas au législatif de prendre des décisions administratives, mais il appartient certainement aux députés de faire valoir les arguments politiques favorables à I'implantation d'un siège social dans leur territoire. Il faut donc se retourner vers l'exécutif. Or, qu'est-ce que l'exécutif de cette Assemblée nationale a comme politique?

La première politique a été soulignée par le passage d'un arrêté en conseil ou d'un décret gouvernemental. Il est connu de tous, il est public, à savoir que tous les nouveaux organismes gouvernementaux, désormais, devront s'implanter en dehors des grands centres traditionnels que sont Montréal et Québec, à moins que l'on puisse démontrer hors de tout doute qu'ils subiraient un préjudice appréciable du fait qu'ils soient localisés ailleurs que dans ces deux centres. Par conséquent, la politique de l'exécutif a été présentée. Elle peut être critiquée par l'Opposition, mais elle ne fait aucun doute quant à l'intention du gouvernement de décentraliser.

Cependant, je dois souligner ma présentation de ce matin, les décisions qui doivent affecter la localisation d'un siège social doivent être basées essentiellement sur une analyse sérieuse. Elle doivent être basées également sur une analyse faite par les gens qui seront impliqués dans cette société, puisqu il s agit là vraiment d'une société qui a tout de même, comme conseil d'administration le pouvoir de réfléchir quant à son siège social, quant à la localisation de son siège social. (16 h 15)

Je trouve également un peu bizarre que le député d'Outremont, que nous n'avons vu que très rarement à cette commission, veuille intervenir sur cette question alors qu'il n est à peu près jamais présent. Je dois dire que le député de Richmond participe à nos débats, le député de Richmond a une position beaucoup plus objective sur cette question. Même le député de Marguerite-Bourgeoys, qui participe — il faut l'en féliciter — très régulièrement à nos travaux, a eu une

position que j'estime passablement objective. Quant au député de Saint-Laurent, à nouveau il est absent.

Par conséquent, ce qui me frappe, c'est que les quelques rares députés qui s'opposent à la position gouvernementale sont des députés qui, finalement, ne participent pas à nos travaux; ils sont absolument incapables d'apprécier les arguments que nous avons invoqués parce qu'ils n'étaient pas présents lorsque nous les avons invoqués. Dans ces conditions, M. le Président, je pense que nous devrions appeler l'article 2 et le voter le plus rapidement possible.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: J'aimerais poser deux questions avant de dire quelques mots sur la motion principale.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...

M. Lalonde: Oui. Je voudrais savoir si le député de Frontenac a démissionné comme adjoint parlementaire: il n'est pas à son siège actuellement... Le voilà. On peut lui poser la question.

M. Bérubé: II a certainement démissionné du Parti libéral.

M. Lalonde: Est-ce qu il a démissionné comme adjoint parlementaire du ministre des Richesses naturelles?

M. Grégoire: Pas encore, non. M. Lalonde: Pas encore.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: Est-ce que le député voudrait que...

M. Lalonde: Voilà, M. le Président, on sera encore dans le mystère et l'attente.

M. Grégoire: Est-ce que le député voudrait que je le fasse?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Je voudrais simplement que le député ait le courage de ses opinions. Je lui laisse la façon d'appliquer ce courage à ses actes.

M. Grégoire: Oui.

M. Lalonde: Voici ma deuxième question. Je me demande si on discute vraiment d'un problème réel. Je lis dans le Devoir de ce matin le titre suivant: Le siège social de la Société de l'amiante sera à Thetford.

M. Grégoire: Bonne nouvelle.

M. Lalonde: C est sous la signature... Peut-être pas le titre, mais I'article est de M. André Bellemare de la Presse canadienne qui a suivi avec beaucoup d'assiduité, malgré le vide...

M. Laplante: Ce n est pas lui qui a écrit le titre.

M. Lalonde: C est cela que je dis. Il a signé I article et non pas le titre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: Est-ce que vous voudriez le faire comparaître à la barre des témoins?

M. Lalonde: Je voudrais savoir si le gouvernement a décidé, malgré son opposition à notre amendement, d installer le siège social à Thetford? Est-ce que le ministre peut répondre à ma question? Y a-t-il eu une décision de prise selon laquelle le siège social de la société de l'amiante sera a Thetford? Parce que c'est le titre d'un journal très crédible.

M. Laplante: Mais il faudrait... Une Voix: II faudrait le souligner.

M. Laplante: II faudrait qu'on lise le haut aussi, par exemple. Elle a deux volets, la manchette.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Alors, il n'y a pas eu de décision à ce sujet?

M. Bérubé: M. le Président, ce qu on me soulignait ce matin, c est que, malheureusement, je ne dis pas le journaliste, mais bien le titreur du journal qui travaillait à cet article, a fait une erreur puisqu'il a supposé que, parce que l'Opposition libérale présentait un amendement quant à la localisation du siège social à Thetford, le gouvernement était à ce point soumis à l'Opposition libérale qu automatiquement il accepterait. Malheureusement, il n était pas au courant que cette motion du Parti libéral avait été défaite. Il faudrait mettre le titreur au courant.

M. Lalonde: Alors, M. le Président, je compte bien que le titreur...

M. Godin: C'est peut-être l'influence de l'an-cien directeur du Devoir.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: ... du Devoir, demain, pourra

écrire: Le siège social de la Société de I amiante ne sera pas à Thetford...

M. Bérubé: Ah, je regrette infiniment... M. le Président...

M. Lalonde: Alors, là, les gens de Thetford seront très heureux et pourront féliciter leur député, le député de Frontenac, de l'influence qu'il a à I intérieur de son caucus.

M. Bérubé: Suite à la question que le député de Marguerite-Bourgeoys m'a posée, je dois dire que cette commission, à ma connaissance, n'a pas décidé que le conseil d'administration ou que le siège social de cette société ne serait pas à Thetford. Au contraire, je ne serais pas du tout surpris de voir le siège social de la future Société nationale de I'amiante établi dans la région de I'amiante et, très possiblement, dans la région de Thetford. Néanmoins, je prétends laisser à I'exécutif...

M. Grégoire: Là, c'est une bonne nouvelle!

M. Bérubé: Néanmoins...

M. Grégoire: II y a eu deux événements marquants aujourd hui.

M. Lalonde: Alors, on pourra avoir le même titre demain, à ce moment, on arrêtera et on passera a autre chose.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Bérubé: Mais passez donc a autre chose, mon cher collègue.

M. Grégoire: II vient de dire que le siege social serait possiblement a Thetford. Bonne nouvelle! M. le Président, je crois qu'il faut s arrêter sur cette bonne nouvelle. Je suis heureux de ce que le ministre vient de dire. C'est la deuxième bonne nouvelle de la journée.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, vous n'avez pas le droit de parole. S'il vous plaît! Après, si vous le demandez.

M. Gratton: Faites attention, la Régie de I'assurance automobile devait aller a Hull et on ne I'a pas vu installée la encore.

M. Lalonde: M. le Président, le ministre vient de nous faire une leçon de législation. C'était réellement touchant de l'entendre faire la leçon aux petits députés ministériels, nouveaux en la matière, et nous dire que la loi doit établir les cadres de fonctionnement de la société, que l'exécutif a le devoir de voir aux choses sérieuses, mais que les membres du pouvoir législatif n'ont qu'à désigner les grandes orientations, les cadres généraux. Les décisions quotidiennes d'administration, a-t-il dit, doivent être laissées à l'exécutif.

Il semble que, dans I'esprit du ministre, l'établissement d un siège social, c'est une décision quotidienne d'administration. Je pense qu'on devrait rappeler au ministre que l'établissement des sièges sociaux des grandes entreprises comme, j'espère, le deviendra la Société nationale de l'amiante, si on lui confie toutes les activités qu'on veut bien nous laisser entendre actuellement, l'établissement et les déplacements de sièges sociaux de grandes entreprises, avec les retombées économiques et sociales qu'ils entraînent, ne sont pas des décisions administratives quotidiennes. On l'a vu dans le déplacement du siège social d'une grande entreprise d'assurances, qui a soulevé un tollé dans toute la population. Si c'est ce genre de décisions administratives peu importantes, secondaires, que le ministre veut laisser à l'exécutif, M. le Président, je pense que les législateurs n'ont absolument rien à faire ici. Qu'on ne nous demande pas d'examiner un projet de loi article par article à ce moment-là. Le ministre devrait savoir que la législation déléguée a atteint, dans le Québec moderne et, en fait, dans tous les régimes démocratiques modernes, une importance qui inquiète beaucoup de personnes responsables. Il y a une réaction à l'ampleur énorme qui a été donnée ces dernières années à la législation déléguée. Des organismes ont réagi. Je me souviens que le Barreau, par exemple, a présenté un mémoire qui a d'ailleurs été entendu par l'ancien gouvernement et aussi repris par le nouveau gouvernement, dans le discours inaugural. Je crois que c'est dans le discours inaugural que l'on retrouve une proposition que le gouvernement veut mettre sur pied, à savoir que la législation déléguée serait désormais soumise, en quelque sorte, à une commission parlementaire spéciale. Ceci démontre jusqu'à quel point on doit revenir en arrière et être de plus en plus sévère, de plus en plus rigoureux quant au fait de confier à la législation déléguée des secteurs entiers de la législation, tel qu'on le fait et qu on le fait de plus en plus.

M. le Président, le ministre a invoqué l'intérêt des députés. Il a mentionné certains députés de cette commission pour conclure au besoin de laisser la décision au ministre. Je ne l'ai pas suivi. Je regrette. Si, réellement, les députés ont démontré un intérêt aussi évident à la question de savoir où le siège social de la Société nationale de l'amiante serait situé, c'est bien justement la preuve que ce doit être laissé aux députés de décider où ce sera situé et non pas dire: Voici, les députés sont intéressés, ce sont donc les ministres qui vont décider. Je pense, M. le Président, que c est un argument autodestructeur qui ne supporte pas du tout la conclusion que le ministre a bien voulu lui donner.

M. Bérubé: II s'autodétruit.

M. Lalonde: La participation des députés à cette commission parlementaire a été le dernier argument du ministre. Je ne sais pas ce que cela venait y faire. Je sais qu étant donné qu il s'est fait rappeler à I ordre par l'Opposition officielle à

cause de ses nombreuses absences, le ministre est devenu chatouilleux quant aux présences des députés, mais je dois dire que, depuis quelques jours, il est là, nous le surveillons et nous allons voir, selon sa conduite, si nous pouvons lui décerner éventuellement un certificat. C est quand même un bon départ et je l'encourage à continuer. M. le Président, le siège social de la société d'Etat a toujours été désigné dans la loi quant au lieu où il doit être situé.

M. Godin: Mais non! M. le Président, le propre office de la langue française, une de ses plus belles réalisations...

M. Laplante: C est de la démagogie, ce n est que cela qu'ils font.

M. Godin: ... M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il y avait deux sites indiqués avec un choix. Il ne faudrait quand même pas se laisser emplir par l'Opposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre! Vous n'avez pas le droit de parole, M. le député de Mercier.

M. Godin: Je le sais, mais je ne peux pas endurer ça.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Question de règlement. D abord, comme vous l'avez vous-même constaté, le députe de Mercier n'avait pas le droit de parole, donc n'aurait pas dû intervenir...

M. Godin: Etes-vous président ici? Il me l'a déjà dit.

M. Gratton: Deuxièmement, il a erré en disant que c'est le député de Marguerite-Bourgeoys qui avait présidé à l'adoption du projet de loi no 22. On sait que le député de Marguerite-Bourgeoys a fait un excellent travail comme responsable de l'application de la loi 22. Mais le parrain du projet de loi était le député de...

Une Voix: François 1er.

M. Gratton: ... L Acadie, je pense, François 1er, M. Cloutier...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, M. le député de Gatineau.

M. Gratton: ... et que le député de Marguerite-Bourgeoys...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau, il ne s'agit pas d'une question de règlement...

M. Lalonde: M. le Président, même si...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... et vous, ancien et brillant président, vous le saviez sans doute. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Gratton: Merci, M. le ministre.

M. Lalonde: M. le Président, même si...

M. Gratton: Vous voyez que je ne dors pas au-jourd'hui.

M. Lalonde: ... le député de Mercier allait à lencontre du règlement, M. le Président, j'ai quand même accueilli sa question. J avais bien dit et je répète que la loi confie à la société d Etat, c est-à-dire désigne, dans la constitution de la société d'Etat, le lieu de son siège social. J ai bien dit société d'Etat, à distinguer des organismes du gouvernement.

Dans les organismes du gouvernement, il arrive qu'on laisse ça, complètement au bon désir du gouvernement. Ainsi, dans SOQUIJ, la Société québécoise d information juridique, qui s appelle une société, mais qui, au fond, aurait pu être une direction générale du ministère de la Justice, mais il fallait y inclure toute la contribution des diverses universités, y compris l'Université de Montréal, sur le travail déjà commencé. C est une espèce d excroissance du ministère de la Justice, c est une société qui est un organisme du gouvernement comme l'Office de la langue française et l'an-cienne régie de la langue française.

A ce moment, généralement, on laisse au gouvernement le soin de désigner où ses propres services vont être situés. Quoique même dans certains services, dans certains organismes du gouvernement, on laisse un choix. On l'avait fait pour la loi 22 et on l'a retrouvé dans la loi 101. On a dit: c'est soit Montréal, région métropolitaine, soit Québec, région métropolitaine. Mais dans les sociétés d'Etat — je peux faire erreur, je n'ai pas fait une étude exhaustive — les seules dont je me souvienne au moins dans la période récente depuis 1969, j'en ai donné la liste ce matin; par exemple, pour la Société québécoise d'initiative agro-alimentaire dont la loi a été sanctionnée le 27 juin 1975, on dit: "la société a son siège social dans le territoire de la Communauté urbaine de Québec . La Société de récupération et d exploitation des développements forestiers du Québec, appellee communément Rexfor, a son siège social dans le territoire de la Communauté urbaine de Québec.

Il en est ainsi de la Société québécoise d'exploration minière dont la loi a été sanctionnée le 15 juillet 1965. Cela date quand même d'il y a plusieurs années. La tradition a été aussi établie et suivie par SOQUIP, dont la loi a été adoptée le 28 novembre 1969. Pourquoi? Parce que nous croyons qu'il appartient au législateur qui crée la société de dire où sa tête et son coeur seront situés.

Le conseil d administration administrera, on sait comment il sera désigné, on l'autorise dans la

loi, mais il prendra des décisions d'administration. Quant à savoir d'où l'action va provenir, où les décisions vont être prises, nous croyons qu'il est important, à cause des retombées, surtout quand on parle d'une société aussi importante qu'elle l'est dans l'esprit du gouvernement, comme la Société nationale de l'amiante, de par son nom, de par la mission qu'on semble vouloir lui confier... Il me semble que c'est au législateur — je fais appel aux députés qui sont ici à la table, qui sont des législateurs — pour qu'ils disent: C'est à nous de le désigner, surtout...

S'il s'agissait d'un secteur d'activités dispersées dans la province, absolument...

M. Godin: S'il y a des mines découvertes ailleurs plus tard. Est-ce qu'on peut prévoir ça?

(16 h 30)

M. Lalonde: Hypothétiquement oui. C est possible qu'on en trouve dans le beau comté de Marguerite-Bourgeoys. J'espère qu'on en trouvera un jour. Mais on légifère actuellement, en 1978.

M. Godin: II y en a en Abitibi, M. le député.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le siège social.

M. Lalonde: Est-ce que le député de Mercier va quand même contester que le coeur de l'amiante, que le coeur de la région de l'amiante est à Thetford Mines, que le coeur de l'amiante est dans la région de l'amiante et que le coeur de la région est à Thetford Mines? On ne peut pas contester cela.

M. Godin: On n'est pas contre Thetford Mines, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. On n'a jamais dit qu'on était contre Thetford Mines.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous donnez une réponse.

M. Godin: Mais il me pose une question, M. le Président, il faut que je lui réponde.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Votre remarque est très subtile, M. le député de Mercier.

M. Godin: Qu'il cesse de m'interroger et je ne répondrai plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense que vous vous êtes senti questionné. Mais en ce qui me concerne, je n'ai pas perçu de question.

M. Lalonde: Je demandais si le député de Mercier conteste le...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors, M. le député de Mercier, allez-y.

M. Lalonde: ... fait que la majorité des activités d'amiante se trouve dans...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Votre but n'était pas de poser une question, mais la phrase était sous la forme interrogative.

M. Lalonde: M. le Président, allez-vous me dire que le député de Mercier conteste cela?

M. Grégoire: II ne le sait pas, lui.

M. Lalonde: C est au président que je dois m'adresser. Je n'ai pas le droit de parler au député de Mercier.

C'est évident que ce n'est pas pour rien, ni par hasard, que nous insistons sur le droit du législateur de désigner l'endroit du siège social. Nous invoquons, à ce moment-là, une tradition bien établie qui l'a été par les anciens gouvernements de l'Union Nationale, qui a été suivie par les anciens gouvernements libéraux et qui, aussi, est conforme à une réforme législative, à un courant qu'on essaie de refaire à rebours, c'est-à-dire de réduire le plus possible la législation déléguée, ou ce que l'on confie à la législation déléguée. Le gouvernement en a trop. Il est rendu qu'il est appelé à légiférer littéralement quotidiennement, alors qu on se plaint que le rôle du député, actuellement, est réduit à presque rien, surtout pour les députés d'arrière-ban.

M. Godin: Vous en savez quelque chose.

M. Lalonde: On est ici, autour de la table; c'est le temps, pour les législateurs, de se lever et de dire: Non, c'est à nous de décider cela. La tradition, vous I avez derrière vous. J'invoque la tendance actuelle qui est même acceptée par le gouvernement, de réduire le morceau qu'on laisse à la législation déléguée. J'invoque, dans ce cas-ci également, un argument encore plus actuel. Dans ce cas-ci, c'est évident qu'on ne peut pas mettre le siège social de la Société nationale de l'amiante à Mont-Laurier, par exemple.

M. Godin: On n'a jamais dit cela, M. le Président.

M. Lalonde: On ne laisse pas le gouvernement errer dans ce sens. Que les législateurs disent au gouvernement où on veut qu'il soit. C est pour cette raison que je suis contre cet article 2, qui, d'ailleurs, est une indication...

M. Godin: Est-ce que je peux poser une question au député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Lalonde: La première qu'on a eue. dans ce projet de loi, c est le drapeau, avec le nom de la société. Après cela, on s aperçoit que c est de l'improvisation. Le reste, au fond, ça ne compte pas. Le drapeau est fait et on attend tout simplement que cela finisse.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, j'avais cru, a un moment donné, que cette demi-oreille attentive que je prête à ces débats s était sentie légèrement aiguillonnée, car j'ai cru entendre parler le député de Marguerite-Bourgeoys sur un ton qui m'a impressionné, des problèmes de la législation déléguée.

En effet, le gouvernement actuel s'inquiète de voir à quel point on puisse confier au gouvernement beaucoup trop de décisions a caractère souvent législatif, par le biais de lois-cadres qui sont extrêmement vagues et qui confient au gouvernement le soin de faire des règlements. A ce moment-là, I'essentiel de la loi étant entre les mains du gouvernement qui prépare les règlements et qui finalement, donne tout son sens a la loi.

Effectivement, la préoccupation du député de Marguerite-Bourgeoys est fondée. C est une préoccupation qui I'honore. J avais cru, a I entendre aborder ce sujet, que nous aurions eu droit a une réflexion interressante sur le sujet. Malheureusement, il oublie que la sélection comme telle d une ville pour un siège social, c est véritablement une décision qui doit reposer, comme il I admettra avec moi — et je pense que le député d Outremont, économiste de grand renom, le reconnaîtra aussi — sur un certain nombre de critères qui sont des critères économiques, des critères politiques. Si la décision était purement politique, il va de soi monsieur — et j'ai de mes électeurs de Matane dans cette salle — que le siege social de cette société serait a Samte-Anne-des-Monts.

Il va de soi qu une telle décision est une décision grave, il faut évaluer l'ensemble des critères, critère économique, critère d'aménagement du territoire, avant de prendre une telle décision. Pour cette raison, la sélection du siège social n est pas une décision législative comme telle, mais bien une décision administrative. Une autre raison qui me fait croire qu une telle décision ne doit pas reposer sur le législatif, c'est que, depuis deux mois — vous avez entendu le député de Marguerite-Bourgeoys pendant vingt minutes, puisqu'il avait droit à vingt minutes de paroles— vous avez entendu le député de Marguerite-Bourgeoys, parler, je devrais dire ergoter sur un thème sans absolument rien dire.

Après un mois de travail, nous sommes rendus à l'article 2. Vous voyez à quel point le législatif, dans le système actuel, est incapable de prendre des décisions, parce que si le député de Marguerite-Bourgeoys voulait véritablement jouer son rôle de député, il devrait se dépêcher d'aller aux articles importants que sont l'article 4 qui donne le mandat de la société, l'article 6 qui va traiter du conseil d'administration, de la structure du conseil d'administration et il réfléchirait au contenu de la loi. Voilà le rôle de la députation. Voilà ce que le député de Marguerite-Bourgeoys devrait se dépêcher d'aborder, plutôt que de perdre son temps et de faire perdre le temps de cette commission à ergoter sur des sujets qui n'ont absolument rien à voir avec le législatif, mais qui ont tout à voir avec l'administratif. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, premièrement, je tiens a rappeler, comme je l'ai fait ce matin, que tout ce que dit larticle 2, c est que c est le gouvernement qui va déterminer ou sera implanté son siège social.

Ce qui est certain, avec la création de cette Société nationale de lamiante, dont le principe a été rejeté par nos amis d en face suite à un vote en deuxième lecture — c'est important de le rappeler ici — ce qui est important, c'est qu'il y aura un siege social établi quelque part au Quebec, a proximité des marches.

Ce qui est le plus important encore, c est qu il ne déménagera pas, lui! C est peut-être important de vous le dire. C'est une des raisons pour lesquelles on s occupe de cette affaire. On en a assez de voir des gens déménager avec des primes d assurance des Québécois et d'autres bien semblables. Un des seuls moyens qu on a vu, dans ce secteur, d arriver à cet objectif, c est de créer cette société. Vous avez voté contre le principe de ladite société en Chambre. C est important de le rappeler ici.

Si le député d'arrière-ban du deuxième rang a quelque chose à dire, qu'il vienne à cette table, qu il s y inscrive officiellement. Il pourra parler, M. le Président. Pour I'instant, comme il a quitté sa place, qu il ait lélémentaire courtoisie de se taire.

Ce que je veux dire, en terminant là-dessus, c est que c'est une décision qui sera prise en tenant compte de tous les facteurs. Il n'est nullement exclu...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A I'ordre!

M. Godin: ... que ce soit à Thetford Mines. Le ministre l'a dit tout à I'heure. La décision sera prise en tenant compte de tous les facteurs. Ce n est pas une décision qui sera prise par le député de Frontenac, je regrette de le lui dire, parce qu à ce moment-là, il le ferait chez lui, ni par le ministre, parce qu il le ferait dans Matane. Ce sera pris en fonction de critères objectifs. C est la seule manière de bien administrer. Je suis convaincu qua I'époque où I'Opposition était au pouvoir, elle procédait à peu près de la même manière. Elle tenait compte des avis des experts. Elle tenait compte des études qui se faisaient. Elle tenait compte de tous les facteurs sociaux, de chômage, de sous-développement régional, de proximité des marchés, de proximité des routes et des moyens de communications, etc. On tiendra compte de cela dans notre décision qui sera prise en temps et lieu.

Ce qui m étonne, c'est qu'elle veut nous dire où implanter le siège social, mais elle est contre le fait qu'on le fasse. Elle est contre le fait qu'on ait une Société nationale de l'amiante, mais elle veut nous dire où la mettre, par exemple. Je trouve cela un peu bizarre comme comportement.

Si elle est contre, qu'elle ne s'occupe pas du choix de l'endroit où on va la mettre, où on l'implante. Qu'elle soit logique. Si elle est contre le fait qu'on la crée, quelle soit contre le fait qu'on l'implante où que ce soit. Là, elle serait logique. Non, elle ne veut pas qu'on la fasse, mais elle dit: Ne la faites pas, mais faites-la là. Je ne la comprend pas. Je ne l'ai jamais comprise, sauf en 1960. Depuis ce temps, je ne l'ai pas comprise. Cela ne change pas. Au contraire, cela empire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je vais essayer de faire comprendre au député de Mercier comment on peut dire qu'on est contre la création d'une Société nationale de I'amiante, mais pourquoi...

M. Godin: Vous allez avoir un gros boulot à faire.

M. Lalonde: Cela va être dur de leur faire comprendre quelque chose.

M. Gratton: ... on insiste également...

M. Lalonde: ...

M. Grégoire: ... ce n'est pas de I'amiante.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s il vous plaît!

M. Gratton: ... pourquoi, tout en étant contre la création de la Société nationale de l'amiante, nous voulons absolument que l'article 2 soit amendé pour qu'on désigne immédiatement Thet-ford Mines comme étant l'endroit du siège social de la société. C'est bien simple. C'est qu'on a une certaine expérience du gouvernement d'en face. On a eu des occasions où on a été contre des projets de loi présentés par le gouvernement en deuxième lecture. On a même eu des expériences où on nous avait dit: On va faire les modifications qui s'imposent en commission parlementaire. On va essayer de donner satisfaction à l'Opposition sur les détails du projet de loi. Je prends, par exemple, le projet de loi no 101, on pourrait prendre le projet de loi no 2 sur le financement des partis politiques, le projet de loi no 67 sur l'assurance automobile. On était contre à la deuxième lecture. On est venu à la commission parlementaire avec la ferme intention de bonifier autant que possible les détails du projet de loi, puisque c'est tout ce qu'on peut faire en commission parlementaire. Chaque fois, on s est fait refuser. On a fini avec des projets de loi...

M. Godin: II y a eu 80 amendements à la loi 101.

M. Lalonde: Les vôtres.

M. Gratton: Oui, les vôtres, pas les nôtres. Ils étaient reliés à un seul principe, finalement.

M. Godin: Pas uniquement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Dans la loi 67, il y avait à peu près 150 amendements

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A

I ordre! Sur la loi 70, s'il vous plaît!

M. Gratton: De toute façon, je n'ai pas interrompu le député de Mercier. Je n ai pas été à la commission très souvent, mais il semble être l'espèce de conscience du gouvernement et de la commission. Il a rabroué le député de Bourassa au mois de mars. Il vient d'indiquer au député de Frontenac que ce n'est pas lui qui va décider de la localisation du siège social...

M. Godin: II est du Parti québécois, lui?

M. Gratton: ... et il a même dit au ministre que ce ne serait pas à Sainte-Anne-des-Monts non plus que cela va aller.

M. Bérubé: Cela vous étonne?

M. Laplante: C'est la liberté qu'on a dans notre parti.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: On n'est pas des moutons ici, M. le député...

M. Gratton: M. le Président, c'est vrai qu'on est contre la création de la Société nationale...

M. Bérubé: Vous êtes contre tout.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Gratton: ... de l'amiante. Vont-ils me laisser parler?

M. Laplante: Tu aurais été mieux de rester en haut!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Ma liberté de parole, mes droits fondamentaux à titre de citoyen du Québec et de député à l'Assemblée nationale, qu'est-ce que vous en faites?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):

Sur le sujet, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Voulez-vous lui demander quelle est sa langue maternelle?

M. Gratton: J'ai deux langues maternelles, même trois.

M. Laplante: Je pourrais lui demander... M. Godin: M. le député...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mercier et tous les députés...

M. Godin: Non, mais il y a exagération... C'est un peu "cheap", excusez-moi...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît! A l'ordre!

M. Grégoire: C est mesquin!

M. Godin: Occupez-vous donc de votre comté! Vous n'êtes jamais là!

M. Grégoire: On va y arriver...

M. Lalonde: Qu est-ce que vous en savez?

M. Godin: Les rumeurs! J'ai des amis chez nous qui le savent...

M. Laplante: ... M. le député de Marguerite-Bourgeoys, on vous a presque sorti du...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Qui vous a donné le droit de parole, M. le député de Bourassa?

M. Gratton: Vous allez vous faire "sacrer dehors, si vous continuez. Est-ce clair?

M. Laplante: C est vous qui le dites.

M. Gratton: Le président est en train de se fâcher.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense que vous pouvez y aller.

M. Gratton: Merci, M. le Président. Je disais donc que nous, de l'Opposition officielle, tout en nous opposant de toutes nos énergies, de toutes nos forces, à la création de la Société nationale de I'amiante, exigeons quand même ou reconnaissons que cela ne change absolument rien, que le gouvernement avec son bulldozzer, avec son rouleau-compresseur, va faire adopter sa loi. Donc, sachant d avance que le gouvernement fera adopter cette loi, on se dit: Aussi bien la bonifier autant que possible. Je m'adresse, en particulier, au député de Frontenac. Il se réjouissait tantôt du lapsus — je ne sais pas si c'était un lapsus — que le ministre a fait, à savoir que ce serait probablement à Thetford Mines qu on localiserait le siège social de la société. Je lui rappellerai simplement que, dans l'Outaouais, on a eu des engagements de ce genre, des engagements qui n'en sont pas finalement. Durant toute la campagne électorale, on nous a dit: Quand on aura fait la réforme de I assurance automobile, on va s'assurer que... Juste- ment, on va faire l'indépendance également très brièvement après l'élection; on s'attendait que le référendum soit tenu beaucoup plus rapidement qu'il ne semble I être... On disait: II y a des édifices fédéraux dans la région de I'Outaouais; ils vont être vides; le gouvernement fédéral ne peut pas mettre des roulettes dessus et les traverser à Ottawa; donc, il va les laisser là. On pourra installer la Régie de l'assurance automobile à Hull avec toutes les conséquences économiques que cela comporte. Mais vous avez vu où le siège social de la Régie de I'assurance automobile est installé.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le sujet.

M. Gratton: II n'est pas à Hull; il n est pas à Hull.

M. Lalonde: II n'est pas à Thetford Mines non plus.

M. Gratton: Je suis en train d'indiquer au député de Frontenac qu il se leurre...

M. Grégoire: Etes-vous un gars de Hull?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Gratton: Non, je suis un gars de Gatineau. M. Grégoire: Ah! bon.

M. Gratton: ... lorsqu il prend les paroles du ministre comme étant une garantie que le siège social de la société va finalement se retrouver à Thetford Mines. Dans le cas de la régie de l'assurance automobile, le siège social est bel et bien installé à Montréal. Une fois qu'il est installé, on sait tous qu'il ne déménagera pas, comme disait le député de Mercier. Il ne déménagera pas à l'extérieur et il ne déménagera pas à Hull non plus.

Ce n est pas seulement durant la campagne électorale qu on a fait cet engagement. Le député de Hull, après son accession au cabinet, a même continué de dire à la population: Je ferai toutes les représentations voulues pour faire en sorte que le siège social de la Régie de l'assurance automobile soit installé à Hull, en tout cas dans I Outaouais. Cela ne s'est pas fait, M. le député de Frontenac. Donc, je dis...

M. Godin: Les représentations ont été faites, M. le Président. Elle a essayé de l'avoir.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Gratton: Les représentations ont été faites, mais le résultat net, c'est quoi?

M. Godin: C'est cela qu'elle avait promis: qu elle ferait des représentations.

M. Gratton: Oui, c'est ce que je veux faire, M. le Président; c'est de prévenir le député de Frontenac de ne pas s enflammer, de ne pas aller dire à ses électeurs: C'est fait, le ministre a dit qu'on l'installerait à Thetford Mines. Il n'y a aucune garantie à ce sujet. On lui a offert, avec la motion du député de Saint-Laurent, de lui fournir cette garantie.

M. Grégoire: J'ai voté pour.

M. Gratton: Oui, vous avez voté pour. Vous avez vu ce que votre ministre vous a fait, par exemple.

M. Grégoire: J'étais contre lui aussi. J'étais contre lui. Il n'en est pas question.

M. Gratton: M. le Président...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: Le droit a la dissidence existe.

M. Grégoire: Oui, cela existe chez nous.

M. Lalonde: Le droit a la démission aussi.

M. Godin: Dans I'amiante, on peut s'enflammer sans risque.

M. Grégoire: Ce n'est pas un troupeau de moutons.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: Le droit a la démission, qu'est-ce que vous en faites?

M. Grégoire: C'est mon droit a moi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Grégoire: C'est mon droit et mon privilege.

M. Gratton: M. le Président, j espère que toutes ces interruptions ne sont pas enlevées de mon temps parce que j'ai tellement de choses à dire. Je vais avoir besoin de mes 20 minutes.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est très difficile a calculer. A Tordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: Je disais donc, M. le Président, que le député de Frontenac devrait se préoccuper de cette situation et je pense que la seule façon maintenant pour lui d'obtenir satisfaction et une garantie formelle que ce ne serait pas strictement des paroles en I'air, ce serait peut-être de proposer lui-même I'ajournement des travaux de la commission tantôt, lorsqu'il prendra la parole.

M. Grégoire: Je n'ai pas l'intention de parler.

M. Gratton: Et de prendre la soirée pour tâcher de convaincre le ministre de revenir avec une motion d'amendement pour qu'on inscrive, à l'article 2, la localisation a Thetford Mines du siège social de la société.

Le député de Marguerite-Bourgeoys a souligné tantôt que toutes les lois adoptées — toutes, sans exception, je n'en connais pas une — ou on parle de créer, ou Ton crée des sociétés d'Etat, que ce soit la SOQUIA, la SOQUIP — le prochain, je vais avoir de la difficulté — la SOQUIJ...

M. Grégoire: C'est pas une société.

M. Lalonde: C' est une...

M. Grégoire: La SOQUEM.

M. Gratton: La Société québécoise...

M. Lalonde: ... d'information juridique.

M. Gratton: ... la Société québécoise d'information juridique, c'est la SOQUIJ, la SOQUEM, la REXFOR, la Commission des biens culturels et combien d autres, M. le Président, toutes les lois constituantes indiquaient, en blanc sur noir, ou serait localisé le siège social.

Une Voix: En blanc sur noir.

M. Gratton: Pourquoi? En noir sur blanc. C'est parce que je n'ai pas pris connaissance des textes originaux, ce sont des photocopies que j'ai vues et, pour moi, c était en blanc sur noir.

M. Bérubé: vous avez I esprit plutôt négatif.

M. Gratton: M. le Président, pourquoi faire exception dans le cas du projet de loi no 70, dans le cas de la Société nationale de l'amiante? Est-ce qu'on a l'intention de faire un concours? On sait que le gouvernement, à l'heure actuelle, est fort sur les concours. Apparemment on donne les contrats aux ingénieurs par concours...

M. Godin: C'est mieux que Taillibert.

M. Gratton: On tire d'un chapeau le nom des heureux architectes qui reçoivent des contrats. Je ne suis pas supposé le dire, M. le Président, mais il n'y a pas beaucoup de contrats qui se donnent, donc les tirages sont plutôt rares; mais le fait demeure que tout se fait au hasard, dans ce gouvernement, incluant la législation...

M. Godin: Fini le patronage.

M. Gratton: Oui, le placement étudiant...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: Aimez-vous mieux le patronage comme avant?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le siège social!

M. Gratton: On parle de patronage? Est-ce que je dois répondre au député de Mercier?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, la question était irrecevable et la réponse est irrecevable également.

M. Gratton: C'est malheureux parce quon pourrait...

M. Bérubé: On remplace I'arbitraire par I'aléatoire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Gratton: M. le Président, je disais donc que dans toutes les lois qui ont constitué des sociétés d'Etat, on a pris la peine de spécifier très exactement où se trouverait le siège social des dites sociétés.

C'est à se demander pourquoi, ici, surtout qu'on a eu des demandes très explicites, très formelles de la part du maire de Thetford Mines qui est venu témoigner devant la commission, du maire de Black Lake également...

M. Godin: Evidemment.

M. Gratton: Evidemment! C'est sûr.

M. Godin: Tous les maires du Québec le veulent, c'est bien certain.

M. Gratton: Je pense bien que le maire de Hull n'a pas fait de demande pour que le siège social de la société de I'amiante soit installé là.

M. Godin: Demandez-lui pour voir s il va dire oui, il va dire oui.

M. Gratton: Lui. il comptait beaucoup sur le siège social de la Régie de I'assurance; il s est fait jouer un tour, je pense bien qu il ne se laissera plus prendre.

M. le Président, je me pose donc la question:— j'espère que le ministre y répondra tantôt—Est-ce que le cabinet des ministres n'a pas autre chose à faire que de décider, par arrêté en conseil de la localisation des sièges sociaux des sociétés qu'il crée lui-même?

M. Bérubé: Cela ne nous prendra pas un mois.

M. Gratton: C'est encore drôle, avec la vitesse à laquelle le premier ministre a effectué son dernier remaniement ministériel; cela lui a pris 18 mois pour accoucher de la nomination du député de Trois-Rivières, je ne suis pas sûr que ça ne prendra pas aussi longtemps pour décider de la localisation du siège social de la société.

M. le Président, justement c est ce gouvernement qui passe des heures et des fins de semaine complètes en réunion du cabinet à chercher des poux ici et là. Combien de temps ça peut leur prendre pour en arriver à régler cette dissension profonde qu'il y aura entre le député de Frontenac et le ministre, si chacun veut avoir le siège social dans son comté? C'est le ministre lui-même qui l'a dit tantôt, le ministre a voulu faire croire au député de Frontenac qu'il lui accordait d avance que le siège social soit localisé à Thetford Mines, mais j'ai prévenu le député de Frontenac, adjoint parlementaire. D'abord, dans un prochain remaniement, dans 18 mois, sera-t-il encore I'adjoint parlementaire des Richesses naturelles? Aurons-nous adopté le projet de loi no 70? C est ça la question.

M. le Président, combien de temps me reste-t-il?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous avez jusqu'à 18 h 1.

M. Bérubé: Hélas, il vous en reste!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pardon, 17 h 1.

M. Grégoire: C est I expert et il ne sait déjà plus quoi dire.

M. Gratton: Non, au contraire, M. le Président, j'ai énormément de choses à dire et j entends les dire au moment où cela me plaira. Que je sache, il n'y a pas encore de directive de la part de quiconque qui puisse me forcer à dire ce que je ne veux pas dire, au moment ou je ne veux pas le dire.

M. le Président, je me réserve les quelques minutes qu il me reste pour donner la réplique au député de Frontenac, en temps et lieu.

M. Grégoire: Je n ai pas I'intention de parler.

M. Gratton: Et moi non plus.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci!

M. le député d Outremont.

M. Raynauld: M. le Président, j'avais employé très peu de temps tout à I heure, je peux donc ajouter quelques remarques supplémentaires. Le ministre a jugé bon, tout a I'heure, de distribuer des leçons aux députés et il a essayé de nous démontrer qu'on ne comprend rien au processus parlementaire ou législatif.

Alors sans revenir sur les exemples qui ont été donnés tout à I'heure, je voudrais simplement poser une question à savoir si la décision de localiser les sociétés qu'on a mentionnées tout à I heure, SOQUIA, REXFOR, SOQUEM et SOQUIP était une décision administrative, vous devriez donc admettre que ce sont des erreurs qui ont été commises à ce moment-là, parce que dans ces lois-là, comme par hasard, c'est le législatif qui a décidé la locali-

sation des sièges. Alors, je pense qu'à ce moment-là...

M. Bérubé: M. le Président...

M. Raynauld: ... votre leçon était mal placée...

M. Bérubé: ... le député d'Outremont m'a posé une question. Est-ce que je dois...

M. Lalonde: Non, c'est une affirmation.

M. Raynauld: ... était mal placée. J'ai dit que je posais une question, mais en réalité c'est une affirmation...

M. Bérubé: Parfait, continuez.

M. Raynauld: ... que je fais. Vous avez erré dans votre leçon sur la distinction entre les décisions administratives et les décisions législatives. Nous n'avons pas ergoté, comme vous l'avez dit tout à l'heure, lorsque nous avons prétendu et que nous prétendons encore que cette décision est tout à fait légitime pour nous, les parlementaires.

En second lieu, je voudrais également relever ce qui a été dit tout à l'heure par le député de Mercier. Je me pose la question pour savoir quelle sorte de notion il a du parlementarisme. Parce que la logique qu'il a essayé d'exposer était un sophisme. Parce que dans le régime parlementaire, on peut être contre le principe d'une loi et aussi se prononcer pour ou contre chacun des articles qui sont proposés. C est pourquoi il y a une troisième lecture, puis une commission parlementaire. Votre logique, à vous, de nous laisser apparaître comme des gens stupides, tombe complètement à côté du sujet.

M. Godin: Vous n'avez pas besoin de moi pour faire cela.

M. Raynauld: On n'a pas besoin de vous non plus pour nous dire des choses qui sont absolument fausses, absolument erronées. Il est parfaitement logique, dans notre système, d'être contre un projet de loi dans son principe et d'être pour et contre. Il n'y a personne qui va nous enlever le droit de discuter des articles, même si au nom de votre logique simpliste, cela ne semble pas aller. Je pense que cela valait la peine d être relevé. Enfin, je dirai que la véritable décision que nous demandons dans ce débat, c est que le gouvernement prenne sa décision et qu'il l'indique dans le projet de loi. On ne demande pas que ce soit nécessairement fait de façon précipitée, on ne demande pas non plus que ce soit fait nécessairement à un endroit plutôt qu'à un autre, à Iheure actuelle. On aurait voulu que le gouvernement ait pris sa décision et qu'il l'ait marquée dans le projet de loi, comme cela a été fait pour toutes les sociétés que nous connaissons. Cela a été fait dans toutes les sociétés antérieurement et on aurait voulu qu'il le fasse; on aurait aimé que la décision ait été prise maintenant plutôt que plus tard. On ne nie pas que la décision devra être prise à un moment ou à un autre. On ne nie pas non plus que le gouvernement devra la prendre, c'est bien évident, mais on aurait aimé qu'elle soit prise au moment où on discute du projet de loi.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. Est-ce que l'article 2 sera adopté?

M. Bérubé: Adopté.

M. Lalonde: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article 2, adopté sur division.

M. Bérubé: Deuxième article, un mois.

Mandataire du gouvernement

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'appelle l'article 3. Est-ce que l'article 3 sera adopté?

M. Lalonde: M. le Président...

M. Bérubé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... l'article 3 présente un problème tout à fait particulier. Je fais appel aux membres de cette commission, et en particulier au gouvernement, pour tendre une oreille, non pas à demi attentive, mais sérieuse. Voici pourquoi. On dit à l'article 3: "La société jouit des droits et privilèges d'un mandataire du gouvernement." On poursuit: "Les biens de la société font partie du domaine public mais I'exécution de ses obligations peut être poursuivie sur ses biens. " Enfin: "La société n'engage qu'elle-même lorsqu'elle agit en son propre nom." Voilà les trois alinéas de l'article 3, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un instant, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Est-ce que quelqu un pourrait présenter une motion pour corriger, à la deuxième ligne, du deuxième paragraphe "l'exécution des ses obligations" par "de"? M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous en faites motion?

M. Lalonde: S il faut corriger le gouvernement, ce sera la seule motion qui va être acceptée, M. le Président.

M. Grégoire: Proposé, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La motion du député de Marguerite-Bourgeoys est-elle adoptée?

M. Lalonde: Adopté. M. Grégoire: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Adopté. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Cela va être un peu inutile, M. le Président... (17 heures)

M. Laplante: II y a une de vos motions qui a été adoptée.

M. Lalonde: Etant donné I'ouverture d esprit du gouvernement, M. le Président, étant donné que je vais désirer qu'on fasse le retrait total de I'article, à ce moment-là, la correction va devenir un peu académique. Enfin! Ce sera un article bien écrit qu'on pourra effacer.

Voici le problème, M. le Président. On fait de la société un mandataire du gouvernement, on dit que ses biens sont fondus avec ceux du gouvernement. Pourtant, on a pris soin de créer une personnalité juridique séparée en constituant une société d Etat. Nous avons consulte les precedents là-dessus, et c est la première fois, je crois, qu une société d'Etat se fait ainsi traiter, de par la loi constituante. Je ne vois pas comment on peut ainsi à la fois créer une personnalité juridique séparée et, dans le même souffle, dire que ses biens seront confondus avec ceux du gouvernement, c'est-à-dire qu ils font partie du domaine public, et, deuxièmement, que la société est un mandataire du gouvernement.

On retrouve des articles semblables dans les lois constitutives d organismes. Je pense, par exemple à SOQUIJ, la Loi constituant la Société québécoise d'information juridique, sanctionnée le 19 décembre 1975. A larticle 11, on retrouve justement des dispositions analogues. Je le lis, on me dit que c'est textuel: "La société jouit des droits et privilèges de mandataire du gouvernement; les biens de la société font partie du domaine public, mais l'exécution des obligations de la société peut être poursuivie sur ces biens. La société n engage qu'elle-même lorsqu elle agit en son propre nom". Il me semble que c est presque la même chose. Je n ai pas vérifié personnellement, mais on me dit que c'est textuellement la même chose.

Mais voilà, SOQUIJ, j'ai eu I'occasion de le dire, est un organisme du gouvernement, comme la Commission des valeurs mobilières, presque comme les ministères, peut-être moins indirectement, mais ses biens font naturellement partie du domaine public. Ses budgets sont assujettis à toutes les dispositions des lois applicables, y compris surtout la Loi de l'administration financière. C'est la même chose que le gouvernement. Mais voilà que le gouvernement nous propose de constituer une société nationale, une société d'Etat, donc une personnalité juridique séparée, avec capital-actions, administration séparée, et on tond ses biens avec ceux du domaine public.

On dit qu'elle sera un mandataire du gouvernement, donc, elle va pouvoir engager le gouvernement. Comment cette société pourra-t-elle, par exemple, emprunter sur ses biens si elle n'a pas de distinction entre ses biens et les biens du gou- vernement? Comment la société pourra-t-elle poursuivre ses activités séparément, comme il semble que ce soit I intention du gouvernement qu'elle le fasse, cest-à-dire comme une société d Etat, comme la SGF le fait, comme la Commission hydroélectrique, I'Hydro-Québec aussi, qui est une personnalité juridique séparée, comme SIDBEC. par exemple.

Je soumets ces quelques propos à I'attention du ministre. Je pense que c est une objection de fond que nous avons à ce que cet article demeure. Cela n'a rien à voir avec l'opposition que nous menons contre le projet, cela sadresse strictement à la cohérence du projet de loi et j'aurais une motion, à moins que le ministre ne réagisse maintenant ou dise: On va y penser. Je sais que ce n est pas lui qui a écrit le projet de loi, ce sont les conseillers juridiques, sûrement, qui I'ont conseillé. A ce moment-là, on pourrait suspendre.

Je pense que c'est un problème fondamental qui devrait être réglé par le retrait, ni plus ni moins, de I'article 3.

M. Bérubé: M. le Président, concernant cet article, précisément, je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys a parfaitement raison. Il s agit évidemment d'un article, comme il le reconnaît d'ailleurs, qui existe dans des lois qui datent de 1975, même d'avant. Il s'agit là d une approche juridique qui est en vigueur au niveau de la législation déléguée du gouvernement du Québec, sur laquelle, malheureusement, ma formation d ingénieur ne me permet pas de commenter comme telle, si ce n est de comprendre le sens général de I'article, mais non d entrer dans un débat absolument technique. Donc, je n'aurais absolument aucune objection à ce que nous retardions, nous passions à I'article suivant, et qu on puisse convoquer peut-être Me Rioux, de la législation, ou un autre légiste du gouvernement, puisque ce n est même pas au niveau du ministère que cette loi a été préparée, du moins dans sa forme finale, et nous pourrions avoir un avis purement technique et juridique sur la composition, sur I'organisation de cet article et voir dans quelle mesure il répond peut-être aux objections de I'Opposition, ou qu il répond même aux objectifs du gouvernement.

Je pense que sur cette question, personnellement, je serais sûrement très mal venu de vouloir le commenter. M. le Président.

M. Brochu: Je proposerais. M. le Président...

M. Lalonde: Avant que le ministre n aille plus loin...

M. Brochu: ... de I article...

M. Bérubé: C est ce que j allais faire.

M. Lalonde: Avant que le ministre n aille plus loin. Je ne suggère pas que Me Rioux comparaisse devant la commission, mais je suggère que le ministre consulte les conseillers juridiques. S'il croit qu il serait plus à I'aise de se faire accompagner

par un conseiller juridique lorsqu'on abordera cet article, c est libre a lui.

M. Bérubé: Je proposerais une motion à I effet qu'on suspende I examen de I'article 3 qui semble faire l'objet de discussions, et que I on passe a I'article suivant.

M. Lalonde: Adopté, M. le Président. Objets de la société

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'appelle I article 4. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, on aborde l'article qui a été mentionné à plusieurs reprises comme étant une étape particulière dans I examen de ce projet de loi. Si I on se souvient, quelques motions préliminaires n avaient pas été reçues, en particulier à cause de leur caractère prématuré et on avait indiqué, en particulier, quant à certaines de ces motions, que ce serait à l'article 4 qu elles devraient être présentées.

Je n'ai pas en mémoire la liste de toutes ces motions. Je sais, entre autres, que celle concernant les études juridiques en est une et qu'un président qui siégeait là à ce moment, je ne sais pas si c était le député de Jonquière...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C était le député de Drummond.

M. Lalonde: Le député de Drummond avait indiqué que si elle était présentée à larticle 4, elle serait parfaitement recevable. Il y a aussi la motion qui invitait le ministre des Richesses naturelles à distribuer aux membres et intervenants de cette commission, l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat de la Société Asbestos Limitée, tel que decide par le gouvernement.

Je fais une parenthèse ici, M. le Président. Je ne sais pas si celle-ci a déjà été présentée, il faudrait que je vérifie. Peut-être qu on pourrait vérifier dans les galées ou suspendre une minute ou deux pour me laisser...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En ce qui concerne la dernière, je pense que je I avais déclarée irrecevable parce que prématurée. C était relativement aux documents d achat pour...

M. Lalonde: Oui. Je la présente à nouveau, M. le Président; je le fais sans préambule: Que cette commission invite le ministre des Richesses naturelles à distribuer, avant le début de l'étude de I article 4 du projet de loi no 70, aux membres et intervenants de cette commission, revaluation du coût et le plan de financement de I achat de la Société Asbestos Limitée, tel que décidé par le gouvernement.

Une Voix: On va le faire distribuer.

M. Raynauld: M. le Président, j'ai une note que j avais prise ici à propos de cette motion qui vient d'être présentée. J'ai inscrit ici: Renvoyer à l'article 4. Je suis à peu près convaincu que c'est celle dont on parlait.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est cela. A ce moment-là, elle demandait un dépôt. J avais suggéré également qu'on le distribue à l'article 4.

M. Raynauld: C'est que ce n'était pas vous qui étiez président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Pour celle-là, oui. Je me le rappelle.

M. Lalonde: Pour les études juridiques.

M. Raynauld: Ici, j'avais inscrit en dessous: Renvoyer à I'article 4.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, je la déclare recevable.

M. Raynauld: Cela va.

M. Grégoire: M. le Président, on n'a pas de copie et vous la déclarez recevable. On n'a pas discuté sur la recevabilité.

M. Lalonde: M. le Président, je m'excuse, mon assistant...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne permets pas de discussion sur la recevabilité, je la déclare recevable.

M. Grégoire: On n'a même pas de copie pour en juger.

M. Lalonde: M. le Président, quant aux copies...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cette motion, pour le bénéfice des membres de la commission, a été présentée au tout début de la commission parlementaire, je me rappelle. Je me rappelle même de ma décision à ce moment-là, puisqu'elle n avait aucunement rapport à l'organisation matérielle de nos travaux, mais qu'au contraire, elle était reliée intimement à l'article 4. Je l'avais déclarée irrecevable parce que prématurée.

D'autre part, j'avais invité I'Opposition officielle à enlever le mot "déposer " pour qu'on parle de distribution. Je pense qu'il n'est pas question de discuter sur la recevabilité lorsque j'ai déjà manifesté, au préalable, l'intention de la déclarer recevable.

M. Forget: Je vois qu on est à faire la distribution. J'aimerias...

M. Grégoire: On a la copie. Seulement une seconde. Je veux bien croire qu'à première vue, elle peut vous sembler recevable. Je voudrais...

M. Forget: Mais la décision est rendue.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non seulement elle peut me sembler, mais elle me semble et elle est recevable.

M. Grégoire: Je voudrais soulever une question de règlement.

M. Forget: Est-ce pour contester la décision du président?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, M. le député de Saint-Laurent! Du moment que vous n en ferez pas un appel de la décision du président.

M. Grégoire: Non, je ne veux pas en appeler de votre décision, mais je cherche — seulement une seconde — le numéro de l'article. C est le 176.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si vous me redonniez mon règlement, je pourrais vérifier.

M. Grégoire: C est I article 176 où il est dit: "Le gouvernement n est pas obligé de produire des documents s'il le juge contraire à l'intérêt public..."

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac, je vous arrête immédiatement. La motion est une invitation a distribuer... Je suis au courant de cet article. Le gouvernement pourra adopter ou défaire la motion; s il adopte la motion, il pourra même ne pas donner suite à cette motion et ne pas distribuer. C est un voeu, une demande qui n a aucune force de coercition. C'est une incitation, une demande, une invitation.

M. Forget: Une prière.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une prière. Le gouvernement demeure toujours libre de dire qu'en raison de l'intérêt public, il déclare qu il n'a pas à distribuer ce document, etc.

M. Grégoire: Je me soumets à votre décision. Ce que je demanderais, par exemple... Normalement, les présidents, souvent ou par tradition, comme celui qui vous a précédé ce matin, invitent les députés à parler sur la recevabilité. Je crois que cela a toujours été de bonne grâce de la part d'un président de commission de le faire.

M. Forget: S'il a besoin d être éclairé.

M. Grégoire: Je vous demanderais s il y a une directive à ce sujet.

M. Raynauld: La décision est rendue.

M. Grégoire: Est-ce encore dans votre intention d'accepter les arguments que peuvent soulever des députés sur la recevabilité?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Lorsque j'aurai des doutes, oui; mais, lorsque je n ai aucun doute, non.

M. Grégoire: Si un député a des doutes, s il voulait vous les soumettre, ça ne compte pas.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le député peut avoir des doutes, mais c'est la présidence qui a le pouvoir décisionnel.

M. Grégoire: Je ne veux pas enlever à la présidence le pouvoir décisionnel.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Si la présidence n'a pas de doute... Ecoutez un peu, M. le député de Frontenac...

M. Grégoire: M. le Président, est-ce que le député a encore le droit de dire son opinion sur la recevabilité?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le député en a encore le droit, mais le président est là pour prendre des décisions.

M. Grégoire: Je ne nie pas cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'ai déjà, à loccasion, demandé des avis qui ont d'ailleurs été très pertinents à maintes occasions, mais, lorsqu il est évident à la présidence que la motion est recevable, je ne vois pas pour quelle raison je demanderais à tous les partis politiques d apporter des arguments pendant dix minutes, alors que ma décision est déjà prise. Il faut au moins que j'aie la franchise de vous dire que ma décision est prise dans certains cas.

C'est d ailleurs la politique que j'ai suivie depuis un an et trois mois.

M. Lalonde: M. le Président, sur la question de directive, je ne voudrais pas que les propos du député de Frontenac semblent suggérer que vous n avez pas consulté les députés, lorsque cette motion a été présentée la première fois. Je pense que la consultation a été faite.

M. Grégoire: C'est la consultation qui a été faite qui...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous me demandiez si j'avais l'intention, chaque fois, de... Je n'ai pas I'intention, nécessairement chaque fois, de demander d avis, sauf lorsque j'ai manifestement des doutes.

D'ailleurs, ce ne sont pas tous les présidents qui, à chaque motion, permettent à tous les partis... A I occasion, les présidents le font. A d'autres occasions, ils ne le font pas. Cela dépend du genre de motion.

M. Forget: On peut y aller?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

(17 h 10)

M. Forget: Le but de la motion présentée est fort simple. C'est d'avoir des éclaircissements sur le coût de l'achat de la société Asbestos, tel que décidé par le gouvernement. Evidemment, une fois le coût d'achat décidé, il y a un plan de financement, un programme de financement qui doit être également mis sur pied. Cette demande, nous l'avons formulée lors de la deuxième lecture. Nous l'avons formulée également, de façon préliminaire et partielle, lors des remarques préliminaires formulées en commission parlementaire. Dans les deux cas, elle s'est heurtée à une fin de non-recevoir de la part du ministre.

Il est malgré tout normal et absolument coutumier qu'un gouvernement, qui fait l'acquisition d'une société commerciale, industrielle ou minière privée, procède pour ses propres fins à une évaluation du coût. Il serait tout aussi normal et tout aussi habituel de rendre publique cette évaluation au moment où la décision prise par le gouvernement est annoncée. Idéalement, il ne devrait pas y avoir lieu de formuler cette demande que nous formulons dans cette motion, dans ce projet de motion, puisque, de son propre mouvement, le ministre ou le premier ministre aurait dû, lors de sa conférence de presse à Thetford Mines, le 21 octobre dernier, mettre cartes sur table au moment de cette annonce.

On sait très bien qu'il y a eu un précédent pour un achat de sociétés privées par le gouvernement du Québec. Il y a eu, et je pense qu'on s'en souvient tous, pas pour y avoir participé — mais pour en avoir été les témoins intéressés à l'époque... Il s agit de l'acquisition des sociétés privées productrices d électricité en 1962 et 1963. A ce moment, contrairement à aujourd'hui, le gouvernement avait annoncé ses couleurs. Il avait, lors de sa conférence de presse, annoncé le prix auquel il se porterait acquéreur des actions de la Shawinigan Power, de la Quebec Power, de la Gatineau Power. Il l'avait fait avec la ferme intention de ne pas dépasser les montants indiqués, de ne pas les dépasser substantiellement, du moins. Effectivement, quelques mois plus tard, l'achat se réalisait à ces conditions.

Nous avons eu accès, bien sûr, aux études préliminaires qui ont amené le premier ministre de l'époque à prendre cette voie, à emprunter cette voie pour procéder à l'acquisition des sociétés productrices d'électricité. Assez curieusement, ces études préliminaires, du moins certaines d'entre elles, avaient pour auteur l'actuel ministre des Finances, M. Jacques Parizeau, lequel s'était livré, sur la base des rapports financiers de ces sociétés qui étaient publics, à une analyse de la valeur aux livres des sociétés en question. Il avait déterminé un montant qui, effectivement, s'était avéré réaliste pour le prix d'achat de ces actions.

Il n'y a rien dans la situation actuelle du gouvernement face à la société Asbestos qui soit ma- tériellement différent de la situation à laquelle était confrontée le gouvernement en 1962 face aux sociétés productrices d'électricité. En effet, nous disposons, aussi dans ce cas, de rapports financiers qui nous permettent d'évaluer la valeur dépréciée des actifs, la rentabilité des opérations sur un ensemble d'années, d'établir à partir de ces chiffres des projections. Nous connaissons aussi, ou nous pouvons connaître, du moins lorsque le gouvernement fait de telles études, tous les autres renseignements pertinents à l'établissement d'une valeur réaliste. Il y a, par exemple, la valeur des réclamations des travailleurs souffrant d'amiantose qui est en voie d'être liquidée, avec la participation, d'ailleurs, du gouvernement. Donc, il s'agit de chiffres que le gouvernement connaît ou peut connaître sans difficulté. Nous pouvons connaître également, puisqu'il y a eu des constructions récentes et que de toute manière une expertise par une maison d'ingénierie spécialisée dans l'équipement minier pourrait facilement le révéler, quel est le coût probable estimatif des installations nouvelles qui pourraient être requises dans un avenir prévisible. Nous connaissons le chiffre des réserves prouvées, des réserves probables, de même que les réserves possibles, puisque ces renseignements sont fournis au ministère des Richesses naturelles par toutes les compagnies minières. Donc, nous pouvons placer un prix également sur la valeur de ces réserves; un prix qui reflète la contribution au revenu futur que la société et le gouvernement peuvent escompter de l'exploitation de ces réserves.

Il n'y a pas d élément inconnu. Il y a également la connaissance des territoires qui sont la propriété de la Société Asbestos, territoires qui sont fort étendus dans la région de Thetford Mines et qui ont, en plus de leur valeur intrinsèque — si l'on peut dire — quant à la teneur en amiante du sous-sol qu'ils peuvent couvrir, une valeur additionnelle. C'est-à-dire que leur position stratégique sur le territoire alentour des autres mines, des mines autres que celles de la Société Asbestos, détermine une situation, un avantage, une certaine supériorité de la Société Asbestos quant à la possibilité de jouer un rôle plus ou moins déterminant, mais un rôle, de toute façon, quelconque dans l'évolution des exploitations minières de ces autres sociétés. Une valeur peut être placée sur ces fonds immobiliers et la valeur serait les avantages additionnels pour la Société Asbestos et pour le gouvernement qui découleraient de ces arrangements ou de cette planification concertée de toutes les mines de la région.

Il est également possible d'évaluer— D'ailleurs les municipalités l'ont fait — le coût des transformations, des transplantations de quartiers et de la contribution que les compagnies seraient appelées à y faire à ce titre. Donc, il n'y a pas de mystère dans tout cela; il y a des éléments connus ou facilement connaissables et on peut se demander pourquoi on procède aussi secrètement qu'on a choisi de le faire, contrairement aux précédents créés lors de la nationalisation des compagnies productrices d'électricité.

Dans I'un et I'autre cas, nous avons des situations semblables, mais des attitudes gouvernementales très différentes. Une attitude gouvernementale qui, dans le cas de la nationalisation de I électricité, n a pas provoqué pour les détenteurs des actions de ces sociétés un profit de capital important. Le prix de ces actions a varié de quelques cents entre le moment de I'annonce par le gouvernement à l'automne, je crois, 1962 et le rachat éventuel au printemps 1963; il a varié de quelques cents sur les marchés boursiers. Il en a résulté des profits ou des pertes insignifiants pour les détenteurs de l'époque.

La façon utilisée par le gouvernement pour faire son annonce a, dans le cas de la Société Asbestos, au contraire conduit à une plus-value très substantielle des actions de la Société Asbestos. Donc, un gain en capital considérable non seulement pour I'actionnaire majoritaire, à supposer que la valeur actuelle de ces actions sur les marchés boursiers corresponde à la valeur pour laquelle, éventuellement, elles seront vendues au gouvernement. Ces plus-values ont également résulté en un profit de capital pour tous les autres détenteurs minoritaires, les quelque 45% d'autres actions détenues par un grand nombre de groupes, d individus, d'institutions financières. Pour ces individus, ces espèces de spectateurs innocents et impuissants, elles ont résulté en des possibilités de pertes si jamais la valeur d'achat de ces actions par le gouvernement était inférieure au prix actuel des cours, au niveau actuel des cours sur les marchés boursiers. Ce qui veut dire que I'opération engagée par le gouvernement aurait pu résulter, pour certaines personnes en des pertes financières; elle pourrait éventuellement se solder par des pertes financières pour des gens qui ne sont pas des actionnaires majoritaires, qui ne sont donc pas dans la position de pouvoir d aucune façon négocier le prix auquel ils vendront les actions, mais qu'ils devront nécessairement accepter, et cela est en vertu des lois de prise en charge de sociétés, le prix qui sera accepté lui-même par la General Dynamics, l'actionnaire majoritaire.

On se demande un peu pourquoi on a procédé de cette façon, pourquoi on a procédé en particulier de façon à faire subir un bond important à la valeur de ces actions. Le trésor public ne peut certainement pas s'en trouver avantagé, à moins que le gouvernement ne soit persuadé, de par des études qu'il n'a pas publiées, mais qu il pourrait fort bien avoir faites, que le prix du marché, tel qu'il s'établissait l'été dernier, était de loin inférieur à ce qu'il serait décent de payer et qu'avant même d'entreprendre les négociations, et pour éviter I'odieux que la négociation se fasse à un prix qui soit trop loin de la valeur du marché en l'été 1977, qu'il fallait de toute manière, provoquer plus ou moins artificiellement une hausse des cours boursiers de manière que le gouvernement ne subisse pas l'odieux de cette plus-value, mais quon I'attribue, au contraire, à des mouvements spéculatifs généraux attribuables à une variété de causes qui sont d'autant plus difficiles à retracer que la période qui s'écoulera entre I'annonce et le moment de la transaction finale sera longue, sera plus étendue.

En tout état de cause, il s'agit là d une opération inquiétante parce que, si elle est amorcée de cette façon, on ne sait pas encore trop bien comment elle va se terminer. En effet, il ne faut pas être devin pour comprendre que, lorsqu'à la fin de mai ou au début de juin, selon les informations données hier à I Assemblée nationale par le ministre des Finances la négociation s'ouvrira, il risque fort d'y avoir des fuites. Il y a toujours des fuites, il y a toujours des informations — qui sont parfois voulues — qui filtrent dans la presse, et on risque de voir une nouvelle flambée de spéculation à I'occasion de ces fuites.

En effet, I'une des informations qui va peut-être filtrer — et là-dessus, dans le fond, on ne pourrait même pas blâmer les principaux intéressés— c'est celle que les évaluations auxquelles la société General Dynamics a procédé démontrent que la valeur nette de ces actions doit se situer à un niveau encore supérieur au cours actuel des actions de la société Asbestos. Dans la région de l'amiante, où je me suis rendu il y a un certain temps, on a cité des chiffres assez inquiétants, inquiétants pour le trésor public. Si jamais la société General Dynamics réussissait à étayer suffisamment son dossier, on a parlé d une demande initiale de la société General Dynamics qui pourrait dépasser $100 l'action.

Je ne veux certainement pas prendre à mon compte un chiffre comme celui-là, mais, de toute façon cest un secret de polichinelle, puisque les gens le mentionnent, c'est un chiffre qui est chuchoté, ce peut être une position de pure négociation de la part de la société General Dynamics et ne correspondre à rien de sérieux. Il reste que si des bruits comme ceux-là se répandent; certaines personnes qui sont actives sur le marché financier voudront peut-être prendre le risque d un coup de bourse important parce que, dans le fond, regardons un peu la situation qui sera celle des spéculateurs au moment où les négociations sentre-prendront, il sera probablement assez facile aussi de découvrir le prix plancher. Ce prix plancher correspondra à l'évaluation gouvernementale. Un spéculateur sera donc en face d une situation où il sera assuré de voir le prix de I'action ne pas fléchir en deçà de loffre initiale du gouvernement, il y aura un minimum qui sera acquis, puisqu'il y a une volonté ferme d'acheter, au moins à ce prix. Il y aura une possibilité que, au hasard de la négociation, le prix puisse grimper pour rejoindre presque ou même totalement le prix demandé par la General Dynamics. (17 h 30)

II est impossible de savoir, à ce moment-ci, I'écart qui peut exister entre loffre minimale du gouvernement et la demande minimale de General Dynamics, mais l'écart, comme je l'ai dit tout à I heure, pourrait être important. Il est clair que la Société General Dynamics, contrairement au gouvernement, ne sera peut-être pas disposée à déduire de la valeur nette de la société, toutes les réclamations et tous les investissements futurs qui

ont été mentionnés par le ministre comme devant être déduits de la valeur de ses actions. Ce qui veut dire qu'il y a une probabilité assez forte que l'écart sera important. Devant un tel écart, il y a des possibilités de gains substantiels si le plancher devait se situer aux alentours de $40, ce qui correspond à la valeur actuelle des marchés. N'importe qui peut acheter sans risque de perdre puisqu'il pourra un jour revendre au gouvernement à un prix analogue au prix auquel il achète et il prend le risque de faire un gain important si jamais la Société General Dynamics est suffisamment persuasive ou si le gouvernement hésite à passer aux actes relativement à l'expropriation, avec toutes les conséquences que cela implique sur les marchés internationaux pour les emprunts de l'Hydro-Québec, etc.

Donc, il y a là une situation extrêmement propice à la spéculation et le ministre des Finances, dans la réponse qu'il a donnée hier à ma question, n'a même pas voulu préciser sa stratégie. Je lui offrais quand même l'opportunité extraordinaire de nous dire: Ecoutez, l'offre que l'on va faire, ce n'est pas une offre pour fins de négociations, c'est une offre sérieuse et finale. Tout ce que nous voudrons faire par les négociations, c'est peut-être corriger des erreurs de calcul, mais essentiellement venir à bout de la résistance de General Dynamics et les persuader qu'elle est aussi bien de nous vendre de gré à gré, mais à ce prix-là plutôt que de se voir expropriée.

L'alternative, comme je le suggérais au ministre des Finances c'est de dire essentiellement: Le prix sera négociable et, à ce moment-là, toutes les possibilités sont ouvertes. Il n'a pas fait d'option. Il ne nous a pas indiqué son intention d'adhérer à un prix tel qu'établi par le gouvernement. Il a donc, par cette réponse évasive, ouvert la porte à la spéculation et la spéculation, comme je l'ai dit, dans des circonstances extrêmement propices pour le spéculateur mais extrêmement préjudiciables, du moins en puissance, pour le trésor public.

Je ne comprends pas la réticence du gouvernement à ne pas nous donner ses chiffres, à ne pas publier ses évaluations. Je ne vois pas en quoi sa position de négociation peut être affaiblie par une telle publicité qu'il donnerait à sa propre évaluation. Je ne comprends pas, en deuxième lieu, la réticence du ministre des Finances, qui est le principal intéressé dans cette négociation, à laisser ouverte la possibilité que le prix demeure une quantité essentiellement négociable plutôt que d'indiquer l'intention ferme du gouvernement de s'en tenir à un chiffre fixe.

D'autant plus que le ministre des Finances, ayant été le conseiller financier de gouvernements antérieurs, en particulier lors de la nationalisation de l'Hydro-Québec, doit se souvenir, comme nous nous souvenons nous-mêmes, que c est cette stratégie très rigide qu'avait adoptée le gouvernement Lesage de l'époque en disant: Voici notre prix. Voici le prix auquel nous achetons. Advienne que pourra. On prend une attitude, à l'heure actuelle, qui diverge de cela et il n'y a pas de raison d'intérêt public qui, quant à moi, me vient à l'esprit pour expliquer une telle stratégie, une telle attitude de la part du gouvernement.

Je pense que I'on prend des risques énormes parce qu'encore une fois, M. le Président, le prix véritable, le prix juste pour un bien, quel qu'il soit, c'est une expression empruntée de la théorie de l'évaluation foncière, c'est le prix pour un bien qui est vendu par quelqu'un qui n'est pas obligé de vendre et que paie quelqu'un qui n'est pas obligé d'acheter. A ce moment-là, si l'on veut, c'est une fiction. On essaie de se situer dans la position de deux personnes qui transigent entre elles librement, sans contraintes. Or, ce n'est pas la situation dans laquelle le gouvernement se retrouve. Il se retrouve, par ses orientations politiques, par ses déclarations, ses conférences de presse, devant l'obligation d'acheter ou, à défaut d'acheter, de perdre la face. Donc, il est obligé d'acheter. La Société General Dynamics n'est pas obligée de vendre à moins d être face à une loi d expropriation, ce qui n'est pas le cas dans le moment. On a donc les conditions les moins bonnes pour trouver le juste prix. On le fait avec une stratégie qui a des trous importants, qui laisse des portes ouvertes importantes à la spéculation.

Pour ces raisons, M. le Président, je pense qu'il serait urgent que le ministre prenne occasion de cet amendement et saisisse l'occasion, la perche qu'on lui tend pour éviter au trésor public de courir les aventures qu'il se destine à lui faire courir.

Le Président (M. Laplante): Le député de Richmond.

M. Brochu: Merci, M. le Président. J'aimerais évoquer certains arguments qui me font militer en faveur de l'adoption de cette motion que je trouve tout à fait justifiée, qui s'inscrit exactement dans le cadre des discussions préalables que nous avons eues avant d'aborder l'article 1 du projet de loi. Je vous rappellerai, M. le Président, qu'à ce moment-là nous avions voulu demander au ministre toutes les informations pertinentes que nous jugions nécessaires pour aborder l'étude du projet de loi. Evidemment, pour des raisons techniques, M. le Président, la motion qui avait été présentée dans les mêmes termes qu'aujourd'hui avait été reportée, selon votre décision, puisqu'elle se rapportait davantage à l'article 4, du présent projet de loi.

Il n'en demeure pas moins, M. le Président, que, fondamentalement, les mêmes raisons qui militaient en faveur de l'obtention de toutes les données pertinentes possibles demeurent aujourd hui. Nous pouvons nous appuyer encore sur ces mêmes motifs pour demander au ministre, au gouvernement, de bien vouloir, maintenant, nous faire connaître exactement les bases sur lesquelles il s'est appuyé pour faire le choix politique du moyen qu'il a choisi pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés.

Un projet comme celui de la loi 70 pour la création d'une Société nationale de l'amiante implique des déboursés énormes. On voit, dans un premier temps, l'engloutissement d'une somme de

$250 millions. Comme j'ai eu I occasion de le mentionner à différentes reprises, il est à prévoir, immédiatement, que les sommes à investir dans le projet et dans les autres projets qui viendront par la suite seront beaucoup plus élevées que ce qui est même prévisible actuellement.

C est une autre raison qui milite en faveur du dépôt, par le ministre, de son évaluation des coûts du projet que l'Assemblée nationale lui vote... C est non seulement un souhait de voir le ministre faire circuler un document dans ce sens, je pense que cela va de soi. A mon sens, sa première responsabilité est de faire connaître aux membres de cette commission parlementaire, et aux citoyens du Québec par la même occasion, ce sur quoi il s'est appuyé et ce qu'il va exiger comme coûts aux citoyens du Québec pour son projet.

Il y a des choses que Ion peut prévoir actuellement, choses en quelque sorte statiques, concernant les coûts. Par contre, il y a de nombreux secteurs qui demeurent dans ce que j'ai appelé les zones grises, qui demeurent dans des zones de fluctuation énorme, sur lesquelles on peut se poser de nombreuses questions. Qu'il suffise de souligner laugmentation subite des réserves qu'on a pu constater dans les mines de l'Asbestos Corporation depuis l'annonce, par le gouvernement, de sa volonté d'acquérir, de gré à gré, I'entreprise ou encore de la nationaliser, si le premier pas ne pouvait être réalisé.

Donc, on a déjà là un élément sur lequel on peut s appuyer pour dire que le projet du gouvernement, à plusieurs égards, nous place devant une situation très floue. On ne peut vraiment pas prédire les coûts réels de toute I'opération. Cela devient d autant plus important que le ministre nous dise sur quelle évaluation il s est appuyé pour dire que le moyen qu on choisit est le meilleur et le plus rentable.

Je pense qu'on est en droit de I'exiger. D'ailleurs, c est tout à fait compréhensible si I'entreprise Asbestos Corporation voit maintenant ie jour où elle pourra vendre ses actifs, ses entreprises ici, de gré à gré ou encore être nationalisée. Evidemment, pour elle, il est avantageux de faire valoir ses points de vue. Il est avantageux de dire comme les réserves qui lui restent sont grandes. D ailleurs, elle a déjà manifesté I ampleur de ses réserves. Elles sont beaucoup plus grandes maintenant quavant I'annonce, par le gouvernement, de son intention d acheter cette corporation.

Cependant, par la même occasion, l'entreprise Asbestos Corporation n'a pas cru bon de souligner au ministre l'état des usines qu elle conserve encore, pour lesquelles on devra engloutir des sommes énormes, mais dont on peut prévoir à peine un ordre de grandeur général, mais où on n'a pas de précisions vraiment valables sur lesquelles s'appuyer pour dire aux Québécois: L'achat par le gouvernement, ou l'acquisition de gré à gré, ou la nationalisation d'Asbestos Corporation va vous coûter tant. Et la transformation de I'usine, pour la rendre salubre, va vous coûter tant.

On peut prévoir certains ordres de grandeur; mais encore là, on sait que lorsque le gouverne- ment s engage dans des projets comme ceux-là, au bout de la ligne, cela coûte toujours un peu, et même souventefois pas mal plus cher que prévu au début.

Je pense que si le ministre, le gouvernement était sérieux dans la présentation du projet de loi, il a sûrement en main un plan assez étoffé qui peut lui fournir des données assez précises, sur lesquelles il s'est sûrement appuyé pour nous présenter le projet de loi que nous avons devant nous. Sinon, je devrais conclure que ce n est pas sérieux et qu on nous demande à ce chapitre du coût que cela va coûter au Québécois, de voter au gouvernement un chèque en blanc. Là, on peut avoir d énormes réticences. C'est notre devoir d allumer le signal d'alarme et dire au gouvernement: Vous n'avez pas le droit d'impliquer les citoyens du Québec dans une aventure aussi nébuleuse, où on n a pas suffisamment de données précises.

En outre, M. le Président, je vous ai déjà fait part ici qu'à cause du choix du moyen du gouvernement, soit celui d'acheter une des entreprises, on sait qu'au lendemain de l'application de cette loi — si jamais le gouvernement l'applique, si vraiment c est sa volonté de l'appliquer—ou de lacquisition de l'Asbestos Corporation, le gouvernement du Québec va se retrouver, étant seulement un des producteurs d amiante, dans une situation de forte concurrence avec les autres entreprises déjà existantes.

J'avais prévenu le gouvernement. On pourra voir alors se dérouler le scénario suivant. A mesure que les mois et les années vont passer, le gouvernement va peut-être devoir, pour survivre avec son entreprise, augmenter son appétit et reluquer, commencer à regarder du coin de I'oeil les autres entreprises, et vouloir se porter acquéreur des autres producteurs d'amiante au Québec en disant: On a fait un premier pas, on a acquis Asbestos Corporation, mais ce n est pas rentable. On s'aperçoit, après nous être lancés dans cette entreprise, que ce n est pas rentable, parce que nous ne sommes qu'un des producteurs. Nous sommes assis à la table des producteurs, selon le voeu du premier ministre, dans ce club sélect des producteurs d'amiante, mais il nous faudrait vraiment aller un peu plus loin. Là, on n'a pas tous les pouvoirs qu'il nous faut pour arriver à rendre rentable cet emblème de la possession d'une mine d amiante au Québec.

Le gouvernement du Québec peut se retourner vers les autres entreprises, revenir devant l'Assemblée nationale et nous dire: Ecoutez, ça va être bon. On vous le garantit. Le premier coup, on a essayé, on pensait qu'on était correct. On s est rendu compte que l'Opposition avait raison, à ce moment-là, et que ce n était pas tout à fait rentable. Mais cela va l'être, on vous le garantit maintenant, parce qu'on va avoir le monopole, on va acheter tous les autres. Ce ne sera pas un problème.

A ce moment-là encore, on se lance dans une autre aventure, dont l'ordre de grandeur est inconnu jusqu à maintenant, mais qui pourrait se chiffrer, on le voit facilement, par des sommes as-

tronomiques qui seront toujours puisées, en tout ou en partie, dans les goussets de nos concitoyens québécois. Tout au moins devront-ils faire les frais de cette dette à long terme. Donc, ce serait le temps que le ministre dépose son plan et nous dise jusqu'où ils veut aller réellement, qu'il nous donne maintenant des garanties, à savoir sur quoi il s'est basé pour dire que son entreprise de vouloir acheter une des mines va lui garantir une rentabilité. Et pour cela, lorsqu'on parle de rentabilité, évidemment, il faut évaluer nos coûts, combien cela nous coûte pour acheter l'entreprise. Ce sera à peu près combien? Evidemment, je sais qu'il y a des négociations en cours. Cela peut fluctuer et je pense que cela va fluctuer encore.

Par contre, le ministre peut-il nous fournir des évaluations sur l'achat d'équipement qui existe à Asbestos Corporation? Le ministre peut-il nous donner des indications, par exemple, sur l'âge de l'équipement qui existe dans les usines d'Asbestos Corporation? Là aussi, il y a toute une question de l'évaluation des coûts sur laquelle on aimerait avoir plus de précisions, parce que j'imagine que le ministre est un homme d'affaires averti. Lorsqu'il s'approche d'une entreprise comme cela pour l'acheter...

M. Lalonde: ...

M. Brochu: ... il a sûrement fait le tour, pas encore le tour du propriétaire.

M. Godin: II rêve à une Opposition qui fonctionne.

M. Lalonde: C est évident que vous rêvez, en couleur à part cela, en trois dimensions.

M. Godin: On rêve à une Opposition qui fonctionne, mais qui ne met pas le frein.

M. Brochu: Je reviendrai justement à la question des freins tantôt. J'avais un élément à vous souligner là-dessus.

Une Voix: On va renvoyer faire un voyage à... (17 h 45)

M. Brochu: J'étais à dire que le ministre n'a peut-être pas encore fait ce qu'on appelle le tour du propriétaire pour ce qui concerne Asbestos Corporation. Il n'a peut-être pas visité toutes les usines, les installations, etc. Je comprends qu'il rêve peut-être d'y aller un jour, qu'il se voit déjà entrer à Asbestos Corporation avec toute une armée de fonctionnaires devant lui, avec des balais spéciaux, à cause de la poussière qu'il y a là. On dit que c'est la mine la plus empoussiérée qu'il n'y a pas. Il va falloir, à ce moment-là, mettre en place tout un mécanisme spécial pour permettre l'entrée du ministre dans ces catacombes que constituent les mines de I'Asbestos Corporation...

M. Bérubé: A ciel ouvert.

M. Brochu: Même si le ministre n'a pas fait le tour du propriétaire, peut-être aurait-il dû faire le tour au moins de la mine qu'il veut acquérir. J'aurais même souhaité, lorsque le ministre est venu à Asbestos avec son collègue de Frontenac, j'aurais peut-être aimé que le ministre jette un coup d'oeil du côté de la mine. Il a frôlé le trou.

M. Godin: C'est la "minote ".

M. Brochu: II est resté le long de la clôture. Il ne s'est pas rendu à la mine. J'aurais aimé que le ministre aille voir l'installation qui existe à Asbestos, chez la Canadian Johns-Manville. Il aurait pu faire des comparaisons entre les installations de la mine Johns-Manville et celles qui existent à Asbestos Corporation. Je pense que la comparaison est assez nette et que le ministre aurait eu grand intérêt à voir ce qui se fait dans notre région de ce côté.

Une Voix: ... peut-être acheter les deux.

M. Brochu: Oui, justement, M. le Président, je suis content que les députés soulèvent ce point, la volonté d'acheter les deux.

M. Grégoire: Arrêtez si vous n'avez plus rien à dire.

M. Brochu: Ce que je disais tantôt, c'est qu'à un moment donné... L'appétit vient en mangeant. On commence déjà à en parler. J'ai à peine parlé que le gouvernement allait vouloir acheter toutes les autres mines, déjà, il y a deux députés qui sont plus friands de cela, et je pense qu'ils vont commencer à souffler dans l'oreille du ministre pour lui inculquer cette idée de se porter acquéreur de l'ensemble des mines d'amiante au Québec. Même, M. le Président — remarquez bien que je ne veux pas vous surprendre trop, mais je me dois de vous le dire quand même — c'est qu'il y a déjà eu — c'est indiqué ici dans un article qui a paru dans le Montréal Matin, le 22 février 1977 —

M. Godin: Montréal Matin?

M. Brochu: ... c'est inscrit qu'il y a déjà eu des négociations.

M. Godin: Ce n'est pas jeune, c'est passablement vieux cela.

M. Brochu: "Des négociations ont déjà été entreprises entre le gouvernement et le premier producteur québécois d'amiante, la Canadian Johns-Manville". C'est donc dire qu'à ce moment, dans l'optique de ce que vous dites — l'article est ici — dans l'optique de ce que les députés viennent de soulever, le gouvernement a jeté un petit coup d'oeil, à un moment donné, à Asbestos, pour voir ce qui se faisait. Il a rencontré les gens de l'entreprise. Par après, il est allé voir ailleurs. Il a fait un peu de "window shopping ". Après tout, quand on s'achète une mine d'amiante, il faut aller voir un peu.

M. Lalonde: D'autant plus que cela coûte quelques dizaines de millions.

M. Brochu: Oui, c'est justement, mais c est I'argent des Québécois. C'est pour vous dire qu'il est allé voir, mais bien délicatement. Après avoir fait un petit tour d'horizon comme cela, j'imagine qu'il a certainement des données à nous fournir pour nous dire: Ecoutez, la décision qu'on a prise, c'est quelque chose de vraiment rationnel. C est quelque chose qui s'appuie sur des données quantifiables, qui s appuie sur des choses logiques. Je pense que si j'étais le gouvernement, à ce moment, je serais fier de pouvoir déposer ces choses, pour dire: Maintenant, l'Opposition, vous n avez plus raison de critiquer ou d apporter des critiques négatives en ce qui concerne soit la rentabilité ou l'évaluation. La voici, l'évaluation des coûts! Voici à peu près ce que cela va nous coûter, et on a comparé, puisqu'on a fait du "window shopping". Comme cela, on doit être en mesure de nous donner certains barèmes de comparaison qui peuvent nous indiquer certaines choses.

M. le Président, sur cette question de I'appétit éventuel du gouvernement, parce qu'il va devoir, à ce moment, aller plus loin, s'il veut que son entreprise soit rentable, j'aimerais vous rappeler ici un article qui a paru dans le Devoir du 9 mars 1978. Il donne d'autres possibilités et il laisse des portes ouvertes au gouvernement en cette matière et qui peuvent indiquer là où ses intérêts et ses appétits peuvent également se porter. Pour le grand intérêt du député de Frontenac et pour celui du ministre, j'aimerais lire le bout suivant, pour achever l'oeuvre si bien commencée, et je cite: "De plus, la Société de développement de la baie James — il est bon de le rappeler — a toujours le projet d'activer I'exploitation de gisements d'Abitibi Asbestos entre Amos et Joutel. La SDBJ a déjà effectué des forages pour améliorer le niveau de réserves d Abitibi et ainsi augmenter les perspectives de rentabilité. Abitibi appartient à 60% à Brinco, qui a tenté l'an dernier d'intéresser à ASARCO, via sa filiale québécoise, Lake Asbestos, au développement du projet. "Depuis, le tout a été mis en veilleuse, mais il est intéressant de noter que Brinco a conservé la gérance du projet Abitibi jusqu'en 1978. Il ne manque à Brinco — ceci est important — qu'un partenaire et des fonds. La mise en valeur du gisement d'Abitibi exigeait en 1977 des fonds de l'ordre de $300 millions pour une capacité de production annuelle de 220 000 tonnes. L'exploitation créerait un millier d emplois directs — cela devient intéressant, un millier d'emplois directs — c'est-à-dire deux fois et demie le nombre d emplois envisageables dans le secteur de la transformation d'ici cinq ans."

La SDBJ, au cours d'une entrevue avec le Devoir en février 1977, planifiait la mise en service du gisement d Amos vers 1983 ou 1984.

Il deviendrait donc évident à ce moment que dans l'optique dans laquelle le gouvernement s'embarque actuellement avec son projet de loi, du jour au lendemain, le ministre pourrait revenir et nous demander, a ce moment, des fonds supplémentaires, des fonds additionnels pour la création d'emplois, puisqu'il semblerait exister là-bas des possibilités. J'aimerais avoir des précisions lorsque le ministre pourra nous répondre à ce sujet. Ceci pour vous dire que j aimerais beaucoup — et je I'espère — que le ministre dépose ces fameuses évaluations de coût réel de première main, disons l'évaluation du coût réel du projet lui-même. Ce que je viens de vous dire, c'est ce que je crois qu'il va se passer dans l'avenir, que le gouvernement ne limitera pas à cette première étape son intervention dans le domaine de l'amiante, parce que, de la façon qu'il s'y engage, il ne pourra pas le faire, il ne pourra pas s'y limiter. Je vous dis, M. le Président, que cela va nous coûter beaucoup plus cher, énormément plus cher que prévu.

Mais dans ce qui est prévisible, dans ce qu'on a ici, dans ce que le projet de loi mentionne comme premier pas de la part du gouvernement dans le domaine de I'amiante, j'aimerais que le ministre nous dise exactement ce qui en est.

J'aimerais aussi que, dans ce plan d'évaluation — puisque cela fait partie de la réalité, on doit se préoccuper de la question de la sécurité des travailleurs et de la santé des travailleurs — le gouvernement — je pense qu'on doit être en mesure de le faire lorsqu'on achète une mine, lorsqu'on se lance dans une entreprise comme celle-là, avec tout ce que cela comporte de conséquences et d'obligations—nous précise à quel coût il va devoir supporter désormais, si tel est le cas, toute la question du paiement des amiantosés.

Il y a toute cette question qui est également comprise dans ce dossier. On sait que les mines d'amiante, malheureusement, ont entraîné plusieurs problèmes du côté de la santé. On sait que plusieurs de nos travailleurs dans la région de Black Lake, Thetford Mines et Asbestos sont aux prises avec différents problèmes de santé sérieux. On sait que bon nombre d'entre eux doivent trouver leur gagne-pain dans des formes de pensions accordées par la Commission des accidents du travail, par le biais des entreprises, pour défrayer leur subsistance à la suite des maladies contractées dans le milieu industriel.

Donc, le gouvernement aura la responsabilité de ces personnes amiantosées, qui travaillent actuellement dans les mines et qui devront laisser leur travail éventuellement, et de ceux qui sont déjà sans emploi. J'aimerais que le ministre dépose les documents, s'il y en a et j'espère qu'il y en a, sur les coûts réels que vont poser pour le gouvernement tous ces amiantosés qui sont là et qui, en réalité, font partie du coût social de l'ac-quisition de I'entreprise.

M. le Président, c'étaient les quelques remarques que je voulais faire en vous rappelant toujours que, par le passé, on a vécu certaines expériences où le gouvernement a voulu s impliquer directement au niveau de l'entreprise. Cela a été le cas concernant la question de I Hydro-Québec. On a vu de quelle façon cela a fonctionné. On a éga-

lement vu les coûts au bout du compte. Maintenant, que le gouvernement actuel veut se lancer dans I'opération amiante, dans le dossier de I amiante, avec le moyen qu'il a choisi, au lieu d aller directement à la transformation des produits, ce qui nous semble une solution immédiate plus logique... Mais comme il a choisi d'acquérir une mine, je pense qu il devrait maintenant être en mesure de déposer, de nous faire connaître les motifs réels et l'évaluation des coûts, ainsi que le plan de financement de toute cette entreprise. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Vous avez fini juste au bon moment.

M. Brochu: Time .

Le Président (M. Laplante): Au retour, la parole sera au député d'Outremont. Les travaux sont suspendus jusqu a vingt heures.

(Suspension de la séance a 17 h 56;

Reprise de la séance à 20 h 5

Le President (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, messieurs!

La parole est au député d Outremont.

M. Raynauld: Je vais passer mon droit de parole à mon collègue, étant donné qu'on a des problèmes avec l'Assemblée nationale ce soir.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous avez des problèmes avec l'Assemblée nationale? Du moment que ce n'est pas I'Assemblée nationale qui a des problèmes avec vous, M. le député d'Outremont.

M. Lalonde: Pas seulement avec l'Assemblée nationale, c'est avec le gouvernement qu'on a des problèmes.

M. Laplante: Je ne suis pas sûr que ce soit avec le gouvernement.

M. Grégoire: Dites-nous cela, on va essayer de le régler.

M. Lalonde: M. le Président, devant cette motion pour inviter le ministre à nous remettre des renseignements qui apparaissent à beaucoup de monde extrêmement importants... en fait, il nous apparaît essentiel que le gouvernement nous remette ces renseignements, non seulement pour procéder à l'étude — on en a besoin — du projet de loi, mais aussi pour que le gouvernement s'affranchisse du doute qui pèse actuellement dans lesprit des gens sur la façon dont le gouvernement s est acquitté, jusqu'à maintenant, de sa tâche dans le cas de I'achat de la compagnie Asbestos.

Le gouvernement a annoncé, à un moment donné, qu'il achetait la compagnie, qu'il avait décidé de l'acheter. Il n'a pas dit le montant d'argent, il n'a pas donné d'indications sérieuses quant au montant qu'il est prêt à payer. On a vu immédiatement la spéculation boursière qui a profité à on ne sait qui, de sorte que les citoyens québécois sont en droit de se demander pourquoi le gouvernement a agi de cette façon-là. Je suis sûr que le député de Mercier se pose aussi des questions là-dessus. Le défaut, par le gouvernement...

M. Grégoire: Oui, mais cela vous a été expliqué plusieurs fois.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

Une Voix: Est-ce qu'il se pose des questions, lui?

M. Lalonde: Je ne sais pas s'il se pose des questions en tant qu'actionnaire, mais c'est ce qu'il vient de me dire.

M. Grégoire: Cela vous a été expliqué plusieurs fois.

M. Lalonde: Le député de Saint-Laurent a décrit, je pense avec beaucoup d'à propos, la façon exemplaire avec laquelle le gouvernement aurait dû procéder à l'annonce de l'achat. D'abord, l'évaluation est faite confidentiellement, la décision est prise, elle est annoncée et, elle est ensuite sans appel. Cela évite toute spéculation et tout coup de bourse comme on en a vu dans les actions. Les actions sont passées, je pense, autour de $20...

M. Grégoire: $22.75.

M. Lalonde: ...à près de $40.

M. Grégoire: Elles ont baissé de nouveau.

M. Lalonde: Ce sont des gens qui ont spéculé.

M. Grégoire: C'est normal. Celui qui joue à la bourse, c'est pour spéculer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: M. le Président, le député de Frontenac ne semble pas comprendre quelque chose.

M. Grégoire: C'est toujours comme cela.

M. Lalonde: Lorsqu'on permet à un marché, en matière de valeurs mobilières, en ignorance de cause, en ignorance de circonstances importantes, à ce moment-là, on permet la spéculation.

M. Grégoire: Ce n'est pas le gouvernement qui a fait la spéculation.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Frontenac.

M. Lalonde: Le gouvernement, en disant... M. Grégoire: II ne connaît pas le dossier.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vous reconnaîtrai si vous voulez parler tout à l'heure.

M. Lalonde: ...qu'il avait décidé d'acheter, sans indiquer le prix qu'il est prêt à payer, non seulement se barre les pieds complètement, mais est pieds et mains liés devant la compagnie qui peut maintenant exiger à peu près n'importe quoi; je parle en ce qui concerne un contrat de gré à gré, parce que le gouvernement a un engagement politique, maintenant, c'est important. Ce n'est pas une transaction privée. Le gouvernement en a fait, avec tous les drapeaux et la parade qu'on a vus, un engagement dont il ne peut pas s'affranchir tout simplement en disant: J'ai changé d'idée. Alors, étant pris pour acheter, sans avoir déterminé le prix, sans avoir fait son évaluation, nous sommes devant une situation où les gens ont spéculé.

M. Grégoire: II n'y en a pas eu. Cela ne s est pas acheté, cela ne s est pas vendu.

M. Lalonde: Le défaut par le gouvernement de rendre publiques les études à ce stade-ci... On aurait préféré qu'il l'ait fait au moment de l'annonce de la décision, en octobre de I'an dernier.

Est-ce que le député de Frontenac pourrait me permettre de parler, M. le Président? Il ne fait que murmurer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je l'espère avec vous.

M. Ouellette: II réfléchit.

M. Grégoire: Parlez. Je le sais d'avance, vous avez dit vingt fois tout cela. Je vous l'ai dit: le Boléro de Ravel.

M. Lalonde: On aurait de beaucoup préféré que le gouvernement, pour lui, tout d'abord, parce qu'il serait à ce moment-là en toute transparence, en toute limpidité, comme le gouvernement Le-sage avait fait lors de la nationalisation de l'électricité, et aussi pour nos sous, on serait beaucoup plus confortable s'il avait fait son évaluation avant et ensuite avait décidé d'acheter, et l'avait fait publiquement. De sorte que le défaut par le gouvernement de rendre publiques maintenant les études sur l'évaluation du coût de la Société Asbestos Ltée justifiera tous les soupçons quant à la préparation du dossier du gouvernement. Ces soupçons sont malheureusement étayés de plus en plus lorsque l'on sait, depuis octobre dernier jusqu'à maintenant, quels documents le gouvernement a utilisés pour appuyer sa décision. On connaissait le rapport Alexandre, on connaissait le jugement de I' OPDQ sur ce rapport, du moins on en a eu état il y a quelques jours, quelques semaines, on a vu un document d'un groupe de travail fantôme qui semble être très important dans la décision du gouvernement. Cela ne nous rassure pas, M. le Président, quant à la préparation du gouvernement, s'il arrivait avec une étude dont il pourrait déterminer le fait qu'elle a été faite au moment ou avant la décision d'octobre dernier.

A ce moment-là, on pourrait dire: Le gouvernement était quand même mieux préparé qu'on pensait. On pourrait rassurer beaucoup de monde. La population dirait: Le gouvernement administre bien nos fonds publics. Le défaut, par le gouvernement, de rendre publiques les études, justifie aussi les soupçons quant à la spéculation qui a été faite à la Bourse. M. le Président, il n'y a aucun doute que les députés, y compris le député de Mercier, ne veulent pas que toutes sortes de gens aient profité de cette situation un peu mi-chair, mi-poisson. Ils ne veulent sûrement pas qu'il y ait eu des passeux de sapins. Il connaît ce langage, des passeux de sapins, des tireux de ficelles, des zi-gonneux de fonds publics, M. le Président.

J'emploie, ici, le vocabulaire que le député de Mercier connaît bien.

M. Godin: Tout à fait, il l'applique.

M. Lalonde: Si, tout à coup, dans ce coup de Bourse, il y avait eu toute sorte de monde qu'on a déjà vu décrire dans un poème célèbre du député de Mercier...

M. Godin: Non moins célèbre que Québec-Presse...

M. Lalonde: ... à ce moment-là, je suis sûr que le député de Mercier serait le premier à s'opposer.

M. Godin: Certainement.

M. Lalonde: Je suis sûr qu'il aurait mal à son parti à ce moment-là, M. le Président, s'il savait que par les passeux de sapins et les tireux de ficelles, les zigonneux de fonds publics...

M. Godin: Fonds publics, oui. Continuez, lisez-le au complet.

M. Lalonde: ... des coûts. M. le Président, je pourrais le lire au complet, mais je pense qu'il y aurait certains termes antiparlementaires.

M. Grégoire: Non, déposez-le. M. Godin: Déposez-le.

M. Lalonde: Certainement, il y a les pas-clair-de-noeuds.

M. Godin: Les pas-clair-de-noeuds, oui. M. Lalonde: On peut en trouver.

M. Godin: S'il y a un seul pas-clair-de-noeuds ici, on va le dénoncer.

NI. Lalonde: On peut en trouver dans le coup de Bourse de l'amiante, des pas-clair-de-noeuds!

M. Godin: Des taches de graisse sur la conscience, les taches de graisse sur la conscience.

M. Lalonde: On peut en trouver aussi, M. le Président.

M. Godin: Certainement. M. Grégoire: Nommez-les.

M. Lalonde: Nautrellement, je ne parle pas des va-la-gueule de l'égalité ou de l'indépendance, parce que, à ce moment-là, cela pourrait être pris comme une insulte à l'Union Nationale.

M. Godin: Non, cela visait peut-être...

M. Lalonde: Je n'en parle pas. Je ne parle pas non plus de tous les... Vous allez m arrêter. Je ne parle pas de la "puanterie" des antichambres de ministres.

M. Godin: Oui, oui.

M. Lalonde: Le ministre vient d'arriver, je ne peux pas en parler.

M. Grégoire: Cela a l'air d'un beau poème. M. Godin: Cela a été écrit en 1972.

M. Lalonde: Plus ça va dans ce coup de bourse, M. le Président, plus le député de Mercier va avoir mal à son parti.

M. Grégoire: C'est un poème de jeunesse, dites-le donc. (20 h 15)

M. Lalonde: Si le ministre ne clarifie pas la situation le plus tôt possible, c'est à son parti que le député de Mercier va avoir mal, s'il ne s'ouvre pas les yeux, de la façon que le gouvernement s'est conduit dans cette spéculation quasiment volontaire du gouvernement, alors que les actions sont passées de $20 à $40. On retrouve des échos d'un poème célèbre qu'on a lu dans notre jeunesse.

M. Godin: Et c'est reproduit, M. le Président, sans copyright, à 36 000 exemplaires, par le parti de lOpposition, dans une campagne électorale, sans copyright.

M. Grégoire: Nous aurions pu vous poursuivre...

M. Godin: C était illégal. Le coup de bourse, il est là.

M. Lalonde: Au cas où le député exprimerait des doutes quant à l'origine de la copie que j'ai, c'est dans le Journal de Québec que je l'avais eue. Je ne sais pas si le Journal de Québec a payé ses droits d'auteur, mais je n'ai pas profité du coup de poésie.

M. Grégoire: Lisez-le.

M. Lalonde: M. le Président, la façon dont le gouvernement a procédé ouvre la porte à tous les abus, à toutes les passes, à tous les tirages de ficelle, à tous les zigonnages de fonds publics...

M. Godin: Cela pèse sur la conscience.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Lalonde: J'invite le ministre à distribuer aux membres et intervenants de cette commission l'évaluation du coût et le plan de financement, pour éviter qu'on continue. Cela fait six mois qu'on est dans cette situation-là, une situation trouble, où il y a eu des dizaines de personnes et où des millions de dollars ont changé de mains, dans l'obscurité la plus totale. Si le gouvernement avait dit: Voici notre évaluation. Je ne reprends pas l'argumentation du député de Saint-Laurent, il l'a faite en comparaison aussi avec un exemple

qui était la, tout près, chez nous. Ce n'est pas tellement ancien. Le député de Mercier, qui est jeune, était de ce monde lorsque, en 1962, le gouvernement Lesage s était conduit de la façon la plus exemplaire dans une situation ou des tireux" de ficelle et tout ce beau monde peuvent faire des profits a même les fonds publics. Pourquoi le gouvernement... C'est impensable qu un gouvernement qui se dit honnête qui, je crois, a des intentions honnêtes...

Une Voix: La plupart du temps.

M. Lalonde: Individuellement, je suis sûr que chacun des députés veut donner au Québec un gouvernement honnête, j'en suis convaincu. Mais, quelle inconscience que de laisser le gouvernement agir de cette façon! Vous allez traîner, dans votre sillage, le sillage de votre ignorance. Les dommages, je pense qu'ils vont vous coller quelque part longtemps, M. le Président, non pas à vous, mais au gouvernement.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je lespère.

M. Lalonde: Comment pouvons-nous être sûrs que des pressions indues, qu'un "lobbying" occulte n'auront pas été faits pour faire modifier le prix du gouvernement entre le mois d octobre 1977 et le moment où le gouvernement va rendre son prix public? Qui va nous en assurer? A moins d'avoir une évaluation datée du mois d octobre 1977 qui dit que le gouvernement pense que cela vaut tant et qu'il est prêt à payer ce montant... Etant donné qu'on ne le sait pas, on peut supposer toutes sortes... Je pense que le gouvernement est irresponsable de laisser se perpétuer une situation comme celle-là où toutes sortes de choses... On peut supposer. Il ne s'agit pas de les présumer, mais il me semble que, pour éviter justement ces suppositions, ces doutes, ces soupçons, le gouvernement a un devoir d'être totalement transparent et totalement limpide.

La seule façon aurait été de rendre public son prix au moment de I'annonce au mois d octobre. Il est trop tard pour revenir en arrière, mais, au moins, qu'on le fasse maintenant, qu on donne les évaluations, les bases solides, les fondements sérieux de sa décision. Ce n'est quand même pas, M. le Président, demander un miracle. Cela n'est pas demander l'impossible. Cela doit exister. Cela n affecte pas du tout — le député de Saint-Laurent l'a bien démontré — les négociations actuellement.

On ne demande pas au gouvernement de nous révéler ici le prix maximal qu'il est prêt à payer. Naturellement, il y a des négociations à venir. Qu'il nous donne au moins une évaluation, qu'il nous donne un prix-plancher. A ce moment-là, personne ne peut en profiter. Cela peut protéger ceux comme...

M. Bérubé: Zéro.

M. Lalonde: Des citoyens du Québec, entre autres, peuvent acheter des actions mutuellement, ne sachant pas quel prix le gouvernement veut payer éventuellement. Il y a toutes sortes de spéculations qui se font sur le dos des citoyens.

M. le Président, le défaut, par le gouvernement, de rendre publiques les études sur l'évaluation du coût de la société Asbestos Ltée justifie même jusqu'à sa véritable volonté d acquérir la compagnie, la société Asbestos. Plusieurs citoyens à qui j'en parlais et qui ont une certaine connaissance de la façon de faire ou de ne pas taire les choses en matière commerciale et industrielle sont convaincus que le gouvernement ne veut pas acheter la compagnie, parce qu'il a procédé exactement comme s il ne voulait pas acheter la compagnie. Le gouvernement s'est peinturé dans un coin, il s est lié les deux mains et il ne peut littéralement pas acheter la compagnie, faire un contrat de gré à gré qui soit juste pour les Québécois, pour ceux qui vont payer la note. Ce n est pas le Parti québécois qui va payer cela, c est tout le monde.

Vous êtes dans la situation où vous pouvez déterminer d avance une échéance, une stratégie. Il faut le faire avant, pas après. Après, il sera trop tard. Naturellement, si l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat de la société Asbestos n existent pas, à ce moment, je comprends qu'on parle dans le désert.

Le ministre détient un poste qui ne lui appartient pas, les Québécois lui ont délégué des responsabilités. Il a aussi celle de dire la vérité ici, à cette commission, comme celle de dire la vérité en Chambre. A mon sens, cette responsabilité est grave maintenant, à savoir est-ce qu'une telle étude de l'évaluation du coût et du plan de financement existe. Je pense que le ministre ne peut se libérer de sa responsabilité. Il ne peut assumer sa responsabilité de ministre devant ce dossier sans révéler ici si cette évaluation existe, quand elle a été faite, la remettre aux membres de cette commission et, par le fait même, à toute la population du Québec.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. M. le député d Outremont, et par la suite M. le député de Mercier.

M. Raynauld: Merci, M. le Président. Je voudrais pour défendre...

M. Lalonde: ... un poème.

M. Raynauld: Non, je ne lis pas cette littérature bien souvent.

M. Lalonde: Les notes personnelles...

M. Raynauld: Pas tous les jours. Je voudrais défendre cette motion en prenant peut-être la situation d'un peu plus haut, d'un peu plus large que cela n'a été le cas jusqu à maintenant.

M. Godin: ... pour votre collègue.

M. Raynauld: Non, pas du tout. Je voudrais... M. Godin: Vous avez dit plus haut que lui.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Raynauld: Je voudrais surtout essayer de ne pas simplement répéter ce qui...

M. Godin: Ils vont continuer à pelleter des nuages.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, à I ordre!

M. Raynauld: ... a déjà été dit. Je voudrais ajouter des éléments additionnels qui pourraient peut-être éclairer un peu le débat. Je ne pense pas que mon propos va convaincre nos amis d'en face, mais je pense que je serais...

Une Voix: Ce n'est pas sûr; essayez-vous, essayez-vous.

M. Grégoire: Si vous êtes lumineux, on ne sait jamais.

M. Raynauld: Je serais très surpris que cela puisse en aucune façon faire changer d idée les gens qui, de toute façon, ont pris leur décision sans aucune base de quelque nature qu'elle soit pouvant justifier la décision qui a été prise. La preuve en est simplement que le gouvernement n est même pas capable de répondre de façon positive à une motion comme celle-ci où tout ce qu'on demande dans le fond, ce sont des assurances que le gouvernement a pris sa décision en toute connaissance de cause. Pour qu'un gouvernement prenne une décision en toute connaissance de cause, je pense qui) aurait fallu qu'il existe — peut-être en existe-t-il? je serais heureux de le savoir — des études de rentabilité. Lorsqu'on décide de faire un investissement dans quelque chose, d habitude on essaie de voir si cet investissement que l'on va faire va être un investissement rentable, qui va produire des recettes, qui va tenir compte des coûts de production, qui va ensuite nous amener à évaluer si cet investissement était préférable à celui qu'on aurait pu faire dans un autre endroit, quelles que soient les sources de fonds et les possibilités de financement qu'on peut avoir.

M. Grégoire: C est bien évident.

M. Raynauld: C est bien évident, mais si c'est si évident que cela, à ce moment-là, il devrait exister des études...

M. Grégoire: ... de rentabilité...

M. Raynauld: ... qui auraient montré que dans le cas de l'achat de la société Asbestos, il y avait, attachées à cette opération et à cette transaction, des comparaisons de rendement des investissements à entreprendre...

M. Grégoire: Le député me permettrait-il une question?

M. Raynauld: ... entre, par exemple, les différentes mines qui existent au Québec... Non, je ne permets pas de question, je voudrais continuer...

M. Grégoire: Les bilans sont des études de rentabilité.

M. Raynauld: ... pour vous expliquer un peu le problème. Non, un bilan n'est pas une étude de rentabilité, je m'excuse.

M. Grégoire: Mais voyons donc! M. Raynauld: Absolument pas.

M. Grégoire: C'est une constatation de rentabilité.

M. Raynauld: Je voudrais simplement... M. Grégoire: C'est mieux qu'une étude.

M. Raynauld: ... montrer qu'on ne prend jamais de décision économique dans l'absolu. On prend des décisions économiques...

M. Godin: C'est le cours magistral qui commence.

M. Raynauld: ... en comparant les usages auxquels...

M. Grégoire: Le professeur qui cause. Cela fait longtemps que je n ai pas pris de cours.

M. Godin: Est-ce qu'on peut prendre des notes, M. le professeur?

M. Raynauld: ... on aurait pu placer les fonds...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): MM. les députés de Frontenac et Mercier, s'il vous plaît!

M. Godin: Est-ce qu'il y a un copyright pour ces cours?

M. Raynauld:... que nous avons à notre disposition.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre!

M. Godin: Est-ce qu'il y a un copyright pour ces cours?

M. Raynauld: Non, je n'ai pas de copyright, je ne me plains pas quand des gens reproduisent

mes idées quelque part, je ne suis pas comme le député de Mercier, je m en contrefous.

Je pense donc qu une des premières opérations aurait dû consister à comparer ce qu'aurait représenté pour le gouvernement la rentabilité relative d'un investissement dans une mine plutôt que dans une autre. Donc, il ne suffit pas d'étudier la rentabilité absolue d'une activité comme l'As-bestos Corporation. Pour être capable de porter un jugement éclairé sur la question, il aurait fallu avoir cinq ou six choix pour la même somme d'argent qu on avait investie. C'est peut-être difficile à comprendre, mais c'est élémentaire. Il aurait fallu avoir des études de rentabilité qui auraient comparé le rendement qu'on aurait obtenu si on avait placé cet argent dans l'achat de la société Asbestos avec un investissement équivalent, par exemple, dans une mine en Abitibi, puisqu on sait qu'il existe des dépôts d amiante en Abitibi. Il aurait fallu...

M. Bérubé: Ce n'est pas compliqué.

M. Raynauld: Ce n'est pas compliqué, mais donnez-les donc si vous les avez.

M. Bérubé: Non, vous ne les aurez pas.

M. Raynauld: Alors, à ce moment-là, c'est de I'entêtement; ce ne sont même pas des réponses intelligentes.

Il aurait fallu avoir une étude qui aurait montré si le rendement aurait été supérieur si on avait fait un investissement dans l'exploitation d'une nouvelle mine en Abitibi ou, par comparaison, un achat d Asbestos Corporation.

Ce n'est pas tout, je pense qu il aurait fallu — puisqu'on nous dit qu'il y a sept mines à Thetford Mines ou à Asbestos, mais il y a plusieurs mines d'amiante — pour être éclairés sur le sujet, comparer également ce qu'auraient rapporté des investissements équivalents dans chacune des mines qu on avait là. Là, on aurait pu comparer ce qui était le plus profitable pour le Québec, compte tenu...

M. Grégoire: De quelles mines?

M. Raynauld: De toutes les mines, I'une après l'autre; c'est ce qu'il aurait fallu faire et ensuite obtenir de cela des estimations du taux de rendement de l'investissement que l'on fait.

M. Godin: II ne connaît pas le dossier.

M. Grégoire: Non, il ne connaît pas le dossier, c est évident.

M. Raynauld: Une fois qu'on a fait cela entre des mines...

M. Grégoire: Etes-vous déjà allé à Thetford?

M. Raynauld: Oui, plusieurs fois, M. Grégoire, cher ami.

M. Grégoire: Avez-vous vu comment c était placé?

M. Raynauld: S il vous plaît, M. le Président, est-ce que je pourrais continuer?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Raynauld: Une fois qu'on a fait cette opération élémentaire de comparer ce qui est disponible, je pense que n'importe quelle étude de rentabilité aurait exigé que l'on ajoute ensuite les dépenses en capital qu'il va falloir entreprendre dans l'achat ou à la suite de l'achat de la société Asbestos pour respecter les règles de I'environnement, puisqu'on nous dit qu'il faudrait peut-être rebâtir à peu près complètement ce qui existe déjà. Il aurait fallu, autrement dit, tenir compte des changements que le gouvernement entend apporter, ne serait-ce que pour rentabiliser I'investissement initial. Il aurait fallu avoir des estimations des coûts que ces opérations représentent et ensuite calculer les recettes attendues sur un certain nombre d années, compte tenu des circonstances de marché, et en arriver encore une fois à un taux de rendement. (20 h 30,

Non seulement cette comparaison entre les mines était nécessaire, mais à mon avis, étant donné qu'un des choix fondamentaux que nous avons c'est de placer de l'argent dans l'achat d une mine en comparaison à un investissement dans la transformation des produits de l'amiante, je pense qu'il aurait fallu également envisager d'autres options que cet achat sous la forme d'usines de transformation des produits de I'amiante. A cet égard, on avait, je pense, un bon départ avec I'étude de SORES, qui est ici, qui donne justement des exemples d'études qu'on pourrait appeler de "rentabilité " ou de "feasibility " à partir de certains produits particuliers. On a des tableaux où on a... J'en ai ici devant les yeux, où on dit quelle est l'estimation des coûts d'investissement, des frais d'exploitation et des revenus pour une nouvelle usine d'endos et de papier-joint. On a là la liste d'un certain nombre de facteurs dont il faut tenir compte avant d'en arriver à un jugement sur la question de savoir s'il est utile, profitable et rentable de faire l'investissement considéré.

On n'a rien de cette nature qui nous est venu du gouvernement du Québec jusqu'à maintenant en relation avec l'achat d'Asbestos Corporation. Je pense, par conséquent, que de deux choses l'une: ou des études de ce genre existent et ont été faites par le gouvernement avant que la décision ait été prise et, à ce moment-là, nous demandons respectueusement, puisqu'on ne peut pas l'imposer, qu'elles soient déposées, qu'elles soient distribuées aux membres pour que nous puissions en prendre connaissance, ou bien ces études n'existent pas et la décision a été prise sur une base purement politique. Je pense que lorsqu'il s'agit d'un investissement de l'importance de celui qui

est envisagé à I'heure actuelle, prendre une décision exclusivement politique et dogmatique sur un sujet comme celui-là, c'est une décision inacceptable. Cela c'est pour les études de rentabilité.

Je pense que parallèlement à des études de rentabilité de la nature que j'ai essayé d'exposer, il faudrait également — c est ce à quoi la motion se réfère lorsque la motion parle de plans de financement— il aurait fallu, dis-je, avoir également un plan de financement de cette opération. Qu'est-ce qu on entend par un plan de financement? C'est d'abord la nature, l'identification des sources de financement. D'où vient l'argent dont le gouvernement aura besoin pour l'achat de la société Asbestos? Est-ce que cet argent va provenir d'impôts additionnels? Est-ce qu'il va provenir d'emprunts faits sur le marché du Québec? Est-ce qu'il va pro-venir d'emprunts faits sur les marchés étrangers? Est-ce qu'il va venir d'emprunts qui vont venir des sociétés publiques qui existent déjà comme la Société de dépôt?

M. Godin: La caisse de dépôt.

M. Raynauld: La caisse de dépôt. Est-ce qu'on aura, parallèlement, une fois ces sources d investissement identifiées, des fonds d amortissement qui seront placés, qui seront créés d'une année à I'autre? Est-ce que ce serait exagéré de penser qu'on pourrait savoir quel est le taux que nous allons payer pour cet emprunt ou pour ces emprunts, et si ces taux sont des taux qui vont se traduire en tant de millions par année d'impôts supplémentaires.

Enfin, quand on parle d un plan de financement, d'habitude, on se pose aussi la question à savoir si ce financement particulier n'aura pas un impact sur d'autres transactions que le gouvernement du Québec doit faire de façon régulière. Quel serait l'impact d'un emprunt ou d'un plan de financement du genre de celui dont nous avons besoin sur, par exemple, les possibilités d'emprunt pour les fins générales d'opération du gouvernement du Québec? Quel va être l'impact d'un emprunt comme celui-là si cet emprunt, par exemple, provient de l'étranger? Quel va être l'impact de cet emprunt sur les autres emprunts à l'étranger que le gouvernement envisage de faire ou a besoin de faire de façon régulière? S'il ne s'agit pas d'un emprunt à l'étranger, quel est l'impact sur les autres opérations générales du gouvernement? A ce moment-là, avec ce genre d'information où on a, d'un côté, les rendements attendus de l'investissement, où on a de l'autre les sources de financement nécessaires pour faire cet investissement, je pense qu'on est capable de porter un jugement sur la validité ou non de la décision qui peut être prise.

Je pense que c est la méthodologie à suivre lorsqu'il s'agit de prendre une décision de l'importance de celle qui est envisagée ici. Ce que cette motion demande, c'est, au fond, de déposer des études — si elles existent — qui pourraient au moins se rapprocher de cet objectif, d'essayer de prendre des décisions en toute connaissance de cause et non pas de façon aveugle, de façon dogmatique, comme il semble bien que cela ait été le cas en ce qui concerne l'achat de la société Asbestos.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci. M. le député de Mercier.

M. Godin: M. le Président, je vous remercie de me donner la parole. Je regrette qu'un des deux jumeaux du capitaine Ryan soit parti. J'aurais aimé lui parler de son coup de bourse. Il est abondamment fait mention d'un coup de bourse dans cette affaire, mais les coups de bourse — tout journaliste qui a fait, ne serait-ce que six mois de journalisme le sait — peuvent se vérifier facilement, M. le Président. Dans le cas de la Corporation du gaz naturel, par exemple, il y a un journaliste qui est encore chroniqueur parlementaire, M. Guy Lamarche, qui avait prouvé, avec l'aide de son collègue Pierre Laporte, dans le temps, qu'il y avait eu un coup de bourse, parce qu'il avait étudié le transfert des actions de détenteurs à d'autres détenteurs.

Cela se vérifie. Affirmer qu'il y en a eu un sans avoir fait ce travail, à mon avis, c'est passer du coup de bourse à ce que j'appelais le coup de "bouse ". On veut salir le gouvernement, on veut salir ce projet. Je recommanderais à mon collègue de Saint-Laurent, si jamais il revoit son collègue de Marguerite-Bourgeoys, de lui conseiller de faire faire la recherche par son recherchiste. Cela se vérifie facilement s'il y a eu un coup de bourse ou non. Si, effectivement, il y en a eu un, je serais le premier à le dénoncer, et je serais le premier à trouver que le gouvernement a eu un comportement répréhensible. Mais, jusqu'à preuve du contraire, il n'y a pas eu de coup de bourse. Il n'y a personne qui a, jusqu'à preuve du contraire, échangé des masses d'actions d'une direction à une autre. Par conséquent, il n'y en a pas eu. Combien d'actions ont changé de mains depuis que c'est annoncé? Dites-nous le, si vous le savez. Si vous ne le dites pas, ne dites rien.

M. Grégoire: ... à peu près?

M. Godin: D autre part, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le cours magistral de notre John Kenneth Galbraith local, le député d'Outremont, et je suis impressionné par la théorie...

M. Bérubé: ... C est plutôt... Kaine M. Godin: Kaine?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Godin: La théorie de notre John Kenneth Galbraith local m impressionne; mais je regarde son passé, je regarde d où il vient, Conseil économique du Canada, je regarde la performance de I'économie canadienne dont il a été le conseiller depuis quelques années et cela ne m'impressionne pas beaucoup, M. le Président, la méthodologie. Je reste un peu sur mon appétit, la piastre

canadienne est au plus bas, léconomie du Canada est de plus en plus dépendante des marchés extérieurs, cela s est tait sous ses conseils, ça, sous son parapluie théorique et méthodologique, M. le Président, cette économie. Ce défaut de Iéconomie canadienne n'a pas été corrigé par ses conseils.

Une Voix: Trouvez autre chose.

M. Godin: Ce que nous voulons faire, nous... Cela lui fait mal, il est gêné, M. Galbraith junior est blessé de ces remarques, il est gêné. Je regarde les résultats de ses travaux à Ottawa, ce n est pas riche, M. le Président.

M. Raynauld: Des beaux poèmes!

M. Godin: Lisez-les, ils sont publiés.

M. Raynauld: Parlez-nous de vos poèmes!

M. Godin: Moi, je n'en ai pas honte, M. le député d Outremont.

M. Raynauld: Non, les "crisse de tabarnak" de poèmes, je vais les lire.

M. Godin: Moi, je n'ai pas honte de mes crisse de tabarnak', ils sont imprimés et diffusés par votre parti dans le comté de Bourassa, feu M. Bourassa, qui va peut-être rebondir avec les jumeaux du capitaine Ryan bientôt, dans un congrès politique. Si vous le voyez, vous le saluerez de ma part d ailleurs.

Je dirai que la performance passée de notre méthodologue ou théoricien en économie ne m impressionne guère. La raison pour laquelle le gouvernement décide d'acheter Asbestos Corporation, c'est tout simplement la confiance qu'il a dans le marché de l'amiante, qui est prouvé par la performance d'entreprises depuis quelques années. Et le Galbraith d'Outremont...

M. Raynauld: Vous avez une confiance aveugle.

M. Godin: Le Galbraith d Outremont peut bien tenter de m'interrompre et tenter de dire qu il aurait fallu suivre un cheminement écrit dans les livres, comme il a fait au Conseil économique du Canada depuis quelques années, avec le résultat qu'on sait.

Mais la vérité, c est qu il lui suffirait de prendre cinq actions d Asbestos Corporation, d'en recevoir gratuitement les états financiers pour constater qu effectivement il y a un marché pour cela, qu'effectivement c est rentable, qu effectivement il y a une piastre à faire là, qu effectivement on n'achète pas une "minoune". On achète quelque chose qui fonctionne et qui rapporte.

Donc, ses inquiétudes auraient été grandement diminuées s'il avait fait ce qu'on appelle en journalisme son "legwork" c'est-à-dire sortir de ses livres de cours magistraux, sortir de son Gal- braith, sortir de ses conseils qui ont eu le résultat qu on a vu à Ottawa, regarder la valeur de I'amiante dans le monde actuel, et surtout prendre conscience du fait qu'enfin ce qu'on fait au Québec, c est ce que le Canada n'a jamais osé faire, ou pu faire, ou tenté de faire sur une échelle suffisamment importante, soit de rapatrier ici le contrôle des richesses naturelles, de rapatrier ici I'industrie secondaire, au lieu de rester une économie de succursales américaines, de "branch plants qui se sont développées sous le parapluie de la pensée économique canadienne.

On nous dira, M. le Président, que le développement économique, c est I'affaire d Ottawa. Je regrette, mais les plus beaux coups ont été faits par les provinces, pas par le grand ensemble canadien. La résistance aux multinationales est venue des provinces, dans la majorité des cas. au Canada. Il le sait, notre Galbraith local.

Je ne comprends pas qu'il ne place pas ce qui se passe ici dans le cas de I'amiante dans cette perspective, perspective que dans certains de ses rapports lui-même recommandait, mais qu'il semble avoir oubliée pour des raisons bassement partisanes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce que la motion présentée par le députe de Saint-Laurent sera adoptée?

Une Voix: Non.

M. Raynauld: M. le Président, je pense que mon voisin m avait dit qu il voulait parler sur le sujet.

M. Grégoire: II en a parlé.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II en a parlé? A Tordre, s'il vous plaît!

M. Bérubé: II a parlé. Pas de problème. Son silence est éloquent.

M. Grégoire: Un vote...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voici. M. le député d Outremont. Je comprends la demande qui a pu être faite par le député de Richmond, mais, étant donné son absence, je pense qu'il n'y a pas lieu de suspendre les travaux. A moins qu un autre député ne demande la parole, je demanderai le vote sur la motion.

Est-ce que la motion du depute de Saint-Laurent?

M. Grégoire: Appel des noms.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Bérubé (Matane)?

M. Bérubé: Je voterai contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Godin (Mercier)?

M. Godin: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Brochu (Richmond)? M. Forget (Saint-Laurent)?

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Grégoire (Frontenac)?

M. Grégoire: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Laplante (Bourassa)?

M. Laplante: Contre.

M. Forget: II est revenu au bercail.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Ouellette (Beauce-Nord)?

M. Ouellette: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Rancourt (Saint-François)?

M. Rancourt: Contre.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?

M. Grégoire: Absent.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il vous plaît, M. le député de Frontenac! La motion du député de Marguerite-Bourgeoys, et non de Saint-Laurent, est rejetée six voix contre une. Est-ce que l'article 4 sera adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, le ministre n'a pas vraiment daigné expliquer la position de son gouvernement dans cette affaire. D'ailleurs, je pense bien qu'il en serait incapable parce que c'est une position fondamentalement malsaine et inexplicable. (20 h 45)

Cependant, dans la mesure où il a tenté, à d'autres occasions, d'expliquer, d'excuser son silence, il a invoqué l'intérêt des négociations et l'intérêt qu'il trouve à ne rien dire qui puisse être interprété comme un jugement favorable sur la valeur des actifs de la société Asbestos, de manière à éviter tout ce qui pourrait faire augmenter son prix. Je veux donc lui donner l'occasion de nous donner des explications sur des éléments qui pourraient, au contraire, faire diminuer son prix. C'est là une invitation à laquelle il ne saurait, j'imagine, résister, puisque chaque mot qu'il dira, chaque parole qu'il prononcera fera baisser d'au- tant de quelques dollars le prix de chaque action dont il doit acheter les $2,6 millions qui existent. Ce sont donc des paroles en or qui vont tomber bientôt de la bouche du ministre pour nous renseigner, en même temps que pour profiter directement au trésor public du Québec. Chaque respiration vaut littéralement des centaines de milliers de dollars. Il est rare que le ministre pourra dire des choses d'autant de valeur. Je pense d'ailleurs qu'il n'en a jamais dit qui aient une valeur comparable à celles qu'il pourrait dire maintenant.

S'il condescendait à expliquer un certain nombre de choses qui, encore une fois, sont toutes ou des passifs ou des passifs contingents de cette société.

La première préoccupation, comme il se doit, devrait porter sur des questions de salubrité pour les travailleurs. Il y a toutes sortes de spéculations qui ont cours relativement à l'importance des travaux qui seront nécessaires pour corriger une situation qui, dans cette entreprise en particulier, est jugée par tous les observateurs comme méritant une attention toute particulière.

On se souviendra que lorsque le vice-président du Syndicat des travailleurs de l'amiante, CSN, a fait une intervention devant cette commission, il a insisté pour souligner les difficultés qui existaient encore dans ce domaine, telles que démontrées par les rapports des services de protection de l'environnement et du ministère des Richesses naturelles. Il ne fait donc aucun doute que des travaux sont nécessaires.

D'ailleurs, dans le bulletin que, j'imagine, tous les députés de cette Assemblée nationale ont reçu cette semaine, en provenance de l'Association des mines d'amiante du Québec, volume II, no 2 de février 1978, il y a une brève note à la dernière page qui paraît sous le titre suivant: "$80 millions pour la salubrité. Les producteurs d'amiante du Québec ont investi, de 1975 à la fin de 1977, un total de $26 134 970 dans les travaux directement reliés à l'assainissement de l'air dans les mines et moulins des compagnies minières, à Thetford Mines et à Asbestos. Ces sommes ne représentent pourtant qu'une partie des programmes d'investissement dans lesquels les compagnies productrices d'amiante sont engagées depuis les années soixante et, particulièrement, le début de 1970 et qui visent à rencontrer la norme gouvernementale de dépoussiérage de 0.20 milligrammes par mètre cube d'amiante dans la poussière totale respirable qui entrera en vigueur en 1981. A cette date, les compagnies minières d'amiante auront consacré quelque $81 millions pour l'exécution des travaux destinés à l'élimination optimale des poussières et à l'amélioration des conditions de salubrité dans les usines de traitement et autres installations. Essentiellement, ces travaux consistent en l'installation de nouveaux équipements de ventilation et de systèmes de dépoussiérage et en la modernisation de certains équipements en usine et en laboratoire". En particulier, on précise que la société Asbestos, parmi les autres sociétés dont on décrit les travaux de modernisation... "La société Asbestos engagée dans un programme d'assainissement

de $30 millions a mis sur place, depuis le début de 1976, de nouveaux équipements qui contrôlent la poussière à ses installations de Thetford, Black Lake et Coleraine. Les autres projets réalisés comprennent la construction d un vestiaire-séchoir à la King Beaver no 3 et I installation d'un nouveau système d'aspiration mécanique aux usines Normandie et British Canadian no. 1. Un système semblable est en voie d'installation à la King Beaver. Au cours de 1977 également, les séchoirs de la British Canadian no 2 ont été munis d'un système de dépoussiérage à filtres. En outre, on poursuit le recouvrement des convoyeurs et tamis dans les différentes installations".

Il s'agit donc de travaux considérables, mais il est très apparent, à la lecture de cette note, et d'ailleurs à la lecture des rapports annuels de ces sociétés, que ces travaux ne se termineront pas cette année, qu'il y en a encore pour plusieurs années. Ceci suppose que les évaluations, a priori, faites par les ingénieurs des capacités de dépoussiérage des installations actuellement en cours d'installation s'avéreront satisfaisantes. Bien sûr, impossible de l'affirmer avant d'en avoir fait l'essai, d'autant plus que dans le moulin, en particulier le moulin de la société Asbestos, plusieurs personnes expriment des avis divergents à ce sujet. Certains, et bien sûr les cadres de la société Asbestos, se disent confiants que ces installations seront suffisantes et qu'en particulier, le moulin de Normandie qui sert actuellement, comme on le sait, à toutes les mines de la société à Thetford Mines, sera suffisamment rénové et suffisamment dépoussiéré pour qu'il ne soit pas nécessaire de reconstruire à neuf un moulin entièrement nouveau.

Ces affirmations sont cependant contredites par d'autres personnes, en particulier, je cite cet article d'Actualité du mois de mars 1978 où, faisant allusion à cette question, on dit, à la page 27: "Si vraiment, comme le promet René Lévesque, Asbestos doit devenir un employeur modèle, la liste des sommes à y injecter s'allonge. D'abord et avant tout, il va falloir jeter par terre l'usine de dé-fibrage de la Normandie et en construire une nouvelle. Selon Johns-Manville, la compagnie qui a le plus investi depuis dix ans, il est presque impossible de rendre salubres des installations vieillottes. Les nouvelles normes de salubrité, deux fibres par centimètre cube d'air, en vigueur depuis le 1er janvier 1978, exigent des méthodes de défibrage modernes. Johns-Manville et Bell Asbestos se sont donc dotées de moulins neufs." Quand nous avons abordé la question avec M. Bernard Landry, ministre d'Etat au développement économique, il a répondu: Indiscutablement, nous devons construire une usine neuve. Le coût: Pas moins de $75 millions. Cette affirmation, qui semble corroborée par un collègue du ministre des Richesses naturelles, laisse donc planer un doute sur l'envergure des responsabilités financières de l'Etat, lorsqu'il sera propriétaire de cette société. "Il est, en effet, évident qu'une acquisition qui prendrait effet le 1er janvier 1979 trouverait la société Asbestos en quelque sorte en plein milieu de son programme de dépoussiérage avec encore une somme substantielle à dépenser, probablement de l'ordre de $15 millions à $20 millions, pour compléter son programme d'investissement. Ces $15 à $20 millions correspondent, encore une fois, à l'évaluation optimiste que les ingénieurs de la société Asbestos ont faite des possibilités de dépoussiérage et des possibilités de satisfaire aux normes gouvernementales, non seulement les normes qui sont en vigueur depuis le 1er janvier 1978, mais celles qui viendront en vigueur ulté-rieusement, puisqu'il y a une progression qui est graduellement envisagée dans le caractère de rigueur, dans la rigueur de ces normes. Si, cependant, cette opinion optimiste n'était pas fondée, s il se révélait, au contraire, que l'opinion relativement moins optimiste de certains observateurs de lextérieur, tels que ceux cités dans cet article d'Actualité, et les opinions qui sont couramment entendues par quiconque se déplace à Thetford Mines et parle aux gens impliqués à divers titres dans l'industrie de l'amiante, si ces autres hypothèses moins optimistes devaient se révéler véritables, on pourrait se retrouver en face de la nécessité de reconstruire en entier le moulin de la société Asbestos. Le chiffre de $75 millions est, évidemment, le chiffre d'aujourd'hui; rien ne permet de croire que l'inflation des coûts de construction va s arrêter subitement, d'autant plus que I'équipement qui entre dans un moulin est, dans une certaine proportion, de l'équipement de provenance étrangère, et que la dévaluation du dollar, entre autres, est susceptible de faire progresser, de façon encore plus sensible, les coûts d investissement dans un nouveau moulin, puisque I'inflation s'ajoute la dévaluation; ce qui peut avoir un effet très sensible sur l'évaluation des coûts de remplacement de l'usine.

Donc, il y a là un factuer qui a un impact direct sur les négociations puisque le ministre a dit, à plusieurs reprises, à la suite des questions qui lui étaient posées, entre autres à l'Assemblée nationale à ce sujet, qu il s'attendait que le prix qu il aura à payer, que le gouvernement aura à payer pour la Société Asbestos tiendra compte, c'est-à-dire sera réduit dans une proportion équivalant exactement aux coûts additionnels rendus nécessaires pour satisfaire aux normes de salubrité.

Pour cette raison, M. le Président, j aimerais présenter une motion, de manière que nous obtenions un certain nombre d'éclaircissements sur cette question.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Saint-Laurent, je serai forcé de suspendre la séance pendant quelques minutes parce que je préférerais que ce soit le président régulier qui puisse prendre avis de votre motion afin de juger de sa recevabilité.

M. Forget: Ah! bon.

Le Président (M. Laplante): Etant donné que je fais partie de cette commission, je ne voudrais pas être juge et partie en même temps concernant les motions.

M. Forget: D accord.

Le Président (M. Laplante): La commission est suspendue jusqu'au retour du président. Il est sorti à cause d'une urgence et il m'a dit qu'il serait ici dans quelques minutes.

(Suspension à 20 h 57)

(Reprise à 21 heures)

M. Forget: Je vais vous donner lecture de la motion: "Que cette commission invite le ministre des Richesses naturelles à distribuer, avant le début de l'article 4 du projet de loi 70, aux membres et intervenants de cette commission les études qui ont été préparées concernant les investissements supplémentaires au coût d'achat que le gouvernement devra faire pour améliorer les installations périmées de l'usine de la société Asbestos Ltée afin de respecter les normes de salubrité dans l'industrie de l'amiante".

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On m avait, avec gentillesse d'ailleurs, remis cette motion avant qu'elle soit présentée. Je dois vous dire qu'elle me cause des soucis, qu'elle me donne des soupçons. Là-dessus, j'aimerais entendre parler quelque peu de la recevabilité.

Le député de Frontenac doit être content que je demande l'opinion des membres pour m'éclairer sur ce sujet. Au nom de l'Opposition... En fait, la question que je me pose, c'est: Est-ce que cette motion est recevable dans le cadre de l'article 4 du projet de loi? C'est la seule question que je me pose et j'aimerais qu'on m'éclaire.

M. Godin: Question de directive. Est-ce qu'on ne pourrait pas également en contester la recevabilité ou...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, c'est cela.

M. Godin: Non, dans une autre perspective; c'est en fait une version légèrement modifiée de la précédente. Il y a deux raisons, à mon avis, de s'interroger sur la recevabilité.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous argumenterez tout à l'heure, chaque parti politique aura droit...

M. Godin: Non, mais j'interviens maintenant parce que vous voulez réduire le débat à la recevabilité dans le cadre de l'article 4.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, vous pouvez donner tous les arguments que vous voulez.

M. Godin: D'accord, parfait.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: S'il y a des objections à la recevabilité, j'aimerais les entendre parce que je n'en vois pas, a priori. J'aimerais répondre à ces objections, si on veut bien les exprimer.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Au nom du parti ministériel, M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: M. le Président, de prime abord, il semble que cette deuxième motion soit une subdivision de la première motion qui avait été présentée et qui a été défaite.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De quelle motion parlez-vous?

M. Grégoire: De celle qui a été présentée et sur laquelle on a voté au début de cette séance.

M. Godin: Qui a été rejetée.

M. Grégoire: La motion qui a été rejetée se lisait comme suit: "Que cette commission invite le ministre des Richesses naturelles à distribuer, avant le début de l'étude de l'article 4 du projet de loi no 70, aux membres et intervenants de cette commission, l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat de la société Asbestos Ltée, tel que décidé par le gouvernement."

Cela veut dire l'évaluation du coût et le plan de financement de l'achat, et le coût comprend tous les coûts. On nous arrive avec la deuxième et on nous dit:... "et les études qui ont été préparées concernant les investissements supplémentaires au coût d'achat que le gouvernement devra faire pour améliorer les installations périmées de l'usine de la société Asbestos Ltée afin de respecter les normes de salubrité dans l'industrie de l'amiante. '

Je crois que c'est un peu inclus dans l'autre.

M. Raynauld: Juste un peu.

M. Grégoire: Oui. Si on avait mentionné d'autres points que les investissements supplémentaires au coût d'achat... cela rentre donc dans le coût d'achat, indirectement si l'on veut. Les renseignements demandés aujourd'hui appartiennent à la compagnie Asbestos et si l'Opposition veut les avoir, elle n'a qu'à les demander à la compagnie Asbestos Corporation, puisque c'est elle qui fait ces investissements. Le député de Saint-Laurent nous a justement cité les dépenses qui étaient en cours et celles qui devaient être faites par l'Asbes-tos, qui sont évaluées et qui existent. C'est demander, par une motion, au ministre de déposer les études faites par une compagnie à son intention. Je crois que ce n'est pas réglementaire que de demander un tel document.

M. Forget: M. le Président, cette argumentation est cousue de fil blanc puisqu'il est clair que, dans la première motion, qui effectivement a été défaite, nous demandions une évaluation du coût d'acquisition des actifs actuels. Nous ne deman-

dions pas le coût d'acquisition de tout actif hypothétique pouvant un jour exister et être la propriété de la même compagnie.

Comment, de quelle façon, par quel procédé comptable le gouvernement en arriverait-il à déterminer le coût d acquisition de la société, c'est une chose que l'on ne saura jamais, M. le Président, et sur laquelle la commission ne peut pas présumer s'être prononcée parce que justement le ministre ne nous a pas donné les renseignements voulus pour qu'on puisse dire: Dans les renseignements sur l'évaluation de la compagnie, le gouvernement a tenu compte des nouveaux investissements. Comme c'est le silence total, on ne peut pas présumer que dans le coût d'acquisition de la société, on tient compte d'investissements futurs, hypothétiques, qui peuvent consister dans ceux que je mentionne dans cette nouvelle motion ou qui pourraient consister dans l'acquisition de filiales d'une autre mine, de propriétés foncières additionnelles, etc. On peut faire toutes sortes de suppositions quant au futur, quant à l'avenir de cette société, une fois qu'elle sera propriété du gouvernement, mais il serait assez fantaisiste de supposer que, dans l'évaluation du coût d'acquisition d'une société aujourd'hui, à ce moment-ci, on va prendre en considération toute cette série d'hypothèses. Si, encore une fois, le ministre avait déposé des études, on pourrait soit confirmer, soit infirmer ce que j'avance, mais, comme il a refusé de les déposer, la supposition, l'hypothèse la plus normale, la présomption la plus normale, c'est que ces études portant sur les actifs actuels et que, s'il y a d autres informations qui doivent s'y ajouter, elles doivent faire l'objet de demandes supplémentaires.

D'ailleurs, le libellé même de la motion, M. le Président, indique très bien qu'il s'agit d'investissements supplémentaires et hypothétiques dans le fond, puisqu'il pourrait se trouver que, par suite de toute une série de circonstances, ces investissements ne soient pas nécessaires. On pourrait également demander quelle est l'évaluation que le gouvernement fait des déficits futurs de cette société puisque le ministre a parfois exprimé l'avis que la fabrication au Québec n'était pas rentable, etc., donc il faudrait des mises de fonds. Mais on ne peut pas présumer qu'on va déduire cela du coût d acquisition de la société Asbestos, à moins que le ministre ne dépose l'étude où il démontre qu'il en a tenu compte. Mais, à défaut, de cela, on doit présumer qu'il va se fier aux actifs actuels et non pas à des actifs hypothétiques et que la valeur dont il n'a pas voulu nous parler, de toute façon, mais la valeur d'acquisition n en tient pas compte, ce qui justifie, je pense, I'admissibilité de cette motion qui traite d'un sujet qui n'a pas été l'objet d'une discussion préalablement. D'ailleurs, au niveau même de la justification, pour ne pas produire les données, c'est une justification d'un ordre tout différent, alors qu'au niveau de l'évaluation, le ministre pouvait, à la limite, dire qu il ne voulait donner aucune information qui permette de donner une valeur élevée aux actifs. Dans le cas d'un investissement à venir, qui diminue, dans le fond, l'utilisé ou l'intérêt des actifs qui feront

I objet de l'acquisition, I'argumentation est complètement à l'inverse, ce qui montre bien le caractère distinct des préoccupations et le caractère distinct des données demandées. Pour ces raisons, M. le Président, je pense humblement qu il s agit d un sujet nouveau, qui se rattache, bien sûr, à I'objet visé par l'article 4, qui est l'acquisition et I exploitation de sociétés minières, ce qui est donc pertinent à l'article 4, mais qui n'a pas déjà été tranché par notre débat sur la motion précédente.

M. Raynauld: M. le Président, je voudrais seulement ajouter quelques points pour renforcer la même argumentation. En ce qui me concerne, je ne vois pas du tout comment cette motion peut être assimilée à la précédente. Si, dans un premier temps, je demande combien coûte cette table-ci et si, dans un deuxième temps, je demande quelles pourraient être les utilisations qu'on pourrait faire de la salle et que je demande quel est le coût de cela, c est bien évident que ce n'est pas la même chose. C'est complètement différent. C est tellement différent — et je pense qu'on n'a pas compris quelle était la nature de la motion — qu il n est pas pensable non plus qu on puisse dire que ce que nous demandons, ce sont des informations qui appartiennent ou qui sont de la société Asbestos Corporation. Il s'agit des investissements que le gouvernement devra faire, pas des investissements d'Asbestos Corporation, s'il achète Asbestos Corporation. Quels seraient les investissements supplémentaires que le gouvernement devrait faire pour améliorer les installations périmées. Donc, cela n'a rien à voir avec Asbestos Corporation, à ce moment-là, ce sont des estimations que le gouvernement devrait avoir, dont il devrait disposer à présent pour savoir si l'investissement qu'il fait dans la société Asbestos est un investissement rentable ou non. Donc, il me paraît très clair qu'il s'agit de deux motions complètement différentes et qui se rapportent également bien à l'article 4.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le député de Richmond. M. le député de Bourassa.

M. Laplante: M. le Président, contrairement au député d'Outremont, je crois que ces deux propositions sont presque identiques. Je vais vous lire l'article 63 du règlement, je pense que c'est assez clair. "1. Une motion ne doit pas soulever une question identique au fond à une question dont l'Assemblée a décidé pendant la session en cours à moins qu'elle n'indique des faits nouveaux. 2. Une motion ne doit pas soulever non plus une question identique au fond à une question qui est alors inscrite ou annoncée au feuilleton". Mais la première partie de l'article 63 couvre exactement les deux motions qu'on a devant nous, celle qui a été battue tout à l'heure, celle qui est présentée sous une autre forme, mais qui demande encore des évaluations.

Pour moi, elle ne peut être recevable, en vertu de l'article 63. Ce sont deux évaluations différentes.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, je crois qu'effectivement, votre position est assez délicate puisqu'on pourrait vous amener dans ce cas-ci à vouloir trancher, non pas simplement un aspect de procédure, mais une question de fond à savoir si l'amélioration des installations est un coût qui doit servir à l'évaluation du coût de la société Asbestos. En d'autres termes, s'agit-il d'un coût intrinsèque à l'évaluation de l'achat?

Il me paraît qu'il nous faut cependant reconnaître qu'effectivement, il s'agit bien là d'une seule et même chose. En effet, je prendrai une certaine analogie. Si vous devez choisir d'acheter une voiture, que cette voiture a été accidentée, il ne fait aucun doute qu'il existe une énorme différence entre le prix d'une voiture accidentée et exactement la même voiture avant l'accident. Par conséquent, vous serez nécessairement obligé, au moment où vous évaluez le prix d'achat de la voiture, de bien indiquer l'étendue des dommages qu'a subis cette voiture, par conséquent, d'en tenir compte dans le coût d'achat. Il s'agit donc d'une seule et même chose.

M. Forget: On ne tient pas compte du coût d'achat de votre prochaine voiture.

M. Bérubé: Présentement, M. le Président, s'il n'existait pas au Québec de normes qui sont en vigueur, comme le député de Saint-Laurent l'a souligné, depuis janvier 1978, s'il n'existait pas de nouvelles normes qui rendent nécessairement les transformations à ces usines obligatoires, je pense que l'Opposition serait justifiée de parler d'un coût supplémentaire que l'Etat pourrait vouloir ou ne pas vouloir encourir lors de l'achat.

Cependant, comme la société devra se conformer à la réglementation, elle doit donc encourir ses frais et nous devons en tenir compte lors de l'achat de l'entreprise. Il m'apparaît qu'effectivement, on ne peut pas dissocier les coûts requis par la modernisation de cette société du coût d'achat de l'entreprise.

M. Godin: M. le Président, je voudrais faire une intervention, est-ce que j'ai le droit de parole?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'avais l'intention d'en donner un à chaque parti, mais j'en ai accordé deux à l'Opposition officielle.

M. Godin: Cela sera très court. Je trouve que la motion est irrecevable un peu pour les raisons mentionnées par le député de Saint-Laurent, parce que premièrement, elle est très hypothétique. Nulle part devant nous et vous, comme président, n'avons-nous la preuve que les installations en question sont périmées. On a lu ça dans les journaux...

M. Raynauld: M. le ministre vient juste de dire le contraire.

M. Godin: ... le ministre a dit le contraire, mais il n'y a aucun document déposé ici, M. le député d'Outremont, vous le savez très bien.

M. Raynauld: ... des documents non officiels.

M. Godin: C'est une hypothèse.

M. Forget: C'est légitime comme question.

M. Godin: Deuxièmement, M. le Président, est-ce que j'ai toujours la parole?

M. Ouellette: II a parlé d'une auto qui avait mauvaise mine, ce n'est pas la même chose. (21 h 15)

M. Godin: On parle du respect des normes de salubrité dans l'usine.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'allais vous dire de ne pas être surpris quand vous êtes interrompu, parce que...

M. Godin: Non, parce que cela m'arrive à moi aussi, de temps en temps. D'accord. On parle des normes de salubrité, mais ces normes peuvent changer. Ce sont de pures hypothèses. Deuxièmement, je pense que, techniquement, la principale faiblesse de la motion, c'est qu'on parle de l'usine de la société Asbestos Ltée.

Or, cette société Asbestos Ltée a deux usines. L'une qui est très moderne, qui est à Asbestos Hill, l'autre qui est peut-être effectivement un peu vieillie...

Une Voix: Trois.

M. Godin: Trois autres, une qui est peut-être effectivement moins neuve qu'à Thetford et nulle part, M. le Président, dans la motion, ne précise-t-on de quoi il s'agit. Je peux vous dire que l'usine d'Asbestos Hill ne fera l'objet d'aucune modernisation, parce qu'elle est très moderne. Par conséquent, sur une technicité, je trouve qu'elle est vague, d'une part, parce qu'elle ne précise pas de quoi il s'agit exactement. On parle de l'usine dans son sens large, alors qu'il y en a quatre.

Enfin, comme le disait lui-même le député de Saint-Laurent, c'est extrêmement hypothétique. Comme nous n'avons rien devant nous qui nous permet de croire qu'il y a des installations périmées — je ne dis pas qu'il n'y en a pas ailleurs — je dis que, devant nous, il n'y a rien qui nous permet de croire que les installations sont périmées et que ladite usine ne respecte pas les normes. La motion est irrecevable, à mon humble avis. Merci, M. le Président.

M. Brochu: M. le Président, simplement pour enchaîner avec les propos de mon collègue de Mercier, qui fait référence à l'obligation que nous devions avoir devant nous des faits clairs et précis en ce qui concerne l'état des usines en question, que le gouvernement se propose d'acquérir, je vous rappellerai simplement à vous et au député

de Mercier que, devant cette commission, lorsque nous avons reçu les personnes impliquées, le Syndicat national de l'amiante, de même que les personnes qui sont venues à la demande même du député de Frontenac, soit M. Tanguay et son groupe, le maire de Thetford également, lorsqu'on leur a posé des questions nettes et précises sur l'état des installations d'Asbestos Corporation, les réponses ont également été précises et nettes, indiquant que ces installations sont vétustes et contraires à la salubrité, dans toutes les usines.

M. Godin: II y a une technicité qui rend la motion irrecevable.

M. Forget: Voulez-vous faire un sous-amendement?

M. Brochu: Merci, M. le Président. Je tenais à faire cette précision qu'au niveau des faits, ils sont clairement établis, non seulement au niveau de la presse, mais également au niveau de cette commission parlementaire.

M. Ouellette: Ce sont des ouï-dire.

M. Raynauld: L'argent est dans la caisse?

M. Grégoire: Le moulin a brûlé et l'assurance a payé. Il y a $21 millions dans le coffre-fort.

M. Raynauld: Je le sais, mais cela ne vous appartient pas.

M. Grégoire: Cela appartient à l'Asbestos Corporation.

M. Raynauld: Vous allez les payer. C'est bête de dire une affaire comme cela.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Raynauld: Vous allez les payer, les $21 millions..

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! Les travaux de la commission sont suspendus pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 17)

Reprise de la séance à 21 h 22

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, messieurs!

Je pense que la présente motion qui vient d'être présentée, dans le cadre de l'article 4, doit être étudiée en fonction de la première motion qui a été présentée au préalable et également en fonction de notre règlement.

Tout d'abord, quant à certains arguments qui ont été employés, je dois vous dire que le député de Mercier nous a déclaré qu'il n'y avait pas preuve devant cette commission que les installations étaient périmées. Voilà un terme un peu excessif; mais, le moins que l'on puisse dire, c'est que la présidence a pu se rendre compte, elle qui a siégé depuis le début et qui a entendu certaines personnes qui sont venues témoigner, que si les installations n'étaient pas périmées, du moins, les conditions de travail des travailleurs de la société en question, au point de vue de la salubrité, étaient telles qu'elles demandaient considération de la part d'un futur acquéreur.

Je ne peux pas tenir pour acquis ici que preuve n'a pas été faite que les installations étaient périmées. Je dois prendre les témoignages qui ont été rendus devant moi et je pense qu'il y aurait lieu, pour n'importe quel acquéreur, d'envisager possiblement une intervention dans ce domaine.

La deuxième question que je me pose et que je dois me poser: Est-ce que. face à ce qui a été dit, parce qu'on a soulevé I'"hypothétique de cette motion, cette motion est "hypothétique"? Dans un sens, c'est bien sûr qu'elle l'est, parce que le futur acquéreur est toujours libre ou non de faire des investissements supplémentaires à une installation.

D'autre part, la présidence ne peut oublier que les témoignages qui ont été rendus démontrent que, dans les circonstances — je ne veux pas porter de jugement sur le fond — qui ont été décrites, normalement, un acquéreur avisé aurait certaines améliorations à faire au niveau de la salubrité.

Raisonnant en bon père de famille, je me dis qu'il y aurait une possibilité ou, du moins, une probabilité même peut-être d'intervention, si minime soit-elle. C'est hypothétique, mais c'est également dans le domaine des choses probantes.

L'argument le plus sérieux me vient du ministre et du député de Frontenac qui me disent que la deuxième motion, c'est la première motion sous une forme déguisée. J'ajoute l'argument du député de Bourassa qui me parle de l'article 63, paragraphe 1.

Effectivement, il est vrai que, normalement, en affaires, lorsqu'un individu veut se porter acquéreur d'une propriété, il doit considérer, dans le coût d'achat, les investissements qu'il aura à faire. Normalement, comme cela se passe assez souvent, ces investissements sont déduits du coût d achat, de telle sorte que si on revenait à cette façon, on en viendrait nécessairement à dire que la deuxième motion est incluse dans la première motion qui a été défaite, puisque l'acquéreur normal se conduit de cette façon lorsqu'il achète une propriété ou une installation quelconque.

Cependant...

M. Godin: C'est quasiment du Ryan, M. le Président.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... nonobstant tout ce qui a été dit au préalable...

Une Voix: II l'a dit en riant.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... la présidence ne peut présumer de la façon que le futur acquéreur négociera l'achat de la société en question. Compte tenu d'une longue tradition dans le droit parlementaire qui veut qu'en cas d'indécision, qu'en cas de doute, on doive donner la chance au coureur, et comme la présidence a joué longtemps dans un sport qui s'appelle le base-ball, qu'il a arbitré dans ce sport et qu'il y a une règle en matière de base-bail qui dit que, lorsque l'arbitre du premier but est indécis, à savoir s'il doit déclarer l'homme retiré ou sauf, il doit le déclarer sauf, donc donner le bénéfice du doute au coureur...

M. Grégoire: II ne court pas fort!

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... toute comparaison étant boiteuse, mais l'analogie étant quand même faite, je déclare, pour tous ces motifs, la motion recevable et débattable.

M. Forget: Merci, M. le Président.

M. Bérubé: M. le Président, pourrais-je avoir une directive?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.

M. Bérubé: Dans la ligne du jugement que vous venez de rendre — je ne peux pas le remettre en cause, connaissant le règlement — vous semble-t-il que, si une autre motion devait être déposée, demandant par exemple l'évaluation de la valeur de la machinerie dans tel endroit de l'usine, cette motion serait à nouveau recevable, utilisant la même argumentation que vous avez invoquée, c'est-à-dire que vous ne pouvez pas présumer de la méthode que le gouvernement pourrait utiliser dans l'évaluation de l'entreprise, et que, par conséquent, il serait possible à l'Opposition de demander que l'on dépèce l'usine pièce par pièce et qu'on présente des motions individuelles qu'il faudrait toutes débattre les unes après les autres?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne pense pas que ce soit l'esprit de la décision, mais je voudrais vous rappeler poliment une directive que nous avons eue, à savoir de ne jamais, au préalable, annoncer les décisions que nous rendrions sur des motions hypothétiques qui ne sont pas encore présentées.

M. Forget: On peut rassurer le ministre, M. le Président; on n'a pas l'intention de...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): J'espère que l'Opposition n'irait pas me mettre dans l'embarras à ce point.

M. Forget: On n'a pas l'intention de soulever des problèmes de ce genre pour la présidence.

M. Bérubé: Merci, M. le député de Saint-Laurent, vous me rassurez.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): D'ailleurs, une chose que je voulais dire. Une des questions que je me posais au début, et je ne l'ai pas mentionné tout à l'heure, c'est qu'à partir du moment où l'article 4 prévoit, non seulement la recherche, le développement, mais l'exploitation de gisements d'amiante, et comme l'exploitant d'une mine d'amiante a nécessairement à respecter des normes de salubrité, la salubrité devient, pour toute motion visant à parler de salubrité, presque indirectement acceptable, puisque l'exploitation d'une mine d'amiante amène des questions de salubrité. Je ne le dis pas nécessairement dans le cadre d'une motion d'amendement qui aurait pour but d'ajouter des articles ou de retrancher des articles, pour le bénéfice de l'Opposition, mais dans le cadre d'une motion générale, pour discuter de l'article 4; c'est pertinent à l'article 4 à cause du mot "exploitation ".

M. Grégoire: M. le Président, le député de Saint-Laurent, tout à l'heure, m'a demandé si on finissait de siéger à 21 h 30 ce soir. Je voudrais lui faire une proposition. Comme il a le droit de parler 20 minutes, le député d'Outremont 20 minutes, le député de Richmond 20 minutes, cela fait une heure. On pourrait ajourner les travaux tout de suite et se retrouver mardi; au lieu de 10 heures, ce serait à 10 h 30. A ce moment, il y aurait une heure d'écoulée. On présumera que vous avez parlé tous les trois 20 minutes, et on votera immédiatement. Je dois vous dire que nous autres, on sait exactement d'avance ce que vous allez dire tous les trois. Est-ce qu'on peut vous proposer cette suggestion?

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grégoire: On va vous laisser une heure et on reviendra à 10 h 30, au lieu de 10 heures, ce qui veut dire...

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Grégoire: ... une demi-heure aujourd'hui et une demi-heure mardi et, à 10 h 30, on votera comme si vous aviez tous parlé. Cela peut se faire.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, cela peut se faire, mais...

M. Grégoire: Vous déposerez vos discours par écrit au journal des Débats.

Une Voix: II n'y a pas de dépôt.

Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député d'Outremont. (21 h 30)

M. Raynauld: M. le Président, je pense que le député de Frontenac ne prend pas les choses bien au sérieux pour proposer des choses comme celle-là.

M. Grégoire: Au contraire.

M. Raynauld: Je pense que, plutôt que de s'attacher simplement à des vétilles relatives aux motions qu'on peut présenter, il devrait essayer de comprendre ce que nous cherchons à faire, ce que nous cherchons à avoir. Nous cherchons à obtenir des informations qui sont indispensables, lorsqu on prend une décision de l'importance de celle que le gouvernement entend prendre. Nous voudrions avoir un peu de clarté.

Cette motion, comme la précédente, a le même objectif, même si elle porte sur deux choses entièrement différentes, qui est celui de forcer le gouvernement, si c'est possible, à fournir des informations qui nous permettent de porter un jugement éclairé. Cel n'est pas difficile à comprendre. Cela ne met pas en cause les problèmes que le gouvernement peut avoir en vue de sa négociation avec Asbestos Corporation.

Ce que cela met en cause, c'est l'information des parlementaires qui ont à prendre une décision. Comment voulez-vous qu'on puisse approuver une opération, lorsque nous ne savons pas du tout ce que sont les sommes impliquées? Comment voulez-vous qu'on prenne une décision et que, vous, vous preniez une décision éclairée lorsque vous ne savez pas du tout quels peuvent être les engagements de la province de Québec face à un projet dont on peut bien désirer, en général, le voir se réaliser, mais qui dépend, évidemment, des sommes d'argent qu'on devra y consacrer, par opposition aux autres projets qu'on devra laisser de côté en cours de route?

On n'a pas des ressources illimitées. C est bien joli de dire: On va racheter le Québec. Moi aussi, en principe, je suis d'accord avec cela, mais par la suite on dit: Une fois qu'on aura accepté cela comme vue générale et comme principe, il va quand même falloir que quelqu un paie; il va falloir que les contribuables paient. Or, nous sommes déjà dans la province du Canada la plus taxée. On est déjà...

M. Godin: Attendez le 18 avril.

M. Raynauld: ... dans une province qui a de la difficulté à être compétitive sur les marchés extérieurs, parce que, justement, on a des coûts de production souvent plus élevés qu'ailleurs. On nous propose un projet qui, dans I immédiat, tout au moins, et pour de nombreuses années, ne crée pas un seul emploi, mais fait un transfert de propriété pur et simple. On voudrait savoir, à l'aide de cette motion, quels vont être ses engagements. Il faut se rappeler, même si aujourd'hui on peut être d'accord, qu'en 1968 ou 1969, lorsque le gouvernement a décidé d'acheter la DOSCO pour la transformer en SIDBEC, il a payé $60 millions. Il faut se rappeler qu'aujourd'hui on est rendu à environ $750 millions. Est-ce que les gens auraient accepté, s'ils avaient su qu'il ne s'agissait pas d'un investissement de $60 millions, mais de $750 millions, réparti sur dix ans? Est-ce qu'ils auraient accepté? On n'en sait rien. Je doute qu on aurait accepté. C'est cela être honnête envers une population.

M. Bérubé: Oui, M. le Président.

M. Raynauld: C'est dire à la population ce à quoi on s'engage.

M. Bérubé: Si le député d'Outremont me le permet?

M. Raynauld: Si c'est une question.

M. Bérubé: Oui, c'est une question, elle n est pas malicieuse, c'est que vous dites que les parlementaires de l'époque n'auraient sans doute pas accepté, à l'époque, mais il faut quand même retenir que les parlementaires ont voté dans le mandat de SIDBEC la construction du complexe sidérurgique intégré. Or, à partir du moment où on acceptait le principe d'un complexe sidérurgique intégré, il ne fait aucun doute qu'un complexe de cette nature ne peut certainement pas coûter moins de $1 milliard en argent 1978. Par conséquent, je suppose que les parlementaires devaient le savoir.

M. Raynauld: Vous, M. le ministre, peut-être savez-vous comment I'amiante va coûter, dites-nous le donc, si vous le savez.

M. Bérubé: $250 millions.

M. Raynauld: Ah oui! Est-ce que vous allez mettre votre siège en jeu, si cela dépasse $250 millions?

M. Bérubé: $250 millions d investissement, c est ce que la loi propose.

M. Raynauld: Oui, c'est final?

M. Bérubé: L'Assemblée nationale décidera.

M. Grégoire: S'il y avait à construire d autres usines de transformation, s il y avait une demande pour dix usines de transformation, cela donnerait de l'emploi.

M. Raynauld: Nous voulons nous attacher, dans cette motion, nous attacher à essayer d'obtenir du ministre les plans qui conduiraient à des investissements supplémentaires à l'achat de la société Asbestos Corporation. On n'est pas intéressé ici à découvrir, par des voies détournées, ce que coûte Asbestos Corporation, nous voulons savoir quels vont être les investissements nécessaires pour que cette usine ou ces usines soient rentables, pour que l'investissement que le gouvernement du Québec fait dans ce projet soit également rentable.

Ce qui me renverse, c'est que je ne comprends pas que le gouvernement n'ait pas une idée de ces sommes à engager et qu'il ne veuille pas nous éclairer sur ce sujet. Je ne comprends

pas non plus comment il se fait que ces députés qui sont de I'autre côté et qui sont, je pense, d'habitude, assez honnêtes pour reconnaître qu'ils ont peut-être également besoin d'information avant...

M. Godin: Merci pour: d'habitude!

M. Raynauld: ... de prendre des décisions, ne puissent pas même s'entendre sur des choses aussi élémentaires. Que le ministre nous dise qu'il n'y a pas d'étude, qu'il nous dise qu'il n'a pas l'information et on saura à quoi s'en tenir. Mais ce n'est pas là la position du ministre; la position du ministre est: On vote contre les motions. On dit: Ce sont simplement des mesures dilatoires pour retarder l'adoption du projet de loi. Ce n'est pas cela, ce ne sont pas des mesures dilatoires pour retarder l'adoption du projet de loi, même si cela a pour effet de le retarder, ce n'est pas pour cela. On voudrait que vous nous croyiez, on voudrait avoir des informations élémentaires. Quand on est en commission parlementaire sur les crédits, la pratique a voulu que le gouvernement soit tenu de dire aux parlementaires quel est l'élément 1 du programme 1; il est tenu de nous dire combien il paie pour les traitements, combien il va dépenser en capital; il est tenu de faire cela. Comment se fait-il qu'on ait un projet considérable, qui peut aller jusqu'à $250 millions, et qu'on ne soit même pas capable d'avoir une ligne d'information qui nous indiquerait ce à quoi ces sommes d'argent vont être consacrées, quels sont vraiment les engagements que nous prenons pour l'avenir. Est-ce excessif de demander à un gouvernement? Qu'il dise à l'Assemblée nationale et à la population ce à quoi nous nous engageons? On va nous dire: Est-ce que cela pourrait être des investissements hypothétiques? Ils sont peut-être hypothétiques à ce stade-ci, quoi qu'on sache, d'après toutes les informations que nous avons, que des investissements sont requis, ne serait-ce qu'à des fins de salubrité. Est-ce qu'on va entreprendre des investissements supplémentaires? Là encore, sans que jamais l'Assemblée nationale soit saisie de ces projets...

Lorsque SIDBEC, aujourd'hui, veut faire un investissement, comme SIDBEC en a fait un pour Fire Lake... On a eu une commission parlementaire qui a examiné cette demande. Je ne sais pas combien de temps cela a duré. Cela a dû durer quelques semaines pendant lesquelles SIDBEC a dû justifier une demande d'investissement. Il y a eu des rapports qui ont été faits. Cela a fait partie de plusieurs phases de développement, avec des plans de développement. — Oui, M. le ministre, pour votre information, il y avait des plans de développement de 1974. — Oui, il y a eu des plans de développement qui ont été soumis à l'Assemblée nationale. Il y a eu une longue commission parlementaire qui a discuté de ces choses-là probablement pendant des semaines, même si je n'y étais pas. On a étudié probablement chacun de ces éléments. Il y en avait peut-être 50 pour étudier l'opportunité de faire un investissement comme celui-là. Une décision a été prise après coup.

Qu'est-ce qu'on nous présente aujourd'hui? On nous présente une demande en blanc. On dit: $250 millions et laissez-nous cela, nous savons ce que nous pouvons faire. D'un côté, on va acheter Asbestos Corporation. Là, la position du gouvernement est simple. On dit: On achète au prix le plus bas possible. On achète Asbestos Corporation, point final.

On arrive à une autre étape. Il ne s'agit plus simplement d'acheter une société, il s'agit d'envisager des investissements supplémentaires. Pour quelle raison ces investissements supplémentaires ne seraient-ils pas soumis aux mêmes critiques, aux mêmes examens que n'importe quels autres qui sont toujours soumis à des examens par l'Assemblée nationale de façon régulière, systématique, ce qui remonte à plusieurs années?

On demande qu'avant de s'engager à donner des pouvoirs à une société, en vertu de l'article 4, on nous informe sur la nature des investissements que le gouvernement peut envisager de faire. Quels sont les besoins qui existent? Qu'est-ce que sera, là encore, même si cela déplaît au député de Mercier, le taux de rendement de ces investissements qui seront entrepris? C'est élémentaire pour qui veut prendre une décision un peu éclairée.

J'aimerais qu'à l'occasion de cette motion, le ministre nous réponde ou réponde à ces attentes que nous avons d'éclaircissement sur des activités vraiment importantes que cette société devrait entreprendre. C'est pour cela que nous voulons demander au gouvernement qu'il dépose ou qu'il distribue les études qui peuvent exister.

Je pense bien que la vérité du silence du gouvernement sur cette motion comme sur la motion précédente — et je pense que c'est cela qu'il faut souligner — c'est qu'il n'y a pas d'étude du tout. C'est pour cette raison que le gouvernement ne peut pas répondre, ne peut pas accepter des motions comme celle-ci. Je suis absolument convaincu, quant à moi, que si le gouvernement avait des études, il les aurait déposées. Parce que toutes celles qu'il nous a déposées, même certaines qui étaient des torchons, ont été déposées à la commission parlementaire.

Là, il n'y a pas d'étude, c'est pourquoi on ne soumet rien, et c'est pourquoi le gouvernement prend une attitude absolument hautaine sur ces sujets plutôt que de reconnaître qu'effectivement, il n'y a pas eu d'étude faite. On ne sait absolument pas où on s'en va et on présente un projet de loi parapluie, une espèce de loi qui donne tous les pouvoirs possibles et imaginables. On y arrivera, je suppose, dans une session ultérieure, où on verra que l'article 4 permet à cette Société nationale de l'amiante d'entreprendre à peu près n'importe quoi, pourvu qu'il y ait une fibre d'amiante, même sur un train. Cela permet de faire n'importe quoi. La vérité est simplement ça.

On se donne une loi tellement générale qu'elle prévoit toutes les possibilités, toutes les éventualités, les études ne sont pas faites, on ne sait pas où on s'en va. On dit à la population du Québec: II nous faut $250 millions d'autorisation, nous allons adopter ça à l'Assemblée nationale et, ensuite, nous déciderons. Nous déciderons et ce sera à ce

moment-là, ce que le ministre a appelé cet après-midi, une décision administrative.

Une décision administrative, c'est facile ça. On n'a qu'à déclarer que c'est de nature administrative et le gouvernement a toutes les autorisations possibles et imaginables, il n'a plus besoin de l'Assemblée nationale. Ce n'est pas la notion que j'ai d'un certain respect des institutions parlementaires que nous avons. Je pense qu'ici, on ne pourra jamais le souligner assez. Si le gouvernement répond de la même façon à cette motion qu'à la motion précédente, je pense que ce sera notre devoir, à nous et aux media d'information, de dire à la population qu'effectivement, il n'y a pas d'étude, il n'y a pas eu de réflexion qui a précédé l'adoption de ce projet de loi. Le gouvernement en prendra la responsabilité et en tirera les conséquences.

Le Président (M. Ouellette): M. le député de Mercier.

(21 h 45)

M. Godin: M. le Président, sur l'intervention précédente, il est sûr que toute entreprise achetée par qui que ce soit, que ce soit un gouvernement, un citoyen ou un groupe de citoyens, implique que si besoin en est, il y aura des réparations faites. Le député d'Outremont laisse entendre que nous qualifions ces motions de mesures dilatoires. En ce qui me concerne, non. Je pense que les motions précédentes sur l'article 1 et sur l'article 2 étaient effectivement dilatoires et portaient sur des détails fort peu impotants quant au fond de ce projet de loi.

Mais les deux motions que nous avons sous les yeux sont des motions qui sont, à mon avis, beaucoup plus sérieuses et qui touchent le fond de la question en ce qui concerne ce projet. Donc, je fais une distinction, quant à moi, entre les deux dernières motions présentées et les précédentes.

Je pense, par ailleurs, que ce n'est pas le lieu, au moment où on étudie un projet de loi, où se poser des questions sur ce que coûterait la peinture qu'on mettrait sur la voiture qu on a l'intention d'acheter. Il n'y a pas lieu de se poser ces questions ici. Tôt ou tard, vous aurez tout le loisir d'avoir sous les yeux ces documents dont vous parlez. L'équivalent des documents que vous avez eus sous les yeux dans le cas de SIDBEC, vous les aurez sous les yeux quand viendra le temps d'affecter les crédits à tel ou tel point de cette usine de la Société nationale de l'amiante au Québec.

Vous savez fort bien, connaissant la vie parlementaire comme vous l'invoquez, que c'est comme cela que cela va se passer et que, tôt ou tard, vous serez saisis de ces faits, de ces données, et que vous aurez le loisir d'interroger, si besoin en est, et vous aurez les réponses aux questions que vous poserez à ce moment-là.

Mais ce que nous faisons ici, c'est étudier le bien-fondé ou non de la création d'une telle société. Vous disiez tout à l'heure— et je suis d accord avec cela — de racheter le Québec. C'est ce que nous tentons de faire. Nous demandons un mandat. Nous ne savons pas le prix que nous al- lons payer pour Asbestos. Nous demandons un montant d'argent qui inclut le montant requis pour acheter Asbestos.

Au fond, vous prenez des moyens détournés pour savoir une chose que ni Asbestos ne sait actuellement, ni le gouvernement, puisque deux sociétés mandatées par les deux, vendeur et acheteur, font actuellement cette évaluation. Elles la font et, cela fera partie de l'entente qui interviendra entre les deux parties, M. le député d'Outremont, M. le Président. C'est dans ce sens.

Malgré que cette motion ait été admise — je n'a pas de commentaire à faire sur la décision — revenons au fond, ce n'est ni le lieu ni l'heure, à mon avis, M. le Président, de répondre à ces questions, puisque cela fait partie de l'étude qui est actuellement en cours par Kidder and Pea-body.

Ce que nous voulons savoir de l'Opposition, c'est si elle est d'accord pour affecter un budget à ce projet. Au fur et à mesure que les choses évolueront, elle sera saisie des raisons pour lesquelles le gouvernement procède de telle ou telle manière et affecte telle partie du montant global à l'achat de la compagnie Asbestos Corporation et de ses usines au Québec.

Si on le savait, on n'aurait pas confié le mandat à Kidder and Peabody d'évaluer les actifs et de négocier, puisqu'on le saurait. Mais on ne peut pas confier un tel mandat sans avoir cet instrument qui va nous permettre de réaliser ce projet, avec lequel l'Opposition, prise individuellement, est d accord, mais, dans son ensemble, est contre, pour des raisons que je ne comprends pas jusqu'à ce jour. Merci beaucoup.

M. Raynauld: J'aurais une question, M. le Président.

M. Godin: Si je peux y répondre, j'y répondrai.

M. Raynauld: Est-ce que vous savez que, lorsque le gouvernement a acheté la Shawinigan Water and Power, il n'y a pas eu de projet de loi comme cela avant. Il y a eu des études; on a eu ces études, il a annoncé l'achat et ensuite, il est allé l'acheter. Lorsqu'il a présenté un projet de loi, c'était en payant, pour acheter.

En tout cas, je voulais vous poser une question. Est-ce que vous êtes au courant de cela lorsque vous dites que c'est essentiel d'avoir un parapluie comme celui-là pour pouvoir acheter Asbestos Corporation?

M. Godin: Je ne dis pas que c'est essentiel, je dis que c'est le chemin que le gouvernement a pris.

M. Raynauld: C'est ce que vous avez dit.

M. Godin: Non, j'ai dit que le gouvernement a pris ce chemin-là.

M. Brochu: M. le Président... Le Président (M. Ouellette): Oui.

M. Brochu: Pour enchaîner avec les propos du député de Mercier, il faut quand même considérer que toute cette question de salubrité, lorsquon l'envisage sous l'aspect des coûts qu'elle va impliquer, reste un des facteurs mouvants et un des facteurs incertains, je dis bien un des facteurs, parce qu'il y a également d'autres facteurs dont l'ordre de grandeur, en termes de coût réel, est loin d'être connu actuellement. La question de la salubrité, en particulier, on sait comme cette question est délicate, importante et nécessaire à régler. On sait que, de toute façon, cela va coûter de gros sous, mais ce qu'on ne sait pas jusqu'ici, c'est combien. On est en droit de s'interroger sur l'ordre de grandeur, justement. C'est une autre zone qui reste floue dans l'approche que le gouvernement choisit avec son projet de loi no 70.

Le problème de la salubrité, qu'on le veuille ou non, c'est un problème réel. D'ailleurs, d'autres opinants avant nous en ont largement parlé, en ont largement fait état à l'Assemblée nationale et à différentes commissions.

M. Godin: On l'admet.

M. Brochu: Je pense que c'est de notoriété publique et tout le monde le reconnaît. Il y a donc un besoin réel de corriger ces situations, non seulement un besoin réel, mais également une obligation réelle, parce que le lendemain du jour où le gouvernement se sera porté acquéreur d'Asbestos Corporation, il va devenir, pour ainsi dire...

M. Godin: Un modèle.

M. Brochu: ... sa propre victime, jusqu'à un certain point. Il va devoir, à ce moment-là, ayant en main les plus vieilles installations du Québec, ayant cet apanage d'avoir les plus vieilles installations du Québec, se conformer à ses propres normes pour donner vraiment l'exemple aux autres.

M. Godin: Cela coûte moins cher, M. le député.

M. Brochu: Le gouvernement du Québec va donc devoir engloutir les sommes nécessaires, s'il veut tenir son engagement vis-à-vis des travailleurs, d'en arriver à des installations salubres, puisqu'il sera maintenant l'employeur; d'autre part, s'il veut également être le modèle d'un gouvernement employeur mettant en application à un niveau exact le nombre de fibres exigées par centimètre cube d'air, cela implique des normes de transformation au niveau des installations existantes.

On ne sait pas encore... Du moins, selon ce que j'ai constaté tout à l'heure, lorsqu'on a présenté la première motion pour avoir l'évaluation réelle des coûts d'achat de la société... On sait qu'il y a très peu de choses ou il ne semble pas y en avoir, puisqu'on ne dépose ni plan de financement, ni plan d'évaluation réelle... Je ne pense pas non plus qu'on soit en mesure de déposer une es- timation concernant les coûts réels que va causer éventuellement le fait de se mettre au diapason des lois actuelles du Québec dans la question de la salubrité.

On sait pertinemment...

M. Godin: Excusez-moi, M. le député, on veut vous refiler un article de Maclean.

M. Brochu: On sait pertinemment...

M. Godin: ... que c'est devenu la bible de l'Opposition. C'est flatteur pour mon ancien métier. Il reste que...

Le Président (M. Ouellette): M. le député de Mercier, à l'ordre!

M. Brochu: Je pense que je n'ai interrompu en aucun moment le député de Mercier.

M. Godin: Ce n'est pas une raison.

M. Brochu: Je l'ai écouté... Cela pourrait en être une, si vous respectiez les règles du jeu.

M. Godin: II n'y a pas de précédent là, voyons donc!

M. Brochu: M. le Président, je me permets de continuer.

Le Président (M. Ouellette): Vous avez la parole.

M. Brochu: Je vous ferai remarquer que j'essaierai même à l'avenir de ne pas l'interrompre dans ses prochains propos comme je l'ai fait dans le passé.

M. le Président, je vous rappellerai donc que, lorsque les témoins sont venus à la commission parlementaire, à notre demande, et certains groupes sont venus également à la demande du gouvernement lui-même, on nous a clairement indiqué l'état dans lequel se trouve une grande partie des installations d'Asbestos Corporation, et cela, de façon claire, nette et précise, que ce soit, comme je l'ai mentionné, le curé Tanguay, que ce soit le maire de Thetford, que ce soit le Syndicat de l'amiante, on nous a même décrit avec force détails, dans le dernier cas, l'état général des lieux et ce qu'il a comme atmosphère directe de travail. On nous a parlé des "drifts", c'est le jargon du métier. On nous a décrit ce qui se passe réellement dans ces mines. C'est de nature à nous faire réfléchir. Je me référerai, pour vous indiquer une espèce d'ordre de grandeur dans cette question de salubrité, aux propos que j'ai tenus en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, lorsque j'avais prévenu le gouvernement, du côté de la salubrité, en disant: Vous allez devoir engloutir des sommes considérables seulement à ce chapitre. A ce moment, je me rappelle, le député de Frontenac, fidèle à sa tradition, était sur les premières banquettes à côté du ministre des Richesses natu-

relies, ou devrais-je dire, que le ministre des Richesses naturelles était flanqué, comme toujours, du député de Frontenac. Quoi qu'il en soit, il était là. Lorsque j'ai lancé cet argument, en disant: Vous ne savez pas du tout quelles sommes astronomiques vous allez devoir investir, parce qu'un des moulins est complètement inadéquat, et vous allez même devoir le reconstruire à des coûts énormes, j'ai lancé un chiffre de $75 millions, à ce moment, le député de Frontenac m'a répondu, et c'est au journal des Débats: Ce n'est pas $75 millions, c'est $100 millions que cela va coûter pour reconstruire...

M. Grégoire: J'ai dit $80 millions.

M. Brochu: Mettons qu'on s entend pour $85 millions.

M. Grégoire: Non, le chiffre exact, $87 millions.

M. Brochu: En tout cas, on pourra vérifier au journal des Débats. Mettons $80 millions.

M. Godin: On ne l'a pas caché. M. Brochu: Si j'extrapole...

M. Grégoire: Je suis prêt à spécifier ce que je veux dire, par exemple.

M. Brochu: ... en me basant sur les données réelles, ce qui me laisse entrevoir $120 millions.

M. Grégoire: Non, je voudrais spécifier...

Le Président (M. Ouellette): A Tordre, s il vous plaît!

M. Grégoire: Quant à me donner un chiffre, je voudrais bien vous dire pourquoi je prends...

M. Brochu: Non, je vous ai dit ce que vous m'aviez répondu, parce que je vous avais indiqué, à ce moment, ce qui a été fait jusqu'à maintenant, dans le domaine de l'industrie de I'amiante, parce qu'il y a des industries qui ont quand même voulu se mettre au diapason des normes qui ont été établies, entre autres Canadian Johns-Manville, à Asbestos, qui ont investi des montants considérables pour se mettre au diapason, en termes de centimètres, en termes de normes, et ces choses. Elles ont donc l'expérience pratique de ce domaine. Dans les déclarations faites par rapport aux usines existantes a Asbestos Corporation, elles ont dit: On ne peut pas rafistoler en quelque sorte. Au niveau de la salubrité, il va falloir reconstruire cette usine. C'est à ce sujet que j'amenais à l'Assemblée nationale le fait que le gouvernement, se retrouvant propriétaire d Asbestos Corporation, devrait non seulement repeinturer — si je prends les propos du député de Mercier — mais jeter I'usine à terre et rebâtir, en somme, recommencer à zéro.

Déjà on peut prévoir un ordre de grandeur d'investissement énorme, qu'il soit de $70 millions, $80 millions ou $100 millions.

On nous demande maintenant de voter un projet de loi qui au chapitre de la salubrité, va nous amener, au lendemain de l'acquisition d'une entreprise à engloutir I'argent des Québécois d une façon qui doit nous mettre un peu la puce à l'oreille et nous faire réfléchir sérieusement sur cette question. Ce que le gouvernement nous demande, finalement, c'est un chèque en blanc, si je comprends bien.

C est pour cela que je vous dis que cela me surprendrait — parce que, en aucun moment au cours des débats, cela a été servi clairement — que le gouvernement ait des données précises. S il n'y en a pas sur l'évaluation approximative de la mine, d'une part, est-ce qu'il peut y en avoir davantage sur la question de la salubrité? N oublions pas une chose: le gouvernement n'a quand même pas — ce qu'on appelle— le "know-how "dans ce domaine. Ce n'est pas parce que du jour au lendemain le gouvernement va se retrouver propriétaire d'une mine qu'il va avoir automatiquement les spécialistes et la connaissance nécessaires pour passer à l'action...

M. Raynauld: II va être dans le club.

M. Brochu: D accord, il va être dans le club, mais cela ne veut pas dire qu'il va savoir jouer. C'est la différence.

M. Raynauld: II va tout savoir.

M. Brochu: Je peux entrer dans le Club des Canadiens demain matin.

M. Godin: Ce sont eux autres qui vont y aller.

M. Brochu: Mais je ne saurai pas nécessairement jouer comme les joueurs de la ligue nationale. C est discutable et cela peut être nuancé; c est évident. Pour vous dire que le lendemain matin de l'acquisition de cette entreprise, vous allez vous retrouver avec un problème sérieux; celui de la salubrité. Vous ne savez pas du tout actuellement de quel ordre de grandeur vous devez parler. C'est sérieux.

Ecoutez! Il vous a fallu un an avant de mettre en application en termes de loi simplement les données du rapport Beaudry à certains égards. D'un autre côté, quand on parle de la santé des travailleurs — on en parle depuis déjà quinze mois — vous n'avez même pas encore corrigé la loi des amiantosés, qui est une technique législative au point de départ, une volonté politique qui était également exprimée.

Comment voulez-vous, quand vous parlez d'acheter une mine, entrer dans ce fameux club sélect alors que vous ne savez même pas le coût de I'entreprise? Comment voulez-vous qu'on vous dise: Oui, messieurs, on va vous donner un chèque en blanc, alors que vous allez devoir recons-

truire complètement l'usine et que déjà on entrevoit un ordre de grandeur qui peut dépasser les $100 millions? C'est sérieux.

Je pense que le gouvernement du Québec ne doit quand même pas se présenter dans cette affaire comme un Pee-Wee. J'ai hâte de voir vraiment sur quoi vous vous appuyez. Là-dessus vous devez être en mesure parce que c'est vous qui avez fixé les normes de salubrité et qui allez devoir les appliquer. Vous avez sûrement des choses précises à nous dire là-dessus et j'espère que le ministre, sincèrement, va nous fournir les données. Je ne demande pas les derniers chiffres, par contre des données précises sur lesquelles nous appuyer et un ordre de grandeur assez juste, du moins en ce qui concerne cela. Parce que, en ce qui concerne Asbestos, je vous fais grâce de tous les articles qui ont été écrits là-dessus, vous avez pu les lire comme moi. La presse a été fort active sur l'état des installations là-bas, c'est de notoriété publique; je pense que vous n'avez pas le choix, le lendemain matin, vous tombez d'accord, un des membres du blub, mais vous tombez avec le gou-ret le plus — si vous me passez l'expression — "magané ", et vous n'avez pas encore créé d'emploi; alors vous allez devoir jouer au médecin avant de commencer à penser à créer de l'emploi. Vous nous avez demandé...

Le Président (M. Ouellette): M. le député de Richmond, il est 22 heures et les travaux de la commission sont ajournés à mardi 10 heures.

(Fin de la séance à 22 heures)

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