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Étude du projet de loi no 70
Loi constituant la Société
nationale de l'amiante
(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre,
messieurs!
Au moment où nous avons terminé nos travaux, nous en
étions rendus à un amendement du député de
Saint-Laurent et il avait la parole.
M. Bérubé: N'était-ce pas le
député d'Outremont?
M. Forget: N'y a-t-il pas des changements dans les intervenants,
M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Pour le moment, vous avez la
parole.
M. Forget: Non, mais est-ce qu'il n'y a pas des changements dans
les intervenants?
Le Président (M. Jolivet): Ah! Dans les intervenants?
Est-ce qu'il y a des changements dans les intervenants?
M. Forget: II y a M. Ciaccia remplaçant M.
La-rivière, M. Lalonde remplaçant M. Garneau.
Le Président (M. Jolivet): Donc, dans les intervenants, M.
Lalonde remplaçant M. Garneau (Jean-Talon) et M. Ciaccia
remplaçant M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue).
Objets de la société
Motion pour retrancher les mots "la recherche"
(suite)
Nous étions rendus à l'amendement proposé par le
député de Saint-Laurent et il avait la parole à ce
moment.
M. Forget: Merci, M. le Président. Je ne profiterai pas de
cette coïncidence pour souligner l'aveu fait hier par le ministre des
Finances dans le dépôt de son budget, l'inexistence de toute
prévision financière dans le budget du Québec pour
réaliser quoi que ce soit dans le domaine de l'amiante au cours de la
prochaine année.
M. Bérubé: Par conséquent, vous pouvez le
laisser passer sans problème. On peut peut-être adopter la loi
immédiatement, vous n'avez rien à craindre.
M. Forget: Cela pourrait devenir une de ces lois qu'on ne se
donne même pas la peine de sanctionner et qu'on laisse mourir gentiment
dans les archives de l'Assemblée nationale.
M. Bérubé: Alors, inutile de perdre notre
temps!
M. Forget: C'est ce qu'on pourrait croire, mais nous nous en
voudrions de donner un prétexte au gouvernement pour se vanter d'un
accomplissement quelconque dans un domaine où, manifestement, il n'a pas
lés moyens de sa politique.
Les considérations qui président à l'amendement en
question visent à s'assurer que les sommes importantes que le texte de
cette loi envisage de consacrer à l'exploitation d'industries de
transformation dans le secteur de l'amiante, puisque nous persistons à
croire que cela devrait être là l'objet de la politique
gouvernementale et non pas l'exploitation de mines ou toute autre
activité très accessoire et reliée de façon
très lointaine à la transformation, donc, que ces sommes soient
consacrées à cet objet principal plutôt qu'à
d'autres activités qui seraient de nature à le distraire de son
objectif principal qui, encore une fois, devrait être la
transformation.
Or, dans ce premier alinéa de l'article 4, on
énumère des activités relatives à l'extraction de
la fibre d'amiante du sous-sol. On parle de l'exploitation d'une mine, on parle
du développement du gisement et c'est là qu'on a la chose
la plus lointainement reliée aux objectifs de transformation de
la recherche de gisements d'amiante.
Donc, non content d'envisager l'achat d'une mine existante, le ministre
souhaite donner à cette société de l'amiante le pouvoir
d'entreprendre l'exploration minière, ce qui nous apparaît
absolument sans aucune justification. En effet, non seulement c'est une
distraction par rapport à l'objet principal, mais existe-t-il
déjà la SOQUEM, un organisme qui a l'expertise nécessaire
pour effectuer toute espèce de prospection, toute espèce
d'exploration minière. Il n'est pas nécessaire de constituer, au
sein d'une autre société, un groupe qui ferait double emploi avec
le premier, c'est un gaspillage de fonds publics. Si jamais la
société de l'amiante se trouvait à court de gisements,
à court de matière première, elle pourrait, par une
entente contractuelle avec SOQUEM, obtenir de cette dernière la
collaboration nécessaire pour l'exploration de nouveaux gisements.
Le ministre, dans un aparté à la fin de nos travaux
d'hier, a indiqué qu'il s'agissait non pas d'exploration, dans un sens
très large, mais d'une possibilité que devrait, selon lui, avoir
la société de l'amiante de faire de l'exploration ou de la
recherche de gisements dans des dépôts connexes à des
installations existantes dont elle serait déjà
propriétaire. Il s'agit, autrement dit, selon cette
interprétation restrictive, d'établir, dans te voisinage
immédiat de mines déjà en activité, des
réserves probables, des réserves prouvées par des
activités de forage, des activités d'exploration ou de recherche
de caractère géologique, toujours en extension d'activités
existantes.
Fort bien. S'il ne s'agissait que de cela, M. le Président, il ne
serait pas nécessaire de formuler le paragraphe a) comme il est
formulé, parce qu'on se rend très bien compte que
l'interprétation que donne le ministre à ce paragraphe est
immensément plus restrictive que les mots mêmes
utilisés
dans le projet de loi. Si l'on veut tout simplement permettre
l'exploitation continue d'un gisement déjà exploité, il
n'est pas du tout nécessaire d'utiliser un langage comme celui qu'on
utilise. Il est évident que l'exploitation d'une mine implique la
détermination de la direction dans laquelle le gisement nous
amène, d'une activité qui, évidemment
précède les foreuses et les pelles mécaniques. Il s'agit
de savoir dans quelle direction on s'en va, dans quelle direction la mine, les
galeries ou les puits doivent être orientés de manière
à pouvoir poursuivre le lendemain, la semaine après et dans les
mois subséquents, l'exploitation du minerai qu'on cherche, plutôt
que de roches stériles.
Il ne s'agit donc pas comme telles d'activités de recherche de
gisements. Il s'agit tout simplement d'activités de génie minier
reliées à l'exploitation d'une mine, et il n'est pas du tout
besoin d'un langage particulier pour couvrir les activités comme
celles-là. C'est le travail normal de l'ingénieur minier, du
géologue que de tracer des plans, de faire certains forages, de faire
certaines explorations de manière à s'assurer que leur chantier
d'extraction a la forme et l'orientation voulues et que son exploitation
continue d'être profitable.
La raison pour laquelle une explication comme celle qu'a fournie
spontanément le ministre n'apparaît absolument pas
appropriée pour justifier un tel langage. Quelle que soit sa valeur dans
ce contexte précis, il demeure que la loi propose quelque chose
d'entièrement différent. C'est-à-dire le pouvoir
général, sans restrictions et sans limites, de cette
société de s'engager dans l'exploration et la prospection
minière.
Or, on sait très bien que les intentions gouvernementales sont
une chose, mais que le dynamisme interne de ces sociétés
d'État en est une autre et que trop souvent les gouvernements
successifs, face aux activités et aux initiatives des
sociétés d'État, se sont trouvés devant des faits
accomplis. C'est après coup que, souvent, les gouvernements se sont
rendu compte que telle ou telle initiative prise par une société
d'État avait engagé celle-ci et, par conséquent, le
gouvernement sur le plan financier à des mines de fonds additionnelles
considérables. Il est important, il est capital, à mon sens, pour
que le contrôle de l'Assemblée nationale, le contrôle des
élus soit maintenu sur les activités des sociétés
publiques, que les pouvoirs ne soient pas décrits de façon si
large que toute l'initiative, que toute la discrétion quant à
l'envergure même des opérations ou même à leur nature
soient laissées au bon vouloir des cadres de ces entreprises. Encore une
fois, l'expérience de ce côté-là nous a donné
un certain nombre d'enseignements et, si l'on veut justement que l'on prenne au
sérieux cette initiative dans le domaine de l'amiante et surtout les
assurances que donne ou que prétend donner, à son sujet le
gouvernement, à savoir qu'il s'agit là d'une activité qui
est orientée par une réflexion profonde et sérieuse sur le
problème, il est capital que les pouvoirs de cette société
ne soient pas définis d'une façon si vaste que cela devienne une
devinette de savoir dans quelle direction le PDG de cette société
va vouloir entraîner le gouvernement et les contribuables à sa
suite.
C'est très facile dans un rapport annuel, tout à coup, de
dire: Évidemment, nos opérations courantes de la mine Untel vont
très bien et ont montré un surplus appréciable; cependant,
il est apparu au comité exécutif du conseil d'administration de
la société qu'il serait peut-être intéressant de se
lancer dans certains travaux de manière à s'assurer, pour les 50
prochaines années, de réserves adéquates de minerai. Pour
ce faire, on a consacré 60% du surplus annuel ou peut-être
même un peu plus à des travaux de prospection et d'exploration
dans telle ou telle zone et, malheureusement, on n'a rien trouvé. Cela a
coûté seulement $18 millions, mais qu'est-ce que vous voulez,
quand on se lance dans l'exploration, c'est un des coûts qu'il faut
pouvoir assumer.
C'est ce genre de fait accompli devant lequel à la fois le
gouvernement et l'Assemblée nationale peuvent très bien se
trouver. L'Assemblée s'y est trouvée déjà à
l'occasion d'activités d'autres sociétés d'État,
à l'égard desquelles le gouvernement actuel a dit qu'il
était en train de réfléchir. D'ailleurs, il
réfléchit depuis longtemps sans résultats palpables. Cette
réflexion porte sur les indicateurs de performance et les normes
auxquelles devrait être astreint par le gouvernement, par
l'Assemblée nationale, le fonctionnement des sociétés
d'État. Il serait important que, lorsqu'on s'apprête à en
créer une nouvelle, on n'y aille pas avec un pinceau de six pouces
là où un pinceau d'un quart de pouce pourrait suffire pour tracer
les contours de cette activité. Certainement, c'est un blanchis-soir
qu'on utilise, c'est un gros, gros pinceau. On peinture tout et on se dit:
À force d'en mettre, on va finalement tomber sur l'objectif visé.
Même si on ne le sait pas beaucoup au départ, on n'a pas
d'idée très précise, on verra par la suite. C'est une
forme de raisonnement très dangereuse. Encore une fois, il y aura
même si ce sont des sommes considérables, $250 millions
malgré tout, des obligations financières également
considérables, ce qui veut dire que la marge de manoeuvre qui sera
disponible pour de nouvelles initiatives, à l'intérieur de ce
capital autorisé de $250 millions, ne sera peut-être pas aussi
considérable qu'on voudrait le souhaiter au départ. Le coût
d'acquisition de la Société Asbestos va dévorer, va avaler
une grande partie de ces $250 millions.
Certains travaux directement reliés à cette acquisition,
certaines dettes ou certains passifs qui y sont reliés de façon
nécessaire vont dévorer une autre partie et, finalement, on se
retrouvera avec une marge de manoeuvre qui ne sera peut-être pas aussi
grande qu'on le voudrait. Dans une telle circonstance, il est très
dangereux d'ouvrir plus de portes à l'exploration minière qu'on a
l'intention d'emprunter éventuellement, alors qu'on a déjà
un moyen privilégié contrôlé à 100% par le
gouvernement pour effectuer l'exploration minière, c'est la
Société SOQUEM. Une expertise s'est présumément
constituée de ce côté. Au moins, dans certains domaines, on
en a eu cer-
tains fruits déjà, par exemple, par ce projet aux
Îles-de-la-Madeleine et certaines autres propriétés
minières qui semblent susceptibles d'un développement
éventuel.
Donc, il y a une expertise dans le domaine de l'exploration
minière. De grâce, ne créons pas, n'invitons pas une autre
société d'État à faire double emploi de cette
expertise. N'ouvrons pas une porte à cette société
d'État, elle sera fatalement incitée à emprunter. On aime
toujours mieux faire soi-même les choses qu'on a le pouvoir de faire
soi-même plutôt que de s'entendre avec une société
d'État qui est elle-même actionnaire mais qui est rivale et avec
laquelle on entretient certains sentiments de rivalité, etc.
C'est une espèce de souveraineté ou d'impérialisme
de tout organisme bureaucratique qui veut réaliser par ses propres
moyens des choses qui pourraient très bien être
réalisées par son voisin. C'est un désir,
évidemment, de grossir le plus possible. Je pense bien que tous ceux qui
sont familiers avec l'administration publique connaissent fort bien ce
phénomène. L'importance de chacun, parmi les cadres en
particulier, dépend directement et en proportion du nombre
d'employés, de la variété des activités
entreprises, et c'est un penchant trop humain auquel cèdent trop souvent
les administrateurs publics ou privés pour que l'Assemblée
nationale leur ouvre une porte si facilement. Je pense que le ministre, encore
une fois, dans les explications qu'il nous a données a sans doute
acheté, si l'on peut employer cette expression, trop rapidement un
raisonnement qu'on lui a présenté à savoir que, pour
être sûr que l'exploitation d'une mine pouvait se continuer
indéfiniment, il fallait bien faire un peu d'exploration à
même les gisements attenants à une mine déjà en
activité.
M. Bérubé: C'est ma formation dans ce domaine.
M. Forget: Vous voyez, justement, je pense qu'on a pris avantage
de la formation du ministre dans ce domaine pour lui vendre un argument
technique.
M. Bérubé: ... connaissance.
M. Forget: Lui vendre un argument technique, mais en lui donnant
une expression juridique dont il ne comprend pas le sens. Je ne fais pas de
reproche au ministre de ne pas être familier avec la rédaction des
lois...
M. Bérubé: ... excellent juriste, mais vous ne
comprenez pas le contenu.
M. Forget: C'est une faiblesse, bien sûr, qui est tout
à fait excusable. Il ne peut pas tout connaître, M. le
Président. On est bien content qu'il soit compétent dans la
façon dont on doit creuser les trous de mines. C'est une
expérience et une connaissance qui est fort utile, probablement,
à un ministre des Richesses naturelles. Encore que j'aie de
sérieuses réserves sur les ministres techniciens, M. le
Président.
M. Bérubé: Aux Affaires sociales, d'ailleurs, vous
vous y connaissiez beaucoup.
M. Forget: Oui, je n'étais pas médecin, remarquez,
et...
M. Bérubé: Dieu soit loué!
M. Forget: L'époque des ministres de la Santé
médecins et, j'espère, des ministres des Richesses naturelles
ingénieurs miniers devrait être révolue. Il reste que je ne
lui fais pas reproche des choses qu'il sait. Je lui fais cependant reproche des
choses qu'il ne sait évidemment pas, c'est-à-dire le sens qu'on
doit donner après coup à cette formulation du paragraphe a). On
va en faire essentiellement une autorisation générale, et la plus
large possible, pour la Société nationale de l'amiante de s'en
aller dans une aventure d'exploration minière, alors que les ressources
que l'État et que l'Assemblée nationale, éventuellement
peut-être, mettront à sa disposition ne lui sont pas
données pour cela. C'est une espèce de tromperie que de parler de
transformation, alors qu'on crée une société qui suivra la
pente naturelle de faire de l'exploration et des activités où on
peut consacrer énormément de fonds sans jamais avoir besoin de
les justifier trop précisément. (10 h 30)
Étant donné qu'il s'agit d'une société
d'État, étant donné que, selon l'expression du ministre
des Finances hier, un État paternel inépuisable et toujours
présent je pense que c'est littéralement la citation du
ministre des Finances se trouve là pour éponger à
la fin de l'année les besoins de trésorerie d'une telle
activité, je pense que c'est une tentation qui est beaucoup trop grande.
Il faudrait très certainement, M. le Président, accepter notre
amendement, supprimer la recherche. Encore une fois, les recherches sont
nécessaires dans les gisements qui sont contigus à une mine
existante. On n'a pas besoin d'un mot spécial pour autoriser la mine
à le faire. C'est implicitement compris dans la définition de
l'exploitation d'une mine de regarder dans quelle direction le gisement s'en
va, de manière que le lendemain, la semaine prochaine, le mois suivant
et l'année suivante, le trou de la mine ou la galerie s'en aille encore
dans la bonne direction. Je pense que c'est l'enfance de l'art. On n'a pas
besoin d'un langage spécial dans le projet de loi pour permettre
à une société de planifier son travail d'extraction de
minerai de façon intelligente.
Lorsqu'on parle de recherche de gisements, on parle d'une chose
entièrement différente. On parle d'un concurrent à SOQUEM.
Je pense bien que SOQUEM n'est pas un désastre, encore que ce ne soit
pas un succès éclatant, mais ce n'est certainement pas un
succès tellement grand, de toute façon, que l'on doive multiplier
les exemples de ce genre et fournir à la Société de
l'amiante l'occasion de placer, encore une fois j'y reviens et
j'insiste, parce que l'expérience nous a montré que
c'était un problème réel le gouvernement, placer
l'Assemblée nationale devant des faits accomplis en disant:
Écoutez, c'est dans nos pou-
voirs, l'Assemblée nationale a approuvé ce principe qu'on
faisait de l'exploration minière, on en a fait, on est
désolé, messieurs, on a dépassé $20 millions, cette
année, pour faire l'exploration, et cela veut dire qu'on a des besoins
de trésorerie, parce que nos profits, cette année, étaient
de seulement $12 millions ou de $15 millions. On a tout dépensé
et un peu plus pour faire de l'exploration, on n'a rien trouvé, c'est
bien dommage, mais c'est ce qui arrive quand on cherche, parfois on ne trouve
pas et puis, messieurs, donnez-vous $10 millions, parce que, autrement, on est
obligé de fermer quelque chose.
Ce genre de situation, on ne l'a pas vu une fois; on l'a vu des dizaines
de fois par d'autres sociétés d'État, et voilà que
le ministre, dans un contexte où on dit: Ah! maintenant, on va
être plus exigeant, on va être plus sérieux vis-à-vis
des sociétés d'État, ouvre les portes à gauche et
à droite pour se retrouver ou que ses successeurs plutôt se
retrouvent dans quelques années devant une situation analogue.
C'est, à mon avis, irresponsable. J'espère que tous les membres
de la commission et particulièrement les membres du côté
ministériel se rendront compte que c'est là une chose non
nécessaire, superflue, dangereuse et qu'il faudrait éliminer dans
ce projet de loi. En ce faisant, on ne sacrifie absolument rien aux objectifs
réels, aux objectifs véritables que devrait poursuivre, selon
l'aveu même du ministre, une telle société. C'est superflu,
ce qu'on veut y mettre, c'est une erreur de rédaction, c'est aux membres
de la commission d'en prendre conscience et d'y apporter une correction.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Richmond.
M. Brochu: Oui, M. le Président, très
brièvement, simplement pour indiquer qu'en ce qui concerne la recherche
comme telle incluse dans le projet de loi tel qu'il nous est
présenté actuellement, il me paraît, en ce qui me concerne,
que c'est quand même là un des éléments qu'on doit
conserver dans le projet de loi.
C'est pour cela que je ne peux accueillir favorablement la motion telle
que rédigée actuellement par le député de
Saint-Laurent. Au contraire, j'ai établi clairement les positions de la
formation que je représente en indiquant que nous sommes d'accord sur la
transformation de plus de produits d'amiante en sol québécois,
pour aller chercher si possible le réservoir d'emplois
supplémentaires qu'il peut y avoir là-dedans. On s'est dit en
désaccord avec le moyen que prend actuellement le gouvernement, soit
celui d'acquérir une entreprise au lieu de procéder directement
à la création d'industries visant la transformation
immédiate. Par contre, en ce qui concerne l'élément de la
recherche, je pense que cet élément est beaucoup plus vaste que
ce qui a été souligné tout à l'heure. Dans ce
sens-là, le gouvernement a peut-être une responsabilité,
celle de faire la promotion des nouveaux produits.
M. Forget: Est-ce que le député de Richmond me
permet une question? A-t-il bien lu la rédaction de cet
alinéa?
M. Brochu: Oui.
M. Forget: Le mot "recherche " est strictement lié, dans
cet alinéa, aux gisements. Il a tout à fait raison de
déplorer l'absence de préoccupation de recherche, mais c'est un
autre alinéa ou un autre article du projet de loi qui pourrait en
traiter, mais qui n'existe évidemment pas. Qu'on relise cet
alinéa. La recherche, l'exploitation et le développement sont
reliés aux gisements et seulement aux gisements. Il ne s'agit pas de
recherche industrielle, de recherche de marchés, etc.; il s'agit de
recherche de gisements. Si l'interprétation du député de
Richmond peut-être a-t-il obtenu un avis juridique
là-dessus était vraie, nous serions les premiers à
retirer notre amendement. Mais ce n'est pas cela; c'est la recherche de
gisements.
M. Brochu: Ah bon!
M. Forget: Je pense que c'est dans ce sens qu'il faut le
voir.
M. Brochu: Alors, est-ce que le ministre pourrait me dire si la
recherche ici s'applique directement à la recherche de nouveaux
gisements?
M. Bérubé: II faut bien comprendre que c'est la
recherche de gisements d'amiante.
M. Brochu: Bon, d'accord. Je remercie le député de
Saint-Laurent de m'avoir apporté cette précision. J'avais compris
le mot "recherche " dans un sens beaucoup plus large, englobant la recherche de
nouveaux produits, etc.
M. Bérubé: Cela comprend l'exploration pour des
gisements d'amiante.
M. Brochu: Je me dois donc de modifier ma position pour les
raisons que j'ai déjà eu l'occasion d'exprimer. Ce n'est pas le
rôle du gouvernement d'intervenir dans l'exploitation des gisements
d'amiante, ni non plus de doubler une fonction qui peut être remplie par
d'autres organismes actuellement en ce qui concerne plus
précisément la recherche lorsqu'on la définit, comme on
vient de le préciser, en fonction de la recherche de nouveaux gisements
d'amiante. Cela change évidemment tout le portrait.
À ce chapitre, je dois m'en tenir aux positions que nous avons
prises dans le passé à ce sujet-là et appuyer la motion
d'amendement qui a été proposée par le
député de Saint-Laurent, puisque ce n'est pas du tout le
rôle du gouvernement d'intervenir dans ce secteur, au contraire. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je crois que la première questior qu'on doit
se poser en discutant de cet article 4
c'est: Quel est le but de cette loi? À quoi le gouvernement
veut-il en arriver? On nous dit le gouvernement l'a dit, et il y a
même eu des représentations qui ont été faites par
ceux qui sont venus devant cette commission que le but principal de
cette loi est d'en arriver à la transformation des produits de
l'amiante. L'acquisition d'Asbes-tos Corporation, c'est une étape pour
en arriver à cet objectif. C'est ce que le gouvernement dit. Nous
prétendons, nous, que ce n'est pas nécessaire d'acquérir
Asbestos Corporation pour en arriver à la transformation.
Pour le moment, tenons-nous-en à l'objectif même du
gouvernement, aux déclarations du gouvernement et aux
représentations qui ont été faites par les syndicats, par
divers groupes qui sont venus ici. Ils nous ont dit: C'est inutile
d'acquérir la compagnie, la société Asbestos Corporation,
ce qui est nécessaire, c'est de faire de la transformation, de
créer des emplois et de générer des fonds pour le
Québec provenant de ce produit.
Si c'est l'objectif principal, cet objectif devrait se traduire dans le
projet de loi qui est devant nous. Malheureusement, M. le Président, de
la façon dont l'article 4 est rédigé, on ne peut, en
aucune façon, en venir à la conclusion que c'est là
l'objectif. On peut même en venir à d'autres conclusions; on nous
étale une série d'objets que la société va avoir
qui, du point de vue juridique, sont tous au même niveau d'importance; on
pourrait même dire que dans l'ordre de priorité dans lequel ils
sont rédigés, le premier objectif, la question de la recherche
des gisements d'amiante, est aussi important que le développement, que
l'exploitation et peut-être même plus important que la
transformation parce qu'on en arrive seulement à l'article b) à
parler de la transformation.
Dans le but d'exprimer et de traduire les intentions du gouvernement
dans un projet de loi, il faudrait, M. le Président, que la
rédaction de ce projet de loi reflète vraiment ce que le
gouvernement a l'intention de faire. On ne peut pas s'en tenir aux explications
que le ministre donne aujourd'hui parce que ce sont ses intentions, c'est son
interprétation. Une fois que le projet de loi sera adopté, ce ne
sera plus nécessairement le ministre qui va l'administrer, ce sera une
société qui aura des administrateurs qui vont regarder les
pouvoirs qu'ils ont, ils vont voir les droits, les responsabilités, les
obligations qu'ils ont et ils vont interpréter cela à la
lumière des droits que ce projet de loi leur donne.
C'est pour cela qu'il faut être assez clair, qu'il faut enlever
toute ambiguïté, il faudrait s'en tenir vraiment au but et aux
objectifs que le gouvernement a par le projet de loi. Par exemple, un autre
pouvoir qu'une compagnie pourrait avoir, ce serait d'acquérir une autre
société. Ce n'est pas un des buts principaux du projet de loi, on
le discutera plus tard, mais ceux qui ont rédigé ce projet de loi
le réalisent, l'acceptent et on voit que, plus tard, ils ont
inséré ce pouvoir dans l'article 16. Or, en lisant le projet de
loi, on voit que vraiment ce n'est pas un des principaux buts, pour ce projet
de loi, que de permettre l'acquisition d'autres compagnies, mais cela peut se
faire. Alors, il faudrait avoir les mêmes règles, le même
but dans la rédaction de l'article 4.
Il n'y a aucun doute que si on met sur un pied d'égalité
ces différents pouvoirs: recherche, développement,
transformation, ce qui va se produire c'est que, dans l'administration de cette
société, le danger sera que la société va s'occuper
également de tous ces champs d'activité. Il a été
souligné qu'il existe déjà une société pour
faire la recherche de gisements miniers. On a aussi dit: Cela n'a pas eu les
résultats qu'on aurait voulus, qu'on aurait pu espérer, mais il
ne faudrait pas prendre l'attitude que, si une société ne
réussit pas, la façon d'y remédier est de créer une
autre société pour faire la duplication de ce que la
première n'a pas réussi. Il faudrait plutôt porter nos
efforts vers l'amélioration de ces sociétés qui ont ces
droits et qui existent déjà. Alors, il y aura le danger d'une
duplication. Nous allons avoir deux sociétés d'État qui
vont avoir les mêmes pouvoirs. Ceux qui ont eu l'expérience, non
seulement de la fonction publique et des sociétés d'État,
mais d'autres sociétés, savent qu'on encourage la duplication,
chacun essaie de créer son petit empire. Alors, si une compagnie, une
société a le droit de faire de la recherche, ce sont des
pressions sur les administrateurs pour qu'ils s'occupent de cela. Une fois que
quelqu'un s'en occupe, la tendance humaine est de vouloir augmenter le
personnel, de demander un plus gros budget. La première chose que vous
allez voir, c'est que vous allez vous trouver dans une position où vous
allez changer complètement le but principal de cette
société; vous créez de la duplication, vous pouvez prendre
des fonds qui devraient être mis à la disposition de la
transformation et ils pourraient être utilisés à d'autres
fins.
Non seulement, comme l'a souligné le député de
Saint-Laurent, dans le budget il n'y a pas de montants alloués pour
l'acquisition de la société Asbestos, mais les gouvernements
n'ont pas des fonds illimités. Advenant le cas où il y aurait des
fonds alloués pour l'acquisition, ce sera un budget d'un certain
montant. Il faut que le gouvernement s'assure que les montants qui seront
versés pour la transformation, pour l'acquisition de la
société Asbestos vont être utilisés pour ces buts
principaux. Si l'on mêle les pouvoirs, si on donne ce genre de pouvoirs
additionnels, il est inévitable que, du budget qui sera donné
pour la société Asbestos, il y aura un certain montant qui ne
sera pas utilisé pour la transformation, mais qui va aller dans la
recherche de gisements et qui peut s'accroître, et réduire ainsi
les montants nécessaires pour le vrai but, la vraie raison d'être
de cette société. (10 h 45)
Pour avoir une loi qui reflète les intentions du gouvernement,
qui est claire dans ses objectifs, je crois qu'on devrait rayer les mots "la
recherche" dans le paragraphe a). C'est un pouvoir superflu en tout cas. Ce
n'est pas nécessaire de l'inclure dans la loi parce que vous l'avez
même dans le dernier paragraphe de cet article. Ce n'est pas
né-
cessaire d'inclure dans le paragraphe a) la recherche de gisements
d'amiante, parce que dans le dernier paragraphe vous dites: "À cet
effet, la société, aussi bien que ses filiales, peut s'associer
ou conclure des accords avec toute personne ou société, sous
réserve des autres dispositions de la présente loi". Alors, vous
avez le droit de faire un accord avec SOQUEM ou avec toute autre
société pour arriver à vos objectifs, à vos buts
principaux. Même dans le droit corporatif, vous avez certains pouvoirs
accessoires qui découlent des pouvoirs principaux que la
société aura. Mais, en l'incluant dans le paragraphe a), vous
l'enlevez d'un but secondaire, d'un objectif secondaire, et vous le mettez
comme priorité, vous lui donnez une importance principale. Je ne crois
pas que cela soit votre intention. Vous dites vous-même que ce n'est pas
votre intention. Alors, vous devrez concrétiser cela et enlever le mot
"recherche" dans le paragraphe a). Cela rendrait plus clair le but de la
société et éviterait beaucoup de danger une fois que la
société serait mise en place pour les administrateurs et pour
ceux qui auront à administrer cette loi.
Le Président (M. Jolivet): Le député
d'Abitibi-Est.
M. Bordeleau: M. le Président, sur la motion qui est
actuellement devant nous, à savoir qu'on devrait enlever le mot
"recherche", vous me permettrez de m'exprimer un tout petit peu car je ne suis
absolument pas d'accord. Surtout dans une région comme la mienne, je
pense que c'est d'autant plus important que la Société nationale
de l'amiante puisse faire effectivement de la recherche. C'est même
nécessaire parce que l'avenir de l'amiante est aussi dans de nouveaux
gisements. Le député de Saint-Laurent sait très bien qu'on
a des gisements connus dans la région du Nord-Ouest
québécois. On a deux grands gisements connus qui ne sont pas
encore en exploitation. Il y en a d'autres également, plus petits, qui
sont plus ou moins connus encore et qui ne demandent qu'à être
exploités un jour.
Prenons le cas de McAdam, dans le secteur de Chibougamau, où il y
a des réserves pour 90 millions de tonnes qui attendent d'être
développées. Il s'y fait actuellement de la recherche et de
l'exploration, si l'on veut. Dans cette région, il y a une entente qui
vient d'être signée au montant de $181 000 avec justement la
société McAdam, sur une propriété de
Campbell-Chibougamau. Imaginez-vous, si l'on découvrait des
réserves intéressantes dans ce secteur qui est situé
à côté de la réserve déjà connue de
McAdam, cela pourrait donner un gisement intéressant à
développer, à exploiter dans l'avenir. Cela pourrait aussi
être un endroit intéressant pour investir de la part de la
Société nationale de l'amiante.
Il y a un autre exemple que je voudrais vous donner, celui de la mine
Bolduc, qui appartient à Johns-Manville, qui a été en
exploitation quelque temps, mais qui est maintenant fermée à
cause apparemment du manque de réserves. Cela est un exemple pour vous
dire qu'actuellement on exploite, chez-nous en tout cas, des petits gisements,
ici et là, sans faire de planification, sans faire de recherche. De
sorte qu'il y a un concentrateur qui a été installé sur
place qui va rouiller là. Il n'est pas utilisé, il va être
perdu d'ici quelque temps si on ne fait pas autre chose avec et si on ne trouve
pas d'autres gisements alentour. Je pense que si on avait plus planifié,
si on avait fait des recherches plus considérables aux environs, on
aurait pu trouver d'autres gisements pour permettre une continuité dans
l'exploitation de l'amiante dans ce coin-là. M. le Président, il
faut absolument conserver le mot "recherche", parce que, comme je le disais au
début, c'est important que les nouveaux gisements qui attendent
d'être développés puissent recevoir l'aide ou qu'on puisse
connaître d'autres réserves situées à
proximité pour que l'exploitation future devienne plus
intéressante. Merci.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Saint-François.
M. Rancourt: M. le Président, je suis complètement
contre le fait d'enlever les mots "la recherche de nouveaux gisements". Pour
une raison très simple, c'est qu'en fait c'est exact qu'on peut dire que
SOQUEM peut faire de la recherche, mais la recherche que SOQUEM peut faire,
c'est d'une façon générale. Elle peut trouver beaucoup
d'autres métaux que l'amiante et si, dans ses recherches
générales, elle fait une découverte d'amiante, elle peut
refiler cette découverte à la Société nationale de
l'amiante et qui, elle, fera l'expertise spécifique concernant
l'amiante. Je crois qu'à ce niveau la Société nationale de
l'amiante devra elle-même s'installer. On peut trouver des objections
à cela, mais, comme vient de le dire le député
d'Abitibi-Est, il arrive que des petites mines fonctionnent plus ou moins ou
sont mises en opération et sont laissées en plan. S'il y avait
à l'intérieur du Québec un plan de recherche global de
nouveaux gisements, on pourrait peut-être rentabiliser de nouvelles
sources d'approvisionnement, peut-être pas demain matin, parce
qu'actuellement nous avons une certaine réserve. Mais, comme la
Société nationale de l'amiante, c'est à long terme, notre
approvisionnement doit être perçu comme quelque chose qui doit
s'étaler dans le temps. C'est à peu près tout pour
l'instant, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, juste deux minutes,
parce que je suis complètement estomaqué de voir que mes
compagnons d'en face veulent enlever le mot "recherche". Il me semble qu'en
1980, ce n'est pas un mot qu'on devrait enlever de notre dictionnaire ou de nos
projets de loi. C'est un mot, au contraire, dont on doit profiter. Si on ne
cherche pas, c'est vouloir se mettre un mur en face de soi. On travaille ici
et, tout d'un coup, on ne cherche plus; cela arrête là, le mur est
là et on bloque
là. Je ne comprends pas le raisonnement de mes compagnons d'en
face de vouloir se fermer les horizons. C'est cela, en fait, ils se ferment les
horizons en voulant enlever non seulement de la loi, mais de leur tête,
de leur esprit et de leur intelligence le mot "recherche". On ne cherche plus.
Où va-t-on aller si on cesse de chercher? C'est ce que vous dites:
Enlevez du projet de loi le mot "recherche". Cela veut dire quoi?
M. Ciaccia: Me permettez-vous une question? M.
Grégoire: Oui.
M. Ciaccia: Cela veut-il dire que vous voudriez enlever à
la société SOQUEM le pouvoir de faire des recherches pour des
gisements d'amiante?
M. Grégoire: Mon cher ami, je vais vous dire une chose:
Dans un pays riche en ressources naturelles comme le Québec, plus il y
en a qui vont faire des recherches, mieux ce sera. Les pays qui se
développement le plus dans le monde sont ceux qui consacrent le plus
haut pourcentage possible de leur produit national brut à la recherche.
S'il y a un pays qui se développe, ce sont les États-Unis. Voyez
le pourcentage de leur produit national brut qu'ils consacrent à la
recherche. Au Congo, on lui en consacre peut-être un peu moins.
M. Ciaccia: Au Congo, ils ont des sociétés
d'État plus qu'aux États-Unis.
M. Grégoire: Au Kenya ou au Cameroun, ils lui en
consacrent peut-être un peu moins.
M. Ciaccia: Votre exemple n'est pas tout à fait exact.
M. Grégoire: Je suis absolument abasourdi de voir que des
hommes supposément intelligents veulent tout à coup enlever le
mot "recherche" de notre projet de loi. Oui, c'est cela, le sens de la motion,
enlever le mot "recherche". Si on cesse de chercher, à un moment
donné, on va être bloqué.
M. Forget: Le député de Frontenac ne comprend pas;
on sent qu'on est sur la bonne voie.
M. Grégoire: Vous n'êtes certainement pas sur la
bonne voie quand vous voulez faire enlever le mot "recherche" du projet de loi.
Vous voulez que la Société nationale de l'amiante ne fasse pas de
recherche. Quand les gisements qu'on a à l'heure actuelle seront
épuisés, qu'est-ce qui va se produire? Cela, ce serait gouverner
sans voir plus loin que son nez, mais un bon gouvernement voit plus loin que
son nez.
M. Bérubé: Gouverner, c'est prévoir, mais
ils n'ont jamais été capables de prévoir.
M. Grégoire: Ils n'ont jamais prévu. Mais un bon
gouvernement voit plus loin que son nez et se dit: Tiens, là, il y a des
mines qui vont s'épuiser; on va faire de la recherche pour que les
gisements nouveaux arrivent en temps voulu. C'est ce que dit ce mot. Mais
cesser de chercher, c'est quasiment scandaleux de venir nous demander cela dans
un amendement. Je ne comprends pas. J'arrête là-dessus parce que
j'en suis tout abasourdi encore, de voir qu'on veuille enlever du projet de loi
le mot "recherche".
M. Ciaccia: Si vous aviez été ici à 10 h 15,
quand la discussion a commencé, peut-être que vous
comprendriez.
Une voix: Ah! C'est cela.
M. Ciaccia: C'est cela, le problème.
M. Forget: II arrive en retard!
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Bérubé: J'ai beaucoup apprécié les
remarques...
M. Ciaccia: II cherchait la commission parlementaire.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mont-Royal, à l'ordre.
M. Grégoire: Vous avez dit: Cessez de chercher.
M. Forget: II l'a trouvée, finalement.
M. Bérubé: M. le Président, j'ai beaucoup
apprécié les remarques du député de Saint-Laurent
tout à l'heure qui soulignait la difficulté, pour le ministre des
Richesses naturelles, de comprendre tous les aspects juridiques de ce projet de
loi. Il devait conclure qu'il lui apparaissait dommageable d'avoir au
gouvernement un ministre susceptible de comprendre comment fonctionne cette
industrie et comment fonctionne le secteur qu'il doit prendre en charge. Je
l'ai trouvé intéressant, parce que, effectivement, il a mis
l'accent sur l'importance de l'aspect juridique, sur l'importance de la
formule, sur l'importance de la forme et j'ai pu constater qu'effectivement, il
a une formation d'avocat. Personnellement, je pense que je ne saurais critiquer
cette honorable profession d'avocat. Mon collègue de Frontenac est un
avocat. Mais, ce qui caractérise cependant mon collègue de
Frontenac, c'est cette capacité de comprendre un problème;
l'intuition qui permet d'aller au fond des choses; cette intuition profonde,
cette intuition directe. Alors que, malheureusement trop souvent, chez certains
de nos collègues avocats, et je pense que le député de
Saint-Laurent en est un exemple peut-être un peu frappant, l'attention
porte davantage sur la formule, sur l'extérieur et souvent,
malheureusement, le contenu passe en second.
Je pense que la présentation de cette motion, malheureusement, a
trahi le député. Il est vraiment dommage que le président
n'ait pas jugé bon de la déclarer irrecevable pour sauver le
député de Saint-Laurent du ridicule.
M. Grégoire: C'est bien cela, votre amendement.
M. Forget: Des pitreries.
M. Bérubé: Malheureusement, je pense qu'il faut
reconnaître que, dans ce cas-ci, le recher-chiste du Parti libéral
ne semble pas vraiment comprendre le mécanisme profond à la base
de l'industrie minière. C'est sans doute ce qui explique pourquoi nous
avons attendu en vain des politiques minières et que cette industrie qui
s'est développée au Québec s'est développée
sans la participation de Québécois. Elle s'est
développée de façon à passer entièrement
entre les mains des étrangers. En effet, à la base du
développement minier, c'est l'exploration, car il ne fait aucun doute
que le territoire comme tel n'a qu'une potentialité virtuelle d'apporter
des richesses aux Québécois. Un gisement n'existe que lorsqu'il a
été découvert. Nous sommes assis littéralement sur
des millions de gisements, mais malheureusement nous ne savons pas où
ils sont.
Par conséquent, la seule façon pour le Québec de
véritablement développer son industrie minière, c'est de
trouver des gisements. Il faut donc les chercher. Or, le député
de Saint-Laurent n'a pas compris que pour trouver des gisements, il faut les
chercher. Enfin, j'espère...
M. Forget: On croyait que vous vouliez faire de la
transformation, on s'excuse.
M. Grégoire: II faut avoir de la matière
première.
M. Bérubé: J'espère qu'effectivement il va
comprendre qu'il est impossible de trouver des gisements d'amiante sans d'abord
les chercher. C'est dommage, mais il est assez rare que l'on trébuche
par accident sur un gisement d'amiante dont on connaisse exactement le volume,
la composition et les propriétés. Mais enfin, les talents qu'on
connaît, les talents d'avocat, évidemment, de notre
collègue de Saint-Laurent pourraient sans doute lui permettre, par, je
ne sais pas, la magie des mots, d'inventer des gisements sans avoir à
faire d'efforts de recherche. Cela explique en même temps, je pense, non
seulement l'absence de politique, mais l'absence de politique minière de
l'ancien gouvernement, en fait, qui a peut-être traduit non pas tant
l'absence de connaissance, puisqu'ils avaient certainement des fonctionnaires
qui pouvaient leur donner cette connaissance, mais je pense que c'est d'abord
une absence de volonté politique.
La notion même de recherche...
M. Forget: Est-ce que c'est pertinent, M. le Président, au
débat sur l'amendement de parler de toutes sortes de philosophies
politiques?
M. Bérubé: Faire de la recherche, c'est
l'expression d'une volonté.
M. Forget: Je pense que ce n'est plus très très
pertinent.
M. Ciaccia: J'invite le ministre à la pertinence.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît. La parole est au ministre.
M. Bérubé: Je dois dire que la proposition que nous
avons m'a plu. Elle m'a plu parce qu'enfin, pour la première fois, j'ai
pu constater que l'Opposition libérale reconnaissait l'importance pour
la Société nationale de se lancer dans l'exploitation
minière puisqu'elle nous recommande d'amender cet alinéa en
retirant le mot "recherche". Au contraire, ils disent bien: le
développement, l'exploitation de gisements d'amiante, cela nous
apparaît valable.
M. Forget: Je n'ai pas fini. Attendez. Ne vous réjouissez
pas trop vite.
M. Bérubé: C'est la première fois que le
Parti libéral, enfin, reconnaît que l'exploitation de gisements
est fondamentale à l'activité de la Société de
l'amiante. Je dois rendre témoignage à cette Opposition. Ils ont
reconnu l'importance de l'exploitation de gisements d'amiante. Ils n'ont pas
cru bon d'éliminer tout l'article, mais ils ont reconnu l'importance
d'exploiter. Malheureusement, ils n'ont pas compris; le député de
Frontenac s'est bien amusé, et je pense qu'il faut l'en pardonner,
à asticoter l'Opposition sur leur ignorance... (11 heures)
M. Forget: Et comment va la cousine?
M. Bérubé: ... du fonctionnement de l'industrie
minérale. Alors, ce qui est intéressant...
M. Forget: ... votre cousine. M. Grégoire: Cela
fait mal.
Le Président (M. Jolivet): Le ministre a la parole.
M. Bérubé: Ce qui est intéressant, c'est que
lorsqu'on parle de recherche et que l'on dit que la Société
nationale de l'amiante pourrait exploiter un gisement d'amiante, mais ne
pourrait faire d'exploitation, je m'interroge. Parce que, comment
pourrait-elle, par exemple, faire de l'exploitation en chantier de
manière à développer ses réserves? Là, on va
me dire: Oui, mais cela serait implicite, c'est-à-dire que la
Société nationale de l'amiante, comme l'a dit d'ailleurs le
député de Saint-Laurent et comme l'a repris le
député de Mont-Royal, pourrait certainement continuer à
développer ses réserves. Donc, on accepte que la
société natio-
nale puisse continuer à faire de la recherche, mais on voudrait
enlever les mots "recherche de gisements" de son mandat. Cela me paraît
un peu bizarre et cela me paraît, je pense, mettre encore plus de vague
que le projet de loi n'en présente, puisqu'on accuse ce projet de loi
d'être vague.
M. Forget: Est-ce que le ministre me permet une question?
M. Bérubé: Non. À la fin, il me fera plaisir
d'y répondre.
L'Opposition nous accuse d'avoir là un projet de loi qui est
vague, et, pourtant, ce que l'Opposition nous propose c'est d'enlever le mot
"recherche", mais, cependant, elle reconnaît dans son argumentation que
la société devra certainement continuer à faire des
recherches de manière à s'assurer un approvisionnement en
minerai. Cela me paraît un peu bizarre puisque l'Opposition voudrait
rendre ce projet de loi soi-disant vague encore plus vague. Vraiment, c'est
assez incompréhensible. Mais il n'y a pas que l'exploration en chantier
qui est importante, il y a également l'exploration hors chantier. En
effet, il va de soi que, si un gisement est en exploitation, il se produit
parfois que par suite de la structure géologique de nouvelles formations
puissent apparaître dans la continuité du gisement,
c'est-à-dire à quelques milles de là, à quelques
kilomètres, pour adopter le système métrique. Alors, on se
retrouverait dans la situation absolument intéressante de la
société minière qui ne pourrait, pour se protéger,
s'assurer des propriétés environnantes, s'assurer de la
possibilité de développer dans l'avenir son exploitation
minière, parce qu'elle n'aurait plus le droit de faire la recherche.
Elle devrait demander, sans doute à la Johns-Manville, de venir faire de
la recherche de gisements pour elle, de manière qu'éventuellement
elle puisse avoir de nouvelles réserves. Donc, cela me paraît un
petit peu farfelu, je pense. Ce qui me paraît également farfelu,
mais je pense que cela peut s'expliquer de par l'ignorance, qu'a d'ailleurs
voulu reconnaître le député de Saint-Laurent, qu'il a de
l'industrie minière. C'est que, dans le fond, il ne comprend pas ce
qu'est l'industrie minérale. L'industrie minière et
là, je devrai effectivement essayer de rétablir la
compréhension de l'industrie minière repose sur
l'exploitation d'une ressource épuisable. C'est donc dire que, par
définition, une mine devra nécessairement un jour fermer ses
portes, ce qui fait que toute compagnie minière qui a
développé des installations de transformation, des installations
de traitements doit donc, de façon continue, chercher de nouveaux
gisements de manière à maintenir au moins sa part du
marché sinon et je pourrais expliquer cela augmenter sa
part du marché. Par conséquent, nous nous retrouverions devant la
situation absolument aberrante d'une société qui serait
impliquée dans l'exploitation de gisements, dans le développement
de gisements, mais qui ne pourrait pas continuer à prendre de
l'expansion ou, au moins, maintenir sa position actuelle. Cela me paraît
complètement aberrant.
Ou bien on dit: Elle ne doit pas exploiter de gisements, auquel cas, en
toute cohérence, j'accepterais qu'elle ne puisse pas faire non plus
d'exploration, mais, si elle peut faire du développement et de
l'exploration, alors éliminer la recherche me paraît totalement
inexplicable, si ce n'est qu'en fait l'Opposition ne comprend pas vraiment le
mécanisme de l'industrie minière. Cela peut expliquer pourquoi,
effectivement, ils ont fait cette proposition et cela pourrait expliquer en
même temps pourquoi ils auraient avantage à se chercher un
ingénieur minier pour intégrer à leur formation, mais,
pour l'instant, ils semblent se spécialiser dans les journalistes.
M. Forget: Je n'en connais qu'un et c'est déjà
trop.
M. Bérubé: Mais...
M. Grégoire: Vous auriez de bonnes leçons à
recevoir. Si vous écoutez comme il faut vous allez en savoir plus
après.
M. Bérubé: Quant à l'hypothèse que
fait l'Opposition sur le danger qu'il pourrait y avoir pour SOQUEM de se voir
en conflit avec la Société nationale de l'amiante, c'est
là un peu tiré par les cheveux. En général, au
niveau de l'exploration minière à nouveau, je me
permettrai de donner certaines indications au député de
Saint-Laurent et au député de Mont-Royal les
sociétés qui font de l'exploration ne doivent pas dépasser
un certain seuil, une certaine taille. En effet, l'exploration minière
demande beaucoup d'ingéniosité. Généralement, elle
se fait mal a l'intérieur de grosses structures administratives
considérables et les compagnies minières, d'une façon
générale, ont tendance à multiplier le nombre de leurs
sociétés d'exploration de manière, justement, à les
maintenir à une certaine taille. Donc, en deçà d'un
certain budget d'exploration acceptable.
M. Forget: Une lueur de bon sens!
M. Bérubé: Ceci peut expliquer pourquoi il peut
être aberrant, pour la société SOQUEM, de devenir l'unique
gérant de l'exploration dans le domaine de l'uranium, dans le domaine
des métaux de base, dans le domaine des minéraux industriels,
dans le domaine de l'amiante, ce qui amènerait SOQUEM, possiblement,
à assumer une taille qui la rendrait incompatible avec un certain
dynamisme à l'intérieur d'une société
d'exploration. Par conséquent, d'une part, il me paraîtrait
personnellement dangereux qu'on veuille confier à SOQUEM le mandat de
faire toute l'exploration au Québec. D'autre part, il faut
reconnaître qu'il existe des spécialités.
M. Forget: Deuxième lueur!
M. Bérubé: À titre d'exemple, l'analyse
d'une carotte contenant un échantillon d'amiante est assez difficile
à faire. Dans le cas du cuivre, ceci s'avère assez simple puisque
vous avez une taille,
une dimension de minéralisation. Vous envoyez votre
échantillon à un laboratoire, on vous en donne la teneur, et ceci
vous permet de déterminer des volumes. Ce qui se produit dans le cas de
l'amiante, c'est tout autre chose. En effet, au moment du forage, on a des
problèmes d'attrition, on a des problèmes de présentation
de la veine par rapport à la carotte; on a donc des problèmes
excessivement sérieux d'interprétation de
l'échantillonnage. Par conséquent, la technique même de
l'exploration dans le domaine de l'amiante est une technique assez
particulière.
Il me paraîtrait assez amusant de dire que le Québec,
enfin, aurait décidé d'intervenir dans l'amiante; que le
Québec, enfin, aurait décidé que tous ses gisements
d'amiante ne passeront pas nécessairement, de façon automatique,
entre les mains de l'étranger, mais que des Québécois
auraient la possibilité de faire du développement, eux aussi, de
l'amiante, mais que ces Québécois à qui le gouvernement,
à qui l'Assemblée nationale aurait confié ce mandat ne
pourraient pas, eux, prêter leur assistance à des entreprises qui
voudraient les amener dans un secteur comme celui de la recherche sur
l'amiante.
À titre d'exemple, récemment, nous étions
approchés par des prospecteurs qui font du travail dans le secteur de
l'amiante. Le député d'Abitibi-Est a souligné la
présence du McAdam. Effectivement, ceux-ci, tout récemment,
signaient une entente de développement, d'exploration avec le
gouvernement du Québec. La clause de cette entente, évidemment,
est que nous nous réservons un certain pourcentage de la
propriété advenant une découverte, pourcentage que le
gouvernement pourrait confier à un mandataire. Nous serions devant la
situation totalement aberrante que nous aurions un mandataire qui
connaîtrait, lui, l'amiante, mais nous ne pourrions lui confier cette
participation que nous aurions acquise; au contraire, nous devrions la
transférer à un autre mandataire du gouvernement qui, lui, ne
connaît rien à l'amiante. C'est assez amusant, comme contradiction
interne, cette proposition de l'Opposition libérale.
En d'autres termes, selon la philosophie de l'Opposition
libérale, il faudrait toujours donner le mandat d'établir des
politiques gouvernementales à ceux qui ne connaissent rien au domaine,
éviter de confier un ministère des Richesses naturelles à
quelqu'un qui connaît l'industrie de l'amiante, qui connaît
l'industrie minière, éviter de donner le soin de
développer des gisements, le soin de découvrir des gisements
à la société qui connaît ce domaine, mais toujours
faire en sorte qu'on donne cela au plus incompétent. Je comprends, dans
ces conditions, pourquoi l'Opposition libérale a perdu le pouvoir le 15
novembre.
C'est une tendance contre laquelle il faut s'élever. Je pense que
c'est une mauvaise approche de façon générale. Il faut,
malheureusement, M. le député de Saint-Laurent M. le
député de Mont-Royal, prendre l'habitude de confier les mandats
que le gouvernement veut confier à ses sociétés
d'État de préférence à des sociétés
qui connaissent quelque chose au sujet. La proposition qui nous est faite nous
apparaît une aberration mentale que j'attribuerai, en fait, à une
connaissance insuffisante du domaine minier et que, par conséquent,
j'excuserai volontiers, mais, M. le Président, vous comprendrez que nous
devrons certainement voter contre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
pourrait nous dire si, selon lui, la société Asbestos,
actuellement, se livre à des activités d'exploration
minière dans le sens où il l'a utilisé,
c'est-à-dire des activités qui dépassent le
périmètre de son gisement de Thetford Mines?
M. Bérubé: Oui, il me fait plaisir de vous dire
cela. La société Asbestos d'ailleurs, le
député de Richmond pourra le corroborer, ainsi que le
député de Frontenac s'est acquis un très grand
nombre de propriétés dans la région de Thetford, je dirais
même entourant les propriétés de ses compétiteurs,
de telle sorte qu'elle est sans doute en mesure, pour une bonne part, de...
M. Grégoire: D'étouffer.
M. Bérubé: ... non pas d'étouffer comme tel,
mais certainement de contrôler le développement. Si elle l'a fait,
c'est certainement avec l'idée qu'elle devrait éventuellement
percer un trou pour aller faire du forage, aller faire de l'exploration. Non
seulement cela, mais effectivement la société Asbestos a
certainement fait de l'exploration, puisqu'elle a développé son
gisement d'Asbestos Hill. Je regrette d'avoir à souligner cela au
député de Saint-Laurent, qui ne savait sans doute pas que la
société Asbestos Corporation avait développé
je le lui ai expliqué dans le nord du Québec, à
Asbestos Hill, un gisement d'amiante. Effectivement, il n'y en avait pas
autrefois.
M. Forget: Cela ne répond pas à la question.
M. Bérubé: Elle a, évidemment, fait de
l'exploration pour développer le gisement et elle en fait
également dans les pays étrangers.
M. Forget: Non. M. le Président, j'ai posé une
question fort simple au ministre.
M. Bérubé: Vous avez eu une réponse
directe!
M. Forget: Non, j'ai eu une espèce de dissertation qui, en
aucune façon, n'était une réponse à ma question. Je
sais fort bien qu'elle est propriétaire de terrains à Thetford
Mines. Je n'ai pas demandé quel était le propriétaire des
terrains entourant les mines de la société Asbestos à
Thetford Mines. J'ai posé au ministre une question de fait, et il vient
de nous faire sa longue dissertation sur l'intérêt, pour toute
société minière parce que c'était une
déclaration très générale qui ex-
ploite une mine, de se livrer, et elles s'y livrent de fait, à
des activités d'exploration minière. On ne parle pas, bien
sûr, des activités reliées au prolongement de son
gisement.
M. Bérubé: Je m'excuse, M. le député
de Saint-Laurent.
M. Forget: J'aimerais que le ministre nous apporte des
clarifications et qu'il nous indique, dans le cas de la société
Asbestos, si effectivement, en dehors des forages que la société
fait, bien entendu, alentour de ses puits actuels pour voir dans quelle
direction les veines s'en vont, dans quelle direction il faut qu'elle poursuive
son exploitation, dans le territoire du Québec en général
ou ailleurs dans le monde, il y a des équipes de géologues et
d'ingénieurs miniers qui font de l'exploration et qui sont des
employés de la société Asbestos.
M. Bérubé: Comment cette société
Asbestos Corporation aurait-elle pu trouver son gisement d'Asbestos Hill?
M. Forget: Ce n'est pas une déduction que je demande au
ministre; je lui demande de nous affirmer si, selon lui, oui ou non, il y a de
telles personnes à l'emploi de la société Asbestos.
M. Bérubé: Présentement, la
société Asbestos, en Algérie, effectue des travaux
d'échantillonnage de gisements potentiels d'amiante. On ne peut pas dire
que ce sont des gisements, mais elle fait du travail dit de recherche de
gisements en Algérie, à titre d'exemple. Vous m'avez
demandé s'il y en avait ailleurs; alors, je vous dis même qu'elle
a des géologues en Algérie; elle a également des
géologues au Québec. Elle a concentré son effort,
récemment, sur l'étude systématique de ses
propriétés dans la région de Thetford, dans la
région d'Asbestos Hill, de manière à connaître les
gisements. Cela s'appelle de la recherche de gisements, cela s'appelle de
l'exploration. Vous avez de l'exploration en chantier, de l'exploration hors
chantier. De là à vous dire si la société Asbestos
présentement a également des équipes en Abitibi en train
de faire de l'exploration, je ne saurais le dire, de la même façon
que je ne saurais dire, présentement, si la société
Noranda a un géologue en train de faire de l'exploration dans ma cour
arrière. Mais une chose est certaine, c'est que la société
Asbestos a une excellente équipe de géologues qui font
continuellement de l'exploration. (11 h 15)
M. Forget: En chantier, je n'en doute pas. Hors chantier... Le
ministre ne peut-il pas admettre qu'un très grand nombre de
sociétés minières ont acquis toutes leurs
propriétés de sociétés d'exploration, de
prospecteurs qui, eux, ont fait la recherche, puisque le ministre vient de nous
dire lui-même que l'exploration demande beaucoup
d'ingéniosité, ne peut pas être le fait de grandes
entreprises nécessairement bureaucratisées. C'est l'argument
qu'il a employé pour dire que SOQUEM ne devait pas faire d'exploration.
Ne reconnaît-il pas que c'est une pratique très répandue
dans le monde minier que des sociétés d'exploitation font
l'acquisition de propriétés minières mais qu'elles ne sont
pas celles qui ont recherché et prouvé l'existence de gisements
en premier lieu.
M. Bérubé: M. le Président, je pense que le
député de Saint-Laurent manifeste une lueur de
compréhension, mais pas tout à fait adéquate. Il est vrai
que les grandes sociétés minières achètent ce qu'on
appelle, en jargon de prospecteur, des "prospects". Qu'est-ce qu'un prospect?
Lorsqu'un prospecteur arpente le territoire et qu'il trouve un affleurement, ce
n'est pas un gisement. On ne peut même pas parler de développement
de gisement à ce stade. Nous en sommes au stade de l'exploration. Ou
lorsqu'un prospecteur, par suite de la publication des relevés
géophysiques du ministère constate une anomalie à un
endroit particulier du territoire et qu'il accourt jalonner ce territoire, il a
à nouveau ce qu'on appelle une propriété minière.
Ce n'est pas là un gisement. Il s'agit là, tout simplement, d'un
ensemble d'anomalies, de conditions propices à la présence d'un
gisement. En général, je vous dirais qu'il y a peut-être
une chance sur mille qu'il y ait là un gisement.
Le prospecteur, qui généralement n'a pas les moyens, offre
aux compagnies minières une option et la compagnie minière envoie
son groupe de géologues effectuer l'exploration du gisement, donc
généralement la géophysique, la géochimie, les
forages stratigraphiques si nécessaires, de manière à
confirmer si cette anomalie peut être transformée en un gisement,
s'il existe quelque chose ou s'il s'agit simplement d'une veine de
graphite.
Par conséquent, la compagnie minière n'achète que
très rarement des gisements. Le gouvernement canadien, lorsqu'il a pris
le contrôle de Texas Gulf and Sulphur a acquis une mine en exploitation.
Mais il est extrêmement rare qu'une compagnie minière
achète un gisement connu parce qu'un gisement connu, d'une façon
générale, a un potentiel de rendement économique tel que,
au mieux, la société minière va peut-être offrir une
participation aux risques en partageant le capital-actions de l'entreprise, va
devenir partenaire, mais non pas acheter carrément un gisement.
Ceci est très rare pour la simple raison que ce qui, justement,
est très coûteux et très risqué, c'est
l'exploration. Lorsque vous avez en main un gisement,
généralement, vous le développez vous-même parce que
c'est là qu'est le potentiel. Lorsque vous avez véritablement un
gisement, lorsque vous avez en main quelque chose qui est potentiellement
intéressant, il devient beaucoup plus facile d'emprunter pour faire le
développement et pour faire l'exploitation. Par conséquent, les
difficultés de financement se situent au niveau de l'exploration et non
au niveau du développement, de l'exploitation du gisement comme tel.
C'est pour cette raison que la plupart des compagnies minières vont
acheter les propriétés poten-
tielles de prospecteurs; et il va de soi que la Société
nationale de l'amiante, tout comme SOQUEM et comme toutes les compagnies
minières, prend régulièrement des propriétés
sous option. C'est une des façons les plus conventionnelles de faire de
l'exploration minière.
M. Forget: Une autre question. Il existe un modèle
extrêmement simple du prospecteur individuel, qui part avec sa pioche et
ses relevés du ministère fédéral des mines...
M. Bérubé: ... le ministère
québécois des mines.
M. Forget: ... pour jalonner un claim ou le
ministère québécois, si l'on veut et qui envoie au
bureau d'analyse certains échantillons qu'il a pris à la surface
des affleurements et, sur la base de cela, vend un prospect. C'est un
modèle très simplifié. Il y a aussi et c'est
très fréquent...
M. Bérubé: Je l'imagine avec un grand chapeau, avec
une casserole pour l'or et une grande malle.
M. Forget: C'est dommage que notre poète national ne soit
pas présent à la commission parce que c'est une image qui le
ferait sûrement vibrer. Mais, outre ce modèle extrêmement
simple et presque caricatural de l'exploration minière faite par
l'individu, une espèce de coureur des bois, il y a aussi des structures
qui ne sont pas des sociétés minières comme telles, qui
sont des sociétés d'exploration; d'ailleurs, elles ont cela dans
leur nom, la plupart du temps. Ce sont des sociétés qui n'ont pas
vraiment l'intention d'exploiter un gisement, mais qui, sur la base d'une
exploration préliminaire de relevés géologiques,
même de prospects qui leur sont amenés par des prospecteurs, vont
acheter des claims et vont se livrer à des activités de forage de
puits, de forage tout simplement, de manière à établir
l'existence d'un gisement.
Ils n'ont pas, encore une fois, les ressources, ils n'ont pas de
concentrateurs de minerai, ils n'ont pas, non plus, ni les ressources de
centaines de millions nécessaires pour faire cela. Ce sont des groupes
de gens, probablement, qui eux aussi peuvent mettre des actions sur le
marché et qui ont pour but essentiellement de faire passer du stade du
prospect au stade du gisement. Il y a là des profits
considérables et un très grand risque, comme le sait tout le
monde qui a investi quelque argent sur les marchés boursiers, dans ce
genre de titre. Ce sont des sociétés petites qui groupent une
poignée d'invididus et une poignée d'actionnaires. Ce sont des
sociétés, je pense, auxquelles on peut attribuer la
responsabilité, en quelque sorte, d'un très grand nombre
d'installations de mines effectivement en activités sur tous les
continents. Cela est une voie qui apparaît plus normale, plus
appropriée que le développement de créer une
société d'État qui va être assez lourde et
très bureaucratique probablement, comme toutes ces
sociétés, et qui elle verrait à franchir toutes les
étapes. Rien ne permet de croire qu'on se limiterait, qu'on ferait du
travail à partir de la prospection initiale, jusqu'au forage de puits
etc., de manière à établir les gisements. C'est là
une partie de l'industrie minière qui est très risquée,
qui fait, cependant, le plus souvent appel à des individus qui ont le
goût du risque qui ont l'ingéniosité et la capacité
de saisir des indications multiples pour essayer d'en tirer avantage. Pourquoi
vouloir à tout prix qu'une société d'État
s'insère dans ce processus-là? Pourquoi ne pas faire comme un
très grand nombre de grands groupes miniers, qu'il s'agisse de Rio
Tinto, de n'importe qui, qui agit à peu près sur tous les
continents, qui a peut-être une société d'exploration parmi
ses filiales, mais qui est très ouverte quant à la
possibilité d'agir autrement et qui dans le fond on pourrait le
vérifier dans la plupart des cas prend une participation ou prend
le contrôle d'une société d'exploration une fois qu'elle a
un gisement intéressant. Il me semble que c'est une question de fond qui
est posée. Pourquoi engager l'État dans cette partie la plus
risquée alors qu'il y a des tas de gens qui sont prêts à y
perdre des fortunes? Pourquoi ne pas concentrer l'activité de la
société de l'amiante sur la partie qui est très
importante, qui demande des ressources de fonds considérables et qui
implique des centaines de millions, mais une fois qu'on sait qu'il y a un
gisement? D'ailleurs on a des gisements au Québec, dans le Nord-Ouest,
à Chibougamau, où il y a des gisements et on ne sait pas ce qu'on
va en faire! Pourquoi, alors découvrir d'autres gisements avant d'avoir
épuisé ce stock qui semble abondant déjà, de mines,
de gisements à peu près prouvés, mais non
exploités?
M. Bérubé: M. le Président, à nouveau
je trouve intéressante la proposition qui nous est faite. Il est
certainement dommage qu'en 1975 le député de Saint-Laurent n'ait
pas eu, lorsqu'il siégeait au Conseil des ministres, une connaissance un
peu plus profonde de l'industrie minière. Il aurait compris toutes les
implications de l'adoption du règlement numéro 8 de la Commission
des valeurs mobilières qui a tari le financement de toutes ces petites
sociétés "junior" d'exploration dont il parle avec beaucoup
d'amour et qu'il a conduites à la faillite littéralement de par
ses gestes irréfléchis, sans comprendre les implications du
règlement qu'il passait. C'est ce qui nous amène
présentement, effectivement, à essayer de réparer les pots
cassés en modifiant le Code civil et en introduisant les "limited
partnerships" qui sont les sociétés en commandite, de
manière à chercher des moyens de réparer le
dégât causé. C'est vraiment dommage. Je pense qu'il n'en a
probablement pas perçu, à ce moment-là, toute
l'implication. Là-dessus, je suis absolument d'accord. Il faut souligner
qu'à peine 5% de l'exploration se font à travers les
sociétés d'exploration dites junior. Par conséquent, c'est
un volume extrêmement faible.
Quant au prospecteur folklorique dont on parlait tantôt, il existe
encore mais il est de moins en moins folklorique, en fait. Ce sont souvent
même des géologues avec doctorat en géologie qui
adorent la nature et qui sont loin d'avoir l'inexpérience ou
l'insuffisance des connaissances du prospecteur antérieur.
Néanmoins, il ne faut pas non plus, je pense, ridiculiser notre
prospecteur un peu historique, artisanal, puisqu'il a découvert des
mines et que, effectivement, il avait le flair. Il faut reconnaître que,
dans l'exploration minière, il faut peut-être un tout petit peu de
connaissances et beaucoup de flair.
Je pense qu'en ce sens les prospecteurs ont contribué de
façon significative au développement de l'industrie
minière au Québec. Néanmoins, il faut également
reconnaître que les gisements de surface n'abondent pas au Québec,
en ce sens que nous avons passablement épuisé je ne peux
peut-être pas l'affirmer d'une façon aussi catégorique
une bonne partie des anomalies de surface que l'on pouvait retrouver
facilement.
Il faut maintenant aller en profondeur. Il faut donc utiliser des
techniques beaucoup plus sophistiquées et, là, l'ère du
prospecteur artisanal est certainement dépassée.
Par conséquent, il faut reconnaître que le volume
d'exploration fourni par ce prospecteur artisanal et par les
sociétés juniors d'exploration est beaucoup trop limité.
C'est ce que nous avons essayé de corriger en introduisant notre
programme d'aide de financement partagé des sociétés
junior d'exploration, ce qui nous a permis de signer des ententes avec McAdam
et également avec le groupe Brominco qui est un groupe
québécois extrêmement valable dans le domaine de
l'exploration minière.
Donc, nous avons cherché à encourager ces groupes juniors
mais il nous faut reconnaître que, malheureusement, leur effort est
largement insuffisant. Si on a à l'esprit que, désormais, les
Québécois joueront un rôle dans leur industrie de
l'amiante, je pense que la participation des sociétés juniors ne
saurait répondre entièrement aux besoins. Il faudrait
certainement encourager la Société nationale de l'amiante
à s'associer, dans des "joint ventures" d'exploration, avec,
effectivement, les sociétés juniors. Je pense que c'est une
façon d'encourager le développement au Québec de petits
entrepreneurs autochtones dans le secteur minier, de faire en sorte qu'un
nombre de plus en plus grand de Québécois finalement participe au
développement de l'industrie minière et que l'on n'ait pas
à se tourner uniquement vers les sociétés d'État.
Le problème qui se pose, au Québec, dans ce domaine minier, c'est
que, présentement, nous n'avons pas de structures porteuses
privées proprement québécoises qui véritablement
puissent servir de locomotive au développement minier dans ce secteur.
La Société nationale de l'amiante et la Société
SOQUEM vont représenter cet outil de développement.
Je pense qu'il faudra c'est ce que nous essayons de faire
présentement miser sur des associations avec des entrepreneurs
québécois de manière que ceux-ci, profitent de la richesse
générée par ces gisements, puissent, à leur tour,
avoir leur propre activité d'exploration. Je pense au groupe Brominco,
à titre d'exemple. À ce moment-là, on aura un secteur
privé minier proprement québécois, auquel cas
l'État québécois pourrait certainement choisir de se
retirer. Dans la situation actuelle, je pense qu'il nous faut
pénétrer dans un secteur qui a été
entièrement contrôlé par des étrangers. Dans ce cas,
ce serait catastrophique de retirer à la Société nationale
de l'amiante ce pouvoir de faire de la recherche parce que ce serait tarir,
à la base même, tout le dynamisme que cette société
devrait manifester au nom de tous les Québécois dans ce secteur
de l'amiante. (11 h 30)
M. Brochu: Je voudrais poser quelques questions au ministre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond, est-ce que vous aviez épuisé
vos 20 minutes?
M. Brochu: Non, j'ai fait seulement quelques brèves
remarques au début. Évidemment, le gouvernement s'est
engagé dans la voie d'acquisition d'une entreprise. Logique avec son
cheminement, l'acquisition d'une entreprise, il veut faire de la recherche, il
veut faire de l'exploitation de gisements à l'intérieur de son
même projet de loi.
M. Bérubé: Je m'excuse, monsieur; je voudrais juste
corriger immédiatement parce qu'il y aurait peut-être un quiproquo
qui pourrait nous entraîner trop loin. Il est vrai que le gouvernement a
choisi d'acheter la société Asbestos Corporation, mais il est
également vrai que le gouvernement a décidé de s'engager
dans le développement et l'exploitation de nouveaux gisements,
d'ailleurs, pour répondre à une interrogation du
député de Saint-Laurent en Chambre. Il m'a demandé:
Qu'est-ce que vous attendez pour vous lancer dans l'exploitation du gisement
d'Abitibi-Amiante? Il m'a posé la question, ce qui a montré
à quel point il tenait à ce que le gouvernement s'implique dans
le développement, dans l'exploitation de gisements d'amiante.
Par conséquent, il faut bien se dire que tout ce que nous
faisons, c'est non seulement participer à l'achat d'Asbestos
Corporation, mais également que nous allons nous impliquer au niveau du
développement de nouveaux gisements, par conséquent dans la
recherche de nouveaux gisements.
M. Brochu: D'accord, c'est essentiellement ce que je disais au
point de départ, si vous voulez une enveloppe globale. Vous voulez avoir
la possibilité de faire, à l'intérieur du mandat de la loi
70, tout ce cheminement, sous le chapeau de la Société nationale
de l'amiante.
M. Bérubé: On veut que la Société
nationale de l'amiante ait les coudées franches de manière
à pouvoir véritablement atteindre l'objectif que nous nous sommes
fixé et que nous fixons à cette société, soit
d'imposer une présence québécoise importante dans
l'amiante.
M. Brochu: Puisque nous sommes sur cet article, lorsque vous
parlez du besoin, de ce qui semble être un besoin dans votre philosophie,
dans votre mode d'approche, de faire appel à la recherche de nouveaux
gisements pour le gouvernement du Québec dans le cadre de la loi 70,
dans le cadre du mandat que vous vouliez confier à la
Société nationale de l'amiante, est-ce que ce n'est pas un
constat, d'un autre côté, qu'il vous serait impossible d'obtenir
de la fibre d'une autre façon? Autrement dit, ne serait-il pas possible,
pour atteindre l'objectif d'une transformation plus grande de l'amiante en sol
québécois, d'acheter des entreprises exploitant
déjà des gisements de la fibre pour procéder à la
transformation par une société mixte ou autrement?
M. Bérubé: Alors là, évidemment, le
débat serait de savoir si nous devons posséder des mines pour
faire de la transformation. Je pense que c'est un débat
extrêmement intéressant, mais, voyant l'épaisseur du cahier
de résolutions, de motions du député de Saint-Laurent, il
ne fait aucun doute que, dans les prochaines pages, nous aurons l'occasion de
débattre cette question. Par conséquent, je ne voudrais pas
gaspiller ma salive, il reste encore au moins 200 ou 300 motions...
M. Forget: Jamais.
M. Bérubé: ... que nous aurons l'occasion de
discuter. Donc, si on revenait plutôt à la motion que nous avons
à discuter, reconnaissant que l'alinéa a) dit: "La recherche, le
développement et l'exploitation de gisements d'amiante, y compris la
mise en marché de la production", la proposition qui nous est faite ici,
c'est de retirer la recherche. Or, je prétends que, si nous avons un
article qui nous dit que nous allons faire du développement et de
l'exploitation de gisements, il serait totalement aberrant, en vertu de
l'argumentation que j'ai invoquée et en vertu, d'ailleurs, de
l'argumentation du député de Frontenac et de l'argumentation du
député d'Abitibi-Est, d'aller dans l'exploitation minière
sans en même temps faire de l'exploration.
Compte tenu de la nature même de l'industrie minière qui
est basée sur l'exploitation de richesses non renouvelables, la seule
façon de renouveler des richesses dans l'industrie minière, c'est
par l'exploration. Et le maintien d'une activité suppose
nécessairement l'exploration.
M. Forget: Pas quelqu'un. Pas nécessairement par
soi-même.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
autre question, M. le député de Richmond?
Une voix: Par quelqu'un de compétent.
M. Brochu: Oui, je n'ai pas fini. Je laisse au ministre le temps
de réfléchir...
M. Bérubé: Non, je pense que ma
réponse...
M. Brochu: ... pour donner sa réponse à la
sous-question du député de Saint-Laurent.
M. Bérubé: Seul quelqu'un qui ne comprend pas le
fonctionnement de l'industrie minière peut supposer qu'une compagnie
minière, faisant du développement de gisements, exploitant des
gisements, accepterait de se livrer pieds liés et poings liés
entièrement à des sociétés concurrentes pour
l'exploration et le développement de ses réserves futures. Cela
me paraît tellement aberrant que, personnellement, je ne comprends
absolument pas. La seule explication que je peux voir...
M. Forget: ... des camions aussi, parce qu'ils ont besoin de cela
aussi.
M. Bérubé: Non, pas tout à fait. Mais, ce ne
serait pas une mauvaise idée qu'on construise des camions effectivement
au Québec. C'est quand même le genre de choses que vous n'avez pas
comprises encore.
M. Forget: La société de l'amiante va devoir en
construire, parce qu'elle en a besoin pour sa mine.
M. Bérubé: Enfin, je sais que vous vous opposez
à l'idée d'industrialiser le Québec par des
Québécois. Mais, néanmoins, ce serait une excellente
suggestion.
M. Forget: ...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Brochu: II ne faudrait pas, au moins, faire appel à
General Motors; on pourrait peut-être encourager Bombardier dans ce
cas.
M. Forget: C'est une bonne suggestion.
M. Bérubé: Mais je suis en entier accord.
M. Brochu: C'est dommage que vous n'ayez pas été
d'accord avant, on aurait pu avoir la fabrication d'autobus chez nous.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le
sujet, s'il vous plaît.
M. Grégoire: Vous voulez embarquer sur un autre sujet,
là?
M. Brochu: Ce n'est pas moi qui ai embarqué. La porte
était ouverte, je suis entré.
M. Bérubé: On pourrait peut-être vous ouvrir
la porte de derrière.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît, le temps s'écoule.
M. Brochu: C'est certain que c'est le principe que j'ai
émis au début. Mais si vous parlez d'exploitation de gisements,
vous devez parler en même temps d'exploration et de recherche, de la
même façon que cela se fait dans l'entreprise privée, de
toute façon.
Là où je veux en venir, c'est que si vous n'avez pas
besoin de faire d'exploitation, vous n'avez pas besoin de faire de recherche.
C'est pour cela que je posais ma question tantôt, est-ce que vous
n'êtes pas capable... On peut même discuter
immédiatement...
M. Grégoire: Pas sur un autre amendement de motion.
M. Brochu: Non, cela fait partie de toute la question, mais on
peut en parler immédiatement. Lorsqu'on parle de recherche, ça
fait partie d'un tout, du bien-fondé pour le gouvernement
d'acquérir une mine et de procéder à la recherche de
nouveaux gisements et de tout ce cheminement-là. Autrement dit, pour
bien me faire comprendre, ce que vous faites par le projet de loi, tel que vous
le présentez actuellement, c'est que vous partez de Québec et
vous passez par Ottawa pour aller à Orsainville.
M. Bérubé: C'est le député de
Saint-Laurent qui fait cela présentement. Si le vrai débat de
fond est à savoir que la Société nationale de l'amiante ne
devrait pas s'impliquer dans l'exploitation minière, et si le
véritable objectif de l'Opposition libérale n'était pas de
retarder les débats mais bien de faire porter le débat sur le
fond, la proposition du député de Saint-Laurent serait de rayer
l'alinéa a) de l'article en question. À ce moment-là, nous
réglerions le problème fondamental de l'exploitation et nous
pourrions avoir un débat de fond. Mais ce n'est pas ce qu'il a choisi.
Il va nous demander d'abord d'enlever l'article "la".
M. Forget: M. le Président, une question de
règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, question de règlement, M. le ministre.
M. Forget: M. le Président, le ministre, dans son
intervention passionnée...
M. Bérubé: De quel article du règlement
s'agit-il. M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je vais
voir.
M. Forget: ... soulève la possibilité d'un
amendement pour abolir le paragraphe a). C'est une invitation qu'il nous fait
de présenter un tel amendement. Est-ce qu'un tel amendement serait
recevable?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non.
M. Forget: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Bérubé: Un tel amendement ne serait pas
recevable?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non,
parce qu'un amendement ne peut avoir pour effet que d'ajouter ou de retrancher
des mots et non pas d'écarter la motion principale.
M. Bérubé: Et non pas des phrases.
M. Grégoire: Si ce n'est que le paragraphe a).
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît, M. le député de Frontenac, une motion
d'amendement ne peut avoir pour effet d'écarter la motion principale.
Or, la motion principale, actuellement, c'est le paragraphe a) de l'article 4.
Et toute motion visant à abroger le paragraphe a) serait irrecevable,
parce que visant à écarter la motion principale.
M. Bérubé: M. le Président, si je comprends
bien, la façon logique d'organiser nos travaux consisterait d'abord
à amender l'alinéa a) en enlevant l'article "la", après
ça la "recherche", après cela la virgule, "le"
développement, jusqu'à la fin et laisser le mot "production".
Parce que de toute façon on ne peut pas tout enlever.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
que la logique serait de continuer sur l'amendement que nous avons
actuellement.
M. Grégoire: Mais j'aimerais, M. le Président,
remplacer un mot justement et j'abonde dans le sens...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur
quoi, M. le député de Frontenac?
M. Grégoire: Sur la question de règlement du
député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II a
demandé une directive, M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: Je vais vous la demander, moi aussi, la
directive. Est-ce qu'on peut vous en demander de ce côté-ci?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui, du
moment que ce n'est pas la même.
M. Grégoire: On va vous la demander. Ce que le
député de Saint-Laurent veut c'est d'aborder le débat de
fond sur la nécessité, pour la Société nationale de
l'amiante, d'acquérir ou d'exploiter un gisement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, la directive est toujours demandée au
président.
M. Grégoire: C'est le but auquel le député
de Saint-Laurent veut en arriver, et le député de
Richmond, c'est d'en arriver à la discussion de fond. Est-ce que
l'exploitation d'un gisement de l'amiante est nécessaire...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac.
M. Grégoire: Est-ce que je peux finir?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, quelle est votre demande de directive?
M. Grégoire: C'est cela que je vous demande là.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quelle
est la directive que vous voulez avoir?
M. Grégoire: Pour en arriver au débat de fond qu'on
veut avoir.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
parle pas de fond, je parle de procédure, l'article 70 de notre
règlement.
M. Grégoire: Je veux vous demander quelle est la
procédure...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Bon,
toute motion visant à écarter la motion principale est
irrecevable. Alors une motion qui a pour but de retrancher un paragraphe est
irrecevable, parce qu'elle a pour but d'écarter la motion
principale.
M. Grégoire: Ce n'est pas cela que je vous demande, M. le
Président.
M. Forget: ... consentement, M. le Président.
M. Grégoire: Si je vous demande une directive et que vous
ne me laissez pas vous la demander, c'est évident que vous allez dire
non d'avance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Demandez-la.
M. Grégoire: C'est ce que j'essaie depuis tantôt,
laissez-moi vous la demander.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ne
parlez pas du fond.
M. Grégoire: On veut avoir un débat de fond sur la
nécessité, pour la Société nationale de l'amiante,
d'exploiter un gisement. M. le Président, c'est la directive que je vous
demande, est-ce que, de consentement unanime, on peut en arriver à ce
débat de fond? Si, au paragraphe a), on demande d'enlever seulement le
mot "exploitation", cela n'a pas de sens. Si on laisse la recherche et le
développement en ne retirant que le mot "exploitation", cela n'a pas
plus de sens que d'enlever le mot "recherche".
M. Bérubé: C'est vraiment illogique!
M. Grégoire: Je ne vous demande pas d'enlever tout
l'article, mais est-ce que la motion ne pourrait pas demander de rayer le
paragraphe a), laissant là le paragraphe b), ce qui permettrait d'entrer
dans le débat de fond que tout le monde veut avoir et qu'on est
prêt à commencer?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De
consentement, vous pouvez passer au paragraphe b) si vous voulez.
M. Grégoire: Bon!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais ce
n'est pas la directive qui m'a été demandée.
M. Grégoire: C'est ce que je vous demande.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De
consentement, vous pouvez passer à l'article 8, si vous voulez. Vous
pouvez aussi passer à l'article 12.
M. Grégoire: C'est ce qu'on vous demande, est-ce qu'on
peut le faire?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
question qui m'a été posée, ce n'est pas une question de
fond, c'est une question de procédure.
M. Grégoire: Ce n'est pas ce que j'ai posé comme
question.
M. Forget: M. le Président, humblement...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On
vouvoie la présidence, M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: Vous ai-je dit "tu"? Je m'excuse.
M. Forget: Je crois que la nature de la question qui a
été posée par le député de Frontenac est la
suivante. Je vais essayer de la reformuler dans mes propres mots. Serait-il
possible, du consentement de tous les membres de la commission, de
débattre un amendement qui aurait pour objet d'amender l'article 4 pour
en supprimer le paragraphe a)?
M. Grégoire: C'est ce que j'ai demandé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Répétez.
M. Forget: Serait-il possible, de consentement unanime, de
débattre un amendement qui aurait pour objet de supprimer le paragraphe
a) de l'article 4? Nous avions cru que ce n'était pas recevable parce
que nous avions assimilé le paragraphe a) à un des principes
fondamentaux du projet de loi; cependant, c'est une interprétation qui
n'a aucune autorité, c'est celle que nous avions formu-
lée nous-mêmes. Je pense que c'est la question du
député de Frontenac; il peut me corriger.
M. Ciaccia: Autrement dit, est-ce que, de consentement, on
pourrait aller à l'encontre de l'article 70?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Autrement dit, est-ce qu'une chose illégale dans le règlement
devient possible du consentement unanime?
M. Ciaccia: Oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je dis
qu'en commission parlementaire le consentement unanime de la commission
parlementaire peut presque tout permettre même si le règlement dit
le contraire. Tout à l'heure, j'ai rendu une décision uniquement
sur la procédure; ce n'est pas sur le fond que je suis intervenu
tantôt. L'article 70 dit qu'un amendement doit se reporter directement au
sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants:
retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres. Il est irrecevable
si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a
été proposé et il en est de même d'un
sous-amendement par rapport à un amendement.
La question qui m'a été posée est celle-ci: Est-ce
qu'une motion d'amendement ayant pour but d'éliminer totalement le
paragraphe a) de l'article 4 serait recevable en vertu de notre
règlement? J'ai dit: Non. Est-ce que, de consentement unanime, vous
pouvez le faire? Oui.
M. Bérubé: Dans mon inexpérience de la chose
parlementaire, il me paraît que cette question, cette demande de
directive que nous vous adressons est extrêmement importante pour
s'assurer qu'à l'Assemblée nationale nous puissions avoir de
véritables débats de fond sur des problèmes importants et
éviter la procédurite accessoire qui, finalement, ne nous
entraîne nulle part. Lorsque je prends l'article 4 et que je m'attache
à son esprit, je constate qu'essentiellement il y a deux alinéas,
deux points. La société a pour objet l'exploitation de gisements
et, deuxièmement, des activités industrielles reliées
à la transformation. On dit qu'elle peut s'associer à d'autres
pour le faire. Essentiellement, ce sont les trois points importants.
Il me paraît qu'on puisse être d'accord avec les
activités manufacturières sans être d'accord avec
l'exploitation minière ou vice versa. Si notre commission ne peut pas se
pencher sur ces trois objets possibles pour en rayer un et en garder deux
autres, nous travaillons de façon inutile. En effet, imaginons que nous
amendions en enlevant le mot "recherche", que nous amendions en enlevant le mot
"développement" et que nous amendions en enlevant le mot "exploitation";
nous aurions certainement obtenu les fins désirées,
c'est-à-dire que nous aurions enlevé la partie activités
minières de l'objet, et ce pourrait être de consensus
général. Mais, à mon avis, c'est complètement
déformer la procédure parlementaire. (11 h 45)
Essentiellement, l'article 4 définit deux objets et une
façon d'y arriver. On pourrait être en désaccord avec la
façon d'y arriver, on pourrait être en désaccord avec l'un
ou l'autre des objets. Il me semble qu'une interprétation de l'article
70 devrait nous permettre d'enlever des mots qui, sans modifier l'article 4 en
profondeur, pourraient certainement enlever l'un des mandats. Cela
raccourcirait considérablement les débats, il me semble, et nous
pourrions avoir un véritable débat de fond. Là, nous
entrons dans un dialogue de sourds puisque, comme ministre des Richesses
naturelles, si je veux que cette société puisse faire de
l'exploitation de gisements, je trouve totalement aberrant qu'on lui interdise
de faire de l'exploration, puisque c'est totalement illogique et incompatible
avec l'activité minière telle qu'elle est connue depuis des
siècles. Par conséquent, je ne peux que m'y opposer, mais je
comprends entièrement le sens de l'amendement si je le raccroche
à ce moment à la remise en cause même du principe de
l'exploitation. Dans ce cas, je suis certainement prêt à avoir un
débat de fond sur l'exploitation, l'importance d'exploiter les
gisements. Je pense que cela pourrait considérablement raccourcir nos
débats et pourrait même les rendre beaucoup plus
intéressants puisque, au lieu de faire de l'obstruction sur des
questions de procédure, nous présenterions véritablement
des objections sur le fond du débat.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce que
je peux vous dire, c'est que je n'ai pas répondu sur le fond, mais sur
la forme. C'est qu'il y a des décisions nombreuses qui disent que toute
motion qui a pour but de retrancher entièrement une motion principale
est irrecevable. Vous pouvez la remplacer par d'autres.
M. Grégoire: M. le Président, la motion principale
serait de retrancher l'article 4, non pas un seul paragraphe.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, l'article 160 dit qu'un député
peut parler 20 minutes sur chaque paragraphe, chaque article, chaque motion
d'amendement, chaque sous-amendement. À partir du moment où on
commence à étudier un article paragraphe par paragraphe dans
l'article 4, pour moi, la motion principale que j'ai devant moi, c'est la
motion qui est le paragraphe 4a. Le paragraphe 4b deviendra, une nouvelle
motion principale ainsi que le dernier paragraphe, 4c. Cela dépend de
quelle façon les membres de la commission entreprennent l'étude
de l'article.
M. Forget: M. le Président, sur la question de
règlement, il y a, à mon avis, deux considérations.
Il y a d'abord une distinction qu'on doit faire entre ce qui est une
motion principale et ce qui est
un principe d'un projet de loi. Toutes les motions principales dans un
projet de loi ne sont pas nécessairement des principes approuvés
en deuxième lecture. Quand on regarde l'article 4, en particulier, il me
semble, de mémoire, que précédemment, ce qui était
le principe reconnu et déclaré par vous...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
C'était la création de la société et non pas les
objets.
M. Forget: ... c'était la création de la
société et que les paragraphes a) et b) étaient des
modalités. S'il est vrai que les paragraphes a) et b) étaient des
modalités, contrairement à notre première perception, il
serait donc acceptable d'avoir un amendement retirant complètement le
paragraphe a). C'est une motion de retirer une motion principale, mais pas de
retirer un principe approuvé en deuxième lecture.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
ministre peut...
M. Bérubé: Le député de Saint-Laurent
me permettrait-il...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
offrir à la commission de retirer le paragraphe a) de l'article 4. La
directive qui m'a été demandée est celle-ci: Est-ce qu'une
motion ayant pour but de retrancher totalement le paragraphe a) de l'article 4
est recevable? Je dis que, en vertu des décisions qui sont rendues
depuis plusieurs années, c'est irrecevable. J'ai déjà vu
des ministres retirer...
M. Bérubé: Le député de Saint-Laurent
peut-il, pour expliciter...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, un
instant, on parle de procédure. D'abord tous les articles sont des
motions principales. Les articles ayant des paragraphes, si on les
étudie paragraphe par paragraphe, chaque paragraphe devient une motion
principale. Le ministre est celui qui propose, de par la loi, de par notre
tradition, toutes ces motions principales, et celui qui propose une motion
principale peut la retirer. Mais la directive qui m'a été
demandée, c'est: Est-ce qu'une motion d'amendement ayant pour but de
retrancher totalement l'article 4a serait recevable?
M. Bérubé: M. le Président, à titre
de directive, pourriez-vous m'indiquer le numéro de règlement
parce que j'ai un peu de difficulté à m'y retrouver?
Une voix: L'article 70.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, ce
n'est pas l'article 70. L'article qui dit que le ministre peut...
M. Bérubé: Non, l'article qui dit que l'on doit
étudier alinéa par alinéa.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, ce
n'est pas cela... On s'en va dans des discussions de procédure. Ce n'est
pas l'article 70 qui dit cela, c'est l'article 160. Si on interprète
l'article 160, c'est que, implicitement, lorsqu'une commission étudie un
projet de loi ou des crédits, un député peut prendre la
parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à
condition de ne pas parler plus de 20 minutes en tout sur un même
article. On suppose donc là un article où il n'y a pas de
paragraphes, où il n'y a pas d'alinéas différents.
Supposons un article qui a dix paragraphes et que les membres de la commission
c'est déjà arrivé à la commission sur la loi
101 décident d'en adopter un, je peux demander: Est-ce que
l'article 4 est adopté? Mais je peux demander aussi: Est-ce que
l'alinéa a) de l'article 4 est adopté? Et j'initiale alors
l'alinéa a). La motion principale qui est constituée par le
paragraphe a) est adoptée. Maintenant, est-ce que le paragraphe b) de
l'article 4 est adopté? Là, on commence à prendre
l'habitude de discuter de procédure.
M. Bérubé: M. le Président, je voudrais
avoir une directive. Si, par exemple, le gouvernement avait choisi de
présenter le projet de loi de la façon suivante: La
Société a pour objets: a) la recherche; b) le
développement; c) l'exploitation, cet article n'aurait jamais pu
être amendé en aucune façon par cette commission
parlementaire, puisque, chaque alinéa étant autonome, nous
n'aurions pas pu en proposer la disparition. Par conséquent, nous nous
serions retrouvés dans un cul-de-sac procédurier qui n'a aucune
signification. Aussi, je vous demanderais si vous ne pensez pas qu'on devrait
peut-être prendre quelques minutes pour bien soigneusement peser les
implications d'une telle décision, puisque toute décision rendue
rapidement a évidemment un rôle de précédent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, ce n'est pas un précédent. Les précédents
sont nombreux et je vous dis que toute motion visant à retrancher
totalement le paragraphe a) est irrecevable.
M. Grégoire: M. le Président, si vous me le
permettez, sans critiquer votre décision, la motion...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De toute
façon, l'amendement n'a pas été
présenté.
M. Grégoire: Non. Mais là je vais vous demander une
directive. Est-ce qu'il serait logique de penser que la motion principale
à l'article 4, c'est: "La société a pour objets". C'est la
motion principale.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac!
M. Grégoire: Laissez-moi finir, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, s'il vous plaît! Vous ne me
donnerez pas de cours de procédure ici! "La société
a pour objets", ce n'est pas une motion principale. Bon. "La
société a pour objets", avec le paragraphe a), peut devenir une
motion principale. "La société a pour objets, avec le paragraphe
b), peut devenir une motion principale. Il y a deux points après les
mots "pour objets". "La société a pour objets" est
nécessairement étudié avec le paragraphe a) et, ensuite,
"La société a pour objets", paragraphe b). C'est un tout. On ne
peut pas dissocier "La société a pour objets" du paragraphe a) et
on ne peut pas dissocier "La société a pour objets" du paragraphe
b).
M. Bérubé: Vous n'avez pas répondu à
ma demande de directive. Évidemment, vous allez me dire que c'est une
question hypothétique, mais, néanmoins, cela pourrait
certainement nous servir dans l'avenir. Si j'avais présenté le
projet de loi ainsi: "La société a pour objets: a) la recherche;
b) le développement; c) l'exploitation de gisements d'amiante...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
n'auriez qu'à retirer votre motion principale. Je vous l'ai dit tout
à l'heure.
M. Bérubé: Non.
M. Grégoire: On n'a pas à retirer un seul mot.
M. Bérubé: Nous sommes...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
ministre peut toujours retirer une motion qu'il présente. C'est lui qui
présente toutes les motions.
M. Bérubé: II est totalement illogique que le
ministre, qui est en entier accord avec...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
ce moment-là, vous direz au président de l'Assemblée
nationale que notre règlement est mal fait et la Chambre amendera
l'article 70 de nos règlements.
M. Bérubé: La directive que vous me donnez, c'est
que, si le projet de loi était présenté comme ceci, il ne
serait pas possible pour cette commission de retirer l'alinéa a)?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
vous dis pas que ce n'est pas possible pour la commission. Je vous dis qu'il
est toujours possible pour un ministre de retirer une motion principale. Je
vous dis qu'une motion d'amendement du député de l'Opposition
visant à retrancher totalement l'article a) est irrecevable en vertu de
nos règlements actuels. Que vous considériez ce règlement
logique ou non, il est rédigé de cette façon.
M. Ciaccia: M. le Président, peut-être que cela
pourrait aider le ministre. Quand vous dites que le ministre peut retirer la
motion principale, cela veut dire qu'il peut la retirer pour discussion. Cela
ne veut pas dire qu'il retire l'article 4a. Subséquemment, il peut
réintroduire une motion pour discuter tout l'article 4. Est-ce que c'est
cela que vous voulez dire?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non. Ce
que je veux dire par retirer, c'est l'enlever du projet de loi.
M. Ciaccia: Ah! Pas retirer sa motion!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
motion d'amendement ayant pour but de retrancher totalement l'article a)
équivaut à une motion du ministre demandant de retirer l'article
a).
M. Bérubé: M. le Président, ne pourrait-on
pas suspendre les débats pour quelques instants? (12 heures)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
D'ailleurs, avant de continuer, je dois vous dire une chose, je me rappelle
fort bien que l'un des premiers articles de la loi 101 comportait dix ou douze
paragraphes et que chaque député a eu un droit de parole de vingt
minutes sur chacun des paragraphes. J'ai initialé personnellement chacun
des paragraphes de l'article 1 ou 2, chacun était une motion principale,
parce qu'étudié de façon particulière. Alors, je
pense que cela est très clair.
M. Grégoire: Lequel des deux à un paragraphe?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Entre
autres, en passant, dans la loi 67, il y a un des articles, je pense, les
définitions à l'article 1, qui avait 23 paragraphes. Chacun a
été adopté individuellement. Et l'article 160 donnait un
droit de parole de vingt minutes à partir du moment où on
l'étudiait paragraphe par paragraphe. Vingt minutes à chacun,
c'est l'esprit, c'est le sens du règlement. J'ai, d'ailleurs, eu
l'occasion de le dire, tout à l'heure, à des étudiants
stagiaires de la Chambre des communes; le règlement est tellement fin
pour les commissions parlementaires que je leur ai donné l'exemple
théorique où, dans un même article ayant plusieurs
paragraphes, ayant plusieurs motions d'amendements et de sous-amendements, un
même député pouvait avoir vingt minutes par article. C'est
non seulement le sens et l'esprit, mais c'est la lettre du
règlement.
M. Ouellette (Beauce-Nord): ... disant que l'Opposition
officielle avait l'intention d'étudier l'article 16 vers la fin du mois
d'août.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'ailleurs, ils vont venir nous voir à midi et quart. Je leur ai dit
qu'il y avait deux sortes de commissions parlementaires, ils vont venir nous
regarder, nous voir à l'oeuvre.
M. Bérubé: Vos renseignements nous auront
certainement aidés, M. le Président à...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
êtes dur!
M. Bérubé: II faut comprendre que nous apprenons
notre rôle de parlementaires et que nous aimerions, de temps en temps,
avoir un débat de fond sur le sujet de la loi, plutôt que de
parler autour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion du député de Saint-Laurent sera adoptée?
M. Brochu: Quelle question généreuse, je suis vos
directives. C'est pour cela que je vous ai demandé tantôt de
rétablir votre directive, en ce qui concerne la matière
pour...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
résumé, une motion d'amendement présentée par un
député autre que le ministre ne peut avoir pour effet
d'écarter totalement, soit directement ou indirectement, la motion
principale que nous étudions qui est, en conséquence, l'article
4, paragraphe a). D'autre part, un ministre est, d'office, le proposeur de
toutes les motions principales qui sont dans ce projet de loi et, à ce
titre, il peut retirer une motion principale.
M. Brochu: Ce qui veut donc dire...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Par
contre, de consentement unanime, la commission parlementaire, je pense, peut
retirer une motion principale. Habituellement c'est le privilège du
ministre.
M. Bérubé: On va supposer que la prochaine motion
sera d'inviter le ministre à retirer la motion.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il l'a
déclarée irrecevable.
M. Ciaccia: Inviter le ministre à se retirer!
M. Brochu: Ce qui veut donc dire, M. le Président, que je
peux quand même poser ma question, à ce moment-ci, au ministre en
ce qui concerne...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Mais
votre temps achevait tout à l'heure, il ne vous reste que deux ou trois
minutes.
M. Brochu: Ce n'est pas parce que le temps diminue que le
principe est enlevé. Je n'en ai pas l'impression, du moins. M. le
Président, je reviens donc avec cette question...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Puis-je
vous dire que...
M. Brochu: J'espère que votre intervention n'est pas
retenue sur mon temps.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Allez-y,
M. le député de Richmond.
M. Brochu: J'aimerais demander au ministre... Je comprends que
c'est peut-être difficile de discuter du tout, lorsqu'on le prend par
parties, comme cela, il va falloir s'entrecouper au point de vue des
discussions, c'est certain. Mais qu'est-ce qu'il en est de l'approvisionnement
en fibres? Est-ce que vous avez regardé de ce côté?
M. Bérubé: Là-dessus, comprenant maintenant
très clairement le fonctionnement de la procédure parlementaire,
je devrai répondre que je me réserve pour le débat de fond
sur l'alinéa a) de l'article 4. En d'autres termes, présentement,
comme nous devons discuter de recherche, pour l'instant, pour autant que
l'approvisionnement en fibre est concerné, vous devrez rester sur votre
faim, les règlements de cette Chambre l'exigent.
M. Grégoire: On ne s'y attend pas.
M. Brochu: Ah! On va rester là-dessus et on y reviendra,
par exemple.
M. Bérubé: On y reviendra.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion du député de Saint-Laurent sera adoptée?
M. Brochu: Certainement.
Vote sur la motion
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé (Matane).
M. Bérubé: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bordeleau (Abitibi-Est). M. Brochu (Richmond).
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Forget (Saint-Laurent).
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grégoire (Frontenac).
M. Grégoire: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Laplante (Bourassa). M. Ouellette (Beauce-Nord).
M. Ouellette: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François).
M. Rancourt: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion est rejetée, 4 voix contre 2. Est-ce que l'article 4, paragraphe
a), est adopté?
Autre motion d'amendement
M. Forget: Non, M. le Président, j'ai une autre motion,
j'en fais la lecture immédiatement: "Que le paragraphe a) de l'article 4
soit modifié en ajoutant, dans la première ligne, après le
mot "de", le mot "nouveaux", et en ajoutant, dans la deuxième ligne,
après le mot "production", les mots "de ces nouveaux gisements".
Le paragraphe a) amendé se lirait comme suit: "La recherche, le
développement et l'exploitation de nouveaux gisements d'amiante, y
compris la mise en marché de la production de ces nouveaux
gisements."
Nous sommes enfin dans un débat de fond, l'autre aussi en
était un, même si le ministre a choisi de ne pas y répondre
directement. Comme je l'indiquais au début de nos travaux, il est devenu
apparent, lors du débat sur la motion précédente, que le
ministre est...
M. Grégoire: M. le Président, peut-on parler sur la
recevabilité de la motion d'amendement?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je l'ai
déclarée recevable. Je pense qu'elle est recevable.
Une voix: II l'a déclarée recevable.
M. Grégoire: Vous avez dit tout à l'heure: II est
recevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle
il a été proposé et il en est de même d'un
sous-amendement par rapport à un amendement. Alors, là, est-ce
qu'on n'enlève pas la question principale du paragraphe a) qui parle des
gisements d'amiante existants? Pour enlever tout cela...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Ce n'est
pas l'esprit et ce n'est pas le sens du règlement.
M. Grégoire: Est-ce qu'on ne cherche pas à faire
indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement? Barrer le paragraphe?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Absolument pas. Cette motion a pour but d'ajouter un mot au paragraphe a) de
l'article 4 qui est notre motion principale. Elle n'écarte pas. Ecarter,
cela veut dire enlever totalement, cela veut dire déplacer totalement.
C'est dans ce sens que la motion hypothétique aurait été
déclarée irrecevable. Celle-ci est parfaitement recevable.
Je voudrais demander à tous les membres de la commission, s'il
vous plaît, de ne pas revenir continuellement sur les décisions
que je rends. Si vous n'êtes pas satisfaits, qui que vous soyez, vous
avez des moyens, vous avez des personnes à voir. M. Cardinal est le
responsable des présidents de commissions parlementaires. Allez le voir
et ne soyez pas gênés! Là, franchement, je pense que cela
devient une habitude et une mauvaise habitude, à part de cela.
M. Forget: J'admire votre patience, M. le Président.
Je reprends. Donc, comme je l'avais indiqué au début de
nos travaux, il semble évident, et cela a été
confirmé par les propos que le ministre a tenus ce matin, que le
ministre, en compagnie d'un certain nombre de ses fonctionnaires, veut se
lancer en affaires. C'est un objectif admirable, M. le Président. Le
seul ennui, c'est qu'il se lance en affaires avec les ressources des
contribuables, et là on est un petit peu plus nerveux. Il est clair
qu'un ministre qui est un ingénieur-minier, même s'il
s'intéresse beaucoup à la transformation de l'amiante, a un
penchant tout naturel pour le côté minier des choses.
M. Bérubé: Ingénieur
métallurgiste.
M. Forget: Le côté souterrain. Ah bon, de toute
façon, il semble, soit peut-être par une inclination à
laquelle il n'a pas voulu céder lors de son séjour... C'est
là peut-être l'influence de ses fonctionnaires, mais il semble que
l'on veuille se lancer en affaires et qu'on ait une attraction
particulière pour le secteur minier, le côté souterrain.
D'ailleurs, cela irait assez bien avec le ministre. Je pense que c'est
probablement pour cela que je me suis formé cette impression qu'il
était ingénieur minier, M. le Président. Il a toujours ces
allures souterraines.
M. Bérubé: Allure que je partage sans doute avec le
député de Saint-Laurent.
M. Grégoire: M. le Président, il faudrait
peut-être corriger. Les mines d'amiante sont toutes à ciel
ouvert.
M. Forget: Mais c'est malgré tout sous la surface normale
du sol. Il y a certains gisements qui sont exploités par voie de
puits.
M. Bérubé: Notez, notez sa connaissance. M.
Grégoire: C'est juste.
M. Forget: D'ailleurs, dans le cas de la Normandie, c'est la
question qui se pose pour la poursuite de l'exploitation de cette mine. Mais
cela ne nous étonne pas ces espèces de réflexes de taupe,
n'est-ce pas, du gouvernement. On veut forer, on veut aller loin dans les
sous-sols...
M. Bérubé: En profondeur.
M. Forget: On veut aller dans le creux, M. le
Président.
M. Bérubé: Et non pas dans les profondeurs.
M. Forget: Trêve de plaisanterie. Cela me désarme ce
désir d'être absolument actif dans le domaine minier alors qu'on
proclame tout haut et que l'ensemble de la population a l'impression que ce
dont il s'agit dans la Société nationale de
l'amiante, c'est de projets de transformation. Le ministre
lui-même nous a annoncé son impatience de justifier son
intérêt pour l'aspect minier des choses alors que tout le monde se
préoccupe de la transformation. Mais nous y viendrons lorsque nous
débattrons, si je comprends bien, la motion principale.
Il reste que même si à tout prix on veut être actif
dans le secteur minier, même si, comme on le sait maintenant à
cause de notre discussion sur la procédure, l'Opposition est impuissante
pour éliminer cette considération du projet de loi tout ce
qu'on pourra faire, c'est voter contre, on ne peut certainement pas aller plus
loin que cela il y a quand même des choses qu'on peut faire pour
limiter les dégâts en quelque sorte. Limiter les
dégâts dans le sens suivant. C'est que nous avons, faut-il le
rappeler, des ressources limitées. L'État au Québec, comme
n'importe qui, n'importe quel gouvernement, a des ressources limitées,
et ces ressources devraient être utilisées au meilleur escient. Il
ne nous apparaît pas évident, loin de là, que la meilleure
utilisation de ces ressources limitées, c'est d'acheter des mines
existantes. Et si on ne peut pas éviter le désir, si on ne peut
pas refuser au gouvernement la possibilité, puisqu'il a le pouvoir, il a
la majorité, de s'engager dans la voie des opérations
minières, au moins peut-on l'inviter à le faire à
l'occasion de nouveaux gisements.
S'il est intéressé à créer des emplois dans
le secteur de l'amiante, les emplois, il va les créer par la
découverte, le développement et l'exploitation de nouveaux
gisements, certainement pas par l'acquisition de mines existantes. Le sens de
cet amendement c'est de dire au gouvernement: Créez, si vous ne pouvez
pas vous en empêcher, une société de l'amiante; donnez-lui,
si vous ne pouvez pas résister à la tentation, le pouvoir de
s'intéresser aux activités minières, mais, à ce
moment-là, intéressez-vous aux activités minières
dans les régions où des gisements ne sont pas actuellement en
fonctionnement, ne sont pas actuellement exploités et qui, s'ils
deviennent exploités, créeront des emplois. C'est
présumément une de vos préoccupations sur le plan social,
préoccupation louable à laquelle nous pourrions souscrire
à la limite. En effet, si le gouvernement à tout prix, encore une
fois, veut s'occuper de mines et s'il le fait en créant des emplois dans
les régions comme le Nord-Ouest ou dans la région de Chibougamau,
la région à 55 milles environ au nord d'Amos où il y a un
gisement du Catel ou du Chatel je ne me souviens pas du nom de
l'endroit, mais il y a des gisements que le gouvernement exerce
là cette espèce de désir irrépressible qu'il a de
se livrer à des activités souterraines. Il pourra les exercer
utilement pour la société et non seulement pour assouvir un
quelconque désir des gens qui sont ses conseillers ou des ministres
d'avoir un empire minier, ce qu'ils ont peut-être désiré
avoir à d'autres moments de leur carrière et qu'ils n'ont pas
réussi à faire dans le secteur privé. Là, ils se
sont dit: On a quand même une poignée, on a quand même une
façon, on a le pouvoir, on va se lancer en affaires, on va s'en faire
une mine. On n'a pas pu être nommés ingénieurs ou
administrateurs d'une société minière dans le bon temps.
Au moins là, on a cette entrée, on va entrer par la porte
d'argent que le gouvernement nous permet d'ouvrir et on va se faire une
société minière à notre goût. (12 h 15)
Si c'est irrépressible, ce désir, malgré que ce
n'est absolument pas justifié, comme le gouvernement a la
majorité, il peut se servir à même les deniers publics, il
peut se créer son petit empire minier. Tant mieux pour ceux qui vont en
bénéficier. Je ne pense pas que, dans la mesure où on
achète des mines existantes, il y aura d'autre chose que l'amour propre
du ministre et des choses beaucoup plus terre à terre pour un certain
nombre de cadres qui seront parachutés dans cette société
qui seront satisfaites, mais enfin, si cela semble important pour le ministre,
qu'il le fasse, mais au moins qu'il le fasse d'une façon socialement
utile en créant une nouvelle mine, en ouvrant un gisement à
l'exploitation dans le comté du député d'Abitibi-Est qui a
manifesté son impatience, justement.
D'ailleurs, ce qui est amusant, quand on parlait de recherche de
gisements, c'est que dans le fond, le ministre a joué très
habilement sur le désir caché, je dirais le désir
souterrain de tous les députés ministériels, par ces
activités de recherche on découvre bien, un jour, dans leur
comté un joli petit gisement d'amiante. Les deux ou trois
députés ministériels qui en ont parlé avaient
presque un regard de concupiscence à la pensée que
peut-être les activités d'exploration dans leur comté
permettraient de trouver un gisement. Même si on ne trouve pas de
gisement, quand même, par directives gouvernementales, on pourra faire
chercher dans leur comté.
M. Grégoire: On est allé dans le comté de
Saint-Laurent, on n'a pas trouvé de gisement, mais on a trouvé
une population qui voulait que cela fonctionne.
M. Forget: On me dit que vous avez un caucus ministériel.
J'ai trop de charité d'âme pour ignorer cela, mais je m'en
voudrais de ne pas souligner ce désir, cette lueur de concupiscence
à l'idée de voir les équipes d'exploration arriver dans
leurs comtés pour chercher de l'amiante.
M. Grégoire: On est allé dans le comté de
Saint-Laurent.
M. Forget: Quel joli spectacle, n'est-ce pas? On pourrait
même, dans les envois sans adresse de l'Assemblée nationale,
publier jusqu'à quatre photos, deux fois par année, des
équipes de prospection à l'oeuvre dans le comté. C'est un
spectacle qui réjouit la pensée de tout bon péquiste et je
pense que c'est peut-être un des éléments les plus
déterminants dans la façon dont ce projet de loi a
été rédigé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant
d'ajourner nos travaux, j'aimerais apporter
une nuance à ce que j'ai dit tout à l'heure, M. le
ministre, sur une question que vous m'avez posée. Vous m'avez
demandé: si le paragraphe a) disait "recherche", si le paragraphe b)
disait "développement", si le paragraphe c) ne parlait que de
"exploitation", seulement un mot, est-ce qu'on pourrait enlever le mot
"recherche" au paragraphe a), le mot "développement" au paragraphe b) et
le mot "exploitation" au paragraphe c). Je dirais oui, à partir du
moment où vous proposez que l'article 4, qui est une motion principale,
soit modifié en retranchant le paragraphe a); mais à partir du
moment où on a déjà eu une motion d'amendement du
député de Saint-Laurent sur le paragraphe a), le paragraphe a)
devient une motion prin- cipale et, à ce moment-là, une motion
ayant pour effet de retrancher tout le paragraphe a), qui devient article
à toutes fins que de droit, devient irrecevable.
M. Bérubé: M. le Président, je dois dire que
je reconnais votre très grande sagesse en ce qui a trait à
l'application du règlement et j'ai finalement compris...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 12 h 20)