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Étude du projet de loi no 70
Loi constituant la Société
nationale de l'amiante
(Quinze heures quinze minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
Les membres de la commission pour la présente sont: M.
Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu
(Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M.
Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt
(Saint-François) et M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys).
Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin
(Mercier)...
M. Lalonde: Seulement pour aujourd'hui.
M. Bérubé: Est-ce que vous remplacez M. Raynauld,
qui vous avait remplacé?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant, s'il vous plaît! M. Raynauld (Outremont) comme intervenant
remplace M. Garneau (Jean-Talon); M. Landry (Fabre)... Ce n'est pas mieux un
lundi qu'un mardi. Vous vous interrompez et on n'a pas encore
commencé.
M. Grégoire: On leur souhaite la bienvenue pour la
semaine.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Raynauld (Outremont) en remplacement de M. Garneau (Jean-Talon); M. Landry
(Fabre), M. Lari-vière (Pontiac-Témiscamingue) est
remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Léger (Lafontaine), M.
Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M. Roy
(Beauce-Sud) et M. Samson (Rouyn-Noranda).
Si vous pouviez m'indiquer où on était rendu. Je sais que
nous étions à discuter...
M. Lalonde: Je n'ai aucune idée où on est rendu, M.
le Président.
Objets de la société
Motion sur le recyclage des résidus d'amiante
(suite)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... on
était à l'article 4, paragraphe d). Il y a un sous-amendement qui
avait été adopté. Nous étions rendus à la
motion principale, laquelle se lisait comme suit: "Le recyclage des
résidus d'amiante". Qui avait la parole?
M. Bérubé: J'avais pris la parole, M. le
Président, jusqu'à midi et demi, ce qui nous a permis, en
même temps, d'examiner plus avant cet amendement. Après l'avoir
soigneusement examiné, compte tenu des remarques que j'ai faites lors de
mon intervention, remarques qui, à mon point de vue, demeurent toujours
pertinentes dans la mesure où on dit, au paragraphe b) de cet article,
que "la société a pour objet toute activité de nature
industrielle, manufacturière ou commerciale..." Par conséquent,
cela doit également inclure, dans son mandat, le traitement des
résidus d'amiante, traitement qui pourrait produire des profits, donc
qui s'avérerait économique. Par conséquent,
déjà au paragraphe b) du premier alinéa, nous avons
inclus, à l'intérieur de ce paragraphe, le mandat de s'occuper
des résidus d'amiante. Je dois également souligner que dans la
mesure où nous avons un autre article qui donne un pouvoir de
directive c'est l'article 18au ministre des Richesses naturelles,
par conséquent, il demeure tout à fait possible et
d'ailleurs, c'est ce qui s'avérera la réalité lorsque nous
émettrons nos premières directives il s'avérera
donc toujours possible de définir dans nos directives un mandat à
la société qui viserait à l'obliger à s'occuper du
traitement des résidus d'amiante. Cependant, il demeure que
présentement, à notre connaissance en tous les cas, il n'existe
pas de résidus d'amiante que l'on puisse exploiter commercialement. On
ne connaît pas de procédés commerciaux actuels permettant
le traitement des résidus, et la crainte que je manifesterais à
l'amendement du député d'Outremont, amendement qui, en soi, peut
sembler assez innocent, la crainte que je pourrais manifester vis-à-vis
de cet amendement est que la société pourrait peut-être se
servir de cet amendement particulier pour justifier des opérations non
commerciales, non économiques, non industrielles, non
manufacturières, donc, justifier un autre type d'activités qui ne
répondent pas comme telles à l'objectif que le gouvernement s'est
fixé pour la Société nationale de l'amiante qui est d'en
faire une entreprise commerciale, industrielle, manufacturière
rentable.
Par conséquent, étant donné la possibilité
de confusion ultérieure quant au vouloir des législateurs au
moment de la rédaction des objets, je préférerais donc que
cet amendement soit rejeté.
Le Président (M. Vaillancourt, onquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, on se fait servir des
arguments à la convenance du ministre. Il ne change même pas la
couleur de la sauce que ce soit de la chair ou du poisson ou la plupart du
temps ni l'un, ni l'autre; M. le Président, on se les fait servir avec
la même sauce.
M. Bérubé: Les grands vins se servent avec
n'importe quel mets.
M. Forget: M. le Président...
M. Lalonde: M. le Président, pour votre salade.
M. Grégoire: Le vin ne se prend pas avec la salade non
plus.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Franchement, pour un président qui n'a pas dîné, vos propos
sont... M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Vous ne nous invitez pas à suspendre
jusqu'à ce que le président ait dîné. Ce serait une
motion débattable probablement. Non, on s'abstiendra de demander une
suspension pour le plus grand confort du président. Il reste que le
raisonnement qu'on nous a servi souvent durant les travaux de cette commission,
à savoir qu'il y aura un conseil d'administration et que le conseil
déciderait, etc. Maintenant, à ce moment, il s'agissait, bien
sûr, d'éviter de faire quelque chose, d'éviter de s'engager
dans quoi que ce soit, dans des opérations manufacturières, de
s'engager plus avant que dans des généralités. On disait:
Cela sera étudié, évalué par la
Société nationale de l'amiante. Lorsqu'il s'est agi de nouveaux
gisements, on nous a dit: Lorsque la Société nationale de
l'amiante existera, ils verront s'il est opportun ou non de s'engager de ce
côté.
Là, on nous sert à peu près la même salade
pour éviter de parier d'un sujet, tout simplement, éviter de
mentionner dans la loi qu'il y a une responsabilité. On pourrait tout
aussi bien dire que le paragraphe a) et le paragraphe b) devraient être
supprimés, qu'on devrait se limiter à créer une
société de l'amiante; le titre étant par lui-même
tellement expressif, on saurait bien à quoi cela doit servir. On devrait
laisser au pouvoir de directives du gouvernement et à la
discrétion...
M. Bérubé: Ce n'est pas une mauvaise
idée!
M. Forget: ... du conseil d'administration de déterminer
s'il va faire de l'exploitation minière, s'il va faire du commerce
international ou s'il va faire de la fabrication. Après tout, ce sont
des questions administratives. Pourquoi le législateur s'est-il
donné la peine d'écrire le paragraphe a) et le paragraphe b)?
Tout à coup, quand arrive le paragraphe c), on dit: II y a aussi la
question des détritus, la question des résidus ou des crassiers,
comme le dit le député de Mercier.
M. Bérubé: M. le député de
Saint-Laurent, le paragraphe c) a été modifié, a
été ajouté, puisqu'il porte sur la recherche et le
développement et que nous l'avons accepté; nous sommes maintenant
au paragraphe d).
M. Forget: C'est cela, au paragraphe d). On ne nous a pas dit,
dans le cas de la recherche: Non, on va faire cela d'une autre façon, on
fera cela par directives. Cela a été jugé important,
significatif. D'ailleurs, j'en félicite le ministre; c'est la seule
ouverture d'esprit qu'il a manifestée pendant huit semaines, mais toute
règle a son exception.
Quand on arrive aux résidus, il me semble, pour avoir d'abord vu
les crassiers en question, pour avoir parlé aux gens qui se sont
préoccupés de cela depuis un bon nombre d'années, il y a
à peu près quatre ou cinq ans, un des syndicats actifs dans la
région de l'amiante a pris l'initiative d'une étude. Je crois
qu'ils en ont pris eux-mêmes et seuls l'initiative au départ. Je
pense que c'était le syndicat qui est actif dans le comté de
Richmond, dans Asbestos, qui a mis en valeur la notion d'une utilisation des
résidus. Ayant fait cette démonstration, du moins de façon
superficielle, de façon assez convaincante, le ministère des
Richesses naturelles et le ministère de l'Industrie et du Commerce ont
commandité et entrepris eux-mêmes une étude sur
l'utilisation des résidus, une étude fort intéressante,
d'ailleurs, que j'ai à mon bureau et que j'ai lue. Justement, je
félicite le député de Frontenac de l'avoir en sa
possession, je ne sais pas s'il l'a lue.
M. Grégoire: Au complet.
M. Forget: S'il l'a lue...
M. Grégoire: Elle a été annotée
partout.
M. Forget: ... probablement qu'il pourrait, avec encore plus de
persuasion que moi, suggérer la lecture de ce document au ministre qui
apprendrait par là qu'il y a toute une dimension, à la question
de l'amiante, qui devrait être mentionnée dans la loi constitutive
d'une société de l'amiante. Qu'on mentionne l'utilisation des
résidus dans une loi créant la Société de
l'amiante, ça n'a pas du tout pour but de forcer la
société à produire de l'engrais chimique, par exemple.
C'est une des utilisations possibles, ni... bien, le magnésium est un
métal, mais on peut l'utiliser, soit pour en extraire certains
métaux, comme le nickel ou le magnésium ou on peut, sans
l'utiliser, sous forme de sel, s'en servir comme engrais, non pas sous forme
métallique, mais sous forme de sel, comme engrais chimique.
C'est d'ailleurs peut-être...
M. Grégoire: ... magnésium, phosphate de
magnésium.
M. Forget: Bien sûr. C'est parce qu'il y a certains
éléments dans le résidu qu'on peut utiliser, mais on ne
l'utilise pas comme élément métallique, alors qu'il serait
aussi imaginable d'en extraire le magnésium ou même le nickel,
quoique les prix, de ce côté, de ces deux métaux ne sont
pas tels, surtout dans le cas du nickel, même s'il y en a une
quantité importante dans le résidu, ce n'est pas, apparemment,
susceptible de justifier une exploitation sous cette forme.
Certainement à titre d'engrais chimique, il semble qu'il y ait
là un débouché très intéressant. Même
si on le mettait dans le projet de loi, ça ne forcerait pas la
société, demain matin... D'ailleurs, ce qui est remarquable,
c'est que la Société de l'amiante n'est pas obligée de
faire quoi que ce soit demain matin. C'est vrai pour les engrais chimiques
comme c'est vrai pour la production de n'importe quoi; il demeure qu'elle a la
discré-
tion de le faire, au moment opportun, de la manière opportune,
pour des produits qui lui semblent appropriés.
Mais ce serait, malgré tout, de témoigner de
l'intérêt que le gouvernement prend dans cette question des
résidus qui constitue un problème localement, un problème
qui est bien connu. On s'est complu, dans certains reportages
cinématographiques sur la région, à démontrer
l'omniprésence de ces crassiers dans la région de l'amiante; les
gens qui y vivent les voient tous les jours, ce n'est pas un spectacle qui est
très réjouissant. Non seulement cela existe-t-il sur le plan
esthétique pour quelqu'un qui arrive de l'extérieur et qui voit
ces amoncellements pour la première fois, mais il demeure que,
même pour les gens qui y vivent... Un syndicat, en particulier, a
témoigné de son intérêt dans la question.
Or, ce que cela indiquerait, si on le mettait dans la loi par la voie
d'un amendement, c'est que, outre les buts économiques poursuivis par le
gouvernement, c'est-à-dire la création d'emplois dans le secteur
de la transformation en particulier, outre ces objectifs économiques, il
existe des objectifs sociaux; on en a parlé beaucoup lorsqu'on a
parlé de sociétés d'État, dans tous les pays et ici
aussi, on veut parler de nouveaux critères de performance pour les
sociétés d'État. Cela ne sert à rien de parler de
critères de performance et d'objectifs, et de les bien définir,
si on se confine, dans le secteur public, à des objectifs que le secteur
privé pourrait tout aussi bien réaliser et poursuivre. Dans le
fond, le gouvernement s'intéresse à cette question parce
que du moins c'est la seule raison valable qu'on puisse y trouver
il est persuadé que le secteur privé laissé à
lui-même n'a pas la motivation, l'intérêt suffisant, la
conscience sociale qu'il faut pour poursuivre un certain nombre d'objectifs que
seule une entreprise publique peut poursuivre. C'est un objectif absolument
valable et défendable qu'il y ait, dans une intervention de
l'État, des objectifs autres que des objectifs strictement
économiques.
Or, l'élimination par leur utilisation à des fins
socialement productives, mais l'élimination, même si ce n'est pas
terriblement rentable, de cet élément, de ces retombées
assez négatives de l'extraction de l'amiante, devrait compter parmi les
objectifs sociaux d'une société d'État.
Il est déplorable que le ministre se retranche derrière un
pouvoir de directives qu'il prétend vouloir invoquer le lendemain de la
création de la Société de l'amiante. Allons donc! S'il
avait vraiment cette intention, il ne lui en coûterait pas de consacrer,
dans le projet de loi lui-même, que cette préoccupation, que n'ont
pas eue les sociétés ex-tractrices de fibres jusqu'à
maintenant et que vraisemblablement elles n'auront jamais, si laissées
à elles-mêmes, fait partie des préoccupations
gouvernementales et constitue l'une des raisons d'être de l'intervention
du gouvernement dans l'industrie de l'amiante.
Encore une fois, si cette indication apparaît dans le projet de
loi, la Société de l'amiante, le lendemain de sa création,
n'est pas pour autant obligée immédiatement d'amorcer quelque
chose de concret. Elle n'est pas davantage obligée d'amorcer la
construction d'une usine de transformation le lendemain de sa création.
On lui laisse une grande liberté de moyens, une grande liberté de
temps, mais il reste qu'elle doit avoir des objectifs à long terme. La
transformation en est un, la recherche en est un autre, par un amendement que
le ministre a accepté d'intégrer au projet de loi. Il me semble
que l'élimination des résidus et l'élimination des
accumulations de résidus par une utilisation la plus productive
possible, la moins coûteuse possible, correspond à une de ces
grandes préoccupations sociales qui doivent fonder l'intervention de
l'État dans des activités industrielles ou commerciales.
Dans tous les cas, lorsque les États interviennent, ils ont
ordinairement au moins la précaution de le faire au nom d'objectifs qui
dépassent simplement le monde relativement étroit des
considérations économiques et utilitaires. Il me semble que ce
serait bien vu que le ministre, même s'il est un ministre sectoriel qui
pourrait prétendre, à la limite, ne s'intéresser qu'au
développement des richesses naturelles, témoigne également
de sa préoccupation pour les dimensions sociales, si l'on veut, les
dimensions plus larges des activités minières. (15 h 30)
D'ailleurs, ce serait un exemple excellent à donner à ceux
qui, un peu partout, pas seulement pour l'amiante, mais pour d'autres
productions minérales, ravagent littéralement le paysage et
même lorsqu'un gisement est complètement épuisé, ne
se soucient aucunement de restaurer l'environnement physique qu'ils ont parfois
troublé de façon irrémédiable. Ce n'est pas le cas
seulement des grandes compagnies minières, c'est le cas même de
ces innombrables carrières de gravelle que l'on retrouve à
travers tout notre paysage québécois, M. le Président, qui
n'ont que depuis peu fait l'objet d'une sollicitude quelconque de la part du
gouvernement et qui déchirent littéralement le paysage. Il y a
là un exemple à donner d'une société
gouvernementale qui aurait, dans ses objectifs mêmes, celui de restaurer
un certain équilibre écologique. Cela pourrait être
formulé...
Si le gouvernement voulait faire des améliorations, nous serions
ouverts à cela. On a suggéré que, même s'il
était possible de découvrir une utilisation aux résidus,
au fur et à mesure de leur production... parce qu'il y a
évidemment quelque chose comme 80% en poids, en masse de la roche
extraite des mines qui représentent des déchets, mais il y a, au
plus, une partie beaucoup plus faible qui est utilisable sous forme de fibre
d'amiante...
Donc, l'immense majorité de ce qu'on extrait de la mine devient
des rebuts. Même si on trouvait une utilisation à ces
résidus, il est fort probable que la production courante des
résidus dépasserait de loin ce qu'il serait possible d'utiliser
sous quelque forme nouvelle que ce soit. Même si c'était pour
produire de l'engrais, on se bornerait probablement à utiliser les
résidus courants.
Pour ce qui est des accumulations passées, il y a quelque cent
ans d'exploitation minière, il n'y a pas beaucoup d'espoir d'utiliser
ces masses, parce qu'encore une fois il y en a trop qui viennent en circulation
tous les ans pour qu'on puisse, en plus de cela, utiliser ce qui s'est
accumulé dans le passé. C'est du moins ce que l'étude que
le député de Frontenac avait entre les mains tout à
l'heure tente de suggérer.
Dans ces cas-là, il me semble que la Société de
l'amiante pourrait, à ces fins, recevoir des subventions
spéciales du gouvernement il n'y a absolument aucune objection
à celaet pourrait devenir l'agent gouvernemental chargé de
restaurer l'environnement par certains travaux d'aménagement de ces
crassiers.
Une des choses qui m'ont frappé, étant sur place, c'est
que certaines de ces accumulations sont là depuis très longtemps,
présumément. On n'y ajoute plus rien. De toute façon, elle
sont là depuis longtemps. On n'y ajoute plus de résidu. On a fait
d'autres piles à côté. Même ces dépôts
anciens sont sujets à une érosion continuelle. On n'a pas
réussi à stabiliser les pentes, de façon satisfaisante;
alors la végétation ne peut pas y prendre racine. Il y a des
travaux nécessaires pour restaurer l'environnement de ce
côté.
Il me semble que, plus encore qu'au gouvernement lui-même, il
reviendrait à la société de l'amiante d'être l'agent
gouvernemental pour expérimenter d'abord sur une échelle
réduite certains projets de stabilisation des pentes, d'ensemencement,
de plantation, et Dieu sait quoi, si c'est possible, mais cela doit être
possible par un amendement quelconque au sol. Je suis sûr que le ministre
a à la bouche, sur le bout des lèvres, des expressions qui vont
souffler l'Opposition. On va sûrement nous servir une expression
technique. Je sens, d'ailleurs, le ministre assis sur le bout de sa
chaise...
M. Bérubé: Ce ne sont pas des amendements au sol,
ce sont des amendements à la loi.
M. Forget: ... qui se prépare à nous réciter
un chapitre de la géologie des sols en mouvement ou quelque chose dans
ce genre, qui va nous régaler, d'ici quelques minutes, de tout un
arsenal de termes techniques qui vont nous permettre de comprendre ce que la
société de l'amiante devrait faire, dans ce domaine...
M. Lalonde: Ou de ce qu'il ne faut pas faire.
M. Bérubé: Vous n'avez pas l'air de comprendre
grand chose.
M. Forget: ... ce que d'humbles profanes, comme nous, ne
connaissons évidemment pas. Tout ce qu'on sait, c'est que les crassiers
sont là. On sait également que les gens qui vivent dans la
région de l'amiante les ont en pleine face depuis des années. Ils
souhaiteraient que le gouvernement, alors qu'il s'apprête à poser
un geste, le fasse non seulement pour des motifs bassement économiques,
M. le ministre, mais aussi ait certaines préoccupations du
côté de la qualité de la vie dans cette région, de
l'environnement. Je pense qu'ils vont s'étonner beaucoup dans deux
minutes, je vais bientôt terminer d'entendre parler du ministre et
du député de Frontenac, lorsqu'on leur dira: Écoutez, on a
cherché à faire inscrire dans la charte de la
société de l'amiante une préoccupation, quelques mots
seulement, moins de cinq lignes, deux lignes et demie, je pense, pour qu'on ne
perde pas de vue, du côté gouvernemental, du côté de
la société de l'amiante, le problème que constituent les
résidus, alors qu'ils savent eux, que depuis des années il en est
question. Le gouvernement a créé des comités
d'étude là-dessus. Il a publié des rapports. Les syndicats
eux-mêmes ont été actifs sur ce dossier. Tous ces gens vont
se demander ce qui se passe. Notre député, adjoint parlementaire
du ministre des Richesses naturelles...
M. Lalonde: C'est presque un ministre. M. Forget: C'est
presque un ministre. M. Lalonde: Entre nous. M. Bérubé:
... tout état.
M. Forget: II a le pied dans la porte, M. le Président. Il
a le pied dans la porte du cabinet.
M. Grégoire: En tout cas, pas un ancien.
M. Forget: II serait mieux d'avoir la tête, mais il a le
pied. C'est déjà...
M. Lalonde: ... est rendu.
M. Forget: Le reste suit. Espérons-le pour lui.
M. Grégoire: ... le pied dans la porte que d'être
sorti complètement à coup de pied dans le derrière.
Le Président (M. Ouellette): À l'ordre! M.
Grégoire: Vous, vous êtes sortis.
M. Forget: M. le Président, c'est un étonnement non
mitigé qu'éprouveront tous ceux qui connaîtront la
réticence du gouvernement à inscrire quelque chose en noir sur
blanc relativement aux résidus. Cela fait des années. Encore une
fois, on ne peut pas aller là sans se faire littéralement
harasser par des interventions relatives aux résidus. On sait que cela
frappe les gens de l'extérieur. Probablement qu'on profite de notre
étonnement devant cette situation pour nous faire comprendre que ce
n'est pas drôle de vivre dans cette région. Non seulement on a la
pollution dans l'air et même dans les poumons, pour un certain nombre de
ces gens, mais on a, devant les yeux, le signe constant de ce dont on
dépend pour sa vie de tous les jours. Ce n'est pas un paysage
très réjouissant.
Encore une fois, c'est un objectif social que le gouvernement ferait
bien d'inscrire dans une telle loi. Cela ne crée pas plus d'obligation
là que cela en crée pour d'autres sujets. Cela laisse au conseil
d'administration le soin de choisir les moyens.
Quand le ministre nous a dit, à plusieurs reprises, qu'un conseil
d'administration d'une société d'État jouissait d'une
autonomie de fonctionnement, je suis sûr qu'il ne voulait pas parler des
objectifs, M. le Président. Il ne voulait quand même pas dire que
ces gens recevaient $250 millions et après cela s'assoyaient autour
d'une table pour décider à quoi ils serviraient. Les objectifs ne
dépendent pas du conseil d'administration. Les objectifs leur sont
donnés de l'extérieur, par l'Assemblée nationale, sur
l'initiative du gouvernement. C'est très bien, mais qu'on ne nous dise
pas que ce sont eux qui décident des objectifs. Or, il peut être
difficile pour un conseil d'administration qui se voit donner certains
objectifs, mais pas d'autres, d'interpréter ce serait la seule
façon de le faire avec restriction son mandat.
C'est une loi spéciale qui crée cette
société. On ne dit pas qu'elle a le droit de prendre tous les
moyens et de tout faire relativement à l'amiante. On dit qu'elle a le
droit de faire A et B. On va faire A et B et ce qui est en dehors de A et B, on
va le juger conformément à l'interprétation normale du
droit statutaire. Tout ce qui échappe à A et B est, par
définition, implicitement exclu. Si on ne l'a pas explicitement comme
objectif, c'est évident que le conseil d'administration sera ultra vires
de décider d'une intervention dans ce domaine. Même le
gouvernement ne pourrait pas, légalement et validement, émettre
des directives contrairement aux objets de la loi.
Comme on le verra à l'article 17, les directives sont restreintes
à l'objet de la loi. Le gouvernement ne peut pas amender la loi par une
directive. Il y est astreint comme tout le monde. C'est pour cette raison, M.
le Président, qu'il est absolument important c'est un symbole de
l'intention du gouvernement de voir les choses largement plutôt
qu'étroitement que cet amendement soit adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, j'aurais quelques
questions à poser au député de Saint-Laurent. Quand le
député de Saint-Laurent nous dit que les crassiers sautent aux
yeux, je dois lui dire que c'est vrai. On voit ces montagnes depuis longtemps.
Cela a commencé par des petits tas, dans le temps de S.-M. Parent,
premier ministre libéral, au début du 20e siècle, il y a
78 ans. Cela a continué avec Lomer Gouin, premier ministre
libéral; les tas ont grossi.
M. Forget: C'étaient des petits tas encore.
M. Grégoire: Non, là ils étaient plus gros.
Cela a continué avec Alexandre Taschereau, premier ministre
libéral.
M. Forget: Là, j'admets que le tas a dû grossir.
M. Grégoire: II y avait plus de tas et ils étaient
plus gros.
M. Lalonde: On a toujours été au pouvoir?
M. Grégoire: Cela a continué avec Adélard
God bout, en 1940, 1945...
M. Lalonde: Vous en passez un là.
M. Grégoire: Non, après Alexandre Taschereau, je
nomme les premiers ministres libéraux.
M. Lalonde: C'est cela, vous en passez quelques-uns. Les gens de
l'Union Nationale ne seront pas heureux.
M. Grégoire: Le siège est vide, alors... Je ne
parle pas des absents. Le chef des tas. Les chefs des tas libéraux. Cela
a continué avec Adélard Godbout, cela a continué avec Jean
Lesage, avec Robert Bourassa et alors, les tas grossissaient, il y en avait en
plus grand nombre.
M. Forget: On commençait à se poser des
questions.
M. Grégoire: Oui, mais vous ne vous êtes que
posé des questions comme vous posez des questions, mais...
M. Lalonde: Oui, mais depuis l'arrivée au pouvoir du
nouveau chef d'État, est-ce qu'ils sont encore là, les tas?
M. Forget: Là c'est fini, on n'en pose plus de
questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre.
M. Grégoire: Vous vous êtes toujours posé des
questions et c'est pourquoi, quand vous parliez tantôt de ceux qui
étaient à la porte ou dans l'antichambre des ministres, vous
autres, vous avez perdu complètement le ministère. Vous en
êtes sortis parce que cela faisait assez longtemps que vous voyiez
grossir les tas. Que vous vous posiez des questions" cela n'a pas donné
de réponse.
M. Forget: II fallait aller voir les...
M. Grégoire: Que vous étiez dans
l'indécision... Je voudrais demander au député de
Saint-Laurent, pour revenir aux choses sérieuses: Quand il parle des
résidus et d'essayer d'éliminer cela ou de trouver une autre
solution, d'arranger les pentes, de replanter, est-ce que c'est la
Société nationale de l'amiante qui doit s'occuper de cela,
d'après lui, pour toutes les compagnies ou simplement pour les mines
qu'elle exploiterait? Est-ce qu'à ce moment, il faudrait que la
Société natio-
nale de l'amiante rédige également les règlements
ou défraie les coûts d'enterrement des tas de résidus de la
Johns-Manville ou de la Canadian Carey?
M. Forget: Pour les enterrer, cela pourrait être difficile
avant de creuser d'autres trous.
M. Grégoire: Oui, mais prenez le cas de la Flintkote
où la Flintkote a cessé ses opérations; il y a le trou et
il y a le tas. Elle est partie. Elle n'est pas restée là, mais
elle a laissé le trou et le tas. Devrait-il y avoir, d'après
vous, une loi qui l'obligerait à refermer? Devrait-il y avoir un fonds
spécial pour prévenir cela? En d'autres termes, est-ce que la
Société nationale de l'amiante devrait s'occuper de tous les tas
de résidus, de tous les crassiers?
M. Lalonde: Vous ne vous êtes pas encore posé cette
question?
M. Grégoire: Est-ce qu'elle devrait fournir les
règlements? Je veux savoir ce que vous en pensez.
M. Lalonde: Vous êtes au gouvernement. Vous ne vous
êtes pas posé ces questions?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît.
M. Grégoire: Je fais des suggestions, le
député de Saint-Laurent a parlé de cela. Est-ce que la
Société nationale de l'amiante devrait avoir comme mandat de le
faire pour toutes les compagnies ou simplement pour les mines qu'elle
exploiterait? Je veux le demander au député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, étant donné...
M. Grégoire: Si le député de Saint-Laurent
ne veut pas répondre...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Étant donné que le temps de parole du député de
Saint-Laurent est écoulé, s'il répond, il répond
sur votre temps, évidemment.
M. Grégoire: S'il ne veut pas répondre...
M. Forget: Écoutez, s'il veut absolument poser la
question, je répondrais en le renvoyant aux propos du ministre quand on
a posé des questions analogues. Il a dit: Écoutez, attendons de
voir qui a l'expertise. La Société nationale de l'amiante va
avoir l'expertise. Elle va tout connaître dans le domaine de l'amiante.
Elle va répondre à toutes les questions du député
de Frontenac.
M. Grégoire: Ah bon! C'est le patinage qui continue.
M. Lalonde: Où est-ce que vous voyez le patinage?
M. Forget: C'est le patinage du ministre là.
M. Grégoire: Comme le patinage du député de
Saint-Laurent.
M. Forget: II n'en avait pas de solution, lui non plus.
M. Grégoire: Comme cela, vous savez qu'en Allemagne, le
député de Saint-Laurent est peut-être au courant, le
gouvernement allemand oblige, à Noddenham, d'enterrer au fur et à
mesure les résidus, ce qui revient à $7 la tonne. Est-ce que
c'est une des suggestions que le député de Saint-Laurent fait ou
quoi?
M. Forget: Je ne suis pas un expert en enterrement de
détritus, mais je suis prêt à prendre la parole du
député de Frontenac.
M. Grégoire: Je m'aperçois que vous avez
laissé monter les tas sans savoir ce que c'était.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît.
M. Bérubé: Qu'ils se contentent d'enterrer le
fédéralisme.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre.
M. Grégoire: On aurait peut-être une proposition
à faire au député de Saint-Laurent et au
député de Marguerite-Bourgeoys pour inclure l'idée des
résidus sous une autre forme. Si vous voulez l'accepter, c'est pour
inclure l'idéenon, j'ai une proposition...
M. Forget: On est ouverts aux propositions.
M. Grégoire: ... et cela prendra probablement le
consentement parce que ce serait revenir sur un article déjà
adopté. Ce serait d'ajouter, à la suite du paragraphe b), de
l'article 4 qui se lit comme suit: "Toute activité de nature
industrielle, manufacturière ou commerciale reliée directement ou
indirectement à la transformation de la fibre d'amiante, les mots "y
compris la récupération des résidus."
M. Bérubé: D'abord, le terme
"récupération" est supérieur au terme recyclage parce que
de fait on ne recycle pas les résidus. Quand on parle de recyclage des
déchets, en général, c'est que ces produits ont servi
à une première utilisation, ils sont rejetés et on les
reprend à nouveau pour une deuxième utilisation. Donc, le terme
"récupération" serait, d'un strict point de vue grammatical, le
terme correct. Deuxièmement, l'idée...
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.
Je voudrais simplement savoir si le ministre parle sur une motion d'amendement
ou sur un...
M. Bérubé: Je veux simplement expliquer la raison
pour laquelle... (15 h 45)
M. Grégoire: II faudrait revenir au paragraphe b).
M. Lalonde: Puis-je vous demander une directive?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Lalonde: Comme le député de Frontenac le
suggère, est-il exact qu'il faudrait le consentement pour revenir
à l'article b) qui a déjà été
adopté?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Grégoire: Oui, pour parler sur cette motion-là
ou cet amendement-là...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article b) a été adopté. Si le député de
Frontenac proposait un amendement, pour que je puisse le déclarer
recevable, il faudrait nécessairement le consentement, puisque l'article
b) a été adopté.
M. Forget: Est-ce que je peux poser une question, en retour?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Lalonde: C'est de l'improvisation, un peu.
M. Forget: On ne comprend pas. Personnellement, je ne comprends
pas l'idée, non pas d'enterrer les résidus, mais d'enterrer la
référence aux résidus dans un autre paragraphe. Il y a une
dimension différente. Lorsqu'on parle des activités industrielles
et commerciales, ce sont des activités qui sont poursuivies pour
elles-mêmes. Dans le cas des résidus, ce n'est pas
nécessairement une activité dans laquelle on se lance pour des
raisons économiques, mais pour des raisons autres que commerciales. Il y
a là la question d'un coût social, peut-être, d'une
dimension sociale à l'ensemble des activités qui devrait
être traitée plus qu'incidemment à des activités
commerciales, mais bien comme l'un des objectifs de la société
auxquels elle jugera, selon ses moyens, d'accorder plus ou moins d'importance
en termes de budget. Mais c'est vraiment un objectif. C'est pour cela que je me
dis que si on l'enterre dans un autre paragraphe, cela a l'air d'une mention en
passant, qu'on fera cela aussi, si possible, à l'occasion d'une autre
activité. Il me semble y avoir une différence de nature.
M. Grégoire: S'il s'agit de prendre le point de vue de la
protection de l'environnement, je crois qu'à ce moment-là c'est
le ministère de l'environnement qui définit ces
règlements. À ce moment-là, toutes les mines y sont
soumises et non pas seulement une mine qui serait détenue ou
dirigée, par exemple, par la Société nationale de
l'amiante. Elles seraient toutes sur le même pied, en concurrence
commerciale, pour l'observance des règlements du ministère de
l'environnement.
Lorsqu'on parle ici de récupération, on parle des tas
existants, comme le député de Saint-Laurent en parlait tout
à l'heure, qui n'ont pas nécessairement une valeur
économique.
Je dois vous dire qu'à l'heure actuelle, chaque jour et de plus
en plus, des entrepreneurs en voirie, par exemple, vont avoir des contrats avec
des mines d'amiante et vont chercher les résidus. Pour eux, cela devient
non pas une action pour la protection de l'environnement, mais une action
économique car ils se servent de cela pour les routes, les chemins, etc.
Il faut dire aussi et cela n'est pas dans la protection de
l'environnement si on prend l'Asbestos Corporation, par exemple, que de
plus en plus l'Asbestospendant certaines périodes, on le
faitva rechercher la fibre plus longue dans les tas de résidus. Il
y a là des actions économiques qui ne sont pas
nécessairement liées au fait de la protection de
l'environnement.
M. Bérubé: M. le Président, je pense qu'il
faut nécessairement qu'il y ait un consensus. Je voudrais tout
simplement souligner un point au député de Saint-Laurent. La
nature de ses objections vient peut-être du fait qu'il a gardé
à l'esprit la motion originale qu'il nous a proposée. Je ne l'ai
pas sous les yeux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): De
manière à assurer un meilleur rendement...
M. Bérubé: C'est cela. Dans la motion originale, il
y avait une section, à cette résolution, qui a été
retirée lors d'un sous-amendement. Par conséquent, l'amendement
que nous discutons présentement est le recyclage des résidus
d'amiante. D'une part, le mot "recyclage" est inexact sur le plan grammatical;
donc, il y aurait lieu de modifier ce terme. Quant à modifier le terme
"recyclage", à ce moment-là, la suggestion que nous ferions
serait de se servir, au lieu d'inscrire "la récupération des
résidus d'amiante", de ce terme et de l'ajouter au paragraphe b)
directement plutôt que d'en faire, non pas un alinéa, mais un
paragraphe supplémentaire.
M. Forget: Personnellement, je ne suis pas convaincu qu'on
obtienne le même résultat...
M. Bérubé: Bon, alors, il n'y a pas le
consensus.
M. Forget: ... de cette façon-là, à moins
que je ne me trompe. Il ne faudrait pas non plus donner à la
Société nationale de l'amiante un mandat qui, dans son volet
commercial et industriel, grève la société d'un fardeau
plus lourd que celui qui grève les autres sociétés qui
exploitent, par exemple, les mines. Si on en fait un paragraphe spécial,
à ce
moment-là, cela devient un mandat particulier vis-à-vis de
l'ensemble de l'industrie et pour lequel, encore une fois, il pourrait y avoir
des budgets de l'État.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Donc, il
n'y a pas consensus.
M. Forget: C'est ce que je constate, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): N'ayant
pas le consentement unanime, on revient à la motion d'amendement...
M. Grégoire: L'amendement ne spécifiait pas
cela...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): S'il
vous plaît...
M. Grégoire: C'était mon droit de parole.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II
achève, votre droit de parole, il reste deux minutes.
M. Grégoire: Dans votre amendement, vous ne
spécifiez pas du tout ce que vous venez d'ajouter, à savoir que
c'était un mandat de la société pour l'ensemble des mines.
Je ne vois pas pourquoi la Société nationale de l'amiante,
à ce moment-là, irait se substituer au ministère de
l'Environnement. Rendu là, vous pourriez tout aussi bien donner un
mandat à la Société nationale de l'amiante qui lui
permettrait de se substituer au ministère des Finances ou au
ministère des Affaires sociales ou au ministère de l'Agriculture
en lui disant: Plante des carottes et des patates sur les tas de
résidus. Je ne vois pas pourquoi cela ajouterait quelque chose.
Si nous sommes en faveur de spécifier l'idée de
récupération des résidus d'amiante, nous croyons que
même si les recherches ne sont pas toutes faites, même s'il y a
encore des recherches à faire, qu'il y a possibilité de
récupération économique des résidus et c'est
pourquoi nous avons fait la proposition que nous avons faite. Si vous voulez
absolument en faire un mandat spécial ou en faire quelque chose
s'adressant à toutes les compagnies, nous ne croyons pas qu'il
appartiendrait à la Société nationale de l'amiante de
régir la protection de l'environnement pour toutes les compagnies
d'amiante.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ... je ne comprends plus rien.
M. Bérubé: Cela fait longtemps qu'il ne comprend
rien; M. le Président, ça fait trois mois qu'on se rend compte
qu'il ne comprend rien; enfin, il l'avoue.
M. Lalonde: Devant ce gouvernement, M. le Président, ce
n'est pas surprenant qu'on ne comprenne plus rien.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: II a dû avouer qu'il ne comprenait
rien.
M. Bérubé: II a finalement avoué qu'il ne
comprenait rien.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!
M. Lalonde: On ne comprend plus rien à ce gouvernement, il
n'y a plus rien à y comprendre, M. le Président.
M. Grégoire: Si vous ne compreniez rien...
M. Bérubé: ... la même chose.
M. Grégoire: Qu'est-ce que vous faites ici?
M. Lalonde: Voilà un gouvernement qui, la semaine
dernière, a accepté d'ajouter un objectif à ceux qu'il
avait proposés, à savoir la recherche et le développement
de nouveaux usages ou procédés de transformation de l'amiante,
qu'on aurait pu plaider facilement être inclus au paragraphe b), par
exemple. Mais non, on a accepté de l'ajouter sans discussion, à
ce qu'on me dit. Voilà un gouvernement qui, après avoir
proposé un sous-amendement à une motion d'amendement,
c'est-à-dire d'enlever les mots, "de manière à assurer un
meilleur environnement physique", se retourne et vote contre la motion
d'amendement. Mais il me semble que si le gouvernement a indiqué son
désir d'améliorer l'amendement en y faisant un sous-amendement,
en enlevant un membre de la phrase, il indiquait sans doute qu'il était
prêt à voter en faveur de la motion d'amendement, telle que
sous-amendée.
C'est tellement vrai qu'on l'a vu tantôt dans un exercice
d'improvisation que j'ai rarement vu en commission parlementaire après
neuf semaines de séance, alors qu'on est seulement à l'article 4,
tenter de revenir au sous-paragraphe b) pour ajouter, d'un trait de crayon sur
le coin de la table, des objectifs qui méritent d'être
spécifiés de façon séparée.
L'argument du député de Frontenac fait sourire un peu. Il
dit: On ne veut pas que notre société d'amiante remplace le
ministère de l'Environnement, mais il a justement sous-amendé
notre motion d'amendement pour ne pas que cela arrive. On a justement
enlevé... D'ailleurs le ministre le demandait au député de
Saint-Laurent tantôt, vous souvenez-vous, est-ce que vous savez qu'on a
enlevé une partie de la phrase? Je repose la question et le
député de Frontenac le sait-il? Est-ce qu'il sait, le
député de Frontenac, qu'il a voté lui-même en faveur
d'un sous-amendement, qu'il a enlevé
les mots, "de manière à assurer un meilleur environnement
physique"?
Donc, il n'est pas question que la société serve de
ministère de l'Environnement. On ne parle donc que de recyclage,
récupération, si le ministre préfère. On peut faire
facilement un amendement et, d'avance, on vous le dit, on va l'accepter sans
même en parler, "récupération des résidus
d'amiante."
Parce qu'on pense que le gouvernement aurait dû y penser avant,
ça fait neuf semaines qu'on en discute. Si la récupération
des résidus le préoccupait un peu, il aurait dû l'inclure
lui-même au paragraphe b), premièrement; deuxièmement, on
pense qu'il s'agit d'un objectif assez important pour recevoir du
législateur un traitement spécifique et séparé,
dans le sens suivant: que la société a pour objet d'abord la
recherche, le développement et l'exploitation de gisements d'amiante,
etc.; deuxièmement, toute activité de nature industrielle, etc.;
troisièmement, la recherche et le développement des nouveaux
usages ou procédés de transformation de l'amiante et
quatrièmement la récupération des résidus
d'amiante, pas nécessairement de toute l'industrie, pas
nécessairement de toutes les compagnies, mais possiblement de toutes les
sociétés. C'est un objet de cette nouvelle Société
nationale de l'amiante, le président le sait. Quand on crée une
compagnie, quand on crée une société, on met des objets.
Ce n'est pas une obligation, mais cela lui donne le pouvoir de le faire. On
souhaiterait que les autres sociétés privées qui sont
actuellement dans le domaine de l'amiante le fassent ou l'aient fait davantage
dans le passé.
Pourquoi ne veut-on pas actuellement, après avoir, dans l'esprit
du gouvernement, bonifié la motion d'amendement du député
de l'Opposition officielle la semaine dernière, après avoir
voté en faveur de cet amendement avec l'air de dire: Si on enlève
tel ou tel mot, à ce moment-là, on va voter en faveur... On
arrive aujourd'hui et on vote contre. Réellement, je me demande quelle
est la cohérence. Au nom de quelle cohérence le ministre peut-il
aujourd'hui nous dire: On a amendé votre motion, on a enlevé tout
ce qui ne nous plaisait pas, mais on est contre ce qui reste. Il me semble que
la motion de sous-amendement, M. le Président, aurait dû
être de tout enlever. Cela aurait été irrecevable. On nous
dit: Ce qui ne nous plaît pas, c'est tel ou tel mot, on les a
enlevés; mais ce qui reste, on est contre. Je ne comprends plus
rien.
Est-ce que le gouvernement est prêt à nous présenter
un projet de loi préparé? Il veut corriger un paragraphe qui a
déjà été adopté. Nous croyons qu'on doit
traiter de la récupération des résidus de façon
séparée. L'action du gouvernement, actuellement, m'apparaît
tellement illogique! Tout d'abord, le ministre vote contre, après
l'avoir amendée la semaine précédente, et tout de suite
après il est prêt à voter pour, mais dans un autre
paragraphe. Si on ne le met pas dans l'autre paragraphe parce que cela
prend notre consentement il va voter contre. C'est vrai, M. le
Président, il n'y a rien à y comprendre.
Et il s'agit de quoi? Il ne s'agit plus, naturellement, du grand
drapeau. Il y a cela. Ce n'est plus tellement important, M. le
Président. Ce qui est important, c'est le drapeau. Il faut brandir le
drapeau de l'amiante aux fins nationalistes et aux fins de tous les objectifs
du Parti québécois.
Les résidus, cela ne fait pas bien beau sur un drapeau. Il faut
les cacher. Alors, on n'en parlera pas. Le refus du ministre de se donner cela
comme objectif, toutefois, est plein de conséquences pour la population
environnante. De plus en plus, les populations environnantes, dont on nous
invoque les désirs depuis le commencement de ce débat, vont se
réveiller et vont s'apercevoir que le gouvernement, au fond, tout ce
qu'il veut, c'est s'approprier le problème de transformer un drapeau
à des fins partisanes. Le problème particulier et précis
des crassiers, ce ne sont pas des problèmes propres, propres, ce sont
des problèmes sales, on ne peut pas mettre cela sur un drapeau. Ce n'est
pas important, cela, mais c'est important pour les populations
environnantes.
De plus en plus les populations de la région vont poser des
questions au député de Frontenac: Pourquoi n'avez-vous pas voulu,
M. le député de Frontenac, notre député, te
député de l'amiante qui ne m'écoute pas
actuellement, parce qu'il sait très bien que s'il entend cela, il entend
l'écho des suppliques et des plaintes de ses
électeursn'avez-vous pas voté en faveur de la
récupération des résidus? Pourquoi l'avez-vous
refusée? Je comprends qu'il soit absent de la table actuellement, parce
qu'il n'aime pas répondre à de telles questions... Je parle du
député de Frontenac. Quelle réponse va-t-il donner
à ses électeurs quand ils vont lui demander: Pourquoi ne vous
êtes-vous pas occupé des résidus, de la
récupération des résidus?
M. Grégoire: II n'y en a pas un qui va me dire cela.
M. Lalonde: II va y en avoir plusieurs qui vont vous dire
cela.
M. Grégoire: Jamais de la vie. M. Lalonde: Oui.
M. Grégoire: Ils savent que je m'en occupe, bien plus que
vous vous en êtes occupés.
M. Lalonde: Occupez-vous un peu plus, parce qu'ils sont encore
là les crassiers, ils sont encore là les tas.
M. Grégoire: Vous ne vous en êtes jamais
occupés, vous autres; ils savent que nous autres, on s'en occupe. C'est
la première fois qu'ils commencent à diminuer...
M. Lalonde: Occupez-vous-en un peu plus. Je ne sais pas ce que
vous en faites, et cela ne m'intéresse pas non plus.
M. Grégoire: II n'y a personne qui va me poser cette
question.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, M. le député de Frontenac!
M. Grégoire: II m'a posé une question, j'y
réponds.
M. Lalonde: M. le Président, les électeurs du
comté de Frontenac vont lui demander: Pourquoi avez-vous voté
contre cette motion?
M. Grégoire: Parce que la motion était mal
rédigée, c'est tout. (16 heures)
M. Lalonde: Pourquoi n'avez-vous pas proposé une bonne
rédaction?
M. Grégoire: On en a proposé une, vous l'avez
refusée.
M. Lalonde: Oui, mais pourquoi ne pas proposer une motion
d'amendement, M. le Président, qui va remplacer le mot "recyclage" par
"récupération"? Cela va satisfaire le député de
Frontenac.
M. Grégoire: Vous avez la proposition. Elle a
été faite tantôt. C'est moi qui l'ai faite. Vous n'en avez
pas voulu.
M. Lalonde: Vous êtes deux semaines en retard.
M. Grégoire: Vous n'en avez pas voulu, c'est de votre
faute.
M. Lalonde: Le sous-paragraphe b), cela fait deux semaines qu'on
a passé cela.
M. Grégoire: C'est de votre faute, si ce n'est pas
dedans.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: Quelle improvisation! C'est épouvantable. Vous
n'y avez pas pensé à ce moment-là?
M. Grégoire: C'est de votre faute.
M. Lalonde: C'est cela que vos électeurs vont nous
demander. Pourquoi n'avez-vous pas pensé aux résidus quand vous
en êtes arrivés au sous-paragraphe b)?
M. Bérubé: Vois-tu ton électeur te demander
cela?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!
M. Lalonde: Pourquoi n'y avez-vous pas pensé? C'est votre
réponse, c'est la rédaction.
M. Grégoire: Le projet de loi no 70, article 4, paragraphe
b), petit a) pourquoi n'y avez-vous pas pensé à ce
moment-là?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: II n'y a pas un électeur qui va me
demander cela, voyons donc.
M. Lalonde: Comptez sur moi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre s'il vous plaît, M. le député de Frontenac!
M. Grégoire: II a bien pu vous...
M. Bérubé: Le paragraphe b), ah oui!
M. Grégoire: Le paragraphe b).
M. Lalonde: Comptez sur nous.
M. Grégoire: Venez dans mon comté...
M. Lalonde: Beaucoup de questions vous serons posées par
vos électeurs désormais.
M. Grégoire:... et je serai sûr d'être
réélu pour longtemps.
M. Lalonde: Beaucoup ont dit cela avant.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: C'est le fameux défi classique. Venez dans mon
comté. J'espère que vous allez venir dans mon comté, parce
que je vais être réélu.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: Quand je parle de Forget et Lalonde, dans
Frontenac, on dit: Les deux gars qui retardent tout, qui ne savent pas quoi
dire, qui parlent pour ne rien dire? Je dis: Oui, c'est cela.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Lalonde: II prend cela sur son temps, M. le Président,
n'est-ce pas?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II n'en
a presque plus.
M. Lalonde: Il n'a presque plus de temps. Vous voulez dire qu'il
n'a plus de temps, ou presque plus de temps. Vous ne voulez pas m'annon-cer une
bonne nouvelle?
M. Grégoire: C'est long de parler vingt minutes, quand on
n'a rien à dire?
M. Lalonde: M. le Président, c'est rare qu'on a
été mis devant une contradiction aussi flagrante de la part du
gouvernement. J'espère que le ministre écoute. Je sais qu'il a
l'habitude d'écouter que d'une oreille, mais peut-il m'expliquer comment
il se fait que, la semaine dernière, il ait fait une motion d'amendement
pour enlever la moitié simplement de l'amendement? Avait-il l'intention
de voter pour à ce moment-là? Si oui, il n'avait pas besoin de
l'amender, il n'avait simplement qu'à parler contre la motion du
méchant député de l'Opposition officielle. S'il avait
l'intention de voter pour, il n'avait qu'à proposer un amendement
lui-même. Qu'est-ce qui l'a fait changer d'idée? Le ministre
peut-il répondre à ces questions?
M. Bérubé: Est-ce une question très
intelligente de la part du député de Marguerite-Bourgeoys ou
s'agit-il tout simplement de faire traîner en longueur le
débat?
M. Lalonde: Je laisse au ministre l'appréciation de
l'intelligence de la question.
M. Bérubé: C'est par pure magnanimité de la
part du gouvernement, puisque l'Opposition nous a proposé un amendement,
un amendement totalement superflu puisqu'il est entièrement inclus dans
le paragraphe b). Malheureusement, depuis un bout de temps, on parle de
crassiers et malheureusement je pense que, comme le député de
Marguerite-Bourgeoys l'a très bien souligné tantôt, il n'y
comprenait plus rien. En fait, j'ai l'impression que, depuis le début,
il a manifesté une ignorance crasse et, de fait, ce qu'il faut
reconnaître, c'est que, comme l'amendement qu'il nous a proposé
était déjà inclus dans le paragraphe b), on a pensé
lui rendre service en l'explicitant dans le paragraphe b), puisqu'il ne
semblait pas l'y vouloir là, mais puisqu'il ne veut pas accepter notre
modification, c'est avec plaisir que nous battrons son amendement quand viendra
le temps du vote.
M. Lalonde: M. le Président, cela ne répond pas
à ma question. Qu'est-ce qui l'a fait changer d'idée lorsqu'il a
proposé la motion d'amendement; il avait sûrement l'intention de
voter pour l'amendement amendé, sous-amendé. Sinon, cela aurait
et strictement l'incohérence la plus totale.
M. Bérubé: Je peux vous le dire.
M. Lalonde: Étant donné qu'on n'a jamais de
réponse sérieuse de la part du ministre, je lui ai donné
la chance de s'expliquer et les explications sont totalement insatisfaisantes.
Est-ce que c'est comme cela...
M. Grégoire: Moi, je suis satisfait de l'explication.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: Cela me rassure sur l'insatisfac- tion que je
ressentais. Cela va. J'avais raison d'être insatisfait. Le
député de Frontenac l'est satisfait.
On a invoqué l'article 18. Quand on est mal pris, naturellement,
on veut noyer le poisson. Tout ce que dit l'article 18, c'est que le ministre
des Richesses naturelles peut, dans le cadre des responsabilités et
pouvoirs qui lui sont confiés, émettre des directives. Ce n'est
pas cela que nous voulons. Premièrement, on n'a pas confiance au
ministre des Richesses naturelles actuel. Deuxièmement, rien ne nous dit
qu'un prochain ministre des Richesses naturelles va donner comme objectif
à la Société nationale de l'amiante le soin de
régler le problème des résidus.
M. Bérubé: S'il est libéral, il n'a aucune
chance.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: M. le Président, laissez-le, plus il dit des
choses comme celles-là, plus il montre son vrai visage. Les gens vont en
juger.
M. le Président, c'est noyer le poisson de dire qu'on doive
laisser au ministre des Richesses naturelles le soin de dire à la
Société nationale de l'amiante: Occupez-vous donc du sol. C'est
absolument inacceptable. C'est à l'Assemblée nationale de le
faire. Quant à moi, je ne partage pas du tout l'avis du ministre
là-dessus. Il y aurait toujours l'article 16. En concluant, on peut
dire: "La société ne peut je citesans l'autorisation
du gouvernement, sous réserve des exceptions et conditions
prévues par règlement du gouvernement, premièrement:
Exercer ses pouvoirs relativement aux objets visés au deuxième
alinéa de l'article 4." Donc, le gouvernement a encore un mot à
dire, à ce moment, mais seulement, dans le cadre de l'article 4. Le
gouvernement lui-même ne pourra pas aller au-delà de l'article 4.
Si on ne met pas dans l'article 4 "ce qui est désirable pour la
population" en ce qui concerne l'amiante, en ce qui concerne, non seulement la
mise en marché et la mise en valeur de la firme, mais aussi le
traitement des résidus, on n'a pas fait notre boulot. C'est ce que
j'accuse le gouvernement de ne pas faire actuellement.
Vote sur la motion
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
Est-ce que la motion du député d'Outremont sera
adoptée?
M. Grégoire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé (Matane)?
M. Bérubé: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bordeleau (Abitibi-Est)?
M. Bordeleau: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Brochu (Richmond)? Il sera ici, en passant, à 16 h 15, j'en ai
été avisé à 15 heures. M. Forget
(Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grégoire (Frontenac)?
M. Grégoire: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Ouellette (Beauce-Nord)?
M. Ouellette: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François)?
M. Rancourt: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?
M. Lalonde: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion d'amendement du député d'Outremont est rejetée
à cinq voix contre deux. J'appelle maintenant le dernier alinéa
de l'article 4.
M. Bérubé: J'aimerais, à la suite d'une
réflexion du député de Marguerite-Bourgeoys, lors de la
dernière séance, à savoir qu'il aurait aimé que
l'on aborde le plus rapidement possible l'article 3. Il avait même
souligné, à ce moment, qu'on pourrait envisager de suspendre
l'étude de l'article 4, pour passer directement à l'étude
de l'article 3, étant donné qu'il est difficile de coordonner
l'activité de nos juristes au gouvernement, et peut-être les
activités de cette commission. Nous avons donc, suivant cette
suggestion, demandé à M. Jules Brière de se joindre
à nous aujourd'hui pour discuter plus précisément de cet
article 3. Est-ce que l'Opposition y verrait des objections que nous
suspendions temporairement l'article 4 pour passer à l'article 3?
M. Forget: C'est parfaitement valable.
M. Lalonde: D'ailleurs, c'est conforme à ce qui
était entendu.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. De consentement unanime, l'étude du dernier alinéa de
l'article 4 est suspendue, et de l'article 4 en tant que tel, pour retourner
à l'étude de l'article 3.
M. Lalonde: Je vous ferai quand même remarquer que c'est
à la suggestion du gouvernement qu'on recule actuellement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'article...
M. Bérubé: Non, c'est une suggestion du
député de Marguerite-Bourgeoys.
Droits, privilèges et biens
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'article 3 sera adopté? C'est de mon devoir de poser cette question
au préalable.
M. Lalonde: Non. J'avais soulevé des questions, non pas
des objections, mais certaines questions quant à la rédaction de
l'article 3, à savoir que la société, et je cite, "jouit
des droits et des privilèges d'un mandataire du gouvernement", à
savoir, deuxièmement, et je cite, "les biens de la société
font partie du domaine public dans l'exécution de ces obligations, mais
l'exécution de ces obligations peut être poursuivie sur ces
biens".
J'avais posé certaines questions au ministre parce qu'il me
semble qu'il s'agit là du droit relativement nouveau,
c'est-à-dire qu'on ne retrouve pas, du moins, de cette manière,
dans les lois qui ont créé des sociétés
d'État dans un passé récent. À ce moment, M. le
ministre avait suggéré de consulter les conseillers juridiques.
Je le remercie de nous offrir les talents de Me Brière. Peut-être
qu'on pourrait poser la question immédiatement. Quel est cet...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cela va
prendre votre consentement pour que Me Brière réponde et
réponde au nom du ministre. Tout ce qu'il dira sera dit au nom du
ministre, mais il pourra parler lui-même.
M. Lalonde: Cela va quand même améliorer la
qualité...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Me
Brière, d'ailleurs, qui est un de mes anciens professeurs à
l'Université Laval en droit constitutionnel.
M. Lalonde: On ne choisit pas ses élèves. M.
Grégoire: ...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On ne
choisit pas nos professeurs, mais dans ce cas, j'ai été
gâté.
M. Lalonde: La question qu'on se posait, c'était...
M. Bérubé: Posez-la.
M. Lalonde: ... dans quelle mesure on pouvait, en même
temps, conserver une personnalité juridique et un patrimoine
séparé et avoir ces biens qui font partie du domaine public? Quel
est le but aussi du premier alinéa qui fait en sorte que maintenant,
désormais, de façon aussi formelle, une société
d'État est mandataire du gouvernement.
M. Bérubé: Au fond, il y a deux
éléments de réponse que je suis en mesure de fournir sur
le
plan technique. Le premier élément de réponse est
la citation de certains précédents dans la législation
québécoise où cette technique a été
utilisée. On la retrouve dans la Loi organique de l'Hydro-Québec,
dans la Loi organique de la Société des alcools et dans la Loi
organique de la Société d'information juridique. Ces lois ont
été respectivement adoptées en 1964, 1971 et 1975.
Je vous ferai remarquer c'est un détail important du point
de vue technique que la Société des alcools est une
compagnie à fonds social. Ce n'est pas un organisme.
M. Lalonde: Ce n'est pas SOQUIJ.
M. Bérubé: Pas SOQUIJ.
M. Lalonde: Cela, j'allais vous le dire.
M. Bérubé: La Loi organique de SOQUIJ parle d'un
organisme qui est constitué alors que la Loi de la Société
des alcools dit qu'une compagnie à fonds social est constituée.
D'après ce que j'ai pu comprendre, à partir de mon
expérience de légiste, le but de dispositions de ce genre est
essentiellement fiscal, c'est-à-dire, comme vous le savez, en vertu de
l'article 125 du BNA Act, les propriétés de la couronne sont
exemptes de taxation. En précisant dans la loi que la
société jouit des droits et privilèges d'un mandataire du
gouvernement, on se trouve à faire bénéficier la
société de ce privilège ou de cet avantage dont
bénéficie la couronne au terme du BNA Act. En plus, cela se
trouve à faire bénéficier la société de
l'avantage de l'imprescriptibilité de ses biens, un autre
bénéfice qu'on pourrait appeler de présomption de
solvabilité vis-à-vis de ses créanciers.
Toutefois, dans un deuxième alinéa, on précise,
comme vous l'avez remarqué, que même si les biens font partie du
domaine public... Cela aurait été superflu compte tenu du premier
alinéa, mais cette affirmation indiquant que cela fait partie du domaine
public est nécessaire à cause de la réserve qui suit:
"L'exécution de ces obligations peut être poursuivie sur ses
biens." C'est pour permettre de créer des liens sur les biens de la
société même s'ils font partie, théoriquement du
domaine public. Autrement, il n'y aurait pas d'hypothèque possible. Les
détenteurs d'obligations ou les créanciers, par exemple, seraient
dans une situation défavorisée, d'une certaine manière,
par rapport à d'autres créanciers de sociétés
privées. Cependant, ceci mérite une précision. On peut
dire qu'en bénéficiant de la présomption de
solvabilité, les créanciers ne seraient pas si mal
partagés. Cependant, ce détail a été jugé
nécessaire dans le cas de l'Hydro-Québec en raison, m'a-t-on dit
et cela c'est en 1964, de remarques qui étaient en provenance du
marché obligataire. En toute bonne foi, c'est l'information que j'ai
obtenue lorsque je me suis enquis de la raison pour laquelle on avait inscrit
cela dans la Loi de l'Hydro-Québec. Cette précision
n'était pas là au début. Elle a été
ajoutée en 1964. C'était pour des raisons de clarté.
M. Lalonde: Excusez-moi de vous interrompre. La loi en 1964
était-elle pour ajouter l'équivalent du premier alinéa ou
du... (16 h 15)
M. Bérubé: Du deuxième.
M. Lalonde: Du deuxième.
M. Bérubé: C'est-à-dire la mention que
l'exécution des obligations de l'Hydro peut être poursuivie sur
ses biens. Maintenant, il y a un deuxième avantage, à mon avis,
qui est poursuivi, lorsqu'on prévoit cette mention dans les lois, c'est
celle d'éviter des débats judiciaires. Comme vous le savez, les
tribunaux ont développé toute une théorie de la notion de
mandataire du gouvernement ou, comme le droit public anglais le dit, la notion
de "Agency of the Crown". II y a une série de critères
jurisprudentiels qui ont été élaborés par les
tribunaux et qui doivent être utilisés chaque fois qu'un doute
s'élève sur la question de savoir si la société ou
l'agent en question doit payer des taxes ou bénéficier d'un
privilège Y, X ou Z. Chaque fois, il y a une incertitude qui est
créée. Donc, en le précisant dans la loi, en
précisant que l'organisme en question est mandataire du gouvernement, on
évite ainsi des débats judiciaires qui se sont produits à
propos d'autres sociétés, comme vous le savez peut-être, ou
d'autres organismes du même titre.
S'agissant d'une société dont les activités sont de
nature commerciale et industrielle, a priori, on serait porté à
croire qu'il y a peu de chances que les tribunaux estiment que c'est un
mandataire du gouvernement en utilisant les critères qu'ils utilisent
généralement, dont un de ceux-là est la nature des
fonctions assumées par l'organisme. Cependant, ce n'est pas le seul. Il
y a d'autres critères qui sont utilisés, le degré de
contrôle qui peut être exercé par le gouvernement, par
exemple, en est un. Le pouvoir de directive étant prévu dans une
loi, on peut imaginer, je ne dis pas que cela serait la conclusion d'un
tribunal je ne veux pas donner d'opinion juridique aussi
catégorique mais il y aurait un risque.
Un des objectifs poursuivis, c'est de clarifier cette question.
M. Lalonde: Si vous le permettez, est-ce que, d'après
vous, l'article 1727 du Code civil, qui dit que le mandant est responsable
envers les tiers pour tous les actes de son mandataire faits dans
l'exécution et les limites de son mandat, etc., s'appliquerait ici?
Est-ce que le gouvernement pourrait être poursuivi sur ses propres biens,
au-delà des biens de la Société nationale de
l'amiante...
M. Bérubé: Je ne crois pas.
M. Lalonde: ... pour tout acte fait dans l'exécution de
son mandat par la Société nationale de l'amiante? J'attire votre
attention et là, je ne veux pas que cela devienne une discussion
juridique parce que si on ne s'entend pas, éventuellement...
Lorsqu'on dit: "L'exécution de ses obligations peut être
poursuivie sur ses biens", est-ce que cela sous-entend que l'exécution
des obligations de la société peut aussi être poursuivie
sur les biens du mandant?
M. Bérubé: Je ne crois pas que le mandat au sens du
Code civil s'applique à un mandataire du gouvernement du type de celui
de la Société nationale de l'amiante ou d'un organisme analogue.
Je pense que, d'après la jurisprudence courante, la théorie du
mandat est utilisée pour expliquer parfois le lien entre un
préposé ou une personne physique qui agit au nom du gouvernement
pour l'engager dans un contrat. On a recours, parfois... et même la Cour
suprême du Canada, encore récemment, y a fait allusion à
l'occasion d'un contrat administratif, de l'analyse qu'elle a faite dans un
contrat administratif. Le juge Pigeon, en particulier, y a fait
référence, mais pas dans le contexte d'un mandataire, d'un "Agent
of the Crown", au sens où on l'entend en droit public.
Comme vous le savez, le droit fondamental au Québec, de nature
publique, comparativement au droit privé, c'est le droit anglais. C'est
le Code civil comme tel. Les concepts de droit civil ne sont pas applicables ou
transposables lorsqu'il s'agit d'une personne de droit public, comme le
gouvernement ou un de ses agents, au sens de "Agent of the Crown", si vous me
pardonnez l'expression. De sorte que, a priori, je ne crois pas que cette
disposition du Code civil soit applicable implicitement du fait que l'on
réfère ici à la possibilitéparce que c'est
votre question, si je comprends bien que les obligations puissent
être poursuivies sur ses biens. Je pense que ce sont les obligations de
la société elle-même qui ne peuvent être poursuivies
que sur ses biens à elle et non pas sur ceux du gouvernement.
Je ne crois pas que la théorie du mandat au sens du Code civil
puisse être transposée ici dans le cas de l'article 3. Maintenant,
c'est une opinion.
M. Lalonde: Le troisième alinéa, à ce
moment, me crée un problème. On dit: La société
n'engage qu'elle-même, lorsqu'elle agit en son propre nom. Est-ce qu'on
peut conclure que, lorsqu'elle agit comme mandataire, elle engagerait quelqu'un
d'autre.
M. Bérubé: Je comprends votre...
M. Lalonde: Quelle est la raison d'être du troisième
alinéa?
M. Bérubé: C'est une raison de protection des biens
publics. Selon toute apparence, pour éviter tout doute sur la
possibilité que la société puisse engager le gouvernement
ou le patrimoine de la couronne, si vous voulez, ou le patrimoine
gouvernemental lorsqu'elle agit.
Si je comprends bien votre question, si on disait "la
société n'engage qu'elle-même", votre question ne se
souderait pas.
M. Lalonde: C'est-à-dire qu'il faudrait aussi...
M. Bérubé: Cette dernière partie de la
question ne se souderait pas.
M. Lalonde: Ce serait probablement contradictoire avec le
paragraphe b) selon une certaine interprétation. Enfin, je vous remercie
de vos réponses. On voit que dans ce domaine, les questions ne sont pas
toutes réglées encore.
M. Bérubé: C'est vrai.
M. Lalonde: Je vous remercie d'avoir attiré notre
attention là-dessus.
M. Forget: M. le Président, me permettriez-vous une ou
deux questions?
Lorsque vous dites que la notion de "mandataire" du Code civil ne
s'appliquerait pas puisqu'il s'agit là d'un domaine de droit public,
cela soulève immédiatement la question de savoir si la traduction
de "agency" en droit public britannique doit nécessairement être
"mandataire".
M. Bérubé: C'est une question que les
légistes se posent depuis un certain nombre d'années. Il y a un
écueil dans cette utilisation qu'on fait du mot "mandat". C'est comme le
mot "gouvernement" qui est parfois utilisé à tort pour
désigner l'équivalent de la couronne ou l'État, si vous
voulez. Le mot "agent", qui serait une traduction plus littérale de
"Agent of the Crown", a été abandonné. À ma
connaissance, c'est une question de terminologie. Je ne pense pas que le risque
de confusion avec le mandat au sens du droit civil soit tel qu'il faille
nécessairement utiliser un terme différent. Un mandataire de la
couronne ou un mandataire du gouvernement, c'est une expression en soi, qui a
sa signification propre; je pense qu'il n'y a aucun doute là-dessus. Ce
n'est pas un mandataire au sens du Code civil.
Si on parlait d'un mandataire tout court, dans le texte d'une loi, et
qu'on voulait impliquer par là qu'il s'agit d'un "Agent of the Crown",
il y aurait peut-être un risque, mais je ne crois pas que dans le
contexte l'expression prise dans sa globalité "mandataire de la couronne
ou du gouvernement" puisse prêter à confusion à cet
égard.
M. Forget: Vous avez souligné que dès 1964 on voit
apparaître l'expression "mandataire du gouvernement" ou l'expression
"mandataire de la couronne" des lois du Québec.
M. Bérubé: ce qui est apparu en 1964, c'est la
mention...
M. Lalonde: Le deuxième alinéa.
M. Bérubé: ... que la société ou
l'Hydro-Québec pouvait être poursuivie sur ses biens. La Loi de
l'Hydro-Québec, enfin, l'article 13, je ne sais pas à quelle date
il a été édicté... Je m'excuse, c'est juste de dire
que c'est en 1964 que cette mention a été ajoutée dans la
Loi de l'Hydro-Québec, mais rétroactivement au 14 avril 1944. Je
vais vous lire la disposition. Cela dit: "La commission est, pour les fins de
ta présente loi, un agent
de la couronne. Au droit de la province, il l'a toujours
été depuis le 14 avril 1944." On voit que c'était pour
clarifier une ambiguïté.
M. Forget: On a donc légiféré
rétroactivement...
M. Bérubé: Oui, pour clarifier.
M. Forget: ... pour faire cette précision. Dans SOQUIJ,
évidemment, on l'a fait aussi. Ce qui n'est pas clair dans tout cela,
c'est qu'il y a eu beaucoup d'autres sociétés qui ont
été constituées dans cet intervalle. Ce que je ne
comprends pas, c'est que tous les motifs qui viennent d'être
évoqués à l'appui de l'utilisation de l'expression se
transposent à 100% pour toutes les autres sociétés. Ces
deux théories étaient connues en même temps. C'est donc
qu'on doit comprendre qu'il y a une distinction, quelque part, qui a
été jugée importante et on a choisi que, par exemple,
SOQUEM, REXFOR, SOQUIA ne soient pas des mandataires du gouvernement.
Ce que j'aimerais comprendre et ce sera ma dernière
question c'est pourquoi, puisqu'on ne voulait probablement pas les
soumettre à l'impôt, etc., enfin, toutes les raisons valables
prima facie que vous avez citées au départ...
M. Bérubé: On trouve cette mention dans la Loi de
la Société des alcools.
M. Lalonde: Est-ce à capital-actions?
M. Bérubé: C'est une société à
fonds social.
M. Lalonde: À fonds social, mais est-ce à
capital-actions?
M. Bérubé: Non, c'est-à-dire qu'il n'y a pas
de capital-actions, mais il y a un fonds social.
M. Lalonde: Autrement dit...
M. Bérubé: Ce n'est pas divisé en
actions.
M. Lalonde: ... cela prend un fonds social, je comprends.
M. Bérubé: Oui.
M. Lalonde: Mais dans les trois exemples que vous nous donnez, la
Commission hydroélectrique n'a pas de capital-actions?
M. Bérubé: Non, mais il y a un capital-actions de
300 000 actions d'une valeur nominale de $100 chacune, dans la loi de la
Société des alcools.
M. Lalonde: Dans les trois exemples, il y en a deux qui sont des
organismes du gouvernement, un est une commission hydroélectrique,
l'autre, SOQUIJ, est un organisme sans capital-actions et le seul qui soit
mandataire à la Société des alcools, qui a un
capital-actions.
M. Bérubé: Mais en termes de... Je pense que, dans
la réalité, il faut considérer l'Hydro-Québec, bien
que flanquée de l'appellation commission, comme un organisme qui a une
fonction qui s'apparente beaucoup à celle d'une société,
beaucoup plus que celui d'une commission qui, d'après la terminologie
généralement utilisée, est un organisme de
réglementation, une commission... Alors...
M. Lalonde: Je veux seulement faire une distinction au niveau du
capital-actions.
M. Bérubé: II n'y a pas de fonds social dans le cas
de l'Hydro-Québec.
M. Lalonde: C'est pour ça qu'on se pose la question,
pourquoi une société... ce n'est pas à vous que je pose la
question, c'est au ministre...
M. Bérubé: Pourquoi les divers gouvernements...
M. Lalonde: Pourquoi une société à
capital-actions, une société d'État, ici, alors que par
l'article 4, on la traite de la même façon qu'un organisme
gouvernemental et qu'on ne traite pas généralement les
sociétés d'État de cette façon?
M. Bérubé: Ce serait difficile pour nous de se
prononcer quant aux autres lois adoptées antérieurement, dans la
mesure où on veut que cette société
bénéficie du privilège d'immunité fiscale et qu'il
n'y ait aucune contestation quant à ce privilège.
Évidemment, c'est peut-être préférable de le mettre
dans le texte de loi comme mandataire de l'État. Cela pourrait
être l'explication. Cependant, j'étais sous l'impression que
SOQUEM ne paie pas d'impôt non plus; par conséquent, ils agissent
véritablement en mandataires du gouvernement.
M. Lalonde: La SGF ne paie pas d'impôt.
M. Bérubé: Ils agissent comme mandataires du
gouvernement.
M. Forget: On peut tout aussi bien supposer je ne sais pas
si je devrais même demander une réponse à
çaque les différences sont tout autant dues à la
personnalité des conseillers juridiques successifs qu'à toute
autre théorie de droit public.
M. Bérubé: Ce n'est pas M. Brière qui a
préparé cette loi.
M. Forget: II peut en parler avec indépendance
d'esprit.
M. Bérubé: Je pense qu'il n'y a pas de principe de
base en cette matière. Je serais tenté d'expliquer ces
différences par le désir plus ou moins présent et
immédiat, au moment de l'adoption de la loi ou de l'intervention de la
loi, de faire bénéficier de certains avantages des
sociétés
qu'on a créées. C'est sûr que SOQUEM, SOQUIP,
REXFOR, SOQUIA, n'ont pas de disposition à leur loi; la
Société des alcools en a. Il n'y a pas de ligne de
démarcation absolue qui pourrait être un élément
d'explication juridique à la chose. Je pense qu'on a, dans certains cas,
voulu mettre l'accent davantage sur le caractère concurrentiel de
l'entreprise.
M. Lalonde: La Société des alcools a un monopole,
c'est étrange.
M. Bérubé: Dans d'autres cas, on a moins voulu
mettre l'accent là-dessus.
M. Forget: ... Dussault ne comporte pas de chapitre
là-dessus.
M. Bérubé: Non.
M. Lalonde: Je vous remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Messieurs de l'Opposition, est-ce que vous avez encore besoin de Me
Brière? Est-ce qu'il peut disposer, s'il le veut?
M. Lalonde: Est-ce que c'est l'Opposition qui mène?
M. Grégoire: Est-ce que l'article 3 est adopté,
d'abord?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un
instant, s'il vous plaît.
M. Forget: Est-ce qu'on peut demander quelques minutes, parce
qu'il y a des éléments d'information qui nous ont
été donnés?
M. Grégoire: On peut prendre cinq minutes?
M. Bérubé: Certainement, cinq minutes
d'ajournement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux sons suspendus pour cinq minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 30)
Reprise de la séance à 16 h 40
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, messieurs!
Est-ce que l'article 3 sera adopté?
M. Forget: Non, M. le Président, il ne sera pas
adopté. Nous avons des amendements.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, il est désormais
acquis, d'après ce que nous avons entendu, que l'objectif de l'article
3, en particulier de son premier alinéa, est essentiellement de viser
à accorder à la société de l'amiante un statut
fiscal qui l'exonère de toute charge fiscale, de tout impôt.
Nous savons par ailleurs, à cause des allégations du
ministre, lors de l'étude de l'article 4, que cette
caractéristique de la société de l'amiante est au coeur
même de la stratégie adoptée par le ministre pour
"développer" la fabrication des produits à base d'amiante,
c'est-à-dire d'utiliser le manque-à-gagner fiscal dans le domaine
minier, de manière à subventionner, de façon
perpétuelle, la fabrication de produits à base d'amiante.
Nous ne serions donc guère fidèles à l'attitude que
nous avons prise au cours des travaux de cette commission, si nous ne
soulignions pas avec insistance cet élément malheureux de la
stratégie adoptée par le gouvernement, un aveu d'impuissance,
dans le fond, lorsque le ministre affirme que jamais la société
de l'amiante ne pourra acquérir une situation concurrentielle
avantageuse au Québec et que, en conséquence, il faut lui
accorder un statut fiscal particulier, de manière qu'on puisse
indirectement faire ce qui ne serait pas possible de faire directement,
c'est-à-dire de subventionner les activités de fabrication
à l'aide du surplus engendré dans les activités
d'extraction.
Motion pour retrancher le premier alinéa de
l'article 3
Ce genre de raisonnement, nous le trouvons inacceptable, M. le
Président, et dans ce but, nous allons proposer un amendement à
l'article 3, de manière à biffer le premier alinéa de
l'article 3. La motion d'amendement se lit donc essentiellement comme suit:
"Que l'article 3 soit modifié en retranchant le premier
alinéa".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion est recevable.
M. Forget: M. le Président, nous avons
écouté avec étonnement, même avec stupeur, le
ministre dire une chose que, même dans nos rêves les plus
fantaisistes, nous n'aurions jamais supposé qu'un ministre responsable
avoue, à savoir qu'une industrie qu'il veut stimuler au Québec,
une industrie sur laquelle il mise pour la création d'emplois, la
génération de richesses, que cette même industrie
est condamnée, de façon irrémédiable,
à toujours vivre de l'aide, de la charité publique.
Si c'est là la prémisse, comme cela l'est,
malheureusement, puisqu'il l'a affirmé à de nombreuses reprises,
si c'est là la prémisse qui guide le ministre dans
l'élaboration d'une politique de développement de l'industrie de
l'amiante au Québec, il est de la plus haute importance que, non
seulement les membres de cette commission en soient saisis, mais il faut que
cette nouvelle se répande le plus possible. C'est en effet la politique
d'un gouvernement, qui est probablement sans équivalent au monde, qui
veut encourager ce qu'il juge, a priori, comme non viable.
Sans doute, des gouvernements, sous toutes les latitudes et à
différentes époques, même ici, se sont fait des illusions
sur la viabilité de certaines entreprises, de certaines industries
qu'ils cherchaient à stimuler. Ils se sont imaginés, à
tort parfois, qu'il suffisait d'un coup de pouce initial de l'État,
qu'il suffisait de réunir des fonds, un capital suffisamment important
pour lancer le mouvement, pour faire démarrer le mouvement, pour situer
une société, une entreprise à un palier au-delà
d'un seuil minimal, seuil que ne pouvaient franchir, pour différentes
raisons, les agents économiques du secteur privé, et qu'une fois
ce coup de pouce donné, une fois ce seuil franchi, une fois ces fonds
amassés, il serait possible et effectivement on devait espérer
que l'entreprise, l'industrie qu'on cherchait à stimuler serait non pas
une espèce de boulet de canon que l'économie du Québec
traînerait en permanence derrière elle, mais un moteur de
richesse, un moteur de développement et non pas un frein.
D'ailleurs, dans le raisonnement sous-jacent qu'on retrouve
explicitement dans des mémoires comme dans ceux du CRDE, qu'on retrouve
même dans certains travaux qui ont inspiré au Parti
québécois et au gouvernement actuel son intervention, son
désir d'intervention, on retrouve cette foi, cette croyance qu'il y a
là, du côté de l'amiante, un réservoir
inexploité, sous-développé de richesses pour la
collectivité québécoise. Jamais n'a-t-on
soupçonné que cette industrie était condamnée au
départ et que, si elle ne s'était pas développée
au-delà de la phase d'extraction de la fibre, c'était
effectivement pour des raisons qu'aucune intervention ne saurait surmonter.
Pourtant, c'est là l'affirmation que nous a faite le ministre à
plusieurs reprises.
Il nous dit, dans le fond, que l'attitude des sociétés
productrices d'amiante était justifiée, que leur absence
d'intérêt pour toute espèce de transformation, étant
donné leur statut d'entreprises privées, était
compréhensible, et que, s'il avait été à leur
place, il eut fait exactement la même chose. Il est bien
évident personne ne s'attend que des sociétés
privées fassent des cadeaux à la
collectivitéqu'elles ne pourraient réussir longtemps
à le faire puisque, bien sûr, elles ne peuvent continuer à
exister que pour autant que leurs recettes dépassent leurs
déboursés, qu'elles produisent un surplus.
Le ministre, en proclamant bien haut sa totale incrédulité
quant aux possibilités de développe- ment autonome, non pas dans
le sens habituel de ce mot, mais dans le sens où cette
société n'aurait plus besoin, après une période
initiale, d'une espèce de transfusion sanguine ininterrompue, n'aurait
plus besoin d'un appui continu de l'État, il nous a dit qu'il ne croyait
pas à cette possibilité, que, quant à lui, le
Québec serait toujours désavantagé sur le marché
mondial quant à la production de produits à base d'amiante et que
cette réalité inéluctable, il fallait y faire face par une
concession fiscale permanente.
Ses tentatives pour justifier une telle attitude en disant que c'est une
pratique courante que d'utiliser l'intégration verticale pour produire
une économie d'ensemble sur l'ensemble d'une production ne sont pas
très convaincantes, M. le Président. Cela me rappelle un peu
cette anecdote où un bonhomme qui veut décrire de façon
imagée le fonctionnement des grandes sociétés qui
réussissent à couper les prix, à faire une concurrence
féroce, en vient à dire qu'au fond, ces concurrents qui le
menacent de faillite par leur concurrence très dure font des pertes sur
chaque élément, chaque produit qu'ils fabriquent, et que c'est le
volume qui les réchappe. Ils perdent surtout sur chaque article produit,
mais ils en produisent tellement qu'ils réussissent, malgré tout,
à faire des profits. Vous savez, ce genre de raisonnement naïf
n'émeut personne. Il est bien clair qu'il est possible pour des
sociétés intégrées d'avoir des prix internes qui
reflètent les coûts de production avec une contribution nulle au
profit, mais c'est plus que cela que le ministre suggère. Il
suggère, au fond, d'aller au-delà de cela. Il suggère
d'aller à un point où certaines productions à long terme,
parce que ce sont souvent des raisonnements à court terme qui peuvent
être appropriés lorsqu'il y a un affaissement d'un
marché... On peut consentir à produire et à commercialiser
un produit, pourvu que les coûts directs de fabrication soient tout juste
couverts. Il n'y a pas d'exemple dans l'industrie privée où l'on
planifie des investissements sur cette base, parce qu'à long terme, les
coûts généraux, les frais généraux doivent
être absorbés proportionnellement par toutes les lignes de
production et par tous les stades de fabrication d'un produit, sinon il n'y a
aucune raison pour la société d'investir ou de réinvestir
dans |a maintenance même, dans le renouvellement et dans les
réparations de l'équipement qui ne produirait pas un taux de
rendement suffisant pour se justifier lui-même.
Il faut donc s'enlever de la tête la notion selon laquelle en
faisant des concessions sur le prix de la fibre, le gouvernement ne ferait que
parodier le fonctionnement de sociétés verticalement
intégrées. À long terme, il est impossible de planifier de
cette façon. Si on le fait, on se met dans la situation ridicule
où on pourrait se retrouver un peu, par analogie, avec cette anecdote de
tout à l'heure, où dans l'espoir d'avoir un rendement global
intéressant, on fera des pertes à tous les stades de la
fabrication.
Il n'est pas raisonnable, encore une fois, lorsqu'on parle d'une
industrie qui était censée, d'après tout le monde
d'autant plus qu'il
connaissait moins l'industrie être un
générateur de richesse pour le Québec, de faire comme si
elle devait, au contraire, être un boulet de canon, une espèce de
puits sans fond. On va utiliser tout ce qu'elle produit de surplus annuellement
et dont l'État bénéficiera, d'ailleurs, d'une bonne part,
par la fiscalité, pour essayer de maintenir à flot une industrie
de fabrication qui n'a pas de justification en elle-même, du moins, pour
emprunter le langage du ministre, qui ne croit pas qu'effectivement,
l'industrie de transformation de l'amiante ait un avenir quelconque au
Québec, à moins, encore une fois, d'être l'objet d'un
gavage, d'une transfusion sanguine continue qui va constituer un fardeau
continuel pour le Québec, pour les finances publiques, en particulier,
et pour l'ensemble de la société, puisque les finances publiques,
si on en soulage le poids à certains endroits, vont devoir de
façon correspondante, être d'autant plus lourdes et se faire
sentir d'autant plus lourdement ailleurs.
Dans une telle perspective, ce serait criminel de ne pas marquer
très bien que nous ne pouvons pas souscrire à cette façon
de concevoir les choses. Nous ne pouvons pas souscrire à une
hypothèse qui grèverait les finances publiques du Québec
à perpétuité, alors qu'on a l'admission du ministre,
à savoir qu'il ne s'agit pas de passer quelques années et de
donner un bon coup, de se situer à un certain palier, et après,
de laisser venir, de laisser évoluer la situation. Il s'agit d'un boulet
de canon qui nous est bien rivé aux pieds et qui va ralentir le
Québec dans d'autres efforts, dans d'autres initiatives. Tout cela
repose sur la notion de mandataire du gouvernement, on vient de nous
l'expliquer. Ce statut fiscal privilégié repose sur la notion de
mandataire du gouvernement. Si c'est vraiment le cas, si c'est vraiment
là-dessus que dépend l'exemption fiscale de la
société de l'amiante, décidément, il faut raturer
ce paragraphe et donner, à cette société d'État,
des règles du jeu qui soient non seulement susceptibles d'établir
entre la société Asbestos, eu égard à ses
activités minières une situation de parité, de concurrence
égale avec les autres sociétés
minièresà mon avis, c'est un aspect secondaire, c'est une
préoccupation sur laquelle certains pourraient s'étendre
longuement, quant à moi, je m'en abstiendrai mais veiller à
ce qu'on ne pipe pas les dés au désavantage du trésor
public alors qu'on n'entretient aucun espoir, à long terme, de
viabilité d'une industrie.
D'ailleurs, M. le Président, je m'interroge comment le
gouvernement a pu en venir à une conclusion comme celle-là alors
que le ministre des Finances a fait état de son désir de voir, au
moins pour des fins comptablesil ne le ferait pas pour des fins
comptables s'il ne voulait pas, éventuellement, avoir une correspondance
réelle dans les états financiers, une comptabilisation de
la charge fiscale qui serait normalement payable par ces
sociétés.
Dans cet esprit, c'est donc le grand responsable de la politique
financière du gouvernement qui juge qu'il est impératif que les
sociétés de l'État soient des contributeurs à la
richesse collective.
Au-delà de la question des profits, au-delà de la question
de la concurrence il y a une question sociale d'une très grande
envergure derrière cette question de rentabilité.
Aucune société ne peut prospérer si la valeur des
ressources qu'on consacre à une fin particulière est
inférieure à la valeur de ce qui en résulte soit comme
produit ou comme service à la population. Autrement dit, si on prend un
certain nombre de ressources humaines et matérielles, si on les dirige
dans un certain sens, ces ressources ont une valeur collective pour la
société. Cette valeur est constituée, en termes
réels, par d'autres multiplicités de fins auxquelles les
mêmes ressources peuvent être destinées à être
utilisées. Ce n'est pas gratuit pour la société de
consacrer des millions de jours-homme et des millions de dollars en
équipement matériel. Ce sont des ressources qui, si on les
utilise pour la fabrication de produits d'amiante, ne sont pas disponibles pour
les Québécois pour construire des écoles, construire des
hôpitaux, ou donner des services de santé ou éducatifs, ou
enrichir la vie culturelle, ou améliorer le réseau routier, ou
Dieu sait quoi. Ce sont des ressources qui nous coûtent, non pas
seulement l'argent qu'on y consacre, mais aussi les satisfactions, les besoins
que l'on se refuse de satisfaire justement parce qu'on privilégie une
certaine utilisation.
Cette valeur des ressources doit, au moins, être égale
à la valeur de ce qui est produit par ces ressources. Un déficit
reflète tout simplement le fait que la société, en
général, place une valeur inférieure sur ce qui est le
résultat d'une activité qu'elle n'en place sur les ressources
utilisées pour produire cette activité. Ce n'est pas seulement
une perte financière, mais c'est une perte sociale. Si ce que l'on
produit dans une industrie de fabrication de l'amiante vaut moins cher
globalement que les ressources qu'on y consacre, ce n'est pas seulement un
déficit financier que l'on encoure. C'est simplement une perte sociale.
C'est la perte d'une possibilité de satisfaction de gains, de
consommation, d'investissements dans d'autres secteurs. C'est un
appauvrissement collectif pour le présent et pour l'avenir. (17
heures)
Lorsque le ministre nous dit qu'il n'y a aucun* espoir qu'une
société de fabrication des produits à base d'amiante ne
fasse ses frais, ce qu'il nous dit essentiellement, c'est qu'on va, à
perpétuité, y consacrer des heures de travail, des ressources
matérielles qui valent plus, globalement, que ce qu'on va en
retirer.
C'est une admission d'une gravité considérable. Si
l'exemption fiscale, comme c'est le cas le ministre l'a affirmé
à plusieurs reprisesest la condition essentielle pour qu'on puisse
emprunter cette voie, la conclusion à laquelle j'en arrive,
personnellement, c'est qu'il faut absolument enlever ce moyen, le supprimer.
Tout ce que l'on va faire, si on donne ce moyen au gouvernement, ce sera de lui
permettre de prendre une initiative qui va résulter en une perte
constante pour la société québécoise, en un
appauvrissement graduel, alors que tous avaient espéré que
l'amiante, cette res-
source naturelle que nous avons en quantité
particulièrement abondante au Québec, soit une source de
richesse.
Voici que par l'action d'un gouvernement trop pressé à
agir, qui veut des solutions, des "gadgets" plutôt que de
véritables solutions, au lieu d'être une source d'enrichissement,
voilà qu'on va avoir une initiative qui va être une source
d'appauvrissement. Appauvrissement qui va être sensible, d'abord et avant
tout, dans le secteur public, puisque ce sera une ressource du secteur public,
qui va être visible de façon très concrète par un
manque à gagner fiscal, tout ceci en pure perte puisque, encore une
fois, jamais on n'accédera à un niveau supérieur de
rentabilité. On n'a aucun espoir; le gouvernement n'entretient aucun
espoir de ce côté. C'est une forme lente non pas de suicide, mais
c'est une maladie chronique de l'économie québécoise que
l'on entretient à plaisir, M. le Président.
La seule façon d'empêcher un tel malheur, une telle
aventure, sans préjuger de la possibilité de le faire autrement
et de le faire mieux, de le faire de manière que ce soit une source de
richesse plutôt que d'appauvrissement, la seule façon de
l'empêcher, M. le Président, c'est de retirer ce statut fiscal
à la Société nationale de l'amiante. Il me semble,
d'après ce qu'on a entendu, que c'est en supprimant le premier
alinéa que nous y parviendrons.
C'est la raison de l'amendement et la raison pour laquelle j'implore
tous les membres de la commission de reconsidérer cette question.
Le Président (M. Ouellette): Merci. M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, puisque vous
venez de m'accorder le droit de parole sans que je l'aie demandé, j'en
profiterai pour être éminemment bref.
En dépit de l'argumentation fort savante, mais erronée du
député de Saint-Laurent, l'élimination du paragraphe 1) de
l'article 3 ne changerait en rien l'état de fait. En effet, dans le cas
de la société SOQUEM, dans le cas de REXFOR, il n'est nullement
mentionné que cette société est mandataire du gouvernement
et, néanmoins, elle profite de tous ses privilèges. Il est une
règle acquise au niveau des deux gouvernements que toute
société d'État, dont les actions sont détenues
à 90% par les gouvernements, sont, à des fins de
fiscalité, considérées comme des mandataires du
gouvernement, donc, bénéficient de l'immunité fiscale. Par
conséquent, que nous le mettions ou que nous le retirions ne change
absolument rien à la pratique. Cependant, cela risque d'ajouter un
inconvénient, soit, comme le disait Me Brière, de faire en sorte
qu'il existe une certaine incertitude juridique quant au véritable
statut de cette entreprise, ce qui pourrait entraîner des poursuites
judiciaires ou, du moins, une contestation en Cour.
Par conséquent, retirer à l'article 3 que la
société jouit des droits et privilèges d'un mandataire du
gouvernement ne changera absolument rien. On me souligne que dans la Loi du
développement de la région de la baie James, donc du chapitre 34
des lois de 1971, si je ne m'abuse oui dans la partie 1 de la loi
portant sur la constitution de la société, nous avons bel et bien
un article 3 qui reproduit textuellement, en fait, notre article 3 de la
présente loi no 70.
L'ancien gouvernement avait donc cru bon d'adopter cette formule
juridique qui, je pense, à la suite de la discussion que nous avons eue
tantôt, n'apparaît pas comme absolument majeure, mais permettrait
à tout le moins d'enlever un élément d'incertitude.
Par conséquent, je pense que toute cette magnifique gymnastique
oratoire du député de Saint-Laurent aurait pu lui être
épargnée, bien qu'effectivement cela lui permet de
développer sa voix qu'il a d'ailleurs fort agréable et
soporifique. Cela aurait donc pu lui permettre d'éviter toute cette
gymnastique et nous économiser en même temps vingt minutes, et je
suppose 40 minutes puisque, sans doute, le député de
Marguerite-Bourgeoys va-t-il prendre la parole pour vingt minutes. Du fait
qu'on enlève ou qu'on maintienne cet article 3 ne change rien,
finalement, au statut de cette société puisqu'elle continuera
à être un mandataire du gouvernement, comme toutes les autres
sociétés d'État. Il me paraît donc plus simple,
puisque ceci ne fait que préciser et ne nuit pas à la loi comme
telle, de maintenir cet article tel qu'il est; par conséquent, nous
voterons contre l'amendement.
Le Président (M. Ouellette): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Je n'avais pas l'intention d'intervenir étant
donné que j'ai moi-même été persuadé par les
propos du député de Saint-Laurent. Je croyais que le ministre
aurait fait de même, mais puisqu'il ne veut rien comprendre, je vais
invoquer l'article 160 qui donne au ministre la chance d'écouter des
arguments en faveur de la motion d'amendement que nous proposons.
Au fond, les réponses que nous avons eues...
M. Bérubé: Vous avez droit à vingt minutes,
c'est juste.
M. Lalonde: ... concernant le caractère ou l'aspect
juridique sont justes, je crois. Il ne s'agit pas de donner une opinion
légale ici, mais il me semble que les réponses que nous avons
eues étaient fort honnêtes. On a évoqué certains
précédents qui militent en faveur de l'inclusion du premier
alinéa de l'article 3, à savoir que la Société
nationale de l'amiante jouirait des droits et privilèges d'un mandataire
du gouvernement. De nombreux exemples vont dans le sens contraire. Ainsi,
REXFOR, qui est une société à capital-actions, n'a pas ce
statut; la société SOQUIA non plus; on peut penser à
SOQUIJ, mais c'est un organisme du gouvernement, ce n'est pas une
société avec une personnalité juridique distincte; on peut
penser à SOQUIP qui, étant une société de la
couronne, n'a pas ce statut de mandataire du gouvernement; on
peut penser aussi à SOQUEM où il en est de même.
On a évoqué le précédent de la
Société des alcools du Québec. À la lecture de la
loi adoptée en 1971, on voit que l'auteur ou le rédacteur de la
loi 70 semble s'être inspiré quasiment verbatim de cette loi parce
qu'on copie strictement l'article 4 qu'on retrouve dans la Loi de la
Société des alcools du Québec. Je me suis demandé
pourquoi le législateur avait cru bon agir de cette façon. Cela
me paraît être une erreur qui est peut-être moins importante
parce qu'il s'agit d'une société qui fonctionne dans une
situation de monopole.
M. Bérubé: Pourriez-vous noter que la
Société de développement de la baie James aussi a
exactement les mêmes articles et cette fois-ci repris textuellement?
M. Lalonde: C'est de la même année?
M. Bérubé: Oui, même année, chapitre
34, article 3 aussi.
M. Lalonde: Je vois que le chapitre 34 des lois de 1971 est dans
le même sens, sauf que je cherche la similitude avec d'autres... oui,
c'est bien une société à capital-actions. Mais il semble
que depuis 1971, on ait changé d'attitude de la part du gouvernement
précédent, parce que les lois des sociétés que je
vous ai mentionnées tantôt ne contiennent pas de telles
dispositions.
On peut aussi reconnaître que la Société des alcools
et même la Société de développement de la baie
James, la SDBJ, toutes deux sont appelées à fonctionner dans une
situation de monopole. La Société de développement de la
baie James a des pouvoirs extraordinaires, en fait, presque de
municipalités, d'organisation, d'infrastructure, de tout un territoire;
la Société des alcools a le monopole dans la mise en
marché des alcools au Québec. Mais voilà que pour une
société qui va possiblement, espérons-le, s'engager dans
la transformation de l'amiante, qui n'acquerra pas, d'après les projets
du gouvernement, toute l'industrie de l'amianteil semble que le projet
d'acquisition ne soit arrêté qu'à Asbestos Corporation qui
a produit, en 1976, je crois, les 32% ou 33% de toute la production de
l'amiante au Québec.
Donc, voilà que cette société va copier les
dispositions des lois régissant deux sociétés qui ne sont
pas appelées à faire le même genre d'activités,
c'est-à-dire qui ne sont pas appelées à être en
concurrence; en copiant ces dispositions, on avoue de façon formelle que
la seule raison, c'est pour être bien sûr qu'elle ne paie pas
d'impôt.
M. le Président, je pense qu'à ce moment-là, on
devrait, non pas faire seulement une motion de retrait de l'alinéa 1 de
l'article 3, mais demander au ministre des Finances de venir nous visiter pour
expliquer ici quelles sont ses vues quant à la fiscalité, quant
aux obligations fiscales des sociétés de l'État, ses vues
telles qu'il les a exprimées il n'y a pas tellement longtemps, à
peine une semaine ou deux, où il aurait, d'après les rapports que
nous avons lus dans les journaux, indiqué sa volonté très
ferme de faire en sorte que toutes les sociétés d'État
soient jugées quant à leur rentabilité, sur le même
pied que les autres sociétés, surtout quand il s'agit de
sociétés qui sont en concurrence avec des industries
privées dans le même secteur.
Voyez Asbestos Corporation qui va pouvoir vendre sa fibre à des
industries de transformation à des coûts beaucoup moins
élevés que d'autres compagnies qui font l'extraction ici...
M. Bérubé: N'est-ce pas honteux!
M. Lalonde: Le ministre dit: Ce n'est pas honteux.
M. Bérubé: N'est-ce pas...
M. Lalonde: Est-ce que le ministre s'est demandé dans
quelle mesure les autres sociétés qui font les mêmes
activités que la Société Asbestos vont pouvoir vendre au
Québec leurs fibres, alors qu'elles payent de l'impôt et à
quel prix? Est-ce qu'il ne s'est pas mis dans une situation de...
M. Bérubé: Elles peuvent le faire.
M. Lalonde: ... déstabilisation complète du
marché de l'amiante au Québec?
M. Bérubé: Elles peuvent le faire, puisque ce sont
elles qui fixent les prix internationaux. Par conséquent, elles peuvent
pratiquer à peu près n'importe quelle politique de
commercialisation sans qu'on puisse, en aucune façon, les en
empêcher. Donc, elles peuvent faire toute la transformation qu'elles
veulent au Québec. (17 h 15)
M. Lalonde: M. le Président, le ministre a tenté de
répondre à ma question. Est-ce que, si la société
nationale de l'amiante, ou la société Asbestos, comme filiale de
la société nationale, ne paie pas d'impôt, et comme c'est
le plan avoué du ministre de réduire le prix de vente de la fibre
aux sociétés du Québec qui feront la transformation,
est-ce que, à ce moment-là, il ne ferme pas la porte
complètement aux autres sociétés...
M. Grégoire: Ils ne l'ont jamais fait.
M. Lalonde: Je sais qu'ils ne l'ont pas fait. Il y a 3% de
transformation actuellement. Cela ne vient pas seulement de l'Asbestos
Corporation.
M. Bérubé: Puisque vous voulez avoir la
réponse à cette question...
M. Lalonde: Est-ce que le député de Frontenac veut
dire que le 3% de transformation...
M. Bérubé: Est-ce que le député de
Marguerite-Bourgeoys voudrait la réponse?
M. Lalonde: Un instant.
M. Bérubé: II ne faut pas poser de questions.
M. Lalonde: Est-ce que le député de Frontenac veut
dire que les 3% de la transformation des fibres d'amiante viennent toutes
d'Asbestos Corporation?
M. Grégoire: Non.
M. Lalonde: Non; naturellement, il le sait très bien.
Pourquoi dire que cela n'aura pas un effet de déstabilisation, puisque,
Asbestos Corporation pourra vendre à X dollars de moins la tonne,
simplement parce qu'elle ne paie pas d'impôt? C'est fermer la porte
à tout le reste. C'est condamner toutes les autres
sociétés à l'exportation.
M. Bérubé: Elle peut signer une entente de
développement avec le gouvernement du Québec et, par ce biais,
contribuer au développement d'une industrie de transformation au
Québec et cette fois-ci, de concert avec le gouvernement du
Québec.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre prétend que, à
la suite d'une entente de développement il pourra acquérir au
prix international, la fibre des autres sociétés, pour ensuite en
faire la mise en marché, pour fins de transformation au Québec,
à un prix moindre? Alors, c'est lui qui se condamne, ou c'est la
société nationale de l'amiante qu'il condamne à une perte
perpétuelle.
M. Bérubé: Est-ce que c'est une
interprétation erronée de mes propos?
M. Lalonde: Vous êtes assez vague dans vos propos. Des
ententes de développement, cela va faire quoi? Comment les autres
sociétés qui, elles, vont payer de l'impôt, vont-elles
pouvoir être sur un pied d'égalité quant à la vente
de leur fibre au Québec, alors que la société nationale de
l'amiante, nous a avoué le ministre, ne payant pas d'impôt, va
ainsi subventionner chacune des tonnes de fibres vendues au Québec pour
la transformation?
M. Bérubé: C'est exactement la même
façon. Si toutes les sociétés au Québec
décident d'un commun accord de transformer de 10% à 12% de fibre
d'amiante que nous voulons lui voir transformer et que, dans ces conditions,
toutes se retrouvant sur un pied d'égalité, il ne soit plus
nécessaire de faire appel à un avantage comparatif au niveau du
prix de l'achat de la fibre, tant mieux. Il n'y a aucune raison.
M. Lalonde: Alors, le premier alinéa de l'article 3 n'est
pas si nécessaire, à ce moment-là. Vous n'aurez pas besoin
du congé fiscal.
M. Grégoire: Ce n'est pas lui qui va empêcher le
congé fiscal, cet article du premier paragraphe.
M. Lalonde: À ce moment-là, enlevons-le.
M. Grégoire: Le ministre l'a dit clairement, il clarifie
la situation devant les tribunaux à l'égard des marchés
financiers.
M. Lalonde: S'ils n'en ont pas besoin, enlevons-le.
Les seuls exemples qu'on a, ce sont deux exemples qui n'ont pas
été suivis depuis sept années de législation, alors
que plusieurs sociétés d'État ont été
créées ce qui, d'ailleurs M. le Président, vous
êtes à même de vous en rendre compte, je ne vous demande pas
une opinion semble être un accroc à l'amendement, à
l'effet qu'une société d'État que l'on veut voir comme
personnalité juridique séparée et distincte, soit tout
à coup mandataire du gouvernement dans tout ce qu'elle fait. À ce
moment-là, ce n'est plus nécessaire de faire une
société d'État. À moins que le ministre
préfère ne pas avoir de société d'État.
À ce moment-là, on ferait un organisme du gouvernement...
M. Forget: Une direction générale de l'amiante.
M. Lalonde: Une direction générale de l'amiante,
bien oui. Et les acquisitions, on pourra faire faire cela pas la
Société générale de financement, ou par d'autres
sociétés d'État. On en a plusieurs qui pourraient
facilement se porter acquéreurs des actions d'Asbestos Corporation,
suivant le grand projet du gouvernement.
Mais ici, on veut, d'une part, créer un état de
déstabilisation du marché. Je ne pense pas qu'on l'ait
mesuré. La surprise du ministre, lorsque j'ai fait cette proposition,
cette hypothèse, me laisse à penser qu'on n'a pas mesuré
du tout les conséquences de déstabilisation du marché, le
fait qu'on condamnerait littéralement toutes les autres
sociétés à l'exportation. On leur interdirait directement,
par cette mesure, tout effort de transformation au Québec, parce qu'il
n'y aurait plus de concurrence possible avec les prix du gouvernement qui ne
paierait pas d'impôt. Cette situation existe actuellement dans divers
secteurs. Elle existe, par exemple, pour la Société
générale de financement, qui a quelques filiales dans divers
secteurs qui ont des congés d'impôt, mais ce n'est pas voulu comme
tel. C'est sur cela que le ministre des Finances est venu intervenir l'autre
jour. Il a dit: Ce n'est pas parce que la loi vous privilégie d'un
congé fiscal que vous ne devriez pas, d'autre part, viser à une
rentabilité mesurée de la même façon que dans toute
l'industrie.
Est-ce que ce sera le ministre des Finances qui aura raison? Est-ce que
ce sera le ministre des Richesses naturelles? On ne le sait pas. Il ne semble
pas que le ministre des Richesses naturelles ou ses propos pèsent bien
fort auprès du ministre des Finances, puisque, dans son propre budget,
il n'a absolument rien prévu pour l'acquisition de la
société Asbestos. Il ne semble pas très optimiste, mais on
verra bien.
Si le ministre des Richesses naturelles acceptait d'enlever le premier
alinéa, ce serait au moins un geste allant dans le sens des politiques
qui sont définies par le ministre des Finances, en ce qui concerne la
rentabilité des sociétés d'État. C'est important la
rentabilité des sociétés d'État. On ne forme pas la
Société nationale de l'amiante
et on n'achète pas la société Asbestos pour faire
des pertes. Sans cela, on s'inscrit dans un processus d'appauvrissement
collectif constant.
Naturellement, actuellement, on pense plutôt au drapeau, au beau
geste, à la signification du symbole, mais demain matin on va se
réveiller et les Québécois auront signé le
chèque de $150 millions ou de $200 millions. On aura ainsi
condamné toutes les autres sociétés de l'amiante à
faire des exportations de façon exclusive; on leur aura interdit de
s'intéresser à la transformation. La transformation aura
été ni plus ni moins qu'expropriée par le gouvernement,
avec une telle mesure. Est-ce que c'est cela que nous voulons? Est-ce que c'est
ce genre de société qu'on veut ou est-ce que c'est le
commencement d'une nationalisation de toute l'industrie? Que le gouvernement
dise exactement ce qu'il a en tête.
Quant à nous, nous croyons que le retrait du premier
alinéa de l'article 3 clarifierait la situation, serait conforme aux
diktats, aux politiques du ministre des Finances en ce qui concerne la
fiscalité des sociétés d'État et permettrait
à la Société nationale de l'amiante d'être
considérée comme une entité juridique
séparée qui agirait comme toutes les autres ou la majorité
des autres sociétés d'État, non pas comme la
Société des alcools ou la Société de
développement de la baie James qui agissent dans une situation de
monopole, mais comme toutes les autres sociétés d'État qui
sont dans une situation de concurrence.
Je vous remercie, M. le Président.
Motion rejetée
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'amendement du député de Saint-Laurent sera-t-il
adopté?
M. Grégoire: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Rejeté sur division?
Une voix: Non.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion d'amendement du député de Saint-Laurent est rejetée
sur division. Nous revenons à l'article 3. L'article 3 sera-t-il
adopté?
M. Grégoire: Adopté.
M. Forget: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, comme on veut, selon
l'expression du ministre, éliminer les ambiguïtés et comme
nous avons déjà eu l'occasion de constater une entente
philosophique autour de cette table au sujet d'un aspect connexe à celui
qui vient d'être discuté et qui tombe, je pense, de façon
très appropriée sous l'article 3, j'aimerais proposer un autre
amendement qui se lit de la façon suivante: "Que l'article 3 soit
modifié en ajoutant à la fin l'alinéa suivant: La
société ou ses filiales, dont elle détient plus de 50% des
actions, doivent payer sur leurs biens les taxes foncières municipales
et scolaires au même titre qu'une corporation privée."
En effet, dans ce...
M. Grégoire: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la
recevabilité?
M. Grégoire: II y a quelque chose de prévu à
l'article qu'on voulait ajouter à 16a, qui va dans le même sens.
Alors, peut-être que...
M. Lalonde: Est-ce qu'on a cela?
M. Bérubé: Ce n'est peut-être pas le meilleur
endroit pour introduire, puisque...
M. Lalonde: Si vous avez quelque chose de semblable à
l'article 16a, ce sont les pouvoirs spéciaux et conditions d'exercice de
ces pouvoirs à l'article 16a. Là, c'est une obligation de payer
des taxes.
M. Grégoire: Oui.
M. Lalonde: C'est dans le statut.
M. Grégoire: Oui, mais ce serait un article
ajouté.
M. Lalonde: L'article 3.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, vous n'avez pas encore parlé sur la
recevabilité.
M. Grégoire: Non, mais avant...
M. Bérubé: Je voudrais simplement souligner
à l'Opposition que nous avions l'intention de soumettre après
l'article 18 un nouvel article qui lui, indiquerait que la
société doit payer les taxes municipales et scolaires sur tous
les biens et immeubles qu'elle possède. Nous avons un article assez
complet, je pense, qui pourrait rejoindre les préoccupations du
député de Saint-Laurent. La proposition serait d'insérer
cet article, cet amendement après l'article 18.
M. Forget: M. le Président, il me semble que c'est
à l'article 3 que cette insertion devrait être faite, parce que
c'est là qu'on définit un statut. Le statut s'accompagne d'un
certain nombre de privilèges et aussi devrait comporter des obligations
qui font exception à ces privilèges, étant donné
que le statut de société d'État entraîne celui de
l'exemption aux taxes foncières. Il me semble que c'est dans le
même article qu'on doit faire cette précision, non pas dans un
article qui en suit tout de suite un autre dans lequel on dit, au fond, que le
ministre peut faire des subventions et des cho-
ses de ce genre. Il ne s'agit pas de subvention, II s'agit d'une
obligation stricte.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
président n'a pas à décider à quel endroit doit se
situer l'amendement ou non. Je le déclare recevable,
débattable...
M. Grégoire: Ce qu'on peut faire, c'est de prévenir
l'Opposition qui avait l'intention d'en apporter un.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est
cela.
M. Lalonde: Vous pouvez voter pour à l'article 3 et cela
réglerait votre problème.
M. Grégoire: Je vais voter contre à l'article 3. Si
vous voulez passer à d'autres amendements, vous en avez probablement une
série à faire valoir. Vous aurez l'occasion de parler sur
celui-là parce qu'il serait apporté après l'article
18.
M. Lalonde: Est-ce que c'est une promesse que le
député de Frontenac fait, promesse qu'on aura l'occasion de
parler sur l'article 18? Est-ce que c'est un engagement?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! Sur la motion...
M. Lalonde: Je ne fais pas confiance à ce
gouvernement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: Je ne peux pas faire confiance à
l'Opposition.
M. Lalonde: Cela sent la guillotine!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Cela sent?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent, sur la motion.
M. Grégoire: M. le Président, je voudrais bien dire
qu'il n'est pas question de guillotine, parce que pour qu'il y ait une
guillotine, il faut qu'il y ait des têtes.
M. Lalonde: II y en a 12 000 qui l'ont faite avant vous,
celle-là!
M. Grégoire: Elle est encore bonne. M. Lalonde:
Vous perdez la mémoire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre! Vous pouvez aller discuter dans le corridor, si vous voulez, M. le
député de Frontenac et
M. le député de Marguerite-Bourgeoys, les deux
ensemble.
M. Lalonde: Non, merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Grégoire: Je ne vois pas ce que je ferais dans le
corridor avec M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Forget: On a eu des visiteurs au tout début de nos
travaux, on s'en souviendra. D'ailleurs, le gouvernement, depuis ce temps, se
gourme à toutes les occasions et même en dehors des occasions
à l'idée que nous sommes en face d'un consensus
d'applaudissements répétés, de tout ce qu'on veut de la
part des gens de la région de l'amiante. On sait très bien, vous
et moi, qui étions présents lors de ces visites, qu'on a
assisté à un plaidoyer de la part des gens de la région de
l'amiante, pour que quelque chose se fasse, plaidoyer passionné, fort
compréhensible, étant donné les circonstances dans
lesquelles se trouvent ces personnes. J'ai relu la transcription pour bien
m'assurer de l'impression que j'avais conservée de cette rencontre et
jamais les représentants des municipalités, les
représentants du syndicat, ni même les représentants du
Conseil régional de développement, ne sont allés
jusqu'à affirmer qu'ils endossaient les solutions retenues par le
gouvernement et qu'ils y voyaient là la meilleure des solutions
possibles. Ils se sont dit intéressés à ce que quelque
chose se fasse. Ils se sont dit disposés à accorder le
bénéfice du doute au gouvernement; bien sûr, leur
rôle n'est pas celui de l'Opposition. Il est le rôle de gens qui
attendent de la part du gouvernement des gestes de bienveillance,
d'intérêt, de sollicitude. Ils seraient mal placés pour
venir en commission parlementaire dénoncer une initiative
gouvernementale; même si elle n'avait qu'un demi de 1% de chances de
réussite, ils viendraient quand même dire: Écoutez, essayez
cela, et si cela ne fonctionne pas, on pourra toujours revenir vous voir et
demander autre chose. C'est bien logique. Le ministre s'est réjoui un
peu trop tôt, lorsqu'il a fait état publiquement d'un appui
supposé. L'appui viendra quand les résultats viendront. De ce
côté, je lui souhaite autant de patience qu'aux gens de la
région de l'amiante. (17 h 30)
II y a quand même des choses précises que nous ont dites
les gens de la région. Ils nous ont dit: Écoutez, s'il y avait
moyen de préciser dans la loi un certain nombre de promesses ou
d'espoirs qu'ont suscités les multiples rencontres et tournées
électorales des ministres et des députés dans cette
région sans excepter le premier ministre lui-même, des
indications, entre autresc'est l'objet de cette motionque les
quelque $300 000 de taxe foncière qui sont perçus par la seule
municipalité de Thetford Mines, pour ne donner que cet exempleles
commissions scolaires auraient pu dire la même chose parce
qu'ordinairement ils ont des montants à peu près
comparablesque ces
montants ne soient pas interrompus par le changement de
propriété.
Évidemment, les ministres qui se sont rendus sur place ont voulu
rassurer leurs commettants de la région en leur promettant que le
gouvernement, bien sûr, tiendrait compte de cela et que les
municipalités recevraient des subventions pour des montants
équivalents.
Actuellement, les commissions scolaires et les municipalités de
la région ont le droit strict de percevoir des impôts sur ces
actifs immobiliers. Les gens n'ont pas besoin de faire de pèlerinages
à Québec. Ils n'ont pas besoin de demander à M. le
ministre et à M. le député de bien vouloir intervenir et
de faire passer un arrêté en conseil. Ils n'ont pas besoin de se
mettre à genoux devant le gouvernement pour aller percevoir leurs taxes.
Ce n'est pas suffisant, ce n'est pas équivalent pour un ministre de
dire, du haut de sa grandeur, qu'il va avoir la sollicitude, la bienveillance
de leur concéder une subvention au lieu d'une taxe foncière. Ce
qu'elles aimeraient bien recevoir, c'est une assurance stricte qu'elles
n'auront pas besoin de faire ces pèlerinages et ces génuflexions
pour maintenir leurs revenus municipaux ou scolaires au même niveau
qu'avant.
C'est là un espoir, une attente légitime de la part des
conseils de ville, de la part des commissions scolaires. Le ministre devrait
aller plus loin que simplement des assurances de caractère politique qui
peuvent être dénuées de toute valeur réelle lorsque
le moment viendra de les honorer. Ce n'est pas parce que le ministre veut
tromper qui que ce soit, c'est parce que les ministres se succèdent et
ils ne se ressemblent pas toujours, que les gouvernements eux-mêmes se
succèdent et se ressemblent encore moins souvent. Un gouvernement qui
succédera au gouvernement actuel... en effet, je ne doute pas, bien
sûr, qu'il veuille continuer à honorer cette promesse, mais
pourquoi engendrer le doute? Pourquoi susciter des problèmes de ce
genre?
Le député de Frontenac et le ministre lui-même,
sentant venir cet amendement par des propos que j'ai moi-même tenus en
commission parlementaire puisque j'ai insisté sur ce point à plus
d'une reprise, évidemment, ont demandé à leur conseiller
juridique de proposer un amendement. Les gens d'en face sont malins, M. le
Président. Ils ont soigneusement dissimulé l'amendement
après l'article 18. se disant que les aléas du débat
parlementaire pourraient fort bien faire qu'on ne se rende pas à
l'article 18. On pourrait aller sur place...
M. Grégoire: On peut y aller tout de suite, si vous le
voulez.
M. Forget: On pourrait aller sur place proclamer qu'on s'est
intéressé à cette question sans, cependant, donner
l'occasion, è l'Opposition, de réaffirmer ses convictions de ce
côté.
M. Grégoire: On peut y aller tout de suite, si vous le
voulez.
M. Forget: On se sent superflu dès qu'on devra adopter la
motion sur l'article 3. On n'aura plus besoin de l'article 18. Il n'y a pas de
raison de mettre à l'article 18, ni à l'article 19... si ce n'est
que l'article 18 vient bien après l'article 3. C'est cela la raison.
Cela vient plus loin. Le but de l'exercice, ce n'était pas de le mettre
dans la loi. C'était d'éviter qu'il soit débattu en
commission parlementaire. Le député de Frontenac, avec tous ses
gestes, ne réussit pas à dissimuler son désarroi devant le
fait que cette astuce qu'il a peut-être inventée parce que c'est
le genre d'astuce que le député de Frontenac, j'imagine, peut
fournir à son ministre, c'est le genre de préoccupation où
il doit exceller. Il ne peut certainement pas rivaliser avec le ministre pour
nous décrire la rhéologie des matières. C'est une chose
qui doit lui être étrangère comme à nous,
d'ailleurs, M. le Président. Je ne lui en fais pas reproche, mais quand
il s'agit de bien placer un article pour s'assurer que le débat ne
tournera pas mal ou tournera le moins mal possible pour le côté
ministériel, on peut lui faire confiance. Si la loi avait
comporté 180 articles, M. le Président, je vous fais un pari que
cet amendement aurait été l'article 181a.
M. Grégoire: Recevable.
M. Forget: Mais, comme on n'avait que 25 articles, il y a quand
même un certain nombre d'articles à la fin où il ne serait
pas décent de dissimuler un amendement comme celui-là parce que
le jupon dépasserait un peu trop. On s'est dit: Bon, entre les articles
18 et 19, c'est assez loin pour qu'on n'en parle pas, mais ce n'est quand
même pas trop loin. C'est la théorie du juste milieu.
M. Grégoire: La question c'est que cela passe, soit
adopté.
M. Lalonde: Rendu là, vous n'avez plus le choix.
M. Forget: On ne se laissera pas décourager par des
manoeuvres parlementaires comme celles-là, M. le Président. On
nous fera crédit d'assez de perspicacité pour voir, à
travers les lignes, les intentions gouvernementales. Ceux qui auront la
patience insigne de lire le compte rendu de nos délibérations, M.
le Présidentpeut-être un obscur chercheur de l'an 2000 qui
fera l'histoire de nos institutionsne seront pas dupes de la manoeuvre du
député de Frontenac. Ils verront clair dans son jeu et dans les
histoires à venir qui s'écriront sans aucun doute de ces
péripéties, il sera attribué à l'Opposition
officielle l'insistance et l'initiative d'un amendement qui en est un qui
devrait aller de soi.
Je le dis ici, non pas seulement pour la Société nationale
de l'amiante, mais même si on peut entretenir des doutes, en
général, quant à l'opportunité de verser à
100% des taxes foncières sur les édifices publics lorsqu'ils sont
occupés par des services proprement gouvernementaux, pour des raisons
qui sont fort simples, c'est la concentra-
tion et tant que cela demeurera aussi concentré à
Québec et dans une certaine mesure à Montréal, il y aura
un avantage fiscal peut-être démesuré à ce qu'il y
ait une compensation à 100% pour les édifices publics du
gouvernement proprement dit.
Mais dans le cas des sociétés d'État, des
activités industrielles et commerciales des sociétés
d'État qui sont beaucoup moins susceptibles et, effectivement, qui ne
sont pas concentrées à Québec ou à Montréal,
il y a d'excellentes raisons de les placer sur un pied d'égalité
absolu avec les entreprises industrielles et commerciales analogues. Si
c'était possible un tel amendement ne serait évidemment pas
recevable j'irais même jusqu'à suggérer que, de
façon générale, les chartes constitutives, les lois
organiques de toutes les sociétés d'État soient
amendées de manière à les obliger à payer les
impôts fonciers et scolaires sur leurs actifs; il me semble que cela va
de soi.
M. Grégoire: Pourquoi ne l'avez-vous pas fait?
M. Forget: Ce sont des préoccupations que je n'avais pas
à l'époque, M. le Président, et je n'ai jamais vu, non
plus...
M. Grégoire: II ne voyait pas...
M. Forget: Je n'ai jamais vu le député de Frontenac
en faire un cheval de bataille; donc, je m'étonne un peu de son
étonnement. Mais s'il veut en prendre l'initiative justement au sein de
son caucus, on pourra mesurer pleinement la vigueur et la force de son
argumentation au cours des prochains mois lorsque nous verrons arriver un train
de législation, comme on dit. On ne sait jamais où est la
locomotive. Il y a des trains de législation. Peut-être
pourrait-il, justement, se faire la locomotive de ce train en
particulier...
M. Grégoire: II est seulement sur la voie ferrée,
le train.
M. Forget: ... Et nous proposer des amendements à la Loi
constitutive de toutes les sociétés d'État, au moins
à celles déjà nombreuses qui dépendent du ministre
auquel il est associé.
M. Bérubé: II faudrait peut-être même
aller plus loin que simplement les sociétés d'État,
même l'appliquer à tous les édifices gouvernementaux.
M. Forget: Si le ministre avait suivi le raisonnement que j'ai
tenu plutôt que de corriger son communiqué de presse, il aurait vu
qu'il y a à cela des objections possibles parce qu'encore une fois il y
a un phénomène de concentration. Déjà, des citoyens
à l'extérieur de Québec, par exemple, peuvent se dire: Mon
Dieu, le gouvernement provincial fonctionne seulement à l'avantage de
Québec d'une certaine façon. C'est là qu'il est
générateur d'activités économiques. Est-ce qu'on va
ajouter à cela un avantage additionnel? C'est une question que je ne
prétends pas trancher, mais c'est une question qui se pose à
cause de la concentration géographique.
M. Bérubé: Le gouvernement actuel est à cent
coudées en avant de votre réflexion, M. le député
de Saint-Laurent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Forget: Cent coudées, oui! On verra!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bérubé: Toute cette discussion a
déjà eu lieu et elle est en cours de négociations.
M. Forget: Sur le plan des mots, vous avez une bonne heure
d'avance.
M. Grégoire: Vous êtes deux ans en retard. M.
Lalonde: Au moins!
M. Forget: Mais sur le plan des réalisations, on attend
encore.
M. Ouellette: Deux années lumière.
M. Forget: On verra! On verra ce que vous allez faire. Ce n'est
certainement pas pour ce budget-ci, de toute façon, parce que la porte
est fermée. Peut-être le budget subséquent, peut-être
l'autre après. Il ne faudrait pas penser au troisième
après, parce que ce ne sera plus le vôtre. De toute façon,
vous avez encore deux budgets pour essayer de résoudre ce
problème.
Plus que cela, encore une fois, il ne s'agit pas seulement de donner de
l'argent par condescendance, il s'agit de l'inscrire dans les lois et d'en
faire une obligation stricte. De ce côté, il va falloir apporter
des projets de loi amendant les lois organiques de toutes ces
sociétés, les inscrire au budget. Je vous souhaite bonne chance
pour l'an prochain, mais j'ai l'impression qu'on n'est pas si avancé que
cela de l'autre côté, malgré le plaisir qu'on prend
à le prétendre. Entre les déclarations et les
réalisations, le peuple québécois a commencé
à mesurer l'écart qui nous sépare ces temps-ci l'un de
l'autre. Je ne voudrais pas répéter toutes les promesses qui ont
été faites dans le programme du Parti québécois le
plus récent, celui de 1976, avant les élections, car cela
deviendrait une lecture embarrassante, j'en suis sûr, pour ceux qui ont
rédigé ces textes. Pour ceux qui ne les ont pas
rédigés et qui, comme nous, ne les ont jamais pris tout à
fait au sérieux, alors que c'était une lecture tragique ou
attristante, cela devient une lecture drôle, ce qui démontre
très bien que, au fond, rien n'est en soi tragique ni drôle, c'est
dans l'oeil de l'observateur beaucoup plus qu'autre chose.
C'est comme la beauté des roses, comme le disait Shakespeare,
c'est dans l'oeil de l'observateur beaucoup plus que dans la chose
elle-même.
M. Lalonde: Cela ferait une rose fanée.
M. Forget: Effectivement, comme le dit le dé-
puté de Marguerite-Bourgeoys, quand on regarde le programme
politique du gouvernement au pouvoir depuis deux ans, cela fait un bouquet
passablement fané!
M. Lalonde: C'est plein d'épines.
M. Forget: C'est pour cela que, quand les jardiniers nous
arrivent en nous promettant de nouvelles variétés florales, des
tulipes doubles ou triples, avec des feuilles en amande, etc., on se dit: On a
déjà vu ça!
M. Ouellette: Vous avez une drôle de façon de lancer
des fleurs!
M. Forget: C'est souvent monté en graine avant de
fleurir!
Pour toutes ces raisons, je pense que c'est un amendement qui est bien
placé, qui est placé au moment opportun dans la loi et dans la
discussion. C'est un amendement qui est souhaité ardemment par les
représentants et les porte-parole de la région de l'amiante qui
sont venus devant nous, c'est un amendement dont l'adoption s'impose.
En parlant de choses comiques, il sera probablement très amusant
de voir le gouvernement dire, après avoir passé huit semaines sur
un projet de loi et soi-disant un an et demi à sa préparation,
tout à coup qu'il ne pourra pas voter pour cet amendement parce qu'il a
pensé, la semaine dernière, que cela pourrait faire l'objet de
l'article 18a. Quelle belle planification! Quelle formidable planification que
le spectacle en commission parlementaire de ces amendements de dernière
minute auxquels même le ministre des Richesses naturelles
n'échappe pas! D'ailleurs, il en a probablement d'autres en
préparation. Je suis à peu près sûr qu'à
partir de maintenant tous nos amendements vont être accompagnés,
en sourdine, d'une expression de surprise faisant que nous avons
présenter un amendement puisque le gouvernement est déjà
en train de réviser sa position.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, d'une part, je
dois dire que dans la rédaction originale du projet de loi, nous avions
un article disant que la société devait payer toute taxe scolaire
municipale et autre. Je pense que le député de Frontenac s'en
souviendra d'ailleurs. Cet article a été rayé sur la base
de l'argumentation selon laquelle, compte tenu des habitudes de nos
législateurs, nos sociétés d'État avaient pris
l'habitude de payer des en-lieux de taxes. (17 h 45)
En fait, je pense que, même dans le cas de l'Hydro-Québec,
il y a présentement un programme de désengagement
vis-à-vis de certaines taxes municipales qu'elle paie. La tendance au
niveau de la taxation allait plutôt, au cours des années
antérieures, dans le sens adopté dans le projet actuel,
c'est-à-dire de ne pas inscrire dans le projet de loi l'obligation de
payer des taxes scolaires ou municipales et que cela se fasse en vertu d'une
pratique généralisée, universelle de paiement d'en-lieux
de taxes.
Pour ne pas faire en sorte que la loi 70 soit différente de
toutes les autres lois adoptées par les gouvernements antérieurs,
nous avons donc choisi d'enlever, à la lumière des argumentations
de nos juristes, cet article. Je dois dire cependant qu'entre-temps se
déroulait une réflexion en profondeur sur la fiscalité
municipale au niveau des ministères des Affaires municipales et des
Finances.
Je pense que tous sont au courant de certaines modalités de ce
projet, en vertu duquel non seulement les sociétés d'État
allaient devoir payer des taxes foncières aux municipalités, mais
également l'État du Québec. Pour répondre à
l'objection du député de Saint-Laurent, ces taxes seraient
divisées en deux montants, le premier allant per capita à
l'ensemble de la province, donc étant versé aux
municipalités sur la base d'un per capita unique, uniforme pour
l'ensemble du Québec; le deuxième montant étant
versé aux municipalités qui doivent offrir des services au
gouvernement, qui ont donc des charges financières
supérieures.
Par conséquent, toute la réflexion au niveau du
gouvernement s'est faite de ce côté du paiement des taxes
foncières, non seulement par les sociétés d'État,
mais par le gouvernement lui-même. C'est donc à la suite de cette
réflexion, particulièrement à la suite, je dois le dire,
des représentations des citoyens et des municipalités qui ont
demandé que l'on inclue que la Société nationale de
l'amiante paie des taxes et qu'on inclue cette obligation dans le texte
même de la loi non pas que le groupement de citoyens ait
demandé que ce soit inclus dans la loi, mais ils ont bien insisté
pour que la Société nationale de l'amiante paie les taxes et
redevances aux municipalités où elle disposera des
immobilisations par conséquent, à la lumière de ces
réflexions, et compte tenu de la réflexion globale ayant cours au
niveau du gouvernement concernant la fiscalité municipale et
l'obligation pour le gouvernement de payer les taxes qu'il doit à ces
municipalités, nous avions donc décidé, il y a
déjà de cela plusieurs mois, au moins quelques semaines, d'aller
à l'encontre d'une coutume juridique et d'inclure dans ce projet de loi
un article qui, lui, obligerait la société à payer les
taxes et il ne s'agirait plus ici d'en-lieux de taxes, mais bel et bien d'une
soumission aux normes et pratiques courantes de la société
québécoise.
Pourquoi introduire cela à l'article 18 plutôt qu'à
l'article 3? Je pense que l'article 3 fait partie de la section I qui parle de
la constitution de la société. Il définit le cadre
juridique à l'intérieur duquel cette société va
évoluer. Il donne donc à la fois son mandat, ses
privilèges, son titre et son siège social. C'est donc la
constitution de la société.
Par contre, nous avons, beaucoup plus loin, une autre section qui
s'intitule, cette fois, les pouvoirs et les conditions d'exercice de ces
pouvoirs. Il nous est donc apparu que l'endroit le plus pro-
pice pour insérer un tel article serait à
l'intérieur de cette section portant sur les pouvoirs spéciaux et
conditions d'exercice et que, par conséquent, nous avions l'intention,
et nous avons toujours l'intention, de déposer cet amendement qui se
lirait de la façon suivante: En insérant, après l'article
18, l'article suivant: "La société doit payer toutes les taxes
municipales et scolaires imposées sur les biens immeubles qu'elle
possède. "Néanmoins la société peut, nonobstant
toute disposition législative au contraire, faire, avec des corporations
de commissaires, de syndics ou d'administrateurs d'écoles, des ententes
pour le paiement de sommes fixes de deniers pour tenir lieu de toutes taxes,
contributions, cotisations et redevance pour services municipaux, quelle que
soit la nature de ces taxes, contributions cotisations et redevances. "Les
ententes conclues en vertu de l'alinéa précédent entrent
en vigueur dès leur approbation par le gouvernement."
En d'autres termes, l'amendement est peut-être
légèrement plus complet que celui proposé par l'Opposition
libérale, puisqu'il tient compte du fait que, advenant le cas où
une municipalité ou une commission scolaire voudrait procéder
à un mode de taxation différent du mode de taxation courant, la
loi constitutive de la Société nationale de l'amiante ne devrait
pas interdire à cette société le pouvoir de signer de
telles ententeset c'est pour cette raison que nous avons cru bon de
compléter l'amendement en le rendant peut-être un peu plus souple
et en permettant aux municipalités, aux commissions scolaires, de signer
des ententes avec la Société nationale de l'amiante qui
puissent être différentes de la simple tradition que
représentent les taxes municipales et scolaires imposées sur les
biens immeubles.
Par conséquent, le gouvernement votera contre l'amendement tel
que proposé, d'une part parce qu'il est insuffisant et qu'il est
incomplet et d'autre part, parce que, à notre avis, il ne se situe pas
au bon endroit dans la loi. Il devrait plutôt apparaître, non pas
dans les articles constituant la société, mais bien dans les
articles traitant des pouvoirs et des conditions d'exercice de ces pouvoirs de
la société.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion sera adoptée?
M. Lalonde: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, le ministre a commencé
par une explication compliquée dans le sens qu'un projet no X avait une
telle disposition obligeant la société à payer des taxes
municipales et scolaires. Cette disposition aurait été
enlevée à cause des juristes... toujours à cause des
autres, M. le Président.
M. Bérubé: La tradition juridique en vigueur au
gouvernement.
M. Lalonde: C'est très courageux de la part du ministre de
mettre cela sur le dos des juristes. Par une autre pirouette assez
nébuleuse, on vient de nous dire qu'il y a quelques mois on avait
déjà décidé de remettre cela dans la loi. C'est
étonnant, c'est la première fois qu'on en entend parler. Je veux
m'élever contre cette façon du ministre qui est tout à
fait conforme, d'ailleurs, à son attitude arrogante: Jusqu'ici il nous a
donné au compte-gouttes les amendements qu'il a l'intention d'apporter
au projet de loi et ceci à l'encontre d'une tradition qui a
été établie depuis longtemps par d'autres gouvernements et
même suivie par plusieurs de ses collègues.
On se souvient, par exemple, de l'épais volume des amendements
que le ministre des Consommateurs nous avait remis pour le projet de loi 67. On
savait au moins qu'à tel article on aurait tel amendement. Dans ce
cas-ci, on n'en a pas eu à ma connaissance, à moins que... Non,
je vois que mes collègues me disent qu'aucun de nous n'a reçu un
avis des amendements que le ministre va proposer au projet de loi.
Ensuite, il conclut en disant que l'amendement du député
de Saint-Laurent n'est pas complet et que le sien, que vous avez d'ailleurs
laissé lire, même si on n'est pas rendu à l'article 19, ce
qui crée quand même une situation un peu spéciale, M. le
Président, vu que nous n'aurons peut-être pas l'occasion d'en
discuter... Nous devons discuter de deux amendements dans le même temps,
ce qui est un peu injuste pour les membres de cette commission.
Je vous dirai que l'amendement du ministre, en ajoutant des ententes
possibles, n'est pas plus complet; il est seulement plus complexe. Il ouvre la
porte à toutes sortes d'abus. Je n'ai pas l'intention d'en discuter plus
longtemps. J'ai seulement saisi cet aspect, cette modalité dans la
lecture qu'il en a faite, étant donné qu'il ne l'a pas
distribué. Je ne peux pas en parler davantage.
Il justifie son opposition à l'amendement du député
de Saint-Laurent par la section I de la constitution de la
société, où l'amendement se retrouverait, tout en
prétendant qu'une telle obligation, de la part de la
société, devrait se retrouver dans la section intitulée
"Pouvoirs spéciaux et conditions d'exercice", naturellement de ces
pouvoirs spéciaux. Tout à coup, nous allons confondre une
obligation avec un pouvoir. Ce n'est pas le pouvoir de payer les taxes
scolaires et les taxes municipales que les autorités municipales de la
région sont venues réclamer. C'est facile. Ce que les gens
veulent, c'est une obligation, de la part de la Société nationale
de l'amiante, de contribuer au fardeau fiscal scolaire et municipal.
M. Grégoire: C'est ce qui est dit dans l'amendement. La
société doit payer.
M. Lalonde: M. le Président, est-ce que vous
pourriez, s'il vous plaît, rappeler à l'ordre le
député de Frontenac que j'entends murmurer?
M. Grégoire: II dit qu'il ne comprend pas. J'essaie de le
lui faire comprendre, mais il ne veut pas comprendre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: Je disais donc que c'est une obligation que la
population veut voir inscrire dans ce projet de loi. Comment cette obligation
verrait-elle plus sa place dans la section IV, qui décrit les pouvoirs
spéciaux, que dans la section I qui détermine la constitution de
société, donc son cadre juridique? Le ministre lui-même a
avoué que c'était là que le cadre juridique se retrouvait.
C'est dans le cadre juridique que l'on définit les obligations et les
droits de la Société nationale de l'amiante. Elle aura tous les
droits devant la terre du gouvernement, dit-on. Nous voulons ajouter qu'elle
aura aussi l'obligation d'un contribuable municipal et scolaire.
L'Opposition du parti ministériel à l'amendement me semble
simplement dictée par une espèce de vanité politique qui
ne devrait pas avoir sa place ici dans nos débats. Nous avons
proposé avant le ministre... ce n'était pas une course, nous
n'avions aucune idée qu'il le ferait. Nous avons toutes les raisons,
d'ailleurs, de ne pas nous fier à ce gouvernement pour apporter les
corrections nécessaires à ce projet de loi. La très grande
majorité des amendements ont été proposés par
l'Opposition, non pas par le parti ministériel.
C'est donc ici, à la section I, intitulée Constitution de
la société, dans le paragraphe 3, où on détermine
les droits et les privilèges de la société, que nous
devons inscrire l'obligation de la société de payer les taxes
scolaires et les taxes municipales.
Le gouvernement, en refusant son appui à notre proposition,
n'agit pas comme un bon et vrai gouvernement tel qu'il l'a promis il y a un an
et demi. Il ne fait que de la petite politique partisane. Qui nous dit,
malgré les propos tenus par le ministre tantôt, qu'on va apporter
cet amendement à l'article 19? On a déjà changé
d'idée une fois. Le ministre l'a dit. On avait une telle disposition
dans un avant-projet. On l'a déjà enlevée une fois. Ce
n'est sûrement pas nous, de l'Opposition, qui allons donner la chance, au
ministre, de l'enlever une deuxième fois. Nous lui demandons donc de
voter maintenant. Étant donné la visite ponctuelle du leader
parlementaire du gouvernementvous avez sûrement remarqué
qu'il nous a rendu visite comme il l'avait fait d'ailleurs au moins à
une reprise la semaine dernière il semble que le gouvernement ait
donné suite à ses intentions de mettre fin à nos
débats d'une façon brutale. Le ministre rit, M. le
Président. Il est heureux que le débat soit terminé alors
que nous n'avons...
M. Grégoire: La violence?
M. Lalonde: ... nous ne sommes rendus qu'à l'article
4.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: C'est à cause de l'incurie et de
l'incompétence de ce gouvernement. Nous sommes même revenus en
arrière, à la suggestion du ministre, à l'article 3.
M. Grégoire: Est-ce qu'il est question de violence? Ais-je
bien compris?
M. Lalonde: Nous n'avons même pas voté sur l'article
4.
M. Brochu: ...
M. Lalonde: On recule avec ce gouvernement.
M. Grégoire: Ais-je bien compris, M. le Président,
qu'on nous menace de violence?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, à l'ordre!
M. Bérubé: Oui.
M. Lalonde: C'est donc à la demande du ministre que nous
sommes revenus en arrière, M. le Président, pour répondre
à votre question. Alors que nous ne sommes qu'à l'article 4 et
que nous sommes menacés par une clôture bientôtje ne
sais pas quand et le ministre peut-être pas non plus ...
M. Grégoire: Vous êtes pris dans la
clôture.
M. Lalonde: M. le Président, ce n'est pas de la peur.
C'est de l'insatisfaction à l'égard du ministre et du
gouvernement. Il n'a pas réussi à faire avancer les débats
plus loin que l'article 4 d'un projet de loi important et déjà
son collègue nous annonce un bâillon. Est-ce que les
députés ministériels sont heureux de se faire
bâillonner comme cela?
M. Grégoire: ... clôture de fil de fer
barbelé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Ouellette: On vous annonce d'excellents amendements à
l'article 18.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Beauce-Nord, ne suivez pas l'exemple du
député de Frontenac.
M. Lalonde: On n'a eu qu'un amendement depuis le
commencement.
M. Ouellette: On vient de vous en annoncer un délicieux
pour l'article 18.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 1)
Reprise de la séance à 20 h 6
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
À moins que je ne me trompe...
M. Grégoire: ... la brutalité dont est victime le
député de Marguerite-Bourgeoys.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
parole était au député de Marguerite-Bourgeoys,
effectivement.
M. Lalonde: M. le Président, j'allais conclure en invitant
le ministre et les députés ministériels à
démontrer leur bonne foi dans ce débat, peut-être, s'il le
faut, en procédant à un sous-amendement si l'amendement du
député de Saint-Laurent leur apparaît incomplet. Mais ils
peuvent facilement démontrer leur bonne foi ayant reçu la
réaction qu'on a eue aux arguments du ministre qui m'apparaissent
relatifs, pour dire le moins. On pourrait, si le ministre le désire,
procéder à l'amender pour compléter cette motion
d'amendement, mais je pense que cela démontrerait le désir, sans
appel, indélébile du gouvernement de régler ce
problème de la fiscalité municipale et scolaire d'une
façon claire et tout à fait transparente, maintenant, et non pas
dans un moment très aléatoire, c'est-à-dire, quand la
commission, si on le lui permet, abordera l'article 19.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
M. le député de Frontenac.
M. Grégoire: M. le Président, me sentant tout
à fait en accord avec le député de Marguerite-Bourgeoys,
je crois que ce qu'il demande...
M. Lalonde: M. le Président...
M. Grégoire: ... est possible. M. le Président, je
vous ferai remarquer qu'on m'interrompt je pense que vous n'en avez pas
dit un mot depuis que j'ai commencé.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Elle
était bonne.
M. Grégoire: Je crois que ce serait possible. Le ministre
des Richesses naturelles a bien mentionné qu'il voulait introduire un
article dans la loi pour régler le problème de la
fiscalité qui deviendrait l'article 19. Il me semble que l'entente peut
être possible. Je crois que la question de la taxe municipale que devra
payer l'Asbestos Corporation, non seulement ne devrait pas être
incorporée à la section I, qui traite de la constitution de la
société, mais elle doit être incorporée à la
section IV qui traite des conditions d'exercice de la société. Si
mes amis de l'Opposition sont consentants, nous allons tout simplement et
rapidement, sans attendre ni à demain ni à 9 h 30, mais
immédiatement, passer à l'article 19 et présenter
l'amendement pour dire qu'Asbestos Corporation paiera ses taxes ou toute mine
fonctionnant sous
l'égide de la Société nationale de l'amiante,
paiera les taxes foncières et les taxes scolaires. On passera à
cela immédiatement.
M. Lalonde: Cela me paraît être une question
intéressante. Le député a l'air surpris.
M. Grégoire: Non, pas du tout!
M. Bérubé: Estomaqué, c'est plus exact.
M. Grégoire: Epoustouflé serait le bon terme.
M. Lalonde: Si le député me permet, ce que je
préférerais, puisqu'il suggère de passer à la
section IV, c'est qu'on attaque la section IV complètement,
c'est-à-dire l'article 16 et non pas l'article 19 parce qu'on ne sait
pas exactement dans lequel contexte cela s'inscrit.
M. Grégoire: Disons que vous devez le savoir. J'imagine
que vous avez dû lire les articles 16, 17 et 18.
M. Lalonde: Mais il y a tous les amendements qu'on peut
apporter.
M. Grégoire: Oui, vous y reviendrez. Là, vous
voudriez inclure dans la loi l'amendement proposé comme quoi l'Asbestos
Corporation continuera à payer ses taxes municipales et scolaires; il
n'y a pas de problème, vous retirez votre amendement et nous appelons
immédiatement l'amendement qu'a lu le ministre des Richesses naturelles.
Nous sommes prêts. Vous ne serez pas obligés d'attendre, on
passerait cela tout de suite pour vous démontrer notre bonne foi, pour
vous démontrer...
M. Lalonde: À l'article 16.
M. Grégoire: Si vous ne voulez pas...
M. Lalonde: Si on allait à l'article 16, on serait
d'accord.
M. Grégoire: C'est parce que c'est à trois articles
plus loin. Vous allez encore nous blâmer si vous avez 12 amendements
à l'article 16, 17 amendements à l'article 17...
M. Lalonde: II n'y a pas de bonne foi!
M. Grégoire: ... 23 amendements à l'article 18, on
n'arrivera pas à l'article 19.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Elle se
présume.
M. Lalonde: II n'y a pas de confiance! M. Grégoire:
Laissez-moi hésiter un peu. M. Lalonde: Hésitez
quelques minutes.
M. Grégoire: J'aimerais, M. le Président, par votre
entremise, faire remarquer au député de
Marguerite-Bourgeoys que dès le début, dans ma tête,
l'Opposition, pour moi, était une caractéristique musicale qui me
rappelait le Boléro de Ravel.
M. Lalonde: II me semble que vous l'avez dite,
celle-là.
M. Grégoire: Oui, mais cela a continué et c'est
encore cela.
M. Lalonde: À la page 228, je pense.
M. Grégoire: Sachant que vous êtes capables, avec un
seul thème musical, de répéter...
M. Forget: C'est de plus en plus fort. M. Grégoire:
... pendant vingt minutes... M. Forget: Mais c'est de plus en plus
fort!
M. Grégoire: Non, ce n'est pas de plus en plus fort. Au
début, il n'y a que la flûte et, après, les caisses de
résonance et puis les instruments à vent qui soufflent à
pleins poumons.
M. Lalonde: Avez-vous vu les apprentis sorciers se faire
défoncer par cette musique?
M. Grégoire: Vous allez être rendus aux instruments
comme le hélicon ou le trombone ou le tuba; vous êtes rendus
à ces instruments. Les caisses de résonance ont fait leur
apparition dans le Boléro de Ravel. Là, il se développe,
ce Boléro. C'est toujours le même thème, ce sont toujours
les mêmes notes...
M. Lalonde: La pertinence, M. le Président.
M. Bérubé: Quant au gouvernement, nous n'y allons
que de soupirs.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la
motion, s'il vous plaît!
M. Grégoire: Je suis sur la motion en faisant une
comparaison de ces thèmes.
M. Lalonde: Ce sera bientôt un "expire".
M. Grégoire: Tout en oubliant ce qui caractérise
l'Opposition, nous sommes de bonne foi, nous voulons l'être et nous
sommes prêts à accepter d'aller à l'article 19. Vous allez
proposer votre amendement et cela va revenir au même; cela va forcer
Asbestos Corporation à payer ses taxes municipales et scolaires, mais
ça va se trouver au bon endroit, tel que suggéré par les
juristes. Cela deviendra l'article 19.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac...
M. Grégoire: C'est parce que...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
sur l'amendement. Là, vous parlez sur la procédure...
M. Grégoire: Je suis sur l'amendement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ... vous
faites une suggestion.
M. Grégoire: L'amendement concerne les taxes municipales.
Si mes amis d'en face sont prêts, on nous a demandé d'accepter
l'amendement, très bien, nous l'acceptons, à l'article 19, tel
que rédigé. C'est dans la section IV qui traite des conditions
d'exercice de la Société nationale de l'amiante. Je crois que
cela irait mieux là que dans la section traitant de la constitution de
la société; on constitue la société, mais c'est une
chose que de constituer une société et lui donner son statut
juridique et c'est une autre chose de lui donner ses conditions d'exercice.
Disons que si le député de Marguerite-Bourgeoys, qui, tout
à l'heure, semblait être d'accord avec l'article 7, le veut, nous
sommes prêts à accepter ça. Est-ce que le
député de Marguerite-Bourgeoys...
M. Lalonde: M. le Président, j'ai bien indiqué que
dans le cadre d'une étude complète de la section IV, on serait
d'accord avec cela.
M. Grégoire: On y reviendra à la section IV, mais
on ajouterait...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, vous avez fait une offre, elle n'a pas
été acceptée, est-ce qu'il y a d'autres
interventions...
M. Grégoire: Non, je veux continuer, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord, sur la motion.
M. Grégoire: Je n'ai pas parlé encore
là-dessus. Ne demandez pas s'il y a d'autres interventions tant que je
n'aurai pas fini, M. le Président. Je veux bien croire que...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que vous aviez commencé?
M. Grégoire: J'avais commencé par une suggestion,
M. le Président. Je veux bien croire que le débat sur ce point
devient ennuyant. En fait, je l'ai vu bien avant six heures, quand vous
bâilliez la bouche grande ouverte, M. le Président, que les
remarques de mon ami de Marguerite-Bourgeoys...
M. Forget: ... question de privilège.
M. Lalonde: Question de privilège, M. le
Président.
M. Grégoire: II n'y a pas de question de privilège,
il n'y en a pas, il n'y en a pas.
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
M. Grégoire: À quel article?
M. Lalonde: De la même manière que vous êtes
le protecteur des droits des députés, surtout de l'Opposition, je
m'élève contre l'attaque basse qui a été
adressée à votre endroit, M. le Président.
M. Grégoire: Ce n'est pas une attaque basse. M.
Lalonde: Jamais je ne vous ai vu bâiller. M. Bérubé:
... à son endroit. M. Lalonde: Je vous ai vu
réfléchir.
M. Grégoire: M. le Président, ce n'est pas une
attaque à l'endroit du président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Question de règlement, M. le Président.
Je me dois de me porter à votre défense également, parce
qu'actuellement, le député de Frontenac est en train de vous
faire symboliser l'éventuel bâillon qui s'en vient sur cette
commission. Il faudrait être préservé de ça, M. le
Président.
M. Grégoire: M. le Président, ce n'est pas une
attaque à votre endroit, c'est une attaque à l'endroit du
député de Marguerite-Bourgeoys qui, à ce moment-là,
parlait. C'est lui qui avait la parole, c'est lui qui vous endormait. Ce n'est
pas à votre endroit, c'est à l'endroit de celui qui parlait.
M. Lalonde: C'est une question au président?
M. Grégoire: M. le Président, je crois qu'on
m'interrompt continuellement, est-ce que vous allez réagir, M. le
Président, quand on m'interrompt comme ça?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, oubliez les phrases que je vous ai dites
à l'heure du souper, et respectez le règlement, comme je vous
l'ai dit d'ailleurs.
M. Grégoire: Je crois que je dois continuer mon
intervention sans...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Respectez le règlement.
M. Grégoire: Je le respecte, j'ai le droit de parole. Ce
sont ceux qui m'interrompent qui ne respectent pas le règlement. (20 h
15)
Je crois que parler sur cette affaire de taxes municipales, à
l'heure actuelle, comme cela a été accepté par le
gouvernement, comme cela a été accepté par le ministre,
cela devient ni plus ni moins qu'une discussion superflue puisque, à
l'article 18, il y aura, à ce moment-là...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, s'il vous plaît, sur la motion
d'amendement. Vous avez fait une offre à l'Opposition de reporter
à l'article 18 ou 19... Ils ont refusé. À partir du moment
où il n'y a pas consentement, je me dois de vous ramener à la
motion qui est de discuter sur le fond, sur les taxes municipales et scolaires
que devrait payer la société, et non pas sur l'article 18; cela a
été refusé.
M. Grégoire: J'en suis à l'amendement sur l'article
3, M. le Président, disant ceci.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur le
fond.
M. Grégoire: Sur le fond, nous sommes d'accord avec le
fait, mais nous nous trouvons obligés de voter contre, justement parce
que ce qui a été mentionné et lu par le ministre et
accepté par vous lors de la lecture, cela reviendra à l'article
18. Je ne parle pas de l'article 18 ni de l'article 19. Je parle de
l'inopportunité de l'accepter à ce moment-ci. À ce moment,
je crois que je suis sur le fond, c'est-à-dire sur l'opportunité
de l'accepter à un endroit ou à l'autre.
C'est pourquoi je ne veux pas m'attarder sur ce point, mais je crois que
nous acceptons le bien-fondé du fait que la compagnie Asbestos
Corporation paie des taxes foncières, des taxes scolaires, des taxes
municipales. Elle l'a toujours fait, elle reçoit les services des
municipalités. Il est bien évident qu'il y a une partie de ces
mines, comme la Lake Asbestos dans le canton de Coleraine, et la Normandie qui
est également dans ce canton, qui ne reçoivent pas, à
l'heure actuelle, tous les services qu'elles devraient recevoir de la
municipalité, parce que c'est un peu loin du centre du village.
Je crois que, pour ce qui est des mines qui sont situées dans
Thetford ou dans Black Lake, elles reçoivent tous les services
d'aqueduc, d'égout, de protection contre les incendies. Je crois que les
mines doivent continuer à payer des taxes municipales et scolaires.
C'est pourquoi je suis en faveur du principe de la chose, même si je
crois que ce doit être reporté, étant toujours sur le fond
du sujet des paiements de taxes, que cela doit être reporté
à la section IV qui traite des modalités d'existence de la
société.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion du député de Saint-Laurent sera adoptée? M.
le député de Richmond.
M. Brochu: M. le Président, quelques remarques sur cette
motion présentée par le député de Saint-Laurent.
Comme tous les collègues qui ont pris la parole sur cette motion, sur le
fond, je suis également d'accord que l'on doive inclure au projet de
loi, de façon directe, cette obligation pour la société ou
ses filiales, de devoir payer sur leurs biens les taxes foncières,
municipales et scolaires.
D'ailleurs, si la Société nationale de l'amiante ne
s'avère pas rentable pour les Québécois, au moins, il
faudrait s'assurer qu'elle le soit pour les municipalités qui recevront
en leurs murs cette dite Société nationale de l'amiante ou ses
filiales. Tout au moins, le gouvernement pourrait, à ce
moment-là, se targuer d'avoir rendu rentable une partie de ses
opérations au moins au niveau du paiement de la taxe scolaire. À
ce moment-là, il sera tout au moins un citoyen faisant face à ses
obligations.
Évidemment, les espoirs que les gens ont peut-être
actuellement, au niveau de la création de cette Société
nationale de l'amiante, sont peut-être beaucoup plus grands que les
résultats réels qui viendront par la suite. Encore là,
tout au moins, le fait d'établir, dans la loi comme telle, cette
obligation pour l'entreprise donnera au moins une assurance, une garantie
c'est peut-être la première garantie que nous obtenons dans
le présent projet de loi soit celle de fournir à ces
municipalités les revenus équivalant aux responsabilités
de cette société et de ses filiales.
Je pense que lorsque le député de Frontenac a
indiqué qu'il voterait contre, tout en étant pour le principe,
c'est son droit, mais je crains et j'espère que ce n'est pas le cas,
qu'on ne voit jamais dans le projet de loi 70 l'adoption de cet amendement,
puisque nous risquons fort bien de ne jamais nous rendre justement à
cette partie du projet de loi...
M. Grégoire: On est prêt à l'adopter tout de
suite.
M. Brochu: ... où se trouve l'article 18, tant et si bien,
M. le Président, que déjà, dans le passé...
le ministre l'a indiqué lui-même d'ailleurs au
début, on avait pensé inclure cet amendement, mais dans le projet
de loi, tel qu'il a été présenté, il n'y
apparaît même pas.
Cela indique qu'en cours de route même on s'est ravisé,
qu'on a d'abord vu le bien-fondé de son inclusion dans le projet de loi,
de son inscription comme tel pour que l'entreprise, la société
d'État ou ses filiales aient vraiment cette obligation, dans ses statuts
comme tels, mais, par la suite et aux dires même du ministre, on s'est
ravisé et on a enlevé du texte de loi cette obligation clairement
indiquée.
On nous dit maintenant qu'on a l'intention, plus tard, au cours de
l'étude du projet de loi, dans les articles qui viendront plus loin, de
l'inclure. Cependant, le député de Frontenac nous dit oui en
principe, mais lorsque viendra le temps, je me pose des questions. Si cela
pouvait être fait le plus tôt possible, je dirais d'accord, vous y
avez donné suite...
M. Grégoire: Tout de suite.
M. Brochu: ... mais lorsqu'on regarde la menace de guillotine qui
pèse sur cette commission parlementaire, on peut sérieusement se
demander si on a vraiment l'intention cette fois-ci d'apporter cet amendement
que tous, d'ailleurs, se disent unanimes à vouloir adopter autour de
cette table.
J'espère je suis favorable à cette motion
d'amendementque si elle est immédiatement rejetée
par le gouvernement, qu'au moins on pourra passer à son adoption dans
une autre partie du projet de loi.
D'ailleurs, lorsque je lis la motion telle que présentée,
on dit ici que l'article 3 serait modifié en ajoutant à la fin de
l'alinéa, la phrase suivante: "La société ou ses filiales
dont elle détient plus de 50% des actions doivent payer sur leurs biens
des taxes foncières, municipales et scolaires au même titre qu'une
corporation privée." Je dirai simplement que ce sera peut-être
là la seule ressemblance à une entreprise privée, soit
qu'au moins, elle va payer ses taxes comme toute autre entreprise, mais au
niveau de tout le restant, les garanties ne sont pas là. Au moins, si on
peut avoir celle-là, déjà ce sera un acquis
peut-être pour les populations qui auront à vivre avec cette
société de l'amiante. Parce que je suis convaincu, et l'avenir
nous le diraj'espère me tromper que les municipalités
qui sont venues ici remplies d'espoir, tout comme les groupes aussi qui avaient
beaucoup d'espoir dans la création de cette Société
nationale de l'amiante, espoir d'une manne d'emplois qui pourraient venir de
là ou d'une stimulation économique réelle, dans cette
région, seront peut-être déçues lorsqu'elles devront
faire face à la réalité. Évidemment, l'avenir le
dira.
Ici, autour de cette table, chacun est libre d'exprimer ses opinions
à ce sujet, de défendre le point de vue basé sur les
options politiques qui sont les siennes. Cependant, seule la mise en
application du projet de loi comme tel dira qui avait raison. J'espère
que je me trompe, mais je crains énormément qu'à ce
moment, les espoirs de ces gens soient quelque peu déçus,
puisqu'il ne me semble pas qu'on ait des garanties suffisantes jusqu'à
maintenant que la société comme telle ou ses filiales
éventuellement créées, pourront justement apporter cette
manne et ces retombées positives que ces gens ont soulignées et
espérées en venant à notre commission parlementaire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-François.
M. Rancourt: M. le Président, si dans les faits, je suis
d'accord avec le bien-fondé que la Société nationale de
l'amiante doive payer les taxes foncières, municipales et scolaires, je
serai contre l'amendement, parce que, comme nous le savons tous, les ministres
des Finances et des Affaires municipales ont annoncé qu'il y aurait
révision de la fiscalité municipale et que le ministre des
Ressources naturelles a un ajout à l'article 18, un amendement qui fera
justement qu'il sera assuré que cette Société nationale de
l'amiante paiera ses taxes foncières. Je puis aussi assurer les
Oppositions que du côté parlementaire, nous ferons le suivi
nécessaire pour que cela soit inclus au texte du projet de loi 70.
M. Lalonde: Cela me rassure. Je prends votre parole, vous avez
l'air honnête, vous.
M. Rancourt: Cela veut dire qu'elle est officielle.
M. Lalonde: Vous n'êtes pas le gouvernement,
malheureusement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, brièvement, quelques
points que me suggèrent les échanges auxquels j'ai assisté
depuis un peu plus d'une heure de débat. Quant au premier point et
à ses caractéristiques, un des objectifs que nous poursuivons par
cet amendement et tout ce débat qui s'y rapporte, c'est d'éviter
une perte aux municipalités où est située la
société Asbestos. Il ne s'agit pas d'assurer un gain, il ne
s'agit pas d'obtenir la promesse d'un avantage nouveau. Il s'agit
d'éviter que les gens qui reçoivent quelque chose dans le moment
le perdent. C'est assez caractéristique du contexte dans lequel on est
forcé de débattre ce projet. Il faut même se battre pour
garder l'acquis, le statu quo. Même cela, c'est remis en question par ce
projet. J'ai ici le tableau des taxes qui sont versées par les
compagnies minières à la cité de Thetford Mines. C'est une
somme importante. Cela a augmenté de $291 000, soit 11,27% de toutes les
taxes directes, de toutes les taxes foncières en 1973 et à $465
464 soit 12,33% du total des taxes foncières de la municipalité
en 1978. C'est donc une somme importante pour une municipalité de cette
taille. On en est rendu à débattre la nécessité de
protéger cette source de revenu pour la municipalité. Par le
miracle d'un changement dans le statut légal de cette
société, par un changement de propriétaire, voilà
qu'elle serait dépouillée de 10% de ce à quoi elle a droit
dans le moment. C'est important de le remarquer et de le souligner
j'allais dire d'un trait rouge, mais j'imagine que le ministre est incapable de
souligner quoi que ce soit d'un trait rouge, alors disons d'un trait vert pour
ne pas le gêner un large trait vert...
M. Bérubé: On ne souligne que les
âneries...
M. Forget: Justement, ce n'est pas une ânerie que de
préserver cette source de revenu pour la municipalité de Thetford
Mines. Je suis sûr que le député de Frontenac serait
d'accord avec moi. Ce n'est pas une ânerie que de souligner qu'elle a le
droit actuellement de percevoir cette taxe. C'est un droit qu'elle peut
même revendiquer devant les tribunaux.
Or, le projet que nous a lu le ministre relativement à sa
façon de voir les choses n'est pas du tout un substitut à la
motion que nous avons prononcée. Ce n'est pas un substitut valable.
C'est une obligation conditionnelle. C'est une obligation qui peut être
plus ou moins contournée par une négociation entre la compagnie
et la municipalité. La municipalité serait devant un droit qui
pourrait être aménagé, contourné,
négocié par la compagnie puisque tout ce à quoi la
compagnie serait
astreinte, selon le projet que nous a lu le ministre, c'est de payer des
taxes ou de payer un montant selon une négociation.
Or, M. le Président, on sait très bien que dans une
négociation, il n'y aurait pas d'objet, si ce n'est pour la compagnie
d'aménager, de diminuer, de rendre plus facile à supporter cette
obligation. On pourra nous dire qu'il n'y a pas de raison puisqu'il y aura une
obligation de payer au moins les taxes foncières. Ce n'est pas du tout
vrai parce qu'il y a plus qu'une dimension au problème. Par exemple, et
on y reviendra tout à l'heure, la ville de Thetford Mines a des demandes
à formuler auprès de la compagnie pour des questions
d'aménagement urbain, de planification urbaine, etc, et on peut fort
bien s'imaginer que la compagnie s'approche de la municipalité,
après l'adoption du projet que propose le ministre et dise:
Écoutez, je comprends qu'on est obligé de vous payer des taxes
foncières, mais si vous étiez "raisonnables" entre guillemets, on
pourrait regarder d'un meilleur oeil votre projet de zonage, votre projet de
relocalisation de quartiers. Ce sont des choses qui se négocient entre
amis et entre gens civilisés. Je comprends qu'on vous payait $200 000
d'impôt, mais là, on a le pouvoir de négocier cela. Si vous
voulez, on va s'arranger pour $100 000 et, d'un autre côté, on va
vous promettre solennellement, vous savez, qu'on va vraiment vous donner une
considération adéquate pour la relocalisation de quartier ou
l'urbanisation. Il y a toutes sortes de dépenses sociales. Mais vous
comprenez, nous sommes mandataires du gouvernement par le premier alinéa
de l'article 3. On ne peut pas s'engager ainsi à la
légère. Ne nous demandez pas de promesses. Mais on va mettre les
taxes à $100 000 et je vous assure qu'on va présenter au ministre
un projet d'arrêté en conseil pour défrayer 40% du
réaménagement de tel quartier.
C'est cela. On va demander aux gens de se mettre à genoux pour
obtenir des fonds, de l'argent auquel ils ont droit dans le moment en vertu des
taxes qui déterminent les contributions foncières. Et on va
substituer à cela, un pouvoir de marchandage par une
société dont les ressources financières dépassent
de loin celles de la ville de Thetford Mines qui, évidemment,
dépend du gouvernement, ne peut pas se lier parce que tout est soumis
à l'arbitraire valablement, la décision ultime du Conseil des
ministres. Alors, on ne pourra pas prendre de promesses du côté de
la compagnie. Ce qu'on va faire, on va promettre de regarder les choses d'un
bon oeil, d'être gentil. Les édiles municipaux sont
coincés, ils ont des emprunts aux banques, etc., il faut que l'argent
entre. À un moment donné, il y a des salaires à payer aux
pompiers et aux policiers et à ceux qui cueillent les ordures
ménagères.
Un jour, ils vont signer sur la ligne pointillée et ils vont
dire: Après tout, dans la loi, le ministre ne nous a pas
protégés. Il nous avait bien dit qu'il nous protégerait.
Mais ce n'est pas une protection. Ils auront le doigt dans l'oeil jusqu'au
coude, à ce moment, et ils pourront blâmer le ministre qui, par un
amendement insuffisant, vient soi-disant réaliser une promesse qu'il a
faite, mais cette pro- messe, comme les autres, c'est un faux-semblant. Les
gens vont être déçus. C'est pour cette raison qu'on insiste
afin que pour cette motion, les gens de l'autre côté, qui votent
contre, montrent leur vraie couleur. Quand il s'agit de prendre un engagement,
ils se défilent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Richmond.
M. Brochu: J'aurais quelques questions à poser au
ministre.
M. Grégoire: J'aurais une réponse à donner
au député, parce qu'il me reste encore du temps. Ce que le vieux
gouvernement libéral faisait, qu'il ne s'imagine pas que tous les autres
vont le faire. Cela s'est peut-être fait dans votre temps. C'est pourquoi
vous n'êtes plus ministre.
M. Forget: Cela ne s'est jamais fait dans mon temps. Je suis
capable. J'ai assez d'imagination pour savoir que vous le feriez.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: Je voudrais savoir ce que vous feriez, vous.
M. Grégoire: Vous êtes rappelé à
l'ordre, alors, suivez le règlement. Vous dites que vous le connaissez.
Ce que le vieux Parti libéral a fait dans le passé, cela ne s'est
pas fait depuis un an et demi. Alors ne prenez pas les autres pour ce que vous
avez été. Si vous avez agi ainsi, vous avez été
battus. Vous avez été battus et prenez votre défaite.
M. Lalonde: Le nouveau gouvernement nous fait une histoire
politique, les créditistes ne se battent plus, eux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: Vous avez beaucoup d'expérience.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Merci, M. le Président, je pense avoir
droit à mon droit de parole en fin de compte.
M. Forget: Servez-vous-en bien.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): C'est la
monnaie de votre pièce qui vous est rendue quelque peu. Continuez.
M. Grégoire: M. le Président, je vais vous rappeler
à l'ordre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Je pense que peut-être vous auriez
besoin... Dites-vous bien une chose, c'est que si votre gouvernement l'a fait,
c'est pour cette raison qu'il a été battu. Ce n'est pas dans les
intentions du nouveau gouvernement d'agir comme vous avez agi. Vous avez mal
agi pendant six ans, le peuple l'a dit, le peuple vous a jugés. Admettez
donc ce jugement. Vous l'étiez ministre. Vous ne l'êtes plus.
Pourquoi? Parce que vous avez fait ce que vous reprochez au gouvernement, ce
qu'il ne veut pas faire. (20 h 30)
M. Lalonde: La meilleure défense, c'est l'attaque. On en a
la preuve.
M. Grégoire: C'est parce que vous l'avez fait pendant six
ans. Vous savez, quand le peuple s'est prononcé, c'est parce qu'il
disait: Finie l'indécision. Fini de toujours se poser des points
d'interrogation. Cela ne sera jamais résolu.
M. Lalonde: Finie l'incertitude.
M. Grégoire: Je vous vois agir depuis le début de
l'étude de cette loi, vous vous posez des questions. Avons-nous assez de
renseignements? J'en ai une pile, je les ai les renseignements. Si vous n'avez
pas voulu les lire, si vous n'avez pas voulu vous renseigner, c'est votre
faute. Vous avez été battus à cause de cela.
Écoutez...
M. Forget: Je pensais que c'était à la suite des
Jeux olympiques.
M. Grégoire: ... je n'insisterai pas là-dessus, ce
ne serait pas conforme au règlement. Ce serait à l'encontre du
règlement. Or, je veux me conformer au règlement.
M. Forget: Est-ce que le député de Frontenac veut
dire que ce sont les Jeux olympiques... je pensais que c'étaient les
Jeux olympiques.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Non, ce ne sont pas seulement les Jeux
olympiques, c'est vous tous. C'est votre indécision, c'est vous
tous!
M. Lalonde: Ah, il y a cela aussi?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: C'est votre indécision, c'est vous
tous! Vous êtes passés de 102 à 20!
M. Forget: C'est vrai, on n'aurait pas dû décider
cela. C'est vrai.
M. Lalonde: Nous sommes encore ici, nous.
M. Grégoire: Cela ne s'est jamais vu.
M. Lalonde: Nous sommes encore ici, nous.
M. Grégoire: Moi, je n'y étais pas et j'y suis.
M. Lalonde: Et nous sommes malcommodes!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Le député de l'amiante, avant,
il y était et il n'y est plus!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: Vous aimeriez bien qu'on ne soit pas là?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: Vous seriez mieux que maintenant.
M. Grégoire: Le député de la région
de l'amiante...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît!
Une voix: Certains comtés ont été
distraits.
M. Grégoire: II y en avait un dans Richmond qui n'y est
plus, qui était là de 1973 à 1976. Il y en avait un
libéral, mais il ne s'est jamais décidé; il n'a jamais
fonctionné et il n'y est plus. Pourquoi voudriez-vous qu'on fasse comme
vous? La population vous a rejetés. Rejetés, vous savez ce que
cela veut dire? Oui!
M. Lalonde: Les taxes municipales, qu'est-ce que vous en
faites?
M. Grégoire: Les municipalités vous ont
rejetés.
M. Lalonde: Parlez de cela.
M. Grégoire: Quand les maires sont venus...
M. Lalonde: Parlez de cela.
M. Grégoire: ... ils ont dit: Cessez de faire les fous et
votez donc pour quelque chose.
M. Lalonde: Allez-vous voter contre les taxes?
M. Grégoire: Ils ont dit: Au moins, on est sûr que
cela ne sera pas pire que dans votre temps. Ils ont dit cela. Ils sont venus et
ont dit: Au moins, il y a un gouvernement qui veut bouger alors que vous, vous
n'avez jamais bougé. Ils ont dit: Cela ne sera pas pire que dans votre
temps, vous, c'était 0.0000, presque autant de zéros qu'il y en a
dans votre parti! C'est ce que la population a dit. C'est ce que la population
de la région est venue vous dire au début de la commission et
c'est ce
que les maires vous ont dit. Ils ont dit quoi? Ils ont dit: Non, ils ne
nous ont pas fait de promesses, mais eux sont honnêtes. Vous, vous nous
avez fait des promesses sur toutes sortes de choses.
Je parle des taxes municipales. Quand on leur a posé la question:
Est-ce qu'ils vous ont promis de payer les taxes municipales? On ne leur a fait
aucune promesse. Vous leur en avez tellement fait que vous n'avez
respecté ni les unes ni les autres, qu'ils vous ont sortis. Vous n'avez
plus votre ministère vous non plus, cessez de "brailler"
là-dessus, c'est un fait!
M. Lalonde: Lequel avez-vous?
M. Grégoire: Je suis bien content comme je suis!
M. Lalonde: Oui, certain!
M. Grégoire: Moi, je suis le député de
l'amiante, je m'occupe de l'amiante.
M. Lalonde: À votre place, je serais bien content!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: Je suis le député de l'amiante
et je m'occupe du problème de l'amiante avec le ministre qui est
très bon pour s'occuper de cela aussi. Bon! Là, ils vous ont
sortis de votre "pot", vous ne l'avez plus et cessez de "brailler"
là-dessus. Les Affaires sociales, ce n'est plus vous et le Solliciteur
général, ce n'est plus vous! Cessez de "brailler"
là-dessus. Là, parce que vous n'avez pas agi, vous voudriez que
les gouvernements qui vous suivent fassent la même chose, qu'ils ne
bougent pas. Là, il y a un gouvernement qui bouge et cela vous choque,
cela vous chicote, vous qui n'avez pas bougé.
M. Lalonde: Oui, il tourne en rond. Il bouge, il tourne en
rond.
M. Grégoire: Au moins, il bouge. Quand les maires de la
région, quand le maire de Thetford et le maire de Black Lake sont venus,
ils ont dit: Non, ils ne nous ont pas fait de promesse. Ce qu'ils
sous-entendaient, c'est que vous, vous en avez assez fait, que vous n'avez pas
respectées, que vos maudites promesses, on ne veut plus en entendre
parler!
M. Forget: Nommez-en une!
M. Grégoire: Eux, ils ne nous en feront pas. Au moins, on
a plus de chances que ce soit vrai.
M. Lalonde: Laquelle?
M. Grégoire: Vous autres, vous nous en avez assez
fait!
M. Forget: Laquelle, nommez-en une!
M. Grégoire: Tellement! M. Lalonde: Combien?
M. Grégoire: Des promesses? Crime! Hé! Hé!
Hé!
M. Forget: Ils les ont eues.
M. Grégoire: Je me rappelle un député
libéral, dans le comté de Matane, qui est arrivé et qui a
dit: Si vous avez besoin d'une polyvalente, on va vous en construire une. Tout
le monde a applaudi. Il a dit: Ici, il n'y a pas d'université?
C'était dans une petite paroisse à 30 milles de Matane et il a
dit: On va vous en construire une, une université. Tout le monde
applaudissait. Il a dit: Ici, on va vous construire un pont. Tout le monde
applaudissait.
Une voix: Vous n'avez pas de rivière? On va vous en
creuser une.
M. Grégoire: II y en a un qui a dit: On n'a pas de
rivière! On vous la promet, la rivière.
M. Lalonde: C'est une vieille histoire!
M. Grégoire: C'était dans le comté de
Matane, d'un député libéral.
M. Lalonde: C'est une vieille histoire, cela, c'était en
1943!
M. Grégoire: Vous en avez promis, des choses comme
ça.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: C'est en 1943!
M. Grégoire: Vous avez promis le pont où il n'y
avait pas de rivière; vous avez promis la rivière parce que vous
aviez promis le pont.
M. Forget: Mais vous devez admettre qu'ils ont eu le pont
même s'ils n'ont pas eu la rivière.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Ils ont eu le pont et pas de
rivière.
Une voix: Ils avaient des contrats à donner. M.
Lalonde: Ils ont eu le pont, par exemple.
M. Grégoire: Où y a-t-il un pont sans
rivière en-dessous? Cela existe au Québec! C'était la
promesse d'un pont.
M. Brochu: II y a des ponts où il n'y a pas de route, la
route 55.
M. Forget: À l'Ancienne-Lorette, il y en a un, mais c'est
un autre problème.
M. Grégoire: Au moins, ici, ils ont reconnu
l'honnêteté du gouvernement actuel qui ne leur a rien promis, ni
l'endroit du siège social... Ils l'ont dit: Non, ils ne nous ont rien
promis. Ils ont quand même dit: On leur fait confiance...
M. Forget: Non, ils ont dit: On aimerait cela qu'ils
promettent.
M. Grégoire: ... parce que vous n'avez rien fait dans le
passé.
M. Forget: Ils ont dit: On aimerait cela qu'ils promettent.
M. Grégoire: M. le Président, ai-je le droit de
parole?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Parlez!
M. Grégoire: On parle à trois, est-ce qu'il faut
que ces deux-là parlent en même temps que moi?
M. Forget: On veut vous poser des questions.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Trois,
c'est déjà très bon, cela a déjà
été six.
M. Grégoire: Vous me les poserez. Je vous ai dit une
chose, M. le député de Saint-Laurent, votre ministère des
Affaires sociales, vous l'avez perdu, la population ne voulait plus que vous
soyez là. Vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, la
population ne voulait plus que vous soyez là. C'est fini, cessez de
brailler, là.
M. Forget: Le peuple est content.
M. Grégoire: Bon. Regardez, M. le Président. Le
peuple est content, oui. Là, nous autres, on veut agir, mais on n'agira
pas par promesses. Quand je me suis présenté dans le comté
de Frontenac, j'ai dit: Je ne vous promets rien.
M. Lalonde: Et vous n'avez rien fait. M. Grégoire:
J'ai dit: Je vous promets... M. Forget: II a tenu parole. M.
Lalonde: Vous avez tenu parole.
M. Grégoire: J'ai dit: On va y voir à ça. M.
le Président, c'est de la provocation à laquelle je vais
répondre. C'est de la provocation à laquelle je vais
répondre. J'ai dit: Je vous promets une chose, c'est de faire mon
possible. Je l'ai fait. Ils disent qu'on n'a rien fait. Les libéraux,
pendant quinze ans, pendant l'Union Nationale et depuis 1962, depuis seize ans
que tout le monde parlait du Parc Frontenac, on faisait des analyses, il y
avait du pi- quetage tous les ans... Je réponds à une
intervention. Cela ne s'était jamais fait, cela a commencé l'an
dernier, quand le nouveau député de Frontenac a été
élu, six mois après, ça commençait. Ah! Tout le
monde a dit: Tiens, il agit, les autres parlaient. Les autres piquetaient, ils
faisaient du piquetage pour des plages, pour des routes, pour aller là.
Là, il y en a un qui agit. Le boulevard 112...
M. Lalonde: On est rendu au boulevard 112.
M. Grégoire: Je réponds. La route 112 qui
était promise par les libéraux depuis vingt ans...
M. Lalonde: M. le Président, la pertinence, s'il vous
plaît.
M. Grégoire: Je réponds à une intervention,
M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
M. Grégoire: J'ai le droit de rectifier les faits.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
réponse ne devient pas pertinente parce que la question...
M. Grégoire: C'est mon droit de parole. Je la fais cette
année, vous autres, vous l'avez promise, moi, je la fais.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre.
M. Lalonde: Question de règlement, M. le
Président.
M. Grégoire: C'est la différence entre vous autres
et nous autres.
M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.
Alors que la guillotine se dessine au-dessus de notre tête, M. le
Président, nos minutes sont comptées, dans l'esprit de quelqu'un,
quelque part, j'aimerais que le député de Frontenac...
M. Forget: Retienne son souffle.
M. Lalonde: ... nous parle des avantages de voter contre la
motion du député de Saint-Laurent.
M. Forget: ... pas voter contre.
M. Lalonde: S'il veut voter contre. On enverra à son
comté tous ces votes d'aujourd'hui.
M. Grégoire: M. le Président, je pense bien qu'il
n'y aura pas de question de...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Sur la
motion, sur la motion.
M. Grégoire: Je vais parler sur la motion, elle est bien
simple...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): On
était rendu au ministère des Transports.
M. Grégoire: ... c'est ceci: Le paiement des taxes
municipales et scolaires par l'Asbestos Corporation à la
Société nationale de l'amiante, c'est parfait, mais il faut que
ça figure dans la loi à l'endroit où ça doit
être. Il ne s'agit pas de faire une loi de fous comme il y en a trop eu,
ce qui a entraîné votre défaite. Il s'agit d'en faire une
qui soit logique; ça va à la section IV et non pas à la
section I. Je vous ai proposéc'est justement sur l'intervention,
je reste dans le sujet, sur le fond du problème le paiement des
taxes municipales et scolaires par la Société nationale de
l'amiante.
Je vous ai proposé de le voter immédiatement, tout de
suite, de ne pas attendre à demain. Vous avez refusé, parce que
vous n'étiez pas décidés. Même style que depuis six
ans, vous n'êtes jamais décidés, vous n'avez jamais
été décidés. Vous remettiez toujours ça
à plus tard, plus loin, plus tard. On vous a dit: Tout de suite. Est-ce
que j'ai fini mes vingt minutes?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En
concluant, M. le député de Frontenac. Vous aviez
déjà pris dix minutes.
M. Grégoire: Nous autres, on est prêts à le
faire en toute logique. Mais on n'hésitera pas et on ne taponnera pas
comme vous l'avez fait. Le résultat, vous l'avez vu. Cela va être
voté et adopté, comme disait le député de
Sherbrooke et comme l'a dit le ministre, ça va être dans la loi,
guillotine ou non. Mais il n'y aura pas de guillotine, parce qu'il faut des
têtes, je le répète, ça va être dans la loi,
une fois adoptée, à l'article 19, que la Société
nationale de l'amiante va payer ses taxes foncières et scolaires. Je
vais voter pour ça.
Mais de là à vouloir dire qu'on veut faire de la petite
politicaillerie, de la vulgaire politicaillerie, intégrer ça
n'importe où, vous auriez pu tout aussi bien dire: Le siège
social de la Société nationale de l'amiante sera à
Thetford, et en même temps dire: Elle paiera ses taxes foncières
et scolaires; cela n'aurait eu ni queue, ni tête. On va l'arranger, la
loi, pour qu'elle ait du bon sens, de la logique et ça va être
dans la loi. Quand ça va être adopté en troisième
lecture, ça va être dans la loi, on va voter pour.
M. Forget: Pouvoir discrétionnaire.
M. Grégoire: On va voter pour. Pas de pouvoir
discrétionnaire, c'est bien dit que la Société nationale
de l'amiante paiera ses taxes foncières et scolaires, ça va
être dans la loi et on va voter pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci,
M. le député de Frontenac, M. le député de
Richmond.
M. Brochu: J'avais une question à poser au ministre
justement à ce sujet. J'aimerais l'entendre se prononcer sur cette
question importante. Je ne vous dérange pas trop?
M. Bérubé: M. le Président, est-ce qu'on
vous dérange dans votre conversation?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, le
député de Frontenac ne me dérange pas. M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Merci, M. le Président. Pour revenir au
député de Frontenac qui est en train d'organiser les travaux de
cette commission, je lisais dans la Tribune un article indiquant que,
dès cette semaine, M. Grégoire veut proposer l'augmentation des
séances d'étude de trois à cinq jours par semaine, soit du
mardi au samedi. De cette façon dit-il, l'Opposition aura tout le loisir
de présenter encore des amendements, etc. En outre, le
député de Frontenac a précisé qu'il
n'hésitera pas à demander l'imposition de la clôture
dès le mois de mai si l'obstruction systématique devait se
continuer.
À cause de cette menace qui plane sur nous, M. le ministre,
est-ce que vous seriez prêt à prendre l'engagement, compte tenu du
consensus qu'il y a au sujet de cette nécessité d'inclure cet
amendement à la loi, que même s'il devait y avoir fin abrupte de
nos travaux, que nous allons retrouver, en fin de course, dans la loi,
l'amendement comme tel?
M. Bérubé: M. le député de Richmond,
j'ai fait l'erreur de prendre la parole après deux exposés de nos
savants collègues qui vous ont sans doute endormis, ce qui vous a
empêché d'entendre qu'effectivement, nous avions la ferme
intention de présenter un amendement plus complet que celui soumis par
l'Opposition ici et qui va exactement dans le sens que vous soulignez.
M. Brochu: Ce que je voulais entendre, c'est un engagement formel
de votre part à ce niveau, pas simplement déplacer les choses et
arriver au même résultat. Au sujet du parc Frontenac, lorsque le
député de Frontenac se plaignait de ceux qui, depuis des
années plantaient des piquets et qu'après son arrivée, six
mois après, il n'y en avait plus, mais que le parc était ouvert,
les mêmes gars qui plantaient des piquets sont chez nous depuis ce
temps-là, parce qu'ils mesurent la Transquébécoise et elle
n'avance pas vite. Il ne faudrait pas déplacer le problème comme
cela. Ils ont tout simplement déplacé l'équipe de
piquets...
M. Grégoire: Occupez-vous de votre comté et
ça va marcher.
M. Brochu: C'est vous qui vous ne vous en occupez pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, nous ne sommes pas au ministère des Transports ici.
M. Brochu: II y a un pont de bâti, mais il n'y a pas de
route.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Cela me
surprendrait énormément que le ministre
des Transports lise nos travaux. À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: On voit dans quel imbroglio l'improvisation du
ministre à cette commission a amené la commission parlementaire.
Vous vous souvenez sans doute, M. le Président, avec votre courte mais
intense expérience au niveau des commissions parlementaires qui
étudient les projets de loi article par article, que lorsqu'un
gouvernement a l'intention d'apporter des amendements à ce stade de
notre étude, normalement, il les dépose, il les distribue. Vous
vous souviendrez peut-être même, que ce soit au projet de loi no 67
ou 101je ne me souviens plus lequel, je pense que c'est 67,
peut-être les deux il y avait même eu une entente au
départ, entérinée par la présidence, à
l'effet que chacun des amendements devenait une motion principale, de sorte que
si le ministre avait agi de cette façon, l'amendement du
député de Saint-Laurent aurait même été
irrecevable, parce qu'ayant le même objet qu'une autre motion qui
était sur la table.
Je ne peux pas m'empêcher de souligner ce fait, M. le
Président, qui vient d'enferrer littéralement les
députés ministériels dans une position absolument
abracadabrante où ils vont devoir voter contre un amendement et,
ensuite, voter en faveur d'un autre, semblable, ayant le même objet,
peut-être moins bon. Quand le ministre dit qu'il est plus complet, je
dirais qu'il est aussi plus complet qu'une chaloupe pleine de trous et plus
complet qu'une chaloupe qui n'a pas de trous. Cela va être tellement
complet qu'on va pouvoir passer à côté, qu'on va pouvoir
faire n'importe quoi, sauf payer les taxes, suivant le droit des gens
actuellement, le droit qui donne aux commissions scolaires et aux
municipalités le droit d'imposer et de recouvrer les taxes. (20 h
45)
Je vois pourquoi les légistes ont convaincu le gouvernement, le
ministre en particulier, d'inclure cet amendement du ministre à la
section "Pouvoirs spéciaux". Au fond, il s'agira, si j'ai bien compris
l'amendement du ministre il n'a fait que le lire, je n'en ai pas le
texte d'un pouvoir et non pas d'une obligation. La Société
nationale de l'amiante aura le pouvoir de payer des taxes et aura aussi le
pouvoir de ne pas les payer suivant l'entente qu'elle aura réussi
à avoir avec les municipalités en cause.
C'est pourquoi il m'apparaît absolument impossible de travailler
sérieusement à cette commission. Nous avons un amendement qui est
désiré par le gouvernement, contre lequel il devra voter à
cause de son improvisation, de son manque de préparation, de son
incompétence, de l'incurie du ministre qui n'a pas cru bon de
déposer ses amendements au début de nos travaux. Il est fort
possible qu'on ait d'autres amendements à mesure que nos travaux vont se
dérouler; ils vont peut-être répondre au désir du
gouvernement, mais ils vont devoir être défaits. C'est pour cela
que nos travaux sont en train de s'embourber dans l'incompétence et
l'improvisation du gouvernement.
Je pense que c'est l'endroit où on doit dénoncer cet
état de chose qui va sûrementon ne peut pas s'en
surprendre inspirer des méthodes brutales mais non violentes au
leader parlementaire du gouvernement, à savoir ce qui arrive à
cette commission parlementaire. Je comprends qu'il soit venu nous visiter cet
après-midi et encore jeudi dernier pour se rendre compte jusqu'à
quel point le gouvernement est incapable de mener le débat ici. Il veut
s'en rendre compte de visu, parce que c'est absolument incroyable qu'un
gouvernement n'ait pu mener un débat sérieux sur un projet de loi
relativement simple qui constitue une société; au-delà de
quatre articles depuis un mois et demi. C'est absolument impossible à
penser, sauf lorsqu'on s'en rend compte de visu, lorsqu'on vient voir
jusqu'à quel point le ministre et les députés, surtout le
ministre, il ne faut pas accuser les députés qui, ce n'est pas de
leur faute, sont appelés plutôt à faire le nombre; ils font
quelques interventions souvent fort pertinentes, mais ils sont, de par l'ordre
des choses, de par la nature des choses, appelés surtout à faire
la majorité plutôt qu'à intervenir. Je pense que c'est au
ministre à porter la responsabilité de cet état de
chose.
Ce vote de la part du gouvernement est plein de conséquences. Je
ne pense pas qu'on doive... J'ai vu le député de Richmond qui, en
faisant appel à tout ce qu'il peut avoir de confiance dans ce
gouvernementcela peut en surprendre quelques-uns, cela me surprend, je
n'ai aucune confiance, enfin! a demandé au ministre s'il
s'engageait à faire un amendement semblable dans le projet de loi; tout
ce qu'il a eu, c'est une ferme intention. Il devait y avoir aussi une intention
dans l'avant-projet, quand on l'avait mis et qu'on l'a enlevé. Comment
voulez-vous qu'on se fie à cela? Tout à coup que le ministre
change d'idée. On ne sait jamais. Il n'a même pas cru bon, il n'a
même pas cru assez à son amendement pour le déposer sur la
table de la commission au début des travaux. Son intention
n'était même pas assez ferme pour nous le distribuer
aussitôt qu'il l'a fait. On ne sait pas quand il l'a fait. Il y a
peut-être un mois et demi, peut-être un mois, peut-être hier,
mais il n'y croit tellement pas qu'il ne nous l'a pas donné. Il nous
semble que ce n'est pas très sérieux.
Il a dit: Je vais mettre cela dans les pouvoirs au lieu de mettre cela
dans les obligations. M. le Président, c'est tout à fait
inacceptable. Le député de Frontenac pourra se gargariser de
toutes les réalisations qu'il aura pu amener dans son comté dont
plusieurs, on s'en rend compte, ont été naturellement
initiées avant qu'il n'arrive. Après moi le déluge,
dit-il; il devra quand même expliquer à ses électeurs et
aux municipalités en particulier le vote qu'il va prendre en se
déclarant contre une motion d'amendement, contre un amendement aussi
important pour les municipalités où les installations de la
Société nationale de l'amiante seront situées. Je vous
remercie.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Bérubé: Très brièvement, pour
souligner le caractère erroné d'une affirmation du
député de Marguerite-Bourgeoys, reprise en choeur par le
député de Saint-Laurent, à savoir que l'amendement dont
j'ai lu le texte, lors de mon intervention, ne répondait pas à
leur attente. Or, je prends la peine ici de répéter l'amendement
tel que rédigé et tel qu'il se présentera à
l'article 18.
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, sur une question de
règlement.
M. Lalonde: Lorsque le ministre a lu son amendement tantôt,
j'ai été tenté de soulever un certain nombre de questions
de règlement. J'ai hésité, je l'ai laissé faire. On
a vu dans quel imbroglio cela nous a amenés. On est en train de comparer
deux amendements, dont un n'est pas du tout sur la table. Comment voulez-vous
que soit pertinent à notre amendement le fait que le ministre nous lise
tous les amendements relativement à l'article 19?
M. Grégoire: Sur la question de règlement,
seulement une directive.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Non, M.
le député. Ma décision est prête, la voici.
M. Lalonde: On n'a même pas le temps d'en parler.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne
considère pas les propos que va tenir le ministre sur une question
d'amendement formel, puisque l'amendement n'a pas été
proposé. Je considère tout simplement que le ministre entend se
servir de l'article 96 pour rectifier certains faits sur des propos qu'il a
déjà tenus.
M. Bérubé: Exactement. J'ai donc dit, lors de mon
intervention, que cet article se lirait ainsi: La société doit
payer toutes les taxes municipales et scolaires imposées sur les biens
et immeubles qu'elle possède.
Par conséquent, il ne peut pas être
interprété de quelque façon que ce soit autrement que par
une obligation qui est faite à cette société de payer les
taxes municipales et scolaires imposées.
En deuxième alinéa, il est bien dit: Néanmoins, la
société peut...
M. Lalonde: Néanmoins.
M. Bérubé: ... nonobstant toutes les dispositions
législatives, au contraire, faire avec des corporations de commissaires,
de syndics ou d'administrateurs d'écoles, des ententes. Par
conséquent, ceci...
M. Forget: Pour payer moins. M. Bérubé: ...
n'exclut pas.
M. Lalonde: Le "néanmoins" et le "nonobstant"...
M. Bérubé: Pardon? Je viens d'être interrompu
à deux reprises; une fois par le député de Saint-Laurent.
Qu'il ait l'obligeance de prendre la parole! M. le député de
Saint-Laurent, nous vous écoutons.
M. Forget: Je n'ai pas le droit de parole.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): ...
parole, M. le ministre.
M. Bérubé: Ah! Vous n'avez pas le droit de parole?
En ce cas, il serait peut-être plus approprié que vous vous
taisiez lorsque j'interviens.
M. Lalonde: Oh! J'ai le droit de parole!
M. Bérubé: Allez-y, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Oui, justement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre, vous avez la parole, s'il vous plaît!
M. Bérubé: Merci, M. le Président,
j'espère que vous rappelerez à l'ordre ces deux gamins.
M. Lalonde: Vous ne me donnez pas le droit de parole. On l'offre,
puis on le retire.
M. Bérubé: Le deuxième alinéa de cet
article ne fait qu'indiquer la possibilité pour cette
société de s'entendre avec des corporations de commissaires, de
syndics, d'administrateurs d'écoles, ou de municipalités pour
d'autres types de paiements si ceux-ci s'avéraient nécessaires.
Par conséquent, c'est plus complet que le simple paiement de taxes
municipales et scolaires. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
rectification étant faite, est-ce que l'amendement du
député de...
M. Lalonde: Est-ce qu'il me reste quelques minutes?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II vous
reste une minute.
M. Lalonde: Le ministre vient de confirmer nos craintes. Il y a
un "néanmoins" et un "nonobstant" dans son amendement. Le
"néanmoins" détruit tout d'abord l'idée principale. Le
"nonobstant toute disposition législative", au contraire, cela le
démolit, après l'avoir détruit...
M. Grégoire: C'est beau "néanmoins".
M. Lalonde: Cela veut dire que nous avions raison d'être
très craintifs. Nos appréhensions sont fondées.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lalonde: C'est vous qui avez bu le vin, M. le
Président?
M. Grégoire: C'est vous.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'amendement du député de Saint-Laurent sera
adopté?
M. Grégoire: Non, M. le Président.
M. Lalonde: Vote. Appel nominal, s'il vous plaît!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé (Matane)?
M. Bérubé: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bordeleau (Abitibi-Est)?
M. Bordeleau: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Brochu (Richmond)?
M. Brochu: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grégoire (Frontenac)?
M. Grégoire: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Ouellette (Beauce-Nord)?
M. Ouellette: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François)?
M. Rancourt: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Lalonde (Marguerite-Bourgeoys)?
M. Lalonde: En faveur.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion est rejetée: cinq voix contre trois. Est-ce que l'article 3 sera
adopté?
M. Forget: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
Coût de la relocalisation des quartiers
M. Forget: M. le Président, il y a un autre
élément qui doit, à mon avis, être ajouté
à l'article 3. Il prendrait la forme de l'amendement suivant: "Que
l'article 3 soit modifié en ajoutant à la fin l'alinéa
suivant: La société ou ses filiales, dont elle détient
plus de cinquante pour cent des actions, doivent défrayer le coût
total de la relocalisation de quartiers rendue nécessaire en raison de
l'exploitation d'une mine d'amiante".
M. le Président, très brièvement je fais la lecture
du mémoire...
M. Grégoire: M. le Président, sur la
recevabilité. Là, M. le Président, je crois qu'il doit y
avoir une question sur la recevabilité. La section I traite de la
constitution de la société. L'article 3 traite du statut
juridique de la société. On dit: "Elle jouit des droits et
privilèges d'un mandataire du gouvernement. Les biens de la
société font partie du domaine public, mais l'exécution de
ses obligations peut être poursuivie sur ses biens. La
société n'engage qu'elle-même lorsqu'elle agit en son
propre nom".
On voudrait faire ajouter que s'il y a transfert... la
Société nationale de l'amiante n'est pas l'Asbes-tos Corporation.
À la Société nationale de l'amiante, il n'est dit nulle
part qu'il peut y avoir une mine tout près, mais si la mine a des
obligations, la mine les remplit.
À l'heure actuelle, à l'article 3, là où il
est question du statut juridique de la Société nationale de
l'amiante on lui demande qu'elle prenne des engagements en ce qui concerne
l'expansion d'exploitation à venir, l'expansion possible d'un
cratère. Il est bien dit, à l'article 4, que la
société peut exploiter un gisement, mais il n'est pas dit lequel.
Il se peut qu'aucune relocalisation de quartiers ne soit rendue
nécessaire. En fait, s'il y a un quartier qu'il est nécessaire de
relocaliser dans Thetford, c'est la tâche de la Bell Asbestos qui est la
propriété de Turner & Newall, et il n'a jamais
été question de déménager ce quartier. Ici,
lorsqu'il est question du statut juridique de la Société
nationale de l'amiante lui faire prendre des obligations en ce qui
concerne la relocalisation de quartiers... mais de quels quartiers? Est-ce que
c'est dans Thetford, dans Asbestos, dans Coleraine, dans Black Lake, dans
Robertsonville, dans East Broughton, partout où il y a des mines? Non
seulement ce n'est pas spécifié... La mine de Johns-Manville qui
est à Asbestos où il n'a jamais été question
d'achat par le gouvernement ou par la Société nationale de
l'amiante... si un quartier d'Asbestos qui appartient à la
Johns-Manville est à relocaliser, est-ce que la Société
nationale de l'amiante est obligée de payer pour cela? Si un quartier de
East Broughton qui appartient à la Canadian Carey...
M. Forget: Question de règlement... M. Grégoire:
Je parle de la recevabilité.
M. Forget: On argumente sur le fond dans le moment.
M. Grégoire: Je ne parle pas sur le fond. Je parle sur la
recevabilité. La motion ne spécifie rien. On dit pour "la
relocalisation de quartiers rendue nécessaire en raison de
l'exploitation d'une mine d'amiante". On ne dit pas laquelle, on ne dit pas
quel quartier. Cela, c'est une première chose.
Deuxièmement, à l'article 3, il s'agit du statut juridique
de la Société nationale de l'amiante et non pas de son
exploitation, ce qui était à l'article 4, non pas de la
protection de l'environnement, non pas des cas d'accidents de travail, non plus
de l'achat des camions, non pas d'aucune des activités
opérationnelles d'une société minière. Il s'agit de
la section I qui traite de la constitution de la société et de
l'article 3 qui traite du statut juridique de la société.
Si l'Opposition veut apporter un amendement dans ce sens, elle aura
pleinement le droit de le faire lorsqu'elle arrivera, par exemple, aux
conditions d'exercice de la société, aux pouvoirs spéciaux
qu'elle aura. Elle aura l'occasion de le faire à ce moment, mais
lorsqu'il s'agit du statut juridique de la société constituant la
Société nationale de l'amiante, ce serait s'écarter loin
du sujet.
M. Brochu: M. le Président... (21 heures)
M. Forget: Sur la recevabilité, M. le Président.
D'abord, la plupart des remarques que le député de Frontenac a
émises s'adressaient au fond. Il argumentait sur l'opportunité
d'approuver ou de désapprouver un tel amendement. Il y a deux choses:
premièrement, cet amendement n'est, par sa nature, aucunement
différent de l'amendement qui a été
précédemment discuté, qui est d'ajouter, en même
temps qu'on dit que la société, de par son statut, est mandataire
du gouvernement qu'elle ne peut pas payer de taxes, qu'elle peut agir au nom du
gouvernement. Elle peut être poursuivie sur ses biens;
d'énumérer, d'un autre côté, que même avec ce
statut fort exalté, elle a des obligations sociales. Elle n'est pas
complètement en dehors de la société, complètement
une loi pour ses propres fins, mais elle a, dans son statut, justement, des
obligations sociales qui en font partie intégrante.
C'est l'endroit pour le mettre. De toute façon, par analogie,
cette argumentation aurait dû être présentée lors de
l'étude de l'amendement précédent, c'est exactement le
même type d'amendement. Si le député de Frontenac est
gêné par la formulation de cet amendement, quant à moi je
serais prêt, si cela peut l'aider, à dire: En raison de son
exploitation d'une mine d'amiante, de manière à restreindre cela
à l'exploitation d'une mine d'amiante possédée par la
société Asbestos. Quant au reste, je pense que c'est parfaitement
recevable.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Très brièvement, M. le député de Richmond.
M. Brochu: Oui, M. le Président. Je vous rappelle que vous
nous avez déjà rendu une directive dans un contexte semblable, en
nous disant, à ce moment, que vous deviez vous référer
à ce qui vous était connu ou à ce qui avait
été porté à votre connaissance comme étant
le contexte de la discussion. Ceci pour faire suite aux propos tenus par le
député de Frontenac. Dans ce sens, il devient évident que
la Société nationale de l'amiante vise l'acquisition d'Asbestos
Corporation; d'ailleurs, cela a fait l'objet de beaucoup de nos discussions
dans le passé. D'autre part, vous n'êtes pas sans savoir, ce qui
est aussi évident, M. le Président, qu'actuellement le
gouvernement est en négociations pour l'acquisition de gré
à gré ou par la suite par expropriation de l'entreprise en
question.
D'ailleurs, des témoins venus à cette commission
parlementaire nous l'ont clairement indiqué. En ce qui concerne
même cette ville précise et cette entreprise, je vous rappellerai
également, M. le Président, que le ministre lui-même a
répondu je pense que c'était dans le contexte d'une motion
qui avait été présentée à des estimations de
coûts en ce qui concerne l'indemnisation des amiantosés par la
Société nationale de l'amiante. Donc, on admettait clairement,
à ce moment, qu'il s'agissait d'une entreprise clairement
identifiée, soit l'Asbestos Corporation àThet-ford Mines. Comme
dernière remarque, M. le Président, pour faire suite aux propos
du député de Frontenac, je vous rappellerai une motion qui a
été appuyée par le député de Frontenac et
qui visait à situer le siège social de la Société
nationale de l'amiante à Thetford Mines. Donc, il est tellement de
notoriété publique qu'il s'agit de la municipalité de
Thetford Mines et des environs que le député de Frontenac
lui-même avait appuyé une motion visant cet endroit. Alors, je
comprends mal son argumentation à ce stade-ci lorsqu'il dit que les
propos sont hors du contexte.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II est
vrai que la présidence peut, lorsqu'il est manifeste qu'une motion n'a
absolument aucune incidence avec le sujet de l'article en question, il est
manifeste que le président peut suggérer à un
député de... Bien, il peut la déclarer irrecevable ou
suggérer à un député de la présenter de
nouveau à un autre article, ce que j'ai déjà fait. Dans le
cas présent, j'estime qu'il n'est pas manifeste, qu'il n'y a aucune
incidence entre la motion d'amendement et la motion pricipale qui se trouve
à être l'article 3. Après avoir regardé la loi de
façon très générale, il est vrai qu'on peut
admettre que cette motion d'amendement pourrait être
présentée à un autre article, peut-être. C'est vrai.
D'autre part, il n'est pas manifeste qu'il n'y a aucune concordance et, comme
on parle de droits et privilèges, comme souvent dans nos lois les droits
et privilèges sont assimilés au même chapitre que les
obligations, à ce moment, je me dis qu'étant donné qu'il y
a un lien entre la motion d'amendement et la motion principale, qui pourrait -
remarquez, et je voudrais être juste ici être
présentée ultérieu-
rement dans le cadre d'un autre article, étant donné qu'il
y a un rapport entre la motion d'amendement et la motion principale, je la
déclare donc recevable et débattable.
M. Forget: M. le Président, je fais
référence aux représentations du Conseil municipal de
Thet-ford Mines en commission parlementaire au sujet du projet de loi 70. Le 21
mars 1978, il nous soulignait ceci: Nous espérons que l'implication du
gouvernement dans l'industrie de l'amiante incitera tous les producteurs
à respecter de façon encore plus stricte les normes de
santé qui ont été établies dans le but de
protéger nos travailleurs et que, de plus, les mêmes
préoccupations s'étendront à la protection et à
l'amélioration de notre environnement. Il ajoutait: Nous espérons
qu'avec l'application de la loi 70, le gouvernement sensibilisera davantage les
producteurs d'amiante dans leurs rôles et leurs devoirs de citoyens
à part entière de notre communauté. C'est cette dimension
sociale qui doit se retrouver quelque part dans une loi, dans une charte
créant une société d'État. Le gouvernement aurait
bien pu fonder une Société nationale de l'amiante, s'il tenait
absolument à lui donner ce nom-là, en vertu de la première
partie de la Loi des compagnies; il n'avait absolument pas besoin de
créer, par charte spéciale, une société dite de la
couronne, une société d'État, si son seul objectif est de
lui attribuer des objectifs commerciaux, des objectifs industriels
ordinaires.
Il y a plus que cela, le gouvernement s'intéresse à cette
industrie parce qu'il lui semble du moins, c'est ce qui nous
paraît devoir être le casqu'il y a une dimension sociale,
dans cette industrie, qui dépasse les simples préoccupations
économiques. On ne retrouve pas, dans le libellé de ce projet de
loi, dans le moment, un reflet adéquat de ces dimensions sociales. Nous
avons parlé tout à l'heure de la question des taxes; nous avons
parlé, un peu plus tôt, de la question des résidus. De ces
deux côtés, il y a un potentiel considérable de pousser
plus loin que ne peuvent le faire les sociétés privées des
actions, des initiatives et, sans aucun doute, l'engagement de crédits,
l'engagement de dépenses publiques.
Du côté de l'urbanisme, du côté de
l'aménagement urbain des villes, où se fait une exploitation
minière aussi intense, aussi considérable que celle de l'amiante,
un des premiers griefs mentionnés par les conseils de ville lorsqu'on
leur en parle, c'est la difficulté extrême dans laquelle ils se
trouvent de planifier le développement de leur ville et de financer ce
développement de façon normale puisque les hasards de la
géologie, probablement, forcent les compagnies minières à
faire des développements qui, tout à coup, grugent des espaces
réservés à l'habitation, réservés à
des routes ou réservés à d'autres types d'industrie. Cette
difficulté est considérable dans la mesure où, justement,
les compagnies, dans un contexte concurrentiel, ont fortement
hésité jusqu'à maintenant à dévoiler leur
programme d'exploitation à moyen et à long terme aux conseils
municipaux en disant: Notre mine va s'étendre de telle façon,
voici comment on a plani- fié le développement du chantier
minier, en quelque sorte. On pouvait fournir aux concurrents des indications
que ces concurrents ne pouvaient pas obtenir d'une autre manière quant
à l'orientation du gisement, quant à la forme que le gîte
minier peut prendre sous le sol. On a donc été extrêmement
réservé. Cela, on le comprend dans un contexte concurrentiel,
dans un contexte d'entreprise privée où on doit se surveiller les
uns des autres, où on doit rationner l'information qui devient
impossible aux concurrents.
Encore une fois, nous avons là une initiative de l'État
qui fait échos à des préoccupations de caractère
social. Il n'y a pas seulement un développement industriel; pourquoi
l'amiante plutôt qu'autre chose? Il y a peut-être des raisons
économiques, encore qu'elles soient très peu visibles dans le
raisonnement du ministre puisqu'il dit qu'il n'y a pas de motifs, sur le plan
de l'avantage comparatif, à développer cette industrie; mais sur
le plan social, par exemple, il y a des griefs certains, il y a des griefs
nombreux et de longue date. Il nous semble que ce ne serait pas pécher
par excès pour la loi organique de cette société de
l'amiante de comporter en même temps et dans le même souffle, alors
qu'on dit que cette société a un statut spécial, elle est
dipensée de payer des impôts... Normalement, toute
société fait une contribution sociale par les impôts
qu'elle paie puisque ces impôts servent à financer
l'éducation, les services de santé, les activités
culturelles, nos institutions politiques. C'est la contribution sociale de la
plupart des entreprises.
Dans ce cas-ci, on dit: Non, la contribution sociale ne pourra pas
prendre cette forme, la forme économique habituelle de subventionner les
services publics, on va dispenser l'industrie de l'amiante, la
société Asbestos en particulier, de cette obligation de
contribuer aux coûts sociaux normaux. Il devrait y avoir, dans le
même article, une équivalence, une contrepartie. Quand on donne
une exemption fiscale, ce n'est pas simplement pour obéir à une
obscure manipulation de fonds de manière à subventionner
secrètement des activités qu'on ne pourrait pas subventionner en
plein jour, un peu selon le scénario assez compliqué, assez
douteux du ministre; on devrait, dans la même loi, énoncer
clairement des objectifs sociaux qui sont la raison d'être de
l'intervention gouvernementale.
Des raisons d'être, il y en a plusieurs. Nous en citons deux.
Probablement que le ministre pourrait y ajouter quelque chose, mais l'attitude
du ministre n'est pas d'y ajouter quoi que ce soit, c'est de retrancher les
deux obligations de type social qu'on voulait insérer dans cet article.
Il veut les mettre dans des articles qui appartiennent au pouvoir de la
compagnie, de la société de l'amiante. C'est très
caractéristique, on veut donner à la société de
l'amiante le pouvoir d'obéir à des impératifs sociaux,
mais c'est aussi lui donner le pouvoir de ne pas y obéir, parce que
c'est dans le chapitre sur les pouvoirs.
Un pouvoir qui ne serait pas un pouvoir, on ne devrait pas le mettre
dans le chapitre sur les pouvoirs, on devrait le mettre dans le chapitre sur
les
obligations. C'est ce qu'on veut faire en disant: L'article 3 est un
statut très particulier d'une société d'État dans
le monde industriel et commercial. En particulier, ce statut comporte
l'exemption d'impôt. Pour compenser, il devrait y avoir, non pas une
exemption d'impôt, mais sa contrepartie, une obligation
particulière, un statut particulier d'assumer des obligations sociales,
en nature, en quelque sorte, plutôt que de le faire sous forme
pécuniaire, comme la plupart des sociétés industrielles et
commerciales le font.
On dit: Elle ne paiera pas de revenus au gouvernement, mais au moins,
cette société va s'occuper elle-même de certains objectifs
sociaux. Pourquoi? Parce que c'est là où on endosse de
façon absolue l'argument du ministre, il s'en réjouira
probablement cette société a une certaine expertise dans
le domaine de l'exploitation de la mine etc., et qu'il y a certains coûts
sociaux qui découlent directement de l'exploitation minière. La
question des résidus en était une. La question des taxes
foncières, c'est un aspect. On dit: exemption fiscale, d'accord, mais
pas d'une façon absolue. Que le gouvernement donne ce qui lui
appartient, l'impôt sur le revenu, mais qu'il ne donne pas ce qui ne lui
appartient pas, l'impôt foncier qui appartient, au contraire, aux
municipalités, aux commissions scolaires.
Autre obligation sociale: l'aménagement urbain. Les travailleurs
qui vivent dans ce milieu ont le droit de s'attendre, de la part d'une
société d'État, de la part du nouvel actionnaire de la
compagnie, à une attitude de citoyen exemplaire. Mettons de
côté, pour l'instant, la question de la concurrence. Après
tout, la société Asbestos, s'il est vrai que le ministre ne veut
pas utiliser à 100% les bénéfices actuels ou les
impôts actuels pour subventionner la vente de la fibre, il va lui en
rester un peu pour subventionner les activités à orientation
sociale, pour aménager un environnement physique adéquat.
D'ailleurs, il devrait être le premier à endosser une telle
recommandation, parce que si on avait un citoyen exemplaire en la personne, si
on peut dire, de la société Asbestos et de la
société de l'amiante, ce serait une raison de plus pour que le
public, la population, dans la région en particulier, appuie la
décision du ministre et trouve qu'il a fait là un geste d'homme
d'État, pas simplement un geste d'un ministre sectoriel qui veut
développer son industrie, qui veut se lancer en affaires, en quelque
sorte, qu'il s'est préoccupé, non pas seulement de ses objectifs
à lui sur le plan de l'industrie et sur le plan du développement
économique, mais qu'il s'est intéressé aux
préoccupations des citoyens, lui, à titre de citoyen.
Une première préoccupation, j'en veux pour
témoignage ce que nous disent les conseils municipaux, ce que nous
disent les maires de la région, ce que nous disent tous ceux qui ont un
peu réfléchi au style de vie qu'impose l'existence dans des
régions où on a de crassiers qui font plusieurs centaines de
pieds de hauteur et qui, littéralement, saupoudrent le paysage dans ce
coin-là, une préoccupation prioritaire, dis-je, est d'avoir un
en- vironnement physique qui soit moins disgracieux, qui soit moins
pénible à supporter, qui soit moins caricatural dans l'impression
qu'il donne d'un monde industriel sans humanité, sans
considération pour la qualité de la vie. Parce que c'est visible,
il y a des choses qui sont moins visibles, il y a des choses comme la
poussière. Au niveau actuel, pour vraiment voir s'il y a de la
poussière, dans bien des coins, il faut des instruments de mesure
très sensibles. Ce n'est pas comme c'était il y a vingt ans
où en été, on marchait à Thetford Mines
à ce qu'on m'a dit et les pas sur le trottoir laissaient des
traces, comme en hiver, les pas laissent des traces sur un trottoir
enneigé. Ce n'est plus la même situation. Il faut maintenant
mesurer cela avec des microscopes et des balances extrêmement sensibles
et des filtres, etc., autrement, on ne s'en rend pas vraiment compte. (21 h
15)
Mais il y a une chose dont on se rend compte, une chose qui est le
symbole du caractère inhumain du développement industriel
à l'époque moderne, c'est cette accumulation de débris,
c'est ce développement urbain complètement sauvage qui fait
qu'à Thetford-Mines même, entre deux mines qui appartiendront
à la société d'État, on trouve une rangée de
maisons qui se situent à peu près à 150 pieds en dessous
du niveau de la route. Il suffirait d'un gros bélier mécanique
pour aplatir les deux montagnes de chaque côté, on pourrait
niveler le sol et on ne verrait plus le toit des maisons. Cela serait
même plusieurs dizaines de pieds en haut du toit des maisons. C'est une
espèce de tranchée, c'est une espèce de tombeau à
ciel ouvert.
Une voix: C'est la rue Smith.
M. Forget: Oui, c'est cela, c'est la rue Smith. C'est absolument
invraisemblable, cette situation. Et on pourra, sur un plan légal, sur
un plan...
M. Grégoire: Cela a été fait dans votre
temps. M.Forget: Cela a été fait il y a
très longtemps. M.Grégoire: Dans votre temps.
M. Forget: Mais sur un plan légal, et dans la mesure
où cela demeure une entreprise privée, on peut comprendre qu'il y
a des raisons juridiques, qu'il y a une contestation juridique. On dit que ces
maisons-là sont déjà la propriété de la
compagnie et que les gens veulent bien encore y vivre, pour un loyer
dérisoire.
Mais il y a des choses qui peuvent s'expliquer en termes de relations
privées. Mais quand l'État intervient, ce n'est plus
tolérable. On s'attend de l'intervention de l'État qu'elle soit
non seulement bénéfique quant à ses aspects
économiques, mais qu'elle témoigne également d'un souci de
certaines valeurs humaines qui ont leur place dans ce cadre et qui constituent,
encore une fois, la raison d'être de l'intervention gouvernementale.
C'est exactement dans l'article 3, où le gouvernement fait cadeau
à cette société des impôts
qu'il pourrait autrement percevoir... il lui en fait cadeau. Il dit: On
ne percevra plus d'impôt. C'est $20 millions par année de cadeau.
Est-ce que, dans le même article, on ne devrait pas pousser la
décence jusqu'à dire: On a des obligations et on va le manifester
dans cette loi qu'on a des obligations envers les gens de la région.
Bien sûr, on pourrait ajouter bien des paragraphes. On pourrait en
trouver plusieurs autres.
M. Grégoire: L'ancien gouvernement n'aurait pas dû
tolérer cela.
Le Président (M. Ouellette): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Forget: On pourrait penser à un centre social pour les
mineurs qui sont désoeuvrés parce qu'ils ont perdu leur emploi
à cause d'un taux d'intoxication par l'amiante trop élevé.
On pourrait penser à plusieurs manifestations de cela.
Mais laissons les choses dans l'ordre du raisonnable, laissons les
choses dans l'ordre des priorités telles qu'elles sont
dégagées et perçues localement. Je suis sûr que le
député de Frontenac a entendu ces plaintes adressées aux
compagnies minières sur le développement urbain.
M. Grégoire: C'est vrai, M. le Président, ils m'ont
dit: L'ancien gouvernement n'aurait jamais dû tolérer que cela se
fasse.
Le Président (M. Ouellette): À l'ordre, s'il vous
plaît, M. le député de Frontenac!
M. Forget: Voilà un nouveau gouvernement qui lui,
légifère...
M. Lalonde: Nous sommes rendus ici, maintenant.
M. Forget: ... et qui omet de légiférer
là-dessus.
M. Grégoire: ...
Le Président (M. Ouellette): M. le député de
Frontenac.
M. Lalonde: II y a des vieilles personnes qui radotent comme cela
tout le temps, qui sont plus vieilles...
M. Grégoire: Vous auriez pu l'empêcher et vous ne
l'avez pas fait. Excusez-moi, M. le Président, je ne dis plus un
mot.
M. Forget: Justement, on s'acquitte de nos obligations sociales
aujourd'hui, M. le Président, en poussant comme législateurs le
gouvernement à agir dans ce domaine, à avoir le courage de dire:
Cela ne sera pas suffisant d'avoir une certaine performance économique,
une certaine performance financière, si tant est qu'on n'ait jamais des
raisons de se féliciter de ce côté-là. Et on sait
combien, de ce côté-ci, nous sommes sceptiques
là-dessus.
Mais même si c'était un succès de ce
côté-là, ce ne serait pas un succès encore suffisant
puisqu'il y a d'autres considérations, il y a d'autres dimensions dans
ce dossier. C'est la seule occasion que le gouvernement peut avoir de
manifester son intérêt. On a vu ce scandale qu'on va voir
répéter à partir du moment où l'État devient
propriétaire d'une mine d'amiante, propriétaire d'industrie de
transformation de l'amiante, ce scandale de voir déjà
apparaître dans les rapports de fonctionnaires, avant la lettre
même, des propos qui, sur le plan des préoccupations humaines, de
qualité de vie, de salubrité, amènent déjà
des fonctionnaires de l'État à dire: On a beaucoup
charrié, on a beaucoup exagéré. Ce n'est pas vraiment le
cas que la santé et la salubrité soient menacées. Vous
allez voir, tout est réglé. On va arrêter d'en parler, de
ces histoires. Cela nous fatigue maintenant d'en parler.
Et vous allez voir le gouvernement, non pas l'abstraction, l'État
comme abstraction dans les manuels de science politique, mais l'État tel
qu'il s'incarne dans les hommes qui poursuivent un objectif industriel et
commercial...
Le Président (M. Ouellette): Je vous rappelle que votre
temps est écoulé.
M. Forget: Dans deux secondes.
M. Lalonde: II a commencé à 21 h 5, cela fait
seulement 15 minutes.
Le Président (M. Ouellette): Je veux m'excuser, il vous
reste encore cinq minutes.
M. Forget: Merci, M. le Président. M. Lalonde:
C'est fort intéressant.
M. Forget: On peut voir que, dans cette situation, l'État
tel qu'il s'actualise dans des individus qui ne peuvent pas avoir cinquante
objectifs à la fois, mais qui s'identifient tout à coup comme
individus, comme équipe de travail à un objectif qui est tout
à coup non plus la salubrité, non plus la protection des
travailleurs, mais le développement industriel, qui deviennent un
"lobby" en quelque sorte industriel au sein même de l'appareil
gouvernemental et qui se mettent à avoir le langage que les industriels
avaient il y a dix ans ou vingt ans en disant: Cela va aller, nous avons un job
à faire et notre job, c'est de développer l'industrie de
l'amiante, c'est de financer des investissements, c'est de les rentabiliser,
parce qu'autrement on va nous poser des questions à l'époque de
l'étude des crédits, on va nous critiquer en disant que cette
industrie n'est pas rentable. Arrêtez de nous ennuyer avec des
considérations sur la salubrité.
L'État n'est pas encore propriétaire d'une mine et on a
vu, dans un rapport déposé en commission parlementaire pour le
ministre les fonctionnaires qui se mettent à lancer des: Ah!, des parce
que, des peut-être bien, des ce n'est peut-être pas sûr, on
n'a pas toutes les preuves,
on a charrié, on a exagéré, on est en train de
faire du tort au Québec. Ici, on va charrier dans l'autre sens; alors
que quand l'État n'avait que comme rôle d'assurer un inspectorat
sur la salubrité, on a pu voir un certain charriage et un certain
débordement de l'autre côté que tous regrettent maintenant,
tant du côté syndical et patronal, que du côté
gouvernemental où on dit: On a peut-être mis en jeu, mis en
péril l'avenir de l'industrie de l'amiante au Québec. Ce n'est
rien ce qu'on a vu et ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant. Quand
l'État sera propriétaire, il y a des gens dont l'avenir
professionnel au sein de la fonction publique, dont l'avenir politique au sein
du parti au pouvoir sera relié au développement et à la
rentabilité de l'industrie de l'amiante, vous allez voir ce qu'on va
dire sur les considérations de salubrité. Lorsqu'on est en face
d'une possibilité, dans cet article, de donner au moins un coup de
chapeau au passage à un principe qu'on prétend respecter, celui
de s'occuper de la qualité de la vie, des dimensions humaines du
problème de l'amiante et d'une région qui connaît 20% de
chômage, on va au moins s'en préoccuper, on va au moins, en
contrepartie d'une exemption fiscale absolue, imposer à cette
société des obligations sociales claires, précises, non
pas des choses qu'on va référer aux pouvoirs
discrétionnaires et aux recommandations du conseil d'administration qui
aura d'autres chats à fouetter que de s'occuper de cela.
On va lui dire, au départ, voici votre mandat: Messieurs, vous
êtes les mandataires du gouvernement. Quel est votre mandat? Est-ce de
faire les profits maximaux? Est-ce à tout prix d'investir les $20
millions d'impôt qu'ils ne paieront pas dans la multiplication d'emplois
subventionnés jusqu'à la fin des siècles ou est-ce, dans
une certaine mesure, d'être sensible aux préoccupations sociales,
aux préoccupations humaines qui doivent être présentes et
qui constituentje le répète pour la dixième
fois la seule raison d'être véritablement acceptable d'une
intervention de l'État dans ce secteur? Puisque, sur le plan
économique, le ministre s'est déjà chargé de jeter
le bébé avec l'eau du bain en disant: II n'y a pas d'espoir que
ce soit rentable.
M. Bérubé: Cela fait plusieurs fois qu'on l'entend
celle-là aussi.
M. Forget: Oui, c'est une expression consacrée pour
décrire une réalité qui existe malheureusement dans ce
dossier où le ministre a commencé par une admission
d'impuissance. Or, s'il y a une admission d'impuissance sur le plan
économique, au moins compensez-la par une admission partielle de
puissance et de capacité dans les dimensions humaines et sociales qui
vous donneront une base sur laquelle vous tenir quand vous viendrez justifier
les déficits annuels de cette société que vous nous avez
d'ailleurs annoncés d'avance fort prudemment en disant: Oui, c'est vrai,
cela ne fait pas d'argent cette affaire, mais au moins c'est un bon citoyen
corporatif. Au moins, les gens ont une qualité de vie décente,
désor- mais. Désormais, il y a une qualité de vie qui est
acceptable.
M. Grégoire: ... ce n'est pas mal.
M. Forget: Mais si vous n'avez rien fait comme citoyen
corporatif, si vous n'avez pas aidé à réhabiliter
l'environnement physique, si vous n'avez pas payé les taxes
foncières, sauf après un marchandage odieux, si vous n'avez rien
fait de ce côté-là, mon Dieu! vous n'aurez pas grand-chose
pour justifier vos déficits, sauf l'espoir d'une rentabilité
à venir que vous nous avez appris d'avance à ne pas
espérer.
M. le Président, de grâce, que le gouvernement accepte
notre amendement. C'est peut-être une des dernières occasions
qu'il a de montrer un peu d'humanité dans ce dossier.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. le
député de Saint-Laurent. Est-ce qu'on prend le vote? Est-ce que
la motion d'amendement à l'article 3 est acceptée?
M. Grégoire: Rejetée.
M. Lalonde: M. le Président, l'incapacité et
l'impuissance du gouvernement à réagir à la motion
d'amendement du député de Saint-Laurent nous dictent, à
nous de l'Opposition, des conclusions qui sont malheureusement très
négatives. Nous avons vu le gouvernement piétiner sur une motion
concernant la récupération des résidus d'amiante, faire un
pas en avant, deux pas en arrière, et en fin de compte, se retrouver sur
le dos en votant contre. Quand on a vu le gouvernement faire une pirouette pour
se défiler devant l'obligation d'assurer une fiscalité
foncière raisonnable et acceptable aux municipalités
impliquées en nous déclarant une intention ferme de
présenter un amendement à peu près semblable un peu plus
loin, on aurait pu, au moins, s'attendre à un peu de décence,
à un peu de bon sens de la part du gouvernement, s'attendre à ce
qu'il nous dise pourquoi il est contre l'urbanisme et la protection du milieu
naturel, et pourquoi il est contre la protection du milieu naturel...
M. Bérubé: On est pour le bien, mais on est contre
le mal.
M. Lalonde:... de la région de l'amiante. Naturellement,
si le ministre ne s'en préoccupe pas, on peut dire: II n'est pas de la
région, lui, mais que le député de Frontenac et ses
voisins qui sont, à divers degrés, impliqués,
c'est-à-dire députés de comtés qui ont des
activités d'amiante, ne disent rien du toutou qui veulent en
avoirà ce moment, cela dépasse les bornes. Je vous dis cela
à vous, M. le Président, parce que le règlement le
requiert. On dira que cela n'existe nulle part. D'ailleurs, on a tenté
tantôt, heureusement que la présidence est d'une force et d'une
neutralité neutralité, il faut le présumer,
d'ailleurs, personne ne peut la mettre en douteet a fait preuve d'une
clairvoyance en acceptant cette motion, parce qu'on aurait même pu
invoquer des précédents, précédents qui ont
été invoqués par le ministre cet après-midi pour
tenter d'appuyer le libellé de l'article 3. On a
référé à d'autres lois. On a
référé, en particulier, à la Loi du
développement de la région de la baie James, chapitre 34 des lois
de 1971. Or, dans la section I, Constitution de la société
c'est important, cela, d'ailleurs, le député de Frontenac est
tout ouïe il y a l'article 5 qui dit: La société doit
veiller à la protection du milieu naturel.
M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un bon jugement.
M. Lalonde: C'est un excellent jugement, le
Président...
Le Président (M. Ouellette): Vous m'excuserez...
M. Grégoire: ... S'il faut que le député de
Jonquière se mette à interrompre!
Le Président (M. Ouellette): ... mais j'attendais
l'occasion.
M. Forget: Surtout pour critiquer le président.
M. Lalonde: Là se confirment la clairvoyance et le
bien-fondé de la décision du président qui vous
précédait à la chaise, étant donné que
justement, dans une loi qui a constitué une société
d'État, la Loi sur le développement de la région de la
baie James, SDBJ, on met un article spécial, qui vient tout seul, qui
n'est pas inclus dans un autre article; l'article 3 qui ressemble beaucoup au
nôtre dit: La société doit veiller à la protection
du milieu naturel. C'est là un engagement. Je pense que le
législateur a fait preuve d'un sens des responsabilités à
l'égard du milieu naturel, à l'égard des citoyens,
à l'égard des gens qui vivent à l'intérieur de ce
territoire. Lorsqu'on dit... Comme on disait ici, on avait le même texte
qu'on a invoqué tantôt à l'article 3, et je lis le texte de
l'article 3 de la Loi sur le développement de la région de la
baie James: "La société jouit des droits et privilèges
d'un mandataire du gouvernement".
On retrouve le même texte ici, mais au moins là, on a le
pendant. On a la dimension sociale que le député de Frontenac
rejette du revers de la main. Elle est tellement peu importante qu'il n'a
même pas voulu parler... (21 h 30)
M. Grégoire: Je n'ai pas encore parlé
là-dessus. Je ne vois pas pourquoi vous me mettez des mots dans la
bouche.
M. Lalonde: Je retire mes paroles, M. le Président,
étant donné que je viens de m'apercevoir que le
député est prêt à parler sur cet amendement.
Tantôt, on a demandé le vote et il n'a pas protesté.
M. Grégoire: Je n'ai pas dit cela non plus. Vous ne savez
pas comment je vais voter non plus.
M. Lalonde: J'ai hâte de voir comment le
député de Frontenac va voter sur cet amendement et surtout quels
seront les arguments qu'il pourra apporter en faveur de l'amendement.
M. Grégoire: C'est grave ce que vous dites là.
M. Lalonde: Justement pour laisser le député de
Frontenac dire son mot, je vais interrompre immédiatement mes
propos.
Le Président (M. Ouellette): Merci, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys. Êtes-vous prêts
à voter sur la motion d'amendement?
M. Grégoire: Contre, M. le Président. M.
Lalonde: M. le Président...
M. Grégoire: J'ai réussi, sachant fort bien que le
député de Marguerite-Bourgeoys continuerait à parler. Je
voulais le faire sursauter.
Le Président (M. Ouellette): Est-ce qu'on est prêts
à passer au vote sur la motion d'amendement de l'article 3 tel que
proposé par le député de Saint-Laurent?
M. Bordeleau: Nous sommes prêts, M. le
Président.
M. Bérubé: M. le Président, nous aurions
encore besoin de nouveaux encouragements. Le député de
Marguerite-Bourgeoys devrait prolonger. Il lui reste encore quinze minutes. Il
me semble qu'il devrait chercher à nous convaincre parce que
jusqu'à présent son argumentation a été
épouvantablement faible. Quant à celle de son collègue de
Saint-Laurent, je dois dire qu'elle a été minable.
M. Grégoire: J'étais pour voter pour l'amendement,
mais là, j'en suis rendu à voter contre parce que justement ils
nous ont donné les mauvais arguments.
Le Président (M. Ouellette): Nous appelons le vote.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Ouellette): Oui, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ... à l'occasion de nos débats, souvent
la proximité surtout que cette table nous impose entre les participants,
tout cela est propice à une bonne humeur et à l'échange de
blagues, mais je ne peux pas m'empêcher de trouver absolument
inacceptable l'absence de réaction sérieuse à
l'égard de l'amendement du député de Saint-Laurent de la
part des députés ministériels.
Le député de Saint-Laurent propose que la
société d'État, qui doit être le meilleur citoyen
corporatif possible, soit foncièrement impliquée à 100%
dans la relocalisation des quartiers rendue nécessaire en raison de
l'exploitation d'une mine
d'amiante par la société ou ses filiales. Naturellement,
c'est un problème qui préoccupe peu les députés
ministériels qui sont ici ce soir. On ne discute pas sur la question de
la relocalisation des quartiers, pourtant certains députés du
milieu de l'amiante qui ont vécu cette situation savent jusqu'à
quel point c'est un problème important.
C'est un problème lourd à porter aussi pour les
municipalités et les citoyens. M. le Président, mettons de
côté la question de la planification. Le député de
Saint-Laurent l'a décrite tantôt; c'était très
difficile et peut-être plus difficile autrefois lorsqu'on n'avait affaire
qu'à des entreprises privées qui, ne voulant pas dévoiler
leurs plans à long terme, se voyaient contraintes de donner au
compte-goutte leur projet de sorte qu'une planification sérieuse
était impossible imposant de cette façon à des citoyens
qui restent dans des maisons, dans des quartiers un état d'être,
un état de demeurer qui devenait inacceptable. Ce n'est qu'après
la création d'une telle situation qu'on devait relocaliser des
quartiers. Mettons la planification de côté, M. le
Président. Prenons la situation telle qu'elle l'est actuellement.
Prenons la situation où la société Asbestos devient une
filiale de la Société nationale de l'amiante. Il y a des
problèmes à régler. Là, il y a une planification
à faire. Il y a des problèmes de relocalisation à
régler.
Le Président (M. Ouellette): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Bérubé: Qu'est-ce que je pourrais bien dire?
Le Président (M. Ouellette): La parole est au
député d'Outremont.
M. Lalonde: M. le Président, on assiste encore à la
comédie des bouffons devant nous. On ne peut pas transposer cette
bouffonnerie dans le journal des Débats. Naturellement, ce ne sont que
les quelques spectateurs ici qui se rendent compte jusqu'à quel point
les députés ministériels, pas tous, surtout celui de
Frontenac qui devrait avoir un peu plus de sérieux à
l'égard de la question de la relocalisation des quartiers rendue
nécessaire en raison de l'exploitation d'une mine d'amiante... Le
ministre, naturellement, mais lui, ce n'est pas la première fois qu'il
fait le pitre ici, même si c'est lui qui a la responsabilité.
M. Grégoire: C'est peut-être une expression
antiparlementaire, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Vous
devez soulever une question de règlement.
M. Grégoire: Je soulève une question de
règlement. Quand j'en avais prononcé une, je l'avais
retirée et je n'avais pas insisté.
M. Lalonde: Si vous me dites que c'est antiparlementaire, je vais
la retirer, mais je ne pense pas.
M. Grégoire: J'avais dit moins que cela et je l'avais
retiré.
M. Lalonde: Quand j'ai parlé des bouffons devant nous, M.
le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je pense
qu'il est extrêmement difficile pour la présidence de
décider ce qui est antiparlementaire ou non.
M. Grégoire: J'ai soulevé la question. Je vous
demande de vous prononcer. C'est antiparlementaire, oui ou non. Si oui,
demandez-lui de la retirer. Vous ne le savez pas.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je ne le
sais pas. Écoutez un peu, M. le député de Frontenac, on
n'a pas encore fait un lexique des termes parlementaires et antiparlementaires.
À l'occasion, si cela arrive, je le consulterai. Pour le moment, disons
qu'il y aurait des expressions qui seraient mieux choisies, mais à
savoir si c'est antiparlementaire...
M. Lalonde: M. le Président, donc si ce n'est pas
antiparlementaire, je disais que le ministre qui fait le pitre en face de moi,
M. le Président, depuis combien de semaines n'ajoute pas non plus
à la profondeur des débats. On dirait qu'un certain ministre et
certains députés devant moi se réjouissent de la
proximité de la guillotine qu'ils auront bien méritée
malheureusement en embourbant notre débat de l'improvisation et du
manque de préparation qui ont présidé à nos
débats.
M. le Président, devant ce manque de sérieux, je vais
mettre fin à mes propos.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion du député de Saint-Laurent sera adoptée?
M. Grégoire: M. le Président, je voudrais dire deux
mots. Je crois que le fond de la question est valable. Je crois qu'il faut
absolument se prononcer sur le rôle social des compagnies qui exploitent
des mines. Non seulement les mines d'amiante, mais toutes les exploitations
minières. Cependant, il y a un mot sur lequel je pense que les
députés, les pitres, les bouffons, les deux, devant nous, puisque
les mots sont parlementaires, je ne sais pas lequel est le pitre et lequel est
le bouffon... Comme disait le député de Mercier, je crois que
c'est encore mieux les deux jumeaux du capitaine Ryan. Il y a un mot que je ne
peux pas accepter, c'est le coût total. Pourquoi avoir mis le mot total?
Je me le demande.
M. Lalonde: Pourquoi pas total?
M. Grégoire: C'est justement parce qu'il existe une loi
fédérale...
M. Lalonde: Ah.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: La dignité, M. le Président. La
dignité de Québécois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Forget: II faut se tenir debout.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Lalonde: II faut être bon Québécois.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Forget: II faut refuser ces temps...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent, s'il vous plaît!
M. Grégoire: II faudrait employer des expressions pires
que pitre et bouffon pour mes amis d'en face. Ils continuent à
interrompre tout le temps et vous êtes obligé de les rappeler cinq
fois de suite à l'ordre. J'ai compté le nombre de fois. Et ils
continuent. Ils récidivent. L'ancien solliciteur général
qui est rappelé à l'ordre, récidive. Je comprends pourquoi
la population l'a expulsé, parce que c'était un
récidiviste.
M. Lalonde: M. le Président, question de
règlement.
M. Grégoire: J'espère que le mot est parlementaire,
M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président, dans le contexte de
bouffonnerie qui est en face de nous, il semble que ce soit un mot très
léger. Mais dans le journal des Débats, cela va mal.
M. Grégoire: M. le Président, je pense bien qu'il
n'y a pas de question de règlement.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: J'ai employé le terme
récidiviste...
M. Lalonde: J'ai une question de règlement et vous allez
m'écouter. M. le Président, dans le journal des Débats, le
mot récidiviste va prendre son sens général, à
savoir un délinquant qui "dé-linque" souvent. Je pense qu'ici,
c'est tout à fait faux et le député devrait retirer...
M. Grégoire: Non, je pense que c'est vrai. Cinq fois
rappelé à l'ordre et avoir recommencé après. C'est
une récidive et je maintiens le mot récidiviste.
M. Lalonde: À l'égard du règlement. M.
Grégoire: Vous êtes un récidiviste. M. Lalonde:
À l'égard du règlement.
M. Grégoire: Non, vous êtes un récidiviste,
parce que loin de moi l'idée que vous puissiez être
délinquant. Je crois, au contraire, que vous êtes un honnête
homme, et je suis prêt à l'admettre et à vous donner toutes
ces qualités. Un homme avec une bonne réputation et tout. Je
l'admets. Je sais que vous avez un rôle à jouer.
M. Lalonde: Mais il est récidiviste?
M. Grégoire: Selon le règlement, oui. Il est
récidiviste selon le règlement, je veux bien le
spécifier.
M. Lalonde: D'accord.
M. Grégoire: Je suis prêt à lever mon
chapeau, je reconnais que vous avez un rôle à remplir ici. Il faut
également reconnaître que vous le remplissez très bien. Je
dois vous dire que je lève mon chapeau devant la façon dont vous
le remplissez. Ce n'est pas le Boléro de Ravel, je pourrais même
dire que vous êtes un génie de réussir à parler
pendant 60 heures sans rien dire. Je vous donne toutes les qualités. Le
rôle qu'on vous a confié, vous l'avez rempli à la
perfection.
On mentionne le coût total. Il y a justement une loi
fédéraleà ce que je sache, tant que le
référendum n'aura pas eu lieu, nous sommes encore dans la
confédération qui est en vigueur déjà depuis
1971 et qui dit que la Société centrale d'hypothèques et
de logement du gouvernement fédéral est prête à
payer 50%...
M. Forget: Des prêts.
M. Grégoire: ... du coût de relocalisation, ce qui a
été fait avec le quartier Saint-Maurice à Thetford. Je ne
vois pas pourquoi mes amis d'en face voudraient prendre encore une fois la
défense d'Ottawa, voudraient venir à la rescousse du gouvernement
fédéral...
Une voix: Pour lui faire économiser de l'argent.
M. Grégoire: Oui, et pour encore l'empêcher de nous
donner ce qui nous est dû. Je veux bien croire que jeudi dernier, devant
l'évidence et l'appui massif de la population aux propositions
Pari-zeau, on a dit à Ottawa: Nous sommes solidaires avec le
gouvernement, il faut que vous remettiez au Québec ce qui lui est
dû. Là, j'admets que c'était peut-être l'ignorance de
cette loi qui existe à Ottawa qui ait fait que vous l'ayez
oubliée; peut-être ne connaissiez-vous pas la loi, c'est possible.
On ne peut pas tous être députés de l'amiante, je l'admets,
mais il y a tout de même le fait qu'on paie des taxes et des impôts
à Ottawa.
M. le Président, je suis sur le sujet parce qu'on parle du
coût total. Je dis que normalement Ot-
tawa doit payer 50%. On paie des taxes et des impôts à
Ottawa et je ne vois pas pourquoi vous voudriez absolument vous porter encore
une fois à la défense du gouvernement libéral d'Ottawa
pour essayer de l'exempter de venir payer ce qu'il doit payer étant
donné qu'il reçoit des impôts et des taxes, étant
donné que nous sommes une richesse qui lui permet de faire entrer de
l'argent étranger au Canada; c'est le gouvernement canadien au complet
qui profite des $400 millions provenant d'exportations.
M. Forget: On pourrait accepter un sous-amendement, si vous
êtes en faveur du principe.
M. Grégoire: Pourquoi? Pourquoi voudriez-vous exempter
Ottawa de ces coûts?
M. Forget: Voulez-vous faire un amendement?
M. Grégoire: Je n'ai pas d'amendement à
faire...
M. Forget: On va l'accepter.
M. Lalonde: On va l'accepter.
M. Grégoire: ... c'est votre motion. Je vous dis ceci: Je
ne peux pas me prononcer.
M. Lalonde: Ah!
M. Forget: Ah!
M. Grégoire: Parce que je veux qu'Ottawa paie sa part.
M. Lalonde: Faites un amendement.
M. Grégoire: Selon la même loi, il y a eu ce qui a
été fait lors du déménagement du quartier
Saint-Maurice. Le gouvernement du Québec, la Société
d'habitation du Québec a payé sa part et je trouve cela normal.
On paie bien notre part comme vous, les députés de
Montréal, pour les Jeux olympiques, pour le stade qui est là et
qu'on ne déménage pas de là. Il est à
Montréal, le stade, et on paie notre part des taxes.
M. Lalonde: Le voulez-vous?
M. Grégoire: Et vous voudriez, vous autres, ne pas payer
votre part quand il s'agit des affaires...
M. Lalonde: Le voulez-vous?
M. Grégoire: Si vous voulez le transporter dans mon
comté, faites-le et je ne le refuserai pas, je vais lui trouver un
terrain.
M. Forget: N'insistez pas trop!
M. Grégoire: Transportez-le! Vous l'avez construit et vous
n'en voulez plus, n'est-ce pas?
M. Brochu: Je suis certain qu'au prochain conseil de ville il va
être question de cela.
M. Grégoire: De le déménager?
M. Forget: On pourrait compenser, vous pourriez construire le
mât à Thetford Mines.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre!
M. Grégoire: Vous voudriez, vous autres, encore une
fois...
M. Bérubé: On pourrait demander à M. Lalonde
de nous fournir les crédits.
M. Grégoire: ... vous porter à la défense du
gouvernement fédéral qui a une obligation de payer sa part?
Avez-vous pensé aux taxes, aux impôts et à tout ce qu'il
reçoit de cela? L'argent qui entre au Canada venant de l'étranger
l'enrichit parce qu'on calcule toujours aussi, comme part du
développement économique d'un pays, les exportations, pour
essayer de compenser les importations et quand la région fait sa part
pour faire rentrer des sommes considérables c'est peut-être la
région qui fait le plus sa part au Canada pour faire rentrer des sommes
considérables ici dans le pays vous voudriez exempter Ottawa de remplir
ses obligations?
M. Forget: Encore un quart d'heure et on ne votera pas.
M. Grégoire: II reste également ceci: Vous voudriez
que le gouvernement du Québec, qui a payé sa part dans le
déménagement du quartier... ne paie plus? Quand on paie pour les
installations, à Montréal, des Jeux olympiques, le stade, le
village olympique, c'est vous autres qui l'avez fait construire, on paie pour
ça, nous autres, les citoyens québécois de Thetford, ceux
d'Asbestos payent pour ça. Nos taxes sont là pour ça. Vous
êtes assez égoïstes pour venir nous dire que seule la
région va payer? Le total, non, la société, s'il y a une
mine et une relocalisation, vous voudriez que la région seule paie? (21
h 45)
M. Forget: Les impôts qu'on donne à la
société...
M. Grégoire: Les impôts d'Ottawa, vous ne voudriez
pas que ce soit là? Messieurs, je ne vous comprends pas, je ne vous
comprends pas...
M. Lalonde: Faites un amendement.
M. Grégoire: Vous en auriez trop à faire en
partant.
M. Lalonde: Faites un amendement.
M. Grégoire: Société centrale,
Société d'habitation, et tout.
M. Forget: Le coût net, un seul mot, le coût net.
M. Grégoire: Vous voudriez que ce soit eux autres qui
payent tout. Je ne peux pas accepter qu'on dégage Ottawa de ses
responsabilités et de ses obligations. Je ne peux pas accepter
ça. Je veux bien croire que vous êtes à la remorque
d'Ottawa, mais si vous l'acceptez, si vous préconisez ça, si vous
prenez des moyens détournés pour montrer toujours que vous
êtes les fidèles esclaves, est-ce que c'est un mot parlementaire,
M. le Président? Esclave est un mot parlementaire?
M. Forget: Oui.
M. Grégoire: ... esclaves du gouvernement libéral
à Ottawa, pas nous autres, on va se tenir debout, messieurs d'en face.
On va se tenir debout et on va vous montrer comment on fait quand on se tient
de bout. Tant qu'Ottawa profitera de ça, on va aller chercher au moins
la part qui nous revient. Je vais me battre pour qu'on aille chercher à
Ottawa la part qui nous revient.
Ottawa ne veut pas payer sur la taxe de vente, pensez-vous qu'on va
continuer à payer des impôts et des taxes à Ottawa, et
qu'on va lui laisser tout garder sans rien nous remettre; sans qu'on ne
reçoive plus rien? Allons donc, messieurs. L'autre jour, le chef de
l'Union Nationale...
M. Forget: ... le fédéral, ça vous a bien
réussi dans le passé.
M. Grégoire: ... vous a donné une magistrale
leçon: comment on se tient debout plutôt que de ramper. Cela a
été l'expression du chef de l'Union Nationale. Aujourd'hui, vous
avez oublié ça vite, hein? Vous avez oublié ça
vite. Pas moi. Je suis pour la relocalisation, que les citoyens soient
dédommagés et que le gouvernement fédéral fasse sa
part.
M. Forget: ... comment ça va?
M. Grégoire: Cela a été demandé par
les résidants du quartier Mitchell, toute l'association, je suis
allé à la réunion de l'Association du quartier Mitchell au
mois de décembre. Elle est allée voir le ministre
fédéral André Ouellet à ce sujet-là. Ouellet
a levé le nez comme il l'a fait pour la taxe de vente. Je demande
l'appui unanime de vous tous pour dire qu'Ottawa doit payer sa part. Merci, M.
le Président.
M. Forget: Mais la part des citoyens, c'est elle qui est
difficile à payer.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Merci.
Est-ce que la motion du député de Saint-Laurent sera
adoptée?
M. Brochu: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
député de Richmond.
M. Brochu: M. le Président, je vais parler là-
dessus aussi, parce que ça implique quand même beaucoup de choses,
cette motion, ça va beaucoup plus loin que les propos tenus par le
député de Frontenac qui m'a précédé comme
orateur. D'abord, parce que l'État, en se portant acquéreur de
l'Asbestos Corporation, comme d'autres l'ont souligné également,
va devoir devenir un employeur modèle. Il va être aux prises avec
l'application de ses propres lois dans une foule de domaines. Il va devoir
donner l'exemple en appliquant, le plus judicieusement possible et le plus
rigoureusement possible l'ensemble de ses lois, tant en matière de
travail qu'en matière de salubrité, qu'en matière de
conditions de travail auprès de ses éventuels employés de
la compagnie en question. Cela sera là une lourde
responsabilité.
Cela me surprend qu'immédiatement, avant même que le projet
de loi soit adopté, que sur la présentation d'une motion aussi
importante que celle-là, qui vise à corriger une situation
intolérable qui a perduré depuis trop longtemps, qui vise
à corriger une injustice qui a été faite envers les
citoyens résidents de cette région, alors même qu'on
présente, avant la fin de l'adoption du projet de loi, une motion qui
vise à apporter certains correctifs, les premières
réactions, du côté du gouvernement, soient non. À ce
moment-là, on cherche à trouver, à l'intérieur de
la motion, toutes les bibites sur lesquelles on pourrait avoir le loisir de
s'enfarger pour dire: Voici, on est contre cela.
M. le Président, face à cette motion, le gouvernement
aurait actuellement l'occasion rêvée de se prononcer
véritablement en ce qui concerne les travailleurs comme tels, ceux qui
sont atteints par les préjudices, appelons-les de cette façon,
les retombées négatives des situations dues à
l'exploitation des mines d'amiante, en particulier dans la région de
Thetford.
Je pense que le député de Frontenac, d'abord, comme
responsable du comté, devrait se lever non pas pour ramener le
débat sur la question constitutionnelle, mais se lever pour
répondre aux besoins des travailleurs de sa propre région, dans
ce domaine-là. Il y a des gens qui, depuis des années je
pense que je ne me trompe pas, sinon vous me corrigerez et les candidats
du Parti québécois, lors de la dernière campagne
électorale, se sont élevés également contre ces
situations qu'ils jugeaient eux-mêmes intolérables à ce
moment-là, sur lesquelles, disaient-ils, le gouvernement a des
responsabilités et doit intervenir.
Maintenant, le gouvernement veut se donner un outil, pour intervenir
directement dans le domaine de l'amiante. Et, par une curieuse circonstance, il
apparaît que son intervention porte justement sur une des villes au
Québec, soit Thetford, qui a le plus souffert et qui a encore le plus
à souffrir de ces situations qu'on jugeait, en tant que candidats
péquistes lors de la dernière campagne électorale, comme
intolérables et devant être corrigées au plus
tôt.
Et ce soir, devant cette même commission parlementaire, ces gens
de la même formation politique qui forment maintenant le gouvernement,
vous disent non. On ne touchera pas à cela.
M. Grégoire: À la motion. M.
Bérubé: On n'a rien dit.
M. Brochu: Vous avez dit beaucoup, par la bouche du
député de Frontenac.
M. Grégoire: On a dit non à la rédaction de
la motion.
M. Bérubé: On a dit que le fédéral
doit participer au partage des coûts.
M. Brochu: Non, non. Ne reportez pas. Ne jouez pas au ministre de
l'Agriculture et ne reportez pas à la séparation le
règlement de tous les problèmes. Je vais vous ramener sur une
autre dimension tout à l'heure. C'est bien différent.
Si la motion, telle que présentée, ne vous convient pas
et elle le peut, je le concède à ce
moment-là, amendez-la. Mettez le coût réel, mettez le
coût correspondant à ce que le Québec doit payer. À
ce moment-là, vous allez...
M. Bérubé: Si vous convenez qu'elle est
inadéquate, rien ne nous empêche de l'amender.
M. Brochu: Je peux le faire. À ce moment-là, je
vais...
M. Bérubé: Où allez-vous faire votre
amendement?
M. Brochu: À ce moment-là, j'aurai l'appui du
député de Frontenac et des députés
ministériels.
M. Grégoire: Si le fédéral paie au moins
50%, c'est déjà un bon départ.
M. Brochu: Vous connaissez les proportions à ce
niveau-là. Il y a des proportions établies en ce qui concerne les
possibilités, concernant la société centrale et ainsi de
suite. Je n'ai pas les chiffres de mémoire. Si vous voulez, dans la
proposition, mettons la proportion équivalente à la part devant
être payée par le Québec, suite à la participation
fédérale, ou une formule semblable qui aurait pour objectif de
donner la pleine responsabilité a la Société nationale de
l'amiante, en ce qui concerne sa part à elle, compte tenu du contexte
fédéral.
M. Grégoire: ... 63?
M. Brochu: À ce moment-là, on rejoindrait les
objectifs de tout le monde. Le ministre comme les députés du
côté ministériel, comme le député de
Frontenac, pourraient voter en faveur de cette motion, l'appuyer, donner une
garantie dans le projet de loi à ces gens qui sont touchés par
les conséquences négatives de l'amiante au niveau de la
relocalisation de quartier de sorte que ces gens puissent avoir la garantie
qu'ils recevront les compensations nécessaires et qu'on procédera
à la relocalisation telle que souhaitée.
Je pense que ce serait en même temps, M. le Président, une
garantie sur le plan des principes, une garantie d'ordre général
que l'on accorderait aux citoyens de cette région, leur assurant ainsi
qu'il n'y aurait pas que des retombées négatives du projet de loi
70, qu'il n'y aurait pas, d'un côté, qu'à financer les
coûts énormes qu'ils auront à assumer pour l'application du
projet de loi, qu'il n'y aurait pas qu'à supporter la
non-création d'emplois seulement, qu'il n'y aurait pas qu'à
supporter toutes les conséquences négatives qui pourraient
découler du projet de loi lui-même, mais qu'au moins, dans le
secteur de la relocalisation sur lequel le gouvernement s'est
déjà prononcé en principe, il y aurait dès
maintenant, au niveau de l'adoption du projet de loi, une garantie que ce qui
est faisable par le provincial au niveau du paiement des coûts de
relocalisation des quartiers rendue nécessaire en raison de
l'exploitation d'une mine d'amiante, il y aurait cette garantie de sorte qu'il
verrait que l'ensemble du projet de loi peut peut-être offrir d'autres
garanties.
M. le Président, dans ce sens, je pense qu'il convient de
proposer justement une motion de sous-amendement pour rejoindre les
préoccupations de mes collègues. Sur ce, je voudrais soulever
aussi un autre point dans le sens que jusqu'à maintenant les
travailleurs du domaine de l'amiante n'ont pas eu suffisamment de garanties
à tous les niveaux et même dans les domaines d'intervention
où le gouvernement, le Parti québécois avait donné
des garanties d'intervention pour protéger les travailleurs. Ces
engagements n'ont, d'une part, pas été respectés. Si
maintenant le gouvernement se permet de rejeter du revers de la main une
proposition qui apparaît aussi logique et sur laquelle il s'est
déjà prononcé publiquement dans le passé, je pense
que c'est quand même non pas seulement la confiance des travailleurs de
l'amiante qui sera minée face au gouvernement, mais également la
confiance d'une partie beaucoup plus large des citoyens du Québec. Il y
a eu beaucoup de citoyens, pour vous donner un exemple, M. le Président,
qui ont eu énormément confiance et, à juste titre, lors de
la dernière campagne électorale, au gouvernement du Parti
québécois concernant la santé des travailleurs, plus
particulièrement pour ce qui concerne l'application de la loi 52. Je le
donne à titre d'exemple je pense qu'il me reste encore
suffisamment de temps pour le faire pour montrer que le gouvernement ne
doit pas décevoir ici non plus et que, les preuves sont faites, il a
malheureusement déçu dans d'autres domaines. Pour ce qui concerne
la loi 52, vous vous rappellerez qu'il y avait énormément
d'insatisfaction au moment de la campagne électorale. Plusieurs
personnes se plaignaient, à ce moment, que la loi 52 n'était pas
appliquée intégralement. Les candidats du Parti
québécois, à ce moment, disaient et on pourra
sortir les articles de journaux nombreux à ce sujet qu'une fois
rendus au pouvoir, qu'une fois formant le gouvernement, ils verraient à
appliquer la loi 52 ou à l'amender, parce qu'un bon nombre de
travailleurs se trouvaient encore en milieu de
travail sans avoir leur permis de travail, donc dans
l'illégalité. Maintenant, après quinze mois, seize mois
d'exercice du pouvoir, ces mêmes travailleurs sont encore dans les mines
en train de travailler, atteints d'amiantose à 15%, 18% ou 20% dans
certains cas, sans permis de travail, travaillant dans
l'illégalité. Si on appliquait sévèrement la loi,
telle qu'elle est actuellement, donc passible d'amendes très fortes pour
tous les jours de travail ouvrables durant lesquels ils se sont
présentés au travail...
Cela fait seize mois et on n'a pas vu l'ombre d'un changement dans ce
secteur. C'est cela, la forme de garantie que le gouvernement a donnée,
c'est-à-dire une garantie de non-intervention. Ils ont laissé
tomber après. Cela concerne un seul secteur des travailleurs soumis aux
injustices de l'application de la loi 52 tel que c'est actuellement. Je suis
intervenu à différentes reprises en Chambre auprès des
ministres, de différentes façons. Rien n'a bougé. On n'a
pas respecté les engagements qu'on avait pris à ce moment.
Comment voulez-vous que maintenant, la population puisse avoir des garanties
suffisantes face à un projet de loi comme celui-là? Cela ne me
surprend pas tellement, j'espère que cela changera l'attitude de
s'enfarger actuellement dans des virgules, du côté du
gouvernement, en ne voulant pas accepter un engagement de la sorte, de vouloir
compenser les travailleurs qui ont à subir les préjudices des
industries de l'amiante, comme ceux de Thetford ont eu à subir par les
années passées.
L'autre groupe maintenant qui a à subir l'inaction du
gouvernement et le manque de réponses à ses propres promesses, si
vous voulez, c'est ceux qui ont été expulsés par la loi 52
du marché du travail et qu'on a accepté d'indemniser, selon la
loi, à 90% de leur salaire. Ces gens ont demandé, comme
c'était leur droit, à titre d'invalidité, de
bénéficier du Régime des rentes du Québec. Ils
reçoivent donc une rente. Pendant quinze ou seize mois, ces gens ont
reçu la compensation de la loi 52, ils ont
bénéficié du Régime des rentes du Québec.
Leur pension était payée à part, par exemple, à la
Canadian Johns-Manville, puisque ce sont des cas d'Asbestos, comme j'en ai eu
plusieurs dans mon bureau ce matin. Or, depuis quelque temps, la Commission des
accidents du travail revient, oblige ces gens à fournir des
déclarations en ce qui concerne le Régime de rentes du
Québec et déduit maintenant de leur revenu net les montants
qu'ils reçoivent de la Régie des rentes du Québec, de
sorte que ces gens se voient volés directement par le gouvernement du
Québec, à cause de l'inaction du gouvernement du Québec,
une partie de leur salaire. Ce sont des engagements que le gouvernement
s'était engagé à leur fournir, à partir du projet
de loi 52 et des compensations subséquentes. Ce sont des situations
auxquelles on a à faire face dans ce domaine.
Je vous citerai simplement un cas que j'ai rencontré ce matin. Ce
sont des personnes qui sont venues à mon bureau en plus des nombreux
appels téléphoniques reçus et des autres person- nes que
j'ai rencontrées, car le problème prend de l'ampleur
actuellement. C'est M. Gaston Élie, d'Asbestos, qui recevait, comme
indemnité complémentaire à la loi 52, $381.35 par mois,
$56.00 de son fonds de pension de Canadian Johns-Manville et $241.69 du
Régime de rentes. Cela faisait un grand total mensuel de $679. Or,
maintenant, par je ne sais pas quelle opération de grattage de fond de
tiroir je ne sais pas si c'est pour récupérer les $20
millions que le ministre va perdre en n'imposant pas sa corporation je
ne sais pas quel est l'objectif de cela, mais maintenant on court après
ces gars. Dans son cas, on lui enlève $298 par mois, c'est-à-dire
son régime de rentes et sa pension qu'il s'est lui-même
payée à l'entreprise d'à-côté. La personne se
retrouve donc avec un salaire passablement atrophié. Ce qui
créé énormément d'injustices...
M. Grégoire: Est-ce un gars de la loi 52? M. Brochu:
Oui, c'est un gars de la loi 52. M. Grégoire: Combien
reçoit-il de la... M. Brochu: Je viens de donner les
chiffres.
M. Grégoire: Vous dites $50 en vertu de la loi 52?
M. Brochu: Au lieu de recevoir $381 par mois comme il recevait de
la loi 52, maintenant il est condamné pour ainsi dire, avec
l'administration du gouvernement actuel, à ne recevoir que $82 par mois.
C'est cela l'application de la loi. C'est cela la protection des travailleurs
qu'on accorde actuellement. Quel genre de garantie qu'on va avoir...
M. Grégoire: II recevait seulement $381 en vertu de la loi
52?
M. Brochu: Oui, parce qu'il avait d'autres compensations à
côté de son fonds de pension qu'il s'était payé
à la Canadian Johns-Manville et de son régime des rentes du
Québec. Le problème qui se produit actuellement, c'est que depuis
trois semaines ou un mois...
M. Grégoire: Quel âge a-t-il?
M. Brochu: Ce n'est pas une question d'âge. C'est celui de
la loi 52. Ils sont tous dans le même cas.
M. Grégoire: Parce que la loi 52 arrête à 65
ans.
M. Brochu: II n'a pas encore 65 ans. Ce n'est pas cela. C'est que
maintenant le gouvernement a décidé de faire une rafle à
l'intérieur de tous ces gars et de déduire ce qu'ils
reçoivent du Régime de rentes du Québec invalidité
sur le montant qu'ils recevaient d'indemnisation en vertu de la loi 52. C'est
devant cela que les travailleurs se retrouvent actuellement. Cela fait des mois
que je demande
au gouvernement d'intervenir, d'appliquer ou de changer la loi 52. Non
seulement le gouvernement n'agit pas, mais on se retrouve devant des situations
aussi ridicules ou aussi injustes que celle-là. M. le Président,
c'est pour je termine là-dessus mon intervention souligner
que cela ne m'étonne pas que le gouvernement refuse actuellement une
motion telle que celle présentée devant nous, aussi logique
soit-elle. Je me demande vraiment s'ils veulent le bien des travailleurs. Leur
réponse à l'avenir me dira quelle est leur attitude.
J'espère qu'ils la changeront.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
travaux de la commission sont ajournés à demain 10 heures.
(Fin de la séance à 22 h 1)