Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Etude du projet de loi no 70
Loi constituant la Société
nationale de l'amiante
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
M. Bérubé (Matane), M. Bordeleau (Abitibi-Est), M. Brochu
(Richmond), M. Forget (Saint-Laurent), M. Grégoire (Frontenac), M.
Laplante (Bourassa), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Rancourt
(Saint-François), et M. Ciaccia (Mont-Royal).
Les intervenants sont: M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Godin
(Mercier), M. Garneau (Jean-Talon), M. Landry (Fabre), M. Larivière
(Pontiac-Témiscamingue) est remplacé par M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Léger (Lafontaine), M. Lévesque
(Kamouraska-Témiscouata), M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud) et
M. Samson (Rouyn-Noranda).
Nous en étions à discuter de la motion du
député de Richmond, une motion d'amendement à l'article
5.
Conseil d'administration (suite)
C'est le député de Taschereau qui avait la parole à
l'ajournement de 22 heures. Le député de Taschereau est absent.
L'amendement à l'article 5 sera-t-il adopté?
M. Forget: Adopté, M. le Président. M. Brochu:
Adopté.
M. Bérubé: Pardon, M. le Président... Non,
évidemment, nous ne pourrons pas voter pour la motion.
M. Grégoire: Quelle est la motion?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'amendement du député de Richmond est-il adopté?
M. Bérubé: Non, M. le Président.
M. Forget: Vote nominal, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé (Matane)?
M. Bérubé: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bordeleau (Abitibi-Est)?
M. Bordeleau: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Brochu (Richmond)?
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Forget (Saint-Laurent)?
M. Forget: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grégoire (Frontenac)?
M. Grégoire: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Laplante (Bourassa)?
M. Laplante: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François)?
M. Rancourt: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Ciaccia (Mont-Royal)?
M. Ciaccia: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion du député de Richmond est rejetée. L'article 5
est-il adopté?
M. Grégoire: Adopté, M. le Président. M.
Forget: Une minute!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, dans sa formule actuelle, et
maintenant qu'on a rejeté cet amendement à cause du vote
prépondérant du côté ministériel, nous avons
un article 5 qui ne comporte aucune obligation de résidence au
Québec pour les administrateurs de la Société nationale de
l'amiante.
Comme nous le disions hier, cet article est un précédent
puisque, dans le cas de toutes les sociétés d'Etat au
Québec et je pense qu'on pourrait probablement étendre ces
comparaisons plus largement encore à des sociétés d'Etat
d'autres provinces canadiennesou d'organismes analogues du gouvernement
fédéral l'exigence de résidence, et même,
dans certains cas, de citoyenneté canadienne, se retrouve de
façon universelle dans tous les statuts des sociétés
d'Etat. C'est le cas au Québec. Toutes les autres sociétés
d'Etat créées précédemment comportent l'obligation
pour les administrateursde résider au Québec. Nous ne pouvons pas
accepter que le gouvernement instaure du droit nouveau à cet
égard sans autres justifications que les quelques vagues excuses que le
ministre a présentées hier. Ce sont des excuses qui ne tiennent
pas parce qu'encore une fois, si le gouvernement envisage que la
Société nationale de l'amiante conclue des ententes ou s'engage
dans des projets communs
avec des sociétés étrangères, elle pourra le
faire par la voie de filiales ou elle détiendra une participation
égale ou majoritaire ou minoritaire et où elle se retrouvera sur
le conseil d'administration de cette filiale, selon les proportions
appropriées. Pourcequi est du conseil d'administration de la
Société nationale de l'amiante, surtout après les longs
délibérés que la commission a faits sur l'insertion, dans
le titre de cette société, du mot "nationale", il apparaît
décidément déplacé que l'exigence de domicile au
Québec n'apparaisse pas dans la loi.
Pour cette raison, M. le Président, nous ne pouvons pas accepter
l'article sous sa forme actuelle, puisque l'amendement du député
de Richmond, amendement, comme je l'ai dit hier, que nous aurions fait
nous-mêmes, si le porte-parole de l'Union Nationale ne l'avait pas fait,
à l'effet d'exiger la résidence au Québec pour les
administrateurs, a été défait par le gouvernement. Nous
sommes obligés de voter contre l'adoption de l'article 5 dans sa forme
actuelle. C'est absolument aberrant de constater, M. le Président, qu
après avoir déclaré qu'il faut développer l'amiante
par nos propres moyens, après avoir joué la corde du nationalisme
de la façon dont on l'a fait au cours des premiers jours de
délibération à cette commission parlementaire, sous le
plus vague prétexte, on s'écarte maintenant d'une pratique
établie qui n'a jamais donné lieu à des
difficultés.
On peut sans aucune peine imaginer pourquoi le gouvernement tient tant
à la présence d'administrateurs étrangers sur le Conseil
d'administration de la Société nationale de l'amiante. On devra,
d ailleurs, écrire nationale" entre guillemets, à l'avenir. C'est
sans aucun doute pour faire de la place à une personne qui serait le
porte-parole et le représentant de syndicats financiers auxquels le
gouvernement aurait recours pour financer I acquisition de la
société Asbestos de manière à s'assurer que cette
société est administrée, entre guillemets, sainement. Il
n'est pas impossible d'imaginer que le gouvernement se réserve la
possibilité d'inviter à siéger sur le conseil
d'administration des personnes qui auraient la confiance pleine et
entière de ces syndicats financier, de manière à permettre
une mise en marché des obligations, le moment venu, l'automne prochain,
sans trop de difficultés ou même de la permettre tout court,
puisqu'il serait fort possible surtout si l'on doit en venir à une phase
d'expropriation, que le gouvernement du Québec trouve les plus grandes
difficultés à financer cette acquisition à moins de
pouvoir, justement par la flexibilité dont il a voulu se
prévaloir dans la rédaction de l'article 5, faire cette
invitation à un homme de confiance d'un syndicat financier
étranger, de manière à donner des assurances qu'il ne peut
pas donner autrement.
M. le Président, si c'était la raison et si, au moins, le
ministre avait eu le courage de I'admettre, on pourrait peut-être,
après discussion, considérer si une place, un siège
pourrait être réservé pour ces fins, encore que nous
éprouverions à ce sujet la plus grande réticence, la plus
grande réserve. Mais, le ministre n'a voulu rien dévoiler de ses
plans, si ce n est de se camoufler derrière une excuse, I excuse de
"joint ventures" qui, encore une fois, ne constitue pas une excuse valable. Les
"joint ventures ", s'il y en a, prennent une forme autre que celle de la
participation au conseil d'administraton de la Société nationale
de l'amiante. Il n'est donc pas nécessaire, pour le ministre, d avoir
cette flexibilité et, pour cette raison nous voterons conre l'adoption
de l'article 5 dans sa forme actuelle.
M. Ciaccia: M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je voudrais revenir, pour un instant, sur I'une des
raisons évoquées par le ministre pour justifier la
possibilité de nommer un administrateur qui ne serait pas
domicilié au Québec. Il a évoqué la raison des
"joint ventures": je ne sais pas si le ministre est familier avec les
différentes formes de "joint venture". S'il l'était, il verrait
que dans aucune de ces formes de "joint venture" possibles, non seulement il
est nécessaire, mais il n'est pas même désirable de voir un
administrateur de la société faire partie de la compagnie du
"joint venture".
Il y a, en général, deux manières de former un
"joint venture"; il y a l'association: Deux compagnies qui s'associent pour des
fins spécifiques avec un protocole d'entente: ce pourrait être la
Société nationale avec la compagnie X, pour un projet
spécifique. A ce moment-là, il y aurait une entente entre la
Société nationale et la compagnie avec laquelle on fait le "joint
venture" pour le projet et, à ce moment-là, il y aurait un
conflit d'intérêt, on ne pourrait jamais envisager de dire: On
fait une association avec une telle compagnie pour, soit développer une
mine, soit s'associer dans I'industrie de transformation avec un objectif
spécifique.
Chaque compagnie, dans le protocole d'entente, a ses obligations, a ses
devoirs, a ses responsabilités. Je dirais même qu'il y aurait un
conflit d'intérêt si on disait que dans ces deux compagnies qui
font un "joint venture", on va placer I'administrateur d'une compagnie au sein
de I'administration de l'autre; à ce moment-là, vous confondez
les responsabilités des deux compagnies qui sont impliqués dans
le "joint venture": chacune est une compagnie spécifique, chacune a ses
responsabilités, a ses obligations. Ces obligations sont établies
par le protocole d'entente et chaque administrateur doit s'assurer que la
compagnie qu'il gère remplit ses devoirs, ses responsabilités; il
doit aussi s'assurer que l'autre compagnie qui fait l'objet de ce "joint
venture" remplit aussi ses obligations. Alors, on ne peut pas s'attendre que I
administrateur... On va échanger les administrateurs; alors, à ce
moment-là, où est la distinction entre les différentes
responsabilités des différentes compagnies? Un administrateur ne
peut pas avoir deux chapeaux. S'il est administrateur de la
Société nationale, il doit voir aux inté-
rets de cette société. S'il est administrateur de la
Société nationale et en même temps administrateur ou a des
intérêts dans la compagnie associée qui forme le "joint
venture", il y aura un conflit d'intérêt, il portera deux
chapeaux, il ne pourra pas remplir ses responsabilités envers la
Société nationale.
Dans cette forme de "joint venture", je dirais qu'il ne serait pas
normal d'échanger les administrateurs et de placer à la
Société nationale des administrateurs de l'autre
société.
L'autre forme de "joint venture", c'est la création d'une autre
société. Au lieu d'avoir deux compagnies, avec un protocole
d'entente, qui vont S'engager dans une certaine entreprise, on procède
à la création d'une autre société qui est la
société de "joint venture"; dans cette société, on
participe, la Société nationale va participer et l'autre groupe
va aussi participer, selon le pourcentage, selon I'entente que les parties ont
prise.
Dans cette forme de "joint venture", ce n'est pas la
Société nationale qui entreprend les travaux, c'est la nouvelle
société. Alors, les administrateurs de la Société
nationale ne changent pas; si vous voulez avoir des administrateurs
additionnels, des administrateurs des deux côtés, ce n'est pas au
sein de la Société nationale que vous allez nommer des
administrateurs, c'est au sein de la nouvelle société de "joint
venture" qui comprend les actionnaires de sociétés nationales du
gouvernement et qui comprendrait des actionnaires du groupe avec lequel on
s'associe pour le "joint venture".
Dans ce cas particulier, la nouvelle société peut avoir
des administrateurs qui représentent les deux groupes. Encore une fois,
ces administrateurs qui représentent les deux groupes et qui font partie
de l'administration du conseil d'administration de la société
"joint venture" forment une autre société, une
société séparée, complètement à part
de la société nationale.
A ce moment-là, il n'y a aucune raison de changer le conseil
d'administration de la société nationale; ce serait aller
à l'encontre de la pratique de placer, au sein du bureau
d'administration de la société nationale, des administrateurs de
la compagnie "joint venture". Ce ne serait absolument pas nécessaire et
ce n'est pas généralement fait.
Dans ces deux types qui sont les types principaux de "joint venture",
que ce soit une association avec une autre compagnie ou que ce soit la
formation d'une autre société, ni l'un ni l'autre ne justifie la
nomination, le changement au sein du bureau d'administration, d'administrateurs
qui ne sont pas domiciliés au Québec ou la
nécessité du changement d'administrateurs.
Je crois, M. le Président, que les raisons invoquées par
le ministre quant à la question de "joint venture" ne s'appliquent pas.
Ce n'est pas la pratique courante, ce n'est pas la façon dont ce type
d'entreprise fonctionne, et je dirais qu'il n'y a aucune justification et si
c'est la seule justification que le ministre a donnée, il n'en a pas
donné.
Pour ces raisons et pour les autres raisons invoquées par mon
collègue, le député de Saint-
Laurent, je voterai contre cet article. Le ministre ne nous a pas
donné de raison valable pour laquelle il ne suivrait pas la coutume qui
a été suivie, qui a été pratiquée par les
autres gouvernements et qui apparaît dans les autres projets de loi.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Très brièvement. On remarque que le
dernier bout de phrase du deuxième alinéa précise que la
qualité d'actionnaire n'est pas requise pour être nommé
administrateur. Evidemment, c'est normal que cette disposition apparaisse dans
le cas d'une société d'Etat. Même si c'est normal dans ce
cas, il faut noter que cela constitue une dérogation par rapport
à la règle générale a l'effet que peut être
nommée administrateur d'une société une personne qui a un
intérêt dans cette société. Autrement, c'est une
nomination gratuite et sans justification.
L'équivalent pour une société d'Etat de la
qualité d'actionnaire qui ne peut pas se retrouver, c'est d'être
un contribuable, d'être un citoyen, un électeur de l'Etat, de la
circonscription politique dans laquelle se retrouve la société en
question.
Il serait normal que dans le même article où on dit: Comme
c'est une société d'Etat, il n'est pas nécessaire
d'être actionnaire, parce qu'il y a un seul actionnaire qui est l'Etat
lui-même... il y a une autre façon d'avoir une qualité
d'actionnaire dans une société d'Etat, par analogie, c'est
d'être un ressortissant de la juridiction politique, de l'Etat, d'avoir
la citoyenneté ou, dans le cas d'une juridiction provinciale, d'avoir
son domicile dans cette juridiction, parce qu'en ayant son domicile dans cette
juridiction, on est, en même temps, un contribuable de l'Etat en
question.
Il y a une grande correspondance entre les deux notions, et je pense que
c'est un des motifs qui fait qu'on retrouve, dans les articles... ou
l'équivalent de l'article 5 dans les autres chartes constitutives des
sociétés d'Etat, à la fois, l'indication qu'il n'est pas
nécessaire d'être actionnaire, mais qu'il est nécessaire
d'avoir son domicile dans la province. Il me semble que c'est essentiellement
lié au caractère même d'une société
d'Etat.
M. Bérubé: M. le Président, d'une part, je
dois dire que l'amendement qui a été soumis par le
député de Richmond n'était pas, en soi, un amendement pour
lequel on pouvait s'objecter, dans son principe, sauf qu'il nous est apparu
trop rigoureux.
Je serais certainement prêt à concevoir quelque chose, si
c'était de nature à rassurer le député de Richmond,
concevoir un amendement qui pourrait se lire sous la forme d'un alinéa
qui pourrait être placé entre le premier et le deuxième
alinéa de l'article 5 et qui dirait ceci: "La majorité des
administrateurs doit être domiciliée au Québec" ceci
visant, évidemment, à garantir que ceux qui ont le contrôle
effectif de la société sont des citoyens québécois.
(10 h 30)
Je pense que cela ne répond pas, évidemment,
entièrement à ce que le député de Richmond avait
à l'esprit puisque dans son esprit nul ne pouvait
être administrateur sans être domicilié au Québec.
Néanmoins, cela pourrait lui assurer une garantie face à un
gouvernement de type libéral qui, lui, serait intéressé
à vendre le Québec à des étrangers; à ce
moment-là, cela pourrait être une protection dans la loi que le
député de Richmond pourrait voir incluse.
Dans un tel cas, je n'ai aucune objection, effectivement, à
introduire un amendement et j'en ferais une proposition, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Pourriez-vous me l'écrire, s'il vous plaît?
M. Ciaccia: On présume que la majorité va
être...
M. Forget: Ce n'est pas une question de majorité, il faut
qu'ils soient tous domiciliés au Québec.
M. Ciaccia: Je ne peux pas croire qu'avec l'article 5...
M. Bérubé: C'est une garantie, parce qu'on ne sait
jamais, vous pourriez prendre le pouvoir.
M. Forget: C'est très drôle, votre affaire, mais on
n'a jamais créé de société avec la
flexibilité que vous voulez vous donner.
M. Ciaccia: Vous êtes un comique manqué, vous. Son
ambition, c'était de...
M. Forget: C'est cela, un comédien frustré.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Voici,
j'ai une proposition d'amendement du ministre, à savoir que l'article 5
serait amendé en ajoutant, après le deuxième
alinéa, un troisième alinéa qui serait le suivant: "La
majorité des administrateurs doit être domiciliée au
Québec. '
M. Brochu: L'amendement est recevable?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui,
l'amendement est recevable, évidemment.
M. Bérubé: M. le Président, nous n'avions
pas inscrit, dans la loi, un tel article parce que nous avions estimé
que, dans la mesure où le ministre des Finances choisit lui-même
les administrateurs de la société d'Etat, il serait
éminemment étrange que le ministre des Finances n'ait pas
à coeur le bien-être du Québec, n'ait pas à coeur le
bon fonctionnement de la société d'Etat. Par conséquent,
un ministre des Finances va nécessairement chercher, dans sa
sélection, une majorité de Québécois, une
majorité de gens susceptibles de prendre à coeur la
défense de l'Etat québécois, la défense des
intérêts de la Société nationale de l'amiante.
Par conséquent, nous avions supposé que le ministre des
Finances verrait à prendre à coeur la défense des
intérêts du Québec. Nous n'avons pas, cependant, voulu
éliminer toute possibilité de recours à un administrateur
venant de l'extérieur; d'une part, parce qu'il m'apparaît que la
réflexion du député de Saint-Laurent tient davantage d'un
concept étriqué du nationalisme, d'un concept du nationalisme
tourné vers soi-même, où on exclut entièrement les
autres, où on ne reconnaît pas les qualités que pourraient
présenter, effectivement, certaines personnalités, certains
chercheurs, certains hommes d'affaires étrangers qui pourraient,
certainement, avoir une contribution à apporter à la
Société nationale de l'amiante.
C'est en fait le concept d'un nationalisme refermé sur
lui-même. Ce n'est pas ce type de nationalisme dont parle le Parti
québécois. Lorsque le Parti québécois parle de
redonner le contrôle du Québec aux Québécois, c'est
de redonner, effectivement, le contrôle du Québec aux
Québécois, mais cela ne veut pas dire pour autant que nous
rejetons une collaboration avec, par exemple, des Canadiens. Cela ne veut pas
dire que nous rejetons, pour autant, une collaboration avec les pays
étrangers. Cela veut donc dire que, s'il devait je n'ai pas dit
que notre intention est d'en nommer un, dès la première
année mais s'il devait s'avérer que parce que cette
Société nationale de l'amiante est essentiellement une
société d'exportation de matières premières, une
société d'exportation de produits... Déjà la
société Asbestos exporte dans plus de 70 pays, il faut donc
imaginer que cette société aura des activités dans
lensemble du monde, activités qui la mettront en contact, sans doute,
régulièrement, avec des partenaires avec lesquels elle s'engagera
dans des projets de développement économique. Cela peut amener la
Société nationale de l'amiante à reconnaître en
certains hommes d'affaires étrangers un génie dont pourrait
bénéficier la Société nationale de I'amiante.
Dans la mesure où l'objectif du gouvernement n'est pas de donner
le contrôle de la Société nationale de l'amiante à
des étrangers, je pense qu'on peut reconnaître une saine
préoccupation de la part du député de Richmond, selon
laquelle si on peut s'ouvrir sur le monde, il faut néanmoins maintenir
un contrôle sur notre Société nationale de l'amiante. Par
conséquent, tel que rédigé, il pourrait toujours exister
une tentation de la part d'un gouvernement de céder le contrôle
carrément à des étrangers, à des gens non
domiciliés au Québec.
Il pourrait également s'avérer que, par suite du
déménagement d un certain nombre d'administrateurs bien
qu'il n'ait pas été prévu que la Société
nationale de l'amiante se retrouve avec une majorité d'étrangers,
ce qui n'était pas non plus voulu et pour un certain nombre
d'années, on pourrait faire face à une situation qui serait
certainement préjudiciable pour le bien de la société. Par
conséquent, je pense que l'amende-ment proposé pourrait
peut-être répondre à la
préoccupation du député de Richmond,
c'est-à-dire de bien garder un contrôle québécois
sur la Société nationale de l'amiante et en même temps
respecter la préoccupation du gouvernement, une préoccupation qui
se veut une préoccupation d'ouverture. Nous parlons de la
Société nationale de l'amiante, pour faire sourire le
député de Mont-Royal, bien qu'il ne sourie pas souvent, sauf
à ses plaisanteries...
M. Ciaccia: Le sourire est assis de l'autre côté de
la table...
M. Bérubé: ... nous aimerions une
société multinationale de l'amiante, peut-être, un jour. En
d'autres termes, je verrais d'un très bon oeil la Société
nationale de l'amiante se transformer en un gigantesque "holding" avec des
filiales un peu partout dans le monde et occupant une part importante du
marché de la transformation et de la production de la fibre.
Dans la mesure où l'idée que nous nous faisons de cette
Société nationale de l'amiante est une idée d'ouverture
sur le monde, de "joint ventures" avec différentes
sociétés, donc, d'entreprises qui vont certainement nous mettre
en contact avec des gens valables... Je citais l'exemple tout récent de
IBM américain, IBM monde, multinationale qui s'est dotée d'un
Français comme président, sans doute parce que la
société IBM a reconnu dans cet homme une compétence
à l'échelle internationale qui pourrait lui être
très bénéfique. De la même façon, je pense,
lorsqu'on examine des sociétés comme Philips, comme Shell, comme
un grand nombre de ces sociétés multinationales qui ont des
activités dans le monde, on reconnaît sur ces conseils
d'administration des membres qui viennent d'un peu partout dans le monde et qui
permettent justement de représenter certains intérêts
étrangers et permettent à ce moment-là un
développement harmonieux de l'entreprise en question dans l'ensemble du
marché mondial.
Dans la mesure où notre Société nationale de
l'amiante se voit confier un tel mandat, puisqu'il ne fait aucun doute que nous
ne pouvons pas transformer, même 10% ou 15% de l'amiante au
Québec, à l'intention du marché québécois,
c'est forcément une activité d'exportation. Il nous faut
délibérément nous retourner vers l'extérieur et en
ce sens, nous ne voulons pas priver le ministre des Finances du pouvoir daller
chercher un ou deux bonshommes à l'étranger qui seraient de
nature à étoffer son conseil d'administration.
Quant à I'accusation de vouloir pactiser avec les milieux
étrangers financiers, accusation que le député de
Saint-Laurent manie continuellement, je pense que je lui répondrai de la
façon suivante: C'est le député de Saint-Laurent qui a
tenu à inviter General Dynamics ici, à cette commission, pour
porter sur la place publique les négociations entre elle et le
gouvernement. C'est le député de Saint-Laurent qui, sachant
très bien que l'objectif de General Dynamics serait de mettre en valeur
sa position, a cherché à inviter cette société de
manière que la position du Québec puisse être mise en cause
par la société General Dynamics pour affaiblir sa position de
négociation et faire monter les prix. Je me suis interrogé
à savoir quel genre d'alliance pouvait exister entre le Parti
libéral et General Dynamics. Le député de Saint-Laurent a
également mentionné, à plusieurs reprises, qu'il avait
visité...
M. Forget: M. le Président, qu'est-ce que cela vient faire
dans la motion d'amendement?
M. Bérubé: C'est une réponse à une
accusation que vous avez faite, à l'effet que c'est pour pactiser avec
les milieux financiers étrangers, alors je continue sur le thème
que vous avez développé.
C'est donc également le député de Saint-Laurent qui
nous a parlé de ses visites régulières à la mine
d'Asbestos; il semble bien au courant de ce qui s'y passe, il semble avoir de
très bonnes relations avec la direction de la société et
qu'il y fait également des visites régulières...
M. Forget: Vous me faites le reproche de m'être
informé sur l'industrie, M. le ministre?
M. Bérubé: II a même et là
c'est le député de Mont-Royal souligné des
renseignements confidentiels concernant les paiements d'impôts de cette
société, alors que le ministre n'a absolument pas le droit, en
vertu de la loi, de faire la moindre révélation concernant ces
impôts.
M. Forget: Vous nous avez induits en erreur là-dessus!
M. Ciaccia: Oui, vous nous avez induits en erreur.
M. Foget: Vous avez trompé l'Assemblée nationale
là-dessus.
M. Ciaccia: Vous avez trompé le public; ce n'est pas $20
millions, c'est $3 800 000, 700 pour 100.
M. Bérubé: Dois-je souligner également,
concernant ceci, que le député de Mont-Royal a obtenu ses
renseignements ou de façon illégale et il le sait puisque
le député de Mont-Royal a déjà été
député d'une formation ministérielle ou il les
a...
M. Forget: Alors, il fallait le dire que c'étaient des
chiffres confidentiels, et ne pas utiliser des chiffres faussés.
M. Bérubé: ... obtenus de façon
illégale de fonctionnaires gouvernementaux, ou il les a obtenus de la
société ce qui, à nouveau, fait ressortir les liens
très étroits entre ce parti d'opposition et la
société General Dynamics et la société Asbestos
Corporation.
Lorsqu'il nous parle de pactiser avec les multinationales
étrangères et qu'on a pu assister à
ces manoeuvres répétées durant la commission
parlementaire, M. le Président, tout ce que je peux dire c est que la
seule crainte que le député de Saint-Laurent a, c'est que ce soit
lui qui utilise mal la loi constituée de la Société
nationale de I a-miante.
M. Foget: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Question de règlement,
M. le ministre.
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Je veux avertir le ministre que j'ai l'intention
d'invoquer l'article 96 à la fin de ses remarques.
Le Président (M. Lapiante): M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, par
conséquent, inutile de dire que je n'ai pas prisé l'accusation
bassement démagogique que le député de Saint-Laurent a
lancée concernant notre motivation derrière le désir de
voir des étrangers pouvoir siéger...
M. Foget: Faux. Adoptez I'amendement du député de
Richmond.
M. Grégoire: Voyons, de l'autre côté!
M. Bérubé: ... sur le conseil d'administration. A
ce moment, devant l'aspect bassement calomnieux de l'accusation du
député de Saint-Laurent, j'ai cru bon de lui rappeler un certain
nombre de ses agissements en commission parlementaire qui, à tout le
moins, nous permettent d'avoir certains doutes quant à son propre
comportement.
Néanmoins, M. le Président, ce n'est pas pour cette
raison, ce n'est pas pour pactiser avec les milieux financiers
étrangers...
M. Ciaccia: Médisance, mais pas calomnie! Vous n'en
connaissez pas la différence.
M. Forget: On sait que vous faites cela, vous I'avez fait avec
GM.
M. Grégoire: M. le Président, est-ce qu on pourrait
avoir un peu de silence de la part des braillards de l'autre
côté.
M. Forget: Cela trouble le député de Frontenac,
n'est-ce pas?
M. Grégoire: Non, mais si cela vous choque trop, prenez la
pilule et endurez-la, c'est tout. Mais au moins soyez polis.
M. Ciaccia: Ce sont des faussetés.
M. Forget: Des faussetés que I'on salue au passage.
M. Ciaccia: Pensez-vous qu'on va s'asseoir ici et écouter
des faussetés?
Le Président (M. Lapiante): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Mont-Royal, vous voulez un droit de
réplique sur I'amendement?
M. Ciaccia: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lapiante): Je vais inscrire votre nom
immédiatement.
M. Ciaccia: S il vous plaît oui; merci.
Le Président (M. Lapiante): M. le député de
Saint-Laurent, votre nom est inscrit.
M. Foget: Merci, M. le Président.
M. Grégoire: M. le Président, je vous ferai
remarquer qu'il y a des cruches qui ont besoin de bouchons parfois.
Le Président (M. Lapiante): M. le député de
Frontenac, s'il vous plaît! M. le ministre.
M. Bérubé: M. le Président, je m excuse d
avoir dû interrompre mon argumentation par suite des cris et des
vociférations répétés de I'Opposition. (10 h
45)
Mais, je dois donc répéter que si le gouvernement aimerait
garder une certaine flexibilité dans le choix du conseil
d'administration, c'est en vertu de la différence fondamentale qui
existe entre la Société nationale de l'amiante et la plupart des
sociétés d'Etat qui ont leurs activités au
Québec.
En effet, la plupart des sociétés d'Etat qui ont leurs
activités au Québec fonctionnent dans un contexte purement
québécois. Si SOQUEM s'est lancée dans des
activités en association avec d'autres sociétés, des
multinationales ou d'autres entreprises étrangères, en
général, elle le fait pour exploiter des mines et la mise en
marché de ses concentrés fait rarement appel à un
réseau de distribution très développé, comme on
devrait avoir dans le cas de la mise en marché de produits de
transformation. On n'écoule pas, sur le marché mondial, des
produits d'amiante-ciment ou du papier d'amiante ou quelque autre produit d
amiante, comme on écoule un concentré; celui-ci se vend
très fréquemment sur les marchés mondiaux, par exemple, le
London Metal Exchange, à une bourse internationale, et cela ne demande
pas nécessairement d'association, on peut très bien se contenter
d'un courtier; c'est d'ailleurs ce que fait SOQUEM dans le cas de son
concentré de zinc.
Dans le cas des sociétés nationales, des
sociétés d'Etat québécoises comme SOQUEM, comme
REXFOR, comme SOQUIPon pourrait les énumé-rer toutes
en général, on est en présence d'une entreprise qui
fonctionne à l'intérieur du marché
québécois; elle peut avoir un certain nombre de vendeurs pour
écouler ses produits, mais l'écoule-ment de ses produits ne
demande pas, généralement, d'association avec des réseaux
de distribution bien structurés, situés à
l'étranger.
Ce n est pas le cas de la Société nationale de l'amiante.
Nous sommes en présence d'une société
qui d'ailleurs, le député de Saint-Laurent l'a
souligné à plusieurs reprises, et il a parfaitement raison
va devoir nécessairement s'ouvrir sur les marchés mondiaux, qui
nécessairement devra s'ouvrir sur un certain nombre d'associations avec
des firmes étrangères.
D'autre part, le député de Mont-Royal a souligné
l'absence, à l'article 5, d'un alinéa portant sur les conflits
d'intérêt ou la présumée absence de conflits
d'intérêts qui doivent exister entre les administrateurs de la
Société nationale de I'amiante et la société
elle-même. Je vous avouerai franchement que c'est effectivement un
problème sérieux, mais la brève expérience que j'ai
des sociétés d'Etat m'a permis de prendre connaissance d'un
certain problème qui est très sérieux au niveau de la
constitution des conseils d'administration de nos sociétés
d'Etat.
En effet, si je donne le mandat à REXFOR de développer une
industrie forestière au Québec, je ne peux, en
général, en vertu d'une clause d'absence de conflits
d'intérêts, demander un administrateur qui soit déjà
impliqué dans la forêt, dans l'industrie forestière; je
dois nécessairement aller chercher quelqu'un à sa retraite,
quelqu'un qui a entendu parler de l'industrie forestière, quelqu'un qui
a déjà vu une usine de transformation du bois, mais surtout pas
quelqu'un qui connaît cela, surtout pas quelqu'un qui travaille
là-dedans, surtout pas quelqu'un qui pourrait conseiller à bon
escient. Effectivement, que retrouve-t-on à REXFOR? On retrouve un
ancien ministre des Terres et Forêts, un ancien ministre de
l'Agriculture, etc. Par conséquent, on retrouve des gens qui ont
déjà côtoyé l'industrie.
Si je devais être nommé sur le Conseil d'administration de
REXFOR parce que j'ai été ministre des Terres et Forêts, ce
serait une catastrophe...
M. Forget: On est bien d'accord.
M. Bérubé: Ce serait une catastrophe parce que ce
n'est certainement pas parce que vous avez dirigé un ministère
pendant quelques années que vous connaissez l'économique de cette
industrie. Vous connaissez les relations de cette industrie avec l'Etat, il ne
fait aucun doute, mais vous ne connaissez pas pour autant le fonctionnement
interne de l'industrie. On me nommerait sur une société
minière, la Société nationale de l'amiante, que je dirais:
Le gouvernement fait preuve d'un choix un peu plus judicieux puisque...
M. Forget: Oui, cela se sent, depuis le début...
M. Bérubé: ... ce ne sont pas mes talents de
ministre des Richesses naturelles auxquels on fait appel, mais sans doute,
à l'expérience que j'ai acquise, dans les années
antérieures, dans ce domaine. Ce serait la seule excuse que le
gouvernement pourrait avoir.
M. Forget: Au départ.
M. Bérubé: Non, mais je ferai remarquer que je
n'hésiterais jamais à nommer, à un conseil
d'administration, quelqu'un qui aurait des aptitu- des ou des penchants
politiques tout à fait libéraux parce que je ne manifesterai
jamais le moindre sectarisme politique quand il s'agit de nommer un
administrateur dune société d'Etat. Nous le choisissons pour sa
valeur et non sa couleur.
Deuxièmement...
M. Forget: Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ce que
vous dites.
M. Grégoire: Voyons, M. le Président...
M. Brochu: Ce n'est pas ce que vous faites.
M. Forget: ... vous allez les reconnaître quand vous les
rencontrerez.
M. Grégoire: ... envoyons donc des bouchons pour mettre
sur les cruches de l'autre côté.
M. Bérubé: Par conséquent, M. le
Président...
M. Forget: On ne parle pas de l'autre cruche de l'autre
côté, M. le Président. Le bouchon assez grand n'a jamais
été trouvé.
M. Grégoire: Un bouchon accrocherait.
M. Bérubé: ... dans le domaine des conflits
d'intérêts, il nous est apparu cela peut être
discutable, j'admets que c'est du droit nouveau, peut-être, que nous
allons tenter... nous avons cherché à garder la
possibilité d'aller chercher, pour notre conseil d'administration, des
gens qui connaissent l'amiante. C'est aussi bizarre que cela, c'est aussi
surprenant que cela. Nous pensons que si cette Société nationale
de l'amiante doit se développer, il serait utile que nous ayons,
à son conseil d'administration, deux ou trois experts dans l'amiante. Il
me semble qu'il serait utile que, dans Sidbec, on ait un ou deux
métallurgistes; cela ne serait pas mauvais. Ce serait surprenant comme
ce pourrait même être utile. Par exemple, les
sociétés allemandes ont cette malheureuse habitude que je
n'ai jamais comprise de nommer un docteur en génie civil à
la présidence de leur société responsable de travaux de
construction civile. La présidence de Krupp est donnée à
un ingénieur métallurgiste. C'est aussi bizarre que cela; cela
veut dire qu'on commence par aller chercher des gens qui connaissent le
métier.
Notre système nous oblige à ne choisir, pour nos
sociétés d'Etat, que des gens qui ont entendu parler du domaine.
C'est cette aberration et j'admets que c'est du droit nouveau
mais, je regrette d'avoir à faire du droit nouveau dans cette
matière parce que cela m'apparaît tellement évident que je
ne comprends pas pourquoi les gouvernements antérieurs n'ont pas fait du
droit nouveau là-dessus, malheureusement.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, j'avais l'intention d'invoquer
l'article 96...
M. Ciaccia: Moi aussi, M. le Président.
M. Forget: ... pour corriger les fumisteries du ministre...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent, je voudrais savoir si vous invoquez l'article 96 ou seulement de
bonnes intentions. Vous avez dit: J'ai l'intention...
M. Forget: Non, j'ai l'intention, je l'invoque, oui.
Le Président (M. Laplante): Vous l'invoquez. M. Forget:
Oui.
Le Président (M. Laplante): C'est par rapport à
votre temps.
M. Forget: J'invoque l'article 96 qui permet de corriger les
insinuations et les interprétations fausses du ministre vis-à-vis
des positions...
M. Bérubé: Les insinuations fausses, non, mais les
interprétations fausses, possiblement. Cela peut être
discuté.
M. Forget: Bien, c'est non seulement discuté mais,
très certainement, ce que le ministre cherche à faire pour
défendre...
M. Bérubé: C'est plus fondé que vos propres
insinuations, M. le député de Saint-Laurent.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, je crois que
vous avez eu tout le temps voulu pour vous exprimer.
M. Bérubé: Oui, M. le Président, mais j'ai
été interrompu continuellement.
Le Président (M. Laplante): Vous avez un droit de parole
illimité après, M. le ministre. Ce qui fait que je pourrai vous
le redonner, si vous voulez, après les interventions du
député de Saint-Laurent.
M. Bérubé: Merci, M. le Président.
M. Forget: Pour défendre une position qui est
indéfendable, M. le Président, le ministre, dans un emportement
qui est assez caractéristique de ses bons moments ou de ses mauvais
moments, défigure la position que l'Opposition a adoptée face
à un certain nombre de dispositions du projet de loi, pour nous faire
dire que nous souhaitons qu'il ne nomme que des incompétents.
S'il...
M. Bérubé: C'est votre théorie, M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: ... comprend de cette façon...
M. Bérubé: Cela fait trois fois que vous nous
l'exposez.
M. Forget: ... notre insistance à ce que des gens
domiciliés au Québec soient nommés membres du conseil
d'administration, il y a...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Laurent, je voudrais à ce moment-ci... Vous avez invoqué
l'article 96, vous aviez des faits à rétablir et j aimerais que
ce soit court, comme il est dit dans le règlement, s'il vous
plaît.
M. Forget: Bien, les faits à rétablir, M. le
Président, c'est que nous n'avons jamais demandé au ministre
qu'il nomme des incompétents au conseil d'administration de la
Société nationale de l'amiante.
M. Bérubé: On ne vous nommera pas, M. le
Président.
M. Forget: Nous avons demandé... M.
Bérubé: On ne vous nommera pas.
M. Forget: ... qu'il nomme des gens domiciliés au
Québec.
M. Bérubé: Vous êtes contre cela, on ne vous
nommera pas.
M. Forget: C'est le ministre qui a donné
l'interprétation que des gens domiciliés au Québec
seraient, malheureusement, des incompétents.
M. Bérubé: Ah! non.
M. Forget: C'est un jugement qu'il porte, c'est le sien, mais ce
n'est pas le nôtre. Nous sommes persuadés...
M. Bérubé: Je vais être obligé
d'invoquer l'article 96, M. le Président, je n'ai jamais dit cela.
M. Forget: ... au contraire...
Le Président (M. Laplante): Je crois comprendre que vos
faits sont rétablis, M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, j'aimerais présenter un
sous-amendement, mais avant de le faire, mon collègue a demandé
d'intervenir en fonction de l'article 96.
M. Forget: Les faits sont rétablis, je pense...
Le Président (M. Laplante): Maintenant, votre temps
compte.
M. Forget: ... assez clairement, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): Votre temps commence à
compter pour la période de 20 minutes. M. le député de
Saint-Laurent.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal en vertu de l'article 96.
M. Ciaccia: En vertu de l'article 96, il y a deux points, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): Allez au point.
M. Ciaccia: Premièrement, je me réfère
à la question des profits de la compagnie, les profits et les montants
que la compagnie paie en taxes. Le ministre a laissé entendre que quand
j'ai finalement donné les vrais chiffres, hier, et que j'ai
déclaré que le ministre nous avait induits en erreur en ne nous
donnant pas les vrais chiffres et même en nous laissant croire que la
société aurait $20 millions dont elle pourrait disposer,
plutôt que de payer $20 millions en taxes, ces $20 millions
appartiendraient à la société... J'avais porté
à son attention que c'était seulement $3 800 000 payables au
gouvernement fédéral et que ce n'était pas de $20 millions
dont la société pourrait disposer.
Le ministre, ce matin, a laissé entendre que j'avais obtenu ces
informations d'une façon illégale. C'est absolument faux. Si
c'étaient des fonctionnaires qui m'avaient donné ces chiffres,
cela démontrerait que les fonctionnaires ne sont pas d'accord avec la
façon de procéder du ministre, de nous induire en erreur et de
nous laisser entendre...
M. Bérubé: C'est strictement illégal en
vertu des lois.
Le Président (M. Laplante): Le deuxième.
M. Bérubé: C'est strictement illégal en
vertu des lois.
M. Forget: Pour les fonctionnaires.
M. Ciaccia: Pour les fonctionnaires, mais ça ne l'est pas
si j'arrive à mon bureau et que les chiffres sont sur mon bureau.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal, votre première mise au point est faite...
M. Ciaccia: Je ne sais pas d'où ils sont venus,
comprenez-vous?
M. Bérubé: C'est beau, on va développer cela
tantôt, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Je ne dis pas que cela provient des fonctionnaires,
mais si cela provenait des fonctionnaires, il n'y a rien d'illégal de ma
part d'avoir obtenu...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal, c'est votre première...
M. Ciaccia: C'est ma première, mais c'est important...
Le Président (M. Laplante): La deuxième, s'il vous
plaît.
M. Ciaccia: C'est important, je ne veux pas être
accusé d'avoir agi d'une façon illégale. Si la compagnie a
fourni les chiffres, peut-être que la compagnie les a aussi fournis au
ministre et aux autres députés, mais ceux-ci ont persisté
à nous induire en erreur et à utiliser le chiffre de $20
millions. Il était temps que quelqu'un apporte la vérité
à cette commission.
Le deuxième point, c'est la question de conflit
d'intérêt. Quand le ministre a développé son
thème sur le conflit d'intérêt, il s'est
référé à mon intervention à l'effet qu'on ne
devrait pas nommer au conseil d'administration des gens qui auraient eu un
conflit d'intérêt avec la Société nationale.
Le point que je faisais était strictement en vertu et en
conséquence du point de "joint venture". Je restreignais mes remarques
à une question de joint venture", parce que le ministre, hier, a
justifié la nomination au conseil d'administration pour des raisons de
"joint venture". Le seul point que j'ai souligné c'est que si vous avez
un "joint venture", vous ne pouvez pas nommer quelqu'un du "joint venture" au
sein de l'administration de la société nationale; ce serait un
conflit d'intérêt. Je ne veux pas parler de tous les autres
conflits d'intérêt que vous avez créés ce matin et
que vous m'avez attribués.
Le Président (M. Laplante): D'accord, vous avez obtenu
votre droit.
M. le député de Saint-Laurent.
M. Forget: Avant de présenter mon amendement, j'aurais une
question à poser au ministre, avec sa permission.
M. Grégoire: Sur une question de règlement. Le
député de Saint-Laurent avait la parole, tout à l'heure,
lorsque j'ai levé la main vous demandant de parler sur l'amendement. Par
la suite, le député de Saint-Laurent a laissé son droit de
parole au député de Mont-Royal...
M. Ciaccia: II ne me l'a pas laissé, je l'ai
invoqué selon l'article 96.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Frontenac, je vais vous expliquer exactement de quelle façon cela s'est
produit.
Le droit de parole appartenait au député de Saint-Laurent
qui s'est prévalu d'un premier droit de parole en vertu de l'article 96
pour rétablir certains faits, et le député de Mont-Royal,
tout de suite après l'annonce d'un sous-amendement du
député de Saint-Laurent, a voulu rétablir certains faits,
lui aussi, en vertu de l'article 96.
La parole retourne au député de Saint-Laurent qui avait
déjà annoncé un sous-amendement. M. le
député de Saint-Laurent.
M. Ciaccia: Autrement, j'aurais pu perdre mon droit de parole en
vertu de l'article 96, si je ne l'avais invoqué à ce
moment-là.
Le Président (M. Laplante): Personne ne l'a perdu.
M. Forget: M. le Président, j'aimerais, avant de lire mon
sous-amendement, poser une question au ministre. Il a fait une longue tirade
sur la compétence ou l'incompétence des conseils
d'administration, des membres des conseils d'administration des
sociétés d'Etat actuelles.
Est-ce qu'il prétendrait que les membres des conseils
d'administration, par exemple, de REXFOR, nommés par les gouvernements
précédents, sont des incompétents? (11 heures)
M. Bérubé: Non, M. le Président. Ce que je
souligne par exemple dans le cas de REXFOR puisque c'est une
réalité il n'est pas possible de nommer pour REXFOR un
industriel ou quelqu'un qui serait théoriquement en conflit
d'intérêts, c'est-à-dire quelqu'un qui serait
déjà impliqué dans le secteur forestier. Alors, cela nous
oblige à faire appel à des fonctionnaires qui connaissent le
domaine forestier, à d'anciens hommes politiques qui ont
été en contact avec le milieu forestier il ne fait aucun
doute qu'un ancien ministre de l'Agriculture, à cause de
l'écoulement du bois des cultivateurs, a été en contact
avec le milieu forestier ou encore à des banquiers, à des
gens qui ont peut-être une expérience financière. Mais dans
le secteur industriel même où oeuvre la société
d'Etat, il n'est généralement pas possible ou il est
excessivement difficile, sauf par un pur hasard... Il peut parfois se trouver
que et encore là c'est excessivement rare un industriel du
sciage qui vend sa scierie et qui se lance dans l'épicerie et qu'on
aille le chercher pour le nommer au conseil d'administration de REXFOR parce
que, tout probablement, il a la mémoire des connaissances fraîches
dans le domaine.
En d'autres termes, ce problème de l'existence des conflits
d'intérêts que l'on cherche à éviter nous
amène à ne choisir, pour nos conseils d'administration, que des
gens qui n'ont qu'une connaissance indirecte.
Evidemment, j'ai blagué en disant qu'ils ont vu une usine de
loin, qu'ils l'ont peut-être approchée, j'amplifie pour des fins
oratoires, cela ne fait aucun doute, mais je pense que le concept que j'ai
essayé d'expliquer au député de Saint-Laurent je
suis convaincu d'abord qu'il n'est pas du tout intéressé à
mes explications, mais néanmoins je vais les lui donner quand même
puisqu'il m'a posé une question c'est simplement de dire qu
à un conseil d'administration à titre d'exemple SIDBEC
il serait utile d'avoir un ou deux sidérurgistes. D'ailleurs,
c'est intéressant parce que le député de Saint-Laurent, je
pense, reconnaît ce problème puisqu'il a suggéré que
la Société nationale de l'amiante ne s'engage que dans des
associations avec des industriels ayant déjà de
l'expérience. Je pense que, ce faisant, il reconnaissait qu'un des
problèmes auxquels font face nos conseils d'administration, c'est
généralement l'incapacité dans laquelle se trouve
placé le gouvernement de nommer, à ces conseils d'administration,
un certain nombre d'administrateurs connaissant le domaine, ce qui l'obligeait,
nécessai- rement, à aller chercher cette expertise par
I'association d'une société à l'autre, la formation d'une
nouvelle société et, à ce moment, au conseil
d'administration, un certain nombre de personnes qui connaissent le
métier.
C'est donc pour éviter cela que nous avons voulu éliminer
cette clause. Cependant, je dois dire, M. le député de...
M. Forget: ... conflit d'intérêts.
M. Bérubé: La clause sur les conflits
d'intérêts? Ce que nous avons introduit dans la loi, c'est
I'obligation, lorsqu'un administrateur est nommé pour plus de deux ans,
qu'il y ait un contrat qui le lie à la société de
manière qu'on puisse, peut-être si on se trouve dans des
conditions particulières de conflit d'intérêts,
spécifier des conditions d'exercice de sa tâche d'administrateur
et qu'il ne soit pas placé dans une situation de conflit
d'intérêts. En d'autres termes nous avons ouvert je pense
que c'est également du droit nouveau; vous le reconnaîtrez
le type d'association entre I'administrateur et la société de
façon à avoir suffisamment de flexibilité pour pouvoir
prévoir une situation conflictuelle, une situation de conflit
d'intérêts et que, à ce moment, dans le contrat qui lie
l'administrateur de la société, on puisse prévoir des
clauses particulières d'exercice de ses capacités
d'administrateur. C'est dans ce sens que l'article 6 est rédigé
et c'est la raison pour laquelle, par exemple dans l'article 5, on n'a pas
cette clause que l'on retrouve dans la loi établissant de nombreuses
sociétés d'Etat.
M. Forget: Est-ce que le ministre est favorable à ce que
toutes les clauses de conflits d intérêts disparaissent des lois
constituant des sociétés d'Etat?
M. Bérubé: Cela dépend,
énormément... Je pense que, peut-être dans des
sociétés à caractère industriel qui demandent une
technologie ou une maîtrise particulière des marchés,
où on fait appel à quelque chose qui peut peut-être
dépasser le Québec il faut quand même
reconnaître que le Québec est un petit pays: 6 millions
d'habitants on ne peut pas trouver au Québec deux, trois ou
quatre sidérurgies, avec la possibilité, dans ce cas, de faire un
peu de transferts d'administrateurs d'une société à
l'autre. Par conséquent...
M. Ciaccia: Avec vos théories, vous devriez parler du Dr
Laurin! Vous devriez lui confier ces théories.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Mont-Royal. M. le ministre.
M. Bérubé: M. le député de
Mont-Royal, je pense que chaque fois qu'on leur parle d'une façon
raisonnable... Et si vous écoutiez M. Laurin...
M. Ciaccia: Non, c'est raisonnable aussi. Je suis d'accord avec
vous.
M. Bérubé: ... vous remarqueriez que ce n'est pas
une justification pour s'asseoir et chercher à détruire le
Québec, ce que vous faites continuellement. Se reconnaître avec
ses déficiences et ses qualités, c'est une chose. Partir de ces
déficiences pour adopter une attitude défaitiste, comme vous le
faites, vis-à-vis du Québec, c'est une autre chose et c'est cela
que nous refusons.
M. Forget: On n'est pas défaitistes, on est contre
vous.
M. Bérubé: Par conséquent, pour
résumer mon intervention, il y a effectivement du droit nouveau, mais
c'est pour tenir compte de ce que dans le contexte québécois et
particulièrement la Société nationale de l'amiante
présentement... Il faut tout de même reconnaître qu'il y a
peu d'entreprises qui font de la transformation ici, qu'il y a peu de
"know-how" disponible et qu'il va peut-être falloir baser le
développement de notre industrie sur le "know-how" existant, d'une part.
D'autre part, pour répondre à votre question, personnellement, je
favoriserais une modification de certaines lois des sociétés
d'Etat; mais là je parle à titre purement personnel et non en
tant que représentant du gouvernement. Je pense qu'il pourrait y avoir
avantage à ce que ces clauses soient éliminées pour
certaines de nos sociétés d'Etat qui font face à des
problèmes semblables à ceux que j'ai exposés. Dans le cas
de SOQUEM, de REXFOR... Dans le cas de SOQUEM, je suis moins convaincu, parce
que nous avons au Québec une très bonne base dans le domaine
géologique et on n'a aucun problème pour trouver de bons
géologues, pour trouver de bons industriels dans le domaine minier. Cela
m'apparaît moins nécessaire. Ce n'est pas parce que c'est le
domaine dans lequel j'ai oeuvré, mais néanmoins, nous avons
certainement suffisamment d'expertises; il y a énormément
d'ingénieurs québécois dans l'industrie minière. Il
y a peut-être peu d'hommes d'affaires dans le domaine minier, mais en ce
qui a trait à la compétence technique, il ne fait aucun doute
qu'elle est disponible.
Dans le domaine de la sidérurgie, c'est davantage un
problème. Dans le domaine de la foresterie aussi.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre. Je voudrais
éclaircir avant d'aller plus loin, parce que le temps court...
M. Bérubé: Je répondais à...
Le Président (M. Laplante): Non, c'est justement, cela est
toujours pris sur le temps du député de Saint-Laurent. Vous
n'avez pas annoncé encore votre sous-amendement. Je voudrais être
très large d'esprit...
M. Forget: M. le Président, cela frise la
déloyauté.
M. Bérubé: Je n'ai pas terminé, M. le
Président.
Le Président (M. Laplante): C'est pourquoi, je vous mets
en garde actuellement, M...
M. Forget: Vous me mettez en garde!
Le Président (M. Laplante): Non, absolument pas. Si vous
avez l'intention d'y couper...
M. Forget: Je vous remercie, M. le Président, de me mettre
en garde.
Le Président (M. Laplante): Oui, il ne faut...
M. Bérubé: J'aurais encore quelques
développements, M. le Président.
M. Forget: Dites-lui qu'il se taise. C'est assez. M. le
Président, le ministre a plus qu'abondamment répondu à
cette question et à d'autres qu'il a imaginées en cours de route
également. M. le Président, mon sous-amendement, je vais en faire
la lecture immédiatement. Il a pour but de dissiper toute
ambiguïté, parce que le torrent de mots qui vient de l'autre
côté est de nature à faire dévier le débat.
La motion se lirait comme suit:
M. Ciaccia: ...verbal...
M. Forget: La motion du député de Matane est
d'amender en retranchant le mot "majorité" et en lui substituant le mot
"totalité". La motion amendée se lirait comme suit: "La
totalité des administrateurs doit être...
M. Bérubé: Irrecevable, M. le Président.
M. Forget: ... domiciliée au Québec."
M. Bérubé: C'est irrecevable, M. le
Président, en vertu même de l'amendement précédent
qui a été rejeté et qui stipulait que: "Nul ne peut
occuper un poste d'administrateur s'il n'est domicilié au
Québec." Je regrette infiniment, mais nous ne pouvons pas accepter un
tel amendement.
Le Président (M. Laplante): Je vais, Messieurs les membres
de la commission, suspendre 30 secondes pour laisser le président
régulier de cette commission prendre la décision.
M. Forget: Merci, M. le Président.
M. Grégoire: Est-ce qu'il admettrait quelques commentaires
sur la recevabilité?
Le Président (M. Laplante): La séance est suspendue
pour quelques instants...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors,
cela me semble... Qui a présenté le sous-amendement?
M. Forget: L'amendement a été
présenté par le ministre, le sous-amendement, par votre humble
serviteur.
M. Bérubé: M. le Président, est-ce qu'on
peut parler sur la recevabilité, du fait que nous changeons de
président? C'est que nous avons rejeté un amendement
précédent qui stipulait que nul ne pet occuper un poste
d'administrateur s'il n'est domicilié au Québec. Or, modifier "la
majorité" par "la totalité des administrateurs doivent être
domiciliés au Québec" revient à dire exactement la
même chose. De ce fait, c'est reprendre une motion qui a
déjà été débattue et rejetée. Par
conséquent, en vertu de notre règlement, elle devrait être
irrecevable. Mais je n'ose présumer de la décision que la
présidence voudra bien rendre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Les
décisions sont toujours rendues en fonction du règlement. Je dois
vous dire que, pour une des rares fois, je vais accueillir votre argumentation
puisque c'est celle que j'ai vue immédiatement en arrivant, en prenant
mon siège, dès que j'ai vu lamendement. Effectivement, je pense
que le député de Richmond a présenté une motion qui
disait: "Nul ne peut... s'il n'est domicilié au Québec".
C'était une autre formulation mais le sens de cette motion du
député de Richmond qui a été rejetée
était à l'effet que tous les administrateurs devaient être
domiciliés au Québec.
Il s'agit maintenant de regarder la motion du député de
Saint-Laurent pour voir si, effectivement, elle a la même implication que
celle qui a été présentée par le
député de Richmond et qui a été battue.
Effectivement, si ce n'est que la formulation est différente, la motion,
du point de vue contenu, est exactement la même.
Il y a des articles de notre règlement qui nous empêchent
de revenir sur une question qui a été décidée
pendant la session en cours. Alors, cette chose ayant été
décidée, en droit, puisqu'il y a eu chose jugée, je ne
peux juger une deuxième fois, je ne peux permettre la discussion sur ce
même sujet. En conséquence, la motion de sous-amendement est
déclarée irrecevable.
M. Grégoire: M. le Président, je suis surpris un
peu de l'attitude de l'Opposition concernant cet article 5 du projet de loi no
70. L'Opposition officielle réclame que tous soient domiciliés au
Québec et s'oppose à ce qu'il y ait des membres du conseil
d'administration qui puissent être domiciliés ailleurs qu'au
Québec.
M. le Président, on reconnaîtra que l'amiante et les
produits finis d'amiante sont des produits d'exportation. On en exporte dans
plus de 70 pays. De plus, c'est un des rares matériaux
considérés comme stratégiques...
M. Forget: Oui, mais cela nous appartient. M. Grégoire:
Oui.
M. Forget: On veut développer cela nous-mêmes.
M. Grégoire: M. le Président, oui. La richesse nous
appartient...
M. Forget: Avec nos ressources.
M. Ciaccia: Le nombre d'emplois.
M. Forget: Avec nos entreprises, nos emplois.
M. Grégoire: ... mais ce que je ferai remarquer...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
I'ordre!
M. Ciaccia: Cela fait 100 ans qu'on ne fait rien.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Grégoire: ... à l'ancien ministre, au
député de Saint-Laurent, c'est que la richesse nous appartient,
les mines nous appartiennent, la fibre nous appartient mais la fibre et les
produits transformés, à base de fibre, sont des produits
d'exportation.
M. Ciaccia: Les administrateurs vous appartiennent-ils?
M. Forget: Mais c'est nous qui voulons les exporter.
M. Grégoire: Dans au-delà de 70 pays, à
Iheure actuelle, il y a des industries de transformation de fibre, dont la
fibre provient du Québec. L'amiante est un matériau
considéré comme stratégique par toutes les puissances
occidentales, que ce soient les Etats-Unis, la France, l'Angleterre,
l'Allemagne, le Japon, que ce soient également les puissances des pays
de l'Est, comme la Russie et les autres. L'amiante constitue une richesse de $6
milliards de chiffre d'affaires dans le monde.
M. Ciaccia: Combien d'emplois?
M. Grégoire: Cela procure 250 000 emplois dans le
monde.
M. Ciaccia: 250 000.
M. Grégoire: Dans le monde!
M. Ciaccia: Combien d'emplois au Japon?
M. Grégoire: C'est même, M. le Président, un
des matériaux, à cause de sa qualité, qui va servir dans
la construction de vaisseaux interplanétaires, de fusées qu'on
lance vers la lune. C'est donc un produit...
M. Forget: C'est pour cela que vous voulez des administrateurs
étrangers.
M. Grégoire: ... extrêmement important. La richesse
peut être basée au Québec...
M. Forget: Vous êtes parti en orbitre là, le
député de Frontenac.
M. Grégoire: ... mais le produit fini n'a pas de
frontières.
M. Forget: Revenez sur terre!
M. Grégoire: M. le Président, est-ce que le
député de Marguerite-Bourgeoys tient à...
M. Ciaccia: II n'est même pas ici.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: ... toujours continuer à placoter
comme cela. Je vous demanderais...
M. Ciaccia: II n'est même pas ici.
M. Grégoire: ... de mettre un bouchon sur la cruche. C'est
le dernier matin.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Forget: Soyez pertinent un peu. NI. Ciaccia: Soyez
pertinent.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît! Sur la motion. A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Forget: On ne vous interrompra pas.
M. Grégoire: M. le Président, ayant situé
l'amiante comme produit d'exportation, même si la richesse
elle-même est basée au Québec, c'est vendu à travers
le monde; je me dis que c'est là un domaine où le Québec
peut rayonner à travers le monde. C'est peut-être le seul secteur
économique...
M. Ciaccia: Avec des administrateurs d'en dehors. (11 h 15)
M. Grégoire: ... où le Québec peut rayonner
à travers le monde, manifester sa présence dans le monde,
développer son économie à l'échelle mondiale.
Alors, que le Québec s'associe au reste du monde, et que le reste du
monde s'associe au Québec, dans ce secteur, je crois que c'est un
objectif éminemment louable...
M. Forget: C'est déjà..
M. Grégoire: ... désirable et souhaitable. Le
député de Marguerite-Bourgeoys a peut-être l'esprit trop
restreint pour concevoir cela.
M. Forget: Ne parlez pas des absents.
M. Ciaccia: II est aussi exact avec les chiffres, comme il le
dit, il a la même exactitude avec ses chiffres.
M. Grégoire: Le député de Saint-Laurent a
peut-être l'esprit trop restreint pour comprendre cela, mais je crois que
les membres du gouvernement, à l'heure actuelle, loin de vouloir se
replier sur eux-mêmes comme le souhaite le député de
Saint-Laurent, veulent au contraire rayonner. Dans le domaine de l'amiante, M.
le Président, c'est peut-être le secteur économique
où nous pouvons le mieux le faire.
M. Forget:... étrangers.
M. Grégoire: Qu'on aille chercher une ou deux personnes
compétentes ailleurs dans le monde, dans d'autres pays...
M. Forget: Des béquilles.
M. Grégoire: ... je trouve que ce serait parfait, et je
dis bien des personnes compétentes.
M. Forget: Des béquilles.
M. Grégoire: Ce serait parfait si cela nous aidait
à développer davantage notre industrie de l'amiante. Qu'on aille
chercher un ou deux spécialistes internationaux du marketing, c'est
encore parfait pour la croissance de notre industrie.
Je trouve absolument...
M. Ciaccia: Votre ministre ne vous écoute pas, il est en
train de lire La Gazette.
M. Grégoire: M. le Président, est-ce que c'est
l'attitude que le député veut prendre, ce matin? Je sais fort
bien que le ministre écoute quand même.
Est-ce que c'est la position que veut prendre le député de
Mont-Royal, ce matin, quand on lui rive son clou là où il a fait
erreur en demandant que le Québec se referme sur lui-même, se
concentre sur lui-même et cesse de regarder à l'extérieur?
Est-ce que le député de Mont-Royal est tellement choqué de
l'attitude qu'il a prise au départ que maintenant, il voudrait
empêcher toute discussion là-dessus?
M. Ciaccia: Je n'ai pas pris cette attitude, je voudrais
seulement que votre ministre vous écoute.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre.
M. Grégoire: Le député de Mont-Royal ferait
bien mieux de reconnaître son erreur et dire: C'est vrai...
M. Ciaccia: Ce serait plus poli s'il vous écoutait.
M. Grégoire: On va toujours avoir ce brailleur à
chaque intervention qu'on va faire, ce matin, M. le Président?
M. Ciaccia: II est en train de lire La Gazette; ce n'est
même pas un journal francophone.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s il vous plaît.
M. Grégoire: Comme je le disais tout a I'heure...
M. Bérubé: Cela montre jusqu'à quel point
vous êtes bornés. Je lirai La Gazette, le Star, le Globe and Mail,
je lirai n'importe quel journal...
M. Ciaccia: II cherche des administrateurs; y a-t-il des "help
wanted"?
M. Grégoire: Comme je le disais tout à
I'heure...
M. Ciaccia: Est-ce que vous regardez les "want ads" pour des
administrateurs, "administrators available"?
M. Bérubé: Celle-là n'est pas mal, par
contre, M. le député de Mont-Royal, continuez, c'est la seule,
mais continuez.
M. Grégoire: Mais il y a quand même, ce matin, M. le
Président, des cruches qui manquent de bouchon.
Je crois que cela est tellement évident que je trouve
incompréhensible que l'Opposition nous demande, dans le secteur de
l'amiante, surtout, qui est destiné à avoir un
développement à travers le monde, de nous refermer sur
nous-mêmes.
Si on peut trouver des gens compétents, si on peut trouver des
spécialistes, si on peut s associer ou associer le monde à nous,
pour développer ce secteur qui constitue notre principale richesse
minière, notre principale richesse naturelle, en termes
économiques, je me demande pourquoi on s'opposerait à cela?
Je me demande pourquoi, si ce n'est que pour maintenir une opposition
systématique, on refuse d'ouvrir les yeux et de voir dans le secteur de
l'amiante une possibilité énorme pour le développement du
Québec, une possibilité énorme pour la création
d'industries ici au Québec, une possibilité énorme pour la
création de nouveaux emplois. Peut-être faut-il être de la
région de l'amiante pour considérer que cela peut être un
produit qui, à cause de ses qualités, nous permette de rayonner
économiquement dans le monde.
Je n'ai aucune objection à cet article 5 où on mentionne
que la majorité doit être domiciliée au Québec
c'est vrai mais qu'il se peut ceci sous-entendant
que le Québec aille chercher quelques personnes compétentes
à l'étranger, pour permettre encore un plus grand rayonnement de
I'amiante dans le monde, un plus grand développement de l'amiante dans
le monde, un plus grand rayonnement du Québec. Je trouve que c'est un
objectif économique, un objectif politique, un objectif social
souhaitable et désirable. Merci M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Richmond.
M. Brochu: Merci M. le Président. J'aimerais faire
quelques remarques sur la motion d'amendement qui a été
présentée par le ministre à l'article 5, indiquant que la
majorité des administrateurs doit être domiciliée au
Québec.
Lorsque le ministre a présenté son amendement, il a
indiqué que c était suite à l'amendement que j avais
proposé hier demandant que l'ensemble, la totalité des
administrateurs soit domiciliée au Québec et je vous rappellerai
que c'était, à ce moment-là, pour être conforme avec
l'ensemble des autres cadres législatifs formant des
sociétés d Etat, mais qui ont à oeuvrer, comme le ministre
l'a indiqué, dans un autre mode d'approche, dans un autre champ
d'activités que celui que I'on veut donner à la
Société nationale de l'amiante.
Dans son amendement, en disant "la majorité", le ministre assure
donc quand même un contenu québécois pour la plus grande
partie, un contrôle du Québec sur la Société
nationale de I'amiante également. Je dirai simplement ceci: Si on ne
peut obtenir la garantie du tout, en ce qui me concerne, honnêtement, je
pense que je dois accepter cette garantie, puisqu'elle assure ce contrôle
québécois, justement, en partie au moins. Si on ne peut pas avoir
le tout, au moins on a une partie de cette préoccupation.
J'aimerais aussi revenir brièvement sur les propos tenus par le
ministre lorsqu'il a parlé de nationalisme, en indiquant qu'il ne doit
pas être tourné vers soi, qu'il ne doit pas être
égocentri-que. Je rappellerai simplement au ministre, à ce
moment, les propos que j'ai tenus à cette même commission
parlementaire où j'ai indiqué aussi ma façon personnelle,
la façon de l'Union Nationale de voir le nationalisme. Je suis content
que le ministre ait présenté sa perception du nationalisme de la
façon qu'il l'a fait. A mon sens, le nationalisme sain doit s'inscrire
dans la ligne d'une affirmation de soi, d abord, deuxièmement, dans le
respect des autres et aussi dans une volonté de participation dans une
acceptation des différences, soit entre les races, entres les nations,
les différents points de vue, sur différents plans, mais que
cette acceptation de la différence se traduise par une volonté de
collaboration.
Je pense que c'est une chance de succès, quelles que soient,
à ce moment, les entreprises concernées. Dans ce sens, je suis
content que le ministre ait souligné cette perception qu'il a du
nationalisme, c'est-à-dire un nationalisme tourné vers
l'extérieur.
Ma préoccupation, dans la motion que j'avais
présentée et je pense qu'elle se retrouve à
l'intérieur de la proposition que fait le ministre actuellement
c'est que la Société nationale de I'amiante ne se retrouve pas
avec une majorité d'étrangers à son conseil
d'administration. Dans ce sens, la motion que propose le ministre souligne
cette préoccupation et donne cette garantie que je recherchais. Pour
toutes ces raisons, je vais appuyer la motion d'amendement qui a
été proposée par le ministre à l'article 5.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Merci.
M. Ciaccia: M. le Président, quand on dit que la
majorité doit être domiciliée au Québec; si vous
avez un conseil d'administration de onze membres, cela veut dire qu il en faut
seulement six au Québec, et il peut y en avoir cinq. Ce n'est pas une
grande marge. Est-ce cela?
M. Laplante: Est-ce qu'il parle sur l'amendement, M. le
Président?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ciaccia: Le député de Bourassa veut-il me faire
une faveur?
M. Laplante: Je vous demande si vous parlez sur l'amendement.
M. Ciaccia: Je parle, point.
M. Laplante: Sur l'amendement?
M. Ciaccia: Ce ne sont pas vos affaires, sur quoi je parle.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Laplante: Pardon, vous êtes grossier, M. le
député de Mont-Royal. On demande au président si vous avez
demandé la parole.
M. Ciaccia: J'ai demandé la parole et il me l'a
donnée.
M. Laplante: II ne vous a pas donné la parole. M.
Ciaccia: Oui, il me l'a donnée.
M. Laplante: Vous êtes un grossier personnage.
M. Ciaccia: M. le Président, ai-je le droit de parole?...
Merci, M. le Président.
Vous avez un but, vous ne voulez pas donner le contrôle de la
Société nationale de l'amiante à des étrangers;
pensez-vous que vous arrivez à cet ojectif en disant; au moins six
membres sur onze seront domiciliés au Québec? Cela
dépendra beaucoup de la force de chacun des administrateurs. Quand vous
dites "la majorité", ce ne sont pas les chiffres utilisés de
cette façon qui vont vous assurer un contrôle. Cela peut
être un contrôle numérique, mais quand vous dites que vous
avez cinq membres sur onze qui ne sont pas domiciliés au Québec,
si, comme vous dites, ce seront des gens qui auront plus d'expérience,
des ingénieurs, des financiers, ce sont vraiment eux qui
contrôleront la société, ce ne sont pas les six autres.
Je ne pense pas que vous ayez atteint votre objectif avec votre
amendement ou votre sous-amendement.
M. Forget: C'est un amendement.
M. Ciaccia: II y a le contrôle théorique et le
contrôle dans les faits. Si vous avez cinq administrateurs sur onze, des
hommes forts, je n'y ai aucune objection. On vous accuse toujours de vous
refouler en vous-mêmes. Ce n'est pas nous qui voulons entrer en
nous-mêmes et qui ne voulons pas ouvrir le Québec au monde, c'est
vous. Si c'est votre objectif, sérieusement, en termes de nombre,
pensez-vous que...
M. Bérubé: Est-ce que le député de
Mont-Royal me permettrait une question?
M. Ciaccia: Oui.
M. Bérubé: Je ne m'oppose pas à ce que vous
me disiez: La majorité, ce n'est pas assez. Si vous me disiez 99%,
j'aurais des problèmes parce que cela m'enlèverait un peu de
flexibilité puisque je serais obligé de diviser un administrateur
en je ne sais combien de fractions, ce qui serait douloureux. Mais si vous
voulez proposer un amendement qui respecte l'esprit et qui donne plus de
contrôle, je n'y ai pas d'objection. On fait un autre type de travail; je
dois souligner au député de Mont-Royal qu'on cherche vraiment
à bonifier un projet de loi en en respectant l'esprit, plutôt
qu'en essayant d'envoyer des pelures de bananes continuellement, respectivement
de vous à nous ou de nous à vous.
M. Ciaccia: Cela a toujours été mon approche.
M. Bérubé: Permettez-moi d'en douter, M. le
député de Mont-Royal!
M. Grégoire: Vous pouvez rire parce que c'est la farce de
la commission que vous venez de faire là; la farce des deux derniers
mois vient d'être prononcée.
M. Bérubé: Enfin, je n'ai aucune objection
si...
M. Ciaccia: S'il y a une farce à la commission, je ne veux
pas vous insulter en disant qui est la farce de la commission...
M. Bérubé: Pour avoir l'unanimité sur cette
question, je serais absolument d'accord pour dire... Proposez-nous quelque
chose: 60%, deux tiers...
M. Forget: Soit un pourcentage ou un nombre d'administrateurs;
l'ensemble moins un.
M. Bérubé: II me semble que un, c'est... A deux
tiers on serait probablement... Je m'excuse, M. le Président, de faire
ce "bargaining à cette table, mais cela pourrait peut-être
permettre d'arriver plus rapidement...
M. Forget: Les trois quarts! M. Ciaccia: 80%.
M. Brochu: Les trois quarts seraient peut-être acceptables,
si le ministre l'accepte.
M. Grégoire: Les deux tiers font quatre sur sept, cinq sur
sept ou huit sur onze.
M. Forget: Huit sur onze, c'est raisonnable.
M. Bérubé: Les trois quarts, cela ne vous en ferait
qu'un sur sept; aux deux tiers, nous serions certainement d'accord.
M. Forget: Vous en nommerez huit!
M. Bérubé: C'est vrai qu'on peut jouer. Non, mais
il faut se garder une réserve.
M. Forget: Trois quarts, c'est un beau chiffre, on voterait
pour.
M. Bérubé: Deux tiers m'apparaissent la
règle magique puisque les décisions importantes à
l'Assemblée nationale se prennent aux deux tiers. Cela m'apparaît
un chiffre magique.
M. Grégoire: M. le Président, je vous fais
remarquer que cinq sur sept, ce sont les deux tiers ou les trois quarts, cela
revient au même.
M. Bérubé: Non, cinq sur sept, c'est plus fort que
trois quarts.
M. Ciaccia: Ah, deux tiers c'est comme trois quarts! C'est
bien!
M. Grégoire: Huit sur onze, ce sont deux tiers plus
faibles ou trois quarts, cela peut être deux tiers, cela peut être
trois quarts.
M. Ciaccia: Deux tiers équivalent aux trois quarts! C'est
une nouvelle proposition!
M. Bérubé: Aux deux tiers; suivant les us et
coutumes de notre Assemblée nationale, pour les questions importantes,
on demande la majorité des deux tiers.
M. Forget: Avec huit administrateurs sur onze, cela vous laisse
une marge de trois pour des associations avec d'autres.
M. Bérubé: Mais c'est sur sept, je fais le calcul
sur sept.
M. Grégoire: Les deux tiers, c'est huit sur onze.
M. Forget: Vous en nommerez huit. Huit sur onze, c'est deux
tiers.
M. Ciaccia: Si vous en nommez huit, ils vont en nommer
deux...
M. Bérubé: Est-ce que deux tiers traduiraient
davantage ce que vous avez à I'esprit?
M. Forget: Non, c'est trois quarts.
M. Bérubé: ... devant la malhonnêteté
intellectuelle de ce parti.
M. Brochu: II m'apparaît que, à huit sur onze, cela
pourrait être acceptable.
M. Ciaccia: Trois quarts vous permettraient, sur huit, d'en avoir
deux.
M. Brochu: Vous, de l'Opposition officielle, vous voulez neuf
administrateurs sur onze?
M. Grégoire: Sur les deux tiers aussi.
M. Bérubé: Dans un tel cas, puisque nous n'arrivons
pas à nous entendre, il m'apparaîtrait que, en gardant la
majorité et en laissant finalement au gouvernement qui sera au pouvoir,
le soin, lors de la nomination, de veiller aux intérêts
supérieurs du Québec... La seule chose, à ce
moment-là, c'est que dans la loi il y aura une garantie, c'est qu'au
moins il y aura toujours une majorité qui sera entre les mains du
gouvernement. Il m'apparaît, de toute façon, peu probable qu'un
gouvernement aille se choisir plus qu'un, deux ou trois administrateurs
étrangers, selon le nombre d'administrateurs.
M. Brochu: Si l'ensemble des membres de la commission acceptait,
par exemple, huit sur onze administrateurs domiciliés au Québec,
est-ce qu'on pourrait l'inscrire dans la loi, de sorte qu'on aurait une
garantie réelle d'inscrite dans la loi?
M. Bérubé: Pour les deux tiers, il n'y aurait aucun
désaccord de notre côté, ce serait le compromis entre 50.1%
et les trois quarts du Parti libéral.
M. Ciaccia: Le compromis est trois quarts. (11 h 30)
M. Bérubé: Parce qu'eux se méfient
d'eux-mêmes.
M. Ciaccia: 50 à 100, le compromis est de 75%.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Qu'arrive-t-il?
M. Brochu: La réponse était... M.
Bérubé: 72%.
M. Grégoire: Ce sont les deux tiers. M.
Bérubé: 8 sur 11, c'est 72%.
M. Grégoire: 7 sur 11, ce serait moins que les deux
tiers.
M. Bérubé: Alors, si on prend...
M. Grégoire: II faut que ce soit 8 sur 11.
M. Bérubé: C'est qu'on manie des nombres entiers.
Forcément, on est...
M. Ciaccia: 8 sur 11, ce n'est pas deux tiers.
M. Bérubé: Pardon? 8 sur 11, c'est 72%. Alors, si
vous prenez toujours au moins deux tiers, forcément... Si vous prenez,
par exemple, 75%, les trois quarts, 8 sur 11 ne serait pas acceptable, parce
que, au moins, les trois quarts... Par conséquent, ce ne serait que 9
sur 11.
M. Grégoire: 7 sur 11, ce ne serait pas les deux tiers.
Cela prendrait 8.
M. Bérubé: C'est ça.
M. Forget: On ne calcule pas de la même façon, parce
que les deux tiers de 11, ça me donne 7 et un tiers.
M. Bérubé: 7 sur 11, ça fait 63%.
M. Grégoire: Alors, 7, ça ne ferait pas les deux
tiers.
M. Forget: 8 sur 11, c'est acceptable. Notez bien ça. 7
sur 11, ça fait 64%. 8 sur 11, ça fait 73%. La norme, deux tiers,
permettrait 8 sur 11.
M. Grégoire: Mais ne permettrait pas 7 sur 11.
M. Brochu: D'accord! Moi, ça me semble acceptable.
M. Bérubé: Moi, deux tiers me semblerait acceptable
aussi.
M. Forget: On reste sur nos positions, M. le
Président.
M. Bérubé: Cela ne m'étonne pas que vous
restiez sur vos positions. Vous pouvez sous-amender...
M. Forget: Oui.
M. Bérubé: ... parce que là, il faudrait
sous-amender notre proposition pour modifier "majorité" par
"majorité des deux tiers".
M. Grégoire: Par les deux tiers...
M. Ciaccia: Bien non, majorité des deux tiers...
M. Brochu: ... c'est 34%. Il faudrait, à ce
moment-là, inscrire le nombre précis d'administrateurs.
M. Ciaccia: La majorité des deux tiers, c'est 34%.
M. Bérubé: Au moins les deux tiers...
M. Grégoire: Au moins les deux tiers...
M. Bérubé: D'accord. "Au moins les deux tiers des
administrateurs doivent être "...
M. Brochu: Ah bon! D'accord. "... doivent avoir leur domicile au
Québec ".
M. Bérubé: Ce qui donnerait 8 sur 11 dans un cas
ou...
M. Grégoire: 5 sur 7 ou 8 sur 11.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Qui...
M. Brochu: M. le Président, je pense que l'amendement
venant du côté...
M. Bérubé: Qu'elle vienne de vous ou d'un autre,
cela n'a pas d'importance.
M. Ciaccia: Avez-vous suivi qui aurait le droit de...
M. Brochu: D'accord. Je fais la proposition de sous-amendement,
M. le Président, qui se lirait comme suit: "Que l'amendement
proposé par le député de Matane soit modifié
à nouveau et se lise maintenant comme suit: "L'article 5 est
amendé comme suit en ajoutant, après le deuxième
alinéa...
M. Grégoire: "... au moins les deux tiers... "
M. Brochu: ... "au moins les deux tiers des
administrateurs...
M. Grégoire: "doit être domicilié au
Québec". M. Brochu: ... doit être domicilié au
Québec". M. Grégoire: "doivent être".
M. Brochu: "doivent être domiciliés au
Québec".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II y a
un sous-amendement qui est présenté par le député
de Richmond, de sorte que s'il était reçu, l'alinéa se
lirait de la façon suivante: "... au moins les deux tiers des
administrateurs doivent être domiciliés au Québec ".
M. Brochu: M. le Président, est-ce que vous me permettriez
de reformuler, pour une bonne présentation, l'amendement en question,
qui se lirait comme suit: "Les administrateurs, dans une proportion d'au moins
les deux tiers doivent être domiciliés au Québec ".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Je la
trouve personnellement meilleure. Or, je comprends que vous avez retiré
votre motion de sous-amendement et que vous en présentez une autre qui
est déclarée recevable. La motion de sous-amendement sera-t-elle
adoptée?
M. Forget: Non, M. le Président. Vote
enregistré.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bérubé (Matane).
M. Béburé: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Bordeleau (Abitibi-Est).
M. Bordeleau: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Brochu (Richmond).
M. Brochu: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Forget (Saint-Laurent).
M. Forget: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Grégoire (Frontenac).
M. Grégoire: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Laplante (Bourassa).
M. Laplante: Pour.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M.
Rancourt (Saint-François). M. Ciaccia (Mont-Royal).
M. Ciaccia: Contre.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La
motion de sous-amendement du député de Richmond est
adoptée: Pour 5; contre 2.
L'amendement tel que sous-amendé est-il adopté?
M. Forget: Même vote, M. le Président.
M. Grégoire: Même vote.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Un vote.
L'amendement tel que sous-amendé par le député de Richmond
est adopté. C'est l'article 5 qui est adopté.
M. Grégoire: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Même vote.
M. Forget: Même vote, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 5 est adopté par le même vote que la motion de
sous-amendement.
J'appelle l'article 6.
L'article 6 sera-t-il adopté?
M. Forget: Non, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Saint-Laurent.
M. Forget: Dans l'article 6, il y a une procédure que le
ministre d'ailleurs, sur mon temps de parole de la dernière fois, s'est
permis de commenter par anticipation, mais qui, comme il l'a indiqué,
constitue elle aussi du droit nouveau. Décidément, on innove
à tour de bras dans ce domaine, mais...
M. Bérubé: C'est l'imagination au pouvoir.
M. Forget: Oui, l'imagination délirante au pouvoir. On
aura maintenant des administrateurs élus par un unique actionnaire et
c'est le premier point que je voudrais faire ressortir.
Le ministre des Richesses naturelles qui pilote ce projet se voit
dépouiller de la fonction normale d'un ministre de tutelle. Normalement,
un ministre de tutelle a le privilège ou la prérogative de faire
des recommandations au Conseil des ministres quant à la
désignation des administrateurs des sociétés d'Etat qui
sont sous sa tutelle.
Le ministre s'est emporté, tout à l'heure, pour nous
brosser le tableau des génies qu'il allait recruter pour faire partie du
conseil d'administration de la Société nationale de l'amiante
l'expression est de lui qu'il allait découvrir des
génies et qu'il allait en étoffer le conseil
d'administration.
Le malheur de cette histoire est que même s'il trouve des
génies à supposer même qu'il en rencontre et qu'il
les reconnaisse, ce qui est doublement douteux, mais à supposer que ces
deux hypothèses extrêmes se réalisent, que le ministre
rencontre des génies et qu'il les reconnaisse au passage il
n'aura aucun pouvoir de faire des recommandations au Conseil des ministres
puisque ce pouvoir n'est même pas donné au Conseil des ministres.
Il est donné à l'actionnaire, et l'actionnaire sera le ministre
des Finances. Ce dernier sera I'actionnaire de la compagnie. Donc, dans cette
loi...
M. Bérubé: ... incompréhensible, dans votre
optique!!!
M. Forget: ... contrairement aux précédents
établis déjà par de nombreuses lois créant des
sociétés d'Etat, on enlève au Conseil des ministres une
prérogative qui est de faire la nomination. On enlève au ministre
de tutelle le choix ou la prérogative de faire des recommandations au
Conseil des ministres pourconfierà un seul homme. le ministre des
Finances, ce droit de patronage éminent qu'il exercera, sans doute, non
pas nécessairement pour nommer les génies qui auront
été découverts parson collègue des Richesses
naturelles, mais pour nommer ses génies, ses génies domestiques
ou enfin, tout ce qu'on peut imaginer que le ministre des Finances peut vouloir
désigner comme étant ses génies.
M. Bérubé: ... pourquoi il appuyait M. Ryan
plutôt que M. Garneau.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Bérubé: II s'est toujours méfié de
son ministre des Finances.
M. Forget: Ce n'est pas du nôtre qu'on se méfie,
mais du vôtre; et d'ailleurs, on n'est pas les seuls à s'en
méfier...
M. Grégoire: Vous avez eu une mauvaise expérience
avec votre ministre des Finances!
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre!
M. Forget: Oui, plusieurs ministres. Le ministre actuel, oui,
bien sûr.
M. Grégoire: Vous êtes méfiants envers les
ministres des Finances.
M. Bérubé: C'était un gouvernement
divisé sur lui-même. C'est pour cela, d'ailleurs, que l'opinion
publique vous a mis dehors.
M. Forget: Une mauvaise expérience avec l'actuel ministre
des Finances, pour dissiper tout doute dans l'esprit du député de
Frontenac.
M. Grégoire: Pourtant, il vous a fait changer
d'idée sur la taxe de vente.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: Vous avez fait volte-face très
vite.
M. Forget: M. le Président, je ne sais pas si vous allez
trouver le bouchon approprié...
M. Grégoire: Je pense que, tantôt, vous avez assez
interrompu qu'on peut vous rendre la monnaie de votre pièce.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Forget: M. le Président, ce processus
d'élection... En plus de cela, il ne s'agit pas le moins du monde d'une
élection. Au moins, quand cela est passé au Conseil des
ministres, on aurait pu toujours imaginer un vote au Conseil des ministres,
donc une véritable élection, encore que cela taxe un peu
l'imagination, mais on pourrait imaginer une véritable élection
au Conseil des ministres avec les discours des candidats, etc.; mais, quand la
nomination est faite ou "l'élection" est faite par un seul homme, le
ministre des Finances, I'expression a une très grande saveur. C'est
probablement un autre de ces gestes symboliques dont le ministre a
parsemé ce projet de loi pour lui faire donner des apparences qui, dans
le fond, ne correspondent pas du tout à la réalité. Il
appelle une élection la désignation d'une personne à un
poste par une seule autre personne, sans pouvoir, pour le Conseil des
ministres, de vraiment déjuger, ou réviser, avant qu'elles ne
soient officielles, les nominations ainsi exercées. Je serais
très curieux de savoir pourquoi le ministre de tutelle se
dépouille ainsi d'une prérogative normale, lui qui est si
préoccupé par la compétence et le caractère
génial des candidats qui pourraient se présenter comme
administrateurs.
En deuxième lieu, il y a un autre élément de droit
nouveau dans cet article 6, ce sont des contrats. Dans les
sociétés d'Etat existantes, c'est le gouvernement qui
détermine les traitements des administrateurs et, normalement, dans
presque tous les cas, et je dirais même dans tous les cas à
mon avis, dans tous les cas, mais je le dis avec une certaine réserve
parce que je n'ai pas fait une recherche exhaustive dans tous les cas,
il existe un arrêté en conseil qui dit à peu près
ceci: Les fonctionnaires ou toute personne qui est déjà
rémunérée à même les fonds publics ne
reçoit aucuns honoraires pour sa présence et sa participation au
conseil d'administration d'une société d'Etat; par contre, les
personnes, qui ne sont pas rémunérées à même
les fonds publics, reçoivent un jeton de présence dont,
évidemment, la valeur a varié au cours des années comme
à peu près tout le reste, mais qui s'établit à $100
ou $200, je pense, maintenant, par jour de séance, ce qui est à
peu près dans l'ordre des rémunérations pour des jetons de
présence à l'heure actuelle.
A l'avenir, nous aurons des négociations parce que des contrats,
cela suppose des négociations. Les administrateurs pourront
négocier leur participation à des conseils d'administration de
sociétés d'Etat et on commencera par la Société
nationale de l'amiante. Le gouvernement sera donc dans la situation
embarrassante de s'engager vis-à-vis d'un individu, pour un terme
donné, à verser des jetons de présence selon des
honoraires qui pourraient être uniques, à tel ou tel individu, qui
auraient été négociés avec lui. Ceci est
susceptible d'engendrer des difficultés évidentes puisque des
administrateurs vont finir par se rendre compte, étant donné que
ce sont des choses publiques essentiellement les
rémunérations versées à même les deniers
publics sont publiques donc, des administrateurs siégeant
à un même conseil d'administration en viendront à
connaître les différences dans les contrats et donc dans la valeur
des jetons de présence qui leur sont donnés. Ceci n'est pas
susceptible de produire l'harmonie au sein d'un conseil d'administration.
D'autre part, il est coutumier, je crois, pour un membre de conseil
d'administration, d'être révocable en tout temps. Par la
stipulation d'un contrat, le gouvernement va s'engager, pour une période
allant jusqu'à cinq ans, à verser des honoraires à des
administrateurs alors même qu'après un an ou un an et demi, il
peut se révéler que la performance d'un administrateur est
insatisfaisante, et pas nécessairement pour des raisons
d'assiduité ou de compétence j'imagine qu'on aura
pris au départ des renseignements et certaines assurances
minimales mais pour des raisons de relations interpersonnelles, de
jugement, d'erreurs flagrantes qui auront pu être commises et pour
lesquelles, à un moment donné, il semble nécessaire au
gouvernement d'apporter des changements, comme il l'a fait, récemment,
dans certaines sociétés d'Etat. Cela peut se reproduire n'importe
quand, lorsqu'il y a des déboires et c est bien humain de trouver des
responsables, de rénover, d'apporter du sang neuf, etc. Mais avec des
contrats, ce sera toujours possible, bien sûr, mais le gouvernement devra
continuer à honorer les contrats. (11 h 45)
Voici que le gouvernement, par le biais de cet article, instaure une
espèce de semi-permanence des administrateurs, !a sécurité
d'emploi pour les administrateurs des sociétés d'Etat. On avait
vu à peu près tout dans le domaine de la sécurité d
emploi, mais, maintenant, voici qu'on va peut-être avoir un jour, pour
négocier des conventions collectives entre les administrateurs des
sociétés d'Etat et le gouvernement, on va peut-être avoir
un syndicat des administrateurs des sociétés d'Etat.
Sans pousser jusque-là le ridicule, M. le Président, il
reste que cette conception de droit nouveau le ministre l'a dit tout
à l'heure qui a pour but soi-disant de tenir lieu des
règles absentes sur les conflits d'intérêt... Le ministre
prétend, que par des contrats, il va pouvoir circonscrire la
présence de conflits d'intérêts, il va pouvoir, dans un
contrat, si je l'ai bien compris, dire: M. Untel, qui est administrateur
également de Johns-Manville ou Eternité, s'abstiendra de
siéger lorsque des questions pertinentes à des transactions avec
Johns-Manville ou des filiales de Johns-Manville, etc., dans lesquelles il a
également des intérêts seront discutées.
Ceci pourrait se faire par le biais d'un article, parce qu'il y a
déjà dans nos lois certains articles qui prévoient que,
lorsqu'un intérêt personnel d'un des administrateurs ou qu'un
intérêt à titre officiel d'un des administrateurs est en
jeu, cet administrateur doit se retirer. Même si cela n'était pas
dans des lois, c'est une règle d'éthique fondamentale que,
lorsqu'on est le sujet ou l'objet d'un débat dans une assemblée
délibérante quelconque, on s'abstient de participer au
débat.
On peut paraître à la barre des témoins, en quelque
sorte, on peut exposer les faits pertinents à titre d'information, mais
on ne doit pas participer à la décision. On ne doit même
pas assister à la décision, puisque la simple présence de
l'individu, évidemment, constitue une gêne pour ceux qui doivent
prendre la décision et qui doivent délibérer. La
règle élémentaire est de s'abstenir.
Mais on pourrait, dans un projet de loi, comme celui-ci, au lieu de
l'article 6, au lieu de vouloir le faire par un contrat, comme le ministre se
propose de le faire, puisqu'il a décidé d'éliminer les
clauses de conflit d'intérêt... Il pourrait malgré tout
introduire un certain nombre de règles d'éthique, codifier un
certain nombre de règles d'éthique, même s'il veut inviter
des admi- nistrateurs qui ont des intérêts ou qui ont une
participation dans des sociétés impliquées dans la
fabrication ou la vente de l'amiante, de la fibre ou sa fabrication ou sa mise
en marché. A ce moment-là, il y a un certain nombre de
règles d éthique simples avec lesquelles il serait possible de
procéder.
Autrement, la règle qui est privilégiée ici,
à savoir un contrat, est irrecevable à notre avis. Le contrat, c
est un terme très vague qui ouvre la porte à toutes sortes de
tractations, toutes sortes de négociations, toutes sortes de
disparités; disparités qui, à leur tour, seront la source
de disfonctions à l'intérieur d'un conseil d'administration,
parce que ces disparités vont venir à la surface, vont engendrer
des rivalités, des haines même, et sont susceptibles de semer la
zizanie au sein d un conseil d'administration.
Jusqu à maintenant, des règles simples ont
été adoptées, je crois, par tous les conseils
d'administration de toutes les sociétés dans le monde, à
savoir que les jetons de présence sont payés à un taux
à peu près uniforme dans la plupart des cas. Dans le cas des
sociétés d'Etat, c'est un taux uniforme, exception faite, bien
sûr, des fonctionnaires qui, étant déjà payés
pour travailler de façon complète et par exclusivité, ne
reçoivent pas de jetons de présence lorsqu'ils siègent
à des conseils d'administration.
Mais à part cette exception, tous les autres sont payés au
même taux. Ils sont révocables en tout temps, ce qui veut dire que
si le gouvernement a des raisons de croire que son jugement est en faute, qu'il
a commis une bourde monumentale ou qu'il est dans une situation de conflit
personnel avec le directeur général ou avec d'autres membres du
conseil d'administration et, par conséquent, que les assemblées
du conseil d'administration dégénèrent en une
espèce de rixe sans profit pour personne et qu'il est nécessaire
de remplacer certaines gens, on n'est pas lié à eux par un
contrat de cinq ans. C'est l'élémentaire prudence que de ne pas
se lier.
Bien sûr, la nomination, à l'origine, peut se faire pour
une période de deux ans ou de cinq ans. Mais c'est une nomination qui
est révocable. C'est une nomination durant bon plaisir. C'est important.
Cela ne crée pas un droit de la personne nommée à une
rémunération pour cinq ans. Il y a une certaine assurance qu'on
peut s'impliquer, on peut faire un certain investissement intellectuel dans les
dossiers, parce qu on se dit : On va être là trois ans, on va
être là quatre ans, on va être là cinq ans. Cela vaut
la peine.
M. Laplante: Est-ce que vous me permettez une question, M. le
député de Saint-Laurent?
M. Forget: Oui.
M. Laplante: Dans les autres sociétés d'Etat qu'on
a actuellement, c'est cela qui se passe?
M. Forget: C'est cela qui se passe. C'est exactement cela qui se
passe. Les gens sont nommés pendant bon plaisir, mais ils peuvent
être nommés
pour trois ans. La nomination est toujours révocable par un
arrêté en conseil.
M. Laplante: ... est-ce qu'ils sont payés aux jetons?
Est-ce qu'ils sont à salaire fixe?
M. Forget: C'est ce que j'ai expliqué tout à
l'heure. L'arrêté en conseil dit que les administrateurs sont
payés $200 par jour de séance du conseil d'administration,
parexemple. C'est un chiffreque je donne comme cela. Cela peut être $150,
cela peut être $100. Je ne le sais pas. Mais disons $200. Cependant, les
fonctionnaires, le sous-ministre des Finances ou le sous-ministre des Richesses
naturelles ne sont pas payés. Cela fait partie de leurs fonctions
d'assister par exemple, à des réunions de SOQUEM ou REXFOR. Il y
a des sous-ministres des Terres et Forêts, etc. Ces gens ne sont pas
payés, lis sont payés comme fonctionnaires. Ceux qui sont de
l'extérieur sont payés en jetons de présence. Leur
nomination, en tout temps est révocable, même si
l'arrêté en conseil dit qu'ils sont nommés pour deux ans ou
pour trois ans, cela n'a pas d'importance. Ils n'ont pas de droit. Ils ne
peuvent pas, s'ils sont révoqués, aller en cour et dire: Ecoutez,
on a un arrêté en conseil, on avait le droit d'être
là jusqu'en 1982. Ce n'est pas vrai. Ils sont là durant bon
plaisir.
M. Laplante: Prenons le président de la
Société des alcools, parexemple, qui est une
société d'Etat. Est-ce que son poste serait révocable
également?
M. Forget: Dans le cas du président ou du directeur
général, par exemple...
M. Laplante: Oui.
M. Forget:... c'est une fonction de cadre. Là, on parle
des administrateurs, des membres du conseil d'administration. Ils ne font rien
d'autre, dans la société, que d'assister aux séances du
conseil d'administration et d'adopter des résolutions. Ceux qui sont, en
même temps, membres du conseil d'administration et cadres ont des
contrats de travail. Ils ont un contrat en fonction du Code civil, ou en
fonction d'une loi. A ce moment-là, ils peuvent avoir des obligations
légalement "enforçables", si on peut employer cette expression,
qui ont une force légale devant les tribunaux, parcequ'ilssont des
employés à temps plein liés par un contrat
d'exclusivité. Mais c'est une catégorie à part, qui n'est
pas, comme telle, traitée par l'article 6. On y vient un peu plus loin,
quand on parle du président-directeur général.
M. Bérubé: M. le député de
Saint-Laurent me permettrait-il d'intervenir simplement pour préciser
ses propos sur cette question? Vous dites que, lorsque le gouvernement nomme,
par arrêté en conseil, présentement, pour une
période de deux ans, par exemple, un administrateur, il est
révocable en tout temps?
M. Forget: Bien sûr.
M. Bérubé: Nous avons eu des opinions des juristes
gouvernementaux à l'effet inverse, c'est-à-dire qu'à
partir du moment où, dans un arrêté en conseil, un
administrateurest nommé pour deux ans, on peut évidemment passer
un deuxième arrêté en conseil pour le révoquer
n'importe quand, sauf qu'il faut lui verser des paiements compensatoires, parce
que le premier arrêté en conseil tiendrait lieu effectivement de
contrat, liant le gouvernement à l'administrateur en question. Je dois
vous dire qu'à ma propre expérience, cela implique
automatiquement qu'on ne peut quasiment pas toucher quelqu'un qui a
été nommé par arrêté en conseil, à
moins, évidemment, de lui verser, à la suite d'une entente
tacite...
M. Laplante: C'est pour cela que j'avais des doutes.
M. Forget: II s'agit là d'une opinion juridique qui n'a
pas été testée par les tribunaux...
M. Bérubé: Exactement, je crois.
M. Forget:... et qui est extrêmement discutable, parce
qu'elle touche l'exercice de ce qu'on appelle, en droit public, une
prérogative de la couronne. Les prérogatives de la couronne sont
très larges, lorsqu'elles existent, leur exercice n'est assujetti
à aucune règle de droit civil. Je pense bien que si on allait
jusqu'aux plus hauts tribunaux il se peut même qu'un tribunal de
juridiction inférieure hésite à se prononcer dans ce
sens-làceux-ci affirmeraient très carrément la
prérogative de la couronne de défaire, par arrêté en
conseil, ce qui a été fait par arrêté en
conseil.
C'est mon avis, c'est pour cela que je suis persuadé...
Evidemment, les opinions juridiques, je pourrais vous en parler longuement.
M. Bérubé: C'est pour cela que j'ai respecté
la vôtre. M. le député de Saint-Laurent, parce que ce qui
m'épate, dans le droit, c'est de voir qu'il y a autant de latitude qu'en
génie.
M. Forget: Oui. Il y a toujours au moins deux opinions. C'est
comme le facteur de sécurité en génie. C'est à peu
près la même chose. En droit aussi, il y a un facteur de
sécurité. Il y en a qui ont un multiple de dix, je pense. Le
facteur de sécurité est très élevé chez les
juristes gouvernementaux, c'est une expérience que j'ai eue et dont je
vous fais part gratuitement. Ce n'est pas une opinion juridique, mais on
hésite beaucoup à proposer au gouvernement des attitudes qui
pourraient être contestables devant les tribunaux. Bien sûr,
à la limite, tout est contestable en droit, c'est pour cela que les
tribunaux existent. Au fond, le test final, c'est le jugement d'une cour de
haute instance, le tribunal d'appel. Dans un cas comme celui de droit public,
je pense qu'on aurait intérêt, de façon
générale, à faire certains "test cases" de certaines
choses dans ce genre pour ne pas...
M. Bérubé: Pouvez-vous me suggérer des noms
sur les conseils d'administration sur lesquels on pourrait s'exercer?
M. Forget: Non, je ne vous fais pas de suggestion, je sais que
vous avez déjà des litiges pendants sur lesquels je ne me
prononce pas, quant au fond. Mais il reste que, quant à l'existence
d'une prérogative de la couronne ou de l'Etat dans ces domaines, je
crois qu'on a tout intérêt à la laisser la plus large
possible, parce que finalement, c'est le gouvernement qui est responsable. Si
par des contraintes juridiques ou légales additionnelles à celles
qui peuvent exister déjà, on veut enserrer davantage la
responsabilité ministérielle, on perd essentiellement toute
possibilité de contrôle démocratique de ces organismes.
Pour cette raison, nous voudrions présenter l'amendement suivant
à l'article 6: "Que l'article 6 soit modifié en remplaçant
dans la deuxième ligne, les mots "peuvent être élus pour un
terme par les mots "sont nommés pour une période d'au moins"; en
remplaçant dans les deuxième et troisième lignes les mot
"sans excéder " par les mots "et d'au plus"; en retranchant dans les
troisième, quatrième, cinquième et sixième lignes
tous les mots après le mot "en " et en ajoutant l'alinéa suivant:
"Le président doit s'occuper exclusivement du travail de la
Société et des devoirs de sa fonction. "
L'alinéa amendé se lirait comme suit: "Les membres du
conseil d'administration, y compris le président, sont nommés
pour une période d'au moins deux ans et d'au plus cinq ans. Le
président doit s'occuper exclusivement du travail de la
Société et des devoirs de sa fonction. '
Le dernier alinéa de cet amendement parle par lui-même.
C'est, j'imagine, une omission du rédacteur du projet de loi 70. Il est
habituel que le président de la société soit une personne
qui s'attache en totalité à la direction de cette
société et ne partage pas son temps pour en faire un emploi
à temps partiel. C'est, je pense, une précaution très sage
de prévoir, parce que, au fond, celui qui a en main les destinées
de la société pourrait être tenté d'accepter
d'autres responsabilités, parce qu'étant président, il
acquiert une certaine notoriété, une certaine visibilité.
Il aura certainement des offres pouvant l'intéresser à participer
à d'autres activités. Si, cédant à une tendance
humaine fort compréhensible, il accepte ces offres qui sont flatteuses
et qui l'impliquent dans différentes questions d'intérêt
pour lui, sans aucun doute, il met en péril, par cela même, la
bonne conduite des activités de la société dont il est le
président.
La plupart des autres lois créant des sociétés
d'Etat prévoient que le président a une obligation
d'exclusivité. Bien sûr, le ministre pourra dire: tout cela sera
réglé par le contrat. Oui, mais à force de vouloir tout
régler par le contrat, on ouvre beaucoup de portes à des
négociations. On voudra peut-être attirer quelqu'un de grande
envergure. On sera peut-être en difficulté pour lui offrir la
rémunération qu'il pourrait avoir, par exemple, dans le secteur
privé. C'est un scénario qui est très plausible dans les
circonstances. (12 heures)
Si, en plus de cela, on a ouvert la porte à ce que dans le
contrat, on lui permette d'autres activités, on place le gouvernement
dans une position de faiblesse dans la négociation avec cette personne.
Si la loi a fermé la porte à cela, c'est une concession qu'on
n'est pas obligé de faire. C'est très dangereux parce que,
finalement, le gouvernement n'est ordinairement pas celui qui peut offrir le
plus en termes financiers. Donc, il va être amené à faire
d'autres concessions. Il va dire: Comme on ne peut pas offrir $125 000 par
année, ce serait indécent pour un organisme public, on va vous
permettre de faire autre chose en parallèle.
M. Bérubé: Je ne voudrais pas interrompre le
député de Saint-Laurent. Simplement pour être certain que
nous comprenons bien son exposé, parce que je ne voudrais pas qu'il
épuise son temps de parole et qu'après cela, on soit
obligé de poser une question à nouveau, mais quand il parle du
président qui doit s'occuper exclusivement du travail de la
société, parle-t-il du président de la
société ou du président du conseil d'administration?
M. Forget: Ce n est pas totalement clair que les deux sont
distincts.
M. Bérubé: La loi est ainsi rédigée
qu'ils peuvent être distincts. C'est pour cela que, dans le cas
présent, j'aimerais savoir ce que le député de
Saint-Laurent a à I'esprit.
M. Forget: Dans le cas où ils ne sont pas distincts, je
parle certainement, à ce moment, du président-directeur
général.
M. Bérubé: Le président de la compagnie.
M. Forget: Selon la distribution des tâches entre le
président du conseil d'administration et le président
exécutif, si les deux ne sont pas distincts, il se peut également
que le président doive être à temps plein. Dépendant
de l'envergure, évidemment, de l'entreprise, dépendant du nombre
de filiales, etc. Il est fort possible que le président du conseil
d'administration doive être également à temps plein.
Maintenant, comme tout cela est hypothétique dans le moment, il est
très difficile de le dire, mais il est clair que si on ne le dit pas, le
problème qui se posera sera celui que j'ai indiqué tout à
l'heure. Si on veut avoir quelqu'un de grand prestige, on ne pourra pas lui
faire les concessions, du côté rémunération, qu'on
aimerait lui faire si on était dans le secteur privé. On sait
très bien que dans le secteur public, il y a certains plafonds qu'on n'a
jamais osé franchir, et je pense bien, pour des raisons
évidentes, que l'individu peut dire: Ecoutez, j'ai des
possibilités dans le secteur privé d'un revenu de $120 000
ce n est pas un chiffre inimaginable pour des gens de ce calibre dans une
industrie comme celle-là ou de $100 000 et vous m'en offrez $55
000 ou $60 000; au moins, laissez-moi être membre d'un certain nombre de
conseils d'administration, laissez-moi faire ceci, laissez-moi faire cela,
ouvrez-moi des possibilités ailleurs pour que je puisse au
moins ne pas perdre trop par rapport à la situation actuelle.
Ce sont des négociations extrêmement difficiles à
conduire. Si le ministre s'est laissé trop de portes ouvertes dans la
loi, il est coincé. Ce que l'on dit au ministre, c'est: Ne vo'is en
laissez pas trop d'ouvertes, parce que vous allez être obligé de
les franchir, les portes, à reculons peut-être, mais vous ailes
être obligé de les franchir pour avoir la personne qui, elle a lu
la loi et vous pouvez être assuré que tous les candidats
à ces postes vont lire la loi et vont savoir ce que le ministre est en
droit de leur donner et ce qu'il n'est pas en droit de leur donner. Ils vont
essayer d'avoir tout ce sur quoi le ministre est en droit de faire des
concessions. Il serait peut-être avantageux de fermer un certain nombre
de portes, pas nécessairement toutes les portes, mais celle-là,
la possibilité par contrat de s'entendre sur l'envergure, la
rémunération, l'exclusivité, cela fait bien des choses. IL
aurait peut-être intérêt à réfléchir un
peu à l'agencement de ces articles pour en fermer quelques-unes. C'est
dans cet esprit qu'on présente cet amendement, au moins de faire une
obligation de l'exclusivité. C'est dans l'hypothèse où
c'est le même poste, et même dans l'hypothèse où ce
sont deux fonctions distinctes... Mais là, c'est le ministre qui peut
vraiment nous donner les éclairages. Est-ce que, d'après ce qu'il
nous a dit déjà, il n'y a pas suffisamment de pain sur la planche
pour faire du président un employé à temps plein?
M. Bérubé: M. le Président, puisque vous
occupez à temps plein ce poste et que je peux vous déranger, j'ai
écouté avec attention l'argumentation du député de
Saint-Laurent, parce qu'effectivement, je pense que chaque fois que l'on essaie
d'innover dans un domaine juridique où il existe beaucoup de
précédents, il faut sans doute s'avancer avec précaution
et ne pas, évidemment, causer plus de problèmes qu'on a
cherché à en régler. Cependant, je dois dire que, surtout
à partir de la fin de l'exposé du député de
Saint-Laurent, suite à la question que je lui ai posée, j'ai
retiré une impression de confusion, non pas que les propos du
député de Saint-Laurent étaient confus, mais que la
situation était confuse en ce sens qu il a dit: Suivant que le
gouvernement veut que le président du conseil d'administration soit le
même que le président de la société, suivant que la
société est plus ou moins étendue, il faudrait...
Ce qui m'a frappé, c'est l'énormité des cas
je ne devrais pas dire l'énormité, mais le grand nombre
auxquels le gouvernement peut être amené à apporter des
solutions diverses et qui oblige à une certaine flexibilité.
Justement, si on revient à l'article 6, on constate qu'il est
éminemment flexible. Que l'on oblige le président ou le
président-directeur général de la société
à s'occuper exclusivement du travail de la société et des
devoirs de ses fonctions, cela m'apparaît tout à fait raisonnable,
si on veut avoir une entreprise dynamique qui soit suivie de près. Par
conséquent, cela me paraîtrait une des clauses d'un tel contrat
liant le président de la société à la
société.
Je pense qu'il est important de bien relire la dernière ligne de
l'article 6, où il est dit: Pareil contrat n'a d'effet que s'il est
ratifié par le gouvernement. Il ne fait aucun doute que le gouvernement
devra toujours surveiller la rédaction de ses contrats et les ratifier.
S'il apparaît nécessaire que le président de la
société consacre toutes ses énergies à la
société, je pense que, forcément, le gouvernement verra
à ce que cela soit inscrit dans le contrat.
Quant à certains problèmes soulevés par le
député de Saint-Laurent, je dois lui signaler que la nomination
pour des périodes très longues... Récemment, par exemple,
nous avons nommé le président de SOQUEM à nouveau pour un
mandat de dix ans, parce que la loi de SOQUEM exigeait que le président
de SOQUEM soit nommé pour un mandat de dix ans, ce qui nous a
amenés à réfléchir à l'ensemble du
problème. Nous avons d'autres administrateurs à REXFOR qui sont
nommés également pour des mandats très longs. On s'est
donc interrogé, à savoir: Est-ce normal que dans la loi on
définisse le mandat d'une façon si précise?
Je vois que le député de Saint-Laurent a dû faire
cette réflexion. Il semble que la tendance actuelle dans à peu
près toutes les sociétés d'Etat soit de donner des mandats
ouverts, de ne pas les définir dans la loi et de laisser le gouvernement
libre de nommer un administrateur pour une période plus ou moins
longue.
Ce qui me frappe aussi, c'est que le député de
Saint-Laurent a souligné la très grande marge de manoeuvre que
s'autorisaient les juristes, lorsqu'ils recommandaient certaines attitudes au
gouvernement. De fait, certains juristes gouvernementaux, qui conseillaient
sans doute le député de Saint-Laurent à l'époque
où il était ministre des Affaires sociales, nous ont dit: II nous
apparaît difficile de révoquer un administrateur gouvernemental
d'une société d'Etat qui a été nommé par
arrêté en conseil, parce que l'arrêté en conseil
tient lieu d'engagement formel de la part du gouvernement, et, de ce fait,
tient lieu de contrat.
Puisque l'arrêté en conseil tenait lieu de contrat et que
la plus grande flexibilité apparaissait nécessaire, on a donc
tenu à ce que le contrat liant l'administrateur à la
société soit préparé par la société
et l'administrateur et qu'il fasse l'objet d'un contrat en bonne et due forme.
Soulignons d'ailleurs que des exemples récents soulevés par le
Vérificateur général ont été portés
à notre attention.
A titre d'exemple, lorsqu'un membre du conseil d'administration d'une de
nos sociétés d'Etat, vérifiées par le
Vérificateur général ceci est important, toutes ne
sont pas vérifiées par le Vérificateur
général mais lorsqu'elles sont vérifiées par
le Vérificateur général et que cet administrateur
reçoit des jetons de présence pour une filiale de cette
société, le Vérificateur général dit:
Puisque ceci n était pas prévu dans l'arrêté en
conseil, le montant qui lui a été versé, nous devons
appliquer strictement la loi. Il l'interprète de cette façon. Par
conséquent, il nous apparaît illégal, ou du moins contraire
à la gestion financière normale
que cet administrateur puisse percevoir des jetons de présence
à une filiale. Nous avons reçu des opinions juridiques, à
l'effet contraire, c'est-à-dire que cet administrateur siégeant
à une filiale, y siégeait en vertu de la loi des compagnies,
c'est-à-dire à titre personnel et, par conséquent, ceci
n'avait pas à être prévu dans le contrat le liant à
la société. Enfin, on se rend compte de la complexité
épouvantable avec les problèmes perpétuels
d'interprétation, ce qui nous met dans des situations qui sont
passablement détestables parce que l'on peut effectivement s'interroger
à savoir s'il est normal, lorsqu'un administrateur d'une de nos
sociétés d'Etat siège à une filiale, que lui ne
perçoive pas de jetons de présence, alors que tous les autres
administrateurs à ce même conseil recevraient des jetons de
présence.
Effectivement, cela m'apparaît un peu arbitraire de vouloir
considérer deux types d'administrateurs totalement différents un
avec de pleins droits, l'autre avec des mini-droits. Tenant compte de cela,
tenant compte de la très grande variété des situations
auxquelles nous avons à faire face, nous nous sommes dit qu'il
était peut-être préférable de prévoir dans la
loi une formule qui a justement cette flexibilité, qui ne nous
amène pas continuellement dans des situations, dans des imbroglios dont
on ne sait se tirer, parce qu'ils ont été prévus de
façon très rigide dans la loi, mais la réalité nous
oblige continuellement à faire des compromis.
De là, dans ce cas particulier, l'obligation qui est faite au
gouvernement d'approuver un contrat, mais ce contrat a quand même cette
possibilité d'être très flexible et élimine donc les
objections qui peuvent avoir été soulevées par le
Vérificateur général, alors que d'autres avis juridiques
nous disent que le Vérificateur général n'a pas raison.
Evidemment, il devient difficile à ce moment de trancher et il faudrait
pratiquement aller en cour et ce n'est pas le genre de choses que le
gouvernement aime faire. On préfère, à ce moment, se
garder une certaine flexibilité.
Il est important également de souligner et je m'excuse
d'avoir à me référer à l'article 8 que
lorsque les administrateurs sont nommés pour un an ou deux ans au moins,
le gouvernement fixe le traitement du président, de même que les
indemnités à l'occasion, auxquelles ont droit le président
et les autres membres. Le traitement du président ne peut être
réduit. C'est-à-dire que, pour les nominations d'une durée
inférieure à deux ans, nous avons maintenu essentiellement ce que
propose le député de Saint-Laurent. Dans ce cas,
évidemment, nous serions tenus à fixer le traitement dans
l'arrêté en conseil, nous serions donc tenus à un certain
nombre de règles bien précises et qui, certainement, limitent la
marge de manoeuvre du gouvernement. Ce n'est que lorsque l'on veut nommer
quelqu'un pour deux ans, trois ans ou quatre ans, à titre d'exemple, un
président de société en général, qu'il
s'avère assez difficile de le nommer uniquement pour deux ans, parce que
ce président ne voit peut-être pas dans sa nomination la
sécurité qu'il trouverait peut-être dans l'entreprise
privée, puisque, très fréquemment, dans l'entreprise
privée, il existe une rotation à la présidence d'une
société a l'autre, alors qu'il est possible on a
invoqué cet argument qu'une personne compétente dans le
secteur privé hésite à passer au secteur public à
moins d'une certaine sécurité et, de ce fait, on a prévu
la possibilité qu'elle puisse être élue pour un terme
excédant deux ans, c'est-à-dire un an, mais ne dépassant
pas cinq ans.
Nous croyons que dépasser cinq ans est peut-être un peu
exagéré. Donc, dans le cas plus particulier du conseil
d'administration qui est nommé ou élu pour plus de deux ans, nous
donnons la flexibilité à ce moment à la
société de rédiger les conditions de sa nomination
à l'intérieur d'un contrat qui devra cependant être
ratifié par le gouvernement, mais il sera possible à la
société de prévoir le problème des jetons de
présence, lorsqu'il siège à des filiales; il sera possible
de prévoir des cas particuliers. A titre d'exemple, l'ancienne
administration avait prévu que deux administrateurs de REXFOR jouiraient
d'un statut un peu particulier avec un traitement prévu par
arrêté en conseil valable pour je ne sais combien d'années;
par conséquent, l'ancienne administration avait donc prévu des
cas un peu particuliers.
On pourrait critiquer ce que l'ancienne administration a prévu de
faire à l'époque, mais une chose est certaine, c est que nous
préférons que, dans cet article de loi, il y ait justement cette
flexibilité qui puisse permettre à un gouvernement de voir des
modalités un peu différentes pour la nomination de certains
membres du conseil d'administration, ne serait-ce que parce que l'on voudrait
que ce membre du conseil d'administration se consacre davantage à
I'administration de la société, y consacre plus de temps et que,
à ce moment, on veuille inscrire dans le contrat qui le lie à la
société, non pas simplement le paiement de jetons de
présence, mais possiblement un certain salaire, une certaine
rémunération en échange d'une expertise qu'il va consacrer
à la société. (12 h 15)
Donc, on a gardé une certaine flexibilité. C est nouveau
mais il reste néanmoins ceci devrait rassurer le
député de Saint-Laurent que le contrat n'a d'effet que
s'il est ratifié par le gouvernement, c'est-à-dire que le
gouvernement se réserve un certain contrôle, identique en un sens
à celui qu'il propose, parce que s'il dit que les membres du conseil d
administration, y compris le président, sont nommés pour une
période d'au moins deux et d'au plus cinq ans, il va de soi que
l'arrêté en conseil pourrait également inclure un
détail complet de tous les engagements auxquels l'administrateur
consent, et. par conséquent, pourrait représenter un contrat tout
aussi valable. Certains juristes, comme je le disais, prétendent que ce
contrat, d'ailleurs, est encore plus fort que le contrat que l'on
prétend présenter dans cet article.
Par conséquent, je ne vois vraiment pas d avantage, d'autant plus
que la proposition du député de Saint-Laurent reste vague,
puisque lui-même dit: Je ne sais pas trop s'il s'agit du président
du conseil d'administration ou du président de la société,
et c'est justement parce qu'il pourrait y avoir un avantage réel
à ce que le
président du conseil d'administration soit distinct du
président de la société. C'est une pratique courante dans
l'entreprise privée et elle repose sur le raisonnement suivant: le
président de la société qui, en même temps, est
président du conseil d'administration, est un peu en conflit
d'intérêts lorsqu'il doit défendre certaines
décisions administratives qu'il a prises face à son conseil
d'administration. Puisqu'il préside à la fois à son
conseil d'administration, c'est donc lui qui donne le droit de parole à
un critique qui va peut-être s'en prendre à certaines
décisions qu'il a prises au sein de la société.
Donc, il peut être intéressant d'avoir un président
de la société distinct du président du conseil
d'administration. Dans le cas présent, le projet de loi le permet. Je ne
dis pas que c'est nécessaire, mais je dis que cela le permet. A nouveau,
c'est au nom d'une certaine flexibilité, d'une certaine souplesse.
Il faut dire également... c'est intéressant parce que le
député de Saint-Laurent a soulevé le fait que le conseil
d'administration est élu par l'actionnaire. Il a dit: Le ministre des
Richesses naturelles perd son pouvoir sur la nomination des administrateurs.
Oui, M. le Président, j'ai sacrifié ce pouvoir.
M. Forget: Vous devez en être fier.
M. Bérubé: Oui, je dois dire que j'en suis assez
fier, parce que chaque fois qu'on sacrifie une once, une miette de son pouvoir,
certains petits politiciens s'en pensent diminués, alors qu'au
contraire, lorsqu'on le fait au nom de l'intérêt public, je pense
qu'on devrait en être fier, comme disait le député...
M. Forget: Les premiers seront les derniers.
M. Ciaccia: Vous parlez de compétence, cela veut dire que
le ministre des Finances est plus compétent que vous pour nommer des
administrateurs.
M. Bérubé: Je m'explique, M. le Président.
Pourquoi avons-nous introduit cet élément de droit nouveau?
On sait que le ministre des Finances doit répondre à
l'Assemblée nationale des dépenses des deniers de l'Etat.
Lorsqu'une société d'Etat est inefficace, c'est le ministre des
Finances qui devra présenter dans son budget, des crédits
supplémentaires pour pouvoir couvrir le déficit de la
société.
Mais, lorsqu'il se choque et qu'il dit: Cela n'a pas de maudit bon sens,
cela fait cinq ans que cette société me fait des déficits
année après année, je suis l'actionnaire, c'est moi qui
encaisse, qui éponge le déficit sur le fonds consolidé; il
doit y avoir des changements.
S'il n'existe pas la collaboration qui devrait normalement exister entre
le ministre des Finances et le ministre titulaire, le ministre des Finances se
voit les mains entièrement liées puisque ce n'est pas lui qui
fait les recommandations au Conseil des ministres concernant la nomination.
C'est un cas relativement académique, puisque dans un
gouvernement qui se respecte, il devrait exister une harmonie suffisamment
grande entre les différents ministres et le premier ministre, de
manière que ces questions puissent se résoudre.
Mais, il faut quand même reconnaître que la nature humaine
étant ce qu'elle est... le député de Saint-Laurent le
reconnaîtra.
M. Ciaccia: Vous voulez parler jusqu'à la fin. M.
Forget: Ce qu'il ne faut pas entendre.
M. Ciaccia: Vous ne m'avez pas donné la chance... Ce n'est
pas une obstruction systématique que vous faites?
M. Bérubé: Dans ce cas particulier, je pense qu'il
est nécessaire que le ministre des Finances ait un droit de regard sur
les gens qu'il va choisir au conseil d'administration, puisque ce conseil
d'administration devra gérer financièrement cette
société sur une base rentable. En même temps, cela fait
ressortir l'objectif de notre Société nationale de l'amiante.
Nous voulons en faire une société qui fonctionne sur des bases,
des critères économiques de rentabilité. Nous voulons que
cette société doive rendre des comptes au ministre des Finances
et que les administrateurs sachent qu'effectivement, leur actionnaire est
véritablement le ministre des Finances, parce que nous avons
présentement la situation assez bizarre d'une réunion
d'actionnaires parce que nous avons des réunions d'actionnaires
chaque année où le conseil d'administration vient
rencontrer le ministre des Finances, vient faire rapport au ministre des
Finances, mais le ministre des Finances peut poser toutes les questions qu'il
voudra, de toute façon, ce n'est pas lui qui, s'il est en
désaccord avec le conseil d'administration pourra,
éventuellement, changer le conseil d'administration, puisqu'il est le
ministre des Richesses naturelles. Cela m'apparaît un peu arbitraire.
M. Forget: Cela fait aussi ressortir que le ministre est un cocu
content.
M. Bérubé: Ah bien là, c'est un point de
vue! Cependant, dans le cas de cette loi, nous avons introduit un article. Un
article qui donne un pouvoir de directive au ministre des Richesses naturelles.
Donc, donne un pouvoir extrêmement grand sur les objectifs, sur les
orientations de la société, en ce sens, marque de façon
beaucoup plus ferme le rôle du ministre des Richesses naturelles en ce
qui a trait à l'évolution de la Société nationale
de l'amiante.
C'est donc un aspect important. Le député de Saint-Laurent
a raison de souligner que c'est peut-être du droit nouveau qu'il a
introduit. Il l'a souligné, je pense, dans la Régie de
l'assurance-maladie, et si effectivement il est à l'origine de ce
droit nouveau, je l'en félicite. Ce jour-là, il a fait
montre d'un sens politique aigu, d'un souci de la res publica qui est louable.
Je dois dire qu'il ne iaut pas rejeter tout ce qui est de droit nouveau, au
contraire. Parfois du droit nouveau peut être intéressant.
A partir du moment ou le ministre des Finances détient les
cordons de la bourse, il doit éponger les déficits et
récupérer les profits de ces sociétés d'Etat, il me
paraît normal que, comme actionnaire il est toujours
considéré comme actionnaire il puisse effectivement jouer
son rôle d'actionnaire et avoir une certaine autorité quant
à la nomination. Je me dois cependant de dire que sa décision
doit encore faire l'objet d'un arrêté en conseil ou d'un
décret ministériel, de-vrais-je dire, en bon français.
A ce moment, le contrat lui-même doit être ratifié
par le gouvernement et également dans le cas des membres du conseil
d'administration élus en vertu de l'article 8, c'est le gouvernement qui
fixe le traitement du président de même que les indemnités.
En d'autres termes, le ministre des Richesses naturelles a toujours l'occasion,
au Conseil des ministres, de faire valoir son argumentation et à ce
moment, le Conseil des ministres peut trancher. Je pense que le premier
ministre peut également arbitrer.
Ce que nous avons voulu faire, c'est donner au ministre des Finances un
certain contrôle sur la profitabilité de l'entreprise, sur le
rendement économique de l'entreprise, en lui gardant un contrôle
au niveau de la nomination, ou du moins, de la sélection de ses
représentants. Il ne fait pas de doute, cependant, qu'un bon ministre
des Finances... et à plusieurs reprises notre ministre des Finances
s'est adressé à moi pour me demander des suggestions de
nomination dans différentes sociétés...
M. Forget: C'est bien gentil!
M. Bérubé: ... parce que justement, le
présent gouvernement travaille en équipe et ce que nous
réussissons à faire comme gouvernement...
M. Forget: Un gars aimable, comme...
M. Bérubé: ... nous pensons que le Parti liberal
devrait l'imiter. Je suis absolument d'accord qu'il n'y aura aucun
problème si jamais nous avions M. Ryan premier ministre, parce que
sachant sa tendance dictatoriale à mener, de toute façon ses
ministres n'auront plus rien à dire dans la gestion quotidienne du
gouvernement. M. Ryan prendra toutes les décisions, c'est d'ailleurs ce
qu'il faisait quand il était au Devoir. Il continuera, sans doute,
puisqu'on les voit déjà à plat ventre devant le chef. Je
continue, M. le Président...
M. Forget: Oui, encore cinq minutes. M. Ciaccia: Regardez
l'horloge.
M. Forget: On voit que le son voyage plus vite que la
lumière.
M. Bérubé: Je vois M. le Président, que j'ai
couvert l'ensemble des points que je voulais soulever. Par conséquent,
je souligne, malheureusement, que la modification proposée par le
député de Saint-Laurent, va à l'encontre de l'esprit de
I'article que nous avons inscrit ici dans le projet de loi et par
conséquent, comme gouvernement, avec une certaine logique, je pense,
nous devrons nous opposer aux amendements tels que présentes.
M. Grégoire: M. le Président, une question de
règlement sur l'article 77 qui dit qu'une motion non annoncée
d'ajournement du débat peut être faite en tout temps. Je voudrais
la proposer à ce moment-ci étant donné qu'il ne reste que
trois minutes et que ce sont les trois dernières minutes de cette
commission qui siège déjà depuis le 16 mars. Je voudrais
la présenter justement pour permettre à chacun,
peut-être...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac, pour présenter une motion il faut
avoir le droit de parole. Au préalable j'avais reconnu M. le
député de Mont-Royal.
M. Grégoire: Je vous l'ai demandé, M. le
Président. Je pense que vous n'aviez reconnu personne, M. le
Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II y a
environ quinze minutes, le député de Mont-Royal m avait
demandé la parole.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président.
M. Grégoire: Je croyais que c'était en tout
temps.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): En tout
temps, c'est-à-dire en tout temps lors de nos travaux pour autant qu'on
ait le droit de parole, évidemment.
M. Grégoire: M. le Président, je demandais
cette...
M. Ciaccia: M. le Président, non...
M. Grégoire: ... Seulement une question pour
m'expliquer.
M. Ciaccia: Non, M. le Président, j'ai le droit de parole,
je I'ai demandé...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Frontenac...
M. Grégoire: C'était simplement pour essayer, au
cours des trois dernières minutes de la commission...
M. Ciaccia: II ne me reste que quelques minutes avant la fin de
la commission, alors je voudrais faire quelques remarques sur l'amendement
suggéré par le député de Saint-Laurent. Le ministre
parle d'innovation dans le domaine juridique, mais il ne faudrait pas
faire...
M. Grégoire: ... donner le droit de parole avant que
quelqu'un...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): A
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Grégoire: M. le Président, seulement une
question de règlement.
M. Ciaccia: II ne faudrait pas...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): La seule
chose qu'on n'a pas faite dans cette commission, depuis le début
on est passé par toutes les gammes du règlement et de la
procédure c'est d'expulser un député, et je serais
bien malheureux de le faire à 12 h 27.
M. Grégoire: M. le Président, est-ce que je peux
soulever une question de règlement? Est-ce que le règlement me le
permet?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Une
question de règlement, oui.
M. Ciaccia: M. le Président, cela c'est pour brûler
les dernières trois minutes, n'est-ce pas?
M. Grégoire: M. le Président, sur une question de
règlement...
M. Ciaccia: Evidemment, vous m'aviez reconnu le droit de parole,
et je pense que c'est une tactique du député de Frontenac...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Quelle
est votre question de règlement?
M. Grégoire: M. le Président, si vous me dites, sur
la question de règlement, que vous aviez donné, il y a quinze
minutes, le droit de parole...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): II n'y a
pas de question de règlement là-dessus. M. le
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: II y a une distinction, M. le Président, entre
innovation et confusion. L'article 6, tel que rédigé, crée
la confusion. Cette confusion, on l'a vu, était exprimée par la
question du député de Bourassa quand il a demandé au
député de Saint-Laurent:: Que feriez-vous avec le
président? On ne semble pas faire la distinction entre un administrateur
et quelqu'un qui occupe un poste. Un administrateur, par sa nature même,
on ne peut pas dire, tel que le dit l'articie 6. qu il sera lié pour
deux ans pendant toute la durée du contrat. Je voudrais même vous
référer à I'article 23 du projet de loi. L article 23 fait
référence à certains articles de la Loi des compagnies qui
ne s appliquent pas à la société. Cela veut dire, par
implication, que les autres articles s'appliqueraient. Les autres articles
concernent la façon dont le conseil d'administration est nommé et
les droits qu'une société a à I'égard de ses
administrateurs. Un de ces droits est de les changer, d'accepter leur
démission. C'est la nature même du rôle d'un administrateur,
c est un rôle de fiduciaire, c'est un trusteeship et pour innover comme
on le fait dans I'article 6, cela va complètement à l'encontre
des travaux d un administrateur. L'administrateur, par sa nature même,
n'est pas nommé à temps plein. Le gouvernement doit se garder le
droit de changer les administrateurs quand les conditions vont changer, mais si
I'on en juge par la façon dont est rédigé I'article 6, il
ne semble pas faire cette distinction entre un administrateur et quelqu un qui
occupe un poste. Ce sont des contradictions qui existent non seulement dans le
projet de loi lui-même, mais qui existent entre le projet de loi et la
Loi sur les compagnies. Je pense que le ministre n a pas répondu
à ces questions sur le rôle des administrateurs et les droits que
la société s'est elle-même donnés d'après la
Loi des compagnies. Cela termine le temps.
M.Bérubé: M.lePrésident, je voudrais
souligner la coopération que nous avons reçue de nos amis de
l'Opposition tout au long de ces longs travaux.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Avant de
déclarer nos travaux terminés, j'aimerais rappeler que le
député de Bourassa devra faire rapport à la Chambre, des
travaux de notre commission, conformément à une motion qui a
été adoptée par la Chambre.
Je voudrais remercier tous les membres de la commission parlementaire
pour la collaboration qu'ils ont démontrée, à l'occasion,
au cours de cette commission parlementaire. Là-dessus, j'ajourne les
travaux de cette commission sine die.
(Fin de la séance à 12 h 30)