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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mardi 16 mai 1972 - Vol. 12 N° 28

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Société d'aménagement de la baie James


Journal des débats

 

Commission permanente des Richesses naturelles

Société d'aménagement de la baie James

Séance du mardi 16 mai 1972

(Seize heures quatorze minutes)

M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

Préliminaires

M. LACROIX: M. le Président, m'est-il permis, au début de cette réunion, de suggérer que le nom de M. Larivière soit remplacé par celui de M. Bourassa; que celui de M. Arsenault soit remplacé par M. Saint-Pierre; celui de M. Mailloux par M. Harvey (Chauveau); et que celui de M. Massé soit remplacé par celui de M. Garneau?

M. LE PRESIDENT: Adopté?

Est-ce que d'autres partis ou d'autres représentants auraient des changements à faire sûr la liste régulière?

M. ROY (Beauce): Nous aurons peut-être un changement à faire ce soir seulement.

M. LE PRESIDENT: II faut le faire au début de la séance. On comprendra bien ça.

M. ROY (Beauce): Après l'ajournement de la séance, c'est-à-dire demain.

M. LE PRESIDENT: Mais au début de la séance.

M. ROY (Beauce): Très bien.

M. LACROIX: Je suggère M. Prudent Car-pentier, député de Laviolette, comme rapporteur de la commission.

M. ROY (Beauce): Adopté.

M. LE PRESIDENT: Mes commentaires, messieurs, seront un simple mot de bienvenue à tous ceux qui ont voulu se présenter devant cette commission qui doit entendre les représentants de la Société de développement de la baie James cet après-midi, à cette séance, et aux heures ou aux jours qui suivront.

Puisque cela a déjà été fait dès jeudi aux représentants de l'Hydro-Québec, je voudrais ajourd'hui, au nom de la commission, souhaiter la bienvenue à M. Nadeau, président de la Société de développement de la baie James et aux autres directeurs de cette société, ainsi qu'à tous les membres de son personnel qui sont ici présents.

Nous avons établi certaines façons d'agir, et puisque nous continuons la séance déjà engagée jeudi, je me dispenserai aujourd'hui de demander aux chefs de faire des commentaires dès le début, exception faite — je crois que ce serait normal — du premier ministre qui est chef du gouvernement. S'il a un commentaire à faire avant le début de la séance, nous passerons, immédiatement après, à M. Nadeau qui commencera à donner les explications et les détails à la commission.

Une fois que M. Nadeau aura terminé son exposé — ou quiconque voulant compléter l'information donnée durant son exposé — nous entendrons les chefs de parti ou les représentants des partis qui voudront faire des commentaires.

Ensuite nous commencerons les questions. Il est entendu que tous les députés — et je pense que c'est une tradition qu'on a établie depuis le début de la session— de cette Chambre ici présents ont le droit de parole, mais lorsqu'il s'agira d'un vote, si le cas se présente, les seuls députés qui sont membres officiels auraient le droit de voter à main levée.

Si on s'entend sur cet exposé, nous allons commencer immédiatement et je demande au premier ministre s'il a des commentaires à faire au début.

M. BOURASSA: M. le Président, une brève déclaration, mais non moins importante. Je voudrais souhaiter d'abord, comme vous l'avez fait, au nom de tous, la bienvenue aux dirigeants de la Société de développement de la baie James, ainsi qu'à ceux de l'Hydro-Québec et les remercier à l'avance de leur travail considérable en vue de mener à bon terme l'important projet de la baie James.

Il y a maintenant un an, j'annonçais la décision du gouvernement de procéder à l'aménagement et à la mise en valeur des ressources exceptionnelles de la région de la baie James. Peu de temps après, l'Assemblée nationale adoptait la loi 50, créant la Société de développement de la baie James. Beaucoup de choses ont été dites et écrites au sujet de ce projet. Des questions nombreuses ont été soulevées. Nous avons voulu garder une certaine distance vis-à-vis des débats plus ou moins informés ou intéressés qui se sont ainsi engagés. Notre attitude a été de miser sur le sérieux, la compétence et le travail des experts à qui la Société de développement et l'Hydro-Québec confiaient l'examen technique de ce projet.

Aujourd'hui, nous ne pouvons que nous féliciter de l'attitude que nous avons maintenue. En effet, le gouvernement a reçu une recommandation conjointe de la Société de développement et de l'Hydro-Québec. Appuyée sur des expertises sérieuses, cette recommandation est à l'effet de commencer, dans une phase initiale, l'aménagement de la région de la baie James par le complexe de la rivière La Grande, les études et les recherches ayant démontré qu'il s'agit là du choix le plus avantageux et le

plus économique, tenant compte des alternatives et des multiples aspects que comporte le projet d'aménagement de la baie James. Le coût du complexe La Grande qu'on nous a recommandé est de $5.8 milliards, en tenant compte de son actualisation en 1980.

M. Pierre Nadeau, président de la Société de développement de la baie James, et M. Roland Giroux, président de l'Hydro-Québec, vous exposeront les raisons qui les amènent à formuler cette recommandation. Par la suite, avec leurs collaborateurs, ils vous apporteront toutes les explications additionnelles voulues. J'ajoute simplement, en terminant, que, quant à nous du gouvernement, nous sommes convaincus que ce projet de la baie James apportera des avantages économiques et sociaux considérables pour les citoyens de toutes les régions du Québec.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. le premier ministre.

M. BOURASSA: M. le Président, je ne sais pas si on préférerait passer aux explications immédiatement. Pour ce qui a trait aux documents qui pourraient être disponibles, j'en ai discuté avec M. Giroux.

A cause de certains facteurs, à cause de certaines conséquences que pourrait avoir la publication de certains documents nous avons décidé, pour l'instant, de ne pas les rendre publics. Je ne sais pas si M. Giroux aurait des commentaires à ajouter sur cette décision.

M. GIROUX: Dans certains de ces documents, il y a des choses qui pourraient impliquer des taux de base. Après avoir fait tous les exposés, je ne sais pas si le dépôt de ces documents sera nécessaire. Après les exposés que.nous ferons, nous jugerons s'il y a nécessité ou non de les déposer.

M. LOUBIER: Si le président me permet, est-ce que le président de l'Hydro-Québec pourrait nous donner un exemple qui n'est pas spécifiquement contenu dans les documents qui sont secrets mais qui pourrait relever de l'intérêt public ou qui pourrait s'avérer tel que ce ne serait pas profitable, pas avantageux ou pas prudent à ce stade-ci d'en dévoiler la teneur?

Je ne lui demande pas de prendre un élément qui est contenu dans les rapports que l'on veut garder secret, sous prétexte qu'il y va de l'intérêt public, mais un type d'exemple qui démontrerait qu'il vaut mieux garder cela secret.

M. GIROUX: Dans certains de ces documents, supposons qu'il y aurait une estimation des taux de salaire que nous devons payer. Pour entrer en négociation, il est assez difficile de dévoiler cela.

M. LOUBIER: C'est-à-dire une projection des taux de salaire répartis sur X années?

M. GIROUX: Ce sont des choses comme cela; sur la teneur même des documents, il n'y a rien de secret.

M. LOUBIER: Est-ce qu'on tient compte de ces éléments dans l'estimation de $5.8 milliards?

M. GIROUX: Certainement.

M. LE PRESIDENT: Faisant suite à l'impartialité que j'ai annoncée dès le début, je me rends compte qu'à ce moment-ci on est passé un peu outre. On m'a demandé la parole ici. Est-ce que M. Joron ou M. Laurin...

M. LAURIN: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Un instant, excusez-moi.

M. LAURIN: ... avant de...

M. BOURASSA: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît! La parole est demandée ici.

M. LAURIN: Est-ce qu'on pourrait nous expliquer cette décision du premier ministre?

M. BOURASSA: Ce n'est pas une décision unilatérale. J'assume totalement mes responsabilités.

M. JORON: ... libéraux.

M. BOURASSA: Ce n'est pas le Parti québécois qui va me faire modifier mon point de vue là-dessus.

M. ROY (Beauce): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Avant de procéder, je demanderai aux photographes, puisque nous avons été assez tolérants, dans les quelques instants qui ont précédé, pour permettre les photographies, de bien vouloir nous dispenser des éclairs qui non seulement nous gênent, mais vont nous distraire de ce qui va se dire. S'il y avait, plus tard, exception faite de "flashes", exposition de dessins, de cartes ou d'autres choses, nous vous donnerons l'occasion de prendre les photographies nécessaires. Pour le moment, s'il vous plaît, voulez-vous vous restreindre...

Le député de Beauce.

M. ROY (Beauce): Merci, M. le Président. Avant que nous ayons eu le temps de poser une première question et d'entendre le premier rapport par MM. Nadeau et Giroux, on nous parle de documents secrets. Je comprends qu'il y a des choses, à un moment donné, dans un gouvernement, dans toute administration publi-

que ou privée, qui ne sont pas de nature à être dévoilées au grand public, surtout lorsqu'il s'agit de salaires ou de négociations. Mais, aujourd'hui, étant donné que cette commission parlementaire était attendue avec impatience depuis plusieurs semaines, pour ne pas dire depuis plusieurs mois, je pense qu'il est important — je le demande surtout au premier ministre — de faire toute la lumière possible sur ce projet. Je pense que le gouvernement a, au cours de cette séance, à nous prouver que la réalisation du projet d'aménagement de la baie James est avantageuse pour les Québécois ou s'il ne s'agit que d'une aventure dans laquelle le gouvernement veut s'orienter de plus en plus, et de façon ténébreuse, pour remplir certains engagements politiques qu'il aurait pris.

Je ne veux pas accuser le gouvernement, mais je pense qu'il est extrêmement important que toutes les cartes soient mises sur la table de façon que chacun des membres de la commission puisse en tirer le plus de renseignements possible pour que nous soyons en mesure de juger, de part et d'autre. Je pense qu'il s'agit d'un projet d'une importance capitale pour le présent gouvernement. Quand je dis gouvernement, je ne parle pas d'un parti politique; je parle du Parlement, de tous les membres de la Chambre, sans distinction de partis politiques, parce que c'est un projet qui concerne l'avenir de la province de Québec et le bien-être des Québécois.

Tous les documents devraient...

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse auprès du député, mais je dois, je pense, à ce moment-ci, l'interrompre. J'ai déjà énoncé, au début, que nous suivrons une certaine procédure. Si vous aviez une objection — c'est pour ça que je vous ai donné la parole — c'était de l'exprimer. Je ne veux pas, à ce moment-ci, entendre un discours, soit d'opposition ou d'application de principes, etc.

C'est l'article 181 de notre règlement qui me gouverne. Cet article ne peut être débattu. Il s'agit d'appliquer tout simplement ce que dit l'article 181. D'ailleurs, j'ai pris cet article sous réserve jeudi et, après consultation avec le président de la Chambre, on m'informe qu'une régie gouvernementale est assujettie à l'article 181, où on mentionne le mot "gouvernement".

Cette décision ne peut être débattue. Vous avez fait votre commentaire et je pense que, pour le moment, si on peut donner la même occasion de s'opposer ou d'affirmer une position déjà énoncée, je demanderai au député de Bourget s'il a un commentaire.

M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais simplement dire ceci avant la réponse. Nous n'avons pas dit que c'était une décision finale. Il y avait toute une série de documents qu'on nous a remis pour la fin de semaine. J'en ai discuté avec les autorités. S'il y avait des objections à ce que ces documents soient rendus publics, ils pourront l'être peut-être après la discussion, pendant la discussion. On me dit que plusieurs documents seront rendus publics au cours de la discussion. On m'a soulevé quelques exemples touchant les taux horaires, les taux d'intérêt qu'on prévoit ou les taux horaires, cela pourrait compliquer les négociations.

Il y a peut-être moyen d'expurger ces documents de certaines données comme celles-là et les rendre publics. Mais cela ne pouvait pas se faire en fin de semaine.

M. LAURIN: M. le Président, je ne veux pas faire de discours, je ne veux pas faire de commentaires non plus. Je veux simplement contester énergiquement la décision qu'a prise aujourd'hui le premier ministre de ne pas nous donner les documents dont nous estimons avoir un besoin essentiel pour qu'on ait une discussion cohérente, claire et éclairée sur un projet d'une aussi grande envergure.

J'aimerais que vous nous permettiez de discuter avec le premier ministre des raisons qu'il a présentées. Nous aimerions présenter des contre-arguments.

M. BOURASSA: D'accord.

M. LAURIN: Ce n'est pas Un commentaire. C'est simplement une discussion préalable sur des matériaux dont nous estimons avoir besoin pour discuter. J'aimerais bien que vous nous donniez des directives à ce sujet.

M. BOURASSA: Je suis ouvert à la conviction. Si vous avez des bons arguments en réponse à ceux qui nous ont été apportés, tant mieux.

M. LAURIN: Nous allons essayer d'en présenter, M. le Président, avec votre permission.

M. LE PRESIDENT: Au fur et à mesure ou immédiatement?

M. LAURIN: Non, tout de suite, parce que c'est préalable à toute discussion. Comment voulez-vous qu'on discute si on n'a pas les matériaux qu'on a demandés et dont on estimait avoir besoin?

M. LOUBIER: Est-ce que je pourrais faire une contre-proposition...

M. LE PRESIDENT: Oui, bien sûr.

M. LOUBIER: ... au désir exprimé par le député de Bourget? Est-ce qu'il ne vaudrait pas mieux, dans les circonstances, écouter les propos du président de la Société de développement de la baie James et, par la suite, considérer la nécessité de demander le dépôt des documents?

M. LAURIN: M. le Président, de toute façon, nous aurons besoin de ces documents.

M. LOUBIER:Oui.

M. LAURIN: D'ailleurs, si vous vous le rappelez bien, à la dernière réunion, le président de l'Hydro-Québec ne s'était aucunement opposé au dépôt de ces documents. Il laissait la responsabilité de leur publication entièrement au gouvernement. Il nous avait même dit, à des questions que nous posions sur les activités normales de l'Hydro-Québec: Je ne répondrai pas aujourd'hui à cette question. Je vais déposer, la prochaine fois, des programmes d'aménagement comprenant les activités régulières de l'Hydro-Québec, autant que celles de la baie James. Cela va comprendre tout le programme de l'Hydro-Québec.

Donc, on voit bien qu'il...

M. BOURASSA: Bien oui, nous allons en déposer.

M. LAURIN: ... n'était pas contre le dépôt de ces documents.

M. BOURASSA : II y a des documents qui vont être déposés, mais ils vont être déposés avec les explications de ceux qui les ont écrits.

M. LAURIN: Si je comprends bien ce que vous avez dit au début, vous vous êtes refusé à publier tout document.

M.BOURASSA: Non, non. Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. LAURIN: D'ailleurs, M. le Président, l'an dernier...

M. BOURASSA: M. le Président, ce que j'ai dit — je m'excuse, si le député me permet de faire une correction — c'est que je ne pouvais pas accepter, tout de suite, de publier tous les documents qui avaient été demandés.

M. LAURIN: D'accord. Mais là, vous n'en publiez aucun.

M. BOURASSA: Certains d'entre eux seront déposés à l'occasion de la discussion.

M. LAURIN : Ce n'est pas ce que nous avons entendu tout à l'heure. Vous avez dit...

M. BOURASSA: Je m'excuse si j'ai été mal compris.

M. LAURIN: ... que c'était une décision conjointe que vous aviez prise avec les dirigeants de l'Hydro-Québec de ne rien répondre aux demandes que nous avions formulées.

M. BOURASSA: Je crois que le député m'a mal compris, M. le Président. J'ai dit qu'il y avait certains documents dont je ne pouvais pas, immédiatement, dire qu'ils seraient rendus publics.

M. LAURIN: Par ailleurs, M. le Président, si ces documents étaient déposés immédiatement, nous pourrions les étudier assez rapidement, le plus rapidement que nous pourrions. A une séance ultérieure, nous pourrions nous en servir pour poser des questions aux représentants de la baie James et aux représentants de l'Hydro-Québec. Cela nous mettrait en bien meilleure posture pour accomplir notre devoir. C'est un devoir très sérieux que nous remplissons aujourd'hui.

M. BOURASSA: Jeudi, nous pourrions, peut-être, puisque les séances reprendront mardi prochain — je n'ai pas eu le temps, je dois l'avouer, de discuter de cela très longuement avec les autorités compétentes — voir à vous remettre ces documents.

M. LAURIN: Encore une fois, M. le Président, je voudrais contester le fond même de cette décision. L'an dernier, lorsque nous nous sommes réunis, on nous avait donné d'abord le rapport de l'Hydro-Québec, qu'on nous avait, d'ailleurs, promis pour aujourd'hui et qu'on n'a pas apporté. On nous avait déposé, également, toutes sortes d'études: une étude de ABBDL, une étude de Rousseau, Warren, Sauvé, des études de l'Hydro-Québec, qui nous avaient permis, quand même, de nous renseigner, à l'avance, sur les travaux effectués et de poser des questions.

M. BOURASSA: Nous avions déposé une synthèse, M. le Président. Certaines parties avaient été enlevées pour fins d'intérêt public.

M. LAURIN : Bon, justement, si on avait fait la même chose, au moins, aujourd'hui!

M. BOURASSA: Nous n'avons pas eu le temps, M. le Président. Il y a des documents qui ont été remis par la société Ebasco.

M. LAURIN: Oui.

M. BOURASSA : Les responsables n'ont pas eu le temps d'enlever les parties qui...

M. LAURIN: Vous auriez, quand même, pu enlever juste des taux qui semblent faire objection.

M. BOURASSA: Cela a à peu près un pied de hauteur.

M. LAURIN: Ces taux, vous auriez quand même pu les enlever. D'ailleurs, c'est d'autant plus contestable que, là, on veut nous faire accepter une recommandation comme un acte

de foi; on nous demande de donner un blanc-seing.

M. BOURASSA: C'est faux.

M. LAURIN: II semble bien, puisque vous ne voulez pas nous fournir les matériaux...

M. BOURASSA: Attendez donc que la discussion commence. Vous commencez tout de suite à faire de la partisanerie.

M. LAURIN: Vous ne voulez pas fournir les matériaux sur lesquels on peut se baser pour faire nos études.

M. BOURASSA: Attendez que les explications soient données.

M. LAURIN: Vous nous annoncez la décision de l'Hydro-Québec, à savoir qu'on doit commencer par la rivière La Grande alors que, l'an dernier, dans les rapports préliminaires qui avaient été déposés, on faisait une recommandation tout à fait inverse, à savoir qu'il fallait commencer par NBR.

M. BOURASSA: Toutes les explications...

M. LAURIN: Si, en moins d'un an, on a changé, cela indique bien qu'il est important pour nous de lire les études, de lire les matériaux pour justifier un pareil renversement de stratégie. Ce n'est qu'une raison additionnelle.

M. BOURASSA: Vous aurez toutes les explications. J'ai dit, M. le Président, si le député est de bonne foi, quand même, que...

M. LAURIN: Bien sûr que je suis de bonne foi, et j'entends bien le prouver au cours des discussions, M. le Président.

M. BOURASSA: Si le député est de bonne foi, il devra comprendre que nous n'avons pas eu le temps, au cours de la fin de semaine, d'expurger les documents que nous avons reçus il y a quelques jours, qui ont plusieurs milliers de pages, de certaines données qui pourraient nuire, éventuellement, à la réalisation du projet. Je donne un exemple: les taux d'intérêt, notamment. Si nos financiers savent qu'on prévoit tel taux d'intérêt, je pense que cela ne facilitera pas le financement du projet.

Je pense qu'il est peut-être facile d'expurger ces parties mais on demande un peu de temps de la part des membres de l'Opposition. Les séances vont continuer la semaine prochaine. Entre-temps, ce soir, demain après-midi et jeudi, il y aura toutes les explications, avec beaucoup de documents qui seront déposés.

Si le député veut commencer un grand débat sur une question de principe qui, à mon sens, n'existe pas, évidemment on perdra encore du temps. Mais je lui demande de comprendre la position du gouvernement là-dessus. Ce n'est pas une décision de principe. H faut nous donner le temps d'enlever de ces documents les éléments qui peuvent nuire à la réalisation du projet, quitte à en donner beaucoup d'autres entre-temps.

M. LAURIN: Mais, M. le Président, le premier ministre veut nous présenter ces chiffres, taux de base et taux horaires, comme des chiffres définitifs, alors que ce sont des taux qui ont été calculés comme des hypothèses par l'Hydro-Québec ou par la Société de la baie James. On sait très bien que des chiffres, comme ceux-là, qui ont circulé dans des études antérieures, que nous avons pu voir l'an dernier, qui circulent dans les revues, qui circulent dans les journaux, sont révisables et peuvent être révisés, selon la conjoncture. Je ne crois donc pas que ces chiffres aient un caractère intangible, sacré, et puissent donner des renseignements tellement essentiels et tellement dangereux pour les négociations futures quant à un projet qui, de toute façon, ne sera réalisé qu'à partir de 1980, 1981.

M. BOURASSA: De toute façon, c'est votre avis.

M. LAURIN: II y a bien de l'eau qui a le temps de couler sous les ponts, d'ici là.

M. BOURASSA: Mais je vous dis qu'il y a des documents qui vous seront distribués au cours de l'après-midi et au cours de la soirée. Voulez-vous 10,000 pages immédiatement, aujourd'hui? Pensez-vous que vous aurez le temps de lire cela?

M. LAURIN: Non, M. le Président. Nous voulons les documents qui peuvent nous aider à remplir notre devoir, comme c'est notre devoir de le faire.

M. BOURASSA: Vous allez les obtenir.

M. LAURIN: C'est difficile à accepter, que vous répondiez d'une façon négative à ces demandes.

M. BOURASSA: C'est faux, je ne réponds pas d'une façon négative. Je me pose des questions sur la bonne foi du député. Je ne réponds pas d'une façon négative. Je lui demande de donner le temps au gouvernement, dans les jours qui viennent, d'enlever les éléments susceptibles de nuire à la réalisation du projet. Les séances de la commission peuvent durer plusieurs semaines. Quelle différence y a-t-il entre aujourd'hui et jeudi?

M. LAURIN: Comment expliquer que l'an dernier vous ayez déposé les rapports de plusieurs compagnies d'ingénierie et de l'Hydro-

Québec et qu'aujourd'hui vous vous refusiez à déposer des rapports comme celui de...

M. BOURASSA: J'invoque le règlement, M. le Président, parce que j'ai déjà répondu à cette question. J'ai, l'an dernier, déposé les documents après en avoir éliminé certaines parties — cela fait trois fois que le député revient sur ce sujet — après avoir pris le temps de voir quelles parties pouvaient nuire à la réalisation du projet.

C'est exactement la même attitude que je veux avoir cette année.

M. LAURIN: Quels rapports vous refusez-vous à déposer parmi ceux que nous avons demandés?

M. BOURASSA: J'ai dit que nous n'éliminions aucun rapport. Il est possible que nous puissions arriver à la conclusion qu'après en avoir enlevé certaines parties, nous allons tous les déposer. Même s'ils sont très complexes et très volumineux, nous n'avons absolument rien à cacher, bien au contraire. Et vous allez voir que les arguments que vous avez apportés contre le projet de la baie James vont être démolis en petits morceaux. Mais nous voulons avoir le temps nécessaire pour fins d'intérêt public — pas pour fins gouvernementales — d'éliminer les parties qui pourraient nuire. C'est tout.

M. LAURIN: En tout cas, nous vous demandons simplement de ne pas nous forcer à faire un acte de foi absolument sacré et à donner un blanc-seing absolu sans preuve à un gouvernement qui, depuis un an, a quand même montré que sur ce projet il y avait encore beaucoup de choses à révéler avant qu'une décision puisse être prise dans l'intérêt du Québec.

Et si cette fin de non-recevoir que vous avez opposée au début à notre demande devait persister sous une forme ou sous une autre, je pense bien que nous serions obligés — et la population aussi — d'en tirer nos conclusions.

M. BOURASSA: Vos conclusions sont nettement prématurées.

M. LAURIN: On verra bien.

M. LOUBIER: Est-ce que le député de Bourget accepterait qu'au lieu de savoir ce qu'ils ont à cacher, pour le moment on sache ce qu'ils ont à dévoiler? Je pense que ça irait un petit peu plus rapidement.

M. LAURIN: Je suis bien prêt à écouter".

M. LE PRESIDENT: La présidence est saisie du fait qu'il y a de la part du chef de l'Opposition officielle des commentaires et des questions, et que les réponses qui ont été données ont été reçues favorablement. J'ai accepté aussi de la part du député de Beauce une objection à la procédure et au fait qu'il n'y avait pas de dépôt de documents dès le début.

J'ai aussi noté les observations du député de Bourget en ce qui concerne le même sujet. D'autre part, le premier ministre est le seul responsable en l'occurrence du dépôt de documents, selon l'article 181. J'ai aussi reconnu ses commentaires au sujet de leur dépôt éventuel, au fur et à mesure et au cours de cette séance.

Je pense, messieurs les membres de la commission, que nous devons immédiatement entendre M. Nadeau. La parole est à M. Nadeau.

M. GIROUX: M. le Président, avant de donner la parole à M. Nadeau, nous avions fait la promesse de déposer à l'ouverture de la session le texte de notre rapport annuel. Est-ce que nous pouvons en faire la distribution?

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il peut être distribué, même au cours des commentaires que fera M. Nadeau, puisque déjà le bilan a été le sujet de la discussion de jeudi. M. Nadeau.

Exposé général de M. Pierre Nadeau

M. NADEAU: M. le Président, M. le premier ministre, MM. les membres de la commission, à la suite de la sanction de la loi 50, le 14 juillet 1971, le gouvernement du Québec a procédé à la formation du conseil d'administration de la Société de développement de la baie James.

Au début de septembre, les cinq administrateurs prévus par la loi étaient nommés. Dès le 3 septembre, le conseil tenait sa première réunion. Début octobre, M. Ernst, le vice-président, et moi-même entrions en fonction à plein temps.

Au départ, le bagage de la société consistait principalement en des rapports d'étude faits par trois groupes d'ingénieurs, à savoir le service d'ingénierie de l'Hydro-Québec, la firme Asselin, Benoît, Boucher, Ducharme, Lapointe et la firme Rousseau, Sauvé, Warren et associés. Les rapports de ces études et la décision même du gouvernement du Québec de lancer sans délai le projet de développement du territoire de la baie James nous imposaient de procéder immédiatement à l'octroi de contrats de construction de la route permanente de Matagami à la rivière Rupert.

Autrement, il aurait été impossible d'utiliser dès la première saison les routes d'hiver qui empruntent comme pont les glaces des lacs et des rivières pour le, transport des équipements nécessaires. Un retard de seulement quelques semaines à accorder ces contrats aurait obligé les entrepreneurs à attendre l'hiver 1972-1973 pour monter leurs machines et installer leurs camps, ce qui aurait entrafné un décalage d'un an dans la réalisation de tout le projet.

Dans le but d'éviter cet inconvénient, la Société de développement de la baie James s'est empressée de procéder à la préparation des

appels d'offres ainsi qu'à l'ouverture des soumissions pour la construction de l'infrastructure en utilisant la direction des contrats de l'Hydro-Québec. C'est ainsi qu'entre novembre 1971 et mars 1972 nous avons accordé des contrats de construction de routes permanentes et d'hiver pour un montant de $64, 515,629 et nous avons mis en chantier un aéroport à Matagami, dont le premier contrat s'élève à $1,589,000.

Nous avons entrepris ou fait entreprendre toute une série d'études allant de l'aménagement régional jusqu'à l'inventaire de la faune. Au total, la Société de développement de la baie James a ainsi octroyé des contrats d'étude d'une valeur globale d'environ $1,100,000. Au terme des septs premiers mois de son existence, la Société de développement de la baie James a pu suffisamment identifier les problèmes dans tous les domaines relevant de la coordination du développement global du territoire pour compléter les ordres de priorité de son programme d'étude et d'action des douze prochains mois. Ces priorités sont: l'établissement d'un programme intégré de développement régional et certaines actions concrètes qui en résulteront dans les domaines forestiers, miniers et touristiques; l'étude des problèmes de transport et la conception d'un réseau adéquat de communication; l'étude des problèmes sociaux et écologiques et la prise des mesures conservatrices qui s'imposent dans ces domaines.

Ces études et quelques autres de moindre importance seront menées par des consultants soigneusement choisis pour leur compétence et leur expérience sous le leadership et le contrôle d'un groupe d'experts faisant partie du personnel de la Société de développement de la baie James.

M. LE PRESIDENT: Auriez-vous des copies du texte que vous lisez présentement?

M. NADEAU: Je regrette, M. le Président, on a dû faire des corrections à la dernière minute et les corrections ne sont faites que sur mon texte. On les aura tout de même demain.

M. LE PRESIDENT: Vous verrez peut-être à nous les fournir pour qu'on puisse les distribuer aux membres à ce moment-là. Je vous remercie.

M. NADEAU: Certainement.

Pour l'établissement du programme intégré de développement du territoire, nous avons confié à un important groupe de consultants un mandat d'étude d'une durée de 18 mois. Il s'agit de parfaire l'inventaire des ressources minières, forestières et touristiques disponibles dans le territoire en général et particulièrement dans les zones qui seront inondées, d'envisager, pour ces ressources les marchés locaux, nationaux et internationaux, les capacités de production locales ou voisines et donc, les possibilités d'exploitation économique.

Sans attendre que ces études soient terminées, soit vers la fin de 1973, certaines actions seront prises dont l'économie et l'urgence s'imposent déjà. Dans le domaine forestier, par exemple, nous assumons dès maintenant la responsabilité d'établir, pour les industriels qui s'approvisionnent dans le territoire, des programmes de coupe à court et à moyen terme. Nous coopérerons aussi à l'intensification des programmes de protection contre le feu.

Dans le domaine minier, pour encourager l'exploration par l'entreprise privée, nous avons donné et maintiendrons systématiquement l'avis favorable,prévu par la loi, au jalonnement de concessions minières sur 95 p.c. du territoire, réservant seulement les régions où les travaux publics sont prévus ou celles dont l'inondation relativement prochaine nous impose d'accélérer l'exploration et donc, d'y procéder nous-mêmes ou en collaboration. Par exemple, nous avons l'intention de consacrer environ $500,000, pendant les prochains douze mois, à des recherches géologiques dans le territoire.

Ces actions sont ou seront prises en étroite collaboration avec le ministère des Terres et Forêts, des Richesses naturelles, du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche ainsi qu'avec les organismes paragouvernementaux spécialisés. Par exemple, nous négocions actuellement avec Soquem un programme d'exploration géologique aérien, et sur le terrain, et nous prévoyons dès cette année des forages dans une zone qu'elle nous a recommandée.

Conformément à l'article 16 de la Loi du développement de la région de la baie James, la Société de développement de la baie James et l'Hydro-Québec ont créé, le 20 décembre 1971, la Société d'énergie de la baie James pour mettre en valeur les ressources hydrauliques du territoire. Le conseil d'administration de la Société d'énergie de la baie James est composé de trois représentants de l'Hydro-Québec: MM. Giroux, Yvon Deguise, Paul Dozois, et deux représentants de la Société de développement de la baie James: M. Charles Boulva et moi-même.

Lorsque le législateur a voulu que la Société de développement de la baie James soit actionnaire de la Société d'énergie de la baie James, en vertu de l'article 16, c'était pour assurer la bonne coordination des aménagements hydroélectriques avec le développement global de tout le territoire. C'est dans cet esprit, depuis les débuts, que la Société de développement de la baie James a établi sa collaboration avec la Société d'énergie de la baie James. Grâce aux conclusions des études de normalisation et de maximisation des différents rapports d'ingénierie sur le développement hydro-électrique dans le territoire, études confiées à des firmes de réputation internationale, nous avons été en mesure de soumettre au gouvernement les recommandations sur les modalités de mise en route de l'aménagement des rivières du territoire de la baie James.

Nous estimons, en effet, que l'aménagement du complexe la Grande constitue le choix optimal des points de vue technique, économique, écologique et social. Cet aménagement ne touche en aucune façon le droit foncier des réserves et des établissements indiens du territoire. Il dérange le moins possible les territoires de trappe, de chasse et de pêche des populations autochtones. Il protège les grandes surfaces boisées du sud en vue de leur exploitation future. Il sauvegarde le lac Mistassini dans son état naturel. Nous sommes conscients que ce lac est le plus important, le plus joli et le plus accessible du territoire et que ses régions comportent une flore et une faune uniques en Amérique.

De plus, l'aménagement du complexe La Grande entraîne la mise en oeuvre de la première route au Canada débouchant sur la baie d'Hudson. Il satisfait aux exigences prévues par l'Hydro-Québec, il ouvre un vaste champ de prospection, d'exploration et de mise en valeur de richesses minières actuellement inaccessibles faute de moyens de communication.

Il ne noie qu'une partie limitée, dans une des régions où les forêts sont clairsemées. Il ne submerge que 1,400 acres de jalonnements miniers et aucune route, ni chemin de fer, mine, exploitation, habitation ou camp de pêche existants.

La majorité des forêts qui seront inondées est située entre les parallèles 52 et 55, à l'intérieur de la zone dite taiga, laquelle est caractérisée par une majorité d'épinettes noires non commerciales.

D'après les conclusions des études, l'aménagement hydro-électrique pourrait s'étendre sur une quinzaine d'années. Voilà, en bref, l'activité de la Société de développement de la baie James depuis sa création, ainsi qu'un aperçu de son programme pour le présent exercice financier. Cette activité a été assurée par une direction et un personnel permanent qui comptait moins de 30 personnes jusqu'en février dernier et qui ne dépasse pas encore la cinquantaine, y compris le personnel de la Société d'énergie.

La Société de développement de la baie James s'interprète comme un organisme de conception, d'organisation, de gérance et de contrôle, en d'autres termes, un organisme de "management". En conséquence, au lieu de se structurer en personnel et en équipement, la société continuera de poursuivre ses objectifs en collaboration avec les services gouvernementaux, les sociétés paragouvernementales et l'entreprise privée.

Cette collaboration, la Société de développement l'établit conformément aux désirs du législateur, directement avec les organismes précités ou par l'entremise de ses filiales.

La Société de développement de la baie James s'interprète également comme devant continuer d'exercer l'autorité et d'assumer la responsabilité découlant de sa loi-cadre et qu'exige l'accomplissement de son mandat. Ce mandat est défini par les articles 4 et 5 de la Loi du développement de la baie James, loi créant la société. Voici ce que dit l'article 4: "La société a pour objets de susciter le développement et l'exploitation des richesses naturelles qui se trouvent dans le territoire décrit à l'annexe, ci-après désigné sous le nom de "territoire", d'effectuer ce développement et cette exploitation conformément â la présente loi, ainsi que de voir à l'administration et à l'aménagement de ce territoire, conformément à la présente loi et aux autres lois du Québec, aux fins d'en favoriser la mise en valeur par elle-même, ses filiales et les autres agents de la vie économique et industrielle en donnant priorité aux intérêts québécois". De son côté, l'article 5 stipule que: "La société doit veiller à la protection du milieu et prévenir la pollution dans le territoire".

Par ailleurs, au journal des Débats du 6 juillet 1971, volume 2, no 69, pages 3123, 3125, nous relevons les remarques suivantes du premier ministre: "La connaissance que nous avons du dossier, les avis non équivoques des experts et des spécialistes, les impératifs de la relance économique, tout nous commande de procéder sans délai aux premières étapes du développement de la baie James, pour le progrès du Nord-Ouest québécois et du Québec tout entier. Cette décision prise, nous aurions pu procéder, sans grand effort d'imagination, par les voies classiques qui s'offraient à nous, en confiant simplement aux institutions existantes des morceaux de développement: les ressources hydrauliques à l'Hydro-Québec, les ressources forestières à Rexfor, les ressources minières à Soquem, les ressources pétrolières à Soquip, les pêcheries et le tourisme aux ministères appropriés, l'aménagement routier au ministère de la Voirie, les communications au ministère des Transports et des Communications. Avant même de commencer les travaux, nous faisions donc face à une dizaine de juridictions autonomes et compartimentées. "Le risque nous a alors paru grand d'une dispersion des énergies, d'une confusion des tâches et d'un manque grave de planification intégrée dans l'aménagement d'un territoire aussi vaste que prometteur".

Le premier ministre précisait: "C'est la nature même du projet, les impératifs de la planification et du développement global du territoire qui imposent la nécessité d'une structure de gestion munie de l'autorité et des pouvoirs indispensables à la réalisation de cet immense projet. Cette structure de gestion, c'est la Société de développement de la baie James".

Le premier ministre poursuivait: "Car le projet de la baie James est plus qu'un projet purement hydro-électrique; il touche un vaste domaine: exploitation forestière, reboisement, développement minier, découvertes pétrolifères

possibles, ouverture d'un vaste territoire à la pêche, au tourisme et à la récréation des années soixante-dix et quatre-vingt et, ne l'oublions pas, un développement industriel considérable à moyen terme qui saura profiter non seulement aux citoyens du Nord-Ouest québécois mais à toutes les régions".

Plus loin, M. Bourassa poursuivait: "On lui confiera — à la société — la responsabilité de planifier l'usage, la sauvegarde et le développement rationnel des ressources naturelles du bassin de la baie James pour le progrès économique et social de tout le Nord-Ouest, région jusqu'ici trop souvent négligée par les gouvernants. Mais la société ne doit pas seulement planifier. Elle doit être investie des pouvoirs nécessaires pour mettre ses plans à exécution".

Plus loin encore, le premier ministre déclarait: "L'originalité du projet vient du fait qu'un seul organisme gouvernemental sera chargé de toutes ces responsabilités et qu'aucune de ces activités ne pourra être considérée comme une fin en soi. C'est là la caractéristique essentielle de la Société de développement de la baie James".

Le premier ministre ajoutait enfin: "La société n'empêchera pas, mais devra au contraire susciter la participation de l'entreprise privée au développement de cette région. Emanation de l'Etat, la Société de développement de la baie James devient l'instrument de l'aménagement global du territoire".

La loi no 50 a été votée et sanctionnée. C'est dans le cadre et l'esprit de cette loi que la Société de développement de la baie James a entrepris et poursuivra sa mission. Elle continuera également de stimuler, de surveiller, de contrôler dans la poursuite de ses objectifs les divers aspects de l'aménagement global du territoire.

M. le Président, M. le premier ministre, MM. les membres de la commission, mes collègues et moi-même de la Société de développement de la baie James, sommes à la disposition de la commission.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Nadeau. Le député de Verchères et ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'aurais trois petites questions. Un des buts, comme l'a souligné M. Nadeau, en créant la société était de s'assurer un développement intégré de toutes les ressources du territoire et s'assurer en particulier que le plan d'aménagement, pour des fins de production de l'électricité, devait être compatible aussi avec un plan optimum pour le développement des autres ressources.

Je crois comprendre, d'après les propos qu'on vient de tenir — et nous en sommes aux premières explications pour le changement des rivières du sud pour les rivières du nord — qu'une des raisons de l'aménagement de la rivière La Grande est le fait — si je comprends bien M. Nadeau et c'est le sens de ma question — que vous considérez que l'aménagement hydro-électrique axé sur la rivière La Grande est compatible avec la mise en valeur optimum d'autres ressources minières, forestières, touristiques. En particulier, c'est ce type d'aménagement qui a le moins d'effets négatifs sur le problème de l'écologie et sur le problème des populations locales. C'est bien le sens de votre recommandation?

M. NADEAU: Oui, M. Saint-Pierre. La recommandation de la société était en fonction de ces aspects et aussi en fonction, évidemment, de l'aménagement hydro-électrique. Nous sommes heureux que l'Hydro-Québec ait fait les mêmes recommandations que la société. En allant vers les rivières du nord, nous épargnons évidemment les populations autochtones dans une grande proportion. Nous épargnons aussi les ressources forestières, qui sont immensément riches dans la région du sud. Nous favorisons l'exploitation ou l'exploration minière à travers le territoire en débouchant sur un réseau plus au nord.

Enfin, nous éliminons, ou sans éliminer, nous amoindrissons énormément les effets néfastes d'un tel développement sur l'écologie.

M. SAINT-PIERRE: Monsieur, vous nous avez brièvement mentionné la mise sur pied de la filiale, l'Hydro-Québec y étant majoritaire et la filiale devant produire l'énergie électrique. Est-ce que vous pourriez, brièvement, renseigner les membres de la commission sur les activités qui ont pu ou qui pourraient se produire en ce qui touche les autres filiales devant être formées? Est-ce que ces filiales sont, effectivement, formées? Est-ce que ce sont des discussions que vous auriez pu avoir avec Rexfor? Quelles sont les perspectives de collaboration dans ces secteurs?

M. NADEAU: Nous avons eu, jusqu'à présent, des pourparlers avec Rexfor et avec Soquip. Nous sommes actuellement en négociation avec Soquem. Quant aux autres, évidemment, les priorités s'étant établies au début, nous ne voyions pas la nécessité, à ce moment-là, de presser le pas pour former les filiales immédiatement avec Rexfor et Soquip. Nous y voyons tout de même une priorité plus importante quant à Soquem. C'est pour cela que des négociations sont maintenant en cours avec Soquem.

M. SAINT-PIERRE: Dernière question, M. le Président. La phase de réalisation et la phase d'exploitation comporteront une différence avec d'autres projets que nous avons pu voir au Québec ou ailleurs dans le monde et qui étaient essentiellement axés sur une seule ressource. Je pense qu'on conviendra qu'en général l'aménagement de Manic Outardes a été axé sur une ressource, l'énergie hydro-électrique. Je pense

d'ailleurs qu'il y a des discussions actuellement pour remettre le réseau routier de l'Hydro-Québec au ministère de la Voirie pour des fins touristiques. Mais c'est un peu un produit qui vient après que la phase de construction est terminée.

Comme, dans ce cas, on vise l'exploitation optimale de plusieurs ressources et leur mise en valeur, est-ce que la société a quelques réflexions préliminaires sur les problèmes d'intégration, les problèmes de logistique entre les différents utilisateurs pour une infrastructure qui pourrait être commune? Je pense aux routes, aéroports et agglomérations semi-permanentes qui pourraient être utilisés non pas comme ce fut le cas dans le passé uniquement par ceux qui construisent pour des fins électriques, mais qui pourraient être utilisés, évidemment, par ceux qui visent une exploitation minière ou par d'autres.

M. NADEAU: Evidemment, c'est dans le mandat même de la société de faire un développement intégré du territoire. Le tracé de la route, par exemple, facilite ce développement parce qu'il est au centre du territoire et qu'il se prolonge jusqu'au nord, jusqu'à la rivière La Grande. Nous n'avons pas encore arrêté les modalités du développement intégral pour une bonne raison. C'est que nous avons donné, comme je l'ai mentionné dans mon rapport, une étude à une firme de consultants de grande réputation afin de nous faire des suggestions et des recommandations quant au développement intégral. Cette firme doit faire les inventaires approfondis des forêts et des ressources minières, touristiques et résidentielles. Nous voulons, évidemment, éviter certaines, je pourrais peut-être dire bévues qui se sont faites dans le passé, où des régions ont été développées dans le but de n'y extraire qu'une seule ressource. Par exemple, aujourd'hui, on peut penser à certaines régions de l'Abitibi où on a été chercher des mines et exclusivement des mines alors qu'aujourd'hui on voit des villes fantômes.

Ce sont les aspects que nous voulons éviter. Nous voulons développer ce territoire de façon intégrale.

M. SAINT-PIERRE: Je crois que vous déposez un rapport préparé. Je ne sais pas si cela peut consoler...

M. LAURIN: Vous êtes chanceux.

M. SAINT-PIERRE: Pardon?

M. LAURIN : Vous êtes chanceux.

M. SAINT-PIERRE: Bien, je l'ai eu il y a à peu près deux heures. Vous allez voir que nous ne sommes pas des cachottiers. Nous tentons de vous donner toutes les informations. C'est un rapport... Est-ce que vous pourriez nous l'expliquer...

M. LAURIN: Pour un projet comme ça, il serait normal que vous le déposiez.

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse. Avant de passer à des commentaires concernant ce rapport, je voudrais procéder avec les questions qu'auraient les chefs des différents partis en rapport avec les commentaires du début.

Le député de Bellechasse.

M. LOUBIER: M. le Président, une des premières questions que j'aurais à poser à M. Nadeau est la suivante: Est-ce que les experts et les commissaires de l'Hydro-Québec sont entièrement d'accord sur la teneur et l'exposé des arguments et des éléments du rapport que vous venez de nous lire?

Si vous voulez une formulation différente, est-ce que le rapport que vous venez de soumettre a été préparé de concert avec les experts de l'Hydro-Québec ou si c'est le fruit, tout simplement, des membres de la Société de développement de la baie James?

M. NADEAU: M. le Président, je crois que c'était la responsabilité de la Société de développement de la baie James de faire ces recommandations. Maintenant, à savoir si l'Hydro-Québec est d'accord ou non, je crois que M. Giroux pourrait répondre à la question.

M. LOUBIER: Pourrais-je poser ma question à M. Giroux?

M. GIROUX: Nous sommes parfaitement d'accord sur le rapport, en ce qui concerne le développement de la baie James et au sujet du développement de la rivière La Grande. Peut-être qu'il y aura quelques divergences d'opinions dans la façon de concevoir ce programme, ce qu'on expliquera plus tard avec les documents.

M. LOUBIER: Est-il possible, à ce moment-là, que nous puissions avoir, de l'Hydro-Québec, des recommandations différentes de celles qui sont contenues dans le rapport, quant à la conception, quant au "management", comme on dit, et quant aux structures administratives?

M. GIROUX: C'est possible.

M. LOUBIER: II est possible qu'il y ait divergence. Pourrais-je savoir également si la firme de consultants de grande réputation, dont parlait tout à l'heure M. Nadeau, est une firme québécoise, canadienne ou américaine?

M. NADEAU: C'est une firme québécoise qui porte le nom de Sores, qui est une filiale de SNC, qui s'est jointe à une firme américaine afin de compléter les connaissances qu'elle n'avait pas.

M. LOUBIER: Elle est donc associée à une firme américaine?

M. NADEAU: Oui. Le mandat que nous avons donné est entre la Société de développement de la baie James et Sores.

M. LOUBIER: Et Sores. Ne serait-il pas avantageux que la société envisage la possibilité d'accorder des mandats à un consortium de firmes de consultants du Québec?

M. NADEAU: Dans quel domaine?

M. LOUBIER: On parlait, tout à l'heure, du programme d'intégration, etc.

M. NADEAU: Dans le domaine des transports, par exemple, il y a une étude en cours, actuellement, sur le transport intermodal, qui est donnée à une firme québécoise: Lea, Benoît et associés. Egalement, dans le domaine forestier: Thériault et Dumont; et, dans le domaine minier: Caron, Dufour et Séguin.

M. LOUBIER: Dans le "management", M. Nadeau pourrait-il nous dire s'il y a des firmes québécoises assez spécialisées pour recevoir un mandat de la part de la société?

M. NADEAU: En fait, c'est à savoir si vous me demandez une opinion personnelle ou si je dois m'exprimer au nom de la société. Je crois personnellement que oui. Le problème de la gestion est encore en discussion. Nous n'avons pas encore établi la formule définitive.

M. LOUBIER: Si vous recourez à des firmes internationales de consultants, y aura-t-il une disposition selon laquelle la langue de travail, sur tous les chantiers et dans les plans, etc. sera le français?

M. NADEAU: Assurément.

M. LOUBIER: Quelle que soit la firme, qu'elle soit américaine ou qu'elle soit...

M. NADEAU: Je crois que cela s'impose.

M. LOUBIER: C'est une garantie que vous donnez aujourd'hui.

M. NADEAU: Dans la mesure où je pourrai prendre la décision, oui.

M. LOUBIER: Est-ce que le président a pris connaissance d'une déclaration du président de l'Energie atomique du Canada, disant qu'à la baie James, on devrait plutôt tenter un développement sur le plan nucléaire?

M. NADEAU: Je ne crois pas que ce soit la teneur exacte des déclarations de M. Gray.

M. LOUBIER: II y en a une, ce matin, dans la Gazette.

M. NADEAU: M. Gray a dit ce matin, dans la Gazette, que la province de Québec devrait probablement se lancer dans un programme mixte, qui inclurait la baie James, si j'ai bien lu ou bien compris le sens de l'article.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Est.

M. LOUBIER: M. le Président, je m'excuse. Une dernière question, pour le moment. Quel est le montant investi, à ce jour, par le gouvernement, et quel est le montant prévu pour l'an prochain et, disons, pour les deux ou trois prochaines années, et quelle est la proportion des montants fournis par l'Hydro-Québec?

M. NADEAU: II faut faire ici une différence entre la Société de développement de la baie James et la Société d'énergie de la baie James.

Dans la Société de développement de la baie James, il est prévu dans la loi que le gouvernement doit souscrire un capital de $100 millions, au rythme de $10 millions par année. Dans la Société d'énergie de la baie James, il y a un capital autorisé de $1 milliard dont $700 millions sont souscrits.

M. LOUBIER: Les $700 millions sont souscrits par qui jusqu'à maintenant?

M. NADEAU: Par l'Hydro-Québec.

M. LOUBIER: Répartis sur combien d'années?

M. NADEAU: Sur une période de dix ans.

M. LOUBIER: Quels sont les montants prévus pour la participation du gouvernement?

M. NADEAU: Le calcul se fait rapidement: $700 millions représentent 70 p.c. du capital autorisé. C'est donc dire qu'il reste une proportion de 30 p.c. qui pourraient être souscrits par la Société de développement ou par le gouvernement, si vous voulez.

M. LOUBIER: Ce qui veut dire que, dans une proportion de 70 p.c, c'est un investissement fait par l'Hydro-Québec.

M. NADEAU: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: Le député d'Abitibi-Est.

M. TETRAULT: Le président de la société a parlé d'un montant de $5.8 milliards et a cité, à plusieurs reprises, le Nord-Ouest québécois et différentes compagnies. Le président a parlé aussi des négociations qu'il y a présentement avec Soquem et de celles qu'il y a eu avec Soquip et tous les autres. Les $5.8 milliards,

est-ce la société elle-même qui les paie ou si Soquem est appelée à en dépenser une partie?

M. NADEAU: D'abord, je n'ai pas mentionné $5.8 milliards.

M. TETRAULT: Le premier ministre.

M. NADEAU: C'est le premier ministre qui a mentionné ça. C'est pour les aménagements hydro-électriques; ça n'a rien à faire avec Soquem.

M. TETRAULT: Lorsque Soquem va participer, c'est à même son propre budget.

M. NADEAU: C'est ça. C'est prévu dans la loi que la filiale-mines est formée de Soquem et de la Société de développement de la baie James. Ce sera dans une proportion de 51 p.c., Société de développement, et de 49 p.c, Soquem.

M. TETRAULT: On a dans le développement de la baie James certaines compagnies, dont une provient de l'Ontario. On a parlé de langue française. Le président nous assure que la langue officielle, la langue de travail qu'il va y avoir là est strictement le français. Est-ce que j'ai bien compris la réponse ou si je l'ai mal interprétée?

M. NADEAU: Oui.

M. TETRAULT: Quant à l'embauche des employés qui vont présentement à la baie James, dans les contrats — selon une réponse obtenue du ministre du Travail — qui avaient été donnés, il n'y avait aucune clause spécifiant que ce serait les gens du Nord-Ouest québécois qui auraient la préférence d'emploi.

Est-ce que le président de la société s'apprête à ajouter cette obligation dans les contrats afin que les gens du Nord-Ouest québécois puissent aller travailler à la baie James?

M. NADEAU: Je regrette, mais il est bien stipulé dans les appels d'offres — et je vais vous lire le texte — "qu'une priorité doit être donnée aux résidents du Nord-Ouest québécois, du reste de la province ensuite et enfin qu'on déborde les frontières.

M. TETRAULT: Donc, selon vos documents, c'est spécifié et, dans ceux du ministre du Travail, ça ne l'est pas.

M. NADEAU: J'ai ici l'article 17 des appels d'offres, qui se lit ainsi: "Recrutement de la main-d'oeuvre. Pour le recrutement de la main-d'oeuvre employée à l'exécution de ce contrat, l'entrepreneur doit, dans la mesure du possible, faire appel aux centres de main-d'oeuvre du Québec et, compte tenu des qualifications requises, il doit accorder aux candidats une préférence s'échelonnant dans l'ordre suivant: a) Personnes résidant dans la région du Québec où s'exécutent les travaux"; Cela, c'est le Nord-Ouest. "b) Personnes résidant dans les autres régions du Québec; c)Personnes résidant dans les autres provinces; d)Etrangers.

M. TETRAULT: Le président est au courant — il devrait l'être, j'en suis sûr, avec la tournée qu'il a faite dans le Nord-Ouest — que la minorité des employés provient du Nord-Ouest québécois. Est-ce que c'est un manque de compétence chez les gens du Nord-Ouest québécois, parce qu'il semble que la majorité provient d'autres régions?

M. NADEAU: Certains problèmes se sont présentés. Il y a eu énormément de concurrence entre les centres de main-d'oeuvre de la province et ceux du fédéral et aussi entre les diverses unions. Cela a créé un manque d'efficacité, jusqu'à un certain point, dans l'embauchage des ouvriers.

On tend actuellement à améliorer, avec la coopération du ministère de la Main-d'Oeuvre, cette situation et à la rectifier. Ce qui est arrivé aussi dans bien des cas, c'est que des gens se sont rendus dans la région de Matagami, de Val-d'Or ou d'ailleurs et se sont enregistrés comme résidents. On donnait une preuve, une lettre qui était falsifiée, ni plus ni moins, et à ce moment-là on obtenait des emplois alors qu'on ne venait pas directement de la région, qu'on venait d'ailleurs et qu'on allait là pour essayer de se trouver un emploi.

M. TETRAULT: On m'informe, dans les bureaux locaux du centre de main-d'oeuvre du Québec, que le seul groupe qui se sert de leurs services est l'Hydro-Québec et que les autres compagnies, les contractants et les sous-contractants sauf un, emploient leurs hommes où ils le peuvent dont en assez grande quantité de l'Ontario.

M. NADEAU: Je regrette, mais ces informations-là ne me sont pas parvenues. D'ailleurs j'étais, en fin de semaine dernière, à Val-d'Or et ce point-là ne m'a pas été rapporté.

M. TETRAULT: Je vous l'apporte là.

M. NADEAU: Enfin, si cette situation existe, nous ne sommes pas au courant et n'en sommes pas responsables.

M. TETRAULT: Lorsque vous émettez les contrats, pour la construction de routes ou celle qui sera faite pour l'aéroport, est-ce qu'il est spécifié au contractant que premièrement les hommes qu'il emploiera devraient parvenir des centres de main-d'oeuvre du Québec et, deuxiè-

mement, des centres fédéraux? Il y a une clause dans ça qui l'explique.

M. NADEAU: Non, on ne donne pas de priorité. On dit tout simplement que — c'est dans l'article 17 que je vous ai lu tantôt — pour le recrutement de la main-d'oeuvre employée à l'exécution de ce contrat l'entrepreneur doit, dans la mesure du possible, faire appel aux centres de main-d'oeuvre du Québec. Compte tenu des qualifications requises, il doit accorder aux candidats une préférence s'échelonnant dans l'ordre que je vous ai donné tantôt.

M. TETRAULT: J'aimerais poser une question au président, peut-être qu'il ne l'aimera pas: Est-ce que ce sont des voeux pieux ou bien une réalité qu'il va...?

M. NADEAU: Je crois que c'est une réalité. En fait, l'entrepreneur qui a besoin de dix menuisiers demain matin s'adresse au centre de main-d'oeuvre. Si le centre de main-d'oeuvre peut lui en fournir cinq, évidemment il va s'en chercher cinq autres. Il s'adressera peut-être ailleurs à ce moment-là, soit au centre de main-d'oeuvre fédéral, soit au bureau des syndicats qui sont installés déjà à Matagami.

M. TETRAULT: Dans l'étude qui existe présentement sur le développement minier, est-ce que la société prend en considération que le territoire pourrait s'ouvrir aux prospecteurs?

M. NADEAU: Le territoire est ouvert aux prospecteurs.

M. TETRAULT: II n'y a aucun problème pour jalonner les terrains, aucune restriction?

M. NADEAU: Aucune restriction, sauf les zones qui sont appelées à recevoir les travaux publics ou celles qui devraient peut-être être inondées. Alors ce sont les seules zones qui ont été soustraites au jalonnement. C'est donc dire que 95 p.c. du territoire sont ouverts au jalonnement.

M. TETRAULT: La compagnie, plus spécifiquement dans le bout de la chute rouge, dit d'ailleurs, si l'on prend les données des différents journaux miniers, qu'il y a possibilité d'ouvrir une mine mais qu'elle se voit restreinte par les lois et la future étude non complète du territoire. Elle ne pourrait pas commencer à faire l'exploitation de ses mines. Est-ce que c'est chose réelle? Je sais que dans les journaux miniers il y a beaucoup de fla-fla.

M. NADEAU: Non, c'est absolument faux.

M. LE PRESIDENT: Monsieur le député, je vous ferai remarquer une chose, malgré l'importance de vos questions. A ce moment-ci, nous essayons de faire une espèce de résumé de questions autour des commentaires qu'a faits le président. Je comprends que les faits que vous rapportez sont entremêlés de questions hypothétiques. Je pense qu'on devrait progresser et ne pas s'attarder à des propos qui peuvent être hypothétiques ou non.

Si vous avez des faits bien spéciaux, bien catégoriques, je pense que vous aurez l'occasion au cours des délibérations de demander des précisions. Maintenant, je ne vous enlève pas la parole. Ce n'est pas là la question, mais je voudrais qu'on passe plutôt à un niveau général plutôt que de s'arrêter à des questions locales ou régionales strictement parlant.

M. TETRAULT: M. le Président, je vais prendre votre conseil. Peut-être que mes questions sont hypothétiques pour vous, mais je dois vous dire qu'elles sont réelles pour les gens du Nord-Ouest.

M. LE PRESIDENT: Je n'en doute pas. Avez-vous terminé? Le député de Bourget.

M. LAURIN: Encore une fois il m'est très difficile de poser des questions sur un rapport oral du président qui a été très bref et qui a surtout porté sur l'intégration territoriale, les forêts, les mines, où les travaux ont d'ailleurs à peine commencé. Ce rapport portait très peu sur la filiale et ne nous a donné au fond que les conclusions. Il est très difficile également de poser des questions sur un rapport écrit, qui m'a l'air un peu plus substantiel mais que je n'ai pas eu le temps de lire.

C'est un rapport un peu plus substantiel où le plan hydro-électrique ne prend quand même, que le tiers de l'espace. Il m'apparaîtrait beaucoup plus convenable de poser des questions après que nous aurons eu le temps de lire et d'étudier ce rapport. Je regrette infiniment — cela confirme l'impression qu'on veut nous mettre devant un fait accompli, qu'on veut nous passer un sapin — mais je vais quand même poser les questions préliminaires qui me viennent à l'esprit.

Est-ce que le président pourrait nous dire pendant combien de temps ont été menées ces expertises sur le terrain et par qui? Combien de membres de Sores y ont participé? Pourrait-il nous donner un peu plus de détails sur ces explorations, sur ces expertises, le résultat, les rapports auxquels elles ont donné lieu et combien il y a eu de rapports? Est-ce que plusieurs hypothèses ont été étudiées en même temps? Est-ce l'aménagement de La Grande seule ou de La Grande avec d'autres rivières, Caniapiscau ou Eastmain, etc ? Est-ce que plusieurs hypothèses ont été envisagées en même temps, donnant lieu chacune à des études séparées?

M. NADEAU: L'étude donnée à Sores n'est pas du tout dans le but de nous aider à déterminer si on doit aller vers les rivières du

nord ou les rivières du Sud. L'étude donnée à Sores est une étude qui concerne le développement régional. Vous me demandez combien de gens ont travaillé sur le terrain. Je dois vous dire que l'étude a été confiée à Sores il y a à peu près un mois. On met actuellement en branle les mécanismes nécessaires pour faire ces relevés dont vous parlez sur le terrain.

M. LAURIN: Donc, l'étude de Sores portait plutôt sur l'inventaire forestier, l'inventaire minier, les problèmes d'aménagement régional et non pas spécifiquement sur l'aménagement hydro-électrique de la rivière.

M. NADEAU: Pas du tout sur l'aménagement hydro-électrique.

M. LAURIN : Pas du tout sur l'aménagement hydro-électrique de la rivière.

M. NADEAU: Sur le développement régional du territoire de la baie James.

M. LAURIN: Quelle firme s'est occupé des études géologiques, techniques, hydro-électriques portant sur l'aménagement de la rivière et des autres rivières qui peuvent s'y déverser ou qui pourraient s'y déverser?

M. NADEAU: Les firmes qu'on a mentionnées au début de mon exposé, soit Rousseau, Sauvé, Warren et Associés, l'Hydro-Québec et l'ABBDL.

M. LAURIN : De quelle époque à quelle époque ont-elles travaillé au cours de l'année 1971 et combien de personnes ont été sur le terrain?

M. NADEAU: M. DeGuise peut vous répondre à ce sujet.

M. DEGUISE: Le premier mandat a fait l'objet d'un rapport préliminaire au comité parlementaire de l'an dernier. Par la suite, un autre mandat a été donné et s'est terminé effectivement avec un rapport émis le 31 décembre.

M. LAURIN: A quelles firmes?

M. DEGUISE: Les trois firmes ont eu des mandats: Rousseau, Sauvé, Warren et Associés, sur La Grande, l'ABBDL pour la rivière Eastmain et un autre mandat a été donné à la compagnie Shawinigan Engineering qui a normalisé, si vous voulez, ou qui a essayé d'apprécier, en se servant des mêmes barèmes, les études faites par deux bureaux séparés.

M. LAURIN: De quelle époque à quelle époque ont-elles travaillé sur le terrain?

M. DEGUISE: Elles ont travaillé sur le ter- rain durant toute l'année. Je crois que le mandat a été donné au mois de mars et elles ont travaillé jusqu'à la fin de la saison, en novembre, le rapport ayant été remis en décembre. Il y a évidemment l'équipe de l'Hydro-Québec qui a travaillé sur NBR, évidemment.

M. LAURIN: Sur NBR?

M. DEGUISE: Sur Nottaway, Broadback, Rupert, les trois rivières.

M. LAURIN: Mais pas sur La Grande?

M. DEGUISE: Elle a participé à certaines études sur La Grande aussi, faisant des relevés sur le terrain qui ont été remis au bureau de génie conseil pour consolider toute l'affaire.

M. LAURIN: Au mois de mai, quand nous avons eu notre réunion l'an dernier, un premier mandat avait été donné à Rousseau, Sauvé, Warren et Associés. C'est ce premier rapport que nous avions étudié?

M. DEGUISE: Oui, c'était le premier rapport. Il y avait eu des compendiums ou des résumés des études faites par les deux bureaux de génie conseil et par l'Hydro-Québec.

M. LAURIN: C'est ce rapport qui avait été déposé et où on disait, par exemple, que la construction des centrales sur le complexe Rupert devrait débuter en mars 1974, la mise en marche des groupes 1 et 2 se faire au début de 1978 et où on disait aussi que la construction des centrales sur le complexe La Grande devrait débuter en 1975 et la mise en marche des goupes 1 et 2 à la fin de 1978. Est-ce leur premier rapport?

M. DEGUISE : C'est le premier rapport de tout, un rapport.

M. LAURIN: Est-ce qu'il y a eu d'autres rapports et combien, menés à la suite de quelles études, par combien d'hommes, pendant combien de temps?

M. DEGUISE: Je vais prendre les questions une à une. En me répétant, l'étude de l'aménagement de La Grande a été confiée au bureau de Rousseau, Warren, Sauvé. Leurs études se sont terminées avec la remise d'un rapport en fin d'année 1971. Le nombre de personnes sur le terrain, je crois que ça peut-être variable. Disons, par exemple, pour fixer des idées, que l'Hydro-Québec, qui travaillait sur les trois rivières inférieures, Nottaway, Broadback, Rupert, a eu jusqu'à 600 personnes à peu près sur le terrain.

M. LAURIN: En bas?

M. DEGUISE: En bas. Certains groupes tra-

vaillaient sur la rivière La Grande et sur la rivière Eastmain. En effet, comme nos équipes étaient déjà là en partie, en vue de faire progresser les études plus rapidement, l'Hydro-Québec a collaboré avec les groupes d'ingénieurs-conseils.

M. LAURIN: Combien d'autres rapports ont été déposés, par la suite, par la firme Rousseau, Sauvé, Warren et aussi, peut-être, par l'Hydro-Québec, puisqu'elle a collaboré?

M. DEGUISE: Ils ont produit chacun un rapport. D'abord, un rapport du groupe de génie de l'Hydro-Québec qui a donné, en plusieurs volumes, le résultat des études sur l'aménagement de Nottaway, Broadback, Rupert. Il y a eu un rapport ABBDL sur l'aménagement de la rivière Eastmain et un rapport de Rousseau, Warren, Sauvé sur l'aménagement de La Grande et du complexe La Grande.

M. LAURIN: Quand vous parlez de complexe La Grande, pourriez-vous donner un peu plus de détails?

M. DEGUISE: Le complexe La Grande implique le détournement de rivières avoisinantes dans la rivière La Grande. Dans le complexe Nottaway, Broadback, Rupert, les rivières Nottaway et Broadback étaient détournées dans la rivière Rupert. D'une façon semblable, pour le complexe La Grande, on détourne une partie de la rivière Eastmain, une partie de la rivière Caniapiscau et une partie de la rivière Grande Baleine.

M. LAURIN: Quand le premier ministre dit $5 milliards est-ce le coût du complexe?

M. DEGUISE: C'est le complexe.

M. LAURIN: Tout le complexe comprenant le déversement des trois rivières que vous venez de mentionner?

M. DEGUISE: C'est exact.

M. SAINT-PIERRE: Incluant le transport de l'énergie?

M. DEGUISE: Incluant les lignes de transport.

M. LAURIN: Maintenant, est-ce que ces études, faites, si je comprends bien, surtout sous la responsabilité de Rousseau, Sauvé, Warren, ont compris des relevés aussi bien géologiques sur le terrain que des relevés aériens et des études techniques?

M. DEGUISE: Absolument. Des sous-contrats ont été donnés à des bureaux spécialisés en examen de sols ou en forage qui ont travaillé avec le bureau de génie-conseil.

M. LAURIN: Est-ce que ces études ont été aussi poussées que celles qui avaient été faites sur le complexe NBR, au cours des années précédentes?

M. DEGUISE: Etant donné, je crois, l'élément temps, on ne peut pas dire qu'il y a eu autant d'heures-homme consacrées à l'étude du projet La Grande qu'il y en a eu à l'étude du projet NBR, parce que les trois rivières du bas ont été étudiées par l'Hydro-Québec depuis probablement 1967 à une cadence variable, si vous voulez. Alors, cela a commencé plus tôt pour les rivières du bas que pour la rivière La Grande.

M. LAURIN: Est-ce que ces études n'ont été menées que par Rousseau, Sauvé, Warren et par l'aide conjoncturelle de l'Hydro-Québec ou s'il y a eu d'autres firmes auxquelles vous avez également demandé des études?

M. DEGUISE: Sur le terrain, par exemple, il y a eu des firmes comme Terratech ou National Boring qui ont participé à des sondages, à des forages, à l'examen du sol. Maintenant, il y a eu une revue de ces études, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, par la compagnie Shawinigan Engineering.

M. LAURIN: Ces études ont-elles été vérifiées par les services techniques de l'Hydro-Québec sur le terrain, par le bureau de programmes?

M. DEGUISE: Les rapports de toutes les études parvenaient au bureau de l'Hydro-Québec. Maintenant, quel temps ils pouvaient y consacrer alors qu'ils menaient eux-mêmes l'étude du projet des rivières d'en bas, c'est une vérification, jusqu'à un certain degré.

M. LAURIN: Est-ce que cela a été une vérification en cabinet plutôt qu'une vérification sur le terrain?

M. DEGUISE: Non, non, parce que les équipes de l'Hydro-Québec étaient sur le terrain et participaient. Les échantillons de sol étaient vérifiés dans un laboratoire où il y avait les représentants de l'Hydro-Québec, etc.

M. LAURIN: J'avais demandé, lors de la dernière réunion de la commission, qu'on dépose la liste des contrats ainsi que des mandats, aussi bien en ce qui concerne les routes que les aéroports, que les études qu'on avait demandées aux diverses firmes. Je ne sais pas si l'exclusive qu'on a prononcée tout à l'heure vaut également pour le dépôt de ces listes de contrats ainsi qu'un exposé résumé sur les mandats.

M. NADEAU: En ce qui concerne les contrats de routes qui ont été attribués par la Société de développement de la baie James, nous avons, je crois, une liste que nous pouvons déposer.

M. LAURIN: Avec les mandats donnés également.

M. NADEAU: En fait, je parle des contrats de routes. Les mandats aux firmes d'ingénieurs n'ont pas été donnés par la Société de développement de la baie James mais étaient donnés quand les administrateurs de la société sont entrés en fonction. Je parle...

M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il s'agit des mandats d'étude...

M. NADEAU: Je parle des mandats d'études seulement qui ont été donnés pour la construction des infrastructures et non pas des mandats d'études comme celui de Sores, par exemple, qui a été donné par la société de développement, de même que ceux de Thériault et Dumont, de Caron, Dufour et Séguin et des autres firmes que j'ai mentionnées.

M. SAINT-PIERRE: Mais les mandats d'études reliés à l'aspect de la production d'énergie du projet, est-ce que cela a été donné par l'Hydro-Québec.

M. NADEAU: Cela a été donné par l'Hydro-Québec?

M. LAURIN: Est-ce que je pourrais alors répéter ma demande, aussi bien à la Société de développement de la baie James qu'à l'Hydro-Québec et qu'à la filiale, de déposer, avec la permission du premier ministre, la liste des contrats ainsi qu'un exposé sommaire des mandats accompagnant ces contrats?

M. SAINT-PIERRE: La liste des contrats.

M. GIROUX: En ce qui concerne votre demande, voici un résumé qui a été préparé et que nous pouvons distribuer. Je vais simplement faire la lecture de la première page, si cela vous donne satisfaction. Dans les projets de centrales, par exemple, pour l'exploration géologique, on a inclus le nom de la firme qui était la Compagnie nationale de forage, les numéros de commandes, une brève description du mandat. "Fournir sur demande le personnel technique pour effectuer, conjointement avec le personnel de l'Hydro-Québec, des études sur les rivières de la baie James. Un montant autorisé jusqu'ici de $250,000". On a la Compagnie nationale de forage: "fournir sur demande..." C'est le même genre de description parce que c'est le même genre de services, et les montants. Les contrôles techniques: les laboratoires Ville-Marie. Je crois que nous avons tous les projets qui sont décrits. Il y en a dont les descriptions sont un peu plus longues. Est-ce que...

M. LAURIN: Cela nous satisferait.

M. GIROUX: Est-ce que le député tient à ce que je donne lecture? Nous pourrions peut-être simplement les déposer?

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, peut-être que nous pourrions demander au personnel ici d'en tirer des photocopies et on les déposera...

M. GIROUX: Nous en avons.

M. SAINT-PIERRE: Ah! vous en avez? Alors, je n'ai pas d'objection.

M. GIROUX: Nous avons 20 exemplaires, parce que c'est un dossier assez...

M. LAURIN: Est-ce que cela comprend les contrats donnés aussi bien par l'Hydro-Québec que par la SDBJ ou que par la filiale?

M. GIROUX: Non, cela comprend les contrats donnés par l'Hydro-Québec. Cela comprend les contrats donnés par mandat de la Société d'énergie à l'Hydro-Québec. Mais cela ne peut pas comprendre les contrats de la Société de la baie James.

M. SAINT-PIERRE: Mais cela comprend tous les contrats d'études en ce qui touche l'aménagement hydro-électrique.

M. GIROUX: Absolument, oui. Ces choses-là sont totalement détaillées. Je crois, en fournissant cela, qu'on répondait exactement à la question qui a été posée.

M. LAURIN: Est-ce que cela comprend aussi les études comparatives du coût de l'énergie hydro-électrique avec les autres formes d'énergie?

M. GIROUX: Les études comparatives sont faites par nos services à l'Hydro-Québec. Donc, on fera un exposé des systèmes. Et comme on l'a dit tantôt, quand on fera les exposés, on distribuera au fur et à mesure les dossiers qu'on a préparés et dont nous avons des copies.

M. LAURIN: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, le député de Bellechasse, sur la même question.

M. LOUBIER: Est-ce qu'il y aurait eu possibilité, pour l'Hydro-Québec, d'utiliser strictement les services de ses ingénieurs pour procéder à toutes les études qui ont été faites jusqu'ici, sans utiliser pour autant les services de firmes extérieures à l'Hydro-Québec?

M. GIROUX: Non.

M. LOUBIER: Cela aurait été impossible?

M. GIROUX: C'est impossible à cause du

temps donné. Si on veut prendre 20 ans pour faire les études, oui. Mais là il y a 25 firmes qui ont travaillé pendant, peut-être, un an. Je pense qu'en faisant l'étude des différentes mandats on voit qu'il y a beaucoup de spécialités là-dedans. Maintenant, je peux demander à M. Cahill, puisque cela dépend du génie. Est-ce que vous avez une opinion différente de celle-là?

M. CAHILL: Non, monsieur, nous n'aurions pas pu faire le travail en si peu de temps.

M. LOUBIER: En si peu de temps, il serait impossible.

M. LAURIN: M. le Président,...

M. LE PRESIDENT: Le député de...

M. SAINT-PIERRE: Simplement pour fins comparatives, j'aurais peut-être deux questions. La première: Est-ce que l'on a une idée, même approximative, des sommes d'argent prévues à l'intérieur du budget interne de lïlydro-Québec pour l'ensemble du dossier de la baie James? Je ne sais pas si l'on peut parler de l'an dernier ou même depuis toujours. Je ne sais pas si vous avez des postes budgétaires ou un certain contrôle comptable qui vous permet de nous donner les coûts à ce jour. Ce serait ma première question.

La deuxième: Est-ce qu'il n'y a pas certains de ces contrats qui prévoyaient, quand même, des sommes importantes pour des sous-contrats? Je parle de certaines études, j'en vois au moins deux, qui impliquaient que certaines des parties du contrat étaient données à sous-contrats. Dans quel contexte ces sous-contrats étaient-ils donnés? Est-ce que ces contrats étaient sujets à l'approbation de l'Hydro-Québec?

M. GIROUX: Oui. Je crois qu'on peut donner une estimation. Mais nous pouvons répondre à toutes les questions qu'il y a dans ce document. C'est assez facile d'expliquer ou d'élaborer sur des questions précises. Il y a des montants qui paraissent gros mais ce n'est pas totalement pour l'ingénierie. Il y a des dépenses incidentes.

M. DEGUISE: La première question, je crois, se rapportait aux dépenses effectuées. Pour l'année 1971, par exemple, les dépenses, sous différents chefs, se chiffrent par $28,753,000. Pour l'année 1972, il y avait des dépenses, pour les trois premiers mois, de $9,263,000. Le budget prévu pour le reste de l'année, soit de avril à décembre, est de $29,677,000, soit un total de $38 millions pour l'année 1972.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que ce sont des montants strictement d'études ou de relevés cartographiques? Est-ce qu'il y a des montants pour la construction dans ça?

M. DEGUISE: Nous n'avons pas la construction de routes là-dedans qui relève de la Société de développement de la baie James.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il y avait d'autres constructions?

M. DEGUISE: II y a peut-être eu une partie de chemins d'hiver ou des choses semblables.

M. SAINT-PIERRE: Ah!

M. DEGUISE: Mais, en gros, ce sont les études sur le terrain, les frais d'avion, d'hélicoptère.

M. SAINT-PIERRE: Mais ces montants, ce sont des dépenses internes de l'Hydro-Québec. Cela ne comprend pas les montants qui sont dans le rapport et qui auraient été donnés. Est-ce que c'est ça?

M. DEGUISE: Non, ce sont les montants de l'Hydro-Québec.

M. SAINT-PIERRE: De l'Hydro-Québec.

M. DEGUISE: Une partie est sous mandat de la Société d'énergie à l'Hydro-Québec.

M. SAINT-PIERRE: Ce sont donc des salaires, des services, des...

M. DEGUISE: Des salaires, des services.

M. SAINT-PIERRE: ... fournitures reliés au travail même des employés de l'Hydro-Québec.

M. DEGUISE: C'est ça. Cela comprend les ingénieurs-conseils.

M. SAINT-PIERRE: Cela comprend les ingénieurs-conseils.

M. DEGUISE: Pour les routes. Le contrat de l'ingénieur-conseil pour la route est dans le mandat de l'Hydro-Québec. Si vous voulez les grandes subdivisions...

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que cela est le contrat de Desjardins, Sauriol?

M. DEGUISE: Desjardins, Sauriol, c'est ça.

M. SAINT-PIERRE: Au numéro 490533, il y a $13 millions.

M. DEGUISE: Gendron, Lefebvre, pour la route de Chibougamau-Mistassini.

M. SAINT-PIERRE: Mais c'est l'ensemble du montant de $13 millions qui serait inclus dans vos $28 millions que vous aviez en 1971?

M. DEGUISE: Pardon. Je crois qu'une partie du contrat s'étendra sur les années 1973 et 1974.

M. SAINT-PIERRE: L'an dernier, il y a des gens que je considère sérieux qui ont soulevé la question à savoir qu'on s'était lancé dans la baie James sans études suffisantes et que cela avait été un ballon. Je ne reprendrai pas tous les termes. Mais simplement pour renseigner les membres de la commission, combien d'argent avait été dépensé pour l'ensemble de la baie James, pour l'étude des rivières de la baie James par l'Hydro-Québec, directement ou indirectement, jusqu'à l'an dernier, approximativement? A un million de dollars près?

M. DEGUISE: II y avait $8 millions antérieurement à 1971 et $29 millions en 1971. C'est-à-dire $8,477,000 avant 1971.

M. BOURASSA: Avant le 29 avril 1971, il y avait presque $10 millions qui avaient été dépensés.

M. JORON: C'était à l'étude depuis combien d'années?

M. BOURASSA: Avant le 29 avril 1971, presque $10 millions avaient été dépensés.

M. JORON: On faisait des études depuis combien d'années?

M. DEGUISE: Cela avait commencé en 1966,1967.

M. LOUBIER: On se rend compte qu'avant le 29 avril 1971 les gens qui étaient là étaient économes, prudents et sages.

M. SAINT-PIERRE: Mais, au total, jusqu'à aujourd'hui, à peu près, sur la baie James, combien y a-t-il de dépensé? C'est assez difficile à dire.

M. DEGUISE: II y a $42 millions de dépensés.

M. SAINT-PIERRE: II y a $42 millions de dépensés.

M. DEGUISE: A part les contrats de route.

M. SAINT-PIERRE: Oui, d'accord. Au point de vue des études pour arriver à un schème d'aménagement, c'est $42 millions.

M. JORON: Dont 80 p.c. depuis que la décision a été prise, le 29 avril 1971.

M. SAINT-PIERRE: Quand on passe à l'action, il faut...

M. JORON: Ce n'est pas de l'action. Ce sont des études préparatoires.

M. BOURASSA: M. le Président, cela confirme le 29 avril et cela confirme, en même temps, la déconfiture du Parti québécois.

M. LOUBIER: Si l'on voulait, M. le Président, continuer dans la même veine, on pourrait dire...

M. LE PRESIDENT: Je ne veux pas du tout continuer dans la même veine.

M. LOUBIER: Je voudrais savoir, M. le Président, après le grand "pageant" électoral du Colisée, du 30 avril 1971, combien il y a eu de dépensé.

M. LE PRESIDENT: Avant de redonner la parole au député de Bourget, j'ai deux petites annonces en ce qui concerne les travaux de la commission.

Premièrement, nous voulons suspendre la séance de six heures moins quart à huit heures et quart. Deuxièmement, de la part de la Société de développement de la baie James, les journalistes sont invités à voir une projection cinématographique sur le développement du complexe nord de la rivière La Grande. Ce film sera projeté à 18 heures, à la salle des conférences de presse, édifice B. Naturellement, il va de soi que les membres de la commission y sont aussi invités. La restriction est sur la grandeur de la pièce.

On me dit que c'est un film de 25 minutes. Il y a aussi une version en langue anglaise. Donc, les deux versions sont disponibles, soit en anglais ou en français. On me dit aussi qu'il n'y aura pas de commentaire ou de description au cours de ce film. Ce sera donc à la salle des conférences de presse, édifice B, à six heures. En suspendant nos travaux à six heures moins quart, cela permettra aux gens qui voudraient s'y rendre d'y être pour six heures.

La parole est au député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, nous venons d'apprendre qu'antérieurement au 29 avril 1971 il y avait eu $8 millions de dépensés.

M. DEGUISE: Au 31 décembre 1970, il y avait eu $8 millions de dépensés.

M. LAURIN: Donc, c'est quand même une somme considérable. Dans les études qu'on avait déposées à la commission des richesses naturelles, les 19 et 20 mai 1971, il y avait quand même des renseignements. Toutes ces études suggéraient unanimement de commencer l'aménagement de la baie James par le complexe NBR. Par exemple, dans le rapport de ABBDL, on pouvait lire, aux pages 8 et 9, la phrase suivante: Le coût du kilowatt installé étant le plus bas pour le complexe NBR, comparativement aux rivières Eastmain et La Grande, il est logique de commencer par une tranche du complexe NBR.

De plus, les investigations préliminaires sont

plus à point et les accès sont plus faciles pour la tranche A.

Dans le rapport de l'Hydro-Québec, à la page 21 et à la page 22, on disait: "Pour faciliter le financement, la construciton du complexe pourrait être divisée en trois phases". M. Giroux nous avait bien expliqué ça et il concluait son témoignage en disant: "Au sujet du programme de la baie James, je ne peux que répéter que nous avons étudié la question à fond avec le meilleur jugement."

Comment expliquer qu'à peine un an après on nous présente une telle volte-face? Quels sont les arguments à ce point probants, à ce point importants et sérieux qui peuvent avoir justifié un tel changement d'orientation?

M. GIROUX: Dans une question comme celle-ci, je ne considère pas comme une volte-face d'améliorer la situation de l'Hydro-Québec. Je pourrais faire une volte-face tous les jours dans les circonstances.

Je crois cependant que pour bien expliquer cette chose là, il faudrait avoir l'occasion d'expliquer notre programme complet.

M. SAINT-PIERRE: D va le faire.

M. GIROUX: Nous sommes prêts à expliquer tout notre programme. Nous pouvons commencer tout de suite après l'ajournement et expliquer le programme. Parce que nous pouvons dire: Oui, ça s'avère plus rentable en faisant ainsi, mais il y a autre chose qu'il faut faire. Je pense que tous ces éléments doivent être décrits et nous sommes en position de répondre à ces questions après avoir fait l'exposé.

M. LAURIN: Je demanderai à ce moment-là...

M. BOURASSA: Jeudi, probablement que je pourrai remettre toutes les études qui ont été faites depuis un an. J'ai demandé à mes collaborateurs d'examiner ça le plus rapidement possible.

M. LAURIN: Est-ce que nous allons siéger demain?

M. BOURASSA: Oui.

M. LAURIN: Nous aimerions mieux pouvoir poser nos questions après que ces études auront été déposées et que nous aurons eu le temps de les étudier. H me semble que ce serait plus logique. Nous pourrions faire un meilleur travail.

M. GIROUX: Je crois que demain, après avoir fait l'exposé, il peut y avoir de nombreuses questions pour éclairer l'exposé et dire d'où viennent nos bases. Probablement que ça peut prendre la journée.

M. LOUBIER: Mais à moins que je ne m'abuse, nous ne siégerons pas demain en commission parlementaire des richesses naturelles.

M. BOURASSA: Pour quelle raison?

M. LOUBIER: Je pense que le leader parlementaire a annoncé que nous ne siégerons pas demain en commission parlementaire.

M. ROY (Beauce): II a dit qu'au salon rouge à partir de 9 h 30 c'était l'industrie et le commerce qui siégeait et que, comme c'était mercredi, il n'y aurait pas de séance de commission parlementaire le soir.

M.BOURASSA: Selon l'entente entre les leaders il n'y a pas de séance...

M. ROY (Beauce): C'est ce que le leader de la Chambre, l'honorable Gérard-D. Lévesque, nous a dit tout à l'heure, qu'aux salles 81-A et 91-A c'étaient la justice et les transports, et possiblement l'agriculture.

M. BOURASSA: J'étais impatient de faire la lumière pour nos amis.

M. ROY (Beauce): II n'a été aucunement fait mention en Chambre cet après-midi de la possibilité de faire siéger la commission des richesses naturelles demain.

M. LOUBIER: C'est un autre court-circuit du premier ministre.

M. LAURIN: Dans ce cas-là, je laisserai mes questions portant sur cet aspect du projet et je n'aurai qu'une autre question à poser sur la route. Est-ce qu'on en a établi maintenant le tracé définitif? Quelle alternative a-ton étudiée? Et quels changements sont survenus en cours de route dans les projets initiaux?

M. NADEAU: Le tracé définitif est établi. Il l'est d'ailleurs depuis assez longtemps, avant même que la société soit formée. Aucun changement n'a été apporté à ce tracé.

M. LAURIN: Est-ce que, dans le rapport que vous nous avez remis, il y a un tracé de cette route?

M. NADEAU: Oui.

M. BOURASSA: M. le Président, il y a une séance du conseil des ministres à six heures, si vous n'avez pas d'objection, je proposerais la suspension à 8 h 15.

M. LE PRESIDENT: La commission suspend ses travaux jusqu'à 8 h 15.

(Suspension de la séance à 17 h 44)

Reprise de la séance à 20 h 38

M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): Mesdames, messieurs, sans vous convoquer immédiatement, je voudrais vous annoncer qu'il y a un léger retard à cause du conseil des ministres. Normalement, nous aurions dû commencer à 8 h 15. C'est la cause du délai présentement. Aussitôt qu'ils arriveront, on commencera.

J'ai fait distribuer, tout â l'heure, à chacun des membres de la commission, une copie de l'allocution de M. Nadeau. En première page, version française, quatrième paragraphe, pour-riez-vous, à la dernière ligne, faire le changement suivant? Au lieu de "service des contrats", ça serait "direction des contrats". Une mise au point très simple: direction des contrats au lieu de service des contrats.

Le député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, à la page 13, nous lisons que la Société de développement de la baie James est un organisme de conception, d'organisation, de gérance et de contrôle. Est-ce à dire que la Société de développement de la baie James verra à la supervision de l'aménagement intégré du territoire, comme vous l'avez dit cet après-midi, y compris le développement électrique, qu'elle contrôlera, de ce point de vue, tous les travaux qui seront faits et deviendra le maître d'oeuvre de tous les travaux hydro-électriques entrepris dans la région?

M. NADEAU: M. le Président, je crois qu'à l'article 16 de la Loi créant la Société de développement de la baie James il est bien stipulé que les aménagements hydro-électriques seront confiés à une filiale qui a été créée, la Société d'énergie de la baie James. Toutefois, nous prévoyons que les développements des aménagements hydro-électriques se feront en collaboration et en coopération avec la Société de développement de la baie James.

M. LAURIN: Est-ce à dire que la responsabilité immédiate serait confiée à quelqu'un d'autre que la SDBJ?

M. NADEAU: A la SEBJ, la Société d'énergie de la baie James.

M. LAURIN: A la Société d'énergie de la baie James.

M. NADEAU: C'est ce qui est mentionné dans la loi, que le développement hydro-électrique serait confié à la Société d'énergie de la baie James.

M. LAURIN : Et non à la Société de développement de la baie James?

M. NADEAU: Et non à la Société de développement de la baie James.

M. LAURIN: Et non à l'Hydro-Québec?

M. NADEAU: Vous avez lu la loi?

M. LAURIN : Oui, bien sûr.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous terminé?

M. LAURIN: Pour les autres questions, je préférerais les reporter à un peu plus tard.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin. M. JORON: Je pense que je vais attendre.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: Certains journalistes et certains politiciens ont cherché à discréditer la Société de la baie James dès ses premiers contrats. Pourriez-vous, M. le président de la baie James, nous expliquer ce qui s'est produit lors du premier contrat octroyé par la Société de la baie James pour la construction de routes à Kiewit Construction?

M. NADEAU: Vous faites allusion au contrat qui a été adjugé à la finie Kiewit Ltée. Je me sens très à l'aise pour commenter ce même contrat qui a été adjugé à la Kiewit. Etant donné que c'était le premier contrat officiel que la Société de développement de la baie James adjugeait, nous avons cru bon, pour nos archives, d'avoir un cinéaste qui filmait le déroulement des événements. Nous avions confié, comme vous le savez, à la direction des contrats de l'Hydro-Québec, que nous jugions extrêmement compétente et pour laquelle, d'ailleurs, nous n'avons que des félicitations, et pour M. Hardy, qui en est le directeur, nous avions donc confié à la direction des contrats de l'Hydro-Québec le soin de préparer les appels d'offres et de faire l'ouverture des soumissions, chose qui se produisait à l'Hydro-Québec même, c'est-à-dire sur le boulevard Dorchester. Etant donné que c'était le premier contrat d'importance adjugé par la Société de développement de la baie James, nous avons cru bon de le faire, à ce moment-là, aux bureaux de la Société de développement de la baie James, dans nos locaux du boulevard Maisonneuve. Se sont présentés à la société, M. Hardy, d'abord, qui est le directeur de la direction des contrats de l'Hydro-Québec, le secrétaire, M. Lacasse, le co-secrétaire, M. Johnson et enfin, tous les individus qui, normalement, assistent à l'ouverture des soumissions.

Nous avons procédé à l'ouverture. Je ne sais pas si vous savez comment ça se produit exactement, mais nous arrivons avec un paquet d'enveloppes brunes qui sont scellées. Pour l'occasion, nous sommes arrivés avec une pile d'enveloppes brunes. Je crois que c'est un M. Venne qui avait la tâche d'ouvrir ces enveloppes, chose qu'il faisait très bien, d'ailleurs.

Après l'ouverture de ces enveloppes, il passait les documents au secrétaire, lequel, après vérification, confirmait si oui ou non la soumission était conforme aux appels d'offres. On a sorti, à ce moment-là, un paquet de soumissions dont nous avons ici la liste. Il y avait Bot Construction, les Constructions du Saint-Laurent, Dé-sourdy Construction, Seroc Inc., la Compagnie Miron Ltée, BA Construction, Cartier Construction, Pitts (Quebec) Limited et ainsi de suite.

A un moment donné, à travers tout ceux dont je viens de mentionner les noms, est arrivée la soumission de Simard-Beaudry. Le secrétaire de l'Hydro-Québec a fait l'examen des documents pour révéler qu'ils n'étaient pas conformes aux appels d'offres, le chèque de garantie étant fait au nom de l'Hydro-Québec alors qu'il était très bien stipulé dans les appels d'offres que le chèque devait être fait à la Société de développement de la baie James.

Ce qui s'est produit c'est que le secrétaire a dit: Je regrette, messieurs, mais cette soumission — sans mentionner le nom — n'est pas conforme aux appels d'offres. Donc, il l'a remise dans l'enveloppe et nous avons procédé à la soumission la plus basse qui était celle des entreprises Kiewit Limitée.

Maintenant, au sujet des entreprises Kiewit Limitée, on a dit que c'était le premier contrat que la société adjugeait et que nous le donnions à une entreprise américaine. H faut dire que Kiewit Limitée est une entreprise qui est tout de même enregistrée au Canada depuis 1947, capital souscrit et ainsi de suite, avec des directeurs canadiens ici, qui sont enregistrés dans la province de Québec depuis 1967, je crois. C'est elle qui a construit le tronçon du métro qui conduit de l'île Sainte-Hélène à Longueuil. A ce moment-là, il n'y a pas eu de levée de boucliers ni de tollé. Je comprends mal comment il se fait que, parce que c'était un contrat de la Société de la baie James, on ait crié au patronage.

Nous étions purement justifiés d'accepter la soumission de Kiewit qui était la plus basse. D'ailleurs, j'ai ici les montants: celle de Kiewit était de $12,238,379 alors que la soumission suivante était celle de Bot Construction Limitée, $13,338,000.

L'on passait ensuite à Saint-Laurent, $14,197,000, Désourdy, $14,998,000, Miron Limitée, $17 millions, Cartier Construction à $19 millions et enfin Pitts (Québec) Limited à $20,979,000.

Donc, nous nous sommes crus justifiés d'adjuger le contrat à Kiewitt Limitée, qui était le plus bas soumissionnaire. C'était la procédure suivie par l'Hydro-Québec et c'est sur recommandation de la direction des contrats de l'Hydro-Québec que nous avons adjugé ce contrat.

Nous avions établi des procédures. Nous les avons suivies à la lettre.

M. BOURASSA: Un autre ballon de dégonflé.

M. PERREAULT: Deuxième question...

M. LE PRESIDENT: Un instant, sur le même sujet.

M. PERREAULT: Même sujet.

M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, allez-y.

M. PERREAULT: Est-ce que l'Association nationale de la construction vous a fait des représentations à ce sujet-là?

M. NADEAU: Qu'est-ce que l'Association nationale...? Comment appelez-vous cela?

M. PERREAULT: ... de la construction.

M. NADEAU: Non, nous n'en avons aucune. La seule, c'est dans les journaux où on a fait écho à ce contrat. A part cela, nous n'avons eu de représentation de personne.

M. PERREAULT: Est-ce qu'on en a fait à l'Hydro-Québec?

M. NADEAU: Je ne sais pas.

M. VEILLEUX: Est-ce que vous avez eu des représentations de la firme dont on avait rejeté la soumission?

M. NADEAU: Non, pas du tout. La firme Simard-Beaudry, dont j'ai mentionné le nom tantôt, n'a fait aucune représentation et a admis son erreur. En fait, la firme Simard-Beaudry a obtenu par ce fait deux autres contrats, alors qu'elle n'avait soumissionné que pour un au commencement. Elle a obtenu deux autres contrats plus considérables et les journaux n'ont pas fait état de ceux-là. Je doute fort que la firme Simard-Beaudry ait pu entreprendre le premier contrat pour lequel elle avait soumissionné et les deux autres en plus pour lesquels elle a obtenu...

M. SAINT-PIERRE: Sur cette décision — peut-être que je devrais poser la question à M. Giroux — je crois comprendre qu'il n'y avait aucun désaccord entre les commissaires de l'Hydro-Québec?

M. GIROUX: Non. On a consulté l'Hydro-Québec et nous avons dit: Voici, nos normes sont telles. Et l'expérience prouve que c'est arrivé plusieurs fois à l'Hydro-Québec de recevoir un chèque qui n'était pas conforme. On ne peut faire autrement. Parfois des chèques ne sont pas visés, et vous savez ce qui arrive. Si quelqu'un, après trois semaines de négociation, ne veut pas remplir son contrat il dit: Vous ne pouvez pas encaisser mon chèque. Alors, ce n'est pas un chèque qu'on nous a donné. C'est aussi clair que cela.

M. JORON: M. le Président, sur le même sujet.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin, sur le même sujet.

M. JORON: Est-ce que vous avez dit, M. Nadeau, que la soumission de Simard-Beaudry était inférieure à celle de Kiewitt ou supérieure?

M. NADEAU: Au moment de l'ouverture des soumissions, nous ne le savions pas. D'ailleurs, il n'est pas de coutume, je crois, de dévoiler les montants lorsque les soumissions ne sont pas conformes aux appels d'offres. Nous avons donc tout simplement remis dans l'enveloppe la soumission de Simard-Beaudry, en leur disant qu'elle ne se qualifiait pas.

M. JORON: C'est parce que vous avez...

M. NADEAU: Alors, c'est par la suite tout simplement que nous avons appris, par un tiers, si vous voulez, que le montant de la soumission de Simard-Beaudry, était moindre.

M. JORON: Etait inférieure au départ.

M. NADEAU: Oui. Mais nous ne l'avons pas su, à ce moment-là, à la table où nous étions assis pour accepter ou rejeter les soumissions.

M. JORON: D'accord. Parce que le ministre des Richesses naturelles avait affirmé, en Chambre, que la soumission de Simard-Beaudry était inférieure. Je ne voudrais pas...

M. NADEAU: Oui, c'est vrai, M. Joron.

M. JORON: ...que le premier ministre le fasse mentir.

M. NADEAU: C'est d'ailleurs sorti par la suite. Mais au moment où nous avons ouvert les soumissions, nous ne le savions pas.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de l'Assomption avait terminé?

M. PERREAULT: Oui.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que le député de Gouin a terminé?

M. JORON: Oui.

M. LE PRESIDENT: Vous avez terminé. Le député de Bellechasse.

M. LOUBIER : J'aurais simplement une courte question à poser à M. Nadeau. A la page 13, il est écrit: "La Société de développement de la baie James est un organisme de conception, d'organisation, de gérance, de contrôle. C'est, en d'autres mots, un organisme de "management"." Est-ce que, concernant le développement hydro-électrique, le "management" appartient à la société d'énergie ou si cela appartient à la Société de développement de la baie James?

M. NADEAU: L'esprit dans lequel cet énoncé est fait, à la page 13, M. Loubier, ne fait pas référence au développement hydro-électrique comme tel, mais tout simplement au développement du territoire en ce qui concerne tous les aspects.

M. LOUBIER: Oui. Mais en ce qui a trait strictement à la société d'énergie, est-ce que le "management", à ce moment-là, relève de l'autorité de la société d'énergie à l'intérieur de laquelle l'Hydro-Québec est majoritaire?

M. NADEAU: Je crois que c'est toute une autre question. Cet énoncé, que vous lisez, s'applique à la Société de développement de la baie James et non pas à la Société d'énergie de la baie James.

M. LOUBIER : D'accord. Je m'en servais tout simplement comme base à ma question. Je pose la question de façon très directe: Est-ce que l'aspect "management", de gérance est réservé ou est sous l'autorité de la Société d'énergie de la baie James ou si, généralement, dans tous les cas, dans tous les secteurs, le "management" relève de l'autorité et de la responsabilité de la Société de développement de la baie James?

M. NADEAU: Si vous voulez parler de la gérance du projet ou des aménagements hydroélectriques, je crois que, cet après-midi, nous avons fait une déclaration à l'effet que ce problème était encore en discussion, qu'il n'était pas réglé et qu'aucune décision n'avait été prise.

M. LOUBIER: Est-ce que vous concevez qu'il est normal, à ce moment-là, que le "management" soit confié à la Société de développement de la baie James, alors que la responsabilité, sur le plan hydro-électrique, relève directement de la Société d'énergie dont la responsabilité première est sous la gouverne, l'inspiration et la direction de l'Hydro-Québec?

M. NADEAU: Je pense qu'il faut qu'on fasse, ici, une espèce de partage entre les déclarations qui sont faites dans cette plaquette que vous avez devant vous et qui est une présentation de la Société de développement de la baie James. Cela n'a rien à faire avec le "management" ou la gérance des aménagements hydro-électriques. Il n'y a aucune relation entre ces déclarations et la gérance du projet des aménagements hydro-électriques.

M. LOUBIER: II n'y en a aucune à la page

13. Je ferme le volume. Je vous demande maintenant carrément: Est-ce que la société d'énergie a la responsabilité, l'autorité dans le domaine du "management" ou si elle doit s'en référer à l'autorité de la Socitété de développement de la baie James, c'est-à-dire à la maison mère, si vous me permettez l'expression populaire?

M. NADEAU: En ce qui concerne la Société d'énergie, je crois qu'il y a, à ce moment-là, deux maisons mères ou une maison mère et une maison fille. L'Hydro-Québec étant actionnaire majoritaire dans la Société d'énergie et la Société de développement de la baie James étant également actionnaire je crois que ces décisions doivent être prises au bureau de direction de la Société d'énergie de la baie James. Quelle sera l'issue de ces discussions? Je n'oserais pas, à ce moment-ci, me prononcer.

M. LOUBIER: Est-ce que l'on pourrait connaître votre opinion?

M. NADEAU: Si vous voulez connaître l'opinion de la Société de développement de la baie James comme actionnaire dans la Société d'énergie de la baie James, c'est une autre affaire.

M. LOUBIER: Oui. Pourrais-je connaître votre opinion à vous, comme président de la société?

M. NADEAU: Mon opinion, c'est que la gérance d'un tel projet peut être confiée à des organismes québécois.

M. LOUBIER: Mais confiée par la société d'énergie?

M. NADEAU: Par la Société d'énergie. M. LOUBIER: Par la Société d'énergie.

M. NADEAU: Formée majoritairement par l'Hydro-Québec.

M. LOUBIER: Ce qui voudrait dire qu'à ce moment-là, dans ce secteur, il appartiendrait à la Société d'énergie de planifier son "management" et d'accorder, selon sa conception, selon sa propre planification, des contrats à des firmes qu'elle jugerait compétentes en la matière.

M. NADEAU: D'accord.

M. LOUBIER: Sans être en aucun moment gênée par des directives qui pourraient venir de la Société de développement de la baie James.

M. NADEAU: Elle peut être difficilement gênée par la Société de développement de la baie James, parce que celle-ci est minoritaire dans la Société d'énergie. Donc, elle ne peut intervenir que dans le bon sens. Elle ne peut pas imposer ses vues, disons.

M. LOUBIER: D'accord.

M. LE PRESIDENT: On m'avait demandé la parole de ce côté-ci. Est-ce dans le même ordre d'idées, M. le député?

M. GARNEAU: Sur un autre sujet.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que les questions de ce côté-ci sont dans le même ordre d'idées, sur la gestion?

M. ROY (Beauce): C'est sur la question de gestion, de revenu, de financement.

M. LE PRESIDENT: Mais il ne faudrait pas élaborer. Si c'est sur ce dont on vient de discuter, posez la question. On y reviendra. Je ne vous enlève pas le droit de parole, mais je propose que vous fassiez à un autre moment vos autres commentaires. Sur la question de gestion, tel qu'on vient d'y répondre, si vous avez des questions à poser, posez-les.

M. ROY (Beauce): Je reviendrai pour poser mes questions dans leur ensemble, parce que j'imagine que ça se tient.

M. LE PRESIDENT: Sur la même question, M. le député?

M. AUDET: Pas tout à fait.

M. LE PRESIDENT: Cela branle un peu. Nous y reviendrons.

Le ministre des Finances.

M. GARNEAU: Ma question concerne un tout autre sujet. Dans votre exposé, cet après-midi, M. Nadeau, votre recommandation était à l'effet de commencer par les rivières du nord et vous avez traité un peu du problème des Indiens. Est-ce que vous pourriez nous dire comment le territoire qui est couvert par la rivière La Grande et ses bassins, se situe géographiquement par rapport au traité, signé il y a je ne sais combien d'années, avec les Indiens?

Vous avez parlé d'une partie. Est-ce que vous pourriez élaborer davantage pour que nous sachions jusqu'à quel point la première étape du projet de développement de la baie James — qui est celle de la rivière La Grande — affecte les Indiens?

M. NADEAU: Si on se réfère au rapport Dorion et si mon interprétation de ce rapport est bonne, il semble qu'au-delà du 52e parallèle les problèmes sont éliminés ou presque en totalité éliminés. Donc, il semblerait qu'au-delà du 52e parallèle les droits territoriaux ou, enfin,

les droits fonciers des Indiens seraient presque non existants ou non existants.

M. GARNEAU: Les réservoirs qui alimentent la rivière La Grande, est-ce qu'il y en aurait une partie qui serait au sud du 52e? Tout est au nord?

M. NADEAU: Tout est au nord du 52e pour la phase initiale du développement hydro-électrique.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. Le député de Verchères.

M. TETRAULT: Les Indiens qui demeurent dans cette région, dans le territoire de La Grande, le film que nous avons vu, ce soir, montre que les Esquimaux, les Indiens habitent la région de Fort George. Au sujet des droits de pêche, Max Gros-Louis dit qu'il est pour faire bloquer le développement et tout ça et le premier ministre nous avait assurés l'an passé qu'il n'y avait aucun problème pour les traités ou les concessions qui furent faits. Est-ce que vous envisagez des manifestations qui vont faire quelque chose de tangible?

M. NADEAU: Des manifestations, évidemment tout le monde est libre d'en faire. Quant à la constitutionnalité, cela appartient au gouvernement de la déterminer et non pas, je crois, à la Société de développement de la baie James.

Alors, la société tient pour acquis que les territoires lui sont prêtés ou lui seront cédés en ce qui concerne certains ouvrages et qu'à ce moment-là la constitutionnalité du droit foncier lui appartient.

M. TETRAULT: Au sujet de la chasse et de la pêche, avec les études que vous avez de faites présentement dans la rivière La Grande, est-ce que ça affecte considérablement leur territoire ou s'il n'y a presque pas de changement?

M. NADEAU: Non. Cela affecte beaucoup moins les territoires que si on s'était dirigé vers les rivières du sud, parce que dans les rivières du sud, à cause de la densité de la faune, les territoires de chasse et de trappage sont à peu près de dix milles carrés chacun alors que dans le nord, sur la rivière La Grande, les territoires peuvent être d'une étendue de 100 à 200 milles carrés, chacun, à cause justement de cette densité de la faune qui n'existe pas vers le nord. Evidemment, les bois sont beaucoup plus clairsemés que dans le sud et les lacs et les rivières sont moins riches en faune.

M. TETRAULT: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.

M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais une question à poser concernant la structure de l'ensemble de la Société de développement de la baie James. On nous a dit tout à l'heure, et les rapports le mentionnent, que le capital de la société serait de $100 millions souscrits entièrement par le gouvernement du Québec à raison de $10 millions par année pendant dix ans. Est-ce que M. Nadeau pourrait nous dire quels seront les besoins de capitaux de la Société de développement de la baie James pour réaliser l'infrastructure qu'elle doit avoir en vue de l'aménagement du premier complexe hydroélectrique, soit celui de la rivière La Grande, d'ici dix ans?

M. NADEAU: Je me demandais quand exactement la question serait pour venir, parce qu'évidemment une capitalisation de $10 millions par année — nous avons dit que nous avions adjugé à ce moment-ci des contrats pour $64 millions — ça semble peu. Alors, il faut vous dire que, le 10 février 1972, nous avons conclu une entente avec la Société d'énergie de la baie James par laquelle la société d'énergie s'engage à payer une proportion très importante, soit au-delà de 90 p.c., des infrastructures quitte, si vous voulez, à contrebalancer cette proportion à mesure que l'usage des infrastructures changera

Au moment de la construction des aménagements hydro-électriques, il est facile de prévoir que les infrastructures seront presque en totalité utilisées par la Société d'énergie de la baie James ou ceux qui seront responsables de la construction des aménagements. Plus tard, cette proportion peut évidemment diminuer. Entre-temps, la Société d'énergie de la baie James a accepté — c'est une entente qui a été signée le 10 février entre la Société d'énergie de la baie James et la Société de développement de la baie James — d'absorber, si vous voulez, la presque totalité des coûts des infrastructures.

M. ROY (Beauce): En somme, c'est la Société d'énergie de la baie James qui va assumer à elle seule 90 p.c. des coûts, au départ, de l'infrastructure fournie par la Société de développement de la baie James.

M. NADEAU: Parce qu'elle en sera l'usager presque exclusif pour une période donnée.

M. ROY (Beauce): Pour une période de combien d'années prévoyez-vous?

M. NADEAU: C'est difficile à dire. Le temps de la construction, ce qui peut être dix, douze ou quinze ans.

M. ROY (Beauce): Dans les structures de votre société de développement, est-ce que vous avez prévu des revenus à cette société ou si ce sera toujours un organisme à la charge du gouvernement? Les autres 10 p.c, j'imagine que c'est le gouvernement du Québec qui va en assumer les frais.

M. NADEAU: C'est la question qu'on se pose tous les jours.

M. ROY (Beauce): Vous vous posez la question.

M. NADEAU: Où allons-nous chercher nos revenus? C'est pour cela que nous sommes actuellement en négociation avec Soquem; c'est pour cela que nous étudions, par exemple, l'exploration minière, l'exploitation forestière, le tourisme, la chasse, la pêche et ces choses-là. On espère, à un moment donné, en arriver à une formule où on pourra peut-être subvenir à nos propres besoins, en plus des souscriptions qui nous seront données par le gouvernement.

M. ROY (Beauce): Croyez-vous possible que les ressources forestières, les ressources minières et les autres ressources du milieu soient organisées à l'intérieur des sociétés existantes? Lorsqu'on parle de Soqem, on peut parler de Rexfor et de Soquip. Il peut y avoir des découvertes dans ce coin-là, nous ne sommes pas au courant de toutes les études qui ont été faites. Est-ce que la Société de développement de la baie James envisage des recettes lors de l'attribution des différentes concessions, que ce soit des concessions minières ou des concessions forestières? Tirera-t-elle des revenus de l'attribution des concessions et de certaines formes de compensations qui pourraient être accordées au moment de l'exploitation de ces ressources? On a fait grand état...

M. NADEAU: Si vous continuez votre question, je ne pourrai pas y répondre.

M. ROY (Beauce): Non, je ne voulais pas y répondre.

M. NADEAU: Evidemment, la Société de développement de la baie James envisage la possibilité d'une contribution intense de l'entreprise privée dans le développement du territoire, que ce soit dans les domaines forestier, minier ou autres. Evidemment, la société entrevoit aussi participer elle-même à certains développements ou à certaines exploitations, exploitations qui peuvent éventuellement apporter des revenus à la Société de développement de la baie James qui pourra ainsi subvenir à ses propres besoins.

Je ne puis vous dire exactement aujourd'hui quelles sont les possibilités de revenu pour la Société de développement de la baie James. Ces choses-là sont à l'étude.

Il nous faudra aussi négocier et entrer en pourparlers avec l'entreprise privée pour savoir dans quelle mesure on peut participer tous les deux ensemble afin de développer cet immense territoire qui regorge de ressources naturelles.

M. ROY (Beauce): En somme, c'est l'objectif de la société de pouvoir bénéficier des avantages que pourraient lui procurer les autres ressources de façon à amortir...

M. NADEAU: Sans entraver, toutefois, les efforts de l'entreprise privée et tout en les encourageant.

M. ROY (Beauce): Je reviens à ma première question. J'avais demandé, tout à l'heure, quels étaient les capitaux nécessaires à l'installation ou à l'organisation de toute l'infrastructure du territoire? Ces capitaux sont-ils inclus dans les chiffres que vous avez mentionnés dans le rapport, qui partent de $5,250,000,000, ou si le coût des montants d'investissement pour l'infrastructure viendra s'ajouter à ce montant?

M. NADEAU: Le coût total de $5,800,000,000 qui a été mentionné inclut les infrastructures qui font partie intégrante des richesses naturelles, plus particulièrement les richesses hydro-électriques. C'est compris dans le projet.

M. ROY (Beauce): Maintenant au sujet de ces montants qui sont accordés pour l'infrastructure, pourriez-vous nous dire de quelle façon ils pourront être amortis? Seront-ils amortis sur une période de 20, 30 ou 40 ans? De quelle façon prévoyez-vous l'amortissement?

M. NADEAU: Les montants alloués à l'infrastructure seront amortis de la même façon que les montants totaux qui seront consacrés à l'aménagement hydro-électrique. Cela peut être sur une période de 20 ou 30 ans, selon les modes de financement que nous adopterons.

M. ROY (Beauce): Relativement au mode de financement — j'en reviens à ma question principale— prévu pour cet immense projet, se fera-t-il avec la supervision ou sous le contrôle du ministère des Finances du Québec?

M. NADEAU: J'imagine qu'il faudra que ça se fasse en collaboration avec le ministère des Finances du Québec.

M. ROY (Beauce): Comment prévoyez-vous financer tout ce projet, en utilisant les crédits canadiens ou en ayant recours à l'autofinancement? Avez-vous envisagé d'avoir recours à une certaine forme d'autofinancement ou si on fera appel à l'épargne ou aux capitaux étrangers? J'aimerais savoir vers quelle forme de financement pensent s'orienter les dirigeants de la Société de développement de la baie James. La question pourra peut-être s'adresser également à la société qui s'occupe du développement hydro-électrique dans cette région.

M. NADEAU: M. Giroux fera tantôt un exposé des programmes d'équipement de l'Hydro-Québec. Evidemment, nous avons fait notre recommandation quant à la Grande, on ne

peut pas arrêter des programmes de financement avant qu'on ait arrêté des programmes d'aménagement.

On a dit tantôt que la Société d'énergie jouissait d'un capital autorisé de $1 milliard. Evidemment le reste devra venir d'emprunts qui seront faits sur des marchés nationaux, puis internationaux, comme le font la province et l'Hydro-Québec actuellement.

M. LEDUC: Au sujet du financement, M. Nadeau, depuis que la Société de développement de la baie James existe, est-ce que, soit vous ou des membres de la société avez fait des démarches auprès des provinces créditistes afin d'avoir des prêts sans intérêt pour développer la Société de développement de la baie James?

M. ROY (Beauce): Comme l'a fait M. Lesa-ge, en 1963 ou 1964? Est-ce que c'est ça que vous voulez dire?

M. GARNEAU: Avec intérêt. M. ROY (Beauce): Sans intérêt.

M. LE PRESIDENT: Je demanderais, s'il vous plaît, qu'on s'en tienne aux questions et aux réponses qui concernent le débat présent.

M. LOUBIER : On pourrait peut-être satisfaire la curiosité du député de Beauce en demandant au président, lui qui connaît le monde de la finance, s'il envisage la possibilité de recourir à la Banque du Canada pour financer en partie le projet.

M. GIROUX: Je vais exposer tout cela. J'attends.

M. ROY (Beauce): Vous allez nous exposer tout ça, tout à l'heure. Nous avons hâte de prendre connaissance de toutes vos suggestions. Nous pourrons revenir sur le sujet. Voici pourquoi j'ai posé la question. C'est parce que...

M. LE PRESIDENT: Non, si vous voulez, ne nous expliquez pas la raison de la question, parce que vous aurez l'occasion d'y revenir.

Le député d'Abitibi-Ouest.

M. AUDET: J'aimerais continuer dans la même veine. Cela va bien. On nous a déclaré que le Québec, par exemple, pouvait fournir environ 75 p.c. de la main-d'oeuvre, des services techniques, des matériaux, etc. D'après le mode de financement dont on vient de parler, ne craignez-vous pas un peu que toutes ces belles propriétés du Nord-Ouest ne deviennent une propriété américaine?

M. NADEAU: Non.

M. AUDET: Même face aux revenus qui pourraient en découler?

M. NADEAU: Nous ne vendons rien; nous empruntons sur des actifs que nous possédons.

M. AUDET: Oui. Maintenant, vu que les revenus peuvent être moins élevés que les intérêts que nous avons payés, peut-être que nous aurons à hypothéquer nos territoires pour plusieurs années à venir. Maintenant, vu la façon dont le gouvernement veut continuer à financer ces développements, ne seriez-vous pas d'avis, comme M. Giroux l'était l'autre soir, lorsqu'il a répondu affirmativement à ma question, que le gouvernement devrait faire pression auprès du gouvernement central pour lui demander que la banque centrale devienne l'agent financier de ces développements avec des prêts sans intérêt?

M. NADEAU: Vous devriez poser la question au gouvernement.

M. AUDET: Pardon?

M. NADEAU: Je ne vois pas pourquoi vous me posez la question. Elle devrait être posée au gouvernement et non à moi. Vous me demandez si je crois que le gouvernement...

M. AUDET: Je l'ai demandé à M. Giroux, l'autre soir.

M. NADEAU: Non, je ne crois pas que je doive répondre à cette question. Il appartient au gouvernement d'y répondre.

M. LOUBIER: Ce n'est pas la question qui est sans intérêt. Ce seraient les emprunts faits à la Banque du Canada.

M. GIROUX: L'autre soir, on nous a demandé si nous avions objection à emprunter de la Banque du Canada. Nous avons déclaré que nous n'avions aucune objection à emprunter de la Banque du Canada, même avec intérêt.

M. LOUBIER: Cela ne répond pas à sa question.

M. GIROUX: Nous avons déclaré, l'an dernier, que l'Hydro-Québec avait emprunté, pour son centre de recherche, du gouvernement canadien à un taux d'intérêt favorable. Chaque fois qu'une transaction sera intéressante, nous la ferons. Naturellement, on ne peut pas dire que la Banque du Canada devrait ou non...

Cela est une question entre les deux gouvernements. Mais nous, si nous avons l'occasion d'emprunter à un taux moindre que le taux courant, soyez assuré que nous allons avoir l'autorisation, par téléphone, du ministre des Finances et de la province de Québec.

M. AUDET: M. le Président, je crois que c'est très logique puisque le Canada accepte de

prêter aux pays étrangers. Je ne vois pas pourquoi il ne prêterait pas à la province de Québec.

Une autre question. Est-ce que le tracé du chemin de Villebois-baie James, qui a été commencé par la Chambre de commerce de La Sarre, aurait des chances d'être choisi comme un parcours futur pour une route desservant les établissements de la baie James?

M. NADEAU: M. le Président, je ferai, à cette question, la même réponse que j'ai faite la semaine dernière à Val-d'Or. Si on me pose la question ce soir, je dirai non. Dans un mois, dans deux mois, dans six mois, dans un an, ma réponse pourrait être différente. A ce moment-ci, non, nous n'envisageons pas la route Villebois-baie James.

Cela peut devenir nécessaire pour le développement ouest du territoire. Mais, à ce moment-ci, en ce qui nous concerne, non, nous ne l'envisageons pas.

M. AUDET : Vous ne partagez pas l'optimisme de votre collaborateur, M. Cliche, par exemple?

M. NADEAU: Ecoutez, je pourrais vous dire oui et, si cela ne se réalise pas, vous seriez le premier à me blâmer. Alors, je vous dis que ce soir, au moment où nous nous parlons, non, nous ne l'envisageons pas.

M. AUDET: Nous n'avons qu'à espérer.

M. GARNEAU: M. le Président, concernant le financement, je ne sais pas si je devrais attendre l'exposé de M. Giroux ou non. Mais, comme des questions ont été posées sur le financement, est-ce que vous pouvez nous dire, M. Nadeau, à quel moment la Société d'énergie va pouvoir bénéficier d'un "cash flow" autonome pouvant lui permettre de contribuer au financement des étapes ultérieures du projet? Supposons que le projet est sur une base de dix ou douze ans, à quel moment la Société d'énergie va-t-elle pouvoir dégager elle-même un "cash flow"?

M. NADEAU: M. Garneau, je ne voudrais pas anticiper sur ce que M. Giroux va dire. Seulement, la seule réponse que je peux vous donner, c'est pas avant qu'elle produise de l'électricité.

M. GARNEAU: Oui, mais ce que je veux savoir, c'est à quelle phase?

M. NADEAU: Vers 1980, si on en juge par les besoins qui seront énoncés tantôt par M. Giroux.

M. GARNEAU: Donc, je vais attendre que M. Giroux ait fait son exposé.

M. NADEAU: Je crois que ce serait préférable.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, nous avons eu beaucoup de documents et, évidemment, bien des choses peuvent s'entrecouper. Je me demande, en remerciant bien sincèrement M. Nadeau du témoignage qu'il nous a fait au nom de la Société de la baie James, s'il n'y aurait pas lieu, peut-être, de demander aux gens de l'Hydro-Québec de parler. Les deux problèmes se recoupent et on risque, en posant des questions, d'empêcher un exposé plus méthodologique, plus ordonné du problème.

M. LE PRESIDENT: J'attendais, avec beaucoup d'anticipation, l'occasion de faire ce commentaire. Je remercie le député de Verchères d'avoir voulu le suggérer. Alors, avec beaucoup d'intérêt, nous écouterons M. Giroux faire son exposé du programme d'équipement.

M. GIROUX: M. le Président, messieurs, comme je l'ai expliqué ici en 1971, les besoins d'électricité du Québec vont sans cesse croissant. Je voudrais donc vous expliquer, avec l'aide de nos spécialistes, comment l'Hydro-Québec a établi son programme d'équipement pour combler les nouveaux besoins d'énergie électrique du Québec entre 1978 et 1985. Nous verrons que l'Hydro-Québec prend tous les moyens disponibles pour faire face à ces besoins. Nous verrons comment nous avons considéré très soigneusement les différents modes de production possibles. Pour en arriver à un choix, nous avons dû essayer diverses combinaisons de projets hydro-électriques, thermiques et nucléaires, pour former des programmes conçus pour satisfaire la demande tout en respectant certaines contraintes.

Nous verrons selon quels critères et quelle méthode nous avons procédé à ce choix, tenant compte des coûts ainsi que des autres facteurs pertinents.

Nous verrons enfin le résultat de toutes ces études et les recommandations qui en découlent.

Les besoins. On sait que notre puissance disponible doit doubler approximativement à tous les dix ans. Nous avons toutes les raisons de croire que ce rythme de croissance ne va pas ralentir dans les dix ou quinze prochaines années. Certains courants d'opinion publique, en particulier aux Etats-Unis, peuvent commencer à s'inquiéter d'un tel taux de croissance mais même ceux qui s'en inquiètent ne voient pas de possibilité de ralentissement durant cette période.

Comme le Québec n'a pas encore atteint le niveau de prospérité de nos voisins du Sud, on peut prévoir que la croissance de notre consommation d'électricité n'est pas près de ralentir.

Il faudra donc, d'ici 1982, une capacité additionnelle de production égale à toutes nos installations actuelles.

Vous avez entre les mains, dans l'annexe A, la prévision année par année de nos besoins. Dans ce document, vous verrez que nos projets en cours, comme Manic 3 ainsi que nos achats de Churchill Falls, permettent de faire face aux besoins jusqu'en 1977 inclusivement.

M. Le Président, si vous me le permettez, à ce stade-ci je demanderais à un de nos spécialistes, M. Fournier, d'expliquer les besoins, parce que les questions qui peuvent découler du reste du programme dépendent énormément de cette annexe A.

M. FOURNIER : Les besoins ou la puissance requise, si on peut l'appeler ainsi, est composée de trois choses: les besoins du réseau principal de l'Hydro-Québec, autrement dit les clients qui sont raccordés directement à notre réseau; les besoins qui sont composés des ventes en bloc — ce que l'on entend par les ventes en bloc, ce sont les ventes que l'on fait aux autres compagnies à l'intérieur de la province et les ventes que l'on fait aussi à l'extérieur de la province — et la troisième partie de la puissance qui est requise, c'est la partie de la puissance qu'il faut installer pour tenir compte des pannes des groupes.

Les trois mis ensemble font la puissance qui est requise pour répondre aux besoins.

Maintenant, si on regarde les chiffres à partir de 1977 on a déjà mentionné que jusqu'à 1977 l'apport énergétique de Churchill Falls et de Manic 3 comblera nos besoins — nous avons un besoin, jusqu'en 1985, de 15 millions de kilowatts et de 70 milliards de kilowatts-heures de plus pour l'année 1985.

Cette augmentation croît dans le temps. Elle est de 1,200,000 kilowatts en 1978 et d'environ 2,500,000 kilowatts par année en 1985. Dans cette puissance disponible, nous avons une croissance de 17 millions de kilowatts — je parle de la puissance totale de 1'Hydro-Québec en 1977 — à 32 millions de kilowatts en 1985, lesquels, il est intéressant de le mentionner, comprennent environ 3 millions à 3.5 millions de kilowatts de réserve.

Je mentionne ce point-ci parce que l'on voit que plus de 10 p.c. de la puissance installée est requise pour combler les pannes des groupes soit thermiques, nucléaires ou hydrauliques. Tous les groupes sont sujets à des pannes et à des périodes d'entretien.

J'aimerais aussi mentionner que dans les déficits que l'on vous mentionne ici pour les années qui suivront 1977, on n'a tenu compte d'aucune vente à l'extérieur de la province, mais tous les contrats existants se terminent en 1976 et 1977. Donc, les seules ventes que nous ayons dans nos déficits, après 1977, sont les ventes à l'extérieur de notre réseau mais à l'intérieur de la province. J'entends par ceci des compagnies comme la Canadian British Aluminum, par exemple.

M. LOUBIER: Ce qui voudrait dire que pour notre propre consommation à l'intérieur du Québec, à partir de 1978, nous sommes fatalement déficitaires.

M. FOURNIER: A chaque année, oui, pour un total de 15 millions de kilowatts en 1985.

M. LOUBIER: Et même en rapatriant alors toutes les exportations que l'on fait actuellement?

M. FOURNIER: Elles seront rapatriées en 1977.

M. LOUBIER: En 1977.

M. FOURNIER: Oui.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.

M. JORON: Le taux de croissance annuel moyen de 7.9 p.c. est une extrapolation de ce qui s'est passé autrefois.

M. FOURNIER: Une extrapolation des vingt dernières années.

M. JORON: Le taux de croissance de la population du Québec a été considérable au cours des vingt dernières années. Par contre, les statistiques démographiques actuellement disponibles et les projections pour l'avenir montrent un ralentissement considérable de ce taux de croissance. Quel est l'effet de la baisse de l'augmentation démographique de la population du Québec sur la demande d'électricité? Quelle partie peut-on imputer, dans la demande globale d'électricité, au seul facteur de la population et est-ce qu'il en a été tenu compte dans vos prévisions?

M. FOURNIER: Non, les prévisions, à l'heure actuelle, sont basées sur le passé historique.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il ne serait pas vrai de dire, cependant, que le besoin d'énergie des consommateurs représente à peu près 18 p.c. à 20 p.c. de votre consommation totale?

M. FOURNIER: La consommation résidentielle est de l'ordre de 20 p.c. ou peut-être 1 p.c. ou 2 p.c. de plus.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il ne serait pas juste de dire, donc, que 80 p.c. de votre demande annuelle sont plutôt reliés à une activité commerciale et industrielle et que, peut-être alors, une projection du taux de croissance du produit national brut serait un meilleur indicateur de l'évolution de la demande d'électricité que strictement la population? En effet, la même population, qui se transforme de rurale à industrielle, évidemment, va impliquer des changements.

M. FOURNIER: Je peux, peut-être, me servir de ma mémoire pour répondre indirectement. Le taux de croissance de la population, si je ne me trompe pas, au cours des vingt

dernières années était de l'ordre de 1.5 p.c, tandis que le taux d'augmentation de l'électricité était de 7.9 p.c. Je ne peux pas vous dire...

M. JORON: Quel effet cela a-t-il?

M. FOURNIER: ... quel effet pourrait avoir une diminution du taux.

M. JORON: Si c'était de 1.5 p.c. depuis une vingtaine d'années, c'est 0.3 p.c. ou 0.4 p.c. à l'heure actuelle. C'est une jolie différence. On parle de 1 contre 3; ça va sûrement avoir un effet.

Pour enchaîner avec la question de M. Saint-Pierre, le secteur commercial est directement lié aussi à la population desservie. Le secteur industriel, peut-être dans une mesure moindre; là, j'en conviendrais. Mais le secteur commercial a quand même une relation très directe avec la population desservie.

M. SAINT-PIERRE: Je ne sais pas si quelqu'un peut commenter. Je pense que la plupart des pays européens n'ont aucune croissance de population. Effectivement, il y en a plusieurs qui sont en décroissance, mais il y a, quand même, croissance des besoins d'électricité, ce qui reflète des besoins plus sophistiqués des consommateurs, plus de transactions entre les parties et plus d'activités extérieures.

M. JORON: A cause de l'industrialisation accélérée qui s'est faite en Europe de l'Ouest depuis la fin de la guerre, cela va de soi.

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, mais est-ce qu'on ne pourrait pas dire que le Québec, avec un taux de croissance de son PNB de 9.5 p.c. prévu pour cette année, qui est le plus haut de tous les pays industrialisés, sauf le Brésil et le Japon, et qui reflète un changement dans sa structure industrielle beaucoup plus grand que dans certains pays européens, serait beaucoup plus influencé par cela?

En d'autres termes, si on prend un pays comme la France, est-ce qu'il y a réellement des changements, une accélération de l'industrialisation? Je pense qu'elle est moins forte que ce qu'on a au Québec actuellement.

M. BOYD: On pourrait peut-être ajouter qu'au point de vue résidentiel, l'accroissement de la demande est beaucoup plus relié aux revenus disponibles des individus qu'à l'augmentation de la population. Cela se reflète aussi dans la consommation moyenne des abonnés domiciliaires, qui augmente dans certaines régions au rythme de 25 p.c. et 30 p.c.

Si vous prenez un territoire comme la Gaspésie, depuis que les gens ont des revenus plus considérables — même s'ils ne sont pas encore ce qu'ils voudraient, c'est quand même mieux qu'en 1960 ou 1963— le taux de consommation a augmenté de 20 p.c. à 25 p.c.

M. JORON: Cela traduit la pénétration des appareils électriques dans les ménages. Il arrive un moment où on atteint, quand même, une certaine saturation. Je pense que, quand on fait des taux de croissance semblables, il faut se poser cette question-là: A quel moment le taux de saturation est-il arrivé?

Quand 99 p.c. des domiciles auront par exemple la sécheuse, la laveuse, le réfrigérateur, etc? Il arrive quand même à un certain point de saturation. Il faudrait savoir à quel point on est rendu au Québec dans cette accélération-là, savoir quand même, avoir...

M. BOYD: On n'est pas rendu très loin, M. Joron. D'ailleurs les chiffres qu'on emploie dans nos projections sont même conservateurs par rapport à ceux qu'emploient les utilités américaines. Federal Power Commission, qui a fait une étude pour tout l'ensemble des utilités américaines, prévoit que d'ici 1985-1986, la même période que la nôtre, leur taux d'accroissement va être plus grand que celui qu'on emploie.

Même si aux Etats-Unis il y a toujours les gens du Sierra Club et tous ceux qui s'opposent à l'utilisation de l'énergie et toutes les campagnes formidables qu'ils font, on ne peut quand même pas mettre en doute la Federal Power Commission. On a un rapport ici, qui vient de sortir, qui emploie un taux d'accroissement de charge qui est supérieur à celui qu'on projette.

M. JORON: Qui est de combien, au fait?

M. GIROUX: C'est 7.9 p.c. ou quelque chose comme ça qu'ils emploient en comparaison de nos 7.5 p.c.

M. SAINT-PIERRE: Je pense que le député de Gouin conviendra avec moi que cette possibilité, cette pénétration maximum qui pourrait survenir, ça touche quand même seulement 20 p.c. de la demande d'électricité. Je pense tout à coup à un club de baseball majeur qui s'appelle les Expos qui, j'en suis certain, a consommé plus d'électricité dans une saison que peut-être toute la croissance possible du reste des consommateurs.

Un autre point je pense qui mériterait d'être souligné, et j'en discutais avec le député de Bellechasse aussi, c'est cette poussée vers l'urbanisation qu'on prévoit en 1980. Près de 87 p.c. des Québécois vivant dans des centres urbains impliquent également, par des études passées, une consommation d'électricité beaucoup plus grande, per capita, que celle des gens qui vivent dans les centres ruraux. Je pense que...

M. JORON: Alors on a toujours 80 p.c.

M. SAINT-PIERRE: Pour toutes ces raisons, l'estimation me semble quand même...

M. PERREAULT: D'ailleurs, M. le président,

je demandais à M. Boyd, ces 20 p.c. de consommation résidentielle, est-ce que le taux de croissance, en 1971, n'a pas dépassé 9 p.c?

M. BOYD: Oui, de beaucoup.

M. PERREAULT: En 1971, 9.2 p.c, 9.3 p.c?

M. BOYD : Oui, d'après notre rapport annuel, présenté la semaine dernière, l'augmentation de la consommation domiciliaire dépassait 9 p.c, la consommation résidentielle.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin. Est-ce qu'on pourrait continuer?

M. BOYD: II n'y a pas d'autres questions sur la croissance?

M. LE PRESIDENT: Je ne crois pas.

M. GIROUX: Les charges nécessaires. Alors il faut considérer qu'à partir de 1978, il faudra nécessairement commencer à mettre en service de nouvelles unités de production à un rythme croissant allant de 1.2 à 2.5 millions de kW par année jusqu'en 1985. Il faut comprendre que cette puissance dont nous avons besoin n'est pas toute de même nature. Une partie comprend la puissance de base, c'est-à-dire celle qui est utilisée presque continuellement. Une autre comporte surtout la puissance de pointe, c'est-à-dire qu'elle n'est utilisée qu'à certaines heures où la demande est à son maximum. Cette distinction sera très importante quand nous parlerons de la composition d'un programme d'équipement. Vous trouverez à l'annexe B une série de définitions plus complètes de toutes ces notions.

Le mode de production possible. Pour décider quel type de centrale pourrait produire cette électricité à partir de 1978, nous avons d'abord effectué une double évaluation. D'autre part, nous avons fait le tour d'horizon des techniques de production disponibles, avec leurs caractéristiques bien distinctes. D'autre part, nous avons considéré les ressources dont dispose le Québec dans ces domaines ainsi que les développements futurs prévisibles. Vous trouverez dans l'annexe "C" une brève description de ces modes de production avec quelques-uns de leurs avantages et désavantages respectifs.

Peut-être qu'on pourrait aller directement à l'annexe "C", les modes de production d'électricité, et à ce moment-là, débuter...

M. BOYD: Débuter par l'annexe "B".

M. GIROUX: M. De Groot, pouvez-vous donner l'explication de l'annexe B)?

M. LE PRESIDENT: M. Giroux, il semble y avoir, pour des membres de la commission, de la difficulté à vous entendre; pourriez-vous approcher du micro un peu?

M. DE GROOT: M. Le Président, les membres de la commission, je vais faire quelques brefs commentaires sur l'annexe B), sur les définitions. Toute analyse s'appuie généralement sur un ensemble de contraintes, de critères, de définitions qui forment ce qu'on pourrait intituler le contexte sans lequel un chiffre, un mot ou une phrase peut conduire à de multiples interprétations et semer la confusion.

Afin d'éviter ce genre de choses et de faire un peu de lumière sur ce fameux contexte des analyses qui conduisent au choix d'un programme d'équipement, nous tentons maintenant de définir les termes qu'il est nécessaire de comprendre afin d'expliquer deux grandes questions. La première est: Pourquoi est-il nécessaire de comparer des programmes d'équipement plutôt que des projets individuels? La deuxième est: Comment s'effectue la comparaison entre plusieurs programmes d'équipement?

Au sujet de la première question, je vais d'abord définir un programme d'équipement. C'est simplement un ensemble de projets individuels constitués de centrales, de lignes et de postes qui sont échelonnés sur une période de temps de façon à répondre à l'accroissement de la demande. L'objet d'un bon programme d'équipement est évidemment de marier le produit et la demande en tenant compte de certaines contraintes et, bien entendu, au coût le plus bas possible.

Je voudrais, très rapidement, passer aux caractéristiques du produit. Le produit d'un programme d'équipement, comme il a déjà été mentionné par M. Fournier et par le président de l'Hydro-Québec, se mesure en kWh. Pour fournir cette énergie, on a recours à de la puissance que l'on mesure en kW. Une puissance de 1 kW qui fonctionne pendant une heure fournit 1 kWh d'énergie. Ainsi, comme pour une centrale électrique, un moteur a un certain potentiel de puissance et ce potentiel est de 200 chevaux-vapeur, par exemple. Dans notre vocabulaire, nous dirions que l'auto a une puissance installée de 149 kW. Ce potentiel n'est pas toujours utilisé complètement car l'auto ne roule pas continuellement à la vitesse de pointe mais il doit être disponible car il ne peut être emmagasiné.

Pour un réseau électrique, le phénomène est le même. Lorsque beaucoup de puissance est demandée en même temps, cette puissance doit être disponible mais, lorsque la demande diminue, une partie de cette puissance reste inutilisée. Lorsque la puissance est inutilisée, elle entraîne des coûts mais ne génère pas de revenu. Il est donc important de tenir compte du pourcentage d'utilisation. Une pièce d'équipement qui doit fonctionner tout le temps à pleine capacité, donc avec un facteur d'utilisation de 100 p.c, devrait avoir des caractéristiques différentes d'une autre pièce dont le facteur d'utilisation serait 50 p.c.

Comme nous le verrons, les caractéristiques de la demande sont telles que toutes les nouvelles centrales ne peuvent pas avoir le même facteur d'utilisation. Certaines doivent fonctionner en pointe, comme M. Giroux l'a dit, d'autres en base, d'où la nécessité de comparer plusieurs projets à l'intérieur d'un même programme.

Rapidement, quelques notes sur les caractéristiques de la demande. Je m'excuse encore de certaines répétitions mais je crois que, comme ces termes vont se reproduire dans les rapports d'ingénieurs-conseils et dans les rapports de l'Hydro-Québec, il est utile qu'on fasse un effort pour bien les définir.

En ce qui concerne, donc, les caractéristiques de la demande, plus il y a d'appareils qui sont branchés ou qui démarrent ensemble, plus il y a de puissance qui est demandée sur le réseau. Ce phénomène est désigné comme un appel de puissance. A l'intérieur d'une journée, les caractéristiques de la consommation sont telles que cet appel de puissance varie d'heure en heure. Il y a des variations également hebdomadaires, mensuelles et entre les années.

Dans la pointe journalière, les deux sommets sont appelés des pointes. Ces pointes ne durent pas longtemps et doivent être fournies par certains types d'équipements compatibles avec un faible facteur d'utilisation. Aussi, il y a un niveau de puissance en-dessous duquel l'appel ne descend pas. On désigne ce niveau comme la base, qui exige des équipements compatibles avec un facteur d'utilisation élevé car ils doivent fonctionner une grande partie du temps.

Enfin, quelques notes sur les contraintes qu'un programme d'équipement doit respecter. Dans ses grandes lignes, l'exploitation peut être définie comme les opérations qui permettent d'avoir disponible, en tout temps et dans de bonnes conditions d'utilisation, l'énergie électrique dont le client a besoin.

Ceci, évidemment, amène notamment la notion de réserve. Cette notion, j'insiste dessus parce qu'un coût s'applique sur la réserve. Ce coût n'est pas nécessairement inclus dans des études de manufacturiers et c'est un des éléments qui, dans les comparaisons, amène à des confusions. Ceci couvre donc la réserve.

Je crois devoir encore dire quelques mots sur la comparaison entre les programmes d'équipement. Une des complications, un des problèmes compliqués avec la comparaison des programmes d'équipement est la longévité différente de certains modes de production d'électricité. Une centrale hydro-électrique peut avoir une vie de 50 à 60 ans alors que le nucléaire peut avoir une vie de 25 à 30 ans. La comparaison économique de la production par ces deux différents modes requiert des ajustements qui sont importants et les techniques utilisées introduisent la notion de réinvestissement et de valeurs résiduaires.

Le problème parait compliqué mais il n'est pas différent du problème d'acheter un pneu qui fait 20,000 milles dans un cas et dans l'autre un pneu qui est capable de faire 40,000 milles. C'est à peu près le même problème.

Enfin, dans le domaine des coûts, très rapidement, il est important de noter qu'il faut considérer non seulement des coûts d'investissement, mais les coûts d'exploitation.

Si on prend deux camions de spécifications égales à coût égal, le choix sera probablement du camion qui a les frais d'exploitation les plus bas.

Donc, en faisant un choix d'investissement ou en faisant un achat, le problème est le même. On doit considérer les deux genres de coûts.

Finalement, sur les coûts encore, dans nos termes, les coûts de construction s'expriment; en dollars par kW. Les coûts d'exploitation s'expriment en mills par kWh. J'insiste beaucoup sur le fait que comparer des programmes seulement sur la base des dollars par kW équivaut à ne considérer que les coûts de construction et peut conduire à de mauvaises interprétations.

M. SAINT-PIERRE: Mais ceux qui porteraient un jugement sur cette base, comment les qualifiez-vous? Cela m'a surpris. Je pense que les membres de cette commission ont entendu, en fin de semaine, une manchette de Radio-Canada dans laquelle on a dit: La baie James est une aberration puisque le coût du kW installé est de X, le nucléaire serait tant et l'autre serait tant. Cela a fait les manchettes aux nouvelles de Radio-Canada. C'est un professeur de l'université de Toronto. Comment prenez-vous un tel jugement?

M. GIROUX: J'ai remarqué qu'il n'était pas trop trop précis. Pour en venir entre $200 et $400, pour ma part je pense qu'il n'a pas travaillé fort pour les calculs.

M. SAINT-PIERRE: II ne tenait pas compte des frais d'exploitation à long terme.

M. GIROUX: II ne tenait compte de rien. Il faisait un discours.

M. SAINT-PIERRE: Mais il a défrayé les manchettes. Si je comprends votre exemple, vous nous dites de nous méfier des gens qui prétendent qu'au lieu d'acheter — je vais faire un peu d'annonce commerciale — un pneu Michelin il est préférable d'acheter un pneu à $14.35. Ce sont des gens qui peuvent nous donner de mauvais conseils.

M. LOUBIER: Cela dépend de votre capacité de payer.

M. JORON: Cela dépend de ce que vous pouvez faire d'autre avec l'argent que vous avez de disponible aussi.

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse.

M. DE GROOT: Je vous en prie. Donc, j'en viens à la conclusion qu'il faut considérer tous ces coûts, ce qui amène, bien entendu, la notion d'inflation et d'actualisation. Ces notions sont expliquées dans ce texte. Je ne crois pas nécessaire de les reprendre. D'ailleurs, un de mes collaborateurs ici est un expert dans la question. Il sera très content de répondre à n'importe quelle question qui puisse exister sur le domaine de l'inflation et de l'actualisation.

Nous en arrivons, en fait, du point de vue économique bien entendu, à une comparaison entre formes de production qui se fait sur un programme d'équipement, sur la base du coût de l'énergie livrée actualisée. Nous pensons que c'est la notion, du point de vue économique, qui est la plus exacte.

Je m'excuse d'avoir été aussi long. Nous pensons que ces définitions sont nécessaires. Tout au moins, j'espère qu'elles seront utiles et qu'elles aideront à éclaircir, clarifier les nombreuses informations qui seront données et surtout mieux comprendre et discuter le choix de programmes d'équipement.

M. LE PRESIDENT (Harvey, Chauveau): Alors, si les membres de la commission veulent poser des questions. L'honorable député de Bellechasse.

M. LOUBIER: J'aurais deux ou trois questions, pour essayer d'améliorer mon aspect profane de la perception de tous ces problèmes et toutes ces données que vous avez présentés. A la page 7, sous la rubrique "En tout temps", les délais de construction.

Entre le moment où l'on décide qu'il faut une nouvelle centrale et le moment où cette centra produira de l'électricité, il s'écoule entre six et dix ans. A ce moment-là, est-ce que pour une centrale thermique ou une centrale hydroélectrique ou une centrale nucléaire que c'est la période moyenne de construction ou de mise en marche et en production? A la page 7.

M. CAHILL: Le temps de construction, pour une centrale thermique, est de l'ordre de cinq ans.

M. LOUBIER: Oui.

M. CAHILL: A partir du moment où on prend la décision de construire une centrale thermique, on fait la recherche du terrain et on fait les différentes études. On peut tabler, peut-être, sur huit ans, lorsqu'on ne connaît pas l'emplacement où la centrale sera construite.

M. LOUBIER: Oui.

M. CAHILL: C'est plus sûr. Pour une centrale hydro-électrique, cela dépend, évidemment, à quel stade on est rendu dans les études et quel est le temps de construction de ce projet. Il y a différentes périodes de construction pour différentes centrales hydro-électriques.

M. LOUBIER: Oui.

M. CAHILL: Cela peut varier, pour une centrale hydro-électrique, entre quatre à six ans, disons...

M. LOUBIER: Oui.

M. CAHILL: ... pour donner un ordre de grandeur.

M. LOUBIER: Très bien. Et, pour une centrale nucléaire, est-ce que vous avez des statistiques américaines qui pourraient nous donner au moins une certaine idée?

M. CAHILL: Nous pouvons parler en termes de six ans, si vous voulez...

M. LOUBIER: En termes de six ans.

M. CAHILL: ... pour le temps de construction et de mise en route, le service commercial. Vous pouvez entendre des chiffres qui varieront d'un an ou deux ans. Pour nettoyer les pépins, avoir une mise en service commercial réelle et pour que l'équipement produise un facteur d'utilisation de 80 p.c. à 90 p.c, dans le cas de centrales thermiques, cela peut prendre peut-être six mois; dans le cas de centrales nucléaires, cela peut prendre de six mois à un an et demi, enfin.

M. LOUBIER: La durée de production efficace d'une centrale nucléaire, on a dit, tout à l'heure, que cela se situait entre 25 et 30 ans. S'il s'agissait d'une centrale hydro-électrique, on a dit que sa vie, littéralement, variait entre 40 et 50 ans. Est-ce ça?

M. CAHILL: On dit 50 ans pour les fins de calcul, si vous voulez. Mais il y a des centrales hydro-électriques qui ont 60 ans et qui produisent toujours, comme la centrale des Cèdres, par exemple, sur le Saint-Laurent.

M. LOUBIER: Oui. Mais c'est prouvé que, s'il s'agit d'une centrale nucléaire, sa durée de production efficace serait de l'ordre de 25 à 30 ans.

M. CAHILL: II n'y a peut-être pas de preuve définitive, parce...

M. LOUBIER: Non.

M. CAHILL: ... que, présentement, il n'y a pas de centrale nucléaire commerciale, si l'on peut dire, qui est âgée de 30 ans.

M. LOUBIER: Oui.

M. CAHILL: Mais c'est ce qu'on prévoit. Certains groupes prévoient 25 ans et certains autres groupes prévoiront 30 ans. C'est un peu, je ne sais pas si on peut dire, fictif.

M. SAINT-PIERRE: C'est un chiffre utilisé par à peu près tous ceux qui se penchent sur le problème.

M. CAHILL: De 25 à 30 ans.

M. LAURIN: Sur quoi base-t-on ces viabilités en ce qui concerne la nucléaire et le thermique, par exemple?

M. CAHILL: Je crois qu'on table sur la vétusté de l'équipement qui demandera trop de réparations, à un moment donné. Dans le cas du réacteur, je crois qu'on ne peut plus se servir des matériaux à cause des radiations.

M. LAURIN: Dans des centrales qui atteignent l'âge de 30 ans, est-ce qu'on a constaté ces facteurs dont vous parlez?

M. CAHILL: Dans le cas des centrales nucléaires, je ne pourrais pas dire.

M. LAURIN: Non, mais dans celles qui s'approchent le plus de la trentaine d'années, est-ce qu'on a noté ces choses?

M. JORON: En Angleterre, il y en a qui ont...

M. LAURIN: Vingt ans.

M. LOUBIER: Dix-sept ans dans le plus.

M. SAINT-PIERRE: Les premières, en Angleterre, ont été...

M. JORON: En 1952.

M. SAINT-PIERRE: ... en 1952?

M. LOUBIER: Cela fait 17 ans, je pense, en Angleterre.

M. CAHILL: Je ne saurais pas vous le dire, de mémoire.

M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, le député d'Abitibi-Est.

M. TETRAULT: Dans l'annexe, vous dites que les centrales hydro-électriques — pour revenir à la question du député de Bellechasse — peuvent durer 50 ans, tandis qu'une station nucléaire peut durer 30 ans avant d'être remplacée. Est-ce que le coût de réaménagement d'une centrale hydro-électrique par rapport au coût de réaménagement d'une centrale thermique est bien différent ou s'il est à peu près comparable, pour suivre l'explication que vous avez donnée tout le long?

M. CAHILL: Bien le coût pour construire une centrale...

M. TETRAULT: Non, pas la construction. Pour remplacer l'équipement à l'intérieur pour le bon fonctionnement de la centrale.

M. CAHILL: On n'emploiera plus la même centrale.

M. TETRAULT: La centrale, après cinquante ans...

M. CAHILL: Quelle centrale voulez-vous dire?

M. TETRAULT: Vous avez dit qu'il y a des centrales hydro-électriques pour une période de cinquante années, tandis qu'une centrale nucléaire dure une période estimée à trente ans, avant que le remplacement se fasse.

M. CAHILL : Les centrales hydro-électriques que je connais, à l'Hydro-Québec, et que nous avons abandonnées, nous ne les avons pas reconstruites. J'ai en tête, par exemple, Chambly, qui était une centrale de 2,000 ou 3,000 kilowatts, qu'il n'était pas économique de remplacer. On l'a tout simplement détruite. Il y a quelques autres centrales du même genre, que nous avons détruites.

M. JORON: ... dans trente ans. On abandonne tout, le barrage inclus ou quoi?

M. CAHILL: Ecoutez, dans trente ans, c'est assez difficile.

M. JORON: On refait un autre barrage ou si on change seulement les turbines.

M. CAHILL : Changer les turbines, c'est relativement facile. Probablement qu'on changera les turbines.

M. JORON: Les turbines, cela a une vie de combien de temps?

M. CAHILL: Je ne sais pas si vous avez mentionné trente ans pour l'hydraulique mais on se base toujours sur une vie de cinquante ans pour l'hydraulique.

M. JORON: Non. J'ai dit dans trente ans, à Beauharnois, parce que cela existe déjà depuis une trentaine d'années au moins.

M. CAHILL: C'est ce que j'avais compris. C'est bien cela. A Beauharnois, nous remplacerions les turbines, comme question de fait. Les alternateurs se remplacent assez facilement. Je pourrais prévoir qu'il y aurait possibilité de faire tenir le barrage encore pendant longtemps.

M. JORON: Ce que je veux dire, c'est que dans une centrale hydro-électrique, il n'y a rien qui se remplace, même pas les turbines, en moyenne, avant une cinquantaine d'années.

M. CAHILL: C'est cela.

M. JORON: Le barrage lui-même, comme tel, comme masse de ciment, est-ce que cela a une vie limitée?

M. CAHILL: S'il est entretenu régulièrement, si on corrige les infiltrations qui se font soit à travers le barrage, soit en-dessous du barrage, il peut durer très longtemps. Il y a une certaine inclinaison du barrage, oui, mais cette inclinaison n'est pas dangereuse et n'augmente pas appréciablement avec le temps.

M. LOUBIER: Pourriez-vous nous établir le coût de construction, avec la même production énergétique, d'une centrale nucléaire, pour la même production énergétique qu'une centrale hydro-électrique? Est-ce possible d'établir cela?

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je ne sais pas si on veut immédiatement aborder la question des coûts —je n'ai pas d'objection — mais je pense qu'un peu plus tard, les gens de l'Hydro-Québec...

M. CAHILL: Nous pourrions peut-être traiter de ce sujet plus tard, si cela vous convient.

M. LOUBIER: D'accord.

M. LAURIN: Une dernière question, M. le Président, sur la viabilité des centrales nucléaires. Etant donné que les premières centrales ont été construites d'une façon expérimentale et que les procédés se sont considérablement améliorés depuis, j'imagine, est-ce que le taux de viabilité des centrales nucléaires tend à s'accroître, avec les années?

M. CAHILL : Le taux de fiabilité?

M. LAURIN: De viabilité. Est-ce que la longévité tend à s'accroître avec les années, au fur et à mesure que la technologie s'améliore?

M. BOYD: La meilleure réponse à cela, M. Laurin, c'est que les experts canadiens en énergie nucléaire et les experts qui s'occupent de la même chose, aux Etats-Unis, ne veulent pas risquer des chiffres de plus de 25 ou 30 ans de service. Les compagnies qui en fabriquent aux Etats-Unis emploient les mêmes chiffres, soit 25 ou 30 ans.

Comme l'expliquait M. Cahill, les matériaux qui entrent là-dedans sont soumis à toutes sortes de réactions. Ils considèrent qu'il serait trop dangereux de les prolonger.

M. LAURIN: Quels étaient les chiffres de viabilité qu'on utilisait il y a quelques années? Est-ce que c'était moins que 30 ans, moins que 25 ans?

M. BOYD: Je pense que cela diminue plutôt. Les renseignements qu'on obtient des experts en énergie nucléaire, c'est qu'ils ont diminué de quelques années, dernièrement, la longévité des centrales nucléaires.

M. LAURIN: Quand on dit qu'une centrale nucléaire a 25 ou 30 ans de longévité, est-ce que cela veut dire que lorsqu'on a à la remplacer, on peut remplacer seulement certains aspects comme on le fait, par exemple, pour les turbines dans le cas de centrales hydro-électriques ou s'il faut les abandonner complètement?

M. BOYD : Certainement que le réacteur nucléaire serait remplacé. Il se peut que les turbines puissent être maintenues. Il y a certaines parties, je suppose. Là, nous sommes devant une hypothèse assez avancée. Ce n'est pas tellement prudent de s'avancer là-dedans.

Mais, dans tous les calculs qui sont faits, ici aussi bien qu'ailleurs, les experts que nous avons consultés nous-mêmes se basent sur 30 ans de vie.

M. LOUBIER : Si vous me permettez, dans le domaine des centrales hydro-électriques vous vous basez sur des expériences ou des faits précis, tandis que sur la longévité ou la durabili-té des centrales nucléaires, il est impossible d'avoir un exemple, puisque c'est depuis à peine 15 ou 20 ans que c'est en marche. Est-ce que c'est la raison fondamentale?

M. GAUVREAU: Je pense qu'on oublie qu'une centrale nucléaire, c'est aussi une centrale thermique. On connaît beaucoup des centrales avec chaleur, avec des turbines et de la tuyauterie. On a des tas de centrales thermiques dans le monde et on n'a jamais eu beaucoup plus de 30 à 35 ans pour ces centrales. Dans une centrale nucléaire, aujourd'hui, une bonne partie de la transformation de la chaleur, de la transmission, de la fabrication d'électricité, c'est la même chose que dans une centrale thermique traditionnelle.

Ce qu'on connaît le moins, c'est le réacteur. Là-dessus, je pense que nous pourrions peut-être demander à notre spécialiste, M. Cloutier, si un réacteur a des chances de vivre plus longtemps qu'une chaudière classique.

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. SAINT-GERMAIN: Pour fabriquer de l'électricité à partir du réacteur nucléaire vous alimentez habituellement le réacteur avec de l'eau lourde?

M. BOYD: Cela dépend si vous employez le système canadien ou le système américain. Dans le système canadien, on emploie l'eau lourde, oui. L'eau lourde sert à modérer les réactions.

M. SAINT-GERMAIN: Dans le système canadien, c'est l'eau lourde habituellement?

M. BOYD: Oui.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'il y a des difficultés actuellement à s'approvisionner en eau lourde?

M. BOYD : Actuellement, l'eau lourde est en grande demande et, au Canada, elle est très rare. Je pense que nous avons mentionné dans notre rapport annuel la semaine dernière que l'eau lourde de Gentilly, l'AECL, qui en est le propriétaire, nous en a demandé l'usage ailleurs pour un certain nombre de mois afin de l'utiliser à d'autres fins.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.

M. LAURIN : Est-ce que nous pourrions avoir la réponse de M. Cloutier dont vous parliez tout à l'heure?

M. LE PRESIDENT: En attendant la réponse, le député de Saguenay.

M. LESSARD : Je désirerais savoir si, dans le choix entre plusieurs programmes d'équipement, le facteur diversification des sources d'énergie, est un facteur important parmi les contraintes.

M. LE PRESIDENT: On a interchangé entre-temps.

M. SAINT-PIERRE: Cette dernière question est un peu comme la question posée par le député de Jacques-Cartier. Je pense que dans les annexes données par l'Hydro-Québec, on va étape par étape et, ici on tente d'en sauter.

M. LESSARD: C'est que le ministre a vu les annexes.

M. SAINT-PIERRE: Vous les avez vous aussi, les annexes. Moi, je les ai eues aujourd'hui.

M. LESSARD: Cela a été déposé seulement ce soir.

M. SAINT-PIERRE: Vous voyez que nous ne sommes pas cachottiers, j'ai eu ça à onze heures ce matin.

M. LESSARD: Nous, ça a été ce soir.

M. SAINT-PIERRE: Je pense qu'en dehors...

M. LESSARD: II y a quand même un certain nombre de contraintes.

M. SAINT-PIERRE: Mais elles sont dans l'annexe.

M. GIROUX: Une question directe a été posée à M. Cloutier. Il pourra expliquer ça. Après, on continuera à exposer et au fur et à mesure des annexes nous aurons tout le personnel nécessaire pour donner les explications.

M. CLOUTIER: Est-ce qu'il serait possible de poser la question clairement?

M. LAURIN : Sur quels critères est basée la longévité des centrales nucléaires? Quand on a à remplacer une centrale nucléaire, est-ce qu'on peut ne remplacer que quelques-unes de ses parties?

M. CLOUTIER: Je pense que quand il s'agit de remplacer les centrales nucléaires, la partie la plus délicate, celle qui est sujette à tomber en panne le plus rapidement, c'est la partie du réacteur lui-même où se trouve le niveau de radioactivité le plus élevé qui risque d'affecter en particulier la structure des matériaux à l'intérieur même du réacteur. On a mentionné tout à l'heure que du côté des centrales thermiques, il y a déjà une très grande expérience qui existe. Là-dessus, on a déjà des vies établies de l'ordre de 30 ans, 35 ans.

Au niveau du réacteur nucléaire lui-même on n'a pas encore pu l'établir définitivement; on n'a pas une expérience acquise dans ce domaine-là comme dans les autres domaines. Mais on peut prévoir, justement à cause de ces phénomènes de radio-activité, que ça sera peut-être la première partie qui va apporter les problèmes de fonctionnement.

Alors, il y a déjà, je pense, certains réacteurs qui sont en activité depuis 15 à 20 ans; 20 ans c'est peut-être le maximum, je n'ai pas les chiffres exacts. On a déjà observé des défauts de matériaux, des défauts de structure et dans certains cas, on a déjà réduit le taux de fonctionnement du réacteur de façon à prolonger sa vie.

Je pense qu'il faudra attendre encore un certain nombre d'années avant d'établir de façon plus précise la vie des réacteurs eux-mêmes, du noyau du réacteur. Il faut dire également qu'il y a plusieurs types de réacteurs. Il y en a qui ont des niveaux de radioactivité qui varient d'un type de réacteur à l'autre et là encore il y a des expériences à acquérir avec le temps. Quand les gens sont prêts à vendre des réacteurs en assurant des vies de 25 ans à 30 ans, je pense que c'est le maximum qu'on peut espérer dans le moment. Cela pourra changer.

M. LE PRESIDENT: Je reviens au député de Saguenay.

M. LESSARD: On me dit que tout à l'heure nous aurons à discuter de ça.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce. M. ROY (Beauce): Puisque qu'on parle un

peu trop de centrales thermiques, de centrales nucléaires surtout, comparativement au coût de l'électricité, j'aurais une question à poser; je m'excuse d'avance, je vais être très direct. En supposant que le coût de production serait exactement le même, compte tenu du fait que nous avons chez nous au Québec à l'heure actuelle toutes les rivières, toutes les ressources possibles et compte tenu des difficultés que pourrait entraîner l'importation de l'eau lourde, qu'est-ce que l'Hydro-Québec, la Société de développement de la baie James, ou la Société d'énergie recommanderait au gouvernement, en supposant que ça coûte le même prix? Qu'est-ce qui serait le plus avantageux pour le Québec?

M. GIROUX: Nous prendrions l'hydraulique, c'est positif. Vous allez voir, les recommandations vont venir au fur et à mesure de l'exposé.

M. BOYD: Je pense, M. Giroux, qu'en deux minutes on peut répondre: A coût égal les retombées économiques sont plus grandes pour l'hydraulique; donc, on irait à l'hydraulique. Deuxièmement, l'hydraulique nous permet d'ouvrir un territoire tout à fait nouveau. C'est encore une retombée économique; c'est définitif qu'à coût égal on irait à l'hydraulique.

M. LE PRESIDENT: Je reviens donc à M. Giroux, je pense que vous étiez en train de nous donner des informations.

Choix de l'énergie hydraulique

M. GIROUX: Dans les ressources, comme choix de l'énergie hydraulique vous avez pu le constater à l'annexe, nous avons toute une gamme de techniques à notre disposition. Voyons maintenant vis-à-vis de ces techniques quelles sont les ressources dont nous pouvons disposer au Québec. Pour produire de l'énergie thermique classique, il faut du combustible. Malheureusement, le Québec ne possède pas de ressources substantielles connues de combustibles requis pour les centrales thermiques: le charbon, le pétrole, le gaz naturel. Il faut donc importer et, dans le contexte énergétique mondial actuel, la ressource la plus économique serait de l'huile résiduelle. Une telle source est naturellement sujette à des incertitudes et d'autres problèmes comme la sécurité des approvisionnements et l'accroissement accéléré des coûts sur le marché mondial.

Du côté hydraulique, le Québec possède d'immenses ressources. Depuis longtemps des études sont faites pour inventorier, explorer et évaluer ce potentiel. Tel qu'illustré à l'annexe "C" on évalue à plus de 30 millions de kW le potentiel hydro-électrique non aménagé sur les rivières importantes dans la province. On ne peut cependant pas conclure à l'avance que tout ce potentiel est économiquement utilisable. Chaque rivière ou ensemble de rivières constitue un cas particulier, compte tenu de ses caracté- ristiques et de son éloignement des centres de consommation.

C'est pour cette raison que nous procédons continuellement à des études et des relevés pour mieux connaître la situation. Ces études convergent naturellement d'abord vers les rivières qui, selon les apparences, semblent être plus prometteuses comme prochaine étape d'aménagement. Depuis plusieurs années, nous accumulons des renseignements sur les différents bassins comme ceux de la Côte-Nord, du Saint-Maurice, du Lac-Saint-Jean, de la baie James. Nous étudions aussi divers sites de centrales à réserve pompée.

Au cours des dernières années, nous avons concentré nos études du côté de la baie James, en particulier sur les rivières Nottaway, Broad-back, Rupert, Eastmain et La Grande. Déjà l'an dernier, nous avons présenté à cette assemblée des rapports décrivant les possibilités d'aménagement pour les rivières de la baie James; ces rapports étaient suffisamment concluants pour nous amener, vous le savez, à recommander le début des travaux dans cette région. Toutefois, comme nous l'avons alors souligné, il fallait poursuivre nos études pour mieux évaluer les possibilités et décider des meilleures variantes d'aménagement tout en nous tenant continuellement en état de comparer avec les autres modes de production.

En ce sens, nous avons reçu de divers bureaux de génie-conseil et de notre direction générale de génie des études élaborant des propositions de variantes bien définies d'aménagement à la baie James. En même temps que d'autres études sur les modes nucléaires et thermiques, ces propositions nous ont servi à élaborer plusieurs possibilités de programmes complets d'équipement que nous avons ensuite pu comparer.

L'établissement des programmes d'équipement. Voici un point que je voudrais maintenant exposer le mieux possible. Nous devons comparer des programmes d'équipement complets et non pas seulement des projets individuels.

Quand on affirme que l'hydraulique est plus rentable que le nucléaire ou vice versa, on ne fait qu'un énoncé incomplet. D'abord, on ne peut parler du "coût de l'hydraulique" comme tel puisque chaque projet comporte des installations dont le coût varie énormément.

Ensuite, il ne s'agit pas pour l'Hydro-Québec de faire "du thermique" ou de faire "du nucléaire"; il s'agit de choisir un ensemble de projets parmi divers modes de production disponibles. Cet ensemble sera conçu pour répondre à notre calendrier précis de besoins d'année en année, tenant compte de facteurs comme la puissance de base et de pointe. Le programme d'équipement est affecté par toutes sortes de contraintes comme la stabilité électrique du réseau, l'état futur du réseau, les conditions hydrologiques, la fiabilité de l'ensemble, les durées de construction, etc. Il s'agit donc d'un problème beaucoup plus vaste que la

simple comparaison d'un projet nucléaire avec un projet hydro-électrique. Vous trouverez, à l'annexe "D", un exposé plus complet de la façon dont un programme est élaboré et des contraintes qu'il faut respecter.

Les programmes que nous avons retenus pour fins de comparaison incluent une ou plusieurs des grandes variantes du projet de la baie James, avec des centrales de pointe intercalées, en plus de divers éléments thermiques ou nucléaires. D'autres sont plus fortement axés sur des centrales nucléaires canadiennes ou américaines, d'autres sont surtout thermiques classiques avec de plus petits projets hydrauliques. Tous tendent à répondre à un besoin nouveau de 15 millions de kW entre 1978 et 1985 selon les demandes de base et de pointe prévues. Il existe donc toute une variété de programmes possibles et le problème consiste à bien comparer ces programmes entre eux.

Méthode de choix entre divers programmes. Notre premier critère de choix, tel que le prescrit la loi, c'est évidemment de choisir le programme le plus économique pour faire face à la demande. Après le calcul des coûts, nous évaluons également des facteurs comme les problèmes de financement, les répercussions sociales, l'environnement ainsi que les effets sur l'économie du Québec.

Considérons d'abord les coûts. Le critère qui compte vraiment c'est le coût de l'énergie qui sera consommée et non pas seulement le coût de construction. En effet, c'est vraiment le coût de l'énergie qui se reflétera sur nos tarifs. Ce coût résulte des effets combinés des dépenses de construction, des intérêts et des frais d'exploitation. Dans le cas du thermique classique, une partie très importante du coût de l'énergie est le coût de combustible. Nous devons tenir compte dans ce calcul des effets de l'inflation et aussi de la vie plus ou moins longue que l'on peut prévoir pour chaque type d'installation.

Pour ce qui est de la méthode précise de calcul du coût d'un programme, elle est conforme aux règles de l'analyse de rentabilité telles qu'utilisées universellement par les spécialistes en ce domaine. Vous trouverez des détails aux annexes B) et D).

Examinons maintenant les sources de renseignements pour les coûts de base utilisés dans ces calculs. Dans le cas du projet de la baie James, les études récemment complétées par deux firmes de génie-conseil et la direction générale de génie de l'Hydro-Québec ont servi à déterminer les estimations de base. Ces études ont résulté en des rapports complets et détaillés.

Notre souci d'obtenir des coûts réalistes nous a conduits à retenir les services d'un firme indépendante des premières pour effectuer une synthèse des résultats obtenus et, finalement, une autre firme indépendante pour en faire une dernière analyse critique et globale. Je parlerai, tout à l'heure, des chiffres obtenus. Ce que je voulais bien illustrer, c'est que ce travail nous a menés à des résultats auxquels on peut avoir confiance.

Quant aux coûts des centrales nucléaires et thermiques classiques, nous avons eu recours à plusieurs sources que nous avons, ensuite, pu recouper. Pour le nucléaire canadien, nos chiffres proviennent de l'Energie atomique du Canada Limitée. Pour le nucléaire américain et le thermique classique, nous avons commandé une étude spéciale à une firme américaine, United Engineers and Constructors Incorporated.

A partir de ces renseignements, il nous a fallu faire une normalisation qui a permis de ramener le résultat à une même base de comparaison, en incluant tous les éléments appropriés, rajustés selon des hypothèses identiques.

De la même façon, à partir d'études et de renseignements fiables, nous avons évalué les coûts futurs d'exploitation, la durée des centrales, ainsi que les autres hypothèses pertinentes. Toutes ces données ont ensuite servi de base à l'établissement des coûts des programmes étudiés.

Programme d'équipement choisi. L'Hydro-Québec, à l'aide de ces options, a élaboré 25 programmes principaux susceptibles de satisfaire aux besoins. Nous avons ensuite calculé le coût de chacun de ces programmes pour établir un ordre de préférences. Nous avons, de plus, étudié l'effet sur cet ordre de préférences d'une variation de certaines hypothèses, comme les taux d'intérêt, les coûts de combustible et les taux d'inflation.

Voici nos conclusions principales: premièrement, les programmes à prédominance thermique ou nucléaire sont plus coûteux que les programmes à prédominance hydraulique. Ceci résulte des facteurs suivants: pour le thermique classique, c'est le coût élevé du combustible et la vulnérabilité à l'inflation qui augmente le coût. Le nucléaire, comme l'hydraulique, coûte cher à construire, mais il coûte plus cher à exploiter. Le thermique et le nucléaire durent moins longtemps que l'hydraulique et leur degré de fiabilité moindre nous impose des investissements supplémentaires en équipement de réserve.

L'hydraulique s'avère donc plus avantageux. C'est pourquoi nos efforts doivent porter sur l'aménagement du potentiel hydraulique de la baie James pour alimenter la grande majorité des besoins du Québec. Nous répétons, cette année, avec plus de précision ce que nous avions dit l'an passé. Cependant, le choix d'un programme hydraulique n'empêche pas la construction de centrales thermiques et nucléaires en quantité moindre durant cette période.

Pour la période de 1978 à 1985, le programme le plus avantageux que nous avons trouvé est celui qui implique le complexe de la baie James, soit le complexe de La Grande, avec début de mise en service en 1980, en plus de divers autres projets complémentaires.

L'étape suivante, celle du complexe Rupert

(NBRE), reste disponible pour répondre aux besoins subséquents et la décision définitive à son sujet devra être prise d'ici quatre ou cinq ans.

Notre programme immédiat devra, à cause de besoins particuliers, comprendre d'autres éléments. En 1978 et 1979, nous devrons mettre en service des installations de pointe et de base pour répondre à des besoins de l'ordre de 2,500 MW. Parmi ces installations, notre intention est d'inclure un groupe nucléaire de 600MW, tel que proposé, par l'Energie atomique du Canada Limitée, projet dont les conditions restent à négocier. En plus, nous construirons certains des projets suivants, tels que Outardes 2, centrales de pointe soit thermique soit de réserve pompée. Dans le but d'assurer la stabilité et la fiabilité du réseau, il sera avantageux d'installer des équipements près des centres de charges.

Notre choix précis parmi ces options n'est pas encore déterminé, mais il devra se faire très prochainement dans certains cas. Enfin, le programme sera équilibré vers 1984-1985 par des groupes de pointe.

A cause des durées prévues de construction, ce qui est actuellement le plus urgent, c'est de commencer les travaux du complexe La Grande. Les autres projets du programme démarreront au moment requis.

Nous avons évalué, de façon globale, le coût de tout ce programme couvrant les besoins de 1978 à 1985. Il impliquera des investissements de l'ordre de $7.2 milliards et le coût du complexe La Grande dans ce programme est de $5.8 milliards. Ces coûts incluent les frais de transport d'énergie vers les centres du Québec.

Ce genre de programme, je veux bien le préciser maintenant, constitue un énoncé des grandes lignes directrices selon lesquelles nous pourrons orienter nos efforts. Il va de soi que nous poursuivrons des études plus détaillées d'optimalisation dans le cadre de ce programme.

Nous essaierons également d'être en tout temps prêts à le modifier en fonction des circonstances nouvelles.

Comme vous le constatez, nous avons jugé plus sage, au départ, de planifier en fonction de nos propres besoins seulement. Si des ventes à l'extérieur venaient à se concrétiser, nous pourrons alors songer à accélérer l'achèvement de certains projets.

Autres facteurs. En plus de toute cette question de coûts, nous avons, pour effectuer un choix, tenu compte d'autres facteurs importants.

En premier lieu, on parle de plus en plus des questions d'environnement. Soyez assurés que l'Hydro-Québec est extrêment consciente de ses responsabilités dans ce domaine. Nous avons en ce sens créé chez nous un comité de protection de l'environnement et nous nous efforçons d'étudier tous les aspects de la question.

Financement. Sur le plan du financement des programmes, il est important de s'arrêter à certaines considérations. D'une part, disons que le nucléaire, surtout le nucléaire canadien, exige, tout comme l'hydraulique, des investissements initiaux élevés; donc, ils sont assez comparables sous cet aspect. Le thermique, lui, exige moins d'investissements au départ mais coûte beaucoup plus cher à exploiter.

Il se pose donc deux questions principales. D'abord, pourrions-nous être assurés d'obtenir assez de capitaux pour financer les projets hydro-électriques ou nucléaires? Ensuite, même si on avait accès à ces capitaux, ne vaudrait-il pas mieux en utiliser le minimum pour faire du thermique et utiliser le supplément pour d'autres investissements?

A la première question, je peux apporter une réponse affirmative. Il ne faut pas oublier qu'une capacité d'emprunter résulte d'une capacité de pouvoir rembourser et de payer les intérêts. La capacité d'emprunt de l'Hydro-Québec existe â cause de sa réputation sur les marchés financiers, de ses revenus et de ses avoirs propres qui lui permettent d'autofinancer une partie de ses projets. C'est donc la stabilité et la solvabilité de l'Hydro-Québec qui lui assurent une ouverture sur ces marchés financiers.

Dans les conditions actuelles des marchés financiers et après une étude de nos besoins et des disponibilités sur les divers marchés, en plus de nos capacités d'autofinancement, j'ai pleinement confiance que nous pourrons réunir les capitaux requis. Mais ceci, à la condition que le mandat total d'ingénierie et de gérance du projet d'aménagement hydro-électrique de la baie James soit confié à l'Hydro-Québec. Afin de respecter les limites budgétaires établies, il faut que la structure de gérance puisse assurer le contrôle des travaux d'ingénierie, d'estimation des coûts, d'approvisionnement et l'exécution des contrats adjugés aux différentes entreprises. Devant l'ampleur de ce projet, l'Hydro-Québec pourra s'adjoindre les services d'une firme reconnue dans le domaine de la gérance de grands projets.

A cause de l'importance des aménagements hydro-électriques à réaliser et des capitaux à être investis dans le territoire de la baie James et les autres territoires avoisinants touchés par le projet, et â cause des garanties qui devront être données pour assurer le financement de ce dernier, il est essentiel que la Société d'énergie de la baie James ou l'Hydro-Québec, selon le cas, si c'est en dehors du territoire, détienne, avant le début des travaux, tous les droits nécessaires pour assurer la réalisation complète de tout le complexe.

Ces droits devront comprendre notamment la concession des droits de propriété sur tous les biens immobiliers requis pour la construction des centrales, barrages, digues, déversoirs, postes de transformation et de communications, chemin d'accès et autres ouvrages connexes ainsi que les droits réels et perpétuels de

servitude pour l'inondation des terrains qui devront être submergés pour la construction et le maintien des lignes de transport et de distribution d'énergie. Ces droits devront aussi comprendre le droit d'établir des ouvrages sur des rivières navigables et de détourner les cours d'eau ainsi que tous les droits nécessaires quant aux richesses naturelles qui se trouvent affectées par le projet.

Tous les droits devront être concédés pour la somme de $1 de façon à maintenir le coût total du projet à son plus bas niveau et contribuer à assurer sa rentabilité.

Pour réaliser ce projet, nous demandons au gouvernement de procéder à des modifications législatives en vue d'assurer que la Société d'énergie de la baie James ou l'Hydro-Québec, selon le cas, soit exemptée de la taxe de vente provinciale, de la taxe sur l'huile et l'essence de l'impôt provincial sur la production d'énergie électrique et de toute autre redevance et lover. De plus, nous sommes d'avis que l'Hydro-Québec devrait être également exemptée de l'impôt provincial sur la production d'énergie et de toute autre redevance et loyer en ce oui touche les installations futures, de façon à ne pas imposer à l'Hydro-Ouébec des taxes indirectes qui entraîneraient des augmentations de tarif.

Advenant une détérioration inattendue des marchés financiers, nous pourrions rajuster nos calendriers de réalisations en conséquence, puisque le programme que nous recommandons est flexible. La seconde question, celle d'utiliser un minimum d'investissements, implique plusieurs notions complexes. Il faut bien se rendre compte que si l'on retenait le programme en prédominance thermique, en investissant ainsi $3 milliards et demi de moins au départ, l'économie réalisée en remboursements et intérêts moins considérables serait largement dépassée par les frais d'exploitation beaucoup plus grands, dont $400 millions à $500 millions par année pour le combustible, sans même considérer les effets de l'inflation sur ce dernier.

De plus, il faudra encore prévoir un réinvestissement beaucoup plus tôt avec des centrales thermiques.

Un programme à prédominance thermique coûtant plus cher que celui que nous recommandons, les consommateurs québécois subiraient des majorations de tarif en conséquence. Si l'on fait le calcul de rentabilité au long, le consommateur québécois devra payer $150 millions par année de plus pour l'électricité thermique et ce pendant 50 ans.

Facteurs technologiques. Nous avons aussi, dans le choix d'un programme d'équipement, considéré plusieurs facteurs de nature technologique. Sur le plan réseau, par exemple, il est certain que des lignes de transport pour intégrer des centrales hydrauliques éloignées causent des difficultés techniques qui ne se rencontrent pas dans un réseau de transport reliant des centrales thermiques près des centres de consommation.

Toutefois, l'Hydro-Québéc a toujours été un pionnier en ce qui concerne le transport d'énergie sur de grandes distances et possède très certainement les connaissances nécessaires pour réaliser un tel réseau.

Dans le domaine technologique, une de nos préoccupations, c'est d'être prêts pour l'avenir. La création de notre Institut de recherche illustre bien cette préoccupation de même que notre projet nucléaire de Gentilly. Je suis d'accord avec ceux qui disent que, tôt ou tard, nous devrons nous orienter fortement vers le nucléaire et qu'il faut s'y préparer. En tenant compte de l'évolution prévue de la technologie nucléaire et des problèmes associés à la fiabilité et à l'endurance des réacteurs nucléaires, nous croyons qu'il serait sage de développer nos ressources hydrauliques dans la mesure où cela s'avère une proposition économiquement intéressante. Nous croyons que, parallèlement, il serait souhaitable de procéder graduellement à la construction de réacteurs nucléaires. Une telle initiative permettra à l'Hydro-Québec de se familiariser davantage avec cette nouvelle technologie; elle permettra également à nos industries, à nos ingénieurs et à nos scientifiques de prendre leur part de ce marché industriel croissant.

Dans le programme retenu, nous avons à l'étude un projet nucléaire bien concret, de l'ordre de 600 MW, qui nous a été proposé par l'Energie atomique du Canada Limitée. Avec un tel projet, qui devra se décider très bientôt, nous pourrons former des spécialistes comme nous l'avons déjà fait grâce à Gentilly. Ainsi, le Québec sera prêt à faire une utilisation croissante de l'énergie nucléaire tout en profitant au maximum des développements technologiques.

Avec un programme d'aménagement progressif en énergie nucléaire, le Québec pourra augmenter sa capacité industrielle. D'ailleurs, plusieurs industries du Québec fabriquent déjà des pièces de centrales nucléaires et vendent leurs produits sur les marchés d'exportation.

Conclusion. Voilà, Messieurs, comment nous en sommes arrivés à un choix de programme. J'espère que les renseignements qui sont maintenant disponibles aideront à dissiper la confusion et l'inquiétude qui ont paru se manifester.

La conclusion est sans équivoque. Il s'agit maintenant d'aller de l'avant et, pour réussir à temps, il faut immédiatement entreprendre les travaux du complexe La Grande.

Les conclusions sur lesquelles s'appuient nos recommandations découlent de l'énorme somme de travail accompli avec beaucoup de méthode et de compétence par nos propres services à la Direction générale du Génie et à la Recherche économique, de même que par les bureaux d'ingénieurs-conseils qui ont participé aux investigations et aux études.

Au nom de mes collègues de la commission et en mon nom personnel, je tiens à remercier tous ceux qui, à l'Hydro-Québec ou ailleurs, ont participé à l'élaboration du programme d'équi-

pement de l'Hydro-Québec et en particulier du projet de la baie James.

Maintenant, Messieurs, nous sommes prêts à répondre à vos questions. Peut-être, avant la période des questions, aimeriez-vous avoir certaines explications sur les méthodes utilisées pour le choix de l'équipement ou la normalisation. Ces programmes vous ont été distribués, je crois.

M. LE PRESIDENT: Le député de Verchères.

M. SAINT-PIERRE: M. Giroux, sur le projet de la baie James, bien des rumeurs ont circulé. Il est très intéressant, ce soir, de faire la confrontation sur les faits, sur les études qui ont été menées depuis un an. Je pense que plusieurs des questions vont nous sauter aux yeux.

Il y en a une première qui m'intéresse plus particulièrement puisqu'un des grands points — encore il y a quelques jours, on le répétait — qu'on a mis en doute sur l'ensemble du projet, c'est que c'était une aventure financière, un désastre pour le Québec de se lancer dans de telles opérations, que toutes les autres formes d'énergie pouvaient coûter moins cher.

Or, vous avez une remarque au bas de la page 19 que j'aimerais, avec vous, explorer. Elle me semble fort intéressante. Vous parlez d'"un programme à prédominance thermique". Comme je pense que nous sommes familiers avec les différences entre le thermique et le nucléaire sur le plan des coûts, on voit là — cela m'apparaît capital dans la recommandation de l'Hydro-Québec — des épargnes de $150 millions par année pour les consommateurs en prenant la baie James par rapport au thermique.

Je pense qu'on pourrait faire le calcul rapidement et trouver un même ordre de grandeur d'épargne, si on prend la baie James, en comparant le nucléaire qui nous a été proposé: $150 millions par année, si je comprends bien, ce n'est pas un chiffre tiré en l'air, ce n'est pas un ballon. C'est la suite des études qui ont été amorcées au cours des douze derniers mois qui nous permettent d'arriver à des chiffres aussi précis. Ce ne sont pas des discours, ce sont des faits. C'est un texte que vous nous déposez, que déposent, au nom du gouvernement, ceux qui sont appelés à nous conseiller le plus directement dans la production d'énergie.

Ma première question, donc — et cela m'apparait capital — je ne sais pas si cela a autant d'éclat qu'un professeur d'université d'Ontario qui lance quelque chose en fin de semaine, mais cela m'apparaît, pour les consommateurs, fort important puisque, si je me rappelle bien, la semaine dernière, on avait vu que l'ensemble des consommateurs québécois paient à l'Hydro-Québec, pour le service à domicile, à peu près $180 millions par année. Alors lorsqu'on parle de $150 millions d'épargne, je pense que c'est un ordre de grandeur qui doit nous frapper, compte tenu de son importance.

M. JORON: Sur le chiffre d'affaires total, par contre. Sur $500 millions de vente. Vous le reprenez uniquement sur cette partie des ventes.

M. SAINT-PIERRE: C'est parce que les consommateurs connaissent cela, l'Hydro-Québec. Ils sont 12,012 employés mais nous sommes six millions d'abonnés. A ces six millions, pour le service à domicile — on reçoit le compte une fois par mois et on sait ce que cela coûte — cela donne — vous me corrigerez si je n'ai pas raison — à peu près $180 millions par année, le service domiciliaire. Ce que l'Hydro-Québec nous dit, c'est qu'en n'ayant pas accepté l'avis assez frivole qui nous a été fait de sauter dans du nucléaire, l'épargne directe est de $150 millions.

M. JORON: Ne mélangez pas les choses. Il s'agit du thermique, dans le texte de l'Hydro-Québec.

M. SAINT-PIERRE: C'est le sens de ma première question, M. Giroux.

M. LOUBIER: Etiez-vous en faveur du nucléaire, vous autres?

M. JORON: Nous sommes en faveur d'un programme mixte que l'Hydro-Québec recommande, d'ailleurs.

M. LAURIN: Diversifié.

M. LOUBIER: Recommande comme projet dans quelques années. Pas avant quelques années.

M. LE PRESIDENT: Pour éviter les discours...

M. SAINT-PIERRE: Pour préciser les faits, si on mettait l'équivalent de la baie James, parce qu'il faut bien voir que sur l'ensemble de vos puissances demandées, il y a seulement 8,800 mégawatts qui viennent du complexe La Grande, le reste, comme vous l'avez mentionné dans vos programmes, est de l'énergie de pointe et de l'énergie thermique. Les 8,800 mégawatts de la baie James, si on les avait mis dans du nucléaire, au lieu de $150 millions, puisqu'on parle de prédominance thermique, si on parle de prédominance nucléaire, qu'est-ce que cela pourrait donner comme épargne?

M. GIROUX: Au lieu de prendre la prédominance thermique.

M. SAINT-PIERRE: Thermique.

M. JORON: ... peut-être que ce serait plus facile de se comprendre.

M. BOYD: Si vous me permettez, j'ai ici des comparaisons entre le programme que nous proposons, celui que M. Giroux vous a donné, et le programme nucléaire avec lequel nous avons fait la comparaison.

Dans ce programme nucléaire canadien, où il y a 10,200 mégawatts qui sont du nucléaire canadien, si on considère les investissements requis par l'un et l'autre, entre 1972 et 1985, dans le cas du programme qu'on a recommandé, il s'agit de $7.2 milliards d'investissement. Dans le programme nucléaire, à prédominance nucléaire, c'est à peu près la même chose. Il y a environ $40 millions de différence dans les investissements.

M. JORON: Pour le même montant d'électricité produit?

M. BOYD: Pour répondre à notre demande. Mais au point de vue des frais de fonctionnement, si on regarde la période de 1979 à 1990, c'est quand même onze ans, pour le programme que nous recommandons, les frais de fonctionnement sont de $847 millions, dans le cas de l'hydraulique, comparativement à $1,464 millions pour le programme nucléaire.

M. JORON: En additionnant le coût d'installation plus les frais de fonctionnement, en termes de coût de revient, en mills, quelle est la différence entre les deux? En mills, enfin par kilowatt?

M. BOYD: Je ne l'ai pas ici en mills.

M. JORON: On est en train de comparer les montants d'électricité produite qui diffèrent, dans certains cas, des périodes d'années qui diffèrent, on ne fait pas les totaux.

Je voudrais bien qu'on parle d'une base où tout le monde peut se comparer: en termes de mills par kilowatt, le coût de revient.

M. PERREAULT: Vous l'avez sur la même base.

M. BOYD: C'est comparé, parce qu'il s'agit de rencontrer les besoins de l'Hydro-Québec. Il nous faut 15,000 mégawatts environ de puissance et 58 milliards de kilowatts-heures pour rencontrer ces deux demandes ou besoins. Les investissements, on peut dire à toutes fins utiles qu'ils sont les mêmes: $7.2 milliards et $7.240 milliards.

L'autre facteur c'est les frais de fonctionnement. Dans un cas, c'est $847 millions pour la période qu'on étudie, tandis que pour l'autre c'est $1,464 millions. Vous avez une différence de $600 millions sur une période de 11 ans.

M. JORON: Pour un coût total de 8.6 p.c. au lieu de 8.0 p.c.

M. BOYD: Oui.

M. JORON: Ce qui vous donnerait une différence de 7 p.c. à 8 p.c. en termes de coût de revient.

M. SAINT-PIERRE: En comptant la capitalisation initiale.

M. JORON: Y inclus les frais de fonctionnement. C'est le coût de revient de l'électricité, finalement.

M. LAURIN: Vous voyez, si vous aviez déposé les études, nous pourrions lire tout ça nous-mêmes, nous faire une idée et poser des questions.

M. GAUVREAU: Nous vous avons distribué un document intitulé "Normalisation des coûts". C'est justement un exercice de comparaison ramené aux mêmes années de mise en service et à la même année de calcul des différents modes de production. M. Cahill qui a travaillé à ce document-là va vous l'expliquer tout à l'heure et je crois que ça va vous donner satisfaction.

M. JORON: Peut-être, M. le Président, pourrait-on expliquer ce document-là tout de suite, étant donné que la discussion semble s'engager dans cette voie.

M. LE PRESIDENT: Si les membres de la commission n'ont pas d'autres questions se rapportant directement à ce que dit le président, je suis complètement d'accord que nous procédions à l'exposé.

M. SAINT-PIERRE: Nous sommes prêts à prendre une heure pour leur prouver qu'il y a une épargne de $150 millions par année pour les Québécois, en prenant le programme suggéré.

M. LE PRESIDENT: M. le président, vous avez terminé?

M.LESSARD: Le programme des Trois-Rivières.

M. LAURIN: Nous demandons à voir.

M. SAINT-PIERRE: Vous êtes comme saint Thomas. On va mettre le doigt et vous allez croire.

M. LE PRESIDENT: On me dit qu'il y a des questions en ce qui concerne l'exposé du président. M. Giroux est absent. Peut-être M. Boyd? De toute façon, les questions ont rapport à l'exposé du président.

M. DEGUISE: M. le Président, si vous me le permettez, lorsqu'on parle de prix de construction, de prix de revient, une foule de facteurs interviennent et on risque, si on ne précise pas

absolument ces hypothèses, de se contredire en disant la même chose. Pour préciser ma pensée — M. Cahill est peut-être sur le point de vous expliçuer son mémoire — j'ai fait une liste ici que je vous donne, tout bonnement.

Par exemple, lorsqu'on parle des prix de construction, différents facteurs peuvent intervenir: la période de construction. Si on construit entre 1965 et 1972 ou bien entre 1972 et 1978, les frais de croissance sont entièrement différents. On peut supposer que les prix augmentent annuellement de 3, 4, 5 ou 6 p.c, mais, sur une période de dix ans, cela a une influence fondamentale.

Les intérêts intercalaires. Est-ce qu'on assume que l'argent coûte 8 p.c, 9 p.c, 10 p.c? Cela aussi, il faut le mentionner.

La taille des groupes. Si on parle du thermique ou du nucléaire, il y a un effet d'échelle. Des groupes de 1 million de kilowatts coûtent, au kilowatt, moins cher que des groupes de 500. Alors, il faut savoir de quelle sorte de groupe on parle. Les conditions du sol. Souvent, on normalise ou on assume que le sol est de première qualité. Au point de vue nucléaire ou thermique, pour les zones sismiques, il y a des précautions à prendre, dépendant des fondations, qu'il faut connaître. Cela peut influencer le prix sérieusement.

La nature des groupes, si on parle du thermique. Si on parle du thermique de pointe, on fait ce qu'on apelle du thermique léger, qui coûte moins cher que des groupes thermiques qui fonctionnent 7,000 heures par année. C'est une autre précision qu'il faut donner. Le pourcentage de réserve contre les pannes.

On a mentionné souvent ici que dans l'hydraulique il faut garder en réserve, en cas de panne, beaucoup moins d'équipement que lorsqu'on fait du thermique et du nucléaire. Alors, il faut préciser le "différentiel" que l'on accepte, que l'on prend dans les calculs.

Lorsqu'on parle du thermique, on voit bien des prix qui incluent ou qui n'incluent pas de l'équipement antipollution. Cela peut aller chercher dans les $40 à $50 du kW. Alors, jusqu'ici je n'ai mentionné que des facteurs qui concernent les prix de construction. Maintenant, si on parle des prix en mills par kWh il y a évidemment les frais d'exploitation qui interviennent. Il y a les prix du combustible. Est-ce qu'on parle du combustible à 3 p.c. de soufre, 1 p.c. de soufre, 0.3 p.c. de soufre? Que prévoit-on comme variation des prix du combustible dans l'avenir?

Si on étudie les frais sur une période de 35 ans, il faut bien le spécifier. Pour les frais d'exploitation et d'entretien, qu'est-ce qu'on prévoit comme variation dans les taux de main-d'oeuvre ou des coûts des salaires des employés, puis des matériaux? Lorsqu'on parle du nucléaire il y a le coût de l'eau lourde. Il y a de drôles de variations dans les coûts de l'eau lourde actuellement; alors si on projette 35 ans en avant, il faut préciser quel taux d'escalation on prend. M. Charuk se prépare je pense à vous donner des données là-dessus, mais si on prend 10 p.c. ou 9 p.c. ou 8 p.c. de taux d'actualisation, ça change les calculs.

La centrale, est-ce qu'elle fonctionne en pointes ou en bases? Si elle produit 7,000 heures par année, au lieu de 1,000 heures par année, ça change le prix du kWh drôlement. Enfin, il y a la durée de la centrale. Je n'insiste pas, on l'a mentionné. Vous voyez que, si on part des discussions sur les prix des différentes techniques et si on ne précise pas ces facteurs, on peut dire à peu près n'importe quoi.

M. LE PRESIDENT: Vous comprendrez, M. Deguise, qu'il y a dans la pensée des membres de la commission toutes sortes de questions qui arrivent au fur et à mesure que le débat se déroule. Si je vous comprends bien, selon la nomenclature que vous venez de faire, vous nous dites que ces choses seront bel et bien exposées au cours de ce débat devant la commission. Alors il me semble, avec un peu de coopération de la part des membres, qu'on pourrait peut-être laisser compléter l'exposé. S'il y a des questions pour une explication ou un éclaircissement sur un point, on pourra interrompre. Mais il me semble que pour le bon ordre il faudrait entendre l'exposé au total, ce qui donnera aux membres de la Commission une période de temps d'ici la reprise pour étudier les données dans les annexes. On pourra peut-être à ce moment-là demander les détails voulus sur les différents points qui ont été apportés par M. DeGuise il y a un instant.

Le député de Bourget.

M. LAURIN: Je vais vous poser une question à propos de ce que vient de dire M. DeGuise, à propos du chiffre que nous disait M. Boyd qui nous a donné un chiffre global $1,400 millions par opposition à $800 millions. Pour se conformer à ce que vient de nous dire M. DeGuise, il faudrait qu'il nous dise par exemple sur quelle base ont été établis les $1,400 millions, quel taux d'intérêt, quel taux d'escalation, quel taux d'utilisation, quel taux de réserve, quel taux de fuite pour qu'on puisse comparer des choses semblables. Là on a juste eu le chiffre global.

M. BOYD: Vous posez une question, M. Laurin. C'est un peu ce que disait le président tout à l'heure. Nous répondons à des questions du mieux que nous pouvons lorsqu'elles sont posées.

Mais, n'ayant pas encore eu l'occasion d'expliquer tous les rapports, nous sautons par-dessus les points de base comme les intrants qui ont justement servi à en arriver aux conclusions.

M. LE PRESIDENT: Ma fonction est d'essayer d'obtenir une explication la plus logique possible; c'est pour cela que je faisais cette suggestion. Les députés de Verchères, de Bellechasse et celui de Beauce m'ont demandé la

parole. On pourrait peut-être réduire nos questions à leur plus simple expression à ce moment-ci. Il va falloir ajourner quand même à 11 heures.

M. SAINT-PIERRE: Cela m'apparaît très important. Comme M. DeGuise l'a mentionné, en jouant avec ces chiffres-là on peut faire dire n'importe quoi et effectivement, sans les accuser de malhonnêteté intellectuelle, il y a bien des gens qui ont dit n'importe quoi sur le projet. Tous les facteurs que 1'Hydro-Québec a mentionnés il y a quelques instants, on n'a pas joué avec ces facteurs. Dans un premier temps, on a tenté avec le plus de recherche, le plus d'expérience et le plus de jugement possible, de déterminer avec le plus de précision possible tous ces facteurs. C'est après qu'on a analysé les 25 programmes que M. Boyd a mentionnés.

La recommandation de l'Hydro-Québec d'avoir 8,800 mégawatts venant de la rivière La Grande, s'articule avec l'analyse de ces critères qui n'ont pas été joués mais qui ont été déterminés le plus honnêtement possible. C'est cela qui nous donne $150 millions d'épargne par année. Cela m'apparaît important étant donné que d'autres ont bien aimé...

M. LE PRESIDENT: Le député de Bellechasse.

M. SAINT-PIERRE: J'en étais convaincu il y a un an, mais cela a pris un an pour vous convaincre de la chose.

M. LOUBIER: C'est plutôt une demande de confirmation qu'une question. Les conclusions auxquelles en sont venus les commissaires de l'Hydro-Québec sont basées, si j'ai bien compris, sur des études préalables faites par la direction générale de génie de PHydro-Québec, études complétées, détaillées davantage par deux firmes d'ingénieurs-conseils. Les rapports de ces firmes d'ingénieurs-conseils ont été scrutés à nouveau par une firme indépendante; par la suite, la synthèse de tout cela a été à nouveau analysée par une autre firme indépendante. Pour chapeauter tout cela, il y a eu demande à une firme américaine spécialisée d'en analyser toutes les implications. C'est cela?

M. GIROUX: C'est exactement cela.

M. LOUBIER : Sur le plan nucléaire, vous avez obtenu des études, des conclusions par l'Energie atomique du Canada Ltée et vous avez eu la précaution de demander également une étude à une firme américaine spécialisée pour vois s'il y avait convergence dans les rapports que vous aviez reçus.

M. GIROUX: Exactement.

M. LOUBIER: C'est à la suite de tout cela que vous arrivez aux conclusions que vous avez soumises.

M. GIROUX: Les divers services de l'Hydro-Québec mentionnés — le génie, la construction, la recherche économique, la planification, le centre de recherche — sont tombés d'accord sur les recommandations que nous faisons. La commission transmet, en somme, les recommandations de son personnel de base en qui elle a pleinement confiance.

M. LOUBIER: Cela résulte de deux, trois ou quatre ans d'étude.

M. GIROUX: C'est cela, trois ans.

M. LOUBIER: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.

M. ROY (Beauce): Le député d'Abitibi-Est sur le même sujet.

M. TETREAULT: M. le Président, je remarque, dans la question que le député de Bellechasse vous a posée, que vous avez pris une firme de génie conseil et deux firmes indépendantes pour faire les relevés. Est-ce par suite d'un manque d'ingénieurs à PHydro-Québec ou si c'était pour avoir une meilleure appréciation de...

M. GIROUX: C'était surtout pour avoir une appréciation totalement indépendante...

M. TETREAULT: Aucun parti pris.

M. GIROUX: Aucun parti pris d'une firme. On a demandé à une firme de normaliser des coûts et elle a normalisé les coûts de tout le monde, puis nous avons demandé à une firme de donner les différentes méthodes d'aborder les constructions dans les rivières de la baie James. Cette firme ne peut pas avoir d'intérêt dans la construction future. Donc, elle est totalement indépendante et n'émet que son opinion. Ce que recherchaient la société d'énergie et PHydro-Québec, c'était d'avoir une recommandation d'une firme qui ne pourrait pas être intéressée à avoir des contrats subséquents dans la baie James.

M. TETREAULT: Merci.

M. ROY (Beauce): M. le Président, je voudrais poser une question.

M. LE PRESIDENT: Allez-y.

M. ROY (Beauce): A la page 14, dans le premier paragraphe, on dit: "Nous avons évalué de façon globale le coût de tous ces programmes couvrant les besoins de 1978 à 1985. H impliquera des investissements de l'ordre de $7,200,000,000 et le coût du complexe La Grande dans ce programme est de $5,800,000,000. Ces coûts incluent les frais de transport d'énergie vers les centres du Québec".

Or, il a été fait mention à quelques reprises de transport aérien par pylônes et il a également été question de transport souterrain par câble, par de nouveaux procédés. Dans votre estimation, était-il question du transport traditionnel par pylônes?

M. GIROUX: Du transport par pylônes. En dehors de ça, nous n'avons fait aucun calcul, ce serait beaucoup trop dispendieux.

M. ROY (Beauce): Maintenant, entre le coût estimé que vous avez dans votre rapport et le coût réel, en se basant sur l'expérience qu'a acquise l'Hydro-Québec dans la construction de d'autres barrages, combien peut-il y avoir de variation entre les estimations que vous avez fournies et la réalisation du projet, compte tenu de...?

M. GIROUX: Nous aurons des chiffres bien plus précis en 1980.

M. ROY (Beauce): Ce sera un peu tard.

Nous devons en somme étudier les besoins de 1980. J'estime qu'il est tout de même normal à ce moment-là qu'on s'interroge sur une certaine différence entre l'estimation et le coût réel, compte tenu qu'il y a toujours une différence entre la réalisation d'un projet et l'estimation initiale. J'aimerais savoir, au regard des travaux et des expériences qu'a PHydro-Québec ailleurs, quelle a été la différence entre les estimations et les coûts réels?

M. GIROUX: Les estimations et les coûts réels ont pu varier beaucoup. A un certain temps nous avions des estimations et des coûts absolument semblables, puis sont arrivés des facteurs d'inflation inconnus qui, par exemple, de 1963, 1964 à 1970 ont été énormes. Seulement, dans ces estimations nous avons pris les réserves que nous croyions justifié de prendre comme réserves pour établir un coût. Nous avons considéré une inflation de 4 p.c, nous avons actualisé à des taux de...

Dans tous les programmes, nous nous sommes servis du même taux d'actualisation, du même taux d'intérêt de base et des mêmes réserves sur les programmes mêmes. Là-dessus, c'est assez long à élaborer, mais dans les jours qui viendront notre service de recherche économique est à votre disposition pour vous donner tous les détails des bases dont il a fait l'analyse sur l'inflation et les taux de l'avenir.

M. ROY (Beauce): Est-ce que, dans les travaux qui ont été effectués, dans les projets qui ont été réalisés, la variance a atteint un taux inférieur, un taux de 10 p.c. par exemple entre la valeur estimative et le coût de la réalisation, soit 15 p.c. 20 p.c? Quels ont été vos taux minimum?

M. GIROUX: Je vais demander...

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous pourriez nous donner les variations dans vos coûts d'immobilisation, disons, pour les postes et les lignes de transmission? Actuellement, vous êtes à construire des choses semblables. Il y a eu des montants, au cours des dix dernières années, assez impressionnants. Peut-être, dans un même ordre de grandeur, vous pourriez mentionner ce qui survient pour un projet récent où PHydro-Québec est impliquée et qu'elle connaît puisqu'elle est cliente, Churchill Falls. Cela ferait deux exemples qui pourraient vous rassurer en tout cas.

M. ROY (Beauce): C'est ça. Disons que cela peut me rassurer. Mais j'aimerais aussi que le coût des barrages soit inclus, qu'on puisse me donner une approximation sur les coûts du barrage.

M. SAINT-PIERRE: II y a des barrages à Churchill Falls.

M. ROY (Beauce): Oui, d'accord. C'est parce que je ne voulais pas que la question soit limitée uniquement aux lignes de transmission.

M. BOYD: On peut répondre à cette question. Premièrement, pour les lignes de transports et les postes à très haute tension, ce n'est quand même pas négligeable. Dans la période de 1960 à 1971, PHydro-Québec a planifié, a fait toute l'ingénierie et a fait construire pour $1 milliard de lignes et de postes. Ce programme a été réalisé en deça des estimations. Pour les centrales, il y a également environ $1 milliard qui ont été dépensés dans les centrales pendant la période de onze ans, de 1960 à 1971. Là, il y a eu des dépassements, mais il faut d'abord connaître les principales causes. Ce n'est que dans les dernières années que les méthodes d'estimation employées prévoient de l'escala-tion.

Sur les projets, à partir de Manic 5 et tous les autres, il n'y avait pas d'escalation prévue. Evidemment, il y a eu de l'escalation d'une façon assez importante. En plus, les imprévus — prenons le barrage Daniel Johnson — étaient à 6 p.c. tandis que dans le projet de la baie James, dans les autres projets, enfin dans tous les projets que nous avons comparés dans les programmes, les imprévus sont de 12 p.c.

Donc, les méthodes d'estimation sont différentes. Egalement, quand on avait commencé les projets de Manic-Outardes, on avait employé des taux d'intérêt qu'on connaissait à ce moment-là, qui étaient de 5 1/2 p.c, 6 p.c. Lorsqu'on a terminé, il y a deux ans, vous savez que c'était près de 10 p.c. Ces choses-là ont eu des influences. Ayant acquis cette expérience que, sur de très longs projets, il faut prévoir "l'escalation". on met 4 p.c. par année. On doit prévoir des imprévus. C'est curieux de l'exprimer ainsi. On met 12 p.c. maintenant. Donc, c'est différent.

M. GAUVREAU: Pour répondre au député de Bellechasse, vous avez fait, tout à l'heure, l'énumération des firmes que nous avons employées. Il faut bien signaler que le mandat de la firme Shawinigan Engineering était précisément de voir à ce que des critères identiques soient respectés par toutes les firmes. Alors, quand je parle de critères, j'inclus, là-dedans, des taux "d'escalation", les taux d'intérêt utilisés.

M. LOUBIER: D'accord.

M. GAUVREAU: Alors, le document de Shawinigan Engineering est extrêmement élaboré là-dessus et l'autre compagnie américaine, qui a regardé par-dessus ça, a aussi confirmé la hausse des taux "d'escalation" et les taux d'intérêt utilisés dans les trois rapports.

Alors, c'est une des précautions qui ont été prises et qui n'avaient pas été prises dans les années 1960 à 1970. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. ROY (Beauce): Oui. Disons que pour bien comprendre et pour résumer ce que M. Boyd disait, vous avez calculé un taux "d'escalation" de 12 p.c, incluant un taux inflation-naire de 4 p.c, ou si le taux inflationnaire est en plus, ce qui voudrait dire 16 p.c. en tout?

M. BOYD: C'est 4 p.c. par année pour l'inflation et on a mis 12 p.c. pour les imprévus.

M. ROY (Beauce): Bon.

M. BOYD: Mais cela, ce n'est pas par année. On met une réserve de 12 p.c. pour l'éventualité. Mais "l'escalation" annuelle est cumulative; les imprévus sont de 12 p.c. pris sur le total des coûts.

M. ROY (Beauce): Pris sur le total tandis que le taux inflationnaire est un taux annuel.

M. BOYD: Les 4 p.c. sont annuels.

M. ROY (Beauce): Maintenant, j'aurais une deuxième question à la page 18, si l'on me permet.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.

M. ROY (Beauce): Très bien.

M. LESSARD: Merci, M. le Président.

L'an dernier, à la commission des Richesses naturelles, j'avais, à partir de certains chiffres concernant la construction de cinq barrages, je crois, prouvé qu'il y avait eu une variation de 47 p.c. entre le coût estimé et le coût réel. Il s'agissait de Manic 5, Manic 3 et d'autres barrages. A ce moment-là, l'Hydro-Québec nous avait fourni un certain nombre de chiffres concernant l'aménagement de toute la région de la baie James, des trois complexes, des trois rivières de la baie James. Le coût était, je crois, évalué à $6.1 milliards.

J'avais demandé, je crois, à deux reprises, à M. Boyd, à partir des chiffres que j'avais donnés: Est-ce qu'on peut prévoir, maintenant, que ce coût, tel qu'estimé, sera véritablement le coût réel? M. Boyd m'avait répondu: Ce coût sera entre 0 p.c. et 20 p.c., c'est-à-dire qu'on ne prévoyait aucunement d'augmentation.

Actuellement, on nous soumet un autre chiffre, c'est-à-dire que, pour l'aménagement seulement de la rivière La Grande, nous arrivons à un chiffre de $5.8 milliards. Il y a, quand même, une différence entre l'aménagement de La Grande et l'aménagement du projet complet, tel qu'on en discutait à la Commission des richesses naturelles! On voit, quand même, un changement assez considérable.

Comment se fait-il que, maintenant, on arrive avec un nouveau chiffre et qu'il y ait un changement aussi considérable? Qu'est-ce qui nous prouve que c'est exact, alors que les chiffres qui avaient été soumis lors de la construction de certains barrages ont été dépassés? Je comprends que M. Boyd nous avait expliqué ce qu'il vient de nous expliquer tout à l'heure, à savoir qu'on n'avait pas prévu l'augmentation du taux d'intérêt, qu'on n'avait pas prévu une nouvelle négociation collective, ainsi de suite, mais, l'an dernier, à la suite de certaines questions que j'avais posées, M. Boyd nous répondait: Le coût maximum, c'est $6 milliards. Cela comprenait tout le projet.

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, si le député me permet. La grande différence, c'est simple comme de l'eau. C'est que, l'an dernier, dans les études qui avaient été faites, on parlait de commencer à réaliser cela beaucoup plus tôt que cette année, c'est-à-dire qu'on parlait de l'essence du programme de construction, dans les années 1973, 1974 et 1975, alors que, là, on prévoit une mise en service pour 1979-1980.

M. LESSARD: M. le Président, l'an dernier, on n'avait pas prévu essentiellement de dates.

M. SAINT-PIERRE: Ce sont des dates.

M. LESSARD: M. le Président, en une période de deux ans, on passe d'un coût de $5.8 milliards au coût de $6.1 milliards pour l'aménagement de tout le complexe de la baie James. Il y a, quand même, toute une différence.

M. SAINT-PIERRE: Le député me permet-il une question?

M. LESSARD: Oui, allez-y.

M. SAINT-PIERRE: D'après lui, le chiffre de $5.8 milliards qu'on a mentionné pour la réalisation, dans le temps, si on était capable

demain matin de réaliser l'étude, c'est-à-dire si on enlève de l'estimation les frais d'intérêt et les frais d'augmentation qu'on a mentionnés, quel pourcentage ça peut représenter dans les budgets qui ont été donnés? D'après votre conception. Si on enlève l'intérêt et l'augmentation annuelle, de combien peut-on diminuer le coût qui a été mentionné? De 40 p.c.

M. LESSARD: C'est que l'an dernier il y avait quand même ces escalades qui avaient été calculées. Il y avait quand même aussi ces critères qui avaient été calculés. Et à la question que j'avais posée, on avait répondu qu'on ne pouvait pas dépasser $6.1 milliards, qu'on pouvait aller jusqu'à moins 20, p.c. Mais voici la question. C'est qu'on nous avait dit lors de la dernière réunion des richesses naturelles: Cela ne peut pas dépasser ça.

J'avais prouvé à ce moment-là que concernant les barrages antérieurs, d'accord, il y avait eu une augmentation considérable allant jusqu'à 47 p.c. Je comprends que l'Hydro-Québec au début n'avait pas l'expérience qu'elle a, mais on arrive aujourd'hui pour l'aménagement d'une seule rivière avec un montant presque égal à ce qu'on avait l'an dernier pour l'aménagement de tout le complexe. Qu'est-ce qui fait la différence?

M. BOYD: Je pense qu'il faudrait retrouver cette citation. Il faut d'abord savoir de quoi on parle. Actuellement, on parle du complexe La Grande qui représente 8,300 mégawatts et on dit $5 milliards 800 millions, rendu à Montréal, et non pas seulement pour la construction. Et il s'agit de rendre l'électricité à Montréal, c'est inclus.

M. LESSARD: C'était inclus aussi l'an dernier.

M. BOYD: Et de combien de mégawatts parlait-on

M. JORON: On parlait des cinq rivières pour un total de 12 millions.

M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas tant la rivière, ça.

M. JORON: On parlait de 12 millions de kilowatts pour le total des cinq rivières.

M. BOURASSA: C'est rendu à 16 et ça augmente tout le temps. Forcément, le prix augmente. C'est un potentiel presque sans limite que les Québécois possèdent...

M. JORON: Ce n'est pas de ça qu'on parle.

M. BOURASSA: Je comprends que ça va mal pour le Parti québécois. Je comprends qu'il a l'air ridicule aujourd'hui. Je comprends son dépit.

M. JORON: Suivez donc les débats au lieu de venir semer la pagaille de demi-heure en demi-heure.

M. LESSARD: Cela va coûter combien dans dix ans?

M. BOURASSA: Ils font pitié aujourd'hui.

M. LESSARD: Ces 5 milliards 800 millions vont être rendus à combien, parce qu'on change chaque fois qu'on fait siéger la Commission des richesses naturelles. Ce chiffre-là change à chaque fois.

M. BOURASSA: M. le Président, c'est un faux débat. Ce qu'il fallait décider c'est de combien on a besoin d'électricité au Québec et quelle est la formule la plus avantageuse. Or, les firmes les plus compétentes dans le monde ont décidé que c'était l'exploitation de la rivière La Grande, une partie importante de la baie James, qui donnait la formule la plus avantageuse aux Québécois pour leur propre électricité. C'est ça qui est important, c'est ça qui a été décidé. C'est ça qui va être commencé.

M. JORON: Ce n'est pas ça qu'on est en train de discuter, justement.

M. LE PRESIDENT: Je regrette, il est déjà passé onze heures et, comme les meilleures décisions doivent se prendre avant onze heures habituellement, je pense qu'il serait bon peut-être d'ajourner à jeudi quatre heures.

M. BOURASSA: Mais je pense que vous avez un débat.

M. JORON: Oui.

M. BOURASSA: Parallèlement au débat on pourra siéger.

M. LAURIN: Non, non.

M. BOURASSA: Bien c'est moi qui déciderai quand même.

M. LAURIN: Ah bon! d'accord. Mais est-ce que vos études seront déposées, celles que vous nous avez promises?

M. BOURASSA: Oui, oui, j'ai demandé au ministre de l'Industrie et du Commerce d'essayer de vous rencontrer demain pour vous remettre le plus d'études possible. Comme on ne peut pas siéger demain, ça voudra dire qu'on ne pourra pas siéger avant la semaine prochaine. Alors je pense qu'on pourrait essayer de faire un effort pour siéger jeudi, d'autant plus que M. Giroux doit s'abstenter, doit être hospitalisé en fin de semaine.

UNE VOIX: A quatre heures, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Jeudi quatre heures, après demain. Merci, messieurs.

(Fin de la séance à 23 h 6)

Séance du jeudi 18 mai 1972

(Seize heures dix-huit minutes)

M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

M. LACROIX: M. le Président, avant le début de la séance, me permettriez-vous de suggérer le remplacement, pour les séances d'aujourd'hui, des membres suivants: M. Arsenault, remplacé par M. Bourassa; M. Mailloux, remplacé par M. Saint-Pierre; M. Massé, remplacé par M. Garneau; M. Coiteux, remplacé par M. Veilleux. Le rapporteur est toujours M. Carpentier, qui sera ici dans quelques minutes.

M. LE PRESIDENT: Votre efficacité n'est dépassée que par votre apparence, M. Lacroix.

M. LACROIX: Est-ce que je peux disparaître maintenant, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Vous pouvez disposer. Est-ce que d'autres partis ont des changements à suggérer à leur représentation à la commission?

Je dois procéder avec la liste suivante: MM. Bourassa, Carpentier, Veilleux, Drummond, La-rivière, Lessard, Loubier, Saint-Pierre, Garneau, Perreault, Simard, Tétreault.

M. JORON: M. le Président, c'est Joron au lieu de M. Lessard. Cela avait été fait je crois au début, la dernière fois.

M. LE PRESIDENT: Je ne ferai pas les mêmes commentaires que j'ai faits au whip du parti officiel, du gouvernement. Le chef du parti m'a demandé un dépôt de documents. Il y a un dépôt de documents qui doit se faire.

Dépôt de documents

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, lors de la première séance et même précédemment à la Chambre, tous les partis d'Opposition avaient réclamé le dépôt de certains documents. Le gouvernement n'a jamais voulu être cachottier sur ces documents. Certains d'entre eux — les documents les plus importants — nous sont parvenus à peine quelques jours avant le début des séances de la commission parlementaire. Bien sûr, nous avions été associés de près ou de loin à certains travaux mais, dans leur forme définitive, ces documents nous sont parvenus très récemment. Comme le premier ministre l'avait indiqué, nous avons passé, avec les collaborateurs, les deux dernières journées à revoir ces documents. Nous avons voulu nous assurer que les informations servant les intérêts de la collectivité ou de l'Hydro-Québec soient préservées. Ainsi, cela nous permet aujourd'hui de rendre publics certains documents qui pourraient assurer une meilleure compréhension à ceux qui voudraient s'intéresser au projet.

C'est ainsi, M. le Président, que j'ai remis à 9 h 30 ce matin, à tous les chefs de parti, un exemplaire de tous les documents suivants, dont le coût est quand même assez élevé. Je vais les énumérer et je déposerai d'autres copies de documents. Je pense que c'est l'essence de tous les documents qui sont pertinents au projet. Il y en a d'autres qui ont été mentionnés, mais je pense qu'en fournissant les explications, on pourrait voir qu'ils sont superflus.

Comme l'Hydro-Québec l'a mentionné elle-même, si nous voulions déposer tous les documents concernant la baie James, ce sont des pieds de documents qu'il nous faudrait déposer. Alors, ce matin nous avons déposé auprès des chefs de partis... Nous en avons remis une seule copie à la presse, mais les documents les plus importants ont été reproduits sous forme de synthèse et seront déposés cet après-midi au plus tard.

Un premier document déposé a été le programme d'équipement 1978-1985, préparé par l'Hydro-Québec en date du 15 mai 1972, par la direction de la planification du génie. Ce document revoit l'ensemble des 25 programmes que l'on nous avait mentionnés. On y retrouve tous les critères d'analyse de même que la comptabilisation, et l'actualisation des programmes d'investissement, tant dans leur forme d'immobilisation que dans leur forme de coût d'opération.

Une synthèse de ce document sera disponible, en une centaine de copies et distribuée un peu plus tard par l'Hydro-Québec qui, d'ailleurs, peut la distribuer immédiatement. Un deuxième document qui a été distribué ce matin à tous les partis politiques, c'est le rapport complet, non épuré, du groupe Ebasco, daté d'avril 1972 et dont le titre est: "Revue des études et variantes d'aménagement des projets de la baie James." Ce document a fait le point sur l'ensemble des études qui avaient été faites et donne suite à un mandat qui avait été confié conjointement par l'Hydro-Québec et la Société de la baie James au groupe de consultants Ebasco. Egalement, nous avons aussi déposé ce matin auprès des partis un autre rapport du groupe Ebasco qui a comme titre anglais: "Supplementary Report To Review Report and Development Scheme for James Bay Energy Corporation" Je voudrais mentionner que la version française de ce document sera disponible d'ici quelques jours, mais j'ai pensé qu'il était peut-être approprié de le donner aujourd'hui même. Ce rapport supplémentaire donnait suite à un mandat additionnel dans lequel on avait demandé au groupe Ebasco d'examiner particulièrement un nouveau schème de développement de harnachement des rivières, qui impliquait comme ossature principale la rivière La Grande, qui impliquait aussi des diversions des rivières Eastmain et Rupert.

Encore une fois, ce rapport sera disponible en français d'ici quelques jours et il me fera plaisir de le remettre à tous et à chacun.

Egalement, je dépose immédiatement — puisque je viens de les avoir, il y a cinq minutes — un rapport qui avait été préparé par Rousseau, Sauvé, Warren et associés à la demande du groupe Ebasco. C'est un rapport qui est relié au mandat supplémentaire qui avait été confié au groupe Ebasco. Ce rapport s'intitule "Preliminary Report".

Il avait été commandé par le groupe Ebasco. Encore une fois, il s'intitule Preliminary Report, La Grande, Eastmain, Rupert Complex. Est-ce qu'on pourrait avoir quelqu'un pour le distribuer à chacun des représentants des partis.

Comme le schéma d'aménagement recommandé par l'Hydro-Québec de la rivière La Grande se retrouve dans les documents de l'Hydro-Québec comme le schème 37, et qu'il contient essentiellement le rapport du complexe La Grande avec certaines diversions, il nous a semblé également d'intérêt de déposer le volume 1 d'un rapport de janvier 1972, dont le titre est Rapport sur le projet d'aménagement hydro-électrique de la rivière La Grande, préparé par Rousseau, Sauvé, Warren & Associés. Nous déposons ce rapport simplement parce que c'est l'essentiel des informations requises. Le volume 1 décrit l'ensemble du projet, son évaluation; les volumes 2 et 3, touchant les études techniques et les évaluations de base, me semblent très techniques comme' donnés, mais si certains groupes politiques voulaient en prendre connaissance, nous pourrions toujours le rendre disponible.

Quelqu'un veut-il passer les trois copies par là?

M. le Président, dans quelques instants — nous les attendons d'une minute à l'autre — nous déposerons deux autres rapports qui nous avaient été demandés. Le premier rapport est de la firme United Engineering et traite des coûts de l'énergie nucléaire; le deuxième rapport est de l'Hydro-Québec et porte sur les lignes de transport. Je n'ai pas le titre exact parce que je ne l'ai pas devant moi, mais c'est un rapport préparé par l'Hydro-Québec sur les lignes de transport, les choix possibles, les types d'aménagement, leurs contraintes par rapport au projet d'aménagement.

Il me semble, M. le Président, qu'avec toutes ces données, toutes les informations pertinentes pour le projet et peut-être beaucoup plus que pour d'autres projets dans le passé, ont été distribuées et rendues publiques. S'il y avait d'autres documents qu'on pense nécessaires, ça nous fera plaisir de les examiner. Le seul qui ne me paraît pas d'intérêt est celui qui avait été préparé par Shawinigan Engineering. Si nous devions le rendre public, il nous faudrait en enlever plusieurs chapitres, plusieurs pages, puisque, au niveau des taux d'accroissement de salaires, des salaires exacts pour des corps de métier au niveau des intérêts et autres choses, il y avait quand même des données qu'il ne nous semble pas d'intérêt de révéler publiquement. Je pense que tous les rapports qu'on a donnés jusqu'ici permettent quand même à tous les partis politiques, à toutes les personnes ici présentes de poser des questions pertinentes sur le projet et d'être entièrement renseignés.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au chef de l'Opposition officielle, étant donné qu'il doit s'absenter d'ici quelques minutes pour retourner en Chambre.

Le député de Gouin m'a aussi demandé la parole.

Sans restriction à ce que ces messieurs vont dire, je voudrais restreindre, si c'est possible, le débat dans l'ordre suivant. Nous allons entendre tous les commentaires de la part de l'Hydro-Québec ou de la Corporation de développement de la baie James, au point de vue technique.

Toutes les questions d'administration, de gestion ou de "management", nous les placerons à la suite. Nous allons apprendre ce que nous voulons faire puis, nous apprendrons de quelle façon ce sera administré, si on veut procéder de cette façon, si la commission accepte ces données, sans restriction aux commentaires, naturellement, des deux députés qui ont demandé la parole pour le moment.

Par la suite, on essaiera de procéder dans l'ordre, c'est-à-dire, de recevoir toute l'information technique nécessaire, les explications voulues. S'il y a des questions de gestion, des questions de "management", une fois qu'on aura compris et qu'on aura fait la partie technique, on pourra y revenir exception faite, naturellement, des questions qui peuvent être posées et que je ne connais pas, de la part du leader de l'Opposition officielle et du représentant du Parti québécois.

M. LOUBIER: M. le Président, non seulement vos propos me restreignent mais m'obligent à demeurer pratiquement bouche bée: Je voulais précisément obtenir un certain éclaircissement sur des commentaires qui avaient été faits la semaine dernière par le président de l'Hydro-Québec, et surtout sur des réponses que j'avais reçues de M. Nadeau, concernant l'administration que l'on confiait à l'Hydro-Québec que je retrouve à la page 16 du mémoire présenté par le président de l'Hydro-Québec.

Ce n'est pas tellement un contre-interrogatoire comme une demande de précision que je voudrais plus particulièrement avoir sur la teneur de la page 16. M. le Président, je voudrais tout simplement relire rapidement l'objet de mon point d'interrogation. A la page 16, on dit au paragraphe 2: "Dans les conditions actuelles des marchés financiers et après une étude de nos besoins et des disponibilités sur les divers marchés, en plus de nos capacités d'autofinancement, j'ai pleinement confiance que nous pourrons réunir les capitaux requis."

Et c'est là que vient, pour moi, le passage assez rempli d'ambiguïté.

Je continue à citer: "à la condition expresse" que le mandat total d'ingénierie et de gérance du projet d'aménagement hydro-électrique de la baie James soit confié à HydroQuébec.

Or, M. le Président, en vertu du bill 50 et en vertu de la charte de l'Hydro, je ne comprends pas pourquoi on met tant d'insistance et surtout que l'on emploie l'expression "à la condition expresse". Je me demande pourquoi, étant donné que les pouvoirs sont déjà accordés par le bill 50 et par la charte de l'Hydro-Québec, je voudrais demander tout simplement au président de l'Hydro pourquoi il a tenu, dans son mémoire ou dans sa présentation, à mettre autant d'insistance à ce que ce mandat soit confié expressément à l'Hydro-Québec et non pas à une autre société.

M. GIROUX: M. le Président, c'est exact ce qu'on a déclaré. C'est simplement pour mettre une condition claire, susceptible de préciser le bill 50 et la charte. Alors, au cas où il y aurait des équivoques, c'est simplement pour clarifier cette question.

M. LOUBIER: Où je ne comprends pas beaucoup, c'est que la semaine dernière, M. Nadeau ne semblait pas être assuré, ou rassuré, ou rassurable dans sa réponse en ce qui concernait ce mandat très expressément donné à l'Hydro-Québec. Et si je me trompe ou si j'erre, je voudrais bien être corrigé immédiatement. M. Nadeau nous donnait l'impression que ce mandat serait décidé ultérieurement et à qui on le confierait exactement.

Or, c'est compris que c'est l'Hydro-Québec qui l'aurait à ce moment-là? Oui?

M. NADEAU: J'ai pris connaissance du texte de M. Giroux en même temps que vous, et j'ai fait l'autre jour les commentaires indiquant que je croyais qu'une décision ultérieure devait être prise en ce qui concernait le "management". Et je maintiens cette réponse.

M. LOUBIER: Ce n'est pas, en ce qui vous concerne, décidé que ce serait l'Hydro-Québec qui aurait le mandat expressément accordé, nonobstant les dispositions du bill 50 et la charte de l'Hydro-Québec. Autrement dit, il n'y a pas consensus entre les deux, quant au mandat clair et précis en ce qui concerne l'ingénierie et la gérance du projet d'aménagement hydro-électrique.

M. NADEAU: Pas nécessairement, non. Tel que M. Giroux l'a dit, il y a des divergences à ce point de vue-là, mais qui ne sont pas profondes.

M. LOUBIER: Comment seront réglées les divergences et de quelle façon?

M. NADEAU: C'est une décision qui devrait être prise au niveau du bureau de direction de la Société d'énergie dans un avenir rapproché, j'imagine.

M. LOUBIER: Mfis si l'Hydro-Québec pose une question essentielle à obtenir ce mandat pour le mener à bonne fin, est-ce que...

M. NADEAU: Etant donné que l'Hydro-Québec est majoritaire dans la société d'énergie, évidemment, la décision sera prise par l'Hydro-Québec.

M. LOUBIER: Oui, mais si la Société d'énergie, à un certain moment, doit référer à la société mère, cela serait drôlement déléguer sa capacité ou son pouvoir.

M. NADEAU: Vous entendez par la société mère la Société de développement de la baie James?

M. LOUBIER: Oui.

M. NADEAU: Qui est toutefois minoritaire dans la Société d'énergie.

M. LOUBIER: Je comprends, mais pourquoi ne pas tenir compte et respecter les prescriptions du bill 50 et la charte qui l'accorde, d'une façon claire et précise, à l'Hydro-Québec?

M. NADEAU: C'est ce que nous croyons faire...

M. LOUBIER: C'est ce que vous croyez faire?

M. NADEAU: ... à la Société de développement de la baie James. Oui.

M. LOUBIER: Mais ce n'est pas encore très bien établi dans votre esprit, même si c'est exprimé de façon assez claire et définitive par l'Hydro-Québec. Si, par hasard, il arrivait qu'une décision contraire soit prise, ceci voudrait dire, d'après le texte en tout cas du président de l'Hydro-Québec, qu'il y aurait des difficultés énormes à ce que l'Hydro en assure non seulement la responsabilité mais en garantisse le succès d'aménagement.

M. NADEAU: II faudrait peut-être poser la question au président de l'Hydro, pour avoir l'interprétation de cette phrase, et non pas à moi.

M. LOUBIER: Je pose la question au président de l'Hydro. Je ne torture pas ces gens, M. le Président. Je veux simplement avoir plus d'éclaircissements.

M. LE PRESIDENT: J'allais intervenir à ce

moment-ci, à savoir si on ne devrait pas passer... Cela fait partie de la phase "comment administrer ce que nous allons établir". J'aimerais qu'on établisse complètement tout ce qui concerne le projet. Les questions concernant la façon d'administrer doivent venir par la suite. J'ai reçu la question du député...

M. LOUBIER: Dans deux ans. Vous êtes deux ans avant votre temps.

M. LE PRESIDENT: Deux ans avant mon temps. On peut se permettre parfois de rêver.

M. GARNEAU: Est-ce que le chef d'Unité-Québec entend changer de parti?

M. LOUBIER: Je suis trop libéralement en faveur de l'unité pour cela. Le président de l'Hydro s'apprêtait à répondre. Cela mettrait un point final. Est-ce que vous le considérer comme absolument essentiel?

M. GIROUX: On le considère comme absolument essentiel.

Cette phrase est là pour clarifier ce que nous allons présenter.

M. LOUBIER: Et c'est absolument essentiel que l'Hydro ait un mandat clair, précis et unique.

M. GIROUX: Clair et net. L'Hydro est le maître de l'oeuvre et va faire progresser les travaux.

M. LOUBIER: Une autre question pour essayer d'éclaircir... Je pars, après cela, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: C'est justement; c'est dans cette...

M. LOUBIER: Vous parlez d'exemption de taxes à la fin de votre mémoire, et je cite rapidement: "Pour réaliser ce projet, nous demandons au gouvernement de procéder à des modifications législatives en vue d'assurer que la Société d'énergie de la baie James ou l'Hydro-Québec, selon le cas, soit exemptée de la taxe de vente provinciale, de la taxe sur l'huile et sur la gazoline..."; Est-ce une exemption que vous demandez, à ce moment-là, pour les années à venir, c'est-à-dire pour le projet?

M. GIROUX: C'est une exemption pour les années à venir. L'Hydro n'a pas l'intention d'être exemptée des taxes qu'elle paie actuellement.

M. LOUBIER: Mais pour ce projet précis?

M. GIROUX: Les projets futurs, comme la redevance sur la production et les autres vont directement affecter le taux. Et, comme les taux sont universellement selon les pronostics, pour doubler et tripler ailleurs, on croit que ce serait une économie qui se refléterait dans les taux, si l'Hydro-Québec était, ni plus ni moins, arrêtée au niveau actuel où elle paie la taxe et si les futurs projets en étaient exemptés.

M. LOUBIER: Et vous prétendez que c'est en vue de protéger davantage le consommateur?

M. GIROUX: C'est la protection du taux. Ce n'est aucunement l'intention de l'Hydro-Québec de se soustraire à la taxe actuelle qu'elle paie. Elle paie $29 millions. Elle va payer prochainement un peu plus de $30 millions en redevances à la province de Québec. Nous demandons au gouvernement de nous exempter; nous lui demandons de faire cette chose-là. Nous n'avons pas le pouvoir de le faire par nous-mêmes.

M. LOUBIER: Une dernière question, M. le Président, avant que vous ne sursautiez.

M. LE PRESIDENT: Avant que je ne m'impatiente trop!

M. LOUBIER: Comme dirait mon collègue de Chicoutimi, avant que vous ne sursautassiez. Dans l'esprit de ce mémoire, il semble se dégager qu'on n'a aucunement mis de côté l'idée de jumeler des développements hydroélectriques et nucléaires, au cours des prochaines années.

M. GIROUX: Je crois que nous avons très clairement établi qu'au cours des prochaines années, nous allons essayer de faire un développement nucléaire qui nous croyons, nous maintiendra dans la course, au point de vue technologique. Nous attendons les développements. Nous ne voulons pas aller plus vite que les possibilités, que le programme canadien ne nous le permet.

Strictement au point de vue nucléaire, on a l'intention, dès que la Commission parlementaire sera terminée de continuer les négociations avec acharnement du côté de l'énergie atomique pour en avoir les meilleurs prix et les meilleures conditions possible à plusieurs points de vue et d'examiner très attentivement tout ce que l'AECL peut nous offrir comme centrale suppléante. Il n'y a aucune objection de la part de l'Hydro-Québec à ce point de vue-là. IL s'agit de bien établir qu'actuellement nous désirons débuter par une offre ferme que nous avons pour une centrale de 600 mégawatts.

Est-ce que cela répond clairement à votre question?

C'est assez difficile de se prononcer à savoir quelles vont être les offres futures de l'AECL dans ce domaine-là. Nous avons une offre qu'elle se croit en position de faire en vertu de l'eau lourde qu'elle aura à sa disposition à partir de 1978.

M. LOUBIER: Est-ce qu'actuellement vous avez eu des offres de l'AECL?

M. GIROUX: Oui, nous en avons eu. M. LOUBIER: A quel prix?

M. GIROUX: C'est ce que nous vous expliquons dans le programme d'équipement.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Giroux. Le député de Gouin a demandé la parole, puis ce sera le ministre des Finances.

Est-ce que vos questions concernent la gestion?

M.JORON:Non.

M. LE PRESIDENT: Dans l'ordre technique?

M. GARNEAU: C'est parce que les questions du député de Bellechasse, le chef de l'Opposition, ont lancé le débat sur un sujet. Je ne sais pas, M. le Président, comment vous voulez ramener cela...

M. LE PRESIDENT: Je veux trancher le débat sur cette question de gestion. Le député de Bellechasse a passé sur une question technique, au point de vue du développement nucléaire et cette question a été reçue. On a hésité à y répondre disant simplement que dans le développement de la programmation d'équipement, on viendrait à expliquer toutes ces choses-là. Je pense que le député a reçu sa réponse.

M. LOUBIER: Si le ministre des Finances me permet, c'est que je dois retourner en Chambre pour répondre à un certain psychiatre au sujet de...

M. GARNEAU: Simplement, c'est dans l'ordre des travaux, parce que les questions que le député de Bellechasse, chef de l'Opposition officielle, a posées me paraissent fort importantes et j'ai, moi aussi, à poser des questions concernant l'exemption de taxes, etc., et je ne sais pas à quel moment je dois les poser.

M. LE PRESIDENT: Je voudrais, M. le ministre, établir l'ordre dans un certain sens pour essayer d'avoir le portrait le plus complet. Naturellement, il y a toutes sortes de questions qui se posent au fur et à mesure qu'on fait des commentaires. C'est naturel et normal. Je voudrais tout simplement qu'on puisse présenter le programme d'abord. Une fois que le programme sera présenté, je pense que ce serait tout à fait dans l'ordre de discuter de la façon dont on administrera, de la façon dont les taxes seront perçues ou non perçues. Ce sont des choses qui se rattachent toutes au programme qu'on voudrait élaborer. C'est malheureux si on doit intervenir à tout bout de champ sur des questions qui se rattachent indirectement au grand problème de la présentation du projet. Je n'ai pas de manchettes à faire, moi.

M. VEILLEUX: M. le Président, j'aurais une directive à vous demander. Pour faire suite à la première question déposée par l'honorable député de Bellechasse...

M. LE PRESIDENT: Cette question est en suspens. Le député pourra y revenir plus tard. D a voulu pour cause d'urgence.

M. VEILLEUX: Et si nous voulons y revenir, nous pourrons y revenir à ce moment-là?

M. LE PRESIDENT: Absolument, sans discussion.

M. VEILLEUX: Avec discussion, je l'espère.

M. LE PRESIDENT: Sans discussion de ma part, parce que je ne peux pas prendre part au débat, mais avec discussion de la part de la table certainement.

Le député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, je pense qu'il importe, à ce stade de nos travaux, et devant un projet d'une ampleur aussi considérable, que les différents partis politiques fassent connaître leur position sur le déroulement des travaux jusqu'à ce point-ci.

M. LE PRESIDENT: Je regrette, à ce moment-ci, nous discutons en commission sans qu'il y ait égard à un parti politique. Il y aurait lieu sans doute qu'on se range à gauche ou à droite de la table, je voudrais tout de même qu'on puisse permettre à la Corporation de développement de la baie James et à l'Hydro-Québec de présenter les faits, quitte ensuite à discuter selon les lignes des partis ou de faire de l'opposition.

M. JORON: C'est ce que j'avais l'intention de faire, M. le Président, de résumer les faits tels qu'on les connaît et tels qu'on les perçoit jusqu'à présent.

M. LE PRESIDENT: Pas à ce moment-ci M. le député, si vous me le permettez.

M. SAINT-PIERRE: On était rendu à l'Hydro-Québec, qui devait expliquer la méthodologie de l'implantation...

M. JORON: Ayant des questions précises à poser à l'Hydro-Québec à ce sujet, je pense qu'il est normal qu'un préambule soit fait pour qu'il soit compris dans quelle optique nous situons ces questions.

M. LE PRESIDENT: Je ne vous empêche pas de faire un préambule mais — je vous le

demande — ce moment-ci n'est peut-être pas choisi pour faire ce préambule. Si vous avez des questions sur ce qui a été dit, je ne veux pas être arbitraire, franchement, je voudrais qu'on progresse normalement et avec ordre.

M. JORON: D'accord, c'est justement pour que la discussion progresse dans l'ordre que je voulais situer...

M. LE PRESIDENT: Je crains que si vous adoptez une position politique ou autre à ce moment-ci, au point de vue des principes, je devrai accorder à tous les partis réunis à la table le même privilège d'établir leur position. Je ne voudrais pas ouvrir cette porte-là, c'est aussi simple que cela. Je pense que nous discutons d'un problème qui est non seulement important mais tout à fait technique à ce moment-ci, et qu'il convient qu'on entende les données des techniciens ou des responsables. S'il y a des questions sur ce qui s'est dit à la dernière séance, puisqu'on a dû terminer rapidement à cause de l'heure, j'inviterais le député à poser ses questions mais qu'on nous permette de procéder avec ordre au point de vue du déroulement de cette commission.

M. JORON: C'est justement, M. le Président, dans ce souci d'ordre que je veux résumer notre compréhension des faits tels qu'ils ont exposés jusqu'à ce jour et des questions qui restent en suspens.

M. LE PRESIDENT: Je regrette, si vous voulez, posez des questions directes, sans prise de position. Comment pouvons-nous, que ce soit d'un côté de la table ou de l'autre, que ce soit un député ou un autre, prendre une position sans connaître les faits? Je m'attends tout simplement à ce qu'on présente les faits à la commission. Ensuite viendront les questions, tant que vous en voudrez, il n'y aura aucune restriction.

M. JORON: M. le Président, vous me permettrez quand même en commençant de remercier d'une part le gouvernement d'avoir déposé finalement les études — la majorité des études — que nous avions demandées et qui nous paraissent essentielles à la compréhension et au bon déroulement de nos travaux. D'autre part, au début de la séance d'aujourd'hui, je voudrais remercier l'Hydro-Québec sur deux plans, quant à la qualité d'une part du travail qui a été effectué, quant au souci d'objectivité que l'Hydro-Québec a témoigné en commandant d'aussi nombreuses études, à différents endroits et à l'extérieur du pays. Je pense que c'était ce qu'elle devait faire et je tiens à souligner que nous apprécions la qualité des travaux effectués au cours de la dernière année.

L'Hydro-Québec mérite également des remerciements quant à la démarche qu'elle a retenue, quant à sa façon d'aborder le problè- me. Toute la question qui nous intéresse aujourd'hui se devait d'être abordée en fonction des besoins d'électricité internes du Québec. Il fallait aussi aborder la question, non pas en comparant une rivière avec une autre ou une usine nucléaire avec une rivière ou ainsi de suite, mais l'aborder par le biais de programmes intégrés.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: C'est très bien, je saisis exactement et j'ai compris. La commission a compris, à ce moment-ci, que le représentant du Parti québécois, le député de Gouin, a fait un énoncé disant qu'il remerciait tous ceux qui ont paru devant la commission jusqu'à ce jour et de tout ce qu'ils ont présenté. J'accepte ce commentaire. Les questions, s'ils vous plaît, sans discours.

M. JORON: M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Non. Je ne vous empêcherai pas de parler.

M. JORON: Est-ce que vous allez me dire quels remerciements j'ai droit de faire ou non?

M. LE PRESIDENT: Vous les avez tous faits.

M. JORON: Vous ne les connaissez pas.

M. LE PRESIDENT: Vous êtes rendu, à ce moment-ci sur un... A l'ordre! s'il vous plaît. Vous en êtes rendu à ouvrir une discussion sur la question de rivières, de systèmes, soit thermiques, soit nucléaires par comparaison avec un système hydraulique. Je demande tout simplement qu'on s'en tienne à ce moment-ci aux commentaires. Vos remerciements, nous les acceptons volontiers avec beaucoup de satisfaction. Mais je demanderais qu'on puisse procéder à l'exposé — à moins que vous ayez des questions sur ce qui a été dit jusqu'ici — qui nous est offert par le président de l'Hydro-Québec ou par ses adjoints.

M. JORON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: C'est très simple, je ne voudrais pas faire de débats. La décision est prise, je ne voudrais pas en appeller de la décision. Je ne voudrais pas de vote sur cette question. Je demande tout simplement qu'on entende l'histoire. Une fois qu'on l'aura toute entendue, vous pourrez faire votre prise de position, vos énonciations, vos commentaires, critiquer ou accepter ce qui a été dit. Mais au moins, entendons l'histoire. C'est tout à fait normal dans une procédure.

M. JORON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Allez-y.

M. JORON: Parmi les remerciements il en est un aussi, que je n'ai pas mentionné, qui était celui-ci. Je voulais remercier 1'Hydro -Québec, féliciter l'Hydro-Québec de la façon qu'elle a résolu le problème qui nous concernait, soit de partir d'un procédé essentiellement comparatif. Il nous a toujours paru que c'était de cette façon que le problème devait se résoudre. C'est ce que l'Hydro-Québec a fait. Il appartenait effectivement à l'Hydro-Québec de le trancher et non pas au gouvernement, puisqu'il s'agissait d'une décision technique et non d'une décision politique.

M. LE PRESIDENT: Vous frisez exactement le bord du précipice sur lequel je ne veux pas m'avancer. Voici, il s'agit tout simplement à ce moment-ci, je pense.

M. JORON: ... précipice...

M. LE PRESIDENT: Questions, s'il vous plaît.

M. JORON: M. le Président, je veux vous demander une directive. Nous est-il permis...

M. LE PRESIDENT: Oui.

M. JORON: ... de faire un exposé préliminaire ou limitez-vous la séance à des questions et à des réponses, sans qu'il ne soit permis aux membres de la commission, de présenter leurs opinions et leurs commentaires?

M. LE PRESIDENT: Absolument pas. Tout ce que j'ai suggéré de procéder dans le bon ordre. Que l'on permette de faire l'exposé. Une fois l'exposé terminé, toutes les questions seront permises de la part de qui que ce soit à la commission. Il est même permis — non seulement permis, mais reconnu comme étant acceptable — que les gens représentant l'Hydro-Québec ou le développement de la baie James puissent aussi faire des commentaires et poser des questions aux représentants du gouvernement ou d'un parti politique, sur leurs positions.

Mais au moins, soyons dans l'ordre. Entendons l'histoire d'abord. Quand nous aurons tout entendu, vous serez en mesure de tirer des conclusions. Je comprends mal que l'on puisse tirer des conclusions, à ce moment-ci, sur un tiers, un quart ou un cinquième d'une histoire qui n'est pas racontée.

M. JORON: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Qu'on l'entende au moins. D n'est pas question de restreindre, ici; comprenez-moi bien. Il est tout simplement question de mettre la procédure en ordre.

M. JORON: M. le Président...

M. GAUVREAU: Nous acceptons les remerciements.

M. LE PRESIDENT: Alors, ce point-là est terminé et les remerciements sont acceptés. Avez-vous des questions sur ce qui a été dit?

M. JORON: M. le Président, j'ai des commentaires à faire sur la partie de l'histoire — comme vous dites — qui nous a été livrée aux séances de la commission, jusqu'à ce point. Ce que je vous demande, c'est s'il est permis aux membres de la commission de faire des commentaires, non pas sur des choses qui n'ont pas été discutées, mais sur les points qui ont déjà été livrés, soit par l'Hydro-Québec, soit par la Société de développement de la baie James.

M. LE PRESIDENT: Oui. Je pense qu'il est admissible de recevoir des commentaires, à ce moment-ci, sur ce qui a été dit. Je voudrais tout de même dire que tout commentaire sur un sujet qui sera fait à ce moment-ci... Lorsqu'arrivera le moment de discuter du problème complet, je devrai tout simplement dire, à ce moment-là: "Cette question a été résolue; ce point a été fait" Je n'accepterai pas, à ce moment-là, de répétitions. C'est simplement dans le but de faire progresser les travaux.

M. JORON: M. le Président, je voudrais, par exemple présenter les opinions et les commentaires que nous avons à faire sur des sujets qui ont été, jusqu'ici, vidés.

M. GARNEAU: Est-ce que votre opinion...

M. JORON: ... sur des points qui ont été présentés, soit par l'Hydro-Québec, soit par la Société de développement de la baie James.

Dans le matériel qui nous a déjà été livré...

M. GARNEAU: Est-ce que le député de Gouin me permettrait seulement une question? Evidemment, l'Hydro-Québec nous a déposé hier une série de documents; à ma connaissance, il en restait un, celui de la normalisation des coûts. Est-ce que l'Hydro-Québec a encore d'autres documents à donner à la suite de ça? Seulement pour savoir s'il en reste plusieurs avant.

M. SAINT-PIERRE: Le député de Gouin me permettra... IL n'est pas question... On tente de faire progresser la commission; il me semble que l'on se soit...

M. JORON: Cela n'en a pas l'air.

M. SAINT-PIERRE: Je ne sais pas moi. Je n'ai pas parlé depuis vingt minutes et nous vous écoutons. Tout ce qui arrive... Il ne me semble pas que ce soit le moment approprié pour commencer à se lancer dans les remerciements. Nous avons accepté, au départ, une méthodologie. L'Hydro-Québec nous a expliqué... D'ail-

leurs, je ne voudrais pas tomber dans le même péché que lui et commencer à entrer dans les remerciements. Mais, il y a eu une méthode. Et même, dans le discours de M. Giroux, les gens étaient portés à sauter les questions.

Nous avons dit: "II faut y aller étape par étape". L'avant-dernière étape, c'est la normalisation et la dernière étape, c'est le choix définitif de la chose. Il me semble essentiel de franchir au moins toutes ces étapes-là. Après, nous poserons toutes les questions que nous voulons sur toutes les étapes. A la fin, on pourra dire: Cela a été bien fait ou mal fait. Et à la fin complètement, s'il y en a qui trouvent qu'il y en a qui n'ont pas fait leur devoir, ils le diront.

En cours de route, on fait un peu de psychanalyse coDective. Nous disons: Voici ce que l'on pense jusqu'ici.

Est-ce que le député de Gouin est d'accord? Je ne sais pas, je pense qu'on peut quand même progresser sur ça...

M. GARNEAU: On peut finir et, après ça...

M. SAINT-PIERRE: On peut commencer à remercier immédiatement le journal des Débats d'avoir bien fait la transcription des dernières discussions, remercier les pages d'avoir ouvert les portes, mais ce n'est pas ça; on va au moins finir nos travaux. Après ça, à la fin...

M. LE PRESIDENT: Si on finit les remerciements, on pourra peut-être lever la séance!

M. JORON: M. le Président, si je comprends bien les intervenants précédents, il serait peut-être de mise, à ce moment-ci, que l'on ait tout de suite les derniers documents qu'ont à nous livrer l'Hydro-Québec ou la Société. Je vous demanderais la parole par la suite, à ce moment-là.

M. LE PRESIDENT: II n'y a aucune bataille là-dessus. Il n'est pas question de couper la parole à qui que ce soit, il s'agit simplement d'essayer d'avoir un peu d'ordre dans la procédure. Je ne souffre pas de procédurite, je peux vous l'affirmer.

A moins de commentaires tout à fait acceptables à ce moment-ci, je demanderais à M. Giroux, qui avait la parole, ou à ses adjoints, de continuer l'exposé déjà commencé.

Coût des divers modes de production d'électricité

M. GIROUX: M. le Président, il y a deux documents sur lesquels on vous demande la permission de donner des explications assez détaillées, afin d'être en mesure d'éliminer beaucoup de questions, c'est la normalisation des coûts unitaires des divers modes de production d'énergie électrique et le résumé des études.

Avec votre permission, je demanderais à M. Charuk de donner les explications au fur et à mesure sur la normalisation, et à M. Cahill, ensuite de présenter le résumé des études. Je crois que ça pourra réellement ouvrir les portes à plusieurs débats. Si vous permettez, je vais laisser mon siège à M. Charuk.

M. CHARUK: Yan Charuk, Hydro-Québec. M. le Président, messieurs, vous avez entre les mains un rapport portant sur la normalisation des coûts unitaires des divers modes de production d'énergie électrique au Québec.

Comme il semble actuellement exister une grande confusion dans les diverses estimations de coût des centrales nucléaires et thermiques classiques, cette étude cherche à éliminer la confusion apparente autant sur les coûts unitaires d'investissement que sur les frais d'exploitation. Elle porte sur les centrales nucléaires de types américain et canadien ainsi que sur les centrales thermiques classiques.

L'étude consiste principalement à normaliser des données citées par diverses sources fiables en les ajustant pour des hypothèses indentiques et un ensemble d'éléments comparables. La comparaison des diverses prévisions retenues révèle que leur disparité initiale découle principalement des facteurs suivants: La prise en considération d'éléments différents de coût et l'utilisation d'hypothèses différentes quant au taux d'inflation, quant aux années de mise en service et quant au coût de financement d'un projet.

M. le Président, si vous me le permettez, j'aimerais maintenant vous expliquer brièvement ce que comporte cette normalisation en vous référant au tableau 1 qui suit la page 5 du document. Ce tableau présente la normalisation des prévisions du coût unitaire d'investissement de centrales nucléaires américaines pour des groupes de 1,000 mégawatts, mises en service aux Etats-Unis en 1978. Comme vous pouvez le constater, les sources de référence sont multiples. Les dates de publication sont très récentes.

La disparité qui existe entre la prévision des coûts unitaires d'investissement est assez énorme, si vous voulez, elle passe du simple au double.

Je tenterai maintenant de vous expliquer les facteurs qui amènent cette disparité.

Premièrement, les prévisions effectuées par les divers organismes le sont pour des groupes de taille variant entre 800 et 1,100 mégawatts. Deuxièmement, les donnés de base utilisées sont exprimées en dollars 1969, 1970 ou 1971. Troisièmement, l'année de mise en service de ces unités est prévue entre 1975 et 1980. D'autres raisons expliquent les différences entre les prévisions. Ce sont les hypothèses utilisées quant au taux d'inflation, soit le taux d'intérêt pendant la construction et les taux de contingences.

Nous avons tenté de normaliser ces coûts en dollars 1971. Pour ce faire, nous avons d'abord

déterminé les coûts d'investissement de référence pour des centrales de 1,000 mégawatts. Puis, nous avons appliqué une inflation globale à ces projets pour les données de base qui étaient exprimées en dollars 1969 et 1970, puis nous les avons ramenés en dollars 1971.

La dernière étape de la normalisation en dollars 1971 a consisté à faire des ajustements sur les éléments de coût qui n'étaient pas entièrement inclus dans les estimations. Par exemple, certaines sources n'incluent pas le poste de sectionnement, ou n'incluent pas entièrement les montants requis pour les services professionnels. A cela, nous avons ajouté un taux de contingences ou d'imprévus de 10 p.c. Nous avons déterminé, finalement, le coût normalisé en dollars 1971.

Pour déterminer la normalisation en dollars 1978, nous avons tout simplement appliqué une inflation au coût normalisé 1971 et un coût de financement des projets pour en arriver à un résultat moyen, pour 1978, de $445 par kilowatt pour des groupes de 1,000 mégawatts. De plus, on peut constater que les diverses prévisions varient entre plus ou moins 5 p.c. par rapport à la moyenne choisie, d'un minimum de $427 par kilowatt à un maximum de $467. Enfin, il s'agissait de déterminer la même chose pour des groupes de 800 mégawatts et de 500 mégawatts. Les résultats donnent $500 par kilowatt pour les groupes de 800 mégawatts et $575 par kilowatt pour les groupes de 500 mégawatts.

A toutes fins pratiques, les prévisions une fois normalisées se réconcilient très bien. La valeur retenue peut être considérée, d'après nous, comme une indication fiable du coût d'investissement unitaire aux Etats-Unis.

Vous avez aussi les coûts d'exploitation des centrales nucléaires américaines. Ils sont décrits à la page 13. Les prévisions effectuées en ce domaine se concilient assez bien.

Passons maintenant à la transposition de ces coûts au Québec. La transposition de ces coûts au Québec nécessite les principales corrections suivantes: Premièrement, les taux de rémunération de la main-d'oeuvre sont plus bas au Québec qu'aux Etats-Unis et deuxièmement, le taux d'inflation global, applicable aux dépenses de construction, est lui aussi moins élevé qu'aux Etats-Unis. Tenant compte de ces facteurs et de d'autres facteurs, le tableau 5 de la page 16 illustre le détail de la transposition au Québec. Le coût d'investissement unitaire prévu pour des groupes de 800 mégawatts, mis en service en 1978 au Québec, est de $367 par kilowatt, comparativement à un coût aux Etats-Unis, de $500 par kilowatt. Ce coût se compare à celui qu'a prévu la firme United Engineers and Constructors Incorporated pour des centrales construites au Québec en 1978.

Cette firme a prévu un coût de $364 le kilowatt. Donc, ça c'est la normalisation des centrales nucléaires américaines.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je pourrais poser une question? Est-ce que ce coût inclut les frais d'investissement pour les dispositifs touchant la pollution, sur le plan de la radiation nucléaire, sur le plan thermique ou autrement, compte tenu des normes récentes aux Etats-Unis?

M. CHARUK: Voici. En réponse à votre question, il y a deux considérations principales; d'abord, la pollution thermique de l'eau. Aux Etsts-Unis, vous allez voir dans le document que les tours de refroidissement peuvent coûter jusqu'à $50 le kilowatt, mais en général, sur une rivière avec un débit raisonnable, le coût est d'environ $20 le kilowatt. Nous l'avons considéré pour les centrales américaines construites aux Etats-Unis, mais enlevé pour les centrales construites au Québec. En ce qui concerne maintenant l'équipement additionnel pour assurer la sécurité, nous avons tenu compte, justement, de l'investissement additionnel requis.

M. SAINT-PIERRE: Un petit point mineur. Je crois comprendre que les normes américaines, en particulier pour tous les Etats le long des Grands Lacs, le Michigan et les autres, pour Chicago, en général, maintenant c'est assez simple, c'est un maximum d'un degré: l'eau qui est versée dans le Grand Lac ne doit pas être plus chaude d'un degré Fahrenheit que l'eau du lac même. Est-ce qu'au Canada, dans le contexte, ce serait à peu près ça dans les rivières, ou si ce serait plus considérable?

M. CHARUK: Je ne connais pas les normes canadiennes de ce côté-là. Tout ce que je puis répondre, c'est ce qui a été déclaré ici, il y a quelques jours, en ce qui concerne la centrale de Gentilly. Peut-être qu'ici, M. Cahill pourrait m'aider. Je crois qu'effectivement, pour Gentilly, la température de l'eau dans le fleuve augmente d'une façon très, très négligeable, étant donné le débit très élevé du fleuve Saint-Laurent à cet endroit. Est-ce que ça répond à votre question?

M. SAINT-PIERRE: Très bien, oui.

M. CHARUK: La deuxième étape des études en normalisation consistait à normaliser les coûts pour les centrales nucléaires canadiennes. Toujours pour une mise en service en 1978, le coût d'investissement d'une centrale nucléaire canadienne au Québec est prévu à $475 le kilowatt. Ce montant représente une moyenne, pour quatre groupes, de 500 mégawatts. Il découle d'une normalisation de plusieurs estimations. La majorité de ces estimations ont été publiées par l'Energie atomique du Canada Ltée et vous les retrouvez au tableau de la normalisation des centrales canadiennes, à la page 21. L'augmentation des coûts prévus par rapport aux prévisions antérieures résulte principale-

ment des facteurs suivants: une forte hausse des coûts de main-d'oeuvre de 1969 à 1972, une hausse sensible du prix de l'eau lourde, la hausse des taux à intérêt, un taux de contingence plus élevé et une période de construction légèrement plus longue. Comme on peut le constater à la page 18 du document, les estimations fournies par l'Energie atomique du Canada Ltée à l'Hydro-Québec, en avril 1972, confirment la validité des résultats des études en normalisation. A titre d'exemple, l'AECL prévoit $505 le kilowatt, alors que nous avons prévu $475. La différence entre les prévisions est partiellement expliquée par l'utilisation de taux annuels d'inflation différents, puis la période de construction. Nous avons retenu 4 p.c, alors qu'ils ont retenu 5 p.c. Aussi, les deux prévisions supposent un échelonnement légèrement différent des mises en service. En ce qui a trait aux prévisions des coûts d'exploitation, nous avons analysé et, enfin, retenu les prévisions de l'Energie atomique du Canada à ce sujet.

Enfin, la troisième étape consistait à normaliser les coûts d'investissement et d'exploitation des centrales thermiques classiques à l'huile.

La même procédure a été suivie que dans le cas des centrales nucléaires américaines et les coûts que nous avons déterminés confirment les coûts qui ont été prévus par la firme United Engineers and Constructors Inc. Ces coûts sont de $200 par kilowatt pour des groupes de 500 mégawatts et de $180 par kilowatt pour des groupes de 800 mégawatts.

Ces coûts excluent l'équipement antipollution.

M. SAINT-PIERRE: Quel serait, approximativement, le coût additionnel pour l'équipement antipollution?

M. CHARUK: C'est très difficile à ce stade-ci de se prononcer d'une façon catégorique sur ce sujet mais nous estimons qu'en 1978 l'investissement requis sera entre $50 et $60 par kilowatt.

M. SAINT-PIERRE: Merci.

M. CHARUK: L'autre solution est d'utiliser du combustible à très basse teneur en soufre. Nécessairement ce combustile coûte plus cher que le combustible qui a un contenu supérieur en soufre.

Concernant les prévisions des prix de combustibles, vous les retrouvez à la page 24 du document, soit à la dernière page. En 1980, nous prévoyons pour de l'huile résiduelle, c'est-à-dire l'huile no 6, un coût de $0.64 par million de BTU et un coût de $0.71 par million de BTU si le contenu en soufre est de 0.3 p.c. Nous pensons qu'un taux d'inflation à long terme après 1980 de 2 p.c. par année devrait être retenu pour les prix du combustible fossile.

J'ai terminé. Si vous avez des questions.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, est-ce qu'il y en a qui ont des questions? Le député de Verchères.

M. SAINT-PIERRE: J'imagine que dans un deuxième temps on reprendra ces paramètres qui ont été déterminés à la suite de l'étude de normalisation et on va jouer avec ces paramètres en fonction de situations bien données. Je ne sais pas si je pourrais poser deux questions, la première: compte tenu du problème de demandes de l'Hydro-Québec, parce que c'est une situation particulière qu'on veut bien saisir, les besoins d'énergie sur une période jusqu'à 1985 et l'ampleur de cette demande, lorsqu'on applique les solutions que vous avez mentionnées, soit nucléaires américaines, nucléaires canadiennes, si on les applique pour fournir une énergie de base, essentiellement, compte tenu que l'hydraulique pourrait faire la pointe, quel pourrait être le coût en mills par kilowatt-heure pour le nucléaire américain et le nucléaire canadien dans le contexte de 1978 à 1985 appliqué au programme que vous avez? L'électricité livrée à Montréal?

M. CHARUK: Premièrement, il est extrêmement difficile de prendre un complexe de base, c'est de cela que vous voulez parler, d'extraire ses coûts d'un programme d'équipement et de tenter de déterminer le coût de l'énergie livrée. Les programmes d'équipement de l'Hydro-Québec rencontrent les besoins quotidiens, mensuels et annuels des caractéristiques de la demande du réseau dans son ensemble.

Toutefois, nous avons préparé des estimations approximatives ici du coût de l'énergie livrée aux postes de répartition de la région métropolitaine de Montréal pour le complexe hydro-électrique La Grande et des projets équivalents produisant de l'énergie de base. Ces coûts donnent environ 11.8 mills par kilowattheure pour le projet de La Grande; 14.7 mills par kilowatt-heure pour un projet nucléaire.

Nous croyons que la différence entre le nucléaire canadien et américain n'est pas significative.

M. SAINT-PIERRE: Avec les difficultés d'avoir le nucléaire américain en sol canadien?

M. CHARUK: II est difficile de se prononcer. Nos estimations, en ce moment, donnent un couple nucléaire américain d'environ 3 p.c. supérieur au nucléaire canadien. Ce n'est pas significatif étant donné que nous prévoyons pour dix ou quinze ans.

M. SAINT-PIERRE: 14.7...

M. CHARUK: ... mills par kilowatt-heure que j'ai dit. Oui, pour le nucléaire. Pour un programme...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît, sur le même...

M. SAINT-PIERRE: On pourrait peut-être voir le thermique et après cela vous pourriez poser votre question, compléter?

M. CHARUK: Pour le thermique, en utilisant si vous voulez l'équivalent de brûler 1 p.c. de contenu en soufre dans le combustible, nous avons 14 mills. En utilisant l'équivalent de brûler 0.3 p.c. du combustible de contenu en soufre, nous avons 14.7 mills.

M. SAINT-PIERRE: C'est donc dire, en général, entre le dernier que vous avez mentionné pour le thermique et le nucléaire, un écart de 2.9 mills, soit entre 11.8 et 14.7.

M. CHARUK: Vous voulez dire entre le projet La Grande et le nucléaire.

M. SAINT-PIERRE: Entre le projet La Grande et un programme équivalent d'énergie de base qui donnerait la même quantité de kilowatts-heures.

M. CHARUK: D'accord c'est cela, 2.9 mills. Maintenant, il s'agit de 2.9 mills en moyenne sur une période d'horizon de 50 ans.

M. SAINT-PIERRE: J'ai une question, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Est-ce dans le même ordre d'idées?

M. JORON: M. le Président, je voudrais demander...

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je pourrais terminer? Je ne voudrais pas y revenir trop longtemps. On a mis très longtemps en doute la rentabilité même des rivières de la baie James et je ne voudrais pas faire de la partisanerie politique. L'ampleur des décisions est telle qu'on doit essayer d'être le plus objectif et le plus froid possible dans tout ceci. Mais j'aimerais signaler et cela m'apparaît particulièrement important, qu'on joue avec bien des chiffres. On parle de La Grande comme ayant 58 milliards de kilowatts-heures.\On parle de mills, de dixièmes de cents par kilowatt et là il faut bien voir. Je veux simplement faire reconfirmer par vous ou par M. Boyd qu'effectivement les informations que vous venez de nous donner veulent dire que si on donnait suite à la recommandation de l'Hydro-Québec de prendre le développement de la rivière La Grande versus d'autres choix qui s'offraient à nous pour le même type d'énergie qui correspond non pas à des besoins d'exportation mais à des besoins du réseau de l'Hydro-Québec sur une période de 1975 à 1986, que les 58 milliards de kilowatts-heures que nous donnera le complexe La Grande ou qu'aurait pu nous donner le complexe nucléaire de même type d'énergie, avec un différentiel de 2.9 mills nous donnerait une épargne annuelle — j'insiste sur le chiffre — une épargne annuelle au Québec de $168,200,000. Est-ce que mes chiffres sont exacts, me suis-je trompé? Parfois les ingénieurs se trompent, ils calculent précisément mais ne mettent pas le point à la bonne place.

M. CHARUK: C'est l'ordre de grandeur. Par contre j'aimerais ajouter un commentaire à ce que j'ai déclaré tantôt. Le coût de l'énergie livrée ici n'est pas un prix de revient, pas du tout. C'est le prix, le coût si vous voulez en moyenne sur une période de 50 ans.

M. SAINT-PIERRE: Mais essentiellement, si on le reprend sur une période de 50 ans?

M. CHARUK: Vous économisez annuellement le montant approximatif que vous avez donné tantôt.

M. SAINT-PIERRE: Annuellement. Donc en donnant suite aux études, en terminant... Peut-être y a-t-il des députés qui pourraient être moins familiers avec les projets hydro-électriques. On était peut-être surpris d'apprendre que l'Hydro-Québec elle-même ou par d'autres avait dépensée $20, $30 ou $40 millions pour les études sur la baie James. Je pense qu'on ne saurait trop insister quand même sur cette épargne réelle. S'il y a un an, on avait pris l'énergie nucléaire comme cela, en acceptant les chiffres qui étaient lancés, effectivement à chaque année le Québec aurait eu $168 millions à dépenser. Ce n'est pas la première fois que le débat nucléaire intervient dans notre vie sur le plan de la production d'énergie. Je ne sais pas s'il va falloir un jour changer votre nom pour Hydro-électricité ou autre chose, parce que le mot hydro est trop près de votre production.

Je rappelle aux membres de la commission —je me permettrai peut-être de le dire aux journalistes — qu'il y a deux jours, nous avions, en revoyant le bilan de l'Hydro-Québec, demandé aussi à M. Boyd et à M. Giroux certaines précisions touchant la décision prise par les commissaires sur l'énergie de Churchill Falls versus — et là on parle de 1966-1967 — le nucléaire. En effet, ceux qui regardent en arrière se rappellent qu'à cette période on a eu les mêmes débats qui sont revenus, peut-être avec moins d'agressivité. On est revenu quand même nous dire: On devrait aller dans le nucléaire. Oublions toutes les difficultés d'approvisionnement d'eau lourde, oublions tous les autres problèmes techniques qui auraient pu survenir. Disons simplement que pour le nucléaire, s'il n'y avait eu aucune difficulté, compte tenu du contrat réalisé pour les chutes Churchill, pour l'approvisionnement en électricité, l'épargne réalisée grâce à cette décision —je lève mon chapeau à ceux qui en ont été principalement responsables et je pense que je ne me trompe pas en mentionnant, du côté québécois, M. Boyd, M. Gignac et peut-être M.

Giroux — je ne voudrais pas aller dans les détails —et d'autres commissaires qui y ont été associés, mais je pense qu'il y en a particulièrement qui ont suivi le dossier de très près — pour le Québec, ça représente en moyenne près de $100 millions par année. Ces deux décisions — c'est par des études poussées et non par des ballons qu'on est allé au fond — représentent quand même pour le Québec, en évitant le nucléaire et en évitant peut-être une théorie de prestige ou autre, des épargnes réelles de $250 à $260 millions par année. Je pense que le député de Gouin et critique financier du Parti québécois réalise que $260 millions dans le budget québécois, c'est quand même un montant substantiel.

M. JORON: M. le Président, je constate d'une part que, pour quelqu'un qui était pressé tout à l'heure d'entendre les exposés de base avant de sauter aux conclusions et aux commentaires, vous êtes devenu joliment pressé tout d'un coup.

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. le Président, je tire simplement, à partir d'une étude de normalisation des coûts unitaires, les conséquences de ces coûts unitaires. C'est très bon de dire dans les journaux que ça va coûter $5,000, $6,000 et que tel professeur a dit $9,000. Il faut en savoir les conséquences et les implications financières pour justifier cela.

M. JORON: Ceci dit, M. le Président, — à ce que je sache, c'est moi qui avais la parole — je pense que le ministre a été imprudent et qu'il aura peut-être malheureusement bientôt à ravaler ses paroles. Je voudrais donc que l'on poursuive la séance selon la démarche qui nous a été indiquée au début: établir d'abord les faits, avant de faire les commentaires et de tirer les conclusions. J'ai quelques questions à poser sur le sujet immédiatement.

M. LE PRESIDENT: Excusez, M. le député. Les commentaires qui ont été faits l'ont été à l'intérieur des commentaires qui avaient été faits par M. Charuk. Il n'y a pas d'écart et c'est une question de précision. Je ne voudrais pas qu'on puisse interpréter l'intervention du député de Verchères comme une intervention à l'écart ou en dehors de la discussion.

Le député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, les questions que j'ai à poser sont les suivantes. Comment se fait-il qu'il y a une différence entre le coût qui vient de nous être donné pour La Grande et celui qui apparaît dans le document qui nous a été remis ce matin? C'est le programme d'équipement par l'Hydro-Québec au 15 mai et qui monte La Grande à 12.2. D'autre part...

M. SAINT-PIERRE: C'est tellement évident. M. JORON: Vous permettez que je fasse la liste de mes questions, comment se fait-il que le nucléaire canadien y apparaît à 14.2 et non pas à 14.7? Comment d'autre part concilier ces chiffres avec ceux par exemple... Et ceci m'amènerait à demander de quelles études découlent cette synthèse, cet effort de normalisation, puisqu'il semble y avoir des contradictions évidentes avec les données de United Engineers qui prévoit, selon la taille des unités concernées, des prix — toujours pour 1978 — sur le nucléaire variant entre 7.3 et 9.3 mills?

Troisièmement, j'ai à vous demander quels taux d'utilisation et de réserve ont été retenus pour arriver à ces chiffres? Je souligne l'importance de ce point. Selon que l'on prenne un taux d'utilisation de 60 p.c., 70 p.c. ou 80 p.c, les différences vont se répercuter sur le prix en mills de façon considérable. A cet égard, je signale le danger de se tromper là-dessus. Je me rappelle, l'année dernière, par exemple, les propos de M. Boyd au sujet de Pickering, prévoyant un taux d'utilisation de 60 p.c. qui s'est avéré de 83 p.c. dans les premiers mois de production de Pickering, ceci pouvant avoir des conséquences considérables.

D'autre part, je veux vous demander si, dans les coûts de La Grande, est inclus un calcul tenant compte de coûts supplémentaires pouvant résulter du prolongement considérable du réseau que cela occasionne, puisque nous avons établi, il y a deux jours, à cette commission, que le prolongement et le déséquilibre que ce prolongement peut provoquer dans un réseau, entraînent des coûts supplémentaires. On en a même, il y a deux jours, mentionné quelques-uns dans l'effort de produits nouveaux qu'il fallait faire maintenant pour la question des lignes de tension, etc. Ce facteur-là est-il inclus dans le coût?

En dernier lieu, les deux autres questions que je me pose, toujours au sujet du coût, aurait-on — et ceci est très important, étant donné que l'Hydro-Québec est actuellement en négociation avec l'Energie atomique du Canada Ltée — intentionnellement diminué ou augmenté les coûts qui apparaissent dans les études qui sont livrées aujourd'hui, de façon à avoir une arme de négociation avec...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'invoque le règlement, un instant.

M. JORON: Quel article? Sur quel sujet?

M. SAINT-PIERRE: Article 637, page 23, paragraphe 2; le sujet est très précis M. le Président. La question du député de Gouin est malhonnête. Jamais je n'oserais, comme membre de cette assemblée législative, à des gens qui viennent participer à une commission, demander, devant témoin, devant la presse, s'ils ont intentionnellement tenté de tromper la commission pour avoir un pouvoir de... Je trouve, M. le Président, que...

M. JORON: M. le Président...

M. SAINT-PIERRE: ... pour quelqu'un qui, il y a à peine trente minutes, nous faisait perdre vingt minutes pour féliciter les gens, il y a une contradiction qui, peut-être, reflète d'autres contradictions.

M. JORON: Vous me permettrez, M. le Président, de formuler la question d'une façon différente. Etant donné cette négociation qui a lieu avec l'Energie atomique du Canada, était-il prudent, à ce moment-ci, de dévoiler les chiffres? La dernière question...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, l'ampleur du projet et la conscience que les dirigeants de l'Hydro-Québec ont toujours montrée dans l'exécution de leur tâche... je pense qu'il était capital de donner les faits pour qu'une bonne décision soit prise.

M. JORON: M. le Président, la dernière question que j'avais à poser est la suivante: Est-ce que les coûts de revient en mills pour La Grande tiennent compte de ce que l'on retrouve en page 18 de l'exposé de M. Giroux lorsqu'il disait ceci: Pour réaliser ce projet, nous demandons au gouvernement de procéder à des modifications législatives et ainsi de suite... en vue d'exonérer l'Hydro-Québec de la taxe de vente provinciale, de la taxe sur l'huile avec gazoline, de l'impôt provincial sur la production d'énergie électrique et de toute autre redevance ou loyer. De plus, nous sommes d'avis que l'Hydro-Québec devrait également être exemptée de l'impôt provincial sur la production d'énergie et de toute autre redevance ou loyer en ce qui touche ses installations futures.

A-t-on présumé de ces recommandations, dans le calcul des coûts, puisque la phrase commence par: Pour réaliser ce projet?

M. GIROUX: Voici, il y a plusieurs questions mais il n'y a qu'une question au sujet de la demande que nous faisons, dans les redevances provinciales et toutes ces choses-là. Ces taxes-là sont chargées à l'exploitation et les frais d'exploitation résultent directement dans le coût des tarifs.

Si on prend les $0.50 de redevance et que nous demandons au gouvernement de nous exempter sur les projets futurs, c'est pour ne pas avoir à percevoir cet excès de taxes... Probablement que nous ne serons pas du même avis que le ministre des Finances, je ne veux pas entrer dans son domaine à ce sujet-là. Nous faisons la demande.

M. JORON: Cette partie-là de la demande, je la comprends? Mais pour la partie qui porte, non pas au moment où la taxe a une incidence à la distribution mais au niveau de la production par exemple, l'exemption de l'impôt provincial sur la production d'énergie de redevances ou loyers, en ce qui touche les installations futures, quand on dit les installations futures, est-ce qu'on va présumer dans les calculs que ces taxes-là étant enlevées, diminuent d'autant les installations à La Grande ou...

M. GIROUX: Non, il n'y a aucun calcul d'exemptions qui a été fait, on les a simplement considérées comme bases pour exploitation.

M. JORON: Merci.

M. BOYD: Sur ce dernier point, M. le Président, on peut peut-être ajouter quelque chose. Dans la loi...

M. LE PRESIDENT: Approchez du microphone.

M. BOYD: Dans la loi provinciale, l'impôt ou la redevance prévue pour l'énergie hydroélectrique.

Alors, elles ne seraient pas là à moins que la loi soit amendée pour l'énergie nucléaire. Donc, d'un côté il faudrait que les chances soient égales pour les deux méthodes de production...

On demande, nous, que toute redevance, que ce soit de l'énergie produite par le nucléaire, le thermique ou l'hydro-électrique, soit exempté à l'avenir, de cette redevance. Cela n'affecte donc pas les projets ou les programmes que nous avons calculés, que nous avons présentés. Concernant les taxes dans les programmes que nous avons étudiés, les taxes fédérales, les taxes payables par les entrepreneurs et les taxes d'essence y sont. La seule chose, je répète, que nous n'avons pas mis, est l'impôt provincial. Il n'y est pas au nucléaire, ni au thermique, ni à l'hydraulique.

Quant aux négociations avec AECL, je vous assure qu'il n'y a aucune considération qui est donnée à ça. Les normalisations que M. Charuk vous a expliquées étaient justement pour faire disparaître toutes les divergences. Pour expliquer les différences que vous avez soulevées en 14.2, 14.7, etc., il y a deux façons de l'expliquer. M. Charuk peut vous donner une explication sommaire. M. Chahill, tout à l'heure, va vous expliquer le choix des programmes. Concernant surtout UANC, on doit ajouter des réserves, des facteurs pour la fialibilité, si vous voulez. Alors, tout cela va vous être expliqué dans quelques minutes par M. Cahill. M. Charuk peut répondre à une partie.

Quand au réseau de transport, il est prévu pour inclure tous les éléments nécessaires pour que le réseau soit stable.

M. JORON: Avez-vous inclus une provision tenant compte des risques supplémentaires que l'extension du réseau amenait dans le cas de la Grande?

M. BOYD: Oui.

M. JORON: Quand on pense à la panne d'électricité de mars 1972, on voit tout de suite

qu'il y a des frais aux fins d'avoir un réseau très étendu et qui porte un certain désiquilibre. Si ce désiquilibre est encore accru, il doit y avoir une provision quelconque dans le coût, tenant compte de ce facteur.

M. CAHILL: Oui, nous en avons. Le nombre de lignes, que nous avons employées pour faire l'étude et estimer les coûts du transport de l'énergie de La Grande à Montréal, tient compte des difficultés qu'on pourra avoir avec la stabilité. Nous espérons que des études plus poussées pourront permettre de diminuer le nombre de ces lignes tout en obtenant la même stabilité.

M. BOYD : M. Charuk aurait une partie de réponse. M. Cahill, dans son exposé, je crois, répondra au reste.

M. CHARUK: Concernant votre première question à l'effet que le coût ici, qui a été mentionné tantôt, est plus élevé, l'explication vient du fait que c'est un coût d'un projet de base, un facteur d'utilisation de 80 p.c. L'énergie ici est livrée à la région métropolitaine de Montréal.

M. JORON: 80 p.c. dans tous les cas? M. CHARUK: Dans tous les cas. M. JORON: D'accord.

M. CHARUK: Mais c'est livré — et j'insiste — au réseau de répartition de la région métropolitaine de Montréal tandis que pour un programme d'équipement dans son ensemble, ce n'est pas nécessairement livré à Montréal.

M. SAINT-PIERRE: M. Charuk, est-ce qu'il n'y a pas un autre facteur qui m'apparaît... peut-être que c'est ça, je ne voudrais pas vous couper... est-ce qu'il n'y a pas un autre facteur très différent aussi du fait que — et peut-être que ça peut éclairer le député de Gouin — au tableau 3, je suppose que c'est à ça qu'il réfère, on voit le programme 37 qui était celui de La Grande que vous avez recommandé hier.

Nous voyons un coût de milles de 12.02 mills. Si nous allons au tableau 37 de ces feuilles qui ont été distribuées aussi hier, nous nous apercevons que le programme 37 comporte non seulement la rivière La Grande mais comporte également en 1978 une usine de pointe. Je suis certain que le député de Gouin sait qu'une usine de pointe n'a pas d'énergie du tout. Cela donne seulement de la puissance. C'est même de l'énergie négative dans un sens. En 1985, dans ce même programme, il y a des éléments thermiques. L'ensemble de tout ceci donne, pour le programme 37 LG 80 PA, des investissements de tant actualisés en 1971; ce qui donne un coût actualisé de l'énergie de 12.02 mills. La question qui a été posée tantôt, pour avoir la réponse, c'étaient strictement des choix de 58 milliards de kilowatts-heure en hydraulique La Grande, en thermique et en nucléaire. C'est la différence.

M. CHARUK: Ce sont des projets de base que nous avons comparés tantôt tandis que tantôt M. Cahill vous parlera du programme d'équipement dans son ensemble. C'est ce qui explique la différence.

En ce qui concerne votre deuxième question, c'est-à-dire le rapport de la firme United Engineers and Constructors Incorporated, relativement à nos estimés, j'ai indiqué tantôt que les frais d'investissement unitaire de cette firme sont les mêmes que ceux que nous utilisons, de même que les frais d'exploitation. Cependant, la firme United Engineers and Constructors Incorporated a déterminé les coûts de production pour la première année de l'exploitation seulement. Donc, elle n'a pas considéré l'inflation à long terme sous l'exploitation. Premier facteur. Le deuxième facteur: Le pourcentage de réserve que la firme United Engineers and Constructors Incorporated a considéré n'est pas le même que celui que nous considérons à l'intérieur d'un programme d'équipement.

M. JORON: Quelle est la différence?

M. CHARUK: On ne peut pas donner une réserve pour un projet donné. On calcule la réserve pour l'ensemble du programme. Seulement en termes hypothétiques, voici la différence: C'est que la firme United Engineers and Constructors Incorporated a calculé une réserve d'environ 25 p.c. avec du thermique léger pour des groupes de 800 mégawatts et de 35 p.c, avec du thermique léger encore une fois, pour des groupes de 500 mégawatts. Nous, dans le cas du nucléaire, nous avons une réserve de 37 p.c. Mais cette réserve est une réserve pompée et non pas des groupes thermiques légers.

M. JORON: Est-ce que ce taux de 37 p.c. ne vous apparaît pas excessif?

M. CHARUK: Je n'ai pas compris.

M. JORON: Est-ce que le taux de 37 p.c. ne vous apparaît pas excessif?

M. CHARUK: II n'est pas excessif. La firme United Engineers and Constructors Incorporated avait 35 p.c.

M. BOYD: Les réserves ou les taux de fiabilité que nous avons employés sont basés sur les derniers renseignements que nous a fournis l'Hydro-Ontario.

M. JORON: Quels sont-ils?

M. BOYD : Comme le dit M. Cahill, si vous me permettez, M. le Président, je suggérerais

qu'on entende maintenant M. Cahill. Ça va compléter. S'il reste encore des questions, on pourrait y répondre.

M. LE PRESIDENT: D'accord!

M. CAHILL: Avec votre permission, M. le Président, je fais un exposé sur le résumé des études qui ont conduit au choix d'un programme d'équipement pour la période de 1978 à 1985. Ce sera évidemment un exposé un peu aride. Il y aura quelques répétitions. Mais il faut passer à travers pour arriver à la fin. Le document que vous avez entre les mains résume les études qui ont mené au choix d'un programme d'équipement conçu pour satisfaire les besoins du réseau de l'Hydro-Québec pour la période de 1978 à 1985. Les études ont porté, comme vous le savez, sur des options thermiques, nucléaires et hydrauliques. Une partie de ce document donne la méthode utilisée pour le choix des équipements plutôt que des projets individuels. Il démontre de quelle façon les programmes sont conçus et de quelle façon on les compare. Cette partie du document est le texte de l'annexe D que M. le Président de l'Hydro-Québec a présenté à la commission parlementaire le 16 mai 1972.

Nous donnons les hypothèses de base pour tous les programmes étudiés. Elles sont données à titre de renseignement. Nous présentons ici le meilleur programme pour chacune des options, soit un programme thermique, un programme nucléaire selon la filière américaine, un programme nucléaire selon la filière canadienne et enfin un programme hydraulique dans ce cas-ci, avec La Grande comme source principale d'énergie.

Afin de permettre la comparaison de ces quatres programmes d'équipement, nous incluons dans les feuilles qui sont annexées les investissements annuels, les frais de fonctionnement incluant les carburants ainsi que les coûts actualisés de ces programmes. L'analyse technique et économique des différents programmes permet de conclure que la mise en route des centrales du complexe La Grande à compter de 1980 constitue la façon la plus économique de satisfaire le besoin d'électricité pour la période de 1978 à 1985. Des études de sensibilité sur la variation des taux d'intérêt, d'inflation, d'actualisation et des coûts de combustible dans des limites plausibles nous permettent de confirmer la conclusion déjà exprimée.

Alors, brièvement, nous passerons à l'annexe D, si vous le permettez. Pour faire le choix des investissements de production, notre approche consiste à rechercher la combinaison de nouvelles sources d'énergie qui satisfera de la façon la plus économique les besoins d'électricité de l'Hydro-Québec pour une période déterminée. C'est ce que nous appelons un programme d'équipement.

Les études pour le choix d'un programme d'équipement comporte deux phases principa- les. Il faut d'abord concevoir les programmes et ensuite en faire l'évaluation économique. La première phase débute avec le choix des sources d'énergie disponibles. Les projets normalement retenus sont ceux qui peuvent être réalisés au cours de la période étudiée et pour lesquels évidemment il existe des données techniques et économiques disponibles. On ne peut évidemment pas inclure dans le programme des projets qu'on ne connaît pas suffisamment.

Outre les projets hydrauliques connus, des usines thermiques et nucléaires de différentes tailles sont habituellement considérées.

Suit la conception des programmes consistant à déterminer un certain nombre d'arrangements des sources énergétiques qui satisferont les besoins du réseau et en énergie — c'est bien important — pour chacune des années de la période étudiée. Le programme d'équipement doit donc respecter deux contraintes principales. D faut que la puissance installée soit égale ou supérieure à la somme de l'appel de puissance et de la réserve contre la défaillance, en mégawatts, et que la productibilité annuelle soit au moins égale à la consommation annuelle d'énergie.

Ce sont deux critères qu'il faut, évidemment, respecter continuellement. Le bilan de la puissance implique, pour chaque année du programme, le calcul de la réserve. Il faut donc faire un calcul de la réserve pour chaque année, dépendant des installations déjà existantes et des installations que l'on ajoute à celles qui existent déjà, lesquelles dépendent, entre autres, de la taille et du taux de défaillance des équipements considérés, ce dernier variant beaucoup d'un type d'équipement à l'autre. Il y a donc la taille qu'il faut considérer et aussi la sorte d'équipement. Le bilan de l'énergie repose habituellement sur la productibilité annuelle moyenne des installations actuelles et à l'étude. Il est nécessaire, à l'occasion, de simuler la production des centrales sur une base mensuelle pour tenir compte des conditions d'hydraulicité réelle, c'est-à-dire qu'à chaque instant, chaque heure ou chaque minute de la journée, il faut satisfaire à la demande d'énergie et au taux où cette énergie-là est demandée par le consommateur.

Le nombre de solutions réalisables ou de programmes techniquement possibles est très élevé. En effet, le nombre de combinaisons de projets hydrauliques, thermiques, nucléaires, réserves pompées, pour une période d'une dizaine d'années pourrait dépasser le millier et même davantage. En pratique, le choix du meilleur programme — il n'est pas nécessaire de faire autant de programmes — se fait parmi une trentaine de combinaisons plausibles et choisies judicieusement. Un nombre si limité est rendu possible par une connaissance du coût relatif des différents moyens de production et par l'expérience acquise à ce travail. La seconde phase, dans l'étude d'un programme d'équipement de production, consiste à comparer, du

point de vue économique, les programmes établis plus haut. L'objectif de l'Hydro-Québec étant de fournir l'électricité au taux le plus bas, compatible avec une saine administration financière, nous croyons satisfaire cet objectif en recherchant le programme d'équipement dont le coût actualisé est le plus faible.

L'actualisation consiste à ramener à une base commune toutes les dépenses annuelles d'investissement et d'exploitation pertinentes à un programme. Le taux d'actualisation utilisé pour cette opération est une mesure de la préférence de l'entreprise à effectuer des déboursés maintenant ou plus tard. Les investissements dont il faut tenir compte sont ceux des centrales à l'étude et des additions au réseau de transport que ces centrales-là nécessitent. Les frais d'exploitation, d'entretien et de combustible de chaque équipement sont évalués pour une période commune à chaque programme d'équipement.

Dans notre cas, nous évaluons ces coûts sur une période de cinquante ans. Les réinvestissements et les valeurs résiduelles tiennent compte des longueurs de vie différentes entre les sources d'énergie. La méthode d'actualisation permet également de prendre en compte l'inflation sur les coûts de construction et d'exploitation et sur les combustibles, qu'ils soient thermiques ou nucléaires. Chaque programme d'équipement étant soumis à l'actualisation selon les mêmes critères —dans notre cas, nous avons employé un taux d'actualisation de 10 p.c. pour les études principales — celui dont le coût actualisé est le plus faible constitue le meilleur programme, du point de vue technique et économique.

Source d'énergie disponible. Les sources d'énergie disponibles pour la période 1978 à 1985 comportent de l'hydraulique, du thermique et du nucléaire. Nous allons donner rapidement l'inventaire des projets considérés pour satisfaire les besoins de cette prériode. Les projets hydrauliques les plus importants sont évidemment ceux du bassin de la baie James. Cinq possibilités ont été considérées. L'aménagement combiné des rivières Nottaway, Broad-back et Rupert, NBR, ou encore avec la dérivation de la Eastmain (NBRE) l'aménagement de la Eastmain, ES, l'aménagement de la Grande Rivière seule, LGS, ou avec une dérivation des rivières adjacentes, Eastmain, Grande Baleine et Caniapiscau, qu'on appelait dans notre terminologie LG. A ces cinq possibilités est venue s'ajouter une revision du projet NBRE que nous appelons NBR 2. D'autres projets hydrauliques de moindre importance sont également possibles au cours de cette période: II s'agit des centrales Outardes 2, Cascade et Champlain sur le bas Saint-Maurice.

Il importe de faire une mention spéciale aussi des projets d'usine à réserve pompée considérés dans nos programmes. Le site du lac Saint-Joachim dans la région de Québec a fait l'objet d'études poussées depuis 1966. Les problèmes de corrosion en milieu salin sont présentement analysés. Aucune décision à ce sujet ne pourra être prise avant la fin de l'étude en cours. D'autres emplacements prometteurs ont aussi été examinés. Par ailleurs, le thermique conventionnel a été considéré en tailles de 300 et de 500 mégawatts. Des tailles supérieures à 500 mégawatts ne se sont pas avérées économiques pour cette période, principalement à cause de leur taux de défaillance élevé. Des turbines à gaz en module de 60 mégawatts sont également disponibles comme équipement de pointe.

Deux types de centrales nucléaires font l'objet d'évaluation, Ici, il faudrait corriger. On a indiqué américain alors qu'on aurait dû écrire canadien, le nucléaire canadien du type Pickering en taille de 600 mégawatts et le nucléaire américain de type PWR, Pressure Water Reactor, en taille de 500 mégawatts.

Maintenant passons aux programmes, pour la question des programmes étudiés. En vue d'en arriver à déterminer le meilleur programme, c'est-à-dire le programme le moins cher, nous avons été amenés à adopter un processus d'évaluation progressive. Pour ce faire, parmi les 30 programmes que nous avions, nous avons procédé de la façon suivante: Nous avons divisé l'étude en trois étapes, en essayant de répondre successivement aux questions suivantes:

Quelle est la meilleure source d'énergie pour la période 1978 à 1985? Nous avons comparé des programmes qui étaient en majorité hydrauliques, en majorité thermiques et en majorité nucléaires. Comme vous le savez, on a calculé qu'un programme à majorité hydraulique, comportant le complexe La Grande, fournit le coût total actualisé le plus bas pour la période de 1978 à 1985. A partir de ce moment, il fallait déterminer quelle était la meilleure date de réalisation pour la meilleure source d'énergie. A partir des études que nous avons faites, nous avons conclu qu'il était préférable de commencer à produire de l'énergie sur le complexe La Grande dès l'année 1980.

Maintenant quelle est la façon optimale d'aménager la meilleure source, c'est-à-dire dans ce cas-ci, le complexe La Grande?

Comme le complexe en question va produire de l'énergie, un facteur d'utilisation de 80 p.c, et qu'en face de cette production, la demande est à 65 p.c, il faut évidemment intercaler des usines de pointe, soit durant la construction, la réalisation du complexe La Grande ou encore, installer des usines de pointe après avoir complété le projet. Dans un cas, on aura des suppléments d'énergie. Nous pouvons conclure là-dessus, présentement, d'après les études que nous avons faites, qu'il est à peu près indifférent du point de vue économique que de construire deux centrales de pointe durant la construction du complexe La Grande ou après la construction de celui-ci.

Si vous voulez maintenant, nous allons passer au dernier paragraphe de la page 7. Nous

avons, pour votre renseignement, construit deux autres programmes pour présenter une vue d'ensemble des projets de la baie James. Ce sont les projets NBRE 2 et le complexe La Grande aménagés à la suite l'un de l'autre, c'est-à-dire NBRE 2 - La Grande et ensuite nous avons comparé à La Grande avec NBRE 2.

Ces deux derniers programmes ne se comparent toutefois pas à ceux des séries précédentes parce qu'ils couvrent des périodes de longueur différente.

J'ajoute qu'avec ces deux complexes réalisés, nous pourrions satisfaire la puissance et l'énergie jusqu'en l'an 1989 ou 1990.

En ce qui concerne, maintenant, les années 1978 ou 1979, nous ferons bientôt une recommandation concernant les équipements de production qui devront être mis en service à ces dates. Nous disposons de plusieurs moyens possibles comme les centrales à réserve pompée, la centrale d'Outarde 2, une centrale nucléaire de 600 mégawatts, une centrale de turbines à gaz et peut-être d'autres encore.

Sur la feuille suivante, nous indiquons les hypothèses de base que nous avons employées pour faire nos calculs économiques des programmes. Le taux d'intérêt durant la construction a été établi à 8 1/2 p.c, le taux d'actualisation se chiffre à 10 p.c., les taux d'inflation pour les centrales hydro-électriques, construction 4 p.c, exploitation et entretien 5.5 p.c. Nous passons brièvement, si vous voulez. Tenons-nous en, pour commencer, à la construction. Inflation, centrale hydro-électrique, 4 p.c; nucléaire, 4 p.c; thermique aussi 4 p.c; inflation pour la construction des lignes, 2.2 p.c; postes 1.5 p.c; Pour les frais d'exploitation et d'entretien: 5.5 p.c. hydro-électrique; 4.5 p.c. nucléaire; 4 p.c, 2.2 p.c. et 2.2 p.c, c'est-à-dire 2.2 p.c. pour les lignes et 2.2 p.c. pour les postes.

Quant à la vie économique des équipements, pour les centrales hydro-électriques, nous avons pris une vie de 50 ans; ça ne signifie pas nécessairement qu'après 50 ans, nous rejetons la centrale ou que nous la détruisons. Evidemment, si elle est encore bonne, nous continuons de produire avec cette centrale. Pour les turbines à gaz, c'est 20 ans; pour les centrales nucléaires, 30 ans; pour les centrales thermiques, 30 ans. Encore dans ce cas-ci, il se peut qu'une centrale thermique, après 30 ans, continue à produire mais comme son rendement sera moins bon et que les défaillances seront plus nombreuses, on ne s'en servira qu'à la pointe et elle ne produira pratiquement plus de kilowatts-heures.

Pour les lignes de transport, nous avons une vie de 50 ans, pour les postes de consommation, 35 ans. Pour notre étude, nous avons pour le thermique un coût du combustible mazout no 6, à 1 p.c. de soufre, un taux de $0.536 le million de BTU en 1971, et à .3 p.c. de soufre, $0.594 le million de BTU en 1971.

Pour les études de base, dans les études économiques, que nous avons faites, nous avons employé un coût du combustible à 1 p.c. de soufre de $0.536 le million de BTU. Nous avons supposé un coût d'inflation du combustible ou du mazout à 2 p.c. par année. Pour le nucléaire, nous avons établi le coût du combustible à 0.849 mills par kilowatt-heure en 1971 avec une inflation de 1 p.c. par année. Quant à l'uranium enrichi américain, c'est un taux d'inflation de 2 p.c. par année avec un coût en mills par kilowatt-heure en 1971 de 1.738.

Maintenant, comme il est aussi important pour les calculs de réserve de savoir quel taux de panne on emploie, nous avons employé les taux de panne suivants pour le calcul de la réserve. En hydraulique, pour les groupes plus petits que 400 mégawatts, nous avons employé 3.6 p.c. comme taux de panne pour la première année et après cinq ans, alors que les groupes sont mûris, c'est-à-dire qu'on a corrigé les pépins qui ont pu se développer pendant les premières années, nous avons un taux de panne de 1.2 p.c

Pour les groupes de 400 mégawatts et plus, nous avons employé 4 p.c. lors de la première année, — c'est là qu'on trouve la majorité des pépins— et après cinq ans: 2 p.c. Pour les groupes nucléaires de 500 mégawatts, pour les taux de panne dans la première année, nous avons pris 12.5 p.c. et, après cinq ans 9 p.c.

Pour le thermique conventionnel, thermique classique, pour les groupes de 500 mégawatts, nous avons employé 8.5 p.c. pour la première année et 7.5 p.c. à la cinquière année et les années subséquentes. Pour les groupes de 300 mégawatts, nous avons employé 5.5 p.c. pour la première année et 4.5 p.c à partir de la cinquième année et les années suivantes.

Maintenant, vous allez probablement trouver que, dans le rapport de ÛANC, on a employé des taux de panne pour les groupes thermiques et nucléaires de 6 p.c à partir de la première année jusqu'à la dernière année. Par ailleurs, je crois que dans le même rapport, les groupes de 500 mégawatts, d'après Edison Institute, ont des taux de panne de 9 p.c. Nous ne pouvons pas endosser un taux de panne aussi faible pour le thermique ou pour le nucléaire d'après les renseignements que nous avons de sociétés semblables à la nôtre, qui emploient des taux de panne beaucoup plus élevés que ceux mentionnés dans le rapport de UANC.

Pour les coûts des centrales qui ont servi à faire les études économiques: Pour La Grande, nous avons employé les estimations qui nous ont été fournies par les ingénieurs-conseils; pour la Eastmain, la même chose; pour NBR et NBRE, nous avons employé les estimations produites par l'Hydro-Québec; pour les nucléaires américaines, nous avons employé les coûts produits dans le rapport de UANC; pour le thermique classique, la même chose; enfin, pour le nucléaire canadien, nous nous sommes basés sur les coûts qui nous ont été fournis par l'Energie atomique du Canada Limitée.

En ce qui concerne les lignes de transport et les postes de transformation, nous avons employé les estimations établies par l'Hydro-Québec.

Si vous voulez, nous pouvons passer rapidement. Nous avons quatre programmes qui forment le bilan de la puissance de l'énergie nécessaire qu'on doit ajouter pour les années 1978 à 1985 pour un programme à majorité thermique, à majorité nucléaire canadien, à majorité nucléaire américain et avec le complexe La Grande. Si vous êtes d'accord, je repasserai avec vous, rapidement, deux programmes seulement; les autres ressemblent aux deux premiers.

Alors, le programme no 20...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît! Je constate qu'il est six heures moins une ou deux minutes...

M. CAHILL: Cela prendra plus de temps...

M. LE PRESIDENT: ... je me demande, avant d'entamer une autre partie de votre exposé si, à ce moment-ci, la commission serait prête à suspendre jusqu'à 8 h 15? Cela vous permettra de commencer un nouveau chapitre avec la reprise.

M. CAHILL: D'accord, ça va très bien.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que j'ai une motion d'ajournement?

(Suspension de la séance à 18 h 1 )

Reprise de la séance à 20 h 25

M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

M. Cahill.

M. CAHILL: M. le Président, Messieurs, si nous référons au programme no 20 au tableau supérieur, nous pouvons lire le bilan de la puissance pour les années 1978 à 1985. La première colonne de gauche qui pourrait être intitulée 1977 indique que nous avons une puissance hydro-électrique installée de l'hydraulique de 15,987,000 kilowatts, thermique, 628 mégawatts, nucléaire, 250 mégawatts, soit un total de 16,865,000 kilowatts. En 1978, nous voyons que la demande nette du réseau sera de 16,241,000 mégawatts pour l'équipement déjà installé. Pour l'équipement qui sera installé en 1978, il faut avoir une réserve de 1750 mégawatts pour une puissance requise de 17,991 mégawatts.

A ce moment-là, dans le programme étudié, nous avons préconisé les installations de 1,200 mégawatts d'usine de pointe. Cela pourrait être une usine à réserve pompée ou une usine avec turbines à gaz ou une usine thermique léger.

Le tableau du bas nous montre le bilan énergétique pour les années 1978 à 1985. Les bilans énergétiques sont faits d'après le bilan hydraulique, c'est-à-dire du 1er octobre de l'année 1978 au 1er octobre 1979. La demande nette est de 96,183,000,000 de kilowatts-heures; l'hydraulique peut en fournir 74,000,000,000, le thermique, 995,000,000, le nucléaire, 1,970,000,000. Nous incluons dans cette colonne l'énergie qui peut être produite par les centrales installées sur la rivière Manicouagan qui peuvent développer 18,590,000,000 pour un global de 96,193,000,000 de kilowatts-heures. Or, cette année, nous pouvons donc installer en 1978 des usines de pointe car nous n'avons pas besoin d'énergie additionnelle pour alimenter la consommation en énergie.

Pour 1979 — on passera seulement une couple d'autres colonnes, si vous le voulez — l'appel net est 17,546 mégawatts, les réserves calculées sont de 1,800 mégawatts pour une puissance requise de 19,346 mégawatts. On ajoute encore 1,200 mégawatts de pointe et du point de vue énergétique, comme on a une déficience énergétique cette année-là, on préconise d'abaisser le réservoir de Manicouagan 5 et de produire plus d'énergie que normalement avec la rivière Manicouagan pour cette année-là, quitte à la remplir par la suite ou à remplir le réservoir par la suite avec la production nucléaire à un facteur d'utilisation de 80 p.c.

Enfin, si je passe à l'année 1985 — pour être rapide, s'il y a des questions, vous pourrez me les poser par la suitev — on voit que l'appel net du réseau sera de 28,186 mégawatts, la colonne 1985 à droite supérieure. Donc, l'appel en 1985

sera de 28,186 mégawatts. Les réserves requises, étant donné les taux de défaillance de l'équipement en service, devront être de 4,850 mégawatts pour un global de puissance installée de 33,036 mégawatts. Et cette année-là, on installera un groupe nucléaire de 600 mégawatts, un autre groupe nucléaire de 600 mégawatts et des installations de pointe de 1,200 mégawatts. On voit aussi que durant l'année 85/86, la production énergétique atteindra 167,684,000,000 de kilowatts-heures. Juste en bas du tableau du bilan énergétique, on voit donc le montant total des installations additionnelles pour satisfaire à la demande et à la consommation d'énergie durant la période de 1978 à 1985, on aura 5,600 mégawatts d'usine de pointe, et 10,800 mégawatts pour un global de 16,400 mégawatts qui seront installés, et une production de 71 milliards de kilowatts-heures.

Maintenant, passons rapidement au programme no 37 qui est celui qui inclut le complexe de la rivière La Grande. En l'année 1978, nous avons, évidemment, la même demande nette, c'est-à-dire 16,241 mégawatts, 1,750 mégawatts de réserve, soit une puissance requise de 17,991, des installations de pointe de 1,200 mégawatts comme dans le programme que nous avons étudié précédemment concernant le nucléaire canadien.

Pour ce qui est du bilan énergétique, il est également identique au bilan énergétique que nous avons vu précédemment. En l'année 1979, la demande nette est la même que précédemment, des réserves de 1,800 mégawatts, une puissance requise de 19,346 mégawatts. Ici, on pourrait installer une usine de pointe de 800 mégawatts. Et il serait possible d'installer la centrale Outardes-2. Et, comme dans le cas précédent, nous pourrions soutirer plus d'énergie de la rivière Manicouagan en abaissant le niveau du réservoir Manic-5 et produire 25 milliards de kilowatts-heures sur la rivière Manicouagan au lieu d'en produire 18 milliards comme durant les années normales ou régulières.

En 1980, on voit apparaître la première puissance, la première production d'énergie au complexe La Grande, c'est-à-dire que la demande nette est de 19,104, les réserves de 2,000 mégawatts, soit une puissance requise de 21,104. A ce moment-là, nous installerions quatre groupes dont la puissance globale sera de 1,960 mégawatts à la centrale La Grande no 2. Le bilan énergétique qu'on produirait à ce moment-là serait de 13,689,000,000 de kilowatts-heures sur La Grande no 2 pour un total de production d'énergie, pour l'année hydraulique 1980-1981, de 113,344,000,000. Enfin, si l'on va à l'avant-dernière colonne, la puissance en mégawatts... On voit ici qu'on termine les installations sur le complexe La Grande, la centrale no 1, en l'année 1984; on installerait huit groupes pour un global de 929 mégawatts. Enfin, en 1985, la demande nette sera de 28,186 mégawatts, la réserve de 2,900 méga- watts, soit une puissance requise de 31,086 mégawatts.

Je pourrais souligner ici que la réserve serait de 10 p.c. dans le cas du complexe La Grande alors que, dans le cas du programme nucléaire canadien, la réserve serait de 17 p.c. C'est à cause des taux de défaillance, des taux de pannes, qui sont différents pour les deux bilans.

Enfin, dans le bilan énergétique, évidemment, la production globale pour l'année hydraulique 1985-1986 est la même que dans le cas où on a étudié le programme nucléaire. Comme bilan total dans ce cas-ci, on aurait 4,000 mégawatts; l'usine de pointe, avec l'hydraulique, produirait 8,227 mégawatts, soit 60.9 p.c; le thermique qui serait ajouté durant la dernière année pour compléter le bilan en mégawatts jusqu'en 1985 atteindrait 1,600 mégawatts, c'est-à-dire 11.2 p.c. du rendement global. On aurait donc des installations additionnelles de production de 14,327 mégawatts pour cette période-là avec la même production en milliards de kilowatts-heures.

Si on passe au tableau où on inscrit les investissements pour ces deux programmes, soit le tableau qui est intitulé "Programme RI-71-09-20, le programme 20, c'est-à-dire le programme nucléaire canadien. On y voit quels sont les investissements et les frais de fonctionnement pour les années 1971 à 1998; on aurait pu continuer pour ce qui concerne les frais de fonctionnement jusqu'en l'année 2037. On s'est arrêté à cette date-là, évidemment, mais on en a tenu compte dans l'étude économique. Donc, pour les frais d'investissement, on a ici les différentes dépenses à l'endroit intitulé: Centrales. En 1971, aucune dépense évidemment; en 1972, zéro aussi; $1,300,000 en 1973; puis $13,500,000 et $134,000,000; enfin on peut continuer pour en arriver à un montant global de $6,906,000,000 —c'est bien cela— qui indique le montant investi pour les additions de production que nous avons examinées au programme no 20.

Ceci inclut les frais intercalaires au taux de 8 1/2 p.c. tel que nous vous l'avons indiqué tout à l'heure.

Pour les lignes de transport, on a des investissements de $108 millions; pour les postes $205 millions; le montant total est de $7,220,000,000 d'investissement pour ce programme-là.

Les frais de fonctionnement pour les centrales, ça comprend le combustible fossile et le combustible nucléaire. On voit qu'on a un total de $3,046,000,000, jusqu'en l'an 2037, pour les frais d'entretien de lignes. Ceci est à calculer au taux que je vous ai mentionné tout à l'heure. L'entretien des lignes, $20,900,000; l'entretien des postes, $39,910,000 et l'usage qu'on a fait du thermique existant — c'est-à-dire que pour différents programmes, on a fait fonctionner le thermique nucléaire existant, c'est-à-dire l'usine de Tracy et la centrale nucléaire de Gentilly de différentes façons, on a donc tenu compte des

dépenses de combustible, dépendant des programmes — dans ce cas-ci, on a dépensé $87,970,000. Le total des frais de fonctionnement pour ce programme-là est donc de $3,195,000,000.

Quels sont les coûts actualisés des dépenses d'investissement et de fonctionnement de ce programme-là? Comme on l'a indiqué tout à l'heure, le coût total actualisé du programme qui satisfait à la demande et l'énergie est de $71 milliards. Ce doit être le programme qu'il devrait être préférable de choisir économiquement.

On voit à gauche, actualisé à un taux de 10 p.c, que les investissements des centrales se chiffrent à $2,428,000,000, pour les lignes, $41 millions; pour les postes $73 millions, c'est-à-dire un total d'investissements, pour les centrales, de $2,544,000,000.

Comme la vie des centrales thermiques ou nucléaires est basée sur une vie de 30 ans, il faut réinstaller des centrales semblables, mais à un coût calculé après 30 ans.

Donc, le coût de réinvestissement pour ces centrales-là, pour continuer à produire la puissance et l'énergie que nous étudions présentement, et actualisé à l'année 1971, pour les centrales, s'établit à $408 millions; les lignes à $1,100,000; les postes à $4.4 millions et pour un total de $413 millions.

Après 50 ans, ces centrales-là, comme elles ont encore une vie résiduelle de dix ans, il faut donner un crédit qui s'établit à $27 millions. Le fonctionnement pour les centrales, en valeurs actualisées, s'établit à $500 millions; pour les lignes à $5.1 millions; les postes à $9.5 millions; le combustible à $290 millions pour un fonctionnement global de $805 millions.

Donc, le total actualisé de tout ce programme, et pour les investissements et pour les frais de fonctionnement, est de $3,735,000,000, qui donne un coût de l'énergie moyen, c'est-à-dire qu'on a le coût total actualisé de tout le programme divisé par les kilowatts-heures actualisés produits durant toute la vie durant laquelle le programme a été étudié, s'établit à 14.198 mills, ou 14.2 mills du kilowatt-heure.

Maintenant, si nous passons au programme no 37, celui qui comprend le complexe La Grande, nous allons procéder plus rapidement parce que nous avons procédé avec assez de détails pour le programme précédent.

M. SAINT-PIERRE: M. Cahill, je m'excuse de vous interrompre. Effectivement, le programme 37 est celui que vous avez recommandé, que M. Giroux recommande dans son texte également.

M. CAHILL: C'est bien ça. Les quatre programmes que nous avons attachés à ce résumé-là comprennent le meilleur programme hydraulique, le meilleur programme thermique et le meilleur programme nucléaire, c'est-à-dire le meilleur programme nucléaire, soit canadien, soit américain.

Nous venons d'examiner en détail les coûts du meilleur programme canadien. Si maintenant nous examinons les coûts du meilleur programme hydro-électrique, nous voyons qu'en centrales, nous investissons toujours un taux incluant l'escalade, j'aurais dû dire aussi tout à l'heure un taux de 4 p.c. par année et incluant aussi les frais intercalaires d'intérêt à 8.5 p.c. par année. Nous investissons $5,637,000,000 pour les centrales; pour les lignes, $1,316,000,000; pour les postes, $343 millions, soit un total de $7,297,000,000.

Evidemment, les frais de fonctionnement des centrales hydro-électriques sont très faibles. Par ailleurs, comme nous avons complété la fin du programme jusqu'en 1985-86, pour compléter le bilan énergétique 1985-86 avec du thermique, ça comprend donc aussi des frais de combustible. Ainsi les frais de fonctionnement peuvent apparaître relativement élevés. On a donc des frais de fonctionnement pour des centrales de $1,680,000,000; les lignes, $236 millions; pour les postes, $66 millions; le thermique et le nucléaire existants — ce que j'expliquais tout à l'heure— c'est le coût de l'énergie produite soit par Tracy, soit par l'usine de Gentilly, $237 millions; soit un total de frais de fonctionnement de $2,222,000,000.

Si on actualise les coûts des investissements tels que montrés ci-haut, évidemment en soustrayant les coûts des frais intercalaires, nous avons pour les centrales, $1,969,000,000; pour les lignes, $460 millions; les postes, $122 millions-, soit un total de $2,549,000,000. Quant aux réinvestissements en ce qui concerne la partie thermique qui est incluse dans le programme, nous avons un total de $153 millions; les valeurs résiduelles de cette partie thermique s'établissent à $76 millions, crédités évidemment contre les frais de fonctionnement, eux, s'établissent à $536 millions; — à un moment donné, on devient mêlé entre les milliards et les millions — soit un total de $3,161,000,000 actualisés. C'est le programme qui a donné le coût actualisé le plus bas. Le coût de l'énergie est calculé de la même façon que tout à l'heure. C'est-à-dire que les coûts actualisés de toutes les dépenses s'étalent au cours des années entre 1972 et l'année 2037 et comprennent les dépenses d'investissements de chaque année, de même que les dépenses de fonctionnement, s'établissent à 12.02 mills.

Ceci donne un résumé bref — même s'il a pu paraître long — très bref des études faites pour arriver aux conclusions obtenues. J'aimerais faire un commentaire sur certaines différences qui peuvent exister entre des coûts d'énergie thermique ou nucléaire que nous pouvons avoir dans nos programmes en regard de ceux de UNC.

J'en nomme ici quelques-uns. Entre autres, l'étude de UNC comporte des coûts d'investissement de centrales en watts entre les années 1978 et 1980 inclusivement alors que les coûts d'investissement de centrales des programmes que nous montrons sont fait généralement entre

les années 1980 à 1985. Donc, il y a un coût d'inflation de 4 p.c. qui peut s'ajouter pour des périodes entre deux à cinq ans, selon les centrales. Quant aux frais d'exploitation, évidemment, dans le titre des coûts de UNC comme nous avons demandé des coûts d'énergie pour les années 1978 à 1980, l'inflation des combustibles n'a été faite que pendant trois ans alors que, dans notre cas, l'inflation des combustibles a été faite de 1980 à l'année 2,035 et comprenait tout le programme. La même chose s'applique aussi pour les frais d'exploitation et d'entretien. UNC a pris un taux de réserve de 6 p.c. pour les groupes de 500 mégawatts alors que nous avons pris pour du nucléaire de 500 mégawatts des taux décroissants de 12.5 p.c. à 9 p.c. selon la maturité des groupes. Pour le thermique, nous avons pris 8.5 p.c. à 7.5 p.c.

Un détail peut-être, mais le rapport de UNC ne tient pas compte aussi du coût de tout le personnel de soutien qu'on doit avoir au siège social ou ailleurs pour appuyer l'exploitation ou le fonctionnement d'un réseau ou d'un ensemble de production de centrales nucléaires ou thermiques.

Enfin, le rapport de UNC a été fait pour alimenter une charge qui aurait un facteur d'utilisation de 80 p.c. alors que notre programme a été étudié pour alimenter un réseau qui a un facteur d'utilisation d'environ 65 p.c. Mon rapport est terminé. Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: M. Cahill, en reprenant vos hypothèses de base, dans la vie économique des équipements, je lis ici: "50 ans pour les centrales hydro-électriques". Est-ce que les 50 ans s'appliquent aussi aux barrages dans votre étude?

M. CAHILL: Cinquante ans, c'est une longueur de vie économique qui est employée pour faire le calcul. Maintenant, comme je l'ai déjà mentionné, après 50 ans, rares sont les centrales hydro-électriques qui ne continuent pas à produire aux mêmes facteurs d'utilisation pour lesquels elles ont été construites originalement. Nous pouvons citer Les Cèdres et d'autres centrales. Généralement, on ne démonte une centrale hydro-électrique que lorsque l'équipement est complètement désuet et que le barrage peut être devenu difficile à entretenir.

M. PERREAULT: Alors, vous avez appliqué 50 ans pour le barrage aussi?

M. CAHILL: Pardon?

M. PERREAULT: Pour les barrages. Deuxièmement, vous avez des programmes pour la rivière La Grande avec pointe après et pointe intermédiaire. Est-ce que les pointes nécessaires pour les années 1978 et 1979 sont intercalées là-dedans ou sont-elles en surplus?

Dans le programme 37, où la rivière La Grande arrive en 1980, vous avez des pointes après.

M. CAHILL: Nous avons étudié le complexe La Grande; comme le complexe aménagé a un facteur d'utilisation de 80 p.c, nous pouvons insérer la pointe pendant, pour amener le facteur général du complexe plus près de la pointe à 68 p.c. au fur et à mesure qu'on réalise le complexe, ou on pourrait tout construire le complexe à 80 p.c. et installer la pointe après. Les études économiques que nous avons faites jusqu'à maintenant indiquent qu'il n'y a presque pas de différence de coût entre les deux versions. Eventuellement, nous prendrons une décision à ce sujet. Présentement, il ne semble pas y avoir beaucoup de différence entre les deux méthodes.

M. PERREAULT: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Verchères.

M. SAINT-PIERRE: M. Cahill, dans le programme 37 qui est celui que vous recommandez, tel qu'il apparaît dans le volume, il n'y a effectivement pas de nucléaire qui est prévu dans le programme, bien que, quelque part, vous dites que, peut-être, on pourrait...

M. CAHILL: C'est-à-dire que j'aurais pu souligner que, dans le programme 37, nous avons d'ailleurs un ou deux programmes qui indiquent du nucléaire canadien. Comme le disait M. Giroux, ce sera certainement intéressant d'insérer un groupe nucléaire pour l'entraînement technique et pour les exploitants de sorte que, lorsque nous passerons plus tard à la production nucléaire en masse, nous ayons les connaissances techniques et l'expérience d'exploitation nécessaires.

M. SAINT-PIERRE: C'est là que vous envisagez de construire du...

M. CAHILL: Dans nos programmes, nous en avons qui montrent un groupe nucléaire; dans celui-ci, dans le programme 37, c'est peut-être une coincidence qu'il n'y en ait pas.

M. SAINT-PIERRE: Et ce serait la poursuite des négociations que vous avez déjà entreprises pour une station de 600 mégawatts de nucléaire canadien?

M. CAHILL: Exactement, M. Saint-Pierre.

M. SAINT-PIERRE: C'est donc dire que, sur un programme d'équipement pour faire face à vos besoins de pointe d'ici 1985, vous prévoyez quand même une puissance additionnelle d'environ 14,400 mégawatts?

M. CAHILL: C'est ça!

M. SAINT-PIERRE: Sur le programme que vous recommandez au gouvernement, sur 14,400 mégawatts, on y retrouve donc 600 mégawatts de nucléaire, le reste étant 8,400 de La Grande et des réserves pompées pour l'énergie de pointe?

M. CAHILL: De l'énergie de pointe. Ce ne sera pas nécessairement toute de la réserve pompée. Ce pourra être les turbines à gaz, ou encore du thermique léger. La décision reste à prendre.

M. SAINT-PIERRE: C'est donc dire que, dans le programme que vous nous recommandez, sur 14,400 mégawatts de puissance, vous nous recommandez 600 mégawatts de nucléaire, soit environ 4 p.c. de la puissance requise pour l'ensemble du programme?

M. RUSSELL: C'est 4 p.c.

M. SAINT-PIERRE: C'est 4 p.c. Les 600 sont 4 p.c. de 14,400.

M. CAHILL: J'aimerais...

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je pourrais également poser une question? Je m'excuse, est-ce que vous aviez...

M. CAHILL: Je ne me souviens plus si j'ai souligné que le programme des années 1978-1979 n'est pas encore optimisé, que nous avons encore le temps de l'optimiser et que nous allons bientôt faire, dans quelques mois, des recommandations sur les équipements de production que l'Hydro-Québec devra avoir pour ces années-là.

M. SAINT-PIERRE: Outardes 2, le Bas Saint-Maurice ou, enfin, Manic 5.

M. CAHILL: L'usine à réserve pompée, thermique, turbines à gaz.

M. SAINT-PIERRE: M. Cahill, à la page du tableau 11 de votre volume, vous examinez l'ensemble de ces programmes et on y voit la colonne investissements qui représente la somme des investissements pour la réalisation de chacun de ces programmes. On y retrouve, à côté du programme 20, qui est essentiellement le programme qui aurait été axé sur du nucléaire canadien — c'est bien ça, le programme 20...

M. CAHILL: Le programme 20, oui.

M. SAINT-PIERRE: ... du tableau 11 — on y retrouve le montant de 7,221.

M. CAHILL: C'est ça,

M. SAINT-PIERRE: Si on tourne la page, M. Cahill, au programme 37, qui est celui recom- mandé, qui est axé essentiellement sur la rivière La Grande comme on l'a vu, à 96 p.c. pour la puissance et 4 p.c. pour le nucléaire, on y retrouve comme investissements pour le programme qui est axé sur la baie James, 7,298. Est-ce bien ça?

M. CAHILL: C'est ça!

M. SAINT-PIERRE: C'est ce qui vous permet, après tous ces calculs, M. Cahill, de dire que les investissements totaux requis de l'hydraulique donnent $7,298 et que ceux requis du nucléaire donnent $7,221. Cela indiquerait que les coûts — et je reprends les mots que vous aviez hier — d'immobilisation sont comparables?

M. CAHILL: Cela provient du fait que le coût du nucléaire est relativement élevé, si on peut employer cette expression. Aussi, c'est dû au fait qu'on a besoin de plus de réserves, à cause de la fiabilité plus faible des groupes nucléaires.

Si vous remarquez, nous avons besoin d'installer plus de mégawatts lorsque nous avons un programme nucléaire que lorsque nous avons un programme hydro-électrique.

M. SAINT-PIERRE: Vous êtes convaincu que vos comptables, en établissant ces coûts-là n'ont pas gonflé deux fois des amortissements reliés au nucléaire? Est-ce que vous êtes convaincu des chiffres, quand même, avancés? Des experts, ici, nous font dire que l'Hydro-Québec a gonflé indûment les chiffres du nucléaire en amortissant deux fois la même chose dans les calculs.

M. CAHILL: Ce n'est pas notre habitude. Si l'on nous montre...

M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas la mienne.

M. GIROUX: Non. Ce que vous citez; je m'excuse.

M. SAINT-PIERRE: Ce qu'on cite... On doute du fait que les coûts d'immobilisation sont comparables — coûts qu'on retrouve d'ailleurs au tableau 11 — $7,221 et $7,298. Quelqu'un dit que c'est faux, parce que les comptables sont prêts à démontrer devant la commission que l'Hydro-Québec gonfle indûment les coûts du nucléaire en amortissant deux fois la même chose dans ses calculs.

M. GIROUX: Si vous comparez quelque chose qui a une vie de 50 ans à quelque chose qui a une vie de 25 ans, je ne suis pas un mathématicien, mais c'est deux fois... N'est-ce pas? Les chiffres qui sont présentés ont été actualisés par notre département d'économique...

M. SAINT-PIERRE: Suivant les critères qui ont été donnés.

M. GIROUX: ... suivant les critères qui servent à l'ensemble des analystes des compagnies d'électricité. On se sert de ces critères-là pour fins de comparaison. Mais, on ne voit pas beaucoup dans les revues américaines, de ce temps-ci des comparaisons avec l'hydraulique pour une raison bien simple, c'est qu'il n'y a pas d'hydraulique.

M. SAINT-PIERRE: II n'y en a pas. Je m'excuse, M. le Président, peut-être que la question aurait dû être posée cet après-midi. Je sais qu'elle a été posée, mais peut-être que M. Cahill... J'ai personnellement foi aux données que vous avez avancées; il me semble que c'était très clair, d'une façon très méthodologique, que toutes les étapes avaient été parcourues, les mêmes critères. On a tenté d'équilibrer pour pouvoir comparer des choses comparables. Je ne voudrais pas reprendre l'exposé qui a été donné, mais trouvez-vous réellement que votre taux d'utilisation projeté pour les centrales nucléaires à 80 p.c. est trop bas par rapport à ce qui se produit normalement?

M. CAHILL: Je crois que c'est un taux raisonnable. C'est peut-être élevé pour les premières années, mais les problèmes d'enfance — si on peut les appeler comme ça — n'ont pas été corrigés.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous trouvez également...

M. CAHILL: C'est aussi la même chose pour les thermiques classiques, pour les gros groupes, si vous voulez.

M. SAINT-PIERRE: Trouvez-vous également que vous faites preuve d'irréalisme en disant que vous devez avoir un taux de réserve de 25 p.c?

M. CAHILL: Pas du tout.

M. SAINT-PIERRE: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, maintenant que les exposés de l'Hydro-Québec sont terminés, je pense qu'il est important de poser un certain nombre de questions, de façon que soit établi le plus clairement possible le coût exact de revient en mills entre les différents programmes suggérés. Voici pourquoi il est si important que ce coût en mills comparé des différents programmes soit bien établi. Si nous présumons au départ que les coûts devaient être égaux et qu'il y avait des différences quant aux sommes d'investissements initiaux requis, alors, à ce moment-là, la formule qui suggérerait ou qui offrirait l'investissement moindre se verrait forcément la plus rentable, puisqu'elle nécessiterait l'engagement de moins de capitaux dans un même secteur donné, pendant qu'au Québec, il y a des besoins considérables en capitaux et en investissements dans d'autres secteurs que celui de l'électricité.

C'est la raison pour laquelle nous insistons pour que soient établis, le plus clairement possible et le plus définitivement possible, ces écarts ou ces différences de coût en mills entre les différents programmes afin de pouvoir composer de la façon optimale le "mixe" du programme mixte suggéré.

Le programme proposé et suggéré par l'Hydro-Québec comporte, bien entendu, une partie nucléaire. Mais c'est la plus petite partie du programme total. Le Parti québécois avait, l'année dernière, pensé à un programme mixte ou l'accent sur le nucléaire aurait été considérablement plus fort, plus marqué, qu'il ne l'est en ce moment. Cette inclinaison, pour un contenu dans le programme mixte nucléaire plus fort que celui suggéré aujourd'hui se relie au fait justement de cette économie d'investissements initiaux que présente la formule nucléaire canadienne.

Il appert d'une part — au point où nous en sommes et avant d'éclaircir les dernières questions — que la différence en coûts de revient, en mills entre le programme 37 et le programme 20 pour illustrer deux exemples, est de l'ordre d'environ deux mills par kilowatt.

M. le Président, je voudrais que, lorsque nous sortirons de cette commission, cet écart, s'il en subsiste un, soit établi le plus clairement possible. Et pour ce, il faut vérifier et scruter à nouveau les facteurs les plus importants qui conditionnent, dans le cas du nucléaire canadien par exemple, et qui nous donnent le coût en mills qui nous est présenté dans le rapport de normalisation de l'Hydro-Québec. Les points les plus centraux et les plus importants à cet égard sont les suivants et c'est sur ceux-là que je veux faire porter mes questions. Il faut vérifier le taux d'utilisation qui a été employé, le taux de réserve qui a été employé, le taux de pannes de démarrage qui a été employé. A la fin de la séance cet après-midi on nous a présenté des chiffres à cet égard. Ces chiffres appellent certaines questions et c'en est une, entre autres, que je voudrais poser. A la lumière de l'expérience de Pickering où on avait anticipé de la même façon un taux de panne de départ assez considérable, l'expérience a montré, puisque lesdites centrales rentrent en production et d'ailleurs un peu plus rapidement que prévu et à un taux d'utilisation dès le départ de 83 p.c, qu'il est peut être excessif de projeter des taux de panne sur une situation aujourd'hui en 1972, de les projeter sur 1980 ou au début des années 80 d'une part. D'autre part, une autre question que je voudrais poser — toujours pour que la lumière soit faite sur ces écarts entre le coût en mills — dans le cas du nucléaire canadien, le

facteur lignes de transmission et transport présumait que les centrales étaient situées à quel endroit? C'est une des questions que je voudrais poser. Evidemment, si la centrale est située à Sept-Iles dans le but de fournir le marché de Montréal par rapport à Gentilly ou par rapport à l'intérieur même de la ville de Montréal, cela ferait une différence considérable. Dans les taux normalisés, le coût du transport présumait de quel site des centrales?

M. LE PRESIDENT: Me permetteriez-vous une question, sans vouloir vous interrompre. D y a déjà une série de questions. Je me demande si en ce moment on ne devrait pas prendre part et entendre ce que pourrait répondre...

M. JORON: Une par une?

M. LE PRESIDENT: Une par une ou trois par trois, cela ne m'inquiète pas.

Vous avez suggéré entre le tableau 20, le tableau 37 ou le programme 20, le programme 37 d'écarts en mills, le taux d'utilisation, le taux de réserve, le taux de démarrage, taux de panne, enfin... Est-ce que, par exemple, on pourrait nous répondre à ce moment-ci, directement, sur cette question de variations qui pourraient exister entre les deux projets, soit 20 ou 37? C'est ce qu'on a suggéré comme début.

M. CAHILL: Je pourrais répondre à la question qui porte sur le taux de panne qui a été choisi. Je mentionnais tout à l'heure que pour les groupes nucléaires de 500 mégawatts, nous avons choisi un taux de panne qui variait de 12.5 p.c. à 9 p.c, selon que c'était la première année ou la cinquième année de service. D'après les renseignements que nous avons, ce sont des hypothèses que nous pourrions appeler probables, ou les plus probables. Si nous avions employé des hypothèses pessimistes, que nous n'avons pas voulu employer, nous avons ici des taux de panne pour des groupes de 500 mégawatts qui pourraient aller aussi haut que 20 p.c. pour la première année et 11 p.c. pour les années à venir lorsque les groupes ont vieilli, ou bien où on a enlevé les pépins.

M. JORON: M. Cahill, si vous me permettez? Comment cela se compare-t-il à des expériences récentes disons comme Pickering? Dans les faits, il se produit quoi à Pickering?

M. CAHILL: L'expérience de Pickering est peut-être une expérience... Les statistiques doivent être faites à partir d'un nombre d'échantillons beaucoup plus considérables que l'expérience qui provient d'une seule centrale. L'expérience de Pickering, actuellement, semble bonne et nous nous en réjouissons, mais nous ne pouvons pas faire de prévisions d'équipement de production, à partir d'un seul échantillon. Il faut se baser sur un nombre plus considérable d'échantillons.

M. JORON: Cela donnerait un taux de panne de quoi à Pickering?

M. CAHILL: Le taux de panne, c'est le pourcentage du temps que le groupe ne peut pas être employé, parce qu'il est en panne, ce n'est pas prévu. On n'a pas ici le taux de panne...

M. JORON: J'imagine, pendant qu'on traite des pannes, que le taux que vous avez projeté découle forcément partiellement de l'expérience passée.

M. CAHILL: Cela découle de l'expérience de sociétés qui emploient du nucléaire et qui nous ont fourni les statistiques provenant de leur expérience, lesquelles statistiques ne sont pas nécessairement les statistiques qui sont publiées soit dans les revues ou soit devant le Federal Power Commission aux Etats-Unis, pour différentes raisons. Je pourrais citer l'exemple d'une société semblable à la nôtre qui avait préconisé un certain taux de panne pour son équipement et qui prévoyait avoir, avec les équipements de production prévus dont on avait décidé la construction, un surplus d'environ 1 million de kilowatts pour l'année 1978. Et à la lumière des taux de panne qu'elle a eu avec le thermique et ce qu'elle prévoit avoir avec le nucléaire, a changé le taux de panne qu'ellle emploie pour la prévision maintenant et qui prévoit un déficit de 2 millions de kilowatts pour l'année 1978. Ce qui était un surplus de 1 million de kilowatts est devenu un déficit de 2 millions de kilowatts lorsqu'on a changé le taux de panne. C'est une société qui a de l'expérience avec ce genre d'équipement.

M. JORON: Les taux de panne qui ont été bâtis à la lumière d'expériences passées essentiellement, ce sont des expériences qui ont dû se dérouler dans les années soixante...

M. CAHILL: C'est-à-dire que l'expérience s'est surtout détériorée lorsqu'on a augmenté la grosseur des groupes.

M. JORON: Quand on prend ça et qu'on l'envoie, on le projette dans les années quatre-vingts, est-ce que ça vous paraît bien fondé que, sans présumer d'aucun progrès technologique dans une période...

M. CAHILL: Nous pouvons espérer que ça s'améliore mais, lorsque nous faisons des prévisions, il faut toujours nous baser sur ce qui nous semble raisonnablement sûr. Comme je vous le mentionnais tout à l'heure, nous avons employé ce que nous appelons des hypothèses probables. Nous n'avons pas employé des hypothèses pessimistes que certains emploient ou doivent employer.

M. PERREAULT: Question additionnelle,

M. le Président. Est-ce que le taux de panne que vous mentionnez s'établit après la mise en service commerciale?

M. CAHILL: Oui.

M. PERREAULT: Et non pas le temps...

M. CAHILL: Nous ne tenons pas compte du fait que souvent, des groupes, à cause des difficultés que nous avons, sont retardés d'un an ou deux. Raison de plus pour avoir une réserve additionnelle pour tenir compte des délais dans la mise en route commerciale de ces groupes-là. Nous n'en avons pas tenu compte dans nos prévisions.

M. PERREAULT: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.

M. JORON: Je pense que M. Cahill s'apprêtait à répondre à d'autres questions.

M. LE PRESIDENT: Très bien.

M. CAHILL: C'est-à-dire que j'avais terminé ma réponse; je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Revenez un peu sur vos questions, je pense que nous en avons peut-être oublié.

M. JORON: Oui, c'est ça. Il y en avait deux, sur le taux d'utilisation par exemple. Est-ce un taux — vous m'avez répondu cet après-midi — uniforme de 80 p.c. dès la première année ou sur une moyenne de 50 ans?

M. CAHILL: C'est-à-dire que la disponibilité donne le facteur d'utilisation que nous pouvons avoir avec une centrale. La disponibilité, c'est à peu près la différence entre 100 p.c. et le pourcentage de temps qu'il faut dépenser pour entretenir l'équipement sur une base routinière et le taux de panne. Alors, les premières années, il se peut que le facteur d'utilisation soit de moins que 80 p.c, si on a beaucoup de pépins.

M. JORON: Alors, dans la normalisation qui a été faite, quel était ce taux pour les premières années, celui qui a été utilisé?

M. CAHILL: Je devrais peut-être demander à M. Charuk, qui a fait ce travail, de répondre à votre question.

M. LE PRESIDENT: M. Charuk.

M. CHARUK: Excusez-moi, M. le député, pourriez-vous répéter votre question, s'il vous plaît?

M. JORON: Cet après-midi, on nous avait répondu que le facteur d'utilisation prévu, quand on a normalisé les coûts, — je parle du nucléaire canadien — était de 80 p.c. Est-ce qu'il était de 80 p.c. sur la moyenne des 50 années ou était-il différent dans les premières années de départ?

M. CHARUK: Dans l'étude de normalisation, pour les coûts d'investissements unitaires et les frais d'exploitation, il n'y a pas lieu de parler de facteur d'utilisation. Mais lorsque nous avons donné des coûts pour des projets qui fournissaient de l'énergie de base, effectivement, le facteur d'utilisation était de 80 p.c. sur toute la période d'horizon.

M. JORON: A partir de la première année?' M. CHARUK: Oui.

M. JORON: Bon! Là, nous parlons évidemment de choses qui entrent en service dans les années quatre-vingts. Ce taux-là découle-t-il d'expériences —quand on fait une projection, ça découle toujours en partie d'une expérience historique — qui ont été réalisées aux Etats-Unis?

M. CHARUK: Pour comparer les projets de base, nous utilisons un facteur d'utilisation de 80 p.c. Nous pourrions comparer les projets de base avec des facteurs d'utilisation de 75 p.c. ou de 85 p.c. C'est une base de comparaison. Habituellement, pour de la base, nous utilisons 80 p.c.

M. JORON: Dans le cas du nucléaire canadien.

M. CHARUK: Dans les trois cas, nous avons utilisé 80 p.c.

M. JORON: Dans les trois cas. Ce taux de 80 p.c. vous apparaît-il bien fondé, encore une fois, à la lumière de l'expérience de Pickering qui, dès le départ, était de 83 p.c? Et si l'on présume encore une fois que dix ans s'écoulent ou presque d'ici les années quatre-vingts, peut-on penser que le taux restera autour de 80 p.c. dans ces années-là?

M. CHARUK: Je répète encore une fois que, pour fins de comparaison, nous utilisons un facteur d'utilisation de 80 p.c. Il est possible que, dans le futur, des centrales nucléaires puissent avoir des facteurs d'utilisation plus élevés que celui-là.

Mais jusqu'à l'heure présente, l'expérience en général ne démontre pas des facteurs d'utilisation aussi élevés.

M. JORON: C'est ce que je voulais vous demander précisément. C'est que cela découle de l'expérience, le choix de ce taux de 80 p.c. tient compte de l'expérience. Cette expérience a été acquise en grande partie à l'extérieur du

Canada, dans un type de dossiers différent, pour ce qui est du cas du nucléaire, puisque la majeure partie des expériences ont eu lieu aux Etats-Unis.

M. PERREAULT: M. Charuk, est-ce qu'à ce moment-ci, on ne mélange pas un peu le facteur de charge avec le facteur d'utilisation?

M. CHARUK: Non, cela n'a rien à voir avec le facteur de charge.

M. PERREAULT: Parce que, si on retourne dans l'hydraulique, ce ne sera pas le facteur d'utilisation, disponibilité d'unité hydraulique, je pense bien qu'on est en haut de 83 p.c.

M. JORON: On sait ça, c'est 90 p.c... M. PERREAULT: On se fie à 80 p.c.

M. JORON: ... c'est ça qu'on veut savoir, à partir de quoi on a utilisé 80 p.c. pour le nucléaire canadien alors que les expériences actuelles montrent que, dès le départ, on est à 83 p.c.

M. CHARUK: Si nous avions utilisé un facteur d'utilisation plus élevé pour fins de comparaison, nécessairement les frais d'investissements auraient été répartis sur un plus grand nombre de kilowatts-heures. Nous avons...

M. JORON: Ce qui se serait évidemment traduit par une différence dans le coût de revient en mills au bout de la ligne.

M. CHARUK: Oui. Maintenant, du point de vue de l'exploitation d'un réseau, il est rare que toutes les centrales puissent opérer à un facteur d'utilisation de 100 p.c. L'expérience démontre, aux Etats-Unis et, en tout cas, en ce qui concerne les centrales thermiques traditionnelles, que ces centrales n'ont pas atteint, à ce jour, un facteur d'utilisation de 80 p.c. Certaines d'entre elles peut-être, mais, dans l'ensemble, c'est non, et pour fins de comparaison, encore une fois, pour produire de l'énergie de base, nous utilisons 80 p.c.

M. JORON: Sur la question que je posais il y a un moment, quant au facteur transport dans le programme 20, nucléaire canadien, il y a évidemment, pour arriver à un coût en mills au bout de la ligne, un facteur lignes de transmission, un facteur transport qui est inclus là-dedans. D présumait que les centrales devaient être à une certaine distance des points de consommation. Où est-ce que les sites... où prévoyait-on les sites pour arriver à ce coût de transport, ce coût des lignes de transmission?

M. CHARUK: Monsieur Fournier pourra répondre à cette question.

M. FOURNIER: Si je comprends bien, vous demandez les endroits où l'on prévoyait installer des centrales nucléaires. C'est ça?

C'est une question assez difficile à répondre si on parle d'un programme massif de centrales nucléaires. J'entends par programme massif, 8 millions ou 9 millions de kilowatts, mais pour un programme plus faible, à l'heure actuelle, le site le mieux connu est la région de la centrale de Gentilly où on a déjà prévu 2 millions à 3 millions de kilowatts comme installation ultime.

Je mentionne bien 2 millions à 3 millions parce que, dépendant de la taille des groupes, la puissance totale qui pourrait y être installée est de cet ordre.

M. JORON: Dans le programme...

M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, dans le même sens, quel pourcentage de l'ensemble de votre demande se retrouve dans la région métropolitaine de Montréal dans le moment, par rapport aux usines?

M. FOURNIER: Pour répondre à cette question-là, j'aimerais parler de façon un peu plus globale pour situer les charges de l'Hydro-Québec dans la province : 90 p.c. des charges de l'Hydro-Québec, dans la province, sont situées dans la bande étroite du sud de la province, une bande qui va de l'Ontario, disons à Montmagny et Sainte-Anne-de-Beaupré, ou à peu près; 90 p.c. de nos charges sont dans cette région, dont approximativement un tiers dans le Montréal métropolitain, un tiers dans le sud du fleuve et un tiers au nord du fleuve.

Ceci se rattache très bien à la question précédente, si vous me permettez de continuer, parce que les deux vont de pair. Le fait que nous avons un tiers de nos charges au sud du fleuve Saint-Laurent et que toutes nos centrales hydrauliques sont au nord, il est intéressant de choisir des emplacements de centrales aussi bien thermiques que nucléaires au sud du fleuve. Donc, Gentilly est très bien située pour alimenter le tiers des charges qui sont dans les Cantons de l'Est et au sud du fleuve.

M. JORON: Je reviens à ma question originale. Dans le programme 20 qui était entièrement nucléaire dans les quelque 30 tableaux alternatifs qui sont suggérés, je reviens à la question du coût de transport, vous nous avez parlé de Gentilly pour quelque chose comme de 2,000,000 à 3,000,000 de kilowatts mais dans le programme 20 qui était essentiellement nucléaire et qui est de beaucoup supérieur à ce que les autres étaient, je veux savoir si l'incidence du coût de transport, dans l'établissement du coût en mills, est issue du programme 20.

M. FOURNIER: Pour les coûts de transport, nous avons supposé un coût moyen de dollars par kVA ne sachant pas exactement où seraient les centrales. C'est un coût moyen qui est de $17 par kVA de transport.

M. SAINT-PIERRE: Le programme 20 tel que décrit, implique quand même 20 centrales nucléaires; ce sont 20 centrales nucléaires dont une bonne partie d'entre elles auraient dû être situées très près des grands centres pour justement utiliser le potentiel nucléaire canadien au maximum. Je ne parle pas...

M. FOURNIER: Exactement. Probablement le long du fleuve parce que c'est le seul endroit où il y a de l'eau de refroidissement, de Québec jusqu'à la frontière américaine. Je ne peux pas vous donner d'emplacement exact parce qu'il y a beaucoup d'études à faire, surtout au point de vue sismique pour déterminer où on peut mettre des centrales nucléaires.

M. SAINT-PIERRE: C'est un point qui m'intéresse. Nous savons que Montréal sur le plan sismique est quand même dans une des zones, un taux deux, qui cause assez de préoccupation. Est-ce que c'est une question qui a été examinée? D'après les experts, quelle pourrait être l'incidence de ce taux élevé sur le plan sismique par rapport à la construction de 22 centrales nucléaires près de la faille Logan.

M. FOURNIER: J'aimerais mentionner que ce sont plutôt 22 groupes, ce qui voudrait dire peut-être trois centrales de 3,000,000 ou 4,000,000 chacune...

M. SAINT-PIERRE: Autrement dit, trois emplacements.

M. FOURNIER: Trois emplacements, oui. Ce que vous mentionnez est la raison pour laquelle Gentilly avait été choisie pour la centrale qui existe à l'heure actuelle.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous devez être le long du fleuve Saint-Laurent à cause des problèmes de pollution thermique et de débits d'eau? Mais est-ce que le fait, sur le plan sismique, du danger que cela représente versus le réacteur, il n'y avait pas de problème?

M. FOURNIER: Comme vous le savez, l'emplacement est sujet à l'approbation du gouvernement fédéral. Je ne pourrai pas me prononcer à savoir s'il accepterait ou non une centrale à un endroit donné spécifique.

M. SAINT-PIERRE: Aux Etats-Unis, le long de la côte ouest, où l'on retrouve la même zone sismique, près de San Francisco et autres endroits, est-ce que c'est un facteur qui a été soulevé? Est-ce qu'on est obligé de s'éloigner de certaines zones, sur le plan sismique, à cause des dangers de radiation?

M. CAHILL: En ce qui concerne les centrales le long du fleuve, les centrales nucléaires doivent reposer sur le roc. On doit alors avoir des fondations qui reposent sur le roc et on doit connaître évidemment la valeur des tremblements de terre que nous pouvons nous attendre d'avoir, les valeurs d'accélération. Et en fonction de ces valeurs, la Commission de l'énergie atomique spécifie certaines précautions du point de vue "design" qu'il faut prendre. Evidemment, cela peut impliquer alors des dépenses additionnelles.

M. BOYD: M. le Président, il y aurait sans doute une autre façon de répondre à la question de M. Joron. On sait que dans le cas du programme 20, le coût des lignes, des postes représente un demi mills tandis que pour le programme 37, le coût des lignes et des postes représente 2.56 mills.

Pour le programme 37 le coût de lignes et postes est cinq fois plus grand que celui que nous avons employé. Donc, vous avez là votre réponse. On ne peut pas vous spécifier exactement, sauf pour Gentilly. Les autres, on espère que ce serait entre, peut-être, Montréal et Québec, dans les environs, mais les emplacements précis devront être choisis avec beaucoup de précaution pour toutes sortes de raisons. L'effet des lignes et postes est cinq fois plus grand dans un programme que dans l'autre.

M. JORON: Et pourtant, la distance, elle, est dix fois plus grande puisque, disons, si on parle de Gentilly, on est à l'intérieur d'un rayon de 60 milles de Montréal, alors que La Grande est à 600 milles.

M. BOYD: Evidemment, il ne faut pas oublier que nous parlons des lignes et postes. Pour les postes, qu'ils soient près de Montréal ou qu'ils soient loin de Montréal, c'est le même coût.

M. JORON: Ça va.

M. BOYD : Pour les lignes, ce sont des grosses lignes, quand même, qu'il faut pour transporter ces quantités d'énergie. Je ne peux pas vous dire autre chose. Ce sont les coûts que nous avons dû mettre dans les programmes et c'est pour des emplacements le plus près possible des charges.

M. SAINT-PIERRE: Dans ces deux cas-là, M. Boyd, vous avez une expérience très récente et très pertinente de la construction de lignes à haute tension dans des régions éloignées comme celle qui vient de Churchill Falls, et celles qui impliquent des constructions dans des centres plus urbains. Ce n'est pas un secteur où vous avez procédé par hypothèse; vous avez procédé à partir de...

M. BOYD: S'il y a quelque chose où l'on est certain de nos chiffres, ce sont les lignes et postes. D'ailleurs, d'après les résultats de nos estimations et de nos coûts réalisés, c'est là que nous sommes les meilleurs.

M. RUSSELL: Est-ce que ces coûts que vous avez utilisés pour faire vos calculs dépassent ceux que vous avez actuellement sur les lignes existantes ou s'ils sont moindres?

M. BOYD: Ce sont les mêmes coûts que l'on emploie, mais escaladés, pour tenir compte des coûts qui vont augmenter; escaladés de 4 p.c. comme tout le reste. Maintenant, pour les lignes et postes, on emploie, je crois, 2 p.c. par année d'"escalation".

M. JORON: Est-ce que c'est basé sur du 735 kV?

M. BOYD: C'est du 735, oui.

M. SAINT-PIERRE: Si vous aviez du 1,100 kV, monsieur... Je me rappelle qu'il y a un an, la possibilité de 1,100 kilowatts avait été évoquée. A supposer que sur le plan technologique les 1,100 — et je crois comprendre qu'à l'Institut de recherche il se fait des essais, vous l'avez mentionné dans votre rapport annuel — étaient possibles sur le programme 37, est-ce qu'effectivement, ça voudrait dire une diminution de coûts?

M. CAHILL: Pas d'après les résultats préliminaires de nos études. Les coûts seraient à peu près équivalents, si nous employons des lignes à 735,000 volts avec compensation en série, c'est-à-dire des lignes dans lesquelles nous incluons des condensateurs en série avec la ligne, pour faire croire à la ligne qu'électriquement elle est plus courte qu'elle n'est longue physiquement.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Gouin.

M. JORON: M. le Président, une dernière question, peut-être, à ce stade-ci sur ces sujets-là serait la suisvante. Dans le programme 20 (nucléaire canadien), on a évidemment prévu, pour normaliser le coût en mills sur une vie de 50 ans, un rééquipement au milieu de la période ou à peu près, puisqu'on prévoit qu'une centrale nucléaire a une vie de 20 à 25 ans. Les chiffres, pour arriver à la normalisation qui a été faite, impliquent-ils un rééquipement dans exactement le même type de centrale que celle du début?

M. CAHILL: Oui. A toutes fins pratiques.

M. JORON: Avec le développement actuel des "fast breeders" entre autres, sans parler des progrès technologiques qui, je le pense bien, en tout cas, sont susceptibles de se produire sur une période de trente ans, est-ce qu'il vous apparaît normal de prévoir pour trente ans plus tard un rééquipement dans exactement la même sorte de centrale? Et quel aurait été l'effet, par exemple, si dans les calculs de normalisation on avait tenu compte que les "fast breeders", comme à peu près tous les experts le prévoient, vont probablement être en opération dans une dizaine d'années... Ils le seront très certainement alors dans quarante ans, puisqu'on parle à peu près de l'année 2,010 comme point de rééquipement d'une centrale nucléaire.

Alors, présumant que... Si les calculs avaient été faits en tenant compte de la question des "fast breeders" qui ont une incidence considérable sur l'approvisionnement en matières premières — parce que le "fast breeder", en fait, se nourrit par lui-même, à toutes fins pratiques, le surgénérateur...

Quelle aurait été, si un tel calcul avait été fait, l'indidence sur le coût final en mills de la même période de 50 ans d'un programme nucléaire?

M. CAHILL: Nous faisons des prévisions, dans ce genre-là des coûts. H faut généralement s'appuyer sur les prévisions qui sont les plus sûres, si vous voulez. Evidemment, il est possible que de nouvelles sources, de nouvelles méthodes plus économiques soient développées d'ici 20 ans, mais on ne peut pas faire de prévisions sur des possibilités; il faut faire des prévisions sur ce qui est le plus sûr possible. Rien ne nous dit que les coûts que nous obtiendrons avec les "fast breeders" seront plus économiques que ceux que nous obtenons avec les centrales actuelles.

Un autre aspect, c'est que les coûts de réinvestissement, lorsqu'ils sont actualisés, n'ont tout de même pas une importance capitale — même s'ils ont une certaine importance — à moins qu'il n'y ait une différence assez importante dans les coûts d'investissement. Une valeur actualisée à 10 p.c... Une dépense qui est faite dans 30 ans est relativement faible en valeur actuelle.

M. BOYD: Pour concrétiser ce que dit M. Cahill: sur le programme 20 où il y a $3,700 millions de valeurs actualisées pour le programme complet, il y a $408 millions pour le réinvestissement actualisé, moins $26 millions de valeurs résiduelles, ce qui fait environ $380 millions sur $3,735 millions. Alors, le réinvestissement a une faible valeur ou une faible importance. Et même si on enlevait ces $380 millions des $3,730 millions, on arriverait à un montant supérieur au programme 37 actualisé qui est de $3,161 millions; donc $3,700 millions moins $380 millions. C'est encore supérieur au programme 37. En fait, on pourrait ne pas actualiser le remplacement et vous auriez quand même un programme qui serait plus favorable dans le 37. Pour votre question concernant les surgénérateurs, il est fort probable que dans 30 ans d'ici... D'ailleurs, nous l'avons dit; le docteur Cloutier vous en a parlé. Vous avez le texte du docteur Cloutier qui vous dit que, dans 15 ans, les "fast breeders" ou les surgénérateurs seront d'opération commerciale. Mais, il n'y a absolument personne qui peut dire combien ils

coûteront en investissements. Si vous voulez, on pourrait demander à M. Cloutier de vous en parler davantage.

M. JORON: J'apprécierais cela.

M. LE PRESIDENT: Avant qu'on ne laisse le sujet, le député de Laviolette avait demandé la parole. Est-ce sur le même sujet ou en rapport avec ce qui a été dit?

M. CARPENTIER: Dans votre rapport, M. Cahill, à la page 4, lorsque vous mentionnez les sources d'énergie disponibles, justement après avoir retenu les projets de la Baie James, à la fin du deuxième paragraphe de cette page, vous mentionnez les autres projets hydrauliques de moindre importance. Et, vous mentionnez, à ce stade-là, les projets Outardes-2, Cascade et Champlain sur le bas Saint-Maurice. Est-ce que vous avez également retenu la possibilité de la construction, de l'aménagement du rapide des Coeurs dans le haut Saint-Maurice?

M. CAHILL: ... le rapide du Lièvre, c'est-à-dire que nous allons les réévaluer, mais actuellement, ces projets-là, comme ils produiraient un facteur d'utilisation très faible, de l'ordre de 25 p.c. et que le coût semble élevé, il serait peut-être difficile de les introduire dans notre programme. Nous allons quand même les réévaluer.

M. CARPENTIER: Parce que si j'ai bonne mémoire, déjà des...

M. CAHILL: Des études ont été faites à ce sujet par une société d'ingénieurs-conseils.

M. CARPENTIER: Des débuts de travaux ont été également amorcés à un certain moment; je ne me souviens pas en quelle année exactement.

M. CAHILL: Je ne saurais dire. Cela doit faire un certain temps.

M. BOYD: II se pourrait que les travaux aient été commencés par la compagnie Shawini-gan au moment de la nationalisation...

M. CARPENTIER: La Shawinigan Water & Power.

M. BOYD: ...les travaux ont été arrêtés au moment de la nationalisation et des études ont été refaites. Evidemment, avec les possibilités qu'avait l'Hydro-Québec à ce moment-là de développer d'autres sites beaucoup plus rentables, les autres sites plus rentables ont été développés. Rapide-des-Coeurs et Rapide-du-Lièvre, comme disait M. Cahill, produisent un facteur de charge très bas, c'est presque l'équivalent d'une centrale de pointe. Or, des centrales de pointe, à une grande distance de la charge, ce n'est pas très rentable parce que le coût de transport est trop élevé, c'est ce qui crée le problème de ces centrales. Comme le disait M. Cahill, nous ne disons pas qu'elles ne seront jamais faites; ces centrales sont toujours réévaluées, réestimées. Dès qu'elles deviennent rentables, nous les employons. Mais lorsqu'on peut avoir des centrales de pompage beaucoup plus considérables, tout près de nos grands réseaux et à des prix bien inférieurs, je pense bien qu'on a l'obligation de développer les centrales de pompage pour avoir de la pointe plutôt que des centrales éloignées qui nous coûtent cher.

M. CARPENTIER: Mais considérant les lignes de transport déjà existantes dans cette région-là, est-ce qu'il n'y a vraiment pas avantage à essayer d'exploiter au maximum la rentabilité de cette rivière-là, la rivière Saint-Maurice?

M. BOYD: M. Cahill vous a lu son programme, il y a des augmentations d'installations qu'on se propose de faire sur le bas Saint-Maurice mais je ne crois pas que les lignes que nous avons pourraient prendre plus que cela, sans avoir des modifications pour le transport de cette énergie supplémentaire qui viendrait du haut des rivières. Il y a une limite à ce que ces lignes-là peuvent porter.

M. LE PRESIDENT: Dr Cloutier, vous nous excusez en attendant qu'on pose une couple de questions.

M. SAINT-PIERRE: Simplement deux petites questions reliées au nucléaire avant qu'on en arrive aux surgénérateurs. Je pense que ma question s'adresse à M. Boyd. M. Boyd, un des problèmes de toute cette question-là, — et je pense que vos services avaient raison de dire qu'il y a beaucoup de confusion — c'est que non seulement dans les titres mais même dans les articles publiés ici et là, on peut voir toutes sortes de coûts mentionnés pour le nucléaire et l'hydraulique et des choses semblables. J'en prends un ici qui me frappe dans la Gazette du 16 mai, 1972 c'est assez récent. Un journaliste, Don Murray, pour lequel j'ai beaucoup de respect, n'a pas écrit cela comme cela, je suis certain. Effectivement, je lui en parlais tantôt et il me disait qu'il était allé à des sources. On y dit: "Nuclear power either from the Canadian or the American system will cost between 7 and 9.5 mills depending on the estimates you accept", en même temps que la baie James serait construite, c'est-à-dire "at the end of the decade". Comment peut-on concilier des chiffres que l'on voit comme cela, 7 mills pour le nucléaire et de 7 à 9.5 mills en regard des 14.7 mills que vous nous avez donnés et qui me semblaient quand même articulés sur des études très sérieuses après normalisation et lorsque tout est très bien pesé dans une situation donnée?

M. BOYD: Evidemment, aux chiffres qui sont mentionnés il faut ajouter l'intégration au réseau; il y a les réserves qu'il faut ajouter et il faut ajouter les lignes de transport, les postes; il faut aussi savoir à quel moment ces chiffres sont cités et pour quelle année de mise en service.

M. SAINT-PIERRE: II vous semble impossible que, pour l'énergie, pour les 8,800 mégawatts de la baie James, on puisse parler d'énergie nucléaire intégrée à votre réseau pour 7 à 9 mills?

M. BOYD: D'après les renseignements que nous avons, l'énergie nucléaire qui entrerait en service entre 1972 et 1976 serait d'environ 10 mills.

M. SAINT-PIERRE: Et de 1976 à 1985, ce sont les 14 mills que vous nous avez mentionnés, 14.7 mills.

M. BOYD: L'installation entre dans cette estimation.

M. JORON: Si vous permettez, les chiffres qui sont cités et qui correspondent un peu à ceux que l'on trouve dans le rapport de United Engineers varient quelque part entre 7 et 9 mills.

M. Boyd mentionnait, il y a un moment, qu'il faut rajouter à ça les lignes de transport et le raccordement au réseau. Dans ces études, ces facteurs étaient déjà inclus? Les lignes de transport pour livraison à un point donné.

M. CAHILL: Pas dans le UENC. M. BOYD: Pas dans UENC.

M. JORON: Pas dans UENC.

L'UENC donnait un chiffre de production. Vous avez mentionné l'année de service de mise en service par exemple. Quelle était l'année de mise en service qui était donnée dans le rapport de United Engineers.

M. SAINT-PIERRE: On l'a dans les données de normalisation.

M. CAHILL: C'est ça.

M. JORON: La ligne de transport présumant par exemple que ladite centrale ou le groupe de centrales est dans un rayon, disons, de 60 milles de Montréal, qu'est-ce que ça peut ajouter? Vous avez parlé d'un demi-mills tout à l'heure. On monte de 7 à 7.5 et à l'autre extrême de 9 à 9.5, à ce moment-là.

M. BOYD: Je ne veux pas me dérober à la question. Je crois que M. Cahill, tout à l'heure, a donné trois ou quatre raisons qui expliquaient les différences entre UENC et les chiffres qu'on vous cite.

M. CAHILL: J'ai déjà donné les raisons. Est-ce que vous voulez que je les répète?

M. JORON: D'accord.

M. CAHILL: Voici quelques-unes des raisons qui peuvent expliquer ces différences. Dans le rapport de UENC, le coût des investissements des centrales est fait pour des centrales qui entrent en fonctionnement, entre 1978 et 1980 inclusivement. Dans le cas du programme Hydro-Québec, le coût des investissements des centrales est fait pour des centrales qui sont en service entre 1980 à 1985. Comme il y a un taux d'inflation de 4 p.c. sur les coûts des centrales par année, il faut ajouter un coût d'inflation pour deux à cinq ans dépendant des mises en service de certaines centrales.

M. JORON: M. Cahill, si vous permettez. Si on se situe dans le cadre d'un programme mixte, à ce moment on a le choix de faire entrer les centrales nucléaires avant de faire entrer la balance du programme mixte qui, lui, pourrait être hydraulique. Le facteur que vous venez de mentionner — que je comprends très bien — ne rentrerait pas en ligne de compte, dépendant de quelle partie d'un programme mixte on fait entrer le premier.

M. CAHILL: Comme nous avons mentionné, tout à l'heure, pour l'année 1978, nous n'avons pas besoin d'énergie. C'est pourquoi nous installons des usines de pointe. Pour l'année 1979, en nous servant de la banque d'énergie qui existe au réservoir Manicouagan 5, en abaissant de quelque peu le niveau du réservoir, nous pouvons produire plus d'énergie que durant les années normales à Manicouagan 5 et installer encore des usines de pointe. Repousser à plus tard le procédé d'actualisation, comme on a dit tout à l'heure, a tendance à repousser à plus tard les investissements lourds qui fait que le taux actualisé est plus bas. C'est pour ça que les premières usines nucléaires n'entreront en service qu'en 1980 et non pas en 1978. L'UENC, évidemment, n'a pas tenu compte...

M. JORON: Sur une différence de deux ans, de combien ce seul facteur augmente-t-il le coût?

M. CAHILL: Deux fois quatre, au moins 8 p.c. pour les premières. Puis 85 et 80, peut-être 20 p.c. pour les dernières en ordre de grandeur.

M. JORON: D'accord.

M. LE PRESIDENT: M. Cahill, vous alliez ajouter au sujet d'UENC: n'a pas tenu compte. Puis on a fait une interruption. Voulez-vous continuer votre pensée?

M. CAHILL: Je pense que j'avais terminé ma pensée.

M. LE PRESIDENT: Vous aviez terminé, d'accord.

M. CAHILL: Du moins, si ne n'ai pas terminé, je l'ai oublié. J'aurais d'autres facteurs que je pourrais citer. Est-ce que vous aimeriez que je continue?

Quand je cite des différences comme ça entre UENC et notre programme, je désirerais souligner que nous ne désirons pas critiquer en aucune façon le rapport de UENC. C'est une firme d'ingénieurs-conseils en laquelle nous avons entièrement confiance. Nous leur avons demandé un certain travail qu'ils ont fourni. Mais ce n'était pas un programme d'équipement pour inclure au programme d'équipement Hydro-Québec. C'était un exercice à l'intérieur d'un certain mandat.

Quant aux frais d'exploitation de UENC, le prix du combustible supporte l'inflation — si on peut employer cette expression — de 1978 à 1980, c'est-à-dire pendant trois ans. Dans le cas de notre programme, le combustible supporte l'inflation de 1980 jusqu'à l'an 2037, soit pendant une période de 50 ans. Evidemment, ça se réflète dans le coût final, dans le coût moyen.

M. JORON: M. Cahill, il y aurait là une différence au moment du rééquipement, comme on l'a dit tout à l'heure; si nous étions à l'époque des surgénérateurs à partir de ce moment-là, il y aurait une incidence assez directe sur le coût du combustible.

M. CAHILL: II se pourrait...

M. BOYD: Si vous permettez, M. Cahill, c'est très difficile de faire un programme avec une hypothèse de surgénérateur sur lequel on ne peut fixer aucun prix. H faut quand même oeuvrer avec des chiffres que nous connaissons assez bien et auquels nous ajoutons une augmentation. Il est assez probable que le surgénérateur, lorsqu'il va venir dans quinze ans d'ici, tout ce qui va y entrer aura aussi subi les augmentations au moins de 4 p.c. par année, en plus d'avoir absorbé des frais de recherche.

Le président des Etats-Unis a autorisé des frais de recherche de $3.5 milliards pour développer un surgénérateur. Evidemment, quand le surgénérateur deviendra commercial, ces frais de recherche, quelqu'un va les absorber. Donc, il nous est assez difficile d'élaborer un programme, pour nous, en supposant toutes sortes de choses sur lesquelles on ne peut réellement pas mettre le doigt.

M. SAINT-PIERRE: Vous ne nous le recommandez pas. A $3 milliards pour les frais de recherche, vous ne nous le recommandez pas comme projet collectif?

M. BOYD: Ce que nous préférons, c'est laisser les autres faire cette recherche et en profiter le plus tôt possible.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, lorsqu'on parle de financement des coûts pour le projet 37 que vous nous recommandez, une des questions qui...

M. JORON: M. le Président, pourrions-nous laisser M. Cloutier finir son témoignage?

M. SAINT-PIERRE: J'ai pensé, juste avant les surgénérateurs, comme nous venons de parler de coûts d'investissements...

M. LE PRESIDENT: J'attendais la question.

M. JORON: Parce que la question du financement est fort importante.

M. SAINT-PIERRE: Je ne parle pas du financement du projet, je parle du montant d'argent total de la capitalisation du programme...

M. JORON: Allez-y.

M. LE PRESIDENT: J'attendais justement la question.

M. SAINT-PIERRE: Ma question s'adresse à M. Giroux, c'est le financier à l'Hydro-Québec, plutôt qu'à M. Boyd, mais soyez à l'aise. Souvent, les gens sont un peu inquiets par le projet de la baie James, lorsqu'on fait miroiter des chiffres comme $5.8 milliards pour le programme d'investissement que vous nous avez recommandé. Est-ce que, M. Giroux, vous pourriez nous situer de nouveau ce programme d'investissement que vous recommandez d.e $5.8 milliards, comparativement à ce que vous prévoyez comme chiffre de vente, comme actif, peu importe la base que vous allez utiliser, dans les opérations de fonctionnement de l'Hydro-Québec à cette époque, par rapport au niveau d'emprunt, au niveau de capitalisation qui aurait pu être requis dans les décennies 1950-60 ou 1960-70?

Vous comprenez le sens de ma question: est-ce que $5.8 milliards, dans le programme d'investissement que vous nous recommandez, compte tenu de vos ventes, de votre actif que vous anticipez dans ces années-là, c'est un effort plus grand, moins grand, ou à peu près égal à ce qu'on a pu faire dans les décennies 1950 ou 1960?

M. GIROUX: Je crois que nous avons des chiffres de base qui sont assez éloquents sur cette question-là. Si on se référait un peu à certains débuts, quand j'ai commencé dans le financement des émissions de la province de Québec, à ce moment-là, nous faisions une émission de la province de $15 millions par année. C'était un fiasco, et l'Hydro empruntait je ne sais pas combien.

Aujourd'hui, je crois que nous avons un programme qui va toucher la province et l'Hydro-Québec de $1 milliards pour cette

année, ou à peu près, et nous ne sommes absolument pas inquiets. Cela vous donne un peu une idée des possibilités d'emprunt. Ce qu'on semble oublier, c'est le programme, comme vous disiez tantôt, si on avait établi le complexe total de Manic-Outardes en 1958, quand les gens de l'Hydro-Québec l'ont commencé, probablement qu'il y aurait eu la même hésitation qu'aujourd'hui s'ils avaient connu l'ampleur de ce programme. Maintenant, je pense que M. Boyd a des chiffres qui sont plus posés sur cette question-là.

Je donnais seulement une explication de l'ampleur des montants d'emprunt.

M. SAINT-PIERRE: Et il ne vous semble pas que, pour faire face à ces besoins de croissance d'énergie, ça va être un effort disproportionné par rapport aux revenus de l'Hydro-Québec, à l'actif de l'Hydro-Québec, par rapport aux ventes annuelles de l'Hydro-Québec à cette période?

M. GIROUX: Non, je crois que dans nos chiffres, tous ces programmes-là sont très bien calculés et ce n'est pas plus de l'aventure que ça.

Naturellement, les montants vont être doublés, vont être plus gros. Il y a cinq ans, six ans, on empruntait peut-être $400 millions et on trouvait ça énorme. D'abord, je ne veux pas amoindrir le travail de ceux qui ont à faire les emprunts, ça reste tout de même un travail énorme mais, à mon sens, j'ai pleinement confiance que ça peut s'accomplir.

M. BOYD: Si vous voulez plus de précisions...

M. SAINT-PIERRE: Oui, j'aimerais ça.

M. BOYD: J'avais déjà préparé, pour mon information, des comparaisons. Si on prend la période 1960 à 1976, vous avez...

M. PERREAULT: Seize ans.

M. BOYD: ... les travaux de Manic-Outardes qui représentent près de $1,900,000,000; pendant cette même période, vous avez les travaux de Churchill et des travaux de centrales et de postes de lignes du côté de la compagnie Churchill, qui étaient quand même garantis par l'Hydro, qui étaient basés sur le contrat de l'Hydro-Québec, qui étaient de $950 millions; vous avez les lignes et postes par l'Hydro-Québec, pour aller chercher cette énergie pendant cette période-là, qui étaient de $500 millions. Cela vous donne, pour la période de seize ans, $3,350,000,000.

Le programme que nous proposons pour les années de construction 1972 à 1985-86, vous avez là quatorze ans: un programme de $7,200,000,000, c'est-à-dire un peu plus que le double, légèrement plus que le double; par contre, les revenus de l'Hydro durant la période 1960 à 1976, on peut en faire une moyenne d'environ $390 millions, et, durant la période 1972 à 1986, une moyenne de $1,500,000,000. On peut estimer que les revenus auront un peu plus que triplé pour des investissements un peu plus que doublés.

C'est peut-être une autre façon d'exprimer la même chose que M. Giroux, mais avec les programmes.

M. SAINT-PIERRE: C'est donc dire que, dans une période de temps où, si on prend des moyennes d'une année pondérée, par rapport à une situation de 1960 à 1976, donc l'année moyenne 1968 par rapport à une année moyenne de 1979 ou 1980, les revenus triplent alors que les dépenses, les besoins de capitalisation, les besoins de capitaux ne font que doubler, à peu près, pour une période moyenne.

M. BOYD: Oui. Evidemment. On peut avoir de grosses surprises parce que, durant la période de 1972 à 1986, nos dépenses d'exploitation vont avoir augmenté également. C'était tout simplement pour indiquer que, lorsqu'on regarde un programme de $7,200,000,000, on se dit: C'est fantastique.

Le même portrait se serait présenté à nous si on avait fait cet examen en 1960.

M. RUSSELL: M. le Président, est-ce qu'on pourrait nous informer si les calculs de revenus sont basés sur le taux actuel de l'électricité?

M. BOYD: On estime, à partir de 1972 à 1986, comme on l'a dit l'an dernier, une augmentation moyenne de 4 p.c. par année. C'est pour des fins de calculs seulement. M. Giroux avait annoncé ça dans sa présentation de l'an dernier. Peu importe la méthode de production, pour répondre à la demande des années à venir, nous devons faire face à des augmentations de tarif.

M. LE PRESIDENT: M. Dozois.

M. DOZOIS: M. le Président, vous comprendrez que l'expérience que j'ai eue dans la vie ne me permet pas tellement de parler des techniques de l'électricité, mais j'aimerais peut-être, à ce moment-ci, émettre une opinion sur le financement d'un tel programme, domaine dans lequel j'ai eu une certaine expérience.

M. LE PRESIDENT: Comme ancien ministre des Finances de la province.

M. DOZOIS: Pardon?

M. LE PRESIDENT: Comme ancien ministre des Finances de la province.

M. DOZOIS: Disons que j'ai eu cette expérience et une expérience semblable dans une autre juridiction municipale. En étudiant tout

ce problème financier, ce qui m'est venu à l'esprit, tout particulièrement, c'est le fait que l'Hydro-Québec, si nous voulons rencontrer les besoins de la population, doit réaliser un programme de 14,000,000 à 15,000,000 de kilowatts entre les années 1978 et 1985. On est porté, dans certains milieux — je n'accuse personne mais il y a des gens qui m'ont posé la question — à faire des comparaisons en se disant: Vous voulez dépenser $7, $8 ou $10 milliards pour la baie James et il y a des gens qui croient qu'on pourrait ne rien dépenser. Ce ne sont pas $7 milliards ou rien. C'est le coût pour aménager 14,000,000 ou 15,000,000 de kilowatts. Or, les programmes que nos experts ont mis au point varient entre $6,500 millions et $7,200 millions sauf pour les programmes thermiques, qui sont à peu près de 50 p.c. comme coût des programmes nucléaires ou hydrauliques.

Or, que l'on finance sur une période d'ici 1985, à mon avis, $6,500 millions ou $6,700 millions en nucléaire ou $7,200 millions dans un programme mixte comme celui que nous préconisons, j'ai confiance et je crois, comme M. Giroux, que c'est une chose possible. Comme M. Giroux l'a signalé, il y a quelques années, la province empruntait $15 ou $20 millions et cela paraissait considérable. J'ai déjà eu dans le passé à m'effaroucher de certains emprunts de $200 ou $300 millions et j'en avais fait part publiquement en certaines occasions. Plus tard, personnellement, j'ai dû autoriser, comme vous le savez, des emprunts qui doublaient ces montants qui m'avaient déjà effarouché. Or, je constate que c'est une courbe qui se continue et j'ai été agréablement surpris, sinon renversé, de voir que et la province et l'Hydro, au cours de l'année 1971, avaient atteint un taux d'emprunt de $900 millions et ont un programme pour l'année en cours de $1 milliard pour les deux organismes. Ce sont des chiffres qui, il y a à peine deux ou trois ans, ne nous paraissaient pas, du moins à moi, possibles comme programme d'emprunts. Aujourd'hui, cela se réalise. On allait sur le marché et on se trouvait audacieux de lancer des emprunts de $50 millions. Aujourd'hui, et l'Hydro et la province réussissent à faire des emprunts de l'ordre de $100 millions et même plus.

Or, je crois que, tenant compte de l'autofinancement qui sera possible grâce à l'augmentation du chiffre d'affaires de l'Hydro d'ici 1985 — il y a des projections — qui faciliteraient un autofinancement plus considérable, grâce aux pouvoirs d'emprunts que nous avons et à la bonne réputation d'emprunteur que l'Hydro-Québec possède, nous pouvons faire face à un tel programme d'emprunts.

Mais, encore une fois, comme administrateur, j'avais à prendre une décision et je l'ai prise en considérant qu'il fallait trouver les moyens d'obtenir des capitaux pour fournir à la population du Québec des installations de l'ordre de 15,000,000 de kilowatts.

M. SAINT-PIERRE: La dette totale du Québec en proportion au cours de ces années, en pourcentage du produit provincial brut, est à peu près toujours au même point. Ce qui est peut-être plus surprenant, c'est que la dette per capita du Québec qui, en 1965, était une des plus élevées au Canada parmi les provinces, est maintenant — et c'est dommage que le ministre des Finances ne soit pas ici — une des plus basses, je pense que c'est la septième ou huitième province. Il y a six provinces qui ont une dette per capita plus élevée que celle du Québec à une période où pourtant nous avons dû accumuler les emprunts.

M. LE PRESIDENT: Le député de Gouin.

M. JORON: Puisque le ministre de l'Industrie et du commerce nous a ouvert la porte au sujet du financement, même si ça laisse en suspens M. Cloutier à qui on a demandé de nous parler des surgénérateurs, — s'il nous excuse d'ouvrir un tant soit peu la parenthèse — au sujet du financement, M. Dozois vient de nous donner son témoignage comme Pavait fait M. Giroux, un peu plus tôt, dans son exposé quant aux capacités d'emprunter ces sommes. M. Giroux avait fait dans son exposé une condition expresse au succès possible de la réalisation de ce programme d'emprunt, soit que PHydro-Québec ait la maîtrise et la gérance totale des travaux. Cela m'apparaft un point essentiel. Vous vous rappellerez que l'année dernière on en avait fait, au moment de la discussion sur le bill 50, un des thèmes majeurs pendant ce débat. Il nous était toujours apparu que l'on allait de pair avec l'autre. C'est ce qu'a confirmé cette année M. Giroux dans son exposé.

Je pense qu'il nous serait difficile de terminer à un moment ou à un autre les séances de cette commission sans que ce point soit une fois pour toutes définitivement établi.

Nous avons entendu le témoignage de M. Giroux à ce sujet. La recommandation est claire, nette, précise et formelle. Je regrette que le ministre des Finances ou que le premier ministre ne soit pas présent, mais peut-être que le ministre de l'Industrie et du Commerce, au nom du gouvernement, pourra régler cette question qui est restée en suspens et qui est très importante puisque d'elle dépend, d'après M. Giroux et bien d'autres, le succès de cette opération. Là est toute la question du financement. Je ne sais pas si le ministre, à ce stade, est prêt à s'engager, au nom du gouvernement, à assurer publiquement l'Hydro-Québec de la gérance et de la mainmise totale sur les travaux de façon, justement, à permettre, à rendre plus facile en tout cas, ce financement.

M. LE PRESIDENT: Sans vouloir interrompre, comme je l'ai dit au début de la séance de cet après-midi, lorsqu'il s'agit de gestion ou de management, je voudrais qu'on remette à plus tard cette question. Epuisons d'abord tout ce

qui concerne l'équipement. On a permis ou autorisé, on a commenté très librement ici, pour quelques minutes, la question de financement. En ce qui concerne la gérance et l'administration, je voudrais considérer cela comme un autre chapitre où tous ceux présents auront le droit de faire leurs commentaires, de faire leurs suggestions tant qu'ils le voudront. N'en déplaise, M. le député, à ce jugement ou à cette opinion, pour le moment, nous allons passer outre sur ce débat ou sur cette discussion qu'il pourrait y avoir sur l'administration et entendre M. Cloutier qui attend avec beaucoup de patience, de pouvoir répondre aux commentaires que vous avez demandés ou aux questions que vous avez posées au début.

M. JORON: M. le Président, je n'ai pas d'objection à ce que la question soit mise en suspens. Je voudrais tout simplement signaler qu'on devra y répondre avant que les séances de cette commission soient terminées.

M. LE PRESIDENT: Ce sera peut-être au chapitre 4 ou 5 du livre qu'on ouvre présentement.

M. PERREAULT: M. le Président, j'aurais une question additionnelle à poser à M. Boyd.

M. LE PRESIDENT: Pas sur l'administration. D'accord!

M. PERREAULT: Sur les chiffres que vous avez mentionnés tout à l'heure, M. Boyd. Lorsque nous avons décidé d'entreprendre le complexe Manic-Outardes, d'après ces chiffres, le ratio aurait été pour le revenu-investissement de 6.1 p.c. Il semble que ce serait à peu près le même pour le projet La Grande et votre projet d'investissement actuel. Un rapport 1-6 à peu près?

M. BOYD: Je m'excuse, je n'ai pas...

M. PERREAULT: Je disais qu'au moment où on a entrepris le complexe Manic-Outardes qui coûtera $1,900,000, vous avez mentionné comme revenus $360 millions en moyenne.

M. BOYD: Comparé à cette période?

M. PERREAULT: Oui.

M. BOYD: C'est $490 millions.

M. PERREAULT: Le ratio, qu'on a établi à ce moment entre les revenus et les investissements pour cette période, est-il à peu près semblable pour la période qui vient?

M. BOYD: Cela se peut. C'est un chiffre que je n'ai pas considéré. Si vous l'avez fait.

M. PERREAULT: Je n'ai pas les chiffres.

M. BOYD: Je pense qu'il est assez difficile de faire la comparaison que vous faites. Je pense qu'il faudrait inclure l'énergie qui nous vient de Churchill pendant cette période.

M. PERREAULT: Oui.

M. BOYD: Je n'ai pas fait cette relation. Je m'excuse.

M. JORON: M. le Président, si vous me permettez, sans entrer dans des questions de gérance, ma question concerne le financement, comme tout à l'heure.

M. JORON: Non, ce n'était pas mon intention. Tout à l'heure, on a parlé des tarifs, on prévoyait une augmentation annuelle des tarifs de 4 p.c., Je voulais demander comment cela se comparait au taux moyen d'augmentation des tarifs des dix dernières années à titre d'exemple? Est-ce que cela fait accélérer la courbe d'augmentation ou si cela la maintient sur le même niveau?

M. BOYD: On a eu deux augmentations. Je dirais que, pour la période, ce n'est certainement pas une augmentation plus forte. Si vous permettez, j'aimerais mieux obtenir les renseignements précis avant de répondre à votre question...

M. JORON: Je pense que...

M. SAINT-PIERRE: Pendant que vous regardez en arrière, est-ce qu'on peut vous demander comment ce 4 p.c. se compare avec les prévisions qui pourraient avoir été émises par des compagnies d'utilité publiques aux Etats-Unis? Est-ce qu'il y a des croissances de tarif?

M. BOYD: Je vais vous demander une minute. Peut-être que M. Cloutier répondra à ces deux questions-là. On a des statistiques du Federal Power Commission qui viennent juste de paraître. Je vais les trouver et on pourra répondre.

M. LE PRESIDENT: Alors, on pourra faire directement ce qu'on n'a pas pu faire indirectement. M. Cloutier.

M. CLOUTIER: M. le Président, je pense qu'il apparaît à ce point-ci intéressant de faire un peu le point sur les réacteurs surgénérateurs dont on prévoit l'utilisation commerciale peut-être d'ici à quinze ans. Je crois qu'il faut d'abord rappeler la raison pour laquelle on pousse le développement des surgénérateurs. La raison principale est que ces types de réacteurs-là vont permettre d'utiliser de façon beaucoup plus efficace le combustible uranium qu'on utilise actuellement dans les réacteurs nucléaires traditionnels. C'est la raison principale qui amène actuellement les pays à pousser des

recherches de développement en vue d'utiliser ces réacteurs-là, de façon à ne pas épuiser les réserves d'uranium qui existent à travers le monde. Je pense que c'est la première raison, la plus importante, qui pousse ces types de développement. En même temps, on espère également pouvoir, étant donné l'utilisation plus efficace de combustible, arriver à un coût de production d'énergie, disons, plus faible. Mais il faut bien se rendre compte qu'il s'agit d'un problème de technologie très poussé et qui fait appel à des développements qui ne sont pas encore complètement établis. Je pense qu'il faut bien situer le problème ici. Quand on parle de surgénérateur, le degré d'incertitude d'utilisation est beaucoup plus grand que celui des réacteurs actuels traditionnels et, naturellement, encore plus grand que celui de la génération par l'hydraulique. Je pense qu'il faudra arriver à un surgénérateur. Je pense que c'est une question absolument inévitable si on veut pouvoir répondre aux besoins dans trente ans. Je pense que c'est très important à établir. C'est une technologie sur laquelle on met des efforts très grands dans certains pays, entre autres, aux Etats-Unis actuellement, et non seulement là, mais dans d'autres pays industrialisé du monde qui ont des besoins très grands du côté de l'énergie nucléaire. Je pense que c'est assez intéressant de noter le fait qu'on pense actuellement — il y a naturellement un degré d'incertitude — que, dans environ quinze ans, ces types de réacteurs seront disponibles commercialement. Je pense que, dans le contexte des programmes dont on a discuté aujourd'hui, je veux mettre en lumière le fait que ce sera peut-être intéressant, dans quinze ans, de penser que ce type de réacteurs sera celui dont on pourra faire un choix pour le Québec en particulier. Egalement, je pense qu'il est important de mentionner que, même à cette époque-là, il faudra continuer à faire des réacteurs nucléaires traditionnels parce que le réacteur nucléaire traditionnel, on en a besoin pour produire du combustible pour le surgénérateur, pour démarrer les surgénérateurs. Donc, on prévoit encore, jusqu'au moins en 1990, devoir continuer à utiliser et à développer les réacteurs nucléaires du type qui existe présentement.

Je ne voudrais pas m'étendre sur le type de surgénérateur, je ne sais pas s'il y a des questions que les députés voudraient poser.

M. JORON: Ma seule question d'ordre général. Vous venez de nous livrer votre témoignage, je vous demanderais votre opinion personnelle. Je sais que si je vous demandais si ce sera 14, 15 ou 17 ans là vous seriez embêté de répondre. Mais si on parle de 40 ans, si on parle par exemple de l'année 2010, quelle serait votre opinion ou votre avis juridique?

M. CLOUTIER: Je voudrais bien, si je fais un énoncé ici, que ce soit bien compris que ce sont des prévisions ou des prédictions basées sur les connaissances que nous avons actuellement et qui vont naturellement changer avec les années à venir. Je crois qu'après l'an 2000 on aura possiblement une nouvelle source d'énergie nucléaire qui sera la fusion à un combustible qui est disponible de façon quasi inépuisable et partout au monde, c'est-à-dire qu'à partir de l'eau on pourra brûler l'eau pour produire de l'énergie nucléaire, cela revient un peu à cela.

M. JORON: Par la fusion plutôt que la fission.

M. CLOUTIER: Par la fusion plutôt que la fission. Alors que, dans la fission, on utilise de l'uranium, dans la fusion, on utilise comme combustible un isotope de l'hydrogène qu'on retrouve dans l'eau et qui contient une quantité énorme d'énergie latente.

M. JORON: Je comprends qu'on est encore un peu plus loin.

M. CLOUTIER: On est très loin ici. Pour faire une distinction ici, il faut dire que la fusion est encore à l'état de la recherche; sur les "breeders", on est encore à l'état de développement de la recherche et du développement. Sur les réacteurs conventionnels, on est à l'échelle de la commercialisation, mais au début de l'échelle de commercialisation. Je pense qu'il y a encore des améliorations considérables à apporter aux réacteurs déjà existants.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je peux vous demander aussi un jugement personnel? Compte tenu de l'état des surgénérateurs que vous connaissez bien en matière de recherche, d'un côté, et compte tenu, d'un autre côté, que, pour faire face à des besoins d'un réseau qu'on connaît très bien, une décision doit être prise très bientôt, croyez-vous que face au programme 37, tel que suggéré, l'existence ou la possibilité dans 40 ans peu importe les surgénérateurs est telle qu'on devrait retarder la décision? Ou est-ce que, d'après vous, cela n'a finalement aucun effet direct dans les décisions qu'on doit prendre ces jours-ci?

M. CLOUTIER: Pour répondre à votre question, je crois que ceci n'a pas d'influence sur les décisions qu'il y a à prendre aujourd'hui. C'est mon opinion et c'est d'ailleurs, je pense, dans le texte que j'ai mis ici. Je crois qu'on a fait circuler, qu'on a déposé le texte que j'avais préparé, et je pense que c'est important de noter que pour nous ici, en particulier au Québec, si on fait une planification à long terme de l'énergie, on sait qu'on aura besoin de l'énergie et on sait non seulement qu'on aura besoin de l'énergie mais qu'on aura besoin de nouveaux moyens d'énergie. Je pense que ce qui est important dans le moment, en parallèle avec le développement des ressources hydrauliques qu'on a, c'est de se préparer à faire une utilisation maximum des moyens futurs de

production d'énergie. Et là, cela veut dire que d'ici quinze ans il faudra qu'au point de vue de la recherche, qu'au point de vue du développement et au point de vue industriel, on se prépare non seulement à fournir cette énergie-là mais avoir une industrie qui puisse profiter de ces nouveaux marchés.

M. LE PRESIDENT: M. DeGuise.

M. DEGUISE: Si vous permettez, M. le Président, je crois que le problème des surgénérateurs est venu en discussion lorsque l'on causait des frais de réinvestissement après l'expiration de la période de 30 ans. Or, à la Commission de l'énergie atomique du Canada, c'est une question qui s'est posée parce que, comme vous le savez, on y a des propositions d'affaire à soumettre à d'autres pays et un peu comme ici, l'économie du nucléaire est remise en question. Or, sur la question du réinvestissement après 30 ans, la Commission de l'énergie atomique a pris la position suivante: Dans 30 ans, cela représente trois décennies, et l'expérience prouve que la puissance unitaire des groupes thermiques double à peu près à chaque décennie. Alors, dans 30 ans, y dit-on, il est logique de penser que les groupes à ce moment-là auront une puissance huit fois supérieures à ce qui existe aujourd'hui. Si on prend des groupes de 500 mégawatts, il est pensable d'avoir des groupes de 4,000 mégawatts.

En fait, pour confirmer ça, il paraît qu'un manufacturier allemand se dit maintenant prêt à fabriquer des groupes de 4,000 mégawatts. Partant de cette hypothèse, que des groupes soient disponibles, l'expérience ou les calculs indiquent en général que le coût d'un groupe varie comme les deux tiers de la puissance, ce qui indiquerait que des groupes-là, par unité de kilowatt, coûteraient à peu près 40 p.c. des prix actuels. Puis, si on actualise, l'énergie atomique, de fait, même à 3 p.c. Si on actualise à 3 p.c. ce coût de 40 p.c. dans 30 ans, on arrive à des frais de réinvestissement de 20 p.c. de nos coûts ordinaires. Alors, je crois que si vous regardez nos programmes, nos gens ont mis même moins que 20 p.c. et puis nous, nous actualisons à 10 p.c. S'ils avaient actualisé à 10 p.c. ils auraient peut-être été justifiés de mettre 5 p.c. ou 10 p.c. des coûts initiaux.

M. PERREAULT: M. Cloutier, j'aurais une question à vous poser. M. Laurent Amyot, directeur du génie nucléaire à la polytechnique mentionnait récemment que les quantités connues d'uranium seraient épuisées bien avant l'arrivée du surgénérateur et que, de ce fait on pouvait assister à partir de 1980 à des prix qui augmenteraient beaucoup plus vite que ceux qui ont été préconisés comme une augmentation escaladée du coût du combustible. J'aimerais connaître votre point de vue là-dessus.

M. CLOUTIER: Je n'ai pas vu la déclaration. ni le texte de M. Amyot. Je crois que les chiffres que j'essaie de me rappeler et que j'ai vus aux Etats-Unis, je ne crois pas que... il faut faire un peu attention, il faut voir le coût du combustible de l'uranium en fonction de sa disponibilité. Naturellement, si on utilise l'uranium qu'on peut obtenir à un coût très bas actuellement, qui est facilement disponible, ce coût sera naturellement plus bas que si on vient à utiliser des réserves plus éloignées ou moins concentrées en uranium, alors le coût devra naturellement augmenter.

Si je me rappelle assez bien les données que j'ai vues à ce sujet, je crois qu'aux Etats-Unis, on peut satisfaire la demande certainement pour les 30 prochaines années. Je pense qu'au Canada, on n'a pas de problème au point de vue réserve d'uranium. Il a été établi qu'on pourrait, avec le système canadien actuel en utilisant l'uranium, les dépôts d'uranium connus, répondre aux besoins du Canada pour des centaines d'années. Je pense qu'il faut bien s'en rendre compte. Mais si on regarde à l'échelle mondiale et c'est là que le problème est très critique, c'est que le Canada est un des rares pays qui a des ressources très vastes, non seulement au point de vue hydraulique, mais également au point de vue uranium. Alors que les Etats-Unis qui ont également des ressources très vastes, en font une utilisation également beaucoup plus grande que chez nous et ils prévoient, je crois, si je me rappelle les chiffres, je pense que je pourrais peut-être pouvoir apporter des données plus précises sur les réserves américaines, avec leur système actuel, pouvoir répondre aux besoins pour 30 à 50 années à venir. Mais ceci est très risqué, il faut se voir dans un contexte qui évolue, un contexte dynamique. Et pour les Américains, il est absolument impératif, d'ici 15 ans, qu'ils solutionnent leurs problèmes d'utilisation du combustible uranium beaucoup plus efficacement. Actuellement on utilise à peu près 1 p.c. seulement de l'uranium utilisé comme combustible, alors qu'avec un surgénérateur, on espère pouvoir atteindre jusqu'à 60 p.c. d'utilisation, ce qui est un facteur très considérable, qui pourrait amener des réserves d'uranium pour des milliers d'années. Le facteur est très important.

M. JORON: M. le Président, sur ce que viennent de dire précédemment M. Cloutier et M. DeGuise, il y avait un point très très important. Quand vous avez souligné qu'au moment où on rééquiperait, dans une trentaine d'années, les centrales nucléaires que l'on conçoit aujourd'hui de l'ordre de grandeur de 500 ou de 600 mégawatts, que dans 30 ans, évidemment, la possibilité serait de les rééquiper par des unités beaucoup plus grosses, vous avez mentionné que ça peut aller jusqu'à 4,000 mégawatts, puisqu'on en parle déjà 30 ans auparavant... Dans un cas semblable, vous avez mentionné qu'il y a une incidence considérable sur les coûts de réinvestissement à ce moment-là.

On parle toujours de la nucléaire conventionnelle, à ce moment-là. Vous avez dit: De l'ordre de 40 p.c. Evidemment, dans la normalisation qui a été faite dans l'étude et dans la projection du coût en mills qu'un tel programme donne au bout de la ligne, on n'a pas tenu compte de ce facteur. Est-ce exact?

M. DEGUISE: J'ai mentionné que, d'après l'hypothèse émise par l'AECL, on était justifié de mettre un coût de 20 p.c. du coût initial, comme coût de réinvestissement seulement. Je crois et je faisais remarquer que le chiffre que nous avons mis dans nos tableaux est même inférieur à 20 p.c, en tenant compte de toutes les hypothèses favorables émises par l'AECL.

Vous remarquez qu'eux-mêmes ne font pas allusion au surgénérateur à ce moment-là, pour les mêmes raisons que donnait M. Cloutier. Il faut un "mixte" de surgénérateur et de réacteur ordinaire à ce moment-là.

M. BOYD: J'aimerais répéter ce que j'ai dit précédemment, c'est que l'effet du réinvestissement n'est pas considérable sur le programme actualisé. Il est de $380 millions. Si l'on soustrait du coût actualisé du programme nucléaire canadien $380 millions on dit qu'on oublie le réinvestissement — cela donne $3,355 millions comparativement à $3,161 millions pour le programme que nous avons choisi. Donc, même si nous émettons l'hypothèse qu'il n'y aura pas de réinvestissement, nous sommes encore dans un programme plus favorable.

Je serai en mesure de répondre aux questions de tarifs, M. le Président, si...

M. LE PRESIDENT: Le député de Jacques-Cartier.

M. JORON: M. Boyd devait répondre à ma question.

M. SAINT-GERMAIN: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Ah bon! Sur la question de tarif. Alors, M. le député, si vous voulez attendre un instant. Allez-y.

M. BOYD: Les renseignements que nous avons ici, c'est un rapport qui vient juste de sortir, émis par le Federal Power Commission, qui cite — et ça couvre toutes les utilités américaines — qu'en 1968, le coût moyen de l'électricité était de 1.54 cent. En 1990, ils estiment que le coût moyen de l'électricité aux Etats-Unis sera de 3.48 cents. Donc, ce sera plus que doublé.

Evidemment, nous n'avons pas les mêmes périodes' d'année, mais quand même, pour essayer de répondre à votre question, si on parle de la période de 1972 à 1986, c'est une période 14 ans, à 4 p.c. par année, nos tarifs auraient augmenté de... On multiplierait par 1.73, comparativement à l'autre chiffre qui fait plus que doubler aux Etats-Unis, pour une période un peu plus longue.

Dans le passé, nous avons eu une augmentation en 1967 et une autre en 1970; il n'y en avait jamais eu avant, à 1'Hydro-Québec. Mais, ces deux augmentations représentent environ 4 p.c. par année sur cette période.

M. JORON: A partir de 1967? M. BOYD: Oui.

M. JORON: Et si nous reculons pour faire une moyenne de dix ans en 1962, il faut le diminuer... La moyenne sur dix ans, par exemple, aurait été, à ce moment-là, de...

M. GAUVREAU: II y a eu des baisses de tarifs après la nationalisation.

M. JORON: Pardon?

M. GAUVREAU: II y a eu une baisse de tarifs après la nationalisation.

M. JORON: En fait, je vais poser la question autrement. Depuis la nationalisation de l'hydro-électricité, quelle a été l'évolution globale des tarifs sur une base annuelle?

M. BOYD: C'est assez difficile de répondre rapidement à ça. Premièrement, au moment de la nationalisation, il y a eu une légère diminution des tarifs dans certains endroits et...

M. JORON: Oui.

M. BOYD: Nous avions quand même, à ce moment-là, dans certains coins, des tarifs très élevés, même après ces légères diminutions. Cela a permis de durer un peu plus longtemps, sans augmentation de tarifs. Il y a eu des normalisations qui se sont faites, mais finalement en 1967, nous avons été obligés de faire une augmentation de tarifs assez importante, environ 10 p.c, et en 1970, environ 7 p.c.

Il est question qu'on en ait une bientôt, mais pour faire la relation exacte de dix ans, la période de nationalisation complique les choses assez gravement pour m'empêcher de donner une réponse exacte à votre question.

M. GARNEAU: M. Boyd, le rapport sur lequel vous vous appuyez pour parler d'augmentation des tarifs, est-ce que vous croyez que c'est un chiffre magique, un chiffre miracle ou si vous pensez qu'il s'appuie sur un critère fondamental?

M. BOYD: Je pourrais répondre à cela, mais peut-être que M. Lemieux pourrait le faire mieux que moi. C'est en fonction des emprunts et du financement qu'il faudra faire. M. Lemieux, voulez-vous préciser?

M. GIROUX: Vous voulez parler de la couverture du taux d'intérêt?

M. GARNEAU: Oui.

M. GIROUX: Ce sont des normes qui sont établies aux Etats-Unis.

M. GARNEAU: Oui, je sais, mais c'est parce que les emprunts de l'Hydro étant garantis par la province, je me demande si la nécessité se pose de la même façon que lorsque ce sont des entreprises privées qui vont sur le marché d'un emprunt.

M. GIROUX: Bien, exactement de la même façon parce que, quand il y a des compagnies qui avaient de très bon bilans... Aux Etats-Unis, on est considéré comme une corporation.

M. GARNEAU: Oui.

M. GIROUX: Et les titres de la province de Québec sont considérés comme ceux des corporations aussi. On compare toujours mis en rapport avec les corporations qui existent. Et une de ces compagnies-là a baissé en bas du rapport ordinaire de 1.25 et elle a été changée de classification. A ce moment-là, ça lui a coûté 1/4, 1/2 de plus d'intérêt par année.

M. LEMIEUX: Encore plus remarquable, il y a des compagnies d'électricité aux Etats-Unis qui gagnaient leurs intérêts cinq fois, elles ont baissé à trois fois et elles ont vu baisser leur "rating" en conséquence. L'Hydro a maintenu qu'une fois et quart suffit à cause de la garantie. Vous voyez, une couverture d'une fois et quart est très basse comparée avec une norme de trois ou quatre fois que font beaucoup d'autres compagnies. On est chanceux de pouvoir arriver à des "ratings" satisfaisants avec une fois et quart.

M. GARNEAU: M. le Président, les autres questions que je voudrais poser en regard du problème qu'il soulève se rattachent aux questions qu'a soulevé le chef de l'Opposition officielle cet après-midi et aussi aux possibilités de financement suivant une forme ou l'autre de gestion du projet de la baie James. Je ne sais pas s'il y a d'autres... Je ne voudrais pas... J'ai dû m'absenter parce que, de l'autre côté aussi il y a un débat, et il fallait que j'aille faire un petit discours là-bas. J'y suis allé et je suis revenu. Je ne sais pas si...

M. LE PRESIDENT: II y en a d'autres...

M. GARNEAU: Je ne voudrais pas interrompre la discussion...

M. LE PRESIDENT: ... par contre qui sont dans la même situation.

M. JORON: Je peux signaler au ministre des Finances que le président nous a indiqué qu'il préférait que cette question-là, puisqu'elle est reliée à la gestion et à l'administration, soit reportée après...

M. LE PRESIDENT: A un autre chapitre.

M. GARNEAU: D'accord, M. le Président. Je m'excuse si j'ai fait une intrusion dans vos directives.

M. LE PRESIDENT: J'attendais toujours pour voir où on allait en venir.

M. GARNEAU: C'est étroitement relié, parce que je comprends que, dans l'exposé que vous avez fait, vous prévoyez le financement via l'Hydro-Québec. J'aurais aimé avoir vos opinions et celles de M. Nadeau aussi sur les autres formes de financement, comment ça pourrait affecter l'augmentation des tarifs à l'Hydro-Québec, dans un sens ou dans l'autre.

M. LE PRESIDENT: L'ordre que j'essaie de maintenir...

M. GIROUX: Je pense bien qu'il y a un point où c'est facile de répondre, mais je ne sais pas si ce serait une objection, M. le Président. L'augmentation des tarifs est toujours basée sur le coût de l'électricité. Dans l'exposé que l'Hydro-Québec a clairement fait, c'est que, si on se rend responsable des coûts et on a à faire les demandes, on veut contrôler le coût de l'électricité. C'est le raisonnement de base, M. Garneau.

M. GARNEAU: Oui, ce contrôle peut s'exprimer de différentes façons. Mais c'est un autre sujet qui fera l'objet de questions tout à l'heure, parce que nous pourrions prendre l'exemple de Churchill Falls. J'aime autant attendre pour ne pas interrompre la discussion et revenir...

M. LE PRESIDENT: Le plan de progression est tout simple. Cela a été la présentation. Une fois que nous avons eu la présentation, qu'on essaie d'établir clairement le programme d'équipement. Une fois que le programme d'équipement sera établi clairement, nous entrerons par la suite dans plus de détails en ce qui concerne le financement, la gestion, l'administration et ce secteur. Ce sera le troisième chapitre du travail de la commission.

M. GARNEAU: Est-ce que je peux poser une question sur le programme d'équipement, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il est encore temps.

M. GARNEAU: Oui?

M. LE PRESIDENT: ... malgré que les interlocuteurs ont un peu changé.

M. GARNEAU: Dans le programme d'équipement, vous avez fait référence aux réserves pompées et en particulier à Saint-Joachim, au bout de l'île d'Orléans. Je ne sais pas lequel des spécialistes a parlé du problème de l'eau salée qui créait certaines difficultés. C'est M. DeGui-se?

M. DEGUISE: J'en ai parlé, oui.

M. GARNEAU: Si j'ai bien compris, le problème se pose quand vous repompez l'eau du fleuve à la hauteur où se trouverait le projet. Il y a de l'eau avec une certaine teneur en sel qui donne une certaine corrosion dans l'équipement que vous utilisez. Dans les turbines?

M. DEGUISE: C'est un des problèmes de l'eau salée. La corrosion de tout l'équipement métallique, depuis les grilles, les prises d'eau, les turbines, les conduites.

M. GARNEAU: En dehors du problème de corrosion, est-ce que le projet de Saint-Joachim pourrait causer quelques problèmes, par exemple, au point de vue écologique? Nous savons que c'est un endroit où il y a beaucoup d'oiseaux migrateurs qui vont là. Est-ce que cela aurait un effet?

M. DEGUISE: Il y a déjà eu des débuts de discussion avec le gouvernement fédéral, parce que je pense qu'il s'agit des oies...

M. GARNEAU: Oui, des oies blanches.

M. DEGUISE: II y a des précautions à prendre durant la construction et après la mise en service.

M. GARNEAU: Si, dans le développement, dans l'aménagement de toute cette région de Québec, il y avait possibilité de trouver une solution au problème de la teneur en sel de l'eau que vous devez pomper, est-ce que les problèmes que vous rencontrez seraient beaucoup plus facilement résolus?

M. DEGUISE: Si la solution n'est pas coûteuse, elle serait certainement accueillie.

M. GARNEAU: Elle pourrait ne pas être coûteuse pour l'Hydro. Cela n'affecterait pas les tarifs. Est-ce le seul problème que vous avez actuellement? Ou y en a-t-il d'autres?

M. DEGUISE: Actuellement, il y a beaucoup d'autres problèmes d'ordre technique qui sont solvables et qui ne sont pas spéciaux à Saint-Joachim et qu'on retrouve dans toutes les centrales pompées. Mais particulièrement pour le site de Saint- Joachim, il y a l'eau salée, il y a les possibilités des effets de l'eau dans les réservoirs au niveau supérieur, s'il y avait infiltration, etc. Il y a peut-être des problèmes de digues dus à des variations de niveau considérables dans les réservoirs.

M. GARNEAU: Toutes choses étant égales, supposons que les problèmes disparaîtraient. A quel moment, dans votre programmation, voyez-vous l'arrivée de cette centrale pompée pour les besoins du réseau?

M.nEGUISE: Selon les prix, il y aurait des possibilités pour 1978. Je dois émettre une réticence tout de suite. Si c'était possible de construire la centrale, un dernier examen par notre personnel technique indique que, même si tous les problèmes étaient résolus, il est pratiquement impossible d'arriver pour 1978. Il faudrait viser 1979.

M. GARNEAU: Combien de temps doit durer cette période de construction?

M. DEGUISE: Sept ans, si on commençait...

M. GARNEAU: Si la décision était prise aujourd'hui, cela ne serait pas...

M. DEGUISE: Si la décision était prise aujourd'hui, il n'est pas possible, apparemment, d'être prêt pour 1978. On ne peut certainement pas le garantir.

M. LE PRESIDENT: II s'agit ici, je pense — et vous reconnaîtrez le problème — de déterminer si c'est poisson ou fruit de mer.

Alors, il y a d'autres questions, je pense, qui doivent venir à ce moment-ci en ce qui concerne l'écologie. Est-ce du domaine de l'équipement ou est-ce du domaine de l'administration? Je me pose la question. Je permets à ce moment-ci au député de Jacques-Cartier de m'interroger. Cette question va suivre un problème écologique qui a été soulevé par le ministre des Finances et je pense qu'on ne pêchera pas trop. S'il y a d'autres questions au point de vue écologique, posez-les.

M. PERREAULT: M. le Président, je pourrai revenir à l'équipement après?

M. LE PRESIDENT: Bien, considérons l'écologie comme partie de l'équipement. On résoudra le problème, posez vos questions.

M. SAINT-GERMAIN: J'aurais aimé, M. le Président, demander au Dr Cloutier s'il considérait personnellement que les problèmes de pollution occasionnés par la production d'énergie en partant de l'uranium ont été résolus à sa satisfaction.

M. GIROUX: C'est-à-dire les problèmes de pollution?

M. SAINT-GERMAIN: C'est ça.

M. GIROUX: Actuellement, on n'a pas eu de plaintes de problèmes de pollution avec la station que nous avons.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce qu'en général, aux Etats-Unis, lorsqu'on se sert de réacteurs, on considère que les problèmes de pollution sont résolus, les problèmes de radiation?

M. GIROUX: Non, je crois qu'il y a une différence énorme entre les normes de sécurité du système canadien et du système américain. C'est pourquoi notre système canadien est plus dispendieux, il exige une plus grande sécurité, des normes de sécurité beaucoup plus élevées.

M. SAINT-GERMAIN: Est-ce que vous croyez que ces normes de sécurité pour les citoyens sont au maximum et qu'il n'y a aucun danger?

M. GIROUX: Bien, je crois qu'il y a des gens beaucoup plus qualifiés en cette chose-là, comme le Dr Cloutier ou le Dr Boulet qui pourraient répondre — ou M. DeGuise — sur les normes de sécurité.

M. DEGUISE: Vous parlez toujours de pollution nucléaire, pas de pollution de...

M. SAINT-GERMAIN: C'est ça.

M. DEGUISE: Du côté pollution nucléaire, le système canadien présente certains avantages, je crois, sur le système américain en ce sens que d'abord le combustible nucléaire est dans une première enveloppe métallique et qu'ensuite le liquide, l'eau lourde, qui sert de réfrigérant est dans une deuxième enveloppe métallique. Il y a une gaine extérieure qui protège et enfin il y a l'enceinte du réacteur; il y a réellement quatre compartiments, si vous voulez, ou quatre obstructions à la fuite des particules nucléaires, des particules radioactives. Il faudrait un accident absolument majeur. L'Atomic Energy Control Board, avant de donner une autorisation de procéder, considère la possibilité de deux accidents simultanés les plus graves, soit la perforation ou la rupture d'une des grosses conduites qui véhiculent l'eau lourde et en même temps une fissure de l'enveloppe nucléaire du combustible et que le réacteur accélère rapidement. Les dispositifs de prévention et de sécurité prévoient deux accidents simultanés extrêmes et les calculs statistiques mathématiques indiquent que ça peut arriver une fois peut-être dans un million; les normes sont excessivement sévères. Du côté du personnel qui travaille dans la centrale, évidemment, il y a des précautions à prendre et nous les prenons. Il y a tout un service médical avec des appareils de détection extrêmement poussés.

Les employés sont soumis à des examens réguliers. Les instruments sont vérifiés pour savoir s'ils sont devenus radioactifs. Il y a un contrôle extrêmement serré surtout pour le personnel. Mais à l'extérieur les dangers sont... Peut-être que le docteur Cloutier pourrait donner des précisions...

M. CLOUTIER: C'est très juste ce que M. DeGuise vient de dire. Il y a tout de même un point qu'il faut noter. Je crains toujours, lorsqu'on parle de ce système, que l'on ne parle que des avantages et qu'on tende à cacher certains désavantages. Il faut être réellement très franc et voir les choses en face.

Comme je l'ai expliqué dans le texte, il y a certains dangers aux réacteurs nucléaires. Je pense qu'ils sont là. Je crois également qu'il existe des moyens techniques de prévenir tout danger à l'environnement.

Il faut réellement voir l'équilibre qui a été établi ici dès le départ dans le développement des réacteurs nucléaires. Comme le dit M. DeGuise, la conception du réacteur canadien est telle que, présentement, c'est le réacteur le plus sûr au monde au point de vue de sa conception. Il a une conception très différente. Il y a certains désavantages au point de vue de radioactivité. Etant donné qu'on utilise de l'eau lourde, il y a une certaine partie de l'eau lourde qui a une production de tricium, c'est-à-dire un élément de l'eau lourde qui est convertie en un élément plus lourd de l'hydrogène qui fait partie de l'eau et qui est radioactif. On a réussi à Chalk River à contrôler ceci. Je pense qu'on a réussi à contrôler le manipulement du tricium qui est produit dans l'eau lourde de façon très sécuritaire.

M. SAINT-GERMAIN: Relativement à la sécurité des employés, est-ce que vous croyez que les employés qui travaillent près de ces réacteurs pendant des années ont actuellement une protection maximum, où il n'y a pour eux aucun danger?

M. CLOUTIER: Au point de vue protection au niveau radioactivité, les gens qui ont manipulé dans les réacteurs, si on s'en tient aux normes qui sont établies par les agences, en particulier par l'agence canadienne sur l'énergie nucléaire, sur le contrôle de l'énergie nucléaire, le niveau d'activité qui est prescrit est plus faible, ne dépasse pas le niveau de radioactivité de l'environnement normal en l'absence de réacteurs. C'est-à-dire que partout dans l'environnement des radiations cosmiques de très haute énergie, on en est bombardé continuellement. Le niveau de radiation que l'on admet, pour les gens qui travaillent autour des centrales, correspond, ne dépasse pas essentiellement le niveau de ce qu'on appelle "background", le bruit de fond des radiations, ou très peu.

Je ne pense pas, si on suit les normes qui ont

été prescrites, qu'on puisse considérer qu'il y a un danger, que les gens qui sont soumis à un degré de radioactivité plus élevé que la plupart des autres personnes qui ont à véhiculer partout ailleurs soient en danger.

M. SAINT-GERMAIN: II y a certainement des employés qui travaillent avec ces réacteurs ou près de ces réacteurs depuis un certain nombre d'années. Les médecins n'ont jamais découvert chez ces employés aucun indice, aucun symptôme qui laisserait croire qu'ils ont physiquement été détériorés par leur travail?

M. DEGUISE: Si vous permettez, j'ai quelques notes d'une conférence qui était donnée par M. Gray, le président de l'Atomic Energy of Canada, où il était question pour des employés du danger d'être exposés à des radiations.

Il y a un tableau ici qui, par exemple,indique que le personnel médical qui travaille dans les rayon-x absorbe à peu près 900 ou 9,000 fois plus de radiation que le personnel affecté aux centrales nucléaires. La même chose pour les retombées nucléaires qui proviennent des explosions de bombes qui se font périodiquement ici et là et donnent à la population — ce qu'ils appellent les "rems" — un degré d'exposition à la radio-activité qui est de l'ordre de 400 ou 500 fois ce qu'un employé peut prendre normalement. Evidemment, s'il y a un accident dans une centrale nucléaire, c'est une autre affaire, mais lorsque la centrale fonctionne normalement, la dose à laquelle est soumis l'employé est infiniment faible. Ce à quoi les gens pensent toujours, ce sont les cas de leucémie ou des cas de cancer provoqués par une radiation trop forte.

M. LE PRESIDENT: M. DeGuise, vous m'excuserez s'il vous plaît tout ce que vous venez de dire est très intéressant je ne voudrais pas être obligé à un moment donné d'ici une minute ou deux de vous interrompre. Nous voulons ajou-ner à 10 h 45 jusqu'à jeudi prochain, 4 hres. Il y avait une question sur l'équipement que le député de l'Assomption voulait poser. Nous reviendrons, si vous le voulez, sur cette question et je pense qu'avec le consentement de la commission, vous aurez droit de parole en premier lieu, jeudi à 4 hres, sur les questions écologiques et sur les questions de radiation, etc. Je crains énormément que vos commentaires amèneront d'autres questions, avec nos excuses au député de Jacques-Cartier, qui pourra continuer ses questions jeudi prochain.

M. le député de l'Assomption, une question, on me dit que la réponse c'est oui ou non, alors c'est possible.

M. PERREAULT: M. le Président, ma question s'adresse à M. Boyd ou M. Giroux, le schème de développement proposé pour La Grande, est-ce qu'il est le même qui avait été proposé dans le rapport de Rousseau, Warren, l'an dernier, au point de vue emplacement, ainsi de suite?

M. DEGUISE: Je dirai oui essentiellement. Seulement, il y a probablement plus de variantes possibles qui nous sont signalées maintenant, qui pouvaient être optimisées, qu'il y en avait il y a un an.

M. PERREAULT: Est-ce qu'il y avait quatre emplacements?

M. DEGUISE: Quatre centrales.

M. JORON: Est-ce que c'est le même?

M. DEGUISE: Je voudrais revérifier ce qui a été donné l'an dernier avant de vous répondre.

M. JORON: Merci.

M. LE PRESIDENT: Nous allons terminer sur ces paroles très sages.

Ajournement jeudi 4 h ici à la même salle. Merci.

(Fin de la séance à 22 h 45)

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