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Commission permanente des Richesses naturelles
Société d'aménagement de la baie
James
Séance du jeudi 25 mai 1972
(Seize heures dix minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
M. LACROIX: M. Bourassa va remplacer M. Arsenault; M. Saint-Pierre va
remplacer M. Mailloux; M. Bienvenue va remplacer M. Massé.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres changements pour les autres
partis? Un instant s'il vous plaît.
M. SIMARD (Témiscouata): M. Armand Russell, député
de Shefford va remplacer M. Loubier.
M. LE PRESIDENT: M. Loubier.
M. SIMARD (Témiscouata): M. Roy va remplacer M.
Tétrault.
M. LE PRESIDENT: M. Roy, député de Beauce va remplacer M.
Tétrault. M. Joron, qui remplacez-vous?
M. JORON: M. Lessard.
M. LE PRESIDENT: M. Lessard. Le rapporteur de la commission est M.
Carpentier.
De nouveau, bienvenue à notre commission. Après une
semaine de vacances, on devrait avoir bonne voix pour faire part, à tous
ces gens rassemblés, de tout ce qu'ils veulent savoir au sujet de ce
projet. Avant de donner la parole au président de la Corporation de
développement de la baie James, je dois dire où nous en sommes
dans nos travaux. D'abord, je ferai une brève récapitulation. Il
y a eu les commentaires sur les introductions qui ont été faites
de part et d'autre. Nous avons commencé et quasi achevé la
question de l'équipement.
Je comprends qu'il y a d'autres questions, mais pour autant que je
sache, à ce moment-ci, on doit terminer la discussion relative au
programme d'équipement. Nous passerons ensuite à
l'administration. Une fois que nous aurons épuisé ce sujet,
autant que possible, nous passerons â l'ordre de financement des travaux.
Je crois, pour autant que je sois renseigné, que la documentation voulue
et nécessaire a été déposée.
Pour le moment, avec le consentement des membres de la commission, M.
Nadeau, le président de la Corporation de développement de la
baie James, m'a demandé de prendre la parole pour faire une mise au
point et présenter un commentaire dès le début. M. Nadeau,
si vous voulez procéder.
Direction du projet
M. NADEAU: M. le Président, MM. les membres de la commission.
Voulant nous conformer à vos instructions, nous avons
évité de parler de management, et nous n'en parlerons que
brièvement pour faire une légère mise au point.
Nous voulons, toutefois, faire part à cette commission de nos
vues à ce sujet. Ce qui suit ne doit nullement être
considéré comme un ultimatum ou une condition expresse à
la réalisation du projet. Il s'agit purement et simplement de
recommandations.
Nous reconnaissons que la société est un organisme
paragouvernemental dont le patron est l'Etat, donc les Québécois.
Nous nous soumettrons aux décisions que prendront les autorités
compétentes.
Voici nos recommandations: Premièrement, que la gérance du
projet soit confiée à l'entreprise privée.
Deuxièmement, que cette entreprise privée soit
québécoise.
Nous considérons que si nos ingénieurs du Québec
sont capables de travailler sur le plan international, ils sont donc assez
compétents pour oeuvrer au Québec. Que la société
d'énergie soit une corporation de contrôle où seraient
intégrés autant d'individus de l'Hydro-Québec que possible
à qui nous reconnaissons une grande compétence dans les domaines
qui leur sont propres. Le nombre ne pourrait être limité que par
les nombreux travaux requis par le programme d'équipement...
M. LE PRESIDENT: Sur un point d'ordre.
M. JORON: M. le Président, je m'aperçois qu'il ne s'agit
pas d'une mise au point, il s'agit d'une déclaration qui concerne
l'administration et la gestion. Je m'étonne que vous veniez de dire il y
a â peine trente secondes que l'on réserve cette
question-là après que la question de l'équipement aura
été épuisée...
M. LE PRESIDENT: C'est simplement pour savoir jusqu'à quel point
on irait.
M. JORON : Je ne veux pas être désagréable à
l'endroit de M. Nadeau, je m'en excuse, mais c'est pour l'ordre et la bonne
marche de nos travaux, car on va peut-être mêler les cartes si on
continue dans cette veine-là.
M. VEILLEUX: Je m'excuse, M. le Président, sur le point d'ordre
soulevé par le député de Gouin, si on retourne en
arrière et on regarde la déclaration du président de
l'Hydro-Québec, il a fait une déclaration sur ce point-là;
personnellement, je ne vois aucun inconvénient à ce que M. Nadeau
fasse la même chose quitte à discuter et de la déclaration
de M. Giroux et de la déclaration de M. Nadeau au moment où vous
le jugerez opportun.
M. LE PRESIDENT: Au point de vue de l'administration, d'ailleurs c'est
ce que j'ai essayé d'expliquer au député de Bourget.
M. VEILLEUX: Que cela n'empêche pas M. Nadeau de faire sa
déclaration quand même.
M. LAURIN: Sur le point d'ordre. J'étais là quand le
président de l'Hydro-Québec a présenté son rapport
et dans ce rapport, il y avait un paragraphe sur cette question de la
gérance. On l'a laissé passer mais, même si c'était
une erreur, errare humanum est, diabolicum perseverare.
M. LE PRESIDENT: Voulez-vous traduire? La présidence ne comprend
pas du tout.
M. LAURIN: Si on a fait une erreur une fois, M. le Président, ce
n'est pas une raison pour refaire la même erreur une deuxième
fois.
M. LE PRESIDENT: Mais il s'agissait du diable, je pense, dans votre
commentaire.
M. LAURIN: S'il est humain d'errer, il est diabolique de
persévérer, M. le Président. Si on a laissé passer
cela une première fois avec tout le toho-bohu qui a pu s'ensuivre, le
désordre dans les questions qu'on a pu poser, je pense que,
conformément aux règles que vous avez émises depuis le
début, il est préférable de ne pas s'engager dans cette
direction-là qui pourrait donner lieu aux mêmes
conséquences une deuxième fois. D'autant plus qu'il n'y a aucun
inconvénient, M. le Président, à entendre cette
déclaration lorsque nous en viendrons à l'aspect du
financement.
M. NADEAU: M. le Président, je considérais ce court
rapport comme un addendum à mon rapport de la semaine dernière.
Sur cette base, j'aimerais pouvoir continuer.
M. VEILLEUX: M. le Président, ça nous permettrait aussi
d'avoir, au journal des Débats, une copie de la déclaration de M.
Nadeau. Et quand viendra le temps de discuter du financement, on pourra partir
d'un document. Je verrais d'un bon oeil que M. Nadeau poursuive.
M. LAURIN: La décision appartient au président.
M. VEILLEUX: Moi, je suggérerais que M. Nadeau poursuive.
M. LAURIN: Nous nous opposons, pour le moment.
M. VEILLEUX: Alors, passons au vote, M. le Président.
M. SAINT-PIERRE: Je n'ai pas de position particulière. Est-ce
qu'on peut demander au président, M. Nadeau, pour quelle raison il
ajoute cet addendum aujourd 'hui?
M. NADEAU: Pour les raisons qui ont été mentionnées
par monsieur. C'est que dans le discours de M. Giroux, il en a
été question, alors que j'ai dû faire sauter un paragraphe
que j'aimerais énoncer aujourd'hui.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que c'est ce paragraphe-là que vous aviez
prévu?
M. NADEAU: Sensiblement.
M. LE PRESIDENT: Vous en avez pour combien de temps?
M. NADEAU: Cela va durer deux minutes, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il serait encore conforme à l'ordre,
que ayant entendu le paragraphe supplémentaire en addendum à la
déclaration de M. Nadeau du début ou de l'entrée, nous
puissions entendre cette commission, quitte à ne pas faire de discussion
ou de débat sur cette question-là, au moment présent.
C'est dire que nous allons terminer avec l'équipement. Je demanderai aux
membres de la commission de bien prendre note de ces déclarations. Si un
texte peut être distribué afin qu'on puisse puiser plus
profondément dans ce qui aura été dit, qu'on revienne sur
le sujet lors de l'étude des problèmes administratifs. C'est
strictement et purement de la courtoisie en ce qui me concerne comme
président. Quant à nous, les membres de la commission, nous
pouvons diriger nos travaux. Mais, je pense que lorsqu'il s'agit de gens qui
veulent informer la commission, il faut peut-être avoir une espèce
de largesse d'esprit qui nous permette d'absorber certains commentaires,
même en dehors du texte ou en dehors du programme, quitte à y
revenir ensuite. Mais, je demanderais à M. Nadeau, surtout, qu'il soit
présent à un moment, plus tard, où il s'agira de revenir
sur ses commentaires. Donc, si vous voulez procéder. J'ai entendu les
objections et les commentaires; mais, d'un autre côté, en toute
justice et en toute sincérité, puisque je voudrais que cette
commission soit surtout une commission d'affaires et non pas une commission
politique, je voudrais qu'on puisse entendre aussi en détail que
possible les déclarations des deux représentants, soit de
l'Hydro-Québec et de la Société de développement de
la baie James pour ne pas les séparer, mais plutôt pour les unir;
qu'on entende tout ce qu'ils ont à dire. M. Nadeau, voulez-vous
procéder? Je demande surtout qu'on soit bref dans cette
déclaration.
M. NADEAU: Merci, M. le Président. Je recommencerai donc au
début du paragraphe de ma troisième recommandation: Que la
société d'énergie soit une corporation de contrôle
où seraient intégrés autant d'individus de
l'Hydro-Québec que possible, à qui nous reconnaissons une grande
compétence dans les domaines qui leur sont propres.
Le nombre ne pourrait être limité que par les nombreux
travaux requis par le programme d'équipement, si bien expliqué
par M. Giroux et ses collègues, la semaine dernière. Que si
nécessité il y avait d'obtenir les services de consultants de
l'extérieur, que ceux-ci n'agissent qu'à temps partiel. Confier
la gérance à un groupe étranger ne pourrait que contribuer
à affaiblir nos groupes québécois, étant
donné que la langue du travail sera le français, le groupe
étranger devra recruter parmi nos bureaux d'ingénieurs les hommes
les plus compétents pour finalement retirer les honneurs à nos
dépens. La politique que nous recommandons permettrait à
l'Hydro-Québec de jouer le rôle prépondérant,
prévu dans la loi, à l'article 16, que je ne vous lirai pas.
Le financement. De plus, nous croyons qu'une telle formule rendrait le
financement plus facile, parce que l'entreprise privée représente
une garantie particulière aux yeux des banquiers. C'est l'impression que
nous avons perçue très nettement en agissant ainsi. Nous
créerons trois entités emprunteuses; la province,
l'Hydro-Québec et la Société d'énergie, ce qui
répartira les charges et les fréquences sur les
marchés.
Le projet de la baie James serait considéré comme
Churchill Falls, avec en plus l'endossement de la province. L'énergie
électrique étant considérée comme une
priorité sur le continent nord américain et même dans le
monde entier, le monde financier a jusqu'ici montré un vif
intérêt au projet, réalisant que nous possédons ici
un potentiel unique. Nous prétendons qu'un tel programme permettrait le
financement du projet sans heurt, surtout si on pouvait compter sur un contrat
de vente ferme d'énergie entre la Société d'énergie
et l'Hydro-Québec. Dans de telles conditions, nous ne prévoyons
aucune difficulté.
En conclusion, M. le Président, nous croyons sincèrement
que nous avons ici, au Québec, une ressource qui fait l'envie du monde
entier et que l'objectif commun doit être de l'exploiter au profit de
tous les Québécois et de la façon la plus rationnelle
possible.
Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Nadeau. Revenons immédiatement, je ne
me souviens pas qui avait la parole, je pense que c'est M. Joron.
M. JORON: M. le Président, je voudrais poser quelques
questions...
M. GAUVREAU: Est-ce que je pourrais faire une déclaration
aussi?
M. JORON: Je n'ai pas d'objection.
M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas d'objection.
M. GAUVREAU: Mon nom est Georges Gauvreau, je suis commissaire. Si je
préside, c'est que notre président, M. Giroux m'a demandé
de le faire, en son absence. Il regrette de ne pouvoir être ici
aujourd'hui. Il est entré à l'hôpital hier et il avait
retardé cette entrée depuis au moins trois semaines. M. Giroux
m'a aussi suggéré de rappeler devant cette commission la
façon dont a été préparé le texte de la page
16 de son discours je ne sais pas si vous l'avez encore mais
c'est la partie de ce discours qui a été la plus discutée,
je crois, depuis la semaine dernière. Ce texte, effectivement, a
été rédigé en collaboration. Il a été
visé par les commissaires.
Je crois qu'il reflète, dans les grandes lignes, la pensée
des commissaires.
Evidemment, ce texte est un peu compliqué. Si vous voulez nous
poser des questions là-dessus en temps et lieu, selon que vous le
jugerez à propos, M. le Président, chacun des commissaires sera
prêt à interpréter ou à expliciter davantage ce qui
est formulé surtout dans cette page 16.
M. LE PRESIDENT: Vous avez sans doute, et je le reconnais, le vice du
parlementaire lorsqu'il s'agit d'apporter toutes sortes de problèmes au
moulin. C'est-à-dire qu'un président de commission doit
constamment être sur ses gardes parce que, vous savez, avec des gens
comme les membres de la commission, qui sont tellement alertes sur toutes
sortes de points, il y a une tendance régulière à
élargir un peu les cadres de la discussion.
Votre déclaration est tout à fait acceptable dans les
conditions que nous avons posées au début. Ayant entendu M.
Nadeau, je pense que vos déclarations sont très à point.
Je voudrais, messieurs, s'il vous -plaît, qu'on retourne aux questions du
programme d'équipement et nous reviendrons sans doute, je peux vous
l'assurer, à tous les problèmes de gestion et
d'administration.
L'énergie nucléaire américaine et
canadienne
M. JORON: M. le Président, j'ai quelques questions relativement
aux différents programmes d'équipement concernés, qui
portent sur les programmes 20 et 23, le nucléraire canadien et le
nucléaire américain. On retrouve dans le document
déposé par l'Hydro-Québec la semaine dernière
intitulé Normalisation des coûts unitaires de divers modes de
production, à la page 3, des données quant aux coûts
d'investissement par kilowatt, selon la taille des unités
concernées.
L'on s'aperçoit que, selon que le groupe est de 500
mégawatts, le coût est de $575; selon qu'il est de 800, il devient
$500; selon qu'il est de 1,000, il devient de $445; ce qui fait une
différence entre les 500 mégawatts ou les 1,000 mégawatts
de l'ordre de 22 p.c; 22 p.c. de moins quand il s'agit d'une unité de
1,000 mégawatts et 13 p.c. quand il s'agit d'une unité de
800.
D'autre part, un peu plus loin dans le même
document, on lit que la transposition, la normalisation de ces
coûts au Québec montre, dans le cas précis par exemple, et
je lis en page 14 que: "le coût d'investissement unitaire prévu
pour des groupes de 800 mégawatts mis en service en 1978 est de $367 par
kilowatt installé. La taille des unités semble donc avoir une
incidence très directe et très importante sur le coût total
de l'énergie produite".
A ce sujet, étant donné que, par exemple, au début
du rapport de United Engineers qui fait état de son mandat, on lit,
à la demande de l'Hydro-Québec, ainsi de suite: "Sizes of units
considered are 500 megawatts and 800 megawatts"...
D'autre part, dans les différentsprogrammes d'équipement
que nous a livrés la direction de la planification du génie de
l'Hydro-Québec, on ne retient que des unités de 500
mégawatts dans le cas américain et de 600 mégawatts dans
le cas du nucléaire canadien.
Je veux donc demander, peut-être en l'absence de M. Giroux,
à M. DeGuise, pourquoi on a bâti ces deux programmes, dans un cas
avec des unités de 600 mégawatts et dans l'autre cas, avec des
unités de 500 mégawatts?
M. DEGUISE: M. le Président, je vais donner quelques minutes
à nos ingénieurs pour retrouver les notes. Je vais vous donner
immédiatement les réactions qui me viennent, à la question
de M. le député. Si on considère le nucléaire
canadien, la seule expérience acquise jusqu'à maintenant
était avec des groupes de 500 mégawatts. Il y a eu des
discussions. Atomic Energy of Canada a fait des propositions, aussi bien chez
nous qu'à l'étranger, pour des groupes de 600 mégawatts.
J'admettrai qu'il y a, pour l'Hydro de l'Ontario, en construction actuellement
des groupes de 750 mégawatts; mais, évidemment, il n'y a aucune
expérience sur leur comportement. Alors, pour être du
côté de la sécurité, nous nous sommes limités
à ce que l'Egernie atomique du Canada avait fait ou croyait faire avec
une très légère modification, si je passe de 500 à
600 mégawatts.
Une autre raison, peut-être, qui pourrait se justifier davantage
bientôt: vous remarquerez que les taux de pannes croissent
énormément avec la taille des groupes. Alors, il y avait cette
possibilité qu'en voulant économiser sur les coûts
d'investissement en ayant des groupes plus considérables, il fallait
mettre davantage d'équipement de réserve. Et le
bénéfice net n'était pas évident.
Maintenant, je cède la parole à M. Charuk.
M. CHARUK: J'entame dans la même direction que vient de le faire
M. DeGuise.
Il est exact que le coût unitaire d'investissement des groupes de
500 mégawatts est supérieur au coût unitaire
d'investissement des groupes de 800 ou de 1,000 mégawatts. Mais, par
contre, les taux de panne de ces groupes, historiquement, et ceux que
prévoient les organismes, comme la Federal Power Commission croissent
avec la taille des groupes, donc le pourcentage de réserve requise
croît lui aussi. Et si nous faisons le calcul pour déterminer le
coût global, avec des groupes de 500 mégawatts, incluant la
réserve d'une part, et d'autre part des groupes de 800 mégawatts
incluant la réserve, nous nous apercevons qu'il est plus
économique d'utiliser des groupes de 500.
M. JORON: On fait état dans la réponse de
l'expérience acquise. M. DeGuise a souligné d'ailleurs avec
justesse, l'expérience de Pickering où certaines unités
entrent en production cette année dont la taille est de 500
mégawatts. Mais il faut bien considérer que ce sont là des
unités déjà en construction et devant entrer en production
assez rapidement alors que dans le cas qui nous concerne ici, on parle
d'unités devant entrer en production en 1980. D'autre part, si nous
considérons le nucléaire américain, il y a beaucoup plus
d'expérience acquise dans ce domaine en raison du nombre
considérable de centrales qui existent aux Etats-Unis. D'après la
revue Nuclear News Buyers Guide de février 1972, on y retrouve une liste
de 79 centrales en construction, qui seront en activité aux Etats-Unis
entre 1973 et 1980. Ce qui m'étonne, c'est que de cette liste, nous
voyons que dès 1979, il n'y en aura que deux qui seront de 500
mégawatts et moins et qu'il y en a huit entre 500 mégawatts et
800 mégawatts, 30 entre 800 mégawatts et 1,000 mégawatts
et 39 entre 1,000 mégawatts et 1,200 mégawatts. Ce sont des
centrales qui doivent entrer en production entre 1973 et 1980. En d'autres
mots, tout cela me semble et j'aimerais entendre vos commentaires
là-dessus indiquer que des unités de 500 mégawatts
dans le nucléaire américain, cela ne se fait plus, à
toutes fins pratiques. Alors, je m'étonne que dans le programme 23 qui,
lui, commence en 1980, en plus du fait qu'il doit s'échelonner jusqu'en
2,035, on considère à ce moment-là des unités de
500 mégawatts alors que déjà au moment où on se
parle, ça ne se fait plus aux Etats-Unis.
M. DEGUISE: M. le député, si vous me permettez, je pense
que nous revenons à la question fondamentale. On voit très bien
que des utilités américaines se lancent dans la construction de
gros groupes. Le cas est peut-être légèrement
différent en ce sens que vous avez des réseaux parfaitement
interreliés où ils subviennent l'un à l'autre en cas de
panne, etc. J'ai devant moi un article vous savez, on peut aller loin
d'Electrical World de septembre 1969 et qui est écrit par la
compagnie Ebasco, la même que nous avons consultée dans les
programmes de la baie James, et c'est intitulé: "Generating units, the
case for large or small". On y prend à la page 2 de l'article, un
programme hypothétique qui, assez curieusement, ressemble au
nôtre, pour une installation
de 12,500,000 kilowatts. On fait une estimation avec des groupes de 500
mégawatts et on arrive à la nécessité d'intaller,
pardon pour 10,000,000 de kilowatts, on arrive à la
nécessité d'installer 12,492,000, ce qui implique une
réserve d'à peu près 25 p.c. Si on installait des groupes
d'un million de kilowatts, on arrive à la conclusion qu'il faudrait
installer 15,476,000 kilowatts, ce qui impliquerait une réserve de 50
p.c. avec les gros groupes. Disons que c'est un autre cas qui vient confirmer
que plus vous augmentez la taille des groupes, plus il vous faut de
réserve.
M. JORON: En raison de quoi?
M. DEGUISE: Les dimensions, la température, quand vous extrapolez
n'importe quoi et je crois, sans divulguer de secret ici, par exemple,
que l'eau lourde est peut-être un excellent cas , quand, dis-je,
vous partez d'une fabrique qui avait une capacité limitée et que
vous voulez l'étendre à une capacité beaucoup plus grande,
il y a des problèmes d'échelles qui ne sont pas en ligne droite.
Je crois que la même chose arrive dans les turbines ou les alternateurs;
l'affaire se complique plus qu'une simple règle de trois, vous savez,
passé de 500 à 1,000, l'expérience est là dans les
rapports de la Federal Power Commission. Vous avez une expérience
vécue de groupes de toute capacité et on voit que le taux de
panne augmente très distinctement avec l'augmentation de la taille des
groupes.
M. JORON : Je comprendrais le raisonnement davantage s'il s'agissait
d'un nombre assez restreint d'unités très grosses, mais comme
dans le" programme 23 on parle d'un total de 22 unités de 500
mégawatts, disons jusqu'à un certain point que la pertinence me
semble moins grande.
De toute façon, l'exercice que nous conduisons aujourd'hui, c'est
de pouvoir comparer pour être bien sûr de la justesse du choix que
nous devons faire. Je voulais vous demander si un programme avait
été construit à partir d'unités de 800 ou 1,000
mégawatts. Par exemple, je vois dans les numéros des programmes
je ne sais pas à quoi cela correspond qu'à un
moment donné, on a 20 et 23; on n'a pas de 21 et de 22. Puis, ça
saute de 23 à 27; il y a les programmes 24, 25, 26. Est-ce qu'il y a eu
des programmes?
M. DEGUISE: Il y en a eu 75.
M. JORON: Donc, si j'ai bien compris, il y a eu des programmes
basés sur des unités de 800 mégawatts?
M. DEGUISE: Pas nécessairement.
M. CAHILL: Nous avons fait des études séparées qui
nous indiquaient que des groupes de 800 mégawatts n'étaient pas
intéressants du point de vue économique. Nous n'avons pas
étudié spécifiquement, pour l'étude que nous avons
présentée, des groupes de 800 mégawatts. A prime abord,
comme vous le disiez, les groupes de 800 mégawatts peuvent coûter
moins cher en dollars le kilowatt, donc sembler une économie
intéressante. Par ailleurs, comme le taux de pannes augmente en fonction
de la dimension des groupes et que chaque fois qu'on perd un groupe, on perd un
plus gros groupe, donc, c'est plus pesant sur la perte en mégawatts de
production qu'on fait. Cela veut dire qu'il faut augmenter d'autant les
réserves et que l'économie qui peut être apparente est
perdue à cause des réserves qu'il faut augmenter. Pour
débuter, nous avons pensé qu'il était plus
sécuritaire il faut quand même être raisonnablement
sécuritaire pour assurer l'alimentation fiable de la demande de
commencer avec des groupes de 500 mégawatts, du point de vue
économique et du point de vue de la fiabilité.
M. JORON: Je comprends le raisonnement et la prudence qui
m'apparaît peut-être excessive. Mais, pour le profane que je suis,
ce qui me paraît curieux, c'est que dans un pays où il y a
passablement d'expériences accumulées, on ne fait plus de 500
mégawatts, on fait du 800 et surtout du 1,000 mégawatts
maintenant. Si c'était économiquement moins rentable ces
gens-là, aux Etats-Unis par exemple, ne sont quand même pas des
idiots pourquoi le feraient-ils?
M. DEGUISE: Je crois qu'une raison est qu'ils ne se lancent pas dans des
programmes totalement nucléaires, ils alternent assez souvent: avec un
groupe thermique fossile ordinaire et un groupe nucléaire. Ils estiment
probablement ou prennent une chance, si vous voulez, qu'un des deux sera plus
stable que l'autre. Dans le rapport de la Federal Power Commission
américaine, qui est sorti au mois de mars 1971, vous avez, par exemple,
des groupes qu'ils appellent Mature Nuclear Unit. Ce sont des groupes
nucléaires qui auront fonctionné pendant deux ou trois ans, qui
seront prouvés. A 600 mégawatts, il y a un taux de pannes qui
varie de 5.1 p.c. à 7.2 p.c. et à un million de kilowatts ou
à mille mégawatts, le taux de pannes varie de 6.5 p.c. à
10 p.c. C'est presque le double. Il y a une note qui nous dit, un peu plus
loin, qu'il faut se servir d'un multiplicateur pour les années
initiales; et le multiplicateur varie entre 1 p.c. et 1.6 p.c.
M. JORON: Le taux de pannes augmente, mais même dans votre
programme de 500, vous avez pris entre 9 p.c. et 12.5 p.c. de taux de pannes
pour des unités de 500. Alors, il faudrait à ce moment-là
ajuster les deux en conséquence.
M. DEGUISE: C'est parce que cela variait selon les années.
M. JORON: Dans ce sens-là, d'après ce que vous me dites,
de 9 p.c. à 12.5 p.c. serait trop élevé dans le cas de 500
mégawatts.
M. DEGUISE: Au début, il y a le multiplicateur qui entre en ligne
de compte. Si on commence avec 600 mégawatts entre 5.1 p.c. et 7.2 p.c.
qui est une moyenne et que vous apportez le multiplicateur de 1.6 p.c. ou de
1.4 p.c, vous n'êtes pas tellement loin.
M. LAURIN: Evidemment, ce n'est pas la même chose, les taux de
pannes s'amenuiseraient également avec le temps, avec les grosses
centrales. Comme ce sont les plus grosses unités, cela corrigerait.
M. DEGUISE: On ne peut pas dire que c'est impossible. Mais si on veut
être du côté de la sécurité, c'est une
question de jugement, à savoir à quel point vous donnez de la
sécurité.
M. JORON: Quels étaient les programmes 21, 22, 24, 25 et 26 par
exemple? Ils n'apparaissent pas mais, ils ont été faits
dans les documents qui ont été remis par
l'Hydro-Québec.
M. CAHILL: Dans quels documents?
M. JORON: Non, je dis...
M. CAHILL: Dans le livre bleu?
M. JORON: Les programmes d'équipement, dans le livre bleu, les
21, 22, 24, 25 et 26, entre autres, n'apparaissent pas. Qu'est-ce que
c'étaient que ces programmes-là? Est-ce qu'il y avait d'autres
programmes nucléaires?
M. GAUVREAU: Les commissaires ne les ont jamais vus, on va voir ce que
c'est parce que...
M. BOYD: M. le Président, pendant qu'on discute cela, est-ce que
vous permetteriez que j'ajoute à ce que mes deux confrères
viennent de dire? On a des chiffres ici qu'on a obtenus de l'Hydro-Ontario
hier. On leur a demandé: Qu'est-ce que vous mettez dans vos programmes,
dans votre planification comme taux de pannes? Qu'est-ce que vous
prévoyez pour l'avenir comme taux de pannes pour le nucléaire et
qu'est-ce que vous avez dans vos programmes pour les réserves? Alors, je
peux vous donner cela si vous voulez?
M. JORON : C'est du nucléaire canadien, évidemment.
M. BOYD: C'est canadien. Pour Pickering, ce sont des unités de
500 mégawatts, la première année ils prévoient 22
p.c. allant à 15 p.c. la cinquième année, de taux de
pannes. Pour leurs 500 mégawatts futurs, ils escomptent que cela va
s'améliorer et ils prévoient de 15 p.c. à 10 p.c. Pour
Bruce, 750 mégawatts, vous voyez que cela confirme ce qu'on a
déjà dit, la première année ils prévoient 24
p.c. comparativement à Pickering, 24 p.c. à 15 p.c. la
cinquième année et ils prévoient davantage avec les
unités plus grosses. Pour des unités de 750 mégawatts plus
tard, les futures, ils prévoient de 20 p.c. à 13 p.c.
comparativement à 15 p.c. à 10 p.c. pour les 500
mégawatts.
Alors, vous allez me dire Pickering est meilleur que cela, la
première unité est meilleure que cela. J'en ai discuté
avec eux hier au téléphone et ils disent oui, elle est meilleure
que cela mais on doit considérer qu'on est chanceux. Une seule panne
majeure la semaine prochaine, dans un mois, dans deux mois, changerait ce
pourcentage-là complètement et ils ne pensent pas qu'il serait
prudent et nous sommes d'accord avec eux d'employer des chiffres
basés sur une unité qui marche depuis quelques mois. Je vous ai
donc cité leurs chiffres de planification. Quant à la
réserve qu'ils emploient dans leur planification, on a ici: "Forecast of
Load and Capacity" c'est assez récent, octobre 1970. En 1973, ils
prévoient une charge totale, une demande totale sur leur réseau
de 13,400 mégawatts qui passe à 18,700 en 1978. Le pourcentage de
réserve qu'ils prévoient passe de 17.9 p.c. à 18.1 p.c,
20.5 p.c, 26.1 p.c, 28.3 p.c, 23.8 p.c. On voit l'effet en 1975, 1976, 1977 des
gros groupes nucléaires qui entrent en service et pour lesquels ils sont
obligés d'avoir des pourcentages de réserve sur leur
réseau beaucoup plus élevés. Alors, on est loin d'avoir
prévu une telle réserve dans nos...
M. JORON: Si vous permettez, est-ce que cette réserve-là
est prévue en thermique ou en nucléaire?
M. BOYD: C'est global. C'est leur réserve globale sur l'ensemble
de leur réseau, dans laquelle ils ont de l'hydraulique, du thermique, du
nucléaire.
M. JORON: La réserve pourrait être en hydraulique, en
thermique ou en nucléaire.
M. BOYD: Elle peut être en n'importe quoi: ce qui est plus
pratique pour eux d'avoir comme réserve, ce qui est plus
économique comme réserve et c'est tout simplement pour vous citer
ce qu'on emploie comme réserve à l'Hydro-Ontario. Je pense que
nos ingénieurs pourront vous dire que ce qu'on a prévu comme
réserve dans nos programmes c'est beaucoup moins que cela. Pour en
revenir au nucléaire américain, on a parlé tout à
l'heure de la Federal Power Commission, d'un rapport qui vient de sortir et au
sujet de la réserve, il y a un paragraphe assez intéressant, qui
concerne la réserve. "In arriving... Vous permettez? Je ne puis faire la
traduction simultanée.
M. LE PRESIDENT: Je souhaiterais que vous le fassiez dans la langue du
texte.
M. BOYD: Dans la langue du texte, bon. "In arriving at estimates of
future capacity requirements, the survey le "survey" s'applique à
toutes les entreprises d'utilités publiques et privées aux
Etats-Unis concludes that the industry overall should maintain an
average reserve margin of approximately 20 p.c, if viewed upon a nationwide
basis, but varying among regions and systems to reflect generating another
characteristics. This range could vary between 15 p.c. and 26 p.c."
dépendant du type de réseaux d'unités que vous avez. "The
FPC said it should not be trimmed to 15 p.c. as had seemed possible in the 1964
National Power Survey." Donc, eux-mêmes, en 1964, pensaient que 15 p.c.
de réserve en moyenne aux Etats-Unis auraient été
suffisants. "This conclusion is based on the industries increasing dependance
on large generating units and the consequent need for large blocks of reserve
capacity to offset unscheduled activities."
M. SAINT-PIERRE: Le texte que vous avez est bien un résumé
18-200 du 16 avril 1972 de la Federal Power Commission?
M. BOYD: C'est ça.
M. SAINT-PIERRE: Qui donne suite, qui résume le rapport
périodique?
M. BOYD : On a le gros rapport ici.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que je pourrais avoir la page 14 de ce rapport,
je n'ai pas d'objection à en déposer une photocopie, c'est un
document disponible.
M. JORON: J'en ai une photocopie.
M. SAINT-PIERRE: Quelqu'un pourrait vous en prendre une photocopie.
Au sujet de la page 14, j'aurais aimé avoir quelques
explications.
M. BOYD: A quel article, M. Saint-Pierre?
M. SAINT-PIERRE: "Outlook for costs". Evidemment, les coûts, c'est
bien important, on peut comparer le coût du programme que vous nous avez
recommandé avec des aménagements passés. Il me semble que
c'est un peu boiteux, parce que c'est comme comparer le coût d'une pinte
de lait en 1900 avec le coût d'aujourd'hui. Je trouve intéressant
et peut-être que vous pourriez me l'expliquer si je le comprends bien,
à la troisième ou quatrième ligne, on dit que le
coût moyen américain prévu pour l'électricité
serait de 2.72...
Quelles étaient les prévisions? C'est à la page 10,
je m'excuse, les coûts d'électricité, "electri- city costs"
parce que ceux que j'avais à la page 14 étaient les coûts
uniquement du combustible.
A la page 10 du même rapport, on indique que les coûts
moyens étaient (actual costs average) 15.4 mills par kilowatt-heure en
1968 et on les projette pour 1990 à 34.8 mills compte tenu du taux
d'inflation prévu en dollars constants, tel que vous l'avez fait dans
votre analyse. Quels seraient ces coûts pour la période
équivalente de celui de l'aménagement de la rivière La
Grande, c'est-à-dire de 1978 à 1984?
En d'autres termes, où j'en suis, il semble qu'ici, à la
suite de ce rapport-là, on conclut qu'en 1968, les coûts moyens
sont donc 15.4 mills et compte tenu de tous les facteurs qu'eux aussi ont
analysés pour l'ensemble de leur réseau, on arrive en 1990
à 34.8 mills. Le document que j'ai n'est évidemment qu'un seul
résumé, mais je me demandais si dans l'étude
complète qui a plusieurs centaines de pages, on prévoyait des
coûts pour une période équivalente à celle de la
baie James. On aurait pu comparer comment les coûts
d'électricité obtenus par le complexe que vous nous recommandez
sur le plan de la puissance, et, comme on l'a vu, à 96 p.c.
d'hydraulique de la baie James à 11.8 mills, pouvaient se comparer aux
coûts anticipés aux Etats-Unis, qui, j'imagine, seraient
inférieurs à 34 mills, mais supérieurs à 15
mills.
M. BOYD: On a ici le document qui a plusieurs centaines de pages.
M. SAINT-PIERRE: On pourrait reprendre ce sujet plus tard.
M. BOYD: Si on le trouve, on pourra répondre à votre
question.
M. JORON : Si vous me permettez, après ce petit écart sur
les réserves mais poursuivant l'écart et revenant aux questions
principales que j'avais posées tout à l'heure, on a abordé
la question des réserves. Serait-il juste de dire que dans un programme
global, s'il est prévu que la réserve soit en thermique
plutôt qu'en nucléaire, il y a encore un prêt
d'investissement moindre?
C'est plus économique de faire la partie réserve en
thermique. C'est exact?
M. DEGUISE: C'est ça.
M. JORON: C'est pourquoi je m'étonnais qu'il n'y ait pas, parmi
les différents programmes qui nous ont été soumis, un
programme nucléaire ou un programme à prédominance
nucléaire, mais où, par contre, la partie réserve
je ne sais pas le pourcentage de la puissance totale de tout le programme
aurait été prévue en thermique. Ce qui me
ramène à ma question.
Nous avons deux programmes mais exclusivement nucléaires, ce qui
veut dire qu'on fait la réserve même en nucléaire, ce qui
est plus
coûteux que de la faire en thermique. Je reviens à ma
question.
M. CAHILL: C'est-à-dire que, dans le programme 20, qui est le
programme nucléaire canadien qui s'avère le plus
économique, nous avons indiqué des usines de pointe. Ces usines
de pointe, nous n'avons pas indiqué si c'étaient des usines de
réserve pompée ou des usines de thermique léger,
c'est-à-dire dont le coût d'investissement est bas et qui
produisent le moins de kilowatts-heures possible.
Il peut effectivement y avoir des usines thermiques à bas prix,
dans le programme 80 que nous avons montré, qui pourront servir d'usines
de réserve.
M. JORON: Est-ce qu'on n'est pas en train de mêler deux notions,
la partie pointe et l'autre sujet, qui était la réserve? Est-ce
que nous ne sommes pas en train de mélanger deux choses?
M. CAHILL: Les usines nucléaires produisent un facteur
d'utilisation de 80 p.c, or, afin de satisfaire la demande qui est un facteur
d'utilisation de 65 p.c, nous avons préconisé des usines à
réserve pompée et des usines thermiques qu'on appelle du
thermique léger, à un bas coût d'investissement. Les usines
thermiques à bas coût d'investissement pourront servir de
réserve. Evidemment, ça coûterait cher de produire les
kilowatts-heures, au cas où il y aurait du nucléaire qui ferait
défaut.
M. JORON: Au cas, oui, c'est cela.
M. DEGUISE : Est-ce que je pourrais signaler, sur le même sujet,
que, dans le programme 20, si vous regardez dans le bas des tableaux, il y a
10,800,000 kilowatts de nucléaire de base et qu'il y a 5,600,000
kilowatts de pointe qui seraient, comme le disait M. Cahill, ou de la
réserve pompée ou du thermique? Alors, il y a plus de la
moitié du programme qui est matière à investissement
minimum, si on veut.
M. JORON : Je reviens à la question que je vous posais plus
tôt, avant qu'on s'engage dans les réserves, la question des
différents programmes et la question de la taille des unités
concernées. J'avais demandé ce que comportaient les programmes
21,22,24,25,26 et ainsi de suite; si ces programmes étaient des
programmes nucléaires avec des unités de tailles
différentes.
M. CAHILL: A ceci, mes collègues ont répondu qu'il
était possible qu'il y ait des programmes nucléaires, mais ils ne
s'en souviennent pas de mémoire. Si vous le désirez, nous pouvons
vérifier; il nous serait difficile de vérifier avec nos bureaux
de Montréal à cette heure-ci parce que les bureaux sont
peut-être fermés, mais ils ont dit que ces programmes
étaient moins économiques que les programmes que nous avons
montrés. Mais il n'y avait pas de programme avec des groupes de 800
mégawatts.
M. JORON: Tout à l'heure, je ne me souviens plus si c'est M.
DeGuise ou vous-même M. Cahill qui l'avez mentionné, vous avez
fait état d'une étude possible, sinon d'un programme construit
sur la base de l'unité de 800 mégawatts. Est-ce que ce programme
n'arriverait pas à un coût voisin de 13 mills plutôt que de
14.6 mills, comme c'est le cas de l'unité de 500 mégawatts?
M. DEGUISE: Sous réserve, je ne crois pas qu'il y ait de
programme fait avec 800 mégawatts mais je crois que la meilleure
indication que vous avez de l'influence de 800 contre 500, c'est dans le
rapport de United Engineers and Contractors, où on a fait
l'étude. Vous voyez des prix unitaires pour des groupes de 500 ou pour
des groupes de 800.
M. JORON : Est-ce que je peux vous demander pourquoi un programme n'a
pas été bâti sur la base d'unité de 800?
M. DEGUISE : C'est probablement parce que, à cause de calculs
absolument approximatifs au début, nous nous sommes aperçu que
ça n'avait pas d'intérêt, à cause de la
réserve additionnelle.
M. CAHILL: Nous avons déjà, dans un passé
récent tout de même, fait des comparaisons économiques et
ça nous avait indiqué qu'il n'était pas intéressant
d'avoir des groupes de 800. C'est pour ça que nous n'avons pas inclus de
programme de 800 dans les programmes que nous avons étudiés. Mais
rien, enfin, ne nous aurait empêchés de le faire.
A la question que vous posiez tout à l'heure: Quelle
différence en mills cela donnerait-il? Malheureusement il m'est
impossible de répondre, parce qu'à moins de l'inclure dans un
programme en bonne et due forme, on ne peut pas avoir de chiffres qui seraient
assez exacts.
M. JORON: Est-ce que je peux vous demander qui a pris la décision
du choix des programmes?
M. CAHILL: C'est la direction de la planification.
M. JORON: La direction de la planification. C'est elle qui a
écarté certains types de programme et qui en a retenu
d'autres?
M. CAHILL: Oui.
M. JORON: Est-ce qu'il y en...
M. CAHILL: Tout de même après certaines discussions avec
les supérieurs.
M. JORON : Quel est le directeur de la direction de la
planification?
M. CAHILL: Vous désirez avoir un nom?
M. JORON: Oui.
M. CAHILL: M. Joseph Bourbeau.
M. JORON: Est-ce qu'il est présent aujourd'hui?
M. CAHILL: Non, il n'y est pas.
M. JORON: J'aurais été curieux de savoir si ces
décisions ont été prises... Il existe un groupe,
évidemment, à l'intérieur de l'Hydro-Québec, sous
la direction générale des centrales, je pense, dirigé par
M. Monier, si ma mémoire est bonne.
M. CAHILL: La direction des projets de centrales.
M. JORON : Est-ce que ce groupe a été consulté par
ceux qui ont pris la décision d'écarter certains programmes? Je
ne sais pas si M. Monier est présent. Il pourrait répondre.
M. CAHILL: Il n'y a peut-être pas eu de consultation très
poussée, si vous voulez.
M. JORON: Il n'y a pas eu de consultation avec le groupe du service des
centrales nucléaires à l'intérieur même de
l'Hydro-Québec.
M. DEGUISE: M. le député, est-ce que je pourrais
intervenir à ce moment-ci et souligner si c'est un ordre de
grandeur que vous voulez que dans le rapport de UE & C, à la
table 7-A, le prix unitaire calculé à leur manière...
Parce qu'il y a des variantes dans la manière dont ils calculent et la
nôtre; cela a déjà été expliqué la
dernière fois. Mais, tout de même je pense que les bases
étant les mêmes, l'écart entre un programme avec des
groupes de 500, c'est-à-dire des groupes de 500 et des groupes de 800
n'est que de 3/10 le mill.
M. JORON: Cela, c'est UE & C.
M. DEGUISE: United Engineers and Constructors, dans la table 7-A,
à la page la page n'est pas numérotée dans
la première section. Pour des prix 1978 et qui ne sont pas des prix qui
tiennent compte de l'escalation dans la période et qu'on actualise
après, ils ont $10.47 mills pour des groupes de 520 avec de la
réserve de 275 en thermique et ils ont un prix de $10.18 ou $10.19 mills
avec des groupes de 800 et des groupes thermiques de 400 en réserve.
M. JORON : J'ai une dernière question. Je reviens au programme 23
qui prévoit 22 unités de 500 mégawatts. Comment se fait-il
qu'on prévoit sur une longue période, la construction
d'unités toujours de même grosseur et surtout à la fin de
la période de la vie de ces unités, au bout de la
trentième année ce qui nous porte à l'année
2010 qu'encore en 2010 il est prévu dans ce programme-là
le rééquipement par des centrales encore de même
unité? On s'engage, en d'autres mots, dans un programme, à
perpétuer des unités de 500 mégawatts pendant une
cinquantaine d'années, alors que déjà huit ans avant 1980
je le signalais tout à l'heure il ne s'en faisait plus aux
Etats-Unis.
M. DEGUISE: Si je peux répondre à cette question, je crois
qu'on a déjà signalé que les frais de
réinvestissement il y a une analyse dans les documents qui vous
ont déjà été remis dans le coût du
kilowatt-heure en mills ne jouent que très peu. Je crois que c'est un
mill et une fraction. Admettons que la méthode soit fautive ou laisse
à désirer, l'amélioration que vous pourriez obtenir serait
de l'ordre de quelques dizièmes de mills. Je ne pense pas que cela
change l'ordre de grandeur des conclusions.
M. JORON: On parle de quelques dizièmes de mills. On discute, en
fait, d'un écart... Par exemple, si on veut comparer au programme qui
semble le plus économique d'après les études, le programme
37 qui est autour de douze mills, et des programmes nucléaires
enfin, des deux seuls qui nous ont été présentés
ici de 14 et quelque mills, on est dans un écart de deux. Cela ne
prend pas beaucoup de...
M. SAINT-PIERRE: De 20 p.c, quand même.
M. JORON: 15 p.c. et 12... Cela ne prend pas beaucoup de dizièmes
pour réduire ou annihiler l'écart à ce moment-là,
surtout si on considère... Je comprends qu'il y a d'autres facteurs qui
entrent en ligne de compte, mais s'il y a une économie de 22 p.c. au
moment de l'investissement, la partie importante dans le coût que
représente l'investissement, on ne peut quand même pas
écarter cela du revers de la main. Cela doit bien se traduire quelque
part, un moment donné.
M. DEGUISE: Je crois que nous nous sommes également donné
le bénéfice du doute. Si vous parlez du nucléaire
américain, vous n'êtes pas sans vous douter des difficultés
qu'il y aurait d'introduire du nucléaire américain au Canada. Et
la commission de contrôle aurait toute la latitude pour se servir des
objections qui, actuellement, se font aux Etats-Unis, du côté
environnement, du côté sécurité pour exiger des
dépenses additionnelles qui pourraient représenter 15 p.c. ou 20
p.c. dans les frais d'investissements, à part les délais de
licence.
M. JORON: Je comprends ce problème mais...
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que nous ne pourrions pas dire exactement la
même chose du côté hydraulique? Vous avez quand même
prévu 50 ans pour la période d'amortissement d'une centrale
hydraulique. Dieu sait qu'il y en a plusieurs actuellement qui ont beaucoup
plus de 50 ans et dont le coût est de zéro point zéro
puisqu'il n'y a aucun nouvel investissement et il n'y a pas de frais
d'exploitation. Alors, le gain est complet tandis que dans le nucléaire,
même si on dit qu'il n'y a pas d'amortissement, de
réinvestissement, les coûts d'exploitation demeurent et avec
l'installation...
M. JORON: Je ne vois pas ce qui ressort de tout cela.
M. SAINT-PIERRE: Cela me semble assez important.
M. JORON: Ce que je retiens de tout cela, c'est que dans les tableaux
comparatifs et surtout à cause du fait qu'il n'y a pas d'alternative
quant à la taille des unités, quant au mixte, il n'y a que deux
seuls programmes nucléraires qui nous sont présentés, nous
avons une bien maigre base pour nous permettre d'en juger. Nous avons
peut-être l'air et je ne m'en cacherai pas de vouloir faire
valoir les mérites d'une formule mais qui visiblement est
dépréciée puisqu'on nous suggère parmi un total de
je ne sais pas combien de programmes...
M. SAINT-PIERRE: Je ne suis pas d'accord.
M. JORON: ... deux seuls et qui ne sont pas des programmes optimaux dans
le fond. On a optimalisé le programme hydraulique, principalement, de la
rivière La Grande, on n'a certainement pas optimalisé les
programmes nucléaires. Tout cela nous laisse dans un état de
scepticisme et d'incertitude. Nous avons l'impression qu'on essaie pour
reprendre les images qui sont chères au député de
Verchères quand il parle de pintes de lait de nous vendre une
automobile en 1972 en nous faisant la description d'un Ford à
pédales. Il est bien évident que nous ne l'achèterons
pas.
M. SAINT-PIERRE: Plus je vous écoute, plus j'ai l'impression que
vous devez être le député de Saint-Thomas!
M. JORON: C'est notre rôle aussi. Cela devrait être la
première responsabilité du gouvernement. L'Opposition est
là pour vous y faire penser. Vous n'avez pas l'air d'y penser
très souvent.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse, M. le Président. Ce sont des
affirmations gratuites. Nous en avons eu beaucoup depuis un an mais nous
pensions...
M. JORON: Pas aussi gratuites que vos $168 millions de la semaine
dernière.
M. SAINT-PIERRE: Nous allons recommencer s'il le faut l'explication de
ces $168 millions. Vous verrez que vous arriverez assez près de $168
millions. Vous savez multiplier par deux, des milliards de kilowatts-heures par
une différence de 1.8, cela va donner $168 millions.
M. LAURIN: Mais si vous chargez le programme nucléaire avec une
prudence extrême, une prudence tellement extrême que vous
exagérez peut-être les dangers écologiques qui vont
demander des processus antipollution, si vous mettez au plus haut point
possible les taux de pannes, les taux de réserve et si après
cela, vous accumulez tout cela, puis pour l'hydraulique, nous avons affaire
à des calculs qui, au contraire, sont destinés à le
valoriser, il est entendu qu'à la fin nous nous rendrons compte que le
programme nucléaire, c'est l'âne de qui venait tout le mal et il
faut l'éliminer.
M. SAINT-PIERRE: Malheureusement, M. le Président à la
dernière réunion de la commission, nous avons eu le même
genre de questions mais cette fois-là, cela a été une
question directe, presque un affront que de demander à
l'Hydro-Québec si on avait chargé les dés pour favoriser
une conclusion. Je pense qu'avec toutes les études qui ont
été faites, nous pouvons demander à l'Hydro-Québec
qui, il y a un an, n'était pas partie avec la preuve de tenter de
démontrer l'aménagement de la rivière La Grande. Elle l'a
fait de la façon la plus objective en fonction de ses besoins et elle
est arrivée avec les conclusions. Cela fait je ne sais pas combien
d'heures pour poser chaque question et je trouve que nous avons eu des
réponses satisfaisantes. Pourquoi a-t-on pris tel facteur pour tous les
différents paramètres qui impliquent la construction d'un
coût? Et les résultats sont tels. Il faut quand même se
rendre à l'évidence un jour. Même Saint-Thomas a admis
quand il a mis le doigt, que c'était la vérité.
M. JORON: Tout ce que je peux répondre, c'est que ce n'est pas
mon opinion. C'est tout.
M. SAINT-PIERRE: Oui, mais qu'est-ce que vous voulez?
M. JORON: On compare...
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous accusez l'Hydro-Québec de
partialité en faveur de l'hydraulique?
M. JORON: Nous avons 75 programmes ici et il y a deux seuls programmes
nucléaires dans tout cela et qui sont loin d'être des programmes
optimaux. Nous n'avons pas de programme avec des unités de 800
mégawatts, nous n'en avons pas avec 1,000 mégawatts. Nous n'avons
pas de programmes mixtes à prédominance nucléaire.
M. SAINT-PIERRE: Mon cher ami...
M. JORON: Nous avons des programmes exclusivement nucléaires.
J'ai l'impression nettement... Je n'accuse personne...
M. SAINT-PIERRE: Nous avons eu...
M. JORON: Et suite au fait justement que des morceaux d'étude
d'autre part n'ont pas été déposés...
M. SAINT-PIERRE: Lesquels?
M. JORON: ... les dés sont jetés. Je pense à
l'étude de Shawinigan Engineering.
M. SAINT-PIERRE: J'ai donné la raison pourquoi...
M. JORON: Une des raisons.
M. SAINT-PIERRE: Vous viendrez ce soir!
M. JORON: D'autres raisons apparaîtraient peut-être.
M. SAINT-PIERRE: Absolument pas.
M. JORON: Extrayez la question des salaires du document de la Shawinigan
Engineering entre autres et déposez-le. Demandons aux différents
services ou aux différents bureaux de l'Hydro-Québec si d'autres
études ont été faites et n'ont pas été
déposées et voyons-les.
M. SAINT-PIERRE: Je pense que quand vous soulevez la question et
demandez comment il se fait qu'il n'y ait que deux programmes avec le
nucléaire américain et deux programmes avec le nucléaire
canadien versus un certain nombre d'autres qui ont aussi été
considérés, on vous a donné la réponse. On a dit
que les premières analyses, le premier déblayage de l'ensemble de
ces programmes, ont donné certaines conclusions. Lorsqu'on est logique
avec soi-même, certaines conclusions orientent. On n'a pas rejeté
mais on a retenu les meilleures formules. C'est la même chose que si vous
me demandez d'aller ce soir aux courses. C'est bien de valeur, mais le cheval
qui ne gagne jamais, il n'y a pas grand monde qui mise dessus. Les autres se
concentrent sur celui qui gagne. A la fin, on a un résultat.
M. JORON: Vous trouvez ça normal que le bureau du
nucléaire de l'Hydro-Québec n'ait pas été
consulté sur un sujet semblable?
M. SAINT-PIERRE: Reposez toutes les questions. On n'a pas dit cela.
M. BOYD: M. le Président, M. Cahill, le directeur
général du génie voudrait répondre à
ça. Après cela, je voudrais ajouter mes propres commentaires.
M. CAHILL: Il peut vous sembler curieux que notre groupe
nucléaire n'ait pas été consulté à fond.
Vous avez nommé M. Monnier. Il est un excellent spécialiste
évidemment, il vient d'être nommé au poste de chef de
service adjoint au groupe thermique et nucléaire. Jusqu'à tout
dernièrement, il était occupé à la mise en route de
la centrale nucléaire de Gentilly.
Nous n'avons pas de groupe spécialisé dans l'estimation
des coûts pour les centrales nucléaires. Nous avons donc eu
recours à un bureau expérimenté dans l'estimation de ces
coûts, comme question de fait, à United Engineers &
Constructors. Cette firme nous a fourni des coûts qui, j'espère,
ne sont pas entachés de partialité, ce sont des coûts
d'ailleurs que vous avez. Du point de vue des taux de panne, nous n'avons pas
de centrale nucléaire à l'Hydro-Québec qui, actuellement,
puisse nous permettre d'établir des taux de panne. La direction de la
planification, est en contact avec toutes les autres sociétés du
même genre que la nôtre, soit américaines, soit canadiennes.
Elle est très bien placée pour avoir des discussions avec les
départements de planification semblables aux nôtres et qui, pour
choisir les futurs moyens de production, doivent s'occuper de
l'économique, des taux de panne et de tout et obtenir des taux de panne
de ces gens-là. C'est pourquoi c'est la direction de la planification
qui, à partir des coûts obtenus de United Engineers et des taux de
panne que nous avions a choisi et les dimensions des groupes et les taux de
panne à employer.
Est-ce que ça répond à votre question, M.
Joron?
M. JORON: Oui, merci.
M. PERREAULT: La direction de la planification doit tenir compte de
l'exploitation autant que de la construction.
M. CAHILL: Absolument!
M. LAURIN: Est-ce qu'on n'a pas quand même le droit, M. Cahill, de
se poser des questions quand on voit qu'aux Etats-Unis tous les nouveaux
programmes comportent la construction de centrales de 800 mégawatts ou
supérieures à 800 mégawatts, à 1000
mégawatts? Est-ce qu'on n'a pas le droit quand même de se poser
des questions? Est-ce qu'il faut admettre, à la suite de votre
étude vous l'avez dit tout à l'heure que tous les
spécialistes américains se trompent en construisant des centrales
aussi grosses puisque vous venez d'affirmer que la construction de centrales de
800 mégawatts ce n'est pas intéressant, ce n'est pas rentable, ce
n'est pas économique? C'est ma réponse, d'ailleurs, au
député de Verchères.
M. CAHILL: Nous n'avons peut-être pas dit que ce n'est pas
intéressant. Evidemment, si on ne pouvait faire que ça, ce serait
certainement intéressant. C'est un moyen de produire de
l'énergie. Il y a peut-être une réponse. Comme le
disait tout à l'heure M. DeGuise, les réseaux américains
sont mieux reliés entre eux que les nôtres, ils peuvent donc mieux
se supporter les uns les autres en cas de panne. Il y a peut-être aussi
le fait qu'ils ont de la difficulté à obtenir des emplacements
où construire des centrales nucléaires. Alors, lorsqu'ils en
construisent une, ils essaient d'en construire une grosse et de mettre les plus
gros groupes possibles à l'intérieur de l'emplacement qu'ils ont
réussi à obtenir. Mais on voit tout de même les
résultats. Actuellement, je suis sûr qu'ils ne planifient pas des
"blownouts" vous savez ce que c'est un "blownout" n'est-ce pas
mais ils ont quand même des "blownouts". Nous, jusqu'à maintenant,
nous avons eu la chance de ne pas en avoir, et nous essayons de planifier pour
ne pas en avoir à l'avenir.
M. SAINT-PIERRE: En rapport avec cette dernière raison que vous
évoquez, je pense que si le député de Bourget lit
régulièrement les revues américaines sur l'énergie
nucléaire, il va constater que la grande difficulté depuis deux
ans est beaucoup plus une question de trouver des sites. Je pense que nombre
d'injonctions sont prises à cause des sites et que nombre de
délais sont occasionnés par les problèmes de sites. Cela
expliquerait qu'une fois qu'on peut avoir un site on ne tente pas de placer une
petite source d'énergie, on tente d'en placer une qui soit la plus
grande possible, même si les difficultés peuvent être plus
grandes.
M. LAURIN: Mais le rapport d'United Engineers tenait compte des
difficultés des sols à certains endroits.
M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas la difficulté des sols, c'est
d'obtenir des sites.
M. LAURIN : Est-ce que vous êtes en mesure d'affirmer, M. Cahill,
à la suite de vos études, qu'il est véritablement plus
économique de bâtir des centrales nucléaires de 500
mégawatts plutôt que 800 ou 1000 ou 1200 mégawatts? Est-ce
que vous êtes en mesure maintenant d'affirmer ça?
M. CAHILL: Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, la
direction de la planification a fait des études concernant des groupes
de 800 mégawatts, ensuite des groupes de 500 mégawatts et ils ont
conclu qu'il n'était pas plus économique d'employer des groupes
de 800 que de 500 mégawatts. Donc, à partir de ces
conclusions-là, nous devons agir...
M. LAURIN: Est-ce que c'est une conclusion temporaire, provisoire ou une
conclusion définitive?
M. CAHILL: C'est peut-être que ce que nous projetons, lorsque nous
établissons un programme comme ça, c'est une image statique de ce
qui pourra se faire à l'avenir. Mais comme je vous dis, c'est une image
statique. La planification, c'est dynamique. Alors, on revoit chaque
année au fur et à mesure à la lumière des
expériences et des changements qui surviennent les programmes futurs et
nous faisons nos recommandations de projets à la lumière des
changements qui peuvent survenir.
M. LAURIN: Si l'an prochain, il y avait un nouveau bulletin de la
Federal Power Commission qui montrerait justement que les centrales de 1,100 ou
1,200 sont plus économiques c'est marqué dans ce bulletin
que nous avons reçu est-ce que vous n'êtes pas
engagés à partir du moment où la décision est prise
à continuer pour un grand nombre d'années dans une direction
donnée?
M. CAHILL: C'est-à-dire que nous serions engagés pour les
premiers groupes mais pas pour les groupes qui seront installés en 1982
ou 1983,1984 ou 1985, par exemple.
Parce que lorsque nous établissons un projet comme celui que nous
avons étudié pour faire une recommandation de certains projets,
nous ne recommandons pas de construire tout le programme, nous recommandons la
construction des premiers projets. Nous ne recommandons la construction des
projets qu'au fur et à mesure qu'il est nécessaire de le faire
pour que la construction soit terminée à temps pour respecter la
demande.
M. LAURIN: Peut-on dire également que si dans le programme qui a
été retenu, soit 37, on avait prévu la construction de
deux centrales nucléaires de 600 ou 800 mégawatts à
Gentilly plutôt qu'une, vous en seriez arrivés au même
résultat final puisqu'on peut penser que la construction de deux
centrales au lieu d'une contribuerait à abaisser les coûts?
M. CAHILL: C'est-à-dire que et M. Fournier pourra me
confirmer nous avons fait un programme, il doit être
indiqué dans le livre bleu que nous vous avons fourni, où nous
avons inclus un groupe nucléaire de 600 mégawatts tel que M.
Giroux vous l'avait dit il y a quelque temps, et lesfait d'ajouter ce groupe
nucléaire-là a légèrement augmenté les
coûts du programme. En ajouter un autre, évidemment cela aurait
tendance à augmenter davantage.
M. JORON: Est-ce qu'il n'est pas exact sur ce sujet-là que
lorsque les unités sont construites par groupe de deux, la
deuxième coûte passablement moins cher?
M. CAHILL: Nous avons tenu compte de ce fait-là. Le premier
coûte le plus cher, le deuxième coûte moins cher que le
premier, le troisième coûte plus cher que le deuxième et le
quatrième coûte moins cher que le deuxième.
M. LE PRESIDENT: Un instant, si vous vou-
lez. Je pensais à Shakespeare, je pensais à Macbeth, je
pensais â une contestation trop prolongée sur certaines questions.
Plusieurs députés ont demandé la parole; je voudrais tout
simplement sans enlever le droit de parole, que la commission et les membres
puissent reconnaître le droit des autres. Sans plus de commentaires, le
député de Shefford avait demandé la parole, j'ai vu une
demande ici il y a quelques instants. Peut-être pour quelques instants
pouvons-nous au moins entendre d'autres...
M. RUSSELL: M. le Président, je...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que les commentaires étaient
adressés au président?
M. JORON: C'est au minuscule député de Saint-Jean que
c'est adressé.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît.
M. VEILLEUX: J'aime mieux être minuscule à
l'intérieur qu'à l'extérieur.
M. LE PRESIDENT: S'il vous plaît, la parole est au
député de Shefford.
M. RUSSELL: M. le Président, depuis quelques minutes que je suis
ici, j'écoute les échanges de propos et je m'interroge sur le
rôle de la commission. J'écoutais le ministre de l'Industrie et du
Commerce qui semblait être bien informé en ce qui concerne les
données ou les recherches d'information que nous tentons d'obtenir de
l'Hydro-Québec. Je me demandais s'il n'était pas du mauvais
côté de la barre, s'il ne devrait pas être en arrière
pour nous fournir de l'information ou si on ne devrait pas demander à
l'Hydro-Québec de se retirer et que lui pourrait nous fournir toute
l'information, pour éviter tout ce débat, et éviter aussi
que l'Hydro-Québec, avec tout son personnel technique, perde un temps
énorme à tenter de nous fournir de l'information ici à la
commission. Je m'interroge et la réponse qui semble me venir, c'est que
le but poursuivi par la commission est que les membres qui forment cette
commission sont ici pour tâcher d'obtenir le maximum d'information
possible de l'Hydro-Québec ou de ses techniciens. Ils veulent savoir si
la décision prise par le gouvernement, indépendamment de sa
couleur politique, est la bonne. C'est dans ce sens que nous tentons de
travailler actuellement. On nous a soumis un rapport dans lequel nous posons
des questions. Pourquoi est-ce qu'on se limite à un ou deux types de
construction autre que la construction hydroélectrique ou hydraulique?
Pourquoi est-ce qu'on se limite à 500 mégawatts plutôt
qu'à 800 ou 1,000, plutôt qu'à un autre style qui pourrait
être employé ailleurs? Est-ce que l'Hydro-Québec peut nous
fournir ces détails? Sinon, je pense qu'elle doit clairement dire: Nous
ne possédons pas ces détails-là. Nous allons les obtenir
pour la commission, nous les fournirons au ministre des Richesses naturelles
qui, en d'autres occasions, pourra les présenter à la commission
et enfin nous éclairer, plutôt que de se tirailler.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais dire que, depuis trois quarts d'heure
déjà, les représentants de l'Hydro-Québec
s'efforcent justement de répondre aux questions que vous venez de
soulever. Cela fait trois quarts d'heure que l'on fait cela.
M. RUSSELL: Si le président veut me laisser terminer, ou je vais
lui laisser la parole, peut-être qu'il pourrait continuer mon
intervention pour en arriver â la conclusion. J'étais â
dire, M. le Président que je pensais que tel est leur rôle, ou
peut-être que les techniciens n'ont pas cru bon ou que les directeurs de
l'Hydro-Québec n'ont pas demandé à ces techniciens de
fournir ces études ou de les apporter avec eux ou de les faire
faire.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je m'excuse. Est-ce que le
député me permet une simple question? Est-ce que vous avez
passé à travers les multiples rapports déposés
à la dernière séance et qui tentent, je pense, de livrer
tout ce qu'il est possible de livrer sur les questions que vous soulevez? Je ne
pense pas qu'on puisse blâmer les techniciens de ne pas avoir fourni
l'information.
M. RUSSELL: M. le Président, encore là, je dis que le
ministre est à la mauvaise place. Il devrait être de l'autre
côté de la barre. Je ne blâme personne. Je ne tente
d'excuser personne. Je m'interroge simplement et je me dis ceci: Si ceci a
été oublié, cela ne donne rien de questionner ou de
s'interroger. Je dis clairement qu'on n'a pas les études ici en
main.
M. CARPENTIER: Elles sont loin d'avoir été
oubliées. Elles nous sont fournies depuis X temps.
M. RUSSELL: M. le Président, je me demande ce qu'a le
député. Est-ce que cela lui fait mal, est-ce qu'il a quelque
chose à défendre? Est-ce que l'Hydro-Québec a quelque
chose à faire défendre? Est-ce que je n'ai pas le droit de
m'adresser aux gens de l'Hydro-Québec?
M. CARPENTIER: Assurément, mais je pense que les simples
remarques que le ministre a, bien voulu faire tantôt démontrent le
bon sens de la question. Depuis un certain temps, tous les fonctionnaires de
l'Hydro-Québec tentent de démontrer par tous les moyens possibles
le bien-fondé des arguments qu'ils nous amènent. Je pense que si
quelqu'un a bien voulu écouter, les arguments qu'on nous a amenés
sont très valables.
M. RUSSELL: M. le Président, je vais tenter
d'être plus poli que le député. Je l'ai
écouté, je vais maintenant tenter de finir une fois pour toutes
mon intervention et donner la parole au député qui pourra
continuer dans cette même voie.
M. le Président, je pense que, de la façon que nous
procédons actuellement, cela va finir par une discussion avec des
accusations de part et d'autre, d'un côté et de l'autre, et on
n'aura pas plus d'information que nous n'en avons actuellement en lisant, comme
le disait si bien tout à l'heure le ministre de l'Industrie et du
Commerce, les documents qui nous ont été fournis. Est-ce qu'on
met en doute les documents? Je ne suis pas qualifié pour les mettre en
doute.
Etant un profane, je peux me questionner sur bien des réponses
que je trouve là-dedans et dans des magazines que je peux lire qui sont
émis par d'autres gouvernements, d'autres provinces ou d'autres pays.
Maintenant, je peux difficilement comparer les Etats-Unis avec le
Québec. Nous ne sommes pas dans un même climat, dans une situation
semblable; pas plus que si je tente de comparer même la province de
Québec à l'Ontario. Je veux terminer sur cette question et dire
que si nous ne sommes pas satisfaits des documents qui ont été
présentés ici, s'il y a des questions autres que celles-là
que nous voulons poser, nous allons les poser aux gens de
l'Hydro-Québec. Si ces gens-là ne peuvent pas y répondre
et que la commission, unanimement, majoritairement décide que c'est
important qu'on les ait, je pense qu'on est en droit de les demander et que
l'Hydro-Québec est peut-être en droit de les refuser. C'est une
question discutable. Actuellement, nous possédons beaucoup de
détails, beaucoup d'informations. Je répète que je
m'interroge sur beaucoup de ces informations qui nous sont fournies ici. Je
pense que c'est fait objectivement, mais je pense que c'est fait d'une
façon restreinte aussi, dans plusieurs domaines sur lesquels on a
posé des questions tout à l'heure.
Est-ce qu'on doit avoir un équipement de 800 plutôt que de
500? C'est évident qu'au point de vue de l'immobilisation, c'est comme
une grosse ou une petite machine. L'immobilisation est moins chère,
l'opération, totalement, est plus chère. Est-ce que s'il y a une
panne, la perte est plus forte avec 800 que 500? Oui, c'est vrai. Ce sont
toutes ces choses-là, mais ce sont toutes des choses qui peuvent se
mesurer et qu'on est en droit de savoir des techniciens qui devraient nous
fournir ces détails, cette information, pour démontrer, hors de
tout doute, qu'il n'y a aucune hésitation, que le choix qui a
été fait et la compilation de ces rapports sont justifiés
et justifiables. A ce jour, je pense qu'il y a eu une hésitation dans ce
domaine-là et c'est pour cette raison qu'on amène tant
d'interrogations. Si les gens de l'Hyrdo-Québec ne sont pas en mesure de
répondre objectivement, je suis prêt à proposer que la
commission s'ajourne sur ce point-là et qu'on continue à discuter
d'autres points. Si la commission veut avoir cette information et qu'on ne peut
pas la fournir, cela peut s'obtenir facilement.
M. GAUVREAU: M. le Président, je pense que la commission a
entièrement approuvé sa direction de la planification lorsque
celle-ci a présenté ses programmes. Ils ont dit: Nous avons
travaillé environ 75 programmes, nous en avons choisi douze typiques,
les plus significatifs et nous allons publier ceux-ci dans ce volume; nous
allons les étudier avec vous. Nous avons passé plusieurs heures
avec eux. Si le député Joron n'est pas satisfait et croit qu'il y
a encore un, deux ou trois programmes qui devraient être faits, qui ne
sont pas faits, je lui demanderais de les préciser. Et nous aviserons,
entre les deux séances, en vous consultant, si ce sont des programmes
qu'il est encore possible de bâtir et de faire, de les faire parvenir en
temps et lieu. Nous sommes convaincus d'avance que cela ne changera rien aux
conclusions.
M. JORON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Suite aux remarques qui viennent d'être
formulées... Je vous le permets.
M. JORON: Si vous me permettez, en enchaînant sur ces remarques et
sur celles, précédemment, du député de Shefford,
à ce moment-ci, j'aimerais faire une suggestion, pour apporter
l'éclairage supplémentaire et voir s'il y aurait
nécessité de bâtir les nouveaux programmes dont a
parlé M. Gauvreau: N'y aurait-t-il pas lieu de faire comparaître
des représentants de Atomic Energy of Canada, de United Engineers, de
Shawinigan Engineering et ainsi de suite? Je fais la demande aux membres de la
commission, qu'à une séance ultérieure, des
représentants de ces groupes soient invités à
comparaître pour répondre à nos questions sur ces
sujets-là. Merci.
M. SAINT-PIERRE: En faisant cette demande, est-ce qu'on veut simplement
témoigner qu'on n'a pas confiance à l'expertise qui est
disponible?
M. LAURIN: Absolument pas, M. le Président.
M. SAINT-PIERRE: Alors, c'est quoi? M. LAURIN : La raison est
très simple.
M. SAINT-PIERRE: On va faire venir M. Gray ici et qu'est-ce qu'il va
nous dire?
M. LAURIN: M. le Président, est-ce que j'ai la parole?
La raison est très simple, c'est que Atomic Energy of Canada a
des programmes qui fonctionnent depuis un certain nombre d'années. Ils
ont acquis une expérience, ils se tiennent, bien sûr, au courant
eux aussi de tout ce qui se passe
aux Etats-Unis. Ils ont des projets pour l'avenir. Ils sont en
consultation M. Giroux nous l'a dit à plusieurs reprises
constante avec les autorités de l'Hydro-Québec. Nous aimerions
pouvoir leur poser des questions directement sur ce qui fonctionne
déjà, en Ontario, sur les projets qu'ils ont ailleurs, pour voir
si cela ne pourrait pas éclairer notre discussion en cours.
Quant à United Engineers, si l'Hydro-Québec a eu la
sagesse à la suite de la dernière commission
parlementaire, alors que la cause du nucléaire semblait tellement bien
entendue l'an dernier de demander une étude à United
Engineers, et puisque nous avons cette étude et qu'elle nous a
été communiquée et que nous l'avons étudiée,
il est bien possible que nous ayions des questions à poser à ceux
qui ont préparé eux-mêmes les études.
On sait que ceux qui préparent eux-mêmes les études
ont souvent des arguments à nous faire valoir que peuvent ne pas se
rappeler, ne pas avoir mémorisés ceux qui les étudient
à un niveau supérieur. Il est bien possible que les
réponses qu'ils donneraient à nos questions pourraient
éclairer notre discussion puisque, en fin de compte, c'est aux
parlementaires et au gouvernement bien sûr, d'abord, à prendre les
décisions en dernière analyse. M. Nadeau l'a dit tout à
l'heure. Nous nous soumettrons aux décisions de l'Etat.
Mais l'Etat, ce n'est pas seulement le gouvernement. C'est aussi la
commission parlementaire. Il me semble que nous sommes simplement dans nos
droits, le droit d'être bien informés, le mieux informés
possible parce qu'il s'agit d'un projet du siècle comme on l'a
dit et qui engage l'avenir économique aussi bien
qu'énergétique du Québec pour de très longues
années.
Il me semble que ce n'est pas faire montre d'irrespect à
l'égard de l'Hydro-Québec que de demander d'être
informés le plus complètement, le plus minutieusement possible
avant qu'on puisse en arriver à une décision qui aurait le
mérite de rallier le consensus de tout le monde. Notre but n'est pas de
chercher noise à l'Hydro-Québec ni au gouvernement mais
simplement de prendre toutes les précautions pour en arriver à la
meilleure décision possible. Et c'est le sens de la proposition de M.
Joron.
M. SAINT-PIERRE: Pour juger du bien fondé de cette demande,
j'appellerais ça perdre du temps. S'il y en a qui, pour être bien
convaincus, doivent faire du filibuster.
M. LAURIN : Vous avez droit à votre avis.
M. SAINT-PIERRE: J'ai droit à mon avis et je vous respecte. Par
les pensées, c'est différent. Pour que la commission juge du bien
fondé de cette demande, parce qu'on pourrait penser à aller plus
loin, il ne serait pas nécessaire de faire comparaître des experts
français qui ont fermé la filiale nucléaire pour savoir
les raisons pour lesquelles en France, on a fermé la filiale
nucléaire.
M. LAURIN: Nous ne sommes pas allés jusqu'à ces
extrêmes.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais nous pourrions y aller. On peut dire
où on va aller.
M. JORON: Je voudrais savoir pourquoi ils ont 26 unités de 900
à 1,200 mégawatts actuellement . dans le programme qui est en
construction en France.
M. SAINT-PIERRE: Il va vous dire: J'espère que vous connaissez la
réponse. Ce sont des affaires assez élémentaires. Mais je
me demande si, justement, et avec une très bonne volonté pour
voir les requêtes, le Parti québécois ne pourrait pas nous
déposer les questions particulières qui font l'objet de ses
inquiétudes en cette matière? En fait, il me semble qu'on
implique des délais; on implique de faire venir 40 personnes ici pour
voir si c'est bien fondé. Est-ce qu'il n'y a pas possibilité
à l'intérieur, soit par des communications écrites ou
autres, que le personnel de l'Hydro-Québec obtienne des faits?
Est-ce que le doute que vous avez dans votre esprit pour
l'interprétation il s'agit bien d'une interprétation
puisque l'étude de United Engineers vous avait été
communiquée est-ce que c'est un doute sur l'interprétation
donnée par l'Hydro-Québec? Non? Est-ce très profond pour
une multitude de questions? Est-ce qu'on pourrait avoir la nature de votre
doute pour juger du bien fondé de retarder les gens de
l'Hydro-Québec et de les obliger à revenir à Québec
pour prolonger le débat?
Dieu sait qu'il n'y a pas un projet entrepris par un organisme
parapublic qui a été autant scruté que celui-là.
Est-ce qu'il faut le poursuivre davantage? Je suis bien ouvert. Mais j'aimerais
bien savoir exactement l'ampleur de votre doute et ce qu'on entend faire avec
ça. Est-ce que c'est simplement une plate-forme pour tenter de ranimer
un vieux débat et de lancer des rumeurs comme on continue d'en
lancer ou si c'est véritablement pour aller au fond des
choses?
Il y a quand même eu depuis un an vous l'avouez
vous-même tant sur le plan des études,
énormément de dépenses pour donner
énormément de réponses à plusieurs questions et
plus que jamais on en a eu dans les projets. Je vois seulement l'attitude du
Parti québécois sur SIDBEC, on ne pose pas beaucoup de questions;
personne ne s'interroge sur la nature du procédé, où on
met les colonnes et quel choix on a fait. Il me semble que c'est raisonnable,
avant que la commission se penche sur l'à-propos de faire venir ces
gens, de voir l'ampleur de votre doute et...
M. LAURIN : Je vous laisse, quant à moi, la paternité des
insinuations que vous faites à l'endroit de notre attitude.
M. SAINT-PIERRE: Les insinuations, c'est
moi; les faits, c'est vous qui en êtes les responsables.
M. LAURIN: Je pense quand même que l'attitude du Parti
québécois, depuis un an, a été très utile
pour l'évolution du débat. Cela a été noté
par plusieurs journalistes spécialisés, plusieurs
éditorialistes. Cela a pu amener une clarification du débat, la
poursuite de certaines études et surtout...
M. SAINT-PIERRE: Mais on pourrait...
M. LAURIN: ... cela a permis à la population de s'informer
davantage sur un projet qui . engage son avenir collectif et que la population
va payer avec ses taxes.
En ce sens il est absolument nécessaire qu'on s'entoure de toutes
les précautions.
M. SAINT-PIERRE: Mais dégager...
M. LAURIN: Quant à vos formules partisanes...
M. SAINT-PIERRE: Cela ne me convient pas...
M. LAURIN: J'ai la parole, M. le Président. Quant à vous
soumettre d'avance...
M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer au député de Bourget
qu'il pourra revenir, mais je cède la parole au représentant de
l'Hydro-Qué-bec et, immédiatement, je reconnaîtrai le
député d'Abitibi-Est qui attend depuis de nombreuses minutes.
M. GAUVREAU: Il me semble je ne sais pas ce que mes
collègues en pensent que cette convocation d'autres experts,
ça peut être possible mais je suis convaincu que ça
n'apportera pas de lumière. On a fait un très grand effort pour
vous démontrer qu'un programme c'est fait par l'utilisateur, par celui
qui connaît son réseau, qui connaît ses besoins. Il me
semble qu'on a fait un effort suffisant et puis même si ces
gens-là viennent ici élaborer davantage sur les chiffres qu'ils
nous ont fournis, ces chiffres doivent nécessairement être
évalués, interprétés et rajustés par nous et
c'est le travail qui a été fait depuis deux ou trois mois avec
une intensité qu'on n'a jamais vue dans le passé. Mais s'il y a
des programmes qui peuvent encore être faits, je pense que je suis
prêt à me réunir avec mes collègues à
l'interruption et on va discuter ensemble, voir si vraiment, mais il faudrait
que la question soit très précise et on le verra.
Mais faire venir ces gens-là, ils ne refuseront pas de venir, il
y en a qui ont déjà offert de venir mais c'est du temps perdu.
Parce qu'ils ne vous donneront pas satisfaction, ça va être encore
plus confus après.
M. SAINT-PIERRE: Il me semble que dans ce secteur...
M. BOURBEAU: On peut éclaircir ça davantage pourvu
que...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député d'Abitibi-Est.
M. TETRAULT: Merci, M. le Président, quant à nous, je
partage les paroles du ministre de l'Industrie et du Commerce et du
représentant de l'Hydro-Québec. Je crois que l'on s'engage dans
un débat inutile et que tout ce que l'Hydro-Québec a pu nous
fournir en documentation, tout ce qui a été écrit, le pour
et le contre, tout ce qui a été fait depuis un an ou depuis 1970,
en ce qui concerne le développement de la baie James, pour les
ressources hydro-électriques est bien fondé. Nous croyons
sincèrement que 1'Hydro-Québec est venue très bien
préparée et si l'on va jusqu'à aller chercher n'importe
quel individu qui aurait pu présenter une thèse sur le
développement des ressources hydro-électriques comparativement au
nucléaire et au thermique, on pourrait peut-être ensuite faire
venir certains économistes peu responsables pour venir nous dire que le
nucléaire peut-être serait meilleur que le thermique en l'an
2595.
Je crois que, présentement, avec ce que l'on a, c'est une perte
de temps globale, on s'achemine vers un point qui veut défendre soit une
position de partie ou une autre. C'est futile et on devrait commencer à
se pencher sur' le problème de la construction du développement
de la baie James, la rivière La Grande. Après ça arriver
et dire si on est pour ou contre. Si on est contre, on entre en Chambre et on
fera le débat mais ici, faire venir experts par-dessus experts parce
qu'un expert favorise le nucléaire pour sauver quelque
intérêt que ce soit et l'autre favorise le thermique, que l'autre
favorise l'idée qu'on va prendre les rayons du soleil, faire
évaporer l'eau et la force et tout ça pour faire de
l'énergie, on va être ici jusqu'à l'an 2000.
M. JORON: Et les moulins à vent aussi.
M. TETRAULT: Les moulins à vent, on peut retourner aux
bicyclettes à pédales pour faire de l'énergie. On pourra
prendre tous les moyens pour dire que l'Hydro-Québec n'est pas
rentable.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: M. le Président, je trouve très drôle
l'attitude du Parti québécois dans cette affaire, étant
donné qu'il cherche à se poser en expert pour analyser les
données.
M. JORON: Je serais tenté de soulever une question de
privilège.
M. PERREAULT: Privilège...
M. JORON: Vous me prêtez des intentions et des prétentions
surtout...
M. PERREAULT: Pas des prétentions, parce que vous... La direction
de la planification de l'Hydro est celle qui doit évaluer les
différentes sources d'énergie, qui doit tenir compte non
seulement de la construction mais de l'exploitation du réseau et ce ne
sont pas des experts qui viendraient ici, qui n'auraient pas les connaissances
du réseau de l'Hydro-Québec dans la province, qu'ils soient de
l'Energie atomique du Canada, qu'ils soient des Etats-Unis;
l'Hydro-Québec doit donc faire une estimation et regarder en fonction de
son réseau et toutes ces données dont vous parlez, qui ont
été analysées par le service de l'Hydro-Québec, et
je ne vois pas que ce que les experts de l'Hydro-Québec ont fait en
plusieurs mois pourrait être fait ici par les parlementaires en quelques
jours, sans les connaissances requises. A moins que vous ne prétendiez
que vous avez les connaissances, que vous avez plus de connaissances que les
experts de l'Hydro-Québec.
M. JORON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT (M. Séguin): Le député de
Gouin.
M. JORON: ... notre proposition tient du fait je serais
tenté de citer un autre dicton, on dit qu'un chat échaudé
craint l'eau chaude je rappellerai tout simplement que l'année
dernière l'eau chaude ou l'eau froide...
M. LEGER: L'eau lourde!
M. JORON: A partir du fait que l'année dernière, suite
à des questions justement que l'on posait à M. Giroux on avait eu
des réponses et on pourrait se référer au journal
des Débats à l'effet que les connaissances qu'avait
l'Hydro-Québec à ce moment-là sur le nucléaire
pouvaient leur permettre de juger dès cet instant que les avantages
comparatifs étaient en faveur de l'hydraulique et qu'il fallait tout de
suite commencer le développement de la baie James.
En moins de deux semaines, après la séance de cette
commission parlementaire, en date du 3 juin 1971, pour être
précis, M. Cahill et ce souci de responsabilité honore
l'Hydro-Québec écrivait une lettre à la firme
United Engineers & Constructors Inc. pour faire faire une étude sur
le coût du nucléaire. Cela, c'était deux semaines
après qu'on nous avait dit qu'il y avait suffisamment d'information. A
d'autres égards, également, toutes les études qui ont
été faites depuis, si vous vous référez surtout
à ce que nous connaissions de la rivière La Grande au moment des
séances de la commission parlementaire de l'an dernier je me
réfère au rapport intérimaire soumis par
l'Hydro-Québec qui montrait l'étendue des études et
relevés faits sur la rivière La Grande, sur la rivière
Eastmain il n'y avait à peu près rien de fait sur la
rivière La Grande. Alors, cela voulait donc dire quelque chose...
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, question de privilège.
Parce que l'autre jour, on a fait soulever la question, sortir les documents
qui n'avaient pas été rendus publics l'an dernier pour trouver
que le projet de la rivière La Grande et je pose la question
à M. Boyd avec 800 mégawatts, que l'on retient
aujourd'hui, c'est exactement, à très peu de choses près,
à 99 p.c. près, le même aménagement que nous avions
il y a un an, lorsque la commission siégeait ici. Dans la plus grande
perception des faits. C'est cela, la vérité.
M. JORON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît.
M. JORON: M. le Président, c'est moi qui avais la parole au
moment...
M. SAINT-PIERRE: Vous affirmez des choses.
M. LE PRESIDENT: Il y a eu référence à un individu,
soit M. Boyd. M. Boyd m'a demandé la parole. Est-ce que nous pouvons lui
permettre de faire des commentaires?
M. BOYD: C'est parce que j'aimerais répondre à quelques
questions du député Joron en commençant par la
dernière. Il est vrai qu'après la commission parlementaire de
l'an dernier, l'Hydro-Québec, par l'intermédiaire de M. Cahill, a
demandé une étude à la firme UE & C. Ce n'est pas
parce que nous doutions des chiffres que nous avions avancés au moment
de la commission parlementaire. C'est parce que nous voulions avoir un document
qui pouvait donner de la substance à ce que nous avions avancé.
Parce que ce que nous avions avancé était basé sur
l'expérience des autres. Nous avons dit : L'expérience des autres
nous semble un peu faible comme argumentation, nous allons donc demander une
étude des experts. Nous avons l'étude. L'autre point est que je
comprends bien difficilement que l'on fasse venir beaucoup d'autres personnes.
Nous avons démontré, depuis que nous sommes ici, que nous
voulions répondre à toutes les questions; et nous pouvons le
faire aussi longtemps que vous le voulez. Mais les commissaires, dans la
présentation qui a été faite par le président, ont
unanimement démontré qu'ils étaient
intéressés au nucléaire. Je suis commissaire
moi-même et on a laissé entendre que j'étais contre le
nucléaire. Je ne suis pas du tout contre le nucléaire. Je pense
que c'est une des choses de l'avenir. En ce qui concerne le nucléaire
canadien, nous avons demandé à l'AECL de nous faire une
proposition pour une unité. Ce sont eux-mêmes qui ont choisi de
nous proposer 600 mégawatts. C'est parce que c'est la même
unité qu'ils présentent dans différents pays et c'est
l'unité en laquelle ils ont confiance; c'est celle-là qu'ils nous
présentent. Et nous l'acceptons.
M. JORON: Est-ce que c'est celle que vous leur avez demandée?
M. BOYD: Nous, nous ne l'avons pas demandée. Ce sont eux
qui...
M. JORON: Vous n'avez pas spécifié.
M. BOYD: Ce que nous aurions aimé, en fait, c'est une
unité du même type que Gentilly, mais avec une puissance plus
grande. Ils nous ont dit: Nous ne sommes pas prêts à extrapoler
Gentilly plus haut que ce qui existe à Gentilly pour le moment. Ce que
nous pouvons vous offrir d'intéressant, c'est un 600 mégawatts du
type Candu. Alors, c'est la proposition que nous avons. M. Giroux vous l'a dit
l'autre jour, il reste à discuter avec eux des termes, des conditions,
etc.
Quant aux grosseurs des 800 mégawatts, je pense que M. DeGuise
vous a dit tout à l'heure que, d'après le rapport de l'UE &
C, qu'on aille à 500 ou qu'on aille à 800 américains, la
différence est minime. Elle n'influencerait pas un programme. En plus de
cela, nous sommes pour le nucléaire, qu'on en fasse un groupe ou deux
groupes, cela ferait notre affaire.
Mais, au moment où on a parlé à l'AECL, il
n'était pas tellement prêt à nous en offrir deux. Il y a
des problèmes d'eau lourde dans le moment puis certainement que la
commission n'aurait pas voulu s'engager pour 10,000 mégawatts de
nucléaire pour la période 1978 à 1985 parce que ça
aurait été très risqué pour ne pas dire davantage
de mettre autant d'oeufs dans le même panier. Mais tout ça ne veut
pas dire qu'on n'a pas confiance au nucléaire, on a confiance, on en
ajoute un autre groupe, on l'étudié, on espère que
ça va déboucher et ça va déboucher. Je ne comprends
pas encore tellement, mais si on peut faire d'autres programmes, on en fera
d'autres.
M. JORON: Vous avez mentionné, par exemple, vous avez fait
allusion à l'étude de UE & C. Le tableau 2 de l'étude
qui nous a été remise, par exemple, montre une différence
selon la taille des unités de 520 ou de 820 variant en moyenne, pour
l'année 1980, passant de 9.1 dans le cas des unités de 500
à 8.4 dans le cas des unités de 800. Il y a quand même une
différence assez substantielle de 0.7 mills, 7/10 de mills. On n'a pas
les chiffres puisque l'étude ne demandait pas de le faire sur des
unités de mills.
M. DEGUISE: Pardon, M. le député, avez-vous dit le tableau
2?
M. JORON: Oui, le tableau 2 qui suit la page...
M. DEGUISE: Vous n'avez pas le rapport UE & C à ce
moment-là.
M. JORON: Preliminary cost estimates nu- clear and fossil fuel power
plants United Engineers. C'est ce qui a été déposé
la semaine dernière.
M. DEGUISE: Si ça réfère à la même
table 2 que dans le rapport de UE & C, il n'y a pas de réserve dans
ces cas-là. Alors lorsqu'on compare un 500 et un 800, le fait qu'avec
800 il faut mettre plus de réserve n'est pas
réflété dans les chiffres.
M. JORON : Vous n'avez pas de réserve, ni dans un cas ni dans
l'autre...
M. DEGUISE: C'est ça.
M. JORON: ... à ce moment-là, je veux dire que la
réserve dans les deux cas augmente proportionnellement aux deux...
M. DEGUISE: Pas proportionnellement.
M. JORON: Pas proportionnellement, oui, peut-être en raison des
réserves supplémentaires pourvu que la réserve soit
toujours faite en nucléaire et non pas en thermique.
M. DEGUISE: Pardon, si vous lisez le rapport de UE & C, il a
été convenu entre eux et nous que la réserve était
faite avec du thermique qui demandait un minimum d'investissements. Je pense
que pour répondre à une question de base, pourquoi on n'a pas
poussé davantage à 800, c'est que je crois qu'on pourrait vous
établir assez rapidement sans faire un gros programme que le coût
de la réserve additionnelle, 800 et 500, dépasse
l'économie d'investissements. Le problème se résume dans
ces deux mots-là. En allant à des plus gros groupes, admis que
les frais d'investissements sont diminués, mais leur réserve
augmente proportionnellement tellement plus vite que ça annihile
l'économie dans les frais d'investissements.
M. JORON : Sur cette augmentation de la réserve...
M. DEGUISE : Maintenant on peut dire ou on peut alléguer, on peut
différer d'opinion sur le montant de la réserve, mais il ne faut
pas oublier que nous l'examinons dans l'optique d'une comparaison avec un
programme hydraulique que nous savons être entièrement
sécuritaire. Alors si on veut comparer deux choses sur la même
base il nous faut, avec la réserve suffisante, rendre le programme
absolument sécuritaire pour qu'il se compare à l'hydraulique.
M. LE PRESIDENT: Le député de Verchères.
M. SAINT-PIERRE: Je ne sais pas, M. le Président, si on peut
terminer un peu sur ceci, le député de Gouin me permettra
peut-être à la
blague de dire qu'il devrait changer de parti politique car vraiment,
dans ce secteur, moi, je suis convaincu que nous sommes vraiment maîtres
de nos données, de la perception des choses et qu'après toutes
les études qu'on a eues, on n'a pas besoin d'avoir d'Américains
ou de président de 1'Atomic Energy venir nous redire ce qui a
déjà été déposé ici.
Si on n'est pas dans ce secteur vraiment maîtres de
nous-mêmes et qu'on a besoin des Américains, je suis pas mal
sceptique pour finir la lecture d'un livre que j'ai commencé.
M. LE PRESIDENT: Je n'étais pas au courant du tout de la question
ou du commentaire du député de Verchères. Donc le
député de Gouin avait la parole.
M. LAURIN: M. Boyd nous avait dit tout à l'heure que ce n'est pas
vous qui avez demandé la centrale de 600 mégawatts à
Gentilly. Cela vous a été offert par Atomic Energy of Canada?
M. DEGUISE: Si vous permettez. C'est moi qui ai participé
à la négociation. La déclaration de M. Boyd est exacte et
il faut la préciser. Nous avons demandé à Atomic Energy of
Canada si nous faisons une centrale nucléaire, c'est pour 1978 ou 1979.
Il nous faut quelque chose d'absolument sécuritaire parce que dans ces
années, nous avons un déficit de pointe. Alors nous voulons
être certains que cela va fonctionner, aussi certains que vous pouvez
l'être. Ils ont dit: Dans ces conditions, nous vous recommandons un
groupe de 600 mégawatts qui est l'expérience de Pickering que
nous connaissons à quelques variantes près. Cela ne veut pas dire
que le groupe de 750 mégawatts qu'ils font pour Bruce ne fonctionnerait
pas. Si vous nous demandez une expérience vécue, on vous
recommande du 600 mégawatts.
M. LAURIN: Est-ce que vous avez eu l'idée de demander deux
centrales de 600 mégawatts au lieu d'une?
M. DEGUISE: Nous avons des prix pour deux, pour quatre. Evidemment, il y
a une économie sur la deuxième. Comme on vous l'a dit tout
à l'heure, le fait d'introduire un groupe nucléaire dans des
périodes où c'est plutôt la pointe qui prédomine
nous force déjà à un certain investissement additionnel.
Autrement dit si c'était uniquement de la pointe qu'on cherchait, on
devrait y aller en thermique. Pour toutes sortes d'autres raisons, pour se
tenir à l'avant en technique nucléaire et pour utiliser
pleinement notre personnel, on recommande de faire un groupe nucléaire.
En faire deux empirerait légèrement la situation sur le plan
économique. C'est une affaire qui peut fort bien être
révisée dans quelques années suivant l'expérience
de Pickering.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Ce n'est pas un expert en matière
d'aménagement hydro-électrique ni en matière
nucléaire qui prend la parole. Après avoir examiné le plus
possible il y a évidemment toujours une question de temps
à notre disposition les rapports que nous ont soumis les gens de
l'Hydro-Québec et après avoir écouté avec le plus
d'attention possible les réponses obtenues aux nombreuses questions
posées de part et d'autre, en ce qui nous concerne, nous en venons
à la conclusion qu'étant donné les circonstances, nous
favorisons le développement tel que proposé pour trois raisons
particulières. Il y en aurait d'autres aussi; mais premièrement
parce qu'il nous apparaît à l'heure actuelle que, se lancer dans
le nucléaire au Québec, il y aurait une dépendance en ce
qui a trait à l'approvisionnement de l'eau lourde. Dans les rapports
soumis et par les études faites, on a semblé nous dire
qu'à ce moment l'eau lourde pourrait constituer un réel
problème. La preuve c'est qu'à Gentilly on a dû fermer
à cause de cela. Deuxièmement, il y a lieu de profiter de la
vaste expérience acquise par tout le personnel de l'Hydro-Québec
en matière hydro-électrique.
Les rivières, nous les avons. Les barrages, nous pouvons les
construire. Si nous sommes vraiment maîtres chez nous comme
quelqu'un nous l'a dit il est évident que nous sommes au
Québec, à l'heure actuelle, en utilisant des ressources
premières du Québec.
Je termine en disant que le développement de cette région,
en matière hydro-électrique va certainement contribuer à
accentuer le développement minier, le développement d'autres
ressources qui, sans équivoque, sans aucune
arrière-pensée, je suis convaincu, contribuent à un essor
économique assez considérable pour le Québec. Alors, je
pense que selon les renseignements que nous avons, selon les décisions
qui semblent avoir été prises, en ce qui nous concerne, pour les
trois raisons principales que nous venons de mentionner, cela semble nous
satisfaire. C'est pourquoi je pense que mon collègue d'Abitibi-Est est
de la même opinion, nous sommes de la même opinion, de ce
côté-là et nous optons pour ce projet. Maintenant, il est
évident, je l'ai dit et le président a peur que je parle de la
finance, nous allons y revenir, parce que sur ce point nous allons certainement
avoir quelque chose à dire.
M. LE PRESIDENT: Les membres de la commission sont appelés en
Chambre, les cloches ont sonné tout à l'heure, il faut se rendre
de l'autre côté. Dois-je comprendre qu'à ce moment-ci nous
terminons le programme d'équipement?
M. JORON : M. le Président, je crois que vous avez l'intention de
suspendre jusqu'à huit heures?
M. LE PRESIDENT: Huit heures et quart.
M. JORON: Nous n'avons pas de très longues questions encore, mais
je préférerais que l'on termine au moment ou l'on
reprendra...
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on peut arriver à une entente, par
exemple qu'à 8 h 30 on pourra prendre la question gestion?
M. JORON: Cela peut-être 29 ou 31.
M. LE PRESIDENT: 29 ou 31 je ne suis pas regardant, ou 35, oui.
De toute façon, je ne permettrai aucune question qui a
déjà été posée et je ne permettrai aucune
question à laquelle on a déjà répondu.
M. BOURASSA: On vous fait confiance. M. LE PRESIDENT: D'accord.
(Suspension de la séance à 17 h 50)
Reprise de la séance à 20 h 23
M. SEGUIN (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
Le député de Gouin.
M. BOURASSA: Est-ce qu'il a des révélations à
faire, le député de Gouin, ou bien s'il va se ranger à
l'avis de la presque totalité?
M. JORON: Attendez! Vous ne perdez rien pour attendre. Cela s'en
vient!
M. BOURASSA: Nous vous écoutons.
M. JORON: M. le Président, j'ai une seule intervention à
faire. Je voudrais résumer les dernières questions qu'il nous
reste à poser en une seule intervention. Je vais toutes les poser d'un
coup, comme cela, pour les résumer. Quand on aura entendu les
réponses, s'il y en a, à ces questions, je vous demanderai la
permission d'intervenir une dernière fois pour conclure, une fois pour
toutes, sur cette question des choix de programmes d'équipement.
M. LE PRESIDENT: J'ai compris. Un résumé, d'abord.
M. JORON : C'est cela.
M. LE PRESIDENT: Allez-y
M. JORON: Les questions que je voudrais poser sont de deux natures. Les
unes s'adressent à l'Hydro-Québec, les autres s'adressent aux
membres de la commission. Je voudrais demander aux représentants de
l'Hydro-Québec, au sujet de La Grande, s'ils sont en mesure
d'établir, pour le bénéfice du public et le nôtre
aussi, avec le plus de certitude possible, les coûts qui nous sont
présentés dans le programme 37. Les questions que je vais vous
poser sont les suivantes:
Est-ce que toutes les études pertinentes permettant
d'établir les coûts de façon finale ont été
faites? Je vous signale, sans en faire une citation exhaustive, que ce qui nous
fait poser cette question, c'est le fait que, l'année dernière,
d'après les documents qui avaient été
déposés par l'Hydro-Québec, par exemple, on voyait, au
chapitre des études et des relevés qui avaient été
faits, jusqu'en 1970, sur NBR, par rapport à La Grande
c'était à la séance de la commission, en 1971
photos aériennes: 20,500 dans le cas de NBR et 150 dans le cas de La
Grande; feuillets de topographie: 1,000 dans le cas de NBR et 25 dans le cas de
La Grande; superficie topographiée: 8,350 milles carrés dans le
cas de NBR et rien dans le cas de La Grande; forages d'exploration: 100 dans le
cas de NBR et zéro dans le cas de La Grande et ainsi de suite. En fait,
il y a à peine un an, fort peu d'études avaient été
faites sur La Grande. Nous sommes surpris, agréablement, d'une part,
de l'étendue des études qui ont été faites
dans un délai aussi court. Cependant, ce que nous nous demandons, c'est
si, dans ce délai assez court, on a pu véritablement faire tout
ce qu'il fallait pour établir les coûts d'une façon
définitive. C'est une première question.
Une deuxième question. Je veux demander si l'Hydro-Québec
peut se porter garante des études qui ont été faites par
des firmes privées, en l'occurrence Rousseau, Sauvé et Warren,
quant au coût ou si elle pense, dans les mois qui viennent,
réviser à nouveau ces coûts?
Et en troisième lieu, si l'Hydro-Québec peut assurer
contre des éventuels dépassements de coûts, dans quelle
mesure ces coûts-là peuvent leur apparaître comme
définitifs?
M. BOURASSA: Juste pour essayer d'éclaircir la question du
député, les études ont été faites en ayant
en vue un certain taux d'intérêt. Ce que le député
demande aux commissaires de l'Hydro-Québec, c'est qu'ils puissent
garantir que l'évolution de la situation internationale serait telle que
les taux... Mais ça revient à ça.
M. JORON: Ce n'est pas du tout ce que ça revient à dire.
Présumant les mêmes taux d'intérêt tels qu'ils ont
été normalisés dans toutes les autres études.
M. BOURASSA: Il me semble moi que...
M. JORON: Avec les mêmes hypothèses de base, j'aurais
dû peut-être spécifier je remercie le premier
ministre de la précision que les autres études ont
été conclues. Ceci pour les questions.
Ensuite, je voudrais demander à l'Hydro-Québec de faire
parvenir aux membres de la commission des exemplaires des programmes
numérotés qui n'apparaissaient pas, s'il en existe,
c'est-à-dire en l'occurrence 21, 22, 24, 25, 26.
Deuxièmement, je demanderais à l'Hydro-Québec s'il
y a possibilité, dans les mois qui viennent, d'établir de
nouveaux programmes, ou s'ils existent déjà de fournir
ceux-là, trois sortes, basés sur un programme nucléaire
à base d'unités de 800 mégawatts d'une part, de 1,000
mégawatts d'autre part, et finalement un certain nombre, à leur
choix, de programmes mixtes, c'est-à-dire pas des programmes
exclusivement nucléaires comme l'étaient le 20 et le 23, mais des
programmes à prédominance nucléaire, et qui incorporent
soit du thermique ou soit de l'hydraulique secondaire.
La dernière question adressée à l'Hydro serait:
Est-ce que vous avez étudié la possibilité de bâtir
d'abord 4 unités de 600 mégawatts, ou de 750 comme il est en
train de se faire à Bruce, et de reporter d'un an le début des
travaux sur La Grande? Est-ce que cette possibilité existe? Et
êtes-vous prêts à l'étudier? Je résume tout
d'un paquet; Je pense que ça va accélérer les travaux, si
on veut en finir avec cette question d'équipement le plus tôt
possible. Cela c'est pour la partie qui s'adressait à l'Hydro.
Pour la partie qui s'adresse aux membres de la commission, je vais leur
demander si la commission serait prête à se réunir à
nouveau, si l'Hydro-Québec acquiesce à ces demandes ou s'ils sont
en mesure de fournir ces nouveaux programmes que j'ai esquissés,
dès que ces programmes seraient prêts, pour qu'on les
étudie? Ceci peut peut-être vouloir dire, à toutes fins
pratiques, à l'automne, j'imagine.
En même temps, à cette séance de la commission dans
quelques mois, nous pourrions faire comparaître, sur le sujet du
nucléaire canadien, 1'Atomic Energy of Canada et, sur le
nucléaire américain, l'United Engineers & Co.
M. GAUVREAU: Alors, pour ce qui est de La Grande je
réponds comme commissaire, pas comme spécialiste je vous
dis que nous sommes moralement satisfaits, que toutes les études
suffisantes ont été faites pour être convaincus que c'est
la bonne décision.
Je pense que M. Cahill va vous donner des précisions
supplémentaires là-dessus.
M. BOURASSA: La deuxième question dépend de la
réponse à la première.
M. JORON: Oui.
M. BURNS: C'est pour ça peut-être qu'il vaudrait mieux
laisser les gens de l'Hydro répondre avant.
M. BOURASSA: C'est ce que je fais exactement.
M. BURNS: D'accord, c'est ce qu'on avait compris, mais, vous autres,
ça vous prend pas mal de temps.
M. VEILLEUX: Avec le temps on va vous avoir.
M. SAINT-PIERRE: Dans cinq ans vous allez être maître du
domaine hydro-électrique.
M. BOURASSA: Le chef du clan...
M. BURNS: Cela serait beaucoup plus que bien des ministres actuels.
M. BOURASSA: Le député de Bourget, le chef du clan
hydraulique dans le Parti québécois, n'est pas présent ce
soir?
UNE VOIX: Du clan hydraulique!
M. BURNS: Il s'occupe de votre ministre qui est à la veille de
démissionner aux Affaires sociales.
M. BOURASSA: Vous en avez quelques-uns dans votre parti comme ça
qui sont...
M. BURNS: Non, c'est plutôt le contraire. Vous n'avez pas
remarqué que ça augmente plutôt, depuis quelque temps? Il y
a même des sous-ministres qui s'en viennent chez nous.
M. BOURASSA: Les menaces de démission de votre chef, c'est
périodique ça.
M. VEILLEUX: Ceux-là, on vous les laisse avec plaisir.
M. BURNS: Oui, mais ce n'est pas ce que vous disiez quand ils partaient,
par exemple. En tout cas...
M. LE PRESIDENT: Je voudrais faire remarquer au public ici
présent que tout ce qui se passe à ce moment-ci ne fait pas
partie des travaux de la commission.
M. BURNS: M. le Président, je dois tout simplement vous dire et
vous faire remarquer que ce n'est pas nous qui avons commencé à
discuter de ce problème mais, selon son habitude, c'est le premier
ministre qui a lancé des petites choses.
M. LE PRESIDENT: Je suis certain que le député ne voudra
pas m'obliger à prendre une décision.
M. BURNS: Non, vous seriez trop gêné, M. le
Président, vous seriez trop mal à l'aise.
M. LE PRESIDENT: Je n'ai pas voulu interrompre le débat en
cours.
M. BURNS: C'était pour remplir le vide créé par la
restriction de l'Hydro.
M. BOYD: C'est ça. Cela nous a permis de trouver des
réponses. Alors, pour la première question, à savoir si
les études pertinentes permettant d'établir les coûts ont
été faites, on peut répondre qu'on a fait suffisamment
d'études sur La Grande et la NBR depuis la commission de l'année
passée pour nous justifier de commencer par La Grande.
Les prix unitaires que l'on retrouve dans les différentes
études, soit celles de l'Hydro-Québec, de ABBDL ou de RSW, nos
ingénieurs les ont étudiés. Nous avons confié un
mandat à Shawinigan Engineering, qui a fait une relation entre les deux
et qui nous rapporte que les estimations ou les coûts unitaires sont dans
l'ordre qui convient. Elle nous suggère un ajustement en moins dans un
cas et en plus dans deux cas, ce qu'on a fait.
Tout cela a ensuite été passé à Ebasco, qui
aussi nous a dit que les coûts unitaires employés par les firmes
ainsi que par l'Hydro-Québec sont dans l'ordre. Je pense que cela
répond à la deuxième question. L'Hydro-Québec
peut-elle assurer qu'il n'y aura pas de dépassement éventuel?
Nous ayons pris un certain nombre de précautions. Nous avons
prévu, comme vous le savez, 4 p.c. d"'escalation" et on a inclus 12 p.c.
d'imprévus. Nous avons employé un taux d'intérêt de
8 1/2 p.c. Si les conditions financières et 1'"escalation" sont de cet
ordre-là, la possibilité de dépassement est pas mal
diminuée. En fait, elle ne devrait pas exister avec 12 p.c.
d'imprévus.
C'est beaucoup plus qu'on a employé jusqu'à présent
dans nos autres projets.
M. JORON: C'est-à-dire qu'à ce moment-là cela vous
permettrait de vous porter garant des projections de coûts fournies par
les firmes privées que vous avez mandatées?
M. BOYD: On a fait faire plusieurs études. Nos ingénieurs,
Shawinigan Engineering et Ebasco ont tous revu ces coûts unitaires.
M. DEGUISE: Est-ce qu'on pourrait vous relire rapidement la conclusion
no 10 du rapport d'Ebasco? Elle se lit comme suit? Les coûts estimatifs
préparés par l'Hydro-Québec, RSW et ABBDL,
coordonnés et rectifiés par la société Shawinigan,
semblent bien correspondre aux déboursés globaux
qu'entraînerait la construction des projets selon les prix en vigueur au
1er juillet 1971.
Il est très difficile de prédire avec certitude le niveau
des taux d'intérêt et d'escalade.
Ces taux varieront sûrement pendant la période des quatorze
ans que durera la construction du projet. Les taux utilisés indiquent
l'ampleur relative des capitaux en jeu relativement au coût estimatif au
1er juillet 1971.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, j'aurais peut-être une
question à poser à l'Hydro-Québec avant de conclure sur le
programme d'équipement. Est-ce qu'effectivement il y a
accélération des travaux sur le chantier, depuis les travaux
d'étude et de recherche à l'automne 1970 pour l'ensemble de la
baie James, sans être nécessairement sur la rivière La
Grande? Est-ce que l'Hydro-Québec a accéléré son
rythme d'étude à cette époque?
M. BOYD: Certainement, nous avons accéléré
considérablement, oui. Et les montants des dépenses que nous vous
avons indiqués précédemment sont une preuve assez
évidente qu'on a accéléré considérablement
les travaux.
M. SAINT-PIERRE: Cela c'était en septembre, octobre 1970, avant
même que le projet soit annoncé. C'était dans quelles
perspectives qu'on avait accéléré les travaux?
UNE VOIX: M. Cahill a les chiffres.
M. CAHILL: Durant l'année 1971, nous avons dépensé
$28 millions, soit en études, soit en relevés techniques sur le
terrain alors que, pendant toutes les années précédentes,
nous avions dépensé environ $8 millions.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que ça donnait suite à une revue
interne de l'Hydro-Québec de voir dans la baie James, à l'automne
1970, des perspectives qu'on pouvait combler les besoins de
l'Hydro-Québec, surtout à partir de la baie James, ou est-ce que
c'était pour explorer plus à fond ce qu'offrait le potentiel de
ces rivières?
M. CAHILL: C'était pour mieux évaluer et le potentiel et
les coûts d'aménagement de ces rivières.
M. SAINT-PIERRE: Une deuxième question, M. le Président.
Dans les journaux de fin de semaine je le dis ici pour permettre
d'établir ou de rectifier des faits ou de mauvaises impressions
certains se posaient des questions, on a parlé à la
dernière séance d'une volte-face de l'Hydro-Québec. M.
Giroux nous avait expliqué enfin que dès qu'il y avait une
économie il était prêt à faire volte-face. Comment
peut-on expliquer le fait que les $8 millions que vous avez mentionnés
avaient surtout été dépensés sur les
rivières NBR et que, par après, on arrive avec le complexe La
Grande? Quelle en est l'explication? J'ai vu moi-même dans quelques
journaux qu'on soulevait un point d'interrogation sur ce point particulier du
projet.
M. CAHILL: Je ne crois pas qu'il y ait eu volte-face. Lorsque
l'Hydro-Québec a commencé, à ce moment-là je
n'occupais pas le poste que j'occupe, à faire les études sur les
rivières de la baie James, il était peut-être logique,
classique de commencer par les rivières qui étaient le plus au
sud parce que les lignes de transport évidemment étaient plus
courtes et qu'il était plus facile d'accéder aux rivières
du sud qu'aux rivières du nord.
Mais, tout de même, nous avions dépensé $1,800,000
en relevés techniques sur le terrain pour La Grande et en études
au bureau. Mais, en 1967 ou 1968, si ma mémoire est bonne, les
crédits ont été relativement coupés pour faire les
études sur la baie James, parce que les promesses étaient
tellement bonnes pour l'énergie thermique conventionnelle classique et
l'énergie nucléaire qu'on a pensé, pendant un certain
temps, qu'il ne serait pas économique d'aménager la baie
James.
Cela ne veut donc pas dire qu'éventuellement nous n'aurions pas
trouvé qu'il était préférable de commencer par La
Grande, plutôt que de commencer par les rivières du sud. Donc, je
ne vois pas de volte-face dans la recommandation qui a été
faite.
M. SAINT-PIERRE: Effectivement, si on se reporte à la
période particulièrement de l'automne 1970 jusqu'aux travaux de
la commission en 1971 je ne sais pas à quelle date, mais avant le
29 avril, de toute façon vous aviez fait suffisamment
d'études pour être capables d'avoir, avec assez de
précision, l'ordre de grandeur du potentiel qu'offrait la baie James. Si
je comprends bien, parce que l'Hydro-Québec avait déjà
commencé des études sur les rivières Nottaway, Broadback
et Rupert, on a poursuivi, comme équipe technique, l'ensemble de cet
aménagement, confiant à d'autres groupes le potentiel de la
rivière Eastmain et de la rivière La Grande.
En d'autres termes, il y a un an, il n'y avait pas une recommandation
fixe pour un type de programme, mais il y avait une recommandation à
l'effet que, sur le plan de la production d'énergie, les rivières
de la baie James offraient à la fois une quantité
d'énergie relativement importante à un coût qui semblait
prometteur comparé à d'autres formes d'énergie.
M. CAHILL: Dans notre cas, c'est-à-dire dans le cas du
génie, l'an dernier, nous avions mentionné que
l'aménagement du complexe Nottaway, Broadback, Rupert était
rentable. Nous n'avions pas dit que le complexe La Grande ne l'était
pas.
M. SAINT-PIERRE: D'accord.
M. RUSSELL: J'aurais une autre question. A quel moment avez-vous
commencé les travaux de recherche à la baie James?
M. CAHILL: En 1965. M. RUSSELL: En 1965.
M. CAHILL: C'est ça. Peut-être même fin 1964 ou en
1965.
M. RUSSELL: Et vous avez diminué vos travaux en 1967-1968?
M. CAHILL: En 1967.
M. RUSSELL: Pour les reprendre à quel moment?
M. CAHILL: Au mois de décembre 1970, si ma mémoire est
fidèle.
M. SAINT-PIERRE: Je m'excuse. Est-ce que ce n'est pas un peu avant? En
septembre 1970, il y avait...
M. CAHILL: Excusez-moi. Effectivement, cela a peut-être
commencé en décembre 1970 mais les préparatifs se sont
faits en septembre. Avant que cela commence à rouler, à
fonctionner, il y a un laps de quelques semaines.
M. RUSSELL: Est-ce que ce sont les commissaires de l'Hydro-Québec
qui ont décidé d'accélérer les recherches?
M. CAHILL: Est-ce que je peux souligner que nos études, au
bureau, avaient commencé en juin 1970?
M. RUSSELL: En juin 1970.
M. CAHILL: Oui. Je mentionnais les relevés sur le chantier qui
avaient commencé, de façon intensive, en septembre 1970.
M. RUSSELL: Quel montant d'argent aviez-vous dépensé
à ce moment-là? Avant juin 1970?
M. CAHILL: Avant juin 1970, comme je vous le mentionnais tout à
l'heure, c'était de l'ordre de $8 millions.
M. RUSSELL: Vous aviez déjà $8 millions de
dépensés.
M. CAHILL: Oui. C'est un ordre de grandeur, on peut vérifier.
M. RUSSELL: Au mois de juin 1970, est-ce que ce sont les commissaires de
l'Hydro-Québec qui ont décidé d'accélérer
les travaux ou si c'est à la demande du gouvernement?
M. CAHILL: C'est l'Hydro-Québec qui a décidé.
M. RUSSELL: Ce sont les commissaires de l'Hydro-Québec qui ont
décidé.
M. CAHILL: Et qui nous ont demandé d'accélérer les
travaux.
M. JORON: Je reviens aux demandes que j'ai formulées au
début, à l'effet de déposer des copies des programmes 21,
22, 24, 25 et 26, s'ils existent. D'autre part, l'Hydro-Québec veut-elle
considérer l'établissement de nouveaux programmes basés
sur les points que j'ai mentionnés tout à l'heure?
M. BOYD: Justement, j'ai manqué une de vos questions. J'ai celle
où vous parlez de nouveaux programmes où on inclurait des
unités de 800 et 1,000 mégawatts.
M. JORON: C'est ça.
M. BOYD: La question précédente, pour-riez-vous la
répéter?
M. JORON: Les programmes, tels qu'ils apparaissent dans le cahier bleu,
absents, portent les nos 21, 22, 24, 25 et 26. Est-ce qu'il y avait des
programmes qui correspondaient à ces numéros et est-ce que vous
pourriez les déposer?
M. BOYD: On va s'enquérir de ça.
M. LE PRESIDENT: Je ferai remarquer quand même, au sujet de cette
demande où il s'agit d'un dépôt de documents, qu'il y a
toujours la réserve de l'article 181 du règlement.
M. JORON: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Du moment où nous nous en tenons à
ça, d'accord.
M. BOYD: Pendant qu'on discute de ce point-là, on pourrait
peut-être répondre à la cinquième question, qui
concernait un nouveau programme où on inclurait des unités de 800
et de 1,000 mégawatts. M. DeGuise pourra répondre. Mais j'ai un
commentaire d'ordre général à faire.
C'est que, comme commissaire, je ne verrais pas tellement
l'utilité, dans le moment, de faire des programmes avec des
unités surtout de 1,000 mégawatts parce que AECL ne pourrait pas
nous en livrer.
D'un autre côté, on ne voudrait pas non plus prendre le
risque de mettre des unités aussi grosses sur notre réseau.
M. JORON: J'avais aussi parlé d'un programme mixte qui pourrait
être fait en considérant des unités de tailles
différentes, au moment du rééquipement, au bout de la
période de trente ans.
M. BOYD: J'ai un autre commentaire avant de passer à M. DeGuise
pour la réponse. Je ne sais pas si on peut expliquer cela
différemment, mais on a déjà dit que l'importance du
réinvestissement influence si peu le résultat que même si
vous enlevez complètement les coûts ou les investissements du
programme qui sont dus au réinvestissement, le programme 37 est encore
plus économique que le programme 20. Vous pourriez dire: Mettons la
moitié. Moi, je dis: Mettez zéro, comme réinvestissement,
et le programme 37 est encore meilleur. Alors, qu'on mette des 800, des 1,000
ou des 12,000 dans le réinvestissement ou même qu'on mette
je n'oserais pas le dire des "fast breeders", cela ne changerait rien
pour le programme qu'on considère.
M. JORON: Les "fast breeders" ne changeraient rien...
M. DEGUISE: Sur l'opportunité de faire des programmes avec des
unités de 800 ou de 1,000, il faudrait savoir s'il s'agit de la
filière canadienne ou de la filière américaine.
M. JORON: Dans les deux cas.
M. DEGUISE: Dans la filière canadienne, je crois que 1,000...
M. JORON: Ici, il n'y en aura pas, de 1,000. M. DEGUISE: Non, il n'y en
aura pas. M. JORON: D'accord.
M. DEGUISE: Il reste les 750 ou les 800. Vous feriez face à la
même objection qui a été
mentionnée précédemment. C'est que l'Hydro-Ontario,
pour les groupes de Bruce, qui sont actuellement en commande, établit
dans son programme des réserves qui sont au-delà de 27 p.c, je
crois, à cause de l'incertitude de la performance des groupes au
début.
Sur du nucléaire américain, évidemment, au point de
vue pratique, je crois que vous devinez qu'il peut se poser des objections
assez considérables avant d'obtenir la licence pour exploiter des
centrales du type américain au Canada. Disons que c'est ce qui nous a
fait regarder cet aspect...
M. JORON: Pourriez-vous être plus précis sur ce sujet? En
fait, cela implique une question d'ordre politique. Je comprends qu'elle ne
concerne pas directement l'Hydro-Québec, mais vous voulez dire que
l'Atomic Energy...
M. DEGUISE: Je ne voudrais pas prêter d'intentions, mais tout de
même...
M. JORON: Oui, d'accord. Je comprends votre position, à ce
moment-ci. The Atomic Energy of Canada, évidemment, qui essaie de vendre
ses programmes CANDU, verrait d'un mauvais oeil, l'établissement
d'unités nucléaires américaines. Comme c'est elle qui doit
accorder la licence ou le permis pour de telles choses, on pourrait
présumer qu'on se verrait entraîner, non pas
l'Hydro-Québec, mais le gouvernement du Québec, dans un autre
conflit fédéral-provincial avec le gouvernement d'Ottawa.
M. DEGUISE: Je n'irais pas si loin que cela mais je dirais que l'octroi
d'une première licence au pays à un réacteur de type
américain exigerait certainement beaucoup d'études, beaucoup de
précautions. On pourrait certainement prévoir des délais
comme c'est le cas actuellement aux Etats-Unis, avec les nouvelles
réglementations qui pourraient retarder la mise en marche de trois ou
quatre ans, on ne le sait pas.
M. JORON: D'autre part, l'expérience acquise est beaucoup plus
vaste que dans le CANDU.
M. DEGUISE: Elle est plus vaste, mais je ne sais pas si elle est bien
meilleure.
M. BOYD: J'aurais un autre commentaire, M. Joron, c'est que les
filières américaines sont considérées dans le
moment plus dangereuses, disons, que la filière canadienne. Et je pense
même que UE & C a un commentaire à quelque part dans son
rapport, où on dit qu 'avec les sols que nous avons le long du
Saint-Laurent, s'il s'agissait d'installer une centrale à filière
américaine, il faudrait faire beaucoup plus attention à
l'emplacement à cause de ça.
M. JORON: Je comprends tous ces facteurs additionnels dont il faut tenir
compte, et c'est bien entendu qu'il faut en tenir compte. Mais pour en revenir
à la question originale, l'Hydro est-elle en mesure d'établir ces
programmes nouveaux, d'une part? Et d'autre part, qu'est-ce qui arrive des
programmes 21, 22, 24, 25, 26, qui n'apparaissent pas dans le cahier bleu?
M. CAHILL: On me rapporte, quant aux numéros de programmes que
vous mentionnez, que nous avons établi les bilans de demande et les
bilans énergétiques, mais nous n'en avons pas calculé les
coûts parce que nous avons jugé qu'ils ne seraient pas
avantageux.
M. JORON : Ces programmes-là n'ont donc pas été
faits?
M. CAHILL: Non, mais nous pouvons faire une foule de programmes et ne
pas les évaluer du point de vue monétaire ou du point de vue
économique.
M. JORON: Moi ce que je vous demande, c'est si vous êtes en mesure
de les compléter et de nous éclairer davantage à une
séance ultérieure de la commission? C'est la commission,
évidemment, qui est maîtresse de ses séances, ce n'est pas
vous qui êtes impliqués. Mais êtes-vous en mesure de
compléter ces études-là?
M. CAHILL : Si nous avons fait des programmes, nous sommes en mesure de
les compléter du point de vue économique, certainement.
M. PERREAULT: Dès que vous avez posé l'hypothèse,
vous réalisez immédiatement qu'ils ne sont pas
intéressants.
M. CAHILL: C'est ça, qu'ils vont coûter plus cher que
d'autres programmes. C'est pour ça que nous ne les évaluons
pas.
M. SAINT-PIERRE: Effectivement ils coûteraient plus cher
qu'à 14 mills.
M. JORON: C'est ce que nous aimerions voir.
M. BOURASSA: Pour les saints Thomas du Parti
québécois.
M. BURNS: Mais si on les produit, nous allons le savoir.
M. BOURASSA: Il y en a tout un lot qui ont été
produits.
M. BURNS: La question du député de Gouin est uniquement
ça.
M. SAINT-PIERRE: Jusqu'ici on a économisé $168 millions,
mais si c'est rendu à 15 ou 16 mills, on va épargner $300
millions par année.
M. BURNS: Tant mieux.
M. JORON : Vous comparez des pommes et des oranges, parce que vous
comparez un programme exclusivement nucléaire. Il faudrait le comparer
avec un programme mixte, d'une part.
M. SAINT-PIERRE: Nous comparons deux options qui tentent de
répondre aux mêmes besoins. La différence en dollars est
$168 millions dans le moment.
M. JORON : Je vous trouve aventureux de faire un calcul semblable, et de
vous prononcer publiquement...
M. BOURASSA: Après $40 millions d'étude.
M. JORON: ... quand vous n'avez, pour en juger, que deux sortes de
programmes nucléaires devant vous qui vont vous permettre de comparer.
C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas été comme vous
aussi aventureux dans nos avancés.
M. SAINT-PIERRE: C'est le meilleur. C'est évident que le
programme nucléaire, une fois qu'on a établi un certain
coût de base pour une usine et qu'on voit tous les facteurs... Nous avons
pris les meilleures conditions, comme on vous l'a expliqué, nous n'avons
pas pris les grandes, parce que le coût de réserve, etc, pourrait
être plus élevé. Nous avons pris celles qui étaient
optimales et nous arrivons à 14 mills. C'est simple.
M. BOURASSA: Ils ne veulent pas faire leur mea culpa.
M. JORON : Nous n'avons pas de mea culpa à faire...
M. SAINT-PIERRE: Maxima culpa.
M. JORON: ... nous souscrirons je vous le dis d'avance au
programme le plus économique quand toutes les options auront
été considérées et qu'on nous les aura mises sur la
table. Ce n'est pas compliqué ça. Nous ne sommes pas en guerre
contre la baie James. Nous n'avons pas une déclaration au Colisée
à sauver, de notre côté.
M. VEILLEUX: Est-ce que vous avez fait les mêmes calculs pour
l'indépendance du Québec?
M. JORON: Vous avez amené votre artillerie lourde, à ce
que je vois.
M. BURNS: Nous ne nous occuperons pas de ces affaires-là.
M. BOURASSA: La question est pertinente. Cela fait $40 millions
d'étude qu'on fait sur la baie James et le Parti québécois
est encore réticent, alors que sur la question d'indépendance,
qui est quand même plus importante fondamentalement, ils se contentent de
généralités.
M. JORON: Ah ça! nous en reparlerons à un autre moment. Ce
n'est pas le lieu, vous en conviendrez.
Mais, heureusement, nous avons demandé les études
supplémentaires sur la baie James, vous voyez ce que ç'a
donné cette année.
M. BOURASSA: Ce n'est pas parce que vous l'avez demandé que
ç'a été fait.
M. JORON: Si on avait écouté votre précipitation du
Colisée, le 29 avril, le barrage serait peut-être
déjà construit.
M. BOURASSA: Il y avait eu $10 millions d'études qui avaient
été faites l'an dernier.
M. JORON: Enfin, il reste, M. le Président, je ne sais pas qui
est en mesure de répondre, une double demande. D'abord à
l'Hydro-Québec d'établir de nouveaux programmes; ensuite aux
membres de la commission de se réunir, quand ils seront faits, pour les
considérer, en même temps que de faire comparaître les gens
de l'Atomic Energy Commission of Canada et de United Engineers. Ce sont les
questions que je voulais...
M. PERREAULT: Je peux vous répondre pour ces programmes-là
les hypothèses ont été posées ils
n'étaient pas intéressants.
M. SAINT-PIERRE: Pour ne pas retarder la commission, on peut, si c'est
le désir du Parti québécois, demander aux gens de
l'Hydro-Québec de reprendre ces programmes-là. Au départ
on se fait dire par des experts que, compte tenu des critères, des
paramètres utilisés, ça va être plus de 14 mills.
Mais je pense qu'on peut leur demander si c'est possible au cours des
prochaines semaines de nous faire ça. Cela va donner 15 ou 16 mills,
puis peut-être qu'on peut les déposer en Chambre et vous les
remettre.
M. JORON : Vous en présumez à l'avance.
M. SAINT-PIERRE: Bien, écoutez, ça fait quatre jours qu'on
écoute et on nous dit que les paramètres du départ ce ne
sont pas les solutions optimales. On vous a prouvé tantôt que les
unités les plus grandes demandent plus de réserves, on a
prouvé tout ça. C'est évident que si on les met dans un
programme d'ordinateur ça va donner plus cher de coût
d'énergie. Maintenant on peut l'obtenir, puis on vous déposera
ça en Chambre.
Quant à la deuxième demande pour faire comparaître
des experts, il n'y a rien encore qui nous dit, compte tenu de toutes les
études qui ont été livrées, qu'il y a quelque chose
de
nouveau qui va ressortir. On a qu'à s'en remettre à des
interviews, on a qu'à s'en remettre à ce que nous ont dit les
experts de l'Hydro-Québec. Pourquoi faire venir ici le président
de l'Atomic Energy of Canada et les Américains pour nous dire ce qu'ils
ont écrit dans leur rapport? Je maintiens qu'on n'est pas dans
l'inconnu, on est dans la production au Québec d'énergie
électrique. Dans ce domaine-là, je pense qu'on est maître
des données. On a suffisamment passé de temps avec suffisamment
d'experts et d'une façon suffisamment méthodologique pour savoir
dans quel sens on s'oriente. Je pense que ce serait faire perdre le temps de la
commission de remettre à demain, de faire venir tous ces experts
ici.
M. JORON: C'est donc dire que vous déclinez des séances
ultérieures de la commission et la comparution des experts?
M. SAINT-PIERRE: On juge la demande futile. Pour le bien de la
commission et ne pas faire perdre le temps des gens de l'Hydro-Québec,
il faut passer à l'action.
M. PERREAULT: M. le Président, je demanderais au
député de Gouin s'il croit que les gens de l'Hydro-Québec
qui ont examiné ces données de United Engineers, Atomic Energy ne
sont pas qualifiés pour estimer ces coûts?
M. JORON: Le point central que nous avons évoqué à
ce sujet-là, qui est l'origine de tous nos doutes, c'est la taille des
unités, des économies d'échelle, puis ces
choses-là. L'Hydro-Québec ne s'est jamais prétendue non
plus un expert dans le nucléaire. C'est la raison pour laquelle on
voulait avoir la réponse "from the horse's mouth", comme on dit en
anglais, des experts eux-mêmes, de ceux qui ont soumis les études
à l'Hydro-Québec, à partir desquelles elle a fait une
synthèse.
M. BOURASSA: C'est un vote de non-confiance à
l'Hydro-Québec.
M. JORON : Ce n'est pas un vote de non-confiance. Elle-même n'a
jamais prétendu être experte en nucléaire, elle n'en a
jamais fait. Ce n'est pas étonnant qu'elle ne puisse pas être
aussi catégorique sur le nucléaire qu'elle l'est sur
l'hydraulique.
M. SAINT-PIERRE: Vous voudriez qu'on se lance dans le nucléaire
quand on a des réponses comme ça? Si nous ne sommes pas capables
d'évaluer le rapport de United Engineers, je ne sais pas comment
ça se fait qu'on va se lancer dans le nucléaire.
M. JORON: Je voudrais savoir de la bouche des experts...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre.
M. GAUVREAU: Je crois que j'ai répondu à ça, je
pense que mes collègues sont tous d'avis que les rapports des experts
ont été fournis à l'Hydro-Québec pour être
analysés par notre équipe d'experts et pour être
réajustés, adaptés à notre réseau, à
nos taux de panne, nos taux de réserve, etc. Je ne crois pas que les
experts puissent apporter ici quelque témoignage qui pourrait
éclairer la commission. Excusez donc, M. Joron, je voudrais
continuer.
Dans le rapport d'Ebasco, il y a quand même deux réserves
que monsieur DeGuise vous a soulignées, qui sont les deux
réserves importantes sur les taux d'escalation et les taux
d'intérêt. Nous ne pouvons pas nous porter garants, selon vos
expressions...
M. JORON : J'ai compris ça.
M. GAUVREAU: Bon. Au sujet de la non-expérience de
l'Hydro-Québec, j'aimerais faire une petite mise au point d'ordre
très général. On semble brosser une espèce de
tableau qu'à l'Hydro-Québec nous sommes des hydrophiles, des gens
qui aiment l'hydro-électrique et que nous avons un parti pris contre le
nucléaire.
Cela fait onze ans que je suis à l'Hydro-Québec et cela
fait onze ans que j'entends parler de nucléaire. Dès la
première année, il a été question de cours. Je me
rappelle qu'en 1963 M. Baribeau avait organisé des cours et 50
ingénieurs ont suivi des cours de nucléaire de la compagnie
General Electric. Ensuite, nous avons des gens qui ont été
mêlés à des projets nucléaires de toutes sortes de
façons.
D'abord, le projet de Gentilly. On a eu des gens en exploitation
à Gentilly; il y en a actuellement. On en a eu, à Sherrigham
Park; on en a eu à Montreal Engineering et SNC. Nous avons envoyé
des gens à Saclay, au commissariat de l'énergie atomique, environ
six ou sept. Nous avons six physiciens à l'Institut de recherche. Nous
avons en exploitation une vingtaine d'ingénieurs
spécialisés en nucléaire, nous avons, en radioprotection,
six ou sept personnes. Nous avons trois ou quatre ingénieurs
économistes en recherche nucléaire.
M. Lessard, notre ancien président, était président
de la Canadian Nuclear Association. Dans ce temps-là, il y avait de
symposiums; chaque année, les commissaires étaient invités
et je suis allé moi-même participer à des symposiums
où nous étions mis au courant de la technique, des projets. Nous
avions des conférences sur les coûts. Je me souviens de M.
Haywood. Cela a duré cinq ou six ans. M. DeGuise a remplacé M.
Lessard à la Canadian Nuclear Association; à l'Atomic Energy of
Canada, il est membre du comité exécutif. Nous avons aussi cinq
ou six ingénieurs membres de comités.
Nous ne sommes pas de grands experts, mais je pense que ce serait
inexact de dire que l'Hydro-Québec se désintéresse ou a un
parti pris contre le nucléaire. Une telle activité
montre un très grand intérêt. La première
fois que j'ai rencontré à l'Hydro-Québec, il y a onze ans,
M. Raymond Fournier qui est ici, le directeur adjoint de la planification, il
m'a dit: M. Gauvreau, on s'intéresse intensément au
nucléaire, parce qu'on sait que c'est une source d'énergie de
l'avenir. Je voulais combattre ce préjugé qui semble
s'accroître.
UNE VOIX: Vous vous prenez pour d'autres.
M. GAUVREAU: Nous sommes les seuls capables.
M. LE PRESIDENT: Le député de Shefford.
M. RUSSELL: Je pourrais peut-être tenter de me rallier au
député de Gouin aussi bien qu'au député de
Verchères et peut-être en arriver à un compromis. Je pense
que le député de Verchères a proposé que les
études demandées par le député de Gouin puissent
être faites par l'Hydro-Québec et déposées en
Chambre. Il reste donc un seul différend: Est-ce que la commission sera
obligée de siéger de nouveau et d'entendre les
spécialistes?
Si, toutefois, les études que vous ferez et que vous
déposerez en Chambre démontraient une différence
importante, que le gouvernement s'engage à faire siéger de
nouveau la commission...
M. GAUVREAU: Les spécialistes vont être très
embêtés.
M. RUSSELL: ... et à faire venir des experts additionnels.
M. BIENVENUE: Qu'est-ce que vous disiez, M. Gauvreau?
M. GAUVREAU: Je disais que les spécialistes, à mon avis
on connaît ces gens-là; on est habitué de leur
parler et on connaît leur langage, on connaît leur
honnêteté et leur rigueur intellectuelle vont
répondre par de très grandes généralités et
ne se prononceront pas sur la recommandation que nous avons faite. Ils vont
tout simplement répéter ce qui est écrit dans leur
rapport. Ils ne viendront pas commenter les programmes choisis par
l'Hydro-Québec parce qu'ils n'ont pas la compétence et qu'ils ne
les ont pas étudiés.
M. RUSSELL: M. Gauvreau, vous êtes certain qu'il y a peu de
différence entre les études dont nous avons discutées?
L'Hydro-Québec s'engage, à la demande de la commission, à
compléter les études qui ont été mentionnées
par le député de Gouin...
M. GAUVREAU: Oui.
M. RUSSELL: ... et à les remettre à la commission ou au
ministre des Richesses naturelles qui, lui, va les déposer en Chambre?
Si, à ce moment-là, il y avait une différence
marquée, le gouvernement pourrait convoquer de nouveau la
commission...
M. GAUVREAU: Ce n'est pas à nous de décider.
M. RUSSELL: ... quitte à faire revenir les experts, si la
commission le désire. Je pense que ce serait une demande bien
mesurée et que cela mettrait fin à ce débat qui semble
s'éterniser.
M. BOURASSA: Est-ce que, d'après vous, cela vaut la peine de
compléter ces études? Il y a aussi le temps des employés
de l'Hydro-Québec. Je pense qu'il vient un moment où, comme je
l'ai déjà dit, assez, c'est assez! Après $40 millions
d'études et l'analyse de 56 programmes, je demande aux responsables de
l'Hydro-Québec si, d'après vous, cela vous parait justifié
de poursuivre encore l'évaluation de ces programmes.
A première vue, il vous a paru clair que c'était
supérieur à 14 mills. Est-ce que, d'après vous, ce serait
une perte de temps de poursuivre encore ces études?
M. CAHILL: Nous allons compléter les programmes.
M. BOURASSA: Combien de temps cela peut-il prendre?
M. CAHILL: Cela devrait prendre moins d'une semaine.
M. BOURASSA: M. Boyd ou M. Gauvreau, si le gouvernement du
Québec, en 1966 ou en 1967, avait choisi l'énergie
nucléaire plutôt que le développement de Churchill Falls,
quel en aurait été le coût ou quelle économie aurait
pu réaliser la province, ou vice versa?
M. JORON: Puis-je poser une question en même temps? Qu'est-ce que
ça a à voir dans le débat actuel?
M. BOURASSA: Nous parlons des coûts respectifs entre Churchill
Falls et l'énergie nucléaire.
M. JORON: En quelle année?
M. BOURASSA: Il y a quelques années à peine.
M. JORON: Vous êtes au courant que les coûts d'installation
à Churchill Falls n'étaient pas tout à fait les
mêmes.
M. BOURASSA: On discute depuis plusieurs heures des coûts
respectifs, le député a-t-il peur de la réponse?
M. JORON: Pas du tout.
M. BOURASSA: Alors, nous allons...
M. BIENVENUE : Ecoutons la réponse.
M. JORON: Vous savez ce que ça coûtait, en mills, Churchill
Falls comparé à La Grande?
M. BIENVENUE: Ecoutons la réponse.
M. JORON : Nous la savons depuis longtemps, la réponse. Le
député de Verchères a posé la question la semaine
dernière, d'ailleurs.
M. BOURASSA: Pouvons-nous écouter la réponse.
M. BURNS: Sauf que le premier ministre ne suit pas les commissions et il
y a des détails qui lui manquent.
M. BIENVENUE: La question s'adressait là-bas à des
nerveux.
M. BURNS: Pas du tout.
UNE VOIX: Les bonnes nouvelles, quand même on les entendrait deux
fois, M. Boyd.
M. LEGER : La question est posée.
M. BOYD: M. le Président, je me charge de la réponse parce
que je l'avais donnée l'autre fois. Le coût moyen de Churchill, on
l'a mentionné, était d'environ 5 mills, livré à
Montréal et si, pour la même période, on avait eu du
nucléaire, on a estimé que le nucléaire nous aurait
coûté près de 10 mills alors...
M. JORON: Est-ce qu'on peut vous demander, par la même occasion,
le nom des signataires du comité qui ont recommandé justement de
procéder via Churchill Falls plutôt que via le nucléaire?
Cela éclairerait peut-être le premier ministre, c'est
peut-être ce qu'il veut savoir dans le fond?
M. BOURASSA: Non, je ne mets personne en cause.
M. BURNS: Avez-vous peur d'avoir des réponses sur votre
problème?
M. BOURASSA: Nous savons de quoi il s'agit.
M. BURNS: Ah bon, nous autres aussi on savait la réponse.
M. BOURASSA: M. le Président, quand même...
M. SAINT-PIERRE: Je crois qu'on a établi clairement qu'avoir
choisi Churchill Falls au lieu de l'énergie nucléaire
représentait des épargnes aux Québécois, à 5
p.c. près, d'environ $100 millions par année. Cette fois-ci, au
lieu d'avoir pris un programme axé essentiellement à 96 p.c. sur
la baie James, d'après les données de l'autre jour, si on avait
pris des programmes axés sur du nucléaire, que ce soit
américain ou canadien, ce serait $168 millions. Alors, pour les deux
décisions...
M. JORON: Des programmes d'unités de 500 mégawatts.
M. SAINT-PIERRE: ... dans lesquelles on a évité
l'énergie nucléaire. C'est $268 millions
M. BIENVENUE: Un instant, un à la fois. Allez-y.
M. SAINT-PIERRE: Les deux décisions dans lesquelles on a
évité la tentation flamboyante d'aller dans le nucléaire
ont représenté pour la province des épargnes de $268
millions par année. Cette année, l'an prochain, l'année
d'après. Par année. C'est plus que la contribution de tous les
Québécois comme consommateurs à l'Hydro-Québec pour
l'électricité.
M. JORON: Est-ce que vous parlez de Churchill là?
M. SAINT-PIERRE: Là, on parle des deux, c'est $100 millions pour
Churchill et $168 millions, vous êtes capable de faire une
multiplication.
M. JORON: Je ne vois pas ce que Churchill vient faire
là-dedans?
M. SAINT-PIERRE: C'est parce que ça fait deux fois depuis cinq
ans que des gens qu'on connaît bien, qu'on n'identifiera pas, nous ont
porté à aller vers le nucléaire comme étant
l'avenir des Québécois.
M. JORON: Je regrette, M. le Président... M. SAINT-PIERRE: Or,
ces deux décisions...
M. JORON : ... je soulève une question de privilège et on
va y répondre carrément. Le nom de Jacques Parizeau apparaissait
parmi ceux qui recommandaient Churchill Falls plutôt que le
nucléaire en 1967, est-ce exact?
M. SAINT-PIERRE: Je ne l'ai pas nommé. J'ai dit que deux fois des
gens...
M. JORON: Dites donc à quoi vous voulez en venir, mettez donc les
cartes sur la table et arrêtez donc de niaiser.
M. SAINT-PIERRE: Privilège, M. le Président,
privilège.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. BOURASSA: On ne
s'énerve pas.
M. LE PRESIDENT: Je pense que le débat
dégénère un peu à ce moment-ci.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je regrette, le
député de Gouin m'impute des motifs, je n'ai jamais dit que
Jacques Parizeau avait...
M. BURNS: M. le Président, ce n'est pas du tout la question.
M. SAINT-PIERRE: ... recommandé le nucléaire.
M. BURNS: Pas du tout.
M. SAINT-PIERRE: Oui, c'est ce qu'on a dit. Je répète,
comme conclusion, pour terminer sur cela que...
M. BURNS: Là n'était pas la question. Ne court-circuitez
pas la question.
M. SAINT-PIERRE: ... on va se permettre de se rendre au fond, que les
deux fois que le gouvernement du Québec et Dieu sait que le
dernier gouvernement ce n'était pas celui-ci après des
études, a évité ce que j'appelle l'écueil
nucléaire, ces deux fois-là, c'est-à-dire en 1967 et
aujourd'hui, ça représente des épargnes de $268 millions
par année aux Québécois. Vous en êtes convaincus?
C'est $1 milliard à tous les quatre ans.
M. BURNS: Ce n'est pas beaucoup.
M. BOURASSA: Cela ne les intéresse pas! Ils ont la banque du
Québec!
M. LE PRESIDENT: Le président est un peu mal pris dans cette
situation. J'avais entendu parler de Churchill, de La Grande, de Rupert, de
Broadback, mais jamais Parizeau n'est arrivé dans la situation ou dans
le débat jusqu'ici. Alors, est-ce qu'on pourrait s'en tenir, dans les
discussions, aux rivières dont il s'agit au point de vue du
développement nucléaire, thermique ou hydraulique?
M. RUSSELL: Sinon, M. le Président, nous serions obligés
de demander à M. Parizeau de venir témoigner ici.
M. LE PRESIDENT: Malheureusement, le nom n'a jamais paru dans les
rapports. Je dois nécessairement rester à l'intérieur du
débat en question.
M. BURNS: Est-ce que vous en faites une suggestion, de faire
témoigner M. Parizeau?
M. LE PRESIDENT: Ah, le président, com- me vous le savez,
d'après les règlements, n'a pas le droit de prendre part à
un débat. Je constate des faits tout simplement et je porte cela
à votre intention.
M. BURNS: Je demandais cela au député de Shefford.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député
d'Abitibi-Est.
M. TETRAULT: M. le Président, je suis aussi confus que vous, dans
le moment.
M. LE PRESIDENT: Nous sommes deux dans ce cas-là.
M. TETRAULT: Est-ce que ce Jacques Parizeau est le même qui
était directeur de Sogefor? Est-ce que c'est le même dont vous
parlez?
M. SAINT-PIERRE: Le directeur de Sogefor?
M. TETRAULT: Oui, le directeur.
M. SAINT-PIERRE: Je pense que oui, mais je n'en suis pas certain.
M. BOURASSA: Il était directeur de la SGF.
M. JORON: Si vous me permettez, j'ai peut-être semblé
et M. Gauvreau s'en est senti quelque peu piqué mettre en
doute la compétence de l'Hydro en ce qui regardait le nucléaire.
J'ai été mal compris. Je tiens à m'expliquer. Ce que je
voulais signaler, c'est que n'en ayant, à toutes fins pratiques, sur une
grande échelle, jamais fait, on ne pouvait s'attendre au même
témoignage d'expertise découlant de l'expérience qu'on
pourrait avoir, par exemple je ne sais pas de Consolidated Edison
ou même de l'Hydro-Ontario qui est plus avancée dans ce
domaine.
Ce qui nous rend sceptiques à cet égard, c'est le fait que
vous avez fait mention vous-même du nombre d'ingénieurs et de
techniciens qui travaillent sur le nucléaire à un bureau de
l'Hydro-Québec. Or, à un autre moment, un peu plus tôt au
cours de la séance de la commission aujourd'hui, justement, on a fait
état que ceux-ci n'avaient pas participé à la
décision sur le choix des programmes. C'est une des choses qui nous ont
été données.
M. GAUVREAU: M. Cahill a très bien répondu, en disant que,
dans l'équipe qui s'occupe des centrales thermiques et
nucléaires, il n'y a pas personne de spécialisé en
estimation. L'estimation est, quand même, une technique spéciale.
C'est un métier. Je crois qu'il a très bien répondu
à la question.
L'Hydro-Québec, en général, respecte une certaine
hiérarchie. Elle consulte, d'abord, son
directeur général du génie, lequel travaille avec
son directeur de la planification. Nous leur faisons confiance parce que ce
sont eux qui ont réuni les experts et qui sont en mesure de sayoir qui,
dans leur équipe, a la compétence pour faire les calculs, pour
donner les bonnes estimations. Je ne crois pas que, de l'extérieur, on
puisse nous poser cette question: Qui avez-vous consulté? Je crois que
nous sommes maîtres de notre façon de procéder dans ces
décisions.
M. JORON: M. le Président, à ce stade-ci, vous me
permettrez, enfin pour ma part, de conclure sur la question du choix des
programmes. Je ne veux pas prolonger indûment les débats. Nous
avions convenu, d'ailleurs, de terminer plus tôt. Je vois qu'il est 9 h
10. En terminant, je tiens à dire que, tant que ces nouveaux programmes
ne seront pas connus et que toutes ces études supplémentaires ne
seront pas faites, nous ne pouvons, pour notre part, que demeurer sceptiques et
dans un état d'incertitude. Nous ne sommes pas prêts, comme
d'autres partis politiques l'ont fait, à endosser aveuglément ou
prématurément, à notre avis... Je ne leur prête pas
d'intentions.
M. LE PRESIDENT: Non, un instant!
M. BURNS: Il n'y a rien d'antiparlementaire.
M. BOURASSA: Aveuglément? Cela fait trois jours de
discussions!
M. JORON: Bon, d'accord.
M. BURNS: Laissez-le terminer. Cela vous fait mal. Cela vous fatigue.
Laissez-le faire, quand même.
M. BOURASSA: Oh non! Cela ne nous fait pas mal. C'est vous autres qui
vous faites mal.
M. BURNS: Non, non; on verra cela à la prochaine fois.
M. JORON: M. le Président, j'étais à dire que nous
croyons qu'il est prématuré d'endosser une formule plutôt
qu'une autre pour les raisons suivantes: Peut-être qu'on dira que nous
sommes des saint Thomas d'Aquin. Enfin, peu importe.
UNE VOIX: Ce n'est pas d'Aquin.
M. JORON: Ce n'est pas d'Aquin, d'accord.
M. BOURASSA: Ce n'est pas le philosophe, non.
M. JORON: Je suis mélangé dans mes saints. Cela fait
longtemps que je ne les ai pas consultés.
M. LE PRESIDENT: Heureusement qu'il est de bonne heure.
M. JORON: Les programmes qui nous ont été soumis, en tout
cas, bien qu'on nous ait dit que, si on n'en a pas soumis d'autres,
c'était qu'on les avait jugés dès le départ, mais
sans les compléter, les estimations des coûts nous sont apparues
non économiques ou non rentables par rapport aux autres.
Pour notre part, nous croyons que faire un choix, à partir des
différents programmes qui ont été mis sur la table, c'est
impossible à ce moment-ci en raison du fait que les deux seuls
programmes nucléaires qui nous sont suggérés ne sont pas,
d'abord, des programmes mixtes. C'est un point important. Ce sont des
programmes exclusivement nucléaires.
D'autre part, ils portent sur de petites unités. Comme je l'ai
signalé plus tôt, des unités de 500 mégawatts,
à toutes fins utiles, il ne s'en produit plus. Par exemple, dans la
filière américaine, il ne s'en fait à peu près
plus. Il ne s'en fera certainement pas en 1980. On n'a pas
considéré, bien qu'on en ait parlé la semaine
dernière, tout l'effet sur les coûts que pouvait avoir, par
exemple, l'introduction, dans les années 1985, des "fast breeders".
Toutes sortes de facteurs, en d'autres termes, qui ont des incidences sur le
coût final. Je pourrais même ajouter, mais dans le fond c'est un
détail, la question du plutonium, c'est-à-dire le déchet,
si on peut employer ce terme, qui est produit. A l'heure actuelle, il ne trouve
pas marché. On ne peut donc pas, en 1972, attribuer un prix à ce
déchet produit qui baisserait d'autant le prix de revient de
l'énergie produite par voie nucléaire. Mais d'ignorer cet apport
supplémentaire qui pourrait faire baisser le coût sur une
période de 50 ans, surtout à partir du moment où les "fast
breeders" seront en activité, quand on sait que le plutonium est l'une
des matières premières qui sert au démarrage, si vous
voulez des "fast breeders", cela nous paraît aussi excessif. Enfin, je
n'attache pas d'importance exagérée à ce
point-là.
Nous croyons, en d'autres mots, à partir de toutes ces raisons,
que peut-être les comparaisons ont été, en quelque sorte,
déséquilibrées indûment et peut-être sans s'en
rendre compte. Je veux être clair là-dessus et ne pas prêter
de mauvaises intentions ou faire des allusions d'interventions politiques
vis-à-vis de qui que ce soit. Mais je pense que nettement on a
minimisé les coûts de l'hydraulique ou on a certainement
exagéré les coûts du nucléaire. Cela a pu
découler des facteurs suivants: Un certain manque d'expérience,
je l'ai mentionné tout à l'heure. L'Hydro-Québec n'a pas
d'expérience en matière nucléaire.
M. BOURASSA: M. Gauvreau a répliqué à
ça.
M. JORON: Je précise. Sur une grande échelle si on exclut
la centrale pilote ou expérimentale de Gentilly, elle n'en a pas fait.
D'autre part, on a peut-être versé cela a peut être
été à certaines occasions, dans le passé, à
la fois une
vertu ou un "handicap" des Québécois dans ce qui
nous paraît, nous, être une prudence excessive et un certain
conservatisme. Par exemple, dans ces différences entre les taux de panne
que l'Hydro-Québec suggère par rapport à ceux que les
experts, comme United Engineers et ainsi de suite, signalaient.
L'Hydro-Québec, évidemment, a voulu être plus prudente et
plus conservatrice. Alors, on a pris un taux plus élevé.
Finalement, il y a des éléments politiques. On ne peut pas
oublier qu'il y a des incidences politiques dans tout ce débat, la
précipitation du gouvernement à faire un choix. On a toujours
prétendu que le choix de trouver une formule pour répondre aux
besoins d'électricité du Québec dans l'année X
appartenait à l'Hydro-Québec. C'était de
l'Hydro-Québec qu'on devait attendre, normalement, des suggestions et
des programmes. Cela a toujours été ce qu'elle a fait,
d'ailleurs, dans le passé. Elle a toujours été, dans
différentes occasions, placée devant le problème, à
un moment donné, de répondre â une demande accrue de
l'électricité. Elle s'est, jusqu'à présent,
à notre avis, très bien sortie de ça ou, enfin, elle a
très bien exécuté ce mandat. Pourquoi est-ce que, pour la
première fois, peut-être dans l'histoire du Québec, le
gouvernement est intervenu et a...
M. BOURASSA: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. JORON: .. précipité...
M. BURNS: Voyons donc!
M. BOURASSA: Si je peux rétablir les faits...
M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement sur,
justement,...
M. BOURASSA: Je peux rétablir les faits.
M. BURNS: Bien non, pas du...
M. LE PRESIDENT: Un instant, messieurs!
M. BURNS: ... tout, M. le Président.
M. BOURASSA: M. le Président,...
M. BURNS: L'article 97 du règlement.
M. LE PRESIDENT: Un instant.
M. BURNS: J'avoue que le premier ministre ne connaît rien aux
règlements.
M. BOURASSA: J'ai essayé de les apprendre.
M. BURNS: Il pourra rectifier les faits tant qu'il voudra mais
après.
M. BOURASSA: Mais est-ce que le député...
M. BURNS: Je vous renvoie à l'article 97, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît !
M. BURNS: Qu'il demande la permission au député de Gouin
de lui poser une question.
M. BOURASSA: Je dois m'absenter quelques minutes. Est-ce que le
député peut me permettre de lui rappeler que dans le cas de
Churchill Falls, â ma connaissance, même si nous n'étions
pas au gouvernement, il y a eu des relations étroites entre
l'Hydro-Québec et le gouvernement du Québec.
M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement. Cela
vaut pour le premier ministre comme pour tous les autres députés,
cette affaire. Ou bien cela ne veut rien dire. Non, laissez-le terminer et il
parlera pendant une demi-heure, après, s'il le veut. Je n'ai pas
d'objection.
M. BOURASSA: Je pose une question.
M. BURNS: Qu'il respecte les règlements. Ce n'est pas parce que
c'est le premier ministre qu'il va mettre cela de côté.
M. BOURASSA: Non. Je suis prêt à respecter le
règlement.
M. JORON : Le premier ministre devrait savoir que Churchill Falls avait
fait des transactions avec un autre gouvernement et qu'à partir de ce
moment-là, il était bien clair qu'il fallait que le gouvernement
intervienne. Cette parenthèse ouverte est refermée.
M. le Président, je veux terminer en disant que cette
précipitation, si vous voulez, dont a fait preuve le gouvernement, a
certainement eu une influence sur l'Hydro-Québec. Il ne faudrait pas
être naif au point de se la cacher. Faisant cela, nous avions, en quelque
sorte, placé l'Hydro sur la corde raide. Vous ne leur avez pas du tout
rendu la tâche facile de préparer dans le calme et dans
l'objectivité la plus totale et la plus à l'abri, si vous voulez,
de l'intervention du politique j'allais presque dire dans le judiciaire
dans l'électrique. Cela a quand même créé une
drôle de situation qui, à notre avis, ne peut pas faire autrement
que se refléter dans ce que nous discutons aujourd'hui.
En terminant, il y a une autre incidence politique. Si on est rapidement
passé sur les études comparatives avec le nucléaire
américain, il y a là un problème. On le savait très
bien au départ et je suis sûr que l'Hydro-Québec ne
l'ignorait pas. Il y avait là au départ, un problème de
nature à engendrer un très sérieux conflit
fédéral-provincial, en ce sens que faire du nucléaire
américain, au Québec, cela implique de demander un permis
à 1'Atomic Energy of Canada qui, lui, essaie de vendre un autre
système nucléaire. Cela aurait mis carrément le
gouvernement du Québec dans un autre conflit. Il en a eu suffisamment,
je pense, récemment surtout. Je n'insisterai pas sur la nomenclature de
conflits semblables.
Je pense que la volonté implicite d'éviter de se mettre
dans une situation semblable a certainement eu une influence quelconque
je n'essaie pas de la quantifier sur ce qui nous occupe aujourd'hui.
Je termine en formulant tout simplement un espoir. C'est que les
délais d'implantation des nouveaux programmes ayant été
quelque peu retardés par rapport, par exemple, â ce que le
gouvernement, dans sa précipitation, avait suggéré
l'année dernière, nous laissent quand même croire qu'il y a
une période de répit et qu'il y a peut-être un bout de
temps, au moins, où on pourra reprendre son souffle, reconsidérer
de nouveaux programmes, recevoir de nouvelles études, prendre
témoignage d'expériences qui se font ailleurs et peut-être,
finalement, permettre d'éviter une erreur, qui pourrait peut-être
se traduire, je pourrais très facilement verser dans la facilité
mathématique du député de Verchères, par $174.3
millions pendant X années, additionner cela et faire un total de
tant.
M. BOURASSA: Prouvez-le
M. JORON: Si on se trompe sur la différence de coût entre
les deux, c'est cela que ça peut avoir comme conséquence. C'est
la raison pour laquelle on a tellement joué les saints Thomas et qu'on
continue à le faire, d'ailleurs, parce qu'on estime que c'est notre
rôle. Je pense aussi que ces délais supplémentaires vont
peut-être permettre ce répit et que, d'autre part, la
dépolitisation graduelle du débat, je dois l'admettre, cette
année, par rapport à l'année dernière
l'année dernière, on a eu le sentiment que le gouvernement nous
avait enfermé dans une politisation très grande de ce
débat on s'en est, avec le temps, quelque peu sorti.
J'espère qu'on continuera de s'en sortir davantage. Et finalement, tout
cela permettra que le choix final qui sera fait sera celui qui sera le plus
économique, le plus rationnel, économiquement et à
d'autres points de vue aussi, le plus avantageux pour les
Québécois.
C'est tout ce que nous souhaitons. Si, à ce moment-là, on
sait que c'est tel type de programme, que ce soit La Grande ou quelque
rivière que ce sera, on sera prêt à y souscrire volontiers,
avec la meilleure volonté du monde.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais à ce moment-ci, messieurs,
interrompre très brièvement le débat pour suggérer
aux membres de la commission, s'il vous plaît, de continuer dans la
même veine que nous avions suivie depuis le début de nos
délibérations, de nos discussions autour de ce problème,
il y a déjà quinze jours.
J'ai remarqué qu'il y a eu, depuis quelques minutes, un filet de
politisation du débat. Je n'accuse pas. Je dis tout simplement: S'il
vous plaît, soyons suffisamment adultes pour éliminer du
présent débat tous ces accrochages. Que ce qu'on dit soit vrai ou
faux, peu m'importe. Il est déjà suffisamment difficile aux
membres de la commission et au public présent de suivre ce débat,
très technique à certains moments. Si on arrive à
infiltrer des commentaires, des hypothèses, des discussions qui ne se
rapportent pas directement à ce qu'on veut entendre, à ce qu'on
nous dit, je pense qu'on ne saurait profiter au maximum de ce qu'on attend de
cette commission.
D'autres députés m'ont demandé la parole et je
demanderais, de grâce, qu'à ce moment-ci... Un point d'ordre?
M. BURNS: M. le Président, sur le point de
règlement...
M. LE PRESIDENT: C'est un commentaire, mais...
M. BURNS: C'est un point de règlement que vous soulevez. Je veux
tout simplement vous dire que je suis entièrement d'accord avec
vous.
M. LE PRESIDENT: Bien.
M. BURNS: Je veux vous dire ça. Et il y a quelques "smarts" de
l'autre côté qui peuvent rire tant qu'ils voudront, ça ne
me dérange pas. Mais je veux vous dire, que tant qu'on écoutera
les personnes, chacune à leur tour, il n'y aura pas de problèmes
de cet ordre. J'espère que vos remarques s'adressaient à tous les
membres de la commission, y compris le premier ministre.
M. LE PRESIDENT: Mes remarques s'adressent à tous les membres de
la commission, sans exception.
M. BURNS: Si le premier ministre comprend très bien, il n'y aura
pas de ces problèmes.
M. LE PRESIDENT: Tous ont été en mesure d'entendre ce qui
s'est dit...
M. BURNS: C'est tout ce que j'avais à dire.
M. LE PRESIDENT: ... et il y a des endroits ou des secteurs où le
débat aurait pu commencer à se dégrader quelque peu. Je
demanderais qu'on essaie de suivre le plus religieusement possible le
déroulement des procédures.
Je m'adresse directement au député de Maisonneuve. La
porte a déjà été ouverte, est-ce que le
président doit tolérer...
M. BURNS: Ce n'est pas moi qui l'ai ouverte.
M. BOURASSA: Un instant.
M. LE PRESIDENT: Non, mais est-ce que le président doit
tolérer la même représentation, les mêmes
commentaires peut-être en sens inverse de la part d'autres membres de la
commission? S'il s'agit de justice, je devrais nécessairement entendre
tout ce que les autres autour de la table ont à dire, même si
ça peut déplaire à un parti ou à un autre.
On a déjà demandé la parole. J'ai
terminé.
M. le premier ministre.
M. BOURASSA: Si on me permet de répondre au député,
tantôt je l'ai interrompu, je l'admets, mais c'est parce que ça
fait une demi-heure qu'on m'attend et je voudrais partir. Mais je voudrais
préciser un certain point. Il a accusé le gouvernement d'avoir
politisé le débat. Or, je pense qu'au cours de la dernière
année je ne veux pas rester dans ce domaine politique des
représentants du Parti québécois ont fait de la politique
avec la question de la baie James.
On a dit qu'il y a eu interférence de la part du gouvernement de
manière à forcer l'Hydro-Québec à prendre telle ou
telle orientation. Or, quand on considère toutes les études qui
ont été faites très fouillées, très
techniques par des firmes internationales, je ne vois pas en quoi ces
firmes peuvent être influencées par des déclarations
politiques.
La position du gouvernement est qu'il y a un an il y avait suffisamment
d'études pour annoncer le développement de la baie James. Il y
avait eu pour $10 millions d'études et il restait par la suite à
établir de quelle façon on pourrait aborder le projet de la
manière la plus rentable. Au cours de cette année-là on a
eu les études les plus fouillées qu'on pouvait trouver et
l'Hydro-Québec a recommandé au gouvernement de même
que la Société de la baie James l'avait recommandé
de procéder immédiatement.
M. LE PRESIDENT: M. Boyd m'a demandé la parole. Et il y a
d'autres membres de la commission qui veulent parler aussi.
M. BOYD: Avant qu'on laisse le domaine technique, il y a une
rectification que je voulais faire depuis plusieurs séances. J'attendais
toujours la présence du député de Saguenay pour la faire.
C'est qu'à une de ces séances il avait mentionné que
l'année passée j'avais parlé de $6.6 milliards pour un
projet NBR et il demandait comment il se faisait maintenant que nous pouvions
être si sûrs de nos chiffres.
J'ai eu l'occasion de le rencontrer par la suite et nous en avons
discuté. M. Lessard a admis qu'il s'était trompé,
qu'effectivement j'avais bien dit $4.1 milliards et que c'était pour
5,300 mégawatts. Alors, j'ai lu le procès-verbal des
séances des 19 et 20 mai 1971.
J'aurais préféré qu'il soit ici, mais, étant
donné que le temps passe, je pense qu'il faut rectifier cette chose. Je
suis convaincu que M. Lessard est d'accord sur cette rectification. Si vous
regardez dans ces débats, il y a quatre ou cinq endroits où j'ai
mentionné $4.1 milliards pour une production à NBR qui
était de 5,300 mégawatts, ce qui faisait un prix moyen de $773 du
kW pour une mise en service en 1978.
Dans les études qu'a déposées
l'Hydro-Québec, encore au mois de janvier 1972 pour le projet NBR revu,
réétudié et complété, nous arrivons, pour le
même NBR, à $4 milliards pour 5,600 mégawatts, pour une
mise en service en 1978, ce qui nous donne un coût moyen de $717 par kW.
M. Lessard demandait, à ce moment-là, comment il se faisait que
nous arrivions à des chiffres comme ceux que nous signalions pour La
Grande. Si nous continuons notre comparaison, nous atteignons $5,800 millions
pour le complexe La Grande, qui nous donne 8,300 mégawatts pour une mise
en service en 1980, ce qui fait un prix moyen de $700 par kW.
Alors, je veux simplement rectifier cette chose et je peux vous dire que
M. Lessard était d'accord. Au moins, il a admis que je n'avais jamais
mentionné $6 milliards, mais que j'avais mentionné, plutôt,
$4.1 milliards.
M. BURNS: M. le Président, sur ce point-là, ça va
être très bref. Je veux juste dire que, malheureusement, M.
Lessard, le député de Saguenay, est dans l'incapacité
d'être ici. Je sais, d'autre part, que, s'il avait pu être ici, il
aurait rectifié les faits dans le sens que M. Boyd vient de mentionner.
Si jamais l'occasion se présente d'une prochaine séance où
il pourrait être présent et également les
représentants de l'Hydro-Québec pourraient l'être, je suis
sûr que ça lui ferait plaisir de faire cette rectification
lui-même.
M. LE PRESIDENT: Le député de Verchères.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, en terminant l'étude du
programme d'équipement, je pense qu'on doit dire que le gouvernement est
satisfait de l'ensemble des études qui ont été faites et
des conclusions qui s'en dégagent non parce qu'elles tendent à
prouver des points de vue que nous aurions pu évoquer, mais parce qu'il
nous semble qu'au cours des douze derniers mois il s'est fait, quand
même, un travail très sérieux, tant par
l'Hydro-Québec que par d'autres firmes qui ont reçu des mandats
de l'Hydro-Québec et de la Société de développement
de la baie James.
Sur l'ensemble du projet, je pense qu'il faut être réaliste
et voir qu'il n'y a peut-être aucun projet au Québec qui a
été autant discuté et qui a fait l'objet d'autant
d'études sérieuses. Depuis 1964, c'est-à-dire depuis
déjà huit ans qu'on s'attaque à l'ensemble du potentiel
qu'offre la baie James pour les Québécois, inutile de
répéter les millions de dollars qui, tant avant le 29 avril
dernier qu'actuellement, ont été dépensés. En
particulier, lorsqu'on examine l'ensem-
ble des conclusions qui se dégagent, la méthodologie
suivie par chacun des groupes qui ont eu à étudier le projet, on
ne peut s'empêcher de croire qu'on voit là un cheminement
très sérieux de la part de gens qui, face à des
investissements fort importants, je pense, se sont acquitté très
bien des responsabilités qui leur étaient confiées, que ce
soit au niveau des commissaires de l'Hydro-Québec, des cadres de
l'Hydro-Québec, de ceux qui ont eu des mandats ou même du
gouvernement lui-même. Qu'on pense aux études très
fouillées que l'Hydro-Québec nous a données et qui ont
été peut-être pour plusieurs un véritable cours
d'introduction à tout le jargon d'aménagement
hydroélectrique.
On pense aux rapports qui nous ont été soumis par des
firmes d'ingénieurs qui ont étudié certains projets, au
rapport de la firme Shawinigan, au rapport d'Ebasco dont tous les partis
d'opposition ont pu obtenir une copie. On voit là des études
très sérieuses sur l'ensemble d'un projet.
J'avoue franchement que l'an dernier, dans les discussions de la
commission, nous n'avions pas évoqué la question de
l'énergie de pointe, peut-être parce que, l'an dernier, les
travaux de la commission s'étaient en particulier reportés non
pas sur les besoins de l'ensemble du réseau mais sur le potentiel de la
baie James qui avait été évoqué. D'ailleurs,
l'énergie de pointe et les réserves pompées, bien que
n'étant pas une nouveauté technologique, sont quand même
assez récentes sur le continent nord-américain. Je pense que
cette année, bien que cet élément n'était pas dans
le programme de l'an dernier, on l'a justifié non pas parce que, comme
énergie de centrales â réserve pointée, comme
réserve de pointe, on peut voir quelque chose de similaire à du
nucléaire. Je pense que cet élément remplit une fonction
très appropriée, c'est-à-dire tenter d'établir la
stabilité du réseau et, en même temps, répondre
à des besoins de pointe au moindre coût qui s'avère, dans
ce cas-ci, un cas essentiellement d'hydro-électricité mais sous
des formes nouvelles.
Je pourrais dire que d'ailleurs, l'an dernier, nous n'avions pas mis
tous les dés sur l'ensemble du développement total de la baie
James, en ce sens qu'il fallait sortir toutes les énergies des cinq
rivières de la baie James. Nous avions tout simplement fait non pas un
acte de foi mais un acte après $8 millions d'études, à
l'effet que ce potentiel, compte tenu du coût d'énergie,
était fort valable, se comparait à d'autres sources et que le
Québec pouvait en retirer sur le plan des retombées
économiques, sur le plan d'un prolongement de nos compétences en
matière de développement hydro-électrique, beaucoup
d'avantages.
Nous avions bien dit j'ai relu certaines des déclarations
du premier ministre, de moi-même et d'autres députés
libéraux que ce n'était pas une formule exclusive. Nous
n'excluions pas, à l'époque, qu'il y ait des aménagements
nucléai- res dans l'ensemble d'un programme, mais nous voyions la baie
James comme offrant un plus grand potentiel afin de combler des besoins
d'énergie à un coût moindre que l'énergie
nucléaire. On pourrait dire, à la rigueur, qu'on nous
présente un programme mixte, mais je pense qu'on conviendra que le
programme mixte est quand même très fort en teneur
d'hydro-électricité, non pas pour prouver qu'une partie pouvait
avoir raison mais parce que strictement à l'étude de tous les
programmes, c'est ce programme qui semble être le plus économique
en fonction des besoins du Québec.
D'ailleurs, je suis un peu surpris. En annonçant le
développement de la baie James, il est bien sûr qu'il y a une
foule de décisions qui auront à être prises. Ce qu'on nous
annonce aujourd'hui, c'est que, dans une première phase
là, j'aimerais quand même souligner l'unanimité qui se
dégage de tous ceux qui ont participé à l'étude, en
particulier l'Hydro-Québec et la Société de la baie James
de recommander quelque chose qui ne semblait peut-être pas évident
l'an dernier mais qui le devient maintenant que l'ossature même de
ce projet d'aménagement est l'ensemble du complexe La Grande. A ceci
viendront s'ajouter d'autres phases et là, tant l'Hydro-Québec
que la société nous ont dit que nous avons à la fois le
temps et les études nécessaires à compléter pour
savoir quelles sont les autres phases qui pourront se greffer, qu'il s'agisse
de diversion de bassins ou d'aménagement, en circuit fermé, de
certaines rivières.
C'est un peu la même chose lorsqu'on compare avec Manic-Outardes.
J'ai tenté de retrouver les coupures de presse parce que le journal des
Débats n'existait pas à l'époque. Lorsque le premier
ministre de la province a annoncé Manic-Outardes, je pense que ce
n'était pas, en toute honnêteté, à un stade plus
avancé que lorsque, l'an dernier, nous avons annoncé le
développement de la baie James. Il y avait encore beaucoup
d'études à parfaire et même on voit encore que des
aménagements comme Manic-3, comme Outardes-3, qu'on a inclus, je pense,
dans le projet, sont encore des décisions qui sont toutes
récentes et même à prendre. Cela n'empêchait pas
l'annonce, il y a tout près d'une dizaine d'années, du
développement du complexe Manic-Outardes et graduellement,
l'acheminement de tout ceci.
Je pense également que l'Hydro-Québec et le gouvernement
ont tenté de faire preuve de concertation. Je pense que c'est ce qui
doit intervenir dans des décisions d'une telle importance. Il en reste
toutefois que, même l'an dernier, on n'a qu'à reprendre mot
à mot la lettre de M. Giroux et les recommandations de
l'Hydro-Québec ou même cette année, il s'agit
essentiellement d'une recommandation de l'Hydro-Québec. Contrairement
peut-être à ce que le député de Gouin a
soulevé, j'aimerais attirer son attention sur les articles 36, 37 et
suivants de la Loi de l'Hydro-Québec, qui donnent quand
même une responsabilité au lieutenant-gouverneur en conseil
d'approuver certains des plans d'aménagement même, on le sait,
dans certains détails, même au niveau des postes et des lignes de
transmission.
La politisation du débat, j'espère qu'effectivement elle
cessera.
Je suis bien prêt à faire des efforts
supplémentaires. Voici un projet qui a beaucoup de retombées pour
le Québec, qui se situe dans le prolongement de nos compétences
et qui nous permettrait peut-être, au cours des prochaines années,
d'exporter sur le plan de la compétence, sur le plan des ressources un
talent particulier au Québec. Qu'on pense aux immenses besoins de
l'Amérique latine ou aux immenses besoins de l'Afrique, sur le plan de
l'aménagement hydroélectrique. Je pense que l'ensemble de ce
projet aurait quand même des retombées très
bénéfiques pour les Québécois.
Au cours des douze derniers mois, je pense qu'on ne peut pas accuser le
gouvernement d'être revenu considérablement à la charge
pour soulever l'à-propos de l'aménagement de la baie James. C'est
qu'avant de pouvoir montrer des plans, de donner des chiffres dans les moindres
détails ça impliquait des décisions qui font suite aux
recommandations que nous avons eues. Alors que, dans d'autres formes
d'énergie, il était facile de situer des cas précis, des
coûts actuels.
Il faut bien comprendre que chaque développement
hydro-électrique est particulier dans sa nature et que des chiffres
précis impliquent des recherches sur le terrain, des études en
bureau qui sont beaucoup plus poussées que dans d'autres cas où,
compte tenu des coûts de construction qui sont à peu près
semblables pour le thermique et le nucléaire d'un site à l'autre,
seuls des facteurs d'escalation, des facteurs d'intérêt pourraient
jouer.
J'espère simplement que dans ce débat, constamment, toutes
les parties tenteront d'être très dynamiques pour défendre
leur point de vue mais, en tout temps, prêtes à engager
véritablement un dialogue, jouer le vrai jeu du dialogue. Celui-ci
consiste à être prêt à convaincre l'autre de son
point de vue mais être également prêt en tout temps à
être convaincu par l'autre par un point de vue différent. De tout
ceci on pourra trouver un projet qui pourra rallier, sans partisanerie, tous
les Québécois. Voici un champ d'action qui est peut-être
plus que tout autre à la mesure de nos capacités, avec toute la
modestie dont on peut être capable sur le plan économique, sur le
plan industriel. Je pense qu'on va tenter dans d'autres secteurs des aventures
qui sont beaucoup plus risquées. Celle-là n'est pas
risquée, c'est le prolongement de nos compétences, que ce soit au
niveau de la conception, de la construction, de la réalisation et de
l'exploitation. Il y a une chose certaine c'est que, si on n'est pas capable au
départ de faire preuve de bonne volonté et d'unir tous nos
efforts, on risque d'éclabousser ou de compromettre sérieusement
un projet qui a toutes les chances de réussir et qui apporte des
avantages marqués aux Québécois.
Alors, je pense que c'est la position du gouvernement. En même
temps, je remercie tous ceux qui ont participé jusqu'ici à
l'élaboration de ce? programme d'équipement, qui, encore une
fois, est peut-être différent de ce que nous avions à
"l'esprit il y a un an. Mais il correspond à nos désirs, de
développer la baie James comme étant une source d'énergie
à meilleur marché pour satisfaire les besoins du Québec.
Deuxièmement, il s'agit sur le plan des retombées
économiques, du prolongement de nos expériences passées et
cela nous promet des avantages marqués.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption avait
demandé la parole il y a déjà près d'une
demi-heure.
M. PERREAULT: Ce sera très court, M. le Président. Je
voudrais souligner que la position adoptée par le député
de Gouin traduisait, je suppose, la politique du Parti québécois
vers une orientation nucléaire. Elle se base sur des hypothèses
qui ne pourront être vérifiées que beaucoup plus tard, soit
vers 1985, parce que dans les discussions on a mentionné les
surgénérateurs. Ceci me fait penser un peu à la
proposition qu'on nous a faite au comité interministériel de la
baie James, où d'ailleurs siégeait le commissaire DeGuise de
l'Hydro-Québec. En effet, un haut fonctionnaire du gouvernement est venu
nous proposer des usines thermiques à partir du pétrole à
être découvert au Québec. Nous lui avons proposé
d'attendre que du pétrole soit découvert au Québec avant
de penser à profiter du pétrole du Québec.
M. LE PRESIDENT: Le député de Shefford.
M. RUSSELL: M. le Président seulement pour conclure ou terminer
en ce qui me concerne ou en ce qui concerne le parti
Unité-Québec. Sur le développement hydroélectrique
de la province de Québec, je veux simplement faire, d'une façon
très rapide, à vol d'oiseau, une rétrospective du
passé pour, sans vouloir défendre l'Hydro-Québec ou
l'accuser, tenter d'exposer les faits tels qu'ils se situent actuellement. S'il
s'agit de faire un peu d'histoire, on pourrait peut-être commencer avec
la Manicouagan. A ce moment-là, bien des gens ont émis des
opinions et des doutes sur une décision qui avait été
prise. Par contre le développement s'est avéré une chose
rentable. Il y a eu la question de Churchill Falls où à certains
moments un doute a été émis.
La négociation s'est avérée encore là une
chose très rentable pour le Québec. C'est à ce moment
peut-être qu'est arrivée cette situation d'un autre mode de
production de l'électricité
et qui a peut-être freiné, en somme,
l'accélération qui aurait dû se produire pour le
développement de la baie James.
Mais je crois bien que l'Hydro-Québec, voyant qu'il y avait un
délai raisonnable qui lui permettait de faire cette étude qui
était nécessaire pour s'assurer si, réellement, le
nucléaire était plus rentable qu'un développement comme
celui de la baie James, a fait un arrêt pour en faire l'étude. Ce
qui explique ce retard de 1967, 1968 et peut-être 1969 et ensuite
l'accélération du projet à la lumière des
faits.
Je pense qu'il s'agit là d'un projet qui est très
coûteux mais qui s'avérera, comme beaucoup d'autres, rentable
économiquement pour la province et auquel je souscris. Je ne suis pas un
gars du nucléaire. Je n'ai jamais eu tellement foi dans ce domaine. Je
pourrais peut-être citer les paroles d'un ancien premier ministre qui se
sentait malheureux, parce que lui non plus n'était pas tellement
près du nucléaire mais qui, sérieusement, se posait des
questions et avait questionné les commissaires de l'Hydro-Québec.
Il leur avait dit: Soyez certains. Faites une étude qui en vaut la peine
pour être sûrs que vous ne feriez pas une erreur si on
décidait de ne pas procéder avec un projet comme celui de la baie
James.
Je me rends compte que les commissaires de l'Hydro-Québec ont
fait leur travail. Sans vouloir leur envoyer des fleurs, je me dis qu'ils ont
décidé de procéder avec le projet de la baie James qui,
économiquement, il ne s'agit pas simplement d'une question
hydro-électrique ou d'électricité, parce qu'il y a
d'autres sources qui sont dans cette région et qui méritent
d'être développées, va permettre de les développer
en même temps que nous allons faire ce développement
hydro-électrique.
Tout à l'heure, nous aurons l'occasion, je l'espère, en
discutant avec la Société au point de vue du
développement, de voir quelles précautions ont été
prises pour s'assurer que le développement va se faire d'une
façon rationnelle et que les aménagements qui se font
actuellement vont répondre aux besoins grandissants de la province dans
le domaine de l'électricité.
M. le Président, je conclus là-dessus en me
réservant le droit de faire des commentaires sur d'autres sujets qui
viendront tout à l'heure, lorsque nous parlerons du développement
avec la Société. Je conclus que je peux, au nom de mon parti,
dire que nous sommes favorables au développement de la baie James tel
que cela se présente actuellement.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, comme je l'ai mentionné
avant la suspension pour le souper, je vais tout simplement ajouter quelques
commentaires pour dire que nous aussi, du Ralliement créditiste,
même si nous n'avons pas été tellement bruyants dans ce
débat, nous nous sommes toujours intéressés et nous nous
intéressons encore au développement et à l'avenir du
Québec.
Il nous paraît, à la suite de ce que nous avons obtenu, de
ce que nous connaissons actuellement, que le développement
hydro-électrique proposé dans le projet de la baie James
contribue davantage à la libération économique du
Québec du fait que nous avons justement nos compétences, notre
Hydro-Québec. Même si, à l'heure actuelle, elle est
obligée de se financer ailleurs mais c'est un autre
problème et nous y reviendrons nous avons nos ingénieurs
et nous sommes capables de développer ces richesses chez nous.
Nous avons l'impression, en ce qui nous concerne, qu'en optant
immédiatement pour le nucléaire, il est évident que le
Québec se trouverait à dépendre de l'approvisionnement en
eau lourde avec les problèmes que cela comporte à l'heure
actuelle. Evidemment, il nous faudrait peut-être importer dès
ingénieurs des Etats-Unis ou de Russie pour être en mesure de nous
orienter et de nous diriger dans ce domaine.
M. le Président, nous n'avons voulu politiser le débat
à aucun moment. Même s'il a été politisé au
point de départ et si ceux qui ont voulu le dépolitiser l'ont
politisé à leur façon, nous ne voulons pas ni d'une
façon ni d'une autre politiser le débat. Je tiens tout de
même à dire une chose à l'endroit du député
de Gouin qui a dit que certains partis politiques avaient approuvé ce
projet aveuglément.
Je tiens à faire une nuance tout simplement. C'est qu'il y a une
différence entre approuver aveuglément et savoir ce qu'on veut.
J'ai été surpris de constater, dans les conclusions que le
député de Gouin nous a apportées tout à l'heure,
qu'il en était justement arrivé à la conclusion que le
projet proposé par les Etats-Unis, le programme américain ne va
pas dans le même sens que le programme de 1'" Atomic Energency of Canada"
et que ceci nous aurait amenés dans un débat constitutionnel.
Je comprends que les débats constitutionnels peuvent faire
l'affaire de quelqu'un mais, en ce qui nous concerne, lorsque c'est possible de
nous en exempter, je pense que nous devons le faire. Nous devons regarder
l'intérêt de la province, l'intérêt des
Québécois. Nous devons surtout travailler à
développer les entreprises que nous avons déjà, avec les
compétences que nous avons déjà, pour que cela
bénéficie à tous ceux qui vivent au Québec.
M. LE PRESIDENT: Je remercie le député. Si j'ai bien
compris, vous avez terminé. Le député de Gouin avait
terminé ses commentaires. Messieurs, je demanderais, pour une
période de trois à cinq minutes, la suspension du débat
pour permettre aux représentants de l'Hydro-Québec et de la baie
James, qui auront à discuter des finances, peut-être
d'échanger leurs positions avec les ingénieurs qui sont
devant
nous. Cela va vous permettre de vous détendre en même
temps, après une heure et demie de discussions.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Nous continuons nos travaux. Le
prochain chapitre, soit le troisième, portera sur les finances.
M. JORON: M. le Président, puis-je vous demander une directive?
Cela m'apparaît être un changement au programme. En fait, je ne
sais pas si vous avez l'intention que les deux se discutent, dans un sens,
simultanément. Je fais référence, par exemple, au point de
M. Giroux, qui avait relié l'une très étroitement à
l'autre. Il va peut-être apparaître difficile de parler de
financement sans parler de gérance. Je vous réfère au
témoignage du président de l'Hydro-Québec, qui reliait
très directement les deux questions.
M. LE PRESIDENT: Il y a ici les représentants de la
Société de développement de la baie James et il y a aussi
des représentants de l'Hydro-Québec. Je pense que si nous pouvons
procéder immédiatement, ce sera probablement un chapitre moins
long que le problème de l'administration. S'il y avait des questions,
même si cela touchait très légèrement à un
point administratif, il s'agirait pour moi, je pense, comme président,
de mesurer.
Il se peut fort bien qu'au cours de la discussion sur les finances, je
doive intervenir pour référer à la séance de la
gestion, la séance de l'administration proprement dite. Il s'agira non
pas d'enlever la parole mais plutôt de retarder ou d'avancer plus avant
dans ce sujet.
Donc, en commençant, à dix heures, sur les finances, je
préviens les membres de la commission immédiatement que je
demanderai l'ajournement du débat à dix heures trente, ce soir,
au lieu de onze heures. C'est dire que nous avons une demi-heure. Au tout
début, je pense que M. Gauvreau a demandé la parole.
M. GAUVREAU: Nous avons un bref exposé.
M. LE PRESIDENT: C'est cela. Il s'agirait d'entendre, je pense, comme
nous avons procédé dès le début, un bref
exposé de la part des deux groupes ou, s'il n'y en a pas, de la part de
la Société. Procédez, si vous voulez. De là
viendront les questions. Ensuite, les questions des membres de la commission
vis-à-vis de vos commentaires.
M. GAUVREAU: Je vous présente tout de suite les deux cadres de
l'Hydro-Québec qui feront l'exposé sur les finances. Il s'agit de
M. Edmond Lemieux, directeur général,
finances-comptabilité, à la droite de M. Boyd, et de M. Georges
Lafond. Même si le ministre des Finances le sait bien, il y en a
peut-être d'autres qui ne le savent pas, je tiens à souligner ici
que pour le financement de l'Hydro-Québec, en général,
surtout lorsqu'il s'agit d'emprunts aux Etats-Unis, de programmes d'emprunt
pour toute l'année, le monde devrait savoir que nous travaillons en
collaboration très étroite avec l'équipe du gouvernement,
du ministère des Finances.
Nos programmes d'emprunt sont planifiés, ils sont
étudiés et l'équipe qui va vous parler ici est une
équipe aussi qui est associée de très près dans ses
travaux à celle du ministère des Finances.
M. LEMIEUX: En examinant le projet de la baie James au tout
début, j'étais très inquiet à cause des sommes
fantastiques qui semblaient être impliquées. A la suite des
études faites par les ingénieurs, et à la suite de
prévisions que nous avons préparées, je crois que les
sommes empruntées sont facilement accessibles. Je dis facilement, parce
qu'une province ou une entreprise cette dernière qui a bonne
réputation n'a pas trop de difficultés à trouver les fonds
sur les marchés internationaux que, depuis quelques années, nous
connaissons assez intimement, ayant fait d'abord des emprunts aux Etats-Unis,
à partir de 1953; en Allemagne à partir de 1969; à Londres
en euro-dollars à partir de 1969 et il se peut que prochainement on
puisse explorer d'autres marchés, par exemple la Suisse, la France et
éventuellement le Japon. Le monde devient plus petit.
J'aimerais ne pas préciser les emprunts année par
année que nous prévoyons pour les dix ans à venir, mais
j'aimerais mentionner qu'avec le programme hydraulique, nous prévoyons
des emprunts moyens, pour l'Hydro-Québec et le financement du projet de
la baie James, de $526 millions par année, en moyenne. Et durant les
cinq premières années, c'est-à-dire de 1972 à 1976,
les emprunts ne dépasseront pas $400 millions par année. En 1972,
nous allons effectuer des emprunts de $380 millions facilement, étant
donné que sur le marché américain nous effectuons
maintenant des emprunts de $100 millions à la fois la province
parfois même plus que ça et avec deux emprunts à
New-York de $100 millions chacun, nous faisons 50 p.c. de notre programme.
En ce qui concerne le programme nucléaire, les emprunts de dix
ans seraient en moyenne de $364 millions comparés à $564 millions
plutôt que $526 millions, donc légèrement plus
élevés.
En ce qui concerne la pointe des emprunts, qui arriveront en 1979 ou en
1980, dans le cas de l'hydraulique, c'est environ $900 millions qui, pour un
an, sont pas mal élevés.
Cependant, rendus à ce moment-là, nous pouvons effectuer
des emprunts, à trois ans ou à cinq ans, là où il y
a des très gros montants disponibles, des montants que nous ne pouvons
pas toucher aujourd'hui du fait que, d'abord, nous pouvons effectuer tous les
emprunts nécessaires à long terme et aussi que ce ne serait pas
recommandable d'emprunter aujourd'hui et
d'être obligés de rembourser dans trois, quatre ou cinq
ans, quand nous aurons des sommes plus élevées encore.
En effet, nous empruntons le plus possible, au meilleur compte possible
et le plus vite possible. Jusqu'ici, nous avons réussi à trouver
les fonds nécessaires pour l'Hydro-Québec, L'autre jour, nous
avons parlé de l'autofinancement. Ceci est une partie importante du
financement de l'Hydro-Québec. D'ailleurs, nous avons signalé que
nous cherchons à maintenir une couverture des intérêts
à payer, c'est-à-dire que nous devons sûrement avoir la
somme de nos intérêts comme minimum. Aux Etats-Unis, la norme pour
une compagnie d'électricité, ça peut être deux ou
trois fois les intérêts. L'Hydro-Québec, jusqu'à ce
jour, a convaincu nos prêteurs et Moories and Standard and Poor, des gens
qui établissent des cotes de nos obligations, l'idée qu'une fois
et quart suffit. Cela a été très bien accepté par
tous ces gens et ça représente, d'ailleurs, un pourcentage
semblable à celui qu'a l'Hydro-Ontario qui est un de nos concurrents sur
le marché des emprunts.
Il y a aussi un deuxième rapport que nous considérons
comme important et qui est considéré comme très important
par tous les gens du monde de la finance, c'est le rapport entre la dette
à long terme et notre avoir propre ou le capital engagé. Le
capital engagé peut comprendre des sommes provenant d'emprunts et des
sommes provenant de nos réserves, c'est-à-dire des profits, si on
peut les appeler ainsi. Nos réserves, dans le moment, sont environ 25
p.c. de l'actif; nos emprunts représentent environ 75 p.c. de
l'actif.
Autrefois, dans une compagnie commerciale, on trouvait que l'avoir
propre devait être, au moins, 50 p.c. de l'actif; la dette, pas plus que
50 p.c. Pour une compagnie d'électricité, il est convenu qu'on
peut avoir une dette, disons, de 60 p.c, avec un avoir propre de 40 p.c. Ceci
représente, disons, une norme acceptable aux prêteurs.
L'Hydro-Québec a un avoir propre de 20 p.c. à 25 p.c. et des
emprunts de 75 p.c. à 80 p.c.
Je crois qu'avec ces niveaux-là nous avons atteint un niveau
raisonnable que nous devons chercher à maintenir dans le but d'effectuer
nos emprunts aux meilleures conditions possibles. Comme l'a dit M. Gauvreau,
nous travaillons étroitement avec le sous-ministre des Finances et avec
son personnel; c'est toujours très agréable de travailler avec
eux.
Il est donc permis de penser que nous pourrons emprunter les sommes
nécessaires pour financer ces projets. Si vous avez des questions, M.
Lafond et moi serons heureux d'essayer d'y répondre.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. M. Nadeau, s'il vous plaît.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une
question? Quand vous parlez d'une moyenne de $526 millions d'emprunts dans les
dix prochaines années, est-ce que cela inclu aussi les emprunts
réguliers de l'Hydro-Québec en dehors du projet de la baie
James?
M. LE PRESIDENT: S'il vous plaît! On avait convenu, dès le
début, qu'on entendrait les observations. D'autres députés
ont demandé la parole, il y en a deux ou trois. Si vous voulez poser des
questions, je pense que le moment viendra. M. Nadeau a la parole.
M. NADEAU: M. le Président, en ce qui nous concerne, il
était assez difficile d'établir un programme d'investissements ou
d'emprunts avant que les projets d'aménagement soient bien
arrêtés. Les projets d'aménagement semblent maintenant
arrêtés, donc on pourrait se pencher sur le problème des
emprunts. Toutefois, je crois qu'il serait opportun de transmettre à
cette commission les réactions que nous avons eues de financiers tant
canadiens qu'américains, et qu'européens, réactions
extrêmement favorables au projet de la baie James, réactions aussi
très favorables au fait que nous avons mentionné que le projet
devait être réalisé en grande partie par l'entreprise
privée, intérêt et attrait particuliers au système
de "management" ici, je parle de la société
d'énergie et non pas de "management" du projet mais de la
Société d'énergie ou de la Société de la
baie James de la façon dont on concevait, si vous voulez, la
Société de la baie James.
Nous avons reçu de nombreuses visites, lettres et
téléphones, témoignages, etc., d'intérêt
presque fantastique de la part de tous ces banquiers. J'en ai un paquet que je
peux vous passer. En ce qui nous concerne, nous ne prévoyons aucune
difficulté sérieuse. Comme je vous l'ai dit, nous avons
reçu des visites qui ont été non sollicitées dans
bien des cas. Ces institutions bancaires ou financières, qu'elles soient
européennes, canadiennes ou américaines, n'attendent qu'un signe,
de notre part. A toutes fins utiles, le crédit d'une
société ou d'une régie gouvernementale ne vaut que dans la
mesure où l'Etat lui apporte son endossement ou sa garantie et je crois
qu'à ce point de vue-là, M. Lemieux a rendu un témoignage
l'autre jour en disant que si nous avons besoin d'une couverture de 1.25 alors
que les compagnies d'utilité publique ont besoin d'une couverture
d'entre 3 et 5 aux Etats-Unis, c'est parce qu'on avait l'endossement de la
province. Je crois que c'est un facteur très important à
considérer.
Avec la capitalisation de la société d'énergie qui
est autorisée à $1 milliard, nous croyons qu'il serait
très facile, encore une fois, d'obtenir les fonds nécessaires
à la réalisation du projet, étant donné que nous
pouvons concevoir d'emprunter au moins cinq fois le capital investi ou souscrit
alors que, dans le cas de Churchill Falls, par exemple, on a emprunté
6.3, cinq fois le capital investi.
M. le Président, c'est pour résumer un peu notre position
et vous dire qu'en ce qui nous concerne, je crois que nous sommes d'accord avec
l'Hydro-Québec que le financement du projet est très possible et
probablement sera très agréable.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Nadeau. Le député de
Verchères.
M. SAINT-PIERRE: Ma question s'adresse à la fois à M.
Lemieux et à M. Nadeau. Seriez-vous d'accord, d'après vos propos,
pour le financement d'un tel projet que les trois critères les plus
importants soient les suivants: premièrement, la rentabilité du
projet pour lequel les sommes sont demandées, c'est-à-dire
justifier l'ampleur des sommes et la rentabilité du projet
lui-même; deuxième facteur, pas nécessairement par ordre
d'importance, le fait que suivant l'article XYZ des deux lois, la garantie de
la province est apportée à l'organisme emprunteur, et,
troisièmement, le sérieux de l'organisme qui emprunte. Est-ce que
ce sont les trois facteurs les plus importants?
M. LEMIEUX: D'accord. Je m'excuse de ne pas avoir mentionné
l'importance de la garantie de la province, je ne voudrais pas donner
l'impression que nous ne l'apprécions pas énormément. Vous
avez bien raison, c'est la garantie de la province, la rentabilité du
projet et la rentabilité de l'Hydro-Québec au complet en plus de
ce projet. D'ailleurs, je n'aimerais pas être obligé de financer
ce projet isolément.
M. SAINT-PIERRE: Compte tenu de la structure juridique des projets de
loi, la loi de l'Hydro-Québec, chapitre 86, et le bill 50 de l'an
dernier, est-ce qu'il vous semble que, sur le plan strict du financement, la
Société d'énergie sera en mesure, sans difficulté,
d'obtenir le financement requis, compte tenu de la structure juridique des deux
projets de loi? Je vous le demande à vous, comme représentant de
l'Hydro-Québec qui a trois des cinq directeurs, et 70 p.c. des parts
dans la société.
M. LEMIEUX: J'aimerais décrire ce qui est arrivé dans le
cas de Churchill Falls, qui a eu à emprunter $550 millions. Avant de
pouvoir effectuer ces emprunts, il y a eu des estimations très
sérieuses qui ont été faites pendant plusieurs
années. On y avait des plans complets, un contrat pour la vente de
l'énergie, des garanties de l'Hydro-Québec que, s'il manquait des
fonds pour compléter la centrale, l'Hydro-Québec les fournirait,
des garanties que, s'il arrivait quelque chose à la centrale durant
l'exploitation, l'Hydro-Québec aussi aurait à débourser
les fonds pour garantir que les intérêts et le principal des
obligataires seraient payés.
M. SAINT-PIERRE: Mais, dans le cas de Churchill Falls, c'était
une société privée qui ne bénéficiait pas de
la garantie gouvernementale de Terreneuve ou de Québec. C'était
simplement le contrat de vente.
M. LEMIEUX: Pour eux, le contrat de l'Hydro-Québec en
était l'équivalent.
M. JORON: Sur cette même question, est-ce qu'on pourrait demander,
si le ministre me le permet, si, effectivement, dans le cas de Churchill Falls,
l'Hydro-Québec a été appelée à fournir
finalement une partie, suite à l'engagement de garantie s'il manquait de
fonds, que vous venez de mentionner?
M. LEMIEUX: Non, pas en fonction de cet article dans le contrat.
Cependant, l'Hydro-Québec avait acheté, en plus d'une
quantité d'actions, pour $100 millions d'obligations avant que CFLCO ait
son financement.
M. JORON: Avant les émissions publiques? M. LEMIEUX: Oui.
M. SAINT-PIERRE: Peut-être que je pourrais reposer la question
à M. Nadeau. Croyez-vous, compte tenu de la structure juridique et la
garantie qui est offerte dans les deux, que, strictement sur le plan du
financement et je voudrais bien séparer cela d'autres points de
vue la Société d'énergie satisfait à ces
trois critères que j'ai énumérés et qui semblent
importants?
M. NADEAU: C'est toujours le langage que nous avons tenu avec les
financiers. C'est le suivant, que la société d'énergie
était une entité à part qui, d'après le bill no 50,
aurait la garantie de la province. Ceci revenait à la surface
constamment. Evidemment, on tenait à avoir la garantie de la province
comme on tient à l'avoir dans le cas de l'Hydro-Québec.
On a été enthousiasmé par la rentabilité du
projet, parce que vous savez que l'électricité est si rare aux
Etats-Unis que cela en est criant. On s'arrache les cheveux pour savoir comment
on va subvenir aux besoins d'énergie électrique, alors que nous,
ici, nous avons le potentiel. Aussi, la structure d'organisation de la
société était tout de même, encore une fois, un
attrait particulier. Ces trois facteurs que vous mentionnez ont su attirer
l'attention des financiers. Et aussi le sérieux de l'entreprise.
M. JORON: M. le Président, j'aurais une question
supplémentaire...
M. LE PRESIDENT: A l'intérieur de la question du
député de Verchères.
M. JORON: Oui, c'est ça. Sur les critères
mentionnés par le ministre de l'Industrie et du Commerce, je voudrais
demander, à la fois à M. Lemieux et à M. Nadeau, s'ils
retiennent égale-
ment comme critère l'expérience passée de
l'organisme emprunteur. Estiment-ils que cela établit, dans une certaine
mesure, sa crédibilité auprès du prêteur? Ceci se
rattache à la question de la réputation. On ne peut pas avoir de
réputation, évidemment, si on n'a pas d'expérience
passée. Ensuite, est-ce que le facteur de la connaissance et de la
familiarité acquises avec les prêteurs joue et facilite le
financement?
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que le député me permet de dire
qu'on a quand même la réputation de son père et de sa
mère? Dans cela, la filiale, la société d'énergie,
il me semble qu'il ne faut pas nier le lien héréditaire avec un
père qui a 70 p.c. et une mère qui a 30 p.c. Non?
M. NADEAU: Si je peux répondre à la question de M. Joron,
je ne crois pas que personne ait le monopole sur les possibilités
d'emprunter. Je ne sais pas si cela répond à votre question. Des
crédibilités, cela s'établit et, comme dit M.
Saint-Pierre, avec le père et la mère les choses se passent assez
bien.
Je crois que la façon dont nous avons décrit le projet a
été extrêmement bien acceptée, que nous avons
créé une certaine crédibilité qui est, je crois,
toute à notre honneur.
M. LEMIEUX: J'aimerais commenter votre question. D'ailleurs, je ne
voudrais pas dire qu'une nouvelle entreprise comme la société
aura des difficultés à emprunter et elle aura sûrement une
réputation qui peut être créée assez rapidement.
Mais il y a deux facteurs qui favorisent plus la vente des obligations
de l'Hydro-Québec que les obligations d'autres entreprises. Il y a
surtout le fait qu'il existe pour nos obligations c'est-à-dire
les obligations de l'Hydro-Québec un marché secondaire,
qui assure à celui qui achète nos obligations de pouvoir les
vendre s'il a besoin de fonds. Un marché secondaire pour la vente des
obligations est très important pour l'acheteur. Je crains que ce serait
un handicap pour la société. Quand même, je ne dis pas du
tout que cela rend la vente impossible, même l'utilité, à
un moment donné, d'effectuer des emprunts au nom de la
société. Mais j'insiste sur l'importance, pour la vente de nos
titres, de ce marché secondaire.
Deuxièmement, il est très important, pour la vente de nos
obligations, que ceux qui sont responsables de l'achat d'obligations aux
Etats-Unis par l'entremise des fonds de pension surtout aux Etats-Unis
parce que c'est là que nous en vendons 50 p.c. des banques et de
tous les acheteurs possibles soient souvent venus visiter Bersimis et
Manicouagan. Ils sont venus visiter les chutes Churchill. Ils viendront visiter
la baie James. Le fait que ces gens connaissent les officiers de
l'Hydro-Québec nous aide énormément à favoriser la
vente de nos titres.
M. LE PRESIDENT: M. Dozois.
M. DOZOIS: M. le Président, j'ai dit la semaine dernière,
à la suite de M. Giroux, que j'avais bien confiance que nous puissions
financer un projet de cette envergure. Sur ce qui a été dit ce
soir, je voudrais ajouter ceci: Lorsque nous avons discuté de la
capitalisation de la Société d'énergie, nous en sommes
venus à la conclusion qu'il fallait que l'Hydro-Québec souscrive
cette somme de $700 millions qui constituerait la capitalisation de la
Société d'énergie. Nous nous sommes arrêtés
à ce chiffre qui pouvait représenter environ six ou sept fois le
coût des investissements de la Société d'énergie, en
se basant à peu près sur la capitalisation de Churchill Falls
qui, elle, construisait un projet de l'ordre de $900 millions.
Nous l'avons fait précisément en vue d'assurer le
financement possible par la société d'énergie. Mais vous
comprendrez, M. le Président, qu'avant d'utiliser les facilités
d'emprunt par le truchement de la société d'énergie il va
sûrement falloir poser des gestes concrets pour que le crédit de
la société d'énergie s'établisse sur les
marchés. En effet, on a dit, tout à l'heure, qu'un des rapports
importants était de gagner l'intérêt une fois et quart. Il
faudra qu'il y ait un contrat entre la société d'énergie
et l'Hydro-Québec, qui sera son seul client, qui assure suffisamment de
revenus à la société d'énergie pour remplir cette
première exigence des prêteurs.
Je pense qu'il va de soi également qu'il devra y avoir des
discussions entre l'Hydro-Québec, la société
d'énergie et le ministère des Finances de la province pour
déterminer s'il y a lieu de lancer sur le marché une
troisième catégorie de titres, portant la garantie de la province
de Québec. Je ne dis pas que ce serait mauvais. Je ne dis pas que ce
serait la seule chose à faire, mais je pense que, comme dans le
passé, pour le financement des projets de l'Hydro-Québec, cela a
toujours été fait en accord avec le ministère des
Finances. Le financement de la société d'énergie ou le
financement de ce projet d'investissement par l'Hydro-Québec,
peut-être, devrait être fait en accord avec le ministère des
Finances.
M. LE PRESIDENT: Le député de Jean-Talon.
M. GARNEAU: M. le Président, vous conviendrez qu'il est assez
délicat de poursuivre la discussion sur ce sujet sans risquer de tomber
dans ce qui retiendra l'attention de la commission dans la prochaine
étape, c'est-à-dire le "management" et le rôle que joueront
la société d'énergie et l'Hydro-Québec dans la
réalisation de ce projet. C'est pourquoi je ne voudrais pas aller plus
à fond dans ce secteur. En effet, je trouve que l'on place
peut-être inutilement, pour le moment, les gens de la
Société de la baie James et les gens de l'Hydro-Québec
dans
l'eau chaude. Peut-être n'ai-je pas raison, mais, en tout cas,
c'est l'impression que cela me laisse.
Pour ma part, je dois dire que, depuis un an et demi, tant avec les gens
de l'Hydro-Québec qu'avec les gens de la Société de la
baie James et avec les sous-ministres des Finances, M. Casavan, d'abord, et M.
Goyette maintenant, les rencontres que j'ai eues avec les courtiers
américains, français, allemands, anglais, japonais, me portent
à croire que, peu importe la formule, c'est la rentabilité du
projet qui va établir le crédit, et peu importe qui va emprunter.
En tout cas, il m'a paru à moi que ça demeurait bonnet blanc et
blanc bonnet pour ce qui était des fournisseurs de capitaux.
C'est pourquoi je voudrais laisser de côté en ce qui
me concerne ce sujet-là pour revenir aux programmes d'emprunts
dont parlait M. Lemieux tout à l'heure et lui poser la question
suivante: quand vous établissez votre moyenne d'emprunt, à partir
de quel moment considérez-vous que le projet de la baie James va
dégager un "cash-flow" pour assurer une partie de l'autofinancement des
étapes futures?
M. LEMIEUX: Etant donné que la société
d'énergie est une filiale de l'Hydro-Québec qui détient
plus de 70 p.c. des actions, on est obligé de préparer un bilan
consolidé, alors les états sont des états
consolidés. Et dans cette consolidation, il n'y a pas d'importance pour
des paiements entre l'Hydro et la société. Alors, les revenus qui
résultent de la production de l'électricité sont
reflétés dans les états que nous avons
préparés. Les sommes à emprunter sont les sommes nettes et
sont aussi les sommes nécessaires pour payer, en plus de toutes les
dépenses, le rachat des obligations à échéance dans
le cas de l'Hydro et pour aussi payer l'achat des placements pour fonds
d'amortissement qui deviennent assez considérables, atteignant $100
millions par année en 1980.
Cela comprend tous les projets de l'Hydro, tous les besoins de l'Hydro
et tous les besoins de la société, étant donné que
nous ne pouvons pas séparer des besoins, si on est pour
considérer l'ensemble. Alors le fait qu'on reflète tous ces
besoins-là, dans nos prévisions, ne veut pas dire que nous
insistons pour faire nous-mêmes les emprunts.
M. GARNEAU: Je comprends cet aspect-là.
M. LEMIEUX: Au point de vue "cash flow", il n'y a pas grand "cash flow"
pour aider au financement.
M. GARNEAU: Si la Société d'énergie de la baie
James existe, il faudra, à un moment donné, qu'elle ait un bilan;
il sera consolidé par la suite. Supposons que je prends votre propos
à l'effet qu'on considère un bilan consolidé à quel
moment l'Hydro-Québec sera-t-elle en mesure de vendre de
l'énergie?
M. LEMIEUX: Dans l'année 1980.
M. GARNEAU: Dans l'année 1980 et la fin des travaux est
prévue pour un peu plus tard, en 1985.
M. LEMIEUX: 1985.
M. GARNEAU: 1985. Donc, à partir de 1980, une partie de la
production pourrait "générer" des revenus.
M. LEMIEUX: Oui, mais des revenus qui sont déjà
reflétés dans les prévisions.
M. GARNEAU: Oui, j'admets ça, mais c'est à partir de 1980
que la Société d'énergie va commencer à
"générer" des revenus dont vous avez tenu compte dans vos
prévisions d'emprunt. C'est donc dire qu'il y aura, quand même,
une partie qu'on pourrait appeler, pour les fins de la discussion, de
l'autofinancement. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire maintenant
quelle est cette évaluation du "cash flow" qui pourrait être
"généré" de la vente d'électricité produite
par la filiale de la baie James? Est-ce que vous pouvez le séparer ou si
vous ne le pouvez pas?
M. LE PRESIDENT: J'aimerais, messieurs, suggérer la fin de ce
débat-ci pour dix heures trente. Je vois qu'on dépasse l'heure.
Je pense qu'on pourrait attendre à la prochaine séance pour
continuer dans cette veine-là.
M. GARNEAU: M. Lemieux peut finir.
M. LEMIEUX: Je peux répondre à la question de M.
Garneau?
M. LE PRESIDENT: Oui, oui.
M. TETRAULT: Il ne faudrait pas que la réponse amène
d'autres questions.
M. LE PRESIDENT: Si la réponse est brève, je ne vois pas
d'inconvénient...
M. LEMIEUX: Oui, c'est très bref. Il ne reste pas grand-chose
pour l'autofinancement, étant donné que les fonds sont tous
mangés par les intérêts, les fonds d'amortissement et les
dépenses.
M. GARNEAU: Je vous poserai la question la prochaine fois, sous une
autre forme. Je vous dirai tout à l'heure, pour que vous le sachiez, ce
que je veux savoir.
M. LE PRESIDENT: Alors, la séance est levée, pour le
moment, sine die. Lundi ou au début de la semaine, les membres de la
commission, ainsi que les représentants des deux corporations seront
avisés de l'heure et de l'endroit de la prochaine séance.
M. BOURASSA: Ce sera très probablement mercredi
après-midi.
M. ROY (Beauce): Pourquoi pas jeudi parce que, si vous la faites
mercredi, le soir, vous avez le conseil des ministres?
M. BOURASSA: On pourra en reparler au début de la semaine.
(Fin de la séance à 22 h 33)