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Version finale

29e législature, 3e session
(7 mars 1972 au 14 mars 1973)

Le mardi 21 novembre 1972 - Vol. 12 N° 109

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Politique forestière


Journal des débats

 

Commission permanente des Richesses naturelles et des Terres et Forêts

Politique forestière

Séance du mardi 21 novemhre 1972

(Dix heures trente-trois minutes)

M. PILOTE (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

Au début de la séance, je voudrais mentionner que M. Cornellier, de Saint-Hyacinthe, remplace M. Coiteux, M. Faucher, de Yamaska, remplace M. Massé, d'Arthabaska, et M. Béland, de Lotbinière, remplace M. Tétrault d'Abitibi-Est.

La parole est au ministre des Terres et Forêts.

M. DRUMMOND: M. le Président, il avait été convenu au commencement des séances sur l'étude de la politique forestière, qu'après avoir reçu les mémoires déposés devant nous, nous allions nous rencontrer encore une fois — ensemble seulement — pour que les partis de l'Opposition puissent faire leurs commentaires sur les mémoires ou sur la politique forestière et poser les questions qu'ils voudraient poser avant de passer à une autre étape de l'étude de la loi.

Alors, messieurs, je suis à votre disposition.

M. LE PRESIDENT: M. Vincent, de Nicolet, remplace M. Loubier, de Bellechasse.

Questions de l'Unité-Québec

M. VINCENT: M. le Président, il y a différents points que j'aimerais voir éclaircir par le ministre. Comme l'on sait, nous avons reçu une quantité de mémoires. Les autorités du ministère des Terres et Forêts ont eu le temps d'analyser dans les grandes lignes chacun de ces mémoires. Est-ce que le ministre pourrait d'abord nous dire si quelques-unes des suggestions faites ont été retenues, car nous avons oui-dire — et même je crois que le ministre l'a confirmé officiellement — qu'il n'était pas question d'aller de l'avant quant à la suggestion de former une société de gestion forestière? Je pense que c'est un premier point. Deuxième point, est-ce que d'autres sujets soulevés par les mémoires que nous ont présentés les compagnies forestières, les associations forestières ou encore les syndicats ont pu amener le ministère des Terres et Forêts ou le ministre ou le gouvernement du Québec à prendre position sur certains des aspects des deux tomes du livre blanc? Troisième point, avant d'aller plus loin, est-ce que le ministre a l'intention d'aller de l'avant quant à la suggestion de visiter des forêts domaniales, des concessions forestières et même des usines de papier? Je sais très bien que ce n'est pas la faute du ministre si ces visites n'ont pas eu lieu.

Il y a eu des circonstances telles que l'exercice de la démocratie sur le plan canadien et sur le plan d'un comté, mais avant le 30 octobre, il était pratiquement impossible de faire ces visites. Est-ce qu'on peut s'entendre pour faire ces visites d'ici la période des fêtes ou encore si tout dépendra de la présentation des lois? Est-ce possible, tenant compte du fait que la session devrait reprendre ses travaux comme d'habitude en février? Naturellement, c'est bien difficile de visiter les forêts en janvier ou en décembre à cause de la neige. Mais est-ce possible de faire le tour?

Le quatrième point est le plus important: A quel moment le ministre entend-il présenter sa législation en ce qui concerne la politique forestière du Québec et sa législation fera-t-elle l'objet de discussions en commission â huis clos, sans la participation du public, ou avec la participation du public? Par la suite, est-ce que cette législation sera présentée comme un document de travail avant la deuxième lecture sur l'acceptation de principe? Je ne sais pas si les autres partis d'opposition sont intéressés à avoir les réponses à ces questions. Je pense que c'est normal que nous puissions savoir à quoi s'en tenir avant de faire nos commentaires sur les généralités du livre blanc.

Réponse du ministre

M. DRUMMOND: Ppur parler de l'étude des mémoires, c'est bien évident qu'au ministère, on travaille sur toutes les suggestions faites par les intéressés qui sont venus pour faire un exposé, soit sur ce qu'on peut rejeter ou sur ce qu'on va changer. Ce serait quasiment la présentation d'un quatrième livre blanc si on donne trop de détails sur ça.

Société de gestion

M. DRUMMOND: Pour répondre à la question concernant la société de gestion, c'est un exemple où onze sur seize des mémoires étaient contre la société de gestion en soi en préconisant que ce soit le ministère des Terres et Forêts qui s'occupe de la gestion des forêts au lieu de créer un autre organisme. Je retiens cette suggestion parce que, même au commencement, en suggérant la société de gestion, je pense à mon discours d'ouverture de la séance, j'avais dit qu'il s'agissait de savoir quelle serait la meilleure modalité pour la gestion de nos forêts.

Selon moi, il semble bien qu'on doive, pour le moment, oublier la société de gestion et effectuer la gestion des forêts par le ministère.

Visite des forêts

M. DRUMMOND: Pour les visites, je n'étais pas en pleine campagne électorale à ce moment-là, j'étais prêt à faire les visites avant les élections, mais il est évident que cela aurait causé des problèmes. Il y avait quelques mem-

bres de la commission qui faisaient la campagne et il y en avait d'autres qui faisaient une anticampagne. C'est la raison. Mais je suis prêt, quand même, à effectuer ces visites à une date convenable pour tout le monde, afin de voir les opérations en forêt aussi bien qu'une ou deux scieries. Au lieu de toujours parler de ces choses à l'intérieur d'une salle de commission, voir comment ça se passe en forêt.

Législation

M. DRUMMOND: Nous sommes actuellement à préparer la législation en vue de vous la présenter. Pour le mode de discussion, ce sera à la Chambre de décider. Il y aurait probablement, premièrement, un bill sur Rexfor qui sera déposé et, ensuite, l'autre loi sera présentée pour étude et pour dépôt en Chambre. Pour les modalités de discussion, on décidera à ce moment-là.

M. VINCENT: Est-ce que je pourrais poser une question supplémentaire au ministre? Vous dites qu'il y aurait une loi de présentée sur Rexfor. Ce serait la première loi qui serait déposée. Quels seraient les grands principes de cette loi?

M.DRUMMOND: Disons, M. le Président, qu'en temps et lieu, on verra l'ampleur de cette loi, mais nous tiendrons compte des suggestions du livre blanc au sujet du rôle accru de Rexfor et de la participation de Rexfor à certaines entreprises.

M. VINCENT: Est-ce que ce sera présenté au début de la prochaine session, c'est-à-dire à la fin de février ou au début de mars?

M. DRUMMOND: Non. J'aimerais bien que cette loi soit déposée avant Noël.

M. VINCENT: II serait question que cette loi soit présentée, avant Noël, en première lecture?

M. DRUMMOND: Oui. C'est bien cela. Sinon ce serait juste après Noël.

M. VINCENT: Je pense que, si le ministre pouvait obtenir que cette loi, sans en discuter sur le principe, soit déposée avant Noël...

M. DRUMMOND: C'est déjà au feuilleton.

M. VINCENT: Cela peut être au feuilleton et mourir là.

M. DRUMMOND: Oui, d'accord...

M. VINCENT: Si cette loi pouvait être déposée avant Noël, nous serions parfaitement d'accord en ce qui nous concerne. Deuxièmement, le ministre a parlé de certaines autres lois qui devraient suivre cette première législation. Est-ce que c'est l'intention du ministre de déposer ces autres lois avant Noël?

M. DRUMMOND: Non, je pense qu'il y a la question de temps. Nous allons compléter nos travaux aujourd'hui, même si la législation est en train d'être rédigée. Il y a l'étude nécessaire au niveau du gouvernement avant que ce soit déposé, et, avec le programme du comité de la législation, je doute fort que ce soit déposé avant Noël.

M. VINCENT: Est-ce que cette loi doit toucher d'autres aspects que la loi du ministère des Terres et Forêts dans son ensemble? Ce sont des amendements à la loi du ministère des Terres et Forêts?

M. DRUMMOND: Oui, grosso modo, ce serait peut-être une refonte au complet.

M. VINCENT: De la Loi des terres et forêts.

M. le Président, en ce qui nous concerne, nous avons reçu, au cours des derniers mois, plusieurs mémoires nous venant de différents organismes, incluant les compagnies forestières. Comme le ministre l'a mentionné, plusieurs de ces mémoires faisaient des suggestions construc-tives. Egalement, nous avons remarqué que d'autres mémoires défendaient des principes complètement opposés. C'est normal, je crois, dans une société en pleine évolution, qu'il y ait des prises de position, de part et d'autre, sans ce détruire, mais des opinions complètement différentes.

Il reste cependant que les deux tomes du livre blanc ont été un outil de travail qui, à notre avis, était nécessaire, dans les circonstances. Maintenant que nous avons entendu ces mémoires, il reste au gouvernement et au ministère des Terres et Forêts le devoir important d'agir le plus tôt possible.

Je ne crois pas que nous puissions, au cours de cette séance de la commission parlementaire, revoir chaque mémoire ou faire le parrallèle entre les différents mémoires. D'ailleurs, je me souviens, il y a environ trois semaines, nous avons eu l'occasion d'avoir une séance de travail pour faire le parallèle entre ces différents mémoires et, à ce moment-là, j'avais pris position devant notre groupe disant que ce serait bien difficile de discuter de nouveau chacun de ces mémoires. Nous préférerions plutôt voir de quelle façon le livre blanc sera transposé dans la législation, de quelle façon également on tiendra compte des recommandations des différents organismes qui sont intéressés à la gestion forestière.

Nous préférerions surtout voir de quelle façon le gouvernement du Québec, qui est le principal responsable de l'avenir de l'agriculture, de la mise sur pied de forêts rentables au Québec et de leur utilisation. C'est pour ça que je suis parfaitement d'accord et que je demande au ministre de déposer dès qu'il le pourra son projet de loi sur Rexfor — les amendements à la loi de Rexfor — pour qu'on puisse les étudier, les lire. Ainsi, se basant sur les mémoires reçus, ce sera beaucoup plus facile de faire des

commentaires intelligents sur une loi appropriée.

Comme cette loi devrait être déposée avant la période des fêtes, ma suggestion serait, au cours du mois de janvier, vers la fin de janvier peut-être, de visiter les chantiers, les usines de papier et autres usines surtout parce que l'autre projet de loi ne viendra qu'en mars, peut-être en avril et que la deuxième lecture des amendements à la loi sur Rexfor ne viendra qu'à la fin de février, de mars ou peut-être même d'avril. Je suggère donc que nous puissions à la fin de janvier, donner suite à ce voeu exprimé par les membres de la commission d'aller dans les chantiers, les usines de papier et autres usines et de passer une couple de jours dans les différents coins de la province où ils se situent. Je pense que cela serait possible à la fin de janvier ou au début de février.

La recommandation que l'Opposition peut faire à l'heure actuelle est qu'il est évident qu'il faut que le gouvernement agisse, soit pour les compagnies de pâtes et papiers, qui ont une quantité de problèmes à résoudre, soit pour les manufacturiers de meubles qui sont venus devant la commission parlementaire, soit pour leur approvisionnement, car il faut trouver des solutions, soit également pour les syndicats qui sont venus faire des représentations ici. Il faut, en fin de compte, assurer à tous ces organismes une certaine continuité dans le domaine forestier.

Comme je le disais au début de mon intervention, lorsque le ministre a présenté son livre blanc, ce n'est pas tout de présenter un livre blanc et de référer toute politique éventuelle à cette politique générale qui sera mise sur pied par le ministère parce que, à ce moment-là, on peut retarder indéfiniment les solutions aux problèmes que nous avons à affronter dans le domaine forestier.

C'est aussi bref que cela. Le ministre, dans son livre blanc, avait l'intention d'abolir les concessions forestières sur une période donnée, de les changer par des contrats qui ressemblent quelque peu aux concessions forestières. Quelle formule le ministère va-t-il élaborer? Il reste à savoir si cette nouvelle formule sera meilleure que celle que nous avions déjà? Nous l'espérons, nous le souhaitons et nous le croyons.

En ce qui concerne la société de gestion, si j'ai bien compris le livre blanc, elle devait voir à l'organisation rationnelle de la coupe, à l'organisation rationnelle également de la forêt au Québec, à l'utilisation de la forêt, au reboisement même. Cette société de gestion financière, dans l'esprit du ministre, maintenant, elle est moins probable ou peu probable. Il va certainement y avoir un organisme. J'ai pu comprendre que ce serait le ministère des Terres et Forêts qui aurait cette mission, qui aurait cette tâche. D'ailleurs, c'est son rôle premier...

M. DRUMMOND: C'est ça!

M. VINCENT: ... de voir à la conservation des forêts. Je pense bien que nous ne devons pas nous chicaner sur des mots, sur des expressions, pour autant qu'il y a un organisme responsable. Je suis d'avis que le ministère des Terres et Forêts est un organisme responsable qui prend charge des forêts pour le bien des contribuables du Québec, pour le bien de la province. Je pense bien qu'il ne faut pas faire la guerre des mots sur un sujet comme celui-là. Mais il reste tous les autres problèmes que nous avons soulignés au cours des discussions sur le livre blanc. Je vais laisser la parole à mes collègues pour le moment.

Quant à moi, j'aurai d'autres questions à poser au ministre tout à l'heure sur des points bien particuliers. Mais comme vue générale, je pense bien que j'exprime l'opinion de notre formation politique.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

Commentaires du Ralliement créditiste

M. BELAND: M. le Président, à mon tour, je remercie, premièrement, le ministre d'avoir bien voulu faire travailler la deputation à une même table après avoir entendu une certaine quantité de mémoires dont quelques-uns en contredisaient d'autres. Compte tenu de l'étude, grosso modo, des deux livres blancs qui ont été présentés — pour ne pas dire des trois livres blancs, si on tient compte de la déclaration faite par le ministre, à un certain moment, pour compléter ses idées, lesquelles n'avaient pas été incluses dans les deux premiers livres blancs — c'est entendu que ce matin les partis de l'Opposition essaient d'apporter des idées précises et des suggestions en vue d'une refonte globale de la Loi des terres et forêts.

Etant donné qu'il y a eu beaucoup de suggestions de faites dans les mémoires présentés et à la suite des discussions qui ont eu lieu, peut-être que l'honorable ministre avait l'intention, ce matin, de nous présenter quelque chose et cela le gêne. A tout événement, l'ensemble des forêts du Québec ne peut être laissé dans l'état actuel. Autant dans le domaine des forêts publiques que dans celui des forêts privées, beaucoup de difficultés sont survenues à cause d'un manque de politique adéquate jusqu'à aujourd'hui. A ce moment-ci, devons-nous rester muets et attendre que l'honorable ministre présente sa législation, quitte à faire des suggestions à ce moment-là?

J'ai écouté attentivement l'honorable député d'Unité-Québec et les quelques réponses apportées par le ministre, ce matin. Réellement, je ne suis pas complètement satisfait. Cependant, je précise. J'ai moi-même consacré plusieurs heures à l'étude du livre blanc ou des livres blancs, des mémoires qui ont été présentés. C'est assez difficile d'apporter quelque chose de précis compte tenu des suggestions précises qui ont été formulées dans les deux livres blancs. Il reste qu'on n'a pas tellement tenu compte de la

grande partie de la forêt qui, tantôt, devra être consacrée à la population pour divers loisirs. On n'a pas tenu compte d'une certaine quantité d'autres facteurs, à mon sens.

Il faut analyser l'ensemble des forêts publiques vis-à-vis de l'autre ensemble des forêts privées qui ne constitue que 28,000 milles carrés environ au Québec. Ces forêts privées, jusqu'à présent — cela a d'ailleurs déjà été dit — ont été, dans certains cas, surexploitées dans une certaine quantité de secteurs, mais est-ce que les propriétaires avaient tellement le choix? Dans certains cas, je dis non. Ils ont surexploité cette infime partie de leur propriété car leur médiocre revenu les obligeait à le faire. On ne peut qu'en tenir compte. Dans une politique globale, je pense qu'il va falloir qu'il y ait quelque chose d'assez précis pour corriger cette situation.

Des situations difficiles ont été le fait d'une certaine quantité d'utilisateurs des produits de la forêt. Non pas parce qu'il n'y a pas de bois au Québec, il y en a beaucoup, mais pour une certaine quantité d'utilisateurs, c'était très difficile de pouvoir se procurer le bois de la couronne qui est propriété générale ou qui appartient à tous les Québécois. Seuls quelques privilégiés avaient la possibilité d'exploiter, de surexploiter ou de faire ce qu'ils voulaient avec notre forêt. Si on pense à ITT, nous sommes même obligés de payer certaines entreprises forestières pour venir chercher notre potentiel forestier au Québec.

Ce sont des situations difficiles qu'il va falloir corriger et ça presse. C'est là que repose ma difficulté en ce moment. Est-ce que je dois réellement proposer des choses ou tout simplement attendre que la législation soit présentée? Parce qu'à ce moment-ci, je me pose sérieusement la question. Est-ce pertinent de ma part de faire des propositions — compte tenu du peu d'écoute qu'ont reçue, jusqu'à maintenant, les partis d'Opposition — afin d'essayer de corriger les situations et transformer, d'une façon draconienne, la situation désastreuse qui existe pour les utilisateurs des produits du bois?

M. le Président, il existe certaines libertés fondamentales qu'on ne peut laisser de côté. Pourtant, elles ont été bafouées jusqu'à maintenant dans les livres blancs. On en a tenu compte, je ne puis pas dire le contraire. On en a tenu compte jusqu'à un certain point. Va-t-on en tenir compte suffisamment dans la future législation. C'est là que repose tout le problème. Est-ce qu'on peut penser que, par cette législation, il va y avoir possibilité de voir poindre à l'horizon d'autres industries qui ne demandent qu'à s'installer, qu'à grossir? Est-ce qu'on va voir s'étendre le marché d'importation de bois provenant d'autres pays? Réellement, la situation est désastreuse en ce moment pour une foule d'industries.

Je pense qu'à ce moment-ci je fais mieux d'attendre que la loi soit déposée.

M. DRUMMOND: En ce qui regarde la ques- tion de l'importation de bois, est-ce que vous pourriez compléter ce commentaire? Parce qu'en ce qui concerne l'importation de bois, dans certaines régions, c'est une garantie de la survie des scieries.

M. BELAND: II est entendu qu'il y a une certaine étendue de forêt de la couronne où le bois se perd, d'une part. D'autre part, on a commencé à importer du bois, notamment pour les industries de fabrication de meubles du Québec, pour ne nommer que celles-là. Est-ce que c'est à cause d'un manque de coordination d'efforts que, justement, dans les endroits où le bois se perd, il n'y a pas possibilité de le récupérer? Il faut étudier le problème à fond. Il faut essayer d'y apporter des solutions. Ces importations ont tendance à augmenter de jour en jour et ces industries essaient présentement de s'organiser afin d'importer de grandes masses de bois au Québec. Il est urgent de régler le problème. Le ministre s'en rend certainement compte. Au lieu de donner à une compagnie internationale de très grandes étendues de forêt, essayons donc, au moins, de faire en sorte que nos Québécois puissent étendre leurs industries afin que nous puissions donner du travail à nos gens qui ne demandent qu'à travailler. Essayons de trouver des solutions logiques. J'ose suggérer — j'étais pour le faire dans des suggestions globales — qu'il y ait même une aide au transport de ce bois provenant de certaines parties des forêts de la couronne, notamment des régions très éloignées, afin de pouvoir alimenter ces industries, nos industries du Québec, au lieu d'importer du bois qui, en somme, n'est pas meilleur que le nôtre. Je n'entrerai pas dans le détail de ces analyses de bois, mais nous devons corriger cette lacune.

M. le ministre a parlé tantôt de changements qui pourraient être apportés au rôle de Rexfor. J'ai hâte de connaître cette nouvelle loi qui régira une entreprise paragouvernementale comme Rexfor. Mais je n'ose pas faire de suggestions. Je préfère attendre la loi du gouvernement. De cette façon, nous pourrons mieux voir sous quel angle le gouvernement aligne son fusil, si vous me permettez cette expression.

Après quoi nous pourrons faire des suggestions logiques — comme nous l'avons toujours fait d'ailleurs — au gouvernement.

M. le Président, il ne reste qu'une chose sur laquelle je voulais parler ce matin, c'est cette possibilité signalée dans le mémoire présenté par le Dr Lussier relativement aux forêts privées du Québec. Il y a une certaine quantité d'aspects de ce mémoire que j'endosse. Par contre, il faudra tenir compte, peut-être d'une façon spéciale, du fait que les droits des propriétaires de lots boisés devront être sauvegardés tant et aussi longtemps que ceux-ci voudront les garder. Ceci est extrêmement important si l'on veut, encore là, garder ou sauvegarder l'aspect de la motivation chez nos propriétaires de lots boisés et faire en sorte qu'il y ait peut-être intensification au travail, afin que les associa-

tions de sylviculteurs, tel que proposé d'ailleurs par le ministre dans un des tomes de son livre blanc, puissent être créées et mises en marche ou enfin stimulées. Mais encore là, il faudra tenir compte des aspects qu'on a laissés de côté dans le passé, à savoir l'encouragement à donner à des entreprises d'agglomérations ou d'associations de ce genre comme ce fut fait d'ailleurs dans le passé. On a laissé aller au petit bonheur ces entreprises, ces producteurs privés qui essayaient de s'organiser de façon à pouvoir s'occuper de la mise en marché, non parce qu'ils voulaient jouer là-dedans mais parce que justement ils y voyaient une façon de procéder bien précise pour sauvegarder leurs droits et surtout pour sauvegarder ou améliorer la situation de leur porte-monnaie.

Dans ces façons de procéder des associations de sylviculteurs, je vois beaucoup de possibilités de faire en sorte que nos sylviculteurs eux-mêmes s'éduquent et que nous puissions améliorer d'abord tout l'aspect de nos terrains boisés au Québec et également l'aspect de la mise en marché ou de la qualité des bois mis sur le marché au Québec.

M. le Président, je termine ici mes observations. Elles sont courtes. J'aurais voulu les faire plus longues parce que, en arrivant ici, ce matin, j'étais certain, par ce que j'avais pu deviner — mais encore là, j'ai mal deviné — que l'honorable ministre ferait une déclaration pour apporter certains correctifs et, suite aux mémoires déjà présentés permettrait de faire des suggestions bien précises. Je me garderai de les faire, les réservant pour le moment où la loi sera déposée, ou encore quand l'honorable ministre jugera bon tout au cours de la discussion de faire certaines déclarations. A ce moment-là, je verrai au fur et à mesure et j'aurai certainement des questions à lui poser. Je vous remercie, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.

Position du Parti québécois

M. LESSARD: Pour ma part, je tiens à déplorer le fait que cette commission parlementaire qui m'apparaissait extrêmement importante, puisque l'industrie du bois est quand même une industrie qui fait travailler considérablement de gens chez nous, n'ait pas soulevé dans l'opinion publique autant d'enthousiasme qu'on aurait pu le croire au début. Malheureusement, ce sont strictement des groupes très particuliers qui sont venus présenter des mémoires et nous ne pouvons pas dire ce matin que nous avons véritablement, à la suite de ces séances de la commission, tâté au cours de ces discussions ce que désirait vraiment l'opinion publique. Malheureusement et c'est compréhensible, cette opinion publique ne s'est pas exprimée. Je me réfère en particulier aux travailleurs de la forêt, qui ne sont pas organisés ou le sont très peu.

Leur syndicat, qui fait partie de la FTQ — j'ai eu à le déplorer — n'a pas présenté un mémoire très satisfaisant pour la commission et en ce qui me concerne personnellement. Quant au mémoire de la CSN, je pense qu'il était assez bien fait. Malheureusement, comme vous le savez, à la suite de problèmes qui se sont posés au niveau de ce syndicat, de cette centrale, ce n'est pas celui qui a préparé le mémoire qui a eu à le présenter et le mémoire a été" particulièrement tronqué par rapport à ce qu'il était originalement. Il y avait en effet dans ce mémoire des solutions qui réapparaissaient assez pratiques, assez réalistes, et qui n'étaient pas du tout ce qu'on a proposé, c'est-à-dire une socialisation intense pour régler le problème des terres et forêts.

M. le Président, de toute façon, je pense que la commission de ce matin est importante, mais j'aurais aimé moi aussi que le ministre nous fasse part de certaines expériences qu'il a eues, par exemple, depuis que nous nous sommes laissés à cette commission parlementaire. Le ministre s'est rendu en Suède, je crois, pour voir un peu ce qui se passait dans ces régions, pour voir comment on exploitait les forêts. Nous savons que c'est passablement différent de chez nous. J'aurais bien aimé que le ministre nous dise quelle leçon, quelle expérience il avait pu tirer de ce qu'il a vu là-bas en relation avec son livre blanc et en relation avec les discussions qu'on avait eues ici, concernant l'abolition des concessions forestières. C'est là une expérience, je crois, qui influencera la décision du ministre dans ses différents projets de loi, mais il aurait été important que les parlementaires soient informés de ce qui est réalisable ici par rapport à là-bas et ce qui n'est pas réalisable. Je suis assuré que le livre blanc était quand même basé sur l'exploitation dans d'autres pays.

Pour ma part, je vais présenter mon point de vue sur le livre blanc, à la suite des audiences parlementaires de cette commission. Parce qu'il est toujours facile de blâmer par la suite un ministre ou un projet de loi lorsque nous n'avons pas nous-mêmes précisé notre propre position.

Je l'ai dit au ministre, il est certain que la grande décision, c'est lui qui qui va la prendre, que c'est lui qui va légiférer. Il va certainement légiférer à partir de ce que nous lui avons soumis. Cependant, lorsqu'il aura légiféré, il saura si nous sommes en grande partie d'accord ou non avec lui. Encore ce matin, j'ai bien l'intention de présenter clairement la position du parti que je représente.

M. le Président, nous avons participé assez activement aux auditions publiques tenues pendant l'été sur la politique forestière. Nous croyons que ces auditions publiques ont été particulièrement importantes et ont permis une série d'échanges et de confrontations d'idées sur le livre blanc.

Nous entrons donc dans cette deuxième étape. Tout d'abord, cette commission stricte-

ment limitée aux parlementaires nous permettra particulièrement de préciser et d'élaborer notre position sur certains points du livre blanc suite, d'une part, à certains changements récents que le ministre a lui-même annoncés il y a quelque temps et, d'autre part, suite aux avis présentés à cette commission parlementaire par différents corps intermédiaires.

Je voudrais d'abord dire que, dans ses grandes lignes, la position que nous avions présentée au début de cette commission n'a pas particulièrement changé. Nous avons eu l'occasion de discuter des différents points de vue que nous avons fait valoir dans ce premier mémoire et, dans l'ensemble, nous disons qu'ils ont été bien souvent confirmés plutôt que réfutés.

En effet, nous avons subi de l'opposition en ce qui concerne nos points de vue mais nous avons plus particulièrement subi de l'opposition de la part de certaines compagnies forestières qui sont véritablement intéressées à conserver le statu quo même si, bien souvent, elles nous ont dit qu'elles acceptaient le changement.

En effet, les réserves les plus fortes provenaient d'organismes dont la mentalité des revendications et l'acharnement continuel à défendre le statu quo en font plutôt des corps intermédiaires à vocation d'éternels rétrogrades. Le ministre a d'ailleurs eu l'occasion de le leur dire. Quant à nous, nous avons posé comme prémisses le changement; aussi entendons-nous continuer dans ce sens-là.

Je débuterai donc en exposant à nouveau la conclusion du mémoire que je soumettais à titre de position préliminaire du Parti québécois à la séance du 20 juin dernier. Cette conclusion se lisait comme suit: La réforme de la politique forestière que nous propose le ministère repose certes sur des éléments fort valables. Le diagnostic du tome I portant sur la gestion des forêts, la situation de l'industrie primaire et secondaire, ses difficultés et contraintes quant à la production et à la mise en marché des produits, aussi bien que l'identification des prérequis essentiels, tels l'abolition des concessions et la planification de l'usage du territoire forestier, constituent autant de prémisses nécessaires à toute démarche sérieuse pour relancer le secteur forestier au Québec.

Malheureusement, sur de nombreux points, on ne retrouve guère, dans le programme d'action que nous présente le ministre, de prolongement logique à ces éléments. Le zonage, tel que conçu dans le second tome de l'exposé, n'est certes pas le moyen idéal d'atteindre à une utilisation optimale du territoire. Les délais prévus pour la redistribution des territoires de coupe contribueront à maintenir pour encore longtemps le chaos et l'inefficacité de l'exploitation forestière sur les territoires concédés.

La dilution du principe de la reprise en main par l'Etat de la gestion des forêts publiques par la délégation à l'entreprise privée d'une partie importante de ces pouvoirs limite sérieusement la portée de la réforme. L'attribution de superficies particulières pour des périodes de vingt à quarante ans soulève l'hypothèse d'un nouveau système de concessions.

Finalement, on ne peut que déplorer le manque de perspectives quant à l'intégration du secteur privé. Nous sommes encore loin d'une solution qui nous permettrait d'associer les propriétaires de boisés privés au développement de l'industrie forestière. De même sommes-nous encore loin de ce que le ministre appelait, en page 7, une nouvelle stratégie industrielle où l'entreprise privée ou publique de transformation serait intégrée dans une politique globale de relance de l'industrie forestière.

M. le Président, je n'ai pas l'intention de reprendre tous ces points. Certains de ceux-ci n'ont d'ailleurs pas fait l'objet de témoignages particulièrement éclairants, chacun se contentant, trop souvent, d'une approche sectorielle favorisant ses propres intérêts.

Toutefois, j'aimerais préciser notre position sur quatre points qui ont fait l'objet d'une attention particulière au cours de la première étape des travaux de la commission: l'abolition des concessions forestières, la société de gestion, la régie des approvisionnements et la relance de l'industrie de transformation.

Abolition des concessions forestières

M. LESSARD: En ce qui concerne l'abolition des concessions forestières, on sait que les entreprises de pâtes et papiers se sont particulièrement opposées à l'abolition des concessions forestières ou, du moins, acceptaient le principe pour autant que cela ne dérangeait pas grand-chose dans leur façon d'exploiter ces concessions. Sur ce point, les témoignages ont été fort intéressants. Ce fut surtout l'un des rares sujets où l'unanimité fut à peu près complète. Jusqu'à un certain point tous s'entendent sur la nécessité de redistribuer les territoires de coupe de façon à optimiser, en termes de prix et de quantité, l'apport des forêts publiques à l'industrie de transformation. Même le Conseil des producteurs de pâtes et papiers se dit prêt à envisager une révision du mode de tenure. Là où les avis sont pour le moins prudents, voir même vagues et inconsistants, c'est lorsqu'il s'agit de se fixer une échéance pour passer à l'action. Là-dessus, notre position est claire. Pourquoi attendre puisque, de toute façon, une bonne partie de la solution réside, inévitablement, dans la redistribution des aires de coupe? Pourquoi, surtout, laisser pourrir une situation en appliquant de façon progressive et en quelque sorte à moitié une réforme devenue urgente? On ne nous a apporté aucune raison sérieuse. Aussi, nous maintenons qu'il faut prévoir un jour prochain, avant 1975, où toutes les concessions seront abolies et où serait instaurée une nouvelle carte des territoires forestiers.

Cette inconsistance du livre blanc devait

d'ailleurs faire l'objet de la première recommandation de l'Union catholique des cultivateurs: "Que le ministère des Terres et Forêts révise la période prévue de dix ans pour la reprise des concessions puisque nous craignons qu'une période aussi longue constitue un facteur de paralysie pour la mise en place d'une politique forestière valable."

M. Allain enchaînait par la suite en disant: "Comment le gouvernement du Québec va-t-il pouvoir concilier une planification véritable des forêts de la province tout en laissant dans le tableau des concessionnaires en bonne et due forme qui, eux, continueront de jouir des privilèges du passé, continueront d'appliquer les méthodes du passé? " C'est là d'ailleurs une question que nous avons soulevée dès la première séance de la commission parlementaire, qu'il serait extrêmement difficile pour le ministre de pouvoir établir une véritable planification si on continuait encore pendant une période de dix ans de laisser le système tel qu'il est actuellement.

Quant au second aspect de l'abolition des concessions, soit celui du mode de tenure qui prévaudra sur les territoires publics libérés, nous continuerons de mettre en garde le ministre contre un retour déguisé au système des concessions. Il ne suffit pas de changer les mots. L'avis fourni par l'UCC et la Corporation des ingénieurs forestiers sur cette question est fort pertinent. Un système qui accordera des superficies particulières pour des périodes de vingt à quarante ans à des entreprises qui seront chargées d'opérations spécifiques de gestion sur ces mêmes territoires présente de sérieuses ressemblances avec le régime rigide des concessions.

L'usage contrôlé et non exclusif d'un territoire déterminé pour une période de dix ans et renégociable aux termes de l'entente constitue, selon nous, une garantie suffisante, et ceci tant pour les usagers de l'industrie des pâtes et papiers que pour ceux du sciage et des contre-plaqués. Là encore, nous ne pouvons qu'endosser la huitième proposition de l'Union des producteurs agricoles que le mécanisme d'allocation des bois du domaine public ne permette aucun privilège spécial pour quelque utilisation que ce soit. L'allocation garantie ne devra jamais dépasser dix ans. Autrement, la politique de reprise des concessions ne voudrait rien dire.

Au sujet des concessions forestières, j'aurais bien aimé que le ministre nous parle un peu de ce qui se fait en Suède ou dans les pays qu'il a visités et si ce qui se fait là-bas, peut être applicable chez nous.

Société de gestion

M. LESSARD: Un deuxième point, M. le Président, l'abandon du projet de la création d'une société de gestion. Je suis un peu d'accord sur ce que disait le député de Nicolet et représentant de l'Unité-Québec, c'est que nous n'avons pas du tout l'intention, pour notre part, en tout cas, de discuter ou de faire une guerre de mots. Pour ma part, que ce soit une société de gestion ou qu'il y ait à l'intérieur du ministère un véritable organisme qui va être capable de faire le travail qui était prévu, à l'intérieur du livre blanc, pour la Société de gestion.

Je ne ferai pas de guerre sur ce point. Mais, M. le Président, vous me permettrez quand même de poser certains points d'interrogation au ministre.

Le ministre annonçait récemment qu'il abandonnait son projet de créer une société de gestion des forêts publiques. Plusieurs, dont nous sommes d'ailleurs, se sont posé de nombreuses questions. Est-ce le début d'un recul qu'amorce le gouvernement? Est-ce qu'il s'agit des premiers effets du "lobbying" des riches compagnies papetières? Le ministre n'admettait-il pas lui-même, à la séance du 20 juin, qu'il y avait un fond de vérité lorsque certains prétendent que les grosses compagnies forcent la main du gouvernement? D'ailleurs, comment expliquer autrement ce recul du ministre après les paroles que ce dernier a prononcées au cours de cette même séance du 20 juin? Je cite, M. le Président: "Plusieurs craignent que la prise en main par l'Etat de la gestion de ses propres forêts ne nuise plutôt aux utilisateurs, à cause de la réputation des gouvernements d'être de mauvais gestionnaires. Cette crainte, nous la partageons. C'est pourquoi nous avons proposé la création d'une société de gestion. Ce genre de société a fait preuve d'une efficacité qui ne se retrouve pas dans les rouages de l'administration gouvernementale traditionnelle."

Le ministre maintenait donc à l'époque, pour des motifs d'efficacité, son projet de création d'une société de gestion. Le plus étrange, c'est que, trois mois plus tard, le même ministre l'abandonnait, aussi pour des raisons d'efficacité. Il justifiait sa position en ces termes: "Les tenants du statu quo invoquent la crainte de l'inefficacité de la question publique dans le territoire forestier. A la lumière des séances publiques tenues au cours de l'été, nous considérons sérieusement qu'il serait peut-être prématuré de créer un tel organisme."

Le moins qu'on puisse exiger, c'est qu'on nous fournisse des explications moins confuses. Quant à nous, nous continuons de préconiser le maintien de cette société de gestion qui, tout en demeurant reliée au ministère pour ce qui est des grandes orientations, serait la mieux en mesure de répondre aux exigences purement administratives de la gestion des quelque 270,000 milles carrés des forêts publiques. A ce sujet, M. le Président, je voudrais tout simplement souligner le fait que la Régie de l'assurance-maladie est un organisme qui a comme fonction de gérer toute l'administration concernant l'assurance-maladie. Et on n'a pas accusé, pour autant, le ministère de délaisser ses responsabilités. Il s'agit de fonctions strictement administratives et cela ne veut pas dire que le

ministère n'aurait pas de fonctions fort importantes, soit la fonction de législation, la fonction de déterminer les grandes orientations. Je ne crois pas qu'en proposant une société de gestion, ce soit faire un vote de non-confiance aux fonctionnaires actuels du ministère des Terres et Forêts.

Régie d'approvisionnement

M. LESSARD: Troisième point, M. le Président, la régie d'approvisionnement. Les débats de la commission ont relativement peu porté sur cette importante question de la planification des approvisionnements. Pour les uns, tel M. Lachance du Conseil des producteurs des pâtes et papiers, les territoires publics devraient continuer d'être la première source d'approvisionnement. Pour d'autres, tel M. Allain, les forêts publiques devraient constituer une source complémentaire à l'apport des forêts privées. Quant au ministre, il a continué de défendre une position qui m'apparaît ambiguë, basée sur l'établissement de plans de distribution du bois pour chaque usine. Ces plans seraient conçus par le gouvernement en collaboration avec les utilisateurs. Cette position nous a toujours semblé irréaliste, voir même naive. On ne nous a jamais convaincus de l'efficacité de cette formule. Les questions suivantes demeurent toujours sans réponse. Comment fonctionneraient concrètement ces plans de distribution? D'autres interlocuteurs que l'entreprise et le gouvernement seraient-ils représentés à ces comités?

Deuxième question, dans le cadre de quel organisme, l'ensemble de la production québécoise, que celle-ci provienne des terres publiques, privées ou de résidus de l'industrie, serait-il coordonné? On sait que c'est particulièrement important pour l'industrie du bois de sciage. Troisième question, comment se réaliserait concrètement ce que M. Allain décrivait comme un mécanisme efficace permettant la planification de la production et de la protection des ressources? A défaut de ces explications, nous maintenons la nécessité d'établir le plus rapidement possible cette régie mixte d'approvisionnement que nous suggérions à la séance du 20 juin 1972. De plus, nous attendons toujours des éclaircissements quant au rôle des territoires privés. Nous ne pouvons que déplorer le manque d'information et la confusion dans laquelle nous entretient le ministre, quant au prix du bois mis en marché par les plans conjoints par rapport â celui en provenance des terres publiques.

Nous attendons toujours du ministère des Terres et Forêts un avis scientifique qui nous permettrait de répondre à cette question vitale posée au dernier congrès des ingénieurs forestiers: La sylviculture est-elle rentable sur une base industrielle au Québec?

A ce sujet, je tiens à dire que je déplore que les tomes I et II du livre blanc n'aient pas été basés sur des renseignements économiques con- crets. J'ai eu l'occasion d'utiliser, au cours des discussions de la commission parlementaire, certains chiffres du livre blanc. Ces chiffres ont été contestés par les compagnies forestières, sans que le ministre intervienne pour faire valoir sa position à ce sujet. Je pense — et je le regrette — que le livre blanc du ministère a été défendu assez mollement. Pour ma part, je crois qu'il aurait été nécessaire, devant la réforme d'une situation comme celle-là, d'avoir un livre blanc qui ait des réponses concrètes, précises, économiques, aux questions, par exemple, ou aux affirmations que nous ont faites les compagnies de pâtes et papiers. Nous avons eu l'occasion de discuter, par exemple, du prix du bois provenant des agriculteurs, des propriétés publiques ou de l'exploitation des compagnies forestières. Nous avons attendu particulièrement la position des compagnies forestières mais nous n'avons jamais été capables de savoir si le ministère avait fait une étude sérieuse sur ça. Je crois que cela aurait été possible puisque le gouvernement du Québec a une société qui est, en grande partie, contrôlée par la Société générale de financement, la Donahue, qui aurait été utile pour savoir quel est le prix d'exploitation du bois.

Je le déplore, M. le Président, mais le livre blanc nous donne très peu de renseignements sur les coûts de cette réforme qu'il propose. Voilà une des attaques qu'ont fait valoir le plus les compagnies forestières. Pour ma part, je le déplore.

Industrie secondaire

M. LESSARD: Quatrième point, M. le Président, l'industrie secondaire. Nous avons longuement reproché au ministère d'avoir évité de traiter du coeur du problème, d'avoir évité volontairement d'élaborer dans son livre blanc une véritable politique de relance de l'industrie de transformation. Il faut comprendre l'administration gouvernementale, nous disait-il dans son exposé du 20 juin. Ce genre de justification, pour le moins primaire, n'aidera certes pas la reprise de l'industrie des pâtes et papiers, pas plus qu'il ne contribuera à enrayer le mouvement des mises à pied. Nous ne pouvons donc que préconiser à nouveau la création d'un complexe intégré et qui appartiendrait à l'Etat.

M. le Président, je me défends bien de vouloir proposer, comme on a voulu bien souvent le laisser entendre, une nationalisation intense de toutes les compagnies forestières. Je ne crois pas que le rapport de la Confédération des syndicats nationaux ait eu ce point de vue comme orientation originale. Malheureusement, je crois qu'il a été tronqué.

Ce serait certes la meilleure contribution concrète de l'Etat à la relance de cet important secteur de l'activité économique. Autant un tel complexe pourrait être une source directe de concurrence et un stimulant face à l'entreprise privée, autant indirectement par ses possibilités

de recherche et de développement technologique ce projet pilote pourrait aider l'industrie dans son ensemble.

Nous avons d'ailleurs un premier élément dans ce sens, puisque la Donahue est contrôlée, en grande partie, par une institution gouvernementale à 51 p.c, soit la Société générale de financement. Mais lorsque nous parlons d'un complexe intégré, il ne faudrait pas penser que nous voulons avoir la Société de transformation des pâtes et papiers à la Malbaie et une autre compagnie de transformation du bois pour en faire du contreplaqué à Maniwaki. C'est absolument inacceptable et on ne peut jamais parler d'un complexe intégré qui serait rentable dans ce sens.

A d'autres niveaux, peut-être de façon moins ambitieuse, il y aurait certainement place pour des initiatives régionales. Il y aurait lieu d'assister et d'encourager l'initiative des groupes populaires, tant au niveau de l'exploitation que de la transformation.

En particulier, dans l'industrie du sciage, il faudra encourager le développement des coopératives et les inciter à se regrouper. Dans l'industrie paraagricole, la formule des coopératives regroupées n'a-t-elle pas produit d'excellents résultats?

Enfin, M. le Président, il nous faut insister sur la nécessité de passer rapidement à l'action, sur la nécessité de transposer d'ici les prochains mois en termes législatifs les éléments les plus importants de cette politique dont nous terminons actuellement l'élaboration. Il est maintenant impératif de fixer le plus tôt possible l'échéancier de mise en 'application de cette réforme. Sinon, on risque de répéter l'avortement qu'a connu en 1965 le projet de réforme de la politique forestière. Sur cela, M. le Président, nous serons intransigeants et nous espérons que le plus tôt possible — on a parlé d'avant Noël en ce qui concerne Rexfor — le ministre nous présente une véritable législation qui ne touche pas strictement la Régie d'exploitation forestière, mais qui touche l'ensemble du problème forestier au Québec.

Merci, M. le Président.

Importation de bois

M. DRUMMOND: Je ne sais pas de quelle façon continuer les échanges de vues. Certaines questions ont été posées. M. Béland dans ses commentaires, a surtout parlé du secteur de la forêt privée. Tout ce que je veux dire, c'est que nous préconisons évidemment une aide accrue à ce secteur, tel que le souligne le livre blanc.

En ce qui concerne la question d'importation de bois, je pense que cela regarde surtout l'industrie du meuble et les feuillus, où il y a vraiment un problème. Cela n'est pas une question de loi; les études sont en cours, le gouvernement en fait l'analyse afin de trouver des formules valables en ce qui concerne l'allocation de bois dur à l'industrie du meuble afin de prévoir le manque d'approvisionnement de notre industrie. Ce n'est pas surtout une question d'importation, mais une question d'exportation par notre industrie de sciage. C'est dans le but de réduire l'exportation de bois au lieu de défendre l'importation.

Est-ce que vous comprenez ce que je veux dire?

M. BELAND: M. le Président, il est évident que le ministre a des vues bien précises sur ce point. Il reste qu'on peut quand même légèrement différer d'opinion. Probablement que le ministre accepte cela? On peut légèrement différer d'opinion sur les façons d'appliquer une politique véritable où il y aurait possibilité pour toutes ces industries de s'alimenter au Québec. Il est bien clair qu'à un moment donné une espèce d'équilibre doit s'agencer. Encore là, il faut tenir compte davantage de la possibilité d'utilisation du bois du Québec d'abord par nos entreprises du Québec. Il ne faut pas répéter la réallocation de certaines superficies boisées de la couronne. J'espère qu'on tiendra alors compte davantage des besoins généraux de l'ensemble de l'économie du Québec que lorsqu'on a accordé toute la basse Côte-Nord à l'ITT. Nos enfants auront honte de nous lorsqu'ils constateront cet état de fait. Ces gestes ne devraient pas être répétés.

M. DRUMMOND: Cela est un tout autre problème. La question est ici de garantir l'approvisionnement d'une industrie sur place.

Pour revenir à la question d'importation de bois, je dois dire qu'il est plus économique dans plusieurs endroits de la province de Québec d'importer le bois, à cause du transport, etc., pour la survie des usines.

Pénurie de main-d 'oeuvre

M. DRUMMOND: Le député de Lotbinière a aussi fait mention du fait que ce qu'on veut est d'avoir du travail. A ce sujet-là, je dois dire qu'à ce moment-ci, il y a une pénurie d'à peu près 3000 bûcherons.

L'offre est là mais les gars ne se sont pas présentés à ces chantiers. Le travail est disponible mais la main-d'oeuvre n'est pas là. Cela crée certains problèmes évidemment, surtout à certaines compagnies et même dans l'industrie du sciage, qui réalise cette année la meilleure année de son histoire. C'est dommage, mais dans certains cas, il n'est pas question d'un manque d'approvisionnement mais d'une pénurie de main-d'oeuvre et ceci nuit aux efforts qui sont faits.

M. LESSARD: M. le Président, le ministre me permet-il tout simplement une remarque? Je ne veux pas engager une discussion sur ce sujet. Si on s'était penché dans le passé sur les conditions de vie de ces gens-là, peut-être aurait-on touché un peu le problème. Je peux

apporter des exemples, si le ministre me le permet.

M. DRUMMOND: Vous savez, je suis d'accord que cela porte seulement sur un des aspects du problème, mais quand même, ils ont leur propre syndicat qui négocie avec les compagnies et il y a donc un mécanisme pour leur trouver de bonnes conditions de travail.

M. LESSARD: M. le Président, je pense que chaque député pourrait apporter des exemples concrets de sa région et prouver qu'il est plus payant de retirer de l'aide sociale — et je les comprends — que d'aller bûcher, parce que, aussitôt qu'il pleut, ils ne sont pas payés et ainsi de suite...

Je ne propose pas une solution, je me dis que c'est un véritable problème.

M. BELAND: II y a quand même un fait, si l'honorable ministre me le permet, à ce moment-ci, étant donné que la question première avait été posée dans ce sens. L'honorable ministre se rend compte qu'on ne joue encore que sur des conséquences et qu'on ne remonte pas suffisamment aux causes. Il faudrait tout remettre en cause. Dans le développement de la science, dans le système présent, si l'amélioration au point de vue mécanique — et cela s'applique justement dans le cas de récupérage du bois — si toute la mécanique n'est pas à des prix acceptables ou facilement accessibles à beaucoup d'individus, c'est une preuve qu'on est dans un système faux. Normalement, le développement de la science devrait pouvoir permettre à l'homme et à l'ensemble d'une société de mieux se développer. Cela devrait être accessible aux hommes de façon à apporter les correctifs nécessaires au système. Mais il m'est venu une autre question, qu'avait d'ailleurs posée le député de Nicolet tantôt. Est-ce que vous avez l'intention dans un avenir prochain d'agencer cette visite? Je ne connais même pas le contenu de ce que pouvait être exactement cette visite, si réellement cela en vaut la peine ou pas. Vous pourriez peut-être donner quelques explications sur ce que cela constituerait? Ce serait pour visiter quoi?

M. DRUMMOND: En ce qui concerne la visite, nous y tenons. Il faut prévoir une date convenable pour tous en tenant compte des travaux de l'Assemblée nationale et de l'horaire des députés qui aimeraient faire cette visite.

Dans mon esprit, ce serait une bonne idée de voir, si possible, les travaux en forêt dans un endroit donné aussi bien qu'aller voir les usines de sciage, les scieries et une usine de pâtes et papiers pour poser les questions pertinentes à tous les travailleurs et aux membres de la gestion à ces endroits pour mieux nous renseigner.

M. LE PRESIDENT: C'est une question à laquelle on a déjà répondu. Cela fait deux fois qu'on répond à cette question.

M. BELAND: Mais de quel genre d'usines de sciage s'agit-il?

M. DRUMMOND: Je pense que ce serait plus intéressant de voir une usine assez moderne.

M. BELAND: Encore là, est-ce que ce serait une usine de sciage pour le bois mou ou le bois dur?

M. DRUMMOND: Ce que l'on veut, c'est de donner...

M. BELAND: C'est important...

M. DRUMMOND: Non, mais ce sera prévu entre nous. Ce n'est pas une affaire de diktat. Faites vos suggestions et on en tiendra compte. Il s'agit de savoir ce que désirent les membres de la commission.

M. BELAND: Je prétends que c'est important, même si vous pouvez penser que ce ne l'est pas, parce qu'il y a eu une certaine quantité d'usines qui ont voulu démarrer au Québec et à un certain moment dans certains domaines, la plupart ont fait faillite. Il y en a une dont je dirai seulement le genre, utilisant le bois de sciage et dont tout l'approvisionnement se faisait en bois de huit pieds de longueur. Or, le bois récupéré sur ces terrains privés serait quand même un apport très précieux, si on pouvait dans certains coins de la province bénéficier de la possibilité de le livrer à ces usines. Je donne seulement un cas.

M. LESSARD: II n'y a pas que cette usine. C'est seulement une des usines que l'on va visiter.

M. BELAND: Non, absolument pas.

M. DRUMMOND: Je suggère à cet égard que mon attaché de presse entre en communication avec les membres de la commission, demande leurs suggestions et essaie de prévoir une date convenable pour tous.

M. VINCENT: M. le Président, est-ce qu'il serait possible d'avoir des indications aujourd'hui? On m'informe qu'en janvier ou février ce sera à peu près impossible, à cause de la neige dans les bois. C'est toujours possible mais ça prend des bonnes raquettes.

M. DRUMMOND: Cela nous ferait du bien quand même.

M. VINCENT: II faudrait faire cela presque au début de décembre parce que, si on se rappelle bien les années dernières, du 15 jusqu'au 22 décembre, les séances du Parlement et des commissions sont assez drues. Je me deman-

de si on ne devrait pas envisager une date tout de suite. Est-ce que le 8 décembre irait?

M. DRUMMOND: C'est quoi le 8 décembre?

M. VINCENT: Est-ce que les usines sont fermées? C'est l'Immaculée-Conception.

M. CARPENTIER: Les usines fonctionnent. UNE VOIX: Est-ce que le Parlement siège? M. DRUMMOND: Le Parlement siège.

M. VINCENT: Oui, le Parlement siège. Si on regardait tout de suite...

M. DRUMMOND: Quel jour est-ce? Est-ce un jeudi?

M. VINCENT: Le 7 est un jeudi.

M. DRUMMOND: Pour moi, ce serait plus convenable si on pouvait s'entendre avec les whips sur un jeudi et un vendredi.

M. VINCENT: Les 7 et 8 décembre. Si on pouvait tenter de prévoir cette date, qu'est-ce que les membres de la commission en pensent? Il ne semble pas y avoir de commission parlementaire qui chevauche avec la nôtre.

M. CARPENTIER: M. le Président, je pense qu'il faudrait bien vérifier si le 8 décembre n'est pas une date décrétée par les conventions collectives de travail comme une journée chômée.

M. VINCENT: Pour les fonctionnaires, il n'y a certainement pas de travail le 8 décembre.

M. LE PRESIDENT: Pour les fins de la commission et pour faire avancer le travail de la commission, l'attaché de presse du ministre ou le ministre rencontrera les chefs de parti et ils fixeront une date convenable à l'ensemble. D'accord?

M. DRUMMOND: D'accord.

M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, j'aimerais mieux que la parole soit au ministre.

M. DRUMMOND: C'est un commentaire et je vais peut-être oublier quelques questions.

M. LESSARD: Parlez de votre voyage en Suède.

M. DRUMMOND: Prenons notre voyage en

Suède. Je ne sais pas si c'est le moment. Il serait peut-être mieux de le faire en son et lumière. Je serais prêt à inviter les intéressés au ministère, on pourrait manger quelques sandwiches et discuter ensemble de tout cela. Nous avons des diapositives qu'on pourra regarder et discuter. Grosso modo, ma première impression en Suède est celle-ci: quand la deuxième compagnie en importance The South Sweedish Forest Owners Association, a commencé, ses actionnaires ont été les propriétaires de petits boisés. Cela a commencé comme ça et c'est vraiment une industrie contrôlée par les cultivateurs. Evidemment, lorsqu'on atteint une certaine économie à cette échelle, c'est difficile de toujours tenir compte des demandes en ce qui concerne le prix du bois, parce qu'ils sont en concurrence avec d'autres. Ils ont donc tous les problèmes des grosses compagnies, mais c'est quand même une expérience formidable de voir comment cela a monté vite.

M. LESSARD: Est-ce que pour les autres compagnies, dans l'ensemble, en Suède, c'est encore en grande partie le système des concessions forestières?

M.DRUMMOND: II y a de grosses forêts privées, il y a les forêts de l'Etat et il y a des industries qui sont — surtout au sud — basées sur la petite propriété.

M. LESSARD: Donc, on trouve...

M. DRUMMOND: L'Etat est entré au commencement au nord du pays lorsque certaines industries ont fait faillite. C'est vraiment une économie mixte dans l'industrie. L'autre aspect qui m'a frappé, en rentrant au Québec, c'est que, depuis 1904, après chaque exploitation forestière — et je parle aussi pour les boisés des cultivateurs — il faut assurer la régénération. Pas question d'incitation là-dedans, c'est un fait. Cela doit être effectué et tout de suite.

Un autre aspect qui m'a aussi frappé, en ce qui concerne l'administration gouvernementale, c'est la régionalisation des opérations forestières. Il n'y a qu'une poignée de gars au centre et toute l'action est vraiment dans les régions où les administrateurs ont le pouvoir nécessaire pour faire fonctionner le système.

M. LESSARD: Est-ce qu'ils...

M.DRUMMOND: Je trouve qu'ici, dans la province de Québec, tout le monde aime trop la ville de Québec, je parle des gars...

M. LESSARD: Est-ce qu'on a un problème de main-d'oeuvre aussi dans l'industrie suédoise?

M. DRUMMOND: Pas nécessairement à ma connaissance, mais elle a le même problème en essayant de planifier les coupes sur les petits boisés. C'est un peu comme ici pour certaines

choses, le boisé est une sorte de banque. Si on a besoin d'argent, comme l'a signalé plus tôt le député de Lotbinière, on coupe le plus possible; lorsque ça va mieux dans le reste de la ferme, on garde le boisé en réserve.

M. LESSARD: M. le Président, peut-être, si on nous présentait des diapositives, car nous avons plusieurs autres questions. Etant donné qu'il y a une autre commission parlementaire, ne réunissant que les parlementaires prévue pour jeudi, elle ne devrait pas apporter des discussions bien longues. C'est le ministre qui va résoudre le problème, qui va décider de présenter une législation.

Il nous appartient, à nous, de dire: Voici, dans cette législation-là, nous aimerions qu'on s'en tienne à tel point. Le ministre aura à décider. Mais comme le ministre vient de nous faire une suggestion de se rendre au ministère, qu'il serait prêt à nous présenter certaines diapositives sur son voyage en Suède, est-ce que ce ne serait pas possible que jeudi matin, on puisse les voir ici?

M. VINCENT: Jeudi, nous avons les engagements financiers. Est-ce qu'il y avait quelque chose de prévu pour les Terres et Forêts jeudi?

M. LE PRESIDENT: Oui, pour jeudi, dix heures.

M. VINCENT: Si nous avons du travail. M. LE PRESIDENT: Oui.

M. VINCENT: Maintenant, si le député de Saguenay me le permet, est-ce que ça ne pourrait pas être le départ de notre éventuel voyage? Par exemple, le départ de notre voyage pourrait avoir lieu un jeudi matin, ça prendrait une heure au ministère.

M. DRUMMOND: Si on veut faire ça, je préférerais que ce soit plus long, parce qu'en plus de ça, on a préparé, pour cette visite, une autre présentation son et lumière sur toutes les opérations du ministère des Terres et Forêts. Je l'ai vue hier, elle est très bien préparée. En même temps donc qu'on parlera de la situation en Suède, on pourra montrer aussi ce spectacle son et lumière relativement aux travaux du ministère.

M. VINCENT: Cela...

M. DRUMMOND : Nous pourrions le faire pendant la soirée, la veille de notre départ.

M. VINCENT: D'accord.

M. DRUMMOND: Si possible.

M. LESSARD: Concernant la société de gestion, est-ce que le ministre a décidé de reculer parce qu'il ne croit plus maintenant à l'efficacité de sa société de gestion ou parce que ce sont les compagnies de pâtes et papiers qui n'y croient plus? Est-ce que le ministre croit qu'il est capable, à l'intérieur de son ministère, de créer une direction qui puisse faire le travail de façon aussi efficace que celui qui était proposé dans le livre blanc?

M. DRUMMOND: En toute franchise, à part les présentations de mémoires faites à la commission parlementaire, il n'y a eu aucun "lobbying". En toute honnêteté, nous en avons parlé. Au début, lorsqu'il a été question de cela, j'étais en partie pour l'idée de la société de gestion et, en partie, pour renforcer notre service des forêts domaniales et le faire fonctionner d'une manière plus efficace. C'était sûrement un choix à faire. Je vois les inconvénients d'une formule et je vois les inconvénients de l'autre aussi. Mais je pense que, lorsqu'on veut centraliser le travail du ministère, créer une autre organisation amènerait peut-être double emploi et que ce serait plus efficace de le faire par l'entremise du ministère. Alors, il faudrait fixer la manière d'agir. Si ça ne marche pas à cause de certaines contraintes qu'on trouve dans l'organisation gouvernementale, je suis prêt à reconsidérer cela. Mais j'ai bon espoir qu'avec la mise en place progressive d'un PPBS, le gouvernement va décentraliser un peu les opérations en améliorant de plus en plus certaines choses, en les dégageant des contraintes parce qu'elles sont trop centralisées. Alors, sous cet aspect, je pense que c'est probablement mieux de commencer avec le ministère comme...

M. LESSARD: Est-ce que vous avez quand même l'intention de laisser à cette nouvelle direction tous les pouvoirs qui étaient prévus ou les fonctions qui étaient prévues par la société de gestion? L'aménagement...

M. DRUMMOND: Précisément. Même, dans toutes nos discussions, avant la publication du livre blanc, il n'a pas été question de changer les fonctions, mais plutôt de choisir le meilleur mécanisme.

Pistes de motoneiges

M. BELAND: J'ai une autre question, légèrement à côté de ce que nous avons à étudier aujourd'hui, malgré que cela y touche. Pour faire suite aux déclarations de l'honorable ministre de la Voirie concernant les motoneiges, les sentiers et les pistes pour motoneigistes, est-ce que vous avez prévu quelque chose d'assez précis, à savoir que tous les clubs de motoneigistes ou groupements du genre auraient accessibilité à n'importe quel endroit et à toutes les sections de terrain appartenant à la couronne?

M. DRUMMOND: II est un peu difficile de répondre à cette question. Dans tout cela, les ministères impliqués travaillent avec le ministère de la Voirie. Le comité est centralisé. Cela revient à savoir comment dépenser les fonds pour encourager l'implantation de sentiers pour motoneiges et les associations de motoneigistes. Nous allons faire notre part, dans les limites de notre budget, pour l'entretien de certains sentiers ou pour améliorer la situation. Mais, cela n'est pas centralisé chez nous.

M. BELAND : Est-ce que vous voulez dire par là que vous envisagez une certaine difficulté à pouvoir dépenser les fonds?

M.DRUMMOND: Nous n'avons jamais de difficulté à dépenser les fonds. C'est plutôt pour obtenir les fonds qu'il y a des difficultés. C'est normal.

Politique de zonage

M. LESSARD: Concernant la politique de zonage, est-ce que le ministère a l'intention, en relation avec d'autres ministères, celui du Tourisme en particulier ou celui qui est responsable de la qualité de l'environnement — on a parlé des 114 réserves écologiques dans un mémoire qui a été présenté — d'étudier l'application d'une véritable politique de zonage en relation avec d'autres ministères, d'une politique qui devrait être respectée?

Cela devient particulièrement important puisqu'on parle de plus en plus de l'aménagement de la Jacques-Cartier, parc et réserve. Mais il est important que le Québec — je pense que cela devrait commencer par le ministère des Terres et Forêts — établisse une véritable politique de zonage, tel que cela existe ailleurs, une politique qui devra être respectée. Au moins, si on peut la modifier, qu'il y ait des auditions publiques avant de le faire.

M. DRUMMOND: Comme l'a souligné le député du Saguenay, il y a plusieurs ministères impliqués. Il devient de plus en plus évident que ce travail doit être prioritaire pour plusieurs raisons, y compris le zonage des agglomérations municipales, le zonage pour l'agriculture, près des grandes villes, aussi bien que pour l'utilisation de nos forêts. Le travail commence. Mais je dois aussi dire que ce ne sera pas réalisé du jour au lendemain. Cela prendra du temps, mais le travail est déjà commencé.

M. LESSARD: Vous dites que cela prendra du temps. Est-ce que cette politique-là, en particulier, en relation avec l'inventaire des terres et forêts qu'on a fait...

M. DRUMMOND: Oui, c'est le travail de base pour commencer tout cela.

M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, je pense bien que nous allons, dans quelques instants, terminer les travaux de cette commission parlementaire. Je ne pense pas que ce soit nécessaire de revenir jeudi, mais je voudrais simplement résumer quelques points que j'avais l'intention d'aborder après les mises au point ou l'exposé du ministre.

Tout d'abord, nous verrons, dans quelques semaines, peut-être dans quelques mois, la véritable politique forestière du gouvernement du Québec. Tout le monde souhaite, tous ceux qui sont venus devant la commission parlementaire ont souhaité que cette politique, que cette législation réponde aux besoins de planification du développement économique des ressources forestières. Il y a certains points, en ce qui me concerne, dont je voudrais qu'on tienne compte dans cette future politique.

Usines de pâtes et papiers

M. VINCENT: On a parlé au cours des deux ou trois dernières années de ce problème important dans les usines de pâtes et papiers du Québec. Il faut quand même tenir compte que 90 p.c. de la production des usines de pâtes et papiers sont exportés. Il va donc falloir regarder dans ces lois une façon d'en arriver à une modernisation de nos usines ici au Québec pour faire concurrence aux usines soit de la Colombie-Britannique soit du sud des Etats-Unis. Il va falloir également regarder — d'ailleurs le ministre est allé faire un tour dans ces régions — de quelle façon les pays de Scandinavie ont réussi à devenir encore plus concurrentiels sur le marché européen. Il y a également le problème de la Grande-Bretagne, qui est entrée dans le Marché commun. Dans tout ça, dans ces lois, tout en élaborant une certaine planification, il ne faut pas que cette planification devienne en quelque sorte un culte sacré ou absolu. Il ne faut pas dire: On a établi des balises, il va falloir dorénavant aller à l'intérieur de ces balises. Il y aura certainement des moments où le ministère — ceci devrait être prévu dans les futures lois — et où le gouvernement du Québec devront — je vais citer quelques exemples — faire en sorte que les usines existantes continuent à tourner et que l'on remette en production celles qui ont dû fermer leurs portes. Il y a des exemples que je pourrais donner dans certaines provinces ou dans certains pays, quand il se pose des moments difficiles. Il faudrait que le ministère des Terres et Forêts, le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral puissent apporter des allégements temporaires, comme ç'a été suggéré par certains mémoires et comme le ministre a eu l'occasion d'en parler à un certain moment. Il faudrait des allégements temporaires soit dans la taxation ou dans les redevances, parce qu'il y a des situations qu'on ne peut prévoir pour dix ans, quinze ans ou vingt ans à venir. Un des exemples les plus frappants qu'on a pu constater au cours des dernières années fut la réévalua-

tion du dollar canadien. A ce moment, personne ne pouvait prévoir que les Etats-Unis seraient dans une situation économique qui obligerait le Canada à réévaluer son dollar et cela a posé des problèmes assez considérables à nos usines de pâtes et papiers. Dans cette planification qui ne devrait pas être un culte absolu, il faudrait aussi prévoir que nos industries de sciage, ici au Québec, ont quand même un rôle important à jouer.

Nous avons entendu l'Association des manufacturiers de meubles qui emploie des dizaines, des centaines et des milliers de personnes dans nos régions rurales. Il faudra, dans ces lois futures, prévoir des approvisionnements, à mon sens, sur le même pied que les approvisionnements qu'on peut prévoir pour les usines de pâtes et papiers. Parce que l'industrie du sciage a un rôle à jouer. L'industrie du meuble a également un rôle à jouer et quand nous avons discuté avec les membres de l'association qui sont venus présenter leur mémoire... Je me demande s'il n'y aurait pas lieu, à ce moment-ci, de prévoir un mécanisme où l'association, avec les membres, puisse avoir accès à une formule de contrat pour pouvoir se procurer les matières premières à même ce que l'on appelait autrefois les concessions du ministère des Terres et Forêts.

Il est bien entendu que ce n'est pas le ministère des Terres et Forêts qui peut imposer à l'Association des manufacturiers de meubles de se former en coopérative ou en compagnie pour exploiter certaines fermes forestières ou certaines, comme on les appelait autrefois, concessions forestières du gouvernement.

M. DRUMMOND: II y a évidemment la possibilité d'insister sur le sciage en vue d'approvisionner ces industries du meuble, trouver une formule en procédant dans cette direction au lieu d'avoir une garantie d'approvisionnement direct.

De toute façon, nous cherchons les formules car c'est un problème important.

M. VINCENT: L'autre point, M. le Président. Que ce soit Rexfor avec les amendements ou la refonte complète de la Loi des terres et forêts, il ne faudrait pas non plus — et je pense que le ministre en est conscient — créer, par cette législation, des organismes ou encore des services qui deviendraient embarrassants sur le plan administratif; que ce soit dans l'entreprise privée ou dans le monde coopératif, on a remarqué que, lorsqu'on donnait des structures, il fallait qu'elles soient très simples et ne deviennent pas une entrave, surtout dans le monde des affaires, à la réalisation d'objectifs à court ou à long terme.

Je m'explique. Si dans l'esprit, du ministre, du ministère ou du gouvernement, on a l'intention de donner à une division du ministère des Terres et Forêts, toute la gestion de nos équipements ou de notre organisation fores- tière, il faudrait que cette division ou ce service soit à la page.

Il faudrait que cette division ou ce service puisse répondre immédiatement aux besoins des gens et non pas référer des décisions de Caiphe à Pilate. On a vu dans certains pays, il y a cinquante ans — je cite en exemple la Russie — où on était sur le point de manquer de blé pour la nourriture des habitants. Or la Russie a établi la plus belle politique de planification pour que ce pays puisse prévoir ses marchés à venir de blé. Cela fait cinquante ans, et là, on est rendu à importer du blé en très grande quantité. Cette politique de planification n'a pas eu de succès du tout. Même à l'heure actuelle — je lisais un rapport la semaine dernière paru dans les journaux — on nous apprend que cette année, en Russie, on mange du pain rassis même dans les restaurants prétendus de luxe. Une surveillance étroite est exercée partout où l'on aurait tendance à jeter des restes de pain encore propres à la consommation. On termine en disant : On en arrive à ce point, après cinquante années de planification en matière agricole. Je voudrais que dans cette législation, même tout en établissant des balises, on ménage une certaine marge de manoeuvre au ministre, au gouvernement du Québec pour les situations d'urgence, parce qu'il y aura encore des situations d'urgence, il y aura encore des problèmes épineux qui surviendront. D'où? On ne le sait pas encore mais cela viendra éventuellement.

Ce qu'on a pu remarquer au cours des discussions sur les deux tomes du livre blanc, c'est que tout le monde demandait de participer à l'élaboration et à la mise en place de ces nouvelles structures et, par la suite, à la mise en marche de cette nouvelle politique forestière. Là-dessus, je reviens à une suggestion qui a été faite par le chef de l'Opposition, à savoir que, dans ces politiques, on tienne compte que ce véhicule, sur le plan forestier, d'exploitation, de gestion, de mise en marché et de consommation de nos produits de la forêt du Québec, doit réellement avoir quatre roues: L'Etat, d'une part; les syndicats — que se soient les syndicats professionnels, ouvriers ou d'agriculteurs qui sont des producteurs — et également, vous avez l'entreprise privée qui a un rôle à jouer... Que tous ces responsables — je pourrais les mentionner plus explicitement — puissent jouer leur rôle et que ce soit prévu dans cette politique que le ministre a l'intention d'élaborer.

On parle souvent, lorsqu'on présente de nouvelles lois ou de nouveaux organismes, de comité consultatif. Quelques-uns en ont contre l'objectif poursuivi par ces comités consultatifs. Il reste quand même que ces membres des comités consultatifs, lorsqu'ils s'assoient autour d'une table, avec les principaux responsables du ministère, eux-mêmes en apprennent, eux-mêmes étudient, eux-mêmes voient des objections qu'ils n'avaient pas vues. Egalement, ces personnes peuvent apporter de la lumière sur des problèmes que, peut-être, des officiers du

ministère ne voient pas. C'est avec ces consultations, avec ces discussions, avec les principaux responsables de l'industrie forestière au Québec, qu'on peut en arriver à de meilleures politiques.

M. le Président, je termine là-dessus en souhaitant, comme l'ont dit les autres députés, que les lois — d'ailleurs nous aurons une première loi de Rexfor avant les fêtes — que les autres lois nous viennent le plus tôt possible, que ce soit en mars ou en avril, pour que nous puissions les discuter devant la commission parlementaire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lotbinière.

M. BELAND: Est-ce que, dans votre législation, vous avez l'intention de préconiser qu'il y ait des aires de conservation ou d'aide à la multiplication de la faune qui a tendance à diminuer énormément au Québec?

M. DRUMMOND: Certaines recommandations ont été faites au gouvernement par des groupes qui s'intéressent particulièrement à la préservation et à la conservation, en vue de créer une loi préconisant certaines aires qui seraient gardées propre, où il n'y aurait aucune exploitation forestière, et certaines aussi pour des recherches scientifiques, et qui ne seraient pas non plus pour le grand public. Nous considérons tout cela. Tel qu'expliqué dans le livre blanc, c'est vraiment notre intention de réserver certains endroits pour la récréation, pour la conservation de la faune ou pour la protection des sols, etc. C'est dans notre esprit de procéder de cette façon.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions?

M. DRUMMOND: M. le Président, en terminant, j'aimerais, en toute franchise, remercier, et les membres du côté ministériel qui ont grandement contribué aux discussions lors de la présentation des mémoires et les membres de l'Opposition qui, dès le début, ont travaillé d'une façon très directe, très honnête en essayant de chercher ensemble des solutions valables en vue de la formulation d'une politique forestière. Ce n'était pas une affaire partisane.

Nous cherchons tous la meilleure formule pour obtenir une bonne politique forestière. La prochaine étape relève du gouvernement, soit proposer une législation à la lumière de tout ce que nous avons dit, de tout ce que nous avons écouté depuis quelques mois.

M. le Président, j'aimerais aussi vous remercier de votre travail. En calmant les esprits de temps en temps, vous le faites avec doigté. Je remercie tout le monde.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, messieurs. La séance ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 12)

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