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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le mercredi 3 juillet 1974 - Vol. 15 N° 118

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Rapport des activités de l'Hydro-Québec


Journal des débats

 

Commission permanente

des richesses naturelles

et des terres et forêts

Rapport des activités de l'Hydro-Québec

Séance du mercredi 3 juillet 1974

(Seize heures dix-sept minutes)

Préliminaires

M. LAFRANCE (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs! Avant de commencer les travaux de la commission, je voudrais mentionner qu'il y a des changements parmi les membres de la commission: M. Morin (Sauvé) remplace M. Bédard (Chicoutimi), M. Massicotte (Lotbinière) remplace M. Carpentier (Laviolette), M. Houde (Limoilou) remplace M. Drummond (Westmount), M. Bacon remplace M. Larivière et M. Saint-Pierre remplace M. Shanks.

La commission est heureuse de recevoir les membres du bureau de direction de l'Hydro-Québec, ainsi que de la Société de développement de la baie James. Je demanderais au président de l'Hydro-Québec de nous présenter ses invités et de nous faire son rapport, si ça lui plaît.

M. GIROUX: Merci, M. le Président. Je crois que, pour débuter, ce seront les gens de l'Hydro-Québec particulièrement... Si la commission est consentante, on nettoiera les problèmes de l'Hydro-Québec proprement dits et, après, on prendra les problèmes de la Société d'énergie. Alors, les gens...

M. LESSARD: M. le Président... M. GIROUX: Pardon?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Un instant, s'il vous plaft, M. Giroux.

M. LESSARD: Malheureusement, M. le Président, je ne sais pas s'il y a un problème de microphone, mais nous n'entendons pas M. Giroux.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): II n'y a pas de microphone?

M. GIROUX: II n'y a pas de haut-parleur. On peut faire venir les ingénieurs.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, on va leur demander de parler plus fort. Est-ce enregistré quand même? Bon, d'accord. Alors, s'il vous plaît, M. Giroux, on vous demanderait de parler un peu plus fort afin que tous les membres puissent comprendre, étant donné qu'il y a des petits problèmes; il fait chaud, on est obligé de garder les fenêtres ouvertes.

M. GIROUX: Alors, messieurs, à mon extrême droite, je crois que les gens reconnaissent M. Dozois, M. Boyd et, à l'extrémité de la table, M. Gauvreau, M. De Guise et M. Charuk qui m'accompagnent pour parler de ces problèmes. Si vous me le permettez, nous allons faire l'exposé des bilans de l'Hydro-Québec pour répondre aux questions qui regardent l'Hydro-Québec; c'est la façon dont nous avons procédé l'an dernier. Après, nous prendrons les problèmes de la Société d'énergie; encore une fois, c'est ainsi que nous avons procédé l'an dernier.

Si vous me le permettez, je vais commencer la présentation pour ne pas retarder cette commission. Il nous fait plaisir, à mes collègues de la commission et à moi-même, de nous retrouver pour faire le point sur nos activités.

M. LESSARD: M. le Président, je m'excuse auprès de M. Giroux, auprès des responsables de l'Hydro, ainsi qu'auprès du public, mais il semble qu'on ait très mal choisi la salle. Il y a actuellement à la salle 81 une commission de la justice qui n'amène certainement pas autant de gens et il me semble qu'il serait normal que nous échangions les deux salles. Ce serait, je pense, bien utile pour tout le monde qui est ici.

M. MORIN: Et, M. le Président, comme nous avons quelque difficulté à suivre le rapport oral de M. Giroux, est-ce que le texte pourrait en être distribué aux membres de la commission?

M. GIROUX: II est disponible immédiatement.

M. LESSARD: II n'y a pas de monde de l'autre côté.

M. MORIN: J'aperçois deux ministres qui semblent avoir le texte. Est-ce que l'Opposition pourrait aussi en avoir un exemplaire?

M. GIROUX: Nous avons des textes disponibles immédiatement. Si vous voulez en faire la distribution.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je pense qu'il y a deux problèmes qui se posent, soit celui de la salle et celui des textes. Je demanderais de ne pas distribuer les textes tout de suite si on décide de changer de salle. Maintenant, je peux suspendre les travaux de la commission pour quelques instants afin de m'informer s'il y a moyen de faire le changement.

M. LESSARD: D'accord. DES VOIX: D'accord. (Suspension de la séance à 16 h 21)

Reprise de la séance à 16 h 26

LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre, messieurs!

Vous avez pu constater l'efficacité du vice-président du caucus, qui a réussi à nous trouver une salle beaucoup mieux adaptée pour la circonstance. Je crois que tous les membres de la commission ainsi que nos témoins et tous les invités en sont heureux. Je remercie le vice-président du caucus.

M. Morin, le chef de l'Opposition officielle, m'a demandé de dire un mot avant l'exposé de M. Giroux, si vous le permettez, M. Giroux.

M. MORIN: M. le Président, en vue de faciliter la marche de nos travaux, à la suite du rapport de M. Giroux, puis-je proposer que nous suivions l'ordre du jour suivant? J'en donne un exemplaire au ministre ainsi qu'à vous-même. 1 ) L'estimation des besoins et des nouveaux projets autres que ceux de la baie James; 2)le projet de la baie James; 3)la tarification; 4) l'accord Churchill Falls Company avec l'Hydro-Québec; 5)les inondations; 6)le régime de retraite; 7 ) les questions diverses.

Le seul but de ma proposition est d'activer la marche des travaux après le rapport que M. Giroux est sur le point de nous faire.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE: M. le Président, je pense qu'à la lecture de l'allocution du président on verra qu'il y a également une forme de proposition des discussions. Si on suit l'une ou l'autre des formules, cela permet la discussion des sept points que suggère le chef de l'Opposition.

M. MORIN: M. le Président, je n'ai pas d'objection qu'on adopte un autre ordre des travaux. Le seul but est de mettre quelque ordre dans nos questions. L'expérience des années passées, la lecture des Débats nous enseigne que, si nous n'agissons pas de la sorte, les questions se promènent dans tous les sens.

M. MASSE: D'accord, mais est-ce qu'on ne pourrait pas entendre l'allocution de M. Giroux, quitte à revenir sur cette question par la suite?

M. MORIN: Oui, oui.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: J'aimerais revenir puisqu'on parle de l'ordre des travaux. Je n'ai aucune objection que la commission accepte l'ordre prévu par le chef parlementaire du Parti québécois, mais j'estime qu'il y a un point qui devrait être ajouté à cela, et c'est le financement de l'Hydro-Québec. A plusieurs reprises, depuis trois ans, nous insistons toujours pour qu'on discute du financement de l'Hydro-Québec comme tel et de quelle façon on va financer ce projet-là. J'estime que ce point devrait être ajouté dans l'ordre du jour soumis avant qu'on discute d'inondation. Chaque fois qu'on est arrivé pour discuter de ce sujet-là devant la commission parlementaire, la commission parlementaire a été ajournée sine die.

Ainsi on n'a jamais pu discuter de cette question à fond. Si on engage des milliards et des milliards du Québec dans ce financement, j'estime qu'on devrait savoir quel sera l'ordre de grandeur et de quelle façon le gouvernement du Québec entend financer tout ça de concert avec l'Hydro-Québec. Alors, j'aimerais bien qu'on en discute.

M. GARNEAU: Si ma mémoire m'est fidèle, M. le Président, l'an dernier cela avait été discuté, mais l'opposition créditiste s'était retirée de la salle, après un exposé ou un monologue du chef parlementaire des créditistes. De toute façon, je ne voulais certainement pas laisser passer l'affirmation du député de Beauce-Sud sans souligner que ce problème avait été discuté.

M. ROY: Ce problème a été discuté, je dois rectifier un peu ce que vient de dire l'honorable ministre, je n'ai pas l'intention d'engager un débat de procédure là-dessus, mais j'ai assisté moi-même à la commission parlementaire et c'est moi-même qui avais insisté pour que cette question soit discutée. On n'a qu'à relever le journal des Débats, la commission parlementaire avait été ajournée sine die.

M. GARNEAU: On va le relever pour montrer que ce n'est pas vrai.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, si le Parti créditiste a toujours manifesté beaucoup d'intérêt vis-à-vis des questions de financement. Je pense que le Parti québécois avait également manifesté, sinon une opinion biaisé, tout au moins beaucoup d'intérêt vis-à-vis de la filière nucléaire. Peut-être qu'il y aurait lieu de mettre à jour des comparaisons entre des options qui ont été épousées dans le passé par l'Hydro-Québec et acceptées par le gouvernement et les thèses maintes fois répétées, de même que les erreurs sur le plan de la filière nucléaire, avec une comparaison de coûts pour savoir si le contribuable québécois est effectivement bien servi par une décision qui a été prise par l'Hydro-Québec, il y a deux ans, de poursuivre le programme de la baie James.

M. MORIN: Cette question nous intéresse au plus haut point, M. le Président, et je ne vous cache pas que sur le chapitre de la baie James, nous avions bien l'intention d'examiner et le financement pour répondre à la question du député de Beauce-Sud, et la question de la comparaison avec d'autres sources d'énergie.

Peut-être convient-il maintenant d'écouter le président de l'Hydro-Québec, après quoi nous pourrons peut-être nous mettre d'accord sur l'ordre des travaux.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, M. Giroux, on s'excuse pour ce minidébat et on vous cède la parole.

Etats financiers de l'Hydro-Québec

M. GIROUX: Merci, Messieurs. Je ne sais pas si vous m'entendez mieux, malheureusement, c'est le mieux que ma vieille voix peut faire, parce qu'il en manque des morceaux.

On disait tantôt qu'il nous fait plaisir, à mes collègues de la commission et à moi-même, de nous retrouver devant vous pour faire le point sur nos activités. Vous avez en main les états financiers et statistiques 1973 de notre rapport annuel, ainsi que notre rapport d'activité qui renferme une quantité importante de détails sur les multiples facettes de l'activité de l'entreprise durant l'année.

C'est la première fois que nous publions et déposons un tel rapport, dont le contenu déborde largement les seuls aspects financiers et statistiques de nos opérations. Il vise à vous fournir, ainsi qu'au public québécois en général, une information plus complète sur les actions de l'Hydro-Québec. Il répond aussi, je le souhaite, au voeu exprimé par certains d'entre vous dans le passé.

Puisque vous êtes en possession de ces documents, vous me permettrez, dans mon allocution, de déborder quelque peu leur contenu afin de mettre en lumière certains faits ou événements qui s'y rattachent.

Je vous présenterai d'abord les faits saillants de l'année 1973 en ce qui concerne la consommation d'électricité et nos résultats financiers. Ensuite, je vous entretiendrai de la demande d'électricité que nous prévoyons, du programme d'équipement que nous avons choisi pour satisfaire cette demande et, finalement, du défi que l'Hydro-Québec devra relever durant les prochaines années.

La consommation de l'électricité au Québec. Au cours de l'année 1973, nous avons pu constater au Québec une forte hausse de la demande d'électricité, qui s'est manifestée dans tous les secteurs et, en particulier, dans les secteurs domestique et industriel.

Je veux d'abord souligner que le nombre de nos abonnements a franchi le cap des deux millions au cours de l'année, soit une augmentation de 3.8 p.c. Depuis 1964, la croissance annuelle moyenne des abonnements a été de 3.4 p.c.

Les Québécois ont consommé 53.2 milliards de kWh en énergie souscrite, soit une augmentation de 8 p.c. par rapport à 1972 et de plus de 77 p.c. de nos ventes totales, qui ont été de 68.7 milliards de kWh. Cette augmentation est fortement supérieure à celles de 5.8 p.c. et de 3.6 p.c. des deux années précédentes, ce qui traduit assez bien l'intensité de l'activité économique depuis la fin de 1971.

Le secteur domestique. Comme je l'indiquais plus haut, le secteur domestique a connu une forte augmentation en 1973. Les abonnés ont consommé 14.13 milliards de kWh ou 11.2 p.c. de plus qu'en 1972, alors que le secteur agricole a augmenté sa consommation de 9.1 p.c.

Cette hausse de la consommation d'électricité dans le secteur domestique mérite que nous nous y arrêtions pour en chercher les principaux facteurs.

Le nombre d'abonnements du secteur domestique s'est accru de 4.2 p.c, ce qui est nettement supérieur au taux annuel moyen d'accroissement de 3.4 p.c. enregistré depuis 1964. Comme vous le savez, l'augmentation des abonnements domestiques est surtout attribuable à la formation de nouveaux ménages et non pas à l'accroissement de la population.

D'autre part, la consommation moyenne par abonnement domestique a été de 8,456 kWh, soit une hausse de 7.3 p.c. C'est la deuxième année de suite que nous connaissons une hausse aussi importante. Elle était de 6.4 p.c. en 1972 alors que de 1967 à 1971, le taux moyen d'augmentation annuelle n'avait été que de 3.3 p.c.

Il n'est pas facile de déterminer avec certitude les facteurs qui, en 1973, ont contribué à cette forte augmentation de la consommation domestique. On peut toutefois croire que l'augmentation du revenu personnel disponible, associé à l'intensité économique, contribue largement à accroître la consommation d'électricité.

Etant donné que près de 56 p.c. des nouvelles unités de logement ont adopté le chauffage électrique, il est certain que la construction domiciliaire au Québec a influencé la croissance et la consommation en 1973.

L'augmentation du prix de l'huile à chauffage vers la fin de l'année peut avoir eu un certain impact sur la consommation d'électricité. Plusieurs abonnés se sont équipés de chauffage électrique d'appoint et le nombre de demandes de conversion du système de chauffage à l'huile au chauffage électrique qui nous est parvenu a dépassé toutes nos prévisions. Quoi qu'il en soit, l'effet de l'augmentation du prix de l'huile à chauffage sur la consommation d'électricité se fera davantage sentir au cours des prochaines années.

Dans le même ordre d'idées, je dois souligner que la crise du pétrole nous a amenés à repenser notre politique de mise en marché.

L'objectif principal de cette politique tend à encourager plus fortement nos abonnés à utiliser rationnellement l'énergie. L'utilisation rationnelle de l'énergie, dans le cas de l'hydroélectricité, ne signifie pas le rationnement, mais plutôt une utilisation de cette ressource naturelle qui soit la plus efficace et la plus rentable pour le Québec. Nous avons, par exemple, atténué certaines politiques incitatives et orienté nos messages publicitaires vers l'information du consommateur sur les moyens à prendre pour atteindre l'objectif fixé. C'est dans cet esprit que nous avons intégré et amélioré, en 1973, nos services à la clientèle que vous pourrez mieux connaître en parcourant notre rapport d'activité.

Dans les secteurs commercial et industriel, la commission d'électricité a été de 6.9 p.c. supérieure à celle de 1972, ce qui est nettement plus fort que celle des trois dernières années. Dans le secteur industriel, la consommation d'énergie des grandes entreprises a connu des hausses significatives: 7 p.c. dans l'industrie électrométallurgique, 5.4 p.c. dans l'industrie chimique et électrochimique, 11.5 p.c. dans l'industrie minière et de 20.8 p.c. dans l'industrie manufacturière.

Il faut toutefois signaler que la consommation de l'industrie des pâtes et papiers, notre plus important consommateur industriel, a diminué de 1.8 p.c. Le ralentissement de la demande de cette industrie est sans doute surtout attribuable aux grèves qui ont ralenti son activité en 1973.

Je voudrais terminer mes commentaires sur la consommation d'électricité en 1973 en ajoutant un mot sur nos ventes d'énergie excédentaire dans la province.

L'énergie excédentaire consommée au Québec est passée de 2.1 milliards de kWh en 1972 à 3.5 milliards en 1973, soit une augmentation de plus de 66 p.c. Ce volume d'énergie excédentaire est l'équivalent d'environ 100 millions de gallons de mazout, ce qui a certainement contribué à réduire l'impact de la crise du pétrole au Québec.

L'énergie excédentaire est, en fait, un surplus temporaire d'énergie attribuable surtout à des excédents hydrauliques. En d'autres mots, la productibilité de nos centrales est intimement liée à la quantité d'eau disponible et à la durée de cette disponibilité. Il arrive parfois que ces quantités d'eau dépassent le volume requis pour répondre à la demande d'énergie souscrite. Les turbines peuvent alors continuer de fonctionner à pleine capacité, même aux heures où la demande souscrite diminue. Cette production excédentaire nous permet alors de retirer des revenus supplémentaires.

Comme vous avez pu le constater dans notre rapport d'activité, la valeur énergétique des apports hydrauliques a été relativement élevée en 1973: 65.4 milliards de kWh, soit 11 p.c. de plus que la moyenne. Du début à la fin de l'année, la quantité d'eau de nos réservoirs, exprimée en kWh, est passée de 27.11 à 34.96 milliards de kWh.

L'eau tient la place de combustible dans les centrales du Québec et, de ce fait, nous avons eu l'avantage en 1973 de ne pas être affectés par la pénurie de combustibles fossiles qui a été ressentie par la plupart des autres réseaux. Il en résulte que nous avons été en mesure non seulement de répondre à la demande d'énergie souscrite mais de produire d'importantes quantités d'énergie excédentaire.

Cette énergie excédentaire, lorsque nous en avons, est offerte à notre clientèle québécoise, c'est-à-dire surtout à nos abonnés industriels. En 1973, notre capacité de production d'énergie excédentaire a coincidé avec les besoins accrus de notre clientèle industrielle. En définitive, 82.5 p.c. de nos ventes d'énergie souscrite et excédentaire ont été réalisées au Québec. Le reste a été vendu aux réseaux voisins.

La quantité d'énergie que nous avons exportée peut vous paraître importante. Elle l'est effectivement. Cela est dû en bonne partie au devancement de la production de la centrale Churchill Falls qui nous procure un surplus d'énergie important qu'il est profitable de revendre. C'est aussi une conséquence des conditions hydrauliques favorables que nous avons mentionnées tout à l'heure. En définitive, qu'elle soit sous forme souscrite ou excédentaire, selon notre jargon, l'énergie exportée représente toujours un surplus qui dépasse les besoins du Québec.

A partir de 1977, comme vous le savez, notre seul engagement au chapitre des exportations est le contrat d'interconnexion que nous avons signé avec la Power Authority of the State of New York. Cette entente illustre bien ce que nous entendons par l'exportation de surplus. Elle prévoit que nous vendrons à New York une certaine quantité d'énergie durant les mois d'été, qui constituent un creux dans la demande québécoise et, pour New York, une pointe à cause de la climatisation massive des immeubles. Cette entente prévoit aussi un mécanisme d'échange qui nous permettra, à l'occasion, d'importer de New York certaines quantités d'énergie durant notre période de consommation de pointe, c'est-à-dire l'hiver.

Pour l'Hydro-Québec et, par conséquent, pour tous ses abonnés, ces exportations constituent une source intéressante de revenus. En 1973, par exemple, qui fut une année exceptionnelle à cet égard, nos ventes hors Québec sont responsables de 20 p.c. de l'augmentation de nos revenus de ventes. D'une certaine manière, ces revenus sont des suppléments en partie imprévus, puisqu'ils dépendent des besoins des réseaux importateurs et de la productibilité de nos centrales. Cet apport contribue en outre à maintenir nos tarifs internes au plus bas niveau.

J'aimerais cependant qu'il soit bien compris que notre programme d'équipement n'est pas conçu en fonction des exportations que nous pouvons réaliser mais uniquement pour répon-

dre à la demande québécoise. Nos exportations sont des surplus temporaires qui peuvent être d'une journée ou de plusieurs mois qui résultent des caractéristiques propres d'un réseau de production hydroélectrique.

Permettez-moi maintenant d'analyser les revenus produits par ces ventes en 1973, ainsi que les dépenses que nous avons dû encourir.

Comme vous pouvez le lire dans le rapport annuel, ces revenus ont atteint $654 millions, soit un accroissement de $93 millions. Ce revenu additionnel se repartit ainsi : 9 p.c. provient de la demande des nouveaux abonnements enregistrés au cours de l'année, 35 p.c. de l'augmentation de la consommation des abonnés existants au début de l'année et 33 p.c. de l'augmentation des tarifs en avril 1973. En d'autres termes, 77 p.c. du revenu additionnel est dû aux ventes d'énergie souscrite au Québec. D'autre part, 3 p.c. provient de nos ventes d'énergie excédentaire au Québec alors que 20 p.c. est attribuable à nos exportations aux réseaux voisins.

En 1973, nos charges globales, c'est-à-dire la somme des dépenses et des intérêts, se sont élevées à $573 millions soit une hausse de $73.6 millions ou 14.7 p.c. par rapport à 1972.

Nos frais d'exploitation, d'entretien et d'administration et autres dépenses ont augmenté de 17 p.c, en 1973, pour atteindre $201.6 millions. Près de 69 p.c. de cette somme a été versée en salaires. Par rapport à 1972, la masse salariale a augmenté de 16.8 p.c. Cette augmentation est attribuable à la croissance du salaire de base des employés au cours de l'année (8.5 p.c), à la croissance des effectifs permanents (3.2 p.c) et des emplois temporaires (5.1 p.c).

Quant aux dépenses autres que les salaires, qui comprennent le matériel roulant, le matériel et les fournitures, les services achetés et divers articles, elles ont représenté 31 p.c. de nos dépenses d'exploitation et d'administration en 1973. Par rapport à leur niveau de 1972, elles accusent une hausse de 17.4 p.c. Cette hausse est surtout attribuable à la hausse générale des prix des biens et services que nous avons tous subie en 1973. Vous avez entre les mains un document qui traite d'une façon plus détaillée la hausse des coûts et de ses répercussions sur l'Hydro-Québec.

Vous avez sans doute remarqué, dans nos états financiers, que nos achats d'énergie ont presque doublé par rapport à l'an dernier. Cette augmentation est essentiellement attribuable à nos achats de l'énergie produite par la centrale Churchill Falls qui est à la veille d'atteindre sa puissance installée maximum.

J'aimerais maintenant dire un mot de nos dépenses d'intérêts, qui, en 1973, ont atteint $191.1 millions. Il s'agit là d'une hausse de 9.9 p.c. par rapport à 1972, attribuable principalement à l'augmentation en volume de la dette à long terme.

Les intérêts de la dette à court terme ont diminué parce que nous avons moins fait appel à cette source de financement qu'au cours de l'année précédente.

Enfin, les intérêts imputés aux travaux de construction en cours sont passés de $22.4 millions à $25.5 millions dans le cas de ceux exécutés pas l'Hydro-Québec, et de $3.4 à $14.7 millions pour les travaux de notre filiale, la Société d'énergie de la Baie James. En effet, les travaux en cours à l'Hydro-Québec représentaient, à la fin de 1973, un investissement de $374.9 millions, soit une hausse de 18.2 p.c. par rapport à 1972. Par contre, les investissements dans le cadre du projet de la baie James ont augmenté de 155 p.c. pour atteindre $377.1 millions.

Il se dégage de tout ceci que le revenu net avant intérêt sur réserves a été de $120.6 millions en 1973, soit une hausse de 21.9 p.c. par rapport à 1972. Je vous fais remarquer cependant qu'il est inférieur à celui de 1971 qui était de $127.8 millions.

L'état consolidé de provenance et d'utilisation des fonds révèle que les fonds générés par l'entreprise sont passés à $204.3 millions, une augmentation de 19 p.c. sur 1972. Toutefois, les marchés financiers n'étant pas propices à l'écoulement d'obligations, surtout dans le dernier trimestre de l'année 1973, nous avons choisi de ne pas réaliser le programme d'emprunts que nous avions prévu au début de l'année. Nous avons emprunté un montant de $465.2 millions, $35 millions de moins qu'annoncé l'an dernier. Cependant, une tranche de $32.5 millions n'a été livrée qu'en janvier 1974, de sorte que le produit net de nos emprunts à long terme, déduction faite des frais d'émission, a été de $429.6 millions.

Nos dépenses d'immobilisations de l'année se sont considérablement accrues pour atteindre $550.1 millions. Je dois préciser cependant que depuis 1968, grâce au projet Churchill Falls, notre programme de construction a été sensiblement réduit. Il a repris de l'ampleur en 1973 afin que nous soyons en mesure de répondre aux besoins d'électricité des années 1976 à 1986. Ainsi, l'an passé a marqué le début des travaux du projet La Grande; nous atteindrons cette année la pointe des travaux au chantier de Manic 3.

En définitive, nos états financiers de 1973 révèlent une bonne année à plusieurs égards. Ils reflètent la croissance vigoureuse de la consommation d'électricité dans tous les secteurs. Nous avons, par ailleurs, maintenu un "ratio" de couverture des intérêts à un niveau acceptable, soit 1.31 comparativement à 1.33 en 1972. L'autofinancement dans les immobilisations de l'année a été de 11.2 p.c. à cause des échéances élevées de la dette à long terme qu'il nous a fallu respecter, soit $95.7 millions. Il n'en demeure pas moins qu'à la fin de 1973 notre capital propre constitue 26.1 p.c. du capital investi. Le taux effectif de nos emprunts a été de 8.14 p.c. comparativement à 8.5 p.c. en

1972, à 8.58 p.c. en 1971 et 9.68 p.c. en 1970. Nos états financiers contiennent cependant aussi des indices qui nous permettent de penser que l'avenir pourrait être plus difficile, notamment aux chapitres de la hausse des coûts et du financement.

Depuis 1971, l'augmentation annuelle moyenne de nos revenus globaux a été de 11.8 p.c. tandis que celle de nos dépenses globales a été de 15.8 p.c. De plus, au cours des prochaines années, les investissements requis pour réaliser notre programme d'équipement seront très élevés. Les conditions des marchés de capitaux risquent d'être plus sévères comme on a pu le constater dès la fin de 1973 et la hausse des taux d'intérêt aura un impact sérieux sur nos charges globales. Sans vouloir paraître pessimiste, j'estime que l'augmentation des coûts, due à l'inflation et au financement de nos projets, nous posera un solide défi pour la prochaine décennie, défi que nous entendons bien relever et dont nous parlerons plus loin.

J'aimerais maintenant faire quelques commentaires sur notre prévision de la demande d'électricité. N'ayez crainte, messieurs, je n'entrerai pas ici dans le détail de l'argumentation qui sous-tend cette prévision. Nous pourrons y revenir en réponse à vos questions et nous pourrons même vous remettre un document sur la question.

Certaines personnes reprochent à l'Hydro-Québec de faire reposer son programme d'équipement des quinze prochaines années sur un taux de croissance de la demande trop élevé. Ces personnes font souvent l'erreur de confondre la demande d'électricité prévue pour le Québec en général et celle qui s'adresse à l'Hydro-Québec. Il ne faut pas oublier, en effet, que l'Hydro-Québec ne répond actuellement qu'à environ 75 p.c. de la demande d'énergie électrique au Québec. Le reste de la demande est satisfait par des autoproducteurs et son taux de croissance est nettement inférieur à celui que connaît l'Hydro-Québec. Ceux qui font ce genre d'erreur voudraient que nous utilisions les taux de croissance qu'ils prévoient pour l'ensemble du Québec, soit parfois aussi peu que 4 p.c. par année.

La prévision de la demande d'électricité n'est pas une question que nous traitons à la légère et nous ne voyons pas quel serait notre intérêt de grossir indûment cette prévision. D'ailleurs, la réalité nous ferait mentir. On ne peut quand même pas refuser de voir la réalité telle qu'elle est. En 1973, la demande d'électricité à l'Hydro-Québec a été de 8 p.c. supérieure à 1972. Il s'agit là de l'augmentation des ventes internes facturées d'énergie souscrite. D'autre part, de 1954 à 1973 le taux annuel moyen de croissance a été de 7.4 p.c La demande consolidée à l'Hydro-Québec et aux compagnies nationalisées a donc plus que doublé à tous les dix ans. J'apporte intentionnellement cette dernière précision car on nous reproche, à tort, de fonder nos prévisions sur un historique non consolidé.

De 1950 à 1970, c'est-à-dire au cours des vingt années qui ont précédé la crise énergétique, la part de l'électricité dans le bilan énergétique du Québec s'est accrue de façon significative. Or, depuis 1970, le prix des hydrocarbures ne cesse de grimper, en particulier celui de l'huile à chauffage qui a plus que doublé. Dans ce nouveau contexte, je me demande donc s'il est réaliste de penser que la part de l'électricité va baisser ou même qu'elle se maintiendra à son niveau actuel.

Voilà quelques-unes des raisons pour lesquelles nous prévoyons pour les quinze prochaines années un taux de croissance annuel moyen de près de 8 p.c.

De plus, lorsqu'on sort de nos frontières québécoises, on constate que, partout dans le monde, l'évolution de la demande d'électricité est à peu près la même que chez nous, c'est-à-dire un doublement décennal. Dans des pays comme la France, l'Allemagne et le Japon, on note une stabilité étonnante de la croissance de la demande. Dans une province en plein développement comme le Québec, il est normal que l'augmentation prévue de la demande d'énergie électrique soit au moins aussi grande que celle de régions déjà fortement industrialisées comme les Etats-Unis et l'Ontario. Or, ceux-ci prévoient des taux de croissance du même ordre de grandeur que le nôtre.

Il n'est pas du tout exagéré de prétendre qu'un jour l'électricité couvrira la quasi-totalité des usages énergétiques. La majorité des experts s'entendent, partout dans le monde, pour dire qu'en l'an 2,000 la part de l'électricité dans la consommation totale d'énergie sera proche de la moitié. En effet, non seulement l'électricité est-elle susceptible de desservir les mêmes usages que les combustibles fossiles — qu'on pense seulement au chauffage et au transport terrestre — mais elle bénéficie de l'exclusivité de plusieurs autres usages, tels l'éclairage, la force motrice, la transmission des données, etc.

Permettez-moi maintenant de vous présenter le programme d'équipement qui a été choisi afin que nous puissions rencontrer la demande prévue.

Comme vous le savez, nos besoins additionnels en énergie électrique seront largement comblés jusqu'en 1976 grâce à la production de la centrale Churchill Falls.

L'accroissement de la demande d'énergie de base des années 1976 à 1980 sera satisfait principalement par les centrales Manic 3, Outardes 2 et Gentilly 2.

Manic 3, d'une puissance de plus de 1 million de kilowatts, sera mise en service à partir de 1975.

Quant à Outardes 2, dont la construction avait été suspendue en 1968, les travaux y ont repris en avril dernier. D'une puissance de 454,000 kilowatts, cette centrale sera mise en service en 1978. Sa construction avait été reportée à plus tard par suite d'une révision du programme d'équipement et de la signature du contrat d'achat d'énergie avec la Churchill Falls

(Labrador) Corporation. Il est important de souligner que la mise en service de cette centrale marquera la fin de l'aménagement du complexe Manic-Outardes, qui aura nécessité en tout vingt ans de travaux. La puissance du complexe sera alors portée à 5.5 millions de kilowatts.

Nous avons, d'autre part, entrepris la construction de Gentilly 2, première centrale nucléaire commerciale importante de notre réseau de production. Elle est du type CANDU à eau lourde pressurisée. Les travaux dureront six ans et, selon les estimations préliminaires, ils coûteront $385 millions. D'une puissance de 637,000 kilowatts, Gentilly 2 sera exploitée à sa pleine capacité au début de 1979.

Durant les années 1978 et 1979, il nous faudra, en outre, répondre à des besoins en puissance de pointe. Cette demande additionnelle sera satisfaite, en 1978, par un achat temporaire de 150,000 kilowatts de l'Alcan, et, en 1979, par les sources suivantes: d'une part, nous comptons faire un achat temporaire de 200,000 kilowatts au Nouveau-Brunswick; d'autre part, nous poursuivons cet été nos études sur le Bas Saint-Maurice en vue d'installer une puissance de 420,000 kilowatts. S'il s'avère, à la suite de ces études, qu'il est impossible d'installer économiquement une puissance aussi élevée, nous devrons compléter ce projet par l'installation de turbines à gaz ou encore n'installer que des turbines à gaz pour 420,000 kilowatts.

Pour répondre aux besoins qui se manifesteront à partir de 1980, nous ferons appel progressivement à la production des centrales du complexe La Grande. Comme nous l'avions annoncé l'an dernier, les études d'optimisation de ce projet ont été réalisées en 1973. Ces études ont amené la modification du programme de production du complexe, ainsi qu'une révision des coûts de réalisation. Le nouveau projet La Grande que nous recommandons aura une puissance installée de 10,340,000 kilowatts et une production annuelle, après 1985, de 69 milliards de kwh.

Le président de la Société d'énergie de la baie James vous expliquera en détails les résultats de ces études d'optimisation ainsi que les nouvelles estimations de coût du complexe.

Nous croyons que notre recommandation est la plus économique pour les consommateurs québécois, car le coût de l'énergie du complexe La Grande sera inférieur à celui de projets nucléaires équivalents. L'énergie du complexe La Grande permettra non seulement de satisfaire les besoins sans cesse croissants du consommateur québécois, mais elle constituera également un attrait certain pour l'industrie et un facteur important du développement économique du Québec.

En 1973, nous avons annoncé que l'énergie qui sera produite par les futures centrales de la baie James sera transportée vers les centres de consommation par un réseau à 735 kV.

Avant toutefois d'en arriver à ce choix, nous avons étudié les autres modes de transport possibles, soit un réseau à 1,100 kV et un réseau en courant continu. Nos études nous ont toutefois démontré que le réseau à 735 kV est le plus économique des modes étudiés. Il offre suffisamment de flexibilité pour s'adapter à des modifications du programme de production du complexe. Cette solution est, en outre, la plus sécuritaire et la plus fiable du point de vue de l'entretien et de l'exploitation.

Le réseau de transport d'énergie du projet La Grande comportera cinq lignes construites dans trois corridors distincts. Ces lignes s'intégreront au réseau actuel, d'une part, dans la région de Montréal et, d'autre part, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Le coût de construction des lignes et postes de la baie James est estimé à près de $3.3 milliards. Un document sur le détail du projet vous sera d'ailleurs remis.

Voici maintenant quelques-unes de nos actions en 1973 qui témoignent de notre préoccupation pour la qualité de la vie.

Nous avons créé une direction générale de l'environnement dont la tâche principale est d'intervenir à toutes les étapes d'un projet, de manière que sa réalisation s'insère le mieux possible dans notre environnement physique et humain. C'est ainsi, par exemple, qu'elle participe étroitement au projet des lignes de transport de la baie James. Cette direction, qui regroupe des spécialistes de plusieurs disciplines, agit également comme consultant auprès des autres unités administratives de l'entreprise qui font appel à ses services.

Il nous paraît essentiel qu'une entreprise comme l'Hydro-Québec se dote de principes et de règles de conduite en matière de protection de l'environnement. C'est dans cet esprit que nous avons, d'une part, travaillé très étroitement avec les autres entreprises canadiennes d'électricité à la rédaction d'un code de l'environnement qui sera complété au cours des prochaines semaines, pour le compte de l'Association canadienne de l'électricité. Par ailleurs, l'an dernier, nous vous avions fait part de notre projet de rédaction d'un code de l'environnement. Nous nous sommes résolument engagés dans la rédaction de ce code qui, nous croyons, répondra davantage à nos objectifs particuliers et sera mieux adapté au milieu dans lequel nous évoluons.

Au cours des prochaines années, l'Hydro-Québec évoluera dans un climat économique marqué d'incertitudes et sur lequel elle a peu de prise. Le contexte économique québécois sera influencé par la conjoncture internationale. L'Hydro-Québec devra alors relever le défi de trouver la main-d'oeuvre, les biens et services ainsi que les capitaux nécessaires à la réalisation du programme d'équipement que je viens de décrire.

Actuellement, il nous est possible de former une main-d'oeuvre qualifiée, adaptée à nos besoins futurs par la gestion efficace et la

formation du personnel existant. Pour ce qui est des ressources humaines extérieures à l'entreprise, la seule façon d'influencer la main-d'oeuvre qui nous sera disponible dans le futur est de faire connaître nos besoins au gouvernement et au monde de l'enseignement afin que ceux-ci permettent à la population qui formera cette main-d'oeuvre de s'orienter vers des secteurs où l'Hydro-Québec constituera un débouché intéressant.

Historiquement, par notre pouvoir d'achat, nous avons toujours pu influencer un peu le marché des biens et des services québécois. Comme 1'Hydro-Québec achète pour près de $300 millions par an sur le marché local, elle peut exercer une certaine influence sur l'offre des biens et services. Dans le climat actuel de déséquilibre où la demande est supérieure à l'offre, la situation défavorise les consommateurs. A ce titre, l'Hydro-Québec pourrait voir diminuer le pouvoir de négociation qui, à ce jour, lui a permis de s'assurer un approvisionnement en biens et services répondant à ses normes de qualité et à des prix acceptables.

Durant les dix dernières années, l'Hydro-Québec s'est taillé une place sur le marché des capitaux. Le maintien d'une saine gestion financière devrait l'aider dans sa recherche future de capitaux. L'Hydro-Québec n'est toutefois pas la seule entreprise du secteur énergétique canadien à envisager des investissements importants. On estime que d'ici 1980, les investissements dans le secteur énergétique seront de l'ordre de $60 milliards au Canada. Sur le marché des capitaux, nous sommes donc en concurrence directe avec un ensemble d'entreprises, autant privées que publiques, au Canada ainsi qu'à l'étranger. Le défi financier des prochaines années est très grand et il est essentiel que l'Hydro-Québec maintienne une image financière saine et équilibrée, si elle veut garder une place de choix dans cette course aux capitaux.

L'inflation exerce des pressions sur la taille des capitaux demandés et en fait monter le prix. Même si, par diverses mesures, les gouvernements parvenaient à contrôler l'inflation, les taux d'intérêt demeureraient élevés par rapport à ce qu'il en coûte pour les dettes déjà contractées. Même dans une situation générale de coûts croissants, il faut maintenir un équilibre financier sain et rendre l'électricité disponible au plus bas coût pour le consommateur québécois. C'est afin d'assurer au consommateur québécois un approvisionnement en électricité au plus bas coût à long terme que l'Hydro-Québec a choisi de s'engager dans un programme hydraulique.

Pour maintenir une saine administration financière, nos sources de financement, aussi bien l'autofinancement que la dette, devront croître au même rythme que nos besoins de capitaux.

Etant donné l'envergure des projets prévus dans nos programmes d'équipement, les pressions inflationnistes que nous aurons à subir ainsi que le prix plus élevé des emprunts, nous estimons présentement qu'au cours des cinq prochaines années, il faudra augmenter nos tarifs non plus d'un minimum de 4 p.c. par an mais d'un minimum de 10 p.c. en moyenne annuellement. Ce taux est avantageusement comparable à ce que prévoient les compagnies d'électricité qui ne peuvent bénéficier comme nous d'un projet hydroélectrique et à ceux qui sont prévus pour les autres formes d'énergie.

Voilà, messieurs, j'ai tenté de vous brosser, dans ses grandes lignes, le portrait de l'Hydro-Québec qui se dégage des opérations de 1973 et le défi que nous aurons à relever au cours des prochaines années. Je vous remercie de votre attention. Nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions, après quoi, si vous le permettez, le problème de l'Hydro, la majeure partie des questions étant vidées, le président de la Société d'énergie de la baie James, M. Boyd, vous livrera un exposé sur les travaux d'aménagement du complexe La Grande.

M. Le Président, nous sommes à votre disposition.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Avant de passer aux questions, le ministre des Richesses naturelles aurait un commentaire.

M. MASSE: D'abord, je voudrais remercier le président de l'Hydro de l'exposé qu'il vient de nous faire, et aussi les membres de la commission, qui sont ici en grand nombre, pour répondre aux questions des députés de l'Assemblée nationale.

Je pense que pour revenir à la question du début, à savoir un ordre de discussion, M. Giroux, selon la structure de son texte, répond, je pense, un peu à la demande des membres de l'Opposition. Il y aurait peut-être lieu, au départ, qu'il y ait des questions d'abord sur les activités de la dernière année de l'Hydro-Québec. En deuxième point, il pourrait y avoir un exposé sur la demande future d'électricité. En troisième point, de quelle façon l'Hydro-Québec entend répondre à cette demande. C'est-à-dire que les points deux et trois sont le point un du chef de l'Opposition.

Je pense qu'à la façon de répondre à cette demande, il est assuré que nous aurons à toucher à la tarification et au financement et, enfin, on pourrait aborder le projet La Grande et les autres questions mentionnées qui pourraient intéresser les députés.

M. MORIN: M. le Président, avant d'entrer dans l'ordre des travaux, ne serait-il pas possible que nous soyons saisis de tous les documents dont on a fait état? Par exemple, je n'ai pas encore sous la main le document sur le coût de construction des lignes de transmission, dont nous aimerions prendre connaissance le plus tôt possible.

De même, M. Boyd, je crois, doit nous faire un exposé sur la Société d'électricité de la baie James. Il nous paraît important de

prendre connaissance de tous ces documents le plus rapidement possible si nous voulons être en mesure d'interroger intelligemment nos invités. Est-ce que ces documents pourraient nous être remis immédiatement et est-ce que nous pourrions avoir le temps de les consulter avant de commencer l'interrogatoire des comparants?

M. MASSE: Est-ce que M. Giroux aurait un commentaire sur cette question?

M. GIROUX: II y a certainement une partie des documents — je suis positif — qui peut être distribuée mais il y en a peut-être d'autres qui sont à être imprimés ou à une correction finale. Je pense bien qu'on pourrait donner une liste de ceux qui pourraient être distribués immédiatement. Je ne sais pas si vous avez...

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, est-ce qu'il n'y a pas justement le danger qu'on retombe dans l'abus et l'incompréhension que manifestait le chef de l'Opposition? Je pense que nous nous sommes entendus sur un ordre assez logique pour aborder la question, les prévisions de la demande; on peut demander s'il y a un document disponible et on l'obtient, on le parcourt et on le discute à fond. Une fois que la demande est réglée, on n'en parle plus, on passe à la prochaine étape qui consiste à savoir comment satisfaire cette demande. Là on peut prendre tous les documents disponibles sur les solutions à cela. Lorsqu'on a fini ça, suivant le cheminement même du chef de l'Opposition, on passe à une autre étape pour voir quelles sont les solutions nucléaires, thermiques, le coût de la baie James. On pourrait procéder par étapes, sinon on risque de se faire remettre des briques importantes et d'avoir des questions qui se promènent d'un document à l'autre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de L'Assomption.

M. PERREAULT: Je crois que nous avons en main, depuis un certain temps, le rapport annuel de l'Hydro-Québec. Il a été distribué à tous les députés. Je pense qu'on pourrait aborder dès maintenant la discussion sur le rapport annuel.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable chef de l'Opposition.

M. MORIN: Je ne suis pas en désaccord avec le ministre de l'Industrie et du Commerce sur l'ordre qu'il faut instaurer dans nos travaux. Toutefois, il est important, tant pour le gouvernement que pour l'Opposition, que nous ayons sous la main rapidement tous les documents dont nous allons discuter au cours des jours qui viennent. Dans le passé nous avons, du côté de l'Opposition, revendiqué, réclamé que les documents nous soient remis à l'avance pour que nous ayons le temps d'en prendre connaissance.

Plusieurs de ces documents sont d'un contenu hautement technique. Quand nous allons, tout à l'heure, plus tard, examiner le coût actualisé du mil au kWh nous voulons avoir tous les chiffres sous les yeux avant de nous lancer dans cette discussion.

Je n'ai pas d'objection à suivre le raisonnement du ministre de l'Industrie et du Commerce, mais je désirerais que nous ayons, sous les yeux, tous les documents au départ pour que nous puissions, au cours des heures qui viennent, au cours de la nuit qui vient au besoin, passer au travers et nous faire une idée des questions que nous aurons à poser à nos invités.

D'autre part, est-ce qu'il ne serait pas opportun que M. Boyd nous présente immédiatement le rapport sur la SDBJ? Cela forme un tout, du point de vue des questions que nous avons à poser sur les investissements, avec le rapport de l'Hydro-Québec.

Je proposerais donc que nous entendions immédiatement M. Boyd.

M. MASSE: M. le Président, le chef de l'Opposition lui-même a voulu que nous dissociions l'ensemble des questions. D'abord l'estimation des besoins, par la suite les investissements nécessaires pour y répondre et, en troisième lieu, qu'on examine d'une façon plus particulière le projet de La Grande et la Société d'énergie de la baie James.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, je pense qu'il y a deux points qui sont en discussion à l'heure actuelle, il y a d'abord la question de l'ordre de nos travaux. Je suis entièrement d'accord avec le ministre de l'Industrie et du Commerce et le chef de l'Opposition lorsqu'ils disent qu'on doit procéder selon un ordre de travaux. Mais le fait de procéder selon un ordre dans nos travaux n'implique pas le fait qu'on ne doit pas avoir les documents entre les mains. J'estime qu'il est bien important que nous ayons tous les documents entre les mains de façon que nous puissions les consulter, les étudier, les analyser. Je pense que ça va nous permettre de procéder avec beaucoup plus de célérité lorsqu'il s'agira de poser des questions à nos invités. En effet, si on entreprend d'étudier un rapport seulement et que c'est le rapport de M. Giroux, par exemple, et que par la suite d'autres documents nous sont remis, il sera nécessaire de revenir sur les premiers sujets.

Alors, je pense qu'on risque que la commission perde énormément de temps. Si on avait tous les documents pour être en mesure de savoir exactement ce dont il sera question, et connaître tous les chiffres et tous les éléments que l'Hydro-Québec a à nous fournir, par la suite on procédera selon un ordre de travaux bien défini, bien précis et on pourra procéder de façon beaucoup plus intelligente. Je ne

voudrais pas, M. le Président, le croire, mais on veut nous faire avaler un document à la suite de l'autre de façon à ce qu'on arrive à une conclusion inévitable.

M. MASSE: Je pense que le président de l'Hydro-Québec a répondu à la question du chef de l'Opposition qu'il y a des documents qui sont disponibles. Je pense qu'il n'aura pas d'objection à ce que ceux-là soient distribués, quitte à ce que les autres qui sont à l'impression le soient plus tard.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Trois-Rivières.

M. BACON: M. le Président, je ne suis pas en désaccord majeur avec aucun des ordres du jour proposés. Seulement, je ne voudrais pas qu'on oublie — pour une fois, cette année, il semble que je ne sois pas le seul à vouloir en parler à la commission— les discussions qu'on devrait avoir autour du régime de retraite des employés de l'Hydro-Québec.

M. MORIN: Oui, c'est le sixième point dans l'ordre du jour que j'ai proposé.

M. BACON: C'est parce qu'on n'en parlait plus, et j'avais peur de tomber seul encore comme l'an passé et l'année d'avant.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, il faut tenter, à un moment donné, de se placer dans la position de l'Opposition. Nous recevons tout à coup, à la commission parlementaire des richesses naturelles, à la fois de la part de l'Hydro-Québec et à la fois cette année de la part de la Société de développement de la baie James...

M. SAINT-PIERRE: Société d'énergie.

M. LESSARD: ... d'énergie de la baie James, d'accord, une série de documents qui sont éminemment techniques, et ce que nous voulons justement — il est cinq heures vingt — c'est tenter d'obtenir ces documents. Il me semble qu'il aurait été beaucoup plus logique que nous les ayons quelques jours avant la commission parlementaire. C'est toujours la même demande que nous faisons chaque année et, malheureusement, bien souvent c'est le cas de plusieurs commissions parlementaires. Il va tout à l'heure y avoir une suspension entre six heures et huit heures quinze. Si nous pouvions obtenir ces documents — je comprends que ça devrait normalement prendre beaucoup plus de temps pour regarder ces documents — ça nous permettrait, à nous de l'Opposition, dans cette période de suspension, de revoir les points principaux, par exemple, du rapport de l'Hydro-Québec qui a été présenté par M. Giroux et, en même temps — ça ne touche pas à la modification de l'ordre du jour — de regarder le rapport du président de la Société d'énergie de la baie James. Parce que, dans le rapport de M. Giroux, il y a justement des relations avec le prochain rapport qui nous sera fait, à savoir celui de M. Boyd.

Alors, ce que nous demandons au cours de cette séance, c'est de passer à tous les exposés, de recevoir les documents et, par la suite, il me semble qu'il serait logique de suspendre la séance jusqu'à huit heures quinze. Nous ne sommes malheureusement pas capables de prendre connaissance immédiatement des documents; on veut au moins avoir deux heures, deux heures quart pour nous permettre de prendre connaissance de ces documents, ce qui me paraît tout à fait logique.

D'autant plus, M. le Président, et nous l'avons constaté tout à l'heure lorsque nous sommes arrivés en commission parlementaire, que le ministre des Richesses naturelles, le ministre de l'Industrie et du Commerce avaient déjà en leur possession le rapport du président de l'Hydro-Québec. Le ministre des Richesses naturelles, comme le ministre de l'Industrie et du Commerce, comme le ministre des Finances ont déjà des informations que nous avons demandées à plusieurs reprises, ont déjà des informations qu'ils ont pu consulter eux-mêmes. Nous demandons au moins d'avoir un certain équilibre dans cette commission parlementaire et nous demandons justement de pouvoir recevoir ces documents, ce qui me parait juste et équitable.

M. MASSE: M. le Président, première chose, est-ce qu'on s'entend sur l'ordre du jour que je proposais qui était peut-être le même; votre point 1 est en deux points. Si on est d'accord sur cette procédure, je pense qu'il n'y a pas de problème à ce que les documents disponibles maintenant soient distribués et que nous attendions, la suite des discussions sur les besoins futurs et les projets ou les investissements, pour y répondre, et que nous examinions ensuite le projet de la baie James avec M. Boyd.

Dans toutes les estimations des besoins et des investissements nécessaires pour y répondre, on a, je pense, fait aussi de la part de l'Hydro-Québec, cette distinction pour ce qui est du projet de la baie James. Alors, je ne vois pas, il n'y a pas de possibilité de...

M. MORIN: Est-ce que j'ai bien compris le ministre? Nous nous mettrions d'accord sur l'ordre des travaux et puis viendrait, immédiatement après, l'exposé de M. Boyd? Mais je vous avoue, M. le Président, que je commence à sentir de la stratégie là-dedans et que...

M. SAINT-PIERRE: II n'y a pas de stratégie.

M. MORIN: ... je suis inquiet de la tournure des choses. Je ne vois pas pourquoi nous n'aurions pas devant nous, immédiatement,

tous les documents de façon que nous puissions travailler.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre de l'Industrie et du Commerce.

M. SAINT-PIERRE: M. Giroux, comme documents, qu'est-ce que vous pouvez rendre disponibles?

M. GIROUX: Pour les documents, on n'a pas d'objection. La seule chose c'est que certains documents doivent être donnés avec les explications en déposant les documents. Par exemple, pour celui qui couvre la Société d'énergie de la baie James, il y a le document principal et il y a des annexes. La prévision de la demande est un gros document et il y a quatre grosses annexes. Pour bien déposer ces documents, il faut les expliquer et les commenter en même temps. Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'ils soient déposés pour autant qu'on ait l'occasion de les commenter en les déposant.

M. MORIN: C'est bien sûr, M. le Président, que ces rapports se tiennent par eux-mêmes et que, si les commentaires du président de l'Hydro-Québec sont utiles pour les comprendre, ils ne sont peut-être pas absolument essentiels.

M. GIROUX: Ce n'est peut-être pas essentiel, mais des interprétations peuvent faire perdre énormément de temps. C'est pourquoi une interprétation qui pourrait être facilement donnée par un spécialiste, devrait l'être au tout début, je crois.

M. MORIN: Seulement, il faut bien comprendre que si vous nous remettez le document en même temps que vous faites l'exposé, nous n'avons pas le temps de parcourir le document. Donc, nos questions risquent de tomber à côté et c'est là que nous perdrons du temps.

M. GIROUX: M. Morin, je ne crois pas qu'on ait besoin de questionner une seconde après qu'on a déposé et expliqué le document. Vous avez des documents qui doivent se tenir, n'est-ce pas? Si on fait le développement de la baie James, il faut prouver qu'on en a besoin, donc ça dépend de la demande. Voici, prenons les côtés pratiques de l'affaire. Si on explique la demande et si on explique le programme de la baie James, si on le commente à ce moment-là, on ne répond pas aux questions; on donne des explications sur les documents qui sont déposés.

M. MORIN: Non, M. le Président, je regrette, il y a là une différence de conception dans le déroulement des travaux de cette commission qui me semble tout à fait fondamentale. L'Opposition, pour sa part, soutient qu'elle doit être saisie de l'ensemble des documents pour se faire une idée synthétique des problèmes, et je crois me rendre compte que l'Hydro-Québec veut révéler ses activités pièce par pièce; au fur et à mesure que nous aurons fini de commenter l'une des pièces, on nous présentera l'autre. Bien, ce n'est pas notre façon de travailler, je regrette. Nous voulons avoir devant nous l'ensemble des faits.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, je voudrais ajouter aussi, en réponse justement à M. Giroux, que cette commission parlementaire, à ce que je sache, ne siégera pas pendant deux ou trois semaines. Ce que nous voulons justement, nous de l'Opposition, avant de recevoir un exposé massif comme celui que vous venez de faire en ce qui concerne votre rapport, c'est justement de pouvoir vous interroger par la suite intelligemment. Puisqu'il y a des documents qui suivent ce rapport, pour avoir la possibilité de le faire, il faut prendre connaissance de ces documents.

Je pense qu'il est important, actuellement, que M. Boyd puisse faire aussi son rapport, parce qu'il y a certainement une relation entre le rapport que vous avez fait et le rapport que fera M. Boyd. C'est ce que nous vous demandons. Si, par exemple, nous pouvions ajourner à demain la commission parlementaire pour avoir la possibilité au cours de la nuit de prendre connaissance de tous ces documents, peut-être que nous ne ferions pas exactement la même demande. Mais ce qu'on vous dit, par exemple, c'est que nous avons deux heures et quart, au cours de la période de suspension, pour prendre connaissance d'un certain nombre de rapports qui auraient dû normalement, à mon sens, parce que c'est toujours la même chose chaque année, nous être envoyés au moins quelques heures avant la commission parlementaire.

Or, ce n'est pas le cas. Comment voulez-vous que nous, de l'Opposition, puissions faire notre travail? Actuellement, vous autres, vous avez toutes les informations, le ministre des Richesses naturelles, le ministre de l'Industrie et du Commerce, le ministre des Finances possèdent toutes les informations nécessaires. Ce que nous demandons, c'est un juste équilibre. Nous demandons de recevoir au moins ces informations à cinq heures trente, au cours de cette commission parlementaire, afin que nous puissions justement vérifier ces informations au cours de la période de suspension de cette commission.

M. GIROUX: M. le Président, on ne refuse pas de donner les documents. Il ne faut pas donner de fausses interprétations. On dit que les documents doivent être commentés en les déposant. Si vous voulez, on va tout déposer. Moi, ça ne me fait rien. L'heure du souper, je peux m'en passer et puis vous les lirez toute la nuit. Maintenant, on n'a aucune objection; la

seule chose qu'il y a, je retiens l'heure, ça fait une demi-heure et on aurait fini deux documents.

M. MORIN: M. le Président... M. ROY: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. LESSARD: C'est toujours la même chose.

M. GIROUX: Ce n'est pas toujours la même chose, vous les auriez entre les mains.

M. ROY: Je regrette. Je ne voudrais pas être désagréable à l'endroit de nos invités mais la commission parlementaire est maîtresse de ses travaux.

M. GIROUX: Bien oui. M ROY: Premièrement.

M. PERREAULT: Pas le député de Beauce-Sud.

M. ROY: Je ne voudrais pas être désagréable, mais je trouve qu'il est tout simplement normal que les membres de la commission demandent à ceux qu'ils ont convoqués devant la commission de se rendre à la demande des parlementaires. Nous avons, ici aujourd'hui, à la suite d'une demande qui a été faite, l'Hydro-Québec qui comparait devant nous. La commission demande que les documents soient déposés de façon que nous puissions les examiner. Il n'y a rien de plus normal que cela. Il n'appartient pas à l'Hydro-Québec d'accepter ou de refuser cette demande, c'est à la commission parlementaire de prendre cette décision. Je fais motion, immédiatement, pour que les documents soient déposés. Qu'on discute de la motion et qu'on mette la motion aux voix, mais ici même, au niveau de la commission.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Est-ce qu'il y a des membres de la commission qui ont des commentaires à faire sur la motion du député de Beauce-Sud?

UNE VOIX: Est-ce qu'on pourrait avoir le texte?

M. SAINT-PIERRE: Le texte de la motion?

M. LESSARD: Non, nous n'avons pas à présenter de texte.

M. SAINT-PIERRE: C'est quoi? Répétez-la donc, votre motion.

M. ROY: Je fais motion pour que les docu- ments, dont il a été question dans le rapport de M. Giroux et dans le rapport de M. Boyd, soient déposés immédiatement.

M. GARNEAU: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable ministre des Finances.

M. GARNEAU: ... j'ai l'impression qu'on est après tourner en rond. Ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce vient de dire, ce que le président de l'Hydro-Québec vient de dire c'est qu'on va les déposer, les documents. Si vous arrêtez de parler, ils vont déposer les documents à demande. Ne posez pas de question, on va les laisser aller, ils vont déposer le document sur la Société d'énergie de la baie James, ne posez pas une question, ils vont déposer tous les documents, et vous placoterez demain. Arrêtez de placoter tout de suite et on va demander à M. Giroux de nous donner le document à demande, tel que suggéré par vous-même au début.

M. MORIN: M. le Président, nous serions prêts, en vue d'accélérer les travaux, à accepter cette proposition. Qu'on dépose tous les documents, avec tous les commentaires qu'on voudra dès maintenant. Ensuite, nous aurons également le placotage du ministre des Finances.

M. MASSE: Ce n'est pas le ministre des Finances qui placote, je pense.

M. SAINT-PIERRE: On peut avoir le document sur la demande.

M. ROY: Donc, on peut conclure que la motion a été adoptée.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On ne peut pas conclure que la motion du député de Beauce-Sud a été adoptée.

M. PERREAULT: Elle n'est pas adoptée.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je crois qu'il y a eu une autre motion, alors, si on veut discuter de la motion.

M. LESSARD: M. le Président, question de règlement. A moins d'un amendement, M. le Président, il ne peut pas y avoir deux motions devant la commission. S'il y a eu amendement à la motion, M. le Président, d'accord.

UNE VOIX: Cela recommence.

M. LESSARD: Non, on ne recommence pas. Est-ce que l'intervention du ministre des Finances veut dire qu'il y a dépôt des documents et, en même temps, aussi rapport du président de la Société d'énergie de la baie James? Si c'est le cas, nous sommes complètement d'accord avec la proposition; arrêtons d'en parler et passons.

M. ROY: Je suis prêt à retirer ma motion si on est prêt à accepter cela, de façon à accélérer les travaux.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... du chef de l'Opposition qu'on acceptait la proposition du ministre des Finances, de la part de l'Opposition officielle. A cette condition-là, il faudrait retirer la motion du député de Beauce-Sud.

M. MORIN: Si le député de Beauce-Sud est d'accord.

M. SAINT-PIERRE: Alors, passons à la prévision de la demande. C'est fondamental, il faut s'entendre sur cela, et le rapport.

M. LESSARD: Pas la prévision de la demande.

M. SAINT-PIERRE: Bien oui. La prévision de la demande est avant l'exposé.

M. LESSARD: Le dépôt du document?

M. GIROUX: Voulez-vous mon régime de retraite?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, M. Giroux...

M. BACON: Vous n'avez pas le document?

M. GIROUX: Je vais vous donner cela dans deux minutes.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... on vous demande de nous faire part de votre document sur les prévisions de demande.

M. MORIN: M. le Président, est-ce qu'il est clair que nous aurons également le rapport de M. Boyd avant le dîner pour que nous puissions en prendre connaissance? Je vois que le ministre de l'Industrie et du Commerce donne son assentiment. Espérons que ça correspond à la stratégie de l'Hydro-Québec.

M. ROY: C'est une des conditions de la motion.

M. BOYD: Cela fait plusieurs fois qu'on me le demande et qu'on ne s'entend pas. Personnellement, je suis prêt à lire mon rapport depuis longtemps. Si vous voulez, on va vous distribuer les documents qui vont avec, à mesure que je vais le dire. Les documents en annexe, vous les lirez à loisir et vous nous questionnerez à loisir. Je pense que c'est ça que vous voulez. J'en ai probablement pour vingt minutes, une demi-heure à lire ça. Je pense que cela répondrait à la demande de tout le monde.

UNE VOIX: D'accord.

M. MORIN: Un instant, M. le Président, il y a une question de principe là. Pourquoi nous remettre les documents au fur et à mesure? Pourquoi ne pas nous donner le paquet au départ?

M. BOYD: Je vous donne mon texte.

M. MORIN: Je n'aime pas, M. le Président, que ce ne soit pas la commission qui soit maîtresse de ses travaux. L'Hydro-Québec est venue nous renseigner, nous apporter les renseignements. Ses représentants doivent déposer sur la table ce que la commission leur demande, et ne pas traiter les membres de la commission comme si c'étaient des petits garçons.

M. SAINT-PIERRE: Un instant, un instant, M. le Président. Le ministre des Finances, je pense, en tentant de régler la question, a fixé un déroulement qui me paraît parfaitement logique. Connaissant peut-être la façon et la capacité de certains membres de votre parti d'interpréter des chiffres, comme il y a beaucoup de chiffres dans ces choses, on voudrait bien que personne ne se mêle là-dedans, en particulier le consommateur et le public. Donc, on a dit que tous les documents, on va les distribuer. Ils vont être commentés et, demain ou ce soir, si possible, on posera toutes les questions et on les étudiera à fond. Mais on aimerait, pour retenir votre première suggestion, avoir un ordre logique dans ça. L'ordre logique implique que, dans un premier temps, on parle des prévisions de la demande d'électricité, parce que, s'il n'y a pas de besoin, on va arrêter le projet de la baie James, on va tous retourner chez nous, mais s'il y a des besoins, il va falloir les combler. Là, on laissera à l'Hydro-Québec le soin de suivre l'ordre logique qu'on a déjà indiqué.

M. LESSARD: M. le Président...

M. SAINT-PIERRE: C'est terrible, M. le Président! Je suis certain que, si on avait fait l'inverse aujourd'hui, si on vous avait donné ça d'épais de documents, on se serait fait accuser par le député de Beauce-Sud et l'Opposition officielle de tenter de mêler l'Opposition.

M. MORIN: Nous avons toujours demandé ces documents à l'avance, pour pouvoir en prendre connaissance.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, ça fait trois semaines qu'on a le rapport annuel et pas une question n'a été posée sur le rapport annuel, même si ça fait une heure et demie qu'on est ici.

M. MASSE: Alors, M. le Président, est-ce qu'on peut demander à M. Boyd de faire son exposé?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Boyd, la parole est à vous.

Société d'énergie de la baie James

M. BOYD: D'accord, Merci, M. le Président. MM. les membres de la commission — s'il vous plaît, distribuez le texte et ceux qui vont avec.

Dans l'exposé que nous avons fait devant les membres de cette commission permanente des richesses naturelles...

M. CHARUK: Nous demandons quelques secondes pour que le texte soit distribué.

M. BOYD: M. le Président, dans quelques secondes, vous aurez tout le texte. Si vous me le permettez, je vais le lire immédiatement.

Dans l'exposé que nous avons fait devant les membres de cette commission permanente des richesses naturelles, en avril 1973, nous avons déclaré que, pour respecter chaque étape du cheminement critique conduisant à la mise en service de la centrale LG 2...

M. ROY: Un instant, on distribue les documents et il y a toutes sortes de choses en même temps; je suggérerais qu'on attende trente secondes et, après ça, on pourra entendre M. Boyd.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On demanderait à tous les membres de la commission de se tenir tranquilles, afin que nous puissions écouter avec beaucoup d'intérêt M. Boyd. Alors, M. Boyd, si vous voulez procéder.

M. BOYD: Alors, je peux procéder?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Oui, M. Boyd.

M. BOYD: Dans l'exposé que nous avons fait devant les membres de cette commission permanente des richesses naturelles, en avril 1973, nous avons déclaré que pour respecter chaque étape du cheminement critique conduisant à la mise en service de la centrale LG 2, au début de 1980, il fallait entreprendre dès 1973 des travaux de dérivation temporaire de la rivière La Grande à l'emplacement du barrage principal.

Nous disions également que les études détaillées d'optimalisation du complexe permettront d'établir avec exactitude la puissance et le nombre de groupes générateurs à LG 2 et apporteront des précisions concernant les dérivations et les déversoirs.

Au début de cet exposé, je me dois donc de faire savoir aux membres de cette commission que nous avons effectué nos études d'optimalisation, que nous avons poursuivi, non sans difficultés, les travaux entrepris et que nous nous proposons de prendre tous les moyens pour respecter l'échéancier général malgré les avaries survenues en mars dernier.

Nous aborderons donc, dans cet exposé, les sujets suivants: —les activités, travaux et difficultés survenues depuis le printemps 1973; —la description du schéma d'aménagement retenu suite aux études d'optimalisation; —et finalement les coûts du projet. Résumé des activités. Dans notre rapport d'activité pour l'année 1973 — rapport que vous avez en main — nous apportons des précisions sur chacun des aspects de nos travaux. Je me contenterai donc ici de ne faire qu'un bref survol du contenu de ce document.

A l'emplacement de LG 2, la plus importante des centrales du complexe La Grande, on effectuait en 1973 la phase finale des explorations et des travaux de déboisement pendant que des ingénieurs-conseils préparaient les plans et devis du barrage.

En même temps, le contrat de percement des galeries de dérivation progressait selon les prévisions pendant qu'un autre entrepreneur creusait, à 340 pieds sous terre, une galerie d'exploration à l'emplacement même de la centrale.

Sur le plan du logement à LG 2, l'activité ne manque pas au cours de l'année. En février, on ajoute des dizaines de tentes au campement d'exploration qui devient le campement provisoire du chantier; en mai, on porte sa capacité à 450 hommes; en août, on commence déjà à le démonter pour reloger les hommes au campement principal, un mille plus loin, où, en fin de 1974, on pourra loger 2,000 personnes.

Quant aux travaux effectués à l'emplacement des autres centrales, ils se résument à l'installation à LG 3 d'un campement à l'intention des géologues et arpenteurs et à de l'exploration, tant à LG 3 qu'à LG 4.

Au cours de l'été, la SEBJ mettait la dernière main aux installations prévues à l'aire de manutention de Matagami.

A propos d'infrastructure, notons que la route Matagami — LG 2 — Fort George était, l'hiver dernier, carrossable sur la moitié de sa longueur, praticable à divers degrés sur le reste de son parcours et que les travaux progressaient au pont de la rivière Eastmain, le dernier des ouvrages importants non encore terminé.

Je passe rapidement sur la question du transport pour mentionner l'achat par notre société d'un cargo aérien, un Lockheed de type Hercules, qui peut transporter une cargaison utile de 25 tonnes. C'est un appareil d'une grande maniabilité qui peut même se poser sur une piste de glace. Cet avion est surtout affecté au transport vers les postes qui ne sont pas reliés par route aux autres chantiers.

La conjoncture économique fait l'objet d'un chapitre dans notre rapport d'activité 1973. C'est une question, tout comme celle de l'environnement, qui prendra toute son importance au moment de la description du cheminement qui a conduit la Société d'énergie à opter pour une variante plutôt que pour une autre dans l'optimalisation du complexe et qui a permis d'établir le coût du projet.

Si nous nous reportons à certaines déclara-

tions antérieures prévoyant un contenu canadien de 84 p.c. et un contenu québécois de 77 p.c, pour la construction de centrales hydroélectriques, il est intéressant de noter qu'en pratique 82 p.c. des commandes de matériaux et contrats de construction ou de services ont été remplis par des firmes québécoises l'an dernier.

En somme, la Société d'énergie considère qu'elle a pu respecter ses engagements dans les délais prévus et qu'elle a atteint les objectifs qu'elle s'était fixés pour l'année 1973.

Activités 1974. La situation est cependant un peu différente pour l'année 1974. En effet, si les travaux se sont poursuivis normalement au début de l'année, les événements de mars dernier, soit le sac et l'incendie d'une partie du campement LG 2, ont amené non seulement un arrêt de travail de 51 jours mais une perturbation importante de l'échéancier.

Nous reviendrons sur ce sujet avec un peu plus de détails dans quelques minutes.

Nous avons donc, en début d'année, arrêté notre choix sur les dérivations qui seront effectuées dans la région de la rivière La Grande et défini ce que sera le complexe La Grande optimalisé. Nous en donnerons les grandes lignes dans un instant.

En ce qui touche la construction du barrage principal, la plus basse des soumissions reçues se rapproche sensiblement des estimations les plus récentes faites par la Société d'énergie.

Toutes les soumissions ont fait l'objet d'études détaillées par divers groupes de spécialistes et le contrat a été octroyé le 26 juin dernier.

L'appel d'offres pour la fabrication des turbines a été lancé le 11 février. On prévoyait recevoir les documents le 23 mai, mais les événements de mars nous ont fait reporter l'ouverture des soumissions au 16 juillet.

Du côté de LG 1, les travaux de déboisement, les investigations géologiques et les relevés topographiques ont été suspendus pendant que s'accéléraient les négociations avec les autochtones.

A LG 3, l'exploration se poursuit aux emplacements des digues et des bancs d'emprunt. L'ingénierie des ouvrages permanents de LG 3 est en marche. Enfin, à LG 4, on poursuit les travaux d'exploration.

A Matagami, l'aire de manutention est en place de même que les quelques bureaux installés auparavant dans la ville même. La base des explorations a été déménagée sur le territoire du complexe hydroélectrique.

En ce qui concerne les campements, on peut noter qu'à LG 2 la remise en état — suite à l'incendie et au sac des installations— est complétée. Nous avons, d'autre part, amorcé une autre phase de l'installation du campement, la phase II A, qui consiste en l'installation d'une cuisine de 1,000 hommes, d'une soixantaine de dortoirs et de quelques bureaux.

Ce contrat pour la phase II A prévoit aussi le déboisement et l'installation des services essentiels. On abordera cet été la phase II B qui comprend entre autres l'installation d'une nouvelle taverne, d'un hôpital, d'un poste d'incendie en plus des services récréatifs comprenant salle de quilles, gymnase, salle de théâtre et cinéma, et arène qui, à l'été, se transformera en court de tennis et de ballon-volant.

Déjà, on est à monter des tentes à LG 2 et LG 3 pouvant abriter les joueurs de ping-pong, billard, etc. Notons enfin que le signal de la télévision française de Radio-Canada peut être capté à LG 2 depuis déjà une quinzaine de jours.

Le litige présentement devant les tribunaux. On sait que nos travaux ont fait l'objet de plusieurs procédures judiciaires depuis 2 ans. En voici un bref aperçu.

Le 2 mai 1972, certains chefs Indiens et Inuit prenaient action devant la cour Supérieure du Québec dans le but de faire cesser les travaux de développement dans la région de la baie James. L'action principale alléguait que la loi 50 est inconstitutionnelle et que les travaux portent atteinte aux droits des Indiens et Inuit. Dans une deuxième étape, soit le 2 novembre 1972, les requérants demandaient que soit accordée une injonction interlocutoire pour empêcher la poursuite des travaux.

L'audition de la preuve pour cette injonction interlocutoire a débuté le 11 décembre 1972; 167 témoins ont été entendus et 312 exhibits ont été produits. La cause a été prise en délibéré le 21 juin 1973, et le 15 novembre l'honorable juge Malouf rendait un jugement qui enjoignait aux intimés de cesser les travaux. Le même jour, les intimés faisaient appel à l'encontre de cette injonction interlocutoire. Six jours plus tard, soit le 21 novembre, ces mêmes intimés demandaient à la cour d'Appel que soit suspendue l'injonction. Cette demande était accordée le 22 novembre et les travaux, interrompus depuis le 15 novembre, pouvaient se poursuivre.

Au début de décembre les requérants demandaient à la cour Suprême la permission d'appeler de la décision autorisant la reprise des travaux, permission qui leur fut refusée.

Le 10 juin 1973, la cour d'Appel a commencé l'audition de l'appel du jugement rendu par l'honorable juge Malouf, le 15 novembre dernier. Le 14 juin la cause a été prise en délibéré. Les événements de mars. Notre présentation devant cette commission parlementaire ne serait pas complète si je ne faisais mention des événements survenus sur nos chantiers au cours du mois de mars dernier.

Je ne commenterai pas les faits qui ont mené à la création d'une commission d'enquête, à des poursuites et même à un plaidoyer de culpabilité. Je me contenterai de rappeler que vers la mi-mars un incident des plus banal, soit la mise en disponibilité de deux travailleurs et leur embauchage par un autre sous-traitant, a donné lieu tout d'abord à un affrontement intersyndical chez un employeur qui a ensuite dégénéré en un arrêt de travail général.

Ceux qui ont fomenté cette grève générale

ont profité de l'occasion pour présenter de nombreuses revendications ne relevant aucunement du conflit à l'origine du mouvement et pour ensuite se livrer à du sabotage.

On sait que les importants dommages causés à nos installations nous ont forcés à évacuer le campement LG 2, à effectuer de coûteuses réparations et à garder le chantier fermé durant plusieurs semaines afin que soient prises des mesures permettant d'éviter la répétition de tels incidents dans l'avenir.

A cet effet, nous avons rencontré l'honorable premier ministre pour discuter des points suivants: Une modification des politiques d'embauchage; une intensification des mesures de sécurité; la révision du statut des travailleurs non régis par le décret de la construction; le non-respect dudit décret.

On sait que depuis ce temps l'Association des employeurs de la baie James offre à ses membres un service d'embauchage par l'entremise du Centre de recrutement de la baie James qui reçoit les demandes de personnel des employeurs et effectue son recrutement auprès des centres de main-d'oeuvre du Québec ou des autres services appropriés de personnel.

D'autre part, la Sûreté du Québec maintient un détachement de quelques hommes à proximité de l'aérogare de LG 2. Ce poste de la Sûreté dispose de ses propres moyens de communication avec les centres urbains, assurant ainsi une liaison constante quoiqu'il advienne de nos installations.

Enfin, le gouvernement a institué une commission d'enquête qui fera la lumière sur la liberté syndicale dans le domaine de la construction au Québec.

Quant au statut des travailleurs non régis par le décret, cette question demeure à l'étude.

Nous n'avons pas terminé l'estimation des coûts additionnels du projet directement reliés aux événements de mars.

L'optimisation du complexe La Grande. Nous avons mentionné, l'an dernier, que les études en cours permettraient de présenter à la fin de 1973 tous les éléments nécessaires à la formulation définitive des composantes du complexe La Grande optimisé.

Une documentation volumineuse a été compilée, de laquelle les spécialistes de la Société d'énergie et de l'Hydro-Québec se sont inspirés pour rédiger un rapport conjoint. Ce rapport a été étudié par les administrations concernées et la décision a été prise. J'en dégage ici les points saillants: en 1971, l'Hydro-Québec rend publique sa décision d'opter pour le développement du potentiel hydroélectrique des rivières de la baie James, plutôt que d'axer son programme d'équipement surtout sur l'énergie thermique ou nucléaire. A l'époque, la décision est justifiée devant la commission des richesses naturelles. Un an plus tard, un autre choix doit être fait entre ces deux options. Il est alors convenu d'exploiter d'abord les rivières du secteur nord de la région de la baie James, plutôt que celles du sud. Le complexe La Grande sera donc mis en chantier immédiatement, plutôt que le complexe NBR, c'est-à-dire Nottaway, Broadback, Rupert. Ce choix global fait, il est entendu que le complexe La Grande fera l'objet d'études détaillées sur la possiblité de dériver la rivière Eastmain dans La Grande et sur l'opportunité d'y dériver aussi les rivières avoisinantes, plutôt que d'en faire l'aménagement individuel.

L'Hydro-Québec effectue donc des études de validation. La Société d'énergie, de son côté, fait des études techniques. Des études générales de synthèse en vue du choix définitif suivent. A la fin de 1973, tous les éléments permettant de prendre une décision sur les dérivations à effectuer sont compilés.

Au début de 1974, le choix est fait. Un choix qui tient compte des facteurs suivants: l'aspect économique, les contraintes techniques, le respect de l'environnement, l'intégration du projet dans la politique énergétique à long terme du Québec, les problèmes de transport d'énergie.

Ce choix devait se faire entre deux options principales: l'aménagement séparé du potentiel énergétique de chaque rivière ou l'aménagement regroupé par le jeu des dérivations.

On a examiné une trentaine de possibilités théoriques à la lumière des études antérieures pour ne retenir qu'un nombre minimal de possiblités de regroupements de rivières, ayant toujours comme centre principal d'aménagement la rivière La Grande et ses quatre centrales ou, en d'autres termes, le complexe La Grande.

Ces possiblités sont composées du complexe La Grande auquel peuvent s'ajouter les apports des rivières Eastmain, Grande Baleine, Caniapis-cau, Rupert. Notons que la dérivation de la rivière Opinaca dans La Grande fait partie de chaque projet évalué, l'aménagement de cette rivière séparément s'avérant non économique.

Ces diverses études ont permis de conclure que, du point de vue économique, plus une option comporte de dérivations, plus elle est intéressante. Les dérivations qui présentent le plus d'intérêt, par ordre de préférence économique, sont les suivantes: d'abord, la dérivation de la Caniapiscau et de la Eastmain, puis de la Grande Baleine et, enfin, celle de la Rupert.

A cause des contraintes économiques et d'environnement, il ressort, par ailleurs, qu'il n'est pas souhaitable d'inclure dans le complexe plus de deux dérivations, outre celle de la rivière Opinaca.

La solution adoptée a donc été celle de n'inclure dans le complexe La Grande que les dérivations Eastmain et Caniapiscau, pour obtenir une puissance installée de 10,300 MW.

Description technique du complexe. Voici en quoi consiste, sur le plan technique la variante d'aménagement sur laquelle s'est porté notre choix et que nous appelons "Complexe La Grande 1974." Il s'agit, en bref, de la construction de quatre centrales sur la rivière La Grande, nommées LG 1, LG 2, LG 3 et

LG 4; de la dérivation partielle des eaux des rivières Caniapiscau, Eastmain et Opinaca dans le bassin de la rivière La Grande.

La capacité totale de ces quatre centrales est de 10,300 MW. Une description technique du complexe vous a été donnée. On y trouve des détails sur chacun des ouvrages. Je me contenterai, ici, de ne citer que les données principales.

Les détournements. Une digue en enrochement d'environ 130 pieds de hauteur sur la rivière Eastmain permettra d'effectuer le détournement des eaux du bassin supérieur de cette rivière dans le bassin de la Petite Opinaca, puis dans celui de l'Opinaca et enfin dans le bassin de la rivière La Grande.

A l'est du bassin de La Grande, un réseau de 29 digues permettra la fermeture de la rivière Caniapiscau supérieure et la création d'un réservoir dans cette même région qui alimentera les installations sur la rivière La Grande via la rivière Laforge.

Les centrales. La centrale LG 1, située à 23 milles de la baie James, occupera la largeur totale de la rivière La Grande. Elle sera composée de dix groupes de 118 MW pour une capacité totale de 1,180 MW, sous une chute nette nominale de 88 pieds en hiver et de 93 pieds en été. A l'emplacement de LG 2, à 73 milles de la baie, on entreprendra sous peu la construction du barrage principal. Il sera en enrochement avec noyau de moraine et d'une longueur totale en crête de 10,000 pieds. Le volume de remblai requis est de 30 millions de verges cubes et un réseau de 29 digues viendra compléter la fermeture du bief amont, réseau nécessitant quelque 25 millions de verges cubes de matériaux de remblai.

Une vallée naturelle située sur la rive sud permet la canalisation des eaux vers les prises d'eau et la centrale qui sont situées à quelque trois milles en aval du barrage principal.

La puissance installée à LG 2 sera de 5,328 MW fournis par 16 groupes d'une puissance de 333 MW chacun. Cette centrale souterraine aura une longueur totale de 1,245 pieds et une largeur de 93 pieds.

Elle sera logée dans le roc à plus de 300 pieds de profondeur. La centrale LG 3, construite en surface à 188 milles de la baie, comptera dix turbines de type Francis d'une puissance unitaire nominale de 174 MW chacune. Le barrage principal sera divisé en deux sections, coupant la rivière de chaque côté d'une île sur laquelle sera située la centrale. Ce barrage sera en enrochement avec noyau de moraine; un réseau de 25 digues sera également requis sur les rives nord et sud pour maintenir le bief amont à l'élévation 825. La longueur totale en crête de ces digues et du barrage sera de 64,700 pieds.

La route d'accès, située au sud de la rivière La Grande, part d'un point situé sur la route Matagami-LG 2 dans la région du lac Yasinski; elle a une longueur de 79 milles. La centrale souterraine LG 4 sera construite à 288 milles de l'embouchure sur la rive nord de La Grande et comptera huit groupes d'une puissance unitaire nominale de 257 MW sous une chute nette de 392 pieds. Le barrage principal en enrochement avec noyau de moraine, ainsi qu'un réseau de 10 digues permettront la fermeture des vallées secondaires. Une route d'accès entre les centrales LG 3 et LG 4 sera construite au sud du bief amont de LG 3, sur une longueur totale de 143 milles.

On aura donc, au total, quatre centrales comptant 44 groupes turbine-alternateur pour obtenir une puissance installée de 10,340 MW, fournissant 69 milliards de kwh d'énergie annuellement.

Maintenant, le coût du complexe La Grande. Le coût du complexe La Grande, incluant l'infrastructure principale et les lignes de transport, a été évalué, en 1972, à $5.8 milliards. Sa puissance totale prévue était alors de 8.3 millions de KW et elle devait répondre à la prévision de la demande du consommateur pour les années 1980 à 1984 inclusivement. Depuis lors, quatre facteurs principaux sont venus modifier cette évaluation : 1) Le taux d'inflation exceptionnellement élevé des deux dernières années; 2) les modifications au complexe imposées par des contraintes techniques ou des impératifs reliés au respect de l'environnement; 3) l'augmentation de la puissance de nos installations dictée par les études d'optimisation et le choix définitif des dérivations, et, enfin, 4) la révision des prévisions d'escalade de coûts reliés à l'inflation et au taux d'intérêt sur les emprunts à long terme.

Les coûts prévus du complexe La Grande, en 1972, se situaient, comme je le disais, à $5.8 milliards, soit $3.5 milliards affectés au coût de base et $2.3 milliards devant couvrir les taux d'inflation et d'intérêt sur les emprunts durant la construction.

Or il arrive — si on reprend chacun des quatre facteurs énumérés plus tôt — que : 1.1e taux d'inflation entre les années 1972 et 1974, qui s'est situé au-delà de 10 p.c. par année, augmente les coûts de base de 20 p.c. pour les porter de $3.5 milliards à $4.2 milliards; 2.les modifications apportées aux types de barrage, à l'amplacement des déversoirs et autres modifications imposées par les contraintes d'ordre technique ou de respect de l'environnement apportent une majoration des coûts de l'ordre de 17 p.c. qui nous porte à $4.9 milliards. 3.l'augmentation de la puissance installée, qui découle de nos études d'optimisation, étant de l'ordre de 24 p.c. (soit de 8,300 MW à 10,340 MW), les coûts sont donc majorés d'autant... ou presque. Le facteur de majoration est en fait de 22 p.c. puisque les infrastructures et certains autres ouvrages ne sont pas touchés par l'augmentation de puissance.

Nous voilà donc maintenant à $6 milliards.

$6 milliards pour un complexe hydro-électrique qui permettra de faire face à la demande des consommateurs durant la période 1980 à 1985 plutôt que durant la période 1980 à 1984; 4. les facteurs "inflation — taux d'intérêt" viennent s'ajouter. Ces facteurs sont en fait les seuls qui puissent prêter à interprétation.

En admettant qu'ils soient les mêmes que ceux utilisés en 1972 —soit 4 p.c. pour l'inflation et 8.5 p.c. pour l'intérêt — les coûts se situeraient alors à $9.9 milliards.

D'autre part, si on retient des hypothèses moins optimistes, ces mêmes taux peuvent fort bien se situer à 7 p.c. pour l'inflation et à 10 p.c. pour l'intérêt. Nous aurons alors à faire face à des coûts de l'ordre de $11.9 milliards pour un complexe La Grande optimisé, d'une puissance plus élevée et permettant de répondre à la demande pendant au moins une année de plus que prévu originalement.

On vous a distribué un document, il y a quelques minutes, qui vous explique les coûts d'une autre façon. J'aimerais le discuter. Vous avez ce tableau-là? Oui.

On répète la même chose mais c'est fait graphiquement, c'est peut-être plus facile à suivre. Je vous ai dit tout l'heure que les $5.8 milliards sont décomposés en $3.5 milliards pour le coût de base et $2.3 milliards pour les prévisions d'inflation et d'intérêt.

Alors l'inflation, depuis 1972, augmente le projet de $.7 milliard, le portant à $4.2 milliards.

Les modifications techniques et d'environnement les portent à $4.9 p.c. milliards et l'augmentation de puissance, de 24 p.c. qui nous coûte 22 p.c. de plus, porte l'estimation de base à $6 milliards.

Evidemment, vous avez trois possibilités, suivant que vous êtes optimistes ou pessimistes. On a un taux d'inflation de 4 p.c. et de 81/2 p.c. d'intérêt qui vous donnent $9.9 milliards; l'inflation à 5 1/2 p.c. et l'intérêt à 91/2 p.c. vous donnent $10.9 milliards; 7 p.c. d'inflation et 10 p.c. d'intérêt vous donnent un total de $11.9 milliards.

Nous avons retenu le dernier, tout en étant conservateur, et ce sont les chiffres qu'on a cités. Vous remarquerez cependant l'influence que peuvent avoir l'inflation et l'intérêt. Pour un projet qui est rendu à $6 milliards, si on emploie un taux d'inflation de 7 p.c, un taux d'intérêt de 10 p.c, vous doublez, vous passez de $6 milliards à $12 milliards.

C'est évidemment des choses qui sont incontrôlables dans quelque société que ce soit et les augmentations du projet sont facilement explicables, comme vous l'avez vu précédemment; il y a $1.1 milliard qui est dû au fait qu'on a plus d'énergie, cela vaut pour un an de plus. C'est donc de 3.5 à 4.6. Il reste que pour l'environnement on a dû faire des travaux spéciaux assez importants ou prévoir des travaux spéciaux importants. On a également dû prévoir des sommes d'argent pour le règlement avec les Indiens et les Inuit et cela est inclus dans ce facteur.

Vous avez, évidemment, l'inflation, que tout le monde connaît, qu'on a subie de 1972 à 1974.

M. le Président, messieurs, ici se termine ma présentation officielle. On pourrait répondre à vos questions.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On vous remercie M. Boyd. La commission des richesses naturelles suspend ses travaux jusqu'à huit heures quinze minutes, ce soir.

M. MORIN: M. le Président, avons-nous maintenant tous les documents à notre disposition?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On pourrait demander...

M. MORIN: Tous les documents qui vont être invoqués?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Giroux...

M. GIROUX: Attendez un peu, je ne peux pas vérifier, je ne sais pas ce que vous avez en main.

M. MORIN: Est-ce que, d'après vous, tout nous a été distribué?

M. GIROUX: II manque juste les lignes de transport. Est-ce que vous pouvez les distribuer?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Voulez-vous l'avoir tout de suite?

M. MORIN: Oui, nous aimerions avoir tous les documents.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, il en manque seulement un, M. Giroux?

M. GIROUX: Les lignes de transport.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Les lignes de transport. Alors, on va le distribuer immédiatement et on reviendra à huit heures quinze minutes.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

Reprise de la séance à 20 h 27

M. LAFRANCE (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

L'honorable ministre des Richesses naturelles aurait une question à poser à la suite de la présentation des mémoires.

M. MASSE: C'est-à-dire que le ministre de l'Industrie et du Commerce a souligné, cet après-midi, avant le souper, qu'il faudrait faire connaître les coûts comparatifs entre le complexe hydro-électrique de la baie James et les installations équivalentes au nucléaire.

J'ai consulté d'autres membres de la commission et il ne semble pas qu'on ait eu de documents de déposés cet après-midi sur cette question. Est-ce exact?

M. GIROUX: Je ne crois pas qu'il y ait eu de tels documents de déposés. On a certains documents en réserve si les questions sont posées. On peut exposer immédiatement nos vues sur le nucléaire et l'hydraulique...

M. MORIN: M. le Président...

M. GIROUX: ... et déposer les documents. On peut les déposer tout de suite.

M. LESSARD: Déposez les documents. M. le Président, on demande le dépôt des documents et, par la suite, on discutera des comparaisons. On s'était entendu, au cours de la séance précédente, nous allons parler, à un moment donné, des prévisions de la demande et, par la suite, on parlera de la baie James et des comparaisons entre le nucléaire et l'énergie hydraulique.

M. MORIN: M. le Président, j'allais poser la même question que le ministre des Richesses naturelles. En 1972, l'Hydro-Québec nous avait remis un programme d'équipement qui contenait des tableaux de comparaison fort instructifs. Tout à l'heure, j'ai demandé si on nous avait remis tous les documents écrits. Il m'a été dit: Oui. En cherchant parmi cette pile de documents, je me serais attendu justement à trouver une mise à jour de votre programme d'équipement, au moins en ce qui concerne une comparaison générale entre les projets de la baie James et les projets nucléaires, les projets d'électricité à base nucléaire.

Or, ce document, nous ne l'avons pas. S'il existe, nous serions également extrêmement intéressés à l'avoir et dès maintenant. Je voudrais vous faire comprendre, messieurs, en toute amitié, que si nous devons avoir un dialogue intelligent avec vous il faut que nous puissions consulter les documents auparavant, et non que vous ne nous les remettiez avec vos commentaires.

M. GIROUX: On n'a aucune objection. La seule chose, c'est que je ne sais pas si on a un document qui est fait sur ce document qui fut présenté en 1972. Est-ce que vous auriez ce document? Est-ce qu'on pourrait le voir?

M. MORIN: C'est votre programme d'équipement.

M. GIROUX: Je regrette mais je ne vois pas si loin que ça.

M. MORIN: C'est intitulé: Programme d'équipement, 1978-1985. Cela émane de la Direction de la planification, génie, de l'Hydro-Québec, c'est daté du 15 mai 1972. C'est une comparaison d'un certain nombre de programmes...

M. GIROUX: Oui je crois qu'il y a une cinquantaine de programmes, mais si on en a laissé tomber, cette année, on aura les programmes simplement qu'on croit continuer et non pas ceux qu'on laisse tomber.

M. MORIN: C'est exactement ce que nous voulons.

M. GIROUX: Ah! bon.

M. CHARUK: Nous n'avons qu'un programme d'équipement.

M. MORIN: C'est-à-dire LG, la suite du programme 37.

M. CHARUK: Si vous voulez, c'est le nouveau programme d'équipement de l'Hydro-Québec qui comprend le projet La Grande mais aussi d'autres installations.

M. MORIN: Vous voyez, justement, il serait bon que nous sachions si vous avez mis à jour votre ancien programme 34, c'est-à-dire La Grande 80, pointe intercalée, ou encore votre programme 37 de La Grande 80 avec pointe après. Nous serions intéressés à pouvoir établir une comparaison entre vos nouvelles estimations, vos coûts de production et ceux que vous nous donniez en 1972.

M. GIROUX: II n'y a pas de programme tel quel. Nous avons un programme qui est la comparaison des coûts de l'énergie entre le complexe hydro-électrique de la baie James et un projet nucléaire canadien équivalent. De projet canadien, il n'y en a qu'un, c'est le CANDU. Qu'on le multiplie ou qu'on le réserve, on ne peut pas faire 50 genres de programmes, on l'a fait à titre d'information, mais on ne fait pas ça tous les ans.

M. MORIN: Je comprends. Maintenant nous aimerions avoir le document; comme ça on saurait si vous nous parlez de Pickering ou si vous nous parlez de Gentilly. Avez-vous fait des calculs sur Pickering? Avez-vous fait des calculs

sur Gentilly? Comment est-ce que ça représente de mils par kWh dans chaque cas? C'est ça qui nous intéresse.

M. GIROUX: On l'a.

M. MORIN: II faudrait nous le faire parvenir.

M. GIROUX: C'est un exposé qui n'est pas long, voulez-vous faire l'exposé, M. De Guise?

M. DE GUISE: Cela ne me fait rien, comme la commission en décidera.

M. LESSARD: M. le Président, vous nous dites, à la question du chef parlementaire de l'Opposition, que vous avez le document. J'espère, depuis que vous vous êtes présenté à cette commission parlementaire, que vous avez révisé vos chiffres, parce que depuis ce temps, la science a évolué, à ma connaissance en tout cas, concernant l'énergie nucléaire. Ce que nous vous demandons c'est: Avez-vous ce programme de comparaison? Et nous avions aussi demandé d'autres documents qui devaient nous parvenir. Je vois les programmes 21, 22, 24, 25 et 26 et cela c'est en juin... c'est-à-dire que nous avions demandé ça lors d'une commission en 1971.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Pour le bénéfice du journal des Débats, c'est M. De Guise.

M. DE GUISE: Oui. Si vous voulez me le permettre, je vais répondre. Nous n'avons pas absolument l'équivalent ou une mise à jour du document que vous avez là mais je vais vous expliquer ce que nous avons. Etant donné les échéances évidemment, pour 1979, nous n'avons plus le temps d'étudier ou de programmer différentes choses, il faut nous fixer. Alors, c'était dans le programme de notre présentation; nous allons vous dire de quelle manière nous prévoyons faire face aux charges en 1976, 1977, 1978, 1979 avec un programme arrêté, défini.

En 1980 se pose l'option et, évidemment, en 1980 La Grande doit être prête. A ce moment-là, nous avons une option théorique, d'aller au nucléaire ou à La Grande, et nous avons un document qui compare le coût de La Grande, tel qu'exposé par M. Boyd, versus une option nucléaire que nous avons choisie.

M. MORIN: De combien de MW?

M. DE GUISE: Equivalente en puissance; 9,750 MW ou treize groupes de 750.

M. MORIN: Treize groupes de 750?

M. DE GUISE: Oui, quatre centrales de Bruce, si vous voulez.

M. MORIN: Est-ce que vous avez fait aussi des études de coût pour des centrales de 1,000 et de 1,200 MW?

M. DE GUISE: Non parce que, à notre connaissance, l'EACL n'est pas prête à en constui-re. Elle n'a pas de design, elle n'a pas de projet sur la table pour des centrales de cette dimension.

M. MORIN: Oui, mais enfin, M. le Président...

M. MASSE: Est-ce que c'est vraiment l'occasion ici de commencer à questionner sur ce sujet? Il y aurait peut-être lieu...

M. MORIN: Qu'on dépose le document.

M. MASSE: ... qu'on dépose...

M. LESSARD: Qu'on dépose le document.

M. MASSE: ... et qu'on fasse un court exposé si nécessaire.

M. LESSARD: Voici, M. le Président, pour le moment nous ne demandons pas un exposé. Nous avons assez du document de M. Giroux. Tel que nous l'avions prévu dès le début, il y a une demande d'électricité, il y a une prévision de demande. Nous avons l'intention d'interroger M. Giroux ce soir sur la prévision de demande. Cependant, comme l'Assemblée nationale va commencer à siéger demain matin à dix heures, entre minuit et dix heures du matin, nous avons l'intention nous autres, de vérifier un certain nombre de documents parce que si vous autres, vous les avez eus il y a trois, quatre, cinq ou six mois, quant à nous nous avons reçu cette somme de documents au cours de cette soirée, soit quelques minutes avant les séances de la commission parlementaire.

M. MASSE: II ne faudrait pas toujours revenir sur le même point. Ce que je dis...

M. LESSARD: Je ne reviens pas sur le même point mais qu'on s'entende. Au lieu...

M. MASSE: ... tout ce que je dis, c'est qu'on a permis...

M. LESSARD: ... de toujours discuter, qu'on dépose donc les documents.

M. MASSE: ... au président de l'Hydro-Québec de faire un exposé général. Le Parti québécois a demandé par la suite que dès maintenant on entende M. Boyd, président de la Société d'énergie de la baie James. Bon, alors, on a un certain nombre de documents.

Maintenant, M. De Guise et M. le président Giroux ont un autre document à déposer sur les coûts comparatifs. Je dis à M. De Guise que, s'il a des notes explicatives à nous donner en le déposant, de le faire. C'est tout.

M. LESSARD: C'est que le document...

M. MASSE: Je ne parle pas d'en discuter dès maintenant.

M. LESSARD: ... de M. De Guise rejoint l'exposé de M. Boyd. Alors, nous avons demandé, avant la suspension, le dépôt de tous les documents. Nous demandons, actuellement non pas une information ou un exposé de M. De Guise, parce qu'à ma connaissance nous avons aujourd'hui à vérifier justement l'administration de l'Hydro-Québec et l'administration de la Société d'énergie de la baie James. Alors, une fois que nous aurons les documents, si nous avons à interroger M. De Guise par la suite, nous l'interrogerons, de même que M. Giroux. Mais, pour le moment, nous demandons le dépôt du document et, pour la discussion, nous avons l'intention de suivre le programme tel qu'il a été proposé et accepté.

M. MASSE: C'est exactement le même procédé que je propose, à l'exception que, s'il y a des notes explicatives à donner au départ, M. De Guise le fasse. C'est tout.

M. MORIN: II y en a pour combien de temps, M. le Président? Est-ce bien long ces notes explicatives?

M. DE GUISE: Evidemment, ça dépend des questions.

M. MORIN: Non, il n'y aura pas de questions pendant l'exposé.

M. MASSE: On réservera les questions.

M. MORIN: Nous y viendrons en temps et lieu.

M. DE GUISE: Je peux vous faire un exposé très bref, de cinq ou dix minutes, si vous voulez, je peux juste les résumer.

M. MORIN: Alors, nous allons y consentir, c'est important que vous puissiez présenter le document. Par la suite, M. le Président...

M. MASSE: C'est la même procédure que cet après-midi.

M. MORIN: ... je demanderai s'il n'y a pas, par hasard, d'autres documents.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, M. De Guise.

M. DE GUISE: Mon document. On peut l'avoir.

M. MORIN: S'il y en a encore beaucoup comme cela, on pourrait peut-être nous les distribuer tous du même coup. Peut-être que cela simplifierait les recherches.

M. BEDARD (Montmorency): Vous ne trouvez pas qu'on en a assez?

M. DE GUISE: M. le Président, est-ce que je pourrais commencer lentement? Au début, je n'ai pas de chiffre à donner, rien, c'est de la théorie, si on veut, ou un exposé général. C'est comme vous voudrez.

M. LESSARD: M. le Président, c'est qu'actuellement nous n'avons pas encore le document. Pendant que la recherche va se faire, il va y avoir beaucoup de bruit. On aimerait bien vous suivre et, en même temps, annoter le document. Puisque ce document va nous être déposé à l'instant, nous aimerions bien, nous de l'Opposition, pouvoir l'annoter en même temps.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre, s'il vous plaît! Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, étant donné qu'avant le souper on nous avait dit que tous les documents avaient été déposés et qu'on vient de nous déposer un autre document, j'aimerais avoir ici, pour mon propre bénéfice comme pour le bénéfice des autres membres de la commission, d'autres documents qui seraient prêts et que nous n'avons pas reçus.

M. BOYD: M. le Président, en ce qui concerne la Société d'énergie ou même l'Hydro-Québec, des documents, on en a par centaines à l'Hydro-Québec. Si quelqu'un nous pose une question sur — je ne sais pas — l'usage des hélicoptères de la baie James, je vais vous répondre et je vais vous donner le document pour appuyer ma réponse.

M. ROY: M. le Président...

M. BOYD: II y a des tas de documents ici, il y en a à l'Hydro-Québec, puis il y en a à la société

M. ROY: M. le Président, je m'excuse, mais ce n'est pas du tout ce que j'ai demandé. Je n'ai pas parlé des hélicoptères du tout et je n'ai pas l'intention d'en parler, non plus. Je comprends que ce sont des circonstances bien spéciales, mais je n'aimerais pas me faire répondre sur ce ton, premièrement.

Deuxièmement, moi, ce que je veux savoir, c'est si l'Hydro-Québec, puisqu'elle est venue se présenter devant la commission ici, a préparé d'autres documents à notre intention, oui ou non. Des documents que nous n'avons pas reçus. C'est ça que je veux savoir. Est-ce que vous en avez d'autres à nous remettre?

M. GIROUX: Les documents qui étaient mentionnés dans le rapport que j'ai fait ont été déposés. Maintenant, il peut y avoir des documents d'appui sur des questions qui peuvent

être posées; je ne sais pas si on peut appeler ça des documents de présentation. Les documents de présentation ont été faits. Ils comprenaient le document de l'exposé de la Société d'énergie, les coûts comparatifs, les lignes de transport et le coût de... Les lignes de transport, vous ne l'avez pas?

M. LESSARD: Les lignes de transport, oui, on l'a.

M. ROY: Les lignes de transport, oui.

M. LESSARD: Les coûts comparatifs entre l'énergie nucléaire et l'énergie hydro-électrique, on vient de le recevoir.

M. GIROUX: Alors, moi, je n'ai pas d'autres documents de base que ça. Il peut y avoir des documents qui répondent à des annexes sur les bilans. Il peut y avoir des documents comme ça, dépendant des points qui sont soulevés.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): La question des documents étant réglée, on peut passer à M. De Guise qui va nous faire l'exposé sur la comparaison entre les coûts de l'énergie du complexe hydroélectrique de la baie James et d'un projet nucléaire canadien équivalent. M. De Guise.

M. DE GUISE: Maintenant que vous avez le document en votre possession, je crois qu'il n'est pas nécessaire de le lire mot à mot, surtout si je veux être bref; je vais donc attirer votre attention sur les points principaux.

M. LESSARD: Vous pouvez le lire, il n'y a aucun problème. Nous sommes ici, nous autres, jusqu'au mois de septembre, s'il y a lieu; il n'y a aucun problème.

M. ROY: On n'est pas pressé.

M. DE GUISE: Alors, je lis dans ce cas-là. Il semble exister actuellement...

M. LESSARD: Si on a une suspension pour la chasse à l'orignal. Il n'y aura pas de problème.

Allez-y.

M. DE GUISE: Je procède. Il semble exister actuellement une grande confusion dans l'établissement des coûts de l'énergie électrique produite par divers types de centrales. Ainsi, on publie souvent des coûts comparatifs en ne tenant compte que d'une partie de ceux-ci, ce qui amène des comparaisons boiteuses. Par exemple, il serait faux de considérer les frais de construction à l'exclusion de tous les frais d'exploitation. Il y a aussi cet autre genre d'erreur qui consiste à comparer des projets dont les dates de mise en service sont différentes et dont les coûts sont exprimés en dollars courants d'années différentes.

En d'autres occasions, on oublie certains éléments de coût qui diffèrent selon la nature des projets.

Ainsi, il faut tenir compte de la réserve nécessaire à assurer une alimentation fiable puisque le montant de cette réserve varie selon la taille et la nature des groupes (thermiques, nucléaires ou hydroélectriques) qu'on utilise. Enfin, on omet souvent d'énoncer tous les éléments de coût pris en considération et de tenir compte des différentes hypothèses de taux d'inflation, de coût de financement, etc.

Nous essaierons d'éliminer la confusion apparente en exposant la méthodologie à suivre pour obtenir une comparaison valable des coûts de l'énergie provenant de différentes centrales. Nous donnerons ensuite un exemple de comparaison entre les coûts du complexe hydroélectrique de la baie James et ceux d'un projet nucléaire canadien équivalent.

Le but de la présente section est de mettre en évidence les facteurs qui doivent être considérés lorsque l'on compare différents projets de production d'électricité. Lors de cette comparaison, on doit exiger que les projets rendent le même service. Ceci implique que la période d'horizon considérée pour ceux-ci doit être la même et que la fiabilité exigée du réseau après l'intégration des divers projets doit aussi être la même, quel que soit le projet choisi.

Afin de respecter ces deux conditions de même période d'horizon et de même fiabilité, voici les facteurs qui doivent être considérés: -les coûts d'investissement; ici j'ouvre une parenthèse, le coût d'investissement lui-même va faire l'objet d'un examen assez serré. Je pourrais vous donner une liste d'à peu près une page d'éléments de coûts qui, suivant les projets, sont dans le coût d'investissement ou n'y sont pas. Prenez, par exemple, l'eau lourde, ou bien la charge de combustible initiale, les frais de génie, les frais de mise en route de la centrale, etc. -les coûts de réinvestissement; là le problème se pose lorsque vous comparez de l'hydraulique et du nucléaire. Tout le monde admet assez facilement que l'hydraulique a une durée de 50 ans. Vous n'avez qu'à regarder la centrale de Beauharnois, la centrale des Cèdres, alors que le nucléaire doit être remplacé ou déprécié après 30 ans. Evidemment, si on veut comparer les deux mêmes choses, il faut ajouter au coût du nucléaire le coût du réinvestissement après 30 ans. -les frais de combustible; c'est évident. -les frais d'exploitation et d'entretien; ils sont différents dans les deux cas parce que le personnel est passablement plus nombreux dans le cas d'une centrale nucléaire que dans le cas d'une centrale hydroélectrique. -les coûts dus à l'inflation sur les frais de construction durant la construction, les frais d'exploitation et d'entretien durant toute la vie utile de la centrale et les frais de combustible; -les coûts de financement; -les coûts d'intégration des projets au réseau; évidemment, dans le cas de l'hydroélectrique, les lignes de transport et postes de transformation coûtent beaucoup plus cher.

- la valeur des pertes de transport; dans l'hydroélectrique, généralement les pertes sont plus élevées à cause de la distance. - la réserve requise pour assurer la fiabilité d'alimentation; c'est un élément des plus importants et nous y reviendrons.

Afin d'éviter toute confusion ou toute comparaison boiteuse, il faut particulièrement faire attention aux points suivants: 1 ) Vie utile des projets et période d'analyse. On fixe habituellement une période d'analyse qui servira de point de référence par rapport à la durée des projets évalués, ce qui facilite la comparaison. Cette durée de la période d'analyse doit être assez longue pour englober les durées de vie économique utile des projets comparés.

Une fois la durée de la période d'analyse établie, il s'agit d'aligner la vie des projets par rapport à la période d'analyse: si leur durée coincide avec celle-ci, nous pouvons effectuer la comparaison; sinon, il faut réinvestir pour ceux dont la vie utile est plus courte que la période d'analyse et attribuer une valeur de récupération à ceux dont la vie utile est plus longue. 2)Estimation et méthodologie. Il est aussi nécessaire de bien faire la distinction entre les coûts utilisés pour fins de comparaison économique de divers projets et les chiffres cités dans les journaux et les périodiques. Habituellement, ces derniers réfèrent uniquement au coût de construction des projets, c'est-à-dire aux sommes nécessaires à la construction des ouvrages incluant l'inflation et l'intérêt durant la construction, et dans la grande majorité des cas, les hypothèses et les années de référence ne sont pas énoncées.

Pour comparer adéquatement les coûts de l'énergie de deux (2) types de centrales, il importe d'inclure toutes les composantes de coût et de les traiter selon les méthodes économiques reconnues. La méthode utilisée pour comparer les coûts de deux (2) ou plusieurs projets est la méthode d'actualisation. Elle permet de transformer tout montant ou toute série de montants échelonnés dans le temps en un montant unique ou en une annuité équivalente, compte tenu de l'intérêt composé (taux d'actualisation). Ce taux est basé sur le coût total de financement qui comprend le coût du capital propre et celui des emprunts. 3)Façons d'exprimer les coûts de l'énergie. On peut exprimer les coûts de l'énergie de plusieurs façons. Celle utilisée le plus couramment par les gens du milieu exprime les coûts en mils/kWh — où un mil signifie $0.001 — que l'on détermine en utilisant les techniques d'actualisation. Une autre façon de comparer les coûts est celle qui utilise des dollars par kilowatt actualisés ($/kW); elle est aussi valable que la précédente parce que les coûts et les kilowatts sont actualisés en tenant compte des facteurs d'utilisation de ces derniers. 4)Illustration de l'estimation du coût d'un projet nucléaire. Le tableau 1 présente les coûts d'un projet nucléaire tels que donnés couram- ment dans diverses publications mais que nous avons ventilés de façon à rendre possible une comparaison adéquate avec les coûts d'un projet hydroélectrique. Les hypothèses et les données de référence sous-tendant ces coûts apparaissent au bas du tableau et son accompagnées de remarques explicatives. On réfère au tableau de la page 5.

Nous prenons comme exemple un complexe nucléaire tel que Pickering (filière CANDU), soit quatre (4) groupes de 500 MW chacun pour un total de 2,000 MW et une mise en service équivalente à la fin de 1972. Le facteur d'utilisation prévu en moyenne pour toute la durée de la vie utile est de 80 p.c.

L'estimation du coût d'investissement en dollars de 1968 pour le projet de Pickering était de l'ordre de $498 millions. On vous cite des références au bas de la page. Une estimation subséquente de $604 millions dollars de 1969 fit la manchette des journaux après sa publication dans un rapport de l'Energie Atomique du Canada. Les références sont données en 2, 3 et 4. Enfin, une estimation plus récente (en dollars de 1972) des coûts de Pickering donne $746 millions, référence 5 et 6.

Les estimations du coût d'investissement de Pickering sont donc passées de $498 millions en 1968 à $746 millions au début de 1972, ce qui reflète bien l'aspect inflationniste de la conjoncture économique depuis 1968. Prenons ce coût de $746 millions comme acquis et ajoutons-y les composantes qui permettent de déterminer le coût total de l'énergie.

Alors, source et date de publication, puissance totale, avec une certaine optimisation, 2,056 MW; coût d'investissement, $302 par KW en 1969; $386 actualisés, fin 1972. Vie utile, 30 ans dans tous les cas. Taux d'intérêt durant la construction, première colonne, les chiffres de 1971, c'était 7.5 p.c; les chiffres de fin 1972, 8 p.c. Le coût pour fin de comparer, est conservé à 8 p.c. Coût de financement, 10 p.c. Facteur d'actualisation, 10 p.c. Charges annuelles fixes, c'était 8.47 p.c, évidemment, en 1971, passé à 10.61 p.c. en 1972 et on conserve 10.09 p.c. sur une période de 50 ans pour les fins de comparaison.

Si on revient au coût de l'énergie à partir des données établies ci-haut et suivant les hypothèses qui sont au bas de la page, on en arrive à "investissement" dans les centrales; je prends le coût total pour le comparer à un projet hydroélectrique, 5.56. Attendez un peu, il y a une référence (1): Pour déterminer la contribution de l'investissement au coût de l'énergie, un coût de financement de 10 p.c. a été utilisé. La référence est à la page 6. Pour déterminer le coût d'exploitation et d'entretien, il faut appliquer un taux d'inflation de 4.5 p.c. par année sur la période de 50 ans, faire les dépenses annuelles dans chaque cas et actualiser le tout pour revenir à la période de base. En divisant par les kWh actualisés, vous en arrivez à un chiffre de 9.5 mils. Le renouvellement d'eau lourde, c'est tout simplement le coût de l'eau

lourde qui subit l'inflation et qui est perdue chaque année; c'est un chiffre assez généralement adopté. Pourquoi est-il plus haut dans la dernière colonne? C'est parce que ce sont les résultats de l'inflation pendant 50 ans qui est actualisée après. Le coût du combustible, là aussi on voit le jeu de l'inflation dans la période comparativement aux chiffres de 1971. Ce qui n'apparaissait pas dans les chiffres de 1971/72 et qu'on doit remettre en cause pour les fins de comparaison avec un projet hydroélectrique, c'est le réinvestissement. Après 30 ans, vous n'avez plus de centrale; donc, il faut dépenser de l'argent pour avoir les 20 autres années. Cela équivaut à 9.3 de mils. La réserve, est-ce que c'est la réserve totale? C'est 25 p.c. de réserve? Un instant, je donne la référence. La réserve est basée sur un taux d'indisponibilité des centrales nucléaires dû aux pannes de 6 p.c, ce qui nécessite des installations de réserve dont la puissance représente 25 p.c. La différence avec l'hydraulique, c'est que, pour l'hydraulique, vous avez des machines d'un autre type dont nous avons l'expérience. Elles ne tournent pas à grande vitesse, elles ne sont pas sujettes à des pressions de vapeur, etc. L'expérience nous prouve que, sur un réseau hydraulique, avec 10 p.c. de réserve, vous vous en tirez amplement.

Sur la réserve, comme nous n'avions pas tellement d'expérience nous-mêmes que nous pouvions citer, nous avons adopté tous les chiffres de l'Hydro-Ontario.

Je dois vous dire que dans les documents qui ont été déposés devant l'Ontario Energy Board récemment l'Hydro-Ontario prend une réserve de 30 p.c. sur l'ensemble de ses installations, ce qui équivaut à 38 p.c. ou 40 p.c. pour le thermique et le nucléaire seulement. Alors, ici, nous avons conservé 25 p.c, ce que nous étudions maintenant. Ce sont des groupes de 500 MW. Plus les groupes sont gros, évidemment, plus les pannes dans les premières années frappent durement.

Le coût de l'énergie produite, vous avez 9.45 mils; maintenant, dans le cas de l'énergie nucléaire, pour la comparer à l'énergie hydraulique ou hydroélectrique, il faut se reporter à un même poste dans le réseau; généralement c'est la tension 315,000 volts. Alors, il y a des dépenses à faire pour une centrale nucléaire, il faut élever la tension à 315,000 volts, et la connecter au réseau. Ce sont des chiffres moyens que nous avons pris et qui figurent du côté hydroélectrique.

Il y a les pertes aussi évidemment, il y a un minimum de perte de lignes et de postes qui est évalué. Vous retrouvez, en adoptant notre méthodologie, un chiffre de 9.91 mils par kWh alors qu'on publiait en 1971 les fameux chiffres de 4.5 et 4.8 mils qui ont failli nous faire manquer le projet des chutes Churchill. A ce moment-là...

M. LESSARD: En quelle année, en 1971?

M. DE GUISE: Disons qu'on avait des chiffres encore plus bas au moment où on discutait le projet des chutes Churchill. Il y en a qui prétendaient...

M. LESSARD: En 1971, on ne parlait pas de 4 mils; on parlait de 12 mils.

M. DE GUISE: 4.85 mils, c'est cité dans les journaux; regardez la première colonne que nous donnons.

M. MORIN: Mais vos chiffres à vous, en 1972...

M. DE GUISE: Oui, oui.

M. MORIN: ... pour le programme HNA 80, c'était 14.60 mils par...

M. DE GUISE: Oui, oui, en appliquant la méthodologie.

M. MORIN: ... kWh.

M. DE GUISE: Oui, oui. Là, nous faisons simplement reprendre les chiffres de 1971 publiés, en leur appliquant tous les éléments que, normalement, on aurait dû appliquer si on voulait le comparer à l'hydraulique. Maintenant, disons que c'est un exercice intérimaire; un peu plus loin, on prend les chiffres de La Grande et on prend les chiffres de 1974.

M. BOYD: M. De Guise, me permettriez-vous, pour éclaircir le point soulevé par M. Morin? J'ai signalé que le tableau 1 dont M. De Guise s'est servi, c'est pour quatre groupes de 500 MW mis en service fin 1972, et la comparaison est 9.91 mils. Les 14 dont vous parliez tout à l'heure, M. Morin, c'était pour mise en service en 1980.

M. MORIN: Cest ça, d'accord. Oui, c'est pour 1980.

M. DE GUISE: Je pense qu'il y a une erreur de frappe en page 6, au milieu de la page. Les estimations de coût d'investissement à Pickering sont donc passées de $498 millions, au lieu de $598 millions, en 1968.

Alors, je continue à la page 10 du document. On voit bien, à la suite de la lecture du tableau I, que des coûts de l'énergie inférieurs à 5 mils par kWh en 1972 n'avaient aucune signification.

La deuxième colonne du tableau tient compte, dans le calcul de la composante investissement du coût de l'énergie, de l'inflation entre 1969 et 1972 et du coût de financement plutôt que de l'intérêt seulement sur les emprunts durant la construction. Toutefois, l'inflation durant la période d'exploitation et les coûts d'intégration au réseau ne sont pas considérés. Le résultat donne 7.466 mills/kWh, soit 2.6 mills/kWh de plus que celui de la colonne 1, une hausse de plus de 50 p.c.

Dans la troisième colonne, on considère tous les facteurs mentionnés à la page 2 et le coût de l'énergie s'élève à près de 10 mills/kWh pour une mise en service à la fin de 1972. On réalise que les coûts du projet nucléaire cités dans les journaux ne représentent, de fait, qu'environ 50 p.c. du coût réel total de l'énergie.

Comparaison du coût de l'énergie du projet de la baie James à celui d'un projet nucléaire équivalent avec données de 1974.

Pour les fins du présent document, la filière américaine n'est pas comparée au projet de la baie James. Nous signalons, pour les intéressés, que les coûts d'investissement des centrales nucléaires américaines sont maintenant du même ordre que ceux des centrales nucléaires canadiennes, ce qui renverse la situation d'il y a quelques années alors que la filière américaine exigeait moins d'investissement que la filière canadienne. Toutefois, le coût du combustible dans la filière américaine est supérieur à celui du combustible dans la filière canadienne; il ressort que le réacteur canadien, type CANDU, s'avère moins cher que le réacteur américain, type PWR et BWR.

Le tableau II compare les coûts de l'énergie du projet de la baie James à ceux d'un projet nucléaire canadien équivalent à partir des données de référence de 1974 et en appliquant les principes et la méthodologie présentés dans la section précédente.

En pratique, pour répondre aux besoins du réseau, les gens du milieu comparent des programmes d'équipements — ce qui avait été fait en 1972— dont chacun comprend plusieurs types de centrales ayant des mises en service qui s'étalent sur plusieurs années. Ils peuvent ainsi tenir compte des interrelations entre les nouvelles installations et aussi avec le réseau déjà existant afin d'optimiser son expansion. Ceci n'infirme pas les conclusions tirées lors d'une comparaison limitée aux projets de base.

Les projets comparés ici sont de l'ordre de 10,000 MW. Ils fournissent de l'énergie de base pendant une période d'exploitation de 50 ans. Les mises en service sont échelonnées de 1980 à 1986. Pour fins de comparaison, la fin de l'année 1982 a servi de point de repère au calcul du coût de l'énergie.

Résultats.

En considérant tous les facteurs mentionnés ci-dessus et en utilisant les données de référence de 1974 le coût, de l'énergie livrée aux postes de répartition du réseau pour une période d'exploitation de 50 ans (la vie utile d'un complexe hydroélectrique) atteint 21.0 mills/kWh pour le projet La Grande — il faut bien signaler encore que c'est le prix moyen pour la vie du complexe, 50 ans — et 24.4 mills/kWh pour un projet nucléaire équivalent, soit un écart de 16.2 p.c. en faveur du projet La Grande. Le tableau III met en évidence la contribution des principales composantes des projets au coût total de l'énergie livrée.

Il y a énormément d'étapes à suivre pour en arriver aux données du tableau no II Les hypothèses utilisées sont données au bas de la page. Evidemment, ces calculs valent pour les hypothèses qui ont été prises: période d'analyse, 50 ans; vies utiles, 50 et 30 ans. Lignes et postes, 50 ans dans les deux cas. La puissance de réserve, comme vous voyez est très différente: 940 MW dans le cas de l'hydroélectrique et 3,713 MW dans le cas du nucléaire, ce qui équivaut à peu près aux 38 p.c. que je mentionnais tout à l'heure. Le taux d'inflation annuel global dans les centrales, 7 ou 6.4 p.c, suivant le cas. La construction des lignes et postes, 6.7 p.c. Taux d'inflation annuel après les mises en service dans le cas de réinvestissement, 5.1 p.c. Entretien et exploitation, 7 p.c. dans les deux cas. Augmentation de l'eau lourde, 4 p.c. par année, le combustible, 3 p.c. par année. Taux d'actualisation, 10 p.c. dans les deux cas et les charges annuelles fixes, 10.086 p.c.

Les taux d'inflation utilisés ici sont les taux d'inflation cités par 1'Hydro-Ontario lors de sa comparution devant l'Ontario Energy Board. Vous allez trouver, par exemple, vers le milieu de la page, dans les coûts unitaires de l'énergie, tous les articles qui affectent le coût du nucléaire et qui, évidemment, ne s'appliquent pas dans le cas de l'hydroélectrique: le renouvellement de l'eau lourde, le prix du combustible, le réinvestissement, la réserve qui est beaucoup plus forte, évidemment, à l'avantage du nucléaire. Aux lignes et aux postes, les pertes coûtent moins cher.

Vous avez une série de remarques qui s'appliquent au tableau de la page 13. Le point de repère des mises en service (fin 1982) correspond au centre de gravité du flux monétaire et il permet la comparaison du coût de l'énergie des projets dont les mises en service varient de 1980 à 1985. Les coûts sont exprimés en dollars courants actualisés et tiennent compte de l'inflation et du financement. Dans le cas du projet hydroélectrique, l'investissement des centrales de base comprend le coût des aménagements ainsi que celui des installations communes complémentaires. Le coût des centrales, l'inventaire d'eau lourde et la charge initiale de combustible sont inclus dans l'investissement des centrales nucléaires.

Coût d'investissement en dollars pour 1973, $345 par kW excluant l'eau lourde et le combustible; le prix de l'eau lourde, $80 du kilogramme; prix du combustible, $55 du kilogramme d'uranium.

Le réinvestissement ne s'applique qu'aux centrales nucléaires de base et il tient compte de la valeur de la récupération après 50 ans. Il exclut donc les centrales de réserve, les lignes de transport et les postes de transformation.

Le coût unitaire, actualisé en 1982 des centrales de réserve du nucléaire, est évalué à $628 le kilowatt de réserve. Il faut faire bien attention. Ceci comprend $289 du kilowatt pour l'investissement et $339 du kilowatt capi-

talisé, si vous voulez, représentant les frais d'exploitation, alors que dans le cas de La Grande, ces coûts sont de $236 et $297 respectivement pour un total de $533. (Il s'agit ici de kilowatts installés.)

La vie utile des postes de manoeuvre est de 50 ans tandis que celle des autres postes est de 35 ans. Puisque le coût de ces derniers est à peu près le même dans les deux projets, le réinvestissement de ces postes n'a pas été considéré.

Les pertes d'énergie et de puissance dues au transport pour le projet La Grande sont respectivement de 3 p.c. et 4 p.c, et elles sont de 1.1 p.c. et de 1.7 p.c. pour le projet nucléaire.

Enfin, en dernière page, soit pour l'hydroélectrique soit pour le nucléaire canadien, on donne les principales composantes du coût. Encore ici, vous voyez le cas du nucléaire où le combustible est à 8.2 p.c, les frais d'exploitation et d'entretien, 12.6 p.c, le réinvestissement actualisé, 10.9 p.c; ce sont tous des facteurs qui réduisent l'escalation ou qui ont été affectés par l'escalation, chose qui n'existe pas du côté du projet hydroélectrique. Par contre, l'investissement, si on inclut les lignes et postes, représente 92.5 p.c. dans le cas de l'hydroélectrique alors que c'est seulement 67 p.c. dans le cas du nucléaire.

M. le Président, je comprends que ça fait un très grand nombre de chiffres à absorber. S'il y a des questions ou des explications, plus tard, cela me fera plaisir d'y répondre.

M. MORIN: M. le Président, je crois que le moment n'est pas venu de poser des questions ou d'organiser un débat. Nous avons des chiffres qui ne correspondent pas aux vôtres. Alors, on va scruter votre rapport avec beaucoup de soin et quand viendra le moment, dans l'ordre des travaux, nous pourrons avoir un débat ou une période de questions.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Guise, ne nous quittez pas.

M. MASSE: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE: ... est-ce qu'il est temps de questionner sur les prévisions de la demande d'électricité avant de passer à l'article 2?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE: J'aimerais demander ceci à l'Hydro-Québec, aux commissaires. A ma connaissance, en tout cas, je pense que l'évaluation, les prévisions et les méthodes de calcul des prévisions de la demande en électricité de l'Hydro-Québec sont plus sophistiquées qu'antérieurement; est-ce que c'est quand même une méthode qui est récente, qui a été adoptée récemment?

M. GIROUX: M. le Président, je crois que M. Boyd peut répondre à toutes ces questions. Il a le résumé requis. Je dois vous dire que c'est changé légèrement selon les vieilles méthodes, mais il n'y a pas beaucoup de différence entre les méthodes ultra-modernes et les vieilles méthodes dont on se servait. Si M. Boyd veut prendre ce point et expliquer ça.

M. BOYD: M. le Président, vous avez, je crois, tous les documents qui seraient utiles aux prévisions de la demande d'électricité à l'Hydro-Québec.

Avant de répondre précisément à votre question, il y a quelque chose d'important à signaler qui a fait l'objet de certaines discussions par certains professeurs qui n'ajoutaient pas foi aux prévisions de l'Hydro-Québec, il y a quelque temps. C'est qu'ils oubliaient qu'au Québec l'Hydro-Québec ne fournit pas toute la demande d'énergie électrique. Il y a des autoproducteurs, comme l'Alcan entre autres, qui fournit une part importante de l'énergie consommée au Québec et qui augmente sa production très peu par rapport au reste de la province. Ce qui avait été fait, c'est qu'ils avaient pris l'ensemble de la consommation de la province et avaient fait la moyenne de l'augmentation de la demande de l'Hydro-Québec avec celle des autoproducteurs. Les autoproducteurs représentent dans le montant environ 20 p.c. de la demande de la province. Leur pourcentage va diminuant constamment à mesure que la charge de l'Hydro-Québec augmente pendant que la leur est stable.

M. MASSE: Excusez-moi, mais est-ce qu'on n'a pas mentionné 25 p.c. tout à l'heure ou cet après-midi?

M. BOYD: Oui, je m'excuse, vous avez à la page 3, les chiffres exacts. La part de l'Hydro-Québec en kWh est passée de 66 p.c. en 1958 à 77 p.c. en 1972. On prévoit qu'elle atteindra 89 p.c. en 1988. C'est ce que je vous expliquais. Donc, dans un grand coup de publicité, on a dit que nos chiffres étaient trop forts; c'est qu'on commettait cette erreur de prendre ces 23 p.c. des autoproducteurs qui sont presque stables et de les ajouter à ce que nous avons comme demande.

C'est un point, je pense, qu'il était important de préciser.

Pour répondre précisément à votre question, depuis toujours à l'Hydro-Québec on faisait la prévision de la demande selon les tendances historiques, c'est-à-dire on examinait ce qui s'était passé et on projetait dans l'avenir, cinq ans, dix ans, quinze ans en avance. A tous les ans, on révisait ces courbes en fonction de la demande de l'année précédente, qui avait pu être différente de ce qui avait été prévu. Donc, c'était une courbe qui était basée sur les tendances historiques, corrigée annuellement pour maintenir la bonne perspective.

II en a toujours été ainsi, et c'est ce qui nous a donné pour de longues périodes, vous avez les chiffres ici, 67.5 p.c. On nous disait que ce n'était pas assez savant cette méthode, alors on a essayé différentes méthodes beaucoup plus savantes.

On a même été consulter des experts internationaux, Ebasco, qui font ces travaux pour la plupart des activités privées américaines et publiques aussi, pour faire vérifier nos nouvelles méthodes.

Alors, vous avez, à la page 6, quatre méthodes qui sont énumérées; des méthodes consistant à projeter suivant la tendance historique, c'est celle dont je viens de vous parler, et des méthodes considérant séparément chacun des grands secteurs de conservation. Alors, l'Hydro-Québec a fait des modèles chronométriques et des enquêtes auprès des différents secteurs domiciliaire, agricole, commercial, industriel, petite industrie et grande industrie.

Troisièmement, des modèles analytiques considérant les principaux usages de l'électricité dans chaque secteur.

Et une autre méthode analogique consistant à comparer le Québec avec l'étranger au point de vue de l'évolution de la demande de l'électricité.

Alors, toutes ces études et toutes ces comparaisons nous ont apporté une confirmation de ce qu'on faisait avant, puisqu'il y a une différence de 4 p.c. seulement, sur une période de quinze ans, entre la méthode ancienne, basée sur l'histoire, et la méthode sophistiquée qu'on emploie depuis 1974. Donc, ceci pour vous dire qu'on a décidé, à la commission, pour les cinq prochaines années, d'utiliser une méthode technique beaucoup plus avancée, beaucoup plus compliquée pour le vérifier que notre méthode ancienne.

M. MORIN: M. Boyd, puis-je vous poser une question?

M. BOYD: Oui.

M. MORIN: Vous avez fait allusion au professeur Khazzoom, je crois.

M. BOYD: Je n'ai pas mentionné...

M. MORIN: Non, vous n'avez pas mentionné son nom, mais, comme il est le seul, je pense, qui se soit prononcé sur la question, qui soit un universitaire, je pense bien que c'est à lui que vous faisiez allusion.

Vous lui répondez en disant que cet universitaire n'a pas tenu compte du fait que l'Hydro-Québec ne répond pas à toute la demande d'énergie au Québec, mais à seulement environ 75 p.c. ou 77 p.c. de l'énergie.

Mais je lisais un compte rendu du témoignage du professeur Khazzoom devant la cour Supérieure et je vois un extrait qui montre qu'il a tenu compte de cet élément. Je vous lis le passage: "Dr. Khazzoom said the utility's analysts had used a wrong approach by dealing with trends rather than facts and ignoring the total electrical requirements of the province". Et cette phrase: "He noted private firms still supply about a third of Quebec's power needs". Donc, il a même exagéré le pourcentage de l'énergie qui est fournie par les sociétés privées.

Ceci m'amène à vous poser la question suivante. Est-ce que vous avez eu l'occasion de scruter de très près le témoignage du professeur Khazzoom? Est-ce que vous avez eu tous ses chiffres en main?

M. BOYD: Je comprends. Je vais demander à un spécialiste de répondre, si vous voulez.

M. MORIN: Volontiers.

M. CHARUK: Voici. J'aimerais tout simplement...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Pour le bénéfice du journal des Débats, identifiez-vous.

M. CHARUK: Yan Charuk. Donc, je disais, comme entrée en matière, qu'il faut retenir que le marché de l'Hydro-Québec est beaucoup plus dynamique que les autoproducteurs; le marché des autoproducteurs est stagnant. Si vous voulez avoir des précisions et si vous avez des questions à poser concernant les témoignages ou les avancés du professeur Khazzoom, nous avons ici M. Larochelle qui peut répondre à vos questions.

M. MORIN: Oui. Le professeur Khazzoom, en gros, en vient à la conclusion que, vers 1975, 30 p.c. de la capacité de l'Hydro-Québec constitueront un surplus, puisque, dit-il: "... since it will be in use a bare 35 p.c. of the time".

Est-ce que vous avez eu l'occasion de scruter ces chiffres?

M. BOYD: Certainement, M. le Président, qu'on a scruté ces chiffres. M. Larochelle va vous répondre du point de vue technique mais il y a une chose que j'aimerais ajouter, avant qu'on lui cède la parole. Si on s'était basé sur son témoignage de ce moment-là, si on avait suivi ce qu'il proposait, on aurait été à court d'énergie à l'automne 1973 et on le serait en 1974.

C'est facile, pour lui, de dire qu'on devrait prévoir seulement 5 p.c. d'augmentation et non 7.5 p.c. et 8 p.c. quand il n'a pas la responsabilité de répondre à la demande, quand il n'a pas à venir devant la commission, ici, pour vous répondre si on est à court d'énergie.

M. MORIN: Je n'en doute pas mais j'aimerais avoir la réponse technique.

M. BOYD: La réponse technique va venir mais je pense qu'il est important qu'on vous

signale que, suivant ce qu'il avait prévu dans son témoignagne, on aurait été à court d'énergie en 1974.

M. GIROUX: Si on se compare avec Consolidated Edison, ils ont eu des experts qui ont prédit cela il y a sept ou huit ans. Actuellement, il leur en manque pas mal. C'est à la province de choisir si elle veut prendre le risque de manquer d'énergie ou d'avoir de l'énergie pour tout le monde.

M. MORIN: Oui. Je voyais, à propos de Consolidated Edison, de New York, qu'à part ce projet l'électricité de la baie James, d'après les derniers calculs, serait la plus chère au monde. Mais c'est un point sur lequel nous reviendrons par la suite. Puisque vous mentionniez Consolidated Edison...

M. GIROUX: C'est Consolidated Edison qui a dit cela?

M. MORIN: Non, non. Ce n'est pas eux qui on dit cela. Cela se trouve dans un article qui compare Consolidated Edison avec la Grande. Mais nous y reviendrons par la suite. Je voudrais entendre les explications de M. Larochelle.

M. LAROCHELLE: Ce qui est arrivé, en fait, dans les calculs du professeur Khazzoom, c'est qu'il a étudié les statistiques de la province au complet. Maintenant, comme le disait M. Boyd tantôt, quand on regarde l'évolution des ventes de la province, on trouve des taux plus bas que ceux de l'Hydro-Québec. C'est tout à fait normal puisque la province est formée, du point de vue de la production, de l'Hydro-Québec et des autres, notamment les autoproducteurs.

Alors comme la portion d'environ 25 p.c, selon l'année où on se place, qui est produite par les autoproducteurs ne croît qu'à environ 2 p.c. par année et que l'Hydro-Québec, elle, croît au taux de 7.5 p.c. ou 8 p.c. par année, si vous prenez ces deux chiffres ensemble, vous pouvez obtenir un chiffre de 6 p.c, de 5 p.c. Si, en plus, vous mettez cela dans des équations plus ou moins rapidement construites, vous pouvez obtenir des résultats qui projettent à 4p.c. pour le futur. Mais, sans entrer dans les détails techniques, c'est une erreur aussi simple que cela que de dire: Pour la province cela donne 5 p.c, par exemple; donc, pour l'Hydro-Québec, cela va être 5 p.c. Cela ne peut pas être 5p.c. pour l'Hydro-Québec. Si, dans un cas, on a plus petit que 5 p.c, il faut que dans l'autre, dans le cas de l'Hydro-Québec, ce soit plus grand.

C'est une erreur arithmétique aussi élémentaire que cela qui fait qu'il trouve qu'on n'a pas besoin de la baie James avant beaucoup après 1980.

M. MORIN: 1983 plus exactement. Ecoutez, je ne veux pas éterniser ce débat, parce que nous n'avons pas devant nous tout le témoignage du professeur Khazzoom, mais je mentionne qu'il avait noté que les sociétés privées fournissaient le tiers des besoins. Je veux dire, ce n'est pas un facteur qu'il ait ignoré complètement.

M. LAROCHELLE: Fournissaient le tiers, c'est à peu près ce qui est dit dans le document auquel M. Boyd faisait allusion tantôt. Il mentionnait des chiffres jusqu'à 77 p.c. et antérieurement à cela, un petit peu plus bas, je pense que le chiffre le plus bas était de 68 p.c. Alors il n'y a pas de contradiction. Les données du professeur Khazzoom s'arrêtent à 1970, incidemment. Je peux noter ici qu'on avait des chiffres, nous, pour 1971 et 1972. On lui a dit: Voici les résultats réels de 1971 et de 1972 par rapport à vos prévisions; notamment au secteur domestique, la réalité est beaucoup plus grande que vos prévisions, puisque vos données s'arrêtaient en 1970 pour des raisons de disponibilité, à Statistique Canada. Les résultats réels de l'Hydro-Québec, c'est qu'il y a beaucoup plus que cela. Là, il a dit: Vous exagérez toujours. Vos chiffres ne sont pas consolidés, ainsi de suite, alors que c'est faux.

Essentiellement, cela me fait de la peine de le dire mais ce n'est pas un travail sérieux du tout.

Disons que la seule excuse que je peux voir est que ça a été fait rapidement en deux semaines. S'il avait pris deux ans, peut-être qu'il serait arrivé à quelque chose d'intéressant.

Maintenant, du point de vue des prévisions pour la province au complet, malgré toutes les erreurs qu'il y a dans son affaire, il ne trouve pas tellement plus bas que nous, pour la province au complet, mais si on isole la partie de l'Hydro-Québec là-dedans, ça ne marche plus du tout.

Il faut distinguer la partie du tout quand on fait des calculs, des déclarations comme ça.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, suite aux explications de M. Larochelle, j'aimerais poser une question au ministre des Richesses naturelles qui prévoyait, en date du 27 mars 1974, une diminution du taux de croissance de la consommation énergétique pour le Québec, laquelle aurait tendance à diminuer progressivement jusqu'à l'an 2,000, le taux qui était annuellement de 6 p.c. entre 1960 et 1970 devant fléchir à 3 p.c. en 1990. Comme le taux de croissance annuel de l'Hydro-Québec, selon le rapport de M. Giroux, est estimé à 8 p.c, pour les prochaines années, j'aimerais savoir du ministre des Richesses naturelles s'il se basait sur les chiffres du Dr Khazzoom ou s'il se basait sur les chiffres de l'Hydro-Québec.

M. MASSE: M. le Président, c'était la tendance générale qui semblait se manifester à partir

des statistiques officielles. Je pense qu'à partir des données récentes que nous fournit maintenant l'Hydro-Québec on peut constater qu'il y a maintenant une augmentation qui s'est manifestée au cours de l'année 1973, alors que d'autre part...

M. LESSARD: C'est le 27 mars 1974 que vous déclariez ça.

M. MASSE: Maintenant, il faut dire que ce ne sont pas toujours les informations que possède d'une façon plus précise l'Hydro-Qué-bec et que dans l'ensemble c'était la tendance générale qu'on pouvait observer. Je dois souligner cependant que quand on mentionne des chiffres pour 1990, il est évident, quand on regarde le tableau 2 — que je regardais à l'instant et que nous fournit l'Hydro-Québec — qu'il y a une augmentation qui est plus importante de 1973 à 1978 qu'elle ne le sera par la suite.

M. LESSARD: Maintenant, M. le Président, lorsque le ministre déclarait ceci, le 27 mars 1974, il avait fait état d'études préliminaires entreprises par son ministère sur les habitudes des Québécois en tant que consommateurs d'énergie. Ces études seront d'ailleurs complétées au cours de l'été qui vient. Les deux constatations majeures étaient justement cette diminution du taux de croissance. Est-ce que, étant donné que nous avons, d'une part, les chiffres de l'Hydro-Québec et que, d'autre part, le ministre des Richesses naturelles faisait état d'études préliminaires, il ne serait pas bon, pour pouvoir confirmer ou vérifier les chiffres de l'Hydro-Québec et du ministère des Richesses naturelles, d'obtenir ces études du ministère des Richesses naturelles dont vous parliez le 27 mars 1974?

M. MASSE: M. le Président, on peut toujours, à partir des statistiques officielles, fournir les statistiques à la commission, ici, mais compte tenu des méthodes plus raffinées de l'Hydro-Québec maintenant, compte tenu des facteurs que retient l'Hydro-Québec, compte tenu aussi d'une situation qui peut être différente dans l'avenir, suite à la situation pétrolière qu'on a connue l'hiver passé, je préfère croire les statisticiens ou les gens de la planification de l'Hydro-Québec plutôt que les statistiques officielles qu'on peut retrouver dans n'importe quelle revue.

M. LESSARD: Donc, vous aimez mieux qu'on utilise les chiffres de l'Hydro-Québec que les chiffres de votre ministère. Vous avez donc plus confiance en l'Hydro-Québec qu'aux fonctionnaires de votre ministère qui ont fait ces études-là?

M. MASSE: Non, M. le Président, j'ai confiance en l'Hydro-Québec et j'ai aussi confiance en mes fonctionnaires. Tout dépend des bases qu'on prend pour arriver à des extrapolations.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre, pour nous permettre de comparer ce taux de croissance estimé par l'Hydro-Québec à 8 p.c. avec une diminution du taux de croissance estimée par les fonctionnaires du ministère des Richesses naturelles, accepterait de déposer cette étude préliminaire?

M. MASSE: Elle a été faite avec des documents beaucoup moins précis. Je ne vois aucune objection à déposer ces statistiques.

M. LESSARD: Maintenant? Quand?

M. MASSE: Bien écoutez, pas ce soir évidemment.

M. LESSARD: Demain?

M. MASSE: Bien, si possible.

M. MORIN: Bien, demain ça irait toujours, ça nous donnerait l'occasion de comparer.

M. MASSE: Je dois dire qu'on peut trouver dans différentes revues officielles ou magazines les statistiques officielles auxquelles on peut accorder une certaine crédibilité, et que la méthode que nous soumet l'Hydro-Québec actuellement me paraît, en somme tenir compte des différents facteurs qui peuvent influencer la demande future. D'autre part, j'aurais peut-être une question à poser, c'est que par rapport aux quatre articles de la méthode qu'on nous mentionne à la page 6, je ne retrouve pas nulle part si on tient compte de situations changeantes du domaines énergétiques, actuellement.

M. LESSARD: D'accord, M. le Président. Alors, le ministre n'aurait...

M. MASSE: Est-ce que vous permettez à l'Hydro-Québec de répondre?

M. LESSARD: D'accord, excusez. Je pensais que c'était une affirmation que vous faisiez.

M. BOYD: M. le Président, si vous allez à la page 10, vous allez voir qu'on y parle de trois hypothèses: hypothèses minimum, moyenne et maximum. Ce qui veut dire que, si le prix du combustible ou du pétrole continue d'augmenter au rythme où il augmente dans le moment et s'il continue d'être aussi rare, c'est probablement vers l'augmentation de la demande maximum qu'il faudra aller plutôt que vers la moyenne qu'on a utilisée.

Dans le moment, l'électricité — j'essaie de retrouver les chiffres, à la page 14 — vous avez de 1954 à 1973, nos ventes d'énergie souscrite ont augmenté au taux annuel moyen de 7.4 p.c, la prévision moyenne montre une

légère accélération du mouvement à 7.8 p.c. par an, et les hypothèses faibles et fortes se situent respectivement à 7.4 p.c. et 8.4 p.c. Alors, si la tendance qu'on sent dans le moment se maintient, c'est-à-dire la conversion, entres autres, du chauffage à l'huile au chaffage électrique, c'est probablement vers 8.4 p.c. qu'il faudra aller, peut-être 9 p.c. dans l'avenir. Ici même aujourd'hui, dans le parlement, il y a au moins trois ou quatre personnes qui m'ont dit qu'elles convertissaient leur chauffage à l'huile en chauffage électrique. Partout où on va, les gens nous en parlent. Donc...

M. MORIN: C'était jusqu'à ce que les journaux annoncent vos nouvelles augmentations de tarif.

M. BOYD: Même là je crois.

M. GIROUX: Si vous voulez prendre une hypothèse de ce qui arrivera demain, c'est une possibilité réelle que les producteurs d'huile augmentent le prix de l'huile de $2 le baril. A ce moment-là, c'est très difficile de faire une prédiction sur la demande.

M. LESSARD: M. le Président, avant de nous engager dans ce débat, je voudrais continuer à lire les estimations du ministère des Richesses naturelles. M. Massé, à ce moment-là, ne parlait pas n'importe où. Il parlait à l'occasion d'un symposium sur l'énergie organisé par l'Association des ingénieurs civils de France et l'Institut canadien des ingénieurs à Montréal. Alors M. Massé c'est-à-dire le ministre des Richesses naturelles que vous connaissez, j'espère, expliquait cette baisse du taux de consommation par trois phénomènes précis: une stagnation dans le taux de croissance démographique, ensuite un déplacement de la croissance du secteur secondaire au secteur tertiaire et ce dernier secteur consommant moins d'énergie; enfin, la prise de conscience par les citoyens de la nécessité d'éviter le gaspillage de l'énergie, ce dont vous nous avez parlé d'ailleurs.

A ce moment-là, je pense, justement en date du 24 mars 1974, nous vivions un peu la crise énergétique. Est-ce que vous pourriez me dire, M. Boyd ou M. Giroux, si, dans vos estimations de croissance annuelle, vous avez tenu compte des facteurs dont parlait M. Massé, le ministre des Richesses naturelles, soit une stagnation dans le taux de croissance démographique, un déplacement de la croissance du secteur secondaire au secteur tertiaire et, enfin, la prise de conscience par les citoyens de la nécessité d'éviter le gaspillage? D'autant plus qu'on remarque que vous avez modifié un peu votre publicité depuis un certain temps parce que là vous dites: Avant de modifier, avant de transformer votre système de chauffage en électricité, pensez-y bien, contrairement au Cascade 60 qu'on avait, et au Cascade 30 qu'on avant avant.

M. Giroux l'a souligné un petit peu dans son rapport, mais de façon très limitée. Alors, j'aimerais demander si vous avez tenu compte justement, dans votre estimation, du taux de croissance de ces critères-là dont parlait le ministre des Richesses naturelles.

M. GIROUX: Le troisième facteur concerne la rationalisation ou la meilleure utilisation de l'électricité; je crois que tout le monde l'a utilisée à bon escient et qu'on a fait un effort de ce côté. Par contre, au point de vue du développement dans les régions, des mouvements dans les régions, c'est assez difficile pour nous, parce qu'on prend un montant de moyenne. Remarquez bien, je suis très épaté par tous les travaux de ces grands spécialistes mondiaux, qui nous ont coûté énormément cher.

M. LESSARD: Mais là je parle de M. Massé.

M. GIROUX: Oui, oui, il est inclus. Je l'ai inclus. J'ai beaucoup de respect pour toutes ces nouvelles méthodes qui ont été appliquées, mais, si vous prenez leurs travaux comparés à notre vieille méthode de statistiques qui était réelle, parce que c'est la dépense réelle qui ne s'argumente pas, il y a 4 p.c. de différence sur 15 ans. Alors, je serais énormément surpris, honnêtement, de voir une baisse dans la demande, même si malheureusement il arrivait une dépression absolument rangée. Si on prend les statistiques, ce qui m'a le plus surpris lorsque je suis arrivé à l'Hydro-Québec, c'est de voir que, dans les années de dépression de 1930 et de 1932, que vous n'avez pas connues, il n'y a pas eu tellement de diminution de...

M. LESSARD: Cela s'en vient, là. Avec $12 milliards, ça s'en vient.

M. GIROUX: II faut penser à une chose, vous savez, ce chiffre-là, je pourrai vous l'expliquer tantôt. H y a cinq ans, quand on regardait des montants de $250 millions, on avait crainte. Aujourd'hui, on en regarde de $2 milliards $5 millions; vous savez, tout est relatif. Au point de vue des nouveaux ménages qui ont été installés, probablement qu'on a tenu compte d'une considération qu'on a expliquée. Maintenant, vous savez, toutes ces méthodes, c'est beaucoup plus justifié par le taux réel de la consommation au bout de cinq ans que par les prévisions. Moi, je suis encore parfaitement d'accord sur la vieille méthode qu'on avait à l'Hydro-Québec. Remarquez bien qu'on prend la nouvelle parce qu'elle est beaucoup plus scientifique, mais je ne crois pas qu'on va trouver, au bout de cinq ans, une différence énorme.

M. LESSARD: Maintenant, M. le Président, M. Giroux pourrait-il me dire justement s'il était au courant de ces études préliminaires qui étaient faites par le ministère des Richesses naturelles?

M. GIROUX: Non, je ne suis pas... M. LESSARD: Donc...

M. MASSE: M. le Président, je dois souligner qu'en ce qui concerne le facteur démographique M. Giroux, vous-même, vous déclarez dans votre allocution que ce n'était pas dû à une évolution de la démographie, l'augmentation de la consommation au niveau domestique, mais surtout à cause de nouveaux abonnés.

M. GIROUX: Nouveaux ménages. M. MASSE: De nouveaux ménages.

M. BOYD: En fait, M. le Président, il y a une tendance marquée ici au Québec, comme ailleurs, j'imagine. Avec le niveau de la vie plus élevé, il y a de plus en plus de ménages. Les jeunes partent de la maison et s'établissent en ménage de toutes les façons, comme vous le savez et...

M. GIROUX: II n'y a pas de jalousie de votre part?

M. BOYD: C'est un commentaire gratuit, en passant. En plus de ça, de plus en plus, les gens ont deux maisons, une maison de campagne. C'est ce qui fait qu'il y a plus de ménages au point de vue de l'électricité. Mais il y a une chose, dans ce que disait le député Lessard tout à l'heure, que je n'ai pas très bien saisie. Quand vous parliez de l'étude, est-ce que c'était concernant l'énergie au Québec ou l'énergie électrique?

M. LESSARD: M. le Président, je faisais mention d'une étude qui avait été entreprise par le ministère des Richesses naturelles et qui avait été annoncée justement par le ministre des Richesses naturelles à l'occasion d'un symposium sur l'énergie, organisé par l'Association des ingénieurs civils de France et l'Institut canadien des ingénieurs à Montréal, Justement, suite à cette étude, M. Massé avait affirmé que le taux de croissance de la consommation énergétique pour le Québec aurait tendance à diminuer progressivement jusqu'à l'an 2,000. Ce taux, qui était selon M. Massé annuellement de 6 p.c. entre 1960 et 1970, fléchira à 3 p.c. en 1990.

Or, d'après justement le rapport de M. Giroux, l'Hydro-Québec a estimé ce taux de croissance annuelle à 8 p.c.

Ce que je demandais à M. Giroux ou à vous-même, M. Boyd, c'est: Est-ce que vous étiez informé de ces études? M. Massé expliquait cette diminution du taux de croissance de l'électricité par une stagnation dans le taux de croissance démographique, ensuite un déplacement de la croissance du secteur secondaire au secteur tertiaire, ce dernier secteur consommant moins d'énergie, et enfin la prise de conscience par les citoyens de la nécessité d'éviter le gaspillage de l'énergie. Est-ce que dans vos études de 8 p.c. vous avez tenu compte de ces facteurs-là? Même si vous avez tenu compte de ces facteurs-là, vous ne semblez pas arriver aux mêmes conclusions que le ministre des Richesses naturelles.

M. BOYD: C'était le sens de ma question. Je voulais comprendre bien clairement ce qui avait été déclaré.

M. LESSARD: Par le ministre.

M. BOYD: Non, mais, s'il vous plaît, j'essaie de répondre à la question...

M. LESSARD: D'accord.

M. BOYD: ... et de clarifier quelque chose qui n'est pas clair. Si j'ai bien compris votre réponse de tout à l'heure, il parlait d'énergie. L'énergie, c'est l'électricité, c'est le gaz, c'est le charbon, c'est l'huile, c'est toutes sortes de choses. Dans son discours, il parlait d'énergie. L'étude de la demande d'énergie, ce n'est pas notre responsabilité. Nos études, dont je vous parle ici, c'est la prévision de la demande de l'énergie électrique. Ce sont deux choses différentes.

D'ailleurs, pour aller plus loin, nous prévoyons que notre part du marché ou du gâteau québécois de l'énergie va aller en augmentant. Actuellement, je ne le sais pas, disons qu'il est de 20 p.c. Selon mon opinion personnelle, dans quinze ans on va occuper 30 p.c. du marché québécois. Donc, notre demande va en augmentant pour l'énergie électrique. Il est probable, mais là je n'ai pas les statistiques pour le dire, que les énergies d'autres formes, elles, aillent en diminuant. Je ne le sais pas.

M. LESSARD: Alors, vous croyez qu'il est probable que les autres formes d'énergie diminuent?

M. BOYD: Je ne sais pas, monsieur.

M.LESSARD: Etant donné l'augmentation de l'énergie électrique.

M. BOYD: Si notre part augmente, il est probable que l'autre va diminuer, oui.

M. LESSARD: Je veux dire relativement.

M. MORIN: M. le Président, une question relative au même problème. J'imagine que, si votre part augmente, c'est parce que le coût, pour le consommateur, est moindre par rapport aux autres formes d'énergie. Est-ce que, dans vos projections, vous avez tenu compte du fait que le coût, pour le consommateur, va augmenter de façon somme toute, draconienne d'ici quelques années? J'entends le coût d'électricité. Est-ce que vous en avez tenu compte?

M. BOYD: On en a tenu compte en partie. Vous dites draconienne; moi, ça me fait sursau-

ter. Je ne peux pas être d'accord sur ça. On vous parle d'une escalade de 7 p.c. par année sur une période de douze ans qui fait doubler toute chose. Le coût du boeuf, le coût des gages, le coût des assurances, le coût de tout, si on a effectivement une escalade de 7 p.c. par année, tout va monter de cette façon-là, les coûts d'électricité vont monter de cette façon-là. On vous dit qu'à la baie James, dans la comparaison faite par M. De Guise tout à l'heure, le coût va être de 20 mils sur une période de 50 ans; c'est-à-dire de 1980 à l'an 2030, cela va être 20 mils. Moi, je ne peux pas admettre que c'est astronomique ou épouvantable parce que, dans cette période-là, l'escalade va être quoi? La livre de beurre qui vaut tant aujourd'hui, en l'an 1990 elle vaudra combien? Si vous payez 20 mils pour votre kWh, je pense que ce sera encore bon marché.

M. MORIN: Maintenant, M. le Président, à moins que...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de L'Assomption a une question depuis quelques instants.

M. MORIN: Je puis revenir par la suite.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): A la suite, le député de Beauce-Sud.

M. PERREAULT: A la page 8, vous parlez de la conversion de l'électricité, des systèmes de chauffage et aussi du chauffage d'appoint. Vos statistiques finissent à 1973. Durant les mois de janvier, février et mars de cette année, quel genre d'accroissement avez-vous constaté comparé à l'an dernier? Pour les mois de janvier, février et mars 1974 comparé à 1973?

M. GIROUX: Vous parlez du marché de l'habitation ordinaire. On a certaines statistiques. Par exemple, en 1971, notre pourcentage de pénétration était de 43.3 p.c. sur la mise en chantier. Il faut prendre les nouvelles habitations. En 1972, c'était 48.4, et, en 1973, c'était 56.5 p.c. Il n'y a pas d'erreur qu'il y a...

M. PERREAULT: Mais ce qui m'intéresse un peu c'est que tous les manufacturiers de chauffage d'appoint ont été littéralement vidés, aux mois de janvier, février, mars de cette année. Je me demande quelles sortes d'effets cela a eu?

M. GIROUX: On pourrait peut-être demander à M. Saint-Jacques qui est spécialiste en la matière. Vous parlez de tous les genres d'appoints et non pas des nouvelles maisons?

M. PERREAULT: C'est ça, les genres d'appoints. Ce genre d'appoint qui s'est accru à cause du prix de l'huile à chauffage.

M. SAINT-JACQUES: Maurice Saint-Jac- ques. Nous avons tenté de suivre l'évolution des chaufferettes qui font le chauffage d'appoint sur notre réseau et on trouve que ce phénomène est extrêmement difficile à saisir. Nous avons fait certains sondages dans les magasins et chez tous les fabricants, et on sait que, dès la période d'octobre, novembre et décembre, c'est un fait que tous les magasins se sont vidés et que toutes les capacités de production de chaufferettes ont été taxées et que, somme toute, il y a eu un très grand engouement pour le chauffage d'appoint. Seulement, on sait aussi que la capacité de production de ces chaufferettes, d'une façon générale, est limitée et que cette tendance à augmenter d'une façon considérable ne peut pas continuer d'une façon indéfinie.

En ce qui concerne le chauffage électrique, de toute façon, nous prévoyons évidemment depuis six mois une augmentation assez substantielle du nombre de maisons construites qui choisissent l'électricité comme moyen de chauffage.

M. Giroux vous indiquait des taux de pénétration jusqu'à 56 p.c. en 1973 et on croit même qu'en 1974 et en 1975, le pourcentage de logements construits passera de 65 p.c. et ira même jusqu'à 70 p.c. Vous me direz que les augmentations de tarifs pourront modifier un peu ces tendances. Il faut quand même dire aussi que ce qui est le plus imprévisible encore, c'est l'évolution du coût de la concurrence. On ne sait pas du tout ce que sera le prix de l'huile dans un an ou deux. M. Boyd indiquait $2 le baril. A $2 le baril c'est une inflation beaucoup plus considérable que ce que l'on voit pour l'électricité à l'heure actuelle.

Alors la tendance vers le chauffage électrique dans les résidences a certainement été une tendance définitive dans notre milieu et qui a certainement été une cause de l'augmentation assez importante depuis six mois et un an.

M. PERREAULT: ... sensibilisé au point de vue conversion de bouilloires à l'huile, à eau chaude pour des bouilloires électriques, actuellement, que les manufacturiers ont des livraisons pour six ou sept mois.

M. SAINT-JACQUES: II y a des problèmes de fabrication et de fournisseurs, c'est un fait.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, après avoir lu le rapport et après avoir écouté M. Giroux, vers la fin de l'après-midi, et lorsqu'on regarde, dans le rapport que vous nous avez soumis, la prévision de la demande d'électricité à l'Hydro-Québec, dans le tableau no 2, il est évident que vous avez parlé selon un pourcentage d'augmentation de consommation de l'électricité qui tient compte d'une augmentation plus haute que prévue au cours des derniers mois. Alors, à partir de là, il y a un facteur qu'on ne peut pas

ignorer, c'est que, depuis quelques mois, il y a eu la hausse considérable des prix des produits pétroliers. Il y a énormément de gens qui ont changé leur système de chauffage à l'huile pour des systèmes de chauffage électrique, à cause des coûts. Il s'en est fait un certain nombre, et d'ailleurs, je me réfère au rapport qu'on nous a soumis, dans toutes les nouvelles constructions il y a un taux beaucoup plus considérable.

Dans le rapport que vous nous avez soumis, à la page 27, vous nous mentionnez qu'il faudra augmenter nos tarifs, non plus d'un minimum de 4 p.c. par an mais d'un minimum de 10 p.c. en moyenne annuellement. Si je fais un parallèle, j'ai fait un calcul durant l'heure du souper, c'est que, de 1974 à 1985, en prenant votre chiffre et votre prévision qui est d'un minimum moyenne de 10 p.c, cela veut dire que le coût de $100 d'électricité en 1974 serait porté à $259.34. Et si le taux minimum était révisé — parce qu'on peut s'attendre qu'il pourra être révisé — et était porté à 12 p.c, $100 d'électricité coûterait $310.57 en 1985. Comme il semble, selon vos propres données, que le facteur du coût des différentes sources d'alimentation en énergie peut influencer le choix du système des produits pétroliers plutôt que du système électricité, est-ce que, dans votre tableau, dans lequel vous avez fait toute votre analyse, votre projection pour les années futures, vous avez tenu compte de l'impact que pourrait avoir cette hausse de 10 p.c. minimum annuelle dans le coût de l'électricité?

M. GIROUX: En prenant le même taux d'inflation pour tous les produits.

M. ROY: Vous avez pris le même taux d'inflation pour tous les produits.

M. GIROUX: Pour tous les produits. Naturellement, comme je disais tantôt, s'il arrive un chaos où vous avez une augmentation de $2 du baril comme il était question, il y a quelques jours, à ce moment-là, l'huile... seulement on n'a pas pris cette hausse qui peut être possible, qui peut-être possible.

Mais si on prend les rapports des pays producteurs, comme le Vénézuéla ou les pays arabes, qui ont dit qu'ils maintiendraient le prix du pétrole au taux inflationniste dans les pays producteurs, il faut s'attendre qu'ils vont suivre cette chose-là.

M. ROY: Cela, vous en avez tenu compte. M. GIROUX: Oui, on en a tenu compte. M. ROY: Vous en avez tenu compte.

M. BOYD: M. le Président, c'est au tableau 2. Au tableau no 2, justement, si vous prenez la première ligne, "domestique-agricole", de 1973 à 1978, on prévoit une augmentation annuelle moyenne de 9.7 p.c. tandis que pour la période plus longue, de 1973 à 1988, on prévoit 8.3 p.c. C'est donc que pour les premières années on pense que cela va monter plus vite et qu'ensuite cela va ralentir un peu. Donc, il va certainement, ou on pense qu'il peut y avoir un effet de ralentissement à mesure que l'électricité va coûter plus cher. Mais qui peut dire ce que les gens vont vouloir acheter et consommer en 1985? Un peu plus d'électricité ou un peu plus d'autres choses? Cela va être suivant leurs goûts. Il y a une possibilité que les taux plus élevés, en 1985, amènent un certain ralentissement. Mais, à mon avis, ce ne sera pas fort.

M. ROY: Maintenant, si je pose cette question, c'est parce qu'il est évident qu'il y a des gens qui ont planifié à moyen terme, lors de la construction d'une résidence, suite aux annonces qui ont été faites que le taux d'augmentation de l'électricité serait d'environ 4 p.c. et qu'aujourd'hui on leur annonce 10 p.c. J'estime qu'il peut y avoir, à ce moment-là, un changement assez marqué dans les tendances. Cela peut changer, en quelque sorte, les prévisions que vous avez faites.

M. GIROUX: Cela peut changer. Je l'admets. M. ROY: Cela peut changer en diminuant.

M. GIROUX: En diminuant; cela peut changer en augmentant terriblement aussi. Parce que lorsqu'on a annoncé que le taux d'inflation prévu était autour de 4 p.c, on parlait d'un taux d'augmentation minimal de 4 p.c. pour les produits électriques. Par contre, à ce moment-là, on avait, dans des études de prévisions, des économistes reconnus qui prévoyaient 2 p.c. d'augmentation pour les produits pétroliers. Si vous prenez ce qui est arrivé, par exemple, entre le 14 novembre 1970, dans les pays du Golfe Persique, où le pétrole est à $1.75 le baril, et le 1er janvier 1974, où il est à $11.65, le baril, les taux d'inflation, cela ne se compare plus.

Naturellement, ce qui n'est presque pas pensable, actuellement, c'est une diminution du prix du pétrole. Les producteurs, en deux mots, seraient beaucoup plus sages en affaires, si le prix mondial baissait, de baisser la production. Parce qu'ils ont du pétrole pour tant d'années devant eux et, en baissant la production, ils reconduisent leurs revenus pour une période d'années très longue. Alors, je ne pense pas qu'on puisse penser...

Maintenant, dans les calculs qui ont été faits, comme M. Boyd l'expliquait tantôt, pour les premières années, on croit qu'on va avoir une plus grande demande. Ce qui ralentit le plus les gens ou les a ralentis le plus dans la demande durant la crise ou la demi-crise, si vous voulez, parce qu'ici on n'en a pas eu tellement, c'est le fait qu'ils ne pouvaient pas acquérir d'appareils électriques pour s'en servir. Mais, actuellement...

Cette chose-là, je ne crois pas qu'elle puisse baisser de façon draconienne. Je ne vois pas qu'elle puisse baisser. Même si, logiquement, on fait une prévision à 8 p.c, je ne crois pas qu'elle baisse en bas de la moyenne qui a été établie, selon l'usage reconnu dans les quelque 30 dernières années, à 7.4 p.c.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député...

M. ROY: J'aimerais revenir un peu là-dessus, je m'excuse. Dans votre rapport — à la page 3 — que vous nous avez lu au début, comme je l'indiquais plus haut, le secteur domestique a connu une forte augmentation en 1973. "Les abonnés domestiques ont consommé 14.13 milliards kWh ou 11.2 p.c. de plus qu'en 1972, alors que le secteur agricole a augmenté sa consommation de 9.1 p.c." Alors, qu'il s'agit — vous l'avez dit plus loin — d'une année de croissance économique un peu exceptionnelle, que c'est à cause d'une hausse des coûts des produits pétroliers, dont on ne verra pas l'équivalent, je ne pense pas qu'on puisse prévoir l'équivalent d'une hausse aussi spectaculaire que celle que l'on a connue.

Vous prenez comme augmentation moyenne, de 1973 à 1978, presque le maximum de ce que nous avons vu puisque vous parlez d'une moyenne de 9.7 p.c. Alors que le secteur agricole a augmenté sa consommation de 9.1 p.c, vous parlez de 11.2 p.c. en 1972 dans l'autre domaine.

Alors, il s'agit de choses complètement maximums. Pour en revenir un peu à ce que je disais tanôt, à cause des facteurs démographiques, à cause d'une possibilité de ralentissement de la croissance économique, ne croyez-vous pas que le taux que vous avez mis là, c'est un taux pour être à l'abri de toute possibilité, pour être capable de faire face à toutes les éventualités possibles mais au niveau des maximums?

M. GIROUX: Je souhaite que vous ayez raison et j'espère qu'on ne se trompe pas parce que, si on se trompe, il va manquer d'électricité à quelque part.

M. ROY: Comme cela vous avez mis le maximum partout?

M. GIROUX: Non, pas nécessairement. Mais il y a un point, je pense, qui peut illustrer. Après tout, nous ne sommes pas les seuls qui ayons des pronostics qui ressemblent à cela, mais vous indiquez le prix de l'énergie. Vous avez des endroits où, par exemple, cela coûte deux fois ce que cela nous coûte ici; à certains endroits, c'est trois fois. Leur croissance a été la même et leur prévision pour l'avenir est la même.

Il y a Boston, qui est un de ces endroits, dont on a eu des chiffres qui nous donnaient ces prévisions. Vous avez aussi un coin que je connais mieux, parce que j'ai quelqu'un qui y demeure, Baltimore, où cela coûte pratiquement trois fois ce que cela coûte ici. Leur croissance est telle qu'ils vont avoir des problèmes probablement cette année; il y aurait une certaine période, cet été, de noirceur, de "brown-out".

M. ROY: Est-ce que la croissance de la demande en électricité est proportionnée au taux de croissance de l'économie locale?

M. GIROUX: La croissance de l'économie locale, dans Boston, n'a pas été tellement vertigineuse, si vous prenez les rapports du Massachusetts. Dans le Maryland, pas tellement non plus mais peut-être un peu mieux, par exemple.

M. ROY: Mais le niveau de la consommation d'électricité se fait surtout davantage...

M. GIROUX: C'est au domiciliaire... M. ROY: Au domiciliaire.

M. GIROUX: ... qu'ont été les augmentations dans ces deux endroits.

M. ROY: Et, dans ces deux endroits, il y a aussi la consommation d'été, la réfrigération des édifices.

M. GIROUX: Oui mais quel que soit le genre d'utilisation qu'on en fait, les statistiques sont là pareil.

Le problème, c'est que c'est tout de même très facile et même beaucoup plus facile pour nous de tromper le public et de faire des prédictions très basses pour les cinq prochaines années; mais seulement, dans cinq ans, il manquera d'électricité. A ce moment-là, on dira: Ecoutez donc, on s'est trompé. Il manquera d'électricité.

Alors il faut y aller au meilleur de son jugement et au meilleur de sa connaissance. Là-dessus, j'ai la conviction que les gens de l'Hydro ont fait les études. Même quand on leur a demandé de changer de système, ils ont changé de système pour arriver aux prévisions les plus plausibles possible. Je crois que c'est le jugement dont on doit se servir. Le reste peut être discuté. On peut discuter pendant des heures. Est-ce que, l'an prochain, cela va être telle chose ou telle chose? Cela, c'est tout hypothétique.

M. BOYD: M. le Président, j'aimerais ajouter qu'il y a un facteur très important de correction. Annuellement, on révise nos prévisions. Alors, on ne peut pas se sauver bien loin par en haut ou par en bas si c'est bien fait. Annuellement, vous avez des chiffres, ici, des courbes. L'an prochain, on va en faire d'autres qui vont aller un an plus loin. Et c'est révisé annuellement. On peut toujours rectifier notre tir en plus ou en moins à tous les ans.

M. GIROUX: Alors vous demandiez, M. Roy, si on s'est servi de certains chiffres. Un calcul rapide interne à l'Hydro, établit, que, dans les douze mois de 1972/73, on a eu une augmentation domiciliaire d'à peu près 10 p.c. Actuellement, dans les cinq premiers mois, on en a une de 16 p.c. Alors, on n'a pas pris ces chiffres comme des chiffres de base.

Voyez-vous, c'en est une partie des gens où il y a une demande supérieure à la demande de moyenne qu'on a calculée. On ne croit pas que cela va se maintenir à 16 p.c. mais cela se peut.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Guise, si vous avez des précisions.

M. DE GUISE: Sur le plan pratique, aussi, sans que nous planifiions pour être ou en excès ou en déficience, il faut voir ce que cela cause.

Si on est en déficience, nous sommes pris pour acheter de l'énergie des réseaux voisins à des prix extravagants, parce qu'à ce moment-là ils prennent des turbines à gaz ou ils prennent les dernières choses qu'ils ont sur le réseau et s'en servent pour nous vendre de l'énergie. Si on a planifié un excès dans les conditions actuelles du marché américain ou du marché ontarien, on est certain de pouvoir l'écouler. Alors, disons que, sans le faire exprès pour être d'un côté ou de l'autre, il y a certainement avantage à avoir un léger excès sur le plan pratique.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE: Le secteur domestique et commercial, c'est peut-être le secteur le plus propice à des changements de système de chauffage ou d'utilisation plus grande d'électricité. Je considère que, quand vous mentionnez une prévision forte, vous tenez compte de cette situation qui fait qu'on utilise davantage l'électricité à la place de l'huile à chauffage, par exemple. Est-ce que vous tenez compte de ça dans votre méthode qui dit que vous considérez les principaux usages de l'électricité dans chacun des secteurs?

M. BOYD: Oui.

M. MASSE: Maintenant, dans le domaine industriel, est-ce que vous avez des prévisions par rapport à l'utilisation du pétrole?

M. BOYD: C'est le domaine le plus difficile; c'est en fonction des industries qui vont s'établir, des industries qui vont augmenter leur production. Dans l'étude, il y a eu des enquêtes faites auprès de différents types d'industries pour savoir leurs projections, ce qu'elles entrevoyaient comme augmentation de charge. Cela a été assez exhaustif, cette enquête, même si on n'a pas vu tout le monde, mais on a fait un échantillonnage pour avoir une idée de ce qui était prévu par les industries pour l'avenir.

M. MASSE: Dans l'immédiat.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, tenons pour acquis, sous toute réserve — mais, pour faire avancer la discussion sur la demande, c'est tout de même utile — que vos chiffres, soient exacts et que l'hypothèse faible soit de 7.4 p.c. et l'hypothèse forte de 8.4 p.c. Est-ce que nous pourrions maintenant reprendre, année par année, non seulement les besoins en puissance, mais les besoins en énergie de 1973 à 1985, en chiffrant le déficit chaque année, sur la base de vos hypothèses?

M. BOYD: Ce que vous avez au tableau 2, c'est en énergie.

M. MORIN: En bas, il y a la puissance. C'est bien ça, en bas, la dernière ligne, c'est en MW.

M. GIROUX: Dans le programme d'équipement, je ne sais pas si vous l'avez, mais M. DeGuise peut le donner.

M. MORIN: M. Boyd nous avait donné comme indication le tableau 2; je pense que c'est effectivement le tableau pertinent. Il est chiffré en énergie pour toutes les...

M. BOYD: En énergie, oui.

M. MORIN: ... lignes, sauf la dernière; et, enpuissance, c'est-à-dire en MW, je pense, pour la dernière ligne en bas.

M. BOYD: Vous voulez savoir, au point de vue puissance, quelles sont les déficiences année par année?

M. MORIN: Oui. C'est ça, le déficit. Vous pouvez nous le donner en puissance, puis en énergie.

M. CHARUK: J'aimerais intervenir ici pour expliquer une petite chose interne. C'est que le programme d'équipement qui est établi présentement à l'Hydro-Québec repose sur les prévisions de la demande sur le réseau en énergie et en puissance de l'année 1973, que nous avions effectuées l'an dernier. Les prévisions qu'on vient de vous déposer par secteurs de consommation énergétique, ce n'est pas au niveau du réseau; c'est au niveau de l'abonné, si vous voulez, et c'est pour 1974. Ce sont des prévisions qui seront utilisées dans des nouveaux programmes d'équipement parce qu'on les revoit annuellement. Il y a un décalage interne d'utilisation de données.

M. De Guise a ici les résultats de la prévision de l'an dernier et c'est la base du programme d'équipement.

M. DE GUISE: II n'y a pas une grande différence entre 1973 et 1974 mais vous allez réaliser que les chiffres — vous ne pouvez pas les concilier — de prévisions, basés sur les données de 1973, amènent des charges légèrement différentes mais à quelques pour cent près. Cela n'influe pas sur la décision de faire tel aménagement ou tel aménagement.

M. SAINT-PIERRE: Le sens de la question, M. De Guise, je pense que c'était plutôt d'avoir un ordre de grandeur sur le surplus ou le déficit de puissance...

M. DE GUISE: Cest ça.

M. SAINT-PIERRE: ... pourriez-vous nous le donner année par année?

M. DE GUISE: Oui, en puissance, évidemment, il faut que je vous donne, par la même occasion, si vous voulez quelque chose de compréhensible, les additions au réseau année par année parce que, évidemment, à mesure que la croissance agit année par année, il nous faut ajouter de l'équipement nous aussi.

M. LESSARD: Autrement dit, en tenant compte de Manic 3, Outardes 2, Gentilly 2, etc.?

M. DE GUISE: Cest ça.

M. MORIN: Bien. Comme nous disions tout à l'heure, nous verrons dans le détail quels sont vos principaux projets et dans quelle mesure ils répondent à la demande...

M. DE GUISE: Cest ça.

M. MORIN: ... mais pour l'instant...

M. DE GUISE: Alors, en 1973-1974, sur le plan puissance, nous avons de la puissance additionnelle de Churchill Falls qui entre dans le réseau et nous laissera un surplus de 273,000 kW. Lorsque je dis un surplus, c'est un surplus qui tient compte d'une réserve normale d'à peu près 10 p.c. que nous donnons toujours, c'est en plus de la réserve de 10 p.c. Pour l'année 1974-1975, nous ajoutons évidemment Gentilly 1 qui entre en opération et il y a encore de la puissance additionnelle de Churchill Falls qui vient sur le réseau; il y a un peu de puissance d'Alcan dans nos échanges de contrats à différents endroits, qui nous laisse un surplus de 711,000 kW. Evidemment, là nous devons accepter ce qui vient des chutes Churchill et qui n'est pas de notre décision. Quant au montant qui arrive annuellement; ils ont un programme de construction, ils construisent et nous sommes...

M. MORIN: Le contrat vous oblige à accepter tout ce qui vous arrive.

M. DE GUISE: A en disposer, oui. Il n'y a pas de problème, on fait un profit.

M. MORIN: D'accord.

M. DE GUISE: 1975-1976, il y a encore la dernière puissance de Churchill Falls qui entre sur le réseau, il y a Manie 3 qui commence à produire et ça nous laisse un surplus de 636 — pour être exact — en puissance, en plus de la réserve.

M. LESSARD: 636,000?

M. DE GUISE: 636,000, pardon, kW. En 1976-1977, le reste de Manic 3 entre en production nous laissant un surplus de 826,000 kW. En 1977-1978, il n'y a pas d'addition au réseau, pas d'addition perceptible, et nous demeurons avec un surplus de 840... — attendez un peu, il y a quelque chose qui se passe là dans la fin des contrats, un instant — 1977-1978, il n'y a pas d'addition importante au réseau et on demeure avec un surplus de 842, ce doit être le jeu des contrats d'achat et de vente, il faudrait que j'examine cela.

M. MORIN: 842,000?

M. DE GUISE: 842,000 kW. Ce sont les contrats de l'Ontario qu'on récupère à ce moment-là, ce sont vos ventes avec l'Ontario qui finissent; alors, ça agit comme une production additionnelle. 1978-1979, la mise en service de Outardes 2 nous apporte à peu près 400,000 kW et puis nous achetons temporairement de l'Alcan de l'énergie de puissance de pointe et là nous n'avons qu'un surplus de 190,000. 1979-1980, Gentilly 2 entre en production avec 635,000; l'Abitibi est intégrée, alors elle entre des deux côtes, elle entre comme charge et comme production, ce qui ne change pas grand-chose à ce qui reste et, actuellement, si nous ne faisions pas autre chose que d'entrer Gentilly 2 en 1979-1980, nous aurions un déficit de 759,000 kW.

Alors, dans notre programme d'équipement pour faire face à ce déficit, nous prévoyons acheter 200,000 kW du Nouveau-Brunswick sur une base temporaire, rien que pour un an, et il nous reste une décision à prendre, soit de faire le Bas Saint-Maurice pour à peu près 420,000 kW ou d'installer des turbines à gaz pour une puissance équivalente ou de faire une proportion de chacune. Et puis évidemment, les 150,000 d'Alcan se reproduisent; ce que nous achetions l'année précédente 150 MG, est encore disponible en 1979-1980.

Pour l'année 1980/81 — c'est peut-être la dernière, si c'est un peu fastidieux — nous perdons la tranche d'Alcan, nous récupérons autre chose légèrement et, si nous n'avons pas la baie James, il nous manque 2,429,000 kW. Alors, ça, c'est cumulatif par rapport aux 759,000 kW, c'est-à-dire qu'il faudrait l'ajouter.

Il nous manque 759,000 kW l'année 1980/81 et il nous manque la différence entre 759,000 kW, puis 2,426,000. Je continue. Dans les années suivantes, le déficit monte à 44,179,000 en 1981/82 et à 5,865,000 en 1982/83.

M. ROY: Ce n'est pas 44 millions.

M. DE GUISE: 4,179,000 kW. Je m'excuse si j'ai dit autre chose.

M. LESSARD: Puis en 1982/83?

M. DE GUISE: 5,865,000 kW, puis, là, vous avez pratiquement une augmentation de 7 p.c. ou 8 p.c. de charge sur le réseau qui continue. En 1983/84, 7,661,000 kW; en 1984/85, 9,686,000 kW, en 1985/86, 11,868,000 kW. Il me reste deux chiffres à vous donner; en 1986/87, 14,536,000 kW; en 1987/88, 17,074,000 kW. Cela vous indique qu'à partir de 1979/80 jusqu'en 1987, il faut en installer plus que nous n'en avons actuellement.

M. LESSARD: Est-ce qu'il serait possible de nous faire parvenir une copie de ce tableau, s'il vous plaît, si ce n'est pas trop vous demander?

M. DE GUISE: Oui, on va essayer d'en trouver un qui es plus lisible que celui que j'ai, parce qu'il est extrêmement fin.

M. LESSARD: Le gouvernement a une bonne machine à photocopier.

M. DE GUISE: Si vous voulez la situation sur le plan énergétique, je peux vous la résumer. Nous avons des surplus jusqu'en 1978/79 et les mêmes déficits en énergie commencent en 1979/80, pour atteindre un chiffre de 85 milliards en 1987/88.

M. MORIN: Où est-ce que vous entrez Gentilly 3?

M. DE GUISE: Gentilly 3 n'est pas autorisée actuellement.

M. MORIN: Non, mais, enfin, elle est annoncée.

M. DE GUISE: Non, il n'y a pas de décision de prise à l'Hydro-Québec en ce qui concerne Gentilly 3.

M. MORIN: Ah bon! Il y a seulement une déclaration de M. Trudeau à la faveur de la campagne électorale, à Drummondville, l'autre jour. Le ministre de l'Industrie et du Commerce n'est pas au courant?

M. DE GUISE: Remarquez qu'entre les années, quelque part après le programme de La Grande, il va falloir intercaler du nucléaire. Après les années 1985 ou peut-être avant, il faudra certainement intercaler du nucléaire.

M. SAINT-PIERRE: II y a tellement d'investissements au Québec que je ne suis pas capable de les suivre tous.

M. MORIN: Alors, vous n'avez pas la date d'entrée en service, même éventuelle, de Gentilly 3?

M. DE GUISE: Je peux vous dire que ça ne peut pas être avant 1981 pour des raisons pratiques de construction.

M. LESSARD: C'est loin de l'élection de 1974.

M. ROY: Oui, puis le ministre de l'Industrie et du Commerce risque de s'étouffer avec le candy du fédéral.

M. DE GUISE: Le CANDU du fédéral.

M. ROY: Moi, j'aurais une question à poser ici, à ce moment-là. Dans les rapports qui nous ont été remis, il y a un an et demi, je me souviens d'un graphique qu'il y avait à l'intérieur d'un rapport, qui démontrait qu'il fallait à peu près 17 p.c, de la capacité de production pour être en mesure de fournir 1 p.c. de la consommation à cause de la fameuse pointe du mois de décembre. Je remarque, dans le rapport ici, qu'il y a des échanges qui se sont faits — je pense que c'est à la page 9 justement — avec la Power Authority of the State of New York, à l'effet qu'il y a un changement d'électricité l'été, pour être capable, autrement dit, d'exporter les surplus durant l'été, puis d'importer ce qui nous manque durant cette période de l'année.

Est-ce qu'il y a d'autres possibilités qui s'offrent à l'Hydro de faire des échanges avec d'autres réseaux à ce sujet?

M. GIROUX: C'est régi par la capacité des lignes.

M. ROY: Oui, je sais qu'il est question, actuellement, d'aménager des lignes entre l'Etat de New York — c'est un programme qui a été annoncé — et la province de Québec, avec le réseau de l'Hydro-Québec, pour pouvoir inverser du courant, de l'exporter et d'en importer.

M. GIROUX: Si l'Etat de New York avait de plus grosses lignes, on pourrait peut-être faire plus quand on a plus d'énergie excédentaire en été.

M. ROY: Mais est-ce que cette question-là est envisagée actuellement par l'Hydro-Québec? Est-ce qu'il y a des études qui se font à la lumière des coûts que ça pourrait impliquer pour le Québec et de la récupération d'électricité qui pourrait se faire à prix plus modique considérant le fait qu'il s'agirait d'un échange fait dans d'autres périodes de l'année?

M. DE GUISE: Est-ce que je peux vous demander si vous ne pensez pas à d'autres provinces du Canada, par exemple? Le décalage été-hiver n'a pas lieu avec les autres provinces du Canada, il faut aller au sud pour que la pointe soit en été.

M. ROY: II y aurait peut-être du décalage au niveau des heures, quant au Canada, mais je pense que le décalage est beaucoup plus prononcé du côté sud qu'il peut l'être du côté est ou ouest.

UNE VOIX: On est trop loin.

M. ROY: Pour cela, pas besoin d'être un expert. C'est pour cela que je parlais de nord-sud.

M. DE GUISE: Oui, nord-sud. Il y a un problème technique pratique. Lorsque nous vendons aux Etats-Unis, dans l'échange en question avec Power Authority of the State of New York, il faut que nous isolions des machines de la centrale de Beauharnois qui sont déconnectées du réseau de l'Hydro-Québec pour pouvoir alimenter l'Etat de New York. Autrement dit, on ne peut pas connecter les deux réseaux ensemble. Il faut qu'on sépare des machines de notre réseau pour les relier au réseau de l'Etat de New York. Il y a une limite pratique à ce que nous pouvons faire dans ce domaine-là. Si on essayait de transmettre beaucoup plus que les charges qui ont été admises, cela pourrait nous causer des problèmes, sur le réseau de l'Hydro-Québec, au point de vue de la stabilité ou autrement.

M. ROY: Est-ce que les investissements qui seraient requis pour corriger ces questions techniques seraient aussi dispendieux que ceux que ça implique dans le cas de l'aménagement, proportionnellement, de la baie James?

M. DE GUISE: A ce moment-là, il y a un problème de politique gouvernementale. Est-ce qu'on est prêt à vendre de l'énergie aux Etats-Unis sur une certaine base? Pour justifier des équipements ou des modifications appréciables, il faut dépenser de l'argent qu'on doit amortir sur une période relativement courte si on ne veut pas livrer d'énergie aux Etats-Unis pour des contrats à long terme.

M. ROY: Disons que les politiques gouvernementales pourraient venir en deuxième lieu. En premier lieu, il s'agirait de savoir si c'est avantageux de le faire ou non.

M. DE GUISE: II n'y a pas de doute qu'on pourrait faire un profit. Avec les conditions du marché américain, il n'y a pas de grandes difficultés avec nos coûts de production à trouver un profit en vendant aux Etats-Unis, mais il y a aussi nos problèmes de financement parce que, pour réaliser cela, il faut évidemment immobiliser de l'argent.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: Dans vos estimations, vous tenez compte de la possibilité maximum ou de l'énergie de pointe, si vous voulez. L'heure, je pense, c'est l'hiver à cinq heures de l'après-midi; vous arrivez vers le mois de décembre, le 18 décembre, à un maximum. Donc, vous tenez compte, dans vos installations, de cette énergie de pointe. Or, selon votre programme d'équipement qui avait été déposé le 15 mai 1972, concernant les années 1978 à 1985, vous teniez compte, à ce moment-là, pour 1978 d'une usine de 1,200,000 MW, je pense. De la puissance en MW. Cela n'a pas de sens.

UNE VOIX: Ce doit être des watts. M. LESSARD: Maintenant, c'est bien...

M. PERREAULT: Des MW, c'est gros, mon gars.

M. LESSARD: D'accord, ce sont des milliers de kW. En tout cas, vous teniez compte à ce moment-là, selon votre programme... Il est bien indiqué MW. MW, à ma connaissance, ce sont des mégawatts. A ma connaissance. Voici, ce n'est pas un million, c'est 1,200 MW ou 1,200,000 kW. J'aimerais savoir quelle usine d'énergie de pointe est prévue pour 1978.

Voici c'est qu'en 1978, justement on va en parler, parce que là il s'agit de rationaliser le réseau. C'est que l'usine de pointe permet d'équilibrer le réseau. En 1979, vous prévoyez une autre usine de pointe de 800 MW. Etant donné qu'il semble que vous avez laissé tombé pour le moment la Jacques-Cartier, est-ce que vous avez étudié d'autres possibilités?

M. GIROUX: Voici, on n'a pas laissé tomber la Jacques-Cartier, on nous a demandé de nous retirer. C'est pas mal différent. On a déclaré que les usines à gaz sont des systèmes nouveaux qui polluent — on ne s'en cache pas — Ils étaient les seuls moyens disponibles si on ne pouvait pas faire des usines pompées. A ce moment-là, la seule localisation possible était la rivière Jacques-Cartier pour arriver en 1978. Donc, pour l'année 1978 et 1979, il va falloir des usines à gaz. Vous nous avez demandé la dernière fois de plutôt faire autre chose que la Jacques-Cartier. C'est ça qu'il y a.

M. LESSARD: Mais il ne semble pas, d'après ce que je lis dans le rapport annuel, que vous ayez laissé tomber complètement le projet Champigny. En effet, je lis ceci: "Sans préjugé de la décision éventuelle du conseil des ministres, nous avons entièrement évacué la vallée de la rivière Jacques-Cartier au mois d'août mais

nous avons ensuite travaillé à compiler les données recueillies sur le terrain et commencé de préparer un rapport préliminaire sur le projet Champigny. L'objectif initial d'une mise en service en 1979 a été abandonné." Est-ce que pour le moment vous avez laissé tomber les études préliminaires complètement?

M. GIROUX: Non, on avait beaucoup de données entre les mains. Au point de vue strictement d'une base d'affaires, on ne doit pas laisser toutes ces statistiques, toutes ces données sans faire un rapport. Alors on a fait faire des études sur les rapports que nous avions en main, mais nous nous sommes retirés du terrain et nous n'y sommes pas retournés.

M. LESSARD: Mais vous continuez les études.

M. GIROUX: Bien là c'est pas mal fini.

M. LESSARD: Vous conservez quand même une vue sur la Jacques-Cartier.

M. GIROUX: Oui, c'est là que vous verrez l'erreur que vous avez commise.

M. LESSARD: On verra, il reste qu'on verra. Il reste qu'il y a des choses quelquefois qui méritent d'être conservées.

Dans votre tableau 2, vous parlez de la prévision de demande de l'Hydro-Québec, hypothèse moyenne, vous parlez d'une puissance calculée à partir d'un facteur de charge de 63.9 p.c. Comme je ne suis pas ingénieur, M. le Président, est-ce que vous pourriez m'expliquer, est-ce que c'est le taux d'utilisation de la capacité actuelle?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Guise voulait ajouter, je crois, à la réponse de M. Giroux tout à l'heure; si vous voulez procéder...

M. DE GUISE: Je pense que vous vous informiez de la capacité de pointe de 1 million qui n'apparaissait pas. Si vous vous rappelez, dans les chiffres que je vous ai donnés tantôt, il y a 150,000 kW de pointe que nous achetons de l'Alcan; c'est uniquement de la pointe, il n'y a pas d'énergie là-dedans.

Il y a 200 kW que nous achèterons du Nouveau-Brunswick, les transactions ne sont pas terminées, ce qui fait 350,000 kW et j'ai dit que nous avions au programme 420,000 kW de turbines à gaz ou, comme alternative, le Bas-Saint-Maurice. Mais les coûts sont très différents. Alors, il resterait une décision, sur le plan économique, à prendre. Alors, 350,000 kW et 420,000 kW, cela fait tout de même 770,000.

Je reviens à votre autre question. Vous me dites: Le facteur d'utilisation de 63 p.c. ou 64 p.c...

M. LESSARD: A votre tableau 2...

M. DE GUISE: Oui.

M. LESSARD: ... concernant les prévisions de la demande de l'Hydro-Québec...

M. DE GUISE: Oui.

M. LESSARD: ... vous dites justement que tous ces chiffres sont calculés à partir du facteur de charge de 63.9 p.c.

M. DE GUISE: Voici ce que cela veut dire. M. LESSARD: Est-ce que c'est l'utilisation... M. DE GUISE: Oui.

M. LESSARD: ... de votre capacité installée?

M. DE GUISE: C'est sur tout le réseau. Prenez une centrale au hasard, Manie 3, par exemple, où nous installons 1,180,000 kW. Mais la quantité d'eau qu'il y a en arrière de cette centrale et qui est disponible, il y en a assez pour fonctionner à 1 million de kW 64 p.c. du temps seulement.

M. LESSARD: C'est ça.

M. DE GUISE: Alors, disons que la demande varie de telle façon qu'à un certain moment, elle est de 1,100,000 kW et, à d'autres moments, elle baisse en bas de cela et elle s'établit à une moyenne de 64 p.c. de 1,100,000 kW.

M. LESSARD: Mais vous êtes obligés, à ce moment-là, d'établir votre puissance sur le maximum, c'est-à-dire sur la pointe.

M. DE GUISE: C'est ça sur ce que le réseau est appelé à donner.

M. LESSARD: Bon. Maintenant, est-ce que, justement, la construction d'usines de pointe ne permettrait pas de hausser cette moyenne de charge qui me semble un peu faible à 63.9 p.c? Est-ce qu'il n'y aurait pas un moyen de rationaliser ou d'optimiser, si vous voulez...

M. DE GUISE: Oui.

M. LESSARD: ... cette utilisation du réseau?

M. DE GUISE: Nous partons de quelque chose qui n'est pas sous notre contrôle, la demande des clients. Si les clients demandent, en moyenne — j'ai parlé d'un million de kW — une puissance de 650,000 kW, il faut qu'il y ait dans la rivière assez d'eau pour produire 650,000 kW à longueur d'année. Mais leur demande n'est pas une ligne droite comme ça. A une époque, il y a 1,100,000 de kW; à d'autres, il y a 300,000 kW et la moyenne fait 650,000 kW.

Qu'est-ce que l'on peut faire avec la puissance de pointe? Evidemment, on pourrait installer 200,000 kW —c'est un exemple— de turbines à gaz, ce qui nous permettrait de rencontrer une pointe de 1,300,000 kW. Mais si la moyenne d'énergie à fournir se situe à 65 p.c. de 1,300,000 kW, il n'y a plus assez d'eau dans la rivière et la turbine à gaz, il va falloir la faire fonctionner en brûlant de l'huile pour faire des kW avec. Là, cela devient moins économique.

Une turbine à gaz, c'est une installation de pointe, qui ne coûte pas cher en pointe, mais, dès que vous commencez à la faire tourner pour un nombre d'heures appréciable, le prix monte en flèche.

M. LESSARD: Je suis d'accord. Mais il y a moyen, quand même, de conserver un équilibre...

M. DE GUISE: C'est ce que nous essayons...

M. LESSARD: ... entre la puissance installée et l'usine de pointe, c'est-à-dire de rationaliser un peu le réseau, de faire en sorte que, par exemple, il puisse y avoir une utilisation moyenne supérieure à 63.9 p.c.

M. DE GUISE: Vous allez retrouver cela sur le réseau. Prenez, par exemple, la centrale de Carillon, qui est près de Montréal, près du centre de charge. On y a installé, si je me rappelle bien, 640,000 kW ou HP. Mais il y avait de l'eau pour fonctionner seulement 200,000 kW en moyenne. Parce qu'on était près de Montréal, malgré qu'on savait que l'énergie était limitée, on a suréquipé la centrale et on s'est dit: On va s'en servir aux heures de pointe. C'est généralement économique de le faire dans des centrales comme sur le Saint-Maurice ou le Saguenay, quand on n'est pas trop loin des centres de consommation.

Si on essayait de faire cela à la baie James, par exemple, on se punirait soi-même parce que, pour transporter l'énergie de pointe, il faudrait peut-être ajouter une ligne de 600 milles de longueur qui...

M. LESSARD: Bien, je comprends que lorsque vous installez une usine de pointe, il faut que ce soit près...

M. DE GUISE: Cela doit être assez près, oui.

M. LESSARD: ... du marché de consommation.

M. DE GUISE: Là, si vous aviez... Malheureusement, vous n'avez pas le tableau que j'ai devant moi.

M. LESSARD: Ce qui explique, d'ailleurs, vos échanges entre New York et...

M. DE GUISE: A un moment donné, on a un surplus de kW, on le passe ailleurs. Si, à un moment donné, on a un déficit en période de pointe, on essaie d'aller en chercher à Alcan ou au Nouveau-Brunswick. Mais on essaie toujours de faire un équilibre entre la demande de kWh et la demande en kW pour que nos installations puissent rencontrer la pointe, mais, en même temps, n'aient pas un trop grand surplus de kWh dont il faudrait se débarrasser à l'extérieur.

LE PRESIDENT (M. Lafrance—: L'honorable chef de l'Opposition officielle.

M. MORIN: M. le Président, dans vos prévisions de déficit de puissance pour les années 1983, 1984 et 1985, est-ce que vous avez tenu compte de la possibilité de l'aménagement de la Basse Churchill? Il a été question d'un aménagement qui produirait 3,000 MW en février 1974. Est-ce que vous avez été saisi de ce projet? Est-ce que vous en avez tenu compte de quelque façon?

M. GIROUX: Nous avons été saisis du projet. Nous en avons discuté avec les gens qui, à ce moment-là, étaient Brinco et nos associés. Nous avons discuté avec les gens de Terre-Neuve. Selon leurs propres experts, nous n'avions pas besoin d'une ligne additionnelle. Nous, nous prétendions que nous avions besoin d'une ligne additionnelle.

La conclusion a été que Terre-Neuve était intéressée, en principe, à nous vendre du pouvoir pour une période de temps très limitée. Alors actuellement, comme vous le savez — je pense bien qu'on peut l'expliquer tout de suite, je comprends que c'est ailleurs à l'ordre du jour — il y a eu une transaction par laquelle Brinco a vendu ses actions de Churchill au gouvernement de Terre-Neuve. En ce qui nous concerne, il n'y a absolument aucun changement. Le gouvernement de Terre-Neuve — naturellement, on s'est tenu en dehors de la transaction parce qu'on n'avait pas à y participer — nous a assurés qu'il n'y avait aucun changement en ce qui regardait l'Hydro-Québec et que, dès que leur transaction serait faite, ils prendraient contact avec nous afin qu'on puisse regarder les possibilités.

Actuellement, le gouvernement de Terre-Neuve complète sa transaction, nous réinvite à nous asseoir avec eux. Il nous a demandé de recontinuer, comme membre du bureau de direction de Churchill, ce que les trois membres de l'Hydro-Québec vont continuer de faire. On ne croit pas qu'il y ait intérêt à protéger nos actions dans ce domaine. On va étudier certaines possibilités qui existent dans la question de Lower Falls.

Maintenant, les Terreneuviens désirent cette énergie pour eux et on ne peut pas les blâmer.

M. MORIN: A partir de quand?

M. GIROUX: A partir de quand? A partir de tout de suite, s'ils pouvaient l'avoir.

M. MORIN: Mais il faut qu'ils la transportent.

M. GIROUX: II faut qu'ils la transportent. Ils ont un problème de transport. Ils ont des rapports d'ingénierie en main qui leur disent que c'est faisable, ce qui ne nous regarde pas. Nous aurons probablement une offre pour une partie d'énergie après en avoir discuté avec eux et on sera très consentant d'acheter, il n'y a pas l'ombre d'un doute.

M. MORIN: Qu'est-ce que cela peut représenter comme puissance?

M. GIROUX: Cela peut représenter peut-être 25 p.c, mais pour une courte période, cinq ans ou dix ans, parce qu'ils veulent s'en servir pour leur propre développement.

M. MORIN: 25 p.c. de combien de MW? M. GIROUX: 1,500.

M. SAINT-PIERRE: II n'y a jamais eu 3,000 MW.

M. MORIN: On a mentionné jusqu'à 3,000 MW, oui.

M. BOYD: Pour arriver à 3,000, il faut avoir Lower Falls et Muskrat Falls, qui est une autre possibilité, près de Goose Bay, et qui est beaucoup moins rentable que l'autre. Alors, dans le moment, il n'est pas du tout question de Muskrat Falls. Il est question seulement de Lower Falls, qui est quelque chose comme 1.5 million de kW.

M. MORIN: De kW.

M. BOYD: Ils ne sont pas intéressés à nous vendre le tout. Ils veulent garder peut-être 70 p.c. ou 75 p.c. pour eux et nous vendre le reste.

M. MORIN: Alors, ce serait 25 p.c. de 1,500 MW.

M. BOYD: Pour une courte période seulement.

M. MORIN: Soit dit en passant, est-ce que vous connaissez le coût en mills de cette énergie?

M. GIROUX: Non, nous non plus!

M. MORIN: Vous n'en avez pas la moindre idée?

M. GIROUX: Remarquez bien que ce programme est arrêté depuis deux ou trois ans. Maintenant le programme regarde les Terreneu-viens et change beaucoup d'aspect parce qu'on veut alimenter à l'île de Terre-Neuve. Alors là, c'est une chose qui est totalement différente de ce qui avait été proposé autrefois.

Je crois bien que c'est de l'intérêt de la province de Québec que de coopérer au maximum avec les gens de Terre-Neuve à développer cette chose parce qu'on en aura une partie.

M. MORIN: Oui. Mais dans vos prévisions, étant donné qu'il s'agit de 25 p.c. de 1,500 MW, vous n'en avez pas tenu compte, surtout que c'est temporaire.

M. GIROUX: C'est temporaire si on considère que dix ans, dans l'énergie c'est temporaire, alors c'est temporaire.

Maintenant, ce qu'on peut dire, ce que les Terreneuviens nous ont déclaré, c'est que leur intention était de le développer pour leur propre usage.

Je pense bien qu'on ferait la même chose si nous étions dans leur situation.

M. SAINT-PIERRE: Un programme de construction prévu, ce n'est pas un actif. Je veux dire que vous n'avez pas la certitude d'avoir accès à ces 25 p.c, c'est la déduction préliminaire.

M. GIROUX: Non, je crois bien que nous allons être mis au courant de toutes leurs démarches, de tout leur développement, de leurs études, de ces choses-là. Le gros problème, comme l'a mentionné tantôt M. Morin, c'est la question de le transporter dans l'île. On aura probablement accès à leur point de vue, il nous demanderont peut-être de le regarder, ils sont très coopératifs. D'ailleurs, il pourrait nous être utile de savoir que ça se transporte.

M. MORIN: C'est ce que je pensais.

M. GIROUX: La seule chose est de savoir si, actuellement, ils sont assez avancés dans ce programme. Il est difficile pour nous de nous prononcer là-dessus parce que les gens se sont portés acquéreurs officiellement la semaine dernière.

M. MORIN: II serait intéressant de savoir s'ils vont mettre ce projet en chantier avant de savoir comment ils vont transporter l'électricité. S'ils ne savent pas comment la transporter... Il y a quand même le détroit, large de neuf milles et quart marins, au minimum à franchir. Est-ce de 735,000 volts sous l'eau?

M. GIROUX: Ce peut être en courant direct, ce peut être à 500. Il y a plusieurs solutions maintenant, vous savez. Il faut tout de même. Ils ont employé dans les deux derniers mois tous leurs gens pour compléter la transaction, ce qui est très compliqué. La semaine dernière, avait lieu la conclusion de la transaction. Tout de suite après nous avons eu un

contact avec eux et ce fut très ouvert, très amical.

M. SAINT-PIERRE: Je pense bien qu'il me semble impossible que les gens de Terre-Neuve mettent le projet en chantier sans savoir, sur le plan du marché, ce qu'ils vont faire avec l'énergie. Ce n'est pas un gouvernement libéral, mais il ne faut pas les prendre pour des imbéciles.

M. MORIN: Non, ce n'est pas du tout ce que je disais.

Enfin, il pourrait se produire, s'ils n'arrivaient pas à résoudre les problèmes du transport par-dessus le détroit de Belle-Isle, que vous soyez peut-être acquéreur de toute cette énergie, des 1,500 MW.

M. GIROUX: C'est une possibilité, mais il faut toujours prendre en considération le fait que le gouvernement terreneuvien aura aussi peut-être intérêt à développer la région du Labrador. Il pourrait facilement amener là une industrie qui pourrait se servir d'un gros bloc.

M. SAINT-PIERRE: L'aluminium.

M. MORIN: L'aluminium, peut-être. Oui, parce qu'autrement il n'y a guère que les pêcheries.

Est-ce qu'on pourrait jeter un coup d'oeil, messieurs, sur les autres projets qui font l'objet, je pense, d'études préliminaires à l'heure actuelle? Le Bas-Saint-Maurice, la haute Mauricie, la Moisie. Est-ce que vous avez des chiffres de la puissance que développeront ces projets?

M. GIROUX: Les possibilités de puissance sur la Moisie?

M. MORIN: Oui, c'est cela, les possibilités sur tous vos projets, le Bas-Saint-Laurent, le Haut-Saint-Maurice,...

M. GIROUX: Vous voulez dire le Bas-Saint-Maurice, le Haut-Saint-Maurice.

M. MORIN: C'est cela, je m'excuse. Bas-Saint-Maurice, Haut-Saint-Maurice, Moisie, Sainte-Marguerite, Chamouchouane, La Romaine, est-ce que vous avez des chiffres là-dessus?

M. CAHILL: Mon nom est Lionel Cahill. Sur le Bas-Saint-Maurice, comme le mentionnait M. De Guise tout à l'heure, la possibilité d'installation d'usines de pointe est d'environ 420 MW. Sur le Haut-Saint-Maurice, nous pouvons installer deux usines pour un potentiel global d'environ 800 MW à un facteur d'utilisation de 25 p.c. soit plus exactement 792 MW. Quant aux rivières de la Basse-Côte-Nord, le potentiel approximatif que l'on pourra développer à un facteur d'utilisation de 80 p.c. est de l'ordre de 4,500,000 kW.

M. ROY: Cela, c'est pour toutes les rivières? M. CAHILL: Pour toutes les rivières.

M. LESSARD: Est-ce que vous avez, par exemple, une répartition par rivières telles que la Moisie, Sainte-Marguerite?

M. CAHILL: Je peux vous les donner approximativement. J'ai un rapport plus détaillé. Est-ce que vous voulez les avoir exactement ou approximativement?

M. ROY: Le plus juste possible. Les meilleurs chiffres dont vous disposez.

M. CAHILL: D'accord, parce que exactement ça va prendre un peu plus de temps.

UNE VOIX: Les plus récents.

M. LESSARD: Comme je vous l'ai dit, nous avons jusqu'au mois de septembre.

M. CAHILL: Ces chiffres-là demeurent approximatifs, on ne sait pas si ce sont des potentiels qu'on pourra aménager économiquement. La rivière Sainte-Marguerite, 319 MW, mais c'est beaucoup trop précis actuellement ces chiffres-là, c'est de l'ordre de 300 MW. 80 p.c. toujours.

M. SAINT-PIERRE: On a la preuve qu'il y a trop de rapports. A la page 40, comme le souligne le ministre des Richesses naturelles, du volume d'activités, on a les moindres détails: la Moisie, 1,124, 1,366.

M. ROY: Oui, mais nous aimions vérifier quand même avec les gens de l'Hydro-Québec.

M. SAINT-PIERRE: Cré Fabien!

M. GIROUX: On les prend au ministère des Richesses naturelles.

M. MORIN: M. le Président, est-ce que vos études préliminaires sont suffisamment avancées pour que vous ayez pu établir un coût approximatif pour chacun de ces projets?

M. CAHILL: Présentement, nous avons un coût très approximatif pour la Moisie. Nous avons un rapport d'avant-projet préliminaire mais le coût estimé est très élevé. Il faudra faire des études subséquentes afin d'avoir un coût plus exact. Quant à la rivière Romaine, nous en sommes encore à des études très préliminaires de même que sur la rivière Natashquan, sur la rivière Petit Mécatina. Présentement, nous n'avons pas de coûts que nous pourrions donner qui sont significatifs.

Les coûts que nous avons actuellement sur la rivière Moisie ne sont pas très prometteurs parce qu'ils sont relativement élevés.

M. MASSE: Est-ce que c'est la même chose pour la rivière...

M. CAHILL: II y a aussi un problème d'environnement évidemment sur la Moisie, c'est-à-dire la remontée du saumon. Je crois que le saumon remonte jusqu'à la quatrième centrale à partir de Laval. Alors, il y a là aussi un problème d'environnement très sérieux à considérer et nous en sommes conscients.

Pour le moment, nous avons cessé les études sur la Moisie et, durant l'été 1974, nous allons concentrer nos efforts sur la rivière Romaine qui, elle, semble s'avérer beaucoup plus prometteuse du point de vue du coût et qui a un potentiel d'environ un million de kW, si ma mémoire me sert bien.

M. LESSARD: 1,124,000. M. CAHILL: C'est ça.

M. LESSARD: Donc, actuellement, ce sont des projets qui sont au niveau de la recherche préliminaire et, à ce stade-ci, il ne s'agit pas de prévoir pour l'Hydro-Québec l'entrée en activité de ces projets à une date précise.

M. CAHILL: Non, disons que même si on faisait un programme d'investigation, d'étude et de construction très hâtif, très rapide, je ne crois pas qu'on puisse mettre en service aucune de ces centrales sur ces rivières si elles étaient économiques avant l'année 1983, par exemple. H faut se rappeler que la rivière Petit Mécatina est à 900 milles de Montréal, donc à une distance équivalente sinon plus grande que la LG 4, par exemple, sur La Grande.

Donc, il y a un problème de transport, c'est-à-dire que le coût du transport sera très élevé et que, de plus, il faudra construire les lignes supplémentaires entre Manicouagan et Montréal, si nous ne construisons pas ces centrales-là, disons, plus tard, vers les années 1990 peut-être, par exemple. A ce moment-là, les lignes entre Manic et Montréal seront délestées d'une partie de leur charge et ça signifie qu'on pourra avoir un transport pratiquement gratuit pour l'énergie des centrales en question entre Manicouagan et Montréal.

M. MASSE: II n'y a pas de coût d'établi encore; c'est la même chose, je suppose, pour la rivière Chamouchouane?

M. CAHILL: Oui, pour la rivière Chamouchouane, il y a un coût d'établi. Un instant. Maintenant, c'est une étude préliminaire. Sur la Chamouchouane, il y avait deux projets: un où sous un facteur d'utilisation de 80 p.c. on pouvait produire 577 MW et le coût en dollars par kW en 1979 était de $1,179. Cela, c'est sans le transport. Disons qu'encore là c'est un coût qui est très peu prometteur, c'est-à-dire qui est très élevé, mais qui, éventuellement, pourra devenir intéressant, quand d'autres sources d'énergie auront été aménagées ou encore que d'autres sources d'énergie auront augmenté par comparaison avec le coût d'un projet sur la Chamouchouane.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le chef de l'Opposition.

M. MORIN: M. le Président, dans le rapport qui nous a été soumis par M. Roland Giroux cet après-midi, il est question de l'exportation de surplus d'énergie, en particulier vers les Etats-Unis. A la page 9 de votre rapport, vous nous dites qu'une entente a été conclue avec la "Power Authority of the State of New York". Cette entente prévoit un mécanisme d'échange qui permettra, à l'occasion, d'importer de New York certaines quantités d'énergie durant la période de consommation de pointe au Québec, c'est-à-dire l'hiver. Est-ce que vous pourriez nous donner une idée des quantités d'énergie en cause, j'entends à l'importation?

M. GIROUX: C'est un problème. Cet échange est assez compliqué: je demanderais à M. Villeneuve de donner le mécanisme total de la transaction. Alors, je pense que la commission serait éclairée du même coup sur la transaction.

M. VILLENEUVE: Mon nom est Jean Villeneuve. Le contrat que nous avons avec PASNY prévoit, après les cinq premières années, que l'énergie que l'Hydro-Québec exportera durant l'été sera retournée durant les mois d'hiver à l'Hydro-Québec par PASNY.

Seulement, comme PASNY doit payer pour la transaction et que l'Hydro-Québec, donc, recevra en hiver de l'énergie sans payer, c'est-à-dire sans payer pour la capacité, il est évident que PASNY n'aura pas à retourner cette énergie durant les heures de pointe. Nous leur en fournirons en été, au moment de la pointe de leur réseau, alors qu'eux vont nous retourner l'énergie en hiver en dehors des heures de pointe, mais dans la période de pointe du réseau de l'Hydro-Québec.

Evidemment, ce sont eux qui payent pour cette capacité, alors que nous, nous ne payons pas pour la capacité. Maintenant, le contrat prévoit que, si au cours de ces années...

M. LESSARD: Une minute, là, je veux bien comprendre. Vous dites que ce sont eux qui vont payer pour cette capacité. C'est quand même une capacité d'énergie de pointe du Québec qui s'en va justement vers la région de New York.

M. VILLENEUVE: C'est juste. Ce que je veux dire, c'est...

M. LESSARD: On a payé pour l'aménagement.

M. VILLENEUVE: Oui, et eux ont payé pour une partie d'aménagement qui est de l'ordre de peut-être huit ou neuf fois la partie que nous devons investir. Nous n'avons qu'une ligne de peut-être 40 milles à construire, et eux ont peut-être 200 milles de lignes à construire ou 250, je ne me souviens pas.

Ce qu'il faut noter, c'est qu'il est possible que nous ayons de l'énergie à vendre durant cette période et, deux ans à l'avance, nous pourrons leur indiquer les quantités d'énergie qui seront disponibles. Nous négocierons avec eux un prix pour l'énergie en question. Ou on s'entend ou on ne s'entend pas sur le prix. S'il n'y a pas d'entente sur le prix, ou si nous n'avons pas d'énergie à exporter, automatiquement, tout ce qu'ils prendront en été devra être retourné en hiver. Encore une fois, eux paieront l'été pour la capacité et nous ne paierons pas en hiver pour cette capacité-là qui nous sera remise sur le réseau.

M. MORIN: II s'agit d'un maximum de 800 MW, si j'ai bien compris.

M. VILLENEUVE: C'est la puissance mise à leur disposition durant les mois d'été.

M. MORIN: C'est cela. Quelle est la puissance qui est mise à votre disposition pendant les mois d'hiver?

M. VILLENEUVE: Elle n'est pas spécifiée, ils n'ont qu'à nous retourner un nombre donné de kWh qui est égal au nombre de kWh qu'ils auront pris durant l'été.

M. MORIN: Bon, je comprends.

M. ROY: Avant d'aller plus loin, j'aimerais bien avoir des précisions sur une chose qui a été dite tout à l'heure. Vous avez parlé de l'énergie qui ne nous est pas retournée durant les heures de pointe, là où nous en avons le plus besoin, mais durant la période de pointe.

M. VILLENEUVE: C'est juste.

M. ROY: Est-ce que cela veut dire que si cette électricité ne nous était pas retournée, notre réseau pourrait suffire quand même, étant donné que l'heure de pointe est complétée par notre réseau?

M. VILLENEUVE: L'hypothèse qu'on fait à ce moment-là c'est que nous n'avons pas de surplus énergétique en kWh, mais nous pouvons tirer de nos réservoirs, durant l'été, et nous devons, durant l'hiver, ensuite, refaire la réserve. C'est à ce moment-là que l'énergie qu'ils nous fourniraient à toute heure... Cela pourrait être, remarquez, à l'heure de pointe mais ce n'est pas obligatoire. Cela peut nous être retourné durant les fins de semaine, durant la nuit. A ce moment-là, nous pouvons réduire la production de nos propres centrales, donc, refaire notre réserve d'eau dans nos réservoirs. C'est de cette façon-là que nous les aidons en déplaçant l'énergie en réserve.

M. ROY: Ils retournent l'équivalent mais, moi, je pense que le marché est plus avantageux pour eux qu'il ne l'est pour nous du fait qu'on leur envoie de l'électricité pendant leurs heures de pointe, durant le temps qu'ils en ont besoin, donc, le potentiel, au point de vue investissement de production, de la masse de production de l'électricité devient moins nécessaire du fait qu'ils peuvent en importer. Mais si on nous retourne de l'électricité, à un moment donné, qui permet à nos usines d'électricité de fermer afin de leur permettre d'augmenter leur réservoir, le potentiel nécessaire pour le Québec pour être en mesure de satisfaire la demande des consommateurs durant l'heure de pointe, on ne peut pas conclure ou déduire, si vous voulez, que l'électricité qu'on nous fournit peut nous permettre de compenser ou de réduire, en quelque sorte, ou d'empêcher l'investissement additionnel au niveau de la construction d'usines.

M. VILLENEUVE: Non, ça peut être une grosse économie pour nous. Ce qui peut arriver, si l'énergie ne nous était pas retournée, on pourrait être obligé de la produire par la centrale thermique de Tracy, disons.

M. ROY: On pourrait, mais ça ne veut pas dire que ce serait nécessairement ça.

M. VILLENEUVE: Si on leur dit, deux ans à l'avance, que nous ne prévoyons pas avoir de surplus d'énergie, il est à peu près sûr qu'effectivement, s'ils ne nous la retournaient pas, il faudrait la produire de source thermique.

M. ROY: Mais ce n'est pas sûr. M. VILLENEUVE: Pour nous...

M. ROY: Mais ce n'est pas une chose qui est sûre.

M. VILLENEUVE: Deux ans à l'avance, on peut prévoir la productivité de nos centrales mais les conditions hydrauliques varient d'une année à l'autre. Le contrat prévoit qu'il est toujours possible pour nous de modifier les quantités indiquées. Disons qu'on leur annonce que, dans deux ans, on n'aura pas d'énergie et qu'on s'aperçoit qu'on en a; on va leur en offrir et il est virtuellement certain qu'ils vont être heureux de l'acheter au prix qu'on leur demandera à ce moment-là, parce qu'ils sont toujours acheteurs, ils sont toujours prêts à acheter tous nos surplus.

M. LESSARD: Cette énergie-là proviendra de la centrale de Châteauguay, Beauharnois?

M. VILLENEUVE: De Beauharnois. Ce pourrait être autre chose au cours des années parce que...

M. LESSARD: Est-ce que cela pourrait être plus tard, puisque le contrat commence en 1977? Lorsque, par exemple, la baie James entrera en opération, est-ce que cela pourra provenir de la baie James?

M. VILLENEUVE: Non, M. De Guise expliquait un peu plus tôt qu'on ne peut pas, pour des raisons techniques, raccorder les deux réseaux ensemble.

La capacité ou l'énergie de la baie James va alimenter les charges du Québec et ce qu'on libère, c'est-à-dire la puissance disponible de Beauharnois, est raccordé au réseau américain.

M. LESSARD: Donc, si vous ne pouvez pas raccorder l'énergie provenant de la baie James au réseau américain, est-ce que cela veut dire que l'énergie de la baie James ne pourra pas être exportée aux Etats-Unis?

M. VILLENEUVE: Le contrat que nous avons signé n'est pas relié du tout à l'énergie de la baie James, il est fondé sur la différence entre nos charges d'été et nos charges d'hiver. Et dès qu'on a installé une capacité pour fournir nos charges d'hiver, elle devient disponible en été pour aider nos voisins. Alors cela n'a pas de relation avec la baie James ou toute autre source qui alimente le réseau de l'Hydro-Québec.

M. MORIN: Mais pour ce qui est de la baie James, M. le Président, il y a eu un certain nombre de déclarations sur l'exportation possible de l'électricité qui sera produite, notamment par le vice-premier ministre, M. Gérard-D. Levesque. Celui-ci, au cours d'une conférence des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre, déclarait qu'il serait possible probablement d'exporter de l'électricité. Il semble que cette déclaration ait été contredite, notamment par le pouvoir fédéral, qui lui parle plutôt d'un pool canadien de l'énergie. Et, si je ne m'abuse, l'Hydro-Québec a aussi fait une déclaration là-dessus. Quelle est votre position actuellement sur l'exportation éventuelle de l'énergie de la baie James?

M. MASSE: Est-ce que je peux apporter une précision, M. le Président? Je pense que M. le vice-premier ministre n'a pas dit qu'à partir de la production de l'électricité de la baie James on pourrait exporter cette électricité en Nouvelle-Angleterre. Il a parlé d'une décision d'aménager les rivières du sud, je pense. Il avait conditionné sa déclaration à la phase 2. Il a dit que l'on pourrait peut-être examiner cette possibilité, point.

M. MORIN: Quelle est l'attitude de l'Hydro-Québec là-dessus?

M. GIROUX: A l'Hydro-Québec, on n'a jamais prétendu qu'on pourrait exporter. Je crois qu'on a établi très clairement que nous aurions besoin de toute l'énergie produite à la baie James, dans le programme de l'Hydro-Québec.

M. MORIN: Dans la déclaration, d'ailleurs, je pense qu'il s'agissait d'énergie primaire et non pas de surplus.

M. GIROUX: Non, non, pour ce qui est des surplus naturellement, je pense bien que c'est dans l'intérêt de tous les Québécois, si on avait un surplus temporaire, qu'on obtienne le meilleur prix possible et qu'on gagne le plus possible.

M. MORIN: Et d'organiser des échanges.

M. GIROUX: Oui, oui, mais seulement je pense que le vice-premier ministre, M. Gérard-D. Levesque, parlait de la possibilité de la phase 2. D'ailleurs, dernièrement, il me demandait si un jour on prendrait une décision sur la phase 2. Je lui ai dit que c'était encore prématuré.

M. MORIN: M. le Président, sur ce point, je n'ai plus de questions. Peut-être convient-il, en raison de l'heure, d'ajourner à demain matin.

M. ROY: Je seconde le chef de l'Opposition, étant donné que la Chambre est convoquée pour dix heures demain matin.

M. SAINT-PIERRE: Est-ce que vous ne voulez pas profiter du fait que l'Hydro-Québec est ici?

M. ROY: De toute façon on ne peut pas finir ce soir.

M. SAINT-PIERRE: On ne peut pas tout finir ce soir, mais on peut avancer dans les discussions.

M. ROY: On n'a pas trois "shifts" nous autres, comme le Parti libéral.

M. SAINT-PIERRE: Je vous demande pardon.

M. ROY: D'accord? Il vous en manque toujours 35 en Chambre, on sait que vous fonctionnez avec trois "shifts".

M. LESSARD: M. le Président, je pense que demain nous commençons à siéger avec le chiffre qui est prévu par le leader du gouvernement. Il est quand même onze heures, nous avons reçu une série de documents que nous devons consulter entre ce soir et demain.

Alors il me paraîtrait normal, je pense, que nous puissions ajourner puisque nous ne pourrons pas terminer avec l'Hydro-Québec. Je ne crois pas que nous puissions terminer même si

nous siégeons jusqu'à minuit. Alors, je pense que ce serait tout simplement logique que nous puissions ajourner à demain.

M. MASSE: II n'y a pas moyen de finir le premier point de l'ordre du jour?

M. SAINT-PIERRE: Je ne vois pas d'objection. Est-ce que, d'habitude, vous arrêtez à onze heures de travailler? On a encore les gens...

M. MORIN: On nous a donné une pile de documents et nous aimerions avoir le temps de les parcourir pour pouvoir interroger intelligemment nos invités, demain. Si on nous avait remis ces documents il y a trois jours, nous aurions eu le temps de les parcourir et nous ne serions pas exposés à poser des questions oiseuses. Le ministre comprendra facilement que, si les réponses à nos questions se trouvent dans ces documents, nous ferions perdre leur temps de nos invités en leur posant à nouveau les questions.

M. SAINT-PIERRE: Je pense que si vous posez les questions les gens de l'Hydro-Québec peuvent facilement vous indiquer où se trouvent les réponses. On peut avancer le débat. Il me semble qu'on a mis tellement de temps à démarrer cet après-midi qu'on ne devrait pas s'arrêter. Continuons. Il n'est pas question de terminer aujourd'hui, mais cela nous donne une heure de temps pour poser des questions. A tous les jours en Chambre, nous recevons des questions de l'Opposition. Vous ne nous avertissez pas d'avance. On tente de répondre à vos questions.

M. LESSARD: ...que le ministre ne vient pas trop souvent.

M. SAINT-PIERRE: Ah! Je vous demande pardon.

M. LESSARD: II faut dire que le ministre de l'Industrie et du Commerce...

M. SAINT-PIERRE: ...les présences.

M. LESSARD: ...ne vient pas trop souvent.

M. SAINT-PIERRE: Trop d'investissements.

M. MORIN: A deux reprises, récemment, j'ai eu des questions à vous poser et vous n'y étiez pas.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On peut revenir sur la motion d'ajournement, je crois,...

M. MORIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): ...et non pas sur les présences en Chambre, si vous voulez bien avancer la discussion.

M. LESSARD: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions à demain.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Est-ce qu'il y a d'autres membres de la commission qui veulent parler? Alors, s'il y a une motion d'appelée, la motion est la suivante: C'est que l'ajournement soit prononcé jusqu'à demain.

M. ROY: Demain, étant donné que la Chambre commence demain matin, à dix heures.

M. MORIN: M. le Président, je regrette d'insister. Mais si le gouvernement avait fait en sorte que nous ayons tous les renseignements en provenance de l'Hydro-Québec, il y a trois jours ou même il y a deux jours, nous aurions pu les parcourir. Nous sommes aux prises avec près de 1,000 pages de texte. Il nous faut au moins nous laisser la nuit pour essayer de consulter les plus importants.

Je veux bien que nous procédions mais nous allons poser nécessairement des questions qui trouvent leurs réponses dans les documents, ce qui me paraît être une perte de temps. Je regrette d'insister mais j'ai une impression en regardant toute la situation, la façon dont les documents nous sont remis au dernier moment ; quelquefois même il a fallu insister pour avoir les documents entre les mains au moment où ces messieurs de l'Hydro-Québec commençaient à parler. Quand je considère ça, plus le fait que vous voulez pousser ce soir jusqu'à minuit, je me dis qu'il y a là une tactique et je le déplore.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, la seule tactique du gouvernement, c'est de faire travailler le plus rapidement possible l'ensemble des commissions de l'Assemblée nationale. Nous avons beaucoup de besogne à abattre. Je pense que les membres de l'Opposition seront les premiers, à la mi-juillet, à nous reprocher de ne pas avoir eu le temps nécessaire à la fois au projet de loi no 22 et à la commission de l'Hydro-Québec.

M. MORIN: Non.

M. SAINT-PIERRE: Un instant, M. le Président. Je pense qu'il faut se rappeler que, finalement, les gens de l'Hydro-Québec — si on recule plusieurs années en arrière, on pourra voir l'évolution — nous fournissent des documents simplement pour faciliter l'expression d'une revue de l'année. Ce n'est pas un interrogatoire d'un témoin qu'on fait. On ne tente pas de bâtir une preuve. On tente, le plus logiquement possible, de revoir l'année en cours de l'Hydro-Québec. C'est le sens de la loi. On fournit le plus de détails possible et on tente progressivement de faire comprendre aux membres de l'Opposition le travail qui a été accompli et quelles sont les perspectives d'avenir. Il me semble qu'il reste encore une heure aujourd'hui et qu'on peut faire cela.

M. LESSARD: D'abord, je dois répondre au ministre de l'Industrie et du Commerce que ce que nous avons reproché, justement, au gouvernement, c'est de commencer les sessions passablement en retard. Lorsque nous commençons les sessions en retard, nous arrivons à un rythme de travail qui est absolument inhumain. Comme le disait le député de Beauce-Sud, c'est que nous autres, nous n'avons pas trois "shifts" comme Opposition comme vous les avez, justement comme députés libéraux.

M. SAINT-PIERRE: Vous avez un tiers de job et nous avons un job à plein temps.

M. LESSARD: Je pourrais aussi poser la question suivante au ministre. Je ne demande pas de réponse. Est-ce que le ministre a conscience que nous jouons avec un projet de $12 milliards? Lorsque nous en avons discuté en 1972, nous avions tout prévu et ce projet était prévu au montant de $5.8 milliards. Nous sommes rendus actuellement à $12 milliards, calculés sur un taux d'inflation de 7 p.c, ce qui veut dire que ces chiffres ne sont encore que des estimations.

M. le Président, est-ce qu'on pourrait demander au ministre, au moins, avant de s'engager strictement sur le projet de la baie James, que nous ayons la possibilité, comme députés de l'Opposition, de vérifier les documents qui ont été déposés par M. Boyd et qui me paraissent fort importants? Ils sont d'autant plus importants qu'il s'agit d'un projet d'une ampleur considérable.

Je pense, M. le Président, que, jusqu'ici, il a fallu se battre pour obtenir des documents, pour obtenir des informations sur un projet aussi important. Ce qu'on vous demande tout simplement — ce qui me paraît fort logique, puisque nous autres, c'est depuis dix heures ce matin qu'on siège à des commissions — c'est de nous permettre, entre 11 heures 10 ce soir et dix heures demain matin...

M. SAINT-PIERRE: Sept heures, ce matin. Sept heures!

M. LESSARD: ... de voir les documents qui ont été déposés par M. Boyd. Je pense que c'est quand même fort important.

M. MASSE: Est-ce que vous seriez prêt, justement, à passer à ce projet de $12 milliards?

M. MORIN: Non, nous ne sommes pas prêts à passer au projet de $12 milliards.

M. MASSE: Vous avez encore des questions sur les deux premières parties?

M. MORIN: Nous n'en sommes pas encore au projet de $12 milliards. Nous avons énormément de questions, dont certaines reçoivent une réponse dans les documents qui nous ont été remis. M. le Président, je regrette, de revenir à la charge. Ce n'est pas l'Opposition qui a décidé de convoquer l'Hydro-Québec le 3 juillet, en fin de session, au milieu des vacances. Cela aurait pu être fait au mois de mars ou avril ou encore au mois de mai.

M. PERREAULT: Le rapport n'était pas complété.

M. MORIN: Alors, cela aurait pu être fait en mai et, en ce qui nous concerne, nous commençons à voir là-dedans une tentative de nous empêcher de faire notre métier proprement.

M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je trouve qu'il y a trop de boulot à abattre pour perdre beaucoup de temps sur des questions de procédure. On peut passer une heure sur la procédure et nous allons perdre notre temps. Je pense que les députés de l'Opposition trouvent que l'activité de 1'Hydro-Québec est fort importante au Québec et je demande le vote sur la motion qui est sur la table.

M. ROY: M. le Président, avant que la motion soit mise aux voix, j'aimerais ajouter un commentaire. D'ailleurs, on se rappellera la position que nous avons maintenue à l'Assemblée nationale lorsque M. Gérard D. Levesque a présenté cette motion. Nous avons dit que le gouvernement n'avait pas raison. Je pense qu'il n'y a pas un conseil d'administration d'une entreprise le moindrement sérieuse qui étudierait des projets de cette envergure avec la pression que semble vouloir mettre le gouvernement. Je comprends qu'il a... Si vous n'appelez pas cela de la pression, je me demande ce que c'est?

M. SAINT-PIERRE: Nous voulons vous donner une heure de plus.

M. ROY: Prenons le temps d'examiner les docuements qu'on nous a donnés, de les étudier, de nous préparer et demain nous reviendrons en commission parlementaire travailler dans des heures normales, même si les heures normales ici, à l'Assemblée nationale, ce n'est déjà pas normal dans les entreprises.

Je pense qu'il y a un point qu'il est important de mentionner ici, c'est que le gouvernement lui-même — ce n'est pas de moi — a considéré le projet de la baie James comme étant le projet du siècle. On nous a parlé de $6 milliards, on est rendu à $12 milliards; on nous a parlé d'une hausse du taux d'électricité de 4 p.c, on est rendu à l0 p.c. on veut encore mettre la pression pour tenter de faire en sorte que l'Opposition ne soit pas en mesure de faire son travail. Peut-être que si on avait eu moins de pression dans le passé, des choses auraient pu être évitées.

Je pense que la motion devrait être acceptée

de façon qu'on ne prenne pas une heure pour la discuter pour finalement l'accepter. Acceptons-la tout de suite et demain matin nous reviendrons en commission parlementaire et nous pourrons continuer notre travail d'une façon sérieuse, à tête reposée. Si la nuit porte conseil, je pense que le gouvernement en a besoin.

M. KENNEDY: On devrait suivre la recommandation du chef de l'Opposition de convoquer la commission au mois de mars parce que je remarque que la plupart des documents sont datés de juin et juillet 1974. Cela aurait été beaucoup moins long.

M. LESSARD: Si l'Hydro-Québec avait été convoquée avant...

M. ROY: Ce qui prouve que certains ministériels ont besoin...

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le vote a été demandé sur la motion d'ajournement. Alors, M. Morin, pour ou contre?

M. MORIN: En faveur.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Ciaccia?

M. CIACCIA: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Houde (Abitibi-Est)?

M. HOUDE (Abitibi-Est): Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Giasson (L'Islet)?

M. GIASSON: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Lessard (Saguenay)?

M. LESSARD: Pour.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Massé?

M. MASSE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Perreault?

M. PERREAULT: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Saint-Pierre?

M. SAINT-PIERRE: Contre.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, six contre, deux pour.

M. ROY: Un instant, M. le Président, je fais partie de la commission et on ne m'a pas demandé mon opinion.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): J'ai, comme représentant du Parti créditiste, M. Samson, et personne ne m'a demandé de faire des changements à la commission.

M. ROY: Je m'excuse, vous me l'avez demandé au début, j'ai dit que je prenais la place de M. Samson, lorsque nous étions dans l'autre salle, avant d'arriver ici. Je n'ai pas cru nécessaire de revenir sur la question. Alors, si ça n'a pas été fait, je pense que c'est le temps de le faire.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): En tout cas, je fais le changement avec plaisir.

M. LESSARD: Cela vait été demandé à l'autre salle.

M. ROY: Cela avait été demandé à l'autre salle.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je l'ai demandé et je n'ai eu aucune réponse. C'est pour ça que je n'ai pas considéré le changement.

M. ROY: J'ai dit oui.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, disons que je le change pour le moment. Alors, ça va faire trois contre six, de toute façon c'est...

M. ROY: Bon, d'accord.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... pour. La commission continue jusqu'à minuit. Est-ce qu'il y a encore des questions à poser aux membres de l'Hydro-Québec?

M. LESSARD: II faut dire que nous avions quand même une entente ce matin avec le ministre des Richesses naturelles qui nous permettait d'ajourner à onze heures.

M. MASSE: M. le Président, je tiens à rectifier qu'il n'y a jamais eu d'entente. On a dit au départ qu'on devait finir à minuit et qu'on verrait, vers onze heures; il semble qu'on ait commencé à discuter les prévisions de la demande et qu'on est toujours sur cette question. Je ne vois pas pourquoi on serait à court de questions.

M. LESSARD: Non, on n'est pas à court de questions du tout.

M. MORIN: M. le Président, le ministre fédéral de l'Energie, M. Donald MacDonald, a annoncé récemment la possibilité de construire deux usines d'uranium enrichi au Québec avant 1980. Ces deux usines exigeraient chacune 2,000,000 à 2,500,000 kW d'énergie. Est-ce qu'il y a eu consultation entre le ministère fédéral et l'Hydro-Québec? Je pourrais poser également la même question au ministre des Richesses naturelles. Et comment ces projets

s'insèrent-ils dans la politique de l'Hydro-Qué-bec?

M. GIROUX: La première question, s'il y a eu une conversation avec le ministre fédéral au sujet de l'uranium enrichi, moi je n'en ai jamais eu, je ne sais pas si d'autres gens en ont eu. Au point de vue de notre propre ministère, le ministère a demandé qu'on regarde les possibilités d'établissement d'uranium enrichi dans la province de Québec. M. le ministre a nommé une personne qui est chargée de coordonner les différentes demandes qui nous sont faites. Nous avons eu une demande de la firme Brinco qui a déclaré publiquement qu'elle serait intéressée à étudier les possibilités de créer une usine d'uranium enrichi dans la province de Québec.

Nous avons eu la même demande d'un comité français, dans lequel il y a des Canadiens comme participants, la possibilité de créer un corsortium pour étudier l'établissement d'une usine d'uranium enrichi dans la province de Québec. Tous les gens nous ont demandé, ces deux unités, s'il nous était possible de livrer l'énergie soit en 1979, soit en 1980. L'Hydro-Québec a dit que nous ne croyions pas qu'il était possible de s'engager à livrer de l'énergie dans ces chiffres demandés avant 1983. Actuellement, il y a des démarches qui se font en Europe et ici sur ces possibilités. Le tout représente un programme d'étude. Il peut y avoir des études très préliminaires par exemple, comme on peut en faire simplement pour voir la possibilité normale; il peut y avoir des études plus poussées.

Les deux groupes concernés nous ont dit que ça prend au moins de 18 à 24 mois pour faire des études. Actuellement, on croit qu'il y a des gens qui sont prêts à faire des études, mais on n'a pas eu la confirmation que ces gens feraient des études avancées. Brinco a déclaré qu'ils avaient fait des études préliminaires. Le groupe français a fait des études parce qu'ils ont une usine, ils en ont construit une en France; ils ont des études de base de faites. Il y a des annonces qui ont été faites par le gouvernement fédéral. On a dit dernièrement qu'ils avaient demandé aux autorités de Washington la possibilité que le gouvernement canadien ait accès à leurs procédés.

Je ne connais pas la réponse du gouvernement fédéral à Washington, mais le gouvernement fédéral à Washington avait déjà déclaré qu'il serait favorable à ce qu'il y ait une usine d'uranium en dehors du pays. Je crois qu'on avait certainement le choix ou bien leur idée était vers le Canada. Actuellement c'est extrêmement prématuré. Il y a plusieurs facteurs dans ces choses-là. Il faudra absolument qu'avant que l'Hydro-Québec regarde ces possibilités on regarde s'il y a des meilleurs usages à faire avec 2,500 MW. Est-ce que des usines d'uranium enrichi pourront fonctionner avec des coûts de tarif tels qu'il faudra peut-être leur demander avec des constructions nouvelles?

Vous pouvez prendre une rivière qui a une possibilité d'aménagement de 2,500 MW et dire: On va le faire pour cette chose et ils paieront le prix que ça coûtera. Ce sont des possibilités. Techniquement, je ne suis pas convaincu que les futurs producteurs d'uranium enrichi seraient prêts à s'engager sur ces bases-là. Vous avez des producteurs d'uranium enrichi qui actuellement voudraient avoir de l'énergie à 5 mils ou à 6 mils ou des prix comme ça; c'est impensable. A ces prix-là. C'est mon opinion personnelle. On n'est pas allé plus loin que ce domaine-là.

On est prêt à coopérer avec tout groupe qui veut étudier et notre centre de recherche et tout ça sont à la disposition de tout groupe. Si on pouvait économiquement avoir une usine d'uranium enrichi au Québec, on le ferait.

M. MORIN: Pour l'exportation d'uranium enrichi?

M. GIROUX: C'est le seul moyen dont on puisse se servir dans le moment.

M. MORIN: Non, je le sais bien; je parle de projets d'avenir.

S'il s'agit d'uranium qui est exporté, puisque, si les Français sont intéressés, c'est sans doute parce qu'ils veulent utiliser l'uranium enrichi chez eux, dans leurs propres réacteurs. Il s'agit donc, en fait, d'exportation d'énergie.

M. GIROUX: Actuellement, il n'y a pas de permis accordé à des usines d'uranium enrichi par l'Energie atomique du Canada. Il y en a simplement sur le procédé CANDU. Il y a peut-être de l'avenir dans cette chose-là. Remarquez bien que ça peut se développer; il y a des choses qui peuvent se développer. C'est pourquoi on ne doit pas ignorer ces choses-là. Mais de là à recommander au gouvernement de se lancer dans cette chose-là; on veut y participer, mais on veut y regarder deux fois.

M. MORIN: Mais vous êtes bien d'accord que, si l'uranium enrichi était exporté, ce serait, en fait, de l'exportation indirecte de l'énergie électrique québécoise.

M. GIROUX: Absolument. Pour une partie, naturellement, parce qu'on n'est pas consommateur, actuellement.

M. MORIN: Est-ce conciliable avec vos politiques à long terme d'exporter directement ou indirectement de l'énergie de la sorte?

M. GIROUX: Ce n'est pas notre but. Notre but, n'est-ce pas, est de fournir de l'énergie à la province de Québec et d'essayer d'amener le maximum possible d'industries dans la province de Québec. A ce moment-là, est-ce qu'il y a une différence entre une industrie qui fabriquerait et qui exporterait d'autre chose que de l'ura-

nium? C'est au gouvernement de juger si c'est valable au point de vue des installations manufacturières.

M. MORIN: C'est parce que d'autres processus manufacturiers font appel à de la main-d'oeuvre plus abondante et créent du développement économique sur place, tandis qu'une usine d'uranium enrichi, ça crée très peu d'emplois.

M. SAINT-PIERRE: II ne faudrait pas oublier lorsqu'on poursuit — je pense que le Parti québécois est avec nous — des objectifs pour changer la structure industrielle du Québec, que la transformation pour l'enrichissement de l'uranium est peut-être le procédé où la valeur ajoutée par homme employé, la productivité, les salaires, l'effet bénéfique sur la balance des paiements sont, parmi les groupes manufacturiers, sûrement les plus grands. En d'autres termes, on peut se poser la question: Est-ce qu'un pays qui aurait, pour différentes raisons, une partie importante des usines d'uranium enrichi qui ont été évaluées pour l'an 2000 à autant que quinze ou seize usines d'uranium enrichi au monde, un pays qui aurait un marché important là-dedans, artificiellement, peut avoir le même avantage que les pays arabes peuvent avoir dans le moment pour l'or noir? Cela ne doit pas nous faire oublier que les études n'ont pas été complétées sur cela. Fondamentalement, la question demeure: Comme on n'imprime pas d'argent et comme on ne produit pas d'électricité du jour au lendemain, est-ce que, finalement, ce n'est pas préférable de la réserver à d'autres types d'usage? Je pense que la question, ce n'est ni blanc ni noir. Elle demande un approfondissement.

M. LESSARD: M. le Président, je voudrais que ça me soit confirmé bien clairement. Dans les prévisions que vous avez soumises cet après-midi pour 1985, je pense, n'est pas comprise la possibilité d'installation de deux usines d'uranium enrichi.

M. GIROUX: II n'y a même pas un projet. On dit ceci: Si, par exemple, ça devenait intéressant pour le développement économique, il y a plusieurs facteurs à analyser pour faire face à la situation de l'an 2000. Vous dites qu'il n'y a pas beaucoup d'emploi. Ces chiffres-là ne sont pas les nôtres, mais les chiffres qui ont été publiés montrent ici que, durant la construction, vous aurez plus de 9,000 emplois directs, dont 5,000 sur place. Les emplois indirects peuvent aller jusqu'à 20,000 ou 25,000. C'est très haut, mais ce ne sont pas nos chiffres.

A l'exploitation, c'est environ 1,400 et ça peut employer environ 2,000 personnes indirectement. Pour nous, si cette chose s'avérait rentable pour l'avenir — c'est une longue analyse, n'est-ce pas? — il faudrait développer d'autres sites ou d'autres moyens de production d'énergie que ce que nous avons dans nos programmes.

M. LESSARD: Ce qui m'inquiète, M. Gi-roux, lorsque je vous pose cette question, c'est que dernièrement le candidat libéral du comté promettait à la région de Manicouagan l'installation d'une usine d'uranium enrichie, un autre ballon qui vient de se dégonfler.

M. MORIN: Est-ce que je pourrais poser une question semblable au sujet des projets d'aluminerie? Il me semble qu'au crédit du ministère de l'Industrie et du Commerce, j'ai eu l'occasion d'interroger le ministre sur cette question, des projets d'aluminerie, sur la Basse Côte-Nord notamment. Le ministre avait semblé indiquer qu'il n'était pas intéressé, qu'il avait même peut-être refusé un projet de ce genre. Est-ce que l'Hydro-Québec a été saisie de la possibilité d'une aluminerie considérable sur la Basse Côte-Nord qui ferait appel à une quantité d'électricité également considérable?

M. SAINT-PIERRE: Rectification, M. le Président, je n'ai jamais parlé... Le projet spécifique dont on a parlé n'avait pas été identifié à une région. J'ai dit que dans des projets importants d'investissement, de plus en plus, depuis trois ou quatre ans, comme l'investissement manufacturier au Québec a connu des hausses qu'on connaît très bien, nous pouvions de plus en plus nous permettre d'être plus sélectifs pour le type d'investissement, de nous assurer que l'investissement pouvait apporter à long terme des bénéfices à l'économie québécoise.

M. MORIN: II s'agissait bien d'une aluminerie.

M. SAINT-PIERRE: Que dans le cas d'une aluminerie, nous pouvions poser des questions sur l'effet bénéfique d'entraînement, sur le degré de transformation et autres considérations semblables.

M. GIROUX: M. le Président, nous avons été sollicités à différentes périodes par des groupes étrangers. Je n'ai pas eu connaissance d'avoir été sollicité par des groupes canadiens au sujet d'une aluminerie.

Nous avons reçu ces gens, regardé leurs projets et nous leur avons demandé d'avoir un contact avec le ministère de l'Industrie et du Commerce. Le ministère de l'Industrie et du Commerce a aussi reçu ces gens et a discuté avec eux. Il n'a jamais été question d'établir des alumineries, de réserver des montants ou de fixer des prix ou des choses de ce genre. Seulement, nous avons souvent de ces demandes d'étrangers qui viennent ici, qui veulent s'installer. On les a toujours envoyés, d'ailleurs, au ministère de l'Industrie et du Commerce avec qui on est en contact continuellement au

sujet de toute industrie. Toutes nos banques d'informations sur ce qu'on a, où sont nos surplus, etc. sont, d'ailleurs à la disposition de ce ministère.

M. LESSARD: M. le Président, au mois de mars 1974, le ministre des Richesses naturelles annonçait la création d'un comité spécial sur l'énergie dont le mandat serait de conseiller le ministre et le conseil des ministres sur les grandes orientations à prendre en matière énergétique. Est-ce que je pourrais demander à l'Hydro-Québec si elle a été consultée et si elle est membre, comme Hydro-Québec, de ce comité spécial?

M. GIROUX: Nous avons été invités à envoyer un représentant qui est allé aux assemblées. Ce comité a été formé. Il y a eu une demande assez urgente, au moment de la crise, par le ministre des Richesses naturelles, de changer un peu l'orientation de la publicité, parce qu'il y avait une rareté d'énergie.

Alors, jusqu'à présent, ce sont les choses que je peux rapporter. Maintenant, ces études, je ne suis pas plus familier que ça avec les études mêmes sur l'énergie parce que la partie électricité, le ministère a nos programmes en main, enfin il a nos vues.

Mais l'huile, le gaz et les autres moyens possibles sont du domaine de ce comité et non pas de l'Hydro-Québec comme telle.

M. LESSARD: Maintenant, est-ce que le ministre pourrait me donner des informations?

M. MASSE: Le comité a fonctionné vraiment au ralenti depuis deux ou trois mois parce que celui qui devait être responsable, au comité exécutif, a eu un travail urgent à effectuer. Les réunions intensives doivent reprendre au cours des prochaines semaines.

M. LESSARD: Bon. M. le Président, j'aurais, en ce qui me concerne, une dernière question, pour le moment en tout cas, à poser au président de l'Hydro-Québec concernant son rapport.

Etant donné justement cette demande considérable ou ces prévisions considérables de la demande en énergie électrique, est-ce que je pourrais, malgré le fait qu'on en ait quelque peu parlé tout à l'heure, demander à l'Hydro-Québec quelle est sa politique maintenant en matière de promotion de l'énergie électrique? Etant donné justement qu'on faisait beaucoup de publicité dans le passé, est-ce que...

M. GIROUX: Au point de vue de la publicité, naturellement, on a essayé d'avoir une publicité rationnelle, une publicité où on fait un meilleur usage de l'électricité. Cette publicité a été continuée. Si on a...

M. LESSARD: Mais je veux dire pour amener les gens à consommer plus d'électricité.

M. GIROUX: Non, cela a été abandonné. M. LESSARD: Cela a été abandonné.

M. GIROUX: Cela a été abandonné. Naturellement, il y avait des engagements de pris envers des gens auxquels on avait fait des promesses, s'ils s'installaient tout à l'électricité, tous ces domaines. Tous les engagements ont été respectés.

Mais, actuellement, on ne donne plus de montants ou on ne donne plus d'aide aux gens directement, comme on le faisait autrefois dans les campagnes, pour promouvoir la vente du tout électrique.

M. LESSARD: Et je pense aussi que la transformation exigeait des coûts considérables et, de plus, l'installation électrique pour chauffer les maisons demandait des normes très strictes, qui étaient plus ou moins appliquées.

M. GIROUX: On le conseille encore, et dans notre publicité on conseille encore aux gens de ne pas s'installer avec des systèmes électriques à moins qu'ils aient le système Novelec, qu'ils aient le système d'isolateurs, qu'ils soient absolument protégés. Je crois que c'est dans l'intérêt du public qu'on continue cette publicité et ces campagnes.

M. LESSARD: Dernièrement, en fait, depuis la crise pétrolière, cette publicité positive qu'on faisait sur la promotion électrique est devenue pratiquement une publicité négative puisqu'on dit: Maintenant, pensez-y deux fois avant de convertir votre système de chauffage à l'électricité. Est-ce que c'est une modification à la promotion?

M. GIROUX: Bien, c'est une modification dans l'approche. Naturellement, lorsque l'on fait une campagne de publicité pour vendre les systèmes, on le fait dans le sens d'une promotion de vente. Actuellement, on fait une promotion, comme je vous le mentionnais tantôt...

M. LESSARD: D'épargne.

M. GIROUX: Je crois qu'il est très important que les gens ne construisent pas ou ne changent pas leur système à moins qu'ils soient très très bien isolés et qu'ils n'aient pas de problèmes à surmonter au point de vue de la construction de leur maison.

M. LESSARD: Autrement dit, actuellement, étant donné le défi pour l'Hydro-Québec dont vous parlez, vous parlez beaucoup plus, maintenant, dans votre publicité, d'épargner l'électricité que d'en dépenser.

M. GIROUX: Oui, d'en faire un meilleur usage, si vous voulez. Il y a toujours un point assez dangereux, n'est-ce pas? Une certaine compagnie aurait fait une grande campagne

pour sauver des choses. Cela s'est avéré le meilleur agent de vente qu'elle n'ait jamais eu. Alors, il ne faut peut-être pas pécher par cet excès non plus.

M. MASSE: Vous dites que certaines compagnies ont fait des campagnes de publicité pour restreindre la consommation et qu'il y a eu plus de consommation?

M. GIROUX: Elle a augmenté. Je ne sais pas si c'était dû à la campagne mais cela a eu un effet. Vous savez, souvent on laisse le voisin s'occuper d'épargner de l'énergie.

M. MORIN: M. le Président, j'aimerais maintenant revenir au déficit que nous mentionnions tout à l'heure et le comparer avec l'entrée en service des kW de la baie James, année après année. Est-ce que vous pourriez, M. le président de l'Hydro, nous donner un tableau précis de l'échéancier d'entrée en service?

M. GIROUX: Je vais demander à M. Boyd, qui a présenté le programme de la Société d'énergie, de donner réponse à votre demande.

M. MASSE: M. le Président, si je comprends bien, les articles 1 et 2 seraient terminés et on passerait maintenant à l'étude du projet La Grande.

M. MORIN: C'est-à-dire qu'il y a un joint, ici, entre la demande, qui faisait l'objet de notre entretien avec nos invités, ce soir, et la question que je viens de poser, qui a trait à la baie James. La charnière, c'est tout simplement que la baie James est appelée à répondre à la demande après 1980. Donc, nous sommes à cheval sur les deux questions.

Mais je n'aurais pas d'objection, si c'est ce que le ministre allait proposer, à ce que nous ajournions à demain matin!

M. MASSE: Je propose qu'on passe à l'article 3.

M. BOYD: M. le Président, il me fait plaisir de répondre. Les premières unités vont être installées à LG 2. En 1980, il y aura 1,926 MW; en 1981, 1,926 MW; en 1982, 1,284 MW à LG 2, 348 MW à LG3 et 210 MW à LG 1.

M. MORIN: Je m'excuse, est-ce que ces chiffres se trouvent dans l'un des rapports que vous nous avez remis?

M. BOYD: Je ne crois pas.

M. MORIN: Alors je vous demanderais d'aller plus lentement, pour que je puisse les noter.

M. BOYD: Parfait. Alors, en 1980... M. MORIN: 1,926 MW.

M. BOYD: 1,926 MW.

M. MORIN: Cela, c'est LG 2?

M. BOYD: LG 2, oui.

M. MORIN: Oui.

M. BOYD: Si vous voulez plus de détails, ce sont six unités. En 1981, à LG 2 encore, 1,926 MW.

M. MASSE: C'est la répétition de 80 ou si ça s'accumule?

M. MORIN: Six unités de plus.

M. BOYD: Pour expliquer davantage, à LG 2 il y aura 16 unités. Donc je reprends: en 1980, six unités qui donnent 1,926 MW; en 1981, six unités qui donnent 1.926MW,...

M. MORIN: Oui, additionnelles.

M. BOYD: ...1982, à LG 2, quatre unités qui donnent 1,284 MW, plus deux unités à LG 1 qui donnent 210 MW, plus deux unités à LG 3 qui donnent 348 MW. En 1983, six unités à LG 1 qui donnent 630 MW; six unités, à LG 3, qui donnent 1,044 MW. En 1984, à LG 1, deux unités qui donnent 210 MW; à LG 3, deux unités qui donnent 348 MW; à LG 4,...

M. MORIN: Vous allez un peu vite, M. Boyd.

M. LESSARD: Est-ce qu'on pourrait reprendre à 1983?

M. BOYD: En 1983, d'accord. En 1983, six unités à LG 1.

M. MORIN: C'est cela, 630 MW.

M. BOYD: Six unités à LG 3,1,044 MW. En 1984, deux unités, 210 MW; deux unités à LG 3, 348 MW; six unités à LG 4, 1,542 MW. En 1985, deux unités à LG 4, 514 MW, et c'est tout.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Guise a quelque chose à ajouter, je crois.

M. DE GUISE: Au cas où vous voudriez faire la réconciliation avec les chiffres, le déficit que j'ai donné tout à l'heure, n'oubliez pas que...

M. MORIN: Oui, c'est la question que j'allais vous poser.

M. DE GUISE: ... les déficits sont cumulatifs. Par exemple, pour savoir ce qu'il faut ajouter entre 1980 et 1981 par rapport à 1979, 1980, il faut faire la différence entre 2426 et 759. Les déficits sont cumulatifs, alors si on ne

fait rien en 1979-80, si on n'installe pas le 759 qui manque, l'année suivante le déficit est de 2428. Mais si on a comblé le déficit de 759, on n'a qu'à ajouter la différence entre les deux ou 1,667, l'année suivante, si vous me suivez.

L'année suivante, si on n'a rien fait les deux premières années, il nous manque 4,179 MW. Mais si vous avez pris soin du déficit de l'année précédente de 2,426, il ne vous reste à ajouter, dans l'année 1981-82, que la différence entre 4179 et 2428.

M. MORIN: Oui.

M. SAINT-PIERRE: M. De guise, dans le cas des déficits que vous avez donnés, est-ce que vous n'utilisez pas l'année hydraulique qui va du 1er octobre au 1er octobre, par rapport, dans le cas de M. Boyd, à l'année civile?

M. DE GUISE: Oui, il y a cette différence-là.

M. LESSARD: Pour que ce soit plus clair, est-ce qu'on pourrait avoir, étant donné que les unités s'ajoutent, les déficits ou les surplus d'année en année, une fois que ces unités sont ajoutées? On n'a pas de machine à calculer ici à côté, malheureusement.

M. BOYD: On peut donner ça ici, si vous voulez.

M. LESSARD: Si vous avez un tableau, on pourrait le déposer aussi.

M. BOYD: Pas d'objection, il faudrait en faire des copies, je pense qu'il n'y en a pas pour tout le monde.

M. LESSARD: En tout cas, pas ce soir mais donnez-nous le. On pourrait au moins, si c'est possible, en faire des copies avant minuit ce soir pour qu'on puisse en prendre connaissance entre minuit et dix heures du matin.

M. BOYD: Alors, est-ce que vous voulez que je les cite?

LE PRESIDENT (M. Lafrance): On m'informe que d'ici dix minutes on pourrait avoir les copies, si vous voulez nous prêter la vôtre, M. Boyd, s'il vous plaît.

M. LESSARD: En attendant d'obtenir des copies, quitte à revenir sur ce sujet, dans votre rapport, M. Boyd, vous parlez aux pages 8, 9 et 10 des événements de mars. Il y a eu différentes estimations concernant les retards que ça pourrait causer, suite à ces événements, dans l'aménagement de la baie James. On a même parlé de possibilité de retard d'un an. Est-ce qu'on pourrait savoir quelles sont les estimations? D'abord, est-ce qu'on pourrait savoir s'il est exact que ce retard peut aller jusqu'à un an? Est-ce qu'on peut savoir quelles sont les estima- tions que vous avez faites qui pourraient être apportées par ces retards? Est-ce que c'est calculé dans le coût que vous nous avez donné aujourd'hui, soit $11.9 milliards?

M. BOYD: Premièrement, il y a un chiffre qui a été mentionné déjà, environ $1,500,000, qui était pour les dommages directs, le feu, le saccage, etc.

M. LESSARD: $1,500,000?

M. BOYD: Environ $1,500,000, oui, pour les dommages directs. Ensuite, les dommages indirects, par exemple, on avait un certain nombre d'entrepreneurs qui étaient à l'ouvrage là-bas et qui avaient de l'équipement, des matériaux, du personnel de cadre qui était en place et qui a été obligé d'arrêter pendant 51 jours. Donc, il y a aussi le décalage dans le temps pour leurs contrats. Vous voyez tout de suite que tout ce monde nous a écrit pour faire des réclamations pour l'arrêt de travail de 51 jours qui n'était pas leur fait; c'était le fait d'autres.

Donc, il y a ces réclamations. En plus de ça...

M. LESSARD: Vous ne pouvez pas estimer pour le moment?

M. BOYD: C'est ça. Je ne voudrais pas... je vous explique ça pour essayer de justifier ma réponse à la fin.

M. LESSARD: Je vous vois venir.

M. BOYD: Vous savez qu'une réclamation, on en a peut-être six, sept ou huit à venir. On ne les a pas discutées, on ne les a pas réglées encore. Si je donne un chiffre, j'ai éventé la mèche. Il y a l'autre facteur qui est le retard possible. C'était dans nos plans de détourner la rivière dans les deux tunnels de dérivation, en novembre ou décembre cette année. A cause de ces troubles, c'est impossible de le faire. Seulement, dans notre malheur, on a été fortuné d'une certaine façon. L'entrepreneur qui avait des contrats pour les tunnels de dérivation, c'est Spino et l'entrepreneur qui a soumissionné le plus bas pour le barrage principal — c'est la phase suivante; on dérive, puis on fait le barrage — c'est un corsortium qui a été formé de Impregilio-Spino. Donc, c'est plus facile de négocier quand c'est en partie une continuation de la même entreprise. Heureusement, également, l'entrepreneur qui a soumissionné est un des plus considérables.

En résumé, il va être possible, à compter du mois d'avril 1975, de dériver la rivière en faisant des travaux supplémentaires, des corrections et un changement de programme qui va nous permettre de rattraper le programme prévu. On va pouvoir rattraper le retard grâce à des changements de programme; au lieu de dériver en décembre, on va dériver avant ou après le

mois d'avril, dépendant des crues qu'on aura le printemps prochain.

Ce n'est pas encore défini; ce sont les crues qui vont nous le dire. On dit après avril. Le programme de construction a été modifié pour que le barrage soit terminé à temps pour produire de l'énergie en 1980. Peut-être qu'on ne les aura pas au début de 1980, peut-être qu'on les aura plutôt vers la fin de 1980. Ce n'est pas encore définitif. Les besoins urgents du réseau sont pour l'automne 1980.

M. LESSARD: Donc, si vous ne les avez pas au début de 1980, mais à la fin de 1980, ça veut dire que ça pourrait aller jusqu'à un retard d'un an?

M. BOYD: Non, ce n'est pas un retard d'un an. Vous savez comme moi que la charge est à son minimum l'été et qu'elle augmente pour atteindre sa pointe en décembre. Les déficits qu'on vous montre, ce sont les déficits de décembre 1980; ce sont ceux qu'il faut aller rencontrer. Donc, on veut avoir les unités prêtes en septembre ou octobre pour être sûr qu'elles fonctionnent pour décembre. Je veux dire qu'on peut respecter le programme tel que prévu. Mais, là aussi, il y a des coûts additionnels pour avoir changé le programme. On n'a pas finalisé tous ces coûts, mais, si vous insistez beaucoup, on peut vous donner un ordre de grandeur...

M. LESSARD: Un ordre de grandeur.

M. BOYD: ... qui sera global. Ne me demandez pas de détails, si c'est pour les entrepreneurs, si c'est pour ceci ou si c'est pour ça.

M. LESSARD: Non, non. Je comprends votre décision. Il est certain que si vous me donnez un chiffre concernant les entrepreneurs et qu'il est assez élevé, les demandes des entrepreneurs vont s'équilibrer en conséquence. Je trouve cela tout à fait normal, M. le Président. Ce que je demande, c'est justement un ordre de grandeur.

M. BOYD: Ce pourrait être de l'ordre de $25 millions.

M. LESSARD: $25 millions, bon.

M. SAINT-PIERRE: C'est une décision importante qu'un homme a prise cette journée-là.

M. LESSARD: Oui, bien d'accord. C'est un ex-organisateur libéral, d'ailleurs.

M. ROY: Ce n'est pas toujours rassurant. M. MASSE: II a fait faire des recherches. M. LESSARD: Maintenant... UNE VOIX: ... dans quel comté, à part ça?

M. LESSARD: Dans quel comté? Est-ce que vous voulez qu'on précise? Il y a même eu arrestation pendant la journée des élections.

M. SAINT-PIERRE: Ce qu'il est important de tirer de cela, avec le chiffre de $25 millions qui porte à réfléchir — c'était évoqué dans le discours de M. Boyd — c'est jusqu'à quel point, dans nos sociétés, on peut se permettre, avec une collectivité de six millions qui est entrée dans un projet considérable qui, sur le plan économique, c'est pas indifférent, jusqu'à tel point dis-je, on peut être à la merci d'un individu quel qu'il soit dans nos sociétés pour, un bon matin, décider, en 1974, que cela a coûté... en gros, on dit que ça peut aller à $20 millions, $25 millions, $30 millions.

Je pense que ce qu'il est peut-être important de se rappeler — et peut-être que cela pourrait orienter l'action du gouvernement — c'est que si la même action avait été faite vers la fin des travaux, alors qu'on a un investissement dans le sol de $11 milliards et qu'on provoque une action, quelle qu'elle soit, qui reporte les travaux et qui nous fait manquer la période de décembre, là, l'action d'un individu — si on s'expose aux mêmes choses — ce n'est plus $20 millions mais c'est $1 milliard qu'elle coûte. $1 milliard, c'est substantiel.

M. LESSARD: Je suis parfaitement d'accord avec le ministre. Je suis d'autant plus d'accord que le 29 octobre dernier la démocratie était aussi à sa merci. Dans votre rapport, à la page 10, vous parlez d'une modification du recrutement de votre main-d'oeuvre. D'abord, je voudrais vous demander si, jusqu'ici, vous avez eu des problèmes de rareté de la main-d'oeuvre dans cette région. Rareté de la main-d'oeuvre non seulement au niveau du journalier mais au niveau des techniciens.

M. BOYD: J'aimerais qualifier ma réponse. Ce n'est pas tellement une rareré qu'une lenteur à les avoir.

M. LESSARD: Qu'une?

M. BOYD: Lenteur à les avoir.

M. LESSARD: Eh, monsieur, je pourrais donc vous en faire parvenir de mon comté, si je pouvais.

M. ROY: Quelles sont les causes? On parle de lenteur. J'aimerais bien qu'on nous indique quelles sont les causes de cette lenteur.

M. BOYD: Comme vous le savez, on a établi le système d'embauchage dont on parle ici et on insiste pour que ça fonctionne ainsi pour la meilleure protection de tous ceux qui y vont. Le système est assez bon. Il y a un certain rodage à y faire, et c'est pour cela qu'on a un peu de lenteur. On espère que ça va se corriger.

M. LESSARD: Là, vous modifiez votre embauche. Vous parlez, pas tellement de rareté, mais de lenteur. Vous aviez, à ma connaissance, un bureau de placement, je pense, pour la baie James. Je me demande s'il a bien fonctionné, en tout cas, ce n'est pas... Mais à ce moment-là, vous aviez trois possibilités comme bureau de placement. Vous aviez les centres de main-d'oeuvre du Québec, vous aviez les bureaux syndicaux, particulièrement, soit de la CSN soit de la FTQ. Quand vous parlez de lenteur, est-ce que le fait que ces trois bureaux n'étaient pas coordonnés expliquerait en partie la lenteur d'obtenir de la main-d'oeuvre qualifiée? Vous comprenez, M. Boyd, que si vous subissez une rareté de la main-d'oeuvre d'ici, par exemple, la fin des travaux, ça peut aussi avoir une conséquence sur l'échéancier des travaux.

M. BOYD: Je suis d'accord avec vous, mais ce qui m'inquiète beaucoup plus, ce sont les grèves qui sont possibles à tout moment, beaucoup plus que la lenteur. Je vous ai dit que le nouveau système qu'on avait établi entrafnait une certaine lenteur qu'on espérait roder. J'ai confiance que cela va se roder. Ce qui m'inquiète, ce sont les grèves.

M. ROY: Là vous parlez de grève, tout à l'heure, vous avez parlé de lenteur puis il a semblé, du moins c'est ce que j'ai cru déceler, qu'il y avait un problème réel au niveau de l'embauche. Maintenant, il y a évidemment des travailleurs qui sont engagés comme manoeuvres, 0 y a aussi des travailleurs avec des cartes de formation professionnelle, des gens qualifiés. Est-ce que vous éprouvez les mêmes difficultés lorsqu'il s'agit d'embaucher des manoeuvres que lorsque vous embauchez par exemple la main-d'oeuvre qualifiée? Est-ce que vous avez à faire face aux mêmes problèmes?

M. BOYD: C'est à peu près la même chose.

M. ROY: Maintenant, vous avez dit qu'il y avait des choses qui étaient en train d'être corrigées, mais j'aimerais bien savoir quelles sont les causes que vous avez décelées des lenteurs qu'il y a au niveau de l'embauche? Si je pose cette question, c'est parce que c'est bien important que la question soit posée. D'abord, si le fait d'avoir énormément de retard dans l'embauche ça peut retarder l'échéancier des travaux, comme vient de le dire le député de Saguenay, il y a aussi des gens qui demandent des informations, des gens qui sont intéressés à travailler dans le territoire de la baie James puis il semble qu'il y a des difficultés de se faire embaucher de ce côté-là.

M. BOYD: Vous savez sans doute aussi bien que moi que les syndicats aiment à utiliser leurs centres d'embauche beaucoup plus que les centres d'embauche du gouvernement. Nous, nous insistons pour que l'embauchage se fasse par le centre d'embauchage de la province.

Donc, cela amène un certain tiraillement. C'est d'ailleurs un point qui a été discuté à plusieurs reprises, soit ici à la commission parlementaire ou soit en Chambre, d'après les débats qu'on voit. Toujours, les instructions que la société avait, c'était de procéder par les centres d'embauchage de main-d'oeuvre de la province de Québec. C'était notre accord, notre désir aussi. C'est toujours ce que l'on a voulu.

Mais ce n'est un secret pour personne que les syndicats préfèrent leurs centres d'embauchage à eux.

M. ROY: Est-ce que vous pourriez nous donner des chiffres, par exemple, quant au pourcentage de la main-d'oeuvre qui a pu être embauchée par les centres de main-d'oeuvre des syndicats ainsi que par les centres de main-d'oeuvre du Québec?

M. BOYD: Avant les événements, je ne crois pas qu'on puisse donner de chiffres, je n'en ai pas. Depuis les changements, à peu près tous les gens qui y montent sont engagés par notre centre d'embauchage, qui lui travaille avec le Centre de main-d'oeuvre du Québec.

M. LESSARD: Vous avez votre propre centre de recrutement à la baie James. Il est situé à Montréal?

M. BOYD: Oui.

M. LESSARD: Situé à Montréal. Quelle adresse à Montréal?

M. BOYD: Sur la rue Crémazie. Attendez une minute.

M. LESSARD: Rue Crémazie? C'est une question pratique que je pose.

M. BOYD: 225 rue Crémazie est.

M. LESSARD: 225 rue Crémazie est. Bon.

M. BOYD: Voici comment ça fonctionne,...

M. LESSARD: C'est ça.

M. BOYD: ... si vous permettez.

M.LESSARD: C'est ça.

M. BOYD: Evidemment, la majorité des travaux sont confiés à des entrepreneurs. Les entrepreneurs doivent indiquer au Centre d'embauchage de l'Association des employeurs leurs besoins. Ils avisent s'ils ont besoin de menuisiers, de plombiers, d'électriciens, ils mentionnent les dates, etc. L'Association des employeurs ou son centre de recrutement transmet ses demandes au Centre de main-d'oeuvre du Québec et indique les besoins, les qualifications et les dates où les personnes sont requises.

Le Centre de main-d'oeuvre de Québec, vous le savez a également des bureaux à travers la province et ils font le recrutement pour nous, à travers la province. Les candidats sont dirigés vers le Centre de recrutement de l'Association des employeurs de la baie James, et les candidats sont envoyés à l'entrepreneur lui-même, qui a le dernier choix — c'est normal, je pense — de l'employé.

M. LESSARD: Mais vous dites, dans votre rapport — on va terminer en ce qui me concerne, la main-d'oeuvree — que le Centre de recrutement baie James effectue son recrutement auprès des centres de main-d'oeuvre du Québec — c'est ce que vous venez de me dire — et autres services appropriés du personnel. Pourriez-vous préciser "autres services appropriés du personnel"?

M. BOYD: Vous avez différentes possibilités qui s'offrent. D'ailleurs, le décret de la construction le prévoit. C'est le Centre de la main-d'oeuvre du Québec, ou si le Centre de la main-d'oeuvre du Québec ne peut pas fournir, on peut avoir recours aux centres d'embauchage des syndicats ou on peut laisser à l'entrepreneur le soin de recruter certains de ses employés lui-même. Mais la préséance est donnée au Centre de main-d'oeuvre du Québec. Vous avez compris ma réponse?

M. LESSARD: Oui. Alors, il reste que nous sommes rendus avec quatre bureaux de placement: Centre de recrutement baie James, Centre de la main-d'oeuvre du Québec, les bureaux syndicaux, quatre ou cinq. En tout cas, M. le Président, quant à moi... Il est minuit.

LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission ajourne ses travaux à demain matin, après la période des questions, soit environ vers onze heures.

(Fin de la séance à 23 h 56)

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