Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission permanente
des richesses naturelles
et des terres et forêts
Rapport des activités de
l'Hydro-Québéc
Séance du jeudi 4 juillet 1974
(Onze heures seize minutes)
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs! Pour la
séance d'aujourd'hui, voici les changements: M. Morin (Sauvé)
remplace M. Bédard (Chicoutimi), M. Massicotte (Lotbinière)
remplace M. Carpentier (Laviolette), M. Bacon (Trois-Rivières) remplace
M. Larivière (Pontiac-Témiscamingue) et M. Saint-Pierre remplace
M. Shanks.
Alors, M. le ministre des Richesses naturelles aurait un mot à
dire pour commencer la séance.
Taux de croissance de la consommation
d'électricité
M. MASSE: M. le Président, je veux simplement revenir à
une question posée par le député de Saguenay hier, tentant
de mettre en contradiction une de mes allocutions par rapport aux
prévisions de l'Hydro-Québec. En relisant mon texte, la chose est
très différente.
M. LESSARD: Vous pensez?
M. MASSE: Si vous permettez que je lise quelques paragraphes de ce
document, je pense qu'on revient à peu près à la position
ou aux prévisions de l'Hydro-Québec actuellement. Alors, je
disais à la page 15 de mon texte du 26 mars 1974...
M. LESSARD: Vous pouvez déposer le texte.
M. MASSE: Je pourrai le déposer par la suite, oui.
M. LESSARD: Article 177.
M. MASSE: ... que "si certaines études préliminaires que
nous avons entreprises et que nous devrons terminer durant le cours de
l'été s'avèrent justes et si la réalité des
données des années qui viennent correspond aux tendances
historiques, nous pouvons percevoir, premièrement, que le taux de
croissance de la consommation énergétique pour le Québec
aurait tendance à diminuer progressivement jusqu'en l'an 2000. Ce taux,
qui était annuellement d'environ 6 p.c. entre 1960 et 1970, tendra
à fléchir vers 3 p.c. vers 1990.
Cela rejoint les données contenues dans l'allocution du
président de la Commission hydroélectrique, M. Giroux, où
on dit qu'en somme le taux de croissance aux Etats-Unis a été,
jusqu'en 1972, de 3.4 p.c. et que cette tendance devrait se poursuivre. C'est
pour l'ensemble des sources énergétiques. Aussi, plus loin,
j'ajoutais que "la part relative des diverses formes d'énergie en l'an
2000 sera sensiblement la même qu'aujourd'hui si nos prévisions
préliminaires s'avèrent exactes. Nous prévoyons, en effet,
les consommations sectorielles suivantes pour le Québec, jusqu'en
1990..."
Les gens de l'Hydro-Québec mentionnaient que dans les quinze
prochaines années, on atteindrait près de 30 p.c. la
partie électricité alors que dans mon texte je mentionnais
27.1 p.c. Je voulais rectifier je vous l'ai rectifié, M. le
Président certains propos d'hier, et j'aurai l'occasion, au cours
de la journée, de déposer ce texte.
M. LESSARD: Je n'ai pas compris trop bien la dernière
déclaration concernant la diminution de la demande d'énergie.
Est-ce que le ministre parle de 6 p.c?
M. MASSE: Pour l'ensemble de la consommation, on pense que vers 1990 le
taux de croissance atteindra environ 3 p.c.
M. LESSARD: 3 p.c. de taux de croissance.
M. MASSE: Taux de croissance qui, jusqu'en en 1972, a été
à peu près de 3.4 p.c. aux Etats-Unis alors que chez nous il
était de 6 p.c, et on dit que la tendance devrait plutôt
rapprocher les deux...
M. LESSARD: En ce qui concerne l'électricité, on
prévoit, je pense, qu'il va y avoir une augmentation dans ce secteur, et
M. Giroux estime ce taux de croissance à 8 p.c. et non pas 3 p.c.
Jusqu'ici, le président de l'Hydro-Québec...
M. MASSE: J'ai mentionné la totalité, la croissance,
excusez, M. le Président, je veux quand même rectifier les faits,
j'ai mentionné qu'il y avait un taux de croissance pour l'ensemble du
secteur énergétique et non uniquement pour
l'électricité. Je n'ai pas mentionné de pourcentage
précis pour l'électricité. J'ai dit que la part de
l'électricité augmenterait au cours des prochaines années,
ce qui vient confirmer les allégations de l'Hydro-Québec.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le chef de l'Opposition officielle.
Croissance du coût des travaux de la baie
James
M. MORIN: Me permettez-vous, M. le Président, avant de poser la
première question, de faire quelques observations préliminaires.
Tout d'abord, la lecture des documents qui nous ont été
distribués hier m'a convaincu qu'on ne
saurait accorder trop d'importance à la comparution de l'Hydro.
Les investissements actuels dans la production et la distribution de
l'électricité représentent quelque 40 p.c. de tous les
investissements manufacturiers au Québec et cette proportion tend
à s'accroître plutôt qu'à décliner.
C'est donc l'un des postes les plus importants de l'affectation des
ressources collectives que nous étudions en ce moment. Or, nous le
savons tous, la collectivité a de nombreux besoins essentiels.
L'énergie constitue, certes, un besoin absolument essentiel au
développement mais ce n'est pas le seul auquel la collectivité
doit faire face. On comprendra donc que l'Opposition ne puisse être
insensible, en particulier, à deux dimensions, deux faits qui ont
été mentionnés au cours de la journée d'hier, soit
le coût plus que doublé, ou à tout le moins doublé,
de la baie James et l'augmentation des tarifs. Notre inquiétude se fixe
d'abord sur la croissance fulgurante des coûts. De $5.8 milliards, dans
le cas de la baie James, nous sommes passés à $12 milliards pour
le complexe La Grande optimalisé, à moins que ce ne soit
davantage.
Comme nous allons en faire la démonstration ce matin, les $12
milliards semblent constituer un minimum; étant donné que nous
n'avons de chiffres certains, de chiffres sûrs que pour LG 2, alors que
pour LG 1, LG 3 et LG 4, on en est encore au stade de l'exploration. S'il faut
se fier aux augmentations de coût dont nous avons été
témoins, ne serait-ce que pour LG 2, nous pouvons nous attendre que les
$12 milliards soient un minimum. Certes, il y a eu une augmentation de 24 p.c.
de la capacité installée, mais les coûts de base ont
augmenté substantiellement en raison des révisions de plan et du
début des entrées de soumission. Il n'y a pas que l'inflation;
les dépassements de coût, nous commençons à peine
à voir ce que cela va être.
Pour LG 1, pour LG 3, pour LG 4 nous n'avons pas encore de devis. C'est
donc avec une certaine anxiété que nous attendons cette
étape des travaux. Aussi, ne sommes-nous pas surpris de voir que
certains journaux ont parlé de $18 milliards, voire de $20 milliards. On
a même dit que le chiffre de $18 milliards pouvait venir du gérant
du projet, la Société Bechtel. Nous serions fort
intéressés à ce titre je le dirait tout à
l'heure à voir déposer devant cette commission le contrat
remettant la gérance à Bechtel.
Hausse des tarifs de
l'électricité
M. MORIN: En second lieu nous sommes inquiets également de la
hausse de tarif annoncée. Pour 1973, le tiers de l'augmentation des
revenus, c'est-à-dire une somme de $31 millions, provient de la hausse
des tarifs, comme le président de l'Hydro-Québec nous l'a appris
hier dans son exposé, à la page 10.
Or, comme il est dit à la page 13 du même exposé,
l'augmentation de l'autofinancement a été de $33 millions,
c'est-à-dire, en gros, une somme équivalente, soit la
différence entre $171,680,000 de 1972 et les $204 millions de 1973.
Ce n'est pas parce que les coûts montent, semble-t-il, que
l'Hydro-Québec a augmenté ses tarifs l'an dernier. Si elle a
été obligée d'augmenter ses tarifs, il semble bien que ce
soit pour financer la baie James, puisque les deux montants que j'ai
mentionnés correspondent.
J'ai l'impression, M. le Président et nous avons
l'intention de nous étendre sur cette question aujourd'hui, d'aller au
fond de cette question que sans la baie James, l'Hydro-Québec
n'aurait pas besoin de la hausse de tarif de 10 p.c. qu'elle nous annonce,
échelonnée sur plusieurs années.
Notre impression, à la lecture du rapport de M. Giroux je
crois qu'il aura fort à faire pour démontrer le contraire
c'est que toute cette augmentation de tarif est due à la baie James et
non pas à la hausse des coûts de production de
l'électricité.
En troisième lieu, pour ce qui est des coûts
comparés, nous allons tenter également d'explorer les diverses
hypothèses dont l'Hydro-Québec nous a fait part hier. La plupart
des hypothèses nous paraissent très critiquables. Qu'il s'agisse
du taux d'utilisation là-dessus, nous pourrons nous
référer aux taux qui ont été obtenus à
Pickering, qui ont fait l'objet de rapports qui sont certainement connus de
l'Hydro-Québec qu'il s'agisse du réinvestissement, qu'il
s'agisse du renouvellement, toutes ces hypothèses nous paraissent
quelquefois critiquables, quelquefois plus que douteuses.
Si elles étaient modifiées un tant soit peu dans un sens
ou dans l'autre, il nous parait qu'on pourrait démontrer que
l'énergie nucléaire coûterait le même prix et
peut-être même moins que le complexe La Grande et, en plus de
ça, en outre, cette énergie, aurait l'avantage d'étaler,
dans le temps, beaucoup plus qu'on peut le faire pour la baie James, les
investissements et les emprunts.
De toute façon, il semble bien que les coûts de base du
nucléaire ne peuvent monter. Au contraire, nous nous attendrions
plutôt, sauf en raison de l'inflation naturellement...
UNE VOIX: Ah!
M. MORIN: Oui, bien sûr, mais ce n'est pas de ça que nous
parlons. Il semble bien... Je vois que le premier ministre nous honore de sa
présence, ce matin.
M. BOURASSA: Avec les faussetés...
M. MORIN: J'espère qu'il écoutera avant de dire quoi que
ce soit et de nous apporter sa confiture ou sa marmelade habituelles.
M. BOURASSA: Une série de faussetés qu'on entend,...
LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!
M. BOURASSA: ... en série. M. MORIN: Nous verrons bien. UNE VOIX:
... la déconfiture. M. BOURASSA: C'est épouvantable.
M. MORIN: On va bien voir. C'est vous qui êtes pris avec ce
problème et vous allez avoir à vous en expliquer.
M. BOURASSA: Vous allez voir ce qu'il va vous arriver avec cette
question.
M. MORIN: M. le Président, en ce qui concerne les coûts du
nucléaire, nous estimons, jusqu'à preuve du contraire, que,
l'inflation mise à part, les coûts ne peuvent que diminuer par
rapport à Pickering, par rapport à Gentilly. Tandis que ceux de
la baie James sont des coûts qui, dans une large mesure, demeurent
hypothétiques puisque, pour LG 1, LG 3 et LG 4, nous n'avons pas encore
devant nous de chiffres définitifs. Ce n'est donc pas de $12 milliards
qu'il faut parler. Je suis bien convaincu que, l'année prochaine, on
viendra encore devant cette commission pour nous dire : II y a eu ceci, il y a
eu cela, il y a tels facteurs, c'est maintenant $15 milliards. L'année
suivante, ce sera $18 milliards. Et l'année suivante, combien? Nous
aimerions bien que l'Hydro-Québec et le gouvernement nous donnent des
chiffres un peu plus sûrs que ceux-là.
M. BOURASSA: Vous connaissez le taux d'inflation...
M. MORIN: En résumé, l'Opposition ne peut que se montrer
très inquiète devant la tournure des événements,
devant ce que nous avons entendu hier. Maintenant, nous pouvons peut-être
revenir aux questions que nous avions commencé à poser.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, à la suite de
l'intervention du chef de l'Opposition officielle, je voudrais lui faire la
suggestion. Aux questions et interrogations qu'il se pose, peut-être
devons-nous commencer par la fin qu'il a suggérée,
c'est-à-dire vider complètement... Hier si je peux
m'expliquer nous avons établi clairement que la demande
anticipée de l'ensemble du réseau jusqu'aux années 1985,
c'était quelque chose de fondé. Ce sont des études
sérieuses qui ont mené à ça. Je pense que nous
avons donné libre choix à l'Opposition de mettre en doute
l'évolution de la demande tant dans le secteur domestique que dans le
secteur industriel.
Or, nous avons vu et très clairment qu'il y a un déficit
de puissance de l'ordre d'environ 10,000 MW, qu'il faut combler d'une
façon ou de l'autre, à moins que quelqu'un veuille bien se lever
et dire qu'on va retourner à l'ère de la chandelle.
M. MORIN: D'une façon ou de l'autre.
M. SAINT-PIERRE: D'une façon ou de l'autre. Il me parait
fondamental ce matin que la première question à vider, c'est
quelle est réellement pour le Québec, compte tenu du bien commun
de la collectivité, compte tenu de l'enjeu des investissements, des deux
solutions celle qui représente les choix les plus plausibles?
Je pense que l'Hydro-Québec et je l'en remercie
encore cette année, mais d'une façon peut-être plus
détaillée que l'an dernier, nous a fourni un document qui
illustre bien quelle est la nature de ces choix et qui, en particulier
on doit le déplorer tente de mettre fin à des critiques
souvent absolument injustifiées qui font preuve de si peu de rigueur
intellectuelle. Je suggérerais de reprendre les relevés de presse
qui rapportent, depuis trois ans, ce qu'on a entendu sur cette question et je
pense que même le chef de l'Opposition a suffisamment de rigueur
intellectuelle pour admettre avec moi que certaines personnes on en
avait une illustration flagrante, hier, dans le petit papier qui a
été distribué ont tenté d'induire la
population en erreur en citant des chiffres qui ne se comparent absolument
pas.
D'ailleurs, en relisant le document de l'Hydro-Québec, on se rend
compte que ceux qui l'ont préparé ont tenté de nous
signaler les erreurs les plus flagrantes qui peuvent être faites, qui
vont du fait de comparer uniquement des coûts d'investissement et de ne
pas tenir compte des coûts d'exploration, de ne pas tenir compte de la
réserve qui est différente dans un cas et dans l'autre. Il y a
nombre d'aspects techniques, mais qui, pour prendre une bonne décision,
me paraissent fondamentaux.
Je pense que peut-être il y a intérêt à ce que
l'Opposition pose des questions. Nous en avons, nous aussi, à poser sur
le document qui, justement, tente de justifier le choix qui a été
fait en 1970 entre une filière nucléaire et la filière de
la baie James.
D'ailleurs et ce serait peut-être le premier sens de mon
intervention ce n'est pas la première fois que ce choix se pose.
Sur ce point, il faut dire que le Parti québécois est très
constant; il fait preuve de la même erreur et il la répète
constamment. Je ne sais pas si c'est un entêtement ou quoi.
Peut-être qu'on pense que c'est une mission prédestinée ou,
au contraire, comme dans d'autres cas, on substitue à la fin en soi des
moyens. C'est comme l'indépendance, c'est comme le
fédéralisme. Ce n'est pas une fin en soi.
M. MORIN: C'est pour cela qu'après vous être opposés
au nucléaire mordicus, vous commencez à en faire ! Cela doit
être pour cela.
M. SAINT-PIERRE: Non, M. le Président, la première chose
que je voulais...
M. MORIN: Ce sont des fausses affirmations.
M. SAINT-PIERRE: ... faire, c'est un rappel historique, parce qu'il faut
se rendre compte que ce n'est pas seulement en 1974 qu'on soulève cela,
ce n'est pas seulement en 1970 et en 1971 qu'on a soulevé cela. La
même question a effectivement été soulevée lorsqu'en
1966/67 on a eu le choix entre l'énergie de Churchill Falls et
l'énergie de centrales nucléaires. A l'occasion, des hommes
très bien connus du Parti québécois agissaient comme
conseillers du gouvernement et malheureusement, sur ce plan, on voit
jusqu'à quel point c'étaient des mauvais conseillers. S'il y a
quelque chose dont on doit rendre hommage à l'Hydro-Québec et en
particulier aux cinq hommes qui sont devant nous comme commissaires, c'est
l'épargne considérable dont ont bénéficié
les Québécois avec le contrat de Churchill Falls, mais
rappelons-nous... On pourrait le nommer s'il fallait le nommer.
M. MORIN: Ce n'est pas de cela qu'on parle.
M. SAINT-PIERRE: Non, mais je vous rappelle l'erreur parce que,
fondamentalement, si on avait suivi l'entêtement de Jacques Parizeau
à l'époque, on aurait dit non à Churchill Falls et on
aurait dit non aux 5,000MW qu'on obtient, je pense que c'est assez bien connu,
avec un coût approximatif de 3 mils pour les 66 ans du contrat. On peut
voir le calcul, ce sont des millions et des millions de dollars qui ont
été sauvés à l'épargne
québécoise et aujourd'hui c'est aussi incroyable...
M. MORIN: Ce que vous faites dire à Parizeau est faux en ce qui
concerne Churchill Falls.
M. BOURASSA: C'est un secret de polichinelle.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'on peut demander au président de
l'Hydro-Québec si, à un certain moment, à l'époque
des années soixante, dans le gouvernement de M. Johnson, on n'a pas
remis en cause la décision de Churchill Falls ou on n'a pas eu un doute
de dernière heure et tenté de le soulever.
M. LESSARD: M. le Président. M. BOURASSA: Bien oui, mais...
M. SAINT-PIERRE: C'est un point important historiquement, je pense qu'il
faut le soulever.
UNE VOIX: Vous êtes mal pris.
M. LESSARD: Question de règlement. On n'est pas mal pris du tout.
Si on veut convoquer M. Parizeau ici, on est bien prêt à faire en
sorte qu'il soit convoqué et accepté qu'il soit convoqué.
Le ministre de l'Industrie et du Commerce fait dire certaines choses à
M. Parizeau alors qu'il n'est pas ici. Je pense qu'il était normal qu'en
1966 on envisage différentes hypothèses. Ces hypothèses
ont été envisagées et on a opté pour une solution,
on s'est engagé dans une solution. Ceci était normal. Nous ne
sommes plus en 1966. Nous sommes aujourd'hui en 1974 et depuis 1966, il y a eu
quand même certaines modifications qui se sont présentées,
qui se sont faites depuis cette période.
Si le ministre de l'Industrie et du Commerce est prêt à
accepter que M. Parizeau soit convoqué à cette table, il n'y a
aucun problème. Mais, je ne pense pas qu'il soit normal de faire dire
des choses à un conseiller du gouvernement qui n'est pas ici pour se
défendre.
Quant à moi, je ne suis pas au courant de ce qu'a dit M. Parizeau
à cette période, je ne peux pas vous répondre, mais il
était normal qu'on envisage à ce moment-là les deux
possibilités comme il est normal qu'on envisage aujourd'hui...
M. BOURASSA: Mais, M. le Président, c'est connu que dans le Parti
québécois on favorise le nucléaire.
M. LESSARD: Non, on envisage des possibilités.
M. BOURASSA: Le chef de l'Opposition lui-même ne cesse, depuis
qu'il a été élu, de favoriser le nucléaire et le
thermique au détriment de l'hydraulique.
M. LESSARD: Aucunement.
M. SAINT-PIERRE: En réponse à la question de
règlement, je veux tenter de prouver que fondamentalement il n'y a pas
eu de modification. Ce que je veux tenter de dire, c'est que ce choix que la
collectivité et les élus du peuple doivent faire, et que la
commission doit recommander au gouvernement pour qu'il prenne ses
responsabilités, assisté par les gens de l'Hydro-Québec,
ce choix s'est posé en trois occasions et que l'expérience, le
recul du temps d'à peine sept ou huit ans que nous avons, prouve que
fondamentalement d'après moi que c'est le meilleur marché, que le
Québec ait jamais conclu sur le plan économique que celui des
chutes Churchill.
Qu'on pense que nous allons avoir, dans 50 ans d'ici, 3,000 kWh, et
qu'on compare n'importe quelle étude sérieuse que nous avons dans
le moment. Deuxièmement...
M. LESSARD: Cela coûtait $1 milliard.
M. SAINT-PIERRE: Je vais vous en donner d'autres milliards. Je vais vous
dire que l'année passée, vous vous rappelez...
M. MORIN: Vous comprenez surtout...
M. SAINT-PIERRE: Une seconde. Je vais vous dire que, l'an dernier ou il
y a deux ans, lorsqu'on a posé le même problème et
vous vous rappelez, on prendra le journal des Débats...
M. LESSARD: Oui.
M. SAINT-PIERRE: ...je vous ai mentionné que compte tenu de
l'énergie...
UNE VOIX: On l'a...
M. SAINT-PIERRE: Le journal des Débats?
UNE VOIX: Les ébats.
M.BOURASSA: M. le Président, on était dans une mer de
chiffres.
M. LESSARD: On a la mémoire longue, vous allez le voir tout
à l'heure.
M. SAINT-PIERRE: Si vous l'avez tellement, vous vous rappelez que, l'an
dernier, alors que le projet avait une puissance de 8,000 MW et produisait une
certaine quantité d'énergie je n'ai pas les chiffres
devant moi j'avais dit que ça me paraissait fondamental qu'avec
les études de l'Hydro-Québec de l'an dernier, sur une
période de 50 ans, chaque année, les Québécois
épargnaient environ $150 millions. Cette année, je vous invite
à regarder...
M. LESSARD: N'allez pas aux conclusions tout de suite.
M. SAINT-PIERRE: Un instant, un instant.
M. LESSARD: On va les discuter, il y a différentes
hypothèses là-dedans. N'allez pas aux conclusions tout de
suite.
M. SAINT-PIERRE: Oui, et les hypothèses, je vais vous montrer
que, dans bien des cas...
M. BOURASSA: II va terminer, vous parlerez après.
M. SAINT-PIERRE: ... on peut jouer avec les hypothèses...
M. LESSARD: On verra.
M. SAINT-PIERRE: ...bien sûr, mais moi je pense que, dans ce
cahier, ce sont des experts qui défendent les hypothèses. Vous
pourrez soulever des questions, moi j'en ai à soulever. Lorsqu'on dit
d'une centrale hydraulique, que sa vie utile est de 50 ans, je suis capable
d'indiquer des centrales hydrauliques qui fonctionnent très bien dans le
moment, qui n'ont jamais été conçues avec autant de
précaution qu'on le fait aujourd'hui au niveau des sols, au niveau de la
planification, au niveau de l'appareil manufacturier et qui continuent de
fonctionner plus longtemps que 50 ans. Je pense qu'on peut dire à ces
gens-là qu'il est possible que ces centrales...
M. LESSARD: Les centrales nucléaires.
M. SAINT-PIERRE: ... de Manic 1, de Manic 2, qu'après 50 ans ces
centrales vont fonctionner parfaitement bien,...
M. LESSARD: Et les centrales nucléaires?
M. SAINT-PIERRE: ...ce n'est pas la même chose que Manic.
Arrêtez-moi deux secondes...
M. MORIN: ... à trente ans. M. LESSARD: A trente ans?
M. SAINT-PIERRE: ...si, M. le Président, on reprend le dernier
tableau, cela me parait fondamental pour les choix qu'on a faits, à
moins qu'on veuille faire la tuyauterie, à moins qu'on pense uniquement
à court terme...
M. LESSARD: Voici...
M. SAINT-PIERRE: ... et d'induire les gens en erreur. Fondamentalement,
qu'est-ce qu'on retrouve dans les données qui sont mises à jour,
qui sont bien défendues dans un document...
M. LESSARD: M. le Président...
M. BOURASSA: Laissez-le terminer, s'il vous plaît.
M. LESSARD: M. le Président, question de règlement.
M. BACON: II n'y a pas de règlement là-dedans.
UNE VOIX: Cela fait donc mal.
M. LESSARD: Je soulève une question de règlement sur
l'ordre du jour que nous avons accepté hier.
M. BOURASSA: Oh! oui, ça fait mal la vérité.
M. LESSARD: M. le Président, c'est justement ce vers quoi s'en va
le ministre; il voulait nous faire accepter un autre ordre du jour ce matin. M.
le Président, avant de discuter des
différentes hypothèses que le ministre veut discuter
actuellement, soit entre le nucléaire et l'énergie
hydroélectrique, je pense qu'il faut d'abord discuter du coût de
la baie James. Et le chiffre de $11,900,000,000, qui était autrefois un
chiffre de $5,800,000,000, il faut d'abord l'établir. Il faut d'abord
savoir si ce chiffre de $11,900,000,000 correspond à la
réalité, si ce chiffre peut être modifié, si ce
chiffre peut s'élever, tel que le laissent entendre certains journaux.
Et certains journaux ont reçu des documents assez sérieux
puisque, avant que la commission parlementaire des richesses naturelles soit
non pas convoquée mais siège, ces journaux avaient affirmé
le chiffre de $11,900,000,000. Il y a d'autres documents aussi qui parlent d'un
chiffre de $18 milliards.
Si ce chiffre de $11,900,000,000, ne correspond même plus à
la réalité, s'il peut atteindre $18 milliards, s'il peut
atteindre $20 milliards, eh! bien, vos hypothèses, tel que d'ailleurs on
l'avait estimé en 1972, vos hypothèses que vous avez
élaborées ne correspondent plus à la
réalité.
C'est pourquoi, M. le Président, il nous paraît logique de
discuter d'abord du coût de la baie James, de savoir si cette estimation
de coût qui nous est présentée par l'Hydro-Québec et
la Société d'énergie de la baie James correspond bien
à la réalité. Si elle correspond bien à la
réalité, c'est-à-dire si c'est vraiment $11.9 milliards,
là on discutera des différentes hypothèses entre le
nucléaire et l'énergie hydroélectrique.
Je pense qu'on doit suivre l'ordre du jour qui a été
accepté.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Sur la question de règlement,
l'honorable premier ministre.
M. BOURASSA: M. le Président, le chef de l'Opposition a fait
certaines affirmations tantôt, sur les valeurs respectives du
nucléaire et de l'hydraulique. Etant donné que ces affirmations
sont complètement fausses et même ridicules, avec tout le respect
que je vous dois, je ne vois pas pourquoi...
M. MORIN: Je vais avoir le loisir de le démontrer.
M. BOURASSA: ... à ces affirmations ridicules du chef de
l'Opposition le ministre de l'Industrie et du Commerce ne pourrait pas donner
la réplique pour montrer jusqu'à quel point l'hydraulique
épargne des sommes considérables aux contribuables
québécois par rapport au nucléaire. Cela a
été prouvé à plusieurs reprises.
M. MORIN: Ah oui, ç'a doublé, M. le Président, une
grosse épargne.
M. BOURASSA: Je ne vois pas pourquoi, M. le Président; on va
donner des chiffres sur les centrales nucléaires qui vont confondre le
chef de l'Opposition.
M. MORIN: Le premier ministre n'était pas là, M. le
Président, hier, quand nous nous sommes mis d'accord sur la marche des
travaux, et la marche logique des travaux c'est d'abord...
M. MASSE: C'est vous qui avez parlé de Pickering tout à
l'heure.
M. SAINT-PIERRE: Encore ce matin, ce sont vos propres paroles et
j'aimerais avoir le texte du journal des Débats, c'étaient vos
ébats, vous avez dit encore ce matin. On a devant nous deux choix. Avant
de parler de la baie James, puis demander comment ça va avec Bechtel,
puis comment ça va dans la gérance, puis comment ça va
dans ci puis dans ça on va examiner à fond ces deux choix. Si
vous êtes capable de me convaincre ce matin que la meilleure
filière c'est la filière du nucléaire, on va simplement
demander quel est l'article qui permet de résilier tous les contrats
à la baie James, puis on va aller au nucléaire.
M. MORIN: Nous voulons examiner les chiffres.
M. SAINT-PIERRE: Je vous prouverais ce matin, et c'est ça qu'on
m'empêche de faire, parce qu'on sait que la vérité va faire
mal tantôt,...
M. BOURASSA: Oui c'est vrai.
M. SAINT-PIERRE: Un instant, si on est capable de me laisser faire pour
montrer quelles seront les épargnes qui seront réalisées
par la collectivité québécoise par la baie James,
peut-être que là vous n'accepteriez jamais plus de revoir les
prévisions.
M. MORIN: Très bien, on commence par la baie James.
M. SAINT-PIERRE: On a un document, M. le Président, sur les
choix, nous sommes à une période de choix. On a un document sur
les choix, il faut comparer les solutions. On a un document que j'ai devant moi
qui a été déposé hier; vous avez eu toute la nuit
pour le lire, comme moi-même. Je l'ai lu, puis je vais vous en parler,
comparaison des coûts de l'énergie entre le complexe
hydroélectrique de la baie James et un projet nucléaire canadien
équivalent.
Je vous réfère, M. le Président au tableau
II...
M. MORIN: On va examiner ça en détail.
M. BOURASSA: Non vous ne l'avez pas examiné, d'après ce
que vous avez dit ce matin.
M. SAINT-PIERRE: ... et je vais vous livrer, un instant. M. le
Président, j'ai la parole...
M. LESSARD: M. le Président, une question de
règlement.
M. SAINT-PIERRE: J'ai la parole.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Une autre question de règlement.
M. LESSARD: M. le Président, ce que je veux dire, c'est que le
ministre de l'Industrie et du Commerce tente de nous prouver quelque chose ou
de nous donner ses conclusions. Nous disons nous, avant d'en arriver aux
conclusions, qu'il faut envisager le projet d'abord de la baie James et les
coûts que ça implique. Il faut d'abord parler de coûts et
après on parlera d'hypothèses. Si on ne peut pas parler de
coûts, M. le Président, comment parler des différentes
hypothèses, comment parler du coût du nucléaire et du
coût de l'hydraulique? Parlons d'abord du coût de la baie
James.
M. BOURASSA: C'est le chef de l'Opposition...
M. LESSARD: ... Le chef de l'Opposition a d'abord parlé des $11.9
milliards.
M. BOURASSA: II a relié ça à la hausse des tarifs,
sans dire ce que serait la hausse des tarifs avec le nucléaire.
M. LESSARD: Non, oui, mais c'est justement, si vous avez raison, vous
aurez raison. Il ne s'agit pas de prouver qui a raison.
Il s'agit de savoir exactement si cette décision qui a
été prise a été bonne ou a été
mauvaise. Avant de le savoir, il faut d'abord se baser sur les coûts
réels. Je me rappelle, on a le journal des Débats, M. le
Président, on a la mémoire longue au Parti
québécois aussi. On va vous rappeler certaines
affirmations,...
M. BOURASSA: Nous autres aussi on va vous rappeler certaines
affirmations, vous allez voir ce dont vous allez avoir l'air à la
lumière de...
M. LESSARD: ... du premier ministre et certaines affirmations...
M. MORIN: $4 milliards, au départ, et c'est rendu à $12
milliards. Est-ce que le premier ministre prend les Québécois
pour des imbéciles?
M. BOURASSA: Est-ce que vous voulez qu'on vous parle des centrales
nucléaires? Est-ce que vous ne le faites pas vous-mêmes quand vous
ne faites pas mention de l'augmentation du coût des centrales
nucléaires?
M. MORIN: Les $12 milliards, c'est trois fois ce que vous aviez
prévu au départ, selon les chiffres de 1971.
M. ROY: M. le Président...
M. LESSARD: Partons de la base.
M. BEDARD (Montmorency): M. le Président, question de
règlement.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre! Une question de règlement
de la part du député de Montmorency.
M. BEDARD (Montmorency): Question de règlement, M. le
Président. Je pense que ça fait déjà deux jours que
ce sont toujours les mêmes qui ont la parole. Ma question de
règlement a trait au droit de parole du ministre de l'Industrie et du
Commerce. Il a commencé de nous faire un exposé. On a entendu
toutes sortes de platitudes, hier, et on n'a pas dit un mot; on les a
laissés parler.
M. MORIN: Ce n'est pas gentil pour l'Hydro-Québec, ça.
M. BEDARD (Montmorency): Un instant, j'ai la parole.
M. MORIN: Je n'admets pas que vous disiez que les gens de
l'Hydro-Québec ont dit des platitudes.
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre!
M. BEDARD (Montmorency): M. le Président, est-ce qu'il serait
possible que vous donniez la parole au ministre de l'Industrie et du Commerce
afin qu'il finisse son intervention? Si ça prend deux ou trois heures,
on va l'écouter parce qu'il est intéressant. Après cela,
vous leur donnerez la parole et on va leur laisser la parole.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de
Beauce-Sud a demandé la parole. Est-ce sur la question de
règlement? L'honorable député de Beauce-Sud.
M. LESSARD: M. le Président, il faut savoir...
M. BEDARD (Montmorency): Quel règlement?
M. ROY: Sur la question de règlement, je tenais tout simplement
à dire qu'on respecte donc le règlement et c'est vous, M. le
Président, qui êtes chargé de l'application du
règlement. Lorsque quelqu'un a la parole, il s'adresse au
président. Lorsqu'une personne invoque le règlement, qu'on lui
laisse donc la possibilité d'invoquer le règlement. On a
prétendu, pendant un certain temps, qu'on n'avait pas le droit
d'invoquer le règlement en commission parlementaire, mais le
député de Terrebonne nous a donné des nouvelles
directions, ce grand spécia-
liste en procédure parlementaire. Qu'on ne parle donc pas trois
en même temps. Il est bien difficile de comprendre ce qui se dit.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): D'accord. Sur la question de
règlement, depuis hier, il y a eu beaucoup d'interventions. Il y a eu
aussi un ordre du jour d'établi et on a laissé, tout de
même, toute la latitude voulue à tous les membres de la commission
de s'exprimer sur le sujet qu'il voulait, même si un ordre du jour avait
été établi. Si la commission décide de revenir
à l'ordre du jour et de s'en tenir strictement à l'ordre du jour,
on sera obligé de faire respecter ce qui a été
décidé par la commission.
Etant donné toutes les interventions qui ont eu lieu hier et
depuis ce matin, je pense que le ministre de l'Industrie et du Commerce est
tout à fait dans l'ordre et je lui donne le droit de parole.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, en m'a-dressant à vous,
je veux donc continuer où j'en étais. Encore une fois, je ne
lance pas des chiffres en l'air; je puise à même un rapport qui me
paraît extrêmement complet et qui a été fait par les
spécialistes de l'Hydro-Québec. Je voudrais, à partir de
cela, tirer la conclusion principale, non pas à court terme, non pas en
tenant compte uniquement des dépenses d'immobilisation, mais en tenant
compte de l'économie complète du projet, c'est-à-dire
qu'en coû-tera-t-il à la collectivité
québécoise pour satisfaire un besoin d'énergie qui a
été exprimé hier? Personne ne veut retourner à
l'époque de la chandelle. Je reprends donc, au tableau 2,
l'énergie produite dans le cas de la centrale de la baie James, page 9
du tableau de l'Hydro-Québec. Je demanderais un effort de
réflexion aux partis de l'Opposition en ce qui touche les chiffres, mais
je pense que c'est important. On est six millions qui paient des taxes et on
doit, au moins, savoir ce que c'est exactement.
On retrouve donc que l'énergie produite en termes de KWh
multipliés par 10 exposant 9, soit en milliards de kWh, est 680.1. Un
peu plus bas, au troisième tableau, on a le coût de
l'énergie livrée et, fondamentalement, c'est le critère de
base. Il ne s'agit pas de savoir combien les routes coûtent ou combien
une cheminée d'une centrale nucléaire coûte; il s'agit de
savoir à long terme actualisé, quel est le coût de
l'énergie qui est donnée dans le réseau. Comme on l'a dit
hier, le besoin qu'on tente de satisfaire, ce n'est pas le besoin
d'investissements, c'est le besoin d'énergie.
Or, on retrouve que le coût de l'énergie livrée,
d'après le rapport de l'Hydro-Québec, puisé avec toute la
documentation... On pourra revenir sur les hypothèses, mais elles me
paraissent raisonnables, rigoureusement intellectuelles et respecter les
critères de base. Pas pour 1972, mais pour la vie entière des
deux projets comparés, soit le nucléaire canadien et l'hydro-
électique, la différence est exactement de 3.4 mils,
c'est-à-dire la différence entre 24.39 mils par kWh et 20.99
M. MORIN: A condition...
M. SAINT-PIERRE: Un instant, M. le Président.
M. MORIN: ... que ce soit bien $12 milliards.
DES VOIX: A l'ordre, à l'ordre!
M. MORIN: Oui, mais, M. le Président, c'est évident,
ça.
M. BEDARD (Montmorency): A l'ordre, à l'ordre!
M. MORIN: II faudrait d'abord établir les coûts de la baie
James.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre, s'il vous plaît!
Notez vos objections et vous répondrez après.
M. SAINT-PIERRE: Ce sont bien des chiffres et même étant
ingénieur de formation, je voudrais confirmer que mes chiffres sont bien
exacts.
Si nous avons une différence de 3.4 mils au kWh dans le
coût de l'énergie livrée et que nous livrons les
quantités d'énergie produites par la baie James qui sont requises
pour le Québec. A moins qu'on ne veuille piétiner sur le plan
économique, à moins qu'on ne veuille pas répondre à
nos besoins d'énergie qui sont 690 milliards de kWh, on arrive
annuellement annuellement et j'insiste avec une différence
d'environ $234 millions qui sont épargnés pendant 50 ans chaque
année aux Québécois. M. Boyd, vous qui êtes plus
expert que moi dans ça, est-ce que grosso modo mes chiffres sont bien
corrects? Je ne me suis pas trompé de zéro, ce n'est pas $23
millions, c'est $234 millions annuellement.
C'est donc dire que depuis 1970...
M. MORIN: Si les hypothèses sont exactes.
M. SAINT-PIERRE: Depuis 1970...
M. BACON: Tu es tannant toi, ce matin.
M. SAINT-PIERRE: ... si on avait donné cours aux vues de Jacques
Parizeau, c'est $1 milliard déjà que les contribuables
québécois auraient eu à payer en plus. Vous savez la valse
des milliards qu'on a eue en octobre dernier, c'est un milliard de plus. Vous
savez compter: $234 millions multipliés par 4, calculez ça,
ça va vous donner tout près de $1 milliard.
M. LESSARD: Puis, vous êtes ingénieur!
M. SAINT-PIERRE: Un peu plus de $1 milliard.
M. le Président, pour la vie du projet de la baie James, en
assumant l'hypothèse qu'après 50 ans les centrales
nucléaires ne seront pas capables de produire d'énergie et
ça aussi on pourrait en discuter pourquoi on ne prendrait pas 60
ans pour les centrales hydrauliques? Cest alors $11.7 milliards que les
contribuables québécois auront épargnés par la
décision qui a été prise sur la baie James par rapport
à...
M. MORIN: Si vos hypothèses sont exactes.
M. BOURASSA: Ce sont les chiffres officiels.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, puisés...
M. BEDARD (Montmorency): A l'ordre! A l'ordre!
M. MORIN: Ce sont des hypothèses officielles.
M. BOURASSA: ... fait la même chose.
M. LESSARD: ... officielles de 1972.
M. BOURASSA: Les centrales nucléaires...
M. MORIN: Vous en avez de bonnes dans les chiffres officiels.
M. BOURASSA: Mais ça fait donc mal.
M. MORIN: Oui, c'est à vous que ça fait mal.
M. BOURASSA: Cela fait mal.
M. MORIN: Vous n'êtes même pas capable... Le double de ce
que vous aviez annoncé.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. SAINT-PIERRE: En conclusion...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. le ministre, si vous me permettez...
M. SAINT-PIERRE: Une très brève conclusion, M. le
Président, de la même façon on pourrait le calculer
très rapidement, M. Boyd pourrait peut-être nous le dire
qu'on peut exprimer en millions, en centaines de millions de dollars.
L'épargne qui a bénéficié aux
Québécois par la bonne décision prise en 1966, 1967 et
1968 de signer le contrat de Churchill Falls par rapport à d'autres qui
voulaient nous engager dans la filière nucléaire, de la
même façon la décision de prendre la baie James par rapport
au nucléaire canadien avec toutes les hypothèses et on
pourra les discuter à fond représente une épargne
d'environ $250 millions aux Québécois chaque année pour
toute la vie du projet. Cest une épargne d'environ $12 à $13
milliards.
M. le Président, c'est la valse des millions, mais on doit au
moins demander à des gens qui sont préoccupés par le bien
de l'ensemble de la collectivité... On est 6 millions ici et $230
millions, moi, ça me préoccupe, lorsqu'on épargne
ça à la collectivité à chaque année.
M. MORIN: Etablissez d'abord vos hypothèses, ensuite on
discutera.
M. BOURASSA: M. le Président, je voudrais ajouter juste une
phrase en réponse au chef de l'Opposition.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le premier ministre.
M. BOURASSA: C'est que plus il y a d'inflation... C'est vrai qu'à
cause de l'inflation, les taux d'intérêt des coûts de
construction, les coûts des matériaux ont augmenté. Cela a
augmenté pour tout. Il n'y a pas un chantier au monde où il n'y a
pas eu une explosion des coûts de construction. Le problème, c'est
de comparer le nucléaire et l'hydraulique, d'une façon relative
quant à la hausse des coûts. Ce que je dis au chef de
l'Opposition, c'est que plus il y a d'inflation et nous traversons
actuellement une période d'inflation plus l'écart est
favorable à l'hydraulique, parce que dans le cas de l'hydraulique, les
coûts d'exploitation, qui ne sont pas sujets à l'inflation ou
à peu près pas sujets à l'inflation, sont
considérablement moindres que dans le cas du nucléaire...
M. MORIN: Oui, et les coûts d'investissement?
M. BOURASSA: Je parle pour 50 ans. Vous exploitez pendant 50 ans, vous
investissez durant trois ans.
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: Et c'est là où l'avantage, dans le contexte
de l'inflation, paraît remarquable et exceptionnel pour l'hydraulique par
rapport au nucléaire.
M. MORIN: Oui, tout ça c'est si la baie James coûte
réellement $12 milliards.
M. BOURASSA: Mais M. le Président...
M. MORIN: Et ça, il faut l'établir d'abord.
M. BOURASSA: Mais oui, mais comment le chef de l'Opposition peut-il
prévoir dans son omniscience le taux d'inflation qui va exister...
M. MORIN: Je n'ai pas d'omniscience, je veux savoir.
M. BOURASSA: ... en 1980?
M. MORIN: Je n'ai pas d'omniscience...
M. BOURASSA: Est-ce qu'on peut savoir...
M. MORIN: ... je suis aussi ignorant que le premier ministre en la
matière, et ce n'est pas peu dire.
M. BOURASSA: Ce sont des mots, ça. M. GARNEAU: Parlez pour
vous-même. M. BOURASSA: Ce sont des mots faciles.
M. MORIN: Et nous allons poser les questions pour savoir si c'est
réellement $12 milliards, si ce n'est pas $18 milliards. Parce que si
c'est $18 milliards, vos affirmations sont parfaitement gratuites.
M. BOURASSA: M. le Président, le chef de l'Opposition peut
répondre par des jeux de mots à défaut d'arguments
sérieux, mais ce que je dis au chef de l'Opposition...
M. MORIN: Je n'ai pas fait de jeux de mots.
M. BOURASSA: ... c'est que personne ne peut prédire le taux
d'inflation en 1980 ou en 1978, pas plus qu'en 1971 on savait que les Arabes,
avec la question pétrolière, contribueraient â la situation
d'inflation qu'on connaît actuellement. Je ne sais pas si le chef de
l'Opposition le savait, mais personne, y compris M. Kissinger, ne pouvait
prévoir la politique arabe qui est l'une des causes du taux d'inflation
de 10 p.c. Donc, comme personne, y compris le chef de l'Opposition, ne peut
prévoir avec certitude quel sera le taux d'inflation en 1978, 1979 ou
1980, il est impossible de dire avec certitude.
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: ... il est impossible de dire avec certitude.
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: Mais ce qui est important...
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: ... c'est de comparer...
M. MORIN: Ce qui est important, c'est de savoir combien coûte la
baie James.
UNE VOIX: Laissez-le donc parler.
M. BOURASSA: Ce qui est important, M. le Président,...
M. MORIN: Parce que si vos calculs sont faux...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre! a l'ordre !
M. MORIN: ... sur la baie James, vos hypothèses ne tiennent
plus.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre! M. BOURASSA: M. le
Président,...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, si vous me permettez,...
M. BOURASSA: ... juste pour terminer là-dessus, ce qui est
important dans le débat, les chiffres absolus, il faut essayer de les
connaître avec le maximum de certitude. Mais il faut tenir compte aussi
et peut-être davantage du coût relatif c'est là
qu'est le problème du nucléaire et de l'hydraulique pour
les Québécois.
M. MORIN: Parfait.
M. BOURASSA: Or, le ministre de l'Industrie et du Commerce vient de
démontrer qu'il y a une épargne de $234 millions par
année...
M. MORIN: Si vos hypothèses...
M. BOURASSA: ... pour les contribuables québécois...
M. MORIN: ... sont exactes.
M. BOURASSA: ... en optant pour l'hydraulique...
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: ... plutôt que pour le nucléaire.
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: Et j'ai donné des faits comme les coûts
d'exploitation qui sont beaucoup plus sujets à l'inflation dans le cas
du nucléaire que dans le cas de l'hydraulique.
M. MORIN: Bon.
M. BOURASSA: On pourra en donner d'autres durant le débat.
M. MORIN: Est-ce que le premier ministre va convenir...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Avant l'intervention d'un autre membre de la
commission, je voudrais tout simplement demander la
collaboration de tous les membres de la commission, de tous les
députés présents et demander à chacun de parler
à tour de rôle. Il y aura de l'ordre et on donnera le droit de
parole à tous ceux qui voudront se faire entendre.
M. MORIN: Parfait. Puis-je avoir la parole?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La parole est au chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: Est-ce que je peux poser, au premier ministre, une simple
petite question?
M. BOURASSA: Avec plaisir.
M. MORIN: Est-ce qu'il ne conviendra pas que la première
étape à franchir, c'est d'établir le coût de la baie
James? Si l'on n'a pas des données un peu plus sûres que celles
que nous possédons en ce moment, si on ne peut pas établir avec
un minimum de vraisemblance que le coût va être limité
à $12 milliards, toutes les hypothèses sur lesquelles le premier
ministre se fonde s'écroulent. Mais si elles s'écroulent?
M. BOURASSA: Bien non, ce n'est pas...
M. MORIN: Si on ne peut pas établir le coût de la baie
James, qu'avons-nous comme base de discussion?
M. BOURASSA: M. le Président,...
M. GARNEAU: Je pourrais poser les mêmes questions sur le
nucléaire aussi.
M. BOURASSA: ...l'aspect...
M. MORIN: Bien oui, mais nous voulons le faire.
M. GARNEAU: Parce que, dans les deux cas, ce sont des
hypothèses.
M. MORIN: Nous voulons passer...
M. BOURASSA: II y a des chiffres qui ont été donnés
et qui révèlent...
M. LESSARD: Les facteurs ne sont pas les mêmes dans le
nucléaire et dans l'hydraulique.
M. BOURASSA: ... que le coût du nucléaire est
supérieur à l'hydraulique.
M. LESSARD: Cela est une affirmation. M. BOURASSA: M. le
Président,...
M. MORIN: Une affirmation gratuite pour autant que nous sommes
concernés.
M. BOURASSA: ... d'accord, on va le démontrer.
M. MORIN: D'accord.
M. BOURASSA: On va le démontrer.
M. MORIN: Parfait.
M. BOURASSSA: Quant aux chiffres absolus, on va faire le maximum pour
pouvoir les déterminer, dans le nucléaire comme dans
l'hydraulique. Il y a des centrales nucléaires en Ontario, on en a ici
au Québec.
M. MORIN: Oui.
M. BOURASSA: II y a des usines d'eau lourde qui devaient coûter
tant il y a un an et qui coûtent beaucoup plus aujourd'hui. C'est la
même chose partout. Il y a une explosion dans les coûts de
construction dans tous les chantiers du monde. Mais ce qu'il est important pour
les Québécois de savoir, c'est: Est-ce qu'ils vont payer moins
avec l'hydraulique qu'avec le nucléaire? Et c'est clair, d'après
les chiffres qui ont été soumis, qu'on va payer beaucoup
moins...
M. MORIN: Ce sont des hypothèses.
M. BOURASSA: ... avec l'hydraulique qu'avec le nucléaire.
M. MORIN: Nous voulons vérifier les hypothèses. M. le
Président, je...
M. BOURASSA: Alors, M. le Président, la parole est aux
commissaires.
M. MORIN: ... propose que nous passions maintenant à
l'interrogatoire...
M. ROY: M. le Président,... M. MORIN: ... de nos
témoins.
M. ROY: ... un instant.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, l'honorable député de
Beauce-Sud.
M. ROY: Je vous ai donné mon consentement pour qu'on permette des
commentaires du chef de l'Opposition et des autres. J'aimerais, à mon
tour, apporter quelques commentaires, si on me le permet.
Suite aux documents qui nous ont été soumis hier et suite
aux déclarations qui ont été faites, je pense qu'il y a
deux grandes questions qui attirent notre attention en premier lieu. Il y a
d'abord le fait que le coût du projet est maintenant estimé
sommairement à $12 milliards alors qu'originalement on nous avait
parlé de $5.8 milliards. Donc, c'est une augmentation de 100 p.c.
Deuxièmement...
M. BOURASSA: Une augmentation de la puissance aussi.
M. ROY: Une augmentation de la puissance, mais je reviendrai sur les
chiffres tout à l'heure.
M. BOURASSA: Ce n'est pas le même...
M. ROY: Je n'ai pas dérangé le premier ministre...
M. BOURASSA: Non, non, mais il y a des erreurs là.
M. ROY: II y a des erreurs dans les chiffres qu'on nous a fournis?
M. BOURASSA: II y a des erreurs dans les affirmations du
député, comme d'habitude.
M. ROY: Bon, un instant. Je n'ai pas dérangé le premier
ministre quand il a parlé. Deuxièmement, on nous a parlé
d'un taux d'augmentation d'électricité de 10 p.c. qu'il avait
été question de 4 p.c. Cela veut dire que jusqu'à
présent la population du Québec a été
trompée. Je pense que tout le monde l'admettra. La population du
Québec a...
M. BOURASSA: ... aux commissaires.
M. ROY: ... été trompée. La déclaration ne
venait pas du premier ministre mais il en avait la responsabilité parce
que ce sont des chiffres...
M. BOURASSA: C'est moi qui suis responsable.
M. ROY: ... en commission parlementaire.
M. BOURASSA: ... de la situation au Moyen-Orient? C'est moi qui suis
responsable des Arabes?
M. ROY: M. le Président, je ne parle pas du Moyen-Orient, je
parle de la baie James.
M. BOURASSA: Moi aussi.
M. ROY: Le premier ministre s'est égaré.
M. BOURASSA: Est-ce que le député est capable de
comprendre...
M. ROY: M. le Président, j'ai demandé la parole. Est-ce
que je l'ai?
M. MORIN: Le premier ministre a changé de latitude et de
longitude.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de
Beauce-Sud.
M. ROY: M. le Président ce qu'on ne semble pas vouloir discuter,
du moins le premier ministre a passablement toujours refusé de le
discuter,...
M. BOURASSA: II ne comprend rien comme d'habitude. C'est donc
malheureux. Cela ne fait rien, on écoute...
M. ROY: Est-ce qu'on pourrait demander au premier ministre d'avoir au
moins du respect pour le poste...
M. BOURASSA: D'accord. M. ROY: ... qu'il occupe?
M. BOURASSA: J'écoute. J'écoute le député de
Beauce-Sud. Cela me prend beaucoup de courage, mais j'écoute.
M. ROY: Hier, vous avez manqué de courage puisque vous
n'étiez pas ici.
M. BOURASSA: Je vous écoute.
M. ROY: Alors, M. le Président,...
M. BOURASSA: II y a trois commissions.
M. ROY: ... c'est la question du financement de la baie James, de la
baie James et du projet. Si on parle de 10 p.c. d'intérêt,
j'aimerais bien qu'on remarque ici qu'il en coûterait $1,200,000,000
d'intérêt par année, pour une population de 6 millions.
Qu'on prenne un crayon et un papier et qu'on calcule combien cela va faire par
personne, par année.
On nous a dit, dans le rapport, que le coût de base, en dollars
1972, est de $3.5 milliards; l'inflation extraordinaire de 1972-1974, sept
dixièmes de millions, cela fait $4.2 milliards; les modifications
techniques d'environnement et la révision d'estimations totalisent $4.9
milliards, plus l'augmentation de la puissance du complexe, suite à
l'optimisation, ce qui fait $6 milliards.
Mais de $6 milliards, on nous donne également le chiffre de $11.9
milliards, qui est la différence qui comprend les coûts de
l'intérêt pendant la construction et pendant l'aménagement
du complexe et qui tient compte également d'un taux d'inflation de 7
p.c, taux qui peut varier. Cela veut dire que de $6 milliards à $11.9
milliards, il y a une différence de $5.9 milliards qui est
consacrée uniquement au taux de l'inflation et au taux de
l'intérêt. J'aimerais qu'on y apporte une attention
particulière.
Maintenant, si on capitalise les taux d'intérêt, si on
capitalise le taux d'inflation, je me demande pourquoi, à l'heure
actuelle, on vient dire qu'il faut augmenter immédiatement le taux
d'électricité de 10 p.c. par année. Est-ce qu'on veut
camoufler, dans le budget des affaires courantes de l'Hydro-Québec,
certaines dépenses inhérentes à la baie James et qu'on ne
capitaliserait pas? Je pense que c'est une
question qui devra être examinée et une question qui devra
être vidée parce que si on capitalise l'inflation et si on
capitalise les taux d'intérêt, pourquoi l'augmentation de 10 p.c.
annuellement? Je pense que c'est un point important.
Maintenant, M. le Président, j'ai appris ce matin, en lisant les
journaux, bien que je n'aie pas eu tellement de temps, que
l'Hydro-Québec vient d'annoncer un emprunt de $150 millions aux
Etats-Unis.
M. BOURASSA: On va en parler de cela.
M. ROY: On pourra en reparler tout à l'heure. Le premier ministre
est donc bien nerveux.
M. BOURASSA: Non, je ne suis pas nerveux.
M. ROY: Le premier ministre est donc bien nerveux.
M. BOURASSA: On va en parler. Je ne suis pas nerveux, je dis qu'on va en
parler.
M. ROY: Je dis qu'actuellement, on est en train de se préparer
pour financer la baie James sur une période de trente ans parce qu'il
semble que c'est la politique établie, tant au ministère des
Finances qu'à l'Hydro-Québec, d'emprunter à long terme.
Est-ce qu'on a pensé plus long que son nez? Est-ce qu'on a pensé
plus long que son nez à savoir...
M. BOURASSA: Cela peut être long!
M. ROY: ... que pendant trente ans... Je sais que le premier ministre
peut penser longtemps...
M. le Président, est-ce qu'on a songé que les $12
milliards qui seront injectés dans l'économie
québécoise, suite aux emprunts qui pourront être
contractés pour financer ces immobilisations, seront retournés au
cours des dix premières années, et qu'au cours des vingt
prochaines années, il nous faudra retourner $24 milliards additionnels
aux Etats-Unis?
Je pose la question au premier ministre et au ministre des Finances
d'une façon très sérieuse ce matin. Est-ce que le
Québec a les moyens, actuellement, de payer 10 p.c.
d'intérêt sur des investissements aussi massifs, compte tenu de
nos limites, compte tenu de six millions que nous sommes, et compte tenu de
l'accroissement de notre dépendance étrangère? Je suis en
train de me demander si le gouvernement actuel n'est pas en train de doubler le
Parti québécois et faire en sorte que nous procédions
à notre annexion aux Etats-Unis avant que l'indépendance se
fasse. On est en train de se le demander. Je me le demande sérieusement
et je dis que la question doit être pensée.
J'aimerais bien qu'on me dise comment nous pourrons retourner aux
Américains $24 mil- liards de plus que ce qu'on va emprunter pour
financer le projet de la baie James. M. le Président, c'est une question
qui est importante, extrêmement importante. Je comprends pourquoi le
premier ministre est allé dire en Europe que l'économie serait de
moins en moins entre nos mains.
M. BOURASSA: Je n'ai pas dit cela. C'est faux.
M. ROY: ...
M. BOURASSA: Question de privilège!
M. ROY: C'est dans tous les journaux, M. le Président. Le premier
ministre n'a jamais soulevé une question de privilège en Chambre
pour dire qu'il avait été mal cité: qu'à l'avenir,
notre économie serait de moins en moins entre nos mains.
M. BOURASSA: M. le Président, est-ce que je peux
répondre?
M. ROY: M. le Président, il y a la question, évidemment,
du choix que le gouvernement doit faire de façon à trouver le
moyen, le système qui coûtera le moins cher. Je pense que nous en
sommes conscients. C'est une responsabilité qui nous incombe. Nous ne
nous dégagerons pas de cette responsabilité.
Mais il y a le deuxième point, le point qui est encore plus
important, à savoir si on doit choisir le nucléaire ou
l'hydraulique. Il y a le choix du financement et de l'accroissement de notre
dépendance vis-à-vis des Etats-Unis dans le financement de ce
projet.
Le gouvernement actuel a la responsabilité d'examiner d'autres
moyens pour financer ce projet parce que je pense qu'on est peut-être en
train de se construire un château en Espagne. Bientôt on se
réveillera avec une mainmise américaine à un tel point que
ce sera toute l'industrie qui y passera, l'industrie secondaire, primaire,
tertiaire, etc.
M. BOURASSA: Je peux répondre...
M. ROY: J'aimerais que le premier ministre, qui a pris note de toutes
ces choses, nous explique et nous donne des garanties à l'effet que
l'économie du Québec permettra que $200 en moyenne par
année par citoyen québécois puissent être
payés en intérêt aux Américains pour
l'aménagement de nos richesses, de nos ressources, en utilisant notre
main-d'oeuvre, nos matériaux, sur notre territoire, sur nos
rivières. J'aimerais que le premier ministre nous en parle.
M. BOURASSA: Juste sur la question au sujet de laquelle j'ai
été mal cité, je sais que le député de
Beauce-Sud blaguait un peu, il sait fort bien...
M. ROY: Non, je ne blaguais pas, je l'ai vu dans les journaux.
M. BOURASSA: ... que je ne peux pas faire des questions de
privilège à chaque fois que je suis mal cité. Il ne
resterait plus de période de questions au député de
Beauce-Sud pour poser ses questions.
M. LESSARD: ... emplois.
M. BOURASSA: On en a eu 128,000 l'an dernier. Mais on ne reprendra pas
ça. Le problème, je vais le poser en termes très simples
au député de Beauce-Sud. Propose-t-il que l'on s'éclaire
à la chandelle dans les années quatre-vingt, c'est ce qu'il
propose?
M. ROY: Ce n'est pas ce que j'ai dit. M. BOURASSA: M. le
Président...
M. ROY: J'ai dit que l'on devrait examiner le problème de
financement, ce n'est pas à la chandelle.
M. BOURASSA: C'est très simple, il y a un déficit pour
l'économie québécoise, pour les Québécois,
pour les services publics, pour l'industrie, il y a un déficit de
puissance considérable pour les années quatre-vingt.
M. MORIN: Ce n'est pas là la question, c'est comment on va
remplir le déficit?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre!
M. BOURASSA: Donc, que ce soit avec des centrales nucléaires ou
avec des centrales hydrauliques, j'ai parlé tantôt du coût
relatif des deux et des avantages. Mais, quelle que soit la formule, il faut
emprunter des sommes considérables; autrement on va être
obligés de s'éclairer à la chandelle. Le gouvernement
serait condamné...
M. MORIN: Cela dépend, n'oubliez pas que les investissements sont
moindres avec le nucléaire, il faut que vous en teniez compte.
M. BOURASSA: ... par la population, et à juste titre, s'il
n'était pas prévoyant comme il le fait actuellement.
L'Hydro-Québec en particulier, le gouvernement de l'Etat seraient
condamnés par la population s'ils ne posaient pas les gestes qu'ils
posent actuellement.
Imaginez si en 1981 ou en 1982 on était obligé de fermer
je suis obligé de parler dans des termes très simples
comme ceux-là à la suite des questions du député de
Beauce-Sud des hôpitaux, des industries et des écoles parce
qu'on n'a pas suffisamment d'électricité, si on était
obligés d'en importer du Nouveau-Brunswick ou de l'Ontario ou du
Moyen-Orient. Là on accroîtrait autrement plus notre dépen-
dance vis-à-vis de l'étranger pour répondre
spécifiquement à la question du député de
Beauce-Sud, on accroîtrait autrement plus cette dépendance des
Québécois dans des secteurs clefs. Là on emprunte, c'est
vrai, mais qui a le contrôle? Le député de Beauce-Sud est
suffisamment intelligent pour faire la distinction entre des obligations et des
actions, entre le pouvoir obligatoire et le pouvoir des actionnaires. Le
contrôle du projet et j'entendais M. Caouette, ces jours-ci,
reprendre les arguments du député de Beauce-Sud. Autant il le
contredit sur la langue d'enseignement, autant il paraît d'accord avec
lui sur ces questions. Je pense que c'est faire de la démagogie que de
dire que le projet de la baie James ne sera pas entre les mains des
Québécois alors que c'est clair que c'est l'Hydro-Québec,
l'Etat et les Québécois qui vont contrôler le projet.
E faut quand même faire une distinction élémentaire
entre les obligations et les actions. M. le Président, je pense qu'on
pourrait en parler durant des heures, les membres de la commission vont donner
toutes les réponses de détail. Mais c'est aussi simple que cela,
si nous ne posons pas les gestes que nous faisons actuellement, nous serons
condamnés, à juste titre, par la population parce que non
seulement on va priver les citoyens de services essentiels, d'une denrée
absolument irremplaçable, mais on accroîtrait beaucoup plus,
infiniment plus la dépendance du Québec vis-à-vis de
l'étranger.
M. ROY: Le premier ministre me permettrait-il une question? Il a
parlé tout à l'heure de 128,000 emplois l'an dernier. A-t-il fait
le calcul? Cela prend tous les emplois qu'il a créés l'an dernier
avec un revenu de $10,000 par année, impôts payés, pour
uniquement payer l'équivalent de l'intérêt de ce que vont
coûter les investissements de la baie James.
M. BOURASSA: Le député ne...
M. ROY: Vous n'avez pas répondu à ma question. Je vous ai
demandé si le Québec avait les moyens de payer annuellement, en
plus de ce qu'on paie actuellement, $1.2 milliard d'intérêt aux
Américains...
M. BOURASSA: Est-ce que le Québec a les moyens...
M. ROY: ...pour construire le Québec chez nous en utilisant les
Québécois?
M. BOURASSA: ...dans les années quatre-vingt de fermer des
écoles, des hôpitaux, des industries...
M. ROY: Ce n'est pas ce que je demande.
M. BOURASSA: ...et de placer des dizaines de milliers de personnes en
chômage? C'est
inconcevable qu'en 1974, à l'Assemblée nationale du
Québec, on pose des problèmes d'une façon aussi
erronée, aussi naïve, aussi candide. C'est inconcevable.
M. ROY: Vous allez voir dans quelques années que nous avons
raison.
M. LESSARD: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable député de
Saguenay.
M. LESSARD: ... je voudrais qu'on revienne à nos moutons, qu'on
revienne au sujet que nous avons à discuter. M. le Président,
nous n'avons pas ce matin convoqué le premier ministre; nous avons
convoqué la commission parlementaire des richesses naturelles...
M. BOURASSA: Vous aimez mieux quand je ne suis pas là, oui, je le
sais.
M. LESSARD: ... afin d'entendre et l'Hydro-Québec et la
Société d'énergie de la baie James. Il me semble qu'il
faut respecter, quand même, certaines choses; dès le début
de la commission, hier, nous nous sommes entendus sur un ordre des travaux. Il
est normal, justement pour pouvoir mieux discuter, qu'on s'entende sur un ordre
des travaux. Le chef de l'Opposition a soumis un ordre des travaux qui a
été accepté à la fois par le ministre des Richesses
naturelles, à la fois par le ministre de l'Industrie et du Commerce et
à la fois par le ministre des Finances. Si nous relisons le journal des
Débats, l'ordre des travaux devait être comme suit:
premièrement, estimation des besoins et des nouveaux projets autres que
celui de la baie James. Alors, nous avons justement, hier, estimé ces
besoins. Deuxièmement, nous devions discuter de la baie James,
c'est-à-dire de l'ensemble de la baie James, des coûts de la baie
James. Et, comme le disait le député de Beauce-Sud, aussi du
financement de la baie James. Troisièmement, nous devions parler de la
tarification, suite justement à l'ensemble de la discussion concernant
la baie James. Quatrièmement, nous devions discuter de l'accord de
Churchill Falls avec l'Hydro-Québec. Cinquièmement, nous devions
discuter des inondations. Sixièmement, le régime de retraite et
sept, autres questions.
M. le Président, cet ordre du jour, si vous relisez le journal
des Débats d'hier, a été accepté. Ce que nous
demandons...
M. BOURASSA: Vous ne l'avez pas respecté vous-même.
M. LESSARD: ... ce matin, c'est que nous revenions justement à la
discussion concernant la baie James, concernant le rapport de M. Boyd qui
touche la baie James. Ensuite, nous entreprendrons justement l'examen des
différents moyens de faire face à cette demande, soit sous forme
de financement ou par d'autres moyens. C'est ce que nous avons soumis hier, je
pense. Ce que nous n'acceptons pas, M. le Président, c'est qu'on modifie
cet ordre du jour. Lorsque le ministre de l'Industrie et du Commerce, tout
à l'heure, nous parlait du rapport entre l'énergie
nucléaire et l'énergie hydraulique, je pense que c'est mettre la
charrue devant les boeufs. Nous allons d'abord parler de la baie James, nous
allons d'abord parler du coût...
M. SAINT-PIERRE: Quand en parlerons-nous dans l'ordre du jour que vous
venez de nous donner?
M. LESSARD: ... tel que cela a été entendu.
M. SAINT-PIERRE: Quand allons-nous en parler dans l'ordre du jour que
vous venez de nous donner? Voulez-vous escamoter le choix...
M. LESSARD: Non, non.
M. SAINT-PIERRE: ... fondamental que vous...
M. LESSARD: Baie James, moyens d'y faire face et financement.
M. SAINT-PIERRE: Alors, baie James, c'est là qu'on est rendu et
la première étape...
M. LESSARD: C'est ça.
M. SAINT-PIERRE: ... c'est la comparaison entre le
nucléaire...
M. LESSARD: Non.
M. SAINT-PIERRE: Non?
M. LESSARD: La première étape...
M. SAINT-PIERRE: C'est quand...
M. LESSARD: ... c'est la baie James, l'ensemble, tel qu'indiqué
dans le rapport. Hier, nous avons eu le rapport du président de
l'Hydro-Québec. Si vous lisez le rapport du président de
l'Hydro-Québec, eh bien, là il y a un ordre du jour, en fait, que
nous avons suivi. Il y a un rapport aussi qui a été
présenté par M. Boyd, concernant justement...
M. SAINT-PIERRE: Vous avez de la misère avec la langue
anglaise.
M. LESSARD: Oui, oui, j'ai de la misère et, M. le
Président, je ne m'en cache pas du tout, comme les anglophones ont
souvent de la misère avec la langue française.
M. SAINT-PIERRE: M. Boyd est un bon Canadien français.
M. BOURASSA: Comme Robert Burns.
M. LESSARD: C'est ça. Si nous relisons, M. le Président,
le rapport du président de la Société d'énergie de
la baie James, nous constatons que, dans ce rapport, il y a les coûts de
la baie James, vers la fin. Ensuite, nous avons eu le rapport de M. De Guise.
Alors, nous allons d'abord discuter du rapport du président de la
Société d'énergie de la baie James et, après
ça, tel que nous avons fonctionné hier, nous parlerons du rapport
de M. De Guise. Est-ce qu'on l'accepte, M. le Président, tel que cela a
été décidé hier?
M. BOURASSA: D'accord, mais c'est le chef de l'Opposition qui a
commencé. Quand je suis arrivé ici, je le voyais tout de suite
aborder la question...
M. MORIN: Non, je faisais une déclaration préliminaire. Si
vous étiez arrivé à temps, vous auriez compris.
M. BOURASSA: J'en ai entendu assez pour répliquer.
M. MORIN: Ce que nous devons faire maintenant...
M. BOURASSA: D'accord... M. MORIN: ... M. le Président... M.
BOURASSA: ... les commissaires.
M. MORIN: ... c'est écouter les commissaires nous parler du
coût de la baie James.
M. BOURASSA: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, MM. les commissaires, je sais que
vous attendez avec impatience pour nous parler.
M. GIROUX: Je crois qu'il y a certains petits points qui pourraient
aider la commission à faire l'analyse de ce qui va être
donné. Je comprends que tout le monde, quand on parle de demain, on
parle de façon hypothétique. N'étant point technicien, je
m'appuie toujours sur le côté pratique des choses plutôt que
sur des hypothèses. Premièrement, on a parlé d'un tarif de
10 p.c. en disant qu'on avait déclaré un tarif de 4 p.c.
Si on se réfère aux débats de ces
années-là, j'ai dit qu'on aurait une augmentation minimale de 4
p.c, parce qu'à ce moment l'inflation était de 4 p.c.
Actuellement, je crois que l'inflation dépasse beaucoup les 10 p.c. Je
pense donc qu'on ne peut pas rattacher les déclarations qui ont
été faites dans le temps... Il était absolument impossible
de prévoir ces augmentations.
Vous aviez des rapports d'économistes dans le temps qui donnaient
un maximum de 2 p.c. pour la hausse du prix du pétrole pour les dix
prochaines années. Je ne leur en fais pas de reproche, c'est
arrivé comme ça. Je pense donc qu'on ne peut pas rattacher
ça...
Il y a un autre point aussi qui est assez important. C'est qu'on parle
de nos centrales hydrauliques et qu'on dit 50 ans, et ça peut aller
à 65 ans. Je suis parfaitement d'accord avec ça. Ce que je veux
simplement expliquer, c'est que nos dépôts depuis toujours
à l'Hydro-Québec... et la raison pour laquelle nous avons un
crédit qui se maintient aux Etats-Unis et dans le monde entier, c'est
qu'on a toujours maintenu les mêmes chiffres de
dépréciation, les mêmes normes. Je prie cette commission de
croire que jamais on n'a eu l'intention de camoufler quoi que ce soit où
que ce soit, nos vérificateurs sont là pour prouver le
contraire.
L'usage peut aller jusqu'à 70, 75 ans. C'est tellement positif
que dans le cas de Churchill nous avons un contrat ferme avec des gens
indépendants de nous, avec des gens qui les ont conseillés
indépendamment de nous, qui ont signé un contrat de 65 ans ferme,
après 1977 mais depuis 1900 on reçoit de l'énergie, donc
la vie de l'hydraulique peut être de 80 ans. La raison pour laquelle on
la limite à 50 ans, c'est que dans nos normes on prend toujours 50 ans
comme vie de dépréciation. C'est une des raisons de base.
L'autre raison, ce sont les augmentations qui vont être
expliquées par des experts, dont je ne suis pas, sur l'augmentation des
coûts, sur les réalisations des coûts. Simplement,
j'aimerais attirer votre attention sur le côté pratique. Des
hypothèses, je peux amener des gens ici qui vont vous faire des
hypothèses pendant des mois et ils ne pourront jamais prouver rien,
parce qu'au moment où ça va être construit, ça
n'arrivera pas conformément aux hypothèses, et c'est la vie qui
dure depuis quinze ans.
Un point qui est assez remarquable, c'est qu'on dit: Allez en
nucléaire. C'est possible de dire: Allez en nucléaire.
Naturellement, il faut premièrement trouver l'eau lourde. Actuellement,
l'Energie atomique du Canada ne peut pas nous garantir d'usine d'eau lourde,
d'usine nucléaire, parce qu'on n'a pas d'eau lourde. On est censé
avoir une usine dans la province de Québec qui pourrait prendre soin de
certaines augmentations, mais une niasse qui doit remplacer 10,000 MW est
certainement impossible en nucléaire. Elle l'a été avant
et elle le reste.
Alors, on parle d'augmentation des coûts. Ce sont des chiffres que
je peux citer, qui ont été faits naturellement sans contrat, mais
ont été faits avec le président de l'Energie atomique du
Canada. M. De Guise était avec moi au moment où on a
discuté. Dans le même temps qu'on commençait les analyses
de la baie James, il y a une usine nucléaire de 600 MW qui était
ce qu'il y avait de plus facile à construire parce qu'on avait tous les
plans. On parlait à ce moment-là de $221 millions et on pensait
d'avoir 66 p.c. d'emprunt du gouvernement fédéral.
Lorsqu'on a terminé les transactions, les prévisions
étaient de quelque $300 millions et on a fini par avoir le consentement
du gouvernement fédéral de prêter $151 millions maximum.
Actuellement, on est à ce montant en estimation et c'est
hypothétique. S'il y en a qui veulent faire des petits paris, si c'est
légal, je vais vous parier que ça va coûter plus de $450
millions et que ça va être plus près de $500 millions quand
ça va être complété.
Quand on parle de ces choses-là, ce sont des choses
réelles qui existent. Un autre point sur lequel je voudrais attirer
l'attention de la commission, c'est les questions réelles et pratiques
qui sont publiques. Toutes les compagnies d'utilité publique,
américaines, canadiennes, depuis la rareté du pétrole, se
sont lancées vers le nucléaire. Tous ces gens ont
bénéficié d'un investissement inférieur pour les
trois, quatre premières années.
Actuellement, ils entrent en concurrence avec nous dans l'hydraulique.
Nous, on dit que pour maintenir notre crédit, il va nous falloir une
augmentation de 10 p.c; eux parlent de 16 p.c, et dans d'autres endroits on
parle de jusqu'à 35 p.c. d'augmentation parce qu'on est dans le
nucléaire. Cela, c'est public à travers tous les Etats-Unis. Ce
n'est pas hypothétique, ce sont des gens qui se sont servis du
nucléaire parce qu'il n'y avait pas d'autre moyen. S'ils avaient pu
prendre de l'huile, ç'aurait été encore plus
dispendieux.
Vous avez devant vous, dans les journaux, les publications de leurs
demandes d'augmentation de tarif. Naturellement, on peut être
hypothétique pendant des mois et des mois. J'ai beaucoup de respect pour
les hypothèses, j'ai beaucoup de respect pour ce qu'on appelle
communément des "feasibility reports" mais j'en n'ai jamais vu, dans 35
ans, rencontrer le montant. C'est une chose que j'aimerais bien établir.
Nos 50 ans, quant à nos usines hydrauliques, c'est parce qu'on se sert
de cela au point de vue du taux de dépréciation. Si on prenait le
même taux pratique et si on allait conduire le nucléaire sur
l'hypothèse d'une durée de vie, on pourrait durer jusqu'à
70 ans parce qu'on en a qui fonctionnent encore très bien et qui ont 50
et quelques années d'expérience.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable chef de l'Opposition a une
question.
M. MORIN: M. le Président, j'admets tout à fait, qu'on
nous parle de faits réels, qui existent, pour parler comme le
président de l'Hydro-Québec; c'est de cela que nous voulons
parler en tout premier lieu à l'égard des coûts de la baie
James. Vous admettrez que si on peut établir ces coûts de
façon un peu plus sûre, on pourra faire des comparaisons valables
avec d'autres moyens de créer de l'énergie électrique.
Je voudrais m'attarder aux hypothèses sur lesquelles reposent vos
coûts révisés de $12 milliards. Vous nous avez dit d'abord
qu'il y aura une augmentation de puissance qui sera portée, donc,
à 10,300 MW. Le taux d'intérêt a été
fixé, par hypothèse, à 10 p.c, ce qui nous paraît,
grosso modo, convenable, assez réaliste. Mais quand vous arrivez au taux
d'inflation des coûts de la construction, nous avons quelques
difficultés à vous suivre. Si je ne m'abuse, vous l'avez
fixé à 7 p.c. Cela ne nous paraît guère
réaliste, très franchement.
M. GIROUX: Cette année, ça ne l'est pas.
M. MORIN: D'après ce qu'on a pu voir dans certaines revues
spécialisées, les revues économiques, le taux d'inflation
des coûts de matériaux de construction a été de 10.5
p.c, comme on dit ici, ou 10,5 p.c. en réalité, dans le
passé, au cours des derniers mois, tandis que le coût de la
main-d'oeuvre a augmenté de 10.1 p.c. L'évolution ne semble pas
se dessiner de la façon dont vous l'avez prévue pour ce qui est
au moins des coûts de construction. Or, c'est un facteur tout de
même déterminant. Ma première question serait double.
Premièrement, est-ce que vous estimez que vos 7 p.c. sont
réalistes pour les années qui viennent? Deuxièmement, que
représente chaque augmentation de 1 p.c. dans l'augmentation des
coûts de construction?
Si on prend un programme semblable à celui dans lequel vous vous
engagez à l'heure actuelle avec le projet La Grande prenons le
projet 30 dans votre programme d'équipement de 1972, programme qui
s'appelait LG 79-PI on avait estimé que chaque augmentation de 1
p.c. dans le coût de construction représentait $500 millions. Il
suffirait donc que vous ayez fait une erreur de 2 p.c, 3 p.c. et
peut-être même 4 p.c. pour que le coût grimpe d'un seul coup
de $1 milliard, $1 milliard et demi ou $2 milliards. Voilà la
première question que je vous pose.
M. GARNEAU: Avant de demander à M. Giroux de répondre
à la question, est-ce que vous pourriez me préciser si vos 7 p.c.
sont cumulatifs ou si c'est 7 p.c du coût total à partir
d'aujourd'hui?
M. BOYD: C'est 7 p.c par année, cumulatif. Pour vous expliquer,
si on parle de notre étude sur l'inflation dans les aménagements
hydroélectriques, l'étude mentionne le coût de la
main-d'oeuvre, des matériaux et de l'équipement. On applique,
suivant l'utilisation de ces trois facteurs dans le temps, des escalades qui
sont prévues. C'est évident que, pour les années
1974-1975, les taux sont plus hauts que 7 p.c. Cela va en diminuant avec le
temps. C'est l'hypothèse qu'on a employée. Par exemple, pour la
main-d'oeuvre, vous avez 11.1 p.c. en 1974 et 9.5 p.c. en 1975. Pour les
matériaux vous avez 25 p.c. en 1974 et 10 p.c. en 1975. Cela va en
diminuant ensuite jusqu'à la fin. Ce sont toutes ces choses
pondérées, si vous avez 25 p.c. ou 10 p.c. par année,
l'économie va en être affectée, puis cela va affecter tout
ce qui se
fait au Québec aussi bien qu'ailleurs. Si on a 10 p.c, ça
va être 10 p.c. ailleurs et toute autre forme de construction va
être affectée par les mêmes facteurs. Ces études sont
faites par les meilleurs économistes qu'on peut trouver et tous nous
indiquent que des escalades de 10 p.c. par année, ça ne peut pas
continuer jusqu'à 1990; c'est leur opinion et ils y ont droit.
Je pense qu'en prenant 7 p.c. on est du côté sûr, si
on prend 7 p.c. pour la moyenne de tous les facteurs. Vous avez du
côté nucléaire des chiffres qui sont également
décomposés, la main-d'oeuvre, matériaux et
équipement. Vous avez à peu près les mêmes
pourcentages d'escalade.
Le problème, on pourrait être conservateur ou garder le
même taux d'escalade qu'on avait autrefois, 4 p.c. et 8.5 p.c, et
quelqu'un pourrait prétendre qu'à la longue, sur la
période du projet, ce serait réaliste. On vous a cité
trois exemples. On prend celui que nous considérons le plus
réaliste sur la foi des études des économistes qui ont
fait ce travail. Si c'est différent, ce serait différent pour
tout, ce serait différent pour le nucléaire, ce serait
différent pour le thermique, ce serait différent pour la
construction de n'importe quel édifice, ce serait différent pour
la livre de beurre, la livre de steak, ce serait différent pour
n'importe quoi, pour les salaires que tout le monde gagnera, ce sera
différent pour le niveau de vie que chacun aura. Si c'est moins, si
c'est plus, il n'y a personne ici qui peut prétendre que ces
études ne sont pas bonnes, parce qu'il n'y a personne qui peut le
prouver. C'est le temps qui va le prouver, c'est l'économie du
Québec, l'économie nationale, l'économie mondiale qui vont
nous le donner.
M. SAINT-PIERRE: M. Boyd, est-ce qu'on pourrait dire également
qu'au niveau de la construction, que ce soit la construction d'un barrage et
des installations hydroélectriques ou au niveau des centrales
nucléaires, pour être capables d'atteindre les puissances
demandées, les périodes de construction dans les deux cas
seraient approximativement les mêmes? C'est-à-dire que les
centrales nucléaires devraient être terminées pour 1984,
1985. Pour les uns comme pour les autres, l'inflation, l'intérêt
durant la construction vont jouer sensiblement de la même façon en
plus ou en moins. Sauf que pour la centrale hydroélectrique, 92 p.c. des
coûts totaux, d'après votre dernier tableau, sont absorbés
dans les premières années alors que, dans le cas des centrales
nucléaires, c'est un montant assez appréciable, 78 p.c. qui est
absorbé par les premières années, mais par après
les autres 22 p.c. par rapport à 8 p.c. pour l'hydraulique
pour le nucléaire, eux aussi pourraient être affectés par
l'inflation. Il me semble que les hypothèses me paraissent des
hypothèses réfléchies qui ont été
données suite à des études. Je veux simplement mentionner
au chef de l'Opposition que l'on prévoit dans votre analyse un taux
d'inflation pour le combustible nucléaire à 3 p.c. par
année, pour 50 ans. C'est pas mal dur de dire exactement quelle sera la
situation dans 50 ans pour le combustible nucléaire, alors que vous avez
également 4 p.c. pour les coûts d'augmentation de l'eau lourde. Je
pense que si on prend l'eau lourde, si on se fie seulement au court terme
l'exemple parce que c'est ça un peu qui vous frappe, vous, c'est
l'inflation qu'on a vécue depuis deux ans, pourquoi qu'on n'a pas le
même taux plus longtemps. Si on prend l'inflation de l'eau lourde, je
pense que les coûts d'eau lourde depuis deux ans ont augmenté
beaucoup plus que les 4 p.c. qui sont prévus ici à long terme.
Mais il me parait qu'à plus long terme ces chiffres donnent suite
à des études sérieuses qui tentent de pondérer des
influences particulières qu'on a pu avoir en 1973/74.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
M. MORIN: A moins que M. Boyd ne veuille répondre au
ministre.
M. BOYD: Je vais répondre à la question de M.
Saint-Pierre, si vous me le permettez.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): D'accord. Allez-y, M. Boyd.
M. BOYD: Dans un programme nucléaire, comme M. Saint-Pierre le
disait, l'investissement est moins fort que dans l'hydraulique. Seulement, on
vous a démontré que les coûts d'exploitation, les
coûts de réinvestissement nous frappent un peu plus tard. C'est un
décalage. Et ce décalage nous arriverait au moment où il
faudrait embarquer dans d'autres programmes de construction et où les
programmes de construction seraient le double de ceux qu'on fait dans le
moment.
En d'autres mots, ce serait déplacé dans le temps pour
arriver à un problème pire en 1985 que celui que l'on a dans le
moment. Alors, est-ce qu'on est mieux de vivre avec notre problème
actuel face à un choix qui est le plus logique ou bien de remettre le
problème à plus tard et de dire aux générations de
1985: On va vous coller un problème d'inflation continue sur l'eau
lourde, sur l'exploitation des centrales nucléaires et vous vous
arrangerez avec le problème?
M. MORIN: Oui. Je ne veux pas m'aventurer tout de suite dans le
nucléaire, parce que là on pourrait discuter longuement sur vos
hypothèses. Il se peut que la technologie nucléaire
s'améliore, elle s'améliore tous les jours de fait, ce qui
pourrait peut-être diminuer les coûts du combustible et les
coûts de l'eau lourde éventuellement. Mais cela viendra à
son heure, ça.
Je voudrais poser à nos invités, M. le
Président, la question suivante: Vous avez pris 7 p.c. comme
hypothèse de travail en ce qui concerne l'inflation des coûts de
construction. Nous, j'avoue que cela ne nous paraît pas très
réaliste. On penserait plutôt à 9 p.c, peut-être
même plus. Est-ce que vous pourriez nous dire, du moins, ce que
représente une erreur ou une augmentation non prévue de 1 p.c.
par rapport à l'ensemble du coût, par rapport aux $12 milliards?
Si vous faites erreur devant nous ce matin, si l'année prochaine vous
revenez devant nous en nous disant: Bien, 7 p.c, c'était trop
conservateur; c'était plutôt 8 p.c, 8 1/2 p.c. et peut-être
même 9 p.c, qu'est-ce que cela représente comme augmentation?
M. BOYD: Cela représente $650 millions. M. MORIN: $650 millions
pour 1 p.c.
M. BOYD: Et cela s'applique à n'importe quel programme.
M. MORIN: Oui, j'ai bien compris ça.
M. BOYD: J'insiste parce que c'est un fait.
M. MORIN: Cest bon que nous le sachions. Bon. Maintenant, on pourrait
peut-être étudier une autre variable. Il s'agit des plans.
Vous avez prévu, si je ne m'abuse, M. Boyd, 17 p.c.
d'augmentation, à la page 22 de votre rapport.
M. BOYD: C'est ça.
M. MORIN: Mais seuls les plans et les soumissions de LG 2 peuvent
être pris en considération à l'heure actuelle. Les
études sur LG 1, LG 3, LG 4 ne sont pas terminées, comme je
l'indiquais dans mon exposé préliminaire. Est-ce que vous
pourriez nous expliquer comment vous avez calculé vos 17 p.c? Est-ce que
vous avez déjà des données un peu certaines pour
établir ces 17 p.c? Où en êtes-vous pour les plans dans LG
1, dans LG 3 et LG 4?
M. BOYD: On est certainement plus avancé que l'an dernier. Cela
fait, en fait, depuis 1972 qu'on étudie plus en détail les plans
et devis de chacun de ces barrages, à tel point qu'on a pu diminuer le
taux prévu dans notre estimation totale.
Les plans et devis des autres centrales sont bien avancés. Ces
estimations sont basées sur les meilleures connaissances techniques
qu'on a au Québec. Je voudrais, d'abord, vous signaler que, dans les $11
milliards, j'aimerais faire une séparation. Vous avez demandé
vous-même, et vous avez obtenu, hier, le rapport sur le coût des
lignes qui est de $3,286 millions...
M. MORIN: Oui.
M. BOYD: ... pour les lignes et postes de $8,658 millions pour les
centrales, digues et barrages.
M. MORIN: A propos des lignes, M. Boyd, est-ce que votre travail est
fait sur le terrain?
M. BOYD: Le travail est fait en partie sur le terrain, mais vous devez
admettre qu'au point de vue expérience de lignes, l'Hydro-Québec
a ce qui est le plus avancé au monde. Je pense que c'est une chose dont
on peut se vanter, l'Hydro-Québec et tous les Québécois
ensemble. Et pour tenir compte des travaux sur un terrain qui ne sont pas
terminés, dans ce montant dont je viens de vous parler, $3 milliards, on
a mis 15 p.c. d'imprévu, pour tenir compte de certaines
prévisions de fondations qui ne sont pas encore connues.
Donc je pense qu'avec la compétence qu'a l'Hydro-Québec et
tout son personnel dans les lignes et postes et avec le facteur de
sécurité de 15 p.c. pour les imprévus que je viens de vous
dire, on est à l'abri. Je ne pense pas qu'aucun groupe au monde puisse
arriver à mieux que cela.
D'ailleurs, je l'ai déjà dit ici dans le passé. Au
point de vue lignes et postes, l'Hydro-Québec a toujours atteint ses
objectifs au point de vue coûts. Quant à l'autre partie qui est
pour les centrales, il y a une estimation de $8,658,000,000. Cette estimation
est basée également sur les meilleures connaissances qu'ont nos
ingénieurs du Québec. Il y en a plusieurs qui ont
contribué à cela. Il y a des ingénieurs de
l'Hydro-Québec; il y a des ingénieurs de la Société
d'énergie; il y a des ingénieurs de Lalonde et Valois; il y a des
ingénieurs de RSW (Rousseau, Sauvé, Warren); il y a des
ingénieurs d'ABBDL (Asselin, Benoît, Boucher, Ducharme, Lapointe);
des ingénieurs de SNC, des ingénieurs de Cartier et des
ingénieurs de Bechtel, qui n'ont pas la gérance, en passant, et
qui sont à notre service.
Tous ces gens ont contribué à l'estimation de $8
milliards. Cela fait deux ans qu'on pousse davantage les investigations, les
explorations, et le projet, on le connaît. De plus, je dois vous dire que
dans ces $8 milliards, il y a, pour les choses imprévues qui sont
toujours présentes sur n'importe quel contrat, n'importe quel chantier,
8 p.c. d'imprévus. Vous pouvez vous imaginer que cela représente
passablement d'argent.
C'est la fondation...
M. MORIN: M. le Président... Est-ce que vous avez
terminé?
M. BOYD: Evidemment, dans les $11.9 milliards, si on les
décompose, et dans les $3 milliards et les $8 milliards, la
moitié de ces sommes est pour l'escalade et pour les
intérêts durant la construction. C'est évident.
M. MORIN: L'escalade des coûts, oui.
M. BOYD: Le coût des travaux, c'est environ $4 milliards. C'est,
en fait, $3.8 milliards pour les centrales, le coût direct des
travaux.
M. MORIN: M. Boyd, dans le cas de LG 2, quelle a été
l'augmentation des coûts de 1972 à 1974?
M. BOYD: Cela a été d'au moins 20 p.c. parce que
l'escalade, on l'a donnée. C'est l'escalade qui a fait changer les
coûts, ce ne sont pas les estimations, ce n'est pas le manque de plans et
devis, ce sont les 20 p.c. d'escalade.
M. MORIN: Sans l'inflation ou avec l'inflation?
M. BOYD: 20 p.c. d'escalade.
M. MORIN: Oui, sans l'inflation ou uniquement l'inflation?
M. BOYD: L'escalade et l'inflation, c'est la même chose, dans mon
dictionnaire.
M. MORIN: Oui, je comprends. C'est uniquement l'inflation, alors, ces 20
p.c.
M. BOYD: Oui.
M. MORIN: II n'y a pas eu d'augmentation en raison de changements dans
les plans, par exemple?
M. BOYD: Oui. Il y a eu premièrement changement pour
l'augmentation de puissance. On a commencé avec neuf ou dix turbines. On
est rendu à seize turbines parce qu'on produit plus d'énergie.
C'est un changement majeur qui affecte les dimensions. La centrale, maintenant,
va avoir une caverne qui va mesurer, je ne sais pas, 1,200 pieds je l'ai
dit hier 1,300 pieds de long. Tout cela a changé.
On a fait certains changements techniques, comme par exemple le
déversoir. Pour des raisons d'écologie, les gens qui s'occupent
de l'écologie et de l'environnement, chez nous, ainsi que les Indiens,
nous ont dit: Si vous avez le déversoir dans telle vallée, cela
va détériorer le site. Alors, on a changé le
déversoir de place. Cela fait partie des 17 p.c. Il y a des choses
semblables qu'on a changées, qu'on a modifiées. On a
changé l'axe du barrage principal parce qu'on a voulu avoir des
meilleures fondations, mais le roc est absolument solide, c'est quelque chose
d'extraordinaire, et les différences sont surtout dues à
l'inflation qui est de 20 p.c. et à une puissance additionnelle.
Il peut y avoir eu certains changements, mais on avait, à ce
moment-là, 10 p.c. d'imprévus dans nos prévisions pour LG
2 et le reste, pour les changements techniques.
Si vous me le permettez, vous avez peut-être tous lu la Gazette de
samedi dernier; c'est peut-être à partir de ça que certains
d'entre vous parlent de $20 milliards. C'est assez effarant qu'on attache
autant d'importance à un journaliste bien motivé peut-être,
mais qui se fait passer pour un assistant cuisinier ou quelque chose de
semblable et qui fait des déclarations qui ébranlent la province,
basées sur des conversations de cuisine avec un type qui fait une farce
et qui met en doute l'honnêteté et la responsabilité de nos
ingénieurs, ainsi que de nos ingénieurs-conseils.
J'ai ici une lettre signée par le vice-président directeur
général de SNC-Cartier, qui est tout à fait importante. Si
le président le permet, j'aimerais la lire et en déposer
copie.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si vous voulez la lire, on pourra en faire
déposer des copies par la suite.
M. BOYD: Alors, SNC-Cartier, c'est un consortium; d'ailleurs, tout le
monde sait que ce sont deux entreprises énormes au Québec qui
font du travail d'ingénierie en Europe, en Afrique, en Amérique
du Sud, au Canada, un peu partout dans le monde. C'est M. Gourdeau qui est le
vice-président directeur général du consortium et qui est
le responsable du consortium chez nous, pour LG 3. "A la suite d'un article
paru dans la Gazette du 29 juin 1974, nous aimerions vous faire part de ce qui
suit: Le consortium SNC-Cartier, consultants de Montréal, qui a
été retenu pour les études techniques relatives au site LG
3 du projet d'aménagement de la baie James, déclare aujourd'hui
que, depuis environ un an que les études du projet se poursuivent, un
programme d'exploration a déjà été
complété et qu'en aucun temps les résultats de ces
études n'ont permis de mettre en doute la qualité et la
stabilité des fondations sur lesquelles reposeront les barrages et
digues. A la suite d'un reportage publié dans la Gazette de samedi, 29
juin, le groupe d'ingénieurs précise que les conditions du sol,
tant au site du barrage qu'ailleurs où il y a des travaux connexes, sont
excellentes et l'évolution des études ne laisse prévoir
aucune difficulté. "De plus, le consortium SNC-Cartier, après une
enquête auprès de la personne citée dans l'article, est
d'avis que le journaliste aurait fondamentalement déformé des
bribes de conversations relevées au hasard de rencontres fortuites avec
des individus sur le chantier. Par ailleurs, le consortium SNC-Cartier
précise également que la personne citée par le
représentant de la Gazette n'a aucunement le mandat ou les
données nécessaires pour se prononcer sur l'ensemble des travaux
relatifs à la qualité du sol ou le coût des travaux. Dans
sa déclaration, le consortium SNC-Cartier, un des plus importants du
genre au Canada, précise enfin que ce groupe d'ingénieurs du
Québec a été retenu par la Société
d'énergie de la baie James pour les études techniques du projet
LG 3 et qu'aucun consultant de San Francisco ou d'ailleurs n'a
été retenu par le consortium pour poursuivre
d'autres études connexes." Signé Jean-Paul Gourdeau.
M. MORIN: M. Boyd, est-ce que...
M. BOYD: J'ai une autre lettre, si vous le permettez, qui est de
Terratech, qui eux sont chargés de faire l'analyse des sols. Ils n'ont
pas été mentionnés comme tels mais une des personnes
mentionnées dans l'article n'était pas de SNC, mais bien de
Terratech.
C'est une entreprise bien connue mondialement, qui fait des travaux
à peu près partout dans le monde, dans l'analyse des sols. Suite
à l'article paru dans l'édition du samedi 29 juin dernier du
quotidien The Gazette, nous désirons apporter les précisions
suivantes: Terratech Limitée détient un mandat de la
Société d'énergie de la baie James pour participer aux
travaux d'échantillonnage du sol et réaliser des essais de
laboratoire sur le site du barrage LG 3 du complexe La Grande de la baie James,
suivant un programme établi par les ingénieurs-conseils, que je
vous ai nommés, et la Société d'énergie de la baie
James.
Nous n'avons aucun mandat pour évaluer la durée et les
coûts des travaux de ce projet particulier et, de plus, nos
équipes sur place ne possèdent pas la formation ni les
données nécessaires leur permettant de faire de telles
évaluations. Nos services professionnels, dans ce cas précis, se
limitent aux essais de la mécanique du sol et notre équipe sur
place se compose d'inspecteurs qui n'ont d'autre fonction que d'assurer la
réalisation des essais; les données recueillies sont alors
remises aux ingénieurs retenus par la Société
d'énergie.
M. MORIN: M. Boyd, pouvons-nous maintenant passer au barrage principal
de La Grande?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si vous me permettez, le chef de
l'Opposition officielle, le député d'Abitibi-Est avait une
question complémentaire à poser.
M. MORIN: Complémentaire, parce que j'aimerais continuer mon
entretien avec M. Boyd.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Est-ce sur les coûts?
M. HOUDE (Abitibi-Est): Sur les coûts, oui. Vous avez parlé
tout à l'heure d'un taux d'inflation de 7 p.c. que vous estimiez
conservateur et que...
M. MORIN: Sur les coûts, oui.
M. HOUDE (Abitibi-Est): ... vous prévoyez arriver à 9.2
p.c. ou 9.1 p.c. Sur quoi vous basez-vous?
M. MORIN: 8 p.c. ou 9 p.c, d'après un certain nombre de revues
spécialisées. .
M. MALOUIN: Mais quelles sont vos...
M. MORIN: J'ai posé la question. Je voulais savoir si
c'était le point...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Cela irait à l'Hydro-Québec, je
veux dire, on demande une précision.
M. MALOUIN: Vous avez dit...
M. MORIN: M. le Président, si je peux continuer à
interroger M. Boyd.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): D'accord, allez.
UNE VOIX: ... une réponse.
M. MALOUIN: Nous, c'est qui ça? Vous avez dit nous...
M. LESSARD: Nous avons tout simplement posé la question à
M. Boyd et au président de l'Hydro-Québec concernant ces 7 p.c.
D'accord?
M. MORIN: Messieurs de l'Hydro-Québec, en ce qui concerne le
barrage principal de La Grande, est-ce que vous pourriez nous dire à
combien vous aviez évalué le coût et à quoi vous
vous attendiez pour ce qui est des soumissions? Le Globe and Mail vous fait
dire, en tout cas fait dire...
UNE VOIX: La Gazette.
M. MORIN: Non, c'est le Globe and Mail, je crois, du 19 avril. Il vous
fait dire que vous aviez pensé que le travail pourrait être fait
pour une somme variant de $117 millions à $125 millions, somme qui
aurait été mentionnée dans des interviews avec le Globe
and Mail, en avril ou en mars dernier. Et il vous fait dire également
que vous vous attendiez à une plus basse soumission de $154 millions. La
soumission de Spino, qui était la plus basse, était de
$224,296,900. Pourriez-vous donc nous dire, en premier lieu, à quoi vous
vous attendiez et, ensuite, nous confirmer le chiffre que vous a donné
la firme Spino?
M. BOYD: Naturellement, il me fait plaisir de répondre à
cette question. Encore une fois, on est pris devant un problème de
journalistes. J'ai beaucoup d'admiration pour les journalistes, qui font un
travail très dur et qui souvent sont pris avec des informations fausses
qui leur sont communiquées. Dans ce cas-ci, le journaliste parle de
chiffres qui ont été mentionnés avant qu'on parle de 7
p.c. d'escalade et de 10 p.c. d'intérêt.
Ce sont des chiffres, qui n'ont plus aucune signification au mois
d'avril 1974, qui n'ont aucune espèce de valeur. Cela c'est un des
points. L'autre point, c'est une chose qui va arriver fréquemment, si
vous vous fiez aux
racontars ou ce qui peut paraître dans certaines documentations,
même officielles. Lorsqu'on va en appel d'offres, il y a un bon de
cautionnement qu'il faut demander aux soumissionnaires et souvent on mentionne
un chiffre qui est beaucoup plus bas que le montant de notre estimation
définitive, parce que les fournisseurs ont pris l'habitude de multiplier
par 10. Et, si on dit $15 millions de bon de cautionnement, ils multiplient par
10, puis ils disent: La soumission devrait être autour de $150
millions.
C'est un truc qui se joue des deux côtés, donc il faut
faire attention à ça. Mais, pour répondre encore plus
précisément à votre question, pendant que les appels
d'offres sont sur le marché, nous avons chez nous un service qui
prépare une soumission de la même façon que s'il
était un entrepreneur, exactement. Il reçoit, dans le cas actuel,
les documents qui sont épais, avec des rouleaux de plans comme
ça. Ils se groupent pendant toute la période, ça leur
prend autant de temps qu'aux soumissionnaires. Ils préparent leur propre
estimation qu'il mettent sous clé et le service d'approvisionnement, de
construction et d'ingénierie n'est pas au courant du montant. Le jour de
l'ouverture des soumissions, on ouvre celle-là en même temps que
les autres.
Et savez-vous ce que c'était notre estimation le jour de
l'ouverture de la SEBJ?
M. MORIN: Non, je vous le demande.
M. BOYD: C'était $228 millions. Celui de Impregilio-Spinon
était de $224 millions. Il y a deux autres entreprises qui ont
soumissionné, $330 millions et $348 millions. Elles étaient hors
course. Alors c'est le mieux que je peux répondre à votre
question.
M. MORIN: Mais vos prévisions originales, avant que vous ayez
fait faire ce travail par vos propres services? C'est un travail
extrêmement utile, je ne le nie pas. Est-ce que vous aviez des
prévisions préliminaires?
M. BOYD: Nos prévisions, qui dataient de 1972, était
basées sur une escalade de 4 p.c. et des taux d'intérêt de
8 1/2 p.c. Alors...
M. MORIN: D'accord, mais quelle était cette prévision
à ce moment-là?
M. BOYD: Peut-être le chiffre que vous avez mentionné, je
ne l'ai pas ici devant moi. Si vous employez la comparaison qu'on a faite tout
à l'heure, que, du fait de changer, l'escalade et le taux
d'intérêt double, vous avez une réponse, ça pouvait
être $150 millions.
M. MORIN: C'est parce que ça nous donnerait une idée de
l'augmentation du coût des matériaux entre-temps.
M. BOYD: Ce ne sont pas les travaux qui ont augmenté de
ça. Ce n'est pas le concept qui a changé, ce n'est pas le manque
de connaissances des ingénieurs qui ont fait les plans et devis. Les
ingénieurs qui ont fait les plans et devis du barrage, c'est Asselin,
Bellemare, Boucher, ce sont eux qui font nos plans dans le moment à
Manic 3, ce sont eux qui en font un peu partout; je pense qu'on peut se fier
à eux. Ce sont eux qui ont fait les plans et l'estimation a varié
dans le temps, parce qu'il y a eu une escalade de 20 p.c. dans la
période.
M. MORIN: M. Boyd, j'aimerais maintenant vous poser une ou deux
questions sur chacun des sites de La Grande.
Dans votre rapport, à la page 6, vous nous dites que du
côté de LG 1 les travaux de déboisement, les investigations
j'imagine que vous voulez dire les recherches géologiques
et les relevés topographiques ont été suspendus pendant
que s'accéléraient les négociations avec les autochtones.
Pourriez-vous nous dire où les travaux, les recherches en étaient
au moment de la suspension? Comment avez-vous pu évaluer, avant la
suspension, le coût approximatif de LG1?
M. BOYD: Les travaux étaient passablement avancés et c'est
seulement pour les mois d'avril et mai. C'est à la demande de M.
Ciaccia, qui est le négociateur avec les Indiens, qui nous a dit que
cela faciliterait les négociations avec les Indiens, que nous avons
retardé. C'est mai et juin jusqu'au 1er juillet. On a dit: On va
arrêter les travaux si ça facilite les négociations,
mais...
M. MORIN: Je n'en suis pas à ça, je vous demandais
où en étaient vos recherches à ce moment-là.
M. BOYD: Elles étaient suffisamment avancées, avec la
connaissance qu'on a du site, pour faire des estimations valides. Quand on
continue, c'est pour le détail du barrage, à savoir si on le fait
à cet endroit, si on prolonge la digue un peu plus par là ou si
on la prolonge un peu plus de l'autre côté.
M. MORIN: Pour LG 4, vous nous dites: On poursuit les travaux
d'exploration. Etes-vous en mesure, sur la base de simples travaux
d'exploration, d'après les résultats de ces travaux, de faire une
évaluation vraiment sérieuse du coût éventuel?
M. BOYD: On connaît bien le site, dans ce cas-là. Je vous
ai dit, tout à l'heure, qu'on avait 8 p.c. d'imprévus sur la
moyenne du projet. Moins on a de connaissances précises sur un site,
plus on met d'imprévus. Dans le cas LG 4, on met un montant plus
élevé d'imprévus parce qu'il est un peu moins connu que LG
2.
M. MORIN: M. le Président, j'aimerais encore poser une ou deux
questions avant que l'heure fatidique ne vienne. Sur le coût, tou-
jours, est-ce que la Bechtel, quelle que soit la nature du contrat qui
vous lie à cette société, a évalué le
coût des travaux de La Grande? Est-ce qu'elle a procédé
elle-même à une évaluation?
M. BOYD: Elle y a procédé avec nous. Je vous ai
parlé de tous les gens qui avaient participé. 1) Les gens de la
Bechtel sont venus de San Francisco, leur siège social, pour travailler
avec nous spécialement pour cette tâche.
M. MORIN: Est-ce qu'ils sont d'accord sur votre évaluation,
globalement?
M. BOYD: Certainement. M. MORIN: A 11.9 p.c? M. BOYD: Certainement. M.
MORIN: Est-ce qu'il est...
M. BOYD: Pardon. Les 11.9 p.c. ne les regardent pas. Ce qui les regarde,
c'est le coût de base. Les taux d'intérêt, l'inflation, ce
n'est pas l'affaire d'un consultant, même s'il est Bechtel ou même
s'il est n'importe qui. C'est le propriétaire qui décide quel
taux d'intérêt il pense qu'il va payer et c'est le
propriétaire qui décide, avec des études
économiques, quel va être le taux d'inflation. Donc, c'est
vis-à-vis du coût de base. Mais, là aussi, je dois faire
une précision, c'est que les lignes et postes je vous l'ai dit
tout à l'heure représentent $3.25 milliards environ.
C'était confié entièrement à l'Hydro-Québec
qui, elle, a des experts et des conseils qu'elle consulte. Donc, Bechtel et les
gens de la Société d'énergie n'ont pas eu à
vérifier les chiffres de l'Hydro-Québec, Celle-ci s'en occupe
elle-même. Donc, il nous reste, pour les coûts directs du projet,
environ $3.9 milliards, comme coût de base. C'est là-dessus que
Bechtel s'est prononcée comme notre conseiller et elle est
entièrement d'accord sur ça.
M. MORIN: Est-ce qu'elle n'aurait pas un point de vue, cependant, non
seulement sur les coûts de base, mais sur l'ensemble des coûts?
Est-ce que vous pourriez déposer le contrat qui vous lie à
Bechtel? Est-ce que c'est possible?
M. BOYD: On a déjà discuté de cela à
plusieurs reprises. C'est un contrat d'ingénierie comme bien d'autres.
On en a plusieurs et il a toujours été décidé qu'il
n'y aurait pas avantage pour le public qu'on dépose les contrats
d'ingénierie. On n'en a jamais déposé un. Ce sont des
contrats négociés et chacun est différent. C'est
basé sur les mêmes normes qu'on emploie pour d'autres.
M. MORIN: Est-ce que, dans ce contrat, il y a des chiffres qui sont
mentionnés quant au coût de base ou est-ce qu'il y a la moindre
évaluation du coût des travaux?
M. BOYD: Dans ce contrat?
M. MORIN: Oui, dans ce contrat?
M. BOYD: Pas du tout.
M. MORIN: II n'y a aucune clause prévoyant que Bechtel doit se
tenir à l'intérieur d'une certaine fourchette de coûts?
M. BOYD: Bechtel ne peut pas se tenir à l'intérieur de
quoi que ce soit comme coûts, parce qu'elle n'a pas la gérance.
C'est la Société d'énergie qui est responsable. Ils sont
là pour partager avec nous...
M. MORIN: Ce sont des conseillers, simplement des conseillers.
M. BOYD: Ils sont des conseillers participants, ils participent à
la gestion avec nos ingénieurs et nos comptables et tout. Dans le
contrat, il n'est pas question du tout d'aucun chiffre parce que, à ce
moment-là, on n'avait pas fini les estimations. On les a finies au mois
d'avril ou au mois de mai.
M. MORIN: Pourriez-vous nous dire deux mots de LG 3?
M. ROY: Un instant, M. le Président. M. MORIN: Oui.
M. ROY: Je m'excuse auprès du chef de l'Opposition.
M. MORIN: Je vous en prie.
M. ROY: Puisqu'on a parlé de Bechtel, il y a une question que
j'aimerais bien poser à ce moment-ci. Est-ce que Bechtel est
rémunérée de façon fixe, c'est-à-dire un
montant global pour toute l'exécution des travaux, ou si Bechtel est
ruménérée selon un pourcentage des travaux en cours?
M. BOYD: Ni l'un, ni l'autre. Les gens de Bechtel sont
rémunérés comme les ingénieurs-conseils. On a
d'autres contrats avec des ingénieurs-conseils qui sont basés sur
les heures travaillées avec un pourcentage pour tenir compte des frais
d'administration, etc. c'est normal et avec un honoraire qui est
le même que dans d'autres contrats d'ingénierie. Mais l'honoraire
est un montant moins important relativement au total. C'est la même chose
pour d'autres contrats. C'est basé, la partie principale du contrat, sur
les heures travaillées. Et c'est nous qui décidons si nous ne
voulons plus de leurs services ou non.
M. ROY: Si l'on se réfère à d'autres contrats qui
sont effectués, on sait très bien que, lorsque le gouvernement
engage des ingénieurs pour la construction d'un pont ou encore pour des
travaux de drainage, les contrats avec les ingénieurs sont donnés
selon les tarifs de la corporation et cela implique un pourcentage.
M. BOYD: Oui, mais selon le tarif...
M. ROY: D'ailleurs, vous l'avez dans la construction de toutes les
écoles polyvalentes de la province de Québec, construction
d'hôpitaux. On sait...
M. MALOUIN: La course aux territoires verts.
M. ROY: Là, je n'ai pas questionné mes collègues
d'en face. J'ai questionné les gens de l'Hydro-Québec,...
M. MALOUIN: Excuse-moi.
M. ROY: ... pour votre propre bénéfice également,
pour savoir...
M. SAINT-PIERRE: Pour cacher votre ignorance.
M. ROY: C'est justement. M. le Président, je regrette mais je ne
ferai pas de commentaire aux propos qu'a tenus le ministre. J'aurais bien des
choses à dire là-dessus. Je comprends qu'il est fier, qu'il a une
certaine suffisance intellectuelle personnelle, cela on le connaît. Je ne
ferai pas de débat là-dessus parce que cela pourrait être
contesté.
M. SAINT-PIERRE: Au contraire, mon quotient intellectuel n'est pas assez
haut pour vous suivre dans vos discussions.
M. ROY: M. le Président, je posais une question sérieuse
aux gens de l'Hydro-Québec. Je voulais savoir si c'était de la
rémunération à l'heure, si c'était de la
rémunération selon un contrat à montant fixe ou encore
s'il y avait, à l'intérieur de ce contrat je repose la
question une partie de la rémunération qui tient compte de
la masse globale des travaux qui sont faits. Vous nous avez dit que vous ne
vouliez pas nous déposer le contrat mais il est normal qu'on pose des
questions là-dessus.
M. BOYD: Premièrement, dans les tarifs de l'ordre des
ingénieurs, il y en aurait différentes sortes dépendant de
l'importance des montants. Pour des petits travaux, habituellement c'est fait
tant par jour. Pour les travaux un peu plus importants, c'est basé sur
les taux horaires des ingénieurs, plus un pourcentage de "mark up" pour
l'administration, les profits, etc. Dans d'autres cas, il y a les taux
horaires, plus un "mark up", plus des honoraires.
Dans notre cas, c'est la dernière formule. Il y a des taux
horaires pour le personnel, plus un "mark up" pour tenir compte de
l'administration, des profits, plus des honoraires. Les honoraires sont
reliés au coût de base.
M. ROY: Reliés au coût de base. M. BOYD: Au coût de
base.
M. ROY: En somme, cela veut dire que, plus les travaux augmentent, plus
la masse globale, les contrats sont élevés, plus cette
rémunération peut être élevée.
M. BOYD: Je pense que c'est une mauvaise façon de regarder la
chose. Premièrement...
M. ROY: Ce n'est pas une mauvaise façon de regarder la chose
parce qu'on regarde ailleurs et c'est ce qui se passe. Alors je veux savoir,
dans le cas de 1'Hydro, si c'est différent.
M. BOYD: Je me suis peut-être mal exprimé mais ce que je
veux dire, c'est que dans le cas actuel c'est une firme qui base sa
renommée mondiale, assez importante, sur la réalisation des
travaux en dedans des coûts estimés. Les estimations sont
maintenant connues. Je vous ai donné le chiffre de $3.9 milliards, qui
est l'estimation de base. On a cette estimation. Cette entreprise, sa
responsabilité vis-à-vis de sa renommée mondiale est
d'arriver à ce montant et non pas de le dépasser. C'est assez
important.
A part cela, c'est quand je vous ai parlé de taux horaires et de
"mark up" dans leur cas pour tout le personnel de leur entreprise qui est au
chantier, c'est le taux horaire sans aucun "mark up". Donc, il n'y a pas
intérêt à avoir plus de monde qu'il ne faut.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Sauvé.
M. MORIN: C'est simplement pour répondre à une question
qui m'a été posée au milieu de mon entretien avec nos
invités. On m'a demandé quelle était la source du
pourcentage d'augmentation du coût des matériaux. Il y en a
plusieurs, mais je voudrais en mentionner une qui est tout à fait
officielle puisqu'il s'agit d'une publication du ministère de
l'Industrie et du Commerce: La situation économique au Québec en
1973. Le tableau 17 porte sur la variation de l'indice des prix des
matériaux de la construction au Canada, et pour 1973, l'augmentation
pour la construction domiciliaire a été de 12.6 p.c. et pour le
non domiciliaire elle a été de 10.5 p.c.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, est-ce qu'on peut demander
à M. Boyd quel est le taux utilisé pour 1973, la même
année qui a été citée dans vos estimations
actuellement?
M. BOYD: Nous avons estimé 10 p.c, pour l'ensemble. Pour les
matériaux, malheureusement cela commence en 1974.
Pour l'ensemble, main-d'oeuvre, matériaux et équipement on
a utilisé un composé de 10 p.c.
M. SAINT-PIERRE: Mais, tantôt, pour les matériaux, vous
n'avez pas mentionné un chiffre de 25 p.c. pour 1973?
M. BOYD: Pour 1974.
M. MORIN: Pour 1974.
M. SAINT-PIERRE: Pour 1974. Pour 1973?
M. MORIN: C'est 25 p.c. en 1974, ça commence bien en moyenne.
M. BOYD: Pour les matériaux en 1974, on a 25 p.c.
M. SAINT-PIERRE: C'est ça, leur estimation, ils ont mis 24 p.c.
et vous trouvez que ce n'est pas assez?
M. MORIN: Je trouve que ce n'est pas réaliste. Cela veut dire que
pour l'ensemble ce sera 7 p.c.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, fondamentalement, ça
fait mal, mais il y a une épargne de $11.7 milliards pour les
Québécois par le choix qui a été fait par
l'Hydro-Québec. Ces gens ont droit à nos remerciements, ils ont
sauvé...
M. MORIN: Si les hypothèses sont exactes...
M. SAINT-PIERRE: ... par le choix de Churchill Falls par rapport
à la filière nucléaire... L'histoire se
répète et on ne comprend pas l'entêtement des gens qui
refusent et qui pourtant sont toujours dans les chiffres...
M. MORIN: M. le Président, c'est un point sur lequel, je pense,
il faut répondre au ministre de l'Industrie et du Commerce. Je l'ai
laissé aller tout à l'heure, mais il est...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si vous le permettez, on reprendra ça
à trois heures.
DES VOIX: Suspension.
M. MORIN: Je demande trente secondes. Le ministre de l'Industrie et du
Commerce essaie de faire retomber sur une personne des décisions au
sujet de Churchill Falls. C'est la deuxième fois qu'il se
réfère à ça. Il faudra qu'il se
réfère à ce qu'a dit Jean-Jacques Bertrand
là-dessus avant son décès lorsqu'il a affirmé que
cette décision n'incombait pas à M. Parizeau le moins du monde.
Il a déclaré...
M. SAINT-PIERRE: Un instant, vous allez me donner dix secondes pour dire
que M. Jean-Jacques Bertrand, dans cette même salle, ici, avait dit que
sur ce point il avait été très mal conseillé par
ceux qui l'entouraient à l'époque.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission suspend ses travaux
jusqu'à quinze heures.
(Suspension de la séance à 13 h 7)
Reprise de la séance à 15 h 11
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des richesse
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
Pour la présente séance, M. Garneau remplace M. Perreault.
Le député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, mes questions feront suite aux
questions du chef parlementaire de l'Opposition et seront posées
à M. Boyd.
Ce matin je vais finir par m'habituer, M. le Président
le chef parlementaire de l'Opposition vous a longuement interrogé
sur le coût du projet La Grande estimé à $11,9 milliards.
Vous conviendrez... Pour autant justement que nous acceptions que le taux
d'inflation peut être de 7 p.c. et de 10 p.c. pour
l'intérêt. Le chef de l'Opposition avait souligné le fait
que ce taux d'inflation de 7 p.c. correspondait assez peu au taux d'inflation
que nous avions subi au cours de l'année dernière.
Cependant, vous conviendrez, M. Boyd, que, par rapport au projet initial
qui était prévu de $5,800,000,000, le prix d'aménagement,
le coût d'aménagement de la baie James a doublé. C'est bien
le cas, le coût d'aménagement de la baie James a doublé par
rapport au projet initial?
M. BOYD: Pas tout à fait, parce qu'on a 24 p.c. plus
d'énergie.
M. LESSARD: 22 p.c, c'est-à-dire qu'il y a... M. BOYD: 24
p.c.
M. LESSARD: D'accord. Je tiens compte du fait que l'augmentation de la
puissance installée augmente le coût de 22 p.c. Disons qu'il y a
une différence de 28 p.c. qui s'explique, semble-t-il, d'après
les réponses que vous avez données au chef parlementaire, par
différentes causes. Ce que nous vous demandons et ce que je vous demande
c'est si, dans l'évaluation que vous avez faite, soit $9,9 milliards si
vous estimez le taux d'inflation à 4 p.c, ou $11,9 milliards, si vous
estimez le coût d'inflation à 7 p.c, si, dans ce coût, vous
avez tenu compte d'un coussin assez important qui vous permette de dire que ce
montant sera vraiment respecté et que nous ne pouvons pas envisager la
possibilité, par exemple, d'en arriver à des coûts de $14
milliards, $15 milliards ou $16 milliards, ou peut-être $18 milliards
comme un journaliste l'aurait laissé entendre dernièrement.
M. BOYD: D'abord, il faut distinguer, comme on le disait ce matin, les
coûts de base, des coûts d'escalade, des coûts
d'intérêt.
On vous dit que le coût de base qui a été
vérifié par tout le monde, que j'ai mentionné ce matin,
celui-là est le coût qu'on peut contrôler, qu'on peut
diriger, et on a l'intention de le respecter.
Quant aux coûts d'escalade et d'intérêt, il n'y a
personne, ici, dans la salle, il n'y a personne au Québec et au
Canada... Je pense bien qu'il y a des tas de gens qui voudraient pouvoir
contrôler l'inflation et l'intérêt dans le moment. Donc, je
ne peux pas vous donner de garantie que cela va être plus, comme je ne
peux pas vous donner de garantie que cela va être moins. Des taux
d'intérêt à 10 p.c. pendant douze ans, si on regarde
l'histoire du passé, à mon avis, cela n'a jamais existé.
Cela a varié. Nous-mêmes, nous Hydro, avons atteint 9.9 p.c. En
quelle année? En 1970/71. Depuis, cela a baissé à huit et'
un tiers pour cent, huit et un quart pour cent. Cela a remonté à
neuf et un quart pour cent, neuf et demi pour cent. On met 10 p.c, mais on n'a
pas encore atteint 10 p.c. Probablement que si on l'atteint, cela va être
pour une courte période. Il n'y a certainement personne qui puisse
donner de garantie là-dessus ici.
M. LESSARD: Mais, M. Boyd, justement dans ce coût estimé de
$11,900 milliards, vous vous êtes quand même conservé un
coussin assez important qui vous permette... Parce que vous avez parlé,
ce matin, de la possibilité d'une diminution du taux
d'intérêt, et le taux d'intérêt, vous
l'évaluez actuellement, selon vos hypothèses, lorsque vous parlez
du coût de $11 milliards...
M. BOYD: C'est 10 p.c.
M. LESSARD: ... vous l'évaluez à 10 p.c. Maintenant,
est-ce que vous vous êtes conservé un coussin assez important,
lorsque vous estimez à $11,900 milliards, pour permettre de dire que
cela ne peut pas aller au-delà de, ou être inférieur
à, c'est-à-dire de vous conserver un maximum. Parce que vous
conviendrez avec nous, M. le Président, que le coût final du
projet a des conséquences énormes pour ce qui concerne le choix
que nous allons prendre entre le nucléaire et
l'hydroélectrique.
M. BOYD: Le choix que nous avons à faire entre le
nucléaire et l'hydraulique est basé sur le coût de
l'énergie qui va en sortir. C'est ce point que nous avons discuté
hier et que nous discuterons peut-être encore tout à l'heure. Pour
nous, c'est le point important: combien nous coûtera l'énergie,
selon une méthode ou une autre. Là-dessus, si vous permettez,
j'ai vérifié les chiffres qui étaient mentionnés ce
matin et c'est bien un montant de $230 millions d'économie par
année si on se base sur les chiffres qu'on nous a donnés par
écrit.
Par contre, il y a un montant que je vous ai donné en
réponse à M. Morin ce matin et que j'aimerais corriger.
C'est un montant qu'on m'avait fait rapidement et, à l'heure du
déjeuner, on a pu corriger. On m'avait demandé quel serait
l'effet de l'augmentation de 1 p.c. de l'escalade. Je vous ai répondu:
$650 millions. C'est une erreur. C'est $650 millions, si c'est
une hausse de 1 p.c. de l'escalade et 1 p.c. de l'intérêt.
Si c'est seulement 1 p.c. de l'escalade, c'est $350 millions. Je voulais
corriger cela.
Pour revenir à votre question principale, j'aimerais bien pouvoir
vous assurer que c'est 10 p.c. et que nous ne dépasserons jamais 10 p.c,
mais je répète qu'il n'y a personne, même pas les
plus grands financiers au monde qui peut assurer cela dans le
moment.
Si on se base sur l'expérience passée, sur la nôtre
à Hydro-Québec, on n'a jamais dépassé 9.9 p.c. Cela
a oscillé. Où en sommes-nous dans le moment? Est-ce que cela
restera à 10 p.c. pendant douze ans? Mon opinion personnelle est non,
mais je ne suis pas un spécialiste financier et certainement pas un
spécialiste mondial en finances. Eux-mêmes ne peuvent pas le
dire.
M. GARNEAU: Dans le même cadre que la question du
député de Saguenay, est-ce qu'il serait correct de raisonner de
la façon suivante? Dans votre choix, puisque vous vous y êtes
référé le député de Saguenay s'y est
référé tout à l'heure entre le
nucléaire et l'hydraulique, en termes de coût de construction,
c'est le coût de base qui serait le point de départ et l'escalade
et les taux d'intérêt jouent des deux côtés, dans les
mêmes proportions.
M. BOYD: L'escalade et le taux d'intérêt sont pour nous des
choses incontrôlables. Cela peut-être 6 p.c, 7 p.c. pour l'un et 10
p.c. pour l'autre. Cela pourrait être plus, cela pourrait être
moins.
M. GARNEAU: Mais ce que je veux dire, une fois que vous partez d'un
coût de base dans le cas présent, c'est $6 milliards qui est
le coût de base que vous nous avez donné avec l'augmentation de
puissance si vous prenez les coûts de base d'un choix qui serait
le nucléaire, les deux coûts de base devraient être
escaladés suivant l'inflation et suivant les taux
d'intérêts. Dans ce sens, les mêmes facteurs joueraient dans
les mêmes proportions, si on parle des taux d'intérêt de
l'inflation.
M. BOYD: D'accord!
M. GARNEAU: L'inflation ne serait pas moins dans le nucléaire que
dans l'hydraulique, de telle sorte que le point de repère serait dans
votre évaluation du coût de base qui produit ensuite de
l'énergie. C'est ce coût de l'énergie électrique qui
sort, qui vous sert de point de comparaison entre les deux.
M. LESSARD: Je pense que nous aurons l'occasion d'en discuter, mais il y
a l'étalement des investissements en ce qui concerne le nucléaire
et l'hydraulique, qui est complètement différent. On reviendra
à cela plus tard.
M. GARNEAU: Non, mais c'est vous qui avez posé la question tout
à l'heure.
M. LESSARD: Non, c'est-à-dire que...
M. GARNEAU: Vous avez même relié le choix ou l'importance
de l'évaluation qu'on doit apporter au taux d'intérêt et
à l'inflation, comme étant un des facteurs très importants
pour savoir si on a bien fait de choisir l'hydroélectrique au lieu de
choisir... Vous avez dit cela vous-même tout à l'heure. Alors, la
question que je repose, c'est de savoir si le raisonnement que je faisais,
était correct. C'est que si les coûts de base sont donnés
dans un cas comme dans l'autre, dans l'hydraulique ou dans le nucléaire,
l'échelle mobile des coûts due à l'inflation et au taux
d'intérêt jouant dans les mêmes proportions dans les deux
côtés, le résultat va être le même. Moi, c'est
ce qu'on m'a dit, à moins que vous soyez plus clair qu'eux.
M. LESSARD: On en discutera si le taux d'inflation joue de la même
façon pour un projet ou pour l'autre. Est-ce que, M. Boyd, étant
donné que vous faites une moyenne du taux d'intérêt
à 7 p.c, vous pourriez nous donner l'estimation du taux
d'intérêt calculé annuellement.
M. BOYD: L'intérêt, c'est 10 p.c.
M. LESSARD: Alors, c'est 10 p.c, d'accord! Est-ce que vous pourriez nous
donner l'estimation du taux d'intérêt d'année en
année jusqu'en 1985?
M. BOYD: On a assumé que ce serait 10 p.c. à tous les
ans.
M. LESSARD: En moyenne?
M. BOYD: Oui.
M. LESSARD: Maintenant, je reviens...
M. BOYD: La façon dont on l'applique... l'année
donnée, on a $1 milliard d'investi. On charge contre ce milliard 10 p.c.
d'intérêt, donc à la fin de l'année, c'est $1
milliard plus 10 p.c. de $1 milliard, cela fait $100 millions, si je ne me
trompe pas. Donc, les travaux à ce moment, représentent $1.1
milliard.
M. SAINT-PIERRE: Une chance que Fabien n'est pas ici!
M. LESSARD: Vous ne pouvez pas assurer les membres de la commission
parlementaire que ce montant de $11,9 milliards ne pourra pas être
dépassé?
M. BOYD: Je vous ai répondu, je pense, tout à l'heure, le
mieux possible. Il n'y a personne, que je connaisse, qui peut dire que les taux
d'intérêt vont être limités à 10 p.c. pendant
douze ans. Je vous ai dit que cela pouvait être moins et que cela pouvait
être plus. Je vous ai dit que l'expérience à
l'Hydro-Québec, c'est
qu'on avait frappé 9.9 p.c. pour une fois, pour un emprunt. Cela
avait baissé ensuite. Ne me demandez pas de vous garantir quelque chose
que les experts financiers ne peuvent pas faire.
M. LESSARD: Si on délaisse le taux d'intérêt qu'on
ne peut estimer, on peut quand même prévoir un coussin. Quel
coussin vous êtes-vous conservé pour pouvoir en arriver aussi
justement que possible à $11,9 milliards?
M. BOYD: On revient à l'estimation de base. Je vous ai dit ce
matin que, pour la partie hydroélectrique de l'estimation de base, on
avait des imprévus de 8 p.c. Alors, 8 p.c. de près de $4
milliards. C'est cela que nous avons comme imprévus qui seraient
causés par des modifications qu'on doit faire du point de vue technique.
Tandis que... On me donne les chiffres exacts, c'est 8 p.c. de $3.7 milliards,
ce qui donne $280 millions d'imprévus pour les modifications techniques
qu'il faudrait faire au projet hydroélectrique. A une autre question, ce
matin, j'ai dit que, pour les lignes et postes, étant donné qu'on
n'avait pas terminé les travaux sur le chantier, c'est-à-dire
l'étude des fondations pour chaque pylône n'est pas faite mais les
tracés sont choisis, dans ce cas, on avait un facteur, un coussin du
côté des lignes et postes de 15 p.c. d'imprévus. Alors,
c'est 15 p.c. de... Je ne me rappelle plus le montant.
M. LESSARD: Pour les lignes de transmission.
M. BOYD: Oui, il y avait 15 p.c. Quant au taux d'intérêt...
C'est 15 p.c. de $1,8 milliard.
M. LESSARD: Combien?
M. BOYD: 15 p.c. de $1,8 milliard pour les lignes et les postes.
M. LESSARD: Pour le taux d'intérêt. Pour les
imprévus.
M. BOYD: Pour les imprévus. Quant aux taux
d'intérêt, il n'y a absolument personne qui puisse donner des
garanties qui ne seront pas plus que 10 p.c. mais il n'y a personne qui peut
vous dire que ce ne sera pas 8 p.c, pour la moyenne.
M. LESSARD: D'après ce que vous nous avez dit ce matin, le taux
d'intérêt aurait plutôt tendance à diminuer par
rapport justement aux années dernières.
M. BOYD: C'est mon opinion personnelle. D'autres peuvent avoir des
opinions contraires mais je vous dis là-dessus que si le taux
d'intérêt pour Hydro-Québec monte, ça va s'appliquer
pour tous les autres projets d'Hydro-Québec, parce que c'est
Hydro-Québec qui emprunte pour la Société
d'énergie. Si Hydro-Québec continue à bâtir Manic 3,
Outardes 2, Gentilly 2, et d'autres choses, les lignes et les postes, etc., si
elle dépense de l'argent qu'elle emprunte pour faire la distribution,
tout ça va être à 10p.c. ou à 8 p.c. ou à 11
p.c. d'intérêt. Si elle bâtissait, au lieu de la Baie James,
Gentilly 3, Gentilly 4, Gentilly 5, Gentilly 6 jusqu'à Gentilly 12,
etc., ce serait aussi à 10 p.c, 11 p.c. ou 8 p.c.
d'intérêt. Donc, le problème resterait là.
M. LESSARD: M. Boyd, parce que nous aurons l'occasion de parler tout
à l'heure du financement, vous conviendrez qu'il est extrêmement
important de pouvoir estimer au moins, selon les chiffres les plus près
possible, un investissement comme celui-là pour pouvoir le financer. Il
reste quand même que $12 milliards correspondent à $2,000 par
personne au Québec, comme investissement. Nous sommes 6 millions au
Québec, ça correspond à $2,000 par personne jusqu'en 1980.
Il est important de pouvoir savoir si ce montant de $11.9 milliards ne sera pas
dépassé.
M. BOYD: Je ne sais pas ce que je peux ajouter...
M. LESSARD: Mais vous ne pouvez pas...
M. BOYD: Je voudrais bien pouvoir ajouter quelque chose. Je vous dis
qu'on a des coûts de base qui sont connus maintenant, ils ont
été déposés et on va les contrôler.
L'escalade et l'intérêt, ce n'est pas nous qui les
contrôlons.
M. LESSARD: Concernant les prix de base...
M. BOYD: Si un organisme gouvernemental voulait nous prêter de
l'argent à 8 p.c, ce serait une bien bonne chose. Maintenant, on ne peut
rien y faire.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'on peut simplement parler encore de
l'inflation et du taux d'intérêt? Ce qu'il est bon de se rappeler,
c'est qu'en ce qui touche d'une part les taux d'intérêt,
Hydro-Québec utilise comme taux moyen pour l'ensemble de son programme
d'investissement, un taux d'intérêt qu'elle n'a jamais payé
jusqu'ici, comme taux moyen.
Je pense que, supportée par autant de revues que vous pouvez en
donner vous-mêmes, l'ascension constante des taux d'intérêt
apparaît inconcevable. Nous sommes dans une période très
forte, mais on voit que les mouvements cycliques ont déjà
commencé à se mettre en oeuvre. On le sent dans le prix du bois,
on le sent dans nombre d'indicateurs économiques. Il me semble donc que,
par rapport à ce taux de 10 p.c, on ne peut sûrement pas accuser
Hydro-Québec d'avoir fait preuve d'imprudence ou d'être trop
optimiste.
Dans les 7 p.c. d'inflation, et c'est une question que j'aimerais poser
à M. Boyd, on sait
que l'inflation, dans un projet de construction hydroélectrique,
n'est pas la même chose que l'indice implicite des prix à la
consommation qui touche le consommateur ou une partie importante
peut-être particulièrement dans ces années actuelles
dans le secteur de l'alimentation. Ils nous ont donné une preuve
que l'indice qu'ils ont retenu est un indice basé spécifiquement
sur une décomposition des coûts du projet, tant sur le plan de la
main d'oeuvre que des matériaux, que des services.
J'aimerais demander à M. Boyd quelle a été
l'expérience des 20 dernières années, depuis la
période d'après-guerre, sur l'indice de l'inflation des
coûts de matériaux. Est-ce qu'il y aurait des statistiques au
niveau de vos recherches économiques qui nous permettraient de donner
quel a été annuellement le taux d'augmentation des coûts de
matériaux qui, bien sûr, dans un projet hydroélectrique
seront un aspect important de ce projet?
Je ne sais pas si on peut le trouver. Mais, je vais risquer...
enfin...
M. BOYD: J'ai ici je ne sais pas si on peut en trouver d'autres
en attendant "Prix et indice des prix" statistiques
fédérales, pour l'indice des prix de la construction non
résidentielle, pour les matériaux. En 1966, l'indice était
de 115.4 et en 1973, c'était 157.3.
C'est un indice. Tandis que la main d'oeuvre on voit qu'il faut
prendre des composantes, on ne peut pas prendre... c'était 128
contre 249.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce...
M. BOYD: Dans le projet, comme on a dit précédemment, on
décompose tant d'hommes/mois et on applique un taux d'escalade pour la
main-d'oeuvre, ensuite les matériaux et l'équipement.
M. SAINT-PIERRE: On voit que, pour une période de treize ans
puisque, dans l'indice donné par M. Boyd, les chiffres 100 se
retrouvent en 1961 de 1960 à 1973, l'augmentation a
été de 57 p.c. Treize ans, c'est à peu près la
période prévue pour la construction du barrage de la baie
James.
Je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui veut faire le calcul, mais,
à un taux de 7 p.c. par année, cumulatif, sur une période
de treize ans, cela va donner beaucoup plus que l'expérience des treize
dernières années. Tout cela pour dire qu'au niveau des
coûts de financement, il m'apparait que 10 p.c, qui est un taux moyen
utilisé, dépassant tout ce qu'ils ont déjà eu, cela
m'apparaît un taux assez libéral et que les 7 p.c. sur l'inflation
peuvent paraître faibles, par rapport à ce qu'on a vécu
récemment, mais lorsqu'on analyse qu'il y a une très forte
proportion, dans cela, qui est reliée aux matériaux et non
à l'alimentation et des choses semblables, la tendance, à long
terme, est de beaucoup plus faible. Je ne sais pas si on l'aurait.
M. BOYD: Pardon, excusez-moi.
M. SAINT-PIERRE: La tendance à long terme, par année,
vous...
M. BOYD: J'ai essayé et, apparemment, mon affaire n'est pas assez
claire. Cela relève de... J'aimerais, avec votre permission, qu'on
demande à M. Larochelle, qui est un économiste de longue
expérience, de vous expliquer cela. Mais avant de lui céder la
parole, j'aimerais essayer de répondre à une question au sujet du
coussin ou des imprévus dont on parlait tout à l'heure. Je vous
ai dit que pour la partie hydroélectrique, on avait 8 p.c. de $3.7
milliards, ce qui faisait $280 millions et que, pour la partie lignes et
postes, on avait 15 p.c. qui représentaient $270 millions. Cela fait
$550 millions.
Evidemment, là-dessus, dans les $11.9 milliards, on prend
l'escalade et l'intérêt de 10 p.c. sur les imprévus. Donc,
les $550 millions doublent. Cela nous fait donc $1,100,000,000 pour les
imprévus escaladés et les intérêts.
M. LESSARD: Qui étaient calculés dans votre
$1,100,000,000.
M. BOYD: C'est inclus, $1.1 milliard M. LESSARD: Soit autour de 10
p.c?
M. BOYD: C'est cela.
M. Larochelle, voudriez-vous essayer de faire mieux que j'ai fait?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Larochelle.
M. LAROCHELLE: J'ai devant moi un tableau qui, j'espère, peut
répondre à la question qui a été posée.
C'est une analyse des indices de 1961 à 1973. On a jugé que cette
période était davantage propice à l'analyse pour nous
donner des intuitions sur le futur, parce qu'on pense que les prix qu'ils ont
eu avant 1961, ont peu de chance de se répéter.
Si on prend, par exemple, l'indice implicite des prix du produit
national brut canadien qui reflète la croissance de tous les prix dans
les biens et services au Canada, on aurait pour la période de 1961
à 1973 un taux de 3.8 p.c.
Si on décompose cette période en deux parties, vous
auriez, de 1961 à 1970, 3.4 p.c. et dans les trois dernières
années 5 p.c Le tout vous donne 3.8 p.c sur cette période.
Ici, j'ai une certain nombre d'industries. Je peux aller un peu plus
rapidement.
M. SAINT-PIERRE: Mais ce sont les chiffres. Ce que vous donnez, c'est
pour l'indice implicite des prix du produit national brut.
M. LAROCHELLE: Le premier que je vous donnais, c'est le tout, l'image
globale. Si on va par secteur, Tantôt, vous parliez des matériaux.
L'industrie du bois, par exemple, au cours de ces années a
été de 6.1 p.c. Mais, depuis trois ans, cela a été
de 18 1/2 p.c.
M. SAINT-PIERRE: J'en connais qui faisaient des allées de
"bowling".
M. LAROCHELLE: L'industrie du fer et de l'acier, 2.2 p.c. de 1961
à 1973, mais au cours de 1970 à 1973, cela a été de
4.9 p.c. Les barres pour béton armé, 1.9 p.c. de 1961 à
1973. Par contre, cela a été de 6.6 p.c. au cours des trois
dernières années, et ainsi de suite, le cuivre affiné, 5.3
p.c; le ciment, 3.2 p.c...
M. SAINT-PIERRE: Globalement, les matériaux de construction comme
tels...
M. LAROCHELLE: Bon, à titre d'exemple, si je prends les
matériaux de construction non domiciliaires...
M. SAINT-PIERRE: Oui.
M. LAROCHELLE: ... de 1961 à 1973, le taux a été de
3.8 p.c. annuellement, en moyenne, alors que, depuis trois ans, il a
été de 6.8 p.c. Or, tout cela indique, au fond tout le
monde le sait, tout le monde l'a vécu que les taux ont connu une
certaine ascension au cours des récentes années. Mais, comme le
disait M. Boyd, on pense quand même que cela va finir par ralentir du
point de vue de l'évolution des prix comme telle. Les prix vont
augmenter, c'est sûr, mais ils devraient augmenter un peu moins vite,
après ce qu'on appelle, dans notre jargon, la "surchauffe".
M. SAINT-PIERRE: C'est un... Je pense que, de 1961 à 1973, c'est
une période de treize ans. Vous avez compris cela?
M. LESSARD: Disons qu'on accepte, M. le Président, ces 7 p.c.
avec réserve, mais disons que c'est possible, étant donné
qu'il y a eu une augmentation considérable au cours des dernières
années. Cependant, on doute que cela puisse diminuer autour de 7
p.c.
Mais, cependant, si on parle maintenant du taux d'intérêt
comme tel, lors du premier projet qui avait été prévu,
quel était le taux d'intérêt estimé?
M. BOYD: C'était 8 1/2 p.c.
M. LESSARD: C'était 8 1/2 p.c. Maintenant, outre le taux
d'intérêt et l'inflation, est-ce qu'actuellement, vous pouvez nous
affirmer, ici, en commission parlementaire, que les coûts estimés,
tant du projet de La Grande, c'est-à-dire tant du projet de LG 2 sur
lequel il y a eu de études complètes de faites que des autres
projets, est-ce que vous pouvez nous dire que tout a été
calculé, par exemple, les modifications aux types de barrages, ou
à l'emplacement des déversoirs, est-ce que vous pouvez nous dire
que, globalement, il n'y aura pas de modification importante en ce qui concerne
les coûts estimés, outre le coût d'intérêt ou
l'inflation?
M. BOYD: II ne devrait pas y avoir de modification qui ferait
dépasser les imprévus qu'on a inclus dans le budget. Je vous ai
dit que ces estimations étaient assez avancées et
détaillées. Il y a plusieurs volumes. Cela a été
fait et refait et revu par tous les meilleurs ingénieurs qu'on connaisse
au Québec. On a même été chercher quelques experts
à l'extérieur pour les vérifier, et c'est la meilleure
somme, à notre connaissance, qu'on puisse donner.
La même chose s'applique à toute autre forme de
construction, et on parlait tout à l'heure, ce matin plutôt, du
nucléaire qui allait en s'améliorant. Il va en
s'améliorant, mais, à chaque fois qu'il s'améliore, il
coûte plus cher. Il y a un grand nombre de centrales nucléaires
aux Etats-Unis qui sont fermées pour un an, deux ans ou trois ans parce
qu'il faut les modifier, parce que les mesures de sécurité ne
sont pas assez bonnes.
Au Québec et au Canada, on n'a pas encore eu tellement ce
phénomène, quoiqu'on l'ait eu à Gentilly 1. Gentilly 1 a
été fermée parce qu'on avait besoin d'eau lourde ailleurs,
mais en même temps, il y avait des changements au système qui ont
dû être faits. Ces changements coûtent de l'argent.
M. GARNEAU: Alors, M. Boyd, dans le domaine des coûts, si on
accepte et qu'on reconnaît que votre évaluation de l'inflation et
du financement à des taux d'intérêt à 7 p.c. et 10
p.c. est assez raisonnable, est-ce qu'il serait juste de dire que le facteur le
plus important dans l'évolution des coûts du projet deviendrait
les relations de travail sur les chantiers.
M. BOYD: C'est évident. Les chiffres qu'on vous donne sont
basés sur des relations de travail normales, c'est-à-dire que
l'on travaille normalement, qu'il n'y ait pas plus de grèves qu'il ne le
faut.
M. GARNEAU: Et qu'il n'y ait pas d'autres événements du
mois de mars.
M. BOYD: II est évident que l'événement du mois de
mars coûte assez cher. Je pense que j'ai cité hier, avec certaines
réticences, un montant. On a mentionné, je pense que c'est M.
Saint-Pierre qui l'a fait, que les dommages pourraient être encore
beaucoup plus graves, s'il se produisait encore des désordres semblables
à une période plus avancée du projet.
Comme on ne peut pas donner de garantie non plus sur les taux
d'intérêt, on ne peut pas en donner sur les relations de travail.
Ce sont
des problèmes qui affectent la baie James et qui affectent le
nucléaire en Ontario, qui affectent le nucléaire au
Québec, qui affectent la construction un peu partout. Il y a eu des
problèmes de toutes sortes de ce côté.
M. LESSARD: Concernant ces conditions de travail, vous avez quand
même estimé un montant d'augmentation des salaires d'ici 1980.
M. BOYD: D'accord. Oui.
M. LESSARD: Mais cependant, il est possible d'envisager que le
coût de $11,900,000,000 soit dépassé.
M. BOYD: Je ne peux pas vous dire cela.
M. LESSARD: Je voudrais le savoir. Je voudrais avoir une assurance. Vous
êtes des spécialistes. Je me fie...
M. BOYD: Je ne suis pas un spécialiste.
M. LESSARD: Vous avez des spécialistes. Vous avez dit, ce matin,
que vous ne croyiez pas... Parce qu'un certain journaliste a laissé
entendre que cela pouvait aller jusqu'à $18 milliards... Nous avons
entendu dire aussi que Canadian Bechtel pouvait envisager cette
possibilité. C'est quand même assez important. Vous nous avez dit,
ce matin, qu'on ne pouvait pas se fier aux journalistes, que vous aimiez mieux
vous fier à vos spécialistes dans ce secteur, vous fier à
Hydro-Québec qui avait de l'expérience dans ce secteur. On vous
demande justement s'il est possible que ce chiffre qui a été
lancé par un journaliste, soit $18 milliards, puisse être atteint,
ou, pouvez-vous nous assurer, aujourd'hui, en commission parlementaire, que le
chiffre de $11,900,000,000 ne pourra pas être dépassé?
M. BOYD: Si vous éliminez les variations possibles en plus ou
moins sur l'escalade et le taux d'intérêt, je dirais oui.
M, LESSARD: Quand vous dites en plus ou en moins, est-ce que vous avez
fait justement une analyse du plus ou du moins, c'est-à-dire que vous
avez parlé des 4 p.c, soit $9.9 milliards, est-ce que justement vous
avez fait une analyse en plus et cela peut aller jusqu'à combien en
pourcentage?
M. BOYD: Je vous ai dit tout à l'heure que si on avait 1 p.c. de
plus en escalade, cela représentait $350 millions. Si on avait 1 p.c. de
plus en intérêt, cela représentait un autre $300
millions.
M. MORIN: Une petite question, si le député de Saguenay me
le permet. Dans l'analyse de sensibilité qui fait partie de votre
programme d'équipement 1978-1985, pour le programme 30,
c'est-à-dire La Grande 79, point intercalé, le coût de
base, à 4 p.c. donnait $7,307,000,000. Avec l'inflation à 5 p.c,
c'est-à-dire 1 p.c. de plus, cela donnait $7,790,000,000. La
différence était dont de $483 millions et non pas de $350
millions pour un programme qui ressemble fort à celui dont nous parlons,
en ce moment, avec vous. Est-ce que vous êtes tout à fait
sûr de vos $350 millions?
M. BOYD: Je n'ai pas le programme, mais vous l'avez. Pourriez-vous me
dire de combien de MW il était question dans ce programme?
M. MORIN: Dans le LG79, je peux vous le dire rapidement. Cela ne sera
pas long. Où est-ce que les programmes sont décrits?
M. BOYD: C'est quel programme, M. Morin?
M. MORIN: Le programme 30. C'était 13,968,000 kW.
M. BOYD: MW.
M. MORIN: 13,968 MW.
M. BOYD: Ah oui! Alors, on ne parle pas de la même sorte de
projet. Nous, on parle de 10,000 MW, et vous êtes rendu à 14,000
MW. C'est un programme complet pour une période différente. Donc,
le montant, c'est raisonnable qu'il soit plus élevé.
M. MORIN: Alors, c'est un projet qui est plus considérable.
M. MASSE: M. le Président...
M. MORIN: Donc, votre chiffre de $350 millions, vous en êtes
relativement certain?
M. BOYD: Oui, je viens de demander à nouveau à nos
spécialistes ici. On m'assure que c'est bien cela. D'ailleurs, j'ai pris
la peine de vous dire qu'on avait vérifié à l'heure du
déjeuner et on a corrigé l'erreur que je vous avais donnée
ce matin.
M. MORIN: Bien.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Richesses naturelles.
M. MASSE: On mentionne du côté du Parti
québécois...
M. LESSARD: On ne mentionne rien, on interroge...
M. MASSE: ... on parle de vouloir faire dire aux représentants de
la société d'énergie qu'il peut y avoir des
excédents sur les prévisions, en termes de coûts. C'est
bien évident. Comme il
peut y avoir aussi des relations de travail plus envenimées en
1976 qu'elles ne le sont maintenant. C'est vraiment une prévision qui
est basée, à mon avis, sur des méthodes assez
scientifiques. Aussi, comme on pourrait demander au président de la
Société d'énergie de la baie James s'il prévoit
également qu'il y ait une possibilité de diminution des
coûts sur les estimations, parce que vous avez déjà
envisagé un taux d'inflation de 4 p.c. et un taux d'intérêt
de 8.5 p.c. qui vous donnaient un coût total de $9.9 milliards. Je pense
qu'autant le député de Saguenay peut avoir raison, autant les
prévisions inverses aussi peuvent arriver, soit une diminution des
coûts.
M. LESSARD: Bon. Justement, M. le Président...
M. GIROUX: Je pense c'est juste un mot, M. Lessard
qu'actuellement, il ne faut prendre que les prix de base qui sont faits en
janvier 1974 et toutes les éventualités qui peuvent arriver dans
n'importe quel genre de construction seront sujettes à toutes sortes de
choses dont on ne peut pas savoir quels en seront les effets réellement.
Pour les taux de base, au meilleur de la connaissance de tout le monde, on
essaie de prendre des taux qui ne favorisent ni l'un ni l'autre, ni un
système, ni un autre système. Seulement, en dehors de cela, je
crois qu'on doit considérer que n'importe quelle déclaration est
hypothétique.
M. LESSARD: Voici, suite à la question du ministre des Richesses
naturelles et au témoignage de M. Giroux, je ne peux pas dire que je
suis complètement d'accord sur le témoignage de M. Giroux parce
que, dans le nucléaire, on peut étaler l'investissement.
M. GIROUX: Vous pouvez l'étaler?
M. LESSARD: Voici. Je vais maintenant poser une question à M.
Boyd. Est-ce que vous pourriez nous dire maintenant, étant donné
que vous évaluez le taux d'inflation à une moyenne, d'ici 1980,
de 7 p.c, année par année de 1975, 1976, 1977, jusqu'à la
fin du parachèvement des travaux, le taux d'inflation qui a
été estimé par Hydro-Québec et la
Société d'énergie de la baie James? Année par
année parce que c'est très important.
M. BOYD: On a les centrales hydrauliques.
M. LESSARD: Disons que, pour l'hydraulique, on pourra y revenir. Mais on
vous demande le taux d'inflation que vous avez estimé, que ce soit pour
les centrales hydrauliques ou les centrales nucléaires, c'est le taux
d'inflation annuel que vous avez estimé.
M. BOYD: Comme on vous le disait ce matin, on a pondéré
les trois composantes, la main-d'oeuvre, les matériaux et le
matériel et avec leur importance, année par année. Pour
les différents projets comme LG1 du début à 1976, on a 8
p.c. par année.
M. LESSARD: Combien? 8 p.c. par année, mais vous n'avez pas fait
d'estimations? Vos 8 p.c. viennent de quelque part. Ce que je vous demande
c'est s'il est possible d'obtenir cette estimation annuellement.
M. BOYD: Oui. Je vais vous la donner autrement si vous voulez. LG1 en
1974, c'est 8 p.c; en 1975, c'est 8 p.c; en 1976, c'est 8 p.c.
M. LESSARD: D'accord. Une minute, pas trop vite. C'est 8 p.c. pour les
trois ans.
M. BOYD: En 1977, c'est 6 1/4 p.c; en 1978, 6 1/4 p.c; en 1979, 6 1/4
p.c.
M. LESSARD: Oui.
M. BOYD: 1980, 5 1/4 p.c; 1981, 5 1/4 p.c; 1982, 5 1/4 p.c; 1983, 5 1/4
p.c, 1984, 5 1/4 p.c.
M. LESSARD: En 1984, 5 1/4 p.c. Est-ce que...
M. BOYD: C'est typique. Je peux vous donner LG2, LG3, LG4 et les
détournements et réservoirs, et cela varie assez faiblement.
C'est sensiblement la même chose.
M. LESSARD: Sur le nucléaire, est-ce que vous avez fait des
estimations?
M. BOYD: Oui, là...
M. LESSARD: On pourra y revenir plus tard.
M. Boyd, nous constatons, et je comprends que vous soyez très
prudents, qu'à la fois Hydro-Québec et la Société
d'énergie de la baie James sont beaucoup moins sûres de leurs taux
ou du coût total du projet qu'elles ne l'étaient en 1971 et 1972.
Cela me surprend considérablement parce que, depuis ce temps, vous avez
dû certainement faire des études qui vous permettent d'être
beaucoup plus sûrs et d'avoir un coussin. Toutes ces différentes
éventualités ont été analysées et il me
semble que vous devriez, après près de trois ans de discussions
de ce projet, pouvoir nous dire, de façon beaucoup plus sûre que
cela ne l'était en 1971, le coût total de ce projet.
M. BOYD: M. Lessard, je pense que vous essayez de me faire dire des
choses que je ne veux pas dire, que je n'ai pas dites ou que d'autres n'ont pas
dites. Quand on a dit $5,8 milliards, c'était toujours conditionel
à 4 p.c. d'escalade et 8.5 p.c. du taux d'intérêt.
C'étaient toujours ces deux conditions et chaque fois
qu'on va vous donner des chiffres, cela va toujours être
conditionnel à l'escalade et au taux d'intérêt.
C'était vrai dans ce temps-là, c'est encore vrai. Nous
étions dans cette condition en 1972; maintenant, les conditions ont
changé et tout le monde le sait. On fait la meilleure estimation
possible et je peux vous assurer que les études économiques
faites sur les escalades sont volumineuses. Elles ont été faites
par un groupe et à la Société d'énergie et à
Hydro-Québec et les deux ont été mises ensemble pour les
comparer et cela vaut n'importe quelle étude économique qui ait
pu être faite sur ce sujet. On ne peut pas vous donner mieux que cela.
Vous iriez ailleurs, en dehors du pays, et vous n'auriez pas de chiffres qui
pourraient être plus garantis que ceux-là.
M. LESSARD: Donc à part l'inflation et le taux
d'intérêt, en fait, les autres facteurs n'ont pas
différé, si on laisse le facteur d'augmentation de la puissance
énergétique, les autres facteurs n'auraient pas modifié,
depuis, vos études depuis 1971 et 1972.
M BOYD: Je vous ai dit qu'il y avait eu des changements, comme des
changements techniques et d'environnement, qui représentaient $700
millions.
M. LESSARD: M. Boyd, vous admettrez qu'étant donné
l'ampleur de ce projet, nous avons certaines raisons d'être fortement
inquiets, tant au point de vue du financement qu'au point de vue des
engagements qui sont pris pour le Québec d'ici plusieurs années.
D'autre part, vous admettrez aussi, en ce qui me concerne, que devant
l'imprécision du fait que ce projet ne pourra pas dépasser $11.9
milliards, que vous ne pouvez pas nous assurer que ce projet ne pourra pas
dépasser $11.9 milliards, ça peut être inquiétant.
Vous me permettrez aussi de rappeler une discussion que j'ai eue avec vous les
19 et 20 mai 1971, concernant le premier projet qui a été
présenté à ce moment-là à la fois par
Hydro-Québec et la Société d'énergie de la baie
James, c'était le projet NBR qui a été rejeté
depuis parce que le projet de La Grande semblait plus avantageux à
longue période. Cependant, le projet de La Grande avait
été choisi parce qu'il était plus avantageux.
Peut-être que ce rappel de la discussion que nous avions eue au cours des
séances de la commission permanente des Richesses naturelles au sujet du
projet de la baie James, les 19 et 20 mai 1971 est assez long. Mais je pense
que ce rappel m'apparaît très important, parce que ça nous
amène, ce n'est peut-être pas le cas des députés
libéraux, à nous poser des questions fort sérieuses. M. le
Président, vous me permettrez de citer le journal des Débats des
19 et 20 mai 1971.
Question de M. Lessard. Je cite intégralement. "M. Lessard: M. le
Président, j'avais deman- dé la parole avant le souper. Mais
questions s'adresseront à M. Boyd. Vous avez bien dit cet
après-midi que le coût maximum du projet pouvait être de
$4.1 milliard et qu'à ce prix-là, ça reviendrait à
environ 10 mills à 12 mills du kilowatt-heure".
Réponse de M. Boyd: "M. Boyd: C'est ce qu'on a
calculé."
M. BOUTIN (Abitibi-Ouest): M. Boyd.
M. LESSARD: Ne me mêlez pas.
Question de M. Lessard: "M. Lessard: Vous avez dit aussi que ce montant
ne pouvait pas être dépassé et qu'au contraire, ce montant
pouvait être diminué jusqu'à 20 p.c.
M. le Président, comment M. Boyd peut-il être aussi absolu
dans ses affirmations lorsque nous savons que lors de la réunion de la
commission des richesses naturelles du 15 décembre 1969, nous avons pu,
par exemple, obtenir les estimations de différents projets:
"Rapide-des-Iles a été estimé à $24.5 millions et
le coût réel a été de $40,765,000; Manic 5 a
été estimé à $237 millions et le coût
réel en a été de $374 millions; Outardes: estimation $150
millions, coût réel: $187 millions. Outardes 3, estimation, $83
millions, coût réel, $128 millions. Total de ces quatre projets:
$494,500,000 en estimations; coût réel: $729,725,000. Ce qui veut
dire que les coûts réels ont dépassé les estimations
sur ces quatre projets de 47 p.c. Comment, aujourd'hui, pou-vez-vous être
aussi catégorique dans l'affirmation que le coût complet du projet
de la baie James sera de $4.1 milliards? "M. Boyd: M. le Président,
à cette assemblée de la commission parlementaire, je pense que
j'avais passé passablement de temps à expliquer les augmentations
de ces coûts. Entre autres, les principales raisons, c'est que nous
étions dans une période où le coût de
l'intérêt était passé de 5 p.c. à 10 p.c. Le
projet de Manic-Outardes a été annoncé en 1959/60. A ce
moment-là, si je ne me trompe, le coût d'intérêt
était d'environ 5 p.c. Lors de la dernière phase, Manic 3, on a
été jusqu'à 10 p.c. d'intérêt. Vous pouvez
vous imaginer l'influence de ce facteur. Dans le cas de la baie James, nous
avons fait des calculs de 8 p.c., 9 p.c. et 10 p.c. d'intérêt.
Nous employons 10 p.c. d'intérêt. Il y a une autre chose qui est
très importante dans les... "M. Lessard: II y a une différence de
47 p.c. "M. Boyd: J'avais le compte rendu du débat où j'ai tout
expliqué cela en détail; si on pouvait le retrouver, je vous le
répéterais. En plus de l'intérêt, on était
dans une période où les salaires ont augmenté d'une
façon vertigineuse. De 1960 à 1969/70, les salaires ont
monté en flèche. "Une troisième chose, c'est que les
estimations qui avaient été faites au départ ne
prévoyaient pas d'imprévus et d'escalades. C'était la
méthode de faire les estimations
autrefois, quand les salaires étaient à peu près
fixes, quand les coûts d'intérêt étaient à peu
près stables, cela n'entrait pas dans les estimations. "Aujourd'hui, on
vous l'a expliqué, on prévoit 4 p.c. d'inflation par année
sur nos projets, on prévoit 12 p.c. d'imprévus dans le cas de la
baie James. Ces choses-là, nous les prévoyons. Quand vous nous
demandez pourquoi nous sommes si sûrs, c'est que dans les cas de
problèmes géologiques que nous avons là-bas, nos gens ont
pris, en plus des prévisions d'imprévus, des marges
sécuritaires. Ils en ont mis plus qu'il n'en fallait. "Vous avez dans la
construction ici, de 1959 à 1963, le salaire horaire moyen pour
l'ensemble des chantiers, qui était de $2.32. En 1969, il était
de $4.50. C'était imprévisible, je pense bien, à ce
moment-là, des escalades semblables. Les gens de Manie-Outardes ont eu
les mêmes salaires que les gens de la construction de Montréal.
"Maintenant nous prévoyons ces choses-là beaucoup mieux que dans
le temps, l'expérience de ces escalades à Manic-Outardes nous a
permis de faire de meilleures estimations. "M. Lessard: Comment se fait-il que
là vous dites que c'est assuré, que le montant maximum sera de
tant, alors que ces différents projets se sont quand même
échelonnés sur un certain nombre d'années et que
là, vous n'avez pas pensé à prévoir ces
différences-là, à corriger les différents montants,
la différence, par exemple, entre les estimations et les coûts
réels, alors que vous nous dites que pour une différence de 47
p.c. dans la construction des projets antérieurs, vous êtes
assurés que cela ne dépassera pas $4.1 milliards. "Est-ce que
vous en êtes vraiment sûrs que maintenant tout a été
corrigé, que le taux d'intérêt sera le même, que
l'augmentation des salaires est comprise dans l'étude de votre projet,
etc. "Si par exemple, on arrivait avec une différence, même de 10
p.c. ou de 15 p.c, je pense que le coût au mil changerait assez
considérablement. "M. Boyd: Je vous ai expliqué que, dans le taux
d'escalade de 4 p.c, nous prévoyions des augmentations de salaire
très importantes. "On prévoyait des escalades de matériel
et d'équipement qui sont réalistes. On a donc prévu dans
l'escalade un montant de 4 p.c. "M. Picard: J'aurais une question, M. Boyd.
Pour résumer ce que vous venez de dire, si je comprends bien, dans
l'estimation de $4.1 milliards, dans votre rapport, vous dites que cela peut
être affecté à plus zéro ou possiblement moins
zéro. Est-ce que cela voudrait dire que les $4.1 milliards
représentent un coût maximum imaginable? "M. Boyd: C'est ce qu'on
vous dit: Oui. "M. Picard: Alors, il n'y aurait pas possibilité que cela
coûte plus cher que cela. Mais il y aurait possibilité que le
coût puisse descendre jusqu'à $3.28 milliards? "M. Boyd: C'est
l'opinion exprimée par ce bureau d'ingénieurs-conseils. "M.
Joron: Est-ce que ce taux comprend l'escalade, aussi ce que les Anglais
appellent "escaladation"? "M. Boyd: Oui, oui. Les escalades sont incluses
à 4 p.c. Je prévois votre question, M. Joron. J'imagine que vous
voulez dire: 4 p.c, est-ce suffisant? 4 p.c, est-ce un taux d'escalade
composé où la main-d'oeuvre représente plus de 4 p.c?
Permettez-moi de ne pas l'indiquer ici, parce qu'on a quand même des
conventions collectives à négocier. "L'équipement est un
facteur inférieur à 4 p.c. et les matériaux de
construction sont également inférieurs à 4 p.c. C'est le
résultat net. A la suite d'études poussées par notre
département de recherche économique qui a fixé ce taux
d'escalade de 4 p.c. sur l'ensemble, c'est ce qui a été
utilisé, par la suite, par les ingénieurs-conseils et
l'Hydro-Québec. Vous avez donc, à partir de $4,100,000,000 des
possibilités d'amélioration, à partir d'un rapport
très conservateur. "Maintenant, vous avez fait des calculs. Le ministre
de l'Education disait 10, vous dites 12. Vous pouvez faire des calculs. Je
reviens. Le ministre de l'Education disait $10, cela voulait dire $10 milliards
Je pense que c'est le ministre de l'Industrie et du Commerce
actuellement . "Vous dites $12 milliards. M. Joron l'estimation à
$12 milliards. Vous pouvez faire des calculs. Nous, nous disons que cela va
être moins de $4.1 milliards. Que sera la réponse
définitive? On le saura un peu plus tard".
Suite, M. le Président, à cette discussion, il y avait eu
d'autres questions qui concernaient encore cette promesse, en fait, de
l'assurance que ce projet de dépasserait pas $4 milliards. En effet,
plus loin, M. Boyd affirmait ceci: "M. le Président, on s'est
basé sur les chiffres de $4.1 milliards sur lesquels les deux groupes
d'ingénieurs-conseils et les ingénieurs d'HydroQuébec se
sont entendus en prenant certaines hypothèses qui avaient
été fixées d'avance pour essayer d'en arriver à un
chiffre commun. Les trois ont signé ce rapport, mais à ce
rapport, chacun a attaché une lettre de commentaires. Les trois disaient
des choses différentes. "Evidemment, les ingénieurs
d'Hydro-Québec disaient: Ce coût d'investissement peut être
amélioré par l'optimalisation, chose qu'Hy-dro va s'employer
à faire cet été et l'année prochaine. Entre autres,
l'hypothèse prévoyait dix centrales sur la rivière Rupert.
On pense qu'il peut y avoir moins de centrales et que ceci entraînerait
des coûts bien inférieurs. "Si on sait que les dix centrales
représentent la moitié des coûts directs, si vous
réduisez le nombre de centrales, vous avez réduit les coûts
directs d'une façon appréciable et, de la même
façon, les coûts indirects, l'inflation et tout le reste. C'est le
point de vue des ingénieurs d'Hydro-Québec, que les $4, 1
milliards peu-
vent être améliorés. Les ingénieurs
d'HydroQuébec disent également qu'un réservoir qui avait
été prévu antérieurement peut être
éliminé. Un autre réservoir pourra probablement être
éliminé. Il y a là encore également des
possibilités d'amélioration. C'est le contenu des qualifications
que faisaient les ingénieurs d'HydroQuébec à cette
estimation. "M. Joron: Est-ce que ces espoirs tiennent compte aussi des
difficultés qui peuvent être encourues? C'est déjà
entré dans les estimations. Je pense au problème de la glaise des
rivières, c'est déjà inclus dans l'estimation des $4.1
milliards avec une réserve suffisante. "M. Boyd: Oui, les estimations
prévoient des chiffres très conservateurs pour les coûts
directs et, en plus de cela, un imprévu important de 12 p.c, ce qui est
considérable. Si vous vous imaginez les millions impliqués. "Un
autre bureau d'ingénieurs dit: "Ce rapport que nous avons signé
pour les fins de discussions peut être amélioré
considérablement". Il donne certaines raisons. Il dit que les
coûts doivent être de plus de 0 p.c. et de moins de 20 p.c, ce qui
fait encore une grosse différence. "Le troisième groupe et le
deuxième bureau d'ingénieurs disent: Nous continuons de maintenir
que le projet pourrait être modifié pour divertir une partie de la
rivière Eastmain dans la rivière Rupert et, de ce fait
même, augmenter considérablement la production en KWh sur la
rivière Rupert, le projet Nottaway, Broadback et réduire les
coûts. "Cela pourrait représenter une réduction de 25 p.c.
à 30 p.c. Alors, quand vous parlez de $4.1 milliards, il faut toujours
vous rappeler ces quatre choses très importantes qui sont les lettres de
commentaires de nos ingénieurs-conseils. "Voici, M. le Président,
au cours de mai 1971, concernant un projet qui a été par la suite
rejeté, mais un autre projet a été choisi par suite du
fait qu'il était beaucoup plus avantageux, un projet de $5.8 milliards.
A ce moment, lors de la discussion en commission parlementaire, j'avais
posé à peu près les mêmes questions, et on nous
assurait que ce montant de $5.8 milliards ne devrait pas être
dépassé".
Je comprends que vous avez augmenté de 24 p.c, je pense, la
puissance installée depuis cette période. Mais si je vous lis
bien, M. Boyd, vous nous aviez affirmé alors que tout avait
été calculé, qu'en fait, toutes les estimations,
problèmes d'imprévus, etc., tout cela avait été
calculé. Je constate aujourd'hui, qu'à la suite des études
que vous avez faites, vous ne pouvez pas, être aussi affirmatif que vous
l'étiez en 1971, alors que pourtant, ces études ont
été beaucoup plus poussées.
M. Boyd, devant cette déclaration et devant le fait que, ce
matin, cet après-midi, vous ne pouvez pas nous affirmer que ce projet ne
dépassera pas le coût de $11.9 milliards, vous admettrez avec nous
que, comme Québécois, on commence à être inquets.
Quand un montant de $4.1 milliards nous avait été donné
pour l'aménagement du projet de la baie James, et que depuis ce temps,
M. le Président, le coût du projet a triplé, on peut
commencer à être inquiets. En ce qui concerne le coût au mil
le coût du projet a doublé.
Je pose la question à tout le monde. Est-ce qu'on peut s'en aller
comme cela à l'aventure? Parce que la baie James, tel que nous l'avons
dit lors de la commission parlementaire, tant en 1971 et 1972, était une
véritable aventure. Mais Hydro-Québec et la Société
d'énergie de la baie James ne semblaient pas croire, à ce moment,
que c'était une véritable aventure. Vous sembliez être
assuré que ces coûts ne seraient pas dépassés.
Comment, aujourd'hui, pouvons-nous être assurés que le coût
de $11.9 milliards ne sera pas dépassé, et que nous n'atteindrons
pas, d'ici trois, quatre, cinq, six ans, le coût de $18 milliards ou
peut-être de $20 milliards.
M. GARNEAU: M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Finances.
M. GARNEAU: ... avant de demander à M. Boyd de faire des
commentaires justement, je viens d'assister à une partie d'une
pièce de théâtre je vais essayer de retourner un peu
la question pour que M. Boyd puisse la considérer également.
Nous avons établi, au cours de la séance d'hier, la
demande d'électricité qu'il nous faut combler d'ici les
années quatre-vingt-cinq. Donc, je pense qu'on peut tenir cette
donnée pour acquise. Notre problème consiste à savoir
comment est-ce qu'on complète ou comment on fait face à cette
demande.
L'argumentation du député de Saguenay est à
l'effet...
M. LESSARD: L'argumentation de M. Boyd.
M. GARNEAU: Oui, mais je ne parle pas des propos... je parle des propos
que vous venez de tenir, des conclusions que vous avez tenues à partir
d'un projet qui a été modifié, et vous les comparez
maintenant avec ces données.
Je demande au député de Saguenay et également
à M. Boyd, si on suit votre argumentation, cela voudrait dire que dans
un domaine où Hydro-Québec a une longue expérience, dans
le domaine de la fabrication de l'électricité à partir de
pouvoirs hydroélectriques, à partir de l'eau, des chutes et des
rivières, si on tient pour acquis que Hydro-Québec a une longue
expérience là-dedans, les bureaux d'ingénieurs
québécois qui ont travaillé à Manic, Outardes,
etc., ont une longue expérience là-dedans, comment pouvez-vous
nous dire maintenant, ou soutenir que, malgré cette connaissance, il y
ait eu des variations dans les coûts dûs à l'escalade et aux
taux d'intérêt pas tellement d'après ce
que je peux voir dans les coûts de base comment pouvez-vous
dire ou soutenir que si on nous avait prononcé ou proposé un
programme à base nucléaire, que les chiffres qu'on nous aurait
donnés auraient été nettement supérieurs alors que
l'expérience dans ce domaine n'est pas aussi grande.
C'est dans ce contexte que je vous voulais rappeler...
M. LESSARD: Je voudrais poser une question.
M. GARNEAU: ... pour amener l'argumentation du député de
Saguenay parce que l'objectif est de combler la demande.
A partir de cela, on s'est dit: il y a deux possibilités, soit le
nucléaire ou soit l'hydraulique. On a choisi l'hydraulique avec,
évidemment dans un projet de cette ampleur, tous les aléas qui
peuvent se présenter, y inclus les difficultés de relations de
travail, y inclus l'inflation qui n'était pas prévue, je pense
bien, dans les proportions qu'on connaît présentement, y inclus
les variations dans les taux d'intérêt. Je me demande comment le
député de Saguenay peut poser le diagnostic qu'il a posé
sans faire un vote de blâme complet et net à l'endroit de
l'administration d'Hydro-Québec et de la Société de la
baie James parce que même s'il ne veut pas le faire, toute son
argumentation est ramenée à ce point.
M. LESSARD: Ce n'est pas un vote de blâme que je fais contre
Hydro-Québec. En ce qui concerne les coûts pour le
nucléaire, on en parlera plus loin.
M. GARNEAU: ...
M. LESSARD: Une minute, M. le Président. Le vote de blâme
c'est contre le gouvernement du Québec que je le fais, contre le premier
ministre Bourassa, lorsque le 29 avril, sans aucune étude
préliminaire, le premier ministre Bourassa a lancé son grand
ballon, a lancé le projet de la baie James. Et je le dis parce que je le
prévois. Il a, à ce moment, tordu le bras
d'Hydro-Québec...
M. GARNEAU: Un point de règlement.
M. LESSARD: Une minute. Un point de règlement.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Le point de règlement a été
fait avant par le ministre des Finances.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Question de règlement.
M. GARNEAU: Ce que le député de Saguenay soutient...
M. LESSARD: Article 96.
M. GARNEAU: ... c'est que l'administration d'Hydro-Québec est une
marionnette que l'on peut faire varier...
M. MORIN: Ce n'est pas un point de règlement, M. le
Président, je regrette infiniment.
M. GARNEAU: ... et je demande aux gens d'Hydro-Québec de
répondre à cette accusation, qui à mon sens...
M. MORIN: Ce n'est pas un point de règlement.
M. GARNEAU: ... est la plus grave qui ait jamais été
portée d'une façon aussi directe que cela. Je demande aux gens
d'Hydro-Québec et aux gens de la Société de la baie
James...
M. LESSARD: Une minute. Je vais continuer.
M. GARNEAU: ... de dire si ce que le député de Saguenay
vient de dire est vrai.
M. LESSARD: On me répondra par la suite. Je vais continuer.
M. GARNEAU: Quand on pose des questions, vous répondez une
affaire: Je vais répondre plus tard.
M. LESSARD: Non. Une minute. Vous m'avez posé une question. Je
réponds. Je vous dis que ce n'est pas contre l'administration
d'Hydro-Québec que j'ai des blâmes à faire. C'est contre ce
gouvernement...
M. GARNEAU: Vous faites la discussion sur les coûts.
M. LESSARD: A l'ordre, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si vous voulez qu'on maintienne l'ordre, si
c'est une motion de blâme contre le gouvernement, ce n'est pas la place
parce que nous sommes ici pour entendre les représentants
d'Hydro-Québec.
M. LESSARD: Ecoutez. Ne soyez pas ridicule, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... ridicule aussi.
M. LESSARD: On m'a posé une question.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si on veut nous rappeler à l'ordre,
il va falloir discuter du projet...
M. MORIN: M. le Président, qui a mentionné l'histoire du
blâme en premier? C'est le ministre des Finances et il est intervenu
ensuite sur
un point de règlement qui n'en était pas un et je vous
prends à témoin.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Malheureusement, c'est au président
de juger si c'est un point d'ordre.
M. MORIN: Si on veut bien laisser le député de Saguenay
s'exprimer, on aura de l'autre côté de la table tout le loisir de
lui répondre.
M. LESSARD: J'ai dit que si je fais un vote de blâme, ce n'est pas
contre l'administration d'Hydro-Québec. Il y a des gens qui ont
défendu cette administration, en particulier, lorsqu'il y a eu la
présentation du projet de loi 50 qui enlevait, justement, à
Hydro-Québec, l'aménagement de toutes les ressources
hydroélectriques dans la région de la baie James, qui se sont
battus justement pour permettre qu'Hydro-Québec, au moins, continue
d'avoir le contrôle sur ces travaux. Ce qu'Hydro-Québec a dû
faire, suite à cette déclaration inopportune et
inconséquente du premier ministre, le 29 avril 1971, c'est qu'elle a
été obligée de ramasser les pots cassés et c'est ce
que je pense.
Mais, parce qu'il y avait d'autres projets qui pouvaient être
envisagés avant ce projet, mais en ce qui concerne les coûts ou
les différentes possibilités entre l'aménagement
hydroélectrique de la baie James ou le choix pour le nucléaire,
on en discutera plus loin.
Mais si, par exemple, ce projet est maintenant rendu à $11
milliards, je fais d'abord le blâme à vous du gouvernement parce
que vous n'avez pas permis à Hydro-Québec de faire toutes les
études nécessaires, les études préliminaires
nécessaires afin d'arriver devant la commission parlementaire des
richesses naturelles avec un projet précis, un projet dont les
estimations étaient assez exactes. C'est là qu'est le
problème fondamental...
M. BACON: Elle était sur le territoire depuis 1960.
M. LESSARD: ... et c'est ce que nous discutons.
M. GARNEAU:M. le Président, le député de Saguenay a
fait une affirmation et je pense qu'il faudrait quand même laisser
l'occasion à HydroQuébec d'indiquer si dans le choix de
l'hydraulique de préférence au nucléaire ou dans le choix
du développeemnt de la baie James, ce que vient d'affirmer le
député de Saguenay est exact et je laisse la parole aux gens
d'Hydro-Québec.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Giroux.
M. GIROUX: L'opinion de la commission a toujours été
très claire que sur une période de temps donné et
je suis encore du même avis sur une période de 50 ans
l'hydraulique est bien supérieur au point de vue de coût
anti-inflationnaire au nucléaire. Naturellement, sur les coûts
donnés actuellement, il y a plusieurs questions qui sont posées.
J'aimerais le premier avoir et connaître les réponses. Comme je
vous le dis, à partir de demain, dans le système actuel où
nous vivons, tout est hypothétique: les crises ouvrières, les
taux d'inflation, les prix de ci et les prix de ça. Des thèses
hypothétiques, je peux en faire, mais je m'abstiens d'en faire.
Cependant, si on applique une base à une certaine chose, je crois qu'on
doit l'appliquer exactement aux autres procédés de production.
Sur ce thème, ce matin, quelqu'un me disait, en entrant tantôt,
que si on a une hausse du taux, c'est dû au fait qu'on ne s'est pas servi
du nucléaire plutôt que de l'hydraulique. Je crois que c'est le
contraire. Si on s'était servi du nucléaire, sur une
période de cinq ans, on aurait une augmentation beaucoup plus forte que
si on continuait avec l'hydraulique.
Si on prenait cette chose et si on faisait l'application du taux au fait
qu'on construit la baie James, pour les besoins de la demande que nous avons en
1985, ce sont des milliards. Ce n'est pas unique à la province de
Québec. Les provinces voisines déclarent des montants
d'investissements qui étaient autour de $12 milliards ou $13 milliards
il y a un an ou deux et qui sont rendus à $26 milliards. Alors, ce n'est
pas... Malheureusement, je comprends qu'à Hydro-Québec, on est
pas mal "smart", mais pas assez pour contrôler l'inflation et pas assez
pour contrôler le taux d'intérêt, qui est mondial.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Boyd a quelque chose à
ajouter.
M. BOYD: M. le Président, pour commenter la longue citation qu'a
lue M. Lessard, en général, et je pourrais dire à 90 p.c,
je suis très heureux de ce que j'ai dit dans ce temps. Concernant les
escalades et les coûts de Manic-Outardes, les explications que j'avais
données dans ce temps, je ne les retire pas du tout, elles sont
excellentes. Cela se faisait de même en 1960 et depuis ce temps, on a
appris. Il y a une seule chose que je regrette dans la citation que vous avez
lue, et là aussi on a appris. C'est que, quand je mentionnais et que
vous me faisiez mentionner $4.1 milliards, chaque fois que je mentionnais $4.1
milliards, je n'étais pas assez prudent pour rattacher à notre
hypothèse de base, qui était nos documents déposés,
4 p.c. d'escalade. C'est toujours conditionnel. Aujourd'hui, vous avez
essayé de me faire la même chose, mais j'ai appris depuis ce
temps. Quand je mentionne 11.9 p.c, c'est toujours conditionnel à 7 p.c.
et à 10 p.c. Là, je ne me fais pas prendre de la même
façon, parce que j'ai été pris cette fois-là.
M. LESSARD: Autrement dit...
M. BOYD: Les 4.1 p.c. étaient toujours basés sur les
hypothèses de notre document. Malheureusement, chaque fois qu'on
mentionnait, $4.1 milliards, je ne répétais pas
l'hypothèse. J'aimerais continuer l'histoire que vous avez qui elle,
était le 25 mai 1972, un an plus tard. C'est M. Boyd qui parle: "Avant
qu'on laisse le domaine technique, il y a une rectification que je voulais
faire depuis plusieurs séances. J'attendais toujours la présence
du député de Saguenay pour la faire. C'est qu'à une de ces
séances, il avait mentionné que l'année passée
j'avais parlé de $6.6 milliards pour un projet NBR et il demandait
comment il se faisait maintenant que nous pouvions être si sûrs de
nos chiffres.
M. LESSARD: C'est la même question...
M. BOYD: J'ai eu l'occasion de le rencontrer par la suite et nous en
avons discuté. M. Lessard a admis qu'il s'était trompé,
qu'effectivement j'avais bien dit $4.1 milliards et que c'était pour
5,300 mégawatts. " C'est pas mal important je vais revenir
là-dessus. N'oublions pas les 5,300 mégawatts. "Alors,
j'ai lu le procès verbal des séances des 19 et 20 mai 1971.
"J'aurais préféré qu'il soit ici, mais, étant
donné que le temps passe, je pense qu'il faut rectifier cette chose. Je
suis convaincu que M. Lessard est d'accord sur cette rectification".
Donc, je vous ai donné le bénéfice de notre discussion
. Si vous regardez dans ces débats, il y a quatre ou cinq endroits
où j'ai mentionné $4.1 milliards pour une production à NBR
qui était de 5,300 mégawatts, ce qui faisait un prix moyen de
$773 du kW pour une mise en service en 1978".
Tous ces chiffres sont importants. Dans les études qu'a
déposées Hydro-Québec je parle de 1972
encore au mois de janvier 1972 pour le projet NBR revu,
réétudié et complété, nous arrivons pour le
même NBR à $4 milliards pour 5,600 MW pour une mise en service en
1978, ce qui nous donne un coût moyen de $717 par kw. M. Lessard
demandait à ce moment comment il se faisait que nous arrivions à
des chiffres comme ceux que nous signalions pour La Grande. Si nous continuons
notre comparaison, nous atteignons $5.8 milliards pour le complexe de La Grande
qui nous donne 8,300 MW pour une mise en service en 1980, ce qui fait un prix
moyen de $700 par kw.
Alors, je veux simplement rectifier cette chose et je peux vous dire que
M. Lessard était d'accord au moins il a admis que je n'avais jamais
mentionné $6 milliards, mais que j'avais mentionné plutôt
$4.1 milliards. Je continue. On avait parlé de $4.1 milliards pour 5,300
MW, à peu près la moitié. Donc, si on met 10,000 MW pour
La Grande, on arrive au moins à $8.2 milliards, des estimations en 1972
pour la mise en opération en 1980, en 1978 même. Or, on a eu des
escalades depuis ce temps. Si on continue les calculs, on va retomber
exactement sur les chiffres qui correspondent à $11.9 milliards.
Donc, on ne vous a pas dit de faussetés dans ce temps. C'est
assez important.
M. LESSARD: Est-ce que l'assurance que vous aviez à ce moment
vous l'avez encore aujourd'hui?
M. BOYD: Au sujet des coûts de base, je vous ai dit oui tout
à l'heure. Au sujet de l'escalade et du taux d'intérêt, il
n'y a personne ici... M. Giroux est un grand expert en finance, et jamais il
n'osera vous promettre que cela va être plus ou moins, encore moins
moi-même.
M. LESSARD: Au coût de $12 milliards, pourriez-vous nous dire
combien va coûter la puissance installée par kw. Je ne parle pas
en mils parce que vous l'avez évalué à 21 mils, je parle
du prix, du coût.
M. BOYD: On doit avoir cela quelque part.
M. SAINT-PIERRE: J'espère que vous savez faire la division.
M. LESSARD: Non. Je n'ai pas de machine à calculer.
M. ROY: ... bon quotient intellectuel, il veut faire cela
rapidement.
M. SAINT-PIERRE: Je vais vous dire cela. $11.9 milliards, on va lui
donner cela calculé.
M. BOYD: Pendant qu'on cherche ce chiffre, M. le Président,
est-ce que vous permettez que je fasse un autre commentaire? M. Lessard a
également dit je ne veux pas lui attribuer les mots que
c'était effrayant ou épouvantable d'envisager $11 milliards ou
$12 milliards pour un projet pour les finances du Québec. C'est vrai que
c'est considérable, mais tout est relatif. Je me rappelle en 1944,
j'étais là au début d'Hydro-Québec et dans ces
années on empruntait $25 millions tous les deux ou trois ans et
c'était un événement. Le président
d'Hydro-Québec faisait un spécial pour cela. Si vous regardez
dans le rapport annuel, vous voyez que même en 1953 on avait fait un
emprunt aux Etats-Unis de $35 millions pour 1953, en 1954, $20 millions et en
1955, $26,900,000. Donc, les choses changent. Aujourd'hui on va à New
York pour $150 millions. On va trois ou quatre fois par année sur le
marché pour ces sommes. Nous sommes partis comme des tout-nus en 1944.
L'avoir propre d'Hydro-Québec était zéro. Tout en
empruntant tranquillement $25 millions à tous les deux ou trois ans,
après $25 millions par année et maintenant $150 millions assez
souvent, on est quand même arrivé aujourd'hui, en 1974, à
avoir à Hydro-Québec un avoir propre de $1,260,000,000. Les gars
qui sont partis...
M. LESSARD: On est bien content de cela.
M. BOYD: C'est pour des gars qui sont partis. Oui, mais il ne faut quand
même pas avoir peur. Je sais que ça va être très
difficile. MM. Giroux et Lemieux vont faire le financement avec le ministre des
Finances, et nous savons tous que ça va être difficile à
financer mais on a discuté longuement hier du besoin d'énergie au
Québec et il fallait assumer cette demande. On vous dit qu'à long
terme et c'est ce qui est important dans la vie d'une province
sur une période de 50 ans, le coût d'énergie le moins
élevé pour une période de 50 ans, c'est l'hydraulique. On
vous dit qu'on sauve $230 millions par année en moyenne sur une
période de 50 ans. C'est donc ce qu'on vous recommande. Je ne pense pas
que vous puissiez nous accuser de vous avoir trompés dans le
passé, on ne vous a jamais trompés. On peut ne pas vous donner
les détails précis au moment où vous le voulez, on se
corrige quand on s'est trompé. La garantie que vous nous demandez, sur
des choses qu'on ne contrôle pas, ce n'est pas possible de vous la
donner.
M. LESSARD: Vous vous rappelez toute la discussion qu'il y a eue lorsque
vous avez engagé Hydro-Québec ou la Société
d'énergie de la Baie James la firme Canadian Bechtel pour
contrôler les coûts des travaux. Je pense que Canadian Bechtel
était justement engagée d'après les informations, je
peux me tromper, M. le Président, on y reviendra, si je me trompe, je
poserai une autre question pour être la firme-conseil
numéro 1 pour contrôler les coûts. Est-ce que c'était
bien le cas? C'est qu'il y a eu de nombreuses protestations à ce sujet
et vous avez expliqué un peu pourquoi vous engagiez Canadian Bechtel,
parce qu'elle avait justement eu l'occasion d'agir comme firme-conseil à
Churchill Falls et pour BRINCO et que les coûts avaient été
passablement respectés à Churchill Falls. Est-ce que Canadian
Bechtel est encore ou a été engagée comme étant la
firme-conseil numéro 1 coordonnant les autres firmes, s'il y a lieu?
M. BOYD: Non, ça n'a jamais été ça, M. le
Président, je regrette. Canadian Bechtel, en fait, c'est Quebec Bechtel
qui a...
M. LESSARD: A fait ses preuves.
M. BOYD: ... été engagée comme conseiller et non
pas pour contrôler. Le contrôle se fait par une équipe de
gérance dont je suis le président, dans laquelle il y a un
représentant de la Société de développement, le
directeur de l'ingénierie, qui est un ingénieur
d'Hydro-Québec, un représentant de Lalonde, Valois et un
représentant de Bechtel. C'est l'équipe de gérance. Nos
directeurs viennent de différentes sources. Il n'y a ni
Hydro-Québec, ni Lalonde-Valois, ni SD, ni SE, ni Bechtel qui ait la
fonction de contrôler, l'autre la fonction de dépenser, l'autre la
fonction de s'occuper des relations publiques. C'est une entreprise, la
société d'énergie, où tout le monde travaille
ensemble. Mais on a engagé Bechtel pour son expérience dans le
contrôle des coûts. C'est de ça qu'on se sert pour
améliorer le contrôle des coûts dans un projet
semblable.
Comme je l'ai déjà dit, et M. Dozois me le rappelle, le
comité de gérance se rapporte au comité d'administration
de la Société d'énergie. Le rôle de Bechtel, je l'ai
expliqué tout à l'heure. Vous avez cru entendre, ou des gens vous
ont dit que Bechtel n'était peut-être pas d'accord sur
l'estimation de base. C'est absolument faux, l'estimation de base, je vous l'ai
expliqué, je vous le répète, a été faite
avec les gens de Bechtel, sur place, avec les différents bureaux et les
différents groupes de programmation et de contrôle des
coûts, d'ingénierie et de construction que nous avons à la
Société d'énergie. On a fait venir des gens de
l'extérieur pour vérifier avec nous les estimations et le
coût qu'on vous soumet comme coût de base est accepté par
tout le monde. Ce n'est pas une chose que... je ne sais pas d'où peut
venir votre information, mais ce n'est certainement pas exact.
En passant, j'aimerais ajouter ce que je n'ai pas dit ce matin, Bechtel
ne fait pas d'ingénierie. Dans la Société d'énergie
de la baie James, les contrats d'ingénierie sont donnés à
des firmes québécoises. Nous en avons plusieurs que nous poumons
nommer et qui sont déjà engagées.
Pour les chiffres de tout à l'heure, le coût par kW
installé est de $1,155, avec 7 p.c. d'escalade et 10 p.c.
d'intérêt, comparé à $773, dont je parlais en
1971/72, qui était avec 4 p.c. d'escalade et 8.5 p.c.
d'intérêt, je crois.
M. LESSARD: Donc, si je vous comprends bien, Canadian Bechtel est une
firme-conseil parmi d'autres.
M. BOYD: C'est cela.
Contrat de la Canadian Bechtel
M. LESSARD: Maintenant, M. le Président, nous avons
demandé à plusieurs reprises, tant à l'Assemblée
nationale qu'à cette commission parlementaire, au cours des
séances précédentes, étant donné la
discussion fort importante qu'il y avait eue à l'occasion de cet
engagement, le dépôt du contrat entre la Canadian Bechtel et la
Société d'énergie de la baie James. Je ne pense pas, M. le
Président, que le dépôt de ce contrat mette en danger
l'investissement de $11.9 milliards de la Société
d'énergie de la baie James et d'Hydro-Québec à la baie
James.
Est-ce qu'il serait possible, M. le Président, étant
donné que nous l'avons demandé à maintes reprises,
d'obtenir ce contrat?
M. BOYD: Comme je l'ai déjà dit, c'est que
nous négocions constamment des contrats avec des
ingénieurs- conseils...
M. LESSARD: Je demande Canadian Bechtel.
M. BOYD: Pardon?
M. LESSARD: Je demande Canadian Bechtel.
M. BOYD: Je comprends, mais, quand on négocie avec plusieurs
groupes, plusieurs sociétés, plusieurs bureaux des choses
semblables, on ne met pas sur la table, pour que tout le monde en prenne
connaissance, ce qu'ils peuvent attendre de nous dans la négociation.
Nos négociations, nous les faisons pour le mieux de la
Société d'énergie et, là-dessus, je vous prie de me
croire si vous ne me croyez pas, nous parlons pas mal dans le vide
je vous prie de me croire qu'on le fait pour le mieux
d'Hydro-Québec.
M. LESSARD: Je voudrais vous croire...
M. BOYD: Et je n'aimerais pas qu'on mette sur la table on ne l'a
jamais fait, ni pour les firmes québécoises ni pour les autres
des contrats d'ingénierie parce qu'on ne voudrait pas que ces
contrats servent pour d'autres qui s'en viennent. Il faut quand même
avoir une certaine façon d'administrer qui nous permette d'obtenir les
meilleures conditions possibles d'un contrat à l'autre.
M. ROY: M. le Président, on parle d'une façon
d'administrer, mais il y a aussi une façon de rendre des comptes au
public. Je pense que c'est peut-être un point qu'on semble vouloir
négliger, et surtout du côté d'Hydro-Québec, si j'en
juge par les réponses qui nous sont fournies lorsqu'on demande des
détails supplémentaires.
Il n'est pas facile pour les parlementaires, pour ceux qui sont
élus, d'avoir des détails sur l'administration
d'Hydro-Québec. On veut bien faire confiance, mais c'est une confiance
morale que nous sommes obligés d'avoir.
Je me demande pour quelle raison HydroQuébec refuserait de mettre
ce contrat sur la table puisque Hydro-Québec est la
propriété des Québécois, puisque ce sont les
Québécois qui paient. Je pense que ceux qui sont élus par
la population ont quand même le droit, et non seulement le droit, mais le
devoir de demander des comptes au gouvernement et de demander également
des comptes aux sociétés de la couronne.
Si Hydro-Québec était en concurrence dans la production de
l'électricité avec d'autres organismes, mais Hydro-Québec
a, en quelque sorte, l'exclusivité pour la production de
l'électricité dans la province de Québec. Je ne vois pas
comment on peut justifier le fait et comment on peut trouver des arguments pour
se justifier devant la population pour refuser de rendre public un document de
cette importance.
Comme le gouvernement l'a dit lui-même, étant donné
que le développement de la baie James a été
considéré comme le projet du siècle... Je comprends que
cela a été un gros ballon politique et je ne veux pas revenir
là-dessus, tout le monde l'admet et on le sait encore, même si
cela prend énormément d'air pour le maintenir gonflé, on
sait cela...
M. HOUDE (Abitibi-Est): ... s'est prononcé contre.
M. ROY: Mais, il y a quand même des points sur lesquels,
justement, on a le droit de demander des comptes.
M. SAINT-PIERRE: ...
M. GARNEAU: 102 sur 108.
M. SAINT-PIERRE: Cela a dégonflé les
créditistes...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Le chef créditiste s'est prononcé
contre.
M. ROY: M. le Président, je regrette... M. MORIN: ...
M. ROY: Je regrette, mais je ne m'amuserai pas à faire de la
politicaillerie là-dessus...
M. MALOUIN: ...
M. ROY: ... on le demande à Hydro, c'est normal qu'on le demande
à part cela, c'est notre devoir de le demander.
Je pense que le contrat de Bechtel, le contrat qui est intervenu,
étant donné qu'il ne s'agit pas d'un contrat d'ingénierie,
comme on vient de le dire, mais plutôt d'un contrat de gestion pour que
les parlementaires et que les membres de la commission parlementaire
connaissent au moins le contenu de ce contrat.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Vous ne comprendrez rien.
M. ROY: M. le Président.
M. SAINT-PIERRE: A la demande du député...
M. ROY: ... je sais que le député d'Abitibi-Est ne
comprendra rien. Je sais cela. On ne fera pas de commentaire
là-dessus.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, sur la demande du
député de Beauce-Sud...
M. ROY: Et du député de Saguenay, le député
l'a demandé.
M. SAINT-PIERRE: ... des deux députés, tous les deux, mais
particulièrement le dernier opinant, nous a servi une macédoine
où on a assorti des sophistries et des vérités de La
Palice. C'est vrai que c'est le projet du siècle. C'est vrai que c'est
un projet important. C'est vrai que les élus du peuple peuvent demander
des comptes, mais, également, il y a d'autres sophismes qu'il ne faut
pas laisser tomber.
Je pense que, dans la régie interne, M. Boyd a donné une
bonne raison. Je pense qu'il n'est pas d'intérêt public que, dans
les moindres détails, à moins qu'on ait des raisons de penser que
le bien commun n'a pas été respecté, qu'on ait raison de
penser qu'il a pu y avoir des éléments de
malhonnêteté... Il n'est pas dit que tous les contrats, que tous
les engagements contractuels que font les sociétés
paragouver-nementales devraient être portés devant non seulement
les parlementaires, mais devant l'ensemble de l'opinion publique.
Je pense que, si on demandait à SIDBEC de mettre sur la table
tous ses contrats d'approvisionnement d'acier, c'est aussi bien dire qu'on veut
la faillite de l'entreprise. Une entreprise commerciale...
M. ROY: Si on avait le régime des concessions, peut-être
qu'on aurait des surprises.
M. SAINT-PIERRE: Vous me permettrez de terminer?
M. ROY: Oui. Si on veut parler d'un autre sujet, on pourra en
parler.
M. BACON: A l'ordre!
M. SAINT-PIERRE: Je vous dis encore une fois que, dans les propos tenus
par le député de Beauce, il y a des vérités de La
Palice que, j'en suis certain, les ministériels...
M. MALOUIN: Beauce-Sud.
M. SAINT-PIERRE: ... Beauce-Sud partagent, à savoir
que c'est un projet important, que les élus du peuple ont le droit
d'avoir des réponses, etc., mais il y a également des sophismes
qu'on ne partage pas. Un des sophismes, c'est que tous les documents des
sociétés paragouvernementales doivent être
étalés en public.
M. ROY: M. le Président, j'aimerais savoir, si c'est le
gouvernement qui s'oppose à ce que ce contrat soit déposé
ou si c'est Hydro-Québec. Je veux savoir à qui on a affaire
là-dedans.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais intervenir
là-dessus, s'il vous plaît.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le chef de l'Opposition.
M. SAINT-PIERRE: Qu'est-ce que vous voulez savoir?
M. ROY: Je veux savoir à qui on a affaire là-dedans.
M. MORIN: J'appuie la requête des deux députés, de
Saguenay et de Beauce-Sud, pour ce qui est du dépôt du contrat de
Bechtel. On nous dit: S'il fallait déposer tous les contrats, où
en serait-on? Il ne s'agit pas de déposer tous les contrats, il s'agit
de déposer celui-là qui nous intéresse
particulièrement.
M. SAINT-PIERRE: Pour quelle raison?
M. MORIN: Nous avons un certain nombre de raisons. Nous aimerions
scruter le contrat.
M. SAINT-PIERRE: Quelles sont vos raisons? Avez-vous l'impression qu'on
a dilapidé les fonds publics? Avez-vous l'impression qu'il y a eu de la
malhonnêteté? Avez-vous l'impression qu'il y a un contrôle
étranger sur nos ressources?
M. MORIN: On nous a dit tout à l'heure que cette
société-conseil avait une expertise particulière je
crois que c'est M. Boyd qui l'a dit en matière de contrôle
des coûts à la suite de l'expérience qu'elle a acquise dans
d'autres pays et aussi aux chutes Churchill, je crois. Nous serions
intéressés à voir le contrat d'abord et,
éventuellement, même à pouvoir interroger les gens de
Bechtel sur la façon dont le contrôle des coûts a
été organisé. Nous ne demandons pas, encore une fois, tous
les contrats et nous ne voyons pas ce que le gouvernement peut avoir à
cacher. Pourquoi ne pas le déposer?
M. SAINT-PIERRE: Mais ce n'est pas d'intérêt...
M. MASSE: C'est contre l'intérêt de la
société de déposer une telle chose. Vous n'avez pas
compris cela?
M. MORIN: Absolument pas.
M. MASSE: C'est contre l'intérêt des
Québécois, des futurs contrats avec la société
d'énergie.
M. ROY: Non.
M. MORIN: Les Québécois ne savent pas ce qui se passe et
je pense qu'il est...
M. MASSE: Et l'ensemble des conditions...
M. MORIN: ... dans leur intérêt de pouvoir prendre
connaissance, par le truchement de cette commission et par le truchement de
l'Opposition du contenu de ce contrat.
M. le Président, je fais motion pour que cette commission demande
le dépôt du contrat de la Société Bechtel avec
Hydro-Québec.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission est prête à se
prononcer?
M. SAINT-PIERRE: Je n'ai rien contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La motion est faite.
M. MORIN: Vous n'avez rien contre. Acceptez-vous la motion?
M. SAINT-PIERRE: Un instant! Je vais vous dire, je vais vous donner un
parallèle, simplement un exemple, et je vais essayer d'être
bien...
M. MORIN: Si ce sont les contrats d'approvisionnement de SIDBEC, cela
n'a rien à voir.
M. SAINT-PIERRE: Non, je vais vous donner un exemple qui va frapper, qui
fait plus image que cela. Je n'ai rien contre montrer mes fesses, mais ce n'est
pas d'intérêt public de le faire.
M. ROY: On n'est pas intéressé non plus!
M. MORIN: Pour une fois, je me trouve sur un terrain d'entente avec le
ministre de l'Industrie et du Commerce.
M. SAINT-PIERRE: Vous n'êtes pas capable de comprendre cela? Pour
déposer le document, il faut que ce soit d'intérêt public
de le faire.
M. MORIN: Ce qui nous intéresse, ce ne sont pas vos fesses, M. le
ministre, c'est le visage de Bechtel, en l'occurrence.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Sur la motion...
M. GARNEAU: M. le Président, sur la motion faite par le chef de
l'Opposition, j'aimerais, même si M. Boyd l'a indiqué tout
à l'heure, parce que cela peut être une question sérieuse,
j'en conviens, j'aimerais que M. Boyd clarifie un peu plus. Parce qu'en votant
sur cette motion, je ne vous cache pas que ce n'est pas tellement
l'argumentation des députés de l'Opposition qui m'influencera, ce
sont beaucoup plus les propos que vous allez tenir.
En effet je suis prêt à admettre que, au point de
départ, c'est le rôle de l'Opposition de faire ce genre de motion,
de demander ce genre de documents. Je ne leur en tiens pas rigueur. Cela fait
partie de la joute politique, et je pense bien qu'un des commissaires
d'Hydro-Québec comprendra cela peut-être plus que tous les
autres.
M. MORIN: II ne s'agit pas de politique. Il s'agit d'éclairer
l'opinion publique.
M. GARNEAU: Je comprends que c'est une question extrêmement
sérieuse, et personnellement, avant de voter pour ou contre cette
motion, puisque j'ai droit de vote à cette commission, j'aimerais quand
même que M. Boyd prenne quelques instants de plus pour nous
éclairer davantage sur cette question. Vous comprendrez qu'elle est
importante et elle créera, si elle est acceptée, un
précédent qu'il nous faut, du moins, de ce côté-ci
de la table, en incluant le député de Drummond, porter la
responsabilité totale de ce geste, puisque, sans vouloir donner ou
imputer des motifs à l'Opposition, on ne peut certainement pas se fier
à leur argumentation pour prendre une décision. C'est pourquoi,
personnellement je ne sais pas ce que les autres membres de la
commission en pensent avant de voter, j'aimerais entendre, d'une
façon explicite, le président de la Société
d'énergie sur cette question.
M. BOYD: M. le Président, vous m'accordez la parole?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Oui.
M. BOYD: Je vais essayer d'expliquer. C'est un contrat par lequel la
Société Bechtel nous fournit de l'aide à la
gérance. Donc, ce n'est pas un contrat d'ingénierie. Cependant,
c'est basé sur des principes semblables à un contrat
d'ingénierie pour la rémunération. On a un autre contrat
d'aide à la gérance qui est avec Lalonde-Valois, et il est
possible et même très probable, qu'au cours des ans,
Hydro-Québec aura à signer d'autres contrats d'aide à la
gérance pour d'autres projets. Je dis que c'est une
possibilité.
Etant de structure tarifaire de même forme générale
que d'autres contrats qu'on a déjà avec des
ingénieurs-conseils ou qu'on aura à négocier soit à
Hydro-Québec, soit à la Société d'énergie,
avec des ingénieurs-conseils pour de l'ingénierie ou pour de la
gérance, je vous ai dit qu'il n'était pas d'intérêt
public, selon ma façon de voir, de déposer pour que la
concurrence puisse connaf-tre ce qu'il y a dans les termes.
Mais je peux vous dire que... Ce matin, je vous ai expliqué que
pour le travail fait au bureau, ce sont les salaires de base des
employés de Bechtel, plus une majoration, pour les salaires au chantier;
c'est le salaire de base sans majoration pour l'administration, et, il y a, en
plus de cela, un facteur d'honoraires pour le contrat. C'est la même
forme de contrat pour ces choses avec d'autres bureaux
d'ingénieurs-conseils, et je pense qu'on ne met pas sur la table des
contrats quand on en a d'autres semblables à négocier.
Dans cela, on définit la responsabilité de Bechtel, cette
responsabilité a pour but de
fournir de l'aide à la gérance. Je vous ai
déjà dit qu'on estimait qu'elle nous fournirait environ une
centaine d'employés. J'ai dit cela il y a deux ans. Actuellement, ils
sont au nombre de 90 employés.
Je ne sais pas si vous avez d'autres détails que vous aimeriez
savoir sur le contrat, mais on...
M. GARNEAU: Vous estimez...
M. BOYD: ... définit évidemment qu'on leur rembourse les
dépenses justifiées comme dans tous les autres contrats.
M. MORIN: Ce n'est pas cela qui nous intéresse, M. Boyd.
M. BOYD: II n'y a absolument rien de spécial, à mon avis.
On dit dans le contrat que ces gens doivent participer à la
préparation du budget, et c'est ce qu'ils ont fait. Je vous dis que ce
ne sont pas eux qui décident du budget, ce ne sont pas eux qui
décident de quoi que ce soit. Ils apportent leur aide à la
gérance pour la Société d'énergie.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Finances.
M. GARNEAU: M. le Président, si je comprends bien avec
l'expérience que vous avez et j'ajouterai, sans doute aussi, le sens des
responsabilités, les responsabilités que vous acceptez de porter
comme président de la Société d'énergie de la baie
James, vous nous dites qu'il n'est réellement pas d'intérêt
public et il n'est pas à l'avantage de la Société
d'énergie de la baie James de rendre public le texte intégral et
le contenu intégral du contrat et qu'en ce faisant, cela pourrait causer
des préjudices à la Société d'énergie de la
baie James dans ses négociations futures. Est-ce que c'est le sens de
vos propos.
M. BOYD: Exactement.
M. GARNEAU: Je suis assez éclairé.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Beauce-Sud.
M. ROY: Tout simplement ceci. On a parlé de
l'intérêt de la société tantôt, et on a
parlé de l'intérêt public. M. le Président, on a dit
qu'il n'était pas dans l'intérêt de la
société de divulguer ce contrat. Cela peut s'expliquer. Mais
l'intérêt public, lui? Les Québécois qui paient et
à qui on a annoncé hier une hausse du coût de
l'électricité de 10 p.c, n'ont pas le droit de savoir cela. Ce
n'est pas dans l'intérêt public. Lorsqu'on veut discuter pour
essayer de savoir et de connaftre les moyens, les techniques, les
méthodes utilisées et les contrats qui interviennent au niveau de
la gérance, au niveau de l'administration, ce n'est pas de
l'intérêt public, selon le ministre, pour employer les mots qu'il
a employés tout à l'heure. Les vérités de La
Palice. Je pourrais lui en retourner des vérités de La Palice et
l'intervention...
M. MORIN: Le ministre va vous montrer ses fesses si vous ne faites pas
attention.
M. ROY: Ouais. Je trouve que le ministre des Finances...
M. SAINT-PIERRE: Pas de sophisme.
M. ROY: ... a fait un effort remarquable pour interpréter le plus
minutieusement possible les propos ou encore les intentions ou les
décisions qui auraient été prises au niveau
d'Hydro-Québec. Ce que j'ai remarqué, suite à la
réponse que vient de donner M. Boyd, c'est qu'on dit que le contrat est
de la même forme que les autres. Or, il n'y a pas de préjudice
là-dedans, si le contrat est de la même forme que les autres.
C'est connu et admis de tout le monde. Alors, si on prend cela comme argument
et qu'on le transpose ailleurs, je ne vois pas en quoi cela pourrait aller
à rencontre de l'intérêt de la société. Je ne
parle pas de l'intérêt du public. Je parle de
l'intérêt de la société. Et on nous dit que dans le
contrat, il n'y a rien de spécial non plus. Pourquoi refuser de donner
ce contrat? J'aimerais bien savoir, présentement, suite à ce que
j'ai entendu de la part du ministre des Finances, si c'est le gouvernement qui
insiste pour que le contrat ne soit pas rendu public ou si c'est
Hydro-Québec qui ne veut pas le rendre public. C'est une question que je
pose et je pense que nous aurions quand même le droit d'avoir une
réponse à ce sujet. Est-ce le gouvernement qui ne veut pas ou
est-ce Hydro-Québec qui refuse?
M. GARNEAU: Je parle en mon nom personnel, en tant que membre du
gouvernement quand même, ce n'est pas pour rien que j'ai posé la
question au président de la Société d'énergie de la
baie James. Si cela avait été une décision du conseil des
ministres de ne pas déposer ou de ne pas rendre public le contrat de
Bechtel ou celui de l'ABBDL qui y travaille je ne sais pas qui je
n'aurais pas posé cette question au président de la
Société d'énergie de la baie James parce qu'il m'aurait
répondu: Ce n'est pas notre faute, c'est la faute du gouvernement qui ne
veut pas qu'on le dépose. Il me semble que l'interrogation du
député de Beauce-Sud est inopportune compte tenu de la question
que j'ai posée en sachant bien que la réponse aurait pu
être fort différente si cela avait été une
décision du gouvernement.
Et je voudrais aussi ajouter que tout à l'heure, dans son
exposé, le député de Beauce-Sud a parlé d'une
annonce, hier, de l'augmentation des tarifs. Je voudrais quand même
rectifier qu'il n'y a pas eu de décision hier d'augmenter les taux
d'électricité de 10 p.c.
M. ROY: On sait que cela va venir.
M. GIROUX: M. le Président, je pense que cela fait plusieurs fois
qu'on est mal cité sur la question de la hausse des tarifs. J'aimerais
répéter que dans nos prévisions, on prévoit avoir
besoin d'une hausse de tarif. Nous n'avons fait aucune demande au gouvernement.
Nous avons l'intention d'en faire une et cette hausse de tarif, avec notre
système, ne peut pas être appliquée avant 1975. Alors, on
avait déclaré, dans le temps, qu'on aurait besoin d'une hausse de
tarif, en moyenne de 4 p.c. par année avec l'inflation de 4 p.c; cela
fait deux ans que nous n'avons pas eu de hausse. Donc, il y a au moins 8 p.c.
qui ont déjà été déclaré et vous
admettrez que les 2 p.c. additionnels que l'on va demander sont parfaitement
couverts et que l'inflation qui est rendue au 31 décembre pourra
peut-être de beaucoup dépasser les 10 p.c.
Donc, cela n'a rien à voir avec, le développement de la
baie James, ou telle autre forme qu'on se servirait au point de vue de la
hausse.
Sur l'autre point, cela a toujours été la politique
d'Hydro-Québec d'essayer de négocier au plus serré
possible, tous les contrats d'ingénierie et de différents
contrats qu'on fait sous la forme négociée, enfin, tout ce qui ne
se demande pas par soumission, on négocie et on négocie avec
l'instruction de négocier durement.
A ce moment, on a toujours considéré que ce n'est pas dans
l'intérêt d'Hydro-Québec de rendre nos documents publics.
C'est tout ce qu'on a à déclarer là-dessus. Le reste, si
le gouvernement décide de passer une loi et dire: Vous allez
déclarer tous vos contrats, on ne négociera plus. Je ne sais pas
où on prend les services, par exemple. Alors c'est cela qu'est...
M. MORIN: M. le Président, je fais motion pour que cette
commission demande le dépôt du contrat intervenu entre Bechtel et
HydroQuébec.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, les membres de la commission sont
suffisamment éclairés pour pouvoir se prononcer. Ceux qui sont
pour la motion de M. Morin. M. Morin?
M. MORIN: En faveur.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Massicot-te?
M. MASSICOTTE: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Ciaccia?
M. CIACCIA: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Houde (Abitibi-Est)?
UNE VOIX: II est absent.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): II est absent. M. Bacon?
M. BACON: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Lessard?
M. LESSARD: Pour.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Massé?
M. MASSE: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Malouin?
M. MALOUIN: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Garneau?
M. GARNEAU: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Roy?
M. ROY: Pour.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Saint-Pierre?
M. SAINT-PIERRE: Contre.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Deux pour, sept contre.
M. LESSARD: Trois pour.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Trois pour, je m'excuse.
M. ROY: On a raison, M. le Président, de s'interroger.
M. MORIN: M. le Président, est-ce que...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Avant d'aller plus loin, je voudrais vous
rappeler un article tout de même de notre règlement, si vous me
permettez, l'article 153. Je vais vous le lire, c'est tout simplement au cas
où cela se représenterait. Lorsqu'une commission élue
requiert une personne de se présenter devant elle pour s'y faire
entendre ou pour produire des documents et que cette personne refuse de le
faire, la commission fait rapport du refus au président et celui-ci
prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit
satisfaite. Alors, disons que...
M. LESSARD: Ce n'est pas la demande de la commission, elle a
été refusée...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A un moment donné, cela peut arriver
que la commission...
M. MORIN: Ah bon!
LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... agisse exactement dans le sens
contraire.
M. MORIN: Oui, ce serait la sanction de... Oui, cela va.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Un autre article, l'article 76 qui dit: Le
gouvernement n'est pas obligé de produire des documents, s'il le juge
contraire à l'intérêt public. Cette décision ne peut
soulever de débat. J'en ai passé un petit bout, par exemple.
M. MORIN: Bon. M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Ce sont deux points de règlements que
je tenais à vous remémorer tout simplement.
M. MORIN: ... il semble que peut-être M. Boyd ait mal
interprété le sens de notre motion. Ce qui nous
intéressait, ce n'était pas tellement les honoraires, vous pouvez
laisser cela dans vos tiroirs, autant que vous le voulez. Ce qui nous
intéressait, c'était plutôt les fonctions, la clause du
contrat définissant les fonctions de Bechtel. Les honoraires, le
paiement forfaitaire, s'il y en a un, tout cela nous intéresse moins,
quoique j'aurais aimé savoir si les honoraires variaient en fonction du
coût final. Cela aurait été une question qui nous aurait
intéressés. Je ne voudrais pas insister pour ce qui est des
clauses monétaires du contrat. Ce sont les clauses définissant
les fonctions de Bechtel qui nous intéressent.
M. ROY: M. le Président, sur le plan de Bechtel également,
il y a un point sur lequel nous aurions aimé avoir des
précisions, parce que nous sommes au courant un peu de quelle
façon Bechtel négocie ses contrats. Il y a quand même un
certain montant d'évaluation qui est à la base. Il y a, par la
suite, des ajustements qui tiennent compte au moment de la diminution des
estimations prévues. Je ne sais pas si c'est un contrat qui a
été négocié de cette façon avec
Hydro-Québec, mais il y a des contrats de la même
société qui ont été négociés
ailleurs. Supposons qu'on évalue un projet de $5 milliards, et qu'on
réussit, par la suite de la gestion, de faire en sorte
d'économiser un $500 millions ou $1 milliard, il y a des clauses qui
encouragent ou qui intéressent, si vous voulez, la société
de gestion. Maintenant, j'aurais aimé savoir sur quelle base, quel est
le montant global qui a été retenu dans l'évaluation
globale des travaux pour la négociation avec Bechtel? Est-ce qu'on peut
avoir ce montant? Est-ce que cela a été une évaluation qui
a été de $6 milliards, $8 milliards, $10 milliards, $12
milliards, nous aimerions bien avoir des précisions à ce
sujet?
M. BOYD: Maintenant qu'on a déterminé l'estimation de base
à $3.9 milliards ou $3.8 milliards on vous l'a donnée
$3.8 je crois, c'est cette estimation qui sert de base pour les
honoraires.
M. ROY: $3.8 milliards?
M. BOYD: Oui, c'est fixe cela. Donc, il n'est pas question que cela
coûte plus cher, ou que cela coûte moins cher pour les honoraires.
Si c'est cela qui était votre question, c'est très clair.
On emploie un homme qui gagne tant, on paie tant pour le travail fait et
tant pour les frais d'administration comme on fait pour toute autre firme. Il y
a des honoraires et on a des honoraires avec ABBDL, avec SNC et avec les
autres. Il y a des honoraires pour eux qui sont basés sur l'estimation
qui est maintenant déterminée. Cela ne peut pas monter, cela ne
peut pas baisser. C'est fixe quant aux honoraires, dans le budget qu'on vient
de déposer. Quant à la question de M. Morin, si c'est la
définition des fonctions l'objet du contrat de Bechtel, on l'avait
déjà donné et je n'ai pas d'objection je ne l'ai
pas avec moi ici aujourd'hui à le faire parvenir.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Sauvé.
M. MORIN: Est-ce que vous pourrez le faire?
M. BOYD: Oui. Nous n'avons pas d'objection à cela, mais ce qu'on
essayait d'expliquer, c'est que toutes les négociations se font sur les
honoraires et ce n'est pas une chose qu'on fait publiquement.
M. LESSARD: M. le Président, étant donné que nous
ne pouvons pas obtenir le contrat au complet, nous devons nous rallier à
la dernière proposition du chef parlementaire de l'Opposition.
Je voudrais revenir, M. le Président, à la dernière
question concernant les coûts sur un point que m'a donné tout
à l'heure, à la suite d'une question que je lui avais
posée, M. Boyd concernant le coût par kilowatt installé.
Vous m'avez dit, je pense, qu'en 1972 le coût par kilowatt
installé était, estimation prévue, de $773.
M. BOYD: Au taux d'escalade et d'intérêt qui s'appliquait
à ce moment-là.
M. LESSARD: Le taux d'escalade de 4 p.c. et le taux
d'intérêt?
M. BOYD: Je pense que c'était 8 1/2 p.c. Je ne voudrais pas
affirmer... Il faudrait retourner aux déclarations qui ont
été faites dans le temps.
M. LESSARD: C'est bien cela, c'est $773, coût par kilowatt
installé en 1972.
M. BOYD: Pour la mise en service en 1978. Donc, deux ans plus tôt.
Cela a une importance. On vous a dit que c'était $1,155.
M. LESSARD: Ce qui équivaut à une augmentation autour de
50 p.c. si non plus. Près de 50 p.c. $773, le taux estimé
actuellement est de $1,155, ce qui veut dire $382 de supplément.
M. BOYD: Oui, mais c'était en escalade de 7p.c. et
intérêt de 10 p.c.
M. LESSARD: D'accord. Alors, vous croyez... M. BOYD: C'est ce qu'on vous
a expliqué.
M. LESSARD: La différence entre l'escalade estimé à
4 p.c. pour ce projet à 7 p.c, cela fait 3p.c.
M. BOYD: Et l'intérêt qui est de 10 p.c. maintenant.
M. LESSARD: Cela nous met entre 8 1/2 p.c. et 10 p.c. Cela fait 1 1/2
p.c. Entre 8 1/2 p.c. et 10 p.c, à ma connaissance, cela fait 11/2
p.c.
M. BOYD: C'est par année, M. Lessard. C'est 4p.c. d'escalade par
année contre 7 p.c. d'escalade par année. Alors, vous avez
plusieurs années.
M. LESSARD: En tenant compte exclusivement de ces augmentations, vous
arrivez à augmentez le coût du kilowatt installé de 50 p.c.
par rapport au coût prévu en 1972.
M. BOYD: Oui, c'est composé. C'est la différence de 3
p.c.
M. LESSARD: Le 4 p.c. était composé aussi. M. BOYD:
Oui.
M. LESSARD: Le 3 p.c. du 4 p.c. à 7 p.c. d'accord, et à 3
p.c, et c'est composé.
M. BOYD: Oui, c'est composé.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord sur cela. Et entre le 8 1/2 p.c. et le
10 1/2 p.c, cela fait 1 1/2 p.c, c'est encore composé. Mais en composant
cela, en tenant compte de ces deux facteurs...
M. BOYD: Cela fait 50 p.c.
M. LESSARD: ... cela fait une augmentation de 50 p.c.
M. BOYD: Si vous faites le calcul, cela va vous donner environ cela.
M. GARNEAU: C'est deux ans de plus.
M. BOYD: Deux ans de plus dans le temps aussi.
M. MORIN: M. le Président, est-ce que je pourrais revenir
brièvement sur un document qui nous a été remis par M.
Boyd, je crois, hier soir, intitulé: "Complexe La Grande cédule
SEBJ. Il s'agit de l'entrée en service des MW de la baie James.
Ma première question, M. Boyd, serait pour vous demander de bien
vouloir m'expliquer comment sont calculés les surplus qui sont
indiqués sur la dernière ligne. Je parle du tableau de puissance
d'abord.
M. BOYD: Evidemment, le surplus qui est indiqué là, le
premier, 156, c'est dans tout l'ensemble du portrait d'Hydro-Québec
C'est pour répondre à la demande d'Hydro-Québec. Vous vous
rappelez les chiffres que vous donnait M. Deguise, il vous indiquait...
M. MORIN: C'est par rapport à la demande anticipée...
M. BOYD: D'Hydro-Québec.
M. MORIN: ... globale à ce moment-là.
M. BOYD: Vous vous rappelez les tableaux où il vous indiquait
qu'à compter de 1980 il y avait des déficit de 759,000 KW. On me
dit qu'on est prêt à vous les déposer, on devrait les
déposer.
M. DE GUISE: C'est ce que j'avais demandé, M. le
Président, je crois qu'on avait demandé une copie de ce tableau
hier et j'ai l'impression que nos gens sont prêts à la
déposer. Non, l'autre, celle que j'avais utilisée comme
déficit global du réseau.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Jusqu'ici...
M. MORIN: Oui, ça nous intéresserait également de
l'avoir.
M. BOYD: On va vous la donner, mais en attendant, ce qu'on vous donnait
dans ce tableau, c'est qu'en 1979/80, il y avait un déficit de 759,000
KW et en 1980, il y avait un déficit de 2,429,000 KW. On installe les
chiffres qui sont ici et on passe d'un déficit à un surplus.
M. MORIN: Pour l'ensemble d'Hydro-Québec.
M. BOYD: Pour l'ensemble d'Hydro-Québec.
M. MORIN: J'imagine que tout cela était expliqué dans les
pages qui précédaient ce tableau, d'après ce que je peux
voir dans le coin supérieur droit, c'est la page 44 d'un document.
Est-ce que l'ensemble du document ne serait pas de nature à
intéresser la commission?
M. BOYD: Je ne sais pas ce qu'il y a dedans, je ne me rappelle pas avoir
vu le document complet.
M. MORIN: Cette page est la 44e d'un document, sans doute beaucoup plus
substantiel et qui contient des explications à l'égard du
tableau.
M. BOYD: Je n'ai pas ce document, je ne peux pas vous répondre,
M. Morin, je regrette, mais j'ai seulement cette feuille. Pour vous
répondre il me faudrait le document au complet. C'est une série
d'études faites par le génie d'Hydro-Québec, de toutes les
différentes sortes de programmes possibles. Je ne peux pas vous le
décrire mieux que ça.
M. GIROUX: Je pense, M. Morin, que le numéro de page vient du
fait qu'à la base de différentes pages explicatives qu'on a comme
ça, pour des questions qui peuvent être posées, c'est la
page 44.
M. MORIN: Oui, je sentais, à lire le tableau, que j'aurais
été aidé dans ma compréhension du tableau, en
lisant les 43 pages qui précèdent.
M. BOYD: Je pense qu'on peut donner une réponse. C'est un
système de pagination de nos recherchistes et documentaires, qui permet
de reconnaître et de trouver le document en question, ce n'est pas le 44e
page d'un document, c'est un numéro 44 qui correspond aux tables des
matières pour sortir le bon document.
M. GIROUX: Sur une question qui peut être posée. C'est
comme ça que j'interprète ça. Sur une question qui peut
être posée sur cette chose, M. De Guise est là pour fournir
les explications totales.
M. MORIN: Oui, bien sûr.
M. GIROUX: II n'y a pas de document de support comme tel.
M. MORIN: Si j'avais eu un document d'appui, j'aurais compris plus
facilement ce que signifiait exactement le surplus sur la dernière
ligne. Parce que dans un tableau qui ne parlait que de la Grande, tout à
coup arrivent ces surplus qui intéressent l'ensemble du réseau,
qui résultent d'une étude globale.
M. GIROUX: Mais s'il y a des choses qui ne sont pas claires,
là-dessus. M. De Guise peut donner les explications tout de suite.
M. MORIN: Je pense avoir compris, à la suite des explications de
M. Boyd, à moins qu'on ne veuille ajouter quelque chose. Cela
répond à mes questions. J'aimerais peut-être passer
à la question de l'énergie nucléaire. Je me
réfère...
M. MASSE: Sur une question d'information. M. MORIN: Oui, volontiers.
M. MASSE: Je remarque qu'à 85; 86; 90 et 91, vous avez toujours
à LG 1, 7,300 MW, ce n'est pas MW, l'énergie ... en somme c'est
le même montant qui se répète par la suite après
1984/85. Ce n'est pas une accumulation.
M. BOYD: La centrale est terminée et elle produit ce
montant...
M. MASSE: C'est la production. M. BOYD: ... annuellement.
Projet d'usine nucléaire
M. MORIN: Avez-vous terminé, M. le ministre? Bon. Je me
réfère au document intitulé "Comparaison entre les
coûts de l'énergie du complexe hydroélectrique de la baie
James et d'un projet nucléaire canadien équivalent". J'aimerais
savoir de nos invités, M. le Président, à quel complexe
nucléaire, ces chiffres qui nous sont donnés, notamment au
tableau numéro un... D'où viennent ces chiffres?
Je vois qu'il y a une référence à l'Atomic Energy
of Canada Limited. Il semble que ce soit un article qui date de septembre 1971
et la puissance totale à laquelle on se réfère est de
2,000 MW. J'ai cru comprendre qu'il s'agissait de Pickering, mais je n'en suis
pas sûr. Je voudrais en être... C'est bien cela, il s'agit des
quatre...
M. DE GUISE: A la page 6, au premier paragraphe, je pense qu'on vous
dit: L'estimation du coût d'investissement en dollars de 1968 pour le
projet de Pickering était de l'ordre de $498 millions.
M. MORIN: Bon. Ma question suivante est celle-ci: Comment avez-vous fait
la transposition de 500 MW à Pickering à des centrales de 750 MW
dont vous nous parlez? Et avez-vous tenu compte du fait que le coût
d'installation par kW diminue sensiblement au fur et à mesure que
croît la taille d'une centrale? Etes-vous au fait, par exemple, qu'une
centrale de 1,000 MW peut coûter jusqu'à 25 p.c. meilleur
marché qu'une centrale de 500 MW? Comment avez-vous transposé de
500 MW à 750MW? C'est ma première question.
M. DE GUISE: M. le Président, le document déposé
est composé de deux tableaux, le tableau I et le tableau II, et il n'y a
que le
tableau 2 qui sert de base pour comparaison avec La Grande. Le tableau
I, si vous voulez, est un document historique retraçant... Quand on
parlait de Pickering, au début, à 4 mils ou 5 mils, ce
n'était pas très réaliste, si on ajoutait tous les
facteurs qui devraient être considérés.
Alors, ceci explique pourquoi le tableau I est tout simplement un
relevé des différentes publications qui nous indiquent la
variation de coût de Pickering dans le temps jusqu'au coût final
qui a été rapporté à $746 millions.
Lorsque nous prenons un projet nucléaire pour le comparer au
projet La Grande, nous avons choisi le projet Bruce de l'Hydro d'Ontario qui
est en construction actuellement et qui représente quatre groupes de 750
MW. Les chiffres que nous utilisons, en très grande partie, ont
été déposés forment un document public que l'Hydro
d'Ontario a déposé devant l'Ontario Energy Board en
décembre 1973. C'est notre source de documentation ou notre source de
référence.
M. MORIN: Donc, vous vous êtes fondés sur Bruce, quatre
fois 750 MW, qui n'entreront vraiment en service qu'en 1975, le premier des
quatre n'entre en service qu'en 1975, le premier groupe, et cela
s'échelonne ensuite, je crois, jusqu'en 1978.
M. DE GUISE: Je crois que Bruce II c'est un peu plus tard que cela parce
que, dans la déposition de l'Hydro d'Ontario devant l'Ener-gy Board, ils
ont donné des prix de 1982, qui est peut-être le centre de
gravité de la mise en service des différents groupes.
M. MORIN: Ce n'est pas les chiffres que j'ai, M. le Président.
D'après les chiffres que nous avons, cela va du 1er septembre 1975
à 1978. En fait, c'est peut-être un détail, je n'insiste
pas là-dessus.
Est-ce que nous pourrions parler de Pickering? Dans votre tableau
numéro I, le coût, tel que cité dans les journaux et
revues, le coût de l'énergie était, en gros, près de
cinq dixièmes de cent et, suite à vos calculs, à
l'intégration dans le réseau, vous arrivez à un coût
d'énergie livrée de près de 9.9 mils au kW. Si j'ai bien
compris, ce chiffre est pour la fin de 1972.
M. DE GUISE: Ce sont des dollars actualisés à la fin de
1972.
M. MORIN: Actualisés en 1972. Est-ce que vous pourriez
très rapidement nous donner l'actualisation en 1973 et l'actualisation
en 1974 pour qu'on soit en mesure de comparer avec des chiffres que nous avons
de notre côté?
M. DE GUISE: Cela pourrait se faire, mais je ne pourrais certainement
pas le faire immédiatement, parce que vous voyez le travail, surtout
lorsqu'on fait entrer en ligne de compte les coûts d'exploitation sur une
période de cin- quante ans qui représentent des annuités
en montants variables et qu'il faut actualiser X années en
arrière. C'est pratiquement un travail d'ordinateur.
M. GIROUX: Ce ne serait pas plus facile si vous nous donniez les
chiffres que vous avez en 1973/74 et on retracera les erreurs?
M. MORIN: J'aimerais d'abord vous entendre.
M. GIROUX: II faut être pratique. J'essaie de sauver du temps. Si
vous me donnez des chiffres qui, en apparence, peuvent être contraires,
s'il faut le faire faire sur ordinateur, nous verrons à le faire faire
ce soir sur ordinateur. Mais il faudrait nous donner vos chiffres. A quoi cela
sert de venir demain et de nous donner des chiffres? J'aime autant...
M. MORIN: Ah non! vous allez avoir nos chiffres. Il n'y a pas de
problème.
M. GIROUX: Je voudrais bien qu'on s'accorde...
M. MORIN: J'aurais aimé que vous nous disiez à combien
vous l'actualisiez en 1973, en gros?
M. GIROUX: II faut faire cette chose. M. MORIN: Oui.
M. GIROUX: Si vous avez des chiffres, on peut faire faire le calcul.
Vous nous donnez l'information sur vos chiffres. On ne vous demande pas votre
document, on ne vous demande que vos chiffres.
M. MORIN: Je suis prêt...
M. GIROUX: C'est sans malice.
M. MORIN: ... si vous faites motion, M. le Président.
M. GIROUX: Je ne sais pas si j'ai le droit de vote.
M. MORIN: Je me réfère à un document tout
récent qui date de mai 1974 et qui est la description du programme
nucléaire d'Hydro-Ontario, décrit par M. Woodhead qui vous est
certainement connu, qui est le gérant des opérations
nucléaires, de la gestion nucléaire à Hydro-Ontario. Le
chiffre qui nous est donné à la page 10 de cette causerie qui
date du 10 juin 1974 le chiffre est actualisé en 1973
donne pour Pickering, 6.27 mils, c'est le coût total de revient. Cela
comprend...
M. SAINT-PIERRE: Est-ce que cela comprend la réserve?
M. MORIN: Non, cela ne comprend pas la réserve.
M. SAINT-PIERRE: Ah!
M. MORIN: Mais ce serait intéressant de pouvoir comparer ce
chiffre avec votre propre évaluation de Pickering.
M. DE GUISE: Je pense que pour que ce soit un travail utile, il faudrait
comparer toutes nos hypothèses, parce qu'il y a à peu près
une page et demie d'hypothèses avant de faire le calcul. Par exemple,
lorsqu'Hydro-Ontario a déposé les prédictions devant
"l'Energy Board" comme je le disais tout à l'heure, en décembre
1973, elle avait des taux d'intérêt de 8 1/2 p.c. Pour les adapter
à nos calculs, il a fallu modifier le taux d'intérêt. Elle
n'incluait aucune réserve. Elle prenait strictement le coût de
construction de quatre groupes sans mettre de réserve.
Dans les calculs que nous avons présentés, nous avons
toujours inclus la réserve nécessaire pour garantir une
production fiable. Il arrive toute une série d'éléments
où il faudrait nous assurer que nous comparons les mêmes
données de base.
M. SAINT-PIERRE: Simplement, M. le Président...
M. MORIN: Pourriez-vous...
M. SAINT-PIERRE: ... en dehors de la réserve, en dehors de la
nécessité de réinvestissement pour comparer une centrale
à l'autre, l'autre question qu'on peut demander est si le chiffre
cité représente un coût moyen, la première
année d'opération, ou si c'est le coût moyen pour
l'ensemble de la vie de la centrale. Ce n'est pas pareil. On peut arriver avec
un coût moyen bas, compte tenu que, dans le nucléaire, vous avez
des frais d'exploitation qui vont avoir une inflation, mais qui vont augmenter
avec les années.
Lorsqu'on parle, ici, d'un coût moyen de 9.91 p.c, c'est
actualisé pour l'ensemble de la vie de la centrale.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Guise.
M. DE GUISE: J'ai, par exemple, si on doit citer Hydro-Ontario, le
document qui nous a servi de base, si vous le voulez, pour comparer avec le
coût de La Grande.
Le chiffre d'Hydro-Ontario pour quatre groupes de 750 en service en
1982, c'est 11.5 mils. Cela inclut de l'intérêt à 8 p.c. au
lieu de 10 p.c. Il n'y a aucune réserve. Ce sont des prix
d'énergie en 1982, donc qui ne tiennent pas compte de l'avis de la
centrale ou des réinvestissements, et qui ne tiennent pas compte de
l'escalade dans la période future. Mais HydroOntario, à son
gouvernement, a exposé que le coût de base de quatre groupes de
750 mis en service en 1982 étaient 11.5 mils.
M.MORIN: Mais en...
M. DE GUISE: C'est un document public.
M. MORIN: Oui, mais en 1973, qu'est-ce que cela donne, 11.5 mils?
M. DE GUISE: On s'y connaît là-dessus. M. MORIN: Est-ce que
vous l'avez?
M. DE GUISE: J'ai ici la déposition d'Hydro-Ontario devant
le...
M. MORIN: Est-ce que ce serait possible d'avoir une copie?
M. DE GUISE: C'est un document public.
M. MORIN: Oui? C'est possible d'en avoir un exemplaire, une copie?
M. DE GUISE: Cela fait partie de six volumes.
M. MORIN: Oui. Mais de ce que vous avez là, de ce qui pourrait
nous éclairer sur ce point en particulier.
M. DE GUISE: Je peux vous le donner. Cela appartient à
Hydro-Ontario, en fait. C'est une photocopie d'un rapport d'Hydro-Ontario.
M. MORIN: Cela nous intéresserait de l'avoir.
Bien! Pour arriver aux coûts de revient de 24.4 mils kWh,
j'aimerais que nous examinions les données de base sur lesquelles vous
vous êtes fondés. Par exemple, les coûts de revient non
intégrés dans un réseau pour une année de
référence donnée, et sans qu'on fasse intervenir le taux
d'inflation à l'exploitation.
Pourriez-vous nous dire quelles sont les données de base, en plus
des 750 MW?
M. DE GUISE: Oui, voici.
M. MORIN: Les données brutes.
M. DE GUISE: Nous sommes partis d'un coût d'investissements de
$345 par kW en 1973.
M. MORIN: Je m'excuse. Combien?
M. DE GUISE: $345 par kW. Les coûts d'investissements de base ont
été assujettis à des taux d'escalade suivants: En 1974, 16
p.c; en 1975, 9.3 p.c; dans la période de 1976 à 1980, 6.4p.c;
dans la période de 1981 à 1985, 5.5p.c.
Deuxièmement, les charges d'eau lourde: A
rappeler que chaque groupe de 750 MW requiert 700 tonnes d'eau lourde.
L'eau lourde a été prise à $80,000 la tonne, qui est le
prix courant.
Il y a eu l'eau lourde, pour les frais d'opération ou
d'entretien, parce qu'il se perd toujours un peu d'eau lourde, qui a
été assujettie... Ah non! D'abord, les frais pour l'eau lourde
initiale: On a estimé que le prix de l'eau lourde augmenterait de 7.25
p.c. par année entre 1974 et 1980; de 5.30 p.c. de 1981 à 1985 et
de 4 p.c. dans la suite.
M. MORIN: Bien!
M. DE GUISE: Est-ce que je dois continuer? J'en ai une autre page,
d'hypothèses.
M. MORIN: Non, nous avons noté... Si vous estimez qu'elles sont
pertinentes...
M. DE GUISE: Si vous voulez essayer de refaire les calculs, il vous faut
toutes ces hypothèses.
M. MORIN: Alors, il vaut mieux continuer dans ce cas.
M. DE GUISE: Les frais d'exploitation et d'entretien, à
l'exclusion de l'eau lourde et du combustible...
M. MORIN: Oui.
M. SAINT-PIERRE: Ce n'est pas Michaud qui va faire les calculs,
toujours?
M. DE GUISE: ... ont été pris à .48 mils par kWh en
dollars 1973. Les taux d'inflation sur les frais d'exploitation et d'entretien
sont les suivants: En 1974, 14 1/2 p.c; en 1975, 9.5 p.c; de 1976 à
1980, 7.5 p.c. en moyenne; de 1981 â 1985, 7 p.c. en moyenne, et en 1986
et dans la suite, 7 p.c.
J'aimerais souligner en passant, que ce sont à peu près
intégralement les hypothèses d'Hydro-Ontario.
Le remplacement de l'eau lourde, à cause des pertes durant
l'exploitation a été évalué à .056 mils en
dollars 1973. L'eau lourde a été escaladée au même
taux que donnés précédemment.
Le combustible nucléaire, l'oxyde d'uranium est
évalué à un mill du kW en dollars 1973, et les taux
d'inflation sont de 4 p.c. de 1974 à 1980; 3 1/2 p.c. de 1981 à
1985 et de 3 p.c. par la suite. D'autres paramètres nécessaires
au calcul: la durée de la vie est de 30 ans tel que cela a
déjà été mentionné; le taux d'inflation pour
le réinvestissement a été pris à 5.1 p.c; le taux
d'indisponibilité des groupes de 700 MW électriques, suivant
l'expérience d'Hydro-Ontario et suivant ses chiffres, a
été donné à 10 p.c pour des groupes de 750 MW
électriques. Avec ceci...
M. MORIN: 10 p.c?
M. DE GUISE: 10 p.c. Il y en a d'autres probablement, mais j'aimerais
vous signaler aussi... Je sais que la réserve fait souvent l'objet de
questions. Dans le même document d'Hydro-Ontario, on demande, dans la
période qui suit les années quatre-vingt autant que je me
rappelle, de mémoire une réserve de puissance par rapport
à la charge à rencontrer de 30 p.c. et si on garde en
mémoire que sur le réseau d'Hydro-Québec, il y a
déjà à peu près un tiers qui est de l'hydraulique,
cela nous justifie, dans un programme exclusivement nucléaire d'adopter
les chiffres que nous avons pris, d'à peu près 37 p.c. ou 38 p.c.
d'équipement de réserve. Et d'ailleurs, c'étaient des
chiffres que nous avaient recommandés les spécialistes
américains qui nous avaient éclairés dans les calculs que
nous voulions faire.
M. MORIN: Puis-je revenir sur un petit point de détail?
M. DE GUISE: Oui.
M. MORIN: Pour ce qui est de l'inflation sur le coût de
construction, est-ce que je vous ai bien compris? Pour 1974, en ce qui concerne
LG 2, vous le mettez à 8 p.c. et pour le nucléaire, vous le
mettez à 16 p.c?
M. DE GUISE: Nous avons 16 p.c. de taux pondéré pour
lequel je puis vous donner des détails.
M. MORIN: Oui, j'aimerais bien que vous puissiez expliquer... Parce que
par la suite, cela semble se normaliser. En 1975, vous le portez à 9
p.c; en 1976, à 6.4 p.c.
M. DE GUISE: Je peux peut-être vous aider en ce sens que,
évidemment, l'acier, par exemple, a subi une augmentation de
peut-être 50 p.c. dans une très courte période et les taux
d'équipement électrique ou de machinerie aussi ont
dépassé la moyenne.
Pour l'année 1974, nous avions la main-d'oeuvre à 11.1
p.c; les matériaux à 25 p.c. en se rappelant que ce sont des
matériaux assez spéciaux, d'alliage particulier, de fabrication
délicate, de contrôle, etc; l'équipement, surtout pour la
construction, à 15.8 p.c. et suivant les pourcentages, cela faisait une
moyenne pondérée de 16 p.c. Sujet à vérification
avec M. Boyd, mais je crois que dans le calcul de La Grande, pour la
première année, l'année 1974, ils ont un chiffre de 15.5
p.c. La moyenne de la période est de 7 p.c, mais eux aussi, je crois, en
1974, ont un chiffre passablement plus élevé.
M. CHARUK: Je suis Yan Charuk. M. Boyd a donné, ce matin, pour le
projet La Grande les taux d'inflation utilisés pour la main-d'oeuvre,
les matériaux et l'équipement pour les années
1974 et 1975 et de 1976 à 1980, je crois. Et ce sont pratiquement
les mêmes dans le cas du nucléaire, mais la pondération
entre la main-d'oeuvre, les matériaux et les équipements est
différente et deuxièmement, il y a une variation dans les taux
d'inflation des équipements.
M. MORIN: Merci. Je voudrais passer à la construction. Vous nous
donnerez le document auquel vous faisiez allusion il y a un instant.
M. DE GUISE: Vous voulez la page d'Hydro-Ontario, les 11.5 mils
d'Hydro-Ontario.
M. MORIN: Oui.
M. BOYD: Je vais le sortir.
M. MORIN: Merci. M. Boyd nous a dit hier, je crois que c'était M.
Boyd, dans le document comparant le coût de l'énergie du complexe
hydroélectrique de la baie James, avec le coût d'un projet
nucléaire canadien équivalant, à la page 6, que le facteur
d'utilisation prévu en moyenne pour toute la durée de la vie
utile il s'agit de Pickering est de 80 p.c. Dans le cas...
M. BOYD: C'est M. De Guise qui vous expliquait ce document.
M. MORIN: C'est M. De Guise, oui, je m'excuse. Peu importe, celui
d'entre vous qui se sentira compétent pour y répondre pourra le
faire. Dans le cas de Pickering, est-ce que vous n'êtes pas au courant
que les résultats, les performances comme on dit quelque fois, ont
dépassé largement les 80 p.c? Elles ont dépassé,
comme question de fait, toutes les espérances. Le taux d'utilisation net
de la capacité installée a été de 83.4 p.c. Je tire
ce chiffre toujours de la causerie de M. L. W. Woodhead. A la page 6, on nous
indique donc que le taux d'utilisation net de la capacité
installée a été de 83.4 p.c. en 1973. Il s'agit des quatre
unités ensemble. Il a été de 95 p.c. pour les mois d'hiver
1973, avec l'unité III, nous indique-t-on, qui fonctionnait à
99.5 p.c. Est-ce qu'à la lumière de ces résultats, votre
hypothèse de 80 p.c. n'est pas un peu pessimiste?
M. DE GUISE: Je vous donne mon opinion. Il serait peu sage et dangereux,
je crois, de baser un programme d'équipement sur une expérience
d'une année ou de quelques mois dans le cas de certains groupes. Vous
avez probablement eu connaissance aussi, parce que, évidemment,
étant au ECL, j'en entends parler de près, qu'il y a un groupe
qui a dû être arrêté pour huit ou neuf semaines pour
une réparation à la turbine. Cela peut fort bien se produire dans
les autres groupes l'année prochaine. Peut-être que ma meilleure
argumentation serait le fait que toujours dans le...
M. MORIN: Est-ce que cela ne va pas dans la réserve plutôt
que...
M. DE GUISE: J'y arrivais justement. Cela prend de la réserve
pour suppléer aux déficiences des groupes à mesure
qu'elles se produisent. Malgré la bonne expérience de Pickering,
Hydro-Ontario, en décembre 1973, lorsqu'elle présentait son
programme d'équipement, ou lorsqu'elle le défendait devant le
gouvernement d'Ontario, a continué de mettre j'ai la page 2 d'un
supplément 315 "per cent of firm load, margin of over the firm
load". Ils préparent 33 p.c. en 1973, 34 p.c. en 1974, 27 p.c. en 1975,
36 p.c. en 1976, 31.5 p.c. en 1977. On voit qu'on se donne un
suréquipement de l'ordre de 30 p.c.
M. MORIN: C'est dans la réserve ou le facteur d'utilisation?
M. DE GUISE: Non, c'est la réserve pour parer aux arrêts
imprévus des groupes.
M. MORIN: Oui. Quel est le facteur d'utilisation qu'ils indiquent?
M. DE GUISE: On n'indique pas le facteur d'utilisation ici. Il faut bien
remarquer que, dans les facteurs d'utilisation, on écarte
peut-être de la discussion présente, parce qu'un groupe peut fort
bien ne pas fonctionner, parce qu'il n'a pas de charge. Alors, il faut
être prudent à ce moment. Les facteurs d'utilisation sont
affectés par le nombre de machines qu'il y a sur le réseau et la
charge du réseau. Cela ne déforme pas les chiffres que vous avez
dans le cas de Pickering, parce que vu que c'est une centrale nouvelle,
Hydro-Ontario s'efforce de les faire fonctionner au maximum pour savoir ce
qu'elle peut en tirer. Si la charge baisse, on baisse d'autres groupes
généralement. Alors, je crois que la performance de Pickering est
une bonne indication de ce que peuvent faire des groupes nucléaires.
Encore une fois, c'est une expérience d'une année ou d'une
année et demie dans le cas de certains groupes.
M. MORIN: Votre hypothèse de 80 p.c. est quand même du
côté très prudent.
M. DE GUISE: Hydro-Ontario utilise encore les mêmes chiffres. Elle
va peut-être les changer, si après cinq ans l'expérience de
Pickering se maintient. Elle va peut-être les changer.
M. SAINT-PIERRE: Quels sont les chiffres utilisés pour les
centrales américaines aux Etats-Unis?
M. DE GUISE: Ils sont bien en bas de cela. Les centrales
américaines n'ont pas la performance.
M. MORIN: Ce n'est pas le Candu.
M. DE GUISE: Non. Ils n'ont pas la performance de...
M. MORIN: Ils n'ont pas la performance...
M. DE GUISE: Chaque fois qu'ils changent de combustible ils
l'arrêtent.
M. MORIN: On peut difficilement comparer. Mais je vous avoue que cela me
paraît faire une différence parce que si vous baissez votre
facteur, vous pourriez le mettre à 75 p.c. tandis que vous y êtes,
seulement, cela augmenterait tout de suite vos prix.
M. DE GUISE: Si j'ai bien compris, au mieux vous êtes à 83
p.c. On utilise 80 p.c.
M. MORIN: Pour l'hiver on est à plus que cela.
M. DE GUISE: Oui, mais on ne peut pas tabler sur un mois seulement,
parce qu'on a des groupes thermiques qui fonctionnent à 100 p.c. durant
un mois, mais ils sont arrêtés trois mois ensuite.
M. MORIN: Je pense que cela représente quand même...
M. DE GUISE: II y a un minimum d'entretien à faire sur ces
groupes, alors il faut qu'ils les arrêtent lorsqu'ils font l'entretien.
Il est inconcevable qu'ils les gardent...
M. MORIN: Comment l'évaluez-vous? J'ai le tableau sous les yeux,
mais je n'aperçois pas... Comment l'évaluez-vous en mil ce
facteur?
M. DE GUISE: Quel facteur?
M. MORIN: Le coût. Votre facteur d'utilisation à 80
p.c.
M. DE GUISE: Voici ce que cela veut dire. Lorsqu'on a établi le
nombre de kWh dont le réseau a besoin, au lieu de diviser par une
puissance disponible 100 p.c. du temps, cela se trouve à majorer de 20
p.c. C'est peut-être approximatif. Cela varie votre mil par kWh. Si vous
avez une machine qui produit 8,760 heures par année et l'autre à
80 p.c. produit 7,008 heures par année, lorsque vous divisez cela majore
votre prix en conséquence, dans le rapport 20 p.c.
M. MORIN: Dans votre tableau II, vous ne l'avez pas isolé ce
facteur? Je ne le trouve pas en tout cas.
M. DE GUISE: Dans le tableau II, un instant. Lorsqu'on a...
M. MORIN: C'est bien indiqué 80 p.c, mais...
M. DE GUISE: Lorsqu'on a énergie produite au haut de la
page, sept ou huitième ligne actualisée, oublions le
facteur d'actualisation là-dedans, mais on suppose qu'un groupe de 750
ne produit des kWh qu'à 80 p.c. du temps seulement. C'est l'effet que
cela a sur les calculs.
M. MORIN: Bon, j'ai compris. Très bien.
M. SAINT-PIERRE: Quels seraient les commentaires, M. De Guise, que vous
auriez sur les 75.1 p.c. utilisés pour les projets La Grande, facteur
d'utilisation?
M. DE GUISE: Dans les calculs comparatifs, il fallait que nous ayons de
la réserve un minimum pour La Grande aussi qui est de l'ordre de 10 p.c,
peut-être un peu moins, à mesure que les groupes sont
installés, nous assumons, tant que ce n'est pas fini, que la
réserve est prise à même les groupes installés. Ce
qui, au point de vue de production des kWh, se trouve à faire baisser
légèrement le facteur d'utilisation de La Grande, puisqu'on en
considère une partie en réserve. Mais, lorsque l'installation est
finie, pour comparer les deux programmes sur une même base, nous avons
ajouté les turbines à gaz pour servir de réserve dans la
proportion de 9 p.c. à 10 p.c. par rapport au programme La Grande.
Alors, c'est pour cela qu'à un moment donné, à cause de
l'inclusion de la réserve, partiellement le facteur d'utilisation est
à 75 p.c, mais dès que le projet est fini, par d'autres
artifices, il y a moyen de le monter à 80 p.c. Remarquez que cela
baisserait le coût. En le mettant à 75 p.c. on défavorise
La Grande par rapport au nucléaire.
Nous avons établi un crédit de kWh au nucléaire
à cause de ça.
M. MORIN: Oui, mais le point où je veux en venir, c'est celui-ci.
Le résultat de Pickering est quand même, pour l'hiver 1972/73, 96
p.c. Et pour l'hiver 1973/74, 95 p.c. Vous avouerez comme moi que
l'été, on utilise moins, donc c'est le moment où on
répare, où on sort les baguettes. C'est quand même
éloquent, 96 p.c, 95 p.c, comme résultat des deux
premières années et je vous demande, à la lumière
de tout ça, est-ce que vos 80 p.c, qui ont certainement influé
lourdement sur votre évaluation du système nucléaire, ne
paraissent pas un peu conservateur et ne pourraient pas vous amener à
réévaluer votre affaire?
M. DE GUISE: Je voudrais vous rappeler que les 80 p.c sont une moyenne
annuelle. C'est un facteur d'utilisation annuelle, donc qui inclut un
pourcentage du temps où l'équipement, même s'il est
parfait, doit forcément être arrêté pour être
nettoyé, inspecté, vérifié, et admettez que quinze
jours ou trois semaines sur 52 semaines, c'est tout de même 6 p.c. ou
à peu près, rien que pour de l'inspection. Maintenant, dans le
document dont vous aurez copie, celui que je citais, qui donnait un coût
de 11.5 p.c, vous voyez, au mieux, qu'Hydro-Ontario a fait des calculs avec
trois facteurs d'utilisation pour
prouver son projet. On a pris 40 p.c, 60 p.c. et 80 p.c. mais on n'a pas
osé dépasser 80 p.c. Parce que ce sont des moyennes de trente
ans, évidemment. Vous l'avez en haut de la page, à droite,
ACF.
M. MORIN: C'est de là que vous tirez vos 11.52 p.c.
M. DE GUISE: 11.52 p.c, au bas, oui, avec ce que je vous mentionnais
tout à l'heure, l'intérêt est à 8 p.c, il n'y a pas
de réserve, pas de réinvestissement et c'est un prix de 82 p.c,
ce n'est pas un prix moyen pour les prochaines cinquante années.
M. MORIN: Tout de même, vos 80 p.c. sont très prudents.
M. DE GUISE: Je vous ai dit que, depuis le début, nous avons une
certaine expérience, mais nous considérons qu'Hydro-Ontario a
plus d'expérience que nous dans le nucléaire et le thermique.
M. MORIN: Si toutes vos hypothèses sont tout aussi prudentes et
conservatrices, on peut peut-être jeter quelques doutes sur le
résultat final.
M. CHARUK: Je me permets ici de souligner que nous opérons
lesdites centrales nucléaires pour toute leur vie utile à ce
facteur d'utilisation de 80 p.c. Considérant maintenant que, si vous
isolez le réacteur, toutes les autres pièces d'une centrale
nucléaire, c'est du thermique conventionnel, comparez ce thermique
conventionnel, c'est-à-dire les centrales nucléaires du type
Candu, à des centrales thermiques conventionnelles. Regardez, depuis 30
ans, s'il y en a une dans le monde qui a eu un facteur d'utilisation de 80 p.c,
même si elle est en mesure de le faire. Lorsque vous installez de
nouvelles centrales sur un réseau, il y a de bonnes chances que la
centrale soit déclassée dans le classement des centrales et son
facteur d'utilisation va baisser. 80 p.c. est un facteur d'utilisation
très élevé sur trente ans.
M. MORIN: Est-ce que cela correspond? En Europe, c'est encore un autre
système. On ne peut pas établir véritablement de
comparaison.
M. CHARUK: Vous pouvez, mais il y a beaucoup de nuances à
faire.
M. MORIN: Oui.
M. DE GUISE: Je pense que le point de M. Charuk est important. Oublions
le nucléaire et prenons une centrale plus simple qui brûle de
l'huile et du charbon. L'expérience prouve que, même en
brûlant de l'huile ou du charbon, on n'atteint pas sur une longue
période une moyenne de 80 p.c.
M. SAINT-PIERRE: Le député de Sauvé voudrait que
vous soyez beaucoup plus audacieux dans le facteur d'utilisation mais beaucoup
plus prudent dans les taux d'inflation et les taux d'intérêt.
M. MORIN: Ce que je veux savoir, c'est exactement quelle est la
qualité des hypothèses qu'on nous soumet.
M. SAINT-PIERRE: Le juste milieu.
M. MORIN: Est-ce que vos hypothèses, quant au renouvellement,
après 30 ans, ne sont pas également un peu hypothétiques?
Disons trop hypothétiques?
M. DE GUISE: Trop hypothétiques? Disons qu'il y a un point sur
lequel je pense il n'y a pas trop de difficulté à s'entendre,
c'est qu'au bout de trente ans, les centrales même thermiques sont
généralement dépréciées
financièrement et elles deviennent tellement "obsolete" ou inefficaces,
que leur vie utile est bien limitée à trente ans. Qu'est-ce que
vous voulez? Je m'imagine peut-être la question, qu'est-ce qu'on alloue
pour le coût de reconstruction après 30 ans?
M. MORIN: Si vous voulez, parce que si vous remplacez par la technologie
de 1974, peut-être que vos calculs se trouvent faussés.
M. DE GUISE: Oui.
M. MORIN: Ce n'est pas la même chose que si vous remplacez par la
technologie de l'année 2010.
M. DE GUISE: Mais vous... M. MORIN: Comment...
M. DE GUISE: Vous admettrez que dans les hypothèses, dans le
travail que nous avons à faire, il nous faut tout de même essayer
d'entrer quelque chose qu'on connaît. On ne peut pas risquer de
prévoir quelque chose qui marchera sur le principe de la fission
nucléaire quand on ne sait pas combien il coûtera. La chose que
nous connaissons actuellement...
M. MORIN: La fission, on n'y est pas encore M. DE GUISE: La seule
chose...
M. MORIN: Tenons-nous en à la fission, quand même.
M. DE GUISE: La seule chose que nous connaissons, c'est cela. Un
réacteur canadien, un réacteur américain ou les
réacteurs "high température gas reactor", qui sont
l'équivalent, au point de vue des coûts même les
surgénérateurs actuellement, les trois
surgénérateurs en service ou sur le point de l'être
coûtent plus
cher au kW que les centrales conventionnelles. Il peut y avoir des
améliorations de la technique, mais actuellement, les deux
surgénérateurs en service coûtent beaucoup plus cher au kW
que les centrales nucléaires.
M. MORIN: Le facteur provision pour renouvellement, si ma mémoire
est bonne, représente quelque chose comme 2.65 mils; c'est bien cela?
C'est sous réinvestissement.
M. DE GUISE: Ce n'est pas renouvellement, c'est
réinvestissement.
M. MORIN: Sous réinvestissement. M. DE GUISE:
Réinvestissement, oui.
M. MORIN: Vous avouerez que cela représente une proportion
importante de votre coût total. Je crois que cela doit faire dans les...
c'est 10.9 p.c. C'est cela?
M. DE GUISE: Oui. Remarquez que nous avons fait un autre exercice, dont
je vous fais grâce pour le moment, nous avons essayé
d'établir ce qui se passerait si nous déprécions ou si
nous mettons une vie utile de 30 ans au lieu de mettre une vie utile de 50 ans.
A ce moment-là, nous étions obligés de créditer au
projet La Grande la valeur résiduelle d'au moins 20 ans qui demeuraient.
Et cela a donné des résultats qui favorisaient davantage le
projet La Grande.
M. MORIN: Voulez-vous nous expliquer cela un peu?
M. DE GUISE: Nous avons fait tous les calculs ici en supposant une vie
utile de cinquante ans, ce qui nous forçait, dans le cas du
nucléaire, à faire un réinvestissement après trente
ans. Cela nous posait certaines inquiétudes, sur les hypothèses
à prendre.
M. MORIN: Vous voulez dire que cela vous causait des inquiétudes
sur la méthode?
M. DE GUISE: La méthode et sur la valeur qui devait être
prise, dans le réinvestissement après trente ans.
M. MORIN: Nous sommes sur un terrain commun.
M. DE GUISE: Sur un terrain commun. Pour obvier à cette
difficulté, nous avons dit, nous allons chercher une méthode
où on n'a pas de réinvestissement à faire. Nous allons
examiner les deux programmes sur trente ans et, à ce moment,
évidemment, vu que le projet hydroélectrique est encore bon pour
vingt ans, nous allons lui créditer sa valeur résiduelle. En
faisant cela, on avait un pourcentage d'écart qui est encore
supérieur à ce que je vous donne avec la méthode de
réinvestissement que nous avions adoptée.
Je pense que M. Charuk a peut-être un mot à ajouter sur la
philosophie du réinvestissement.
M. MORIN: Oui.
M. CHARUK: Justement, dans un cas comme dans l'autre, le problème
est le même. Dans le cas que nous avons ici, devant nous, le
problème est destiné à quelle inflation annuelle nous
allons réinvestir. Dans l'autre cas, si nous coupons après trente
ans, il s'agit de déterminer une valeur résiduelle de
l'équipement qui est en place. Donc, dans les deux cas, il faut
considérer l'inflation.
Nous avons pris, comme hypothèse fondamentale l'inflation que
l'on retrouve dans le produit national brut, depuis trente ans. Nous faisons
une moyenne Cest à peu près 2.8 p.c. ou 3 p.c. si je ne me
trompe. Nous avons ajouté à cela seulement 1.5 p.c. d'inflation,
ce qui est très conservateur.
M. DE GUISE: Ce qui explique les 5.1 p.c. qui ont été
utilisés dans les hypothèses que je vous ai données.
M. MORIN: Cela ne vous paraît pas exagéré d'allouer
11 p.c. du coût de revient sur la provision pour le renouvellement, dans
ce cas?
M. DE GUISE: Pas tellement. Si vous calculez ce que vous devriez
créditer au projet ne vous en servant que pour 60 p.c. du temps, vous
êtes obligés de lui créditer 40 p.c. de sa valeur.
M. SAINT-PIERRE: II y a une différence entre trente ans et
cinquante ans.
M. MORIN: Bien. En ce qui concerne maintenant la réserve, elle
représente, d'après vos calculs, 14 p.c. du coût,
c'est-à-dire 3.4 mils, je crois, c'est bien cela?
M. MALOUIN: 3.36. M. MORIN: 3.36.
M. SAINT-PIERRE: Est-ce qu'il ne serait pas mieux de la
considérer sous forme de pourcentage parce qu'après tout le
résultat est simplement un calcul? Ce qu'on peut se poser comme question
c'est: Est-ce qu'il est normal d'avoir dans un projet hydroélectrique
une réserve de 10 p.c. et est-ce qu'il est normal d'avoir sur un projet
nucléaire une réserve de 36 p.c.
M. DE GUISE: Cela fait 13.8... M. SAINT-PIERRE: Des coûts.
M. DE GUISE: ... en coût. En coût, c'est environ 13.8. En
pourcentage, vous l'avez. Il y a 3,713 MW de réserve sur une puissance
installée
de 9,7 50, ce qui représente à peu près 38 p.c.
Là encore, nous avons comme guide les chiffres d'Hydro-Ontario. Je vous
ai référé tout à l'heure à un document
où, dans la période de 1973 à 1983, on indique un
pourcentage de réserve en équipement qui varie entre 33 p.c, 26
p.c, 31 p.c, disons qu'il est approximativement de 30 p.c. en moyenne.
Et si vous considérez qu'en prévoyant 30 p.c. de
réserve sur l'ensemble du réseau dans un réseau qui a
déjà un tiers en hydraulique, cela nous justifie de prendre 38
p.c. dans un réseau entièrement nucléaire. Je ne sais pas
si vous m'avez suivi là-dessus.
M. MORIN: J'ai perdu votre dernière phrase.
M. DE GUISE: Voici. Dans les chiffres déposés par
Hydro-Ontario il fallait qu'ils justifient leurs prévisions
financières, leurs besoins d'argent, etc. ils prévoient
une réserve qui varie entre 33 p.c. et 27 p.c. de la puissance
installée.
Vous n'avez peut-être pas ce document. C'est une autre page.
M. MORIN: Non, je ne l'ai pas.
M. DE GUISE: C'est une autre page. C'est pour l'ensemble de tout le
réseau d'Hydro-Ontario.
Dans les premières années je prends 1973 il y
a 57 sur 166, à peu près un tiers d'hydraulique, où
normalement la réserve devrait être très basse. Alors, je
crois qu'on n'est pas tellement loin de la vérité en prenant 38
p.c. pour une hypothèse entièrement nucléaire.
M. MORIN: Oui. Je vais essayer de mieux vous comprendre sur ce sujet en
vous posant une ou deux autres questions.
M. DE GUISE: Oui. Je tiens bien à souligner aussi que, par souci
de coût, nous n'avons pas mis 37 p.c. de réserve nucléaire.
Nous avons mis 37 p.c. de réserve dans un mélange de turbines
à gaz et de centrales à réserve pompée qui sont un
investissement beaucoup moindre.
M. MORIN: A la page 8, on nous dit que la réserve est
basée sur un taux d'indisponibilité des centrales
nucléaires de base dû aux pannes, de 6 p.c, ce qui
nécessite des installations de réserve dont la puissance
représente 25 p.c. de celle des centrales nucléaires pour un
réseau de l'ordre de 10,000 MW dans les années 1970.
M. DE GUISE: Bon, j'aimerais vous signaler...
M. MORIN: Est-ce que ce n'est pas un peu fort?
M. DE GUISE: J'aimerais vous signaler que c'était pour des
groupes de 500 MW, c'était dans l'hypothèse de 1972. Dans le
tableau de La Grande, nous utilisons des groupes de 750 MW, et
l'économie que nous faisons dans la taille des groupes, nous en
reperdons une bonne partie dans la réserve additionnelle qu'il faut
préparer, parce que même dans les chiffres d'Hydro-Ontario, ils
augmentent la réserve à cause de l'augmentation de la taille des
groupes. Parce que plus les groupes sont gros, plus ils ont des chances de
tomber en panne dans les premières années, du moins
et plus l'effet est grand dans le réseau, évidemment. Perdre 750
MW, c'est plus sensible que de perdre 500 MW.
M. MORIN: Est-ce que vous êtes au courant des résultats
obtenus par Pickering récemment, en particulier pour 1973?
M. DE GUISE: Je les ai. A AECL, nous les suivons semaine par semaine et
mois par mois. Je ne les ai pas devant moi, par exemple.
M. MORIN: The average lifetime DAFOR for the four units is 7.4 p.c. In
1973, the average improved to 4.4 p.c.
M. DE GUISE: L'année précédente, c'était 7
p.c et, cette année, c'est 4 p.c. Qu'est-ce que cela sera l'année
suivante et qu'est-ce que cela sera sur une moyenne de 30 ans? Vous savez que
les courbes dans les disponibilités des groupes, c'est comme une courbe
en cuvette. Les premières années, l'indisponibilité est
assez forte parce que c'est la période de rodage, il y a une
période de stabilisation dans la vie moyenne et, dès que l'usine
vieillit ou que le groupe vieillit un peu, l'indisponibilité remonte
encore.
M. MORIN: Vous calculez que votre réserve à 25 p.c. est
raisonnable.
M. DE GUISE: Nous avons pris plus que cela. Je tiens à souligner
que, dans le calcul de comparaison avec La Grande, nous avons pris 37 p.c. de
réserve par rapport à la puissance installée et c'est
basé sur les chiffres après discussion avec les gens
d'Hydro-Ontario.
M. MORIN: Là aussi, c'est très conservateur. C'est encore
une autre hypothèse très conservatrice.
M. DE GUISE: Si on suit les publications américaines, vous allez
trouver des réseaux où c'est encore beaucoup plus
élevé. Evidemment, l'expérience américaine est
moins bonne.
M. MORIN: On ne vous parle pas du système américain. On
vous parle du système Candu.
M. DE GUISE: Mais, évidemment, c'est une question
d'interprétation et de jugement, mais nous croyons imprudent de baser
tout un programme sur une expérience d'un an dans la centrale de
Pickering.
M. SAINT-PIERRE: Vous êtes comme l'indépendance...
M. MORIN: Cela vous amène quand même, finalement, à
trouver des chiffres très élevés pour le
nucléaire.
M. DE GUISE: Voulez-vous que...
M. MORIN: Parce que, si on accumule toutes les hypothèses
conservatrices pour être du bon côté de la clôture, en
toute sécurité, cela n'est pas étonnant que le coût
final soit élevé.
M. DE GUISE: Est-ce que, pour un instant, je peux laisser les
considérations économiques et regarder, sur le plan pratique, ce
que voudrait dire un programme entièrement nucléaire?
M. LESSARD: Ce n'est pas ce qu'on a dit. M. DE GUISE: Très
bien.
M. LESSARD: Tout ce qu'on a dit, c'est qu'on a essayé d'avoir un
programme polyvalent. On n'a jamais dit de se...
M. SAINT-PIERRE: C'est comme l'indépendance, juste avant les
élections...
M. MORIN: Ne mêlez pas les cartes.
M. LESSARD: Non. Ne mêlez pas les cartes.
M. SAINT-PIERRE: Elles sont mêlées dans votre jeu.
M. MORIN: Laissez-nous travailler !
M. SAINT-PIERRE: On va vous laisser vous empêtrer...
M. LESSARD: Par la suite, Hydro-Québec a décidé,
à un certain moment, de se diriger un peu vers le nucléaire. Ce
que nous avons toujours dit, c'est d'avoir un programme polyvalent et, lorsque
vous avez forcé la main à Hydro-Québec, lors de votre
annonce du 29 avril...
M. SAINT-PIERRE: Affirmation gratuite.
M. LESSARD: ... à ce moment, vous avez presque de façon
obligatoire dirigé HydroQuébec exclusivement vers la baie
James.
M. SAINT-PIERRE: Ce sont, M. le Président, des accusations
très graves qu'on vient de lancer. D'une part, une affirmation gratuite
que le gouvernement a forcé la main à HydroQuébec de
prendre un programme hydraulique, deuxièmement, de mettre en doute
l'honnêteté intellectuelle...
M. MORIN: Ce n'est pas comme cela que cela s'est
présenté.
M. SAINT-PIERRE: C'est cela qu'on vient de faire. On met en doute
l'honnêteté intellectuelle des gens et on dit qu'on tourne les
chiffres pour faire plaisir au gouvernement.
M. MORIN: Ne nous opposez pas à HydroQuébec. D'ailleurs,
nous étions en train d'examiner les choses sérieusement...
M. SAINT-PIERRE: Vous étiez en train... M. MORIN: M. le ministre,
s'il vous plaît!
M. DE GUISE: II y aurait peut-être un dernier point à faire
valoir sur le plan économique, c'est qu'en admettant que certains
chiffres sont peut-être jugés trop élevés dans nos
réserves et dans les taux de non-disponibilité, n'oublions pas
que nous avons limité la vie des centrales hydrauliques à 50 ans.
Si nous avions pris 65 ans ou 75 ans, et qu'il ait fallu faire un
réinvestissement et un autre réinvestissement partiel...
M. MORIN: Oui, mais vous avez limité le nucléaire à
30 ans, on pourrait vous faire le même raisonnement aussi.
M. SAINT-PIERRE: Je pense que la preuve...
M. DE GUISE: Je pense qu'on peut prouver que dans tout le thermique,
parce que vous savez l'objection additionnelle au nucléaire, les
métaux ou la partie des réacteurs assujettie aux bombardements
neutroniques, deviennent extrêmement fragiles avec le temps, comme de la
glace. Alors, s'il est prouvé qu'une centrale thermique conventionnelle
ne dure pas plus que 30 ans, je crois que dans le nucléaire, si on
ajoute les risques additionnels que comporte la fission nucléaire, il
serait assez présomptueux de dire que cela va être plus que 30
ans.
M. MORIN: Oui, mais tout n'est peut-être pas nécessairement
à renouveler dans une centrale nucléaire après 30 ans.
M. DE GUISE: Mais qu'est-ce que vous pensez d'une centrale
hydroélectrique ou un tunnel, un massif de roc qui sert de barrage. En
fait, dans nos centrales hydroélectriques, il n'y a à peu
près que les turbines, les alternateurs, l'équipement
électrique à renouveler.
M. MORIN: J'ai une dernière...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Alors, messieurs, je constate qu'il est 6
heures. On va prendre quelques minutes de repos et on reviendra à 20 h
15.
M. MORIN: D'accord. (Suspension de la séance à 18
heures)
Reprise de la séance à 20 h 27
M. LAFRANCE (président de la commission permanente des richesses
naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!
Le député de Mont-Royal aurait une question à
poser.
M. CIACCIA: M. le Président, cela fait quelques heures que nous
nous arrêtons sur les chiffres et les différences
monétaires et économiques entre les projets nucléaires et
les projets hydrauliques. Mais il me semble qu'il doit y avoir d'autres
considérations en plus de l'aspect économique seulement. Je crois
d'ailleurs que la Société d'énergie, Hydro-Québec
ont démontré avec des chiffres et une présentation
très bien préparée, que personne n'a pu, jusqu'à
maintenant, démontrer que ces chiffres n'étaient pas valables,
mais en plus de l'aspect économique, il doit y avoir d'autres
considérations pour favoriser le projet hydraulique plutôt que le
projet nucléaire.
Je suis conscient qu'il faut commencer par les chiffres. On ne peut pas
endetter les citoyens du Québec s'il y a une alternative. Seulement
l'aspect économique n'est pas toujours le seul critère pour
déterminer une façon de procéder.
J'aurais trois questions à poser à HydroQuébec ou
la Société d'énergie si elles pouvaient nous donner des
renseignements sur, premièrement, la question de juridiction, au point
de vue de la juridiction provinciale, juridiction du Québec. Je crois
qu'il n'y a pas de doute sur la juridiction de la province sur le projet
hydraulique.
Je suis conscient du fait qu'il y a des procédures légales
par les autochtones qui contestent certains aspects, l'environnement,
peut-être la juridiction, le bill 50.
M. MORIN: J'espère que vous...
M. CIACCIA: Je crois que dans les documents qui ont été
déposés, la Société d'énergie ne cache pas
le fait qu'il y a des procédures légales, ils donnent
l'historique, mais avec la bonne volonté de tout le monde, j'inclus la
bonne volonté de la Société d'énergie, la bonne
volonté d'Hydro-Québec et la bonne volonté du gouvernement
du Québec, ce litige va être réglé. Je n'ai aucun
doute sur cet aspect, mais quand je parle de juridiction, je me demande si,
dans l'aspect nucléaire il y a des autorités, par exemple,
l'autorité fédérale, l'Atomic Energy Commission il
n'y aurait pas une certaine juridiction sur les projets nucléaires qui
pourrait avoir un effet sur la direction de la province, sur la manière
d'agir, dans ce domaine, de la province, sur les contrôles, non seulement
aujourd'hui mais dans l'avenir, par l'autorité
fédérale.
Par exemple, dans le domaine pétrolier, l'autorité
fédérale, vis-à-vis de l'Alberta et pour le
bénéfice de tous les Canadiens, a exercé un certain
contrôle dans ce domaine. Je me demande si, dans la question de
juridiction, elle ne pourrait pas l'exercer, soit sur le projet, soit dans les
produits qui sont utilisés dans les projets nucléaires, s'il n'y
aurait pas une question de juridiction fédérale, qui n'existe pas
dans les projets hydrauliques, premièrement. Deuxièmement, on n'a
pas parlé jusqu'à maintenant de la protection de l'environnement,
des mesures de sécurité, je ne suis pas technicien mais dans les
revues qu'on lit sur ces sujets, il semble y avoir des mesures de
sécurité nécessaires pour la protection de
l'environnement, pour la protection du peuple et de ceux qui habitent dans les
environs de ces projets nucléaires.
Quand il s'agit de barrages, il n'y a pas de danger d'environnement une
fois que le barrage est construit. Je tiens compte ici que des modifications
ont été apportées par la Société
d'énergie pour répondre aux demandes des autochtones dans le
domaine de l'environnement et vous en avez référé aux
modifications au domaine de l'environnement dans vos rapports. Je suis
convaincu aussi que si d'autres modifications étaient nécessaires
pour accommoder les autochtones, ces modifications pourront aussi être
faites.
Mais une fois le comité d'environnement inclus dans la
proposition du premier ministre mis sur pied, je voudrais avoir des
informations sur les problèmes d'environnement que le projet
nucléaire pourrait apporter, par rapport aux problèmes
d'environnement d'un barrage et de projets hydrauliques.
Troisièmement, on parle de dépenser $12 milliards pour un
projet. On essaie de faire des chiffres pour des projets nucléaires.
Cela peut être plus, d'après les chiffres d'Hydro-Québec,
c'est plus dispendieux. Mais même pour les dépenses initiales,
peut-être que c'est moins, à la longue. Je crois que les documents
démontrent clairement que c'est moins cher et plus avantageux pour le
peuple québécois d'avoir des projets hydrauliques. Mais
même pour les dépenses initiales, si on dépense $12
milliards, quel est le contenu québécois dans ce $12 milliards?
Est-ce que c'est le même contenu québécois pour un projet
nucléaire?
Je crois que nous allons être d'accord. Même si,
initialement, cela coûtait un peu plus dans les dépenses de
capitaux, si ces dépenses sont faites dans la province de Québec
et qu'elles ont un contenu québécois, c'est plus avantageux pour
tous les citoyens du Québec.
J'aimerais, si c'est possible, soit qu'Hydro-Québec, soit que la
Société d'énergie nous donne quelques informations sur ces
trois articles: question de juridiction, question de protection de
l'environnement et question du contenu québécois dans les
dépenses qui vont être faites pour ce projet.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. Giroux.
M. GIROUX: M. le Président, je crois que, prenant les questions
une à une, il y a une question qui est de portée légale.
Je ne voudrais pas être accusé de donner une opinion
légale. Je ne suis pas avocat. Seulement, je crois et j'ai
déjà eu les confirmations à ce sujet, on peut les faire
confirmer par les membres de notre contentieux que, pour construire une
usine nucléaire n'importe où au pays, il faut obtenir une licence
fédérale. Nous avons une licence fédérale.
Le produit est si vous voulez, l'huile absolument, dans
l'uranium, sous le contrôle du gouvernement fédéral.
Seulement, dans Québec actuellement, je sais que certaines parties du
gouvernement font des efforts, dans la société de
développement, un peu partout, pour essayer de trouver de l'uranium
à la source. Dans la province de Québec, nous n'en avons pas.
Actuellement, nous dépendons entièrement du gouvernement
fédéral.
Même si on trouvait des réserves d'uranium, tant qu'il est
dans la terre, c'est provincial et, dès qu'on l'extrait, c'est du
domaine fédéral. Je ne sais pas si cela répond à
peu près entièrement à la question de contrôle
absolu au point de vue du gouvernement fédéral sur l'uranium
comme tel.
Les questions sont très claires. On a déjà
essayé de regarder la possibilité, par exemple, de se servir de
la filière américaine au moment où elle nous semblait plus
avantageuse. Il n'y a pas moyen de s'en servir, parce qu'on ne peut pas obtenir
les licences nécessaires. Je dis qu'il n'y avait pas moyen, je ne dis
pas que, dans deux ans ou trois ans, il n'y aura pas des moyens, mais
actuellement c'est absolument fédéral.
Je pense bien que ce sont des lois qui ont été
établies et reconnues depuis assez longtemps.
Vous me demandiez tantôt, au sujet de l'environnement et de la
retombée économique. Ce sont deux points un peu plus
séparés. Sur la retombée économique, avec les
chiffres exacts, dans le développement hydraulique de la baie James, qui
est le plus gros que nous avons, M. Boyd pourra donner des chiffres exacts
tantôt. On les a déjà donnés ici, dans le
passé.
M. LESSARD: On les a eus.
M. GIROUX: Sur le nucléaire, actuellement, nous n'avons pas
tellement de manufacturiers qui peuvent le produire. Graduellement, on essaie
d'intéresser des manufacturiers à faire du nucléaire.
Mais il y a une partie assez difficile. Sur l'autre partie, comment
opèrent ces choses au point de vue des permis et n'importe quoi, je
demanderais à M. de Guise, qui est membre de la Commission atomique, de
nous donner les réponses sur les possibilités et sur les
retombées.
M. MORIN: Avant l'environnement, M. le Président, est-ce qu'on
pourrait étudier un peu l'aspect constitutionnel, puisque le
député de Mont-Royal l'a soulevé?
M. CIACCIA: On va le laisser finir.
M. MORIN: C'est parce qu'il y a trois grosses questions que vous avez
soulevées. Elles sont toutes les trois intéressantes, mais on
pourrait peut-être les prendre seriatim.
Quand vous dites que l'uranium extrait tombe sous la compétence
fédérale, je ne pense pas qu'on puisse vous contredire,
étant donné que le pouvoir fédéral a occupé
ce domaine. C'est un domaine qui n'est décrit nulle part dans la
constitution, vous en conviendrez. C'est un domaine comme tant d'autres
où le pouvoir fédéral s'est installé comme premier
occupant.
M. GIROUX: Je constate les faits seulement.
M. MORIN: Oui, mais vous êtes d'accord que c'est bien comme cela
que cela s'est passé.
M. GIROUX: C'est contestable.
M. MORIN: Bien! Je prétends, en ce qui me concerne, et je pense
qu'il y en a beaucoup d'autres qui seront d'accord avec moi, que c'est une
compétence fédérale tout à fait contestable. On
peut très bien soutenir que la constitution ne donne aucune
espèce de priorité au pouvoir fédéral sur ce
domaine, pas plus que sur les autres richesses naturelles. On peut bâtir
une argumentation très solide sur le plan constitutionnel pour dire que
l'uranium extrait, tout comme les autres minéraux extraits du sol
québécois éventuellement, seraient de compétence
provinciale. Mais là n'est pas tellement la question.
La vraie question est celle-ci: Est-ce que le fait que ce soit, à
l'heure actuelle, de compétence fédérale, parce que le
pouvoir fédéral s'est arrogé cette compétence,
empêche HydroQuébec, pour le cas où elle ferait une option
nucléaire, de construire les centrales qu'elle entend constuire? C'est
cela, la vraie question.
M. CIACCIA: Si je pouvais seulement préciser un peu ma
question...
M. MORIN: Je le veux bien.
M. CIACCIA: Le but de ma question n'était pas de
déterminer du point de vue constitutionnel si le pouvoir
fédéral était contestable ou non.
Mais quand on discute et c'est pour cela que j'ai posé les
trois questions ensemble les projets nucléaires, je suis d'accord
avec vous que si le projet nucléaire n'avait pas de problème
d'environnement, je présume qu'on va en parler...
M. MORIN: Ce n'est pas comme si... La Grande a quelques petits
problèmes d'environnement aussi.
M. CIACCIA: S'il n'y avait aucun autre problème, supposons, dans
le nucléaire, ce n'est pas la possibilité que le
fédéral a occupé, ou que c'est contestable, qui va
empêcher ou qui devrait empêcher une province, que cela soit le
Québec ou une autre province, de développer le nucléaire.
Ma seule question...
M. LESSARD: Vous en aviez trois...
M. CIACCIA: ... était d'essayer de relever les autres
données qui doivent être prises en considération dans la
détermination de choisir un projet ou un autre. Je crois que
s'arrêter seulement à l'économique, c'est important, mais
les autres questions doivent être aussi soulevées. S'il y a un
problème dans les autres domaines, je crois que nous devons être
au courant de ces questions. Je ne vous dis pas qu'il n'y aura pas de
solutions. Je ne dis pas que le fédéral...
M. MORIN: D'accord.
M. CIACCIA: ... va nous empêcher...
M. MORIN: J'espère.
M. CIACCIA: ... de développer le nucléaire.
M. MORIN: Cela serait...
M. CIACCIA: Non. Ce n'est pas le but de la question. Le but est de voir
s'il y a des questions et si dans toutes les possibilités, il y en a
une, où il n'y a pas de problème du tout, où il y a moins
de problèmes; je crois qu'avec cette position, plus la compétence
d'Hydro-Québec, plus les gens qui nous ont expliqué, qui nous ont
donné tous les documents qu'ils ont déposés, cela serait
plus que raisonnable d'accepter la position qu'Hydro-Québec a prise
vis-à-vis du développement hydraulique plutôt que le
développement nucléaire.
M. MORIN: Je n'ai pas dit que les questions soulevées par le
député de Mont-Royal ne sont pas intéressantes. Elles sont
même passionnantes. Seulement, il ne faudrait pas...
M. CIACCIA: L'environnement...
M. MORIN: ... qu'il nous dise que tous les problèmes sont du
côté du nucléaire parce qu'il y a quelques petits
problèmes d'environnement posés par La Grande. Ce sont de petites
affaires de rien du tout, mais il faut en tenir compte.
M. CIACCIA: Oui. Mais j'ai dit que je suis persuadé que la
Société d'énergie de la baie James a
démontré qu'elle était prête à faire des
modifications pour la protection de l'environnement. Elle en a fait
déjà. Elle a souligné que si d'autres problèmes
d'environnement survenaient dans l'avenir, elle serait aussi prête
à faire ces modifications. Elle a même accepté de former un
comité d'environnement justement pour regarder ces questions et inviter
même les autochtones à participer à ce comité
d'environnement dans ces endroits.
Mais avant de parler des questions d'environnement, j'aimerais si on
pouvait... On n'a pas encore répondu s'il y avait des problèmes
d'environnement pour le nucléaire.
M. MORIN: Si vous voulez, on va vider d'abord la question
constitutionnelle. Ensuite, on passera à l'environnement, et ensuite
à votre troisième problème du contenu
québécois. Ce sont trois problèmes très importants.
Je pense qu'il faut aller au fond.
M. CIACCIA: Non, M. le Président, j'ai demandé, si vous me
permettez, trois questions. J'aimerais avoir une réponse à ces
trois questions. Maintenant, après que les réponses auront
été données parce que je voudrais avoir des
réponses à ces questions si vous voulez faire des
commentaires, alors ce sera votre...
M. MORIN: J'ai posé une question à HydroQuébec tout
à l'heure. Je pense que cela vous intéresse aussi. Est-ce que les
difficultés constitutionnelles, auxquelles vous avez fait allusion,
empêchent Hydro-Québec de procéder avec ses plans
nucléaires, si elle en a?
M. CIACCIA: Non. Avant de vider cette question, j'aimerais avoir la
réponse sur la protection de l'environnement et le contenu
québécois, après cela. Ecoutez, on ne peut pas analyser
ces questions séparément, dire qu'il n'y a pas de problème
de juridiction ou il y en a, je pense qu'il faut prendre une approche
globale.
M. MORIN: On va le faire.
M. CIACCIA: Alors, si on peut avoir la réponse à mes trois
questions, si le président le permet et, après cela, vous pourrez
faire vos commentaires.
M. GIROUX: M. le Président, je crois que quant à la
première question, de mémoire, j'ai cité ce
qu'était la loi du contrôle fédéral. Je pense que
personne ne nie ce domaine. Deuxièmement, à Hydro-Québec,
d'aucune façon, nous sommes empêchés d'opérer par le
fait qu'il y a des lois fédérales. Cela nous dérange un
peu de payer l'impôt, mais à part cela, il n'y a pas de
problème.
M. MORIN: S'il y avait des difficultés, ce serait un bon argument
pour l'indépendance du Québec, en tout cas, un excellent
argument. S'il y en avait.
M. GIROUX: S'il y en avait, je n'en connais pas.
UNE VOIX: On détourne la question.
M. GIROUX: Ce problème est un problème...
M. CIACCIA: L'environnement aussi pourrait être résolu par
l'indépendance.
M. LESSARD: Le premier est sauté, on revient à
l'environnement et, après cela...
UNE VOIX: Laissez donc répondre HydroQuébec.
M. GARNEAU: A moins qu'on ne puisse pas...
M. BACON: Soyez gentil.
M. GIROUX: Vous avez deux problèmes de posés. Il y en a un
sur La Grande, sur l'environnement et les retombées économiques.
L'autre, si je comprends bien, est sur l'environnement et les retombées
économiques en nucléaire. Alors, sur La Grande, les
problèmes de l'environnement...
M. BOYD: M. le Président, concernant l'environnement, c'est une
des premières choses dont on s'est soucié lorsqu'on a
organisé notre société. Dès le début, nous
avons formé un service de l'environnement...
M. CIACCIA: Excusez, je ne veux pas vous interrompre, M. Boyd, mais je
suis au courant des problèmes de La Grande.
Ma question n'était pas sur les problèmes d'environnement
causés par La Grande parce que vous avez apporté beaucoup de
modifications. Je voulais savoir s'il y avait des problèmes
d'environnement dans les projets nucléaires.
M. LESSARD: M. le Président, je suis bien d'accord sur la
question qui est posée, mais je pense que pour pouvoir comparer, il est
important de savoir s'il y a des problèmes au niveau de La Grande et
après cela on pourra parler, comme comparaison...
M. CIACCIA: Excusez, ma question... Un instant. Si vous avez un
problème... Si vous avez une question sur l'environnement, vous pouvez
la poser. Moi, je n'ai pas de question pour le moment sur la question...
M. LESSARD: Parce que vous vous savez...
M. CIACCIA: Je suis au courant de ce que la société peut
faire.
M. MORIN: Pauvres ignorants que nous sommes. Cela nous
intéressait, l'exposé que M. Boyd...
M. CIACCIA: Vous pourrez le demander après. S'il vous
plaît, je voudrais avoir la réponse sur les problèmes
d'environnement du projet nucléaire, s'il y en a.
M. DE GUISE: M. le Président, j'essaierai de résumer assez
brièvement. Lorsqu'on construit ou qu'on veut faire fonctionner une
centrale nucléaire, nous sommes assujettis à des normes
fixées par 1'Atomic Energy Control Board, le Bureau de contrôle de
l'énergie atomique. Je tiens à mentionner immédiatement
que c'est une organisation différente de l'Energie atomique du Canada.
Cet organisme est surtout en place pour la protection du public en
général, il émet des normes quant au degré de
radioactivité permise dans l'émission par les cheminées,
par l'air.
M. MORIN: Combien de rem par an, M. De Guise? Cinq?
M. DE GUISE: Cinq, je crois. Il y a aussi dans l'eau qui est
rejetée à la rivière certaines normes à
respecter.
M. MORIN: Deux, deux et demi.
M. DE GUISE: Oui. Le personnel qui est susceptible d'être en
contact avec la radioactivité doit porter un indicateur qui enregistre
automatiquement le degré d'exposition subi pour les personnes qui sont
dans les salles de rayon-X ou autrement. Il y a des examens périodiques
du sang et du système des personnes qui sont susceptibles de venir en
contact avec la radioactivité. Il y a toute une série de normes
qui ne sont pas tellement difficiles à respecter, mais qu'il faut tout
de même respecter et je pense qu'il n'y a pas...
M. MORIN: Ce sont des normes internationales, n'est-ce pas?
M. DE GUISE: C'est cela. Il n'y a pas de problème avec
l'exploitant parce que c'est dans l'intérêt de l'exploitant autant
que dans l'intérêt du public. Par exemple, aussi, on va surveiller
à quel endroit on veut implanter une centrale au point de vue sismique.
Si on avait dans la province des zones sismiques extrêmement dangereuses,
on pourrait nous les interdire, à cause du danger d'un tremblement de
terre, de la destruction d'un réacteur. Comme vous en êtes bien
conscients, au tout début, lorsqu'un projet est en vue, il nous faut
obtenir l'approbation du bureau de contrôle à différents
stages. Au début, par exemple, pour le site, après cela, au
moment de la construction, il faut faire un rapport très
détaillé sur la sécurité du réacteur, parce
que, malgré qu'on soit toujours dans le système Candu, il y a
toutes sortes d'améliorations ou de modifications apportées d'une
usine à l'autre. Alors, le bureau de contrôle surveille ces choses
de façon très serrée. A un moment donné aussi, il y
a les problèmes des déchets radioactifs qui se posent. Ils ne se
posent pas à une grande échelle actuellement parce que, comme
nous en sommes au début des centrales, le radium ou les tubes qui ont
été exposés à la radioactivité,
dès
qu'ils ne servent plus, sont déposés dans une piscine et
les piscines prévues doivent être construites pour emmagasiner
quelque chose comme 20 ans de production. Alors, c'est seulement quand ces
matériaux sortent de la piscine qu'il y aura le problème de
savoir comment les rendre absolument inoffensifs. Je crois que si l'on pense
à la juridiction fédérale, pour autant que les centrales
nucléaires sont concernées, c'est une série de
règlements destinés à protéger les employés
et le public d'une manière générale.
Les normes ne sont pas tellement difficiles à respecter, il faut
évidemment y faire attention.
M. MORIN: D'ailleurs, en dehors du cas des opérateurs de la
centrale, ce sont des normes population.
M. DE GUISE: Population.
M. MORIN: Ce sont des normes, c'est cinq rems par an pour l'ensemble de
la population, ce n'est donc pas très difficile à respecter.
M. DE GUISE: Oui.
M. MORIN: Est-ce que Gentilly a posé des problèmes de ce
côté?
M. DE GUISE: Nous n'avons pas eu de problème. Remarquez que nous
n'avons été en exploitation qu'un très court laps de temps
à Gentilly, parce qu'à un moment donné il a fallu
transporter de l'eau lourde. Mais j'aimerais vous mentionner, comme exemple,
que la fabrication d'eau lourde tombe sous le contrôle du même
bureau. Là, les exigences sont beaucoup plus sévères, du
moins entraînent beaucoup plus de dépenses et de restrictions. On
va spécifier, par exemple, quand une usine d'eau lourde est construite,
qu'on ne peut pas avoir d'habitation dans un rayon d'un mille ou d'un mille et
demi, que la population doit être peu dense dans un autre rayon, il faut
des dispositifs d'alarme, etc., en cas de fuite d'eau lourde et, en fin de
compte, il s'agit d'un produit qui n'est pas radioactif, le gaz sulfurique est
un produit chimique, mais qui est assez dangereux pour la santé de la
population.
M. CIACCIA: II y a des mesures de sécurité qui existent
dans les projets nucléaires qui n'existent pas et qui ne se
présentent pas dans les projets hydrauliques.
M. DE GUISE: C'est différent.
M. GARNEAU: M. le Président, concernant cette même
question.
M. CIACCIA: C'est important à savoir.
M. GARNEAU: Les mesures de contrôle qu'on dit de surveillance qui
ont un caractère international, j'imagine qu'elles sont sensiblement les
mêmes qui s'appliquent aux Etats-Unis dans les projets d'usine
nucléaire, même si la filière est différente?
M. DE GUISE: Oui. Je pense que le degré de radioactivité,
ces choses-là...
M. GARNEAU: Et le danger de pollution est sensiblement le même ou
les façons qu'on prend pour le contrôler sont sensiblement les
mêmes?
M. DE GUISE: Oui, sauf que, dans les filières américaines,
c'est de l'uranium enrichi qui a des propriétés...
M. MORIN: Mais le système Candu, de ce point de vue, offre de
très gros avantages.
Il est beaucoup moins dangereux. Est-ce que vous êtes au courant
de l'expérience de Pickering?
M. GARNEAU: Avant de continuer le chef de l'Opposition pourra
poursuivre tout à l'heure ce qui m'a toujours frappé,
c'est de voir les groupes de citoyens aux Etats-Unis qui s'organisaient: ils
étaient à ce point engagés que des groupes de citoyens
payaient, dans des grands quotidiens américains j'en ai vu
moi-même dans les journaux américains des annonces pour
inviter la population à manifester contre l'établissement de
centrales nucléaires. Est-ce qu'en dehors de ce qu'on pourrait appeler
des idéalistes de l'environnement, il y avait des motifs quelconques ou
si c'était seulement une crainte qui s'est propagée comme
ça?
M. DE GUISE: On doit dire que, depuis un certain nombre d'années,
les Américains avaient extrêmement de difficulté à
trouver un site pour une centrale thermique ordinaire, à cause de
l'émission de gaz sulfureux ou du charbon. Evidemment, lorsqu'on entre
avec une centrale nucléaire, il reste un mythe dans la population, il
reste quelque chose, on ne peut pas s'empêcher de penser à la
bombe atomique, il y a eu toutes sortes de...
M. GARNEAU: Elle vient d'éclater la bombe atomique.
M. ROY: C'est l'eau lourde qui coule.
M. DE GUISE: Malgré que les techniciens nous assurent que les
précautions prises nous protègent absolument contre cela. Il y a
eu des cas soulevés dernièrement par le groupe Nader, je pense,
où on remettait en cause la possibilité de refroidir suffisamment
le noyau d'un réacteur en cas d'un défaut majeur "emergency corps
cooling". Et évidemment, si on remettait cette affaire-là en
doute, il aurait pu arriver,
dans les circonstances, si leur hypothèse s'était
réalisée, que le noyau fonde, que l'enceinte coule et qu'il y ait
émission de radioactivité. Ce sont toutes ces
choses-là...
M. GARNEAU: Le danger est le même dans les deux filières,
Candu et filière américaine?
M. DE GUISE: II est un peu moindre parce que les températures et
les pressions sont moins hautes dans le Candu, mais s'il y avait perte de
refroidissement complète alors qu'un réacteur est en marche, il y
aurait certainement des précautions à prendre. Mais ce sont
toutes ces choses-là qui sont plus ou moins bien comprises et qui, d'une
manière générale, ont un effet marqué sur la
population. On a peur de ce qu'on ne comprend pas; c'est normal.
M. MORIN: C'est pour cela que le premier ministre, très souvent,
fait allusion à ce danger.
M. GARNEAU: Evidemment, vous êtes plus affecté par les
retombées radioactives.
M. MALOUIN: II est immunisé.
M. DE GUISE: Quant au second point qui a été
soulevé, celui des contenus québécois, il faut bien
admettre que le contenu québécois, dans une centrale
nucléaire, est inférieur à ce qu'il est dans une centrale
hydroélectrique. Si vous regardez la composition d'un projet
hydroélectrique, c'est un déplacement de matériaux
considérables, des structures de béton ou d'enrochement, beaucoup
d'équipement mécanique, une main-d'oeuvre en majorité pas
tellement spécialisée, et, lorsqu'on retombe dans le
nucléaire, on a des groupes turboalternateurs qui ne sont pas faits
complètement au Québec, alors qu'ils le sont presque
complètement dans les groupes hydroélectriques, nous utilisons
des aciers spéciaux qui ne sont pas toujours disponibles ici, la
main-d'oeuvre doit être hautement spécialisée, les
contrôles, les ordinateurs, viennent de l'extérieur de la
province. Un fait aussi qui n'est pas négligeable depuis quelque temps,
à cause du programme intense de l'Hydro de l'Ontario, cette
dernière a pratiquement accaparé à elle seule la
production manufacturière; donc des installations
québécoises travaillent à pleine capacité dans le
domaine des calandres pour des installations prévues en Ontario.
Alors si nous arrivions par dessus avec un programme intense au
Québec, il y aurait peut-être un problème de
capacité manufacturière, même dans les domaines
conventionnels au Québec, parce qu'ils sont déjà
engagés dans le programme ontarien.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je pense que M. Boyd voudrait rajouter
quelque chose.
M. BOYD: J'aimerais donner des pourcentages. Je vous ai dit dans ma
présentation, hier, que pour la baie James, on était rendu
à 82 p.c. de contenu québécois dans nos achats, nos
services et l'étude économique que nous avons déjà
complétée à Hydro-Québec indique que pour le
nucléaire canadien, le contenu québécois est d'environ 61
p.c.
M. LESSARD: M. Boyd ou M. De Guise, est-ce que vous pourriez nous
indiquer, lorsqu'il y a eu création d'Hydro-Québec, lorsque
Hydro-Québec a construit et je pense que M. Giroux pourra me
répondre à ce sujet-là le premier pouvoir
hydroélectrique par elle-même, soit, je pense à
Labrieville, parce que des contrats étaient donnés autrefois,
est-ce que vous pourriez nous indiquer, à Labrieville ou ailleurs, quel
était le contenu québécois du matériel qui
était acheté ici?
M. GIROUX: Si vous vous adressez à moi, malheureusement, je
n'étais pas à Hydro, à ce moment, même à
Labrieville, je ne sais pas si j'étais au monde. Demandez à M.
Boyd.
M. LESSARD: M. Giroux...
M. GIROUX: Je pense que M. Boyd a cela, monsieur.
M. LESSARD: M. le Président, je suis assuré que M. Giroux
était au monde, parce que, moi, j'étais au monde, à ce
moment et j'ai travaillé à Labrieville. Je voudrais savoir
justement je pense que la question est sérieuse M. Boyd,
quel était le contenu québécois, à ce moment, au
début d'Hydro-Québec?
M. BOYD: Je crois que le contenu québécois était
très élevé, même à ce moment, parce que les
matériaux tels que...
M. BACON: Ah oui!
M. LESSARD: Les turbines étaient construites où?
M. BOYD: A Lachine par Dominion Engineering. Donc, le contenu
québécois était très élevé. On a
réussi à l'augmenter avec le temps, mais je dois vous dire qu'au
début, même si M. Giroux tente d'indiquer que je suis plus vieux
que lui, ce n'est pas exact, mais j'étais à Hydro avant qu'il y
soit et M. De Guise était là aussi en même temps que moi,
les contenus hydrauliques ont toujours été assez
élevés au Québec, parce que cela fait très
longtemps qu'on construit des centrales hydrauliques au Québec. Vous
avez la centrale des Cèdres.
M. BACON: Les centrales du Saint-Maurice.
M. BOYD: ... qui ont été construites même avant
cela. En 1914, vous avez eu toutes les centrales du Saint-Maurice, ensuite,
vous avez
eu Beauharnois, en 1928. Donc, cela fait très longtemps. J'ai une
note ici pour me rappeler qu'à Bersimis, c'est une partie des turbines
génératrices qui ont été construites par Vickers et
d'autres par Dominion Engineering. Donc, cela fait longtemps qu'on en fait.
M. LESSARD: Vous dites que le contenu québécois
était très élevé. Cela ne m'indique pas grand
chose, parce que vous venez de me dire que pour les produits nucléaires,
le contenu québécois est à 61 p.c. par rapport au contenu
québécois à 82 p.c. pour l'hydraulique. A ce que je sache,
en tout cas, je ne suis pas tellement vieux et j'ai eu la connaissance de la
construction de Labrieville, l'un des facteurs positifs d 'Hydro- Québec
a été de permettre, par exemple, la construction de certaines
entreprises au Québec, de certains produits qu'on achetait à
l'extérieur. Je pense, par exemple, à Clermont pour les
fils...
Vous ne m'avez pas donné tellement d'indications. J'ai
l'impression que vous êtes très réservé sur cela,
parce qu'on parle de 61 p.c. au point de vue du nucléaire et 82 p.c.
pour l'hydraulique.
A courte période, parce qu'il faut toujours envisager l'avenir,
à court terme, parce que le Parti québécois, en tout cas,
nous de l'Opposition, n'avons jamais envisagé une possibilité
unique. Nous envisageons différentes alternatives. Ce que je vous
demande, M. Boyd, si justement Hydro-Québec s'engage partiellement vers
le nucléaire, est-il possible de faire augmenter ce contenu
québécois, qui serait actuellement de 61 p.c. à courte
période, à 70 p.c. ou à 75 p.c. sur une période de
dix ans, par exemple.
M. BOYD: En fait, on est entièrement d'accord avec vous. Quand on
dit actuellement que c'est 82 p.c. contre 61 p.c, ce sont les faits qui seront
les faits pour un certain temps. On n'est pas contre le nucléaire, on a
bâti Gentilly 1, on bâti Gentilly 2 et on va probablement
bâtir, pas nous, mais on va aider à la construction d'une usine
d'eau lourde. Donc, on n'est pas contre le nucléaire. Il y aura Gentilly
3, probablement, un de ces jours. Donc, on n'est pas contre cela et vous pouvez
être assurés qu'Hydro-Québec va, comme on a fait dans le
passé, inciter les entreprises à s'installer au Québec
pour faire du nucléaire ou les choses qui entrent dans le
nucléaire. Avec le temps, les 61 p.c. deviendront 70 p.c. et 75 p.c.
comme vous le dites, mais ce n'est pas cela dans le moment.
M. LESSARD: Dans le moment, ce n'est pas cela. Mais au moment aussi
où on a commencé Hydro-Québec, on devait aller à
l'extérieur. On devait même aller chercher des entrepreneurs
à l'extérieur. Par exemple, combien de firmes-conseils si
on me répond non, je vais commencer à m'interroger ont
été créées du fait qu'Hydro-Québec a pris
certaines décisions en particulier à la suite de la
nationalisation de l'électricité?
On soulève aussi un problème de main-d'oeuvre
spécialisée. Au début d'Hydro-Québec, je me
rappelle très bien qu'en 1962, lorsqu'on a nationalisé
l'électricité, il y avait beaucoup de personnes qui faisaient de
la politique à ce moment, et qui affirmaient, lorsqu'on voulait
nationaliser certaines compagnies: Les Québécois, nous n'avons
pas d'hommes spécialisés, pas d'hommes compétents, pas de
"know-how". M. le Président, qu'on relève ce qui se disait en
1962.
Est-ce que, dans ce domaine, à mesure qu'Hydro-Québec
s'engagera vers le nucléaire, il est possible de former ces personnes
spécialisées, ces techniciens? Est-ce que vous envisagez la
possibilité de les former dans un programme alternatif?
M. GIROUX: C'est que nous faisons actuellement. Nous avons maintenu des
techniciens à Gentilly 1 durant tout le temps où Gentilly 1 a
été fermé. On essaie d'en développer d'autres. On a
aidé l'Ecole polytechnique. M. De Guise pourrait donner les
détails de l'aide absolument nouvelle apportée pour
développer les techniciens à l'Ecole polytechnique de
Montréal qui nous en a fait la demande. Cela prend
énormément de temps. Vous me direz: On développe ces
techniciens à l'avance. Oui, parce qu'il faut qu'ils soient
développés peut-être cinq ans, dix ans à l'avance.
On travaille sur ce sujet.
Je pense que ce qui peut vous éclairer le plus sur la question
des achats...
M. LESSARD: II y a trois questions.
M. GIROUX: ...c'est qu'au point de vue des politiques d'achat d'Hydro,
ce qui est arrivé, lors de l'augmentation survenue en dehors des
centrales hydrauliques et des grands travaux qui étaient
déjà faits au Québec, s'est appliquée à
aller chercher tous les autres domaines qu'on pouvait faire fabriquer ici.
M. LESSARD: C'est ce que vous allez faire si vous vous engagez vers le
nucléaire.
M. GIROUX: Si on peut s'engager dans le nucléaire, ce qu'on fait
actuellement, c'est qu'on essaie d'avoir certains de ces fabricants pour voir
quelles sont les possibilités. Mais, actuellement, il n'y en a pas
beaucoup. Même l'Ontario, pour faire son programme, va devoir en faire
faire une partie de son équipement en Angleterre, tel qu'elle l'a
déclaré, et au Japon et aux Etats-Unis. Mais c'est une technique
totalement différente. L'achat chez nous restera le principe de l'achat
québécois, notre principe d'Hydro.
Si vous me demandez aujourd'hui les chiffres ce sont les chiffres tels
qu'ils sont aujourd'hui.
M. LESSARD: C'est 62 p.c.
M. GIROUX: Cela inclut toutes les firmes, tous les génies, tout
ce qui est fait, tout ce qui est payé à des
Québécois.
M. LESSARD: Mais est-ce que vous admettez qu'il est quand même
important, étant donné qu'on commence à épuiser nos
ressources hydrauliques, de se diriger vers ce secteur non seulement parce
qu'on commence à épuiser nos ressources hydrauliques, ou parce
que le coût commence à augmenter peut-être assez fortement,
qu'il est important aussi comme secteur de pointe, de développer le
nucléaire.
M. GIROUX: On développe des techniciens. On développe
justement une centrale de 600 MW pour ce principe.
M. LESSARD: Alors, M. le Président...
M. GIROUX: Vous me posez la question, au point de vue des
retombées économiques dans le Québec, ce n'est pas
là, mais cela peut le devenir.
M. LESSARD: C'est cela. C'est qu'à court terme peut-être
que c'est moins important actuellement par rapport à l'hydraulique.
Cependant, si on s'en va exclusivement vers l'hydraulique, on peut être
dépassé par les autres il faudra alors emprunter ailleurs nos
techniques. Il faudra acheter ailleurs notre matériel. Il est aussi
important, je pense, comme l'a fait Hydro-Québec il y a quelques
années, de développer ce secteur, d'essayer, dans ce secteur, de
pouvoir, autant que possible, de fournir notre matériel.
M. GIROUX: Vous savez que j'ai peut-être des vues
différentes d'autres personnes à ce sujet là. Pour
développer des techniciens, j'en suis, il se fait un effort très
grand dans ce domaine. On a plusieurs choses qui ont été
données dernièrement, des cours qui vont être
dirigés vers nos gens du génie, même qui vont être
donnés M. Monty, vous m'avez dit à Manic 3, on va
développer des cours pour sensibiliser les gens vers le nucléaire
et c'est ce qu'on fait depuis toujours.
M. LESSARD: C'est cela.
M. GIROUX: Seulement, au point de vue de développer l'industrie
du nucléaire, c'est beaucoup plus difficile parce que notre fabricant
ici, actuellement, ne peut être qu'un sous-agent de fabrication de
l'Ontario. Et sans vouloir faire de politique, ce n'est pas tellement
populaire. J'ai rarement vu des gars de l'Ontario nous encourager par-dessus la
tête.
M. LESSARD: D'accord. Actuellement, dans les circonstances... Vous me
répondez: Actuellement.
M. GIROUX: Actuellement, oui.
M. LESSARD: C'est comme lorsqu'on a commencé justement. Le fil
qu'on utilisait pour les lignes de transmission, on allait le chercher à
un certain moment à l'extérieur. Il y a eu une entreprise
Clermont qui s'est installée, à Clermont, qui fournit
actuellement du fil à Hydro-Québec. Ce que je vous dis, c'est
ceci. Actuellement, il est vrai que cela serait le cas. Il reste quand
même que ce sont 61 p.c, selon M. Buz... M. Boyd, par rapport à 82
p.c... Ça ne me crée pas de complexe.
Ce que je vous dis, actuellement, je vous réponds: Oui. A courte
période, je vous réponds: Oui, mais selon la politique
d'Hydro-Québec qui a quand même depuis quelques années
réussi à créer et je vous prends à
témoin un certain nombre d'industries québécoises,
il est aussi possible, si on se dirige vers le nucléaire, d'être
capable justement de devenir un peu plus autonome comme on l'est devenu dans
l'hydraulique.
M. GIROUX: Eventuellement, oui. Je vous dis que la mise en marche est
énormément plus difficile, plus onéreuse...
M. LESSARD: Comme cela a été le cas au début pour
l'hydraulique.
M. GIROUX: Non. Plus parce que c'est plus technique. C'est une technique
plus nouvelle. Il y a moins de participation directe... Il y a plus de
spécialistes. Seulement, au point de vue de tenter de développer,
d'aider des industries dans le Québec, conjointement avec le
ministère de l'Industrie et du Commerce, au point de vue
d'Hydro-Québec, il n'y a rien que nous ne pouvons pas réussir
dans un temps donné, mais je vous dis que c'est plus difficile. Il
faudra être plus patient pour rendre l'industrie nucléaire
à ce domaine. Vous dites: On s'en va vers le nucléaire. On s'en
va lentement vers le nucléaire et pas rapidement, pour bien des raisons
parce qu'il nous reste encore beaucoup de rivières à
développer. Mais il faut être prêt dans quinze ans ou dans
vingt ans.
M. LESSARD: C'est cela.
M. GIROUX: Et le seul moyen qu'on aurait d'aller plus rapidement dans le
nucléaire, c'est que si d'ici quatre ou cinq ans, il se faisait une
découverte ou il se faisait un déclenchement technique tel que le
nucléaire deviendrait plus facilement rentable, à ce moment, on
est assez organisé de façon à pouvoir s'en servir; mais
tant que cette percée ne sera pas faite, je ne vois pas pourquoi on ne
servirait d'une chose dont on ne connaît pas les données et
l'expérience pour un domaine où nos gens ont la meilleure
expérience au monde.
M. LESSARD: Je suis d'accord.
M. GIROUX: C'est la raison fondamentale pour laquelle, au point de vue
travail, on fonctionne avec l'hydraulique.
M. LESSARD: Cela ne sera pas toujours... M. GIROUX: Non. Alors, il faut
dépenser...
M. LESSARD: ... le cas. Actuellement, c'est l'hydraulique. Cependant, je
pense qu'Hydro-Québec qui a la responsabilité de produire de
l'énergie électrique, a la responsabilité aussi de ne pas
se faire dépasser par d'autres. Au point de vue hydraulique, vous
êtes devenus des experts. J'ai pu voir, dans ma région, un peu, ce
qu'Hydro-Québec c'est notre fierté a pu faire. Il
ne faudrait cependant pas s'asseoir sur nos lauriers. Le nucléaire peut
devenir un facteur de développement économique très
important. Et c'est justement sur cela. On arrive à un argument. On en a
eu deux tantôt. On dit: Oui, mais quel est le contenu
québécois? On dit: Le contenu québécois est
à 82 p.c. actuellement pour l'hydraulique et à 61 p.c. pour le
nucléaire. Est-ce qu'il ne devient pas nécessaire de faire en
sorte, justement, que d'ici quelques années, on puisse augmenter ce
contenu québécois en ce qui concerne le nucléaire?
M. GIROUX: On travaille à ce domaine. M. LESSARD: Vous travaillez
à ce domaine.
M. GIROUX: On travaille, comme je vous le disais, surtout au
développement des techniciens, c'est la base même. Plus on aura de
techniciens qualifiés en nucléaire à HydroQuébec,
plus l'industrie pourra venir les chercher chez nous, ce qu'elle fait
habituellement, et s'aider à se développer. A ce point de vue,
Hydro-Québec doit devenir une pépinière.
M. LESSARD: Si je résume maintenant, de difficulté
constitutionnelle, il n'y en a à peu près pas. L'environnement,
il n'y a pas de problème. Contenu québécois, cela peut
devenir... M. le Président...
M. CIACCIA: ... faites attention, ce n'est pas là la
réponse qu'on vous a donnée.
M. LESSARD: Contenu québécois, non. Ecoutez, il y a des
mesures internationales, il y a d'autres problèmes aussi... On va parler
des...
M. CIACCIA: Oui, mais on n'a pas besoin de prendre les mesures
internationales pour des barrages.
M. LESSARD: Contenu québécois, oui, il y a...
M. CIACCIA: Pas dans le même danger qu'il vient de souligner.
M. LESSARD: Allez voir la rivière au Saumon, par exemple,
à Bersimis. Allez voir à un moment donné ce qu'il s'est
produit. On en a des problèmes...
M. CIACCIA: Oui, mais il y a des moyens avec...
M. LESSARD: Le contenu québécois, il est possible à
un moment donné, et c'est normal, qu'on augmente le contenu
québécois dans le nucléaire. En termes de baseball, je dis
un, deux, trois, "strike out".
M. GARNEAU: Vous êtes retiré.
M. MORIN: M. le Président, j'ai été heureux
d'entendre...
M. CIACCIA: We win the base any way, so what can you do?
M. MORIN: ... le président d'Hydro-Québec nous dire qu'il
s'intéressait au nucléaire et qu'il tentait de former des
techniciens. Mais j'ai cru entendre certains de mes collègues
universitaires dire des choses moins obligeantes à l'égard du
rythme de développement de l'industrie nucléaire au
Québec. Ils forment des techniciens, mais il n'y a pas beaucoup de
débouchés. Je vous soumets bien respectueusement que si vous ne
créez pas plus de développement que cela dans le domaine
nucléaire, si, comme nous l'apprennent vos chiffres préliminaires
le feuillet que vous nous avez remis hier soir vous entendez
attendre à 1990 pour installer d'un coup douze centrales de 750 MW, qui
d'ailleurs probablement, à ce moment, seront remplacées par des
centrales de 1,000, 1,200 ou 1,500 MW, ce dont on parle pour cette
époque, je pense que le Québec sera complètement
dépassé par ses voisins. A ce moment, il y aura certainement
plusieurs dizaines de centrales en Ontario. Il y en aura 400 en Europe à
la fin du siècle, pour l'an 2,000. Le Québec sera le parent
pauvre. Il devra importer sa technologie, il devra importer oui, c'est
cela la conséquence, il devra importer à peu près tout. Il
devra même importer peut-être des spécialistes, et, comme
par hasard peut-être qu'ils ne parleront pas français.
M. GIROUX: M. Morin, je dois vous dire une chose.
M. MORIN: Oui.
M. GIROUX: Si vous avez des confrères professeurs qui ont des
techniciens en nucléaire, qu'ils m'avisent donc. J'ai des demandes tous
les jours.
M. MORIN: Je vais communiquer cela à mon collègue.
M. GIROUX: Communiquez cela à votre collègue.
M. MORIN: Deuxièmement, je vais vous dire une chose, c'est que
son département ne peut
pas prendre d'expansion, parce qu'on dit: Où sont les
débouchés?
M. GIROUX: Ecoutez, je ne veux pas entrer dans un défaut de
planification universitaire. Ce n'est pas le cas à
Hydro-Québec.
M. MORIN: Ou gouvernemental.
M. GIROUX: A Hydro-Québec, naturellement nous avons besoin de
techniciens. Actuellement, nous avons des débouchés pour des
techniciens. Nous avons des gens desquels on ne se plaint pas, qu'on a dû
importer nous-mêmes de France et de Belgique. Ces gens sont grandement
intéressés à retourner chez eux. On devait les avoir ici
pour un an, deux ans. Actuellement, je crois que M. De Guise pourra donner les
détails, c'est lui qui nous a demandé cette chose, pour essayer
d'intéresser des gens ou de développer des gens, vous avez
donné de l'aide à Polytechnique dernièrement. Vous en
parlerez à M. De Guise. Naturellement, je comprends que les techniciens
ordinairement sont développés à Polytechnique.
M. MORIN: Si j'ai bien compris, selon vos plans actuels, il n'y aura pas
de centrale de façon sérieuse installée au Québec
avant 1990. C'est bien cela, votre projection? Ce sont vos chiffres d'hier.
Est-ce que vous pouvez...
M. GIROUX: C'est marqué de 1986 à 1990.
M. MORIN: De 1986 à 1990, c'est la puissance installée et
1990-1991, c'est l'énergie produite, c'est-à-dire qu'ils
entrent...
M. GIROUX: Ils entrent en production. M. MORIN: Ils entrent en
production. M. GIROUX: En production.
M. MORIN: En 1990. Vous ne commencez pas avant 1986?
M. GIROUX: C'est une étude économique, ce n'est pas un
programme approuvé.
M. MORIN: Alors, c'est une jolie nuance. Alors, dites-nous donc quelles
sont vos intentions?
M. GIROUX: Notre programme actuellement arrête en 1985, le
programme qui est approuvé.
M. MORIN: Oui.
M. GIROUX: Maintenant, c'est ce que je disais tantôt. Il nous
reste de 1974 à 1979 pour voir l'amélioration qui va être
faite dans le coût du nucléaire.
A ce moment-là, c'est toujours une question, dans l'analyse que
l'on fait, purement d'économique. Contrairement à ce que les gens
croient, nous ne sommes pas contre l'installation d'une usine nucléaire.
On a prouvé totalement le contraire.
M. LESSARD: Nous autres non plus.
M. GIROUX: Vous laissez croire que nous sommes contre. Nous ne sommes
pas contre l'installation nucléaire. La seule chose qu'il y a, on le
fait à titre d'expérience lente parce que l'on considère
qu'elle est plus dispendieuse que l'autre, dans l'intérêt des
Québécois. Mais la journée que je verrai, dans mon for
intérieur, que l'intérêt des Québécois est
dans un autre genre d'énergie, je serai le premier à le
défendre.
M. MORIN: Pour l'instant, ce n'est pas avant 1986.
M. GIROUX: Non. Peut-être qu'il peut arriver des circonstances,
comme M. Boyd disait tantôt, où on sera obligé de regarder
vers une autre possibilité. Si on peut trouver les
éléments, il y a les programmes financiers à prendre en
considération, on pourra peut-être avancer un LG 3, comme on y a
déjà pensé.
M. MORIN: Avez-vous une idée du nombre de centrales qui
existeront à ce moment-là en Ontario en 1986?
M. BACON: Qu'est-ce que cela va faire...
M. GIROUX: Ils ne peuvent pas avoir autre chose, ils n'ont pas d'autres
programmes.
M. MORIN: Vous connaissez la réponse, M. De Guise?
M. DE GUISE: Je pourrai le retrouver, mais c'est dans un programme qu'on
a distribué tout à l'heure. J'aimerais peut-être souligner
dans la discussion qu'il faut tout de même admettre qu'au Québec,
entre maintenant, si on inclut Gentilly 1 qui est terminé, et 1979, il
va se dépenser $1 milliard dans le nucléaire ou dans une affaire
connexe, qui est l'eau lourde. Si on fait Gentilly 2, à près de
$400 millions, et l'usine d'eau lourde, qui est autour de $400 millions, plus
Gentilly 1, cela va faire un investissement d'à peu près $1
milliard au Québec dans le domaine que j'appellerai nucléaire ou
paranu-cléaire. Je pense que nous sommes tous d'accord sur la
nécessité de former du personnel et nous réalisons tous
que, surtout pour le Québec, il y a un élément temps
important. Actuellement, Hydro-Ontario a un problème de personnel et est
dans une situation bien plus favorable que nous parce qu'il y avait là
du thermique, il y avait là des techniciens, des ingénieurs
entraînés au thermique convention-
nel. Lorsqu'on a décidé de se tourner vers le
nucléaire, on a eu accès au marché américain et au
marché anglais pour le personnel. Lorsque Hydro-Québec voudra se
lancer dans le nucléaire à fond, son accès
extérieur est assez limité à part d'aller en France vers
une technique qui est différente. Alors, il faut penser, et c'est ce qui
nous préoccupe, nous nous y essayons, de former du personnel pour en
avoir qui soit prêt. Nous avons donné des subventions à
Polytechnique, à l'Institut de génie nucléaire, pour
l'aider à former des spécialistes, nous déléguons
nos propres ingénieurs auprès d'AECL et auprès
d'universités américaines pour les préparer davantage dans
certains domaines, mais il faut admettre que même pour Gentilly 2 nous
avons un problème de recrutement, c'est notre prochaine centrale et le
recrutement n'est pas terminé. Alors, il faut y penser
sérieusement et cela nous préoccupe.
M. GARNEAU: D'une façon générale, M. De Guise,
est-ce qu'on peut dire que les responsables du développement
électrique au Canada, aux Etats-Unis et dans les pays que vous
connaissez, ont opté pour le nucléaire avant que ne soient
épuisées leurs possibilités hydrauliques ou si le choix a
été fait pour le nucléaire en dehors de cela?
M. DE GUISE: Je crois que si on passe en revue les principaux pays, la
France par exemple, ils ont à peu près épuisé les
ressources hydrauliques importantes avant de se tourner... D'abord, ils se sont
tournés vers le thermique conventionnel et ensuite vers le
nucléaire. L'Angleterre n'a pas de problème de ce
côté, elle n'a jamais eu d'hydraulique important.
M. LESSARD: C'est comme les chevaux et l'automobile.
M. DE GUISE: Les Etats-Unis ont pas mal développé
l'hydraulique qu'il y avait dans l'ouest américain, dans le sud, dans la
section du TVA et ailleurs. Ils ont commencé eux aussi à faire
comme l'Ontario, ils se sont tournés vers le thermique classique et ils
sont passés au nucléaire. Je pense qu'on peut dire, d'une
manière générale, que les gens essaient autant que
possible d'épuiser ou d'utiliser les ressources hydrauliques à
moins que ce soit dans des sites extrêmement éloignés.
M. MALOUIN: M. De Guise, comment se fait la recherche? Est-ce
qu'Hydro-Québec fait des recherches intensives sur le nucléaire
ou si ce sont des organismes canadiens ou 1'Atomic Energy Board?
M. DE GUISE: Notre institut de recherche travaille dans des domaines
spécialisés. Ce n'est pas tellement... ça serait
plutôt dans des applications théoriques à ce moment-ci de
la fusion et surtout de la fusion.
Il faut bien dire qu'au Canada, actuellement, il n'y a que le personnel
de l'Energie atomique du Canada capable de dessiner et de concevoir, de
projeter un réacteur Candu. Hydro-Ontario a fait d'immenses
progrès et je pense que dans la prochaine génération de
centrales, ou dans cinq ou six ans, Hydro-Ontario sera presque
"self-sufficient" et pourra les réaliser toute seule.
M. MALOUIN: Est-ce que vous prévoyez que d'ici cinq ans ou dix
ans, on aura des rénovations très importantes ou des
améliorations très importantes au système
nucléaire, ou si ça va plus loin que ça?
M. DE GUISE: Remarquez que je ne suis pas dans les secrets de l'AECL,
mais il y a certaines directions vers lesquelles l'AECL s'intéresse
très particulièrement dans le but évident d'essayer de
faire des économies dans le coût d'investissement des centrales
nucléaires. Par exemple, un domaine qui est examiné actuellement,
c'est la possibilité d'utiliser l'uranium légèrement
enrichi pour réduire les noyaux, réduire les dimensions,
réduire la quantité d'eau lourde et, par le fait même,
abaisser le coût de construction des centrales Candu. C'est une
orientation possible. C'est ce qu'on examine actuellement.
M. MALOUIN: Est-ce que dans la course mondiale, on est en concurrence
avec les autres pays ou bien si on est en arrière?
M. DE GUISE: A ce sujet, il y a peut-être d'autres facteurs que la
technique.
M. MALOUIN: Est-ce qu'on a des moyens afin de pouvoir concurrencer?
M. DE GUISE: J'ai participé à des discussions. Par
exemple, la France, il n'y a pas tellement longtemps, a décidé
qu'elle changeait son programme nucléaire. Elle avait adopté le
même programme que les Anglais, les centrales refroidies au gaz avec le
noyau de graphite, etc. Elle a examiné la filière canadienne et
elle a paru extrêmement intéressée, pour un certain temps.
Mais je pense que le point final, ce qui a fait s'orienter la décision
vers la filière américaine, c'était la capacité de
produire. La France qui a un réseau six ou sept fois plus gros que le
nôtre, évidemment, a des besoins annuels d'énergie qui sont
cinq, six ou sept fois plus que ies nôtres. Les Français ont dit :
Qui est capable, même si on voulait placer des commandes au Canada, de
nous fournir annuellement, cinq millions, six millions ou sept millions de kW?
Leur décision de la filière américaine pourrait être
basée sur des études techniques, sur des
préférences techniques, mais même si les études
techniques avaient favorisé le procédé canadien, il
restait l'incapacité de produire. Dans l'industrie canadienne, les
puissances ou le nombre de réacteurs dont les Français auraient
besoin.
M. GAUVREAU: C'est pour répondre un peu à M. Lessard, qui
n'est plus là, mais à M. Morin aussi. Car il y a deux ans, on a
fait une intervention ici. Justement, M. Joron avait reproché à
Hydro-Québec d'être absente de l'industrie nucléaire. Je me
rappelle d'avoir un peu rassemblé tous les renseignements que je pouvais
avoir sous la main pour montrer qu'eu égard au programme que nous avions
à ce moment-là, qui était fort limité,
Hydro-Québec faisait un effort considérable, il y avait vraiment
un intérêt intense à l'égard du nucléaire
dans Hydro-Québec.
Aujourd'hui, je crois qu'à l'intérieur de l'entreprise, on
vous a donné quelques notes, M. Giroux a parlé d'aide à
l'université, formation d'ingénieurs en construction, etc., la
même préoccupation existe. Il y a une préoccupation
généralisée dans toute l'entreprise, institut de
recherche, exploitation, formation d'exploitants, formation de constructeurs,
formation d'ingénieurs, encouragement aux bureaux
québécois qui participent déjà grandement,
d'ailleurs, au programme que nous avons actuellement. Evidemment, si le
programme d'Hydro-Québec, dans la deuxième phase hydraulique ou
de la baie James, dans la période qui n'est pas encore planifiée,
devait avoir un contenu nucléaire beaucoup plus grand que celui de la
période actuelle, nous sommes prêts à décrire,
à formuler et à mettre sur pied une stratégie de
l'industrie nucléaire au Québec. Nous avons toutes les
connaissances qu'il faut pour ça. Nous savons qu'il va falloir commencer
bientôt, assez prochainement pour ça. Voilà comment je
voudrais un peu détruire l'impression que M. Lessard aurait
laissée dans l'assemblée, savoir que l'Hydro-Québec s'en
désintéresse.
Vous parlez de vos collègues, que M. Amyot n'a eu qu'à
écrire une petite lettre à M. De Guise pour recevoir cinq fois
plus que ce qu'il nous a demandé, et cela a pris une seconde pour le
décider, tellement nous étions convaincus. Nous sommes encore
prêts à collaborer, mais ce que je dis là, je ne voudrais
pas que ce soit pris comme... Il me semble que la démarche normale, pour
une entreprise comme la nôtre, c'est d'abord d'établir un
programme et, ensuite, de décider et de s'équiper. Je crois que
ce n'est pas parce qu'on dit: Dans 15 ans, il va falloir faire cela
qu'aujourd'hui, on va changer l'orientation. Il faut que le programme soit
d'abord décidé. D'ailleurs, on sait que ces programmes sont
décidés avec un horizon suffisant pour se préparer.
Nous sommes d'accord sur cette position-là. Quant aux
retombées, 61 et 82, je ne vois pas comment on pourrait, sous
prétexte d'augmenter de 61 à 70, choisir un programme qui soit
moins bon. On commence par choisir le programme sur lequel nous avons fait des
études et qui nous semble être le plus rentable, le plus
profitable pour le Québec. Le programme étant
décidé, ensuite, on essaie d'obtenir le plus fort pourcentage de
retombées pour le Québec.
Comme je vous le dis, l'effort qu'on a fait, en 1960, pour rapatrier les
commandes d'Hydro qui étaient en Ontario, un peu partout, dans le
génie... Dans les deux ou trois premières années, cela a
pris un peu de temps, parce qu'il faut soutenir les producteurs, les
protéger, parce qu'il y a des difficultés. Cela ne sera pas si
facile que cela.
La troisième remarque n'est peut-être pas tout à
fait de ma compétence, mais c'est un fait, c'est que l'expérience
que nous avons en hydraulique et la capacité de production qui existe au
Québec, en turbines, alternateurs, génie, etc., en l'encourageant
fortement, on encourage aussi ces institutions à devenir des producteurs
internationaux, à exporter du génie international et à
produire plus d'alternateurs et de turbines au Québec. Il y a aussi
cette dimension-là qu'il ne faut pas perdre de vue.
M. GIROUX: Je prends comme exemple, M. Morin, qu'on pourrait donner que,
depuis trois ou quatre ans, on a aidé énormément à
développer des compensateurs 5 rems, les gros compensateurs synchronies.
Et aujourd'hui, Marine est peut-être le meilleur fabricant au monde et le
seul qui fabrique des gros compensateurs 5 rems. Alors, dans les grands
développements, ils vont certainement en bénéficier sur
les marchés internationaux.
Mais il a fallu faire des sacrifices de développement. A ce point
de vue-là, soyez assurés que les sacrifices de
développement seront là dès que le besoin se fera
sentir.
M. MORIN: Je pense, M. le Président, que nos
préoccupations se rencontrent. Nous aimerions que ce qui s'est produit
dans le domaine de l'électricité se produise également
dans le domaine du nucléaire. Mais si on prend trop d'années de
retard, nous aurons de rudes concurrents à affronter en 1986 et
après.
M. GIROUX: Je peux assurer la commission que ce travail est
débuté; il est plus accentué vers le développement
de techniciens que l'industrie elle-même, actuellement.
M. MORIN: J'aurais une petite question à poser, puisque nous
parlons de Gentilly, notamment de l'installation de Gentilly. Est-ce que je
pourrais vous demander, messieurs, comment ces projets ont été
négociés avec le gouvernement fédéral? Gentilly 1,
2 et 3? Et quelle a été votre part dans la décision de
créer ces installations nouvelles? On a l'impression, pour ce qui est de
Gentilly 2, peut-être davantage de Gentilly 3, que ce n'est pas vous qui
décidez, mais que c'est le gouvernement fédéral.
Pour-riez-vous rectifier?
M. GIROUX: Je vais vous assurer et vous donner ma parole d'honneur que,
pour Gentilly 1, je suis entré à Hydro juste au moment de
négocier le contrat. Ayant été
guidés par les gens d'Hydro, nous avons négocié un
meilleur contrat, peut-être, que celui que le gouvernement
fédéral aurait aimé faire, parce que c'était
complété et que le contrat n'était pas fait.
Au point de vue de Gentilly 2, cela a été exclusivement
à notre demande, à notre approche. On a demandé, au tout
début, en 1971, de rencontrer M. Gray. Et avec M. De Guise, nous avons
élaboré un programme pour savoir ce que cela coûtait. Et
c'est à partir de ce moment-là que nous avons eu automatiquement
les autorisations nécessaires.
M. MORIN: C'est vous qui avez pris l'initiative?
M. GIROUX: Absolument. C'est la commission, dans le programme qui nous
venait de nos gens qui nous font des suggestions techniques. Ce n'est pas moi
qui prends l'initiative des programmes.
Nous avons rencontré ces gens et nous avons essayé
d'obtenir la meilleure transaction possible. Je dois dire que, même
aujourd'hui... Et je ne blâme absolument pas l'énergie atomique
des augmentations de coût et ces choses-là pour Gentilly 2.
On ne peut pas faire mieux, comme je vous le disais tantôt, avec
le nucléaire qu'on le fait avec l'autre et c'est vice versa. Les
coûts augmentent d'un côté comme ils augmentent de l'autre.
A ce moment...
M. MORIN: L'étalement dans le temps n'est peut-être pas le
même, l'étalement des investissements, mais c'est une autre
question.
M. GIROUX: Oui, c'est une autre question mais seulement, vous le savez
si on l'étale seulement que pour cinq ans, au point de vue
économique ce n'est pas une étude.
Seulement, au point de vue du gouvernement fédéral, je
dois dire que les ententes que nous avons sont satisfaisantes.
M. MORIN: A Gentilly 3, comment est-ce que cela s'est passé?
M. GIROUX: Gentilly 3, cela n'a pas débuté.
M. MORIN: Non, enfin c'est le projet, c'est un projet.
M. GIROUX: Gentilly 3, c'est simplement une réserve que nous
avons dans nos cartes, si vous voulez, au cas où on aurait un accident,
c'est-à-dire qu'on peut débuter. Il faudrait peut-être se
décider plus vite qu'on le voudrait, parce que ce serait peut-être
la seule unité que le gouvernement fédéral accordera pour
les trois, quatre ou cinq prochaines années.
J'aimerais que M. De Guise se prononce quant à ce domaine, mais
on a été avisé dernièrement, à cause de
l'eau lourde, à cause de tous ces problèmes, que Energie atomique
du Canada ne donnerait pas de garantie de livraison d'eau lourde. Il va nous
donner la permission de construire une usine nucléaire mais non pas
d'eau lourde.
M. MORIN: Est-ce que, dans le cas de Gentilly 3, c'est vous qui avez
pris l'initiative d'en faire la demande ou si cela vous est venu d'Atomic
Energy?
M. GIROUX: Non, c'est nous qui avons approché Atomic Energy
à savoir quelles seraient les possibilités si on décidait
d'en demander une.
M. MORIN: C'est ce que je voulais savoir.
M. GIROUX: Vous pouvez être assuré, n'étant pas
tellement maquignon, mais un peu sur les côtés, que si
c'était Atomic Energy qui était venue nous voir pour Gentilly 2,
la transaction aurait été meilleure. Je ne sais pas si cela
répond à votre question.
M. MORIN: Oui. M. le Président, mes collègues ont
peut-être des questions de l'autre côté?
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le ministre des Finances.
M. GARNEAU: La réponse que M. Giroux vient de donner
soulève un intérêt certain dans le cadre de l'optique de
ceux qui voudraient voir développer, à la place de la baie James,
un programme qui serait essentiellement nucléaire, parce qu'on ne peut
pas développer à moitié la baie James, si on y va, il faut
y aller autrement ce n'est pas économique... Ce que vous venez de dire,
M. Giroux, c'est que vous n'êtes pas certain que la Commission
hydroélectrique du Québec pourrait obtenir les
possibilités de construire deux ou trois autres centrales?
M. GIROUX: Je ne suis pas expert dans le domaine. Je peux simplement
vous rapporter la dernière conversation que j'ai eue avec M. Gray qui
dit que s'il y a une usine qui est accordée ce sera la dernière.
On a un certain temps limité. Je ne sais pas si M. De Guise, qui a un
double chapeau, qui est membre d'Energie atomique, peut oter un chapeau et nous
parler seulement de l'intérêt d'Hydro, mais je pense bien
que...
M. GARNEAU: II a un chapeau dur qui est bon pour toutes les
circonstances.
M. DE GUISE: C'est un fait que, étant au courant de la situation
à l'intérieur d'Energie atomique du Canada, j'ai
réalisé assez vite que si nous voulions un groupe
nucléaire pour les années quatre-vingt ou pour l'année 80
avec le programme d'Hydro-Ontario et les programmes qui se dessinaient au
Nouveau-Brunswick et
ailleurs en Europe, l'eau lourde va être extrêmement rare.
J'ai averti M. Giroux, si on veut G 3 pour 1980 et si on ne commande pas l'eau
lourde prochainement, il y a des possibilités qu'on n'ait pas d'eau
lourde en 1980. Il y en aura en 1981, 1982, 1983, il faudra voir, mais
l'année 1980 est une année-problème à ce point de
vue.
M. GARNEAU: Ce que vous nous dites, si vous nous aviez dit cela au
début de la réunion, peut-être qu'on aurait pu
éviter tout le débat sur le nucléaire. Ce n'est pas "can
do", c'est "no can do".
M. HOUDE (Abitibi-Est): Traduisez pour le député de
Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, j'ai l'impression que le ministre
des Finances ne comprend pas vite.
M. GARNEAU: ...
M. LESSARD: J'ai l'impression que le ministre des Finances ne comprend
pas vite.
M. GARNEAU: Non, c'est parce que j'ai vu que vous aviez compris
tellement vite que vous aviez abandonné le sujet en ne voulant pas me
laisser parler.
M. LESSARD: Non, le ministre des Finances parle de ceux qui voudraient
avoir exclusivement un programme nucléaire. Est-ce qu'il y en a autour
de cette table qui ont déjà parlé de cela?
M. GARNEAU: Je ne comprends plus rien. Depuis deux jours qu'on est
ici.
A quelle place allez-vous le faire votre hydraulique si vous ne le
faites pas à la baie James?
M. LESSARD: II y a d'autres places. On a déjà
démontré... Il y a d'autres places.
M. HOUDE (Abitibi-Est): II y a Jacques-Cartier.
M. LESSARD: II y avait la Moisie qui était prévue. Il y a
Outardes 2 qui a été arrêté depuis 1968. Les travaux
viennent de recommencer.
M. GARNEAU: Mais est-ce que le député de Saguenay veut
nous dire ceci? La question de la on peut employer le terme
filière hydro par rapport à la filière atomique, ne pose
plus ce problème. Il dit: Si cela avait été dans mon
comté ou dans ma région, j'aurais été d'accord,
mais comme c'est dans la baie James, je ne suis pas d'accord.
UNE VOIX: C'est cela, c'est cela. M. LESSARD: II est sérieux en
plus.
M. GARNEAU: Je ne veux pas blaguer, mais il reste quand
même...
M. MORIN: II ne veut pas blaguer, mais il blague quand même.
M. GARNEAU: ... que dans le développement hydraulique, de
l'hydroélectricité, les coûts de construction, etc.,
j'imagine bien qu'il peut y avoir des différences de transport ou
d'aménagement de rivières qui peuvent être plus ou moins
avantageuses, mais essentiellement, j'imagine sans être un expert,
je ne le sais pas aussi, et je voudrais le dire au député
de Saguenay, qu'il y a peut-être d'autres problèmes dans ces
rivières. Parce qu'il y a des parties de rivières qui ne sont pas
nécessairement sous le contrôle québécois en ce qui
regarde la tête de ces rivières.
M. ROY: II y a des saumons.
M. GARNEAU: Non, mais quand même, le député de
Saguenay n'est peut-être pas au courant, mais il y a déjà
eu des discussions assez longues entre Terre-Neuve et le Québec sur le
contrôle de ces rivières, quend on se rapporte aux années
1964, 1965, 1966 et probablement par la suite. En 1966, j'ai perdu la
filière électrique et nucléaire, mais quand même,
à venir jusqu'à 1966, je sais fort bien les discussions qui ont
eu lieu entre Québec et Terre-Neuve. Je ne sais pas si c'est
réglé maintenant, mais il reste que dans un cas, c'est de
l'hydraulique et, dans l'autre cas, c'est du nucléaire. Toute
l'argumentation a été sur le fait que les calculs d'Hydro... vous
étiez très sceptiques sur leurs chiffres...
M. LESSARD: Nous continuons d'être sceptiques.
M. GARNEAU: Si cela avait été des chiffres sur la Moisie,
vous les auriez crus?
M. LESSARD: Non, pas nécessairement.
M. HOUDE (Abitibi-Est): II n'aurait sûrement pas osé se
prononcer contre.
M. LESSARD: Nous continuons d'être sceptiques lorsqu'on s'engage
exclusivement dans un secteur.
M. GARNEAU: Mais...
M. LESSARD: Ce qui nous importe dans cette discussion...
M. GARNEAU: ... tout en blaguant, est-ce vraiment la situation?
M. GIROUX: Si la situation...
M. GARNEAU: En termes d'un programme exclusivement nucléaire,
cela serait cela? C'est-à-dire qu'il y aurait...
M. GIROUX: II y aurait un programme...
M. GARNEAU: ... tout un autre genre de "game" de cartes à
jouer.
M. GIROUX: Tout un autre genre. Naturellement, il faudrait y aller
complètement à nos frais. Vous savez, il n'y a rien d'impossible
si vous voulez y mettre la dépense. Nous pourrions construire une grosse
usine d'eau lourde nous-mêmes.
M. GARNEAU: Vous pourriez avoir des problèmes de relations de
travail à la baie James.
M. GIROUX: II peut y avoir des problèmes de travail à la
baie James. Il peut y en avoir... La première place qu'on les a eus,
c'est à Gentilly. Alors, les problèmes ne sont pas uniques
à la baie James, à Manie aussi, moins je crois qu'on en a
déjà eu, par exemple, on en a déjà eu.
Le problème, actuellement, c'est que... Vous demandiez
tantôt pourquoi on n'a pas empêché le débat. Nous ne
sommes ici que pour répondre aux questions.
M. GARNEAU: C'est-à-dire qu'on a posé les bonnes questions
au mauvais moment.
M. GIROUX: Peut-être un peu tard.
M. LESSARD: M. le ministre, vous répondez à
côté de la question.
M. GARNEAU: J'ai posé la question. Je n'ai pas
répondu.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Beauce-Sud.
M. ROY: M. le Président, il nous semble avoir... Je ne sais pas
s'il y a d'autres questions à poser sur les nucléaire. S'il y a
d'autres questions sur le nucléaire, j'aime mieux laisser passer les
questions parce que c'est un autre sujet qui est complémentaire à
ce qui vient d'être discuté.
M. BACON: M. le Président, on parle de sources d'énergie.
On parle du domaine hydraulique. M. Giroux a fait allusion, dans son allocution
d'hier, à l'aménagement du bas Saint-Maurice. Est-ce que M. De
Guise... Je pense que l'an dernier, il en avait été question en
commission parlementaire. Le député de Saint-Maurice, pour la
nième fois, avait posé la question. Est-ce qu'il y aurait moyen
que vous nous livriez là où vous en êtes rendus dans vos
études, et qu'est-ce qui doit se faire dans le domaine de
l'aménagement du bas Saint-Maurice?
M. DE GUISE: Les études qui avaient été entreprises
à Hydro et même... nous avons donné les contrats
d'étude à des bureaux d'ingénieurs-conseils à
l'extérieur, les rapports nous sont parvenus... Le dernier rapport nous
est parvenu dans les derniers jours de juin. C'est assez récent.
Je commence par le bas Saint-Maurice. Sur le bas Saint-Maurice, il y a
une possibilité d'aménager, d'installer une puissance
additionnelle de 300 MW à Cascade, à Shawinigan et 200 MW
à Grand'Mère, pour un total de 500 MW.
M. MORIN: Mais n'avons-nous pas eu ces chiffres hier? Nous tombons dans
les problèmes de clochers. Je pense qu'on pourrait peut-être
passer...
M. GARNEAU: II voulait donner suite aux questions du
député de Saguenay.
M. BACON: M. le Président, on a parlé... M. MORIN: On l'a
vu hier.
M. LESSARD: Le ministre des Finances n'était pas là, parce
que j'ai constaté que le ministre des Finances n'est pas fort en
finances et il n'est pas fort en géographie non plus. La rivière
Moisie n'est pas...
M. BACON: Si vous faites une répétition, une
redondance...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): A l'ordre, s'il vous plaît !
M. BACON: Je m'excuse auprès de mes collègues de la
commission si, toutefois, c'est une répétition. Je m'excuse, M.
De Guise, mais si vous avez des chiffres que vous n'avez pas encore
donnés, j'aimerais bien les avoir.
M. DE GUISE: Ces chiffres ont été donnés par M.
Giroux. La puissance du Bas Saint-Maurice, la puissance du Haut Saint-Maurice,
des estimations comme nous les avons au niveau d'avant-projet et le facteur
d'utilisation ou le nombre de kWh, l'énergie disponible à chaque
site, cela a été donné hier. Je n'ai pas objection
à les répéter. M. le Président, c'est comme vous le
désirez.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Je pense bien que le journal des
Débats est là, et le député de
Trois-Rivières pourrait se...
M. GIROUX: M. Cahill a donné certaines réponses hier. Si
vous voulez lui poser les questions à nouveau.
M. BACON: Je vais lire le journal des Débats, des
"ébats".
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le député de Beauce-Sud.
M. ROY: Avant d'aborder la question du
financement, j'aimerais savoir combien d'argent est actuellement
engagé dans le projet de la baie James.
M. GIROUX: Je m'excuse, M. Roy. Je n'ai pas compris le début de
votre question.
M. ROY: Quels sont les montants d'argent qui sont actuellement
engagés dans le projet de la baie James?
M. GIROUX: A la Société d'énergie?
M. ROY: A la Société d'énergie, oui. Tout le
développement.
M. GIROUX: Tout le développement.
M. ROY: C'est cela. Est-ce que vous auriez un document à nous
remettre là-dessus? On a eu le bilan au 31 décembre 1972, mais je
ne me souviens pas d'avoir eu le bilan au 31 décembre 1973.
Peut-être qu'on nous l'a remis...
M. GIROUX: C'est dans notre bilan consolidé.
M. ROY: C'est dans le bilan d'HydroQuébec?
M. GIROUX: Je pense que M. Boyd peut donner des détails qui sont
plus intéressants.
M. ROY: D'accord. De toute façon, il y a d'autres engagements qui
ont été pris depuis le 1er janvier 1974.
M. GIROUX: Je pense que M. Boyd peut mettre plus à jour votre
question que le bilan même.
M. ROY: D'accord.
M. BOYD: Au 31 mai 1974, le montant autorisé est de $408 millions
pour la Société d'énergie, excluant les investissements
dans les infrastructures faits par la Société de
développement mais payés à 99 p.c. par la
Société d'énergie.
M. ROY: II y a $408 millions de dépensés,
d'engagés. Est-ce que cela inclut les engagements ou est-ce
effectivement les montants déboursés?
M. BOYD: Ce sont des montants autorisés. M. ROY: Des montants
autorisés.
M. BOYD: Les montants autorisés incluent les engagements.
M. ROY: Quels sont les montants que vous prévoyez d'ici la fin de
l'année? Quelles sont les sommes que vous prévoyez ajouter
à cette somme de $408 millions?
M. BOYD: Les engagements à la fin de l'année pour la
Société d'énergie seront de $577 millions.
M. MASSE: Au 31 décembre? M. BOYD: Au 31 décembre
1974.
M. ROY: Ces montants seront financés par la Société
d'énergie de la baie James, tous financés par la
Société d'énergie.
M. BOYD: Hydro-Québec finance la Société
d'énergie.
M. ROY: Elle avance des montants d'argent à la
société.
M. BOYD: De deux façons. Hydro-Québec achète les
actions de la Société d'énergie, tel qu'elle s'est
engagée à le faire, pour une part; deuxièmement, elle a
fait les avances à la Société d'énergie suivant les
besoins de cette dernière.
M. LESSARD: Quel est le pourcentage des actions qui sont
contrôlées actuellement, 51 p.c., par Hydro-Québec?
M. BOYD: Actuellement, toutes les actions émises, sauf deux qui
sont des actions de qualification pour les directeurs.
M. LESSARD: Toutes les actions émises par la
Société d'énergie de la baie James sont sous le
contrôle d'Hydro-Québec.
M. BOYD: C'est cela.
M. LESSARD: Ce n'est pas comme le premier bill 50 qu'on nous avait
présenté.
M. BOYD: Vous avez dit deux, sauf sept actions.
M. LESSARD: Les sept autres actions appartiennent à qui?
M. BOYD: Les directeurs en ont, les administrateurs, on a cinq
administrateurs. Les membres de la commission qui ont des actions pour se
qualifier comme actionnaires.
M. LESSARD: Combien y a-t-il d'actions émises? Combien?
M. BOYD: II y en a pour $100 millions ou il y a 1.5 million d'actions
émises.
M. LESSARD: 1.5 million d'actions émises.
M. ROY: Le capital autorisé est de 10 millions d'actions.
M. BOYD: Le capital autorisé est de $1 milliard.
M. ROY: 10 millions d'actions à $100. M. BOYD: II y a 10
milliards en actions.
M. ROY: Je me réfère aux chiffres que vous nous avez fait
parvenir.
M. BOYD: Oui, c'est cela.
M. LESSARD: Actuellement, sur 1,500,000 actions...
M. DOZOIS: 1.5 million.
M.LESSARD: 1.5 million, dont 998,000 sont contrôlées par
Hydro-Québec.
M. BOYD: II y en a sept qui ne sont pas... M. LESSARD: 997,000. UNE
VOIX: 998,000.
M. LESSARD: D'accord. J'avais oublié un mille quelque part.
M. ROY: Maintenant, sur ce que...
M. LESSARD: Cela ne correspond pas du tout à votre premier projet
que vous aviez présenté à l'Assemblée nationale.
Vous vous rappelez la bataille qu'on a faite, le "filibuster" pour vous
empêcher de créer une autre Hydro parallèle afin de faire
disparaître Hydro-Québec. Vous vous le rappelez?
M. GARNEAU: M. le Président, je ne comprends pas du tout
l'attitude du député de Saguenay. Je ne la comprends pas du
tout.
M. LESSARD: Nous autres, on comprend la bataille qu'on a dû faire
à un moment donné pour vous empêcher de créer...
M. GARNEAU: Le projet de loi tel qu'il était déposé
et il a été adopté ce projet de loi je ne
veux pas reprendre le débat du bill 50, cela a été...
c'était à peu près à la même date de
l'année.
M. HOUDE (Abitibi-Est): M. le Président, est-ce qu'il est trop
tard pour poser des questions sur les prévisions de demande ou si cela
entre encore, parce qu'à un moment donné, on a parlé de la
demande et on a commencé à discuter de...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): ... il y a eu tellement de latitude et on a
discuté à peu près de tous les sujets, je vous permets la
question.
M. HOUDE (Abitibi-Est): D'accord. J'aimerais...
M. ROY: Je pensais que c'était sur le même sujet, parce que
j'aurais encore d'autres questions, M. le Président.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Non, j'arrive aussi à la baie James. Je
voudrais demander à M. Boyd quelles sont les prévisions de
demandes dans l'électricité pour la région d'Abitibi d'ici
1980, et comment Hydro-Québec compte y faire face. Non, on en est encore
à la demande d'électricité. La baie James est incluse dans
le comté d'Abitibi-Est.
M. BOYD: Quant aux chiffres, on va les chercher. En attendant, je peux
répondre que l'accroissement de la demande en Abitibi est assez forte.
Comme vous savez, le réseau de l'Abitibi n'est pas rattaché au
reste de la province. Il va l'être lorsque les lignes viendront de la
baie James. Il y aura un rattachement qui va se faire avec l'Abitibi, qui
permettra de donner un meilleur service. En attendant, la demande augmentant
assez rapidement, on vous a indiqué hier que nous nous proposons
d'installer des turbines à gaz pour suffire aux besoins de pointe. 180
MW de turbines à gaz qui devront être installées pour
rencontrer la demande...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Mais à quoi est due cette augmentation de
la demande? Comment se fait-il que vous soyez obligés d'installer des
turbines à gaz pour faire face à la demande?
M. BOYD: L'augmentation de la demande est plus rapide que prévu
pour au moins deux bonnes raisons: Le projet de la baie James et,
deuxièmement, l'augmentation de la valeur de l'or.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Mais en quoi le projet de la baie James a-t-il
pu créer une telle exigence sur la demande
d'électricité?
M. BOYD: II y a beaucoup de main-d'oeuvre qui est engagée
à la baie James, qui vient de l'Abitibi et beaucoup d'achats sont faits
localement. Cela crée une activité économique qui
entraîne la prospérité dans la région.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Dans un de vos documents, vous parlez de l'achat
d'un Hercules pour assurer le transport entre Montréal et LG 2.
Pourriez-vous me dire combien a coûté ce Hercules? Pourquoi
l'avez-vous acheté? Qu'est-ce qu'il transporte? Est-ce que c'est plus
économique de transporter par Hercules ou par transport routier ou par
transport ferroviaire? Jusqu'à Matagami par transport ferroviaire.
M. BOYD: D'après les chiffres qu'on m'a donnés, c'est
$4,800,000, mais on va vous préciser. Pourquoi on l'a acheté?
C'est parce que c'est un transporteur lourd et, particulièrement au
moment où on l'a acheté, il y avait la
route qui n'était pas complétée et beaucoup de
transport à faire qui était très urgent. L'Hercules peut
transporter jusqu'à 50,000 livres de cargo. On peut y entrer un tracteur
D-8, c'est assez considérable. Mais où il est réellement
utile, même essentiel, c'est pour tous les chantiers
éloignés LG 4 et même LG 3, Caniapiscau et ces endroits
où on a fait des travaux tout l'hiver, et particulièrement des
travaux d'exploration cet été. Cet avion nous a permis d'entrer
sur des pistes de glace, sur les lacs. Il suffit de faire une couche de glace
de 48 pouces pour entrer avec un cargo de 50,000 livres. Cela nous a permis
d'entrer partout les vivres, les carburants, les tentes, etc., pour faire les
explorations et on a calculé qu'il n'y aurait pas eu assez de DC-3 sur
skis au Québec pour faire le travail au cours de l'hiver qui
était nécessaire pour cet été si on n'avait pas eu
notre Hercules.
Evidemment, faire du transport à longueur d'année avec un
cargo qui peut transporter 50,000 livres dans les endroits
éloignés comme cela, c'est beaucoup plus économique que ce
qu'on était obligé de faire au début, c'est-à-dire
mettre deux ou trois barils de carburant dans un Beaver, faire un voyage et
revenir. Vous mettez 50,000 livres de carburant et vous vous transportez
à 300 milles à l'heure. Vous atterrissez sur une piste de glace
ou un banc de gravier que vous avez nivelé. Donc, c'est très
économique. Le coût d'achat était de $4,877,000.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Maintenant...
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Si le député d'Abitibi-Est me
le permet, je crois que M. De Guise veut compléter la
réponse.
M. DE GUISE: Pour les statistiques que vous m'aviez demandées sur
l'accroissement de charge, il y a eu des prévisions de faites en mars
1973. Une par la région et une par le siège social, à la
direction de la planification qui reçoit ces données
principalement de facturation et de transactions commerciales. Il y a une
légère divergence d'opinion sur les chiffres réels, mais
disons que, pour les fins de la cause, ce ne serait pas tellement important. Il
y a eu une autre rencontre en avril 1974, soit treize mois plus tard, où
on a essayé de réviser la position. Là, je vous lis un
paragraphe d'un rapport: L'accroissement de la charge de l'hiver 1973/74 par
rapport à l'hiver 1972/73 a été d'environ 22 p.c. Si on
regarde les six, les sept ou les huit, voici une région qui, d'une
année à l'autre, a augmenté sa charge de 22 p.c. et,
jusqu'à maintenant, l'accroissement mensuel se maintient autour de 25
p.c. par rapport au même mois de 1973. Les principales raisons de ces
changements de tendances sont le prix de l'or qui a fait rouvrir toutes les
vieilles mines d'or, toutes les mines qui n'opéraient plus, l'essor de
l'industrie du bois, le coût élevé des métaux de
base favorisant l'expansion minière, le chauffage électrique et
aussi le développement régional causé par
l'aménagement de la baie James. De plus, des clients importants que je
ne nommerai pas pour le moment ont des plans définitifs d'expansion qui
requièrent un total de 50,000 kw additionnels en 1976. Les prolongements
de 1976 sont basés sur les prévisions de la région
plutôt que sur les prévisions de la planification de base.
Alors, évidemment que c'est un cas, c'est un exemple typique
où, dans les prévisions de charge, on se fait prendre avec une
insuffisance de capacité de production. Le seul moyen de pouvoir
satisfaire à la charge rapidement, en 1976 parce que 1976 est une
année cruciale c'est d'installer trois turbines de 60,000 kw dans
la région de l'Abitibi, trois turbines à gaz.
M. GARNEAU: C'est la région où le taux de croissance est
le plus élevé...
M. DE GUISE: Avec la Gaspésie, c'est une des... Il y a eu aussi
la Gaspésie dans les années récentes.
M. GARNEAU: Sauf que la Gaspésie étant reliée au
réseau, vous pouvez répondre à la demande, tandis
que...
M. DE GUISE: C'est un réseau isolé, alors, un changement
de quelque importance affecte immédiatement nos ressources disponibles.
Ce que nous prévoyons faire, en 1974, est d'acheter un peu
d'énergie d'Hydro-Ontario; en 1975, nous installons le quatrième
groupe à Première Chute, le dernier groupe hydraulique dans la
centrale de Première Chute et nous prévoyons faire la
dérivation du réservoir Cabonga dans l'Outaouais. C'est une
transaction pour essayer de détourner l'eau du réservoir Cabonga
dans l'Outaouais. En 1976, comme je l'ai mentionné, 180 MW de turbines
à gaz, trois groupes qui seront posés dans la région de
Cadillac probablement. En 1977/78, nous aurons une nouvelle attache avec
Hydro-Ontario, nous pourrons acheter temporairement le déficit auquel
nous avons à faire face et, en 1979, nous espérons avoir la
première ligne de la baie James sur laquelle le réseau pourrait
être alimenté à partir de Montréal, en sens
inverse.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Est-ce que vous auriez la répartition par
consommateur de l'accroissement de demandes, soit le secteur industriel, le
secteur domestique?
M. DE GUISE: Dans les prévisions détaillées, je
pourrais...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Est-ce que vous avez ça?
M. DE GUISE: Cela pourrait être retracé dans nos
prévisions détaillées, surtout de la région.
M. HOUDE (Abitibi-Est): D'accord. Je ne
voudrais pas retarder les débats, mais il y a une
expérience qui s'est poursuivie en Abitibi, je pense que l'entreprise
J.J. Cossette de Champ-neuf a été la première à
utiliser les séchoirs à bois à
l'électricité. C'est la première expérience au
Canada. Est-ce que cette expérience s'est poursuivie? Est-ce que vous
prévoyez un accroissement de la demande, parce que le sciage
représente tout de même près de 50 p.c. de la production au
Québec, dans le Nord-Ouest québécois, est-ce que vous avez
une forte demande prévue?
M. DE GUISE: II faudrait que je vérifie ce point avec nos
données statistiques. M. Saint-Jacques, avez-vous quelque chose?
M. SAINT-JACQUES: On a quelques séchoirs à bois, à
l'électricité, qui sont prévus sur les réseaux.
C'est une application qui prend de la popularité. C'est tout ce que je
peux dire.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Pouvez-vous me dire quel pourcentage total de
demandes ça peut représenter? C'est peut-être insignifiant
comme demande, mais...
M. SAINT-JACQUES: C'est négligeable. Ce sont certaines
industries, ça ne pourra pas faire pression sur les
prévisions.
M. HOUDE (Abitibi-Est): D'accord. Au sujet du Hercules, je voudrais
revenir là-dessus, car il y a plusieurs fournisseurs du Nord-Ouest
québécois qui semblent lésés actuellement en ce qui
concerne les fournitures à offrir à la baie James. Il faut
comprendre que le Nord-Ouest québécois qui a été,
jusqu'à la décision du gouvernement Bourassa, une région
assez déprimée au point de vue économique et, depuis ce
temps je pense que le taux d'accroissement des demandes
d'électricité le prouve c'est une région qui
prospère énormément actuellement. Certains fournisseurs du
Nord-Ouest québécois semblent inquiétés du fait que
vous utilisez le Hercules pour transporter toutes les fournitures à la
baie James et les fournisseurs du Nord-Ouest disent qu'ils n'ont pas la
même chance de concurrencer que ceux de Montréal ou des environs
parce qu'il faut embarquer les marchandises à bord du Hercules pour se
faire passer ça par-dessus la tête. J'ai déjà fait
des représentations à M. Boyd à ce sujet, je n'ai pas eu
de nouvelles depuis. Est-ce que vous pourriez me dire si vous avez l'intention
de changer de politique à ce sujet?
M. BOYD: Oui, en effet. Ce n'est pas à cause du Hercules parce
que la majorité du transport par le Hercules a été fait de
Matagami. Des vivres auraient pu être pris de Matagami,
transportés à LG 2 par Hercules ou vers LG 3 ou LG 4 aussi bien
que d'un autre endroit. Il y a eu un problème de transfert de contrat;
jusqu'à l'automne dernier, c'était Hydro-Québec
elle-même qui achetait les vivres en quantité assez
considérable en Abitibi. On a donné un contrat à une
entreprise pour les gîtes et couverts, Crawley McCracken, et ils ont
continué un certain temps, suivant leur habitude, à acheter de
leur producteur régulier. Lorsque le problème nous a
été signalé par vous et par d'autres fournisseurs de la
région, surtout depuis le mois d'avril, on a donné des
instructions à Crawley McCracken et depuis ce temps toujours sur
une base concurrentielle, une comparaison de qualité presque le
tiers des vivres est acheté en Abitibi.
Concernant l'Hercules, si ça vous intéresse, je pense que
ça vaut la peine de mentionner l'économie qui a été
faite à ce moment-là. Vous parliez de tarifs ou de coûts,
si on assume une distance de 150 milles. Lorsqu'au tout début, on
transportait, par Beaver et Otter, cela nous coûtait entre $600 et $640
la tonne.
Avec des DC-3 sur skis, c'était $309 la tonne et les DC-3 sur
roues, environ $248 la tonne. Avec le Hercules exploité par nous, cela
coûte $50 la tonne. Sur des routes de pénétration, cela
coûte environ $50 la tonne, sauf que cela prend pas mal plus de temps. Ce
n'est pas notre idée de tout transporter par Hercules, mais c'est un
outil assez extraordinaire.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Pour une période de temps donnée,
est-ce que vous croyez que l'ouverture de la route à l'automne 1974 va
changer un peu la situation ou si ce sera encore plus économique de
transporter par Hercules que par transport routier?
M. BOYD: Dans les routes asphaltées entre Matagami et LG 2, et
surtout avec les discussions que nous avons dans le moment avec la Commission
de transport, si nous avons gain de cause, et je crois que nous l'aurons, il
sera plus économique d'effectuer la majorité du transport entre
Matagami et LG 2 par camion. Mais pour les autres endroits et pour de
nombreuses années, ce sera, dans bien des cas, plus avantageux de faire
le transport par Hercules.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Vous avez dit, M. Boyd au chef de l'Opposition
que s'il voulait un document sur les hélicoptères, vous seriez
prêt à le lui fournir. J'aimerais savoir le montant total des
contrats accordés pour des hélicoptères par
Hydro-Québec et la SEBJ pour la dernière année?
M. DOZOIS: Pour le président, Paul Dozois. La SEBJ, la SDBJ et
Hydro-Québec, nous avons fait des demandes de soumissions conjointes
pour toute l'année et nous avons divisé entre les trois
sociétés les appareils disponibles aux meilleurs prix offerts. De
mémoire, je ne sais pas si quelqu'un peut me fournir des documents, je
crois que ce sont des contrats s'élevant à environ $3 millions
pour les trois sociétés.
Cela a été partagé selon la formule mise de l'avant
l'an dernier, à des compagnies québécoi-
ses. Ils prouvent que les avions étaient enregistrés au
Québec et que ces avions étaient pilotés par des
employés payés au Québec et qui, par conséquent,
contribuaient à l'économie de la province.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Vous ne vous souciiez pas à
l'époque, du capital-actions des compagnies? Il fallait qu'elles soient
enregistrées au Québec.
M. DOZOIS: C'est-à-dire que nous demandions des soumissions aux
compagnies du Québec seulement. Je crois que vous voulez faire allusion
au fait qu'il y a deux compagnies, Lac-Saint-Jean Aviation et Sept-Iles
Aviation, qui sont des filiales l'une d'une compagnie de la
Colombie-Britannique et l'autre de l'Ontario.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Hum! Hum!
M. DOZOIS: Mais ces deux compagnies sont des compagnies
québécoises. Pour se rendre aux représentations que nous
avaient faites certains transporteurs, entre autres Hélicoptères
TransQuébec et Héli-Voyageur, on nous avait signalé que
ces gens, lorsqu'on leur donnait des contrats et qu'ils n'avaient pas assez
d'avions ou d'hélicoptères enregistrés au Québec,
faisaient venir des appareils soit de la Colombie-Britannique, soit de
l'Ontario.
Or, à la suite des mémoires présentés par
ces deux compagnies, nous avons institué cette procédure et j'ai
fait part ici l'an dernier qu'avec toutes les soumissions, les soumissionnaires
doivent remplir un questionnaire et nous dire quels appareils ils utiliseront
pour le contrat pour lequel nous demandons des soumissions et quels pilotes
feront le service, de façon à nous assurer que ce ne sont pas des
pilotes résidant dans d'autres provinces, qui paient l'impôt sur
le revenu dans d'autres provinces et qu'ils n'utilisent pas des appareils qui
n'ont pas été achetés dans la province de Québec et
sur lesquels ils n'ont pas payé par conséquent la taxe de vente
provinciale.
Depuis ce temps-là, je crois qu'il n'y a pas eu de
difficulté et, par le fait même, tous les contrats que nous avons
donnés étaient pour des appareils respectant ces conditions.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Je suis d'accord, mais, d'après vous
c'est peut-être un jugement de valeur que je vous demande de poser
qu'est-ce qui apporte le plus de revenus pour la' province?
Est-ce une compagnie dont le capital-actions est en majorité
québécois qui paie tous ses impôts au Québec ou une
compagnie dont les pilotes paient l'impôt au Québec et dont la
taxe sur les aéronefs est payée au Québec.
M. DOZOIS: M. le Président, cela est assez difficile. Je sais que
le gouvernement, comme tous les gouvernements qui se sont
succédé, a fait des efforts pour attirer le développement
de nouvelles industries dans la province de Québec. Quand une compagnie
d'une autre province vient s'installer dans la province de Québec, je
pense que si cette compagnie respecte les conditions que nous imposons, je ne
vois pas pourquoi on boycotterait cette compagnie qui est une compagnie
québécoise.
Lac-Saint-Jean Aviation, même si ses actions sont
contrôlées par Pegasus, je crois...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Dominion Pegasus, oui.
M. DOZOIS: ... c'est quand même une compagnie
québécoise qui s'est installée au Québec, qui a des
appareils enregistrés au Québec, qui fait tout le
reconditionnement de ses appareils au Québec, c'est une compagnie
entièrement québécoise pour nous. Que les actions soient
détenus par des Canadiens d'autres provinces, il y a bien des compagnies
qui sont installées, ici, dans la province de Québec et je pense
qu'on a toujours fait des efforts pour essayer d'intéresser des gens
à venir s'intéresser au Québec. Dans bien des cas, on dit:
Venez vous installer au Québec, on va vous encourager.
M. HOUDE (Abitibi-Est): D'ailleurs, je tiens à souligner ici que
je sais que le chef de l'Opposition va peut-être penser que ce sont
des remarques de Saint-Clinclin pour la transmissions des bobines, ou je ne
sais trop quoi les deux seules compagnies d'importance dans le domaine
des hélicoptères au Québec sont deux compagnies du
comté d'Abitibi-Est, TransQuébec Hélicoptères et
Héli-Voyageur qui ont chacune à peu près trente appareils.
Je crois que, n'eût été du projet de la baie James, ces
compagnies plus que majoritairement québécoises n'auraient pas vu
le jour.
Tout ce que je souhaite, c'est qu'Hydro poursuive sa politique
d'encourager autant que possible les industries québécoises
et vous en avez deux authentiquement québécoise et
qu'elle continue de cette façon.
M. le Président...
M. DOZOIS: Si vous permettez, j'ai le renseignement complet. Pour 1974,
Hydro-Québec, la Société d'énergie a donné
pour $4,874,741 de contrats; Lac-Saint-Jean Aviation, $1,451,000; Sept-Iles
Hélicoptères, $672,000; Héli-Voyageur, $934,000; les Ailes
du Nord, $312,000; les Hélicoptères Trans-Québec,
$1,503,000.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Continuez dans cette direction et je suis
certain que tous les citoyens du Nord-Ouest québécois seront
contents.
M. DOZOIS: C'est bien notre intention.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): M. De Gui-
M. DE GUISE: M. le Président, j'ai la réponse à une
question que posait le député il y a un instant sur
l'augmentation de l'énergie par secteur dans la région d'Abitibi.
Dans le secteur domestique, par exemple, le mois de mai 1974 par rapport au
mois de mai 1973, il y a une augmentation de 21 p,c. Pardon, c'est cumulatif,
c'est pour les cinq mois qui se terminent au mois de mai.
Dans le domestique agricole, il y a une augmentation de 6.8 p.c.
seulement; dans le général, 23.5 p.c; dans l'industriel, 20.6
p.c; dans le transport et l'éclairage public, 10.8 p.c; dans les ventes
en bloc, 19.8 p.c; et dans l'éclairage, sentinelle, entre services,
d'autres charges, etc., 13.5 p.c, ce qui fait que le total des ventes de
l'énergie permanente représente un accroissement de 20.7 p.c.
pour les cinq premiers mois de l'année et, si on inclut les ventes
d'énergie excédentaire, c'est aussi le même pourcentage, il
ne change pas.
Pour le bénéfice de l'assemblée, dans la
région Matapédia, nous avions pour la même période
26 p.c, je crois, d'augmentation. Voici deux régions de la province
où, d'une année à l'autre, nous avons des taux
d'augmentation absolument imprévus ou imprévisibles de 20 p.c. ou
26 p.c.
M. HOUDE (Abitibi-Est): M. le Président, je crois que ce sera la
fin de mes questions. Je tiens à dire que tous les secteurs du
comté d'Abitibi-Est sont très heureux de l'action
d'Hydro-Québec chez nous. Si on changeait les centrales
nucléaires en des centrales hydroélectriques, je pense qu'il n'y
a pas un électeur du comté d'Abitibi-Est qui appuierait le chef
de l'Opposition.
M. BACON: II n'est pas de la région de Gentilly.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Le chef de l'Opposition.
M. GIROUX: Ah! Là, ce n'est pas pareil.
M. HOUDE (Abitibi-Est): II peut s'en construire quand même.
M. MORIN: Est-ce que vous voulez dire que vous n'en voudrez pas,
lorsqu'il s'en bâtira au Québec?
M. HOUDE (Abitibi-Est): II ne s'en bâtira jamais, parce que vous
ne serez jamais là pour en bâtir.
M. MORIN: C'est intelligent cela, M. le Président, comme
remarque!
M. HOUDE (Abitibi-Est): J'ai deviné votre avenir politique.
UNE VOIX: II n'ira pas loin.
M. MORIN: Bon! M. le Président, après ce détour par
Saint-Glinglin...
M. HOUDE (Abitibi-Est): Je le dirai aux électeurs
d'Abitibi-Est.
M. MORIN: ...on va revenir sur les questions qui intéressent
l'ensemble du Québec.
Je voudrais demander d'abord, comme première question, à
nos invités s'ils se souviennent que le 25 mai 1972, lors de leur
précédente comparution devant cette commission, l'Opposition
avait demandé à Hydro de faire un certain nombre d'études,
de procéder à un certain nombre d'études sur des nouveaux
programmes nucléaires et mixtes. A la page 2398 des Débats, le
ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Saint-Pierre, avait dit ceci: "Pour
ne pas retarder la commission, on peut, si c'est le désir du Parti
québécois, demander aux gens d'Hydro-Québec de reprendre
ces programmes-là", et ainsi de suite. Il a fait quelques commentaires
là-dessus. Donc, le ministre Saint-Pierre, visiblement avec l'accord
d'Hydro, vous avait demandé de procéder à l'étude
d'un certain nombre de programmes. Nous avons lieu de croire que vous y avez
procédé effectivement. Les résultats ne nous sont jamais
parvenus. Nous les avons réclamés au gouvernement à
plusieurs reprises depuis cette date.
Nous aimerions savoir quand ces études ont été
remises au gouvernement, si elles ont été faites, et sur quoi
portaient-elles?
M. GIROUX: M. Morin, je crois qu'il y en a une qu'on peut
répondre. Naturellement, on a été arrêté sur
la Jacques-Cartier.
M. MORIN: Est-ce qu'à part cela, il y en a d'autres?
M. GIROUX: II y en a d'autres. On va chercher, parce que c'est un peu en
dehors du mémoire.
M. MORIN: II y avait des programmes mixtes; il y avait des programmes
nucléaires, si ma mémoire est bonne.
M. GIROUX: Nous avons ici réponse aux questions posées
à Hydro-Québec à la séance du 25 mai 1972 de la
commission permanente des richesses naturelles. C'est daté du 8 juin
1972.
M. MORIN: Votre rapport date du 8 juin 1972. C'est bien ce que je
pensais.
M. GIROUX: C'est l'efficacité normale d'Hydro, n'est-ce pas?
M. MORIN: Je voudrais maintenant savoir si l'efficacité du
gouvernement a été égale à la vôtre? A quelle
date...
M. GIROUX: Je présume que...
M. MORIN: C'est là que le bât blesse. A quelle date est-ce
que cette étude a été communiquée au gouvernement,
M. Giroux?
M. GIROUX: Naturellement, je n'ai pas de copie de lettre ici. Cela doit
être durant le mois de juin. Ordinairement, quand c'est prêt, on le
transmet. Je pourrai trouver la date exacte. C'est un document dont nous avons
une copie ici.
M. MORIN: Et c'étaient bien les études qui ont
été faites à la suite de notre requête?
M. GIROUX: Si vous voulez... Je ne le sais pas. Dans un rapport du 15
mai 1972, HydroQuébec présentait les résultats
détaillés des études qui ont été conduites
au choix d'un programme d'équipement pour la période de 1978
à 1985. Ce rapport a été distribué à la
commission permanente des richesses naturelles le 18 mai 1972. Le 25 mai,
à cette même commission, Hydro-Québec se faisait demander
les études et renseignements supplémentaires suivants: Un
programme d'équipement avec quatre groupes nucléaires de 600 MW
en 1980, et le complexe de La Grande en 1981. Un programme d'équipement
mixte nucléaire et thermique classique. Un programme nucléaire
américain avec un groupe de 800. La liste complémentaire des
programmes étudiés par Hydro-Québec, mais non incluse dans
le rapport du 15 mai 1972.
Est-ce que c'est cela que...
M. MORIN: Je pense. Il y avait été question
également, un peu plus tôt, de programmes d'unités de 800
MW et de 1000 MW.
M. GIROUX: Voici: Dans le rapport que j'ai ici, il y a un programme
américain, avec des groupes de 800 MW. C'est le...
M. MORIN: Est-ce que nous pourrions avoir ce document?
M. GIROUX: Absolument!
M. MORIN: Je dois vous dire que le premier ministre n'a pas jugé
bon de nous le communiquer.
M. GIROUX: Le nouveau résultat des études, si vous voulez,
pour le dossier que nous avons, c'est le programme d'investissement 750. En
1980, on avait un coût d'énergie calculé à 1436
mils; nucléaire canadien, La Grande en 1981, à 1252 mils;
thermique mixte avec nucléaire canadien à 1396 mils; mixte
un autre dans un autre genre à 1393 mils, ce qui est à peu
près pareil...
M. MORIN: Plus je vous écoute, plus je commence à
comprendre pourquoi le premier ministre n'a pas voulu nous le communiquer.
Est-ce qu'on pourrait l'avoir?
M. GIROUX: On va faire faire des copies. M. MORIN: Très bien.
M. GARNEAU: M. le Président, à qui l'avez-vous
envoyé?
M. DE GUISE: ... demain matin, mais je n'ai pas de record à qui
on l'a envoyé.
M. GIROUX: Je ne me rappelle pas de vous l'avoir envoyé.
M. GARNEAU: Vous l'avez peut-être envoyé à M.
Jorori.
M. GIROUX: Cela se peut. Cela serait possible.
M. MALOUIN: C'est peut-être lui qui l'a caché.
M. GAUVREAU: II y a une lettre de transmission à
Hydro-Québec et nous essaierons de l'avoir par
téléphone.
M. MORIN: Bien. Pour demain, cela suffit. Je ne demande pas
davantage.
M. GAUVREAU: Nous allons leur téléphoner.
M. MORIN: Si nous pouvions avoir ce document, il nous intéresse
au plus haut point,
M. GIROUX: On attire mon attention, pour votre information, que ces
coûts sont établis sur des coûts de 1971.
M. MORIN: De 1971. C'est-à-dire actualisés à
1971.
M. CHARUK: Les données de référence sont celles de
1971...
M. MORIN: Ah bon!
M. CHARUK: ... et les études ont été
effectuées en 1972 et toutes les hypothèses qui ont trait au taux
d'inflation, etc, sont celles que nous avions retenues lors des programmes
d'équipement 1972. Donc, il ne faut pas comparer ce document avec la
nouvelle comparaison que nous avons présentée hier.
M. MORIN: Non, mais nous sommes tout de même
intéressées à l'avoir, ne serait-ce que pour savoir ce que
le gouvernement nous dissimulait. Je tiens à dire publiquement que nous
avons réclamé ce document à plusieurs reprises en Chambre
et qu'on nous l'a toujours refusé en nous disant: Hydro-Québec
comparaîtra le mois prochain, dans deux mois, dans trois mois, dans six
mois, etc.
M. MALOUIN: ... vous l'avez.
M. MORIN: M. le Président, j'aurais une autre question. Il
commence à être temps que nous achevions la discussion sur le
nucléaire. Hydro-Québec aboutit, dans sa comparaison, entre le
nucléaire et le projet La Grande optimisé, à un coût
de 24.4. mils par kWh pour le projet nucléaire. J'imagine que ces
études ont été faites par votre service de planification.
'
M. GIROUX: Par le service de recherche...
M. MORIN: Par le service de recherche économique. Bon. Je
voudrais vous demander si d'autres calculs ont été faits. Les
économistes, d'habitude, puisque vous parlez du service de recherche
économique, procèdent sur la base de plusieurs hypothèses,
ce qu'ils appellent quelquefois une fourchette. Il y a une hypothèse
minimale et une hypothèse optimale, maximale et j'aimerais savoir si
vous pouvez nous faire connaître, en particulier, ces deux
hypothèses extrêmes.
M. DE GUISE: Je vais laisser M. Charuk regarder ses documents, mais je
suis sous l'impression qu'étant donné la complexité et la
longueur des calculs, il y a eu des réunions entre les deux groupes au
début pour essayer de fixer les meilleurs hypothèses possibles,
pour ne pas avoir à reprendre toute une fourchette, toute une
série de calculs, mais je laisse la parole à M. Charuk.
M. CHARUK: C'est bel et bien cela. Nous avons tenté d'utiliser
les mêmes données de référence au point de vue des
hypothèses autant dans le cas du projet hydroélectrique que dans
le cas du projet nucléaire que nous comparions.
Maintenant, en ce qui a trait aux données qu'Hydro-Québec
possédait, par exemple, comme les coûts d'intégration au
réseau, il n'y avait aucun problème. Les données
qu'Hydro-Québec n'avait pas, nous les avons obtenues d'Hydro-Ontario,
d'abord, surtout par des documents publics déposés à
l'Office provincial de l'énergie en Ontario.
M. MORIN: Mais n'aviez-vous pas diverses hypothèses de travail,
par exemple, prenons le taux d'intérêt. Si je comprends bien, vous
avez pris un 10 p.c. constant. Vous n'avez pas essayé de jouer pour voir
si, par exemple, le taux de l'inflation baissant, peut-être que le taux
d'intérêt baisserait aussi, passerait de 10 p.c. à 7 p.c,
à 8 p.c. Vous n'avez pas joué avec diverses hypothèses
comme cela?
M. CHARUK: Ce sont des exercices que nous faisons. Cependant, nous avons
retenu ce que nous croyons être le taux le plus probable. On peut, si
vous voulez, changer le taux d'intérêt à 8 p.c.
Naturellement, on sait ce qui arrive au point de vue des résultats. En
ce cas...
M. MORIN: Alors, cela vous semblait le plus probable, un taux
d'intérêt de 10 p.c. pendant 30 ans?
M. CHARUK: Non, ce n'est pas cela la chose. Cela, c'est le taux
d'intérêt durant la construction.
M. MORIN: Oui.
M. CHARUK: D'accord? Donc, c'est le montant que nous devrions emprunter
maintenant.
M. MORIN: C'est quand même dix ans. M. CHARUK: Oui.
M. MORIN: Cela vous paraît une hypothèse...
M. CHARUK: C'est plausible dans le contexte actuel.
M. MORIN: Oui, mais pendant ce temps, le taux d'inflation va redescendre
jusqu'à 7 p.c, 6.4 p.c. ou quelque chose comme 5.25 p.c. Le taux
d'intérêt va rester à 10 p.c. tout le temps.
M. GIROUX: M. Morin, je crois qu'ici, il faut impliquer deux choses. La
politique d'Hydro-Québec n'est pas d'emprunter à court terme. Je
ne dis pas que nous n'empruntrons pas à court terme, parce qu'il y a des
temps où il faut faire des emprunts temporaires. Ce qu'on peut appeler
emprunt temporaire, c'est un an à cinq ans. Mais la politique
avantageuse pour Hydro-Québec de connaître ces coûts, c'est
d'emprunter pour la plus longue période possible. Si on peut, pour une
période de 40 ans, nous le ferons.
M. MORIN: Vous n'empruntez pas tout l'argent d'un seul coup. Vous
empruntez au fur et à mesure des besoins.
M. GIROUX: Au fur et à mesure des besoins. Seulement, la
réponse à votre question, c'est qu'au point de vue
d'Hydro-Québec, nous empruntons, en politique, à long terme.
C'est une politique d'emprunt à long terme. Le marché est un peu
divisé en deux, dans les possibilités. La province va souvent
emprunter dans des termes plus courts, pour cinq, huit ou sept ans et nous,
nous empruntons à long terme.
M. CHARUK: J'aimerais tout simplement ajouter que le taux
d'intérêt tient compte de l'inflation qui est
anticipée.
M. MORIN: Oui.
M. CHARUK: D'accord? De la part d'un bailleur de fonds.
M. MORIN: Oui, d'accord, mais généralement, quand on parle
de tendances, si l'inflation baisse, le taux d'intérêt va avoir
tendance à baisser aussi. Généralement, c'est comme cela
que cela se passe.
M. CHARUK: Oui, mais il est très difficile de réconcilier
ces deux choses. Vous n'avez pas de formules mathématiques qui vont vous
donner la composante de l'inflation dans un taux d'intérêt.
M. MORIN: C'est pour cela que j'aurais aimé que vous nous
présentiez une fourchette, et pas une seule hypothèse qui peut
paraître très hypothétique.
M. CHARUK: Nous avons présenté ce que nous croyons
être le plus probable. Nous avons déjà effectué des
exercices avec fourchette.
M. MORIN: J'imagine.
M. CHARUK: Nous présentons ce que nous croyons le plus probable.
Maintenant, pour avoir une explication, si vous le désirez, concernant
cette réconciliation entre le taux d'intérêt que nous
maintenons, aujourd'hui, à une valeur fixe, pour fins de comparaisons,
et la baisse du taux d'inflation à long terme, je demanderais à
M. Larochelle, économètre, de venir vous l'expliquer.
M. LAROCHELLE (André): Au sujet des taux d'intérêt
et des taux d'inflation, il y a lieu d'indiquer ici, comme M. Charuk le
mentionnait, que les taux d'intérêt sur le marché
reflètent un ensemble de facteurs. Ils reflètent, bien sûr,
le prix qu'il faut payer à celui qui prête, pour la privation de
la jouissance de son argent.
Ils réflètent aussi, d'une certaine façon, le
risque relativement faible dans le cas d'HydroQuébec, de voir son
capital non remboursé. Maintenant, un dernier élément, qui
a son importance, reflète également l'inflation qu'il anticipe
dans le futur, inflation qui va rogner progressivement son pouvoir d'achat.
Alors, l'expression "anticipe dans le futur" ici est très importante
dans le sens que même si l'inflation à un moment donné peut
être à 10 p.c. ou 15 p.c, si les investisseurs dans l'ensemble ont
confiance que, d'ici deux, trois ou quatre ans, les taux ne seront plus de
l'ordre de 10 p.c, 12 p.c. mais vont retomber à 9 p.c, 8 p.c, 7 p.c. et
éventuellement dans cinq ans autour de 5 p.c. ou 4 p.c, à ce
moment-là, ils se disent: Pour quelques années, c'est
peut-être moins intéressant, 10 p.c. ou 9 p.c.
d'intérêt. Par contre, s'ils empruntent pour 25 ans et que les
taux à long terme sont 4 p.c. ou 5 p.c, cela devient extrêmement
intéressant. Dans ce sens, il y a une relation qui n'est pas
mathématiquement parfaite, il y a des éléments
psychologiques dedans, mais ce sont des choses qui se tiennent.
Dans les techniques de choix d'investissement comme telles, ce qui
compte essentiellement, c'est une certaine cohérence entre les
éléments d'inflation qu'on ajoute au coût estimé en
dollars de base, comme si on les faisait dans l'année courante et les
taux d'intérêt ou ce qu'on appelle plus généralement
le taux d'actualisation.
Sans être trop technique, dans la formule d'actualisation
elle-même, vous avez un rapport de deux nombres ou une série de
ces nombres. Autrement dit, vous avez un montant qui a de l'inflation et c'est
divisé par un facteur d'actualisation qui lui-même tient compte
d'une certaine inflation. Ce n'est pas le même taux, mais il y a des
relations entre les deux. Ce qui veut dire que, du point de vue des choix, si
vous estimez, à titre d'exemple, l'inflation trop fortement, pour ce qui
est du coût du projet, si vous êtes cohérent, au moment
où vous estimez le taux d'intérêt, vous allez faire la
même chose dans vos taux, mais le rapport des deux, grosso modo, ne
changera pas tellement.
C'est sûr que le projet va peut-être coûter moins cher
comme tel, mais, en décidant entre deux projets, on aurait des chiffres
qui relativement se tiendraient entre eux. Prenons un exemple simple: un gars
veut s'acheter une automobile et il veut prendre celle qui coûte le moins
cher. Si, à un moment donné, une coûte $3,000 et l'autre
coûte $4,000, il va prendre celle à $3,000. Si, du jour au
lendemain, les chiffres sont de $5,000 et $7,000, il va prendre celle de
$5,000. Vous allez me dire: Cela lui coûte $2,000 de plus, je suis bien
d'accord, mais le choix demeure le même. Ici, en gros, il y a une
attention qui a été portée à une certaine
cohérence des hypothèses comme cela. De telle sorte
qu'étant donné qu'il y a une relation entre l'inflation et
l'intérêt, même si nos hypothèses les plus probables
ne se réalisent pas, il y a quand même de très bonnes
chances que les rapports dans le jeu de l'actualisation où entrent ces
hypothèses se réalisent très bien. Alors, dans ce sens, du
point de vue des techniques économiques, des choix d'investissement,
j'ai relativement confiance dans ces choses.
Je peux peut-être ajouter une petite mention. M. Charuk y faisait
allusion tantôt. Si on prend toutes choses égales, d'ailleurs les
économistes aiment dire cela parfois, si le taux d'intérêt
baisse dans notre étude, mettons qu'il passe de 10 p.c. à 8 p.c,
qu'est-ce qui va se passer? Il va se passer que l'économique entre les
deux projets va favoriser l'investissement le plus lourd, c'est-à-dire
l'hydraulique, contre l'investissement un peu plus léger, le
nucléaire. On peut le voir un peu à cause des
intérêts durant la construction. Il y a plus à financer un
peu dans l'hydraulique; à ce moment-là, les intérêts
vont porter moins sur cette portion et, inversement, du point de vue de
l'exploitation, dans le nucléaire, les frais futurs vont être
escomptés ou actualisés à un taux plus faible qui va
donner des chiffres plus gros. Alors, en
somme, si vous baissez les taux d'inflation et de façon
cohérente vous baissez les taux d'intérêt, vous confirmez
davantage, si vous acceptez grosso modo l'ensemble des hypothèses, la
prépondérance probable du nucléaire.
Si on faisait des combinaisons de choses, on pourrait trouver d'autres
résultats. Est-ce que cela répond à votre question, M.
Morin?
M. MORIN: II y a une cohérence. Si le taux d'inflation baisse, le
prêteur, anticipant la baisse, va également... Il va y avoir un
certain parallélisme, autrement dit, entre les deux courbes.
M. LAROCHELLE: C'est ça.
M. MORIN: C'est ça que je voulais simplement établir,
alors, je me demandais pourquoi, dans vos hypothèses, votre taux
d'inflation baisse mais le taux d'intérêt demeure constant.
M. LAROCHELLE: D'accord. Comme je le disais tantôt, ce qui est
dans le taux d'intérêt, au point de vue du bailleur de fonds,
c'est, il y a une séquence difficile à estimer, je vous le
concède, le taux d'inflation futur. Ce n'est pas le taux d'inflation de
cette année, celui de l'année prochaine ou celui dans deux ans.
Si le gars achète des obligations qui seront échues dans 25 ans,
il cherche à se faire une idée, comment l'inflation va monter
dans à peu près 25 ans. A ce moment-là, dans le taux qu'il
demande, on pourrait dire qu'il y a eu par exemple une inflation sur les prix
à la consommation. Si on regarde ça, 11 p.c, et il y a des
personnes qui achètent des obligations à 9 p.c. ou 10 p.c,
à ce moment-là, ce ne serait pas payant du tout parce que non
seulement il voit son pouvoir d'achat rogné complètement mais, en
plus, il aurait un taux d'intérêt négatif. Mais justement,
ceux qui prêtent ne se basent pas seulement, admettons que je prends
seulement le point de vue de l'inflation, c'est plus compliqué que
ça, il y a une question de marché, ainsi de suite, sur un an ou
deux, ils regardent l'économie en général. Actuellement,
on a des taux d'inflation qui se comparent un peu à ce qui s'est
passé durant la guerre de Corée, il y a un certain
parallèle là-dedans. Après la guerre de Corée, les
taux d'inflation ont baissé, les prix ont monté, mais moins
rapidement. C'est ce qui est prévu actuellement. Evidemment, on
espère que tout le monde ne tombe pas en même temps
là-dessus, mais quand même, ce qui est anticipé pour le
futur, ce sont des taux d'inflation à long terme plus forts qu'avant.
Quand on parle de 5 p.c, à plus long terme, c'est quand même pas
mal plus fort que 3 1/2 p.c. ou 4 p.c. qu'on pouvait avoir il y a quatre ou
cinq ans. On voit qu'il y a un changement dans les perspectives de la part de
ceux qui regardent l'économie.
M. MORIN: C'est plus que 3 p.c, mais c'est moins que 10 p.c. Ce que vous
nous dites, en somme, c'est qu'une fois qu'il y a eu une lancée, une
fois qu'un taux d'intérêt est sur sa lancée, il persiste
pendant un certain temps, pendant que la courbe de l'inflation diminue.
Autrement dit, le parallélisme n'est pas strict, c'est ça que
vous êtes en train de dire?
M. LAROCHELLE: C'est ça, exactement. On pourrait dire que le taux
d'inflation, dans le taux d'intérêt, est un peu une moyenne mobile
du futur, un genre de moyenne, tandis que l'inflation réelle, chaque
année, c'est sûr, fluctue beaucoup. Dans ce sens, si on faisait un
graphique, on aurait de très grandes oscillations des taux d'inflation
mais des oscillations moins prononcées dans le taux
d'intérêt, ceci, parce que les facteurs d'inflation qui se
reflètent dans les taux d'intérêt sont des espèces
de moyenne de ce qui est anticipé dans le futur. Bien sûr, les
gens regardent vers le passé un peu pour se donner des idées sur
le futur. Il n'y a personne qui a des boules de cristal, en tout cas.
M. LESSARD: Cela prend un certain temps avant que le taux
d'intérêt s'ajuste au taux d'inflation. La courbe du taux
d'intérêt continue un peu plus loin que la courbe de diminution du
taux d'inflation.
M. LAROCHELLE: Exactement. Parce que le taux d'inflation lui-même,
c'est ce qu'on vit au jour le jour, mais ce qui influence le taux
d'intérêt, c'est ça plus ce qu'on pense qui va arriver dans
le futur sur l'inflation, avec risque d'erreur, évidemment.
M. MORIN: Mais est-ce que vous ne croyez pas, puisque nous vous avons
sous la main, qu'en postulant un taux d'intérêt constant de 10
p.c, pour la période de 1975 à 1990, par exemple, toute la
période de construction, que vous pénalisez sérieusement
le nucléaire? Je termine ma question, vous pourriez y répondre de
façon globale.
M. LAROCHELLE: D'accord.
M. MORIN: Le ministre Saint-Pierre faisait observer tantôt que les
investissements nucléaires sont étalés plus
également pour la période 1975/90. Alors, si on prenait, par
hypothèse, un taux d'intérêt de 10 p.c. pour commencer avec
votre propre hypothèse, de 1975 à 1982, par exemple, pour ensuite
prendre un taux hypothétique mais possible de 7 p.c. et 5 p.c. pour la
période qui va de 1982 à 1990, c'est une hypothèse
vraisemblable, possible, il nous paraît qu'étant donné
l'étalement des investissements pour le nucléaire, les
coûts du nucléaire tendraient à diminuer.
M. LAROCHELLE: Ce qui se passerait... Ce genre de calcul est fait
pratiquement à tous les jours à Hydro-Québec sur
différents projets et ce n'est pas toujours des gros projets comme
celui de la baie James. Cela peut se faire, par exemple, quand on a
décidé d'acheter un camion ou de le louer. Comme j'essayais de
l'expliquer au début, si vous faites cela, ce qui va se passer, c'est
que, relativement, vous allez favoriser le nucléaire.
Dans les hypothèses qui sont prises, on essaie de prendre les
plus probables et, quand on a un peu de préjugés à mettre
et on essaie qu'il n'y en ait pas c'est plutôt de les
mettre dans le sens d'être prudent dans la comparaison,
c'est-à-dire, s'il y a quelque chose à mettre, de favoriser
légèrement l'alternative, comme l'alternative nucléaire
par exemple.
Dans ce cens-là, vous pouvez être assurés que les
chiffres et les études ne sont pas faits pour prouver un point en
particulier. Ils sont faits pour voir l'état des coûts. Il y a
toutes sortes de considérations qui peuvent entrer à part les
coûts.
M. MORIN: Mais...
M. LAROCHELLE: Disons que je répète que, si on faisait les
calculs et, en fait, il y a des calculs de sensibilité qui se
font régulièrement sur ces choses-là; je n'en ai pas
devant moi actuellement, mais on pourrait vous en donner si vous le
désirez si on utilisait la séquence de taux que vous
proposez parce qu'à ce moment-là, cette séquence, il
faut quand même l'utiliser pour les dépenses d'exploitation qui
viennent, les 50 années au complet ce qui se passerait, c'est
que, relativement, le nucléaire coûterait plus cher. Je dis bien
relativement, c'est comme dans mon exemple d'autos tout à l'heure. Les
deux chiffres baisseraient, mais le pourcentage de différence entre les
deux augmenterait par le critère économique, le crible
économique universellement reconnu qu'est l'actualisation.
Si vous voulez favoriser votre nucléaire, pour simplement fins
d'étude de sensibilité, à ce moment-là, le conseil
que je peux vous donner, c'est d'essayer de mettre un taux d'actualisation qui
tienne compte des coûts de financement de 12 p.c, de 15 p.c.
Je me souviens que j'en avais fait une étude tout à fait
préliminaire, il y a peut-être cinq ans, et, pour qu'il y ait
égalité entre les projets, du point de vue du coût, il
fallait que je retienne un taux d'actualisation ou de financement de l'ordre de
15 p.c. Dès que le taux diminuait, les coûts actualisés du
nucléaire prenaient un écart en plus, par rapport à ceux
de l'hydraulique, même si le coût global actualisé pouvait
baisser dans chaque cas...
M. MORIN: Je vais...
M. LAROCHELLE: Mais les deux baissent, en partant du même niveau,
si on part avec des hypothèses où les deux sont égaux,
l'un baisse plus rapidement que l'autre, d'où le résultat.
M. MORIN: Bon. Mais est-ce que, dans l'hypothèse je vous
comprends bien que vous venez de mentionner, l'étalement des
investissements est le même pour les deux hypothèses,
nucléaire ou hydraulique? Ou bien si vous tenez compte
d'étalements différents des investissements?
M. LAROCHELLE: Evidemment, si c'est pour donner un même service
à la population québécoise, il faut que vos centrales
entrent en service pour répondre à un même accroissement de
demandes. Maintenant, ceci étant dit, pour que cela entre en service, il
faut étaler précédemment des dépenses de
construction. Selon l'envergure des projets, vous pouvez avoir des
étalements quelque peu différents entre l'hydraulique et le
nucléaire. Mais de plus en plus, les étalements, à ma
connaissance, entre l'hydraulique et le nucléaire se rapprochent.
Maintenant, quel que soit l'étalement précis...
M. MORIN: Est-ce qu'on construit des routes pour le nucléaire
comme celles que vous êtes à construire vers le Nord? Les
investissements ne se ressemblent pas du tout. L'étalement des
investissements n'est pas du tout le même.
M. HOUDE (Abitibi-Est): Vous vous en rendez compte, vous êtes sur
la route...
M. LAROCHELLE: Disons que je suis d'accord avec vous. Le
nucléaire peut s'étaler sur six, huit et peut-être
même dix ans. Disons que, sur ces choses-là, peut-être que
M. De Guise pourrait répondre...
M. MORIN: D'accord, mais je pense qu'on est allé assez loin pour
que j'arrive à pouvoir regarder les diverses hypothèses par la
suite avec un peu plus de compréhension. Mais, dans ce que vous venez de
nous dire, si j'ai bien compris, vous teniez pour acquis que l'étalement
des investissements, en gros, est le même?
M. LAROCHELLE: Non, ce sont des étalements typiques pour des
projets de chaque nature, c'est-à-dire que pour l'hydraulique, c'est
l'étalement déboursé dans le temps selon ce qui va se
faire, tandis que pour le nucléaire, c'est un étalement propre
à la construction du nucléaire. C'est sûr qu'il n'y a pas
de route d'accès, il y a peut-être des routes d'accès
très courtes à construire dans le bout de Gentilly. Elles sont
peut-être construites actuellement, mais, à ce moment, à
cause de cela, l'étalement va être un peu plus petit dans le
nucléaire. Mais ce que j'ai dit tantôt sur l'effet du taux
d'actualisation entre investissements lourds et investissements légers,
exploitation légère et exploitation lourde s'applique.
Au fur et à mesure que vous baissez votre taux d'actualisation,
toute chose égale, vous
favorisez le projet d'investissement le plus fort au début.
M. MORIN: En ce qui me concerne, j'ai terminé mes questions
à M. Larochelle. Je vous remercie.
M. LAROCHELLE: Merci.
M. LESSARD: M. le Président, j'aimerais poser une dernière
question à M. Giroux. En 1968, je crois, il y avait eu des études
préliminaires concernant l'aménagement de la baie James,
études préliminaires qui n'étaient pas concluantes.
J'aimerais savoir, M. Giroux, en quelle année vous avez justement
décidé de faire ce choix, c'est-à-dire
l'aménagement de la baie James?
M. GIROUX: Les études en 1970, vous dites?
M. LESSARD: En 1968?
M. GIROUX: En 1968, elles n'étaient pas concluantes, si je me
rappelle, de mémoire, par rapport à Churchill.
M. LESSARD: Par la suite... M. GIROUX: Micoua.
M. LESSARD: ...Micoua, Outardes 2 que vous avez laissé, à
un moment donné, vers 1968. Vers quelle date ou en quelle année
vous avez décidé de recommander au gouvernement du Québec
l'aménagement de la baie James?
M. GIROUX: Je crois que c'est en 1971, le 30 avril. M. Boyd nous dit
qu'il en avait été question en 1969, de nouveau en 1970, mais,
officiellement, je crois qu'on a envoyé une recommandation en 1971.
M. LESSARD: Le 25 mai 1971.
M. GIROUX: Je crois que c'était le 29 ou le 30 avril.
M. LESSARD: A ma connaissance, la lettre officielle avait
été envoyée le 25 mai 1971, c'est-à-dire
près d'un mois après le 29 avril 1971.
M. GIROUX: Je vous demande pardon parce que j'ai une mémoire
assez bonne, peut-être pas pour la date, mais pour mes faits et gestes.
Je me rappelle toujours de ce que j'ai fait. Je suis venu la porter
moi-même.
M. LESSARD: Le 29 avril?
M. GIROUX: Le 29 avril, la veille du 30 avril.
M. LESSARD: Justement avant l'assemblée publique...
M. GIROUX: Sur laquelle j'avais même déclaré que je
n'avais pas été invité.
M. GARNEAU: Ce n'était pas sûr si vous viendriez.
M. LESSARD: Mais, à ce moment, vous ne saviez pas qu'il y avait
une grande assemblée publique au Parti libéral?
M. GIROUX: Non, je crois que je le savais. Je savais qu'il y avait une
assemblée. Je ne savais pas qu'elle serait aussi publique, aussi...
M. GARNEAU: Vous ne pensiez pas qu'il y aurait tant de monde que
cela.
M. GIROUX: Ne me demandez pas qui m'avait posé la question, si
j'avais été invité ou non, c'est quelqu'un ici et j'avais
répondu que je n'avais pas été invité
officiellement.
M. MORIN: M. le Président, je me rends compte qu'il est 10 h 45.
Je sais qu'il y a un de nos invités qui doit peut-être s'absenter
demain qui aurait été intéressé à
répondre le plus tôt possible à certaines de nos questions.
On pourrait peut-être mettre le nucléaire entre parenthèses
pour ce soir et procéder à l'étude de la question des
inondations. Je sais que ce monsieur doit nous quitter. J'aimerais bien qu'on
puisse liquider cette question ce soir, avec votre permission.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Est-ce que les membres de la commission sont
d'accord? D'accord.
M. GARNEAU: C'est nous qui sommes inondés par les questions.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): Allons aux inondations. Adopté.
Inondations du printemps
M. LESSARD: Alors, je pense que c'est M. Villeneuve. M. Villeneuve,
j'aimerais, avant de poser des questions, que vous fassiez le point concernant
certaines critiques, relatives aux inondations, en particulier, l'ouverture du
barrage Mercier.
M. VILLENEUVE (Jean): Alors, si je comprends bien, vous aimeriez
entendre un résumé de façon générale des
événements qui se sont produits en mai dernier.
Je pense qu'il faudrait...
M. LESSARD: Quand vous parlez de mai
dernier, est-ce que vous pourriez préciser quelle date?
M. VILLENEUVE: La période dont il sera question va couvrir du
début avril jusqu'à aujourd'hui.
Je pense qu'avant de reprendre les événements, il vaut la
peine de prendre deux ou trois minutes pour revoir le rôle des barrages
réservoirs sur notre réseau. Pour bien comprendre ce rôle,
il faut se rappeler que les rivières au Québec ont un
régime relié à la climatologie du Québec.
C'est-à-dire que les rivières, au printemps, passent par une crue
très élevée au moment de la fonte des neiges, après
quoi le régime diminue et varie au cours de l'été, selon
les précipitations ou l'absence de précipitations. En hiver, ces
débits diminuent à des valeurs très basses, puisque les
précipitations sont sous forme de neige, et le cycle reprend le
printemps suivant.
Quand nous installons un barrage pour créer un réservoir,
nous cherchons à régulariser le débit de la
rivière. A ce moment, nous éliminons les extrêmes de
débits, c'est-à-dire que les pointes les plus
élevées, les débits de crues printanières, sont
diminuées et les débits très faibles qu'on aurait
autrement en hiver, sont augmentés. De cette façon, on peut tirer
de la rivière une production beaucoup plus uniforme au cours de
l'année si on a, sur la rivière en question, des centrales de
production d'électricité. Mais en régularisant le
débit en question, du même coup, nous amenons des
bénéfices secondaires aux riverains, par exemple, puisque nous
éliminons les conditions extrêmes qui sont toujours susceptibles
de nuire à la population. Les débits excessifs du printemps,
donc, sont diminués et les débits très faibles qui peuvent
provoquer, comme exemple, des difficultés dans l'alimentation d'eau
potable de certaines municipalités, sont eux-mêmes
augmentés.
Cependant, il faut bien comprendre que le barrage, à moins
d'avoir une capacité infinie, ce qui est absurde et qui coûterait
évidemment une somme infinie, a des limites et que dans des conditions
extrêmes, il est possible que ces limites soient atteintes. Autrement
dit, un barrage, qui est conçu pour accumuler la crue moyenne du
printemps et même exceptionnelle qu'on retrouve peut-être
généralement 49 fois sur 50 ans, si vous voulez, le barrage en
question peut quand même être dépassé dans sa
capacité par une crue qui dépasse les cas les plus rares qu'on
puisse rencontrer. Alors, on va voir, dans quelques instants, que c'est
exactement ce qui s'est passé cette année dans le cas de la
Gatineau.
Alors, comme toutes les autres années, nous avons graduellement
vidangé le réservoir Baska-tong au cours de l'hiver, pour
arriver, au début d'avril, à une accumulation qui
représentait environ 4 p.c. de la capacité du réservoir.
Donc, il était presque vide.
La crue printanière a été un peu plus tardive que
d'habitude cette année de sorte que, graduellement, dans les premiers
jours d'avril, le barrage, comme chaque printemps, était fermé et
la fonte des neiges a commencé à remplir le barrage.
Les apports, comme on les appelle, hydrauliques dans le
réservoir, produits par cette fonte des neiges, ont augmenté
graduellement du 10 avril au 30 avril pour passer, à ce moment, par un
maximum. A partir du 30 avril, les apports ont diminué pratiquement de
moitié jusqu'au 6 mai. Ils sont passés, en fait, d'une moyenne
quotidienne, le 30 avril, de 53,000 pieds cubes-seconde à 28,000 pieds
cubes-seconde le 6 mai, ce qui représentait une situation normale et
entièrement sous contrôle. Donc, le plus gros de la fonte des
neiges était passé rendu au 6 mai.
Le barrage lui-même, à ce moment, était rendu
à environ 70 p.c. de sa capacité. Dès le 5 mai, nous avons
ouvert quelque peu le barrage Mercier, étant entendu que les
prévisions étaient à l'effet qu'il y aurait certaines
pluies. Entre le 5 mai et le 15 mai, nous avons eu cependant des pluies
absolument exceptionnelles.
M. LESSARD: Le 15 mai?
M. VILLENEUVE (Jean): Oui. En fait, pour tout le mois de mai, mais
spécialement entre les premiers jours de mai et le 15 mai. Pour
illustrer ces chiffres, je vais vous donner ce qui était la moyenne
à long terme des précipitations de mai, soit 2.53 pouces d'eau.
C'est la moyenne de 30 ans ou de 35 ans. Ceci est pour tout le mois de mai.
Le record établi précédemment pour l'ensemble du
mois de moi est en 1947 avec 5.42 pouces de pluie pour tout le mois de mai. Or,
cette année, nous avons eu 8.27 pouces de pluie, toujours sur le bassin
de la rivière Gatineau qui alimente le réservoir de Baskatong.
Là-dessus, environ cinq pouces ont tombés dans les jours
critiques dont je vous ai parlé, soit entre le 3 mai et le 15 mai. Ce
faisant, malgré que nous ayons ouvert le barrage aussitôt que nous
avons eu les prévisions de ces pluies, le barrage s'est rempli de 70
p.c. qu'il était à 100 p.c. de sa capacité dans le temps
compris entre le 6 mai et le 15 mai, soit dans neuf jours.
A ce moment, le barrage étant plein, il nous a fallu ouvrir les
déversoirs du barrage, graduellement, jusqu'au point de relâcher
un débit de 65,000 pieds cubes-seconde du 16 mai au 20 mai.
Il faut bien comprendre que le barrage est fait pour être rempli
jusqu'à une certaine valeur, qui est très près de sa
crête, et qu'on ne peut pas laisser l'eau monter au-delà du niveau
pour lequel le barrage a été construit. De toute façon,
même si on voulait laisser monter l'eau, vous gagneriez seulement les
quelques jours ou
même parfois les quelques heures nécessaires à
remplir l'espace entre la cote maximale permise et la crête du barrage,
et l'eau passerait de toute façon par-dessus, tout en risquant
d'endommager le barrage ou ses assises ou de causer de l'érosion sur les
côtés du barrage.
A ce moment, dès qu'on atteint environ 20,000 pieds cubes-seconde
à Mercier, on commence à créer des inondations à
Maniwaki.
M. LESSARD: Une minute, 20,000 pieds cubes-seconde.
M. VILLENEUVE: En fait, pour être précis, c'est à
18,000 pieds cubes-seconde que nous commençons à créer une
cote qui est considérée comme inondation à Maniwaki.
M. LESSARD: Inondation. Quand vous avez ouvert le barrage, vous l'avez
ouvert à 65,000. Vous avez laissé passer...
M. VILLENEUVE: Nous l'avons ouvert graduellement. Nous avons ouvert
j'ai les chiffres ici le 12 mai, à 5,000 pieds
cubes-seconde; le 13 mai, à 10,000; le 14 mai, à 30,000, il y a
des fois qu'il a fallu changer l'ouverture plusieurs fois dans la même
journée; le 15 mai, à 45,000.
M. LESSARD: Le 15 mai, à 45,000.
M. VILLENEUVE: Cela peut varier de quelques centaines, mais je vous
donne les chiffres arrondis.
M. LESSARD: D'accord !
M. VILLENEUVE: Le 16 mai, à 65,000. Il y a un point important, si
vous me permettez, qu'il faut mentionner. C'est que pendant que nous retenons
l'eau dans cette partie de la rivière Gatineau, la crue, la fonte des
neiges se présente aussi en aval du barrage et crée
elle-même des apports qui peuvent être très importants plus
bas que le barrage. L'intérêt à garder le barrage
fermé aussi longtemps que possible, c'est de laisser passer cette crue
printanière pour la partie en aval de la rivière
inférieure, en bas du barrage Mercier. De cette façon, on
évite de superposer à la fois la crue provoquée par la
fonte des neiges en bas du barrage à celle qui se produit en amont.
M. LESSARD: Maintenant, vous me parliez tout à l'heure de
chiffres, c'est à 65,000 pieds cubes-seconde qu'il y a inondation.
M. VILLENEUVE: Non, à partir de 18,000 pieds
cubes-secondes...
M. LESSARD: C'est cela que j'avais...
M. VILLENEUVE: ... la ville de Maniwaki commence à subir des
effets.
M. LESSARD: C'est cela que j'avais...
M. VILLENEUVE: Evidemment, plus le débit augmente, plus le niveau
d'eau monte à cet endroit et plus il y a de citoyens affectés par
l'inondation. Maintenant, on me fait penser ici pour illustrer un peu aux gens,
qu'on n'est pas toujours habitué à compter la pluie en pouce, je
veux dire que tout le monde ne réalise pas ce que cela
représente. Il faut tout de même comprendre que
l'équivalent en neige, on est plus familier avec cela, de huit pouces de
pluie est d'environ, comme vous le savez, 80 pouces de neige. C'est comme si on
avait eu durant un mois l'équivalent de 80 pouces de neige, sauf qu'en
mai c'est peut-être de la pluie.
M. MALOUIN: Je m'excuse, je vous pose la question. Quand vous parlez de
18,000 pieds cubes-seconde, vous créez l'inondation?
M. VILLENEUVE: Cela dépend quand même de l'importance du
niveau de l'eau en aval du barrage.
M. LESSARD: C'est cela que vous venez d'expliquer.
M. VILLENEUVE: Non, cette partie de la rivière est une partie qui
est relativement accidentée, de sorte que le niveau à Maniwaki
est strictement relié au débit qui se présente à
Maniwaki même. Remarquez qu'à Maniwaki, il y a la Gatineau et il y
a un affluent relativement considérable qui est la rivière
Désert qui vient se jeter dans la Gatineau à Maniwaki. C'est
l'ensemble des deux qui constitue un débit qui peut provoquer des
inondations à Maniwaki. Notre mesure se fait à Mercier et
à la petite centrale de Corbeau et à Paugan. Il faut que nous
tenions compte que Maniwaki reçoit de l'eau d'un affluent. Lorsque nous
disons que 18,000 pieds cubes-seconde peut causer une inondation à
Maniwaki, il faut bien comprendre que cela peut prendre environ 14,000 ou
15,000 pieds cubes-secondes à Mercier seulement pour avoir, en
proportion des bassins, 18,000 pieds cubes-seconde à Maniwaki à
cause des apports intermédiaires.
M. MALOUIN: D'accord!
Maintenant, il a été question, et les gens de la place en
particulier ont souligné qu'HydroQuébec aurait pu ou aurait
dû ouvrir son barrage plus tôt. Si nous avions ouvert plus
tôt, de toute évidence, nous aurions immédiatement amener
ou amener très tôt à Maniwaki des débits
d'inondation. Nous aurions pu tenter d'amener le débit juste au bord de
la cote d'inondation continuellement avant le début de mai.
Nous avons après coup, connaissant les données exactes,
fait une simulation des débits et des niveaux que nous aurions eus en
relâchant juste assez d'eau pour créer ces débits.
C'est assez extraordinaire, mais on se rend compte que nous aurions eu,
dès le 16 mai, exactement le même niveau à Maniwaki que ce
que nous avons obtenu en réalité. En fait, le niveau aurait
été, à Maniwaki, un peu plus bas du 11 mai au 16 mai, mais
il aurait été plus haut, du 15 avril au 11 mai et, à
partir du 16 mai, il aurait été exactement le même
jusqu'à aujourd'hui en juillet.
M. LESSARD: M. Villeneuve, c'est fonction de la période où
vous auriez ouvert votre barrage. Si vous le laissez couler graduellement, si
vous l'ouvrez à partir du moment où il est rendu à 70 p.c,
peut-être que vous allez arriver... Je veux bien comprendre. Si vous
l'ouvrez à partir de 70 p.c. et qu'après le 5 mai, il s'emplit
complètement, peut-être que vous arrivez à cela. Mais si
vous le laissez couler graduellement... Parce que c'est l'un des objectifs des
barrages, c'est de créer un certain équilibre de la
rivière. Lorsque vous avez fait votre calcul, est-ce que je pourrais
savoir à quelle période vous l'avez fait, à quel taux du
niveau du barrage vous avez commencé à le faire?
M. VILLENEUVE: Dans le calcul hypothétique nous avons fait?
M. LESSARD: Oui.
M. VILLENEUVE: Nous avons un graphique ici qui commence le 1er mai, mais
on aurait pu effectivement commencer avant.
M. LESSARD: Le 1er mai, votre barrage était à quel niveau
de sa capacité?
M. VILLENEUVE: Le 1er mai, le barrage était effectivement
à 50 p.c. de sa capacité, exactement.
M. MALOUIN: Quelle est la capacité totale?
M.VILLENEUVE: Du barrage? C'est 95 milliards de pieds cubes d'eau. Pour
répondre à la question du député, on peut
facilement indiquer ce qui se serait passé si on vait laissé le
barrage ouvert continuellement depuis le 5 avril, donc, dans la même
situation que si le barrage n'avait pas été là. A ce
moment-là, les débits que nous aurions eus à Maniwaki sont
exactement égaux aux apports naturels que nous avons eus par la fonte
des neiges et des pluies. A ce moment-là, on constate ceci. Maniwaki
aurait été inondé à partir du 18 avril jusqu'au 2
juillet, selon une courbe quelque peu différente de celle qu'on a
connue. D'abord, l'inondation aurait été beaucoup plus tôt
parce que, dès le 18 avril, nous avons eu des apports de 18,000 pieds
cubes-seconde dans la rivière Gatineau. Donc, on aurait eu, dès
ce moment-là, des inondations. Ce qui plus est, le 1er mai, on aurait eu
déjà des débits de 53,000 pieds cubes-seconde. Ils
auraient ensuite baissé jusqu'au 5 mai, puisque j'ai mentionné
plus tôt que les apports avaient baissé; là, ils auraient
monté en flèche jusqu'à 82,000 pieds cubes-seconde, parce
que ce sont les apports que nous avons connus le 15 mai. Ce qui veut dire
qu'à ce moment-là, l'inondation aurait été beaucoup
plus grave à Maniwaki puisqu'on n'a jamais dépassé 65,000
par l'ouverture du barrage. Là, je vous donne la courbe exacte des
apports qui se sont présentés dans la rivière par la fonte
des neiges et la pluie. Alors, on voit que le barrage, en plus de permettre une
régularisation de la rivière, a retenu et retient encore, au
moment où je vous parle, 95 milliards de pieds cubes. Si le barrage
n'avait pas été là, vous auriez eu toute l'eau que vous
avez eue plus les 95 milliards de pieds cubes.
M. LESSARD: C'est un des objectifs du barrage.
M.VILLENEUVE: Evidemment, il est là pour retenir la crue du
printemps, mais dans la mesure où cette crue est une crue ordinaire, ou
même exceptionnelle. Mais cette fois-ci, c'était une crue
peut-être de l'ordre de celles qu'on peut estimer dans nos calculs d'une
fois dans 100 ans. Comme détail, les huit pouces d'eau dont je vous ai
parlé pour le mois de mai correspondent à 118 milliards de pieds
cubes d'eau dans la rivière Gatineau.
Dono, le mois de mai à lui seul a amené beaucoup plus
d'eau que ce que le réservoir peut contenir à partir d'un
état de vidange complet. Une autre chose qu'il est peut-être bon
de souligner, c'est que, même en juin, nous avons eu pour l'ensemble du
mois de juin, toujours sur le réservoir Baskatong, presque cinq pouces
de pluie, 4.95 pouces. Et la moyenne à long terme pour le mois de juin
est de 3.22 pouces. On voit que la situation a continué d'être une
situation extrême pour tout le mois de juin.
M. MALOUIN: Est-ce que vous avez une limite inférieure en ce qui
touche la capacité de votre barrage? Allez-vous en bas de 50 p.c?
M. VILLENEUVE: J'ai mentionné qu'au début d'avril, il
était, en fait, à 4 p.c. de remplissage, donc il était
presque vide. Il n'y a pas de limite.
M. MALOUIN: A cause...
M. VILLENEUVE: Si on vide et vidange totalement le barrage, on se
retrouve dans la situation extrême qu'on cherche à éviter
où la rivière est presque à sec en fin d'hiver. A ce
moment-là, il y a des municipalités le long de la rivière
qui ont des bassins dont les niveaux baissent et qui risquent de mettre
à découvert leurs prises d'eau. Nous nous pouvons quand
même nous rapprocher d'une vidange complète.
Vous voyez qu'on est allé à environ 4 p.c. ou 5 p.c. cette
année.
M. MASSE: II faut dire, M. Villeneuve, que c'est vraiment à cause
d'une crue exceptionnelle due à une couverture de neige je pense
que vous pourrez confirmer ou me contredire qui était beaucoup
plus importante. On m'a parlé de 200 p.c. à 500 p.c. dans le
bassin de la rivière Gatineau et avec, en plus, une pluie torrentielle
qui a amené une fonte rapide.
M. VILLENEUVE: Je vais devoir faire une certaine correction. Il est
évident que les conditions ont été exceptionnelles et les
chiffres parlent d'eux-mêmes.
M. MASSE: Je parle au 15 avril à peu près.
M. VILLENEUVE: Oui. Au sujet de la neige, ce n'est pas tout à
fait exact, M. le ministre. Nous avions un relevé de neige qui indiquait
des quantités à peine supérieures à la normale.
M. MASSE: Au 15 avril?
M. VILLENEUVE: Au 15 mars. Selon notre expérience, c'est la
période la plus significative pour faire des relevés de neige.
Parce qu'après...
M. MASSE: Au 15 mars, d'accord.
M. VILLENEUVE: ...vous avez une fonte partielle. Nous avions, sur la
Gatineau, en 1974, l'équivalent, en neige, de six pouces à huit
pouces d'eau. Parce qu'on traduit toujours; la hauteur de la neige au sol,
ça ne veut pas dire grand-chose parce qu'elle peut être plus ou
moins dense, ou en glace. On prend un échantillon de la neige et on le
convertit en eau et on a exactement l'équivalent qui était de six
pouces à huit pouces d'eau, selon les points de relevé sur la
Gatineau, au 15 mars, et la moyenne, à long terme, est effectivement de
six pouces à huit pouces aussi. Donc, on avait une situation qui ne nous
permettait pas de prévoir une crue exceptionnelle. C'est uniquement les
pluies de mai, mais il y a aussi la façon dont la neige a fondu cette
année. C'est-à-dire que le printemps, s'il est pluvieux, nuageux
et humide, fait que la neige fond et, évidemment, s'écoule en eau
sans s'évaporer d'aucune façon. Alors que si vous avez un
printemps ensoleillé et venteux, une grande partie de l'eau
s'évapore et une partie moindre ruisselle dans la rivière.
M. MASSE: C'est la raison pour laquelle les spécialistes chez
nous, je suis d'accord avec vous qu'environ au 15 mars, la couverture de neige
approchait la moyenne normale, peut-être légèrement
supérieure. Mais à cause de ce printemps pluvieux, au mois
d'avril, la couverture de neige était plus importante que la moyenne
normale.
M. VILLENEUVE: Oui, parce qu'il était plus tard, la neige n'avait
pas fondu. Maintenant, je n'ai pas les chiffres d'avril ici, malheureusement,
mais il a pu neiger au début d'avril, vraisemblablement, puisque le
temps était froid et cela a ajouté à la
précipitation de pluie qu'on a eue en mai.
M. MALOUIN: On parle d'une fréquence assez inusitée, une
pluie torrentielle que vous avez eue, mais combien ça fait de temps que
le barrage Gouin existe et combien de fois...
M. VILLENEUVE: Là, on parle du barrage Mercier.
M. MALOUIN: Le barrage Mercier. Et combien de fois avez-vous
retrouvé un phénomène semblable?
M. VILLENEUVE: J'ai mentionné tout à l'heure qu'on avait
jamais vu ça. Nous avons des données depuis 1941 pour Mercier et
le record précédent a été de 5.42 pouces en mai,
alors que nous avons eu 8.27...
M. MALOUIN: 8.27.
M. VILLENEUVE: Vous voyez que c'est de beaucoup supérieur
à tout ce qui s'était vu précédemment.
M. MALOUIN: Même en étant supérieur, est-ce que vous
avez des inondations fréquentes à Maniwaki? Ou si c'est
encore...
M. VILLENEUVE: Je sais qu'en 1947, entre autres, qui était
l'année où on avait eu le record précédent, les
gens avaient été inondés à Maniwaki.
M. MALOUIN: Mais les autres années, vous n'aviez pratiquement pas
de problème avec les inondations?
M. VILLENEUVE: L'eau monte habituellement chaque année et les
parties les plus basses de la ville sont peut-être plus
fréquemment inondées. C'est comme dans tout endroit où il
y a des gens bâtis tout près, ils ont plus de chance d'être
inondés que d'autres.
M. MALOUIN: En somme, il n'y a rien à faire pour corriger.
M. VILLENEUVE: Non, écoutez...
M. MALOUIN: Suivre de près le contrôle du barrage.
M. VILLENEUVE: Si vous parlez de ce qu'on peut faire avec le barrage et
le réservoir que nous avons dans le moment, il n'y a strictement rien
d'autre que nous pouvons faire. C'est très malheureux à dire,
nous l'avons dit aux gens de là-bas et cela les a peut-être
rendus
malheureux; mais si nous avions l'an prochain des conditions semblables,
ils seraient inondés de la même façon. C'est malheureux
comme cela.
M. MALOUIN: Vous allez continuer à être encore assez
actifs, suivre de près, comme vous l'avez fait...
M. VILLENEUVE: Ecoutez, on est vigilant autant qu'on le peut, mais le
barrage ne peut pas retenir plus d'eau que ce 94 milliards de pieds cubes.
M. LESSARD: M. Villeneuve, vous affirmez qu'à 18,000 pieds
cubes-seconde, vous êtes assuré qu'à Maniwaki, il y a
inondation?
M.VILLENEUVE: Disons début d'inondation, à 18,000.
M. LESSARD: Début d'inondation. Au début d'avril, la
capacité du réservoir Baskatong est de 4 p.c, d'accord? Du 10 au
30 avril, vous permettez l'accumulation de l'eau à l'intérieur du
barrage. Le 1er mai, l'accumulation de l'eau dans le barrage équivaut
à 50 p.c. de sa capacité. Si, à partir du 1er mai...
M. MALOUIN: Le 6 mai.
M.LESSARD: Non, 50 p.c. le 1er mai... l'ouverture du barrage a eu lieu
le 5 mai, d'après les dates que j'ai. Je vous ai posé la question
tout à l'heure, le 1er mai, votre barrage était à quelle
capacité?
M. VILLENEUVE: Rempli à 50 p.c. M. LESSARD: C'est cela. M.
MALOUIN: Le 6 mai.
M. VILLENEUVE: Le 1er mai. Le 6 mai est la date à laquelle nous
avons commencé à ouvrir.
M.LESSARD: Je ne parle pas du 6 mai. O.K. là?
M. MALOUIN: O.K.
M. LESSARD: Alors, le 1er mai, votre barrage est rempli à 50 p.c.
de sa capacité.
M. VILLENVEUVE: C'est juste.
M. LESSARD: A ce moment-là, est-ce que votre barrage était
complètement fermé?
M. VILLENEUVE: Oui, il était fermé jusqu'au 5 mai
inclusivement.
M. LESSARD: Donc, la rivière est à peu près
complètement à sec.
M. VILLENEUVE: Non, parce que j'ai expliqué tout à l'heure
qu'il y a des apports inférieurs au barrage.
M. LESSARD: D'accord.
M. VILLENEUVE: Et que le 5 mai, évidemment, la fonte des neiges
était commencée.
M. LESSARD: Et la rivière était, à ce
moment-là, à son plus bas niveau?
M. VILLENEUVE: Je pourrais vous trouver les débits que nous
avions à ce moment-là à la centrale Paugan en aval, et
vous verriez qu'il y avait quand même un volume d'eau appréciable
dans la rivière, provoqué par la fonte des neiges, pour tout le
bassin en bas du barrage Mercier.
M. LESSARD: Oui, c'est normal. Maintenant, vous affirmez que si vous
aviez ouvert le barrage à partir du 1er mai et si vous aviez
laissé écouler l'eau à 18,000 pieds cubes-seconde, il y
aurait eu inondation pire que ce qui s'est passé?
M. VILLENEUVE: Si nous avions tenté de relâcher plus vite
l'eau du barrage, de façon à nous tenir à la cote
maximale, juste au début de l'inondation de Maniwaki, nous aurions pu
relâcher des débits variant de 3,000 à 10,000 pieds
cubes-seconde, au début de mai. Parce que, justement, les débits
en aval du barrage, ajoutés à ce 3,000 à 10,000 auraient
amené la cote d'inondation.
M. LESSARD: C'est cela.
M. VILLENEUVE: On n'aurait pas pu ouvrir beaucoup ou, si on avait ouvert
davantage, on aurait provoqué des inondations très
sérieuses à Maniwaki, alors que nous n'avions même pas
d'indication que nous aurions ces précipitations excessives.
On nous aurait sûrement reproché d'inonder les gens alors
que nous avions encore 50 p.c. de capacité dans le réservoir. Ils
auraient été en droit de nous faire un reproche sérieux.
C'est ce que nous faisons chaque année, nous n'allons jamais les inonder
volontairement au cas où on aurait une situation de catastrophe
imprévisible.
M. LESSARD: Ce qui veut dire que vous auriez pu, à ce moment,
laisser écouler 8,000 pieds cubes-seconde sans inondation.
M. VILLENEUVE: Environ de 3,000 à 10,000 en augmentant
graduellement du 1er au 8 mai, mais après, il aurait fallu même
diminuer jusqu'à la fermeture complète le 12 mai, parce qu'ils
étaient déjà inondés par les débits en aval,
à cette date. Le volume d'eau qu'on aurait relâché entre le
1er et le 12 mai de cette façon est presque négligeable en termes
de quantité dans le barrage, parce que de 0 à 10,000 p.c, ce
n'est pas beaucoup.
Ensuite, dès le 15 mai ou le 16 mai, comme je l'ai dit plus
tôt, les gens se seraient retrouvés exactement dans la même
situation qu'ils ont connue,
M. LESSARD: Disons que vous êtes un spécialiste dans le
domaine. Je ne conteste pas ces chiffres. Le barrage a été ouvert
le 6 mai, vous laissez écouler 10,000 pieds cubes-seconde d'eau. A ce
moment, suite aux explications que vous venez de me donner, étant
donné justement qu'en aval il y a un certain débit, vous
êtes assurés, dès le 13 mai, qu'il y a inondation à
Maniwaki.
M. VILLENEUVE: Pour être précis, nous avons prévu le
13 mai qu'il y aurait inondation, parce que nous savions que le barrage
approchait de son plein remplissage et que les prévisions
atmosphériques nous annonçaient pour les 14 et 15 mai plus d'un
pouce de pluie. A ce moment, il est devenu évident pour nous que la
situation deviendrait hors de contrôle, parce qu'au moment même
où ce barrage devenait rempli, à capacité, on nous
annoncerait une pluie très importante.
M. LESSARD: M. Villeneuve, lorsque, justement, le 13 mai, vous avez eu
l'assurance qu'il y avait inondation, pourriez-vous m'indiquer ce que vous avez
fait à ce moment?
M. VILLENEUVE: Nous avons fait ce qui avait été convenu
avec le comité interministériel d'urgence pour les inondations et
glissements de terrain. Nous avons avisé, c'est-à-dire que notre
chef de division responsable de la régulation des ressources a
avisé son homologue ou son homme de contact au ministère des
Richesses naturelles qu'il y aurait inondation, parce qu'il nous faudrait
ouvrir le barrage Mercier.
M. LESSARD: C'est le 13 mai que vous auriez informé le
comité interministériel d'urgence.
M. VILLENEUVE: Je ne sais pas si on a un calendrier à la main. Je
sais que c'était le lundi après-midi. C'est cela, c'est bien le
13 mai vers la fin de l'après-midi.
M. MASSE: Est-ce que je pourrais savoir, M. Villeneuve, qui a fait
l'appel téléphonique et à qui?
M. VILLENEUVE: C'est M. Robert Brise-bois qui a communiqué ou
cherché à communiquer avec, si je ne m'abuse, un monsieur
Bilodeau, mais il n'a pas pu le rejoindre, il a parlé à M.
Triquet.
M. MASSE: Est-ce que cet ingénieur, M. Brisebois, était
mandaté d'une façon officielle pour aviser qui de droit que vous
ouvriez les vannes?
M. VILLENEUVE: C'est lui qui habituellement communique avec le
ministère. Seulement, en appelant la personne qui a été
mentionnée je le répète encore, si ma
mémoire est bonne, c'est M. Bilodeau c'était le nom qui
nous avait été donné dans les réunions du
comité en question comme étant la personne à aviser dans
les cas d'inondation.
M. MASSE: Evidemment, c'est assez important de savoir les dates exactes,
parce que même si, le 13 mai, le débit qui était de 10,000
pieds cubes-seconde n'était pas encore un débit qui amenait
l'inondation automatiquement, si on revient à votre chiffre de 18,000
pieds cubes-seconde qui commence à créer des inondations,
probablement que ce stade a été atteint le 14 mai.
Mais je voudrais que vous vérifiiez si c'est bien le 13 mai que
cela a été fait de votre part officiellement ou le 14.
M. LESSARD: Et non le 14.
M. VILLENEUVE: Cela a été fait le 13 mai. Je l'ai
vérifié avant de partir du bureau. L'appel a été
fait vers 4 heures, ou 16 heures, 16 h 30, le 13 mai. Maintenant, il y a eu une
nouvelle communication aussi le 14 mai au matin.
M. MASSE: Vers 11 heures, de M. Laurent, du service des Relations
publiques...
M. VILLENEUVE: Ah ça! C'est possible, je ne sais pas.
M. MASSE: ... cette fois à M. Jacques Bilodeau. M. Brisebois et
évidemment M. Triquet, le rapport, non pas le rapport,
c'est-à-dire ce que j'ai soumis déjà comme réponse
à des questions du chef de l'Opposition à l'Assemblée
nationale, c'est que le texte même rédigé par les
fonctionnaires disait bien qu'il est tout à fait exact que M. Claude
Triquet a reçu, le lundi 13 mai, une communication de M. Robert
Brisebois, ingénieur à Hydro-Québec au sujet de
l'ouverture probable des vannes du barrage Mercier, et des inondations
prévues dans la région de Maniwaki. A la suite de ce paragraphe,
j'ajoutais que les deux fonctionnaires du ministère... Est-ce que vous
permettez que je lise un paragraphe entre-temps?
M. LESSARD: Je voudrais que le ministre le lise. C'est très
important.
M. MASSE: "Il est à noter que cette information a aussi
été transmise, cette même journée à M.
Maurice Miron, du service de l'hydrométrie. Ces deux ingénieurs
sont en communication constante avec leurs confrères
d'Hydro-Québec dans l'exercice journalier de leurs fonctions. Il s'agit
donc, dans ce cas, d'information officieuse et de routine entre deux organismes
appelés à travailler, en étroite collaboration".
Et le paragraphe aussi important: "Les deux fonctionnaires du
ministère des Richesses naturelles ont cru de bonne foi que le
représentant officiel d'Hydro-Québec avaitdéjà
averti la Protection civile de l'éventualité des inondations
à Maniwaki, suite à l'ouverture des vannes du barrage Mercier.
C'est effectivement seulement le mardi, 14 mai, vers 11 heures de la
matinée que M. Paul Laurent, du service des Relations publiques
d'Hydro-Québec, personne habilitée à transmettre de
l'information officielle pour cet organisme, a avisé Jacques Bilodeau,
notre représentant adjoint au comité urgence inondation, des
dangers que courait la population de Maniwaki, suite à l'ouverture des
vannes du barrage Mercier" et on dit par la suite que cela a été
communiqué à la Protection civile.
Est-ce qu'à votre avis, les faits que je viens de relater sont
exacts?
M. VILLENEUVE: Ecoutez, c'est très difficile d'interpréter
ce que les gens pouvaient avoir à l'idée en communiquant, comme
je n'ai pas non plus de transcription de la communication.
M. LESSARD: Cela a des conséquences énormes.
M. VILLENEUVE: Oui. Je comprends, mais je n'étais pas sur la
ligne quand ces gens se sont parlé. La communication était une
communication de caractère technique
M. LESSARD: Les gens de Maniwaki en n'ont peut-être pas eu
connaissance, mais ils s'en sont ressentis du débit, en moses.
M. VILLENEUVE: Je suis bien d'accord avec vous, entièrement
d'accord. La communication était faite selon ce qu'il avait
été entendu entre les parties, et, d'ailleurs, dans un document
de travail qui est connu, je pense, du ministère, le rôle
d'Hydro-Québec a été reconnu. Sur ce plan, on disait en
particulier, je cite: "Fournir au ministère des Richesses naturelles
tous les renseignements dont Hydro-Québec dispose sur les débits
et niveaux des cours d'eau où elle possède des installations".
Notre direction des relations publiques est responsable d'informer la
population, d'informer les media d'information, mais les informations
techniques de ce genre sont communiquées par le plus court chemin
possible, c'est-à-dire du responsable d'Hydro-Québec à un
responsable au ministère des Richesses naturelles. Et s'il y a eu
malentendu ou interprétation différente de la situation,
évidemment, il faudrait questionner les personnes en cause pour qu'elles
nous disent ce qu'elles ont compris ou cru comprendre de ces appels.
Il était évident que notre homme appelait pour donner une
information. Là, on dit : Probable... Je ne sais pas si le mot probable
est apparu dans la conversation entre M. Brise-bois...
M. MASSE: Et vous et moi n'étions pas sur la ligne à ce
moment.
M. VILLENEUVE (Jean): Non. C'est juste. Mais notre homme nous dit qu'il
a avisé le ministère que nous devrions ouvrir, le lendemain, le
barrage Mercier.
M. LESSARD: ... avisé le ministère?
M. VILLENEUVE (Jean): Le ministère, mais la personne que nous
avions dans notre liste de noms et de numéros de
téléphone, et je pense qu'il s'agissait de M. Bilodeau, mais
là-dessus, il faudrait peut-être faire vérifier.
M. MASSE: C'est exact..
M. LESSARD: Je reviendrai sur cela parce qu'il semble y avoir eu
confusion. Le 12 mai, vous laissez écouler 5,000 pieds cubes-seconde. Le
12 mai, étant donné les pluies justement qu'il y avait, vous ne
pouviez, parce que le barrage est à 70 p.c. vers le 3 mai...
M. VILLENEUVE (Jean): II monte très rapidement. Au lieu d'un
pourcentage, les chiffres que j'ai sont en milliards de pieds cubes, et comme
c'est 95 milliards, c'est très peu du pourcentage.
M. LESSARD: Vous m'avez donné un pourcentage...
M. VILLENEUVE (Jean): Oui.
M. LESSARD: ... tout à l'heure. Le 1er mai: 50 p.c. J'ai un autre
pourcentage dont malheureusement je n'ai pas eu le temps d'inscrire la date
70 p.c.
M. VILLENEUVE (Jean): Le 5 mai, 64 sur 95, cela fait environ 67 P-c,
disons.
M. MALOUIN: Vous avez donné tout à l'heure le 6 mai: 70
p.c.
M. VILLENEUVE (Jean): C'est à peu près cela. Très
près de 70 p.c. le 6 mai. Le 10 mai, pour votre information, 76
milliards de pieds cubes, environ 80 p.c, 79.5 p.c. Le 12 mai...
M. LESSARD: Une minute. Le 10 mai, vous me parlez de combien?
M. VILLENEUVE (Jean): Le 10 mai? Presque 80 p.c.
M. LESSARD: Très bien.
M. VILLENEUVE (Jean): Le 12 mai, 84 sur 95, on est près de 90
p.c.
M. LESSARD: Près de 90 p.c.
M. VILLENEUVE (Jean): 89 p.c. le 12 mai.
M. LESSARD: Le 12 mai, vous avez 89 p.c. Il y a de la pluie et vous
ouvrez votre barrage à 5,000 pieds cubes-seconde. Le 12 mai, M.
Villeneuve, était-il possible de prévoir que vous seriez dans
l'obligation d'ouvrir le barrage parce qu'on est rendu à 5,000 pieds
cubes-secondes?
M. VILLENEUVE (Jean): Oui, mais, dans la même
journée...
M. LESSARD: Une minute. On est rendu à 5,000 pieds cubes-seconde.
Vous calculez qu'il y a à peu près en aval 8,000 pieds
cubes-seconde. Vous l'ouvrez à ce moment et vous laissez écouler
l'eau à 5,000 pieds cubes-seconde. Nous sommes rendus à 13,000
pieds cubes-seconde. Vous êtes donc à 5,000 pieds cubes-seconde du
moment critique des inondations.
M. VILLENEUVE (Jean): Ce qui s'est passé, c'est effectivement que
nous avons commencé à atteindre un débit d'inondation de
18,000 le 10 mai...
M. LESSARD: Le 10 mai?
M. VILLENEUVE (Jean): ... et c'est pour cette raison même que nous
n'avons pas ouvert davantage. Dès le 10 mai, le débit en aval de
Mercier était tel qu'ajouté aux 5,000 pieds cubes-seconde de
Mercier, nous avions 18,000 à Maniwaki et même les 11 et 12 mai,
jusqu'à ce qu'on ait les prévisions que nous avons eues le 12 mai
et qui nous ont fait ouvrir, on espérait encore pouvoir contenir,
laisser terminer cette crue-aval qui achevait à ce moment.
M. LESSARD: Donc, dès le 10 mai, on est vers la période
critique, c'est-à-dire qu'on est au niveau de 18,000 pieds
cubes-seconde.
M. VILLENEUVE (Jean): C'est juste. A ce moment, toute ouverture inonde
davantage Maniwaki.
M. LESSARD: Le 10 mai, on est à 80 p.c. Le 12 mai, on est
à 90 p.c. et cela continue.
M. VILLENEUVE (Jean): C'est cela.
M. LESSARD: Est-ce que pour prévoir quand même, parce que
le 10 mai on est près du niveau des inondations, on est même au
niveau, à 18,000 pieds cubes-seconde, est-ce qu'à ce moment
parce qu'on ne joue pas avec des jouets, on joue avec une population
vous pourriez m'expliquer pourquoi il n'y a pas eu, vers le 10 mai, une
communication avec le ministère des Richesses naturelles pour discuter
de ce problème, parce que c'était, comme vous dites, une
période unique, semble-t-il, discuter avec le comité
interministériel urgence inondation? Il n'y a eu aucune communication,
cela ne vous inquiétait pas. Il n'y avait pas de problème, vous
espériez tout le temps que ces eaux, qui s'accumulaient très
vite... Vous avez parlé tout à l'heure, à un moment
donné, que le barrage, vers la période du 1er mai, s'accumulait
très vite: 1er mai, 50 p.c, 6 mai, 70 p.c, le 10 mai, 80 p.c. Donc, cela
continuait de façon constante. Je suppose que vous êtes quand
même assez prudents sur cela, parce qu'en aval il y a une population qui
est là. Le 10 mai, vous n'avez pas pensé du tout
étant donné justement que le 10 mai, on était rendu au
niveau des inondations à communiquer avec le comité
interministériel urgence inondation, qui est coordonné par la
protection civile, de telle façon qu'au moins parce que cela
prend une certaine préparation avant de faire face à la situation
d'urgence on puisse prévoir des moyens, si cela se
présente, pour faire face à cette situation.
M. VILLENEUVE: Ecoutez, le 10 mai, si on prend cette journée
entre autres, c'est une des rares journées, en tout cas, où il
n'a pas plu dans le mois de mai. C'est une journée où la
situation semblait encore être sous contrôle. Notre guide
principal, ce sont les apports qu'on peut mesurer dans le réservoir et
que nous évaluons par la variation, dans 24 heures, du niveau d'eau. Si
l'eau a monté de tant de dixièmes de pied ou de centièmes
de pied dans 24 heures, cela nous permet de calculer les apports que nous avons
eus.
M. LESSARD: Mais vous connaissiez, à un moment donné,
qu'il y avait un certain nombre de pieds de neige, qu'il y avait de la glace en
amont du barrage, vous aviez analysé cela.
M. VILLENEUVE: Je m'excuse. Cette partie qui est la fonte des neiges, je
l'ai mentionnée plus tôt, a été en diminuant de
façon très marquée, du 1er mai jusqu'au 6 mai et
même au 8 mai. Les apports dûs à la fonte des neiges et au
peu de pluie qu'on avait eue au début de mai, parce qu'on en avait eue
quand même un peu, allaient en diminuant de façon très
marquée. On peut le voir sur le graphique. Je pourrais essayer d'en
avoir un plus propre, mais on le voit très bien. Vous l'avez sur un
petit feuillet qu'on peut faire retourner et distribuer. On voit que ces
apports allaient en diminuant de façon très marquée, ce
qui nous plaçait dans une situation qui semblait normale par rapport
à l'expérience des années dernières. Ce qui a
vraiment renversé la situation, c'est le chiffre de la journée du
12 mai que nous avons connu une fois la journée terminée,
où il est tombé 1.28 pouce de pluie. Ce chiffre, nous le
connaissons dans la journée du 13. C'est la journée où
nous avons alerté immédiatement les intéressés.
M. LESSARD: Donc, le 12 mai, il y a des pluies torrentielles.
M. VILLENEUVE: 1.28 pouce dans la journée du 12 mai.
M. LESSARD: Maintenant, c'est qu'à ce moment, vous aviez quand
même constaté, en date du 10 mai, que le barrage était
à 80 p.c de sa capacité. C'est le 10 mai.
M. VILLENEUVE: C'est cela.
M. LESSARD: A 80 p.c. de sa capacité. Le 10 mai, vous constatez
aussi qu'on est à la période critique d'inondation, soit 18,000
pieds cubes-seconde. Le 12 mai, il y a une pluie torrentielle. D'ailleurs, vous
ouvrez votre barrage et vous laissez passer 7,000 pieds cubes-seconde, le 12
mai.
M. VILLENEUVE: Si vous me permettez, il était ouvert depuis le 6
mai, à des débits qui ont varié.
M. LESSARD: Varié, mais...
M. VILLENEUVE: Assez faibles.
M. LESSARD: Oui.
M. VILLENEUVE: Qui ont varié de façon à ne pas
inonder Maniwaki, c'est-à-dire à toujours laisser aller juste
assez d'eau pour que le volume relâché de Mercier, ajouté
à celui qui vient des apports intermédiaires, donnait 18,000
p.c.s.
M. LESSARD: La journée du 12 mai, M. Villeneuve, étant
donné justement les circonstances qu'on avait vécues le 10 mai 80
p.c, les eaux du barrage s'accumulent très vite; le 12 mai, 70 p.c. et
le 12 mai vous constatez des pluies torrentielles. Est-ce que vous avez, le 12
mai, envoyé un inspecteur, un vérificateur au barrage?
M. VILLENEUVE: II faudrait vérifier. Nous avons des personnes en
poste qui peuvent nous rapporter et qui nous rapportent tous les jours les
niveaux et il y a des relevés, il y a des postes de mesure des
précipitations en plusieurs endroits du bassin. On n'a pas ces
relevés instantanément.
M. LESSARD: Vous dites que c'est le lendemain...
M. VILLENEUVE: Ce n'est qu'à la fin d'une journée que nous
savons combien il est tombé d'eau dans la journée.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord. Mais vous dites que c'est le
lendemain que vous pouvez avoir la quantité d'eau qui tombe dans une
journée.
M. VILLENEUVE: Qui est tombée.
M. LESSARD: Qui est tombée. Cependant, visiblement, quand vous
êtes sur le bord d'un barrage, on peut constater à
différentes heures le niveau de l'eau qui augmente au barrage. Ce que je
vous demande est très important, je pense. Etant donné les
différentes circonstances qui ont précédé le 12
mai, étant donné que le 12 mai vous avez constaté qu'il y
avait des pluies torrentielles, est-ce que le 12 mai vous avez envoyé
une personne pour vérifier le niveau du barrage?
M. VILLENEUVE: Nous avons tous les jours le niveau du barrage, M.
Lessard. Nous l'avons continuellement, nous pouvons l'avoir
continuellement.
M. LESSARD: Donc, vous avez tous les jours le niveau du barrage. Le 12
mai vous n'avez pas prévu la possibilité, étant
donné qu'il pouvait arriver que vous deviez être dans l'obligation
d'ouvrir le barrage, le 12 mai, vous n'avez pas prévu d'intervenir...
d'informer le comité interministériel d'urgence inondation, en
particulier, la Protection civile?
M. VILLENEUVE: Ce qui avait été convenu, c'était
que nous avisions le ministère, et non pas la Protection civile. Il faut
bien comprendre une chose. Hydro-Québec n'a pas des barrages sur toutes
les rivières de la province. Il y a un très grand nombre de
rivières où nous n'avons absolument aucune installation, nous ne
savons même pas ce qui se passe. Nous avisons le ministère dans
les cas où nous avons des installations.
M. LESSARD: Je pose la question au ministre. On dit: Ce qui a
été convenu c'est qu'on avisait le ministère.
M. MASSE: A ce moment-ci je ne peux pas... étant donné
qu'il n'était pas prévu que l'on discute de cette question ce
soir, le directeur général des eaux devait être ici,
demain, pour cette question. Je ne peux pas vous dire, ce soir, s'il y a eu une
convention entre les gens d'Hydro-Québec et le ministère. Je dois
dire qu'il existait à ce moment-là le comité d'urgence
inondation et que la Protection civile... Je serais porté... Il est
possible qu'il y ait eu cette convention. Je n'en sais rien. On a
constaté que le 14 mai, à la suite de l'appel qui pour nous
était officiel de la part d'Hydro-Québec, nous avons
communiqué avec les gens de la Protection civile qui n'étaient
pas au courant à ce moment-là.
M. LESSARD: Le 13 mai vous... M. MASSE: Le 14 mai.
M. LESSARD: Oui, d'accord. Lorsque vous avez eu une communication
d'Hydro-Québec en date du 13 mai, vous étiez assuré
à ce moment-là que la Protection civile avait été
informée?
M. MASSE: Oui. Les deux fonctionnaires en question ont cru, de bonne
foi, que le représentant officiel d'Hydro-Québec avait
déjà averti la Protection civile.
M. LESSARD: A partir de quoi, ces deux
fonctionnaires ont-ils cru que la Protection civile avait
été informée?
M. MASSE: C'est la question à laquelle je ne peux malheureusement
pas répondre.
M. LESSARD: M. le Président, je pense que cette question est fort
importante. Vous comprendrez, M. Villeneuve, que si la population avait
été avertie une ou deux journées auparavant, il y a
quantité de dommages qui auraient pu être annulés ou
diminués. D'accord? Nous croyons que cette date fatidique du 13 mai est
très importante, d'autant plus que nous avons soulevé la question
à l'Assemblée nationale au ministre des Richesses naturelles. Le
ministre des Richesses naturelles nous a informés à ce
moment-là que normalement d'ailleurs cela confirme ce que les
deux fonctionnaires ont dit au ministre des Richesses naturelles
lorsqu'il y a possibilité d'inondation comme ça, on doit d'abord
informer la Protection civile, qui est le comité de coordination d'un
autre comité qui s'appelle le comité interministériel, qui
s'appelle Urgence-Inondation. Or, il semble que la Protection civile, qui a
pour objectif de coordonner, dans des cas d'urgence, l'ensemble des services et
faire face à la situation, n'ait été informée de
cette situation que le 14 mai alors que, le 13 mai, vous ouvrez et laissez
passer 10,000 pieds cubes-seconde. Vous m'avez dit tout à l'heure que,
le 10 mai, nous étions à la période critique, soit 18,000
pieds cubes-seconde. Donc, le 13 mai, en ouvrant le barrage, il y a
inondation.
M. MASSE: Selon les débits, il n'y aurait eu inondation que le 14
mai.
M. LESSARD: Le 10 mai, selon ce que M. Villeneuve nous dit, nous sommes
à 18,000 pieds cubes-seconde...
M. MASSE: Non, non, excusez.
M. LESSARD: Ecoutez, il faut calculer en aval du barrage. D'accord?
M. MASSE: C'est ça.
M. LESSARD: Déjà, Hydro-Québec, le 10 mai, constate
que nous sommes à 18,000 pieds cubes-seconde. 18,000 pieds
cubes-seconde, cela correspond également au niveau d'inondation à
Maniwaki.
M. MASSE: M. Villeneuve, est-ce que, concernant ce que vient de dire le
député, le 10 mai, vous aviez un débit de 18,000 pieds
cubes-seconde?
M. VILLENEUVE: Oui, il s'est produit ceci. Si on regarde seulement les
débits créés par les apports en aval du barrage, on se
rend compte qu'ils ont passé par un maximum le 12 mai et qu'après
le débit a commencé à diminuer en aval, ce qui nous
permettait d'ouvrir davantage à Mercier, sans ajouter un
supplément qui risquait de le faire inonder.
M. LESSARD: Vous dites un maximum le 12 mai. Le 12 mai, c'était
combien?
M. VILLENEUVE: C'était vraisemblablement 18,000,
déjà, sans Mercier.
M. LESSARD: 18,000 sans Mercier et vous avez, le 12 mai, 5,000 pieds
cubes-seconde qui s'écoulent du barrage?
M. VILLENEUVE: Le 12, le chiffre est d'environ 4,000 pieds
cubes-seconde, justement parce qu'on l'avait réduit, du 10 au 12, de
6,000 à 4,000. Pendant toute cette période, nous cherchions
à empêcher l'inondation à Maniwaki et nous relâchions
toujours, de Mercier, juste assez d'eau pour que ce débit ajouté
à ce qu'on pouvait mesurer près de Maniwaki, nous donne le
débit maximum qu'on pouvait tolérer sans inondation. Cela nous a
amenés à réduire, du 10 au 12, l'ouverture de Mercier,
parce que les apports intermédiaires ont augmenté du 10 au 12.
Après le 12, on a vu une certaine baisse en aval et alors, on a ouvert
tout de suite à 5,000. Dès le 13, à 10,000...
M. LESSARD: Le 12, vous ouvrez à 5,000. Le débit de la
rivière, à ce moment-là, avec l'apport qui vient en aval
et le barrage, est de combien, le 12 mai?
M. VILLENEUVE: Je pense que, d'après les chiffres que j'ai
là, il doit être un peu au-dessus de 18,000. Il était
déjà à 21,000. Cela devrait donner 21,000.
M. LESSARD: 21,000 pieds cubes-seconde le 12 mai? Et vous n'avez pas
prévu de communiquer avec le comité interministériel
Urgence-Inondation, puisque vous me dites que 18,000 pieds cubes-seconde
signifie l'inondation à Maniwaki?
M. VILLENEUVE: C'est le début de l'inondation. L'eau...
M. LESSARD: D'accord.
M. VILLENEUVE: On appelle cela l'inondation. Vous savez que, dans toutes
les rivières, au printemps, vous avez le niveau qui monte et c'est
considéré normal par tout le monde, y compris les premiers qui
ont les pieds dans l'eau, les plus près de la rivière. Chaque
printemps, ils ont un peu d'eau qui monte sur leur terrain.
Alors, cela est une situation qu'on retrouve chaque année. Et
elle s'est passée effectivement cette journée-là.
M. LESSARD: D'accord. Et vous ouvrez votre barrage, vous diminuez,
étant donné cette augmentation, votre barrage...
M. VILLENEUVE: C'est du 10 au 12.
M. LESSARD: Du 10 au 12.
M. VILLENEUVE: Diminué légèrement.
M. LESSARD: Le 12, vous ouvrez à 5,000 pieds cubes-seconde...
M. VILLENEUVE: 4,000...
M. LESSARD: ... et vous avez, à ce moment-là, le 12 mai,
21,000 pieds cubes-seconde de débit sur la rivière?
M. VILLENEUVE: C'est estimé par une courbe que j'ai ici qui
représente ce qu'il y avait à Maniwaki et ce qu'on a
relâché de Mercier.
M. LESSARD: Est-ce que, normalement, dans ces circonstances, quand vous
êtes rendus au point critique je comprends que se mouiller les
pieds cela ne fait pas trop mal, mais se mouiller trop, cela commence à
faire mal étant donné qu'il y a un comité qui est
créé pour cela, qui s'appelle le comité
interministériel Urgence-Inondation coordonné par la Protection
civile, étant donné que cela permettait aux gens de se mouiller
les pieds un peu plus avec 21,000 pieds cubes-seconde, n'y aurait-il pas eu
possibilité de faire des communications, le 12 mai, avec le
ministère des Richesses naturelles? Il faudrait quand même avoir
une communication constante.
M. VILLENEUVE: Nous avons des numéros que nous pouvons atteindre.
Remarquez qu'il s'agissait d'un dimanche.
M. LESSARD: Eux aussi ont des chiffres sur les eaux.
M. VILLENEUVE: Si vous permettez, je vous ferais remarquer qu'il
s'agissait d'un dimanche, le 12 mai. Nous avons quand même des noms de
personnes responsables que nous pouvons rejoindre, mais ce n'est que...
M. LESSARD: Urgence-Inondation.
M. VILLENEUVE: ... cependant et je l'ai dit tout à l'heure
que lorsque nous avons connu les précipitations excessives de
cette journée et cela a été le lundi dans la
journée que nous avons réalisé qu'il faudrait
ouvrir à des débits beaucoup plus élevés que ce qui
est tolérable.
M.LESSARD: M. Villeneuve, le 12 mai, vous avez eu des
précipitations très importantes...
M. VILLENEUVE: Je m'excuse, M. Lessard, ces précipitations sont
en plein bois. Il n'y a pas toute une population qui peut les constater.
M. LESSARD: Non, voici, M. le Président.
M. VILLENEUVE: Vous êtes dans un bassin boisé où il
n'y a strictement aucune habitation.
M. LESSARD: J'ai des barrages chez moi, je sais comment c'est
situé, où c'est situé et de quelle façon c'est
fait. Cependant, il y a quand même une situation qui se crée
depuis un certain nombre, de jours. Le 12 mai, vous savez qu'avec
l'écoulement du barrage, nous sommes à ce moment à 21,000
pieds cubes-seconde comme débit dans la rivière. Malgré le
fait qu'il soit en plein bois, le 12 mai, que vous m'affirmez que vous avez une
vérification et que le barrage était à 90 p.c. Est-ce
qu'il n'aurait pas été normal, puisqu'on commençait
à être en période critique, d'avoir une personne qui se
rendrait vérifier le barrage le 12 mai? Parce que, dès le 12 mai,
non pas le 13, dès le 12 mai, vous êtes, d'après vos
connaissances, d'après ce que vous nous affirmez, dans la région
de Maniwaki, en période critique d'inondation. Le 12 mai, il y a une
pluie torrentielle et ce n'est que le 13 mai que vous communiquez avec le
ministère des Richesses naturelles. Selon nos informations, ce n'est pas
avec le ministère des Richesses naturelles, selon, en tout cas et
le ministre me confirme cela ce que le ministre nous a répondu en
Chambre. Normalement, la communication, d'après entente, doit se faire
avec le service civil. Le ministre vient de nous dire, comme il nous l'a dit en
Chambre, qu'à ce moment, on parlait de la probabilité d'ouverture
du barrage.
On semblait croire que le barrage n'était pas ouvert.
C'était probable. Et ce n'est suite probablement à des appels et
à des renseignements, parce que le ministère était,
à ce moment, assuré que la Protection civile avait
été informée, ce n'est que le 14 mai que le
ministère informe la Protection civile de l'ouverture du barrage du 13
mai. M. le Président, je pense qu'il y a eu là, d'après
mes renseignements... Je comprends que M. Villeneuve doit partir, et je pense
que cela serait assez important qu'on puisse peut-être je ne sais
pas quelle sont ses obligations, ses engagements rediscuter de cette
chose, parce qu'il y a eu, M. le Président, une négligence
quelque part.
M. VILLENEUVE: M. le Président, si vous me permettez, je ferai
remarquez au député que la constatation dont il parle, celle de
la pluie de cette journée, est une chose que personne ne peut voir, pour
la bonne raison qu'il s'agit d'un bassin de 6,030 milles carrés, et
c'est en ayant les chiffres des précipitations obtenues en
différents endroits du bassin, des endroits qui ne sont relevés
que périodiquement, qu'on pouvait
savoir exactement qu'il était tombé, le 12 mai, 1.28
pouce.
M. LESSARD: On n'attend pas que le feu soit pris avant de faire venir
les pompiers, c'est-à-dire...
M. VILLENEUVE: Bien d'accord!
M. LESSARD: ... qu'on n'attend pas que la maison soit
brûlée... Je m'excuse. Ce que je voulais dire, c'est qu'on
n'attend pas que la maison soit brûlée avant de faire venir les
pompiers. C'est un peu mieux.
Mais, M. le Président, ce que je dis...
M. VILLENEUVE: J'aimerais faire remarquer une autre chose. C'est que les
18,000... la cote qui est sur le bord de l'inondation, qu'on appelle la cote
d'alerte de 18,000 pieds cubes-seconde est une cote que nous atteignons
pratiquement chaque année à la crue du printemps, et même
indépendamment de l'ouverture de Mercier par la fonte des neiges du
bassin intermédiaire. Donc en soi, ce n'est pas une raison pour
personne, ni pour les citadins ni pour les gens d'Hydro-Québec...
M. LESSARD: Je pense...
M. VILLENEUVE: ... d'être alarmés du fait qu'il passe
18,000 pieds cubes-seconde à Mani-waki.
M. LESSARD: Je pense qu'on devrait... Vous devriez, avec
l'expérience que vous venez de vivre, modifier vos méthodes un
peu. Au moins, quand vous êtes rendus à 21,000 pieds cubes-seconde
comme débit dans la rivière, avertir les pompiers, qui sont en
l'occurence, la Protection civile.
M. VILLENEUVE: Ecoutez, ce qui importe pour les gens, c'est de les
avertir qu'une situation va devenir sérieuse. Les 18,000 pieds cubes par
seconde, ils le constatent comme nous. Il voient la rivière au niveau
où elle est. Ce n'est pas ce dont nous devons les avertir. C'est de
l'ouverture subite et importante du barrage, du barrage Mercier et dès
que nous avons pu...
M. LESSARD: Ce n'est plus le temps de les avertir.
M. VILLENEUVE (Jean): Nous avons appelé au ministère le 13
mai à 20 heures et l'eau n'a été rendue à Maniwaki
qu'à minuit le lendemain soir. Donc, il s'agit d'au moins 30 heures
d'avis quand même...
M. LESSARD: D'accord.
M. VILLENEUVE (Jean): ... qui est la période normale pour avertir
les gens dans un tel cas.
M. LESSARD: Mais il y a avertir les gens et il y a aussi à
prendre les mesures d'urgence nécessaires. Or, il y a justement un
organisme. Comme je le dis, on n'attend pas l'urgence et on pouvait
prévoir. En fait, vous avez quand même un certain nombre de
spécialistes je ne connais pas trop cela qui
prévoient la neige, la fonte des neiges, les glaces, etc. Cela existe au
ministère des Richesses naturelles, cela existe ailleurs. Or, je ne vous
demande pas nécessairement le 12 mai que vous envoyez
à la radio des informations selon lesquelles il va y avoir inondation.
Ce n'est pas ce que je vous dis. Mais je vous dis, par exemple, qu'il
m'apparaft normal, étant donné justement que le point critique
est à 18,000 pieds cubes-seconde pour les inondations, que lorsqu'on
arrive à 21,000 pieds cubes-seconde, au moins on commence à
communiquer avec l'organisme en question afin de faire en sorte que cet
organisme puisse se préparer en conséquence, s'il y a lieu, pour
faire face à la situation. Mais cela n'est pas ce qui arrive. On attend
le 13 mai et le 12 mai, il y a des pluies assez torentielles...
M. VILLENEUVE (Jean): ... connues le 13 mai...
M. LESSARD: ... connues le 13...
M. VILLENEUVE (Jean): ... et c'est la journée où nous
avons avisé, la journée où nous avons connu cette
dernière précipitation.
M. LESSARD: Mais d'après ce que vous me dites, il est entendu
avec votre comité, avec votre direction et avec le ministère des
Richesses naturelles, que dans ces circonstances, vous informez le
ministère des Richesses naturelles et non pas la Protection civile.
M. VILLENEUVE (Jean): C'est exact.
M. MASSE: M. le Président, je ne me souvenais pas de l'ensemble
de ma déclaration du 30 mai 1974, mais M. Villeneuve, vous avez
déclaré qu'il était convenu qu'Hydro-Québec avise
le ministère et non le comité d'urgence inondation. Je dois vous
lire une autre phrase de ma déclaration du 30 mai...
Je dois vous lire une autre phrase dans ma déclaration du 30 mai,
qui se lit comme suit: Les procédures d'information du comité
Urgence-Inondation soit dit en passant, HydroQuébec est
représentée à ce comité par M. Lamoureux
veulent que toutes les informations soient canalisées vers la protection
civile et qu'elles soient transmises par les responsables de chacun des
organismes concernés. Est-ce qu'il y a eu des défauts de
communication? C'est possible. C'est pour reprendre, je pense, l'affirmation
que vous mentionniez tout à l'heure.
M. VILLENEUVE: Je pense que l'honorable
ministre va être d'accord qu'à chaque
expérience...
M. LESSARD: Une minute, je voudrais faire confirmer. Donc,
d'après votre entente avec Hydro-Québec, d'après ce que
vous me dites, M. le Président, par l'intermédiaire du ministre,
c'est que, normalement, les communications se font d'Hydro-Québec vers
la Protection civile?
M. MASSE: D'Hydro-Québec vers la Protection civile, c'est exact.
Je parle des procédures d'information du comité
Urgence-Inondation, comité où est représenté un
membre d'Hydro-Québec.
M. LESSARD: C'est cela. Ecoutez, il y a le comité
Urgence-Inondation qui est coordonné par la Protection civile. Ce que je
vous demande, c'est que, d'après l'entente que vous avez au
ministère entre Hydro-Québec et le ministère des Richesses
naturelles, est-ce que c'est le ministère des Richesses naturelles qui
doit être informé dans ces circonstances ou la protection civile
ou le comité Urgence-Inondation?
M. MASSE: Les trois doivent être informés, mais les
procédures telles qu'établies par les membres du comité
Urgence-Information sont à l'effet que doit être informée
d'abord la Protection civile.
M. LESSARD: Vous autres, vous étiez assurés, à ce
moment...
M. MASSE: Est-ce que, dans le cas qui nous intéresse, cela a
procédé d'une façon différente, étant
donné qu'Hydro-Québec avait un membre au comité
Urgence-Inondation? Ce sont des choses qui resteraient à
vérifier, peut-être.
M. VILLENEUVE: Si vous me permettez, j'allais dire ceci, il y a un
instant. L'honorable ministre, je pense, est bien au courant de la chose. Ce
comité interministériel Urgence-Inondation et glissement de
terrain n'a quand même pas des années d'existence. C'est à
la suite d'expériences vécues, je crois, qu'il a
été mis sur pied et les documents qui ont été
préparés à la suite des diverses rencontres du
comité en question, sont des documents de travail qui, je crois,
n'avaient même pas encore été totalement
officialisés et...
M. LESSARD: Cela change.
M. VILLENEUVE: Je pense que le comité continue de siéger
et il est à mettre au point dans tous ces mécanismes...
M. LESSARD: Cette entente n'était pas officielle.
M. VILLENEUVE: Nous utilisons les ententes dès... On n'attendra
pas, comme vous disiez vous-même, d'avoir fini de frotter la pompe
à feu avant de s'en servir. On avait un outil entre les mains qui
était les ententes faites à la suite de réunions de ces
comités et nous nous en sommes servis dans les circonstances
vécues, même si le document n'était pas...
M. LESSARD: Quelles étaient ces ententes?
M. VILLENEUVE: Selon ce qui est écrit qui était le
rôle d'Hydro-Québec.
M. LESSARD: Est-ce qu'on pourra déposer cette entente?
M. VILLENEUVE: Je ne sais pas si on en a une copie ici, mais c'est un
document qui représente une espèce de rôle défini
pour les différentes parties et qui, je crois, demande encore
d'être poli et ajusté avant d'être complètement rendu
officiel.
M. LESSARD: Je demanderais que vous donniez le résumé de
cette entente au point de vue communication, mais j'aimerais avoir copie de
l'entente.
M. VILLENEUVE: Je pense qu'il doit y avoir moyen d'avoir le document en
question, mais je ne l'ai malheureusement pas ici.
M. MASSE: Je pense que, pour être honnête, 11 faut dire que
ce genre d'action interorganisme dans les cas d'urgence, comme vous le dites,
M. Villeneuve, n'est peut-être pas dans toute sa tuyauterie des plus
huilées du fait que c'est peut-être la troisième
année que ce genre de comité existe. Je dois dire d'autre part,
que cette année, cela a été l'expérience des autres
années qui nous a servis et il reste une chose à souhaiter, c'est
que ce soit un comité qui regroupe des organismes, comité
urgence, mais qui soit institué d'une façon permanente, c'est un
fait.
M. LESSARD: M. le Président, il est 12h 05, je regrette que M.
Villeneuve soit dans l'obligation de partir, mais j'aimerais bien avoir cette
entente et j'aimerais bien poser la dernière question à M.
Villeneuve. J'en aurais d'autres, mais malheureusement il m'a informé
qu'il doit partir. A mon sens, je pense qu'il y a eu une certaine
négligence quelque part. Est-ce que depuis ces incidents, il y a eu des
ententes formelles concernant les communications en cas d'urgence?
M. VILLENEUVE: Je pense que nous continuons d'aviser le ministère
de toutes les situations particulières de nos barrages lorsqu'il y a des
débits excessifs qui doivent être relâchés. Depuis ou
durant la période d'inondation, nous nous sommes tenus en contact
quotidien avec les gens de la Protection civile, aussi bien dans la
région de Montréal pour les inondations
qu'on a eues à cet endroit, que dans la Gatineau. Quant à
l'avenir, je ne vois pas de raison pour laquelle nous ne pouvons pas, si c'est
la façon la plus sûre ou la plus complète de
procéder, aviser aussi bien la Protection civile que le
ministère.
M. MASSE: De toute façon, M. le Président, lors d'un
téléphone au président, M. Giroux, le 21 mai, vous
étiez par la suite nommé officiellement la voix officielle
d'Hydro-Québec.
M. VILLENEUVE : Je pense que cette infor- mation se
référait à la situation particulière que nous
vivions à ce moment-là et nous avions établi des contacts
permanents avec des représentants du conseil des ministres pour
être sûrs qu'ils soient au courant de la situation.
M. MASSE: Cest exact.
LE PRESIDENT (M. Lafrance): La commission ajourne ses travaux à
ce matin, après les travaux de la Chambre, c'est-à-dire vers 11
heures.
(Fin de la séance à 0 h 9)